Expédition Antarctique Française . (1903-1905) COMMANDÉE PAR LE « D"^ Jean CHARCOT CARTE DES RÉGIONS PARCOURUES ET RELEVEES PAR L'EXPÉDITION ANTARCTIQUE FRANÇAISE Membres de l'État-Major : Jean Charcot — A. Matha — J. Rey — P. Pléneau — J. Tubquet — E. Gourdon la ^ OUVRAGE PUBLIE SOUS LES AUSPICES DU MINISTERE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE sous LA DIRECTION DE L. JOUBIN, Professeur au Muséum d'Histoire Naturelle ^3 EXPEDITION ANTARCTIQUE FRANÇAISE (1903-1905) COMMANDEE PAR LE D-^ Jean CHARCOT SCIENCES NATURELLES : DOCUMENTS SCIENTIFIQUES MAMMIFERES PINNIPEDES E. L. TROUESSART Professeur au Muséum d'Histuire Xaiurcllc. OISEAUX A. MENEQAUX Assistant au Muséum d'Histoire Naturelle. DOCUMENTS EMBRYOGENIQUES (Oiseaux et Phoques) PAR Le D-^ ANTHONY Préparateur au Muséum PARIS MASSON ET C'% ÉDITEURS 120, Boulevard Saint-Germain, 120 1907 LISTE DES COLLABORATEURS Les mémoires précédés d'un astérisque sont publiés. MM. *Ti!OLiiEss\RT Mammifères. * Menegaux Oiseaux. * Anthony Documents embnjogéniques. * Vaillant Poissons. * Sluiter Tuniciers. * Vayssière Nudibranches. * JouBL\ Céphalopodes. * Lamy Gastropodes et Pélecypodes. * Thiele A mphineures. * BnoLEMANN Myriapodes. * Carl Colleinholes. * Roubaud Diptères. * Du BuYSSON Hyménoptères. * Lesne Coléoptères. * Trouessart et Ivar Tràgaudii . Acariens. *Neumann PédiculineSyMallophagesJxodidés. * Simon Scorpionides. * Bouvier Pycnoyonides. * Coutière CrustacésSchizopodeset Décapodes. M"= * RicHARDSON Isopodes. MM. * Chevreu.x Amphipodes. * QuiDOR Copépodes. OEhleiit Brachiopodes. Calvet Bvyo:oaires. * Gravier Polychètes. Hérubel Géphyriens. JÀGERSKiÔLU Nématodes libres. * Railliet et Henry Nématltelminthes parasites. Blanchard Cestodes . GuiART Trématodes . JouBiN Némertiens. * Hallez Polyclades el Triclades maricoles. Ed. Perrier Crinoides . * Koehler Slellérides, Ophiures et Ecltinides. * Vaney Holothuries . Roule Alcyonaires. Bedot Siplionophores. 0. Maas Méduses. * Billard Hydroïdes. Topsent Spongiaires . TuRQUET Phanérogames. * Cardot Mousses . * H ARioT A Igues . Petit Diatomées . GoiiRDON Géologie, Minéralogie, Glaciologie. M"''Trislinsky, mm. Wei.nsbkrg, Charcot. Bactériologie. MAMMIFÈRES PINNIPÈDES Par E.-L. TROUESSART PROFESSEUR AU MUSÉUM d'hISTOIRE NATURELLE l>E PARIS La faune des Mammifères terrestres (1) n'est représentée sur l'Antarc- liquc que par quatre espèces de Pinnipèdes, appartenant à la famille des Phocidie^ ou Phoques proprement dits. Cependant, à une époque très rapprochée de nous, une cinquième espèce très remarquable, le Macrorhine, ou « Éléphant marin » [Macro- rhinm leoninux L.) se montrait également sur les terres antarctiques. Comme l'espèce n'est pas éteinte et qu'elle se trouve encore sur les îles qui forment la limite septentrionale de l'Océan Antarctique, il n'est pas impossible qu'elle revienne quelque jour vers les glaces du Continent Austral, d'où la poursuite acharnée des pêcheurs de Phoques l'a chassée. J'en dirai donc (|uelques mots avant d'aborder l'étude des autres espèces. Ouanl aux Otaries [Arclorcphalus aus/ra/is ZimmiM'inanni, cpii, au xix" siècle, se montraient encore par milliers sur les côtes de la Ciéorgi(^ du Sud et de l'archipel des Shetland Australes, elles ont complètement disparu depuis plus d'un quart de siècle ; l'espèce ne dépasse plus, dans ses migrations vers le sud, les parages du cap Ilorn. D'après .I.-A. Allen (2), c'est vers 1800 (jue la chasse de ces « Phoques à fourrure » {Fur Scals des Anglais), poursuivie avec un acharnement sans scrupules par les baleiniers américains, fut surtout fructueuse. Dans une seule campagne (1800-1801), 112 000 peaux de ces animaux furent récoltées, (1) L'Expédition Cliarrot n'a\;iiit ra|i|ioilé aucune espèce de Cétacés, il n'y a pas lieu d'en parler ici. (2) J.-A. Allen, in .liiniuN, The Fur Seuls and Fur Seal hiands, vol. III, 1899, p. 207. Expédition CharuoC. — Tuuuessabt. — Jlaiumiftires l'innipùdcs. 1 4598B 2 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. et, dans les années qui suivirent, 1 200000 Otaries furent tuées. Dès 1822, la colonie {rookei^y) de la Géorgie du Sud semblait exterminée. Il en était à peu près de même aux Shetland du Sud, où, d'après Weddell, plus de 300 000 de ces animaux avaient été tués en 1820 et 1821 . Cependant, les massacres ayant cessé, faute d'un profil suffisant, les Otaries purent se reproduire tranquillement, et bientôt les chasseurs revinrent. En 1874, 1 450 peaux furent préparées et l'année suivante 600. En 1892, on put encore tuer 135 de ces animaux, mais il semble à peu près certain que ce furent les derniers. En 1905, un baleinier chilien fit tout le tour de la Géorgie du Sud, en visitant toutes les baies et les entailles de la côte, dans l'espoir de découvrir quelques Phoques à four- rure ; mais ce fut en vain : la colonie était définitivement exter- minée (1). Ceci nous amène à jeter un coup d'œil général sur la distribution géographique des Phoques et des Otaries dans l'hémisphère austral. Distribution géographique des Pinnipèdes dans VOcéan Anfarclique. — D'après les géographes, l'Océan Glacial du Sud se confond, sans limites précises vers le nord, avec les trois Océans Atlantique, Pacifique et Indien. Cette opinion n'est pas celle des naturalistes, qui estiment que l'on peut fixer cette limite vers le 50° de latitude sud, point où l'on ren- contre encore, chaque année, des glaces flottantes. Cette limite est en outre indiquée par la chaîne des îles échelonnées dans le sens des paral- lèles, notamment au sud de l'Océan Indien, entre l'Afrique et l'Austra- lie,— îles Crozet, du Prince-Edouard, Heard, Kerguelen, etc., — et qui semblent marquer le bord septentrional de l'Océan Antarctique. Plus à l'est, les îles Macquarie et Auckland, au sud de la Nouvelle-Zélande, — à l'ouest, l'île des États et les autres archipels qui entourent le cap Horn, indiquent la même limite. La distribution géographique des orga- nismes marins et particulièrement celle des Pinnipèdes légitiment cette manière de voir. Ceci établi, il est à remarquer que l'Otarie et le Macrorhine, qui naguère pénétraient jusqu'au sud de l'Océan Antarctique, ne dépassent (1) E. LoNNBERG, Contributions to (lie Fauna of South Georgia, Vertébrales (£. Svenska Vetensk.- Akad. Handlingar, vol. XL, n° 5, 1906, p. 9). MAMMIFÈUKS PINNIPÈDES. 3 plus, à l'époque actuelle, cette ligne d'îles qui jalonnent le bord septen- trional de l'Océan Austral. Mais on sait que ces animaux, et particulière- ment les Otaries, accomplissent des migrations annuelles. Ils ne viennent sur ces îles, qui sont leurs rookeries, que pour s'y reproduire pendant le court été de ces régions australes. Le reste de l'an- née, ils mènent une vie vagabonde sur l'océan, et ces migrations, plus ou moins étendues, les entraînent vers le nord, jusque sur des points éloignés souvent do 10 ou 20° de latitude du rivage où ils sont nés et que l'on doit considérer comme leur véritable patrie. C'est ainsi que l'on peut indi([uer, pour la plupart des espèces, une limite septentrio- nale et une limite méridionale à la répartition géographique, celle der- nière étant toujours le point où l'espèce se reproduit pendant l'été, l'autre n'étant pour elle qu'un lieu de repos pendant l'hiver (1). Ainsi l'Otarie [ArctoceplialuK amtralis Zimmermann), qui, comme nous l'avons déjà dit, se reproduisait naguère sur les rochers de la Géorgie du Sud et des Shetland Australes, ne s'y montre plus. Mais on trouve encore ses rookeries sur les récifs qui entourent le cap Horn et la Terre de Feu, à l'île des États et aux îles Falkland, où l'espèce se reproduit pendant la saison chaude, qui, dans l'hémisphère austral, correspond à nos mois d'hiver. Lorsque les jeunes sont élevés, l'espèce se répand sur les côtes orientale et occidentale de l'Amérique du Sud, remontant dans l'Atlanticpie jusqu'à la baie de Rio-de-Janeiio, dans le Pa(in(|u«\jus- qu'aux îles Gallapagos et Juan-Fernandez. L'Otarie à crinière (2), ou « Lion marin » des anciens navigateurs [Otaria byronia Blainville), a presque la même répartition, sauf (|u'elle ne s'est jamais rencontrée sur les terres antarctitpies. Elle se reproduit sur les archipels voisins de la Terre de Feu, notamment à l'île des États et à l'île du Nouvel-An, aux îles de Falkland, et remonte pendant l'hiver jusqu'au rio de la Plata ; dans le Pacifique, elle se reproduit sur les-côtes du territoire de Magellan, d'où elle remonte sur les côtes du Chili et du (1) On sait que le sens de la migration est renversé pour les Pinnipèdes de riiéiiiisphère nord, le lieu de la lepiodiiction élanl toujours le point le plus seplentrional où parvienne chaque espèce. (2) Cette prétendue crinière est foi-mée de poils raides el couchés, nullement comparables à la crinière du r>ion. 4 MAMMIFERES PINNIPEDES. Pérou jusqu'aux îles Gallapagos et probablement aussi à Masa-Fuero et Juan-Fernandez. Les Otaries de rhémisphère oriental opèrent des migrations du même genre. Le Macrorhine, ou « Éléphant marin » [Macro rhimis leoninusL.), qui appartient à la famille des Phocidœ, présente une distribution géogra- phique beaucoup plus étendue, — de l'est cà l'ouest et de l'ouest à l'est dans l'hémisphère austral, — et l'espèce n'est pas soumise à des migra- tions régulières comme celles des Otaries. Nous avons dit que le Macrorhine ne se montrait plus sur les terres antarctiques. Il paraît également exterminé sur les côtes du Chili. A l'époque du voyage de James Ross (1839), on le trouvait, bien qu'en petit nombre, sur la banquise antarctique, par 65° de latitude australe, et plus au nord, sur l'archipel Palmer et la Terre Louis-Philippe. L'espèce existe encore à la Géorgie du Sud, aux Shetland Australes et sur les îles de l'archipel Fuégien, notamment à l'île des États, ainsi qu'aux îles Falkland. Dans l'Océan Pacifique, le Macrorhine se trouve à Juan-Fernandez et à Masa-Fuero. Dans l'Atlantique, il remonte jusqu'à Trislan-d'Acunha et à l'île Inaccessible, qui en est voisine. Dans l'Océan Indien, on le trouve aux îles Ileard, Crozet etKerguelen, et plus à l'est encore sur les îles du détroit de Bass (îles Ilunter, King, etc.), mais non sur les continents delà Tasmanie et de l'Australie ; enfin sur les côtes de la Nouvelle-Zélande. On saitque les Macrorhines des côtes de Californie appartiennent à une espèce distincte [Macrorhinus anyustiroslris Gill). Le Macrorhine des mers du Sud a été observé récemment (1904), à la Géorgie du Sud, par le naturaliste suédois Eiuk Sorling, qui a pu étudier SCS mœurs et en rapporter de bonnes photographies (1). La taille des mâles paraît avoir été exagérée par les anciens navigateurs : elle dépasse rarement S'°,50 (2), ce qui est déjà considérable, surtout relativement à la taille des femelles^ qui n'est que de 3", 10. On trouve ordinairement chaque mâle adulte avec une seule femelle ; à l'approche de l'homme, (1) LoNNBERG, loc. Cit., 1906, p. 9, fîg. 1, p. 12, et l'I. III et IV. (2) Au lieu de 8 à 10 mètres, comme le dit Pérou [Voy. aux Terres Amtrales, M, p. 33 i. MAMMIFÈRES PINNIPÈpRS. 5 qui ne semble pas les émouvoir beaucoup, à moins que celui-ci ne les attaque ouvertement, ils ont la singulière hai)itude de s'accoupler aux yeux du visiteur, comme pour aïïirmcr leurs droits conjugaux. La légende qui prétend « qu'un seul mâle suilit à cenl femelles » ( 1 ) est donc proba- blement apocryphe. Les baleiniers américains, qui visitent périodiquement Kerguelen, recherchant surtout les vieux mâles à cause de Ténorme quantité d'huile que chacun d'eux fournit, l'ont probablement inventée de peur qu'on ne leur interdise de tuer ces reproducteurs. Ce qui est certain, c'est qu'on n'a jamais vu ces vieux m.àles entourés de plus de sept ou huit femelles avec leurs petits, les jeunes mâles faisant bande à pari. Les véritables Phoques (de la sous-famille des Monachinse)^ au nombre de quatre espèces, sont, comme nous l'avons dit, à l'époque actuelle, les seuls Pinnipèdes que l'on rencontre sur les terres antarctiques. Leur distribution géographie s'étend, en longitude, sur tout le pourtour de la banquise australe ; mais trois de ces espèces se retrouvent sur les terres qui forment la limite septentrionale de l'Océan Antarctique, et, sous cette latitude, leur répartition est beaucoup plus localisée. Elles doivent y être considérées comme accidentel leii, car elles ne s'y reproduisent pas. Ainsi le Lobodon carcinophaga [liombr. etJacq.) se trouve sur les côtes de l'Amérique méridionale, remontant jusqu'à la République Argentine (Puerto-de-Ensenada, San-Isidro): il se rencontre aussi en Patagonie, notamment au rio Santa-Cruz. On l(> signale aussi sur les cAtesd'AusIraliî^ comme très accidentel. Le Leptontjchotes Weddelli (Lesson) se montre égahmient sur les cotes de la Patagonie Orientale, au rio Santa-Cruz; mais il pénètre aussi dans le Pacifique, où on le signale à l'îledc La Mocha (Chili),à Juan-Fernandez, et beaucoup plus à l'ouest, dans l'Océan Indien, sur les îles Kerguelen et lleard. Un seul individu a été pris sur les côtes de la Nouvelle-Zélande. Enfin V Ilijdrurga (2) leptonyx (Blainville) se trouve; sur les côtes de la Nouvelle-Zélande, à l'ilc de Lord-llowe, sur les côtes de la Tasmanie et (1) Renk-I:!. P>oissiiiRE, Nouvelle notice sur les îles Kcruuelcn, 1007, p. 20. — La |)liiasi; est ainbigui' ou mal traduite : elle peut vouloir dire simplement que Ton ne tiou\i' qu'un seul mâle conlre cenl femcllfs. (2) .l'indi(iuerai plus loin les raisons pour lesquelles on doit donnei'à ce nom la préférence sur Stenoritynclius et Ogmorhinus. 6 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. de l'Australie méridionale, peut-être aussi à Kerguelen (bien qu'il semble y avoir été confondu avec l'espèce précédente), enfin au sud de l'Amérique méridionale, sur l'archipel Fuégien, aux îles Falkland et sur les côtes de la Patagonie. VOmmatophoca Rossi Gray est la seule espèce qui soit confinée dans le voisinage des terres antarctiques. Pendant longtemps, on a cru que cette dernière espèce était celle qui s'avançait le plus vers le sud : James Ross l'avait signalée par 68° 28' de latitude australe, au sud de la Terre Victoria (1). On sait aujourd'hui que le Leptoiiychotes W^^f/f/i°/// s'avance plus au sud encore, jusqu'à Mac-Murdo Sound, par 77° 50' de latitude australe ; il y vit sous labanquise, ne venant respirer que par les trous qu.'il perce en agrandissant les fentes de la glace. Chacune de ces espèces de Phoques a ses mœurs particulières. VOnuiia- tophoca semble le plus rare de tous . L'Hydrurga leptonyx est un peu moins rare, mais il vit dispersé, ne se montrant jamais en bande comme le Leptonychotes et le Lohodon. Ces deux dernières espèces sont les seules que l'on trouve en grand nombre sur les bancs de glace, où elles ne se font pas concurrence, la première vivant de Poissons, l'autre de Crustacés. Le Lohodon s'éloigne peu de la mer libre : on ne le trouve jamais à plus de 1 ou 2 milles du bord de la banquise. Le Leptomjchotes, au contraire, s'avance assez loin sous cette banquise pour chasser les Poissons dont il se nourrit, sachant, comme nous l'avons dit, se creuser, de distance en dis- tance, des trous ou cheminées, qui lui permettent de venir respirer ou se reposer à l'air libre. Les quatre espèces se reproduisent sur la banquise antarctique, ou sur les glaces flottantes, et, comme la durée de la gestation est de près d'une année (onze mois), on doit admettre qu'elles ne se reproduisent pas ailleurs, à moins de supposer que les colonies [rookerics) du nord ne soient complètement distinctes de celles des terres antarctiques. Ce sont probablement les glaces flottantes qui entraînent ces animaux vers le nord. (1) J. Ross, Narrative, (ilc, p. 181. MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 7 Après avoir décrit chaque espèce, nous donnons dos détails plus précis sur les mœurs qui lui sont propres. ORDRE DES PINNIPÈDES Famille des PHOCID/E. Sous-famille des MONACHIN^. Celle sous-famille a pour type le « Phoque moine » [Monachus alhi- venter Bodd.) de la Méditerranée. On rapporte généralement à ce groupe les quatre genres de la faune antarctique, mais, comme l'a fait remarquer le D' E.-A. WiLSON, le genre Oininatophocn, en raison de ses caractères, serait peut-être mieux placé dans la sous-famille des Ci/stophorinœ. Plu- sieurs naturalistes, notamment le D' Wils(in, font des quatre genres antarctiques une sous-famille à part sous le nom de StenorJujnchinœ (qu'il faudrait changer en Hydrurginse). Dentition. — La formule dentaire dans les quatre genres est la sui- vante : I. |, C.i P.|, M. [x2 = 32dents. Mais, si le nombre des dents est id('iili(|uc, leur forme el Icui' force varient considérablement d'un genre à l'autre et donnent l'explication du régime alimentaire très diflcrent qui caractérise chaque espèce. (jhez Lohodiut, la couronne (l<>s molaires est allongée, comprimée et très compliquée; elle porte un IoIjo principal recourbé ant été perdue, je me liornerai à ces considérations L;énéi-ales sur la dentition. — Quant aux peaux, conservées dans le sel, le rétrécissement que la plupaiL ont subi par suite de cette préparation laisse quelques doutes sur la détermination spécifique de plusieurs d'entre elles, appartenant à de jeunes individus. (2) Les dimensions, prises sur l'animal en chair par le D' Turquet, sont données sans la queue, qui a de 8 à 10 centimètres. MAMMIPEIIIÎS PINNIPEDES. !) N° 2. Peau plate, jeune (l^jQ-i?), plage del'ile Wandel (10 novembre lOO'i). ^"3. Peau plate, 9 [2'",-M), baïuiuise de l'ile Waïuiel (15 rioveiiilire lUO'i). N° 4. Peau plaie, 9 (2'", 10), banquise de l'ile Wandel (20 novembre l'JO't). N" y. Peau i)late, 9 (2"',19), glaces de l'ile Wandel (lô décembn! lOOi). N° 10. Peau plate, 9 (1°',95), banquise de l'ile Wandel (15 décembre lOO'i). Distribution. — Cette espèce est probablement circuinpolaire dans l'An- tarctique. (Test la plus commune des cpiatre; elle a élr iciiconlrée par toutes les expéditions récentes depuis la " IJelgica » jusqu'à la « Discovery » ) ! Fi(^. 1. — l'iioijue crabicr (Lobodon carcinophagus), tiHc vue ilc profil l't du do?. et le « Français » . Elle pénètre au sud jusqu'à Mac-Murdo Sound (77" VA)' de latitude sud), c'est-à-dire jusqu'au point où s'arrête la mer libre vers le pôle, et on la trouve d'ordinaire sur les glaces flottantes ou sur le bord de la banquise, dont elle ne s'éloigne jamais beaucoup. Au Nord, nous avons vu (pi'elle prolonge ses migrations jusqu'à 31"2K' (San-Isidi-o, près Buenos-Ayres). Description. — De tous les Phoques de l'Anlarcliciue, le l.obodon carci- nophage est celui qui ressemble le plus aux lMio(|ues du nord par sa forme générale et les proportions de ses dillerentes parti(^s. La tête est très allongée, le nez saillant et le cou distinct, mais non plus ('Iroit que le crâne, coMune c"<'st le cas chez Hi/druyga leptijui/r. Le corps est passablement élancé, fusiforme, sans èlr'c renflé au milieu connue celui de Leptonjjchotes Weddelli. En définitive, c'est le mieux proportionné et, à terre, le plus actif des trois Phoques que je viens de citer. PEL.\r.E. — L'adulte est d'ordinaire d'un blanc pelucheux, argenté ou Expédition Chorcol. — TnoiEssAnT. — Mammifi'res Pinnipèdes. 2 Il) MAM.MIFÈaKS PINNIPÈDES. tirant sur la teinte crème ; mais on constate des variations de couleur qm paraissent tenir à Tàge et non au sexe ou au changement des saisons ( 1 ). Le jeune, à sa naissance, est blanc comme l'adulte (Racdvitza), avec cette différence que son pelage est laineux et beaucoup plus long que celui de ses parents, comme c'est d'ailleurs la règle chez les Phoques. Mais bientôt cette livrée blanche tombe, et, lorsque le jeune va à la mer, son pelage est beaucoup plus foncé. On peut s'en faire une idée en exa- minant la peau du n° 2, tué le 10 Novembre 1904. Le pelage est gris de fer avec des taches d'un blanc-crème sur les flancs, ce qui avait fait supposer tout d'abord aux chasseurs du « Français » (ju'il s'agissait d'un Phoque de Weddell. En réalité, c'est un adulte jeune du Phoque crabier. « L'adulte jeune, dit E.-A. Wilson (2), lorsqu'il vient de terminer sa mue (en janvier-février), est un très bel animal, dont \o pelage est argenté, gris et non blanc, et les taches qui se montrent d'ordinaire sur les flancs, à la racine dos membres et sur les côtés de la tète, sont d'un beau brun-chocolat...» Ces taches sont très variables, môme immédiatement après la mue, alors qu'elles ne sont pas encore altérées par le temps. « D'ordinaire, les poils sont d'un gris brun soyeux, plus foncé sur le milieu du dos, d'un blanc argenté sous le ventre, et annelés d'un brun chaud. On peut dire que la couleur du fond du pelage est un brun foncé relevé par des taches ovales d'un gris argenté si profuses qu'elles sont conlluentes sur tout le corps, sauf sur les flancs, les épaules, les côtés du dessus du cou et de la tête, et d'une façon très variable sur le reste du corps. >> Quelquefois ces taches ne sont pas confluentes, et alors le pelage est très régulièrement et très élégamment tacheté. Chez les individus qui portent des taches plus rares, ces taches se montrent de préférence à la base des pattes antérieures et posté- rieures (3). (1) La teinte jaunâtre des peaux que [l'on voit dans les musties tienl à l'absorption de la graisse par la peau pendant la dessiccation. (2) N'oy., dans « Southern Cross » Collections (1902), les Planches coloriées IV et V, où ces variations de pelage ont été figurées par E.-A. Wilson. La ligure 1 de la Planche V représonle le pelage /aîié dunjeunemàle ; la figure 2montre le commencement de la mue.etla figure 3 le nouveau pelage foncé complètement développé. (3) Nalinnal Antarclic Expédition, 11, p. 37. .MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. il La couleur du pelage se fane pendant les mois d'hiver et plus rapi- dement encore pendant l'été. C'est un véritable blanchiment^ tout à fait comparable à celui que présentent la plupart des Mannnifères arctiques, tels que l'Hermine, le Renard polaire, etc. Le pelage passe ainsi au blanc- crème, et les taches foncées des membres s'effacent peu à peu en prenant une teinte fauve pâle, à peine distincte. C'est sous cette apparence que le Lohodon a pu être désigné sous le nom « Phoque blanc antarctique ». Ce pelage est celui de l'été ; en Janvier, l'animal mue pour reprendre le pelage d'un brun foncé que nous avons décrit ci-dessus. A mesure que l'animal prend de l'âge, surtout chez les vieux mâles, le pelage tend à devenir de plus en plus pâle, et, chez les individus âgés, les teintes brunes ne se montrent plus, même immédiatement après la mue. Au microscope, les poils des très vieux mâles ne contiennent plus de granules de pigment. Ce pelage, sauf chez le nouveau-né, est très court; les poils ne dépassent pas 15 millimètres de longueur totale. L'animal n'est protégé contre le froid que par l'épaisse couche de graisse que l'on trouve sous la peau. MoEuiis. — On pi'ul dire (pie le Lohodon est le plus migrateur des Phoques antarctiques, en ce sens que c'est celui qui paraît s'éloigner le plus volontiers du rivage ou de la banquise, comine l'indiciue sa présence sur les bancs de glace détachés de cette banquise. Il a liesoin (le la mer ouverte pour trouver sa nourrituic de Crustacés du genre Eupkausia. Les j(>unes doivent naître à la même é])oque que ceux des autres Phoques antarctiques, c'est-à-dire en septembre-octobre. Le D' Raco- viTz.v, (]ui a hiverné dans les glaces, est le seul qui ait pu voir un jeune dans sa livrée du premier âge, les autres expéditions n'étant parvenues dans ces parages que lorsque les jeunes s'étaient d(\j;i dé|jouillés de cette livrée. «Au moment de sa naissance, dit Racovitz.v, le petit a déjà une taille considérable (1"',15) ; il possède déjà des dents et des yeux parfai- tement fonctionnels et même une couche de graisse sous-cutanée efficace pour le protéger du froid. Il peut donc immédiatement se tirer d'affaire tout seul ; aussi In mère l'abandonne-t-elle iq)rès l'avoir allaité seulement 12 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES- deux ou trois jours.» Il est probable que la mise-bas a lieu clans la mer libre, sur les bancs de glace. Les adultes se montrent sur ces bancs dès que l'état de la mer permet aux navires de s'avancer au milieu des glaces flottantes. On les trouve d'ordinaire par petites bandes de cinq à six individus, ou plus, des deux sexes, plus rarement par couples ou isolés, couchés tantôt sur le ventre, tantôt sur le dos. Sur la banquise ou la terre ferme, ils ne s'éloignent jamais à plus de 1 mille ou 2 de la mer libre, tandis que le Phoque de Weddell est aussi abondant à 5 ou 10 milles du bord de la banquise qu'à une faible distance de la mer. La raison de cette habitude, c'est que le Phoque crabier se nourrit d'Euphausia, petits Crustacés Schizopodes qui forment de véritables bancs dans la mer libre et qui s'avancent rarement sous la glace ; les Phoques nagent au milieu de ces bancs la gueule ouverte et avalent les Crustacés par centaines, à la manière des Baleines. La disposition des tubercules des molaires est telle qu'en rapprochant ses mâchoires l'animal forme un véritable crible qui permet à l'eau de- s'échapper, tout en retenant les particules solides. On trouve dans son estomac du sable, qu'il avale en même temps que les Crustacés, et qui sert probablement à broyer la carapace de ces animaux au lieu et place des molaires modifiées pour un tout autre usage. Le Phoque crabier est beaucoup plus remuant et moins endurant que le Phoque de Weddell. A l'approche de l'homme ou des chiens, il se précipite à leur rencontre, ouvrant une large gueule armée de fortes dents et poussant un cri rau(|ue ; puis, dès qu'on le laisse tranquille, il s'empresse de gagner le trou le plus proche et plonge sous la glace. En s'enfuyant, il tient la tête redressée et se sert alternativement de ses nageoires anté- rieures, comme un véritable quadrupède, bien que les postérieures restent inactives. Il progresse ainsi rapidement d'un mouvement sinueux qui rappelle celui d'un serpent, s'aidanten outre d'une sorte de reptation qui consiste à appuyer successivement sur le sol la poitrine et le bassin, mouvement que l'on observe également chez le Phoque de Weddell. Dans la mer, ses mouvements sont encore plus rapides. La peau des Phoques de l'Antarctique présente très souvent des cica- MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 13 Irices en forme de l)alal'res, dont roriyine a été diversoinoiit explujui^e. (^es balafres sont très fréquentes chez le Lohodon.E.-X. Wilson, d'après la position et la forme de celles qu'il a observées, les attribue à lamorsun; des Orques {Orca gladialor), grands Dauphins très communs dans la mer Antarctique et qui sont capables d'avaler un Phoque entier d'un seul coup. Fig. 2. — Phoqui; iiabier respirant à son liou, pcrcù/lans la jiunc glace (d'après une photographie du !)'■ Cliarcot). Mais, lorsque ces balafres sont isolées, il est difficile de les attribuer aux blessures produites par une double rangée de dents, telles que celles des Orques. Le D' Ciiviicdï, qui a étudié cette question sur l'animal fraîche- ment tué, pense que les mâles peuvent produire ces balalVes avec l'ongle saillant de leurs nageoires antérieures, au cours des combats qu'ils se livrent pour la possession des femelles. Il est probable cjuc, selon les cas, ces deux explications sont également exactes, mais E.-A. Wilson a constaté (|ue ces balafres traversent toutela couche de graisse, épaisse de plusieurs pouces, et arrivent jusqu'aux muscles. Geniœ LEPÏONYCIIOTES Gill, 1872. (LeptonijxGraY, 1836, /iecSwainson, 1820.) LEPTONYCHOTES WEDDELLI (Losson). /,(' P/iof/uf (le Wcddclt. 1826. Olaria Weddelli Lesson, in Ferussac, Bull, des Se. A'atur., VII, p. 437. 1880. Leptonijcliofes Wedde/li .Wlen, .Yorf/i-Ainer. Pinnipede.'t.p ACû. 1901. Lcplonycholes Weddelli Barrel-Hamillon, Exp. Anlarct. Belge, Seuls, p. 17. 14 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 1902. Leptonychotes Weddelli Barret-Hamilton, Rep. Mamm. « Southern Ci'oss » Coll., 1902, p. 17, 09, Pi. 11. 1905. Leptonychotes Weddelli Andersson, Wiss. Ergeb. Schioed. Siidpol. Exp., V, 2, p. 3. 1906. Leptonychotes Weddelli Brown, Mossman and Pirie, Voy. « Scolia », p. 129,227, 340. 1907. Leptonychotes Weddelli Wilson, National Antarctic Exped. (pf the « Disco- very »), Natur. Hist., II, p. 10, PI. I à III. Matériau-k. N" 0. Spécimen monté (avec son crâne dans la peau) de 2", GO, ayant figuré à l'Exposi- tion maritime de Bordeaux, en 1907 (ollert parM. Gourdoii, naluralisle de l'Expédition, au Muséum de Paris). N" 0. Peau plate, 9 (l'^,S8). Banquise, île Wandel, 30 novembre 1904. N" 7. Peau plate, 9 (1™,93). Rivage, île Wandel, 3U novembre 1904. N" S. Peau plate, çf (2»',14). Ile Wandel, 9 décembre 1904. Distribution. — Après le Loùodon, c'est l'espèce qui semble la plus commune clans l'Antarctique. A la Terre Victoria, il s'étend, en été, jusqu'à Mac-Murdo Sound, sur les bancs de glace, par troupes plus ou moins nombreuses, mais dont les individus sont toujours dispersés, jamais serrés les uns contre les autres. Lorsque l'hiver ferme ce détroit, on les trouve dans la même .position sur la banquise. A la Terre de Graham et à l'archipel Palmer, les mœurs sont semblables. L'espèce a été récemment signalée aux Orcades du Sud (South Orknei/s), à la Terre Louis-Philippe et à la Terre de l'Empercur-Guillaume [Kaiser Wil/ielm's Land) ; plus anciennement Wilkes et Dumont d'Urville l'ont rencontrée à la Terre d'Adélie. Il est probable qu'elle n'émigre pas. Nous avons indiqué précé- denmient les points où on la trouve plus au nord : sa présence à Kerguelen demande confirmation, l'espèce signalée par Moseley sur ce point restant douteuse. Description. — Avec son long corps fusiforme, sa petite tète etles taches de son pelage, le Phoque de Weddell ressemble de loin à une énorme sangsue. Latèle est surtout remarquablement petite pour un animal de cette taille, le cou étant beaucoup plus gros, de telle sorte que, sur l'animal en chair, on ne voit pas où finit le cou et où commence le crâne. Le museau est plus élargi que celui du Lobodon et tronqué. Pelage. — A sa naissance, le jeune est couvert d'une épaisse toison laineuse d'un gris brun, présentant à peine quelques taches vaguement MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 15 indi(iuées. Cette livrée est formée de deux sortes de poils, les uns longs de 2"", 8, fins et presque droits ; les autres courts, lins et très frisés, si bien que, sur un poil de I""",? de long, on ne trouve pas moins de huit à dix ondulations. (]e pelage est usé au bout de la première quinzaine et semble alors plus court et moins laineux, présentant quelques taches qui rappellent celles de l'adulte. Ce changement est dû surtout à la croissance rapide du jeune. A la fin de cette période, la mue commence ; le poil 0!/lr''^^^HM M Fig. 3. — l'lio.|ut! ili' Weililel [Leplonijclwles Weddclli), lùlo vue du prulil l't ilo ilos. bourru tombe d'abord de la tète et des quatre membres, puis du dos, des flancs et enfin de la poitrine et du ventre. Cette mue exige une quinzaine, de sorte qu'au bout d'un mois le jeune a complètement dépouillé sa livrée du premier âge pour revêtir le pelage court, brillant et marbré de l'adulte, dont il ne difi'ère que par sa taille moindre, n'ayant encore que 2 mètres environ, au lieu de près de 3 mètres, taille qu'atteignent les adultes. Le pelage de l'adulte, d'un gris foncé tacheté de blanc, présente des particularités remarquables qui sont ainsi décrites par E.-A. Wilsox : Les régions les plus claires ne sont pas ventrales ni médianes, mais latérales ou ventro-latérales. Le milieu du dos est noir, puis vient une bande dorso-latérale noire avec quelques taches ou raies blanches ; puis une bande latérale avec des marbrures plus grandes et plus abondantes; une bande ventro-latérale où le blanc prédomine et qui ne porte que de rares taches noires ; enfin la bande médio-venlrale, (|ui est grise avec des taches et des rayures blanches. La queue est, en dessus, plus noire que tout le reste, mais avec une étroite bordure blanche, (|ui est constante. 16 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. La couleur j^rise de la Lrle, après avoir l'ail lo tour des uarines, se dirii^o en arrière et contourne les yeux ; une tache blanche surciliaire se voit de chaque côté du front. La teinte f!,rise s'étend en arrière jusqu'aux épaules et aux nageoires antérieures; les épaules portent quelques raies blanches assez discrètes. Les nageoires antérieures ont leur bord radial et le dessous blancs ; les nageoires postérieures sont duii gris foncé dessus avec le bord tibial blanc, mais passent au noirâtre vers l'extrémité des doigts, dont le bord est blanchâtre avec quelques poils blancs à l'insertion des ongles. Les ongles sont noirs ainsi que les vibrisses tortillées de la face (les moustaches ne sont pas tortillées chez le jeune). Les poils qui entourent les coins delà bouche et les ouvertures naturelles sont d'un brun châtain. Ce pelage, très frais après la mue et remarquable par le contraste des taches blanches et du gris foncé qui forme le fond, se change à la longue en un gris blanc pâle, où les taches blanches se distinguent à peine. Moeurs. — Le jeune est nourri par lanière et reste avec elle beaucoup plus longtemps que celui du Lohodon. Pour allaiterson nourrisson, la mère se couche sur le flanc : elle porte deux mamelons très visibles lorsqu'ils s'érigent par suite de la succion. Ce n'est qu'au boutd'un mois, lorsqu'il a pris le pelage de l'adulte, que le jeune est en état de se suffire à lui-même. Jusque-là, la mère l'abandonne chaque jour sur la glace pour aller cher- cher sa nourriture, et il n'est pas rare d'en trouver quelques-uns, morts de froid, un jour ou deux après la mise-bas. Les yeux sont ouverts dès la naissance. L'involution du cordon ombilical demande plusieurs jours. On trouve quelquefois des petits nouveau-nés encore attachés au placenta par le cordon, bien que l'on doive supposer que la mère coupe ce cordon. Le placenta et ses membranes sont mis en pièces par les Skuas [Megalestris) ; mais ces Oiseaux de rapine ne semblent pas s'attaquer aux jeunes, même lorsqu'ils sont morts (Wilson). Les Phoques de cette espèce sont beaucoup plus apathiques que le Lohodon^ du moins sur la glace où on les trouve couchés en ordre dispersé, paraissant dormir dans une quiétude parfaite. Mais, si l'on s'approche, il est facile de voir que leur repos n'est qu'une veille paresseuse. Les uns changent de place dans une direction ou dans l'autre, sans cause appa- MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 17 rente. D'autres se montrent à l'entrée des trous qu'ils ont creusés dans la i^lace, se hissant gauchement par degrés, tout ruisselants d'eau, jusqu'à ce que toute la masse de leur corps émerge et se séchant en se roulant de côté et d'autre sur la surface neigeuse de la banquise ; puis ils s'étendent un pou plus loin et prennent l'attilude du repos. Comme le dit Racovitza, le Phoque de Weddell est « un brave homme de Phoque » . On peut s'approcher à moins de i mètre de l'animal sans qu'il lasse aucun geste de défense. Ses yeux restent fermés; l'animal s'étire en retirant ses nageoires le long des flancs dans une posture gro- tesque, et, comme le dos lui démange, il porte la patte en arrière dans une altitude presque humaine et se gratte avec l'ongle saillant du second doigt. Puis il se gratte une patte avec l'autre. Il bâille, ce qui produit dans sa poitrine un bruit de glouglou, et, toujours sans ouvrir les yeux, il reprend sa position de repos. Si, placé à quelques mètres, on crie pour l'éveiller, il n'en lient pas compte ; il faut s'y reprendre à deux fois ; alors il ouvre les yeux, se retourne sur le côté el, soulevant légèrement la tète, vous regarde d'un air étonné, sans faire aucun effort pour s'éloigner. Même s'il est couché sur le dos, cela ne l'empêche pas de vider sa vessie, et c'est là le premier mouvement que l'on puisse interpréter comme un signe d'inquiétude. Enfin, s'il aperçoit que vous êtes quelque chose dont il n'a pas l'habi- tude, il s'éloigne un peu, puis s'arrête en faisant entendre un petit gro- gnement intérieur, bouche fermée, qui ressemble au clapotement de l'eau agitée dans une cruche de terre. Puis il reprend l'attitude du repos, comme s'il avait oublié votre présence. Si l'on essaie de le tourner, il s'y oppose en vous faisant face ; enfin, si l'on insiste et que l'on cherche à toucher du pied l'une de ses nageoires postérieures, il semble tout à fait effrayé. Il se dresse à demi sur la glace en face de vous en soufflanl, la gueule ouverte, ou se précipite aussi vite qu'il peut vers le trou le plus voisin. En s'enfuyant, il se retourne constamment en recourbant son corps alternativement d'un côté et de l'autre, pour voir si on le poursuit; ou bien, renversant sa têteen arrière, dans une attitude forcée, les yeux largement ouverts pour vous surveiller, il prend une position tout à fait caractéristique. L'ignorance complète du danger que montre Expédition Charcol. — Thouessart. — Mammifères Pinnipèdes. 3 18 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. cette espèce forme un contraste remarquable avec la défiance des Phoques du nord (Wilson). Le cri du jeune est un bêlement de mouton. L'adulte pousse un véri- table rugissement, mais sa voix peut produire aussi des notes musicales semblables à celles que Racovitz.v a décrites d'un façon si pittoresque chez VOmmatoplioca Rossi. C'est une plainte commençant par une note aiguë et profonde et finissant par une série de notes basses comme celles que produit la glace en se fendant, ou bien encore une série de notes plaintives flutées se terminant comme le cri d'appel du Moineau, ou se changeant en un long sifflement terminé par un grognement ou un ronflement profond. Le D' Charcot a observé plusieurs fois ce fait (1), qui est confirmé parHoDGSONet Wilson, les naturalistes de la « Discovery ». Le Phoque de Weddell est une espèce côtière qui ne s'éloigne jamais hors de vue de la terre ou de la banquise et qu'on ne voit pas sur les glaces flottantes. Ce ne peut donc être que tout à fait accidentellement qu'il est entraîné vers le nord sur les îles où on signale sa présence (Juan- Fernandez, Kerguelen, Ileard, etc.). Sa nourriture consiste presque entièrement en Poissons, bien qu'on trouve quelquefois des becs de Céphalopodes et même des débris de Crus- tacés dans son estomac, mêlés à du limon, du sable et des pierres. Quant au limon et au sable, il est évident qu'ils sont avalés accidentellement en même temps que les Poissons et les Crustacés qui vivent sur le fond de la mer. Les Poissons appartiennent aux genres Trematomus, Notothenia et Gymmodraco^ qui sont aussi abondants en hiver qu'en été, la tempé- rature de l'eau variant peu d'une saison à l'autre et se maintenant très près de 0°, c'est-à-dire du point de congélation. Par suite, le Phoque de Weddell, trouvant en tout temps sa nourriture sous la glace, n'éprouve pas le besoin d'émigrer, et on le trouve aussi communément dans une saison que dans l'autre. Le fait qu'il s'avance beaucoup plus loin sur la banquise que les autres Phoques et trouve sa nourriture sous la glace, grâce aux trous qu'il se ménage de distance en distance, le met presque complètement à l'abri des attaques des Orques [Orca rjladiator)^ et c'est ainsi que W^ilson (1) Charcot, Le « françiiis -i au Pôle Sud, 1906, p. lîJl. MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 10 explique la rareté des balafres sur sa peau, comparée à celle des autres espèces. On peut considérer cette espèce comme la mieux adaptée au continent antarctique. Pendant l'hiver, les Phoques de Weddell passent beaucoup de temps sous la glace. Dans le silence de la nuit surtout, on entend les sons variés de leur voix sous l'étrave du navire pris dans labanquise, et l'on a pu confondre ce bruit avec celui des craquements de la glace, jusqu'au moment où sa véritable nature a été reconnue. D'autres fois, si l'on suit une longue fente de glace, on peut entendre le bruit qu'ils font en cher- chant à agrandir la fente pour creuser un trou et en brisant la glace nou- vellement formée avec leurs dents (1). A l'approche du printemps, ils cherchent plus souvent à venir s'étendre sous les rares rayons du soleil levant. Le long des fentes où se forme la jeune glace, on trouve alors une série de trous d'éventet de trous d'entrée et de sortie distants l'un de l'autre d'environ IGO mètres. Un tiers de ces trous, régulièrement espacés, ont été élargis de manière à donnner passage au corps de l'ani- mal, et, autour de ces trous, ont voit des marques qui prouvent que les Phoques s'y sont reposés souvent pendant les mois d'hiver. La durée de la gestation dans cette espèce paraît être de onze mois. Les mâles se livrent de violents combats, et on en trouve qui sont littéra- lement couverts de blessures, surtout sur la tête, le cou et aux parties génitales. Ces dernières semblent un des principaux points d'attaque. Ces blessures sont courtes et superlicielles, bien distinctes des longues balafres très profondes que l'on trouve sur la peau du Lohodon. Cependant elles ne se cicatrisent que très lentement, suppurant pendant des mois. Les mères semblent très attachées à leurs petits et les défendent quelquefois avec un courage qui peut éli-e dangereux pour celui qui s'en approche. Mais, dans d'autres cas, elles ne font aucune attention aux cris de détresse de leur nourrisson, si bien que les naturalistes de la « Disco- very » ont pu attacher facilement des étiquettes à la queue de plusieurs jeunes, dans le but de les reconnaître et de fixer la durée de leur crois- sance et de leur mue. (1) Les canines sont fortement usée? chez les vieux individus en raison de celte habitude. 20 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. A la fin du premier mois, quand la première livrée est tombée et que le jeune a revêtu les couleurs de l'adulte, la mère l'aide à entrer et à sortir de l'eau en le poussant par derrière ; il apprend rapidement à cher- cher sa nourriture. Cependant il continue encore à téter jusqu'à l'âge de six semaines, c'est-à-dire une semaine ou deux après avoir pris son premier bain. A deux ans, il atteint la taille des adultes, mais il est probable qu'il ne se reproduit qu'à l'âge de trois ou quatre ans. C'est dans la dernière quinzaine d'Octobre et pendant les mois de No- vembre et Décembre que se place la saison du rut. A la fin de cette période, les mâles se retirent à l'écart, et on en trouve qui sont morts de leurs blessures. Pour mourir, ils recherchent quelque- fois des places très éloignées et presque inaccessibles ; on en a trouvé à 35 milles de la côte dans l'intérieur du pays et au sommet d'un glacier élevé de près de 1 000 mètres au-dessus du niveau de la mer. Cette habitude existe aussi chez le Lohodon. On a vu combien ce Phoque est lent et paresseux à terre ou sur la glace. Par contre, dans la mer, il nage avec la rapidité d'un Poisson et doit s'emparer facilement des proies dont il se nourrit. Son mode de locomotion, d'ailleurs, ressemble tout à fait à celui d'un Poisson ; c'est un mouvement sinueux du corps dans lequel les pattes postérieures représentent à volonté une queue de Poisson ou une queue de Cétacé, suivant qu'elles sont opposées l'une à l'autre dans un plan vertical ou étalées horizontalement. Les pattes antérieures sont relativement beaucoup moins utiles pour la nage et ne servent guère qu'à modifier . la direction. Sous ce rapport, et en dépit de ses habitudes littorales, probablement acquises après coup, on peut dire que c'est un Phoque très pélagique. Genre HYDRURGA (1) Gistel, 1848. Stenorhinchus P. Cuv., 1826 (nec Stenorhijnchus Lamarck, 1819). Ogmorhinus Peters, 1875. Stenorhynchotes Turner, 1888. (1) Le nom de Stenorhynchus étant préocupé par Lamarck pour un genre de Crustacés, il est évident que le nom d'Hydrurga proposé par Gistel [Natuvg. Thierrekhs f. Iiôhere Scliulen, p. xi, 1848) a la priorité sur Ogmorhinus Peters, 1875. MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 21 HYDRURGA LEPTONYX (Blainville). Le Phoque aux petits ongles ou Léopard de mer. 1820. Phoca leptonyx Blainville, Journal de physique, XCI, p. 289 et 297. 182G. Stenorhinchus leptonyx P. Cuvier, Dict. Se. Nat., XXXIX, p. 549 (pour « Ste- norhynchus »). 1875. Ogmorhinns leptonyx Peters, Monatsb. K. Akad. Berlin, p. 393. Fig. 4. — Phoque léopard [Uijdniv^a leptonyx], Wtc vue de profil et de dos. 1901 . Ogmorhinns leptonyx Barret-Hamilton, Exp. Antarct. Belqe, Zool., Seals, 1901, p.O. 1002. Ogiiiorh irius leptony.x Bavrel-UamUlon, lîep. » Southern Cross », p. 25, PI. III. 1905. (Jgmorhinus leptonyx Andersson, Wiss. Ergebn. Swhed. Siidpolar Exp.,N, 2, p. 11. 1900. Stenorhynchus leptonyx Brown, Mossman and Pirie, Voy. « Scotia », p. 122, ooo 007 1007. Ogmorhinns leptonyx Wiison, Nation. Antarct. Exp. of « Discovery », II Zool.,i>. 20, fig. 22. L'Expédition du « Français "n'arapportéaucunspécimendecette espèce, qui existe dans la région explorée, mais semble rare. C'est probablement le Phoque que le D' Charcot a vu de loin, dévorant un Cormoran, mais sans pouvoir l'approcher (1). DisTRiuuTioN. — L'espèce semble avoir une assez vaste dispersion, puis- qu'elle a été signalée non seulement sur les côtes du continent antarctique, mais en outre aux îles Falkland, de la Désolation, au cap Horn et en (1) Charcot, Le « Français » au Pôle Sud, 1906, p. 122 (la figure de la page 123, avec la légende i< Léopard de mer », est évidemment un Phoque de Weddell). 32 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. Patagonie, à la Nouvelle-Géorgie, aux îles Campbell, Kerguelen, Lord- Howe, à la Nouvelle-Zélande et à la Nouvelle-Galle du Sud. Dans ces régions, ce Phoque vient souvent à terre, et, bien qu'il ne s'y meuvequ'avec difficulté, il s'avance assezloin dans les buissons, toujours solitaire. Il remonte accidentellement jusqu'à la Nouvelle-Zélande (James Hector). Dans l'Antarctique, on Ta signalé à la Terre Louis-Philippe, à la Terre de Graham, à Roberston Bay, dans la mer de Ross, enfin aux Orcades du Sud et à la Géorgie australe. On l'a souvent confondu avec le Phoque de Weddell sous le nom de Léopard de mer \ mais ses habitudes solitaires bien connues permettent d'affirmer que, toutes les fois qu'il s'agit de troupes plus ou moins nombreuses, on a eu affaire à ce dernier. Ainsi l'espèce signalée à Kerguelen par Moseley, comme formant une rookery de 400 individus, est très probablement le Leptonychotes. De même le Phoque que la u Southern Cross » dit avoir vu se l'eproduire à Robertson Bay semble bien le Phoque de Weddell ; il est probable que YHydrurga se reproduit sur l'Antarctique, mais on ne sait rien de ses habitudes. Description. — La présente espèce se reconnaît facilement à sa forme générale, que l'on a comparée à celle dun court serpent. La tète est grosse et nettement séparée des épaules, qui sont larges, par un cou mince et allongé; le reste du corps s'amincit comme celui d'un Reptile et indique un grand pouvoir de locomotion. La longueur totale peut atteindre plus de 4 mètres. Pelage. — Le dessus est d'un gris brun marqué de taches allongées, les unes noires, les autres jaunâtres ; les flancs sont plus clairs, blan- châtres avec des taches noires ; ces taches sontconfluentes aux épaules ; le devant des nageoires antérieures est d'un brun foncé, tandis que le reste est de la couleur des flancs ; les nageoires postérieures sont brunes, tachetées de jaune, et cette teinte jaune devient parfois orangée ; la poitrine et le ventre, plus foncés que les flancs, sont jaunâtres avec une légère teinte orangée relevée par des tache brunes. Ces teintes paraissent très variables d'un individu à l'autre. Les taches MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 23 qui ont valu à cette espèce son nom de Léopard marin paraissent appartenir au pelage de transition pendant la mue et sont constituées par dos taches claires plus ou moins conduentes, tranchant sur dos anneaux plus fortement pigmentés, formés par les poils en train de tomber. MoELTvS. — Les habitudes de cette espèce sont pou connues, en raison de sa rareté; mais c'est probablement le plus vorace de tous les Phoques de l'Antarctique. Dans l'estomac de l'un d'eux, les naturalistes de la « Discovery » ont trouvé le cadavre presque entier d'un Pingouin (ou Manchot) Empereur {Aptenodijtes Forsteri), de près de 1 mètre de long. Ceux du « Morning » ont trouvé dans celui d'un autre individu les débris d'un jeune Phoque de Weddell, et dans un autre encore 14 kilogrammes de Poissons divers. On y trouve aussi des débris de Céphalopodes. Le D'PmiE, de la « Scotia », a vu un de ces Phoques s'approcher d'un glaçon sur lequel se tenaient des Pingouins, en saisir un de ses redoutables mâchoires et se replonger dans la mer en emportant sa proie. Sur la glace, le Photiue léopard semble moins actif que le Phoque de "Weddell, non par paresse, comme chez ce dernier, mais plutôt par suite de la lourdeur de la tète et des épaules. Les pattes sont ici de véritables nageoires allongées et puissantes, avec le premier et le cinquième doigt des postérieures largement palmés au delà des ongles, h'wn que les quatre membres soient complètement couverts de poils. Les grilles sont bien développées aux pattes antérieures ; la première seule est rudimentairc, les quatre autres dépassant considérablement l'extrémité des doigts. Aux pattes postérieures, les ongles du premier et du cinquième orteil sont rudimentaires, ceux du second et du quatrième bien développés et attei- gnant l'extrémité de Torleil, tandis que celui du lioisième la dépasse nettement. Cette espèce n'est pas à l'abri des attaques des Orques, comme le prouve les balafres que portent plusieurs des individus capturés. 24 MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. Genre OMMATOPHOCA Gray, 1844. OMMATOPHOCA ROSSI Gray. Le Phoque de Ross. 1844. Ommalophoca Rossi Gray, Zool. « Erebus » and « Terror, » p. 7, PI. VII, VIII. 1901. Ommatophoca Rossi Barret-Hamilton, Exp. Anlarct. Belge, Zool., Seuls, p. 3, PI.I (cràne). 1902. Ommatophoca Rossi Barret-Hamilton, Rep. « Southern Cross » Coll., p. 46, PI. VI. 190G. Ommatophoca Rossi Brown, Mossman and Pirie, Voy. « Scotia «, p. 320, 327, 350, 301. 1907. Ommatophoca Rossi E.-A. Wilson, National Antarctic Exp., Nat. Hist., vol. II, Zool, p. 41, fig. 27-29. Matériaux. N° 5. Peau plate, cf (1°',77). Ile W^andel (29 novembre 1904). Distribution. — L'espèce a été découverte par sir James Ross, en 1840, dans le nord de la mer de Ross, par 68° de latitude sud et 1 76° de longitude est. Le spécimen type est resté unique jusqu'à l'Expédition de la « Relgica » (1898), qui retrouva l'espèce à la Terre de Graham. Les naturalistes de la « Southern Cross » et ceux de la « Discovery » l'ont également observée, et ces derniers l'ont rencontrée au point même où Ross l'avait découverte plus de soixante ans auparavant, c'est-à-dire dans la mer de Ross. Elle s'étend donc sur une vaste étendue (du 40° longitude ouest au 1 60° longitude est), dans l'Antarctique. Elle ne semble pas s'écarter de cette région vers le nord, comme les trois autres espèces, bien qu'un jeune ait été signalé récem- ment aux Orcades du Sud. C'est donc une espèce strictement polaire. Description. — Cette espèce se reconnaît au premier coup d'œil à ses formes lourdes ; son corps a l'apparence d'un sac d'où sortent des pattes et un très court museau, sans aucune trace de cou. La gorge est renflée surtout quand l'animal fait entendre sa voix. Pelage. — Comme chez les autres espèces, les couleurs du pelage sont assez variables. Le dos est gris ou brun avec des taches ou mouchetures allongées blanches sur les flancs ; la tête et les extrémités sont de la cou- leur du dos; la poitrine et le ventre sont le plus souvent blancs, les deux couleurs se fondant insensiblement; mais on trouve des individus qui ont ces parties noirâtres. On ne connaît pas la livrée du jeune. La taille peut MAMMIFERES PINNIPÈDES. -25 atleindi'o 2", 80 choz les vieux iiiàlcs, mais les individus de 2", 150 ;i 2", 50 sont les plus communs. Moeurs. — Cette espèce ne se monti'O pas en bandes; les individus que l'on rencontre sont toujours solitaires, et l'on ne sait rien de la façon dont se fait la reproduction. On les ti'ouve d'ordinaire sur les bancs de i;lace. lin raison de la forme du corps, ce Phoque semble bien confoniK- pour la vie pélagique; par contre, il (^st peu agile sur la glace, où il ne fait ►$ l''ig. ii. — riioi[ui' lie Hoss (Ominalopliora liosni). Ii'lc vur île |irulil cl ilr ilos. aucun elVoi't poui' s'échapjier. Il est toujours excessivement gras, et cette graisse forme autour du cou des bourrelets tellement gros que la tète y dis[)arait presque complètement. F>es yeux ne sont pas grands (malgré lu dévelop|)ement des orbites (jiii a inspiré à (Iray le nom du genre), et la l)0uche est reiuarqu.ilileiiienl pclilc. coiiijiai'ée à celle des autres espèces. R.\C(tvn7A a décrit ainsi la voix de ce l'inxpie : " Il peiil goniU-r son larynx et son énorme voile du palais de façon à constituer deux caisses de r(''sonance, deux (xiclies cdiileiiaiil une grande j)rovision d'air, delà lui permet d'exécuter des trilles e| ai'pèges aussi sonores qucHjizarres. Lorsqu'on l'irrite, il comnuMice par goiiller son larynx en rabattant la tète en arrière. H produit alors, la gueule ouverte, et son voile du |)alais distendu apparaissant comme une grosse boule rouge, un roucoulement semblable à celui d'une tourterelle enrouée. Puis il ferme la gueule et émet un gloussement de Poule effrayée. Il expulse finalement avec violence, li-ipéclitioii C/iarciil. — Tiuhkssviit. — MaiiimlIVri'.s l'inni|ir(los. ■'» 26 .MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. par les narines, sa provision d'air, et cela produit un reniflement compa- rable à celui que fait un Cheval qui s'ébroue. » Les nageoires sont grandes et bien développées. Les ongles sont rudi- mentaires et sans usage, les nageoires antérieures étant palmées à l'extré- mité de chaque doigt. Aux pattes postérieures, également très larges, le premier et le cinquième orteil sont allongés et aplatis, formant des lobes comme chez Macrorhinus ; les doigts sont couverts de poils. Le troisième orteil est beaucoup plus court que le premier et le cinquième. L'Ommatophoca se nourrit de Céphalopodes dont on retrouve les becs dans son estomac. On y trouve aussi des Algues marines et, dans l'intestin, une énorme quantité de vers parasites. La préférence que ce Phoque donne au corps mou des Céphalopodes sur toute autre nourriture explique l'atrophie de ses dents molaires et les anomalies que présente la formule dentaire chez beaucoup d'individus. La première prémolaire, notamment, est souvent rudimentaire ou absente. Quant aux molaires, sur l'animal fraîchement tué, elles sont souvent branlantes, et, si Ton veut préparer le crâne, on s'aperçoit qu'elles n'ont plus d'alvéoles et ne tiennent que dans la muqueuse gingivale (Wilson). Chez cette espèce, la mue a lieu en janvier, et l'animal porte alors une toison bourrue, d'un gris brun, dont les poils se détachent facilement, faisant place à un pelage assez ras d'un gris noirâtre. Pendant la mue, qui dure une semaine ou deux, l'animal évite d'aller à la mer. Il reste couché plusieurs jours à la même place, comme le prouve l'amas de poils et d'excréments qu'on voit autour de lui sur la glace, et, en ouvrant son estomac, on le trouve complètement vide. II n'a plus qu'un pouce à peine de graisse sous la peau (Hanson). Le pelage est formé de deux sortes de poils: les plus abondants sont courts et noirâtres ; de longs poils blancs plus rares sont dispersés au milieu des autres; ces longs poils sont d'un tiers plus longs que le reste du pelage. Les cicatrices que l'on trouve sur les peaux sont courtes, localisées sur la tête et le cou, et paraissent dues aux combats que se livrent les mâles pendant la saison du rut. On n'y voit jamais de ces longues balafres, pro- duites par les dents des Orques, si communes chez les autres espèces ilV MAMMIFÈRES PINNIPÈDES. 27 antarctiques. Ce fait semble indiquer que VOmmatophoca est le mieux adapté de tous pour la vie pélagique et que, grâce à la rapidité de ses mouvements, il échappe plus facilement à la voracité des grands Cétacés carnivores. EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE I Fig. 1. — Phoque crabier sur la banquise. Fig. 2. — Phoque crabier (en mue) pleurant sa femelle morte. PLANCHE II Fig. 1. — Phoques crabiers sur la banquise. Fig. 2. — Phoque de Weddell sur la plage de l'île Wandel. PLANCHE III Fig. 1. — Bande de Phoques crabiers sur la banquise. Fig. 2. — Phoque crabier portant deux balafres sur les flancs. Fig. 3. — Phoques crabiers se jouant sur la banquise. Fig. 4. — Phoque de Weddell couché sur le flanc. Fig. 5. — Phoque de Weddell dans un paysage de l'île Wandel. Fig. C. — Phoque de Weddell fortement tacheté. PLANCHE IV Fig. 1. — Phoque crabier (en mue) montrant les dents à l'agresseur. Fig. 2. — Phoque de Weddell troublé dans son repos. Fig. 3. — Phoque de Weddell en marche vers son trou. Fig. 4. — Phoque de Weddell couché sur le dos. Fig. 5. — Phoque de Weddell elfrayé au moyen d'un bâton. Fig. C). — Phoque de Weddell effrayé par un ustensile de cuisine. Expédition Charcot (Tronessart. Mammifères pinnipèdes). PI. I \ \ Flg. 1. — Phoque crabler sur la banquise. ■^^s ■ P)iototy|iic B«nhaud Fig. 2. — Phoque crabler (en mue) pleurant sa femelle morte. Mammifères pinnipèdes. Masson cl Cie. Editeurs Expédition Charcot (Trouessart. Mammifères pinnipèdes). PI. II Flg. 1. — Phoques crablers sur la banquise. riiolotypic Itcrtliâud Flg. 2. — Phoque de Weddell sur la plage de l'ile Wandel. Mammifères pinnipèdes. Masson & Cie, Editeurs Expédition Charcot (Trouessart. Mammifères pinnipèdes). PI. III Fig. 1. — Bande de phoques crabiers sur la banquise. Fig. 2. - Phoque crabler portant deux balafres sur les flancs. Fig. 3. — Phoques crabiers se jouant sur la banquise. Fig. 4. — Phoque de Weddell couché sur le flanc. Fig. 5. — Piioque de Weddell dans un paysage de l'île Wandel. Fig. 6. — Phoque de Weddell fortement tacheté. Mammifères pinnipèdes. Masson et de, Éditeurs Expédition Charcot (Trouessart. Mammifères pinnipèdes). PI. IV Fig. 1. — Phoque crabler en mue montrant les dents à l'agresseur. Flg. 2. — Phoque de Weddell troublé dans son repos. Fig. 3. — Phoque de Weddell en marche vers son trou. Fig. 4. — Phoque de Weddell couché sur le dos. Fig. 5. — Phoque de Weddell effrayé au moyen d'un bâton. Fig. 6. — Phoque de Weddell effrayé par un ustensile de cuisine. Mammifères pinnipèdes. Masson & Cie, Editeurs OISEAUX Par A. MENEGAUX Les animaux supérieurs qui vivent dans le voisinage du pôle Sud sont connus depuis les héroïques voyageurs qui, vers la un duxviii" siècle, ne craignirent pas de s'aventurer dans les solitudes glacées de l'Antarctique ; mais nos connaissances sur la vie et les imeurs de ces animaux laissaient •'ncoro beaucoup à désirer. Depuis cette époque, des séjours prolongés d'un an ou do deux ans ont permis d'entreprendre des recherches do lniigu(> haleine et des observations de longue durée. Les dernières expéditions datant do la fin du siècle dernier, et dont tout le monde a entendu parler, nous ont rapporté une ample moisson et ont donné lieu à des comptes rendus intéressants de la part do Pagens- techer (1881), de Von den Steinen (1800) et do Lônnberg (1!)06), sur les Oiseaux de la Géorgie du Sud ; de Hall ( l!)00), sur ceux de Kerguelen ; de B. Shar|)e (1902), sur ceux rapportés par la « Southern Cross » ; de Raco- vitza (1004), sur ses observations pendant le séjour de la « Belgica » à la Terre de Graham ; de \'anhomMi (lOOi), d'Andorsson (100:i) et S. Glarko (1000), sur les Orcados du Siul. Los s|)écimons nombreux qui ont été rapportés ont enrichi les musées, et les observations biologiques nous ont dévoilé les secrets de la vie animale dans ces régions, tout en permettant do préciser ses rapports avec la vie dans les régions arctiques, car il est certain que des condi- tions d'existence identiques ont dû amener une certaine similitude de structure et d'habitudes. . La vie animale acquiert dans l'Antarctique une intensité, une luxuriance qu'on ne retrouve nulle part ailleurs. Ce sont les Oiseaux qui donnent à Expédilion Charcol, — A. Menegaui. — Oiseaux, 1 2 OISEAUX. la faune des Vertébrés son caractère, son cachet particulier, et, pai-mt eux, ce sont surtout les Manchots, vulgairement Pingouins, les Albatros et les Procellariens qui sont les plus connus et les plus nombreux. Les Oiseaux qui, pendant le printemps (octobre, novembre, dé- cembre 1904), ont construit des nids à l'île Booth-Vandel, station d'hiver- nage <( du Français » et dont on a pu recueillir les œufs, appartiennent aux espèces suivantes : Pjjgoscelis papua (Forst.) ; Pjigoscelis Adeliie (Honib. et Jacq.); PItnIacrocorax atricep>i Iving; Larus dommicanuii Le h t. ; Sterna vittata G m. ; Megalestris antarctica (Less.) ; Oceanites oceanicHs [KvihX) \ ■ Chiotiis alba (Gm.). La Mission Charcot a rapporté plus de 130 spécimens d'Oiseaux en peau appartenant à 16 espèces antarctiques, sans compter les œufs et les jeunes conservés dans l'alcool pour des études plus spéciales d'anatomie et de développement. Les peaux forment de belles séries, donnant les diverses phases, parfois inconnues, du plumage des mâles, des femelles et des jeunes. La série des Manchots, celle des Ossifragagigatitea et ceWe des Larus dominicatms , sont particulièrement intéressantes et remarquables. Il faut ajouter à cela un certain nombre d'observations précises sur la nidification, les habitudes, l'incubation, sur les dates d'arrivée et de départ, sur les quartiers d'été. Il s'ensuit que les résultats acquis par la Mission viennent compléter heureusement ou confirmer ceux des autres expéditions antarctiques. SPHÉNISCIDÉS. Cette famille, qu'on regarde souvent comme constituant l'ordre des Impennes, forme le groupe le plus singulier de la classe des Oiseaux. Les navigateurs les ont toujours appelés Pingouins. C'est Brisson OISEAUX. 3 qui, le premier, en 1 70U, dans son Ornilholugie, imposa lenom de Manchots (Sphenisci), à cause de la brièveté de leurs ailes, aux Pingouins, alors con- nus, des mers australes (1 ), pour les séparer des Pingouins des mers arc- tiques, auxquels il attribua exclusivement ce dernier nom. Les difTérences établies par Brisson entre les Manchots et les Pingouins ont été reprises, précisées et accentuées par Buffon, et son intervention a amené l'adoption de ce terme par les naturalistes français, qui seuls se servent du mot do Manchot, tandis que tous les savants étrangers et les navigateurs ont conservé le nom de Pingouin, auquel M. (Miarcot est revenu aussi, puisque c'est le plus connu. Dans ce travail, m'appuyant sur l'autorité de BulFon et la tradition scien- tifique, j'emploierai de préférence le mot de Manchol, puisqu'il a acquis droit de cité. En effet BulFon, dans le chapitre intitulé : Les Pingouins et les Manchots ou les Oiseaux sans ailes, appuie son opinion sur les arguments suivants (2j : (1) Dans son ordre XXl'^ des Oiseaux, Brisson dil ti'xdR'ilcnient : Manchot, nom que j'ai donné aux Oiseaux de ce genre à cause de la biirveté de leurs ailes (Brisson, Ornith., vol. VI, p. 96, note). Le nom colleetif de Pinfjouin est donc plus ancien ([ue celui de Manchot. Diveises hypothèses ont été émises sui- l'oiigine de ce mot. Lapremicie, due à Daylon [ïn Volijolhiim, SongO, 1013), suppose qu'il vioni du gallois pen ywyn, qui signilie U'te blanche. .Mais on n'a aucune preuve que ce soient les Gallois qui ont découvert ces animaux, et, les eussent-ils découverts, il est fort improblable qu'ils auraient pu faire adopter ce nom parles navigateurs anglais; en outre, ces animaux n'ont pas la tétc blanche, puisipiils n'ont qu'une tache sur le sincipul. D'après la deuxième, admise par LiUré, ce mot piovicndrail du mnl lalin pinmiix, qui veut dire ;//((s. Il leur aurait été donné pur les iiatuialisles hollandais ([ui les signalèrent les premiers à l'attention des naturalistes, d'après Clusius M 598). Mais ce mot n'a pas le son linal in (|u'on y trouve en anglais et, de plus, d'après Skeat {Etyinol. Dkt., p. 433), les soi-disant Hollandais qui affirment être les auteurs de ce nom sont tout simplement le navigateur anglais Francis Drake, mort en liiO;!, et ses compagnons. On a supposé aussi que c'est une corruption du nml pin-irinij ou [icn-wing [Ann. Xal. llisl., i" série, IV, p. 133), s'apidiquant à un Oiseau qui a subi l'opération du jiinioning ou, comme on dit dans une partie de l'Angleterre, du « pin-winging " (raccourcissement de l'aile). Reeks afQrme (in 'Auolugkt, -série 2, 1854) que les habitants de Terre-Neuve, qui avaient l'habi- tude de voir cet Oiseau, l'ont toujours appelé Pin-win;/. Il y a donc tout lieu d'admettre (jue ce nom a été donné ainsi en premier lieu à l'Ahjue du Noid avant que li's Oiseaux du Sud ne fussent connus en Europe. Les navigateurs ne s'en servirent donc que plus lard pour les désigner'. Enlin une dernière hypothèse est celle de Milne-Edwards, (|ui suppose que ce nom a été appli- qué d'abord aux Manchots par les navigateurs espagnols à cause de la grande quantité de graisse dont ils sont chargés ( Pinguigo) et étendu ensuite à tous les < tiseaux pélagiens à ailes co\irtes, puis réservés par les zoologistes aux seuls .I/o» du .Nord (.Milne-Edwards, Faune des i-éyiuns australes, ch. n, p. 23, 18S21. (2) BiFFON, Hist. nat. : Oiseaux, t. IX, p. 372, 373 et suiv., 1783. 4 OISEAUX. « On a donné indistinctement le nom de Pingouin ou Pinguin à toutes les espèces de ces deux familles, et c'est ce qui les a fait confondre. On peut voir dans le Sijnopsis de Ray (p. 118 et 119) quel était l'embarras des ornithologistes pour concilier les caractères attribués par Clusius à son Pingouin magellanique avec les caractères qu'offraient les Pingouins du Nord. Edwards a cherché le premier a concilier ces contradictions : il dit avec raison que, loin de croire, comme Willughby, le Pingouin du Nord de la même espèce que le Pingouin du Sud, on serait bien plutôt porté à les ranger dans deux classes différentes, ce dernier ayant quatre doigts et le premier n'ayant même pas de vestiges du doigt postérieur et 11 ayant les ailes cotwertes de rien qui puisse être appelé plumes^ au lieu que le Pingouin du Noixl a de très petites ailes couvertes de véritables pennes. « A ces différences, nous en ajoutons une autre plus essentielle, c'est que, dans les espèces de ces Oiseaux du Nord, le bec est aplati, sillonné de cannelures par les côtés et relevé en lame verticale ; au lieu que, dans celles du Sud, il est cylindrique, effilé et pointu. Ainsi tous les Pin- gouins des voyageurs du Sud sont des Manchots, qui sont réellement séparés des véritables Pingouins du Nord, autant par des différences essentielles de conformation que par la distance des climats. «Nous allons le prouver par la comparaison de témoignages des voyageurs et par l'examen des passages dans lesquels 7ios Manchots sont indiqués sous le nom de Pm^owm*: tous les navigateurs du Sud, depuis Narborough, l'amiral Anson, le commandant Byron, M. de Bougainville, Mrs. Cook et Forster, s'accordent pour décrire ces Manchots sous les mêmes traits et tous différents de ceux des Pingouins du Septentrion. » « Les moignons des ailes sont étendus en nageoires par une membrane et couverts dej5/2/w2^/e5 placées siprès les unes des autres qu'ellesressemblent à des écailles, et, par ce caractère ainsi que par la forme du bec et des pieds, ils sont distingués du genre des Alex [vrais Pingouins], qui sont incapables de voler, non qu'ils manquent absolument de plumes aux ailes, mais parce que ces plumes sont trop courtes (1). » (1) Forster, p. 186. OISEAUX. S « C'est donc au Manchot qu'on peut spécialement donner le nom (}l Oiseau sans ailes ^ etc. » « Voilà donc une distinction bien établie et fondée sur des différences essentielles dans la conformation extérieure du bec et du plumage entre les Manchots ou les prétendus Pingouins au Sud et les vrais Pingouins du Nord (1). » 1. Pygoscelis papua (Forst.), 1781. Le Manchot papou Sonnerai, Voyage à la Nouvelle-Guinée, p. iSl, PI. CLXXXV (1770). Apienodijles papua Forsler, Nov. Comment. Goltlngensis, l. III, [i. lio, PI. 111(1781, P\ilklnnd). l'i/f/oscclia papua G.-R. Gray, Llsl Birds, t. III, p. 133 (184i, Falkland, Kerguelen). Eudypiex pnpua G.-R. Gray, Gen. Birds, t. III, p. 641 (1846). Apti-noihjle^ tenialn Peale, Zool. IJ. S. Expl. Exped. Divds, p. 260 (1848). PyyosLelis Wayleri Sclaler, /'. Z. S., p. 390 (1860, Falkland). Pygoscelis teniatus Coaes, P. Ac. Philad., p. 19o (1860, Falkland, Kerguelen et Mac- quarie). Pygoscelis papua, Cal. liirds Bril. Mus., vol. XXVI, p. 031 ; Andersson, loc. cit. (190.j), p. 34; Clarke, Ibis (1900), p. 162; Lônnberg-, loc. cit. (1900), p. 87. N°22 9-P''iseà la main, le 22 octobre 1904; paupières blanc bleuâtre ; iris rouge-brique; pattes rose-chair, passant au rouge; dos gris ; l'estomac renfermait des Euphausides. N° 26 Ç. Tuée au chloroforme le 27 octobre 190i; longueur lotalc, 80 centimètres; ailes, 22 centimètres; iris brun-café au lait; pattes rose- chair. N° 38 (2f . Pris à la main et tué au chloroforme le 2 novembre à l'ile Booth-Wandcl; pattes rouge clair; iris brun-marron. N"' 39, 10 Q, o^. Capturés à la main le 4 novembre 1901 n l'ile Booth-Wandel et tués au chloroforme; pattes rouge-chair; iris marron; estomac avec de nombreux Euphausides. N"' 44, 45 çf, 9 • Capturés à la main le 7 novembre 190 i, à l'ile Booth- Wandel et tués au chloroforme; dans l'estomac, Euphausides et Poissons. N" 46 Q . Prise à la main le 9 novembre à l'ile Booth-Wandel et tuée au chloroforme; estomac vide; ténias dans le péritoine. (1) BuFFON, p. 374, 37o et 377. 6 OISEAUX. N° 58 Ç. Prise à la main, le 12 novembre, sur Rocher magnétique ; Euphausides et un Poisson dans l'estomac. 2 Janvier, capturé deux P. papua^ à l'état de jeunes Poussins, l'un mis dans l'alcool. Tête noire en dessus, bec rouge avec dos de la mandibule supérieure brun foncé ; iris marron ; dos brun ; ventre blanc brunâtre ; pattes rouge vif ou plutôt rose-chair très foncé. Un Poussin en duvet sans renseignements. Six œufs en bon état de conservation. Un œuf avec embryon bien formé du 29 décembre 1904. Ile Wiencke. Le Papou a l'aspect arrondi, le bec rouge, il est marqué d'une petite tache triangulaire blanche dont le sommet se termine au coin de l'a-il. Dans la région où se trouvait l'Expédition, cet animal n'est pas rare, quoiqu'on ne l'ait jamais rencontré en colonies très nombreuses. Il se trouve dans toutes les régions circumpolaires subantarctiques. 11 niche en colonies importantes à la Géorgie du Sud et à Kerguelen. Dans l'Antarc- tique, il se trouve seulement au Shetland du Sud, aux Orcades et aux alentours de la Terre Louis-Philippe et à l'île Booth-Wandel. Ce sont pro- bablement des postes avancés vers le Sud. Ici ses colonies sont peu nombreuses, adossées ou mélangées à celles de P. Adeliœ ou de P. an- tarctica. Pourtant Donald en a vu d'isolées, de quarante nids environ, sur la côte occidentale de l'île Dundee et Racovitza, près du canal de Gerlache. Glarke estime qu'aux Orcades du Sud il est en petit nombre proportionnellement à ses autres congénères, et pourtant sur l'île Laurie il en évalue les colonies à 100 000 individus, confinés dans quatre ou cinq rookeries où nichait P. Adeliœ. L'Expédition Charcot en a observé pour la première fois de petites troupes sur des glaçons et sur la banquise à la baie des Flandres, du 7 au 19 février 1904. Le 20 février, pendant le mouillage dans une baie à l'ouest de l'île "Wiencke, elle trouva deux colonies de Papous, déjà visitées en 1898 par Racovitza, le naturaliste de la « Belgica ». L'une d'elle était fixée sur un OISEAUX. 7 plateau de rochers plus ou moins désagrégés, dans le canal de Neumayr, à l'entrée de la baie ; l'autre, au fond de celle-ci, comptait 200 à 300 indi- vidus ayant des jeunes. Le 21 février, l'Expédition mouillait à l'île Booth-Wandel et s' y amarrait définitivement le 5 mars, en vue de l'hivernage. Sur quelques massifs de rochers de cette île, au bord de la mer, vivaient côte à côte des Manchots Adélie et des Papous. Ces derniers formaient une colonie de plus de 4000 individus répartis en quatre ou cinq groupes, tandis que les Adélies n'étaient guère que iOO à iJOO. Les jeunes commençaient déjà à aller à la mer. A côté d'eux se trouvait une rookery de Cormorans. L'Expédition a pu ainsi étudier les mœursdecestrois espèces d'Oiseaux pendant toute la durée du séjour à l'île Booth-Wandel, c'est-à-dire du 1 " mars à la fin de décembre 1904 (fig. 24, 19). Les deuxrookeries vivaient en fort bonne intelligence et étaient même assez confondues. Les divers individus se rendaient de fréquentes visites(fig. 10), s'arrêtaient de tempsen temps pour se saluer ou échanger quelques paroles (fig. 2). M. Charcot décrit ainsi leur village : « Alors même que nous n'aurions pas vu les Pingouins, la présence de ces aimables bêtes se manifeste suffisamment à l'odorat et à l'ouïe. Ce village, on pourrait môme dire cette ville, comprenait plusieurs centaines d'habitants, qui n'ont adopté qu'un seul système, celui du « tout sur la voie publique » ; le parfum qui s'en dégage est très sià (jeneris. Cela n'a d'ailleurs qu'une importance relative, vu le peu de personnes qui pour- raient en ôtreincommodé(>s en dehors des Pingouins, qui ne s'en soucient guère ; puis un peu de neige, une bonne gelée neutraliseront tout cela, et les heures de dégel sont ici courtes et rares ! » Le Pingouin étant doué d'un organe puissant, chacun veut, clans une discussion ou môme dans une simple conversation, placer son mot. L(»s sons qu'ils émettent sont extrêmement variés, et il est bien difficile de ne pas admettre qu'ilscommuniquententre eux parsignes phonétiques équi- valant presque à la parole. C'est en général une sorte de caquetage où le couin-couin du canard apparaît fréquemment, mais diversement modulé. Puis il y a d(»s signaux très variés, des espèces d'ordres donnés en diverses circonstances, notamment quand, par exemple, une bande de 8 OISEAUX. ces Oiseaux est groupée sur le bord de l'eau et que le chef décide qu'il faut s'y jeter. Pendant les heures de repos, au milieu du silence, la plu- part des Pingouins couchés, souvent un de ceux qui veillent renverse sa tète en arrière, ouvre le bec et pousse une série dénotes bizarres, qu'on ne peut mieux comparer qu'au braiement d'un âne ; un autre Pingouin, à une certaine distance, répond de même, et le cri passe d'un veilleur à l'autre comme un cri de sentinelle (fig.8). Ils aiment la promenade, car, dans ses ascensions, M. Charcot a parfois rencontré des Manchots à 400 mètres d'altitude. On se demande ce qu'ils viennent faire à ces hauteurs, étant donnés les moyens de locomotion dont ils disposent et les difficultés qu'ils éprouvent pour y arriver (fîg. 9). L'attitude du corps des Papous au repos est sensiblement la même que pendant la marche : le corps est légèrement penché en avant et les ailerons pendants, comme des bras, en sorte qu'ils ressemblent à des pygmées (fîg. 16). D'après Warborough, de face, on les prendrait de loin pour de petits enfants avec des tabliers blancs ou pour des dominicains, d'après Charcot. Dans la colonie, ils avaient la tète habituellement tournée vers le nord et le nord-est, car c'est de cette direction que soufflaient les vents les plus violents accompagnés de chutes de neige. Leur marche est lente, et ils avancent en se dandinant. Quand on les poursuit, ils se couchent sur la neige et rampent avec tant d'agilité en s'aidant des pattes et des ailerons qu'on peut à peine les suivre en courant (fîg. 12, 20). M. de Pages, dans la relation manuscrite de son voyage, raconte que les ailerons des Manchots leur servent de temps en temps de pattes de devant et qu'alors, marchant comme à quatre, ils vont plus vite ; mais il suppose que, suivant toute apparence, cela n'arrive que lorsqu'ils culbutent, et que ce n'est point une véritable marche (1). C'est, pour ces animaux très vigoureux, un vrai mouvement de locomotion, c'est leur mouvement de fuite (fi g. 20). Dansl'eau, leurs mouvements sont très rapides. Ils plongent et évoluent avec agilité, naviguant en rangs serrés. A cha(|ue bond hors de l'eau correspond un petit cri qui sert d'encouragement ou de ralliement. (1) BuFFON, Oiseaux, t. IX, p. 407- OISEAUX. 9 Dans les cas ordinaires, ils ne se servent que des ailerons; mais, s'ils veulent fuir ou évoluer avec plus de rapidité, ils utilisent leurs pieds. Lajournée se passe entre la pêche, indispensable à la vie des individus, et la construction des nids qui assurera la continuité de l'espèce. Le mâle et la femelle se partagent la besogne, comme ils le feront aussi pour le couvage des œufs et la surveillance des petits. Ils vont toujours à la pèche par groupes de même espèce. Après avoir dégringolé de rocher en rocher, ils se mettent en une seule fde, si la distance à parcourir est longue et par files irrégulières, si l'eau libre est proche. Comme ils suivent toujours les mômes routes, ils finissent |)ar tracer de véritables chemins sur lesquels la neige est bien tassée et dont les bords portent la marque de leurs ailerons (fig. 23). Généralement debout, ils se laissentparfois glisser sur le ventrepour aller plus vite et passer plus facilement la neige molle. Quand ils hésitent sur la direction, ils se grou- pent, semblent discuter, et finalement emboîtent le pas derrière un chef temporaire. Arrivé au bord de l'eau, le caquetage atteint son maximum ; après avoir tâté l'eau avec une patte ou un aileron et après bien des hésitations et des cris du chef, toute la bande se bouscule pour piquer une tête (fig. 2o). Quand la pêche est terminée, les Manchots sortent de l'eau en sautant sur la glace ou les rochers avec une habileté et une agilité remarquables, qui n'égalent que leur vigueur et leur précision. M. Charcot a mesuré quelques sauts : il a trouvé parfois 2°", 75 de hauteur verticale. La bande ne se remet en marche que lorsqu'elle est au complet, et alors l'ascension se fait en s'aidant du bec, des ailerons et des pattes, et, malgré toutes les chutes et les glissades, on arrive à la rookery, où chacun regagne son domicile particulier (fig. 9, 21). Il faut qu'ils fassent des kilomètres |iunr trouver des endroits propices à la pêche; aussi y séjournent-ils plusieurs jours, campant sur la glace (fig. 1 1), tandis que l'autre moitié des habitants reste à couver les œufs, attendant son tour de partir. Ils vont par files de plus de cent (fig. 16). Lors- qu'une crevasse barre la route, la bande s'arrête, se groupe en attendant Toi-dro (lu clief de se jeter à l'eau; |)uis, après de courts débats, les Manchots atterrissent de l'autre côté par un bond rapide et brusque Expédilion Charcol. — A. Menegacx — Oiseaux. 2 10 OISKAUX. succédant à une plongée, ce qui les lail relomber comiquement debout sur leurs pâlies (fig. '21, 2a). Les éclopés, les traînards tiennent la queue, et à chaque instant les valides se retournent pour les surveiller ; s'ils les voient à bout de force, ils préviennent ceux qui précèdent, et, le mot d'ordre se transmettant à toute la colonne, on s'arrête pour laisser reposer les plus fatigués et attendre les retardataires (fig. 22). Dans ces circonstances, ils font preuve d'une solidarité remarquable. M. Charcot en a vu un cas très curieux. Un Pingouin suivait péniblement une colonne en tombant à chaque pas. La compagnie dont il faisait partie finit par s'arrêter longuement. Voyant l'invalidité durable de ce compa- gnon, elle se remit en marche, mais après l'avoir confié aux soins de cinq Pingouins bien portants, qu'on vit rester auprès de lui jusqu'au lendemain matin, et tous les six ne reprirent le chemin des îlots de pêche que le soir, en faisant de courtes étapes espacées par de longs repos. Lorsque la journée de travail est terminée, les Manchots se reposent en caquetant et vont parfois se rendre des visites à de grandes distances. Souvent on en voit se saluer fort cérémonieusement. Ils s'inclinent l'un devant l'autre, puis se redressent en allongeant le cou, levant haut la tête et le bec, avec les poitrines bien parallèles ; ils répètent ces mouve- ments plusieurs fois (fig. 2, 10). Le soir et quelquefois le matin, ils faisaient entendre leur cri, qui est loin d'être agréable. C'est un son élevé qui a beaucoup d'analogie avec le braiement de l'âne. Le D' Turquet dit qu'on peut le traduire par le son que donne la prononciation fortement accentuée des lettres suivantes ii-dâ, ii-dà. D'après Hall, le cri produit par l'expiration ressemble à celui d'un âne ; celui produit par l'inspiration se rapproche du son d'une trompette. Quand ils nageaient dans la mer et que du rivage on les appelait, ils répondaient par des couac très nets, parfois se rapprochaient de celui qui les appelait et même débarquaient près de lui, en sautant sur les rochers. Leur nourriture se compose uniquement à'Euphaima^ car, au moment où ils reviennent de la mer, leur estomac en contient parfois près d'un demi-kilogramme. Aussi, pendant la journée, du matin au soir, c'est un va-et-vient continuel qui se produit entre la colonie et le rivage ; des OISEAUX. 11 bandes se rendent à la nier pendant que d'autres revicnnonl se mettre au repos sur leurs rochers. Ils se couchent ou bien placent leur bec sous l'aile; le plus souvent, c'est sous l'aile gauche, d'après Hall. Le D' Turquet les dit très doux, car ils se laissent approcher aisément; on peut même s'introduire au milieu de leurs colonies sans provoquer d'effervescence. Ils ne se dérangent pas. Ils sont même timides et craintifs et fuient quand on les poursuit, sans chercher à se défendre, il ajoute même que leur colonie, placée dans un endroit moins favorable que celle des Adélie, semblait en former une dépendance et appartenir à un peuple conquis et asservi. D'après Andersson, le caractère du Papou est tout à fait différent de celui des deux autres espèces. Il le dit pacifique et jamais agressif, tout au moins quand il n'a ni œufs, ni jeunes. Jamais il ne l'a vu se battre avec ses semblables ou ses congénères. C'est probablement la raison pour laquelle il niche près ou au milieu des colonies de P. antarctica ou de P. Adeliœ. Pourtant, d'après CJarke, quoique timides, ils étaient assez hardis aux Orcades pour piquer du bec les jambes des intrus humains. Quand on s'approchait du nid, ils s'enfuyaient. Ils étaient plus courageux après l'éclosion des petits; cependant beaucoup de parents les abandonnaient sans honte et sans essayer la moindre défense. Il ajoute qu'ils combat- taient furieusement entre eux avec le bec et les ailes, (juiis se donnaient des coups violents et se faisaient des morsures profondes. D'après Sôrling, à la (ïéorgie du Sud, ils défendent courageusement leurs œufs, et le voliMir n(» s'en tire qu'avec de nombreuses blessures. Quand lun d'eux essayait de voler un œuf par derrière, l'animal se retour- nait vivement pour le défendre. Si l'œuf était néanmoins enlevé, la mère dépouillée se rendait résolument au nid voisin et y volait un œuf malgré les protestations bruyantes du vrai propriétaire. D'une rookery, située à 500 mètres du rivage, ils avaient fait un chemin pour se rendre à la mer entre les hauts chaumes et les amas de tussock. Le sol y était battu et uni. Sur la terre ferme, les Manchots nont pas d'autres ennemis que les grands Skuas, toujours aux aguels pour voler leurs œufs. 12 OISEAUX. Les Oiseaux habitant l'île Bootli-Wandel quittèrent Tiledu l"au 15 juin par petits groupes, au moment où la mer commençait à se recouvrir d'une mince couche defi;lace, début de la banquise. Au mois d'août, en plein hiver, la banquise s'étant disloquée autour de l'île à la suite de mauvais temps, on vit apparaître une bandede 500 Papous sur le sol de l'île, près des rochers qu'ils avaient quittés. Ils y séjour- nèrent une nuit, puis s'éloignèrent. Jusqu'à la fin de septembre, l'Expédi- tion put en apercevoir de temps à autre de petites bandes près des rivages où la mer était sans glace. Le retour s'est effectué du 15 octobre au 1" novembre, et tous les jours on voyait de nouvelles bandes débarquer et reprendre possession des rochers abandonnés quelques mois auparavant. Le 31 octobre, sur les îles Booth-Wandel et Howgaard, les Papous recouvraient tous les rochers qui sortaient de la neige et, suivant l'expression de Cook, paraissaient former une croûte sur ces rochers. Les Manchots qui reviennent sont-ils ceux de l'année précédente ou leurs enfants? On n'est pas fixé sur ce fait. Pour s'en assurer, il aurait fallu à l'automne mettre aux jeunes de petits bracelets aux pattes. C'est à partir de la tin d'octobre, après la fusion de la neige qui recou- vrait leurs anciens emplacements, qu'ils ont commencé à amasser de petites pierres pour les ranger autour de leurs nids dans les excavations des rochers. Pendant la recherche de ces pierres, ils ne se querellent jamais entre eux. D'après Clarke, leur nid était mieux bâti et plus grand que ceux de P. Adeliœ elde P.antarctica. Il étaiten pierres, haut de 40à50centimètres, et il contenait quelques plumes de la queue et quelques os ; ces nids étaient tenus plus proprement que ceux de leurs congénères. Ils se montraient grands voleurs quand il s'agissait de matériaux pouvant servir à la con- struction de leur nid. Sôrling a remarqué que ce sont surtout les mâles qui charrient les matériaux jusqu'au nid et que les femelles les arrangent ensuite. Von den Steinen a observé que les deux sexes concourent à la construction du nid. A l'île Boolh-Wandel, le début de la ponte a eu lieu le 4 novembre. La OISEAUX. 13 femelle pond deux œufs à plusieurs jours d'intervalle ; les œufs uyaul été enlevés pour les besoins de l'Expédition, dans beaucoup de nids la feuielle a pondu un troisième œuf plus petit que les deux premiers. Forster savait déjà que la ponte des Manchots est de deux ou trois œufs, parfois d'un seul. Aux Orcades, d'après Clarke, le nombre normal des œufs est de deux ; jamais les femelles n'en pondent un troisième. Ces œufs sont presque sphériques, plus que ceux de P.Adeliœ. Leur coquille est à grain très fin et blanche avec une légère teinte d'un bleu très léger. Leurs dimenssions sont les suivantes : 73,2 X a9,4 ; 68,9 X 00,3 ; 69,5 X 57,6 ; 68 X 56,2 ; 66,2 X 57,7 ; 66,5 X 56,8. La récolte des œufs, à l'île Rootli-Wandel et dans les environs, a été de 8 000, sans compter ceux que les hommes ont gobés surplace. Les Manchots, pour parer aux vols successifs faits par l'Expédition, ont pondu avec une persistance digne des plus grands éloges jusqu'à huit œufs; mais ces œufs fin de ponte devenaient de plus en plus petits, jusqu'à acquérir à peine la moitié du volume des premiers. Ce chiffre n'atteint pas celui que signale le Caj)itainc. Wood, (luaml il dit qu'à leur retour à Port-Désiré ils ramenèrent 100 000 œufs de Pingouins, dont quelques-uns furent gardés à bord près de quatre mois sans qu'ils se gâtassent. Le màle et la femelle couvent alternativement, cl l'incubation dure environ quatre semaines. Clarke admet trente et un à trente-trois jours. Les œufs en incubation sont déplacés et retournés avec lebecpar l'undcs animaux, pendant que l'autre et les voisins suivent l'opération avec la plus grande attention (fig. 6, 7, 14). Sorling ayant enlevé plusieurs fois un œuf vit que la mère se remettait tranquillement àcouver l'œuf restant. Une autre fois, il plaça dans un nid n'ayant qu'un œuf, un œuf du grand Skua. L'animal n'y fit d'abord aucune attention et couva tranciuillcment les doux œufs ; mais quehjues jours après l'œuf étranger avait disparu. Les jeunes éclosent comme des Poulets ; ils ont le bec brun, la tète est d'un gris brun, et la poitrine recouverte d'un duvet à teinte jaunàlre. Pendant les premières semaines, le ventre est très gros. Les parents restent près des jeunes et les nourrissent même après la fm de li OISEAUX. la mue. C'est ce que le D' Andersson a pu voir encore le li mars. Les Manchots ont pour leur progéniture la tendresse la plus vive. Ils cherchent à les protéger contre les Mouettes, les Pétrels et les hommes. Avec une touchante sollicitude, le père et la mère restent auprès du ou des petits et les garantissent contre le vent et le froid. Lorsque se fait la rentrée de la pêche, les parents ont beaucoup de peine à se frayer un chemin à travers la horde bruyante des jeunes, qui demandent de la nourriture. Le jeune mord le cou avec le bec, puis il enfonce glou- tonnement son bec dans le gosier du parent qui, de son côté, facilite l'opération par une sorte de régurgitation (fig. 3). Vers la fin de janvier, alors qu'ils sont plus âgés, M. Charcot a pu voir qu'ils sont confiés aux soins de nourrices sèches qui les gardent pendant l'absence des parents (fig. 4). « Les petits Pingouins, maintenant presque adultes, n'ont plus besoin de la surveillance continuelle du père ou de la mère, qui en profitent pour aller ensemble à la pèche, tandis que les jeunes, par groupes de huit ou dix, sont confiés à de grands Pingouins, remarquables bonnes d'enfants, qui veillent avec soin sur la progéniture de leurs concitoyens, groupant leurs enfants autour d'eux, les empêchant de s'éloigner ou de se risquer près des endroits dangereux. Tout cela ne se fait pas sans des gronderies, qui feraient rire si elles n'étaient touchantes, sans de petits coups de bec et quelques corrections administrées avec les ailerons. Ouel merveilleux exemple de communisme! (Fig. 4, 13, 17.) « Les jeunes Pingouins, sur le point de devenir adultes, sont particuliè- rement drôles. Ils changent de vêtements et perdent par plaques l'épais et ouateux duvet, véritable Eider gris et blanc souillé de tous les immon- dices dans lesquels ils se vautrent depuis leur naissance, pour adopter finalement et définitivement le bel habit noir bien lisse et bien luisant, ainsi que le beau plastron de chemise très blanc que portent si fièrement leurs parents. Mais la chute ne se fait que lentement et par plaques, le sol est couvert de duvet léger, ce qui ajoute encore au désordre de la ville. .) (Fig. 1, 18.) Chez les jeunes Papous, la mue paraît commencer et se terminer plus tard que chez le Manchot Adélie. Ainsi Andersson a vu que les jeunes OISEAUX. 15 Papous ont commencé à niiier le 9 lévrier etonl terminé le l'i mnrs, tandis que chez le Manchot Adélie la mue s'était effectuée du 18 janvier à la fin de février. Clarke indique le 11 février comme étant le commencement de la mue ; cependant, chez quelques-uns, à cotte date, la bande blanche du vertex avait déjà commencé à se dénuder et le cou à se foncer. Le deuxième duvet est plus foncé que le premier. D'après (Ilarke, les adultes ont, en février, un plumage fané; en mars et en avril, la queue est très petite ou parfois tombée. Le jeune, tout en duvet, rapporté en peau |)ar l'Expédition, est déjrà d'assez grande taille et est sur le point d'effectuer sa deuxième unie. Il appartient bien à l'espèce P.papiia, à cause de la longueur plus grande de son bec et à cause de la coloration blanche que présente déjà l'ailei-on sur ses deux bords. Il est d'une couleur ardoisée noirâtre uniforme, sauf sur les côtés du vertex, où apparaissent déjà les deux taches blanches. Toutes les parties inférieures du corps et des ailes sont blanches, cette couleur remonlaul même assez haut vers les côtés et passant par-dessus l'inserlion des ailes. Les culottes sont blanches. Dimensions : longueur totale, 63 centimètres ; aile, K» centimètres ; queue,') centimètres; culmen,.T"',3; la longueur depuis la commissure est de t)"",2; tandis que chez les jeunes de /'. Adelia- étudiés, elle n'est que de 5"°, i. La largeur du bec, au niveau des premières plumes, est de S"^"",^) ; elle est de 10 millimètres chez les autres. Line plus grande longueui- associée à une largeur moindre fout paraître le bec beaucoup moins robuste; l'orteil médian a 7"', 7, tandis que ceux de /'. Xilolhv ont 7"", 9. Le jeune Papou (sans numéro)que j'ai examiné dans l'alcool etqui avait déjà les deux bords des ailerons blancs avait une longueur totale d<' 2i centimètres, aile 6"", ri, culmen r"',7 et pas encore de (|U(nie. Sa lè(e est noire avec l'espace interscapulaire plus gris, les parties inférieures sont blanches, même les culottes. Le bout des ongles seul est blanc ; la mandibule supérieure est noire, except('' les bords et la pointe extrême, qui sont jaunâtres; la mandilnile inférieure est de cette dernière couleur avec une tache subterminale foncée. 16 OISEAUX Les petits vont à l'eau assez tardivement, car leur fin duvet s'imbibe d'eau et les alourdit dans leurs mouvements. Jusqu'à la ponte, les Mégalestris, les grands Pétrels et les Mouettes vont et viennent, inoffensifs, par la ville ; mais, à partir de ce moment, leur présence n'est plus tolérée, car il faut prendre des précautions pour la protection des œufs et des petits. Le moyen de défense est très simple et très efficace. Dès qu'un de ces ennemis est signalé au-dessus de la rookery, tous lèvent la tèle en se dressant et présentent ainsi une surface hérissée de becs pointus qui l'empêchent d'atterrir. Mais, contre d'autres ennemis, ils défendent leurs œufs non seulement avec le bec, mais aussi avec les ailerons (fig. 29). Pourtant, quand l'œuf est enlevé, ils semblent se résigner assez facilement à cette perte. M. Charcota pu constater avec plaisir que les filets de ces pauvres bêtes sont excellents ; leur viande rappelle celle de mulet. Elle est un peu ferme, rouge foncé et ne sent pas du tout le poisson, ce qui tient évidemment à ce que les Pingouins se nourrissent exclusivement de toutes petites Crevettes. Les Pingouins, imbibésd'huile comme ils le sont, brûlent admirablement bien, os, chair, plumes. Pour le Phoque comme pour le Pingouin, d'ail- leurs, la graisse se trouve immédiatement au-dessous de la peau et, chez les premiers, atteint de 10 à 20 centimètres d'épaisseur; c'est un véritable manteau dont la nature les a doués ; les muscles et autres organes en contiennent au contraire extrêmement peu. Débitée par petits cubes, elle brûle facilement, donnant une chaleur très vive, avec une odeur pénétrante et écœurante. Les chiens, au cours de l'hivernage du « Français », ont tué plusieurs centaines de ces Oiseaux, sur lesquels ils se précipitaient avec férocité, et pourtant ils laissaient leurs cadavres gisant là où ils les avaient surpris. Les ennemis les plus dangereux de leurs colonies sont les Ossifraçia gigantea, toujours aux aguets pour chercher à voler un jeune ; les Chionis allxi, qui savent si bien voler les œufs, et les Mégalestris antarctica, qui aiment et les jeunes et les œufs. Quand les Manchots sont sur l'eau, les Léopards de mer {Og?norhi?iî/s leplonyx) en détruisent de grandes quantités. OISEAUX. 17 2. Pygoscelis Adeliae (Ilomb. cl Jacq.). Cularrhuclcx Adelix Hombr. and Jacq., Ann. Se. nul. (2), p. 320(1841, Terre Adélie). Pygoscelis breviroslris GrdY, /fis/. IS. Brit. Mus., part. 111, p. 154 (1844, Terre Louis- Philippe ; latitude sud G4° 72'; longitude 171° G'). Aptenotlijtes longicaudata Peale, U. S. Expl. Exped. Birds, p. 2G1 (1848, latitude sud 04° 40'; long-itudo est 10:3° 4'). Eudijptes Adelise Sharpe, Voij. « Erebus » and « Terror », App., p. 38, PI. XXVIII (1875); Borchgrevink, Firsl on Antarctic Cont., p. 198-217 (photog-.), p. 257 (photog., Possession Island), p. 286 (Ice Carrier, Robertson Bay). Spheniscus Adelix Schlegel, Mus. Pags-Bus, Urinai., p. 4 (1877, Terres Adélie et Vic- toi'ia). Drisgr/iinnp/riis Adelice Donald, Proc. Rog. Soc, Edinb., XX, p. 170 (1804, latitude sud Gl° 14' ; longitude ouest 52° 27', Danger Islands). Pygoscelis Adeliae Coues, Proc. Ac. J'hilad. (1872), p. 196; Sclater, Ibis (1894), p. 499; Ogilvie Grant, Cat. B. Brit. Mus., vol. XXVI, p. 632 (1898); Forbes, Bull. Liverp. Mus., II, p. 49 (1899) ; Racovitza, Vie des Aninmux, etc., p. 23-27 (1900, avec photog.); Bernacchi, SouUi Polar Régions, p. 44, 58, 190, 192,314 (1901); Howard Saunders, Antarctic Manual, p. 235 (1901) ; Sclater, Reji. « South. Cross » (1902), p. 113 ; Andersson, loc. cit. (190.5), p. 21 ; Clarlce, /(jis (190G), p. 157. N° 21 q'. Tué à coups de bâton le 22 octobre, à l'ile Booth-Wandel ; iris brun, couleur fouille morte ; bec brun ; patte blanc bleuâtre. N° 23 cf. Adulte pris à la main et tué au cliloroformele 2o octobre 1 00 i. N°24. Jeune capturé le 26 octobre à l'île Booth-Wandel et tué au chloroforme. Estomac rempli d'Euphausides. N° 25 cf. Adulte tué au chloroforme le 26 octobre IDOi. N°' 27, 28, o*, 9 • l'i'is à ^^ main et tués au chloroforme le 27 octobre à l'île Booth-AVandel. Le poids du mâle était 5 650 grammes; sa longueur 75 centimètres; iris brun; ailes ayant 15 centimètres. La femelle de ce couple était plus petite (|ue le mâle, iris brun-châtaigne ; longueur 67 centimètres. N° 29 Ç. Prise à la main et tuée au chloroforme le 28 octobre 1904. N° 57 cf. Pris à la main le 12 novembre sur Rocher magnétique. Iris brun. N°' 60, 61, (2f, Ç. Couple pris à la main à la banqui.se de l'île aux Chiens, le 1 i novembre. N° 75 o*. Forme à menton blanc, pris à la main sur le rivage de l'île Convention le 21 novembre ; iris brun-chocolat; bec noir, sauf la mandi- bule inférieure, la partie médiane et les bords de la mandibule su|)é- EjpédiLioii Ckarcol. — A. Menegaix. — Oiseaux. "^ 18 OISEAUX. rieiiio; cou et menton tout blancs, sauf une zone brun grisâtre de \ cen- timètre de largeur et en arc, qui s'étend le long des deux branches de la mâchoire inférieure. Dos couvert de plumes fines à extrémité bleuâtre. Cette région montre un coin formé de plumes noirâtres sous le bord antérieur de chaque aileron ; tarses noirs en arrière, blanc légèrement rosé en avant. Longueur totale 63 centimètres. Cet individu est un jeune de Pyg. Adeliœ. Il présente sous le cou un collier à teinte légèrement brun jaunâtre à reflets dorés et correspondant à peu près au niveau de la face postérieure du crâne. N°97 Ç. Prise àlamain, puis tuée au chloroforme, le 8 déceuibre 1906; iris marron ; pattes rose-chair ; tarses noirs en arrière. N° 98 Q . Capturée à la main le 10 novembre dans le canal Louis XVI. N° 99 cf. Capturé sur la banquise le 9 décembre. N° 109 cf. Capturé le 27 décembre, sur l'îlot, à l'entrée de la baie Wiencke, où il se trouvait avec deux autres de même espèce. N" 110 cf. Compagnon du précédent, capturé le même jour; iris gris brun tirant sur le jaunâtre. N° 131. Jeune Poussin sans renseignement. Six œufs dont un de deuxième ponte. Le Manchot Adélie, au bec noir, plus lourd, plus massif, plus humam d'aspect, forme des troupes colossales dans l'Antarctique, où il est le plus commun de tous les Manchots. Il paraît se rencontrer tout autour du pôle, carsesrookeriesontété trouvées dans la Terre Adélie, la Terre Victoria, laTerredeGraham. Bruce en a vu àl'ile Laurie, l'une des Orcades du Sud, et Clarke y estime leur nombre à 'i 000 000. Il est probable que c'est le point le plits septentrional où ils viennent nicher pendant l'été. VanhôfFen en a observé à la station Gauss ; mais les individus, d'ailleurs peu nom- breux, ne nichaient pas dans le voisinage. Andersson, qui visita dans les Shetland, les îles Nelson, Livingstone, Déception, n'y trouva aucune rookery d'Adélie, et il en conclut que ce Manchot n'existe nulle part dans le détroit de Gerlache, puisque Racovitza OISEAUX. l!l ne paraît pas l'y avoir vu nichant. Charcot a fait la remarque que plus on descend vers le sud, plus les Adôlies deviennent nombreux par rapport aux Papous, dont le nombre, au contraire, va diminuant progressivement. Le2i février 1904, à l'arrivée du « Français » à l'île Booth-Wandel, lEx- pédilion trouva une colonie de quelques centaines d'individus installés sur des rochers près du rivage et contiguë à celle des Manchots Papous. Un an plus tard, le 10 février 190o, au début du voyage de retour, l'Expédition put observer, au sud de l'île Anvers, une colonie de 300 à 400 Manchots Adélie, dont les jeunes étaient déjà gros et achevaient de prendre le plumage de l'adulte. Quelques autres colonies ont été obser- vées dans des îlots au sud de l'île Boolh-Wandcl ; mais jamais leur nombre no fut aussi prodigieusement grand que dans l'île Laurie. Par conséquent, si la limite bien tranchée entre les aires de dispersion de P. (intarctica et de P. Adeliœ paraît être vraie au nord du détroit de Gerlache, elle n'est plus exacte au sud, où les deux espèces se rencontrent à l'ouest de la Terre de Graham. Mais P. antavclka n'a pas fondé de colonie sur l'île Hooth-Wandel. Il est logique de supposer que P. Adeliœ aime plus le froid que P. antarctica, et il ne niche sur la côte ouest de la Terre de Graham que là où les conditions climatériques sont compa- rables par leur rigueur à celles de la côte orientale explorée par l'Expédition Nordenskjold. Pendant dix mois d'hivernage à l'île Booth-Wandel, le D' Turquet a |)u observer les mœurs des Manchots Adélie. Leur rookery occupait, sans doute par droit de conquête, l'emplacement le plus confortable à la surface des rochers, et, bien que, au pourtour de la rookery, des groupes d'individus des deux espèces fussent mélangés, le plus parfait accord régnait entre les deux républiques ; jamais on ne vit de querelle surgir enlre eux pour la possession d'un creux de rocher. D'après le D' Turquet, les Adélie ont le bec brun, l'iris d'un gris plus clair que l'autre espèce. Les pattes sont d'un blanc rose pâle, et leur cou paraît plus court que celui des Papous. A l'état de repos, leur attitude est la mêmeque celle desautres espèces, ainsi que pendant la marche. Clarke dit que, lorsqu'ils marchent, ils effec- tuent un balancement comique du corps, en sorte qu'il les compare à un 20 OISKAUX. « oid sait », c'est-à-dire à un vieux loup de mer quand il aborde après un long voyage (fig. 19). Ils sont plus souples, plus agiles, plus nobles dans leur allure et plus braves que les Papous, car ils tiennent tète à l'homme s'il fait le geste de les menacer. Et pourtant ils craignaient les chiens, car, au début, ils venaient se réfugier près des hommes, quand les chiens étaient lâchés, et s'en plaindre avec des airs indignés. Ils sont aussi plus querelleurs. Si on les attaque, ils se sauvent, mais parfois ils se retournent tout à coup et se précipitent sur les assaillants, qu'ils essayent de mordre aux jambes. Clarke dit même qu'il est nécessaire de chausser de longues bottes pour aller visiter leurs rookeries. Lorsqu'ils sont furieux, ils hérissent leurs ailes et les plumes de l'occiput et du cou, rejettent la tête en arrière et ouvrent un large bec. Turquet a remarqué qu'ils n'attaquent jamais les Papous, mais il y a souvent des combats entre eux près des nids. D'après Clarke, quand les Papous arrivent près de leurs rookeries, ils viennent à leur rencontre en criant aussi fort que possible ; puis ils s'ar- rêtent après cette démonstration bruyante ; ils leur tournent le dos et s'en vont. Ce procédé réussit parfois à arrêter les Papous, qui sont plus timides. Comme les Papous à l'île Booth-Wandel, ils ont quitté leurs rochers à partir de la fin du mois de mai, pour émigrer au loin, là où la mer reste dégagée de glace, même pendant l'hiver. Leur retour et leur rcinstal- lation sur les rochers de l'île a eu lieu du 15 octobre au 1" novembre. Clarke signale ce faille? octobre en 1003 et le 8 octobre en 190i, aux Orcades. Ils étaient alors tous gros et tous gras. Leur place favorite était un plateau caillouteux, à 150 mètres au-dessus du niveau de la mer. Quand la saison avance, les rookeries, comme celles des Papous, deviennent des amas d'immondices, de boue, de guano, et les Oiseaux eux-mêmes deviennent repoussants de saleté. Leur nourriture consiste surtout en Crustacés, et principalement en Euphausies, qui se tiennent en quantités considérables à la surface des eaux, près des glaces. Ils mangent aussi avec avidité diverses Annélides pélagiques, qu'ils trouvent dans les mêmes conditions. Pour gagner leur lieu de pêche, ils préfèrent faire un long détour à pied, malgré la fatigue, plutôt que d'entrer dans la mer, car c'est évidem- OISEAUX. 21 ment là qu'ils ont le plus (rcnnomis à craindre. D'ailleurs jamais un Manchot, même effrayé, ne se jettera à l'eau pour échapper à ses ennemis. Andersson rapporte, à propos de ces Oiseaux, un fait de psychologie intéressant. Quand, au déjjut, lui et ses compagnons commencèrent l'hécatombe des Manchots Adélie, ils ne montraient d'abord aucune peur, et môme ils se plaçaient sur la défensive et se servaient de leurs ailes et de leur bec. Il était alors facile de les tuer avec un bâton ou avec une hache. Mais, peu à peu, les Manchots apprirent à leurs dépens combien les hommes étaient dangereux, et ils se mirent à fuir dès qu'ils aperce- vaient un homme dans le lointain. Ils se couchaient sur le ventre cl travaillaient si bien avec les pieds et les ailerons qu'ils progressaient sur la glace ou la neige avec assez de rapidité pour qu'on ne puisse pas les atteindre. Sur la neige en pente, ils glissaient avec la plus grande vitesse en se servant de leurs pieds comme gouvernail. Au moment du retour, quand ils abordent à terre, l'appariemenl n'esl poinl encore fait (fig. 5). Les mâles s'emparent alors tout de suite des anciens nids et les réparent, ou s'en construisent de nouveaux, disposés sans ordre, sur des roches dégarnies de neige, dont la forme est favo- rable à la construction (d'après Andersson). Alors le mâle, satisfait de son travail, s'assied sur le rocher et attend qu'une femelle passe dans le voisinage pour s'en emparer. Mais, si l'accouplement se fait avant la fin de la construction du nid, la femelle y travaille aussi. Andersson n'a observé qu'un seul cas semblable. Les nids sont formés de petits tas de pierres, creusés au centre el bordés avec des os de congénères morts ou avec des plumes de la queue. Souvent ils doivent aller à plusieurs kilomètres jusqu'au rivage pour chercher leurs pierres ; ils les rapportent dans leur bec, en donnant la pré- férence aux pierres aplaties et rejetant au loin les pierres arrondii's. Ils les déposent avec gravité sur le nid en construction, en ouvrant un large bec el restant ensuite quelque temps immobiles comme s'ils venaient de lâcher un poids énorme (fig. V-i, 28). Pendant celle période règne l'égoïsme le plus féroce. Dès qu'ils commencent à bâtir, ils deviennent des voleurs incroyables, et même quand les jeunes sont éclos. Souvent des querelles très violentes 22 OISEAUX. éclatent entre eux à propos du vol de quelques petites pierres par les propriétaires d'un nid voisin. Malheur au voleur, s'il se laisse surprendre, car il est pourchassé à grands coups de bec et houspillé de belle façon, sans grand dol d'ailleurs (fig. 27). D'après Turquet, à l'île Booth-Wandel, la ponte commença le 3 novembre. Clarke dit que le premier œuf fut trouvé le 29 octobre 1903 aux Orcades. Les œufs sont au nombre de deux dans chaque nid, quel- quefois de trois. Ils ont une forme allongée, une coquille finement grenue et un aspect vert bleuâtre qui les distinguent de ceux du Papou. M. Tur- quet pense que le jaune n'a pas la couleur rougeâtre que l'on observe dans l'autre espèce. Dimensions : 71 X 56,4; 72,4x56,8; 72,5x57,2; 69,2x60,2; 73,4 X 54,5 ; 60,4 x 49,6. Ce dernier, de dimension beaucoup plus faible, appartient à une deuxième ponte provoquée par l'enlèvement des pre- miers œufs. Pendant qu'un Oiseau, Papou ou Adélio, couve, l'autre se tient droit à côté de lui (fig. 6, 7, 26). L'incubation dure de trente et un à trente-cinq jours aux Orcades. Les adultes sont beaucoup plus maigres à la fin de la saison de reproduction; ils ont vécu en partie sur leurs réserves de graisse. L'Expédition Charcot n'a pu observer les Poussins d'Adélie. Les deux échantillons rapportés sous les numéros 75 et 131 sont des jeunes qui ont encore la gorge blanche et qui ont déjà presque les dimen- sions de l'adulte. Le deuxième paraît le plus âgé, car il a perdu tout son duvet; il est tout blanc en dessous; seul le menton noircit, et la tache noire qui marque chez l'adulte le bout et le côté interne de l'aile n'apparaît pas encore, mais le bord en est déjà blanc. Dimensions : Longueur totale, 67 centimètres; aile depuis l'insertion à l'épaule, 17 centimètres ; queue, 12 centimètres. Le deuxième est plus intéressant en ce qu'il nous montre quelles sont les régions qui conservent leur duvet en dernier lieu. Ses dimensions sont un peu supérieures à celles du précédent, et pourtant sa mue est moins avancée ; longueur totale, 69 centimètres ; aile depuis l'épaule, IScentimètres ; culmen, 27'", 5; queue, 9 centimètres. Le duvet brunâtre OISEAUX. 23 existe encore en partie sur le vertex et le liaut de l'occiput, sur le milieu et le bas du dos ainsi que sur le bord postérieur des ailerons, à l'aisselle et sur la face inférieure, près de l'insertion. Le bord interne de l'aile est déjà blanc. Cette forme, décrite jadis par Finsch sous le nom de Dcusijramphus Herculis (1), n'est pas une variété. Comme Donald (2j l'a montré, c'est la forme jeune, en deuxième mue, de P. Adeliœ. C'est ce que Borchgrevink, à la Terre Victoria, et Andersson, aux Orcades, ont aussi pu apercevoir. Jamais les adultes reproducteurs ne présentent cette particularité. On peut donc en conclure que ces Manchots n'atteignent pas leur maturité sexuelle avant l'âge de deux ans. 3. Pygascelis antarctica (PorsL), 1781. Âptenodi/tes antnrctica Forsler, Comment. Golti.ngeniiis,\\l,\). 141, PI. IV (1781). Pi/f/osce/is anlarctirn G. R. Gray, List Birds, III, p. 154 (1844, 64° latiUide sud); V. fl. Stcinen, Intern. PuUirforsrh. dcu/sc/ieti Exped., II, p. 237, 27() (18'J0, Géoi'giu du Sud). Eii(/i//ilcs (inlai'clicus G. R. Gray, Gen. Birds, III, j). 041 (184(>); Voij. » ICrvbus ■n and « Terror » Birds, PI. XXV (1875). Pygoscvlis antarctica, Cat. B. Brit. Mus., vol. XXVI, p. 030 (1898! ; Andersson, lor. cit.. (1905), p. 32; C\aike,Jljis (1900), p. 152; L<3miberg, loc. cil. (1900), p. 80. N° 62 (j'. Pris à la main sur la banquise le 16 novembre 1904. Iris café au lait ; tarse rose-chair en avant, bleu foncé en arrière. Une fine bande noire dentelée en avant-du cou ; parasites, nombreux ténias. N°39 9. N° 61 Ç . Prise au milieu d'une bande de Pingouins Papous, sur les rochers; iris café au lail; estomac rempli d'Euphausides. N° 71 cf. Capturé à la main le 20 novembre, baie du Sud ; il élail accompagné de deux Pingouins Adélie ; iris chocolat; estomac rempli d'Euphausides; et nombreux ténias dans le duodénum. N° 87 cf. Pris à la main le 20 novembre, au milieu de Pingouins Papous ; iris brun clair, café au lait ; bec noir, plus fort et plus court que celui des précédents échantillons de la même espèce. (1) FiNSCH, p. Z. s., 1870, p. 322, PI. XXV. (2) Donald, P. Z. S., Edinb., t. XX, p. 170-176. 24 OISEAUX. N° 90 çj'. Capturé à la main le 30 novembre, accompagné de deux P. Adeliœ ; iris gris clair, avec pupille punctiforme. N° 96 Q. Capturée à la main, le G décembre, sur la presqu'île nord- est, par Basco ; iris marron très clair. N° 106 cf. Prig sur la banquise devant le bateau, le 17 décembre ; iris gris jaunâtre. N° 111 ç^. Capturé le 27 décembre sur l'îlot à l'entrée de la baie de l'île Wiencke, se trouvait seul. Deux autres ont été aperçus dans la matinée mêlés aux Papous. Pattes blanc rosé pâle, un peu plus blanches que celles du P. Adeliie ; iris gris clair passant au marron. Estomac rempli d'Euphausides. Le Manchot antarctique, si facile à reconnaître avec sa jugulaire noire, forme des colonies nombreuses dans les régions Antarctiques. Il a une distribution plus limitée que le Manchot Adélie. L'Expédition Suédoise a trouvé des nids dans les îles Nelson, Livingstone et Déception, ainsi que sur la Terre Louis-Philippe et dans le canal de Gerlache ; mais jamais cette Expédition ne rencontra de colonie sur la côte est de la Terre de Graham, Sôrling a rapporté deux spécimens ( Q et q^) de la Géorgie du Sud. Ce sont les seuls qu'il ait vus, ce qui fait supposer que c'étaient des individus égarés. D'après Lônnberg, ces Manchots se reproduisent dans quelques ijords de la Géorgie du Sud ; mais ils y sont toujours en petit nombre, puisque Sôrling n'a jamais vu de rookeries. Ces îles paraissent donc être la limite septentrionale de leur aire de distribution. Ils sont très abondants aux Orcades du Sud, où ils sont, avec le Manchot Adélie, les Oiseaux les plus communs. Sur l'île Saddle, une seule rookcry renfermait au moins 50000 individus, et les îles Laurie sont regardées comme ayant une population de ces animaux atteignant au minimum 1 000000. Quelques individus se sont montrés le long des côtes des îles Brabant et Anvers, mais l'Expédition Charcot n'a pas observé de colonies. Elles paraissent localisées plus au nord, dans les îles qui se trouvent au nord du détroit de Gerlache. OISRAUX. 23 Au mois de novembre, on en a capturé, sur le rivage de l'ile Booth- Wandel, quelques spécimens qui avaient atterri isolément. (Tétaient pro- bablement des individus qui, étant allés àla pèche trop loin de leurs colo- nies, s'étaient égarés et avaient suivi à l'ile Bootli-W andel des Papous ou des Adélies. Par conséquent le D' Turquet n'a pu étudier leurs mnnirs. (le Manchot a le même caractère que l'Adélie. 11 est querelleur, combatlif; il délend avec courage son nid ainsi que lui-même. Aussi une visite dans une rookery est-elle très pénible, à cause des coups de bec qu'on y reçoit. 11 se nourrit de Poissons et de Crustacés; mais les jeunes paraissent préférer ces derniers animaux, puisque l'estomac des jeunes qu'examina K. -A. Andersson n'était rempli que de Crustacés. Clarke dit qu'aux Orcades les premiers immigrants arrivèrent le 2 novembre et jours suivants. Le premier qui atterrit [)rit une petite pierre, et ce fut la fondation de son nouveau nid. En général, les Manchots antarctiques choisissent pour établir leurs nids (les endroits semblables à ceux qu'aime le Manchot Adélie. Ils ijréfèrcnt souvent les collines élevées, déchiquetées, pour s'y installer, comme il s'en trouve sur la côte occidentale de l'ile Nelson et au cap Ro(|ueniaurel. Ils s'élèvent alors assez haut, et toutes les avancées de rochers sont couvertes de leurs nids. La construction des nids se fait de la même manière (|ue chez le Man- chot Adélie; mais les œufs sont pondus beaucoup plus tardivement, seu- lement vers la fin de novembre, tandis que pour le Manchot Adélie la ponte était terminée au moins un mois plus tôt. Ceci résulte des observa- tions de Bruce aux Orcades du Sud, qui trouva les premiers œufs d'Adélie le 20 octobre et ceux du Manchot Antarctique le 2i) novembre. La ponte compte deux a.'ul's, mais parfois trois ou un seul. Les œufs sont d'un Idanc verl pâle. Dimensions: 77X'>î, 69 X •»•> ; œufs fm de imuiIc, iiX30. La mue doit se faire en février, comme le D' J.-(;. Andersson l'a montré à la baie de l'Espérance, dans la Terre Louis-Philippe. Les premiers Poussins trouvés le 7 janvier aux Orcades paraissaient avoir deux jours. Leur développement est rapide, car li" I 1 février on voyait déjà l'arc jugulaire noir caractéristique de l'espèce. Kjpédilion Chai-cul. — A. Menegaux. — Uisuuux. 4 26 OISEAUX. 4. Aptenodytes Forsteri G. R. Orny. Aplenodi/les /■ors/eri G. R. Giay, Ann. Jl'ig. A'al. I/i.st.,X\U, p. 315 (1844, latilude sud G4 à 77"). Malgré les plus aclives recherches, l'Expédition du « Français » n'a pu observer le Pingouin Empereur, même au cours de deux voyages effectués l'un du 25 février au Ij mars 1904, jusqu'au voisinage du Cercle polaire, et l'autre du 5 au 30 janvier 1905, qui a conduit les explorateurs jusque vers le 69" de latitude sud, en vue de la Terre Alexandre. PIIALACROCORACIDÉS. 5. Phalacrocorax atriceps King-, 1828. Phal. alrircjts Kin"-, Zool. Journ., IV, p. 102 (1828, Straits of Magellan). — imperidlis King-, /'. Z. S. (,18ol), p. ;J0. — carunriild/iis Gould, Zoo/. Voij. licarile, III, Birds, p. 145 (1841, Poil St-Julian). — cirr/ialus G.-R. Gray, Lis/, of JJin/.i, l. 111, p. 18(j (1844). (jniciilus canincn/d/ua Sclilegel, Mus. l'nijs-IUis, l. VI, Pclec, p. 20(1803). Pha/ucrocorux ulriceps .\nderssoii, loc. cil. (1U05), p. 38; Clarke, /i/.vflUOU), p. 184. N° 65 9- Pi"ise sur le nid le 15 novembre ; iris brun; pas de tache blanche; un œuF trouvé près de l'orifice de l'oviducle, dans le cloaque, entouré seulement par la membrane coquillière, déformé, ovale conique, allongé. N' 66 ç^. Pris sur le nid avec la femelle précédente, 15 novembre. La crête, comme chez l'individu précédent, est formée de trois à quatre plumes à teinte d'un bleu ardoisé soyeux. Les plumes du dos des deux échantillons |>résentent la même teinte. N° 76 ç^. Pris à la main pendant qu'il pillait le nid d'un couple voisin absent, 22 novembre; iris brun; crête formée d'une dizaine déplumes de longueur inégale et d'un vert foncé chatoyant très sombre ; caron- cules jaunes un peu rougeàtres. N" 77 o*. Avec crête, pris à la main sur son nid, 22 novembre ; iris brun. N" 78 Ç . Prise sur son nid, 22 novembre; iris brun. N° 86 ç^. Avec testicule presque totalement atrophié. Tué avec un OISEAUX. 57 hùlon dans la rookery îles (Cormorans, le 20 novcinbro; iris brun clair, très adulte. Il ne présente pas la coloration violette des plumes de la zone médiane de la tète, du cou, du dos et de la queue, pas plus que la colo- ration vert foncé des plumes des épaules ; la crête est visible, mais peu développée, demèmequeles caroncules, qui sont rudimentaires. Les tarses sont d'un blanc rosé en avant et noirâtres en arrière. L'estomac était rempli de débris de Poissons plus ou moins digérés. Il ne paraissait pas faire partie d'un couple. M. Turquet dit (|u'un autre individu de même aspect a échappé a leur [•oiirsuile, et il admet que les quelques autres Oiseaux qu'ils ont remar([ués et qui présentent cet aspect brun sale de toute la région du dos (de la tète à la queue) et des plumes des ailes sont très probablement de vieux adultes qui ne s'accouplent |)lus. N° 112 Ç. Capturée à la main dans la rookery des Cormorans, sur le rivage sud-ouest de la baie de l'île Wiencke, 28 décembre. Elle se trouvait isolée et ne paraît pas avoir construit de nid ; l'ovaire ne présentait pas de signe de ponte récente. Elle forme un deuxième écbantillon du type Cor- moran dégénéré ou très adulte. La crête est formée do trois ou quaire plumes brunes à peine distinctes. Les plumes du dos sont de couleur marron, d'aspect soyeux, avec quelques plumes violettes; la queue est marron; le bec est brun avec couleur cornée grise à l'extrémilô; les pattes sont blanc rosé en avant, brunâtres en arrière. Les paupières ont une couleur bleu très pâle et très peu marquée. L'estomac contenait des restes de Poissons, d'un Isopode et de bras de Poul|)es. M" 113. Jeune Poussin, pris dans un nid le 20 décembre, dans la rookery des Cormorans ; son plumage n'est formé que de duvet iniir, avec quelques touiïes blanchâtres à l'abdomen. Les j)attes sont brunes. Le bec est noir avec membrane lisse, rose-chair à la base de la mandibule infé- rieure. L'estomac, avec des débris de Poissons, renfermnif de nombreux grains de gravier. N°792. 2 janvier, un individu, P(Missin, dans l'alcool. iN° 717. Embryons de Cormorans à divers stades dincubation. 28 OISEAUX. N° 73 1. Deux œufs avec embryons et un jeune nouvellement éclos dans l'alcool. Un jeune plus âgé. Deux œufs dont un très allongé. On sait depuis longtemps que les Phalacrocorax nichent dans les glaces de FAnlarctique, car Ross a trouvé un nid de Cormorans sur la Terre Louis-Philippe, et il en vit d'innombrables spécimens sur l'île Gockburn, le 6 juin 1844. Mais l'identité spécifique en était restée douteuse jusqu'au retour de l'Expédition écossaise do 1903 dans les Orcades du Sud. Ces Cormorans sont de fort jolis animaux, avec leur caroncule bleue et rouge à la base de leur bec jaune, avec leurs ailes bordées de blanc et les taches de même couleur qui tranchent sur le noir jais de leurs plumes. P. atriceps typique se reconnaît facilement à la couleur blanche qui s'étend longuement sur les côtés de la tête et entoure l'oreille, à ses pau- pières épaisses et de couleur bleue, et à la tache blanche qu'il porte sur le milieu du dos (fig. 34). D'après Turquet, le mâle se distingue par un bec plus fort, des couleurs semblables à celles de la femelle, mais plus brillantes, une crête un pou plus longue et plus fournie. Son cri est plus bruyant, tandis que celui de la femelle n'est qu'une sorte de souffle, de sifflement. La lémolle a une taille plus faible que colle du mâle. Jamais ces animaux ne se montrent loin de la terre, et leur présence est un indice certain que la terre n'est pas loin. Leur habilat est assez limité et se confond avec celui de Pyyoscelis antarctica. On le trouve dans les îles du détroit de Magellan et sur la côte ouest jusqu'au Chili, dans les Orcades (Bruce), les Shetland du Sud, aux alentours de la Terre de Graham et dans l'île Bootli-Wandel. Lônnberg regarde le Cormoran de la Géorgie du Sud comme une forme spéciale qu'il a appelée /*/<. Ht. Geurgiœ et qu'il distinguo du vrai atricpps de l'Antarctique. D'après Clarke, les Cormorans aux yeux bleus, comme les appellent les explorateurs, se voient toute l'année dans l'archipel des Orcades. OISEAUX. 29 Ils sont nombreux en L'ié, mais ils évitent les grandes îles et cherchent des places pour nicher clans les petites îles ou les rochers, sur la côte des îles Laurie et |Saddle, où on a vu au moins 2^)00 paires, qui cou- vaient, distribuées en rookeries contenant parfois 200 nids. L'hiver, ils y sont moins nombreux, mais on les vit pourtant tous les jours. C'est ce qu'a constaté le D'' Turquet, à l'île Booth-Wandel ; seule- ment, pendant l'hiver, ils s'étaient abrités contre les vents froids du sud. Même pendant les journées les plus froides, on les voyait partir le matin au loin vers la mer libre, et ils rentraient le soir vers trois ou quatre heures en bataillons serrés. Andersson fait remarquer qu'il ne les a pas vus au plus fort de l'hiver, en juin et au commencement de juillet. Ce sont des animaux très sociables, qu'on voit rarement isolés. Une troupe de ces Oiseaux a été observée à la baie des Flandres, sur des rochers, du 7 au 19 février 1904. Une colonie comprenant environ 200 individus a été rencontrée à l'ile Wicncke, près de Fort-Lockroy, dans un empla- cement contigu à celui des Papous, le 20 février 190i. En février 190^), l'Expédition l'a retrouvée avec des jeunes couverts de duvet et déjà assez développés. Une deuxième colonie, ayant construit une vingtaine de nids, s'était établie sur les rochers de l'île Anvers, au bord du canal de Neumayr. Une autre vivait plus au sud, près de l'île Berthelot. Enfin une grande colonie, composée d'un millier d'individus, était ins- tallée dans une masse de rochers désagrégés à l'île Rooth-Wandel, au bord de la mer. D'Iiunicur pacifique, ces Oiseaux entretenaient les meil- leures relations d'intimité et de concorde avec une rookery de Manchots Papous et Adélie (fig. 30). Généralement, les colonies sont moins nombreuses que cette dernière. Elles choisissent pour s'établir, de préférence, des pentes sur le versant nord, où la neige fond de bonne heure, ou bien de petites îles rocheuses, où la neige ne peut s'accumuler. L'attitude des Cormorans à l'état de repos est comparable à celle des Manchots, car leur corps est légèrement incliné en avant (fig. 32). Souvent on en voit plusieurs centaines se ]»oser sur la mer en rangs 30 OISEAUX. serrés, comme s'ils venaient d'apercevoir un banc de Poissons. Ils sont encore plus voleurs que les Manchols, surtout quand il s'agit de matériaux de construction pour les nids. Un jour, le D'Turquet débar- quait avec le matelot Rolland sur un petit massil' tle rochers, où des Goé- lands dominicains avaient établi leurs nids. A l'approche des deux intrus, les Goélands abandonnèrent leurs nids et s'envolèrent. Immédiatement, un grand nombre de Cormorans, dont les nids se trouvaient à environ ^OOmètres delà, se précipitèrentsur les nidssans défense, et, en(|uelques secondes, ils les eurent saccagés, démolis, emportant dans leur bec les toulTes de mousses et de lichens dont ils étaient construits. On [)ent se demander la raison de ce vandalisme, puisque le D' Turquet n'a trouvé dans les nids de Cormorans ni mousses ni lichens. Etait-ce pour assouvir une vengeance? Au moment de la construction des nids, le D' Turquet a vu souvent des individus isolés, des paresseux probablement, attendre, posés sur un rocher, le passage de leurs congénères chargés d'une toufle d'algues et se précipiter sur eux pour leur dérober une parlie delà précieuse plante. Ciarke signale les mêmes vols, mais entre Cormorans ; car, pendant que les Oiseaux timides s'enfuyaient à l'approche de l'homme, les plus hardis couraient voler les matériaux qui se trouvaient alors abandonnés. Les Phoques en détruisent un grand nombre. Ils les saisissent à la surface de l'eau et se livrent aux exercices les plus variés avec le corps jusqu'à ce que la mort arrive. Leur nourriture se compose essentiellement de Poissons, qu'ils at- trapent aisément en plongeant. Quand ils reviennent de la pêche, on voit assez fréquemment des Megalestris se précipiter sur eux pour leur ravir quelques débris de Poissons emportés dans leur bec. Andersson a vu parfois dans leur estomac des restes de Crustacés, et le D' Ekelhôf y a trouvé des graviers dont les plus gros pouvaient avoir 1 centimètre. La viande des Cormorans a été très appréciée par l'équipage tout entier du « Français » ; seulement son goût est un peu plus fort, et elle fatiguerait plus vite que celle des Manchots. Le 15 mai, les Cormorans n'avaient pasquitté leurs falaises du défdé de la OISEAUX. 31 Haclio, etilsreslèrontlà toul l'hiver, puisqu'ils y trouvaientde l'eau lilirt; où ils pouvaient clieiTlier Icui- iiourrilure. Le D' Churcot a reniar(|ué qu'entre Iroiset trois heures un (luart, très régulièrement, tous les jours, ils revenaient à leurs falaises, isolés ou disposés en triangle, se tenant à peine à quelques mètres au-dessus du sol, avec le cou hien allongé, et fai- sant entendre dans leur vol lourd un hruit métallique rythmique (fig. 38). Quand ils prenaient terre, on les voyait décrire une courbe, étendre leurs pattes, ramasser leur cou et battre des ailes sur place. Une fois posés, ils se lissaient les plumes avec un air de grande satisfaction. Ces aimables bêtes, si peu farouches, sont unies en excellents ménages passant leur temps à s'embrasser, à se faire des amabilités dans des poses gracieuses. Souvent elles se tiennent par l'extrémité du bec et, décrivant de jolies courbes avec leur cou, elles balancent lentement leur tète de droite à gauche. Au commencementde septembre, les Cormorans deviennent plus séden- taires; ils s'apparient sans la moindre querelle et commencent vers le 1"> sep- tembre la construction ou la réfection des nids, lis sont si affairés à ce mo- menl-làqueles visites les laissent indifférents, .lusqu'au 15 novembre et même au V décembre, les membres de l'expédition les virent ap[)orler des matériaux avec la plus grande activité le malin et l'après-midi. Tandis (juc l'un d(!s individus reste sur le nid, afin d'éviter le pillage des mali'-riaux par les congénèi-es, l'autre s'éloigne jusqu'à 1 ou 2 kilo- mètres. Là, à marée basse, il plonge et reparait au bout de quelques secondes, tenant dans son bec une longue touffe d'algues rouges ou brunes, qu'il emporte aussitôt dans son bec vers son nid. D(>u\ esi)ôces sont surtout employées: une rouge, Plocomimn coccineiim, et une brune, Iksmurdia acideala (fig. 31). Les filaments d'Algues sont déposés en bordure autour du nid et agglutinés avec de la boue marine ou des excré- ments, de façon à conslilucides édifices hauts et profonds. Le D'Tuniuet a aussi trouvé sur les nids des colonies d'Antipathaires. A trois heures et demie, le travail s'arrête, et les deux é|>ou\ se font mutuellement des grâces autour du nid en se reposant. Bruce, sur la côte nord des iles Laurie, a trouvé les premiers nids le 8 novembre; ils étaient con)posés de mousses, de lichens et déplumes; 32 OISEAUX. les mousses et les lichens avaient été arrachés aux rocs voisins. Certains nids placés sur les rochers étaient utilisés depuis plusieurs années ; d'autres étaient même directement sur la ylace. Andersson a vu que les vieux nids sont réparés chaque année et qu'ils sont constitués par du guano mélangé à de l'argile, des graviers et des os d'oiseaux. A l'inté- rieur, ils sont tapissés d'algues et de colonies flexibles de Bryozoaires. Ils sont souvent espacés de 0'°,rjO, et leur bord antérieur est le plus élevé. Les œufs ont été trouvés dans les nids le 1"' novembre. Les femelles pondent de trois àcinq œufs à coquille grenue d'un blanc légèrement teinté de vert bleuâtre très clair et de la grosseur à peu prés d'un œuf de poule. D'après Andersson, ce nombre n'est normalement que de deux. Leur longueur peut varier de 51 millimètres à 6i ; leur petit diamètre est de 14 millimètres et leur poids 61 grammes. Ceux rapportés par l'Expédition du <■ iMançais » mesuraient 63 X 42 ; 61,5 X 39,1; 65,7 X 43,2; 66,7 X 36,1. Ce dernier œuf très allongé appartient évidemment à une fin de |)Oiite. Le 6 novembre, on récolta î> œufs de Cormorans; le 7, 7 ; le 8, 12 et le 9, 31 seulement. Le \2 no- vembre, la récolte a été de 261 œufs ; un seul nid renfermait trois œufs de même grandeur, un autre deux œufs de môme taille et un plus petit; beaucoup renfermaient soit deux, soit un œuf. En tout 321. Le 15 no- vembre après-midi, on put récolter 422 œufs qui étaient par 2 ou isolés dans les nids. La première omelette d'œufs de Cormorans a donc été mangée vers le 9 novembre. Tout l'équipage l'a trouvée fort bonne, malgré sa coloration un peu trop rouge. Le blanc ne se coagule pas complètement à la chaleur et prend alors, avec une teinte verdàtre, une consistance gélatineuse. Le goût de ces œufs n'est pourtant pas comparable à ceux de cane ou de poule. Les Cormorans couvent très gracieusement leurs œufs en étendant leurs ailes de chaque côté du nid et formant sur celui-ci comme un cimier de casque de Walkyrie (fig. 35). Les difficultés d'élevage sont beaucoup moins grandes que pour les Manchots, car, grâce à leur vol, ils peuvent franchir rapidement les distances souvent considérables qui les sé})arent de l'eau libre, où ils niSRAUX. .13 trouvent la nnurrituro qu'ils l'apporteront à lonrs petits. CcnN-ci la prennent en enfonçant la lète lont enlière dans le gosier de leurs parents (fig. iO). Il est probable que le niàb; et la femelle couvent alternativeinenl. Les Oiseaux couvant sont très confiants; ils permettent, d'après (llaïke, (|n'(»n les caresse sur leur nid. Ils ne défendent pas leurs petits. Si on apiirocbe, ils allongent le cou et se retirent sans résislanco (fig. 3'{, 3(i, il). A leur naissance, les jeunes sont entièrement nus. Le corps est recou- vert par une peau noire très plissi-e, avec le devant du cou et le ventre moins foncés. Les i)attes et la mendjrane interdigitale sont Manches, mais les ongles sont noirs à pointe blancbe. Le tarse est gris, le menlon blanc, de même que les bords de la commissure des mandibules, la paupière supérieure et une tache au-dessous. La mandibule supérieure est noire avec tache blancbe à l'endroil, où la pointe se courbe vers le bas ; la pointe externe est blanche ; la mandiluile inférieui'f^ <'st tout entière blanche à pointe noire. Les caroncul(\s, bien séparées au milieu, apparaissent très nelleinenl sur les côtés, sous la l'orme de finesgranulationsbiancliàires, jias snrc'devées au-dessus de r(''pidermo. Un deuxième jeune Cormoran, sans autres renseignements que la date (juin lOO^i), mesure 10 centimètres de longueur totale. Il est couvert de (iio|dunu^s d'un noir foncé, se résolvant en duvet d'un brun grisâtre. Le l)as-V(Mitre et les cAtés présentent déjà d'assez nombreuses lilo- pluines blanches : elles sont plus jietites et plus rares sur le vcilex; (|uel(pies-iiiies sont disséminées sur le jugulum et la main. La lâche doi'- sale blanche n'est pas encore indiquée. L'angle mentonnier est jaunâtre ainsi que les bords de la commissure et une tach(^ au-dessous de r(eil. La paupière est noire, de même (jiie la mandibule supérieure; l'inférieure est jaunâtre, sauf la pointe. Les caron- cules noirâtres sont moins visibles que dans le spécimen précédent. On voit apparaîii'e les douze rectrices sous la forme de douze faisceaux de rayons blancs qui (•(uitinnent le tuyau de la plume. Les pattes sont grisâtres avec la niembi'ane |)almaire un |)eu [dus claire. Les caractères de l'adulte se dessinent peu à [leu jus(pi'(>n b'vi'ier, où Expédition Charcvl. — A. Mf.negaix. — Uisuaux. O 34 OISRAUX. les plumes du dessus du corps sont formées d'un mélange de plumes brunes et à éclat métallique. Un spécimen montrait déjà la tache dorsale blanche. Les jeunes ne paraissent aller à la mer qu'assez tardivement, afin de chercher leur nourriture, vers les premiers jours de mars seulement, car le 5 mars, à l'époque où l'Expédition a commencé à prendre ses quar- tiers d'hiver à l'île Booth-Wandel, le D' Tunjuet a vu des jeunes Cor- morans qui étaient encore alimentés par leurs parents. Le 30 décembre, les petits Cormorans sont notablement plus âgés que les Pingouins ; mais, par contre, les petites Mouettes sont à peine écloses. Les parents les conduisent à l'eau comme de petits Poussins, sans les quitter une seconde. Mais, le reste du temps, ils sont abandonnés à eux- mêmes et se cachent dans les fentes des rochers, où ils sont difficiles à apercevoir, étant donnée leur couhmr, Clarke a remarqué que les mâles tués en septembre ont la huppe bien développée, de 30 à iO millimètres, tandis (jue les mâles de décembre sont ornés d'une huppe plus courte et que beaucoup de février sont dépourvus de cet ornement. Les spécimens de septembre ont un plu- mage plus brillant que les autres et ont les caroncules plus développées. La tache blanche dorsale varie en grandeur même chez les mâles adultes de la même saison. Dans la colonie de l'île Booth-Wandel, le D' Turquet a observé quelques individus qui n'étaient pas accouplés, dont deux ont été tués. Ces Oiseaux (80 çf et 112 9) pi'ésentent un plumage dont les couleurs sont moins vives que celles des individus accouplés. Il n'a pu savoir si ce sont des jeunes chez lesquels les fonctions de reproduction ne sont pas encore assez développées, ou bien des adultes trop âgés et comme tels impropres à la reproduction. Les différences avec les adultes sont si grandes que je doute que, chez les individus âgés, il se produise des changements de coloration si importants. Le n° 80 çf a toutes les parties inférieures blanches, comme chez l'adulte. Les caroncules très faibles sont encore séparées par quelques petites plumes. Le front, le vertex, l'occiput et le derrière du cou sont OISEAUX. 3a brunâtres; toutes les pointes des plumes commencent à se teindre en violet; c|uel(]ues plumes du vertex indiquent le commencement d'une crête. Le nuuileau prend d^jà une leinle verdiUrc, et les plumes sont bordées de l'oncé couiine chez l'odulte en pluuiiii^c de noces. La tache blanche apparaît, ainsi que la couleur violette du bas du dos et du crou- pion; elle est plus accentuée sur les côtés. Les tectrices alaires sont biunàtres, La bande blanche de l'aile est indiquée, puisque les petites couvertures, qui sont d'un brun très clair, sont bordées de blanc à l'extré- mité ainsi que quelques scapulaircs. Les grandes couvertures présentent aussi du blanc à la pointe et forment ainsi sur les rémiges une deuxième bande un peu indistincte. Couvertures inlériimres et culottes brunes. La queue a la même longueur (jue chez l'adulte, mais les deux reclrices médianes ont la hampe blanc jaune verdàtre sur toute sa longueur, avec les barbes d'un gris brunàti-e. Les autres se rap|»rochent plus de celles de l'adulte. Toutes les reclrices sont plus pointues et paraissent moins usées que chez les adultes que j'ai examinés. Le n" [\'2 Q présente les mêmes caractères avec des taches violacées moins nombreuses et une indication de tache blanche dorsale plus l'ailtle. Les barbes internes des rectrices sont plus foncées, et les sus- caudales présentent une bordure blanche à l'extrémité. ('es individus, doiil la taille est celle de l'adulte, paraissent donc être des jeunes de l'anni'c |)réc(''(lenle, et on pouriait alors conclure de ces faits qu'il faut au Cormoran deux ans pour devenir adulte et être capable de se reproduire. Cilarke [/oc. riL, p. ISO) donne la description des jeunes en premier plumage, récoltés en décembre, mais ne ()arle pas de la taille des individus qu'il a examinés. Sa description coïncide bien avec celle que je viens de faire. Il ajoute que les Oiseaux un peu plus âgés pris en février ont leurs parties supérieures mélangées de brun et de métal- lique, et un spécimen porte même une faible indication de tache blanche. Les rectrices médianes sont noirâtres avec tige blanche, f^e reste du plumage est le même que sur les plus jeunes Oiseaux. ;«> OISEAUX. LARIDÉS. 0. Sterna vittata Gm., 1788. Sterna citlala Gniclin, Sij^l. nul., I, p. GO'J (1788) ; Pelzcln, Heisc A'orarri, Vi'i(j<'/, p. 152 (1805, adulte de Saint-Paulj; Sliarpe, J'hU. Tnins., CLXVIH, p. 113 (1828, Kerg-uelen) ; Siiunders, Voi/. « Challcnijer», II liin/s, p. 13i (1881,Triskm da Cunha Group el Kerguelen); Id., Antarclic Manudl, p. 23IJ (lUOl). Sierna Santi-Paitli Gould, llandh. 11. Aiis/r., II, p. o'JU (1805, Saint-Paul). Sterna mt'lnnoplera Vélaiii, Arcli. de Zuol. expérim. et Gen., VI, ji. 53 (1877, Saint- Paul). S/erna i-itlata Sauinlers, Cal. Ji. Bril. Mus., vol. XXV, \>. 51 (18'J8) ; Sharpe, Hep. « South. Cross » (11)02), p. 1U5. N° 30 cf. Tur au l'iisil sur la plage do l'île Bootli-Wandel, le 30 oc- tobre 1904; dos et ventre ardoisés; bec et pattes rouges; iris brun sombre. N° 31 cf. Tué à côté du précédent le même jour. Les grandes rémiges sont dépassées de 1 centimètre par celles de la queue. N° 34 cf. Tué sur la plage de Tlle Boolh-Wandel, le 31 octobre 1!)0 i ; estomac vide ; l'Oiseau, au moment où il fut tué, tenait un Poisson en son bec. N° 81 cf. Tué sur la plage ouest de l'île Boolh-Wandel, le 20 novembre; iris brun-marron; Feslomac contenait des Crevettes. N° 82 9- Tuée sur la plage ouest de l'île Bootli-Wandel, le 26 novembre ; son estomac était vide. N"^ 83, 84, 83 9, 9, q'. Tués sur la plage ouest de l'île Booth- Wandel, le 26 novembre ; l'estomac était vide. N° 88 (f. Tué sur la plage ouest de l'île Booth-Wandel, 27 novembre; il portait de nombreux parasites externes; estomac vide. N° 89 9 • Tuée sur la plage ouest de l'île Booth-Wandel, 27 novembre; estomac vide ; ])arasites externes. N"" 103 (f, loi cf., 103 (f. Tués le 13 décembre près le défilé de la Hache ; leur estomac était vide. Sur le n° 104 (f, le front est blanc moucheté de noir, comme chez le mâle adulte en hiver. Le menton et la gorge sont presque blancs, les parties inférieures d'un gris plus pâle. Acariens externes. Donc 10 (2f, 3 9 t't un jeune. Deux œufs rapportés de l'île Ilowgaard, 20 novembre. Ils sont de forme OISEAUX. 37 conique allongée; leur couleur est d'un vert-olive teinté de brun, avec petites taches noires semblables à celles des œufs de Mouette. Dimensions : i() X 34°"°, 5. Un œuf, 4i X 33 ; poids, 26 grammes ; 23 novembre. Ces Sternes, tous tués de fin octobre à novembre, sont d'une couleur gris argenté, aussi foncée en dessus qu'en dessous (manteau, ailes, parties inférieures). Le iront, le vertex cl la nuque sont noir foncé, les lores en |)artie blancs, car une bande blanche étroite longe le bord de la mandibule supérieure. Dans un spécimen (104 çf), le front est blanc tiqueté de noir. Une bande d'un blanc pur part de la commissure ; elle est assez large près et en arrière de l'œil, et elle se rend obliquement à la nu(jue pour se terminer au demi-collier supérieur. Sur toute la longueur, elle contraste aussi bien avec le noir de la tète qu'avec le gris de la gorge. Les primaires sont plus foncées près de la pointe et plus ou moins bordées de blanc sur les barbes internes. La hampe est blanche, et les barbes externes de la première sont noirâtres. Les secondaires sont bordées de blanc sur le côté interne. Les sus- et les sous-caudales sont blanches. Les deux paires de rcctrices externes ont les barbes externes d'un gris argenté très pâle. Le ventre est, sur quelques échantillons, plus pâle que la poitrine et le devant du cou. Le bec et les pattes sont d'un beau rouge-cerise. Kn comparant cette forme aux types de l'espèce ^'. hirimdinacea Less. conservés aux galeries du Muséum, j'ai pu constater que leurs dimensions sont plus grandes et que toutes leurs parties inférieures sont d'un blanc pur à peine lavé de grisâtre. Les dimensions des spécimens étudiés sont les suivantes : aile, 265 <à 280 millimètres; culmen, 29 à 31 millimètres; queue, K)7 ; tarse, lo, 5; elles correspondent assez exactement avec celles indiquées par Saunders (in Cat. of B. lirit. Mus., vol. XXV, p. 51) pour N. vittata, mais sont notablement inférieures à celles des deux adultes, types de l'espèce de Lesson : ailes, 300 millimètres; culmen, 40 et 4j millimètres (jeunes, 3."J) ; queue, 11)8 et 210; tarse, 20 milli- i^8 OISEAUX. mètres. Sur le bec et les tarses, la couleur a totalement disparu. Los spécimens de l'Antarctique diffèrent aussi de ceux qui ont été rapportés de la baie Orange par la Mission du cap Ilorn et que M. Oustalet a nommés ^S. lôrundinacea. Étant donné le grand nombre des échantillons que j'ai examinés et la constance des caractères que j'ai observés, celte espèce est donc bien ^'>. villala de Gmelin, déjà signalée à Ker- guelen, Saint-Paul, Saint-Hélène, au cap de Bonne-Espérance et au Brésil. Récemment, en 1904, Rcichenow a rattaché le Sterne de la Géorgie du Sud à cette espèce sous le nom de Sterna villala Georg'ue. Quand le bateau passe près d'une ile, ils accourent d'un vol rapide au-dessus du sommet des mâts; ils se balancent en agitant leurs ailes et en faisant entendre de petits cris aigus et répétés, comme s'ils nar- guaient les chasseurs du bord. C'est probablement leur vol souple, élégant, qui les a fait désigner sous le nom d'Oiseaux royaux par les navigateurs. Généralement ils vivent par petits groupes de 4, 0, 10 individus dissé- minés dans les massifs rocheux des rivages. En naviguant sous la latitude du Cercle polaire (0G° 32' latitude sud), le D' Turquet en a aperçu, près de la côte de la Terre de Graham, une troupe de plus de oO individus. Par conséquent, comme le Sterne hirundiuacé, ils ne se tiennent qu'au voisinage de la terre, et jamais en pleine mer. Ils ne se posent à la surface de l'eau que |)Our y ramasser une Euphausie ou un fragment de Poisson aperçu de haut. Ce sont alors des cris de joie, comparables à ceux qu'émet un enfant lorsqu'il a trouvé un jouet sympathique et longtemps désiré. D'iq)rès Sorling, ils pour- suivent et mangent surtout un petit Poisson, Nolhenia macrocephala mar- morala. Ces Oiseaux ont construit quelques nids dans l'île Booth-M'andel à partir d'octobre, et ils ont disparu à la fin de la saison de reproduc- tion vers juin, d'après Turquet. Clarke indique pour le Sterne hirundinacé, aux Orcades, des dates plus précises. Ainsi l'Expédition observa les premiers arrivants du printemps le 21 octobre ; ils étaient absents depuis le 2o mars de l'automne précédent. OISRAUX. 39 Les nids sont de simples trous dans le gravier, plus ou moins l>ien bordés de fragments de petites pierres. Ils sont placés au sommet de petits rochers, toujours près de la côte, en colonies composées de quel- ques paires seulement ; ils sont tout près les uns des autres et près de ceux de Larm do7ninicanus. Turquet dit qu'ils pondent deux ou trois oMifs, tandis (pic Claïke n'en admet qu'un ou deux aux Orcadcs \)o\\v Steriia liinnitli/Kir.ui. D'après le D' EkcllicW, les u'ul's de ce dernici- SIcrnc oui un liout |)resque pointu; leur co([uille est très mince, et leur couleur est vert-olive foncé, avec des taches brunes irrégulières. Le premier oHif fut trouvé par les naturalistes de la « Scotia ». le 14 novembre, et la ponte se continua jusqu'au lii janvier. En lOUi, Mossmann dit que le premier œuf fut trouvé le 27 novembre, et le pre- mier Poussin le 2.) décembre. Le 7 février, tous ces derniers avaient i\f\\\. p(>rdu leur duvet. L'(euf de S', viltata rapporté par Tun|uet est d'un brun assez clair avec pi(pieté noir. Dimensions: 47""", ."i X ^^3 ,4. (!e Sterne visite aussi en été les Shellauil du Sud; mais, d'après Reiche- now, la forme qu'on trouve à la Géor-gie du Sud (>st le Stcrua villntd Gcorgiœ Reich., tandis que, d'a|)rès le même auteur, la forme de l'Antarc- ti(|ue formerait une sous-espèce particulière qui prendrait le nom de 5. macrura cmlistrojiha. 7. Larus dominicanus Li( ht., 1823. Imi'ux (laminirriiiux LiclisUiiisdnii, Ver:. Doithl., p. 82 (1823, c<')tes ilii Rri'sil); Darwin îtidimU], Zool. « nr(t(jle ■> /!in/s, p. 1 'i2 (I8'il, R. Argentine;; Ciiay, loi/, li Eri'bus and Terrnr »,Bii(/s, \>. ISilS'iC, Xonvelle-Zéiande) ; GonM, /'. Z. S., ISnO, p. 07 files Fiiikla-iil); Layar.l, /ùin, 1707, p. '150 (ilo Crozct); Kiddor ol Coues, liii//. /'. S. Ad/. Mus., n" 2, p. 13(1885, Kergiielcn) ; Saunders, /'. Z. .S'., 1882, p. iOO (Chili et Pérou) ; l'agenslei-hor, ner. Nat. Mus. /ftunliiin/, lS8'i, p. 2'i (Géor-ie du Sud); Forl.es, I/jis, 1803, p. 520 (Chalhani) ; Sclaler, f/iis, 189i, p. 'i05 et •'i07 (Aniéri(]ue antarctiipie I. /.unis fimcus King-, Zoo/. Journ., IV, p. 103 (1828-20). /jiriis antipodus Oray. A/.s7. B. Ilrit. Mus., Aîtsriws, p. 1G9 (18i4). I)(iiiuuic(tntis rori/'crus Mruch, J. S. Ornilli., 18.5:i, [i. 100. I.ariis !>' ;r«(/./:/ Hanaparle, IVauin., 1S5é, \>. 211. Ltirus dominicanus Saunders, (.'al. B. Bril. Mus., vol. X.W, p. 2'j5; Mali, //>/.«, (1900), I). 10; Andersson, toc. cit. {IQOô); p. 51; Clarke, Jbis (1900), p. 178; Lunnberg-, loc. cil. (1900), p. 02. 40 OISEAUX. N° 13 cf. GoiMand cendré tué au fusil le 27 août 1007 à l'île Boofh- Wandel; longueur 59 centimètres ; iris brun jaunàti-e; bec brun avec bande médiane blanche cornée ; tarse violacé en avant, blanc en arrière (jeune tacheté) ; couleur gris cendré, N° la 9 adulte. Goéland dominicain. Tuée au fusil le 27 août 1001, à l'île Booth-Wandel ; iris gris clair; pattes jaune clair. N° 18 9 adulte. Tuée le 21 septembre 1904 sur la plage; iris gris olaii-; bec jaune ; pattes jaunes. NM9 9 . Tuée le 16 octobre 1901 sur la plage de l'île Booth-Wandel ; iris gris clair; bec et pattes jaunes; l'estomac renfermait des patelles, coquille et animal, plusieurs ténias dans le tube digestif. N° 0 9 • De grande taille, tuée sur la plage de l'île Booth-Wandel le 19 octobre 1904; iris gris clair; bec jaune; pattes jaunes ; estomac avec patelles, coquille et animal, ectoparasites acariens (?) dans les plumes de la tète; nombreux ténias dans le tube digestif. N° 20 o^ adulte. Tué sur la plage de l'île Booth-Wandel, le 19 oc- tobre 1904; iris gris clair; bec jaune; |»attes jaunes; estomac avec patelles; ténias dans l'intestin; plus gros que les femelles et plumage plus fourni. N° 47. Tué le 9 novembre 1904, plage de l'île Booth-Wandel; couleur grise, N° 48 (^f jeune. Sans renseignements. N° 1)0 cf. Plumage de couleur grise (sans doute un individu jeune), tué le 5 novembre à l'île Booth-Wandel; iris gris clair; estomac vide. N° îjl 9- Plumage de couleur grise, tuée le 5 novembre 1904 à l'île Booth-Wandel. N° 52 (^f jeune. Plumage de couleur grise; tué le 5 novembre 1904 à l'île Booth-Wandel. N° 53 (;/ jeune. Tué le 5 novembre 1901 à l'île Booth-Wandel; plumage gris; iris gris clair : dans l'estomac, des patelles et des plumes de Manchols. Plusieurs ténias dans le péritoine. N° 54 çf adulte. Tué le 10 novembre sur la baie Nord, au pied du mont Bouille; bec jaune ; dans l'estomac, des patelles à demi digérées. N° 55 çf presque adulte. Tué le 10 novembre sur la baie Nord, près le mont Bouille ; iris gris clair; pas de parasites. OISEAUX. ^1 N° 108 cf (carnet de voy. Ç) très jeune. Tué le 23 décembre, par M. Turquet, sur le rivage de l'anse du bateau et capturé après une longue course avec le canot major et la baleinière. Iris gris clair, tirant sur le jaune ; pattes blanc jaunâtre ; bec noir ; couleur cornée au sommet, dos gris plutôt blanchâtre; tète plutôt blanche avec plumes noires; queue gris bhxnchâtre dont les plumes sont noires à leur extrémité. Deux sans numéros ont des taches blanches sur les couvertures des ailes. Un œuf. N° 114 (^f jeune. Avec plumage duveteux, capturé sur îlot, à l'entrée du port Pingouin, dans la rookery aux Mouettes, 29 décembre ; le bec est gris avec tendance au jaune à l'extrémité, tandis qu'il est noir sur un échantillon plus âgé, avec couleur cornée grise à la pointe. La couleur générale est blanc brunâtre, avec touffes de duvet noirâtre sur la nuque et le cou en arrière ; l'estomac renfermait des débris de coquilles de patelles. N° 1 15. Mouette gris(!, tuée par Rey dans la baie nord do l'île Anvers, le 5 janvier; l'iris est brun, le bord des paupières d'un rouge plus marqué. Les grandes tectrices sont brunes à extrémités blanches; tarses et membrane palmaire d'un blanc bleuâtre. N° 128 (^f jeune. Sans renseignements. 20 Novembre : Plusieurs œufs de forme allongée, conique, de couleur brune olivâtre avec petites taches rondes ou irrégulières et brunes. Dimensions : 73°"°, 5 X •iïJ millimètres. 23 Novembre : Quatre œufs, le plus grand pesait l2o granmies et avait 80 millimètres X 51°"", 5. IS" 733. Jeune Goéland venant de sortir de l'œuf; dans l'alcool. N° 762. Jeune Goéland dominicain plus âgé, 29 décembre lOOi, île Wiencke; dans l'alcool. Le Goéland dominicain, qui est d'un beau blanc pur, avec le dessus des ailes brun, le bec et les pattes jaunes, l'iris gris clair, a une aire de dis- tribution très vaste s'étendant du lO' degré de latitude sud jusqu'au Cercle polaire. Il ne paraît très abondant nulle part dans les régions antarctiques, mais il est plus fréquent dans les îles subantarctiques. Expédilion CUurcol. — A. iMenkoaux. — Oiseaux. 6 ■i2 OISEAUX. Andersson Ta signalé nichant en trois endroits, sur la côte nord-est de la Terre de Graham, sur la côte sud de l'île Trinity et sur l'île Valdivia. Charcot parle d'une colonie comprenant deux douzaines d'individus, établie à l'île Booth-Wandel, dans les rochers, près de la mer, ainsi que d'une deuxième de même importance qui construisit des nids sur l'île Goudier, à Port Lockroy et sur une petite île voisine. Ces animaux sont très méfiants, car ils ne se rapprochent jamais de l'explorateur en deçà d'une portée de fusil. Leur cri ressemble assez à celui de la Chouette le soir, et, quand ils aperçoivent le chasseur en marche ou embusqué, ils semblent le narguer en faisant entendre des sortes d'exclamations : hd, hd, hd, etc. Sôrling dit qu'il ne les a jamais vus en pleine mer, et Hall pense qu'ils n'osent s'y aventurer, car leurs ailes ne sont pas très puissantes. Pen- dant un orage, ils se posent, les ailes demi-étendues, par milliers, sur le kelp, qui les protège contre la violence de l'ouragan. Le bec très épais de cette espèce fait supposer que ces animaux se nourrissent de Mollusques. En effet, le D' Turquet a constaté qu'ils vivent de patelles fixées aux galets et qu'ils recueillent à marée basse. C'est leur nourriture favorite. Ils les emportent dans les rochers, et là ils dévorent l'animal, en sorte que les coquilles s'accumulent en si grand nombre là où ils nichent qu'elles forment une couche épaisse entre les blocs de rochers. Ces amas abritent deux ou trois espèces de petits Acariens et la Mouche antarctique [Belgica antarctica). Au mois d'avril 1904, à l'île Booth-Wandel, M. Turquet a vu des Megalestris et de grands Pétrels occupés à dévorer des cadavres de Phoques qui venaient d'être tués. Près d'eux se trouvaient de nombreux Goélands qui regardaient, mais ne touchèrent pas à la viande. Lônnberg rapporte qu'au contraire les Goélands deviennent des hôtes réguliers des campements quand la pèche de la Baleine a commencé. On les a vus ramasser alors tous les rebuts, même ceux de graisse de Baleine. Quand ils voulaient saisir un objet dans un endroit peu profond, ils faisaient un saut en l'air, et, les ailes demi-déployées, ils s'enfon- çaient juste assez pour que la pointe de leurs ailes ne fût plus visible à la surface. Les Damiers sont de meilleurs plongeurs, ils ne dédai- OISEAUX. W gnent pas les cadavres, mais préfèrent les déchets des campements. Au plus fort de l'hivernage, pendant les mois de juillet et d'août, ils se sont éloignés de leur habitat ; mais, de temps en temps, on voyait quelques individus passer au vol le long des rivages de l'île Booth-Wandel. Clarke assure qu'à Saddle et à l'île Laurie des individus furent aperçus tout l'hiver. Ils sont courageux, car ils font face à l'ennemi sans se laisser eiïrayor. Ils se tiennent immobiles, en tournant la tête du côté de l'ennemi et en ouvrant un bec menaçant, tout en poussant leur coieiclc avec la plus grande régularité. Sôrling décrit les nids comme étant faits de chaumes de tussock, de mousses, d'algues et matériaux semblables. Clarke ajoute que, dans les Orcades du Sud, ils sont bien construits, avec des algues, des mousses, des lichens et des plumes, et qu'ils sont entourés d'une grande quantité de patelles. Ils se trouvent dans les dépressions des rochers. D'après le D'Turquet, la ponte se fait vers le 10 novembre, et chaque nid renferme deux ou trois œufs. Clarke assure qu'aux Orcades le retour eut lieu à la mi-octobre 1903, que les adultes s'apparièrent le 3 novembre et que les premiers oeufs furent pondus le \lj novembre. En 1904, Mossmann indique le 23 novembre. Sôrling dit qu'en règle générale il y a trois œufs par nid ; c'est aussi l'opinion de Von den Steinen dans la Géorgie du Sud, d'Andersson sur la Terre de Graham, tandis que Hall, à l'île Kerguelen, assure que la plupart des nids ne contenaient que deux œufs. Ce dernier, d'ailleurs, a constaté que tous les nids étaient dans les varechs, just(> au-dessus de la haute mer, avec une seule exception : l'un d'eux était dans l'herbe. Ordinairement les nids sont placés sur des rochers plats, abrités plus ou moins les uns par les autres. Von den Steinen trouva les nids dans la zone du flux et du reflux sur des rochers couverts d'herbes. Les œufs reposaient sur un simple lit de chaumes un peu pressés. Andersson put constater d'autre part que certains nids, placés simplement sur la neige, étaient consliiiils uniquement avec de la mousse. 44 OISEAUX. Les œufs ressemblent beaucoup à ceux de Megalestris. Ils ont une couleur chamois olivâtre brillant ou brun clair avec des taches arrondies plus ou moins foncées, irrégulièrement distribuées, et qui parfois montrent une tendance à se fusionner au gros bout. Les taches sous- jacentes sont cendrées. Ces œufs sont de taille assez forte pour l'animal. Le grand axe varie de 70 à 75 millimètres, le petit de 50 à 55 millimètres. L'échantillon rapporté par l'expédition mesurait 73""°, 4 X 50°"°, 9. Le D' Turquet a enlevé les œufs dans cinq ou six nids. Les couples ont construit d'autres nids toujours dans les rochers, non loin des premiers, mais plus près de la mer. Un jour, débarquant près de l'endroit où se trouvaient ces derniers nids, le D' Turquet provoqua la fuite des Goélands qui abritaient leurs œufs. Mais immédiatement des Cormorans établis à 500 mètres de là vinrent tout saccager et emporter tous les matériaux, bien qu'ils n'emploient pas les mômes pour la construction de leurs nids. Le jeune Goéland dominicain près de sortir de l'aîuf a les caractères suivants : La base du bec est noire, mais le bout est blanchâtre. Les filoplumes sont allongées, blanches sur la moitié de leur longueur et presque entièrement blanches sur le ventre. Sur le dos, elles sont bien séparées en deux par une bande médiane nue ; l'aile n'en porte que sur les bords. Les pattes sont nues jusqu'au milieu de la jambe, et l.es tarses sont bien marqués d'anneaux et de squames dépassant le talon. Les paupières sont à peines ouvertes. Lesjoues sont blanches, le front est noirâtre, mais le ventre est plus blanc. Quand l'enveloppe cornée de la filoplume tombe, la touffe de rayons cornés qui y était contenue s'étale ; les barbules apparaissent sur les deux tiers inférieurs, et il se forme les plumules constituant le duvet grisâtre du Poussin. Un deuxième Poussin (u° 762), un peu plus âgé, présente encore exacte- ment les mêmes caractères. Le premier jeune signalé aux Orcades est du 28 décembre 1903 ; il avait déjà une semaine. De nouveaux œufs pondus le 3 décembre éclorent le 28 décembre. L'incubation dure donc vingt- cinq jours. OISEAUX. 43 La période eu duvul doit se prolonger longtemps, puisque des jeunes furent encore observés le 30 juin 1901. Les jeunes Goélands vont de bonne heure à la mer, alors qu'ils sont encore recouverts d'un duvet grisâtre. Au 1" février 1905, ceux qu'a tués l'Expédition étaient un peu moins gros que les adultes, mais ils volaient presque aussi bien qu'eux, et ils étaient couverts d'un plumage grisâtre, même sur la poitrine. Le passage du duvet au plumage de l'adulte doit se faire en plusieurs saisons, donc par plusieurs phases. L'Expédition a rapporté divers spécimens qui oH'rent un certain intérêt à ce point de vue. Le n° 51 Q a déjà le plumage de l'adulte, sauf que les ailes sont encore brunâtres avec les couvertures bordées de blanc. Les cubitales sont déjà largement blanches au bout, et le bec est jaunâtre. Le n° 128 çf est d'un stade moins avancé. Toutes les parties supé- rieures sont brunâtres par suite de la présence de longues taches de cette couleur le long des hampes. Sur le dos, chaque tache s'élargit, et il ne reste plus qu'une simple bordure blanche. Les sus- et les sous-caudales sont blanches avec une tache brune sublerminale triangulaire et d'autres petites plus ou moins effacées et irrégulières. Les rectrices sont blanches à la base, puis portent quatre ou cinq bandes noires étroites, et une dernière, qui occupe à peu près la moitié de la longueur, est bordée de blanc à la pointe. Le menton est blanc, mais le reste des parties inférieures est moucheté par des petites taches foncées subterminales ; le bas-ventre est déjà blanc. Le bord alaire est d'un blanc tacheté ; les cubitales et toutes les couvertures sont bordées de jaunâtre ; les sous-alaires sont mouchetées. Les rémiges primaires sont noires ; les secondaires sont légèrement bordées de blanc avec les barbes internes pâles sur une largeur variable ; le bec est noir, et les pattes sont encore un peu [)lus foncées que chez l'adulte. 11 est probable que c'est un deuxième plumage, car la taille du spécimen est celle d'un adulte. 46 OISEAUX. 8. Megalestris antarctica (Less.). Lestris antarcticus Lesson, Ornith., p. 616 (1831, Palkland, Nouvelle-Zélande); Gray in Dieffenb., Trav. N. Zeal., II, App., p. 200 (1843) ; Id., Voy. « Erebus » and « Terror », p. 18 (1846). Stercorarius antarcticus Gray, His . B. Brit. Mus., Anseres, p. 167 (1844, île Campbell); Giglioli, Faun. Vert. Oceano, p. W (1870); Sharpe, Phil. Trans., CLXVIII (vol. suppl.), p. 109, PI. VII, fig. 1-2 (1879, Royal Sound and Christmas Har- bour, Kerg-uelen); Mac Cormick, Voi/. « Discoverij », I, p. 142 (1844, Campbell); BuUer, B. N. Zeal., 2°* éd., p. 63 (1888). Megalestris antarctica Saunders, Cat. B. Brit. Mus., XXV, p. 321, PI. I (1890); Hall, /6is(1900), p. 8; Sharpe, Rep. « Sottt/i. Cruss » (1902), p. 172; Andersson, loc. cit. (1905), p. 49. Catharacta antarctica Lônnberg-, loc. cit. (1906), p. 58. N° 41 cf. Tué au fusil le 4 novembre à l'île Boolh-Wandel ; iris brun clair ; bec noir ; tarses noirs, couleur générale brun foncé sur le dos avec deux miroirs triangulaires sous les grandes plumes des ailes ; dans l'estomac, débris de Poissons et de Crustacés. N° 42 9 . Tuée le 4 novembre 1904 à l'île Booth-Wandel; iris châtain. N°49 0*. Tué le 'ô novembre à l'île Booth-Wandel; iris brun, marron clair; estomac rempli de débris de plumes de Pingouins. N° 56 o*. Tué le 12 novembre sur un Phoque mort au sommet nord de l'île aux Chiens; bec et pattes noirs; couleur générale noire avec miroir blanc sur et sous les grandes rémiges; bec petit. N° 67 9 . Tuée sur un cadavre de Phoque crabier, le 16 novembre; près de la boucherie ; iris marron, estomac vide ; le bout des plumes du dos est blanchâtre. N° 68 cf. Tué avec le précédent le 16 novembre. N° 69 cf jeune. D'une taille plus faible que les précédents. Tué sur un Phoque crabier, le 1 6 novembre au soir, près de la boucherie ; son estomac contenait des grains de sable assez gros et des plumes. N° 72 (^f. Tué dans les rochers aux Mouettes, le 29 novembre; iris brun . N° 73 cf. Tué le 19 novembre, près du bateau, sur le cadavre d'un Phoque crabier; dans l'estomac, graviers et débris de plumes. N° 74 9 • Tuée au sommet du mont .leanne le 19 novembre dans l'es- tomac des débris de Poissons et des Euphausides. OISEAUX. 47 N' 79 cf. Tué le 24 novembre près du bateau sur un Phoque crabier ; iris brun-marron ; couleur générale noire assez foncée sur le dos, avec plumes du cou d'un jaune doré brunâtre ; couleur blanche sous l'aile ; bec petit. N" 80 9 -Tuée le 24 novembre sur un cadavre de Phoque avec le numéro précédent ; iris brun-marron; couleur générale, ventre et cou plus clairs que dans le spécimen précédent. 1 4 Décembre : Œufs de Megalestris antarctica trouvés sur les rochers du mont Jeanne. Leur couleur est brun-olive avec des taches brunes irré- gulières, de forme ovoïde conique régulière. La texture de la coquille est finement grenue. Un seul a été rapporté. 20 Novembre : A l'île Hovgaard, M. Turquet observa un Megalestris emportant dans son bec un œuf de Larus dnmmkanns. Pendant Tété, les McfjalesU'is antarctiques sont aussi répandus que les Goélands dans les régions polaires australes. D'après Turquet, ils ne vivent pas à proprement parler en colonies, mais on les trouve dans les massifs de rochers (mont Jeanne), où ils construisent leurs nids assez tard, vers le mois de décembre. Ce sont des Oiseaux subantarctiques, qui se rencontrent depuis la Terre Louis-Philippe jusque dans l'Antarctique et, par conséquent, qui ont une distribution identique à celle de Pygoscelis paptia. Très peu méfiants, ils se laissent approcher à moins de quelques mètres; on peut facilement les photographier (fig. 43). Ce sont de vrais pirates, qui ne cherchent qu'à s'emparer des œufs et à tuer les jeunes des autres espèces pour les dévorer, et qui, penchés sur la crête d'un rocher, sont toujours à l'afiutd'un mauvais coup h f;iire. Un jour Andersson vit l'un d'eux attaquer un Adélie blessé, et Skotlsberg en vit un autre poursuivre un Cormoran en le frappant à grands coups sur les ailes jusqu'à ce qu'il fût tombé. Aussitôt un certain nombre d'entre eux se précipitèrent pour partager la proie. Quand il croit l'occasion favorable, il n'hésite pas à s'abattre sur un nid de Mouettes, et il emporte un œuf avec son bec danslesairs. Les parents le %l 48 OISEAUX. poursuivent en criant de colère et de chagrin ; mais le voleur sait les dépister etva déposer son larcin sur un rocher, où il attend tranquillement les Mouettes, qui alors, n'osant plus l'attaquer de face, retournent soigner l'œuf unique qui leur reste. Il semble qu'il choisisse intentionnellement le voisinage des rookeries de Manchots pour y établir son nid, afin d'avoir ainsi facilement de la nourriture (fig. 42). Dès qu'un Oiseau est blessé ou dès qu'un jeune quitte la protection de sa mère, il le happe rapidement. Andersson put constater cette installation dans cinq endroits différents, aux îles Nelson, Paulet, Cockburn, Scymour et à la baie de l'Espérance. D'après Hall et Sôr- ling, sa voracité est telle qu'il dévore même ses œufs et ses propres petits. Quand un Phoque vient à être tué, on en voit toujours plusieurs se poser sur le cadavre, en compagnie de Daption^ Larus^ C/iionis, et ils le dévorent en avalant des morceaux énormes. Souvent il leur arrive alors de se quereller et d'échanger des coups de bec en poussant des cris perçants. Lorsque les Cormorans reviennent de la pèche, ils se précipitent à leur poursuite, pour leur enlever quelques fragments des aliments qu'ils rapportent pour leurs petits. Turquet ayant un jour blessé un Sterne d'un coup de fusil, cet animal tomba sur laneige, mais unMegalestris l'ayant aperçu se précipita sur lui et l'emporta d'un vol rapide. Turquet rapporte qu'un matelot lui a raconté avoir vu un Megalestris saisir dans un nid un œuf de Pingouin et l'emporter dans les rochers; puis, après quelques instants, il l'avait rapporté dans la colonie sans le casser. D'après Andersson, les Megalestris ne s'éloignent pas de la terre et se tiennent pendant l'été à peu près toujours dans le voisinage de leurs nids. .Jamais il n'en vit en pleine mer. En hiver, on ne les aperçoit jamais. Ils disparaissent déjà au commen- cement de mars, dès que les jeunes sont capables de voler, et ils reviennent vers le commencement du printemps. Souvent on en aperçoit quelques- uns dès la lin de septembre ; mais ils ne deviennent nombreux qu'à la fin d'octobre. A l'île Booth-Wandel, ils ne sont partis que vers la fin du OISEAUX. 49 mois de mai, au commencement de l'iiivernage, et ils ne sont revenus qu'au 1' novembre. Ils ont construit leurs nids sur le gravier dans les premiers jours de décembre. Parfois on trouve autour du nid quelques touffes de mousses ou de lichens. Quelquefois même le nid est construit dans un creux de rocher, avec des plumes et du duvet de Pingouin. D'après Clarke, ils se sont installés aux Orcades sur des rocs moussus ou sur des plateaux élevés de 100 à loO mètres au-dessus du niveau do la mor. Les nids consistaient en trous très bien faits dans les mousses, avec des fragments des mêmes plantes formant le bord. Les nids trouvés par Andersson, à l'ile Nelson, formaient une légère dépression dans la mousse, el ils étaient intérieurement recouverts de mousses arrachées. Ils sont donc difliciles à découvrir ; jamais il n'a vu plus d'un œuf ou d'un jeune dans un nid, tandis que Turquet en a trouvé un ou deux. Sôrling en a vu ordinairement deux, souvent trois par nid. Les œufs sont brun jaunâtre avec des taches plus foncées. Dimensions indiquées par Lonnberg : 72 X 55 et 78 X 53 millimètres. L'œuf rapporté par l'Expédition française mesure 7*.),1 X 53. Sorling croit que seule la femelle couve; mais le mâle se tient alors tout près d'elle. Le 25 février, un chien tua un jeune Mcgalestris encore revêtu de son duvet dans un îlot près de l'île Booth-Wandel. Les jeunes de cette espèce sont bruns et, par conséquent, difficiles à apercevoir, tandis que ceux de M. maccormicki sont blanc grisâtre (« Southern Cross » (V>//., p. I(i7). L'expédition écossaise, le 29 janvier, ayant trouvé des Poussins âgés d'une semaine, on peut calculer que l'incubation dure six semaines à peu près. Quand ces Oiseaux ont des petits, ils les défendent avec acharnement. Sôrling a observé que, si on approche d'un nid de Skua, on voit tout de suite s'il y a des œufs ou des jeunes. L'animal se tient alors avec les ailes étendues en dessus, la tète penchée sur le sol el criant aussi fort que possible. Il ne s'enfuit pas avant qu'on no soit lout près du nid; mais, si on lui touche les ailos, il est prêt à ralta(|uo. 11 se précipite sur l'intrus en essayant de le frapper avec les ailes, puis il s'enlève dans les airs et Erpédltion Charcol. — A. MKNEr.Arx. — Oiseaux. 7 50 OISEAUX. répète l'attaque avec des tournoiements inquiétantsjusqu'à ce que l'ennemi se soit retiré des environs du nid. C'est ce que le D' Turquet a pu constater aussi à l'île Wiencke. PROCELLARIIDÉS. 9. Oceanites oceanicus (Kuhl). Procellaria oceanica Kuhl., Beitr.-, p. 136 (1820) ex Bank's Icon., n° 12. Procellaria Wilsoni Bp., Joitrn. Ak. Phi/., III, p. 231, PI. IX (1823). Oceanites Wilsoni Keys. et Blas., Wirb. Europ., p. XCIII, p. 238 (1840). Thalassidroma oceanica Schinz, Europ. Faun., I, p. 397 (1840). Oceanites oceanicus Sharpe, Phil. Trans., CXLVIII (vol. suppl.), p. 132 (1879, Terre Louis-Philippe, Royal Sound, Kerguelen) ; Racovitza, Vie des animauj:, p. 42 (1900); Borchgrevink, First on Antarctic Continent, p. 54 (1901, latitude sud 61° 56', longitude est 153" 53'), p. 64 (pack-ice, Jan. 3, 1899), p. 118 (Terre Victo- ria), p. 231; Bernacchi, South Polar Régions, p. 204 (1901, Terre Victoria), p. 315 (Cap Adare); Saunders, Antarctic Matinal, p. 235 (1900); Hall, Ibis (1901), p. 19; Sharpe, Rep. « South. Cross >. (1902), p. 139; Clarke, Ibis (1906), p. 166; Lônnberg-, loc. cit. (1906), p. 83. N° 100 9- Prise au nid au mont Jeanne, le 11 décembre; iris brun; couleur générale noire, avec croupion blanc ; dessus des ailes et la moitié interne marron clair; dessous des ailes, face ventrale, poitrine et abdomen marron clair ; bec noir, tarses moins allongés, membrane palmaire jaune à leur partie moyenne. N° 101 cf. Pris au vol à la main le 1" décembre près de la maison démontable; iris marron, bec et pattes noirs; dans l'estomac, des Cre- vettes parasites externes acariens. N° 102 cf. Tué le 13 décembre dans les rochers du mont Jeanne, près de son nid contenant un œuf, qui fut récolté et conservé ; iris marron ; bec et pattes noirs; œuf ovoïde, puis conique, avec une couleur blanche, légèrement rougeâtre, et la surface flnement grenue. Dimensions : 31 X22 millimètres. N" 107 cf. Capturé sur un nid par P. Dayné, le 22 décembre, sur les rochers du mont Jeanne ; iris marron foncé, bec noir, pattes noires. Il présente pour le plumage et la grosseur du testicule tous les carac- tères d'un adulte. Dayné prétend que c'est un jeune qu'il a recueilli dans un nid placé sous une grosse pierre et qu'il a vu le père et la mère entrer et OISEAUX. 51 sortir alternativement du trou où se trouvait le nitl. Après avoir soulevé la pierre, il le saisit sans qu'il s'envolât. Il y trouva encore des débris de coquille et un embryon détérioré. N° 606. Un embryon dans l'œuf. 2 Janvier : Trois Océanites paraissant adultes ont été capturés par Rol- land sur deux nids trouvés dans des rochers au bord de la baie. Iris marron foncé. Un œuf en mauvais état. L'Oiseau des tempêtes a, de tous les membres de son (groupe, l'aire de distribution la plus vaste, dans les régions antarctiques et subantarc- tiquos. Ainsi sa présence a été constatée à la Terre Louis-Philippe, dans la Géorgie du Sud, dans les Orcades du Sud (Bruce), à Kerguolen (Hall), au mont Gauss, dans la Terre de Guillaume H (Vanhôffen), et enfin ses nids ont été trouvés dans la Terre do Victoria (« Southern Cross », et « Discovery »), jjar 78° (1(^ latitude sud. Sorling en vil un grand nombre dans la Géorgie du Sud durant tout l'été; mais ils disparurentà la fia de mars et ne revinrent qu'au commencement d'octobre, quand Sorling quittait l'ile. Ces données concordent avec les observations de l'Expédition écossaise, caries animaux apparaissant le 1 1 et le 12 novembre auxOrcades du Sud disparurent le 13 mars. Sorling ne trouva pas de nids dans la Géorgie du Sud, mais des mâles tués le 14 décembre présentaient des espaces nus symétriques à la face inférieure du corps, et il y a tout lieu de croire que ces espaces nus ont certains rapports avec l'incubation. Ainsi le mâle couverait lui-même les œufs. Mais la preuve matérielle que cet Oiseau niche dans la Géorgie du Sud reste encore à faire. Clarke le dit très abondant en été dans les Orcades, mais moins que le Pigeon du Cap et le Pétrel des Neiges. De nombreux groupes nichèrent dans les falaises de l'ile Laurie. Pendantl'hivernage du « Français » à l'ile Booth-Wandel, de février à fin décembre, on en vit constamment quelques individus isolés môme au plus fort de l'hiver. Andersson ne vil TOcéanite qu'au printemps à l'il 82 OISEAUX. Paulet le 7 et le 8 novembre; et il affirme qu'il ne passa pas l'hiver à la baie de l'Espérance. Vers le 15 novembre, ces Oiseaux ont construit quelques nids à l'île Booth-Wandel, au fond des anfractuosités des rochers. Ces nids sont de simples trous dans le gravier, sans autres matériaux. Dans l'un d'eux, le D' Turquet trouva un oîuf blanc ovoïde et, sur les autres, l'Expédition captura plusieurs individus adultes. Le D' Andersson raconte qu'ayant vu plusieurs fois un Pétrel se faufder entre quelques pierres placées non loinde sa tente, Dusc enleva Icspierres le H janvier et attrapa l'Oiseau avec les mains. Il put voir que le nid était très simple et constitué par quelques plumes aumilieu desquelles se trouvait un seul œuf. Le 5 février, Duse trouva un deuxième nid tout près du premier. De pareils nids peuvent donc facile- ment passer inaperçus. Clarke dit même que ce Pétrel ne construit pas de nid, qu'il dépose simplement ses œufs dans des trous, dans des fissures parfois assez étroites et assez profondes pour qu'on ne pût les obtenir qu'au moyen d'une cuiller dont on avait allongé le manche avec un bambou. Ces Oiseaux reviennent pondre au môme endroit, comme l'attestent les débris de coquilles et les cadavres des jeunes de la saison précédente. Les œufs mesurés par Clarke avaient 33""°, 7 sur 24 millimètres. Le plus grand avait 36 X 24 et le plus petit 32 X 23. Celui récolté et rapporté par le D' Turquet est d'un blanc assez pur, mais il paraît un peu plus petit, et il est en trop mauvais état pour qu'on puisse prendre des mesures exactes. Clarke admet que les Orcades du Sud forment la limite nord de la ponte et que plus au sud l'élevage des jeunes réussit mieux. L'Expédition Charcot a rapporté en outre un jeune recueilli en novembre 1904 etqui est encore dans les enveloppes embryonnaires. Les filoplumes sont d'un noir foncé et très longues, surtout sur les ailes, où elles ont 2 centimètres de long. Leur enveloppe cornée est très résis- tante, et la dissociation en plumules se fait plus difficilement. Le front est nu, le bec noir; les pattes sont blanchcâtres dans toute leur longueur ainsi que la membrane palmaire ; mais les ongles sont noirs. OISEAUX. 83 PUFFINIDES. 10. Thalassœca antarctiea (Gm.), 1788. Procellaria antarctica Gmclin, Sijsl. A'al., I, p. 505 (1788). Thalassœca antarctica Goues, Prnc. Acad. Nat. Se, Phihid., 1860, p. 31, 19-2 ; Salva- dori,P. Z. S., 1878, p. 737 (Barrière de glace); Buller,fi.7\'. Zea/,2"* ed.,p. 229 (1888); Sclater, Ibis, 1894, p. 498 (Antarctic ice-barrier, Feb.) ; Salvin, Cal. B. Brit. 3Ius., XXV, p. 302 (1890); Sharpe, Hand-list B., I, p. 125 (1899) ; Raco- vitza, Vie des Animaux antnrct., p. 18 (1900); Saunders, Antarclic Manual, Birds, p. 229, 230 (1901) ; Bernacchi, S. Polar Régions, p. 02, 315 (1901). Priocella anlnrclica Sharpe, l'oy. « Erebus » and » Terror », App., p. 30, PI. XXXIII (1875). Thalassœca antarct. B. Sharpe, Rep. a Southerti Cross», Aves (1902), p. 143; Andersson, loc. cit. (1905), p. 42; Glarke, Ibis (1906), p. 109. N° l o^. Tué le ij août 190i ; longueur, 44 centimètres; envergure, 1 mètre ; iris gris brun; hvc brun; tarse blanc bleuâtre. N°2 (f . Tué le 20aoùt 11)0 1 ; longueur, 47",3 ; envergure, 1",2 ; iris gris brun; bec ])ruii; tarse blanc bleuâtre. N° 3 cf. Tué le 20 août 1904 ; longueur, if/",? ; envergure, r,2 ; iris gris brun; bec brun ; tarse blanc bleuâtre. N°' 10, 11, 12, 12o, 12(3, 127, sans renseignements. Quelques Pétrels antarctiques ou Damiers bruns ont été observés sur les rivages de l'île Booth-Wandel ou en naviguant parmi les glaçons au mois de février en 1904 et en 1905, à la latitude du cercle polaire 66° 3.2'. Comme le Pétrel des Neiges, ils doivent se poser rarement sur les rochers du rivage. Pendant les mois d'août et de septembre 1904, au cours de l'hiver- nage, quand le vent soufflait assez fort du nord-est, ils passaient au vol le long de la côte de l'île Booth-Wandel en venant du sud, et on en a tué quelques-uns. L'expédition n'a pas observé leurs nids. Clarke en signale quelques spécimens aux Orcades, et il ajoute que les membres de l'Expédition de la « Scotia » pensent que ce Fulmar niche sur la côte est de la presqu'île Ferguslie, en compagnie du Pigeon 94 OISEAUX. du Cap et du Pétrel des Neiges. Le l" juin, l'hiver étant très avancé, Bruce aperçut un de ces Oiseaux volant autour de la <( Scotia ». L'Expédition allemande de 1882-1883 et l'Expédition suédoise de 1002 ne l'ont pas signalé dans la Géorgie du Sud. L'estomac des spécimens tués par Sôrlingdans cet archipel renfermait des becs de Céphalopodes. II. Priocella glacialoides (Smith). Procellaria glacialoides Smith, III. Zool. S.Afr., Aves, p. 51(1840); Gould, B. Aiis/r., VII, PI. XLVIII(18iSi ; Buller, B. N. Zrn/., p. 'Ml (1873); Moseley, Notes iiat. « Cliallengcr », p. l:Ji (1879, Tristan da Cunha). Thalassœca glacialoides Coues, Proc. Nal. Se. Philad. (18G6), p. 393; Giglioli, Fnitn. Vert., Océano, yi. 47 (1870); Salvin, P. Z. S., 1878 (barrière de glace, Feb.); Mosclev, A'oteslVat. « Challenger», p. 253 (1870, iDordsdupacic-ice); Buller,//. lY. Zeal., 2°" éd., II, p. 228(1888); Bcrnaochi, S. Polar Régions, p. 315(1901); Saunders, Ant. Manual, p. 230, 230 (1901 j. Thalassœca tenuirostris Sharpe, Phil. Trans., CLXIII (vol. suppl.), p. 123 (1879, Ker- g-uelen). Priocella glacialoides Baird, Brewerand Ridgway, Wuler Birds N. Amer., 11, p. 373 (1884); Salvin, Cat. B. Brit. 3Ius., XXV, p. 393 (1896) ; Sharpe, Hand-lisl B., I, p. 122 (1899). Tagalassoica glacialoides Borchgrcvinii, First on Anturrtic Vont., p. C5, 00 (1901). Thalassœca glacialoides B. Sharpe, Rep. « Southern Cross » (1902), p. 144 ; Ander.sson, loc. cit. (1905), p. 43; Clarke, /bis (1900), p. 170. N" 124-, 125, 126, 127. i cf, pris à la ligne le 20 février 190:3, au large de l'archipel de Palmer, par 64° 40' latitude sud. Un jeune sans numéro et sans renseignements. Ce Fulmar vit aussi bien dans les régions subantarctiques que dans les régions circumpolaires. Ainsi Andersson l'a aperçu le 8 novembre par 57° 14' de latitude sud, au nord de la Terre de Feu, au sud de la Géorgie; le 13 avril par 52°iJo', et même au retour de l'Expédition, le 20 juin, par 50" 40' de latitude sud. Sôrling le vit àquelque distance de la côte de la Géorgie et parfois dans la baie Cumberland. Un spécimen fut même tué a Boilcr-Harbour vers la mi-septembre. Andersson l'a signalé aussi sur le pack-ice, à l'est de la Terre Louis-Philippe, le 3 juin 1902 et au nord des Shetland du sud. Il paraît avoir été moins fréquent dans les parages de l'ilc Booth- OISEAUX. S5 Wandel ; le E)' Turquet raconte qu'il a rencontré quelques-uns de ces Oiseaux le 10 janvier 190IJ, en naviguant dans le détroit de Gerlache, le long des îles do l'Archipel de Palmer (Iles Anvers, Brabant, etc.), ainsi que dix jours plus tard, par mauvais temps, au large des mémos îles. Ce jour-là un grand nombre de ces Oiseaux se posèrent à l'arrière du navire avec des Pigeons du Cap et. dos Prions, en sorte qu'on put en prendre trois ou quatre à la ligne. Dans l'été de 1903, le Pétrel a été observé par l'Expédition de la (I Scotia » sur la côte nord de l'île Lauri(>. Quelques spécimens furent encore aperçus en novembre et en décembre, ce qui ferait supposer que quelques paires nichent dans la partie nord de cette île. Cette espèce fut aperçue en nombre le 1 i février à la pointe nord-ouest de l'île Coronation. \J Antarctic /)/«;«/«/ indi(|ue Kerguelen comme un de ses lieux possibles de reproduction ; Andersson l'a trouvé nichant sur les hauteurs du cap Rocquemaurel, dans laTerre Louis-Philippe. Lonnberg pense qu'il est peu probable qu'il ponde à la Géorgie du Sud. Les nids, d'après Andersson, sont plac('s sur les rochers élevés, au- dessus des colonies du Manchot antarcticiue, ou bien sur de petites avancées des falaises, ordinairement à des endroits tout à fait inacce.s- sibles. Ils sont toujours plus nombreux au sommet de lamontagiie. Ils se composent d'une simple dépression dans le sable ou le gravier. Andersson, de tous ceux qu'il aperçut, ne put en atteindre qu'un seul, dans lequel il n'y avait qu'un œuf, dont il [)uL s'emparer le 27 dé- cembre 1902 ; il contenait déjà un gros embryon. Cet œuf était d'un blanc pur et avait 70 millimètres de long. Quand Andersson s'en empara, l'Oiseau défendit son œuf à la facondes Oiseaux des tempêtes, en vomissant contre l'intrus un liquide infect. 12. Majaqueus sequinoctialis (L.). Le Puffni (lit Cap de Bonne-Espérance Brisson, Ontil/i., VI, p. i:>7 (18U0;. Procel/arin xf/iiinnrtiri/is Limié, Si/s/. .Yal., I, [>. 21."> (ITOG). Êlajaqueuit w//. Bona|iai'le, Cawjites ?'e/u/«.s',XLII,p. 768(1850), et Consp.Ar., 11, p. 200 (1850); \id\\., /bis (1!)00), p. 21. Le D' Turquet a rencontré quelques-uns de ces Oiseaux en naviguant o6 OISEAUX. au large des iles de l'Archipel Palmer (Anvers, Brabant, etc.), vers le 25 janvier lOOo. 5< De loin, ils paraissent tout noirs, un peu plus gros que les Megalestris, avec des ailes plus développées. Ils se sont montrés très défiants et se sont toujours tenus loin du navire. llj. Pagodroma nivea (Gm). Le Pétrel blanc ou de neige Buffon, Hist. Nat., Oiseaux, t. X, p. 153 (1780). Procellaria nivea Gmelin, Sijst. Nat., I, p. 562 (1788); Cassin, U. S. Expl. E.rpecl., p. 415, PI. XLII (1858, latitude sud 6i° ; longitude ouest 104°). Pagodroma nivea Coues, Proc. Ac. Nat. Se., Philad. (1800), p. 100, 171 ; Sharpc, Voy. « Erebus » and « Terror », App., p. :î7, PI. XXXIV (1875) ; Salvin, /'. Z. ■S"., 1878, p. 737 (Barrière de g'Iace); Moseley, A'otes Nat. « Challenger », p. 253 (1870, pack-ice antarctique); Salvin, Cat. B. Brit. Mus., XXV, p. 410 (ISOO); Forbes, Bull. Liverp. Mus., II, p. 48-50(1800); Racovitza, Vie des Animaux antarct., p. 17 (1000); Saunders, Antarctic Manual, p. 220 (1001) ; Borchgre- vink, First on Antarct Cent., p. 64, 210, 223, 220, 230, 230; Bernacchi, S. Polar Régions, p. 226 (1001); Sharpc, /?e;j. « Southern Cro.W).(1002j,p.l48; Anderssoii, /or. r(7. (1005), p. 44 ; Glarke, Ibis (1006), p. 170; Lurinberg-, lue. cit. (1006), p. 80. N° 32 9- Tuée le 30 octobre 1904, plage de l'île Boolh-Wandel. N° 33 o^- Tué le 31 octobre 190i, à l'île Boolh-Wanclel, avait dos parasites sur la tête. N" 35 9, 36 o*. Tués sur la plage de l'île Booth-Wandol, le 31 octobre. L'estomac renfermait des Euphausies et, chez le second, des Poissons. N° 37 juv. cf. Tué au fusil le 31 octobre à l'île Booth-Wandol et quelques spécimens, adultes et jeunes, sans renseignements. Le Pétrel dos Neiges est certainement parmi les Oiseaux les pins élégants des régions circumpolaires, grâce à son plumage tout entier d'un blanc pur contrastant avec la couleur du bec, dos cils et des pattes, qui est noire. L'œil est marron. K.-A. Andersson, do l'Expédition suédoise, l'a trouvé nichant sur les îles Uruguay, Cockburn, Lockyer; Bruce, à l'île Laurio, dans les Orcades du Sud ; l'Expédition de la « Southern Cross «, au c;ip Adare, dans la Terre Victoria, et Vanhôfï'on aux monts Gauss, OISEAUX. 57 dans la Terre Kaiser Wilhelm II. Le D'Andcrsson a signalé ses nids au Cap Dusc, dans l'île Vegas, à l'ouest de la Terre de Graham, où il vit, le 6 et le 1 1 octobre, d'énormes troupes de ces animaux so tenant dans les anfractuosités des flancs abruptes de la montagne. On n'a pas trouvé de nids dans l'île Paulet. Étant donnée la couleur de son plumage, il est certain qu'il doit vivre au milieu des neiges et des glaces ; pourtant il se rencontre aussi dans certaines régions subantarcliques, comme les îles Falkland et la Géorgie du Sud. Von den Steinen a môme trouvé des nids du Pdijochoma nivea sur les hautes montagnes situées dans le voisinage de Royal-Bay. En mai 1 002, l'Expédition suédoise en vit de nombreux spécimens dans la baie de Cumberland (Géorgie du Sud). Aux Orcadcs, Clarke fait remarquer que c'est non seulement un visi- teur d'été, mais encore un hôte d'hiver. Andcrsson a constaté sa présence à l'île Paulet pendant l'hivernage de l'îlxpédilion. Les animaux se tenaient volontiers en petites troupes autour du sommet de l'île, où, pendant la nuit, ils faisaient entendre leurs cris et, à certains moments, ce fut le seul Oiseau qui se montrait sur l'île. Pourtant, pendant les périodes des plus grands froids, entre autres pendant presque tout le mois de juin, ils disparaissaient et revenaient régulièrement quand la température était un peu meilleure. Ils ne quit- tèrent l'île que vers la mi-octobre, pour se rendre probablement dans leurs lieux de reproduction. En hiver, ils se rapprochent des hauts som- mets libres de neige, où ils peuvent se poser et s'abriter; ces conditions leur étaient offertes par les îles Laurie. Sôrling a remarqué qu'ils sont plutôt nombreux loin de la mci". Ils ne visitaient la baie que lorsqu'il y avait des icebergs. Il a constaté alors qu'ils n'attaquent pas les grandes carcasses d'animaux, mais qu'ils pré- fèrent les petits déchets flottants. Dans la baie, on ne les vil (|ii(' durant l'hiver, à partir defla première moitié de juillet. Quand ce Pétrel se trouve sur la glace, il se tient toujours sur les tarses, car il ne peut se poser ou marcher les jambes droites. Il vit de Poissons et de Crustacés. Ces animaux sont très confiants, puisqu'ils se laissent prendi-e à la main Expédition Chaixot. — A. Menecaix. — Oiseaux. <^ 58 OISEAUX. sur leurs nids, comme l'a constaté l'Expédition allemande de 1882-1883, pour les individus observés couvant dans des crevasses de rochers, sur le mont Gauss. L'Expédition Charcot en a vu souvent le long du rivage de l'île Booth-Wandel, mais ils n'y étaient pas fixés. Au mois de janvier 1905, en naviguant à la lisière de la banquise, le long de la Terre de Graham, à peu près sous la latitude du cercle polaire, l'Expédition en aperçut un grand nombre, tournoyant autour des ice- bergs. Quand ce Pétrel plane silencieusement au-dessus des tètes, il paraît plus blanc que neige, et on no dislingue que trois points noirs, ses deux yeux et son bec. Pendant les mois d'août et de septembre, alors que la banquise était disloquée et que les glaçons avaient été en partie emportés, M. Turquet put en voir de nombreux vols passant le long de l'île Booth-Wandel allant du sud au nord. On put en tuer de nom- breux spécimens, et le D' Turquet put voir que, quand ils sont blessés, ils projettent sur leur plumage un liquide huileux d'odeur infecte, qui laisse des taches ineffaçables. Il fut impossible d'observer leurs nids dans les stations visitées par le « Français ». D'après les observations d'Andersson, le Pétrel des Neiges construit son nid, très primitif, sur les avancées de rochers les plus hautes et les plus inaccessibles. Le 7 décembre, dans l'île Uruguay, il trouva des œufs renfermant déjà des embryons assez développés. Jamais il ne vit plus d'un œuf par nid. Quand on s'approche de l'animal, celui-ci ne s'enfuit pas, mais il se retire un peu et lance un liquide huileux sur l'intrus en poussant conti- nuellement des cris perçants. Souvent les parents quittent leur couvée pendant la journée. Ils la nourrissent de Crustacés. D'après Clarke, quand les jeunes ont à peu près le tiers de leur croissance, ils sont couverts d'un duvet long et soyeux, qui cache presque entièrement les plumes naissantes des ailes et de la queue. Ce duvet, gris violacé sur le dos et la poitrine, est plus foncé sur la tête, mais d'un blanc d'ivoire terne sur l'abdomen (1). (1) Clarke, P. Z. S., janvier 1906, PI. III. OISEAUX. 59 14. Macronectes gigantea (Gm.), 1788. Procellaria gifjantea Gmelin, Synt. Aat., I, p. uCO (1788); Gould, D. Aust., Vil, p. 45 (18-48). Oxsifragn gigantea Giglioli, Faun. Vert. Oceano, p. 48 (1870); Sharpe, Phil. Tram., CLXVIII (vol. suppl.), p. 142(1879, Kerguelen); Salvin, P. Z. S., 1878, p. 737; Mosseley, A'otes Nat. « Challenger », p. 134 (1879, Tristan da Cunha), p. 180, 183 (île Crozet), p. 205 (Korguolen), p. 254 (bords du pack-iro) ; BuUer, B. N. ZeaU 2"^ éd., II, p. 235 (1888) ; Salvin, Cnt. B. Brif. Mm., XXV, p. 422 (1890); Racovitza, Vie des Animaux Antarct., p. 18 (1900) ; Borch Grevink, First on Antarctic Conl., p. 04 (19011 ; Saunders, Antarctic Mnnual, p. 231 (1901); Ber- nacchi, .S". Polar Régions, p. 73, 310 (1901). Fiilmarus giganteus Steph., in Shavv's, Gen. Zool., XIII, p. 237 (1826). Procellaria ossifraga Forsler, Descr. Aniin., p. 343 (1844). O^sifraga gigantea Hall., Ibis (1900), p. 25; Sharpe, /fep. « Southern Cross» (1902), p. 153; Clarke, Ibis (1906), p. 172; Lônnberg, 1906, p. 78. Macronectes gigantea, N. Richmond, /'/•. biol. Soc. Wash., 1905, p. 7fi. N° 4 cf. Blanc. N'-S (f. Gris foncé. N° 14 (f. Tué au fusil le 27 avril lOOi, à l'île Booth-Wandel, brun grisâtre ; iris brun ; bec corné ; tarse brun bleuâtre ; envergure, \"\M. N° 16 cf. Gris, bec corné; iris brun; pattes brun noirâtre. 1" sep- tembre i004. N° 17 (f. Tué près du navire, 1" septembre 1904. Couleur générale gris brun; iris brun; bec corné ; pattes brun noirâtre. N°o9 (f. Couleur générale blanche, tué sur Phoque crabior le 12 no- vembre 1904; iris brun-marron ; son estomac renfermait des fragments de viande de Phoque. N° 63 9- Tuée le 14 novembre sur le cadavre d'un Phoque crabier gisant sur la banquise; blanche; iris marron ; bec de couleur cornée; couleur générale blanche avec quelques plumes noires sur le dos et les ailes; estomac vide. N° 70 (f. Blanc avec quelques plumes noires sur le dos et les ailes ; tué sur la banquise le 16 novembre ; iris brun-marron. Une tout enfumée. Deux spécimens sans numéro tout blancs. Quatre spécimens sans numéro, tout enfumés, dont deux à tète grise. 2 Janvier : Grand Pétrel, tué par Basco. Il avait le dos brun clair, la tête blanchâtre, l'iris nettement gris argenté ou blanc argenté. 60 OISEAUX. Ces grands Pétrels étaient assez répandus autour des îles qui bordent les Terres de Danco et de Grahani, mais ils n'avaient pas élu domicile à l'île Bootli-Wandel. Leur plumage est très variable. Les individus fjris sont plus nombreux que les noirs; ce sont les blancs qui sont les plus rares. Ils sont presque aussi grands qu'une Oie. Ce Pétrel est un Oiseau antarctique et même subantarctique, puisque sa région de reproduction embrasse aussi bien les îles Falkland que la Nou- velle-Zélande. Sur la Terre Victoria du Sud et sur la Terre Empereur Guillaume II, il est signalé comme visiteur, mais pas comme nicheur. En été et en automne, il étend donc ses migrations très loin vers le sud. Comme tous les Oiseaux de grande envergure, — quelques-uns mesu- raient plus de 2°", 50, — ces Pétrels ont besoin d'un assez fort élan avant de pouvoir se lancer dans les airs, et ils prennent des allures grotesques avec leurs grandes ailes déployées, leur formidable bec jaune crochu quand ils courent sur leur pattes écartées en compas. On peut les attraper à la course, mais il faut avoir soin d'éviter leurs coups de bec, qui sont dan- gereux. De même lorsqu'ils prennent terre, il leur faut quelque temps pour carguer leurs énormes ailes traînantes. Ils sont très craintifs et ne se laissent pas approcher à plus d'une portée de fusil. D'après Turquet, ils volent le long des rivages à la recherche d'une proie, d'un cadavre de Phoque ou de Balénoptère. Malgré leur voracité, ils paraissent dédaigner ceux des Pingouins et des Cormorans. Ils se précipitent de tous côtés, en volant ou en nageant, sur les carcasses d'animaux morts et grimpent dessus, les membres et les ailes étendus. Ils explorent d'abord avec soin les environs par des évolutions répétées, puis commencent ensuite à déchirer leur proie ; ils s'attaquent d'abord aux yeux, aux muqueuses et aux orifices naturels. Ils ingurgitent la chair avec une grande avidité et s'en gorgent jusqu'à satiété, à tel point qu'ils ne peuvent plus bouger. C'est à ce moment-là qu'on peut les appro- cher. Si plusieurs hommes, armés de bâtons, entourent l'endroit où se trouve le cadavre, ils pourront rétrécir peu à peu le cercle sans inquiéter les Oiseaux, jusqu'au moment où ceux-ci n'ont plus assez d'espace pour OISEAUX. 61 pouvoir s'envoler. On les lue alors racilcmenl à coup de bâtons. En mourant, ils régurgitent une partie des aliments ingérés, humectés d'un liquide huileux d'une odeur infecte. ClarUe admet que, sur un cadavre, ils se gorgent beaucoup moins qu'on ne le dit. Si on les effraye alors, ils vomissent une partie des ali- ments, puis ils se sauvent en étendantles ailes sans les agiter et se rendent à l'eau pour nager; ils agiraient ainsi par habitude, mais non par suite de la difficulté qu'ils éprouveraient à voler. Après un repas, ils vont toujours à l'eau pour se laver la tète. Ils ont quitté l'ile Booth-Wandel vers le 15 mars. Pendant l'hiver, ils émigrent comme les autres Oiseaux, et il est rare d' 9 • 1 ués près du rocher aux Cormorans le V décembre ; l'estomac contenait des débris de jaunes d'oeufs et de coquilles d'oeufs. Deux œufs en bon état et un autre (les mesures sont données plus loin). Ile Booth-Wandel. Les Becs-en-fourreau ou Chioniidés appartiennent uniquement aux régions antarctiques. Ce groupe comprend les deux genres CInonis et Chionarclms^ intéressants par leurs caractères de structure, qui les rap- prochent de divers types, en sorte que les spécificateurs se sont montrés embarrassés pour les classer. Ainsi on les a rangés soit parmi les Galli- nacés, soit parmi les Échassiers et les Palmipèdes ; mais, depuis les travaux de Blainville, de Milne-Edwards et de Kidder, qui ont montré leurs affinités de structure avec les Hsematopus (lluîtriers), il parait cer- tain que leur place naturelle doit être soit dans la famille des Tolanidés, soit à côté dans une famille spéciale. Forster, compagnon de Cook sur la « Resolution » pendant les années 1772-177o, est le premier qui fut frappé des singularités de cet Oiseau et les signala à l'attention des naturalistes, car il le recueillit à l'est de la Terre de Feu, sur les côtes de l'ile des États. Quoy et 70 OISEAUX. Gaymard(in VoyagedeT ^( [Iranien) montrèrent, ainsi que Gray, Sclater et Salvin, qu'il fréquente aussi toutes les îles du détroit de Magellan ; Gould, Gray, Abbott, le signalèrent aux îles Falkland ; Lesson, à l'embouchure de la Plata, et même Sclater put, en 1 893, montrer un spécimen qui avait été tué sur les côtes d'Irlande; puis, en 1894, le même auteur le signale dans les glaces antarctiques, « Antarctic ice », tandis que Tristram, in Ibis, en parle comme habitant 1' « Antarctic Continent ». Les Chionis vivent aussi dans les îles Sandwich australes, comme Eights l'a montré, et dans les îles de la Géorgie du Sud, d'après Pagenstecher et Sôrling. Enfin Ross rapporte que l'un des naturalistes qui l'accompa- gnaient dans son voyage aux mers australes pense que ces animaux nichent sur la terre Louis-Philippe. D'autre part, l'existence d'animaux très voisins de Ch. alba a été prouvée par Hartiaub, Sharpe, Gray pour Kergueleii ; par Hulton pour les îles du Prince-Edouard et l'île Marion, où ils ont une taille et un bec plus faibles que ceux de Kerguelen. Bien que les différences avec Ch. alba soient de peu d'importance, Hartiaub les a désignés par un nom spécial, Ch. minor\ Kidder et Coues sont même allés plus loin en faisant de cette espèce le type d'un nouveau genre Chionarchus , qui comprend en outre une espèce voisine, celle qui habite les îles Crozet [Ch. crozettensis Sharpe). Milne-Edwards admet que ces deux dernières espèces ne sont que des races locales de Ch. alba et que la colonisation de ces îles si éloignées a dû se faire à une époque où il existait des stations inter- médiaires, ou bien grâce aux immenses radeaux d'algues qu'on nomme Kelp, formant des plaines flottantes qui sillonnent ces régions des mers Antarctiques et qui leur ont offert toutes les facilités pour s'irradier vers ces îles lointaines. Les Chionis, quoique pourvus de grandes ailes, s'éloignent peu des rivages sur les bords desquels ils construisent leurs nids. Sôrling, à la Géorgie du Sud, a trouvé trois nids avec chacun un jeune ; mais l'Expé- dition écossaise aux Orcades du Sud a trouvé trois œufs dans les nids, de même que le naturaliste de l'Expédition Charcot à l'île Booth-Wandel. Sur la côte ouest de la baie Cumberland, Sôrling a vu que les nids sont situés à 3 ou 6 mètres de hauteur au-dessus de la haute mer, et placés sous OISEAUX. 71 de larges pierres ou des blocs, dans des éboulis de la hauteur voisine. Ces nids étaient plats, construits avec quelques chaumes de Tussok {Poa cœspilosa) entremêlés d'algues et de mousses. Dedans et autour du nid, il a trouvé de nombreux débris de Poissons, de coquilles et des algues, le tout émettant une forte odeur de putréfaction. La présence du naturaliste près du nid n'effrayait pas les parents; ils couraient, s'approchaient à un demi-mètre de lui pendant qu'il étudiait leur behavior, leur façon de se comporter (fig. 32), Ils n'émettaient que des sons sourds répétés trois fois pour appeler leurs petits. Ils se laissaient même sans trop d'effroi saisir par les mains, en sorte que Sôrling put s'emparer de deux paires et les réduire en captivité en les enfermant dans une cage. La paire qui avait un jeune fut isolée de l'autre. Elle parut se trouver aussi bien qu'aupa- ravant et nourrissait son petit avec du Poisson, de la viande et du pain. Un jour, les deux parents s'enfuirent en laissant le jeune ; mais ils revinrent le même jour pour lui donner à manger, puis le quittèrent délinitivement. Seul, le jeune sut manger, sans difficulté, mais, quand on le donna à l'autre paire, celle-ci l'adopta immédiatement et se mit à lui donner à manger comme à son rejeton propre. Bientôt pourtant ceux-ci s'enfuirent aussi, et le jeune ne vécut que quelques semaines. Peut-être que la nourriture ne lui convenait pas. Ces quatre Oiseaux se prome- naient autour des cages à Poulets et passaient leurs nuits tout auprès. Ils venaient prendre la nourriture aussi familièremont que les Poules. Sur le toit des cages, on avait pratiqué un réduit où ils allaient d'eux- mêmes manger du Poisson. Pendant la journée, ils faisaient de longues courses dans le fjord, mais le soir ils revenaient toujours à leur abri. De temps en temps, ils faisaient une excursion au vaisseau ancré à Boiler Harbour, où on leur donnait de la nourriture. Ils disparurent vers la mi-avril. Dans la Géorgie du Sud, d'après Sôrling, le Chionis se nourrit de Poisson, de Mollusque et d'une algue verte poussant sur les pierres lais- sées à découvert par la marée basse, et qui est probablement une Ulvacée. K.-A. Andersson trouve aussi que ces algues constituent une part importante de leur nourriture, mais qu'ils se repaissent en outre 7-2 OISEAUX. des cadavres de Baleines et de Phoques, autour desquels ils se tienueut toujours très nombreux. Pendant l'été, il n'y en eut que quelques paires qui nichèrent à Cum- berland-Bay ; ils quittèrent à la fin d'avril. Après une absence de quel- ques semaines, ils revinrent bientôtel restèrent alors très nombreux pen- dant tout l'hiver. Jamais Sôrling ne les vit voler des œufs de Manchots et d'autres Oiseaux, et ses observations concordent avec celles de Von den Steinen. Les observations faites par l'Expédition Écossaise aux Orcades diiïèrent complètement de celles-là. Là, le Chiotiis vit aux dépens des rookeries de Manchots, car il s'empare des Oiseaux morts et des œufs cassés. C'est un rusé voleur, et on l'a vu voler un œuf sous un Oiseau couvant-, tout ahuri d'une pareille audace. K.-A. Andersson dit en propres termes : il volait de préférence les œufs, explorait les excréments des Manchots et s'emparait des restes de leur nourriture et de celle des autres Oiseaux. C'est donc un omnivore. 11 est curieux de constater des mœurs si différentes dans deux habitats relativement peu éloignés, et il serait intéressant de contrôler ces asser- tions. Les Chionarc/ms, d'après Hall, ont les mêmes mœurs; ils sont très voraces et mangent volontiers les œufs de Pingouins, de Cormorans et de Goélands. Les Becs-en-fourreau, très curieux, aiment à examiner tous les objets brillants, et on les entendait souvent tambouriner sur les parties bril- lantes de la machine. Pendant les grands froids, il en resta vingt à trente autour de « Scotia Bay ». Ce furent les seules créatures vivantes observées à ces basses températures. Ils se nourrissaient des détritus rejetés du bateau, et l'un d'eux devint si familier qu'il visitait le pont. Pendant l'hiver, les C/i/o?m n'abandonnèrent pas l'Expédition Charcot, et ils vécurent au voisinage de l'installation, en vrais Oiseaux de basse- cour, des restes de la boucherie du bateau; ils mangeaient même dans la main des hommes et trouvaient dans les détritus de la cuisine une abondante nourriture carnée, qui les a engagés à rester aussi longtemps au sud. >-^. OISEAUX. -3 Quand on les étudie, on les voit l'réquemment sauter à cloche-pied, l'un des membres étant replié sous les plumes pour le réchaufler, tandis que l'autre sert à marcher. Ces Becs-en-fourreau vivent en bonne intelligence avec les Pingouins et surtout avec les Cormorans, et M. Charcot les a souvent vus, au moment de la construction des nids, aller chercher dans les algues fraîches rapportées de la mer les divers animaux dont ils se montrent très friands. Les nids observés par Turquet étaient des plus rudimentaires. Ils étaient constitués par de simples dépressions placées dans des fentes de rocherset entourées de quelques plumes. Les œufs, trouvés le lOdécembre, dans les nids de l'îlot du Large, étaient au nombre de deux ou trois, comme chez Chionarclnm. Ils avaient une forme ovoïdo-conique, et ils étaient d'un blanc terne parsemé de taches d'un gris noirâtre ou brun foncé et de forme irrégulière; quelques-unes étaient assez larges. Entre ces taches, on aperçoit un piqueté ou plutôt un réseau brunâtre. Dimensions: H7,iX38,7 millimètres; 54,4X37,1 millimètres; 51 X 36,2 millimètres. Les dimensions indiquées par Clarke sont les suivantes : de o4 à 58 millimètres pour le grand axe et de 37 à 39 millimètres pour le petit axe. Les œufs du Chmiarchm minur, d'après Hall [P. Z. S., 11)00, p. 6) avaient 55 x 38 et 60 X 40 millimètres. Andersson a pu constater qse les nids sont difficiles à découvrir. Il en observa un placé dans une dépression, sous une grosse pierre plate. Il était fait de plumes de Manchots et renfermait un jeune Poussin tiquelé de gris. D'après Hall, le Chionarchus sait mettre ses œufs à l'nbri dans les fissures des rochers ou les vieux nids de Pétrels. Les œufs sont toujours près de l'ouverture et, dès que le parent qui couve entend un bruit, il sort pour voir ce qui se passe au dehors; plus tard, le jeune en fait autant, mais afin de se cacher. C'est ce qui explique pourquoi on trouve tant de nids vides en février à Kerguelen. Quand les jeunes couraient sur le sol uni, ils ressemblaient, d'après Sôrling, à de jeunes Perdrix ou à déjeunes Cailles, tandis que les adultes, Expédition Charcol. — A. Meneoaux. — Oiseaux. '0 74 OISEAUX. dans leurs mouvements, rappelaient les Gallinacés ou parfois les Pigeons; mais, quand ils (Haient tranquilles, ils se tenaient plus droits. Leur posi- tion favorite était celle sur un pied, et ils pouvaient rester dans cette pose pendant des heures. Le jeune, en duvet, est un joli petit Oiseau, d'une couleur bleu cendré, plus brillant et plus bleu en dessus, plus foncé et plus gris en dessous. Le dos porte de longues touffes de duvet jaune brun, tandis que, sur les côtés, les touffes sont en partie de couleur chamois et en partie brun noir. En dessous, le duvet long est plus pâle. La tête est finement mouchetée de jaunâtre et de brun noir. Il existe un espace nu au-dessous de l'œil, et la paupière inférieure est blanche. On voit peu à peu apparaître la cou- leur blanche sur les scapulaires, les grandes couvertures de l'aile et la pointe des rémiges, puis sur les flancs et à la pointe des rectrices. Enfin c'est le dos qui blanchit, puis le ventre et les membres, et enfin la tête et le cou. Le jeune est figuré par Lônnberg (Pi. 1) et par Clarke {P.Z.S., 1906, PI. III). Je ne signalerai que pour mémoire les deux spécimens suivants, rap- portés par l'Expédition, mais qui ne pi'oviennent pas de l'Antarctique. 22. Podiceps americanus Garnot. Podiceps americ. Garnot, Voij. « Coquille », ZooL, I, p. 599(1826, Chili, Brésil). Un spécimen ç^ d'Ushuaia, capitale de la Terre de Feu Argentine. Le Podiceps americanus, qu'on a souvent confondu avec P. Rnllandi Quoy etGaimard, des îles Falkland, appartient au groupe des Pygopodes (Podicipidés). Il est commun au détroit de Magellan et se rencontre depuis le Pérou jusqu'au cap Horn. Les collections du Muséum en ren- ferment des échantillons rapportés duRio-Grande,au Brésil, par G. Saint- îlilaire, en 1822; de Patagonie, par d'Orbigny, en 1831, et de Bolivie en 1834, deïalcahuano, par les naturalistes de la « Zélée » en 1841 ; des OISEAUX. '5 Yungas, par de Castolnau, en i8i— J -'^ 1 LE O é T FI O 1 7- D E W 1 E N C K E 0 ^ ^„ ^'— ^ B 1 s M ^ Pi C K c^' ^--v ,J V 0 o '-" ../ \ ■°'''-' '!-[ So 1 - p j f^ ' ^' 1 K.ogrr, I.Potermann /\ y (t.Lund) (l ^ du MATIN (^ \ and1 , 1 (2000" «ov O •ï- v"^' ••• (^ ^c^ / O ^^' i- , ■lis, ) 0 s*-;; u. , rs Argentins p û; N' 1 R<.okeiy de M papous de rUe Wiencko. 1 .N" i It«n»kefy(lernrl-I-ockroy,pn''Sfle la crique Alice: | p noiiibreux I Itraiiroiip de apous, peu d'Adélie: îi l'ouest. Cormorans. Nids de iMoiiellcs sur nie Clotitlifr et sur un Ilot voisin. N :i HtMilicry (le Pous h In pointe PléncAU, sur l'Ile ^'^ — \ / Bsrthelot n; Hûwï:«;ird, fy^ N» .-. Rnokery d'Adclie sur l'Ile Pétermann. | J N- 1^ Ilookery d'Adt lie sur les Iles Areentine. \ '^ .N« r Rookrry de Cormorans sur un llol. prè* de l'île | Ilerllielol. Maison ot C's éditeurs. Exprililion r.harcol (.1. Meiifijaiir. (fiscati.r.) PI. II. l'iu. 1. Fio. 2. I"ii.. 1. — La iniu' des jeunes. Le sol est jonché de du\eL Fie;. "2. — Ueii.x .Manchots se saluant. Masson et C'*, édileurs. Exin'ililion Chnrcdl 1. M,'ncf/aiir. Oixcdii.r.) l'I. III Fit.. :;, Vu;. I. I'"i(:. 3. — Aiiiillr iKuirrissMiil mim |ii'lil. l'iu. 4. — l m- i(MiN,.|v ft une ^'iinicn,. ^{^. joimcs. Mussuii il Ci', édileui'i. % I*ZN|i(''(lilion Cliaiiol .1. Mcnef/aii.r. Oiseriii.r.) PI. IV >;iâflL * *.. 1 FiG. •V 'tv-*^ KiG. 5. Fio. Cl. 1'],.. i;. Appariemciil vue ,\f proiil ,•! sur ,!,• il,, s). In Mancliot debout derrièri^ son iiiil cl son œuf. Massoii el C'e, iSditcuis. Iv\|>i''ilili(iii rii.'irrot I, Mcnrf/im.r. Oiscati.r.) PI. \' ■!(.. .S. 5" » MU-'* '' 1 -, -V m-^^ ^ ^- *t^-% Fn; iî<>< tkrry (le M;iri( ■llols l.M| loii-;. Fi.; ;.?>,- \ n Mîun'liot l.r ;iy:nil Fi,, ,. '.i, -- MlllirhoU l-i ii^iiiil une ;isi' iMlsioii M,. >t'un c l C' r.lil curs. k;. Fm.. il. '\|irililiim ('li.'il'Cdl .!. Mciii'f/dll.r. Oisfilll.r.) ri. \- Kl,; m 'iXiî.,.^ a l'ic. Fi,,. Vu.. I-K.. in,. 11. 1 1. 1. I M,-iiiili(iN se rriidaiil ximIc. • ^;iiii|iriiienl siii' la irlni'O. Mancliol cil l'iiilc. .Xdiilli'S âgés i^Mi'daiil dos juuiK'S. 'm|ii)iis romani ,\'i>ir fig. 7). Massuii et C" , ciliteurs. Expédition CInircol (A. Mcitff/mi.r. ()isi'. Fu.. 21. .M;uicli.)ls i);ilioiis. l'i,;. -'T. _ Tnc qiiprnllo ;'i ]if(ipos (ii- railloiix. .Manchots se pn-cipilaiil ilans ICaii. l'ii,. •>. — |i,'|hM iVuwr pirrir pour le nid. Xiils dp >raii(dinls. Fi,;. 2"J. — Drl'ciisc du nid cl des .l'iils. Masson et VM, ('(lilours. ExjK'ililioii (iliarcoL i.l. Mencijau.r. (JiaeaiiJC. PI. X Fi... :;ii FiG. 31. Vk.. :i-i. I'k;. .'iO. — Rookcry dos Coi-moran*. I'k;. .'!1. — Coniiorans ap|)'■ — Mils cl JiMiiics (!()rriiiii-;ins. Î8. — ConiiorMii rcMMKinl ihc/ lui. !'.•. — Un iciil'ili' Cormoran. .MiisM.ii l't C" , éJileui's. Kx|HMlilioii Cliarcol .1. Meiietjfiii.v. Oiseaii.r.) PI. Mil. /'^m ^ - o 5 i5 — t/: c - OISEAUX ET MAMMIFERES (EMBRYONS ET FOETUS) Par R. ANTHONY Lorsque l'on parcourt les comptes rendus scientifiques des expéditions qui, pendant ces dernières années, ont exploré les mers antarctiques, on constate que l'attention des naturalistes qui se sont occupés de recueillir des Mammifères et dos Oiseaux n'a guère été attirée que par les formes adultes, et, si l'on voit, de temps en temps, des descriptions et des repré- sentations de formes ye?<«e.s, les formes embryonnaires Qi foetales semblent avoir été totalement négligées. On ne saurait trop le regretter, car l'im- portance qu'il y aurait, tant au point de vue de la Zoologie pure qu'.à celui de l'Anatomie générale, à bien connaître les formes embryonnaires de ces animaux si particuliers que sont les Aptenodijtes et les Pijgoscelis, par exemple, n'échappe à personne. La Mission Charcot, par le fait d'une heureuse exception, a rapporté au Muséum d'Histoire naturelle une petite collection, trop peu considé- rable encore, d'embryons et de foetus d'Oiseaux et de Mammifères appartenant aux espèces suivantes (1) : (1) Les caractt'ics dos formos embryonnaires ou même foetales étant ntVessaiicment très différents de ceux de l'adulte, il m"a été souvent tirs difiirile, po\ir ne pas dire impossible, de déterminei' directement les matériaux qui m'ont été soumis. .l'indiquerai donr, pour charunc des pièces de la collection, la façon dont je suis parvenu à l'identifier, ainsi ([iic le degré de probabilité que j'attache à ma détermination. Ayant fait reproduire pholographiquement et à des échelles très e.xactes tous mes embryons et foetus, je juge inutile de muKiplier les mesures; des mensurations effectuées .sur des tissus aussi délicats, plus ou moins déformés par un séjour prolongé dans des liquides conservateurs, ne pouriaient d'ailleurs donner que des résultats illusoires. Expédition C/uncol. — R. .\nthiinv. — Oiseaux et .Mammifères. I 2 OISEAUX ET MAMMIFERES. 1° Pygoscelis papua (1) Forster. Le Manchot Pnpou Sonnerai. Sonnerai, Voyage à la lYouref/e-Guinée, p. ISl, el PI. CXV, 1770. Aptenodijies papua Forster. Forslur, IS'ov. Comm. GOtting., t. III, p. 140, el PI. III, 1781. Papuar} Pinguin Latham. Latham, Gen. Sgn., III, n" 2, p. 505, 1785. Apterodita papux Scop. Scop., Del. Fia?', et Faun. Jnsul., II, p. 01, 1780. Aptenodyta papua Forster. Bonnat, Enc. Métli., I, p. 07, Pi. XVII, fig-. 3, 1790. Chrysocoma papua Forster. Slepliens in Shaw's, Gen. Zoo/., XIII, p. 5*J, ISiô. Pygosceli.s papua Forslev. Wag-ler, /s/.ç, 18:i2, l. XI, f>. 403. — taeniata Peale. R.-B. Sharpe Voy. « Erebus » and « Terror », Bd. I, App., p. 3l,18'i4. Eudyptes papua Forster. G.-R. Gray, Gen. of Birds, 1840, t. III, p. 041. Aptenodytes taeniata Peale. Peale, Un. st. Expl. Expéd., p. 204, 1848. Pygoscelis Wagleri Ph.-L. Sclater. Ph.-L. Sclater, Cat.of the Birds of the Falhiand Islands, Procecd. zool. Soc. London, 1300, p. 890, n° 40. Spheniscus papua Forster. H. Schlegel, Mus. des Pays-Bas, 1807. l'rinatores, p. 5. Pygoscelis papuensis Van der Hoeven. Van der Hoeven (Gray, Handlist, Bd. III p. 98, 1871J. Pygosceles taeniatus Goues. Coues, Proceed. Acad. Phi/., 1872, p. 195. — taeniatus Ph.-L. Sclater et 0. Salvin. Ph.-L. Sclater et G. Salvin, A'oin. Av. neotrop., 1873, p. 151. Matériel l'apporté par la Mission : Un œuf contenant un embryon prêt à éclore. Cet oeuf, remis au laboratoire de Mamma- log-ie, m'a été communiqué par M. le professeur Trouessart. Numéro du Catalogue de la Mission : N° 762. Numéro d'entrée au laboratoire de Mammalogie : N" 1907-410. Extrait du Registre de 31. Turquet., naturaliste de la Mission : OEuf de Ping-ouin Papou recueilli dans un nid à l'île Wiencke, le 29 décembre 1904. Nota. — Nous rappelons, pour mémoire, que la Mission a rapporté éga- lement un jeune poussin en duvet de Pijgoscelis papua Forster (n° 1 907- i09), qui a été déterminé et catalogué au laboratoire de Mammalogie. Il n'en sera question ici qu'à titre de terme de comparaison. Quand l'œuf en question de Pygoscelis papua Forster m'a été commu- niqué, il était en partie brisé, et, à travers la solution de continuité de sa coquille, on apercevait le corps d'un embryon très avancé en âge et qui, (1) .Je n'ai pas cru devoir donnor la bibliographie zoologique complète des espèces citées au cours de ce travail, me bornant simplement à indiquer les références de chacun des noms spécifiques différents appliqués au même animal (Voy. Catal. Br. Mus. Birds pour le reste de la bibliographie). OISEAUX ET MAiMMIFÈRES. 3 sans doute eût éclos sous peu. Cette solution de continuité paraissait être, par le fait même de son siège, d'origine accidentelle et non provoquée par le jeune poussin au moment de sa sortie. Avec la permission de M. Trouessart, j'ai achevé de briser la coquille de cet œuf. En compa- rant le jeune Oiseau qu'il contenait, d'une part, au poussin en duvet (n° 1907-409) que M. Trouessart a bien voulu me permettre d'examineir aussi comme terme de comparaison, et, d'autre part, aux formes adultes de cette même espèce, je suis arrivé à en faire une détermination que je considère comme certaine et que corroborent d'ailleurs les caractères de l'œuf et les renseignements fournis par le naturaliste de la Mission. Une fois extrait de l'œuf, le jeune Pijgnscelis apparut replié sur lui- même, la tête rabattue sur l'abdomen ; le bec, tourné à droite, était recouvert de l'aileron droit, et les pattes ramenées en haut et en avant; l'une d'elles était en contact avec la région antéro-supérieure de latête(Voy. Pl.I,fig. II). Une des questions les plus intéressantes qu'on pourrait essayer d'exami- ner à propos de ce jeune poussin est celle des différences de coloration (le ]dumage que présentent, suivant l'âge, les individus de cette espèce. Le plumage du Pi/goscelis papKa Forster adulte est, on le sait, coloré de la façon suivante : d'une façon générale, les parties dorsales sont gris noir foncé et les parties ventrales blanches; la gorge, la région antérieure du cou, la queue, les ailerons sur leur face extérieure sont noirs, comme le dos; ces ailerons, de plus, sont également, sur leur face extérieure, bordés d'un liséré blanc; à leur face intérieure, où ils sont colorés en blanc comme leventreetprésentent une tache noire terminale. La tête, enfin, est traver- sée d'une bande blanche allant d'un œil à l'autre et passant sur le vertex. Le corps du jeune Pijgoscplis (n° 1907-410) était couvert d'un court duvet. On peut dire que, semblablement à ce qui existe chez l'adulte, ce duvet était, d'une façon générale, plus foncé sur les régions dorsales que sur les régions ventrales; toutefois, alors que chez l'adulte le dos est franchement noir, la teinte noire du duvet n'était réalisée ici que dans les régions supérieures et dorsales de la tête; elle s'atténuait sur le cou, pour passer au gris sur le dos, lequel devenait de plus en plus clair à me- 4 OISEAUX ET MAMMIFÈRES. sure qu'on s'éloiynait des régions médianes. Au voisinage du coccyx, elle était même devenue tellement claire qu'elle se confondait insensiblement avec celle de l'abdomen. D'autre part, la région abdominale ne présentait pas la teinte blanche éclatante de l'adulte, mais était plutôt blanc grisâtre. D'une façon générale, par conséquent, les parties qui sont noires chez l'adulte paraissaient légèrement atténuées de blanc, et les parties blanches légèrement mélangées de noir, de telle sorte que le tout affectait une cou- leur grise qui aurait pu paraître, à première vue, presque uniforme, mais qui, à un examen plus attentif, laissait voir avec une grande netteté la limite du dos foncé et du ventre plus clair. On n'observait pas sur la tète la bande blanche qui, chez l'adulte, la traverse allant d'un œil à l'autre. . De même la tache noire caractéristique siégeant à l'extrémité de l'ai- leron (face intérieure) était à peine visible ; par contre, le liséré blanc qui le borde existait, quoique moins nettement limité que chez l'adulte, particularité en rapport avec l'atténuation déjà signalée de la couleur noire de la face extérieure de ces ailerons. Signalons enfm que les joues, la gorge et la région antérieure du cou étaient d'une nuance simplement grise, au lieu d'être nettement noires, comme chez l'adulte ; la limite de la coloration foncée semblait, en cette région, passer un peu au-dessus de l'œil. Si on compare la livrée de ce poussin non encore sorti de l'œuf à celle de l'autre poussin (n° 1907-409) (1) né, depuis un certain nombre dejours, on constate d'assez notables différences. Notons d'abord que la couleur foncée du dos de ce dernier avait passé du gris au noir franc ; seule la face extérieure des ailerons était encore restée d'une couleur grisâtre bien qu'affectant une nuance beaucoup plus foncée que chez le premier poussin ; le liséré blanc marginal de ces ailerons était plus nettement accusé; la tache noire de leurextrémitéintérieureétait aussi maintenant bien visible. Quant à l'abdomen, sa couleur s'était sensiblement éclaircie. Les joues, la gorgeetla région antérieure du cou, noires, comme on sait, chez l'adulte, étaient encore de couleur grise, et la limite des parties abdominales claires (1) La longueur de l'aileron depuis le coude jusqu'à l'extrémité était, chez le premier poussin (n° 1907-410), de 21 millimètres et, chez le second (n° 1907-409), de 43 millimètres. OISEAUX ET MAMMIFÈRES. 5 et des parties dorsales fonct^os suivait le même trajet que chez le poussin précédent, c'est-à-dire qu'elle passait au-dessous de l'œil, au niveau des épaules, puis, se dirigeant obliquement du côté du genou, croisaitia jambe pour atteindre finalement l'extrémité du coccyx. Cette limite avait surtout acquis beaucoup de netteté dans les régions postérieures, au niveau de la jambe. Cette description montre nettement que, chez ce deuxième poussin, la livrée de l'adulte est manifestement en voie de s'établir. Il est intéressant de comparer cette livrée du jeune Pygoscetis papua Forster avec celle du jeune Pijgoscelis Adeliae Homb. et Jacq. Au point de vue de la coloration du plumage, le Pingouin de la Terre Adélie adulte diffère surtout du Pingouin Papou par l'absence de la bande blanche interoculaire et du liséré blanc bordant les ailerons. La limite de la région foncée et de la région claire suit à peu près le même trajet dans les deux espèces. Dans le Report sur les Collections d'Histoire naturelle rapportées par le « Southern Cross » des mers antarctiques, M. R.-B. Sharpe (1) représente (PI. VIII) de très jeunes poussins en duvet de Pygoscelifi Adeliae Homb. et .lacq. D'autre part, dans les comptes rendus des résultats scientifiques de \a.National Antarctic Expédition (« Discovery »), M. E.-A. Wilson (2) représente et décrit (p. ol) les très intéressantes modifica- tions qui se produisent dans le plumage du Pingouin de la Terre Adélie, depuis sa sortie de l'œuf jusqu'à l'âge adulte. Au début, le jeune animal serait uniformément gris, ayant seulement la tête et le cou noir. Au cours de la première année, il prendrait une livrée très semblable à celle de l'adulte, mais en différant cependant par ce fait que la gorge est blanche au lieu d'être noire, la limite du blanc et du noir passant au-dessous de l'œil. Ce ne serait que plus tard que la gorge et les joues deviendraient noires à leur tour. Les choses se passent donc à peu près comme chez le Pingouin Papou, avec toutefois cette différence très importante, c'est que, chez ce dernier, (1) R.-B. SiiARPE, Awes, in Rep.on the Coll. of. H. H. mode in the antarctic régions during the Voy. »r the « Southern Crnss », 1902. (2) E.-A. Wilson, Aves, in National Antarclic Exiicl. Nut. Uist., 1007. 6 OISEAUX ET MAMMIFÈRES. la démarcation du dos noir et du ventre blanc est beaucoup plus précoce, puisqu'elle existe déjà dans l'œuf et est admirable de netteté chez un poussin de quelques jours. Une autre question très importante à étudier sur les Pygoscelis serait aussi celle du développement topographique de leurs bulbes pennigères, c'est-à-dire de l'établissement de leur ptérylosis. Le matériel que j'ai eu entre les mains n'était malheureusement pas suffisant pour me permettre de le faire aussi complètement que je l'aurais désiré. Les Sphenisciflae, c'est-à-dire les Oiseaux appartenant aux genres Spheniscus, Aptenocbjtes, Eialyptes^ Pygoscelis, présentent, on le sait, une particularité remarquable parmi les Garinates : leur ptérylosis, comme celui des Ratites, est continu, c'est-à-dire que leurs plumes, au lieu de s'insérer en certaines régions limi- tées symétriques de part et d'autre du corps et sépa- rées par des aptériums ou espaces nus, constituent un revêtement presque absolument continu. Le seul aptérium des Spheniscidae est constitué par une étroite bande commençant un peu en avant du cloaque et s'é- tendant jusqu'au milieu de l'abdomen à peu près. Il serait, on le conçoit, extrêmement important, au point de vue de la connaissance de la phylogénie des Sphenicidae, de suivre, au cours de leur développement Fig. 1 . — Schéma de l'ap- ....... lérium abdominal mé- embryonnaire, la distribution topographique destuber- dian. — A, section du • i i i i pédicule ombilical ; B, culcs sur Icsquels uaisseut plus tard les plumes, et cloaque; C, coccyx. de voir si, à un certam moment, ces tubercules ne constituent pas un ptérylosis discontinu avec aptériums intercalaires. Le poussin extrait de l'œuf que j'ai examiné présentait déjà un ptérylosis très semblable à celui de l'adulte ; son aptérium abdominal était cependant particulièrement développé, affectant dans sa partie inférieure une forme élargie autour de l'insertion du pédoncule ombilical (dispo- sition qui doit être commune à tous les poussins, quelle que soit l'espèce à laquelle ils appartiennent). Chez l'adulte, où toute trace de ce dernier a disparu, le ptérylosis abdominal médian est linéaire. OISEAUX ET MAMMIFÈRES. 7 L'étude complète et raisonnéc du développement topogniphique du ptérylosis des Splmiiscidne nécessiterait un grand nombre d'embryons de tout âge, appartenant aux diflerentes espèces de ces animaux. 2° Oceanites oceanicus 0. Salvin. Procellaria pelagica Wils. Wils., Ann. orn., III, p. 90, PI. LX, lig. (i, 1813. — oceanica Kuhl. Kiihl., Beitr. sooi., p. 130, PI. X, liy. i, 1820, ex Banks. Icon., n" 12. — WUsoni. Ch.-L. Bpt. Ch.-L. Bonaparte, Journ. Acad. l'Iiil., t. 111, paît II, p. 231, PI. IX, flg. 2, 1823. W'ihnn's Stormy Pclrel Nuit. Nutt., Man. Woler-Bin/s, p. 322, 183i. Itceanilox Wihnni Ch.-L. Bpt. Keys. et Bios., Wirb. Eiir., p. xliii, p. 322, 1834. Tlialassiflroma océanien Kuhl. Schinz, Eur. Fnun., p. 397, et Pi. I, 1840. Wihon's Pe/rel Yarr. Yarr., Brit. Birds, III, p. 510, 1843. Thalasaidroma misoni Ch.-L. Bpt. J.-J. Audubon, B. Americ, PI. CCCCLX, et éd. in-8, t. VIII, p. 100, PI. CCCCLX, 1844. Ocennites oceanica Kuhl. Ch.-L. Bonaparte, C. B. Acad. de.i Se, t. XLII. p. 769, 1896. — océaniens 0. Salvin. 0. Salvin, Report on Coll. made during- the Voyage of « H. M. S. Challenger >., Procellariidae {Procecd. roo/. Soc. London, 1878, p. 735), et Voyage of li C/ia/lenyer ", Procellariidae, p. 141, n° 1. Matériel rapporté par ta l)tissio/i : 1° Un embryon recueilli dans l'œuf; 2° Un embryon recueilli dans l'œuf. Niiméro.s du Catalofjue df la .Mis.sio/i : l" N°752; 2' N°C5C. Numéros d entrée au lahorutuire : \" Au laboratoire d'Anatomie comparée: n° 1905-144; 2 ' Au laboratoire de Mammalogie : n" 1907-405. Extraits du lieyistre de M. 7\irquet, iiaturaliste de la Mission : 1° Embryon (VOreanitcsoreanicux 0. Salvin, Ir'ouvé dans un œuf recueilli sur les rochers de l'ile Wandel, en novembre lOO'i ; 2° Néant. Ces embryons devaient être déjà d'un certain âge, si l'on en juge par leur aspect extérieur et la coloration de leur bec. Ils étaient couverts d'un duvet formé de rares éléments longs, noirs et raides, disposés suivant un ptérylosis, dont le mauvais état de conservation des tissus ne m'a pas permis d'étudier la topographie. Les œufs à' Oceanites oceanicus 0. Salvin qui contenaient ces embryons n'ont pas été recueillis, comme on l'a vu, au nid, mais bien trouvés sur 8 OISEAUX ET MAMMIFÈHES. des rochers où ils avaient pu être amenés par des causes accidentelles. Leur identification ne peut donc être absolument certaine, bien que les jeunes embryons qu'ils contenaient aient nettement présenté au bec et aux pattes les caractères du genre et de l'espèce. 3° Phalacrocorax atriceps King-. Phalacrocorax ntriceps King. King, Zool. Joiirn., IV, p. 102, 182S. — imper ialis King. King, Proceed. Zool. Soc, 1831, jj. 30. — carunculatus Gould. Gould, Zool. Voij. ^'Beugle », PI. III, Birds, p. 145, 1841. — cirrhatus Gray. Gray, List, of B.. Pi. III, p. 186, 1844. Graculus cirrhatus Gray. Gray, Ilist. Chili Zool., I, p. 490, 1847. I/ypoleuciis cirrhati/s Gray. Ch.-L. Bonaparte, Consp. Av., \). 174, 1855. Urile carunculatus Gh.-L. Bpt. Cli.-L. Bonaparte, Consp. Av., p. 170, 1855. Graculus e/eiyans Philippi. Philippi, Wiegen. Arch., XXIV, ]). 305, 1858. — carunculatus Sctilegei. Schlegel, Mus. Pays-Bas, VI, Pelec, p. 20, 1863. Ilalieus atriceps Burin. Burmeister, Ann. Mus. Nac. Buenos-Aijres, III, p. 249, 1888. Matériel rapporté par la Mission : 1° Deux œufs contenant des embryons assez jeunes ; 2° Deux œufs prêts ù éclore et dont la coquille avait déjà été brisée parle jeune poussin. Numéros du Catalogue de la Mission : 1«N°717; 2° N" 734. Numéros d'entrée au laJioratoire de Mammalotjie : 1° N° 1909-408; 2° N" 1907-407. Extraits du Registre de M. Turquet., naturaliste de la Mission : 1° OEufs de f/j«/acrocorax recueillis le 11 décembre 1904 à File Wandel, dans un nid ; 2° OEufs de Phalacrocorax recueillis dans un nid. Les deux plus jeunes embryons dont l'identification directe n'a pu être faite, mais qui ont été recueillis par le naturaliste de la Mission dans un nid même de Phalacrocorax atriceps King, présentaient d'ailleurs très nettement les caractères distinctifs des Cormorans (forme du bec, métatarses courts, hallux réuni par une palmature au deuxième doigt). Ils devaient, autant qu'on en peut juger, avoir une dizaine de jours environ d'incubation. Leur corps était absolument glabre, mais couvert de tubercules marquant la place des plumes futures ; l'agencement de ces OISEAUX ET MAMMIFÈRES. 9 tubercules, ou plérylosis, aiFectait une disposition à peu près continue, présentant simplement : 1" un aptérium abdominal linéaire en haut et s'élargissant en bas au niveau du pédoncule ombilical, qu'il entou- rait ; 2° un second aptérium au niveau de la gorge et de la région antéro-supérieure du cou ; 3° un dernier espace sans tubercule, enfin, au niveau du bord antérieur des ailes. Tous ces tubercules n'étaient pas aussi accusés les uns que les autres : ceux courespondant aux rémiges, par exemple, ainsi que ceux correspondant aux rectrices de la queue (six de chaque côté) étaient de beaucoup les plus marqués. Les deux embryons suivants, également recueillis dans des nids et qui présentaient aussi très nettement les caractères an Phalacrocorax^ étaient beaucoup plus avancés en âge ; lorsque les œufs qui les contenaient m'ont été soumis, ils présentaient chacun une solution de continuité, par laquelle on apercevait l'extrémité du bec de l'embryon, lequel, arrivé au terme de son développement, avait commencé à briser la coquille. Avec la permission de M. Trouessart, j'ai pratiqué l'extraction d'un des jeunes Cormorans, le second œuf ayant été conservé tel quel pour les Collections. Ce jeune poussin était ramassé sur lui-même et dans la position repré- sentée sur la figure V de la Planche I, position absolument identique à celle du jeune Pygoscelis décrit plus haut. Son corps était glabre et couvert de tubercules marquant la place de plumes futures et qui affectaient une disposition identique à celle observée sur les deux embryons précédents. A titre de comparaison, j'ai examiné un autre jeune Cormoran de la môme espèce (même numéro), né depuis quelques heures seulement, et à peine, ainsi qu'on en peut juger par les traces encore existantes de son pédicule ombilical. Il était à peu près semblable au poussin précédent (Voy. fig. VI, PI. I). Il n'y a pas lieu d'y insister. 4» Ghionis alba Gmelin. White shcalh bill. Latham. Lalham, Gen. Si/n., III, part. I, p. 208, PI. LXXXIX, 1785. Expédilion Charcol. — R. Anthony. — Oiscaui et Mammifùres. 2 10 OISEAUX ET MAMMIFERES. Vaginalis alba Gmelin. Gmelin, Sijsl. A'at., 1788, t. I, p. 705. — r/iionis Latham. Latham, /7id. Cern., 171)0, II, p. 774. Caleoramp/tus 7ih'alis Dumont. Uumont, JJict. Se. nat., X, p. 36, 1818. Chionis alba Gmelin. Quoy et Gaimard, Voy. « Uranie », p. 131, PI. XXXV, 1824. — Forsteri Stephens, in Shaw's, Gen. Zonf., XII, p. 281, 1824. — vaginalis Temm. Temminck. PI. Col., V, PI. DIX, 1830. — nccrophaya Vieill. Vieill., Gai. Ois., II, p. 146, PI. GGLVIII, 1834. — lactea Porster. Forster, Descr. Aniin., p. 330, et Icun. inécL, \). 125, 1844. Matériel rapporté par la Missioti : Un œuf contenant un embryon très jeune. JSuméro du Catalogue de la Mission : N° 755. Numéro d'entrée au laboratoire d'Anatomie comparée : N» 1905-139. Extrait du Registre de M. Turquet., naturaliste de la Mission : Embryon trouvé dans un œuf de Chionis alba, recueilli au nid sur un îlot au voisinage de l'île Wandel, le 19 décembre 1904. Cet embryon était trop jeune pour qu'on puisse essayer d'y reconnaître des caractères spécifiques ou même génériques quelconques. On est donc obligé de s'en tenir purement et simplement à l'affirmation de M. Turquet, qui l'aurait extrait d'un œuf recueilli da72s un nid àe Chionis alba Gmelin. Autant qu'on en peut juger, cet embryon pouvait paraître âgé de six à sept jours au plus. Son corps, de couleur gris clair, était abso- lument dépourvu de bulbes pennigères. De chaque côté de la queue, néan- moins, on devinait en léger bourrelet, commencement du développement des tubercules correspondant aux rectrices de la queue. Les extrémités étaient en palettes et n'ébauchaient pas encore la forme d'ailes ou de pattes. 5° Larus dominicanus Licht. Black-backed-gull (part) Lath. Latham, Gen. Sijn., PI. III, n" 2, p. 372, 1785. Larus marinus Lath. Latham, Ind. Orn., II, p. 814, 1790. — dominicanus Licht. Licht., Verz. d. Doubl., p. 82, 1823. — fuscus King-. King-, Zool. Joiirn., IV, p. 103, 1828-1829, et Voy. « Advent » and « Beagle », I, p. 541, 1839. — flavipes (part) Temm. Temminck, Man.d'Orn., 2" édit., 4= part., p. 472, 1842. — littoreus Forster. Forster, Descript. Anim., 1844, p. 40. — antipodus Gray. Gray, Catal. Ansev. British Muséum, 1844, p. 169. Dominicanus antipodus, D. pelagicus, D. vetula, D. vociferus, D. antipodum, D. Ver- reauxi, D.Fritzei Bruch.Bruch,Journ.ofOrnilh., 1853, p. 100, et 1855, p. 281. — antipodum Ch.-L. Bpt. Ch.-L. Bonaparte, Naiim., p. 211, 1854. OISEAUX ET MAMMIFÈRES. 11 Dominicanus Verreauxi Ch.-L. Bpf. Ch.-L. Bonaparte, ;Vrt«wi., p. 211, 1854, et Rev. et Marj. £0oL, VII, p. li'>, 1855. — velula Ch.-L. Bpt. Ch.-L. Bonaparte, A'auin., p. 211, 1854. — pela ;/icus Ch.-L. Bpt. Ch.-L. Bonaparte, Naum., p. 211, 1855. — Fritsci, D. vetufa, D. Acarae, D. pi'lafficus, D. nntipndum Ch.-L. Bpt. Ch.-L. Bonaparte, C. R. Acad. des Se, t. XLII, p. 770, lS.-)(;, et Cunsp. Av., 1857, t. II, p. 214. Clupeilarus Verreauxi Ch.-L. Bpt. Ch.-L. Bonaparte, C. R. Acad. des Se., t. XLII, p. 770, 1856. — antipodumCh.-L. Bpt. Ch.-L. Bonaparte, C. R. Acad. des Se. t. XLII, p. 770, I85G. Larus voci férus Burm. Burmeister, Th. liras., III, p. 448, 1S5(), olReise, La Plala, II, p. 518, 1801. Lest ris antareticus Ellmann. Elhnann , Zool., p. 747, 1861. — fuscus Ellmann. Id. Larus paci ficus Layard. Layard, Ibis, p. 245, 186:3. — nzarae Pelz. Pelz., Orn. Bras., p. 323 et 401, 1871, et Verh. z. b. Ges. Wien., p. 100, 1873. — Fritzei Salvad. Salvad., Ucc. Rom., p. 371, 1874. — douiinicanus H.Saunders. II. Saunders, Re- ports on Coll. of Biids made during- the voyag-e of « H. M. S. Challenger «, n° 5, Laridae [Proceed. roof. Soc. London, 1877, p. 799, 11° 14). — Voy. of the " Challenger », Reports on Birds, Laridae, p. 130, n" 14. Gabiota maijor Azara. Azara, Apunt., III, p. 338, 1882. Dominicanus litoreus Heine et Reichenberg. Heine et Reichenberg, iXouv. Mus. Ifein, p. 357, 1890. Matériel rapporté par la Missmi : Un embryon de Larus dominicanus Licht, extrait f'S- - — Schéma du piéryiosis. — / et ,, , ///.///e)y/(»(; spinaux; //, p/ei'v/f; scapulo- a un œut. Iiuiii.-iai: IV. pteri/la fémoral ; V, bulbes »T , 7/^J; 17 tr- ■ |ioniiit,'ért's des douze rectrices de la Jywnero du Latalogue de la Mission : 'luoue. N° 687. Numéro d'entrée au laboratoire dWnatomie comparée : N" 1905-143. Extrait du Registre de M. Turquet., naturaliste de la Mission : OEuf de Larus dominicanus Licht., recueilli au nid, le 10 décembre 1904, à l'île Wandel. Le fait que M. Turquet a recueilli dans un nid même de Larus domi- nicanus Licht. l'œuf qui contient l'embryon dont il est question ici nous 12 OISEAUX ET MAMMIFÈRES. permet d'être sûr de l'identification de ce dernier, bien que nous n'ayons pu, en raison du trop jeune âge de l'animal, constater la présence des caractères spécifiques. Mentionnons seulement la forme spéciale de la patte et du bec, la palmature des doigts 2, 3 et 4, et la liberté de l'hallux, qui, en dehors de tous autres, nous auraient déjà fait songer à un repré- sentant de la famille des Laridae. L'embryon paraissait relativement peu avancé dans son développe- ment ; autant qu'on en peut juger, il ne devait pas avoir plus de sept à huit jours d'incubation. La peau était glabre, et les bulbes pennigères qu'elle présentait étaient localisés en certaines régions particulières, de telle sorte que, à l'âge où je l'ai observé, le ptérylosis de cet embryon était constitué : 1° de quatre ptérylosis spinaux disposés symétriquement, comme le montre la figure; 2° de deux ptérylosis scapulo-huméraux très marqués; 3° de deux ptérylosis fémoraux ; 4° et enfin de deux ptérylosis coccygiens marquant la place des rectrices de la queue ; ils étaient constitués chacun de deux rangées de bulbes pennigères : une première rangée antérieure compre- nant six gros bulbes; une seconde rangée postérieure en comprenant six autres plus petits. Les autres ptérylosis n'avaient pas encore fait leur apparition. 6° Sterna hirundinacea Lesson. Sterna Jiirundo Garnot. Garnot, Ann. Se. Nat., 182G, t. VII, p. 55. — hirundinacea hesson. Lesson, Traité d'Ornith., i831, p. 621. Bydrocecropis hirundinacea Boie. Boie, Isis, p. 179, 1844. Sterna nntarctica Peale. Peale, Un. St. Expl. Exped., 1848, p. 280 [nec Less.). — Wilsoni Burm. Burmeister, Sijst. Ueb., III, p. 451, 1856. — meridiona/is Cassin. Cassin, Un. St. Expl. Exped., 1858, p. 385. — Cassini Ph.'L. Sclater. Ph.-L. Sclater, Cat. ofthe Birds of the Palkland Islands {Proc. cool. Sor. London, 1860, p. 391, n" 55). — acutirostris Tsch. Tsch., Wiegm. Arch., CLXXXIV, PI. I, p. 389, et Eaun. Per. Av., p. 53, 306. Matériel rapporté par la Mission : Un embryon de Sterna hirundinacea Lesson. Numéro du catalogue de la Mission : N» 745. Numéro d'entrée au laboratoire d'Anatomie comparée : N» 1905-144. OISEAUX ET MAMMIFÈRES. 13 Extrait (lu Regifitre de M. Turquet^ naturaliste de In Mission : OEuf de Sterna hirundinacea Lesson contenant un embryon, recueilli au nid, le 17 décembre 1904, à l'île Wandel. Cet embryon paraissait être à un stade de développement sensiblement peu moins avancé que le précédent. Ses téguments, absolument lisses, étaient complètement dépourvus de bulbes pennigères, sauf au coccyx, où l'on voyait à peine indiqués les six gros bulbes des rectrices de la queue. Aucune identification directe de cet embyron n'était possible. J'ai donc dû m'en tenir à l'affirmation de M. Turquet, qui dit avoir recueilli au nid même l'œuf qui le contenait. 7° Foetus de Pinnipèdes (i). La Mission Charcot a rapporté au laboratoire d'Anatomie comparée trois foetus de Pinnipèdes de différents âges. Nous n'avons eu sur ces foetus aucun renseignement ; c'est pourquoi j'ai cru préférable de ne pas en donner ici de détermination précise, me bornant, pour deux d'entre eux (le premier étant trop jeune pour se prêter à quelque identification que ce fût), à une approximation à laquelle je suis parvenu de la façon suivante : 11 est d'abord indubitable que les trois foetus que nous avons eus entre les mains appartenaient à la famille des Phocidae, dont les caractères sont si faciles à reconnaître. Les espèces de Phocidae rencontrées par les dernières expéditions qui ont exploré les régions antarctiques et auxquelles nos foetus auraient pu être rapportés sont les suivantes : Leptomjciiotes Weddelli Lesson ; Ogmorhinus leptonyx de Blainville ; Lohodon carcinophurjus Flower et Garson ; Ommatoplioca Rossi Gray. La Mission Charcot semble avoir rencontré seulement le Phoque de (1) Ces foetus, ayant séjourné trop longtemps dans des bocaux trop étroits, ont subi des défor- mations fâcheuses dont il m'a été impossible de faire disparaître les traces. J'ai dû les représenter tels quels (Voy. Planche II). 14 OISEAUX ET MAMMIFÈRES. Weddell et le Phoque crabier. Il semble par conséquent a priori très pro- bable que les deux plus gros foetus appartiennent à l'une ou l'autre de ces deux espèces. Le Phoque de Ross et VOgmorhinus leptonyx àa Blainville présentent des caractères extrêmement particuliers, dont je n'ai pas constaté la moindre trace chez les foetus en question. Les caractères du Leptonychotes Weddelli Lesson et ceux du Lobodon carcinophmjux FI. et Garson concordent au contraire avec les leurs. C'est donc, sans aucun doute, à l'une de ces espèces qu'il convient de rapporter les deux jeunes foetus. J'avais un moment pensé pouvoir arriver à une identification plus précise par l'étude de la forme du crâne et celle des germes dentaires ; mais ni l'une et ni l'autre ne m'ont donné do renseignements suffisants pour me permettre d'être plus affirmatif. Pour ce qui concerne le crâne, en effet, si chez le Phoque crabier adulte il affecte des formes nette- ment plus allongées, moins trapues que chez le Phoque de Weddell, ces différences doivent être chez le jeune et, à plus forte raison, chez le foetus si atténuées qu'elles deviennent quasiment imperceptibles. Bref, j'ai cru préférable de m'en tenir aux désignations suivantes : W 1. Foetus très jeune de Phocidé. / Foetus appartenant vraisemblablement à la même espèce, qui ' ne peut être que le Leptonijchotes Weddelli Lesson ou le N° 3.( Lobodon carcinophagus Flower et Garson. N" 1. Longueur approximative (1) ; 7 à 8 centimètres. Sexe : Impossible à déterminer d'une façon certaine en raison du trop jeune âge probablement, çj^. Téguments : D'une couleur gris jaunâtre très clair. Phanères : La peau était complètement lisse, dépourvue de poils ; sur la lèvre supérieureelle-méme,lamoustachen'étaitpas développée; envoyait simplement ses ébauches à droite et à gauche de la ligne médiane repré- sentée par deux zones couvertes de cinq à six rangs de tubercules. (1) Les longueurs de ces foetus de Pinnipèdes sont mesurées en projection, du vertex à Textrémité de la queue. OISEAUX ET MAMMIFÈRES. 15 Les ongles n'exislaient pas encore ; toutefois leurs ébauches paraissaient être dans un état de développement plus avancé aux membres antérieurs qu'aux membres postérieurs. Organes des sens : Langue bifide; conduit auditif àpeinc indiqué; narines obliques. Extrémités : Les extrémités, surtout les extrémités antérieures, présen- taient un aspect encore très différent de celles des Phoques adultes (Voy. fig. I, PI. II). Queue : Courte et arrondie, sans ébauche des ailerons latéraux, dont on constate la présence dans les spécimens suivants. N» 2. Longueur approximative : 20 centimètres environ. Sexe: Impossible à déterminer d'une façon certaine, en raison du trop jeune âge; probablement. Q. Téguments : La peau, d'une couleur gris clair jaunâtre à peu près uni- forme, présentait dans la région de la face ou, pour mieux dire, du mu- seau, une teinte de gris plus foncé qui se perdait sur le cou par atténuation progressive. Le cou était, au contraire, d'un gris plus clair sur lequel tranchait assez nettement, d'une part, la teinte plus foncée du museau et, d'autre part, de légères petites taches noires ovalaires, qui paraissaient lui faire suite. Phanères : La peau était complètement lisse, dépourvue de poils, sauf au-dessus de la bouche, où commençaient à apparaître les moustaches rudes et dures des Phocidae. Les ongles étaient au début de leur déve- loppement. Organes des sens : La langue était bifide; le conduit auditif à peine indiqué ; les narines obliques. Extrémités : Elles ne présentaient rien de bien particulier et ressem- blaient, comme formes, à celle des Phoques adultes. Queue : La queue enfin présentait une sorte d'ébauche des ailerons laté- raux que nous verrons exister avec une beaucoup plus grande netteté dans le spécimen suivant. 16 OISEAUX ET MAMMIFÈRES. N° 3. Longueur approximative : 30 à 35 centimètres. Sexe : Ç . Téguments : D'une couleur gris foncé à peu près homogène. Phanères : La peau était complètement lisse, dépourvue do poils ; la moustache seule avait pris un développement assez considérable. Les ongles étaient bien développés. Organes des sens : La langue était bifide, comme dans les exemplaires précédents. J'ai constaté la présence de ce même caractère sur une pièce anatomique rapportée également par la Mission Charcot, et qui devait provenir d'un animal adulte appartenant à la même espèce que les foetus ici décrits. Le conduit auditif était très petit; les narines obliques. Extrémités : Ne présentaient rien de particulier. Queue : La queue enfin, arrondie suivant son axe central, présentait de part et d'autre, dans le plan horizontal, les sortes de petits ailerons laté- raux qui caractérisent la queue des Phocidae adultes. Nous allons ouvrir ici une courte parenthèse à propos de l'explication morphogénique possible de la forme très spéciale de cet organe chez les animaux qui nous occupent : Il paraît actuellement impossible de ne pas admettre que la forme de la région postérieure du corps de tout animal nageur est, pour une très grande part, déterminée par l'action mécanique des eaux dans lesquelles l'animal se déplace. Si l'on traîne longtemps dans un liquide un corps déformable dans sa région postérieure, on s'aperçoit que ce corps finit par prendre une forme effilée à l'arrière ; de môme, si on fait monter lentement dans un liquide des bulles d'un autre liquide plus léger et ne se mélangeant pas avec le premier, on voit également que ces bulles prennent une extrémité inférieure effilée dont la forme semble bien véri- tablement déterminée parles pressions périphériques. Tout se passe comme s'il en était de même pour les animaux nageurs ; eux aussi ont l'arrière de forme effilée; mais, dans ce cas, le problème est beaucoup plus complexe, car il ne s'agit plus de déplacements passifs, OISEAUX KT MAMxMIPÉRES. 17 mais bien de déplacements actifs, dans lesquels la partie postérieure du corps joue un rôle éminemment important. En effet, si, d'une part. Ton considère la silhouette horizontale (section passant par un plan horizontal) d'un Poisson téléostéen, par exemple, on voit bien qu'elle présente, et à des degrés variables, un arrière très effilé; mais, d'autre part, si l'on considère sa silhouette verticale (son profil), on voit que son arrière est muni de deux prolongements qui constituent la queue, laquelle a, comme on le sait, un rôle locomoteur actif très important. Si, de ces animaux parfaitement adaptés à la vie dans les eaux, on passe à d'autres organismes menant une existence qui n'est plus exclusivement nageuse, comme l'Hippopotame parmi les Mammifères, par exemple, on constate encore les résultats très nets, quoique bien moins marqués, de l'action morphogénique des pressions liquides : c'est ainsi que la queue de l'Hippopotame, qui ne semble véritablement pas avoir un rôle de direction appréciable, au lieu d'être arrondie commecelle des Mammifères en général, est nettement aplatie dans le sens vertical. A côté des Poissons téléostéens, qui peuvent être, par exemple, pris comme le type des organismes nageurs dont la queue s'étale dans le plan vertical, il existe d'autres animaux menant une existence ana- logue, chez lesquels elle s'étale, au contraire, dans le plan horizon- tal, disposition évidemment en rapport avec des conditions fonction- nelles encore mal connues, (l'est, par exemple, le cas des Cétacés, des Siréniens; c'est celui aussi des Phoques, dont la véritable (lueue f()7iciionnelle est représentée par les membres postérieurs. Chez ces animaux, l'extrémité postérieure du corps est effilée comme chez tous les autres animaux nageurs: mais, alors que c'est la silhouette hori- zontale qui, chez les Poissons téléostéens, nous permet d'apprécier cet effilemenl, chez les Phoques, comme chez les Cétacés, c'est à la silhouette verticale qu'il faut s'adresser. Les causes qui ont déterminé l'aplatissement de la région posté- rieure du corps dans le plan horizontal chez les Phoques ont aussi bien agi sur les membres pelviens que sur la queue rudimentaire elle-même, laquelle peut être considérée comme ayant pris de ce fait la forme spéciale décrite plus haut. Expédition Cliavcul. — R. Anthony. — Oiseaux et Mammifères. •* LÉOENDE DE LA PLANCHE I Fig. I. — Jeuno poussin de Pygoscelis papua Forster, extrait de l'œuf à la fin de l'incubation. Vue postérieure. Grandeur naturelle. Pig'. II. — Id. Vue antérieure. Grandeur naturelle. Fig-. III. — Embryon à'Oceanites océaniens 0. Salvin. Grandeur naturelle X"-i. Fig. IV. —Embryon très jeune de Phalacrocorax atrieeps K.\ng. Grandeur naturellex2. Fio-. V. — OEuf de Pliuincrocorax atriceps King-, dont la coquille a été brisée par le poussin parvenu au terme de l'incubation. Grandeur naturelle. (Les taches noires que l'on aperçoit à la surface de cet œuf sont des taches de boue devenues indélébiles.) Fig. VI. — Jeune poussin de Phalacrocorax atriceps King-, extrait de l'œuf :i la (in de l'incubation. Vue antérieure. Grandeur naturelle. Fig. VII. — Jeune poussin de Phalacrocorax atriceps King, sorti de l'œuf depuis quelques heures à peine. Grandeur naturelle. Fig. VIII. — Embryon très jeune de Chionis alba Gmelin. Grandeur naturellex 2. Fig. IX. — Embryon très jeune de Larus dominicanus Licht. Grandeur naturelle x -■ (Les deux embryons représentés dans les figures VIII et IX paraissent noirs en photographie. Cela tient à ce que pour les nécessités de l'étude ils ont été colorés au carmin aluni(|ue.) pjo-. X. — Embryon très jeune de Sterna hirundinacea Lesson. Grandeur naturelle X 2. LÉ&ENDE DE LA PLANCHE II Fig. 1. — Foetus de Phoque (sp. ?). Grandeur naturelle. Vue antérieure. — c, Section du cordon ombilical; g, papille génitale. Pig. II. — Foetus de Phoque (sp. ?) avec son placenta. Demi-grandeur naturelle. Vue de trois quarts. — c, Cordon ombiHcal; p, placenta zonaire. Fig. III.— Foetus de Phoque (sp.?). Demi-grandeur naturelle. Vue de profil. -c, Cordon ombilical ; q, queue avec sa forme spéciale. Expédition Charcot (Anthony. Docununis embryo^'âiitjnes). PI. I Cintra:t, phoi. VII Ptiototypie BeitbAud. Masson S: Cie, Hthtcurs. Expédition Charcot {Anthony. Docuinails eiiibi)Oi;ciiiquei). PL II Ciiitract, photo. M se, Jï r .>> M y •^7 / \y f» N,