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SOCIÉTÉ

PHILOMATHIQUE DE PARIS.

ANNÉE 1858.

EXTRAIT DE L'INSTITUT,

JOURNAL UNIVERSEL DES SCIENCES ET DÉS SOCIÉTÉS SAVANTES EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER.

Are Section, —Sciences mathématiques, physiques et naturelles,

Rue de Trévise, 45, à Paris.

SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE DE PARIS.

EXTRAITS DES PROCÉS-VERBAUX DES SÉANCES

PENDANT L'ANNÉE 1858.

PARIS, IMPRIMERIE DE COSSON,

RUE DU FOUR-SAINT-GERMAIN, 43,

1358.

SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE

DE PARIS.

SÉANCES DE 1858,

Séance du 2 janvier 1858,

BOTANIQUE. Des hémicarpelles des Borraginées et des La-* biées. M. D. Clos, professeur à la faculté des sciences de Toulouse, adresse les remarques suivantes sur la communication faite à la Société dans la séance du 31 octobre 1857, par M. Germain de Saint-Pierre. Dans cette communication M. Ger- main de Saint-Pierre signalait une intéressante anomalie que lui avait présentée un pied de Myosouis cæspitosa dont l'ovaire était remplacé par deux feuilles dépassant la corolle et dépourvues d’o- vulés (voy. l'Institut, n°1245, du 11 noverbre 1857, p. 374); et il accompagnait la relation de ce fait réflexions qui sont l’objet de la note de M. Clos.

Malgré l’analogie de la forme de l'ovaire des Borraginées avec l’ovaire des Labiées, disait M. Germain de Saint-Pierre, 07 continuait cependant à leur attribuer dans les traités des- criptifs un ovaire composé de quatre carpelles : j'ouvre, écrit M. Clos, la Flore de France de MM. Grenier et Godron (t 2, p. 507) et j'y lis aux caractères de la famille des Borraginées : ovaire supère, formé de deux feuilles carpellaires(i). Dès 1836

(4) Il est vrai que plus bas ‘ces auteurs ajoutent à tort selon nous : fruit formé de carpelles secs, etc, C

Extrait de l'Institut, Are section, 1858. 4

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M. Seringe considérait le pistil des Labiées et des Borraginées comme formé de deux carpelles (Voir son Mém. s. l'embryon des Labiées, p. 63 et 65 à la suite de la Monog. du genre Scu- tellaria par Hamilton), et nous-même, dans une note qui a été communiquée à la Société botanique de France dans sa séance du 10 juillet dernier,proposions d’appliquer aux parties du fruit des Labiées et des Borraginées le nom très convenable d’hémicarpel- les créé par M. Seringe.

Aucun fait tératologique, ajoute M. Germain, n’était venu démontrer d'une manière évidente la structure réelle de l'o- vaire chez les plantes de cette familie (les Borraginées). Or, dès 1851, M. Wigand, analysant un ouvrage de M. H. Schacht sur le microscope, s'exprime ainsi: Quant aux Borraginées, je puis, d’après mon observation personnelle, établir la biparti- tion originelle de l'ovaire avec une cavité simple (Botan. Zei- tung,9° année, p. 618(1) ; et, dans un nouveau travail en date du 5 décembre 1856, sous ce titre: Beîträge zur Pflanzenterato- logie, ce même botaniste décrit un Symphytum officinale, L., . pourvu d’une corolle verte, d’un pistil à ovaire grossi, foliacé, bi- loculaire, avec deux ovules par loge. (Voir l'analyse de ce mé- moire dans le Builetin de la Soc. bot. de France, t, IV, 3, p. 227).

En ce qui concerne le pistil des Labiées, je crois avoir été l’un des premiers à démontrer la nature dicarpellaire de cet organe (Voy. Bull. Soc. bot., t. IT, p. 169). J'ai cité quelques anomalies présentées par les fleurs du Sfachys sylvatica, L., dans lesquelles on voyait 6 hémicarpelles, tantôt libres, tantôt soudés 2 à 2 avee un style divisé au sommet en 3 branches. Cette communication provoqua la publication de faits du même genre dus, partie à M. J. Gay (2. c., p. 170), partie à M. Germain de Saint-Pierre (4. C., p. 258).

Depuis lors, de nouveaux individus spontanés de la même es- pèce m'ont offert quelques autres faits analogues que je crois de- voir signaler.

On sait que les faux verticilles du Séachys sylvatica, L. sont- de six fleurs, chaque pédoncule en portant une médiane et deux

(1) Fur die Boragineen Kann ich nach eigener Beobachtung die ursprungs= liche Zweitheiligkeit des Ovariums mit einfacher Hæhle aussprechen.

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latérales. Or, dans un de ces verticilles, une des fleurs médianes avait un calice à 7 divisions et 8 hémicarpelles réunis en 2 grou- pes égaux et distincts ; l’autre un calice à 8 divisions et 5 hémi- carpelles. Dans un autre verticille, une fleur médiane avait un calice à 9 divisions et au fond du tube 8 hémicarpelles en 2 grou- pes, les 4 de l’un étant plus petits que ceux de l’autre. Une fleur d’un autre verticille montrait un calice à 7 divisions et 7 hémi- carpelles ; une autre encore un calice à 5 divisions et 8 hémicar- peiles dont un plus gros occupant le fond du tube du calice, les 7 autres étant insérés sur les parois de ce tube. Dans un autre ver- ticille, le nombre des fleurs était réduit à 5, l’une d’elles résultant évidemment de la confluence de 2 autres. Son calice subrégulier, campanulé, était à 10 divisions et offrait au fond du tube 8 hémi- carpelles. -

Dans tous les cas que je viens de citer la corolle et le style étaient tombés : cette coïncidence dans l’augmentation du nom- bre des hémicarpelles et des divisions calicinales est un fait qui mérite d’êtr> noté.

Séance du 23 janvier 4858.

HYDRAULIQUE. M. de Caligny communique des expérien- ces sur le mouvement d’une nappe liquide relativement à un ap- pareil de son invention dont la description a été publiée dans /’1n- stitut, et sur lequel il donne de nouveaux détails.

J'ai communiqué, dit-il, en 1845, des observations sur fa marche des filets liquides , d’où il paraît résulter qu’il suffirait’ pour l'écoulement de l’eau par un orifice disposé sur la paroi la - térale d’un canal bouché transversalement, que cet orifice eût la mêue largenr ét la même hauteur que ce canal, dans certaines circonstances. Gela semble d’ailleurs confirmer des expériences déjà anciennes. sur le bélicr hydraulique, pour lequel on à trouvé qu’il était inutile de donner à l’orifice de sortie en aval un dia- mètre intérieur plus grand que celui du corps de bélier, Ces ef- fets, pour être bien compris , exigent quelques explications qui serviront à en montrer l’usage.

Les orifices dont il s’agit, pour les anciens bélicrs, étaient précé- dés d’une espèce particulière de renflemert dont aucun ouvrage sur lhydraulique n’a peut-être remarqué le genre particulier d'influence. Or il est essentiel de remarquer que si, en amont du genre d’orifices latéraux dont il s’agit, les filets liquides ne pou-

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vaient pas s’infléchir d’une manière convenable, en vertu de cette espèce de renflement qui doit être par conséquent très utile, un orifice d’une section égale à celle du tuyau ou canal ne serait plus suffisant, à beaucoup près, pour débiter une quantité d’eau ana- logue à ce que débiterait un orifice latéral plus large.

L'auteur a disposé sur la paroi d’un tonneau un tube en zinc horizontal d’une longueur convenable et de vingt-cinq millimètres de diamètre intérieur. Un autre tube horizontal de même diamèë- tre, bouché à son extrémité la plus éloignée, était successivement disposé sur le même axe à diverses distances du premier, On pou- vait d’ailleurs le retourner pour présenter à la veine liquide sor- tant du tonneau l'extrémité bouchée par un plan. Quand on dé- bouchait subitement le tube à l’intérieur du tonneau, le niveau du liquide baissait dans celui-ci. On mesurait avec une montre à se- condes la durée de l'écoulement entre deux points de repère dont l'un était à seize centimètres au-dessus de l’autre. On a pu obser- ver ainsi comment la résistance était modifiée par la distance à la- quelle la veine liquide venait frapper un même obstacle, placé suc- cessivement à des distances diverses de l’extrémité extérieure du tube sortant du tonneau. Il en résulte qu’il ne suffit pas, à beau- coup près, que la section anuulaire de sortie soit égale à la section du tube. Il ne suffit même pas encore que la section annulaire soit double ; mais, dans ce dernier cas, la résistance est déjà très diminuée. Enfin la durée de l’écoulement ne diffère plus que de quelques centièmes de celle de l'écoulement par le tube fixé au tonneau, l’autre tube étant entièrement ôté, quand ce dernier est encore à une distance du premier pour laquelle on observe encore un genre particulier de succion à contre courant, sur lequel re- pose l'appareil à élever l’eau de M. de Caligny, présenté à la So- ciété le 2 novembre 1850, et pour lequel le jury international de lexposition universelle de 1855 lui a décerné une médaille de première classe.

Cependant la veine liquide ne se dilate pas d’une manière brusque, dès le point elle quittele tube pour frapper en diver- geant l'obstacle qui lui est offert, à une certaine distance pour la- quelle la résistance est très diminuée. Mais on conçoit qu’il est utile que cette veine, avant de rencontrer l'obstacle particulier dont il s’agit puisse se dilater , selon certaines lois qui ne sont pas encore assez connues pour que l’on puisse donner exactement la

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forme , analogue à celle d’un pavillon de trompette , que le tube pourrait avoir, si l'on voulait rapprocher l’orifice de sortie de l'obstacle dont il s’agit sur le pourtour duquel la veine doit diver- ger. Cela justifie jusqu’à un certain point l’espèce de renflement disposé en amont de l’orifice principal de certains béliers hydrau- liques mentionnés au commencement de cette note, et pourra servir à lui donner une forme plus parfaite en montrant sur quel prineipe il doit reposer.

Mais c’est particulièrement au perfectionnement de l'appareil de M. de Caligny, qui a fonctionné à l'exposition universelle, que les observations précédentes sont applicables ; car elles montrent, dit-il , combien il est essentiel qu’un tube vertical mobile qui, dans ce système , est alternativement ramené sur son siége, en vertu d’une espèce particulière de succion à contre courant, puisse s'éloigner alternativement le plus possible de ce siége dans les limites cette succion se fait suffisamment sentir. L'auteur, en présentant cette remarque, croit pouvoir conclure qu'en don- nant au tuyau fixe de cette machine une longueur suffisante et en débitant des quantités d’eau convenables, it obtiendra un effet utile supérieur à celui qu’il a obtenu jusqu’à ce jour ; et que cet effet utile pourra atteindre un chiffre aussi élevé que celui de son moteur hydraulique à flotteur oscillant, reposant aussi sur un mode particulier de succion, mais dont les conditions sont très différen- tes, le but n’étant pas le même.

Dans la séance du 19 décembre dernier, l’auteur à signalé une propriété de l'appareil, objet de cette note, consistant en ce qu'il peut, dit-il, le transformer en machine pour les épuisements, au moyen des vagues de la mer, en rendant toutes ses pièces fixes. Il entre aujourd'hui dans quelques détails sur ce sujet. IL insiste particulièrement sur la maniere d'obtenir une succion, au moyen d’une percussion de la manière la plus directe possible. Cela pro- vient de ce que le mouvement des filets liquides peut occasionner une non pression en vertu de la forme des excavations qui peuvent être creusées dans les rochers, et de la forme convenablement disposée des bords à l’intérieur et à l'extérieur de ces excavations, d’où le liquide en mouvement doit sortir, en agissant sur des cours d’eau. souterrains ou des tuyaux, par la force centrifuge résultant du mode de courbure des filets, même abstraction faite

Extrait de l’?nstitut, 1e section, 1858, 2

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de certains phénomènes analogues à ceux de la succion dans les ajutages.

Les observations relatives à ce système, considéré d’abord seu- lement comme ayant pour but d’élever l’eau au moyen d’une chute d’eau, ne doivent pas être nécessairement sans doute toutes appliquées, dans tous les cas , au même principe considéré comme moyen de faire des épuisements par l'effet de la percussion des vagues dela mer, ou des courants d’eau quelconques frappant des surfaces fixes convenablement disposées pour chaque espèce de courant. L'auteur présente quelques exemples de l’inflexion des filets liquides sur des obstacles dans les courants permanents, et annonce qu'il reviendra prochainement sur ce sujet, espérant d’ailleurs pouvoir appliquer son système à faire des épuisements dans les marais de la Gamargue , quoique, en général , les flots de la Méditerranée ne soient pas très élevés près de cette localité.

La puissance des flots, même peu élevés, étant presque indéfi- nie, on conçoit que le probléme consiste à trouver un moyen économique de les employer, tandis que , pour utiliser les chutes d’eau ordinaires, il faut plus particulièrement étudier les condi- tions qui permettent d’épargner le travail moteur,

GÉOMÉTRIE, Sur la théorie des roulettes. Au nom de M. Mannheim, lieutenant d'artillerie, M. Catalan a communiqué à la Société la note suivante :

Théorème. « Lorsqu'une courbe plane A CB roule sur une droûte fixe E F, la roulette décrite par un point M, lié à la courbe roulante, a même longueur que la courbe G P H, lieu des projections du point M sur les tangentes à À CB. »

Corollaires. I. Le limacon de Pascal, lieu des projections d’un point d’une circonférence sur les tangentes à cette courbe, a pour longueur le quadruple du diamètre.

IL. La chaînette, engendrée par le foyer d’une parabole qui roule sur une droite, est rectifiable.

TT. La spirale logarithmique est rectifiable; car, lorsqu'elle roule sur une droite, son pôle décrit une ligne droite.

IV. Lorsqueila développante d’un cercie O roule sur une droite, le centre O décrit une parabole, Par conséquent, le lieu des pro- peson du point O sur les tangentes à la développante est recti-

able,

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V. La courbe élastique, engendrée par le centre d’un hyper- bole équilatère qui roule sur une droite, est rectifiable; car la lemniscate est rectifiable.

VI. La courbe décrite par le foyer d’une ellipse qui roule sur une droite a même longueur que la circonférence décrite sur le grand axe comme diamètre, etc., etc.

Séance du 6 février 1858

CHIMIE. Camphène, —M, Berthelot a fait dans cette séance la communication suivante : sk

« Les relations qui existent entre l’essence de térébenthine et le composé cristallisé produit par son union avec l’acide chlorhy- drique et désigné sous le nom de campbre artificiel ont été l’ob- jet des recherches d’un grand nombre de chimistes. En effet, l’é- tude de ces relations paraît de nature à jeter quelque jour sur les phénomènes qui se passent dans la combinaison et sur la conser- vation plus ou moins complète des propriétés des corps généra- teurs au sein des combinaisons auxquelles ils donnent naissance.

» On sait que le camphre artificiel se produit avec une extrême facilité et que son pouvoir rotatoire correspond presque exacte- ment à celui du carbure d'hydrogène au moyen duquel on le pro- duit : ces faits et quelques autres avaient conduit à penser que le monochlorhydrate cristallisé était constitué par le carbure lui- même, uni à l'hydracide,-sans être modifié.

» La formation constante et simultanée d’un chlorhydrate li- quide isomérique , alors même que l’on opère avec un carbure homogène et défini par l'identité du pouvoir rotatoire des produits successifs de sa distillation , n’est pas un obstacle à la conclusion qui précède; car j'ai prouvé que le chlorhydrate liquide varie dans sa proportion et dans la valeur de son pouvoir rotatoire , suivant les conditions de l'expérience, ce qui autorise à l’envisager comme produit par une altération moléculaire du carbure générateur .

» Toutefois, les expériences par lesquelles MM. Soubeiran et Capitaine ont cherché à dégager le carbure uni à l’acide chlorhy- drique dans le camphre artificiel n'ont pas confirmé les induc- tions relatives à la nature de ce carbure d'hydrogène, En effet, le carbure qu’ils ont obtenu en décomposant le camphre artificiel par la chaux est liquide (1) comme l’essence de térébenthine et iso-

(1) M. Oppermann avait obtenu dans cette même réaction un carbure fu- sible à 40°,

Li]

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mérique avec elle ; mais il est privé du pouvoir rotatoire, ce qui l'en distingue d’une manière complète, Traité par l'acide chlo- rhydrique, il forme de nouveau et simultanément deux chlorhy- drates isomères, tous deux privés du pouvoir rotatoire, l’un cristallisé et analogue au campbhre artificiel, l’autre liquide. Ce carbure d'hydrogène n’est donc pas identique avec l’essence de térébenthine, et l'absence du pouvoir rotatoire ne permet pas d’ad- mettre sa préexistence dans le camphre artificiel.

» Ainsi, le carbure d'hydrogène qui constitue l’essence de té- rébenthine, en traversant la combinaison, semble passer par une série successive de modifications isomériques , sans pouvoir être ramené soit au point de départ, soit du moins à quelque état fixe et déterminé propre à servir de base aux spéculations moléculaires,

» C’est cet état fixe que j'ai réussi à obtenir à la suite de mes recherches sur les états isomériques de l’essence de térébenthine.

» D'après ces recherches, l’essence de térébenthine etla plupart des carbures isomères sont modifiés soit quand on les chauffe isolé- ment au-dessus de 250°, soit surtout quand on les porte jusqu’à cette température avec le contact du chlorure de calcium ou d’au- tres chlorures terreux ou métalliques. Or, ces deux conditions

défavorables se trouvent réalisées dans la décomposition : par

la chaux du monochlorhvdrate cristallisé d’essence de térében- thine. Pour les prévenir, il sémble nécessaire d’opérer cette dé- composition à une température inférieure ou tout au plus égale à 250°, et au moyen de la potasse ou de la soude qui n’altè- rent sensiblement l'essence, ni par elles-mêmes ni par les chlorures auxquels elles donnent naissance. Mais la potasse et

la soude, chauffées en vase clos avec le camphre artificiel à une

température voisine de 250°, ne l’attaquent que très imparfaite- ment, en raison de l’absence de dissolution réciproque. Les dissol- vants communs généralement usités, tels que l’alcool et les corps analogues, ne sauraient être employés, car la potasse et la soude des décomposent au-dessus de 200° avec dégagement d'hydrogène.

»J’ai pensé que cette difficulté pourrait être tournéeen employant comme dissolvant commun de l’alcali et du camphre artificiel un acide organique, c’est-à-dire en employant un sel de potasse ou de soude convenablement choisi. L’acétate de soude qui se présente tout d’abord ne peut être mis en œuvre ; car l’acide acétique mo- difie isomériquement l’essence dès la température de 100°, mais

43 : on peut recourir soit au benzoate de potasse, soit aux sels de soude formés par les acides gras, c’est-à-dire au savon dessé- ché. On obtient ainsi un carbure cristallisé , tout-à-fait ana- logue par ses propriétés au camphre artificiel-dont il dérive, doué du pouvoir rotatoire et susceptible de s’unir de nouveau à l’acide chlorhydrique en ne donnant naissance qu’à un composé unique et défini, le camphre artificiel dont il dérive. Voici comment on opère : on chauffé le camphre artificiel avec 8 à 10 fois son poids de savon sec ou bien avec 2 fois son poids de benzoate depotasse dans des tubes scellés à la lampe, à une température comprise entre 240° et 250° et soutenue’pendant 30 à 40 heures au moins. Après refroidissement, on briseles tubes et on introduit le contenu de consistance gélatineuse dans une cornue tubulée ; on distille jus- qu’à ce que l'apparition de vapeurs blanches annonce que la sub- stance grasse est sur le point de se décomposer. On redistille le produit volatil; on met à part les premières gouttes qui distillent vers 160°, et on recueille séparément ce qui passe ensuite jusque vers 180°. Ce produit se prenden une masse cristalline, soit immé- diatement, soit au bout de quelques heures. On égoutte celte masse et on la comprime fortement entre des feuilles de papier buvard jusqu’à ce que le papier cesse d’être humecté. C’est le carbure d'hydrogène cherché, le véritable camphène. Le camphène renferme C =: 87,8 ; la formule C20H !6exige CG —88,2 H=—11,9 H=11,8 99,7 Il est solide, cristallisé, doué d’un aspect et de propriétés phy- siques tellement analogues à celles du camphre que de prime abord il serait impossible de l’en distinguer ; son odeur est ana- logue, mais beaucoup plus faible, souvent masquée par des traces de produits odorants développés durant sa préparation. Il fond à 45° et bout vers 160: il se‘sublime à la manière du camphre dans les vases qui le renferment. Il dévie à gauche le plan de: polarisation, mais dans une proportion beaucoup plus forte que l'essence de térébenthine, car son pouvoir rotatoire, déduit d’observations faites avec la solution du carbure dans 3 fois son poids d’alcool absolu, a été trouvé [x]r = —49°,1. Celui du carbure principal défini que j'ai isolé de l’essence de térében- thine du pin maritime, correspondante au camphène, est égal à 32°,3.

Th

»On remarquera que le pouvoir rotatoire du camphène ne pré - sente aucune relation simple avec celui du chlorhydrate dont il dérive; la relation que l’on avait cru remarquer entre le pouvoir de ce dernier composé et celui de l'essence est donc acciden- telle. Du reste, un tel rapport ne se retrouve ni entre le pouvoir de l'essence du pin austral et celui de son chlorhydrate cristallin, tous deux lévogyres, ni entre ceux de l’isotérébenthine et de . sonchlorhydrate cristallisé, tous deux dextrogyres (1).

_»fLecamphène est insoluble dans l’eau, peu soluble dans l'alcool ordinaire, très soluble dans l’éther et dans l’alcool absolu. Aban- donné au contact de l’air pendant 4 ans, il paraît n’éprouver au- cune altération et conserve ses propriétés, son aspect et son point dejfusion normal. Légèrement chauffé il absorbe le gaz iodhydrique et forme un composé liquide, lequel ne renferme probablement qu'un carbure modifié.

» Le camphène agité avec de l'acide sulfurique concentré s’y délaye peu à peu avec une légère coloration jaunâtre ; bientôt surnagent quelques gouttelettes huileuses. Si l’on ajoute de l’eau au mélange, ou bien si on le broïe directement avec du carbonate de baryte, l’odeur du térébène produit de modification molécu- laire se développe aussitôt; il ne se forme pas de sel de baryte con- jugué stable, mais on observe quelques indices de son existence éphémère.

» L’acide azotique résinifie le camphène, aussi bien qu’un mé- lange d’acide sulfurique et de bichromate de potasse; maisl’attaque du camphène par cesagents est plus lente et plus régulière que celle de l'essence de térébenthine.

» Si l’on considère les grandes analogies physiques qui existent entre le camphène et le camphre ordinaire, on peut concevoir quelque espérance de changer le camphène en camphre par une oxydation ménagée : je poursuis ces expériences.

» Le camphène se combine directement avec l’acide chlorhydri- que à la température ordinaire et régénère le camphre artificiel; 0sr,261 de camphre chauffés légèrement dans une petite cloche remplie de gaz chlorhydrique ont absorbé dans l’espace de quel- ques heures un volume de ce gaz pesant’ 05',0683, c’est-à-dire

{1) Il est probable qu'il existe plusieurs variétés de camphène correspon- dantes à la multiplicité des camphres artificiels que je viens de rappeler,

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26.2 p. 400. La formule G20H16HCI répond à une absorption de 26, 8 centièmes.

» Le camphène dissous dans Palcool puissaturé de gaz chlorhy- drique se change entièrement en camphre artificiel', sans pro- duire de combinaison liquide : ce caractère l’éloigne tout à fait de l'essence de térébenthine, laquelle forme dans ces conditions un chlorhydrate sesquicarburé, 3C:0H8,2HCI, combinaison de bichlor- hydrate cristallisé, C?0H16,2HCI, et de monochlorhydrate liquide, C20H!6HCI. J’observerai que le camphène ne préexiste pas à l’état . de simple mélange dans l’essence de térébenthine, dont lacide chlorhydrique le séparerait sous forme cristalline en entrant en combinaison; car le pouvoir rotatoire du camphène est égal à 49e, celui du carbure principal défini contenu dans l'essence de téré- benthine à 32°; et celui de l’essence brute très voisin de ce dernier nombre. La proportion du camphène mélangé avec le carbure principal ne pouvait donc étre que très faible ; or 100 parties d’essénce peuvent fournir jusquà 110 parties de monochlorhy- drate solide, ce qui répond aux 86 centièmes du poids de l’essence. Cette dernière proportion indique même que l’on ne saurait con- sidérer le carbure principal comme formé par l'union intime du camphène apte à former un chlorhydrate solide avec un carbure isomère apte à former un chlorhydrate liquide ; car lerapportentre ces deux carbures devrait être au moins celui de 86 ; 14=6 : 1, relation trop compliquée pour être probable.

L'action de l'acide chlorhydrique sur une solutionalcoolique de camphène est également contraire aux hypothèses précédentes.

» La transformation complète du camphène en monochlorhydrate solide ou camphre artificiel achève d'établir que le carbure est bien réellement la base de ce chlorhydrate : l’analyse et la synthèse concourent à une telle conclusion. Elle est appuyée d’une manière remarquable par la conservation du pouvoir rotatoire et par l'ex- trême analogie de propriétés physiques qui existe entre le chlor- hydrate et le carbure d'hydrogène correspondant, et qui semble indiquer la permanence du groupement moléculaire du carbu: e au sein mêmé de sa combinaison. »

M. Berthelot a fait ensuite une autre communication rela- tive à l’action d’une dissolution alcoolique de polasse sur divers composés chlorés.

L'action d’une dissolution alcoolique de Foie surles compo:

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sés chlorés a ëté jusqu’à ces derniers temps assimilée en principe à l’action d’ure dissolution aqueuse de potasse , et les avantages que présente l'emploi du premier liquide ont été attribués uni- quement au contact simultané de la potasse et du composé chloré au sein d’un même menstrue. Dans ces conditions favora- bles, le composé chloré peut perdre plus aisément tout ou partie de son chlore sous forme de chlore, C'H{CI? + KO—C'H*CI+KCI+-HO

ou même l’échanger contre de l'oxygène :

CHCF+4KO—C?H0*,KO +AKCI. mais l'alcool ne semble pas intervenir.

«Il n’en est pas toujours ainsi, dit M. Berthelot, et dans un grand nombre de circonstances, on peut reconnaître que l’alcool lui-même entre en réaction: tantôt il se combine à l’état nais- sant, tantôt il éprouve une décomposition complète.

» J'ai établi ce rôle de l'alcool en montrant que la transformation de l’éther bromhydrique en éther ordinaire, sous l'influence d’une solution alcoolique de potasse, n’est pas due à un simple échange du brome contre l'oxygène : C*H5Br+KO—C{#H5O+-KBr, mais à l'intervention chimique de l’alcool : en effet, le poids d’éther or- dinaire formé est double de la proportion indiquée par l'équation précédente, et si l’on remplace l'alcool par la glycérine ou par la mannite on obtient des combinaisons particulières.

» En étudiant l’action d’une dissolution alcoolique de potasse sur divers compusés perchlorurés, j’ai observé quelques phénomènes, dans lesquels l'intervention de l’alcool se manifeste d’une manière encore plus tranchée : car ce corps chauffé à 100° avec de la po - tasse et ces composés perchlorurés fournit du gaz oléfiant.

» Ainsi, par exemple, si l’on chauffe à 100° pendant une semaine, dans des tubes fermés à la lampe, un mélange de potasse, d’alcool absolu et de perchlorure de carbone, C°Cl', ou de chloroforme, C2HCF, on obtient une certaine proportion de gaz oléfiant pur.

» Le dernier fait s'accorde avec une expérience de M. Hermann d’après laquelle le bromoforme décomposé par une dissolution alcoolique de potasse à fourni un mélange de gaz oléfiant et d'oxyde de carbone (Ann. der Ch. und Pharm., XCY, 211, 4855). Seulement dans les conditions je me trouvais, je n'ai pu observer la formation de l’oxyde de carbone, parce que sous

A

l'influence du temps, ce gaz est absorbé à 100c et changé en for - miate par une dissolution aqueuse alcoolique de potasse.

» La décomposition del’alcoo! sous l'influence de la potasse ct du composé chloré à une température aussi basse que 100 et la pro: duction du gaz oléfiant dans ces conditions est extrêmement cu- rieuse. Elle n’est pas due à l’action directe de la potasse sur l'alcool, car ces deux corps peuvent être chauffés ensemble, même à 200°, pendant plusieurs heures, sans éprouver d'action réciproque. On pourrait peut-être rattacher cette production de gaz oléfiant au défaut de stabilité de certaines combinaisons doubles qui ten- draient à se former entre l'alcool et les produits oxygénés dé- rivés du corps chloré par substitution ; mais je ne vois pas com- ment cette explication s’appliquerait aux faits suivants :

» Si l’on chauffe à 400° pendant unesemaine une solution alcoo- lique de potasse avec du sesquichlorure de carbone, C{CI°, om avec du protochlorure, G*C!°, il se forme un mélange de gaz olé- fiant, C*H*, et d'hydrogène.

» La production de cesdeux gaz, celle du dernier surtout, atteste le jeu de décompositions plus profondes et pluscompliquées qu’on n'eut été porté à le croire, dans la réaction d’un corps chlorésur une solution alcoolique de patasse. Ces décompositions sont en- core atteslées par d’autres phénomènes.

» En effet, dans ces conditions, non-seulement le chlorure de car- bone, C?CI*, produit de l'acide carbonique, G?0* -_

» Le chloroforme C:HCB, de l'acide formique C2H0%,HO:

» Le sesquichlorure de carbone, CCIf, de l'acide oxalique, G:05,2H0 (1). | DA . » C'est-à-dire les produits simples et stables de la substitu- tion du chlore par l'oxygène; mais en même temps prennent naissance divers liquides et surtout des substances insolubles, de nature humoïde, analogues à celles qui se forment dans la réaction des alcalis sur le glacose {2). Ces matières paraissent résul .

A

ter de l’action à l’état naissant exercé par l’alcali sur les principes

(4) Le protochlorure de carbone, C*CG', a fourni également de l'acide oxalique.

(2) Epuisée par l’eau et par l'acide chlorhydrique dilué, puis séchée dans le vide, la matière fouroie par le perchlorure de carbone, C2CI*, renfermait : C=—52,2; H—/,8; CI=12, 2; cendres—6,8 ; cellefournie par le sesqui- chlorure de carbone, G*CI", renfermait ; C—38,5 ; H—5,5; Cl=/,0: cen- dres—21 ,7 ë

Extrait de l’Znstitut, 47° section, 1858. 3

æ

Lo)

trèsoxygénés et analogues laglycérinc etaux matières sucrées qui tendent à se former, en vertu de cette même substitution du chlore par l’oxygène, »

Séance du 20 février 1858.

CHiMie. Recherche et dosage de l'acide phosphorique.. Voici le résumé d’une communication de MM. Damour et Henri Sainte-Claire Deville.

Le dosage de l’acide phosphorique dans ses combinaisons exerce depuis longtemps la sagacité des chimistes : on sait que la présence de cet acide échappe souvent aux recherches analytiques ; on sait aussi combien il est difficile de le dégager de certaines substances avec lesquelles il est uni par de fortes affinités. Divers réactifs ont été successivement proposés pour reconnaître et doser les phos- phates ; on peut citer notamment : les sels de chaux; de magné- sie, de fer, de manganèse, d’urane, de mercure, d'argent, le molybdate d’ammoniaque, etc., etc.

« Aux méthodes déjà connues et qui suivant les cas peuvent présenter des avantages réels, nous venons, disent les auteurs de la communication dont il s’agit ici, en ajouter une nouvelle qui nous paraît de nature à faciliter la recherche de l’acide phospho- rique, à lle dégager de ses combinaisons les plus stables, et, nous

l’espérons aussi, à fournir un moyen de le doser exactement.

» Dans le /cours d’un travail que nous avons entrepris en com- mun sur les'propriétés du cérium, du lanthane, du didyme et de leurs composés, nous avons reconnu que les sels de sesquioxyde de cérium pouvaient devenir un réactif commode pour manifester la présence de l'acide phosphorique. Lorsqu'on verse, en effet, du nitrate ou du sulfate acide de sesquioxyde de cérium dans la dissolution nitrique acide d’un phosphate, il se forme assez rapi- dement un volumineux précipité blanc ou légèrement teinté de jaune qui se dépose et reste insoluble dans la liqueur acide. C’est ainsi qu’en dissolvant dans l’acide nitrique du phosphate de chaux, ou bien du phosphate de fer, du phosphate d’urane, du phosphate d’alumine, et versant ensuite dans cette liqueur acide du nitrate ou du sulfate cérique acide, il se forme un précipité de phosphate cérique, tandis que la chaux, l’oxyde de fer, l’oxyde d’urane, lalumine, restent en dissolution dans la liqueur acide.

» Cette réaction des sels cériques sur les phosphates s'exerce

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de la même manière sur les arseniates, de telle sorte qu’on serait exposé à confondre ces différents composés si l’on n’avait pas déjà des méthodes qui permettent de les distinguer très nettement.

» Nous espérons que le procédé que nous venons d’indiquer pourra trouver un utile emploi dans les recherches de chimie agricole il est devenu si important de déterminer la présence, et, autant que possible, la proportion des phosphates contenus dans les terres, les amendements et les engrais.

» En dissolvant certains échantillons de fer métallique dans l’a- cide nitrique, et traitant la dissolution par du nitrate cérique, nous avons obtenu un faible précipité floconneux indiquant ainsi, dans le fer, la présence d’un composé se

» Nous nous bornons, pour le moment, à présenter ce sim- ple exposé des réactions des sels cériques sur les phosphates, nous réservant d'entrer dans plus de développements lorsque nou aurons complété nos recher ches sur ce sujet. »

Séance du 27 février 1858.

ANATOMIE COMPARÉE, La note suivante sur l’encéphale du Caïnotherium commune, Brav., a été communiquée dans cette séance par M. Pierre Gratiolet.

« En poursuivant mes recherches sur l'encéphale des animaux mammifères, j’arrivai bientôt à cette conviction qu’on ne pouvait a voir une idée exacte de la forme de leur cerveau que par des em- preintes fidèles de la cavité cranienne; je reconnus qu'il était possible d’assigner à l’encéphale des animaux qui composent un groupe naturel une figure définie et caractéristique, qui se modifie toutefois d’une certaine manière dont on trouve le plus souvent la loi en passant des plus grandes espèces aux plus petites; je re- marquai enfin que dans ces petites espèces les plis cérébraux lais- sent sur la boite osseuse des traces profondes, à tel point que chez ces animaux une empreinte intérieure du crâne devient la repré- senfation exacte et complète de leur encéphale et des circonvo- lutions qui en couyraient la surface. Ainsi, par une circonstance véritablement admirable, l'organe le plus important et le plus dé- licat de l’économie animale est, du moins dans les Mammifères et les Oiseaux fossiles, celui dont les traces se conservent le mieux, et tandis que nous ne pouvons juger que par analogie des viscères et de la constitution des autres parties molles, il nous est permis

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de décrire avec la plus grande certitude les formes caractéristi- ques de leur cerveau, ce qui donne à l'étude des circonvolutions cérébrales une importance nouvelle que peu de personnes ont soupconnée. On comprendra d’ailleurs très aisément que la per- fection des résultats ayant pour condition l’état de conservation des crânes dont on dispose, il ne dépend de la volonté d’aucun anatomiste de multiplier à point nommé ses recherches et ses ex- périences, de manière à arriver à un système complet d’observa- tions en un temps déterminé. Ce nouveau desideratum de la mammologie paléontologique ne pouvant donc être comblé par les efforts d’un seul homme, il faut nécessairement faire appel à tous, et pour ne point perdre, en ce qui me concerne, des instants pré- cieux, j’aborde immédiatement la description complète de la con- figuration extérieure de l’encéphale d’un petit Palchyderme fossile, voisin des Anoplothères. C’est un premier tribut au- quel j’ajouterai successivement au fur et à mesure des occasions qui me seront offertes; mais je dois dire avant toutes choses que le travail m'a été rendu facile par la perfection des empreintes véritablement admirables que je dois à l’habileté de M. Sthal, chef de la section de moulage du Muséum.

» L’encéphale du Caënotherium commune, Brav., dont je donne ici un dessin exact, est moins volumineux et surtout beau- coup moins large que celui du Lapin. Sa longueur totale est d’en- viron 46 millimètres, depuis le point le plus reculé du cervelet médian jusqu’à l’extrémité des lobes olfactifs. Dans cette somme, le diamètre antéro-postérieur du cervelet égale 10 millimètres. La longueur des. hémisphères cérébraux est de 30 millimètres. Celle de la partie des lobes olfactifs qui dépasse le cerveau est de 6 mil- limètres seulement. L'ensemble du cerveau proprement dit est fort allongé eu égard à sa largeur. Cette largeur en effet n’est que de 23 millimètres en arrière; elle diminue à mesure qu’on s’a- vance vers l'extrémité antérieure, dont le diamètre transversal est tout au plus de 11 millimètres. Les lobes olfactifs, presque entiè- rement à découvert, sont moins divergents que dans les petits Ruminants : leur racine est moins étranglée. L’atténuation des lobes antérieurs en avant, bien que fort apparente, est beaucoup moins marquée que dans les petits Chevrotains et dans les plus petites Antilopes, que distingue d’ailleurs une plus grande largeur du cerveau à sa partie postérieure. Le lobule du pli unciforme est

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peu saillant, et la racine du lobe olfactif n’est point excavée par la saillie des voûtes orbilaires | comme on le voit dans les petits ani- maux que nous venons de nommer ici.

» Ainsi, à tous ces égards le Caënotherium diffère absolument des plus petites Antilopes et des Chevrotains, sans en excepter le Moschus aquaticus, dont quelques naturalistes ont voulu le rap- procher, mais fort à tort selon nous; et s’il a quelques analogues dans le groupe des Ruminants tel qu’il est aujourd'hui conçu par jee z0ologistes, il faudra les chercher, non dans la division des Cerviens, mais parmi les Caméliens, qui offrent un type d'organisation cérébrale très distinct, et à certains égards semblable à celui des Pachydermes tridactyles, du moins au membre postérieur.

» L'étude des circonvolutions exprimera | davantage encore ces différences d’une part, J jet d'autre part ce rapprochement. L’étage / supérieur des circonvolutions, fig. 1 a, b, com- prend sur chaque hémisphère deux plis longi- iudinaux à peu de chose près parallèles. Cette disposition est fort différente de celle que pré- sente l'étage supérieur des circonvolutions des Chevrotains qui offre la forme d’untriangle à 18. 1 (1)+ : base large dont le sommet est dirigé en avant. L’étage inférieur, fig. 2. f,s He aussi beaucoup de la forme que présentent les vrais Ruminants. Chez ces derniers, de deux lobu- les qui le composent, le postérieur l’emporte con- stamment sur l’antérieur. L’inverse a lieu dans le

(1) Explication des lettres de la figure 1.—a, b, plis parallèles de l'étage supérieur. €, d, étage moyen, e, étage inférieur. À, lobe olfactif, B; bulbe. C, lobe médian du cervelet, D, lobe latéral, E, lobule auriculaire,

(2) Explication des lettres de’la figure 2. A, lobe olfactif, B, bulbe, C, D, cervelet médian. E, cervelet latéral. e, lobule auriculaire, & , b, plis parallèles de l'étage supérieur, c, d, étage intermédiaire. f, lobule postérieur de l’élage inférieur, g, racine du lube olfactif,

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Caïnotherium, ce qui le rend à Ja fois semblable aux Caméliens et aux Pachydermes à doigts pairs qui composent le grand genre Sus de Linné; mais l'existence de l’étage intermédiaire 4 le sé- pare clairement de ces derniers, pour le rapprocher au contraire des Chameaux.

» L'examen du cervelet considéré.en général fournit des carac- tères non moins précis. Dans tous les vrais Ruminanis, et n0- tamment dans les plus petits du groupe, le cervelet a une forme caractéristique fort aisée à définir. Le corps du lobe médian est très court d’avant en arrière et fort élevé. Sa direction est pres- que horizontale. Son vermis au contraire est vertical et deux fois plus long. Les vermis latéraux sont enroulés d’une manière assez compliquée, surtout dans les grandes espèces, mais ne présentent aucune trace du lobule auriculaire, Le cervelet du Caïnothe- rium offrait une forme très différente ; en effet, la portion hori- zontale du cervelet médian est,dans l'empreinte que nous étudions ici,deux fois aussi longue que sa portion verticale,et se recourbant en avant s’enfonce sous le bord postérieur des hémisphères céré- braux. Le vermis est régulier et présente des indices de plis assez. nombreux. Les lobes latéraux, fig. 2. E, et fig. 4. D, forment deux masses symétriques très simples et présentent un petit lobule auriculaire, fig. 4. E, et fig. 2. e; cette configuration n’a évidem- ment aucun rapport avec celle que présente le cervelet des plus petits Ruminants vrais, tels que le Moschus javanicus par exem- ple.—Les tubercules quadrijumeaux étaient évidemment entière- ment recouverts par le cerveau, règle qui ne souffre d’ailleurs aucune exception parmi les Mammifères monodelphes hors de l’état fœtal.

» Cette observation confirme l’idée que j'ai ailleurs énon- cée, savoir que, dans les groupes de Mammifères qui compren- nent à l’état vivant ou fossile des animaux gigantesques, toutes les espèces ont des circonvolutions, quelle que soit d’ailleurs l’exi- guité de leur taille. On peut faire encore une autre remarque : si un grand groupe naturel comprend plusieurs familles, dont les unes contiennent des espèces gigantesques, les autres n’en pré- sentant au contraire que de fort petites, les animaux pygmées des premières familles, parents si je puis.ainsi dire d'espèces géantes,

_ont, quel que soit d’ailleurs le degré de leur petitesse, des circon- volutions plus compliquées que certains animaux beaucoup plus

2

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grands en réalité, mais qui appartiennent à d’autres familles dont le type n’a jamais présenté que des réalisations médiocres. C’est ainsi que le Moschus moschiferus (Linn.), le géant du groupe des Chevrotains, a beaucoup moins de circonvolutions que le Quevey (Antilope pygmæa, Pall.) qui lui est très mférieur par la taille, mais qui est une Antilope. Je suis convaincu que l’étude de l’encéphale d’un animal encore plus petit (l’Æntilope spini- gera, Temm.) confirmera cette règle, que tous les faits qu’il m’a été permis d'étudier suffisamment confirment. »

Séance du 20 mars 1858

MINÉRALOGIE OPTIQUE. Propriétés optiques biréfringentes des corps crislallisés.—M. Descloïzeaux avait communiqué l’an- née dernière à la Société l’extrait d’un premier travail sur les propriétés optiques biréfringentes des corps cristallisés ; dans une seconde communication faite aujourd’hui, il expose les nouveau x résultats auxquels il est parvenu en continuant ses recherches et en les étendant à un assez grand nombre de cristaux naturels ou artificiels. Dans l’extrait qui suit, l’auteur se contente de donner la valeur desindices qu’il a pu mesurer, et de présenter quelques remarques sur les corps pour lesquels la détermination incom- plète ou inexacte de la forme cristalline a été complétée et corrigée par l'examen des propriétés optiques biréfringentes.

Parmi les corps biréfringents à un axe positif, M. D. n’en a trouvé que deux dont il ait pu déterminer les indices.

Le premier est le sulfate de lanthane en pctites aiguilles inco - lores décrites par M. Marignac comme se rapportant à un prisme rhomboïdal droit voisin de 120, La forme doit en réalité être considérée comme hexagonale ; ses indices ordinaire et extraor- dinaire sont : o—1,564 ; 1, 969 pour les rayons rouges.

Le second est la schéelite en petits cristaux transparents de Traverselle et de Framont. Les indices sont : w—1,918 à 4,949 ; —1,934 à 1,935 pour les rayons rouges.

Parmi les corps à un axe négatif, voici ceux dont M. D. a dé- terminé les indices ou seulement le signe de la double réfraction.

Mimetèse : o—1,47h; &—1,465 pour les rayons rouges. Cristaux d’un jaune pâle en prismes hexagonaux,

2h

. Hédyphane, arséniate de plomb. Gristaux blancs. o—1 "h67; 22; ,163 pour les rayons rouges.

Arséniale de potasse en petits cristaux prismatiques carrés, parfaitement purs et transparents. w—1,564 ; «1,515 pour les rayons rouges.

Bromate de didyme ; Marignac : prisme hexagonal régulier.

Saphir d’un bleu pâle. w—1,7676 à 1,7682 ; e—1,7594 à 4,7598 pour les rayons rouges.

Rubis d’un beau rouge. w—1,7674 ; e—1,7592. On voit que les indices du rubis sont très peu différents de ceux du saphir.

Wulfénite, plomb molybdaté. w—2,402 ; e—2,304 pour les

rayons rouges. Ce minéral est une des substances assez rares dont les indices sont supérieurs à 2.

Tartrate d’antimoine et de strontiane cristallisé à chaud ; Ma- rignac. Prisme hexagonal régulier. w—1,6827 ; «—1,2874 pour les rayons rouges.

J'avais espéré, dit l’auteur, rencontrer dans ces cristaux, comme dans le sulfate de strychnine octaédrique, la polarisation rota- toire; malheureusement il n’en est pas ainsi ; cela tient sans doute à ce que cette propriété y est peu développée et qu'elle y est même annulée par suite d’irrégularités analogues à celles du béryl, qui, dans certaines positions, donnent au cristal l'apparence d’une substance à deux axes.

Les cristaux à deux axes dont M. D. a déterminé le sens de la double réfraction ou les indices sont les suivants :

Cristaux positifs.

Calamine en petits cristaux de la Vieille-Montagne. «1,635 : B—1,618 ; y—1,615 pour les rayons jaunes; d’où l’on conclut : 2V—h5° 57; 2E—78020/, On a trouvédirectement : 2£—79030" environ.

20 Diopside très pur. «—1,7026; £—1,6798 ; y—1,6727 pour les rayons jaunes. On en conclut 2V—58°59"; 2£—111°34". On a trouvé directement 2£—111025".

Amphibole. Prisme rhomboïdal oblique de 124030’.pht— 40458". Plan des axes parallèles à g!. Bissectrice faisant un angle d'environ 75° avec une normale à 2! et un angle de 150°2’ avec une normale à p dans la hornblende. Ces angles paraissent être de 729 envi'on ct de 4470 dans la pargassite. L’angle extérieur des

Ù

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axes dans cette dernière variété est approximativement 2E—100° à 105.

Sulfate de Strychnine à 42 atomes d’eau. Prisme rhomboïdal oblique de 24°57' ; pm—93°4h"; pht—107°23', hémièdre. Cli- vage interrompu suivant la base. Plan des axes parallèle à la dia- gonale horizontale de la base, faisant un angle de 15°10’ environ avec une normale à [a base et un angle de 57°17’ avec une nor- male à Af, Bissectrice normale à la diagonale horizontale, faisant un angle d'environ 74°50’ avec la diagonale inclinée. 2£—16°30” à 17°, ÿy—1,594 pour les rayons rouges. La dispersion parallèle propre aux cristaux du système prismatique rhomboïdal oblique qui ont le plan de leurs axes parallèle à la diagonale horizontale de la base est des plüs marquées ; il est donc impossible de considé- rer la forme de ce sel comme dérivant du prisme rhomboïdal droit, ainsi que l’a fait M. Schabus.

Les cristaux de sulfite de soude fraîchement préparés offrent une dispersion très forte pour les axes des différentes couleurs, et ces axes sont beaucoup plus rapprochés que dans les cristaux déjà altérés à l’air. Vers 10° G., le plan des axes rouges est parallèle à 9! ; leur bissectrice fait un angle d'environ 22° avec une normale à ht et un angle de 108°24/ avec une normale à p. Le plan des axes violets est perpendiculaire au premier ou parallèle à la dia- gonale horizontale de la base ; leur bissectrice coïncide avec la bissectrice des axes rouges. Pour les rayons compris entre le vert et le bleu, les deux axes sont réunis-.en un seul.

Chlorure de cuivre ; CuCl-+-2Aq. Prisme rhomboïdal droit de 94°54"; clivage très facile suivant les faces #2 et suivant la base p; plan des axes parallèle à la base ; bissectrice parallèle à la petite diagonale de la base ; £—1,681 pour les rayons rouges.

Chlorure de baryum ; BaC14-2Aq, isomorphe avec le précé- . dent. Prisme rhomboïdal droit de 92051’; clivage facile suivant

_p, assez facile suivant gt et hî. Plan des axes parallèle à la base ;

bissectrice normale à gl. a—1,664 ; f—1,644; y—1,635 pour les rayons jaunes. On conclut de : 2V—67°4"; 2E—130°22" M. Grailich a trouvé 128°6’.

Hureaulite. Prisme rhomboïdal oblique de 61°; phl— 90°33. Plan des axes parallèles à la diagonale horizontale de la base ; bissectrice faisant un angle d’environ 45° avec une normale

Extrait de l'Institut, A'e section, 1858, 4

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à A1 et un angle de 74°27’ avec une normale à p. Axes très écartés.

Tartrate d’antimoine et de chaux avec azotate de chaux; 4 (CaO Sb°05, CSH4010 + 6Aq)+-Ca O Az°0ÿ, Marignac. Prisme rhomboïdal droit de 123°56'; clivage facile parallèle à g*. Plan des axes parallèle à g! ; bissectrice normale à la base. «—1,6196 ; B—1,5855; y—1,5811 pour les rayons jaunes; d'où l’on conclut : 9V—40°11'; 2E—661; M. D. a trouvé directement 2E— 65°30/ à 66°. -

Ce sel a été décrit par M. Rammelsberg comme cristallisant en prisme droit à base carrée, à cause de la presqu’égalité des angles pal et gtm et de l'hémiédrie habituelle à une des faces.

Les corps négatifs dont M. D. a déterminé les propriétés opti- ques biréfringentes lui ont surtout été fournis par MM. Damour et Henri Sainte-Claire Deville, dont les recherches sur les compo- sés des oxydes de cérium, de lanthane et de didyme, poursuivies laborieusement depuis plus de deux ans, promettent une série de cristaux des plus intéressants pour la variété de leurs formes et de leurs propriétés optiques. Les principaux sels qui ont été re- mis par ces deux chimistes à M. Descloizeaux sont les suivants :

Cristaux à un axe négatif.

Azotate de lanthane et de magnésie. Rhomboèdre obtus de 10907. Double réfraction énergique.

20 Azotate de lanthane et de manganèse. Rhomboëdre obtus de 109°7/, complétement isomorphe avec le précédent. Cristaux légè- rement rosés. Double réfraction énergique.

3o Azotate de lanthane et de zinc; complétement isomorphe avec les deux précédents.

Cristaux à deux axes négatifs :

Azotate de lanthane et d’ammoniaque cristallisé au milieu de l’acétate de lanthane. Prisme rhomboïdal droit de 98°4h'; cris- taux incolores très aplatis suivant la base. Plan des axes parallèles à A1; bissectrice normale à la base; 2E—62° environ.

90 Azotatede lanthane etd’ammoniaque. Prisme rhomboïdal obli- que de 82048; pm—106°; phi—113°; clivage facile parallèle à la base, Plan des axes parallèle à la diagonale inclinée et à gt ; bissec- trice faisant un angle d'environ 33° avec une normale à p et un angle de 41002 avec une normale à h1.2E—80 à 10°. Les axes sont comme on le voit très rapprochés et lorsque leur plan coïncide avec le plan

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de polarisation , les deux {systèmes d’anneaux se réduisent à une ellipse traversée par une croix noire dont les deux sommets sont notablement dissymétriques.

Azotate ammonicocéreux. Prisme rhomboïdal oblique a 82°50’ environ. pm—105°40"; ph'—113°; isomorphe avec le sel précédent. Plan des axes parallèle à la diagonale horizontale de la base faisant un angle d'environ 33° avec une normale à la base et un angle de 400° avec une normale à 21 ; bissectrice normale à la diagonale horizontale, faisant un angle d'environ 123° avec la diagonale inclinée en avant. 2E—26°10” pour les rayons rouges. Dispersion, horizontale indiquant lobliquité du prisme, aussi no- table que dans le suifate de strychnine à 12 atomes d’eau. Ce sel a le plan de ses axes perpendiculaire à celui du sel précédent; comme ils sont géométriquement isomorphes, leur mélange pro- duira peut-être des phénomènes intéressants à étudier.

Sulfate de didyme rose. Prisme rhomboïdal oblique de B4°50/.pm—99c4l"; phi=—118°8", Marignac. Clivage très facile suivant la base. Plan des axes parallèle à la diagonale horizontale de la base, faisant un-angle d’environ avec une normale à pet un angle de 53°52’ avec une normale à k!. Bissectrice perpendi- culaire à la diagonale horizontale el faisant un angle d’environ 820 avec la diagonale inclinée. L’angle apparent des axes dépasse 120.

Sulfate de dede te cérium. CeOSO®+34Aq, Marignac. Prisme rhomboïdal droit de 92°37. Cristaux ordinairement en octaèdres rhomboïdaux sous les angles de 114°12/, 1141010’ et 103014’. Plan des axes parallèle à la base. Bissectrice parallèle à la grande diagonale de la base,

Sulfate de cérium à chaud ; cristaux rosés. Prisme rhomboï- dal oblique de 70035’; pm—95°58 ; phl—100°22, les cristaux sont presque toujours hémitropes autour de At et offrent l’appa- rence de prismes rhomboïdaux droits terminés par un sommet té- traèdre. Plan des axes normal à g‘ faisant un angle d’environ

a ae M : 3245" avec l’arête €tun angle de 67057 avec l’arète == . Bis-

sectrice normale à g!.

Acétate de lanthane. Prisme doublement oblique ; #h1— 130025"; 4A1—141056/; pm—117095 ; p{—11910/, Ces cris=

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taux g’altérant facilement à l’air, on n’a pu encore déterminer la . position de leurs axes optiques.

Aiguilles rhombiques accompagnant quelquefois l’azotate double 2. Ces aiguilles se rapportent à un prisme rhomboïdal droit de 95°40’ environ dont les dimensions ne sont pas encore parfaitement déterminées. Leur composition et leurs propriétés optiques devront aussi être soumises à un nouvel examen.

Azotate de lanthane ; cristaux roses très aplatis ; prisme dou- blement oblique, m{—118°30"; pm—91930’ environ; p{—96035”, Ce sel demande aussi un nouvel examen pour en déterminer les propriétés optiques. Les cristaux qu’on en a obtenu jusqu'ici sont moins nets que ceux des autres sels de lanthane et de cérium.

MATHÉMATIQUES. M. Catalan communique les propositions suivantes, relatives à la {héorie des séries (1).

Théorème I. Soit f(x) une fonction positive et infiniment dé- croissante, au moins à partir de x—0 ; soit F (x) la fonction pri- mitive de f(x); on aura, en désignant par S, la somme des pre- miers termes de la série f (1), (2), f (3)... :

S, ZE (a41)—F(1), | 4 8, EF (x) F(0). (a)

Théorème I. $, > E(u+1)—A)+5] 04 f(x) à: SG] F—0-r(0-+rçi4-1)—70 | (8) + Loto]

Théorème III.

S, D F1) F1) (020) 1)

dj), | C SC U PL) A1) 12) 55 f{a—1) o 7 +33 /().

(4) Quelques-unes de ces propositions sont connues; mais, comme on les démontrait ordinairement en employant le calcul intégral, il paraissait diffi- cile de les faire entrer dans l’enseignement élémentaire,

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Remarques. T. Les formules (A), qui sont les plus simples et les plus évidentes, sont aussi celles qui donnent le moins d’ap- proximation. Le contraire a lieu pour les formules (C). Si l’on désigne par &, 6, y les limites des erreurs qui résultent de l’em- ploi de ces trois systèmes de formules, on a

= ÉCRECI Le (1) —F(0) | , pui [rt (+1) )rtu1) | CE [ro Es ru) |- ie (1) |

+ 70 Hi rere0 | II. Si l’on applique les formules(C)à la formation du deuxième * million de termes de la série harmonique, savoir :

4 6 1 4 000 001 Er 2 000 000 l'erreur commise est inférieure à 0, 000 000 004.

III. Le terme général d’une série ayant pour limite zéro, la somme d'un nombre indéfiniment grand (1) de termes peut avoir pour limite zéro, sans que la série soit convergentc.

Séance du 3 avril 1858,

CHIMIE. États du soufre. Leur préparation. Action de La chaleur, M. Berthelot a communiqué à la Société, dans cette séance, la note suivante, relative à l’étude détaillée de la prépara- tion des divers états du soufre et à l’action qu’ils éprouvent de la part du temps et de la chaleur, c’est-à-dire à des faits connus d’une manière générale, mais dont l’examen plus approfondi n’est point sans quelque intérêt.

« I. Soufre insoluble extrait de la fleur de soufre. De toutes les variétés de soufre insoluble, c’est la plus facile à obte- nir ; elle peut être envisagée comme un type au point de vue de ses prépriétés et de ses réactions, car elle se trouve dans un état d'équilibre presque définitif.

» 800 grammes de fleur de soufre sont broyés dis) un mortier

(1) Indéfiniment grand signifie ici ; qui croît indéfiniment.

30

avec 500 à 600 grammes de sulfure de carbone, le tout est intro duit dans un ballon d’un litre et placé sur un bain-marie jusqu’à ce que le sulfure entre en ébullition. On enlève le ballon; on le laisse reposer pendant deux ou trois minutes et on décante sur un filtre sans plis le sulfure de carbone avec la portion de fleur de soufre demeurée en suspension. On répète trois à quatre fois cette série d'opérations dans la même journée, et on termine en jetant tout le soufre avec le liquide qui l’imprègne sur un filtre sans plis. Le lendemain, on détache le soufre resté sur le filtre, on le broie, on l’introduit de nouveau dans le ballon, et on recommence la même série de traitements que le premier jour. Au bout de six jours, le soufre ne cède pour ainsi dire aucune matière soluble au sulfure de carbone ; on le jette sur du papier buvard, et on le laisse se dessécher pendant un jour ou deux; puis on le replace dans le ballon; on le mouille avec 100 grammes d’alcool absolu et on fait bouillir le tout au bain-marie pendant un quart d’heure. Cette opération a pour but de transformer en soufre octaédrique, par une action de contact, une portion du soufre insoluble, moins stable que le reste et analogue au soufre insoluble extrait du sou- fre trempé. Au bout d’un quart d'heure d’ébullition, on décante l'alcool et on jette le soufre sur un filtre sans plis pour l’égoutter. On achève de le dessécher rapidement entre deux feuilles de pa- pier buvard, puis on l’introduit dans un ballon et on recommence à l’épuiser par le sulfure de carbone, en suivant la même marche que ci-dessus. Cet épuisement est terminé au bout de trois ou quatre jours. On égoutte le soufre, on le sèche en le plaçant sur du papier buvard, puis on l’étend en couche mince entre deux feuilles de papier buvard et on le conserve à l'air libre pendant deux semaines, afin de laisser échapper les liquides volatils dont il est imprégné. Enfin on le sèche dans le vide à côté de l'acide - sulfurique et on le conserve dans un flacon bouché à l’émeri.

» 300 grammes de fleur de soufre fournissent par ce procédé 15 à 80 grammes de soufre insoluble.

> Voici quelques précautions qu’il est bon d'observer. —Le sul- fure de carbone du commerce, même rectifié, n’est point suffi- samment pur pour les épuisements ; car je n’ai point trouvé d’é- chantilllon tel que 10 grammes lévaporés dans une petite capsule ne laissassent aucun résidu : il reste en général quelques traces de soufre mou et visqueux, renfermant des matières étrangères ;

o1

aussi est-il indispensable de redistiller soi-même le sulfure de carbone. Il faut éviter l'emploi d’un sulfure de carbone con- tenant de l'hydrogène sulfuré, ce qui arrive parfois, parce que l'hydrogène sulfuré exerce une action nuisible. Enfin le sulfure de carbone doit être anhydre et conservé dans des flacons secs, autrement il s’altère et jaunit.

» Le soufre insolable doit être très exactement dépouillé d’al- cool, car s’il en retient la moindre trace, il se modifie lentement par action de contact et repasse à l’état de soufre cristallisable. Dans une préparation les traitements définitifs par le sulfare de carbone n'avaient pas été suffisamment prolongés, et malgré l'exposition à l’air libre pendant plusieurs jours, le soufre rete- nait encore des traces d’alcool presque impondérables : etccpen- dant leur action fut telle que les # de soufre se trouvèrent rame- nés au bout d’un mois à l’é tat de soufre cristallisable, «Ce fait prouve combien ces phénomènes sont délicats et sous la dépen- dance de circonstances qui peuvent demeurer inaperçues faute d'une attention suffisante.

J'ai cherché à déterminer quelle sacre être l'influence du temps sur la conservation du soufre insoluble extrait de la fleur de soufre, Un échantillon préparé il y a deux ans renferme mainte- nant 33 centièmes de soufre cristallisable, Il serait intéressant de faire cet examen sur des échantillons plus anciens : malheureu - sement la découverte du soufre insoluble est trop récente pour le permettre ; mais on peut arriver au même but jusqu’à un certain point en étudiant des fleurs de soufre anciennes. Les résultats sont moins nets que s'ils avaient porté sur le soufre insoluble pur, car il se trouve intimement mélangé dans la fleur de soufre avec du soufre cristallisable : de plus, l’âge de la fleur de soufre repose seulement sur des témoignages, el on ignore à quelles influences il a pu être soumis. Toutefois sa conservation dans des collections présente des garanties qu’il est facile d'apprécier. Divers savants, MM. Bérard (de Montpellier), Stas, Ch. Deville, Guibourt, Bé- champ,Brame,Jacquelain, Personne, Riche, de Luca, Péan de Saint- Gilles, Deschamps, Barruel, ont eu l'obligeance de m'adresser des échantillons de soufre d'origine et de date diverses: je les prie de vouloir bien accepter ici l'expression de ma reconnaissance.

» Voici les résultats :

Fleur de soufre récente ; sur 400 parties, soufre insoluble 28

32 ,

Grésil pris au sommet du monticule qui se forme au-des- ;

sous du gueulard (Bérard) (1857) 23 Id. pris à la base (id.) 24 Id, pris loin du gueulard (id.) 26 Id. pris dans l’axe du gueulard près du mur opposé (id.) 30 Fleur de soufre datant de plus de 7 ans (Riche) 25 Id. ide 40 ans (Péan de St-Gilles) 27 Id, id, A0 ans 2, Id. id. 12 ans (Biame) 46 Id. de 7 à 44 ans (Ch. Deville) 16 Id. 45 ans (Barruel) 23 Id. . 20 à 25 ans (Jacquelain) 22 Id. 48 ans (Deschamps) 47 Id. 16 ans (Stas) 42

Ide 80 ans (de Luca) 42,5 ."1d 38 ans (Slas) 17 Id. 30 à 50 ans (Béchamp) 45

On voit que le sens général de ces résultats indique une dimi- nution progressive de la proportion du soufre insoluble contenu dans la fleur de soufre, sous l'influence du temps : mais cette di- minution est lente.

» II. Soufre insoluble extrait du soufre trempé. Ce sou- fre se distingue du précédent par sa résistance moindre à l’action de la chaleur et à celle des agents modificateurs. Ainsi il suffit de le faire bouillir avec de l’alcoo! pendant quelques minutes pour le changer en soufre cristallisable,

» Pour le préparer, on chaufle dans un creuset du soufre én canons jusqu’à ce qu'ilsoit fondu et ait dépassé la première pé- riode de fluidité, puis on Ie coule en filet très mince dans une terrine d’eau : on recueille les filaments, on les sèche avec du pa- pier buvard et on les broie dans un mortier avec du sulfure de carbone : cette opération se fait péniblement, en raison de l’élas- ticité du soufre. On introduit le tout dans un ballon et on fait bouillir au bain-marie pendant quelque temps. Le soufre , d’abord élastique, translucide et presque entièrement insoluble, devient opaque et durcit sous le dissolvant. On peut alors le broyer : on fait bouillir de nouveau avec du sulfure de carbone et on jette la masse sur un filtre sans plis. Le lendemain, on reprend le soufre, on le broie avec soin en le mélangeant avec du sulfure de carbone, on Je fait bouillir avec ce liquide, on décante sur un filtre; on

35

répète cette opération trois ou quatre fois par jour. Chaque soir, on jette la masse sur un filtre sans plis. Le lendemain, on la'détache, on la broie avec soin en la mélangeant avec du sulfure de carbone et on recommence. L’épuisement est très lent, et dure plus d’un mois, parce que le soufre demeure mêlé de soufre mou insoluble, lequel durcit progressivement en formant une petite partie de soufre cris- tallisable, Cette circonstance communique au soufre insoluble ex- trait du soufre trempé une certaine plasticité que ne possède pas le soufre insoluble de la fleur de soufre. Chaque matin, la masse du premier, qui se trouve sur le filtre, est agglomérée à la manière d’une masse d’argile desséchée, et il est nécessaire de la broyer de nouveau. En la détachant du filtre, il faut se tenir en garde con- tre son adhérence au papier et rejeter les portions que l’on ne peut détacher sans enlever quelque parcelle du filtre.

» Quand l'épuisement est terminé, on égoutte le soufre sur le papier buvard, on l’abandonne à l'air libre pendant quelques jours et on l’enferme : il n’est guère possible d'obtenir ce soufre dans un état de pureté complète, car il est dans un état de trans- formation continue ; au bout de quelques jours, il contient déjà du soufre cristallisable. Il renferme d’ailleurs une petite quantité de soufre appartenant à la variété extraite de la fleur et susceptible de résister à l’action modificatrice de l’alcool.

» 300 grammes de soufre trempé ont fourni 80 grammes de ce

“soufre insoluble.

» Voici deux expériences relatives à l'influence du temps : un échantillon pur, préparé il y a deux ans, contient maintenant 38 centièmes de soufre cristallisable ; ua échantillon de soufre trem- pé, préparé il y a un an, contenait à l’origine 20 centièmes de soufre insoluble ; il n’en renferme plus que 10 centièmes.

» IIL. Soufre octaëdrigue.— La préparation du soufre octaé- drique au moyen du suliure de carbone est bien connue; mais je crois utile d'appeler lattention sur la circonstance suivante : ex- trait du soufre en canon, il retient dés traces de soufre mou susceptible de devenir insoluble ; 3 ou 4 cristallisations, au moins, sont nécessaires pour l'obtenir pur.

» IV. Soufre amorphe des hyposulfiles. Ce soufre peut affecter A états différents successifs : l’état liquide et soluble dans le sulfure de carbone ; l’état liquide et insoluble dans le même dissolvant ; l’état pâteux et insoluble : enfin l’état solide et inso-

Extrait de l'Institut, Att section, 1858, 5

3h luble, Quel que soit son état, est la moins stable de toutes les variétés, car une tempé rature de 400 le transforme presque im- médiatement, aussi bien que la plupart des actions que l'on peut exercer sur lui. 41 se distingue très nettement du soufre du chlo- rure, lequel affecte les mêmes états avec une stabilité beaucoup plus grande.

» L'expérience suivante suffit pour caractériser la préparation du soufre des hyposulfites :

» 700 grammes d’ hyposulfite de soude ont été dissous dans 2 À litres d’eau, ct on a versé la liqueur froide dans un litre d’acide chlorhydrique pur et fumant. 4 heures après, on a agglomeré les fiocons de soufre avec une baguette et décanté le liquide aqueux encore trouble. On a lavé légèrement la masse molle de soufre précipité, et on l’a broyée avec du sulfure de carbone.

» Une portion est demeurée insoluble ; elle pesait 43:r,5 ; une autre portion s’est dissoute, on à évaporé immédiätement la dis- solution sulfocarbonique, et on a obtenu du soufre huileux ; après refroidissement, on à agité ce dernier à plusieurs reprises avec du sulfure de carbone : la majeure partie est demeurée huileuse et insoluble. Elle pesait 34sr,7. Une portion s'était dissoute ; on a éva- poré sa dissolution, laissé refroidir et repris par le sulfure de car- bone : une portion est demeurée insoluble à l’état visqueux et opa- que; elle pesait 2#",3.0n a réitéré encore deux fois ces évaporations, traitements,etc.,et obtenu 0,9 dc soufre insoluble,et 32,7 de soufre en partie mou, en partie cristallisable. Toute cette série d'opéra- tions, effectuées aussi rapidement que possible, a duré une heure et demie. Elle à fourni sous forme insoluble la majeure partie du soufre des hyposulfites, comme le prouvent les nombres cités plus haut, et cela malgré l’intervention de la chaleur nécessaire pour chasser le dissolvant.

ÊTe

» Mais ce soufre est loin de se trouver dans un état définitif. En effet voici ce que les soufres de HU de précédente sont de- venus.

» La portion primitivement insoluble n'est pas du soufre pur, mais un mélange de soufre, d’eau et de matière fixe montant à 7 centièmes el formé surtout par du chlorure de sodium. Le len- demain, le soufre qu’elle renferme, traité par le sulfure de car- bone, lui a cédé les 26 centièmes de son poids, sur lesquels 4 sont devenus insolubles par refroidissement, ce qui réduit à 7

30 centièmes le soufre cristallisable régénéré dans ect iutersalle de temps. —On a traité lamasse par l’eau froide pour enlever les matiè- res salines, puis on l’a épuisée par le sulfure de carbone. —Le len- demain, une portion notable était redevenue soluble, et au bout de 5 jours la totalité de ce soufre ou sensiblement s’est trouvée changée en soufre cristallisable, en même temps toute sa masse a blanchi.

» Le soufre huileux insoluble, au bout de 24 heures, est devenu solide. Il a cédé alors au sulfure de carbone 43 centièmes de sou- fre soluble, dent 3 centièmes sont redevenus insolubles par le fait de l’évaporation ; les autres 40 centièmes étaient déjà trans- formés, en soufre cristallisable. On a épuisé le soufre insoluble par le sulfure de carbone; mais le lendemain une portion était déjà devenue soluble, Au bout d’une semaine, ce soufre, malgré la formation d’un peu d'hydrogène sulfuré à la présence d’une trace de matière étrangère, est jaune et renferme encore un tiers de soufre insoluble.

» Enfin les 38,7 demeurés solubles le premier jour, ont fourni le second jour 0,7 de soufre insoluble et 3,0 de soufre ociaédrique.

» Ges faits, joints à ceux que j'ai publiésil y a un an sur la trans- formation du soufre mou des hyposulfites en soufre cristallisable au sein de sa dissolution sulfocarbonique,définissent les conditions de la formation du soufre insoluble des hyposulfites, Ils montrent que ce soufre doit être isolé et étudié immédiatement.

» Du reste sa transformation sous l'influence du temps, bien que démontrée pär les faits précédents, n’est pas aussi complète qu’on pourrait le croire : en effet des échantillons de ce soufre, conservés à l’état brut et tout imprégnés de chlorure de sodium, renfermaient encore au bout d’un an, l’un 6 centièmes, un autre 25 et un dernier jusqu à CA centièmes de soufre insoluble.

» V. Soufre amorphe extrait du chlorure de soufre. —Ce soufre peut affecter trois états successifs : l’état liquide et solu- ble dans le sulfure de carbone ; l’état mou et insolable, et l'état solide et insoluble, Sous ces trois états, il est beaucoup plus stable que le soufre trempé, lequel est plus stable que le soufre des hy- posulfites, ces divers soufres étant comparés dans des états cor- respondant(s.

» Les conditions de la pr éparation du soufre insoluble extrait du chlorure de soufre sont définies par l’expérience suivante :

» 4 500 grammes de chlorure de soufre du rommerce, d’une

composition intermédiaire entre Le protochlorure etle perchlorure,

ont été distribués dans 8 flacons de deux litres et demi chaque, à

large ouverture. On a rempli les flacons d’eau ordinaire et on a

agité vivement. La température ambiante était voisine de 0°. Deux

fois par jour on renouvelle l’eau et l’on agite fréquemment. Au

bout de 12 jours, les flacons renferment du soufre, en partie dur,

en partie mou et visqueux, contenant un peu de chlorure non

décomposé et d’acide sulfureux. Les dernières eaux de lavage

présentent une odeur excessivement faible d'hydrogène sulfuré.

» On détache le soufre, on l’égoutte sur du papier buvard, on

le pèse : son poids s'élève à 440 grammes. Puis on le broïe avec

du sulfure de carbone dans un mortier, et on fait bouillir le tout

dans un ballon chauffé au bain-marie : il se forme ainsi un mé-

lange émulsif entre le sulfure de carbone et le soufre encore hu-

mide : on jette le tout sur un filtre sans plis. La filtration est très

lente et fournit un liquide orangé. Le lendemain, le soufre est égoutté; on le détache des filtres et on répète la même série d’opé- rations les jours suivants. Bientôt le soufre devient tout à fait dur,

et il s’en sépare quelques gouttelettes d’eau que l’on enlève avec soin. Chaque fois que l’on détache le soufre des filtres, il faut éviter de détacher avec lui le papier auquel il est adhérent, et

perdre de préférence une portion du soufre en rejetant le filtre. Au bout de 6 jours, le soufre est devenu plus cohérent et plus so- lide, il cesse de former une émulsion avec le sulfure de carbone. Il ne renferme plus que 2 ou 3 centièmes de soufre soluble, comme on peut le vérifier en 6pérant sur un échantillon pesé de quelques décigrammes. Avant de continuer le traitement, on réunit à ce

soufre la portion insoluble fournie par la transformation du soufre tout d’abord dissous par les eaux mères. En effet, la première eau mère. abandonnée pendant 24 heures dans un flacon, a déposé

spontanément 12 grammes de soufre insoluble ; la 2e et la 3e eau

mère en ont fourni une petite quantité ; enfin, les 6 premières

eaux mères évaporées au bain-marie ont fourni 155 grammes de

soufre liquide, susceptible de se redissoudre dans le sulfure de

carbone au moment il vient d’être isolé. Ce soufre retient un

peu de chlorure de soufre. Abandonné pendant deux ou trois

jours sous une couche d’eau, il durcit et se change en partie en soufre insoluble, sans que son poids change de plus d’un centième.

On l’a traité par le sulfure de carbone, de la même manière que

27

la masse prunitive, Au bout de 2 traitements, il était presque épuisé, et avait fourni 110 grammes de soufre insoluble et A3 gr. de soufre liquide soluble. On a réuni le soufre insoluble à la masse primitive et on a continué à traiter par le sulfure de carbone, en opérant de la manière suivante : —On broie le soufre avec da sulfure de carbone, on introduit le tout dans un ballon, on fait bouillir au bain-marie, on laisse déposer et on décante le sulfure surnageant. —A la fin de la journée, on jette toute la masse sur un filtre sans plis pour l’égoutter complétement. Le lendemain, on la trouve agglomérée, en raison dela plasticité que lui communique la présence du soufre mou insoluble. Ce soufre mou retarde beau- coup les traitements, en raison de la lenteur avec laquelle il ar- rive à son état de cohésion définitive, en fournissant du soufre solide insoluble et du soufre mou soluble, Au bout de trois mois, l'épuisement n’est pas encore terminé, et surtout le soufre n'a pas encore pris dans toute sa masse sa cohésion définitive : cepen- dant il ne renferme plus que des traces de soufre soluble ou susceptible de le devenir, et des traces presque impondérables de chlorure de soufre retenu. On le délaie alors dans 8 à 40 fois son poids de sulfurede carbone et on laisse digérer pendant 8 jours; on jette sur un filtre, et le soufre égoutté, puis exposé à l'air libre pendant une semaine, peut être conservé. Cependant il ne faut pas.oublier que le soufre insoluble du chlorure ne possède ses propriétés tout à fait normales que quand il a été conservé pendant quelques mois et épuisé de nouveau après ce laps de temps.

_ » Dans l'expérience précédente, on a cherché à déterminer la proportion de soufre octaédrique formé durant les traitements. Pour atteindre ce but, il suffit d’évaporer à mesure les eaux mères successives depuis la 6e, et de réunir les résidus qu’elles laissent aux 43 grammes de soufre soluble extraits du soufre des premières eaux mères. On abandonne le tout pendant quelques jours sous une couthe d’eau, puis on traite par le sulfure de carbone : on obtieñt ainsi une nouvelle proportion de soufre insoluble et 30 gr. de soufre cristallisable en gros octaèdres. Ces octaèdres sont oran- gés et imprégnés de soufre mou, dont la présence se manifeste d’une manière assez curieuse. En effet, les octaèdres placés sous l'eau ne tardent pas à se ternir et à devenir opaques : le soufre mou qui les imprègne se change en soufre insoluble en produisant un phénomène de pseudomorphose assez curieux ; on croirait voir

o al JC

des cristaux de soufre changés en soufre insoluble; mais la por- tion devenue insoluble est très faible Si l’on traite le tout par le sulfure de carbone, celui-ci évaporé fournit des cristaux octaédri- ques jaune citron, lesquels ne tardent pas à se ternir comme les premiers par suite de la transformation en soufre insoluble des traces de soufre mou qu'ils retiennent encore. Quoi qu’il en soit, on voit que les 440 grammes de soufre brut fournis par le chlo- rure de soufre ont fourni seulement 30 grammes de soufre cris- tallisable, le reste étant tout d’abord insoluble ou l’étant devenu ; ces 30 grammes représentent 7 centièmes seulement du poids du soufre total. On peut contrôler ce résultat en déterminant la pro- portion-de soufre insoluble fourni : par le soufre brut primitif, et par les dépôts durcis fournis : par les eaux mères successives, depuis la première jusqu’à la dernière; par les eaux mères obte- nues en traitant les premiers dépôts par le sulfure de carbone ; lo par les eaux mères obtenues en traitant les dépôts durcis des eaux mères précédentes, On calcule ainsi la proportion du soufre . définitivement cristallisable par un procédé indépendant de toute perte de matière durant les expériences : le poids, calculé par cette voie, s’élève à 9 centièmes.

» Bref, le soufre fourni par le chlorure de soufre est presque en- tièrement insoluble ou susceptible de devenir tel, pourvu qu’on l'isole dans un espace de temps assez court. Quant à la poriion cristallisable, on peut admettre qu’elle s’est formée en vertu de la stabilité prépondérante du soufre octaédrique, en partie durant l’'évaporation du dissolvant, laquelle n’est complète que par l’in- fluence soutenue d’une température voisine de 100, et en partie sous l'influence prolongée de la distension au sein d’un dissolvant. Cette dernière influence peut être établie d’une manière directe. A cet effet, on a pris une dissolution sulfocarbonique, renfermant 54 grammes de soufre mou extrait du chlorure et on l’a partagée en deux parties égales. L'une, contenant 27 grammes, a été évapo- rée immédiatement ; le produit abandonné sous une couche d’eau pendant 24 heures, a durci ; on l’a repris par le’sulfure de ca*- bone, et la portion soluble a été isolée par évaporation et traitée comme la première. Cette opération réitérée a formé finalement, au bout de quelque jours, 3 grammes de soufre octaédrique. L'autre portion contenant 27 grammes à été abandonnée à elle-même pendant 3 mois. Il s’en est séparé 4 grammes de sou-

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fre insolubie, spontanément; au bout de 3 mois, on a soumis la liqueur aux mêmes opérations que ci-dessus et obtenu 12 gram- mes de soufre octaédrique. Ainsi le soufre mou du chlorure se change spontanément en soufre octaédrique au sein de sa disso- _ lution sulfocarbonique. J'ai établi ailleurs qu'il en est de même du soufre mou des hyposulfites ; mais le soufre mou du chlorure se change bien plus lentement et bien moins complétement que le soufre mou des hyposulfites.

» Cette stabilité supérieure du soufre du chlorure se manifeste aussi dans les conditions de formation lente : en effet, j'ai prouvé que la décomposition lente des hyposulfites produit surtont ou même presque exclusivement du soufre octaédrique ; or du soufre provenant de la décomposition spontanée du chlorure sous des influences hygrométriques dans des vases mal bouchés conten:it encore, au bout de 7 ans, 50 centièmes de soufre insoluble ; un autre échantillon, 27 centièmes.

» VI. Action de la chaleur sur les diverses variétés de soufre insoluble. J'ai étudié cette action dans deux conditions trè: distinctes, fe J'ai maintenu à 00° les diverses variétés de soufre insoluble et déterminé la proportion de soufre insolable non trans- formé, au bout de divers intervalles de temps. J'ai maintenu ces mêmes variélés à 1419, c’est-à-dire au voisinage de la tem - pérature de fusion du soufre octacdrique et examiné les dégage- ments de chaleur auxquels peut donner lieu la transformation des soufres insolubles en soufre cristallisable.

» 1. Expériences faites à 1002.

100 p. soufreinso- Après Après 15 Après Après Après Ajn'5

luble extrait ÿ minules. 30 A 2 5 - dusoufre liquide minutes, ? Entière- minutes, heure, heures, heures. durci des hypo- ment sulfiles 16 transformé, D] » !) » dusoufre trempé 74,5 54 20 0,3 » » dela ( Acréchant, 88 60 54 23 44 Ge fleur | échant, 88,5 74,5 » 31 95 4% Sul | eréch. 663 D rise 29) AN AS. Ut non ]|2ECch 57 | 30 27 15 13 ai

» Ainsi le soufre des hyposulfites est changé complétement au bout d’un quart-d’heure : c’est le moins stable, Le soufre extrait du soufre trempé ne résiste qu’une heure. Le soufre extrait de fa

0

fleur-n’est pas encore complétement changé au bout de 5 heures, et présente une stabilité sensiblement différente selon les échan - üllons ; le premier avait été préparé selon la méthode décrite plus haut ; le second avait en outre éprouvé l’action des vapeurs d’al- cool pendant un mois, circonstance qui avait transformé en soufre cristallisable les de la masse.

» Enfin le soufre extrait du chlorure, au moins aussi stable que celui de la fleur, présente une circonstance curieuse; sa trans- formation commence beaucoup plus vite, ce qui m@ paraît à la présence dusoufre mou insolubleet non arrivé à sa cohésion défini- tive dans l'échantillon employé , dont la préparation était récente. Sil’on compare la transformation du soufre du chlorure à la trans- iormation du soufre de la fleur, à partir de la fin du premier quart d'heure seulement, on remarquera que la transformation du premier soufre est en réalité plus lente que celle du second.

» Le soufre insoluble,extrait du soufre huileux durci des hypo- sulfites porté à 100°, se transforme assez rapidement pour que l’on puisse constater les phénomènes calorifiques qu'il éprouve au même moment : dans une expérience, la température d’an thermomètre noyé dans la masse de ce soufre s’est élevée à 107°; le soufre s’était aggloméré, mais sans entrer en fusion.

2. Expériences à 4110. Dans un tube de verre mince, on introduit quelques grammes de soufre et un thermomètre sensible. On place le tube dans un bain d’huile maintenu entre 411 et 112 degrés. Le soufre insoluble, extrait du soufre trempé, fond bientôt, et la température s'élève de quelques degrés au-dessus de la tem- pérature du bain, Au bout d’un quart d'heure, les deux thermo -

mètres marquent la mêmetempérature.l.e soufre renferme encore 6 centièmes de soufre insoluble.

» Le soufre insoluble, extrait de la fleur de soufre, se comporte de la même manière : seulement, le dégagement de chaleur est notablement plus intense et dure plus d’une demi-heure. Au bout d’une heure, le soufre renferme encore 9 centièmes de soufre insoluble. |

» Le soufre insoluble, extrait réceminent du chlorure, se com- porte comme le précédent : le dégagement de chaleur est encore plus prolongé. Au bout d’une heure, tout est changé en soufre cristallisable.

» Deux Causes peuvent concourir aux dégagements de chaleur

RE observés dans les expériences précédentes : la transformation da soufre insoluble en soufre cristallisable, et aussi le dégagement de la chaleur retenue par le soufre mou qui n’a pas encore pris sa cohésion définitive.

» Pour éliminer autant que possible le dernier phénomène, j'ai opéré avec du soufre insoluble extrait d’une fleur de soufre qui date de près de 50 ans. Ce soufre dégage également de la chaleur ; mais le dégagement est plus lent et semble moins considérable que celui qui répond à la fleur de soufre récente. La tempé- rature de 110°, soutenue pendant dix minutes, l’agglomère sans le fondre, et il contient encore 83 centièmes de soufre insoluble. Au bout d'une demi-heure, à 111°, il n’est pas encore compléte- ment fondu et renferme 10 centièmes de soufre insoluble non transformé, »

Séance du 8 mars 1858,

Dans la dernière séance M. L. Foucault, cherchant à définir le pouvoir pénétrant de son dernier télescope de 32 centimètres de diamètre, a évalué à deux tiers de seconde la distance angulaire des dernières parties distinctement visibles au foyer de lin- stument. Ayant vérifié de nouveau les données relatives à cette détermination, M. Foucault à reconou qu'il a apprécié l’instra- ment un peu au-dessous de sa valeur. En réalité ce télescope dédouble la demi-seconde ou rend distinctement visible deux points écartés de la quatre-cent-millième partie de leur distance au miroir objectif. -

Séance du 10 avril 1858.

ZOOLOGIE. -— L'observation suivante relative à un fœ£us concu par une mule, a été communiquée par M. Pierre Gratiolet,

« M. Paul Bert, à son retour d’un voyage en Afrique, a bien voulu me remettre un fœtus conçu par une mule qui mourut en avortant, dans la plaine du Hodna, près de Biskra. Il tenait ce fæ- tus de M. Schmitt, pharmacien de l'hôpital militaire de Biskra, “qui a constaté de visu ce fait intéressant.

» Le phénomène de la conception chez les mules est en Europe extrêmement rare, etne l’est pas moins en Afrique, si l’on en juge par l’épouvante le fait dont nous parlons jeta les Arabes. Ils crurent à la fm du monde, ct pour conjurer la colère céleste

Extrait de l’Znstitut, 47€ section, 1858, 6

pratiquèrent de longs jeunes ; aujourd’hui encore, ils ne parlent de cet événement qu'avec une terreur religieuse. Ainsi voyons- nous de nos jours vivre encore en Afrique ces croyances qui dic- tèrent autrefois les livres bizarres de Julius Obsequens et de Con- rad Lycosthènes. Le gardien de la mule affirma à M. Schmitt que la mule avait été couverte par un chameau. Geci est une assertion d’Arabe qui, ainsi que M. Bert me l’a fait remarquer, ne mérite pas un examen sérieux. »

CHIMIE. Dans la séance du 40 avril, M. Wurtz a fait aussi communication suivante :

Lorsque, par la réaction du charbon sur le phosphate acide de chaux, le phosphore est mis en liberté, il sabit l'influence de la chaleur rouge à laquelle cette réaction s’accomplit. J'ai cherché à le soustraire à cette influence en le mettant en liberté à la tempé- rature ordinaire. Il se présente, dans ce cas, avec les caractères du phosphore amorphe. Voici le procédé qui a été employé : Dans du sulfure de carbone parfaitement sec, on dissout du phos- phore et de l'iode dans les proportions nécessaires pour former le composé Ph 12. La combinaison étant effectuée, on ajoute du mercure dans le rapport de 1 équivalent de ce métal pour 1 équi- valent d’iode. On abandonne le flacon à lui-même et on l’agite fréquemment. Peu à peu, à la lumière diffuse, ou dans l’obscu- rilé, on voit le mercure se convertir en iodure rouge, et une pou- dre rouge-brun est mise en liberté. Au bout de deux mois, on la recueille, et on la traite par l’iodure de potassium. Il reste une poudre brune. Projetée sur un charbon incandescent, cette subs- tance brûle avec un viféclat. Elle s’enflammie de même dans le chlore. L’acide nitrique, même très faible, l’'oxyde vivement. E; posée longtemps à l'air humide, elle finit par s’acidifier légère- ment. Elle est complétement insoluble dans le sulfure de carbone. En la distillant dans un courant de gaz hydrogène, on en retire de 50 à 80 pour 100 de phosphore ordinaire soluble dans le sul- fure de carbone. Cette subs'ance est du phosphore amorphe en- veloppant encore un peu d’iodure de mercure et mêlée à une petite quantité de mercure formé, sans doute, par l’action de l'iodure de potassium sur quelques traces d’iodures mercureux.

L'auteur continue ses recherches : la présente note n’a pour but que de prendre date.

Séance du 47 avril 1858.

Dans la séance du 17 avril, M. Thenard a annoncé : que, sous l'influence des sels de chaux ou d’alumine, la décomposition des feldspaths est singulièrement activée ; que, par suite, si l’on fait bouillir pendant plusieurs jours du phosphate d’alumine avec de la couverte de Sèvres, on obtient du phosphate de po- tasse; que le plâtre donne du sulfate de potasse ; que le nitrate de chaux donne du nitrate de potasse. Ges expériences ont conduit M. Thenard à expliquer l’action du plâtre sur lés prai- ries artificielles ; le plâtre sert d’agent assimilateur d’une plus grande quantité de potasse, substänce dont les prairies artificielles sont très avides. Du reste M. Thenard va continuer et développer ces observations, et les étendre à l’agriculture, comme il l’a fait pour les phosphates. Mais on sait combien ces expériences sont longues. La note que nous donnons ici n’est donc qu’une prise de date sur laquelle nous reviendrons en temps et lieu.

Séance du 24 avril 1858.

RÉSISTANCE DES SOLIDES. M. de Saint-Venant présente les considérations et communique les résultats qui suivent, sur la position des points dangereux ou les plus exposés, dans la torsion des prismes ou cylindres ayant des bases de forme variée.

Ces points, commencerait la désagrégation qui précède la rupturé si la torsion excédait une certaine limite, sont ceux le glissement que cette torsion détermine, c’est-à-dire l’inclinaison prise par les fibres ou arêtes longitudinales devenues des hélices, sur les éléments des sections planes transversales devenues des surfaces légèrement courbes, a la plus grande valeur possible.

Il a été démontré par l’auteur (Mém. des Savants étr. ,t. XIV, et l'Institut, 1853, 1002, et 1855, 1124) que lorsque la section est une ellipse, ou un rectangle, ou un triangle équilaté- ral, ou une de ces courbes du quatrième et même du huitième degré, symétriques et égales dans deux sens rectangulaires, pour lesquelles les glissemerfs s’expriment en fonction entière des coor- données, ces points dangereux ou de plus grand glissement se trouvent aux endroits du contour les plus rapprochés du centre. ou de l'axe de torsion, et non pas, comme on Île pensait autre- fois, aux points les plus éloignés. |

Mais cette loi ne saurait être générale, On démontre bien qu'aux

ll extrémités des plus petits et des plus grands diamètres des sections symétriques le glissement est un maximum un minimum ; mais on démontre aussi qu'aux angles rentrants des sections, lors- qu'elles en offrent, les fibres ou arêtes restent normales à leurs éléments superficiels, en sorte que le glissement y est nul comme à leurs angles saillants ; d’où l’on peut inférer que lorsque les sections offrent des parties rentrantes arrondies mais d’une cour- bure très prononcée, le glissement doit y être un minimum et non un maximum, et qu’il doit y avoir, sur le contour, des points de plus grand glissement, intermédiaires entre ceux qui sont à la plus petite et ceux qui sont à la plus grande distance du centre. C’est ce que l’auteur de la communication a reconnu, par l’a- palyse, sur les courbes du quatrième degré symétriques par rap- port à deux droites rectangulaires, mais non égales dans les deux sens que ces droites déterminent.

1% Ces courbes, dont la figure = ci-contre offre à peu près tous 7 les types, sont représentés par l'équation suivante(/’Institut,

4124, et Sav. ctr., note de

l'art. 404) : Cy2 +072 —n(b? 0?) (y2—2° ) ny" —6y" 2 +24) (14) 207 20, 2c sont le plus grand et le plus petit diamètre, dirigés respectivement suivant les axes AUU des y et des z (en sorte que y2=—=b? pour. z=—=0 et ——c. pour y—0), et » un DOmREE qui doit rester compris entre

1/51 2

= il}; AI 0u ep De = TEE Pour que les courbes soient fer-

mées. Les Rue de la partie supérieure de la figure sont rela-

tives aux valeurs négatives de » ; celle qui enveloppe les autres $ c?

répond à n— sa limite négative FONE Les courbes de la par-

tie inférieure sont données par les valeurs positives de 7 ; celle V/2—1

qui enveloppe les autres répond à RE CE l’équa-

tion peut être écrite :

45 Cy—(v 2—1) 2027 [a (2-1) y —027=0 en sorte que le contour est formé alors par deux hyperboles qui se coupent, ct dont Îles asymplotes ont pour équation y = + (2-1; et z + (J/2—1)y. La courbe en & répond à «—V; et on a figuré, même, des courbes composées de deux orbes s€- parés, pour lesquelles le petit diamètre 2c est imaginaire, ou c?est

négatif.

Comme les courbes ovales de la partie supérieure de la figure n’ont pas de portion rentrante, les points dangereux ou de plus orand glissement, lorsqu'on les prend pour sections de prismes tordus, sont constamment aux extrémités du petit diamètre 2c.

Il en est de même des courbes de la partie inférieure, répon-

dant à > positif, quand le rapport du plus petit au plus grand

diamètre ne descend pas au-dessous d’une certaine limite qui diminue avec n.

Mais si - est moindre que cette limite, les extrémités du petit

diamètre deviennent des points de minimum du glissement. Les points de plus grand glissement ne passent pas pour cela aux ex- trémités du grand diamètre 20 ; ils se trouvent, au nombre de quatre, placés entre les premières extrémités et les secondes.

La : Le L Q C Pour déterminer cette valeur-limite du rapport =, DENTS de

laquelle le glissement.aux extrémités du petit diamètre cesse d’être uu maximum et devient un minimum parmi ceux qui ont lieu dans le voisinage sur le contour de la section, il faut exprimer que Je coefficient différentiel du second ordre du glissement par rap- port à l’abscisse y, pour des valeurs correspondantes de l’ordon- née z du même contour, passe d’une valeur négative à une valeur positive, c’est-à-dire est égal à zéro quand y—0, z°—=c°. Or, g étant le glissement, on a g°—g”+95", g’et g/” étant ses com- posantes ou projections suivant y et 3, déterminées par —g" (°c) = 0201 + (1422) (b®—c2)—in (3y°—2°)] g' (020?) —0y [4 (1427) (b2—c°) Lin (y2—822)] 6 est l'angle de la torsion par unité de longueur du prisme,

À6

En ajoutant les carrés, et égalant à zéro après avoir différentié

hr as deux fois par rapport à y, et remplacé ae Par sa valeur tirée 22) RUE AE À d.z° de l’équation du contour, puis faisant y—0, z?—c?, 0, y

\

c? on obtient entre et le rapport À l'équation du second degré :

2 (1 —15n + 38n°) Gé) a ue ) En (n+1)=0, d’où l’on tire successivement: Pour 7 —0,2071 ; 0,2: 0,1; 0,0827; us: 0,04; 0

C 503247; 0,320; 0,249; 0,2332; 0,192; 0,097; 0.

Les points dangereux restent donc aux extrémités du petit diamètre 2c, ou aux endroits les plus proches de l’axe de torsion (qu’on suppose passer au centre de la section) tant que le rap-

c port D des deux diamètres ne descend pas au-dessous de

RUE MÉRITE rar Pa+6y2 valeur 0,207107. Quand » n’a que la valeur 0,1, ce rapport peut descendre à 0,249 ou au quart à peu près, etc.

ou du tiers environ, » ayant sa plus grande

c ' Lorsque 3 descend au-dessous de ces valeurs numériques, les

quatre points dangereux sont plus ou moins à droite et à gauche des extrémités du petit diamètre 2c. Le carré de leur dbsise y

es (+2) [0—e (1 L6p/2)1 lorsque x 0,2071 —.

vi, cette abscisse, ainsi que le plus grand glissement qui doit entrer dans l’équation de résistance permanente à la rupture, se déterminent par tâtonnement numérique quand » a une autre _ valeur.

Quelques-unes des sections considérées iei peuvent avoir un intérêt pratique, car on peut leur assimiler plus moins celles

À'7 des rails de chemin de fer, qui sont soumis quelquefois à des efforts tendant à les tordre.

Seance du À mai 1858,

M. Léon Foucault fait connaître à la Société les résultats qu’il a obtenus en poursuivant ses études sur la construction des téles- copes en verre argenté.

« Depuis le jour de ma première communication, dit-il, les quinze mois qui se sont écoulés ont montré que l'argenture sur verre se conserve bien et qu'on peut désormais l’introduire sans crainte dans la composition des grands instruments d’opti- que. D'ailleurs la réaction par laquelle le dépôt s'opère a été régularisée de telle sorte qu’il arrive bien rarement de manquer une pièce.

» L’instrument présenté au commencement de l’année dernière et qui s’est conservé intact a 0",9 de diamètre réel et 0,50 de foyer.

» M. Secrétan, qui avait exécuté le travail du verre, a abordé sans difficulté la construction d’un plus grand modèle qui pré- sente une ouverture réelle de 0",18 et une longueur focale de 1",50. Ces deux grandeurs de télescope sont actucllement dans le commerce. |

» Ayant principalement pour but de réaliser les grands pouvoirs

optiques au profit de lastronomie. physique, j'ai encore réussi avec le concours de M. Secrétan à me procurer deux miroirs de 0m,22 et 0,36 de diamètre, lesquels donnent de très bonnes images à la distance focale principale de 3,50, * » J’estime que ces images sont bonnes, parce qu’elles présen- tent le même caractère de netteté et de limpidité qui déjà consti- tuaient les qualités dominantes des instruments plus petits fondés sur-le même principe. Mais pour échapper aux appréciations va- gues qui laisseraient place aux illusions, j'ai voulu exprimer en nombres la valeur optique de ces deux miroirs considérés comme objectifs de télescope.

» Supposant qu’une échelle, divisée en parties égales alternati- vement noires et blanches, s'éloigne jusqu’à ce que les parties examinées dans l'instrument se confondent les unes avec les au- tres, la distance de l'échelle au miroir, divisée par l'interv alle qui

[a] O

sépare es milieux de Geux parties homologues consécutives , donne la mesure absolue de la netteté ou du pouvoir pénéWrant.

» C’est ainsi que j'ai reconnu que mon télescope de 0",32 montre distinctement les deux tiers de la seconde, ou, en d’autres termes,qu’il rend isolémentvisibles deux points écartés de la trois- cent-millième partie de leur distance au miroir.

» La netteté ainsi définie rend les instruments comparables sans qu'il soit nécessaire de les essayer côte à côte ; il sera donc possible d'éviter l’équivoque et de suivre en connaissance de cause les progrès accessibles au nouveau système de télescope. »

Séance du 15 mai 1858.

RÉSISTANCE DES SOLIDES. M. de Saint-Venant commu- nique quelques résultats relatifs à la lorsion d'un cylindre ou d'un prisme quelconque autour d'un axe extérieur, parallèle à ses arêles.

Les forces à appliquer tangentiellement aux divers éléments superficiels des bases circulaires d’un cylindre droit pour le main- tenir tordu uniformément d’un bout à l’autre sont les mêmes, dit-il, soit que la torsion ait lieu autour de l'axe de figure ou au- tour tout axe parallèle, pourvu que cette torsion soit érès petile en sorte qu’on puisse négliger comme petites du second ordre les forces nécessaires pour féchir en même temps l'axe de figure en hélice lorsque l’axe de torsion ne se confond pas avec lui.

Cette propriété n’est pas particulière au cylindre à base circu- laire. Elle a lieu pour un cylindre on prisme à base quelconque ; ec l’on démontre facilement, soit en faisant un calcul complet des forces pour le cas général des bases dont le plan se change par Id torsion en une surface qui a une coordonnée exprimable en fonc- tion entière des deux autres, soit en raisonnant sur les équations différentielles qui s'appliquent à des bases absolument quelcon- ques, que quel que soit l’axe, parallèle aux arêtes, autour duquel une petite torsion uniforme estopérée, les glissements, c’est-à- dire les inclinaisons prises sur les éléments des sections transver- sales primitivement planes par les fibres devenues des hélices, sont toujours les mêmes, et que, par conséquent, les forces tan- gentielles, qui sont proportionnelles à ces glissements, ont les mêmes intensités (toujours quand on néglige les petites quantités

À - \ 4 ! « 4

A9

d’ordre supérieur) quel que soit l’axe autour duquel la torsion est supposée effectuée.

On réalise facilement la torsion d’un prisme autour d’un axe extérieur en disposant symétriquement, de l’autre côté de cet axe, un deuxième prisme pareil au premier et en les unissant en- semble par plusieurs liens solides de manière qu’en se tordant simultanément ils se regardent toujours par les mêmes arêtes si- tuées toutes deux dans un plan passant par l’axe intermédiaire, et que cependant leurs sections et leurs fibres soient partout libres de s’incliner et de se courber. L’effort à faire est égal à la somme de ceux qu’il faudrait développer pour imprimer à chacun des deux prismes la même torsion autour d’un axe intérieur, car on démontre que les forces tangentielles on transversales qui font tordre uniformément et qui sont désignées par g'dw, g'do ou par £:,do, g,.dw à divers mémoires (surtout au t. XEV des Sa- vants étrangers) se réduisent à un couple. ou qu’on a constam- ment J&z,du—0, f/g,,dw—0 ; or le moment de ce couple est, comme on sait, le même autour de tous les axes perpendiculaires à son plan, qui est ici celui d’une des deux bases du prisme.

M. Léon Foucault annonce à la Société qu’il est parvenu à modifier la figure d’un miroir de verre primitivement sphérique, au point d’en faire approximativement le sommet d’un ellipsoïde de révolution dont les deux foyers comprennent sensiblement une distance de neuf mètres. Il en résulte qu’un télescope formé avec ce miroir et dirigé sur un objet placé à l’un des foyers donne à l’autre foyer une image totalement exempte d'aberration, bien que le miroir présente 24 centimètres de diamètre et que la distance du foyer le plus proche n’excède pas 1",10. Les images sont alors d’une si grande pureté et la mise au point tellement précise qu’on en doit conclure que la surface réfléchissante qui les engendre approche autant de lellipsoïde que les surfaces obtenues par les procédés ordisaires approchent de la sphère.

Si l’on fait croître la distance des foyers, la surface se modifie encore et tend à se confondre avec celle du paraboloïde.

Sans vouloir entrer dans les détails pratiques, M. Foucault dé- clare que c’est en retouchant la surface à la main et en suivant attentivement les changements progressifs des effets optiques,

Extrait de l’Institut, 1'e section, 4858. 7

00 qu’il est parvenu à combattre l’aberration et à réduire la longueur du télescope à des proportions inusitées. Le miroir de verre une fois terminé, l’argenture neparaîtaltérer en rien les propriétés de la surface. Dans le but d'apprécier numériquement le pouvoir optique du nouvel instrument, on a constaté qu’il dédouble le 30° de milli- mètre observé à la distance de 10 mètres.

Séance du 22 mai 1858.

GécMÉTRIE. M. Paul Serret communique à la Société quel- ques propositions, relatives à la géométrie de la sphère, et qui paraissent compléter la série des analogies déjà constatées entre les coniques planes et sphériques.

« 4. Le lieu géométrique des points de la sphère dont les sinus des distances sphériques à un point et à un grand cercle fixes sont dans un rapport constant, est une conique sphérique dont l’un des foyers est au point fixe, et pour laquelle la polaire de ce der- nier coïncide avec le grand cercle directeur.

» 2, Réciproquement, dans toute conique sphérique les sinus des distances sphériques d’un point quelconque de la courbe à l’un des foyers et au grand cercle qui est la polaire de ce foyer relativement à la courbe, sont dans un rapport constant.

» Remarque. La perspective d’une conique sphérique sur le plan tangent à la sphère mené par l’un de ses foyers a même foyer que celle-ci ; sa directrice est la perspective du grand cercle directeur de la conique sphérique , et réciproquement.

» 3. L'équation, en coordonnées polaires, d’une conique srhé- rique rapportée à l’un de ses foyers, est de la forme

1yp— Dire 1—e cos (wa) ; elle peut aussi s'écrire #9 p = mtgx - ntqy Hp, l'équation mtgx + ntgy +p —0 représentant le grand cercle directeur ; et réciproquement, toute équation, de l’une ou de l’autre forme représente une conique sphérique ayant l’un de ses foyers à l'ori- gine ; la proposition directe avait seule été établie par Gudermann.

»h. Le lieu des points de la sphère également éloignés d’un point et d’un grand cercle fixes. est précisément la courbe qui a déjà reçu le nom de parabole sphérique, dont l’équation peut se ra-

o1

mener à la forme {g? y—2p. {g x et dont le grand axe est égal à un quadrant.

» 5. Le lieu décrit par le sommet d’un angle droit circonscrit à la parabole sphérique se compose de deux grands cercles, qui sont les cercles directeurs relatifs aux deux foyers.

» 6. Le lieu des projections d’un foyer d’une conique sphérique sur les grands cercles tangents à la courbe est en général, une seconde conique sphérique : ce lieu peut se réduire à un grand cercle , mais n’est jamais un petit cercle de la sphère. »

Seance du 29 mai 1858.

GÉOMÉTRIE. M. Catalan communique le théorème suivant :

Le lieu des points d’inflexion 1 des cycloïdes accourcies, en- gendrées par les points A du rayon OC d’un cercle roulant sur une droite XY, se compose de la double cycloïde qui serait en- gendrée par le point de contact C considéré comme appartenant au cercle décrit sur OG comme diamètre, )

Cette double cycloïde, lieu des points d’iuflexion I, enve- loppe les «ycloïdes accourcies, engendrées par les points A.

Séance du 3 juillet 1858.

. M. Léon Foucault à communiqué, dans cette séance, de nou- veaux détails sur la construction des télescopes en verre argenté dont il a déjà entretenu plusieurs fois la Société.

Dans une précédente séance, il a annoncé qu’en agissant sur un miroir de verre primitivement sphérique, il l'avait transformé sansen altérer le poli en ellipsoïde de révolution, fonctionnant sans aberration optique pour une distance finie. Depuis, M. Foucault a répété la même opération sur un autre miroir qu'il dit avoir changé en un sommet de paraboloïde fonctionnant comme miroir de télescope pour les objets situés à l’infini.

Ge nouvel instrument a 24 centimètres de diamètre et 1 mètre de distance focale ; il montre distinctement des points distants les uns des autres de la deux cent cinquante millième partie de leur distance au miroir , d’où il suit que dans l’image focale les der- nières parties distinctes n’excèdent pas = de millimètre.

Pour démontrer que dans un pareil instrument, dont la lon- gueur n’atteint pas cinq fois le diamètre du miroir, tous les rayons réfléchis concourent d’une manière efficace à la formation de-Pi-

92

mage focale, on peut recourir à une épreuve bien simple. Après avoir dirigé le télescope sur des objets d’épreuve convenablement choisis, on restreint par un diaphragme l’étendue de la surface libre de l'objectif, et ce changement, loin de produire un meilleur effet, en écartant les rayons nuisibles, compromet la qualité des images et fait disparaître des détails qu’on saisissait d’abord à miroir découvert. Ce résultat est du reste entièrement conforme aux indications de la théorie , car dans le système des ondulations la convergence d’un faisceau conique est d'autant plus exacte que les rayons extrêmes viennent se croiser sous un angle plus ouvert.

Séance du 47 juillet 1858.

NÉVROLOGIE. Connexions entre le pathétique et l'appareil lachrymal. La communication suivante a été faite par M. Eu- gène Curie,

« Swan a figuré dans son atlas sur le système nerveux un ra- meau allant du pathétique à la branche lachrymale de l’ophthalmi- que. Ce résultat a été contesté ; les uns n’ont pas admis ce ra- meau, les autres n’y ont vu qu’un filet de la cinquième paire. Voici comment la chose se passe d’après mes observations :

» Le nerf pathétique s’accole à la paire au niveau de l'émis-

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sion de la branche lachrymale. C'est une véritable fusion, en sorte que toute séparation est artificielle et qu’il serait par conséquent difficile d'affirmer que la glande ne reçoit pas de rameau du pa- thétique x. D'ailleurs, il est toujours possible de suivre un filet se rendant du pathétique sur le rameau lachrymal qui semble ainsi formé de deux filets, l’un provenant de la partie inférieure de la 5e paire, l’autre, xx, provenant de la partie supérieure et dont la continuation directe avec le pathétique paraît évidente. Ce rameau est quelquefois considérable, et alorson peut parfaitement distin- guer qu'il est absolument différent des rameaux rétrogrades que la paire envoie au pathétique, ainsi que d’un filet de la paire qui embrasse parfois le pathétique comme dans un anneau.

» Ce n’est pas la seule connexion qui existe entre le pathétique et l'appareil lachrymal.En effet dit M. Curie, j’ai constaté l’existence d'un filet de communication que je crois constant entre le pathéti- que et la branche nasale de la paire. Ge filet,xxx, croise supérieu- rement le muscle grand-oblique. Sa ténuité, son accolement con- tre le nerf frontal, quelquefois jusqu’au point de jonction avec le pathétique, et son application contre l’aponévrose orbitaire, expli- quent pourquoi il a échappé à l’attention des anatomistes. La plu- part du temps on doit le couper en ouvrant l’aponévrose orbitaire.

» Voici maintenant quelques considérations physiologiques qui découlent des faits précédents.

» La glande lachrvmale paraissait dépourvue de nerfs moteurs, et ce fait était en désaccord avec ce qu’enseigne la physiologie sur l’excrétion des glandes. Or, n’est-il pas curieux de voir le pathéti- que, par ses terminaisons au muscle grand-oblique et par les deux rameaux qu’on vient de décrire, présider à la fois dans la douleur à la position du globe oculaire, à l'excrétion des larmes et à leur écoulement, puisque le nerf nasal se distribue au sac et aux muscles qui l'entourent ?

» Je sais qu’on a voulu contester que le muscle grand-oblique fût l’agent actif dans la position que prend l’œil dans la douleur; mais je crois au contraire qu’il faut lui maintenir cette attribu- tion. En effet, il ne saurait y avoir de doute au sujet de l'élévation en masse du globe oculaire. Le muscle grand-oblique élève le globe oculaire, le rapproche de la paroi interne, le fait saillir en avant et tend aussi à cacher l’œil derrière la paupière supérieure.

5,

» Maintenant arrivons à la partie sérieuse de l’objection. Exé- cule-t-il un mouvement de rotation qui fait tourner la cornée en bas? Je ne pense pas que son insertion au globe oculaire soit assez postérieure pour obtenir à cet égard un effet sensible ; et d’ailleurs l'insertion secondaire à tout ce tissu fibreux qui entoure la partie postérieure du globe oculaire, doit largement compenser la petite action qu’il pourrait avoir en ce sens.

» J'ai vainement cherché une relation entre la glande lachry- male et le ganglion ophthalmique ; quelques filets rétrogrades venant de ce gangiion m'ont seuls para avoir avec elle quelques connexions possibles, mais je n’ai pu les suivre assez loin.

» M. Dubarry a montré sur une des pièces qu’il a présentées au Concours pour la place de prosecteur des hôpitaux un filet qui allait directement du ganglion à la glande ; malheureusement sa pièce était desséchée, et par conséquent n’était point suffisamment démonstrative. C’est ici le lieu de remarquer combien sont stériles pour la science ces névrologies desséchées qu'un vieil usage ad- met encore, et qui devraient être réprouvées, malgré l’incontesta- ble habileté dont les anatomistes qui suivent encore cette méthode de la dessiccation font preuve tous les jours.

°» Encore un mot au sujet de l’appareil lachrymal : la glande reçoit-elle des filets du nerf maxillaire supérieur au moyen de l’anastomose établie entre le nerf et le filet lachrymal de la bran- che ophthalmique ? Il me semble qu'il peut y «voir des doutes à ce sujet. En effet, j’ai trouvé cette anastomose remplacée par deux filets provenant, l’un du lachrymal supérieur, l’autre de la bran- che du maxillaire supérieur ; ces deux filets, au moment de s’a- nastomoser, perçalent la paroi de l’orbite par deux trous séparés bien que très rapprochés. »

Explication de la figure.

Elle représente l’ensemble de l'œil droit vu de son côté interne,

x. Nerf pathétique.

xx. Filet de jonction qu’il envoie au rameau lachrvmal du nerf frontal v.

xxx. Anastomose d’un filet interne du pathétique avec la branche nasale de l’ophthalmique.

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Seance du 7 août 1858,

ORGANOGRAPHIE VÉGÉTALE. M. Trécul à communiqué, dans cette séance, des observations sur des cristaux organisés et vivants, dérivant d’une petite cellule et reprenant à la fin l’as- pect cellulaire.

Ces corps singuliers se rencontrent dans l’albumen du Spar- ganium ramosum. Quand on étuaie sous le microscope la forme de cet albumen, on trouve qu'il est composé de deux sortes de grains. Les uns sont assez petits, de 0.,0075 de millimètre envi- ron, d'un volume assez régulier, globuleux ou ovoïdes , souvent atténués par un bout ; ils sont bleuis par l’iode ; ce sont des grains . d’amidon. Les autres grains sont beaucoup plus gros, de dimen - sion plus inégale, de formes plus variées. Tantôt ils sont simples ettantôt composés. Les grains simples ont assez souvent un contour hexaédrique, mais leurs arêtes et leurs angles sont obtus, arron- dis; ils ont fréquemment une cavité centrale assez étendue, qui rappelle celle d’une cellule à parois très épaisses. Les grains com- posés sont très irréguliers dans leurs formes ; ils paraissent consti- tués d’un agrégat de petites cellules dont les côtés libres saillants donnent à la masse un aspect mamelonné. Ces corps, à la première vue, ne frappent que par leur dimension beaucoup plus considé- rable que celle des grains d’amidon qui les environnent et dont ils sont couverts ordinairement. Ils donnent lidée de grains de fécule beaucoup plus volumineux que les autres. Mais lorsqu'on les examine, principalement sur le Sparganium natans, on est surpris de la régularité avec laquelle ces corps ou leurs agrégats sont revêtus par les grains de fécule. Ces derniers sont si pressés à leur surface qu'ils sont devenus polyédriques. Leur forme porte à croire qu'ils sont nés là, et ceite idée acquiert d’autant plus de vraisemblance que ces granules d’amidon sont atténués par l’ex- trémité qui touche le corps central auquel ils semblent attachés par cette pointe. Si l’on ajoute de la teinture d’iode, ils prennent une belle couleur jaune, plus ou moins foncée suivant la quantité d’iode ajoutée. L’addition d’un peu d’acide sulfurique légèrement dilué les gonfle en donnant plus d'intensité à la teinte. Hs ont alors toute la figure de cellules formées d’une membrane mince et remplies d’une substance jaunissant sous l'influence de l’iode

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et de l'acide sulfurique. Get acide plus concentré finit par les dé- composer, en leur faisant subir la même altération qu'aux mem- branes cellulaires infiltrées de matières azotées. Il les transforme en un liquide d’apparence oléeuse, brun-jaunâtre, divisé en une multitude de gouttelettes.

En remontant à l’origine de ces corps, on les trouve remplacés par de magnifiques cristaux, par des rhomboèdres à angles aigus et à arêtes tranchantes, ou par de belles plaques hexaédriques de la plus grande régularité, ou quelquefois un peu allongées, mais conservant toujours le parallélisme de leurs côtés deux à deux. Les rhomboèdres et les lames hexaédriques ont parfois au centre une petite cavité de forme variable, et les uns et les autres se groupent suivant les lois de la cristallographie. En examinant avec attention les lames, on s’aperçoit que leurs côtés ne sont pas ho- mologues ; ils sont alternativement inclinés vers l’une ou l’autre face de la lame, et cette inclinaison donne des angles égaux à ceux des rhomboèdres, en sorte que ces lames auraient pour forme pri- mitive le rhomboèdre. On acquiert cette conviction quand on voit les deux formes réunies, c’est-à-dire des rhomboèdres naissant des lames hexaédriques.

Mais ce n’est pas tout; ces jolis cristaux si réguliers perdent quelquefois en partie par la végétation leurs formes géométri- ques. Il n’est pas rare de trouver, en effet, des lames hexaédri- ques qui deviennent mamelonnées sur leurs deux faces, ou même sur deux ou trois de leurs côtés, les autres côtés restant géo- métriques. L'auteur a vu de ces mamelons qui étaient très volumineux et qui offraient une grande cavité à l’intérieur. On avait ainsi l'union en apparence monstrueuse d’une celiule et d’un cristal ; ce qui semble prouver que tout s’enchaîne dans la nature, puisque nous avons ici, dans un être vivant, la forme des êtres inorganisés.

Poursuivant cette étude organogénique en prenant des fruits de plus en plus jeunes, M. Trécul a vu les cristaux d’abord grossiè- rement dessinés, limités par une membrane formant pour les rhomboëèdres une cellule elliptique, pour les lames hexaédriques une cellule cireulaire. On distinguait jusqu’à un certain point la formation de ces cristaux ; leurs formes primitivement irrégu- lières prenaient peu à peu de la régularité ; leurs arêtes et leurs

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anoles d’abord mousses devenaient fortaigus. Quelques cellules de même nature, plus ou moins arrondies, étaient mêlées à celles qui subissent les modifications que l’on vient de décrire. Enfin, des fruits très jeunes ne donnèrent plus que des cellules ou mieux des vésicules globuleuses ou elliptiques, ayant des parois assez épaisses et une cavité relativement grande. Chez d’autres vési- cules moins âgées, beaucoup plus petites, la cavité se réduisait à un point noir central; chez d’autres moins avancées encore, cette cavité n’existait plus ; elles consistaient en un petit globule blanc et brillant, comme une sorte de nucléus extrêmement exigu.

En résumé, les cellules de l’albumen du Sparganium ramo- sum. offrent l'exemple de cristaux qui commencent par être cha- cun une vésicule nucléaire ; et ces cristaux végètent à la manière des cellules ordinaires, présentant parfois des éminences cellue loïdes qui deviennent des cristaux semblables à eux; enfin ils perdent, en vieillissant, leurs formes géométriques pour reprendre l'aspect de cellules isolées ou groupées.

ZooLoGiE. Structure des valves et du pédoncule de la Lin- gula anatina. M. Pierre Gratiolet a communiqué à la Société, dans cette séance , la note suivante.

« La forme générale des valves du têt en apparence corné des Lingules et des Orbicules a été assez bien indiquée par les au- teurs ; on sait qu’elles ne s’articulent point entre elles et, dans l’état de relâchement des muscles, un assez grand intervalle les sépare. Cette indépendance des valves , l'absence de toute char- nière, étaient des conditions indispensables pour une grande va- riété dans les mouvements, variété qu’explique d’ailleurs la com- plication du système musculaire.

» (A). La structure de ces valves est très remarquable, surtout quand on se rappelle celle de la coquille des Térébratules. Elles sont composées de lames superposées, et chaque lame comprend deux feuillets, l’un corné, l’autre caleaire. La structure du feuillet corné est très difficile à démêler, l’œil n’y découvre que des fi- bres pâles, assez courtes, souvent interrompues. Elles ne sem- blent pas suivre la direction générale du feuillet, mais passer obliquement d’une de ses faces à l’autre. Leur diamètre dépasse rarement 0m, 001.

» Les feuillets calcaires sont minces, très fragiles, d’une demi-

Extrait de l’Institut, Are section, 1858, 8

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transparence. On y retrouve aisément les perforations dont la coquille des Térébratules est criblée, mais réduites à une extrême petitesse ; jamais leur diamètre ne dépasse Omm,002. Ces perfo- rations se retrouvent aussi dans les feuillets calcaires du têt des Orbicules, mais avec une ténuité plus étonnante encore, leur dia- mètre ayant à peine ici 0"",0005. Dans la Terebratula australis, leur diamètre égale 0vm,05. Il est donc cent fois plus petit dans les Orbicules et vingt-cinq fois plus dans les Lingules. Les éléments prismatiques du têt des Térébratules se retrouvent aussi dans ces feuillets calcaires, mais presque invisibles à force de petitesse.

» Il est incontestable que les perforations du têt servent dans les Térébratules à une respiration palléale extérieure. Ont-elles ici le même usage ? J'avoue n’oser rien décider à cet égard. Quoi qu'il en soit, leur existence dans les Lingules et les Orbicules est un curieux témoignage d’un plan général d’organisation dans les Brachiopodes.

» (B). L'étude anatomique du pédoncule, à peine effleurée par Cuvier, a été faite avec un rare talent par M. Vogt ; j’y reviendrai cependant dans le but de donner à certains points une précision plus grande.

» On connaît la forme du pédoncule des Lingules. C’est une sorte de massue fort allongée dont le manche se termine par un évasement. Deux parties essentielles le constituent : (a) l’enve- loppe cornée, et (b) une tige centrale, élastique et contractile à la fois.

» (a). Structure de l'enveloppe cornée (Æornscheide , Vogt). Cette enveloppe est à peu près transparente dans l’état frais. Elle est légèrement teintée de brun dans la Lingula anatina : cette coloration manque dans d’autres espèces. Nous y distinguerons plusieurs couches, savoir :

» «. L'enveloppe striée extérieure. Elle est formée par une membrane mince composée de fibrilles très pâles légèrement flexueuses, dont le diamètre maximum égale à peine 0wm,0035. Le tube qu’elle constitue est sillonné par des plis et par des stries _aonulaires; les plis sontirréguliers; lesstries, légèrement colorées en brun , sont parallèles et à peu près équidistantes. Elles doi- vent leur coloration à des granules très fins; des sillons irrégu-

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liers divisent en très petites aréoles , disposées d’ailleurs sans au- cun ordre, les intervalles compris entre les stries.

» 6, La couche fibro-cartilagineuse. Fort épaisse et transpa- rente, bien que légèrement teintée de brun, elle est essenticlle- ment formée de fibres plates, élastiques, circulairement disposées autour de l’axe du pédoncule ; le diamètre de ces fibres égale environ 0®®,001. Elles sont fort exactement parallèles entre elles et adhèrent fort peu l’une à l’autre ; aussi peut-on décomposer ad libitum l'enveloppe cornée, dont elles forment la plus grande part, en un nombre. pour ainsi dire indéterminé de couches minces et transparentes ; les couches les plus profondes sont par- courues dans le sens de la longueur du pédoncule par des fibres minces, transparentes et fort clairsemées.

» y. L’enveloppe siriée intérieure. C’est une question très embarrassante, s’il faut considérer cette enveloppe comme faisant partie de l’étui corné, ou comme formant à la tige musculaire centrale une enveloppe spéciale. On peut la séparer avec beau- coup d’exactitude et l’isoler complétement, soit d'avec le tube corné, Soit d'avec le muscle intérieur ; mais cette séparation , fort aisée dans le premier cas, est difficile dans le second. Ce qui explique comment, quand la dessiccation ou un commencement d’imbibition cadavérique ont altéré le pédoncule et dissocié ses parties, elle se détache constamment du tube corné et reste collée sur le muscle intérieur ; ce qui s’explique d’ailleurs si l’on re- marque que les fibres qui composent ce muscle prennent leur insertion sur elle.

» Elle est d’ailleurs, sauf un peu plus de transparence dans ses éléments, presque en tout semblable à l'enveloppe striée exté- rieure ; on y retrouve ces bandes annulaires séparées par des stries linéaires équidistantes. Les éléments de son tissu sont les mêmes. M. Vogt, dans son mémoire, a très bien décrit et figuré cette membrane , tabl. 1, fig. 4. Toutefois, les stries sont-elles peut-être trop rigoureusement accusées ; enfin il n’a pas fait men- tion des petites fibres flexueuses et des granules qui sont les élé- ments constitutifs de cette membrane.

» (b). Muscle intérieur. Ce muscle est formé par des bandes longitudinales appliquées à la surface interne de l'enveloppe que nous venons de décrire, Ces bandes s’envoient réciproquement des

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faisceaux intermédiaires et , comme M. Vogt l’a parfaitement re- marqué, laissent au centre du pédoncule un espace vide. Je soup- conne que cet espace est immédiatement limité par une mem- brane très fine, appliquée sur les faisceaux musculaires. Des plis, ou plutôt des rides très fines, mais assez apparentes sur l’arête de ces faisceaux, paraissent indiquer l'existence de cette mem- brane ; cependant il m’a été impossible d’en détacher des lambeaux assez distincts pour en étudier la texture.

» M. Vogt a fort bien figuré l’ensemble de ces dispositions, tab. 1, fig. 2 et 5, et tabl. 11, fig. 20 de son mémoire. Il a éga- lement donné quelques détails intéressants, tabl. 1, fig. 6, sur les éléments fibrillaires qui composent ce muscle intérieur. « Ces fibrilles, dit-il, se montrent sous le microscope comme une foule de filaments entremélés, d’une extrême finesse et qui rappellent assez bien les fibres primitives des muscles involontaires chez des animaux plus élevés. »

» Les fibres élémentaires que signale M. Vogt, dans ce pas- sage, sont plates, sèches, transparentes et légèrement jaunâtres ; leur diamètre est compris entre 0mm,004 et 0,006. Leur élasti- cité est fort apparente et se conserve indéfiniment ; mais je doute fort de leur contractilité. Il me semble plus exact de les considé- rer comme de minces filaments tendineux terminant les véritables éléments musculaires.

» Ces éléments, dont n’a point parlé M. Vogt, se présentent sous la forme de cylindres à sommet conique, qui m'ont paru composés de fibrilles pâles et prodigieusement déliées. Le dia- mètre de ces cônes est compris entre 0m®,010 et Onm,020. Leur longueur totale égale en moyenne 0,120. Leur sommet se continue avec une fibre longue qui n’est rien autre chose que l’élément décrit par M. Vogt.

» Il ne m'a pas été possible de mesurer la longueur totale de ces petits muscles élémentaires et de leur filament tendineux. L’extrême enchevêtrement des faisceaux s’y oppose. Il m’a paru que les extrémités se terminaient l’une: et l’autre dans la mem- brane striée interne de manière à déterminer d'espace en espace de petites courbures très rapprochées, dont la somme donne un déplacement effectif.

» Tels sont, en général . les éléments qui composent le pédon-

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cule ; je vais essayer maintenant de décrire ses rapports, soit avec la coquille, soit avec les corps externes.

» (C). Des deux extrémités du pédancule, Pune est renflée et ent à la coquille, l’autre s’atténue d’abord de plus en plus et puis elle se termine par un évasement irrégulier qui adhère aux rochers ou à d’autres cerps extérieurs.

» (a). Extrémité renflée. Le renflement qui la distingue tient

à une épaisseur plus grande de tous les éléments en ce point. Vers son sommet, l’enveloppe cornée présente une petite ouver- ture au-dessus et au-dessous de laquelle se remarquent deux dépressions profondes se logent les sommets des valves cuand l'animal les rapproche et les serre l’une contre l’autre. Un mince prolongement de muscle intérieur sort par cette ouverture et va se fixer à l'extrémité de la valve supérieure immédiatement au- dessous de son sommet. » Cuvier n’est eutré sur ce point dans aucun détail exact. Les deux valves, dit-il, n’engrènent l’une avec l’autre par » aucune dent ; elles ne sont pas non plus attachées par un li- » gament dorsal élastique capable de les ouvrir comme le sont » celles des Bivalves ordinaires. Mais elles sont suspendues l’une » et l'autre à un pédicule commun... etc. » (Sur la Lingule, page 3e)

» Cette expression, « l’une et l’autre » indique que Cuvier admettait un rapport semblable du pédoncule avec les deux valves.

» M. Vogt, dont l’exactitude est en général si grande, paraît partager l’opinion de Cuvier sur ce point, si l’on en juge par le passage suivant il diten parlant des muscles intérieurs : « Sie » befestigedessich endiich an den inneren, einander Zugewandten » seiten des Schlosses», (4nat. der Ling. anat. page 3.) Il attribue enfin à ce muscle une certaine action sur les valves par suite de laquelle elles pourraient s'écarter l’une de lautre.

» Or, voici les faits tels qu'ils sont en réalité :

» L’enveloppe cornée enchâsse assez exactement le sommet de la valve supérieure, mais sans y adhérer. La valve inférieure peut s'appliquer contre elle , mais n’adhère point. Quant au muscle central, il n’a aucun rapport avec la valve inférieure. Le prolon- gement très-grêle qui sort par l'ouverture de l'enveloppe cornée

Ÿ

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s'engage au-dessus du bord supérieur du manteau entre ce bord et le sommet de valve supérieure de la coquille, puis il se divise en quatre petits fascicules ; deux de ces fascicules se fixent symétriquement à un espace rugueux qui se voit immé- diatement au-dessous du sommet de la valve; les deux autres s’enfoncent dans le corps de l’animal ou plutôt dans la zone mus- culaire qui l’entoure. Rien du muscle ne va à l’autre valve. Il pe peut donc, en aucune facon, ouvrir la coquille. Mais il peut déterminer des oscillations en divers sens du corps de l’animal tout entier.

» (b). L’extrémité inférieure ou adhérente du pédoncule est plus remarquable encore; elle se termine par une sorte d’évase- ment l’enveloppe striée extérieure est molle, épaisse et toute chiffonnée. Le fond de l’évasement est largement ouvert et donne passage à une partie molle qu’on pourrait prendre au premier abord pour un ligament d’adhérence ; mais en y regardant de plus près, on y reconnaît une vésicule transparente à parois épaisses et résistantes, dont le collet se continue avec l’enveloppe striée interne. La couche musculaire qui s’amincit de plus en plus en pénétrant dans le collet s’y prolonge en une lame transparente formée de fibres plates dont le diamètre égale environ 0",008; ces fibres enveloppent d’anses fort élégantes le fond de la vésicule, Je n’ai pu découvrir dans ce fond même au moyen d'’injections poussées avec force aucun vestige d'ouverture.

» L’extérieur de la vésicule est comme hérissé de cellules ou plutôt de fibres courtes au moyen desquelles elle adhère à la couche cornée; l’intérieur contenait une matière pulpeuse com- posée d’un amas de corpuscules, dont chacun examiné au micros- cope, est un embryon de Lingule. D’autres embryons se retrou- vent, mais en moins grande quantité, dans toute l’étendue du canal central du muscle pédonculaire, qui se continue librement avec la cavité de la vésicule.

» De ces embryons, il ne restait que la coquille, dont les deux valves bien distinctes , allongées , pointues à leurs extrémités et très-finement striées , avaient à peu près 0,016 de longueur. Quelques-uns de ceux que j'ai observés portaient évidemment un pédicule très-fin ; ceux qui en mänquaient l'avaient sans doute

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perdu. Ils étaient en moyenne plus développés que ceux qu’on observe assez souvent dans le corps de l'animal.

» D'où provenaient ces embryons? Du corps de l’animal sans doute; mais par quelle voie ? Je me suis attaché à résoudre cette question , et j'y suis parvenu d’une manière très simple. Si l’on pousse avec précaution un stylet mousse , mais très-fin, dans le canal intérieuridu muscle pédonculaire, on le voit pénétrer peu à peu dans ce canal, s'engager au-dessous de la valve supérieure entre les deux faisceaux qui composent le muscle adducteur du sommet des valves, et pénétrer enfin dans le sinus viscéral au—

.dessus de l'intestin et du mésentère qui l’unit aux deux cœurs. Les injections démontrent le même fait et d’une manière encore plus certaine. Ainsi la cavité du corps communique avec celle du pédoncule, et conséquemment les embryons peuvent passer facis lement dans celle-ci. Ils paraîtraient y subir une sorte d'incuba- tion ; en effet, on rencontre fréquemment des embryons dans le pédoncule de Lingules dont le sinus abdominal est vide, et dont les ovaires ne contiennent que des œufs. Mais par quelle voie les œufs sont-ils fécondés ? Par quelle voie les embryons sont-ils émis? Voilà ce que je n’ai pu jusqu’à présent décider. Quoi qu'il en soit, et si incomplètes que soient d’ailleurs les observations que j'ai pu faire, j'ai cru devoir les faire connaître dans le but de solliciter à cet égard les recherches d’anatomistes plus heureux ou plus habiles. »

Séance du 30 octobre 1858,

CHIMIE ORGANIQUE. Nouvelles expériences sur le trehalose. Dans cette séance, qui était la séance de rentrée de la Société après les vacances, M. Berthelot a lu la note suivante :

« L’an dernier, dans une communication faite à la Société de biologie et publiée, en premier lieu, dans ses comptes rendus (août 1851), j'ai décrit les résultats auxquels je suis arrivé en étudiant le tréhalose, principe sucré cristallisable renfermé dans une manne venue d'Orient. Vers la même époque, dans une note lue à l’Acadé- mie dessciencesde Berlinle Znovembre1857(V.lInstitut, n°1265, 31 mars 1858), M. Mitscherlich a décrit le mycose, principe su- cré contenu dans le seigle ergoté. Le tréhalose et le mycose sont

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isomères et jouissent des mêmes propriétés générales soit au point de vue chimique, soit au point de vue physique. On peut se de- mander s'ils sont réellement distincts. En comparant leurs carac- tères d’après la description du mycose et l’examen d’un échan- tillon que l’illustre chimiste de Berlin a bien voulu m’adresser, j'ai été conduit à faire une étude plus particulière de certaines propriétés du tréhalose, et notamment de son état d’hydratation, de sa forme cristalline et de son pouvoir rotatoire : d'après cette étude, le tréhalose et le mycose présentent la plus frappante ana - logie ; la seule différence essentielle réside dans leurs pouvoirs rotatoires. Voici les faits.

» 4. Hydratation. Le tréhalose, récemment cristallisé, peut se représenter par la formule C12H1#013. Il renferme 2 équiva= lents d’eau de cristallisation que l’on peut chasser par la chaleur sans altérer le principe sucré; 400 parties de tréhalose cristallisé perdent ainsi 9,7 parties d’eau : la formule exige 9,5. Le mycose présente la même composition et les mêmes phénomènes.

» Abandonné à lui-même, au contact de l’atmosphère, avec le concours d’une température de 25 à 30 degrés, le tréhalose perd une certaine proportion d’eau, variable suivant les conditions de l'expérience, mais qui finit par s'élever à la moitié de l’eau de cris - tallisation. Aussi la détermination de cette dernière doit être faite sur un échantillon récemment cristallisé, sinon on obtient des nombres trop faibles, une portion de l’eau ayant déjà disparu : diverses expériences exécutées sur sept échantillons distincts, pré- parés séparément et conservés au contact de l’atmosphère ou dans des tubes mal bouchés, ont fourni, au lieu de 9,5 centièmes d’eau, 9,0 ; 8,8: 8,4; 17,43 6,5;.5,4, et enfin 5,0 seulement. Ce dernier nombre répondrait seulement à un équivalent.

» Le mycose n’a pointété étudié au point de vue de sa déshy- dratation partielle à la température ordinaire.

» Si l’on chauffe à 100 degrés le trébalose cristallisé, placé au fond d’un long tube, il entre en fusion au bout d’un certain temps. Mais si on porte lentement à 100° ou plus exactement à 97° le tréhalose contenu dans une capsule, il blanchit, devient opaque et se déshy- drate complétement sans entrer en fusion. Dans une expérience, au bout de trois heures la perte d’eau était égale à 9,7; elle n’a aug-

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menté ni sous l'influence du temps à 97°, ni sous l'influence d’une température élevée progressivement jusqu'à 160° et maintenue pendant plusieurs heures. Le tréhalose ainsi déshydraté à 100 n’est entré en fusion ni à 1600 ni même à 180°; seulement à cette der- pière température il s'est coloré légèrement par suite d’un commen- cement d’altération, et a perdu encore trois millièmes d’eau. Entre ces deux phénomènes, fusion lente à 1000, ou déshydratation sans fusion, même à 180°, on peut observer tous les intermédiaires suivant le mode d'application de la chaleur. Si l’on chauffe rapi- dement le tréhalose, il peut fondre seulement à 120°, à 140, etc., après avoir perdu une certaine quantité d’eau, variable suivant la durée de la chauffe. Une fois fondu, la perte d’eau continue, avec formation de bulles plus ou moins boursouflées, et la matière de- vient de plus en plus pâteuse, sans toutefois passer de nouveau à l’état complétement solide.

» Le mycose peut fondre à 1000, mais, d’après M. Mitscherlich, sans perdre son eau de cristallisation. Ce n’est qu’à une tempéra- ture plus élevée qu'il perd cette eau en présentant des phéno- mèênes fort analogues à ceux du tréhalose. IL paraît donc exister une différence entre la température de déshydratation du tréha - lose et celle du mycose. Toutefois cette différence est si légère, qu’elle disparaîtrait peat-être à la suite d’une étude comparative.

» 2, Forme cristalline. Le tréhalose cristallise en octaèdres rectangulaires et le mycose cristallise de la même manière. Voici les angles déterminés sur des cristaux de tréhalose extraits de trois préparations différentes exécutées à deux années d'intervalle : j'y joindrai les angles du mycose d’après M. Mistcherlich.

Angle de deux faces octaédriques opposées par le sommet :

A, 444045’ Tréhalose { 2. 141° 31° | Moyenne 144° 31'|Mycose 110°6/, 3. 141°46"

Angles des deux autres faces octaédriques opposées au même sommet :

1. 63°/49"

réa | 2, 64°19 Moyenne 63° 59°| Mycose 63° 28’

3. 63° 50’

Extrait de l’Institut, 1'e section, 1858. 9

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Angle de l’une des faces de première espèce sur son adjacente de seconde espèce : 6

1, 115°53' Tréhalose ! 9, 415°59/ ; Moyenne 115° 47 | Mycose 115° 32’ (calculé). (E 11530’ Calculé 415059"

» Le tréhalose et le mycose présentent donc des formes cris- uallines sensiblement identiques : les différences ne sortent pas de l'ordre des différences observées entre les cristaux d’une même substance organique appartenant à deux préparations distinctes.

» 3. Pouvoir rotatoire. 2:",059 de tréhalose cristallisé, C!*H#0#, ont été dissous dans l’eau : le volume (V) de la Cis- solution était égal à 13ce,9.

a;, déviation de la teinte de passage —-- 59° 0

l, longueur da tube = 200%:

température 1150 » D'où le pouvoir rotatoire, rapporté à la teinte de passage

(2); = « = + 199° pour le tréhalcse hydraté et +220 pour

le tréhalose anhydre C*H"'0°".

» Cepouvoir est exactement triple de celui du sucre de cannes. Il varie à peine sous l'influence de la chaleur, car la solution précédente, observée à la température de 60” dans les mêmes conditions, déviait de 57° au lieu de 59, et encore l'écart dimi- nuerait-il d’un degré environ, si l’on tenait compte de la dilatation du liquide.

» Le pouvoir rotatoire paraît indépendant du temps écoulé depuis la dissolution opérée à froid, car il ne varie pas depuis le premier instant on peut l’observer.

» Si l’on opère avec du tréhalose récemment déshydraté sans fusion, le pouvoir rotatoire est également constant, quel que soit le temps écoulé depuis la dissolution ; en effet, une solution qui déviait de 27°2’, tout d’abord, a dévié de même de 2703’, vingt- quatre heures plus tard.

» Le nombre indiqué plus haut + 220c pour le pouvoir rota- toire a été trouvé le même dans deux autres déterminations exé- cutées à deux années d'intervalle. En voici les données :

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» I. p —08".,504 de tréhalose, renfermant 5,4 centièmes d’eau de cristallisation ; d’où poids réel 0,477.

M6 00, = =" 2200

» II. p—28".,000 de tréhalose, renfermant 5,0 centièmes d’eau de cristallisation ; d’où poids réel —1,900.

V—15%,0, /—200, «;—<+5504", (a) ;— +219.

» Ces deux résultats, obtenus tout d’abord et calculés dans l'hy- pothèse d’un état d’hydratation normal et égal à 9,7, avaient con- duil à un pouvoir légèrement distinct et égal à + 208°; mais j'ai depuis reconnu l'inexactitude de cette hypothèse, et déterminé directement la proportion d’eau contenue dans ces échantillons que j'avais conservés.

» Le pouvoir rotatoire du tréhalose, qui vient d’être défini, s’écarte beaucoup de celui du mycose, car ce dernier, rapporté au sucre cristallisé, d’après M. Mitscherlich, est égal à +-17302/, tandis que celui du tréhalose cristallisé est de + 1990. Le premier est déduit d’une déviation égale à + 34°8'; observée avec une solution de tréhalose de même richesse, cette déviation aurait été égale à + 40°. La différence est de plus de 5°, ce qui dépasse beaucoup les limites d’erreurs expérimentales. Elle ne s'explique ni par la température de l’observation, ni par le temps écoulé de- puis la dissolution, toutes circonstances qui n’exercent guère d’in- fluence sur une dissolution de tréhalose.

» On est donc conduit à admettre l'existence de deux corps presque identiques dans toutes leurs propriétés et même dans leur forme cristalline, mais distincts par la grandeur de leur pouvoir rotatoire. Bien que cette conclusion s'accorde avec les faits observés dans l'étude des monochlorhydrates cristallisés d’es- sence de térébenthine , elle exige, je crois, une vérification plus . complète ; j'avais intention de préparer et d'étudier moi-même le mycose; mais ayant appris que M. Mitscherlich s’occupait lui- même de celte révision, j'ai cru convenable de me borner à sou - mettre le tréhalose à un examen plus attentif. »

OPTIQUE MÉTÉOROLOGIQUE. Observation d’un soleil bleu. M. Lissajous a communiqué à la Société dans cette séance la note suivante:

M. Laugier, dans une note communiquée à l'Académie des

66 sciences de Paris, a donné la description du phénomène suivant observé par lui à l’île d'Ouessant, le 22 juillet 1854 :

€. Au moment le centre du soleil atteignait la ligne » parfaitement définie qui limitait l'horizon de la mer, la partie » supérieure du disque, la seule qui fût encore visible, se teinta » subitement en bleu... Ce phénomène persista tout le temps » qu’on vit la partie supérieure du soleil, »

« Etant moi-même au bord de la mer à Benzeval (Calvados) pendant le mois d'août 1856, dit M. Lissajous, le souvenir de cetle observation me porta à examiner avec attention le soleil au moment il disparaissait derrière la ligne d'horizon. Je reconnus ainsi qu'à l'instant il n’y avait plus qu’un très petit segment visible, ce segment se colorait en bleu verdâtre, puis disparaissait, le phénomène durait à peine une seconde. Durant un séjour de six semaines ce fait ne sc présenta à moi que trois fois. Je pus néanmoins le faire observer à plusieurs personnes. L'année suivante, pendant un séjour de quinze jours au bord de la mer dans le même lieu, je vis cette apparence quatre fois, et je pus le faire observer par un de mes collègues, M. Drion, professeur de physique au lycée de Versailles, et nous pûmes constater, en nous plaçant à des hauteurs différentes au-dessus du niveau de la mer, que le phénomène se produisait pour chacun de nous à des ins- tants différents. Enfin cette année, pendant le mois d'août, la pureté exceptionnelle de lPatmosphère m’a permis de voir le soleil bleu un grand nombre de fois, et de reconnaître la cause de ce phénemène. Pour cela, il m'a suffi d'observer l’astre au moment de sa disparition à laide d’un télescope à miroir de verre argenté construit par M. Foucault. Cet instrument, parfaitement achro- matique, grossissait environ cent fois. Il m'a fait voir le soleil accompagné de franges irisées qui bordaient sa partie supérieure, absolument comme si cet astre eût été vu à travers un prisme d’un angle faible dont l’arête stringente eût été placée en haut. A me- sure que le soleil s’abaissait au-dessous de lhorizon, les parties les plus brillantes du disque étaient masquées par la mer, et il ne restait de visibles que les teintes comprisesentrele vert et le violet ; ces couleurs disparaissaient elles-mêmes au bout d’un temps très court.

» J'acquis donc la certitude que le phénomène était simple -

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ment à la dispersion produite par suite de la réfraction des rayons solaires à travers l'atmosphère, les teintes les plus réfrangibles ne devenant visibles pour l’œil qu’au moment les couleurs les plus vives du disque solaire étaient masquées par l'horizon.

» Ce phénomène n’a pas lieu quand le soleil'disparaît derrière un obstacle quelconque. En effet, la dispersion n’est sensible que dans le cas l'épaisseur de la partie de l’atmosphère traversée par les rayons solaires est assez grande ; et comme cette épaisseur croit très rapidement à mesure que le soleil se rapproche de l’ho- rizon, On conçoit que la dispersion soit insuffisante dans toute autre. position. L’éclairement général du ciel serait aussi un obstacle à la perception de cette faible teinte.

» L'observation ne peut pas se faire quand le ciel n’est pas suf- fisamment pur, car alors le pouvoir absorbant de l’atmosphère s'exerce de préférence sur les rayons les plus réfrangibles du spectre, et le soleil en atteignant l’horizon ne présente plus qu’une teinte rouge uniforme. Aussi l'intensité de la teinte bleue n’a-t-elle pas la même valeur aux différents jours.

» Les jours les plus favorables sont ceux il y a mirage à l’ho- rizon, le ciel étant d’ailleurs très pur, car alors on aperçoit au- dessous du soleil son image qui marche à sa rencontre, et, au dernier instant, l’astre et son image se colorent de la même teinte bleue, ce qui double l’étendue occupée par cette teinte, et rend par cela même le phénomène plus visible.

vLefait dont nous venons de parler n’a évidemment aucun rap- port avec des apparences analogues produites lorsque le soleil était au-dessus de l'horizon, au sein de certains brouillards secs dont la teinte jaunâtre le faisait paraître bleu par effet de contraste.

» Il est même probable, d’après les indications de M. Laugier, que le fait observé par lui n’était pas un simple effet de dispersion atmosphérique, et ne doit pas être confondu avec l’apparence es - sentiellement fugitive que nous avons signalée dans cette note. »

S Séance du 20 novembre 1858.

HYDRAULIQUE. A. de Caligny a signalé dans cette séance quelques propriétés de sa machine hydraulique à cscillations indéfinies, pour laquelle l'Académie des sciences lui décerna le prix de mécanique, le 30 décembre 1839. L'auteur rappelle

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qu’il a présenté à l’Académie des sciences, le 22 octobre 1855, un moyen de faire fonctionner les deux tuvaux d’ascension de cette machine, en employant une seule soupape, espèce de porte de flot d’une forme particulière , mue par un piston, alternative- ment poussé sur chacune de ses faces, en vertu de la baisse alter- native de la colonne liquide dans chacun des tuyaux d’ascension pendant que l’autre est plein ou à peu près. Pour ne laisser au- cun doute sur le degré de simplicité de cette modification du régulateur, il remarque aujourd’hui que l’appareil peut n'avoir en tout qu’une seule pièce mobile, quoique deux colonnes liqui- des oscillantes fonctionnent sur un même tuyau.

Il suffit, dit-il, de concevoir l’axe de la soupape porte de flot prolongé suffisamment au delà de son enveloppe fixe. A cet axe est attaché une sorte de diaphragme, ou piston de pompe tour- nante , fonctionnant dans un espace angulaire disposé comme l'espèce de corps de pompe les pistons des pompes dites /owr- nantes ont un mouvement alternatif. Chacune des faces de ce diaphragme pourra être alternativement pressée par l’eau conte- nue dans un des tuyaux d’ascension, pendant que l’eau sera con- venablement baissée dans l’autre. Il suffira pour cela que chacune des extrémités ou limites ouvertes de l’espace angulaire dans le- quel fonctionne ce diaphragme soit toujours en communication, l’une avec un seul des tuyaux d’ascension, l’autre seulement avec le second tuyau d’ascension. IL n’est pas à la rigueur indispen- sable que, dans chacune de ses positions d’arrêt, la soupape porte de flot soit retenue par un ressort, à cause d’une disposition par- ticulière de ce genre de soupapes depuis longtemps expliquée à la Société. Il ne paraît pas nécessaire qu’il y ait un semblable piston de pompe tournante à chaque extrémité de l’axe‘de la soupape, quoique cela ne fit encore qu’une seule pièce mobile dans tout le système.

Enfin il n’est pas nécessaire que le piston frotte à son pourtour comme dans les pompes tournantes; il pourra rester un peu de jeu entre lui et les surfaces fixes, parce qu'il pourra s'appuyer sur des siêges dans ses deux positions de repos. Quant à la crainte qu’on pourrait avoir que l’eau ne tendit à se mettre de niveau dans les deux tuyaux d’ascension, pendant le jeu de ce régulateur, il suffit de remarquer qu’on peut donner à la soupape porte de flot une

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forme telle que sa section ressemble à deux secteurs de cercle op- posés par le sommet ; de manière, en un mot, à faire en sorte queles deux tuyaux d’ascension ne communiquent pas ensemble, si l’on veut, ou ne communiquent que de la quantité qui sera reconnue sans inconvénient, soit à cause de la vitesse du jeu de la soupape, soit à cause des phénomènes de succion, etc.

M. de Caligny fait ensuite observer que si en principe cette ma- chine peut, sauf lesrésistances passives, élever de l’eau, sans rétré- cissement des tubes d’ascension, à des hauteurs indéfinies, ou dé- pendant dela profondeur de l’enfoncement de la soupape au-des- sous du niveau du bief d’aval, on peut s’en servir pour comprimer de l’air etle faire entrer dans des réser voirs de grandeur convena- ble, au lieu d'élever de l’eau. Or, dit-il, au lieu d'élever de l’eau à une hauteur indéfinie, sauf les résistances passives, on peut s’en servir en principe pour comprimer de l’air à des tensions très grandes, dont la limite pratique ne peut être d’ailleurs indiquée à priori, à cause des secousses qui pourraient se présenter quand la tension aurait atteint une certaine force.

M. de Caligny rappelle qu’en juin 1844, il a présenté à la Société les dispositions nécessaires pour transformer une colonne liquide oscillante en machine soufflante ou à compression d'air, et qu’on peut transformer en machine soufflante ou à compression d’air toutes ses machines hydrauliques à colonnes liquides oscil- lantes. Ceux de ces appareils, dit-il, qui ne peuvent fonctionner sans chasser alternativement une colonne d’air , alternativement contenue dans leurs tuyaux d’ascension, sont en principe des machines soufflantes par ce seul fait ; il suffit, dit-il, d’em- ployer à compriiner de Pair le travail employé à élever de l’eau.

Seance du 11 décembre 1858.

HYDRAULIQUE. M. de Caligny a communiqué à la Société, dans cette séance, quelques observations sur les machines hydrau- liques à compression d’air, fonctionnant au moyen d'une chute d’eau.

Sa communication du 20 novembre sur ceux de ces appareils dans lesquels la force vive s’emmagasine dans une colonne liquide, à chaque période, avant qu’il se soit fait un écoulement d’eau à

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l'extérieur, avait principalement pour objet le cas des chutes motrices, petites ou médiocres. Il se présente, dit-il, une cir- constance intéressante dans le cas une colonne d’eau, après avoir comprimé de l’air dans un réservoir avec soupape de rete- nue, etc., en montant dans la seconde branche d'un siphon ren- versé, sort au moyen d'une oscillation descendante sans retour sensible vers la première branche qui esten communication avec la prise d’eau motrice, lorsque cette oscillation descendante n’aqu’une profondeur ne dépassant point certaines limites. Ge cas est parti- culièrement celui la chute motrice est assez grande pour qu'il ne soit pas indispensable de produire des oscillations qui, par la profondeur à laquelle elles font descendre le niveau, suppléent, en vertu d’un mode particulier d’oscillations accumulées, à la peti- tesse de la chute motrice au moyen de la dépense d’eau.

On supposera, dans ce qui va suivre, que la colonne d’eau entrée pour refouler de l’air dans la seconde branche d’un siphon ren-

versé est assez courte par rapport à la chute d’eau motrice.

Si la communication, étant interrompue par un moyen quel- conque entre la seconde et la première branthe, est établie entre la seconde et une troisième branche débouchant dans le bief d’aval, il se présente une oscillation descendante qui vide la se- conde branche jusqu’à une certaine profondeur au-dessous du niveau du bief d’aval, la jonction de la seconde et de la troisième branche étant à une profondeur convenable au-dessous de ce dernier niveau.

Or, si la baisse de l’eau dans l’oscillation descendante ne dé- passe point certaines limites, il se présente une circonstance inté- ressante, objet spécial de cette communication. La soupape, des- tince à laisser entrer de l’air à la place de la colonne liquide qui sort pendant cette oscillation descendante, se fermant en temps utile, le ressort de cet air résiste de manière à ne permettre en- suite à la colonne d’eau de la troisième branche de revenir en ar- rière que d’une quantité assez peu importante pour qu’il n’y ait pas trop à s’en préoccuper. Il résulte même de cette circonstance que pour les machines de ce genre employées à comprimer de l'air, le régulateur n’a pas besoin d'autant de précision que pour le cas elles sont employées à élever de l’eau. Ainsi, quand même la vidange immédiate sur le niveau du bief d’aval ne ferait pas perdre

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beaucoup plus de travail que ce système de vidange par oscillation descendante, il conviendrait de ne pas négliger l'avantage quel- conque provenant de cette oscillation, puisqu'elle ne complique en rien la construction de l'appareil.

L’espèce particulière de suspension alternative dont on vient de parler n’oblige pas même à prolonger la troisième branche un peu au-dessus du niveau du bief d’aval, quoiqu'il puisse être pru- dent de le faire pour certaines conditions, dans le détail desquelles l’auteur ne croit pas nécessaire d’entrér en ce moment.

Il est à remarquer, dit-il, que le délai pouvant provenir de ce mode de suspension alternative, permettra sans doute de diminuer les dimensions du système quelconque de piston, alternativement pressé sur les deux faces opposées, dont le jeu fera, dans diverses circonstances, fonctionner le régulateur par des moyens depuis longtemps expliqués à la Société, les dimensions de ce piston étant d’ailleurs, dans tous les cas, déterminées de manière à avoir, au besoin, égard au ressort de l’air dont il s’agit.

Il est à peine nécessaire d’ajouter que la combinaison, objet de cette note, peut s'appliquer à d’autres inventions de M. de Cali- onv, il ne s’agit ici que d’un exemple particulier.

M. de Caligny a communiqué ensuite une modification de la soupape à double siége, connue sous le nom de soupape de Corn- wall, quand elle est employée, non comme dans ses expériences, à former une portion alternativement mobile d’un tuyau, sans aucun coude ni arrêt intérieur à l’époque elle réunit deux tuyaux alternativement séparés, mais dans le cas l’on veut s’en servir pour boucher alternativement un tuyau transversalement, ce qu'il paraît au premier aperçu difficile de faire, sans qu'il se présente un coude brusque à l’époque ce tuyau cesse d’être bouché ainsi.

M. de Caligny propose d'employer dans ce cas le système qu'il a présenté à la Société, le 28 juin 1851 ct le 23 octobre 18592, pour diminuer la résistance des coudes, au moyen de surfaces courbes concentriques, dans diverses circonstances l’on n’aura pas à craindre que des lames posées comme il l’a expliqué n’ar- rêtent des herbes charriées par le liquide. Dans le cas dont il s'agit, ces lames seraient fixes, en laissant entre elles et la soupape

Extrait de l’Institut, 17° section, 1858. 40

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de Cornwall ou vanne cylindrique l'intervalle nécessaire à son jeu.

MORFHOGÉNIE MOLÉCULAIRE. M. M.-A. Gaudin a fait aussi la communication suivante.

« Le directeur dela Smilhsonian institution,de Washington, m’ayant demandé une collection de mes molécules en relief pour la faire figurer dans ses galeries, l'exécution de cette commande a été pour moi la cause de nouvelles recherches qui m'ont fourni des preuves nombreuses de la vérité de ma théorie. Ceci me four- nit l’occasion de mettre sous les yeux de la Société quelques mo- lécules caraciéristiques.

» En France, la théorie atomique est fort négligée, celle des équivalents domine partout, bien qu’elle soit insuffisante, à elle seule, pour établir le vrai poids des atomes, et par conséquent leur nombre vrai dans les formules, en tant qu’on vise à la connais- sance de la molécule réelle, c’est-à-dire à l'élément géométrique des cristaux. Je puis former un exemple mémorable de cette lacune regrettable.

» Il y à plus de vingt-cinq ans déjà, M. Dumas a déterminé la densité du chlorure et du fluorure de silicium. La première den- sité montre avec la dernière évidence qu’il existe autant de chlore dans un volume de chlorure de slicium que dans un volume de bichlorure d’étain, qui répond au bioxyde d'étain.

» En présence d’un pareil fait, il n’était plus possible de consi- dérer la silice comme l’analogue de l'acide sulfurique non plas que des sesquioxydes d'aluminium, de fer, etc., elle devenait

désormais Si O?, comme le deutoxyde d’étain, l’acide carbonique, l'acide sulfureux. l’eau, etc.

» J'ai discuté à fond cette question dans un mémoire assez étendu qui a été inséré à cette époque dans les Annales de chi- mie et de physique; mais il a passé inaperçu ; si bien que tout récemment M. Marignac à uanné comme chose nouvelle la for- mule Si O? de la silice que je soutiens depuis vingt-cinq ans, en s'appuyant principalement sur les données expérimentales que nous devons à M. Dumas.

» Ainsi, dans notre siècle de lumières, il a fallu vingt-cinq ans pour qu'on commence à apercevoir la portée d’un fait qui doit

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transformer toutes les formules minéralogiques dans lesquelles la silice figure.

» Sans parler des arguments fournis par la densité du chlorure de silicium, il est certain que la discussion étant portée sur les fa- milles si variées des feldspaths, des zéolites, des micas, etc. , on trouve très souvent 8 atomes d'oxygène pour la silice, quand il y en à 3 pour le sesquioxyde et 1 pour le monoxyde : c’est une confirmation éclatante de l'induction fournie par la densité du chlorure de silicium.

» Ma théorie fournit, il me semble, un élément tout nouveau, propre à nous fixer sur le véritable nombre atomique molécu- laire, c’est-à-dire sur le nombre vrai des atomes qui composent le solide géométrique régulier, qui est l'élément des cristaux.

» Étant donnée la formule chimique, il s’agit de déterminer quelle est la molécule cristallisable ? C’est à peu près comme si l’on disait : étant donnée la formule chimique et la densité de iavapeur, quelle est la molécule en atomes? Quand on demande quelle est la molécule cristallisable, on pose pour condition que le polyèdre géométrique établi aura une relation directe avec la forme cris- talline du corps.

» Eh bien, en suivant cette marche, j'arrive toujours à un groupement atomique wnique qui remplit toutes les conditions voulues; et pour écarter tout reproche d’arbitraire, je me suis attaché de préférence aux corps les plus complexes qui, hors d’une solution unique parfaitement régulière, ne permettent pas d’éta- blir un autre groupement symétrique.

» Après avoir construit la chlorite hexagonale, qui est déjà un groupe fort remarquable, j’étais à la recherche d’une substance pierreuse qui fût l’analogue de l'acide stéarique ou des stéarates, lorsque je fis la remarque que l’hydrolite et l’herschélite cristalli- saient en prisme hexaédrique régulier comme l'acide stéarique: dans ce dernier minéral, analysé avec le plus grand soin par M. Damour, il se trouve 8 atomes d'oxygène pour la silice, 3 d'oxygène pour le sesquioxyde, 1 d'oxygène pour le monoxyde et 5 d'oxygène pour l’eau.

» Le problème consistait donc à grouper ces nombres atomi- ques de facon à obtenir l’élément du prisme hexaédrique régulier.

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En prenant la formule 1 fois, 2 fois, 3 fois, 4 fois et 5 fois, on ne peut former un groupement symétrique compatible avec le prisme hexaédrique régulier; tandis qu’en prenant la formule 6 fois, on obtient 48 pour l’oxygènc de la silice, 18 pour le sesquioxyde, 6 pour le monoxyde, 30 pour l’eau. En mettant seulement 31 pour l’eau au lieu de 30, on obtient en effet le groupe magnifique, que je mets sous les yeux de la Société : ilest composé de 61 axes paral- lèles entre eux, 6 graads axes d’aluminate de monoxyde à 7 ato- mes, 24 axes de silice à 3 atomes, et 31 axes d’eau à 3 atomes, représentant 207 atomes comme le stéarate monopotassique, et ayant absolument la même forme.

» En cherchant comment je grouperais les atomes du métasta- nate de monoxyde d’étain hydraté découvert par M. Fremy, j'ai reconnu également que ce corps ne présentait qu’une solution, en effet :

5 (Sa' ©?) ES n' O' +4 (4° O1) montrent clairement que la molécule est carrée ; on a en effet : k (S n! ©?) + 4 (H° Of) + Sn° 0’,

soit un axe à 5 atomes Sn? O*, analogue à l’alumine, entouré de 8 axes à 3 atomes qui forment un prisme carré bi-pyramidé.

» Eu éliminant par la pensée les deux atomes d'oxygène extré- mes de l'axe médian à 5 atomes, il reste wn cube parfait, com- posé de 29 atomes, ayant à ses 8 angles solides un atome d’hydro- gène, au centre de ses 6 faces un atome d'’étain, à son centre de figure et au milieu de chacune de ses 12 arêtes un atome d’oxy- gène ; de sorte que dans ce seul groupement de 29 atomes, on voit wn assemblage solidaire et-intivisible de h5 axes de sy- métrie, Savoir :

16 fois l’eau, les 12 arêtes et les 4 diagonales du cube ;

14 fois le bioxyde d'’étain, les 12 diamètres des 6 faces et les deux extrémités du grand axe:

12 fois l’étain hydrogéné, les 13 diagonales des 6 faces.

3 fois le sous-oxyde d’étain, les 3 diamètres du cube.

» Dans le cas du métastanate de potasse, un atome de potas- sium remplace l’un des deux atomes d'étain du grand axe, et

1 les axes de symétrie sont encore au nombre de 44, tout en don- nant la preuve que dass les axes principaux il peut y avoir des atomes correspondants, de nature analogue, mais non de méme poids.

» Cette molécule est bien près du cube; cependant elle n’est pas cubique, tant il est vrai que le cube est rare, si même il existe, dans la multitude de polyèdres réguliers qui composent la série des corps cristallisables.

» Je n’ai encore pu former un cube qu’en multipliant par 9 la

formule 4A, 2B, correspondant aux bioxydes, aux bisulfures, aux bichlorures, aux bifluorures, etc. _ » Ce cube, que je mets sous les yeux de la Société, présente aussi un certain nombre d’axes de symétrie ou d'équilibre ; on en compte 9 figurant l’atome métallique entre deux atomes du mi- néralisateur, et 24 formés par un atome du minéralisateur com- . pris entre deux atomes de métal. »

OPTIQUE DE L'OEIL. M. Jules Regnauld a présenté l’analyse et les conclusions d’un travail sur la fluorescence des milieux de l'œil chez l'Homme et quelques Mammifères.

L'auteur s’est proposé de constater expérimentalement la fluo- rescence des milieux de l’œil, phénomène devenu très probable pour quelques-uns d’entre eux, d’après les observations de MM. L. Foucault et Stokes. Il a choïsi comme source de radiation épi- polique le faisceau des rayons limites, violets-et: ultra-violets, obtenu au moyen d’un large prisme de Nicol, suivant le procédé indiqué par le premier de ces physiciens. De plus, dans les cas douteux , il fait arriver le soleil par réflexion totale sur un prisme rectangulaire de quartz convenablement taillé, et étudie les matières soumises à l'expérience en interposant entre elles ct l'œil de l'observateur un de ces verres jaunes que M. Stokes dé- signe sous le nom d’absorbin:s complémentaües. Le détail des précautions et du manuel opératoire soal insérés au mémoire que M. Jules Regnauld résume dans les conclusions suivantes :

Chez l’Homme et les Mammifères examinés jusqu’à ce mo- ment (Bœuf, Mouton, Chien, Chat, Lapin), la cornée est fluo- rescente, mais à un faible degré ;

2e Chez l'Homme et ces Mammifères le cristallin est doué au

Ce!

78 plus haut degré des propriétés fluorescentes; chez ces animaux, aussi bien que chez plusieurs Vertébrés aériens, ces propriétés persistent dans les portions centrales du cristallin (endophacine de MM. Valenciennes et Fremy) conservées par voie de dessiccation à une basse température ;

Les portions centrales du cristallin de plusieurs Vertébrés et Mollusques aquatiques (phaconine des mêmes auteurs) sont pres- que totalement privées de la fluorescence ;

Le corps hvaloïde ne présente qu’une très faible flu ores- cence due aux membranes byalines, car l'humeur vitrée ne la possède pas;

La rétine, comme l’a reconnu M. Helmholtz sur un œil hu- main dix-huit heures après la mort, possède une certaine fluo- rescence qui n’est nullement comparable pour l'intensité à celle du cristallin des Mammifères :

6” Enfin, pour revenir à l’origine et au principe de ce travail, l’auteur conclut que s’il faut placer dans un phénomène de fluorescence la source des accidents causés par les radiations fai- blement lumineuses de la lumière électrique, c’est dans l’action énergique produite sur le cristallin qu'il est naturel d’en chercher l’explication ; l’impulsion subie par la cornée ne doit pas néan- moins être négligée.

4

PA

Séance du 18 décembre 4858.

OPTIQUE MINÉRALOGIQUE. Propriélés optiques biréfrin- gentes cl forme cristalline de la liroconite. M. Descloizeaux, dans la note suivante lue par lui devant la Société, expose un nouvel exemple de l'utilité et même de la nécessité que présente la détermination des propriétés optiques biréfringentes des cristaux naturels ou artificiels lorsqu’on veut connaître exactement leur forme géométrique.

Il existe dans la nature un arséniate de cuivre et d’alumine connu sous le nom d’arséniate de cuivre octaédrique ou liroco-- nite, dont la composition peut être exprimée, d’après les analyses de M. Damour {1}, par la formule

2 Cu° (As Ph}5 + AIS (As Ph}5 L 32 Aq.

(1) Annales de chimie et de physique, série, & xmr.

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Ce minéral se présente en cristaux d’un beau bleu céleste qui affectent la forme d’octaèdres surbaissés à base rectangulaire. Les faces de ces cristaux portent presque toujours des stries fines ou de légères ondulations qui ne permettent d’obtenir leurs incidences qu’avec une approximation de quelques minutes ; c’est donc en se basant sur leur grande symétrie plutôt que sur des mesures très précises qu’on les a jusqu'ici rapportés au prisme rhemboïdal droit. Dans cette hypothèse. les octaèdres de liroconite peuvent êtreregardés comine une combinaison d’un prisme vertical #2 sous l'angle de 107° 5” avec un prisme horizontal a! remplaçant les angles solides obtus du premier, et faisant, avec les faces », des angles de 133° 54”. Les clivages les plus distincts ont lieu suivant les faces » ; on er cite aussi des traces suivant les faces a’ et même suivant la base du prisme qui serait tangente à l'arête aiguë de ces faces.

Si les axes cristallographiques sont rectangulaires, les axes d’é- lasticité le seront également; par conséquent le plan des axes optiques devra coïncider, soit avec la base de la forme primitive, soit avec le plan vertical passant par la grande diagonale, soit enfin avec le plan vertical passant par la petite diagonale de la base. Or, si l’on pratique sur les angles solides obtus des octaè- dres de liroconile deux faces artificielles parallèles au plan qui comprend leurs arêtes verticales et leurs arêtes horizontales, on voit immédiatement, par l’inspection des courbes isochromatiques produites, en soumettant la plaque au microscope d’Amici, que cette substance possède deux axes de double réfraction très écar- tés, dans un plan perpendiculaire au plan de la lame et faisant avec

, m ! ; une des arêtes verticales un angle de 20° à 25° ; la bissec- m

trice, de signe négatif, est également perpendiculaire au plan de la lame.

Gette disposition des axes optiques montre d’une manière évi- dente que la forme de la liroconite ne peut pas être rapportée au prisme rhomboïdal droit, mais qu’elle appartient en réalité au prisme oblique symétrique. On obtiendra la forme primitive la plus simple possible, en plaçant devant soi les arêtes aiguës con- sidérées comme latérales dans le système du prisme droit, ce qui

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donnera un prisme rhomboïdal de 72°55', offrant un clivage dif- ficile suivant une base dont l'inclinaison sur l’axe vertical, très voisine de 90», reste pourtant indéterminée. La détermination de cette inclinaison exigerait en effet la connaissance exacte des inci- dences entre les troncatures el, situées maintenant sur les angles latéraux de la forme primitive, et les faces m antérieures et posté- rieures ; or, d’après l’apparence habituelle des octaèdres de ‘i- roconile, ces incidences devant être presque identiques, leur dif- férence ne saurait être constatée que si les faces étaient beaucoup plus unies et plus miroitantes qu’elles ne le sont ordinaire - ment (1).

Les phénomènes optiques de la Ziroconile offrent une nou- velle preuve de la séparation absolue qui existe entre les différents iypes cristallins auxquels on rapporte les formes de tous les cris- taux connus. On sait que ces types sont au nombre de six, et que quelques observateurs, pour expliquer les phénomènes d’isomor- phisme et de plésiomorphisme, ont cherché à réduire ce nombre à trois ou quatre seulement. Considérée d’une manière purement géométrique, l’idée de faire dériver les types obliques de types rectangulaires peut présenter une apparence de vérité; car il ne paraît pas impossible d'obtenir un rhomboèdre à l’aide de l’al- longement très-faible d’une des diagonales du cube, un octaèdre carré à l’aide d’un changement du même genre sur l'octaèdre

(1) Contrairement à l’opinion généralement reçue, M. Breithaupt admet, dans son Traité de mincralogie, que les octaèdres de liroconite affectent une forme hémiédrique dérivée d’un prisme rhomboïdal droit: il base son opinion sur ce qu'on voit des angles rentrants dans quelques cristaux en apparence mâclés, et sur ce que l’arête d’intersection des faces désignées ici par e! est oblique, et non perpendiculaire à l’arête des faces m, avec laquelle elle ferait un angle de 86°. Cette obliquité, qui résulte forcément de la dis- position des axes optiques, n’est peut-être pas aussi forte que l'indique M. Breithaupt; malheureusement les cristaux que j'ai eus à ma disposition n'étaient pas assez nels pour m'en assurer. Autant que j'ai pu en juger sur ces cristaux, le plan des axes serait dirigé dans l’angle aigu de la section verticale parallèle à la diagonale inclinée de la base. Quant aux mâcles dont parle M. Breïithaupt, je n’en ai pas vu une seule dans une douzaine de lames que j'ai fait traverser par un faisceau de rayons parallèles et polarisés,

D.

sl

régulier, etc. Ces passages semblent même indiqués dans les cris- taux voisins d’une forme limite, par une symétrie des modifica- tions analogue à celle que possède la forme limite elle-même ; c’est ainsi que le sulfate de protoxyde de fer a longtemps été re- gardé comme dérivant du rhomboëèdre, et la datholite comme appartenant au prisme rhomboïdal droit. Mais si l’on compare les propriétés optiques des six types cristallins de la minéralogie, on voit qu’elles sont complétement incompatibles et qu’il n’existe aucun passage d’un système à l’autre. Ainsi le rhomboëdre le plus voisin de 90° possède toujours un axe de double réfraction, tan- dis que le cube a la réfraction simple; le prisme rhomboïdal droit le plus rapproché du prisme carré peut avoir des axes optiques excessivement écartés, comme nous le montre la mésotype; le prisme oblique symétrique le plus voisin du prisme rhomboïdal droit, tel qu’est celui de liroconite, possède des axes optiques ouverts dans un plan dont la direction s’écarte beaucoup de celle des axes cristallographiques.

On conçoit, du reste, qu’il en doive être ainsi, et qu’il ne puisse pas en être autrement, Car le rapprochement ou même la presque identité que certains cristaux offrent avec les formes limites du cube, du prisme droit à base carrée, etc., n’existe qu’à une tem- pérature déterminée, et si l’on pouvait chauffer convenablement ces cristaux, on les verrait changer de figure et prendre des formes évidemment incompatibles avec les formes limites, puisque, des trois axes d’élasticité, deux au moins élant inégaux, la dilatation se répartirait d’une manière inégale suivant ces axes.

HYDRAULIQUE. M. de Caligny a présenté dans cette séance une note sur une combinaison de la soupape de Cornwall avec le tiroir dont il avait entretenu la Société le 20 juillet 1839; il a communiqué ensuite des expériences sur les ondes liquides.

T. Dans les expériences répétées à l’École des mines en 1837, de- vant une commission de l’Académie des sciences, M. de Caligny mettait alternativement le tuyau vertical d’une de ses machines hydrauliques en communication avec un tuyau de conduite débou- chant par l’autre extrémité dans la prise d’eau, et avec un tuyau de décharge. Ces deux derniers tuyaux étant horizontaux, l’un était bouché par le tiroir, quand l’autre était ouvert.

Extrait de l’Institut, 1'° section, 4858. 41

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Ce tiroir se compose d’un bout de tuyau toujours ouvert à son extrémité supérieure, toujours fermé à son extrémité inférieure, et percé latéralement d’un orifice venant se poser alternativement devant l’un des deux tuyaux horizontaux dont il s’agit, selon que le tiroir est haussé ou baissé.

Au-dessous de cet orifice un bout de cylindre plein prolonge le tiroir, de manière que le tuyau horizontal inférieur soit bouché pendant que l’orifice latéral se présente devant l’autre tuyau ho- rizontal. Il est à peine nécessaire d'ajouter que cetiroir est taillé de manière à permettre à l’eau de circuler autour de lui pour évi- ter le frottement qui résulterait sans cela de la pression latérale du liquide, sans cependant permettre d'écoulement aux endroits il doit être alternativement interrompu.

M. de Caligny rappelle qu’il a construit des tiroirs de ce genre, en disposant, aux hauteurs convenables, des pistons annulaires attachés extérieurement aux tiroirs. Mais les moyens de construc- tion ayant été très perfectionnés depuis l’époque il présenta ce tiroir, il croit pouvoir aujourd'hui proposer une modification évi- tant toute espèce de frottement du tiroir contre des corps solides, ei sur laquelle il n’a peut-être pas assez insisté dans ses premières communications verbales, à cause des difficultés de construction qui pouvaient exister encore à cette époque déjà ancienne.

Il propose, au lieu d'employer des pistons annulaires extérieurs avec garniture, de faire ces pistons entièrement métalliques , fon- dus tout d’une pièce avec le tiroir, et de tailler ces pistons par- dessus et par-dessous, de manière qu’ils puissent appliquer alter- nativement une surface conique sur un siége annulaire fixe taillé convenablement. Le mode de fermeture et les ajustages seront parfaitement analogues à ceux des soupapes circulaires en usage.

La difficulté pratique consiste en ce que plusieurs de ces pièces annulaires, fondues avec le tiroir, devront en même temps porter sur plusieurs autres pièces annulaires, ou siéges fixés au bout de tuyau fixe corps de pompe dans lequel joue le tiroir, et en ce que la fermeture devra se faire convenablement, non-seulement quand le tiroir sera à l’une des extrémités de sa course, mais quand il sera à l’autre extrémité, les faces opposées de ses pièces annulaires extérieures devant s’appuver contre les siéges fixes. Mais avec une

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bonne exécution, l’auteur fait observer que ce moyen évite toute espèce de frottement du tiroir contre des corps solides, sauf celui des guides, et celui qui pourrait résulter des herbes dans les cir- constances il n°y aurait pasmoyen de s’en débarrasser; qu'il per- met d’ailleurs de profiter de l’extrême précision que le principe de la machine à colonne d’eau lui a permis de donner au jeu du tiroir rappelé au commencement de cette note, par le mode d’action al- ternative des colonnes d’eau sur le fond du tiroir. Dans les expé- riences répétées à l'École des mines en 1837, c'était un contre- poids qui relevait le tiroir en temps utile. L'auteur rappelle qu’au lieu d’un contre-poids solide, on peut employer un contre-poids liquide; c’est-à-dire, soit une colonne d’eau dans un tube recour- bé, disposé au-dessous du corps de pompe dans lequel joue le ti- roir, soit tout simplement la pression de l’eau du bief d'aval au-dessous du tiroir. Les oscillations seraient alors combinées, ainsi qu’il l’a expliqué depuis longtemps à la Société, et l’a d’ailleurs rappelé d’une manière succincte dans sa dernière communication sur les machines soufflantes ou à compression d’air , auxquelles la disposition, objet de cette note, peut aussi être appliquée. La résistance de l’eau au coude brusque de ce tiroir pourra d’ailleurs être atténuée au moyen du système de lames courbes concentri- ques rappelé dans la dernière séance,

Quant à l'emploi de ces lames pour diminuer aussi la résis- tance de l’eau dans les coudes brusques résultant de l’emploi des soupapes de Gornwail ou des vannes cylindriques, telles qu'elles sont indiquées dans dernière séance, il est à peine nécessaire de rappeler que, dans les circonstances de ce genre, ce n’est plus à proprement parler de lames courbes qu’il s’agit, mais de sur- faces courbes de formes analogues à celles de pavillons de trom- pette rentrant les unes dans les autres.

IT. M. de Caligny a communiqué aussi dans cette séance des expériences sur les ondes résultant, dans un canal, du mouvement vertical alternatif d’un corps solide. Il s'agissait de voir si, dans cette espèce d'ondes, appelées courantes, it y à ou il n’y à pas un mouvement de translation sensible.

M. de Caligny rappelle que lorsqu'il présenta des expériencessar ces ondes à l’Académie dessciences, M. Arago remarqua principa-

Sl

lement dans son mémoire le fait nouveau du recul sur le fond ob- servé après le passage de plusieurs ondes. Mais ce mouvement n’é- tant que de quelques centimètres dans les circonstances ces ex- périences furent faites, M. de Caligny a fait de nouvelles observa- tions sur un canal d’une beaucoup plus grande longueur, dont les dispositions particulières seront prochainement expliquées dans une note plus étendue. Ce n’est plus de quelques ondes, mais de plusieurs centaines d’ondes qu’il s’agit; de sorte que les déplace- ments étudiés ne sont plus de quelques centimètres, mais de plu- sieurs mètres, ce qui établit le phénomène d’une manière plus évidente. Cependant, comme les grains de raisin répandus sur le fond, quelque ronds qu'ils fussent, offraient une cause quel- conque de frottement ou même d’irrégularité dans les mouve- ments de va-et-vient, il était plus rigoureux d'observer les dépla- cements des corps légers répandus à la surface, tels que des brins d'herbe quand il ne faisait pas de vent.

Or, soit qu’on observe le recul sur le fond, soit qu’on observe le déplacement en sens inverse à la surface, c’est-à-dire le mou- vement de progression qui se présente à la surface, on voit que le phénomène varie d'intensité selon la distance les déplacements observés sont du point les ondes sont engendrées par un mou- vement de va-et-vient vertical. Ces déplacements sont d’autant plus grands qu’on les observe plus près de ce dernier point. Il y a d’ailleurs lieu de croire qu’ils se compensent à peu près dans une certaine région du canal; car, à de grandes distances , ils ne sont plus assez sensibles pour qu’on soit certain de leur existence quant à présent. Or, cela n’aurait pas lieu s’il se faisait réellement un transport notable du liquide de la première partie du canal à celle l’on n’observe pas de déplacement bien sensible après le passage des ondes. Les déplacements dont il s’agit diminuent même assez rapidement, à mesure qu’on les observe à des dis- tances très-différentes de l’origine du mouvement. Ainsi, dans des limites assez étendues, si l’on considère successivement à la surface les petits flotteurs à des distances diverses de cette ori- gine, les déplacements observés diminuent à peu près comme les termes d’une progression géométrique. Ils diminuent ensuite moins rapidement, mais, étant déjà beaucoup moindres, ils de- viennent moins faciles à observer. Quelques détails sur ce sujet se-

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ront l’objet d’une prochaine communication. On peut dès aujour- d’hui remarquer que l’entraînement des corps flottants, même à des distances considérables, n’est plus une preuve de translation réelle dans tout l’ensemble de la masse liquide en ondalation, à cause des déplacements en sens contraire dans lés régions infé- rieures.

M. de Caligny a communiqué il y a longtemps à la Société des observations sur la comparaison des vitesses apparentes de ces ondes courantes avec celle des ondes appelées solitaires, qui, étant engendrées dans certaines conditions après les premières, par des moyens particuliers, finissaient cependant par les atteindre, et al- laient par conséquent plus vite.

La grande longueur du canal sur lequel il a opéré depuis cette époque lui a permis de varier les observations, d’où il paraît ré- sulter que les deux espèces d'ondes ne vont pas plus vite l’une que l’autre quant à la translation apparente, dans le cas où, à force de patience, on parvient à leur donner sensiblement la même hauteur. Ce qui fait croire que les ondes solitaires vont en général plus vite que les autres, quand on expérimente sur un canal trop court, c’est qu’en se pressant de les produire, avant que les ondes courantes aient atteint l’autre extrémité du canal, on les fait plus fortes qu’on ne veut ; or, on sait que les ondes soli- taires plus fortes vont plus vite que ies plus faibles. Les phéno- mènes de recul au fond du canal et de progression à la surface se présentant avec plus d’intensité à de petites distances de l’origine du mouvement des ondes courantes qu’à des distances notables , cela peut servir à expliquer, selon M. de Caligny, pourquoi, dans les expériences des frères Weber, dont le canal était très court, le grand axe des orbites des ondes courantes dans les ré- gions supérieures était horizontal, au lieu d’être vertical comme dans les expériences qu’il a communiquées à la Société en 1842, et comme dans les observations faites en mer par feu M. Aimé, qui ne les avait d’ailleurs présentées qu'avec réserve, avant qu’elles eussent été confirmées par celles de M. de Caligny.

ORNITHOLOGIE. Oiseaux des iles Sandwich. Les obser- valions suivantes, sur l’ornithologie des îles Sandwich, ont été présentées dans cette séance par M. Pucheran.

06

« Depuis une dizaine d’années, j'ai porté fréquemment mon attention, dans les diverses tentatives de généralisation auxquelles je me suis livré, sur la détermination des caractères généraux propres aux diverses faunes de l’époque actuelle. Dans mes études relatives à cette question, je ne me suis habituellement occupé que des Mammifères, sans essayer de faire l'application aux autres classes du règne animal, même aux Oiseaux, des divers résultats que l'observation me permettait de constater. Si je me suis ab- stenu, dans ces diverses circonstances, c’est qu’il m’a paru à peu près démontré, d’après les faiis que je connaissais, que les con- clusions générales auxquelles j'avais été conduit en mammalogie ne présentaient point de résultats différentiels dans la seconde classe du règne animal. Je suis convaincu de cette coïncidence, non- seulement pour l’ornithologie africaine, mais encore pour celle des parties septentrionales de l’ancien et du nouveau continent. Quant à l’ornithologie de Madagascar, il nv’est impossible d’ad- mettre, dans l’état actuel de nos connaissances, que Les caractères généraux de ses Oiseaux sont les mêmes que ceux des Mammifères qui leur sont congénères. C’est une étude nouvelle à aborder, mais qui exigera, je le crains, de la part des zoologistes qui dé- sireront s'en occuper, des tentatives multipliées avant qu’il leur soit possible d’arriver à formuler un principe qui soit de nature à Jes satisfaire,

» De même que pour Madagascar, le caractère général de la faune ornithologique des archipels de la Polynésie me semble devoir présenter, pour sa détermination, de sérieuses difficullés. J'ai cependant abordé la solution de ce problème, en 4847, pour la Nouvelle-Zélande (1), et je ne crois pas que les observations que j'ai faites à cette époque soient susceptibles d’être modifiées par les faits qui ont été ultérieurement découverts. Dans la pré- sente note, je vais m'occuper, sous le même point de vue, de la faune des îles Sandwich.

» Comme la Nouvelle-Zéiande, l’archipel des îles Sendo ieh est à peu près entièrement dépourvu de Mammifères. Cette observa- tion est, du reste, généralement applicable aux divers archipels de la Polynésie. Le nombre des Oiseaux est de même fort peu con-

(1) Revue zoologique, p. 389.

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sidérable pour les îles Sandwich, et, en compulsant les diverses publications des ornithologistes de notre époque et de ceux du dix-huitième siècle, M. Hartlaub n’a pu dépasser le nombre de trente espèces (1). Parmi ces trente espèces, presque toutes (Buteo solitarius, Peale; Otus sandvicensis, Blox. ; Turdus sandvicencis, Gm.; Corvus havaicensis, Peale: Gallus bankiva, Tem., var.s Sérepsilas interpres, L. ; Totanus solitarius, Blox.; Porzana sandvicensis, Gm. ; Porzana obscura, Laih. ; Gallirula chloropus, L.; Fulica alaï, Peale; Bernicla sand- vicensis,Nig.; Anas boschas,L., var. Anas clypeata, L.), appar- tiennent à des genres à peu près cosmopolites. Nous devons ajouter que ce savant zoologiste n’admet qu’avec doute l'existence, dans les îles Sandwich, du Ptilopus holosericeus, Tem., et celle de l’Ardea exilis, Gm., signalée par M. Peale. M. Peale, au reste, hésite lui-même, en ce qui concerne cette dernière espèce, sur l'exactitude de sa détermination. Ajoutons, à notre tour, qu’il sera peut-être nécessaire d'ajouter à cette liste d'espèces le Rapace nocturne distingué, dans le Musée de Paris, par M. Charles Bona- parte (2), sous le nom de Brachyotus sandvicensis, à moins que cetle espèce ne constitue, ce qui est fort possible, un synonyme de celle décrite par Bloxam sous le nom d’'Ofus sandvicensis, rapprochement que je ne puis ni confirmer ni infirmer, ne con- naissant point cette dernière diagnose. Disons en outre que le Trichoglossus pyrrhopterus, Vigors, admis comme originaire des îles Sandwich, nous paraît, ainsi que nous l'avons dit ail- leurs (3), originaire du Brésil.

» On trouve également dans lesîles Sandwich, indépendamment des espèces dont nous avons plus haut donné la liste, un certain nombre de types dont les formes rostrales sont assez particula- risées pour avoir donné lieu, de la part des ornithologistes mo- dernes, à la création d’un certain nombre de coupes génériques. Il en est ainsi des genres Drepanis, Hemignathus, Hima- tione, Moho, Psitlirostra, Loxops et Chasiempsis. C’est de

(1) Cabanis, Journal fur Ornithologie, vol. II, p. 170. (2) Revue et Magasin de zoologie, 1854, p. 541. (3) Revue et Magasin de zoologie, 1853, p. 160.

[efe)

ces divers types, qui se trouvent n’habiter que dans cet archi- pel, qu’it nous faut essayer de déterminer le caractère le plus gé- néral. Or, par la comparaison de la presque totalité de ces gen- res, il est évident que, sous le point de vue de la forme de leurs becs, ils ontune tendance manifeste à l'incurvation et à l'allongement de la mandibule supérieure, de telle sorte qu’elle dépasse alors la mandibule ivférieure. Les Æimalione et Moho offrent cette par- ticularité de forme d’une manière moins visible , mais il est impossible d’en contester la manifestation dans Drepanis et sur- tout dans Hemignathus. Quoique appartenant à la section des Passereaux déodactyles conirostres, le genre Psittirostra repro- duit la disposition rostrale que nous venons d'indiquer, et on la constate aussi, beaucoup moins évidente, il est vrai, dans le genre Lozxops, lorsque l’on examine son bec de profil, en le comparant avec celui de Carduelis. On observe également que, dans le type polyuésien , la mandibule supérieure est moins droite et plus courbée.

» Je ne puis rien dire du genre Chasiempsis, dont je ne con- pais pas une seule espèce; mais, d’après les détails le concernant et qui nous sont donnés par M. Cabanis (1), il paraît certain que les deux types (Chas. sandvicensis et Ch. obscura), qui en font partie, ne présentent point les formes rostrales que nous avons signalées plus haut. Je pense, au contraire, quoique ne connais- sant pas non plus cet Oiseau, que le Passereau décrit par M. Peale (2) sous le nom d'Entomyza (?) angustipluma ne forme pas une exception au principe que nous nous sommes permis de formuler. Le genre Entomyza ressemble beaucoup, en effet, à ceux des îles Sandwich, dont nous avons initialement cité les noms, et il n’est pas probable que M. Peale eût rattaché à ce type générique les individus soumis à son examen, si, quoiqu'il ne le fasse qu'avec doute, il n’eût pas trouvé convenable le rapproche- ment qu’il établissait.

» Dans tous ces genres des îles Sandwich, les tarses sont élevés et assez forts, les doigts bien divisés, le pouce bien formé, très bien formé dans H0ho, les ongles moyennement développés et peu

(4) 4rchiv. fur Naturgeschichte, etc., vol. 25, p. 207. (2) United Staded exploring Expedition, Mamm. and Ornith.,p. A7.

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courbés, celui du médius plus fort que ceux des doigts latéraux, celui du pouce égal au moins à celui du médius, quand il ne le dépasse pas. Les ailes sont faiblement développées : il en est de même de la queue, excepté dans les individus du genre Hoho, dont les rectrices sont longues et douées de la forme étagée. Tou- tes les formes de ces genres indiquent en eux des habitudes ar- boricoles : ils se livrent, sans nul doute, à la marche; mais cet acte ne leur est pas évidemment habituel. Leurs narines sont dé- couvertes, creusées dans une fosse arrondie, et recouvertes d’une écaille. Dans le genre oho, celui de tous qui s’isole le plus de sescongénères, l’écaille existe également, maiselle’est allongée, et la narine linéaire. Sous ce point devue, par conséquent, ce genre pré- sente tout à fait les conditions offertes par les autres Melliphagidés.

» Du côté de la couleur, celles qui sont le plus habituellement offertes par le plumage, dans ces divers genres, sont le rouge et le vert, avec leurs différentes nuances. La preinière teinte s’observe dans Drepanis vestiaria, dans Loxops coccinea, dans Himatione sanguinea ; la seconde dans Æimatione chloris, Himatione maculata, et dans le genre Psittirostra. Le noir est la couleur dominante dans les individus du genre Moho, mais le jaune re- paraît sur les plumes des hypocondres dans Certhia fasciculata. On aperçoit également du blanc à l'extrémité de certaines de ses rectrices, et des taches de cette couleur se trouvènt sur les bords des rectrices supérieures des ailes dans Æimatione maculata. Rappelons à cette occasion, comme s’harmonisant avec celle que nous venons d'énoncer, l’obser vation de M. de Müller (1) sur la présence, dans les révions les plus septentrionales, de la plupart des Fringillidés , dont la couleur est rouge intense ou rouge carmin.

» Les conclusions que j'ai formalées plus haut sur le caractère général de l’ornithologie des îles Sandwich ne sont, je dois le ré- péter encore, vraiment applicables qu’aux genres spécialement originaires de cet archipel. Parmi les vingt-huit espèces, indiquées par M. Hartlaub et appartenant à d’autres genres dont l'habitat est moins restreint, il en est, sans nul doute, dont la mandibule su- périeure est incurvée, mais, pour savoir quel est le degré de cette incurvation dans les individus des îles Havaii, il serait nécessaire

(1) Revue et Magasin de zoologie, 1855, p. 120,

Extrait de l’Institut, 47€ section, 1858. 42

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d’en avoir sous les yeux un certain nombre d'exemplaires : jus- qu'ici, malheureusement, il nous a été impossible de nous livrer à un semblable examen.

» Tout en renvoyant à des circonstances plus favorables l'étude de cette dernière question , nous ne devons pas omettre de signa- ler ce fait intéressant de la rareté des types dont le régime est plus exclusivement végétal, soit parmi les genres , soit parmi les es- pèces d’Oiseaux originaires des îles Sandwich. Parmi les genres, nous ne voyons que Pséttirostra et Loxops. Quant aux espèces, ce n’est qu'avec doute que M. Hartlaub admet parmi elles le Pt. holosericeus, evil est fort probable que la variété de Gallus Bankiva , citée par cet ornithologiste , a été importée dans cet archipel. Tous les autres types spécifiques, sauf peut-être la Ber- nache, soit Passereaux des genres Corvus, Turdus, Chasiemp- sis, etc., soit Echassiers et Palmipèdes des genres Sirepsilas, Ardea, Totanus, Porzana, Gallinula, Fulica, Anas et KRhyn- chaspis, ou se nourrissent de matières animales, ou présentent un régime mixte d'alimentation. C’est maintenant aux zoologistes occupés de l’étude des Reptiles et Poissons et de celle des ani- maux invertébrés à tâcher de nous expliquer ce fait ; car nous ne voyons que deux espèces de Rapaces et les Corbeaux qui puis- sent se nourrir d'Oiseaux d’une certaine dimension et de leurs œufs ; les autres sont forcés de se contenter de proies moins vo- lumineuses.

» Pour tâcher d'expliquer le fait général que nous venons d’ex- poser, nous sommes donc obligé de recourir à d’autres éclair- cissements que ceux qui nous sont donnés par l’ornithologie. Cette nécessité nous est fréquemment imposée en zoologie, lorsque nous essayons de fixer les caractères généraux des faunes : la cau- salité, Si nous pouvons nous servir d’une expression aussi pré- tentieuse, nous est souvent fournie par un ordre de notions qui sont du domaine d’une autre science. Ainsi, le caractère général de la faune africaine nous est expliqué par la structure géologique de cette partie de l’ancien continent. La botanique , en ce qui concerne la disposition rostrale des genres d’Oiseaux spécialement originaires des îles Sandwich, va nous offrir, à son tour, un fail qui ne peut être passé sous silence. C’est celui de la présence dans cet archipel, d’espèces gigantesques de Lobelias. Des co -

JA

rolles de ces végétaux, le Drepanis coccinea, d’après M. Peale (1), retire les Insectes dont il se nourrit, et son bec, ajoute ce zoolo- giste, est admirablement adapté à cet office. Ainsi agissent égale- ment les Aemignathus obscurus et Hemignathus lucidus (2). Il est probable que les autres genres, dont la forme en faucille des mandibules est moins marquée, offrent dans leurs habitudes quel- que similitude. Je me borne, en cette circonstance, à signaler le rapport qui existe entre ces deux faits empruntés à deux sciences différentes , sans chercher à déterminer en aucune façon quelle est la cause initiale de ce rapport.

» Le mode d’incurvation de la mandibule supérieure, tei qu’on l’observe à l’état normal dans les Æemignathus, est excessive- ment rare dans les genres de la série ornithologique , et, dans certaines espèces, il se manifeste quelquefois, il constitue une véritable anomalie. Il en est ainsi dans des individus de la famille des Corvidés, soit dans le Corbeau lui-même , soit dans le Freux. C’est une preuve, suivant nous, que , sous le point de vue de la disposition que nous signalons, une forme organique qui n’est qu’accidentelle, anormale dans certains types’, a de la tendance à devenir normale et à se produire régulièrement dans d’autres types originaires d autres pays. Nous pouvons citer, sous le même point de vue, le mode de coloration spécial à tant de Mammifères et d’Oiseaux africains, mode de coloration si voisin de lPalbi- nisme. En Afrique, cette coloration est l’état normal; elle consti- tue, dans les animaux d’autres régions, une véritable anomalie dont l'explication est restée insaisissable à toutes les investigations modernes. La zoologie, en cette circonstance, reproduit des faits de même nature que ceux qui nous sont offerts par l'étude des monstruosités animales. Rien de plus fréquent, en effet, ainsi que le savent les physiologistes, que de voir dans les observations téra- tologiques une disposition organique constituer une anomalie, accidentellement produite, par conséquent , dans un individu, tandis que, dans un autre groupe, cette disposition devient l’état normal et régulier. »

(1) Revue et Magasin de zoologie, 1855, p. 152, (2) bid., p. 158.

Paris.—linprimerie de Cossex et Comp., rue du Four-Saint-Germain, 45,

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SOCIÉTÉ | PHILOMATHIQUE DE PARK.

ANNÉE 1859.

EXTRAIT DE L'INSTITUT,

JOURNAL UNIVERSEL DES SCIENCES ET DES SOCIÉTÉS SAVANTES EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER.

4:e Section —Sciences mathématiques, physiques et naturelles.

Rue Gu Marché-St-Honoré, 7, à Paris.

SOCIÉTÉ

PHILOMATHIQUE

DE PARIS.

EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES

PENDANT L'ANNÉE 1859.

PARIS, IMPRIMERIE DE COSSON ET COïP.,

RUE DU FOUR-SAINT-GERMAIN, #8»

1859.

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SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE

DE PARIS.

SÉANCES DE 1859.

Séance du 8 janvier 1859.

GÉOMÉTRIE ET MÉCANIQUE. —M. de Saint-Venant met sous les yeux de la Société deux modèles en relief, l’un d’une surface à plus grande pente constante, l'autre de la surface: décrite par une corde v.brante transporlée d’un mouvement rapide per- pendiculaire à son plan de vibration.

La surface d’égale pente du premier modèle est l’une des sur- faces développables dont il à entretenu la Société le 6 mars 1852 (1). La base horizontale ou directrice à laquelle le plan gé- uérateur , d'inclinaison constante, doit rester tangent, est, au lieu d’une courbe continue , un dodécaèdre inscriptible à une ellipse, en sorte que la surface est polyédrale et composée des plans passant par les douze côtés, et faisant tous le même angle (soit A5 degrés) avec l'horizon. On aperçoit ainsi, très facilement, la forme que doit avoir la surface lorsque la base est une ellipse ou une autre courbe fermée et continue. Elle se compose : d’une partie, ou nappe inférieure , terminée ex haut à la courbe formée par les rencontres deux à deux des arêtes non contiguës ; 20 d’une partie supérieure de forme à peu près sem-

(4) Voy. l’Institut, 1'° section, 952.

Extrait de l’Institut, 1re seclion, 14859, . 4

6

blable, mais qui est en sens inverse et terminée en bas par une courbe analogue à celle dont on vient de parler, ayant de même deux points d'arrêt, et dont le plan est perpendiculaire au plan aussi vertical de celle-ci, qui limite la nappe inférieure ; d’une partie, ou nappe intermédiaire , unissant les deux autres, et li- mitée haut et bas par conséquent aux deux courbes dont il vient d’être question, mais limitée latéralement par les quatre arêtesde rebroussemen! que déterminent par leurs rencontres les arêtes ou génératrices rectilignes contiguëés de la surface d’égale pente.

Les coupes horizontales de ces diverses parties sont les courbes équidistantes à l’ellipse, qui ont été appelées oroëdes et étudiées surtout par MM. Catalan et Breton (de Champ). La partie inférieure donne pour coupes des courbes parallèles à l’ellipse; la partie supérieure, des courbes anti-parallèles ; la partie intermédiaire, des courbes à quatre points de rebroussement, séparant les por- tions parallèles des portions anti-parallèles.

Le deuxième modèle est la reproduction de celui que Monge avait construit et déposé au cabinet de l’École polytechnique, mais qui ne s’y trouve plus (1). Les coupes de la surface modelée, par des plans parallèles à celui de vibration qui est supposé vertical, représentent les états successifs de la corde pendant le temps d’une vibration , temps au bont duquel elle reprend sa première forme. Cette forme initiale est supposée une ligne brisée, com- posée de deux droites de longueur inégale, situées dans un même plan vertical ; et on suppose que l’espace parcouru uniformé- ment par la corde, ou par ses deux points d'attache, dans un sens horizontal et perpendiculaire à sa direction , est égal à sa lon- gueur pendant le temps d’une demi-vibration. Les états successifs de la corde offrent aussi des lignes brisées, mais généralement composées de trois droites ; et la surface est polyédrale et formée, pour le temps d’une vibration , de deux parallélogrammes et six triangles.

M. de Saint-Venant présente également à la Société l’épure de la surface courbe que décrirait la corde vibrante si l’état initial de celle-ci était une ligne composée de deux arcs de parabole se rac- cordant à leur sommet commun , situé au point le plus bas. Cette

(4) Voyez, à la fin de son Analyse appliquée a la géométrie, le mémoire : Construction de l'équation des cordes vibrantes,

7

sur’ace à pour équation différentielle, quel que soit l’état initial ,

d?z UE dt? | dx?»

3 étant la petite dépression verticale subie par un point de la corde située à la distance x d’une de ses extrérhites, et £ le temps, représenté ici par la distance horizontale d’un point quelconque de la surface au plan initial de la corde. Les coupes par des plans parallèles à celui-ci, ou les états successifs de la corde , s’ob- tiennent facilement par le procédé qu’indique Monge, et qui four- nit la même chose que celui qui est donné par Poisson ( Méca- nique, 1833, 486), d’après d’Alembert.

Cette surface, qui est du genre des surfaces profilées, peut être obtenue ou poussée en plâtre ou en argile, d’un mouvement con- ünu, en faisant mouvoir, sur une courbe fixe, dont le plan verti- cal est incliné à 45 degrés sur le plan primitif de la corde, une courbe mobile toute pareille, dont le plan vertical reste à angle droit sur le plan de la courbe fixe. Ces deux courbes s’obliennent l'une et l’autre très facilement en renversant la courbe de l'état inilial après avoir soudoublé ses ordonnées et réduit ses abscisses

s Pt RON dans la proportion de 4 à 3 2—0,707107, puis répété la même

courbe inversement à droite et à gauche. Séance du 5 fevrier 1859.

ORNITHOLOGIE. Observations sur deux espèces de Passe- reaux originaires des Açores. M. Pucheran a fait à Ja Société, dans cette séance, la communication suivante :

« J'ai reçu, il y a quelques jours, de M. Morelet, zoologiste bien connu par ses voyages en Portugal, en Algérie, au Guati- mala et dans l’île de Cuba, quatre Passereaux qu'il a rapportés des Acores ; parmi eux se trouvent deux espèces qui me parais- sent de nature à intéresser vivement les ornithologistes. La première appartient au genre Fringilla, tel qu'il a été restreint et isolé par les auteurs modernes, la seconde au genre Bouvreuil.

» 1. Les deux individus du genre Fringilla sont, l’un mâle et l’autre femelle,

» Le mâle est gris-bleu foncé sur le dessus de la tête et du cou :

)

à partir du bas du cou, la teinte vert-olive occupe le dos et les couvertures caudales supérieures dansleur partie la plus antérieure; dans leur partie la plus postérieure, elles sont noirâtres. Les rémi- ges sont noires en dessus et bordées de blanc : ce blanc est nuancé de vert olive, et cette dernière teinte devient d'autant plus saisis- sable que l’on se rapproche des secondaires. Les tectrices alaires supérieures sont d’an noir encore plus foncé ; elles présentent deux bandes transversales de couleur blanche: les taches qui forment la bande supérieure présentent une certaine étendue, mais la bande inférieure n’est formée que de simples lisérés de même couleur qui occupent l’extrémité des plumes. En dessous les ré- miges sont brunes, bordées en dedans de gris, et cette bordure devient de plus en plus blanche à mesure que l'on se rapproche des secondaires. {es tectrices alaires inférieures sont blanches également, et le bord de la première rémige est blanc, à ce niveau, avec des intersections de couleur noire, qui occupent, au reste, fort peu d’étendue. Le rachis de ces pennes est noir en dessus, simplement noirâtre en dessous. Le roux clair, le blanc et le gris occupent les parties inférieures : la première couleur règne sur le menton, le devant du cou et le thorax, la deuxième sur Île milieu de l’abdomen, la troisième sur les hypocondres. Les cou- vertures caudales inférieures sont blanc roussâtre. La queue est bifurquée; ses pennes médianes, de forme plus étroite, sont grises en dessus aussi bien qu’en dessous, avec un mince liséré blanchâtre en dehors. Une large tache grise se voit à la face in- terne de la rectrice la plus extérieure, laquelle est noire dans le reste de son étendue et présente un liséré blanc en dehors. Gette tache grise occupe moins d'espace sur la seconde rectrice : sur la seconde comme sur la première , la tache grise dont nous nous occupons est bordée de blanc en dedans. Les autres pennes cau- dales sont noires. En dessous règne sur toutes les rectrices le système de coloration que nous, venons de décrire : leur rachis est nettement noir, en dessus, sur les médianes, mais cette teinte est plus effacée en dessous. Sur les deux rectrices externes, il est, en dessus comme en dessous, de couleur blanche,excepté. à la base de ces pennes, il est brunâtre, et dans une plus grande étendue sur la seconde que sur la première. -- Les narines sont bordées, en arrière, de plumes veloutées, dont la couleur est le noir

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bleu. Le bec est gris-bleu en entier, sauf une petite tache blan châtre, au milieu, sur ses parties latérales ; une semblable se voit. en dessous, à la réunion du tiers moyen avec le tiers antérieur de la mandibule inférieure. Les tarses, les doigts et les ongles sont gris plombé.

» La femelle de ce Pinson est brun olivâtre en dessus. Ses tec- trices alaires, ses rémiges et rectrices présentent une couleur noire plus effacée que celle de ces mêmes parties chez le mâle. Les deux pennes caudales externes offrent les mêmes taches grises, mais le iséré blanc qui les borde en dedans se trouve pus saillant chez la femelle. Les pattes sont colorées comme chez le mâle, mais le bec est plutôt brun eorné.

» Si maintenant nous comparons ce Pinson avec les espèces qui se trouvent aux Canaries , telles que Fringilla canariensis, Vieill. ( Fringilla tintillon, Moq.) et Fringilla teydea, Moq., nous constatons les analogies et les différences que nous allons exposer.

» Notre mâle ressemble au F. canariensis, que M. Harcourt a également rencontré à Madère , par le mode de coloration du dessus de la tête et du cou, par celui des parties inférieures, par les bandes blanches de ses tectrices alaires supérieures. Mais il en diffère par le vert de sa région dorsale, quoique l'un des indi- vidus de la galerie du Musée de Paris, un des types de Vieillot, présente dans cette région une teinte huileuse ; il en diffère encore par la moindre largeur de la bande blanche supérieure des tec- trices alaires, par les taches grises de ses deux rectrices externes _{ces taches étant blanches dans le F. canariensis), par la couleur de son bec, qui ne présente point les teintes jaunâtres du type des Canaries, de même que par la couleur de ses tarses et de ses doigts qui ne sont point jaune de corne.

» Si nous comparons , en second lieu, ce même individu au Fringilla teydea, qui paraît uniquement séjourner aux Gana- ries , nous trouvons que, dans les deux espèces, les rectrices ex- ternes présentent du gris ; mais dans le }”. feydea celte même couleur s’apercoit sur les bandes des tectrices alaires supérieures, tandis qu’elles sont blanches dans notre individu des Açores. En outre, le F. teydea est, dans le mâle, d’un gris-bleu uniforme, et ne présente la couleur verte dans aucune partie de son plumage,

Extrait de l'Institut, 1e section, 1859, 2

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pas même sur le croupion. Les deux femelles offrent, il est vrai, beaucoup plus d’analugies ; mais, indépendamment des différences de teintes offertes par le becet les pattes, le thorax et le devant du cou n’offrent point, chez le F. leydea, les teintes rousses de notre exemplaire.

» Par les teintes vertes de son manteau, notre mâle se rap- proche beaucoup, au contraire, du Fringilla spodiogenys, Bp. Mais chez ce dernier les rectrices sont, même chez la femelle, amplement tachées de blanc. Par ce dernier caractère, notre Fringilla cælebs s'éloigne également de notre type des Açores. Ajoutons que chez lui le vert du manteau présente une teinte hui- leuse, et que, dans les parties inférieures, il offre, de même que le Fringilli spodiogenys, une teinte plus briquetée.

» Il est impossible enfin de confondre notre Pinson des Açores avec le Fringilla montifringilla. Par la couleur noire que pré- sente la gorge dans le mâle, ce dernier Passereau se distingue au premier coup d’œil de toutes les espèces du genre dont il fait partie.

» Les détails comparatifs dans lesquels nous venons d'entrer nous paraissent légitimer la création d’une espèce nouvelle pour notre Pinson des Açores. Nous lui imposerons dès lors la déno- mination de Fringilla Moreletti, Nob. , dédicace qui rappellera aux Zoologistes les éminents services rendus à la science par M. Morelet dans ses divers voyages. Ajoutons à cette occasion que c’est pour nous un véritable bonheur d’avoir à décrire une sixième espèce du genre Fringilla, toutes ayant été, depuis Linné, introduites dans le Systema naturæ par des zoologistes de France. En toute artre circonstance, nous aurions procédé peut- être avec plus de lenteur et d'hésitation, mais, malgré toutes les recherches que nous avons faites pour constater que notre nou- velle espèce était inédite, la satisf.ction que nous avons éprouvée d'augmenter la liste des types de ce genre nous a vivement porté à ne pas différer plus longtemps l’exposé des résultats de nos ob- servations.

» 2. Le second Passereau que M. Morelet nous a remis est un individu, de sexe femelle, du genre Bouvreuil. Sous le point de vue de la distribution géographique, la découverte aux Açores d'une espèce de ce genre constitue un fait intéressant, Je n’ai trouvé, en

La

effet, aucune cspèce de ce genre indiquée comme se trouvant aux Canaries dans le Voyage de MM. Webb ct Berthelot, dont la -parüe ornithologique a été rédigée per M. Moquin-Tandon. Toutes les recherches que j'ai faites, dans le même sens, dans les divers arlicles publiés récemment dans le Journal d'ornithologie , de M. Cabanis, sur les Oiseaux des Canarics , par M. Bolle, ont été également infructueuses. Un semblable insuccès a été le résultat de l'examen de la liste des Oiseaux de Madère, récemment publiée par M. Harcourt (1), et de celles dues antérieurement à MM. Jar- dine (2), et Heineken (3).

» L’intérêt que présente la découverte du Bouvreuil d'Europe aux Acores par M. Morelet acquiert plus d'importance encore par celte circonstance que l'individu qui se trouve entre mes mains appartient à la grosse race dont M. de Sélys Longchamps a fait une espèce sous le nom de Pyrrhula coccinea. Or, il n’est aucun Zoologiste qui ne sache que la présence du Pyrrhula co: ci- rea dans les régions tempérées de l’Europe n’est pas constante, et que ce n’est que de temps à autre qu'elle paraît. On prétend bien qu’elle vient du nord de ce continent, mais le fait a encore besoin d’être mieux démontré. Je dois ajouter que notre individu des Açores a le bec plus gros que ceux des exemplaires du Musée de Paris, avec lesquels je l’ai comparé. Des recherches ultérieu- res prouveront, il faut l’espérer, quel est le degré d’importance et de fixité de ce caractère.

» Qu'il me soit permis, en terminant, et à l’occasion de ces deux races de Bouvreuil, si semblables sous tous les points de vue, mais différents par la taille, de faire observer l'extrême ra- reté dans notre Europe, et même en Asie et en Afrique, des types non-seulement génériques, mais même spécifiques, dont le carac- ière initial de distinction consiste dans l'existence d’une taille amoindrie. Ils sont nombreux, au contraire, parmi les Mammi- fères de l'Amérique du Sud, ceux de la Nouvelle-Hollande et de Madagascar. L'ornithologie madécasse en offre également un cer- tain nombre d'exemples dans ses espèces. Si nous réfléchissons,

(1) Proc. of the Zool. Soc. of London, 1851, p. 142. (2) Edinburgh Journalofnaturaland geographical science, vol, I, p. 241. (3) Zoological journal, vol, V, p. 70,

12 en second lieu, que, dans les diverses régions que nous venons de citer, la facne mammalogique présente dans les types qui la com- posent, comparés à ceux de l’ancien continent , un caractère de moindre perfection dans ses organismes, nous serons portés à penser que cette différence de taille entre des animaux si sem- blables à tous égards constitue probablement un symptôme de dégradation faunique. C’est aussi l'opinion à laquelle nous avons été conduit par les réflexions que nous avons faites à ce sujet ; mais, que cette opinion soit vraie ou fausse, il nous a paru utile de signaler une semblable coïucidence (1). »

ANATOMIE COMPARÉE. M. Gratiolet a communiqué aussi à la Société dans cette séance la note suivante sur l’encéphale de l'O: REODON GPACILIS (Leidy. The ancient Fauna of Nebraska. in Smiths. contr. 1852).

« En communiquant à la Société (séance du 27 février 1858, v. l'institut, 1263) la description de l’encéphale du Caino - therium commune (Bray.), j'avais pris l'engagement de faire connaître l’encéphale des animaux fossiles qu’il me serait permis d'examiner à ce point de vue, en profitant de toutes les occasions qui me seraient offertes; ces occasions sont pour moi très rares ; quoi qu'il en soit, j’apporte comme un nouveau tribut à la Société la description de l'encépliale d’un autre Mammifère fossile, l'O- reodon gracilis (Leidy). J'ajoute à cette description deux Fan sans lesquelles elles demeureraient à. peu près inintelligibles ; ptut être trouvera-t-on trop succincts les détails dans lesquels je vais entrer ; mais j'aime par nature la concision, et je puis ajouter d’ailleurs que, loin d’avoir la prétention de bâtir un édifice, j’a- masse seulement des matériaux pour l'avenir.

» La longueur totale de l’encéphale de l'Orcodon gracilis était d'environ 66 millimètres; dans cette somme les lobes oïfactifs

(1) Je profiterai de l'occasion qni s'offre à moi, en celle circonstance, pour rectifier une des citations faisant parlie de la dernière communication que j'ai lue à la Société, Cette citation, qui se trouve à la dernière page du bulletin de la Sociélé philomathique pour 4858 (Institut, n°4206, p. 45, colonne), indique les observations de M. Titian Peale comme ayant été insérées dans la Revue et le Magasin de zoologie. Je me bornerai à rappele' que la citation doit être ainsi faite : United Strates exploring expedition? Mam. and, Ornith.

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figuraient pour 82,5, les hémisphères cérébraux pour 36m%,5, la masse cérébelleuse pour 21", Ces mesures sont indiquées par l'examen de la loge cérébelleuse qui est très développée d’arrière en avant, tandis qu’au contraire la loge cérébrale a une assez grande brièveté relative.

» Les lobes olfactifs étaient très développés et leurs bulbes dépassaient l'extrémité antérieure du cerveau ; leur base épaisse et large embrassait un espace olfactif très saillant ; d’ailleurs leur face inférieure ne présentait en aucune manière au-déssus des orbites cette dépression qui rend si remarquable le cerveau des petits Ruminants tels que l’Antilope hemprichiana par exem- ple, et le Chevrotain de Java; derrière eux faisait saillie un globule unciforme assez court, mais en revanche assez massif.

Fig. 1.

». La largeur du cerveau proprement dit était relativement assez grande; en arrière elle égalait 37,5; en avant, 25°" seulement ; vu d’en_haut, il offrait la forme d’un cœur tronqué vers sa pointe. Il ne présentait en conséquence ni cette atténua-

tion en avant si marquée dans le cerveau des petits Ruminants, ni la courbure et l'allongement extraordinaires du cerveau du Cainotherium.

» Les circonvolulions étaient peu compliquées, mais en revan - che fort épaisses et très nettement accusées. Elles formaient, sur chaque hémisphère, dans l’aire que circonscrivent comme un cadre le pli du corps calleux et le pli unciforme, deux étages distincts que séparait en arrière un petit lobule intermédiaire (fig. 2, E).

» (a) L’élage inférieur (fig. 2, F)présentait quelques flexuo- sités qui rendent incertaine la distinction précise de ses deux lobules. De ces deux lobules toutefois l’antéricur l’emportait évidemment sur le postérieur, ce qui est un caractère du cerveau des Pachydermes.

Fig. 2.

» L’étage supérieur (fig. 2, D, B; fig. 1, D, C) comprenait es- sentiellement trois plis longitudinaux légèrement divergents en arrière, à savoir : deux plis internes assez grêles, confondus en avant en un seul et à peu près parallèles à la grande scissure cérébrale; de ces deux plis, l’interne était étroit et déprimé; l’externe, saillant en arrière, était assez convexe; wn troisième pli externe. Ce pli rappelle assez bien par ses proportions et sa direction générale un pli analogue des hémisphères du Caino- therium, il était épais, large et faisait une grande saillie au-dessus des autres plis à la surface du cerveau (jig. 4 et 2..., D).

» (c) Le groupe intermédiaire (fig. À et 2.., F) était triangu- laire ; il séparait en arrière les deux étages dont nous venons de parler. Sa racine différait de celle du pli analogue qu’on observe

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dans le Cainotherium, en tant qu’au lieu de s'attacher à l'étage inférieur, comme cela avait lieu dans ce dernier, elle s’unissait au contraire à l’étage supérieur; c'est une particularité fort appréciable, et si elle est constante, elle pourra acquérir une certaine importance,

» Nous ne pourrons ajouter ici que peu de détails sur les parties qui existaient sur la base du cerveau. Les bandelettes optiques convergeaient presque parallèlement. Le volume de la cinquième paire était considérable ; il m’a été impossible de me faire la moindre idée du corps piluitaire, de la protubérance ou du bulbe.

» Le cervelel était, comme dans le fort dégagé du cerveau: sa forme était tout à fait caractéristique. Le lobe mé- dian, assez étroit en avant, se leriminait en arrière en un vermis énorme , proéminent, mais sans replis. Il est manifeste que les lobes latéraux étaient fort petits, mais qu’en revanche leurs'ver- mis avaient un assez grand développement.

» J'ai essayé de rendre, dans les figures ci-jointes, la forme de cet énorme cervelet; elles permettront d'apprécier assez exacte- ment la capacité relative de la loge cérébelleuse ; il est évident qu’une telle forme ne convient à aucun Ruminant vrai et ne peut appartenir qu'à un Pachyderme , ou tout au plus à un Camelien.

» J’insiste à dessein sur cette observation, parce que les Oréodons ont été considérés comme établissant un passage naturel entre le type des Pachydermes et celui des Ruminants. « L’Oréodon, dit » M.:Leidy, est un génre remarquable et très particulier de Ru- » minants ungulés, constituant un des chaînons nécessaires pour » combler l’êvidente lacune qui existe entre les Ruminants ac- » tuels et certaines formes très différentes de la même famille, » telles que les Anoplotheriums éteints. » Cette remarque, très juste si on l'applique seulement aux CAMELIENS, qui sont incon- testablement , selon l’expression très heureuse de M. Leidy, des Pachydermes ruminants, et une représentatiou actuelle des Anoplolheriums antiques , ne peut en aucune manière s'étendre aux Ruminants vrais , tels que les Bæufs, les Anfilopes , les Cerfs et les Chevrotains, qui constituent un groupe spécial, non moins par leur mode de ruminer que pi le type très tranché de leur organisation cérébrale,

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» Jetermine ici ces remarques par une simple observation, c’est que la masse cérébelleuse est relativement beaucoup plus consi- dérable dans les petits Pachydermes que dans les grands. Le Rhi- nocéros et l’Hippopotame sont l’un et l’autre remarquables par la petitesse relative de leur cervelet. »

Séance du A9 février 1859,

M. Léon Foucault rend compte à la Société des recherches qu’il poursuit depuis quelque temps dans le but d’améliorer le microscope par l'intervention d’un miroir en verre argenté dont la figure est symétriquement modifiée par des retouches locales, de manière à corriger l’aberration de sphéricité des lentilles.

Séance du 5 mars 18£9,

M. Ducbartre a communiqué, dans cette séance, les résultats des vbservations qu'il a eu occasion de faire dernièrement au su- jet de la partie du fruit des vanilles dans laquelle réside le prin- cipe aromatique, c’est-à-dire au sujet de la pulpe des vanilles. Ses observations ont porté sur le fruit du Vanilla planifolia Andr., étudié frais avant son développement complet et sec à sa parfaite maturité. Elles lui semblent prouver que cette pulpe a une autre origine que celle qui lui a été assignée par Ch. Morren ®t par Splitgerber. Le premier de ces botanistes pensait que le tégu- ment externe des graines des vanilles devenait pulpeux, tandis que le second regardait la pulpe des fruits de ces Orchidées comme formée par la portion basilaire des funicules qui, selon lui, de- viendrait pulpeuse à la maturité. M. Duchartre a retrouvé dans les vanilles commerciales les graines parfaitement entières, recou- vertes d’un tégument consistant et, en outre, les funicules et les placentaires, sans doute plus ou moins déformés par la prépara- tion et la dessiccation, mais néanmoins encore fort reconnaissables. D'un autre côté, il a vu, sur le fruit frais et imparfaitement déve- loppé du J’anilla planifolia, que les trois espaces longitudinaux qui séparent les trois placentaires les uns des autres sont cou- verts d’une immense quantité de productions piliformes, telle- ment serrées les unes contre les autres qu’elles forment une couche continue. Cette formation, entièrement analogue à celle qui, dans les loges de l’orange et du citron, devient la pulpe, lui

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semble avoir la même destination dans les fruits des vanilles. L'étude du fruit adulte de ces plantes, soit desséché pour l’her- bier, soit préparé comme l’est celui que nous apporte le com- merce, à confirmé à ses yeux l’exactitude de son opinion.

HYDRAULIQUE. M. de Caligny a communiqué aussi dans cette séance quelques détails sur une propriété de son bélier uni- valve, transformé en machine soufflante.

jl suffit de se souvenir, pour l'intelligence de ce qui va suivre, que le bélier univalve, tel qu’il est dessiné dans les Annales des mines, année 1838, t. XIV, et tel qu'il a été exécuté en 1839, ainsi qu’on peut le voir dans l'extrait du procès-verbal de la séance du 21 décembre 1839, publié dans le journal l’Institut, est composé d’un siphon renversé ayant sur sa partie horizontale une soupape, seule pièce mobile du système ; el que cette soupape est beaucoup plus près de la branche formant tuyau d’ascension que de la branche débouebant dans le bief snpérieur ; qu’enfin la longueur développée du tuyau recourbé est assez grande par re port à celle du Puyau d’ascension.

Supposons qu'une première fois l'eau soit montée jusqu’au sommet du tuyau d’ascension, comme dans le modèle fonction- -pant dont il s’agit, en vertu d’un écoulement préalable de l’eau motrice, par la soupape plongée à une profondeur convenable au- dessous du niveau du bief d'aval. Supposons ensuite provisoire- ment que l’on fasse fonctionner cette soupape par un moyen mé- caniqué quelconque, sans continuer à faire emmagasiner de Ja force vive dans la colonne liquide au moyen d’un écoulement im- médiat à l'extérieur, précédant chaque oscillation ascendante: mais qu’on veuille, au contraire, après chaque versement au som- met du tuyau d’ascension, produire une cause d’ascension ulté- rieure, en vidant à une profondeur convenable ce même tuyau par une oscillation descendante. Si entre le bief d’amont et la sou- pape le tuyau de conduite est assez long pour que l’eau qu’il con- tient résiste pendant un temps convenable par son inertie, il suffit d’ouvrir la soupape pour que, sauf les résistances passives, si le pied du tuyau d’ascension est enfoncé assez bas au-dessous du ni- veau du bief inférieur, la colonne liquide contenue dans ce tuyau se transporte dans ce dernier bief à la hauteur de son centre de gravité,

Extrait de l'Institut, 1*° section, 4859, 3

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Cela suppose que la profondeur de la soupape et sa distance au tuyau d’ascension soicnt réglées d’une manière convenable, ainsi que quelques autres détails dans lesquels on n’entre pas en ce mo- ment. Mais en ne considérant, pour simplifier, que l’oscillation dans la partie verticale du tuyau d’ascension, il est facile de voir que le principe de l’approfondissement du point de départ de l'os- cillation ascendante, en vertu d’une oscillation descendante qui précède celte dernière à chaque période, n’exige pas en principe que le siphon renversé ait une troisième branche,

On conçoit que si la distance entre la soupape et le tuyau d’as- cension est convenable par rapport à l’amplitude de l'oscillation, iken résultera des effets analogues à ceux d’une troisième branche, en évitant un coude; mais aussi en privant généralement d’un clapet de sûreté, c’est-à-dire d’un clapet qu’il serait facile de mettre dans une troisième branche, si l’on craignait un retour trop prompt de l’eau du bief d’aval, pendant qu’on refermerait la sou- pape qui, pour de grandes dimensions, sera une sorte de soupape de Cornwall ou de vanne cylindrique.

Mais ce retour qui pourrait être à craindre pour une machine élévatoire ne le sera que dans de certaines limites quand, au lieu d’élever de l’eau, l'appareil servira à comprimer de l'air, ainsi que cela a été expliqué dans l'extrait du procès verbal de la séance du 11 décembre dernier (publié dans le journal /’Instilut du 15 dé- cembre 1858, 1302, p. 408). En supposant même qu'on éprouvât à ce sujet quelques difficultés dans de premiers essais, il estclair que quelques tâtonnements dans la pose des soupapes à air suffiraient pour faire fermer ces soupapes assez vite, de ma- nière que le ressort de Pair pât bientôt résister à un retour assez sensible de l’eau dans les limites expliquées le 11 décembre.

Ce qui précède suppose qu’on veut appliquer le principe de l’inertie d’une longue colonne liquide faisant fonction de sou- pape entre le bief d’amont et l’orifice d'évacuation de l’eau. Mais si l’on voulait disposer une seconde soupape pour diminuer la longueur de cette colonne, il est facile de voir que les principes de l'effet de la colonne d’air seraient les mêmes.

L'auteur donsera prochainement des détails sur la manière de réunir les effets de l’oscillation descendante à ceux de la force vive acquise par un écoulement préalable à l'extérieur. Il ajoute

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seulement aujourd'hui que ses soupapes cylindriques à axe bo- rizontal ou incliné peuvent fonctionner en vertu des phénomènes nouveaux de succion, combinés avec les pressions connues, qu’il a présentés depuis le 2 décembre 1850, pourvu qu'on dispose con- venablement les balanciers à contre-poius, ou les ressorts qui en tiennent lieu, et les surfaces qui doivent recevoir ces pressions conformément aux principes qu’il a communiqués à la Société pour le cas des soupapes à axe vertical.

Séance du 12 mars 1859.

M. Paul Serret communique le théorème suivant :

Le lieu géométrique des centres des hyperboloïdes à une nappe qui passent par les quatre côtés d’un quadrilatère gauche est la droite qui réunit les milieux des diagonales du quadrilatère.

Ce théorème, qui comprend celui de Newton sur le licu des centres des coniques inscrites à un quadrilatère plan, s'établit beaucoup plus facilement que ce dernier, soit par le calcul, soit par la géométrie. Au point de vue géométrique , il résulte à peu près immédiatement de celle observation évidente que le centre d'un hyperboloïde est à égale distance de deux plans tangents pa-

rallèles quelconques.

Séance du 26 mars 1859.

ANTHROPOLOGIE. M. A. Antelme a communiqué, dans celte séance, à la Société la note suivante sur les mesures céphalomé- triques et sur un céphalomètre de son invention.

« Des déterminations exactes de la forme du crâne et des me- sures de sa capacité ne sont pas moins nécessaires au médecin qui étudie les altérations de l'intelligence et leurs rapports avec les prédispositions organiques qu’à l'anthropologiste qui cherche à distinguer par des caractères certains les différentes races qui peuplent la terre ; j’ajouterai qu’elles sont encore nécessaires au philosophe qui, en étudiant l'intelligence, ne dédaigne pas l'étude de ses organes imméliats. Ces considérations m’avaient porté il y a déjà bien des années à rechercher un moyen d'exprimer par des formes exactes el par des nombres les dimensions et les caractères divers que le crâne humain peut présenter. J'imaginai dans ce but et je Îis construire un céphaloméèlre qui fat présenié à F'Aca-

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démie des sciences de Paris le 4 juin 1838. 11 fut indiqué par cette Académie à l'expédition scientifique d'Islande que dirigeait M. Gaymard. Des instruments furent construits aux frais de l’État sur les indications que j'avais fournies, et pendant le voyage ils furent mis en usage par deux membres de l’expédition, MM. Bra- vais et Martins ; ces messieurs prirent des mesures nombreuses dont le résultat n’a point été publié pur süite de l’état de santé de M. Bravais ; d’autre part, le mémoire que j'avais déposé à l’Aca- démie des sciences fut égaré par l’un des commissaires. J'avais quitté Paris à cette époque et, détourné par d’autres préoccu- pations, je ne donnai pas une suite immédiate à ces premiers travaux,

» Je n’y reviendrais pas aujourd’hui après environ vingt ans, si lPimportance qu’on a attachée à des méthodes de mensura- tion crânienne qui ont été successivement proposées ne m'avait para un motif suffisant de rappeler un instrument qui a élé pour ainsi dire oublié et qui cependant me semble remplir plus complétement les indications de l’anthropologie que les pro- cédés et les appareils qu’on a préconisés depuis peu et qui ont même obtenu la sanction de rapports très favorables. Je ne ferai pas la critique de ces instruments ; les plus connus, celui de Mor- ton par exemple, et celui de M. Jacquart qui n’en est qu’un perfectionnement, ne donnent que la mesure de l'angle facial dont Blumenbach a fait avec tant de raison sentir l’insuffisance. M. Ch. G. Carus à proposé, en 1843, un procédé exact, mais d’un em- ploi difficile et borné, le moulage par le plâtre ou largile des courbes du crâne que l’on considère. Ce procédé n’a pas eu d’imi- tateurs à cause des difficultés qu’il présente, et d’ailleurs les sultats qu’il donne sont insuffisants. Le céphalomètre que je viens rappeler ici ne semblera donc point avoir perdu de sa valeur pri- milive, et comme je l’applique depuis longtemps déjà et que ces applications que je poursuis encore doivent servir de base à un travail que je prépare sur la céphalométrie des races et des aliénés, j'ai cru devoir m'adresser à la Société et la rendre juge &e ses avantages et surtout de la légitimité de son emploi.

» Suivons sur la figure ci-jointe le détail de cet instrument :

» À est un cercle métallique, léger, qu'on voit ici par la tran- che et qu’on assujettit autour de la tête au moyen de quatre vis

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de pression. Ce cercle fixe sert de support à un demi-cercle mo— bile B. dont le diamètre est censé traverser la tête par les conduits auditifs et sert d’axe de rotation. Sa partie plate est fendue dans toute sa longueur pour donner passage à un curseur C, qu’on fait glisser, à volonté, à droite ou à gauche, d'une oreille à l'autre. Le

@

D

\e

centre du curseur est percé d'un trou s'introduit une broche graduée, destinée à la meñsuration.

» Voici comment on procède à l’emploi du céphalomètre :

» Le cercle fixe A étant placé à peu près comme on le voit dans la figure, on abaisse en avant le cercle mobile B jusqu’à ce que la broche graduée du curseur soit en regard des sourcils. Alors on prend exactement le niveau des conduits auditifs au moyen de deux petites broches qui glissent dans le sens de l’axe du cercle et s'engagent dans ces conduits. On ne serre les vis et on‘n’assu- jettit définitivement l'instrument qu'après avoir mis la tige gra-

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duée, qui sert à la mensuration, au milieu des deux sourcils et bien exactement au niveau du bord supérieur de l'orbite. Ces trois points déterminent un plan qui sépare le crâne @e la face et coupe la tête en deux hémisphères, l’un crânien, l’autre facial.

» Il est aisé de voir que la révolution du demi-cercle sur son axe décrit autour de la tête une sphère dont le rayon nous est connu ; que le centre de cette sphère est invariablement fixé en un point, loujours identique, de la base du cerveau, et qu’il suf- fira de mouvoir ce demi-cercle d’avant en arrière, de faire glisser le curseur de droite à gauche, et enfin d'évaluer la quantité dont s'enfonce Ja broche graduée au contact de la tête, pour avoir la longueur exacte du rayon céphalique en un point donné.

» Pour que chaque point sur lequel on opère soit bien précisé, le cercle mobile porte, de droite à gauche, dans le sens de la mar- che du curseur, les divisions ordinaires du cercle ; puis un autre petit cercle, portant les mêmes divisions, a été fixé à angle droit par son centre sur le grand axe et tourne avec lui pour indiquer, en partant du bord supérieur de l'orbite, les degrés d'avant en arrière. Il résulte de cette disposition qu’on peut, en quelque sorte, désigner le degré de longitude et de latitude sous lesquels un rayon aura été mesuré.

» Cela posé, les ressources qu’on peut tirer du céphalomètre sont faciles à comprendre : il suffira de porter la tige du curseur au point de départ et de relever le cercle mobile, de degré en degré, en prenant note chaque fois de la longucur du rayon qu'indique la broche, puis de reporter ces rayons sur le papier, pour avoir une coupe du crâne d’avant en arrière, telle qu’elle est représen - tée sur la figure.

» Pour avoir des tranches transversales, il suffira de placer le curseur au milieu du front, en prenant comme point de départ le sinciput ou l’occiput, puis d'opérer de la même manière, en reportant sur le papier les rayons qu’on aura mesurés de droite à gauche et de gauche à droite.

» Généralement ces coupes suffisent pour caractériser la confor- malion d’une tête. Cependant il est aisé de voir qu’on peut pro- céder d’après d’autres principes : on peut, par exemple, représen- ter le sphéroïde de la tête par un nombre céterminé de rayons pris sur les bosses frontales, pariétales, occipitales, etc., puis

28 comparer chacun de ces rayons à leur rayon moyen pris pour commune mesure. On pourra donc toujours, quel que soit le pro- cédé qu’on adopte, arriver à déterminer tous les cas individuels avec beaucoup de précision, on pourra les comparer entre eux et les représenter par des chiffres.

» Mais abordons un second point de vue plus important encore; après avoir recherché les types individuels, élevons-nous à la considération du type général des races et du genre humain tout entier.

» Jusqu'à ce moment la science, à cet égard, n'a rien établi de précis : s’agit-il de donner une idée de la forme crânienne qui caractériseune race, un peuple, un âge ou quelque prédisposition intellectuelle et morale, nous trouvons dans nos collections quel- ques individualités de choix, qu’on représente par des dessins arbitraires, et, dans les livres, les conceptions et les appréciations plus ou moins imaginaires des auteurs. Cette facon de procéder ne porte en elle aucun caractère vraiment scientifique. Un type ne doit rien avoir d’arbitraire, c’est la nature elle-même qu'il faut laisser parler, et c’est précisément ce but que nous poursui- vons par l’emploi du céphalomètre.

» Supposons qu’on veuille établir le type de la tête d'homme et celui de la tête de femme, par une coupe antéro-postérieure : on prendra sur vingt, sur cent ou sur mille individus, la série des rayons qui déterminent cette courbe ; puis on fera la somme de chacun des rayons correspondants ; on la divisera par le nombre d'individus, et on aura alors la longueur des rayons moyens qui caractérisent le type rigoureux dérivé d’un grand nombre d'indi- vidualités.

» Les contours du crâne, dans la figure représentée plus haut, sont le type de la tête d'homme déduit des moyennes fournies par l'étude de vingt individus. J'ai aussi déduit du même nombre d’individualités an type de la tête de femme ; dans l’impossibilité de multiplier ici les dessins, je me bornerai à traduire par des chiffres les résultats de l’observation.

» Ces deux types, pour être comparables entre eux, doivent être ramenés à l'égalité des surfaces, tout en conservant l'inégalité des formes. Cela fait, le dessin indique immédiatement que la tête d'homme approche de la forme sphérique, tandis que celle de la

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femine figure un ovoïde dont le grand diamètre est en arrière. Mais il est aisé de déterminer exactement ces rapports; il suffira de prendre le rayon qui approche le plus de la normale et qui divise le mieux la surface de la section antéro-postérieure en deux parties à peu près égales, soit celui qui correspond au 70° degré. Si on réprésente alors dans les deux sexes la partie frontale par 100, la partie occipitale sera de 106,85 chez l’homme et de 409,59 chez la femme.

» Si la coupe de profil ne paraît pas suffisante pour exprimer la forme du crâne, on peut y joindre des coupes transversales. C’est ce-que j'ai fait pour compléter la comparaison des types dont il s’agit ici, et les résultats sont venus confirmer la première obser- vation. La section latérale, passant d’un conduit auditif à l’autre par les bosses frontales, étant représentée par 4100, la section occipitale passant par le 90° degré est représentée chez l’homme par 115,07 seulement, et chez la femme par 124,29.

» Je n’ai pas parlé des mesures de la face, mais il est évident qu’on peut opérer de la même manière que pour le crâne : il suffit d’abaisser le cercle mobile au-dessous du bord supérieur de l'orbite.

» Pour compléter l'étude des types de l’homme et de la femme, j'ai représenté la face par le triangle qu’on voit dans la figure et dont les angles correspondent au bord supérieur de l'orbite, au conduit auditif et au bord inférieur du menton. Ce triangle étant représenté par 400 dans chaque sexe, la surface du crâne donne seulement 318, 72 chez l'homme, tandis qu’elle est de 340, 52 chez la femme.

» On trouve des rapports analogues entre le crâne et la face dans la comparaison des âges, et l’on voit la face s’accroitre dans des proportions très-grandes relativement au. crâne. J’en cite un exemple pris chez les animaux, celui de l’orang à trois époques différentes de la vie ; en représentant chez lui le crâne par 100 dans les trois âges, l'aire du plan médian de la face est de 59 chez les jeunes sujets, puis de 83 dans l’âge moyen, et enfin de 177 à l'état adulte.

» Ces sortes de recherches sont extrêmement variées; ainsi, J'ai employé le céphalomètre avec beaucoup de succès à fixer par des contours et par des chiffres les curieuses observations de l’abbé

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Frère sur les modifications que subit la tête avec les progrès de la civilisation de chaque peuple. MM. Ch. Martins et Bravais, ainsi que je l'ai déjà dit, ont aussi emporté dans l'expédition scientifi- que du Nord, ct pour servir à leurs recherches sur l’origine des Lapons, deux de ces instruments. Ils ont recueilli avec beaucoup de soin un grand nombre de mesures céphalométriques ; regret- tons que la santé de M. Bravais n’ait pas permis à ces savants de publier le résultat de leurs recherches.

» Je borne ici ces remarques sur le céphalomètre. Les anthropo- logistes et les psychiâtres, auxquels cet instrument s'adresse plus particulièrement, apprécieront, je l’espère, l'utilité de son emploi; mais je le recommande aussi aux personnes qui attachent quelque importance aux études morphologiques et qui essayent de détermi- ner le type de la beauté humaine, non d’après les caprices de la mode ou de l'imagination des différents peuples,mais par une ob- servation intelligente et fidèle de la nature elle-même. Enfin, s’il ya entre les facultés de l’âme et la forme extérieure du corps un rapport que tout semble affirmer, ce rapport ne saura être rigoureusement démontré que lorsque l'on aura appliqué à son appréciation des procédés exacts et des mesures géométri- ques. »

Séance du 2 avril 1859,

CHIMIE MINÉRALE. La note suivante sur les fluorures d’a- luminium simple et composé et les produits qui en dérivent a été communiquée, dans cette séance, par M. Henri Sainte-Claire- Deville.

« Fluorure d'aluminium. Dans une note publiée, il y à quelques années, dans les Annales de chimie et de physique, j'ai donné les propriétés et la composition du fluorure d’aluminiurm que j'ai préparé par un grand nombre de procédés différents qui donnent tons ce corps cristallisé en rhomboèdres très voisins des cubes : l’angle est de 88° 30/ ou 89°. Ces crislaux, comme tous les fluorures, sont peu réfléchissants, et on a grand peine à y trouver des facettes non striées et produisant des images nettes : de aussi grande difficulté à les mesurer exactement. D'un autre côté, je n’avais obtenu jusqu'ici que des échantillons assez opa- ques pour ne pas permettre d'étudier sur eux l’action de la lu-

Extrait de l’Institut, Arc section, 4859, 4

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mière polarisée. Dernièrement j'en ai obtenu de tout à fait trans- parents et qui rétablissent parfaitement la clarté entre deux prismes de Nichol croisés. Jusqu’à cette expérience, j'avais pa admettre que ces cristaux étaient réguliers à cause de leur angle très voisin de 90° et parce qu'ils ne possèdent aucune facette dont on puisse déduire la forme primitive.

» Cryolite. J'ai eu aussi occasion d'examiner la composition de la cryolite et les produits de sa décomposition par la chaux. Je donnerai ici quelques résultats de mes analyses. On avait avancé que la cryolite, fluorure double d’aluminium et de so- dium, n'était pas entièrement attaquable par la chaux et suscepti- ble d’être transformée intégralement sous son influence et au con- tact de l’eau en alumine, soude caustique et fluorure de calcium. Cette opinion est erronée et vient sans doute de ce qu’on avait employé une quantité de chaux trop grande et déterminé la pré- cipitation, à l’état d’aluminate de soude, d'une partie de l’alumine dissoute par la soude. Après avoir analysé la cryolite au moyen de l’acide sulfurique, ce qui m'a donné des résultats que j'ai déjà publiés et qui conduisent à la formule Al Fl3,3 Na FI, j'ai essayé l'analyse par la chaux elle-même.

» Pour cela on attaque à l’ébullition une partie de cryolite pul- vérisée par la chaux que donne, après sa calcination, une partie de carbonate de chaux, au moyen de 30 à 40 parties d’eau distillée. On fait bouillir pendant quelque temps, puis on décante sur un filtre en lavant le fluorure de calcium par l’eau bouillie et chaude. On sature la-liqueur par lacide nitrique, on l’évapore dans une capsule de platine tarée, que l’on chauffe gradueliement sur le bain de sable jusqu’à ce qu’étant couverte et bien chauffée, la matière qu’elle contient n’exhale plus l'odeur d’acide nitrique et même qu’elle commence à produire quelques vapeurs nitreuses. Alors tout le nitrate d'alumine a perdu son acide et en reprenant la matière par un peu de nitrate d'ammoniique et une goutte d’ammoniaque (dont l’edeur doit persister après un certain temps de contact avec la substance sèche) on est sûr de ne dissoudre que les sels alcalins. On décante la liqueur chaude, qui se sépare avec une grande facilité de l’alumine dense et grumeleuse qui reste dans la capsule et donton peut éviter facilement le transport sur le filtre dont on se sert par prudence. Une fois le lavage à

21 l'eau bouillante terminé, on chauffe la capsule de platine au rouge avec le filtre, si cela est nécessaire, et on pèse l’alumine. Le nitrate alcalin, traité par l’oxalate d’ammoniaque, donne une trace de chaux qui, on le sait, est insoluble dans les lessives caustiques. On évapore la liqueur filtrée dans une capsule de platine. A la fin on la couvre d’un entonnoir et on chasse le nitrate d’ammonia- que qui se transforme en protoxyde d’azote par la chaleur. On mouille le résidu avec quelques centimètres cubes d’eau, on y ajoute quelques grammes d’acide oxalique pur et un ou deux centigrammes d'acide tartrique (matières qui doivent brûler sans résidu). L’acide nitrique est presque entièrement ex- pulsé pentant l’évaporation. Le peu qui en reste, calciné au rouge avec l’oxalate et le tartrate de soude, se convertit en carbo- pate en même temps que ceux-ci. On peut peser, soit à l’état de carbonate de soude fondu, soit à l’état de sel marin desséché, la soude contenue dans la capsule tarée. Je me suis assuré que la cryolite ne renferme pas de potasse. On arrive par ces procédés aux résutats Suivants : Calculé. Aluminium. 12,7 12,8 13,0 Sodium 091,80 :31,61132,5 Eluor 22/5500 t55:08,0/1,5 100,0 100,0 100,0 nombres identiques avec ceux de Berzelius, et que j'ai obtenus par d’autres procédés.

» En employant le molybdate d'ammoniaque, et mieux encore le nitrate cérique, je suis parvenu à extraire de la cryolite des quantités, très faibles, ilest vrai, mais déjà sensibles, d'acide phos- phorique (1. On expliquera ainsi le fait très curieux qui a été observé par M. Morin, à sa fabrique d’aluminium de Nanterre, il prépare journellement de grandes quantités de chlorure double d'aluminium et de sodium avec de l’alumine extraite de la cryolite. Au moment l'on fait entrer le chlore dans des cy- lindres chauffés au rouge et chargés avec un mélange d’alu mine, de sel marin et de charbon, il se volatilise du phosphore en quan- tités notables qu’on peut recueillir dans les appareils de condensa- tion destinés au chlorure double,

(1) Voyez mon Traité sur l’aluminium (Peris, Bachelier), pag. 99.

-

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» Alumine exlraile de la cryclile. On recoit actuelle- ment , de Copenhague, de l’alumine impurc provenant de la cryolite, et qui est très recherchée pour la fabrication de l’alumi- nium, parce qu’elle ne contient pas sensiblement de fer, quand elle est préparée avec de la cryolite bien blanche. Elle contient, d’après mon analyse :

ATURURE AR RS Carbonate de chaux (1). . 0,7 Carbonate de soude.. . . 20,1 Eau ct acide carbonique... 34,4

100,0

» Cette alumine, préparée en faisant passer de l'acide carboni- que dans de l’alurinate de soude, est, en réalité, un carbonate double d’alumine et de soude que l’eau ne décompose qu'avec une très grande lenteur et jamais complétement. Ainsi un lavage pro- longé à l’eau tiède-ne lui fait perdre que 8,1 pour 100 de earbo- nate de soude, ce qui en laisse encore 12 pour 100 dans cette sorte d’alumine.

» Je profiterai de cetté occasion pour faire remarquer que l’a- lumine contient des combinaisons presque indestructib'es par le lavage avec les matières solubles de toute sorte contenues dans les liqueurs d'où on la précipite à l'état gélatineux. Ce sont ces phénomènes d'adhésion que M. Chevreul attribue à une cffinité capillaire et qui mettent obstacle à toute précision et à toute certitude dans le mode commun d’analyse par les méthodes de pré- cipitation. »

Séance du 30 avril 1859.

PHOTOGRAPHIE. M. Thenard communique à la Socièté l’expérience suivante : ;

{4° En pleine nuit il a désinsolé une feuille de papier ordinaire, en l'exposant pendant une heure à la vapeur d’eau ;

Il a divisé ensuite la feuille détachée en deux parties : l’une

(4) Avec des traces de phosphate de chaux. M. Persoz m’annonce qu'il a Lrouvé aussi du phosphate de fer dans la cryolite et certains aluminates du commerce, phosphate dont les propriétés sont masquées en partie par le dissolvant et qu’il met en évidence par des procédés nouveaux. D.

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a été mise de côté pour servir de témoin ; la seconde, roulée sur elle-même, a été mise dans un tube de verre à l’une des extré= mités duquel on faisait arriver de l’oxygène ozoné. Au bout d’un quart d'heure, l'oxygène ozoné se faisant parfaitement sentir à l’autre extrémité , la feuille a Cté retirée.

Cette même feu'lle étant ensuite employée à la manière des papiers insolés de M. Niepce de St-Victor a de tout point produit les mêmes effets. La demi-feuille laissée pour témoin n’en a pro- duit ancun.

Un papier au chlorure ou au nitrate d’argent, traité par l'ozone, n’a donné au contraire aucun résultat sensible.

Le papier ordinaire ozoné possède d’ailleurs toutes les autres propriétés des papiers insolés.

Un papier ozoné maintenu quelque temps dans une éprou- vette laisse dégager une odeur qui n’est pas celle de l'ozone, mais d’une matière essentielle : elle est d’ailleurs très fusible.

Que conclure de À ? ajoute M. Thenard : c’est que les phé- nomènes d’insolation décrits par M. Niepce sont des phénomènes chimiques, déterminés indirectement par la lumière, qui n’agit que comme agent intermédiaire.

Séance du 7 mai 1859.

CHIMIE. Faits pour servir à l’histoire du chlorure zincique. La note suivante a été communiquée à la Société par M. 3. Persoz.

« On sait que le chlorure zincique partage avec beaucoup de chlorures métalliques la propriété de se volatiliser à une téem- pérature peu élevée; il était donc tout naturel d'admettre, confor - mément aux lois de Berthollet, que la préparation de ce composé pourrait se faire par voie de double décomposition, en distillant un mélange sec de sulfate zincique et d’un chlorure alcalin, le chlorure sodique, par exemple, la réaction devant avoir lieu sui- vant l’équation SO* ZnO + ClNa NaO S03 + Zncl.

» IL était d'autant plus intéressant de tenter cette réaction, que : le chlorure sodique est une matière première très abondante, et que le sulfate zincique est le produit secondaire de nombreuses opérations industrielles, et qu'il peut d’ailleurs être obtenu par l'oxydation directe de la blende SZn.

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» Nous ne croyons pas qu’il soit nécessaire d'appuyer sur les avantages qu'il y aurait à pouvoir fabriquer ainsi le sulfate sodique sans être obligé d'attaquer le sel marin par l’acide sulfurique, ce qui est toujours plus ou moins dispendieux , et obtenir en même temps un composé (le chlorure zincique) qui, soit à l’état anhydre, soit en dissolution, reçoit aujourd’hui les plus belles applications dans les arts et dans l’industrie.

+ Nous avons donc porté progressivement à la chaleur rouge- blanc dans des vases distillatoires un mélange intime à équivalents égaux de sulfate zincique et de chlorure sodique, lesquels avaient été préalablement bien desséchés. Or, l'opération ayant été pro- longée pendant plusieurs heures, la réaction n’eut pas lieu comme nous l’avions pensé, c’est-à-dire qu’il ne passa rien à la distillation. Nous retrouvâmes dans la cornue un composé cristallin repré- senté par les éléments employés (sulfate zincique et chlorure so- dique), mais nous ne saurions nous prononcer sur le véritable arrangement moléculaire de ce composé, qui se dissout dans l’eau avec la plus grande facilité.

» Ayant donc échoué dans notre tentative avec le sel marin, nous songcâmes à lui substituer le ck/orure calcique. Nous reconnûmes que, dans ce cas, la double décomposition s’effectuait très facile ment; et, en effet, à la volatilité du chlorure zincique, cause dé- terminante de la réaction, d’après Berthollet, mais qui était cepen- dant insuffisante dans le cas précédent, vient s’ajouter ici l’infu- sibilité du sulfate calcique, cause non moins déterminante d’après le célèbre chimiste.

» En distillant donc dans une cornue en grès munie d’une allonge et d’un récipient un mélange à équivalents égaux de chlorure calcique et de sulfate zincique, nous obtenons, après que toute l'humidité a été expulsée, un abondänt dégagement de vapeurs blanches très denses qui viennent se condenser sous forme d’un liquide visqueux, lequel prend presque aussitôt une consistance butyreuse. Ce produit est parfaitement blanc, si les matières employées ne renferment pas de fer. Dans le cas contraire, les premières parties qui passent à la distillation sont colorées en bren, suivant la proportion de fer qu’elles renferment, mais il arrive bientôt un moment il ue distille que du chlorure zincique pur,

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de sorte qu’en changeant lallonge on peut recueillir ce chlorure parfaitement pur (1).

» Revenons maintenant à la double décomposition à priori, il semble qu’étant déterminée par la volatilité du CFZn et par l’en- Jusibilité du SOS Ca0, elle doive s'effectuer d’une manière com- plète et donner sensiblement la quantité de chlorure zincique indiquée par la théorie; l'expérience prouve qu’il n’en est pas ainsi, de telle sorte que 100 parties de mélange à équivalents égaux qui, théoriquement, devraient produire 49, 5 p. 100 de chlorare zincique, n’en donnent que 41 p. 100. Par exemple, dans une experience que nous avons faite sur un poids de 308 grammes de mélange qui devait donner suivant la théorie 153 gr. de chlorure zincique , nous n’en avons obtenu que 193 : diffé- rence, 30. Il y a donc environ < du chlorure qui reste fixé sur le sulfate calcique. En retirant de la cornue le résidu de la distillation, le pulvérisant et le traitant par l’eau, on retrouve à peu près tout le chlorure zincique qui manquait dans le produit de la distil- lation.

» Ce résultat prouve que le sulfate calcique possède comme beau- coup d’autres corps le pouvoir de condenser et de retenir la vapeur de certains corps, à des températures bien supérieures à celles cette vapeur se forme, de sorte qu’on ne peut rompre des attrac- tions de cette espèce qu’en ayant recours à l’action mécanique d’autres fluides élastiques.

» ILest évident que,si la distillation dont nous parlons s’effectuait en présence d’un courant de gaz, toute vapeur du chlorure zincique serait expulsée. C’est, du reste, par un phénomène du même ordre qu’on explique pourquoi le zinc et le potassium s’extraient plus facilement et en plus grande quantité, lorsque ces métaux sont mis en liberté en présence d’une vaste atmosphère d’un fluide élastique inerte.

» De ce que nous venons de dire il ressort qu’en se mettant dans les conditions que nous avons exposées ci-dessus :

» 10 On n'arrive pas à distiller du chlorure zincique en çalcinant

(4) En traitant par l’eau le chlorure zincique chargé de fer, et en aban- donnant pendant quelques heures la solution à elle-même, elle ne tarde pas à se dépouiller complétement du fer qui se précipite à l’état d'oxyde ferrique rosé, P.

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un mélange de sulfate zincique et de chlorure sodique, du moins dans les condilions que nous avons reatées.

» On réussit, au contraire, parfaitement en employant un mé- Jange à équivalents égaux de sulfate zincique et de chlorure

calcique. » La volatilisation du chlorure zincique formé n’est jamais

complète par une simple distillation.

» Le procédé de fabrication du chlorure zincique:;tel que nous venons de l'indiquer, peut être suivi avec avantage dans toutes les localités l’on peut se procurer avec abondance le sulfate zin-

cique et le chlorure calcique. » Séance du 21 mai 1859.

PHOTOGRAPHIE.—M.Maxwell Lyte faitpart à la Société des nou- veaux perfectionnements qu’il a apportés à la préparation des glaces, par l'emploi de la mélagélatine ; il annonce qu’une glace ainsi préparée peut conserver sa sensibilité, soit avant, soit après l'exposition dans la chambre noire , pendant un temps presque illimité.

I. Préparation de la métagélatine. Immergez 500 parties de gélatine dans de l’eau de pluie à la température del’air, et lors- qu’elle s’est bien ramollie, faitcs-la égoutter sur un tamis. Faites- la ensuite fondre sur un feu doux, dans un vase de percelaine ou de cuivre étamé, portez-la au point d’ébullition et ajoutez-y 100 parties d’acide oxalique pur. Retirez le mélange du feu, quand il aura bouilli une heure; versez-le dans une large bassine et jetez-y avec précaution, et lorsqu'il est encore chaud, une quantité de craie suffisante pour neutraliser l'acide qu'il contient. Pour sépa- rer le dépôt d’oxalate de chaux, il suffit de laisser reposer et de dé- canter la partie surnagcante au moyen d’un siphon, ou mieux en la filtrant à travers une étoffe de fil. On clarifie complétemerñt le liquide encore laiteux en le faisant bouillir avec 2 ou 3 blancs d'œufs eten le filtrant de nouveau. Sa couleur est alors celle du vin de Xérès.. On y mêle enfin le dixième de son poids d’alcoo! et on le verse dans des flacons bien bouchés ii peut se conser- ver indéfiniment. ,

II. Nettoyage des glaces. M. Maxwell Eyte se sert pour cette opération d’une dissolution de 200 grammes de sous-carbo- nale de soude ordinaire dans un litre d’eau ; il y plonge les glaces

33 pendañt une heure et les frotte ensuite avec un peu de tripoli en poudre : les ayant rincées enfin sous un courant d’eau, il les sèche en les essuyant avec des linges qui ont été netioyés au moyen d'une solution alcaline chaude, semblable d’ailleurs à celie qui a servi pour les glaces elles-mêmes.

Les glaces doivent être neltoyées une heure avant leur emploi et tenues parfaitement sèches ; et le laboratoire dans lequel on les prépare doit être exempt de toute espèce de-vapeurs et parfaite- ment ventilé. Inutile, du reste, de faire remarquer que, par cela même que l'opération de les sensibiliser par ce procédé demande plus de temps que leur sensibilisation par le procédé ordinaire, le lieu elle se fait doit être éclairé avec encore plus de précau- tions que d'habitude. Il faut n’y laisser pénétrer qu’une lumière Jaune parfaitement uniforme.

III. Collodion ; son application. Quant au collodion, il est assez difficile d'indiquer un moyen sûr d’en fabriquer qui donne constamment entre les mains du photographe un bon résultat. Tous les collodions réussissent quand ils ont été colorés par l'âge, no- tamment celui de M. Bertsch qui forme sur la glace une couche quelque peu pulvéralente. M. Maxwell Lyte recommande à ceux qui veulent en fabriquer eux-mêmes de se servir de préférence de la pyroxyline faite avec des acides à une température élevée. Les formules suivantes pour la composition du collodion lui paraissent les meilleures :

En Hiver. En Été. Pyroxyline 8 Pyroxyline 8 Éther 800 Éther 700 Alcool absolu 200 Alcool absolu 300 Todure de cadmium 6,25 Iodure de cadmium 6,25 Bromure de cadmium 2,5 Bromure de cadmium 2,5

Ce collodion ne renferme qu’une faible proportion d’alcoo! ; son emploi exige donc de la précaution ; ainsi, la glace étant tenue sur le porte-plaque, il faut, lorsque le collodion dont on l’a re- couverte s’est écoulé par un coin, porter aussitôt ce coin dans une direction opposée, le coin qui était en haut se trouvant à son tour en bas. De cette manière la vapeur d’éther retourne, en quelque sorte, sur laglace etempêche que le pointsur lequel le collodion a été versé ne se dessèche avant que le coin par lequel il s’est écoulé

Extrait de l'Institut, 1re section, 4859. 5

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ne se trouve prêt à recevoir l’action des liquides sensibilisateurs.

IV. Sensibilisation de la glace et application de la métagé- latine. Cette double opération nécessite emploi detrois bains, dans lesquels la glace doit être passée successivement : le bain ordinaire de nitrate d'argent; un bain d’eau distillée ; un bain composé de 250 parties (en volume) de métagélatine en dis- solution, de 5 parties d’acide lactique sirupeux (1), de 1000 par- ties d’eau et de 1 partie (en poids) de nitrate d’argent,

La glace doit rester dans le premier bain de 5 à 10 minutes ; on la passe ensuite une ou deux fois (pas davantage) dans l’eau dis- tillée pour enlever le nitrate d'argent non combiné, et on la laisse enfin de 5 à 10 minutes dans le bain 3 en l’agitant fréquem- ment, afin que l'absorption de la métagélatine s’y fasse d’une ma- nière bien égale. Dans les temps froids et lorsque l’on désire donner aux épreuves négatives des tons plus intenses on peut ajouter au bain de métagélatine 5 parties d’oxymel.

La glace, retirée de son dernier bain, doit être mise à égoutter pendant quelques minutes dans un endroit obscur, puis placée dans la boîte à sécher qui doit être faite d’un bois non résineux (2), être revêtue intérieurement de papier, et renfermer une petite capsule d'acide sulfurique que l’on renouvelle de temps en temps et à mesure qu'il absorbe l'humidité ainsi que d’autres produits gazeux qui pourraient se rencontrer dans l’atmosphère qui en- toure les glaces, tels qu’ammoniaque. chlore, acide sulfureux, hydrogène sulfuré, vapeurs d’essence de térébenthine, etc.

V. Exposition ; développement de l’image; fixation, etc. L'exposition dans la chambre noire de la glace sensibilisée doit durer plus ou moins, selon le mode de développement que l’on veut adopter. Ainsi, par exemple, pour une vue stéréoscopique prise avec un objectif à paysage de Ross et un diaphragme de 6 à

(1) On pourrait au besoin remplacer l’acide lactique par 10 grammes d’acide acttique purifié du commerce ou par 5 grammes d'acide acélique cristallisable. La raison pour laquelle on donne ici préférence à l’acide Jaclique, c’est qu’il n’a pas, comme l’acide acétique, le défaut d’être volatil et qu'il. ne produit pas des noirs aussi intenses. Dans tous les procédés secs, l’un peut être substitué avec avantage à l’autre.

(2) Il faut rejeter en général de la construction de ces boîtes tous les bois odorants, ainsi que toute espèce de vernis, d'huile, etc.

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7 inillimètres de diamètre, l'exposition doit être de quarante sc— condes à une minute, si l’on veut développer l’image par le sul- fate de fer, ou de trois minutes à trois minutes et demie, si l’on emploie l'acide pyrogallique. M. Maxwell Lyte a pour habitude de développer avec le sulfate de fer, jusqu’à ce que tous les dé- tails soient sortis, et il fait monter l’épreuve, si cela est nécessaire, avec un mélange de nitrate d'argent et d’acide pyrogallique. Voici, du reste, les liquides dont il se sert à cet effet : |

1. Sulfate de fer, 10 grammes. Ac. acétique cristallisable, 20 cent‘ cubes. Eau distillée, 500 »

Ne 2. Acide pyrogallique (1), 1 gramme. Ac. acétique cristallisable, 10 cent‘ cubes. Eau distillée, 500 »

3. Nitrate d’argent, À gramme. Eau distillée, 100 »

On met d’abord un peu d’eau sur la glace de manière à la mouiller également partout; puis, l'ayant placée sur un pied, on y verse assez de solution no À pour la recouvrir; on rejette immédiate- ment ce liquide dans un verre il a été probablement mis quel- ques gouttes du 3, puis on le verse et on le reverse sur la glace jusqu’à ce que tous les détails soient parfaitement développés. Aussiôt que ce résultat est produit, on place l'épreuve sous un filet d’eau , afin d'en enlever toute trare de la solution de fer, et si, alors, on le juge nécessaire, on colore l’épreuve en la traitant par la solution 2 à laquelle on a ajouté un peu de 3. Elle est ensuite fixée à la manière ordinaire, avec le cyanure de potas- sium ou l’hyposulfite de soude, puis enfin lavée, séchée et vernie.

Séance du 2 juillet 1859.

CHIMIE. Nouvelles observations sur les bases organiques dé- rivées de la liqueur des Hollandais. M. S. Cloëz a lu à fa Société, dans cette séance, la note suivante :

« J'ai communiqué anciennement déjà, à la Société, une note

(4) Pour éviter la nécessité de peser constamment l'acide pyrogallique, on peut, ainsi que l’a conseillé M. Crookes, faire une solution de 10 grammes

de ee corps dans 400 grammes d’alcoo! absolu ; 40 centimètres cubes de cetle so'ulion représentant 1 gramme d’acide solide.

6

relative à la production d’une nouvelle série de bases organiques résultant de l’action de l’ammoniaque et des bases volatiles sur les carbures d'hydrogène chlorés ou bromés. (L'Institut, 1853, p. 213.) J'aieu l'occasion, plusieurs fois depuis, de présenter ver- balement les résultats les plus importants de mon travail aujour- d'hui très étendu.

» Je croyais être complétement maître de mon sujet, lorsque M. Hofmann a proposé une légère modification aux formules des bases dont je revendique hautement la découverte. J’espérais que mes observations relatives à la composition de la forménamine, de l’aceténamine et de plusieurs autres bases analogues (Compt. Rend., XLVI, p. 344) auraient pour effet de calmer l’impatience du chimiste anglais, et, dans cette persuasion, je m’occupais tran- quillement de l’analyse et de l’étude des nombreux composés nou- ‘eaux que je suis parvenu à produire et à séparer avec beaucoup de peine, lorsque M. Hofmann, sans avoir répondu à mes obser- valions, sans avoir discuté les expériences présentées à l'appui de ma manière de voir, est venu de nouveau proposer des noms dif- férents et des formules modifiées d’après une théorie préconçue, pour plusieurs des bases dérivées de la liqueur des Hollandais que j'ai obtenues et fait connaître depuis longtemps.

» L'action de l'ammoniaque en excès sur l’éthylène bibromé produit plusieurs bases parmi lesquelles il s’en trouve une bouil- lant au-dessus de 300° et dont la composition est représentée par la formule C8 H10 Az°. Gette base sature un équivalent d’acide, et son chlorhydrate forme avec le chlorure de platine, un sel double formé de C8 H10 Az?, H CI PL CF.

» La réaction qui donne naissance à cette base pour laquelle j'ai proposé le nom de diacétenamine en ce qu’elle représente 2 équivalents d’acétenamine, supposée anhydre, est représentée par l'égalité suivante : ;

2(C4H* Br?) + 5 Az H°— Hi° Az?, H Br + 3 (Az H Br).

» La méthylamine, l’éthylamine, la butylamine, lPaniline agis- seni sur l'éthylène bibromé absolument comme l’ammoniaque ; ainsi l'on obtient :

La diacétenméthylamine CMS PATÉR=— (CENT A7) La diacétenéthylamine CS HIS Az° = 2(C% Az)

oi.

La diacétenbuiylamine C3* H°*° Az? 2(C'2 H°° Az)

La diacétenaniline CHAHPA7I= PE (CHA 7) M is, de même que la production de la diacétenamine est accom- pasznée de celle de la forménamine C? H3 Az, HO, de l’acétena- mine C# H5 Az, HO. de même l’on obtient avec les bases vola- tiles autres que l’ammopiaque : Lo formenméthylamine C* H°Az HO ; l’acétenméthylamine H7 Az,HO La formenéthylamine H7Az HO; l’acétenéthylamine C$ Az,HO La formenbutylamine H°Az HO ; l’acétenbutylamine C!°H'‘Az,HO La formenaniline C':H757; l’acétenaniline C'SH° Az M. Hofmann donne à la formeneniline le nom de !#phényldiam - mine monocthylénique, et il représente sa composition par la formule C?8 H16 47°.

» l’acétenaniline, connue et décrite depuis longtemps, est, pour le même chimiste, de la diphényldiammine diéthyléni- gie dont la formule est la même que la nôtre, sauf qu’elle est doublée.

» Les mêmes rapprochements peuvent être faits pour les pro- duits de l’action de l’éthylamine sur l’ethylène bromé.

» Le chimiste anglais admet l’existence d’un métal diatomique, l'échylène diéthyl-diammonium, dans la formenéthylamine ; et | représente la composition de cette base par la formule C'? H18 47° O?, différant de celle que nous avons proposée par un équivalent d'hydrogène en plus, outre qu’elle est doublée.

» La base diéthylénique de M. Hofmann a la même composition que l’acvtenélhylamine, la formule est simplement doublée.

» Il arrive fréquemment que plusieurs chimistes s’occupent d’un même sujet à l’insu l’un de l’autre; ce n’est pas le cas en ce qui nous concerne M. Hofmann et moi. Das la crainte d’être de- vancé on présente quelquelois des travaux incomplets, dont l’effet est d'engager la science dans une voie fausse ; pour éviter cet écueil, j’ai tenu à faire un travail aussi complet que l’état actuel de la science et mes faibles ressources me l’ont permis.

» J'ai lieu de croire que les observations de M. Hofmann ten- dent seulement à appuyer sa théorie sur la constitution des bases dérivées de la liqueur des Hollandais; à ce point de vue, je ne peux que lui être reconnaissant de l’importance qu’il donne à mon travail; s’il en était autrement, s’il voulait s’attribuer la

38 découverte des faits qu’il interprète à sa manière, mon devoir

serait de protester contre une façon d'agir dont on à eu jusqu ici fort peu d'exemples dans la science. »

Séance du 16 juillet 1859,

La note suivante, sur la composition chimique des valves de la Lingule, a été communiquée dans cette séance par M. S. Cloez.

« Les enveloppes solides d’un grand nombre de Mollusques, de- signées vulgairement sous le nom de coquillages, diffèrent essen- tiellement par leur composition chimique des parties qui forment le squelette des animaux vertébrés. L'élément calcaire est, à la vé- rité, commun aux unes et aux autres; mais dans les coquilles la chaux est principalement à l’état de carbonate, tandis que dans les os elle se trouve en grande partie unie à l’acide phosphorique; c’est la différence caractéristique qui a été constatée par un grand nombre de chimistes.

» Les valves de la Lingule (Lingula anatina) font exception à cette règle. Elles contiennent en effet, comme les os, une grande quantité de phosphate de chaux et fort peu de carbonate; elles fournissent en outre à l’analyse presque la moitié de leur poids d’une matière organique azoto-sulfurée, analogue au cartilage, et tout à fait semblable à la substance cornée des écailles des Poissons.

» L'analyse de ces coquilles ne présente aucune difficulté : on commence par les dessécher dans un couraut d’air sec à 100 de- grés, jusqu’à ce qu’elles ne perdent plus de leur poids. On déter— mine la proportion de l'acide carbonique en les traitant par l'acide chlorhydrique faible, dans le petit appareil communément em- ployé pour cet usage ; après vingt quatre heures de contact, la réaction est terminée. La matière organique, séparée des sels cal- caires, conserve la forme de la coquille ; on la retire du liquide, on lui fait subir plusieurs lavages à l’eau chaude, puis on la des- sèche à 100°, pour en déterminer ensuite le poids. Il est à remar- quer que l’on n'obtient par ce moyen qu’une partie de la sub- stance organique des valves; il s’en dissout toujours dans la liqueur acide une certaine quantité, qui est variahle, et d'autant plus grande que l'on opère à une température plus élevée et que le contact est plus prolongé. Pour avoir le poids total de cette ma- tière, il faut incinérer à blanc une portion des coquilles, peser le

39

résidu, lui restituer par le calcul l'acide carbonique dégagé. La différence entre le poids ainsi déterminé et celui de la coquille soumise à l’incinération représente d’une manière suffisamment exacte la quantité de l'élément organique, qui varie de 0,46 à 0,43, suivant l’âge de l’animal. La moyenne de quatre détermi- nations a été trouvée égale à 0,452. En traitant les valves par l’a- cide chlorhydrique, il reste seulement 0,226 d’une matière mem- braneuse, transparente et semblable à la chitine ; par un hasard singulier, il se trouve que l’acide dissout de la matière organique une quantité précisément égale à celle qui résiste à son action.

» Les cendres de valves de Lingule se dissolvent: complétement dans l’acide chlorhydrique sans effervescence; la solution évapo- rée à sec laisse un résidu qui nest plus entièrement solub e dans l’eau acidulée ; il reste environ 0,001 de silice, provenant sans doute de la matière azoto-sulfurée.

» Un essai préalable m'a montré la présence du fer en quan- tité notable dans les coquilles fraîches. On sépare ce corps sous forme de phosphate basique insoluble dans l'acide acétique, et on le dose ensuite à l’état de sesquioxyde ; à cet effet, on sursature la solution acide du résidu de l’incinération par lammoniaque, on ajoute à la liqueur touble de l'acide acétique en excès, de ma- nière à redissoudre le phosphate tricelcique, sans toucher au phos- phate de fer basique, que l’on recueille, et qu’on analyse à part; la quantité de fer trouvée, évaluée en sesquioxyde, est de 0,0085, représentant 0,0198, ou près de deux centièmes de phosphate de fer, 2 Fe° + 3 Ph O5. La présence du phosphate de fer ex- plique, jusqu’à un certain point, la coloration bleu-verdâtre se rapprochant de celle de la turquoise, que l’on aperçoit sur plu- sieurs endroits de la coquille, notamment vers la pointe ; le trai- tement par les acides fait disparaître cette coloration, mais elle persiste dans le produit de l'incinération, après l’addition de quelques gouttes d’acide azotique et une nouvelle application de la chaleur pour achever combustion.

» Après la séparation du phosphate de fer, l’acide phosphorique restant a été isolé des bases alcalino-terreuses, la chaux et la ma- gnésie, au moyen du perchlorure de fer et de l’acétate de soude. Le précipité, lavé, séché et calciné, a été pesé, le fer en a été ensuite retiré et dosé à l’état de sesquioxyde; la détermination de l’acide

40

phosphorique a été faite ainsi par différence. Dan: une autre ex- périence, le phosphate de fer avec excès d’oxyde à été reilissous dans l'acide chlorhydrique; la solution, additionnée d’acide tartri- que, puissursaturée par l’ammoniaque, a été précipitée par le sul- fate de magnésie ; les résultats obtenus dans ce second essai ont été de 0,005 plus forts que ceux du premier procédé.

» La chaux restant dans la liqueur débarrassée de l’acide phos- phorique a été précipitée par l’oxalate d’ammoniaque et dosée à l’état de sulfate de chaux.

» Quant à la magnésie elle à été retirée après la chaux'et peste sous forme de pyrophosphate.

» La composition chimique de la Lingule se rapproche singulie- rement de celle des écailles des Poissons, déterminée depuis long- temps par M. Chevreul et vérifiée récemment par M. Fremy : elle a aussi beaucoup d’analogie avec celle de l’enveloppe des In- secs, telle qu’elle a été établie au commencement de ce siècle par Hatchett, L ne m'appartient pas de tirer les inductions phy- sivlogiques qui peuvent ressortir de cette comparaison. M. Gra- tiolet, à qui je dois les coquilles qui ont servi à mon analyse, est mieux que personne à même de faire saisir ces analogies et d’en développer les conséquences dans le travail d'ensemble qu’il fait sur plusieurs classes de Mollusques.

r ss

» Pour 100 parties les valves de Lingule séchées à 100 degrés contiennent :

Matière organique azoto-sulfurée 45,20 Acide carbonique 2,94 jhospliorique 22,75 silicique traces Chaux 26,54 Magnésie 4,75 Sesquioxyde de fer 0,85 100,00

ou bien : Matière organique 45,20 Carbonate de chaux 6,68 Phosphate de chaux 42,29 de maenésie 3,35 de sesquioxyde de fer 1,98 Silice traces

400,00

4

» Les écailles de Lépisostée analvsées par M. Chevreul (His. naturelle des Poissons, par Cuvier, t. T, p. 479), renferment :

Matière azotée 41,00

Matière grasse liquide 0,40 Sels desoude (chlorure, sulfate, carbonate) 0,10 Sous-carbonate de chaux 40,00 Phosphate de chaux des os 46,20 de magnésie 2,20 Peroxyde de fer traces Perte 0,10 400,00

» Le test des Insectes, d’après Hatchett, contient : Substance d’un jaune clair analogue à un cartilage

(chitine des chimistes modernes) 26 Phosphate de chaux 64 Carbonate de chaux 40

400

» La matière organique azoto-sulfurée, séparée des coquilles, res- semble à la plupart des substances azotées de l’organisation. Elle se comporte avec les réactifs acides et alcalins à peu près comme la chitine ; seulement elle se dissout bien plus facilement que cette substance dans l’acide chlorhydrique ; mais elle est comme elle à peu près insoluble dans la solution de potasse à la température de l’ébullition. Je ne me suis pas laissé entraîner à considérer cette matière comme une espèce chimique distincte et à lui donner un nom nouveau. À mon avis on ne doit regarder comme principes immédiats définis que les corps susceptibles de se combiner avec d’autres corps sans se modifier et de former des composés défini: qui sont soumis aux lois ordinaires de la chimie. Or, rien de sem- blable n’a lieu pour les éléments anaiomiques organisés des ani- maux et des végétaux. Que l’anatomiste et le physiologiste les étu - dient avec soin pour les distinguer et reconnaître le rôle qu’ils sont appelés à remplir dans l’organisation, c’est un point essen- tiel ; mais le vrai chimiste n’a rien à voir dans leur étude : il ne doit les admettre tout au plus que comme des matières premières pouvantservir à donner, par une altération plus ou moins profonde des corps qui présentent les caractères essentiels des espèces chi- miques définies, des principes immédiats proprements dits »

Extrait de l’Institut Are section, 1859. 6

A9 Séance du 30 juillet 1859,

ANATOMIE VÉGÉTALE. Faisceaux ligneux des Fougères: M. Paul Bert a présenté à la Société dans cette séance la note suivante :

« On enseigne généralement que les tubes vasculaires qui composent les faisceaux ligneux des Fougères appartiennent tous à la classe des vaisseaux scalariformes et des vaisseaux poreux. Hugo Mohl, Richard, de Mirbel, Adrien de Jussieu, M. Bron- gnjart et d’autres ont professé ou professent encore cette spinivn. Cependant, vraie sans doute pour la tige adulte des Fougères en arbre étudiées par Mohl(1), elle devient beaucoup trop exclusive sion veut l'appliquer aux pétioles et aux nervures des jeunes fron- des des autres Fiticinées.

» Si l’on pratique, en effet, une coupe verticale dans une fronde encoreenroulée de Polypodium, d'Adianthum, de Pteris d As- plenium. de Dicsonia. etc., on v constate facilement l'existence de tous les ordres de vaisseaux, y compris les vraies trachées dé- roulables. 11 est même possible, en brisant l'extrémité du pétiole, de soutenir le fragment à l’aide des filaments spiraux sortis de leurs tubes, comme il arriverait d’une jeune tige de Vigne ou de Sureau.

» Ces trachées, comme je l’ai particulièrement constaté dans le Potystichum Filix mas, le Polypodium vulgare, etc., sem- blent même exister seules au sommet de la fronde en voie de dé- veloppement. Bientôt , leur nombre absolu et relatif diminue, et l’on voit apparaître des vaisseaux spiraux annelés ou rayés, se mé- tamorphosant les uns dans les autres pour former des tubes mi:- tes de nature diverse suivant la hauteur. Les vaisseaux scaiari- formes qui, au dire de Mobhl (2), existeraient seuls dans les Fou- sères, sont au contraire fort rares à cette époque ; mais leur nom- bre augmente rapidement avec la densité du tissu, sans que j'aie pu voir nettement s'ils procèdent des autres vaisseaux, chose dou- teuse cependant, vu leur calibre généralement supérieur. Enfin, ils finissent par exister presque seuls dans les parties plus vieilles

(3) De structura Filicum, dans Icones seleciæ plantarum cryptogami-

earum (Martins, 4827, p. A7). À (2) Filicum vas omnia pertinent ad clanem scalariformium poroso-

rumque:(loc. cit.)

43 de la plante, se renconirent encore assez rarement quelques- uns de ces vaisseaux mixtes que Richard appelait spiro annulai- AE » Si quelques vaisseaux scalariformes et un grand nombre de spiraux, d’annelés, etc., procèdent des trachées, un plus grand nombre encore se développent au sein du tissu cellulaire avec la nature qu'ils conserveront plus tard ; ils apparaissent alors sous forme de fuseaux de longueur variable.

» Si l'on écrase entre deux plaques de verre une lame mince de tissu contenant des vaisseaux de différents ordres, leur membrane tubulaire se brise et on les voit alors ou se disperser en anneaux isolés, ou se dérouler en spirale, comme pour témoigner du mou- vement en tourbillon qui les a formés ; mais il est toujours facile, a l’élasticité, à la longueur, à la régularité de la spire, de distin- guer les vrais fils libres des trachées d'avec les lanières plus ou moins fragiles des vaisseaux spiraux ou scalariformes.

» J'ai vu des trachées à 1 ou 2 fils, généralement espacés dans leurs tours de spire, s’enroulant, ainsi que les vaisseaux spiraux simples, de bas en haut et de droite à gauche, chaque fois du moius que j'ai cherché leur direction. Lorsqu’elles font partie d’un faisceau vasculaire complexe, elles m'ont semblé occuper le plus souvent les parties centrales de ce faisceau. »

Séance du 6 aout 4859.

BOTANIQUE. Champignons. MM. Labourdette et Champion ont communiqué, dans cette séance, à la Société, la note suivante sur l’/conographie des Champignons.

« La mycologie s’appuie, dans les ouvrages systématiques, sur des caractères si subtils, que leur application aux déterminations immédiates est, pour ainsi dire, une chose impossible. Un être quelconque est d’abord conn& par sa physionomie ; c’est la phy- sionomie qui dicte les premiers jugements, et les caractères my- crographiques, malsré leur incontestable importance, ne sont après tout qu’un élément indispensable de critique. L'étude des sporules fournit sans doute un caractère précis du Champignon, mais ne donne aucune notion de sa forme et de son aspect : ce même aspect est cependant indispensable. C’est, quoi qu’on en dise, par surtout que se révèlent l'espèce et le genre. Nous in

A

sistons d'autant plus sur ce point qu’on fait aujourd’hui un abus extrême, en botanique, de l'application des éléments microscopi- ques à la classification. Les considérer exclusivement dans la clas- sification des Champignons, en particulier, serait une erreur fâcheuse ; autant vaudrait-il essayer de classer les Mammifères par la considération de leurs globules du sang ou de leurs éléments Z00spermiques.

» Un illustre zoologiste, M. Schlegel, a intitulé un livre célèbre d’erpétologie ; Essai sur la physionomie des Serpents. Nous croyons au’il est temps enfin de réaliser un essai sur la physionomie des Champignons. Comme l'ont d'ailleurs compris MM. Persoon et Léveillé, il faut les grouper selon les caractéres visibles de leur ensemble, selon leurs attitudes et selon les circonstances de leur développement, D'ailleurs, ces groupes indiqués par la physiono- mie scnt presque toujours d’accord avec les résultats que donne l'étude approfondie des éléments reproducteurs. L’un de nous (M. Labourdette) a eu depuis longtemps l’idée d’exécuter ce tra- vail de description et d’iconographie scientifique. Mais le crayon est impuissant à rendre les aspects si délicats des surfaces, la phy- sionomie se perd totalement dans ces images. Or, ce que le dessin ne peut faire ici, la photographie le donne, et M. A. Champion a bien voulu s'associer à cette œuvre pour la partie photogra- phique.

» Nous avons l’honneur de présenter à la Société quelques épreuves de grandeur naturelle, qui feront mieux que des paroles ressortir l'importance de cette application de la photographie. Cette application a réclamé certaines modifications dans les pro- cédés opératoires que M. Champion fera ultérieurement connai- tre à la Societé. Pour le moment, nous avons voulu seulement lui soumettre ces premiers résultats. »

Séance du 13 août 1859.

CHIMIE. Propriétés oxydantes de l'essence de térébenthine. M. Berthelot a communiqué à la Société dans cette séance les recherches suivantes sur ce sujet.

«Un grand nombre de matières jouissent,au moment elles s'oxydent, de la propriété de déterminer l'oxydation simul- tanée de certaines substances que l'oxygène de l'air, agissant

5 ‘isolément, serait impuissant à oxyder.Ces phénomènes d'oxy- dation indirecte semblent jouer un rôle essentiel dansles réac- tions sur lesquelles repose la photographie, et se retrouver fréquemment dans la végétation des plantes et dans la nutri- tion des animaux ; car tous ces phénomènes s’accomplissent à la température ordinaire et sans le concours des réactifs puis- sant que l’on est habitué à mettre en œuvre dans les labora- toires.

C’est pour tâcher d'éclairer quelques points relatifs à cet or- dre si intéressant de phénomènes que j'ai entrepris des re- cherches sur les propriétés oxydantes de l’essence de térében- thine. Cette essence possède ces propriétés d’une manière très-marquée, et c’est en même temps un composé organique suffisamment défini pour se prêter à une étude précise. J’ai fait un grand nombre d'expériences dont plusieurs ont amené des résultats définitifs, tandis que d'autres sont encore trop incomplètes pour en parler ici. Voici les questions que je vais discuter aujourd’hui :

Quelles sont l'intensité et les limites des oxydations indi- rectes provoquées par l'essence de térébenthine ?

Dans quelles conditions l’essence peut-elle acquérir ou perdre ses propriétés oxydantes ?

Quelle est la relation véritable entre l'essence qui déter- mine l'oxydation et l'oxygène qui en est l'agent ?

12

I. La décoloration de l’indigo est l'une des oxydations indirectes les plus frappantes parmi celles que l'essence de té- rébenthine est apte à provoquer. Elle a été découverte par M. Schônbein, qui a signalé également l'oxydation de l’acide sulfureux, celle de divers métaux, etc., sous cette même mfluen- ce. J'ai observé que cette essence peut oxyder aussi le pyro- gallate de-potasse, le sucre et probablement le mercure.Parmi ces divers phénomènes j'ai plus particulièrement examiné avec détail l'oxydation de l’indigo et celle du pyrogallate de potasse comme propres à servir de mesures pour en déterminer l'in tensité et Les limites.

Indigo. On fait bouillir dans un matras une solution aqueuse et étendue de sulfate d'indigo avec de l'essence de térébenthine distillée depuis quelques semaines, on agite vi-

46 vement le tout; au bout de quelques minutes l’indigo se trouve décoloré. Si l’on opère avec une liqueur aqueuse à peine tein- tée de bleu, la décoloration est presque immédiate. J’ai cher- ché combien un volume déterminé d'essence pouvait déco- lorer de volumes d’une solution titrée d’indigo. On opère en ajoutant cette solution par petites quantités et en attendant sa décoloration complète avant d’ajouter une nouvelle propor- üon. L'expérience ainsi conduite se prolonge pour ainsi dire indéfiniment : la décoloration devient de plus en plus lente, sans Cesser pourtant de se produire et sans qu'il soit possible tout d’abord d’en assigner le terme, même au bout de plu- sieurs semaines. Or, l’expéfience ainsi prolongée comporte deux causes d'erreur fort graves. En effet, une ébullition d'aussi longue durée finit par volatiliser presque toute l’essence ; et le reste se résinifie d'autant plus vite que l'on opère à 1002.

J'ai alors cherché si l'expérience pouvait se faire à froid, de façon à permettre de la prolonger sans fatigue et sans perte de matière. Or, il suffit d’agiter l'essence avec la solution d'indigo pour décolorer celle-ci. Au commencement de l’expé- rience, le temps nécessaire pour obtenir la décoloration est plus long qu'à 100°; mais cet inconvénient est bien vite com- pensé. Il n’est point nécessaire d’ailleurs d’agiter continuelle- mentle mélange, car la décoloration se faitd’elle-même au bout d'un certain temps. Ces faits posés, voici comment j’ai opéré :

Dans un flacon de 10 litres j'ai introduit 5% d’es- sence de térébenthine rectifiéé depuis quelques semaines, 90 8'- d’eau et 100% d’une solution titrée d'indigo. Ces 100c exigeaient pour leur décoloration 50° de chlore (1), c’est-à- dire 25° d'oxygène.

Le tout a été maintenu à une température comprise en- tre 20° et 30° pendant 8 mois : on ajoutaitl’indigo par frac- tion de 50%, ou moins, au fur et à mesure de la décolo- ration.

Voici la marche de l'expérience commencée le 29 novem- bre 1858, terminée le 31 juillet 1859 :

Au bout de 7 jours, 5°° d'essence ont décoloré 400°° de solu-

(1) Déduit du volume de chlorure de chaux titré nécessaire pour produire la décoloralion de l’indigo,

L7

tion d'indigo, volume équivalent à 100 d'oxygène, c'est-à-

dire que,

En 7 jours 1 volume d'essence a déter-

miné l’absorption de 20 vol. d'oxyg.

En 16 jours l'absorption s’élevaità 40 » En 25 » 60 » En 37 » 80 ÿ En 63 » 100 En 77 » 108 » En 160 We 135 : En 182 » . 146 » En 220 » 168

La décoloration n’a pu être poussée plus loin. À ce moment l'essence paraissait complétement résinifiée et avoir perdu tou- tes ses propriétés.

On peut se demander si, dans les conditions de temps qui viennent d'être signalées, l’action seule de l’air et de la lu- mière ne serait pas efficace pour décolorer l’indigo. Pour ré- pondre à ce doute, j'ai versé dans un quart de litre d’eau une seule goutte de la solution d’indigo employée dans les expé- riences précédentes, et j'ai abandonné le tout dans des con- ditions d’aération et de lumière aussi identiques que possible avec celles se trouvait l'essence sur laquelle j’opérais. La liqueur en demeura sans aucun changement pendant plu- sieurs mois (1).

Pour se rendre un compte plus précis de l'oxydation de lindigo déterminée par l'essence de térébenthine, on peut comparer la proportion d'oxygène absorbée par l’indigo dans un intervalle de temps déterminé avee cet intervalle lui-

même.

(4) Au bout de ce temps, des moississures apparurent et la décoloration s’opéra en peu de jours. Je signale ce fait pour ne rien omettre. Mais c'est un phénomène à une cause étrangère et qui ne se produit point quand le liquide est recouvert par une couche d'essence de térébenthine, Cepen- dant il paraît que d’autres observateurs ont remarqué la décoloration spon- tanée des solutions d’indigo sous l'influence de la lumière solaire. Ce point mérite d’être éclairci.

48

Temps. Volume absorbé. Volume absorbé en un jour. 7 jours (décembre) ; » 20 9:9 9 » 20 2,3 12 » 20 Al ST 26 jours (janvier) 27 0,85 14 » 6 0,43 83 jours (février, mars, avril) 27 0,31 22 jours (mai) 11 0,50 j 38 jours (juin, juillet) 22 0,58

On voit par que l'absorption d’oxygene a été la plus ac- tive au début, que sa vitesse a décru rapidement, presque jusqu’au dixième de sa valeur primitive, puis, qu’elle a aug- menté de nouveau jusqu’à atteindre le cinquième de cette va- leur, moment elle est parvenue à son terme définitif. Il est possible que cette oscillation singulière soit due en partie à l’époque même des expériences commencées en hiver, pour- suivies au printemps, terminées en été, et sans que l’on ait pris de précautions spéciales pour éviter les variations surve- nues dans la température et dans la lumière ambiantes.

Comparons encore la proportion d'oxygène ainsi absorbée par l'indigo sous l’influence de l'essence avec le poids de cette essence et avec son équivalent.

1 d'essence détermine l'absorption par l’indigo de 168°c d'oxygène. c’est-à-dire : 18: d'essence répond 05:,27 d’oxy- gène absorbé. Si l’on remarque que 1°° d'essence exigeraitpour être changé eneaueten acide carbonique 2litres d'oxygène, on reconnaît que la proportion d'oxygène absorbée par l’indigo s'élève au douzième de la proportion nécessaire pour brûler complétement l'essence, autrement dit, 1 équivalent d'essence de térébenthine C20H16 détermine l'absorption par l’indigo de 4,1 équivalents d'oxygène.

Ces diverses formules donnent une idée exacte de l'intensité et des limites des propriétés oxydantes de l'essence de téré- benthine vis-à-vis de l'indigo.

Pyrogallate de potasse. L’essence de térébenthine peut déterminer l'oxydation du pyrogallate de potasse; cette oxydation doit être effectuée à l’abri du contact de l'air, dont l'oxygène agit déjà sur sur le pyrogallate. L’oxydation de

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ce principe par l’essence atteint au bout de quelques instants sa limite extrême, laquelle peut servir de mesure à la proportion d'oxygène actif unie à l'essence. J’y reviendrai tout à l'heure à ce point de vue. On voit par que non-seule- ment l’essence oxyde dans une liqueur acide l’indigo, sub- stance non oxydable par l’oxygène de l'air; mais que cette même essence oxyde dans une liqueur alcaline l'acide pyro- gallique, substance oxydable par l’oxygène de l'air.

Mercure. L’'essence active jouit également de la pro- priété d’émulsionner et d’éteindre le mercure par le fait seul de l'agitation. En même temps se développe une poudre noire qui semble formée par du protoxyde.

Cette propriété est très-caractéristique ; c’est celle qui permet de reconnaître le plus rapidement si l'essence jouit des pro- priétés oxydantes. J'ai cherché à recueillir la poudre noire qui précède pour la soumettre à l'analyse. Dans ce but je l'ai isolée autant que possible par lévigation, puis je l’ai lavée à l’eau, à l’alcool et à l’éther, et enfin séchée à la température ordi- naire. Chauffée dans un tube, elle a dégagé du mercure métal- lique et une petite quantité d’acide carbonique. Ce gaz était sans doute produit par la réaction de l'oxygène fixé sur le mé- tal et de quelque matière organique non éliminée par les la- vages. Je n’ai point réussi à recueillir cette poudre noire en quantité suffisante pour la soumettre à un examen plus appro- fondi. La fixation de l'oxygène sur le mercure sous l'influence de l’essence de térébenthine, si elle était bien constatée, pour- rait être rapprochée de la formation du protoxyde de mercure signalée dans la préparation de l’onguent gris. On sait que cet onguent se prépare en broyant un mélange de mercure et d'axonge; or l’axonge renferme de l’oléine laquelle possède des propriétés oxydantes indirectes analogues à celles de l’es- sence de térébenthine. L’essence, apte àoxyder l’indigo, n’agit point sur la teinture de tournesol dans les mêmes conditions. Je n’ai pas observé davantage la formation de l’acide nitri- que sous son influence, en opérant soit avec de l’eau pure, soit avec un lait de chaux, toujours avec le concours du temps.

4 Sucre. En abandonnant dans un grand flacon une solu- tion étendue de sucre de cannes avec un peu de chaux éteinte,

Extrait de l’Institut, 1e seclion, 4859. 7

90 le tout placé sous une couche d’essence, j’ai obtenu une pro- portion notable d'acide oxalique. Une portion du sucre de cannes est demeurée inaltérée. L'expérience a duré 7 mois. II. Ilsuffit d'abandonner l'essence récemment distillée à elle-même dans un vase à demi rempli pour lui faire acquérir les propriétés oxydantes caractéristiques.

20 L'influence de la lumière solaire n’est nullement indis- pensable ; l’essence acquiert ces propriétés même dans l’ob- scurité relative d'une armoire fermée.

Le temps nécessaire n'est pas très long; car l’essence, privée de cette aptitude oxydante, ne paraît jamais l’être d’une manière absolue, toutes les fois que l’on opère au contact de l’air. Seulement, dans ces conditions, au lieu de décolorer à chaud l'indigo en quelques minutes, elle le décolore dans l’es- pace d’une demi-heure, d’une heure, ou tout au plus de quel- ques heures. Pour bien constater cette différence, il est né- cessaire d'opérer avec une proportion d'indigo tout au plus suffisante pour donner à l’eau une teinte bleuâtre à peine perceptible. La solution ainsi teintée est dans les conditions les meilleures pour accuser le phénomène cherché avec sensi- bilité.

4 L’essence douée des propriétés oxydantes les conserve pendant plusieurs années et probablement jusqu’à sa résinifi- cation totale.

L’essence qui possède les propriétés oxydantes peut en être privée par plusieurs méthodes :

En la portant à la température de l’ébullition (160°). Comme, dans ces conditions, elle ne dégage point d'oxygène, il est probable que, par le fait de l'ébullition, elle s’unit d’une manière définitive à l'oxygène qu'elle renfermait jusque-là sous une forme transitoire.

En agitant l'essence dans un vase clos ou sur le mer- cure avec du pyrogallate de potasse : l’action est immédiate.

En agitant à froid ou à 100° avec un excès de teinture d’indigo l'essence contenue dans un vase scellé; il est néces- saire de prolonger l’action pendant une demi-journée ou même pendant un jour entier.

L'essence dépouillée de ses propriétés oxydantes cesse

o1

d'agir sur l’indigo, sur le mercure et sur le pyrogallate de: potasse, pourvu qu'elle n'ait pas le contact de l’air dans l'intervalle. Pour constater nettement cette inactivité 1l est nécessaire d'ouvrir sur le mercure les vases qui renferment l'essence rendue inactive et de transvaser celle-ci à l’abri de tout contact de l'air, par exemple à l’aide de la pipette Doyère. Si l’on veut éviter également le contact du mercure, on ouvre sur l’eau bouillie ou saturée d’acide carbonique pur, et on trans- vase dans des flacons ou dans des matras remplis d’acide car- bonique.

J’a cherché s’il y avait quelque différence physique entre l'essence active et la même essence rendue inactive ; mais je n'ai trouvé aucune différence. Les pouvoirs rotatoires, notam- ment, sont les mêmes dans les deux cas.

Voici les nombre observés, dans les mêmes conditions :

Essence type «— 159,3; La même ayant oxydé l'indigo à 100° avec le con-

cours de l'air —15°,0 La même ayant épuisé son action sur lindigo à

100° dans un matras scellé et devenue ainsi

inactive m7 La même ayant épuisé son action à froid sur Pin-

_ digo dans un matras scellé et devenue ainsi

inactive —-15°,3.

Cette identité de propriétés me paraît due à la circonstance suivante : la portion vraiment active de l'essence ne comprend point la totalité de la masse, mais seulement une fraction ex- cessivement minime. En effet, je montrerai plus loin que l’es- sence douée des propriétés oxydantes qui a été examinée ci-dessus renfermait seulement la moitié de son volume d'oxygène actif, c'est-à-dire -— de son poids ou :5 d’équi- valent.

La diversité d’une portion de matière aussi faible n’influe pas suffisamment sur les propriétés physiques de l’ensemble pour devenir manifeste en les modifiant.

III. -— Reste à examiner la nature véritable de l’action oxy- dante exercée par l’essence de térébenthine.

On peut se poser à cet égard quatre questions principales :

52

L’essence s’oxyde pour son propre compte et, eu même temps qu’elle s'empare d’une portion de l’oxygène, elle en modifie une autre portion et lui communique les propriétés de l'ozone. C’est ce qui arrive, par exemple, avec le phosphore. Ce serait cet oxygène demeuré libre, mais modifié, qui oxy- derait l’indigo. Mais l'oxygène uni à l'essence n’interviendrait pas dans le phénomène.

20 L’essence qui s’oxyde et l'oxygène auquel elle s’unit, avant de former une union définitive, Contractent une pre- mière combinaison définie, mais peu stable et transitoire. L’oxygène ainsi combiné peut se porter sur certains autres corps et les oxyder avec plus d'énergie que ne pourrait le faire l'oxygène libre. Dans cette explication le rôle de l'essence vis- à-vis de l’indigo serait le même que celui du bioxyde d’az te en présence de l'air vis-à-vis de l’acide sulfureux dont il dé- termine la transformation en acide sulfurique.

L’essence peut condenser l'oxygène d’une façon spéciale intermédiaire entre la dissolution et la combinaison, ce dont les globules du sang offrent un exemple incontestable. Cet oxygène peut redevenir libre par l'emploi des méthodes qui dégagent les gaz de leurs dissolutions. Il peut aussi exercer sur certains corps une action plus énergique que l’oxygène libre : on admet même cette activité propre dans l'oxygène des globules du sang, mais sans preuves suffisantes.

L'essence qui s’oxyde peut, au même moment, et par une sorte d'entraînement, déterminer l’oxydation d’un autre prin- cipe sans que l'oxygène libre soit modifié préalablement et sans qu'il s'engage d’abord dans une combinaison peu stable, ou dans une dissolution, intermédiaires obligés de son action. C'est ainsi que le chlore sec, incapable d'agir directement sur l'acide sulfureux sec, s’y combine cependant si l’on ajoute au mélange du gaz oléfiant avec lequel le chlore peut s'unir direc- tement.

Les divers effets qui viennent d’être énumérés pourraient exister séparément ou se trouver réunis dans l’action oxy- dante exercée par lessence de térébenthine.

Pour discuter ces divers problèmes, je me suis livré à un

29

grand nombre d'expériences dont je vais rapporter les plus décisives.

Dans une première série d'épreuves, j'ai opéré les oxyda- üons avec le contact de l’air : Les résultats de cette série ont été rapportés plus haut. Plusieurs effets distincts s’y trouvent con- fondus, à savoir l'oxydation qui peut être produite par l'oxy- gène réellement condensé dans l’essence, qu'il y soit dissous ou combiné ; et celle qui peut résulter de celle de l'oxygène de l'air modifié au contact ou bien entraîné, ou bien enfin contractant avecl’essence une dissolution ou une combinaison transitoire.

Voici comment j'ai cherché à démêler ces divers effets :

J'ai déterminé d'abord le pouvoir oxydant de l’essence elle- même, indépendamment de toute action de l'oxygène de l'air. J'ai employé dans ce but l’indigo et le pyrogallate de potasse.

Indigo. On prend un volume connu d’essence, 5°° par exem- ple, on l’introduit dans un matras dont le col étranglé sur un point se termine par une sorte d’entonnoir; on introduit dansle matras de l’eau distillée récemment bouillie; on fait arriver au fond du matras, sous la couche d’eau, à l’aide d’un tube effilé, 1 d’une solution titrée d’indigo ; on achève de remplir pres- que entièrement le matras avec de l’eau bouillie, en évitant avec soin de mélanger les liquides qu'il renferme ; on place le matras, sans l’agiter, dans un bain-marie dont on élève graduellement la température jusqu’à 100°; on l'y maintient pendant quelques minutes. Les liquides intérieurs se dilatent sans se mélanger sensiblement. Quand l’équilibre de tempéra- ture est suffisamment établi, on introduit dans le matras en- core un peu d'eau bouillie, de façon à amener le liquide jusque dans la partie étranglée; on fond aussitôt celle-ci au chalumeau, un peu au-dessus de la surface du liquide. On obtient ainsi un vase clos, renfermant de l'essence, de l’eau, de l’indigo, et privé d’air, si l’on excepte le volume insignifiant contenu dans l’effilure. D'ailleurs ce vase est complétement rempli-à 100°, et non à la température ordinaire, ce qui pré- vient tout risque de rupture due à la dilatation du liquide in- térieur, dans les expériences subséquentes. Enfin les précau- tions prises préviennent complétement ou à peu près toute

04 réaction préalable de l'essence et de l'indigo, réaction dans laquelle on pourrait suspecter l'intervention de Pair.

Dans tous les cas, on dispose simultanément quatre ou cinq de ces matras contenant l’un : de solution d’indigo titré, l'autre 4°, l’autre 8°, l’autre 12, le dernier 16‘, etc. Après avoir scellé les matras, on les chauffe à 100° et on les agite vivement. Au bout d’un certain temps la décoloration est com— plète dans plusieurs matras; elle est incomplète dans les au- tres. On prolonge pendant plusieurs heures, et on réitère l'épreuve le lendemain, de façon à acquérir la certitude que les derniers ne se décoloreront point par un contact ultérieur, quelque prolongé qu'il soit. On obtient ainsi deux limites entre lesquelles se trouve compris le pouvoir oxydant de l’es- sence ; par exemple, il est compris entre 8‘ et 12€ d’indigo titré. Une nouvelle série, semblable à la première, mais dans laquelle on opère seulement sur 96, 10, 11cc, 12° d’indigo titré, permet d’assigner la limite à près ; et on peut pousser plus loin encore l’approximation.

On a reconnu que l'échantillon employé dans la plupart des expériences précédentes pouvait céder à l'indigo un volume d'oxygène précisément égal à la moitié du volume de l’essence active. Cette proportion varie avec les échantillons, comme on pouvait s’y attendre.

En même temps que les essais précédents, on a fait une série d'expériences semblables exécutées à froid, avec des ma- tras remplis avec les mêmes précautions, mais à la tempéra- ture ordinaire et sans les porter jamaïs à 100°. Cette série conduit exactement au même résultat que la série précédente.

Pyrogallate de potasse. Une autre série d'expériences des- tinées à mesurer les propriétés oxydantes de l'essence a été faite avec le pyrogallate de potasse. Trois procédés ont été ici employés :

On introduit sur le mercure dans une éprouvette graduée un vol. déterminé d’une solution concentrée d'acide pyrogal- lique, un fragment de potasse, puis un volume mesuré d’es- sence. On agite le tout pendant quelques minutes ; le pyro- gallate de potasse noireit aussitôt et s'empare de l'oxygène actif contenu dans l'essence.

99

Cela fait, on introduit dans l’éprouvette un volume connu d'oxygène et on détermine la proportion de cet oxygène qui se trouve absorbée, en agitant pendant un quart d'heure.

On s'arrange à l'avance de façon à opérer sur un volume d'acide pyrogallique tel que la proportion non oxydée par l’es- sence soit faible, quoique très appréciable.

L’oxygène ainsi absorbé en dernier lieu se compose de deux parties : une portion principale qui se combine au pyrogallate de potasse et une autre partie qui se dissout dans l'essence.

- Une épreuve semblable opérée sans essence fait connaître la proportion totale d'oxygène absorbable par le volume employé d'acide pyrogallique. Cette proportion est difficile à mesurer avec la dernière précision parce que l'absorption de l’oxygène par les dernières portions d’acide pyrogallique est très lente; cependant l'incertitude est comprise entre des limites assez resserrées.

Enfin dans une autre épreuve, on introduit sur le mercure un volume d'essence désoxydée par l'acide pyragallique et on détermine combien d'oxygène elle absorbe dans le même espace de temps et dans les mêmes conditions que la pre- mière épreuve.

On établira plusloin que la proportion d'oxygène absorbée dans ces dernières conditions est simplement dissoute et peut être re- dégagée en opérant convenablement. C'est une fraction minime de la quantité précédente. Cela fait, on connaît trois choses :

a. Le volume d'oxygène absorbable par l'acide pyrogallique employé ;

b. Le volume absorbable dans les conditions de l'expérience par l'essence désoxydée ;

c. Le volume absorbable par l'acide pyrogallique et par l’es- sence réunis, après que le pyrogallate de potasse a désoxydé l'essence.

Si l’on retranche ce dernier volume de la somme des deux précédents, la différence représentera le volume d'oxygène cédé par l’essence au pyrogallate de potasse; sans être connu avec une extrème précision, comme on peut l'inférer des dé- tails ci-dessus, cependant ce volume est déterminé avec une approximation suffisante, et 1l a été trouvé sensiblement égal

90 au volume d'oxygène cédé par la même essence à la solution d'indigo, c’est-à-dire à la moitié du volume de l'essence em ployée. |

Dans l'épreuve, telle qu’elle vient d’être décrite, le mercure se trouve en contact avec l'essence durant sa réaction sur le pyrogallate de potasse. Comme ce métal aurait pu prendre une portion d'oxygène pour son propre compte, j'ai jugé nécessaire de faire d’autres expériences dans des conditions différentes.

Dans l’une, j'ai opéré comme avec l’indigo, c’est-à-dire, j'ai introduit dans un matras la solution pyrogallique conte- nue dans un petit récipient; j'ai placé la potasse à côté; j'ai rempli le matras avec de l’eau bouillie, j'ai ajouté l’es- sence, etc., enfin j'ai scellé le matras; j'ai opéré à 100. J'ai agité pour mêler les produits, et quand la réaction a été ter- minée, j'ai ouvert le matras sur le mercure et déterminé la proportion d'oxygène libre que les liquides qu’il renfermait: étaient susceptibles d'absorber. D'où j'ai déduit comme ci- dessus l’oxygène cédé par l’essence au pyrogallate de potasse.

3 J'ai fait la même expérience à froid. Les résultats des expériences et 3 se sont accordés avec ceux de l'expérience etavec ceux des expériences faites avec l'indigo.

Cet accord de tous les résultats est fort précieux dans des phénomènes aussi particuliers et aussi délicats. Il est nécessaire del’obtenir pour être autorisé à tirer quelque conclusion géné- rale relativement à l’état de l'oxygène condensé dans l'essence.

Après avoir déterminé par les expériences précédentes la proportion d'oxygène apte à agir sur l’indigo, que renferme l'essence de térébenthine, je me suis demandé si cet oxygène y est simplement dissous comme dans l’eau, s’il s’y trouve dans un état intermédiaire entre la dissolution et la combinai- son, comme dans les globules du sang, ou bien s’il y est con- tenu dans une combinaison réelle, mais peu stable, tel par exemple que l'oxygène combiné au bioxyde d'azote dans l’a- cide hypoazotique.

Voici les expériences que j'ai faites pour discuter ces ques- tions. J'ai d'abord tâché de dégager l'oxygène de l'essence, soit parla chaleur, soit en le déplaçant à l’aide d'un autre gaz.

lo J'ai pris un certain volume d’essence oxydante, j'en ai

91 rempli entièrement un ballon, puis j'ai porté l'essence à l'é- bullition et recueilli sur le mercure les gaz dégagés.

100% d'essence ont aussi fourni 13% environ d'azote pur sensiblement exempt d'oxygène et d'acide carbonique. D'où il semblerait résulter que l'essence examinée ne renfermait pas d'oxygène simplement dissous; mais cette conclusion pour- rait être révoquée en doute, car l'essence, après avoir éprouvé l'ébullition (1602), avait perdu ses propriétés oxydantes. Ilserait donc possibleque sous l'influence de la chaleur l'oxygène sim- plement dissous fût entré en combinaison définitive. A la vérité l'essence chauffée seulement jusqu'à 100° conserve son acti- vité ; mais en la maintenant à cette température je n’ai réussi à en dégager aucun gaz en proportion sensible.

Reste la méthode de déplacement des gaz dissous dans l'essence par un autre gaz. J'ai pris 20° d'essence, je les ai introduits dans une éprouvette sur le mercure et je les ai agités avec 20° d'acide carbonique pur, puis j'ai enlevé le gaz avec une pipette Doyère et je l’ai remplacé par 20° nouveaux d'acide carbonique. J’ai encore agité, puis enlevé les gaz. Les premiers gaz enlevés ont été traités par la potasse pour absor- ber l'excès d'acide carbonique; après ce traitement , il est resté

1,6 de gaz, 1,6 Le pyrogallate de potasse a réduit le volume à RES Les derniers gaz enlevés, après l’action de la potasse,

ont laissé seulement gs

d'azote, exempt d'oxygène.

En résumé les 20% d'essence ont dégagé 1°°,7 d’azote et 0c,1 d'oxygène dans les conditions décrites ci-dessus. Or, ces 20° d'essence pouvaient céder à l’indigo et. au pyro- gallate de potasse 10cc d'oxygène , C'est-à-dire 100 fois autant. On voit que cet oxygène n’est point susceptible d’être déplacé par l'acide carbonique.

Ce caractère l’éloigne de l'oxygène condensé dans les globu- les du sang, car cet oxygène peut être déplacé par d’autres gaz. Cen’est pas tout: d’après les expériences de M. CL. Bernard, l'oxygène des globules peut être, en vertu d’une action spé- ciale, entièrement dégagé sous l'influence de l’oxyde de car- bone, même employé en petite quantité; j'ai essayé l’action

Extrait de l’Institut, 17e section 1859, 8

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de ce gaz vis-à-vis de l'essence de térébenthine, mais il nen a point dégagé plus d'oxygène que l'acide carbonique.

C’est une nouvelle différence entre l'oxygène des globules du sang et l’oxygène uni à l’essence de térébenthine.

Avant d'admettre définitivement une telle différence en- tre l'oxygène des globules et celui de l'essence de térében- thine, j'ai cru nécessaire de faire une contre-épreuve et de m'assurer si l'essence peut dissoudre l'oxygène dans des con- ditions telles qu’elle puisse le dégager ensuite sous la seule influence du déplacement par l'acide carbonique. A cet effet j'ai pris 20° d'essence douée des propriétés oxydantes, et je les ai agités sur le mercure avec 20% d'oxygène ; j'ai enlevé l'excès de ce gaz avecune pipette Doyère, j'ai introduit 20 nou- veaux centimètres cubes d'oxygène et agité, puis sans attendre davantage, j'ai transvasé l'essence avec une pipette Doyère et je l’ai agitée à trois reprises successives avec son volume d’a- cide carbonique, et j'ai fait l'analyse des gaz dégagés. Le pre-

mier gaz renfermait 2508 d'oxygène ; le deuxième Le) Je troisième Occ,1

En tout 3,8

J'ai fait encore l'expérience suivante. J'ai agité l'essence à olusieurs reprises avec un grand volume d'acide carbonique, afin d'éliminer les gaz qu’elle contenait. Elle a dissous à la place une proportion considérable d'acide carbonique; puis je l'ai agitée avec de la potasse pour éliminer l’acide carbonique; l’es- sence s’est ainsi trouvée purgée de tout gaz dissous. Alors je l'ai enlevée avec une pipette Doyère et je l'ai agitée avec de l’oxy- gène ; dans l’espace de quelques minutes elle en a absorbé 19 centièmes environ de son propre volume, ce qui s’acéorde sen- siblement avec le résultat précédent. Seulement il est néces- saire de ne point prolonger pendant plusieurs heures, ni sur- tout pendant plusieurs jours le contact de l'essence et de l'oxygène, parce que ce gaz finirait par entrer en combinaison chimique véritable, ets’absorberait d’une manière graduelle et continue pendant un temps fort long et en proportion consi-

29 dérable ; la portion ainsi combinée ne pourrait plus évidem- ment être déplacée de nouveau.

On remarquera le procédé employé ci-dessus comme pro- pre en général à purger un liquide des gaz qu'il peut renfer- mer en dissolution sans recourir à l’ébullition. Il suffit de dé- placer ces gaz par l'acide carbonique employé d'une manière . réitérée, puis d’agiter le liquide avec la potasse qui enlève cet acide. On voit que la seule condition ici nécessaire c’est l’inso- lubilité dans le liquide de l'agent destiné à éliminer le gaz qu'il renferme en solution.

Les faits que je viens d'exposer prouvent que l'essence peut dissoudre l’oxygène sans s'y combiner immédiatement et sans perdre aussitôt la propriété de le dégager par voie de dépla- cement.

L'oxygène ainsi simplement dissous est distinct de l'oxygène doué des propriétés oxydantes vis-à-vis de l’indigo, car on a vu plus haut que, dans l'essence examinée, son volume n'é- tait guère que la = partie de l'oxygène actif.

Ce dernier est d’ailleurs très supérieur au volume de l’oxygène simplement soluble; car l'oxygène soluble n’atteint pas le : du volume de l'essence ; tandis que l'oxygène actif peut s'élever à la +, Enfin l'oxygène actif se trouve dans l'essence avec des propriétés fort différentes de celles qu'il possède dans les globules du sang, car ce dernier est déplaçable par un autre gaz et l'oxygène actif de l'essence ne l'est point. L'oxy- gène actif contenu dans l'essence s’y trouve sans doute con- tenu dans une combinaison peu stable. Cette combinaison n'a pu être isolée de façon à acquérir une certitude complète re- lativement à son existence isolée. Mais on peut s’en former une idée par voie de comparaison. Le composé dont on peut à plus juste titre rapprocher cette combinaison serait l'acide hy- poazotique formé par l'union de l'oxygène et du bioxyde d'azote et apte à oxyder un grand nombre de corps que l'oxygène libre ne pourrait oxyder.

On remarquera que l'essence peut contenir de l'oxygène

sous trois formes :

De l'oxygène simplement dissous et déplaçable par un autre gaz :

60

20 De l'oxygène engagé dans une combinaison peu stable et apte à se porter sur certaines matières suroxydables, telles que l’ndigo et le pyrogallate de potasse ;

3 De l'oxygène définitivement combiné sous forme de composés résineux privés de la propriété d'agir sur l'indigo.

Ces faits jettent beaucoup de lumière sur l’action oxydante exercée par l'essence non-seulement à l’état isolé, mais aussi avec le contact de l’air.

En effet, l’action oxydante exercée dans ce dernier cas ne peut guère être envisagée comme un phénomène d’entraîne- ment pur et simple provoqué par l'oxydation simultanée de l'essence, car l'expérience prouve que l'essence oxydée jouit précisément des propriétés oxydantes voulues, ce qui autorise à la regarder comme l'intermédiaire nécessaire de l'oxydation. Cette conjecture fort vraisemblable expli- que tous les phénomènes sans autre hypothèse. Elle écarte également l'opinion d’après laquelle l'oxygène en agis- sant sur l'essence acquerrait les propriétés de l'ozone. C’est une hypothèse qu'aucun fait connu jusqu'ici ne vient ap- puyer et qui n'est encore nécessaire à l'explication d’aucun phénomène. Mais le fait le plus saillant, celui d'un composé organique oxydable doué de propriétés oxydantes vis-à-vis d’au- tres composés organiques et apte à leur transmettre l'oxygène de l’air qu'ils n’absorberaient point directement n'en subsiste pas moins, avec des caractères nouveaux propres à le préciser et à lui assigner sa physionomie véritable. »

Séance du 22 octobre 1859.

CHimiE. Dans cette séance, qui a été la premuère après deux mois de vacances, la Société a entendu la communica- tion suivante de M. Berthelot sur le protosulfure de carbone.

«Il y a deux ans, M. E. Baudrimont annonça avoir découvert un nouveau gaz qui aurait échappé jusqu'ici aux recherches des chimistes, le protosulfure de carbone.

En répétant les expériences de cet auteur, je n'ai point réussi à reproduire les mêmes résultats; mais, à la place du gaz nou- veau, j'ai obtenu seulement des mélanges variables de gaz déjà connus, tels que l’oxyde de carbone, l'hydrogène, l'air des

ü1 appareils, etc., le tout chargé de vapeur de sulfure de car- bone qui communique à ces mélanges des apparences toutes particulières.

Parmi les expériences que J'ai faites sur cette question, Je citerai seulement les suivantes; elles ont été exécutées sur un produit préparé par le procédé que M. Baudrimont avait dési- gné comme le plus favorable.

{re expérience. Dans un tube de porcelaine rempli de pierre ponce et chauffé au rouge, j’ai fait passer lentement la vapeur du sulfure de carbone et j’ai recueilli les gaz sur le mercure. Durant cette opération l'air dilaté des appareils se dégage d’abord, puis viennent des gaz particuliers. Ils sont accompa- gnés par une proportion considérable de sulfure de carbone non décompose.

J'ai fait l'analyse des gaz recueillis en dernier lieu et j'ai trouvé que ces gaz étaient formés par de l’oxyde de carbone pur, saturé de vapeur de sulfure de carbone. Leur composition a été déterminée conformément aux méthodes générales que j'ai données pour l'analyse des gaz carbonés.

On isole un certain volume de gaz examiné, en se servant de la pipette Doyère ; on l’introduit dans un tube gradué, on le mesure et on y fait passer un petit fragment de potasse, une goutte d’eau, ce qui ne produit dans le cas présent aucune diminution de volume sensible (1), puis quelques gouttes d’al- cool ; la vapeur du sulfure de carbone est alors absorbée im- médiatement et complétement.

On transvase le résidu gazeux, on le lave avec un peu d’eau pour enlever les vapeurs d’alcool et on le mesure. La diminu- tion de volume qu'il a éprouvée répond à la vapeur du sulfure de carbone.

Le résidu gazeux est brûlé dans l’eudiomètre ; il fournit son volume d’acide carbonique en absorbant la moitié de son volume d'oxygène, nombres qui répondent à l’oxyde de car- bone.

(1) Ceci prouve que le gaz analysé ne renfermait ni acide carbonique, ni acide sulfureux. Il en serait autrement si l’on opérait sur les premières parties recueillies, lesquelles ont éprouvé l’action de l'oxygène de Hais des appareils.

62 Voici les résultals numériques : (1) 108 volumes du gaz primitif, traités par la potasse hu-

mectée d'alcool, se sont réduits à 63,5 volumes.

(2) 21 volumes du gaz privé de vapeur de sulfure de car- bone ont été mélangés dans l’eudiomètre avec

volumes d'oxygène ; ce qui fait en tout

76 volumes. On a fait passer l’étincelle électrique dans ce mélange, et le tout s’est réduit à

65 volumes. On a introduit dans le tube un fragment de potasse humectée pour absorber l’acide carbonique, ce qui a réduit le gaz à

44 volumes. Enfin l’on a ajouté une solution concen- trée d'acide pyrogallique pour absorber l'oxygène excédant et déterminer, sil y avait lieu, le volume de l'azote.

Celui-ci a été trouvé sensiblement nul. D'où l’on conclut. que le volume du gaz, privé de vapeur de sulfure de

carbone, s'élevant à 21 Il a fourni un volume d’acide carbonique égal à 65 44 AL

Et la diminution totale, somme du gaz brülé et de l'oxygène employé à le brüler, était égale à 76 44 AE

Enfin le gaz était entièrement combustible, puisqu'il n’a point laissé de résidu d'azote. Ces nombres répondent à l’oxyde de carbone,

car un volume de ce gaz égal à 21 produit un volume d’acide carbonique égal à 21 et une diminution totale égale à 32,5.

Ils sont d'autant plus décisifs que l’oxyde de carbone est, avec l'hydrogène, celui de tous les gaz combustibles qui ab- sorbe le moins d'oxygène et qui donne lieu à la plus petite diminution totale. Un gaz CS exigerait 2 volumes d'oxygène et produirait une diminution totale égale à 3 volumes.

63

En résumé, d’après les résultats ci-dessus, 100 volumes du gaz analysé renferment :

Vapeur de sulfure de carbone A1 100 Oxyde de carbone 29

Dans l’analyse qui précède, on a admis que la portion du gaz absorbable par la potasse humectée d’alcool est de la va- peur de sulfure de carbone. Cette opinion est conforme aux propriétés connues de cette vapeur et à sa présence nécessaire dans le gaz analysé; car ce gaz se dégage en présence d'un excès de sulfure de carbone liquide non décomposé, et il en est inévitablement saturé.

Toutefois on a cru utile d'appuyer cette opinion par des épreuves numériques. Ces épreuves ont porté sur trois points, à Savoir :

Sur la saturation normale des gaz analysés par la vapeur du sulfure de carbone, dans les conditions des expériences ;

Sur l’analyse eudiométrique du gaz primitif, avant qu'il ait subi aucune espèce de traitement ;

Sur l’action que le protochlorure de cuivre exerce vis-à- vis du gaz primitif.

On isole un certain volume du gaz primitif, on le traite par la potasse humectée d’alcool. Dans le résidu lavé à l’eau et mesuré, on introduit une goutte de sulfure de carbone. Ce volume augmente aussitôt, et il redevient sensiblement égal, dans les mêmes conditions, au volume du gaz primitif avant qu'il ait subi aucun traitement.

En effet, un volume du gaz primitif égal à 74 traité par la potasse et l'alcool s’est réduit à 44 L’addition du sulfure de carbone l’a reporté à 190

Cette expérience est décisive, car elle montre que le gaz primitif renferme une proportion de vapeur de sulfure de car- bone égale à celle qui peut le saturer dans les mêmes condi- tions. Or, le gaz primitif en est nécessairement saturé, d'après les circonstances mêmes de sa préparation. Donc la portion absorbable par la potasse humectée d’alcool représente uni- quement la vapeur du sulfure de carbone.

On arrive au même résultat par une autre méthode fondée sur les analyses eudiométriques comparées du gaz primitif et

64 du même gaz privé de la portion absorbable par la potasse et l'alcool.

En effet, si l’on retranche les résultats de la seconde analyse de ceux de la première, on connaît immédiatement la propor- tion d'oxygène nécessaire pour brûler la portion absorbable par la potasse alcoolique. Or cette proportion correspond exactement au sulfure de carbone. Voici les nombres :

Un volume du gaz primitif égal à 67 a exigé pour brûler un volume d'oxygène égal à 101.

Ces 67 volumes se composent de 2 parties, à savoir, d’une portion absorbable par la potasse et

l'alcool, laquelle s'élève à 2735

et d'une autre portion formée par l’oxyde de

carbone pur, laquelle s’élève à 39,5. Ce volume d'oxyde de carbone s’unit à un vo-

lume d'oxygène égal à 19,5

Donc la portion absorbable par la potasse et l'alcool à exigé pour brûler un volume d’oxy- gène égal à 101 19,5 81,5 Or, le tiers de ce dernier volume est égal à 272

c’est-à-dire sensiblement égal au volume 27,5 de la portion dont il opère la combustion.

C’est précisément le résultat que doit fournir la combustion de la vapeur du sulfure de carbone

Au lieu d'employer les résultats de cette analyse pour éta- blir la composition de la portion gazeuse absorbable par la potasse alcoolique, on peut au contraire s’en servir pour dé- montrer que ce réactif ne change point la nature du gaz qu'il n’absorbe point.

En effet, la présence de la vapeur du sulfure de carbone étant admise comme un fait nécessaire et sa proportion étant déterminée par les premiers essais, on peut dès lors regarder comme connu le volume d'oxygène employé dans sa combus- tion et par suite le volume d'oxygène nécessaire pour brûler le gaz inconnu qui est mélangé avec cette vapeur.

Appliquons ce calcul aux nombres de l’analyse ci-dessus :

4 <s

09

Un volume de vapeur de sulfure de carbone égal à 927 exige pour brüler 4 82,0 d'oxygène. Done le gaz inconnu dont la volume 39 de son-eôté, exige pour brüler | 18 d'oxygène, © 'està-dire sensiblement la moitié de son propre volume.

Ce nombre répond à l'oxyde de carbone et il exclut formel- lement un proiosulfure, CS, lequelexigerait pour brûler deux e. son volume d'oxygène, c'est-à-dire une portion quadruple

e celle que l'expérience indique.

En tel résultat est d'autant plus conan qu'il est fondé uniquement sur l’analÿse du gaz primitif, brûlé avant qu’il ait sühi l’action d'aucun réactif, et il s'accorde avec tous les au- tres pour prouver que la potasse humectée d’aleool ne change en rien la nature du gaz qu’elle n'absorbe point.

Une troisième épreuve peuf être tirée de l'action du pro- tochlorure de cuivre. D’après M. Baudrimont, ce réactif serait sans action sur le protosulfure de carbone. Au contraire, si la composilion du gaz est ceile qui a été signalée-plus haut, ce réactif doit absorber complétement l’ re de carbone pur et annuler par suite la vapeur du sulfure de carbone dont il est saturé. C'est,-en effet, ce que l'expérience a vérifié. Le gaz pri- imitif traité par le protochlorure de Cuivre en solution acide disparaïît-en totalité ou sensiblement. Ce résultat n'aurait évi- demment pas pu être obtenu si le gaz avait été mélangé d'azote ou d'hydrogène.

Je ferai remarquer à ce sujet que, pour purifier un gaz mé- langé d’ oxyde de carbone, il ne suffit point de faire pässer ra- pidement le mélange à travers une dissolution de protochle- rure de cuivre; on ne retient ainsi qu une faible proportion d'oxyde de boue: En effet, celui-ci n’est absorbé en totalité que si on l’agite pendant quelque temps dans une éprouvette avec le réactif, il l’est d'autant plus lentement qu'il est mé-

‘langé avec une pius forte proportion de gaz étrangers.

Après avoir établi la nature du gaz dégagé dans l'expérience précédente, 1l reste à en expliquer la formation. En effet, il peut.sembler étrange que le sulfure de carbone chauffé au rouge fournisse de l'oxyde de carbene. Mais il est facile de

Extrait de l'Institut, Aïe section 41859, 9

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reconnaître que ce gaz provient de la réaction du sulfure de carbone sur les éléments dela pierre ponce et du tube de por- celaine employés dans l'expérience, c’est-à-dire sur lesalcalis, sur les oxydes terreux, sur l’alumine et sur la silice.

Pour en établir l’origine, j'ai pris les précautions suivantes :

° J'ai réduit la capacité intérieure des appareils aux plus faibles dimensions, afin d'éliminer autant que possible l’in- fluence perturbatrice de l'air des apparails. Avec les appareils employés, cette capacité s'élevait seulement à 55 centimètres cubes, dont 5 occupés par le sulfure de carbone liquide.

Avant de faire passer la vapeur du sulfure j'ai dirigé dans le tube de porcelaine chauffé au rouge un courant d'air sec, afin de me metire à l'abri de la présence de l'humidité.

90 J'ai recueilh la totalité des gaz dégagés; leur Vu s'élevait à 280°°, c'est-à-dire à 9 fois environ la faraue in rieure des appareils.

La formation de ces gaz est accompagnée par celle d'une faible proportion de soufre libre.

À la fin de l'expérience, et après refroidissement du tube, j'en ai extrait la pierre ponce : elle était devenue brune ; pro- jetée dans l’eau, elle produit une vive effervescence d’hydro- gène sulfuré. Une addition d’acide chlorhydrique a donné lieu à un nouveau dégagement d'hydrogène sulfuré et l’eau est de- meurée laiteuse, comme il arrive dans la décomposition d’un polysulfure.

Ces faits prouvent que les éléments de la pierre ponce ont concouru à former des sulfures décomposables par l’eau, tels que les sulfures d'aluminium et de silicium, et des sulfures décomposables par les acides, tels que les sulfures alcalins et terreux. Une portion de ces corps semble être à l’état de polysulfure.

La formation de tous ces composés et celle du soufre libre est corrélative de celle de l’oxyde de carbone.

Elle s'accorde d’ailleurs avec les conditions connues de leur préparation; car on sait, d'après les expériences de M. Fremy, que celle-ci peut s'effectuer précisément en faisant réagir le sulfure de carbone sur la silice, sur l’alumine, aussi bien que sur les oxydes alcalins ou terreux.

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2e expérience. J'ai répété l'expérience précédente en opé-- ant de la même manière, à cela près que j'ai remplacé la pierre ponce par la mousse de plat ne.

Le volume gazeux obtenu a été beaucoup plus fable et trouvé égal à 100°° seulement, ce qui s'explique par la suppres- sion de la pierre ponce , substance plus facilement attaquable que la matière du tube de porcelaine. Le volume du gaz recueilli est à peine supérieur au volume de l'air de l’appareil(55°°) aug menté de la vapeur du sulfure de carbone. C'était un mélange d'azote et d'oxygène, provenant des appareils, avec une pro- portion sensible d'acide carbonique et d'oxyde de carbone, provenant de la réaction du sulfure de carbone sur les parois intérieures du tube de porcelaine. Le tout était saturé de va- peur de sulfure de carbone.

L'analyse de ce nouveau gaz a été effectuée par les mêmes procédés que dans la expérience et elle a conduit précisé- ment à la même conclusion.

Séance du 12 novembre 1859.

PALÉONTOLOGIE. M. Delesse a présenté dans cette séance, de la part de sir Charles Lyell, le travail suivant, intitulé : De l'apparition de L'Homme sur la terre.

« Aucun sujet n'a plus vivement excité dans ces derniers temps la curiosité et l’attention générale des géologues et du public que la question de l'antiquité de la race humaine. Avons-nous, oui ou non, des preuves suffisantes pour admet- tre que des débris humains aient été, dès l’origine, mêlés à ceux de certains Mammifères éteints, dans les cavernes à os- sements ou dans ces dépôts superficiels communément nom- més drift ou diluvium ?

» Depuis un quart de siècle, la rencontre fortuite en diffé- rents points de l'Europe d os d'Hommes ou d'ouvrages de ses mains, associés dans les brèches et les stalactites des cavernes à des restes d'Hyènes, d Ours, d'Eléphants ou de Rhinocéros, appartenant à des espèces toutes disparues aujourd’hui, ont donné lieu de penser que la date de l'apparition de PHomme devait être reportée à une époque beaucoup plus reculée qu’on ne l’avait cru jusqu'ici. D'autre part, une extrême défiance.

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s'empara naturellement des esprits sérieux, et l'on n'admit guère la validité des preuves que l'on mettait en avant. Toutes ces cavernes avaient bien pu être habitées à différentes épo- ques ; l'Homme y avait trouvé non-seulement une demeure, mais même un lieu de sépulture favorable; d’autres excava- tions avaient servi de chenal aux eaux débordées de certaines rivières, en sorte que les restes des êtres vivants qui avaient peuplé la contrée à différents âges, avaient pu se trouver en- suite mélangés par le courant et confondus dans le même dé- pôt. Il est vrai que les faits dernièrement mis en lumière pen- dant l'exploration systématique de la caverne de Brixham, tels que les rapporte M. Falconner, doivent, je pense, préparer à un doute motivé, au moins en ce qui regarde cette caverne; mais il n’en est pas moins constant que l'évi- dence de l'antiquité de l'Homme resto parfaitement acquise, la déduction légitime de tous ces faits bien observés nous con- duisant naturellement à cette hypothèse : que de grands changements doivent avoir modifié le niveau relatif de l’mcli- naison des vallées et même, toute la géographie physique des régions sont situées ces cavernes; or, ces changements à eux seuls impliquent une antiquité reculée à cause de la présence de fossiles humains et semblent démontrer que l'Homme a été au moins le contemporain du Mammouth de Sibérie.

» Mais dans le cours de ces quinze dernières années, UnRC autre série de preuves a surgi en France en faveur de l'anti- quité de l'Homme. J’en ai moi-même examiné deux pendant cette saison, et c’est sur elles que je vais maintenant appeler quelques instants l'attention.

» D'abord, dèsl’année 1844,M. Aymard, paléontologisle dis- timgué,annonça la découverte, dans les régions volcaniques de la France centrale, des débris de deux squelettes humains (crâne, dents, os) enfouis dans une brèche volcanique et trouvés sur le mont Denise, près du Puy-en-Velay, brèche antérieure en date à l’une des dernières éruptions de ce volcan éteint. Sur le versant opposé de la même montagne, on avait éga- lement rencontré dans des couches de tufles restes d’un grand aombre de Mammifères, la plupart appartenant à des espèces

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éteintes et qu'on croyait avec raison, selon moi, être de même âge. L’authenticité de ces fossiles humains fut, dès l’origine, contestée par quelques géologues, mais admise par la majo- rité de ceux qui visitèrent le Puy et qui virent de leurs propres yeux les pièces originales maintenant déposées dans le musée de la ville. En outre, M. Pictet, si avantageusement connu par son excellent ouvrage de paléontologie. proclama, après une visite sur les lieux, son entière adhésion à l’opinion déjà émise par M. Aymard. Mon ami M. P.Scrope, dansla deuxième édition de ses Volcans de la France centrale, a également adopté les mêmes conclusions ; mais je dois dire qu'après m'avoir accom- pagné cette année au Puy, il a cru devoir modifier ses vues. Voici, en effet, le résultat de notre examen commun, qui, sije ne me trompe, coïncide essentiellement avec celui auquel sont arrivés deux autres savants, MM. Hébert et LEar- tet, quisont aussi allés cette année même étudicr ce gisement.

» Nous ne sommes nullement disposés à soutenir que le spécimen existant dans le muséum du Puy (lequel ne fut mal- heureusement jamais vu en place par aucun observateur adonné aux sciences) soit fabriqué. Au contraire, nous incli- nons à penser que ces débris fossiles, ainsi que d’autres échan- üillons provenant du même gisement, furent enfermés dans la gangue dans laquelle on les trouve par l'effet de causes tou- tes naturelles. Mais la roche dans laquelle on les a rencontrés se compose de deux parties : l’une est compacte et en général finement lamelleuse , on n'y a jamais vu d'os humains ; l’autre partie sont les fossiles est une pierre légère bien plus po- reuse, non lamellée et que nous n'avons pu rapporter à au- cune roche semblable sur le mont Denise, quoique nous ayons fait pratiquer, M. Hébert et moi, plusieurs excavations dans le prétendu gîte des fossiles. Aussi M. Hébert m'’a-t-il fait remar- quer avec raison que cette pierre bien plus poreuse, qui se rattache par sa couleur et par sa composition minérale sinon par sa structure à différentes roches de vieilles brèches du mont Denise, pourrait bien avoir pour origine ces roches mênies broyées, détachées, puis déposées de nouveau, ou, comme disent les Français, remauiées, ce qui leur assignerait une date bien plus récente

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» Cest à une hypothèse qui mérite bien considération, aussi je pense que nous sommes pour le présent si ignoranis des circonstances précises et de la place réelle dans lesquelles ces débris célèbres furent trouvés, que le mieux est de ne pas m'attacher ici à discuter leur mode probable de dépôt, mais de déclarer simplement qu'à mon avis, ils ne démontrent pas d’une façon absolue que l'Homme ait été témoin des dernières éruptions de la France centrale. Le crâne, au jugement des anatomistes les plus compétents qui l'ont vu jusqu'ici, ne pa- rait pas différer sensiblement des Européens modernes ou du type caucasique ; les os sont dans un état moins avancé de pé- trification que ceux de l’£/ephas meridionalis et des autres Quadrupèdes trouvés dans différentes brèches du mont De- nise, et qu'on peut rapporter au moinso à l’âgo des dernières éruptions volcaniques du pays.

» Mais si je n’ai pu trouver dans les fossiles du Puy pleine évidence en faveur de Fantique origine qu'on prétend leur as- signer, je suis tout prût à confirmer les idées qu’à récemment exposées devant la Société royale de Londres M. Prestwich, au sujet de haches ou d'instruments en silex, qui sont mêlés à des cailloux non remaniés dans le nord de la France, et avec des 05 d’Eléphants à Abbeville et à Amiens. C’esten 1849 qu'ils furent pour la première fois signalés à Abbeville, avec l'indication précise de leur position géologique, par M. Boucher de Perthes, dans ses « Antiquités celtiques. » Ceux d'Amiens n’ont été dt- crits que plus tard, en 1855, par feu le D' Rigollot. Pour la relation précise des faits, je ne puis que renvoyer au mémoire de M. Prestwich. J’ajouterai seulement que j'ai pu moi-même me procurer un grand nombre de ces instruments en silex dans une courte visite que j'ai faite à Amiens et à Abbeville. Deux de ces caïlloux taillés ont même été trouvés perdantmon séjour, dans les carrières de Saint-Acheul, près Amiens, l'un à la profondeur de 3,59, l’autre de au dessous de la sur- face du sol. M. Georzes Pouchet, de Rouen, auteur d'un ou- vrage sur les Races humaines, et qui depuis a visité ce gise- ment, a lui-même extrait de ses mains un de ces instruments, comme MM. Prestwich et Flower Pavaient fait avant lui. Les strates de cailloux gisent ces instruments grossiers reposent

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immédiatement sur la craie et appartiennent à la période qui a suivi la formation des terrains pliocènes, toutes les coquilles fluviatiles ou terrestres qui les accompagnent étant d'espèces encore vivantes. Pendant les dix dernières années, plus d’un millier de ces instruments ont été trouvés dans la vallée de la Somme, sur un parcours de 24 kilomètres. J'en conclus qu'une tribu de sauvages, ignorant l’emploi du fer, a longtemps habité cette région, et cela me rappelle une vaste butte indienne que j'ai vue dans l'ile Saint-Simon, couvrant 4 hectares de terre, haute de 1",60 en moyenne et composée surtout de coquilles d'huîtres qu’on avait jetées là, avec des pointes de flèches, des haches de pierre et des poteries indiennes. Si la rivière voi- sine, l'Alatamaha, ou la mer, qui n’est pas loin, envahissait, enlevait et stratifiait de nouveau les débris de cette butte, on aurait une accumulation d'instruments humains très analogues à celle que nous étudions, et peut-être dépourvue comme elle d’ossements humains.

» Quoique les coquilles qui les accompagnent soient d’es- pèces encore vivantes, je pense que l'antiquité des instruments de silex d’Abbeville et d'Amiens est véritablement très grande, si on la compare au temps qu'embrasse l’histoire ou même la tradition. Je considère ces dépôts de cailloux comme étant d'origine fluviatile, mais je ne puis rien découvrir dans leur constitution qui indique les effets d’un cataclysme, rien qu’on ne puisse rapporter à des imondations de rivières, comme celles dont nous avons été témoins en Ecosse pendant ce der- nier demi-siècle.

» Combien de temps a-t-il fallu pour voir la craie mettre à nu tous les silex brisés qui forment ces amas de cailloux à dif- férentes hauteurs, quelquefois à 30 mètres au-dessus du ni- veau de la Somme; pour laisser déposer ce sable léger avec les coquilles, terrestres et aquatiques qu'on y rencontre, et aussi pour l'érosion que la masse du dépôt a subie à son tour, si bien que ce qui en reste se termine quelquefois à pic, berges antiques qu'est encore venu recouvrir un dépôt plusnou- veau et non straüfié ? Pour expliquer ces changements, j'ad- mettrais volontiers’ des oscillations considérables dans le ni- veau du sol de cette partie de la France, mouvements lents

12 ï d'élévation et d’abaissement ayant dérangé mais non boule- versé entièrement le cours des anciennes rivières. Enfin la disparition de l'Eléphant, du Rhinoctros et des autres genres de Quadrupèdes, maintenant étrangers à l'Europe, implique selon toute vraisemblance, qu'un très grand laps d'âge a séparer l'époque ces instruments fossiles furent façonnés du temps les Romains envahirent la Gaule.

» Parmi les questions théoriques qui ont été éclairées par les progrès récents de la géologie et de l’histoire naturelle, il n'y en a pas de plus importante et en même temps de plus obseure que celle de lurigine des espèces. M. Ch. Darwin va publier prochainement sur ce sujet délicat un ouvrage qui est le résul- tat de vingt années d'observations et d'expériences en zoologie, on botanique et en géologie. Il arrive à cette conclusion que les forces de la nature qui produisent les races et les variétés permanentes dans les animaux et dans les plantes sont en même temps celles qui, dans des périodes beaucoup plus lon- ques produisent les espèces, et enfin dans des séries d’âges incomparablement plus longues donnent lieu aux différences sur lesquelles sont basées les genr s. Il me paraît être parvenu par ses recherches et par ses raisonnements à répandre de la lumière sur toute une classe de phénomènes qui sont intime menti liés aux rapports mutuels, à la distribution géographique et à la sucéession géologique | des êtres organisés ; Ci, Jusqu'à présent, aucune hypothèse n'avait tenté d'en donner une espli- cation.

» Je signalerai aussi une communication que j'ai reçue. de M. lo D' Dawson, de Montréal, qui confirme la découverte que nous avions annoncée d’une coquille terrestre du-genre Pupt dansle terrain houiller de la Nouvelle-Écosse. Si l'on considère qu'il existe entre le terrain tertiaire ct carbomifère une très grande série de couches qui sont dépourvues de Mollusques terrestres, cette découverte met bien en relief la grande im- perfection de nos connaissances géologiques. Il m'a loujours paru que les partisans du développement progressif des êtres ont tenu trop peu de compte de ceîte imperfeelion, et par suite il deviendra nécessaire de modiier ou d'abandonner une grande partie des idées qu'ils ont admises sur la première apparition des animaux et en particulier des animaux terrestres.

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» Quoi qu'il en soit, je suis loin de prétendre que cette doc- trme du développement progressif ne puisse renfermer le germe d'une théorie exacte. Cette question pourra être éclairée lorsqu'on aura bien déterminé l’âge du grès blanc d’Elgin ; car cette roche, qui jusqu’à présent avait été rapportée au terrain devonien ou au vieux grès rouge, contient certainement divers Reptiles dont l’organisation est tellement élevée que plusieurs géologues ont émis des doutes sur sa grande ancienneté. #

Seance du 3 décembre 1859.

GÉOMÉTRIE. M. Abel Transon communique les deux théorèmes suivants :

10 Lorsque deux surfaces se touchent suivant une courbe , si cette courbe jouit d'une propriété de maximum ou de mi- nimum sur la première des deux surfaces, elle jouit de la mème propriélé sur la seconde.

2 5h est le rayon de courbure d'une courbe tracée sur une surface développable, « l’angle de son plan osculatleur avec le plan tangent, r le rayon de courbure de la transformée de celle même courbe lorsqu'on développe la surface sur un plan ; on-a entre ces quantités la relation p = r cos a.

D’après cela, si l’on veut déterminer la courbe qui, tracée sur une surface quelconque renferme sous le plus petit péri- mètre l’aire la plus grande, on imaginera une surface déve- loppable touchant la surface donnée le long de la courbe cher- chée. En vertu du premier théorème, cette courbe considérée comme appartenant à la surface auxiliaire aura nécessairement pour transformée plane un are de cercle.

Puis le second théorème fera connaître une propriété carac- téristique de la courbe demandée ; car puisque r est constant on on concluera que son rayon de première courbure est pro- portionnel au cosinus de l’angle de son plan osculateur avec le plan tangent à la surface, ou bien encore que si on cons- truit pour chaque point de la courbe la sphère qui contenant son cercle osculateur a son centre sur le plan tangent à lasur- face proposée, cette sphère a un rayon constant.

Cette propriété remarquable de la courbe en question est

Extrait de l’Institut, 1e section, 4859, 10

Le 2 A i +

connue (Delaunay, Journil de math. de Liouville), mais on ne l'avait démontrée qu'à l'aide du caloul des variations.

Séance du 17 décembre 4859.

CHIMIE. M. Berthelot annonec à la Société qu'il a re- connu l'existence d’un nouveau gaz, le quadricarbure d'hy- drogène, représenté par la formule C4 H°. Ce gaz se produit dans la décomposition de l'alcool et de l’éther sous l'influence d'une température rouge. Ses propriétés sont semblables pour la. plupart à celle du gaz oléfiant. Elles seront décrites ulié- rieurement avec plus de détails, ainsi que la préparation et la purificationdu gaz lui-même et des composés auxqueis il donue naissance.

Séance du 24 décembre 1859.

GéoLoGie. N uvclle-Zilande. M. Delesse donne commu- nicalion d'une lettre qu'il a reçue de M. Boué qui est relative à la géologie des îles de la Nouvelle-Zélande. M. Hochstetter, géologue attaché à l'expédition de la frégate autrichienne No- rara, a résidé pendant plus d’une année dans ce pays, sur la géologie duquel on n'avait jusqu’à présent que très peu de no- tions dues à M. Dieffenbach. Il y a trouvé parmi les substances métaltiques du cuivre, de l'or et de l’osnuure d'ridium. Les schistes cristallins sont très développés dans la Nouvelle-Zé- lande et occupent un énorme espace; 1ls sont recouverts par des terrains pal‘o-secondaires, puis par des lerrains secon- daires plus récents, peut-être par le trias et par le muschelkalk, enfin par des terrains tertiaires. Les roches volcaniques, le trachyte et les tufs ont également été observés. M. Hochstetter rapporte de son voyage plusieurs espèces des oiseaux gigan- tesques nommés Dinornis qui sont très bien conservés et qui atteignent jusqu'à 3 mètres de hauteur (1).

Zoo1ogie, Observation d'un ixod2 particulier de parasi- tisme, offert par un Mollusque gastéropode, du genre Styli-

(1) On trouve dans le journal l’Institut des détails plus circonstaaciés que ceux que mentionne la lettre de M. Boué sur les recherches de M. Hoch- stelier. Nous y renvoyons le lecteur,

15 fer. Cette observation est exposée avec détail dans la note suivante, présentée par M. Hupé. :

« Ayant eu l’occasion, tout récemment, d'examiner un Échi- noderme du genre Cidaris le Cidaris imperialis, Lamarck, nous remarquâmes que parmi les épines ou baguettes dont le corps de ces espèces est ordinairement armé, il y en avait deux qui présentaient un développement tout à fait anormal, et dif- féraient beaucoup par leur forme et leur aspect de toutes les autres ; ces dernières, en effet, dans l'état normal, sont longues, cylindriques, un peu acuminées vers leur extrémité libre et couvertes de stries longitudinales, plus ou moins rugueuses, tandis que les deux épines en question ont une forme globu- leuse, irrégul'èrement sphéroïdale, ressemblant jusqu’à un cer- {ain point à des noisettes, et rappelant aussi, par leur aspect, ces galles produites par les Cynippes, sur les feuilles de certains végétaux.

» Ayant alors examiné avec soin la surface extérieure de ces épines, ncus vimes qu’elle était plus lisse que celle des mêmes parties à l’état normal, puis nous apercümes à leur base deux petites fentes verticales en forme de boutonnières, placées de chaque côté, sur les faces opposées. La présence de ces fentes, dont on ne voit aucune trace sur les épines ordinaires, jointe à la forme si singulière de ces deux baguettes, nous fit penser qu'il y avait quelque chose de particulier, quelque mystère à dévoiler. Nous fimes alors une section de l’une d'elles, à l’aide d’un instrument tranchant et d’un petit coup de marteau. Quel ne fut pas notre étonnement, de trouver logées dans une cavité intérieure deux petites coquilles que nous reconnûmes aussitôt appartenir au genre Séylifer.

» La cavité qui renfermait ainsi ces deux coquilles a environ un centimètre. Ses parois sont lisses, et on aperçoit vers la base les deux ouvertures en boutonnières que nous avons dit exister à l’extérieur; seulement, leur pourtour est lisse de ce côté in- terne, tandis que du côté opposé il est comme rugueux et parti- cipe de l’ornementation extérieure.

» Encouragé par ce résultat, nous résolümes de tenter une nouvelle épreuve sur la deuxième épine que nous avions à notre disposition, nous répétâmes donc la petite opération et

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nous trouväames le même fait, absolument dans les mêmes con- ditions, c’est-à-dire, deux individus de la même espèce, ren- fermés également dans la cavité intérieure de la baguette ; nous y trouvämes même quelque chose de plus significatif, car avec eux existaient un certain nombre de petites coquilles em- bryonnaires à peine formées. Nous avions sous les yeux toute une génération nouvelle de ces petits Mollusques. Cette obser- vation, qui nous parait entièrement nouvelle, nous permet de tirer les conséquences suivantes : que les Stylifers vivaient en parasites dans l’intérieur de ces épines du Ciduris impe- rialis ; 2 qu'ils étaient arrivés à leur état adulte ; qu'ils paraissent dioïques c’est-à-dire à sexes séparés sur des indi- vidus distincts; enfin qu'ils sont très-probablement vivi- parcs.

» Ce fait d’une espèce du genre Stylifer, vivant en parasite sur un Échinoderme, est d'ailleurs parfaitement conforme à ce que l'on connait déjà sur les mœurs et les habitudes de ces RE tits Gastéropodes. On sait, en effet, que plusieurs espèces du même genre ont été trouvées soit sur des Oursins, soit sur des Astéries ou Étoiles de mer; seulement chez ces dernières, c'est dans la cavité buccale elle-même, ou dans l'épaisseur des mem- branes qui l’enveloppent, qu’elles ont été rencontrées ; il y a donc une. différence très-notable, et cette condition partieu- lière dans leur mode d’existence soulève plus d’une difficulté pour bien concevoir et expliquer de quelle manière le phéno- mène se produit. Et d'abord comment ces animaux peuvent-ils ainsi pénétrer, ou se trouver enfermés dans l'intérieur des éines ? Puis, par quels moyens peuvent-ils y continuer leur [ xistence ?

» Pour répondre à la première question, il est nécessaire de rappeler en quelques mots le mode de développement de ces épines et surtout la forme qu'elles affectent dans certaines es- pèces et notamment dans les Cidaris annulifera, L. Cidaris tubaria, L. et enfin le Gontocidaris geranioides, Agassiz. (C1- daris geranioïides, L.), ainsi que dans quelques espèces que l’on ne trouve plus qu’à l’état fossile.

» Le développement des épines chez les Cidaris parait avoir lieu par l'addition de couches successives de matière calcaire

Al

se recouvrant les unes les autres, de telle sorte qu’en faisanbune section transversale de ces épines, on voit que les couches for- ment des zônes concentriques plus ou mo’ns épaisses, se distin- euant souvent les unes des autres par une coloration un peu différente.

» Ce premier fait étant admis, nous remarquerons que, dans les diverses espèces qu? nous venons de citer, on voit souvent un certain nombre de baguettes terminées à leur extrémité, soit par une partie plane, soit même par une sorte de cupule, plus ou moins prononcée. On peut donc concevoir la possibilité que certains animaux s’établissent dans ces dépressions ; on voit en effet assez souvent des Huïitres de prtite dimension, ainsi fixées sur ces parties. Or, lorsque ces Huitres ou autres espèces se sont établies avant le développement complet des épines, on remarque que celies-ci ont une tendance à les envelopper par par l'addition de couches successives, de telle sorte que le pa- rasite ne tarde pas à être débordé, et que son extension se trouve limitée et, pour ainsi dire, arrêtée ; nous avons surtout constaté :e fait sur une espèce fossile, le Ciduris cyathifera, Agassiz, dont on trouve les épines dans les terrains crétacés supérieurs (sénonien), et, de même que pour le Cidaris imperialis qui nous occupe plus particulièrement ici, nous avons vu que la présence d’une Huitre, ainsi fixée à l'extrémité des baguettes, détermine une modification notable dans l’ornementation de leur surface, car au lieu de continuer à se couvrir de saillies ct d’aspérités, comme cela se voit dans leur partie inférieure, elles deviennent presque lisses, ou du moins ne portent plus que des stries longitudinales, maïs sans aspérités.

» Enfin, le Cidaris clavigera, Kœnig., du même étage géologique, vient encore nous fournir une particularité, la- quelle peut, jusqu'à un certain point, nous venir en aide dans l'explication du phénomène que nous cherchons ; chez ce Ci- daris, en effet, lorsque les épines sont encore peu dévelop- pées , elles présentent également une capsule à leur extré- mité, mais à mesure qu'elles s’accroissent elles se comblent pour ainsi dire vers cette partie, et deviennent tout à fait ar- rondies.

»De ious ces faits, il nous paraît résulter que les Mollus-

18 ques dont il est ici question ont s'établir, alors qu'ils étaient encore jeunes, dans une dépression de l'extrémité de l'épine du Cidaris, puisque cette dernière vontinuant à se dé- veloppor par couches successives et superposées a peu à peu fini par onvelopper ces parasites, lesquels grossissaient et se développaient pour ainsi dire parallèlement.

» Nous avons dit que la présence des Stylifers dans les épines du Cidaris soulevait une autre difficulté relative à , l'explication des moyens à l'aide desquels ils pouvaient vivre dans ces conditions toutes particulières. C'est ici le lieu de rappeler les deux petites ouvertures en forme de boutonnières dont nous avons constaté la présence à la base de chaque épine; on ne peut douter, en effet, qu’elles ne fussent destinées à assurer l'existence de ces potits Ôtres en pormettant, soit l'entrée de l’eau servant à la respiration, soit l’accès des ma- tières alimentaires, qui, dans ce cas, doivent consister on ani- malcules d’un volume peu considérable, soit enfin l'expulsion au dehors des matières excrémentitielles, ainsi que des pro- duits de la génération ; seulement, ‘tout.cela admis, il reste à expliquer comment ces ouvertures si nécessaires sont établies. Le sont-elles par les änimaux eux-mêmes? et, dans ce cas, quels sont les organes ou les instruments qui concourent à leur exécution ? Sont-elles le résultat d’un travail actif de la part de l’animal ou bien au contraire n’y concourt-il que d’une manière passive ?

» Rien dans l’organisation générale des Mollusques ne nous autorise à penser que c'est par une action directe et active que le Stylifer fait ainsi deux ouvertures aussi régulières, si ce n’est peut-être à l’aide de l'appareil lingual. On sait en effet que certains Mollusques gastéropodes pratiquent des trous dans des corps assez durs, tels que des coquilles, par ce moyen. En est- il de même pour celui quinous occupe en ee moment ? C’est ce que le défaut de détails sur l’organisation de l'animal du Sty- hfer ne nous permet pas de décider. Pour nous, en présence de ces ouvertures d’une forme si différente de celles auxquelles nous faisions allusion ci-dessus, nous avouons pencher pour la négative, et nous croyons plus volontiers qu’elles sont bien le fait de l'animal, mais qu'il ne concourt à leur formation que

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l'une manière passive. Ainsi de méme que le fait seul de la présence des Jeunes Mollusques à l'extrémité d’une épine est l'occasion de la formation d’une cavité propre à les renfermer, par suite d’un développement anormal de cette épine, de même, nous croyons que la présence de quelque partie de l'animal vers le lieu se formera l’ouverture, servira de détermination, ou plutôt sera la cause occasionnelle de celle-ci. Il resterait main- tenant à dire quelle est cette partie ou plutôt quel est l’organe qui joue ce rôle passif : Est-ce le pied? Il y aurait quel- que motif de le supposer, car on sait que le pied des Styli- fers est pourvu à sa partie antérieure d'une languette assez prolongée. Ou bien encore serait-ce quelque appendice du mar- teau, lequel formant une sorte de prolongement, serait destiné à mettre l'organe respiratoire de l'animal en communication plus directe avec le milieu ambiant ? Ici, cependant, l’analogie nons ferait défaut, car les Mollusques qui possèdent ainsi ces gout- tières ou ces tubes respiratoires ont sur leurs coquilles des in- dices de ces organes, ils s’y traduisent ordinairement soit par des échancrures, soit par un canal. Nous le répétons de nou- veau, le peu quenous connaissons de l’organisation des Stylifers ne nous permet pas d'aller au delà dans l'interprétation de ces faits aussi étranges que nouveaux.

» L'observation que nous venons de faire connaître nous paraît avoir un certain intérêt, d'abord au point de vue de l'organisation générale des Mollusques, puis à celui de leurs mœurs et de leurs habitudes ; mais il en est encore un autre qui ne manque pas d'importance, c’est qu'elle peut venir en aide dans la détermination des corps vivants ou fossiles qui, en devenant ainsi l'habitation parasitique de certains ani- maux, prennent une apparence et des caractères qui les font souvent méconnaître ; il n’est pas rare en effet de trouver des épines de Cidaris, à l'état fossile, dont les formes plus ou moins bizarres ne se rapportent que très-imparfaitement à celles des épines ordinaires ; peut-être sont-elles le résultat de modifications analogues.

» Après avoir fait connaître les particularités de l'habitat de nos Stylfers, 1l nous reste à les déterminer spécifiquement.

» Le genre Stylifer ne renferme, jusqu’à présent, qu’un pe-

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tit nombre d'espèces; c’est à peine si l'on en compte quatre” décrites ou figurées par les différents auteurs ; parmi celles-cr, il enest une établie par M. Petit de la Saussaye, dans le Jour- nal de Conchyliologie, sous le nom de S. Mittrei, à laquelle nous avions d’abord songé à rapporter notre espèce, tellement elle en est voisine; mais un examen plus approfondi nous a bientôt fait voir qu'il existe entre elles des différences assez notables pour légitimer l'établissement d’une nouvelle espèce.

» Comme le Cidaris sur lequel vivait uotre Stylifer fait partie de la belle collection de feu M. d’Orbigny, acquise par l'Etat pour le Muséum d'histoire naturelle de Paris, nous nous fai- sons un devoir et un plaisir de la dédier à ce savant dont la science regrette la perte, et nous le désignerons par le nom de Stytifer Orbignyanus. »

Paris. Tvp. Cosson et Comp.. rue du Four-Saint-Germain, 43.

SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE DE PARIS.

ANNÉE 1860.

EXTRAIT DE L'INSTITUT,

JOURNAL UNIVERSEL DES SCIENCES ÊT DES SOCIÉTÉS SAVANTES EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER.

te Seclion.—Sciences mathématiques, physiques et naturelles,

Rue du Marché-St-Honoré, 7, à Paris.

SOCIÉTE

PHILOMATHIQUE

DE PARIS.

EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES

PENDANT L'ANNÉE 4860.

RE DE

PARIS, IMPRIMERIE DE COSSON ET COMP.,

RUE DU FOUR-SAINT-GERMAIN, 4%,

4860.

SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE

DE PARIS.

SÉANCES DE 1860.

Séance du 11 février 1860.

PHYSIQUE MATHÉMATIQUE.—M. J. N. Haton dela Goupillière a lu dans cette séance un mémoire sur les théories de la cha- leur et du potentiel. En voici analyse :

« Dans ce mémoire qui touche à la fois à la physique ma- thématique et à la mécanique, je me propose, dit l’auteur, l’é- tude générale de l’équilibre de température dans un plan et l'application de cette théorie à celles du potentiel cylindrique et des polynomes isothermes. Je me bornerai ici à en esquisser les principaux résultats.

» Si l’on considère la température 6 d’un point du plan, et

PO je sa variation PE tout autour de ce point, cette variation s’an- $

nule pour une certaine direction appelée isotherme; elle ac- quiert, suivant la perpendiculaire, son maximum que j’ap- pelle vitesse thermique, et dans l'intervalle elle est représentée par la projection de cette vitesse. Si l’on suit de proche en proche la direction isotherme, on décrit une ligne, et on ob- tient de même une infinité de courbes analogues capables de conserver une température fixe, ce qui ne saurait avoir lieu pour une série de lignes tracées au hasard. Si on prolonge de Exlrail de l'Institut, 1"° section, 1260. A

Ü

même la direction de la vitesse on obtient une famille de filets de chaleur. Celle-ci est également isotherme et forme avec la précédente un réseau orthogonal.

» En étudiant de même la manière dont varient en chaque point les deux éléments : grandeur et direction de la vitesse thermique, on reconnait que da variation de la vitesse atteint son maximum dans un sens celle de la direction est nulle et réciproquement. Ces deux directions sont perpendiculaires. En les prolongeant, on forme un réseau orthogonal dérivé du précédent. Je fais voir qu'il est lui-même isotherme. Sur cha- que ligne de l’une de ses familles la vitesse garde la même va- leur, et pour l’autre la même direction. Ces dernières cour- bes traversent le réseau proposé aux points dont les tangentes sont parallèles à une direction fixe quelconque. L'une d'elles, par exemple, forme le lieu de tous les pointsmaximum et mi- nimum.

» Le réseau dérivé étant lui-même isotherme, admet aussi un dérivé, et ainsi de suite indéfiniment. De une filiation illimitée de réseaux isothermes. Par d’autres points de vue que je ne détaillerai pas ici, je rattache de même à un réseau pro- posé dix filiations analogues. Puis je les ramène à cinq dis- tinctes par autant de théorèmes spéciaux qui les font rentrer l’une dans l’autre. L’une d’elles mérite surtout de fixer l’atten- tion. Je l'appelle filiation principale. Pour l'obtenir, il faut prendre indéfiniment la vitesse de la vitesse. Les lignes sur lesquelles la vitessereste constante formentune des familles du réseau de cette filiation. La famille orthogonale se compose des lignes sur lesquelles reste constante lamoyenne des directions de cette vitesse et de toutes les précédentes.

» Jusqu'ici nous n'avons considéré que la variation du pre- à do ; du mier ordre Te On obtient des propriétés analogues pour la Œs

n

variation d'ordre quelconque Celle-ci s’annule en chaque

52° point pour * directions également espacées qui forment une étoile régulière. Elle atteint son maximum suivant ses bissec-

trices. Ce maximum est précisément la vitesse 7, et sa di-

ñl

rection la moyenne dont il vient d’être question. Enfin elle est représentée pour les directions intermédiaires par la for- mule très simple

Vn SÛR No.

Ainsi la filation principale jouit de cette propriété que la va- riation maximum d'ordre # conserve sur l’une de ses familles une valeur et sur l’autre une direction constante.

» Le paramètre des filets de chaleur étant lui-même iso- therme, on peut lui appliquer tout ce qui précède. Je fais voir que partout la vitesse de tous les ordres est la même que celle de la température, et qu£ leurs directions sont réciproques, la variation nulle de l’un correspondant à la variation maximum de l’autre. La filiation principale est donc la même pour les deux familles et appartient à leur réseau.

» Si, au lieu de réunir par une courbe les points la va- riation garde la même valeur ou la même direction, nous sui- vons de proche en proche ces directions que j'appelle pour abréger nulles et maxima, nous formerons des systèmes tout à fait différents que j'appelle enveloppes nulles et maxima. Leur équation différentielle est du premier ordre, mais du de- gré quelconque ». J'arrive à y séparer les variables et à l’in- tégrer dans toute sa généralité.

» Je considère encore des lignes appelées trajectoires le long desquelles reste constante la variation tangentielle de

dates à température qu'il ne faut pas confondre avec la vitesse en

chaque point. Il en existe une infinité de séries. Chacune de ces lignes présente un rebroussement dont la direction est celle du filet de chaleur. Le lieu de ces rebroussements est pour chaque série une ligne du réseau dérivé. Partout ailleurs qu'aux rebroussements passent deux lignes de chaque série sous un certain angle. Le lieu des points pour lesquels cet angle se conserve est encore une ligne du réseau dérivé. J’ar- rivé à rectifier toutes les trajectoires d’après cette loi que sur chacune d’elles la température varie proportionnellement à l'arc.

» Je généralise encore en considérant, au lieu de la variation

re du premier ordre, celle d’un ordre quelconque. Mais je sup- primerai iei ces développements.

» Je signalerai maintenant des particularités curieuses que présentent tous les réseauxisothermes. On y trouve des points ou nœuds la vitesse s’annule. L'isotherme qui y passe et qui semble au premier abord devoir être indéterminée présente alors deux branches au lieu d’une. Elles sont toujours rectan- gulaires. Le filet de chaleur se trouve dansle même cas, et ses tangentes sont les bissectrices des précédentes. Dans des points plus compliqués, les n premières vitesses s’annulent à la fois. L'isotherme présente » branches toujours disposées en étoile régulière, et le filet de chaleur forme une étoile pareille, bis- sectrice de la précédente.

» Si l’on considère dans le réseau les points de courbure nulle, leur ensemble dessine deux lignes qui contiennent tous les points d’inflexion de chacune des deux familles. Tout le long de ces lignes, le réseau proposé et le réseau dérivé sont tangents. Elles jouissent encore de la propriété de traverser toutes les lignes du réseau aux points la vitesse atteint sur chacune d’elles son maximum et son minimum. Ces deux li- gnes passent à tous les nœuds du système et y présentent elles- mêmes des nœuds rectangulaires tangents à ceux du réseau. Si on considère de même les points de courbure maximum, on forme une ligne unique pour les deux familles du réseau. Elle passe encore à tous les nœuds et y présente elle-même des étoiles à quatre branches ou de 45° tangentes aux doubles nœuds du réseau.

» On sait que dans un système et une loi quelconque d’at- traction, il existe toujours une fonction des coordonnées ap- pelée potentiel, dont les trois dérivées donnent en chaque point les composantes de la force. Dans le cas de la gravita- tion, qui est la loi de l'astronomie, de l'électricité et du ma- gnétisme, le potentiel est toujours une fonction isotherme. Si, de plus, le système attirant se réduit à des droites parallèles, on obtient le potentiel cylindrique capable d'exprimer la tem- pérature d’un plan perpendiculaire. Il rentre par conséquent dans la théorie précédente.

»Les lignes isothermes sontalorsles trajectoires orthogonales

o

«es forces ou les lignes de niveau. Les filets de chalear sont les enveloppes des forces. On obtient une valeur constante le long de chaque ligne de niveau en formant en tous ses points le produit des distances aux centres d’action , respectivement élévées à des puissances marquées par les masses de ces cen- tres, considérées comme posilives ou négatives, suivant qu’ils sont répulsifs ou attractifs. On obtient aussi une valeur con- stante le long des enveloppes en faisant la somme des angles de ces distances avec une direction fixe quelconque multipliés respectivement par les masses. Si le système est homogène, les constantes arbitraires sont simplement le produit des distances et leur direction moyenne pour les deux familles du réseau.

» Les nœuds du système sont les positions d'équilibre les {orces se détruisent mutuellement. Les courbes de niveau et les enveloppes y passent encore par des nœuds rectangulaires ou plus généralement par des étoiles régulières bissectrices l'une de l’autre. Pour un potentiel de x centres on a toujours #—f nœuds ou plutôt »—1 branches parasites, le nombre des nœuds diminuant s’il se trouve parmi eux des étoiles.

» Le réseau dérivé est formé de lignes que j'appelle isodyna- miques et isocliniques, le long desquelles la force garde une intensité et une direction constantes. Nous avons vu qu’il est orthogonal et même isotherme. Je fais voir de plus qu'il ap- partient lui-même à un potentiel que j'appelle de première espèce, parce qu'il se rapporte à un type constant. Il a pour centres attractifs les anciens centres, tous réduits à une même masse qu'on peut prendre pour unité. Les centres répulsifs sont les anciens nœuds doués de masses aussi égales à l'unité, ou au nombre de branches parasites, s’il y a des étoiles. La filiation dérivée sera donc formée toute entière de potentiels de première espèce. On en peut dire autant des quatre autres filiations et en particulier de la filiation principale.

» Je me pose dans toute sa généralité le problème inverse, qui consiste à trouver le potentiel d’où dérive un autre poten- tiel donné. Il faut certaines conditions pour que le problème soit passible. Quand elles sont remplies, je donne pour le ré- soudre deux méthodes, dont l’une est fondée sur l'intégration, et l’autre simplement sur l'élimination du premier degré. J’in-

Extrait de l’Institut, section 1860, 2

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dique aussi la maère de déterminer un potentiel d’après des conditions imposées à ses nœuds. Par exemple, pour avoir une étoile unique d’autant de branches qu'il y a de centres supposés homogènes 1l faut que ceux-ci soient disposés aux sommets d’un polygone régulier. De un potentiel régulier doué de fort bel'es propriétés que je passerai sous silence.

» Si l’on imagine qu’en chaque point du plan se trouve un ikermomètre dont la colonne accuse la température marquée par le potentiel, l’ensemble de leurs sommets décrira une surface dont l'allure sera bien propre à mettre en évidence l’é- tat thermique du plan. Entre autres propriétés de cette surface, je citerai la suivante. Les lignes d’égale pente ont pour pro- jections les trajectoires dont j'ai parlé. Si on imagine qu'un point pesant les parcoure sous l’action de la pesanteur, en même temps qu'un autre mobile décrit la trajectoire sous l'in- fluence des centres d'action, ces deux corps se mouvront de conserve, l’un formant continuellement la projection de l’autre.

» L'étude du potentiel, quoique formant une théorie très générale, n’est donc qu'un cas particuher de celle des fonc- tions isothermes. J'en forme un autre analogue en spécifiant autrement les fonctions employées. Je prends les expressions rationnelles et entières ou les polynomes isothermes.

» La famille isotherme étant donnée par un polynome, celle des filets de chaleur appartient également à un polynome qui s’en déduit aisément. Le réseau dérivé est un potentiel dit de seconde espèce, qui appartient aussi à un type constant, mais différent du précédent. Tous ses centres sont attractifs. Ce sont les nœuds du proposé, et leurs masses sont égales ou ont des rapports entiers, marqués par les nombres de branches para- sites. Le nombre total de ces branches est toujours égal au degré moins un du polynome. Toute la filiation dérivée est ensuite formée de potentiels de première espèce. Elle est il- limitée.

» La filiation principale, au contraire, est limitée et formée d’un nombre de réseaux égal au degré du polynome. Ce sont tous des potentiels de seconde espèce. Au delà du ne ordre toutes les vitesses sont nulles. La dernière est constante. L’a-

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vant-dernière varie comme la distance à un point fixe; l'anté- pénultième comme le rectangle des distances à deux points fixes, placés symétriquement par rapport au précédent. Le dernier réseau est donc formé de cercles consentriques et de leurs rayons, et l’avant-dernier de lemniscates homofocales et d’hyperboles équilatères.

» Quant aux enveloppes, leur dernier système est formé de n familles de droites parallèles, inclinées sous les angles d’une étoile régulière. Pour former l’avant-dernier, il faut construire une famille de spirales sinusoïdes, la faire tourner de manière à l’amener dans #—1 positions équidistantes, puis faire encore tourner quatre fois le tout. On obtient ainsi les enveloppes nulles et maxima, et leurs deux familles orthogonales.

» J’ai terminé cet ensemble par l'étude particulière du po- lynome isotherme du quatrième degré. Elle présente d’inté- ressants rapprochements avec la théorie des intégrales mL, que j'ai donnée dans le dernier cahier du Journal de l’École Polytechnique. Elle tendrait ainsi à rattacher ‘encore à l’étude des fonctions isothermes une dépendance naturelle de la théorie des moments d'inertie.»

PHYSIOLOGIE. M. Armand Moreau à communiqué, dans cette séance, à la Société, des recherches anatomiques et phy- siologiques sur la séparation des nerfs de sentiment et de mouvement duns la classe des. Vertcbrés. La note suivante les résume :

La principale découverte physiologique relative au système nerveux est celle de la distinction des racines de sentiment et de mouvement. Elle fit voir que si le nerf paraît étre à la fois sensible et moteur, c'est un phénomène apparent, non réel, qu'aujourd'hui tous les physiologistes expliquent de la ma- nière suivante : Le nerf nous prenons ici un nerf rachidien, pour plus de simplicité, le nerf dans lequel on constate la propriété de transmettre au sensorium commune des impres- sions sensibles et de transmettre à la fibre musculaire l’excita- tion qui la fait contracter, est un nerf mixte, composé de deux nerfs dont les filets sont unis ensemble et profondément entre- mêlés. La séparation de ces deux nerfs a jusqu’à présent dé- joué les efforts des anatomistes ; mais cette intrication des. deux

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nerfs primitifs ne commence qu'au moment ils sortent du canal vertébral. Avant ce point, ces deux nerfs primitifs, ou, comme on les appelle, ces deux racines sont bien distinctes l'une de l’autre, et si on les soumet à une analyse physiologi- que, on voit qu'elles produisent, l’une, exclusivement le sen- timent, l’autre, le mouvement.

Cette analyse physiologique se faitainsi :—Après avoir ouvert le canal rachidien, on coupe la raeine postérieure, et on constate que cette section produit une douleur très vive. On irrite suc- cessivement les bouts coupés de eette racine, et on reconnaît que le bout central est sensible, que le bout périphérique est in- sensible, et ne réveille point la contractilité des muscles dans lesquels il se distribue.

Ainsi la racine postérieure est sensible, et n'est pas mo- trice.

On coupe alors la racine antérieure, et si on irrite le bout central, on le trouve toujours insensible. Si on irrite le bout périphérique, on réveille la contractilité des muscles dans les- quels il se distribue.

Aïnsi la racine postérieure est une racine de mouvement.

Le phénomène de la sensibilité récurrente est aujourd’hui par- faitement connu, et les conditions dans lesquelles on le constate sont très bien déterminées. La sensibilité de la racine antérieure dépend de la racine postérieure : aussi est-il permis de dire que la racine antérieure est exclusivement motrice puisque la sen- sibilité qu'elle offre est empruntée à la racine ganglionnaire, et que le bout central, après la section, est toujours insensible.

J'ai, dit l’auteur de ces expériences, constaté plusieurs fois sur le Chien le phénomène de la sensibilité récurrente, en sui- vant les préceptes très précis donnés par M. Claude Bernard. Je l'ai en vain cherché, jusqu’à présent, sur des animaux appar- tenant aux trois autres classes des Vertébrés. La distinction phy- siologique entre les racines de sentimentet de mouvement est faite depuis longtemps sur les Mammifères et les Batraciens. J'ai voulu voir si elle existait aussi chez les Poissons et les Oi- seaux.

La disposition anatomique des racines rachidiennes est sem- blable dans les quatre classes des Vertébrés. Les nerfs sont

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mixtes au sortir du canal vertébral. Il convenait donc de cher- cher les racines pour distinguer expérimentalement leurs qua- lités physiologiques.

J'essayai, sur plusieurs espèces de Poissons cartilagineux, d'ouvrir la colonne vertébrale, mais les racines, grèles et courtes, se brisaient et se confondaient quand on parvenait à les attein- dre. Je ne réussis point, et regardai cette opération comme pres- que impossible, au moins sur les Torpilles et les Squales.Cepen- dant, une disposition anatomique toute particulière, que je trou- vai en disséquant, me permit bientôt de faire l'expérience avec la plus grande facilité.

En effet, je remarquai, en observant les nerfs rachidiens sur une Torpille, que ces nerfs sont aplatis, rubanés, et présentant un sillon à peine visible qui est situé parallèlement à leur axe, mais pas tout à fait sur la ligne médiane.Ce sillon, que l’on voit quelquefois très nettement, d’autres fois après quelques recher- ches, est précisément la ligne de démarcation entre l’élément moteur et l'élément sensible du nerf mixte.

On peut déjà le supposer, en faisant une préparation anato- mique qui consiste à engager une pointe fine, par exemple une aiguille à cataracte, dans ce sillon. On coupe le névrilème, et on écarte les deux moitiés inégales du nerf. On remonte ainsi jusqu’au point le nerf se perd dans le tissu même de la co- lonne vertébrale ; là, il convient de sculpter avec précaution, et quand on a dégagé le nerf jusqu'aux deux racines qui tiennent à la moelle épinière on continue à écarter délicatement les deux moitiés de nerf, eton voit que le ganglion reste tout entier ad- hérent à la racine postérieure. Les deux racines primitives pa- raissent alors avec une longueur inusitée, et si l’on continue à les écarter l’une de l’autre, en descendant du côté périphérique, on voit que chacune des racines envoie un filet délié pour for- mer chaque rameau nerveux qui est ainsi mixte.

La séparation se fait d'elle-même, à mesure que l’on avance, et chaque nerf que l’on atteint se dédouble en ses deux élé- ments anatomiques de racine antérieure et racine postérieure. Les deux parties du nerf ainsi dédoublé se suivent en remon- tant jusqu’à la moelle, et la division se prolonge d'elle-même

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en descendant jusque dans les filets les plus fins que l'œil puisse apercevoir.

L'expérience physiologique, on le comprend, devient alors très facile. J’ouvris sur une Torpille vivante la paroi abdomi- nale, et, écartant les viscères, je disséquai un nerf au voisinage de la colonne vertébrale; puis, ayant pénétré dans la ligne de séparation des deux racines prolongées, j'écartai ces deux ra- cines de façon à pouvoir agir sur une longueur de plusieurs cen-

timètres. Je les coupai toutes deux, et le électrisai successive- ment avec le même appareil.

En agissant ainsi sur le bout périphérique, j'obtins des con- tractions musculaires manifestes toutes les fois que je pris la racine antérieure, c’est-à-dire la bande nerveuse qui était du côté de la tête du poisson. Au contraire, en agissant sur la ra- cine postérieure (toujours dans son bout périphérique) je n'ob- tins aucune contraction musculaire.

La racine antérieure est donc une racine de mouvement, et la racine postérieure n’est pas une racine de mouvement et cor- respond à la racine de sentiment.

On doit donc admettre que les nerfs rachidiens des Poissons sont physiologiquement mixtes, comme ils le sont anatomique- ment; qu'ils sont formés de deux racines, dont l’une, non ganglionnaire, est la racine de mouvement, et l’autre, ganglion- naire, la racine de sentiment.

Les expériences sur lesquelles je m'appuie ont été faites à Arcachon en septembre 1857, et à Naples en 1858 et 1859. Les Poissons sur lesquels j'ai opéré, sont : à Arcachon, la Torpille (Torpedo maculatn), la Thouille vulgaire, la Raie bouclée ; à Naples, les deux espèces de Torpilles : oculata et maculata, le Squale vulgaire nommé pesce cane, une petite espèce de Raie de couleur jaune.

J'ai fait sur les Oiseaux, dit encore l’auteur, les mêmes re- cherches expérimentales pour constater les propriétés physio- logiques des racines nerveuses.

Au point de vue anatomique, l’analogie est complète entre leurs nerfs rachidiens et ceux des Mammifères. Voici les diffi- cultés que J'ai rencontrées en opérant sur eux :

J’essayai d’abord sur des Pigeons et des Poules, mais tous ces

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animaux périrent quand j'eus ouvert le canal rachidien, et avant que j'aie eu le temps de chercher les racines nerveuses. Je pris alors des Oies, et réussis, sur quatre de ces Oiseaux, à terminer l'expérience.

Après avoir mis à nu la colonne vertébrale dans une étendue suffisante, je pris des ciseaux forts et des pinces, et ouvris les vertèbres au niveau du point de réunion de la région cer- vicale et de la région dorsale. Les nombreux sinus veineux et les canaux aériens qui circulent dans les vertèbres furent for- cément ouverts, et j'eus beaucoup de peine à étancher le sang qui remplissait le canal vertébral ; ce sang était chyleux comme on l’a remarqué déjà dans diverses opérations. À chaque effort d'expiration, l'animal chassait avec bruit l'air de ses poumons à travers les canaux aériens, et formait ainsi un mélange spu- meux d'air et de sang qui génait l’opération. Je parvins, cepen- dant, à isoler une racine postérieure que je coupai ; je constatai que la section était très douloureuse, puis, ayant pincé le bout périphérique, je n’obtins pas de mouvements dans l’aile corres- pondante; excitant ensuite le bout central, l'animal manifes- tait sa douleur par des cris, et des mouvements volontaires qui s’ajoutaient aux mouvements réflexes. Cette racine postérieure offre donc les mêmes propriétés que les racines postérieures des Mammifères. Je coupai alors la racine antérieure, et, n'ayant point constaté de signes de douleur, ce qui n’étonnera point, puisque la racine postérieure correspondante était coupée, et que, par conséquent, la condition nécessaire pour la manifesta- tion de la sensibilité récurrente était absente, j'irritai alors le bout central, et n’obtins aucun signe de sensibilité, puis le bout périphérique, et J'eus aussitôt des mouvements violents, mais limités, dans l’aile correspondante. Ces essais furent répétés sur quatre Oies, et toujours avec le même résultat. J’excitais les racines tantôt avec la pince, tantôt avec le courant élec- trique.

Je constatai aussi expérimentalement l’analogie des racines rachidiennes des Oiseaux avec celle des autres Vertébrés, au point de vue physiologique.

Les expériences faites sur les Pigeons et les Poules ne furent pas tout à fait sans résultat, car la mort étant survenue pendant

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l'opération, je me hâtai d'isoler les racines, et, les ayant coupées, je galvanisai leur bout périphérique ; la racine antérieure, gal- vanisée, provoqua seule des contractions dans les muscles cor- respondants.

Séance du 25 février 1860.

MÉCANIQUE. La note suivante sur deux potentiels réci- proques a été lue dans cette séance par M. J.-N. Haton de la Goupillière.

« Les systèmes d’attraction que je considère sont formés de la manière suivante : Je prends des droites parallèles en nombre infini, comprises dans un même plan, équidistantes et douées de pouvoirs égaux. Je distingue deux cas, suivant que toutes ont une faculté de même sens, ou qu'elles sont alternativement attractives et répulsives. C’est ce que j'appelle un système simple ou double.

» Faisant, pour simplifier, une section par un plan perpen- diculaire, je construis pour chacun des deux systèmes son ré- seau, composé d’une famille de courbes de niveau partout nor- males et d’une d’enveloppes partout tangentes aux forces. Je construis, en outre, pour chacun d'eux, son réseau dérivé for- de deux familles de courbes isodynamiques et isocliniques pour lesquelles la force garde une intensité et une direction constantes. Ce second réseau est toujours orthogonal et iso- therme. J'ai montré en outre qu'il se rapporte lui-même à un potentiel.

» Pour le déterminer je rattache à chaeun des deux systè- mes un autre appelé son conjugué, à savoir : pour le système simple un système double obtenu en intercalant un système simple pareil mais inverse, et pour le système double le sys- tème simple qui s’en déduit en renversant le sens de la moi- tié de ses droites. Cela posé, j'arrive aux théorèmes suivants :

» En premier lieu : 1°les courbes de niveau du système sim- ple sont les isodynamiques du système double conjugué; les enveloppes du système simple sont les isocliniques du système double conjugué ; les isodynamiques du système simple sont les lignes de niveau du système double conjugué ;

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4 les isocliniques du système simple sont les enveloppes du système double conjugué.

» En second lieu : les courbes de niveau du système double sont les isodynamiques du système simple conjugué ; les enveloppes du système double sont les isocliniques du système simple conjugué ; les isodynamiques du système double sont les lignes de niveau du système simple conjugué ; les isocliniques du système double sont les enveloppes du système simple conjugué.

» Pour obtenir ces résultats j’emploie l’algorithme des fonc- tions hypotrigonométriques qui a été introduit par M. Lamé dans son Traité des inverses des transcendantes. Ce mode de calcul simplifie beaucoup les opérations et introduit dans le résultat une symétrie fort élégante. Pour en donner une idée je me contenterai de transcrire les formules fondamentales.

» À cet effet je désignerai par @, b, «, 6, les paramètres des lignes de niveau, des enveloppes, des isodynamiques et des isocliniques du système simple, et par À, B, A, B, ceux du système double. On aura alors pour les équations des quatre familles distinctes :

23 sin? x +- hypo sin? y = e?4 il: Feng mi lie tang b = Peer EP tang B cos æ hypo tang a Ra hypo tang À sin æ hypo sin y

» Je donnerai encore l'expression l'intensité f, F et de l’inclinaison +, ® dela force dans les deux systèmes :

__cos 2x + hypo sin ?y hypo sin 2y

cotang £ = tang B

De ie ee sols ue 7 sin 2x +ypoh sin ?y° ores 2x 1 hypo tang y qiÎin 2. ! 2 D nn pe Sn 7 + hypo sin *y, tang nd

» Ces deux réseaux constituent deux systèmes de coordon- nées curvilignes tels que les deux autres plus simpies que Extrail de Plnstitut Are section, 1859, 3

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M. Lamé a discutés aveg soin dans son bel ouvrage sur l'em- ploi des coordonnées curvilignes pour les recherches de phy- sique mathématique. J'ai étudié ces deux systèmes et donné leurs formules de transformatioñ, soit entre eux, soit par rap- port au système rectiligne; mais je supprimerai ici ces déve- loppements. »

ÉLÉCTROPHYSIOLOGIE. Expériences sur l'organe électrique de la Torpille. M. Armand Moreau a communiqué aussi à la Société dans la même séance la note suivante :

« Plusieurs hypothèses ont été proposées pour expliquer le phénomène de la décharge électrique de la Torpille : dans les unes, on regarde l'appareil comme produisant l'électricité ; dans les autres, l'appareil est assimilé à un condensateur, et les nerfs nombreux et énormes qui se distribuent dans l'organe électrique sont regardés comme des conducteurs capables de porter à l’or- gane de petites quantités de fluide électrique pendant le temps l'animal est en repos, quantités d'électricité qui s’accu- mulent, et sont ensuite dépensées dans les décharges que l’a- nimal détermine au moment il le veut. Un lobe particulier, nommé lobe électrique, existe dans les centres nerveux, à l'o- rigine des principaux nerfs électriques, et parait avoir un rôle spécial à remplir dans cette fonction remarquable. Je regarde comme tout à fait inutile d’énumérer ici les raisons qui peuvent d'avance faire douter de la valeur de cette dernière hypothèse. L'expérience est l'argument souverain qu'il faut invoquer en physiologie, plus encore que dans les autres sciences, pour légi- timer les hypothèses les plus vraisemblables ou pour détruire les plus improbables.

» 1. J'ai pris des Torpilles vivantes, et j'ai pratiqué la sec- tion des nerfs électriques qui se rendent à lun des deux or- ganes ; soulevant alors, au voisinage de la section, le bout péri- phérique d’un nerf électrique, je l’exeite au moyen du courant d'une machine électromagnétique. Chaque fois que passe le courant, il se produit dans l'appareil une décharge manifestée par les soubresauts violents de Grenouilles préparées suivant la méthode de Galvani et placées sur l'organe. Au bout de plu- sieurs excitations, les décharges deviennent de plus en plus fables, et bientôt on cesse d'en déterminer, malgré les plus

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fortes excitations. J’épuisai ainsi la faculté que possède l'or- “ane de donner des décharges par l'excitation des nerfs, et je replacai le Poisson dans l’eau de mer. Au bout de quelques heures, je le repris, et cherchaï à voir si l'organe privé de toutes ses communications nerveuses avec le lobe électrique et les centres nerveux, et dépouillé d'avance de la faculté de donner des décharges, avait récupéré cette faculté. J'excitai donc comparativement les nerfs du côté sain et les bouts périphéri- ques des nerfs coupés : j'obtins des décharges des deux côtés, décharges dont l'intensité était aussi grande du côté qui avait été soumis à cet épuisement artificiel que de l’autre.

» Il ést donc établi par l'expérience que lPhypothèse qui as- simile l’organe de la Torpille à un condensateur qui recevrait l'électricité des centres nerveux par l'intermédiaire des nerfs est uñe hypothèse impossible à soutenir. |

» 2, J'ai soumis à des excitations très fortes les nerfs électri- ques dans leur état normal, afin de voir s’ils sont sensibles. Je n'ai pu reconnaitre, à l'occasion de cés excitations, les mouve- ments réflexes, signes d’un courant centripète qui caractérise tout nerf de sentiment. Les nerfs électriques ne possèdent donc que des courants ceñtrifuges, et sont, sous ce rapport, analogues à des nerfs de mouvement. Déjà, de Blainville avait admis qu'ils étaient des nerfs moteurs.

» Quoique j'aie excité fortement les nerfs de l'appareil sans obtenir de mouvements réflexes, je crois devoir rappeler que les branches du pneumo-gastrique ne jouissent pas de la même sensibilité que les nerfs de sentiment proprement dits: Chez les Mammifères, ces néffs sont tantôt sensibles, tantôt insensibles.

» J'ai cherché souvent à déterminer des mouvements réflexes en excitant le neff pneumo-castrique latéral des Poissons, sans pouvoir y parvenir; et cependant j'ai obtenu, dans des cir- constances favorables, des mouvements réflexes évidents, signes de la sensibilité de cette branche du pneumo-gastrique. Il m’a paru nécessaire de rappeler ici, à propos des nerfs électriques qui sont en grande majorité des branches du pneumo-8astrique, que les conditions de sensibilité de ce nerf ne sont pas tout à fait les mêmes que celles des nerfs ordinaires de sentiment.

» Malgré ces réserves, je considère, en m'en rapportant à

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mes expériences, les nerfs électriques de la Torpille comme dénués du courant centripète, et je suis confirmé dans cette opinion par l'expérience que j'ai faite, qui consiste à exciter ces nerfs avant leur passage dans les branchies. J'ai obtenu alors des mouvements réflexes évidents, dus sans aucun doute aux filets de sentiment qui vont se distribuer dans les branchies, et dont le nerf pneumo-gastrique est tout à fait dépouillé quand il entre dans l'organe électrique. »

Séance du 10 mars 1860.

PaysiQuE. M. Th. du Moncel communique à la Société quelques-unes de ses recherches sur l’électromagnétisme, et fait même devant elle une série d'expériences rélatives à ces recherches.

T1 démontre d’abord que si l’on soumet un morceau de fer doux à l’action d’un pôle d’un électro-aimant droit, le magné- tisme attiré occupe une calotte sphérique précisément au- dessus de ce pôle, et le développement de cette calotte sphé- rique dépend de la distance de l’écartement entre le fer et l’aimant. Elle diminué très rapidement à mesure que cet écar- tement se réduit et devient nul quand le contact a lieu. Alors, suivant M. du Moncel, le magnétisme attiré se trouve complé- tement dissimulé. Mais, comme entre ce magnétisme attiré et le magnétisme libre de l’électro-aimant il se produit une réac- tion secondaire, il en résulte par le fait une excitation éner- gique du pôle actif, et, par suite, un renforcement de l’autre pôle, puisque la polarité d’un pôle ne peut étreexcitée sans que le pôle opposé ne partage cette surexcitation. Par le moyen de l'addition d’un morceau de fer au pôle inactif d’un électro- aimant droit, on peut donc augmenter la force attractive de celui-ci dans un rapport considérable, et M. du Moncel a montré qu'elle pouvait être quadruplée. Cette augmentation d'énergie est d'autant plus grande que la masse de fer ajou- tée à l’électro-aimant est plus considérable; mais il vient un moment elle devientstationnaire, puis change de signe, ainsi que l’a observé M. Nicklès.

Une chose assez particulière c’est que cette surexcitation polaire de l’électro-aimant avec une masse de fer addition-

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nelle dépend moins de la masse de ce fer que de sa surface. On peut s’en convaincre en articulant une série de lames de fer de manière à pouvoir se replier et se développer comme les différentes lames d’un mètre. Si cette série de lames est repliée de manière à former une même masse de fer, la force attractive due à la surexcitation qui en résulte sera moins grande que quand les lames seront développées, et cela de quelque manière que le développement soit opéré. Cet effet n'a pas seulement lieu avec des lames réunies en faisceau. Ainsi, une barre de 56 cent. carrés defsurface pesant 708": aug- mentait, dansles expériences de M. du Moncel, la force attrac- tive dans le rapport de 12 à 32#-, tandis qu’une barre de A6 centimètres carrés de surface pesant 76€: ne l’augmentait que dans le rapport de 12 à 27. Cet effet peut être expliqué par l'expérience suivante :

Si sur la lame de fer fixée sur l’électro-aimant dont nous avons parlé on place une petite barre de fer légèrement bom- bée et disposée de manière à pouvoir pivoter aisément sur son centre, il arrivera, quand cette dernière barre sera placée lon- gitudinalement sur la première, qu'elle se trouvera déviée avec force au moment du passage du courant à travers l’électro- aimant, soit à gauche, soit à droite, jusqu'à ce qu'elle se soit mise en croix sur la barre fixe, position qui constitue son état d'équilibre stable.

Cet effet vient de ce que la barre mobile, se trouvant in- fluencée par le pôle de l’électro-aimant qui est épanoui sur toute la surface de la barre fixe, est polarisée par celle-ci de telle manière que le fluide attiré se trouve dissimulé au point de contact des deux barres, et que les surfaces extérieures de celles-ci possèdent une polarité semblable sur toute leuréten- due. Il en résulte donc une répulsion qui s’effectue dans un sens ou dans l’autre suivant que l’axe de la barre mobile croise à gauche ou à droite l'axe de la barre fixe, croisement qui a toujours lieu puisque la superposition parallèle des deux lames constitue un état d'équilibre instable que la moindre cause peut troubler. Ce n’est que quand les axes se croisent à angle droit que les forces répulsives se trouvent équilibrées de part et d'autre.

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On peut s'assurer de la vérité de cette explication en plaçant sous partie bombée de la barre mobile un peu de papier. Dans ce cas, le fluide attiré n’est plus tout à fait dissimulé et, se répartissant sur toute la surface inférieure de la barre mobile, provoque entre les deux barres une attraction normale qui s'effectue du côté la lame fixe est attachée à l’aimant en raison de la plus grande force polaire de la barre de ce côté. Alors la force directrice est complétement dissimulée etla barre mobile n’est plus déviée ni à droite ni à gauche.

Si on mesure maintenant les forces attractives du pôle op- posé à celui sur lequel est fixée la barre rigide dont nous ve- nons de parler et qu’on opère cette mesure d’abord avec la barre mobile placée longitudinalement, et, en second lieu, avec cette barre placée en croix, on trouve dans le premier cas 60 grammes, dans le second 65. Or, il est facile de compren- dre que, dans ce dernier cas, l'augmentation de la force attrac- tive vient précisément de ce que la polarité de la barre rigide se trouve alors soustraite aux réactions contraires exercées entre deux polarités semblables, réactions qui ont pour effet de provoquer par réflexion une polarité différente nécessaire- ment nuisible. Or, c’est parce que ces réactions sont moins sensibles dans une lame de fer à grande surface que dans une lame de fer un peu épaisse, que l'énergie de l’action ma- gnétique surexcitée est plus grande dans un cas que dans l’autre.

M. Th. du Moncel montre ensuite que, par suite des effets précédents, l’action d’hélices de différentes tailles composées d'une même longueur de fil et agissant sur un même fer d’é- lectro-aimant est bien différente. Suivant que ces hélices re- couvrent entièrement ou partiellement ce fer, elle donne lieu à un maximum et à deux minima. L'un de ces minima se ré- vèle lorsque le fer est entièrement recouvert par l’hélice ma- gnétisante ; l’autre minimum est idéal et correspond à la plus petite longueur possible d’hélice. Toutefois, ce dernier mini- mum, dans les circonstances ordinaires de l’expérimentation, est toujours de valeur moindre que le premier. Quant au maximum, il a lieu lorsque la masse de fer qui dépasse l'hélice est environ trois ou quatre fois celle du noyau magnétisé. Dans

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ces différentes expériences, il doit être bien entendu que les hélices doivent avoir la même longueur de fil, de sorte que c'est l'hélice qui a le plus grand nombre de spires (1 600 dans les expériences de M. du Moncel) qui donne la plus petite force attractive.

Il ne faudrait pourtant pas conclure de ce résultat que la loi de Jacobi sur les électro-aimants, qui dit que la force des électro-aimants pour une même intensité de courant est pro- portionnelle au nombre des spires de l’hélice, soit infirmée ; elle se complique seulement de réactions secondaires qui changent les conditions des électro-aimants. Si les fers des électro-ai- mants sont de la même longueur que les hélices, les effets pré- cédents n'ont plus lieu, et on trouve que la force attractive est d'autant plus grande que les électro-aimants sont plus longs. Cependant M. du Moncel a reconnu que la loi de Jacob1 peut être formulée plus simplement et plus exactement de la me- nière suivante : La force attractive d’électro-aimants droits de différentes longueurs dont les hélices magnétisantes sont constituées par une même longueur de fil croît avec leur lon- gueur dans un rapport particulier qui est celui d’une progres- sion arithmétique alors que les longueurs eroissent en pro- gression géométrique. De plus la raison de cetie progression arithmétique est dans un rapport constant avec la force élec trique qui agit sur l’électro-aimant et avec le degré de la forec magnétique développée.

M. du Moncel fait voir ensuite la difiérence d’action de la force électro-magnétique quand elle agit comme force vive ou comme force continue. Pour cela, il revient à sa première ex- périence et mesure, lors d’une fermeture momentanée du courant, la force de l’électro-aimant au moment la barre mobile est en croix sur la barre fixe : ce sera, comme il l’a- vait trouvé déjà, 65 grammes ; il ferme enswute le courant d'une manière permanente et fait successivement passer la barre mobile de sa position longitudinale dans sa position d’é- quilibre. Au lieu d’entraimer dans cette dernière position le poids de 65 grammes, elle ne pourra plus même en attirer un de 60.

On a vu que la surexcitation provoquée par une barre de

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fer ajoutée à l’un des pôles d’un électro-aimant droit augmen- tait avec la masse et la surface de cette barre, atteignait un maximum, puis diminuait après ce maximum atteint. Or, M. du Moncel démontre qu’en surexcitant la polarité de la barre en question à l’aide d’un aimant ou d’un électro-aimant de même force à peu près que l’électro-aimant actif, on arrivail à obte- nèr immédiatement ce maximum quelle que soit la masse de cette barre, quelemaximum soit dépassé ou qu’il nesvoit pas en- core atteint. Ce phénomène explique pourquoi un électro-ai- mant à deux bobines dont les branches sont longues ou courtes a toujours la même force, ainsi que l’a démontré M. Nicklès.

Enfin, M. du Moncel a démontré comment, en se fondant sur les lois de la distribution magnétique dans les électro-ai- mants et leurs armatures, il était parvenu à détruire complé- tement le magnétisme rémanent dans les électro-aimanfs.

Dans les électro-aimants droits un aimant fixe placé dans le prolongement de l’armature mobile suffit pour cela, à con- dition que le pôle de cet aimant fixe opposé à l’armature soit de même nom que le pôle de l’électro-aimant qui agit sur elle. Au moment le courant ne passe plus dans l’électro-aimant, le magnétisme de l’armature, condensé en son point de contact avec le pôle de l’électro-aimant, se trouve déplacé par l’aimant fixe, et à la place de ce magnétisme condensé vient se substi tuer du magnétisme repoussé, par conséquent du magnétisme de même nom que celui du pôle de l’électro-aimant. Il y a dès lors répulsion.

Dans les électro-aimants à deux bobines, on ne peut guère détruirele magnétismerémanent, mais avec les électro-aimants à deux branches dont une seule est recouverte d’une hélice, on peut facilement obtenir cet effet en ajoutant à la disposi- tion précédente un second aimant que l’on fixe sur la branche sans bobine, de telle manière que le pôle appliqué sur la culasse de l’électro-aimant soit de nom contraire à celui développé à l'extrémité de la branche recouverte de l’hélice.

Au moment le courant cesse de circuler dans l’électro- aimant, le noyau magnétisé tend à prendre la polarité com- muniquée à la culasse de celui-ci par l’aimant qui est en con- tact avec elle, c’est-à-dire une polarité contraire à celle qui

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constitue le magnétisme rémanent; il y a donc tendance à la destruction de celui-ci. D'un autre côté, le pôle de l’aimant placé devant l’armature déplace le magnétisme condensé de celle-ci et tend d'autant plus facilement à lui substituer du ma- gnétisme repoussé qu'il est aidé dans cette réaction par l’ai- mant placé sur la branche sans bobine.

M. du Moncel a appliqué le principe de ce système électro- magnétique à un télégraphe Bréguet qui peut marcher sans ré- glage en faisant varier la résistance du circuit de 0 à 500 kilo- mètres.

—MM.J. Lemaire et Le Bœuf (de Bayonne) ont adressé dans cette séance à la Société la communication suivante sur les propriétés de lémulsion de coal-tar saponiné :

« La propriété antiseptique du coal-tar est généralement reconnue, et ses applications au pansement des plaies ont ac- quis depuis quelque temps une grande célébrité ; malheureu- sement les matières auxquelles on jugeait indispensable de mélanger le goudron en rendaient l'emploi difficile dans la plupart des cas, et quelquefois absolument impossible. L'ap- plication de ces mélanges ne pouvait être faite qu'aux plaies superficielles. Dès le mois de septembre dernier, profitant des observations antérieures de l'un de nous (M. Le Bœuf), sur la propriété que possède la saponine de former des émul- sions durables avec tous les corps solubles dans l'alcool, nous cûmes l’idée d'employer cette substance pour émulsionner le goudron, et de substituer cette émulsion aux mélanges plus ou moins pulvérulents qu’on a préconisés utilement dans certains cas, mais dont l’usage entraîne des inconvénients qui les ont fait repousser par un grand nombre de praticiens dans le trai- tement des plaies:

» L’émulsion dontil s’agiticis’emploie en mélangeant quatre ou dix-neuf parties d’eau à une partie de la teinture suivante :

» Coal-tär goudron de houille 1000 gr. » Teinture alcoolique de saponine 2400 »

» Dans le premier cas l’émulsion est à À, dans l’autre elle est à =. Ces proportions sont les plus usitées ; toutefois les Extrait de l’Institut, 1'e section, 4860, l

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propriétés émulsionnantes de la saponine sont telles, qu’on peut ajouter l’eau pour ainsi dire en toutes proportions et ob- tenir néanmoins une émulsion persistante ; dans les cas ordi- naires l’émulsion au cinquième est la plus en usage.

» Les applications que nous avons eu occasion de faire de cet agent désinfectant peuvent être rangées sous trois chefs principaux :

» Applications thérapeutiques. L’émulsion de coal-tar saponiné participe des propriétés de la saponine et de celle du coal-tar, c'est-à-dire qu’elle est à la fois désinfectante et déter- sive. Par la saponine elle nettoie et déterge les tissus vivants avec une innocente énergie ; par le goudron, elle désinfecte rapidement les sécrétions les plus infectes des muqueuses en- flammées ou des surfaces suppurantes ; enfin elle exerce sur les tissus malades une action médicatrice puissante, ramèneles sécrétions dans les limites de l’état normal et aide puissam- ment au travail réparateur des plaies.

» Il est bon de signaler dans quelles circonstances l’émul- sion à manifesté ces propriétés.

» La première application en fut faite (par M. Lemaire) sur une femme de 66 ans, atteinte d’une plaie gangréneuse au pli de l’aine, que compliquait un vaste décollement de la peau sur une surface d'environ 60 centimètres carrés; la sécrétion in- fecte que donnaient les surfaces suppurantes était non-seule- ment désinfectée, mais arrêtée par l'emploi continu de l’é- mulsion; elle reprenait de nouvelles forces s’il y avait desinter- ruptions dans son usage. L'expérience en fut faite plusieurs fois. Il fut donc impossible de ne pas attribuer à l’émulsion les heureux résultats que son usage reproduisait à coup sûr et pour ainsi dire à volonté.

» Plusieurs plaies de mauvais caractère, succédant à des an- thrax, furent de la même manière modifiées et amenées à une cicatrisation rapide ; des ulcères phogédéniques le furent pa- reillement par des lavages répétés au moyen de cette émul- sion. Ses applications à des dartres impétigineuses donnant lieu à des écoulements fétides, à des cas d’ozène chronique, au pansement des sétons, enfin au traitement des engelures ulcérées, eurent un résultat semblable.

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» Des observations parallèles ont été faites à l'hôpital de Bayonne par MM Darrican et Petit, chirurgiens de cet éta- blissement ; à Pau, par M. Menien, qui a appliqué l’émulsion au traitement des otorrhées chroniques ; M. le docteur Blache a fait des expériences analogues, et partout les mêmes avan- tages ant persisté, partout les mêmes résultats ont été obtenus . les sécrétions fétides ont été désinfectées, les plaies suppu- rantes ont été détergées,les muqueuses malades, les dartres, les ulcères, ont été amenés à une guérison plus rapide.

» En face de ces résultats qu'aucun fait n’a démentis, on pour- rait être surpris de l’arrêt peu favorable que M. Velpeau a porté contre ce moyen. Ce savant chirurgien le rejette parce que, dans un ou deux cas de brûlure douloureuse, l’applica- tion de cette substance éveilla des douleurs vives ; on con- çoit, en effet, que l’émulsion au cinquième puisse éveiller des douleurs par l'effet d’une trop grande proportion d’alcool; mais qui empêche de l’employer au vingtième et même au delà ? Il est évident que, dans ce cas, la quantité d’eau ajoutée doit être proportionnée à la susceptibilité du malade.

» Les applicationsà l'hygiène se présentent en foule et of- frent, surtout dans les hôpitaux, des avantages sans nombre. L'émulsion de coal-tar saponiné désinfecte à l'instant les ma- tières fécales. En lavant avec cette substance le bois des chaises percées,on fait disparaître à l’instant son odeur fétide et persistante; ce serait dans les salles un grand nombre de malades sont accumulés un moyen préventif très utile. Un peu de cette substance placée d'avance dans les vases et dans les urinoirs portatifs tarirait pour ainsi dire les sources d’ex- halations funestes et à peu près inévitables.

» Des applications non moins favorables peuvent êtrefaites de l’émulsion et, dans certains cas, de la teinture aux prépa- rations anatomiques ; une injection de teinture de coal-tar sa- poniné poussée dans les artères désinfecte les cadavres d’ani- maux, les conserve, empêche la chute des poils et des plumes, favorise le dessèchement et pourrait, dans certains cas, être proposée-comme un procédé taxidermique facile et surtout très économique.

» Tous les anatomistes savent combien repoussantes sont les

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recherches faites sur les viscères abdominaux. Le contact des fluides abdominaux et des surfaces péritonéales quand le ca- davre n’est pas absolument frais laisse aux mains une odeur dégoûtante qui résiste à des lavages répétés et ne se dissipe qu'au bout de plusieurs heures; en versant quelques verres d'émulsion au cinquième dans la cavité abdominale après l'avoir ouverte et en l'y maintenant pendant quelques minutes, on prévient cette conséquence désagréable ; et ce n’est pas en masquant la mauvaise odeur que le goudron agit dans ce cas comme l'avaient pensé quelques personnes, il désinfecte réel- lement; en effet, après l’ablation complète du goudron par des lotions successives d’huile et de savon, aucune odeur appré- ciable ne persiste; en conséquence, l'odeur est réellement dé- truite et non pas seulement masquée. Des matières conservées depuis plus d’un mois dans l’émulsion de coal-tar saponimé ont conservé toute leur fraîcheur. La matière nerveuse de la moelle elle-même, dont la décomposition est en général si prompte, n’a subi aucune altération. C’est donc un procédé d'embau- mement qui semble appelé à rendre de grands services aux sciences anatomiques ; d’ailleurs son action n’est pas dans tous les cas instantanée; maïs il n’est pas d’odeur provenant des matières en décomposition qu’elle ne diminue soudain et ne dissipe à la longue. »

Séance du 17 mars 1860.

La note suivante sur un nouveau sphygmographe, ou appa- reil enregistreur du pouls, a été communiquée, dans cette séance, par M. Marey.

Les anciens, qui attachaient une si grande importance à l'étude du pouls, avaient, pour en caractériser les différentes formes, une riche nomenclature qui, suivant eux, définissait les sensations particulières que peut éprouver le doigt lorsqu'il explore une artère. La difficulté de s'entendre lorsqu'on veut exprimer par des mots des sensations aussi fugaces à fait presque entièrement abandonner ce genre d'études, et la fré- quence du pouls est presque seule restée dans la Pratique médicale.

Cependant les physiologistes cherchaïent toujours de nou-

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veaux moyens de rendre saisissables Les différentes formes de la pulsation artérielle. Les instruments à indications continues ont fourni le moyen de réaliser ces espérances, Tout le monde connaît la machine de Morin, imaginée pour démontrer les lois du mouvement dans les corps qui tombent; c’est le plus simple de ce genre d’appareils qui a introduit une véritable révolution dans l'étude des mouvements variés.

Il devenait possible d'écrire sur un cylindre tournant les oscillations d’un manomètre à colonne mercurielle ; c’est ce qui a été réalisé par Ludwig. Ainsi le £ymograrhion reçoit sur un cylindre le tracé d’un pinceau porté par un flotteur qui monte et descend ayec la colonne de mercure. Avec cet in- strument, Ludwig, Volkmann, Spengler, etc., ont fait de nom- breux et remarquables travaux sur la tension et le pouls des artères chez les animaux.

À peine connaissait-on en France ce genre de recherches que déjà un procédé nouveau tendait en Allemagne à se sub- stituer à l’emploi du kymographion. Karl Vierordt imagina d'adapter à l'artère un levier que chaque pulsation soulève- rait et qui, redescendant dans l'intervalle de deux pulsations consécutives, fournirait des mouvements d'ascension et de descente qui s’inscriraient sur le cylindre comme les mouve- ments de la colonne mercurielle dans l'appareil de Ludwig.

Ce nouvel instrument permettait d'appliquer à la physiologie humaine et à la clinique des recherches qui, jusque-là, ne pouvaient être faites que sur les animaux, car elles exigeaient une vivisection.

Toutefois, dans la construction du nouvel instrument exis- taient encore des défauts considérables qui le rendaient im- propre à fournir les indications de la forme du pouls, ce qui est précisément le plus essentiel et en même temps le plus difficile à saisir par le toucher.

Dans un ouvrage intitulé : Die Lolre von arlerienpulss Braunschweig, 1855, Vierordt donna la figure de son instru- ment et les tracés obtenus par lui dans différentes conditions physiologiques ou morbides.

Le sphygmographe de Vierordt est formé de deux leviers unis entre eux par une sorte de parallélogramme de Watt

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destiné à corriger l’arc de cercle dans les oscillations des le- viers. La multiplicité des articulations doit entraîner de nom- breux frottements, et de plus le poids considérable des leviers et de leurs annexes a déterminé le physiologiste allemand à équilibrer son instrument au moyen d’un contre-poids placé sur le prolongement du levier principal. Comme, de plus, il faut, pour que le pouls se produise, que l'artère soit déprimée avec une certaine force, c’est avec un nouveau poids placé sur le levier lui-même que Vierordt cherche à obtenir cette dé- pression du vaisseau.

La masse considérable de l'instrument est précisément la cause qui enlève aux indications obtenues leur plus grande valeur. Le sphygmographe pondéré oscille comme le ferait une balance presque équilibrée, mais dont les deux plateaux seraient très chargés : les mouvements d’ascension et de des- cente du levier sont sensiblement isochrones. Le nombre des pulsations, leur plus ou moins de régularité et leur amplitude sont donc les seuls caractères que fournisse le sphygmogra- phe de Vierordt.

C'est à l'insuffisance de ces indications, aussi bien qu’à l'incommodité de l’appareil peu portatif à cause de son volume, que j'ai cherché à remédier par la construction d’un nouveau sphygmographe qui n’a de commun avec l’appareil allemand que l’emploi du levier comme moyen de transmettre et d’am- plifier la pulsation.

Ma première préoccupation fut de donner à mon instrument toute la sensibilité nécessaire, ce que je ne pouvais obtenir qu'avec une extrême légèreté du levier. Comme, d'autre part, il fallait exercer sur l'artère une pression assez considérable pour obtenir la pulsation, je me suis servi à cet effet d’une pièce tout à fait indépendante, et qui est formée par un long ressort d'acier qui vient appliquer sur l’artère une petite pla- que d'ivoire avec une force que l’on peut graduer à volonté. Les mouvements que cette plaque reçoit des pulsations arté- rielles sont transmis à la partie inférieure du levier, assez près de son centre de mouvement pour que l'extrémité libre se meuve dans une étendue suffisante.

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Tout l'appareil est établi sur une sorte de brassard qui s'adapte à l’avant-bras et en assure la parfaite fixité. Enfin je reçois le tracé sur une petite plaque de verre ou de métal qu'un mouvement d’horlogerie conduit parallèlement au le- vier et avec une vitesse connue qui sert à évaluer la fréquence du pouls.

L'instrument n’ayant en tout qu'une longueur de 18 centim. et un poids de 240 grammes est aussi portatif qu'on pouvait le désirer.

L'inspection comparative des tracés obtenus par la machine de Vierordt et par la mienne est nécessaire pour bien faire comprendre la différence des indications que donnent les deux instruments.

Fig. 1,

La fig. 1 représente un tracé du pouls à l’état de santé donné par Vierordt. Il est facile de reconnaître l’isochronisme des périodes d’ascension et de descente du levier, caractère commun à tous les tracés donnés par le physiologiste al- lemand.

Fig. 2e

Dans la fig. 2, j'ai réuni bout à bout des tronçons de diffé- rents tracés, afin de faire ressortir la variété des indications de mon appareil. Toutes ces formes sont des types physiologi- ques recueillis dans des conditions de tension artérielle de plus en plus faible.

Il m'a paru convenable de conserver pour mon instrument

32 le nom de sphygmographe que Vierordt a donné au sien. Ce nom rappellera que ce physiologiste est l’auteur de l’idée primitive d’un appareil à levier applicable à létude du pouls chez l’homme.

J'ai fait de nombreuses expériences à l'aide de mon instru- ment sur l’homme sain et sur le malade. J’ai contrôlé les ré- sultats obtenus, par des études hydrauliques sur le pouls arti- ficiel ; je produisais celui-ci avec des tubes élastiques placés dans des conditions hydrauliques que je variais à mon gré. Je crois pouvoir aujourd’hui tirer de ces expériences les con- clusions suivantes que je développerai ultérieurement.

Chez un sujet donné la cause principale des changements dans la forme du pouls réside dans l’état de la tension arté- rielle, celle-ci à son tour est liée à la perméabilité plus ou moins grande des petits vaisseaux.

20 L'état de la tension artérielle modifie le pouls de la ma- nière suivante :

a Si la tensien est forte, l’amplitade des pulsations est fai- ble, leur période d'ascension est plus lente, il n’y à pas de dicrotisme.

b Si la tension est faible, l'amplitude est plus grande, la période d’ascension est très brève et le dicrotisme très prononcé.

Les efforts respiratoires, les changements dans l'attitude du sujet, Papplication de la chaleur et du froid à la surface du corps, la compression d’üne ou plusieurs artères volumineuses amènent des modifications dans la forme du pouls. Ces mo- difications s'expliquent fort bien par les changements de ten- sion qui se produisent sous ces influences, elles se reprodui- sent constamment avec le même caractère lorsqu'on se place exactement dans les mêmes conditions expérimentales.

ï Séance du 2h mars 1860.

M.S. Cloëz a entretenu la Société, dans cette séance, des ré- sultats avantageux que pourrait offrir la culture d’une plante oléagineuse (Glaucium flavum) qui végète dans les terrains incultes des bords de la mer.

Les parties basses des rivages de l’Océan sont généralement recouvertes de matières arénacées, siliceuses et calcaires, dé-

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posées par les vagues ou amenées par le vent. On trouve, à l'embouchure des fleuves, une étendue considérable de terrains incultes ainsi constitués. Le plus souvent les dépôts sont for- més de sable fin; dans quelques localités seulement le sable est remplacé par des cailloux roulés, plus ou moins volumi- neux, comme on peut en voir un Curieux exemple à l'entrée de la baie de la Somme, entre la pointe du Hourdel et le bourg d’Ault. La côte aride voisine de Cayeux a été formée aux dé- pens des eaux par les dépôts successifs de galets amenés du pied des falaises calcaires de la Normandie. Son étendue, au- jourd'hui, est de cinq à six cents hectares, non compris les craus. =

Les rivages caillouteux paraissent au premier abord d’une stérilité complète : ils produisent cependant plusieurs es- pèces de plantes utiles dont on pourrait facilement tirer parti. Tel est, par exemple, le Chou marin (Crambe maritima), que l’on cultive dans quelques parties de la Bretagne, et dont on fait servir les jeunes pousses, blanchies, à l'alimentation de l’homme, tandis que les feuilles vertes et les tiges sont destinées à la nourriture des bestiaux.

On rencontre encore sur toute l'étendue des rivages pier- reux une belle plante, très-commune le long des côles, en France, en Angleterre, en Hollande, en Allemagne et jusqu’en Danemark. Cette plante appartient à un genre voisin des Pa- vots; elle est remarquable par ses grandes fleurs jaunes et ses longs fruits siliqueux. Les botanistes la désignent sous le nom de Glaucie (Glaucium flavum); on lui donne vulgairement le nom de Pevot cornu ou Pavot à fleurs jaunes. C’est le yellow horned-poppy des Anglais. Les habitants de la côte, depuis le Havre jusqu'à Dunkerque, la connaissent sous le nom de corblet.

La culture régulière de la Glaucie pourrait être entreprise à peu defrais dans les terrains incultes cette plante croît na- turellement et elle acquiert un grand développement. Ces terrains sont aujourd'hui sans valeur; leur nature pierreuse, autant que leur grande proximité des bords de la mer, les rend impropres à produire aucune autre plante utile cultivée jusqu'ici.

Extrait de l’Institut, Are section, 4860, 5

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La Glaucie est une plante rustique très-robuste, qui résiste parfaitement au froid le plus rigoureux de l'hiver, et qui paraît peu sensible à la sécheresse produite par les grandes chaleurs de l'été; elle se plaît dans les terrains pierreux , siliceux ou calcaires, facilement perméables à l'air. On la trouve en abon- dance au pied de la colline crayeuse du cap Hornu; elle croît encore spontanément à une certaine distance de la mer, sur les talus de la route longeant le chemin de fer entre Abbeville et Noyelles.

La graine, semée en automne à la volée, doit être enfouie par le binotage, elle germe au printemps suivant vers le mois de

ai; la jeune tige ne fleurit et ne fructifie que la seconde an- née, dix-huit ou vingt mois après l’enfouissement de la graine.

La culture de la Glaucie appartient à la classe des cultures pérennes. Comme celles du Houblon, de la Luzerne, la racine de la plante est vivace : chaque pied peut durer douze à quinze ans; la première année il produit une seule tige, mais ensuite la plante talle progressivement, en sorte qu'il n’est pas rare de trouver des pieds âgés de cinq ou six ans d’où s’élèvent an- nuellement dix ou douze tiges, produisant ensemble 60, 80, 100 fruits, et quelquefois même beaucoup plus. Chaque fruit renferme en moyenne 06':,30 de petites graines noires un peu plusvolumineuses que celles du Pavot.

La récolte du Pavot cornu se fait à la faucille au moment les fruits commencent à jaunir. Alors que les graines sont déjà noires et que les feuilles du sommet de la tige brunissent et se dessèchent, on secoue immédiatement chaque poignée de tiges au-dessus d’une trémie pour faire tomber une portion de la graine, puis on rassemble cinq ou six poignées pour en faire des bottes qu'on laisse exposées sur le terrain, en fais- ceaux ou dizains, pendant le temps nécessaire à la matura- tion plus complète de la graine et à la dessiccation des siliques, en sorte que la totalité de la graine se sépare ensuite facilement par des secousses un peu fortes.

Le périsperme charnu du Pavot cornu un, comme celui de l’'Œillette, par la simple pression, une huile douce, comes- tible, saponifiable et propre à l'éclairage. L'huile, extraite à

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froid, est inodore etinsipide ; elle a une couleur jaune-clair; sa densité est égale à 0,913. Par le repos il s’en sépare à la longue une matière cristallisable présentant tous les caractères de la margarine. La pression à chaud donne un produit plus coloré , possédant une légère odeur qui rappelle celle de la plante; extraite par l’un ou l’autre procédé, l'huile de Glaucie absorbe lentement l’oxygène de l'air, et, de même que toutes les huiles siccatives, elle ne se solidifie pas par l’action de l'acide hyponitrique.

L’hectolitre de la graine de Glaucie séchée à l’air libre pèse 65<,6; la dessiccation complète dans une étuve chauffée à 110 ° lui fait perdre 7,97 ou à peu près 8 pour 100 de son poids d'humidité, qu’elle reprend en partie par une nouvelle exposi- tion à l'air.

Î kil. de graine séchée à 110° renferme 425 gr. d'huile que l’éther enlève facilement et d’une manière complète; le même poids de la graine , simplement séchée à l’air, cède au même dissolvant 391 gr. d'huile. L’hectolitre de graine pesant 65#:,6 donnerait 25,65 de substance huileuse , si on parvenait in- dustriellement à l’extraire en totalité. Le procédé de la pres- sion à chaud laisse 8 à 10 centièmes d'huile dans le tourteau, de sorte qu’on ne retire en réalité que 19 ou 20 kil. d'huile par hectolitre de graine.

Le poids de la graine séchée à l'air est au poids de la tige égrenée après la maturité, mais pourvue encore des valves des siliques, dans le rapport de 1 à 3,64. Dans les essais qui ont été faits en petit, la quantité de graine rapportée à l’hectare s’élevant à 655 kil. ou 10 hectolitres, on aura, pour la même étendue de terrain, 2384 kil. de tiges.

La graine fournit 9,32 pour 100 de cendres. Cette quantité équivaut à 61 kil. pour la quantité de graine récoltée par hec- tare. La tige donne à l’incinération 4,58 pour 100 de résidu, soit 109 kil. par hectare. La culture de la plante enlèverait donc annuellement au sel 170 kil. de substances minérales sur une étendue d’un hectare.

Le résidu de la pression est un engrais puissant; il retient, avons-nous dit, 8 à 10 centièmes d'huile ; il donne 5,3 pour 100 d'azote, et il laisse par l’incinération 13 centièmes de cendres

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très riches en acide phosphorique. Ces nombres se rapportent au tourteau sortant de l’huilerie. Dans cet état, il perd 11 pour 100 d’eau par la dessicc-tion, ce qui porte la quantité d'azote, dans le produit supposé sec, à 6 pour 100, et les cen- dres phosphatées à à 14,6 pour 100. Le poids du tourteau s'élève . à 450 kil. environ par hectare; la proportion d'azote qu'il renferme est de 23%,85.

Les cendres de la tige et de la graine, soumises séparé- ment à l’analyse, ont donné la composition suivante :

Cendre de la tige. Cendre de la graine,

Acide carbonique. 6,387 22,394 ; sulfurique. 5,894 0,756 phosphorique. 2,397 11,287 silicique. 4,150 2,763 Chlorure de sodium. 29,138 4,065 Potasse, 13,821 5,364 Soude. » 1,591 Chaux. 29,002 38,225 Magnésie, 3,35 5,952 Sesquivxyde de fer, 0,823 5,217 Oxyde de manganèse. 0,049 0,695 Sable et perte. 5,045 4,191 100,000 * 400,000

On comprend difficilement à jriori que la végétation soit possible sur des bancs de galets épais de 6 à 8 mètres. C’est pourtant un fait très simple et facile à expliquer quand onJ'a observé. On peut se demander seulement si ce sol aride con- tient actuellement, dans toute son étendue, les éléments né- cessaires à la vie des plantes en quantité suffisante pour une culture régulière. D’un autre côté, on doit se préoccuper du renouvellement de la matière assimilable enlevée annuelle- ment par les récoltes.

La première question d’abord est facile à résoudre. On peut être sûr que partout les interstices des galets sont remplis de sable amené de la mer par le vent, les éléments indispen- sables aux plantes y sont en quantité suffisante. On y trouve des débris de coquilles, de Mollusques, de Crustacés, des frag- ments d'Éponges, des Varechs, etc. L'analyse chimique mon- tre que ce sable renferme environ 10 centièmes de carbonate

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de chaux, une proportion notable de phosphate de la même base: les sels alcalins n'y manquent pas. Chauffé dans un tube, il exhale l’odeur des matières animales; bref, il ren- ferme les substances qu’on trouve dans tous les terrains fer- tiles.

Quant au second point, à savoir l’appauvrissement du sol par l'enlèvement annuel des récoltes, la nature y remédie par le même procédé qu’elle a employé pour le fertiliser : le vent est encore chargé d'amener sur place les matières nécessaires à la durée de la culture. L’épuisement du sol par la culture du Pavot cornu est à craindre seulement dans les endroits le vent n’amène plus le sable marin calcaire; il faut s'attendre encore à trouver des places moins fertiles les plantes ne prendront qu'un faible développement. Ce sera le cas alors ce suppléer le pourvoyeur naturel et de lui venir en aide par l'emploi des engrais artificiels formés avec les varechs et les débris orgeniques de toutes sortes rejetés pendant les gros temps en masses énormes tout le long de la côte. Malgré leur abondance, ces matières ne sont pas encore utilisées; les cul- tivateurs du pays, ne les ayant pas vu employer, n’en connais- sent pas la valeur; ils ne se doutent pas qu’on puisse en tirer parti. On pourrait encore utiliser les tourteaux de la graine provenant des récoltes à l’état de mélange avec la cendre des tiges, pour conserver au sol d’une manière économique une fertilité relative en quelque sorte indéfinie.

Il nous manque quelques données pour établir d'une ma- nière certaine le prix de revient de la graine de Glaucie, les essais ayant été faits sur une petite étendue de terrain. Les frais généraux sont très élevés. Pour que l’opération fût avan- tageuse, il faudrait l’entreprendre sur une grande échelle. On conçoit facilement que les dépenses occasionnées par les constructions, la surveillance, l'entretien et le renouvellement des instruments seraient alors très faibles relativement aux autres dépenses ; en d'autres Lermes, il n’en coûterait pas plus en frais généraux pour exploiter deux cents hectares que pour en cultiver dix. C’est un point essentiel et qu’il ne faut pas perdre de vue; mais on doit remarquer aussi que son impor- tance est subordonnée aux conditions spéciales d’une culture

: 38 isolée, indépendante de toute autre culture, et qu’elle s’amoin-

drirait beaucoup dans le cas d’une culture mixte telle qu’elle pourrait être entreprise par les cultivateurs du pays.

Les frais annuels de culture du Pavot cornu, dans l'hypo- thèse d’une exploitation de cent hectares, peuvent être éva- lués approximativement à 110 fr. par hectare, y compris les dépenses générales, la rente de la terre et la somme destinée à amortir le capital dépensé pour établir la plantation. Le prix de revient de l’huile, d’après ces données, se trouve porté à 45 fr. les 100 kil., ou environ 41 fr. l'hectolitre, déuction faite de la valeur des tourteaux. Or la valeur d’une huile dé- pend de ses qualités et des usages auxquels elle peut servir. L'huile de Glaucie possédant toutes les propriétés de l'huile d Œillette, il eût été naturel de lui attribuer une valeur égale à celle de ce produit. Sans aller jusque-là, on peut assigner à huile de Glaucie la valeur vénale des huiles ordinaires des graines indigènes ; en doublant le prix derevient, onse trouve encore dans les limites des prix ordinaires de la vente. Si l’on adopte ce chiffre pour la valeur vénale de l'huile, on trouve que pour 26 000 fr. environ de capital engagés dans l’entre- prise, le bénéfice net annuel serait de 9300; ce serait un re- venu de plus de 35 pour 100.

En terminant, M. Cloëz signale, comme méritant d’être sé- rieusement examinées, les propriétés thérapeutiques que cer- taines personnes attribuent encore aujourd'hui à la Glaucie. Cette plante a figuré anciennement avec honneur parmi les matières médicales. On a prétendu que son sue, pris à l'inté- rieur, produit le délire et occasionne des convulsions. Ce fait n’est pas impossible, mais M. Cloëz le croit douteux, car il a vu maintes fois employersans danger une assez forte dose d'une teinture vineuse de la plante en question. Le maire de Cayeux, M. Fournier, a toujours chez lui une provision de ce médica- ment quil emploie avec succès dans plusieurs maladies, mais surtout à titre de vulnéraire pour prévenir les suites fâcheuses des chutes graves et des contusions. Il est permis de n’avoir pas une foi entière dans la puissance de ce médicament, mais il ne faudrait pas non plus le rejeter sans examen, d'autant

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plus que l'essai en est simple, peu coûteux, et paraît sans dan- ger ; c’est l'expérience qui doit prononcer.

Séance du Ah avrit 1860.

Zoococie. Caractères généraux de la mammalogie del'Eu- rope et du nord de l’ Amérique et de l’ Asie. M. Pucheran a fait dans cette séance une communication sur ce sujet, pour compléter une communication faite par lui en 1856. A cette époque il s’était borné à constater que, sous le point de vue de leurs aptitudes locomotrices il existe une extrême analogie entre les divers types de Mammifères, habitant les parties sep- tentrionales de l’ancien et du nouveau continent. Il n’était pas alors en mesure de pouvoir établir quels étaient les caractères zoologiques qui leur sont communs. De nouvelles études lui ayant permis de reconnaître ces caractères, il peut au- jourd’hui compléter cette partie {de ses recherches. Voici la note qu'il a lue :

Ainsi que le savent les zoologistes, les divers genres de Mammifères habitant le nord de l’ancien continent ont égale- ment des espèces dans les parties septentrionales de l’Améri- que. Or, quand on examine les types zoologiques que pré- sente cette faune, il est facile de constater, dès le premier coup d'œil, la rareté des Mammifères ongulés, soit de l’ordre des Pachydermes, soit de celui des Ruminants. Les genres du premier de ces ordres sont à peu près étrangers à l'Amérique du Nord (1); en Europe, on n’en trouve qu’une seule espèce ; c’est le Sanglier. Parmi les Ruminants, une seule forme se spécialise un peu dans le nord de l’Amérique; c’est l’Antilo- capra americana. En Europe, les Bouquetins et Moufflons, de même que le Chamois, habitent les cimes de nos montagnes, mais déjà leurs lieux de séjour avoisinent des régions se trouvent des espèces et des genres dont les homologues sont répandus dans le midi de l’Asie et en Afrique. L'extension

(4) M. Baird a récemment signalé, dans les États-Unis, la présence du Dicotyles torquatus (voy. le volume de l'Exploration dela route du Mis- sissipi au Pacifique, p. 627),

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d'habitat des Cerviens et des Boviens est, il est vrai, plus in- contestable, mais leur nombre est encore borné à quelques es- pèces, sans même en excepter le Renne et l’Elan. Un des types européens du genre Cerf, le Daim, paraît même origi- naire des rives méridionales de la \éditerranée.

L'Europe et le nord de l’Amérique sont donc presque en- tièrement dépourvus de ces genres de Mammifères dont les membres sont allongés, la formule digitale plus ou moins in- complète, et dont les conques auditives offrent un certain degré de développement.

Cette caractéristique initiale de la faune qui fait le sujet de nos observations, quoique basée sur un résultat négatif, nous indique évidemment que nous ne devons pas nous attendre à trouver, parmi les genres d'Onguiculés spécialement originaires de cette partie de notre globe, des formes semblables à celles des Mammifères ongulés, et qu’ils doivent nous présenter, au contraire, un ensemble de caractères essentiellement diffé- rents. Une telle conclusion est, en effet, le résultat de l’obser- vation, ainsi que nous paraissent le prouver les divers faits quo nous allens exposer.

L'examen des genres de l'ordre des Carnassiers doit, en premier lieu, attirer notre attention. Les Ursus (1) Meles (Europe), Taxidea (Amérique du Nord), Mephitis (1d.), Gulo, offrent une forme générale lourde et trapue, des membres peu allongés, avec égalité plus complète de ceux de devant et de derrière. Dans tous ces types, la conque auditive est peu dé- veloppée. Une semblable conclusion est applicable, dans l’or- dre des Insectivores, aux espèces de Ta/pa (Europe), Sralops (Amérique du Nord), Condylura (id.), Mygale (Europe), Ga- lemiys (id.), et Erinaceus (Europe). Dansl’ordre des Rongeurs, enfin, les A'ctomys, Castor, Fiber (Amérique du Nord) Ar- vicola, Cricetus (Europe) Hystrix (id.), Erethizon (Amérique du Nord), Spalax (Europe), Siphneus (Europe), etc., ne diffè- rent point, par leurs caractères, des divers types de Carnas- siers et Insectivores dont nous venons de citer les noms.

(1) Les genres dont nous n’indiquons pas l'habitat font partie des deux faunes.

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Parmi les Mammifères de l’Europe et de l'Amérique du Nord, il se trouve cependant des espèces appartenant à des genres dont l’examen conduit à établir une diagnose différente de celle que nous venons de formuler. Il en est ainsi, dans l’ordre des Carnassiers, des Mustela, Putorius, Genetta (Europe), Vulpes, Canis, Felis, Lynx ; dans celui des Rongeurs, dugenre Rat; dans celui des Insectivores, de certains Soricidés. Mais nous avons déjà fait observer, à cette occasion, que lorsque, comme, par exemple, pour la Genette d'Europe et la Man- gouste de Pharaon, les espèces habitant les régions dont ia faune nous occupe en ce moment n'étaient pas aussi peu nom- breuses que le sont les Ongulés, elles faisaient partie de genres, sinon toujours, au moins très souvent, cosmopolites. Or, il en est sûrement ainsi de presque tous ceux dont il vient d’être question.

Les mêmes observations nous paraissent applicables aux types de Mammifères grimpeurs. L'Europe possède, en effet, quelques espèces de Myoæus, mais elle est peu riche en Ecu- reuils et Polatouches. Les premiers, 1l est vrai, sont plus nom- breux dans l'Amérique du Nord, mais il n’est aucun zoologiste qui ne sache que ce genre Ecureuil est excessivement répandu sur la surface du globe.

Nous avons déjà cité dans notre première communication les faits principaux que nous venons de rappeler. Ajoutons maintenant que, lorsque dans ces espèces, les unes euro- péennes, les autres originaires de l'Amérique du Nord, on examine certains caracteres, on ne tarde pas à se convaincre qu'ils éprouvent fréquemment des modifications qui ne per- mettent pas de les assimiler complétement à leurs congénères d’une faune différente. Ainsi, dans le genre Hérisson, celui d'Europe a des oreilles moins allongées que son homologue d'Algérie, qui, sous ce point de vue, ressemble plus à ceux des autres parties de l'Afrique. Dans la famille des Soricidés, les genres dont les conques auditives sont très dévelop- pées sont moins représentés en Europe et dans le mord de l’A- mérique. Aussi, sommes nous persuadé que, plus on examinera avec attention, soit dans leurs caractères, soit dans leurs mœurs, les types spécifiques de Mammifères de ces deux par-

Extrait de l'Institut, 1"e section, 4860, 6

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es du monde, faisant partie des genres dont la distribution géographique est très étendue, plus on aura occasion de con- stater qu'ils présentent fréquemment quelques-unes des formes qui sont spéciales à cette faune. Nous pouvons, pour confirmer la réflexion que nous venons d'émettre, citer encore, comme exemples, les deux Lièvres, originaires de l'Amérique du Nord, auxquels M. Bachman a imposé les dénominations de Lepus aquaticus et de Le pus palustris.

Nous nous croyons dès lors autorisé à conclure que les Mam- mifères habitant d'une manière spéciale l'Europe et l’Amérique du. Nord sont caractérisés :

:Îo Par des formes générales lourdes ;

90 Par la tendance à l'égalité de longueur de leurs deux paires de membres, presque toujours courts et trapus; dispo tion qui s’harmonise avec celle de la forme générale, et qui coïncide avec une formule digitale complète, les doigts étant, en avant comme en arrière, au nombre de cinq, et offrant la même uniformité dans leurs rapports avec Les régions métacar- pienne et métatarsienne ; ;

80 Par le faible développement des conques auditives, dont les divers états d’ampleur sont le plus souvent, aiisi que l'ont prouvé les diverses observations auxquelles nous venons de nous livrer, en rapport avec l’allongement des membres (1), et principalement des membres postérieurs.

Nous ne reviendrons pas sur les indications relatives aux habitudes motrices des divers types de la faune dont nous nous occupons : nous les avons, en effet, signalés dans notre premier travail; elles sont d’ailleurs essentiellement en rap- port avec les caractères zoologiques que nous venons de for- muler. Il nous paraît également de toute évidence que, soit en Europe, soit dans le nord de l’Amérique, la manifestation de ces deux ordres de faits s’harmonise avec la constitution du sol dans ces deux parties du monde.

(4) Le même rapport pourrait bien exister entre l’œil et les membres : -€ est un sujet d’études que nous nous bornons maintenant à signaler, les observations que nous avons faites à cet égard nécessitant surtout, pour être confrinces on infirmées, l’examen de ces organes dans la classe des In- sertébrés.

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C’est à l’aide d'un semblable rapport qu'il nous paraît éga- lement possible d'expliquer comment il existe un véritable antagonisme de caractères entre les Mammifères africains» d’une part, et ceux de l'Amérique du Nord et de l’Europe, d'au- tre part. Dans la première région, en effet, nous trouvons un sol plus aride et plus sablonneux; dans la seconde, un sol plus humecté, plus sillonné de rivières et de fleuves. Rien d'étonnant, dès lors, que, dans les Mammifères qui habitent ces derniers lieux, les membres soient moins allongés.

Ce qui nous paraît, en second lieu, démontrer encore d’une manière moins contestable cette corrélation entre les carac-

tères généraux d’une faune et la consütution du sol qu'elle habite, c’est l'observation des faits que nous présentent les par- tes septentrionales du continent asiatique. Dans le nord de l'Asie, en effet, nous retrouvons le désert, et le désert sans la température élevée du continent africain. Aussi voyons-nous se manifester des types de Mammifères chez lesquels les membres, surtout les postérieurs, et la conque auditive offrent le degré de développement si particulier à la mammalogie afri- caine. Il en est ainsi des Gerboises et Gerbilles, ainsi du genre Cheval. On sait que, lorsque la température moyenne des lieux

. éprouve des modifications, de nouveaux genres et de nouvelles espèces viennent prendre place à côté de ceux déjà existants. Nous pouvons ajouter à cette cause celle relative à l’appari- tion d’un changement dans la nature du sol, et les exemples que nous venons de citer nous semblent de nature à justifier notre nouvelle assertion.

Il nous paraît évident, par ces divers faits, que la manifes- tation de nouvelles formes dans la faune contemporaine du nord de l'Asie se trouve présenter de l’analogie avec le mode d'apparition de nouvelles espèces et de nouveaux genres dans les terrains qui forment l'écorce du globe. La nécessité du comparer ceux-ci avec les types vivants actuellement en Eu- rope et dans le nord de l'Amérique et de l’Asie nous paraît même de nature à faire poser la question des analogies et diffé- rences qu'ils peuvent offrir d'une manière beaucoup plus large qu'elle ne l’a été jusqu'ici. Il nous semble nécessaire, en effet, non-seulement de signaler quels sont les types qui n’existent

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plus maintenant, mais de voir s’ils présentaient ou ne présen- taient pas, d'ensemble dans leurs formes et, par suite, dans leurs habitudes, des caractères différents de ceux qui nous sont offerts par leurs congénères actuels. En ce qui concerne l’Eu- rope et le nord de l'Amérique, par exemple, les Ongulés fos- siles ne sont-ils pas plus nombreux que les Onguiculés ? Tel nous semble être un des côtés par lequel peut être abordé ce grand problème de la perpétuité ou de l’immutabilité des formes dans le règne animal.

Ajoutons, en terminant, quelorsquel’on compare, dans l’an- cren continent, les deux faunes mammalogiques du midi et du nord, on constate qu’elles offrent dans leurs appareils loco- moteurs de véritables différences. À la mammalogie des ré- gions méridionales appartiennent principalement les genres chez lesquels les membres présentent, soit en avant, soit en arrière, plus de longueur et un développement plus marqué. Ils deviennent dès lors, par leurs habitudes, ou grimpeurs ou essentiellement marcheurs, comme les Ongulés. C’est à des observations ultérieures à fixer la proportion relative des types doués de ces deux modes de locomotion en Afrique, dans le midi de l'Asie et les archipels qui l’avoisinent. En Amérique, la même conclusion nous paraît exacte; maïs la dernière question que nous venons de poser devient plus difficile à ré- soudre, par suite de la nécessité, se trouve lezoologiste qui veut l’aborder, de porter son attention sur les caractères de dégradation qui lui sont offerts par les Mammifères de l’Amé- rique méridionale.

Séance du 21 avril 4860,

CHIMIE ORGANIQUE. Sur une nouvelle série cle composés or- ganiques; le quadricarbure d'hydrogène et ses dérivés. M. Berthelot a fait la communication suivante :

1. Les deux gaz hydrocarbonés les plus simples sont le gaz des marais représenté par la formule C2H4 et le gaz oléfiant représenté par la formule CH.

On sait que le gaz des marais est également désigné sous le nom de protocarbure d'hydrogène, parce qu'il est le moins xiche en carbone de tous les carbures d'hydrogène. Le gaz olé-

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fiant a reçu le nom de bicarbure d'hydrogène, parce qu'il ren- ferme une proportion de carbone double du précédent unie à la même proportion d'hydrogène: Par suite des progrès de la chimie organique, chacun de ces deux carbures est de- venu le type d’une suite de carbures d'hydrogène, représentés par une même formule générale. Au gaz des marais répondent les carbures C2H2+72: au gaz oléfiant, les carbures CH:

Enfin, chacun de ces nombreux carbures donne naissance, par ses métamorphoses, à un alcool, à des aldéhydes, à des acides, à des combinaisons chlorurées, bromurées, etc., en un mot, à toute une série de dérivés dont la multitude s’ac- croît chaque jour à la suite de nouvelles découvertes.

Je viens aujourd’hui faire connaître le résultat de mes re- cherches sur un troisième hydrogène carboné, gazeux comme les deux précédents, représenté par une formule aussi simple, et qui paraît destiné à devenir le type d’une série générale non moins nombreuse et non moins importante : c'est l’acétylène ou qguadricarbure d'hydrogène, représenté par la for- mule C#E2, prototype des carbures CHE

2. L’acétylène se produit toutes les fois que l’on fait passer dans un tube chauffé au rouge le gaz oléfiant, la vapeur de l’al- cool, de l’éther, de l’aldéhyde et même celle de l'esprit de bois. Il prend naissance lorsqu'on fait agir à la même température la vapeur du chloroforme sur le cuivre métallique; enfin il fait partie du gaz de l'éclairage. Dans ces conditions si diverses et dont la multiplicité même atteste la stabilité de l’acétylène et l'intérêt qui s’attache à son étude, j’ai obtenu ce gaz, je l'ai isolé à l'état de pureté, et j'ai constaté sa nature par l'analyse. C'est l’éther qui le fournit en plus grande quantité.

3. Quelles que soient les cifconslances de sa production, l’acétylène est mélangé ayec une grande proportion de gaz étrangers, et il doit être engagé d’abord dans une combinaison particulière dont la décomposition ultérieure le fournit à l’état de pureté.

Cette combinaison est identique avec an composé rouge et détonant, découvert par M. Quet en 1858 en faisant agir une

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solution ammoniacale de protochlorure de cuivre sur les gaz obtenus dans la décomposition de l’alcool par l’étinceile élec- trique ou par la chaleur. Ce composé a été également examiné par M. Bôttger ; mais aucun de ces deux chimistes n’a analysé le gaz qu'il dégage lorsqu'on le dissout dans l’acide chlorhy- drique.

Ce gaz est précisément l’acétylène.

Voici ses propriétés. ;

4. L'acétylène est un gaz incolore, assez soluble dans.l’eav, doué d’une odeur désagréable et caractéristique.Mêlé au chlore, il détone presque aussitôt avec dépôt de charbon, même sous linfluence de la lumière diffuse ; 1l brûle avec une flammetrès éclairante et fuligineuse. Je n’ai réussi à le liquéfier ni par le froid, ni par la pression. Sa densité est égale à 0,92. Un volume d’acétylène, brûlé dans l’eudiomètre, fournit deux volumes - d'acide carbonique, en absorbant deux volumes et demi d’oxy- gène. Ces résultats, joints à la densité, déterminent la formule de l’acétylène CH. Cette formule représente 4 volumes. Elle donne lieu à plu- sieurs remarques essentielles. En effet, on voit d’abord que

l’acétylène est le moins hydrogéné parmi tous les carbures _ d'hydrogène gazeux, circonstance qui s'accorde avec sa grande stabilité.

Sa composition centésimale est la même que celle de la

benziné C12HS, du styrol CAS et du stilbène C28H44;

mais tous ces principes sont liquides et leur vapeur est plus condensée.

Enfin l’acétylène CARE ne diffère de l’aldéhyde C:H102 et du glycol CH607

que par les éléments de l'eau. Je n’ai pas réussi à l'obtenir à une basse température avec ces deux substances.

5. Venons à l'étude des propriétés chimiques de l’acétylène. On peut les résumer en un mot, en disant que ce carbure pos- sède la plupart des propriétés essentielles du gaz oléfiant, dont

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il diffère seulement par deux équivalents d'hydrogène ; il fournit des dérivés parallèles en s’unissant au brome, à l’acide sulfu- rique, aux éléments de l’eau, enfin-à l'hydrogène. 1l serait fa- cile de généraliser les prévisions fondées sur ces premiers ré- sultats en envisageant tonne à terme chacun des dérivés du gaz oléfiant. |

Je n’insisterai pas ici sur 1e bromure d’acétylène ; je revien- : drai également plus tard sur l’analyse des composés que l’a- cétylène forme avec le protochlorure de cuivre, avec les azo- tates d'argent et de mercure, et sur l'analyse des composés semblables que j’ai découverts entre le gaz oléfiant et les sels d'argent et de mercure.

L'étude de ces composés me paraît jeter un jour nouveau sur la constitution des fulminates.

L'acide acétylsulfurique mérite une attention toute particu- lière. Cet acide se prépare au moyen de l’acétylène, exacte- ment comme l'acide éthylsulfurique au moyen du gaz oléfiant. Dans un cas comme dans l’autre, l'absorption du gaz s’effec- tue seulement au moyen de l'acide concentré et avec le con- cours d’une agitation violente et continue, prolongée pendant un temps très long. Pour absorber un litre d’acétylène il faut même plus de temps que pour le gaz oléfiant : un litre d'acé- tylène exige près d'une heure et de 4 000 secousses.

L’absorption terminée, on étend l'acide d’eau avec beau- coup de précaution, et on sature par le carbonate de baryte. En évaporant, on obtient un sel très bien . l'acétyl- sulfale de baryte.

Au lieu de saturer par le carbonate de baryte, on peut distil- ler; on obtient ainsi par des rectifications systématiques un liquide particulier, un peu plus volatil que l’eau, très altérable, doué d’une odeur analogue à l’acétone , mais extrêmement irritante. Ce liquide est soluble dans 10 à 15 parties d’eau. Le carbonate de potasse le précipite de sa solution aqueuse ; mais le chlorure de calcium ne paraît pas avoir la même efficacité. Je regarde ce liquide comme l'alcool acétylique C:H4032, lequel diffère de l'alcool ordinaire C:H602 par deux équivalents d'hydrogène. - |

Je me borne à signaler ici l'existence de tous ces composés;

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les difficultés que présente la préparation de quanütés un peu considérables d'acétylène m'ont empêché jusqu’à présent de les étudier avec détail ; je me réserve d'y revenir.

6. Je terminerai en établissant une relation nouvelle entre l'acétylène et le gaz oléfiant, fondée sur leur transformation réciproque. J'ai dit plus haut comment le gaz oléfiant et ses hydrates(alcool, éther) fournissent de l’acétylène; mais ce rap- prochement n’est établi que sur des phénomènes de destruction compliquée et opérée à la température rouge. J'ai réussi à opérer la transformation réciproque à une basse température, c'est-à-dire à changer l’acétylène en gaz oléfiant :

CAF? + H? CHA Acétylène. Gaz oléfiant.

Ii suffit de traiter par l'hydrogène naissant la combinaison qui résulte de l’action de l’acétylène sur le protochlorure de cuivre ammoniacal. J'ai fait plusieurs essais infructueux avant d'arriver au but. L’hydrogène naissant développé dans une liqueur acide n'a pas fourni de résultats convenables. Mais il en a été tout autrement de l'hydrogène naissant produit par la réaction du zinc sur l’ammoniaque en présence du composé acétylcuivreux. Dans ces conditions, il se dégage un gaz très riche en gaz oléfiant, lequel demeure mélangé avec de l’hy- -drogène et un peu d’acétylène. On isole le gaz oléfiant etonle purifie par un procédé particulier que j'ai découvert et quil serait trop long d'exposer ici. Puis on soumet à l'analyse eu- diométrique le gaz oléfiant obtenu dans un état de pureté par- faite.

Deux points sont à remarquer iei : la méthode employée pour développer l'hydrogène naissant dans une liqueur alca- line et en présence du composé organique ; cette méthode me paraît susceptible d'applications très étendues ; la relation définie entre l’acétylène et le gaz oléfiant, relation qui achève de fixer la place du premier carbure d'hydrogène dans la clas- sification systématique des composés organiques. C'estle point de départ de la série acétylique, parallèle à celle des dérivés de l'alcool ordinaire.

La série acétylique est surtout intér essante Fe la simplicité desa composition et par sa construction systématique entière-

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ment fondée sur la synthèse. En effet, elle dérive régulière- ment de son carbure d'hydrogène fondamental, l’acétylène, et ce carbure lui-même peut être obtenu, soit avec le gaz oléfiant et ses dérivés, soit avec l'esprit de bois et le chloroforme, c’est à-dire avec les dérivés du gaz des marais. Or, j'ai établi que le gaz des marais et le gaz oléfiant peuvent être formés par la combinaison des corps simples qui les constituent ; la même démonstration s'applique done à l'acétylène et à toutes les combinaisons que ce carbure forme à son tour par voie syn- thétique.

Seance du 31 mars 1860.

ZooroctEe. Nouveau genre de Mollusque gastéropode. M. Hupé, aide naturaliste au Muséum d'histoire naturelle, propose, dans la note suivante, communiquée à la Société, l'établissement d'un nouveau genre de Gastéropodes sous le nom de Galeropsis.

Tout en reconnaissant combien l’on doit être réservé dans l'établissement de coupes génériques nouvelles ct les inconvé- nients qui résultent de leur multiplicité exagérée, nous avons dû, pour l’objet dont il va être question, faire une sorte de violence à ces principes en nous décidant à établir celle-ci; car, il faut bien le reconnaître, il n’y aurait pas moins de danger à vouloir forcer les rapports qui doivent nécessairement exister entre toutes les espèces d'un même genre en y introduisant des formes qui ne s’y ralllent que très imparfaitement et qui ont, d’ailleurs, pour résultat d'infirmer les genres déjà acceptés de tout le monde, en affaiblissant leur valeur par une extension arbitraire et forcée.

La coquille fossile qui fait le sujet de cette étude appartien à la classe des Gastéropodes, dans l’embranchement des Mol- lusques ; elle a tout à fait l'apparence d’un Cabochon (P:- leopsis) ; mais, quand on l'examine avec plus d'attention, on ne tarde pas à reconnaître que, soit à cause de la présence d’une columelle à l’ouverture, soit par son mode d’enroulement, elle doit évidemment rentrer dans le groupe des Mollusques de la famille des Purpurifères. Elle offre, en effet, une certaine ana- logie avec quelques espèces singulières du genre Pourpre et

Extrait de l’Institut, 1"e section, 1£60, 7

90 notamment avec les Purpura madreporarium, Brod.; Fur- pura monodon, Quoy, etc., lesquelles, par suite de l'habitude qu'elles ont de vivre enfoncées dans les Madrépores, se défor- ment plus ou moins, et perdent ainsi la régularité de leur forme primitive.

Notre nouveau genre pourrait donc, jusqu'à un certain point, être considéré comme l’exagération des caractères présentés par les espèces que nous venons de citer, mais nous ne pensons pas quil y ait lieu d’en faire une assimi- lation générique complète, et nous n'indiquons ces rapports que pour fixer d’une manière plus précise la place qu'il doit occuper dans la nombreuse série des Gastéropodes ; c’est donc auprès des genres Pourpre, Concholépas, etc., qu'il devra prendre rang.

Les caractères que l’on peut assigner à notre nouvelle coupe générique peuvent être exprimés ainsi :

« Coquille capuliforme, subconique, convexe en dessus, concave en dessous; spire courte, à peine distincte; dernier tour très grand, irréguhièrement convexe en dessus; ouverture très ample, dilatée, à bords conünus et flexueux; columelle large, aplatie, peu concave au milieu et pourvue à sa base d’une saillie dentiforme obtuse ; point d'échancrure terminale, mais un léger sinus. »

Nous ne connaissons jusqu à présent qu'une seule espèce appartenant à ce genre, elle est à l'état fossile et provient des terrains tertiaires de l’étage des faluns, probablement du bas- sin de la Gironde; l'individu qui nous a servi de type fait partie de la collection de M. Léon de Lavenay, amateur dis- tingué de conchyliologie, auquel nous la dédions sous le nom de Galeropsis Lavenayanus, Hupé.

Séance du 5 mai 1860.

CHimiE. Présence du chlore et du soufre dans le caoutchouc naturel ou manufacturé.— Voici le résumé d’une communi- cation faite à la Société dans cette Séance par MM.S. Cloëz et À. Girard.

Parmiles nombreux procédés pouvant servir à déterminerle chlore et le soufre dans les matières organiques, les chimistes font souvent usage de celui qui consiste à brûler la matière au

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moyen d'un nitrate alcalin en fusion; cette méthode est trèscon- venable quand il s’agit d’une simple reconnaissance ou d’un do- sage rapide; plusieurs expérimentateurs l'ont employée récem- ment pour l’analyse du caoutchouc; mais on a cru reconnaitre qu'elleneprésente pas desgaranties suffisantes d’exactitude pour le dosage de quantités minimes de chlore et de soufre.On conçoit, en effet, que pendant la combustion, une partie du caoutchouc brûlant à la surface du nitrate fondu, le chlore et le soufre que la matière peut renfermer sous la forme de produits volatils ou susceptibles de le devenir par suite de réactions secondai- res, se trouvent partiellement perdus; dans quelques cas même, lorsque ces corps sont peu abondants, on peut, en opérant de cette façon, n’en retrouver dans le nitrate alcalin que des traces insensibles. Ce procédé conduit en outre à confondre dans un même dosage le chlore et le soufre contenus dans le caoutchouc naturel, et les mêmes éléments ajoutés intention- nellement à l’état de chlorure de soufre, dans le but d'obtenir la vulcanisation.

Pour parer surtout à ce dernier inconvénient, on a proposé récemment une méthode qui permettrait, d’après son auteur, de distinguer le chlore et le soufre existant naturellement à l'état salin dans le caoutchouc, de la portion des mêmes corps désignée sous les noms de chlore et de soufre élémentaires et dont on a cru pouvoir attribuer l'origine au chlorure de sou- fre. La méthode consiste à distiller le caoutchouc à une tem- pérature inférieure à 350° et à diriger les produits volatils dans un tube chauffé au rouge que traverse également un cou- rant d'air; au sortir du tube, les gaz se rendent dans l’eau dis- üllée ils abandonnent, entre autres produits, l'acide chlor hydrique qu'ont pu engendrer les produits chlorés volatils.

Le but de celte note est de montrer que si le premier pro cédé dont nous venons de parler ne donne pas toujours des résultats d'une exactitude rigoureuse, il est cependant préfé- rable au second, si l’on a soin surtout d'opérer comparative- ment. À notre avis, disent les auteurs, il est indispensable de déterminer quantitativementle chlore etle soufre dans le caout- chouc naturel ou manufacturé, et l’on s’exposerait à de graves erreurs si l’on admettait que ce n’est pas la proportion, mais

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l'existence de ces éléments qu'il faut chercher à établir. On a avancé que du moment l'expérience constate quelque pro- portion que ce soit de chlore ou de soufre élémentaires dans un produit fabriqué avec du caoutchouc, quelques propriétés qu'il présente d’ai leurs, l'addition du chlorure de soufre est démontrée. Cette proposition, madmissible en principe, est en réalité une grosse erreur. Pour Le prouver, il nous suffira d’é- tablir que tous les échantillons de caoutchouc naturel existant dans le commerce, tous ceux du moins sur lesquels nous avons expérimenté, non-seulement renferment du chlore et du soufre à l’état de combinaisons minérales que l’on retrouve dans les cendres, mais encore dégagent, à une température voisine de 250, de l'acide sulfhydrique et de l'acide chlorhydrique, dont il est facile de constater l'existence en quantité notable dans les produits de la distillation.

Ce fait pouvait être prévu, d’après la composition du caout- chouc et la nature des cendres qu'il laisse par l’incinération ; en effet, les analyses immédiates les plus anciennes, celles de Faraday notamment, démontrent que le caoutchouc renferme une grande proportion de matières azotées,; d'après les re- cherches de M. Payen, on trouve même dans le caoutchouc naturel trois espèces différentes de ces matières. Or, les chi- mistes savent que la plupart des produits azotés de l’organisa- tion renferment du soufre parmi leurs éléments ; l’albumine, le gluten en sont des exemples bien connus; d’un autre côté, l'analyse fait reconnaître dans les cendres du caoutchouc la présence de divers chlorures et de la magnésie, et l’on sait qu'en chauffant des sels de magnésie hydratés et des chloru- res, il se forme du chlorure de magnésium qui se décompose partiellement, même à une température peu élevée, en magné- sie et en acide chlorhydrique ; dans le cas une matière or- ganique azotée est en présence, il se forme du chlorhydrate d’ammoniaque.

Les considérations qui précèdent nous ont conduits, ajoutent MM. C. et G., à penser à priori que le caoutchouc naturel de- vait donner à la distillation du chlore et du soufre ; l'expérience a démontré l'exactitude de nos prévisions.

Nous avons opéré sur des substances de diverses provenan-

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cs, sur des poi'es du Para, sur le caoutchouc d'Afrique lavé, sur le caoutchouc dit Ceura, enfin sur des échantüllons divers de caoutchouc enfermées depuis nombre d’années dans des collections particulières et de provenances inconnues; dans tous les cas nous avons reconnu :

Qu'il suffisait de chauffer dans un tube fermé par un bout du caoutchouc naturel, et d'exposer à l’orifice du tube une petite bande de papier imprégné d’acétate de plomb, pour que celui-ci, noireissant rapidement, indiquât la présence du soufre dégagé à l’état d'hydrogène sulfuré ;

2% Qu'en incinérant ces échantillons, on retrouvait dans les cendres de l'acide sulfurique, du chlore en quantité très faible, des traces de chaux et enfin de la magnésie; en opérant sur les mêmes échantillons, après qu'ils ont subi le lavage entre des cylindres de fer, nous avons vu qu'aucun de ces produits n'avait disparu, mais qu'au contraire l'acide sulfurique, le chlore, la chaux et le fer avaient augmenté, résultat facile à comprendre, par suite de l’incerporation à la masse des sels que renfermait l’eau employée au lavage et du fer abandonné par les cylindres;

Qu'en distillant au bain d'huile à 2500 les caoutchoucs naturels ou lavés que nous avons cités, dirigeant les produits de la distillation en même temps qu'un faible courant d'air dans un tube chauffé au rouge vif, et faisant passer le mélange de gaz et de vapeurs à travers deux tubes à boules contenant de l’eau distillée, celle-ci contient après deux heures de chauffe une quantité notable d'acide chlorhydrique ; il suffit en effet de précipiter par l'azotate d'argent, de séparer par décantation le liquide du dépôt, et de faire bouillir celui-ci avec de l'acide azotique, pour trouver à côté du cyanure d’argent soluble du chlorure d’argent facile à reconnaître par son insolubilité dans l'acide nitrique bouillant, sa solubilité dans l’ammoniaque et sa fusibilité sous l'influence de la chaleur.

Des faits précédents il résulte que le caoutchouc naturel ou lavé fournit à la distillation des produits sulfurés et chlorés, la présence du soufre s’expliquant aisément par l'existence de matières azotosulfurées dans le caoutchouc, celle du chlore par la nature des substances salines que ce produit renferme ;

D4

dès lors, et eu égard surtout à la petite quantité de substance sur laquelle peuvent se faire ces déterminations, il serait inexact d'admettre qu'un échantillon d’un produit fabriqué avec du caoutchouc a été vulcanisé par le chlorure de soufre, parce qu'il donne à la distillation des produits sulfurés ou chlorés ; on doit toujours s'assurer d'abord que l’objet présente tous les caractères de la vulcanisation, et s'attacher ensuite à déter- miner exactement et par Comparaison les proportions de soufre et de chlore contenues dans le caoutchouc naturelet dans celui qui à passé par les diverses phases de la fabrication.

GÉOMÉTRIE. -— M. Mannheim a exposé devant la Société, dans la même séance, la solution de la question suivante :

Un polygone se déplace dans son plan, en restant semblable à lui-même; on donne les centres de courbure de la courbe enveloppe d'un des côtés et des courbes décrites par les extré- miles de ce côté ; on demande le centre de courbure de la ligne décrile par un sommet quelconque du polygone, ainsi que celui de la courbe enveloppe d'un des côtés.

M. M. montre ce que devient cette solution dans le cas par- ticulier l’on considère une droite mobile, de longueur va- riable, que l’on partage toujours dans un rapport constant.

Il annonce que la solution développée aujourd’hui se dé- duit de recherches générales, qu'il donnera plus tard, et qui sont relatives à l'étude d’un polygone plan déformé d’une ma- nière quelconque. Ces recherches conduisent à certaines pro- priétés vraies pour les polygones sphériques et pour des po- lygones géodésiques tracés sur une surface quelconque.

MÉCANIQUE. La communication suivante a été faite à la Société dans la même séance par M. de Tessan :

« Il y a quinze jours, il s’est produit ici quelques objections contre les conclusions d’une note quo j'avais présentée à l’A- cadémie des sciences, concernant la proposition de statique relative au transport d'un couple. Comme ces mêmes objec- tions s'étaient produites quelques jours auparavant à l’Acadé- mie, j y avais répondu par une seconde note qui n'a pu être insérée dans les Comptes rendus : je demande à la Société la permission de résumer ici cette réponse.

» J'avais montré dans ma première note : que la pro-

99 position relative au transport d'un couple était fausse dans le cas du mouvement varié lorsqu'on suppose nulles les forces d'inertie; que cette proposition n’était vraie que dans l'état d'équilibre des forces prises en considération ; que la démonstration était toujours fausse, en ce qu'elle viole un principe essentiel de mécanique, le principe de M. Duhamel.

» On ne conteste pas le premier point, mais on objecte con- tre le second que la proposition est vraie dans le cas du mou- vement varié, lorsque l’on tient compte des forces d'inertie ; el, quant au troisième point, on se borne à affirmer que la dé- monstrauon ne pèche en rien contre le principe de M. Duha- mel.

» La proposition est certainement vraie dans le cas du mou- vement varié, lorsqu'on tient compte des forces d'inertie ; puis- que alors ces forces font constamment équilibre aux forces du couple, et que la proposition est toujours vraie dans l’état d'équilibre des forces prises en considération. Cette objection ne prouve donc rien contre le second point : elle le confirme.

» De plus, on oublie en la faisant qu'il s’agit ici d'une pro- position de statique, c’est-à-dire d’une proposition formulée à un moment l'élève ignore encore l'existence de ces forces d'inertie etl’équihbre qu’elles font aux forces du couple, notions qui lui sont données seulement dans la dynamique, la- quelle suppose la connaissance déjà acquise de la statique ; no- tions qu'il est dès lors impossible d'introduire dans cette der- nière science.

» Mais cette objection prouve que la démonstration, qui ne tient aucun compte de ces forces d'inertie, nécessaires cepen- dant à l'exactitude de la proposition, ne saurait être exacte, à moins que son exactitude ne soit indépendante de la valeur de ces forces. Or, on ne conteste pas que la proposition ne soit fausse dans le cas du mouvement varié, lorsqu'on suppose nulles les forces d'inertie : la démonstration est donc fausse dans ce cas et par suite fausse dans tous les cas.

» On objecte toutefois contre cette conclusion que les forces d'inertie ne peuvent être supposées nulles dans le :nouvement varié, parce que les vitesses seraient alors infinies. Mais il im- porle peu en statique que les vitesses soient finies, infinies ou

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nulles, puisque cette science ne s’en occupe pas et qu’elle ne peut s'en occuper, puisqu'elle s'occupe exclusivement des for- ces qui ne sont altérées en rien par les vitesses finies, infinies ou nulles qu'elles peuvent produire. C'est là, il est vrai, une abstraction irréalisable ; mais ce n’est pas la seule en mécami- que. Celle du point matériel, celle d’un lien liné:ire immaté- riel, etc., ne le sont pas moins, et cela n'empêche pas d'en faire usage. Cette objection n’a donc pas de valeur en statique; et la démonstration de la proposition relative au transport d'un couple reste nécessairement fausse.

» Il n’est peut-être pas inutile de faire remarquer, en outre, que, dans l’état d'équilibre d’un couple au transport duquel cette démonstration s applique également bien, les forces d'inertie sont nulles ; que, mal2ré cela, Ia démonstration ne tient aucun compte des forces données qui maintiennent alors l'équilibre; et que la proposition est alors certainement vraie. En sorte que, sans que la démonstration en dise rien, ce seraient tantôt les for- ces d'inertie et tantôt des forces données, dont elle ne tient nul comple, qui la rendraient exacte : ce qui serait au moins très bizarre, si ce n’était une erreur.

» Mais, nous l’avons vu, la démonstration est fausse; et, en l'examinant de près, on voit facilement que cela tient à ce qu'elle viole le principe de M. Duhamel.

» Je terminais en disant que la statique, dans l'impossibilité elle est de tenir compte des forces d'inertie, cause de la place qu’elle occupe dans l’enseignement de la mécanique, de- vrait ne trailer que des questions les forces considérées sont à l’état d'équilibre et par conséquent les forces d'inertie sont nulles d’elles-mêmes; et laisser à la dynamique, qui seule peut les traiter, les questions les forces d'inertie ne sont pas nulles. I! suffit en effet à tous les besoins de la mécanique que les propositions de la statique soient vraies dans l'état d’équi- libre ; puisque par le principe de d’Alembert toctes les ques- tions de dynamique sont ramenées à des questions d'équilibre ; ou, ce qui revient au même, puisque, dans le mouvement varié des corps, il y a toujours équilibre entre les forces d'inertie et les forces données C’est aux professeurs à juger si cette lé-

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gère modification n’éviterait pas à leurs élèves bien des diffi- cultés et ne dissiperait pas beaucoup d'obscurités.

» S'il est peu intéressant, relativement aux progrès de la science, qu'une démonstration soit vraie ou fausse, pourvu que la proposition soit toujours vraie dans ses aplications au mou- vement des corps réels, il n’en est pas de même relativement à l'enseignement de cette science : sous ce rapport une dé- monstration fausse a de graves inconvénients, et sa rectifica- tion me semble avoir quelque importance et mériter l’atten- tion des auteurs et des professeurs. »

GÉOMÉTRIE. M. Paul Serret communique les théorèmes suivanls :

1. Un quadrilaière gauch: élant circonserit à une surface du second degré, les points de contact des côlés sont situés dans un même plan. .

La démonstration résulte, géométriquement, du théorème segmentaire de Newton et de la théorie des transversales ; analytiquement, de l'équation générale

(aA + BH cC + dD}? + m.AC+n.BD—o des surfaces du second degré inscrites dans un quadrila- tere ABCD ; a, b, c, d, m et n désignant six paramètres ar- bitraires ; etles plans des angles successifs du quadrilatère étant représentés par les équations o—=AZB=C=D. L’é- quation du plan des points de contact est alors :

aA + bB + cC+ dD —o.

2. Corollaire. Un hexagone qauche étant circonscrit à une surface du second degré, et les points de contact de cinq des côtes élant situés dans un même plan : ce plan contient aussi le sixième point de contact; et les diagonales, joignant les sommets opposés de l'hexagone, se coupent en un même point.

3. Toute surface présentant deux modes distincts de géné- ration par un cercle de rayon variable qui se meut parallile- ment à lui-même, est une surface du second degré.

Les plans de deux cercles fxes, du premier et du second mode de génération, étant pris pour plans des zx et des zy; la corde commune à ces deux cercles ccincidant avec l'axe

Extrait de Pnstitut, 1'e seclion, 1860. 8

D8 des z, et l’origine étant placée au milieu de cette corde; on trouve cette double équation de la surface cherchée :

(D) 224y2422 97. f(y)—2By——0, (2) 22+%2+a2—2y.F (x) —3A%—0c?2—o;

{{y)et F (x) étant deux fonctions arbitraires des seules varia- bles y ou x : d’ailleurs, l'identification de ces équations donne la relation x/(y)+By=yF(x)+Ax, ou CRE A NS anne

qui doit être une identité; ce qui exige que chacun des deux membres se réduise à une même constante C’. On a donc, par exemple,

(3) f@)=A+CYy, et l'équation (1) représente dès lors une surface du second degré.

Rectification. Le théorème communiqué dans la séance du 12 mars 1859 n’était pas nouveau : M. Paul Serret en a trouvé, depuis, l'énoncé dans les concours de l’université de Dublin pour l’année 1852.

Séance du 19 mai 1860.

MéÉcANIQUE.— La note suivante de M. de Tessan, se ratta- chant à une communication précédente, a été lue dans cette séance à la Société.

« Toute proposition de statique, si elle est démontrée d’une manière exacte et rigoureuse, doit nécessairement rester vraie lorsqu'on suppose nulles les masses des points et des liens du système ; car, en statique, une démonstration ne peut tenir aucun compte des masses ; et, dès lors, sa conclusion doit né- cessairement être vraie quelles que soient ces masses; par suite, elle doit être vraie quelque petites qu'on les suppose; et, enfin, elle doit être vraie lorsqu'on les suppose nulles.

» Toute proposition de statique qui cesse d être vraie lors- qu'on suppose nulles les masses des points et des liens du système est donc la conclusion d’une démonstration nécessai- rement fausse, puisque, d’après ce qui précède, la proposition

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resterait vraie si la démonstration était exacte et rigoureuse.

» En statique, une démonstration est nécessairement fausse, si, pour la faire, on a appliqué deux à deux en certains points des forces égales et directement opposées, et si l’on a attribué à chacune de ces forces l’action qu'elle aurait sur les liens du système si elle existait seule; car ces forces, par cela seul qu'elles sont égales, directement opposées et appliquées deux à deux à un même point, ne peuvent exercer aucune action sur les liens, et ne donnent lieu à aucune réaction de leur part. La démonstration est donc fausse, puisqu'elle s’appuie sur l’existence d’actions et de réactions qui n’ont aucune réa- lité. Quant à la conclusion, elle pourra être vraie ou fausse suivant l'hypothèse qu’on fera sur d’autres actions dont la dé- monstralion n’a pas tenu compte : par exemple, suivant l'hy- pothèse qu'on fera sur la valeur finie ou nulle des masses des points et des liens du système.

» Toute proposition de stuitique, vraie seulement quand les masses sont supposées ne pas être nulles, n’est vraie que dans l’état d'équilibre des forces prises en considération ; car, ad- mettre que les masses ne sont pas nulles, c'est prendre im- plicitement en considération les forces d'inertie qui résultent du mouvement de ces masses, ce qui ne peut être fait qu'en dynamique, et comme ces forces d'inertie font constamment équilibre aux forces données, il en résulte que l’ensemble des forces prises en considération se trouve dans l’état d'équilibre. Il suffit donc, relativement à ces propositions, qu’elles soient démontrées vraies dans l’état d'équilibre.

» L'examen, fait à ces divers points de vue, de la proposi- tion relative au transport d’un couple, montre que sa démon- stration est fausse, et qu’elle-même n'est exacte que dans l’é- tat d'équilibre des forces prises en considération, puisqu'elle est évidemment fausse lorsque les masses des points et des liens du système sont supposées nulles. »

Séance du 2 juin 1860.

M. Phillips a fait dans cette séance à la Société la commu- nication suivante sur la théorie du nouveau système de dé- tente pour machines à vapeur et spécialement pour locomo- tives de M. Stewart et Hope.

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Il explique d'abord que cesystème diffère principalement de la coulisse Stephenson en ce que la coulisse fait corps avec la poulie d’excentrique dont elle est très rapprochée, les barres d’excentrique étant supprimées, et que les deux excentriques par cylindre du système ordinaire se réduisent à un seul.

Il donne la formule suivante qui fait connaître à chaque in stant de la marche la position du tiroir. En nommant E la dis tance de celui-ci à un point qui est sensiblement au milieu de sa Course, on a

72 A +) sn; js Sin o

7 est le rayon FAR w, l'angle décrit par la mani- velle depuis l'instant le piston est à fond de course vers l’ar- rière ; €, la demi-longueur de lacoulisse ; w’, la distance du cou- lisseau au sommet de la coulisse, pour le cran auquel on mar- che; #, la distance du centre de l’excentrique au point de sus- pension de la coulisse ; », la distance de ce même centre d’ex- centricité un milieu de la corde de la coulisse, et /, lalongueur de la bielle qui relie le coulisseau à la tige du tiroir.

À une très petite différence près, on voit que & est de la forme

E—cosw—+Bsino,

qui est l'équation polaire du cercle. En d’autres termes, on voit que les courses du tiroir pour des angles w quelconques de la manivelle peuvent être représentées par la projection d'une droite de grandeur et de direction données sur une li- gne faisant elle-même l’angle w avec un axe fixe. M. Phillips déduit de un procédé graphique très simple pour étudier la distribution d'une machine donnée ou, inversement, pour dé- terminer une machine dont la distribution se fasse dans des conditions données. ;

Il'éite quelques exemples, vérifiés chez M. Cail, qui mon- trent combien dans la pratique cette méthode est approchée, et il annonce qu'il l’a étendue aussi à tous les systèmes analo- gues, notamment à la coulisse Stephenson, droite ou ren- versée.

M. Phillips a aussi tenu compte des perturbations du cou-

GI

lisseau dans la coulisse. En appelant w la valeur initiale de u', au commencement de la course, on a alors

c2 Er cosw-(c—" (+ + hi di ARn 5)

r2sin? m rsine (c—u)r sin w à A UD noms - »] T COS w— M Or si) ù Pas sin «w |

Dans cette formule, à est la longueur de la bielle de relevage; 7, celle de l'arc décrit par l'extrémité de cette bielle depuis sa position pour w— 0 jusqu’au bas de cet arc, sa tengente est parallèle à l’axe du tiroir; enfin » est le rapport de lalon- gueur totale de la bielle de connexion du coulisseau à la tige du tiroir à la distance du point elle se relie à cette tige à celui elle est attachée à la bielle de relevage.

L’exactitude de cette formule a été minutieusement vérifiée chez M. Cail.

MINÉRALOGIE. Sous le titre de Recherches sur Les pseudo- morphoses, la communication suivante a été faite par M. De- lesse.

« Lorsqu'un minéral se présente sous une forme qui ne lu; appartient pas, il donne lieu à ce que l’on appelle une pseudo- morphose. Le nombre des pseudomorphoses est assurément très considérable; mais dans ces dernières années il me paraît avoir été démesurément exagéré, par suite d'une confusion des pseudomorphoses avec l'association des minéraux et surtout avec l’enveloppement.

» L'enveloppement présente, en effet, des particularités re- marquables qu'il importe d'abord de signaler. Ainsi, 1l peut être facilement constaté entre les variétés d’un même minéral. Par exemple, l’hornblende des schistes cristallins enveloppe quelquefois de l’actinote. Le mica blanc d'argent du granite renferme du mica brun tombac. Il en est de même pour la tourmaline, qui présente souvent des variétés bien distinctes vertes et roses réunies dans le même cristal. En outre, l’en- veloppement de deux minéraux peut être réciproque. C’est ce qui a lieu pour le grenat et l'idocrase,'le pyroxène et l'amphi-

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bole, l'andalousite et le disthène, la staurotide et le disthène, lémeraude et la topaze, le feldspath et la natrolite. L’enve- loppement réciproque n'indique pas des conditions tout à fait inverses dans l’origine des minéraux, car il s’observe jusque dans la même roche. Si l’on considère deux minéraux cristal- lisés, leur enveloppement peut être accompagné d'orientation. Cette orientation a lieu par rapport à un centre, comme pour le quartz et le feldspath dans la pyroméride. Elle a heu aussi par rapport à des axes, comme pour la staurotide et le disthène, pour l’hornblende et l’augite dans l’ouralite, pour l'hornblende et le diallage dans l’euphotide, pour l’hornblende et l'hyper- sthène dans l'hypérite, pour l'augite et le schillerspath dans le schillerfels.

» Quelle est maintenant la proportion du minéral enveloppé? Il est facile de voir qu’elle peut être très grande et même bien supérieure à celle du minéral enveloppant.

» La chaux carbonatée quartzifère de Fontainebleau, même quand elle a cristallisé en rhomboëèdres très nets, renferme jusqu'à 60 pour 100 de sable. Quand elle est simplement con- crétionnéeou globuleuse, elleen renferme plus de 80 pour 100. Dans cette circonstance, le sable était une matière inerte, mé- langée à la chaux carbonatée et qui devait gêner sa cristallisa- tion; cependant sa proportion était déjà très grande. Maïs quand les deux minéraux ont cristallisé simultanément, ils se sont moins gênés et leur proportion peut, pour ainsi dire, être quel- conque. On sait, par exemple, que le quartz renferme souvent une multitude d’aiguilles de rutile ou bien de paillettes de mica et de chlorite qui y sont disséminées de la manière la plus intime. Le grenat d’Arendal, de la Bergstrasse et du Cani- gou, qui enveloppe de la chaux carbonatée saccharoïde, est quel- quefois aussi mince qu'une feuille de papier. Lorsque le grenat a cristallisé dans le quartz, 1l en a de même enveloppé une très grande proportion. C'est, par exemple, ce que j'ai constaté dans les schistes cristallins du Saint-Gothard. Les globules de certaines roches feldspathiques, comme la pyroméride, sont formés de feldspath et de quartz hyalin. Dans l’un de ces glo- bules provenant de Wuenheim, J'ai trouvé 88 de silice ; ce qui suppose environ + de feldspath et = de quartz. Bien que la

63 formation du globule paraisse surtout devoir être attribuée au feldspath, le quartz s'y trouve cependant en quantité double.

» En général, lorsque deux minéraux sont associés et s’en- veloppent, leur proportion est très variable ; c’est tantôt le mi- néral enveloppant et tantôt le minéral enveloppé qui domine; suivant les circonstances, l'un ou l’autre d’entre eux peut d'ail- leurs diminuer peu à peu et enfin disparaître entièrement. Comme les forces qui déterminent la cristallisation ont une grande énerg'e, de même que toutes celles qui accompagnent les changements d'état, le minéral enveloppant se trouve quel- quefois en proportion tellement petite qu'il est entièrement dissimulé par le minéral enveloppé.

» Lorsqu'un minéral est enveloppé dans un autre, trois cas peuvent d’ailleurs se présenter, suivant qu'il lui est antérieur, contemporain ou postérieur. Ainsi, le quartz en grains qui est enveloppé par la chaux carbonatée de Fontainebleau lui est nécessairement antérieur. Dans ce cas, il y a simplement mé- lange du minéral enveloppé qui est resté inerte.

» Lorsque l'enveloppement est accompagné d'orientation comme dans les divers exemples qui viennent d'être cités, le minéral enveloppé me paraît être contemporain de celui qui l'enveloppe; cela est surtout bien visible pour le disthène et la staurotide, l'hornblende et le diallage ou l’hypersthène, l’hornblende et l’augite dans l’ouralite, le feldspath et le quartz dans les roches globuleuses.

» Il ne suffit pas évidemment qu'un minéral s’observe dans un autre pour qu'on soit en droit de le regarder comme pseu- domorphique ; 1l faut encore qu'il en prenne complétement la forme. Du reste, suivant les circonstances, un même minéral enveloppé est tantôt contemporain et tantôt postérieur à celui qui l'enveloppe; c’est dans ce dernier cas seulement qu’il peut être pseudomorphique; mais il ne l’est pas nécessairement. Il est donc facile de comprendre pourquoi beaucoup de minéraux ontété regardés comme pseudomorphiques,tandis qu’en réalité, ils étaient simplement enveloppés ou enveloppants. Mainte- nant d’autres minéraux, tels, par exemple, que l’achmite et l’asbeste, ne sont pas des produits d’altération, comme l’ad- mettent certains minéralogisies ; ce sont des bisilicates ayant

64 des caractères spéciaux et différant des variétés habituelles par leurcomposition chimique ou par leur structure.

» Les remarques précédentes conduisent à réduire notable- ment les pseudomorphoses ; cependant, lorsqu'on en dresse un tableau général, on trouve que leur nombre est encore très considérable. On observe d’abord quelques particularités ana- logues à celles qui ont été signalées pour l’enveloppement. Aïnsi certains minéraux sont pseudomorphosés par leurs pro- pres variétés. Le quartz hyalin, par exemple, peut être rem- placé par la calcédoine ou par l’opale. Quelques minéraux of- frent aussi des pseudomorphoses réciproques. Car si le spath fluor pseudomorphose la chaux carbonatée, dans d’autres eir- constances cette dernière pseudomorphose à son tour le spath fluor. Il en est de même pour l’argent natif et l’argent rouge, la galène et le plomb phosphaté, le cuivre sulfuré et la pyrite de cuivre, la pyrite de fer et la marcasite, la pyrite de fer et l'hématite, le fer oxydulé et l'hématite, l’hématite et la limo- nite, le scheelin calcaire et le wolfram, la chaux carbonatée et le gypse.

» Les corpssimples sont rarement pseudomorphiques. Quand ce sont des métaux, tels que l'argent, le cuivre, l’antimoine, ils proviennent ordinairement de la réduction de minerais qui con- tenaient ces mêmes métaux.

» Les sulfures et arséniures pseudomorphosent le plus sou- vent d’autres sulfures et arséniures. Cependant ils se substi- tuent aussi à quelques oxydes, à la baryte sulfatée, à la chaux carbonatée et en général aux minéraux des gîtes métallifères. Du reste, ils n’ont pas été observés sous la forme de silicates, ni même d'hydrosilicates. Parmi les sulfures pseudomorphi- ques, la pyrite de fer est de beaucoup le plus important, ce qui s'explique par sa grande fréquence dans toute espèce de roches.

» Les oxydes pseudomorphosent les minéraux les plus va- riés. Ils remplacent généralement d’autres oxydes, mais en outre des sulfures, des carbonates, des sulfates, quelquefois mème des silicates. La limonite et le quartz donnent le plus grand nombre de pseudomorphoses.

» Les silicates et même les hydrosilicates pseudomorpho-

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sent surtout des minéraux de la même famille ; néanmoins les hydrosilicates prennent aussi la forme de minéraux très va- riés. Il est d’ailleurs assez rare que les silicates anhydres soient pseudomorphiques.

» Les tungstates, les molybdates, les sulfates, les phosphates, les arséniates, ainsi queles carbonates, pseudomorphosent gé— néralement les minéraux des gîtes métallifères. Parmi les car- bonates, la chaux carbonatée mérite une mention spéciale comme l’un des minéraux pseudomorphiques les plus fré- quents.

» Lorsqu'on envisage les résultats dans leur ensemble, on voit qu'un minéral se substitue fréquemment à un autre ap- partenant à la même famille ; c’est du moins ce qu'il est facile de constater pour les sulfures, les oxydes, les silicates, les hydrosilicates et les carbonates.

» Les substances organisées, qu'elles proviennent d’ani- maux ou de végétaux, sont aussi fréquemment pseudomor- phosées.

» En résumé, les minéraux pseudomorphiques sont extrè- mement variés. Ce sont, en effet, des corps simples, des sul- fures, des arséniures, des chlorures, des fluorures, des oxydes, des silicates, des hydrosilicates, des tungstates, des molybdates, des sulfates, des phosphates, des carbonates, et quelquefois même des substances organiques. Ils appartiennent donc à toutes les familles du règne minéral. Il est vrai que certains minéraux ont pas encore été observés à l’état pseudomor- phique; mais alors ils sont généralement assez rares et leur analogie avec d’autres espèces de la même famille ne permet guère d'admettre qu'ils fassent exception. D'ailleurs, les sub- stances les plus insolubles et les plus infusibles sont pseudo- morphosées ; telles sont le corindon, le spinelle, le quartz, l’'amphigène, les silicates. D'un autre côté les substances pseu- domorphiques peuvent elles-mêmtcs être insolables et infusi- bles. Enfin, par cela même qu'un minéral est souvent détruit complétement, un autre minéral quelconque, dès que les cir- constances seront favorables, viendra se développer postérieu- rement et occupera l’espace laissé vide par le premier. Ainsi, de proche en proche, on est naturellement conduit à admettre

Extrait de l'Instilut, 17e section, 1560. 9

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que la plupart des espèces minérales peuvent devenir pseudo= morphiques. »

Z001061E. M. Pucheran a communiqué aussi à la Société, dans la même séance, les remarques suivantes sur les carac- tères zoologiques des Mammifères, considérés dans leurs rap: ports avec les fonctions de locomotion :

« Dans un mémoire publié en 1851, j'ai déjà abordé, pour les Mammifères aquatiques, la solution du problème relatif aux rapports des caractères zoologiques avec les fonctions de locomotion. Dans des recherches plus récentes, j'ai porté mon attention sur les Mammifères plus spécialement attachés au sol (marcheurs, coureurs, fouisseurs, sauteurs et grimpeurs), et ces nouvelles études sur les rapports des caractères zoolo= giques avec ces divers modes de progression m'ont conduit aux résultats que je vais formuler.

» lo Formes générales. Allongées chez les Mammifères aquatiques, les formes générales sont lourdes et trapues chez les marcheurs les plus typiques (G. Ours, Blaireau, Glouton, Marmotte, Porc-épic, Hérisson, etc.), dont certains sont égale- ment fouisseurs (G. Taupe, Chrysochlore, Bathyergue, etc.) : elles deviennent plus sveltes et plus élancées dans les genres plus aptes à la course et au saut (G. Martre, Putois, Mangouste, Genette, etc., Ruminants, G. Dasyure, ete., G. Macroscélide, Gerboise, Hélamys, Kangurou, etc.). Les Mammifères grim- peurs sont semblables, sous ce point de vue, aux Mammifères coureurs et sauteurs.

» 2 État desimembres.—Avec ces dispositions de la forme gé- nérale, coincident, chez les Mammifères aquatiques, des mem- bres courts : ils sont gros et forts chez les Mammifères mar- cheurs et fouisseurs, plus grèêles chez lesMammifères coureurs (soit onguiculés, soit ongulés), sauteurs et grimpeurs. Chez les Mammifères marcheurs, les membres antérieurs et postérieurs sont à peu près semblables sous le point de vue de la force et du développement qu’ils présentent. Le caractère opposé est facilement sa sissable chez ceux de leurs congénères doués des autres modes de progression. Ainsi, chez les fouisseurs, le membre antérieur est plus fort que le postérieur; chez les sau- teurs, c’est au contraire ce dernier qui est plus allongé que son

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homologue. Le même fait existe, quoique moins facile à consta- ter, dans presque tous les Mammifères coureurs et grimpeurs; mais, dans quelques-uns de leurs types génériques (G. Hyène, Protèle, Girafe, Bubale, Gorille, Chimpanzé, Orang, Gibbon, Lori, Nycticèbe, Bradype, Cholèpe), c'est l’état inverse qui se manifeste.

» 30 Formule digitale. Ainsi qu'il est facile de le prévoir lorsqu'on connaît les applications dont est susceptible en zoo- logie le principe du balancement des organes (MM. Geoffroy Sant-Hilaire), les variations de la formule digitale coïncident avec les divers états des membres. Chez les Mammifères mar- cheurs et fouisseurs, les cinq doigts sont bien formés, quoique l’interne et l’externe soient moins développés ; il en est de même chez les Mammifères aquatiques, surtout lorsque les pal- matures interdigitales sont bien complètes. Quand les membres s’allongent, la pentadactylie disparaît. Certains Pachydermes (Rhinocéros) nous en offrent déjà des exemples. Cette ten- dance est encore ‘plus manifeste chezles Mammifères coureurs, dontquelques espèces (Solipèdes)sont même monodactyles : elle caractériseégalement les Mammifèresgrimpeurs.Parmiceux-ci, le Cyclothure, les Cholèpes, présentent seulement deux doigts au membre antérieur. C’est, en général, cet organe qui, chez les grimpeurs, subit de semblables atrophies (Colobes, Atèle, Pérodictique, Sciuridés), rarement partagées par le membre postérieur, toujours incomplet, au contraire, sous ce point de vue, chez les Mammifères coureurs les plus typiques. Mais, dans la sous classe des Marsupiaux, la réduction du nombre des doigts en arrière constitue l’état normal chez les types grimpeurs ori- giuaires de l'Océanie ; ceux d'Amérique ressemblent plutôt aux grimpeursmonodelphes:Dansles Mammifères sauteurs lamême tendance est facile à observer, mais presque uniquement aux membres postérieurs ; certains {les Gerbos) ont seulement trois doigts en arrière. Mais si, au lieu d’être tout à fait absents, les doigts latéraux, les seuls qui soient susceptibles de disparaitre, sont seulement atrophiés, leur mode d'insertion sur les ré- gions métacarpiennes et métatarsiennes présente des diffé- rences Caractéristiques chez les Mammifères coureurs et sauteurs, d’une part, et chez les Mammifères marcheurs, fouis-

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seurs et grimpeurs, d'autre part. Chez les premiers, cette in— serlion a heu plus haut que celle des doigts intermédiaires ; chez les derniers, elle s'opère sur la mêmeligne. Cette dernière disposition s’observe chez les Mammifères aquatiques lorsque les palmatures interdigitales sont bien complètes ; lorsqu'elles sont plus rudimentaires, c’est la première qui se mamfeste.

» Prolongement caudal. Lorsqu'il sert aux actes de locomotion (Mammifères aquatiques, sauteurs, grimpeurs à queue prenante), le prolongement caudal est très allongé; mais, lorsque ses fonctions cessent d'être actives, les carac- tèras de brièveté ou d’allongement s’harmonisent avec ceux qui nous sont offerts, soit par la forme générale, soit par les membres. Quand la forme générale est svelte, les deux mem- bres étant relativement raccourcis {grimpeurs à queue non prenante, coureurs onguiculés), la queue est allongée; lorsque, avec un semblable caractère dans la forme générale, les mem- bres deviennent aussi allongés que le tronc (Pachydermes, Ruminants), la queue est plus courte. Elle est à peu près ab- sente quand l’une ou l’autre des deux paires de membres, soit l’antérieure (Pithéciens, G. Lori, Nyctuicèbe, Bradypodés), soit postérieure (Indri), acquiert un développèment excessif. Le prolongement caudal est également plus court dans les Mammifères marcheurs et fouisseurs (G. Ours, Blaireau, Hé- risson, Porc-épic, etc., G. Taupe, Bathyergue, Echidné, etc}, dont la forme générale est trapue et dont les membres sont surbaisés.

» Système phanérique. a. Pelage. Xl est en géné- ral moins allongé et plus rude chez les Mammifères marcheurs (soit onguiculés, soit ongulés), que chez les Mammifères grim- peurs, sauteurs, fouisseurs, et que chez les Mammifères aqua— tiques. Ces dissemblances nous paraissent, au reste, plutôt produites par les différences de température que par eelles qui dépendent des modes de locomotion propres à ces divers types.

» D. Congies nuditives. Leurs divers états d'amplitude sont, en général, en rapport avec le développement des mem bres, et surtout du membre postérieur. Aussi sont-elles courtes chez les Maminilères aquatiques el chez les Mammifères mar-

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cheurs et fouisseurs : plus allongées chez les Mammifères cou- reurs et grimpeurs, plus étalées encore chez les Mammifères sauteurs. Lorsque, au contrare, ce sont les membres anté- rieurs dont l'allongement est excessif (Pithéciens, G. Lori, Nycticèbe, Bradypodés), la conque auditive est généralement plus petite.

» c. Ongles. Peu développés chez les Mammifères aqua- tiques les plus typiques, courts chez les marcheurs ongulés, ils sont allongés et peu courbés chez les marcheurs onguiculés et chez les fouisseurs. Ces deux caractères sont, en général, sur- tout chez les Mammifères fouisseurs, plus saisissables au mem- bre antérieur plus spécialement chargé des actes de préhension; d’autres fois, c'est au membre postérieur qu’ils se manifestent (Mammifères sauteurs, certains genres de Rongeurs). Les mêmes organes sont moins allongés chez les Mammifères grimpeurs, et, lorsqu'ils grimpent sans se servir principale ment des parties dénudées de leurs pattes, ils sont en outre plus ineurvés.

» Nous devons ajoûter que, de même que les actes de lo- comotion des Mammifères, ces divers caractères sont suscep— tibles de variations nombreuses ; mais il arrive rarement, pour ne pas dire jamais, que ces variations aient lieu d'ensemble, soient subies dès lors par tous les organes dont nous venons d'esquisser les diverses modifications. Dans d’autres circon- stances, ces mêmes variations sont produites par d’autres causes, sur lesquelles nous ne pouvons insister en ce mo- ment, mais dont il est impossible de nier l’activité lorsqu'on réfléchit à cette"multiplicité d'influences, véritable conflit de principes dont l’action s'exerce constamment sur les êtres or- yanisés. »

Séance du 26 mai 1860.

GÉOLOGIE. La communication suivante sur l’application du microscope à l'étude de la géologie physique a été faite à la Société dans cette séance par M. Clifton Sorby.

Le travail dont j'ai l'honneur d'entretenir la Société phi- lomathique n’est pas encore complétement terminé, mais dès à présent je désire appeler son attention sur quelques faits

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importants auxquels conduit l’examen microscopique de tran- ches minces de roche.

Ou sait que la structure microscopique des coquilles, des dents et des bois fossiles, a été étudiée par plusieurs observa- teurs éminents. À cet effet, ils ont préparé des plaques assez minces pour devenir transparentes, et ils les ont examinées avec des microscopes ayant un fort pouvoir grossissant. C’est la même méthode que j'ai appliquée à l’étude de la structure physique de toutes les roches, et elle m'a conduit à plusieurs résultats nouveaux et intéressants.

Pour préparer les plaques minces, on use d’un côté de petits fragments deroche; d’abord on se sert de l’émeri et d’un pla- teau de zinc, puis on emploie une pierre très-unie jusqu’à ce quela surface dela roche soit parfaitement plane et polie. Alors cette roche est fixée par cette surface sur un verre, au moyen de baume de Canada, et le côté opposé est usé avec de l’émeri sur des pierres variées, jusqu’à ce que son épaisseur se réduise à 579 OU 55 de pouce. Après ces opérations, elle est bien polie des deux côtés et suffisamment transparente pour être examinée au microscope avec un grossissement de plusieurs centaines de fois. Une nouvelle plaque de verre est ensuite placée par-dessus avec du baume de Canada, de manière qu’elle soit protégée et plus transparente.

L'étude des plaques minces de roche constitue une branche toute spéciale de la géologie, et elle exige des connaissances variées. Depuis dix ans que je l’ai commencée, j'ai préparé plusieurs centaines de ces plaques, et cependant il reste encore beaucoup à faire. Sije voulais décrire tousles résultats auxquels conduit leur examen, je serais amené à faire des excursions dans chaque branche de la géologie ; je me contenterai donc de présenter quelques remarques surles conclusions auxquelles j'ai été conduit.

La méthode d'investigation par le microscope est très-con- venable pour l'étude des calcaires ; car la structure organique des coquilles et des débris de Mollusques qui les composent se laisse facilement reconnaître; souvent même elle est par- faitement bien conservée. De cette manière, on peut non- seulement déterminer la nature des parties qui constituent le

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calcaire, mais même leur proportion relative. On s'assure aussi que des calcaires qui, à l'œil simple, paraissent être les mêmes, diffèrent cependant bien complétement. Quelques-uns sont composés de fragments de coquilles et de polypiers , et présentent des mélanges mécaniques analogues aux sables. D’autres, au contraire, sont formés de parcelles microscopi- ques résultant d’une décomposition complète des coquilles ou des polypiers, etils sont analogues aux argiles.

Nous pouvons aussi nous rendre très bien compte de la constitution des schistes, et reconnaître non-seulement les substances qui les composent, mais encore leur mode d’arran- gement. On voit que les ardoises présentent deux sortes de clivages bien différents : l’un résultant de la compression d’une roche qui s’est comportée comme une matière plastique ; l’autre à un système de fractures et de crevasses serrées qui prouvent que la roche a cédé à la pression, comme une matière quelque peu rigide. On peut même par l’étude de la roche se rendre compte de l’état physique dans lequel elle se trouvait lorsqu'elle a été soumise à l’action des forces qui ont disloqué l'écorce terrestre.

Ces recherches jettent beaucoup de jour sur la structure des roches métamorphiques, et nous permettent d'apprécier quels sont les changements qu’elles ont éprouvés.

Les roches ignées anciennes et modernes présentent égale- ment des particularités remarquables, et nous pouvons recon- naître que quelquefois il s’y trouve beaucoup plus de minéraux qu’il n’est possible de le constater par l’examen à l’œil nu ; nous distinguons même ceux qui ont été formés au moment la roche fondue s’est solidifiée de ceux qui résultent d’une action postérieure de l’eau.

Les roches granitiques en particulier présentent plusieurs faits curieux ; on y distingue un nombre immense de cavités qui renferment de l’eau ainsi que des dissolutions salines; et ces substances ont se trouver à l’état liquide dans ces roches au moment elles se sont formées. Les cavités qui renferment ces fluides sont semblables à celles qu'on connaît dans le quartz, seulement elles sont trop petites pour être dis- tinguées à la vue simple. Avec un fort pouvoir grossissant il est

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d’ailleurs possible de les voir avec la plus grande perfection; dans le quartz du granite et de quelques roches métamorphi- ques, elles sont quelquefois si nombreuses qu'il y en a plus de mille millions dans un pouce cube.

Il faut done admettre que le granite n’est pas simplement une roche ignée, mais qu'il a été formé par l’action combinée de la chaleur et de l’eau, comme M. Delesse l’a prouvé par des considérations différentes dans ses belles Recherches sur l’ori- gine desroches etsur le métamorphisme (1).

Séance du 21 juillet 1860.

BoTANIQUE. M. E. Cosson a communiqué à la Société dans cette séance une note sur la stipule et la préfeuille dans le genre Potamogeton, note contenant en outre quelques con- sidérations sur ces organes dans les autres Monocotylées.

Le genre Potamogeton est, dans l’embranchement des Mo- nocotylées, l’un de ceux chez lesquels la stipule et la préfeuille présentent les modifications les plus remarquables. Une des- cription de ces organes chez quelques espèces, qui peuvent être prises pour types des formes les plus différentes, permettra d'en déterminer les caractères essentiels et d'établir les causes de leurs modifications principales.

La stipule, dans la plupart des Potamogelon, est constituée par un organe-indivis, membraneux, libre, de forme et de longueur variables, inséré à l'aisselle de la feuille et à face supérieure regardant du même côté que la face supérieure de la feuille correspondante et entourant d'une manière plus ou moins complète la base de la tige ou celle du rameau à l’ais- selle de la même feuille. Cette stipule axillaire présente, surtout dans les espèces à feuilles pétiolées, deux nervures presque parallèles, saillantes, généralement en forme de carène, et qui sont placées exactement à la limite du point de contact du pétiole. Assez souvent cette stipule n’est binerviée ou bicarénée que dans sa partie inférieure ; quelquefois elle n’est nullement binerviée. Dans le Pofamogeton pectinatus, elle ofire une

(4) Annales des Mines, 1857, et Bulletin de la Société géologique, 1858.

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disposition toute particulière : elle se soude avec la partie pé- tiolaire de la feuille, à laquelle elle adhère par sa face externe et avec laquelle elle s’enroule pour former une gaîne embras- sant la tige ou le rameau; elle n’est libre qu’au sommet, elle fait saillie sous forme de membrane au-dessus de la gaîne de la feuille. Il est impossible, dit M. E. Cosson, de ne pas être frappé de l’extrème analogie de cette disposition avec celle de la ligule des Graminées. Cette analogie, le peu de constance de la présence des deux nervures saillantes, et sur- tout la conformité que présentent chez la plupart des Pota- mogeton leur stipule et leur préfeuille, nous amènent à consi- dérer dans ce genre la stipule, de même que chez les Grami- nées et les Cypéracées, comme formée par un organe unique et non pas comme constituée par deux organes soudés par leurs bords internes.

La stipule des Puamogeton, lorsqu'elle est binerviée, pré- sente si exactement chacune de ses deux nervures sur les points situés à la limite de son contact avec le pétiole, qu’on ne saurait révoquer en doute l'influence exercée par ce con- tact. Les tissus, en raison de la pression plus ou moins forte

w’ils ont eu à subir, au moins dans le bourgeon, pression qui les a soustraits pendant un temps plus ou moins long à l’action du milieu dans lequel vit la plante, ne développent de ner- vure que cette cause d’atrophie ce:se de se produire.

Sous le nom de préfeuille ou de Vorblaitt les botanistes désignent les premières feuilles des rameaux qui, par leur con- sistance ordinairement mince, membraneuse, l’absence de coloration verte et leur développement imparfait, se distin- guent des autres feuilles. Des travaux modernes (1) ont mis en évidence le rôle important de la préfeuille proprement dite (première feuille du rameau) comme organe protecteur du bourgeon ou des parties florales chez un grand nombre de Monocotylées. En effet, il est établi maintenant que la glu- melle supérieure des Graminées, que le faux utricule des Carcæ, que la gaine qui entoure la base des rameaux des

(1) La préfeuille a été surtout étudiée par MM, A. Braun, T. Irmisch, J, Gay et par le jeune et regrettable E. Desvaux, Extrail de l’Institut, 47° section, 1860, 40

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Joncées et des Cypéracées, etc., ne sont que de véritables pré- feuilles, se comportant comme celles des bourgeons mêmes. Les caractères généraux de cette préfeuille, ou première feuille rudimentaire du rameau, sont : son insertion sur la face du rameau opposée à celle qui regarde la feuille à l’aisselle de laquelle est le rameau lui-même (et par conséquent sa po- sition entre l'axe primaire et l’axe secondaire entouré géné- ralement par elle à sa base), et la présence habituelle de deux nervures parallèles plus ou moins espacées, plus ou moins développées et souvent saillantes en forme de carène. Mais de ces deux caractères, celui tiré de la position de l’organe est le seul qui ait une importance réelle, Les deux nervures pou- vant manquer en partie ou même entièrement chez la pré- feuille, ou dans quelques cas être remplacées par une nervure moyenne.

Turpin (1), qui, l'un des premiers, s’est occupé de l'étude de la préfeuille chez les Monocotylées, avait déjà nettement imdi-- qué la position remarquable de l’écaille inférieure des bour- geons (préfeuille) dans la famille des Graminées et dans un grand nombre d’autres Monocotylées, et en avait formulé ainsi avec exactitude les caractères : « Cette écaille ou feuille rudimen- » taire extérieure est interposée entre le bourgeon qui la porte » et la tige de la plante à laquelle elle s’adosse. » Il avait fait remarquer, en outre, que, dans la fanulle des Graminées, cette écaille est bicarénée, que ses carènes sont ordinairement mu- nies de longs poils, que ses bords sont rentrants et qu’enfin elle a tous les caractères de la glumelle supérieure ; mais il consi- dérait l’écaille inférieure du bourgeon et la glumelle supé- rieure comme formée de deux pièces soudées latéralement et dont les nervures moyennes constitueraient les carènes laté- rales. L'étude de la préfeuille chez les Po{anrageton démontre manifestement l’inexactitude de cette manière de voir, inexac- titude que nous avons déjà relevée dans un article sur la com- position et la structure de l’épillet dans la famille des Grami- nées (2). Dans cette étude on trouvera de nouvelles preuves à

(1) Mémoires sur l’inflorescence des Graminées et des Cypéracées dans les Mémoires du Muséum, tome V.

(2) Bulletin de la Société botanique de France, I, 18.

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l'appui de l'opinion déjà exprimée par nous que la glumelle, l'écaille inférieure des bourgeons et la préfeuille ne sont que de véritables feuilles modifiées dans leur structure en raison du contact des organes voisins et de leur position, quiles sous- traient, au moins dans leur jeunesse, à l’action de deux des agents principaux de la végétation, l'air et la lumière. Chez les Graminées, les deux nervures de la elumelle supérieure (pré- feuille) sont déterminées par le contact de l’axe, ainsi que Kunth l'avait déjà noté (1), ou se produisent aussi générale- ment sur des points cesse le contact des bords de la glu- melle inférieure avec la glumelle supérieure; mais, même dans la famille des Graminées, cette préfeuille n’est souvent bicarénée qu’à la base seulement; elle est trinerviée dans le Leersia, où, en raison de labsence de glumes, elle ne subit d’autre pression que celle des bords de la glumelle inférieure. Elle est uninerviée dans les Anthoxanthum, les Alopecurus et le Crypsis aculeata, où, au contraire, elle subit de la part de la glumelle inférieure une pression sur toute sa surface, à l'exception de sa partie moyenne. Dans les Aristida et les Arihraïtherum, elle est enfermée complétement par la glumelle inférieure, elle est dépourvue de nervure. Dans cette même famille des Graminées, d'autres organes que la préfeuille peuvent présenter deux nervures latérales. Le Lolium temulentum offre quelquefois une glume inférieure rudimentaire qui se trouve serrée entre l'axe et l'épillet; cette glume est souvent échancrée, comme l'est habituellement la glumelle supérieure, et présente de chaque côté une nervure saillante (2). Le Holcus stiqer, dont M. Grœnland (Bull. soc. bot., IE, 175) a décrit et figuré l’épillet, présente souvent une fleur supplémentaire, chez laquelle la glumelle inférieure est munie de deux nervures carénées, tandis que la supérieure est uninerviée.

La description de quelques espèces de Potamogeton, repré- sentant les types les plus tranchés, confirmera ce que nous

(1) Enum. plant., I, 3.

(2) La présence de cette double carène avait fait prendre cette glume ru- dimentaire pour une préfeuille par quelques auteurs, qui, par suite, avaient admettre, pour l’épillet du Lolium, une structure tout à fait anomale,

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venons de dire sur les causes de la nervation latérale des stipules et des préfeuilles, et démontrera que le caractère dis- tinetif de la préfeuille doit être déduit exclusivement de sa position.

Potamogeton natans. Feuilles pétiolées, à pétiole plan en dessus, convexe en dessous. Stipule libre, membraneuse, oblongue-lancéolée, à dos fortement binervié dans la plus grande partie de sa longueur. Préfeuille semblable à la sti- pule, mais à nervures carénées moins saillantes et souvent ne dépassant pas la moitié de sa longueur.

Potamogeton lucens. Feuilles pétiolées, les supérieures à pétiole court, à nervure moyenne faisant saillie sur chaque face. Stipule libre, membraneuse, oblongue-lancéolée, à dos fortement binervié dans sa partie inférieure. Préfeuille presque semblable à la stipule.

Potamogeton crispus.—Feuilles sessiles, à nervure moyenne large déprimée. Stipule libre, membraneuse, très-mince, or- dinairement tronquée ou échancrée au sommet et souvent lacérée en fibrilles avec l’âge, sans nervures latérales. Pré- feuille semblable à la stipule et également sans nervures.

Potamogeton peclinatus. Feuilles étroitement linéaires, enroulées dans leur partie inférieure en gaine entourant la base du rameau. Stipule soudée par sa face externe avec la gaine, à partie supérieure libre saillant au-dessus de sa gaine non binerviée lancéolée-oblongue ordinairement bipartite. Rameau portant à sa base la préfeuille très-petite membra- neuse très-mince lancéolée-linéaire non binerviée, et souvent une deuxième feuille rudimentaire (insérée du côté opposé et émettant quelquefois un ramule à son aisselle) semblable à la préfeuille, mais plus longue et également enfermée dans la gaine.

En résumé : la stipule des Potamngeton, comme celle des Graminées et des Cypéracées, paraît constituée par un seul organe et non pas par deux organes soudés bord à bord; 2 cette stipule est binerviée ou non, suivant qu’elle subit ou non une pression de la part du pétiole de la feuille ou de la nervure moyenne de la feuille ; le caractère essentiel de la préfeuille est sa position ; la préfeuille est d'autant

AT

plus développée que son rôle comme organe de protection est plus important (1).

Séance du 28 juillet 1860.

MÉCANIQUE. Élasticité des solides. Dans cette séance, M. Barré de Saint-Venant a entretenu la Société des condi- lions pour que six fonctions des coordonnées x, y, z, des points d'un corps élastique représentent des composantes de pression s'exerçant sur trois plans rectangulaires à l'inté- rieur de ce corps, par suite de petits changements de distance de ses parties.

Il ne suffit pas pour cela, dit-il, que ces six fonctions satis- fassent aux trois équations dites indéfinies d'équilibre d'un élément quelconque du volume, et aux trois équations d’é- quilibre définies ou relatives à la surface. IL faut encore qu'en les égalant aux six expressions connues, de la forme AD, A0, HA"), HBg,, HBe..+B'e,,, A+ ...., etc. (Mém. sur la torsion, aux S'av. étr., t. XIV, et sur la flexion, au Journ. «des math. pures et appl., 1856) À, B,... sont des coefficients dépendant de la contexture du corps en divers sens, les six valeurs en æz, y, = quon en tire pour les x et les g soient compatibles entre elles, ou puissent bien repré- senter, savoir : celles de à, ),, 2-, les dilatations de trois petites lignes menées en der de ses points dans des direc- tions primitivement parallèles aux coordonnées, et celles de Dycs Gars Bry, Les glissements de lignes de même direction les unes devant les autres à l'unité de distance, ou, ce qui revient au même, les petites diminutions éprouvées par les angles primitivement droits des mêmes trois lignes matérielles dont on vient de parler.

Cela s'exprime, si les dilatations et glissements peuvent être supposés produits par des déplacements tres petits u, v, w des points dans les sens æ, y, z, en posant

du dv div

dr de De

di “Ce

(1) La préfeuille, presque aussi développée que la stipule chez les Potamo- geton à feuilles non engainantes, est très-petite chez le P, pectinatus, dont la gaine protége suffisamment le bourgcon.

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dv «w dw , du COMENT Dr —— no NOTE ee —) Sr ste SE Gen C2) Pi dx d2 0 ana

On élimine w, », w, en tirant leurs valeurs de trois de ces équations pour substituer dans les trois autres, puis faisant disparaître, par des différentiations, les intégraies substtuées. il en résulte ces trois condilions de compatibilité :

9 DRE q + TE 9 Fou 3 72: = RTS dydz dx ddr CEA NN ET d et ces trois autres : Libre Pr ae GESETAN CNE NES

dydz dz2 7 dy?’ üzdz dady.

qui ne font pas tout à fait double emploi aux trois premières, car celles-ci ne donnent, en les combinant ensemble, que les différentielles des secondes, par rapport à r, à y, à z, respec- tivement.

L'auteur de lacommunication fait observer que lorsque les di- latations et glissements, toujours supposés très petits, provien- nent de déplacements u,v,w considérables (1),/'on a les mêmes six conditions de compatibilité. On s’en assure en remarquant qu'alors les déplacements «, v, w, d’une grandeur quelcon- que, parallèles aux x, y, z, sont géométriquement décompo- sables, pour chaque portion peu étendue du corps, en dépla- cements très pelits w’, v', w', parallèles à certains autres axes coordonnés x’, y’, z', et en translations et rotations capa- bles d'amener l'angle trièdre des x’, y’, z’, à coïncider avec l'angle tièdre des x, y, z, et en exprimant les à et les g en fonction des déplacements et des neuf cosinus des angles de ces rotations finies ; la substitution fait disparaître les cosinus, en vertu de leurs six relations connues, et vérifie ces six équa- lions qu'on vient d'écrire.

Ces équations de compatibilité montrent que si l'on se donne OU, 0. de OUI 8-2 Ce IESNTOIS ONCLIONS NON TOR nées peuvent se déduire des trois autres, mais d’une manière

(4) L'Institut, 537, 10 avril 4844,

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qui n’est pas complétement déterminée, car, à leurs valeurs,

déduites de l'intégration des trois différentielles du second 2

d AN he ; ordre telles que ne: se trouvent ajoutées, respectivement, dydz

trois sommes de fonctions arbitraires de la forme

g(d,y) +4 (&,æ), Sel (7,3) 4-4: (x,9), g2 (z,x%)+2 (/,2) ; en sorte qu’à chaque système de trois fonctions représentant les dilatations correspond une infinité de systèmes de trois fonctions représentant les glissements, ou réciproquement. Mais ces derniers systèmes ne diffèrent entre eux, pour cha- cune, que par les sommes v+-4, etc , qu’on vient de poser.

L'usage des conditions de compatibilité dispense, dans beau- coup de problèmes de déformation des corps élastiques, de considérer les déplacements de leurs points dans l’espace.

MÉCANIQUE. Torsion. Dans la même séance, M. de Saint- Venant a montré que les formules du moment de réaction de torsion des prismes ou cylindres, donnés seulement jusqu'ici pour le cas la contexture de la matière offre, en chaque point, ou un axe de symétrie parallèle aux arêtes, ou trois plans de symétrie dont deux perpendiculaires aux axes prin- cipaux d'inertie de la base, peuvent être appliquées, en les modifiant convenablement : pour une base de forme quelcon- que, au cas bien plus étendu il n'y a en chaque point qu’un seul plan de symétrie, perpendiculaire aux arêtes ; pour une base elliptique, à une contexture absolument quelconque, ou sans plan de symétrie.

Dans ce second cas, on reconnaît qu'une torsion uni- forme 0 par unité de longueur est produite dans le cylindre, dont les arêtes sont parallèles aux x, par des forces tangen- tielles p,,, p., agissant parallèlement aux 7, aux =, sur ses bases, par unité superticielle de leurs éléments, et telles qu'on

D UD à ait . SE en tous leurs points et p;;dy—p,,dz—0 y dz à . ag; dSry à ceux de leur contour, et, aussi partout, nn HU —DDMIES

glissements g,, et g.. étant tirés des deux expressions Pr Cr, Hg. » Pr Ge. Gr

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qui résultent de l’éimination de ), dy5 d, 8,- entre les six formules générales de composantes de pression lorsqu'on sup- POSE Pær==0, Pyy 0, Prr—0, P,:=—0. Si, dw étant un élément superficiel quelconque de la base elliptique, on appelle E,, L,, K les intégrales Sedo, Jy?ds, fizdu étendues à toute cette base, ou si, I et [’ étant ses moments d'inertie autour de ses deux axes principaux, et x l'angle de l'axe de I avec les y, fait Icos?:+T'sin?:—1I,, L'cos?z<+ Isin2:—T',, (T'—T)sin-cos1—K, on oblient, pour le moment des forces qui produisent la tor- sion 8, l'expression one (GG—HH) (I, l',—K?)

sue GI+GT—(H+HXK

Et il y a, en même temps que cette torsion, une petite in- flexion en hélice qui s’annule quand la contexture offre des plans de symétrie perpendiculaires aux arêtes, cas l’on a 2070, d 0; Syr—0.,9

On peut déterminer les coefficients d’élasticilé de ghssement G,G, H, H', pour un bloc donné de matière homogène, mais non isotrope, au moyen de cette expression de M,, par quatre expériences de torsion faites sur des cylindres circulaires et elhptiques qu’on en extrairait. Elle se réduit, au reste, à celle qu'on connaît, du cas de trois plans de symétrie se cou- pant suivant les axes principaux de l’ellipse, lorsqu'on y fait H—o0, H'—o et sina==0, d’où K—0o.

Séance du 20 octobre 4860,

GÉOMÉTRIE. M. Paul Serret a communiqué à la Société dans cette séance l'énoncé et la démonstration des proposi- tions suivantes :

1. « Si toutes les cordes concourantes d’une courbe plane ont leurs pôles en ligne droite, cette courbe est du second degré, » le pôle d'une corde n'étant autre chose, ici, que le point de concours des tangentes menées par ses extrémités.

2. « Si les cônes et les cylindres circonscrits à une surface ont leurs courbes de contact planes, cette surface est du se- cond degré. »

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La démonstration géométrique de cette proposition résulte très simplement de la théorie des fangentes conjuguées, ou seulement du théorème 1.

3. « Bi les cônes circonscrits à une surface se coupent, deux à deux, suivant des courbes planes, cette surface est du se= cond déni Corollaire du précédent.

4. « Si les cônes circonserits à une surface sont du second degré, cette surface est elle-même du second degré. » On re- connait, en effet, que deux cônes emconscrits quelconques ont deux plans tangents communs, et se coupent, dès lors, suivant deux courbes planes : l’on rentre done, si l'on veut, dans le théorème précédent ; ou bien l'on achève directement,

-etsans difficulté, la démonstration.

5. « Si les cylindres circonserits à une surface ont leurs courbes de contact planes, cette surface est du second degré. ».

Remarque. Les condkions sous lesquelles on affirme dans les propositions 2 et 5 que la surface est du second degré sont surabondantes , mais l'on peut les réduire au plus petit nombre possible par deux théorèmes cornplémentaires. Voici l'énoncé de celui qui se rapporte à la proposition 2.

6. « Si les cylndres circonserits à une surface, parallèle- ment au plan taugent en l’un de ses points, ont leurs courbes de contact planes, ét si, en outre, les diverses sections de la surface, parallèles au même plan tangent, sont les bases d’au- tant de cônes circonscrits : cette surface sera du second degré dès qu elle admettra un nouveau cône, un nouveau Cylin- dre, à courbe de contact plane. »

La démonstration repose sur lemme suivant, gi généra- lise un théorème à M. de la Gournerie.

1. « Une série de lignes d2 niveau d'une surface étant composée d l'ellipses semblables, semblablement placées, et ayant leurs centres en ligne droite : si la courbe de contact d’un cône circonscrit à la surface est plane, cette surface est du second degré ; » le cas excepté lesommet du cône donné appartiendrait à la droite des centres.

: ÉLECTRICITÉ ANIMALE, M. Armand Moreai a lu dans cette séance la note suivante. Extrait de l’Institut, 1"€ section, 1860, XAT

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« J'ai l'honneur de présenter à la Société le récit d’expé- riences faites en vue d'expliquer le phénomène de la décharge électrique de la Torpille. Chaque expérience a été instituée d’après uneidée préconçue en rapport avec les idées théori- ques que l’on se fait actuellement sur cette question difficile.

» La théorie la plus généralement proposée considère l’or- gane comme agissant à la manière d’une pile, et par consé- quent la décharge électrique comme un phénomène lié à une réaction chimique. On suppose une sécrétion se faisant sous l'influence nerveuse; j'ai d'abord cherché à voir le rôle de la circulation dans cette fonction.

» Dans une première expérience j'ai lié toutes les artères qui vont à un des deux organes électriques. Il faut pour cela pla- cer la ligature sur les artères qui vont du cœur à la branchie du même côté; on supprime forcément un des organes res- piratoires , mais il serait presque impossible d'atteindre sur l'animal vivant, dans l'épaisseur même des branchies, les origines des artères qui vont à l'organe électrique. Après avoir ainsi supprimé la circulation sanguine dans un des organes, j'ai excité les nerfs de cet organe et j'ai constaté que les dé- charges électriques étaient encore aussi manifestes qu'avant la ligature.

» L'expérience suivante, faite aussi dans 10 but de voir le rôle de la circulation dans le ee de la décharge, est plus concluante. Sur une Torpille vivante j’ai cherché, en arrière de l'estomac, le vaisseau dorsal : c’est, comme on le sait, l’a- nalogue de l'aorte des Vertébrés supérieurs; mais, au lieu de naître d’un cœur gauche, il résulte de la réunion des vais- seaux qui, sortant des branchies, portent le sang artérialisé. J'ai injecté dans le vaisseau dorsal et du côté des branchies du suif maintenu liquide à la faveur d’une température conve- nable et d’une petite quantité d'essence de térébenthine. La Torpille a péri aussitôt,et quelques minutes après, le suif, soli- difié par le. refroidissement, remplissait toutes les artères de l'organe électrique. J'ai ensuite excité les nerfs de l'organe et obtenu des décharges manifestes.

»On ne peut, dans cette expérience, objecter, comme dans la précédente, que le cours du sang peut se rétablir par les ana-

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stomoses très petites qui existent entreles vaisseaux du côté droit et ceux du côté gauche de l'animal. En outre, dans des vaisseaux remplis de suif, les phénomènes d’exosmose ne sont pas possibles comme on peut penser qu'ils le sont encore dans l'expérience, bien connue, qui consiste à obtenir la décharge en excitant le nerf d'un morceau de l’ Di électrique déta= ché de l'animal.

» Il est donc établi que le sang qui circule dans les artères n'est pas immédiatement nécessaire au phénomène de la dé- charge électrique.

»Je suprosai ensuite qu'une sécrétion pouvait encore se faire sous l'influence nerveuse aux dépens des éléments liquides renfermés dans le üssului-même, de même que l’on voit dans des instants, très courts il est vrai, la sécrétion de la glande sous-maxillaire se produire encore quand on galvanise le filet nerveux qui part du lingual, après la ligature de l'artère de la glande; et, pensant que les réactions chimiques devaient se faire dans des milieux acides ou alcalins, j’espérai que l’expé- rience suivante me fournirait une indication importante rela- tivement à la nature des liquides mis en présence.

» Je choisis des Torpilles de grande taille et les sacrifie’ en enlevant rapidement les centres nerveux situés au-dessus de la moelle épinière. J’évite ainsi les décharges volontaires et répétées, qui épuisent l'organe. Je dissèque ensuite la peau de la face dorsale, afin de rendre bien apparente la surface supérieure des prismes.Ils sont alors très visibles et offrent des dimensions au moins égales à celles des alvéoles d’un gâteau de miel. Je transperce successivement et sans en passer un seul chacun des 50 prismes les plus voisins de l’abdomen : ce sont les plus gros de l'organe. Le poinçon pénètre à travers le diaphragme supérieur et ressort en perçant la peau qui adhère au diaphragme le plus inférieur du prisme. Quand ils sont ainsi tous transpercés suivant leur axe, je fais passer suc- cessivement dans chacun d’eux un courant d'eau fortement acidifiée par l’acide sulfurique. Puis je coupe l'organe de façon à ne conserver que le département composé des prismes ainsi traversés par l'acide. La branchie voisine est laissée adhérente à l'organe et le nerf respecté, puis le tout est disposé comme

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il convient pour constater la manifestation ou l'absence de la décharge électrique. J’excite alors le nerf et trouve que la décharge se produit toujours.

» Cette expérience fut répétée sur une autre Torpille en sub- stituant à l’acide sulfurique une solution de potasse. La dé- charge fut obtenue comme dans lexpérience précédente. Je m'assurai en faisant, aussitôt après la décharge obtenue, différentes sections dans l'organe, qu’en tous les points le papier de tournesol était fortement rougi ou bleui suivant que j avais agi avec l'acide sulfurique ou la potasse.

» Il est nécessaire de prendre l'acide et l’alcali à un degré de concentration capable de réagir fortement sur le papier de tournesol, mais cependant bien loin encore du maximum de concentration; en effet, j'ai obtenu avec des solutions con- centrées l'arrêt définitif de la fonction électrique.

» En substituant à l’acide sulfurique l'acide nitrique, même très étendu, j'ai cessé immédiatement d'obtenir la décharge. L'aspect opalin que prend alors l'appareil m'a fait penser que la coagulation de l’albumine était la cause de cet effet, et non la nature acide du liquide L'alcool et le tanin, qui tous deux coagulent l’albumine, ont donné le même résultat.

» L'état physique du milieu paraît donc plusimportant pour la fonction que la réaction chimique acide ou alcaline.

» Avant de tirer des conclusions, je désire multiplier et varier encore ces expériences, qui ont été subitement interrompues par des circonstances relatives à la pêche en mer, et queje ns puis pour cela offrir aussi précises qu’il convient,

» Dans un prochain travail, je donnerai le degré de con- centration des liqueurs employées. »

Seance du 27 octobre 1860,

ASTRONOMIE. Éclipse solaire du 18 juillet 1860. Commn. nication a été faite à la Société, dans cette séance, d'une note qui lui avait été adressée de Bagnères-de-Bigorre, en août dernier, par M, Farnham Maxwell Lyte, et qui contient la re-

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lation de quelques observations faites par lui et par M: FÉES) lier, pendant l’éclipse. Voioi cette note.

« Nous trouvant près de la zone l’éclipse de soleil du 18 juillet devait êtretotale, etayaht à proximité un observatoire élevé, nous avons-eu la pensée d’observer le phénomène. Nos observations, ayant été faites dans des circonstances atmosphé: riques exceptionnelles, peuvent avoir Ari intérêt; nous allons les faire connaître.

» L'observation de l'éclipse n’était pas sans difficulté on nous : dépourvus d'instruments, nous avons en fabriquer. Notre but. était de faire des épreuves PANtORFR DBIGRAE des di- yerses phases de l’éclipse,

..» M, Lyte possédait heureusement un objectif à long foyer il a eu l’idée de l’enchâsser dans un long tuyau en bois desa- pin, et de recevoir l’image du soleil sur une plaque. en verre dépoli, portée sur un châssis placé à l'une des extrémités du tuyau, et pouvant glisser dans le tuyau de manière à mettre la plaque au foyer principal de l'objectif. La distance focale principale de l'objectif était de 4,00. Le tuyau en. bois avait 4,75 de longueur, l'objectif était à 0,40 environ en.arrière de l'extrémité supérieure du. tuyau. L'intervalle. entre l'ob- jectf et la plaque de verre dépoli, était muni de quatre dia- phragmes ; l’exirémité supérieure du tuyau. était également, munie d’un dièphragme; ce dernier, placé devant l'objectif; avait 0",06 de diamètre. Les diaphragmes en arrière de l’ob- jectif avaient 8 centimètres environ de diamètre; ils servaient à empêcher la réflexion sur les parois du tuyau; '1ls étaient noircis, ainsi que les parois intérieures de celui-ci.

» M, Lyte avait préparé à l'avance une douzaine de plaques de verre revètues d'une couche de collodion et propres à recevoir l'empreinte de l’image solaire. ; bi

» Ces préparatifs terminés, nous nous acheminämes, le 17 juillet à à midi, vers hôtellerie construite sur le versant sud du pic du Midi, au bord du lac d'Oncet, et connue dans Ié81 Pyrénées sous le nom d'hôéellerie du Pic du Midi: C’est te gîte que nous avions choisi pour nos observations: Son alti- tude, d'environ 2 400% au-dessus du niveau de la mef, nous faisait espérer un ciel plus pur que celui de la plaine et plus

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de précision dans nos observations. Une couche de nuages dont l'épaisseur n’était pas inférieure à 800" couvrait tout l'horizon au moment de notre départ de Bagnères, et nous faisait craindre pour le lendemain. Cependant, après une marche d'environ sept heures, nous arrivâmes le soir à l’hô- tellerie du Pic. La masse nuageuse dans laquelle nous avions voyagé s’arrêtait à 50m environ en contre-bas de l’hôtelle- rie ; nous la dominions et nous eûmes bon espoir pour le len- demain.

- » Le 18 juillet dès le matin, nous cherchâmes à placer notre tuyau de manière à lui ménager la mobilité nécessaire pour suivre le soleil dans sa marche pendant environ quatre heures, et à lui procurer la stabilité également nécessaire pour le rendre fixe au moment des observations. Il fallait aussi le mettre à l’abri des vibrations que lui aurait impri- mées une brise assez fraîche venant du sud-ouest. Nous ne trouvâmes rien de mieux que de pratiquer une ouverture dans le haut du toit d’un hangar annexe de l’hôtellerie, et dans le- quel on loge les chevaux des touristes. L'ouverture pratiquée près d’une des fermes en charpente qui portent le toit en planches, et près du faîte, permettait d’y faire passer le tuyau et de lui donner dans toutes ses positions le meilleur appui dont nous pussions disposer. L’extrémité inférieure du tuyau reposait sur une table à tréteaux, et pouvait s’y mouvoir fa- cilement dans le sens de l’ouest à l’est.

» Il était difficile de déterminer le foyer principal de l’ob- jectif; en dirigeant le tuyau vers le soleil, nous obtenions une image très brillante dont l'éclat ne nous permettait pas de bien juger de sa netteté. Nous dirigeâmes alors le tuyau vers le sommet du Marboré, situé à 30 kilomètres environ de notre station. C'était le point fixe le plus éloigné de notre horizon. Nous avons pu ainsi déterminer, avec une exactitude suffi- sante pour nos observations ultérieures, le foyer sidéral de notre objectif.

» L'objectif était muni de deux diaphragmes de 0,005 de diamètre, placés l’un devant l’autre de manière à intercepter les rayons divergents et à ne laisser passer que le faisceau central.

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» Dans ces conditions, nous avons fait une épreuve instan- tanée du soleil. L'épreuve s'étant trouvée solarisée, nous avons réduit le diamètre du diaphragme supérieur à 0",002.

» Une seconde épreuve faite avec l'instrument ainsi modifié nous à donné une image très nette du soleil, dans laquelle on remarque trois taches.

» Une troisième épreuve nous a démontré que ces taches n'étaient pas un accident, mais qu’elles correspondaient à des taches solaires. Cette épreuve a été faite un quart d'heure en- viron avant le commencement de l’éclipse ; elle porte le 1 de la série jointe à notre relation.

» L’éclipse a commencé pour nous à 2AGEIE (heure du télégraphe électrique de Bagnères).

» L'épreuve 2 a été faite à 2#5:9%:30:

» L'épreuve 3, faite à 27 as

offrait cette circonstance très intéressante que la grande tache située dans la partie inférieure du disque solaire était à moi- tié cachée par le bord oriental de la lune. Cette épreuve ayant été gâtée par la maladresse d'un de nos aides, nous regrettons de ne pouvoir la produire.

» Nous ayons pu cependant remarquer que la partie appa- rente de la tache se séparait de la partie occultée par une ligne très nette.

- » L'épreuve 4 à été faite à 9, 37m 30° » L'épreuve 5 a été faite à 2x 53° A5° (1) » L'épreuve 6 a été faite à 14m

» C'était le moment l’occultation avait dépassé de 3m son maximum. On remarquera sur cette épreuve une auréole qui entoure dans tous les sens la partie brillante; peut-être ne faut-il voir qu'un effet de diffraction. Ce qui donnerait quelque probabilité à cette hypothèse, c’est qu’au moment de la plus grande occultation, les pierres rougeâtres avaient pris une teinte vert olive; les pierresgrises avaient bleui ; les visages des personnes étaient blafards.

(1) Une épreuve faite à 3: 41%, moment du maximum d’occultalion, n’a päs donné d’empreinte sensible, La lumière était très faible et de légers brouillards couvyraient le soleil,

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» L'épreuve 7 a été faite à :: | gt 197 », L'épreuve 8 a été faite à 8} 397 305 » L’éclipse s’est terminée pour nous à Ar Qu

» La vaste plaine de nuages dominée par notre station s’est élevée-peu à peu à mesure que l’occultation augmentait. Elle a atteint la plus grande hauteur au moment du maximum de Poceultation ; elle s’est abaissée ensuite progressivement à mesure que le disque solaire émergeait sur le bord occidental de la lune.

» La température a;suivi une marche inverse ; le minimum a eu lieu au point de la plus grande occultation; îl a fait pen- dant quelques instants un froid très vif.

» Le collodion employé dans nos opérations a été préparé selon la fonmule que vient de donner M. Lyte dans le Bulle- tin. de la Société photographique de Eondres.

»:M. Lyte avait demandé à l'Observatoire de Paris: les moyens nécessaires pour faire des observations plus complètes _etplus circonstanciées. demande étant restée saus réponse, il a faire fabriquer à la hâte les instruments qui étaient in- dispensables et dont l’imperfection ne le cédait qu’à la rusti cité de leur installation au poste élevé qui avait été choisi. »

__ Voici le mode suivi pour la préparation du collodion em ployé dans les opérations ci-dessus, tel qu'il a été décrit par M. Lyte dans le Journal de la Société photographique .de Londres.

«Pyroxyline. J'aime mieux me servir de papier pour la confectionner que de lin ou de coton. El me semble qu'il donne une pellicule plus amorphe qu'aucune autre matière. Le pa- pier que j'emploie est le papier à cigarettes, que l’on fait ha- bituellement de toile de lin et qui offre l'avantage d’imbiber facilement.les acides. bte Prenez : Acide azotique (densité, 1,38), - 200 centim.eubes. sulfurique (densité, 1,84), : 500: Azotate de polassesec en poudre, 150 grammes. Papier, 20 Mettez d’abord le nilre dans l’acide azotique et remuez jusqu'à ce que le sel soit presque dissous. Ajoutez ensuite l'acide sul-

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furique, et plongez un thermomètre dans le mélange; celui-ci doit marquer environ 59° centigr. Sila température se trouvait _ être au-dessus ou au-dessous de 55°, il faudrait la porter à ce point soit parune application prudente de la chaleur nécessaire, soit en Jaissant refroidir le mélange dans"un vase couvert le temps voulu. Lorsque la liqueur est arrivée à la tempéra- ture demandée, on y plonge le papier que l’on a eu soin de couper préalablement en petits carrés. Ceux-ci doivent être jetés dans l’acide un à un, etimmergés au moyen d'une ba- guette de verre; on laisse ensuite le vase couvert et en repos pendant une heure environ, et l'acide en excès ayant été dé- canté, on jette la masse restante dans un seau d’eau froide, en séparant aussi vite que possible les uns des autres les mor- ceaux de papier, afin de rendre plus prompte l'abstraction de l’acide. On complétera le lavage du papier en le laissant pen- dant plusieurs heures dans une eau courante, ce qui se fait le mieux en le mettant dans un filet que l’on place dans une rivière ou dans tout autre courant d’eau limpide. Pour termi- ner, on le trempe pendant quelques heures dans une solution d’acétate de soude (10 grammes par litre d’eau), après quoi on le lave encore dans de l’eau pure, et on le fait sécher au so- leil ou dans une chambre chaude.

Collodion. Prenez :

Éther parfaitement rectifié à62-68-, 1 litre. Pyroxyline, 8 à 10 grammes.

Ajoutez la pyroxyline à l’éther et secouez le mélange forte- ment; dès que la proportion voulue d’alcool aura été ajoutée, on verra le papier devenir transparent et se désagréger. On continue ensuite les secousses jusqu'à ce que la dissolution soit complète.

L’éther du commerce renferme des proportions variables d’alcool, de sorte qu'il est assez difficile d’obtenir un éther de force constante en différents lieux.

Par la méthode exposée ci-desus, on fait une sorte d’ana- lyse approximative de l’éther, et le collodion contient tou- jours une proportion définie d’alcool. On devra d’abord laisser

Extrait de l’Institut, 4e seclion, 1860, 12

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déposer le collodion et puis le décanter. Il devra être COnSeTYé dans un lieu obscur et frais.

Solution iodante. Prenez :

Todure de sodium 10 grammes —- de cadmium 17,5 Bromure de cadmium 6

Alcool à 95-98 p. 100. 1 litre.

Mélez et conservez la solution filtrée dans un flacon propre. Cette liqueur iodante doit être mêlée au collodion dans la pro- portion de 1 partie de la première pour 3 du dernier, et le mieux est de ne l'employer que quelques heures après que le mélange en a été fait. C'est même seulement au bout de vingt- quatre heures qu elle acqui tert toutes ses qualités. De tous les collodions dont je me suis servi celui-c', est de beaucoup le plus actif; il conserve d’ailleurs pendant plusieurs mois une sensibiilé uniforme et fournit une pellicule dense et amorphe, L'iodisation par une solution iodante au sodium et au cad- mium permet l'emploi d'une plus grande proportion de bro- mure que si l’on s'était servi d’un sel de potassium; d’un autre côlé, la tendance à l’opacité qui résuite de la présence de sels d’ammonium se trouve évitée.

L’iodure de sodium doit être sec et non cristallisé, et devra être conservé dans un flacon bien bouché. On peut l'obtenir très pur soit en décomposant l'iodure de fer par du carbonate de soude, soit en traitant l’un par l’autre des équivalents d’iodure de potassium et de bilarirate de soude, dissous séparément dans la plus petite quantité possible d’eau bouil- lante ; les dissolutions étant mêlées, on y ajoute le quart de leur volume d'alcool, et on filtre après le refoidissement., La liqueur filtrée donne, par l'évaporation, de l’iodure de sodium très pur.

ToxicoLocie. Action du curare. M. Arm. Moreau. a COM- muniqué à la Société une note dans laquelle il étudie l’action du curare sur la Torpille et montre par des expériences variées que les nerfs musculaires sont paralysés longtemps avant que les nerfs électriques et les autres organes du sysième nerveux {centres nerveux et nerfs de sentiment) aïent perdu leurs pro-

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priétés physiologiques. Les nerfs électriques ayant avec les nerfs moteurs une grande analogie, cette différence d'action de ce réactif physiologique offre quelque chose d'inattendu. M. Moreau, à l’occasion de ces recherches, ajoute:—Le curare est, on le sait, un réactif physiologique très puissant, que les médecins essayent actuellement d'utiliser comme agent théra- peutique. Ainsi, ces jours derniers, à l'hôpital de l'Enfant- Jésus, un jeune garçon atteint de la rage a été soumis à l’ac- tion du curare. Cette médication ne peut être jugée d’après ce cas particulier, car elle a été interrompue de bonne heure et remplacée par une autre. Tout en reconnaissant que dans une maladie telle que la rage, qui n’a jamais été guérie, ce soit un devoir pour le médecin que de tenter des traitements nou- veaux, on doit remarquer que le curare ayant pour action essentielle la propriété de paralyser les nerfs moteurs ou de diminuer leur excitabilité, son emploi est loin d’être indiqué dans la rage au même titre que dans d’autres affections.

Le tétanos étant caractérisé par des contractions violentes et persistantes offre l'exemple d’une affection dans laquelle l’ex- citabilité du système nerveux moteur est remarquablement exagérée. Aussi l'emploi du curare est-il rationnel et paraît-il devoir être profitable dans cette affection.

M. Vella (de Turin) a eu le mérite de l’employer le premier et le bonheur de voir un de ses malades, blessé de la campa- gue d’Ttalie, sortir guéri de l'hôpital. Dernièrement ce physio- logiste a présenté à l'Académie des sciences de Paris un travail dans lequel il montre par des expériences que le curare doit être considéré comme l’antidote de la strychnine. Il précise avec soin les doses et détermine les conditions dans lesquelles un animal empoisonné par la strychnine et voué à une mort prochaine est guéri par l’ingestion du curare dans les veines.

Si, dans ces expériences il combat à l’aide du curare l'influence de la strychnine déj# absorbée, il peut arriver à af- firmer que l'animal sera guéri ou périra suivant qu’on lui admi- nistrera ou non le curare, tout le monde comprend que cette précision est impossible à obtenir dans le traitement du tétanos, affection moins simple que celle qui résulte de l'ingestion de la Strychnine dans l’économie, et qui exige, pour être bien

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traitée, des tâätonnements nombreux relatifs aux doses et com- porte sans doute aussi des indications thérapeutiques multi- ples en rapport avec sa complexité même.

Aussi celte question intéressante demande-t-elle encore de longues recherches cliniques.

M. Giraldès a fait remarquer à ce sujet la nécessité d'insister sur le dosage du curare dans toutes les recherches et sur la manière dont il est introduit dans l’économie. La muqueuse digestive a été considérée, il y a quelques années, encore, Comme inapte à l'absorption de cette substance, et, depuis, des expériences ont définitivement montré que l’ab- sorption avait lieu aussi par cette voie. Comme, en outre, l'origine de cette substance est encore inconnue, il serait vi- vement à souhaiter que la curarine fût isolée et que les do- sages fussent faits sur ce principe actif et nôh pas.sur cette espèce d'extrait que l’on nomme curare et que n'est pas tou- jours le même.

M. J. Regnauld a dit à cette occasion qu'ayant eu entre les mains à la Pharmacie Centrale un flacon bouché depuis dix ans peut-être et contenant du curare à l’état de pâte très molle et offrant l'aspect du cirage, il l’a trouvé très actif, mais que, plusieurs mois après, ayant essayé cette substance qui avait été laissée dans un flacon ouvert, il l’a trouvée sans action.

M. Dareste ayant fait remarquer que M. Matteucci a publié tout récemment des expériences sur le sujet traité par M. Moreau (Nuovo Cimento, août 1860) et ayant demandé à M. Moreau si les résultats obtenus de part et d’autre sont con- cordants, M. Moreau a répondu que dans le travail cité par M. Dareste, il est dit que les Torpilles soumises à l’action du curare ont offert les mêmes contractions que les Torpilles saines quand on excitait la moelle épinière, et qu'en outre le pou- voir électromoteur a paru aussi le même. Or le premier effet du curare étant de paralyser*les nerfs de mouvement, il est manifeste que les Torpilles n'étaient pas empoison- nées. La substance avait été placée sous la peau, et l’absorp- tion est moins sûre et moins prompte que dans les vei- nes. C'est peut-être à cette circonstance et à l'emploi d’une dose trop faible qu'il faut attribuer l'absence des signes

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caractéristiques de l’intoxication par le curare, plutôt encore qu'à l'emploi d’un curare particulier et inoffensif. Sans doute on peut recevoir des pays étrangers des curares différents ; il a vu M. CI. Bernard essayer une substance désignée sous ce nom, et reconnaître que le principe actif était le même que celui de l’Upas anthiar. Les propriétés physiologiques de l’anthiarrhine sont connues et bien différentes de celles du curare. Mais toutes les fois qu’un physiologiste parle du cu- rare, il est certain qu'il parle d’une substance possédant la propriété de paralyser rapidement les nerfs de mouvement. J'ajouterai enfin, a dit encore M. Moreau, que le paragraphe relatif à l’action du curare ne m'a paru être qu’un détail dans le travail considérable que M. Matteucci publie sur le pouvoir électromoteur de l’organe de la Torpille, et pour cette raison, si une inexactitude s’est glissée dans ce travail, on voit qu’elle ne touche qu'à un point de détail abordé pour ainsi dire en passant par l’auteur, et qu’elle n’a pas rapport au sujet prin- cipal. Séance du 17 novembre 1860,

CHIMIE. On a entendu dans cette séance la note suivante de M. Jules Regnauld, professeur à la Faculté de médecine, sur les phénomènes consécutifs à l’amalgamation du zinc, du cadmium et du fer.

« La première expérience relative à l'influence de l’amal- gamation sur le rôle électrochimique d'un métal remonte à 1826, elle est due à H, Davy (1). L'observation de ce savant illustre prouve que, dans un couple voltaïque du zinc or- dinaire, d’un côté, et du zinc amalgamé, de l’autre, plongent au sein d’un liquide actif, le premier est positif par rapport au second. Cela revient à dire que le zinc amalgamé s'attaque plus que le zinc ordinaire. Le même fait se vérifie avec le zinc pur comparé au zinc qui a subi l’amalgamation.

» J’ai déjà eu l’occasion de rappeler ailleurs (2) les diverses théories qui ont été proposées pour faire connaître l’origine de ce singulier phénomène.

(4) Philosophical Transactions, 1826, p. 405. : (2) Annales de Chimie et de Physique, tome 44, p. 484.

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» Ces théories ont été émises par Davy (1), par MM. Fara- day (2) et Becquerel (3); elles n’ont été données, du reste, par ces physiciens, que d’une façon intercurrente, sans dévelop- pements ni expériences à l'appui.

» Les hypothèses des physiciens que je viens de citer ne m'ayant pas semblé suffisantes, j'ai été amené à chercher une explication nouvelle dans laquelle j'ai fait entrer en ligne les phénomènes thermiques liés d’une façon intime à l’amalga- mation du zinc. Si petite, en effet, que l’on suppose l’affinité du zinc pour le mercure, l'élévation du premier de ces mé- taux dans l'ordre des affinités positives par le fait de sa com- binaison avec un métal plus électro-négatif est contraire à toute prévision fondée exclusivement sur des considérations chimiques.

» Qu'il me soit permis de rappeler l’ensemble des raisonne- ments fort simples qui m'ont guidé dans la solution de ce problème. Lorsque le zincnormal, c'est-à-dire à l’état solide, est plongé dans un liquide sur lequel 1l réagit en se dissol- vant, ce corps, en s’engageant dans la combinaison, prend l'état de liquide. La quantité de chaleur nécessaire pour lui donner cette nouvelle constitution moléculaire estreprésentée par une diminution dans le nombre des calories qui est l’ex- pression etla mesure de l’affinité exercée pendant la réaction chimique.

» Cela étant posé, remarquons que l’amalgamation du zinc comprend deux phénomènes distincts : la liquéfaction de ce métal parle meréure, et la formation d’un alliage, c’est-à-dire d’un composé chimiquement défini. Quelle que soit la gran- deur de l’affinité mise en jeu pour effectuer cette combinai- son, elle est représentée par un dégagement de chaleur qui se trouve en moins dans l’amalgame. La liquéfaction du zinc s'exprime, au contraire, par un certain nombre de calories qui se confinent dans l’alliage comme chaleur de consti- tution.

(#) Recucil cité, (2) Experimental Researches in Electricity, 1839, p, 306, $ 104, (3) Traité de l'Electricité, 1854, t, 1, pag. 221,

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» Le zinc amalgamé, et par suite préalablement liquéfié par le mercure, soumis à l’action d’un liquide actif, l'acide sulfurique étendu, par exemple, pénètre dans la molécule saline sans changement d'état. Il n’y a donc pas d'autre dé- ficit sur la quantité de chaleur correspondant à l’action chi- mique accomplie que celle qui manifeste la perte nécessaire pour la destruction de l’alliage. Si l'on compare électrochi- miquement le zinc amalgamé au zinc normal, le phénomène observé dépend en réalité de la différence de deux actions de signes contraires, de la chaleur ou affinité positive gagnée par la liquéfaction, de la chaleur ou affinité positive perdue par le fait de la combinaison avec le mercure. Si le zinc amalgamé est électropositif par rapport au zinc solide, même pur, j'attribue ce résultat à ce que ce métal exige pour passer à l’état liquide un nombre de calories plus grand que celui qui est dégagé pendant son union chimique avec le mercure,

» Tel est le phénomène observé consécutivement à l'amal- gamation du zinc, et telle aussi l'explication que j’ai cru pou- voir en proposer. Îl était intéressant de savoir si, avec d’au- tres métaux, les choses se passent de la mème façon, car on pouvait espérer ainsi rendre général ce qui n'était encore que particulier. M. Gaugain (1) s’est occupé de résoudre cette question, et son choix s’est tout d'abord porté sur le cadmium, métal extrèmement voisin du zinc par ses affinités chimiques. M. Gaugain a constaté un fait intéressant dont j'ai pu vérifier l'entière exactitude : le cadmium, soit en lames amalgamées superficiellement, soit à l’état d’amalgame pâteux ou liquide, est constamment électronégatif par rappoït au même métal libre et solide. Ainsi le cadmium, si rapproché du zinc, se comporte d’une façon absolument inverse lorsqu'il est soumis à une action complétement identique.

» La théorie que j'ai proposée pour le zine permet de don- ner la solution de ce résultat, qui paraît fort étrange au pre- mier aperçu. Faisons observer d’abord que l’ensemble des propriétés chimiques du cadmium conduit à admettre que son module thermochimique, relativement au mercure, est très

(1) Comptes rendus, t, 42, p, 480, L'Institut, 1856,

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peu inférieur à celui du zinc. Ce sont, en d’autres termes, deux métaux qui, en s’unissant chimiquement au mercure, dégagent à très peu près le même nombre de calories.

D'un autre côté, l'examen des nombres qui représentent leurs chaleurs latentes de fusion donne :

Chaleur latente de fusion, Zinc 28,13 (Person) Cadmium 13,66 (Person)

Différence 14,47

» On voit que la chaleur latente de fusion du zinc est plus de deux fois supérieure à celle du cadmium.

» Il me semble aisé de déduire de cette comparaison la cause des effets inverses produits par l'amalgamation du zine et par celle du cadmium. Le zinc devient électropositif parce qu'il fixe plus de chaleur en se liquéfiant dans le mercure qu'il n’en perd en se combinant avec lui. Le cadmium, dont le rang au point de vue de l'affinité est à peu près le même que celui du zine, possède une chaleur latente de moitié plus faible; en se combinant au mercure, il dégage plus de cha- leur qu'il n’en gagne par la liquéfaction, son affinité positive décroît: amalgamé, il est plus électronégatif qu’à l’état de liberté. à Er

» Voilà l'interprétation que m'a fournie l’analyse des don- nées du problème; j'ajoute que les caractères électrochimi- ques présentés par l’amalgame du cadmium m'ont conduit à réaliser une expérience fort simple, mais qui est un crite- rium sûr de la valeur de l'hypothèse sur laquelle repose ma théorie.

» Le zinc, ai-je dit, devient électropositif parce qu'en s’a- malgamant il fixe plus de chaleur qu'il n’en dégage; le cad- mium électronégatif, parce que, dans les mêmes circon- stances, il dégage plus de chaleur qu'il n’en absorbe. Le premier doit donc, au moment de l’amalgamation, détermi- ner un abaissement, le second une élévation de température. Vu la complication des phénomènes, il était possible que la résultante thermométrique fût très petite, mais on était en

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droit d’espérer que le sens du phénomène n’échapperait pas à une investigation attentive. En réalité, l'expérience donne un résultat d'une netteté parfaite, et on peut dire même que la grandeur des quantités le rend presque grossier.

» Dans un tube de verre fermé à une de ses extrémités, on introduit 20 gr. de mercure pur et un thermomètre à petit ré- servoir permettant facilement la lecture du cinquième de de- gré centigrade. D'un autre côté, on prépare 2 gr. de limaille fine de zinc que l’on place dans un tube semblable au précé- dent. On attend que la température des deux métaux se mette en équilibre avec celle de la pièce dans laquelle se fait l’ex- périence.

» Dans une première expérience, le thermomètre cessa de baisser après une demi-heure; la température du zinc et du mercure était de H 10°. Le mercure fut versé dans le tube contenant la limaille de zinc, et en agitant avec précaution pour déterminer le contact, l’amalgamation commença à s'o- pérer. Aussitôt le thermomètre a baissé et la colonne est res- tée quelque temps stationnaire à+-7°,5. La température du mélange pendant l’amalgamation du zinc a donc diminué de 2e

» La même expérience préparée simultanément pour le cadmium a donné le résultat suivant. Immédiatement après la projection du mercure dans la limaille et l'agitation, la co- lonne thermométrique s’est élevée progressivement et a atteint son maximum à + 13°. La température du mélange durant l'amalgamation du cadmium a donc augmenté de 30. Ces deux expériences répetées plusieurs fois ont donné des résultats remarquablement constants.

» En résumé, cette réalisation complète d'une prévision suggérée par la théorie que je viens de développer me paraît la meilleure confirmation qui se pût fournir en faveur de . l’hypothèse qui m'a dirigé dans ces recherches.

» Je terminerai ce premier travail par quelques observa- tions relatives à l'influence de l’amalgamation sur le fer. Ad- mettant, d’après l’élasticité de ce métal, que sa chaleur latente de fusion est grande, j'ai espéré trouver dans cet exemple un

Extrait de l’Institut, Are section, 1860, 43

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moyen de confirmer ou d'infirmer Îes opinions précédem- ment émises.

» J'ai d'abord constaté que le fer peut être facilement amal- gamé, comme l'a prévu M. Cailletet, par le procédé qu'il a indiqué pour l'aluminium (1).

» En employaut des lames de fer comme caftade, successi- vement dans une solution de nitrate mercureux, puis, après lavage, dans de l’eau aiguisée de + d'acide sulfurique, on les amalgame de la façon la plus complète.

» Or, en comparant des lames identiques de fer pur sans carbone ni silicium, obtenu par le procédé de M. Péligot, les unes amalgamées, les autres libres, j’ai reconnu que, comme pour le zine, la lame amalgamée est toujours électropositive par rapport à celle qui n’a Daÿ subi l’action dissolvante du mercure.

» Ce résultat expérimental était une conséquence de ma théorie. Car si l’on admet, avec M. Person (2), au moins comme approximation suffisante dans l’espèce, que les cha- leurs de fusion des métaux sont proportionnelles à leurs co- efficients d’élasticité, la chaleur latente du fer doit être ex- primée par un nombre de calories plus de deux fois supérieur à celui du zinc.

» En effet, partant de cette relation et prenant pour coeffi- cients d'élasticité les nombres qui résultent des conscien- cieuses recherches de M, G. Wertheim (3), on trouve :

Chaleur latente de fusion, Coefficient d’élasticité, Zinc 28,13 (Person) 9,021 (Wertheim) Fer 64,84 (calculée) 20,794 (Wertheim)

Ainsi le fer, qui n’est pas éloigné du zinc par ses affinités, mais dont la chaleur latente de fusion est beaucoup plus considérable, condense de la chaleur en se liquéfiant dans le mercure, et, ainsi que le zinc, s'élève dans l ordre des af- finités positives.

» Je donnerai dans un prochain mémoire le détail d’ex-

(4) Comptes rendus, lome 44, p. 4250. - L'Institut, 1857, {2)34nnales de Chimie et de Physique, série, t, 24, p. 265, {3) Annales de Chimie et de Physique, 55 série, 1, 12, p. 885,

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périences qui prouvent que les fers doux et même les aciers deviennent tous électropositifs en s’amalgamant; mais qu’il me soit permis aujourd'hui de prendre date relativement à un fait incident que l'étude des propriétés du fer m'a fourni l’oc- casion de mettre en évidence. |

» Je me suis proposé de savoir si la constitution physique de l'acier avant ou après la trempe ne modifie pas d’une façon permanente ses affinités chimiques. Or j’ai reconnu, en expérimentant sur un grand nombre d’aciers d'origines très diverses, que tout acier trempé est électronégatif par rap- port au même acier non trempé. :

» Appliquant à deux états d’un même corps les idées qui ônt servi de guide dans la première partie du présent travail, et remontant des propriétés chimiques aux propriétés ther- miques et mécaniques, n’est-on pas autorisé à penser que la chaleur de constitution de l’acier trempé est moindre que telle de l’acier recuit ? Dans l'acier, formé chimiquement des mêmes éléments, mais soumis à des conditions spéciales de refroidissement qui laissent subsister un groupement anomal et persistant des molécules, cette diminution de la quantité de Chaleur serait la cause sinon l’explication de la constitution mécanique si différente avant ou après la trempe.

» Lorsque des expériences en voie d'exécution seront ter- minées, je reviendrai sur ce sujet avec les développements

qu'il me paraît exiger. » Séance du 2h novembre 1860,

MÉCANIQUE. M. de Caligny a communiqué dans éette séancé quelques développements théoriques sur ses machines à Comprimer de l'air au moyen des chutés d'eau. On renvoie, pour abréger, à ses communications antérieures sur ce sujet, publiées dans l’Instilut.

L'auteur rappelle d'abord que tous ses appareils à élever de l'eau au moyen du mouvement acquis dés colonnes liquides, peuvent être transformés en machines soufflantes à com- pression d'air. Les formules au moyen desquelles on calcule le travail nécéssaire pour comprimer de l'air à une tension donnée, ou le travail résultant de la tension ce fluide,

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Sout très connues. On en trouve la démonstration dans l’In- troduction à la mécanique industrielle de M. Poncelet, avec la table des logarithmes hyperboliques dont on se sert dans ces formules.

M. de Caligny, au moyen de ces formules, examine dans quelles iimites on peut combiner le travail de la détente de l'air sur le mouvement en retour de la colonne liquide com- primante, de manière à supprimer toute espèce de soupape à l’intérieur de cette colonne liquide, sans se priver au besoin de l’oscillation de décharge en général, par une troisième branche qui permet d'approfondir le point de départ de la colonne oscillante, sans laisser retomber inutilement sur le bief d’aval ce qui reste d’eau dans la branche l’air a été comprimé.

Il est clair que si, comme dans le bélier hydraulique, l’os- cillation en retour vers le bief d’amont faisait toujours redes- cendre l’eau au-dessous de la soupape d’évacuation, cette dernière condition serait tout naturellement remplie.

Mais s’il est en général facile de l'obtenir pour les petites chutes, par des combinaisons depuis longtemps communi- quées à la Société, il faut tenir compte, pour les grandes chutes, de ce qu'une colonne liquide d’une grande hauteur doit être refoulée vers le bief d’amont, et, dans tous les cas, la pression atmosphérique agissant sur le bief d’amont doit être ajoutée à celle de la colonne qu ‘il s’agit de refouler, si l’on veut qu un volume d'eau égal à celui de la chambre de compression soit en entier refoulé vers ce bief à chaque pé- riode.

Mais si l’on veut qu'une fraction assez grande de ce volume soit tout simplement rejetée au bief d'aval, il suffit de pou- voir disposer ‘de la détente d'une assez petite quantité d'air convenablement comprimé, pour refouler la colonne liquide vers lamont, seulement de manière qu’à l'époque celle- ci sera réduite au repos, cette détente ait réduit la tension de l’air à celle de l’extérieur. En effet, si toutefois le tuyau de conduite contenant la grande colonneliquide est assez longue par rapport à la chute, la soupape d'évacuation étant ouverte par les moyens précédemment communiqués à la Société, la

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pression de la longue colonne n’agit pas à cette extrémité comme si tout était fermé, à cause d’un phénomène résultant des effets de l’inertie, conformément à des expériences com- muniquées aussi à la Société depuis longtemps. Il en résulte que la colonne liquide qui doit sortir, quoique pouvant être d’une très-petite hauteur par rapport à l’autre, étant d’ailleurs beaucoup plus courte, a non-seulement le temps de sortir au bief d'aval avant un retour trop sensible de l’autre, mais a même le temps de sortir par une oscillation de décharge, de manière que son niveau baisse notablement au-dessous de celui du bief d’aval en contre-bas duquel la branche de dé- charge est convenablement plongée.

On savait déjà, par des communications antérieures de M. de Caligny, que la suppression de toute soupape à l’inté- rieur du grand tuyau de conduite était possible; ce qui vient d’être dit a pour but d'expliquer encore mieux, au besoin, comment il croit pouvoir obtenir ces effets variés au moyen d'une seule soupape à eau fonctionnant d'elle-même, en vertu du principe nouveau de succion présenté à la Société, il y a dix ans, par l’auteur (séance du 2 novembre 1850), sans que l’on soit obligé de se soumettre à des conditions trop génantes. Quant à la pratique, il est clair que si l'on voulait appliquer cette disposition aux grandes chutes, il faudrait examiner dans quelles limites la longueur du tuyau de conduite ne se- rait pas’trop coûteuse. Les expériences en grand qu' on fait edce moment sur une des machines à compression d'air de M. de Ualiony, permettront, dit-il, au moyen de l’échauf- fement de l'air et de l'eau qui en résulte, de constater ce qu’il peut y avoir de vrai dans l'hypothèse d'après laquelle une partie sensible du déchet proviendrait de ce que l’air et l'eau ne peuvent être échauffés en vertu du mouvement acquis dela colonne liquide sans que ce soit aux dépens du travail. Ainsi, abstraction faite du côté pratique, il pense que ces expériences lui permettront de trancher d'une manière définitive une des questions les plus intéressantes que pue re la théorie de la chaleur.

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102 Séance du décembre 4860,

MINÉRALOGIE. Une note sur les propriétés pyro-électri- ques de quelques cristaux bons conducteurs de l'électricité a été lue dans cette séance par M. C. Friedel, conservateur de la collection de minéralogie à l'École état des mines.

M. Marbach, dans une communication adressée à l’Acadé- mie des sciences en 1855, a signalé un fait remarquable qu’il a observé sur les cristaux de pyrite cubique et de cobalt gris. Il a reconnu qu'il existe, parmi ces cristaux, deux variétés jouissant de propriétés thermo-électriques opposées, de telle sorte que l’on peut former, avec deux fragments de pyrite convenablement choisis, un couple thermo-électrique ayant un pouvoir éléctromoteur plus grand qu'un couple bismuth- antimoine, la variété négative étant plus négative que le bis- muth, et la variété positive plus positive que l’antimoine.

Espérant découvrir une relation entre ces propriétés élec- triques ét la forme cristalline de la pyrite, J'ai répété, dit M. Friedel, les expériences de M. Marbach. Il à été facile de reconnaître l'existence des deux variétés de pyrite; mais un examen attentif n'a pas laissé voir la moindre différence cris- tallographique entre les cristaux possédant les propriétés électriques opposées. Toutefois les beaux cubes provenant de Traverselle (Piémont) montrent souvent en quelques par- es de leur surface des places irrégulières, striées d’une ma- nière beaucoup plus fine que le reste de la face, quoique dans la même direction, et faisant naître à l'esprit l’ séé de matles analogues à celles du quartz. Lorsqu'on fait scier le cristal à la hauteur de la partie finement striée, on voit que celle-ci est en rapport avec des fentes qui s'étendent dans l’intérieur du cristal et qui paraissent limiter des macles irrégulières.

Ce qui peut donner quelque intérêt à cette observation, c'est que dans les cristaux que j'ai examinés j'ai toujours trouvé les parties finement striées d'un signe électrique opposé à celui des parties brillantes qui les environnent. On pourrait être porté par à supposer que l'existence des deux variétés de pyrite est liée à celle des cristaux hémièdres de droite et hé- mièdres de gauche, superposables et par conséquent identi-

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ques cristallographiquement lorsqu'ils sont séparés, mais se trahissant dans leurs macles par une différence d'éclat.

Mais l'examen de la forme cristalline de la pyrite pouvait conduire à d'autres recherches. En effet, si l'on considère les deux extrémités d’une des grandes diagonales du cube strié de pyrite, on voit que ces deux extrémités ne sont pas super- posables (en tenant compte de la direction des stries). Elles présentent quelque chose d’analogue à ce qui existe dans la boracite, et, par suite, il serait possible que la pyrite, outre les propriétés thermo-électriques dont il vient d’être question, jouit de propriétés pyro-électriques.

La pyrite conduisant bien l'électricité, si elle était pyro- électrique, il était probable qu’elle donnerait non de l’élec- tricité statique, mais de l'électricité dynamique.

Ayant serré les deux angles opposés d’un cristal entre les brançhes d'une sorte de pince formée de deux fils de platine isolés, communiquant avec un galvanomètre, et ayant introduit la pince et le cristal dans une petite étuve à air, j'ai vu se produire une forte déviation de l'aiguille du galyanomètre. Si la température de l’étuve est'stationnaire, quand le cristal a le temps de prendre cette température, l'aiguille revient au zéro; elle le dépasse et marche en sens contraire de la pre- mière déviation, si la température de l’étuve s’abaisse, ou si l’on retire la pince, pour laisser le cristal se refroidir à l’air libre, Il y a donc'inversion du courant quand la variation de température change de Fione, Ces phénomènes ont été consta- tés sur un grand nombre de” cristaux ; ils présentent tous les caractères de la pyro- électricité.

Toutefois je n'ose pas encore conclure à l’existence de la pyro-électricité dans la pyrite, à cause de l’impossibilité je me suis trouvé d’expérimenter sur un cristal homogène. Dans le grand nombre de cristaux que j'ai examinés, je n’en ai pas trouvé un seul dans lequel on ne parvint pas à reconnaître la _ présence simultanée des deux variétés découvertes par M. Mar. bach. Cette non-homogénéité peut influer de deux manières : soit en constituant dans le cristal même des couples thermo- électri- ques, soit en produisant des courants pyro- électriques de sens contraires dans les différentes parties du cristal. Ce qui pour

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rait faire supposer que c’est de la seconde manière que les macles troublent la direction des courants observés, c’est qu'un prisme scié parallèlement à la grande diagonale d’un cube de pyrite, ayant montré à ses deux extrémités, séparées par une sorte de fente naturelle, Les propriétés opposées des deux va- riétés de M. Marbach, a donné également, dans ses différentes parties, des courants de sens contraires lorsqu'on les a chauf- fées dans la pince de platine.

Ces expériences sur la pyrite devaient trouver une vérifica- tion dans celies qu’on pouvait faire sur diverses autres sub- stances. Le cuivre gris se présentait naturellement comme une des premières à examiner. Avec le galvanomètre à fil court qui m avait servi, j'ai pu à peine constater quelques indices de déviation. Ayant eu depuis à ma disposition, grâce à la complaisance de M. Ruhmkorff, un galvanomètre de 20 000 tours, j'ai pu reconnaître de la manière la plus nette l'exis- tence de la pyro-électricité dans ce minéral. Il est très-difficile d’avoir des cristaux isolés de cuivre gris; cependant un cristal de Ténez a donné dans la direction des quatre diagonales du cube (c’est-à-dire des quatre sommets aux bases opposées) des courants de même seus, avec inversion par le refroidisse- ment (1).

Le même galvanomètre a pu servir à constater qu'au rouge la tourmaline et le pyroxène deviennent assez bons conduc- teurs pour donner passage à des courants thermo-électriques. Le mode de chauffage employé était trop imparfait pour qu'il fût possible de s’assurer s’il y avait dans ce cas développement de pyro-électricité.

Séance du 45 décembre 1860.

GÉOMÉTRIE.— Voici le résumé d’une note sur la transfor- mation par rayons vecteurs réciproques, communiquée dans cette séance par M. Mannheim.

(1) Depuis cette communication, j'ai pu constater le même phénomène, avec une égale régularité, sur un cristal de cuivre pyriteux de Ténez, soit à l’aide d'un galvanomètre de 8 000 tours, appartenant au cabinet de phy- sique de l'École polytechnique, soit même à l’aide du galvanomètre à fil court, . F,

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L'auteur commence par définir ce qu'il nomme un pôle principal de transformation. Il définit ainsi un point par rap- port auquel une figure est à elle-même sa transformée. Il énonce et démontre ensuite les propriétés suivantes :

Propriétés relatives aux courbes planes,

Lemme. « Lorsque des cercles ont même centre radical, 1l » en est de mêmé de leurs transformées par rapport à un » point quelconque de leur plan pris pour pôle de transfor- » mation. »

Prop. 1. « Lorsqu'une courbe admet un pôle principal, il en » est de même de sa transformée obtenue par rapport à un » pôle quelconque pris dans son plan. »

2. « Lorsqu'une courbe a un axe, sa transformée, par rap- » port à un pôle quelconque, a pour pôle principal le centre » de la circonférence qui correspond à l'axe. »

Une courbe ayant un axe peut être considérée comme ayant un pôle principal à l'infini.

3. « Lorsqu'une courbe a un pôle principal, on peut la » transformer d'une infinité de manières en une courbe ayant » un axe ; le lieu des pôles de transformation est une circonfé- » rence ayant son centre au pôle principal. »

Propriétés relatives aux surfaces,

Lemme. « Lorsque des sphères ont même centre radical, il » en est de même de-leurs transformées par rapport à un pôle » quelconque. »

Prop. 1. « Lorsqu'une surface a un pôle principal, il en est » de même de sa transformée par rapport à un pôle quel- » conque. »

2. « Lorsqu'une surface a un plan principal, sa transformée » a pour pôle principal le centre de la sphère correspondant à » ce plan. »

Une surface qui a un plan principal peut être considérée comme ayant un pôle principal à l'infini.

3. « Lorsqu'une surface a un pôle principal, on peut la » transformer d’une infinité de manières en une surface ayant

Extrait de l’Institut, 1"e section, A860, ; 44

106

» un plan principal. Tous les pôles de transformation satisfai- » sant à cette condition sont sur une sphère.

4, « Lorsqu'une surfate est de révolution, sa transformée » a un plan principal et admet une infinité de pôles de trans- formation situés en ligne droite. »

5. « Réciproquement, lorsqu'une surface a une infinité de » pôles principaux en ligne droite, on peut la transformer » d’une infinité de manières en surfaces de révolution ; les » pôles de transformation satisfaisant à cette condition sont » Sur une circonférence située dans le plan principal que pos- » sède nécessairement la surface. »

À l’occasion d’une communication faite à l’Académie dessciences relativement aux ombres des surfaces héliçoïdales, M. Bour énonce ie théorème suivant :

Considérons l’héliçoïde qui forme la surface du filet de la vis triangulaire et l'intersection d’un cylindre circonserit à cette surface avec un plan perpendiculaire à l’axe de la vis.

Cette courbe, qui limite l’ombre portée par la surface héli- coidale sur le plan, jouit de la propriété d'avoir pour caustique une cycloïde, et cela quelle que soit la direction des généra- trices du cydindre circonserit.

En d’autres termes, si l'on considère, dans le plan de la courbe que nous étudions, des rayons parallèles, perpendicu- laires aux génératrices du cylindre d'ombre, ces rayons venant se réfracter sur cette courbe se trouveront ensuite être tous normaux à une certaine cycloïde, ou, si l’on veut, tangents à une autre cycloïde inversement placée.

Appelons h le pas de la vis; a l’angle que fait avec l’axe de cette vis la droite génératrice de la surface héliçoïdale ; b l’an- gle formé avec le même axe par la direction des génératrices du cylindre circonscrit :

ΰ Le diamètre du cercle générateur de la cycloïde est

h tgo; 9x 20 L'indice de la réfraction convenable est ig à fn ts bd

107 Séance du 22 décembre 1860.

GÉOMÉTRIE. Application de la transformation par rayons vecteurs réciproques à l'étude des anticaustiques. Noïici le résumé d’une communication faite, sous ce titre, par M. Mann- heim :

L'auteur adopte l'expression d’anticaustique introduite par Jacques Bernouilli pour désigner la trajectoire orthogonale des rayons réfléchis que M. Quetelet a étudiée sousle nom de caustique secondaire. IL étend cette expression au cas de la réfraction.

Lorsque l’on considère les anticaustiques comme enveloppe de cercles dont les centres décrivent la ligne dirimante et dont les rayons sont proportionnels aux distances de leurs centres au point lumineux, elles se composent de deux parties qui correspondent à des indices de réfraction égaux et de signe contraire.

Ces deux parties peuvent être des courbes distinctes ou constituer une même courbe. M. M. s'occupe particulièrement de l'une ou de l’autrede ces parties en indiquant le signe de l'indice de réfraction ; quant à l'enveloppe complète des cercles, il la désigne sous le nom d’anticaustique complète. Au moyen de la transformation par rayons vecteurs réciproques, M. M. démontre les théorèmes suivants :

1. « Une courbe M et son anticaustique N, correspondant

» à un point lumineux F, et à un indice {, ont pour trans- » formées, -le pôle étant en F, une courbe N’et son anticaus- » tique M, le point lumineux et l'indice restant les » mêmes, »

La ligne dirimante devient anticaustique et inversement : réciprocité remarquable.

2. « L’anticaustique N d’une gourbe M, pour un point lu- » mineux F et un indice /, a pour anticaustique, pour le » même point lumineux et l'indice /, une courbe sembla- » ble à M. Le point F est le centre de similitude et le rap-

De port de similitude est = (1).

(4) M. Bour est arrivé de son côté, par une autre méthode, au même théorème,

108

Si l’on considère l’anticaustique complète de M, elle se compose de deux branches. Chacune de ces branches a une anticaustique complète.

Ces deux anticaustiques complètes ont une partie commune qui est la courbe semblable à M.

Le théorème 2 montre que l’anticaustique se compose toujours de deux courbes distinctes.

Comme cas particulier du théorème 2, on peut déduire le théorème connu de M. Quetelet: « La caustique secondaire » du cercle est une ovale de Descartes. » En effet, l’ovale de Descartes a pour anticaustique un cercle, donc l’anticausti- que du cercle est une ovale de Descartes.

3. « Lorsque le point lumineux est pôle principal de la » ligne dirimante, il est aussi pôle principal de l’anticaustique » complète de cette courbe. La puissance de transformation » est différente. »

Un point quelconque du plan d’un cercle est pôle princi- pal, d’après le théorème 3, il est pôle principal de l’anticaus- tique complète du cercle correspondant à ce point, doncil est pôle principal de l’ovale de Descartes.

Ces trois théorèmes sont vrais pour les surfaces.

CHimte. Les deux notes suivantes ont été communiquées par M. Berthelot. |

1. Sur l'oxydation que l'alcool éprouve à la température or- dinaire sous l'influence de la baryte.

Ayant eu occasion d'examiner des solutions alcooliques de baryte abandonnées à elles-mêmes pendant plusieurs années dans des flacons mal bouchés, j'ai reconnu qu’il y avait eu formation :

De résine d’aldéhyde, ce qui s'accorde avec les faits connus relatifs à l'influence, de l’air sur les solutions alcooli- ques de potasse ;

D’acide oxalique en proportion très notable;

D'un acide particulier, volatile, soluble dans l’eau, doué d’une odeur acétique avec nuance empyreumatique. Son sel de baryte est soluble dans l'alcool ordinaire et incristallisable. © I! a fourni 56 p. 100 de baryte. Il ne précipite point les sels de chaux, de baryte, de cuivre ni de plomb, ni même les sels

109

d'argent en solution étendue ; mais il précipite les sels d'ar- gent en solution concentrée, et le précipité ne tarde pas à fournir de l'argent métallique, surtout à l’ébullition. Il en est de même des solutions assez étendues pour ne pas précipiter le nitrate d'argent.

Cet acide est peu abondant. Ses caractères rappellent l’a- cide acrylique, C6 H# O0, plus que tout autre corps connu, et je suis porté à regarder ces deux acides comme en os

La formation de l'acide oxalique aux dépens de l'alcool, sous la seule influence de l'oxygène de l’air, mérite quelque attention. C’est une nouvelle preuve des relations directes et pour ainsi dire nécessaires qui existent entre :

LAleQob pes Re CHE OZ ÆEi l'acide oxalique, 7. 2 NCFT2 08

2, Oxydation de l'acide malique sous l'influence de V'es- sence de térébenthine. k

Ayant abandonné pendant un an de l’acide malique, de l’eau et de la chaux sous une couche d'essence de térében- thine, j'ai reconnu qu'il y avait formation d'une petite quan- tité d'acide oxalique. La plus grande masse de l’acide mali- que demeure inaltérée.

ZooLocis. Sur la fonction des spicules calcaires renfermés dans le manteau de certains Brachiopodes. La communi- cation suivante a été faite à la Société par M. Eugène Deslong- champs.

En mai 1854, M. ©. Smidt, rendant compte du grand tra- vail de M. Davidson sur les Brachiopodes vivants et fossiles, signalait une lacune assez importante de l'étude anatomique de ces êtres, c’est-à-dire la présence de spicules calcaires d’une forme très élégante dans le manteau, les bras et jusque dans les cirrhes de la Terebralulina caput serpentis ; l'auteur ajoutait que l'examen d’autres espèces de la Norwége ne lui avait pas produit de traces d’une pareille organisation.

L'attention fut bien vite éveillée surunsujetaussi curieux, et très peu de temps après, M. Eudes Deslongchamps retrouvait ces mêmes spicules dans le genre Morrisie, ils sont beau-

110

coup plus développés. M. Woodward signalait également leur présence dans deux autres espèces, la T'erebratula vitrea et la Megerlea truncata, et au contraire leur absence complète dans les Waldheimia australis et Cranium et dans la Ryn- chonella psiltucea.

Enfin dans son grand et beau travail sur l’organisation des Brachiopodes, M. Hancock ajoutait un fait nouveau, plus singulier encore, que ces spicules ne se rencontraient pas également sur toute la surface du manteau ; mais seulement dans les parties en connexion avec les grands sinus veineux, les bras et la cavité périviscérale.

De ces diverses études, il est résulté clairement que la pré- sence de ces spicules n’est point un fait d'importance pre- mière pour l’organisation de ces animaux, puisque certaines espèces en possèdent, tandis qu'au contraire d’autres en sont entièrement privées.

Toutefois, ce fait m'avait vivement intéressé, et j'ai suivi ces petites productions dans tous les Brachiopodes vivants que j'ai eus à ma disposition; j'ai pu me convaincre alors qu'en passant d'un genre à un autre, le nombre, l'arrangement et la consistance étaient très variables, et, bien plus, que chaque espèce avait, pour ainsi dire, sa forme de spicule caractéris- tique.

C'est ainsi que, dans les Argiopes et Crénies, la substance calcaire est amorphe, imbibant seulement le manteau, comme le dit M. Woodward ; on ne peut même se douter de sa pré- sence qu'en faisant sécher une portion du manteau qu'on voit alors devenir comme rigide et prendre une couleur blan- châtre toute particulière (1), ou mieux encore en soumettant ce lambeau à l’action d’un acide affaibli qui provoque une lé- gère effervescence.

(1) Le plus ou moins d'intensité de cette couleur devient un excellent moyen pour reconnaître à priori si une couleur est pourvue ou non de spiculess en faisant sécher le manteau, par exemple de la Ter. caput ser- pentis, on voit que toutes les parties qui sont le siége de cette production calcaire deviennent d’un beau blanc et font entendre un bruissement tout particulier lorsqu'on le déchire avec une pointe d’aiguille,

111

Si on examine ensuite les genres Xraussia, Terebrutula, Terebratulina, Megerlea et Morrisia, on a une série le nombre et la consistance des portions calcaires croissent d'une manière tres rapide, les spicules se superposent quel- quefois sur plusieurs plans et mènent l'observateur par des degrés insensibles jusqu'aux Thécidées, dans lesquelles les spicules se soudént entre eux, envahissent tout le manteau et l’encroûtent tellement qu'il n’est plus distinct de la co- quille elle-même. Le manteau forme alors cette masse cal- Caire quiégale en consistance l'appareil brachial lui-même (1), et dont les paléontologistes se sont, souvent en vain, de- mandé l'explication.

Restait à découvrir la fonction de ces intrus calcaires au milieu de parties vivantes ? Le problème, au premier aperçu, paraît difficile à résoudre; rien n'est plus net cependant. Si on se rappelle que nous avons vu les spicules se placer dans le marteau au-dessus des grands sinus palléaux, tapisser toute la cavité viscérale, les bras et jusqu'à l’intérieur des cirrhes, on verra que toutes ces parties sont baignées par le sang veineux circulant librement dans les grandes lacunes du Corps ; par conséquent'ces spicules sont pour donner pro- tection aux parois peu épaisses des veines; mais un second fait rendra notre conclusion certaine.

Etudions le manteau dans une espèce ces spicules, quoique très petits, sont cependant fort nets. Dans le genre Kraussia par exemple, un lambeau du manteau placé sur le porte-objet du microscope nous offrira tout le trajet d’un des grands sinus indiqué par une foule de petits spicules allongés dans le sens du grand axe de la coquille, et montrant tous à peu près la même forme et la même disposition ; mais, outre : cela, nous verrons encore d’autres particules calcaires un peu plus allongées, suivant une ligne très étroite et coupant quel- quefois à angle droit la direction des autres. Le trajet de ces nouveaux spicules indique, aussi clairement qu’une injection

(2) Delà le nom d'appareil palléal donné à ce manteau entièrement calci- fié, par opposition avec le nom d'appareil brachial, réservé pour les apo- physes servant d’étai aux parties non libres des bras de l'animal.

112

pourrait le faire, la trace de l’artère, qui suit partout les rami- fications du sinus veineux. |

_ Lafisgurein- tercalée ici re- présente une portion du tra- jet de cette ar- tère, grossie à A0 diamètres et pris à l’en- droit cette artère se bifur- que. Comme on le voit, la direction des spicules vei- neux croise ici à angle droit celle des spi, cules artérieis J’ai suivi ce trajet jusque dans ses plus petites ramifications, et partout les particules calcaires accompagnent cette artère comme elles avaient accompagné le smus veineux.

La petite figure sur bois indique la direc- tion des sinus et des artères qui l’accompa= gnent sur un des lobes du manteau.

Il n’y a plus de doute possible. Tout cet ap- pareil de spicules a une fonction bien spéciale, bien déterminée, celle de donner protection aux organes cir- culatoires : un premier système de spivules pour le sang vei- neux, un second pour le système artériel. Ajoutons, comme nous l’avons dit en commençant, que cette disposition si extraordinaire n’est pas un point essentiel de l’organisation des Brachiopodes en général, puisque nous voyons dans la classe, des espèces ces spicules sont en nombre prodi- gieux, jusqu’à égaler en consistance la coquille elle-même, tandis que, dans d’autres, comme les Lingules, les Rhyncho- melles, etc., ces mêmes spicules sont entièrement absents.

Séance du 28 décembre 1860. Paysique, Sur un nouveau principe de thermoscopie. Va=

115

riations de température de l'intérieur et de l'extérieur d’un ressort en hélice pendant son allongement. M. F.-P. Le Roux a fait à la Société dans cette séance la communication suivante :

Je m'occupe depuis longtemps, a-t-il dit, des variations de température qui accompagnent les déformations élastiques des corps. J’ai été amené dans le courant de ces recherches à re- connaître l’exquise sensibilité d’un procédé qu'il eût été diffi- cile d'imaginer à prior.

Décrivons d'abord une expérience destinée à mettre en évidence le principe nouveau dont il s’agit. Un morceau de bois dur est creusé d’une cavité profonde qui forme le réser- voir d’un véritable thermoscope à air complété par un tube de verre d’un petit diamètre dans lequel se meut un index li- quide. On conçoit qu'en plaçant dans cette cavité différents corps élastiques, on pourra, au moyen d’un fil métallique tra- versant une boîte à cuirs, exercer sur eux des efforts plus ou moins considérables.

En mettant dans Le réservoir de ce thermoscope des ressorts en boudin d’acier trempé, et les allongeant par la traction, on est témoin des effets les plus irréguliers en apparence. On ob- serve que la première traction produit généralement un effet de réchauffement, qui diminue et cesse de se mawifester au bout de trois ou quatre opérations. Au premier abord je cher- chai la cause de ce phénomène dans quelque dérangement de l'appareil, mais comme après avoir démonté et remonté celui- ci plus de dix fois je retrouvai toujours les mêmes résultats, et cela toujours avec les mêmes ressorts, je dus penser à attri- buer les eflets observés à quelque changement dans l’état de leurs surfaces. Je reconnus alors qu'en les humectant légère- ment avec l’haleine, par exemple, on augmentait considérable- ment les effets. On doit donc attribuer à une couche hygro- scopique adhérente à la surface des corps mis en expérience la manifestation de leurs variations de température. On reconnaît d’ailleurs la vérité de cette supposition en humectant légère- ment la surface intérieure de nos ressorts, on voit alors la bulle de l'index indiquer un refroidissement.

Ainsi se trouve démontré expérimentalement que dans l'al-

Extrait de l’Institut, 1"° section, 1860. 15

114

longement d'une hélice métallique les fibres extérieures s’6- chauffent, tandis que les intérieures se ‘refroidissent, et par conséquent que l'allongement refroidit les métaux, tandis que la compression les échauffe, ce qui du reste avait été vérifé par M. Joule d’une manière directe au moyen d’un couple thermoélectrique et d’un galvanomètre placé dans des condi- tions exceptionnelles.

Le principe del’expérience que je viens de rapporter mérite, je crois, quelque attention. IL est certain qu'il sera souvent d’une application plus commode que la pile thermoélectrique. Comme celle-ci, en effet, il permet de localiser l'investigation, mais il a sur elle l'avantage de voir sa sensibilité s’accroître indéfiniment avec le nombre des points s’opère l’action thermique qu’on veut mettre en évidence, tandis que la pile thermoélectrique doit borner son exploration à un nombre très limité de points. )

Je borneraï ces indications sommaires. Il y aurait encore à examiner toutes les circonstances du rôle de la couche hy- groscopique dans le cas qui nous occupe. On peut y remar- quer plus d’un fait digne d'intérêt, mais qui demande une étude approfondie que j’ai d’ailleurs soin de poursuivre.

ES Paris. Imprimerie de Cossox et Cowr., rue du Four-Saint-Germain, 15.

SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE.

= ———

ÉTAT DE LA SOCIÉTÉ AU 1" FEVRIER 1861.

PREMIÈRE SECTION (SCIENCES MATHÉMATIQUES ).

Membres honoraires.

NOMS DES MEMBRES.

MMEMBiotiean Bapliste EEE EEE Duhamel (Jean-Marie-Constant). . . . . . Lang (Cons 6 2 o 0 do 66080 Houyile SOS ER EEE MincentilA SRE EEE TRE Duperrey (Louis-Isidore). . . . . . . . . Perdonne MONUEUSLE) PEER Séguier (Armand-Pierre). . . . . . . . . Combes (Charles RER DÉS ON À A ON ON LANTA MELON à ANUS Bienaymék(Irénée-Jules) Blanchet (Pierre-Henri). . . . . . . . . . Catalan (Eugène-Charles). . . . . . . . . Transon (Abel) NE RENE REIN. RES Hértranot(Ua)h ado do 2 0 06 slôtas à Breeueb(louS) EME EEE EN ONCE Barré de Saint-Venant (M.). . . . . . .. Le Verrier {Urbain-Jean-Jacques) . . . . Dortet de Tessan (Urbain) . . . . . . .. Serret (Joseph-Alfred). . . : . . . . . . Millanceau (Non) PE ER EE Hermieléharies) EEE TES Bonnet (Pierre-Ossian) . . . . . . . . . .

DATE

DE L'ÉLECTION.

2 févr. 22 janv. 25 août 25 août 25 août A1 avril 16 mai

2 avril

9 avril 25 févr. 17 janv. 16 févr. 24 mai A1 juillet 16 janv.

4 févr.

2 déc. 24 juillet 7 juin 14 févr. 30 mai 24 juillet 20 juillet

1801 1831 1832 1832 1832 1835 1835 1836 1836 1837 1838 1839 1840 1840 1843 1843 1843 1844 1845 1846 1846 1847 1848

A) D]

PREMIÈRE SECTION (SCIENCES MATHEMATIQUES).

Miernbres titulaires.

NOMS DES MEMBRES. | DE L'ÉLECTION. |

MM. 14. Faye (Hervé-Aug.-Étienne-Albans). . 4 mai 1848 2 Lecnaialier (ILamis}hs se 5605 eu 10 févr. 1849 3. Laboulaye (Charles) . . . . . . . .. 10 janv. 1852 4. Briot (Ch.-Aug.-Albert) . . . . . . . 21 févr. 1852 DR BUISeUX (MEN) RE RE AN 2 avril 41853 CABTESSeN(DhATIES) RARE 16 juin 1855 7. Bouquet (Jean-Claude). . . . . . . . 14 mars 1857 SMSerreti (Paul) 02 RO PRET PAR 12 févr. 1859 JRBOURITACAUES) RENE TU CE 7 avril 1860 ID Pins (Core) CRE NE 19 mai 41860 11. Haton de la Goupillière (J.-Napoléon). 2 juin 41860 12ENannheim(Amedee) RER 2 juin 4860 15 0Paussedati(Aime) A AMAR NN 24 nov. 41860 (BrunnenleAn) te NV AMEN EN 5 janv. 4861

15.

| 4.

A

DEUXIÈME SECTION (SCIENCES PHYSIQUES).

Mexmbres honoraires.

DATE

NOMS DES MEMBRES.

DE L'ÉLECTION.

MM. Chevyreul (Michel-Eugène). . . . . . . . . 14 mai 41808 Despretz (César-Mansuète). . . . . . . . 23 mai 1820 Ponletitlande) PEER er 6 avril 4822 Becquerel (Antoine-César). . . . . . . . 27 avril 1893 Dumas (Jean-Baptiste). . . . . . . . . . 26 févr. 1895 Bussy (Antoine-Alexandre-Brutus) . . . . A1 août 1827 BabineRUACQUeS) EEE PE 1 mars 1828 Élie de Beaumont (J.-Bapt.-A.-L.-Léonce). 5 déc. 1829 PayentiAnselMe) EEE CEE 18 janv. 1832 Gaulthier de Claubry (H.-F.-G.) . . . . . 25 août 1832 Pelouze (Théophile-Jules). . . . . . . . . 7 mars 1835 RElCOMAENCÈNC) AE EC CNE 28 mars 1835 DESROMELSNQUIES) EE PERTE RTE CRE 18 avril 41835 ÉrÉMYAEIMON) EAN EC 6 févr. 1836 Boussingault (Jean-Bapt.). . . . . . . .. 27 févr. 1836 Delafosse (Gabriel). . . . . . . . . . . . 17 déc. 1836 Regnault (Louis-Victor). . . . . . . . . . 98 févr. 1838 Pecanut(i Res) SEEN EEE 30 juin 1838 Caen tele) EE EE 6 avril 1839 Cahours (Aus e) EEE 26 juin 41839 Guérard (Jac.-Alphonse). . . . . . . .. 6 Juillet 1839 Walferdin (François-Hippolyte) . . . . . 20 mars 1841 Balard (Antoine-Jérôme). . . . . . . . . 24 juillet 1841 BecquerelAtEdmond) ER EE 21 août 1841 Sainte-Claire Deville (Henri-Étienne). . . 9 avril 1842 Buratitamendée) PEER 11 avril 1846 Hervé de la Provostaye (Joseph). . . . . 10 déc. 1842 Archiac (Etienne-Jules-Adolphe d’) . . . 8 juillet 1843 Desams (Paul) RENE En Er 31 mai 4845 BravaiS AUCUStE) MEN CENTS 21 juin 4845 Verneuil (Philippe-Edouard de) . . . . . 28 juin 1845 Silbermann (Jean-Thiébault). . . . . .. 20 déc. 1845 ebAnCN Cl) RE OE EETE 17 janv. 1846 Sainte-Claire Deville (Charles-Joseph). . . 24 avril 1847 MWüeAAdolbhe) eee ErTE 8 janv. 4848 IEEE 28 2 5 5'olae ol à ant 24 févr. 1849 Persoz Mules MO PRE RE 9 févr. 1850

DEUXIÈME SECTION (SCIENCES PHYSIQUES).

Mensnbres titulaires.

DATE NOMS DES MEMBRES. DE L'ÉLECTION.

MM ehenardi BnBPaul) ER ENTER 13 juin 1846 2 ÉiZzeaUR (Hip pe LOUIS) MEN 20 janv. 1849 3. Jacquelain (Victor-Auguste). . . . . . 29 juillet 1849 AMEOUCAUlREÉ ON) EE EME 15 déc. 1849 D'RDElESSeRACHIIE) Se 22 nov. 41851 6. Verdet (Marcel-Émile) . : . . . . . . 29 nov. 1851 7. Barral (Jean-Augustin). . . . . . . . 13 déc. 1851 SmDescloieauxe A) Fa me ne 1 mai 41852 8. Cloëz (François-Stanislas) . . . . . . 22 mai 41852 10-Desains (Édouard)... 12 juin 1852

11. Damour (Auguste-Alexis). . . . . . . 12 mars 1853 12. Salvetat (Louis-Alphonse) . . . . . . 23 avril 1853 18Viquesnel (A) AL MENU 21 mai 1853 14. Berthelot (Pierre-Eugène-Marcellin) . 9 mars 4855 16 MResnauld (ques) EE En 27 févr. 1858 46-"DutMoncel (Vite, Théodose}" 2. 7 &4 mai 1860 A MBouIS (Jules) be RUN ONE 28 juin 41860 18. Almeida (Joseph-Charles d’).. . . . . & août 1860 MARCHE ATEN EEE 24 nov. 1860 20. Gaugain (Jean-Mothée). . . . . . . . 12 janv. 1861 21 22 23 24 25.

RE

TROISIÈME SECTION (SCIENCES NATURELLES).

Membres honoraires.

NOMS DES MEMBRES

MM. Cloquet (Jules-Germain)

eo le; joie Die fete Ta

Serres (Etienne-Renaud-Augustin). . . . Brongniart (Adolphe-Théodore) . . . . . Adelon (Nicolas-Philibert) . . . . . . . .

Huzard (Jean-Baptiste). Villermé (Louis-Réné). Milne-Edwards (Henri). Roulin (François). . . . Decaisne (Joseph). . . . Deshayes (P.-G.). . . .

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Montagne (Jean-François-Camille) . . .

Velpeau (Alfred-Armand-

POSE Valenciennes (Achille) .

Louis-Marie) .

MilmounWP=AndEPhATE) EEE

Léveillé (Joseph). . . . Doyère (Louis-Michel). .

Quatrefages (Jean-Louis-Armand de). .

Guillot (Natalis). . . . . Longet (François-Achille) Duchartre (M. P.). . .. Blanchard (Emile). . . . Robin (Charles). . . . . Tulasne (Louis-René). . Lucas (Pierre-Hippolyte) Weddell (Hugues-A.). . Giraldès (Joachim-Albin)

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DATE

DE L'ÉLECTION.

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1835

1835 1335 1835 1836 1836 1837 1839 1841 1845 1845 1845 1846 1846 1846 1847 1849 1849

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TROISIÈME SECTION (SCIENCES NATURELLES).

Membres titulaires,

DATE

NOMS DES MEMBRES.

DE L’ÉLECTION.

MEME Becnard (Claude) Re 16 janv. 2. Germain de Saint-Pierre (Ernest) . . 5 Janv. SDUMERNEAUEUStO) ER ET 6 déc. 4. Lemaout (Emmanuel) . . . . . . . 31 janv. HAGratioIe Piece) PEER 30 avril GS, Dares (Cmmléh oo ue nc 0 40 juin HR EUCHETANTACQUES) EE EEE 7 juillet SRBIEUQIBTOUArT) ER EE RTE 20 déc. Attelé PE 7 juin

10. Moreau (Armand-Francois). . . . . . 28 avril A1. Marey (Jules-Étienne) . . . . . . . . 19 mai 12AGerbe QEIEZÉDRYEIN) EEE 16 juin 13. Hupé (Louis-Hippolyte) . . . . . . . 16 juin AEMBAT ARE ERt ES CRC PES 28 juillet 15. Cosson (Ernest-Saint-Charles) . . . . 8 déc. 16.

A7.

48.

19.

20.

1847 1850 1851 1852 1853 1855 1856 1856 1857 1860 1860 1860 1860 1860 1860

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SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE.

—<“@ 105e—

LISTE DES CORRESPONDANTS, PAR ORDRE D’ADMISSION

Pour faire suite à la liste publiée le At janvier 4832.

DATE ; NOMS. RESIDENCE. DE L'ÉLECTION.

MM. Fernandez Pinheiro (J.-F.). | 18 août 1832 | Rio-Janeiro.

KUNNEEN RENE ENT 8 déc. Munich.

ÉTAT MAMAN ES DUEUNTS Id. Montpellier.

LOMME NE NR MOMENT ENS 15 mars 1834| Genève.

Van Reusselaer, . . . . . . | 29 mars 1834 | New-York.

DElEZENnE RE RE 19 avril 4834 | Lille.

SYIMES TROIS ENT Le A4 févr. 1835

Michaux ee Ne Id.

Pontécoulant (de)... ...| 9 janv. 1836

AIDICHANE SLIDE 6 févr. 1836 | Saint-Pétersbourg.

Owen. PRE 20 févr. 1836 | Londres.

BellERhomas ee EN Id.

BHÉRMINER AE NPA 10 déc. 1836

AS AT ON EE PR EN eee 7 janv. 4837 | Lund (Scanie)

BRUBNEIN RENE 18 févr. 1837 | Parme.

Delanoue (Jules)... . . .. 25 févr. 1837 | Raismes (Nord).

Mandl (Louis). .. . . . . .| 11 mars 1837

Capocci (Ernest). . . . . . 25 mars 1837 | Naples.

Hodgkin (docteur). . . . .| 4 avril 4837 | Londres.

Harani(doctens re 8 juill. 4837 | Philadelphie.

NOLAFIS MIA SE MARIE. de 18 nov. 1837 | Turin.

Maleuti ee TR 25 nov. 1837 | Rennes.

MATTER En ER 2 déc. 1837 | Pise.

DESDINEMIS ARMES 24 mars 1838 | Aix (Savoie).

Ne deSi 7 A ANR 21 avril 1838 | États-Unis d'Amé- rique,

Sismonda (Aug.).. . ...| 7 juill. 4838 | Turin.

Norman eee 12 janv. 1839 | Odessa.

ÉSCRTI CUT ERP RTC 12 janv. 1839 | Copenhague.

OUEN ELA EURE 10 mars 1839| Lyon.

JOURAAREMSENEF SR Id. Id

Eudes Deslongchamps. . . Id. Caen.

NRCQUARE SN CNE Id. Lille:

LE M0

DATE : NOMS. RESIDENCE. E L'ÉLECTION.

MMENotarisi(de) er NUE 14 déc. 1839 | Genève. HHÉTENC EE TAC ENS RRURe < 2 août 4840 | Berlin. MVantbeneden eee 23 août 1840 | Louvain. REDOUTE RE 23 janv. 1841 BOWMAN AN TEE EUR 3 juil. 1841 | Londres. ÉTÉANERAMENMES REF APR Id. Gand. Costa die same 10 juill. 4841 | Naples. PanlatonetIP HS) Eee 17 juill. 4841 | Florence. SCAN EEE MEN ENTER 31 juil. 1841 | Louvain. NVALEROUSEE PEN 7 mai 4842| Londres.

1842

VOOR TAROT ES FORD

Sismonda (Eugène).. . . .| 4 jui

1849 | Turin.

Ivan Simonoff . . . . . .. 7 août 1842 | Kazan. LOVE Ne SAME SEE Id. Stockholm Malmsten eee eee Id. Upsal. NEMVPOR MERE EME 10 déc. 1842 | Londres.

Miranda e Castro (A.-M.de). | 6 mai 1843 | Rio-Janeiro. Selys Longchamps (de).. .|20 mai 4843 | Liége.

Pereboulet PAPERS 15 juin 1843 | Strasbourg. Danbrée rene Ant A juin 1844 Id. VOSE NN ANNE ARR Le 5 déc. 1844 | Genève. ÉCDÉF EME ENCRELE ARE 22 févr. 1845 | Zurich. Duran TRE 3 mai 1845

BAD PEN EEE 7 juin 4845 | Breslau. IE OR er I 22e 21 juin 1845

Newbold (T.-J.). . . . . . | 16 août 1845 | Madras. Brullé se ANPEMErt ‘. . . . [23 août 1845 | Dijon. Graver E PERTE 16 mars 1846 | Londres. KFONN NRA NUE Id. Hambourg. GRAS PAU) PE 23 mai 1846 | Montpellier. Melsens (Louis) . . . . . . 30 janv. 1847 | Bruxelles. Fauret Pre PRE Id. Gap.

Desor. ss ERP A PRE 27 févr. 1847 | Neufchâtel (Suisse). JoaChiMS Al SEE 3 juill. 4847 | Berlin. Dana ee OR 31 juill. 1847 | New-Haven. ÉD RUES ee 29 nov. 1847 | Londres. William Roberts. . . . .. 18 déc. 1847 | Dublin. Michaël Roberts. . . . . . Id. Id.

ADrIdse x ARE RDA 5 févr. 1848 | Bordeaux. Figuier (L.). . . . . . . | 18 mars 1848

Schimper (W. P.) DE Us 25 mars 1848 | Strasbourg. Graham (Thomas) . . . . . 20 mai 1848 | Londres. Lassell: ns men EE" 25 nov. 1848 | Liverpool. Bond: 5 MEME En ae 2 déc. 1848 | Cambridge ( États-

Unis).

DATE

RÉSIDENCE. L'ÉLECTION.

MM BOrChar de ON 9 déc. 1848 | Berlin. Caspanis(de) PNR 14 août 4849 | Naples. Chance MANUEL UE 17 mars 1849 | Montpellier. HofiTaNL A SM ONNEEe 13 avril 14850 | Londres. AE ME LE ro Id. Turin.

SAS ES SE ee 20 avril 4850 | Bruxelles. Kopp (Hermann). . . . .. 11 mai 41850 | Giessen. Marins) PR ME ES 51 Montpellier. BOUTENVE CP NE CI 26 juill. 1851

(Canne (Mio) ne 2 00e 29 nov. 1831 | Leipsis. BTANERN EEE NE TRUE 6 déc: 1831 | Tours. SYIVESIER EE CCC 10 janv. 1852 Londres. Van der Hœven . . . . . . 17 janv. 1852 Leyde. Brown-Sequard . . . . - . 91 févr. 18352 | New-York. PlANCN ON RER EEE Id. Montpellier. HeSMAnn EP PRICE 3 avril 4832 | Lille. Paula Er ns me 18 déc. 1832 | Naples. Lacaze-Duthiers. . . . . . 19 mars 4853 | Lille. Ronmmer (oem un 96 mars 1832 | Liége.

Clos (Dominique). . . . . . | 25 juin 1853 Toulouse. Kronecker (Léopold). . . . | 4 Juill. 1854 Liegnitz (Prusse). William B. Carpenter . . . | 11 nov. 1854 Londres. Favre (Pierre-Ant.). . . .| 9 déc. 1854 Marseille. CFloener ss 4e cevsc 23 févr. 1836 | Liége.

CUIR EMEA ATEN. 14 nov. 1857

Saussure (dE). 0." 93 oct. 1888 | Genève. Don nca es ee 13 mars 1839 | Londres. Maxwell-Leyte. . . - . . . 5 juin 4859 Bagnères-de-Luchon. Morele SAR RE 96 juin 1839 Dijon. NO PRE NET ES 7 avril 4860 | Lyon. ARE RE NT 14 juill. 1860

M AROLOS AEME PEN VE TS ee 5 janv. 1861 Amsterdam.

e 1 a KR Ce DANS ETS % an

SOCIÉTÉ PHILOMATHIQUE DE PARIS

FONDÉE EN 1788.

LISTE DES ANCIENS MEMBRES.

1S&1. DATE DATE NOMS DES MEMBRES. DE L'ÉLECTION. LU DÉCÈS. MM.Audirac (Jacques-Joseph) . . . | 10 déc. 1788 | . . . .. 1790 Brongniart (Alexandre) . . . . | 10 déc. 1788 | 7 oct. 1847 BLOVAT DAME MAUENTE A or 1ONdÉC MIS SP IN NN ENNES CRC RER 10 déc. 4788 | 7 juill. 4811 Riche (Claude-Ant.-Gaspard). | 10 déc. 1788 | 5 sept. 1797 Sylvestre (Augustin-François). | 40 déc. 1788 4 août 1851 Bob Er RARES SÉNOV ATIS ON) APN EE GUTIDETE MENU ES JPNOVAR ITS IEEE Vauquelin (Nicolas-Louis) . . . | 9 nov. 1789 | 15 nov. 1829 Seguin (Armand-Jean-Franç.). | 24 mars 1790 | 23 janv. 1835 BOUVIER EEE ARTE 22 mai 1790 | 27 déc. 1827 Mars lac RME 2 eu REA NAT SAONE PTT Rob Are AR PRE PRO TERSU ITCII AV ENME TE LENS Chappe (Claude) "0" 31 déc. 1791 | 23 janv. 1805 Garnier (Jean-Jacques). . . . . 4 avril 4791 | 21 févr. 1803 ILET LEARN ARS ST ca AS mai MAO IP EEE EREMMENNE Bonnard. ee te DONNE QUE 1797 Coquebert (Antoine-Jean). . . | 27 juin 4791 6 avril 1828 Coquebert (Romain) . . . . . . 21 JUN ATOS LE RME E ÉUCAS EN NIMES 20 2000 RENE EER GO PR ARRETE EL PRE ARE ADLEVE AIO 28 IRON PIC n OEUR cn ER, 23 HÉVOUAT0 0) A ErPAERCE IAE TMS NO NE EME RENE HAVE AET 0 20) DEAN EEE NOTÉE ON SSSR AIN MIT) EC EI 1806 Lacroix (Jean-Alexandre). . . AN CITANT RARE Coquebert de Montbret (C. En 14 mars 1793 9 avril 4834 Gillet-Laumont (F.-Nicolas) . . | 28 mars 1793 À juin 4834 Millin (Aubin-Louis). . . . . . 25 avril 4793 | 44 août 41818

Ben ON de ee RUE LT à 2 Share 110 80) ONE REC

DATE DATE NOMS DES MEMBRES. DE L'ÉLECTION. DU DÉCÈS. MM Ballet MENT Re OAV 709 EME

Berthollet (Claude-Louis). . . | 44 sept. 1793 | 6 nov. 1822 Lavoisier (Antoine-Laurent). . | 14 sept. 14793 8 avril 4794 Fourceroy (Ant.-François). . . . | 44 sept. 1793 | 16 déc. 1809

Mic EE) IEEE 14 sept. 1793 | 20 juin 1794 Hal (lea Noel) EME 14 sept. 1793 | 11 févr. 1822 Ventenat (Etienne-Pierre) . . . | 44 sept. 1793 | 13 août 1808 Lefèvre-Gineau (Louis). . . . . 14 sept. 1793 | 3 févr. 1829 Leroy (Jean-Bapt.). . . . . . . 21 sept. 1793 | 21 janv. 1800

Lamarck (J.-B.-P.-Antoine). . . | 21 sept. 1793 | 18 déc. 1829 Lelièvre (Claude-Hugues).. . . | 21 sept. 1793 | 18 oct. 1835

Monge (Gaspard). . . . . . . . 28 sept. 1793 | 18 juill. 1818 Prony (Gaspard-Clair-Riche de). | 28 sept. 1793 | 29 juill. 1839 lumeniO BE E 28 sept. 1793 | 25 sept. 1807 Laplace (Pierre-Simon). . . . . 3 nov. 1793 5 mars 1827 DéArGcetTEAN) ERP AE 3 nov. 1793 | 13 févr. 1801 Deyeux Nico) REP 13 nov. 1793 | 27 avril 1837 Pelletier (Bertrand). . . . . . . 13 nov. 1793 | 21 juill. 1797 Richard (Louis-Claude) . - . . | 43 nov. 1793 6 juin 1821

Lacroix (Sylvestre-François). . | 13 déc. 1793 | 24 mai 4843 Léveillé (Jean-Bapt.-Francçois). | 43 déc. 1793 | 13 mars 1829

Haüy (René-Just) . . . . . .. 10 août 1794 1 juin 1822 Lonnellierne, + HET NE RTE UE TENTE CUT Duvillars (Emmanuel-Étienne). | 49 sept. 41794 | . . . . . . .. MOZAT EEE EE n 49 sept. 1794 | . . . . . . . » NE RES ARE EME en 49 sept. 1794 | #4 nov. 1832 Girod-Chantran (Justin). . . . | 28 oct. 4794 | À avril 4841 BerthoudiArE de EIRE 24 nov. 4794 | 20 juin 4807

Bosc (Louis-Augustin-Guill.). . | 13 janv. 1795 | 10 juill. 4828 Geoffroy-St-Hilaire (Etienne). . | 43 janv. 4795 | 49 juin 1844

Cuvier (Georges). . . . . . . . 23 mars 4795 | 13 mai 1832 Sédillot (J.-J.-Ernest). . . . . . 23 janv. 1796 |." 1832 Daubenton (Louis-Jean-Marie). | 3 mars 1796 | 34 déc. 4800 Miche RE EEE ee 30mars AOGNIIEEE EEE Duhamel (Guillot J. P.-Frang.). | 43 mars 4796 | . . . . . . .. Teulère) See PNEU JORUReUrOENNETERS TMS à à Macquart (L.-C.-Henri). . . . IMUTENITOREEERS 1808 Duméril (André-Marie-Const.). | 20 août 1796 | 14 août 1860 Larrey (Dominique-Jean) . . . | 24 sept. 1796 | 25 juill. 4842 Collet-Descotils (Hipp.-L.-V.). | 24 nov. 4796 | . . . . . . .. Duchesne (Antoine-Nicolas) . . SMANVE AMOR CRE 1827 Bouillon-Lagrange(E.-J.-Bapt.). 2 févr. 1797 | 23 août 1844 Lasteyrie (Ch.-Philibert de) . . 2 mai 4797 5 nov. 1849 Alibert (Jean-Louis). . . . . . 24 juin 4797 & nov. 4837 Adet (Pierre-Auguste). - :. . | 34 juill. 4797 |: |.

DrÉMELV AC LE SRE EMMA Da ON ITIOTMNNREMENEEEET"

NOMS DES MEMBRES.

NIMAD OR EEE ET Lee

Pajot-Descharmes . . . . . .. BAR RENOM Na EUR Lacépède (Bern.-G.-Et. de). . . Moreau (Jacques-Louis) . . Chaptal (Jean-Antoine). . . . . Olivier (Guillaume-Antoine). . Daudin (François-Marie). . . . Bichat (M.-F.-Xavier) . . . . . DO CE NES Na En ne De Candolle (Augustin-Pyrame). Deleuze (J.-Ph.-François) . . . Brochant de Villiers (A.-J.-M.). (Coste (Lont) se Len Cuvier (Erédéric) Thénard (Louis-Jacques). . . . Brisseau de Mirbel (Ch.-Franç.). LEO LIGUES 81000 Lo Noel Poisson (Siméon-Denis). . . . . Conté (Nicolas-Jacques) . . . . Richerand (Balth.-Anthelme) . Gay-Lussac (Louis-Joseph) . . PÉTONETANCOIS) EN Ne Savigny (Marie-Jules-César) . . Bonpland (Alexandre-Aimé). . Correa de Serra (J.-François) . Dupuytren (Guillaume). . . . . Hachette (Jean-Nicolas-Pierre). Delaroche (François-Etienne). Berthollet (Amédée). . . . .. Ampère (André-Marie). . D’Arcet (Jean-Pierre-Joseph). . Girard (Pierre-Simon). . . .. Dupetit-Thouars (Aubert) . . . Pariset (Étienne) "Un. Duvernoy (Georges-Louis) . . . Malus (Étienne-Louis) . . . .. Arago (Domin.-François-Jean). Nysten (Pierre-Hubert). .:. . . LnSEr (NAT). 1008 ann ROGERS MALI ru Püuissan (lou) PRE Desmarest (Antoine-Gaston). . Legallois (César-Julien-Jean) . Guersent ere Ant ne ve Ducrotay de Blainville (Hilaire).

DATE

DE L’ÉLECTION.

16 janv.

414 avril 46 mai 9 févr. 23 févr. 9 mars 29 fevr.

97 np 9 7

1797 1798 1798

. 1798

1799

: 41700 . 1799 rr. 1800

1800 1801

ill. 1801 . 1804 . 1802 . 1803

1803

. 1804 . 1804 . 1805

1805 1805 1805 1805

. 1806 . 1806 . 1806 . 1807 . 1807 . 1807 . 1807 Jr. 1807 . 1807

1808 1808

. 1810

1810 1810 1810 1810 1810 1810 1811 1811 1841 1812

30 juill. 4 oct.

ae erteie

10 juin

2 août :

30 nov. 19 mai

3 juill. /

1 mars 24 févr. 2 oct. 3 mars 18 avril

23 juin Î mai

DATE

DU DÉCÈS.

.

MG

NOMS DES MEMBRES.

MM. Binet (Jacques-Pierre-Marie) . .

Dulong (Pierre-Louis) . . . . . Bonnard (Aug.-Henri de). . . . Magendie (François). . . . . . Lucas (J.-And.-Henri) . . . . . Lesueur (Charles-Alix). . . . . Montègre (Antoine-Jean a Cauchy (Augustin-Louis). . Clément ARMÉE ra Leman (Dominique-Sébastien). Cassini (Alex.-Henri-Gabriel). . Houmen Joseph) Et Beudant (François-Sulpice). . . Petit (Alexis-Thérèse). . . . . Robiquet (Pierre-Jean). . . . . Edwards (William-Ferd.) . . . Pelletenilose ph) SE Cloquet (Joseph-Hippolyte). Fresnel (Augustin-J.). .

Navier (Claude- Louis-Marie). Béclard (Pierre-Auguste). Francœur (Louis-Benjamin). Turpin (Pierre-Jean-François ). Richard t@A'cmiIle) F0 Audouin (Jean-Victor) . . . . . Prevost (Louis-Constant). . . . Breschet (Gilbert) : : . ..… . . Auguste de Saint-Hilaire. . SAVAIENT RER Savart Ra Me ae Dejean (P.-F.-M.-A.)

Jussieu (Adrien-Henri-Laurent). Eyries (Jean- Baptiste -Benoil) - Brué (Adrien-Hubert). . . . . MONET Soulange-Bodin (Étienne) . . . DUPONT EEE ET Bourdon (Pierre-Marie). . Bérard (Pierre-Honoré). . . . . Serrulas (Georges-Simon) . . Dufrénoy (Pierre-Armand). Coriolis (Gustave-Gaspard). . . Sturm (Charles-François). . . . Guillemin (Antoine). . . . .. Olivier (Théodore). . . . . . . Puillon-Boblaye (Louis). . . . .

DE

DATE

L'ÉLECTION.

mars mars mars avril févr. mars avril déc. janv. févr. févr. févr. févr. fevr. avril avril mai mai avril mai juin févr. févr. mars mai Janv. juin mai févr. févr. avril avril févr. févr. févr. févr. févr. mai mars mars juin juil. févr. févr. août août

1812 1812 1812 1813 1811 1814 1814 1814 1816 1816 1816 1818 1818 1818 1818 1818 1818 1818 1819 1819 1819 1821 1821 1821 1821 1822 1822 1823 1825 1825 1825 1825 1826 1826 1826 1826 1826 1827 1828 1829 1829 1830 1831 1831 1832 1832

21 mai 4856 19 juill. 1838 6 Janv. 1857 7 oct. 1855 6 fév. 1825 12 déc. 1846 4 sept. 1818 23 mai 4857 NE VE 1856 28 fév. 1829 16 avril 1832 | 16 mai 1830 9 déc. 4850 21 juin 4820 29 avril 4840 23 juill. 4842 19 juill. 1842 4 mars 1840 Â% juill. 1827 21 aoùt 1336 16 fév. 1825 15 déc. 1849 A mai 4840 5 oct. 1852 9 nov. 1841 16 août 1856 10 mai 4845 30 sept. 1853 15 juil. 1841 16 mars 1841 17 mars 1845 30 juin 1853 13 juin 1846 16 juill. 1832 NAT US 1838 23 juil. 1846 SUN 1846 15 mars 1854 11 nov. 1859 25 mai 41832: 90 mars 4857 19 sept. 4843 48 déc. 1855 15 janv. 1842 8 août 1853 L déc. 1843

DATE

DU DÉCÈS.

En Ne

DATE DATE NOMS DES MEMBRES. DE L'ÉLECTION. DU DÉCÈS.

MM. Cagniard-Latour (Charles). . . | 21 févr. 1835 5 juill. 4859 Gambey (Henri-Prudent). . . . | 14 mars 1835 | 28 janv. 1847 Péclet (Jean-Claude-Eugène). . 4 avril 1835 | 8 déc. 1857 D'Orbigny (Alcide-Ch.-V.-M.). | 44 avril 4835 | 30 juin 1857 Parent-Duchâtelet (A.-J.-B.). . | 25 avril 1835 | 7 mars 1836

Guérin-Varry (Théophile) . . . 2 mail 1835 | . 1854 Leclere-Thouin (Oscar) . . . . | 16 mai 4838 5 Janv. 4845 Lévy (Armand). 11923mair 1835" | 26" juin 1841 Dujardin (RÉ EE ES 21 févr. 1836 8 avril 1860 Gaudichaud (Charles) . . . .. 9 mai 1836 | 16 janv. 1854

Peltier (Jean-Ch.-Athanase). . | 30 juin 1836 | 27 oct. 1845 Leblond (Ch.-Hipp.-Gabriel) . . | 11 mars 1837 | 22 mars 1838

Voltz (Louis-Philippe) . . . . . 25 mars 1837 | 15 janv. 1840 Laurillard (Charles-Léopold). . | 11 avril 1837 | 28 janv. 1853 Roissy (Aug.-Félix-Pierre de). 9 déc. 1837 | 17 mai 1843 Blandin (Frédéric)... .", 30 mars 4839 | 16 avril 1849 Bibron (Gabriel) een 20 mai 1840 | 27 mars 1848

Masson (Antoine-Philibert). . . | 18 déc. 1841 | 1 déc. 1860 Laurent (Jean-Louis-Maur). . . | 31 déc. 1841 | 30 janv. 1854

Rozet (Claude-Antoine). . . . . | 18 févr. 1843 | 10 août 1858 Ebelmen (Jacq.-Joseph) . . . . | 28 mai 1843 | 31 mars 1852 Mantzel {Lee eee 24 juin 1843 | 21 févr. 1845 Lallemand (Claude-François). . | 40 avril 4845 | 23 juill. 1854 Gerdy (Pierre-Nicolas). . . . . 30 nov. 1845 | 18 mars 4856 HaimeuIes) RP En 10 avril 1852 | 27 sept. 1856 Wertheim (Guillaume). . . . . 4 déc. 1852 | 20 janv. 1861

8 juin 1853 | 28 oct. 1856

Goujon (Jean-Jacq.-Emile). . . 5 nov. 1854 | 22 mars 1860

Vilmorin (P.-Louis-Franç. de).

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