Bibliothèque botanique EMILE BURNAT C':itulo4|iic — 3*c:-- ■l'rovient de * %\: SlA Livros [)r()V<'iuml de la bibliothèque botanique (ITmile Burnat ( 1 828-1 •l'âO), insérés en octobre 1920 dans la bibliollKMiuc ceux de Thurmann, Babey, Rapin, Godet, Reuter, Michalet, Gre- cTt) nier, etc., pour constater que la flore jurassique est bien connue j dans son ensemble ; raison de plus aujourd'hui pour l'étudier £n. dans ses détails. ej II est regrettable que la distance trop éloignée n'ait pas per- ^ mis à la Société botanique de Lyon d'org-aniser facilement des herborisations dans le centre et le nord de la chaîue, dans la _ 4 — région des tourbières, et d'en apprécier les richesses, comme elle l'a fait pour la partie méridionale du Jura. J'ai pu, au cours de cette année, faire un rapide voyage dans une des régions les plus intéressantes du Jura Suisse, le Val de Travers, et sa relation m'a paru pouvoir être de quelque utilité aux botanistes qui auront plus tard l'occasion d'herboriser dans ce beau pays. Aussi bien avais -je la bonne fortune d'avoir les guides les plus compétents, M. P. A. Genty, de Dijon, membre de la Société botanique de Lyon, qui depuis plusieurs années s'est donné la mission d'étudier les plantes critiques de la flore jurassique, y a fait de longs séjours sur différents points, et a déjà consigné dans des notes importantes quelques-unes de ses découvertes ; et M. V. Andrese, pharmacien à Fleurier, botaniste distingué, qui a fait de nombreuses trouvailles dans sa contrée, et met à les communiquer à ses collègues en histoire naturelle autant de complaisance que de savoir (1). C'est donc sous des auspices aussi favorables que le 20 juil- let 1890 je débarquais, à 2 heures après midi, dans le petit village de Noiraigues, en compagnie de mon fils aîné et de M. Genty, que j'avais pris au passage à Dijon. M. Andrese nous attendait, et à peine avions-nous déposé nos bagages à l'hôtel de la Croix-Blanche que nous nous mettions en campagne. Quelques mots au préalable sur le pays que nous allons par- courir, ne fût-ce que pour engager les simples touristes à le visiter. Peu de temps après avoir quitté Pontarlier, on atteint le point culminant du col ou la station mixte de Verrières (933 mètres). Il est bon de prévenir charitablement les voyageurs novices de ne pas emballer avec trop de soins leur provision de papier ; ils auront à subir à la douane l'examen minutieux de (1) M. Genty a déjà fait connaître bon nombre des espèces rares ou liti- gieuses du Jura en les distribuant dans les principaux exsiccata français contemporains, notamment le Flora selecta cxsiccata de M. Ch. Magnier, et la Société dauphinoise pour V échange des plar.tes, 2« série. 11 y a joint, pour la plupart d'entre elles, des notes critiques ou historiques, dans Scrinia florœ selcctœ exsiccatœ et Bulletin de la Soeiété dauphinoise, 2^ série, passim, auxquelles il a bien voulu m'autoriser à faire de nombreux emprunts. Je ne saurais trop lui en témoigner ma gratitude, non plus que pour la communi- cation bienveillante qu'il m'a largement faite de ses observations antérieures. M. Andreœ a bien mérité des membres de la Société botanique de France en prenant part aux travaux de la Session tatraordinaire tenue à Pontarlier en juillet 1BC9, en leur servant de guide, et en leur fournissant des rensei- gnements qu'il'a résumés dans une notice intitulée : Aperçu sur la flore du Jura in Bull. Soc. bot. Fr., XVI (1869), p. xix et seq. — 5 — leurs paquets, et à acquitter, même pour le simple papier à dessé- cher, des droits qui paraissent exorbitants, mais dont le peu de temps accordé pour l'arrêt ne permet pas de contrôler les tarifs. Ils devront, en outre, s'abstenir, s'ils ont fait des herborisations antérieures, d'introduire avec eux sur le territoire helvétique aucune plante fraîche, surtout en boîte ; l'entrée leur en serait impitoyablement refusée, à moins d'être muni de toute une série de certificats d'orig-ine dûment légalisés. Après avoir subi ces petites tracasseries internationales, que la crainte du phyl- loxéra porte nos bons voisins à exagérer quelque peu, le train repart. Ou redescend rapidement le versant neuchâtelois, et le premier aspect du Val de Travers nous ravit d'admiration. A travers les échappées des tunnels et les éclaircies de la forêt, cette belle vallée se déroule à quelques centaines de mètres au- dessous de la voie ferrée, avec ses prés verts arrosés par la Reuse ou l'Areuse aux eaux sombres, ses nombreux et coquets villages, ses établissements industriels, son encadrement de forêts de sapins et, tout au fond, l'échancrure des gorges de l'Areuse qui laisse entrevoir une bande azurée du lac de Neu- châtel et, plus loin encore, le massif des Alpes bernoises que domine le sommet neigeux de la Jungfrau. Le Val de Travers offre un séjour charmant et de tous points recommandable aux convalescents qui y trouveront la pureté de l'air et le calme de la vie, aux touristes qui n'auront que le choix ^tre les sites pittoresques et les belles promenades, aux botanistes enfin qui trouveront à Fleurier ou à Noiraigues des centres admirablement choisis pour une série d'herborisations fructueuses. A Noiraig'ues, notamment, je leur recommanderai tout parti- culièrement l'hôtel de la Croix-Blanche, où la bonne M^^Nivolet mettra à leur disposition, avec la plus g-rande complaisance, les ressources passablement confortables de son hôtel et de sa cui- sine, ses vastes greniers pour étendre et sécher les plantes, et, ce qui n'est pas à dédaigner, le tout à des prix modérés. Noiraigues, comme tous les villages voisins, doit son aisance aux fabriques d'horlogerie, ou plutôt de pièces d'horlogerie, et à ses usines à ciment, dont la matière première se tire, à côté même des fours, des flancs de la falaise néocomienue qui domine le village, et dont les étages la surplombent presque à pic, en livrant sur leurs escarpements un passage difficile à la route de Neuchâtel. — 6 — 20 JUILLET. -- Noiraigues. — C'est par ces rochers que nous commençons nos herborisations, pour utiliser la demi- journée qui nous reste. La petite rivière de Noiraigues, dont les eaux issues des tourbières supérieures sont chargées de matières humiques et leur empruntent une teinte noire à laquelle elle doit son nom (nigra aqua), sort à plein débit de la base du ro- cher et sert à faire marcher tons les ateliers et usines du village. Une mousse aquatique y vit en abondance, Cinclidotus aqua- iicus Br. et Sch. [Hypnum aquatinwn L.), depuis longtemps si- gnalée dans le Val de Travers « ad fontem Noiraigues » par Schimper, Syn. Musc. Eur. II, p. 237. — Un petit sentier part de la source et permet d'escalader le premier gradin calcaire auquel les maisons du village sont adossées. La première plante que nous rencontrons captive notre atten- tion. C'est un Iberis dans lequel M. Genty reconnaît 1'/. deci- piens Jord. bien différent de 1'/. amaraL., avec lequel les bota- nistes suisses l'ont confondu. Il croît dans les éboulis calcaires ou sur les pentes graveleuses exposées au midi. Iberis decipiens Jord. Diagn. esp. nouv., 1, p. 289 (1). M. P. A. Genty, qui a centurie cette plante pour la Société dauphinoise, lui a consacré récemment dans le Bulletin de la Société botanique de France, t. XXXVIl, p. 236. (Note sur un Iberis méconnu de la flore helvétique, séance du 14 no- vembre 1890) un article auquel je renverrai pour plus de détails. Il signale, entre autres, qu'il y a plus d'un siècle Haller (Hist. stirp. indig. Helvetiœ (1768), t. IL p. 224) indique 1'/. amarah. « à la côte de Noiraigues », et en donne une description qui s'applique bien mieux à 1'/. decipiens Jord. qu'à 1. amara, puisqu'il dit : « Caulis firmus, erectus ex summitate ramosus « ei umbellatus. » M. Genty l'a retrouvé le 20 juillet 1885, et a reconnu son identité avec la plante du Bugey, Nantua, Tenay, etc., etc. Nous l'avons récolté cette année en très grande abon- dance sur toute la côte de Noiraigues. Outre ses caractères spé- cifiques : souche souvent multicaule, tiges élevées, port raide. (1) Iberis decipiens Jord. Cette plante a été distribuée eu exsiccata par M. l'abbé Fray, provenant du Mont près Nantua (Ain), dans le Flora selecta exsiccata de M. Ch Magnier (1882), n» 18, et par M. Genty dans la Soc. dauphinoise, 2« série (1891), n» 299, avec deux notices resj>ectives in Scrinia. florœ selectœ, 1, p. 5, et in Bull. Soc. dauphin., 2^ série, II (1891), p. 53. Nyman (Sylloge, suppL, p. 36, et Consp. /i. europ., p. 61) l'a admise comme sous-espèce d'/. amara L. - 7 — rameaux nombreux dressés en corymbe fastigié au sommet des tiges, fleurs plus petites, souvent violacées, grappes fructifères courtes, feuilles plus petites, plus étroites, plus fortement den- tées, etc., il diffère d'/. amara par son mode de végétation bisan- nuelle. En effet, en l'observant attentivement sur le talus des routes, nous avons remarqué à la base des tiges les cicatrices foliaires des jeunes feuilles de l'année précédente et trouvé tout à côté des spécimens fleuris ou fructifies des jeunes plantes des- tinées à fournir la végétation de l'année suivante. Je ferai cependant quelques réserves à cet égard, car bon nombre de plantes, à végétation liabituellement annuelle, peuvent dans certaines circonstances, germination retardée, action du froid, de la neige, etc., être arrêtées dans leur évolution et devenir bisannuelles ou même plurannuelles et pseudo-vivaces. Des expériences de culture me paraissent nécessaires pour bien établir à cet égard la biologie d'/. decipiens. Tout à côté, nous récoltons : Euphrasia cuprea Jord (1). Coronilla vaginalis Lam., en fruits, très abondante; et le long du sentier qui conduit à la route à travers les halliers et les éboulis : Silène nu tans L Carduus defloratus L. Coronilla emerus L. Vincetoxicum officinale Mœnch. Hippocrepis comosa L. Digitalis parviflora Lam. Cornus sanguinea L. — grandiflora Ail. Bupleurum falcatum L. Teucrium montanum L. Asperula cynanchica L. Thesium pratense DC. Valeriana officiaalis L. , var. angus- Sesleria cserulea Ard. tifolia Koch. ( V. angustifolia Galamagrostis montana DC, etc. Tausch) . La route de Neuchâtel contourne en corniche l'éperon ro- cheux de Noiraigues, et à chaque sinuosité découvre un point de vue nouveau, entre autres le cirque du Creux-du-Van, l'ob- jectif principal de notre voyage, qui s'ouvre devant nous, par- dessus la ligne sombre d'une forêt de sapins. A droite et à gau- che de la route, les rochers nous offrent dans leurs fentes ou sur leurs entablements étroits et escarpés les espèces les plus intéressantes : (1) Beaucoup plus abondrint dans le haut Jura méridional. Genty. ap . Magnier. FI. sel. exsicc, VIII (1889), a» 2017 bis. — 8 — Laserpitium siler L., aux racines abondamment chargées de leur parasite spécial, Orohanche laserpitii-sileris Rapin, que ses tiges et ses longs épis rouges signalent de loin à l'œil avide du botaniste, mais dont la cueillette n'est pas toujours facile et sans danger. Thalictrum saxatile DG. (Th. calca- Hieracium bupleuroides Gmel! reum Jordl) — humile Jacq. (H. Jacquini Helianthemum vulgare, var. grandi- Vill ). florum (H. grandiflorum DC). H. amplexicaule L. var. (H. Berar- Kernera saxatilis L. dianum Arv.-T., ex Genty I) Potentilla caulesceris L. Globularia cordifolia L., etc. — verna L. C'est tout en haut des rochers stratifiés qui dominent la route de Neuchâtel, directement au-dessus du village de Noiraigues, que M. Andrese a découvert, en 1866, le rare Hieracium lana- tum Vill. (Andryala lanata L.) nouveau pour le canton de Neuchâtel. On y trouve également Coronilla montana L,, Arc- tostaphylos offlcinalisWimm., Lactuca perennis L., Daphne alpina L., Cephalanihera ensifolia Rich., Carex humilis Leyss., C. Halleriana Asso., et çà et là, dans les bois de sapins, au-dessous des rochers de Tourne, Polygala chamœhuxus L. et Corallorhiza innata R. Br. (V. Andrese, Bull. Soc. bot. Fr., XVI, 1869, p. XXII et m litt.) Mais il nous est impossible de tenter cette ascension, car l'heure s'avance; nous arrêtons notre course près du hameau de Brot, d'où l'on jouit d'un magnifique coup d'œil sur les gorges de l'Areuse et la vallée du Champ du Moulin. Entre les pierres du parapet de la route, nous cueillons Corydallis lutea DC, et dans le bois voisin, Galium rotundifolium L., et nous reve- nons sur nos pas en explorant le bois au-dessus et au-dessous de la route. Il nous donne : Hepatica triloba DG. Melittis melissophylla L. Acer pseudo-platanus L. Euphorbia verrucosa Lam. Orobus niger L. — amygdaloides L. Rosa alpiaa L. Polygonatum verticillatum Ail. Sorbus aria L. Cephalanthera grandiflora Bab. — aucuparia L. — rubra Rich. Laserpitium latifolium L. Epipactis rubiginosa Crantz (1). Lonicora alpigena L. Melica uniflora Retz. Knautia silvatica Duby. — nutans L., etc. (1) Voy. au sujet à'E. rubiginosa Crantz (HeQ), E. atrorubens Hoffm. généralement regardée comme une simple variété à'E, latifolia, AU., une — 9 — Et en revenant à Noiraiguespar les éboulis, entre la route et la rive gauche du ruisseau : Thalictrum saœalile DC. {Th. cal- careum Jord.) très abondant, Rubus cœsius L. forme debilis{l), Galium elaiuinThuiW. avec Orobanche Galii Vaucli., Galeopsis angusiifolia Ehrh, etc. 21 JUILLET. — Creux-du-Van (2). — Nous comptions bien employer la journée entière à l'exploration du Creux-du-Van ; aussi, dès 4 heures du matin, nous levons -nous fort désappoin- tés de voir la pluie tomber à torrents, d'autant plus que notre ami, M. Andreae, compétent en pronostics météorologiques locaux, ne paraît guère rassuré. Cependant, confiants en notre bonne étoile, nous achevons nos préparatifs et nous nous embarquons avec des vivres pour la journée. La pluie cesse en effet, et, à part quelques averses, notre herborisation a pu se faire avec succès. Au sortir même de Noiraigues, nous notons : Fumaria Vaillantii Lois. ^Egopodium podagrarium L. Géranium pyrenaicum L. Bunium carvi Bieb, Trifolium hybridum L. (sans doute Ch?erophyllum aureum L. échappé de quelques prairies arti- Verbascum nigrum L. ficielies). Stachys siivatica L. Potentilla anserina L. Rumex crispus L., etc. Sur les bords de l'Areuse : Garduus personatus Jacq. Phleum pratense L. Salix caprea L. Baldingera arundinacea Dum. — purpurea L. Festuca pratensis Huds., etc. Ranunculus aquatilis L. dans la rivière même ; dans les champs cultivés : note de Ch. Grenier (Notes crit. sur q. q. pi. jur., in Bull. Soc. bot. Fr., XVI (1869), p. Lxiv), dans laquelle il conclutàleur séparation comme espèces, et cela d'après les observations faites par lui dans les monts Jura. U E . ru- biginosa Crantz est commun à la côte de Noiraigues ; quant à V E. latifolia. Ail. , je l'ai vu dans la forêt des Œillons. (1) Forme grêle, à tiges faibles, presque herbacées, à feuilles molles, â pani- cules appauvries, pauciflore, presque inerme. (2) Le Creux- du-Van est bien connu des botanistes et se trouve fréquem- ment cité dans les flores depuis Haller {Iter helveticum anni 1739 : Gœtin- g^, 1740). La Soiiétè botanique de France, lors de sa session extraordi- naire à Pontarlier, y a fait le 13 juillet 1889, et sous la conduite de JM. An- drete, une herborisation, dont le compte rendu a été rédigé par M. Gh Godet, bibliothécaire à Neuchâtel, et auteur d'une Flore du Jura estimée. Bull. Soc. bot. Fr., XVI (1869). Sess. extr. à Pontarlier, p. lxxxii, et seq. — 10 — Thlaspi arvonse L. Linaria vulgaris DG. Cerastium arvease L. Rhinanthus hirsutus Lam. Melilotus officinalis Lam. OJontitos serotina Rchb. Et au bord du chemin : Astragaluscicer L., rare, Poientilla verna L, forme à tiges rougeâtres, étalées, allongées, mais ne s'enra?inant pas, à poils appliqués, qui rappelle beaucoup le P. Chaubardiana Timb.-Lag. (1). Nous remarquons dans les vergers un Poirier à fruits petits, à demi-sauvage, et un Prunier cultivé dans tout le pays sous le nom de Prunier rouge, et dont les fruits servent à confec- tionner une espèce de pruneaux. Le port de ce Prunier est souvent fastigié ; c'est peut-être le P. pyramidalis DC, m Gaud. FI. helv. III., p. 311. Ces arbres fruitiers ne sont pas greffés et constituent vraisemblablement des races locales qui nécessi- teraient une étude spéciale. Un chemin pierreux nous conduit aux prairies déjà fauchées qui longent la forêt, et où nous reconnaissons encore : TroUius europseus L. Alchimilla vulgaris L. Polygala vulgaris L. et var. rosea. Poterium muricatum Spach, Silène nutans L. Bunium carvi Bieb. Géranium silvaticum L. Asperula cynanchica L. Genista sagittalis L. Centaurea scabiosa L. Ononis procurrena Wallr. Rhinanthus minor Ehrh. Anthyllis vulneraria L. Salvia pratensis L. Trifolium montanum L. Plantago média L. Vicia cracca L. Dactylis glomerata L., etc. (2) Nous examinons en passant de curieux blocs erratiques de protogine, assez puissants pour être exploités comme pierres de taille, escaliers, etc., que les géologues prétendent avoir été détachés des flancs du Mont-Blanc et transportés k cette distance par l'action des glaciers (3). (1) Cf. F. Schultz, Arch. deFlo^e, I, p. 228 et 248 et Eerb. norm., no41. Soc. dauph. (1883), n" 3688, Angoulême {le.git Guillon). Le P. Chaubar- diana Timb., P. rubens Saint-Am. (non VilL), P- verna, B. Amansiana F. Schultz, n'est qu'une simple forme ou variation stationnelle de P. verna L. (2) h' Ilenninium clandestiniim G. G. (H monorchis R. Br.j, a été trouvé dans ces pâturagos, au voisinage du chalet des Œillons, par M. Manceau. {Bull. Soc. bot. Fr., XVI, p. lxxxii). (3) Voy. Gh. Martins, Observ. sur l'origine glaciaire des tourbières du Jura neuchâtelois et de la v'gitation spéciale qui les caractérise. Extrait des Mém. de l'Acad. des Irttrrs rt se de Montpellier (1871), t. VIII, p. C; et E. Reclus : Géographie universelle, III, p. 34. 11 Nous entrons dans la forêt des Œillons que nous traversons tout entière. Cette forêt, d'abord mixte, composée de Hêtres, Fagus silvatica L., et de Sapins arg-entés, Abies peciinata DC, devient, à mesure que l'on monte, plus exclusivement formée d'arbres verts, dont le couvert et la fraîcheur perpétuelle con- tribuent à favoriser la végétation herbacée. Nous y observons, principalement sur la lisière : Acer campestro L. Trifolium médium L. Rosa arveusis Huds. Lonicera xylostea L. Viburnum lantaaa L. -^gopodium podagrarium L. (très commua et paraissant biea spoa- tané). Anthriscus silvestris Hoflfm. Origaaum vulgare L. Puis successivement : Ranunculus nemorosus DG. Helleborus fœtidus L, Actaea spicata L. Viola silvatica Pries. Moehriagia muscosa L. (sur les ro- chers.) Mœhringia trinervia Glairv. (sur les places à charbon). Oxalis acetosella L. Hypericum hirsutum L. Acer pseudo platanus L. Lathyrus pratensis L. Orobus vernus L. (eu fruits). Spiraea aruncus L. Fragaria vesca L. Rubus idteus L. Rosa resinosoides Crépi Sorbus scandica Fr. Epilobium spicatum Lam. — moutanum L. Saxifraga rotundifolia L. Sanicula europsea L. (avec une forme naine de 10-15 centim., et pauci- flore, portant de 1-5 ombellules très petites). Viburnum opulus L. Asperula odorata L. Valeriana officinalis L. type. Tussilago farfara L. Solidago virga aurea L. Senecio Fuchsii Gmel. Lapsana communis L. (dans les clai- rières) . Garduus defloratus L. Crépis biennis L. Lactuca muralis Fres. Prenanthes purpurea L. Hieracium murorum L. v. nemorense. Phyteuma spicatum L. Campanula trachelium L. — rotundifolia L, — pusilla Hgenke. Vaccinium myrtillus L. Pirola minor L. Primula elatior Jacq. Monotropa hypopithys L. Myosotis intermedia Link (dans les clairières). Verbascum thapsus L. Digitalis grandiflora Ail. Veronica urticifolia L. — montana L. — officinalis L. Scrofularia nodosa L. Melampyrum silvaticum L. Stachys alpina L. — silvatica L. Galeobdolon luteum Huds. Ajuga reptans L. Euphorbia stricta L. (sur les places à charbon). Euphorbia amygdaloides L. — 12 — Lilium martagon L. Gonvallaria maialis L. Polygonatum vulgare Desf. — verticillatum AU. Maianthemum bifolium DG. Paris quadrifolia L. Orchis maculatus L. Platanthera bifolia Rchb. Epipactis latifolia AU. Listera ovata R. Br. Neottia ni Jus avis Rich. Luzula albida DG. Luzula pilosa WiUd. — maxima DG. Garex paUescens L. — silvatica Huds. — glauca Scop. Calamagrostis montana DG. Anthoxanthum odoratum L. MiUum effusum L. MeUca nutans L. (à fleurs pâles non panachées de violet). Polystichum filix mas Roth. Sur les talus des chemins creux et sur les vieilles souches, nous avons récolté quelques Mousses ou Hépatiques, pour la plupart communes (1) : Hypnum triquetrum L. Pseudoleskea catenulata Br. Sch. Bartramia ithyphylla Brid. — moUuscum Hedw. — cupressiforme L. — cuspidatum L. — uncinatum Hedw. Isothecium myurum Brid. Barbula tortuosa Br. Sch. — ruralis Hedw. Plagiochila asplenioides Dum. Scapania nemorosa Dum. Une vaste clairière, au milieu des bois, est occupée par un chalet, le chalet /?o&er^, entouré de prés et de quelques maigres cultures. Sur la façade du chalet s'étale le dessin enluminé d'une énorme patte d'ours, avec cette inscription : « 1700 : David « Robert tue le dernier ours du Creux-du-Van dans une lutte « corps à corps. » Nous pouvons donc, sans danger du côté des fauves, continuer notre exploration. Autour du chalet croissent : Arabis alpina L. (sur les rochers). Melandrium pratense Rchb. Hypericum perforatum L. Géranium pyreDaicum L. — Robertianum L. Tilia grandifolia Ehrhr. Geum urbanum L. Rosa canina L. var. subglauca, transiens ad R. glaucam. Sorbus aria L. — scandica Fr. Ribes uva crispa L. Pimpinella saxifraga L., var. dissec- tifolia Wallr. Galium elatum Thuill. avec Oro- banche Galii Vauch. Sambucus racemosa L. Gentranthus angustifolius DG. Valeriana officinalis L. var. angus- tifolia Koch. Scabiosa lucida Vill. — columbaria L. (1) Je dois la détermination de ces Muscinées à l'amicale obligeance de M. l'abbé R. Sebille, curé d'Kcnisses (Saôn3 et-Loire), bryologiste distingué et d'une inépuisable complaisance. — 13 — Achillea raillefolia L. Senccio jacobœus L. Cariina chamaîleon Vill, var. caules- cens Lam. Cirsium acaule AH. Garduus dcfloratus L, Phyteuma orbiculare L. Vincctoxicum officinale L. Gentiana lutea L. — cruciata L. Dans les prairies : Trollius europaeus L. Vicia sepium L. Poterium muricatum Spach. Heracleum sphondyliutn L. Leucanthemum vulgare DG. Et dans les champs cultivés Sinapis arvensis L, Raphanus silvestris Lam. Silène inflata Sm. Veronica teucrium L. var. latifolia G. G. (V. latifolia L.) Linaria vulgaris DC. et var. glabra (L. italica, Trev.) Digitalis parvillora Lam. Calamiatha aciaos Glairv. Bruaella vulgaris L. Ghenopodium bonus Honricus L. Euphorbia cyparissias L., etc. Gentaurea raontana L. Tragopogon pratensis L. Colchicum autumnale L. Briza média L. Bromus erectus Huds., etc. Gerastium arvense L. Equisetum arvense L., etc. Amblystegium serpens Br. Sch. Bryum capillare L. Barbula tortuosa Br. Sch. Nos recherches bryologiques, très superficielles, nous ont donné, sur les murs, près du chalet Robert : Barbula muralis Timm. — vinealis Brid. (très fertile). Grimmia apocarpa liedw. Et au bord de la forêt de sapins : Plagiothecium silesiacum Br. Sch. Webera nutans Hedw. (très fertile). Hypnum moUuscum Hedw. Dicranum scoparium Hedw. — Halleri L. Plagiochila asplenioides Dum. Mnium marginatum P. de B. M. Andrese nous montre à gauche, dans la direction du sud, tout en haut du bois, les rochers de la Grand-Vy, au pied des- quels se trouve une station de Cyx^ripedium calceolus L.; et à droite, au nord, un énorme massif de rochers à parois verti- cales, soutenant la montagne du Dos-d'Ane, et portant sur ses flancs quelques espèces rares. On peut, mais avec les plus grandes difficultés, gagner la partie supérieure de ces rochers par les escarpements du Pertuis-de-Bise, mais les dangers de l'ascension ne sont pas compensés par la récolte de ces plantes : Rhamnus alpina L. Aster alpinus L. Anthyllia montana L. Daphne alpina L. — 14 — C est en essayant de cueillir pour un botaniste qu'il accom- pagnait quelques touffes à'Anthyllis montana L., abondant mais difficile à atteindre, qu'un guide, un autre Robert, descen- dant du chasseur d'ours, fut précipité du haut des rochers et trouva la mort dans cette chute de 400 mètres. Un peu plus loin, sur la droite, on peut retrouver encore sur les escarpements, à l'entrée du Creux-du-Van, quelques ves- tiges de Rhododend7^on ferrugineurn L., à peu près détruit dans cette localité (P. -A. Genty in lit t.). A l'entrée du bois, la végétation augmente de vigueur, et nous rencontrons successivement en suivant le ruisseau : Aquilegia vulgaris L. et var. atrata Koch. Astragalus glycyphyllua L. Sorbus aucuparia L. Sambucus ebulus L. Eupatorium cannabiDum L. Girsium palustre Scop. Cirsium eriophorura Scop. Lappa nemorosa Korn I Lithospermum officinale L. Meatba silvestris L. Clinopodiura vulgare L. Convallaria maialis L. (remarquable par l'étroitesse de ses feuilles), etc Nous nous engageons dans la forêt de sapins de plus en plus épaisse et sombre et à végétation alpine de plus en plus carac- térisée par : Dentaria pinuata L. (en fruits). Epilobium trigonum Schr. Ribes alpinum L. Chrysosplenium alternifolium L. Valeriana montana L. Lonicera alpigena L. Knautia dipsacifolia Host. Petasites albus Gaertn (en feuilles). Adenostyles albifrons Rchb. Pirola secunda L. Lysimachia neraorum L. Liliura martagon L. (remarquable par la teinte rouge de ses fleurs^ Sur les rochers : Asplenium trichomanes L. et A. ruta mu- varia L., et, au pied des sapins, le rare Corallorhiza innata R. Br., assez commun, mais difficile à apercevoir au milieu des mousses dont ses tiges aphylles percent à peine l'épais tapis. En avançant toujours : Epipactis rubiginosa Grantz. Neottia nidus avis Rich. (G.) Luzula multiflora Lej. — flavesceus Gaud. Carex muricata L. forma cont igua (C contigua Hopp.) Carex digitata L. — silvatica Huds. Poa nemoralisL. Polypodium dryopteris L. — calcareum Sm. Polystichum dilatatum DG. — 15 — Thalictrum aquilegifolium L, Ranunculua platanifolius L. — lanuginosus L. Aconitum lycoetonum L. Géranium Robertiaaum L., t lidum. Rosa alpina L. Astrantia major L. Sanicula europsea L. Lonicera nigra L. Bellidiastrum Michelii Gass. Senecio Fuchsii Gmel, — Jacquinianus Rchb. Mulgedium alpinum Less. Polygonum bistortum L. Mercurialis perennia L. Orchis globosus L. (R.) Festuca silvatica Vill. Elymus europceus L. Aspidium aculeatum Roth. Athyrium filix fœmiaa Roth. et quelques champignons d'autant plus rares que la saison leur est moins favorable : Collybia dnjophila Fr., Entoloma nido- rosum Fr., Claudopus variabilisYv. sur les rameaux de sapins morts, Clavaria flava Schœff., etc. Mais la forêt s'éclaircit ; la marche y devient de plus en plus difficile à cause des énormes blocs de rochers qui la parsèment, et tout à coup nous nous trouvons en face du Creux-du-Van. C'est un grand cirque de 1,500 mètres de diamètre, fermé par un mur perpendiculaire de rochers néocomiens hauts de 300 mè- tres, dont les éboulis séculaires descendent jusqu'à la forêt avec une pente de plus de 45°. Ces rochers portent le nom du Falco- nnaire ou de la Fauconnière (autrefois mons FalconariusJ, et nous pouvons vérifier le bien fondé de cette appellation, car nous voyons plusieurs faucons fFaZco tintinnunculus L.) tournoyer au-dessus de nos têtes, pendant que sur une saillie de rochers toute une nichée de jeunes fauconneaux mêlent leurs cris stri- dents aux rauques croassements des corbeaux fCoryw^cora^L.J, qui partagent avec eux l'asile des trous de rochers, et que notre présence semble grandement inquiéter (1). L'aspect de ce chaos, de cette solitude profonde, forme un spectacle grandiose et im- posant, comme celui de tous les grands phénomènes de la nature. Ce site sauvage est appelé tantôt Creux-du- Van, tantôt Creux- du-Vent. Son nom viendrait, d'après Gandin, dans le premier cas de sa forme demi-circulaire et évasée comme celle d'un van, (1) Nous avons vu en outre voltiger le long des parois verticales des rochers l'élégant Tichodrome (Tichodroma phœnicoplera Temm.), charmant Grimpereau d'un gris perle, aux ailes d'un rose vif, que l'on a surnommé Papillon de rochers. On trouve, paraît il, assez communément, comme gibier, au Creux-du-Van, la Gelinotte {Bonasa silvestris, G.-R. Gray), et plus rarement le Grand-Tétras (Tetrao urogallus L.), qui niche dans les escarpements. — 16 — dans le second cas des phénomènes météorologiques qui s'y passent (1). En effet, souvent les brouillards se condensent dans le fond du ravin, le remplissent peu à peu, et s'en élèvent en tourbillons chassés par le vent, qui s'y engouffre comme dans une immense cheminée d'appel. Par les temps pluvieux, on voit souvent de loin le Creux-du-Van rempli de brumes, et leur observation fournit aux gens du pays de précieuses indications pour le pronostic du temps. Nous en avons fait l'expérience, et nous avons assisté nous-mêmes au phénomène du Creux-du- Van se remplissant rapidement d'embruns qui s'élèvent pour retomber en averses. La douche que nous recevons en gravis- sant les pentes abruptes des éboulis n'a fait que tempérer la chaleur que développe cette ascension pénible et faciliter nos investigations botaniques. Les étymologies fantaisistes de Gandin me paraissent abso- lument sans fondement, et tiennent à ce que jusqu'à la renais- sance toute moderne de la linguistique les anciens littérateurs, peu familiarisés avec les langues primitives ou les dialectes locaux, voulaient bon gré mal gré trouver dans le latin l'origine de tous les mots, d'où la comparaison puérile d'un cirque de rochers à un van, vannum. Le mot van ou ven est un vocable celtique ou allobroge qui signifie 7nontagne , rocher. C'est ainsi qu'en France le Morvan, district montagneux de l'est de la France, relié au Jura par les collines de Bourgogne, tire son nom des mots celtiques mor van ou ven, noires montagnes ; que dans les Alpes vaudoises ou fribourgeoises, il y a des vans ou vanets, et ce sont partout de grands rochers (V. Andrese m litt.). Il me paraît donc rationnel d'adopter, à l'instar de Gau- din,mais pour d'autres raisons que lui, l'orthographe du Creux- (l) t Creux-du-Van, Creux-du-Vent, mons Jurauus ad limites p agoru m Vau- densis et Neocomensis situs. Intra horam unam ex vico Neocomensi Noirai- gues in immensam rupiumaltissimarurn ac praeruptarum aream, quee formam circularem vanni quadammodo refert, pervenitur. Ex qua similitudine monti nomen inditura fuisse viri peritissimi contendunt; cumautem ia rupium ista- rum cacuraine veatus impetuosus plerumque spiret, ac mirum in modum sublimiora petat, alii putant hocce nomen antrum venti, neque fauces vanni, signilicare. » Gaudin, FI. helv., VII, p. 120. « C'est un cirque d'effondrement, demi-cratère de plus d'un kilomètre de large et de 300 mètres de profondeur ; c'est le Cul-du-Van, dont le nom, ainsi que l'a établi M. Ayer, a été changé pendant ce siècle en celui de Creux- du-Vent; l'étude du relief géographique montre que c'est une ancienne combe. » E. Reclus. Géogr. univ., III, p. 30. — 17 — du-Van, qui signifie à proprement parler creux de rocher ou montagne creuse. La partie inférieure des rocailles, composée des plus gros blocs, est encore occupée par des arbres de plus en plus clair- semés et rabougris, Sapins, Frênes, Bouleaux, Érables, Acer 2)seudo-plalanus L., qX Acer opulifolium Vill., Saules, Salix caprea L. et S. grandi fotia Ser., puis d'une végétation très serrée de sous-arbrisseaux, dont les racines fixent les pierres, pour la plupart entièrement convertes de mousses, principale- ment d'Orthothecium rufescens Br. Sch., au feuillage luisant : Vaccinium myrtillus L. Arctostaphylos officinalis Wimm. — uliginosum L. Empetrura nigrum L. C'est à ce niveau et à la partie centrale du cirque que nous rcclierclions le rare Pirola média Sw., découvert et décrit par M. Geuty sousle nom de P. convallarifolia (1). Malgré le temps que nous y consacrons, nous ne parvenons à en découvrir qu'un seul exemplaire. En revanche, les P. rotundifolia h. et minor L. ne sont pas rares, cette dernière surtout, que nous avons trouvée en abondance et en pleine floraison dans toute la forêt. A mesure que nous montons, se présentent des plantes de plus en plus intéressantes, les unes sur les rocailles, les autres sur les pentes herbeuses ; en première ligne, Androsace lactea L., magnifiquement fleurie, et dont nous faisons une copieuse centurie (2). Rappelons pour mémoire que cette élégante Primu- lacée, plus commune dans les Alpes dauphinoises, est depuis longtemps connue dans le Jura, où elle est assez répandue dans la chaîne centrale, et qu'elle est citée dans le Jura bâlois par Bauhin, (Jean Bauhin, Hist. plant. (1551), III, p. 762, fig. 1), qui eu a même donné une figure fort reconnaissable. Erysimum ochroleucum L. Saxifraga aizoon L. Thlaspi montanum L. Sedum album L. Géranium Robertianum L. Laserpitium latifolium L. Goronilla vaginalis L. Pimpinella magna L. Dryas octopetala L. Athamanta cretensis L. (1) M. Genty a consacré à cette plante une étude très complète: Note sur le Pirola média, S w. (P. convallarlefolia Gty.), p^an^e rare nouvelle pour la flore jurassique et la flore française, in Bull. Soc. bot. France, t. XXX Vil (1890), p. 21-31. (2) Publiée par M. P. -A Genty in FI. sel, exsicc. de M. Gh. Magnier (1891), sousle n° 2560. — 18 - Galium anisophyllum Vill, Gcntranthus angustifolius DG. Leucanthemum vulgare DC, V( atratura (L. atratum DC). Crépis blattarioidcs Vill. Hieracium elongatum Willd. (C.) — deatatum Hopp. (1). Linaria potrœa Jord. Sci'ofularia Hoppii Koch. Phalangiurn ramosum Lam. Polygonatum vulgare Desf. Orchis conopeus L. Asplenium viride Huds. Polypodium calcareum Sm, Et surtout Valeriana montana L., Rumex scutalus L. et Convallariainaialis L. eu fruitô, qui couvrcut de vastes sur- faces de menues rocailles et les retiennent par leurs long-ues racines. Nous atteig"uons enfin la base des rochers, vers la g-auche du Creux-du-Van, à un point qui nous était indiqué depuis le bas par une grande croix fédérale peinte sur la pierre. C'est la Roche- aux- Noms, sur laquelle tous les excursionistes ne manquent jamais d'insarire leurs noms. Nous y lisons ceux des membres du Club alpin suisse et de presque tous les botanistes contemporains qui ont visiié avant nous cette localité. Après un instant de repos employé à contempler le paysage, nous suivons la base même des rochers en remontant vers le centre, et la marche y est singulièrement pénible. L'humidité entretient à ce niveau une zone de végétation luxuriante, et la plupart des espèces déjà signalées plus bas y atteignent une taille de plus d'un mètre, au milieu desquelles il est difficile et même dangereux de se frayer un passage, sur- tout quand elles sont absolument trempées d'eau. Au pied même des rochers, des espèces triviales : Sisymbrium alliarium L. Silène inflata Sm. Vicia sepium L. Angelica silvestris L. Galium mollugo L. — apariae L. Senecio viscosus L. Urtica dioica L. Dactylis glomerata L. Bromus tectorum L. — asper L. (à tiges et panicules fortement teintées de rouge. Agropyrum caninum R. et Sch., etc. (1) M. Genty a récolté au Greux-du-Van, en 1886. deux Hieracium fort curieux: l'un qui paraît un hybride des H. scorzoncrifoliurn Vill. et humile Jacq., et que Christener a appelé H. Godcti; l'autre, qui résulte évi'lemment du croisement des H. murorurn L., et humile Jar(j., et qui a été décrit par Arvet Touvet sous le nom de H squalidum in A. -T., Hier, des Alpes franc. (1888\ p. 45. Gette plante, vérifiée par Arvet-Touvet, ne paraît pas avoir en- core été signalée dans les monts Jura (P. -A. Genty, in litt ) -- 19 — mélang'ées aux plantes caractéristiques de la région Thalictrum majus Jacq. Laserpitium silcr L. Heracleum sphondylium L. — montanum Schl. Chœrophyllum aurcum L. (CC.) Cacalia alpiua Jacq. Garduus personatus Jacq. Cirsium olcraceum Scop. Crépis paludosa Mœnch. Gentaurea scabiosa L., var. macro- cephala. Mulgedium alpinuin Less. Gampanula gloraerata L. — trachcliura L., var. leu- cantha. Cynoglossum montanum Lam. Rumex arifolius AU. Liliura martagon L. Mais ce .^out les rochers surtout qui nous fournissent la flore la plus riche, soit dans leurs fissures, soit sur leurs saillies herbeuses et humides. M, Genty nous montre tout d'abord, non loin de la Roche-aux-Noms, la station fort restreinte et unique pour la flore jurassique, où il a retrouvé le Poa cœsia Sm., dont l'existence signalée dans le Jura par Godet (F/, du Jura, 811, et Sujjpl. 197) avait été niée par Grenier. « C'est prohablement, « dit ce dernier auteur, une variété appauvrie de cette espèce « (P. nemoralis L.) qui, dans le Jura, a été prise pour le « P, cœsia Sm. »(Gren., Fl.de la ch.jur., p. 909). Ce Poa est en efl^et très facile à confondre avec les formes glauques du P. ne- moralis L.; on l'en distinguera sûrement aux chaumes rudes à la base, ainsi que les gaines des feuilles, qui sont en outre plus longues que le limbe et les entre-nœuds qu'elles cachent, et surtout à la forme des ligules des feuilles caulinaires, toujours oblongues, allongées, tandis qu'elles restent tronquées dans le P. nemoralis (1). Puis : Anémone alpina L. — narcissiflora L. Thalictrum saxatile DC. (Th. calca- reum Jord.). Ranunculus alpestris L. — montanus Willd. ( R. gracilis Schl.). Kernera saxatilis Rchb. Draba aizoides L. ( D. saxigcna Jord.). Helianthemum vulgare L., var. gran- diflorum DC. Dianthus silvestris "Wulf. (D. saxi- cola Jord.). Lotus corniculatus L. Potentilla caulescens L. (1) Poa cœsia (Sm.) G&xxà.Fl. helv., I, p. 249; P. aspera Gaud. Agr. hclo. I, p. lus. Voyez les noies que M. Genty a consacré à cette rare espèce qu'il a. contribué à bieu faire connaître, ap. Ch. Magnier : FI. sel. exsicc. (ISUO), ïï" •<^327, et ticrinia fl. sel., IX, p. 170; et in Soc.d auphin^, 2» série (1891), n° 480. — 20 — Alchimilla alpiaa L. (1) Amelanchier vulgaris Mcench. Cotoaeaster tomeiitosa Lindl (RR.) — vulgaris Lindl. Sedura dasyphyllum DC. Astrantia major L., avec var. flori- bus roseis. Libanotis montana Ail. Hieraciura humile Jacq. (H. Jacquini Vill.). Leontodon hispidus L. Phyteuma orbiculare L. La végétation finissant par devenir uniforme, nous nous arrê- tons vers un rocher détaché en saillie sur la pente, et autour duquel nous récoltons abondamment Poa hy brida Gaud. (2), puis, en redescendant les pentes du côté droit du Creux-du-Van, nous apercevons encore quelques nouvelles espèces : Gentiana Clusii Perr. et Song. Piuguicula vulgaiis L., var. alpestris Gty. Bartsia alpiaa L. Globularia cordifolia L. Thesium pratense Ehrh. Carex tenuis Host. — sempervirens Vill. Festuca pumila Chaix. — glauca Schrad. Cystopteris fragilis Bernh. Myosotis silvatica Schm. PolygoQum viviparum L. Salix retusa L, Tofieldia calyculata Wahl. Orchis albidus Scop. Scolopendrium officinale Sm., etc. Chemin faisant, nous avons mis aussi dans nos boîtes quel- ques mousses arrachées un peu au hasard, sur les rochers humides ou les troncs d'arbres : Hypnum crista castrensis L. Ptychodium plicatum Schimp. Leucodoa sciuroides Schw.,uar. fal- catus (avec une autre forme due à l'état patiiologique de la plante). Orthothecium rufescens Br. Sch. Leskea nervosa Myr. Webera cruda Schimp. Mnium rostratum Sahw. Hypnum uncinatum Hedw. Meesea trichoides Spruce. Bartramia Œderi Schw. Grimmia apocarpa Hedw. Dicranum scoparium Hedw. (!) C'est l'espèce caractéristique par excellence de la flore alpestre dans le Jura, d'après Thurmann. Essai de phytost., I. p. 185 et 19i. (2) M. le D'- Saint-Lager in Cariot. Et. des fleurs. S" éd., 11, p. 933, fait de P. hybrida Gaud., une simple variété longifoliaÙQ P. silvatica Vill., et dit avoir trouvé au mont Pilât (Loire) des formes intermédiaires. Les deux types m'ont toujours paru assez tranchés pour être conservés au moins comme sous-espèces; mais je serais très disposé à accepter le nom de P. lon- gifolia Saint Lager, au lieu de P. hybrida, Gaud., qui exprime une idée fausse, et do P. jurana Gty. qui a le défaut de toutes les épilhètes géogra- phi:)ue3 appliquées à des espèces à vaste dispersion. Ge Poa n'est pas spécial au Jura; il existe aussi en Savoie, en Dauphiué, en Suisse, dans le nord de l'Italie, les États autrichiens (Croatie, Garuiole, Styrie, Carinthie, Tyrol, Salzbo'urg, Transsilvanie, Bohême, Moravie), et enfin dans les Alpes bava- roises. — 21 — FissiJena adiantoides HeJw. Barbula ruralis Hcdw., var. aci- Barbula tortuosa Web. phylla Br, Sch., etc. (1). Mais l'heure pi esse; l'entraînement de la botanique nous a fait oublier le boire et le manger, et nous nous hâtons de g-ag-nerdans la forêt une clairière, où les eaux limpides d'une fontaine cap- tée par les bûcherons nous aident à faire honneur à nos provi- sions. Cette fontaine, Fontaine-Froide, est en effet remarquable par l'extrême fraîcheur de ses eaux, dont la température ne dé- passe pas -f 5° au plus fort de l'été (2). Au centre du carrefour s'élève une plate-forme en pierre sur les marches de laquelle croissent Meconopsis cambrica Vig. et Arabis alpina L. A-Utour de la Fontaine -Froide, quelques plantes hydrophiles communes : Cardamine silvatica Link. Veronica cliamsedrys L. Veronica buccabunga L. Poa bulbosa, var. vivipara L. et de nombreuses Muscinées, dont l'humidité favorise la végé- tation, entre autres : Hypnum salebrosum Hoffm. Polytrichum formosum Hedw. — filicinum L. Barbula tortuosa Web. — commutatum Hedw. Dicranum scoparium Hedw. — uncinatum Hedw. Jungermaania trichophylla L. — Sommerfeltii Myr, Scapania umbrosa Dum., etc. et le Lichen d'Islande, Cetraria islandica Fr., commun sur les troncs des grands arbres. Nous avions formé le projet de remonter en contournant le Creux du-Van par son extrémité droite et de revenir à Noi- raigues en suivant la crête rocheuse qui le domine ; mais le temps consacré à notre herborisation ne nous a plus laissé le loisir d'achever cette partie de notre programme. Les fatigues de la course ne paraissent pas devoir être suffisamment com- pensées par les récoltes que nous pourrions faire, et le temps (1) Aux Muscinées que j'ai citées plus haut, il convient d'ajouter les espèces suivantes, recueillies et déterminées, en 1869, par M Cornu: Hypnum loreum L., Ambli/stegimn confervoides Br. Sch., Mnium spinosuni Schw., Ulola crispula Br. Sch., Orthotricham rupestre Schl. , 0. pulchellum Hook et Tayl., Mrt:.grria puhrsrcns Raddi. {Bull. Soc. bot. F)-., XVI, (1S6'.)), p. LXXXV). (•2) Exactement -\- 4"/, à l'altitude de 1,100 m., d'après de Buch (Thur- maaa, Essai de phytost., I, p. 59). — 22 — nuageux nous empêcherait même de jouir des agrémeuts de la vue. Voici du reste les renseignements complémentaires que M. Orenty a bien voulu me communiquer : « On peut atteindre le plateau supérieur par le sentier de la Grand-Vy, le long- duquel on récoltera à mi-côte et en s'écar- tant un peu sur la gauche, le Cypripedium calceolus L. Arrivé au bout du sentier, on débouche sur des pâturages, desquels on a une belle vue sur les Alpes de l'Oberland, surtout en s'avançant jusqu'à la Baronne, point culminant (1,465 mètres). En prenant sur la droite, on revient vers le cirque dont on longe les bords, qui sont en pâturages ou garnis de buissons principalement composés de Sorbus scandica Fr. (S. Mougeoti Soy.-Will. et Godr.). On trouve dans les buissons Bupleurum longifolium L, et Allium victoriale h.\ dans les pâturages Androsace lac- tea L., et en abondance Gentiana Kochiana Perr. et Song., tandis que Gentiana Clusii P. et S., son proche parent, croît seul sur les escarpements de la falaise. Sur les bords du préci- pice on voit Daphne alpma L., Bupleurum ranu7iculoides L. forma g enuinum G. et G., Laserpitium siler L., Aster alpi- nus L., etc. En s'écartant un peu, on trouve dans les pâturages des puits ou e}»7905zet*^, plus ou moins humides, qui renferment Crocus vernus L., blanc et violet, très commun au printemps, Nigritella angustifolia Rich., Selaginella spinulosa R. Br. Botrijchiuni lunaria Sm. en exemplaires gigantesques; en outre, Anémone alpma L., A. narcissijlora L. et Tlialictrum aquilegifolium L. à fleurs violettes. Dans ces pâturages, à peu de distance du cirque, se trouve le chalet du Soliat, d'où part un sentier qui, après de nombreux zigzags conduit au chalet des Œillons, et de là, par une pente rapide, au village deNoir- aigues. » P. A. Genty, m Htt. M. V. Andreœ indique en outre tout en haut des rochers du Creux-du-Van et au Soliat: Hieracium villosum L., Bartsia alpina L., Alliummo7itanum Schmidt ; dans les creux de neige, Soldanella alpina L. peu abondant, et sur le Dos-d'Ane V Orohanche laserpitii-sileris Rapin en grande quantité (V. AndrefE in litt.) (1). (1) Pour donner une idée aussi exacte que possible de la végétation d'une localité aussi riche, et impossible à explorer dans une seule journée, je corn- — 2;i — Sufîiisamment cliaryés d'un lourd fardeau de plantes, nous rentrons à Noirait^ues par la forêt des Œillons, en complétant le long- du chemin les récoltes et les observations du matin. Lorsqu'un botaniste a pu faire des herborisations nombreuses sur des points suffisamment distants, il reconnaît bien vite que les formes végétales, considérées comme espèces, se présentent sous des aspects variés, que l'on peut classer dans plusieurs catégories. Les unes ne diffèrent du type spécifique, générale- ment admis et pris dans un large sens, que par des caractères peu importants : variations de port, de taille, de couleur, d'in- dumentum plus ou moins prononcé, etc., et sont tantôt cantonnées dans des limites assez étroites, races locales, tantôt disséminées dans des localités multiples, mais soumises aux mêmes influences physiques de sol, de température, d'humi- dité, d'exposition, etc., races stationnai les. Les autres se diffé- rencient par des caractères plus nombreux et d'un ordre plus élevé portant sur le développement proportionnel des organes, la présence ou l'absence de poils, de glandes, la forme de la fleur, du fruit, etc., et se retrouvent dans toute l'étendue d'une circonscription géographique ou d'une zone végétale, races ré- gionales [\). Souvent la variation d'un organe entraîne des varia- tions simultanées dans d'autres parties de la plante ; et d'autre part, des modifications analogues se rencontrent dans des genres ou des espèces voisines, variations parallèles ou homologues des espèces, et contribuent à imprimer à la flore de chaque ré- gion son aspect spécial (2). Il importe en systématique de ne pas pléterai mes lif5tes personnelles par la mention des espèces suivantes, ins- crites par Godet dans son rapport {Bull. Soc. bot. Fr., XVI (1869), p. lxxxii- Lxxxv), d'après ses récoltes et celles des botanis.tes suisses, MM. Manceau, Ayasse et Rapin, tant dans la forêt des Œillons que sur les rochers et les sommets du Creux-du-Van : Aconitum napellum L. Hieracium juranum Fr. Cardamine amara L. Campanula persicifolia L. Dentaria digitata L. — rhomboidalis L. Arabis ciliata Koch. Gentiana verna L. Polygala alpestris Rchb. Tozzia alpina L. Rubns saxatilis L. Daphne mezereura L. — glandulosus Bell. Thesium alpinum L. Meura athamanticum Jacq. Listera cordata R. Br. Crépis succisifolia Tausch. Lycopodium annotinum L. Hieracium glabratura Hoppe. (1) Parfois appelées de la dénomination assez impropre d'espèces ou races endémiques (Grisebach, H. Christ). (2) Cf. Thurmana. Essai de Phylost, I, chap. xvir. Modifications de l'es- pèce, p. 326, 333 et seq. — D"' Saint-Lager in Gariot. Et. des /leurs, 8™« éd. Préface, p. xyiii. — 24 — nég-liger ces formes plus ou moins tranchées, et de leur donner dans une classification méthodique, comme on tend à le faire généralement aujourd'hui, une épithète caractéristique et la place qui leur appartient, les unes comme variétés, les autres comme races ou sous-espèces, en cherchant, autant que possible, à les rattacher en sous-ordre au type spécifique, souvent con- ventionnel, dont elles semblent dériver. La flore jurassique, dans la partie limitée que nous avons parcourue, nous a offert un bon nombre de ces formes ou races particulières. C'est ainsi que Helianthemum vulgare DC. est remplacé presque partout par une race rég-ionale à fleurs du double plus grandes, H. grandi floruni DC. — Dianthus sil- vestris Wulf. et Draba aizoides L. sont représentés par des races stationnelles, Dianthus saxicola Jord. et Draba saxigena Jord., que l'on retrouve sur tous les rochers calcaires des Alpes, et même de Bourgogne. — Leucanthemum vulgare DC. fait place à une race régionale ^alpestre à écailles du péricline lar- gement bordées de noir, L. otratum DC. — Centaurea sca~ biosa L. se montre au Creux-du-Van avec une variété ou race locale, macrocephala Billot, à gros capitules qui établit, en même temps que la forme petrophila Reuter, la transition avec la race régionale C. alpestris Heg., propre aux prairies des hautes montagnes des Alpes, de Suisse, etc. Cf. Cariot et Saint- Lager. Et. des fî., 8* éd., II, p. 430; Reuter, Cat. Genève, p. 119, etc., etc. Je signalerai plus particulièrement quelques formes moins connues ou litigieuses au sujet desquelles j'ai pu faire quelques remarques personnelles. Thalictrum saxatile DC. =Th.calcâreum Jord. — Le genre Thalictrum est un de ceux dont les espèces très polymorphes, surtout dans la section Euthalictrum, sont les plus difficiles à déterminer, et dont la synonymie est la plus embrouillée. Aussi quelques auteurs modernes, se basant exclusivement sur le ca- ractère important du mode de végétation souterraine, se sont- ils tirés d'afl'aire en admettant deux espèces seulement, l'une à souche rampante ou stolonifère, T. minus L., l'autre à souche fibreuse, à turions courts, T. majios Jacq. (1). Je crois ce point (1) Cf. Ch. Royer. FI. de la Cote-d'Or, I, p. 2. — Cariot et Saiat-Lager. Et. des fl., 8«éd., II, p. 19. de vue trop larg-c, et sans admettre toutes les espèces micro- morphes que l'on s'est plu à tailler dans le genre Thalictrum (1), il me semble possible d'en dég'ag-er quelques espèces bien carac- térisées. J'ai récolté notamment dans le Val de Travers deux plantes fort distinctes et appartenant au g-roupe des Pigamons à souche épaisse et dépourvue de stolons. L'une d'elles est très commune dans lei éboulis calcaires de Noiraigues et de Fleu- rier, et sur les rochers du Creux-du-Van. Elle est caractérisée par sa tig-e striée, garnie à la base de gaines aphylles, ses feuilles ramassées vers la partie moyenne de la tige, ses folioles petites, à contour orbiculaire, glauques et plus ou moins glan- duleuses en dessous, sa panicule nue, raide, étalée, ses fleurs penchées, ses achènes fusiformes atténués à la base, etc. Si l'on réserve, d'après une interprétation presque unanime, la dénomination de Th. minus L. à l'espèce stolonifère, celle-ci en est donc absolument distincte, et me paraît répondre à Th. saxa- tile (Schleich.) DC. FI. Fr. VI., p. 633, n« 4591'' et Si/st.nat.,1, p. 178, sensu latissimo et parmi les formes de cette espèce à T. calcareum Jord., Observ. 5*, frag., p. 9 QtDiagn.^ I, p. 23. C'est bien certainement le Th. saxatile des Aoristes suisses : Th. minus II saxatile Gaud., FI. helv. III, p. 505 ; Reuter, Cat. pi. vase. Genève, p. 1; et cette opinion est celle de Jordan lui- même, puisqu'il dit positivement à propos de son T. calcareum : « Cette plante est probablement , en partie, le T. 7ninus « saxatile Gaud., FI. helv., III, p. 505. C'est aussi, en c partie, le T. saxatile do Schleicher et celui de DC, mais « ce n'est pas celui de Villars qui est évidemment la même « plante que Th. fœtidum DC. » Jord., Observ. 5^ frag., p. 24. Il y revient dans ses Diagnoses, I, p. 28, à propos de son T. oreites, forme affine de T. calcareum. Enfin, Ch. Gre- nier, Révision de la flore du Jura, p. 24, a en dernier lieu adopté le Th calcareum Jord. comme espèce. Il me paraît préférable de conserver au type spécifique le nom de Th. saxatile Schl. DC, qui lui convient parfaitement, aussi bien au point de vue des caractères descriptifs qu'au point de vue de l'habitat. (1) Cf. A. Jordan. Observ. sur plus. pi. nouv. rares ou critiques de la France, 5« frag.. I, p. 1-29, et Diag. esp. nouv., I, p. 22-54. — Lamotte. Prodr. de la fl. du plateau central de la France, I, p. 34-37. — J.-B, Verlot. Catal. pi. vase. Dauph., p. 1-4. — 2G - Elle varie du reste à tig-es tantôt g-lahres, tantôt couvertes de poussière praineuse; c'est alors le T. miii'is I pruinosum Gatid. FI. helv., III, p. 504, indiqué par Gaudia au Creux-du-Van, mais ce caractère très secondaire a d'autant moins de valeur qu'il disparaît en grande partie sur la plante sèche. Thalictrum majus Jacq.et Auct. plur. — L'autre Thalictrum que j'ai récolté au Creux-du-Van, au pied des rochers, est très différent du précédent par sa tige plus grosse, fouillée dès la base, ses feuilles plus amples, à folioles grandes, de forme obovale, vertes en dessus, glaucescentes seulement en dessous, peu ou pas glanduleuses, sa panicule flexueuse, feuillée, s'js fleurs droites, ses achènes arrondis et comme ventrus à la base, etc. (1). C'est le T. majus Gaud., FI. heiv., V, p. 508; Godet, FI. du Jura, p. 4 ; Gremli, FI. a^ial. de la Suisse, p. 81, et de la plupart des auteurs. Il noircit plus ou moins par la dessiccation, ce qui n'a pas lieu pour T. saxàtile. Aquilegiâ vulgaris L.=A. atrata Koch. — L'Ancolie vul- gaire se trouve dans toute la chaîne jurassique avec une race régionale qui remplace même le type sur certains points, sur- tout daus la partie méridionale, sur les hauteurs de la Faucille, du Reculet, et qui en diffère par ses fleurs d'un violet noirâtre, ordinairement plus petites, à pétales plus courts et par consé- quent à étamines plus saillantes; les tiges et les feuilles pren- nent parfois une teinte purpurine ou violacée, et les folioles sont souvent plus petites et pins profondément lobées. C'est VA. atrata Koch. Sy)%., éd. 3, p. 19, admise, tout au moins comme variété, dans toutes les flores récentes. J'ai remarqué, notamment autour du chalet Robert, cette race mélangée à A. vulgaris type, à grandes fleurs bleues, et entre elles tous les intermédiaires possibles comme dimension de la fleur, comme coloration, comme teinte et forme du feuillage, etc. J'ai même observé toutes ces variations g'roupées sur un point très res- treint en colonies serrées provenant évidemment d'un même serais. Il est donc naturel d'en conclure à une commune ori- gine, et difficile d'y voir autre chose que des modifications d'un même type spécifique. Au surplus, l'A. atrata reviendrait au (1) Les achènes sont souvent ovales ou globuleux, mais cette apparence tient à une déformation tératulogique produite par la piqûre d'un insecte, probablement d'un HyraénoptcrCj dont !a petite larve habite l'intérieur du fruit stérilisé. — 27 — type aprèd quelques années de culture (Ch. Greni'^r, FI. de la ch.jur.y p. 26; Goiet, FI. du Jura, suppl.^ p. 7). AcoNiTUM LYCOCTONUM L. — Revèt dans la forêt des Œillons, au pied du Creux-du-Van, un port particulier : tige très éle- vée, flexueuse, à rameaux espacés, grêles, étalés à angle droit ; feuilles molles, très grandes, à segments larges ; grappes lâches, à fleurs très écartées, d'un jaune très pâle; diffère beaucoup comme aspect du type, tel que je l'ai toujours vu dans le centre de la France, dans les Alpes, et même dans le Jura méridional ; c'en est une forme ombreuse ou silvatique. Géranium Robertianum L., var. pallidum. — Variété à tiges diffuses, à feuilles molles, vertes, à segments élargis, et à fleurs d'un rose pâle, à peine teintées, probablement sous l'influence de l'humidité et du peu d'intensité de la lumière dans les lieux couverts. J'ai déjà remarqué, mais sur un sol siliceux, une forme semblable assez répandue aux environs d'Autun, dans les haies ombragées, près du château de Monthelon et à la Grande- Verrière. On trouve aussi parfois une variété à fleurs entièrement blanches, flore alho, Gaud., FI. helv., IV., p. 417. RosA CANiNA L., var. subglalca = forma iransiens ad R. glaucam. ■ — Les Rosiers m'ont paru rares et peu riches en formes dans le val de Travers. Le R. canina y est cependant répandu, mais avec un aspect spécial par ses feuilles larges, fermes et glauques, qui rappelle celle de R. glauca Vill. Tou- tefois, ses folioles à dents toujours simples et non glanduleuses, ses fleurs d'un rose pâle, ses sépales réfléchis, etc., le rangent sans nul doute dans le groupe spécifique très complexe de R. canina. Il appartient à ces formes intermédiaires entre R. canina et R. glauca qui relient ces deux espèces d'une façon assez étroite pour appuyer l'opinion d'après laquelle R. glauca Vill. ne serait elle-même qu'une race montagnarde ou une sous- espèce de R. canina. RosA RESiNOSOiDES Crépin ! — Reconnu par M. Crépin lui- même, à qui j'en ai envoyé des spécimens, et qui a bien voulu me donner son opinion si autorisée. Trouvé dans la forêt des Œillons, où il paraît rare, mais facilement reconnaissable à l'odeur résineuse de ses nombreuses glandes, à ses fleurs d'un rose très vif, à ses sépales redressés sur le fruit, etc. C'est le R. mollissima des flores jurassiques : Grenier, FI. de la ch. jur., p. 231 ; Michalet, Hist. nat. Jura, Bol., p. 151 ; R. mollis — 28 — Gren,, Rèv. fl. Jura, p. 60; Gremli, FI. an. de la Suisse, p. 266; R. villosaj). p. Gandin, Fl. lielv., III, p. 341 ; Babey, Fl. ju7\, II, p. 60. D'après M. Crépin, ce serait également le Rosa resinosa Déségl. non Sternb, à fruits ordinairement arron- dis et hérissés de nombreux acicules glanduleux. La variation à fruits obovoïdes, piriformes, hérissés seulement à la base, est le R. omissa Déségl., qui se rencontre assez fréquemment dans les montagnes granitiques des environs d'Autun, et dont la forme hétéracanthe a été décrite sous le nom de R. Gilloiii Déségl. et Lucand, in Déséglise, Descript. de plusieurs Rosiers de la Fl. française (Lyon, 1881), p. 16, forme sans valeur à mon avis, car on trouve à la fois sur le même buisson des ra- meaux à aiguillons conformes et des rameaux à aiguillons dégénérants. Heracleum sphondylium L. = h. montanum Schl. — Race régionale que j'avais déjà observée dans le Jura méridional, à la Faucille, et dans le Bugej'', à la Chartreuse-d'Arvières (Ain), et qui semble ne pas franchir les limite^^ de la flore jurassique. Elle a généralement été confondue nxecY H . j)anaces L. ou avec YH. pyrenaicum Lam. (1). Mais d'après Nyman, Consp. fl. Europ., p. 289, le vrai H. panaces L. serait une espèce de Sibé- rie, à exclure de la flore européenne; et il suffit de lire la syno- nymie embrouillée des espèces, à plusieurs desquelles sont attri- buées les formes décrites par les auteurs différents sous le nom d.'^. panaces, pour sentir le besoin de sortir de cette confusion. Du reste, Michalet, loc. cit., avait déjà exprimé des doutes sur la détermination d'//. panaces du Jura, et constaté ses étroites affinités avec H. sphondy Hum L. Les nombreux spécimens que j'ai pu étudier au Creux-du-Van, où Grenier indique son H. pa- naces et Babey son H. asperum, m'ont en effet convaincu que cet Heracleum n'est qu'une forme très robucte d'/i. sphon- dylium., mais offrant cependant un port et un aspect qui peut le faire élever au rang de race régionale. Il diffère a H. sphon- dylium par sa taille bien plus grande, atteignant jusqu'à deux (1) Cf. G. et 0. Fl. Fr , I, p. 696. — Grenier. Fl. de lach. jur., p. 318. — Michalet. Hist. nat. Jura, Bot., p 176. — Cariot et Saint-Lager. Et. des fl., 8» éd., II, p. 345. J'ai vu dans le riche herbier de mon exc'^llont ami Ch. Ozanon un Hcraclrum récolté dans les Pj'réuées, portant le nom de H. setosum Lap , et qui a la plus grande ressemblance avec la l'orme jurassienne. — -20 — mètres, par ses feuilles très larg*es, les inférieures à 3-5 seg*- ments très rapprochés, souvent confluents, donnant parfois aux feuilles l'apparence 3-5 lobées, ses ombelles énormes, à pétales (les fleurs extérieures longuement bifides et rayonnantes, etc. Les fruits presque orbiculaires, à base arrondie, à bandelettes plus arquées, fourniraient de bons caractères disiinctifs d'après Godet, mvÀà je n'ai pas vu de fruits assez développés pour pou- voir les apprécier. C'est l'/f. montanum Schl. des auteurs suisses, Gaudin, FI. helv., II, p. 319; Reuter, Cai. pi. vase. Genève, p. 94 ; Gremli, FI. anal. Suisse, p. 258, et de Ch. Godet, FI du Jura, p. 293, qui l'indique au Creux-du-Van ; H. asperum (Koch), Babey, Fl.jur., p. 227. Malgré l'autorité de ces des- cripteurs, j'ai rencontré au Creux-du-Van de nombreuses formes intermédiaires entre cette plante et VH. sphondylium type, qui croît abondamment plus bas au bord de la forêt, et je ne puis y voir qu'une variété ou race remarquable, tnonlanum, de cette espèce ubiquiste et polymorphe. Quant au soupçon d'hybridité (Thurmann. Phytost,, II, p. 111 ; H. Christ, La fl. de Suisse et ses orig., p. 477), cette opinion me paraît d'autant moins fon- dée que r^. alpinum L., l'un des parents supposés, fait le plus souvent défaut, même au Creux-du-Van, où il a été indiqué (Gandin, Fl. helv., II, p. 320; Babey, Fl. jur., II, p. 229; Godet, Bull. Soc. bol. Fr., XVI, p. lxxxiv ; Thurmann, loc. cit.), mais où il n'a été retrouvé ni par M. Genty, ni par M. Andrese dans leurs nombreuses herborisations; cette localité, admise sur la foi de Gandin, est donc plus que douteuse. Valeriana officinalis L. = V. ANGusTiFOLiA Tausch. — Race régionale de V. officinalis, à tiges plus grêles, élancées, à segments étroits, peu ou pas dentés, les supérieurs linéaires très entiers, à inflorescence serrée, à fleurs plus petites, d'un rose plus prononcé, qui semble remplacer le type dans le Jura et le Bug'ey, où je l'ai maintes fois rencontrée à Hauteville, au Colombier, etc. Elle mérite tout autant d'être mentionnée dans les flores que V. sambucifolia Mik., des lieux humides de la plaine, également sig'nalée dans le Jura, à Longueville, au pied du Mont-d'Or (Ch. Grenier, m Bull. Soc. bot. Fr., XVI, p. lxi), à tiges robustes, à feuilles larges, à segments moins nombreux et profondément dentés, qui semble être l'autre terme d'une série de variations gravitant autour de V. officinalis, et qui se relient par de nombreux intermédiaires. — :50 — Senecio Jacquinianus Rclib. — Le S. Jacquinianus Rclib. FI. excurs, p. 245; G. G., FI. fr. II, p. 119, est une plante critique regardée par les uns comme une espèce distincte, par les autres, comme une variété de S. Fuchsii Gmel. C'est le S. nemorensis Jacq. Aust,, II, p. 50; Gaud,, Fl. helv., V, p. 299; 8. serraii/b- lius var. Jacquinianus Cariot et Saint-Lager, Et. des fi., II, p. 471. On discute encore pour savoir à quelle espèce Linnéenne il doit être rattaché, mais il n'est pas douteux, d'après les judicieuses remarques deKoch,5yn., éd. 3, p. 336, qu'il rentre dans S. nemorensis L., Spec. pi., éd. 2, p. 1221, et non dans S. saracenicush. comme l'avaient dit Grenier et Godron, Fl.de fr., I, p. 118. Du reste, Oh. Grenier, Fl. de la ch. jur., p. 111, est revenu sur cette opinion, mais il comprend uniquement sous le nom de S. nemorensis L. le ses modifications. Cette opinion semble devoir se ))ropager de plus en plus ; elle est partagée, notamment, par M. Geuty, qui a publié le C. obscura Jord. récolté à Boujeailles (Doubs), par conséquent dans le district jurassien, dans le FI. sel ex-.icc. de Ch Ma- gnier, 189U, n» 2232, avec note in Scrinia fi. sel., IX (1890), p. il'3. autour (lu village hsxnçais les Fours, à une lieue Je la Côte-aux- Fées et de Pontarlier (1). « Depuis le Mont- de-Butte, on descendant vers les Bayards, au-dessus de Saint Sulpice, on trouve encore le Corallorhiza innata R.Br., au pied des Sapins, Lathyrus heterophyllus L., Hypochœris maculata L., et sur les amas de pierres un grand nombre de rosiers : Rosa alpina L., ruhrifolia Vill., rubigi- nosa L., etc. Dans la vallée de Saint-Sulpice croît encore en grande quantité, au-dessus d'un grand pont du chemin de fer, près de la Prise-Mylord (on donne le nom de prises à des mai- sons isolées), le Centranthus angustifolius DC. En sortant de la vallée de Saint-Sulpice et en se rapprochant de Fleurier, on trouve au-dessous du Pont-de-la-Roche, au pied du Chapeau- de-Napoléon, C^rinihe alpina Kit., qui tend à disparaître parce qu'on le fauche avec les foins, et Bunias orientalis L., espèce adventice, probablement introduite avec le chemin de fer, et qui se propage dans toute la vallée depuis une vingtaine d'années, « On peut encore récolter autour de Fleurier, entre autres plantes notables : Aconitum napellum L. Arnica moutana L. — lycoctonum L. Swertia perenuis L., au marais de la Arabis alpina L. Ronde Noire. Alchimilla alpina L. Streptopus amplexifolius DC, à la Circaea alpina L. Vaux. Astrantia major L. Scilla bifolia L. Bellidiastrum Michelii Gass. et les quatre espèces de muguets: Convallaria maialis L., Polygonatujnvulgare Desf., muUiflor'um Desf., et verticil- lalum AIL; la plupart de ces espèces sont descendues de la montagne dans la vallée. » V. Andreae, in litt. Arrivés au Haut -de la-Tour (940 mètres), nous traversons la voie ferrée en prenant la route des Bayards. Sur le talus de la route, notre attention est appelée par une colonie de Carduus nutans L. ; au milieu d'elle s'élève un Chardon d'un port tout (1) La plante signalée par M. Andreœ est bien en effet VB. monticola Jord., d'aspect très particulier, mais qui n'est qu'une forme alpestre d'H. umbellatum L., revenant de suite au type par la culture en plaine. Les observations faites sur la plante du Jura sont corroborées par celles faites sur la plante des Alpes par Arvet-Touvet (Genty m litt.). — 4G — particulier et très différent des autres, à pédoncules très allon- gés et à capitules plus petits, qui nous rappellent au premier coup d'œil le C. defloratus L. Il s'agit eu effet et bien évidem- ment, d'un hybride entre ces deux chardons, Carduus deflorato- nutans, dans lequel C. nutans est le porte-graines, puisque le pied que nous avons récolté fait partie d'un même semis de cette espèce, tandis que C. defloratus, qui a fourni le pollen, se trouve communément sur la lisière des bois voisins, mais à une assez grande distance. Je n'ai trouvé nulle part l'indication de cet hybride, bien qu'on ait catalogué de nombreux croisements entre les espèces du genre Carduus, et que Michalel lui-même après avoir décrit tout au long plusieurs hybrides des C. nutans, personatus et crispus, semble avoir vu des hybrides entre ces espèces et C. defloratus, puisqu'il dit: « J'ai trouvé, dans le « Jura, tous les intermédiaires entre les C. defloratus et C. nu- « tans, en passant par les C. personata et C. crispus. » E. ^l\- oXvàXeX, Notice sur q. q.])lantes du Jura, in Hist. nat. du Jura, Botanique, p. 341. Gaudin, FI. helv. V, p. 169, décrit bien un C. aœillaris, voisin de C. defloratus, trouvé aux environs de Baie, mais d'après la description, ce Carduus, qui n'est pas sans rapport avec celui des Bayards, me paraît plutôt être un hybride de C. defloratus et de C. Crispus. Voici la description du Chardon trouvé auprès du village des Bayards : CARDUUS GENTYANUSN.(1)= Carduus DEFLORATo-NUTANS. — C. caulibus erectis, 0'"60, striatis, ramosis ; ramis sinuato- alatis, superne denudatis, uni-paucifloris; foliis latioribus, pal- lide virentibus, subtus glaucescentibus glabratisque, inciso- pinnatifidis, lobulis dentatis trifidisque, obtusis, spinulosis ; superioribus longe alato-decurrentibus, spinuloso-lobulatis ; capitulis longe pedunculatis, erectis, post anthesin cernuis deciduisque, mediocribus, 0"'03, subglobulosis ; involucri (l) D'après l'usage généralement adopté aujourd'hui, j'ai donné à cet hybride une épithète spécifique. Cette manière de faire a un double avan- tage : celui de ne pas préjuger de l'action réciproque des parents, souvent inconnue ; en seconp us com- pressus Fers., et une douzaine de Carex dont les suivants nous ont échappé : C. Davalliana Sm., Hornschuchiana Hoppe, filiformis L. (1) Léo Lesquereux, dans son travail sur les tourbières, in Mémoires de la Soc. des sciences de Neufchâtel, III (1845), a dressé la liste de toutes les - 63 — Amplement satisfaits des résultats do notre journée, il nous faut songer au retour. Aussi bien les tourbières s'étendent en- core au loin devant nous, et plusieurs journées ne suffiraient pas à les explorer complètement. Nous renonçons donc à visiter les tourbières des Var^odes, où nous aurions pu mettre la main sur Polemonium cœruleum L,, et Sagina nodosa Fenzl. qui se trouvent aussi à la Chatagne, mais toujours en petite quantité d'après MM. Genty et Andreœ (1), et notre voiture nous ramène à Fleurier par la route des Sagnettes. Tout le long de la route mes compagnons de voyage, pour lesquels la flore de cette région n'a plus guère de secrets, sup- pléent par leurs renseignements à l'impossibilité de cueillir, en une seule herborisation, toutes les plantes rares du pays, souvent disjointes à de grandes distances de leur centre de vé- g-étation, et dans des localités fort éloignées les unes des autres. Au-dessus et au sud des Varodes, M. Andreœ nous montre un coteau boisé sur lequel Cerinthe alpina Kit. croît le long des murs; à Brasel, vis-à-vis de Bémont, se trouvent Hypericum Richeri Vill., Genista prostrata Lam. [G. Halleri Reyn.), Sedum fabaria Koch (2), Ve^^'onica dentata Schmidt, Daphne cneorum L., etc.; vers le nord, le petit village de Cuchet, au delà duquel, au Châteleu, près de la frontière, mais sur le ter- ritoire français, M. Genty a découvert en 1885 une station à! Heracleum alpinum L. {H.juranum Genty) (3). Mousses observées dans les tourbières du Jura. Cette énumération compre- nant cinquante espèces, dont six Sphagnum, et en plus neuf Lichens, a été reproduite par Gh, Martins in Observ. sur l'orig. glac. des tourbières du, Jura, extrait àÇi%Mém.del'Acad. des se. et lettres de Montpellier, VIlI, p. 26. (1) UAlsine s, etc., des espèces voisines avec lesquelles elle avait été confondue sous le nom de Veronica maxima, Chamœdrys spuria major latifolia, Teucrium majus, etc., et qui répondent aux espèces linnéennes, V. teucrium et V. chamœdrijs L. Digitalis parvo flore p. 48 et 112 == Digitaus parviflora Lam. Euphrasia folio tenuissime dissecto, p. 33 = Euphrasia SALiSBURGENSis Hoppe. C'est VE.alpina Gaud., F/. helv.,lY, p. 111, py^oparte, dont la forme que j'ai récoltée à Noiraigues, répond par son feuillage d'un vert métallique à E. cuprœaJorà. Melampyrum floribus parvis luteis, p. 40 = Melampyrdm SILVATICUM L. Melissophyliura albo et carneo flore, p. 40 = Melittis MELISSOPHYLLA L. Polygonatum angustifolium non ramosum, p. 40 = Poly- GONATUM VERTICILLATUM Ail. Polygonatum aliud flore majore odoro, p. 40 = Polygona- tum vuLGARE Desf. — 73 — Limodorura austriacum, p. 33 = Limodorum abortivdm Sw., belle Orchidée, généralement rare, décrite par Bauhin, Pinax, p. 86, sous le nom de Orchis abortwa violacea, que Haller semble avoir le premier signalée dans le Jura « nova civis, quœ specioso spectaculo, mire mihi placuit » § xxiv, p. 33-34, et distinguée sous le nom de Limodorum des autres Orchis et notamment de Nidus avis = Neottiâ nidus avis Rich. Celui-ci se trouve abondamment dans les mêmes forêts, et était connu des anciens sous le nom à.'Orchis aborHiva fusca. Bauli., Pin., p. 86. Orchis purpurea spica congesta pyramidalis, p. 45 = Ana- CAMPTIS PYRAMIDALIS Rich. Orchis rotundus Dalechampii ; 0. spica brevi densa petalis caudatis, p. 45== Orchis globosus L. Tout le paragraphe xxxi, p. 45-46, est rempli par la description de cette espèce spéciale- ment jurassienne « frequens inJurœpratis », p. 45. Lonchitis aspera, p. 40 = Aspidium lonchitis Sw. Polypodium angustifolium folio vario, p. 40 = Blechnum SPICANT Sw. Haller a emprunté à Tournefort cette phrase diagnostique et il ajoute : « omnino alto génère, et proprio, dignum, cum inter nostras fi lices solimi seminalia folia propria et diversa gerat a sterilibus; » et en note : Ruppius spicant dixit. », p. 40. Eu disant cela, Haller a oublié que l'hétérophyllie existe aussi dans une autre Fougère des Alpes helvétiques et fran- çaises, appelée par Tournefort Filicula montana folio vario, actuellement nommée Allosorus crispus Bernh. 2° Dans les èhoulis, et sur les rochers du Creux-du-Van et du Pertuis-de-Bise. Ranunculus albo flore miniraus, p. 55 et 62 = Ranunculus ALPESTRis L., commun, en effet au Creux-du-Van « in illis lapidosis plurimusprovenit », p. 55, jusque sur la crête des rochers « ad rupium supercilia », p. 62. Leucojum vernum perenne album majus et album minus, p. 48 = Arabis alpina L. Haller le fait remarquer avec raison, ce sont des formes plus ou moins développées, suivant la sta- tion, de cette espèce commune dans toute la Suisse « in iisdem umbrosis et udis similibus que locis per omnia montana Helve- tiœ, miUtum provenit », p. 48. Cardamine hirsutior, p. 48 = Cardamine silvatica Link, — 74 — que nous avons rencontré autour de la Fontaine-Froide, suivant l'indication de Haller « loco subliumido et umbroso ». Le C. sUvaticaLink n'est qu'une race stationnelle de C. hirsuta L., et c'est elle, à mon avis, qui devrait être regardée comme le type de l'espèce, car elle est toujours plus velue que les autres formes. Hesperidis genus, suavissimi odoris p. 68 = Erysimum OCHROLEUCUM L. Haller signale les variations de cette espèce qui se présente dans le Jura avec deux formes: l'une au mont Chasserai, à feuilles étroites, entières ou dentelées : « angus- tissima folia 7nediocria, aliquando vagis dentibus serratis ex Chasserai » ; l'autre, au Creux-du-Van, à feuilles plus larges et plus fortement dentées : « laie profundeque dentata ex monte Falconario *, p. 69, Gaudin, FI. helv., IV, p. 366, cite les mêmes localités que Haller. Lunaria siliqua longiori, p. 48 = Lunaria rediviva L.; dans les bois humides en montant à l'est du Creux-du-Van, aux pâ- turages de Grandvi, d'après Haller. Quinquefolia albi alla species caulifera et tertia a nobis lecta in Creux-du-Veut, p. 71 = Potentilla caulescens L. Haller se livre à une longue discussion, qui n'occupe pas moins de huit pages, p. 70-78, et les § xlvi-lii de Vlter helveticum, sur la diagnose de trois Quintefeuilles ou Poten- tilles, confondues jusqu'à lui sous le titre de Qainquefolium album ou Pentaphyllus albus. La première, § xlvi, p. 70, est évidemment le Potentilla alba L. La troisième, § xlviii, p. 71, est également, et d'une façon certaine, le P. caulescens, L. Sp. pL, p. 713; Gaud., FI. helv., III, p. 373, qui n'est pas rare au Creux-du-Van. La seconde, § xlvii, p. 71, plus dou- teuse et que Haller, § lu, p. 78, tend à réunir à la troisième, comme deux variétés d'une même espèce, ne me paraît guère en effet qu'une forme robuste, à feuilles moins velues, h fleurs plus grandes et à pétales entiers de P. caulescens. Serait-ce P. petiolulata, Gaud. FI. helv., III, p. 374? Haller ne parlant ni des pétioles allongés des folioles, ni des glandes de la tige, il est difficile de se prononcer. Mais cette supposition serait d'autant plus probable que Haller donne à sa plante pour lieu d'origine le mont Salève, qui est une des localités principales attribuées par Gaudin à son P. petiolulata. Godet, FI. du Jura, p. 202, l'a d'abord citée comme simple variété de P. eau- — 75 — lescens L., et ne l'a plus tard admise comme espèce qu'avec hésitation, SuppL fl. du Jura, p. 61. Il en est de même de Ch. Grenier, Revue de la fl. jura, p. 57. Ce n'est donc vrai- semblablement qu'une race locale du P. caulescens L., dont l'épithète spécifique, caulescens, se trouve même appliquée a cette espèce par Haller, p. 75, bien avant Linné Alchemillre g-enus folio quinquefolii subtusargenteo, p. 55 = Alchemilla. alpina L. Saxifrag-a sedi foliis serratis, p. 55 = Saxifraga aizoon, Jacq. Valerianoides ang-ustifolia Vaillantii, p. 33 et 68 = Centran- THUS ANGUSTIFOLIUS DC. Carduus mollis foliis imis laciniatis, superioribus integris, squamis calicis reflexis, p. 49 = Carduus personatus Jacq., Gandin, Fl. helo., V, p. 175, donne, à propos de cette espèce, une citation de Haller, lier, helv., p. 33, qui est erronée. La description de ce Chardon fort bien faite par Haller, et suivie d'une riche synonymie, occupe tout le § xxxv de Y lier helve- ticum et les pages 49-50, et nullement la page 35. Campanula alpina rotundifolia minima, p. 57 = Campanula pusiLLA, Haenke. Androsace alpina perennis angustifolia glabra, p. 56 = An- DRosACE LACTEA L., avec description, § xxxix. Cynoglossum minus folio virente, p. 51 = Cynoglossum MONTANUM L., bien indiqué à la station précise où il se trouve encore aujourd'hui, au pied des rochers : « Prius qua?n peni- tus ex Sylva ad scopulos perveniatur », p. 51. Pinguicula, p. 57 = Pinguicula vulgaris L., retrouvé par nous en assez grande quantité au Creux-du-Van, où sa présence, signalée comme on le voit par Haller, avait échappé à des explorateurs plus récents. Tozzia, p. 68 = Tozzia alpina L. Bistorta alpina minima ; B. foliis variis ad oram nervosis, semine gigartiuo, p. 51 et 55 = Polygonum viviparum L., avec description et riche synonymie, § xxxvii, p. 51-55 ; se trouve dans le Creux-du-Van même, et surtout dans les pâtu- rages supérieurs ; comme dans tout le Jura : « quœ ubique et in editioribus Jurœ et in asperis A Ipinum pascuis provenit . » . p. 55. Filicula saxatilis caule tenui fragili, p. 55 = Cystopteris fragilis Bernh. — 76 — 3" Dans les pâturages de Grandvi ou Grand- Vy, au-dessus du Creux-du-Van. Pulsatilla alba, p. 57 et 62 = Anémone alpina L. Anemonoides montana hirsuta polyanthos, p. 62 = Anémone NARCISSIFLORA L. Thlaspi folio g-lobularias, p. 62 = Thlaspi montanum L. Dryas Linnsei, p. 15 et 62 = Dryas octopetala L. Décrit, d'après les premiers ouvrages de Linné : FI. lapp., 215, Char, gen., p. 419, Hort. Cliffort, p. 195. Haller rappelle, p. 16, que le nom de Dryas a été donné à cette plante par Linné, à cause de la ressemblance de ses feuilles, par leur forme, avec celles du chêne (en grec : dry s, chêne). Bupleuri species olim cognita Gesnero et inter Camerarianas picta, p. 68 = BuPLEURUM longifolium L., surtout aux alen- tours du « Pertuis de la bise ». Daucus creticus rariori folio et pêne glabro, p. 57 = Meum athamanticum Jacq. Daucus brevi et hirsuto folio et latiori, p. 57= Athamanta cretensis L. Tout le paragraphe xl, p. 57-62, est occupé par une longue dissertation sur les caractères des deux ombellifères précédentes, confondues parmi les nombreuses espèces de Daucus, et que Haller a très bien distinguées, surtout par la forme différente du feuillage. La première, à feuilles vertes, menues « foliis capil- larihus », comme celles du Fenouil « laxissimo fœniculi habiiu» répond, d'après Haller lui-même, kV Athamanta yneum de Linné, Hort. Cliff., p. 93 {Meum athamanticum Jacq.), très rare en Suisse, même d'après Gaudin, FI. helv., II, p. 398, et que Haller n'avait jamais observé que dans les hautes prairies du Creux-du-Van : « in planitie montis Falconarii quœ summa est », p. 57, et « in pascuis Grandvi quœ sola in Hel- vetia Meum mihi dederunt », p. 68. Tandis que l'autre espèce, Daucus creticus brevi et hirsuto folio, semine hirsuto, etc., ou Athamanta cretensis L. , se retrouve fréquemment sur les rochers ou les pâturages secs des montagnes « frequentior est », p. 57, et diffère beaucoup de l'espèce précédente par son port, ses feuilles, ses pétales » petalis tamen diversa, quœ Meo intégra sunt, Dauco crktico cordata », p. 61, etc. La descrip- tion n'en laisse rien à désirer, non plus que les citations de tous les auteurs connus de Haller. — 77 — Dauci species; Daucus montanus Pimpinellaesaxifragse folio, p. 63 et 111 =-- LiBANOTis MONTANA A\\. Haller le décrit égale- ment avec détails, et en signale différentes localités, § xlii, p. 63-66. Hieracium montanum latifoliuni villosum maguo flore, p. 62 = Hieracium villosum L., se retrouve actuellement à la même localité, sur la crête supérieure des rochers du Creux-du-Van. Gentiana alpina flore mag-no, p. 62 = Gentiana acaulis L. Gentiana pumila verna major, p. 62 = Gentiana verna L. Globularia montana humillima repens, p. 62 = Globularia coRDiFOLiA L., avec description très exacte, § xli. Crocus alpinus, p. 66 = Crocus vernus L., que Haller récol- tait pour la première fois, bien qu'il ne soit pas rare dans la chaîne du Jura « licet in Jura frequens sit », mais parce qu'il apparaît de très bonne heure, à mesure que la fonte des neiges s'opère « neque enim nisi in spongiosa flavescente terra nas- ciiur, aqua modo ante paucissimos dies nix defluxit, et bre- vissimi œvi est », p. 67. Les habitants l'appellent vulgairement Levrette « antiquum nomen Levrette, apud incolas con- servet », p. 66, et il varie à fleurs violettes et blanches, § xliii, p. 66-67. Orchis palmata angustifolia alpina nigro flore, p. 47 = Nigritella angustifolia Rich. Le paragraphe xxxii est entiè- rement consacré à la description de cette jolie Orchidée com- mune dans les prairies du Jura: « in pratis Grandvi uberrime provenit » et que les indigènes désignent sous le nom vulgaire de Jalousie : « Accolœ vocant Jalousie », p. 47. Graminum species typhoïdes spica densa brevi et villosa, p. 68 = Phleum alpinum L. Graminum species glumis variis, p. 68 = Sesleria c^rulea Ard. Graminum species panicula speciosa variegata, p, 68 = Poa alpina L. Osmunda lunato folio, p. 67 = Botrychium lunarium Sw. Selaginoides crispum, p. 67 = Selaginella spinulosa R. Br. Ces listes sont loin d'être complètes si on les compare à celles que j'ai dressées d'après les plus récentes herborisations ; mais il est probable que Haller n'a pas voulu répéter les noms d'un certain nombre de plantes déjà observées par lui aux envi- rons de Berne, dans la Suisse occidentale, au voisinage des — 78 — monts Jura ou dans les environs de Bâle, et que nous trouvons énumérées dans les premières pages ou à la fin de son Itiné- raire, telles que : Aconitum lycoctonum luteum, p. 112= Aconitum lycoc- TONUM L. Géranium batracliioides montanum folio aconiti, p. 29 = Géranium silvaticum L. Dianthus saxatilis; D. sylvestrisflore magno inodoro hirsuto, p. 111 = Dianthus silvestris Wulf, (D. saxicola Jord.). Barba caprae foliis oblongis, p. 20 = Spir^ea aruncus L. Mahaleb, odorato ligno frutex, ttc, p. 21 et 33 = Prunus MAHALEB L., commuu sur tous les coteaux : « ubique supra vineas, per universum Jurœ tractum, plurimus nascitur », p. 21. Mespilusfolio rotundiori fructu nigro, etc., p. 111 = Amelan- CHIER VULGARIS Moeuch. Bellis média, p. 4 = Bellidiastrum Michelii Cass., commun en Suisse : « frequens in Helveiia, eliam planiori, locis umhrosis et in sylvarum humidis recessibus, » avec une des- cription qui occupe tout le paragraphe v, p. 4-7, et où se trouve rappelée entre autres l'étymologie du genre Bellidiastrum, d'après Micheli, Nov. plant, gen., Florence, 1729, p. 32, pi. 29 : « Michelius denique, vero charactere Bellidis medi^ cognito, novum genus ipsi creavit Bellidiastri, felici connubio certe nominis ex Astere, cujus characterem liabet, et Bellide cujus facietn refert, cujusque nomen gesserat antiquitus », p. 5. Vitis idaea sempervireus fructu rubro, p. 16 = Vaccinium VITIS ID^A L. Myrtillus grandis, foliis crenatis, p. 16 = Vaccinium myr- TILLUS L. Pyrolae vulgatior species, pistillis rectis et mucronato serra- toque folio, p. 20 = PlROLA MINOR L. Pyrola tubo incurvo, p. 29 = Pirola rotundifolia L. Rapunculus folio oblongo spica orbiculari, p. 30 = Phyteuma orbiculare L. Gentiana major lutea, p, 31 =: Gentiana lutea L., commune partout : « multa, ut in omnibus Jurœ et alpinum humilio^ ribus pascuis. » Digitalis lutea magno flore, p. 112 = Digitalis grandifloka Lam. — 79 — Lilium montanum floribus reflexis, p. 28 = Lilium marta- QON L. Helleborine angustifolia piirpurascen?, p. 19 = Cephalan- THERA RUBRA Ricli., etc, etc. Je citerai encore: Astragalus qui Cicer dicitur, p. 78 = AsTRAGALUS CICER L., indiqué au pied du mont Falconaire, près de Saint-Aubin, et que j'ai retrouvé à Noiraigues, où il est rare. On remarquera que Haller ne fait pas mention de Linaria ALPiNA Mill. {L. jJetrœa Jord.), bien connue cependant à son époque sous le nom de Linaria cœrulea repens Bauh., Antir- rhinum alpinum L., et qui aurait dû le frapper par sa rareté et l'élégance de ses fleurs, en plein épanouissement au mois de juillet dans les rocailles du Creux-du-Van. Ne serait-ce point que cette espèce, très disséminée dans la chaîne jurassique, aurait été introduite ou semée dans cette localité ? En effet, d'après Thurmann, Essai de phyiost., I, p. 154, elle aurait été naturalisée par Junod sur des points connus du Jura neuchâ- telois. L'analyse que je viens de faire d'une partie de l'opuscule de Haller, démontre son importance comme source à consulter, relativement à la flore helvético-jurassique. Il en est de même de beaucoup d'ouvrages anciens, des Patres de la botanique pré-linnéenne, trop négligés de nos jours, et que l'on peut cependant toujours étudier avec fruit. Notes complémentaires. — Thalictrum saxatile DC. (T. calcareum Jord.) et sa végétation souterraine. — Dans la détermination des Pigamons du Val-de-Travers, on a pu voir que j'ai attaché une grande importance au développement de leur système souterrain. Or, d'après M. Gaston Bounier, Ohserv. sur les Renonculacées de la fl. de France (Revue g en. de bot., I. p. 330 et seq.), dans son étude sur le genre Thalictrum, « on trouve chez une même plante tous les intermédiaires entre les rhizomes courts, renflés et les stolons grêles. Aussi, ce carac- tère qu'on donne souvent comme distinctif entre les espèces principales de ce genre n'est-il pas meilleur que les autres ». — 80 — loc. cit., p. 339. D'où M. Bonnier a grande tendance à réunir sous le nom de T. minus L, « toutes les espèces qui s'en rappro- chent ou qui se confondent avec lui (T. Grenieri Loret, T. saxatile DC. non GG., T. majus Murr.). » loc. cit., p. 392. La proposition de M. Bonnier me semble trop absolue et je persiste à croire qu'il y a lieu de tenir grand compte de l'apparence du rhizome pour le classement des espèces de la section Euthalic- trum, ce que la plupart des phytographes n'ont pas suffisam- ment indiqué, et ce qui rend si difficile la reconnaissance de leurs espèces. Bien qu'en réalité les rhizomes des Pigamons aient tous la même valeur morphologique, ils me paraissent, suivant les espèces, constants dans leur développement. Les rhizomes courts, eu forme de souche fibreuse, peuvent bien émettre parfois des bourgeons allongés, mais ces faux stolons ont toujours des entrenoeuds courts, ne dépassant pas quelques centimètres de longueur et ne prennent jamais l'aspect lon- guement drageonnant des stolons de certaines espèces, notam- ment de celle que je regarde comme le vrai T. yninus, qui attei- gnent plusieurs décimètres. Ces différences non seulement se maintiennent, mais s'exagèrent par la culture, comme j'ai pu le constater avec les Thalictrum de Bourgogne ; l'aspect pré- senté par les touffes de ces plantes cultivées côte à côte, dans le même jardin, devient tout à fait dissemblable et caractéristique. Dans les éboulis de Noiraigues où abonde le Thalictrum que j'ai signalé, j'en ai examiné un grand nombre de pieds, et si quelques-uns d'entre eux, ensevelis sous les graviers, ont été obligés d'allong-er leurs mérithalles pour atteindre la lumière, aucun d'eux ne m'a présenté, dans des conditions pourtant si favorables, de véritables stolons rampants ou drageons ; c'est ce qui me l'a fait séparer du type franchement stolonifère, T. minus L. et Auct. plur. et rapporter à T. saxatile DC. (T. calcareum Jord.) à rhizome raccourci, en outre des caractères fournis par les autres organes et malheureusement peu fixes. Aquilegia atrata Koch. M. G. Rouy, dans ses Suites à la flore de France de Grenier et Godro7i, p. 23, a décrit cette Ancolie comme une espèce légitime ; il lui donne comme syno- nyme A. nigricans Rchb. FI. excurs., p. 718, et dit qu'elle ne doit pas être confondue avec A. nigricans Baumg., simple forme d'A. vulgaris. M. Rouy m'ayant fait l'honneur de me citer à propos de l'A. atrata du Haut Jura (la Faucille, Crêt- — 81 — de-la Neig'e, près Tliuiry), je crois devoir répéter que, malgré l'autorité de mon savant ami, mes observations personnelles sur différents points du Jura m'ont permis de constater tous les passag'esde l'un à l'autre, soit comme dimensions des fleurs, soit comme coloration, soit comme longueur des étamines et ne me permettent de voir dans A. atrata qu'une race régionale d'A. vulgavis L. Faut-il alors admettre l'hybridation? Les hybrides entre espèces autonomes sont bien plus rares dans la nature que certains botanistes semblent disposés à l'admettre; d'autre part, ces formes bien développées, parfaitement fertiles, ne pré- sentent pas les caractères habituels des hybrides. Tout au plus pourrait-on invoquer le métissage, ce qui reviendrait égale- ment à rattacher les parents, comme races, à une môme espèce. La forme à grandes fleurs, qui ne diffère g-uère d'A, milga- ris que par sa couleur, est probablement l'A. nigt^icansBaamg. signalé par M. Rony ; la forme à petites fleurs, à étamines saillantes, est le véritable A. atrata Koch., dont les caractères s'accentuent de plus en plus avec l'altitude et les conditions stationnelles. On peut donc l'inscrire dans les flores à titre de sous-espèce ou de race, mais en la subordonnant à A. vulga- ris L. Iberis decipien's Jord. IJIberis de Noiraigues m'a paru, après examen, comme à M. Genty, identique à Iberis decipiens Jord. Diagn. esp. nouv., p. 289, Grenier. Revue fl. Jwa^ p, 42, de Nantua (Ain) ; mais j'ai eu quelques doutes en relisant depuis dans les Reliquiœ Pourrelianœ publiés et annotés par le regretté E. Timbal-Lagrave, la phrase suivante à la note I relative à 1'/. resedifolia Pourret : « Cette plante s'éloigne aussi de 1'/. ceratophylla Reuter, que nous avons récoltée en compa- gnie de l'auteur et de notre ami Grenier aux Rochers de Noi- raigues (Jura), en allant au Creux-da-Vent ; celle-ci s'en sépare en effet par la forme différente des feuilles, ftc. » Reliq. Pourret. p. 73. Il semblerait, d'après ce témoignag-e de Timbal- Lagrave, que Y Iberis de Noiraigues aurait été récolté par Reuter et identifié par lui à son /. ceratophylla Reut. Cat. pi. vase. Genève (1861), p. 21 ; mais, outre que cette détermination a dij être faite un peu à la légère au cours d'une herborisation, la description de l'espèce de Reuter ne cadre pas complètement avec V Iberis de Noiraigues. L'/. ceratophylla fait partie d'un — 82 — groupe iutermédiuire entre /. amara L. (ît /. pinnala Gou. que les phytographes les plus récents, Gremli, FI. anal, de la Suisse, p. 114, Nyman, Consp. (l. europ.. p. 61, rattachent à /, pandariformis Pourret, Chlor. narb., n" 625, Reliq. Pourrel, p, 130, pris pour type parce qu'il est le plus ancien en date (1) et auquel ils rapportent /. affims Jord., Diagn. p. 290. Or, j'ai vu des échantillons authentiques de ce dernier, signés de la nnain de Jordan, il est bien différent d'/. decipiens et bien plus voisin que ce dernier d'/. pinnata Gou. De plus, M. Grenier qui, d'après Timbal-Lagrave, aurait dû récolter VI. ceratophylla avec Reuter, à Noiraigues, n'en fait pas mention dans sa Revue de la flore des monts Jura, p. 42, non plus que Godet, FI. dit Jura, Suppl., p. 18, qui du reste n'a fait que reproduire une note de Grenier. Ulberis decipiens Jord. me paraît donc de plus en plus constituer une espèce, ou tout au moins une sous-espèce jurassi(}ue, intermédiaire comme 7. panduriforniis Pourret (7. ceratophylla Reut., 7. af finis Jord.), entre 7. amara. L. et 7. pinnata Gou., mais plus rapprochée à' amara. Telle paraît être l'opinion de Grenier, loc. cit., p. 42, qui admet 7. decipiens Jord. comme espèce, en citant seulement la localité de Nantua, et de Nyman, Consp. fl. eur., p. 61, qui l'inscrit à part, quoiqu'en sous ordre, à la suite d'7. amara L. et de ses formes. A propos de la végétation d'7. decipiens, il me paraît opportun de rappeler l'observation suivante de Grenier que M. Genty paraît avoir oubliée dans l'étude qu'il a consacrée à VI. deci- piens (2) : « L'7. panduriformis est certainement à la fois annuelle et bis-annuelle, comme le 7. pinnata et decipiens. Au début du printemps j'ai souvent pratiqué des semis, j'ai obtenu et presque toujours du même semis les deux formes. En septembre, le bourgeon central de chaque rosette s'allonge et produit une tige simple, dressée, munie de feuilles espacées, tandis que la rosette radicale se détruit ; cette tige ne se ramifie qu'au sommet pour former le corymbe (forme annuelle). Les autres rosettes, après l'hiver, donnent au (1) Cf. B. Martin. Notice sur les Iberis de la flore du Gard in Bull. Soc. bot. Fr., XXXVI (1889). p. 34. (2) P. -A. Genty. Note sur un Iberis méconnu de la flore helvétique in Bull. Sor. bot. France, xxxvii (1890), p. 236 et seq. — 83 — printemps une plante qui ressemble si pea à la forme annuelle, que l'œil qui a suivi leur évolution a peine à croire à leur identité et est tenté d'admettre un mélang-e de graines. Le bourgeon central de la rosette s'allonge peu ou même s'atro- phie; dans l'un et l'autre cas, dans le dernier surtout, on voit sortir de l'aisselle des feuilles de la rosette radicale, des rameaux qui s'étalent en cercle sur la terre, atteignent 1-2 déc, puis se redressent pour produire un corymbe. » Grenier, Revue fl. Jura, p. 43. D'après les remarques que j'ai pu faire sur place, les choses se passent exactement de même dans l'évolution bis- annuelle de 1'/. decipïens Jord. Senecio Jacquinianus Rchb. Dans un travail consciencieux, commetoutcequi sort de sa plume, M. F. Crépin, La flore belge étudiée par /fragments, II, p. 59, a consacré au S. Jacquinianus Rchb. quelques pages dans lesquelles il raconte qu'après l'avoir d'abord regardé comme une variété de S. saracenicus {S. Fuchsii Gmel.), il est arrivé plus tard à le considérer comme espèce distincte. Il décrit minutieusement ses caractères mor- phologiques, insertion, forme et dentelures des feuilles, forme de l'involucre, etc., et insiste surtout sur les mœurs de ce Séneçon qui conserve ses différences par la culture et fleurit une quinzaine de jours avant S. Fuchsii. Ce critérium ne me paraît pas déterminant : on sait aujourd'hui que de simples variations végétales se reproduisent parfaitement, même de semis, et je possède en jardin des plantes appartenant manifes- tement à la même espèce, mais recueillies dans des conditions différentes d'altitude ou de climat, qui continuent à présente»*, malgré une culture identique, des différences notables dans la date de leur floraison. Du reste M. Crépin, loc. cit., p. 61, avoue qu'il existe entre iS. Fuchsii et S. Jacquinianus « certaines for- mes très litigieuses paraissant être ou des variétés fort notables deS. saracenicus {S. Fuchsii Gmel.), ou des produits hybrides ». Nul besoin d'invoquer une hybridation hypothétique ; ce sont plutôt de simples formes de transition entre le type S. Fuchsii Gmel. et sa race ou sous-espèce, S. Jacquinianus Rchb., qui s'avance ainsi vers le Nord, en Belgique, où il paraît rare. }h. -^r Boianical Garden Library QK315.G52 gen Gillot François Xa/Herborisati^^ dans 3 5185 00108 3235