LS 252 SE SE = 3: TS A Se rs 2 Dre 3 | hi ï | ji 1 4! ! Los i} Î 4 ! ! mi | “ii HIHI fl HH #h cu à fit Lu AR (NH 4; ft où 4 £ He LSYEAOT TRE L'ACADEMIE © ROYALE DES SCIENCES- ANNEE M. DCC. Avec les Mémoires de Mathématiques &c de Phyfique ; pour la même Année. Tirés des Regiffres de cette Académie. Seconde Edition, revüé , corrigée & augmentée A RARES, Chez GABRIEL MARTIN, JEAN-BAPTISTE CO1GNARD, | FRA TE OuT s SFR Jacques. M. DCC. LXI + Hé + Ar AR , \ upe said Re à 4 LL jee dl 4: R8 es k = À FEVANANAN AN IN TAUAN ANTENNES TE ue N PNIEN IN INESINIEN UNIS NI NT LT'A BEE POUR LHIST O;HIR EE PHYSIQUE GENERALE. Bervations fur le Barométre , le Thermomètre, les Pluyes pen- dant l’année 1699. Page 1 Sur quelques fingularités de la France. 3 Sur le Phofphore du Barométre. $ Diverfes obfervations de Phyfique générale. 8 ANATOMIE. Sur une Hydropifie laïteufe. 11 De la ftruiture de la Moëlle. 14 Sur une Hernie particuliére. ; LES Sur la formation de la Voix. 17 Sur ce que devient l'air qui eftentré dans les Ponlmons. 2$ Des Vaiffeaux Omphalomefenteriques. 27 Sur l'action du Veniricule dans le vomiffemenr. là même Sur les parties deflinces à la génération. 29 CHIMIE. > Analife de l'Ipécacuanha. 46 Sur la force des Alkali terreux. 48 fanreatr des analifès de la Soye, du Sel Ammoniat ,©" dé la Gre de Sur les Feux fouterreins, les. Tremblemens de Terre , &'c. ip chimiquement. Sur les diffolutions & les Formentations froides, mn Sur l'Eau de Chaux. 4 Des Diffolvans &* des Diffolutions du Mercure. ss Sur les Huiles des Plantes - 56 Sur P Acide del Antimoine. s7 1700. 3 a TABLE Diverfes obfervations chimiques. BOTANIQUE. Sur la perpendicularité des tiges des Plantes par rapport à l'horifon. je Sur la fécondité des Plantes. Sur les Plantes de la Mer. Dinverfés obfervations Botaniques. GEOMETRIE. Sur Les forces Centrifuges. Sur la mefure des Triangles._ ASTRONOMIE. Sur PEclipfé Solaire du 23. Septembre 1699. Sur lEchpfe de Lune du $. Mars. Sur les Réfraëtions. Sur la longueur du Pendule. Sur une conjonction de Venus avec le Soleil. Sur des Taches du Soleil. Sur la Prolongation de la méridienne de Paris. Sur le Calendrier. GEOGRAPHIE. Quelques Latitudes © Longitudes. DIOPTRIQUE. Sur un nouveau Verre de Lunette. e ACOUSTIQUE. Sur la détermination du Son fixe. MECHANI QUE: Sur la Fa 210 des Horloges. Sur un Infrument univerfel pour les jets des Bombes. Sur les Centres de Converfion & fur les Frottemens. Sur les Corps qui nagent dans les liqueurs. Machines ou inventions approuvées par Académie en 1700. Eloge de feu M. Tauvry. Fin de la Table de PHifloire, PÉPÉCLPÉCOPOPSOSIOBICECPETES TABLE | POUR LES MEMOIRES. | A Nalife de l'Ipécacuanha , Par M. Bourpuc. Page tr Obfervations du Barométre , du Thermométre | ©" dela quantité d'Eau de Pluye © de Neige fondue qui eft tombée à Paris dans lV’'Obférvatoire Royal pendant l'année 1699. Par M. DE LA Hire. 6 Solution d’un Probléme Phyfico- mathématique, PAR M. LE MarQUIs DE L'HÔPITAL, 9 Manitre générale de déterminer les Forces , les Viteffes , les Efpaces & les Tems , une feule de ces quatre chofes étant donnée dans toutes fortes de mouvemens rechiignes variez à difcretion, PAR M. VARIGNON. 22 Obférvations fur les Plantes qui naïfent dans le fond de la Mer.PAR M. TOUuRNEFORT. 27 Remarques fur les obfervations des Réfraëfions tirées du Livre intitulé Refrattio Solis inoccidui in Septentrionalibus oris, juflu Caroli XI. Regis Suevorum , &c. à Joanne Bilberg ; Holmiz 1695. PAR M.DpELAHTRE. 37 Réflexions fur les obférvations faites en Botnie, Par M. Cassinr. 39 Sur l'affectation dela Perpendiculatre remarquable dans toutes lestiges, dans plufieurs racines , © autant qu’il ef} poffible dans toutes les bran- ches des Plantes, PAR M. DoDART. 47 Obférvations fur la quantité d'acides abforbés par les Alkali terreux , Par M. HOMBERG. 64 Comparaïfon des Analifes du [el Ammoniac , de la Soye &: de la Corre de Cerf, PAR M. TOURNEFORT. : 71 Probléme propofé, Par M. DE La Hire. 74 Suite des Anahfès de PIpécacuanha, Par M. BourDuc. 76 Expérience de la Réfraëfion de l'air , faite par l’ordre de la Société Royale d’ Angleterre , rapportée PAR M. Cassini lefils, 78 Du mouvement en général paï toutes fortes de Courbes ; & des Forces centrales , tant centrifuges que centripétes , nécel[aires aux corps qui les décrivent, PAR M. VARIGNON. 83 Explication Phyfique © Chymique des Feux Souterrains , des Trem- lemens de Terre, des Ouragans, des Eclairs & du Tonnerre, PAR M.LEMERY. IOL Obférvarions fur les Diffolutions ©* fur les Fermentations que l’on peur appeller froides ; parce qu’elles font accompagnées du refroïdiffemens ai T ABLE. des liqueurs dans lefquelles elles Jepapene ; Par M. GEOFFROY, 170 De l’ufage médecinal delEau de Chaux , PAR M. BURLET, 122 Extrait des Defcriptions que Pifon © Martgravius ont données du Caa-apia , Ÿ’ confrontation des Racines de Caa-apia , ©" d'Ipéca- cuanha tant gris que brun , avec leur defcription , par laquelle on voit fenfiblement la différence du Caa-apia.a l’'Ipécacuanha, P AR M. GEOFFROY. 134 Sur la muliiplication des Corps vivans confidérée dans la fécondité des Plantes, PAR M. DobaART. 136 Remarques fur la contraëfion des Horloges pendule, PAR M. DE … LAHIRE. 167 Des Vailfeaux Omphalomefenteriques, P Ar M. Du VERNE y. 169 Extrait de quelques Lettres écrites de Portugal © du Bréfil , PAR M. Cour Ler le fils, à M. L’ABgé BIGNON, Préfident de l’Académie Royale des Sciences. 171 Nouvelle maniére de rendre les Barométres lumineux, PAR M. BERNOULL y. 173 Obfervations fur des Diffolvans du Mercure , Par M. HomerrG. 190 Suite des obfervations fur les Diffolvans du Mercure, PAR M. HomBERGc. 196 De la ffruéture & du fentiment de la Moëlle , Par M. Du VERNEY.202 Méthode générale fur les jets des Bombes dans toutes fortes de cas pro- pofés avec un Inftrument univerfel qui fert à cecufage. PAR M. DE LA HARE. 204, Obférvations fur les Huiles des Plantes, PAR M. HOMBERG. 212 Queffion Phyfique , s’il eff vrai que Pair qui entre dans les vaiffeaux fanguins par le moyen de la EN A , s'échappe avec les vapeurs & des fueurs par les pores infenfibles de La peau, PAR M. MERY. 217 Des Forces centrales , ou des pefanteurs néceffaires aux Planétes pour faire décrire les Orbes qu'on leur a fuppofées jufqu'ici, PAR M. VARIGNON. 224 Mémoire [ur les caufes de la voix de l’homme, &” de fes différens tons , _ Par M. Doparrt. 244 Objervation des Taches du Soleil qui ont paru au mois de Novembre 17c0. Par M. D£ LA HrRE. 293 Obférvation de la Conjonétion inférieure de la Planéte de Vénus avecie Soleil , faire a l'Objervatoire Royal, P AR M. DE LA H1RE. 294 Sur l'acide de V Antimoine , P AR M. HONMBERG. 298 Obférvation fur une nouvelle efpéce de Hermie, PARM. DE LITRE. 300 : Defcriprion de lUréthre de l’homme , démontrée à l Académie, P AR M.De LiTRe. 311 En de la Table des Mémoires. HISTOIRE L'ACADEMIE ROYALE EPS SU BAT EN ICULE.S. ANNEE M. DCC. PHYSIQUE. PHYSIQUE GENERALE. OBSERVATIONS SUR LE BAROMETRE, le Thermométre, les Pluies de pendant Année 1699. Onfieur de la Hire, quis’eft chargé d’obfer- rométre & du Thermométre , la quantité d’eau de pluie quitombe, & les variations de l'Eguille aimantée, rend compte à l’A- =) cadémie au commencement de chaque an- née , des obfervations qu'il a faites pendant l’année précé- dente. 1700, . A Voy. les M, 5 à 6: ver fans interruptionles changemens du Ba- pes 2 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Il doit être affez agréable pour ceux qui aiment à con- templer la nature d’avoir devant les yeux l'Hiftoire Phyfi- que de chaque année. Ils y voient quels mois ont été fecs ou pluvieux , comment a été diftribuée dans ces différens mois toute la quantité d’eau qui eft tombée du Ciel , quel rapport ont eu enfemble la pefanteur de l'air , & fa con- fitution qui fait le beau ou le mauvais tems, jufqu’à quels. degrés ont été le plus grand chaud & le plus grand froid, s'ils ont été égaux chacun en leur faifon, ou de combien l'un a furpafé Pautre, &c. Sur ces fondemens , on peut conjeéturer avec beaucoup de vraifemblance ce qui a rendu l’année fertile ou ftc- rile , faine ou fujette à de certaines maladies. Mais ce qui fonde encore mieux ces conjeétures, c’eft la comparaifon. de plufieurs années, parce qu’un plus grand nombre de faits fournit un plus grand nombre de rapports , & affüre davantage les conféquences. On ne peut fçavoir que par une longue fuite d’obferva- tions , fi dans un même lieu il tombe toujours la même quantité de pluie , ou , en cas que cette quantité foit iné- gale , dans quelles bornes l'inégalité eft renfermée , quelles {ont aufli les limites des inégalités du chaud & du froid, quels effets peuvent produire leurs plus grands excès , fiPun fuit ordinairement l’autre, &c. Des Phyficiens habiles ont crû que les pluies & les né- ges fondues pouvoient fournir toute l’eau des Riviéres, & cette queftion, l’une des plus curieufes de la Phyfique, ne: peut être décidée fans l’exacte connoiffance de la quantité d’eau qui tombe du Ciel tous les ans. On fçait que l’'Eguille aimantée ne fe tourne pas ordi- nairement droit au Nord , mais qu’elle varie un peu tan- tôt vers l'Eft , tantôt vers l’'Oüeft , tantôt plus , tantôr moins, & que cette variation ne paroît pas entiérement ir- réguliére. Quelles qu’en foient les régles , on ne les dé- couvrira qu'en obfervant continuellement ; & il feroit im- portant de les découvrir pour rendre l’ufage de la Bouf- {ole plus für. On en tireroit aufli de nouvelles lumiéres D} ESS CHE NLC ES 3 “pour le Syftème de l'Aiman, & même pour le Syflème gé- néral de notre Tourbillon, puifque toutes les expériences nous conduifenr à croire que la Terre eft un grand Aïman. Enfin on peut dire en général que puifqu'ilne nous eft permis que de remonter quelquefois & avec peine, des effets aux caufes , le travail des obfervations continues doit être fort néceflaire, & qu’il eft même d’autant plus digne de louange qu’il eft moins brillant, & que ceux qui l’entre- prennent fe facrifient en quelque façon à la gloire de ceux qui feront les Syflêmes. SUR QUELQUES SINGULARITES de la France. ?Académie continuant le deffein d'examiner toutes les 1 de l'Hiftoire naturelle de la France, on a parlé de la Montagne de l’Aiguille en Dauphiné , autre- ment appellée la Montagne Inacceflible. Sa fituation eft renverfée, & elle eft plantée , pour ainfi dire, fur fon fom- -met, & fur fa pointe, car elle n’a par le bas que 1000 pas de circuit, & elle en a 2000 par le haut. De-làa vient fonnom d'Inacceflible. Cependant quand Charles VIIT. alla en Ita- lie en 1492. il envoya des gens qui furent affez hardis & affez adroits pour monter jufqu'au haut de cette Montagne. Ils n’y trouverent que des Chamois , encore n’eft-il pas aifé de comprendre comment ces animaux, qui n'avoientem- ployé nulle induftrie, avoient pû y aller. On n’y vit point d'arbres, mais feulement un pré. Il pouvoit y avoir demi- lieue à monter par le chemin qu’on avoit pris. Il y a fur la platte-forme de cette Montagne une élévation pointue qui lui a fait donner le nom de Montagne de l’Aiguille. Une autre fingularité du Dauphiné , c’eft la Grotte de Notre-Dame de la Balme auprès de Grenoble. Elle s'ou- vre par une voute aflez haute ; & méne à un Lac renfermé fous la Montagne , & qui paroît large d’une lieue. Fran- x RS A i V. les M, pag. 178. 4 4 HisToiRe DE L'AcADEMIE ROYALE cois I. étant en Dauphiné y envoya des gens en bateau; qui allérent plus de deux lieues dans le Lac; mais un grand bruit qu'ils commencerent à entendre leur fit peur , ils n'allerent pas plus avant , & mirent fur des planches des flambeaux allumés qu’ils virent difparoiïtre tout d’un coup en un certain endroit, qui apparemment étoit un gouffre. Un Curé de ce païs-là y alla plufieurs années après , &c foit qu'il eût pris un autre chemin dans la Grotte, foit qu'il fût moins aifé à effrayer, foit qu'il eût l'imagination moins portée au merveilleux, il a laiffé une Relation de ce voyage fort différente , & beaucoup plus fimple. Il vit des chutes d'eaux, il trouva des endroits où l’on étoit à fec, d’autres où la voute étoit fi baffle que l’on ne pouvoit y pañler fans fe coucher le ventre contre le bateau. Ce n'eft pas que cette derniére circonftance ne puifle faire quelque peine , mais enfin dans la feconde Relation, le merveilleux va confidérablement en diminuant. Voilà ce qui eft rapporté dans les Livres fur cette Grotte & fur la Montagne Inaccelflible. Mais M. Dieulamant a pris la peine d'envoyer à l’Académie une Relation de la Grotte qu'il a examinée de fes propres yeux, & elle ne con- ferve plus aucun veftige de fes anciennesmerveilles. Elle eft creufée irréguliérement dans le Rocher, & fon entrée peut avoir 4 à $ toiles de largeur fur ç à 8 de hauteur. Au bas de cette entrée , fort un petit ruiffeau qui s'écoule dans le Rhône. Ce ruiffeau étoit prefque à fec au mois d’Août, que M. Dieulamant alla voir la Grotte , mais fon lit fait juger qu'il eft toujours fort petit. La Grotte fe fourche. Dans la partie qui eft à droite, on voit beaucoup de congela- tions d’eaux qui diftilent au travers des Rochets. Dans la partie qui eft à gauche ,il fe diftile des eaux qui font une partie du ruiffleau. Elles tombent d’abord dans un affez grand baflin naturel , au-deffous duquel il y en a plufieurs autres petits qui font une cafcade aflez agréable. Au fond de cette Grotte eft une efpéce d'ouverture creufée aufli dans le Rocher, au bas de laquelle eft eau qui forme la plus grande partie du ruifleau. C'eft ce qu'on appelle le dr. ‘ DES SCIENCES. $ Lac ; parce que l’eau eft dormante. Il a un demi-pié, ou un pié tout au plus de profondeur. L’allée où eft cette ef péce de Lac parut à M. Dieulamant n'avoir pas plus de 20 toifes de longueur en fe rétrefliffant un peu ; car du commencement où il étoit, il cruten voir le fond avec des flambeaux. Les gens du païs l’affurerent qu’il n’y avoitrien au-delà. C’eft-là cependant labîme où les flambeaux furent engloutis. Si M. Dieulamant avoit examiné la Montagne Inaccef- fible , peut-être fe feroitelle redreflée. Les Ifles flotantes qui font dans un Lac auprès de Saint- Omer, ont aufli pallé en revüe , & ont paru peu merveil- leufes. Ce ne font proprement que des tiflus de racines d'herbes mêlées d’un peu de terre graffe. SUR; L.E..P.H.O0 SP HO; RE du Baromeétre. E Hazard , premier Auteur de prefque toutes les dé- couvertes , apprit à M. Picard , il y a près de 30 ans, que le Mercure de fon Barométre , fecoué dans l’obfcuri- té, donnoit de la lumiére. Aufli-tôt tous les Obfervateurs de la nature éprouverent leurs Barométres, mais il ne s’en trouva que très-peu qui euflent ce privilége ; on ne vit point à quoi l’on pouvoit attribuer que les uns rendiffent de la lumiére, & que les autres n’en rendiffent point; on ne crut pas qu'avec fi peu d’expériences , on füt en état d'ofer raifonner fur cette matiére ; on. attendit du hazard & du tems les éclaircifflemens dont on avoit befoin , & la chofe en demeura-là. | Mais dans cette année M. Bernoulli Profefleur en Ma- thématique à Groningue , ayant été frappé de la leéturé de ce fait extraordinaire , fe mit à l’examiner , & à le fui- vre , & commença par eflayer fon Barométre, qui effe&ti- vement étant agité avec force dans l’obfcurité donna une foible lueur. Aiïj 6 HISTOIRE DE L'AGADEMIE ROYALE Comme l’on pouvoit foupçonner que la lumiére , ou du moins une grande lumiére , n’étoit fi rare dans les Baro- inétres , que parce qu'il n'y avoit pas un vuide parfait dans le haut du tuyau , ou que le Mercure n’étoit pas bien purgé d’air , il s’aflura par expérience qu'avec ces deux condi- tions , des Barométres n'étoient encore que très foible- ment lumineux, & par conféquent que ce n’étoient là tout au plus que des conditions , & qu’il falloit chercher ailleurs une véritable caufe. Il avoit remarqué que quand on fecouoit le Barométre , & que par conféquent l’on faifoit aller le Mercure avec ra- pidité, tantôt au-deflus , tantôt au-deflous du point où fon équilibre avec l'air l’eût arrêté, la lumiére ne fe montroit que dans la defcente du Mercure, & qu'elle paroifloit com- me attachée à fa furface fupérieure. De-la, il conjeétura que quand par cette defcente, il fe forme dans le tuyau un plus grand vuide que celui qui y étroit naturellement , il peut fortir du Mercure pour remplir ce vuide en partie, une matiére très-fine , qui étoit auparavant renfermée & difperfée dans les interftices très-étroites de ce mineral. D'ailleurs il peut entrer dans ce même moment par les pores du verre , plus grands apparemment que ceux du Mercure , une autre matiére moins déliée , quoique beau- coup plus déliée que l'air, & la matiére fortie du Mercu- re, & toute raflemblée au-deflus de fa furface fupérieure , venant à choquer avec impétuolité celle qui eft venue de dehors, y fait le même effet que le premier Elément de Defcartes fur le fecond, c’eft-à-dire , produit le mouvement de la lumiére. Mais pourquoi ce Phénoméne n’eftil pas commun à tous les Barométres ? C’eft-Rà la grande difficulté. M. Bernoulli imagina que le mouvement de la ma- tiére fubtile qui fort du Mercure avec impétuofité lorfqu'il defcend , pouvoit être détruit , affoibli , interrompu par quelque matiére hétérogéne au Mercure qui fe feroit amaf-: fée fur fa furface fupérieure , & y auroit été pouffée par ce mineral plus pefant qu’elle; que cette efpéce de pellicule M # L "DES SCIENCÉS. 7 -_ me manquoit pas de fe former fur le Mercure dès qu'il mé- toit pas extrémement pur; que même quelque pur qu'il fût de lui-même, il contraétoit en peu de tems par le feul at- touchement de l'air les faletés qui la compofent ; qu'afin qu’il les contraétât en un inftant, il ne falloit que le verfer en l'air de haut en bas , comme l’on fait ordinairement dans la conftruétion des Barométres ; que ce mouvement lui faifoit ramaffer en l’air plus de faletés en un moment, qu’il w’auroit fait en plufieurs jours, s’il eüt été en repos ; qu’en- fin cela fuppofé , une méthode füre pour avoir un Baromé- É tre lumineux, étoit de le faire d’un Mercure bien pur ; & d: qui fur-tout quand on le feroit entrer dans fon tuyau, ne tra- | verfat point l'ait , & ne s’y fouillât point. Tout ce raifonnement devança les expériences ; hors- mis peut-être quelques-unes qui regardoient la formation de la pellicule fur la furface du vifargent; tout le refte fut un pur ouvrage d'efprit. M. Bernoulli eut le plus fenfble plaïfir dont Ja Philo- d fophie puifle récompenfer ceux qui la cultivent, il vit la d nature fuivre le fyftême qu'il avoit imaginé , & plufieurs k Barométres qu'il fit , fans que le Mercure paffât dans air, jettoient tous, quand on les agitoit, une lumiére fort écla- tante. Il tourna encore lexpérience de quelques autres manié- res, toujours fur le même principe , & les effets furent tou- jours ceux qu'il avoit devinés,ou du moins s’accorderent toujours avec fa premiere penfée. 1 fe tint donc für d’avoir le fecret de rendre tous les Ba rométres lumineux , pourvû qu'ils fufflent conftruits à fa maniére, & ce feroit dans la nature une nouvelle efpéce de Phofphore d’autant plus beau, qu'il ne fe confumeroit jamais. *: M. Bernoulli fit part de cette nouvelle à l'Académie par des Lettres qu'il en écrivit à M. Varignon. Tout le monde fut touché du génie de découverte qui brilloit dans: tout le fyfême ; & quelque prévention favorable qu'il s’at-- tirât, on ne laïffa pas de fe mettre à vérifier févérement é 8 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE les faits. On fit d’abord réflexion que quelques Baromé: tres, comme ceux du P. Sebafñtien , & de Meflieurs Cafli- ni & de la Hire, quoique faits à la maniére ordinaire, & fans les précautions de M. Bernoulli , étoient luminedk. Enfuite on en fit à la maniére de M. Bernoulli, dont quel- ques-uns ne rendirent aucune lumiére, & les autres en ren- dirent affez peu. Il n'en fallut pas davantage à l'Académie pour fufpendre fon jugement. Dès que l’on connoît un peu la nature, on connoît aufli le péril de décider promptement fur les effets naturels. L'examen de la découverre de M. Bernoulli fut continué, & plus approfondi dans l’année fuivante. On ne pouvoit recevoir fans beaucoup de difcuflion une idée ie , ni fans la même difcuflion refufer une fi belle idée, ' Dai VERS ES :-0,B:S.E RFF. TIOMNAS de Phyfique générale. LT 1: femble que la grandeur apparente d’un objet devroit uniquement dépendre de la grandeur de l’image qu'il trace au fond de l'œil , cependant il arrive quelquefois le contraire , & la Lune dont notre œil reçoit une plus pe- tite image à l'Horifon qu’au Méridien, parce qu'elle eft alors plus éloignée de nous, paroït beaucoup plus grande à l'Horifon. Ce Phénoméne a fort embaraffé les plus grands Philo- fophes d’entre les Modernes, & comme il arriveaffez fou- vent que quand on donne à une même chofe des explica- tions fort différentes , aucune n’eft la véritable , le P. Goüye ne s’eft point contenté de tout ce qu'on a imagi- né jufqu'à préfent fur ce fujer. Defcartes dit que quand la Lune fe leve ou fe couche ; une longue fuite d'objets in- terpofés DES SCIENCES: 9 terpofés entre nous, & l'extrémité de Fhorifon fenfible , nous la font imaginer plus éloignée, que quand elle eft au Méridien , où notre œil ne voit rien entre elle & nous ; que cette idée d'un plus grand éloignement nous fait imaginer la Lune plus grande, parce qu'un objet qu'on voit fous un certain Angle, & qu'on croit en même tems fort éloigné, on juge naturellement qu'il doit être fort grand pour paroître de fi loin fous cet none & qu'’ainfi un pur Jugement de notre ame ; mais néceffaire, & commun à tous les hommes, nous fait voir la Lune plus grande à l'horifon, malgré l’image plus petite qui en eft peinte au fond de notre œil. Mais le P. Goüye détruit tout d’un Coup cette explication fi ingénieufe, en affurant que plus Phorifon eft borné, plus la Lune nous paroït grande. M. Gaflendi prétend que la prunelle, qui conftamment eft plus ouverte dans l’obfcurité, l’étant davantage le matin & le foir , parce que des vapeurs plus épaiffes font alors répan- dues fur la terre, & que d’ailleurs il en fut traverfer une lus longue fuite pour regarder à lhorifon, l'image de la ue entre dans l'œil fous un plus grand Angle, & sy peint réellement plus grande. Mais malgré cette dilatation de la prunelle, caufée parl'obfcurité, filon regarde la Lune avec un br tuyau de papier , on la verra plus petite à l’horifon, Our trouver donc quelque autre raifon d'un Phéno- mene fi bizarre, le P. Goüye conjedure, que quand la Lune eft à l’horifon , le voifinage de la terre , & les vapeurs plus épaifles dont cet Aftre eft alors enveloppé à notre égard, font le même effet qu'une muraille placée derriere une co- lonne , qui paroît alors plus groffe que fi elle étoit ifolée & environnée de toutes parts d'un air éclairé. De plus, une co- lonne, fi elle eft canelée , paroît plus groffe, que quandelle ne l'eft pas, parce que lescanelures font autant d'objets par- ticuliers, qui par leur multitude donnent lieu d'imaginer que l'objet total qu'ils compofent, eft d’un plus grand volume. Ilen va de même à-peu-près de fous les objets répandus fur la partie de l’horifon, à laquelle la Lune ae ; quand 1700. - to HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE elle en eft proche, & de là vient qu'elle paroît beaucoup plus grande , lorfqu’elle fe leve derriere des arbres, dont les intervalles plus ferrés & plus marqués, fontprefque la même chofe fur le diametre apparent de cette Planete, qu'un plus grand nombre de canelures fur le fuft d’une colonne. TI. Le 7. du mois de Janvier, une heure avant le jour , il parut aux Habitans de la Hague en baffle Normandie, un tourbillon de feu fiéclatant , qu’il effaçoit la lumiere de la Lune , & que les Habitans de Saint Germain des Vaux & d'Auderville , deux gros Villages fitués fur le bord de la mer, crurent d'abord qu'il étoit jour, & furent fort effrayés d'une clarté fi prodigieufe. Ce feu avoit la figure d’un grand arbre, & couroit de l'Oueft Nord-Ouef à l'Eft Sud-Efñt. Il étoit plus d’une heure de jour , quand il tomba ; & ce fut avec un fi grand bruit, que les maifons de ces deux Vil- lages en tremblerent. Ceux de douze lieues de Cherbourg crurent qu'il éroit tombé fur Valognes, & ceux de Valo- gnes crurent que c’étoit fur Cherbourg. Mais comme les Habitans de la Hague furent les feuls qui entendirent le bruit & fentirent le tremblement que fa chute caufa, ils font les témoins les plus croyables fur ce point. Il leur pa- rut que cette flâme fe perdit dans la mer aux environs de la petite Ifle d'Origni, & ce fpeétacle fut à -peu-près le même que celui d’un gros Vaifleau, qui auroit été en feu. L'Académie a eu l'obligation d’être inftruite de ce Phéno- mene à M. de Seneffey, Gentilhomme de baffe Normandie, ET ON croit communément que l'Ambre jaune qui fe trou- ve dans la mer de Dantzic, eft une gomme que de certains arbres fitués fur les bords de cette mer ont produite , & y ont laïflé tomber. Mais on a écrit d’Aix à M. Tournefort, qu'il fe trouve de l’Ambre faune dans les fentes des Rochers de Provence les plus dépouillés & les plus fériles ; ce DES SCIENCES 11 qui feroit croire que cette gomme eft minérale, & non pas végétale, & que l’'Ambre de la mer de Dantzic n’y eft pas tombé de quelques arbres , mais y a été entrainé par Les torrens. IV. ON fçait affez combien un mouvement intérieur répandu dans toutes les parties infenfibles d’un Corps , a de force : * pour en changer le tiflu, & pour y produire de grandes al- térations. Mais qu'un pur mouvement extérieur , & qui fem- ble fe terminer à la mafle entiere, fans agiter les parties, produife le même effet, c’eft quelque chofe de plus fur- prenant, du moins pour un-Phyficien. M. Homberg a dit qu'ayant attaché une bouteille de vin au claquet d’un mou- lin, ilavoit trouvé que le feul mouvement de ce claquet avoit changé le vin en très-bon vinaigre dans l’efpace de trois jours, & que par le même moyen une livre de mer- cure avoit donné en trois mois quatre ou cinq onces d’une poudre noirâtre. ANATOMIE. SUR UNE HIDROPISIE LAITEUSE. FN 1690. M. Vernage, Médecin de la Faculté de Pa- ris , ayant été obligé de faire faire la Pontion à une jeune fille hidropique , fut fort étonné de voir fortir une matiere laiteufe , au lieu de l’eau qui devoit naturellement venir. Il apporta de cette liqueur à l'Académie, qui l’'exa- mina avec foin. On trouva qu'en effet elle avoit affez la _ couleur & la confifence du lait, & même un peu le goût, Bji 42 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALr hormis qu'elle étoit falée. On remarqua de plus qu'elle moufloit en tombant, & s’élevoit fur le feu comme du lait, mais elle en étoit différente , principalement en ce qu’elle étoit beaucoup plus legere, & ne fe coaguloit point par les Acides, mais par le Sel de Tartre. On vit par la fuite que la quantité de cette liqueur étoit aufli étonnante que fa nature. Il falloit faire l'Opération à la Malade au moins tous les quinze jours, & on luitiroit à chaque fois treize ou quatorze pintes au moins de ce lait, quelquefois quinze. = On avoit d’abord quelque inclination à croire que c'étoit du chile extravafé, & que quelqu'un des vaiffeaux laétées devoit être rompu, ce qui paroifloit confirmé px le rap- port de M. Vernage, qui difoit que cette fille, Jardi- niere de fon métier, avoit fait un violent effort à plufieurs reprifes pour foulever un gros fardeau , & que fon mal avoit commencé peu de tems après. : Mäisle chilene fe caille point par le Sel de Tartre , com- me faifoit cette liqueur ; & d’ailleurs la quantité des déjec- tions de la malade étant, à ce qu’afluroit M. Vernage, affez proportionnée à celle des alimens, il y avoit de l’ap- parence que le chile pañloit dans fon fang à-peu-près comme à l'ordinaire ; & quoiqu'elle füt extrêmement maigrie, le moyen qu'elle eût fait par jour une pinte de chile inutile, outre celui qui devoit être employé à l’ufage naturel? Quelques-uns crurent donc, que ce devoit être l’eau or- dinaire des Hidropiques, teinte d’un peu de chile extra- vafé , & que ce qui rendoit cette Hidropifie finguliere , c’eft qu’elle étoit compliquée avec la rupture de quelque vaif- feau ladée. Il fembloit que ces vaiffleaux pouvoient être une fource affez abondante , parce que quand le chile n’y coule plus, la limphe y coule en fa place. D'ailleurs cetre limphe extravafée , qui féjournoit dans le bas ventre, pou- voit s’y charger de Sels urineux , puifque ces parties en font toutes imprégnées, & de -là venoit la falure & les autres qualités particulieres de ce faux lait, compofé de chile & de férolité falée. DES SCIENCES. 13 M. Mery convenant avec les autres du mélange qui de- voit entrer dans cette liqueur , imagina une maniere toute différente, dont elle pouvoit s’épancher dans le bas ven- tre. Il prétendit qu'il n’éroit pas impoffible qu'elle fe filerât au travers des membranes de l’eftomach & des inteftins, fuppofé qu'il y eût pour cet effet quelque chofe de parti- culier & d’extraordinaire, foit dans la nature de la liqueur, foit dans le tiflu des membranes. Il avoit fait plufieurs fois l'expérience , que de l’eau dont il avoit rempli un eftomach, ou des inteftins bien liés par les deux bouts, s’étoit échapée par leurs pores, ce que l’air même ne fait pas, tout fubtil qu'il ef. Il avoit vû fouvent que le chile laiteux s'écouloit par la fubfance de la matrice, & par les chairs découvertes de femmes nouvellement accouchées. Et même il rapportoit qu’il ar- rive quelquefois que par les remedes purgatifs , ou diuré- tiques, on oblige les eaux répandues dans le ventre des Hidropiques , à reprendre la route des déjeétions ordinai- res, c’eft-à-dire, à fe filtrer au travers des membranes des inteftins. _ À ce fujet, M. Homberg dit que ce qui donnoit à l’eau plus de facilité que n’en a l'air, de pafler à travers certains vifceres , c’eft que l’eau détrempe la matiere glutineufe qui colle enfemble les petits filamens des membranes, & que de plus elle pénétre ces filamens mêmes , les rend plus fouples, & plus propres à fe ranger & à s’écarter. L'air ne peut faire aucun de ces effets. Et pour preuve de cela, il ajoûta qu'ayant rempli d'air une veflie, & l’ayant chargée d’une pierre , l'air renfermé ne fortit point; mais que l'ayant plongée dans leau ainfi chargée , l'air en fortit, parce que l'eau travailla à ouvrir la prifon de l'air. La fille hidropique mourut après un an de maladie , & _des ponétions aufli fréquentes, que celles que nous avons marquées. Elle fut ouverte , mais avec trop de précipita- tion. Du moins l'Académie n’a pas fcû aflez certaine- _ ment ce qu'on avoit trouvé par la difieétion. me qu, ii à Voy. les M. pag- 202. 14 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE il fut dit que l’on avoit vû quelque vaiffeau laétée rompu DE LA STRUCTURE DE LA MOELLE. L n’y arien dans les Animaux qui nait fa ftruéture pe ticuliere & organique ; & fi le premier coup d'œil ne nous la découvre pas, la recherche de la diffeétion, ou le microfcope, ou le raifonnement nous la découvriront: trois manieres diflérentes de voir , qu'il faut ajoûter à no- tre vüe fimple & ordinaire, & qui vont infiniment plus loin. La Moelle qui paroît une maffe informe & fans arran- gement, eftcompofée d’une infinité de petits facs mem- braneux, qui s'ouvrent les uns dans les autres , tous rem- plis d'une huile fine & délicate, qui a été extraite du fang. M. du Verney, après avoir examiné fa ftruéture dans un plus grand détail, recherche fon ufage. Il combat le fentiment des Anciens, qui ont crû que la Moelle nour- rifloit les os. Il eft bien vrai que l’on ne voit point de vaif- feaux fanguins fe diftribuer dans la partie folide de los, pour y aller porter le fang , nourriture univerfelle de tou- tes les parties; mais c’eft qu’on n’examine pas ordinaire- ment des os d’un Animal fort jeune; car dans ceux-ci les vaifleaux fanguins font fort vilibles, aufli bien que dans les plumes des jeunes Oifeaux. Hors du premier âge , ces mê- mes vaifleaux fe reflerrent , & deviennent imperceptibles, tant dans les plumes que dans les os; mais ils ne laiflent pas d'y être, quoiqu’extrêmement rétrécis, & ces mêmes patties qui ont demandé une nourriture plus abondante dans les commencemens de la vie, en demandent tou- jours tant qu'elle dure, & n’en doivent pas recevoir par d’autres canaux, que par ceux quiavoient commencé à leur en porter. M. du Verney fait un dénombrement de plufieurs os qui font abfolument fans moelle, & qui ne laiffent pas de D'ES S'CITÆENN CES. 1$ £ bien nourrir. Le bois des Cerf, & les pates des Ecre- vices font des exemples connus de tout le monde. Il paroît donc , puifque la moelle ne nourrit point l'os, qu'elle ne fert qu'à l'humeëter & à l'amollir jufqu'à un certain point. Ainfi la concavité de l’os n’eft pas feule- ment faite pour le rendre plus leger, fans rien diminuer de fa fermeté, mais encore pour contenir la moelle, qui l'empêche d'être aufli caffant qu'il le feroit par fa fermeté feule. La moelle a tant de facilité à fe répandre dans la fub- flance de l'os, & à la pénétrer , que cette tranfpiration fe fait même après la mort de l’Animal ; & fi un os n’eft pas bien parfaitement vujdé, on voit qu'au bout de quelque tems, de blanc qu étoit, il devient jaune, parce qu’à la moindre chaleur, il boit, pour ainfi dire , la moelle qu'il renfermoit. = Quant au fentiment de la moelle, dont on a fort douté : on verra par les expériences que M. du Verney en a fai- tes, qu'il eft très-vif & très-exquis. SUR UNE HERNIE PARTICULIERE. L Es mêmes maladies prennent des formes fi différen- tes , que quelquefois on ne les reconnott plus ; & rien n'eft plus important dans la Médecine , que de fcavoir exattement l'Hiftoire de leurs variations. On fçait aflez ce que c’eft que les Hernies ordinaires. Une portion d’inteftin a pailé par les anneaux que forment les intervalles des muf. cles du bas ventre, eft fortie de la cavité du ventre » & en- trée dans le fcrotum , & s’y eft pliée en forme d'arc ; Ce qui le plus fouvent n’empêche pas que les matieres, qui de l'e- ftomach coulent par les circonvolutions des inteftins ,; juf- qu'à leur extrémité, ne fuivent leur cours naturel > parce “qu’elles paffent auffi dans la portion d’inteftin qui forme la . Hernie. Mais comme l'anneau par où cette portion d'inteftin Voy. les Ms Pag- 300: 16 - HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE s’eft engagée dans le fcrotum , eft étroit, & que cependant elle y eften double, fi la difficulté du paffage empêche les matieres d'y entrer, ou d'en fortir librement , alors celles qui n’y peuvent entrer , refluent vers l’eftomach , & on les vomit; & celles qui font arrêtées dans le fac de la Hernie, y croupiffent, & y caufent une gangrenne, qui eft en peu de jours fuivie de la mort, à moins que l’on n'ait recours à une opération connue des Chirurgiens. Mais il y a une autre efpéce de Hernie, jufqu'à préfent in- connue , & que M. Littre a découverte fur quelques cada- vres. Une portion d’inteftin s'engage dans un anneau, mais non pas entiere. Il n’y a qu'un des côtés du canal de l'in- teftin, dont la membrane , par quelque caufe que ce foit, s'enfonce dans l'anneau, s'y Rae Merrie , & forme à la fin un tuyau fans iflue, droit & fimple , femblable à une branche qui fe jette à côté de fon tronc. Aufli M. Littre a-t:il obfervé, qu’à l'endroit où l'inteftin jette cette produétion latérale, & forme la Hernie, fa membrane eft beaucoup plus mince, parce qu’elle n’a pû s’allonger fans perdre de fon épailleur à proportion. ” Il eft aifé de voir que les matieres qui coulent de l'efto- mach, ont toujours un paflage libre jufqu’à l’extrémité des inteftins ; car il y a toujours une partie du canal qui n’eft point engagée. De-là vient que le malade ne vomit point. Mais quoique les matieres coulent fans peine à côté du fac de la Hernie , celles qui font entrées dans ce fac , peu- vent n’avoir pas la liberté d'en fortir : & cela peut arriver d'autant plus facilement , que la membrane qui fait la Her- nie, ayant été extrêmement allongée , & fon reflort forcé , elle ne peut plus fe mettre en contraétion, & chaffer hors d'elle ce qu’elle contient; & que d’ailleurs elle n’eft plus aidée par la compreflion des mufcles du bas ventre, puifqu'elle eft hors de cette région. Aufli-tôt la partie fe gangrene, & il faut appeller le Chirurgien. Cette efpece de Hernie eft rare; & il eft facile de voir par fa mécanique, | qu'elle doit l'être. Elle eft aufli moins dangereufe , fi ce | n'eft DES SCIENCES. 17 n'eft, parce qu'elle eft plus difficile à reconnoître pour ce qu’elle eft ; car la tumeur qu’elle produit eft moins grande, & le malade ne vomit point, ou beaucoup moins. M. Lit- tre avoue, que comme il ne connoifloit point ces fortes de Hernies, un ‘homme qui en avoitune, & à qui il n’ofa or- _ donner opération, parce que fon mal ne paroïffoit pas affez être une Hernie, mourut entre fes mains. Il ne la recon- nüt pas même bien fürement dans le cadavre, faute de fça- voir qu'elle fût poflible : car dans ces occafions on ne voit fi bien ce qu'on ne s'attend pas à voir. Mais depuis ’ayant trouvée par hafard dans deux autres fujets, il s’eft tenu für que le malade, dont il avoit douté , en étoit mort; & il apprend au public , que cette efpéce de maladie ef dans la nature. Ce feroit du moins un avantage pour le genre humain , sil connoifloit tous fes ennemis. M: Littre rapporte tous les fignes aufquels on peut re- connoître cette nouvelle efpéce de Hernie ; & comme elle demande une nouvelle opération, ou du moïns des chan- gemens confidérables dans Fopération commune , il en inf truit les Chirurgiens dans tout le détail néceffaire. SUR LA FORMATION DE LA VOIX: D Our produire le fon, il faut d’abord un air mû avec P une très- grande viteffe ; puifque le fon fait 180 toifes enune feconde ; c’eft-à-dire, qu'il feroit en une heure plus de 283 lieués moyennes de France , fi les caufes étrange- res lui perimettoient de s’érendre fi loin. Cela eft d'expé: rience. DESE Sup, mort H GES - Toutes les conjeétures:, & tous les raifonnemens Phy- fiques , vontià nous perfuader que ce mouvement ne peut être imprimé à l'air, que par les vibrations prompres & vi- ves des petites parties du corps fonore , qui par quelque caufe que ce foit , ont été mifes en reflort. ( La diverfité de ces vibrations modifie le fon, & fait 1700. C Voy. les M, pag. 244. 18 HisTOiR=e DE L’'ACADEMIE ROYALE les tons différens. Un plus grand nombre de vibrations fai- tes en même tems , produit un ton plus aigu. On fçait d’ailleurs qu'une corde, toujours également tendue , fait dans un tems égal d’autant plus de vibrations , qu'elle eft plus courte ; ou fi fa longueur eft toujours la mê- me, d’autant plus de vibrations , qu’elle eft plus tendue. Deux cordes k une égale tenfon, dont les longueurs font comme 1 à 2, fonnent l’Oétave l’une de lautre. Si les longueurs font comme 2 à 3, comme 3 à 4, &c. les cor- des fonnent la Quinte , la Quarte, &c. Ces rapports de 1 à 2, de 2à 3, de 3 à 4; enfin tous les rapports de lon- gueurs de cordes, dontil réfulte des accords de Mufique, peuvent être appellés, Rapports harmoniques. Puifque le rapport de 1 à 2 fait POËtave; celui de 1 à 45 fera la double Oëtave; celui de 1 à 8, la triple O&tave , &tc. & de même des autres rapports. Et Pon peut dire que ces derniers rapports harmoniques, 1 à 4, par exem- le, 1à8, &c. font éloignés en comparaifon de 1 à 2. He cordes, dont les longueurs font égales, font aufli des accords différens, fuivant la différence de leurs ten- fions; mais ce ne fera pas des tenfions , qu'il fera le plus fouvent queftion dans notre fujet. Elles fe reglent, par raps port aux accords de Mufique , fur une autre proportion que les longueurs. Le fon qui frappe notre oreille, n’eft pas feulement ce- lui qui vient diretement du corps fonore à nous, mais encore celui qui étant parti du corps fonore , a été frap- per tous les corps voifins ; & de-là s’eft refléchi vers notre oreille. Car quoique ce fon refléchi ait eu plus de che- min à faire pour venir à nous, que le direct, la différence du tems nous eft entierement infenfible dans de petites diftances, à caufe de l'extrême vitefle de ce mouvement; & fi notre fenfation eft peu fine & peu délicate, en ce qu’elle confond les deux fons, quoiqu’éloignés de quel- que petit efpace de tems , elle profite de cette imperfetion: même ; puifque les deux fons unis enfemble , fe fortifient DES SCIENCES. 19 confidérablement. La fagefle de la nature a facrifié un avantage qui ne nous fervoit de rien, à un autre qui nous eft fort utile. ; Le fon refléchi fortifie d’autant plus le dire&, que les vibrations des corps refléchiffans ont avec celles du corps fonore , faites dans le même tems , un rapport harmonique plus proche, comme de 1 à 2, de 2 à 3, &c. IL peut même arriver que les corps refléchiffans étant beaucoup plus propres à produire du fon, que ne left le corps, fonore lui-même, le fon qu’ils produifent foit plus fort que celui du corps fonore; que le ton qu’ils prennent, fur- monte le fien, & le rende infenfble à l'oreille ; & qu’enfin le ton qu’on entendra foit uniquement celui des corps refñé- chiffans, quoiqu'ils n’ayent pas été l’origine du fon. A plus forte raifon , le ton peut être compofé , & de ce- lui du corps fonore , & de celui des corps refléchiffans. Ce fyftême du fon fuppofé, M. Dodart recherche de quelle maniere fe forme la Voix de l'homme & fes diffe- rens tons. | Dans notre gofier, & au haut de la Trachée Artere, qui eft le canal par où l'air entre dans les poulmons, eft une pe- tite fente ovale, capable de s'ouvrir plus ou moins, qu’on appelle la Glotte. , € long canal de la Trachée , terminé à fon extrémité fupérieure par la Glotte, reflemble fi fort à une flûte, que les Anciens n’ont pas héfité à croire que la Trachée produi- foit la Voix, comme le corps de la flûte produit le fon. Ga- lien 2 été le premier qui s’eft fauvé d’une erreur fi naturelle, & qui a crû que la Glotte étoit le principal organe de la Voix, fans ôter cependant à la Trachée une part confidé- rable de la production du fon ; car il n’arrive guéres que celui qui fe détrompe le premier d’une opinion commune, s’en détrompe entiérement , & les anciens préjugés lui laif fent ordinairement quelque tache dans l’efprit. Mais M. Dodart a fait réfléxion , que l’on ne parle & qu'on ne chante qu’en rendant l'air, & non pas en le re- Ci 20 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE cevant, qu'alors l'air qui fort des poulmons, pafle des plus petits vaifleaux de cette partie dans d’autres toujours plus grands, & de-là enfin dans la Trachée encore beaucoup plus grande & plus large ; que par conféquent fon cours deve- nant toujours plus libre & plus tranquile, & l’étant plus que jamais dans la Trachée, il s’en faut bien que Pair dans ce canal puifle fouffrir fa violence, & acquérir la vitefle néceffaire pour le fon ; mais que comme l'ouverture de la Glotte eft fort petite, par rapport à la largeur de la Trachée , il ne peut fortir de la T'rachée par la Glotte, fans augmenter extrêmement fa vielle, & précipiter fon cours ; qu'’ainfi il agite violemment en pañfant les petites parties des deux lévres de la Glotte, les met en reflort, & ‘leur fait faire des vibrations qui caufent le fon. Ce fon ainfi formé, va retentir dans la cavité dela bou- che & des narines, & M. Dodart remarque que tout Pagré- ment de la Voix dépend de ce retentiffement ; que quand on parle en fe bouchant le nez, la voix devient très-defa- gréable ; & que l’idée commune, felon laquelle le parler d& nez doit déplaire,. eft très-fauffe , puifqu’au contraire ce fon n'eft choquant , que parce que la bouche feule y a pris part fans Île nez. Afin que la Trachée fit le réfonnement, il faudroit que. Pair modifié par la Glotte pour devenir fon, au lieu de continuer fon chemin de dedans en dehors, rebrouffàt de dehors en dedans , & allàt frapper les parois de la Trachée; & c’eft ce qui n'arrive’ jamais, Hormis dans ceux qui ont une toux violente, ou qui, felon lexpreflion commune, parlent du ventre. Dans les premiers, les convultions irré: gulieres de la Glotte , la ferment quand l'air en veut for- tir, & le font rebroulfer en dedans , d’où il ne reffort qu’a- pes s'être fortifié par les réfléxions de la concavité de là rachée. Dans les autres , ce n’eft qu'une habitude, aidée peut-être de quelque difpofition naturelle, & qui produit en eux, quand ils le veulent, ce qui n’eft hors de-là qu'un: accident involontaire, f— D'ESs :S1C:1 BNC Rs: at :* Il eft vrai que dans la plüpart des Oifeaux de riviere , qui ontune Voix très forte , la T'rachée réfonne; mais c’eft ‘que la Glotte eft placée au bas de la Trachée, & non pas au haut comme dans l’homme. Ce canal qui avoit paflé d’abord pour le principal organe de la Voix, ne fera donc pas feulement le fecond & l’ac- cefloire , c’eft-à-dire, celui qui fera le réfonnement, & il ne fervira uniquement qu’à fournir l'air, comme fait le por- te-vent dans les Orgues. Il ne refte plus qu’à trouver la caufe des tons différenss. & puifque les organes qui forment la Voix, font un inftru< ment à vent, M. Dodart va chercher dans les inftrumens. à vent ce qui forme les tons. | Il eft poffible , comme nous l'avons dit, que le ton vien- ne du corps qui réfonne , & non pas de celui qui fonne: ‘Le Haut-bois ne rendroit aucun. fon, s'il n’avoit fon an- che, & fi celui qui joue , pouffant Pair par l'ouverture de cette anche ,.ne caufoit des frémiflemens & des vibrations dans les deux petites feuilles minces & très-mobiles , dont elle eft compofée. Mais le ton ne vient que de la longueur: -du Haut-bois, & Pair agité par l'anche dans la concavité de: Pinfirument, en va frapper les-parois intérieurs, ébranle les ‘fibres du bois difpofeés en long , les fait frémir, & entire un. on plus bas , quand elles font plus longues, & plus haut, quand elles font plus courtes. : L'anche ne laïfle Fe cependant d'avoir fon topar elle- même; mais le fon direét qu’elle rend , étant de beaucoup furmonté par le nombre infini de réfléxions que produit la. concavité de l'inftrument, tout ce que l'Art peut encore: ménager , c’eft que le ton de l’anche ne faffe pas une diflo- nance avec celui du Haut-bois ; qu'il sy accorde felon quelque rapport harmonique éloigné, car en ce cas il ne: peut yen avoir d'autre; & que par-là il le feconde & le for- tifie , autant qu'il eft poflible. Les Joueurs de Haut-bois ne fçavent trouver cette proportion qu’en tâtonnant..Demême- dans les jeux à bifeau de l'Orgue, c’eft une anche qui les: Ci, 22 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE fait parler , & la feule longueur du tuyau leur donne le ton. Il y a au contraire deux jeux d'Orgue, la Régale, & la Voix humaine , où l’anche feule donne le ton par la lon- gueur de fon reffort , & il faut que le tuyau s’y accorde , fe- lon quelque proportion muficale éloignée , ce que les Fac- teurs d'Orgue ne fçauroient encore trouver par des regles précifes. Dans les grands jeux d’anche de Orgue , la Trompette, la Cromorne, le Clairon , le ton vient également & de la .dimenfion dutuyau, & de celle de l'anche. Mais enfin dans l’inftrument naturel qui produit la Voix, que trouvera-t-on de femblable à ce qui fait le ton danstous ces différens inftrumens ? On ne peut, felon cette analogie, attribuer le ton qu’à la bouche & aux narines, qui font le réfonnement , ou à la Glotte qui fait le fon; & comme tous les différens tons font produits dans l’homme par le même inftrument, il faut que la partie qui les produit, foit capable de changemens qui puiflent y avoir rapport. Pour un ton bas, il faut plus d’air que pour un ton haut: La Trachée, pour laifler pañler cette plus grande quantité d'air, fe dilate, s’accourcit ; & en s'accourciffant, tire le ca- nal de la bouche, & l’allonge. Au contraire pour un ton haut, elle fe refferre, s’allonge & permet au canal de La bouche de s’accourcir. | On pourroit donc croire que le canal de la bouche, plus long pour les tons graves ; & plus court pour les aigus, ef jufiement ce qu'il faut pour la produétion des tons. Mais M. Dodart remarque que dans le jeu d'Orgue , nom- mé Voix humaine , où l’anche feule fait le ton , le plus long tuyau a fix pouces , & n’eft pas capable de donner le ton. La concavité de la bouche d'un homme qui a la boffe la plus creufe, n’a au plus que fix pouces de profondeur. Il n'y a donc pas d'apparence qu’elle puiffe donner le ton. Il ne refte donc que la Glotte. Elle formeràa les tons, aufli-bien que Le fon , & ce ne peut être que par les différens DES SCIENCES 23 changemens de fon ouverture. Elle eft ovale , & capable de s’élargir jufqu’a un certain point , ou de s’étrecir; & par- là les fibres des membranes qui la compofent, deviennent plus longues pour les tons bas, & plus courtes pour les tons hauts. Dans le même tems, la bouche qui allonge pour les tons bas, & s’accourcit pour les tons hauts, ajufte fon ré- fonnement à tous les tons différens , du moins felon quelque proportion muicale éloignée ; & la Nature , trop fage pour négliger rien, a fçu ménager jufqu’à ce retentiflement favo- rable. La ftrudure des Lunettes de longue-vûe:, reflemble à . - celle de l'œil ; les Trompettes qui augmententla Voix, pa- roiffent faites a-peu-près fur la même idée que les concavi- tés de Poreille ; mais nul inftrument à vent qui foit forti des. mains de l'Art, n’eft conftruit comme celui qui forme la voix de homme; il #y en a aucun quiproduife fes tons par le changement d’une même ouverture. Il femble même que la Nature ait eu deflein ge mettre cet inftrument tout-à-fait hors de la portée de limitation. D'abord, il feroit difficile que Art eût en fa difpofition des matieres aflez fléxibles pour en faire une ouverture qui pût changer à chaque moment; $& comme ces changemens doivent être pour chaque ton très-juftes & très-précis , ce feroit encore une difficulté invincible. Mais de plus, quand on verra par un calcul exa de M. Dodart , que pour tous lestons, & les demi-tons d’une voix ordinaire , pour tou- tes les petites parcelles de ton , dont elle peut hauffer une O&tave fans fe forcer , pour le plus ou le moins de force, qu’on peut donner au fon fans changer le ton, il faut nécef- fairement fuppofer que le petit diametre de la Glotte ; qui eft de moins d’une ligne , & qui change de longueur à tous ces. changemens, peut être & eft a@tuellement divifé en 9632 parties ; que même ces parties ne font pas toutes égales , & que par conféquent quelques-unes fontsbeaucoup plus pe- tites que la "= partie d’une ligne : quel moyen que PArt s4 HISTOIRE DE L'ACADEMI1E ROYALE des hommes püt jamais atteindre à des divifions fi fines &c fi délicates , & n’eft-on pas étonné que la Nature elle-même ait pu les exécuter ? D'un autre côté, il n’eft pas moins furprenant que l’o- reille, qui a un fentiment fi jufte pour les tons , s’apperçoive d'une différence dont l’origine n’eft que la = partie de moins d’une ligne. Dans tout ce calcul, M. Dodart a tout évalué fur le plus * bas pié, & s’eft bien gardé d’affeéter le merveilleux , hor- mis dans cette maniere d'évaluer tout fur le plus bas pié, qui n'a pas laiflé de le conduire à un nombre fi prodigieux. Ilne faut pas croire que les fibres de la Glotte pour pren- dre, par exemple, l'Oftave en enhaut d’un ton bas , doi- vent s’accourcir de moitié, &accourcir à proportion le pe- tit diametre de l'ouverture de la Glotte. Cela feroit vrai, fi elles ne faifoient les tons, que par leur différente lon- gueur, mais elles les font aufli par leur différente tenfon. Aünfi elles fonnent l'Oëtave en enhaut fans être accourcies . &e la moitié, parce qu’elles font en même tems plus ban- dées, & que ce qui manque à la mefure précife , eft préci- fément fuppléé par la tenfion. Mais enfin elles ne font plus bandées, que dans le même tems qu’elles s’accourciffent ; les accourciffemens du petit diametre de la Glotte fuivent tous les changemens qui leur arrivent; le nombre de 96 32 divifions de ce diametre fubfifte ; & la merveille de la for- mation des tons augmente, parce qu'une méchanique qui dépend de la jufte complication des longueurs & desten- fions dont même les proportions font différentes , eft plus difficile, que fi elle ne dépendoit que d'un feul de ces principes. . Mais que fera-ce, fi l'on fait réfléxion , que l’homme eft un affemblage de merveilles, ou femblables à celle-là , ou équivalentes , dont le nombre eft beaucoup plus grand que celui des divifions du diametre de la Glotte ? ” SUR DES SCIENCES. 25 SUR CE QUE DEVIENT L'AIR QUI EST entré dans les Poulmons. Chaque refpiration il entre dans les poulmons de A nouvel air, qui s'étant mêlé avec le fang que les veines pulmonaires vont porter au cœur , fort enfuite du cœur avec ce même fang , l'accompagne dans toutes les artéres où il fe diftribue , & lui donne Pimpulfion & la vitefle néceffaires pour la circulation. Mais cet air une fois parvenu aux extrémités des arté- res , & à la furface intérieure de la peau, que devient-il car enfin il doit fortir du corps, puifque chaque refpira- tion y en apportant de nouveau, il s’en feroit à la fin un tel amas , qu'il gonfleroit trop les vaifleaux, forceroit leur reffort, & le leur feroit perdre, arrêteroit le fang , ou ren- droit tout au moins la circulation fort pénible. Il ne paroît pas qu'il y ait là beaucoup de diffcuité, Puifque les pores de la peau laifflent échapper les fueurs , & principalement la matiere de linfenfible tranfpiration , qui eft en fi grande quantité qu'elle furpañle en un feul jour , ainfi qu'on le fçait par des expériences exaétes , les déjettions grofieres de plufieurs jours, il eft aifé de com- prendre que ces mêmes pores laïffent échapper en même tems une matiere aufli déliée que l'air. Comme cette penfée eft très-naturelle , apparemment les Phyficiens s'en font contentés, & n’ont pas crû qu’il y eût des recherches plus profondes à faire fur ce fujet. Mais c’eft-là un affez bel exemple de ces difficultés qui ne fe préfentent point d’abord, qu’on ne découvre que par ré- flexion , & qui coûtent quelquefois autant à trouver que le dénouement même de quelque autre difficulté. Si l'air pouvoit pafler au travers des pores de la peau avec les fueurs & les vapeurs , M. Mery demande pour- quoi il ne s’'évapore pas, quand on l’a-enfermé dans quel- PET OR D | kr. V. les M. pag: 211. 26 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE que gros tuyau de veine ou d’artére, dans un cœur, ou dans un eflomach ? De plus, pourquoi les Animaux s’enfleroient-ils dans le vuide ? Affürément c’eft l’air enfermé dans leur corps, & déchargé du poids de l'air extérieur, qui fe raréfie, & les gonfle ; & cependant cet air devroit fortir plus librement que jamais par les pores de leur peau. E Il eft vrai qu'il y a quelques Animaux qui jettent de l'air dans le vuide , mais M. Mery nie que ce foit par les pores de la peau. Il fort de l'air, par exemple , des Poiffons vi- vans, mais en obfervant le fait attentivement, M. Mery a trouvé qu’il fort de deffous leurs écailles , où il doit avoir de petites retraites que l’on ne connoifloit point encore ; & en effet, le corps des Poiflons ne défenfle point pour avoir rendu tout cet air. L'air ne fort donc point par les pores de la peau. Il faut donc qu’étant arrivé avec le fang aux extrémités des arté- res , il entre avec lui dans les petites bouches des veines, le fuive dans tout le refte de la circulation , & aille dans le ventricule droit du cœur, d’où il retourne dans le poul- mon par l’artére pulmonaire , au lieu qu'il y étoit entré par les veines. De ces artéres il rentre dans les véficules du poulmon , & fort enfin par la Trachée qui l’avoit apporté. Cette route n'eft pas feulement prouvée par la néceflité du raifonnement, elle l’eft encore par l’expérience, & par le fouffe. Si l’on confidére les caufes finales, & qu’on ofe deviner les intentions de la Nature, l'air n’eft pas moins néceffai- re au fang des veines, qu’à celui des artéres ; il paroît mé- me l'être davantage. Les veines n’ont prefque pas de reflort en comparaifon des artéres, & elles contiennent prefque la moitié plus de fang , & par conféquent elles ont encore plus de befoin d’une force étrangere qui leur aide à le pouffer. L'air affoibli & en quelque forte ufé par une circulation entiere qu'il a faite dans le corps, n’a plus après cela qu'à en fortir, & à céder la place à de nouvel air plus vif P pi DES SCIENCES, 27 DES VAISSEAUX OMPHALOMESENTERIQUES. Ous les Fœtus ont au moins deux enveloppes , ou membranes , l Amnios , & le Chorion. La plüpart des Animaux ont une troifiéme membrane » ” . . » qu'on appelle Allantoïde , ou Urinaire , parce qu’elle eft le réfervoir de l'urine des Foœtus. Mais il y a quelques Animaux, comme le Chien , le Chat, le: Lapin., qui ont jufqu’à une quatriéme membrane. À P 2 q J q q A 4 « 2 Les Anatomiftes font affez embarraflés à en découvrir l’u- fage, & l’on peut voir ce qu'en a dit M. Tauvry dans fon Traité du Fœtus. Cette quatriéme membrane a des vaifleaux fanguins ; que l’on appelle Omphaloméfentériques , parce que de cette membrane ils vont le long du cordon jufqu'à l’om- bilic, & aboutiflent dans le Méfentere. M. du Verney donne une defcription de ces vaifleaux ; qu’il prétend que M. Tauvri n’a pas bien connus. SUR L'ACTION DU FENTRICULE DANS : le Vomiffement. Onfieur Chirac, fameux Medecin de Montpellier ; ayant le premier propofé que le Vomiflement éroit produit par les mouvemens extraordinaires du diaphragme , & des mufcles du bas ventre, & non par les contrattions des fibres de l’eftomach , de forte que dans cette hypothe; fe , l'eftomach entiérement privé d’aétion , mais feulement V. les M; pag. 170. prefté & applati par des caufes étrangeres, repoufloit hors de lui les matieres qu’il contenoit , l'Académie voulut exa- miner une penfée qui s’attiroit déja par le feul nom de fon Aureur une prévention très-favorable. . M. du Verney, qui étoit dans la même opinion , & qui Di 29 HisToIRE DE L'ACADEMIE ROYALE avoit fait, comme M. Chirac, plufeurs Expériences fur des Animaux vivans, à qui il avoit donné des vomitifs, “entreprit de les refaire dans les Affemblées , & d’y rendre vifible toute la Méchanique du Vomifflement , dont il s'é- toit déja convaincu en particulier. Mais deux Expériences feules que l’on fit, ne donnerent pas aflez d’éclaircifle- ment, & Ja Compagnie fe trouva preffée d'employer à d’autres chofes le tems qu'il en auroit coûté pour recom- mencer. On s’en remit aux Obfervations que M. du Ver- ney pourroit faire encore plus à loifir. Quelques Anatonniftes, & principalement M. Littre op- poferent à fon Syftême, qu'il y a des perfonnes qui vomif- fent avec tant de facilité, que l'on ne peut s’appercevoir d’aucun effort, ou du moins d’un effort fuifant , dans le diaphragme & dans les mufcles du bas ventre ; que certai- nement les Animaux ruminans rappellent fans aucune vio- fence les alimens qu'ils ont déja pris; que l’on rend quel- quefois par la bouche ce qui eft entré par l'anus, & a été par conféquent pendant une grande partie de fon cours hors de la portée de lattion du diaphragnre & des mufcles du bas ventre; qu'enfin comme l'Oefophage , le Ventri- cule , & les Inteftins ne font qu'un même canal continu & revêtu par tout des mêmes fibres charnues, & que d'ail: leurs il eft conftant, que les Inteftins , outre leur mouve- ment périftaltique & naturel , par lequel en fe refferrant fuc- ceflivement de haut en bas, ils chaffent , felon cette di- rettion , les matieres qu’ils contiennent, ont encore le mou- vement antipériftaltique , & extraordinaire, par lequel ils fe refferrent de bas en haut , & font remonter les matieres , it n'eft pas vrai-femblable , que le refte du même canal, c’eft: a-dire, le Ventricule & l’'Oefophage n’ayent aufli quelque- fois ce même mouvement antipériftaltique , & qu’ainfi l’ac-- tion du Ventricule ne produife le Vomiffement. Il y a affez d'apparence , que quand la matiere aura été bien approfondie , les deux opinions fe trouveront vraies ,, fi ce n'eft en tant qu’elles prétendroient s'exclure lune l’au-- DES SCIENCES. ! ‘g tre. Le même Ventricule que l’on fuppofera capable d'a- gir par lui-même en contraétant fes fibres à contre-fens, ne peut-il pas aufli être fi violemment preflé de bas en “haut , que par cette feule caufe le même effet s’en enfuive? Après cela ces deux Méchaniques n'étant pas incompati- bles , pourquoi ne pourront-elles pas quelquefois jouer en même-tems? Rien n'empêche non plus qu'en quelques -efpéces elles ne foïent abfolument féparées, fans que l’on ait droit d'en tirer aucune conféquence pour d'autres ef -péces. Il n’y a encore rien de sûr, que de fufpendre les Propofitions générales. SUR LES PARTIES DESTINEES A LA Génération. | E myftere de la Génération , fi long-tems inconnu, L commence à fe développer. Le Syflême générai de cette Méchanique eft apparemment découvert, & l’on en ‘ft à certaines délicatefles d’'Anatonries, qui deviennent intéreffantes , quand on fe tient sûr du refte. * M. du Verney, qui a fait un grand nombre de recherches fur cette matiere, commença à les communiquer à l'A: cadémie. M. Littre y joignit aufli les fiennes, & la vérité fut d'autant mieux éclaircie, ou du moins les chofes dou- teufes d'autant mieux reconnues pour douteufes, que ces deux Anatomiftes ne s’accorderent pas toujours. D'abord M. du Verney examina ce qui regarde les Ani- maux mâles, & comme l’Anatomie comparée eft la plus inftruétive. & la plus eurieufe , il eut foin de faire toujours voir: les mêmes chofes fur plufieurs efpéces d’Animaux, fur l'Homme , fur le Cheval , le Bœuf, le Belier, le Chien, le Chat, le Rat, le Lapin, le Cochon d'Inde , & quelques autres. 11 fut queftion premierement du Prépuce. M. du Ver- ney fit voir de petites glandes , qui, felon La différentes. il] V. les M pag: 305%- 30 HISTOIRE DE L’ACADEMIE ROYALE efpéces d’Animaux , étoient attachées ou au Prépuce , ou au gland, ou à tous les deux. Leur fruure , & la liqueur qu’elles filtrent, deftinée à enduire , & à huiler le gland & le Prépuce, n’étoient pas moins différentes que leur fitua- tion. 1] conjeétura qu'il pouvoit y avoir de pareilles glan- des, mais fort petites , dans le Prépuce humain , & qu’el- lés feroient les fources de ce qu’on fçait par expérience , qui s’amafle peu-à-peu autour de la couronne. Ce ne fut qu'une fimple conjedure, & il avoua qu'il wavoit rien en- core qui le fatisfit pleinement fur cette matiere. Mais M. Littre crut pouvoir être plus hardi, & en convenant des glandes du prépuce de quelques Animaux, il foutint que dans l'Homme, c’étoitau gland qu’elles appartenoient,qu'il y avoit autour de la couronne des corps gros comme une foie fine de Porc, longs d’une demie ligne, de figure cilin- drique, pofés parallélement felon la direétion du gland, & éloignés lesuns desautres d’untiersde ligne,& qu’en les pref- fant on en faifoit fortir une matiere blanche & épailfe , qui fe formoit en filets , comme celle qu’on exprime des glandes des paupieres. Si l’on foupçonnoit que ces prétendues glan- des pouvoient n'être que Les mammelons de la peau du gland gonflés, M. Littre répliquoit que leur difpoñition trop exacte & toujours la même , leur nombre toujours égal , la grande délicateffe de la peau dontils feroient mam- melons, & qu'ils furpafferoient plus de quatre fois en épaif- feur , furtout la matiere qu'il prétend qu’on en exprime, ce qui convient à la nature de la glande , & nullement à celle de mammelon, ne permettoient guéres d’avoir cette penfée. La liqueur féminale telle qu’elle eft quand elle fort pour fon ufage, eft un mélange de plufeurs liqueurs que verfent en même tems dans le canal commun de l’Urethre, des glandes qui les ont travaillées , ou des réfervoirs qui les ont gardées. M. du Verney montra qu’en différentes efpéces le nombre & la.ftruéture de ces organes étoient différens. Dans l'Homme, les principaux font les Véficules fémi- naires & les Proftates. M. Couper, célébre Anatomifte RNA A FANS SMS ITANLNLEE 37 d'Angleterre, a découvert à chaque côté de l'Urethre, en- tre la naïffance des Mufcles Ereéteurs, & des Accéléra- teurs , de nouveaux corps glanduleux, qu’on peut appeller nouveaux Proftates, & dont les conduits excrétoires vien- nent s’ouvrir dans l’'Urethre , vers la naïffance de la Verge, & M. du Verney à fait voir que dans la plüpart des autres Animaux , ils fe trouvoient aufli, & placés de la même maniere. La queftion eft de fcavoir, fi L liqueur filtrée par ces nouveaux Proftates , fe mêle avec la liqueur féminale, & par conféquent eft néceffaire à la génération. M. du Verney croit qu’elle left, parce que dans les Animaux qui ont été coupés , ces glandes aufli-bien que toutes les autres fources de la génération fe trouvent deffeichées & flétries, que quelques malades , par l'endroit où ils défignent qu’eft leur mal, font juger qu'il eft à ces glandes , & que ce qui vient à quelques perfonnes trop immodérées dans les plai- firs, quand elles rendent les dernieres goutes d'urine, ne doit venir que de ces glandes fituées fous la naïffance des mufcles accélérateurs , qui juftement font alors en ac- tion. À cela M. Littre oppofe que les Proftares ordinai- res ayant plufieurs petits facs, où la liqueur filtrée fe dé- pofe > On conçoit bien qu'elle y attend quelque tems la néceflité de fortir , mais que les Proftates nouveaux de M. Couper, n’ont point de ces fortes de réfervoirs , que par conféquent la liqueur doit couler dans la cavité de l’Ure- thre à mefure qu’elle fe filtre , & être deftinée à quelque ufage continuel , & non pas momentanée ; de plus, que les conduits excrétoires de ces nouveaux Proftrates traver- fent le tiffu fpongieux de l’Urethre en rampant dans une étendue de deux poulces, avant que de pénétrer dans fon canal, & que dans les feuls momens où l’on prétendroit que cette liqueur devroit fortir, ce tiflu fpongieux eft dans un gonflement , & fes parois très-minces dans une compref- fion , qui ne permettent pas un cours libre aux liqueurs. Tous les Phyficiens fçavent préfentement quelle eft la firudure intérieure de la Verge, & delà ils conjedurent 32 HisToirs DE L'ACADEM1IE ROYALE ar quelle Méchanique elle prend la figure néceffaire pour fa fondion. Elle eft compofée des deux Corps Caverneux, qui ne font qu'un amas d’une infinité de petites cellules membraneufes, de l’Urethre, canal commun des deux liqueurs qui fortent par cet endroit, & d’un tiflu fpongieux qui accompagne l’Urethre dans tout fon cours, & ne dif. fére des Corps Caverneux , qu’en ce que fes cellules font plus petites, & qu'il eft par conféquent plus ferré. Ce qu’on appelle le Gland, n'appartient pas aux Corps Caver- neux, ce n'eft qu'une dilatation & un épanouiflement de la fubftance fpongieufe de l’'Urethre, recourbée & retrouf- fée fur les deux pointes Coniques des Corps Caverneux, qui viennent s’y terminer & s’y appuyer, fans autre communi- cation. C’eft l'illuftre M. Ruyfch d’Amfterdam, qui a le premier publié cette flruêture du gland; mais comme à caufe de quelques expreflions négligées dont il s’eft fervi, quelques-uns de la Compagnie doutoient de fon véritable fens, M. Bourdelin fut chargé d’étudier à fond ce point de fait dans le Livre de M. Ruyfch , & il trouva qu'à bien prendre fes paroles, on ne pouvoit lui refufer la gloire d'a. voir connu cette vérité. Il y a dans la Verge deux fortes de vaifleaux fanguins, les artéres & les veines Hypogaftriques, & les artéres & les veines Honteufes. Les premiers de ces vaifleaux fe répan- dent dans l’intérieur de la Verge, c’eft-à-dire , tant dans les Corps Caverneux, que dans le tiflu fpongieux de l’Ure- thre ; les feconds font extérieurs, & ne vont qu'aux tégu- mens & aux enveloppes de la Verge. Mr Ruyfch , du Verney & Littre , ont obfervé que les extrémités des veines Hypogaftriques font percées de trous affez fenfibles. Il eft clair que le fang qui doit paffer des artéres dans les petits filets des extrémités des veines, y paffera plus facilement en vertu de cette Méchanique. M. Mery la découvrit il y a plus de 27. ans dans les veines de la ratte du Veau, & parce que le befoin de faire ren- trer le fang dans les veines , eft le même par tout le corps, ER ere ee TM LEE. DES SCIENCES. 33 ê&c que la difficulté eft toujours affez grande , quoiqu’iné- gale en différens endroits, il foupçonne que toutes les ra- cines des veines pourroient bien être ainfi percées, mais qu'elles le feroient prefque partout d’une maniere infen- fible. Selon Popinion la plus commune aujourd’hui chez les Anatomiftes , la Verge ne change de figure que parce que des Mufcles gonflés d’efprits , compriment alors les troncs des veines Hypogaftriques, qui rapportent le fang tant des Corps caverneux que du tiflu fpongieux de l’Urethre, Ce fang qui n’a plus fon cours libre » refluë par les trous dont les extrémités de ces veines font percées , & va s’épancher dans ce nombre infini de cellules, qui auparavant étoient vaides , & afftiffées les unes contre les autres. Il les remplit & les dilate,& delà vient laugmentation du volume. Quand la verge reprend fa figure la plus ordinaire, c’eft que la com- preflion des veines Hypogaftriques ceffe , & que le fang re- commence à y couler. T'out celui qui étoit répandu & ex- travafé dans les fubftances fpongieufes , reprend d'autant plus aifément le chemin des veines , qu'il ÿ trouve partout ces grandes ouvertures , dont nous avons parlé. Quelque vraifemblable que foit cette Méchanique, lin- terruption de la circulation du fang fait pourtant toujours de la peine à l’efprit. Un mouvement continuel ef nécef. faire au fang ; s’il eft en repos, il fe coagule & s’altére, & felon la remarque de M. Bourdelin, qui examina fort aufli cette matiere, il y a des maladies, où par la longueur de cette interruption, qui dure plufeurs heures, le fang de- vroit abfolument fe figer, & devenir incapable de rentrer dans les vaifleaux & de reprendre fon cours, lorfque cet état violent feroit fini. Et même toutes les cellules mem- . braneufes, dont les petites fibres font apparemment autant de petits mufcles, qui en fe refferrant chaffent le fang hors d’elles quand il le faut, perdroient par une fi longue & fi violente extenfion toute leur force de reffort » & n’en au- roient plus pour donner aucune impulfion au fang. Enfin, il faut que les artéres Hypogafriques, re moins 1700. 34 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE comprimées que les veines , apportent toujours un peu de nouveau fang, & que devient-il , puifque les veines ne le rapportent point ? il romproit à la fin, & détruiroit toutes les cellules, qui ne le pourroient plus contenir. Pour prévenir ces difficultés, M. du Verney a préten- du que le nouveau fang toujours apporté par les artéres Hypogaftriques , quoiqu'en moindre quantité, retournoit; non par les veines Hypogaftriques qui leur répondent na- turellement, mais par les veines honteufes , qui rampent fur l'extérieur de la Verge, & font exemptes de compref- fion. Par cette ingénieufe Méchanique, la Nature aura tou- jours entretenu une circulation imparfaite , & aura fourni aux artéres Hypogaftriques des vaiffeaux de décharge, qui ne leur en ferviront qu’en cette occalion. Mais comment le fang des artéres Hypogaftriques paffe- t-il dans les veines honteufes, qui ne leur répondent pas? quelle eft la communication de ces vaiffeaux ? : M. du Verney montra par le fouffle qu'une partie des veines Hypogañriques communiquoient avec fé veines honteufes. Ainfi le fang nouveau des artéres Hypogañtri- ques qui enfile d'abord le chemin ordinaire des veines Hy- pogaftriques, les trouvant engorgées, eft obligé de fe dé- tourner dans les veines honteufes , qui communiquent avec elles. M. Littre ne convint point de ce changement du cours naturel de la circulation. Il accordoit bien qu’elle fe fai- foit plus lentement , à caufe de la compreflion des vaiffeaux, mais non pas qu'elle fe fit par d’autres routes. La com- preflion de la veine Hypogaftrique n’eft point , felon lui, affez grande pour arrêter entierement le cours du fang, le tronc de cette veine eft logé dans une efpéce d’enfonce- ment ou de canelure que laïffent entre eux les deux corps caverneux , & qui femble le garantir d’être fortement come primé. En même-tems, & par le fouffle , M. du Verney fit voir que les veines du tiffu fpongieux de l'Urethre communi- quoient avec celles des corps caverneux, & avec les vei- E Pr DES SCIENCES. Se. nes honteufes. Il eft vrai que la maniere dont il préten- doit que fe faifoit cette communication fut conteftée par quelques autres Anatomifles , & principalement par M. Littre. M. Bourdelin propofa divers expédiens pour ap- profondir cette Méchanique ; car > & le fouffle , & les in- Jedions , & toutes les autres opérations des Anatomiftes, ont, felon la différente difpofition des parties, des incom- modités différentes qu’il faut prévenir, ou des fignes équi- yoques qui r’éclairciffent rien , de forte que le choix feul des opérations , ou la maniere de les faire , demandent une aflez grande étude. Quand les Anatomiftes de la Compa- gnie reprendront cette matiere > On n'aura qu'à fuivre les yüës de M. Bourdelin. Tous les préliminaires , pour le moins, font arrêtés. DIVERSES OBSERVATIONS ANATOMIQUES,. I. M OnstEur Poupart faifant la diffedtion d’une fille âgée de fept ans, trouva qu’elle n'avoit du côté gauche ni artére ni veine Emulgente , ni Rein ; ni Uretére , ni ar- tére ; ni veine Spermatique , & même il ne vit nulle ap- parence qu'aucune de ces parties y eût jamais été » & fe für flétrie ou détruite par quelque indifpofition. Le Rein & l'Uretére du côté droit étoient plus gros qu'ils ne font na- turellement , parce que chacun d’eux étoit feul à faire*une fonétion qui auroit dû être partagée. Cette fille avoit un Ovaire du côté gauche, mais infé- cond, puifque la veine & l’'artére Spermatique lui man- quoient. D'ailleurs, la Trompe de ce même côté n'avoir point de pavillon ; autre principe de ftérilité pour le côté - gauche. $i le droit eût été difpofé de même , & que cet- te fille eût vêcu , fa férilité auroit été infaillible , & inex- plicable. 4 E ij 36 HisToIRE DE L'ACADEMIE ROYALE IT. Feu M. Tauvry fit part d'une lettre qui lui avoit été écrite par M. Courtial Médecin de Touloufe, fur une femme âgée de 21. à 22. ans , qui d’abord ayant eu la fié- vre, commença enfuite à fouffrir de grandes douleurs dans tout fon corps, à ne pouvoir plus du tout fe foutenir fur fes piés , à devenir contrefaite , & même à décroître fi fen- fiblement, qu'en 18 ou 19 mois de maladie, elle perdit un pié fur fa hauteur. On ne la pouvoit remuer fans que fes os pliaffent, elle enfla de tout fon corps, & fa peau de- vint confidérablement plus épaiffe & plus dure. Cepen- dant elle mangeoit beaucoup. Quand elle fut morte, on trouva tous fes os plus mous que de h cire, hormis les dents qui avoient confervé leur dureté naturelle. Ils étoient plus aifés à couper que les chairs; quelques-uns ne paroif- foient plus que des chairs fongueufes & mollafles, divifees en plufieurs lobes de figure irréguliere , abreuvées de fé- rofités fanguinolentes , fans aucune cavité ni apparence de moëlle: Toutes les autres parties du corps étoient dans leur état naturel. Dita M. Homberg a parlé d’une jeune femme de 20 ans, qui avoit été faignée 20. fois en fix mois , & qui ayant pris un lavement avec de l’eau- de-vie & du camphre, fentit au même inftant l’eau-de-vie dans fa bouche, fut tout à fait yvre , ne rendit point le lavement, & urina beaucoup, ce qu’elle ne faifoit pas auparavant avec tant de facilité. TV. ÏL courut pendant quelque tems un bruit abfurde d’une groffeffe d'homme ; mais tout abfurde qu’il étoit , il avoit quelque fondement : & en effet, comme on eut la curio- fité de l’approfondir , on apprit un accident fort fingulier, dont M. de S. Donat Chiurgien de Sifteron écrivit læ DES SCIENCES. 37 Relation à M. Reneaume. Un jeune homme à l’occafon de quelques privautés qu’une femme lui avoit permifes , en le retenant pourtant dans de certaines bornes , fentit à un des tefticules une douleur très-vive , qui lui dura ainfi deux heures , & ne cefla entiérement que dans le refte du jour. Il s’apperçût quelques jours après qu'il avoit au mé- me endroit une tumeur grofle comme une noifette. Six mois après elle fut plus groffe qu'un œuf de Poule d'Inde. Elle ne lui caufoit point de douleur. Mais enfin , comme dans les deux mois fuivans, elle augmenta démefurément, M. de S. Donat lui en fit lamputation , après l'avoir fé- ÉR de toutes les tuniques:qui compofent le fcrotum. Il e trouva là-dedans une mafle de chair très-blanche., très- folide, & fans fibres, contenue comme dans unarriere- fax, & nâgeant dans une quantité: d’eau, qui auroit rem- pli une grande écuelle. : M. de S.. Donat ayant ouvert cette mafle de chair , vit dans le centre un globe offeux , qui avoit comme deux or- bites remplies de deux petites veflies noires, pleines d’eau, & aflez femblables à lUvée. Au bas dece globe il y avoit: une dépreflion comme celle du palais. Ce globe étoit tout folide, & fans cavité , il en fortoit tout à l’entour comme: des rayons offeux en forme d'étoile, mais fans aucun ar rangement régulier. La playe du Scrotum qui étoit très. grande , fut guérie plus promptement que les autres playes. n'ont coûtume de lêtre. Le: faux air de tête qu'avoit ce: globe, cette efpéce d’arrierefaix , le tems de huit ou neuf mois ; avoient donné lieu à la Fable de la groffeffe , quoi- que dans cette occafion la Fable ne fût pas néceffaire pour le Merveilleux. V.. M. Reneaume apprit aufli par une-Eettre de: M. du: Poirier Médecin de Tours, les faits extraordinaires.qu’om avoit vûs à la. diffe&tion du corps d’une Sœur de- la.Chari-. té de cette Ville: Elle étoit d’une vie fortréguliere } d'un: tempérament mélancolique ; fujette à de grandes. migrai-- ii}. 38 HISTOIRE DE L'AcADEMIE ROYALE nes, & n’avoit Jamais été réglée. Etant tombée un jour fur la tête, elle y fentit toujours de la douleur, & eut de grandes infomnies , cependant fans fiévre. Enfin elle rom- ba dans un délire mélancolique &c férieux, & après fix mois de ce délire qui étoit augmenté fur la fin , elle fe jet- ta une nuit par la fenêtre de fa chambre, & fe tua. On louvrit. Les Ventricules du cerveau contenoient peu de férofité. On trouva dans l'un & dans l’autre trois excroif- fances de couleur brune, de la groffeur d’une noifette , oblongues , d’une confiftance folide & glanduleufe , atta- chées à la Pie-mere par un pédicule long de deux ou trois lignes, & gros comme un crin de Cheval. On n'y put dif tinguer , comme on fait dans les glandes, ni artére , ni veine, ni nerf , ni vaifleau lymphatique. Dans le ventre inférieur , l'Ovaire droit éroit gros comme le poing, & le auche , du volume & de la figure d’un gros œuf de Pou- Fe Le Chirurgien ouvrit le droit , dont il fortit beaucoup de pus liquide fans odeur, il refta une mafle qui éroir com- me une grofle pelotte de poil empâté avec une efpéce de fuif. L'entrée de la Trompe étoit enfermée & engagée dans l'Ovaire dilaté , & prefque détruite par les matieres de l’abfcès , & la Trompe n'étuit plus qu'une efpéce de fiftule ; par laquelle le pus féreux de l'Ovaire pañloit dans lUterus , & de-là dans le Vagin. VX Ux Chirurgien apporta à l'Affemblée un fait particu- lier. Un homme qui étoit à la chafle s'étant détourné la tête du côté droit, avec un grand effort, il eut beaucoup de peine à fe remettre dans fa fituation naturelle , & depuis ce moment il fut toujours malade, ne pouvant ni avaler ni refpirer qu'avec grande difficulté. Il mourut au bout de 15. mois, & on lui trouva l’Aorte extraordinairement dilatée , un grand fac aneurifmal dans 1a Souclaviere droi- te, lOefophage & la Trachée extrêmement preflés par ce fac, les Clavicules écartées , & un morceau d’os qui man- DES SCIENCES L 14% quoit au Sternum , renfermé dans le fac aneurifinal. 11 n’eft pas aifé de comprendre comment cet os y avoit pû entrer. L 1 VII. M. Littre fit voir une Ratte d'homme entiérement pé- trifiée. Elle tenoit à tous les Vaiffeaux où ligamens auf. quels la ratte tient naturellement, enforte qu'on ne pou- voit douter que ce ne füt ce vifcere. L'homme avoit 60, ans , il étoit mort d’une chûte, & l’on n’avoit aucune con- noïffance qu’il fe fût jamais plaint de la ratte, ni d'aucun mal qui y eût rapport. Il étoit même très-gai, quoique la ratte ne fit en lui aucune fon@tion, & que l’on croye communément qu'en purifiant le fang , elle contribue à la gayeté. Cette ratte pétrifiée pefoit une once & demie. VIIL M. Littre montra aufli une partie de la membrane d’une Ratte d'homme devenue offeufe. IX. QUELQU'UN de la Compagnie , qui eff fujet à une réten- tion d'urine , a dit qu'un jour qu'il en étoit travaillé, le Chirurgien ayant introduit la fonde , elle ne rapportoit que du fang , parce qu’apparemment il y avoit quelque vaiffeau fanguin rompu. Cependant le malade fouffroit cruellement. Le Chirurgien s’avifa fur le champ de rem- plir de beurre le bout de la fonde, après quoi elle alla jufqu'à la veflie , & fit venir l'urine , foit parce que ce ne fut que dans la veflie que le beurre fut affez échauffé pour fe fondre , foit parce qu'il fe laiffa plus facilement pénétrer par l'urine que par le fang qui eft plus épais. X. M. du Verney a rapporté qu’un enfant de cinq ans qui fe ao Histroire DE L'ACADEMIE ROYALE plaignoit toujours d'une violente douleur à la racine du nés, ayant eu pendant trois mois une fiévre lente, & à la fin de grandes convulfions , on lui trouva après fa mort dans le finus longitudinal fupérieur du cerveau, un ver d'environ quatre pouces de long, femblable à ceux de ter- re. Ce ver vêcut depuis fix heures du matin, jufqu'à trois heures après midi XL IL raconta en même tems qu’une fille qui faifoit fon lit, en ayant par hazard avalé une plume, elle fentit une gran- de douleur, & eut enfuite une tumeur à côté du Larinx , & que cette tumeur ayant été ouverte, la plume en fortit aufli-tot. XIL Iz a fait voir fur une Grenouille fraîchement morte, qu’en prenant dans le ventre de l'animal les nerfs qui vont aux cuiffles & aux jambes, & en les irritant un peu avec le fcalpel, ces parties frémiffent , & fouffrent une efpéce de convulfion. Enfuite il a coupé ces mêmes nerfs dans le ventre , & les tenant un peu tendus avec la main, il leur a fait faire le même effet par le même mouvement du fcal- pel. Si la Grenouille étoit plus vieille morte , cela n'arri- veroit point. Apparemment il reftoit encore dans ces nerfs des liqueurs, dont l’ondulation caufoit le frémiflement des parties où ils répondoient, & par conféquent les nerfs ne feroient que des tuyaux, dont tout leffer dépendroit de la liqueur qu'ils contiennent. XIIL Dans le cœur d’un homme de 20. ou 22. ans, qui s'étoit noyé ; M. Littre fit voir le trou ovale ouvert. Du moins la membrane qui le ferme s’étoit-elle fi légérement col- lée , qu'en maniant ce cœur, elle s’étoit détachée , fans y’on s’en apperçüt, . + XIV. DES SCIENCES. EU à AVE L'ACADEMIE a vü entreles mains de M. Lemery ‘une pierre trouvée. dans la veflie d’une Cavale | & qui pefe 23 onces 7 gros. Elle a de diametre 4 pouces + d'un fens, & 4 pouces + de l’autre. Elle eft de la groffeur d’un mé- diocre melon , couverte d’une efpece de peau liffe & lui- fante. Sa fubftance eft de couleur cendrée, & elle s’eft dur- cie depuis qu'elle a été tirée de l’animal , quoiqu’elle foit toujours fort friable. Elle a aufi perdu en fe féchant une forte odeur d'urine qu’elle avoit, d’abord. OV M. Lémery a aufi apporté à l'Affemblée un petit Lic- vre monfirueux, ou plutôt deux Liévres joints enfemble depuis la tête jufqu'à la poitrine. Ils w’avoient qu'une tête, -& qu'une face , quoiqu'ils euflent quatre oreilles. Ils n’a- voient à la place de la gueule qu'une petite cavité fans au- cune ouverture pour recevoir les alimens. Cependant ils vê- curent, & mêmehors du ventre de la mere; car ils furent pris à la main par un Chaffeur. L’Animal double. marchoït dans un bois ;:mais l’un des petits Liévres tiroit d'un côté, Pautre de l'autre , & ils n’avançoient guére. On à dità M. _Lemery, qu’en les ouvrant, on leur avoit trouvé à cha- cunun cœur, un poulmon , un eftomach , le tout bien fain. X VI M. Mery fit la defcription de deux Fœtus jumeaux mâ- des, qu'il venoit de voir. Il n’y avoit pour tous deux qu'un placenta, mais ils avoient chacun leur cordon, & leurs en- velopes féparées. Dans l’un & dans l'autre de ces Enfans,, TOmbilic formoit en dehors une efpece de bourlet de 3 à 4 lignes d’élévationau- deflus de la furface du ventre, -& éroit ouvert d’un trou de 7 à 8 lignes de diametre. L’in- teftin Colon finifloit à ce rebord de l'Ombilic , & le per- çoit d'un trou qui avoit une-ligne & demie d'ouverture, 1700. 42 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALR & fervoit d’anus à ces Enfans. Le fond de la vefie éroit auffi ouvert d’un trou, dont l'embouchure, de même que celle du Colon, fe terminoit au rebord de l'Ombilic, de forte que les urines alloient immédiatement dans les mem- branes du placenta. Cependant Purethre & le gland étoient percés dans ces deux enfans ; mais le prépuce étoit ouvert dans l’un & fermé dans l’autre. Ils fortirent vivans du fein de leur mere. UN SE UN autre enfant monftrueux, que vit M. Mery, avoit lépine du dos contournée de telle forte , que la face, la poitrine & le ventre étant vûs par-devant, les parties exté- rieures de la génération, les genoux & les pieds fe trou- voient placés au derriere du corps. Les trois capacités de latête, de la poitrine & du ventre, étoient toutes ouver- tes , la voûte du crâne manquant à la tête , le fternum, & le cartilage des côtes à la poitrine, & au ventre tous fes mufcles, & le peritoine. Les poulmons étoient petits, flé- tris & defléchés, & le cœur avoir une firuéture particu- liere. Les oreillettes ne faifoient point deux cavités fépa- rées, non plus que les deux ventricules. Les veines du poulmon , & les deux troncs de la Cave, avoient leurs em- bouchures dans la cavité commune aux deux oreillettes , qui communiquoit par une grande ouverture dans la ca- vité qu’on pouvoit appeller ventricule droit, & par une fort petite, dans le paffage du ventricule droit au gauche. L’ar- tere du poulmon, & l'aorte tiroient leur origine du ven- tricule gauche. Il n’y avoit point de trou ovale, & l’on voit aifément qu'il eut été inutile. Le fang des veines étant recû dans la cavité commune aux deux oreillettes ; la plus grande partie devoit pafler dans le ventricule droit , & de- là, comme ce ventricule n’avoit point d’artere , dans le ventricule gauche, puifque les deux communiquoient en- femble. Và l'état où étoit le poulmon, prefque tout le fang avoit toujours enfilé la route de Paorte, & le poulmon PET DES SCIENCES. 43 n'en avoit prefque pas recü de l’artere pulmonaire. X VIIL Une fille âgée de 20 à 22 ans, d’un bon tempérament, après une fiévre intermittente , qu'on arrêta par les remé- des ordinaires, fut attaquée d’une extinétion de voix; qui lui dura fans intermiflion pendant un an & demi. Les remé- des qu’on a coutume de faire pour cette incommodité, ne la foulagerent point ; feulement quand on lui faifoit pren- dre le demi-bain , elle recouvroit quelquefois la parole dans Peau , mais avec beaucoup d’enrouement. Quand elle avoit la fiévre, elle parloit dans le chaud. M. Lemery à qui cette maladie fut confultée par relation, ayant ordonné différens remédes , que le raifonnement phyfique lui fai- foit imaginer, & qui délivrerent la Malade de quelques in- commodités qui lui étoient reftées après fa fiévre, mais non pas de fon extinétion de'voix, en ordonna un prefque par hafard , qui fit un effet étonnant. Ce furent des Herbes vul- néraires en guife de Thé. Dès qu’elle en eut pris la premiere fois , fa voix revint pour demie-heure, puis s’éteignit de nouveau. Mais en continuant l'ufage de cette infufion de Vulnéraires, foit chaude, foit froide , elle fit revenir fa pa- role peu-à-peu , de forte qu’elle ne la perdoit plus que le foir, principalement fi elle fe promenoit au frais; mais en- fin dans ce cas-là même, elle en étoit quitte pour prendre deux cueillerées de fes Vulnégaires. A peine a-t-elle ceffé de boire , qu’elle parle. On a crû que la vertu des Vulné- räires pouvoit n'être que celle de l'eau chaude, mais elle a-bû plufieurs fois de l’eau chaude inutilement. Les décoc- tions d’'Herbes qui abondent en acides, & même le Caffé & le Chocolat, la falade , les fruits crûs, le Poiffon, la fou- e maigre, trop d'intervalle entre les tems où elle mange, 1 éteignent la voix. La viande, le lait, ni le vin ne font point cet effet. Elle porte toujours une bouteille de fon anfufion de Vulnéraires, pour s’en fervir dans l’occañon , & elle dit qu'elle a fa voix dans fa poche. Le 1] 44 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE XTZÆ UN jeune garçon étant tombé d’affez haut, fe fit une playe fur la Suture Sagittale , un peu derriere la tête. II ne parut d’abord qu’une fente à la chair de deux travers de doigt, & l'os n'étoit point découvert. La playe dans tour fon progrès ne s’étendit que de.la largeur de quatre doigts, par une legere pourriture qui y furvint, & enfin elle paroïf- foit peu confidérable dans toutes fes circonftances. L'os commença à fe découvrir pa le milieu de la playe, & puis on apperçut fur la Sagittale un petit trou, par où fe faifoit une abondante fuppuration, qui tenoit lieu de trépan. De tems en tems la fuppuration s’arrêtoit pour quelques jours ; & puis recommençoit. Quand elle étoit arrêtée, le malade avoit quatre ou cinq fois le jour pendant un quart- d'heure, de grandes convulfions au bras droit & à la ma- choire dumême côté. Elles ceffoient abfolument , quandla fuppuration revenoit. L’os découvert s’exfolia très-bien ; il fat recouvert de chairs fort vermeilles, & la fracture fur entiérement foudée, ce qui fut caufe que vers le 46°. jour la fuppuration ayant tout-à-fait ceflé , les convulfions recom- mencerent, toujours aux mêmes parties , & du même côté. La fiévre qui wavoit prefque pas paru, fe déclara, &s’en- flamma de telle forte , qu'elle emporta le malade le 51°. jour: Après fa mort , M. Poupart qui avoit obfervé le cours de la maladie , examina le Crang, & y trouva une fellure toute foudée , écartée de plus d’une ligne , & longue de plus d’un demi-pié, Cependant la Dure-mere wétoit ni enflammée ni altérée ; aufli les yeux du malade n’avoient-ils été ni doulou- reux , ni bouflis. Toutle lobe gauche du cerveau étoit abf- cédé; le droit fort fain, aufli-bien que tout Le Cervelet. Ce font des fujets aflez dignes de réfléxion , que cette fuppu- ration périodique ; les convulfions qui prenoient, quand elle s’arrêtoit; qui prenoient au côté droit, quoique l'abfcès du cerveau füt au côté gauché ; la moitié du cerveau pourri & prefque point de fiévre, que les derniers jours , ni d'in> DES SCIENCES. 45 flammation à la Dure-mere ; une fraêture au Crâne de plus d’un demi-pié de long, & malgré tout cela s 1 jour de vie. M. Poupaït a rappoïté que M. Chirac de Montpellier avoit vû aufli un homme qui ayant un petit abfcès au côté droit du cerveau, avoit eu des convulfions du côté gauche. Ces remarques pourront donner quelque ouverture pour le Syfême des mouvemens dont le cerveau ef l’origine. On apprend de-là que le principe & l'extrémité de deux diffé- rens mouvemens fe croifent. PUR X X. A cette même occafion , M. Poupart parla encore d’u- ne Femme à qui il avoit fallu enlever la moitié du Crâne, & qui s’en fervoit à recevoir l’aumône. Comme elle avoit donc la moitié de la Dure-mere découverte , un jour que . quelqu'un a lui toucha legerement avec le bout du doigt, elle jetta un grand cri, & dit qu'on luiavoit fait voir mille chandelles. X CT. M. Littre a fait voit un Fœtus humain monftrueux , qui avoit au derriere de la tête une efpéce de bonnet, com- me les petits Laquais , qu’on appelle Dragons. Il avoit que la bafe du crâne. Les fept vertebres du col qui doivent . être fermées & faire un canal, étoient ouvertes , & la gran- deur de l'ouverture diminuoit toujours du haut jufqu’au bas. Le petit capuchon, qui étant conique, diminuoit aufli dans Le même fens, s’appliquoit fur ces ouvertures, & par fa f- gure proportionnée à la leur, les fermoit affez exattement. M. du Hamel a continué fon Hifloire Anatomique, ou la comparaifon de l’'Anatomie ancienne & de la moder- ne. Ila parlé plufeurs fois du Cerveau, & des efforts, [a plôpart inutiles, que l'on à faits jufqu’ici pour en dévelop- er la frudure , & en découvrir précifément les fonétions.. Éans des deux parties quicompofent __ > k plus Hj Voy. les M. pag. 1. & 76. 46 HISTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE inconnue eft l’Ame ; aufli de toutes les Parties du corps; celle qui a le plus de rapport à l'Ame , eft la plus inconnue. LEE ÉD DE DL D É JR ÉTÉ D D HE YA DRE ED DE à CMPET--MeRr E ANALYSE. DE L'IPECACUANEHA. A Médecine moderne a plufeurs remédes inconnus L à l’ancienne, & aufli infaillibles que des remédes peu- vent l’être. Il y en a quelques-uns, comme l’Antimoine & le Mercure, dont apparemment l’ufage a été prévû & de- viné par quelque raifonnement ; d’autres comme le Quin- quina & l’Ipecacuanha font de pures faveurs de la Nature. Nous les avons reçües immédiatement de fes propres mains, ou plutôt de celles d’un Peuple fauvage qui ne con- noît qu'elle. Mais après en avoir reçû ces préfens, il faut tâcher de les rendre encore plus utiles par le fecours de tout ce que PArt & la Réfléxion y peuvent ajouter. C’eft ce qu'a fait M. Boulduc fur l'Ipecacuanha. Ce reméde s’eft préfenté le premier à lui dans l’entreprife qu’il a faite d’examiner chi- miquement tous les Purgatifs. L'TIpecacuanha eft une racine qui vient du Brefil , & qui eft fouveraine pour les difenteries. Il y a de trois fortes d'Ipecacuanha , le blanc qui eft le plus foible, le brun qui eft le plus violent, & le gris qui tient le milieu entre les deux. M. Boulduc a d’abord travaillé fur le gris. La diftila- tion ne lui a pas donné de grandes lumiéres ; mais par l’Analyfe qu'il appelle d'Extraétion , il a vû que ce Mixte DES SCIENCES. 47 contenoit des parties falines, & fulphureufes ou réfineu- fes, les falines en plus grande quantité. Il à tiré ces deux efpéces différentes de principes, chacune avec le diffolvant qui lui convenoit, les parties falines avec de l'eau de pluye diftilée, les fulphureufes ou réfineufes avec de l'Efprit-de-vin bien reétifié, Et même comme dans ce compofé les fels dominent beaucoup fur les foulfres , M. Boulduc jugea qu'il ne feroit pas impofible que les fels diflous par l’eau entrainaffent les foulfres , ou aidaffent à l'eau à les diffoudre ; & qu’ainfi l’eau tirât feule prefque tous les principes aëtif du Mixte , ce qui fut confirmé par l’ex- périence. { Ces extraits d'Ipecacuanha gris, l’un contenant les parties falines , l'autre les réfineufes, M. Boulduc les a éprouvés fur différens Malades avec les précautions né- ceflaires, & il en rapporte fidélement lhiftoire. Il à mé- me éprouvé le marc ou réfidu de la racine , qui avoit été dépouillé, tant par l’eau que par l'Efprit-de-vin, de fes parties falines & réfineufes, & ce marc ne s’eft pas trouvé fans vertu. Par les expériences de M. Boulduc , on pourra compa- rer leffer des parties fälines à celui des parties réfineufes, fi ce n’eft qu'on veuille attendre un plus grand nombre d'expériences, qui ne feroient effeêtivement pas inutiles pour une comparaifon plus füre. M. Boulduc a opéré felon la même méthode fur l’Ipe- cacuanha blanc, & fur le brun. - Fe. Le brun a beaucoup moins de parties falines & réfineu- fes que le gris, & cependant il eft plus violent dans fon action. Voilà de ces occalions où l'expérience redreffe, ou plutôt dément les raifonnemens les plus vraifembla- bles. 11 faut que dans lIpecacuanha ce ne foit pas la quan- tité des principes aétifs, mais une certaine dofe qui fafle la force. Pour lTpecacuanha blanc, il a beaucoup moins de réfi- ne que le gris, & feulement un peu moins de fels. Il à Voy. les M. pag. 64. # Pag. 52. 48 HisToirg DE L'ACADEMIE ROYALE donc fort peu de parties réfineufes , à proportion des fali- nes , & comme il eft le plus foible des trois , on peut croire que fà foibleffe vient ou du peu de parties réfinsufes qu'il contient , ou du peu qu'il en a par rapport à la quantité des falines. SUR LA FORCE DES ALK ALI TERREUX. I la force des Acides confifte à pouvoir difloudre, celle des Alkali confifte, pour ainfi dire, à être diffolu- bles, & plus ils le font, plus ils font parfaits dans leur genre. On a vü dans l'Hiftoire de l’année précédente * la mefure que M. Homberg donna de la force des Aci- des, maintenant il donne celle de la force des Alkali. Rien n’eft bien connu en Phyfique , que ce qui eft réduit à des mefures précifes; & l'Art de mefurer eft d’autant plus in- génieux qu'on l’applique à des fujets qui en paroiffent moins fufceptibles. M. Homberg n'examine que les Alkali qu’on appelle T'erreux , tels que les yeux d’Ecrevifles, le Corail, les Perles, les coquilles d'Huitre, le Bézoar , la Chaux vive, la corne de Cerf calcinée, &c. Ce font ceux qu’on employe le plus fouvent dans la Médecine, & qu’il eft par conféquent le plus important de connoïtre. Voici comment M. Hom- berg s’eft conduit dans fa recherche. Il y a deux fortes principales d’Acides , les Eaux Rega- les , qui font faites d’Efprit de Sel, & diffolvent l'Or ; &les Eaux fortes, qui font faites d'Efprit de Nitre , & diflolvent l'Argent. . Comme M. Homberg avoit deffein de voir le différent rapport de ces deux Acides aux mêmes Alkali Terreux, il étoit obligé d’avoir les deux Efprits Acides tellement conditionnés, que dans un volume égal ils euffent une force égale. Pour cela il les a déflegmés l'un & l'autre, juiqu'à ce qu’en même volume, ils pefaflent également; DES SCIENCES. 49 & il a trouvé par fon nouvel Aréometre qu’en cet état ils étoient d’un cinquiéme plus pefans qu’un égal volume . d'Eau de Riviere. Il a donc conclu que le flegme dans le- quel nagent les fels des deux Efprits étant de même na- ture, & de même poids que l'Eau de Riviere, cette cin- quiéme partie que les Efprits pefoient au-delà , venoit des fels, & qu'ainfi les fels qui font toute la force des Efprits, avoient de part & d’autre un poids égal. Cela fait, il a appliqué féparément à tous les Alkali Ter: reux, une once d'Efprit de fel , & puis une once d’Efprit de Nitre , & ila vü les différentes quantités qu'il falloir de ces Alkali , pour fe charger, autant qu'il étoit poflible , & fe raffafier, foit d’une once d’Efprit de fel, foit d'une once d'Efprit de Nitre. Les différentes quantités de chaque Alkali néceflaires pourabforber la même quantité de Pun ou de l’autre de ces Acides réduits à la même force, font la mefure de la force affive de chaque Alkali; & pour rendre cette mefure tout- a-fait précife , il y faut joindre encore le plus ou le moins de tems qu'il a fallu à chaque Alkali pour abforber les Acides. ch L'Efprit de Nitre a toujours diffous une plus grande quantité de chaque Alkali, que l'Efprit de fel. Apparem- ment les fels Acides qui entrent dans la compolition du fel commun , font plus maflifs, & par-là moins pénétrans, que les fels Acides du Nitre. Ce qui appuye cette conjec- ture , c’eft que dans l’once d'Efprit de fel , & dans l’once d'Efprit de Nitre, les fels Acides étoient en poids égal; & par conféquent il fe pourroit bien faire que les uns étant plus grofliers pefaflent en moindre quantité autant que les autres, & fiflent moins d'effet, parce qu'ils feroient en moindre quantité, La comparaifon des forces des différens Alkali conduit M. Homberg à une découverte nouvelle , & fort contraire à l'opinion commune. IL trouve que la Chaux éteinte , quoique dépouillée de plufieurs principes:très - vi que 1700. V. les M, P. 7le so HisToiRe DE L'ACADEMIE ROYALE Fon fuppofoit être des Alkali volatils , eft cependant un auf grand Alkali que la Chaux vive. Ces principes adifs qu'elle a perdus , ne font donc pas des Alkali, & l'on n'ima- gine point qu'ils puiflent être autre chofe que des parti- cules ignées que la calcination avoit fait entrer dans la Chaux. Il eft vrai que d’abord ces particules ignées, fixées, & devenues immobiles dans les pores d'un corps, révoltene un peu l'Efprit. Mais enfin le Régule d’Antimoine calci- né au Miroir ardent augmente de poids, & l'on ne peut foupçonner nulle autre matiere de s’y être mêlée , que celle qui compofe les rayons du Soleil. Il faut convenir que cette hypothéfe eft prefque également difficile à recevoir ê à rejetter. Enfin M. Homberg rend raïfon par fes Expériences , pourquoi la poudre de coquilles d'Huitres eft fi propre à rétablir les Eflomachs gâtés par les Acides. II marque même la maniere de la préparer ; & c’eft principalement à ces fortes d’ufages que doivent aboutir toutes les décou- vertes Chimiques. COMPARAISON DES ANALISES DE LA SOYE, du Sel Armoniac , © de la Corne de Cerf. A compofition des fameufes Goutes d'Angleterre , E eft encore un myftére ; connu feulement de quelques Anglois quile cachent aux autres Nations. Mais M. Lifter célebre Médecin de Londres, perfuadé que cette jaloufie de Nation eft ennemie du genre humain, a découvert le myfére à M. de Tournefort , qui le découvre préfente- ment au Public. Les Goutes d'Angleterre font de l'Efprit volatil de foye cruë, redifié avec l'huile de Canelle , ow avec quelque autre huile effentielle. Comme M. de T'ournefort a trouvé par expérience que les Goutes d'Angleterre n'ont aucun avantage fur les pré- D € SM IS) CE NC ES SL parations de la corne de Cerf, & du fel Armoniac, fi ce n’eft par une odeur plus fupportable , il donne l’Analife chimique de ces matiéres , & la compare à celle de la foye cruë , afin que l’on puiffe voir jufques dans les prin- cipes ce que c’eft que les Goutes d'Angleterre, & quel rapport elles ont avec ce qui eft de même efpéce. Peut- être cette difcuflion jointe à l'expérience leur fera-t-elle perdre la gloire d’être un remede unique. SUR LES FEUX SOUTERRAINS,LES Tremblemens de Terre, le Tonnerre, &"c. expliqués chimiquement. L E meilleur moyen d'expliquer la Nature , s'il pou- voit être employé fouvent, ce feroit de la contre- faire, & d'en donner , pour ainfi dire, des repréfenta- tions , en faifant produire les mêmes effets à des caufes que l'on connoïtroit , & que l’on auroit mifes en aëtion. Alors on ne devineroit plus , on verroït de fes yeux, & lon feroit für que les Phénomenes naturels auroient les mêmes caufes que les artificiels , ou du moins des caufes bien approchantes. C’eft ainfi que M. Lemery a fait un Etna ou un Vefuve, ayant enfoui en terre, à un pied de profondeur, pendant l'Eté, so. livres d’un mélange de parties égales de limaille de fer, & de foulfre pulvérifé, le tout réduit en pâte avec de l’eau. Au bout de 8. ou 9.heures, la terre fe gonfla ,& s’entrouvrit en quelques endroits , il en fortit des vapeurs foulfreufes & chaudes , & enfuite des flammes. Il eft bien aifé de comprendre qu'une plus grande quantité de ce mélange de fer & de foulfre avec une plus grande profondeur de terre, étoit tout ce qui manquoit pour faire un véritable Mont Etna ; qu'alors les vapeurs {ulfureufes cherchant à fortir auroient fait un tremblement de terre plus ou moins violent , felon leur force & felon Gi V. les M. p. 101. $2 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE les obfiacles qu’elles auroient rencontrés en leur chemin > que quand elles auroient trouvé , ou qu'elles fe feroient fait une ifluë , elles fe feroient élancées avec une impétuo- fité qui auroit caufé un Ouragan; que fi elles s’étoient échappées par un endroit de la terre qui fût fous la Mer, elles auroient fait de ces colonnes d’eau fi redoutables aux Vaiffeaux ; qu'enfin fi elles étoient montées jufqu’aux nuës, elles y auroient porté leur foulfre , qui auroit produit le Tonnerre. Il ne doit pas paroïtre étrange que ce foulfre , plongé dans l’eau des nuës , ne laifle pas de s’y allumer. Les ma- tieres fulfureufes naturellement ne fe mêlent point avec l'eau, & fi elles font fort exaltées , elles y brûlent , témoin le fu Gregeois. Il eft vrai cependant qu'il y a toujours une partie de ce foulfre qui s'éteint, & même avec un grand bruit. L'un autre côté, la partie qui brûle dans l’eau, fait effort pour s’en dégager & pour s'élever, & cet effort pro- duit encore un vent violent. C’eft ce que M. Lemery prouve par une expérience nouvelle, où une vapeur fül- fureufe qui s'éleve du fond d’un matras étant allumée par une bougie qu'on en approche quand elle fort , la flamme fe communique de proche en proche à toute la vapeur qui remplit le vuide dé matras , en gagne le fond, & va fe prendre à une matiere fulfureufe qui y eft dans de l'eau. Alors cette matiére enflammée dans l’eau, la frappe violemment pour s’en débarraffer , & fait un petit coup de Tonnerre. Si la flamme ne pénetre pas jufqu’au fond du matras, où eft la matiere fulfureufe dans de l’eau, la vapeur enflammée qui n’a point d’eau à combattre , ne fait point de fulmination. es 1:08 Ü DES SCIÈNCES. 53 SUR LES DISSOLUTIONS ET LES Fermentations froides. I: ne paroît pas furprenant qu'une fimple diflolution V. les M. foit froide, c’eft-à-dire , que de l’eau commune , par p. 110. exemple, où lon jettera du fel Marin, ou du fel Armo- niac , ou du Vitriol , &c. devienne plus froide par le mé- linge des fels qu’elle diffout ; car on comprend aufli-tôt que ces fels qui par eux - mêmes font privés de mouve- ment , partagent celui que la fluidité donne à l'eau , & par conféquent le diminuent, dès qu'ils font intimement unis avec elle par la diflolution; & il eft conftant parmi les Phyficiens , que la chaleur eft un mouvement, & le froid une ceffation ou du moins une diminution de mouvement. On ne feroit pas même fort étonné , malgré ce prin- cipe général ,- que toutes les diffolutions ne fuffent pas froides, comme le font celles de tous les Alkali volatils dans l'eau commune , & qu'il y en eût de chaudes, telles que celles de tous les Alkali fixes. On pourroit conjeétu- rer que cette différence vient de ce que tous les Alkali ‘ fixes ayant été calcinés par un grand feu, ils ont em- porté avec eux & emprifonné dans leurs pores, ces par- ticules ignées que nous avons dit ailleurs qui peuvent être admifes en Phyfique. Mais il eft étonnant que des diffolutions accompagnées de fermentation , e’eft-à-dire, où les matieres bouillon- nent & fe gonflent, & même avec bruit, foient cepen- dant froides, & faflent defcendre le Thermométre qui y eft plongé. Comment accorder le refroidifflement avec une: augmentation de mouvement fi confidérable & fi vifible ? Il y a plus. De ces fermentarions froides, il en fort quelquefois des vapeurs chaudes. C’eft ainfi que quand on a mêlé du fel Armoniac avec de l’huïie de Vitriol, fr lon a un Thermométre plongé dans la matiere , & un au- Gi V. les M. D. 122. $4 HISTOIRE De L'ACADEM:IE ROYALE tre un peu élevé au-deflus pour recevoir feulement la va- peur qui en fortira, on voit dans le même tems le pre- mier Thermométre qui baïfle très-vite par la froideur de Ja fermentation , & le fecond qui monte très- vite aufli par la chaleur des fumées qui s’en exhalent. M. Geoffroy, qui a voulu approfondir cette matiere des fermentarions froides , rapporte toutes les expériences qu’il en a faites, & en rend des raifons Phyfiques. Il n'y a peut-être rien de fi bifarre, rien de fi contradiétoire en ap- parence , que ne puiflent exécuter les différentes combi- naifons des mouvemens , toujours cependant aflujetties aux mêmes loix. Qui croiroit que pour rendre de l’eau froide encore plus froide pendant quelques momens , il ne fal- lût qu'y jetter promptement une grande quantité de braife ardente ? on verra dans le Mémoire de M. Geoffroy le fait , & même la poffibilité. S OR L'ANGE FAX: ‘ANTIMOINE & le Mercure prouvent aflez que la É Médecine ne fe perfeétionneroit gueres, fi elle n’avoit la hardiefle d'employer des remedes que les Anciens n'ont pas connus, ou qu'ils n’ont ofé employer. L'Eau de Chaux remplie, comme elle eft , de particules de feu, defféchante , confumante & cauftique, pouvoit être redoutable à prendre intérieurement; & l’on fe fe- roit crû aflez bien fondé à la traiter de poifon. Mais dans ces derniers tems on s'eft mis au-deflus de cette préven- tion & de cette crainte, il s’eft trouvé que l'Eau de Chaux étoit un excellent remede, & même il eft devenu familier chez les Peuples du Nord. M. Rurler ne manqua pas de s’en informer à un voyage qu'il a fait en Hollande. 11 découvrit , car c’eft encore une efpéce de myftére, quelle eft la préparation , & quels font les ufages de ce remede. | ne — DES SCIENCES. 1 1 Comme l'Eau de Chaux agit principalement par une matiére alkaline , terreftre, très-déliée, & très-propre à ab= forber les acides , elle convient aux maladies caufées par les acides , c’eft-à-dire , à celles qui viennent du peu de flui- dité du fang , & par conféquent de quelques obftruétions. L’ufage de cette Eau doit être meilleure pour les Hol- landois, plus fajets que nous à ces fortes de maladies par l'air épais qu'ils refpirent, & plus encore par leurs alimens ordinaires ; mais enfin , puifque nous ne laïffons pas d’é- prouver aufli beaucoup de maladies qui naiffent des acides du fang, il ne s'agit que de proportionner le reméde à des tempéramens un peu différens, & c’eft un détail de Mé- decine où entre M. Burlet avec beaucoup d’exaétitude ,en Y joignant un récit fincere de fes expériences. DORE RCE EP EEE DES DISSOLV ANTS ET DES DISSOLUTIONS du Mercure. Uoique le Mercure ait été Pobjet d'une infinité de recherches, & que les Chimiftes l’ayent rourmenté en mille façons pour le connoître, fa nature n’a pas laiffé de leur échapper jufqu’à préfent fur des chofes aflez eflen- tielles. | Ils ont crû qu'il ne fe pouvoit diffoudre que par l'Eau forte , qui eft aufli le diffolvant de l'argent. Ils ont crû qu'il étoit d’une fubftance parfaitement homo- gene, ou tout au moins que l’Art ne pouvoit tirer du Mer- cure rien qui ne für du Mercure. M. Homberg a reconnu par une longue fuire d'expérien- ces l'erreur de ces deux opinions. 1°. Îl'atrouvé que le Mercure, ayant , à la vérité, reçû une préparation , fe diffout dans l'Eau régale plus prompte- ment que dans l’Eau forte , & que fi on ne le prépare PAS > FEau régale ne laiflera pas de le diffoudre encore , mais un téms fort long ; comme de cinq mois, Ainfi le’ Voy. les M. pag. 212, $6 HisTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE Mercure doit être rangé avec le Fer & le Cuivre , qui fe diffolvent & par l'Eau régale , & par l'Eau forte. 2. Il a tiré du Mercure par une opération très-longue & très-pénible, une poudre ou terre grife & légere. II eft vrai que pour la tirer , il a mêlé avec le Mercure dif férentes matiéres, mais il prouve qu’on ne la peut foup- çonner de venir que du Mercure feul. Elle eft tellement fixe , qu’elle ne fe fond à un très-grand feu qu'en fe vitri- fiant, elle ne fe mêle avec aucun métal, & fi on la fond avec quelque métal, elle fe vitrifie , & le furnage fans le rendre caflant ; toutes qualités très-différentes de celles du Mercure , qui eft extrêmement volatil , qui s'attache facilement à la fuperficie de tous-les métaux , excepté le fer, & qui mêlé avec eux les rend caffans. Sur 3. livres de Mercure , il ya 3 + gros de cette Poudre, & quand on verra la maniére de la tirer , on ne fera pas furpris qu’elle fe foit dérobée fi long-tems à la connoiffance des Chimiftes. SUR LES HUILES DES PLANTES. Es Plantes donnent à la fin de la diftillation une Hui- le fétide , ou puante, mais les Plantes Aromatiques donnent de plus une Huile qui s'éleve après le flegme , & au commencement de la difillation. On l'appelle Effentiel< le , parce qu'elle conferve l'odeur de la Plante , au lieu que l'Huile féride , même celle d’une Plante Aromatique , eft d'une odeur infupportable. LR M. Homberg ayant remarqué que l’une & l’autre de ces Huiles venoit plus ou moins abondamment, felon les diffé- rentes maniéres d'opérer, concut qu'il y avoit donc quelque moyen d'en augmenter la quantité, & il le chercha. Il fit réflexion que les Plantes qui rendent le plus d'acide, rendent aufli le plus d'Huile, d'où il conclut que l'acide pourroit bien aider à Huile, à fe dégager du Mixte, & à s'élever dans la difillation. | Il À J Ê DES SCIENCES. s7 Il fit des Mixtes artificiels, compofés d'Huile fétide de Plante & fort épaifle, d'Efprit acide & de Sablon, & il les diftila. Ceux où il étoit entré de l’Efprit acide végétal , par exem- pie , du Vinaigre diftilé ; rendirent leur Huile toute fembla- le à ce qu'elle étoit pour la confiftance ; mais l’'Huile qui fortit des Mixtes, où étoit entré de l'Efprit Acide minéral, comme l'Efprit de Sel, rendirent leur Huile beaucoup plus claire & plus liquide : ce qui fit juger à M. Homberg que les Acides minéraux avoient qu de force que les végé- taux, pour agir fur l'Huile des Plantes, la diffoudre en quel- que façon, l’érendre ; & la mettre en état de s'élever plus fa- cilement & en plus grande quantité par lation du feu. L'expérience répond parfaitement à cette idée. Les Par: fumeurs ont beaucoup de peine à tirer l'Huile effentielle des Rofes, & ils n’en ont guére qu’une once fur cent livres de,cette fleur. M. Homberg conduit par fes principes , & trouvé l’art d'augmenter d’un tiers cette Huile fiprécieufe. Il faut avant que de diftiler les Rofes , les mettre pendant quinze jours dans de l'eau aigrie par l'Efprit de Vitriol. Cet Acide minéral donne , pour ainfi dire, des ailes à cette Hui- le, & l’enleve en plus grande abondance. C’eft ainfi que les Phyficiens, en obfervant délicatement la Nature, s’en ren dent en quelque façon [es maîtres, & la foumettent à leurs deffeins. | ù : M. Homberg donne en même tems la figure des vaiffeaux dont les Parfumeurs fe fervent pour diftiler l'Eau-rofe , & ne perdre rien du peu d’Huile qu'ils tirent. Ils font myftere de cette invention, & en effet elle le mérite; mais elle métite encore mieux d’être donnée au Public. : SUR L'ACIDE DE L'ANTIMOINE. A TN feavant Anglois ayant été furpris de voir dans l'Hiftoire de l'Académie faite par M. du Hamel, que feu M. Charas avoit une maniere de tirer de l’Anti- 3700. Voy. les M. pag. 298. 58 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE moine une Liqueur acide, & ayant écrit à M. du Hamel pour s'éclaircir avec lui fur cette efpéce de Paradoxe Chi- mique , cette matiere fut traitée dans l'Académie, & M. Homberg donna fes obfervations & fes penfées. En général, il y a beaucoup de Minéraux, dont il n’eft pas aifé de tirer aucuns Principes. Ils y ont été trop bien mêlés , & le tiflu eft trop ferré & trop ferme. On fe trompe à la Liqueur acide qui paroît venir de l’'Antimoine, il n’en donne point quand il eft bien pur, & elle ne vient que d’une terre argilleufe , qui s'y trouve prefque toujours. Ce n’eft pas cependant que l’Antimoine qui n'eft point mêlé de cette terre argilleufe, ne donne un peu d'acide, par une opération très-difficile, & fi délicate que fon fuccès dépend du tems qu'il fait; mais cet acide n'eft encore que celui du foulfre brülant , & tout femblable au foulfre com- mun ,; qui abonde dans l’Antimoine ; & M. .Homberg atrouvé que:fes effets , & ceux de l’Efprit acide du foul- fre commun, étoient parfaitement les mêmes. Ainfi ce n’eft point du tout la partie métallique de l’Antimoine , qui four-. nit l'acide, & il ne refte plus d'autre merveille, fi ce n’eft qu'on puille feulement tirer celui du foulfre qui entre dans la compofition de ce Minéral. DIVERSES OBSERVATIONS CHIMIQUES. I. A CLERMONT en Auvergne , il y a une Fontaine pétri- fiante , dont M. Lemery examina quelques bouteilles qui lui avoient été données par M. Tournefort. Cette eau eft claire comme celle d’Arcueil, & également péfante. Elle dépofe au fond des bouteilles un peu de fable gris , & de pierre blanchâtre qui paroït s’y être formée. Par les Ef fais & les Opérations Chimiques , il paroît qu’elle con- -tient un acide, qui apparemment a diffous quelque fub- DES SCIENCES: s9 flance pierreufe des lieux où elle a coulé. La partie la plus pefante de cette fubftance, fe précipite au fond de Peau, quand elle féjourne , ou qu’elle a peu de mouvement; mais la partie la plus legere ne s’en détache pasavec tant de facilité, & c’eft elle apparemment qui fait les pétrificatibns. Cette eau pétrifiante n’en eft pas plus dangereufe à boire, par rapport aux Pierres qui peuvent fe former dans les reins, on le fçait & par l'expérience journaliere des gens du Païs, & par des Opérations Chimiques, qui ont fait voir à M. Lemery , que le fel de lurine ne fait point dépofer la fub- flance pierreufe de cette eau. En effet les Pierres, & ce qu'on appelle Pierres dans le Corps humain, n’ont rien de commun. II. UE perfonne à qui M. Burlet avoit ordonné des Eaux minérales d’Aix-la-Chapelle , fut furprife de voir qu’au bout de trois jours qu’elle les avoit toujours prifes dans un mê- me gobelet d'argent, il fe trouva doré, comme sil l’avoit été par l’'Orfévre. M. Homberg a dit fur cela , que cette do- rure venoit des foulfres de ces Eaux, ce qu'a confirmé M. du Hamel , qui a été long-tems à Aix -la - Chapelle. Ila rapporté que ces Eaux font certainement très-fulphurées , qu'il a trouvé lui-même un morceau de foulfre qui nageoït deflus , & qu'aux environs d'Aix il y a beaucoup de mi- nes de Pierre Calaminaire. M. Tauvry ajoûta que le pus qui fort des abfcès de poitrine, dore les inftrumens des Chirurgiens. III. M. Geoffroy a fait part de quelques Obfervations de M. on ru fur les Eaux de Bourbonne & de Plombieres, où il étroit allé pour fa fanté. Nous ne mettrons ici que les principales. Il y a à Bourbonne une fource d’eau très- claire, & fans mauvais goût, finon qu'elle eft fort falée, qui ne laïffe pas Hi 6o HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE d’avoir au fond un limon fort noir, & qui fent fort mauvais. Les bords du baflin font jaunâtres, & ce qui y eft attaché y tient peu, & a une petite odeur de foulfre. L'eau ef fi chaude que l’on ne pourroit y tenir long-tems la main fans fe brûler, on y peut plumer de la aille , & y cuire des œufs imparfaitement , les feuilles d’ofeille en font confidé- rablement altérées ; cependant on en boit fans fe brûler. On voit le matin des Iris fur ja furface de l’eau. Elle rougit très- peu avec la folution de Tournefol, & ne fait rien avec le Sublimé corrofif, avec la Noix de Galle , l'Eau de Chaux, & la Couperofe verte. Mêlée avec le fel de Tartre, elle fait un coagulum. Les Eaux de Plombieres ne font point altérées par tout ce que nous venons de dire, qui n’altére point celles de Bourbonne; & de plus, elles ne le font pas par le Sel de Tartre. Il y a à Plombieres des fources froides d'Eau favoneufe. On y trouve des pierres qui font comme du favon , & d’au- tres qui mifes en poudre & jettées fur les charbons ardens, brûlent comme du foulfre, fans en avoir l’odeur. Dans tou- tes ces eaux favoneufes, il y a beaucoup d'Hépatique , qui ne vient point dans les autres fources, chaudes ni froides. Les Capucins de Plombieres ont dans leur Jardin une pe- de fontaine üéde, d’où lon tire des paillettes d'or, ou orées. LV. LE Scorbut étant devenu en France plus commun qu'il n'étoit, M. Lemery le fils a donné une Defcription, & différentes diftilations du Cochiearia, qui eft un excellent reméde pour cette maladie. Les Efprits de cette Plante font bons aufli pour les maux de la Ratte , pour la mélancolie, les Scrophules, la Jauniffe. On peut augmenter leur vertu par le véhicule du Sel Volatil Armoniac , qui les rend plus alkalins, & plus pénétrans. | PpesTSOrENCES 012 M. Lemery a continué cette année fôn grand Traité fur l'An- timoine, &° en a fait voir dans les Affemblées différentes Ex: périences, quil rapportera dans fon Livre. BOTANIQUE. SUR LA PERPENDICULARITE DES TIGES des, Plantes ; par rapport à l'Horifôn. ni O N ne peut guére Sempêcher de répéter fouvent en matiere de Phyfique , que les objets les plus com- muns fe changent en autant de miracles , dès qu’on les re- garde avec de certains yeux. Les tiges de toutes les Plantes font perpendiculaires à THorifon;:on ne s’emétonne point, & même onwmy prend pas garde. Il femble que cela ne puifle pas être autrement Cependant quand on ef affez Phyficien pour fçavoir ce que c’eftqu'une Plante , & comment elle fe forme, on come mence à trouver ce fait merveilleux ; & voici le fujet d’é- tonnement , que M. Dodart a bien fenti. , l Chaque graine contient une petite Plante toute formée , & qui n'a qu'à fe développer. La petite Plante a fa petite racine ;, & la pulpe ou la chair de la graine, féparée ordi- nairement en deux lobes , eft Le fonds de la premiere nour- xiture , que la Plantule tire par fa racine, dès qu'elle com: merice à germer. Siune graine qui eft en terre, étoit tournée de façon, que la racine de la petite Plante qu’elle renferme füt tour- née en embas , &c la tige en enhaut , & même perpendicu- lairement en enhaut , on comprendroit aifément que la Hi Voy. les M, pag. 47. 62 HisTOIirRE DEL'ACADEMIE ROYALE petite Plante venant à fe développer, fa racine &t fa tige ne feroient que fuivre la direétion qu’elles avoient, & par- là toutes les tiges feroient, fans difculté, perpendiculaires à l'Horifon. : Mais les graines, foit qu’elles fe fement elles-mêmes, ce qui eft le plus commun, foit qu’elles foient femées de main d'homme, tombent dans la terre au hafard , & entre un nombre infini de fituations qu’elles peuvent avoir par rap- port à la tige de leur petite Plante , la fituation où cette tige feroit perpendiculairement en enhaut, eft unique, & par conféquent fort rare. Il doit arriver aufli fouvent qu’elle foit perpendiculairement en embas, & fans comparaifon plus fouvent , qu’elle foit dans d’autres firuations moyennes ; mais toujours fort différentes de celle qu'il faudroit. Il eft donc néceffaire dans tous ces cas-là, où la tige de la Plantule eft tournée en embas, qu’elle fe redrefle pour aller gagner la furface fupérieure de la terre. Mais quelle force fait ce redreflement , qui certainement eft une ation violente ? Ef-ce que la tige, qui a moins de terre à percer du côté d’enhaut, va naturellement de ce côté , parce qu'elle y trouve moins d'obftacle ? Mais elle fçauroit donc qu’elle aura moins de terre à percer en. enhaut ; car jufqu’à ce qu’elle foit arrivée à la furface de la terre , elle ne peut fentir cette inégalité d’ob- flacle. | Et fi la petite tige fe redrefloit pour avoir moins de terre à percer, à plus forte raifon la petite racine qui eft alors en enhaut, fuivroit-elle fa direétion naturelle. C’eft ce qu’elle ne fait pourtant pas; au contraire elle fe rabat , tandis que la tige fe redreffe. Il a donc fallu que pour ces deux aëtions fi différentes; M. Dodart ait eu recours à une autre explication. Il fuppofe que les fibres des tiges font de telle nature, qu’elles fe raccourciffent par la chaleur du Soleil , & s’al- longent par l'humidité de la terre , & qu'au contraire celles sas nr DÉS SCIENCES 63 des racines fe raccourciffent par l'humidité de la terre, & s’allongent par la chaleur du Soleil. Selon cette hypothefe , quand la Plantule eft renverfée; êt que fa racine eft par conféquent en enhaut, les fibres d'un Même écheveau, qui fait une des branches de la racine, ne font pas également expofées à l'humidité de la terre. Celles qui regardent en embas, ou les inférieures, le font plus que les fupérieures. Ces fibres inférieures doivent donc fe rac- courcir davantage , & ce raccourciflement eft encore faci- Hté par Pallongement des fupérieures , far lefquelles le So leil agit avec plus de force. Par conféquent cette branche éntiere de racine fe rabat du côté de la terre ; & comme il n’eft rien de plus délié qu'une facine naiffante, “ellene trouve point de difiiculté à à s’infinuer dans les pores d’une terre qui feroit même affez compatte, & cela d'autant moins qu’elle peut gauchir en tous fens, pour. trouver fes pores . plus voifins de la perpendiculaire. à.# 5 En renvérfant cette idée, M. Dodart explique pourquoi au contraire la tige fe redreffe. En un mot, on peut s’imaginer que la terre attire à elle léracine, & que le”Soleil contribue à à la laiffer aller ; qu'au contraire le Soléil attire la: tige à lui, & ‘que la terre Tens, voyé en quelque forte vers le’ SEL DA + Aulipréfqué toutes les tigés naiffent coudées fous tGrres. & cependant en fortent droites. ‘Ees Plantes qui percent tranfverfalement , & ayec une, direttion horizontale, un fol efcatpé ; comme un Mur », Le: redreffent dès qu'elles font à l'air, & ‘s'appliquent enfuire contre le fol d’où elles font forties , tant les Plantes affectent conftamment d’être perpendiculaires à à l'Horifon. C’eft ce que font la Pariétaire , l'Antirrhinum, la Matricaire , &c. fr cependant, quand ales PoErene du mur , leurs ti tiges ne font pas encore afféz fermes, leur poids. les "abat vers la terre, & Jeur fait faire un eoue : ais à quelque tems.de-là, mal- gré leur poids dévenu plus grand , elles fe relevent, & font; un fecond coude pour s’aller appliquer contre lemur. nQC 64 HISTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE © Il paroït que dans ces Plantes, qui d’horifontales qu’elles étoient en fortant du mur, deviennent verticales, l’aétion du Soleil eft afflez marquée. C’eft lui qui accourcit les fi- bres tournées de fon côté , & rappelle la Plante en enhaut, & fi quelquefois il ne fair pas cette imprelflion fur elle, dès qu'elle paroït à l'air, c’eft qu’alors les fibres font encore trop aqueufes , trop molles peu capables d’une contraétion fofifante. La même chofe arrive à toutes les branches; & appa= remment par le même principe. Car naïflant du tronc com- me tranfvérfalement, elles fe redreflent au moins vers l’ex- trémité, & préfentenr ainfi leurs fleurs & leurs fruits à. la féve de l'air dans une fituation plus propre à la bien recevoir. Rien ne prouve mieux combien les Plantes s’obftinent , pour ainfi dire , à la perpendiculaire , que ce que M. Dodart obferva un jour fur la defcente de Meudon à Chaville, Une tempête ayant abattu plufieurs jeunes Pins fur unepen- te , qui en différens endroits étoit. différemment inclinée à lHotifon, toutes les fommités de ces Arbres s’étoient re- levées , de forte qu’elles étoient toutes perpendiculaires à FHorifon, & elles faifoient par conféquent différens Angles avec la ligne de leurs tiges , felon que ces tiges étant cou- chées fur dés plans plus ou moins inclinés, les fommités de- voient faire avec elles des Angles plus ou moins grands; pour être dans une fituation But be “ Certe juftefle fi Géométrique paroït étonnante, cepen- dant il ef affez naturel que le redrefflement finiffe rout court à la perpendiculaire, parce qu'alors le Soleil , & peut-être: auffi d’autres caufes externes agiffent également de tous côtés fur la Plante. ét, I] femble par les principes de M. Dodart que les Ar- bres devroient être panchés du côté du Midi, ique le Soleil agir plus fur eux de ce coté-la, que de celui du Nord; mais cette inégalité d'action peut être effacée ; & l’Arbre redreflé par le cours de la féve , qui tend toujours à enfiler la perpendiculaire, Pa SUR 2 DES SCIENCES. 6$ SUR LA FECONDITE DES PLANTES.. E Ncore une merveille affez expofée aux yeux de tout le monde ; & peu obfervée, c’eft la fécondité des Plan- tes, non pas feulement la fécondité naturelle des Plantes abandonnées à elles-mêmes; maisencore plus leur fécons dité artificielle procurée par la taille , & par le retranche- ment de quelques-unes de leurs parties. Cette fécondité ar- tificielle n’eft au fond que Se ; car enfin l’art du Jardi- nier ne donne pas aux Plantes ce qu'elles n’avoient point, il ne fait que leur aider à développer, & à mettre ‘au jou ce qu’elles avoient. M. Dodart qui examine cette matiere, n'en donne encore aucun Syftême Phyfque, il n'établit que les faits ; mais il faut pour les établir du raifonnement & du. calcul , parce qu’il n’eft pas tant queftion de ce qu'une ‘Plante donne, que de ce qu’elle donneroit, fi.on en tiroit tout ce qu'elle contient. Voici un exemple de la fécondité dont peut être un Arbre en fait de graines feulement, qui font le dernier terme & l’objet de toutes les produétions de l’Arbre. | | On fçait que tous les rameaux de FOrme ne font que des glanes de bouquets de graine extrêmement preflées, Pune contre l’autre. M. Dodart ayant pris au hafard un Or- me de 6 pouces de diametre, de 20 pieds de haut jufqu’à la naiflance des branches, & qui pouvoit avoir 12 ans, en fit abattre avec un Croiflant une branche de 8 pieds de long, & négligeant les graines qui avoient été abattues par les coups redoublés du Croiffant, & par la chute de la bran- che, fit compter ce qui en reftoit. «pet É Il fe trouva fur cette branche 16450 graines. Il y a fur un Orme de 6 pouces de diametre plus de 10 branches de 8 pieds ; mais fuppofé qu’il n’y en aitque 10; çe font pour,ces 10 branches 1645 00 graines. Toutes les branches qui n’ont pas 8 pieds , prifes enfem- 1700, 2 V. les M. pag. 136. 66 HisToiIRE DE L'ACADEMIE ROYALE ble, font une furface qui eft beaucoup plus que double de la furface des 10 branches de 8 pieds. Mais en ne la pofant que double, parce que peut-être ces branches moindres font moins fécondes , ce font pour toutes les branches pri- fes enfemble 329000 graines. Un Orme peut aifément vivre 100 ans, & l’âge où il a fa fécondité moyenne ; n’eftaflurément pas celui de 12 ans: On peut donc compter pour une année de fécondité moyen- ne plus de 329000 graines, & n’en mettre au lieu de ce nombre que 330000 : c’eft bien peu. Mais il faut multiplier ces 330000 par les 100 années de la vie de lOrme. Ce font donc 33000000 graines qu'un Orme produit en toute fa vie, en mettant tout au plus bas pié, & ces 33 millions font venus d’une feule graine. Ce n'eft-là que la fécondité naturelle de Arbre, qui n’a pas fait paroître tout ce qu'il renfermoit. Si on l’avoit érêté, il auroit repouffé de fon tronc autant de branches qu’il en avoir auparavant dans fon état naturel, & ces nouveaux jets feroient fortis dans l’efpace de 6 lignes de hauteur ou environ, à l'extrémité du tronc étêré. À quelque endroït, & à quelque hauteur qu’on leût étêté, il auroit toujours repouflé également; ce qui paroït conf- tant par l'exemple des Arbres nains, qui font coupés pref- que rés pieds rés terre. "Tout le tronc depuis la terre jufqu'à la naïffance des branches, eft donc tout plein de Principes ou de petits Em- bryons de branches, qui, à la vérité ,ne peuvent jamais pa- roître tous à la fois , mais qui étant conçus comme partagés par petits anneaux circulaires de 6 lignes de hauteur , com- pofent autant d’anneaux , dont chacun en particulier eft prêt à paroitre, & paroitra réellement dès que le retranchement fe fera précifément au-deflus de lui. Toutes ces branches invifibles & cachées n’exiftent pas moins que celles qui fe manifeftent, & fi elles fe manifef- toient , elles auroient un nombre égal de graines , qu'il faut par conféquent qu’elles contiennent déja en petit. 0 DES SCIENCES: 67 Donc en füivant l'exemple propofé, ily a dans cet Or- me autant de fois 33 millions de graines, que 6 lignes font contenues dans la hauteur de 20 pieds, c’eft-à-dire qu'il y a f 15840000000 graines, & que cet Arbre contient a£tuellement en lui-même de quoi fe multiplier & fe reproduire un nombre de fois fi éton- nant. L'imagination eft épouvantée de fe voir conduite juf- ques-là par la raifon. Et que fera-ce fi l'on vient à penfer que chaque grainè d'un Arbre contient elle-même un fecond Arbre qui con- tient le même nombre de graines; que l’on ne peut jamais arriver, ni à une graine qui ne contienne plus d'Arbre, ni à un Arbre qui ne contienne plus de graine, ou qui en con- tienne moins que le précédent; & que par conféquent voilà une Progreflion Géométrique croiffante, dont le premier terme eft 1, le fecond 1840000000 , le troifiéme , le quarré de 1$840000000 , Le quatriéme fon Cube, & ainfi de füite à l'infini? La raifon & l'imagination font également perdues & abîmées dans ce calcul immenfe, &en quelque forte plus qu'immenfe. RULES pour ? On trouvera que M. Dodart, pourne pasaffedter le mert veilleux), où peut-être en l’affe&tant plus finement’, a fait à l'égard de quelques articles les évaluations de la fécondité fur un plus bas pié; mais cette différence eft peu impor- tante. Un calcul qui, à toute rigueur , feroit trop fort pouf POrme ; feroit beaucoup trop foible pour la Fougere , in- comparablement plus féconde en graines; &'enfin de quel- que ménage que l'on ufe, onätrivéra toujours à des nom bres prodigieux , & à des miracles de Phyfique. | SUR LES PLANTES DE MER" S Ila Mer a fes Animaux tout différens de ceux dé la y. 1e M. Terre, conftruits en quelque forte fur d’autres princi- Pag: 27. pes ; & fur: d’autres idées de Méchaniqué} elle ‘a auffi fes Th 68 HisToiRe DE L’'ACADEMIE ROYALE Plantes, fi différentes la plüpart de celles que la Terre pro- duit, qu'il n’y a guére que des yeux de Phyficien qui les puiffent reconnoître pour des Plantes. Le Corail, par exem- ple, n’a pas toujours paflé pour en être une , les Eponges n'en ont guére l'air, & beaucoup de Plantes marines ne ref femblent qu'à des Pierres. Enfin la Botanique de la Mer n'a prefque rien de commun avec celle de la Terre. M. de Tournefort qui a trop étudié la Botanique terref- tre, pour ne pas embrafer sut l'autre dans fes recherches, obferve queles Plantes qui naïffent au fond de la Mer , com- munément n'ont point de racines, ou qu'au moins les par- ties qui en font la fonétion , n'en ont guére la figure. Ces Plantes s’attachent à quelque corps folide, & l’embraflent par une efpéce de plaque très-liffe & très-polie, qui ne jet- te aucunes fibres , & d’ailleurs le corps qui foutient ces Plantes étant aflez fouvent un rocher, ou un caillou, ne paroît pas propre à les nourrir. Il faut donc qu'elles fe nour- riffent d’une façon qui leur foit toute particuliere , & qu'elles reçoivent par les pores de la furface extérieure de cette pla- que, un fuc que peut fournir le limon épais & huileux du fond de la Mer. Ce qui eft encore plus fingulier, c’eft que dans la plüpart des efpéces on ne voit point de femences. On a même aflez de peine à imaginer où elles pourroient fe cacher , princi- palement dans les Plantes pierreufes, telles que les Co- raux , & les Champignons de Mer, qui paroiffent plutôt de véritables Pierres , que.des Plantes, & dont la ÉÉtRee très-dure & très-uniforme , ne femble pas permettre ; ni qu'il fe forme des graines au-dedans d'elles , ni qu’elles en for- tent pour fe femer. Cependant ce font viliblement des corps organifés, & organifés d'une faniére toujours conf- tante, & par conféquent leur génération doit être la même que celle de tous les autres corps femblables. Cette loi de l’uniformité eft fi néceflaire, & fi inviola- blement obfervée par la Nature, qu'il n’y a rien qu'on ne puifle légitimement fuppofer, pour trouver des graines aux —- DES SCIENCES. 69 Plantes marines. Si on voit quelquefois fortir de l’extré- mité des branches du Corail une efpéce de lait âcre & gluant, on eft en droit de croire que ce lait tombe au fond de la Mer fans fe mêler avec fon eau, & va y porter une graine très-fine & très-déliée qu'il contient, & qui par le moyen de cette liqueur fe colle au premier corps folide qu’elle rencontre. Aufli M. de T'ournefort a-tl fait voir à l'Académie des Coraux de tous âges, depuis un petit point rouge prefque imperceptible , jufqu'à leur derniere gran- deur , attachés à des Coquillages, ou à des cailloux , fur lefquels ils végétoient. La conjedure que M. de Tournefort propofe fur la gé- nération des Coraux , peut être appliquée à toutes les autres Plantes pierreufes de la Mer. Il croit même qu’elle le pour- roit être aux véritables Pierres. Elles ont une ftrutture or- ganique & confiante, témoin leurs veines, qui les rendent plus aifées à couper en un certain fens. Elles pourroient bien aufli fe former d’une matiere liquide. M. de Tourne- fort a montré à l’Académie des Pierres à fufil, & des mor- ceaux de Craye, formés dans des Coquillages , dont l’ou- verture avoit toujours été très-petite , & où par conféquent ces Pierres n’avoient pû abfolument entrer qu’en forme de iqueur, après quoi elles s’étoient durcies, & avoient peut- être végété. C’eft au tems & à l'expérience à mürir cette idée; mais enfin , quand la Nature a pris une route, elle a coutume de la fuivre, & puifqu’il y a des Plantes-pierres, c'eft un préjugé recevable en Phyfique , que les Pierres æpourroient être des Plantes. DIVERSES OBSERVATIONS BOTANIQUES. L D) Ison, le premier Auteur qui ait parlé de FIpécacuanha, HE n'en connoit que de deux fortes, le blanc, & le brun, le blanc ayant beaucoup moins de force que le brun. Il Li V. les M. Pag: 134- 70 H1isTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE parle en même tems du Caa-apia, autre Plante du Bréfil; & dit qu’elle a prefque les mêmes effets que lIpécacuanha; avec moins de violence ; que par cette conformité quels ques-uns la confondent avec l’Ipécacuanha , mais mal-à- propos; & que les Brafiliens s’en fervent aux mêmes ufa- ges, & pour les bleffures des fléches empoifonnées , & les morfures des Serpens. Outre lIpécacuanha blanc , & le brun de Pifon, nous connoiffons encore le gris, ou s’il a appellé blanc celui que nous appellons gris , ce qui peut être, nous connoiflons le blanc qu'il n’a pas connu. Pour éviter la confufion des différentes fortes d’Ipécacuanha avec le Caa-apia, M. de la Hire donne ici les F igures de ces Plan- tes, telles que Pifon les a connues, & des racines des trois Ipécacuanha, telles que nous les avons , & M. Geoffroy a driné une Defcription du Caa-apia. II. M. Reneaume a trouvé en Berry une nouvelle efpéce de Noyer, qui n’eft point encore connu des Botaniftes. IE l'appelle, Mux Juglans folio eleganter diffeëto , ou Acanrhi folio. M. Marchand a donné à fon ordinaire plufieurs Def: criptions de Plantes refervées pour un Ouvrage parti culier. Cette année M. de Tournefort donna au Public fes Inflitutiones Rei Herbariæe , imprimées au Louvre en trois Volumes in-4°. qui font une Traduétion , mais fort augmen- tée, de fes Elémens de Botanique, qu'il avoit données en François en 1694. | La connoiffance des Plantes a été eflimée dans tous les fiécles , & chez toutes les Nations. Les Hommes font afez communément perfuadés que les Simples renferment prefque toute la Médecine, & comme la Nature a donné DES SCIENCES 75 à certains Animaux un inftinét qui leur fait découvrir dans quelques Plantes les remedes dont ils ont befoin, il fem- ble aufli qu’elle ait donné aux Hommes un inftinét pour les Plantes en général, & une extrême confiance pour les re- medes qui en font tirés. Mais elle a laiffé à notre raifon à découvrir quelle peut être l'utilité de chaque Plante en par- ticulier, & c’eft-là que la raifon a bien de Ia peine à rem- placer l’inftinét de quelques Animaux. Les Ouvrages de Théophrafte, de Diofcoride, de Pline & de Galien, marquent affez que les Anciens ont eu quel- que connoiffance des Plantes, mais peu étendue, & aflez fuperficielle. Diofcoride qui s’y eft attaché le plus particu- liérement, & qui s’eft fait le plus grand nom fur cette ma- tiere , n'a parlé que d'environ 600 Plantes, & les a décrites de maniere qu’il eft fouvent difficile, & quelquefois impof fible , de les reconnoître. Les fiécles qui fuivirent celui de Diofcoride, n’enrichi- rent guére la Botanique. Enfin toutes les Sciences s’éclip- ferent, & elles ne reparurent qu’au quinziéme fiécle. Alors on ne fongea qu’à entendre les Anciens pour en tirer les Iu- mieres, qui avoient été fi long-tems enfevelies, les Bota- niftes ne chercherentles Plantes que dans les Livres des Grecs & des Latins, & Mathiole , le plus fameux Interpréte de Diofcoride, n’alloit pas comparer les Plantes que la Na- ture a produites avec les Defcriptions de fon Auteur; mais fur ces Defcriptions il imaginoit des Plantes que la Nature avoit dû produire, ouqu'elle avoit eu tort de ne produire pas, -| Il w’étoit pas poffible qu'enfin la raifon ne revint au mon- de après les Sciences. On fe mit à étudier la Nature auffi- bien que les Livres, & on ofa chercher les Plantes dans les campagnes. Aulfli-tôt la Botanique devint plus étendue , & elle s’accrut de jour en jour. - 1 Mais d’un autre côté cette immenfe quantité de Plantes toutes différentes les unes des autres, commença à acca- bler les Botaniftes. Quelle mémoire pouvoit fuffire à tant de noms? où prendre même tous les nouveaux noms dont on avoit befoin? 72 HISTOIRE DE L'ÂCADEMIE ROYALE Les Botaniftes fongerent donc à inventer une Méthode qui les foulageât; mais 1l faut avouer qu'il y en eût peu qui y fongerent , qu'ils n’y fongerent que tard , & que quelques autres contefterent ou la poflibilité ou l'utilité d’une Mé- thode, tant il eft naturel que les progrès des Sciences foient lents & traverfés par les Sçavans mêmes. La feule Méthode que l’on püt ou imaginer ou defirer; confiftoit à diftribuer toutes les Plantes connues fous cer- tains genres, de forte que la connoiffance de chaque genre contint en abrégé celle de toutes les Plantes qu'il renfer- moit, & qu'en même tems elles fuffent routes, autant qu'il feroit poflible , appellées d’un même nom commun à tout le genre, & quiépargnât un trop grand nombre de noms particuliers tous différens. C’eft ce que l'ufage commun a fait de lui-même fur les Renoncules, par exemple ; mais la difficulté eft plus grande fur une infinité d’autres Plantes, dont les différentes efpéces ne préfentent pas fi aifément aux yeux ce qu’elles ont de commun, & ce qui peut fervir à établir leur genre. Pour garder dans le Syftème des Plantes luniformité fi néceffaire à toute Méthode, il faut que la même idée regne dans l’établiffement des différens genres, & qu’ils foient tous tirés des mêmes Principes. Une Plante , felon la défi- nition de M. de Tournefort, eft un corps organifé, qui a toujours une Racine, toujours vraifemblablement un Fruit ou une femence, prefque toujours une Tige , des feuilles & des fleurs. Voilà cinq parties ou effentielles ou ordinaires aux Plantes. Il eft évident que la refflemblance entre quel- ques-unes de ces parties, confiituera les genres ; mais elle doit être toujours entre les mêmes parties , & il n’eft quef= tion que de fçavoir lefquelles on préférera aux autres. Après plufieurs raifonnemens que nous fommes obligés de paffer fous filence , parce qu’ils font déja connus du Pu- blic, M. de Tournefort fe détermine pour Les fleurs & pour les fruits pris enfemble. Gefner & Colonne, deux des plus habiles Botaniftes qui DES SCIENCES. 73 qui ayent jamais été , ont eu la même idée, l'intention de la Nature nous conduit à regarder ces deux parties, com- me les principales ; car toute la Plante, & tout l'appareil de fes organes, plus grand fans comparaifon qu'on ne fe Vimagine communément, ne paroît fait qu'en vüe de la production de la femence, ou, ce qui revient au même, du fruit qui n’eft que l’enveloppe & la nourriture de la fe- mence ; & pour ce qui ae la fleur, elle n’eft deftinée qu'a donner ; pendant un tems affez court, une nourriture au fruit naïflant, plus délicate, mieux préparée & plus con- yenable que celle qu'il tireroit des feuilles. Toutes les Plantes, dont les fleurs & les fruits auront la même figure & la même difpofition, feront donc du mê- me genre dans le Syflême de M. de Tournefort. Les Ra- cines, les Tiges & les feuilles ne font alors comptées pour rien. Mais lorfqu’enfuite il s’agit de divifer un genre en fes efpéces , on confidére les Racines, les Tiges & les feuilles, & on prend pour efpéces différentes , celles qui différent, ou en toutes ces trois parties , ou feulement en quelques-unes. Comme il n’eft pas précifément queftion dans tout ceci de fuivre ou d’imiter la Nature, qui ne paroïît pas trop s’ê- tre mife en peine d’un Syftême , mais feulement d'établir un ordre arbitraire qui facilite la connoiffance des Plantes, il n'appartient pas tant au raifonnement de prouver la bonté d'une Méthode , qu'à la commodité, à la clarté, & peut- être aufli à un certain agrément qu’on y trouvera, & c’eft fur ces Principes que le Public peut juger de celle de M. de T ournefort. Il ef vrai qu'elle n’eft pas univerfelle ; il ya des Plantes qui n’ont ni fleurs, ni fruits ou femences, du moins quant aux fruits ou femences, ils ne font pas vifibles fans le fe- cours du Microfcope, ou avec le Microfcope même ils ne font pas aifés à découvrir , & on les fuppofe par raifon- nement fans les appercevoir. Or en cette matiere il faut des marques fenfibles & manifeftes aux yeux, le Microfcope n'y eft point admis, & moins encore les hypothéfes les - 1700. 74 HisToirE DE L'ACADEMIE ROYALE plus folides. M. de Tournefort eft donc réduit à faire de ces fortes de Plantes des genres à part , qu'il regle fur leurs parties les plus remarquables, & comme ces genres font en petit nombre, ils ne font qu'une affez petite bréche à l'univerfalité de fa Méthode, qui fe trouve encore plus univerfelle qu'aucune autre n'eût été. Quelquefois aufli , quand les fleurs & les fruits enfemble ne lui fuffifent pas pour bien régler les genres, il appelle à fon fecours, non-feulement les Racines, ou les Tiges, ou les feuilles, mais même , s’il le faut abfolument, quel- ques propriétés fenfibles , comme leur maniere de croître, ou ce que les Botaniftes appellent le Port de la Plante, c’eft-à-dire , fa conformation générale , & ce qui réfulte du premier coup d'œil. Car encore une fois, puifqu'il ny a point ici de Syftême naturel, dont les regles feroient fans exception, il faut fe contenter d’un Syftême artificiel, le moins défectueux qu'il foit poffible. La diftribution des Plantes fous leurs genres donne une plus grande facilité de les nommer. Elles ont d’abord le nom générique & commun, auquel on ajoute ce qui les fpécife , de forte que leur nom eftune définition. 1l eft vrai que comme les Botaniftes précédens n’ont pas eu en vüûe; ou les genres, ou les mêmes genres, M. de Tournefort eft fouvent obligé de changer les noms qu'ils avoient im- pofés ; mais il marque avec foin les anciens noms, même felon les différens Botaniftes , pourvû qu’ils foient aflez fa- meux; & fi l’on s’accoutume aux nouveaux noms qu'il pro- pofe, on y gagnera de connoître plus promptement les genres & les efpéces des Plantes , dans un Syftême qui fem- ble devoir être fort avantageux à la Botanique. Des Plantes nouvellement découvertesfont venues, pour ainfi dire, fe ranger d’elles-mêmes fous certains genres déjà établis par M. de Tournefort ; & quand il fe découvrira d’au- tres Plantes, qui par leurs fleurs & leurs fruits demande- ront des genres nouveaux, iln’y aura qu’à les établir. M. de Tournefort a tout réduit dans fes Inflitutions à DES SCIENCES. 7$ environ 673 genres, qui comprennent plus de 8846 efpéces de Plantes, foit de Terre, foit de Mer, connues jufqu’à préfent. Ainfi lon connoît aujourd’hui plus de genres de Plantes, que Diofcoride n’en a connu d’efpéces. Mais comme la mémoire feroit extrêmement chargée de 673 genres, dont il faudroit connoître les différens ca- raéteres , fans compter que certainement le nombre en aug- mentera beaucoup, M. de T'ournefort a trouvé le fecret d'adoucir ce travail en réduifant les Genres à des Claffes, & il eft le premier Botanifte qui ait eu cette penfée. Pour établir fes Claffes, il ne prend que la fleur des Plantes, fup- pofé qu'elles ayent une fleur, comme elles en ont prefque toutes. Il détermine toutes les figures connues de fleurs de Plantes, & n’en trouve que 14, qui ne lui donneroient par conféquent que 14 Clafles, fi le nombre n’en étoit aug- menté par les Plantes qui n’ont point de fleur , & par la dif- tinction qu'il a fallu mettre entre les Herbes ou fous-Ar- brifleaux , & les Arbriffeaux ou Arbres, que la différence de grandeur n’a pas permis de ranger fous la même Claffe, quoique leur fleur füt la même. Cependant avec ces aug- mentations il ne fe trouve que 22 Clafles, dans lefquelles eft partagé tout le Livre des Inflitutions de Botanique. 11 fufhit donc d’avoir dans la mémoire 14 figures de fleurs, & dès que l’on verra la fleur d’une Plante que l'on ne con- noîtra pas, on trouvera dans les Inflitutions à quelle Claffe elle fe rapporte. Quelques jours après la fleur, paroîtra le fruit, & l’on aura le Genre; & toutes les autres parties de la Plante donneront l'Efpéce. Si l’on n’a pas la Plante in- connue dans le tems de fa fleur, il le faut attendre pour prononcer fürement. M. de T'ournefort a réglé fes Claffes par les fleurs plutôt que par les fruits, parce que quand on voit la fleur, on a peu de tems a attendre pour voir le fruit, & pour déterminer le genre , au lieu que quand on voit Le fruit, il faut attendre juf- qu’à l’année fuivante pour avoir la fleur. Voilà toutes les difficultés de la Botanique applanies Ki 76 HISTOIRE DE L’ACADEMIE ROYALE autant qu’on puifle efpérer qu’elles le foient, & ce nom- bre prodigieux de Plantes connues, qui couvrent la furface de la Terre, & même le fond de la Mer, renfermé dans des bornes affez étroites pour fe laiffer aifément embraffer par notre mémoire & par notre imagination. Ce ne font-là que les Inflitutions de la Botanique. Après cela la connoif- fance des vertus des Plantes, qui fait le fond de la Science, eft un autre champ d’une immenfe étendue, & encore plus immenfe , fi l’on joint aux vertus qu'elles ont, celles qui leur font attribuées. M. de Tournefort dans fon Hiftoire des Plantes des En- virons de Paris, a déja donné un Effai de la maniere d’ex- pliquer les vertus & les ufages des Plantes, & a propofé de nouvelles vües, fondées fur les plus folides Principes de la Phyfique. Les Figures de tous les genres des Plantes, gravées & en plus grand nombre & avec plus de foin & d'exattitude que des Figures de Plantes ne l’ont jamais été, enrichiffent beaucoup les Infitutions de M. de T'ournefort. Elles font deux Volumes des trois qui compofent fes Inflitutions. Ce fut en cette même année que l'Académie conçut pour l’avancement de la Botanique un deffein affez noble, que le Roi favorifa avec fa magnificence ordinaire. Il feroit important de connoître les Plantes dont les An- ciens ont parlé, foit pour retrouver des remedes qu’ils nous ont vantés comme excellens, foit pour les perfectionner, s'il étoit poflible , foit pour s’en défabufer , s’il le falloit. Mais la plüpart de ces Plantes, nous ne les connoiffons plus, ou parce que celles qui ont les mêmes noms parmi nous, ne font point celles des Anciens, ou parce que la différence des Climats rend leurs figures ou leurs vertus méconnoiffables. Il faudroit donc aller étudier Théophrafte & Diofcoride, en Gréce, en Afie, en Egypte, en Afii- que, enfin dans les lieux où ils ont vêcu , ou qu'ils ont con- nus plus particuliérement. D'ailleurs , comme la Botanique | | DES SCIENCES. 77 ne s’apprend qu'en parcourant les Campagnes, on y fait d'autant plus de progrès qu’on voit plus de Pays ; & indé- pendamment de la Botanique des Anciens, des Voyages en des lieux éloignés devoient toujours être utile à cette Science. Mais quelle pénible maniere de la perfe@tionner! & quel Botanifte affez paflionné fe réfoudroit à cette entre- prife? M. de Tournefort s’y offrit cependant. Il avoit déja couru toute l'Efpagne dans le même deffein, & il fe dé- termina fans peine à un Voyage beaucoup plus long & plus périlleux. M. le Comte de Pontchartrain, qui a par fa Charge de Secretaire d'Etat le foin des Académies, & par une heu- reufe Naiffance le goût des Lettres, eut la bonté de pro- pofer au Roile Voyage de M. de Tournefort en Levant, & Sa Majefté l’agréa en Roi. Elle ordonna que M. de Tour- nefort méneroit avec lui un Deffinateur intelligent dans la Botanique, & choifi par l’Académie ; qu’à fon retour toute fa dépenfe lui feroit payée au Tréfor Royal fur fes fim- ples Mémoires ; qu’on lui payeroïit d'avance 3000. livres ; & qu'à plus forte raifon fes penfions de l'Académie lui fe- roient payées réguliérement pendant fon abfence. Elle ajou- ta qu'il n'en feroit que plus en droit de prétendre aux aug- mentations de penfion, & aux autres gratifications extraor- dinaires qu'Elle pourroit faire aux Académiciens , & qu'Elle vouloit qu’on lui expédiât tous Les Paffeports , & toutes les Lettres de recommandation néceffaires pour la füreté, & même pour l’agrément de fon Voyage. Les Sciences protégées à ce point par un fi grand Prin:- ce, feroient inexcufables fi elles Pda M. de Tour- nefort partit au mois de Mars , avec toute l’ardeur que peut infpirer l'amour des Sciences, & plus encore le defir de fe rendre digne des bontés du Roï. Il mena avec lui M. Gun- delsheimer, que l’Académie nomma pour Compagnon de fon Voyage. M. de Tournefort ne prétendoit pas fe borner aux Plan- tes ,il embraffoitaulli dans fon deffein les Métaux , les Mi+ K iüÿ 78 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE néraux, les Maladies particulieres aux Pays où il iroit , les Animaux rares, enfin tout ce qui regarde l’'Hiftoire Naturelle. A peine étoit-il arrivé à Marfeille, qu’en attendant le tems de s’embarquer, il fit des Defcriptions de quelques Plantes & de quelques Poiflons de Provence, peu connus, qu'il envoya à l’Académie avec les Deffeins. De tous les lieux de l’Archipel, où il alla dans cette an- née, & d’où il put écrire, il envoya un grand nombre de Defcriptions & de Deffeins ; & ce qui fait l'éloge & la ré- compenfe de fon travail, le Roi fe les faifoit montrer , & paroifloit y prendre plaifir. ÉSDR PGO ODA NOR PORN DR GTX FOR EGONNTEREUERES GEOMETRIE. SUR LES'FORCES CENTRIFUGES: Voy. les M. OxsiEur Bernoulli, Profeffeur en Mathématique à PE | 83e Groningue , avoit propofé ce Problême : Trouver dans un Plan Vertical une Ligne Courbe, telle qu'un Corps qui la décriroit defcendant librement , © par fon propre poids , la preffat toujours dans chacun de fes points , avec une force égale à [a pefanteur abfilue. A ne confidérer dans ce Corps que fa péfanteur, ce Pro- blème feroit impoffible. Car une Courbe n’étant que l’affem- blage d'une infinité de Lignes droites infiniment petites , qui toutes font certains Angles les unes avec les autres, & la Courbe er queftion étant fuppofée dans un Plan Vertical , chacun de fes points , hormis peut-être le premier & le der- nier , feroit comme un petit Plan inclinéà l'Horifon. Or tout le monde fçait qu'un Corps porté fur un Plan incliné à l'ho- rifon , n’y fait pas une impreflion égale à fa pefanteur entié- re ; le Plan incliné eft d'autant moins chargé qu'il eft moins incliné ; quand il eft infiniment peu incliné, c’eft-à-dire, DES SCIENCES 79 quandil eft Vertical, il ne foutient aucune partie de la char- ge du poids, & il ne la foutient entiere que quandil eft infini- ment incliné, c'eft-à-dire horifontal. Ainfi la Courbe que l’on cherche ne pourroit porter toute la charge du poids, que dans les points dont les T'angentes feroient horifontales, en cas qu'elle eût de femblables points ; mais dans tous les au- tres, qui feroient de petites droites, toujoursdifféremmentin- clinées à l'Horifon, elle ne porteroit qu’une partie du poids, différente felon la différente inclinaifon des Tangentes de ces points. Le Problême ne pourroit donc pas être réfolu. Mais un Corps, qui par fon mouvement décrit une Cour- be , a encore une autre force différente de fa pefanteur. Tous les Corps qui fe meuvent, tendent à fe mouvoir en ligne droite , parce que c’eft la détermination la plus fimple. S'ils fe meuvent, par exemple , en rond, il faut qu'il y ait une caufe qui les y contraigne, & qui les détour- nant de la Ligne droite à chaque inftant, & les rechaffant vers un Centre, les en tienne toujours également éloignés. Si cette contrainte cefloit , aufli-tôt ils s'échaperoïent par la Ligne qui feroit Tangente de la Courbe au Point où ils fe trouvoient au moment de leur liberté, & fuivant tou- jours cette Ligne droite , ils s’éloigneroient toujours de plus en plus du Centre autour duquel ils tournoient auparavant. C’ef la refiftance qu’ils font à cette force étrangere , c’eft leur tendance perpétuelle à s'éloigner du Centre de leur mouvement, qu'on appelle Force Centrifuge. L'effet de la Force Centrifuge ef telle qu'un Corps obli- gé à décrire un Cercle’, le décrit le plus grand qu'il lui eft poffible, parce qu'un plus grand Cercle, eft, pour ainfidire, moins Cercle, & diflére moins d’une Ligne droite, qu'un plus petit. Un Corps fouffre donc plus de violence, & exer- ce plus fa Force Centrifuge, quand il décrit un petit Cer- cle , que quand il en décrit un grand. Il en va des autres Courbes, comme des Cercles. Car une Courbe quelle qu’elle foit, peut être regardée comme compofée d'une infinité d’Arcs de Cercles infiniment petits, 80 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE tous décrits fur des rayons différens , en forte que dans les endroits où la Courbe a plus de courbure, c’eft que les pe- tits Arcs de Cercle font des portions de plus petits Cercles, & ontété décrits fur de plus petits rayons. Un Corps qui décrit une Courbe tend donc à chaque inf- tant par fa Force Centrifuge à s'éloigner du point qui eft le Centre de Arc de Cercle infiniment petit qu'il décritalors; & cet effort eft d’autant plus grand , que cet Arc de Cercle infiniment petit eft portion d’un plus petit Cercle. Ainfi dans une même Courbe, la Force Centrifuge d’un Corps qui la décrit, varie felon les différens points où il fe trouve. Il fe pourroit donc faire que dans une Courbe, où Pim- preflion de la pefanteur d’un Corps qui la décriroit, varie- roit toujours, la Force Centrifuge variât toujours aufli de telle maniere , que l’une fappléant toujours au défaut de l'au- tre , ou corrigeant fon excès, l'effet des deux enfemble füt © 3 toujours égal à la pefanteur abfolue du Corps. C’étoit-là le Problème de M. Bernoulli , & aucun autre Géometre ne l’avoit réfolu. Il dépendoit d’une Théorie exaéte des Forces Centrifuges qui n’étoit pas encore aflez connue. Pour celle de la pe- fanteur , qui y étoit nécefaire aufli, elle eft fufifamment ap- profondie. On fçavoit feulement que la Force Centrifuge d’un Corps eft d'autant plus grande, qu'il décrit un plus petit Cercle, qu'il eft plus pefant, qu'il tourne avec plus de viteffe. Mais on ne connoifloit point la mefure ni la regle de ces rapports. Il eft vrai que M. Huguens à la fin de fon Traité, De Horologio Ofcillatorio, avoit donné plufieurs Théorèmes , où il avoit déterminé précifément ces rapports ; mais il avoit laiffé les Théorêmes fans démonftration. IL s’étoit contenté de faire voir qu'il fçavoitle fecret des Forces Cen- trifuges , mais il ne l’avoit pas voulu découvrir. C’étoit une efpéce d’'Enigme qu'il avoit propofée aux plus habiles Géometres; l'illuftre M. Newton en avoit deviné une par- tie s DES SCIENCES. 81 tie, & avoit laiflé le refte à deviner à d’autres. Enfin avec toute la Théorie des Forces Centrifuges , le Problême de M. Bernoulli eût encore été très-difhcile. Si des Problèmes, où il n’étoit queftion que d’appliquer à la Géométrie la fimple Théorie ordinaire de la pefanteur, ont tant exercé , & quelquefois inutilement, les plus grands Géométres , à plus forte raifon un Problème compliqué de deux Théories différentes, auroit-il pû être embarraflant. M. le Marquis de l'Hôpital entreprit de vaincre toutes ces difficultés avec le fecours de fa Méthode des Infini- ment petits , & il femble avoir défié toute autre Méthode d'en pouvoir venir à bout. T1 découvrit d'abord par cette voie la Théorie des For- ces Centrifuges dans le Cercle, & en voici la propolition fondamentale. La Viteffe d'un Corps, quelle qu’elle foit, pourroit avoir été acquife par ce Corps, s'il étoit tombé d’une certaine hauteur, fuivant le Syflême commun de l’'Accélération. Qu'un Corps d’une pefanteur déterminée fe meuve unifor- mément autour d’un Centre avec une certaine vitelle , il faut voir quelle eft la hauteur d’où il auroit dû tomber pour acquérir cette vitefle , & enfuite, Comme le rayon du Cercle qu'il décrit , eft au double de cette hauteur , ainli fa pefanteur eft à fa Force Centrifuge. Cela feul dévoile tout le myftere de M. Huguens , & donne les folutions qu’il avoit dérobées au Public. De-h, il eft aifé de conclure, pour peu qu'on foit Géométre , Qu'afin que la Force Centrifuge d’un Corps foit égale à fa pefanteur, il faut que la viteffe dont il décrit fon Cer- cle, foit égale à celle qu'il auroit acquife en tombant d’une hauteur , qui feroit la moitié du rayon de ce Cercle. Que fi deux Corps égaux décrivent différens Cercles avec des vitelles égales , leurs Forces Centrifuges font en raifon renverfée des rayons des Cercles, c’eft-à-dire , - plus grandes en même raifon , que les Cercles font ja petits. 1700. 82 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Que fi deux Corps égaux décrivent des Cercles égaux avec des vitefles inégales, leurs Forces Centrifuges font comme les Quarrés de leurs viteffes. Que fi deux Corps inégaux décrivent des Cercles égaux avec des viteffes égales , les Forces Centrifuges font com- me les pefanteurs, &c. Suppofé que la pefanteur des Corps terreftres ne vienne que de ce qu'une matiere fluide , qui fe meut circulairement autour de la Terre, & avec elle, tendant à s'éloigner du centre de fon mouvement, qui eft auffi celui de la Terre, repouffe vers ce point les Corps moins propres qu'elle à un mouvement rapide , il eft vilible que la pefanteur d'une mafle de plomb , par exemple, fera précifément égale à la Force Centrifuge d'un pareil volume de cette mariere fluide, pris immédiatement fur la furface de la Terre. Il fau- dra donc que la vitefle dont cette matiere tourne autour de la Terre foit la même que celle qu'auroit acquife la mafle de plomb, en tombant de la hauteur de 750 lieues , parce que la moitié du rayon de Ja Terre eft à-peu-près de cette grandeur. Cette vitefle qu'il eft très-aifé de calculer, feroit 17 fois plus grande que celle d’un point de l’'Equateur de la Terre, qui fait à-peu-près 900 lieues en un jour. C’eft ainfi que la prodigieufe rapidité de la matiere fubtile, qui fembloit navoir été fuppofée que pour la commodité d'un Syflême, vient à être déterminée géométriquement par la Théorie des Forces Centrifuges. Comme par la difpofition de l'Univers les mouvemens en ligne droite , quoique les plus fimples, fontles plus rares, & qu'au contraire la violence que fouffrent les corps müs en rond, eft un principe d’aétion fouvent employé par la Na- ture, aufli-bien que le reflort , qui n’agit que quand il ef violenté, il eft aifé de juger que la connoiffance des Forces Centrifuges doit être en Phyfique d’un ufage fort étendu. M. le Maïquis de l'Hôpital donne ici tout ce qu’on pou- voit défirer fur cette matiere. Ce travail fi confidérable qui n'étoit qu’un acheminement à la folution du Problème de Dir: S S'CHEN CES. 83 M. Bernoulli ,-peut pafler pour plus important que cetre fo- lution même, qui en étoit le premier objet. I1ne pouvoit gué- tes manquer de la trouver, après de fi heureux préparatifs. Voici comment on peut prendre fans calcul une idée de la Courbe, qui fatisfait à la Queftion. Elle doit être pref- fée de toutes les manieres dont elle peut l'être par la For- ce Centrifuge & par la pefanteur du Corps qui la décrira, combinées de façon que leurs deux aétions faffent toujours une fomme égale à la pefanteur abfolue du Corps; & par conféquent fi elle peut être preflée , ou par la Force Cen- trifuge feule égale alors à la pefanteur abfolue feule, ou ar la pefanteur abfolue feule , elle le fera. Il eft d’abord évident qu'elle peut être preffée par la pe- fanteur abfolue feule. 11 fuit pour cela qu'il y ait un côté horifontal de la Courbe qui porte le Corps, & que la Force Centrifuge foit nulle. Or quand le Corps fera fur un côté horifontal, il ne pourra tomber, & par conféquent ce point de la Courbe en fera l'extrémité, ou la fin de la chute du Corps. Et afin que la Force Centrifuge foit alors nulle , il faut que le Corps ait eu un mouvement précé- dent en ligne droite, ou infiniment peu différent de la droite; car ce mouvement , de quelque viteffe qu'il foit, ne donne aucune Force Centrifuge. La Courbe vers fon extrémité fera donc extrêmement inclinée à l’horifon. La pofition du Corps fur le dernier côté horifontal em- porte qu'il foit pofé fur la Courbe du çôté de fa concavité, & par conféquent qu’il ait été de ce même côté dans toute Férendue de la Courbe, ou pendant toute fa chute. La Force Centrifuge ne peut caufer feule la preflion de la Courbe, que quand le Corps ne fera nullement appuyé fur la Courbe; car s’il l’étoit, il la prefleroit du moins par üne partie de fa pefanteur abfolue. Si la Force Centrifuge caufe feule la preflion , le Corps fera donc alors comme fufpendu en l'air, & du côté de la concavité de la Cour- be où il doir toujours être, & il preflera la Courbe de bas en enhaut pat fa Force Centrifuge. Or cela eft concevable Li 84 HiSToiRE DE L’ACADEMIE ROYALE fans contradiction , & par conféquent il y aura quelque point ou quelque étendue de la Courbe où cela fera. Dans cette fituation du Corps, fa pefanteur qui le tire toujours en embas, tend à le détacher de la Courbe où fa Force Cehtrifuge l'attache , & par conféquent diminue la prefion caufée par la Force Centrifuge. If faut d’ailleurs que la preflion foit toujours égale à la Force de la pefan- teur abfolue, & par conféquent il faut que dans cette fi- tuation du Corps fa Force Centrifuge foit plus grande que fa pefantewr abfolue. Si Pon conçoit qu'il y ait alors un côté horifontal. de la Courbe, auquel le Corps foit comme attaché en deffous par fa Force Centrifuge, il fera tiré en embas par fa pefan- teur abfolue entiere , & par conféquent il faudra que fa Force Centrifuge foit double de cette pefanteur , afin qu'une moitié de fon action étant détruite, le refte qui cau- fera {eul la preflion foit encore égal à la pefanteur abfolue du Corps. Ce côté horifontal ainfi conditionné , étant pof= fible , il fe trouvera néceffairement dans la Courbe. Après cela la Courbe s’inclinant néceffairement à l’ho- sifon , & le Corps lui étant toujours comme attaché endef- fous par la Force Centrifuge , il ne fera plus tiré en embas par fa pefanteur, dont la direétion eft toujours verticale , que felon les lignes obliques à la Courbe, & par confe- quent la pefanteur agira moins que dans le cas du côté ho- rifontal ; & puifqu'elle agit moins, elle diminueroit trop. peu l'aétion de la Force. Centrifage, fi cette Force étoit encore double de la pefanteur abfolue, ou ce qui eft le même , la Courbe feroit trop preflée de bas en enhaut. Il faut donc que la Force Centrifuge diminue en elle-même; ce qui fe fera par la diminution de la courbure de la Cour- be, & en même tems par le peu d’augmentation.de la vi- tefle du Corps. La Force Centrifuge qui étoit double de la pefanteur ab- folue diminuant toujours , il faut qu'elle devienne égale à cette pefanteur, & qu'alors par conféquent la preflion mises | } à 1| ( DES SCIENCES. 85 qu'elle caufe à la Courbe ne foit plus diminuée par cette pefanteur , fans quoi la preffion feroit trop petite. Pour cela il faut que l’aétion de la pefanteur jufques-là inclinée à Ja Courbe, lui devienne parallele, ou ce qui eft le même, que la Courbe ait un côté vertical, contre fequel la Force Centrifuge preffera le Corps, fans que la pefanteur , ni ai- de à cette action, ni y nuife.Et en effet ileft naturel que la: Courbe ayant deux côtés horifontaux non confécutifs, dont l'un eft à fon extrémité, comme nous avons vü, elle paffe de lun à Pautre par un côté vertical entre deux. Après cela la pefanteur commence à preffer le Corps contre la Courbe , d’où:il fuit que le Corps qui fuit toujours. la concavité de la Courbe, eft appuyé fur elle, & que cette Courbe dans la partie précédente étoit concave vers l'Horifon, & convexe dans celle-ci. Puifque le Corps s’appuye fur la Courbe, il s'y appuye ou la preffle d'autant plus qu'elle s'incline davantage à l'Horifon , & à mefure qu’une plus grande partie de la pe- fanteur abfolue agit , il faut que la Force Centrifuge agifle moins. Ce qui la diminue c’eft la diminution continuelle: de la courbure de la Courbe, & cette diminution eft plus grande que l'augmentation de la viteffe du Corps ,. qui vient de la continuation de fa chute. Enfin le Corps vient fur un côté de la Courbe infiniment incliné ou horifontal. Et là, comme nous l'avons dit, il preffe par toute fa pe- fanteur abfolue, n’a aucune Force Centrifuge, & termine fa chute. . Tout ce que nous avons repréfenté jufqu'ici, épuife tou- tes les combinaïfons de la Force Centrifuge & de la pe- fanteur, poflibles , felon fa Queftion propofée , & par con-- féquent la Courbe à commencé par le côté horifontat où la Force Centrifuge étoit double de là pefanteur ab- folue , comme elle finit par lforifontal. où cette Force eft nulle. Mais afin qu'à l’origine de la Courbe il y eût dans !e Corps de la Force Centrifuge , il falloit que le Corps eût. Luy 86 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE déja de la vitefle, & une certaine vitefle pour avoir une Force Centrifuge double de fa pefanteur; & par confé- quent il faut imaginer ce Corps comme étant tombé d’une certaine hauteur en ligne droite, avant que de commencer à décrire la Courbe. Ainfi à l’origine de la Courbe, la Force Centrifuge eft la plus grande qu’elle puifle être, & diminue toujours jufqu’a la fn, où elle eft nulle. Dans la partie de la Courbe qui eft concave vers l'Horifon , & fur laquelle le Corps n’eft point appuyé, la pefanteur agit contre la Force Centrifu- ge, & en corrige l'excès. Dans l’autre partie qui eft con- vexe vers l'Horifon, & fur-laquelle le Corps eft appuyé, la pefanteur agit d'accord avec la Force Centrifuge ; & fup- plée à fon défaut, de forte que l'égalité de preflion effen- tielle à la Courbe, eft toujours confervée. Si lon vouloit que l’impreflion du Corps fur la Courbe, compofée de fa force Centrifuge , & d’une partie de fa pe- fanteur , au lieu d’être toujours égale à fa pefanteur entiere, le füt toujours à quelque autre grandeur donnée, telle qu'on voudroit ; M. le Marquis de l'Hôpital réfout cette Queftion par les mêmes Principes avec la même facilité, & fait voir le changement qui arriveroit à fa Courbe. Si l’on vouloit même que le Corps ne fit aucune impref- fion fur la Courbe, & que fa Force Centrifuge, & la por- tion de fon poids qui agiroit, fe détruiliffent perpétuelle- ment, parce qu'elles feroient égales, & auroient des di- rections oppoñées ; c’efl-à-dire enun mot, fi l’on ne confi- déroit dans le Corps que fa pefanteur abfolue , qui le feroit toujours tomber en ligne droite ; & que pour lui faire décri- re une Courbe, on lui donnat en même tems une certaine viteffe horifontale, on verroit auffi-tôt la Courbe de M. le Marquis de l'Hôpital fe transformer en une Parabole ordi- naire ; & c’eft aufli cette même Parabole que Galilée fait décrire à un Boulet de Canon, qu'il confidére précifément dans les mêmes termes que nous venons de pofer. Une Courbe une fois trouvée pour fatisfaire à de certai- DES SCIENCES. 87 nes conditions d’un Problême, fe change enfuite en difié- rentes autres Courbes , à chaque changement que l’on ap- porte dans les conditions. Ces transformations font un des plus agréables fpeétacles que la Géométrie fpéculative puiffe donner à l’efprit; & de plus, quand on retombe par leur moyen dans des vérités déja connues d’ailleurs , & qu’on fe retrouve , pour ainfi dire , en Pays de connoiffance, c’eft un furcroit d’aflurance , qu'on avoit pris le bon chemin. Tandis qu'il étoit queftion de Forces Centrifuges , M, Varignon ajoûta une chofe confidérable à une Théorie qu'il avoit donnée en 1698. des mouvemens variés, c'eft- a-dire , accélérés ou retardés, fuivant quelque proportion que ce fut. La Vitefle eft un rapport de l’'Efpace au Tems, ou le Quotient d’une Divifion faite de l’Efpace par le Fems. Plus l'Efpace eft grand & le Tems petit , plus le Quotient de la Divifion ou la Viteffe eft grande. Plus l'Efpace eft petit par rapport à la grandeur du Tems, plus la Vitefe eft petite. Il eft donc vifible que le Tems multiplié par la Viteffe, doit produire l'Efpace ; que l’'Efpace divifé par la Viteffe doit produire le Tems ; & qu'enfin deuxde ces trois chofes étant données, on en conclut la 3e fans difficulté. Mais tout cela n’eft vrai que quand les mouvemens font uniformes , c’eft-à-dire, quand les Efpaces parcourus en Tems égaux font égaux, ou, ce quieftlamême chofe, quand les Efpaces font toujours proportionnels aux Tems. Mais fi les mouvemens font accélérés, comme celui d'un Corps pefant qui tombe dans l'air, ou retardés , com- me celui de l’eau qui fort d'un refervoir par une petite ou- verture , alors la Vitefle change toujours; celle d'une mi= nute n'eft point celle d'une autre minute, & deice. qu’un Corps qui tombe, a, par exemple, parcouru-1 toifé en 1 minute , on n’en fçauroit conclure , comme on auroit fait dans un mouvement uniforme, que fa vitefle conlifte dans 88 HiSTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE le rapport de 1 toife à 1 minute ; & que dans 60 minutes ou 1 heure, il parcourroit 60 toiles; car il eft certain que par l'accélération de fon mouvement, il en parcourroit 3600. On ne peut pas non plus de ce que le Corps a par- couru unetoife dans la premiere minute, en conclure fe- lon quelle proportion la viteffe s’eft augmentée, on peut fuppofer une infinité d'augmentations différentes de vitefle, qui donneront toutes ce rapport de 1 toife à 1 minute. Cependant M. Varignon n’a pas laiffé de traiter les mou- yemens variés comme les uniformes, & de tirer des uns les mêmes conféquences que des autres. | Dans un mouvement uniforme, le rapport de l'Efpace au Tems peut être repréfenté par un Triangle, dont la hau- teur fera divifée en autant de parties qu’on voudra , par au- tant de Bafes paralleles. Les différentes parties de la hau- teur repréfenteront les différens Efpaces parcourus ; les dif férentes Bafes, les différens Tems:& comme dans ce Triangle les Bafes font en même proportion que les Hau- teurs correfpondantes ; aufli dans le mouvement uniforme, les Tems font comme les Efpaces. Dans un Tems dou- ble , l'efpace eft double, &c. Mais un mouvement varié, où, par exemple, en un T'ems double, l'Efpace eft quadruple, ne peut être repré- fenté par un Triangle , il faut qu'il le foit par une Courbe. Car dans une Courbe Les différentes Ordonnées ne font pas entre elles en même proportion que les Abfcifles corref- pondantes, comme dans un Triangle les Bafes paralleles font en même proportion que les Hauteurs, mais les Or- données füivent toujours une certaine proportion pendant que les Abfciffes en fuivent une autre; & par-là les Or- données d’une Courbe font propres à exprimer les Tems d'un mouvement varié, qui augmenteront ou diminue- ront toujours felon une certaine proportion, tandis que les Abfcifles reglées fur une autre proportion , exprimeront les Efpaces. Ainfi dans l'hypothéle de Galilée, où les Ef, paces parcourus par les Corps pefans , augmentent ne“ es D E1Su 191 C 3 É NC ES: 89 les Quarrés des Tems, une Parabole ordinaire repréfente ce rapport, parce que fes Ordonnées étant prifes pour les Tems, &fes Abfciffes pour les Efpaces, une Ordonnée double d'une autre répond à une Abfciffle quadruple, une Ordonnée 3 fois plus grande ,à une Abfaiffe 9 fois plus grande, &c. Il n’eft pas befoin d’avertir que ceci ne figni- fie pas que le mouvement varié fe faffe fuivant une Para- bole, ou une autre Courbe, & que le Corps la décrive, mais feulement que la Parabole , ou quelque autre Courbe repréfente par le rapport de fes Abfciffes & de fes Ordon- nées celui des Efpaces & des Tems d'un mouvement va- rié; & en effet, fuppofé l'immobilité de la Terre, un Corps quitombe ne fe meut qu'enligne droite , & cependant la Pa- rabole ne laiffe pas de repréfenter fon mouvement accéléré. Si une Courbe repréfente le rapport des Efpaces aux : Tems dans un mouvement varié, une autre repréfentera de même par fes Abfcifles & par fes Ordonnées , le rapport des Tems aux Viteffes , ou des Vitefles aux Efpaces. ‘Cela fuppofé, ce fut par la Géométrie des infiniment pe+ tits, que M. Varignon réduifit les mouvemens variés à la même regle que les uniformes, & il ne paroît pas que par toute autre Méthode on eût pù y parvenir. La Vitefle accélérée d'un Corps eft toujours accélérée , dans quelque petit Efpace , & dans quelque petit Tems qu'on la confidére, tant que cet Efpace & ce Tems font d'une petiteffe finie & déterminée. Mais s'ils font regardés comme infiniment petits, la Viteffe devient uniforme, quoi- qu'alors même elle s’augmente encore ; & voici la preuve de ce Paradoxe. | Les infiniment petits ont entre eux les mêmes rapports que les grandeurs finies, l’un peut être double, triple , &c. d’un autre. Le rapport d’un infiniment petit à un autre, qui eft dotble ; triple, &c. eft 1,+, &c. ces rapports, 2,2, &c. font des grandeurs finies & déterminées, & par confé- quent les rapports des infiniment petits, ne font pas des grandeurs infiniment petites , mais des grandeurs finies. 1700. 90 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE La Viteffe d’un Corps qui dans un Tems infiniment pe- tit eft fuppofé parcourir un Efpace infiniment petit, n’eft donc pas infiniment petite, mais une grandeur finie, puif- que c’eft le rapport de deux infiniment petits de même gen- re ; & en effet lorfque l’Efpace & le Tems décroiffent pro- portionnellement, la Viteffe ne décroït pas pour cela, & un Corps qui parcourt d’un mouvement uniforme 1 toife en 1 minute , a la même viteffe que quand il parcourt 60 toifes en 1 heure. / Mais il n’en va pas de l'augmentation de la Viteffe, com- me de la Viteffe même. Car une Viteffe quireçoit à chaque moment des augmentations du même genre, toujours dé- pendantes de la même caufe , eft moins augmentée dans un Tems plus court que dans un plus long , & par conféquent dans un Temsinfiniment petit fon augmentation ne peut être qu'infiniment petite. La Viteffe par laquelle un Efpace infiniment petit, eft par- couru dans un tems infiniment petit , eft donc une grandeur finie, dont l'augmentation dans cet inftant n’eft qu'infini- ment petite. Or une grandeur finie eft infiniment grande par rapport à un infiniment petit , & elle n’eft ni augmentée ni diminuée, quand cet infiniment petit y eft ajoüté, ou en eft retranché ; & par conféquent la Viteffe d’un inftant doit être cenfée uniforme pendant cet inflant, puifque fon aug- mentation n’eft à compter pour rien, par rapport à elle. A la faveur de cette uniformité , fi fubtilement trouvée, les mouvemens variés rentrent dans les mêmes regles que les autres, pourvû qu’on en réduife les Efpaces & les Tems à des infiniment petits. Parce que les Grandeurs infiniment petites fe prennent plus ordinairement, & plus naturellement dans des Cour- bes , on a voulu que les Abfciffes & les Ordonnées d’une Courbe repréfentaffent les Efpaces & les Tems. * _ Le rapport des Efpaces aux Tems , fuppofé toujours Pu- niformité dans le mouvement produite par les infiniment petits, donne la Vitefle ; & la proportion de cette Vitefle . | | | DES SCIENCES. 91 avec le Tems, qui eft déja connu, eft la proportion felon laquelle la Viteffe augmente ou diminue. Ainfi lon trouveroit fans peine la Courbe, qui par fes Abfciffes & fes Ordonnées, exprimeroit la Vitefle & les Tems, ou la Viteffe & les Efpaces. Il eft affez vifible qu’en renverfant ce raifonnement , &t en employant le même art desinfiniment petits , on trouve- roit par la Courbe des Vitefles & des Tems celle des Ef paces & des Tems, & ainfi des autres combinaifons; & qu’enfin de ces trois chofes, Efpace , Tems, Vitefle, deux étant données, la troifiéme s’en déduiroit dans les mouve- mens variés comme dans les uniformes. Voilà ce que M. Varignon avoit depuis deux ans donné à l'Académie. Mais il rendit cette Théorie plus générale & plus belle , en y faifant entrer les Forces Centrales, c’eft-à- dire des-Forces toujours appliquées , qui portaffent en ligne droite vers un certain point, ou en éloignaffent le Corps en mouvement. Telle eft l'idée que l’on a communément de la pefanteur , ou de la legereté. Les Viteffes, les Efpa- ces, & les Tems, combinés enfemble , ne peuvent fournir que trois rapports; mais la Force Centrale étant ajoûtée, il en peut réfulter fix. M. Varignon difpofa fi heureufement fa nouvelle Métho- de, qu’il ne falloit encore qu'un feul de ces fix rapports pour trouver les cinq autres , ou, ce qui eft la même chofe, cha- cun de ces rapports étant exprimé par les Abfciffes & les Ordonnées de quelque Courbe, fi l’on donnoit une feule des fix Courbes, les cinq autres s’en déduifoient fans peine. Pour cela, il eft vifible qu'il falloit exprimer la Force Cen- trale de maniere qu'il n’entrât dans fon expreflion, que des Viteffes , ou des T'ems, ou des Efpaces, moyennant quoi le nombre des chofes qu'il falloit connoître felon la Méthode précédente, n’augmentoit point, & le nombre de celles qui s'en pouvoient déduire étoit augmenté de la Force Centrale. Quand la Vitefle d’un Corps s’accélére, par exemple, 92 HISTOIRE DE L'ÂCADEMIE ROYALE celle d'un Corps quitombe, ce qui caufe cette accéléra- tion, c’eft que la Force qui fait la pefanteur, quelle qu’elle foit, étant toujours appliquée à ce Corps, augmente à cha- que inflant l'effet qu’elle a produit dans l’inftant précédent ; & d’ailleurs, elle l'augmente toujours également, fi elle eft toujours la même, & qu’elle ne change point, comme on le peut fuppofer ici. Sur ce fondement, Galilée a prouvé que les Efpaces pat- courus par un Corps qui tombe, font toujours entre eux ; à les prendre depuis l’origine de la Chute, comme les Quarrés des Tems employés à les parcourir; & il weft pas befoin de répéter ici fa preuve. Il en ira de même de toute autre Force conftante, & con- tinuellement appliquée. É D'un autre côté, comme les Effets font toujours propor- tionnels aux Caufes, & qu’il ne s’agit ici que de proportions, leffet de la Force Centrale, qui eft l'Efpace qu'elle fait parcourir , divifé par le Quarré du Tems, peut tenir fa pla- ce , & l’exprimer géométriquement. Il ne s’agit plus que de déterminer quel eft l'Efpace parcouru en vertu de la Force Centrale. Dans la Théorie préfente, M. Varignon confidére la Vi- tefle & la Force Centrale féparément l’une de l’autre ; & en effet elles peuvent être féparées. Une pierre jettée perpen- diculairement de haut en bas, tient fa Viteffe dubras qui la jettée; mais elle tient de fa feule pefanteur l'accélération de cette Vitefle, & ikne faut donner précifément à la Force Centrale que l'Efpace parcouru par cette accélération. La Démonftration précédente ayant jetté néceflairement M. Varignon dans les infiniment petits , & celle-ci n’en étant qu'une fuite, il faut aller prendre aufli dans les infi- niment petits l'Efpace dont il eft queftion. Nous avons déja vû que lEfpace parcouru en vertu de la Viteffe dans un Tems infiniment petit, eft infiniment pe- tit, & que dans ce même inftant l'augmentation de la Vi- teffe eft aufli infiniment petite par rapport à la Viteffe qui eft DES SCIENCES. 93 finie. Il s'enfuit donc que le nouveau petit Efpace parcouru en vertu de l'augmentation de la Viteffe , fera infiniment petit par rapport à PEfpace infiniment petit parcouru dans le même Fems en vertu d’une Vitefle finie, c’eft-à-dire , que ce fera un infiniment petit du fecond genre; car ; fe- lon cette Géométrie, il y a une infinité d'Ordres d'infini- ment petits, dont les fupérieurs font infiniment grands à ‘Végard des inférieurs. Ainfi un Efpace infiniment petit du fecond genre divifé par le Quarré du Tems, exprimera la Force Centrale , quel- le qu’elle foit, & dans cette expreflion il n'entre que dés Efpaces & des Tems, d’où il eft aifé de pañler aux Vitefles, ou réciproquement des T'ems & des Efpaces, ou des Ef paces & des Virefles, &c. à la Force Centrale. Par exemple , fi lon fuppofe qu'un Corps mû en ligne droite avecune Force Centrale , décrive des Efpaces qui foient entre eux comme les Quarrés des Tems ; ou, ce qui eft la même chofe, que la Parabole commune repréfente par fes Abfcifles & par fes Ordonnées, les Efpaces & les. Tems, on en conclura par les Regles de M. Varignon, que la Force Centrale eft toujours la même, & ne fouffre -aucun changement dans for aétion:, & en effet ce n’eftau- tre chofe que la pefanteur. En ce cas-la, il faut remarquer que la Force Centrale étant toujours la même, les lignes droites qui la repréfen- tent à chaque inflant, font toujours égales ; & par confe- quent ne fçauroient être des Ordonnées de Courbe; maisl eft bon de commencer toujours par fuppofer que les Gran- deurs, dont on cherche les rapports, forment des Courbes, parce que c’efi une fuppofition générale, & que lon verra facilement dans la fuite , fr ces Courbes fe changeront en ‘lignes droites , au lieu que des lignes fuppofées droites ne fe changeroïent pas en Courbes. ? Toutes ces Méthodes pourroient nous fournir des réflé- xions favorables à la Géométrie des infiniment petits. Car toure Géométrie n’eft que L'Art de découvrir les rapports: Mi, 94 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE des Grandeurs , & de déduire les uns des autres, & cet Art eft d'autant plus parfait, que d’un plus petit nombre de rap- ports connus, il en fçait déduire un plus grand nombre d’in- connus. Or il paroït aflez , ne füt-ce que par les Exemples que l’on vient de voir, qu'il y a des rapports que l’on ne peut attraper , à moins que de pourfuivre les Grandeurs jufques -dans leurs parties infiniment petites, & dans leurs premiers Elémens, & même quelquefois jufqu’aux Elémens infini- ment petits de ces premiers Elémens, & encore au-delà, s'il le faut. On a vû que l'Efpace & le Tems d'un mouve- ment varié érant donnés, il a fallu, pour en conclure la Vi- tefle ; aller chercher dans les Eléinens infiniment petits de ces deux Grandeurs , ce rapport qui n’étoit point entre ces Grandeurs même confidérées dans leur étendue finie & na- turelle. Pour la Force Centrale, il a fallu percer jufqu'à l'infi- niment petit de l'infiniment petit, & le rapport que l’on cher- choit, n’étoit point dans les feuls infiniment petits du pre- mier genre. En un mot, des mêmes Grandeurs données la Géométrie des infiniment petits en tire plusqu'une autre, parce qu'elle multiplie les rapports, & en fait naître de nouveaux. Jufqu'ici M. Varignon n’avoit confidéré que les mouve- mens faits en ligne droite. Mais comme la difficulté n’eft prefque que de trouver la bonne voie , & qu'après cela il n'en coûte pas beaucoup pour la fuivre, il voulut étendre fa Théorie aux mouvemens faits felon des Lignes Courbes, & variés ainfi que les précédens. Par la réduction à luniformité que donne la Géométrie des infiniment petits, la Vitelfe de ces mouvemens ef le rap- port d’une portion infiniment petite de la Courbe qu'ils dé- crivent, à un Tems infiniment petit, au lieu que la Vi- tefle des mouvemens faits en ligne droite, étoit le rappoït d’une portion infiniment petite de la ligne droite , à un Tems infiniment petit. De-là, fe tirent les mêmes confé- quences que pour les mouvemens en ligne droite. Pour faire fentir l’ufage de certe nouvelle Regle, M. DES. SIcTENCES 9$ Varignon fuppofe qu'un Corps, dont la pefanteur, felon li. dée commune, eft conftante, & a des direétions toujours paralleles , tombe le long d’une Cycloïde renverfée , & la parcourt depuis un point pris à fouhait , jufqu’a fon point le plus bas, qu'on peut appeller fon fond. 11 cherche enfuite quelle Courbe repréfentera par fes Ordonnées les Tems que ce Corpsemployera à tomber de différens points de cette Cycloïde , plus ou moins élévés , jufqu’à ce même fond. La Regle étant appliquée , les Tems fe trouvent par- tout les mêmes, ce que l’on fçavoit déja d’ailleurs. Si l’on fuppofoit que dansune Cycloïde renverfée toutes les chutes terminées à fon fond, font faites en tems égaux, de quelque hauteur qu’elles ayent commencé, & que lon cherchât quelle hypothefe d'accélération de Vitefle à été néceffaire pour donner cette propriété à la Cycloïde , on trouveroit avec la même facilité que ça été l’hypothefe de Galilée, dans laquelle les Viteffes font comme les Racines des hauteurs. Mais tout cela étant fort limité, M. Varignon s’éléve plus haut, & il tire de fa Regle pour les mouvemens curvi- lignes , l'équation générale d'une Courbe, le long de la- quelle les chutes terminées au fond , de quelque point qu’el- les ayent commencé , fe feront felon telle proportion des Tems qu'on voudra, & cela, quelque hypothéfe qu’on prenne pour l'accélération de la Vitefle. Si dans cette équa- tion indéterminée , on veut que les Tems foient égaux, lin- détermination commence à fe reftraindre, & l’on wa plus qu’une Courbe en général , où les chutes fe faifant tou- jours en Tems égaux , l'hypothéfe de l'accélération pourra être telle que l’on voudra. Si enfuite on détermine cette hypothéfe a être l’hypothéfe commune, on voit renaître aufli-tôt la Cycloïde. M. Varignon reprenant cette Courbe, y détermine les Arcs, qui dans une même chute feroient parcourusen Tems égaux, ce qui étend & augmente encore cette connoifflan- ce de légalité des Tems. Ïl fait plus. Après avoir déterminé quel rapport il y a entre le Tems d’une chute par un Arc 96 HISTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE quelconque de Cycloïde, & le Tems d’une chute par la corde de l'Arc correfpondant du Cercle générateur, il fe fert de cette découverte pour établir une ligne droite conf- tante qui mefureroit le Tems de toutes les chutes faites par les Arcs inégaux d’une infinité de différentes Cycloïdes qui {e couperoient toutes à un point de cette droite, d’où com- menceroient les chutes. De-là naît une nouvelle Courbe, qui pafferoit par tous les points de cette infinité de Cycloi- des, où fe termineroient les chutes faites en Tems égaux. En voilà affez pour faire appercevoir lextrême fécondité de la Regle des Mouvemens curvilignes , prife dans fa pre- miere fimplicité. Mais M. Varignon l'a pouffée beaucoup plus loin en y joignant la confidération des Forces Cen- trales qui tendent à un point. La Force Centrale que lon fuppofe toujours, comme dans les mouvemens redilignes, conftante pendant chaque inflant , & continuellement appliquée , agit fuivant une ligne droite tirée du Centre où tend le Corps, à ce Corps qui fe meut. Quand il fe meut en ligne droite, la ligne de fon mouvement eft la même que celle par laquelle la Force Centrale agit; & cette Force eft par conféquent toujoursap- plicuée de la même maniere. Mais quand le Corps fe meut par une Courbe, cette ligne qui eft celle de fon mouve- ment, eft différente de la ligne droite, par laquelle il tend à un Centre, & reçoit l'impreflion de la Force Centrale. Cette Force, quoique conftante à chaque inftant, & tou- jours appliquée , agit plus ou moins felon qu’elle ef appli- quée plus ou moins avantageufement au Corps fur lequel elle agit. Le plus ou le moins dans cette aétion fe regle comme dans toutes les autres. Si la Force Centrale, agit par une ligne perpendiculaire à la Courbe que décrit le Corps en mouvement, elle agit autant qu’elle puifle ja- mais agir; hors de-là, elle agit d'autant plus foiblement que la ligne de fon aétion eft plus oblique au petit Arc de la Courbe, où fe trouve le Corps à chaque moment. Par-là, il ef vifible , que fi un Corps fe meut circulaire- ment, & qu'il y ait une Force qui le faffe tendre au Cen- tre Des = DES SCIENCES 97 tre de fon cercle, ou, ce qui revient au même, le porte à s’en éloigner , cette force agira toujours toute entiere , & également, parce que toutes les lignes tirées du centre d'un Cercle à fa circonférence , y font perpendiculaires & égales. Mais quelque autre Courbe qu’un Corps décrive, la Force Centrale qui le portera à un point pris au-dedans , ou au- dehors de cette anbe ,ne pouvant agir par des lignes per- pendiculaires à la Courbe qu'en quelques points, & hors delà, agiffant toujours par des lignes inclinées , & toujours différemment inclinées felon la nature de la Courbe, fon action fera inégale. x M. le Marquis de l'Hôpital dans le Problème que nous avons rapporté de lui,n’avoit confidéré la Force Centrale que dans le Cercle, ou, ce qui eft au fond la même chofe ,ilne l'ivoit confidérée qu’agiffant toujours par une ligne perpen- diculaire à la Courbe du mouvement, auquel cas il falloit , afin que cette Courbe ne fût pas un Cercle, que le Centre ou fe rapportoit la Force Centrale , changeât toujours. Mais M. Varignon rendit la Théorie aufli générale qu’elle le puiffe être , en appliquant la Force Centrale à toutes les Courbes poflibles, & en la rapportant à tel point unique qu'on voudra établir pour Centre, foit au-dedans, foit au- dehors de ces Courbes. Il détermina, toujours par la Mé- thode des infiniment petits , & néceflairement par cette Méthode , quelle eft l'inégalité de lation de la Force Cen-_ trale à chaque point d’une Courbe quelconque, où fe trouve le Corps en mouvement. L’expreflion géométrique qu’il donne de la Force Cen- trale ainfi fpécifiée , & accompagnée des inégalités de fon attion , ne contient encore que des Vitefles & des T'ems ,& par conféquent le nombre des chofes que l’on en peut dé- duire, n’eft pas moins grand, que quand on la confidéroit * toute fimple , & agiffant toujours parune même ligne droite. . Réciproquement , il n’eft pas befoin de connoître un plus Fat) nombre de chofes pour avoir la Force Centrale avec les inégalités de fon a@tion , que pour lavoir toute fimple. - 1700. 08 Histoire DE L'ACADEMIE ROYALE Par cette voie, M. Varignon tombe dans les Propofi- tions principales du fçavant Ouvrage de M. Newton , mais ce qui ennoblit le plus fa recherche, ce font les confé- quences qu'il en tire pour l’Aftronomie , & pour les diffé- rens Syftêmes des Cieux. Tout ce qui tourne autour d’un Centre tend à s’en éloi- gner , & M. Defcartes a fondé fur ce principe l'hypothé- fes des Tourbillons. Toutes les Planetes renfermées dans le Tourbillon du Soleil tournent autour de cet Aftre, & tendent par conféquent à s'en éloigner. Mais la matiere éthérée dans laquelle elles nagent , plus fubtile, & plus agitée qu’elles , & plus difpofée à s'éloigner de ce Centre commun , les y repoufle continuellement, ou plutôt ré- prime leur effort, & les tient toujours dans la circonfé- rence de la même Courbe qu’elles décrivent autour du Soleil. C’eft-là ce qu'on peut appeller la pefanteur des Planetes par rapport au Soleil , parce qu’apparemment elle reflemble au principe qui repouffe les Corps terreftres vers HIPIELTES On a grande inclination à croire que ce qui tourne fe meut circulairement , les yeux font naturellement pour le Cercle , à moins qu'ils ne voyent bien clairement le con- traire , & par cette raifon, l'on a toujours crû que les Corps céleftes étoient muüs circulairement. D'ailleurs on leur a attribué je ne fçai quelle nobleffle , à laquelle on a crû que le mouvement circulaire convenoit mieux , parce qu’il eft égal & uniforme , & Copernic lui-même , tout hardi qu'il étroit & tout defabufé des idées communes, a confervé ce préjugé. Cependant quand les Obfervations Aflronomiques ont été devenues plus exaétes qu’elles n’avoient encore été, il ne s’eft point trouvé que la fuppofition des mouvemens cir- culaires sy accommodit. Kepler a été le premier qui a ofé changer en Ellipfes les Cercles que l’on faifoit décrire aux Planetes autour du Soleil. Il y a un foyer commun à toutes ces Ellipfes , & le DES SCIENCES ,,% 99 Soleil y eft placé, au lieu qu'il étoit au Centre de tous ces Cercles. Par-la s'expliquent très-naturellement les diffé- rentes diftances des Planetes au Soleil. L’Aftronomie seft encore perfe@ionnée depuis Kepler; fon hypothéfe n’a point fatisfait entiérement aux Obferva- tions, & M. Caffini y a fait un changement. L’Ellipfe de Kepler étoit lEllipfe ordinaire, où la fomme de deux li- gnes tirées des deux foyers à un même point de la circon- férence , eft toujours égale. M. Caflini fuppofe une autre efpéce d'Ellipfe, où au lieu de la fomme de ces deux lignes, c'eft leur produit qui eft toujours égal. Mais enfin quelque efpéce de Courbe que lon faffe dé- crire aux Planetes autour du Soleil, pourvû que ce ne foit poiat un Cercle , ileft certain que la Force Centrale quiles poufle vers le Soleil, agit toujours inégalement d’un mo- ment à l’autre , & par conféquent leur Viteffe doit être tou- jours inégale , augmenter quand l’aétion de la Force Cen- trale s'accorde avec la direétion du mouvement de la Pla- nete par la Courbe, diminuer , quand elle y eft contraire. Ainfi le mouvement des Planetes, malgré leur prétendue dignité , fera réellement inégal, on en voit une raifon géo métrique , & l’on ne fera plus obligé de recourir à des hy+ pothéfes forcées , pour les fauver de cette inégalité qu'onne pouvoit fe refoudre à recevoir. Cette idée s'accorde même beaucoup mieux avec tout ce que nous connoiffons d'ail-- leurs dans la Nature , où rien n’eft fi exaétement régulier, qu’il nait toujours quelque irrégularité , & quelque variation, renfermée cependant entre de certaines bornes. M. Newton & M. Leïbnits ont été les premiers , & les feuls qui ayent recherché les différentes pefanteurs d’une Planéte vers le Soleil en différens points de fon Orbe; mais ils n’ont fait cette recherche que dans l'hypothéfe de TEllipfe de Kepler, & paffant de cette Ellipfe aux autres Se&tions coniques, ils ont trouvé en général, que les actions d'une même Force Centrale , tendante à un foyer de quel- que Section conique que ce foit, font entre elles en raifon Ni too HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE renverfée des quarrés des diftances de ce foyer au Corps qui décrit la Section conique. Cette Théorie renfermée jufqu'à préfent dans les Sec- tions coniques , M. Varignon l’étend par fa Méthode à tou- tes les Courbes poffibles, quel que foit aufi le rapport qu'on veuille fuppofer entre les Tems employés à en parcourir différens Arcs. Il fuit de-là que fi l’on connoît la Courbe que décrit une Planete , & les Tems qui répondent aux Arcs différens, on peut déterminer à chaque moment de fon cours, le plus ou le moins de Force de la pefanteur qui la pouffe vers le Soleil, & de combien elle iroit vers cet Aftre plus ou moins rapidement dans un moment que dans un autre, fi elle étoic tout à coup délivrée de la contrainte étrangere qui l’empê- che dy aller , & qui la tient attachée à la circonférence d’une Courbe. Eüût-on cru que la Géométrie eût pù atrein- dre jufqu’à mefurer dans le corps de Saturne, les différens dégrés d’une tendance fecrete & cachée qu'il a vers le So- Îeil , qui en eft à une diftance prefque infinie ? Il fuit encore que fi les Planetes tendent vers le Soleil; & que par les Obfervations leur mouvement foit réellement inégal , il eft abfolument impoffible qu’elles décrivent des Cercles, & que pour leur donner un mouvement égal fur quelque autre Courbe , il faudroit fuppofer qu'à chaque inftant de leur cours, elles tendiflent à un Centre différent, ce qui paroït devoir être impoflible felon la Méchanique des Cieux. Il ne refte donc plus qu’à avoir des Obfervations exactes fur le cours des Planetes , la Géométrie a fait ce qui dé- pendoit d’elle , elle eft prête à fournir telle Courbe que l’on pourra fouhaiter , & PAftronomie n’a qu'a choiir. Quand même , ce qui eft affez vrai-femblable, ces grands Corps qui nagent dans un fluide immenfe, ne fe tiendroient jamais bien exaétement fur la circonférence d’une Courbe, & que leur cours ne feroit pas plus régulier que celui d'une Boule abandonnée au milieu du courant d'une Riviere, DES SCIENCES 107 d'où elle fe détourne toujours un peu tantôt à droit, tantôt à gauche , du moins on auroit la Courbe qui tiendroit le milieu entre les plus grands écarts irréguliers des Planetes, & qui naturellement étoit celle qu’elles étoient deftinées à décrire. Nous n’avons fuppofé jufqu'ici que des Forces Centra- les qui tendent à un feul point, ou par conféquent leurs direétions concourent, & telles font apparemment les For- ces Centrales des Corps céleftes dans l’étendue de tout le Tourbillon du Soleil. Mais parce qu’on peut fuppofer dans quelques Forces Centrales des direétions paralleles , foit qu’elles le foient réellement, ce qui feroit cependant diff- cile à trouver dans la Nature, foit qu’elles puiffent pafer pour l'être à caufe du grand éloignement du point où elles concourent, comme les direétions des Corps pefans, qui fe rapportent au Centre de la Terre, il eût manqué quelque chofe à cette Théorie, fi les Forces Centrales agiffant par des lignes paralleles n’y fuffent pas entrées , M. Varignon n’a pas eu de peine à les y rappeller , car après qu’on a rai- fonné fur deux lignes qui font enfemble un angle aigu , il n’y a qu’à fuppofer cet angle infiniment aïgu , les lignes de- viennent paralleles , & d’une longueur infinie , & les chan- gemens qui en arrivent s’offrent d’abord aux yeux. * SUR LA MESURE DES TRIANGLES. Our trouver la mefure de la fuperficie d’un Trian- gle , il en faut connoître quelques Angles , & quelques côtés , d’où lon conclut les Angles & les côtés inconnus. Si l’on ne connoît que les trois Angles, ils ne peuvent ja- mais donner que la proportion des côtés entre eux , & non leur grandeur abfolue , qui feroit nécefaire pour la con- noïflance de la fuperficie du Triangle. Si l’on ne connoît que les trois côtés , il ne paroïît pas d’abord qu'ils puiffent conduire à cette connoiffançe de la fuperficie 4 cependant ii] Vory. les M: Pag- 74: 102 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Theon & plufieurs autres Géométres après lui, ont ré- folu ce Problème, mais d'une maniere embarraffée ,. & comme il eft utile dans la Géométrie pratique , M. de la Hire en donne une folution plus fimple & plus claire. Cette année M. Carré donna au Publicun Livre intitulé, Méthode pour la Mefure des Surfaces, la Dimenfion des Solides, leurs Centres de Pefanteur , de Percuffion, & d'Ofcillation , par l'application du Calcul Intégral. Le Calcul Intégral soppofe au Calcul Différentiel , & en eft une fuite. Comme dans la nouvelle Géométrie qui employe ces deux Calculs, on conçoit que toutes les Grandeurs finies fe réfolvent en Grandeurs infiniment peti- tes , qui en font les Elémens, ou les Différences, on ap- pelle Calcul Différentiel PArt de trouver ces Grandeurs infiniment petites, d'opérer fur elles, & de découvrir par leur moyen d’autres Grandeurs finies. Car ce qui rend la connoïffance des infiniment petits fi utile & fi féconde , c’eft qu'ils ont entre eux des rapports que n’ont pas les Gran- deurs finies dont ils font infiniment petits, & que par ces mêmes rapports il conduifent à découvrir d’autres Gran- deurs finies. Par exemple , dans une Courbe, quelle qu’elle foit , les Différences infiniment petites de l'Ordonnée & de l'Abcifle , ont entre elles le rapport, non de l'Ordonnée & de l’Abfciffe , mais de lOrdonnée & de la Soutangente, & par conféquent , l’Abfciffe &lOrdonnée feules connues donnent la Soutangente inconnue, ou, ce qui revient au même, la Tangente , pourvü qu'on paffe par les infiniment petits. En rebrouffant chemin, il faudroit que la Tangente ou Soutangente connue d'une Courbe inconnue, donnît les infiniment petits de l'Abfcifle & de l'Ordonnée qui l’ont produite , & par conféquent l’Abfciffe & POrdonnée , qui font des Grandeurs finies dont le rapport fait toute l'eflence de la Courbe. Cet Art de retrouver par les Grandeurs in- finiment petites les Grandeurs finies à qui elles appartiens DES SCIENCES. 163 ñent , s'appelle le Calcul Intégral. Le Différentiel defcend du fini à l'infiniment petit , l’Intégral remonte de Pinfini- ment petit au fini. L'un, pour ainfi dire , décompofe une Grandeur, l'autre, la rétablit. Mais ce que l’un a décom- ofé , l'autre ne le rétablit pas toujours, & par conféquent P'Intégral eft imparfait & borné, du moins jufqu'à préfent. S'il cefloit de l'être , la Géométrie feroit arrivée à fa der- niere perfettion. Dès qu'il s'agit de mefurer une furface , c’eft au Calcul Intégral à le faire.La Bafe d’un‘Parallélogramme multipliée par l'Elénent infiniment petit de fa Hauteur, fait un Paral- lélogramme infiniment petit , qui eft l'Elément du Paral- lélogramme fini, & qui y eft répété une infinité de fois, c’eft-à-dire autant de fois qu'il ya de points dans la hauteur du Parallélogramme fini. Pour avoir ce Parallélogramme fini par le moyen de fon Elément, il le faut donc multiplier par cette Hauteur, & c’eft-là le Calcul Intégral qui re- monte de l’infiniment petit au fini. Il eft vrai que cette opération feroit fort inutile , & ce circuit des infiniment petits fort vicieux, pour ne mefurer que la furface d’un Paraléllogramme , car on n’a qu'à mul- tiplier direétement la Bafe par la Hauteur; mais dès qu'il s’agit de furfaces terminées ou entiérement, ou en partie par des Courbes, cette Méthode devientnéceffaire , ou du moins préférable à toute autre. Que lon conçoive dans une Parabole , par exemple, Pefpace renfermé entre deux Ordonnées infiniment pro- - Ches ,une portion infiniment petite de Axe, & un Arcinfi- niment petit de la Courbe. Il eft certain que cette furface infiniment petite , n’eft pas un Parallelogramme , car les Ordonnées paralleles qui la terminent d’un côté ne font pas égales, & l'Arc de la Courbe oppofé à la petite portion de l’Axe, ne lui eft le plus fouvent ni égal , ni parallele. Cependant par les principes de la nouvelle Géométrie cette furface qui n’eft pas un Parallélogramme , peut en toute rigueur géométrique être traitée comme fi elle en étoit un, 104 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE parce qu'elle eft infiniment petite, & par conféquent pour la mefurer, il n'y a qu'à multiplier une Ordonnée de la Parabole par la portion d’Axe infiniment petite qui lui ré- ond. Voilà l’'Elément de la furface de la Parabole. Cet éncne devenu infiniment grand par le Calcul Intégral, ou, ce qui eft la même chofe, changé en une Grandeur finie , ef la furface entiére parabolique. Cet avantage, particulier à la Géométrie des infiniment petits, de pouvoir fans aucune erreur traiter de petits Arcs de Courbes , comme des lignes droites , des efpaces Cur- vilignes comme les Re&tilignes , &c. fait & qu’elle va beau- coup plus facilement que l'ancienne Géométrie aux mêmes Vérirés , & qu'elle va même à plufieurs Vérités où lancien- ne ne peut aller. D'une plus grande facilité dans fes opé- rations , & d’une plus grande étendue dans fes découvertes, naïflent la fimplicité, & l’univerfalité, qui par elles-mêmes embelliffent tout. Les principes & les raifonnemens que la nouvelle Géo- métrie a en quelque façon le privilége d'employer pour les lignes & pour les furfaces , elle les employe aufli pour les Solides. Une furface à laquelle on donne une Hauteur infi- niment petite , eft l’'Elément d’un Solide , & cer Elément fe transforme en ce Solide même par le Calcul Intégral. Les Centres de Pefanteur, de Percuflion, & d’Ofcilla- tion , qui font une partie des plus difficiles queftions de la Géométrie, fe peuvent rapporter à cette même Méthode, & y deviennent des queftions plus aifées. Après que le Calcul Différentiel a tant brillé dans l Ana- fe des infiniment Petits, M. Carré a voulu donner une idée du Calcul Intégral, encore peu connu. Quoiqu'ilfe foit renfermé dans la maniere la plus fimple & la plus faciie de Proianes , elle n’a paslaïffé de lui donner une affez grande érendue. ASTRONOMIE: BD RL EC LEP SE SO «LA. R. E du 23. Septembre 1699. TT Es Eclipfes de Lune donnent facilement les différen< ces de ne ne de différens lieux, parce que le mo- ment de l’Immerfion de la Lune dans l'ombre de la Terre; ou de fon Emerfion , étant le même pour tous ceux qui voyent l'Eclipfe, deux Obfervateurs placés fous deux diffé: rens Méridiens, n’ont qu’à remarquer quelle heure ils com- ptoient chacun dans ce moment, pour avoir enfuite la diffé- rence de leurs Méridiens en heures, après quoi il eft bien aifé de l'avoir en degrés. Maisune Eclipfe de Soleil ne commence ni ne finit dans le même moment pour tous ceux qui la voyent. Au con- traire toutes les Phafes en font différentes dans le même inf tant pour différens Obfervateurs. L’un en voit le commen- cement, tandis que l’autre en voit le milieu ou la fin. Elle ne fournit aucun fpeétacle qui leur foit commun, & fur le- quel ils fe puiffent affurer qu'ils comptent dans le même inf- tant Pheure qu’il eft alors fous le Méridien de chacun d’eux. Ainfi les Eclipfes de Soleil n’ont été jufqu’à préfent de nul ufage pour la connoiffance des Longitudes, La raifon de cette différence entre les Eclipfes de Lune, & celles du Soleil, c’eft que les premieres font réelles, & que les autres ne font qu’une apparence, différente felon les différens points de vüe. Cependant, à confidérer les chofes de plus près, M. Caflini a trouvé dans les Eclipfes de Soleil affez de réalité 1700, 106 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE - pour les faire fervir au même ufage que celles de Lune ; car enfin, fi ces apparences font différentes, ce n’eft que par des caufes réelles qui les y déterminent, & qui reglent tou- te leur diverfité. Mais la difficulté étoit de déimêler le réel d'avec l’apparent , & de fixer l'un au milieu des changemens perpétuels de l’autre. Voici à-peu-près la Méthode de M. Caffini, dont nous ne pouvons donner qu’une legere idée. Il faut concevoir l'Orbe de la Lune comme une furface qui enveloppe la Terre. Les rayons que le Soleil envoye à tout un Hémifphére de la Terre , & avec lefquels il lem- brafle , paflent par cet Orbe de la Lune , & y déterminent une portion circulaire, qui eft la Projetion ou repréfen- tation du Difque de la Terre éclairé. Par la diftance du Soleil , & par la grandeur de FOrbe de la Lune à l'égard du Globe de la Terre, on fçait quelle eft la grandeur de cette Proje@tion. Enfuite on y décrit géométriquement & par des Regles connues tous les Cercles de la Sphére;, l'Equateur, les Paralleles , les Méridiens, lEcliptique, tels qu’ils y doivent être repréfentés felon le jour dont il s’agit; car cela change, & par exemple , le Soleil étant dans l'E- quinoxe , les deux Poles font à la circonférence de la re- préfentation du Difque de la Terre éclairé, au lieu que fi le Soleil étoit à un Solftique, il n’y auroit que le Pole de ce côté-là qui fût fur le Difque , & il y feroit à 23 dégrés de la circonférence. Le Soleil étant fuppofé fixe, felon Copernic, cette re- préfentation peut être imaginée fixe aufli, & chaque lieu de la Terre viendra par le mouvement journalier y décrire fon Parallele , & aura Midi, quand il fera arrivé à un Mé- ridien unique & univerfel qu'on aura tracé. Donc quand: on fcaura qu’un certain lieu , dont on eonnoîtra le Paral- {ele ou la Latitude, aura compté 9 heures dans un certain moment, on fcaura qu'il aura été à 3 heures de diftance du Méridien univerfel, & par conféquent à un certain point du Difque. Comme cette Projeëtion eft faite dans l'Orbe de la Lune, DES SCIENCES. 107 qui doit éclipfer le Soleil, la Lune pat fon mouvement propre pañlera dans ce Difque , & y occupera une certaine place felon la grandeur de fon Diametre apparent. Le So- Fil dont le Diametre apparent eft à-peu-près égal & con- qu, y tiendra aufli une place. 1 . Ceux qui voyent le commencement ou la fin de VE- clipfe, voyent les deux Diametres du Soleil & de la Lune comme pofés bout à bout; ceux qui voyent le milieu d’une Eclipfe centrale & totale , voyent les deux Diametres comme pofés exaétement l'un fur l’autre , & ainfi à propor- tion de toutes les Phafes moyennes entre ces deux. On décrit furla Projeëtion la Trace du mouvement du centre dela Lune, que l’on détermine facilement par 'A- fronomie ; & il eft aifé aufli de trouver quels feront tous les points de cette Trace, où la Lune fera à quelque heure & à quelque minute que ce foit, pour un certain Méridien, par exemple, pour celui de Paris. Tout lieu de la Terre qui voit le commencement de l'Eclipfe , eft tellement pofé fur la Projeétion , que du point où il eft à la Trace de la Lune, il y a l'étendue des deux demi-diametres du Soleil & de la Lune mis bout à bout. Donc fi je fçai qu’une Ville placée fous le 30° Parallele, ou ayant 30 degrés de hauteur du Pole, a vû le commen- cement de l’Eclipfe à 9 heures du matin , je prens fur le 30° Parallele le point qui eft à 3 heures de diftance du Méri- dien univerfel , enfuite je prens avec un compas l'étendue des deux demi - diametres du Soleil & de la Lune, & en pofant une des jambes du compas fur le point déterminé du 30° Parallele, l'autre ira fur le point de la Trace de la Lune, où devoit être cette Planete , quand cette Ville a vû le commencement de l’'Eclipfe. } . Or comme toute cette Trace eft divifée par rapport aux heures de Paris, je fçai quelle heure il étoit à Paris, lorf- que la Lune étoit à ce point-là , & la différence des heures de ces deux villes dans ce même moment, eft celle de Jeur longitude. Ce qui a été dit pour le commencement 3 Oi 108 HISTOIRE DE L’ACADEMIE ROYALE de lEclipfe, s’appliquera fans peine aux autres Phafes. Il eft vifible que cette Méthode demande que l’on con- noiffe la Latitude du lieu dont on trouvera la Longitude, ce que les autres Méthodes ordinaires ne demandent pas; mais dans la pratique elle paroït aufli füre; & elle a été beaucoup plus ingénieufement imaginée. C’eft un avantage de pouvoir mettre à profit pour les Longitudes les Eclipfes Solaires, qui y avoient été jufqu’à préfent inutiles. M. Caffini ayant reçü de quelques Villes éloignées des Obfervations de lEclipfe Solaire du 23. Septembre 1699, s’en fervit pour conclure par cette Méthode les différen- ces de Longitude entre ces Villes & Paris. Des Obfervations faites à Nuremberg par M. Vurzel- baur , il en conclut la différence entre Nuremberg & Paris, tantôt de 34 d'heure 19" tantôt de 34 26”. La grandeur de l'Eclipfe obfervée à Nuremberg fut de 10 doigts 2. Des Obfervations de M. Reiïher à Kiel en Holftein , ik en conclut la différence entre Kiel & Paris de 35° 45". Il y eut à Kiel une obfcurité plus grande, que celle qui fuit ordinairement le coucher du Soleil. Des Obfervations de M. Pyle à Gripfvald en Poméra- nie , il en conclut la différence entre Gripfwald & Paris, tantôt de $2 45° tantôt de $2 40” A Gripfwald, à 10h 22', il ne parut refter que 4 Minu- tes d’un doigt de Soleil, c’eft-à-dire que de tout le Dia- metre du Soleil divifé en 180 parties, il n’en refta qu’une découverte. L’obfcurité fut fi grande, qu'on ne pouvoit ni lire ni écrire. Il y eut des perfonnes qui virent quatre Etoiles, Venus qui étoit au Nord du Soleil en étoit une, & les autres dürent être Mercure, la Queue du Lyon, & FEpy de la Vierge. À Stralfnd en Poméranie , les Etoiles parurent com- me en pleine nuit. DES SCIENCES 109 SUR. L'ECLIPSE DE, LUNE du $. Mars. L devoit arriver une Eclipfe totale de Lune le $ Mars au matin, & M. le Févre, quelques jours auparavant , en donna le Calcul à l'Académie par fes Tables. Le commencement à . $.46 47 matin L'Immerfion totale 6. Ad 25. Le milieu FN AMEN Le commencement de l'Emerfion 8. 22. $. La fin totale 9+ 19. 43e La durée entiere NÉE La grandeur 21. doigts 12°. C'eft-à-dire que le Diametre de lombre, dans l'endroit par où la Lune y entra, furpaffa fi fort celui de la Lune, ou que la Lune traverfa l'ombre fi obliquement, que fi au lieu d’avoir 12 doigts, dans lefquels on la divife toujours, elle en avoiteu 21+ de pareils , elle auroit encore été entié- rement plongée, mais feulement pour un inftant. La Lune, felon le Calcul de M. le Févre, devoit fe coucher à Paris le $ Mars à 6h 26 du matin , & le Soleil fe lever à 6h25 , & comme l’'Eclipfe devoit commencer à 5h46" 47 , il s’enfuivoit que le commencement feroit - vifble à Paris, & que la Lune feroit éclipfée environ de 8 doigts, lorfqu’elle fe coucheroit. M. le Févre prit la précaution d’avertir que cette Eclip- fe devant arriver proche de lHorifon, où les refraétions font plus irrégulieres , il ne faudroit pas être furpris, s'il fe trouvoit quelque différence entre l’'Obfervation & le Cal- cul ; que de plus le Calcul pouvoit être jufte , fans que l'Ob- fervation s y accordit entiérement , parce que le commen- cement de la vraie ombre fur le Corps de la Lune étant af- fez douteux ; & ne dépendant que de l’eftimation des Ob- fervateurs , l'un peut juger qu'elle couvre Fes du Dia: 1 io HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE metre de la Lune, lorfque l’autre ne le juge pas encore, Of une trentiéme partie du Diametre de la Lune, eft une mi- nute de degré, & la Lune, dont le mouvement dans le Zodiaque eft fort vite, parcourt une minute de degré en deux minutes d'heure ; & par conféquent une fi petite er- reur ou une fi petite différence dans l'Obfervation , produi- ra dans le Calcul une erreur ou une différence de deux imi- nutes d'heure, ce qui eft confidérable par rapport à la gran- de jufteffe, dont l’Aftronomie eft aujourd’hui. Élle avoit été jufqu'à préfent fi peu exaéte, que M. le Févre aflura que les meilleures Tables qui ayent été pu- bliées, ne pourroient pas fatisfaire aux apparences dans quatre Eclipfes arrivées de fuite. Les fameufes Tables Ru- dolphines différerent d’avec le Ciel de 21' dans l'Eclipfe So- laire du mois de Septembre 1699 , & de 16° dans l'Eclipfe Lunaire du mois de Novembre 1696. Auffi ne fut-ce pas par ces Tables, que M. le Févre don- na le Calcul de PÉclipfe de Lune du $ Mars prochain. Ce fat par des Tables particulieres qu’il a faites, & qui n’ont point encore vüû le jour. Il s’en étoit fervi pour tous les Calculs d’Eclipfes qu'ilavoit donnés à l'Académie depuis 8 ou 9 ans ; car pour ceux qu'il avoit donnés dans fon Livre de la connoiffance des Tems, ils’étoit contenté des Ta- bles Rudolphines de Kepler , à caufe de leur grande réputation. | Cette Eclipfe du $. Mars, dont on ne pouvoit voir fur T'Horifon de Paris, qu'environ le tiers de la durée, ne fut vûe pendant ce peu de tems, que fort imparfaitement , & avec beaucoup de peine à caufe des nuages, dont le Ciel fut prefque toujours couvert. Le peu de Phafes que Mef- fieurs Caffini & de la Hire en purent attraper , fervirent à vérifier la jufteffe du Calcul de M. le Févre. Comme dans le Calendrier Grégorien, il y a toujours trois centiémes années de fuite fur quatre , qui ne font point Biflextiles, quoique naturellement elles düffent l'être, & que l'année 1700. en étoitune, M. Caflini qui a trouvé DES SCIENCES | une Régle plus facile que celle de ce Calendrier, pour avoir les Epaëtes de ces années-là, voulut voir fi l'Epaéte que lui donnoit fa Régle convenoitavec le jour de lEclipfe qu'on venoit d'obferver. Selon cette Epaéte , la Pleine Lune tomboit juftement au $. Mars. Il ajouta encore plufieurs réfléxions , mais dont lintelli= gence fuppofe que l'on connoifle à fond le Syftême du Ca- lendrier Grégorien, & de plus, une Période de 11600 an- nées inventée par M. Caflini fur le plan de ce Calendrier, pour remettre fous le même Méridien les nouvelles Lunes aux mêmes points du Zodiaque, au même jour de la Se- maine , & à la même heure. On trouvera une ample expli- cation de cette Période à la fin des Régles de l’Aftrono- mie Indienne, dont il devina les Enigmes prefque impé+ nétrables. Cette même Eclipfe du $. Mars fut obfervée à la Mar-- tinique au Fort-Royal par M. des Hayes, qui s’étoit embar+ qué avec M. Renau pour les Ifles Françoifes de l'Améri- que , & qui eft déja connu par plufieurs autres voyages. qu’il a faits pour l'avancement des Sciences. M. des Hayes. n’obferva l'Eclipfe qu'avec difficulté, à caufe des grains fré- quens qui couvroient la Lune. Un peu avant 4 heures du: matin , il la vit au travers des nuages, & remarqua biens tôt quelle commençoit à fe dégager de l'ombre. Elle fe laïffa voir aflez de tems vers la fin de PEclipfe qui fut à $h: 2'40° de l'Horloge non corrigée, au lieu que le commen- cement avoit dû être à Paris à sh46' 47. La fin de la Pe-- nombre fut à sh 8° o”. La Lettre de M. des Hayes à M. Caffini, qui contenoit- cette Obfervation, en contenoit aufli plufieurs autres de: Hauteurs Méridiennes du Soleil, ou d'Etoiles fixes , d’Im- merfions, ou d'Emerfions de Satellites, &c. Elles font: toutes dans le Tréfor de l'Académie, & n’y demeurerons pas inutiles. Voy. les M. pag. 37: 39. & 78 1} H1STÔIRE DE L'ACADEMIE ROYALE SU-R LE SCERGE;EVREA CT, I OfRNES, N ne fçauroit obferver les mêmes chofes de trop O d’endroits différens : à chaque nouveau point de vüe la Nature paroït nouvelle. Les Refra@ions qui changent le lieu apparent de tous les Aftres, ont trompé jufqu'à ces derniers tems tous les Aflronomes, parce qu'ils ne les connoifloient point, & elles ne leur ont laiflé voir que de faufles Hauteurs & de fauffes Diftances de l’'Horifon. Quand on commença à s'en défier & à les connoître , on crut qu’elles n’agifloient que jufqu'au 45 degré d'élévation , au-delà duquel on croyoit en être délivré. Mais M. Caflini fit voir qu’elles alloient jufqu'au Zénit, quoiqu'en diminuant extrêmement , & mit par-là une nouvelle précifion dans les Calculs Aftro- noniques. Quand l’Académie eut les Obfervations faites par M. Richer à la Cayenne, M. Caffini reconnut que vers l'E- quateur , les Refraétions horifontales étoient moindres que celles de notre Climat d'environ un tiers, ce qui eft une. différence confidérable ; qu’enfuite cette différence alloit toujours diminuant jufqu'’au 60° degré d’élévation, après quoi elle cefloit prefque entiérement jufqu'au Zénit, & les Refrattions des deux Climats devenoient à-peu-près égales. Une fuite naturelle de cette découverte, étoit que les Refraë&tions vers le Pole fuffent plus grandes que lesnôtres; mais quelque fujet qu'il y eût de le foupçonner, on s'arrêta fur le panchant d’une conféquence fi légitime, & on atten- dit des Obfervations fur le fait. Elles vinrent heureufement s'offrir à l’Académie dans un Livre nouveau qui lui fut don- né par M. Clement Garde de la Bibliotheque du Roi. Il eft intitulé, Refracfio folis inoccidui in Septentrionalibus oris Jul Caroli XI. Regis Suecorum , &'c. à Johanne Bilgerg. Holmie ; 1695. | Le DES SCIENCES. 119 Le Roi de Suéde étant en 1694. à Torneo en Wefbot- nie vers les 65°. 45’. de latitude , & ayant vû que le Soleil ne s’y étoit point couché au Solftice d'Eté, y envoya Pan- née fuivante des Mathématiciens pour y faire des obferva- tions plus exaétes & plus füres. Elles font contenues dans ce Livre, & Meffieurs Caffini & de la Hire, en concluent, qu’à cette latitude de 65°. 45. les RéfraGions horifontales doivent être prefque doubles des nôtres , qui élevent les Aftres d’un demi degré. M. Caïlini a écrit en Suéde pour avoir quelques éclair- ciflemens importans fur les circonftances de cette obfer- vation. Il faudra déformais que chaque Climat ait fes Ta- bles de Réfra@ion particuliéres , pour fçavoir quelle eft à fon égard l'erreur des hauteurs apparentes. On ne fe feroit pas douté anciennement que le Soleil que l’on voyait fe le- ver, nétoit point le Soleil, mais une fauffe image qui fe montroit en fa place, & que cette image trompoit d’autant plus , ou plus long-tems, que l’on étoit plus éloigné de l'E- quateur. Cette différence des Réfra&tions felon les Climats, eft encore une nouvelle peine, & un nouveau foin dont il faut que PAfironomie fe charge. Ces grandes Réfraétions du Septentrion font fort utiles à des Peuples privés du Soleil pendant plufieurs mois , elles leur rendent cet Aftre beaucoup plutôt qu'ils métoient deftinés naturellement à le revoir , & en détournant vers : eux une lumiére qui n’étoit point pour eux , elles font en quelque forte l’ofice de Canaux qui conduifent l’eau dans des lieux où fon cours ne la portoit point. Si la groffiéreté de l'air qui fait ces grandes Réfraétions du Septentrion, y donne aufli, comme il y abeaucoup d’ap- parence, des Crépufcules, qui foient dans la même propor- tion plus grands que les nôtres, il eft aifé de calculer que dans la plus grande obfcurité de la nuit de fix mois , qui eft fous le Pole , le Soleil n'étant abaïffé que de 23. degrés & demi au-deflous de PHorifon, le Crépufcule fera encore affez fort, & même fans Lune, L'air groffier où vivent ces 1700, 114 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Peuples les dédommagera par fa groffiéreté même d’une partie des incommodités qu’elle leur caufe. Il eft fort à propos de remarquer avec M. de la Hire, que l'air du Septentrion pour être plus épais, n’en eft pas plus pe- fant, & que le Barométre de Stokolm eft comme celui de Paris. Puifque les Réfraëtions augmentent avec la groffiéreté de V’air depuis l'Equateur jufqu’au Pole, il s’enfuit qu'un Rayon dont la direétion feroit de l'Equateur vers le Pole , toujours à égale diftance de la Terre, fouffriroit une Réfrattion con- tinuelle , & par conféquent qu’il fe romproit aufli en pañfant d'un air très-délié , tel que celui qui refte dans la Machine Pneumatique, s’il y en refte , ou même d’un efpace entiére- ment vuide d’air, dans l'air que nous refpirons. Aufli Mef- fieurs de la Société Royale de Londres ayant fait cette Ex- périence, dont M. Caffini le fils nous donna le détail, trou- verent qu'un Rayon qui pafloit du vuide dans l'air fe rompoit, & déterminerent affez facilement la quantité de la Réfraétion. Cela pofé, ils fçavoient précifément & par obfervation de combien l'air détourne un rayon oblique qui fort de la matiére éthérée pour le pénétrer , ce qu'ils appellerent puiflance réfraétive de Pair; ils comparoient cette puiffan- ce réfrattive de l’air à celle de l’eau ou des autres liqueurs, les puiffances réfractives de ces différens liquides à leurs pefanteurs , &c. Enfin, ils pouvoient fuivre géométrique- ment dans toute l'épaifleur de l’Atmofphére la route des rayons, & par conféquent tracer plus exaétement que jamais la figure de l'ombre de la Terre, pofer fes bornes, & mar- quer la diftance de la Lune éclipfée. Tant de connoiflances nouvelles , dont l'expérience faite en Angleterre étoit la fource, & d’ailleurs la con- clufion de l'expérience qui s'accordoit parfaitement avec un raifonnement très-plaufible , penferent empêcher que l'Académie des Sciences n’examinât, & ne fit de nouveau ce que la Société Royale avoit fait. Cependant fur de le- gers foupcons que l’on eut de quelque défe&uofité dans DES SCIENCES I1S l'expérience de Londres, on réfolut d'en faire une plus fimple , & plus füre pour le même effet. M. Homberg fouda bien exactement à un bout d'un tuyau un verre plat , perpendiculaire à l'horifon , & à l’autre bout un autre verre plat, incliné de 45. degrés. Il appliqua ce tuyau à la machine du vuide qu'il avoit placée dans une des fales de l'Académie , qui donne fur la Riviére, & dé- couvre le Quai oppofé , éloigné environ de 100. toifes. On mit vis-à-vis du tuyau une Lunette ordinaire , dont l’Axe étoit à-peu-près fur la même ligne droite que celui du tuyau. La Lunette avoit à fon foyer deux fils croifés. On tira bien exattement tout l'air du tuyau par le moyen de la Machine Pneumatique , après quoi on obferva avec beaucoup de foin un objet pris fur le Quai oppofé , & qui répondoit précifé- ment à l’interfeion des fils de la Lunette. Le Rayon par lequel cet objet étoit vû, entroit d’abord dans le tuyau vuide d'air par le verre perpendiculaire à l'horizon, & par confé- quent ne fe rompoit point; mais en fortant par le verre in- cliné de 45. degrés , il fortoit obliquement ; & comme il pañoit du vuide dans l'air , il devoit fe rompre , s'il y avoit réfraion dans ce changement de milieu, & au contraire ne fe rompre plus , lorfqu’il n’y avoit plus de changement de milieu, & que l'air étant rentré dans le tuyau , le rayon ne. traverfoit plus que de Pair. Ainfi après avoir laïffé rentrer l'air dans le tuyau, le même objet ne devoit plus répondre à l'interfedion des fils de la Lunette. Cependant il y répon- dit toujours. L'obfervation fut répétée plufieurs fois par dif: férens Obfervateurs , & par ceux de l’Académie qui étoient les plus accoutumés à obferver, on trouva toujours qu’un même objet éloigné ne varioit en aucune maniére , foit que le rayon par lequel il étoit vü paffât par le vuide & par l'air , foit qu'il ne paffät que par l'air. Il paroïît prefque incompréhenfible que deux milieux aufli différens quele Vuide, ou la Matiére fubtile & l'Air, ne caufent aucune réfraétion, & foient indifférens à la Lu- micre , qui d’ailleurs eft , pour ainfi dire , fi délicate fur le Pi V. les M. P- 172. 116 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE changement de milieu , qu’elle fe rompt en pafñlant d'un air dans un autre pour peu qu'il foit plus ou moins groflier. Mais à confidérer la chofe de près , peut être n’eft-il pas impoflble que les réfraétions céleftes fe faflent , non pas dans le paflage de la Matiére Ethérée à notre Atmofphére, mais dans le paffage d’une couche fupérieure de l'Atmo- fphére à une inférieure plus épaifle. Il eft vrai qu’on deman- deroit encore pourquoi l'extrême différence de la Matiére éthérée à l'air ne produit point de réfraétion , & que la moindre différence d’un air à un autre air en produit. Mais ce feroit un fyflême à faire , & il n’en eft pas encore tems. 11 fufit que l'Expérience de Paris, quoique moins proba- ble que celle de Londres, mene à une conclufion qui ne foit pas impoflible. Le meilleur parti fera de les examiner de nouveau toutes deux. En fait de Phyfique, le plus proba- ble n’a pas un droitabfolu de décider , & quelquefois même ce qui auroit paru impoflible fe trouve vrai , à la honte du raifonnement. SUR LA LONGUEUR DU PENDULE. ‘IL falloit jufifier la répétition continuelle des obferva- tions, & prouver, comme nous l'avons déja fait par exemple des Réfra@ions Septentrionales ;, que Pon ne peut obferver de trop d'endroits difiérens , il feroit aifé de le faire par cette Lettre dont nous avons parlé, que M. des Hayes écrivit de la Martinique à M. Caffini, & par des obfervations de M. Couplet le fils. M. des Hayes apprenoit à M. Caflini que dans fon Voyage de l'Amérique , non-feulement il avoit vérifié la fameufe découverte de M. Richer , qui avoit trouvé que le Pendule à fecondes étoit plus court vers l'Equateur qu'il ne left ici, mais même qu'il jugeoit fur des conjeétu- res aflez fortes que ce Pendule étoit encore plus court que ne J’avoit fait M. Richer. Peut-être M. Richer n'avoit ofé \ dibé | D ESS ICE MNC € $ 117 fe fier entiérement à fon obfervation , & en avoit retranché quelque chofe, parce qu’elle étoit trop nouvelle & trop imprévüe. Quoi qu'il en foit, M. Couplet le fils au retour d'un Voyage de Portugal & du Bréfil , fe trouva d'accord avec M. des Hayes fur la nécellité d’accourcir le Pendule vers l’'Equateur beaucoup plus que M. Richer n’avoit fait. Le Pendule qui bat les fecondes felon le mouvement moyen , eft à Paris de 3 pieds 8 lignes £, M. Richer étant à la Cayenne à 4 degrés de l’Equa- teur , trouva que pour battre les mêmes fecondes ce Pen- dule devoit être plus court d’une ligne +; & M. Couplet le fils étant à Lifbonne, dont la Latitude eft felon fes ob- fervations de 38° 45° 45°, le trouva plus court qu'à Pa- ris de 2 lignes +, c’eft-à-dire plus court qu’à la Cayenne même qui a 34 degrés de latitude moins que Lifbonne. Et à Parayba Ville du Bréfil, dont la latitude eft felon lui, de 6° 38 18 de l’autre côté de l'Equateur, il trouva le Pendule plus court qu’à Paris , de 3 lignes 2. Comme les opérations néceffaires pour déterminer la longueur du Pendule font longues & délicates, & deman- dent des Infirumens fort juftes, & plus grands que ceux qu'avoit M. Couplet , on ne doit pas encore s’en tenir pré- - cifément à ces Mefures ; mais en général il paroït confiant que la longueur du Pendule diminue d'ici vers l'Equateur, & l’on peut même commencer à croire qu’elle diminue plus qu'on ne penfoit d'abord. On fçait quelles font les conféquences de cette décou- verte. 1°. Elle fervira pour régler à l’avenir les Horloges à Pen- dule felon le Climat où l'on fera, & rien n’eft fi nécefaire pour toutes les obfervations , & pour tous les calculs Aftro- nomiques , que d’avoir des Horloges réglées dans toute la juftefle potlible. À 2°. Suppofé que le Pendule doive être accourci dans les Climats plus proches de l'Equateur, c’eft pour aller Pü 418 “HISTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE aufli vite qu'un Pendule plus long qui bat les fecondes à Paris. Par conféquent un même poids tombe plus lente- ment vers l’Equateur , & fa pefanteur y eft moindre , ce qui eft fort important pour le Syflême de la Petanteur , & n’eût pas été deviné par raifonnement. 3°. Si la Pefanteur vient de la matiere éthérée qui ten- dant à s'éloigner du Centre de la Terre, y repoufle les Corps moins propres qu’elle à un grand mouvement, cette matiere aura donc une force centrifuge inégale depuis Equateur jufqu’au Pole, puifque la Pefanteur left, & croiffante depuis l’Equateur jufqu'au Pole, ou dans le fens d'un Méridien. 4. La fuperficie de la Mer a le niveau que lui donne la Pefanteur ou la force centrifuge de la matiere éthérée qui fera la même chofe, & par conféquent cette fuperficie fera plus élevée fous l’Equateur que fous le Pole , puifque la Pefanteur eft moindre fous l'Equateur. s°. La fuperficie du Globe Terreftre étant cenfée la même que celle de la Mer , la circonférence de la Terre ne fera donc pas circulaire dans le fens d'un Méridien , & le Globe fera applati vers les Poles. 6°. L'inégalité du Pendule une fois bien déterminée, fera la même que celle de l’aétion de la force centrale de la matiere éthérée , & on aura par les Regles de M. Vari- gnon la Courbe de la furface de la Terre dans le fens d’un Méridien. Mais fi on prend une autre idée fur la Pefanteur; fi on l1 conçoit comme une force hérente aux Corps, qui les poule vers le centre de la Terre, indépendamment de tout mouvement circulaire , alors la Pefanteur & la force centrifuge qui naïîtra du tournoyement de la Terre fur fon Axe, feront deux forces oppoftes ; puifque lune pouffera les Corps vers le centre de la Terre, & que l’autre tendra à les en éloigner. Ce qu'ils font fentir de pefanteur ne fera donc que l’excès de leur pefanteur abfolue fur leur force centrifuge; & fi on fuppofe que la D EI Si! SICLÉ E NC Es: 119 pefanteur abfolue foit conftante , ce qu'ils font fentir de pe- fanteur variera felon que la force centrifuge , qu’il en fau- dra retrancher, fera plus ou moins grande. La force centrifuge d'un Corps qui décrit un Cercle étant le quarré de fa viteffe divifé par le rayon du Cercle, celle des Corps qui font dans le plan de l’Equateur de la Terre ; qu'on fuppofe qui tourne, fera plus grande que celle des Corps qui feront dans le plan d'un autre Cercle quelcon- que paralléle à l'Equateur ; car les vitefes de tous ces Corps feront comme les circonférences des Cercles qu'ils décri- vent, & par conféquent leurs forces centrifuges comme les quarrés de ces circonférences divifés par les rayons qui font aufli comme les circonférences. Ainf le Corps qui décrit un plus grand Cercle a une plus grande force cen- trifuge en même raifon que fon Cercle eft plus grand , & le Corps qui eft dans l'Équateur a une plus grande force centrifuge que tous les autres, & par conféquent il lui refte une moindre pefanteur, ce qui s'accorde avec l’accour- ciflement du Pendule fous l'Equateur. En même tems fi l’on conçoit que la Terre ne foit qu'un Globe d'eau , il faut que tous les rayons d’eau tirés de la circonférence au centre foient en équilibre , c’eft-à-dire, que leurs maffes multipliées par ce qui leur refte de pefan- teur, déduétion faite de leurs forces centrifuges, faflent toujours des produits égaux. Donc l’Axe fur lequel tourne la Terre , ou ce diametre d’eau , étant immobile, & n'ayant nulle force centrifuge , il a toute fa pefanteur ab- folue , & par conféquent il n’a pas befoin d’une auf grande mafle que les autres pour les égaler en force totale. Donc l'Axe de la Terre eft plus petit que le diametre de fon Equateur, & cela quoiqu’on remette la Terre dans fa vé- ritable forme, où elle n’eft couverte d’eau qu'en partie. Donc la Terre eft un Globe applati vers les Poles; & quand on connoîtra exaétement les inégalités du Pendule en différens Climats , on fçaura précifément quelle Courbe eft un Méridien. M. Huguens à déja traité cette matiere V. les M. p.294. xo0o HISTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE, dans fon Difcours fur la Pefanteur. Une ligne + de difé- rence qu’on avoit trouvée au Pendule dans la Cayenne , lui donna lieu de changer la figure de la Terre. De plus grandes différences , fi elles fubliftent , la changeront en- core plus confidérablement. SURUNE CONJONCTION DE VENUS avec le Soleil. O N ne connut pas d'abord toute l'utilité des Luneres de longue vûüe pour lAfironomie. On voyoit dans les Planetes ce qu'on n'y avoit jamais vü , on voyoit un nombre infini de nouvelles Etoiles ; & qui ne fe fut con- tenté de tant d'avantages ? Cependant les Lunetes en de- voient encore procurer un confidérable aux Aftronomes , qui ne s’en appercurent qu'avec le tems, c’eft de voir les Planetes & les Fixes en plein jour, & même dans le Mé- tidien avec le Soleil, pourvü qu'elles foient d’une certaine grandeur. D'un côté les Verres de la Lunete augmentant l'image de l'Aftre , & de l’autre , le tuyau qui eft obfcur empêchant qu'elle ne foit effacée par le grand jour , FAf tre paroït malgré le Soleil, Par-l , fe détermine immédiatement la fituation du So- leil par rapport à des Fixes que l’on voit en même tems, au lieu qu’on ne la trouvoit auparavant qu'a force de cal- culs. Par-là ; l'on peut aufli comparer immédiatement, & avec beaucoup plus de certitude ,:le mouvement des Planetes à celui du Soleil. Enfin il vaut toujours mieux en fait d’Aftronomie voir & obferver , que de calculer & de déduire. Pour profiter de cet avantage , M. de la Hire à la fin du mois d'Aoùût, où Venus devoit être en conjonétion avec le Soleil, obferva quelques jours avant & après la conjonétion , le paflage de Venus par le Méridien, qu'el- le traverfoit à peu de diftance du Soleil, Par ce moyen il DES SCIENCES. 2 yat il détermina avec une jufteffe qu'aucune autre méthode neût pô lui donner la conjonétion de Venus en longi- tude à 5h 8° 18" du foir le 31. Août. Il obfervoit cette Planete avec une excellente Lunete de 16 pieds, qui en augmentoit 90. fois le diametre; & comme ce diametre à la vüe fimple n’écoit que d’une minu- te, ilétoit avec la Lunete 3 fois plus grand que celui de la Lune à {a vûe fimple. Venus par fa fituation à l'égard du Soleil & de la Terre étoit néceffairement en Croiffant très- délié , & M. de la Hire voyoit dans la partie intérieure de ce Croiffant des inégalités, ou , fi l’on veut , des Monta- gnes beaucoup plus grandes que celles de la Lune, qui le font plus à proportion que celles de la Terre. Rien ne peut réfléchir plus vivement la lumiére à de grandes dif- tances qu'un amas de Rochers fort élevés & fort fecs; & peut-être cette difpofition fi affreufe de près, contribue à rendre Venus fi brillante & fi agréable de loin. SUR DES TACHES DU SOLEIL. N Aftre qui feroit également lumineux dans toute U fa fuperficie, tourneroit fur fon centre fans que nous puflions jamais nous en appercevoir. C’eft un avantage Pour nous qu'il ait des Taches, c'eft-à-dire, des endroits qui fe laiffent diflinguer des autres > & où nous puiflions nous prendre ; pour fuivre des yeux le tournoyement de tout le Globe fur fon Axe. C’a été par les Taches du Soleil obfervées avec le Te- lefcope , que l'on a découvert que cet Aftre tourne fur fon centre en 27 jours _& quelques heures. Mais comme ces Taches s’évanouiffent fouvent pendant des tems confi- dérables , aufli-tôt qu'il en reparoît de nouveau , on fe re- met à les obferver avec une attention toute nouvelle, pour Voir fi la révolution de 27 jours a été bien exaéte- ment déterminée. 1700. Q V. les M. P. 293. 122 HisTOIRE DE L'ACADEMIE RoOYarzr De plus, fi l'on découvre jamais quelque chofe fur la nature du Soleil , ce fera par leur moyen. M. de la Hire conjeture déja que les Taches que l’on voit , quoique fi différentes en figure , ne font la plüpart qu'une mafle fo- lide beaucoup plus grande que la Terre , & qui n’a d'autre mouvement dans le Corps liquide du Soleil , que de floter tantôt fur la fuperficie , & tantôt de s’y enfoncer ou entié- rement ou en partie, Il a déja obfervé que les Taches qui paroiffent les plus féparées , ne le font jamais tant qu'elles ne puiflent être rapportées à une même maffe irréguliere dont on verroit différentes éminences ; & en effet il ma jamais vû dans le même tems des Taches à un bord du Soleil & à l’autre. Elles paroïflent quelquefois vers le mi- lieu du Soleil fubitement , & fans avoir commencé par fe montrer vers les bords. Alors elles ont prefque toujours toute leur grandeur , & on ne les voit point s’augmenter peu à peu, comme on les voit enfuite diminuer. Ce Phé- noméne convient à un Corps plongé dans un liquide, & qui reviendroit tout-à-coup fur fa furface. Lorfqu'après plufieurs années où l’on n'aura vû aucunes Taches, on recommence à en voir , on les voit ordinai- rement à l'heure , & à l’endroit du Soleil, où elles doivent paroître , fuppofé la révolution des 27 jours , ce qui prouve que cette grande mafle dont les diverfes apparences for- ment les Taches ,-n'eft pas errante & vagabonde fur le Corps du Soleil , mais comme arrêtée à un certain endroit. Cependant parce qu'il y a quelquefois des Taches, dont l'apparition ne s'accorde point avec la révolution de 27 jours , il faut admettre plufieurs maffes différentes pour les ÿ rapporter. Quant à la différence des figures , elle peut venir de ce que la grande maffe fe préfente dans des tems différens, tantôt d'un côté & tantôt d’un autre , & que dans un même tems elle s'enfonce peu à peu, & qu'elle peut avoir quel- que mouvement fur fon centre. Car pour les différentes apparences d’une Tache ou d’un DES SCIENCES, 123 amas de Taches , placées dans le milieu , ou vers les bords du Soleil , elles ne viennent que de leur différente pofition fur un Corps fphérique. Ce qui eft fur les bords, par exem- ple , paroit plus long; ce qui eft au milieu, eft plus court & plus ramañlé, &c. Si malgré tout cela on veut que les Taches foient des générations nouvelles c’eft une autre idée qu'il faut pren- dre du Soleil ; il reffemblera plutôt à une liqueur impure qui bout & qui jette des écumes , qu'à une Mer où il flotte un Corps étranger. : mais comment pourroit - on trouver dans ce Syflême tant de retours fi réguliers d’une même Tache & après tant d'années ? Quoi qu'il en foit, ce fera le Syflême des Taches bien établi qui nous mettra en état de former quelques conje- Etures fur la nature du Soleil. Auffi depuis que M. de la Hire eut annoncé à l'Académie le 13 Novembre qu'il avoit vû des Taches , il les fuivit avec la Lunete , autant qu'il fut poffible. M. Caflini les ob- ferva de fon côté en Languedoc, où il fe trouvoit alors, & l’on remet comme en dépôt toutes ces obfervations entre les mains du Public , pour fervir un jour à un Syflême , qui felon les apparences, fera l'ouvrage de plus d’un fiécle. SUR L A PROLONGATION DE LA Méridienne de Paris. IEN n'eft plus connu dans tous les lieux où les Ma- R thématiques le font, que l’Hiftoire de la Mefure de la Terre , que l'Académie , par les Ordres du Roï, com- mença en 1669. & poufla l'année fuivante depuis le paral- lele d'Amiens , jufqu’à Malvoïfine dans les confins du Gä- tinois & du Hurepoix, c’eft-à-dire, jufqu’à la valeur de plus d’un degré célefe, Par-là, on trouva qu'un degré cé- lefte répondoit fur la Terre à une étendue de 57060 Toi- fes du grand Châtelet de Paris. oi 1] 124 HISTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE La valeur d’un degré une fois connue, il ny a qu’a la multiplier par 360 , & l’on a la circonférence du Globe ter- reftre. Mais cela fuppofe cette valeur d’un feul degré bien exaéte; car s'il y a quelque erreur, ellefe multiplie 360 fois, & par-là devient confidérable, quoiqu’elle püt être d’abord affez légere. Or il étoit prefque impoffible qu’ ne fe füt gliffé quel- que erreur dans les opérations qu’on avoit faites. 1°. Il avoit fallu fur l'étendue de 32 lieues à peu près calculer 13 Friangles. 2°. Aux deux extrémités de la Méridienne qu'on avoit déterminée , il avoit été néceffaire de prendre les La- titudes fur le Ciel ; mais avec les meilleurs Inftrumens & la plus grande jufteffe d'opération, on ne peut répondre de 4 fecondes d’un degré Célefte , qui rapportées fur la Terre, valent plus de 66 T'oifes. L'erreur étant prefque inévitable, on ne pouvoit que la diminuer , & il n'y en avoit pas d'autre moyen que de tirer une Méridienne plus longue que celle du Parallele d’A- miens à Malvoifine. Car il n’eft pas plus difficile de prendre la différence de latitude de deux lieux plus éloignés, que de deux plus proches, & les opérations Aftronomiques ne produiroient toujours tout au plus que les 66 T'oifes d’er- reur, qui fur une étendue de 10 degrés ,par exemple , ne fe multiplieroient que 36 fois, au lieu que fur un degré feule- ment elles fe multiplioient 360 fois. Et pour les T riangles , qui fervoient à mefurer les diftances fur la Terre, ils n’é- toient prefque pas plus fujets à erreur dans de plus grandes diftances , quoique le nombre en füt plus grand. Il étoit très-important pour l’Aftronomie, pour la Géo- graphie & pour la Navigation, que la Mefure de la Terre füt la plus exacte qu'il feroit poffible. Ainfi le Roi or- donna que l’on continueroit jufqu’aux extrémités de la France , du côté du Midi & du Septentrion, la Méridienne qui avoit été commencée. C’étoit dans l'étendue d’un de- gré célefte qu’elle tenoit déja le plus grand ouvrage que la Géométrie Pratique eût jamais entrepris , & elle alloit te- DES SCIENCES. 12$ nir près de 10 degrés, & devenir plus utile à proportion de fon augmentation. L'Académie continua cet ouvrage en 1683. M. Caffini alla du côté du Midi, & M. de la Hire du côté du Septen- trion. Mais l’entreprife fur interrompue d’abord par diffé- rentes caufes particulieres , enfuite par la Guerre qui com- mença en 1688. Quand elle fut terminée, le Roi qui fon- gea aufli-tôt à faire des faveurs extraordinaires aux Scien- ces; donna de nouveaux ordres pour la continuation de la Méridienne, & M. Caflini partit au mois d'Août 1700. pour aller du côté du Midi la reprendre où elle avoit été laiffée. Il porta avec lui tous les Inftrumens , & mena tous les Obfervateurs dont il pouvoit avoir befoin, & fon Voyage a été digne de la magnificence du Roi. Il continua toujours à opérer fur les diftances terreftres par la Méthode des Triangles, & il trouva des difficultés qui ne s’étoient point encore rencontrées dans ce travaif. La Méridienne avoit toujours pañlé par des lieux où l’on avoit des Clochers ou de grands Arbres, vers lefquels on ouvoit pointer les Inftrumens , pour former les Triangles. Mais dans Îles Montagnes rafes de l'Auvergne , où la Mé- tidienne a conduit M. Caflini, il a fouvent manqué de ces marques fenfibles & déterminées; & il a été obligé de faire tranfporter & planter de grands Arbres fur ces hauteurs avec affez de peine. À chaque point remarquable ou commode de la Méri- dienne , il a pris la latitude du Lieu par les hauteurs des Af- tres. Comme on déterminera la différente latitude des deux extrémités de la Méridienne aux deux bouts de la France, quand on y fera parvenu, on fera plus für de la jufteffe de ces deux opérations finales , fi les latitudes de plufieurs par- ties de la ligne ajoutées enfemble , s’y rapportent, & peut- être aufli les unes ferviront-elles à reétifier les autres. Quoique par le foin & l'exaëtitude qu’on appertoit aux opérations des Triangles ,-M. Caffini fe pût aflürer qu'il étoit toujours fur la Méridienne commencée , qui eft celle Qi 126 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE de l'Obfervatoire, il sen affüroit encore par une autre Méthode. Il obfervoit , autant de fois qu'il étoit poflible, les Eclipfes des Satellites de Jupiter , M. de la Hire les ob- fervoit en même tems à l’'Obfervatoire , où il étoit demeu- ré pour faire ces Obfervations correfpondantes ; & fuppofé que l’heure où les Eclipfes arrivoient en ces deux lieux différens füt précifément la même, les deux lieux étoient certainement fous le même Méridien, On fçait que ces Obfervations de la même Eclipfe d’un Satellite faites en différens lieux, font la meilleure mé- thode pour comparer la longitude de ces deux lieux : mais aufli diverfes Obfervations faites dans ces mêmes lieux, & comparées enfemble, ne donnent prefque jamais fi préci- fément le même rapport de longitude , qu'il n’y ait quel- ques fecondes d’heure de différence , parce qu’il y a tou- jours de petites erreurs inévitables dans les meilleurs Inf- trumens, & dans les opérations les plus exactes. Or M. Caffini comparant la Méridienne que lui don- noit en Auvergne, par exemple , la méthode des Trian- gles , avec celle qui réfultoit des Obfervations de la même Eclipfe faites en même tems en Auvergne & à Paris, a trouvé qu’elles ne différoient pas plus l’une de l’autre, que la Méridienne de PObfervatoire différe d'elle-même par le réfultat de différentes Obfervations d'Eclipfes des Satelli- tes en différens tems. L’exaditude a été encore pouffée plus loin. Feu M. Pi- card de l’Académie des Sciences étant à Sette & à Mont- pellier y avoit fait des Obfervations des Eclipfes des Sarel- lites , & par les comparaifons qu’on avoit faites de ces mê- mes Echipfes obfervées en même tems à Paris , on avoiteü la différence des Méridiens de ces deux Villes à celui de Paris, & par conféquent la différence de leurs Méridiens entr'eux. M. Caffini étant en Languedoc mefura par la Mé- thode des Triangles , la différence des Méridiens de ces deux Villes , & il la trouva précifément la même que celle qu'on avoit eue par les Satellites. à DES SCIENCES. 127 De-l il a conclu, & qu'il avoit toute la certitude géo- métrique qu’on peut avoir d'être, en Auvergne ou ailleurs, fur la Méridienne de l'Obfervatoire, & que la Méthode des Triangles , telle qu'il la pratique pour tirer une Mé- ridienne , & mefurer atuellement une étendue terreftre, eft aufli exaéte que celle des Eclipfes des Satellites, la plus exaéte de toutes les Méthodes Aftronomiques pour avoir des différences de Méridiens en degrés céleftes. La Méthode des Eclipfes a une grande commodité , c'eft qu'elle n’eft pas plus fuete à erreur pour les plus grandes diftances , que pour les plus petites ; mais M. Caf- fini prétend que la Méthode des Triangles n’eft pas fujere à une fi grande erreur, pour les petites diftances ; qui font les feules, où l’on puifie lemployer. Quand M. Caflini s’eft trouvé fur de hautes Monta- gnes, il y a obfervé la hauteur du Barometre, pour la com- parer à celle que le Barometre aura eue en même tems à lObfervatoire. On fcait d’ailleurs que la hauteur de lObfervatoire ou de Paris au-deflus de la furface de la Mer, y tient ordinairement le Mercure 4 lignes plus bas qu'il n’eft au bord de la Mer. On fçait aufli que le Mer- cure baïfle d'une ligne pour 11 Toifes de hauteur. De-là, il fera aifé de conclure combien les Montagnes où l’on aura obfervé, feront élevées au-deflus du Niveau de la Mer, ce qui peut être en plufieurs occafions une con- noiffance utile. SURNLE’ CALENDRIER. N mouvement qui fe fit cette année en Allemagne, U & qui eut quelque rapport à l’Académie des Scien- ces, fit bien voir de quelle importance eft l’Aftronomie en certaines occafons pour les affaires Eccléfiafiques & Politiques. La Réforme du Calendrier Grégorien , quoique né- 128 HISTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE ceffaire & bien concertée, n’a point été reçüe des Protef- tans , parce qu’elle venoit de Rome. Ils ont continué à fe fervir de l'Année Julienne, qui auparavant étoit en ufage dans l’Eglife, & qui continue toujours de plus en plus à s'écarter du Ciel , tel qu'il étoit au tems du Concile de Ni- cée , dont on fuit la difpolition fur la Fête de Pâques. La fin du dix-feptiéme Siécle réveilla fur cette matiere l'attention des Etats Proteftans de l'Empire. Ils voulurent fe remettre mieux d'accord avec le Ciel au commence- ment du nouveau Siécle , & réglerent tous de concert que le mois de Février de l’année 1700. ne feroit que de 18 jours, ce qui étoit précifément le retranchement des 10 jours fait 100 ans HpRrAtAnE par Grégoire XIII. que l'on compteroit par conféquent le premier de Mars avec le Ca- lendrier Grégorien , & que pendant tout le dix - huitiéme Siécle on continueroit de s’accorder avec ce Calendrier à l'égard du ftyle des dates, & des Fêtes Immobiles. Enfin , foit pour régler la Fête de Pâques , & les autres qui en dé- pendent, plus exaétement qu'on ne le peut faire par un Calendrier & par des Cycles, toujours fujets à quelques erreurs, à moins qu’elles ne fe compenfent bien jufte les unes les autres , foit pour ne pas tout emprunter de Rome, ils réfolurent que l’on détermineroit immédiatement par lAftronomie l’Equinoxe du Printems. Sur la maniere de faire cette détermination aftronomi- que, M. Leibnitz fut chargé de confüulter l'Académie. Il le fit par une Lettre datée de Hanover du 8. Février 1700: 9 : Après avoir expofé le fait, tel que nous venons de le tapporter, il ajoutoit que comme autrefois l'Eglifé pour exe- cuter les Canons du grand Concile de Nicée, © pour avoir Le véritable tems Pafcal , avoit eu recours aux Mathémati- ciens d'Alexandrie , il étoit à propos dans l'occafion préfente de fuivre les avis des Aftronomes excellens ; ©* que puifque le . Roi par une fondation magnifique , qui n’avoit point encore em d'exemple dans la Chrétienté ; venoit d'établir pour toujours l'Académie DES SCIENCES 129 P Académie des Sciences , ’éroit un fècours que Sa Majefté don- noît fur ces matieres à toute l'Eglife, & dont il falloit profiter. IL propofoit enfuite les penfées que quelques perfonnes avoient eues fur le fujet dontil étoit queftion. M. le Comte de Pontchartrain trouva cette affaire aflez importante pour en parler au Roi. Elle l’étoit d’autant plus que fur le changement qui s’étoit fait en Allemagne, on cherchoit à Rome des moyens d'une conciliation en- tiere fur le Calendrier, & que la Congrégation des Rites y travailloit. Le Roi ordonna que l’Académie ne touche- roit point à ce qui fe traitoit à Rome ; & fi d’ailleurs elle pouvoit fatisfaire à ce qu'on lui demandoit, il lui en laiffa la liberté. Heureufement M. de la Hire étoit fur le point de pu: blier fes Tables des Mouvemens des Planetes, & comme elles doivent être plus exaétes que toutes celles que l’on a eues jufqu'à préfent, l’Académie répondit à M. Leïbnitz qu'elle ne voyoit rien de mieux à faire, que de les attendre. Le Roi avoit fait écrire à M. le Prince de Monaco, alors fon Ambaffadeur à Rome , ce qui s’étoit paflé en France au fujet du Calendrier , & M. le Prince de Mo- naco répondit à M. le Comte de Pontchartrain par une Lettre 4 3. Août 1700, qw'il avoit parlé de cette affaire à M. le Cardinal Spada , qui avoit extrémement loué l'atten- tion du Roi pour la Cour de Rome, & lui-avoit dit que la Congrégation des Rites ne décideroit rien fans confulter l' Aca- démie des Sciences , beaucoup plus éclairée fur ces marieres , gwon ne left en Iialie, Comme le fiécle finifloit cette année , l'Académie fit réfléxion qu'Argolus n’avoit pas pouffé fes Ephémérides lus loin , & que dansle fiécle où l’onalloit entrer, on feroit Fr Ephémérides ; car on ne pouvoit trouver d’exemplai- ‘res de celles de Mezzavacca. Elle chargea M. de la Hire le fils d'en calculer pour l’année fuivante, & d’en donner 1700. R V. les M. pag. 172e a3o HIisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE toujours ainfi à la fin de chaque année pour celle qui fui- vroit. Il accepta ce travail, & fe fervit des Tables Aftro- nomiques de M. de la Hire fon pere, qui doivent être pu- bliques dans peu de tems. Ces Éphémérides de M. de la Hire le fils ont l'avantage d’être les premieres que lon ait jamais eues, calculées fur les nouvelles Obfervations , & qui fe fenrent de la perfedion où l’Aftronomie a été por- ice depuis un certain tems. GEOGRAPHIE "TN Naufrage qui arriva cette année fur la Côte de Pi- cardie, fut une perte confidérable pour l'Académie des Sciences. M. Couplet le fils étoit dans le Vaiffleau, & revenoit de Portugal & du Bréfil, où il étoit allé avec l’ef- prit d’obfervation que les Académiciens portent par-tout. Heureufementil fe fauva du Naufrage , mais tous fes papiers & toutes les Curiofités qu'il rapportoit furent perdues. Il n’eft refté d'autre fruit de fon Voyage que quelques Lettres qu'il avoit écrites à M. Caflini, ou à d'autres, & où il rapportoit quelques-unes de fes Obfervations. Il ramafla ces Lettres à fon retour, & donna à l’Académie le peu d’'Ob- fervations qu'il en put tirer. Nous avons déja parlé de celles qui regardent la lon- gueur du Pendule, il n’en refte plus que quelques-unes qui font pour la Géographie. Entre plufeurs Obfervations des Satellites qu'il fit à Lif bonne en 1698 , ils’en trouva une qui fut faite en même tems à Paris par M. Caffini. C’éroit une Immerfion du pre- mier Satellite dans l'ombre de Jupiter le 7 Mai. L’Obfer- vation fut exaéte. M. Couplet fe fervit d'une Lunette de 17 pieds, du Sieur le Bas, précifément de même force que celle dont fe fervoit M. Caïfini. L DES SCIENCES 131 Par là comparaifon des Obfervations de Paris & de Li£ bonne, la différence de Longitude entre ces deux Villes eft de ES AE TER Cette différence eft marquée , dans les Cartes de San- fon, plus grande de s2' 1 5"; & dans les nouvelles Cartes Marines imprimées par ordre du Roi, il yafixans, plus petite de 27° 45". E Il a déja été dit que M. Couplet trouva à Lifbonne l4 Latitude de 38° 45° 25". Ce fur par les deux Hauteurs Mé- ridiennes de l'Etoile Polaire. I] obferva auf qu'à Lifbonné le 26 Decembre 1697, PEguille déclinoit de 4 10 NO, & à Parayba en Mai 1698, de 5° 35 du même côté. DIOPTRIQUE. SURUN NOUVEAU VERRE DE LUNETTÉ, ONstEur Tfchirnhaus , qui a de grandes vues pour la perfeëtion de la Dioprrique, & qui en a déja donné un bel Effai, rapporté dans l'Hiftoire de 1699 * a appris aux Sçayans les effets d’un nouveau Verre qu'il a fair. Ce Verre eft convexe des deux côtés > & de 32 pieds de foyer, mais il eft extraordinaire pat la grandeur de fon Dia- metre. Au lieu que les plus grands Verres du même foyer qu'on ait employés jufqu’ici, n’ont de Diametre que 4 ou $ pouces, celui-là a plus d'un pied du Rhin, & même au commencement il avoit deux pieds , mais il fat endom- magé par quelque accident. De-là on peut Juger quelle doit être la Machine que M. Tfchirnhaus a imaginée pour tail. ler de fi grands Verres. Ri * Pag. 90. 132 Hisroire DE L'ACADEMIE ROYALE Toute la Dioptrique paroït être renverfée par les effets qu'il produit. Par exemple, on laiffe dans les Lunertes peu d'ouverture aux Objeétifs ordinaires , quoique déja aflez petits, & M. Tfchirnhaus laifle le fien, tout grand qu'il eft, entiérement découvert. Pour comprendre la raifon de Ja pratique commune, & la fingularité de celle de M. Tfchirnhaus, il faut fça- voir exattement comment fe fait au foyer d’un Verre con- vexe l’image d'un point lumineux, dont les rayons l'ont traverfé. Suppofons-que ce Verre foit une demi - Sphere entiere. Les rayons que le point lumineux envoye fur toute la furface de cette demi- Sphere, ne fe réuniflent pas, après l'avoir traverfée , fur un feul point de fon Axe , com- me on pourroit fe l’imaginer fur les termes de foyer , & de réunion ordinairement employés dans cette matiere. Ils occupent au contraire un aflez grand efpace , mais beau- coup moins grand que la furface de la demi - Sphere fur laquelle ils étoient auparavant répandus. Ainfi quoiqu'ils ne foient pas exactement réunis, ils font plus ferrés les uns contre les autres, qu'ils n’étoient. Il y a plus. Dans l’éten- due de cet efpace qu'ils occupent, ils font inégalement ferrés , moins vers les extrémités, & beaucoup plus vers le milieu, c’eft-à-dire , vers l'Axe de la demi - Sphere, & là ils peuvent pañler pour être entiérement réunis en un point. Ces rayons à-peu-près réunis fur l'Axe, font ceux qui étoient entrés vers l’Axe , c’eft-à-dire, vers le milieu de Ja demi - Sphere ; & comme tous les autres qui tombent fur le refte de la furface, fe réuniffent très-mal , on retranche tout ce refte de demi- Sphere, & on n'en obferve que le milieu pour faire lObjeëtif. Mais il y a encore une autre obfervation à faire. Les rayons qui ont été rompus forment naturellement des Couleurs & des Iris, à moins que par la réfration ils ne foient réunis, ou du moins extrêmement ferrés les uns contre les autres. Aïnfi un Verre Obje&tif, qui n’eft qu’un petit refte de la demi- Sphere , eft cepen- dant encore ordinairement trop grand , parce qu'il reçoit nr" tas el DES SCIENCES, 33 vers fes bords des rayons, qui après s'être rompus , ne fe rapprochent pas aflez, &c font des Iris très-incommodes aux Obfervateurs. C’eft pour cela que l’on couvre les bords de l'Obje&tif, & qu’on ne lui laifle qu'une petite étendue circulaire autour de fon Axe. M. Tfchirnhaus défaprouve cette pratique , apparem- ment fi bien fondée, & prétend qu'il y a dans l'Optique plufieurs autres erreurs qu'il faudra détruire. 11 ne retranche rien de la grande furface de fon Obje@tif; mais il a fur cela quelque fecret qu'il ne découvre pas encore. Il eft tou- jours certain qu'il feroit avantageux de laiffer une plus gran- de ouverture aux Obje&tifs, pourvû qu’il n'y eût pas d’ail- leurs d'inconvenient, parce qu’on auroit plus de rayons d'un même point. L’Objettif de M. Tfchirnhaus peut être employé fans Oculaire, ce qui eft encoreun grand avantage. Car plus il y a de Verres dans une Lunette, plus il y a de rayons qui fe réfléchiffent fur leurs furfaces , & qui font perdus pour l'Obfervateur. Auffi M. Tfchirnhaus aflure que les objets fe voyent plus clairement avec fon Verre feul , qu’on ne les avoit encore vûs avec des Lunettes. Il aflure même qu'ils paroiffent plus clairs qu'a la vûe fimple, quoiqu'il fe fafle néceffairement des réfléxions de rayons fur ce Verre; mais apparemment cette perte eft plus que récompenfée par le grand nombre de rayons d’un même point que la grande étendue de fa furface, & de fon foyer, fait entrer dans l'œil. Ce Verre peut fervir fans tuyau, & cela d’une autre ma- niere que celle que M. Huguens a donnée dans fon Aftro- fcopie. Car l’objet fe voit toujours diflintement malgréles . rayons du Soleil qui paffent entre lui & l'œil. Le Champ, c'efta-dire l'Efpace qu’on peut voir à la fois avec ce Verre , eft d’une grandeur incroyable. M. Tfchirnhaus aflure que fans tuyau ni oculaire , il a vü très- diftinétement en plein midi une Ville entiere à la diftance d'un mille & demi d'Allemagne. ; KR iÿ # Pag. 17. 334 HISTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE Tant de fingularités du Verre de M. Tfchirnhaus an: noncent de grandes & d’heureufes nouveautés dans la Dio- ptrique. Quoique cette Science ne faffe prefque que de naître , on fera étonné qu'il s'y puifle faire encore de fiim- portantes découvertes , tant on eft accoutumé dans ce fié= cle au cours rapide des Sciences. BL SON OO ATBDA PO DENT GT MODEM MON NEA PIERRE Eco PRÉ DREL PR E LORPL ETES ACOUSTIQUE SUR LA DETERMINATION D'UN SON FIXE. À Science qui regarde le Sens de l'Ouie , n’a peut- être pas moins d’étendue , que celle qui a la Vüe pour objet, mais elle a été Jufqu’ici moins approfondie. Le be- foin que les Philofophes ont eu des T'élefcopes & des Mi- crofcopes, les a obligés à étudier avec une extrême appli- cation les différens chemins & les différens accidens de la Lumiere; mais comme ils n’ont pas eu le même befoin de connoître exaétement tout ce qui appartient aux Sons, & qu'ils ont le plus fouvent traité la Mufique comme une chofe de goût, dont on ne devoit pas trop aller chercher les Regles dans le fond de la Philofophie, ils n'ont pas tant tourné leurs fpéculations de ce côté-là. Aufli M. Sauveur a-t-il penfé que c'étoit-làa un pays en- core peu connu. Il a trouvé cette Science plus vafte, à mefure qu'il y faifoit plus de progrès, il a cru qu’elle mé- ritoit , aufli-bien que l'Optique, un nom particulier, & l'a appellée Acouftique. C’eft au nombre & à l'importance des nouvelles découvertes à jufifier ce nouveau nom. On peut déja prendre pour un morceau d’Acoufique, ce que l'on a vü de M. Dodart dans cette Hiftoire * fur la forma- tion de la Voix. DES SCIENCES. 135$ _Perfonne n'ignore que pour avoir tous les 4ccords de Mufique fur deux cordes d'Infirument , de même matiere , également groffes & également tendues > il n'y a qu'à faire que leurs Iongueurs foient l’une à l'autre dans de certains rapports de nombres. Par exemple, fi les deux cordes fup- pofées, & que nous fuppoferons toujours dans la fuite, font égales en longueur, elles font à l'Uniflon; fi elles font comme 1 à 2, elles donnent l'Odave ; fi elles font com- me 2 à 3, c'eft la Quinte ; comme 3 à 4, c’eft la Quarte; comme 4à $,c'eft la Tierce majeure , &c. Puifque ces accords rincipaux font formés par ces rapports qu'ont entre elles les longueurs des cordes, il eft vilible que d’autres rapports, par exemple, de 8ào, de 15 à 16, &c. donneront d’autres accords. Et com- me les rapports des nombres font infinis , il femble d’a- bord que les accords de Mufique doivent l'être aufli, & ils le feroient en effet > files Voix & les Inftrumens n’é- toient néceffairement bornés dans une certaine étendue , & fi Oreille ne l'étoit aufli de maniere > qu'au-deffous d'un certain ton bas, ou au-deflus d’un certain ton haut, elle ne peut plus difinguer ceux qui feroient plus bas ou plus hauts. Il eft vrai que dans cette étendue où les Voix & les Inf ttumens peuvent aller, & où l'Oreille peut diftinguer les tons, il femble qu'on pourroit faire encore une infinité d'accords, en donnant toujours aux longueurs des cordes, quoique renfermées entre de certaines bornes -tels rapports de nombres qu’on voudroit, par exemple, celui de 929 à 930, de 1000 à 1001, &c. Mais ces rapports font fi petits, que deux cordes qui les auroient entre elles, feroient le même effet que fi elles étoient égales, c’eft-à-dire , paroi- troient à l’Uniflon, car il s'agit toujours de l'Oreille , qui étant un organe matériel, ne peut fentir des différences qui feront d’une certaine finefe. Avant qu'une corde, dont la longueur eft 2, foit accour- cie jufqu’à n'être plus que 1, c’eft-à dire > à être àl’'Odave 136 HISTOIRE DE L’ACADEMIE ROYALE en enhaut du ton qu’elle rendoit auparavant, elle peut paf- fer par autant de divifions que l’on voudra. M. Sauveur fixe ce nombre de divifions à 43 parties; & ces 43 parties qu'il appelle Merides, & qui rempliffent toute l'étendue de POc- tave, donnent les tons les plus fenfbles & les plus ordi- naires qui y foient compris. Mais fi l’on veut aller à des dif- férences de ton beaucoup plus délicates, il faut divifer en- core chaque Meride en 7 parties qui s’appelleront Eptame- rides, & par conféquent il y aura dans une O&tave 301 Ep- tamerides. Ces nombres de 43 & de 301 ont des commo- dités & des ufages, qui les ont fait préférer par M. Sau- veur à tous les autres qu'il auroit pü choifir; mais il n’en eft pas queftion préfentement. Une corde plus courte fait dans un tems égal un plus grand nombre de vibrations qu'une plus longue , & c’eft par-là qu’elle rend un ton plus aigu. Les nombres des vi- brations de deux cordes inégales font entre eux en raifon renverfée des longueurs, c’eft-à-dire, que fi les deux cor- des font comme 1 à 2, comme 2à3,3à 4, &c. la plus çourte fait deux vibrations pendant que l'autre n’en fait qu'une, 3 pendant que l’autre en fait 2 , &c. Par-là, il eft clair que les vibrations de deux cordes éga- les doivent aller toujours enfemble , commencer, finir, re- commencer dans le même inftant, mais que celles de deux cordes inégales doivent être tantôt féparées , tantôt réunies, & d'autant plus long-tems féparées , que les nombres qui expriment l'inégalité des cordes font plus grands. Car que deux cordes foient comme 1 & 2,& qu’elles commen- cent en même tems leurs vibrations, il eft für qu'après 2 vibrations de la plus courte & de la plus aiguë, & une de l’autre , elles recommenceront à partir enfemble, & qu’ainfi fur 2 vibrations de la plus courte, il y aura toujours une réunion des vibrations de toutes les deux. Si elles étoient comme 24 à 25, il n'y auroit une réunion de leurs vibrations, qu'a chaque vingt-cinquiéme vibra- tion de la plus courte, & il eft clair que pour de plus grands Die 5 : $C DE NICE Eu 1 O0 à 137 grands nombres, les réunions feroient encote plus’ rares. Jufqu'ici ce ne font que des rapports, qui ne font rien connoitre d’abfolu. Il faut fixer un terme au-deflus duquel on prenne la fuite des tons aigus , & au-deflous, celle des tons graves. Il eft fort aifé de le choifir arbitrairement, mais la difficulté eft de le retrouver fürement, quand on en a befoin. Les Muficiens fe fervent d’une efpéce de Silet de bois ou de métal d’une certaine longueur , pour déterminer le ton par rapport auquel les Voix & les Inftrumens doivent s’accorder dans un Concert, & comme ils veulent que ce ton foit toujours le même, ils fuppofent que ce Sifflet le rend toujours. Mais cette fuppofition n’eft pas exactement vraie. 1. Un tuyau d’Orgue de quatre pieds, qui eft par lui-même beau- coup plus jufte qu'un petit Sifflet, ne rend pas toujours pré- cifément le même fon. 2. La matiére du Sifflet étant fort fufceptible d’altération , le feul ufage qu’on en fait, le tems, cent accidens , en changent fenfiblement le ton au bout de quelques années. 3. Il eft certain qu’en donnant le fouffle plus ou moins fort dans un Siflet, le ton hauffe ou baïfle, & l’on ne peut être für de donner toujours le même fouffle. Enfin fi ce Sifflet eft perdu , on ne peut plus retrouver le ton qu’on avoit déterminé. Ces inconvéniens ont fait defirer à M. Sauveur de pou- voir déterminer plus füremént un Son fixe , & voici quelle a été fon idée. Quand on entend accorder des Orgues , & que deux tuyaux qui approchent de l’Uniffon jouent enfemble, il ya certains inftans , où le Son commun qu’ils rendent eft plus fort, & ces inftans femblent revenir dans des intervalles égaux. M. Sauveur ayant cherché la caufe de ce Phéno- méne, a imaginé avec une extrême vraifemblance , que le Son des deux tuyaux enfemble devoit avoir plus de force, quand leurs vibrations, après avoir été quelque tems fépa- rées, venoient à fe réunir, & s’accordoient à frapper lo- -1700. S 138 HisTOIRE DE L’'ACADEMIE ROYALE reille d’un même coup. Il femble même que l’expreffion commune des Muficiens , qui difent que les tuyaux battent, quand leur Son fe redouble ainfi, ait fon origine dans cette idée. Il eft commode que les tuyaux approchent de PUnif- fon, parce qu'alors les nombres qui expriment leurs lon- gueurs, étant plus grands, il y a fur un plus grand nombre de vibrations féparées moins de vibrations qui fe rencon- trent, & qui battent, & par conféquent l'oreille s’apperçoit plus aifément de battemens qui font plus rares, & diftingués par de plus grands intervalles. Si l’on prenoit deux tuyaux, tels que les intervalles de leurs battemens fuffent aflez grands pour être mefurés par les vibrations d'un Pendule, on fçauroit exaétement par la longueur de ce Pendule quelle feroit la durée de chacune des vibrations qu'il feroit, & par conféquent celle de Pin- tervalle de deux battemens des tuyaux; on fçauroit d'ail- leurs par la nature de l’accord des tuyaux combien Pun fe- roit de vibrations pendant que l'autre en feroit un certain nombre déterminé, & comme ces deux nombres feroient compris dans l'intervalle de deux battemens dont on con- noîtroit la durée , on fçauroit précifément combien chaque tuyau feroit de vibrations pendant un certain tems. Or c’eft uniquement un certain nombre de vibrations faites dans un tems déterminé, qui fait un certain ton, & comme les rap- ports des vibrations de tous les tons font connus , on fçau- roit combien chaque ton fait de vibrations dans ce même tems déterminé. Voilà jufqu’où Pinduftrie humaine n’avoit encore pü al- ler. On fçavoit qu'un tuyau faifoit un certain nombre de vibrations dans le même tems qu’un autre en faifoit un autre nombre déterminé; mais quel étoit ce tems? On n'en fçavoit rien, & lon ne croyoit pas même pofible de le fçavoir, parce que ces fortes de vibrations ne fe laiffent pas mefurer à la vûe. M. Sauveur a faif les battemens de deux tuyaux comme deux points fixes & fenfibles , entre lefquels étoit compris DES SCIENCES 139 ce qui a été jufqu’à préfent infenfible & indéterminé. Le tems pendant lequel fe font les vibrations d’un cer- tain ton étant donc arrêté par expérience , & les nombres des vibrations que font les autres tons pendant ce même tems , étant connus d’ailleurs, M. Sauveur prend pour le Son fixe celui qui fera 100 vibrations en une Seconde, & il appelle Oltave fixe aiguë celle qui eft au-deflus, & O&a- ve fixe grave celle qui eft au-deffous. - Ce Son fixe fe peut aifément retrouver en tout tems , & en tous lieux, par l’expérience des battemens de. deux tuyaux, qui conduira fürement à un Son tel qu'il fera 100 vibrations par Seconde. Ainfi que le ton de l'Opera de Paris foit déterminé par rapport au Soh fixe, on fera cer- tain de lavoir précifément à la Chine. Et il n'importe au- cunement que les deux tuyaux fur lefquels on fera l’expé- rience fondamentale des battemens à la Chine , foient de la même longueur, de la même épaifleur, de la même matiere que ceux de Paris, il fufht que l’on trouve par deux tuyaux, quels qu'ils foient, un Son qui faffe 100 vi- brations par Seconde ; ce Son eft toujours le même , in- dépendamment des Inftrumens qui le produifent , & toute fa nature confifte dans ce nombre déterminé de vibrations en une Seconde. Quand M. Sauveur communiqua toutes ces vûes à l’A- cadémie, elle alla d’abord à s’aflurer de l’expérience des battemens , & nomma quelques Académiciens pour la voir. M. Sauveur en rendit compte lui-même, & avoua que pout cette fois elle avoit pas bien réufli; car d’autres fois, & en préfence des plus habiles Muficiens de Paris , elle avoit paru très-Jufle & da té La difficulté de la recom- mencer, l’appareil qu'il faut pour cela , d’autres occupa- tions plus preflantes de M. Sauveur , & même d’autres re- cherches d’Acouftique , où il a été obligé de s’engager par la liaifon qu’elles avoient avec le Son fixe, ont été caufe qu'on en eft demeuré-là; mais on fçait qu’en fait d’expé- riences il ne faut pas fe décourager aifément, & qu’elles Si 140 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE ont, pour ainfi dire, leurs caprices que l’on furmonte avec le tems. En attendant que l’Académie reprenne celle- là , on la propofe ici aux Muficiens comme une expérience qu’ils devroient vérifier, & à tous lesautres, du moins com- me une vüe. Et pour mieux faire voir combien elle mérite d’être fui- vie, on mettra ici quelques conféquences que l’on tireroit du Son fixe une fois établi , foit par rapport à la Théorie de la Mufque , foit par rapport à la Phyfique générale. M. Sauveur a trouvé par fes expériences qu'un tuyau d'Orgue d'environ $ pieds ouverts , rendoit le Son fixe, & d’ailleurs qu’un tuyau de 40 pieds rend le Son le plus grave qui puille être difingué. Ce tuyau de 40 pieds étant 8 fois plus long que celui de $, fait 8 fois moins de vibra- tions en une Seconde , & comme celui de $ , felon l'hypo- théfe du Son fixe , en fait 100 , il s'enfuit que le ton le plus gravé que l'oreille puifle diftinguer fait en une Seconde 122 vibrations. De même fi le tuyau le plus court dont on puille diftin- guer le Son, eft d'un pouce moins une feiziéme partie, c’eft-à-dire eft au tuyau de $ pieds, comme 1 à 64, le Son le plus aigu fera en une Seconde 6400 vibrations. On voit par-là dans quelles bornes eft renfermée la fa- culté qu'a l'Oreille de diftinguer les tons, on voit quel eft le point aù cet organe commence à être fenfible à leur dif férence, & celui où il ceffe de l'être, & comme ce rap- port de 124 à 6400 eft à-peu-près celui de 1 à s12, on peut conclure que Oreille eft fufceptible d'un ébranle- ment de fenfation depuis un certain degré jufqu’à un autre qui eft s 12 fois au-deflus. Ce qui vient d'être dit des tuyaux d'Orgue , fe peut ap< pliquer aux cordes d’Inftrumens, car des cordes peuvent être mifes à l’Uniflon avec tels tuyaux que l'on voudra. Les vibrations des cordes font fenlibles, & celles des tuyaux ne le font pas. On peut, fur-tout avec un Micro- fcope, obferver le chemin que faitune corde pincée par le ‘DES SCIENCES 147 Milieu, c’eft-à-dire,, l'étendue de fa vibration. Si cette cor- . de rend le Son fixe, ce chemin multiplié par 100 , eft tout l’efpace que ce milieu de corde parcourt en une Seconde. Les premieres vibrations d’une corde que l’on vient de pincer font beaucoup plus grandes que les dernieres , mais elles font toutes d’égale durée , & de-là vient que le Son s’affoiblit toujours du commencement jufqu’à la fin , fans que le ton change. IL faut donc dans l'Obfervation précé- dente tâcher d’avoir le chemin que fait le milieu de la cor- de dans fes premieres vibrations , lorfque le fon eft le plus fort, & celui qu'il fait dans les dernieres, lorfqu’il ef le plus foible. M. Sauveur a trouvé que le milieu d’une corde qui rendoit le Son fixe , & qui avoit fon diametre de + de ligne, faifoit dans fes dernieres vibrations fenfbles Æ de ligne, & par conféquent près de 6 lignes en une Seconde , & dans les premieres vibrations 72 fois plus de chemin, c’eft-à- dire 3 pieds par Seconde. Les tons graves font dans un tems égal moins de vibra- tions que les tons aigus, mais ils les font plus grandes, & fi, comme il eft fort vraifemblable, cette grandeur des vi- brations récompenfe précifément le défaut du nombre, toutes les cordes de + de ligne de diametre, à quelque ton qu’elles foient , font le même chemin en une Seconde, que celle qui rend le Son fixe. La quantité de mouvement eft le produit de la mafle dun corps par fa vitefle. Les cordes que nous fuppofons ici de même Diametre, & de longueurs différentes, puif- qu’elles font à différens tons, font des Cilindres qui font entre eux comme leurs hauteurs ou longueurs. Elles ont toutes la même vitefle, puifqu'elles font le même che- min dans le même tems. FL leurs quantités de mouve- ment font comme leurs longueurs. Donc les cordes d’un ton grave ont plus de quantité de mouvement, & en im- priment plus à l'Oreille, mais les coups qu’elles lui portent font moins ferrés, &, pour ainfi dire, moins appuyés les - Si 142 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE uns par les autres. C’eft donc un ébranlement plus petit, mais plus vif, qui fait le ton aigu ; c'en eft un moins vif, mais plus grand , qui fait le ton grave ; & les différentes com- binaifons des degrés de grandeur & de vivacité de l'ébran- lement font tous les tons. On peut s'imaginer une efpéce d'étendue, qui commence par le ton le plus grave, c'eft-à- dire, par l’ébranlementquia le plus de grandeur , & le moins de vivacité. De ce terme , la grandeur va toujours en dimi- nuant, & la vivacité en augmentant, jufqw’à ce qu’enfin la vivacité foit la plus grande, & la grandeur la plus petite qu'il foit poflible. Au point du milieu, elles fe trouvent dans l'égalité. Par les expériences que M. Sauveur a faites pour déter- miner le Son fixe, il a remarqué que quand deux tuyaux faifoient un tel accord qu’ils ne battoient que 6 fois, c’eft- à-dire que leurs vibrations ne fe rencontroient que 6 fois en une Séconde, on diflinguoit ces battemens avec affez de facilité. Donc dans tous les accords où les vibrations fe rencontreront plus de 6 fois par Seconde, on ne fen- tira point de battemens, & on les fentira au contraire avec d'autant plus de facilité que les vibrations fe rencontre- ront moins de 6 fois par Seconde. Or par le Syflême du Son fixe , il eft très-aifé de déterminer combien de fois fe rencontrent en une Seconde les vibrations de tel accord qu'on voudra. Par exemple, fiune corde eft à l'O&tave en enhaut de celle qui rend le Son fixe, elle fera 200 vibrations en une Seconde , tandis que l’autre en fera 100, & leurs vibrations fe rencontreront 100 fois, ce qui eft bien éloigné de ne fe rencontrer que 6 fois. Si cette corde eft à l'Octave grave de celle du Son fixe, elle fera ço vibrations par Seconde, & leurs vibrations fe rencontreront $o fois. Si elle eft à la feconde Oétave grave, les vibrations fe rencontreront 2$ fois, & enfin il faudra qu’elle foit à la quatriéme Ottave gra- ve, afin que les vibrations ne fe rencontrent que 6 fois. Il eft donc imporffible que l’on entende jamais des batte+ ’ DES SCIENCES. 11 143% mens dans une Oétave, quelle qu’elle foit. Si elle eft au- deffus du Son fixe, Fimpoffibilité eft entiere & abfolue; fi elle eft au-deffous , il faudroit un Inftrument qui allât à la quatriéme Oëtave grave du Son fixe, c’eft-à-dire , par exem- ple, un tuyau d'Orgue de 80 pieds, puifqu’un tuyau de $ rend le Son fixe. Or fans compter l'énorme grandeur de lInftrument , nous avons vû que loreille ne peut diftin- guer des tons plus bas que ceux d’un tuyau de 40 pieds. De même , fi une corde de 3 pieds rend à-peu-près le Son fixe, il en faudroit une de 48 pieds, ce qui eft impraticable. … Les battémens ne plaifent pas à l'oreille , à caufe de l'iné- galité du Son, & l’on peut croire avec beaucoup d'appa- rence, que ce qui rend les Odtaves fi agréables, c’eft qu'on n'y entend jamais de battemens. En fuivant cette idée, on trouve que les accords dont on ne peut entendre les battemens, font juftement ceux que les Muficiens traitent de Confonances , & que ceux dont les battemens fe font fentir, font les Diflonances , & que quand un accord eft Diffonance dans une certaine Oc- tave, & Confonance dans une autre, c’eft qu’il bat dans l’une , & qu'il ne bat pas dans l’autre. Aufli ef - il traité de Confonance imparfaite. Il eft fort aifé par les principes de. M. Sauveur qu'on a établis ici, de voir quels accords bat- tent, & dans quelles Oûaves au-deflus ou au-deffous du Son fixe. Si cette hypothéfe eft vraie , elle découvrira la vérita- ble fource des Regles de la Compofition, inconnue jufqu’à. préfent à la Philofophie ; qui s’en remetroit prefque entié- sement au jugement de Poreille. Ces fortes de jugemens, naturels , quelque bifares qu'ils paroïffent quelquefois, ne le font point, ils ont des caufes très-réelles , dont la con- noiffance appartient à la Philofophie, pourvû qu’elle s’en. puifle mettre en poffeilion. Fe V. les M. pag. 161. 144 Histoire DE L'ACADEMIE Royazr ECAR AR ADS 1 BTE re D T4 S D MN se +3 8 CA GB Se SG <3 BB *S re SG 07 8 AN C] 7) AA er] Aa SUR LA CONSTRUCTION DES HORLOGES. Uanp M. Huguens eut découvert que les vibrations O faites par des Arcs de Cycloïde , quelque inégales qu’elles fuflent en étendue, étoient toujours d’une égale durée , il conçut bien qu’un Pendule que l’on appliqueroit à une Horloge , & auquel on feroit décrire des Arcs de Cy- cloïde , rectifieroit les inégalités inévitables de Horloge, parce que quand les différens principes de ces inégalités feroient faire au Pendule des vibrations plus grandes, ou plus petites , il les feroit en vertu de la Cycloïde dans des tems parfaitement égaux, & qu’ainfi il remettroit toujours dans les mouvemens de l'Horloge , fuppofé qu'il la gouver- nât, cette parfaite égalité de tems. Mais la difficulté étoit de faire décrire à un Pendule des Arcs de Cycloïde, car naturellement ce Pendule at- taché à un point fixe, ne peut décrire autour de ce point que des Arcs de Cercle. M. Huguens trouva encore ce fe- cret que tout le monde connoït préfentement. La Verge de fer qui porte le Pendule à fon extrémité d’embas, eft attachée par le haut à un fil de foye, placé entre deux pe- tits Arcs de Cycloïde faits de métal. Le mouvement de vi- bration applique fans ceffe à l’un ou à l’autre de ces Arcs ce fil qui eft fort fléxible, & qui en prend exaétement la figure, & moyennant cela, il eft démontré en Géométrie que le poids fufpendu à l'autre bout de la Verge, décrit exaéte- ment DES SCIENCES. 145 ment un autre Arc de Cycloïde. Voilà une des plus ingé- nieufes , & des plus célébres inventions d’un Siécle, qui en a beaucoup produit. On a crû que l’on n’avoit plus rien à défirer fur l'Art de mefurer le Tems, & en effet les bon- nes Pendules d’aujourd’hui ne manquent pas en plufieurs jours d’une feule Seconde, c’eft-à-dire de la trois mille fix centiéme partie d’une heure. Cependant comme il eft bon de fe rendre difficile à con- tenter, & qu'une certaine inquiétude philofophique , qui ne croit jamais avoir attrapé la perfeétion , eft feule capable d'y parvenir, M. de la Hire avoue qu'il ne défefpére pas de pouvoir encore perfectionner l'Horlogerie. _Ce fil de foye auquel on fufpend la verge du Pendule, s'accourcit par l'humidité, & s’allonge par la fécherefle, & c’eft par conféquent le Pendule entier qui s’accourcit & s’allonge. Or dès que la longueur du Pendule change , il fait plus ou moins de vibrations dans le même tems, & l'exatte jufteffe de toute la Machine eft détruite. M. de la Hire avoit imaginé de mettre au lieu du fil de foye , une petite lame de reffort fort légére & fort fléxible , qui fé feroit Les avec la même facilité contre les petits Arcs de Cycloïde , & qui n’auroit pas été fujette aux mêmes altérations par la féchereffe , au par l'humidité de l'air. Mais il a éprouvé que le froid rendoit le reffort de la etite lame plus roide & fes vibrations plus fréquentes ; que É chaud faifoit un effet contraire; que l’un & l’autre agif- foient fur elle plus violemment que la féchereffe ou l’humi- dité fur la foye, & qu’enfin l'Horloge en contraétoit une plus grande irrégularité. Il s’agit ici du Pendule à Secondes, c’eft-à-dire de celui qui ne fait qu'une vibration par Seconde , mais fi c’étoit un Pendule plus court, & qui en une Seconde fit deux vi- brations , alors l'augmentation ou la diminution du nom- bre des vibrations, caufée par les irrégularités de la lame à reflort tombant fur un plus grand nombre de vibrations, deviendroit infenfble par rapport à ce nombre, &äülferoit 1700. 146 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE avantageux d'appliquer la lame à un Pendule à demi- Secondes , fur-tout dans les voyages fur Mer , où les vibra- tions d’un Pendule qui n’eft fufpendu qu'à un fil de foye, | font fort fujettes à être interrompues parles différens mou- vemens du Vaifleau. Enfin pour le Pendule à Secondes , M. de la Hire vou- droit le fufpendre à une verge roide & ferme dans toute fa longueur. Il eft vrai que par-là il paroït renoncer entiére- ment à la Cycloïde, mais il croit, & il a éprouvé que les vibrations par des Arcs de Cercle fe font dans des tems aufli exaétément égaux , pourvû qu’elles ne foient pas d’une grande étendue, & enfin fi l’on eft perfuadé qu’on ne fe puifle pañler de Cycloïde, ik a imaginé une maniére aflez fine & affez fubtile de l'appliquer à un mouvement ; qui paroît ne fe pouvoir faire que par un Cercle. On auroit donc tout l’avantage de la Cycloïde fans les inconvéniens du fil de foye. Quoique les Montres de poche, petites & portatives comme elles font, ne puiflent jamais être amenées à la juf- téfle des grandes Horloges, il ne faut pas cependant dédai- gner de leur donner toute celle dont elles font capables. Quand un Pendule qui décrit de petits Arcs de Cercle, où des Arcs quelconques de Cycloïde , fait dans destems égaux des vibrations d’une étendue inégale, c’eft qu'il fait les gran- des plus vite à proportion, & les petites plus lentement. Par la même raifon un Reflort mis en mouvement , qui fait fes vibrations plus grandes ou plus petites, felon qu'il eftplus ou moins roide , & qu’il a reçu plus ou moins de mouvement, les fait en des tems à très-peu près égaux , pourvû que l’iné- galite de leur étendue ne pafle pas de certaines bornes. Et comme on a appliqué les vibrations d’un Pendule aux gran- des Horloges pour reétifier les inégalités de leurs mou- vemens, on s'eftavifé aufli d'appliquer au Balancier des Montres, qui a des mouvemens aflez inégaux , un Reffort qui les corrigeât par légalité de la durée de fes vibrations. Ce Refort eft ordinairement tourné en Spirale ; afin que DES SCIENCES. + 147 dans le petit efpace auquel on eft aflujetti il ait affez de lon gueur , & par conféquent affez de force pour ne fe pas laif- fer maitrifer & emporter par les inégalités de ce même Ba- lancier, que l’on veut qu'il regle. Il faut que ces deux Pie- ces ayent des vibrations à peu près de même grandeur, qu’el- les ne fe gênent point l’üne l’autre dans leurs mouvemens , & qu'elles s’ajuftent en forte que le Reffort plus régulier dans la durée de fes vibrations que le Balancier ne fafle que lui communiquer fa régularité dans les occafions. De la maniére dont le Reffort fpiral a été appliqué juf qu'ici , M. de la Hire juge qu'il doit être maitrifé par le Ba- lancier, & que c’eft une des caufes du peu de jufteffe des Montres. Il propcfe donc une autre maniere d'appliquer le Reflort, telle qu'il aura toujours la force de dominer. Il propofe même une autre figure de Reffort. ILeft ployé en ondes, & par-là , il eft fort long dans un petit efpace , & fort doux. Ces correttions que l’on fait à des inventions connues & établies , peuvent, à la vérité, frapper moins les efprits, que n’ont fait Les inventions même , qui avoient l'éclat de la nouveauté, mais quelquefois elles ne font ni moinsutiles, ni même moins ingénieufes. Plus une premiere invention . approche de la perfeétion dont elle eft capable , plus le peu qui lui manque nous eft important, & ce peu eft d'autant plus difficile à découvrir qu'il eft par lui-même moins vifi- ble ; & qu’on s’avife moins de Je chercher. SURUNIINSTRUMENTUNIVERSEL pour des Jets des Bombes. sort L ne fuñit pas à la Géométrie d’avoit déterminé que les Voy-le M. Ï Bombes & les Boulets dé Canon décrivent dés Parabos ?# °°” les en l'air, il. faut encore qu’elle imagine des TInftrumiens: par le moyen defquels une certaine Paraboletparticuliére tracée par une Bombe, aille rencontrer. tel point que l’on: Ti 148 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE voudra, c’eft-à-dire en un mot , que la Bombe aille au but Auffi feu M. Blondel de l’Académie des Sciences, après avoir établi dans le Livre qu'il a fait fur cette matiére , toute la Théorie de la Projeétion des Bombes, y a joint diverfes conftruétions d’Inftrumens. Il n’eft pas fi difficile d’imaginer"des Pratiques qui répon- dent parfaitement à la Théorie , qu'il left de les rendre affez fimples & affez commodes , pour pafler dans un ufage commun , fur-tout s’il y en a d’autres, quoique moins fim- ples, & moins commodes, qui foient établies auparavant ; car comme généralement ceux qui exécutent, font peu habiles & peu appliqués , la premiere difficulté qui fe pré- fente dans .ce qui eft nouveau, fait qu’ils le rebutent , & qu'ils s’en tiennent aux anciennes méthodes, dontles diffi- cultés ont difparu par lhabitude. Le nouvel Infirument que M. de la Hire propofe paroît avoir affez d'avantages fur les autres qui ont été imaginés , & même fur ceux qui font en ufage. Quand on veut tirer une Bombe à un certain but, il faut fçavoir 1. a quelle diftance eft le but. 2. De coiabien il eft au-deflus ou au-deffous du niveau du lieu où l’on tire. 3. Quelle eft la force de la poudre qu'on employera, c’eft-à- dire , queleft le plus grand éloignement où une même char- -ge de cette poudre puiffe porter la Bombe.Ces trois chofes fuppofées, c’eft à la Méthode ou à l’Inftrument dont vous vous fervez à vous apprendre fous quel AngJle il faut pointer le Mortier, afin que la Bombe aille au but propolé, carc’eft cet Angle qui eft le point effentiel. L’Inftrument de M. de la Hire ef tel que des trois con- noiflances préliminaires qu’il faut avoir , il en donne par lui- même les ri premieres , que l’on n’eft point obligé d’aller chercher ailleurs. Pour la troifiéme qui eft la force d’une certaine charge de poudre, c’eft une connoiffance qu'il faut avoir indifpenfablement par des expériences précédentes. Encore une commodité de cet Inftrument; ilne deman- de point, comme ceuxde M. Blondel, des opérations d'A- DES SCIENCES. 149 rithmétique qu'il faille faire à part, ce qui doit être d’un affez grand foulagement pour les Canoniers. SUR LES CENTRES DE CONVERSION © fur les Froremens. 6 I l'on met un bâton fur une eau immobile , & qu’on le tire par un fil qu’on y aura attaché, de forte que le fil faffe toujours le même angle avec le bâton ,toujours, par exem- ple , un Angle droit,on s’appercevra que ce bâton tournera fur un de fes points qui fera immobile , & que M. Parent appelle Centre de converfion. On peut fuppofer pour une plus grande facilité que le fil foit attaché à une des extrêmi- tés du bâton. Cet effet vient de la réfiftance du fluide , & de la maniére dont elle fe partage. Car que l’on conçoive le premier mo- ment de la traétion ;il eft certain que la réfiftance des parties du fluide qu’il faut déplacer , tend à faire tourner le bâton autour du point où le fil eft attaché, comme autour d’un centre , de maniére que dans la fuppofition préfente , le ‘bâton décrivit précifément un quart de Cercle, après quoi le fluide ne réfifteroit plus au bâton felon fa longueur. Mais fi ce mouvement circulaire s’exécutoit, l’extrémité libre du bâton , & les parties qui en font plus proches, décriroient de plus à Arcs de Cercle que les autres, & auroient plus de viteffe. Donc la réfiftance du fluide, qui tend à im- primer un mouvement circulaire au bâton autour du point où le fil eft attaché , tend à imprimer plus de viteffe aux par- ties qui font vers l’autre extrémité , ou, ce qui revient au même , ces parties ont befoin d’une plus grandevîtefle, pour furmonter la réfiftance du fluide, en forte que le bâton ne prenne pas ce mouvement circulaire autour du point où eft le fil, ou eñfin la réfiftance du fluide eft plus grande vers l'extrémité libre du bâton , & va toujours en diminuant de- là vers l’autre extrémité. Or il faut fuppofer que toutés les colonnes ; ou tous les filets d’eau qui réliftent au bâton font de la même longueur , ou de la même mafle. Donc on peut trouver fur le bâton un point tel que prenant un plus grand uJ 150 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE nombre de ces filets du côté où ils réliftent moins , & un plus petit nombre du côté où ils réfiflent davantage , il y aura une compenfation exacte, & les forces feront égales de part & d'autre. C’eft ce point qui ef le Centre de con- verlion , & comme le même raifonnement a lieu pour tous les momens de la traétion qui fe fait toujours de la même maniére, ce Centre efl toujours le même point. . Sil Angle du fil avec le bâton cefloit d'être droit, & de- venoit obtus, le Centre de converfion ne laifferoit pas d’ê- tre toujours au même point, parce que la réfiftance du flui- de, quoique moindre en elle-même, eft toujours felon la - même proportion plus grande vers l'extrémité libre du bâton , & moindre vers l’autre , ce qui paroït vifiblement par le mouvement circulaire qu’elle tend toujours à impri- mer au bâton, quoique ce mouvement ne doive pas être d’un quart de cercle entier. Mais fi après avoir tiré le baton par fon fil fous un Angle droit, on le tiroit fous un Angle obtus, le Centre de converfion, qui ne changeroit pas de place fur le bâton, en changeroit dans le fluide , parce que le bâton entier feroit un mouvement, & on ne le verroit plus” tourner fur un même point immobile. La grande queftion eft de fçavoir à quel point précifé- ment fe doit trouver le Centre de converfion , & c’efl ce que M. Parent a déterminé par un calcul d’Algébre, en y ajou- tant quelques autres confidérations générales de Méchani- que, outre celles qui font particuliéres à ce Phénoméne, & qui font Les feules que nous ayons rapportées. Il trouve que: fi le bâton tiré par une de fes extrémités étoit une fimple ligne divifée. em2o parties à compter depuis le fil, le Centre: de converfion feroit à peu prèsfur la 13e. Si ce n’eft plusune ligne, mais une furface, ou un Solide que l'on tire, il arrive quelque changement à la fituation du Centre de éonverfion, felon la furface ou le Solide. Tout cela demande un grand détail de calcul algébrique , où M. Parenteftentré. | Au lieu que l'on a fuppofé ici que le Corps tiré nageoit fur un fluide, fi on le fuppofoit fur un Plan rude & rabo-, teux, la réfiflance de ce plan'au mouvement du: Corps fe: DES SCIENCES. si partageroiït toujours de la même maniére , & détermineroit le même Centre de converfion. Cette réliftance eft précifément ce qu’on appelle le frote- ment , fi nuifble à l'effet de tautesles Machines, & la Théo- rie des Centres de converfion qui pourroit paroître d’abord affez peu utile , a fervi à M. Parent dans la recherche & dans la détermination de la force des frotemens. Pour renfermer dans de certaines bornes cette queftion, que rend infinie & par conféquent infoluble, la différence infinie des furfaces qui peuvent froter enfemble , M. Parent n’a confidéré qu’un Corps parfaitement dur qui frote ou fur un Corps très-dur aufli, ou fur un très-mou , c’eft-à-dire fluide. Ces deux extrémités étant une fois connues, on ju- gera à peu près de tout ce qui fera entre deux. Chacun de ces deux cas fe partage encore en deux, car il eft queftion de connoître l'effort néceffaire ou pour mou- voir le moins qu'il foit poflible , c’eft-à-dire pour commen- cer à mouvoir un Corps fur un autre, ou pour le mouvoir avec une certaine viteffe donnée. Si le Corps fur lequel doit fe mouvoir le Corps très-dur, eft fluide , l'expérience feule peut déterminer la grandeur du premier effort, mais ce premier effort une fois rrouvé, ceux qui feront nécefaires pour imprimer des viteffes telles que l'on voudra, feront entre eux comme les quarrés de ces vitefles , car la réfiftance du fluide n’augmente pas feule- ment, parce que le Corps qu'on y meut eft mû plus vite, mais encore parce qu’étant mû plus vite , il rencontre & choque d’autant plus de particules du fluide, ce qui faitune raifon doublée, ou des quarrés. Si le Corps fur lequel on meut le Corps très-dur , eft très- dur aufli, M: Parent en confidére les deux furfaces comme toutes hériflées de demi-Sphéres égales, de forte que les demi-Sphéres du Corps fupérieur font engagées dans celles de l'inférieur. 11 s’agit de les en dégager , & de les élever our commencer le mouvement. Cette figure donne à M. East plus de facilité de faire un calcul, & il trouve par pure Géométrie que dans cette fuppolition il faudroit pour * Page 104. & fuiv. 152 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE élever un poids de 20 livres , une force qui füt ou de 14 li- mn il faudroit élever une des demi-Sphéres du Corps fupérieur par-deflus deux de l'inférieur , ou de 7 livres feule- ment quand il ne la faudroit élever que par-deflus une. Or comme ces deux cas fe rencontrent à la fois à l'égard de différentes parties de la même furface, il faut donc une force moyenne entre 14 & 7, ou entre 11 & 10. Cettepropor- tion eft précifément celle que M. Amontons avoit déter- minée par l'expérience des Glaces & de leurs Polifloirs, qui font des Corps affez durs , & qui s’ufent très-peu pa un feul frotement, ce qui les rend très-approchans de la fup- pofition de M: Parent. Quand on enduit de quelque matiére graffe le Corps in- férieur, on remplit les intervalles des demi-Sphéres de fa furface , de forte que celles du Corps fupérieur ne s’y enga- gent prefque plus, & peuvent commencer à fe mouvoir fans être fenfiblement élevées. Donc en ce cas-là , la force qui meut le poids de 2olivres, doit être moindre quela plus pe- tite qui le pouvoit mouvoir dans le cas où il falloit élever les demi-Sphéres de toute leur hauteur, c’eft-à-dire, que cetre force doit être moindre que 7 livres. M. Amontons atrouvé par les expériences qui ont été rapportées dans l’Hiftoire de 1699, * qu'elle étoit le tiers du poids, & par conféquent dans la fuppofition préfente 6 liv. £ce quieft au-deffous de 7. La Géométrie de M Parent , quoique dans une matiére qui fembloit devoir échapper à la Géométrie , la conduit au même point où M. Amontons étoit arrivé par l'expérience. La comparaifon des différentes viteffes avec lefquelles on voudroit mouvoir un de ces Corps fur l’autre, toujours fe- lon lhypothéfe des demi-Sphéres, a jetté M. Parent dans une Géométrie encore plus compliquée & plus délicate. Tout ce que nous en pouvons détacher ici qui foit aflez clair & affez fenfble, c’eft que la réfifance du Corps infé- rieur au mouvement du fupérieur n’augmente pas en même raifon que la viteffe du fupérieur , & même n’augmente plus fenfiblement , paflé un certain point , quoique cette vitefle augmente encore tant qu'on voudra. Que DES SCIENCES. e 153 Que lon concoive avec M. Parent le Corps fupérieur en- tiérement réduit à une feule des demi-Spheres de fa furface fans rien perdre de fon poids, & que cette demi-Sphere pafle fucceflivement, & d’un mouvement hotifontal far une rangée de démi-Spheres inférieures, égales à elle , en tom- bant à chaque moment entre leurs intervalles > & en fe rele- vant toujours. Si le poids de cette demi-Sphere fupérieure eff tel qu'il doive en une Seconde lui faire parcourir un efpa- ce vertical égal à la hauteur ou profondeur des intervalles qui font entre les demi-Sphetes inférieures, & fi le mouve- ment horifontal de la demi-Sphere fupérieure ef tel qu’elle ne fafle en une Seconde qu'un intervalle de deux demi- Spheres inférieures, il eft certain qu’à chaque Seconde elle s’enfoncera toute entiére dans un de ces intervalles , c’eft-à- dire qu’elle engrénera autant qu'il eft poflible. Mais fi par fon Mouvement horifontal elle doit parcourir deux intervalles en une Seconde, elle n’entrera dans chacun qu’à la moitié de fa profondeur, parce que ces deux moitiés mifes enfem- ble feront toute la hauteur dont fon poids doit la faire tom- ber en une Seconde. Il eft donc vifible que plus le mouve- ment horifontal qui peut augmenter à l'infini, fera grand par TAPPOrt au mouvement vertical du poids qui ne peut chan- 8er, moins la demi-Sphere fupérieure s’enfoncera & engré- nera dans les inférieures ; & enfin la vitefle horifontale pour- ra être telle que la demi-Sphere fupérieure ne touchera les inférieures que pat leurs fommets , après quoi le frotement n'augmentera plus fenfiblement par l’augmentation de la vitefle. Mais il faut bien remarquer que le frotement ne fera jamais nul, parce qu’enfin quelque grande que foit la viteffe horifontale | comme elle ne peut être que finie & dérermi- née, celle du mouvement vertical du poids eft toujours quelque chofe par rapport à elle. Plusun Corps fe meut vite dans un Fluide > plus il en ren- contre de parties, dont la multitude eft un plus grand obfta- cle ; & au contraire plus un Corps fe meut vite für un Corps très-dur, moins il s’engage dans lesintervalles defes parties, &t par conféquent moins il en eft arrêté, 1700. V 154 HISTOBE DE L’ACADEMIE ROYALE SURV'EES CORPS EOUTT" NEA GRBENCE dans des Liqueurs. O N fçait affez qu’un Corps de même pefanteur fpéci- fique qu'un liquide où il eft plongé, y demeure en quelque endroit qu'il foit placé ; que s’il eft plus leger que le liquide , il furnage ayant une partie enfoncée plus ou moins grande, felon le rapport de fa pefanteur à celle du li- quide ; & qu’enfin s’il eft pluspefant, il va au fond. T'ous les Mathématiciens.ont démontré la néceflité de ces effets. Cela ne regarde que le lieu d’un Corps dans un Liquide, mais la fituation de ce Corps dans ce même Liquide ef dif- férente du lieu quil y occupe. Une Sphere , par exemple ; qui y feroit un demi-tour fur fon centre , y changeroit de fi- tuation , parce que fa partie fupérieure deviendroit l'infé- rieure , mais elle ne changeroït pas de lieu. Suppofons que l’on plonge dans l’eau un Corps compofé de deux parties différentes, l’une plus légere ; l'autre plus pe- fante que l’eau , par exemple, de bois & de plomb ; fuppo- fons aufli la quantité de ces deux parties tellement propor- tionnée que le tout enfemble pefe précifément autant qu'un volume d’eau égal. Imaginons enfin que ce Corps foit fphé- rique. Il eft clair que plus de la moitié de la Sphere fera de bois. Ce Corps aura deux centres. L’un fon centre de figure & d’étendue , c’eft-à-dire,le point du milieu de la Sphere. L'autre fon centre de gravité, c’eft-à- dire , le point d’un dia- metre horifontal , par lequelil le faudroit fufpendre , afin que les deux parties de bois & de plomb , inégalement pefantes, demeuraffent en équilibre. Or on fçait que pour les mettre en équilibre , il faudroit que le point d'appui, ou , ce quieft la même chofe, le centre de gravité, füt plus proche de la plus pefante. Par conféquent le centre de gravité de cette Sphere , hétérogéne en fes parties , feroit plus vers le côté du plomb, & ne feroit pas le même point que le centre de la Figure, a LT 5 PRET re nc mr DES SCIENCES: 155 Cette Sphere étant plongée dans l’eau, de maniere que fon centre de gravité foit en enhaut, on demande ce qui arrivera. Il eft certain qu'un corps qui a la liberté de fe mouvoir, ne peut demeurer en repos , jufqu'à ce que fon centre de gravité foit defcendu le plus bas qu'il eft poffible. TI faut donc que le centre de gravité de la Sphere , c’eft-à-dire, là Sphere elle-même defcende, puifqu’elle le peut. D'un autre côté, puifqu’elle eft de la même pefanteur fpé: cifique que l’eau , elle ne doitnimonter, ni defcendre , mais demeurer précifément au même endroit oùelle a été placée. Pour concilier ces deux chofes , M. Borelli dans fon ex- cellent Traité du Mouvement des Animaux, Part. 1. Chap. 23. Prop. 207. décide que la Sphere tournera fur fon centre de figure, jufqu'a ce que fon centre de gravité foit defcen: du dans la partie inférieure , & regarde la terre, moyennant quoi le Corps change de fituation ; & non pas de lieu. Cette décifion d’un fi grand Auteur, & fi convaincante en apparence, na pas cependant femblé jufte à M. Parent , & ilna pas craint d'avancer ce Paradoxe ; Que le Corps malgré l'égalité de fa pefanteur fpécifique avec celle dé - l'eau ; defcendroit jufqu’à un certain point; & , ce qui paroi- tra encore plus furprenant, que la Figure du Corps monte: roit , tandis que le Corps même defcendroit. Que deux forces égales, & qui agiffent par des lignes pa- _salléles l’une à l'autre; tirentune Verge chacune par ün bout en deux fens oppofés ; il eft conflant, puifqu’on ne fippofe aucun point fixe de cette. Verge, qu'elle tourheta für üh de fesipoints ; &c: que ce point féra celui du'milieu, pârcë que les deux forces oppofées font égales. Si élles ne l'éfoiént pas, elle tourneroit fur un-autre point, d'autant plus proche de laplus grande force, que cette force-plus grande ee? soit davantage:par rapport à l’autre. :°1°11 24021001 9432 # La Sphere plongée dans l'eau eftpouffée en ernbas par propre pefanteur , dont toute l’aîtionteft réunie dans le cen- tre de’ gravité. Elle.eft en même tems pouffée! en enhaut par la pefanteur d'un volume-d'eau égal àelle c: qui tend Vi 156 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE toujours à defcendre & à prendre fa place, & route l'aétion de ce volume d’eau égal doit être conçûe comme réunie dans le centre de figure de la Sphere , car il s’agit là de l’'é- tendue du volume , & c’eft ce qui détermine la quantité d’eau dont on confidére lation. Voilà deux forces oppofées qui agiflent parallélement, puifque ce font deux pefanteurs; elles font égales par la fuppofition , elles font appliquées à deux points différens pris fur un même diametre de la Sphere. Il faut donc que la Sphere tourne fur un point moyenentre ces deux , & qui en foit également éloigné. Comme le centre de gravité de la Sphere avoit éré mis en enhaut , elle ne peüt tourner fur ce point moyen, quele centre de gravité ne defcende ; & enfin quand il eft defcen- du jufqu’à la ligne verticale , fon aétion ceffe parce qu'il ne peut plus defcendre, & la Sphere s’arrête. D'un autre côté , il eft vifible que dans cette difpofition, le centre de la figure qui étoit au-deffous du centre de gra- vité , a monté , & de-là M. Parent conclut, que le Corps qui fe confidére comme entiérement ramaffé dans fon cen- tre de gravité , eft defcendu, tandis que la figure de ce mê- me Corps eft montée. La figure Sphérique n’a été prife ici que pour exemple, & il eft clair que le même raifonnement fublifte avec toute autre figure. Il fubfifte encore quand les deux forces font inégales. Si le poids du Corps hétérogéne plongé dans l'eau , eft plus grand que celui d’un volume d’eau égal, & que fon cen- tre de gravité ait été misen enhaut , non feulementce Corps doit s’enfoncer dans le Liquide , mais il doit faire un demi- tour en s’enfonçant ; parce qu'il faut que fon centre de gra- vité, defcende.le plus bas qu'il eft poflible, après quoi le Corps continue de s’enfoncer , mais fans tournoyer davan- tage. Le tournoyement fe-fait fur un point qui n’eft pas éga- lement éloigné dés centres dé gravité & de figure, parce que les deux forces qui.y font appliquées , font inégales. De-là vient que les Chats, & plufieuts Animaux du mê- me genre ,.comme les Fouines, Putois, Renards, Tigres, —- Lg LV Ce ‘matter 2 =, DES SCIENCES. 157 &c. quand ils tombent d'un lieu élévé, tombent ordinaire. ment fur leurs pattes , quoiqu'ils les euffent d’abord en en- haut, & qu'ils dûffent par conféquent tomber fur la tête. Il ef bien für qu'ils ne pourroient pas par eux-mêmes fe ren- verfer ainfi en l'air, où ils n’ont aucun point fixe pour s'ap- puyer. Mais la crainte dont ils font faifis leur fait courber l'é- pine du dos, de maniere que leurs entrailles font pouffées en enhaut, ils allongent en même tems la tête & les jam- bes vers le lieu d’où ils font tombés comme pour le retrou- ver, ce qui donne à ces parties une plus grande ation de lévier. Ainfi leur centre de gravité vient à être différent du centre de figure, & placé au-deflus, d'où il s'enfuit par la démonftration de M. Parent, que ces Animaux doivent faire un demi-tour en l'air, & retourner leurs pattes en embas, ce qui leur fauve prefque toujours la vis. La plus fine con- noïflance de la Méchanique ne feroit pas mieux en cette occafion, que ce que fait un fentiment de peur, confus & aveugle. Si le poids du Corps eft moindre que celui de l’eau, il ne fera fubmergé qu'en partie, & il n’y faut confidérer pour centre de figure que celui de la partie fubmergée, parce qu'elle eft la feule qui éprouve & qui recoive l’action de l'eau ; l'une des deux forces inégales & oppoftes. Pour le centre de gravité, c’eft toujours celui du Corps entier, par- ce que c’eft toujours toute la pefanteur qui agit. Après cela, il eft aifé de juger par ce qui a été dit, comment fe fera le tournoyement. Tandis que le Corps fait fon demi-tour, filon fuppofele centre de tournoyement immobile, comme il l’eft naturel. lement & par lui-même, la partie fubinergée dans l’eau fera toujours égale , fi ce Corps eftune Sphere; mais s'ileft de toute autre figure, laétion du tournoyement fera que cette partie fubmergée fera tantôt plus grande, tantôt plus petite. D'un autre côté, l'équilibre du Corps avec un certain volu- me d’eau déterminé demande que fa partie fubmergée en occupe toujours la place , qui eft toujours de la même gran- deur, Ainfi Paétion du tournoyement paroît contraire à ce Vi #8 HisTOirE DE L'ACADEMIE ROYALE que veut l'équilibre ; mais ce qui accorde tout, c’eft que quand par le tournoyement la partie fubmergée eft trop petite, cet équilibre fair que le Corps s’enfonce davantage, & que par conféquent fon centre de tournoyement defcend en ligne verticale. Si la partie fubmergée eft trop grande, le Corps s’éléve , & fon centre de tournoyement aufli. : Ileft manifefte que dans l’un ou l’autre de ces mouvemens, le centre de la figure totale monte ou defcend en ligne droite , & en même tems tourne circulairement , & par con- féquent doit décrire une Cycloïde, car elle fe forme du mouvement direét & du circulaire , mêlés de cette forte. À ces preuves qui font affez voir que dans tous ces cas les Corps tournent , non fur leur centre de figure, mais fur un point moyen entre ce centre , & celui de gravité, M. Parent y en a ajouté une aufli convaincante, mais qui tom- be dans une plus grande difcuflion de Géométrie. Le prin- cipe eft, que le centre de gravité commun, tant à la Li- queur qu'au Corps fubmergé, doit toujours être le plus bas qu’il foi poffible , après quoi M. Parent démontre qu’il n’a cette fituation que dans fon Syftême. Il trouve par les mêmes voies quelle fituation doit pren- dre le Corps hétérogéne plongé en même tems dans plu- fieurs Liqueurs dont les pefanteurs font différentes. Les Principes ne changent point , mais application en devient plus difficile. Les différentes figures qu’on peut fuppofer à ce Corps, jettent aufli ce Problème dans un plus grand détail de Géo métrie. Archimede l’a réfolu pour le Paraboloïde. droit fitué feulement dans une Liqueur. Mais M. Parent.le ré- fout pour tous les Conoïdes fitués en tant de Liqueurs qu'on voudra. La maniere dont on voit que M. Parent a traité les diffé- sens fujets que nous avons rapportés, peut donner quelque ® J7 , S A A o o idée légere d’un Livre qu'il publia cette année, intitulé, Elémens de Méchanique & de Phyfique , où l’on donne gtomé- seront DES SCIENCES. 159 triquement les Principes du Choc & des Equilibres entre toutes Jortes de Corps. Il eft aifé d'imaginer combien eft vafte la Science du Mouvement, conduite par tous les cas diffé- rens , & par toutes les combinaifons dont cette maticre ef fufceptible, & c’eft-là ce que M. Parent a embrafé. De- puis que l’on eft tombé dans cette penfée fi naturelle, & cependant peu commune jufqu'au dernier fiécle , que le Mouvement fait tout, les Philofophes en ont étudié avec foin les Principes, les Loix & les divers accidens; mais comme ils ont eu des vües différentes, & peut-être jufqu’à préfent bornées, onne peut trop s’appliquer , ou à les con- cilier toutes, & à les réduire à l'uniformité > Où à les aug- menter , & à les étendre. Ten eee ei : M. Jaugeon continuant la Defcription de l'Art de lIm- -preffion , a parlé à diverfes reprifes de la Fonte des Carac- téres, des matiéres différentes far lefquelles on a écrit ow gravé , de la maniere dont on frappe les Monnoyes, & les Médailles. Il a commencé l’Hifloire des Alphabets de dif : férenres Langues , & a fait voir PAlphabet Hétrufque, tiré d'Infcriptions ou de Monumens Anciens. M. des Billettes outre la Defcription de quelques Portes. d'Eclufes , a donné celle de l'Art de faire des Epingles, & y a fait remarquer des Pratiques ingénieufes & délicates > qu relevent bien la petiteffe apparente de l'objet. Il fe répandit dans cette année un bruit que le Mouve- ment perpétuel étoit trouvé. On le voyoit dans un lieu où: la difhculté de la chofe n'étoit pas bien connue; où l’in- vention n'étoit pas chicanée, comme elle l’eût été dans: une Académie, où un air de Science réuflit quelquefois , & l'air de confiance prefque toujours. M. Sauveur expliqua Pinvention à l'Académie, qui en fut fort furprife. Peu de tems après l’éclat que fit cette découverte > le mouvement perpétuel difparut avec fon Auteur. À cette occafion M. 160 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE Parent en prouva l’impoflibilité par cette feule raifon, que toutes les parties d’une Machine ont un centre de gravité commun, que pendant qu’elles tournent autour d'un Axe ou d’un point fixe, quel qu'il foit, ce centre de gravité com- mun fe trouve néceffairement dans une fituation, où il eft plus bas qu'en toute autre , & qu’aufli-tôt tout doit s'arrêter, Car puifqu'il y a un point où la force que plufeurs Corps ont pour defcendre , eft réunie route entiére , dès que ce point ne peut plus defcendre, il faut que tous ces Corps demeurent immobiles. M. Parent détermina en général quel devoit être ce point de repos inévitable pour toutes les Machines poflibles. MACHINE SNO UNE N°T TOM approuvées par P Académie en 1700, I. TN Claveffin brifé qui fe peut tranfporter très-facile- ment par-tout où l'on veut, & qui malgré cela fe défaccorde plus difficilement que les Claveflins ordinaires, ii 6 MaAcuinE pour fcier & polir des Marbres, inventée par M. de Fonsjean, Avocat en Parlement. TITI. Deux Piftolets d’Arçon dont on peut faire fur le champ une Carabine , de l’Invention de M. Ifaac de la Chaumette. IV. MACHINE pour relever des Vaiffeaux fubmergés , inven- tée par M. le Baron de Redingues. V. MacHine Hydraulique de M. Adrien de Cordemoy, Prieur de Saint Jacques. : ELOGE AP) A La | . DES SCIENCES xér ELOGE DE FEU MONSIEUR TAUVRY. ANIEL TAUVRY, né en 1669, étoit fils d'Ambroife Tauvry Médecin de la Ville de Laval. Son pere fut {on Précepteur pour le Latin & pour la Philofophie ,. & il trouva dans fon Difciple de fi heureufes difpofitions, qu’il lui fit foutenir problématiquement une Théfe de Logique à l’âge de neufans & demi. La Théfe générale de Phi- lofophie , problématique aufli, vint un an après. Enfuite M. Tauvry le pere, qui étoit Médecin de l'Hôpital de Laval, enfeigna en même tems à fon fils la Théorie de la Médeci- ne, & la Pratique fur les Malades de cet Hôpital. Mais pour Pinftruire davantage dans cette Profeflion , il l’envoya à Pa- ris , âgé de 13 ans, & deux ans après le jeune Médecin fut jugé digne par l'Univerfité d'Angers d'y être recû Doéteur. Il revint à Paris , où il s’appliqua pendant 3 ans à l’Anato- mie , & ce fut alors qu'il donna au Publicfon Anatomie rai- fonnée , âgé de 18 ans; car on ne peut s'empêcher de mar- quer toujours exaétement des dates fi fingulieres. De l’Etu- de de lAnatomie, il paffa à celle des Remédes, & com- pofa fon Traité des Médicamens vers l’âge de 21 an. Quel- que tems après fur les défenfes que le Roi fit aux Médecins Etrangers de pratiquer , il fe préfenta à la Faculté de Paris, & y fut recûü Doéteur. Il en redoubla fon ardeur pour une Profeflion qu'il avoit embraffée prefque dès le berceau, & comme il avoit l’efprit fertile en réfléxions , & que fes Lec- tures & fes Expériences lui en fournifloient inceflamment des fujets , il compofa fa Nouvelle Pratique des Maladies aiguës , & de toutes celles qui dépendent de la fermentation des Liqueurs. Cet Ouvrage parut en 1698. Je le connus en ce tems-là & conçüs beaucoup d’efime: pour lui. J’avois l'honneur d'être de l’Académie des Scien- ces , & Jétois en droit de nommer un Eléve. Je crus ne pouvoir faire un meilleur préfent à la Compagnie que M. 1700, 162 HIisToiRE DE L'ACADEMIÉ ROYALE Tauvry , & quoique ma nomination ne füt pas aflez honoz rable pour lui, l'envie qu'il avoit d’entrer dans cet illuftre Corps, l’empêcha d’être fi délicat fur la maniére d’y entrer, En 1699, le Roi honora l’Académie d’un nouveau Ré- glement, & nomma en même tems plufieurs Académiciens ” nouveaux; on avança les Anciens. Ce fut alors-que M. Tauvry paffa de la place d’Eléve à celle d'Afocic. Auffi-tôt après il sengagea contre M, Mery dans la fa: meufe Difpute de la Circulation du Sang dans le Fœtus; _& à cette occafion il fit fon Traité de la Génération & de le nourriture du Fœtus, qui fat publié en 1700. Cette Difpute contribua peut-être à la maladie dont il ef mort; car comme il avoit en tête un grand adverfaire, il fit de grands efforts de travail , & prit beaucoup fur fon fom- meil, pour étudier à fond la matiére dont il s’agifloit, &c pour compofer fon Livre , fans interrompre cependant la pratique de fa Profeflion. | Quoi qu'il en foit, une difpofition naturelle qu'il avoit à être Afthmatique , augmenta vers le commencement de cette année, & il eft mort d’une Phtilie au mois de Février 1701, âgé de 31 an & demi. 1] paroït affez par tout ce qui vient d'être rapporté de luis qu'il devoit avoir l’efprit extrêmement vif & pénétrant. A la grande connoiffance qu’il avoit de Anatomie , il joignit le talent d'imaginer heureufement les ufages des Struéturess & en général il avoit le don du Syftême. Il y a beaucoup d'apparence qu'il auroit brillé dans l'exercice de la Méde-= cine ; quoiqu'il n'eût ni proteétion , ni cabale , ni art de fe faire valoir; fon Mérite commençoit déja à lui donner en- trée dans plufeurs Maifons confidérables, où je fuistémoin qu'il a été fort regretté, Sa Place d’Académicien Affocié a été remplie par M. Lit: tre, qui étoit auparavant Eléve de M. du Hamel, & la Pla- ce d'Eléve de M. du Hamel a été remplie par M. du Vers ney Chirurgien du Roi, frere de M, du Verney Académis gien Penfonnaire. FIN, Rod ok gd TS Dry LD QE PH TT TN FR Ce MEMOIRES MATHEMATIOUE PRUDENT, O UE, DIRES UD ES REGISTRES de l'Académie Royale des Sciences. DE L'ANNEE M. DCC. ANALYSE DE LYPECACUANHA. Par M Boucrpuc. ExaMEN des vertus & différences desmé- Man dicamens purgatifs, eft à monfens, ce quily à a de plus myferieux & de plus néceffaire dans toute la Phyfique expérimentale ; ce fujet a ] fait jufqu'ici l'attention de tous nos Sçavans ; je Pai pris ici pour mon partage, heureux, fi je puis en fuivant leurs lumiéres , ajouter quelque chofe à ce qu’ils nous en 1700. - 2 MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE ROYALE ont laiffé ; & pour donner quelque chofe à la nouveauté, jai cru pouvoir d'abord commencer par la racine d'Ypeca- cuanha ; je tâcherai de découvrir à quel principe, ou à quelle: partie de ce mixte on peut attribuer fa vertu fpécifique , au- tant que je l'aurai pû connoître par l'induftrie de l'Art, & par les expériences que j'en aurai faites. L'on convient que c'eft un reméde divin pour les dé- voyemens & flux difentériques; qu'il eft en même-tems l'émétique , cathartique , & adfringent ; que cette racine a été connue pour telle par quelques-uns de nos Moder- nes , mais quils ne nous en ont que très-fuccinétement donné la forme & les ufages ; qu’elle a eu chez nous le même fort que quantité d'autres bons remédes , qu’en un: mot elle a demeuré long-tems inutile , foit par la négli- gence ou par l’incrédulité de quelques-uns , qui non-feu- lement ont refufé leur créance à fes merveilleux effets. mais qui ont encore negligé de s’en inftruire par de fages expériences ; foit par la prévention de quelques autres, qui mefurant les forces de la nature par l'étendue de leurs lumiéres , n'ont pù s’imaginer qu'il y eût d’autres bons re- médes que ceux dont ils s’étoient acquis la connoiffance ; foit enfin par le trop de fagefle , ou plutôt par la timidité de certains Auteurs, qui quoique bien inftruits des vertus. de cette racine , n’ont pas eu le courage de s'en fervir , ne pouvant concevoir qu’un reméde pütagir avec füreré quand il agitavec violence. - Ces raifons qui ont fans doute tenu fi fong-tems ce reméde en oubli, aufli-bien que plufieurs autres dont nous nous fervons avec le même fuccès, n’ont pas empêché que quelques-uns plus entreprenans n’en ayent tenté les épreuves , & ne nous en ayent frayé le chemin pour en faire lufage qu’on en fait tous les jours à l'avantage du pu- blic : ce qui a donné à plufieurs occafion de dire , que pour la perfé@tion de ce grand Art , qui a pour fon but principal la confervation de la vie des hommes, la prévention & la négligence font toujours très-nuilibles à fon progrès , & que fouvent une raifonnable hardiefle jointe à une con- | 1 DES SCIENCES 3 noiffance médiocre , eft plus utile pour les découvertes ; qu'une fcience profonde accompagnée de trop de lenteur & de timidité. N'étant plus queftion de douter de la vertu de lYpeca- Cuanha , & laiffant aux Botaniftes le foin de faire la def. cription de cette Plante, je produirai feulement ce que j'ai reconnu de la nature de cette racine ; & pour tenir quelque ordre en ceci, je dirai d’abord que nous en con- noiflons aujourd’hui de deux fortes, un gris; & un autre brun , tirant à l'extérieur fur le noir, que ce gris eft moins violent dans fes effets que le brun, que ce dernier eft pour- tant plus certain dans fa réuflite que le gris , par plufieurs expériences qu'on en à faites, & dont je me füis aflüré moi- même ; cependant comme en fait de reméde on préfere pour l'ordinaire les doux aux violens ; lufage à donné la Préférence à l’'Ypecacuanha gris , qu’on employe plus fré- quemment que le brun. J'ajouterai que depuis que ces deux racines font en ufa- ge, l'on nous en a apporté une troifiéme , blanche , peu femblable aux deux autres , qu’on n’a pas laiflé de nous vou- loir faire pañler pour une autre Ypecacuanha & de fait aujourd'hui on l'appelle Ypecacuanha blanc , dont on fe fert dans les mêmes maladies pour les femmes enceintes, & pour les petits enfans, parce que pour l'ordinaire il fait fort peu d’efet. J'ai d’abord travaillé fur le gris , dans le deffein de con- tinuer fur les deux autres ; j'en ai fait l’Analyfe en deux ma- niéres , & par la voie de la difillation à l'ordinaire par la Cornue au feu du reverbere clos & gradue, & par celle d'extraëtion avec des diffolvans différens > propres & con- venables. Par la difüllation je n’en ai tiré d’abord qu'un flegme , qu'un efprit acide & qu’un peu d’huile , & de la mafle noire reflée dans la cornue & calcinée à feu très-violent ;Jenai retiré très-peu de fel fixe, Le peu de lumiére que j'ai retiré de cette Analyfe , ne mérite pas que j’entre dans un plus ennuyeux détail des Ai 4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE, proportions & effets de toutes les parties qu’elle m'a pro- duites ; j’aurois même bien pü me difpenfer de la faire, prévenu qu'elle eft aflez ne Lie nous faire véritable- ment connoître la nature des Mixtes, que même elle ne nous préfente que le Mixte détruit ; cependant j'ai cru ne pas devoir la négliger, non-feulement parce qu'elle eft d’ufage depuis très long-tems , mais aufi parce qu'elle ne hiffe pas de nous développer & de nous démontrer les pro- portions de leurs parties féparées. Pour donc mieux reconnoître la confiitution de cette racine , J'ai cru devoir procéder par la voie de l'extraétion qui püt me donner un abregé ou du moins quelque partie effentielle de ce Mixte, dans laquelle je puffe véritablement affeoir fa vertu fpécifique & fon principal caraétére. J'ai commencé cette extraétion avec l’efprit de vin très- redtifié , J'en ai tiré par ce moyen fes foulfres ou fes parties réfineufes au poids de dix dragmes, de huit onces de ra- cine que J'avois employées ; le réfidu entiérement dépouillé de fes parties réfineufes & bien féché, ne pefoit plus que fix onces , dont je n'ai pas laiffé de tirer encore avec l'eau de pluie diftillée , deux onces d'extrait affez folide , qui n’étoit que les parties falines de la racine , accompagnées de quelques parties terreftres qui en font inféparables : cet extrait étoit peu lié dans fes parties , parce qu'il avoit été féparé de fes parties réfineufes par l’opération précédente. J'ai cru devoir me fervir de cette double extraétion Pune faite par Pefprit de vin , l'autre par l'eau , très-per- fuadé que la vertu de cette racine ne réfidoit pas dans fa réfine feule, mais encore dans fes parties falines, fur let- quelles l'efprit de vin n’avoit pù mordre , & dont l’eau feule eft le propre diffolvant. Ce dernier réfidu ou cadavre dépouillé tant de fes parties. réfineufes , que de fes parties falines, ne pefoit plus que quatre onces. Il paroït par ces deux différentes extraétions que cette racine contient beaucoup plus de parties falines , que de parties réfineufes ; indépendamment de quelques parties. DES SCIENCES $ terreftres, d’où j'ai inféré que fans le fecours de Pefprit de vin, je pourrois par l’eau feule tirer de cette racine, & les parties falines , & les parties réfineufes, parce que les parties falines prédominant fur les réfineufes , les premieres pourroient attenuer les derniéres, les détacher , les fondre & les réfoudre, pour fe les approprier , & n’en faire qu'un Corps, c’eft-à-dire , un Corps contenant & les parties fali- nes , & les parties réfineufes. Cela eft conforme à l'expérience , puifque nous fçavons que c’eft le propre des fels de difloudre les foulfres, & l'épreuve que j'en ai faite en cette occafion a prouvé mon raïfonnement ; puifqu’avec la feule eau de pluie & pareille quantité de la même racine, j'en ai tiré trois onces & de- mie d’extrait aflez folide , autrement lié & uni dans fes parties que le précédent, & que du réfidu qui ne pefoit plus que cinq onces bien defféché & dont l’eau ne pouvoit plus rien tirer , je n'ai retiré par l’efprit de vin qu’une dragme d'une efpéce de réfine. Tout ce travail & toutes ces obfervations auroïent peu de mérite, fi elles n’étoïent fuivies de quelques expérien- ces fur les effets particuliers de chacune de ces parties; je n'entens point parler de celles qui procédent de la diftil- lation ; nous avons plus d’une preuve, qu'aucune de ces fortes de parties, qu'abufivement on nomme principes, ne reriennent rien des vertus du Mixte d’où on les a tirées : il n'en eft pas de même de celles que nous donnent les dif- férentes extraétions ; nous fçavons que les produits qui en réfultent , renferment comme en abregé tous les principes aëtifs d’un Mixte. J'efpére avoir occafion d’en faire quelques expériences entre ci & le tems que j'aurai à produire mes faits & mes opérations fur l’Ypecacuanha brun , dont j'informerai la Compagnie. A iÿ 1700. 16 janvier. 6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE OBSERVATION DU BAROMETRE, du Thermomètre ; © de la quantité d'eau de pluie &r de neige fondue qui ef} tombée à Paris dans l'Obférvatoire Royal pen- dant l'année 1699. Par M. DE La Hire. Ë Es obfervations de la quantité d’eau de pluie qui tom- be à l'Obfervatoire , ont été faites de la même manié- re que celles des années précédentes. On a placé pour cet effet dans la T'our découverte un vaiffeau de fer blanc, qui a quatre pieds de fuperfcie , & qui a des rebords tout autour de 6 pouces de hauteur. Ce vaiffeau a un peu de pente vers l'un de fes Angles, où il y a une petite ouverture avec un bout de tuyau qui conduit toute l’eau qui tombe dans ce vaiffeau, dans une cruche qu’on place au-deffous ; & aufli-tot quil a plû , on prend un très-grand foin de mefurer exactement toute l’eau qui s'eft amaflée dans la cruche , ce qu'on écrit dans un Repiftre particulier. Cette mefure fe fait dans un petit vafe de figure cubique , qui a fon côté de 3 pouces, enforte que 32 lignes de hauteur d’eau dans ce petit vafe , valent une demi-ligne de hauteur fur la fuperficie du grand vaiffeau de fer blanc: c’eft poui- quoi on a tracé autour du bord d’en haut de ce petit vafe cubique , qui n’eft point fermé par deflus, une ligne à 4 lignes de diflance du bord , afin qu’en rempliffant ce petit vafe jufqu'à la hauteur de cette ligne , on ait la valeur d'une demi-ligne de hauteur d’eau qui eft tom- bée. Voici Pétat de ce qui eft tombé dans chaque mois de cette année. Lignes. | Lignes. Janvier II 2 | Avril 36 + Février 11 : | Mai 22 L Mars 11 + | Juin 29 : DES SCIENCES 7 Lignes. Lignes. Juillet 11 | O&obre 12 = Août 18 + | Novembre 9 2 Septembre 35 Décembre 15 _ La fomme de la hauteur de l’eau qui eft tombée pendant toute l’année , eft de 224 1. + ou de 18 pouces 8 1. +. Quoique cette année ait paru extrémement féche , on voit pourtant que la quantité d’eau de pluie n’eft que très- peu moindre que ce qu'il en tombe dans les années moyen- nes : mais il faut remarquer qu'ordinairement les plus grandes pluies arrivent dans les mois de Juillet & d’Août; au lieu que cette année elles font arrivées dans les mois d'Avril , Mai , Juin & Septembre, & que les plus grandes n'ont pas pañlé 36 lignes en un mois, ce qui eft peu en com- _ paraifon de ce qu'il en tombe affez fouvent en Eté. Mais enfin les trois premiers mois , & les trois derniers de cette: année tout enfemble n’en ont donné qu'à peu près autant que les mois d'Avril & de Septembre enfemble. On peut enfin remarquer que les pluies les plus abondantes de cette année font arrivées en un même jour, & qu’elles n’ont pas été continuelles , & qu'il s'eft pañlé des intervalles de tems fort confidérables fans qu'il ait plû. Pour le Barométre qui eft placé à la hauteur de la gran- de fale de FObfervatoire, & à 20 toifes à peu près au-def- fus de la riviére , la plus grande hauteur du mercure n’y à été que de 28 pouces 3 lignes le 21 Novembre & le 31 Dé- cembre ; & que fon plus grand abaïffement na été que: de 26 pouces 9 lignes le 14 Janvier & le 14 Décembre; & par conféquent la différence des hauteurs du mercure entre la plus grande & la moindre hauteur a été de 18 lignes. Le Thermométre dont je me fers pour faire les obfer- vations du chaud & du froid , eft placé dans la Tour Orien- tale de lObfervatoire , laquelle eft découverte en forte il eft à l’abri du vent , & que le Soleil ne donne jamais fur la boule ni fur le tuyau. Toutes les obfervations que j'en fais chaque jour font un peu avant le lever du Soleil , 8 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qui eft le tems où l'air eft ordinairement le plus froid: J'ai fait des obfervations fur ce Thermométre pour déter- miner fa moyenne hauteur, & après l'avoir laiffé quelques jours dans le fond de la cave de l'Obfervatoire, j'ai trou- vé que l’efprit de vin y étoit demeuré à la hauteur de 38 parties , ce que Je prens pour une hauteur moyenne , en {orte. que lorfqu’il a cette hauteur dans l'endroit où il eft expofé , j'eftime que la température de l'air eft entre le froid & le chaud. J’ai trouvé que pendant cette année de- puis le premier jour de Janvier, jufqu’au cinquiéme de Juin il n'eft arrivé que peu de changement dans la hauteur de la liqueur, & que ces deux jours elle éroit la même de 42 à 43 parties, & qu'il n’a fait que trèspeu de gelée, & feulement dansle commencement de Février , le Thermo- métre n'étant pas defcendu plus bas que de 29 parties+, qui eft ordinairement le tems où il fait le plus grand froid , comme le plus grand chaud arrive au commence- ment de Juillet. Mais le 11 Décembre le Thermométre eft defcendu jufqu’à 2$ parties +, qui a été le plus froid de l'année ; & le 25 Juillet quiaété le plus chaud ; le Ther- mométre eft monté à 63 parties+, d'ou l’on voit que la chaleur de l'Eté comparée à l’état moyen de l'air a été près du double du froid par rapport à ce même état moyen, quoique l’obfervation de la chaleur de l'air n’ait été faire qu'avant le lever du Soleil. J'ai aufi obfervé le 23 jour d'O&tobre la déclinaifon de l'aiguille aimantée de 8° 10° dansle même lieu & avec la même aiguille que J'ai accoûtumé de l'obferver. Cette aiguille a 8 pouces de longueur , & eft une des plus excel- lentes qui ayent été faites; mais quoiqu’elle foit fufpendue très-légérement , je ne trouve pas dans les obfervations des années de fuite une même progreflion de déclinaifon , foit que la déclinaifon ne fuive pas un mouvement égal, foit qu'il y ait quelqu’autre caufe d'irrégularité qui peut provenir aufli de l’obfervation , quoique j y apporte toutes les précautions dont je fuis capable , maisil eft toujours diffi- cile d'obferver les minutes fur un inftrument dont le degré n'eft DES SCIENCES: 9 n'eft que d'une ligne tout au plus, & il fera beaucoup plus dificile de les obferver , lorfque le degré n’aura qu'une de- -mi-ligne , comme font ceux des Bouflolles ordinaires de trois ou quatre pouces de diamétre. Tout ce qu'on peut faire dans ce cas, c’eft de prendre une longue fuite d'Ob- férvations, comme de dix ou douze années , faites avec la même aiguille & dans le même lieu, & divifer la différen- ce par le nombre des années , encore il faudroit être afluré d’ailleurs que {à déclinaifon n'iroit pas en diminuant ou en augmentant. Exemple. A la fin de l’année 1 686. J'ai trouvé que la déclinaifon de l'aiguille aimantée étoit de 4° 30 vers T'Ouett, & qu’à la fin de l'année derniére 16 99. elle étoit de 8° 10'; & par conféquent la différence a été de 3° 40, Où 220 pour treize années, ce qui donne pour chaque an- née 17 de mouvement du Nord vers l'Oueñ, SOLUTION D'UN PROBLEME Phyfico- Mathématique. Par M. Le MARQUIS DE L'HÔPITAL. PROBLEME T RoUveR dans un plan vertical la courbe E FM, 1700. danslaquellele Corps M defcendantlibrement jéC par rene fa propre pefanteur, la preffe dans toutes fes parties avee F'<1 une force égale à celle de fon poids : c'eft-à-dire, que le Corps pefant M étant arrivé en un point quelconque AZ de cette courbe, doit agir fur ce point felon la perpendicu- laire M Save la mémeforce, qu'il prefferoit une ligne ho- rifontale, fur laquelle il feroit placé. Ou, ce qui revient au même ; fi l’on fuppofe que HC foit la développée de la ligne courbe requife , en forte que le poids A, attaché à Pextrémité d'un fil qui entoure cette développée , décrive en defcendant cette ligne courbe; il faut que dans chaque 1700. B F16. Il. 10 MEMOIRES DE LACADEMIE ROYALE poñition du Corps M, il tende le fil développé A7 C avee la même force que s’il étoit fufpendu par ce fil. Soit la ligne horifontale 4 P , Axe de la courbe qui ait pour appliquées les verticales P A7: lorfque le Corps pefant AZ, eft defcendu de la hauteur P M, il acquiert une certaine vitefle, avec laquelle il fe mouvoit dans un plan horifontal autour du centre C, étant atraché à l'extrémité du fil CM, il tendroit ce fil avec une certaine force qu’on appelle centrifuge. Mais parce que le Corps M étant par- venu en M, fe meut dans un plan vertical , il s'enfuit qu'il tend le fil M C'avec cette force centrifuge, augmentée de Ja partie de fon poids qui agit fur le point A de cette cout- be, pour le poufler felon la perpendiculaire A5. Or on fçait par les Méchaniques, que fi l'on fuppofe que la partie conftante MR de la verticale P M prolongée , exprime le poids abfolu du Corps M, & que l’on tire R S perpendicu- laire fur MS, qui coupe à angles droits la courbe Cie M; la droite MS exprimera de combien le poids A agit fur le fil AC , pour le tirer vers S. Il ne refte donc plus qu'à trouver l’expreflion de la force centrifuge avec laquelle ce Corps tend le fil MC, afin de réduire cette Queftion à la pure Géométrie. Pour le faire, j'ai befoin du Lemme qui fuit. LEMME. Siun Corps A fe meut d’un mouvement uniforme dans une circonférence qui ait pour centre le point C, & pour rayon la ligne CM, avec une viteffe égale à celle qu'il au- . roit acquife, en tombant de la hauteur P M; je dis que fa force centrifuge fera à celle de fa pefanteur, comme le double de la hauteur P M eft au rayon C M. C’eft un principe recçû en Phyfique , que tout Corpstend à fe mouvoir en ligne droite; de forte que file fil CM fe rompoit, le Corps M au lieu de fuivre fon chemin dans Ia circonférence , fe mouveroit dans la même direétion où ik fe trouveroitalors, c’eft-à-dire, felon latangente AT, Sup- DES SCIENCES 11 pofons à préfent que le Corps M parcouré fur cette tangen- te la partie AL dans un inftant > Par où j'entends une par- tie infiniment petire de tems; il eft vifible que dans le mé- me infiant il auroit parcouru fur la circonférence un Arc MAN égal à M L. Que l'on joigne AV L, & que l'on mene NO paralléle à MT, il s’enfaivra à caufe de l’infinie peti- tefle de l'Arc MN, que la ligne NO peut être prife pour cet Arc, qui par la fuppoñition eft égal à la droite M L; & qu'ainfi V L peut être regardée comme paralléle & égale à la partie AO du diamétre MK. Or par la propriété du cercle MO— ere & en mettant pour O !V l'Arc M NW, & pour O K, le diamétre AK , on trouvera que MO, ou NL, eft égale au quarré de l'Arc MN appliqué au diamé- tre MK. D'où l’on voit que la force centrifuge feroit par- Courir au Corps M, un efpace égal au quarré de l'Arc M N appliqué au diamétre AK , dans le même inftant que ce Corps parcourroit Arc 44 A; puifque par le moyen de cette force, le Corps 41 fe trouvant en L ; au lieu d’être en NV, elle lui auroit fait parcourir la ligne WL. Or Galilée a démontré que fi le Corps M fe mouvoit uniformement avec la vitefle qu’il a acquife en tombant de la hauteur P M, il parcourroit dans le même tems une ligne double de P M; mais ce même Corps M a par- Couru avec la même vitefle, & par un mouvement unifor- me, l'Arc M N : d'oùil eft clair que les tems feront entre Eux comme ces lignes, & qu'ainfi le tems que le Corps A1 employe à tomber de la hauteur P M » eft au tems qu'il em- ploye à parcourir l'Arc MN, comme > P M et a MAN. a Si donc l’on fait comme 4P M eft à MAN°, de même r MN? 02 n: . » PM Te Ce quatrième terme exprimera l’efpace que parcourroit le Corps A1 dans le premier inftant de fa chute (pendant lequel inftant il ParCoutroit aufli l'Arc MN ); puifque les efpaces parcourus à commencer dès Forigine de la chute, font entre eux comme les quarrés des rems. £ TE Fic. I. 52 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Cela pofé , il eft évident que la force centrifuge du Corps M doit être à celle de fa pefanteur, comme les efpaces que font parcourir ces deux forces à ce Corps dans le même inftant ; car quoique l'effort de la pefanteur du Corps 4 augmente continuellement pendant fa chute , & qu’au con- traire fa force centrifuge demeure toujours la même pen- dant tout le mouvement de ce Corps autour de la circonfé- rence , qui a pour centre le point C’, on ne laiffe pas néan- moins de confidérer la pefanteur comme agiffantuniforme- ment, & fans accroifflement dans le premier infant de la chute , à caufe de l'infinie petiteffe du tems. La force cen- trifuge du Corps M fera donc à celle de fa pefanteur, com- M N° me L V ou es eftà ns Ceftà-dire, comme le dou- ble de la hauteur P M eft au rayon CM. Ce qu'il falloit dé- MONIT EF. CoROLELAIRE. 44 Lo A TS PACRAER ve à De-h il eft évident que —57— exprime la force cen- trifuge avec laquelle le Corps M tendroit le fil C A, s’il fe mouvoit dans un plan horifontal autour du centre €, avec une vitefle égale à celle qu'il auroit acquife en tombant de la hauteur P M. Or l’on vient de prouver que cette force doit être augmentée de la droite M S , qui exprime de com- bien le poids du Corps M agit fur le fl CM, fuivant fa di- rettion MS, parce que le Corps fe meut dans un plan vertical. D’où il fuit que la queftion fe réduit à trouver une ligne courbe EF M, dans laquelle on ait toujours : PAIN + MS— MR. On doit fe reffouvenir que la droite conftante MR ef prife fur l’appliquée P M prolon- gée, & qu’elle exprime le poids abfolu du Corps 41. SIOUD UT I'OÏN: Ayant nommé la conftante MR, a; les indéterminées AP,x; PM,y; lArc de la courbeEFM,v; on aura DES SCIENCES 13: PpouMK=dx, Km—dy, Mm=dv, & (enpre- nant dv pour conftante ) M C— = ; felon PArt. 70. du Livre des Infiniment petits. Or pour fatisfaire à la queftion, il faut que NT (es =) MS (=) — MR (a): MC du dy d'u d’où l’ontire 2 y ddx<+dydx=— du dy; &en divifant le DEMRE zy ddx+dydx dvd : tout par 2Vy, il vient y — 7» dont les in- tégrales donnent d x Vy=duv y—duv a; où l'on doit remarquer que je retranche la quantité conftante duV'a, parce que Mm(d ) étant lhypoténeufe du petit triangle rectangle MK m, duquel MK (dx) eft l’un des côtés , elle le doit furpañfer. Si l’on met dans cette équation pour du fa valeur y dx? 4 y°, on en tirera celle-ci dx LPS Quar li égrale eft sax —2y—2V ay = age; dont l'intégrale eft a x —2y—2Vay—2a x V 24Vay—aa, qui exprime la nature de la courbe cher- chée, qui fera par conféquent Géométrique , & dont l’on pourra trouver tous les points, en ne fe fervant que de cer- cles & de lignes droites. Puifqu’on adxVy—=dvv y—duva, oudx=du ——— d = 2e, on aura en prenant dv pour confiante dd x RATE ; a __ aVa 29 Vy à SN MC Suds )— VE ! adx aVy—avVa aE Mac MR = ? = = ae Vy DORE same “te: & partant cette courbe a la propriété qu'on demande. Si l’on mene la verticale ZF, & qu'on examine la na- ture de cette courbe, on verra, 1°. Qu’ayant pris 4B — +4, elle a fon origine au point B, où elle coupe cette verticale à angles droits. 2°. Qu’elle s’en écarte jufquesen E, en forte qu'ayant mené E D perpendiculaire fur 4 F, onaïit AD=—a,& ED —<{a; après quoi elle s’en approche jufqu'à ce qu’elle la coupe au point F, tel que 2 4 F— 3a—+av 5.3". Qu'elle “TE enfuite à l'infini, en s’éloi- gnant de plus en plus de fon Axe 4 P. De-là il fuit que le Bi Fee. III. 14 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Corps: M doit tomber de la hauteur 7B avant qu'il fe meu- ve dans la courbe B E F M, & que dans la portion BE, on a toujours IE — MS— MR: c'eftà-dire, quela partie du poids 4f qui agit fur les points de BE, doit être retranchée de la force centrifuge , pour avoir la force avec laquelle le Corps #Mtire le fil AC. Si lon prend fur 4 F la partie BG—AB, &fuw ED prolongée la partie E H — 24, les pointsG, H, feront à la développée, & généralement v 4 D.v P M::2P M MC. L’Arc BEF M= Et Vay—aa, & füppofant que P M{(y) devienne 4 D(a), on aura la por- tion BE=#4D. L’efpace BEFMCHGB renfermé entre la portion de courbe BEF M, fa dévéloppée GHC, & fes deux rayons BG, MC,=V 2av ay —aa.x vi ai LIX 9 10 X: YY 58 X 3° sX46x 10X6X Er "a Se VUS PRE re ner K LAVE Si au lieu d'exiger dans la queflion que la force avec la- quelle le Corps tend le fil AZC, foit toujours égale à celle de fa pefanteur abfolue , on demandoit qu'elle fût par- tout égale à la même ligne donnée 4, on trouveroit par un raifonnement femblable au précédent que l'équation dif- bb3V y adyV a « férentielle dx — — ‘ Vaaÿy—bby + 2bav ay—4 nature de la courbe cherchée. Si lon fait dans cette équarionb — 4, on retombe dans le cas qu’on vient d'expliquer en détail. Mais la conftruétion générale dépend de la quadrature de l'hyperbole ou de Finvention des Logarithmées , lorfque # eft moindre que a; & de la quadrature du cercle , lorfqu'eile eft plus grande. | Si l'on fait à = 0 , Péquation différentielle qui exprime cn général la nature de la courbe cherchée , fe changera . d . , : en ctlle-ci dx = ET A ; dont les intégrales donnent: ; exprimeroit la DES SCIENCES. 15 x— 2V ay— aa. Et par conféquent la courbe cherchée fera en ce cas une Parabole B M, qui aura pour Axe la verticale 4 G, pour fommet le point B difant de l’origine A des x dela droite 4B—a, & pour paramétre une li- gne quadruple de 4 B. D'où l’on voit que fi le Corps M étant mû horifontalement avec la vitefle acquife par fa chute de 4 en B, defcendlibrement dans l'air ; & qu'on le con- çoive attaché à un fil BG C; qui entoure la développée G C de la Parabole B M; la force avec laquelle il tirera le fil développé AC dans chaque potion, fera toujours égale à zero, ou nulle : c’eftà-dire , que la force centrifuge RER) avec laquelle il tend à s'éloigner du centre C dans Ja dire&tion € M, eft précifément égale à ce que fa pefanteur lui fait faire d'effort vers le centre C dans cette même direétion ; en forte que le Corps M doit fe mou- voir de la même maniére que s’il n’étoit attaché à aucun fil, & qu'il defcendit librement dans l'air. Or comme Ga- lilée a déja démontré d’une maniére très-différente de cel- le-ci, & reçûe de tous les Géométres, que le Corps M étant mû horifontalement avec une vitefle égale à celle qu'il auroït acquife par fa chute de la hauteur 4B, décri- roit dans l'air en defcendant par fa propre pefanteur cette même parabole B M, c’eft une preuve manifefte de la bon té de nos hypothéfes. Ce Problème a été propofé par M. Bernoulli, Profeffeur à Groningue, dans le fecond Tome des Supplémens des Actes de Leipfic, pag. 291. J'ai crû qu'il étoit à ‘propos d'en donner ici la folution dans toute fon étendue , parce qu’elle me paroït très-propre à faire fentir la néceflité de nos Méthodes, fans le fecours defquelles il feroit très-dif- ficile(pour ne pas dire impoflible ) d’en venir à bout. Comme les Démorftrations de tous les Théorêmes de M. Huguens touchant la force centrifuge, qui font à la fin de fon Horologium Oféihlarorium, dépendent du Lemme pré- cédent , & qu'on ne les trouve dans aucun endroit que je Eic. LI Fic. IV. Fic. II. & IV. 16 MremoiREs DE L’'ACADEMIE ROYALE fçache, je les mettrai ici en peu de mots. PRO POS SAONE Si M exprime la pefanteur du Corps A qui fe meut dans la circonférence qui a pour rayon € M, avec une vitefle égale à celle qu’il auroit acquife par fa chute de la hauteur P M;il eft clair par le Lemme que fa force centrifuge eft RTE ; d’oùil fuir que fi M P = ? C M la force centrifuge fera égale à celle de la pefanteur. C’eft le cinquiéme Théo- rême de M. Hugens. PHRADIPAOSAT ON; ci L Si l’on fuppofe de plus que le Corps W décrive la circon- férence qui a pour rayon D NW, avec une vitefle égale à celle qu'il auroit acquife en tombant de la hauteur © W; il eft clair par le Lemme que la force centrifuge du Corps NV eft auffi LÉ. Et par conféquent les forces centrifu- UN P q P N ges des Corps M, N, feront entre elles : : e, ce = ? d'où l’on voit que files Corps M, NW, font égaux, la for- ce centrifuge du Corps M fera à la force centrifuge du PM:2QN : - ba Corps W:: = = LT. C'eft-à-dire, en raifon compofée de la direête de 2 P Mà 2 O N, ou des quarrés de vitefles VPM,v 9 N, & dela réciproque des rayonsCM, D N. CFORR OT TANT RIE. CL Si les Corps M, N, qu'on fuppofe égaux, parcourent leurs circonférences en des rems égaux, leurs viteffes feront entre elles comme ces circonférences , ou comme leurs rayons. On aura donc en ce cas V PM V ON::CM DN, & par conféquent 2PM 20 N::CM. DN: D'où il fuit que PRET. CM DIN: c’eft-à-dire, que les C'HONDINE DES SCIENCES 17 les forces centrifuges font alors entre elles comme les rayons. COROLLAIRE IL. … Siles Corps M, N font Égaux , & leurs viteffes y PM, V © N,, auf égales ; il eft vifible que les forces centrifuges 2PÀT 20N ; Dr —_ feront entre elles comme D Nef à CM , C'eft: à-dire en raifon contraire des rayons, ou des diametres. CoOROLLAIRE III. Si les Corps M, N font égaux , & les rayons CM,DN aufli égaux, leurs forces centrifuges feront comme 2 P M eft à 2 ON, c'eft-à-dire, comme les quartés de leurs vi- tefles. CoOROLLAIRE 1 V. Siles Corps M, N étant égaux, leurs forces centrifuges font égales, on aura LT — 2<2 & par conféquent P 41. LN:ECMDN,&V P M.vV QN::v CM. VDN. Donc puifque les tems font entre gux en raifon compofée de la dire&te des efpaces parcourus, & de la reciproque des viteffes ; le tems qu'employe le Corps A fera à celui qu’em- ploye le Corps W:: Eu > ou VCM. 2 > uvVDN. C’eft-à-dire, en raifon foufdoublée des rayons. Ces quatre Corollaires répondent aux quatre premiers Théorêmes de M. Hugens. PROPOSITION LET Soit le Corps M attaché en par le fil 4 M, & que ce Corps foit mû, en forte qu'il décrive dans l'air la circonfé. rence qui a pour rayon CM: c'eft-à-dire, que le fil 4 M dé- crive la furface d’un cone droit > formée par la révolution de la draite 4 M autour del Axe 4 C placé verticalement, il eft vifible que l'on peut confidérer en cetétatle Corps M, -Comme étañt pouffé par deux forces : l'une horifontale , 1700. FiG. II. Fie. IV. 18 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE qui tend à l’éloigner du centre C, & qui eft fa force cen- trifuge ; l'autre qui tend à le poufler de haut en bas, & qui eft celle de fon poids. Or felon les principes des Méchani- ques ; puifque le Corps a pris fa fituation félon la diredion A M, il s'enfuit que la force de la pefanteur fera à la force centrifuge , comme C À eft à C M, & qu'ainfi la force cen- e heal Lo dl D FA 24 Li fi ra trifuge et — pa emme , en fuppofant que la vitefle du Corps A foit égale à celle qu'il auroit ac- quife en tombant de la hauteur P A7; d'où l'on tire P M FC Si donc l’on prend P A égale à la moitié de la 2 . troifiéme proportionnelle à C4, CM; il eft clair que la vitefle avec laquelle le Corps A7fe meut dans la circonfé- rence qui a pour rayon C M, eft précifément égale à celle qu'il auroit acquife en tombant de cette hauteur ; & qu'ainfi n ; - CM : cette vitefle s’exprimera par V PM= -=—. Or comme Ô V 2C À le tems s'exprime par l’efpace divifé par la viteffe, il s’en- 4 Ë P be AE fuit que le tems que le Corps M employe à parcourir la cir- q PORERD conférence entiere, s'exprime par —-V 2 C À, en fuppofant 2 ï que — exprime la raifon de la circonférence au rayon. CD RNOS oa TRES Si le Corps V attaché par le fil B NV au point B , fe meut d’un mouvement conique autour de la verticale B D; c’eft- à dire, que ce fil décrive la furface d’un cone droit, qui ait pour Axe la verticale B D':il eft vilible par ce qu’on vient de démontrer , que le tems que le Corps V employe à parcourir la circonférence qui a pour rayon D N s’expri- me par = V 2 B D. Il fera donc au tems que le Corps M employe à parcourir la circonférence qui a pour rayon CM::=V2BD.=vV2CA::VBD.V CA, c'eftà-dire, en raifon foufdoublée des hauteurs. C’eft le Théorême 8. de M. Hugens, dans lequel eft renfermé le 7. DES SCIENCES 19 CoROLLAIRE IL. Si l'on conçoit que le Corps M tombe d’une hauteur double de C À, la vitefle qu'il aura acquife par fa chute fe- ra V 2 CA, & le tems qu'il aura employé à tomber, fera FrG, IL CA Ps par conféquent ca , ou2V 2C À; puifqu'avec une telle viteffe uniforme , il auroit parcouru dans ce même tems une ligne quadruple de C4. Ce tems fera donc à celui que le Corps M employe à parcourir la circonférence qui a pour centre le point C::2V 2CA.©V 2C A::ar.c. c'eft- à-dire, comme le diametre eft à la circonférence. Or con- cevant que le rayon C M foit infiniment petit, la longueur A M du Pendule devient égale à la hauteur 4 C'; & par conféquent le tems qu'un Corps porté par un mouvement conique , employe à parcourir la plus petite de toutes les circonférences qu'il décrit autour de l’Axe vertical du co- ne, fera à celui qu'il employe à tomber d’une hauteur double de fa longueur , comme la circonférence d’un cer: cle eft à fon diametre. C’eft le Théorème o. CoOROLLAIRE III. SiBD —CM, & quele tems que le Corps M employe à faire un circuit autour de l'Axe 4 C foit.égal à celui du Corps M autour de l’Axe B D, il s’enfuit par le Corollaire premier , que C À doit être égaleà B D ou CM, & qu’ainfi la force centrifuge eft égale à celle de la pefanteur. C’eft le Théorème 10, en fuppofant que le rayon D AN foitinfini- ment petit. COROLLAIRE I V. Le tems du circuit du Corps Mautour de l’Axe C A eft =V 2 CA, & le tems que ce Corps employeroit à tomber de la hauteur Z M, eft 2V 4 M. Si donc ces tems font égaux, Pon aura 2 V AM=T V2C À; d'où lon tire AM= CA. ll eft donc évident que fi le Sinus C 4 de Ci z Fic. II. Frc. Il. & IV. Fc... V. 20 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE l'angle À MC de l'inclinaifon du fil fur lhorifon, eft au rayon ou Sinus total 4 M, comme le quarré infcrit dans ün cercle, eft au quarré de fa circonférence; le tems que le Corps M employe à faire un circuit entier autour de fon Axe AC, eft précifément égal à celui qu'il employeroit à tomber d’une hauteur égale à la longueur 4 M du fil. C’eft le Théorême 11. PROPOSITION IV. On démontre dans les Méchaniques que la force avec: laquelle le Corps M agit felon la direétion 4 M eftà celle de fa pefanteur, avec laquelle il agit de haut en bas ,comme k ; Mx-A : t A Meftà AC, & qu'ainfi —"- l'exprime la force avec la- BNXN quelle le Corps M tire Le fl 4AZ. Par la même raifon ——> exprimera celle avec laquelle le Corps Vtire le fil BV. Si donc l’on fuppofe que 4 C & B D foient égales entre elles, comme aufli les poids des Corps M , NV, il s’enfuit que les forces avec lefquelles ces Corps tireront leurs fils, feront en même raifon que les longueurs 4 M, B Nde ces fils: C’eft le Théorême 12. PROPOSITION V. Siun Corps Mattaché en Cparle fil CM décrit, entom- bant, le quart de cercle Z MB terminé par la verticale CB & par lhorifontale C 4; ileft clair par le Lemme (en menant #{P parallele à CB ) que fa force centrifuge eft ZPMXM . . : . cu» en quelque endroit que foitle point M. Si donc. l'on fuppofe qu'il fe trouve en B, la force centrifuge fera 2M; puifqu'alors P M devient égale à C M ou CB : mais elle doit être augmentée de celle de fon poids entier( puif- que CB eft une ligne verticale ou à plomb) pour avoir la. force totale avec laquelle le Corps M étant parvenu de 4 en B tire le fil CB. Cette force fera donc triple de celle de. fa pefanteur. C’eft le Théorême 13. DES SCIENCES | 21 PROPOSITION VL . Trouver la Courbe 4 A1, qui ait pour Axe:{a verticale A P, & dont la propriété foit telle que faifant mouvoir VAxe autour de lui-même fur les pivots E, F, avecune force capable d'élever le poids M attaché au fil MC, qui entoure la développée BC; le tems que le corps M em- ploye à faire fon circuit autour de la verticale EF, foit toujours le même en quelque endroit de la Courbe 4 M qu'il fe trouve. : Il eft vifible que la partie D A1 du fl MC décrit la fut- face d’un cone droit autour de l’Axe D P > de forte que le fil D M peut être confidéré comme attaché en D pendant que le corps 47 décrit la circonférence qui a pour rayon lhorifontale MP. Or afin que le tems qu'il employe à parcourir cette circonférence foit toujours le même en quel- que endroit de la Courbe 4 M que fe puifle trouver le corps A, il faut felon le premier Corollaire de la troifiéme ropofition , que la hauteur D P du conefoit par-tout égale à une ligne donnée 7, D’où:il eft aifé de conclure que la ligne courbe cherchée 4 M eft une parabole dont le para métreeft double de la ligne donnée 4; car on {çait que la partie D P de l’Axe comprife entre une perpendiculaire. D MA la parabole & une appliquée M P à lAxe > €ft tou- jours égale à la moitié du paramétre.. Ci. Fic. VI. 22 MEMOIRES DE L'AcADEM1E Royare MANIERE GENERALE DE DÉTERMINER des Forces, les Vitelles , les Efpaces , & les Tems, une feule de ces quatre chofes étant donnée dans toutes fortes de mou- .… vemens rectilignes variés à difcrétion, Par M VaARIGNON. T Ous les Angles re&i- lignes:érant droits dans la Figure que voici, foient fix Courbes quelconques TD, VB,FM,VK,FN,FO, dont les trois premiéres expri- ment par leur abfcifle com- mune 4H, l'efpace parcouru par un corps quelconque mû comme lon voudra le long de AC, Soit de même le tems employé à le parcourir , expri- mé par l'ordonnée correfpon- | dante-HT de la Courbe TD ; € la viteffe de ce corps en cha- que point À, par les ordonnées auffi correfpondantes 7H, FG', des Courbes /”B,17K ; ce qu'ila de force vers C, à chaque point H , indépendamment de fa vitefle (je l'appel- lerai dorénavant Force Centrale à caufe de fa tendance au point C comme centre ) s’exprimera de même par les or- données correfpondantes encore FH, FG, FE , des Cour- bes FM, FN, FO. C'eft pour cela que la Courbe TD , à laquelle Pordon- née HT fe termine en T; s'appellera la Courbe des Tems ; les deux Courbes Ÿ’B , l” K, aufquelles les ordonnées corref- pondantes & égales 7H, V G, fe terminent en 7”, s'ap- pelleront les Courbes des Wireffes ; enfin les trois Courbes FM,FN FO, aufquelles les ordonnées correfpondantes encore & égales FH,FG,FE, fe terminenten F, s’appel- leront les Courbes des Forces. 1700: 30. Janvier. D ES US QE NeCeE Si 0 mal 23 » Cela pofé, foient les efpaces parcourus 4 H= x , les téms employés à les parcourir HT —=.4 Gr, les viteffes en H( que j'appellerai finales) HP =AE=GV =, les forces centrales corréfpondantes HF=EF=GF= y. De-là on aura dx pour l’efpace parcouru comme d’une, vi- teffe uniforme v, à chaque inftant ; d'u pour l’accroiflement de vitefle qui s’y fait; dd x pour ce qui fe parcourt d’efpace en vertu de cet accroiïflement de vitefle ; & dr pour cet inftant. À ce compte, la viteffe ne confiftant que dans un rapport d’efpace parcouru d’un mouvement uniforme , au rems em- < TA . n , 7 dx ployé à le parcourir ; lon aura déja v—-" pour une pre- dd miére Regle ; laquelle donneradv="" , en faifant dr conftante. De plus, les efpaces parcourus par un Corps mû d'une force conftante & continuellement appliquée, telle qu’on conçoit d'ordinaire la pefanteur , étant en raifon compofée de cette force & des quarrés des tems employés à les pat- courir; l'on aura aufli dd x = y dr, ou y — = = e Cequi fait encore une Regle y=T quiavec la précédente v 2 farisfait à tout ce qu'on fe propofe ici de refoudre. REGLES GENERALES DES MOUVEMENS EN LIGNE DROITE. dx QUE à di nent (ér 2.y= (Te) Us46E. Je dis préfentement qu’une des fix courbes ci- deflus , étant donnée à difcrétion , on pourra toujours en déduire les cinq autres par le moyen de ces deux Regles, fuppofé les Réfolutions & les Intégrations néceffaires des Egalités en queftion. Prat La preuve de cette propofition ef facile : car fi on a le 24 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE rapport quelconque variable ou conftant , par exemple , des vitefles Ÿ H(v) aux efpaces parcourus 4H (x) c’eft-à- dire, l'équation de la courbe des vitefles B 7. re, Cette équation dont les variables font x &v, don- nera la valeur de v en x & en conftantes , laquelle valeur d Es (Reg. 1) formera avec T7, une autre équation dans la- quelle il n’y aura plus que des x, des: & des conftantes ; & qui par conféquent fera celle de la courbe des tems DT, dont les ordonnées correfpondantes HT( t) expriment les tems requis pour venir de À en H. 2°. L'équation donnée, de la courbe 77B donnera en- core la valeur de d'u enx (jy comprens auffi les dx) & en conftantes, laquelle valeur ( Reg. 2.) formera avec y dr, une équation dans laquelle il y aura de trois fortes de va- riables , y, x &r. Mais celle de la courbe des tems DT, qu'on vient de trouver, donnant aufli les valeurs de x en r, & de zen «; fi l'on fubfitue, l’une après l’autre, chacu- ne de ces valeurs de x & de r, dans cette équation de trois variables, la fubflitution de la valeur de x, n’y laif- fant plus que y & + de variables, cette équation deviendra celle de la courbe des forces /V F; & la fubfitution de la valeur def, n’y laïffant plus aufli que y & x de variables, cette équation deviendra encore celle de la courbe des forces F M. 3°. L’équation qu'on vient de trouver pour la courbe ÎVF, nayant que y & : de grandeurs variables, elle don- nera aufli la valeur de y enr & en conflantes, laquelle ; D AU : : valeur ( Reg. 2.) formera avec —', une autre équation dans laquelle il n’y aura plus que : & v de grandeurs variables ; & qui par conféquent fera celle de l’autre courbe des vi- tefles 7’K. 4°. Enfin l'équation donnée de ‘la courbe des viteffes TB , donnant aufli uné valeur de x en v & en Cconflantes ; & celle qu’on en a déduite ( . 2. )pour la courbe des for- -ces FM, donnant de même une valeur de x en y & en conftantes : DES SCIENCES. 25 conftances : ces deux valeurs de x formeront encore une équation , qui n'aura de grandeurs variables que v & y ; & qui par conféquent fera aufli celle de la troiliéme courbe des forces FO. Voilà comment de fix courbes qu’on voit dans cette Fi- gure , la feule des viteffes Z7B étant donnée, l’on en peut déduire les cinq autres ; & ainfi de quelqu’autre de celles-ci, qu’on voudra donner, la maniere d’en déduire B avec les quatre autres , étant par-tout la même. Ce g.f. d. Exemple 1. Pour léclairciffement de cet ufage, l’exem- ple le plus fimple fera le meilleur. Suppofons donc (fi l’on veut) comme dans lhypothefe de Galilée fur la pefanteur , que les efpaces 4 H(x) foient comme les quarrés des vitef- fes correfpondantes 7” H(v), en forte que 7”B foitune Pa- rabole dont le lieu foit x— v v. 19. L'on aurav—vx. Donc( Reg. 1. Jr, oud? d 5 Ê , =; ce qui donnera = 2V%, oux=—+2}#7 pour le lieu x de la courbe des tems D T. Ainfi cette courbe fera aufli une Parabole erdinaire, &c les efpaces 4 H(x) fuivront auffi les quarrés des tems HT(r). 2°. D'où l’on voit déja que les tems feront ici comme les vitefles :.c’eft-à-dire 4 G (7) par-tout àG 77 (v) enraifon conftante ; & par conféquent auili 7” K fera une ligne droite qui pañlera par 4. 3°. L’équation donnée x—v de la courbe des vitef- fes B/”, donnera encore du — _ Donc ( Reg. 2) y — =, Maïs on vient de trouver (#.1.)x —-=1t; ce qui 2 x ia __rdt ALAN EE GE Or donne2Vx=—17t,& dx". Doncy ==}: la même chofe fe trouvera encore par le moyen de la feule équation x —<+## de la courbe FM, en faifant de conf- 7 . dr’ tante; puifqu’alors cette équation donnant ddx—=" , la # ddx 7-5 di? LA x ÉAS feconde Régle donnera aui y ()= TE = is D'où 1700. Eu 26 MEMoïires DE L'ACADEMIE ROYALE lon voit que les ordonnées égales FH, FG, FE, doivent être ici conflantes ; & les lignes FM, FW, FO, des droi- tes paralleles, la premiere à 4 H, & les deux autres à £ G. Ainfi les forces centrales du corps mü, que ces ordonnées expriment, doivent être ici par-tout égales, ou la même dans toute la durée de ce mouvement , comme on le fup- pofe ordinairement de la pefanteur. On voit donc que dans cette hypothéfe des efpaces 4 H: comme les quarrés des vitefles /” H, c’eft-à-dire, où l'om fuppofe B une parabole ordinaire , D Ten fera aufli une; & les quatre autres lignes /’K, FM, FN, FO, feront au- tant de droites, dont la premiere paffera par 4, la fecon- de fera parallele à 4 H, & les deux autres aufli paralle- les à EG. Exemple 2. Suppofons préfentement que la force cen- trale du corps mû foit conflante, comme on le fuppofe ordinairement de la pefanteur. Alors les ordonnées égales FH, FG,FE, qui expriment cette force , étant par-tout les mêmes & conftantes, non-feulement FM, FN,FO, feront des lignes droites, dont la premiere fera parallele: à AH, & les deux autres paralleles à E G ; mais encore leur valeur y aufli conftante, par exemple — 4 donnera (Reg. 2.) a, ou dif Donc ( Rey. 1.) vs ouvdv—adx;ce qui donne “=ax,ouvv—24ax pour le lieu de la Courbe des vitelles B 77, laquelle par conféquent doit être ici une parabole, ainfi qu'on l'avoit fuppofé dans l’'Exemple premier. Son lieu 24 x = v v fer- vira donc aufli comme dans ce premier Exemple; à trouver ceux des lignes D T, K #”. Et par conféquent la. force cen- trale du corps mû, étant ainfi fuppofée conftante , l'on au- ra la nature des fix lignes FM,FN,FO,BV,DT,KV= Les mêmes chofes fe trouveront de la même maniére: dans toute autre hypothéfe; il n’y aura de différence que la, difficulté du calcul, laquelle n’auroit fait qu'embarralfer ici. Ainfi ces deux Exemples fufifent. : D'ES S C'I/EN C'ESS. dr REMARQUE. Mais avant que de finir, il eft bon de remarquer que fans aucune nouvelle hypothefe, les deux Régles précédentes nous donnent tout d’un coup la Prop. 39. du Liv. 1. de M. Newton, De Phil. nat. Princ. Math. En effet ces deux Ré- i dx du, / d x gles donnent di = ,dt= "5 & par conféquent = — _ >ouy dx=vdv, ce qui donne auf ( ffignifie /ômme) dx—=}ïuv,ouv—V2/fydx:ceft-à-dire en général, les vitefles 77H, comme les racines quarrées des efpaces renfermées entre À H, FH, & la courbe MF, quelles que foïent les forces y( FH); ainfi que l’a démontré M. New- ton dans la premiere partie de cette 39°. Propofition. Il fuit aufli de-là & dela premiere des deux Régles pré- dx cédentes,que dr — . D'où l’on voitencore en géné- f2fydx k hu ral , que fi /B, au lieu d’être une courbe des viteffes, étoit telle que 77 H fût par-tout en raifon réciproque des v2/fydx, 2 c'eft-à-dire, en forte qu’on eût par-tout 7 H = —— SEA ? 54 P V2fyd x ayant alors 7” Hx dx — > lon auroit aufli dr — V2fydx RAM V’Hxdx,&enfnt—/f1 Hxdx, ceft-à-dire, lestems T H comme les efpaces correfpondans , compris entre AH, HW, & BF, ainfi que M. Newton l’a encore dé- montré dans la feconde partie de la même 39e. Propofit. OBSERVATIONS SUR LES PLANTES qui naiffent dans le fond de la Mer. Par M. TOURNEFORT. PSE diftinguer les Plantes qui naïffent dans le fond de la Mer, d'avec celles qui croiffent fur fes bords, il eft bon, à l'exemple de quelques Auteurs Latins , d’appel- ler Marines les premieres, & de donner aux autres le nom de Maritimes. { Dij 1700. 13. Février. 28 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Toutes les Plantes Marines que l’on a obfervées jufques. à préfent fe peuvent réduire à quatre principales différen- ces: car elles font ou molles & fléxibles , ou dures comme de la pierre , ou ligneufes comme du bois , mais revêtues d’une écorce mollaffe , ou enfin dures en dehors & remplies d’une matiére fpongieufe. Parmi les Plantes marines qui font molles , les unes on des feuilles & les autres n’en ont point. Celles qui ont des feuilles, fe réduifent aux efpéces de Fucus & à quelques ef péces de Coralline. Celles qui font fans feuilles font pro- prement les éponges, l'Ælcyonium molle Imperati, & fembla- bles. Sous les Plantes marines pierreufes , on doit renfer- mer les efpéces de Corail, de Madrepore & tous les Cham- pignons pierreux. Il faut rapporter aux Plantes ligneufes revêtues d’une écorce mollaffe , toutes les efpéces de Li- thophyton. Enfin ? Ælcyonium durum Imperati montre qu'il y à dans la mer, des Plantes dures en dehors, mais fpongieufes & affez molles en dedans. Toutes ces Plantes fe nourriflent d’une maniére bien différente de celles qui naiflent fur la terre. Tout le mon- de fçait que ces derniéres ont des racines qui reçoivent le fuc nourricier dont les pores de la terre font imbibés , & ces pores font comme autant de petits réfervoirs deftinés pour leur fournir une nourriture convenable. IF femble au contraire que le fond de la mer ne fait que foûtenir les Plantes marines. Elles font fortement attachées contre les rochers. Elles naiflent fur des cailloux très-durs , fur des coquilles , & fur tous les corps qui fe rencontrent dans le fond des eaux. La partie qui les y attache n’en fçauroit recevoir aucune nourriture , puqu’elle n’eft que collée-fur la furface des corps très-durs , très-folides & fort fecs , tels que font les rochers, les cailloux & les coquilles. Ainfi les racines de ces fortes de Plantes n’étant pas faites pour al- ler chercher leur nourriture dans les pores des corps qui les foûtiennent , elles ne font ordinairement ni fibreufes, ni chevelues , mais le plus fouvent étendues en maniére de plaque ou de feuillet, qui par une furface affez large em- braffe fortement les corps fur lefquels elles ont pris naif- DES SCIENCES. 29 fance: Théophrafte a eu quelque raifon de dire que les Plantes marines n’ont point de racines , mais qu’elles font attachées au fond de la mer , comme le Lepas , qui eft une coquille appellée en François , Oeil de Bouc, dont l’ani- mal eft collé fi fortement contre les Rochers, qu'on ne fçauroit lui faire quitter prife qu'avec la pointe d’un cou- teau. De toutes les Plantes marines que j'ai obfervées , il n'y a proprement que la Madrepora ramofa d'Imperatus, dont les racines foient fibreufes, & ces racines ne s’infinuent que foiblement dans les pores de leur foûtien ; ce font plû- tôt comme autant de cordons collés fur la furface des cail- loux , & qui les embraffent fortement , afin de bien affer- mir le refte de la Plante. Les Plantes marines donc ne trouvant pas leur nourritu- re fur les corps où elles naiffent, elles doivent la recevoir d'ailleurs, & il y a beaucoup d'apparence que c’eft de ce limon falé, gras, gluant, mucilagineux & femblable à de Ra gelée , dont le fond de la mer eft enduit, & que l’on dé- couvre aïifément après le reflux de fes eaux; car on ne fçauroit avancer qu'avec peine dans les lieux qu’elles ont abandonnés à caufe que ce limon les rend très-gliffans. Ce limon eft un dépôt de ce que les eaux de la mer ont de plus glaireux & de plus huileux , qui fe précipitant continuellement de même que le fédiment que les eaux douces laïflent tomber infenfiblement au fond des vaif feaux qui les renferment , forme une efpéce de vafe que Fon appelle, Terra Adamica, fort propre pour laproduétion des Plantes ; & même Pon peut croire qu'outre la grande quantité des Poiflons & des Plantes qui meurent conti- nuellement & qui fe pourriffent dans la mer, l'air contri- bue encore de quelque chofe à l'augmentation du limon dont nous parlons , puifque Fon obferve que la Terre Ada- mique fe trouve en plus grande quantité dans les vaifleaux que l’on a couverts fimplement avec du linge, que dans. ceux qui ont été fcellés hermetiquement.. Le limon qui eft dans le fond de la mer fournit donc la principale nourriture aux Plantes marines, . cette nour+ ïij: Lib. 4. Ch, 73 30 MEMOIRES DE L'ACADEM1IE ROYALE riture ne peut entrer que par dehors , en s’infinuant dans les pores de leurs racines, ou même de leurs tiges. On dé- couvre la direction des fibres de ces racines dans le Corail, dans plufieurs efpéces de Madrepore & de Lythophyton. Il y a même quelque apparence que cette écorce tartareufe, dont les coraux font revêtus , fert à filtrer & à fournir quel- que fuc nourricier , de même que le duvet des Plantes qui naiflent dans les lieux fort fecs , femble leur procurer quel- que rafraichiffement, ce duvet n'étant autre chofe qu’un amas de plufieurs brins de coton , qui font comme autant de méches qui s’imbibent de l'humidité de Pair. Cependant il eft fort difhcile de concevoir comment les Plantes marines qui font dures comme du bois, ou com- me de la pierre, peuvent fe nourrir dansla mer, d’autant mieux qu'il y en a quelques-unes , qui certainement n'y font atrachées par aucun endroit , fi ce n’eft peut-être pendant les premiers jours de leur vie. Les efpéces de Co- raux & de Madrepora , les Champignons de met , /4 Ta- bularia marina, rubra IB font aufli durs que les pierres. Mais peut-être qu'ils ne font pas plus durs que les dents des ani- maux, que les os des adultes , que les cornes, que le cœur d’un vieux Chêne , que l'Ebene oule Boisde Fer. Ainli il fe peut faire que le fuc nourricier s’imbibe dans leur tiffure quoi- que très-ferrée , de même qu'il fe diftribue dans les corps dont nous venons de parler. Mais que peut-on penfer de certains Champignons de mer qui ne tiennent à aucun corps comme celui que lon appelle le bonnet de Neptune ? Ce Champignon a cinq pouces & demi de hauteur fur fept pou- ces de large à fa bafe , qui s'éleve infenfiblement & s’arron- dit enfin en maniere de callote ou de dôme feuilleté en dehors par bouquets, dont les lames font coupées ën crête de Coq, & qui repréfentent en quelque maniére une tête naïflante & moutonnée. Sa ftruêture intérieure eft différen- te :1l eft canelé légérement & parfemé de petits grains & de quelques pointes obtufes dont la plus longue n’a pas plus d'une ligne de long. On trouve plufieurs Champi- gnons de mer de pareille fruéture dans la Mer rouge & UNI] fl /f Î ei pl ( DE Ib 1] / DES SCIENCES. 3r dans le Sein Perfique , mais ils font ordinairement fort pe- ts, & n’approchent pas du bonnet de Neptune. Celui que Clufius anommé Fungus faxeus Nili major , eft beau- coup plus applati & refflemble à nos Champignons ordi- naires , fi ce n'eft qu'il eft feuilleté en dehors. On entrou- ve quelques-uns, mais rarement , qui ont un petit pedicule qui les foûtient. Ce pedicule eft fort caffant, cependant il eft à croire que dans leur naïffance ils éroient attachés au fond de la mer par quelque chofe de femblable ; & fuivant toutes les apparences , lorfqu'ils n’ont plus de pedicule, ils fe nourriffent par le fecours de quelque fuc que l'eau de la mer où ils trempent, laifle infinuer dans leurs pores. Nous voyons certaines pierres beaucoup plus dures que les Cham- pignons dont nous parlons , lefquelles étant abfolument fé- parées de tous les autres corps , ne laïffent pas que de croître par le fecours de l’air & des pluyes. J'ai un caillou fort dur, qui en croiffant dans le fond de la mer a enveloppé une partie d'une coquille appellée Purpura teflé nigrä. Cepen- dant il y a apparence que ce caillou a crû dans la mer, fans être attaché à aucun corps. . Ces Champignons pierreux qui font organifés d'une mani$re admirable , qui ne change jamais dans les efpéces de même genre , femblent perfuader que les cailloux ont leur femence particuliére, & même que cette femence a été liquide , de même que la femence de plufieurs Plantes marines pierreufes , ainfi que nous allons voir bien-tôt. Toute la différence que l’on trouve entre les Plantes ma- rines & les cailloux, eft que les organes des uns font très- fenfibles , au lieu que ceux des autres ne le font pas ; mais peut-on douter qu'il n’y ait dans les pierres une ftruéture intérieure, puifqu'on y remarque des veines particuliéres fuivant lefquelles on les coupe plus aifément, & qui ne femblent être autre chofe que la direétion de leurs fibres ? J'ai une pierre fur la furface de laquelle on découvre avec une Loupe, une infinité de petits trous , qui femblent être les orifices des tuyaux différens dont elle paroït compofée. J'ai des pétrifications qui montrent que la premiere for- D 32 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE mation des pierres, & même des plus dures , dépend d’une matiére liquide; car il n’eft pas poilible de concevoir qu’une pierre à fufil fe foit formée dans le creux d'un Echinus pé- trifié, qui n’a pour toute ouverture qu'un fort petit trou, fans s’imaginer qu’une liqueur y ait été portée & qu’elle s'y foit coagulée. J'ai une pétrification très-belle qui s’eft formée dans le creux d’une coquille appellée par Ronde- let, Concha crafle telle. Cette pétification eft très-dure, & renferme une petite mine de criftal de roche. Cepen- dant il faut que la matiére de ces corps ait coulé comme dans un moule par l'ouverture que laifloiert les deux bat- tans de la coquille. Cette ouverture n’étoit que de trois ou quatre lignes , puifque les deux lévres du reliefqui a été moulé dans ce creux, ne font pas fort éloignées l’une de Pautre. On pourroit peut-être s'imaginer aufli que la craye blanche a été liquide dans un certain tems : car com- ment concevoir que certaines efpéces d'Echinus pétrifiés, qui n'ont qu'un fort petit trou, fe trouvent remplis de cet- te craye dans des terres rougeatres & d’une nature tout-à- fait différente, telles que font celles de Berchere & de Maintenon , où on les trouvoit affez fréquemment dans le tems des travaux de l’Aqueduc ? Mais ces fortes de re- cherches demandent une differtation particuliére. Reve- nons à nos Plantes marines. : La tiflure des Plantes marines qui font molles, comme font les efpéces de Fucus, ne paroït pas beaucoup différente de celles des Plantes ordinaires. Celle des éponges paroït d'a- bord affez particuliére , cependant fi on les examine avec foin , il femble qu’elles ne différent des autres Plantes qu'en ce que leur corps fibreux & reticulaire ef tout découvert, au lieu que dans les Plantes ordinaires , les mailles du refeau de ce même corps font remplies d’une chair particuliére , qui n’eft autre chofe qu'un fuc épaifli dans les petits facs de ces mailles. Ce corps reticulaire paroit fort bien dans l’ef- ve d'éponge, qu’Imperatus a nommé, Spongia velaris. ans les communes il eft beaucoup plus ferré. On appor- te des éponges d'Amerique, dont le refeau approche en quelque DES SCIENCES 33 quelque maniére d'un point de Malines. Il y en a qui font femblables à une roche, qui font creufées en tuyau; quel- ques-unes font longues & folides , de la figure de nos Sau- ciffes. Ce Corps réticulaire paroît merveilleufement bien ;, non feulement dans les efpéces du Lithophyton, dans le Fru- tex marinus elegantifimus Clufii, & dans celle que ÿainom- mée Lithophyton reticulatum , luteum , maximum > Mais en- core dans les efpéces d'Efthara. J'en ai une qui ne différe de l'éponge, qu'en ce que fon réfeau par fa confiftence approche de la corne. Pour ce qui eft de la ftrudure des Plantes marines pier- reufes, elle ne différe guéres, ainfi que nous l'avons dit, de celle des pierres. Il ne nous refte donc plus qu’à examiner la frudture de celles qui font dures en dehors & molles en dedans, comme l’Æ/cyonium durum Imperati, où qui font ligneufes couvertes d’une écorce mollaffe , comme les ef- péces de Lirhophyton. L’ÆAlcyomum durum ne paroït autre chofe qu'une éponge renfermée naturellement dans une coque affez dure , dont le dehors eft blanchâtre, & paroît comme chagriné. Cette Plante fe trouve attachée aux ro- chers dans le fond de la Mer autour des Ifles d'Yeres rhoe de celles de Marfeille. : Les efpéces de Lithophyton qui naïffent dans la Mèr Mé- diterranée femblent d'abord n'être que le fquelet ou la par- tie ligneufe des Plantes mortes dans le fond de la Mer ; re- vêtues d’une efpéce d’écorce tartareufe ou limon endurci qui les couvre entiérement. C’eft-là le fentiment de la plû- part des Curieux; mais l’on s’en défabufera facilement, fi l’on Jette les yeux fur ces belles efpéces de Lithophyton , qui naif- fent dans la Mer des Indes Occidentales. Ces fortes de Plantes font compofées de deux parties; l’une eft ligneufe & folide, avecun petit trou dans ke cœur, qui paroït avoir été deftiné pour contenir quelque efpéce de moelle. Cette partie forme la tige & les branches du Lithophyton, elle eft caffante ; mais quand on la met à la chandelle allumée, elle brûle & put comme un morceau de corne, ou com- me les plumes des Oifeaux , ne laiffant pas des cendres 1700. 34 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE comme le bois , mais une efpéce de charbon fort fpongieux & fragile, de même que font les plumes ; ce qui me fait croire que cette partie contient aflez de fel volatile. Elle eft couverte d’une écorce mollaffe, dont la tiflure eft admi- rable dans certaines efpéces. Dans celle que j'ai appellée Livhophyton Americanum maximum , pullum , tuberculis [ur- Jum Jpeëtantibus obfitum , elle eft brune, épaiffe d’une ligne & demie , doublée en dedans d’une membrane fort mince, qui forme un tuyau dans lequel le corps ligneux de cette Plante entre comme dans un étui; l'écorce eft comme fpongieufe , & craque fous la dent, comme fi l’on mächoit un ciment où il y eût beaucoup de fablon ; mais elle eft conftamment divifée dans fon épaifleur, en huit ou neuf loges d'environ une ligne de long, dans lefquelles fe trou- vent aflez fouvent quelques grains noirs d’un tiers de ligne de diametre affez ronds , mais preffés un peu par les côtés, ce qui pourroit faire croire que ce font les femences de cette Plante. Le dehors de cette écorce eft tout couvert de tu- bercules longs d’une ligne , crochus, & dont la pointe eft tournée en dedans. On remarque fouvent à la bafe de ces petits crochets un petit creux qui fouvent communique . avec les loges dont nous venonsde parler. Le Lithophyton ÆAmericanum , maximum , cinereum , cortice punéfato, ne dif. fére pas feulement du précédent par fa couleur , mais par- ce que les loges de Le écorce font ouvertes en dehors par des trous ronds, d’un tiers de ligne de diametre. Son écorce paroît aufli fabloneufe quand on la mâche, ce qui pourroit favorifer la penfée de ceux qui croyent que cette écorce n’eft qu'un limon endurci mêlé de fable : mais ou- tre la ftruéture réguliére & conftante dont nous venons de parler , il faut remarquer aufli que la partie ligneufe des ef péces de Lithophyton ef relevée & fillonnée , comme des petits filets ou canelures étendues dans toute fa longueur, dans lefquelles l’étui membraneux de la partie molle entre très-exattement, ce qu'on ne trouveroit pas fur les fque- lets des Plantes mortes couvertes de limon. Au contraire celles-ci deviennent liffées à force d'être lavées par l’eau de CHTET EU — ,» | Zrst. Rex Herbar. Lithophyton + Americanum tuberculis S ectantibus fp urfuom Sp DES SCIENCES. 35 la Mer , & ne fe recouvrent plus d'aucune écorce. J'ai fait à-peu-près les mêmes Obfervations fur plufieurs efpé- ces de Lithophyton; dont je parle dans le Livre qui a pour titre , Infhtutiones Rei Herbarie. Après avoir recherché la fruêure des Plantes marines il feroit à fouhaiter que l’on pût propofer quelque chofe d’affuré fur la ftruéture de leurs Fleurs. Théophrafte dans fon quatriéme Livre de l’'Hiftoire des Plantes, parle fi fou- vent des Fleurs des Plantes qui naïflent dans le fond de la - Mer, qu'il femble qu'on ne puifle pas douter qu’elles ne fleuriffent ; cependant je ne connois point d’autre Auteur que lui qui ait parlé de ces fortes de Fleurs. Quelque foin que j'aye pris pour m'en éclaircir dans mes Voyages d'Ef- pagne & de Portugal, je n’ai rien pû trouver qui m'ait fatisfait. Pour ce qui eft des femences de ces Plantes, il eft fort difficile de les découvrir. Nous avons lobligation à M. Ceftoni fçavant Apoticaire de Livourne , de nous avoir fait connoître que ce que l’on appelle Olives de mer, fur les Côtes de la Méditerranée , étoient les véritables fruits de VAlga angufhfolia V'itriariorum C. Bauh. I] en a donné la fi- gure dans le Livre intitulé, La Galerie de Minerve. Les Obfervations que l’on a faites fur le Corail, peuvent don- ner lieu de propofer quelques conjedures pour la multipli- cation des Plantes marines pierreufes. On a remarqué que l'extrémité des branches du Corail fe gonfle , s’arrondit & devient une efpéce de capfule partagée en quelques loges remplies d’un lait âcre , cauftique & gluant. Ce lait s’écha pe hors de fes loges, il tombe dans l’eau, & fans fe mêler avec elle, non plus que feroit une goutte d’une huile pe- fante , telle qu'eft celle de Canelle ou de Saffafras, il s’at- tache fur tous les corps qu'il rencontre , & fuivant toutes les apparences , ainfi que je l’ai propofé dans les Mémoires de l'année 1692. il y colle quelque femence très-menue, qui venant à éclore produit d'abord un petit point rougeä- tre, dont le développement fait voir dans la fuite une Plante de Corail. Ces embryons fe trouvent communément fur la Eij Voyez les Memoires de l'Académie , 1692. fous le titre, Reflé- xions Phyf- ques , &c. pag. JS: 36 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE plûüpart des corps que l’on tire du fond de la Mer. J'ai plu- fieurs Champignons de mer & plufieurs Coquilles qui en font revêtues. On montre dans le Cabinet de Pife une piéce de Corail attachée fur un morceau de crâne humain. On a trouvé depuis peu autour de la Jamaïque une bouteille qui en étoit toute chargée. Melflieurs les Prinées de Radzivil m'ont fait l'honneur de me dire qu'ils en avoient de beaux morceaux dans leur Cabinet, qui avoient pris naïffance fur plufieurs fortes de corps. Ainfi lon pourroit étendre ces conjectures fur les Plantes marines pierreufes. L’humeur qui - fe trouve dans les grains de la Sargazo d'Acofa , & dans les efpéces d’Acinaria d'Imperatus , femble deftinée au même ufage. Etant à Gibraltar, je remarquai que cette humeur quoique très-fluide , ne fe mêloit que fort difficilement avec l'eau de la Mer ; mais je ne pus y remarquer aucuns grains, ni aucune concrétion qui approchât de ce qu’on peut ap- peller femence. Cependant l'exemple du Corail, & même de plulieurs Plantes qui naiffent fur la terre, pourroit faire foupçonner avec raifon qu'elles n'en manquent pas, quoi- qu’elles échapent à nos fens. Ces petits grains que l’on trou- ve fur la Côte de la Plante appellée, Lenticula paluftris la- tifolia , punitata , font remplis d’une poufliere plus fine que la fleur de foulfre. La même poulliere fe trouve dans les capfules du Mufcus terreftris , clavatus , dans je ne fçai com- bien de Mouffes & de Lichen, & les grains de cette pouf- fiere délayée dans l’eau, ne fçauroient s’y diftinguer. Ainf il n’eft pas furprenant qu'il y ait des liquides qui tiennent en diffolution des femences, qu’on ne fçauroit découvrir avec les yeux. Qu'eft-ce qui auroit crû avant l’ufage des Micro- fcopes, qu'il y eût eu une fi grande quantité de petits ani- maux dans la plüpart des liqueurs ; & fur-tout dans les fe- mences des autres animaux? Peut-être que la nature a def. tiné des liqueurs des Plantes marines pour porter leurs fe- mences au fond de l'eau, & pour les y attacher contre les autres corps; car autrement elles fe feroient perdues fur la furface de la Mer. DES SCIENCES. 39 RP Re PE LS REMARQUES SUR LES OBSERVATIONS des Refractions ,tirées du Livre intitulé, Refra@io Solis inoccidui in Septentrionalibus oris, juflu Caroli X I. Regis Suevorum, &c. à Joanne Bilgerg Holmiæ. 1695. Par M. DE LA Hire. ? E Roi de Suéde fit un voyage à Torneo , ville fituée LL dans la partie Septentrionale de la Suéde, vers le Sol- ” ftice d'Eté de l’année 1694. mais comme il n’arriva dans ce lieu que quelques jours après le Solflice , il donna ordre à l'Auteur de ce Livre qui by avoit accompagné , d’y retour- ner l’année fuivante avec M. André Spole, Profeffeur de Mathématique à Upfal, & fon Collegue. Le 7 Juin 169$. vieux ftile , ils obferverent à Torneo la hauteur méridienne du Soleil de 47°. 48’ avec des Inftru- . mens qui marquoient les minutes; le 8 , ils la trouverent de 47°. 49’. & le 10 de 47°. 50. Il conclut de ces Obfer: vations que la hauteur du Pôle de cette Ville eft de 65. 43.en y employant la parallaxe , & négligeant la Re- fration qu'il croit infenfible à cette hauteur du Soleil. Il ajoute qu'il auroit fouhaité de déterminer la hauteur du Pôle de cette Ville par les Etoiles circonpolaires , mais qu'il eft impoflible dans cette Saifon-là, à caufe du Soleil qui y pa- roit toujours fur l’'Horifon. Mais comme leur principal deffein étoit d’obferver le Soleil à minuit, où il paroît à l’'Horifon du côté du Nord 3 ils prirent l’occafon entre le 10. & le 1 1. de Juin que PHo- rifon fe rencontra ferein de ce côté-là. Mais alors la hau- teur méridienne du Soleil étant à Torneo de 47°. so. fi lon en ôte une minute de Refraction, comme on leftime ici, & qu’on en Ôte ençore 23° 29, pour la déclinaifon Eij 1700. 13. Février, Vieux Stile, 48 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE du Soleil, il reftera 24°. 20°. pour la hauteur de l’Equateut; dont le complément 65°. 40’. fera la hauteur du Péle de ce lieu, & par conféquent dans le Solftice d'Eté, le centre du Soleil devoit être fous l'Horifon de ÿ 1. & fon bord fupé- rieur de 35. lequel a paru pourtant élevé de plus de 23. donc la Refraétion étoit de 5 8’. ce qui eft prefque le double de ce qu'elle paroït ici. Et quand on fuppoferoit la Refra- €tion de la hauteur méridienne du double de ce que nous l'avons pofée, on ne trouveroit qu'une minute de moins à la Refraëtion horifontale , ce qui n’eft pas confidérable par rapport à celle qu’on en a conclu. | Ces Obfervateurs poufferent plus loin vers le Nord; & le 14. du même mois étant à Kangis où font les For- ges de Fer & de Cuivre, ils virent le Soleil élevé fur l'Ho- rifon de la riviere de trois de fes diametres; mais par leur itineraire on concluroit de la diftance des lieux, que les Refrattions horifontales y feroient trois fois plus grandes uicl. 1 . Enfin fi les Refraëtions des Pays Septentrionaux vien- nent de la nature de l'air qui les augmente fi fort par rap- port à celles de ce Pays-ci, & qu'il foit aufli la caufe du crépufcule, il n’y a pas de doute que fous le Pôle le cré+ pufcule y fera fi grand vers le Solftice d'Hyver, qu’on y pourra voir fort clair, même en l’abfence de la Lune ; ce qui peut être très-utile à ces peuples , dont le grand com- merce fe fait dans cette faifon-là pour la commodité des voyages fur la glace. Mais il y a encore une Remarque à faire, laquelle eft fort confidérable, que la partie de l'air qui caufe les Refra@tions , n’a point de rapport avec celle qui fait fa pefanteur , puifqu’il arrive à Stokolm & à Paris les mêmes changemens du mercure dans le tuyau du Ba- rometre, & qu'on y a aufli obfervé les mêmes hauteurs à très-peu-près, ‘ DESIS cu NNerS In: 77 39 RÉFLEXIONS SUR LES OBSERVATIONS faites en Botnie. Par M. Cassini. M ONSs1EUR le Refident de Suéde nvayant fait voir le Livre des Obfervations faites en Botnie près du Cércle Polaire Ar&ique, par le Roi de Suéde, & par fes Mathématiciens ; j'y fis deflus quelques refléxions que je lui communiquai , afin qu’il les pôt envoyer à ceux qui avoient travaillé ou aflifté à ces Obfervations ;carilya 1700: 17. Février. des chofes qui demandent quelque éclairciflement pour en pouvoir faire un bon ufage. Je calculai de ces Obfervations ; les Refraions du So- leil à ma maniére, & je les trouvai un peu plus grandes qu'elles n’avoient été calculées par les Obfervateurs. Je les comparai avec celles que j'avois tirées des Obfervations faites par ordre du Roi à la Cayenne proche de lEqui- noxial, où je trouvai les horifontales plus petites qu'ici, quoique dans les hauteurs méridiennes 1 Soleil , qui en ce lieu-là furpaffent toujours foixante degrés, les Refradions, qui de part & d'autre n’excédenr guéres une demi-minute, ne différent entre elles que de peu de fecondes , dont on ne fçauroit s’aflürer dans les Obfervations. C’eft pourquoi il n'y eut pas une différence fenfible dans lufage que je fis. de mes Tables de Refrattions, que j'employai dans la ré- duétion des Obfervations de Cayenne. Sous le Cercle Polaire Arêtique , celles qui fe tirent des Obfervations de Suéde font un peu moins du double de- celles que nous obfervons plus reguliérement ici. I] yen a de celles qui les donnent plus grandes du double, mais ce ne font pas des plus certaines. Elles furpaflent toujours: plus de deux fois & demi celles que nous tirons des Obs fervations de Cayenne, t 46 MEMOIRES DE L'A CADEMIE Royace Je ne voulus pas cenfurer la Méthode dont les Suédois fe fervirent pour tirer les Refrattions de leurs Obferva- tions, J'ai mieux aimé expliquer celle dont je me fuis fervi en les trouvant un peu différentes. Je remarquai feulement les endroits où javois quelque difficulté dont j'attendois quelque éclaircifflement avant que d’en faire le rapport à l’Académie, comme je m’y étois engagé dans la propoli- tion des matiéres fur lefquelles je m étois propofé de tra- vailler. 122 N'ayant eu jufqu’à préfent aucune réponfe, je donneun Extrait de l’'Ecrit que j envoyai en Latin, où je n'ai pas laiffé de faire quelques ufages des Obfervations qui ont été faites avec plus d'application & d’exaétitude, Les Obfervations du Soleil que le Roi de Suéde, & fes Mathématiciens ont fait fort proche du Cercle Polaire peu- vent être d'une grande utilité dans l'Affronomie , dans la Géographie & dans la Navigation, à caufe que l’on en peut déduire les Refraétions du Soleil dans les confins de la Zone tempérée & de la Zone froide. Je les ai examinées avec foin , & je ne ferai pas difhiculré de rapporter ce que j'en ai tiré jufqu'à préfent, & de les foumettre à l'examen des perfonnes fçavantes, qui ont fait ces Obfervations. Quoique nous ayons trouvé quelques difficultés dans Pu- fage que nous en avons fait, nous n'avons pas laiflé de choifir celles qui nous ont paru les plus certaines , & nous avons trouvé que la Refraétion horifontale montoit dans ce lieu-là au Solftice d'Eté à près d’un degré, d'où l’on pourroit conftruire des Tables de Refraétions pour les dif férentes hauteurs de l'air dans ce climat, lefquelles étant comparées avec celles qui font propres en ce Pays, pour- roient donner les Refrattions qui conviennent aux climats qui font entre ce Pays-là & le nôtre, ce qui feroit d'un rand fecours dans la recherche des vraies hauteurs du So- feil & des autres Aftres , lorfque l’on auroit obfervéles hau= teurs apparentes, Nous avons des obfervations exaétes du Soleil & des Etoiles .: i | des Taches observess dans de Job . L'u : x s î : Figures der Taches observés dans de Sabu . 4 à Janvier yo. Men de l'Aead. 1700. p. 4e. D'EIS((S CIE N°C.E $. 4i Ætoies fixes , faites par ordre du Roi, proche de PEqui- noxial, dont nous avons tiré les réfraélions à divers de- grés de hauteur. Nous nous en fommes fervis pour trouver la hauteur de lair refraëtif dans ce climat > & la proportion de fa denfité à la rareté de l’Ether contigu , d’où nousavons calculé enfüite la réfraion horizontale, & celle qui con- vient à tous les degrés des hauteurs. Nous avons trouvé que la refra@ion horizontale près de l’Equinoxial étoit de deux tiers & un peu plus de celle de notre climat, & que la différence qui étoit entre les éfraétions des hauteurs plus grandes , diminuoit avec une Plus grande proportion ; de forte qu’elles étoient prefque femblables à la hauteur de 6o. degrés. Je rapporterai ici ce que J'ai pü tirer des obfervations faites dans le Nord par les Mathématiciens du Roi de Suéde. Peut-être ai-je calculé avec plus de fubtilité qu'il n’étoit néceffaire, cepen- dant j'ai crû ne devoir rien négliger. 1 Je me fers de Fobliquité de l'Écliptique telle que je l'ai trouvée d’abord par mes obfervations , & qui a été confir- mée par les obfervations que les Mathématiciens.&r Roi ont fait à la Cayenne. Je me fers aufli de la Régle des ré- fraétions célefes par laquelle étant donné deux réfradtions obfervées à diverfes hauteurs prifes dans un même lieu, Je trouve par la Trigonométrie les réfraétions qui convien- nent à tous les degrés de hauteurs pour ce lieu, ce qui me fit connoître qu’elles étoient fenfibles au-delà des termes ‘qu'on leur avoit donné , & qu'elles ne finiffoient qu’au Zenith. [ Par cette Régle l’on voit autant qu’on le peut vérifier , que la réfra@ion qui convient à 484 dans les Païs Septentrionaux, monte à une minute & demie. ] Je me fers enfin du demi-diamétre du Soleil, tel qu'il réfulte de mes obfervations dans le Solftice d'Eté. Je fuppofe que le Solftice d'Eté de l’année 169$. eft ar- tivé à Boulogne le 20. Juin à 21 heures 42. minutes après amidi, tel que M. Mezavachis l’a fupputé dans fes Ephé- merides tirées de mes Tables. Le Globe de Blaeu » Mar- ‘que Torneo plus Oriental que Boulogne de 11. degrés, 1700. F 42 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE c’eft-à-dire, de 44. minutes d'heures. Le Solftice eft donc arrivé à T orneo le 20. Juin à 22h 26° après midi. 4 T0 R NEO... 1 Co. Le 7. Juin, vieux file, la plus grande hauteur du So- leil , 47448 Le 8. Juin, LTRE Le 10. Jun, 7 50 4 Les différences de ces hauteurs , ayant égard à la décli- naifon , s'accordent dans la minute. Si l’on fe fert de la derniére obfervation qui fut faite 22h 26’ avant le Solfice, il faut avoir égard à la variation de la déclinaifon qui convient à ce tems, & qui eft de 12” qu'il faudra retrancher de l’obliquité de l'Ecliptique de 23h 29° 0", & l’on aura la déclinaifon du Soleil pour le midi du 10. Juin vieux file de 23d 28° 48. - Le 10. Juin. Hauteur Méridienne apparente du Soleil 47dso'o", Parallaxe du Soleil qui convient à cette hauteur , 7 Hauteur corrigée par la Parallaxe , 47 50 7 Réfraétion , 1 2$ Hauteur véritable du Soleil, 47 48 42 Déclinaifon du Soleil , 23 28 48 Hauteur de l'Equinoxial , 24 19 $4 Hauteur du Pôle à Torneo, 65 40 6 Elle eft marquée à la Page 42. de 6$ 43 0 Ils obferverent à minuit après le 10. Juin , que prefque les trois quarts du difque du Soleil étoient fur l’horizon & un quart au-deffous, de forte que le centre du Soleil étoit élevé fur l’horizon d’un quart de fon difque , c’eft-à- dire , de 7° 5’ fuppofant le diamétre du Soleil de 3 1° 40° comme il eft dans le Solftice d'Eté. La baffeffe de l'Equinoxial au-deffous de l’horizon vers le Nord qui eft égale à la hauteur de l'Equinoxial fur l’hori- zon vers le Midi, eft de 24 19 $4 DES SciENcEs. 43 fil’on en retranche ladéclinaifon qui étoit alors de 33 288 l'on a la baffeffe du centre fous l'horizon véritable de © fo 56 Parallaxe horizontale du Soleil a 10 donc baffefle du centre du Soleil fous l'horizon artificiel de SI mais le centre du Soleil paroifloit élevé fur Phori- zon de (oO NT donc à la hauteur apparente du Soleil de od 7’ ss" la ré- frattion étoit de od ç9’ œ fuppofant que l'horizon fenfible für le même que l’artificiel, comme il eft marqué à la page 12. 44. fans cela comme le Roi (v.p. 12.) & fes Mathé- Maticiens ( U.p. 44.) avoient obfervé le Soleil d'une Tour, dont la hauteur eft de près de 100. pieds, l'horizon Phy- fique auroit dû paroïtre 10. ou 1 1. minutes au-deflous de Phorizon artificiel. Il feroit donc à fouhaiter que l’on eût obfervé avec les inftrumens la hauteur ou la bafleffe de l'horizon fenfible, ou du moins la hauteur du bord fupérieur du Soleil au-def. fus de l'horizon artificiel. Peut-être l'ont-ils fait, & n'ayant pas trouvé de différence fenfible entre l'horizon apparent & l'artificiel ; ils ont négligé d’en tenir compte , de forte que Rous ne pouvons avoir aucun égard à cette différence. A PELL OO. Dans une cabane de Pello, qu’ils difent être éloignée de Torneo de 10. milles antiques , ils obferverent à minuit après le 11. que le difque du Soleil étoit non-feulement tout entier fur l'horizon , mais même qu’il paroifloit élevé de deux diamétres de fon difque , ce qu'ils efiment être 60. minutes , & ils ajoutent que la hauteur du centre du Soleil étoit à 45. minutes, d’où il paroît que la hauteur de 60’ fut celle du bord fupérieur du Soleil. Retranchant de cette hauteur de où 45" la refra@ion de Tycho qui eft de 30. minutes, l’on auroit la véritable hau- äeur du centre du Soleil de od 1 se Cependantils concluent, Fi 44 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE que le bord inférieur du Soleil tant la réfraétion, étoit élevé de 15. minutes fur l'horizon. Ils employerent un jour & demi à retourner de Kengis à Torneo , qui en eft éloigné de 16. nulles. La Latitude de Torneo par leur calcul eftde 65443 Et la Latitude de Kengis, 66 4$ La différence eft de 1d 2 de forte que fuppofant que leur chemin füt fur la méri- dienne, ils donnent à chaque mille environ 4. minutes. Si lon fuppofe que les milles antiques de T'orneo à Pello foient de la même grandeur que celles-ci, & que la dif- tance foit proportionnelle à la différence de Latitude , Pon aura la différence de Latitude de Torneo à Pello de od 39° mais la hauteur du Pôle à Torneo, felon eux, eft de 65 43 donc la hauteur du Pôle de Pello fera de 66 22 & la hauteur de l’Equateur de mais à minuit après le 11. la déclinaifon du Soleil fat de 53 29 donc la baffeffe véritable du centre du Soleil fous lhorizon , eft de © mais la hauteur apparente du centre du Soleil étoit de O 4$ donc à la hauteur apparente de od45' la réfration étoit de où 4 OÉEN GT TS: Ils arriverent le 14. Juin avec beaucoup de peine aux Mines de fer & de cuivre de Kengis, & ils virent des ba- teaux où ils éroient , le Soleil élevé de trois diamétres de fon difque fur l’horizon. Le 15.à 10" 15. ayant pris avec leur Afirolabe la hauteur du Soleil, ils fuppurerent la hauteur du Pôle de ce lieu un peu plus grande que 664 45. Ils n’expliquent: point la maniére dont ils fe fervirent pour la déterminer, mais parce qu’ils avoient établi la Latitude de T'orneo plus gran- de de 3. minutes ou environ ; que nous n’avons trouvé par leurs obfervations, nous pouvons retrancher 3. minutes, DÉS SciENCESs. 4s de cette Latitude eftimée de 661 45° & déterminer la Latitude de Kengis de 664 42° La minuit après le 14. la déclinaifon du Soleil étoit de 23d2$ Mis la baffeffe de Equateur corrigée, eftde 23 18 Donc la hauteur véritable du centre du Soleil fur l'horizon eft de di? 7: Mais la hauteur apparente du centre du Soleil étoit de id is Donc à la hauteur apparente de 14 1 5. la réfra@ion étoit à Kengis de 1d 8° Le Soleil ayant paru tout entier dans ces deux obferva- tions, & la hauteur & Soleil ayant été eftimée en diamétres du Soleil, il ÿ aapparence qu'ils ont comparé cette hauteur avec le diamétre vertical qui eft dans le cercle de hauteur, lequel fe retreflit par la réfra&tion, & alors cette derniére obfervation s’accorderoit mieux aux précédentes. Ils rapportent qu’à Kengis où l’on voyoit le Soleil éle- vé de 3. diamétres de fon difque fur l'horizon, il eft démons tré très-clairement qu'ils ont vû le Soleil entiérement dé- gagé de la réfra@ion; mais l’on né voit pas bien comment ils ont pü le conclure, puifque par le calcul que je viens de rapporter , lon trouve que la refra@ion eft plus grande à Kengis que dans les deux autres lieux précédens, quoi- que la hauteur foit plus grande. L'on fouhaiteroit aufi de fcavoir comment il faut enten- dre ce qu'ils difent (v.p. 70.) que dans la Cabane de Pello lon auroit vû le bord inférieur du Soleil avant la réfra@tion élévé de 15. minutes fur Phorizon, puifqu'ils ont marqué que par l’obfervation le centre du Soleil avoit paru éle- vé de 45. minutes fur l'horizon, d’où en retranchant la ré- fraétion qu’ils fappofent de 30. minutes, l’on auroit la hau- teur du centre du Soleil corrigée par la réfraction de 15. minutes, & non pas la hauteur du bord inférieur du Soleil . qui par ce calcul devroit toucher l'horizon. L'on a aufli quelque difficulté far ee que (page 44.)il eft marqué que le difque du Soleil ne paroifloit pas feule- Fi 46 MEMOIRES DE L’ACADEMIE ROYALE ment entrer fur l'horizon , mais même qu'il étoit élevé de deux diamétres de fon difque. Car l’on feroit porté à con- cevoir qu'il y avoit deux diamétres du Soleil entre le bord inférieur du Soleil & l'horizon, s'il ne réfultoit diverfe- ment de ce qui eft marqué (4 /a page 70.) de la hauteur du centre de 45. minutes. Ce que nous marquons ici eft digne d’éclairciffement, fi on peut l'avoir de ces Meflieurs qui ont travaillé aux obfer- vations ou qui y ont affifté. Pour examiner la réfraion d'une minute 25. fecondes que nous avons employé à la hauteur apparente de 474 so,nous nous fervirons de la proportion de la hauteur de l'air réfra@tifau demi-diamétre de la terre que nous fup- pofons être comme 609$. à 10, 000, 000, laquelle à la hauteur de 7° $ 5”, ou à la difiance du Zenith de 89 $25$ donne l'inclinaifon du rayon vifuel à la furface de l'air de 874 59 44; y ayant ajouté la réfraétion obfervée à Tor- neo de 59° 0’, l’on a l'inclination du rayon extérieur à la même furface de 884 58° 44", & comme le Sinus de 89 52 o. eft au Sinus de 87 59 44, amfi le Sinus de 42d 10° - complément de la hauteur de 474 so au Sinus de 4248 7. Et comme le Sinus de 874 59° 44 eft au Sinus de 88d ç8” 44. ainfile Sinus de 424 8 7 eftau Sinus de 424 9° 32 la diffé- rence qui eft de 1’ 25° eft la réfraétion à la hauteur donnée. De la même maniére l’on trouve la réfraétion horizon- tale à Torneo de 59 18. Nous nous fions plus aux obfervations de Torneo qu'aux autrés à caufe que la hauteur du Pôle y a été prife avec plus d’exaétitude que dans les autres lieux; c’eft pourquoi nous en avons tiré la réfraétion horizontale. Il feroit important d’obferver à Torneo dans l'endroit où l’on a và le Soleil à minuit ; s'il y a quelque différence entre l’horizon fenfible-& l'artificiel. Et afin de n'être pas obligé d'employer la hauteur de l'air réfraëtif tirée des obfervarions faites ailleurs , il fau- droit prendre à Forneo des hauteurs méridiennes du So- leil, lorfqu’il eft vers le, milieu du Scorpion & d'Aquarius, DES SCIENCES. 47 ‘où il eft élevé à Torneo de 7 ou 8 degrés, pour pouvoir les comparer avec les horizontales, & en tirer la hauteur de l'air réfra@if & la propofition de la denfité de l'air à celui de l'éther , qui font les deux élemens néceffaires pour détermi- ner les réfraétions à toutes les hauteurs. SUR L’AFFECTATION DE LA PERPENDICULAIRE, * remarquable dans toutes les tiges , dans plufieurs racines, & autant qu'il ef} polfible dans toutes les branches des Plantes. | Par M. DoDaRT. r7oc: . 3 ; a £ 20. Février. N voit affez qu'il faut que les Plantes foient droites & à plomb pour fe foûtenir plus aifémenr, & pour re porter leurs fruits ; mais il s’agit de fcavoir, non pour Pie. quelle fin cela fe fait, mais comment , & par quelles cau- fes. Le fait tout feul fournit des circonftances aflez remar- ne, quables pour mériter d’être remarquées , quand même ces du fait qui elles feroient inexplicables ; car la feule Hiftoire de la na- E EL ture fait la plus grande & la plus confidérable partie de la PE Le Phyfique. 1. Prefque toutes les tiges & les racines naïflent coudées fousterre; cependant les tiges en fortent droites , & untrès- grand nombre de racines s’y enfonçent à plomb, & toutes. fuient l'air , & prennent toujours le bas. 2. Les Plantes qui fortent tranfverfalement d’un fol efcat- 7. la 1, Fig. pé fe redreflent dès qu’elles font à Pair, & fe tapiffentcontre EE Jeunes le fol efcarpé d’où elles fortent, fi leur tige a dès-lors des ” fibres affez fermes. 3. Sinon, leur propre poids leur ayant fait faire un cow- 7.111. Fig. de en les abbattant, elles fe redreflent à quelque tems 4 AN de-là , mais en faifant un fecond coude fans reëtifier le pre- ue mier, V. la xs. Fig, de la feconde Table. LIT Preuves de la néceflité d’une double direction dif- férente de cel- le que la fi: tuation de la graine donne à la tige & à la racine, 48 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE 4. Siune jeune tige d'Arbre eft dégauchie de fa per: pendiculaire naturelle par quelque caufe violente, elle fe redreffe à l’extrénuté & reprend fa perpendiculaire. J'ai vû fur la defcente de Meudon à Châville dans le Parc, plu- fieurs exemples de redreflemens beaucoup plus violens. Car plufieurs jeunes Pins ayant été abbatus par quelque tempête fur une pente plus & moins inclinée, toutes les fommités de ces Arbres fe font élevées à plomb, faifant par conféquent toutes avec da ligne des tiges , chacune un angle aigu plus ou moins ouvert, felon que la pente fur la- quelle Jes tiges ont été abbatues, fe trouve moins ou plus inclinée. J’en apportai il y a quelque tems plufieurs échan- tillons à l’'Affemblée qui fe tenoit alors à la Bibliothéque du Roi. La Compagnie peut s’en fouvenir. Mais fans avoir recours à ces cas extraordinaires qui prouvent fi fortement Paffe@tation dont il s’agit , ce qui arrive dans prefque toutes les branches , en eft une preuve fuMfante , car naiffant toutes du tronc tranfverfalement , la plüpart fe redreffent au moins vers l’extrémité, & la même chofe arrive aux rameaux qui naïffent des côtés des branches en plufieurs Arbres, par exemple, au Frefne. On obferve donc fuivant ce qui vient d’être dit, deux redreffemens dans les Plantes , l'un prefque inévitable &c perpétuel de la tige & de la racine fous terre, & l’autre des tiges, & en quelque forte des branches & des rameaux à l'air. À l'égard du premier redreffement, chacun fçait que la plüpart des Plantes fe fement elles-mêmes, & que celles qui font femées par les Laboureurs & par les Jardiniers, font femées de forte que le feul hazard de la chute donne à toutes les graines leur fituation dans la terre qui les cou- vre , & fur-tout aux femences d’une figure approchante de la Sphérique. La fituation du germe dans fa graine eft re- glée, en forte que fa radicule & fa plantule , c’eft-à-dire, le germe de la racine & l'embryon de tout le refte de la Plante font toujours au même lieu de la graine, & dans une même fituation , tant à l'égard de la graine , que l’une a l'égard D ELSAWS CD E Nice 8 49 à l'égard de l’autre : & en plufieurs graines | comime les légumes, la pointe de la radicule eft tournée vers l'endroit d’où vient à da graine mere la féve de la Plante; & la di- rection de la Plantule dans la graine fe trouve oppofée au moins dans fon origine à la direétion de la radicule. Tout cela eft fort réglé , mais la chute des graines dans la terre & leur fituation eft au hafard. Or il ef impofible qu’un ha- fard foit uniforme. Les graines tombent différemment, les caufes qui les couvrent de terre > ou qui les y enfoncent, changent encore leur fituation. Cependant elles pouffent toutes uniformement leurs tiges en enhaut, & leurs raci- nes en embas, & il eft remarquable que ces diredions op- pofées de la tige & de la racine font perpétuelles & unifor mes, foit que les graines germent à l'air, foit qu'elles ger- ment dans la terre. Les Braffeurs font germer à l'air tousles grains dont ils fe fervent pour faire de la Bierre, en les amoncelant, & fouvent dans des lieux élevés après les avoir humedtés. Et en cet état ces grains germés ont tous leur germe la pointe en embas. J'ai vû la même chofe dans des glands de Chêne amoncelés en lieu humide fur un en- droit de terre foulé aux pieds, & peu propre à recevoir Jeurs germes. | Soit que les graines foient amoncelées à Vair, ou femées en terre , il eft rare & comme impoffible que la graine fe trouve fituée de maniere que fa radicule foit en embas , & fa plantule en enhaut. Car quand on affe&teroit de planter les graines une à une , & quand les Jardiniers auffi inftruits de la fituation de la radicule qu'ils le font peu, voudroient planter toutes les graines, de forte que la pointe de la radi- cule regardêt le bas, & la plantule le haut, ils n’en pour- roient venir à bout dans la plüpart des Plantes, & peut- être dans toutes, mais! tout au moins dans les légumes, car dans ces Plantes , la ligne de da radicule fait un coude avec celle de la Plantule, parce que fa plantule.eft recour- bée pour fe nicher entre les deux lobes de la graine où elle a une niche également creufée dans l'un & dans l'autre lo be, & Ja plantule doit être ainfi fituée au-dedans de la plü- 1700. Voy. Table s. Fig, À. & Fig. t. TV, Conjeñures fur les caufes so MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE part des graines , fi elle ne l’eft dans toutes. De plus , les graines plates fe fement d’elles-mêmes prefque toutes fur le côté. Il n’y a guéres que les graines aigretées qui fem blent faites pour fe femer d’elles-mêmes à plomb , c’eft-à- dire dans le fens naturel; car toutes ces graines font atta-- chées à la plante par leur pointe ; c'eft-à-dire , par le bout oppofé à celui qui porte l'aigrette , & la pointe du germe regarde , comme il a été dit en plufieurs Plantes, l'endroit par où la graine encore attachée à la Plante, reçoit fa nour- riture de la Plante, d’où il s’enfuit que la pointe de la radi- cule regarde le point de cette attache: C'eft ce qui me donne lieu d’appeller , plantées dans le fens naturel , toutes les femences aigretées qui fe fement d'elles-mêmes la ra- cine en embas. Cependant cela ne peut arriver dans les. Plantes que le vent feme, qu’en un cas. C’eft lorfqu’ayant été emportées par un vent très-leger , elles tombent à plomb dans un moment de calme foudain. Mais ce cas eft rare, parce que c’eft le vent qui feme ces Plantes , & qu'il eft rare: que le vent cefle tout à coup ,. & tout jufte un peu avant Finftant où ces graines prennent terre. De plus, lorfqu’el- les font tombées, quand même le terrain feroit affez bien: difpofé pour permettre que la pointe d’un corps fi léger;. & qui tombe fi lentement, entrât dans la terre fufhfam- ment pour fe foutenir un peu de tems fur fon plomb : dès que le vent recommence à balayer la terre, la poufliere. qui les couvre peu après , & les pluies qui les enfoncent dans la terre, & le Hétriffement de leur aigrette, & leur propre figure à-peu-près ou conique , ou cylindrique, les couchent incontinent fur le côté. Cependant malgré toutes. ces différentes fituations fi inévitables, & fi peu favorables à la direétion de la racine , toutes les racines prennent le bas, & toutes les tiges prennent le haut fans manquer. Il faut donc que les tiges fe redreflent, & que les racines fe rabattent par-tout où les graines ne fe trouvent pas plan- tées dans le fens naturel. Il femble que la raifon méchanique de ce premier re- dreflement pourroit être que tout accroiffement eft une | DES SCIENCES. si æfpéce de progreflion, & que cette progreflion doit être änfenfible, & fe fait au travers des corps qui environnent lagraine. Cette progreflion doit donc fe faire vers le lieu où le corps qui croît, c’eft-à-dire , la Plante, trouve moins dobflacle. Or dans un terrain uniforme, il y a toujours moins d'obflacle pour la tige vers la perpendiculaire en en- haut, que dans quelque ligne que ce foit , parce qu'il ya moins de terre à percer. Mais ce n'eft pas-là la caufe de la direétion de la tige en enhaut ; puifqu'elle à la même diredion dans les graines qui germent & pouffent hors de terre; & de plus cette raifon ne peut s'appliquer à la progreffion des tiges ni des racines, des graines amoncelées qui germent à l'air; car d’où vient que dans quelque fituation que ce foit, nulle graine ne poufle fa tige que vers le haut, puifqwelle ne twouve nul obftacle dans l'air de quelque côté que ce foi, & d’où vient que nul germe ne prend aucune- dire&tion que vers le bas , en quelque fituation que la graine fe trou- ve, malgré les obftacles qui fe préfentent aux germes des graines plantées? Ce n’eft donc pas la facilité du pee plus ou moins grande qu'il faut confidérer , pour deviner la caufe de cette diredion. Et cela paroît encore plus clair par les graines qui germent dans la terre, & principale- ment par celles des Plantes qui piquent droit en fonds, comme l'Eryngium, le Burfa Pajloris, & tant d’autres. Car au lieu que les tiges tournées vers le côté horifonta- lement, ourenverfées en embas, fe redreffent vers le haut, Comme pour prendre lair, ce chemin leur étant plus facile que de percer la profondeur de la terre; les ra- cines au contraire même des graines plantées contremont, font la croffe , comme pour prendre le bas & s’enfon- cer en terre, ce qui eft incomparablement plus difficile que de percer la furface en prenant la perpendiculaire en n'en viendroit pas à bout. Je ne laifferai pourtant pas de dire ici ce qui m'eft venu dans lefprit fur ce fujer. Ileft clair que la caufe du redreflement de fa tige fous terre, n’eft pas la feule facilité plus grande de percer la terre de bas en haut, felon la perpendiculaire ; puifque cette caufe ne peut être appliquée aux racines, comme ila été dit ci-deflus. Il faut donc avoir recours à d’autres caufes. Voyons fi la différence de fubftance ou de ftrudu- re des fibres dans les tiges & dans les racines pourroit pro- duire cet effer. Si cela eft, il faut que les fibres de la tige foient de telle fubftance , ou de telle ftruêture , qu’elles fe trouvent plus fufceptibles de, fe raccourcir du côté qui re- garde le Soleil en conféquence de la diffipation de leur fuc par la chaleur de cet Aftre, & que ces mêmes fi- bres foient plus fufceptibles d’allongement du côté qui regarde le profond de la terre, tant par l'introduétion de la vapeur dans les cellules des fibres » qui font difpofées felon leur longueur ; que par l'hume@ation & l'amolif. fement de leur corps, caufé par lPattouchement de la même vapeur. Il faut au contraire que les fibres des raci- nes foient de telle fubftance, ou de telle ftruêture , que l'hu- midité fouterraine continuellement réfoluble & adtuelle- ment réfolue, gonfle, & conféquemment raccourciffe les fibres de la racine les plus expofées à l’afcenfion de ces va- peurs, jentens les fibres qui fe trouvent fituées felorrla li-. gne de leur longueur qui eft la plus baffe , ë&t par conféquent: la plus expofée à l'afcenfion de ces vapeurs. Et il faut en: core que la fubfance ou la flrudure des fibres oppofées les: rendent capables de relâchement du côté qui regarde: le: Soleil, foit par fa raréfa@tion de leur fac & de Pair qu'il: contient, foit par le raccourciflement de leurs fibres du côté qui regarde le profond de la Terre. Mais après tout; il faut avouer que ces raifons ne fatisféroient pas entiére- Gi VIï. Autre corr- jeture pius probable fur la. caufe desdeux directions fou terraines op- pofées de la tige en en- haut, & dela racine en em bas, s4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ment à la queftion de fçavoir comment les racines peu< vent piquer en fond aétuellement & effeétivement , malgré la réfiftance de la terre, felon la direttion, fi on ne confi- déroit que la terre même foulée jufqu’à un certain point, ne laiffant pas d’être poreufe , peut livrer paflage à un corps aufli délicat qu’une racine naïflante, fur-tout, ce corps étant affez fouple pour gauchir en tout fens, & s’infinuer dans les pores les plusvoifins de la perpendiculaire vers laquelle il eft forcé de tendre par les caufes ci-deflus expliquées. Il eft ua peu plus difficile de deviner comment fe peut faire le fecond rabattement de la racine plantée à con- trefens du premier , car il y a deux nouvelles difficultés oppofées au fuccès de cette expérience. L’une vient de la fituation de la racine la pointe en enhaut & à plomb, l'autre de la réfiftance de la terre (quoiqu’elle ne foit que médiocrement refoulée) & de fon oppofition au fecond rabattement. Pour ce qui eft de Ia fituation , la racine étant fituée à plomb , la pointe en enhaut, les vapeurs de la terre mon- tant perpendiculairement, & gliffant également de toutes parts le long de ce pivot renverfé , n’ont pas dû avoir plus de prife d’un-côté que d’autre, pour raccourcir les fibres longitudinales d’un certain côté plus que de l'autre, & par ce moyen faire faire peu-à-peu la crofle de ce côté-là. Mais comme il ne difficile de fituer fi exaétement cet. te racine à plomb de bas en haut , ou de la trouver fi droite qu’elle ne donne pas plus de prife d’un côté que de l'autre, ou dans un endroit qu'en tout autre, il ne refte plus qu'à deviner comment il peut arriver que la racine environnée de terre de tous côtés, & tenue dans une fi- tuation renverfée, a pû vaincre cette réfiftance de la terre pour fe remettre dans le chemin oppof à celui où on l’a- voit voulu engager par une fituation oppofée à fa direc- tion naturelle. Il y à beaucoup d'apparence que cette feconde direc- tion s'eft faite comme la premiére par un dégauchiffement infenfible de l'extrémité de la premiere croffe, & que ce DES SCIENCES ss ‘dégauchiflement a été caufé par le raccourciflement des fibres les plus expofées au mouvement perpendiculaire de bas en haut des vapeurs de la terre, & que ce raccourciffe- ment augmentant de plus en plus à mefure que la recour- bure approche le plus de la kgne Horifontale, & eft plus expofée à l’afcenfion de ces vapeurs, les fibres ne ceflent de fe raccourcir que quand la pointe tournée en embas, eft enfilée droit par les mêmes vapeurs. Car il eft clair qu'après cela les vapeurs montant felon la perpendiculaire, ne peu- vent plus que redreffer cette racine contre tous les petits gauchiflemens , que lobliquité des pores de la terre l’a obli- gée de fouffrir, pour trouver le moyen de piquer en fonds. Un peu d'attention fait voir cela & le démontre aufli claire- ment & plus promptement qu’un long difcours. Au refte les germüres faites à Pair , & tendantes vers la terre, font voir que ce n’eft pas le contact de la terre qui caufe la direction des racines , mais les feules vapeurs aqueu- fes élevées de laterre, ou plütôt de l’eau qui y eft conte- nue,.comme on voit par les grains amoncelés,. humeétés. & germés dans les Brafferies, & même dans des greniers fort éloignés de laterre. Quelle eft maintenant cette fubftance ou cette fruQure- . qui néceflite les tiges à prendre le haut, & les racines à prendre le bas , & en quoi confifte cette différence qui leur donne une direttion fi oppofée , fi conftante & fi unifor- me? Eft-ce que chaque fibre de la racine eft torfe , & que routes les fibres de la tige font droites ? Efi-ce que chaque fibre de l’une & de lautre étant torfe, celles de la racine le font beaucoup moins que celles de la tige, & confé- quemment donnent plus de jeu aux particules d’eau agitées qui compofent les vapeurs, & plus d face inférieure de la racine germante,, horifontalement ou diverfement inclinée à l'Horifon ? L'air contenu dans les fé. ves différentes de la tige & des racines, a-t:il quelque part dans un effet fi furprenant? eft-il en plus grande quantité dans la racine? y eft-il plus capable de reffort. pour çon- e lieu à l'effet, c'eft-à-- dire ; au raccourcifflement qui doit s’en enfuivre dans la fur-- VPIT.- Combiez: cette” conjec- ture laiffeà de-- firer d'éclair- ciflemens né-- ceffaires poue yne entiére fo-- lution du Pro=- blême pro- pofé. IX Conje&ture Sur le redreffe- ment des tiges des branches & des Meaux, Xa- 56 MEMOIRES DE ’AGADÉMIE ROYALE coutir par l'allongement de fa furface fapérieure , avec les vapeurs qui raccourciffent la furface inférieure, & par le concours couder la racine en embas, quand fa fituation l'exige pour prendre terre? Eft-ce la fubftance des particu- Îes élémentaires, dont les fibres de ces deux parties font compofées , la différente ffruêture ou abfolue ou refpe&tive de ces particules ou de leurs intervalles, qui caufent cet effet? Je ne fçai rien de tout cela, & j'aime beaucoup mieux n'en tenir au plailir d'admirer un effet certain, per- p la chaux viÿe n'a Ti, jo MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE pas retenu plus d'efprit acide, qu’en a retenu la chaux éteinte. J'ai jointaux Alcalis à examiner la poudre des coquilles d'Huitres, parce que je les ai donné avec beaucoup de fuc- cès à plufieurs perfonnes , dont l’eftomac gâté caufoit des maladies très-incommodes ; l’efprit de nitre aufli-bien que l'efprit de fel en ont diffout beaucoup en comparaifon des autres Alcalis de lamême nature, fcavoir des Perles, des coraux, & de la nacre de Perles. Je crois que la facilité de leur diffolution dépend en par- tie de ce que la fubflance de la coquille d'Huitre eft remplie d’un fel falin, qui paroït manifeftement fur la langue ; ce fel tient déja la coquille à demi difloute ; laquelle étant d’ail- leurs fort tendre & fort friable , admet aifément les pointes des acides pour en achever la diflolution , au lieu que la fubfance des Perles & de la nacre de Perles n'étant pas entremêlée d'un fel falin, au contraire étant un Corps fec & très-dur , leur diffolution ef plus violente. Je crois que la facilité de la diffolution des coquilles d'Huitres, eft une des raifons pourquoi elles produifent de fi bons effets dans les eftomacs gârés par des acides , à la- quelle on pourroit ajouter la quantité de fel falin qu’elles contiennent , lequel ne me paroît pas un fimple fel marin, mais un {el provenant de l’animal de l'Huitre , ou au moins un fel qui a recû un grand changement par cet animal, ce qui eft confirmé par la forte odeur & par le goût pénétrant , outre le falin, que lon fent dans cette eau qui fe trouve dans les interflices des feuilles qui compofent la coquille lorfqu'on la caffe avant qu’elle foit fort féche. . On prépare les coquilles d'Huitres différemment ; mais comme la préparation les peut altérer & gârer, particuliére- ment lorfqu’on les calcine par le feu, j'ai voulu ajouter ici L maniére dont je me füis fervi pour les préparer. Prenez cette partie de la coquille de l'Huitre qui eft creufe , en jettant l’autre moitié qui eft plate, lavez-les bien des ordures extérieures ; & faites-les fécher pendant quelques jouts au Soleil; érant bien féches , pilez-les dans DES SCIENCES. 71 un mortier de marbre, elles fe mettront en bouillie, expo- fez-les de nouveau au Soleil pour les fécher , puis'ache- vez de les piler , paffez la poudre par un tamis fin ; la doze en eft depuis 20 jufqu'à 30 grains, dans ç ou 6 cuillerées de vin blanc ou d’eau de méliffe le matin à jeun; il faut Continuer à en prendre pendant trois femaines ou un mois. COMPARAISON DES ANALYSES du Sel Ammoniac , de la Soye, & de la corne de Cerf. Par M. TOURNEFORT. E toutes les matiéres connues, il wyena point, ce me : À Fetes > qui donne tant de fel volatile en corps que le fel Ammoniac. On mêle ce fel avec le fel de Tartre ou avec la chaux; & les diftillant par un feu modéré, l’on en tire comme tout le monde fait, l'efprit & le fel volatile ; car la chaux ou le fel de Tartre atrêtant la partie acide du {el Ammoniac , donnent lieu à la partie volatile de fe débar. rafler & de fe fublimer. Quinze onces de fel Ammoniac mêlées avec vingt onces de fel de Tartre, donnent dix on- ces de fel volatile , qui font les deux tiers du fel Ammoniac analifé. On en retire outre cela trois onces & demie d’ef- prit. Le Caput mortuum peze 20 onces +, c’eft-à-dire , demi-once de plus que le fel de Tartre que l'on a employé, Aünf il y a beaucoup d'apparence que les trois onces & demie d’efprit de fel Ammoniac , viennent en partie du flegme qui eft dans le fel de Tartre ; lequel flegme diffout autant qu'il peut du fel volatile du fel Ammoniac uni avec un fouffre très-pénétrant ; car il n’eft pas vrai-femblable que les quinze onces de fel Ammoniac analyfées , ne con- tiennent qu’une demi-once de partie acide. Le {el de Tar- ire conferve toujours beaucoup de flegme. Quelque fec qu’il paroïfle , il devient fort humide; & fi on le metfur le 1700. 6 Mars. 72 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE feu dans une poële de fer pour le deffécher de nouveau , & qu'on l’employe tout chaud fortant de la poële avant que l'air lait pénétré , lefprit volatile du fel Ammoniac ne fçau- roit prefque fe débarraffer. Après.le fel Ammoniac, la corne de Cerf pale pour une des matiéres qui donne le plus de fel volatile. Cependant il eft furprenant que la Soye crue, qui n’a ni odeur ni faveur en contienne beaucoup plus. ; Quinze onces de Soye crue coupée menu mifes dans une cornue à un feu très-lent , donnent deux onces deux gros de fel volatile en corps, au lieu que quinze onces de corne de Cerf difillées auffi à la cornue , n’en donnent que demi-once demi-gros. On tire de la Soye trois onces & demie d’efprit volatile. De la corne de Cerf on en retire quatre onces fept gros , c'eft-à-dire, une once trois gros de lus. Mais tout bien confidéré , il eft certain qu'il s’en faut plus de la moitié que la corne de Cerf ne produife tant de fel volatile que la Soye. Il faut peu de fel volatile pour ani- mer une once & trois gros de flegme, & le rendre affez pé- nétrant pour mériter le nom d’efprit parmi les Chimif- tes. Aufli le Caput mortuum de la corne de Cerf a pefé neuf onces deux gros ; & celui de la Soye n’a pefé que cinq onces cinq gros; ce qui fait bien voir que la corne de Cerf contient beaucoup plus de matiére terreftre que la Soye. On vient de dire que Pefprit volatile de corne de Cerf n’eft qu’un flegme rempli de fel volatile joint à un foulfre très-pénétrant , expérience fuivante paroïît aflez favorable pour le montrer. Si l’on verfe de l’efprit de Vin fur l’efprit de fel Ammo- niac, ou fur l'efprit de Soye, il fait d'abord une concré- tion faline fort confidérable. Dans lefprit de Soye , cette concrétion eft manifeftement féparée en gros grumeaux de fel : dans celle du fel Ammoniac, le fel volatile eft ex- trêmement divifé , & l’on a d’abord quelque peine à con- noitre fi c’eft une maffe faline , ou une mafñfe fulfureufe ; ce qui DES SCIENCES 73 qui lui a fait donner le nom d'Ofa Helmontii ; mais l’on eft facilement convaincu qu'elle eft toute faline, puifqu’elle fe diffout entiérement, fi l'on y verfe de l’eau. Pour ce qui eft du foulfe pénétrant & délié qui fe trouve dans les €fprits volatils , il femble qu'il fe manifefte affez par fon odeur infupportable. Les concrétions falines quiarrivent par le mêlange de Pefprit de vin , & des efprits volatiles, pourroient être rap- ortées à l'acide de l’efprit de vin, qui en s’uniffant avec Îe fel âcre forme des grumeaux aflez fenfibles; mais com- me nous n'avons pas des indices aflez forts pour faire voir qu'il y a véritablement de l'acide dans Pefprit de vin , il paroît plus vrai-femblable que ces concrétions fe font en- fuite de l'union des foulfres de l'efprit de vin, avec ceux des efprits volatiles. Suppofé que ces foulfres s’'accrochent enfemble & qu'ils fe lient entre eux, comme il arrive à celui de l'efprit de vin, qui détache les foulfres de pref que tous les autres Corps: il ne doit pas paroitre extraor- dinaire que les parties falines qui étoient parfaitement bien foûtenues par le flegme des efprits urineux joint à leur foul- fre, fe précipitent en quelque maniére dès le moment que le foulfre qui fervoit comme d’aile aux parties aqueufes, en eft féparé. ÿ L’efprit volatile de la Soye re@ifi£ avec l'huile de Ca- nelle , ou avec quelque autre huile effentielle , fait ce qu'on appelle les véritables goutes d'Angleterre. Monfieur Lifter de la Société Royale & très-habile Médecin de Lon- dres , ma communiqué ce fecret que l’on tient encore aflez caché en Angleterre. Le Roi Charles II. l’acheta d’un Chimifte appellé G. | L'expérience a fait voir que ces goutes, ainfi que le fel volatile de la Soye, re&ifié & parfumé avec quelque huile effentielle , étoient très-proprés pour les affdions fopo- reufes & pour. les vapeurs; on s’en fertintérieurement ou bien on les fait flairer aux malades ; mais je n’ai pas trouvé qu'elles foient préférables aux préparations de la corne de Cerf, du fel Ammoniac, ni à l'efprit & au fel volatile huileux 1700, 1700. 6 Mars, 74 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ordinaires ; fi ce n’eft par leur odeur, qui eft beaucoup moins défagréable , & par conféquent plus propre pour les perfonnes délicates. PR DUB AL ET Par M. DE LA HIRE. Es trois côtés d’un Triangle re@tiligne étant donnés è NA (e) 2 trouver la Superficie ou l’Aire. Ce Problème eft un des plus curieux & des plus utiles de toute la Géométrie Pratique pour la mefure des Super- ficies dont on ne peut pas connoitre les Angles ; & lorf- qu'on peut mefurer les côtés d’un Triangle, on peut tou- jours connoître fa Superficie plus facilement & plus jufte- ment par cette Méthode , que par toute autre ; car on n’a point befoin d’Inftrument divifé par dégrés, ni de Fables de Sinus ; une feule Toiïfe ou Chaîne fuffit pour toute l'O- ire à. P érarion. Je trouve dans Métius que ce Problème eft de héon, dont la folution eft affez fimple , mais la démon- ? B . 4 LA x 4 ftration en eft très-compofée & très-embarraffée. T'ous ceux qui en ont écrit ont tous fuivi lamême Méthode. En voici une autre conftruétion dont la démontftration eft fort fim- ple, & qui fert à même tems à démontrer la conftruétion dont on fe fert ordinairement. Soitle Triangle pro- pofé , 4 BC, dontles trois côtés foient abc connus. Je dis que Viaabb+ïaacc Hrbbcc— 7% at — \ Le = b+ —} Fe à la fu- D HATTLI LE EE ss = perficie du Triangle. DES SCIENCES. 75, DEMONSTRATIO NN. Soit prolongé , s'il eft néceffaire, l’un des côtés du Triangle, comme B C, fur lequel de PAngle oppofé 4. foit mené 4 D perpendiculaire, & foit 4 D — x & CD = Y. Onabb—yy—= xx, & femblablement aa cc—2cy—yy=xx, d'où vient l'équation bb—yy —œaa—cc—2cy—) y quife réduità—bb+aavpec 28722 & par conféquent À D fe- = 2 c y ou bien y = z C ra V hhpaasdi cc , laquelle étant multipliée par 2 C +c donne pour la fuperficie du Triangle la même racine qu’on a propofée. Mais par la Méthode ordinaire , il faut prendre la moi- tié de la fomme des trois côtés, & de cette moitié en ôter chaque côté; ce qui donne trois refles, qui avec la même moitié font quatre quantités ; & fi du produit de ces quatre quantités l’une par l’autre on en tire la Racine quarrée , on aura la fuperficie du Triangle. Et dans les pofitions qu'on a faites ci-devant, La moitié des trois cotés eft131p4icr Les deux La dif. de # à cette moitié —La+ip4i 72 Ée 2 2 2 Quantités. La diff. de #àlamême eft—15+latice ue La diff de c à la même eft+ 1419 2teS Gantités. Maintenant fi l’on multiplie les deux premieres Quan- tités l’une par l’autre, à caufe du même terme qui a diffé- rens Signes, le produit fera +bb+icc+ibc—taa. Et par la même raifon le produit des deux fecondes Quantités lune par l’autre , fera —+bb—=ccH+ibe + =a a. Enfin pour achever la multiplication , il faut multiplier ces deux produits l'un par l’autre, qui ont les mêmes ter- mes chacun, mais avec des Signes contraires, hormis le feul be, ce qui donne un produit — + bt— Lct— Late Ki 76 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE bhcc++bbhaat+aaccquieftle mème que celui qu'on a trouvé par la régle précédente, & dont la racine quarrée fera la fuperficie du triangle propofé. Ce qw'il falloit faire. SUITE DE S''AMAENSES de PYpecacuanha. Par M. Bouzpuc. ] E promis la derniére fois, parlant de l’Ypecacuanha gris, de continuer mesobfervations fur les deux autres : je les ai faites ; j'y ai tenu le même ordre, & j'ay gardé les mêmes roportions. Par la difillation que j'en ai faite , j'ai remarqué que le brun contenoit moins d’huile , & que la derniére portion de cet efprit qui fort avec l'huile par la derniére violence du feu, quoique confidérablement acide , me fembloit conte- nir plus de parties volatiles que ne m’avoit paru en contenir cette même portion d’efprit tiré du gris. J'en ai jugé ainfi par le mélange que j'ai fait de l’un & de l'autre de ces efprits avec du fel de Tarte; les particules volatiles du brun fe font échappées avec plus de vivacité, & ont frappé autrement l’odorat que n’ont fait celles du gris. De ces deux faits j'ai jugé par avance , que fi cet Ypeca- cuanha brun contenoit moins de parties huileufes que le gris , il contenoit aufli moins de parties réfineufes; & en fecond lieu , que fi cette derniére portion d’efprit paroif- foit contenir plus de parties volatiles , que c’étoit la raifon pour laquelle il étoit plus violent dans fes effets. Cette obfervation pourroit affez autorifer le fentiment de ceux qui croyent que la vertu purgative des médicamens eft ex- citée par un certain fel volatil, & qu'ils font plus ou moins violens , felon qu'ils contiennent plus ou moins de ces fels volatils. La queftion eft encore trop délicate pour prendre parti ; elle mérite confirmation par des expériences plus fenfibles ; que je ne négligerai point dans l’occalion & dans mon travail, DES SCIENCES. 77 Voilà ce que j'ai remarqué de plus effentiel fur P'Ype- cacuanha brun comparé avec le gris, par les diflillations que j'ai faites de l’un & de l’autre. Il me refte à toucher ce que m'ont produit les différentes extraétions que j'en ai fai- tes ; elles ont été les mêmes que celles que j'ai ci-devant mis en ufage fur le gris , & toujours par comparaifon de l’un à l'autre. J'y ai d’abord connu les mêmes produits , c’eft-à-dire , un extrait réfine , & un extrait falin ; mais l’un & l’autre de ces extraits en bien moindre quantité dans le brun que dans le gris, & copféquemment le marc de celui-là plus pefant ue le marc de celui-ci. Mais il eft bon de rappeller ces proportions. De huiton- ces d'Ypecacuanha gris , je tirai avec l'efprit de vin dix dragmes d'extrait réfineux : de pareille quantité du brun , je h’en ai tiré que fix dragmes. Du réfidu de ce gris dénué feulement de fon extrait réfineux , je tirai par le diffolvant aqueux deux onces d’ex- trait falin ; & le même rélidu de ce brun ne m'en a produit que cinq à fix dragmes. Le marc du gris dépouillé tant de fes parties réfineufes par l'efprit de vin , que defes parties falines par l'eau, s’eft trouvé pefer quatre onces; & ce dernier au contraire a . été de près de fix onces ; ce qui prouve que les principes a@tifs font plus abondans , & en de grande quantité dans FYpecacuanha gris , que dans l’Ypecacuanha brun. Ce fait s’eft confirmé par lextra@ion fuivante oppofée à la premiere. Je m'étois fervi dans la précédente de l'ef- prit de vin, & enfuite de Peau; jai au contraire d’abord employé l’eau dans celle-ci, & enfuite l’efprit de vin, dans la même vûe que j'ai toujours eu de pouvoir diffoudre par un même diflolvant, & les pärties rélineufes & les par- ties falines , principalement quand les premieres ne prédo- minent pas fur les derniéres par les raifons que j'ai avancées dans mes premieres obfervations. J'ai donc remarqué que huit onces de cet Ypecacuan- ha brun, na produit par le moyen du diffolvant aqueux K iïj …“ 1700. 24 Mars, 78 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE une once trois dragmes d’extrait bien folide & bien lié; & que le réfidu bien defféché ne m'a donné parle moyen de l'efprit de vin que vingt-quatre grains d’extrait rélineux ; au lieu que pareille quantité du gris par ce même diflolvant aqueux , m’avoit fourni trois onces & demie d'extrait, & le rélidu par lefprit de vin ,trente-fix grains d’extrait réfineuxs d’où il eft aifé de conclure par tous ces faits, que l'Ypeca- cuanha brun contient beaucoup moins de parties principa- les, & plus de parties terrefres que le gris. Cependant il eft conftant que le brun eft plus aëtif & plus violent dans fes effets que le gris , cela femble impli- quer & former un paradoxe. Voici ce que j'en penfe. L'on fçait que les vertus aétives ne fe mefurent ni par le poids, ni par la mafle des Corps ; ceux qui ont le moins de volume , ont quelquefois le plus de force & d’aétivité, vis maxima in minima mole. Nous avons d’ailleurs obfer- vé que les derniers efprits détachés du brun , étoient plus piquans & frappoient plus vivement les fens que ceux du gris; pourquoi n’auront-ils pas la même aétivité dans nos Corps pour irriter les parties intérieures & agiter plus vio- lemment les humeurs ? Les extraits du brun font à la vérité en moindre quantité , mais leur vertu en peut être plus con centrée, & par conféquent plus aétive. Je laifle aux Sçavans le champ libre pour en dire davan= tage & penfer plus jufte, en attendant que je puifle donner les obfervations que j'aurai eu occafion de faire fur les effets de toutes ces parties ainfi divifées , aufli-bien que de la trois fiéme efpéce d'Y pecacuanha, EXPERIENCE DE LA REFRACTION DE L'AIR ; faite par l'ordre de la Société Royale d'Angleterre , | rapportée par M. CassiNi le fils. Ette expérience ef inférée dansles Tranfations Phi- lofophiques en ces termes. Nous primes un Cilindre DES SCIENCES. 70 de fonte , F. 1, ABCD ; & nous coupâmes une de fes ex- trémités perpendiculaire à l'Axe, ax, l’autre extrémité 4B étoit inclinée à cet Axe d'environ 27% 30', de forte que la perpendiculaire à ce plan incliné , faifoit avec PAxe du Cilindre, 4 x, un Angle PCA d’environ 624 30. Ces extré- mités étoient appuyées fur un inffrument de cuivre des poliffeurs de glace, & Von avoit mis autour de chacune une bordure étroite & mince de cuivre #bbb.L'on avoit foudé au-deffus du Cilin- dre en E, un tuyau de cuivre EF, & au-deffous un autre tuyau GH. Le dernier de ces tuyaux avoit environ 3 pou ces de logg fur fix de large. L'on avoit attaché für la planche ddd, deux autres planches LL qui lui éroient perpendiculaires & paralleles entr'elles. L'on avoit taillé dans chacune de ces deux planches un Arc de cercle égal à la circonférence du Cilindre, de forte que lorfque le tuyau GH étoit entré dans un trou qui éroit au milieu de la planche ddd,le Cilindre $'ajufloit dans ces deux Arcs où il étoit arrêté avec de la foudure , en forte que PAxe, ax, étoit paralléle à la plaque ddd , © élevé au-dej]us d'environ ur pouce à demi. L’extrémité perpendiculaire du -Cilindre DC étoit bouchée par un verre objeétif de 76 pieds, oo. & l’autre extrémité 4B par un verre plat fpoli avec grand foin, qu’on avoit choifi exprès afin qu'il püt tranfmettre les objets affez diftinéts, nonobftant la grande -obliquité qu'il avoit avec les rayons vifuels. Les /ordures bbbb, étoient cimentées d’un côté exaétement autour des bords de la glace, & étoient de l’autre côté appliquées exac= tement aux extrémités du Cilindre, afin qu’elles fuffent en. état de réfifter à la prefion de l'air. Au lieu d'un baflin , comme dans Fexpérience de Tor- ricelli , nous nous fervimes d’un Syphon renverfé de cuivre, F2, MNO, foudé far la planche GGG. Une des bran- ches de ce Syphon étoit perpendiculaire à la planche, & Tautre VO lui étoit inclinée & étoit foûtenue proche de l'extrémité fupérieure O par un petit appui K K. Nous plaçimes donc le Cilindre , comme dans la Fig. 3, fur une table fixe fur le plancher. Le tuyau GH pafoir par un trou que on avoit fair à certe table ,fèn Axe &oix 80 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE prefque parallèle, & la planche Dddd étoit clouée à cette ta ble. Le tuyau de la Lunette ss , avec l’oculaire étoit ap- pliqué au verre objectif, & l’on avoit mis dans cetuyau un cheveu au foyer commun de ces deux verres dans l’Axe du Cilindre continué. Nous clouâmes fur le plancher au- deffous du Cilindre la planche gegg , fur laquelle étoit le Syphon recourbé , & nous joignimes A1 & H( c'eft-à-dire , l'extrémité de la branche fupérieure du Syphon, avec l’ex- trémité du tuyau inférieur foudé au Cilindre) par l’infertion d’un tuyau de verre, T;les jointures étoient parfaitement bouchées avec du ciment , & recouvertes aveç des mor- ceaux de veflies liées avec du fil fort ; l’on avoit aufli lié une veflie au-deflous de la jointure en AZ, & après l'avoir remplie d’eau l’on Pavoit liée au-defflus en , afin que l'air ne pût en aucune maniére s’inferer dans les pores ou dans les ouvertures du ciment, en cas qu'il y en eût eu quelques- unes. Nous mimes un fil noir fur un morceau de papier blanc , qui étoit fur une petite planche , & nous le pla- çâmes dans l’Axe du Cilindre Cx prolongé. Nous rem- plimes les tuyaux & le Cilindre de mercure , & ayant bou- ché le tuyau de deflus Favec un petit bouchon de cuivre K,& l'ayant fermé aux autres jointures, nous fimes cou- ler le mercure en ©, dans la veflie 7, jufqu’à ce qu'il de- meura fufpendu à la hauteur ordinaire, comme dans le Ba- rométre , laiffant les efpaces au-deflus entre les verres 00 & ff vuides d'air. Nous trouvâmes donc que l’objet qui paroif- foit auparavant dans l’Axe en x , s’étoit élevé confidérable- ment au-deflus, nous le pouffâmes enfuite de 4 en x, juf= qu'a ce qu'il parut en x. + Car l'Axe du rayon vifuel X4, qui eft aufli l Axe du Ci- lindre , tombant perpendiculairement fur l’efpace vuide du Cilindre , pafle au travers fans aucune refraétion. Mais en fortant obliquement dans l'air, il fe rompt vers la perpen- diculaire pe , & reçoit une nouvelle direétion vers x. L’ef pace ax foutend l’Angle de refraétion que nousmefurâmes & trouvâmes, comme il fuit. 3 a DES SCIENCES. 8: “La hauteur de l’objet au-deflus de l’Axe du rayon vifuel, a x étoit de #5 , d’un pouce, la diftance de l’objet au Cy- lindre, étoit d'environ 612 pouces, ce qui donne l'angle de Réfrattion acx de 2 minutes 23 fecondes. L’angle de FEmerfion PCA, par la conftruétion du Cylindre éroit. de 62°. 3 o'; donc l'angle de l'incidence pcx étoit de 624. 27.37 C’eft pourquoi en général felon les loix connues de la Réfration, les Sinus des angles d'incidence étant ée 100000 Les Sinus des angles d'Emerfion font de 100036 Et la puiffance réfra@ive de l’Air denfe de 36 Par puiffance réfra@ive d’un Corps tranfparent , j’en- tends proprement celle parle moyen de laquelle les rayons obliques de la lumiére font détournés de leur direétion, & qui eft mefurée par les différences proportionnellesque l’on a toujours obfervées entre les Sinus des angles d’Incidence & d'Emerfion. Cette propriété n’efl pas toujours proportionnelle à la denfité , ou au moins à la pefanteur du moyen réfra@tif. Car k puiflance réfrattive du verre à celle de l’eau, eft comme ‘55 à 34, au lieu que fa pefanreur eft comme 87 à 34, c’eft- à- dire , que les quarrés des puiffances font à-peu-près entre eux, comme leur pefanteur; & il y a quelques fluides, qui , quoique plus légers que l’eau, ne laïffent pas d’avoir une plus grande puifflance réfraétive ; car la puiflance réfra- étive de l’efprit-de-vin , felon les expériences de D. Hook (Microg. p. 220.) eftà celle de l'eau, comme 36 à 33, & fa pefanteur eft réciproquement à celle de l’eau , comme 33 à36 ou 36%. Mais la puiffance réfraétive de l'air & de l'eau paroît obferver la proportion de leur pefanteur di- reétement, comme je les ai comparés dans la Table fui- vante. Les nombres qui expriment la réfraétion de l'eau , font tirés de neuf Obfervations faites à différens angles d’in- cidence par M. Gafcoigne, qui en eft l’Inventeur. 17c0. L x 82 MEMOIRES DE L’'ÂCADEMIE ROYALE Les Sinus des angles d’incidenceau Eau. Air: travers de l'eau & de Pair étant fuppofés de 100000 100000: Les Sinus des angles correfpondans hors de l’eau & de l'air, fontcomme 134400 à 100036 La puiffance réfraétive de l’eau eft donc à celle de l'air , comme 34400 à 36 Si l’on fuppofe que la pefanteur de Peau foit à celle de l'air, comme 900 à 1 , elles feront entre elles, comme 34400 à 38 Et fi onles fuppofe comme 8çsoà1, , elles feront entre elles, comme 34400 à 40 L'on peut conje@urer de-là que les denfités de Pair & de Feau font proportionnelles à leurs puiffances réfraétives ; & fi l’on peut confirmer cela par des expériences que l’on fe- roit dans la fuite par le moyen de Cylindres vuides d’air à différens angles d'incidence en divers changemens d'air ;: il feroit plus que probable que les puiffances réfradives de FAthmofphere font par-tout à toutes les hauteurs au-defflus de la terre , proportionnelles à leurs denfités &c à leurs rare- tés. Eril ne feroit pas difficile de connoitre par-là quelle eft la trace que doit faire la lumiere au travers de l’Athmofphe- re pour terminer l'ombre de la terre, & d'examiner à quelle: diflance il faut que la Lune foi pour foufirir des Eclipfes dont la durée a été obfervée. Cette détermination eft aflez confidérable en Aftrono- mie pour recompenfer la peine que l’on pourroit avoir à per- feétionner cette nouvelle expérience. Réefléxions [ur les Obférvations précédentes. Dans la derniére des Lettres de mon pere qui ont été in= férées dans les Ephémérides de Malvalie de l'an 1661. le: Sinus de l’inclination dans l’Ether , eft au Sinus de l'inclina- tion dans l'air , comme 100000 à 100028-<, de forte que la puiffance réfraétive qui réfulte de cette fuppofition eft de 284, au lieu que par les derniéres expériences faites à Londrés, on l’atrouvé de 36.. (at LE kr LRO: 4 Fr es -@t ELEC 1 1 LU, 107... vit, te, li à “TPE : , à dé dt Qu ne — mem. de (Acad. 1700 pag. 4 mem. de Ltend. 1700 pag. d'. Berg fe | DES SCIENCES. 8 Il fe peut faire que cette différence vienne de la hauteur de l'air, qui eft plus grande à Londres qu’à Boulogne qui ef plus élevée fur la furface de la Mer, L’air de Londres qui paroit un peu plus groflier qu’à Boulogne, peut aufli con- tribuer à augmenter la puiffance réfrative de Pair. Par l'examen des Réfrattions obfervées à T'orneo en Bo- thnie, le Sinus de l’inclination dans l’Ether, eft au Sinus de l'inclination dans l'air, comme 100000 à 10004$ , & par conféquent la puiflance réfra@tive qui réfulte de ces Réfra- &ions , eft de 45. Si l'on peut compter fur cette expérience qui a été faite en Angleterre, cela fervira à confirmer que les Réfra@tions de l'air font plus grandes, plus l’on approche du Pole, puif- qu'à Boulogne , qui eft à 44. 30° de hauteur, la puifflance téfra@ive eft de 284; à Londres, dont la hauteur eft de $ 1% 30', elle eft de 36 ; & à T'orneo , dont la hauteur eft de 65. 40', elle eft de 45. Cela n’eft pas précifément à propor- tion des différences des hauteurs du Pole; car par les Ob- fervations faites à la Cayenne , la puiffance réfraêtive réfulte de près de 27, peu différente de celle de Boulogne , que Pon a trouvée de 28-24. DU MOUVEMENT EN GENERAL par toutes fortes de Courbes ; © des Forces Centrales, tant Centrifuges, que Centripetes ; néceffaires aux Corps qui les décrivent. Par M VAaRIGNON. FT E 30. Janvier dernier , je donnai une maniére géné- L rale de déterminer les forces, les vitefles , les efpa- ces, & les tems , une feule de ces quatre chofes, ou plu- tôt un feul rapport de deux d’entre elles prifes à difcrétion, ‘étant donné dans toutes fortes de mouvemens reétilignes variés comme l’on voudra. Voici préfentement & de la Li 170€. 31. Mars. F1c. I. 84 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYEÆLE même maniére pour toutes fortes de mouvemens en lignes courbes: c’eft-à-dire , beaucoup plus généralement encore; puifque tout ce qui regarde les mouvemens en lignes droi- tes, s’en déduit. Il en réfulte aufli une formule très-fimple des Forces Centrales, tant centrifuges, que centripetes, lef- quelles font le principal fondement de l'excellent Ouvrage de M. Newton. De Phil. natur. Princ. Mathem. Mais la briéveté de Mémoire ne me permettant pas de m'étendre ici autant qu'il faudroit fur les ufages de cette Régle pour la découverte des pefanteurs des Planétes, j'en referverai la recherche pour une autre fois , me contentant de faire voir ici avec quelle facilité elle expédie les exemples que voict, dont la plüpart font de M. Newton; fcavoir ceux des Prop. 7» 85 95 10, de fon premier Livre, lefquels font compris dans les Art. 11,19, 12, 9, ci-après. J’en ai retranché celui des forces centrales tendantes au foyer des feétions coniques , pour le Mémoire de la pefanteur des Planétes, dont il doit faire partie. L Soient donc encoretoutes chofesles mêmes, que dans le Mémoire du 30. Janvier dernier, c’eft-à-dire, les noms les mêmes, & tous les angles redtilignes (qu'on voit ici} droits , excepté les angles en C. Mais au lieu de concevoir le Corps mû de 4 en H par la droite À H, imaginons-le fe mouvoir de E G en L le long de la courbe © L dontles ar- données foient les Arcs circulaires H L décrits du centre C, & les abfcifles 4 H: en forte qu’au lieu de fix courbes qu'il y avoit dans le Mémoire précédent, il y en ait préfente- ment ici fept, fçavoir 9 L, TD, VB, FM, SHFUNS FO, dont lapremiére { L exprime par fa longueur (depuis. EG jufqu’en L) l’efpace parcouru. Soit de même le tems employé à le parcourir, exprimé par l’ordonnée corref- pondante HT de la courbe T D ; la vitefle du Corps mû (en chaque point L) par les ordonnées aufli correfpondan- tes & égales {’H,//G des courbes B, WK ; fa force centrale en L, c’eft-à-dire, ce qu’il a de force abfolue en L, vers le centre C, par les ordonnées correfpondantes en- DES SCIENG:E-S | & core & égales FH, FG,FE , des Courbes FM, FN, FO. C’eft pour cela que ces Courbes s’appelleront encore comme dans le Mémoire du 30. Janvier dernier : fçavoir, DT, la Courbe des Tems ; VB, V7K ,les Courbes des Viref- fes; FM, FN,FO, les Courbes des Forces ; & de plus 9 L; la Courbe des Chemins. II. Soient encore aufi 4 H=— x» , les Tems HT— AG —t , les Vitefles HV = AE—GV— 1, & les Forces: centrales abfolues HF= EF=GF= y. Soit de plus l'Ef. pace parcouru 0 L=s, AC=a, CH=r, & R/—dz. L'on aura de-là ds pour l’efpace parcouru d’une viteffeuni- forme v, à chaque inftant; d v pour l’accroiffement de vi- teffe qui s’y fait; d d s pour ce qui fe parcourt alors d’efpace en vertu de cet accroïfflement de vitefle; & dr pour cet inftant. L'on aura auflia— x r ; ce quidonne dx = gr en différenciant le tout pofitivement. III. À ce compte la vitefle ne confiftant que dans un rap- port d’efpace parcouru d’un mouvement uniforme, au tems Rd de de à EmP oye à lE parcou f, LOn aura déja LE pour une 5 dds À premiére Regle , laquelle donnera du= = ,en faifant ds conftante. I V. De plus, fi l’on imagine deux Arcs HL, klindéfi- niment proches l’un de l’autre , avec leurs rayons CL, CI, dont le premier CL, rencontre k / en R ; & que de ce point R l’on imagine aufli R P perpendiculaire fur L /; ontrouve- ra que la force abfolue H F(y)en L vers C, étant à ce que’ ke Corps mû en reçoit d'elle fuivant L/:: LREP..LF (ds). LR(dx). Cette force fuivant L / fera — 1 Or les: efpaces parcourus par un Corps mûavec des forces conftan- tes, & continuellement appliquées, telles qu'on conçoit d'ordinaire la pefanteur, étant en raïfon compote de ces forces & des rems employés à les parcourir, F 3 on aura aufli: x dsdds d ST dds="xdr. Doncy— BRIE (es \;ce qui faiten- core une Regle, qui ajoutée à celle de PA. 3. fatisfait à: h Li $s6 MEeMoiRes DE L'ACADEMIE ROYALE tout ce qu'on fe propofe ici de réfoudre , foit que les ordon- nées H L foient droites ou circulaires ; puifque la diflance du centre C'n’entre point dans cette Regle. REGLES GENERALES DES MOUVEMENS EN LIGNES COURBES. 1. v— À D diode). 2 2Y—jxar dx V. Quant à lufage de ces deux Regles, je dis préfente- ment que des fept courbes marquées ci-deflus, deux quel- conques, c'eft-à-dire, les équations de deux prifes à difcré- tion , étant données , l’on pourra toujours trouver les cinq autres , fuppolé les intégrations requifes, & la réfolution des égalités qui s'y pourroient rencontrer. V I. La preuve de cette Propolition eft facile. Car fi on a, par exemple, les équations Fa Courbes des Chemins &c des rems, © L, & DT. 1°. La premiére de ces équations donnera les ds, & la feconde les dr, en x (jy comprends aufli les 2x) & en con- flantes ; & ces valeurs de ds & de dr, fubftituées dans la premiére des Regles générales, la changeront en une équa- tion, où il n'y aura plus que v & x de variables, & qui par conféquent fera celle de la courbe des vitefles 77 B. Et là il eft à remarquer que n’y ayant ici ( 2yp. ) aucun obftacle, ni autre force que la centrale, & le mouvement du Corps L une fois commencé ; fuivant une direétion à angle quelcon- que avec celle de cette force; l’on aura par-tout ici fuivant M. Newton ( Phil. nat. Princ. Math. Lib. 1. Secf. 2. Th. 1.) les dt comme les r dx, ou dr =rd2. De forte qu'une feule de ces équations des courbes © L & DT, fera même ici capable de donner l’autre avec celle de la courbe 77 B. 2°. Cette équation de la courbe F”’B avec celle de DT, donnant aufli x , env, en #, &en conflantes ; il en réfultera encore une autre , dans laquelle il n’y aura plus que des v, des :, & des conftantes ; &c qui fera par conféquent celle de l'autre courbe des vitefles ’K, DES SCIENCES | 87 3°. Ayantainfiles équations des courbes 0 L, DT, V’K, Von aura aufli les valeurs de ds, dt, dv,enx,endx, & en conftantes; lefquelles valeurs fubftituées dans la fe- conde Regle générale, en feront une équation oùil n’y au- ra plus que y & x de variables; & qui par conféquent fera celle de la courbe des forces FM. 4°. Cette équation de la courbe F M, & la donnée de la courbe DT, donneront auflix ,en y,ent, & en con- flantés ; d’où réfultera encore une équation, laquelle n’ayant plus que y & r de variables, fera celle d’une autre courbe des forces F N. 5”. Enfin les équations trouvées de FM & de 77B, don- neront de mêmex,eny,env, & en conftantes ; d'où il en réfultera auffi une , laquelle n’ayant plus que v & y de variables , fera celle de latroifiéme courbe des forces FO, ui étoit la derniére à trouver. VIT. Si au lieu des courbes 0 E & DT, l’on en don- noit deux autres quelconques, par exemple /’B,NF, ceft- à-dire , leurs équations. 1°. Ces deux équations donneroient ven x, ouxenv, & yent;,( j'y comprends aufli les différentielles &lescon- fantes ) , lefquelles valeurs de v & de y, fubftituées dans 3dx= dv, que donne la comparaifon des deux Regles générales, en feront une équation, laquelle n’ayant plusque x &t de variables, fera celle de la courbe T D. Et filon fubftitue feulement la valeur de v en x, dans lPéquation ydx= vd; elle deviendra celle de la courbe F M. De même , fi l’on y fubfitue la valeur de x env, & deyenr, cette équation deviendra celle de la courbe 7 K. 2°. Ayant ainfi les équations des courbes 7’B, DT, FM, Yon aura aufli des valeurs de v, 7, & y, en x & en confiantes, lefquelles valeurs fubftituées dans la feconde Regle générale, en feront une équation, laquelle n’ayant plus que x &s de variables, fera celle de la courbe 9L;, en fubftituant 4 — r (art. 2.) à la place de x, 3°. Ilne refte plus que la courbe FO, laquelle fe trou- vera de même que ci-deflus (7. 5. arr. 6. ) Il eft vifible que Fic. II. 88 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE da même chofe arrivera, quelques autres qu’on donne de ces Courbes, deux à deux. Ce qw’il falloit démontrer. VIII. Cette démonftration fait aflez voir tous les diffé sens ufages qu’on peut faire des Regles précédentes. Mais la briéveté de Mémoire ne me permettant pas d’entrer dans un fi grand détail , je ne toucherai prefque qu’à ce qui con- cerne les forces centrales que M. Newton & M. Leibnitz ont rendues fi célébres par les applications qu'ils en ont fai- tes aux Planéres, pour en découvrir les pefanteurs par rap- port au Soleil dans l'hypothéfe de Kepler : encore la fe conde de ces Regles fufhra-t-elle pour cela, ainfi qu’on le va voir dans les exemples fuivans par la conformité de mes folutions avec celles de M. Newton dans ceux qui nous fe- ront communs. Quant à l'exemple de M. Leibnitz, étant d'Aftronomie, ce fera pour une autre fois. Des Forces Centrales tendantes à un même Point. IX. Exemple 1. Soit lEllipfe ordinaire 4 LB, dont C foitle centre auquel tendent toutes les forces ou pefanteurs du Corps L qui la décrit. Pour les trouver, foient encore CL=r, Arc R/—d2x décrit du centreC, 4H= %, AL—s5;foient de plus fon grand Axe 4 B—24, & fon paramétre = p. . aapdr La nature de cette Ellipfe donnera d2 = à 2ArY—aapxaap—prr pour fon équation au centre , laquelle donnera ds — 3 £ 24 prr—2aprtaapprr d52 ( de + dr ) = a = Are. Donc = 2aarr—2r#taprr 2aa—2rrtap_ d$ 241Y—4a4apx aap—?rr A ni". 1. art, 6.) ap ? ap = ss Et par conféquent aufli, en fafant d: conflante, 2 s — \ rdx aÿ dsdds 1 Le = AE (art. 2) =, JOURS ( art. 4e Reg. 2,)—y. Donc les forces ou les pefanteurs(y ) ten- dantes au centre C de l'Ellipfe, font comme les difiances CL(r) de ce centre au Corps L qui la décrit, ou comme les diamérres correfpondans de cette Ellipfe. D’où lon voit DES SCIENCES 89 voit auffi que la ligne des forces FM (Fig. 1.) doit étre ici (Fig. 2.) une ligne droite MO, laquelle prolongée paflera par le centre C. X. La même chofe fe trouvera pour la Parabole, en fup- pofant a infinie ; & par ce moyen CL (r) infinie auffi, & pa- ralléle à fon Axe 4 B. D'où l'on voit que les forces centra- les feront ici toutes égales ; & qu’ainfi en prenant pour telle la pefanteur des corps, c’eft-à-dire , pour conftante, & fui- vant des diretions paralléles, leur courbe de projection de- vroit être une Parabole dansle vuide ; Ou dans un milieu (s’il étoit poflible) qui ne retardât ni augmentât leur mouve- ment , ain{i que l’a trouvé Galilée. Quant à lhyperbole , le feul changement des Signes négatifs de l'équation au centre de lEllipfe dans Particle précédent, lui en fera aufliune au d centre ( dz— nn one 24YfHaapxaap+prr de même y = —" , c’eft-à-dire, encore les forces centra- les comme les diamétres correfpondans; mais au lieu de centripétes qu'elles étoient ci-deflus, elles feront ici cen- trifuges. XI. Exemple 2. Soit le demi-cercle À LC : on deman- de quelles forces centrales tendantes au point C, font néceffaires au corps L pour lui faire décrire ce demi-cer- cle. Soient encore C Lou Cl=7r, & AC—a. Si l'on fait les droites 4L, Al; Von aura AL = Vaa — rr, & Tr dr dzVaa—rr vs = À (arr. D }— 42; où — — dr. Donc" xdz +dz=dr+dx—ds; ce qui rr ds? aa—vrr aa aa d 5? CR 51 gr = 12 — . I. att. 6. donne = = ile QUE (7 I. art. 6.) ds? zdsdds = ;; Ainfi en faifant dt conftante; l'on aura ET —4aaridr 4aadx 2aa __dsdds | = ou = (art. 4e Reg. 2.) — y: c'eft-à-dire, que les forces centrales tendantes au point C, font ici en raifon réciproque des dote: puif- 4700. Si » laquelle donnera. Fic. IIL. Fi. IV. Fire, V. 90 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE fances de leurs rayons C L. D’où l’on voit aufi que la ligne des forces F M{ Fig. 1.) doitètre ici ( Fig. 3.) une hyper- bole du cinquiéme degré entre les Afymptotes orthogona- les Z2C, CO, dontle lieu fera yr = 24%, en prenant a pour lunité, & r (CH) pour fes abfciffes. XII. Exemple 3. Soit la Spirale Logarithmique © L, dont le centre foit C, auquel tendent les forces ou pefan- teurs du corps L qui la décrit. Pour les trouver, foient toutes. chofes comme ci-deflus (art. 2. ) La nature de cette Spirale donnera R/(dz). LI(d5)::a.b. ou 21—7 ,ou bien enco- bb ds? ds? k re —— = — (».1.art.6.)= =; & en faifant dr conftan- a arr rrdzt dt zdsdds —1bbrdr HAE je bb __dsdds a dr? er art ( PI r laerL 2 aar dxdra = (art. 4. Reg. 2.) = y : c’eft-à-dire, que les forces cen- trales tendantes au centre C de la Spirale Logarithmique , font en raïfon réciproque des cubes de fes ordonnées (CL) correfpondantes. D'où l’on voit aufli que la ligne des for ces F M( Fig. 1.) doit être ici de même une hyperbole cu- bique entre des Afymptotes orthogonales au centre C’, une defquelles foit 4 C; puifque fon lieu eft yr'—4aabb, em prenant encore ici a pour l'unité, &r (CH) pour les ab- {cifles de cette hyperbole. XIII. Exemple 4. Il eftà remarquer que ce même: rapport de forces fe trouve aufli dans la premiere Spirale hy- perbolique. Mais pour les trouver en général pour toutes. fortes de penses tant paraboliques que hyperboliques, {oit CL D L une Spirale de tousles genres ( j'en ai encore une infiniment plus univerfelle ; mais il feroit trop long de l'expliquer ici ), dont € foitle centre, aufli-bienque de l'arc hIR, & du cercle DEFD répondant àtelle revolution qu’on: voudra de cette Spirale. Toutes chofes demeurant les mê- mes que ci-deflus (art. 2.) , fcavoir les rayons des forces. CL=r, l'indéfinie À h=x,LI= ds,&R/— dx ;foit de plus la circonférence D E FD=c, & fon rayon C D: ouCE= a. 4 DES SCIENCES. 91 L'on aura la fomme des E e(fEe) pour les abfciffes de cette circonférence depuis le commencement des revolu- tions; ce qui donnera c. fEe::am, rm, ou crm=— am,x JE e pour léquation de ces Spirales en général: Donc morm—:i dr —amx Ee. Mais C!/(r). Ce(a)::R/(dz). ad z m+-1 m1 Ee——Doncaufimcrm—:dr=" + oué à is La ‘n mem atmH? raz mmocr2m ds? 2 d5s?, ou 4 + LL _ (». 1. art.6.)—= 1; mmMmcCcr m4 2 rt rrdz? dr À 2dsddsi) ET 2M2,2mbI chifnt/rconfapte, 7" 2#*s 0" ere mmccri® +4 m+2 2rdr 2m—+2Xxa Himmecr?m ——— (art. M aa mi XeiM 2 Emmocr 2% dsdds — = mmecr2M#3 Pr PAU OR on 2.) = y: c'eft-à-dire en général, que les forces centrales tendantes au centre C de tous les genres de Spirales ( tant paraboliques que hyperboliques ) doivent être dans toutes, comme ces fractions cortefpondantes. D’où l’on voit auffi que le lieu de la courbe des forces F M (Fig. 1.) feraici _m+ixa M6 Emmatccr2M J= Xe TPE ET, en prenantencorea=—1, MMCCTIMH3 &r(C H) pour les abfciffes de cette courbe. X IV. On voit de-là que la Spirale d'Archiméde ayant: m—1, les forces centrales tendantes à fon centre C, y doi- 2atkccrr L 1 —dr ; ce qui donne dr = dr _ds? m7 I pi (ar.17.)= 7x Donc 5 = dx; & par = dst,ou ; , 2dsdds 4a dx en prenant d+ pour conftante, l’on aura ee = ———— Xa— x? x De 4 a pre 72 . . 2 43 3 à la fin de la différentiation réduite, ou bien ( ==) d pXa— x? px*L G° dsdds = a art. 4. Reg. 2.) = y: c’eft-à-dire , que les forces centrales fuivant LC, feront ici comme les =>, ou en rai- fon réciproque des cubes des ordonnées (L G ) à l’autre axe E D de l’Ellipfe propofée. D’où l’on voit aufli que la courbe . DES SCIENCES. 93 des forces F M Fig. 1.) feraici ( Fig. €.) une hyperbole cu- bique entre les Afymptotes orthogonales ZE , EO, dont le lieu fera FHx HE’ — ©, en prenant a = 1. XIX. Le même rapport de forces fe trouvera de même pour le cercle, en faifanticip — 2 a dans le lieu de l'Ellipfe ; & pour l'Hyperbole, en rendant tous les Signes de ce lieu politifs. Mais 4 étantinfinie dans la Parabole , la valeur pré- 2 ai 2 43 2 cédente ) des forces centrales, lui vient = == —2 Pxa—x? DEAN 7 c’eft-à-dire conftante , ainfi qu’on l’a déja trouvé dans l’art, 10. Voici encore ces mêmes forces en deux mots pour cette premiére Parabole , parmi celles de tous les genres de Paraboles , & d'Hyperboles entre Afymptotes. XX. Exemple 6. Les noms & le refte demeurant tou- jours les mêmes dans la Figure 7. foitzm— x, le lieu de toutes les Paraboles V L, & des Hyperboles entre Afym- ptotes à l'infini. L’onauramz"—1dz=dx,&mmarm—: dz+dz—dx+dx —ds, où mmzrm—iL ir ds? ds? : dsdd (art. 17.)= 5; & en faifant dr conflante, SE — 2m—2xmmzim—3dz(àcaufedemzm—1dz—dx) dsdds dxdrz (arr. 4. Reg. 2.) = y : c'eft-à-dire, que les forces centrales fuivant LC paralléles à l'axe 4 C, font dans tous ces gen- res de Paraboles & d'Hyperboles ; comme lesz”—: cor- refpondantes. D’où l’on voit aufli que y =mm — m x 2m —2 —— M—2 (à caufe de x = 2") 1m m— mxxX m fera ici le lieu dela Courbe des forces F M. X XI. D’où l’on voit encore comme ci-deflus( art. 10. & 19 ) que dans la Parabole ordinaire, quiam=— 2, les forces centrales (y) ainfi dirigées, font par-tout conftantes & uniformes ; & que par conféquent la courbe des forces FM, s'y changera en une ligne droite paralléleä l'axe 4 C. XXII. On trouvera de même dans la Cycloïde ordi- naire , verticalement élevée fur fa bafe , que les forces cen- Mi —2m—2xmzm dx. Donc mm—mxz"—1— Fic. VII. Fic. VIIL 94 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE trales tendantes vers cette bafe, fuivant des direétions pa- reillement verticales ou paralléles à fon Axe, font en rai- fon réciproque des quarrés des diflances de cette même bafe au corps qui décrit cette courbe. Mais en voilà affez pour faire fentir l'ufage de la feconde des deux Regles pré- cédentes ( art. 4.) dans la recherche des forces centrales néceffaires pour la defcription de toutes fortes de courbes tant Géométriques , que Méchaniques , dans les Corps qui les décrivent. D'ailleurs la briéveté de Mémoire ne me per- met pas d'entrer ici dans un plus grand détail. C’eft auffi pour cela que je n’y ajoûterai touchant l’ufage de la pre- miére de ces Regles, que ce qu’elle me fournit tout préfen- tement du rapport des tems des chutes des Corps de pefan- teur conftante , & de direétions paralléles le long de cette Cycloïde renverfée, de maniére que ces direétions foient toutes paralléles à fon Axe ; & cela à caufe de la fimplicité d’une nouvelle démonftration de leurs mouvemens ifochro- nes, qu'on va voir en réfulter, & de la facilité avec la- quelle la courbe fynchrone de M. Bernoulli de Groningue s’en déduit aufli. XXIIT Exemple 7. Soit donc à l’ordinaire un corps de pefanteur conftante, & de direétions paralléles à l'Axe vertical S © de la Cycloïde renverfée G LD, dontle cer- cle générateur foit S FX Q , & le long de laquelle ce corps tombe de L en L, l’un & l’autre de- ces points étant pris. à difcrétion. Suivant cette hypothéfe de Galilée, la cour- be 4 des viteffes fera une Parabole dont le lieu v—v x exprimera par fes ordonnées v (77H) les vitefles de ce corps à chaque point correfpondant L de cette Cycloïde. On demande la courbe 4 T D des tems employés à tom- ber d'un point quelconque K jufqu’au fond © de cette Cy- cloïde, cette chute commençant en K. Soient donc encore, comme dans l’art. 2 4H=%x, HT=1:,8&HL=z,Q L=—s; foient de plus 4 0 = a, SQ—2b;& HQ(a—x)=—m variable. Cela pofé, l'on aura HXV 2bm— mm, & l'Arc 0 X=f re Vibm—mm ? DES SCIENCES. 9$ par conféquent z(HL)=v2bm—mm+ f; 2bm—mm zbdm—mâm dmv °?=", & dz — Vabm=nmm m 2bh—a+ x a— x ce qui donne ds(v dx +dxt)=v #—4ts x gx px G— x D'où réfulte dz— x dx: 20m x d m° (à caufe de m—a— x )— m — b 2 7 =—d xx vV 27, Ainfi puifque (kyp.)v=v x, & (Reg. 1.) —d5s,p DALAULE Vv=— ; l'on aura auffiv x = v + ,oubiendi dx a— x : B v2b d RP XV =" x =, Doncenintégrant, &en ax—x x a 2V ax— xx décrivant le demi- cercle ZZ lon aurat (HT) — SALE >] FA dx ——— Ex f— MN AZ ER SO, pour a 2Vax—xx a A le tems de la chute de K en L. Et par conféquent en fai- fant par-tout les ordonnées HT — x2V SO » c'eft-à- dire , en raifon des Arcs correfpondans 4 Z du demi-cer- cle 4 Z 0; la ligne Z TD, qui paffera par toutes les extré- - mités Tde ces ordonnées , fera la courbe des tems requis: en cet exemple, laquelle fervira à déterminer ou à compa: rer les tems d’une même chute par différens Arcs de cette: Cycloïde ; & réciproquement. La même chofe fe tirera encore de même de la premié- re des deux Regles précédentes ( arr. 4. ) en fuppofant feulement que FArc © L eft double de la corde © X; car cette corde étant —V 2 ab—2bx, l’on aura aufli l'Arc cycloïdal O0 L=2v 2ab—2bx,avec fon élément ds — _ —=—dxv __ > & le refte comme ci-deflus.. . XX IV. De-là fuit encore une nouvelle maniére de démontrer les chutes ifochrones d’un poids tel qu’on. le vient de fuppofer, dans cette Cycloïde renverfée. En effet de ce que dans la chute de Z/K en HL le long de: cette Cycloïde ainfi renverfée , les tems HT font par 96 MEMoIrREs DE L'ACADEMIE ROYALE NPALZI ae 0 . tout (art. 23.) égaux à x 2V S 0, il s'enfuitque le tems © D de la chute entiére de K en Q le long deK LOQ, fera — ed x2VS0,ceft-à-dire, conftant & toujours le même, quel que foit le point K de la Cycloïde G me puifqu’à quelque hauteur À Q que ce point K réponde, le rapport de 4 Z Q à À Q, quieft celui d'une demi-circon- férence cireulaire quelconque à fon diamétre, fera toujours le même.Donc de quelque hauteur K qu’un corps de pefan- teur conftante & de directions paralléles à l’Axe SO d’une Cycloïde renverfée GLO ,tombe le long de cette Cycloi- de ; il arrivera toujours à fon fond © en tems égaux : & par conféquent de telles chutes feront toutes ifochrones, ainfi que je l'ai déja démontré à l’Académie en plufieurs maniéres toutes différentes de celle de M. Huguens & de celle-ci. XX V. Mais la plus générale de toutes eft exprimée par cette équation a s=t v( tirée de la comparaifon des arties femblables des Arcs à parcourir, dont M. Bernoulli in à Groningue s’eft fervi dans les Aëtes de Leip- fik de 1698. pag. 267. pour prouver lifochronifme des . chutes faites fuivant l’hypothéfe de Galilée, dans la Cy- cloïde renverfée , & dont je me fervis aufli en 1697 à l’A- cadémie pour le même fujet) dans laquelle s fignifie l'Arc compris depuis le fond jufqu’à tel point qu’on voudra de la courbe cherchée; #, le tems employé à le parcourir; v, la vitefle acquife à la fin de cet Arc, ou de cette chute ; & a, l'unité. Cette équation, dis-je, exprime en général une courbe le long de laquelle un corps tombant à quelque point de cette courbe qu’il commence, il arrivera toujours au fond de cette même courbe dans des tems qui feront non pas feulement égaux, mais en telle raifon qu'on vou- dra , quelle que foit l'hypothéfe de fes direétions & des vi- tefles qu'il acquiert en tombant. De forte qu’en faifant + con- flant, par exemple :=— 4, pour le cas des chutes requi- fes en tems égaux, lon aura aufli pour lors v=s ; la- quelle équation , quelque hypothéfe de pefanteur qu'on fafle encore , DES SCIENCES. 97 encore, donnera toujours la courbe le long de laquelle les chutes faites fuivant cette hypothéfe, feroient ifochro- nes; & réciproquement quelque courbe qu’on propofe, cette équation déterminera toujours l'hypothéfe de pefan- teur ou de variation de vitelles , requife pour rendre cette courbe ifochrone. Par exemple, pour trouver la courbe G L © , qui feroit ifochrone dans l'hypothéfe de Galilée touchant l’accéléra- tion des Corps qui tombent; foit la chute le long de cette courbe, commencée à celui de fes points L qu’on voudra, duquel parte l'horifontale L'H, qui rencontre en H la ver- ticale H Q , lefquelles foient encore appelées z & m. L’hy- pothéfe de Galilée touchant l'accélération des Corps qui tombent , donnera v— Vm; ce qui déterminera ici l'équa- . A _— 2 AS d tion généralev—5s, à Vm=— 5: d'où refulte = =d=— m Vam +de, & enfindz=dmv 1 — 1—=dm qui eft une équation à la Cycloïde ordinaire, dont le dia- métre du cercle générateur , feroit le quart du paramétre de la Parabole exprimée par v = V'm. De forte que ce pa- ramétre étant arbitraire , on voit que toute Cycloïde ordi- naire fera la-courbe ifochrone de cette hypothéfe de pe- fanteur ou d'accélération dans la chute des Corps. Réciproquement une Cycloïde ordinaire quelconque étant donnée , fi l’on vouloit trouver lhypothéfe de pefan- teur ou d'accélération dans les Corps qui tombent, propre à enrendre les chutes ifochrones le long de cette cour- — mm be; fon équation étant dz=— d m = ; fon élément(ds) . m feroit — en ; Ce qui (en intégrant) donneroit V m—5—u m < è D'où l'on voit que les vitefles (v) acquifes à la fin des chutes, devroïient être alors comme les racines des hau- teurs H Q(m), ainfi qu’on le fuppofe d'ordinaire avec Galilée. 1700, ; N ” 98 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE XX VI De même, fi l’on veut tout à la fois les hÿpo= théfes de pefanteur ou de viteffes requifes pour rendre ifo- | chrone celle qu’on voudra des trois Cycloïdes à bafes droi- tes ; foit prife G L'Q pour une des trois à difcrétion, dont la bafe S G foit à la demi-circonfétence SF X © de fon cer- cle générateur :: g. f. Et le refte comme éi-déffus. On trou: vera de même ; en prenant encore S 0 = 20, & HO=m pour la hauteur du point quelconque L, où commence la chute le long dé celle qu'on voudra de ces trois Cy- cloïdes renverfées , dont G L © repréfentera lA/longées fig f; l'Accourcie M g 2 f; & ordinaire, fig —f:0ot* trouvera, dis-je ; de même en général pour toures les trois. à la fois, que les viteffes requifes pour les rendre ifochro+ nes ; doivent être comine les fommes correfpondantes des Elémens id 4 bits pénis D'où l'on zom— mm voit encore en particulier pour la Cycloïde ordinaire , qui donne f=—g, que ces virefles doivent effeétivement être: D dome lave av 2bm:ceft- à-dire , comme les Racines de hauteurs »( H © ) des chu- tes, pour rendre cette Cycloïde ifochrone, ainfi qu'on Pa vû jufqu'ici. XX VIÏ. Reprenant ainfi G E Q pour une Cycloïde ordinaire , fi l’on prolonge préfentemenr K 4 jufqu'à la rencontre du demi-cercle S X © en F, & qu'on lui fafle la corde F Q qui rencontre L/”en E ; Pon aura ( arr. 23.) Le tems (x: VS0) par K L, au tems (2WVS0) par S 0, ou par FO :: AZ. A O0. Donc fçachant d'ail leurs que dans cetre hypothéfe de Galilée touchant l’ac- célération de la chure des Corps, le rems par F © eft au tems par FE::VFQ.VFE::V 40.v AH.L'onaura auf le tems par KL, au tems par FE::42%x;v AQ. AOxV AH::A2Z. vVAO x AH. C'eft-à-dire , comme PArc 4Z à fa corde. De forte que lorfque 4 K eft en SG, —— = comme fdmv 427 SOC SEE. DES SCIENCE S:.: 99 ou ÂenS, alorsies Arcs 47 & SF X fe trouvant égaux entre eux, & FE confondue avec SH; l'on aura aufli pour lors le tems par G L, au temspar $S H, comme l'Arc S X eft à fa corde, Et par conféquent le tems d’une telle chute de Gen Ÿ le long de la demi-Cycloïde entiére GL Q , eft au tems me pareille chute de S en 9 le long de tout le dia- métre S 9 de fon cercle générateur , comme la demi- cir= conférence $ X 0 de ce cercle eft à fon diamétre S ©. XX VIII. Il fuit aufli de-là qu’une Cycloïde ainli ren: verfée GLQ étant donnée avecfon cercle générateur SX0, & une verticale conftante êr déterminée G P égale ou moin- dre que 5x. fi l’on prend far la demi-circonférence SX Q de ce cercle, l'Arc SX moyen proportionnel entre fon diamétre S 9 & cette verticale G P, & qu'on mene enfuite lhorifontale X L qui rencontre la Cycloïde en Z; l’on au- ra l'Arc G Ltel qu'un même Corps tombant de &, le par- courera dansle même tems qu'il parcourroit G P, la chute commençant de part & d'autre en G. Car dans l'hypo- théfe de Galilée, dont il s’agit ici, le tems par G P doit être au temas par SH ::V GP.VSH::VGPxS 0, VSHXxS AO (confhr.)::S X. v SHx $ 0. C'eft-à-dire (art. 27.) comme le tems par G L eft au temspar S A, Donc les tems par G L & par G P doivent être aufli égaux $ entre eux. :: Cela étant , quelque nombre de Cycloïdes G L M qu’on imagine par le point G ; dont les bafes foient fur G $ pro- dongée ; fi Ponien retranche de cette façon! tout autant d'Arcs G L, chacun d'eux fera toujours parcouru par ce mê- me Corps dans le même tems qu'il mettroità parcourir G P: Et la Courbe P L qui paffera par tous ces points L; fera la Synchrone dont M. Bernoulli de Groningue fait mention dans les Aëtes de Leipfik ; au mois de Mai dé 1607 XXIX. Puifque ( arr. 23.) le point K' indéterminé- ment pris fur la Cycloïde G L Q, donne toujours L2 x av 5 @ pourletemsemployé à-romber de 4£ en HL le ; ÿ Fie. IX, 100 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE long de K L ; fi l’on prend quelqu'autre point A7 à difcré- tion fur cette même Cycloïde , par lequel on tire M R pa- ralléle à Z K ; & de plus telle autre paralléle VY qu’on vou- dra, laquelle rencontre en Ÿ le demi-cercle R Y Q décrit fur le diamétre R Q , l’on aura de même 2 X2VS pour le tems employé à tomber de M en N le long de MN, d'une chute commencée en M: de forte que ces : | + AP ARR : = tems feroient égaux, fi l’on avoit = , c'eft-à-dire , fi RQ les Arcs 4Z & R Y éroient femblables. Donc un même Corps tombant de K en Q , & enfuite de M en ©; les chutes commençant en K & en M, fil'on donnoit un point L quelconque au-deffous de K , & qu’on en demandâtun autre M, tel que ce Corps tombant de M, il parcoure M N dans le même tems que tombant de K, il parcourroit K L ; il n’y auroit qu’à faire les horifontales KA, LH, MR, avecles demi-cercles 4Z 0,&RYO autour des centres E & F fur les diamétres 4 0 & DE dont le premier ( cercle) étant rencontré en Z'par LH, il en faudroit tirer le rayon EZ , & lui faire enfuite paral- léle un rayon FY de l’autre cercle : parce qu’en tirant Y M paralléle à R M, l’on auroit M N pour l'Arc de Cycloïde cherchée , c’eft-à-dire, tel qu'un Corps tombant de M ;le parcourra dans le même tems que tombant de K , il par- courroit K L; puifque de cette maniére les Arcs circular res 1 Z & R Y fe trouveroient femblables ; ainfi qu’on a vû ci-deflus, & qu'il étoit requis pour cela. XX X. Telle eft la maniére de fe fervir de la premiére des deux Regles de l’Art. 4. laquelle nous ayant mené peut- être un peu trop loin pour un Mémoire, je n’en rapporte- rai point d'autre Exemple, Je ne dirai rien non plus de l'u- fage que ces deux Regles peuvent avoir enfemble, ainfi que les Art. s ; 6, & 7. ci-deflus l’indiquent affez. Voici feule- ment en deux mots comment s’en déduifent cellès que je donnai le 30. Janvier dernier pour les mouvemens en li- gnes droites. Reprenons la premiére Figure; & ‘concevons la ligne DES SCIENCES. 101 L Q , füivant laquelle on fuppofe le Corpsfe mouvoir, non plus comme une courbe, mais comme une droite qui fe confond avec /C. En ce cas H L s'anéantiffant, l’on aura L/(ds)—Hh(d x), ou plutôt ces deux Elémens feront confondus en un. Donc tout le refté demeurant le même, les Regles générales des mouvemens en lignes courbes de Y'Art. 4. fe changeront ici pour les mouvemens retilignes , en celles que je donnai le 30. Janvier dernier : Les voici, en faifant encore dt conftante. REGLES GENERALES DES MOUVEMENS EN LIGNES DROITES: ddx 1) É 20. y —= die dt). Je ne dirai rien non plus de lufage de ces Repgles, en ayant fufffamment parlé dans le Mémoire du 30. Janvier . dernier. D'ailleurs il n’y a pas moyen de s'étendre ici da- vantage. EXPLICATION PHYSIQUE ET CHY MIQUE des Feux fouterrains, des Tremblemens de Terre , des Ouragans, des Eclairs © du Tonnerre. Par M. LEMERY. M ON deffein eft de donner par le moyen d’une Opé- {A ration de Chymie, une idée fenfible de ce qui fe pafle dans les nuës , lorfqu’elles s'ouvrent en tems de tem- pête , pour produire les Éclairs & le Tonnerre : mais aupa- ravant que de faire voir cette Opération, il eft à propos de parler de la matiére qui caufe des effets fi violens , & d’exa- miner farnature & fon origine. On ne peut pas raifonnablement douter que la matiére de l'Eclair & du Tonnerre, ne foit un foulfre enflâmé & élancé avec beaucoup ‘de rapidité, Nous ne connoiffons Ni Fic. ZX, 21. Avril, 1700: 102 MEMOIRES DE L'ACADEMIE-RoyaALr tien d'inflammable , ni de plus ea mouvement, que le foul: fre, & l'odeur de foulfre que le Tonnerre laifle dans tous les lieux où il a pañlé, prouve aflez fa nature : il eft donc queftion préfentement de trouver l’origine de ce foulfre ; il n'eft pas vrai-femblable qu'il fe foit formé dans les nuës, il, faut qu'il y ait été porté en vapeur. Il me paroit que l’origine de la matiére qui fait le Ton- nerre, eft la même que celle des Tremblemens de terre, des Ouragans, des Feux fouterrains ; j'ai expliqué la caufe .de ces grands remuemens dans mon Livre de Chymieà loccafon d’une préparation particuliére fur le fer, appellée Safran de Mars , laquelle jai donnée au public il y a plu- fieurs années; & comme mon Explication a été trouvée affez jufte, & que j'ai fait encore depuis la derniére impref- fion de ce Livre , plufeurs autres expériences qui fervent à confirmer ce que j'avois avancé, je prie la Compagnie de vouloir bien que je rapporte en abrégé les unes & Îles au- tres expériences, & de me permettre de lier le plus fuccin- tement-qul fera poflible le principal de l'explication que : j'ai faite, avec celle que j'aurai l'honneur de faire aujour- d’hui ici. Cette liaifon fervira à faire mieux comprendre mon difcours , & elle informera ceux qui n’ont point lü mon Livre de ce qu'il contient à ce fujet; Voici donc les premiéres expériences. On fait un mélange de parties égales de limaille de fer & de foulfre pulverifé ; on réduit le mélange en pâte avec de l'eau, & onle laïffe en digeftion fans feu CR deux ou trois heures. I] S'y fait une fermentation & un gon- flement avéc chaleur confidérable ; cette fermentation fend la pâte en plufeurs endroits, & y fait des crevalles par où 41 fort des vapeurs qui font fimplement chaudes ; quand la matiére n’eft qu’en une médiocre quantité; mais qui s’enflâment lorfque la matiére d'où elles font poufées ; fait une maffe confidérable comme de trente ou de qua- rante livres. La fermentation accompagnée de chaleur , & même de feu, qui arrive, dans cette Opération, procéde de la per Mem. de 1700. pag. 10: Berger frite Men. le 1700. pag. 101 DES SCIENCES. 10? nétration & du frotement violent que les pointes acides du foulfre font contre les parties du fer. . Cette expérience feule me paroit très - capable d'expli- quer de quelle maniére fe font dans les entrailles de la terre les fermentations, les remuemens & les embrafe- mens , comme il arrive au Mont Vefuve , au Mont Etna, & en plufeuts autres lieux; car s'il s'y rencontre du fer & du foulfre, qui s'uniflent & fe pénétrent Lun Pautre, il doit s'enfuivre une violente fermentation qui produira du feu comme dans notre opération. Oril eft aifé de prou- ver que dans les Montagnes dont j'ai parlé, il y a du foulfre & du fer; car après que les flâmes font finies ; on trouve beaucoup de foulfre fur la fuperficie de la terre & l’on découvre dans les crevailes où le feu a paflé, des matiéres femblables à celles qui fe féparent du fer dans les forges. Mais voicr les fecondes expériences que j'ai faites depuis b derniere Edition de mon Livre ; qui appuyeront Les pre- miéres & mon raifonnement, J'ai mis du même mélange de limaille de fer & de foul- fre en différentes quantités dans des pots hauts & étroits , en forte que la matiére ÿ a été plus comprimée que dans les terrines , il s’eft fait aufli des fermentations & des embrafe- mens plus forts, & la matiére s'étant élevée avec un peu de: violence ; il emarejailliune partie autour des pots. J'ai mis en Eté cinquante livres du même mélange dans: ün grand pot ; & j'ai placé le pot dans un creux que j'avois: fait faire enterre à la campagne, je l'ai couvert d’un lingé: & enfuite de terre à la hauteur d'environ un pié, jai ap- percû huit ou neuf heures après que la terre fe gonfloit;, S’échauffoir & fe crevafloit ; puis H en eft fort des vapeurs fulphureufes & chaudes ; & enfuite quelques âmes qui ont: élargi les ouvettutes ; & qui ont répandu autocr du lieu une: poudre jaune & noire : la terre à demeuré long-tems: chaude , je l'ai levée après qu'elle à été refroïdie, je n'ai trouvé dans le pot qu'une poudre noire & pefante ; c'eft la limaille de fér dépouillée d'une partie de fon foulfre ;, Tremblemens de terre. Ouragan. 104 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE on auroit pù mettre davantage de:terre- fur le pot; mais il y auroit eu à craindre que la matiére eût pâ sallu- mer faute d'air. Cette opération réuflit mieux en Eté qu'en Hyver, à caufe de la chaleur du Soleil qui excite un plus grand mouvement aux parties infenfibles du fer &c du foulfre. Il n’eft donc pas néceffaire de rechercher ailleurs ce qui peut mettre les foulfrés en mouvement dans les mines & les enflâmer ; leur jonétion avec le fer produira parfaite- ment bien cet effet, de même qu’elle l'a produit dans nos opérations. Mais il fe préfente ici une difficulté ; c’eft que ces gran- des fermentarions & ces embrafemens fouterrains ne peu- vent avoir été produits fans air; or on ne comprend pas bien par où il auroit pû pafler de l'air fi profondément dans la terre. On répond à cette objeétion , qu'il y a dans la terre beau- coup de fentes & de conduits que nous ne voyons point, & principalement dans les Pays chauds, où ces mouve- mens fouterrains arrivent ordinairement; car la grande cha- leur du Soleil échauffant & calcinant, par maniére de dire, Jaterre en plufieurs lieux , y fait des crevafles profondes par où il fe peut introduire de l'air. Les tremblemens de terre font apparemment caufés par une vapeur, qui ayant été produite dans la fermentation violente du fer & du foulfre, s’eft convertie en un vent ful- fureux , lequel fe fait paflage , & roule par où il peut ; en foulevant & ébranlant les terres fous lefquelles il pale. Si ce vent fulfureux fe trouve toujours renfermé fans pou- voir pénétrer aucune iflue pour s'échapper , il fait durer le tremblement de terre long-tems, & avec de grands efforts jufqu’à ce qu'il ait perdu fon mouvement; mais s'il trouve quelques ouvertures pour fortir, il s’élance avec grande impétuofité, & c'eft ce qu'on appelle Ouraz gan ; il écarte la terre & fait des abimes, il déracine les arbres , il abat les maifons; & les hommes mêmes ne fe- roient pas à l’abri de fa furie, s'ils ne prenoient la précau- tion Te Ë DES SCIENCES 10$ tion de fe jetter promptement labouche-& le ventre contre terre, non pas feulement pour s'empêcher d’être enlevés, mais pour éviter de refpirer ce vent fulfureux & chaud qui les fuffoqueroit. … Les feux fouterrains viennent de la même exhalaifon ful- fureufe ; la différence des effets qu'elle produit peut pro- venir de plufieurs caufes ; de ce que la matiére a été plus abondante , & par conféquent la fermentation plus forte ; de ce qu'il s'y eft introduit davantage d’air ; de ce qu'il s’eft rencontré des fentes ou des crevalles à la terre affez grandes & difpofées pour laiffer pañler les fâmes : ces fâmes en s’élevant impétueufement , fe font bien-tôt un jour plus grand, & elles donnent lieu à toute la matiére du fond de la terre de s’enflâmer & de poufler des feux fi abondants, qu'ils couvrent & inondent quelquefois de leurs cendres les prochains Villages. : Les feux folets & ceux qui paroiffent fur certaines eaux dans les pays chauds, tirent apparemment leur origine de la même caufe ; mais comme la vapeur fulfureufe a été foible , & que fon plus grand mouvement a été ralenti en fe filtrant au travers des terres & en paflant par les eaux , il ne s’en eft élevé qu'une flâme légére , fpiritueufe , errante, & qui n'eft point entretenue par une aflez grande quantité de matiére pour être de durée. Il y a apparence que les eaux minérales chaudes , comme celles de Bourbon, de Vichi, de Bareluc, d'Aix, ont pris leur chaleur des feux fouterrains ou des terres fulfureufes & échauffées par où elles ont pañlé: car quand’ ces eaux font en repos, il s’en fépare des parties de foulfre aux côtés. des baffins. Il fe peut faire aufli que certaines eaux minérales ayent tiré leur chaleur d’une chaux naturelle qu'elles rencon- trent en leur chemin dans les entrailles de la terre ; mais cette chaux n’eft qu’une pierre calcinée par des feux fou terrains, ; Les colonnes d’eau qui s'élevent quelquefois fur la mer, & qui font aux Marelots_les. finiftres préfages M prompt 1700. Feux fouter- LEFT E Feux folsts. © Eaux miné- rales chaudes. Colonnes d'eau. Eclair. Tonnerre. Pierres de foudre. 106 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE naufrage , viennent apparemment de ces vents fulfureux; pouffés rapidement des terres de deffous la mer, après des fermentations pareilles à celles dont il a été parlé. Les vents fulfureux qui font les Ouragans , s’élevent avéc tant de violence en s’échappant de deffous la terre, qu'il en monte une partie jufqu’aux nues ; c’eft ce qui fait la matiére & la caufe du Tonnerre : car ce vent qui contient un foulfre exalté , s'embarrafle dans les nues , & y étant battu & comprimé fortement, il y acquiert un mouvement aflez grand pour sy enfâmer & y former lEclair en fen- dant la nue , & s’élançant avec une très-grande rapidité: c’eft ce furieux mouvement qui caufe le bruit du Tonnerre que nous entendons ; car ce vent fulfureux fortant violem- ment d’un lieu étroit où il étoit contraint , frappe l'air très- rudement, & y roule d’une viteffle extraordinaire, de même que fait la poudre qui fort d’un Canon où elle a été allu- mée. On peut dire ici qu’un nitre fubtil qui eft toujours naturellement répandu dans l'air, fe lie au foulfre du T'on- nerre , & augmente la force de fon mouvement & de fon aétion ; de même que quand on a mêlé du falpêtre avec le foulfre commun, il produit un effet bien plus violent en fe rarefant , que quand il eft feul. Ce vent fulfureux du Tonnerre , après avoir roulé dans Pair, quelqu'efpace de tems , fe rallentit peu à peu de fon mouvement ; c'eft pourquoi le Tonnerre eft bien plus vio- lent & plus dangereux au moment qu'il fort de la nue, que quand il a déja fait dans lair une partie de fes tournoyemens & de fes virevouftes : mais enfin après avoir fait tant d'éclat, tant de bruit, & tant de fracas, il fe réduit à rien, & il ne laiffe dans les lieux où il a paffé qu’une odeur de foulfre femblable à celle de l'Ouragan. Quant aux pierres de foudre dont le vulgaire veut que le Tonnerre foit toujours accompagné, leur exiftence me pa- roît bien douteufe, & j'ai affez de pente à croire qu'il n’y en. a jamais eu de véritables ; il n’eft pourtant pas abfolument impoffible que les Ouragans en montant rapidement juf- qu'aux nues , comme il a été dir , n’enlevent quelquefois avec DES SciENCES::- 107 eux des matiéres pierreufes & minérales, qui s’'amolliffant & s’uniffant par la chaleur , forment ce qu’ôn appelle pierre de Tonnerre; mais on ne trouve point de ces pierres dans les lieux où le Tonnerre eft tombé: & quand même on en auroit trouvé quelqu’une , il y auroit bien plus de lieu de croire qu'elle viendroit d’une matiére minérale fondue & formée par le foulfre enflâmé du Tonnerre dans! 14 terre même , que de penfer que cette pierre eût été formée dans Pair ou dans les nues, & élancée avec le Tonnerre. Il refte une difficulté, c’éft de fçavoir comment le vent fulfareux que j'ai fuppofé être la matiére du Tonnerre, peut avoir été allumé entre les nues qui font compofées d’eau , & y avoir été comprimé fans s’éteindre : car il fem- ble que l’eau des nues devoit avoir empêché que ce foul- fre n'allumôt, ou du moins elle devoit Fabforber étant al- lumé. Pour répondre à cette diculté , je dis que le foulfre étant une fubflance grafle , n’eft point fi fujet à l'impref- fion de l'eau que les autres fübftances , & qu'il peut être enflâmé dans l’eau, & y brûler de même que le Camphre, & plufieurs autres matiéres fulfureufes très-exaltées y brû- lent. Il doit néanmoins être arrivé qu'une partie de ce foulfre ait été plongée dans la grande quantité d’eau qui fait les nues, & qu’elle fe foit éteinte avec une forte dé- tonnation, comme il arrive quand on jette dans de l’eau quelque matiére folide rougie au feu; cette détonnation contribue peut-être à faire le bruit du Tonnerre ; mais l’au- tre partie du foulfre qui étoit La plus fübtile & la plus difpo- fée au mouvement, a été exprimée toute en feu. L’'expé- rience que j'aurai l'honneur de faire devant la Compagnie, prouvera mon raifonnement. he J'ai mis dansun Matras de moyenne capacité, & dont 1e cou avoit été coupé , trois onces de bon efprit de vitriol, & douze onces d’eau commune ; j'ai fait un peuchauffer le mélange , & j'y ai jetté en plufieurs reprifes une once où une once & demie. de limaille de fer, ? s’eft fait une ébu- lition & des vapeurs blanches; J'ai. préfenté: uné bougie O ï Fulmination dans le liqui- d €. 104 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE allumée à l’enibouchure du Matras, cette vapeurapris feu, & à même-tems a fait une fulmination violente & écla- tante; j'en ai encore approché la bougie allumée plufieurs fois , & il s’'eft fait des fulminations femblables à la pre- miére , pendant lefquelles le Matras s’eft trouvé aflez fou- vent rempli d'une flâme qui a pénétré & circulé jufqu'au fond de la liqueur , & quelquefois la âme a duré une efpace de tems aflez confidérable au cou du Matras. Il y a plufieurs circonftances à remarquer dans cette opération. La premiére eft que l’ébulition qui arrive quand onajetté la limaille de fer dans la liqueur, provient de la diflolution qui fe fait d’une portion du fer par l'efprit de vitriol ; mais afin que l’ébulition, les fumées & la diflolu- tion foient plus fortes, il eft néceffaire de mêler de l'eau avec l’efprit de vitriol , en la proportion qui a été dite: car fi cet efprit étoit pur, & qu'il n’eût point été dilayé & érendu par l’eau; fes pointes à la vérité s’attacheroient à la : limaille de fer, mais elles y feroient ferrées & preflées l'une contre l’autre ; en forte qu’elles n’auroient point leur mou- vement libre pour agir fufiifamment , & il ne fe feroit point de fulmination. La feconde eft qu'on doit un peu chauffer la liqueur pour exciter les pointes du diffolvant à pénétrer le fer &c a jetter des fumées; mais il ne faut pas qu’elle foit trop chaude , parce que ces fumées fortiroient trop vite; & quand on y mettroit la bougie allumée , elles ne feroient que s’enflâmer au cou du Matras, fans faire de fulmination : car ce bruit ne vient que de ce que le foulfre de la matiére étant allumé jufques dans le fond du Matras, trouve de la réfiflance à s'élever, & il fait un grand effort pour fendre l’eau & fe débarraffer. Mir - La troifiéme eft qu'il faut néceffairement que le foulfre qui s'éxalte en vapeur & qui s’enflâme , vienne uniquement de la limaille de fer: car l’eau ni lefprit de vitriol , & prin- cipalement le plus fort, comme celui que j'ai employé, n’ontrien de fulfureux ni d'inflimable ; mais le fer contient beaucoup de foulfre, comme tout le monde le fçait; il DES SCIENCES. 109 faut donc que le foulfre de la limaille de fer ayant été ra- refié & développé par l’efprit de vitriol , fe foit exalté en une vapeur très-fufceptible du feu. La quatriéme eft que les efprits acidés de fel , de foulfre & d’Alun produifent dans cette opération le même effet que l’efprit de vitriol: mais l’efprit de nitre ni l’eau forte n'y excitent point de fulmination. Au refte , l’opération dont je viens de parler n’a pas été inventée feulement pour la fulmination ; elle fait le com- mencement d’une préparation nommée fel ou vitriol de Mars, employée & eftimée dans la Médecine: fi Pon veut. donc profiter de ce qui eft refté dans le Matras après la fulmination , il faut le faire bouillir , le filtrer, faire éva- porer la liqueur filtrée à diminution des deux tiers ou des trois quarts , & la laiffer cryftalifer en un lieu frais: on aura le vitriol de Mars, qui reflemble beaucoup en figure, en vixiol de couleur & en goût au vitriol d'Angleterre ; mais il eft un Mars. peu plus doux, & il fent plus le fer. C’eft un fort bon apé- titif; la dofe eft depuis fix grains jufqu'à un fcrupule : fi lon en donne une plus grande dofe , il eft fujet à exciter quelques naufées, mais non pas avec tant de force que fait le vitriol ordinaire. | Le vitriol de Mars eft proprement une révivification du vitriol naturel : car l'efprit acide du vitriol qui avoit été féparé de fa terre par la diftilation , entre par cette opé- ration dans les pores du fer, le diffout & s’y corporifie : j'ajoûte à cela que le fer contient un fel vitriolique très- capable de contribuer à la formation de ce vitriol de k Mars. | | J'ai mis dans une Corhue de grais huit onces de vitriol de Mars ; j'y ai adapté un grand balon ou récipient; & jen ai fait la diftilation, comme on a coutume de faire celle du vitriol ordinaire , j'en ai retiré cinq onces & cinq drag- mes d’un efprit acide , clair , reflemblant beaucoup à Pef-, rit de vitriol commun, mais laiffant fur la langue un ii de vi. goût un peu aftringent ou ftyptique: il eft ste balon triol de Mars. op Vertu , dofe, Vertus. Safran de Mars apéritif. Vitriol de Mars calciné en blancheur. 1700. 12. Mai. 110 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYaALE d’abord qu'il a été féparé de la Cornue , une forte odeur de foulfre; cet efprit eft bon pour les pertes de fang, pour les cours de ventre: j'ai trouvé dans la Cornue une matiére fort rarefiée , légére , très-fryable, rouge, fe dilayant ai- fément dans la bouche, d'un goût aftringent , tirant un peu fur le doux, c’eft un beau & bon fafran de Mars apé- ritif. J'ai mis dans un creufet fur de feu une autre portion de vitriol de Mars cryftalifé : la matiére s’eft fondue ; il s’en eft évaporé beaucoup de flegme , & il eft refté du vitriol blanc , comme il arrive quand on calcine le vitriol com- mun: j'ai pouflé par un grand feu ce vitriol blanc; il eft devenu rouge comme du Colcotar. On peut donc conclure que le vitriol de Mars eft en toutes chofes femblable au vitriol naturel. OBSERVATIONS SUR LES DISSO LUTIONS © fur les Fermentations que l'on peut appeller froides , parce quelles [ont accompagnées du réfroidifement des liqueurs dans lefquelles elles fe paljenr. Par M. GEOFFROY. Engagement dans lequel je fuis entré de travailler Li la nature & les propriétés des fels, lorfque j'ai eu Phonneur d’être admis à l'Académie des Sciences, m'a fait tenter plufieurs expériences pour examiner leurs diffolu- tions, & les effets que produifent leurs mélanges avec cer- taines liqueurs. = Ces expériences fouvent réitérées m'ont donné lieu d’obferver deux chofes , qui m'ont paru également impor- tantes & curieufes. La premiére , que la plûüpart des fels fe diffolvant dans plufieurs liqueurs , les réfroidiffent fans y exciter de fermen- tation fenfible, DES SCIENCES 111 Et la feconde, que malgré les fermentations promptes & violentes dont le mêlange de certains fels avec quelques liqueurs eft fuivi , ce mêlange eft néanmoins accompagné d’un réfroidiflement très-fenfible du liquide dans lequel on le fait. Ces différens effets que produifent les fels dans les li- queurs dans lefquelles on les mêle , me font partager leurs diflolutions en deux Clafes. Je renferme dans la_ premiére les fimples diffolutions froides, c’eft-à-dire , les diffolutions qui ne font accom- pagnées d’aucune fermentation fenfible , mais dans lef- quelles on obferve feulement le réfroidiffement du liquide. Etje comprens dans la feconde les fermentations froides, ou les diflolutions des fels qui font accompagnées d'une fermentation fenfible , & du réfroidiflement de la liqueur dans laquelle elles fe font, PREMIERE CLASSE, Des fimples Diffolutions froides. J'ai mis dans un vafe une pinte d’eau commune; j'ai placé dans l’eau un Termométre ordinaire de dix-huit pouces, & je l’y ai laïflé quelque tems en expérience , afin qu'il s’ajuffât au dégré proportionné à la température de l’ean: j'ai jetté enfuite dans l’eau quatre onces de fel Ammoniac, & la liqueur du Termométre eft defcendue de deux pou- ces, neuf lignes, en moins d’un quart-d’heure. J'ai fait enfuite cette expérience avec le falpêtre, & la liqueur du Termométre eft defcendue d'un pouce, trois lignes, | : Dansla même expérience faite avecle vitriol, la liqueur du Termométre eft defcendue de près d’un pouce. Le fel Marin à fait defcendre la liqueur de dix lignes feulement; & même tout le fel ne s’eft fondu que lente- ment: il m'a paru que c’étoit le plus difficile à fondre. Tous les fels Alcalis volatils ont réfroidi l’eau commu- Diffolution des fels falés dans l’eau commyns. Diffolugion ne par leur mêlange , faifant defçendre la liqueur du Ter- desfels Alcalis 112 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE polatils dans mométre de quelques lignes; mais j'ai remarqué qu’ils Le ne. faifoient plus ou moins, felon qu’ils étoient plus ou moins purifiés. Le fel d'urine nv'a paru le faire plus promptement qu'aucun autre. Sels Ales Pour les fels Alcalis lixiviels , bien loin de réfroidir l’eau lixiviels ex dans laquelle on les mêle, ils l'échauffent plus ou moins, = Adnle. felon qu'ils ont été bien calcinés. parcequequel. Surquoi il faut remarquer que ces fels (pour échauffer due-unsd® l’eau ) doivent être purement Alcalis : car s'ils approchent chauflentdans de la nature du Nitre ou du fel Marin, ils n'échauffent ne moe l'eau que foiblement ou point du tout, ou même ils la " réfroidiffent ; ce que fait très-confidérablement le fel de Tamarifque tiré par la lefcive des cendres de ce végétal. Selsfalésme. Le fel Ammoniac mêlé avec les Acides des végétaux, A comme le Vinaigre diftillé, le fuc de Limons , le Verjus, taux. n’a donné aucune marque de fermentation : il a beaucoup réfroidi ces liqueurs. Une once de fel Ammoniac jetté dans quatre onces de Vinaigre diftillé, a fait defcendre la liqueur du Termométre de deux pouces , trois lignes. Le même fel mêlé avec le fuc de Limons, a fait defcen- dre la liqueur de deux pouces. Il a fait la même chofe avec le Verjus. Voilà les mélanges des fels avec des liqueurs qui n'ont ie les plus remarquables par le froid qu’ils ont excité. affons à ceux qui font accompagnés de fermentations. SECONDE CLASSE. * Des Fermentations froides. Le falpêtre jetté dans fon efprit acide, a élevé quelques fumées ou vapeurs; la liqueur du Termométre eft defcen- due de quatre lignes dans ce mélange. Le falpêtre mêlé avec l'efprit de vitriol , a exhalé des fumées en affez grande quantité, & a fait defcendre la . . .…. liqueur de fix à fept lignes. Sels falés mé- D 2 2 . . . d {el ks ave lle ans ces deux expériences j'ai mis demie once de fe prits acides. fur trois onces de liqueurs. | J'ai s DES SCIENCES. 113 J'ai jetté dans trois onces d’efprit de Nitre , demie on- ce de fel Ammoniac : & la liqueur du Termométre eft defcendue de deux pouces cinq lignes ; il s’eft élevé quel- ques vapeurs de ce mêlange , qui m'ont paru plus confidé- rables que celles qui s’exhalent ordinairement de l’efprit de Nitre feul. J'ai verfé dans trois onces d'huile de vitriol , demie once de fel Ammoniac ; il s’eft fait une violente fermentation; la matiére s’eft élevée confidérablement ; il en ef forti beau« coup de vapeurs , la liqueur s’eft fort épaiflie ; & le Termo- métre eft defcendu de trois pouces fix lignes. J'ai obfervé que les vapeurs qui s’élevoient de ce mêlan- ge étoient chaudes, & elles ont fait monter confidérable- ment la liqueur du Termométre , que jai tenu fufpendu au-deflus de la matiére , pendant que celui qui plongeoit dedans defcendoit , & me marquoit un très-grand froid. Le fel Marin mêlé avec les efprits acides, échauffe les liqueurs , au lieu de les refroidir. Son mêlange avec l’efprit de fel , fait monter le T'ermo- métre de quelques lignes , fans marquer de fermentation fenfible. Avec l’huile de vitriol , il fermente avec bruit , & éleve beaucoup de fumées : la liqueur devient épaille , & forme une efpéce de Coagulum ou gelée claire. La liqueur du Ter- Le fel Marin excepté. mométre monte beaucoup dans ce mêlange; la chaleur eft même fenfible au toucher. Tous les fels volatils Alcalis mêlés avec différentes li- queurs acides , ont excité des fermentations plus ou moins fortes, felon lacidité des liqueurs , & felon la purification de ces fels de leurs huiles fœtides : ils: ont tous fait defcen- dre la liqueur du Termométre ; mais celui qui la fait le plus confidérablement , eft le fel volatil d'urine. Une once de {el volatil d'urine très-reétifié dans quatre onces de vinaigre difillé, a fait une forte fermentation ; la matiére s’eft élevée beaucoup & avec bruit; & la liqueur du Termométre eft defcendue dans la fermentation, d'un pouce neuf lignes. $ e 1700. | Sels volatils Alcalis mélés avec les ef- prits acides, Les fels fixes purement Al- ealis exceptés. Raïlon dure. froidiffement des diflolu- tions des fels. Pourquot la diffolution étant finie le TFermomcétre remonte-t il un peu ? D'où vient la chaleur de la diffolution des fels lixiviels Alcalis. 214 MEMOIRES DE L'AcADEMTE RoYaLE Dans trois onces d’efprit de vitriol , une once de fel vo latil d'urine a excité une violente fermentation ; pendant laquelle la liqueur du Termométre eft defcendue de deux pouces quatre lignes. Le mélange du fel de Tartre ou des autres fels fixes Al- calis purs avec les liqueurs acides , excite des fermentations avec chaleur. J'ai fait toutes ces expériences avec le même Termomé- tre dans un tems affez froid , & dans une temperature de l'air affez égale. ’ Pour rendre raïfon de ces expériences, Jexamine pre miérement les fimples diffolutions froides ; & ayant établi (avec tous les Phyficiens) que le froid n’eft que la diminution du mouvement , je dis que le refroidiffement que les fels apportent à l’eau , me paroït venir de ce que les parties falines étant fans mouvement & partageant celui de la liqueur , le diminuent d’autant; ce qui produit le refroidiflement plus ou moins grand de cetre même li= queur. Il y aune chofe à obferver, qui eft que quelque tems. après que la diffolution eft faite , la liqueur du Termomé- tre remonte un peu; ce qui peut provenir de ce que la matiére fubtile qui couloit abondamment entre les parties. du liquide avoit ceffé d'y couler pendant quelque tems dans la même quantité, les parties grofliéres des fels s’op- pofant à fon paflage : mais ces particules falines s’étant di- vifées peu à peu, ont rouvert les paflages à la matiére fub- tile : ce qui a rendu à la liqueur plus de mouvement qu'elle n’en ayoit au commencement de la diffolution; mais moins. auffi que quand elle étoit pure & fans mélange : les particu= Îes falinés quoique diffoutes , ralentiffant un peu fon mou- vement. On concevra aïfément pourquoi les fels lixiviels pure ment Alcalis & bien calcinés, comme le fel de Tartre, échauffent la liqueur bien loin de la refroidir ; fi on fait réféxion que ces fels dans la forte- calcination qu'ils ont foufferte, fe font chargés de beaucoup de parties de fes, DES SCIENCES as qu'ils retiennent comme en prifon dans leurs pores. Ces parties de feu, reprennent leur liberté par la diffolution de ces parties falines : & dans le même tems que cesfels de- vroient ralentir le mouvement des parties de l’eau & la re- froidir , ces particules ignées très-aétives augmentent l’agi- tation des parties de l’eau , jufqu’à la rendre très-chaude. Je remarque enfuite, que le fel Ammoniac eft de tous les fels celui qui réfroidit plus puifflamment leau dans la- quelle on le diffout ; fa froideur égale celle de l’eau qui eft prête à fe glacer: & 1] m’eft arrivé même une fois , que faifant difloudre une aflez grande quantité de ce fel dans Peau, quelques goutes qui étoient tombées au-dehors du Matras dans lequel je faifois la diflolution , fe glacerent : & le rond de paille fur lequel pofoit le Matras s'étant trouvé mouillé, fut collé pendant quelque tems au vaifleau de verre par la glace : cela n’arriva pendant l'Eté dans un tems où il faifoit chaud. J'ai tenté plufeurs fois depuis la même expérience de diverfes maniéres , fans jamais avoir pû revenir à produire de la glace. Le hazard m’avoit apparemment fait rencon- «rer dans cette expérience, non-feulement une proportion très-précife entre le fel & l'eau, mais même encore une temperature dans l’eau, que je crois néceflaire , pour que la diffolution fe faifant promptement , le refroidiffement en foit auffi plus fubit & plus grand : & c’eft ce degré de tem- perature auquel je m’ai pü arriver depuis. La grande froideur de la diffolution du fel Ammoniac ne vient pas de la difficulté qu'il a de fe diffoudre, puif qu'il fe fond plus aifément qu'aucun autre: & que le fel Marin dont la diffolution eft difficile & fort lente , eft ce- dui qui refroidit le moins fon diflolvant. Il femble au con- traire , que la facilité & la promptitude avec laquelle il Grande froi- deur du fel Ammoniac jufqu’à fe gla- cer, Raïfon de cette froideur. fe diffout, foit la caufe de cette grande froideur en cette «maniére. Le fel Ammoniac eft ( comme l’on fçait) un compofé de fel Marin & de fel d'urine; l’un très-aifé ; l'autre très- dificile à diffoudre. Moer 1 Expérience d'une diffolu- tion faline ex- ceflivement froide. 116 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Les parties du fel Marin étant comme emprifonnées entre les parties du fel de l'urine, il arrivera que beau- coup de parties d'eau pénétrant d’abord très-prompte- ment les particules falines de Furine , y perdront aufli- tôt beaucoup de leur mouvement: & ce mouvement s’af foiblira d'autant plus, que ces parties d’eau rencontreront enfuite des parties falines d’une autre nature , & dont la rélifance eft beaucoup plus confidérable que celle des fels de Purine: ainfi dans les premiers inftans de la diflolurion, le mouvement d’une grande quantité de particules aqueufes fe trouvant ralenti tout d’un coup très-confidérablement par les fels de l'urine & par le fel Marin, excitera dans ces premiers momens un froid bien plus grand que le froid des autres diflolutions des fels , que l’eau ne pénétre pas fi promptement. On pourroit m'objeéter que le fel Marin étant le plus dificile à diffoudre , fa diffolution devroit aufli être. la plus frvide. A quoi je réponds que cela pourrait être , fi l'eau pouvoit pénétrer promptement toures fes parties ; mais la lenteur avec laquelle elle les pénétre (à caufe de la tiflure ferrée des Molécules de ce fel) empêche que la diminu- tion du mouvement des parties de l’eau ne foit fi prompte , ni par conféquent fi grande ; au lieu que danse fel Am- moniac , les parties du fel Marin étant étendues par le fel de Furine, les pores du fek Alcali de Furine font comme autant de chemins ouverts aux parties de l’eau, pour aller pénétrer les parties du fel Marin dans une infinité d’en- droits. Je mets aurang des diffolutions froides , une expérien- ce que M. Homberg a faite il y a déja quelque tems de- vant la Compagnie, & que j'ai crû qu'on ne trouveroit pas mauvais que je répétalle ici ; puifqu'elle fert à prou- ver ce que je viens d'avancer touchant la froideur du fel Ammoniac : cette expérience étant d'ailleurs peu connue. Elle fe fait ainfi. On prend une livre de fublimé corrofif, & une livre de fel Ammoniac , on les pulverife chacun à part; on mêle DES SCIENCES: 117 enfuite les deux poudres très-exaétement ; on met le mé- lange dans un Matras, verfant par-deflus trois chopines de vinaigre diftillé; on agite bien le tout: & ce mêlange fe refroidit fi fort , qu’on a peine à tenir long-tems le vaifleau dans les mains en Eté. Il eft arrivé même quelquefois à M; Homberg , que faifant ce mélange en grande quantité, la matiére s’eft gelée. : Nous voyons dans cette expérience un refroidifflement encore plus grand que dans la diflolution du fel Ammoniac feul dans l’eau commune ; & ce froid eft caufé par le fu- blimé corrofif, qui feul n’eft point, ou très-peu diffolu- ble dans le vinaigre diftillé :’de maniére que les parties fluides du vinaigre diftillé ayant pénétré d’abord les par- ties du fel Ammoniac , & ayant déja perdu beaucoup de leur mouvement, s'engageant enfuite dans les pores d’un corps qu’elles ne peuvent diffoudre ; n’ayant plus affez d’attion pour cela, elles achevent d’y perdre le peu d’aéti- vité qui leur refte : elles fe figent , finon toutes, du moins la plüpart : & cette inaëtion du liquide, excite le grand froid que nous y fentons. Jufqu’ici, je n’ai rendu raifon que des fimples diffolu- tions froides des fels, dans lefquelles il n’y a point d’aug- mentation de mouvement fenfible. Paflons préfentement aux diflolutions de la feconde Claffe, qui font les fermenta- tions froides dans lefquelles le froid paroït une fuite de Pagitation des parties des liqueurs. Pour rendre raifon de ces fermentations froides , je re- connois ( avec tous les Phyliciens) que le froid & le chaud dans les liqueurs , ne font que le plus ou le moins de mou- vement dans les petites parties de ces liqueurs ; caufé par le cours continuel de la matiére fubrile dans les interftices que ces particules laiffent entrelles : & je dis que toutes les fois qu’on diminuera ce mouvement , & que l’on inter- rompra le cours de la matiére fubtile , le liquide nous pa- roïtra moins chaud ou plus froid. | Cela pofé, fi nous obfervons ce qui fe pafle dans les fer- mentations froides ;, nous remarquerons d'un côté, dans la Pi Explication des fermenta- tions froides. ÿig MemoiréS DE L'ACADEMIE ROYALE plûpart ,; des coagulations très-confidérables , & ün épaiflif fement très-fenfible des liqueurs ; nous appercevrons d’un autre côté , une agitation très-violente de quelques-unes des artiés de ces mélanges ;ils’en exhale beaucoup de vapeurs, hi matiére fe gonfle; poufle quantité de bubes ; &t fermente âvec bruit. Voïci dé quelle mañiére je conçois que’rous ces effets peuvent être produits. Dans le mélange que je fais des fels avec les liqueurs aci: des ; la plus grande partie du liquide fe coagulant avec une portion des fels, fon mouvement eft déja diminué confidé- rablement ; mais ces parties ne peuvent pas fe coaguler fans arrêter ou affoiblir le cours de la matiére fubtile : cette ma- tiére trouvant ces paffages fermés , prend fon cours par les interftices qui reftent entre les parties coagulées , où le paf fage eftencore libre : comme elle y coule en quantité, elle ÿ excite une agitation très confidérable dans les parties qu’elle rencontre à fon pañlage. C'eft cette agitation qui fait la fermentation que nous appercevons; c'eft elle qui excite ces bubes d'air & ces fu- mées ; c’eft elle qui éleve & gonfle la matiére avec d'autant plus de violence que toutes les parties de la liqueur étant à demi coâgulées, s'oppofent au mouveinent &r à l'agitation de ces petites parties. Cette agitation cependant , quelque violente qu'elle pa- roifle ; n’eft pas affez confidérable pour rompre entiérement le Coagulum qui fe forme dans la liqueur ; ni par conféquent pouf vaincre le froïd qu'excire cette coagulation : ‘tout ce qu'elle peut faire, c’eft de lui conferver encore quelque efpéce de fluidité. En effet, plus ces mélanges ont de dif polition à fe coaguler , plus ils excitent de froid. Ce que nous voyons arriver dans le mélange du fel Ammoniac & de l’huile de vitriol, dans lequel le Coagulum devient fi fort qu'il fe forme enfin au-deflus de la liqueur une croûte faline fort épaifle. Dans le mélange des autres fels avec des acides plus foibles , comme datis lé mélange des autres fels volatils avec lefptit de vinaigre, le Coagulum ne sy rend prefque DES SCIENCES. 119 pas fenfible : auffi le froid n’y devient pas fi confidérable que dans l’autre. AOINGINOS QE LUES Less J'ajouterai de plus ; que même lagitation: violente qu'excite ce mélange n'étant pas univerfelle, & ne fe paf- fant qu’en très-peu d’endroits de laliqueur elle peut encore contribuer au grand réfroidiffement du mélange dufel Ar moniac & de l'huile de vitriol ‘en augmentant le Gagwarn3 d'autant que les petites partiés qui font violemment agirées dans ce mélange , ne pouvant entraîner dans leur motive ment, les parties coagulées trop grofliéres pour celà ; elles les écartent du centre de leur mouveinent: de maniére que ces parties à demi coagulées ; fe trouvant entre ces petits tourbillons preffées les'unes contre les autres, elles fe fer- rent & fe coagulent encore plus fortement, & perdent en- tiérement leur mouvement : ce qui excite un très-brand froïd. HI 1HyEA) Si on a peine à fe perfuader que l'agitation violente qi fe paile en quelques endroits du mélange puifle contribuer au refroidiflement de la liqueur, on pourra en être convain- eu par Pexpérience fuivante. - J'ai mis de l’eau froide dans un grand baflin, j'ai plons gé aa milieu de l’eau une Cucurbite de verre pleine d’eau: également froide’; & j'ai mis dans la Cucurbiteé un Ter- momiétre très-fenfible , que j'y ai laiffé long-tems en expé- rience. . Lorfqu'il a été ajufté au degré proportionné à la froideur ‘Expérience dé l'eau, j'ai jetté promptemenit dans l’eau du Baflin quatié Fr TE T4 ou cinq pellées de braife bien allumée ; & dans l'infläne la: *° P*° ÿ liqueur du Termométre eft defcendue de deux à trois 1) gnes ; après quelques momens la liqueur'eft remontée, lorf.: que la chaleur de l'eaü du Baïlin s'eft communiquée au: vaiffeau dé verre. CIM UC IEAS BE SD D1549 :'Le refroidifflement de l’eau’ de la Cucurbite ne peut être Raïfox de BE ) Te he Ut nca =. cette °| éxpés attribué qu'au preflément où à la condenfition prompté iençé: que le feu’ a excitée dans l’eau , dans liquelle ilæété plons - gé. Cette condenfation fe peut expliquer de’ cette ma niére. 1 1 AS gui Nouvelle fa- con de Ter- mométre très= fenfible, Railon des vapeurs chau- des de. la fer- rentation. froide exritée par le mélan- ge du fel 120 MEMOIRES DE L'ACADEMIE- ROYALE . Dans Pinflant, que les charbons ardens ont été plongés dans l’eau, le tourbillon de matiére fubtile dont ils étoient entourés, fe trouvant preflé par l’eau qui l'environnoit , a écarté avec violence toutes les parties de cette eau. Cet écartement fe faifant tout à la fois en plufieurs endroits de l'eau du, Baffin , autour du vaifleau de verre, toutes les parties qui environnoient ce vaifleau fe trouvant tout à la fois comprimées de tous côtés, ont dû fe condenfer confi- dérablement ; & fucceflivement le vaifleau fe trouvant au centre de la preffion a porté tout leffort de cette preflion, auffi-bien que la liqueur qu’il contenoit ; & cette liqueur a perdu par la condenfation , beaucoup du mouvement de liquide qu’elle avoit : ce qui a été aflez confidérable pour faire defcendre la liqueur du Termométre. Ce froid pale bien vite , parce que toute l’eau du Baffin venant à s’é- chauffer très-fort , échauffe aufli très-promptement celle du vaiffeau de verre. L'effet des Termométres ordinaires n'étant pas affez prompt pour me marquer affez fenfiblement (dans cette expérience) le refroidiffement de l’eau , j'ai eu recours à une autre forte de, Termométre très-fenfible: ce Termo- métre ef compofé d’une boule de verre qui n’a d'autre ou- verture que celle d’un tuyau fort menu qui defcend pref- que jufqu’au fonds de la boule. Ce tuyau trempe dans une liqueur qui eft au fonds de cette boule , & dont le refte n’eft rempli que d’air: quand cet air fe rarefie , il comprime la liqueur qu'il fait monter dans le petit tuyau; & quand il fe condenfe, il donne la liberté à la liqueur de defcendre. Ce Termométre eft plus fenfible qu'aucun autre ; parce que l'air qui eft fon mobile fe rarefie au chaud, & fe condenfe au froid plus promptement qu'aucun autre liquide. A l'égard de la chaleur fenfible des vapeurs qui s’élévent du mélange du fel-Ammoniac avec l'huile de vitriol , il ne fera pas difficile d'en pénétrer la caufe, fi l’on confidére que ces vapeurs ne font que les parties les plus fubtiles & les plus actives de ce mêlange , que.la matiére fubtile enleve avec elle en le traverfant. Le mouvement de ces parties fe sexe ibre DES SCIENCES 123 libre dans l'air, il n’eft plus reprimé par des parties coagulées trop grofliéres : il devient même d’autant plus violent, qu'il a été retenu & contraint pendant quelque tems : & il fe fair appercevoir par la chaleur , qui eft l’effet ordinaire de tous les mouvemens rapides & violens. Je rapporterai encore une expérience affez confidérable fur la fermentation froide, excitée par le mélange du fel Ammoniac & de l'huile de vitriol. Si après avoir fait le mêlange de quatre onces d’huile de vitriol & d’une once de fel Ammoniac, on jette deflusune cuillerée d’eau commune , dans le tems que la fermenta- tion eft la plus forte , que le froid eft le plus grand, & que le Termométre defcend avec le plus de vitefle ; la fermen- tation cefle, & le froid fe change très-promptement en une chaleur fort confidérable , & qui fait monter beaucoup la liqueur du Termométre. On concevra aifément la raifon de cette expérience, fi on fait réfléxion que l’eau s’échauffant très-promptement & très-fort avec l'huile de vitriol , fait ici le même effet; & cette chaleur eft pour lors affez grande pour détruire le froid des particules coagulées: l’eau par elle-même étant d’ailleurs très-propre à diffoudre ce Coagulum. J’aurois encore à rendre raifon pourquoi le fel Marin s'échauffe avec les différentes liqueurs acides; mais il fau- droit pour cela examiner la nature de ce fel, ce qui nous meneroit trop loin. Je dirai feulement avant de finir, que je m’aipas pré- tendu faire une énumeration exaéte de toutes les diffolu- tions & fermentations froides : je n’ai feulement rapporté que les expériences que j'en ai faites fur les fels & fur les liqueurs dont nous nous fervons le plus , & qui m’ont paru les plus confidérables pour leurs effets. 1700. à Q Ammoniac & de l'huile de vitriol. Ghangement de la fermen- tation froide de ce mélange en une fer- mentation très-chaude avec un peu d'eau. 1700. 34. Avril 122 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE DE lUSAGE ME DECINAE de l’eau de chaux. Par M. BURLET. A chaux ayant toujours été regardée comme un mixte rempli de parties de feu, qui détruit & con- fume les corps fur lefquels elle peut agir : on ne s’en fervoit en Médecine tout au plus que dans la compofition de quelques remédes topiques , ou deflicatifs ou confomprifs , comme des pierres à Cautere, de Peau phagedenique , des injections ou linimens pour de vieux Ulceres , des gonor- rhées , &c. On n’en faifoit aucun ufage intérieur , & on auroit craint en donnant par la bouche un reméde tiré de la chaux , de donner un vrai poifon: jufqu’à ces derniers rems-ci que l'eau de chaux prife intérieurement , a paflé pour un excellent reméde , & que plufeurs Auteurs célébres l’ont mife en ufage pour un grand nombre de maladies. Il y a quelque apparence que ce n’eft que depuis lhy- pothéfe de l'Acide & de l’Alcali & les différentes expé- riences faites en Chymie fur l’Analyfe des mixtes, qu'on a tenté de donner à boire l’eau de chaux ; & Willis eft un des premiers Auteurs que je fçache qui en ait écrit. ; Je fus furpris de trouver en Hollande un Médecin qui m'affüra , qu'il employoit par femaine plus de trente pintes d’eau de chaux, qu’il la donnoit à boire à fes malades déguifée de bien des maniéres : que c’étoit un des meil- leurs alteratifs qu’il y eût dans la nature pour la plüpart des maladies chroniques ; & qu'il s’en falloit beaucoup que cette eau ne füt aufli cauftique & aufli defléchante que fe l'imaginent plufieurs de ceux qui n’en ont fait aucune expérience. La probité & lhabileté connue de celui qui me faifoit part de ce reméde , ne contribua pas peu à m'ôter le fcru- DES SCIENCES. N x23 ule , & la crainte que j'avois de l’eau de chaux, fur-tout depuis cette obfervation communiquée , que des Bœufs al- terés paflant près le Louvre où l’on bâtifloit, & où il y avoit une foffe remplie de chaux éteinte , s’y étoient arrêtés, avoient bû l’eau qui furnageoit la chaux , & étoient morts quelque tems après. L’expérience d'ailleurs de ces vins falffiés par la chaux qui un plus fumeux , qui alterent & échauffent Ceux qui en boivent jufqu’à les rendre malades , m’avoit toujours fait regarder l’ufage intérieur de cette eau, comme préjudiciable & téméraire. Cherchant donc à me défaire infenfiblement de la forte prévention où j'avois été contre la boiflon de l’eau de chaux, je commençai à n’inftruire à fond de tout ce qui concernoit la chaux & l’eau de chaux ; je m’appliquai à chercher les occafions de m'en fervir, de vérifier les ex- périences qui m'avoient été communiquées & celles que J'avois lûes dans quelques Auteurs : & voici au vrai ce que J'obfervai & fur la chaux & fur l'eau de chaux dans l’ufage que j'en fis faire à plufieurs malades tant en Hollande pen- dant mon féjour , qu’à Paris après mon retour. Toute la chaux n’eft pas d’'égale bonté pour faire l’eau de chaux; en Hollande comme en plufieurs autres Provin- ces Maritimes , on fe fert du coquillage ramaffé fur le bord de la Mer pour faire la chaux ; on en faifoit de cette même matiére du tems de Diofcoride:elle n’eft pas d’un bon ufage en Médecine, elle eft trop glaireufe ; l’eau faite avec cette chaux a beau être filtrée , elle dépofe toujours une efpéce de limon , elle fe conferve moins long-tems, elle a un goût moins ftyptique & plus doucitre , elle eftplus fade & plus pefante à l’eftomach que l’eau qui eft faite de chaux de pierre. On l'apporte en Hollande de Liége & de plufieurs autres endroits de Flandre. La pierre qu'on employe le plus ordinairement pour faire la chaux prefque dans tous les Païs, eft une efpéce de Roc ou pierre dure, qui retient le nom de pierre à chaux : onen fait aufli de Marbre & de toute autre pierre ; Qi 124 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE excepté dutuf, du petit caillou , & des pierres fabloneufes ; parce que celles-ci n'étant compofées que comme de pe- tits grains unis & collés enfemble , le feu les divife , les dé- joint fans les pénétrer de tous côtés & fans les réduire en chaux. Plus la chaux eft nouvellement faite en plus groffes pier- res, moins expofée à l'air, gardée en un fé plus fec , fe brifant & s'égrainant moins , meilleure elle eft pour faire Peau de chaux. Elle fe fait en verfant fix livres d’eau de pluie chaude fur une livre de chaux vive, on laiffe bien éteindre & diffoudre la chaux pendant vingt-quatre heures, puis on filtre Peau avec le papier gris , fi l’on veut. L'eau chaude & fur-tour l’eau de pluie diffout , pénétre, & éteint mieux la chaux que l’eau froide commune. La même chaux peut fervir deux fois en remettant deflus la même quantité d’eau ; la premiere eau eft pourtant la forte & la meilleure dans certains cas. Une troifiéme eau fe retire prefque infipide & ne retenant plus rien de la chaux. | La même chaux après plufieurs leffives peut être calci née de nouveau, & elle redonne à l’eau les mêmes qualités qu'auparavant. L'eau de chaux a un goût âcre fiyptique , mêlé de quel- que douceur fade. Il n'eft pas aïfé de la mêler avec d’autres liqueurs; elle fermente prefque avec tous les fyrops , & ne foufire quafi aucun mêlange où1l y ait le moindte acide fans fe troubler & faire une efpéce de précipité. Je ne ferai point ici l’analyfe de la chaux ni des pierres à chaux , & ne répéterai point toutes les expériences qui ont déja été faires en préfence de la Compagnie fur l’eau de chaux; on n'a qu'à confulter les Mémoires de l’Académie : je marquerai feulement les effets qu’elle a eus dans les ma- ladies où je l’ai employée moi-même ou l'ai vûe employer É d’autres, & les différentes compolitions de remédes dans efquels on la fait entrer. DÉS SCIENCES. 12$ Comme dans l’effai des remédes fufpe@s qui ne font oint d'un ufage tout-à-fair commun & approuvé de tout A monde, la prudence veut qu'on n’en donne que de petites dofes, & qu’on les mêle même autant que faire fe peut avec des chofes qui leur tiennent lieu en quelque maniére de correctif; je commençai à donner l’eau de chaux mêlée à froid avec partie égale de lait de Vache, & adoucie avec un peu de Mofcouade liquide; j'en fis ufer d’abord à deux malades, lun Afthmatique , l'autre Dyfen: terique , tous deux Hollandois, jeunes & d’une forte com- pléxion, à chacun neuf onces par Jour, de quatre heures en quatre heures trois onces. Le Dyfenterique dès le fe- cond jour recût du foulagement, il ne fit plus de fang; fon ventre fe tendit fans douleur cependant ; il eut un vo- miflement le quatriéme jour précédé de quelque dégoût, ê& il rejetta quantité de matiéres fereufes mêlées de parties blanches, & comme plâtreufes , je le purgeai le lendemain avec le Tartre émetique , & lui fis après cela ufer encore pendant quatre jours de l’eau de chaux, le cours de ventre qui lui reftoit, s'arrêta entiérement , fon ventre s’amolit & il guérit. Pour l’Afthmatique dès le troifiéme jour, tomba dans un fi grand dégoût, & fe plaignit d'un poids fi pefant fur fon eftomach, que je fus. obligé de lui fure cefler ce re- méde & de le remettre à l’ufage du vin d’Alicant & de la bierre d'Abfynthe; cependant comme l'enflure qu'il avoit: aux jambes augmenta de jour en jour , & vint au point qu'elles creverent , il fut foulagé & refpira bien: plus aifé- ment, d'où je pris occafion de le repurger & de lui:redon- ner fans me rebuter l’eau de chaux déguifée par un mélange d’une décoûtion faite avec la Squinne, l’Anis, la Canelle ;. un peu d’Abfynthe au lieu de lait. Il n’en eut pas ufé huit jours , qu'il fe trouva beaucoup mieux, & continuant non-feulement à en boire , mais à en‘laver fes jambes , il. guérit dans l’efpace d’un mois. Ayant lû dans Willis , Morton, & dans quelques autres Auteurs modernes , que l’eau de chaux étroit un éxcellent Qi 126 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE, reméde & pour la Phthylie commencée & pour les Ecrouelles, j'en fis épreuve dans ces deux maladies; la malade Phthyfique à qui j'en donnai premierement mé- lée avec le lait , enfuite avec une décoélion peétorale faire fuivant la recepte de Morron , avec la Squinne & les rai- fins de Corinthe, en reçut quelque foulagement , le flux de ventre même qu’elle avoit, s’arrêta un peu ; mais pen- dant les fix jours qu’elle en prit fix onces par jour en trois fois, elle fe plaignit fort du dégoût & du mal d'eftomach ; elle fe fentoit plus alterée qu’à l'ordinaire, ce qui m’obligea de lui en faire cefer l'ufage & de la remettre au fimple lait de Chevre & aux bouillons de ris qui la firent encore vivre quelque mois. Un homme Phthyfique âgé d’environ trente ans, qui crachoit très-fouvent du fang , & qui avoit déja maigri, en ufà pendant un mois fans interruption huit onces par jour ; l'effet fenfible de l’eau de chaux fut d’arrêter le crachement de fang & de diminuer un peu la toux , mais la fiévre lente, & la maigreur & le dégoût fubfiftant toujours, le malade fe rebuta & ne voulut plus en prendre; un Médecin Liégeois l'envoya aux Eaux de Spa, & j'appris qu'il y mourut quel- que tems après. Je donnai à deux enfans de dix à douze ans , fcrofuleux, l’eau de chaux en même tems; à l’un les écrouelles pa- roifloient fous la gorge des deux côtés, & il y avoit plus d’un an qu’elles étoient ulcerées ; l’autre n’avoit qu'une tu- meur au bras, ouverte & ulcerée depuis peu , reconnue fcrofuleufe de tous les Médecins qui l'avoient vüe ; ils en prirent tous deux jufqu'à huit ou neuf pintes en moins de trente jours; on en donnoïit à chacun par jour un peu plus de demi-feptier fur chopine d’une prifanne compofée avec la Squinne , le Saffafras, la racine de fcrofulaire & la Regliffe, & onles obligeoit de tout boire fans en rien laif- fer : je fus furpris de voir que le premier tomba encore au bout de quelques jours dans le dégout que jairemar- qué aux autres malades , & qu'il ne put continuer l'ufa- ge de cette boiflon pendant les trente jours, qu’en pre- DES SCIENCES. 127 sant dans les intervalles de petites roties au vin d’Alicant ou Canarie, & un peu de Thériaque les matins ; le fecond eut un faignement de nés vers le quinziéme jour, & mai- grit; fon ulcere parut fe deffécher beaucoup, cependant ni . l'un ni l'autre ne guérirent. Je communiquai aufli-tôt ces expériences à celui qui m'avoit dit tant de merveilles de l’eau de chaux; & cela Fobligea de me faire part de la maniére dont il la donnoit le plus fouvent qu'il tenoit fecrette , & de m'apprendre tous les différens mêlanges qu'il en faifoit dans diverfes maladies. Il ne regardoit donc l’eau de chaux que comme un puif- fant alteratif, & comme une eau purement alcaline , ca- pable d'émouffer & de détruire les levains acides , princi- pes de toutes les obftruétions & la caufe la plus ordinaire de prefque toutes les maladies chroniques. Le principal ufage qu'il faifoit de cette eau c’étoit dans la cachekie , les pâles couleurs , les obftruétions de rarte & de foye, le fcor- but, l'hydropifie , &c. Il Ia mêloit tantôt avec de fimples alteratifs, tantôt avec des purgatifs , le plus fouvent avec la teinture des métaux, reméde fort en vogue en Hollande, en Allemagne ;, & dans tout le Nord que bien des gens tien- nent fecret, & qui fetrouve cependant décrit dans un Livre, intitulé Chymia rationalis ; imprimé à Leyde dès l’année 1637. in-4.. Cette teinture fe fait avec l’étain , le cuivre, quelques-uns . y ajoutent l'or , & le double de regule d'Antimoine martial fondus enfemble ; il en réfulte une mafñfe métallique, à qui quelques Chymiftes ont donné le nom d'E/eéfrum minerale; on prend cette mafle , on la met en poudre ; puis à force de nitre & de charbon en poudre on la réduit par une longue détonation , en une efpéce de fcorie dont la couleur tire fur le verd pâle; on la pulverife encore chaude & on la met en digeftion dans une certaine quantité d’efprit de vin ou dege- niévre à qui elle donne une teinture d’un rouge admirable. Sur une pinte d’eau de chaux il méloit jufqu’à deux & trois onces de cette teinture & donnoir fix onces par jour de cette boiflon à dés Scorburiques & des Hydropi- 128 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ques ; ce reméde pouffe beaucoup par la voie des urines, & eft un grand fondant. Sur un mêlange de quatre onces d’eau de chaux & au- tant de teinture des métaux, une once d’Aloes en poudre & deux gros de rouille d'acier mis en infufion pendant qua- rante heures , compofent un excellent reméde pour les pâles couleurs. En ajoutant à ce mêlange trois gros de réfine de jalap, on à un purgatif très-propre pour les Hydropiques; on en donne jufqu'à deux cuillerées de deux jours l’un dans un bouillon ou dans un verre de fuc de Choux rouge. Dans les fiévres intermittentes rebelles, comme dans la quarte , l’eau de Chaux & quelques goutes de teinture mê- lées avec le Quinquinna, rendent l’effer de ce febrifuge bien plus afluré. t J'ai vû pratiquer tous ces mêlanges en Hollande avec beaucoup de fuccès; l'air de ce païs froid & marécageux, la boiflon des bierres, la grande quantité de beurre , de fromage & de poifflon dont la plüpart des Habitans font prefque toute leur nourriture , toutes ces chofes contri- buant enfemble à rendre leur fang beaucoup plus crû, moins coulant, & par conféquent plus propre à s'arrêter dans les petits vaiffeaux, às’y aigrir , & à donner naiffance aux obftructions, principes de toutes les maladies marquées ci-deflus. Il paroïît que ce n’eft pas fans raïfon que tous ” es remédes alterans font en fi grand ufage dans ces païs, & que l’eau de Chaux qui n’agit qu'en abforbant ou diflol- vant, & la teinture des métaux qui eft un furet très-aétif & très-pénétrant , produifent d'aufli bons effets dans la plüpart des’maladies où l’on s’en fert. Il n’en a pas été tout-à fait de même, & je n’ai pas ob- fervé à beaucoup près un fuccès aufli confant, quand à mon retour jai voulu mettre ces mêmes mêlanges de re- médes en ufage à Paris ; quoiqu'on y trouve, commu nément toutes Îles mêmes maladies qu’en Hollande, la caufe n’en eft pas tout-à-fait la même, l'air qu’on y refpire, les alimens dont on fe nourrit, les vins qu'on y boit, pt ent DES SCIENCES. 129 dent nos tempéramens bien plus a@tifs & le fang bien moins fufceptible de crudité & d’épaifliffement, & c’eft pour cette raifon que notre Médecine ef aflez différente de celle qu’on pratique en ce païs , & que rarement voyons- nous réuflir toutes ces préparations Chymiques de remé- des alterans tant vantées dans les Livres des Médecins Hollandois & Allemans, que nous ne fommes très-fouvent obligés de fcavoir ,que pour ne nous en pas fervir. La tein- ture des métaux mêlée avec l’eau de chaux, ne trouvant point dans la plüpart de nos corps un phlegme épais, un fang ralenti, fur lequel elle agifle , & qui émoufle fa gran- de a@ivité, devient trop corrofive , pique les fibres de l’ef- tomach , met le fang dans de trop grandes fermentations ; ce fait m'eft conftant par un nombre d’expériences que j'en ai faites : & quoique les partifans de cette teinture affü- rent le contraire, je la crois d’elle-même & dans tous les païs, très-âcre & très-corrofive; elle n’eft qu'une diflolu- tion des parties falines & fulphureufes de PAntimoine , & de l'Alcali fixe du nitre, & point du tout des parties mé- talliques du cuivre & de l’étain; le fel de tartre & le nitre calcinés enfemble donnent la même teinture à l’efprit de vin , & les effets en font prefque tous les mêmes : auffi depuis cette remarque ne me fuis-je fervi efficacement de 12 prétendue teinture des métaux , que dans les maladies de crudité & d’obfruétion & dans des corps phlegmati- ques , fans la mêler même avec l’eau dechaux, mais la don- nant fimplement dans le bouillon jufqu’à cinquante ou foi- xante goutes , ou bien la mêlant avec quelques purgatifs fui- vant les formules que j'ai rapportées ci-deflus , mais toujours dans une dofe moins forte. Pour l’eau de chaux, je ne fçaurois affez dire , combien je n'en fuis fervi ; mais au lieu de fix livres d’eau fur une #ivre de chaux, j'en ai fait mettre le plus fouvent huit, & prefque toujours fait fervir la même chaux deux fois, j'ai préferé en bien des occafons la feconde eau à la premiere. Tant que j'ai pû donner cette eau mêlée à Foid avec le lait de Vache, d'Anefle & de Chevre, jufqu’à huit ou 1700. s R 130 MEMoIRES DE L'ACADEMIE ROYALE neuf onces par jour, J'ai préferé cette maniere à toutes les autres ; & quand les malades n’ont pü s’accommoder du lait, je l'ai mêlée avec quelque ptifanne peétorale peu diffé- rente de celle dont M. Boyle donne la recepte dans fon traité de Specificis , qu'il recommande comme un fpécifique dans l'Afthme & dans la maladie de confomption. Prenez quatre pintes de bonne eau de chaux, faites-y infufer à froid du bois de Saffafras, de l’Anis & de la Re- gliffe , quatre onces de chacun, des raifins de Damas ou de Corinthe demi-livre. La dofe eft de quatre ou cinq onces deux fois par jour. J’en ai donné jufqu’à huit, & leffet n’en a été que faluraire. Dans le grand ufage que j'ai fait de Peau de chaux dans tant de différentes maladies , je puis protefter avec fincéri- té, que je l'ai vûe fouvent manquer , & fon effet ne point répondre à mon attente, comme il arrive à bien d’autres - excellens remédes , mais que jamais elle n’a eu d'effets mauvais & préjudiciables aux malades ; & ce reméde quel- que fufpe& qu'il paroïfle à bien des gens & d’un nouvel ufage , a déja été pratiqué en France & l’eft encore au- jourd’hui avec fuccès par un grand nombre de Méde- cins. Feu M. Spon, dans fon Livre intitulé , Æphorifmi novi pag. 415. remarque fur l'endroit où Hippocrate recom- mande pour la Lepre , la demangeaifon, la galle , la lotion de l'eau de chaux temperée, que c’eft un excellent abfor- bent & vulneraire , qui dompte & mortifie puiffamment les acides ; quil convient non-feulement à tous les ulcéres ex- ternes en lotion ou injeétion , maismême aux internes, à la Prhyfe , à la dyffenterie , pris en boiflon; que ce reméde fui a été communiqué par M. de la Clofure Médecin célé- bre dans la Xaintonge & la Gafcogne. Ce difcours deviendroit ennuïeux , fi j’entrois dans un lus long détail de toutes les obfervations que j'ai faites fur Fufage & les effets de l’eau de chaux. Voici feulement les. principales , & qui renferment fommairement prefque tou- tes les autres. DES SCIENCES. 131 L’eau de chaux donne très-fouvent du dégoût & laffe bien-tôt les malades , elle réfroïdit leflomach > S'il eft per- mis de parler ainf, & on eft obligé de donner du vin d’'A- licant , du vin d’Abfynthe, de la Thériaque , comme je l'a semarqué dans les malades dont jai fit mention. .… Elle defféche & faitun peu maigrir. Elle donne quelquefois de altération & fupprime le ven- tre; elle pouffe beaucoup par la voie des urines > aflez fou- vent par les fueurs. Elle ne convient donc point dans la perte de Fappetit & le dégoût, non plus que dans une extrême maigreur, ni dans la fuppreflion du ventre ni dans une altération fiévreufe. . Dans tous les ulcéres internes & externes , mêlée avec le lait ou des décoëtions vulneraires , elle a un très bon effet. Elle arrête les hemorrhagies , le flux de ventre AR dyffenterie, les pertes , les fleurs blanches ; elle convient à tous les relâchemens de vaiffeaux , jufqu’aux chaudes- pifles. Par la même raifon, il n’en faut point donner dans le tems des évacuations néceflaires, comme des menftrues , hémorrhoïdes , des benefices de ventre ; car elle les fup- prime. 6 Dans toutes les obftruétions , dans les tumeurs internes quand elles n’ont point tout-à-fair dégeneré en Schirres, ou en Cancers, l’eau de chaux eft unbon reméde , même pour les Ecrouelles, pourvä qu’elles ne foient pas invéterées. L’eau de chaux pour produire de bons effets dans ces maladies , veut être continuée long-tems, comme tous les autres alteratifs. Mêlée avec le lait, elle empêche qu'il ne fe caille & en rend l'ufage plus facile à ceux qui ont des aigreurs, & qui ne s’accommodent pas aifément de cette nourriture. Mélée avec les purgatifs comme l’Aloës ; la Scammonie & le Jalap , elle augmente leur vertu purgarive. . Tous ces effets de l'eau de chaux femblent affez prou- Ki; 132 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ver que le principe par lequel elle agit , eft une matiére alcaline terreftre , fort attenuée & fubtilifée par la calcina- tion , & rendue affez légere pour fe tenir en diffolution dans l'eau , & lui communiquer cette faveur âcre mêlée de quel- que ftypticité. L'on a déja dit qu'après deux ou trois lotions , l’eau fe retiroit tout à-fait infipide , parce qu'il n’y a plus pour lors dans la chaux que des parties trop grofliéres & trop pefan- tes pour fe tenir flotantes & fufpendues dans l'eau : & ce n’eft que par une feconde calcination qu’elles peuvent ac- quérir ce dégré de légéreté & de fubtilité qui les fait impre- gner l’eau, & lui communiquer toutes les proprietés de l’eau de chaux. L | Il y a quelque apparence qu'il ne refte plus de parties de feu dans cette eau, ou que s'il en refe quelques-unes , elles font en très-petit nombre & fuppofces renfermées dans quelques molecules de la chaux indiffolubles, puif- qu'il eft vrai que l’eau à mefure qu’elle s'infinue & péné- tre dans les porofités de la chaux, elle ouvre & fait écrou- ler comme autant de petites prifons qui tenoient renfer- mées ces parties ignées , lefquelles par la rapidité de leur mouvement , prennent l’effor , s'échappent , & en s'échapi pant caufent ce bouillonnement & cette chaleur fi fenfi- bles dans l’extinétion de la chaux. Or comme cette cha- leur & ce bouillonnement diminuent peu à peu jufqu’à cefler entiérement quand la chaux eft bien diffoute, & parfaitement éteinte , il eft à croire qu'après un certain tems , il s’eft fait une évaporation entiére de ces parties de feu; & que l’eau qui fe retire, n'eft empreinte que de quelques molecules terreftres de la chaux les plus légeres, comme on vient de dire, & les plus diffolubles ; qui font très-alcalines , & aufquelles il eft vrai-femblable de rap- porter tous les effets & les proprietés de Peau de chaux. Je fçai que cette explication n’eft pas tout-à-fait fatis- faifante pour quelques Phyficiens qui demanderont au moins qu'on détermine ce qu'on entend par les parties os DES SCIENCES 13% ignées fuppofées contenues dans la chaux : fi c’eft un foul- fre , ou la matiére du premier élement, qui dans le tems de la calcination fortant du feu avec impétuofité , fe feroit trouvé retenue & comme emprifonnée dans les porofités de la chaux; ou fi c'eftun fel propre de la chaux, foit qu’on le - fupposât dans la pierre avant d’être calcinée, & que le feu n’eût fervi qu’à l’exalter & le dégager des parties groffiéres, foit que ce füt le fel même du bois & du charbon, qui vo- : latilifé par le feu, auroit enfin peu à peu perdu fon mouve- ment à la rencontre des parties de la pierre les plus terref tres dans lefquelles il feroit refté embarraffé. Et ce dernier fentiment a fes partifans ; on trouve trop de difficulté à concevoir , comment des parties de la fubtilité & du mouvement de celles qui forment le feu , de quelque nom qu'on veuille les appeller , refteroient dans la chaux fans s’évaporer, & pourquoi fi elles y reftoient, l’eau les remettroit en liberté, & ces écroulemens de prifons avec Fexplication que je viens de donner ne paroiffent pas ap- puyez d'aflez de vrai-femblance : on tient donc pour un fel renférmé dans la chaux de quelque endroit qu'il vienne, êt on propofe beaucoup de raifons & d'expériences que je ne rapporterai point ici, qui en quelque maniére femblent le faire croire: cependant de quelque nature qu’on veuil- le fuppofer ce fel , foitalcali volatil, foit acide vitriolique & quelque avantageufe que paroifle cette hypothéfe pour Pexplication. de l'effervefcence qui accompagne lextinc- tion de la chaux , & des autres propriétés de l’eau de chaux, je demande où font les preuves & la, démonftra? tion de l'exiftence de ce fel? Quelqu'embarraffé qu'onle fupposät dans les parties terreftres de la chaux , pourquoi ne le retireroit-on pas ou par la diflillation, ou par l’éva- poration? Or rout lemonde fait que quelques moyens qu'on employe, on ne peut retirer de la chaux & de l'eau. de chaux, aucun principe falin ; mais feulement une concré- tion de parties terreufes alcalines , lefquelles ne font en aucune maniére d’une nature différente de tous nosautres Âlcalis terrefires ; qui comme la chaux diffouts jufqu'à une Ki 1700. 39. Mai. 134 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE certaine quantité dans l'eau & donnés à boire , ôtent le lus fouvent l’appetit en émouffant trop les pointes du dif. folvant de l’eftomach ; qui arrêtent les hémorrhagies , em- pêchent la coagulation du lait, &c. en abforbant les aci- des, en rendant le fang plus diffout , & plus coulant; qui en un mot font capables de produire tous les mêmes effets que Je viens de remarquer de l’eau de chaux, fans qu'on foit obligé pour les expliquer , de recourir à un fel de Pexi- flence duquel on devroit au moins avoir quelque démon- ftration fenfible. On pourra quelque jour étendre davantage cette expli- cation des effets de l’eau de chaux, en communiquant quel- ques obfervations fur les Alcalis terreftres qui font en ufage en Médecine, & quiapprochent le plus de la chaux. < PARTR A IT DES D.E SCR LP FI OAMVES que Pifon & Marcgravius ont données du Caa-apia, © confrontation des Racines de Caa-apia, à d’Ipecacuanha * tant gris que brun , avec leur Defcription , par laquelle.on voit fenfiblement la différence du Caa-apia à l'Ipecacuanha. Par M. GEOFFROY. Uelques-uns -ayant penfé que notre Ipecacuanha gris pouvoîit être le Caa-apia de Pifon, j'ai crû qu'il feroit bon d'examiner cette difficulté par la confrontation de ces Racines, avec les Defcriptions que les Auteurs en ont données ; & que c'’étoit le feul moyen de décider la queftion. ni Sr ete © Caa-apia Pifénis- Hiflor. Brafilienf. Caa-apia Braf- lienfibus ditla G: Marcgravi eft une petite plante bañle, dont la racine eft longue d’un ou de deux travers de doigts , de la groffeur d’une plume de Cigne & quelque- fois du petit doigt, noüeufé, garnie à fes côtés & à fon DES SCIENCES. 13% extrémité de filamens , longs de trois ou quatre travers de doigts, d'un gris jaunâtre au-dehors , blanché au-dedans, prefque infipide dans les premiers momens qu'on la tient dans la bouche , d'un goût par la fuite un peu âcre & pic-" quant. : De cette racine s'élevent trois ou quatre tiges ou pedi- cules menus, ronds, de la longueur de trois ou quatré tra- vers de doigts, portant chacun une feuille large d’un travers de doigt , & longue de trois ou quatre, d’un verd luifant par-deflus , un peu blanchâtre par-deflous, chargée d’une nervure dans toute fa longueur, & traverfée de quelques veines relevées en deffous. LAN © La fleur a fon pedicule particulier ; elle eft ronde , radiée approchante de la fleur du Bellis, compofée de plufieurs étamines , portant des femences rondes plus petites que 13 graine de moutarde. Ljh, Cette racine a prefque les mêmes vertus que lIpeca- cuanha , ce qui lui a fait donner par quelques-uns le nom d’Ipecacuanha , mais mal-à-propos , comme Pifon le dit lui-même en ces termes : Eyufdem fere cum Pecacuanha pre- flantie € efficaciæ , unde & Pecacuanha abufive à quibufdam appellatur. Elle arrête les flux de ventre , & fait vomir auffi- bien que lIpecacuanha , maïs non pas fi fortement, ce qui fait qu’on en peut donner une dofe plus grande. La dofe eft depuis demi-dragme jufqu’à une dragme en poudre dans du vin , du bouillon , ou autre liqueur convenable. Les Brafiliens pilent toute la Plante , en expriment le fuc & l'avalent. Ils fe fervent aufli avec fuccès de ce fuc pour guérir les playes des fléches empoifonnées, & les morfures: de Serpens en le verfant dans lefdites playes. Pifon ajoute qu’on trouve encore une autre efpéce de Caa-apia toute femblable à celle que nous venons de dé- crire , à la réferve que fes feuilles font un peu dentées en leurs bords, & velues aufli-bien que les tiges. dé IL paroît par cette Defcription du Caa-apia, par celles de l’Ipecacuanha blanc & brun , que donnent Pifon & Marcgravius, & que l'on peut lire dans PHiftoire naturelle Raiïfons de confdérer la multiplication du femblable dans les Plan- tes, La muki- plication naturelle & comme vo- 136 MEMOIRES D£ L'ACADEMIE ROYALE du Brefil , compofée par ces Auteurs, & par la remarque ex° prefle de Pifon (que quelques-uns donnent au Caa-apia le nom d’Ipecacuanha ) qu’il n’a pas prétendu défigner le Caa- apia fous le nom d’Ipecacuanha blanc. Il eft bien plus pro- bable que ce qu'il appelle Ipecacuanha blanc, eft une efpéce pareille à la grife; que les Efpagnols nous apportent du Perou fous le nom de Bexuguillo : & que l'Ipecacuanha fufca eft cette efpéce d'Ipecacuanha brun à préfent très-commu- ne , qui nous vient du Brcfil par le Portugal. SUR LA MULTIPLICATION des Corps vivans confidérée dans la fécondité des Plantes. Premier Mémoire [4 en PAfemblée les 19. Mai &' 14 Juillet 1700. Par M. DoDaART. ] E ne connois rien dans la Phyfique de plus merveilleux que la multiplication des corps vivans. Je ne prétends pas ici approfondir cette merveille; ce fera le fujet d’un fecond Mémoire. Je ne parlerai dans celui-ci que du fait, & je me renfermerai dans le genre des Plantes, tant parce qu'il eft beaucoup plus facile de traiter de leur généra- tion, fans bleffer l'imagination de perfonne , que parce que malgré leur différence prefque infinie d’avec les animaux, on peut appliquer aux animaux une petite partie de ce qui fera dit ici fur la multiplication des Plantes. Je laiffe tout ce qui a été traité par les Auteurs qui font venus à ma connoif- fance fur la multiplication ordinaire des Plantes fans cultu- re. Je mets encore à part ce quela culture de la terre peut contribuer à la fécondité : Je ne parlerai que de la cultu- re des Plantes mêmes, & principalement de celle des Ar- bres qui fe fait par la taille , & de celle des Herbes par la goupe & pour la coupe; & je n'en parlerai qu’autant € l | DES SCIENCES. 137 néceflaire pour faire fentir les reflources narurelles des lontaire des Plantes pour la multiplication contre les accidens qui pa- rmeetrez roiflent y être les plus oppofés, & qui fembleroientmême comparaifon devoir détruire la Étères Car c'eft de ces reflources feu- TE les que j'ai deffein de traiter dans ce Mémoire. Le fujet que par Ja coupe. je prends pour fondement eft très-vulgaire, étant prefque aufli ancien que l'Agriculture. Car il y a plufieurs milliers d'années qu'on taille les Arbres & les Arbriffeaux pour mulriplier le fruit , ou pour d’autres raifons, & qu'on cou- pe les feuilles des herbes potageres pour les manger, ou pour en tirer d’autres ufages. Mais je n’ai vû dans les Au- teurs de ma connoiffance nulles réfléxions fur ce qui s’en- fuit de ces faits à l'avantage de la fécondité de ce genre d'êtres vivans , & il me femble que cette fécondité cachée qui ne fe manifefte que par ces faits, ou par d’autres accidens fortuits ; n’a pas été approfondie quoiqu’elle foitincomparablement plus merveilleufe , que celle qu’on admire avec raïfon depuis un fi grand nombre de fié- cles. On eft furpris quand on voit dans Théophrafte & dans Pline, dans Jean Bauhin, dans Rayus, & dans les autres Modernes , certains dénombremens de la fécon- dité naturelle ordinaire & anniverfaire de quelques Plan- tes. J'en fçai de beaucoup plus nombreux que je pourrai communiquer une autre fois. Mais pofant cette fécondité naturelle ordinaire & anniverfaire , aufli grande que cha- cun la peut aifément obferver , je dois dire ici que ce que la nature montre en fpeëtacle ordinaire quelque grand qu'il foit, eft peu de chofe en comparaifon de ce qu’elle cache de reflources , tant pour les moyens de la fécondi- té, que pour la fécondité en elle-même , c’eft-à-dire ‘tant pour la produétion de la femence, ce qui eft la fécondité en elle-même & la derniére fin de la Plante, que pour la produétion des parties qui portent la femence , car ces par- ties font ou paroïffent être en elles-mêmes des êtres nou- veaux; & elles fonc d'ailleurs par rapport à la femence les 1700. S La mulipli- sation des branches £ft équivalente en uature à la maltiplication de la (emence. Multiplica- tion prodi- gieufe des branches. 138 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE moyens néceffaires pour parvenir à cette fin. La fuite de ce Mémoire rendra ceci plus clair. Hors l’Arbre de Judée & de Sycomore de Bellon, il y a peu d’Arbres dont le fruit naifle immédiatement de la tige fur fa longueur. Notre Figuier le porte immédiate- ment fur fon bois , mais jamais ni fur les nouveaux jets ni au tronc. La plüpart portent leur fruit où vers la fonunité de la tige, comme les Palmiers & les Cocotiers. ou ce quieft plus ordinaire fur les rameaux de leurs bran- ches & encore une grande partie fur des pédicules parti- culiers qui naïflent de ces rameaux ; & les Plantes même dont le fruit nait immédiatement de leur tige, & qui ont des branches le portent auf , & à plus forte raifon fur leurs branches. Où peut donc dire, que la plûpart des Plantes ne font fécondes que par leurs branches. On doit donc juger de la fécondité par la multitude de leurs branches. Eten effet Findaftrie des Jardiniers va à multiplier le fruit par la multi- plication de certains rameaux. Un Arbre abandonné à lui-même pouffe à une certaine hauteur un certainnombre de branches plus oumoins grand, Par exemple , 2. 3.4. s.felon l'efpéce , le fol , l'expoñition & les autres circonftances. Si ce même Arbre eft cultivé par l'amendement de la terre, par le labour au pied de l’Arbre, & par l'arrofement durant les fécherefles ,il pouffera peut-être un plus grand nombre de branches &c de rameaux. Mais la culture par le retranchement dune partie de: fes branches , contribue plus qu'aucune autre induftrie à la multiplication , de forte qu'on peut dire que plus on re- tranche cette forte de corps vivans jufqu’à certain point ,. plus on les multiplie. Et cela fait déja voir combien font abondantes les reflources de cette forte d'êtres vi vans. Mais tout cela eft encore peu de chofe en compa- raifon de celles qu’on ne voit point, parce que la cultu- se ordinaire n’y donne pas lieu. Cependant ces reffources DES SCIENCES. NC.. 039 me laïffentpas d'être. Car ent un mot, on peut dire que de- puis Pextrémité des branches jufques au pied de lArbre , il wy a prefque point d’endroit pour petit qu'on le puifle dé- figner , où il n'y ait une efpéce d'embrion de multiplication prêt à paroître dès que Foccafion mettra PArbre dans la né- ceffité de mettre au jour ce qu’il tenoit en réferve. Voici les preuves. Si on n’avoit jamais vü d'Arbre ébran- ché jufqu'à fa racine, on croiroit qu'an Arbre en cet état eft eftropié fans reffource jufqu'à la fin de fes jours, & n'eft plus bon qu'à abbattre & débiter en charpente , ou à être mis au feu. Cependant fi un Orme ou un Chêne, um Peu- plier, en un mot, un Arbre dont la tige s’étend affez droi- te du pied à la cime , eft ébranché de bas en haut , il pouffe- ra depuis le colet des branches retranchées jufques à la ci- me, de la tige, de toutes parts un nombre infini de bour< geons, qui pouffant des jets de tous côtés, feront d’un. tronc haut de 30. à 40. pieds comme un gros bouquet de feuilles fi touflu, qu’à peine verra-t-on le corps de FArbre. Voilà pour la fécondité de l’Arbre dans la partie branchue de fon tronc. Si on n’avoit jamais vû d'Arbre étêté par un tourbillon “de vent, ou par le retranchement exprès de fon tronc au -colet des branchés , il ny a perfonne qui ne regardat du- tant fix mois un Arbre fmis en cet état, comme un tronc mort , inhabile à toute génération. Cependant cet Arbre étêté repouffera du tronc au-deffous de l'endroit où il avoit pouffé fes branches un grand nombre de jets ; owfau cou: xonnement, ou vers le couronnement. On en peut dire autant des Arbres coupés prefque rés pied rés terre , car ils repouflent autant & plus qu’à toute autre hauteur. C’eft ce qui fair les Arbres nains en buiffon ow én efpaher ; entres fruitiers & le taillis ; entre les fau: vages. On jugera de cetre multiplication par les exemples fuivans. Le Maronnier d'Inde poufle du couronnement & POr: me près du courannement. J'ai compté 96: Jers àla cou- sonne d'un Maronnier d'Inde de deux pouces de-diamé- Si r. Preuve par les Arbres ébranchés, 2. Preuve par les Arbres étêtés. 3. Preuve par les Arbres coupés près de terre. Exemples. Le Maronnier d'Inde. 140 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE tre que le vent avoit étêté, & j'en ai vü un autre de plus de cinq pouces de diamétre, à qui on m'a aflüré qu’on avoit Ôté l'année pañlée plus de cent jets. Onluien avoit Jaifé 14. Je lui en trouvaiil y a 8. jours 24. nouveaux, le tout faifant la fomme de 138. & je lui en trouve aujour- d'hui 19. Mai de l'an 1700. 25. nouveaux, ce qui fait entout 168. J'en ai obfervé un troifiéme qu’un orage érêra au com- mencement du mois de Juin dernier. Il a 4. pouces de diamétre , & par conféquent un peu plus de 12. pouces de tour , près de fon couronnement. Cependant il a pouflé de cet endroit jufques vers la fin de Décembre 106. jets, il en doit jetter d’autres encore à la féve de Mars , & peut- être en nombre confidérable ; car ce grand nombre a pouffé depuis Juin , c’eft-à-dire depuis la féve du renouveau paflée , & quand l’Arbre perdit fa tête il avoit déja jetté fes fleurs. Ce grand nombre de jets prefque fur une feule ligne de peu plus de 16. ou 18. pouces de tour, fait voir qu’en- core qu'il femble que le tronc foit moins fécond que les branches naturelles qui faifoient la premiere touffe, il en eft tout autrement. Car à quelque hauteur qu’on faffe le retranchement , il pouffera de même depuis le colet des branches jufques au colet des racines. Aiïnfi on peut fup- pofer raifonnablement que comme ce nombre de jets eft forti dans lefpace de deux lignes d’étendue , au plus dans la hauteur dutronc étêté dans les deux premiers exem- ples ; il en feroit autant forti de tout autre endroit où on auroit borné la hauteur du tronc foit au-deflus , foit au- deffous. Ainfi quand on donneroit au lieu de 2. lignes trois fois autant de hauteur à cette couronne de bourgeons, on trouveroit dans la hauteur d’un tronc de dix pieds de haut pour le moins 240. fois 96. ou 138. principes de branches, & apparemment beaucoup davantage ; car le tronc eft plus gros & plus fort, & la féve plus abondante à pro- portion qu'on approche davantage du pied de l’Arbre, comme: on voit par tous les Arbres nains , & par les Arbres fauvages des Bois taillis ou des Forêts , coupés depuis long t) £ 23 ti | ki DES SCIENCES. 141 tems. Il eft vrai que dans les vieilles Forêts , les rejettons des troncs coupés étant devenus de gros troncs par la fui- te des tems, on ne les trouve que par groupes de 4. 5. 6. faifant la croffe par le pied, tous rangés autour de la cir- conférence du tronc jadis coupé rés pied rés terre, com- me je l'ai obfervé plufeurs fois dans les vieilles Forêts , & entre autres dans le Bois de Boulogne près Paris. Mais file nombre de ces rejettons devenus de gros troncs eft au-deffous de celui des jets de Maronnier d'Inde au haut de fon tronc étêté, ce n'eft pas qu'il n’ait pü être autant ou plus grand , mais c’eft que les Jets les plus forts ayant dérobé la féve aux plus foibles, ceux-ci qui font toujours le plus grand nombre, fe font defféchés à mefure que ceux- Jà fe font fortifiés. Ainfi cela n’empêche pas qu’on ne puif fe compter dans ce genre & fur cette hauteur au moins 23040. ou 33220. embryons de branches. Iln’y a guére à cet Arbre que quatre branches principales naturelles. Il fe trouve donc que l'accident d’être étêté par le vent, multiplie ce nombre dans l’un des exemples propofés de 5760. pour un, & dans l’autre exemple de 8280. pour un. L’Orme ni l’'Erable ne font pas moins féconds, & lefont eut-être encore davantage ; car outre une tête fort touf- be qui leur vient quand ils font érêtés ; s’ils le font un peu bas, leur tronc pouffe par places plus ou moins grandes, une grande quantité de petites boffes particuliéres qui en font une large , & irréguliérement ronde , qui imite celles qui furviennent à quelques Chevaux vers les pieds, & qu’on appelle grappes; & chacune de ces petites boffes pouñle un ou plufeurs jets ; de forte que joignant à ces touffes les jets qui fortent du tronc par-ci par-là , il en eft prefque couvert. Voilà pour ce qui regarde le tronc depuis la racine jufqu’aux branches. : Les branches font prefque aufli fécondes en rameaux que les troncs en branches; & cette fécondité paroît fur- tout à leur extrémité. On voit une partie de ce qu'elles font capables de produire fur l’étendue de leur longueur S ü L'Orme: l'Erable. - Les brane ches font fécondes en rameaux. Preuves par PIF, le Buys, Ja Sabine & par tous les Arbres ou Ar- briffeaux que l'on tond. Les racines font fécondes entiges. Les troncs & les branches font féconds en racines. 1. Preuve pr les plantes rampantes. 542 MÉMOIRES DE L'ACADEMIÉ ROYALE par les Arbres nains qui font tels en partie par la taille con- tinuelle qu'on ÿ fait, & on voir ce que les branches font capables de produire à leur extrémité par tous les Arbres dont on garnit les paliflades des jardins, & dont on fe fert pour y faire des buiflons toujours verds. Car à force de re- trancher tous les ans le jeune bois & une partie du vieux, & fur-tout dans les paliffades & dans les buiffons tondus de divers Arbuftes , comme de PIf, du Buys, de la Sabine, &c. la furface de ces paliflades & de ces buiflons devient en lplufieurs endroits ferrée comme une vergette par la multiplication des rameaux fubdivifés en d’autres à l'occa- fion de ces continuels retranchemens. Les racines même ont cette efpéce de fécondité dans certains Arbres dès qu'elles font à Fair. On le voit dans les Ornies des Avenues nouvelles; car étant ordinairement foffoïées , & les racines de cet Arbre, courant beaucoup entre deux terres, le foffé met à nud plufieurs branches de racines qui pouffent des jets feuillés, d’où il arrive que ces foffés font ordinairement tapiflés de touffes de bou- quets de feuilles d'Orme qui font l'effet d'un aflez grand nombre de rameaux qui fortent de toutes parts des bran= ches fouterraïnes de ces racines. Si on coupoit' au pied les Arbres portés fur ces racines, il arriveroit qu'un ou plu- fieurs de ces jets deviendroient à leur tour des troncs du même Arbre, & fur-tout, fi laïffant les plus forts, on retran- choit les plus foibles. Comme les racines fe trouvent fécondes en troncs, & par conféquent en branches & en rameaux, &c. Auf les troncs & les branches font réciproquement féconds en ra- cines, lorfque Foccafñon les mer en état de montrer cette’ Hcondiré cachée , non-feulement dans les troncs, maisen« core dans les branches. En voici les preuves. | 1°. Il eft effentiel à prefque toutes les Plantes rampantes for terre, ou contre des appuis montans, de jetrér désra- cines de leurs très-fongues tiges par rout où elles touchenr à terre ou à leurs appuis. Ces räcines font en plufeuts de ces Plantes pour le moins auffi courtes que les jambes dés = DES SCIENCES 143 Chenilles , mais elles n’en font pas moins racines ; car fi le tronc eft coupé , & par conféquent la racine principale fé- parée des branches, elles ne faiflent pas de fubfifter, nour- ries par ces courtes racines. 20. $i on hauffe la terre qui eft au pied d’un Arbre , de forte qu'une partie du tronc qui étoit à Fair foit enterré, cette partie jetrera tout autour des fibres , un chevelu , & par fucceflion des tems; les fibres de ce chevelu devien- dront de groffes racines. ‘ 3°. Si on abat une branche fans la détacher du tronc, & fi on lui fait faire une efpéce de coude que l'on cou- vre de terre, ce coude prendra racine &t provignera l'Ar- bre. Cette maniére de multiplier eft en ufage pour la Vi- gne, le Figuier, lOrme, l'If, & feroit pratiquable prefque entous'les Arbres. À 4°. Enfin on fçait depuis plus de 2000. ans, & toutes les Relations modernes confirment que les branches du F5- guier d'Inde, jettent des racines pendantes, qui s’allongeant peu à peu prennent terre , pouflent une nouvelle tige & couvrent ainfi la terre qui eft autour du principal tronc d’une Forêt très-épaifle. Cette fécondité de troncs en racines , & de racines en troncs ne fe termine pas immédiatement à la produttion des fruits , comme celle des branches & des rameaux ; mais elle y parvient médiatement par la produ@tion des nouvelles tiges. Quand elle n’y parviendroit pas , elle ne hifferoit pas d'être très-confidérable , puifque ce feroit toujours la produttion d'un être mouveau , & que cet être nouveau n’auroit jamais paru fans les retranchemens. Mais elle eft encore plus confidérable , comme moyen nouveau: de la multiplication de la vraie fécondité , qui eft celle des. graines. Les Herbes ont la plüpart quelque chofe de la fécondité des Arbres quife manifefte parles retranchemens. A peine y en at-il qui étant coupée en bonne faïfon , ne repoufle au moins du verd, c’eft-à-dire de nouvelles feuilles , & cesfeuil- les en plufieurs ,tiennent lieu d’une efpéce de fruit à notre 2. Preuve parles Arbres enterrés au pied, 3- Preuve par les mar- cottes.. 4: Preuve parle Fipuier d'inde. V. Theophr. if. 1. ct 12 Cette fécon- dité recipro— que eft une fé- condité véti= table. On trouve: là même fé- condité de ref= fources dans les herbes re-- cherchées pars coupes, Cette fécon- dité approfon- die dans lO- zzille prife pour exemple entre cinq gen- res différens d'herbes pota- geres. 144 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE égard, puifqu'on s’en nourrit. C'eft ce qu'on voit dans les herbes potageres vivaces ; car les Jardiniers ont plus d'intérêt de les multiplier que les autres Plantes dont l’u- fage eft moins populaire & moins fréquent & dont par conféquent la culture eft moïns lucrative. Il y en a de plufeurs genres ; cat une bonne partie des Plantes qui compofent un potager entrent dans cette efpéce de cultu- re qui tend à outrer la multiplication par les retranche- mens On y voit des herbes proprement dites potageres, plufieurs herbes rampantes à fruit, plufieurs Plantes bul- beufes , tubereufes, légumineufes, &c. Or dans plufeurs efpéces de chacun de ces genres, l’induftrie des Jardiniers trouve des reffources pour la multiplication, par les retran- chemens. C’eft ainfi qu'on muliplie quelques-unes des herbes proprement dites potageres; par exemple , lOzeil- le ,la Chicorée , la Pimpernelle , le Perfil, l’Ache , &c. Car ces Plantes étant coupées rés pied rés terre autant de fois qu’on voudra durant toute l’année hors les gelées , elles repouffent du pied , & fur-tout durant la premiére année plufieurs rejettons , & le nombre de ces rejetrons eft d’autänt plus grand que les coupes auront été plus fré- quentes. Il eft vrai que la premiere année le pied ne don- ne que du verd & quelques rejettons , mais la feconde, fi on laiffe monter la premiere poulfe , elle donnera fa grai- ne. Les rejettons que fa propre fécondité & la coupe du verd de la premiere année lui auront procurés , donne- ront chacun fa tige, & par conféquent fa graine fi on les laiffe monter , & ainfi de fuite jufqu’à la fin de la vie de ce pied. Si on ne coupoit point cette Plante la premie- re année, elle poufferoit du pied 1.2. 3. rejettons , peut- être même quelque peu davantage. Donnons-lui en cinq. La coupe lui en fait pouffer beaucoup davantage. J'en ai vû fur un jeune pied arraché en Décembre qui n’avoit gueres que dix mois jufques à vingt-fix. Je puis donc dire que la coupe a valu à ce pied plus de vingt rejettons. Cetre multiplication eft déja conlidérable , mais ce n'eft pas tout. Chaque rejetton eff un amas de feuilles, roulées PCT Re DES SCIENCES. 14$ roulées les unes dans les autres , les plus grandes envelop- pant les moindres, & celles-ci les petires , & ainfi de degré en degré jufques au cœur du rejetton. Ce cœur eft com- : Fe pofé de feuilles de plus en plus petites’, blanches , déli- cares , les derniéresles plus impercepribles aux yeux ; enfer- mant au centre de la bafe de ce rejetton une pointe conique encore moins perceptible que les feuilles qui la couvrent, & la cime de ce cône ef la tige future en raccourci. Or qui dit la tige & fes branches en ces Plantes, dit la partie qui porte la graine; & il me femble que perfonne ne doit douter que le fommet de cette jeune ti- ge ne contienne aétuellement toutes les graines qu’elle deyoit mettre au jour. Car tout le monde peut voir au Printems au centre des poulles , aufli-tôt qu'elles com- mencent à fortir de terre, les tiges un peu allongées &t chargées de boutons de fleurs qui contiennent leur graine ; & fi l'on examine ces fleurs quand elles feront affez grof- fes pour être feuilletées par des inftrumens très-fins , on y appercevra la partie qui contient la graine , & à quelque tems de-là , la graine toute formée dans le calyce ou dans le piftille, & toute difinéte dès qu'elle aura le petit volume néceffaire pour être apperçue par le microfcope. Cela fe voit aflez aifément , fur-tout dans les Plantes qui donnent leur graine comme nuë. Il y a plus de vingt ans que j'apportai à la Compagnie un épi de froment tout formé dans fa pouffe à peine fortie de terre. Cet épi étoit auffi petit pour le moins , que la as d'une groffe épingle left à demie ligne du bout de a pointe. Cependant on y découvroit déja avec une loupe La mudripli- cation des re- jettons par la coupe, eft une vraie multipli- cation des graines. Les graines font dans la tige dès qu’el- le commence à poindre. Exemple. de demi pouce de foyer tous les grains de l’épi. La tige étoit au-deffous, haute environ d’une ligne & demie. On y découvroit tousles nœuds. Le premier entre-nœud plus grand que les autres, le dernier prefque imperceptible. Tout cela en proportion fi différente de celle d'un tuyau de froment adulte , que ceux qui connoiffent le mieux celui- ci, mais qui ne font pas exercés dans l’Anatomie des Plan- tes, n’auroient point du tout connu cet embryon de fro- 1700. 146 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ment. Le verd de ce pied , c’eft-à-dire les feuilles qui n’au- roient été au plus que la fixiéme partie de la hauteur de la Plante parfaite , avoient plus de quarante-huit fois plus de longueur, que le jeune tuyau & fon épi n’avoient de hau- teur. L’épi avoit le tiers de la hauteur du tout ; au lieu qu'il n’en eft pas la dix-huitiéme partie dans la Plante adulte. La groffeur de la tige éroit environ le tiers de fa hauteur , au lieu qu’elle n’en eft pas la quatre-centiéme partie dans la maturité de la Plante , & les entre-nœuds de la tige paroifloient comme enfoncés l'un dans l’autre ; à peu près comme ceux d'une Lunette d'approche mife en poche, les grains de l’épi étoient ronds comme des Perles parfaites , demi tranfparens, & tout l’épi de la figure de celui de l'Arum en maturité. En voici la figure faite à la loupe d'après nature. Pouffe d'un grain de froment deffigné au Microfcope. Æ. Partie de la racine d’où le tuyau a été arraché. B.C. D. E. Tuyau de ce brin arraché , dont B. Ef le premier entre-nœud. C. Le fecond: D. letroifiéme: E. le quatriéme. Chaque entre- nœud portoit une feuille. On les a Ôtées pour découvrir l’épi cou- vert & caché fous ces feuilles , hors F. La derniére feuille qui le laiffle fufifamment décou- vert. G. L’épi tout formé au milieu “ de la poule. On verra dans le fecond Mémoire pourquoi ÿentre ici dans ce détail. Mais il fufñt pour celui-ci qu'on voie par l'exemple de la poufle du froment & par celui de plufieurs autres poufles , que chacun peut rechercher de la même maniére , & encore par tous les boutons à fruit des Arbres à fruit de plufeurs efpéces , que ce n’eft pas pue DES SCIENCES 147 en l'air que je fuppofe au centre de toute poufle tout l’ap- pareil dé la tige & des graines. J'en ai exatniné autrefois un affez bon nombre pour préfumer raifonnablement qu’on trouvera par tout à peu près le même appareil. Cela fuppofé : Pour fçavoir à quel degré dé fecondité les retranchemens peuvent porter la multiplication des grai- nes , & en donner une idée auffi diftincte qu'il fe peut, fans rien exagerer, il ne faut que confidérer ce qui fuit. L’O- zeille commune ef l'exemple propofé. Un pied de cette Plante d’une feule tige cueilli en pleine campagne , en terroir très-inculte , s’eft trouvé chargé de plus de 1200. grains de compte fair. Cette fécondité eft grande , fur-tout pour une Plante de campagne née dans un fol inculte. Elle auroïit apparemment rapporté davantage dans une terre Efimation de la mulipli- cation par les coupes , dans Pexemple pro- pofé. cultivée. Mais je m'en tiens à ce noimbre que je prends pour . pied dé mon calcul. Il n'y 2 donc plus qu’à examiner l'a vantage que la graine unique qui a porté ce nombre , au- roit pü tirer des coupes ordinaires. Ces coupes ordinaires font ordinairement interrompues durant Juillet & Août. Si on continuoit les coupes durant tout ce tems , les re- jettons fe multiplieroient plus qu'ils ne font ; mais il nim- porte. Je prends les chofes en l'état qu'elles font, felon la culture & les coupes ordinaires , fauf à faire » fi Pon veut, des épreuves plus philofophiques pour voir jüfqu’où on peut porter cette efpéce de fécondiré. La premiere pouffe de ce pied auroit porté fans culture & fans COUPE 1200. grains dans fa feconde année , 2400. dans la troifiéme année , s'il avoit donné deux riges ; à tout rompre, 6000. sil en avoit - porté $ . au lieu qu'il fe trouve que parles coupes & les ceüil- lettes, il porte 20. tiges de plus, & par-là il eft rendu capa- ble de porter dès la troifiéme année 24000. fur les 20. tiges, de plus qu'il n’en auroit porté fur <. Pour déterminer à peu près ce que ce pied auroit pü donner la quatriéme année, J'ai examiné un pied de cet âge , qui durant trois printems &c trois arriere-faifons, avoit fouflert toutes les coupes &c tou- tes les ceüillettes ordinaires; il avoit far 16. racines 40. jet- tons qui auroient pû donner 48000. De ces trois ahnces ; Ti - Cet exemple fommaire- mentappliqué aux autres genres dher- bes potageres. Et fur-tout aux porage- ses. 148 MEMOIRES DE L'ACADEMTE ROYALE il réfulte un total de 71200, pour un, en trois ans de fécon: dité tant naturelle que forcée, fans compter tout ce que cette Plante pourroit produire, fi on la laifloit vivre plus long-tems. On voitbien que je ne donne pas cela pour pré- cis, mais on doit confidérer que le pied de ce calcul pour- roit être,en nature & en effet, beaucoup plus nombreux que Je ne l'ai pofé. S Ce que j'ai dit de la fecondité qui fuit les retranchemens dans les herbes proprement dites potageres , eft encore vrai d'une bonne partie des Plantes de chacun des genres qui entrent dans la fourniture d’un jardin potager. Entre les légumineufes , les Haricots coupés ne repouffent pas, mais les Féves & les Pois repouffent quatre ou cinq tiges pour une. Entre les bulbeufes , les Oignons ne repouffent pas, ni la Ciboule. Mais fi on tranfplante celle-ci après en avoir retranché le vers, elle repoufle plufieurs tiges. La Sivette l'Angleterre ( Cepa fe&hilis Marthioli) & V'Aïl , fans être tranfplantés , étant coupés font le même effet. Entre les rempantes , les Citroüilles , les Potirons , les Melons , les Concombres fe culrivent par le retranchement de leur principale poule dès qu’elle commence à paroître. Si on la laifloit faire , elle feroit unique & s’éleveroit droite jufqu'à une certaine hauteur, comme Jje l'ai vû arriver dans tous ces genres. On la retranche doc naïffante, & comme elle ef fort tendre , on la coupe avec les ongles. Les Jardiniers appellent cela, arrêter. Alors ce qui refte de cette pouffe depuis l'endroit retranché jufqu’à la terre, fait ce que les Jardiniers appellent aller , c’eft comme qui diroit étaller,, c’eft-à-dire que la Plante pouffe fort près du pied de toutes parts 4. $. 6. tiges qui fe couchent d’abord & s’étallent en rond autour de la cicatrice de la tige retranchée. Tous ces retranchemens multiplient les tiges & par conféquent le fruit & conféquenument les graines. On voir les mêmes reffources & même beaucoup. plus aux Choux frifés & aux Choux pommés. Je n'ai pas exa- miné les autres efpéces. Maïs il ne s’agit ici que de donner des exemples que chacun puifle aifément vérifier ; & j'ai DES SCIENCES. 149 choifi ceux-ci , parce que cette Plante eft très-féconde, & a de tout tems paflé pour telle. * Je ne ferai point d’excufe au Leéteur de larrêter à des exemples vulgaires & de les traiter avec quelque exaétitu- de , parce que ceci n'eft fair que pour des Philofophes , qui ne peuvent trouver mauvais qu'on leur donne des idées auffi précifes qu’il eft poflible , & qui font perfuadés que les moindres ouvrages de la nature font toujours très-dignes de notre attention. Cette Plante d’ailleurs a été une des plus célébres entre celles que les anciens ont connues. (4) Ces deux efpéces de Choux étant étêtés même en Septembre & plus tard ,repouffent non-feulement du cou- ronnement comme les Arbres, mais encore de leur tige de haut en bas à l'endroit de l’aiffelle de toutes leurs feuil- les caduques , autant de têtes qu'ils ont perdu de feuilles dans tout cet intervalle, c’eft-à dire au moins 18. ou 19. au plus 24. ou 25. dans les Choux pommés. J'en ai compté jufques à 36. fur un pied de Chou frifé. Ces rejettons font des têtes moins fortes à la vérité que la premiere tête, parce qu'il y en a plufieurs, & que la féve partagée leur donne à chacune moins de fuc.. Mais c’eft tellement lamême fruéture , que ces fecondes têtes donnent leur graine, comme auroit fait la premiére , moins nourrie & moins forte à caufe du partage de la féve , mais à cela près, c’eft de la graine toute femblable. Et cela paroït en ce que fi on ne laifle qu'une de ces têtes , la graine eft aufli bonne que lauroit été celle de la premiére ; & fur-tout fi la pre- mére tête a été abbattue de bonne heure par quelque acci- dent , comme il arrive affez fouvent en tranfplantant. Car cette premiére pouffe étant fort tendre au collet,.ce colles fe cafe aïfément. Alors les reffources foifonnent fur-tout au couronnement , & chaque rejetton forme à part fa tête (a) V. Phim Hifé. nat. xx. e. 9: où il dit, que Chryfppe le Médecin a com- polé un volume entier des vertus de cette Plante dans un grand nombre de malat dies de toutes les parties du corps humain: que Dieuches autre Médecin célébre: n'en a pas parlé avec moins d’eftime , & que Pythagore & Caton l’ancien lui ont été aufh favorables que ces deux Médecins. Mais il ne s’agit ici que des reffources: de cette Plante, ‘ : LE dE ARae Ti * 7, PL hiffs nat. XX, C. 8 Toutes ces reflources {ont maunifeftes dans ces gen- res. Dénombre- ment de ces reflources. 150 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE groffe comme le poing & plus. On appelle ces têtes dans les Chouxfrifés, des Broques , de l'Italien Broccoli. On voit dans ces Plantes ce qu’on fuppofe dans lés Arbres, c’eft-à-dire , des bourgeons vifibles par tout où il pouffera de ces fecondes têtes. On en voir même autant qu'on y peut compter de feuilles, c’eft-à-dire environ de 65. à 85. (a) Car j'ai compté autant de feuilles en un Chou frifé, le fuille- tant en Janvier pour voir fi je pourrois découvrir au centre de cette tête dès le milieu de Fhyver quelque chofe de ce qu'on y voit au Printems. Voilà donc de 6$.à 85. broques. Onne voit pas celles qui font dans l’aiffelle des feuilles près du centre.(4) Mais auffi le moyen de les voir? Les premiéres feuilles ont de feize à dix-huit pouces de long , la dernié: re eft à peine de + de ligne. Or ces Bourgeons de broques fous les plus grandes feuilles du pied , ne font quelquefois pas plus gros qu'un grain de Chenevi, que fera donc le 65. ou le 85. Bourgeon fous la 65. ou 85. feuille? Carces feuilles à mefure qu'elles approchent du centre , diminuent beau- coup plus en largeur qu’en longueur , & elles cachent leur bourgeon dans leur aiffelle. Je ne dis tout cela que pout faire fentir la multitude incroyable de graine qu'on peut raifonnablement fuppofer non-feulement dans les broques qui la donnent actuellement dans leur tems , mais dans les bourgeons qui ne font que des broques raccourcies, (a) J'en ai compté depuis jufques à 110. avec autant de bourgeons, un dans l'aïffelle de chaque feuille; dix-huit de ces bourgeons étoient devenus broques, fçayoir huit fous la rte & dix dans la tete fous autant de feuilles. La plus forte de ces broques n’avoit que dix-fept feuilles, & elle avoit déja le cone de la tige raccourcie chargé de fa gerbe de fleurs. Voyez ci-après la Défcriprion d’une femblable gerbe ou tige en raccourci. Ce qui marque le plus la prodigieufe fécon- dité de ce pied , eft qu’outre tout ce que j'ai dit, on voyoit dans la racine mêmeau milieu d’une touffe de fibres chevelues , dont elle éroit couronnée , trois reietrons d’un pouce , ou un pouce & demi de long, naiffans d’un feul endroit, &leplus fort garni de quelques fibres de racines. (b) Plufeurs de P'Affemblée du 7. Janvier 1702. ont vù les bourgeons jufque fort près de la pointe du Cône. C’eft une chofe remarquable qu’on trouve quel- que chofe de femblable marqué dans Pline: . IL fait mention d'une efpéce qui donne prefque autant de rejettons que de feuilles , & il dit que ces rejeuons font cachés foûs prefque routes leurs feuilles. Il n’eft pas ordinaire aux anciens d'y regarder de fi près, mais je me fuisappercu que quand femblables chofes fe font préfentées à eux , ils fe font fait honneur d’en faire mention. W. Plin. Hif}. nat. 1. XIX. ç. 8. © XX, €, 9. DES SCIENCES. IS puifque les broques n’ont rien de plus que lesbourgeons, fi on excepte la différence du volume. … Mais ce n’eft pas tout, car ces fecondes têtes ont chacune un grand nombre de feuilles moindres à la vérité que la premiére , mais au moins autant de bourgeons que de feuil- les, chaque bourgeon peut être préfumé contenir en foiun très-grand nombre de graine. On verra ci-après quel peut être ce nombre. Cela fuppofé quand on compteroit pour rien tous les Bourgeons, le pied où j'ai compté 3 6.broques, auroit gagné par la coupe de fa tête 36. fois autant qu'il a perdu en la perdant. On verra ci-deffous quel peut être à peu près le nom- bre naturel, & ordinaire de la graine produite par la mai- trefle tige. d’un feul pied de Chou; mais en attendant je dirai ce que j'ai trouvé-.à la cime du trognon de ce Chou frifé éfeüillé. J’y ai vû une gerbe de 28. filets, qui au Microfcope paroifloient comme paroïfloient aux yeux les plus fines étamines des fleurs épanoties. (4) Ces filets re- courbés vers l'axe de la gerbe, finifloient chacun par une petite tête. Les filets à la circonférenceétoientles pluslongs, les plus près de l'axe étoient les plus courts. Tous étoient plantés fur la pente & à l'extrémité de la pointe d’un Cône couvert d’une petite feuille haute de deux tiers de ligne , & le Cône étoit par conféquent plus bas que cette haureur qu'il mettoit à couvert. Cette gerbe étoit compofée de 28. filets, dont les plus longs fans compter la courbure , avoient au plus demie ligne de haut, & les plus courts au plus demi quart. Que fignifie tout cela ? Le Cône ef la. tige, qui en Juin fuivant auroit eu de 5. à 6. pieds de haut; les filets font les pedicules qui auroient environné la tige; Chaque té: te & chaque rejetton con- üuent actuelle- ment fa graine: dès. l’origine, comme le grain debled, les têtes font les fleurs en bouton. Au milieu de chaque bouton doit être le file, & dansyce file la graine dela Plante. (a) Meffieurs Mery & de Liftre ont cherché la mêmechofe dans des broques très= fortes , & l’ont trouvée. J'ai vû depuis quelque chofe de plus le 24. Janvier, car: j'ai compté 27. fleurs dans une broque qui n’avoit que 17. feuilles, & les boutons. de: fleurs les plus: formées vües de face préfentoient dès-lors un quarré parfait. de forte qu’on auroit déja pü prévoir que la fleur en bouton aura quatre feuilles: géand elle fera épanouie, Dénombre- ment fommai- re & eftima- tion de la fomme de graine que peuvent por- ter la maïîtref- fe tigeavec fes branches ou tige collatera- le. Et de ce que peut porterun rejerton. 152 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE La Compagnie a vü la même chofe. Au milieu de cha- que fleur doit être le file comme il a été dit; ceftile de- vient enfin une goufle longue , ronde , & double de 4.à 5. ou 6. pouces de long chargée ordinairement de 40 grains, 20. d’un côté & autant de l’autre. Quand je dis que j'ai trouvé 28. boutons de fleurs à cet embryon de tige en rac- courci, je ne dis pas qu'il n’y eneût que 28. Je fuis au con- traire affüré qu'il y en avoit beaucoup davantage , mais ces 28. étoient les plus avancés & les plus vilibles, parce que la maîtrefle tige fleurit toujours la premiére. Les autres tiges étoient cachées par leur petitefle, leur tranfparence , leurs enveloppes & les autres circonftances des êtres naiffans. Il ne faut donc pas croire que cette tige n’eût apporté que 28. fleurs ; car voici ce que j'ai obfervé fur une tige précoce de plus de cinq pieds: de haut qui ne laiffoit pas d'avoir au-deffous de fon pied huit broques dont une étroit grainée. La tige principale portoit elle feule avec fes bran- ches 197. goulfes, elle étoit environnée de 9.tiges laterales, dont la plus forte portoit 1 12. tant gouffes que fleurs , & la plus foible 26. Ces tiges étoient prefque toutes branchues. La Broque grainée portoit tant en $. tiges principales que laterales 136. tant goufles que fleurs. La tige principale portoit en tout 791. goufles ou l'équivalent, toutes les 8. Broques enfemble eftimées fur le pied de la plus avancée 1088. & zoutes les tiges enfemble 1879. goufles, c’eft-à- dire ;, felon le dénombrement ci-deflus 75 160. grains pour un, dont ce pied avoit pris naiffance. Je dois dire ici que j'ai négligé la plüpart des pedicu- les dont les gouffes avoient été abbattues par le vent ou par le tranfport, quoique je fuffe affüré qu'elles y avoient été , & perfuadé que luniformité dans les produétions gaturelles dorne une efpéce de drait de les eftimer à peu près fur le même pied; mais il faut faire ces eftimations au large, & pancher plutot du côté de la modération que du côté de lexcès pour ne pas rendre fufpeëtes d'exage- ration des merveilles qui fervent de fondement à la Théo- logie naturelle. Voilà ce qu'a produit un pied précoce & avorté 6 n: ne DES: SCIENCES. 153 avotté de cette Plante, Voyons ce qu'il auroit pû gagner à la coupe ou érêtement. ir J'ai dit ci-deflus qu'un Chou fifé étêté avoit pouflé 36. rejettons en broques. Celui-cien ayant donné 8. fans être étêté, il en faut rabattre 8. refte 28. à mettre en li- gne de compte. Or 28. fur le pied de 136. goufles à 40. ‘ grains chacune , doivent produire 152320. donc cetre fomme eft le grain préfumé de la coupe ou étêtement. IL eft vrai que tous les grains de cette Plante n’auroient pas été féconds, mais ils n’auroient pas laiflé d’avoir la même firuture que la meilleure graine. Et il ne s’agit pas ici d’e- ftimer le revenu de l'Agriculture en Jardinier , ou en Pro- priétaire ; mais de fe fervir de la pratique de cet Art mé- chanique , pour établir fur ce fondement folide & vulgaire la connoiffance de la vérité Phyfique. C’eft fuivant cette vérité qu’on peut dire ici que phy- fiquement parlant on ne gagne rien aux coupes , puifqu’el- les ne produifent rien, mais qu’elles donnent feulement lieu de paroître aux êtres qui exiftoient avant là coupe, & cela paroît manifeftement en cette Plante ; car fi l’on pañle, comme on le doit, les bourgeons pour broques en rac- courci , la Compagnie a vû qu'il y en a autant que de feuilles, c’eft-à-dire environ 85. Or chacune eftimée fur le produit aétuel marqué ci-deflus , qui eft s440. pour cha- cune , toutes enfemble font un capital général de 423 360. grains de fécondité annuelle, pour un grain qui à peine a une ligne de diamétre. £ Je reviens aux Arbres & à leur fécondité en branches & en rameaux , fi vérifiée par ce qui leur'arrive quand ils font ébranchés ou étêtés ; & je dis que les plus forts de ces ra- meaux étant parvenus à une certaine force ; porteront du fruit chacun à leur maniére , que les plus foibles feroient la même chofe; fi on retranchoit les plus forts ; que -rous f Ce feroit donc für le pied'de 1 10. rejettons dans les piéds qui ont 10. feuil- les 5 59360. qui joints au produit de la tige principale ci-deflus chargée de 797. gouffes ou fleurs, à 40. grains chacune, feroient $91000, pour multiplication naturelle , car on féme cette Plante tous les ans, li. 1700. V Cette Plante fait voir que les coupes ni les äccidensne caufent dans la vérité aucu- ne multiplica- tion , mais dé- couvrent les réferves. Fécondité des Plantes vi- vaces de lon- gue vie confi- dérée dans quelques Ar- bres , & fur= tout dans l'Orme. Cette f£con- dité par l’été- tement efti mée par la fé- condité natu- relle, multi- pliée à l'infini par létète- ment, 4.7 0.0. Eftimation au rabais de la fécondité na- tureile au- nuelle de cet Arbre. Autre efi- mation beau- coup plus nombreute & toujours au rabais. 154 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE porteroient du fruit, fi la féve fe trouvoit affez abondan- te pour fournir à tout le néceffaire de la multiplication. Et cela étant, cette fécondité ne va pas feulement à la multiplication des parties de l’Arbre , mais à la multiplica- tion de Arbre entier contenu dans chacune de fes grai- nes, c'eft-à-dire à la multiplication des individus de la mê- me efpéce qui fe trouve renfermée dans la multiplication des rameaux d’où fortent les graines , ou nues, comme celles de l'Orme , ou environnées d’une pulpe , comme dans tous les Arbres fruitiers. Qui pourroit comprendre où peut aller dans celle des rameaux cette multiplication individuelle renfermée dans celle des rameaux ! Je prends l'Orme pour exemple. Dans cet Arbre tous les rameaux & tous les brins font toutes les bonnes années, comme celle-ci, des glanes de bouquets de graine feuillues , &preflées l’une contre l’autre ; de forte que tout le bois , avant qu'il ait pouffé une feule feuille , eft couvert de la feule projeétion du contour membraneux & délié de fes graines. J'en ai compté 1 57. dans lefpace de deux pouces de long d’une branche médiocrement gar- nie. Or il feroit très-aifé de trouvet fur un Arbre de 15: ans de cette efpéce, plus de 30. pieds d’étendue aufli gar- nie que ces deux pouces. Sur ce pied , ce feroit 28260. graines ; mais pourle fça- voir plus jufte , & nv’affürer que je n’avois pas outré Pefti- mation ; J'ai fait abattre toutes les graines d’une branche d'Orme de 8. pieds de long, élevée de terre de plus de 24: Onavoit abatu cette branche avec un Croiïffantemmanché au.bout d’une longue perche. Je laïffe-là ce que les coups de Croiffant & la chute de la branche ont abatu des grai- nes que cette branche portoit étant fur l'arbre. Jai pefé toutes les graines de cette branche qui y étoient demeu- rées, & qui en ont été détachées. Le tout pefoit 2. onces, un gros & demi, c’eft en tout 35. demi-gros ; puis j'ai fait compter par comptereaux de dix chacun, les graines dont la fomme compofoit ce demi-gros. 1l y en avoit 47. com- ptes qui font la fomme de 470. qui multipliées par 35» DES SCIENCES: is$ donnent la fomme de 16450. J’ai eftimé au large combien au'moins il pouvoit fe trouver dans un Orme de 6. pouces de diamétre , de branches de femblable dimenfion, c’eft-à- dire de 8. pieds de long. J’y en ai trouvé onze. Ce feroit donc fur un feul pied au moins 18095$0. graines. Dans un Orme d'un pied de diamétre, j'ai compté 15. branches plus fortes de PEREARE Pofons-les égales. C’eft felon cet- teeflimation 246750. La fécondité va donc augmentant à mefure que les branches fe multiplient. Ainfi commeun Orme peut aifément vivre cent ans, prenons pour pied moyen de fécondité, celle dont il eft capable à 20. ans, & compenfons ce qui manque de ce nombre au bas âge de lArbre depuis fa naiffance jufques à 20. ans, par l'excédent du rapport annuel durant quatre fois autant d'années: Difons donc ; Un Arbre de 6. pouces de diamétre donne 180950. Un Orme de 20. ans doit avoir plus de 6. pouces de diamétre , puifque c’eft une groffeur aflez ordinaire aux Ormes de 12. ans. On peut donc compter dans un Arbre de 20. ans plus de 180950. pofons 200000. & multiplions par 100. la fomme totale fera 20000000. & comme tout cela vient d’une feule graine qui a donné naïffance à l'Or- me, on peut compter que cette graine unique a multiplié 20. millions pour un. Quoique cette efpéce de fécondité qui eft toute natu- relle , ne foit pas précifément du fujet de ce Mémoire , où il ne s’agit que des multiplications forcées qui vont beau- coup plus loin que la fécondité naturelle, j'ai crû devoir donner cet échantillon pour faire fentir jufques où peut monter la fécondité qui fuit la multiplication des parties caufée par les retranchemens ou des tiges ou des bran- ches , fur tout dans les Arbres & dans les Arbuftes. Car enfin cette multiplication forcée des moyens , va, comme il a été dit ci-deflus , à la multiplication, naturelle des grai- nes qui font la fin de chaque Plante. Gar plus il y a de branches, plus il doit y avoir de fruit , fi la féve.fuffit pour le mettre au jour. Il faut avouer que cet Arbre a produit extraordinaire- V ÿ Eftimation du ‘produit d’un Orme durant tout le cours de fa vie. Quelle de- vroit être la fécondité de cet Arbre éré- té , eftiméefe- lon La multi- ‘plication de fes branches, Confdéra- tions utiles à Peftimation de la fécondi- té naturelle d’un Arbre, Qu'il la faut eftimer felon le produit de la meilleure année dans le meilleur ter- roir, & dans la meilleure expoñtion.. Preuve par la culture des potagéres sampantes, 156 MEMoiR£s DE L'ACADEMIE ROYALE ment cette année, mais J'ai fait au rabais l’eftimation de fa récolte naturelle. Il femble d’ailleurs qu'on peut dire fans fe flater , que ce qui eft ordinaire pour cette efpéce de récolte actuelle , peut ne l'être qu’en apparence. Les cau- fes externes ont favorifé l’exclufion aétuelle des graines actuelles , & peut-être y avoit-il encore beaucoup de ces. graines aétuelles que les caufes externes n’ont pas fait éclo- re, & qu'une confltution d’air encore plus favorable au- roit mife au jour. Mais une conflitution favorable n’en- gendrera jamais une feule graine ; & tout ce qu’elle peut faire eft de ne la pas fupprimer , ou d’en favorifer la fortie. Ainfi ce qui paroït une fécondité extraordinaire , n’eft peut-être que le rapport ordinaire & annuel de cet Ar- bre : l’année favorable ne pouvant rien de plus en cela , que de laiffer paroître ce qui eft en effet dans l’évolution: naturelle du progrès annuel de tout Arbre de cette efpéce, & l’année la plus contraire ne pouvant que retarder ce progrès , & par-là empêcher l’évolution qui doit s’en en- fuivre. Si donc on vouloit fcavoir à peu près où va la fécondité de la meilleure année de quelque Plante que ce foit , il faudroit fçavoir ce qu’elle produit dans le terrain le plus favorable & dans la meilleure année. Car enfin l’année ne produit rien , c’eft l’Arbre ; & l’Arbre ne peut mettre au jour que ce qu'il avoit déja, comme on tächera de le prouver dans le fecond Mémoire. Cela étant : quoique toute Plante ne rapporte pas éga- lement en tout terrain & en toute confitution d’année, toute Plante ne laiffe pas d’être également féconde en elle-même. Un exemple fera voir que tout ce qui favorife: la multiplication apparente & a@tuelle , ne fe fait qu’en facilitant le développement de ce qui eft dans la Plante; & non en y mettant ce qui n’y eft pas. Une graine de Ci- trouille plantée & abandonnée à elle-même fur une bon- ne couche , bien arrofée , mais fans aucune culture , rap- porte peu de fruit en comparaifon de ce qu’elle en rap- porte , quand après avoir été arrêtée on a foin d’enfoncer DES SCIENCES. : 57 -_ Tégérement dans le terreau d’efpace en efpace , fes longues tiges rampantes , & de les couvrir d'une feule pellée de terreau dans ces endroits. Car alors ces endroits enterrés de ces longuestiges pouffent des racines ; & ces racines. fourniffent une nourriture furabondante, & font fortir du fruit où il n’en auroït point paru fans cette facilité. On peut voir la même chofe dans les Potirons. Ce mweft pas la terre qui produit ces racines, c’eft la Plante. Ces racines m’auroient pas paru fans la facilité que leur donne le con- tat de la terre, qui en les couvrant , couve & fait éclore les racines cachées dans ces longues tiges. Le fruit qui fur- vient par ce renfort de féve, que les jeunes racines four- niflent , n’auroit pas paru fans ce nouveau renfort. Mais. ce n'eft pas les racines qui le produifent , c’eft la tige ram- | pante , & cette tige n’a montré rien de nouveau, nien ra- È cines ni en fruit, que ce qu’elle tenoir de la graine qui lu a donné naiffance. Or cette graine négligée & cette graine cultivée éroient femblables entr’elles , peut-être que l’une étoit mieux nour- rie & l’autre moins, l’une plus forte & l’autre plus foible.. Peut-être que celle qui a été cultivée étoit la plus forte , peut-être encore que celle qui a été moins cultivée étoit la plus foible , & la négligée la plus forte. Mais plus forte ou plus foible , la cultivée rapporte toujours plus , & la né- gligée toujours moins. Cependant dans la forte & dans la: foible , même ftruêture effentielle ; la graine la plus foible comme la plus forte ; avoit fa plantule & fa radicule, & fes deux Pulpes. Et tant la plantule que la radicule avoient apparemment les mêmes reffources. J'ai crû long-temps qu'un grain de froment ne pouvoit pouffer qu'un tuyau , mais j'ai eu entre mes mains deux tro- €hes de froment , dont l’une fembloit contenir plus de cent “tuyaux , & l’autre plus de foixante. Celui qui m'avoit mis ces troches entre les mains vou-- loit me prouver par-là qu’une liqueur dans laquelle il af füroit avoir mis tremper les deux grains de bled ,. d’où if difoit que ces deux troches éroient iffues , augmentoit à: | V üy Et par: le bled... 58 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Yinfini la Écondité naturelle du froment. Je laifle à part I fait de la préparation qui peut être vrai , au moins en par- tie, puifque Monfieur l'Abbé Gallois en a vû quelques épreuves , quoique beaucoup moins fortes, n'allant qu'à huit ou dix tuyaux fur chaque pied ; mais pour ce qui eft de la multiplication , ayant démêlé ces racines entrelaf fées, j'ai reconnu que ces deux groffes troches ne paroif- foient être un feul pied que par l’entrelas du chevelu de plufieurs de ces racines, enforte que cette touffe de raci- nes n'étoit qu’un compofé de plufieurs moindres touffes. J'ai pourtant vû plufieurs de ces racines inféparablement unies, enforte que je n’ai pû les féparer qu'en les écar- tant, &t les arrachant les unes des autres. Cette adhéfion pourroit venir d’un fimple conta& en- tre plufeurs collets de racines encore tendres , voilines & preflées l’une contre l’autre ; ces racines provenues cha- cune de fon grain de bled. Mais fi c’eft une vraie multipli- cation du germe d'un feul grain en plufieurs tuyaux, & fi la préparation eneft la caufe , il y a beaucoup d’appa- rence que cette humeétation d’une graine unique parune liqueur , ouvre les conduits du germe contenu dans la graine, de forte que tombant dans une terre bien cultivée & fucculente , il y rencontre toute la féve néceflaire pour mettre au jour tout ce qu'il a de reflources naturelles. Et ce- la donne occafion de penfer qu'indépendamment de toute préparation dans tout germe de froment, outre le principal tuyau que la féve de la PAIE du grain enfile direétement, il y en a plufeurs autres latéraux prêts à paroïtre toutes les fois qu'il arrivera que cette féve furabonde, de forte que le principal tuvau ayant fon néceffaire , le fuperflu dé- borde dans les latéraux. C’eft apparemment pour procurer cette multiplication de tuyaux fur un feul pied, ou au moins pour s’oppofer à la caufe qui la pourroit empêcher , qu’on fait encore à préfent ce qui étoit pratiqué par les Anciens, mettant le Bétail dans les terres femées lorfqu’el- les donnent trop de verd, afin que le Bétail broutant le fuperflu de ce verd, ils ménagent à chaque pied de fro- DES SCIENCES. F5 ment ou d'autre grain , affez de féve pour bien nourrir l’épi principal , & végérer même les épics latéraux. 8 J'ai pris les mefures néceffaires pour m’affürer de ce fait, & j'en rendrai compte à la Compagnie. En attendant cette confirmation ;, le hazard n'a préfenté une touffe d'un Gra- men fpicatum , qui manifeftement d’une feule racine portoit 18. tuyaux. De plus jai vû chez M. le Préfident Tambon- neau deux pieds de ce froment que G. B. appélle, Triticum fpica mulriplici. L'un de ces pieds avoit 26. tuyaux , l'autre 32. Cependant on m'a fort affüré qu’à l'endroit où font ces deux pieds, on n’a planté dans chaque endroit qu'un grain unique. Cela pofé ,.fima conjecture eft raifonnable , l’un de ces deux grains eft planté dans un endroit moins favorable _que l’autre, fans être moins fécond par lui-même. Sur cha- que épi latéral il y avoit 30. grains. 9..épics latéraux font 270.L'épi du milieu en avoit 36. T'otal 306.32. épics 9792. Pline admire cent pour un, autour de Babylone dans un champ. bien cultivé. Et il peut avoir raïfon d'admirer cette. fécondité, car autre chofe eft de femer du bled, bien dru: dans tout un Champ , & de planter deux graines au large. dans du terreau de jardin bien amandé. Il me paroit donc fort probable que toute graine qui. n’eft pas avortée ou monftrueufe , eft également féconde en. elle-même ; & j'ofe même dire, toute Plante annuelle ; & fi cela eft, pour mefurer à peu près en général la fécondi-. té abfolue de toute graine d’une même efpéce en ce gen-- re de Plantes annuelles , il faudroit au- moins fçavoir ce qu’un individu de cette graine qui a.le mieux réufli, a pro- duit. Car fi cette obfervation ne faifoit connoître tout ce: que cette Plante peut faire , au moins pourroit-on dire,, qu'ôn ne fçait pas qu'elle ait jamais fait davantage , & qu’apparemment les autres ont en elles-mêmes tout ce qu'il. faut pour en faire autant. Mais il n'en eft pas. ainfi des Plantes vivaces. On: fçait ce que la graine d’une Plan- [8 Virgile a fait mention de cette culture au. r. des Georgiques , luxurienx fègetum tenera depalcit in herba : elle a rapport àla coupe de quelques potagéres: dont on a parlé ci-deflus. 1. Lib, sui, c- 17. Uniformité: probable des: ouvrages de la- nature, mefu-- re de-leur fé- condité dans: les Plantes an- nuelles par le- produit d’une bonne graine en bonterroir: durant une bonne année ; fauf le plus,. s'ily échoit.- 560 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE te annuelle peut contenir , au moins quand on fçait ce qu’un pied de cette Plante bien planté & bien cultivé a produit en une année très-favorable ; parce que la vie de cette Plante ne dure qu'une année , & qu’elle montre en Mais non une année tout ce qu'elle peut faire. Mais il femble qu’on dns PR ne peut favoir ce que peut porter une Plante vivace du- ranttoute fa vie, en calculant à la rigueur ce qu’elle porte dans une borine année. Car il fe peut faire que ce qu'elle ne porte pas durant une mauvaife année , demeure en ré- ferve en attendant une meilleure occalion pour fe mon- trer en un tems plus favorable. Et en effer , il eft plus que probable que cela arrive dans les Arbres fruitiers , hors les rencontres , où une conftitution inégale & déréglée ayant avancé le fruit, une autre conftitution contraire , c’eft-à-. dire , trop froide furvenue tout à coup, le fait avorter & périr fans reffource. Cela étant, on ne peut pas dire que tout Arbre eft éga- lement fécond en lui-même en toute année. Mais il me paroït qu’on peut dire que tout Arbre d’une même efpé- ce eft à peu près également fécond, à confidérer tout ce qu'il peut produire dans tout le cours de fa vie , c’eft-à-dire qu'il contient à peu près un nombre égal de principes qui doivent paroiître fucceflivement , fi l'ingratitude du fol , le contre-temps de faifons , les accidens de la vie, ou une mort précipitée ne l’en empêchent. Ainfi pour ne fe pas tromper fur la fécondité d’un Arbre durant toute fa vie , il faut le calculer fur le plus bas pied d’une bonne année. Quelqu'a- On ne peut donc aflürer que le nombre de leurs géné- ir le prod rations fucceflives aétuelles foit réglé & compté précifé- aêtuel des ment. Mais on peut raifonnablement croire que les moins Panes leurs fécondes contiennent un nombre d'autant plus grand de incomparable. Principes enveloppés , qu'elles en ont moins mis au Jour ; Du ‘étque dans les plus fécondes , le nombre des principes en- ”_ veloppés eft infiniment plus grand que celui des principes développés. Il eft queftion de voir fi on le peut prouver : Et ce fera le fujet du fecond Mémoire. REMARQUES D ES IS CNT EN © ENS 161 REMARQUES SUR LA CONSTRUCTION des Horloges à Pendule. Par M. DE LA HIRE. Uoiqu'il ne femble pas pofible d'ajouter quelque O chofe à la conftruétion des grandes Horloges à Pen- dule comme elles font à préfent , pour les rendre plus par- faites & plus juftes dans la mefure du tems ; cependant on y peut faire quelques remarques qui pourront fervir à corri- ger quelques inégalités qui s’y rencontrent. Premiérement, il femble qu’on auroit pà fufpendre la verge du Pendule à une petite lame de reffort au lieu de foie, pour éviter les accidens qui arrivent à la foie , com- me de s'allonger par la pefanteur du poids qui y eft fuf- pendu , & principalement quand le tems eft fec , & tout au contraire de fe raccourcir quand le tems eft humide , comme il arrive à tous les fils & cordes qui font compo- fées de plufieurs filets tortillés enfemble : car le raccour- ciffement ou l'allongement de la foie , raccourciffant ou allongeant la longueur du Pendule , fera avancer ou re- tarder l'Horloge. On pourroit encore ajouter qu’à chaque vibration , la foie fait un petit pli à l'endroit où elle eft atrachée.à la verge du Pendule , par l'effort que fait la fourchette pour entretenir le mouvement du Pendule. Mais Pexpérience que jai faite il y a quelques an- nées d'un reflort appliqué à la verge du Pendule au lieu de foie, m'a convaincu qu'il lui arrive des irré- gularités bien plus confidérables qu'à la foie, ce que je mai pû attribuer qu'aux différentes altérations du reffort par le froid & par le chaud ; qui rendant les corps à ref- fort plus ou moins roides, y caufe des changemens fort confidérables ; car plus un reflort eft roide , & plus il fait {es vibrations fréquentes , tout au contraire quand il eft 1700. X. 1700. 22. Mai. dE À 162 MEMOIRES DE LACADEMIE ROYALE mou il les fait plus lentes. Je fus donc obligé d’ôter d'une grande Pendule à fecondes, le reflort qui foûtenoit la ver- ge du Pendule pour y mettre une foie, & je n'y trouvai plus enfuite toutes les irrégularités que J'y avois remarqué auparavant, ce qui fervit à me convaincre entiérement que ces inégalités n’éroient caufées que par le reffort. Secondement, j'ai confideré que fi dans les Pendules à demi-fecondes où les irrégularités ne feroient pas fenfibles, on attachoit bien ferme la petite lame de reffort Æ à la verge du Pendule, on pourroit rendre par ce moyen ces fortes d'Hor- loges plus portatives qu’elles ne font ordinaire- ment avec la foie dans des voyages fur mer & de long cours, ce qui pour- roit peut-être avoir des utilités pour la connoif- fance des longitudes, car dans les balancemens or- dinaires d’un Vaifleau, le Pendule fe foûtiendroit de lui-même, & ne feroit pas autant interrompu dans fes vibrations que lorfqu’il eft feulement fuf- pendu à une foie. Mais fi au lieu d’une lame de reffort 4 qui eft appliquée ar fa largeur fuivant la longueur de l'Arbre , on fufpendoit fe Pendule à une verge roide & ferme dont la largeur cou- A : : > > ) pât perpendiculairement l’axe de PArbre , & qu’elle füt ar- rêtée à l’Arbre , alors le mouvement du Pendule gouverne- toit entiérement le mouvement de l'Horloge, EEE D DES ScirENCESs. 163 - Enfin fi dans les Pendules à fecondes, pour éviter les accidens de la foie & du ref fort , on fufpendoit le Pen- dule , comme je viens de dire, à une verge roide & ferme, laquelle fût engagée & arré- tée ferme dans un petit Ar- bre particulier Z qui fe mou- veroit librement fur fes pi- vots, l’Arbre des Palettes qui porteroit la fourchette, pour- roit imprimer le mouvement au Pendule par le moyen de cette fourchette, laquelle étant gouvernée par les vibrations du Pendule reétifieroit le mou- vement de l'Horloge. Je fuis perfuadé que cette maniere d'appliquer le Pendule aux Horloges , feroit meilleure que celles qui font en ufage. 11 faudroit que Axe du pivoit ; î 4 fe trouvât dans la même ligne droite que celui de l'Arbre qui porte les Palettes pour éviter le frotement de la fourchette au long de la verge du Pendule , ce qui arrive néceffairement aux Pendules qui ont des cycloi- des, & ce frotement caufe une inégalité confidérable dans le mouvement du Pendule, quand l'huile qui eft en cet endroit s’épaiffit, ou qu'il s'y engendre un peu de rouille. On pourroit m'objeëter que les vibrations du Pendule qui pourroient être d'inégale longueur ne feroient point ré- duites à l'égalité , n'y ayant point de Cycloïde dans cette confiruéhon. Mais je puis répondre auffi que ceux qui ont long-tems gouverné & avec foin des grandes Horloges à Pendule , fçavent bien que les vibrations font fi égales qu'elles pourroient bien n’avoir pas befoin de Cycloïde , & fur:tout fi ces vibrations ne font pas d'une longue étendue : 2 164 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE mais quand on voudroit avoir égard aux inégalités des vi- brations du Pendule dans cette conftruétion , j'expliquerai dans la fuite la maniére dont on doitles corriger. On a conftruit quelques Pendules dont la fourchette étoit placée au-deflus des Palettes, & qui rencontroit la verge du Pendule au-deffous du poids du Pendule dans une partie de la verge qui pañloit au-delà du poids : mais cette conftruétion eft vitieufe , & ne peut pas fervir pour de grandes Horloges à faire des obfervations, car les vi- brations étant de très-peu de longueur , le poids du Pen- dule n’a que peu de mouvement, & il peut être arrêté & détourné très-facilement par une puiflance fort foible , ainfi les mouvemens inégaux de la fourchette fe commu- niquant au mouvement du Pendule, il ne peut pas en être recbfié , & l’'Horloge ne peut être jufte, comme quel- ques-uns de nos Académiciens le remarquerent alors. en comparant ces Horloges avec celles dont nous nous fer- vons ordinairement. Mais après que les grandes Horloges qui fervent aux obfervations céleftes , ont été réduites'à un point de perfection auquel on n’auroit pas crû qu'on pôût Jamais arriver, puifque nous voyons affez fouvent que dans l’efpace de plufieurs jours de fuiteelles ne s’écartent pas du mouvement égal qu’elles marquent ; d’une feule feconde de tems ; il ne falloit plus que trouver l’inven- tion de réduire à la régularité, celles qu’on porte ordinai- rement dans la poche ; & pour régler le mouvement du balancier qui eft ordinairement fort inégal , on s’eft avifé d'y appliquer une petite lame de reffort , qui en fe ban- dant & débandant pût en rectifier le mouvement. Ce principe de régularité eft fondé fur ce que les vibrations des refforts mis en mouvement font à très-peu près égales, au moins lorfque ces vibrations font à peu près d’égale étendue. On a d’abord appliqué à ces Horloges une petite lame de reflort toute droite , laquelle étant arrêtée ferme par lune de fes extrémités, portoit à l’autre extrémité qui étoit libre, une petite fourchette qui gouvernoit un des DES SCIENCES. 16$ rayons du Balancier en le rencontrant dans une médiocre diftance de fon centre, & par ce moyenle mouvement du Balancier étoit réduit à une efpéce d'égalité par la régu-. larité des vibrations du reflort. Mais comme la longueur de ce petit reffort ne pouvoit être tout au plus que des + du diamétre de la Montre, il falloit qu’il füt extrêmement foible pour avoir fes vibrations à peu près égales à celles du Balancier , & fi il étoit fi foible , il ne pouvoit pas ré- gler les inégalités du Balancier qui doit faire environ qua- tre vibrations par fecondes de tems. On a donc aban- donné ce reflort droit pour lui en fubflituer un de figure fpiralé qui n'occupe que peu d’efpace quoiqu'il air une longueur confidérable. L’extrémité la plus éloignée de l'œil de cette fpirale eft arrêtée ferme en deux endroits pour y être foutenue, & l’autre extrémité vers loœil eft auffi arrêtée dans l’Arbre qui porte les Palettes & le Ba- lancier , afin que le mouvement du reffort qui eft entrete- nu par le mouvement du Balancier pût à même tems lui communiquer fa régularité : mais quand on examine avec foin le mouvement de ce Balancier reglé par le mouve- ment de la lame fpirale , on s’apperçoit qu'il lui refte en- côre beaucoup d'inégalité ; d’autant que les mouvemens des Palettes agiflant contre l'extrémité de la lame fpirale, & faifant effort par rapport à la longueur du demi-diamétre de l’Arbre à l'endroit où ce reflort eft engagé , ils maïitri- fent le reffort qui obéit & qui céde à l'inégalité à caufe qu'il eft foible & leger, & qu'il ne peut réfifter au mouve- ment du Balancier , ce qui ef facile à entendre , par ce que Jai déja expliqué ci-deflus , en parlant des grands Pendules fufpendus à un reflort. RO IDANE lon -: J'ai donc confideré que le mouvement du reffort doit être néceffairement appliqué à une diffance un peu con- fidérable du centre du Balancier , pour pouvoir gouver- nér avec plus de force fes mouvemens inégaux, & pour n'en recevoir pas les inégalités. 11 faudroit donc couper le reflort en fpirale affez loin de l'œil , & à cette extrémité y appliquer une petite fourchette ; laquelle fit engagée à X ii] 166 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE dans l'un des rayons du Balancier à un quart à peu près à la circonférence du centre; & le Balancier devroit être pofé de telle maniére que lorfque la fpirale eft en repos Z & qu’elle n'eft point contrain- te par le Balancier , le rayon où eft engagé la fourchette fût toujours perpendiculaire à la ligne tracée par le point où eft appliqué la DRAP LUE le réflort fe bande & débande, afin que la fourchette eût moins de frotement au long du rayon du Balancier , ce qu’on peut voir dans la figure qui eft ici re- préfentée. Mais voici encore une autre maniére pour-ap- pliquer un reflort au Balancier d’une Montre ordinaire. Ce. reflort doit être mince & plat, comme ceux des fpira- les ordinaires , mais fa figure eft ondoyante dont les ondes font fort ferrées. Par ce moyen on à un grand reflort qui n'occupe que peu de place en longueur, en forte que fes vibrations peuvent être lentes, fans occuper un grand efpace. Les ondes font formées fuivant Ja largeur de la lame qui eft pofée fur le champ, ce qui iait qu'il peut fe foûtenir aifément dans fa grande longueur. On pourroit même lui donner beau- coup plus de largeur qu'aux fpirales ordinaires , afin qu'il pôr fe foûtenir plus aifément. J'ai éprouvé que ces fortes de refforts ployés en ondes ont de très-grands avantages DES SCIENCES. 16% fur les autres reflorts en ce qu'ils font fort doux ayant beau- coup de longueur , & qu'ils ne font que peu d'effort dans chacune de leurs partiés. Ils ont encore un très-grand avantage par-deflus lés refforts à boudin, qui ont aufli celui de la longueur dans un peu d’efpace , en ce que ces reflorts dans leurs allongemens & refferremens ne peuvent étendre leurs fpires , fans que le fil dont ils font compofés ou formés, ne fe torde & dérorde , ce qui le ruine très- promptement dans un mouvement continu ; ce qui n'ar- rive pas au reflort en onde, quand même il feroit formé d’un fil au lieu d’une lame , comme je le fuppofe ici. Pour faire l'application de ce reffort en onde au Balan- cier de la Montre, il doit être arrêté ferme par l’une de fes extrémités à la Platine fupérieure de Ha Montre de la même maniére que les reflorts en fpirale , & par l’autre extrémité où finiflent les ondes, il porte une petite four- chette qui pafle dans un des rayons du Balancier au quart à peu près de diftance du centre, comme on voit dans la figure. Pour ce qui eft de la maniére de raccourcir ou d’allon- ger ce reflort pour lui faire faire fes vibrations plus cour- tes ou plus longues, on le fera comme aux refforts en fpi- rale par le moyen d’une petite bride attachée à une cra- maillere qui coule dans une couliffe pour s'approcher où s'éloigner de l'endroit où le reflort eft attaché à la Platine de la Montre. On pourra faire ce reffort long ou court, fuivant le nom- bre & la grandeur de fes ondes pour en faire convenir les vibrations au mouvement alternatif du Balancier , car ces deux mouvemens doivent être à très-peu près égaux pour s’entretenir l’un autre plus facilement. Voici maintenant de quelle maniére on peut rettifier le mouvement du Pendule lorfqu’il n’y a point de foie pour le foùtenir , & que la verge qui foûtient le Pendule eft arrêtée ferme dans le pivot fur lequel il fe meut, comme je l'ai propofé ci-devant. 168 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE Soit 4B la longueur du Pendule depuis fon point de fufpenfion À jufqu'au centre B du poids total que je fup- pofe être celui d'ofcillation , dont il faut que le mouve- ment fe faffe par une Cycloïde , comme M. Hugens la pofé. Du centre B & pour rayon BA, je décris le cercle AD , & ayant coupé 4 B en deux parties égales en E, je mene EF perpendiculaire fur 4B , laquelle foit la bafe d’une Cycloïde 4GF qui a pour diamétre de fon cercle générateur la grandeur E A qui en fera Axe. Maintenant foit 4H la courbe décrite par l’évolution de la Cycloïde en commençant l’évolution au fommet 4 & foit aufli la Cycloïde BIF décrite par l'évolution de la Cy- cloïde /GF en commençant l’évolution fur la bafe en F. Je dis que le pivot qui doit foûtenir la verge du Pendule doit être creux par deflous de la figure circulaire ZD & qu'il doit fe mouvoir fur la partie convéxe de la courbe 4H. Je ne dis rien fur la maniére d'appliquer ce pivot & ce qui le foûtient, car il n’y aura pas de difficulté , & il nimporte pas que la partie concave roule ou gliffe fur la convéxe 4H, puifque je point B fe trouvera toujours dans la Cycloïde BIF. La DES SCIENCES. 169 La démonftration de cette conftruétion dépend de la nature des courbes décrites par évolution. Carileft certain que fi la ligne droite 4B roule en s’appliquant fur la Cycloi- de AGF, fon extrêmité B décrira la Cycloïde BIF, & fon extrèmité À la courbe 4H, & que cette ligne AB fera dans toutes fes pofitions différentes, comme 1GH perpen- diculaire des deux côtés à chaque courbe BIF & AH. Mais lorfqu’un point tel qu’on voudra D du cercle AD fera appliqué fur la Courbe AH au point À, le cercle & la courbe fe toucheront dans ce même point H, & la ligne HGI menée de ce point H pour touchante de la Cycloïde en G étant perpendiculaire à la courbe 4H & au cercle, fera égale à B4 par la defcription du cercle; & par conféquent l'extrêmité Jde cette ligne conviendra avec le point B placé en Ifur la Cycloïde , quoique la verge AB fe trouve alors en quelqu’autre pofition , comme 4R; car il n'importe pas quel point D du cercle 4D par rap- port au point 4 où eft appliqué la verge du Pendule, fe trouve en H fur la courbe 4H puifque toutes ces lignes feront les rayons du même cercle. Mais comme cette maniére de pivot creux pourroit fembler de difficile exécution, je dis qu’on le pourra faire d’une infinité de figures différentes convéxes ou concaves & telles qu'on voudia, ce qui détermine à même-tems la figure de la courbe, du trou ou foûtien fur lequel il fe meut ; ce qui fera facile à faire par les méthodes que j'ai ex- pliquées dans mon Traité des Epicycloïdes, DES VAISSEAUX : Omphaloméfentériques. Par M. pu VERNEY. Jen ne flate plus agréablement l'efprit de l'homme R que les nouvelles découvertes ; mais il n’eft rien aufli où il prenne plus facilement le change : au moment qu’on s'eft imaginé d’avoir. dévoilé quelque vérité si alors in- 17008 Y 1700. 16. Juin. 170 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE connue , amoureux d’un Syftême dont on eft l’Inventeur ; on n’oublie rien pour l’établir , & fi l’on ne fuppofe pas des faits pour l'appuyer, ons’en propofe à foi-même qui ne fub- fiftent que dans des préventions. C’eft à remettre l'efprit humain dans les voies , que les Compagnies doivent appli- quer, & c’eft un des grands avantages que le Public puifle urer de leurs Conférences. Un Anatomifte de la Compa- gnie étanttombé dans cet inconvénient, & ayant fair dans un Ouvrage imprimé, un Syfême des vaiffeaux Omphalo- méfentériques , qui n’eft appuyé que fur des faits imaginés contre la vérité, j'ai crû que je devois en détruire la fuppofi- tion par la démonftration du véritable état de ces vaiffeaux. Il y a donc deux vaiffeaux Omphaloméfentériques dans sous les Fœtus qui ont une quatriéme membrane. Ces vaiffeaux confiftent en une veine & une artére. L’artére qu'on voit paroître vers le centre du Mézentere du Fœtus, a fon origine dans la mézentérique fupérieure , & pañfant au travers de la Glande nommée , Pancreas d'A- zellius, va droit au nombril fans jetter aucun rameau , & fort par-là hors du ventre pour s'engager dans le cordon. Le refte de fa diftribution n'étant pas du fujet, eft renvoyé à une autre occalion. La veine a fon origine dans la quatriéme membrane , elle eft formée d’un nombre infini de petites branches qui fe réuniffent en un feul tronc , lequel accompagnant l’arté- re, vient avec elle fe rendre dans le cordon, & fans jetter de rameaux , va paffer fous le duodenum pour s'implanter dans le tronc de la veine-porte. Ces deux conduits fe trouvent donc enfermés dans le: cordon avec les autres vaifleaux ombilicaux ; & ils ne s’en féparent qu’à la diftance d'environ trois pouces du nom- bril pour aller fe diftribuer dans la quatriéme membrane par un nombre infini de rameaux. L’artére qui palle tout au travers du Pancreas d'Azellius n’a aucune communication avec cette Glande , ainfi qu'il eft aifé de s’en aflürer par le foufle &c par l'injetion. Cetre fimple defcription détruit entiérement les faits fup- pofés parl’Anatomifte ; lorfqu’il a dit; 10, Que ces vaifleaux DES SCIrENCESs. 171 n'ont point de communication immédiate avec les veines ou avec les artéres du Mézentere , & qu'ils font de même confiftence. 2°. Qu'ils vont toujours aboutir dans des corps glanduleux, & fur-tout dansle Pancreas d'Azellius. 3°. Que les artéres Ombilicales donnent des rameaux à la quatrié- me membrane. Enfin rien r'eft plus faux que l’ufage qu’il attribue à ces vaiffeaux Omphaloméfentériques , lorfqu'il affüre qu'ils peuvent porter aux Glandes du Mézentere le fuc laiteux & nourricier de la quatriéme membrane , puifqu’il paroît par notre démonftration que ces vaifleaux n’ont nulle commu- nication avec ces Glandes. La plûpart des autres faits con- tenus dans cet Ouvrage roulant fur de pareilles fuppofitions, 4 : > a . * fe détruifent d'eux-mêmes: je n’en ferai pas un plus long détail. EXTRAIT DE QUELQUES LETTRES écrites de Portugal & du Brefil, par M. Couple le fils, à M. l'Abbé Biguon, Préfident de ? Académie Royale des Sciences. Yant été reçu de l’Académie Royale des Sciences encore fort jeune ; après avoir aflifté aux Affemblées pendant quelques années, je crus ne devoir point différer plus long-tems d'exécuter le deffein que j'avais de voyager pour »’avoir plus dans la fuite d’occafion d'interrompre le cours de mes études , lorfque je ferois dans un âge plus avancé. Ma premiere penfée avoit été d'aller aux Indes Orientales faire quelques obfervations des Satellites de’ Jupiter pour la détermination des longitudes. Mais ayant fait réfléxion que depuis que les RR. PP. Jéfuites ont été envoyés par le Roi dans l'Orient, ils y avoient fait un nom- bre confidérable d'obfervations , lefquelles nous donnoïent une connoïffance afflez parfaite des principaux points de longitude de cette partie du Monde; mais qu'au contraire y en ayant très-peu du côté des Indes Occidentales ,un voyage du côté de l'Occident pourroit être pr utile pour ij 172 MEMoiRes DE L'ACADEMIE ROYALE le progrès de la Géographie : je pris donc l’occafion du départ de M. le Préfident Roüillé qui alloit en Ambañfade en Portugal pour pafer à Lisbonne avec lui. J'y reflai quelque tems pour y apprendre la Langue dans la penfée qu’elle ne me feroit pas inutile pour mon voyage des Indes: & enfuite ayant trouvé une occafion d’aller au Brefil, ÿy ‘allai & demeurai trois mois & plus, tant à Paraïbe, qu’à Olinde où Pernambouc, où après avoir fait quantité d'ob- fervations de Géographie , de Phyfique & d’Aftronomie, je repaffai en Portugal; & dela mes affaires domeftiques m'ayant rappellé en France après deux ans & demi d’ab- fence , j'eus le malheur de venir faire naufrage fur les Côtes de Picardie le 2j. Novembre 1699. d’où je ne pus me fau- ver moi-même qu'avec beaucoup de peine ,.après avoir vü périr dès la veille toutmon équipage, mes Livres , mes Inf- trumens de Mathématique, & même mes Mémoires 8e les curiofitésque J'avois ramaffées avec beaucoup de foin & de dépenfe, & doût Je n’ai pà fauver quoi que ce foit. Il ne me refta donc de toutes ces obfervations que ce que J'ai pù tirer de quelques Lettres que j'avois écrites à M. l'Abbé Bignon, & à M. Callini dans le cours de mon voyage. Longitude de Lisbonne. Entre plufeurs obfervations des Satellites de Jupiter que je fis à Lisbonne en l’année 1698. il s’en trouva une qui fut pareillement obfervée à Paris dans PObfervatoire Royal par M. Caflini. C'étoit une immerfion du premier Satellite ‘dans l'ombre de Jupiter. Elle arriva le 7. Mai 1698. ainf que je le remarque ci-après. IL eft bon auparavant de remarquer que je nv’étois pofté fur le Mont Sainte-Catherine fitué au Sud-Sud-oueft de la Ville,dans un lieu commode pour ces fortes d’obfervations; que je m’étois parfaitement aflüré de l’état de ma Pendule , & que je fis mon obfervation avec une Lunette de 37. pieds de le Bas, précifément de même force que celle dont M. Caffini fe fervoit à Paris pour la fienne. DES SCIENCES. 173 Le 7. Mai 1698. Immerfion totale du premier Satellite dans l'ombre de Jupiter obfervée. A Paris à 11 heures 9°21"du foir à Lisbonne à 10 17 30 La différence des Méridiens eft o CET Ce qui revient à 12 dégrés $7" 45° dont Lisbonne eft plus Orientale que Paris. Suppofant la longitude de Paris de 21. dégrés feule- ment, commeil y a de fortes préfomptions pour le faire , celle de Lisbonne fera de 8. dégrés 2° 6 Cette différence de Méridiens entre Paris & Lisbonne, eft bien plus grande dans les Cartes de Sanfon, qui paf- foient fans contredit pour les meilleures , il y a 30. ans. Lisbonne y paroït encore plus Occidentale que par nos ob- fervations de $ 2. minutes 15.fecondes de dégrés qui valent 16. à 17. lieues dans ce paralléle. Au contraire les nouvelles Cartes Marines imprimées ‘par Ordre du Roi, il y a fix ans, font Lisbonne moins Occidentale que nos obfervations de 27 45”. de dégrés qui valent plus de 9. lieues. Ainfi la diftance entre les Méridiens de Paris & de Lisbonne , marquée dans les nouvelles Cartes Marines, eft différente de celle des Cartes de Sanfon, d’un dégré vingt minutes; ce qui eft confidéra- ble, étant plus d’un dixiéme de leur véritable diftance , qui xéfulte de nos obfervations. Lotitude de Lisbonne. Pour ce qui eft de la Latitude : comme elle s’obferve affez aifément , il n’eft pas fi facile de s’y tromper , pourvû qu'on ait des inftrumens d’une grandeur raifonnable. Les obfervations que jai faites de la Latitude de Lisbonne , fer- viront #confirmer celle qui eft marquée dans les nouvelles Cartes Marines. Pour ce qui eft de la Latitude de Lisbonne marquée par Sanfon dans fa Carte particuliére de Portugal de Vannée 1654. à 38. dégrés 27, elle eff fi éloignée de la véritable , que je ne crois pas que perfonne s’y puifle trom- Yi 174 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE per; aufli dans une Carte générale d'Efpagne qu'il a don- née depuis, il l’a augmentée tout d'un coup de 23. minutes. J'ai obfervé lEtoile Polaire fur la fin de Décembre 1697. avec un inftrument d'un pied & demi de rayon garni de Lunettes avec des fils, & je trouvai à Lisbonne, La plus grande hauteur méridienne de l'Etoile Polaire 419 «40 Le plus grand abaifflement de lamême 36 28 65e La différence des deux hauteurs eft 4 37 40 La moitié de cette différence eft 2 18 so Ajoûtant cette demi différence avec la plus petite hau- teur de l'Etoile Polaire, on aura pour haüteur apparente du pôle 33 46 $o e laquelle retranchant la réfradion convenable ) É 429 Il reftera 38 PTE T pour hauteur véritable du pôle à Lisbonne. Déclinaifon de l'Aimant à Lisbonne. Le 26. du même mois de Décembre 1697. j'obfervai à Lisbonne la déclinaifon d’une aiguille aimantée de fix pou- ces de long ; par le moyen d’une ligne méridienne que j'a- vois tracé quelques jours auparavant avec beaucoup d'exac- titude , & je la trouvai de 4. dégrés, 18. minutes Nord- oueft. Différence de la longueur du Pendule à Lisbonne & à Paris, A vant que de partir de Paris j'avois réglé mon Horloge à l'Obfervatoire Royal au mois de Juillet & au commen- cement d'Août 1697. & je l’avois mife au moyen mouve- ment, où elle avoit demeuré un tems afféz confidérable pour en être afluré.. L’ayant laiflé dans le même état , je la mis en mouvement à Lisbonne au mois de‘: Novembre fui- vaut, &c Je remarquai qu’elle tardoit de 2'13"en 24.heures. omme Javois éprouvé qu’en hauffant le petit poids autant qu'il fe pouvoit hauffer , on n'accéleroit pas le mouvement de la Pendule d'une minute entiére, ce qui n'étoit point fufhfant; je me déterminai à raccourcir le Pendule , & après plulieurs tentatives , je connus que le Pendule de lHor- DES SCIENCES. 175 loge devoir être plus court à Lisbonne qu’à Paris de deux lignes & demie. ei Latitude de Paraibe. Comme le Ciel étroit fouvent couvert, je fus plus d'un mois à régler mon Horloge , parce qu'il fallut un grand nombre d'obfervations pour avoir la longueur du Pendule, & pendant ce tems jai pris plufeurs fois la hauteur du Soleil , d'où je conclus que cette Ville eft à 6. dégrés 5818" de Latitude méridionale. Déclinaifon de ? Aimant à Paraïbe. Le 20. Mai 1698. ayant auparavant tracé foigneufe- ment une ligne méridienne, dont je m’érois fervi pour les obfervations Aftronomiques , j'obfervai la déclinaifon de l'aiguille aimantée de so. 3; Nord-ef. Différence de la longueur du Pendule à Paraibe &@: à Paris. Lorfque je fus arrivé à Paraïbe au mois de Mars 1698. mon premier foin fat de régler mon Horloge, & de la mettre exactement au moyen mouvement, tant pour con- noître la différence de la longueur du Pendule, que pour me préparer à faire les obfervations des Satellites de J upi- ter pour déterminer la longitude de cette Ville. D'abord Je remis ma Pendule en l’état où elle étoit lorfque je partis de Paris, & la misen mouvement, Je trouvai qu’elle tardoit de fon moyen mouvement de 4‘12"en 24. heures. Jerac- courcis donc le Pendule à plufieurs fois,& l'ayant enfin réglé fur le. moyen mouvement, je connus que le Pendule doit être plus court à Paraïbe qu'à Paris de 3. lignes & deux tiers. Je mis enfüite cette même Horloge dans l’état où elle étoit, lorfque je m'en étois fervi pour faire mes obfervations. à Lisbonne où je l'avois réglée fur le moyen mouvement : &t je remarquai que dans cet état elle tardoit à Paraïbe de 2°$'en24. heures. Quoique la différence qui fe mouve entre les deux Pen: dulesà fecondes pris à Paraïbe & à Paris , ne foit, comme nous le venons de marquer , que de 3. lignes ? (ce qui n’eft pas confidérable fur une longueur de 3.à 4. pieds ,telle que celle des Pendules que nous comparons) cependant elle: 176 MEMOIRES DE L'ACADEM1:E ROYALE ne laifferoit pas de porter à une erreur fenfible ( comme il eft aifé de le voir , puifque nous fcavons que les tems em- ployés dans les vibrations des Pendules font entr'eux com- me les racines de leurs hauteurs ), d’où l’on voit que fi à Paraïbe on fe fervoit du Pendule à fecondes tel qu'il eft à Paris, c'eft-à-dire de 3. pieds 8. lignes + au lieu de 3. pieds 4. lignes £ qu'il doit avoir dans cet endroit du Brefil pour y battre les fecondes ; alors fon mouvement feroit ralenti, en forte que dans l’efpace d'une heure , il n’y donneroit plus qu'environ 3585. ofcillations au lieu de 3600. qu'il don- noit à Paris, ce qui eft près de 1 5” de différence par heure: de même au contraire que fide Pendule à fecondes de Pa- raïbe, c’eft-a-dire de 3. pieds 4. lignes £ éroit mis en mou- vement à Paris où il doit être de 3. pieds 8. lignes +il accé- lereroit & donneroit 361$. vibrations dans une heure , au lieu de 3600. feulement qu'il donnoit à Paraïbe. Ces obfervations jointes à celles qui ont été faites à ce fujet par plufieurs Sçavans , confirment fuflifamment que plus on approche l'Equateur , plus il faut accourcir le Pen- dule ; mais le rapport qui eft entre ces accourciflemens dif férens qui ne fuivent point la proportion des Latitudes dif férentes aufquelles ils conviennent, nous eft jufqu’à préfent inconnu, quoique plufieurs habiles Phyficiens ayent tâché de nous l’expliquer ; & pour y parvenir il faut encore un grand nombre d’obfervations à ce fujet , qui toutes enfem- ble pourront peut-être dans la fuite , par leurs nombreufes comparaifons, nous découvrir la vraie caufe qu'on cher- che depuis long-tems. L’attention qu'on doit avoir à connoitre la vraie lon- gueur du Pendule propre pour le lieu où l’on obferve, ne {e renferme pas dans les obfervations Aftronomiques, mais elle eft encore effentielle dans une infinité de chofes, com- me pour exemple dans la jauge des eaux courantes , dans la pratique de laquelle on fe fert ordinairement du Pendule fimple dont la longueur fe mefure comme l’on fçait depuis le centre de la balle jufqu’au point de fufpenfion , & cette longueur de Pendule propre pour le lieu où l'on a à faire des obfervations , doit être mefurée avec précifion , puif- que DES SCIENCES 177 que telle fource pour exemple qui à Paris fourniroit 3600. pouces d’eau en une heure de tems , dérerminée par le moyen du Pendule de la longueur vraie, c'eft-à-dire ; de 3, pieds 8. lignes +, fembleroit en fournir 3615. pouces, fion s’y étoit fervi du Pendule de 3. pieds 4. lignes £ tel qu'il le faut à Paraïbe, & ainfi on feroit en erreur de 15. pouces d'écoulement par chacune heure. Je n’ai pü jetter les yeux fur ces obfervations Afronomi- ques que j'ai faites à Paraïbe, fans me reffouvenir d'un acct- dent qui m'y arriva dans le mêmetems. Comme je ne crois pas qu'aucun Auteur ait jamais parlé d’une chofefemblable, on fera peut-être bien aife de le voir ici. Il ya dans le Brefil une efpéce de Serpent d'environ deux pieds de long, & de trois à quatre pouces de tour, que les Portugais appellent Couleuvre à deux têtes, non pas qu’elle ait effe&tivement deux têtes , ainfi que Je l'ai reconnu après lavoir examiné avec foin, elle a feulement au bout de la queue une grof- feur qui a de loin quelque apparence de tête. Les Bréfiliens ou Mazombes, & après eux les Portugais l'ont prife pour une tête d’autant plus facilement qu'ils apprehendent extré- mement cette efpéce de Couleuvre, à la piquure de laquelle ils prétendent qu'iln'y a point de reméde. Ils fçavent même qu'il eft dangereux de la toucher après fa mort, & c’eft ap- paremment ce qui les a empêché de l'examiner. Ils n’aver- tirent que le feul attouchement faïfoit venir la galle ; je négligeai un avis auf falutaire que je regardois comme un effec de leur timidité , mais je fus puni de ma témerité ; car ayant tué plufieurs de ces Couleuvres , jen écorchai auel- ues-unes pour les examiner, & en-conferver la peau; & Er ou trois Jours après je me vis effectivement tout cou- vert de puftules qui étoient remplies d’eau rouffe : elles me durerent long-tems , & même trois mois après je n’en étois pas encore entiérement quitte. Il y a dans le Païs des Coulenvres d’une groffeurextraor- dinaire , j'en tuai une d’un coup de fufil dans les bois entre Paraibe & Pernambouc; qui avoit plus de 1 s.pieds delong & 16. à 18.pouces de tour; elle étoittoute couverte d’écail- 1700. Z 178 MEMoOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE les, noires, blanches , grifes & jaunâtres , qui toutes enfem- ble faifoient un fort bel effet : la morfure de ces Couleu- vres eft venimeufe , néanmoins les Bréfiliens & les Noirs ne font aucune difficulté d’en manger la chair. Cela ne doit pas paroître plus étrange que ce que l’on obferve dans la Manioque ; dont la farine eft laliment le plus commun dans le Brefil, & dont le fuc eft un poifon , comme je lai expérimenté fur un chien baflet à qui en fis boire fur les huit heures du foir moins d'un demi-verre de Cabaret : je Pobfervai pendant quelque tems fans remarquer en lui aucun changement fenfible ; je l’enfermai le foir , & le lendemain matin je le trouvai mort. J’avois fait une infinité d’autres obfervations Phyliques qui ont été perdues avec mes Mé- moires lorfque je fis naufrage. NOUVELLE MANIERE de rendre les Barométres lumineux. Par M.BEerNouLLY, Profeffeur à Groningue. Extraite d'une de [es Lettres écrite de Groningue le 19. Juin T7QZ A Yant Iü dans un petit Livre, qui porte pour Titre, Traités des Baromètres à Notiométres , ou Hygrométres, le Phénoméne extraordinaire qui arriva en 167ç.au Ba- rométre de feu M. Picard , fçavoir cette lumiére entrecou- pée, qu'il apperçut par hazard dans le mouvement du vif argent, en tranfportant le Barométre d’un lieu à un autre dans une grande obfcurité , & duquel il eft encore fait men- tion dans la premiere Edition de l'Hiftoire Latine de l'Aca- démie pag. 312. je lai jugé digne d'y faire quelques réflé- xions ; & ce d'autant plus , que l’Auteur de ce Traité invite. les Curieux à perfeétionner cette découverte, & dit que: dans ce qu’on a déja fait d'expériences fur plufieurs autres Barométres pour voir fi la même chofe arriveroit ; on n’en atrouvé qu'un qui approchât de celui de M. Picard ; c'eft TD ES: «S CAE NCÆE-S 027 179 apparemment celuide M. Caffini, dans lequel M. du Hamel dit avoir été obfervé le même effet quoique moins fenfible que dans l’autre. Je m'y fuis donc appliqué; & après quel- ques médirations faites fur ce fujetaccompagnées des expé- riences néceffaires dont le faccès a répondu à mon fouhait, & conformément au raifonnement que j'en faifois à priori , il me femble que j'ai découvert la véritable caufe de ce Phénomene , & une maniére de faire paroitre une lumiére fort vive dans tous les Barométres fans diftin@ion en tout tems &c.en tout lieu: en forte que voilà une nouvelle efpéce de Phofphore perpétuel, qui ne fe confume pas comme ceux qu'on fait par la Chymie. Avant que de vous expliquer mon raifonnement , je vous dirai que le même foir que je lûs ce Phénoméne dans ce petit Traité, je voulus faire l’effai fur mon Baro- métre qui avoit été en expérience environ quatre femai- nes;je le tranfportai donc dans l’obfcurité, je le balançai d'abord légerement, mais fansaucun fuccès ,n’yremarquant pas la moindre lumiére : mais l'ayant enfin balancé avec violence ( ce que je puis faire fans danger de caffer le tuyau ou de répandre du vif argent , le tuyau étant monté fur uñe planchette , & comme enchañlé, & le vifargent d’en- bas enfermé dans une boëte de buis attachée à la plan- chette & clofe par tout , enforte que c’eft par les pores du buis feulement que l'air entre pour preffer fur le vifargent) j'obfervai que lorfque le vif argent (montant & baiffant avec une grande viteffe par une longue partie du tuyau ) étoittout au bas, il jettoit un éclair fort foible, & qui s'éva- nouifloit dès que le vif argent commençoit à remonter. Cela me fit penfer ,que celle des conjeétures que l’Auteur du Traité allégue pour rendre raifon de ce que cette lu- miére n’avoit encore paru que dans un feul Barométre, fçavoir que pour les autres / ny eât peut-être pas affez detems qu'ils fullent en expérience , ne pouvoit avoir lieu , vû que mon Barométre n'avoit été en expérience que quatre fe- maines ou environ. Après cette expérience je voulus effayer, fi les autres Zi 530 MEMOIRES DE L'AÂCADEMIE ROYALE conjettures de l’Auteur feroient admiffibles : il dit que les autres Barométres n'ont pas fait le même effet, for qgwils ne fuffent pas affex épurés d'air , ou que le vif argent n'en für pas allez pur. Pour m'en affürer, après avoir nétoyé foigneu- fement le vif argent en le forçant de paffer par les pores d’un morceau de peau, je le mis encore dans un récipient dont je tirai l'air , & l’y laïffai pendant vingt-quatre heu- res afin de lui donner le tems de laïffer évaporer les par- ticules d'air mêlées dans le vif argent. Après Pavoir ainfi purgé, jen remplis un tuyau à l'ordinaire avec toute la précaution poflible pour empêcher qu’il n’y demeurât quel- que petite bulle d’air ; mais le Barométre ainfi monté n’en fit pas plus d'effet. Car quelque violent balancement que je donnaffe au#if argent , à peine pouvois-Je tirer cette foible lueur qui fe montroit & s’'évanouifloit prefque dans le même inftant. J'ai lafé le Barométre en cet état pour l'ufage ordinaire; ayant jugé être dommage de le démonter après avoir pris tant de peine & de foin à le monter fi exaétement, que je fuis affüré , que ni dans la partie vuide du tuyau ni parmi le vif argent, il n’y a pas la moindre chofe d’air groflier. J'ai donc conclu de cette feconde expérience , que les autres conjeltures de l’Auteur du Traité n’étoient pas vala bles non plus; ou du moins, que ni la purification du mer- cure ni le vuide parfait de la partie d’enhaut du tuyau , n’é- toient pas la principale caufe de l’apparition de cette lumiére. Cela étant, j'en ai cherché la véritable caufe, & voici comme je me fuis pris dans mon raifonnement. Comme la lumiére ne paroït dans chaque balancement , que lorfque le vuide fe fait, c’eft-à-dire , dans la feule defcente du vif argent, jai compris que quand le vif argent defcend , il en doit fortir & remonter au même inftant une matiére très-déliée. & très-fubtile pour occuper & remplir en par- tie l’efpace du tuyau que le vif argent quitte : je dis en partie ; parce qu’il faut bien croire , que les pores du verre étant fans doute plus amples que ceux du vif argent ( com-. me il paroit par la légereté de l'un & k grande pefanteur- DES SCIENCES ES £ de l’autre, ) il entre en même tems par les pores du tuyau une autre matiére bien plus fubtile que l'air groflier , mais bien moins que celle qui fort du vif argent : & cés deux matiéres fe mêlant incontinent , rempliffent Pefpace quele: vif argent leur céde par fa defcente. Il n'importe quels noms vous donniez à ces deux matiéres: vous pourrez, sil vous plait, appeller avec M. Defcartes , celle qui pé- nctre les pores du tuyau, la matiére du fecond élement ;. ou les globules céleftes ; & celle qui eft fi fine qu’elle fort du vif argent , la matiére du premier élement. En effet M. Defcartes a affez bien montré dans fes principes de Philofophie Part. IV. art. 58. que les particules du vif argent laiffent entrelles des angles fi étroits , qu'ils ne peuvent être remplis que par lamatiére la plus fine, c’eft-à-dire, par celle du premier élement. Or vous fçavez comment M. Defcartes explique la pro- duétion de la lumiére , la faifant confifter dans le mouve- ment très-rapide de la matiére du premier élement, affem- blée feule dans quelque efpace , & dans l'effort qu’elle fait fur les globules céleftes : je dis donc, que pendant que les particules du premier élement font difperfées dans ces pe- tits interftices, & comme opprimées par les particules ter- reftres du vifargent, elles ne peuvent pas acquérir ce mou- vement rapide , ni agir &c faire effort conjointement pour produire de la lumiére ; mais aufli-tôt que par la defcente du vif argent elles en fortent en abondance, elles vont s'unir enfemble:; & dégagées ainfi d’abord de toute autre matiére , elles prennent ce cours rapide qui leur eft ordi, maire quand elles font libres; &. par l'effort qu’elles font fur les globules céleftes quiviennent à leur rencontre, elles produifent cette lumiére. De-là fe voit la raifon pour la- quelle cette lumiére ne s’obferve que dans.la defcente du mercure ; car quand il remonte, bien-loin qu'il en forte de la matiére du premier élement; il y rentre plutôtune partie- de ce qui en étoit forti dans fon abaiffement précédent - & le refte eft chaffé avecles globules céleftes hors dutuyaw parlespores du verre. Voiläencore la raifon de laquelle- ii, Le 182 MEMOIRES-DE L'ACADEMIE ROYALE cette lumiére accompagne toujours le haut du mercure defcendant , & qu’elle eft comme attachée à fa fuperficie fupérieure ; pourquoi la lumiére produite dans une defcen- te n'eft pas durable; & pourquoi chaque defcente finie; cette lumiére finit & s’évanouit aufli-tor. Cela vient de ce que les particules du premier élement qui étoient unies en fortant du mercure, & ayant fait tant foit peu de cheminen s’éloignant de la furface du mercure, font d'abord diflipées & difperfées par la foule des globules céleftes , qui avec leur impétuolté les accablent & leur ôtentainfi toute la force de produire cet effet de lumiére: de forte qu'elle ne peut durer qu’à mefure qu'il fort du mercureune continuelle & nouvelle matiére du premier élement, pour fuccéder à celle qui fe diflipe auffi continuellement, à peu près de même que la flamme d'une chandelle fe diflipe & fe renou- velle à tout moment. Il eft donc manifefte que la lumiére en queftion ne peut durer tout au plus qu’autant que dure chaque defcente du vif argent. Il me refte à faire voir le principal : fçavoir pourquoi cette lumiére ne fe montre pas dans tous les Barométres , & pourquoi elle na été obfervée jufqu’à préfent que dans’ deux ou trois : comme aufli la maniére de remédier à cela, pour la faire paroître infailliblement dans tous les Baro- métres en tout tems, & avec une vivacité furprenante , pourvû qu’on le faffe dans un lieu fort obfcur: l’un & lautre fortifiera & confirmera parfaitement bien les raifons dont je me fuis fervi dans l'explication que je viens de faire de la caufe de ce Phénoméne. J'ai remarqué que fi on expofe du vif argent dans quel- que vafe à Pair libre , on en trouvera au bout de quelque tems la fuperficie , par où l'air le touche , toute trouble & couverte d'une pellicule très-mince , laquelle étant ôtée par le moyen d’une plume nette, la premiere clarté re- vient à la fuperficie , & fera derechefpolie comme un mi- roir ; mais fi l’on laïffe le vif argent expofé à l'air, une autre pellicule d’abord femblable à une toile d’Araignée qui s’é- paiflit avec le tems, s’étendra par-deflus. Que fi on l’exa- DES SCIENCES. 183 mine bien avec le Microfcope , on verra qu’elle reffem- ble beaucoup à de l'argent battu en feuille : en effet ce n’eft autre chofe qu'un tiflu très-fin d’une efpéce de moufle ou de poil folet , qui fe forme de petits filamens , lefquels ayant été féparés du vif argent par l'agitation continuelle de l'air, & ne pouvant pourtant pas fuivre fon mouvement, retombent avec d’autres ordures qui fe trouvent toujours dans l'air fur la furface du vifargent ; & s’entrelaffant peu à peu, compofent cette pellicule. Nous remarquons la même chofe dans toutes fortes de liqueurs, lefquelles fi on les laïffe repofer en forte que Pair Les puifle fécher pat- deflus , fe couvrent enfin d’une peau plus ou moins épaifle felon la confitution des corpufcules qui s’exhalent & re- tombent enfüite fur les liqueurs. Tout cela bien confidé- ré , Je dis que c’eft cette pellicule qui empêche Papparition de la lumiére dans les Barométres qui ont été remplis à la maniére ordinaire : voici comme je conçois la chofe. Lorfqu'on fait le Barométre on prend un tuyau fcellé her- métiquement par un bout, & par lautre on verfe du vif argent qui tombe goute à goute tout le long du tuyau , en forte que chaque goute en pénétrant & en fendant l'air depuis le haut jufqu’en bas , en efluye, pour ainfi dire, & entraîne tout ce qu’il y a d'impur ; ce qui fair que dans ce moment employé à couler le long du tuyau , le vif argent fe charge plus de cette moufle qu'il ne feroit en deux ow trois jours , étant fimplement expofé à l'air. Ce que je viens. - de dire, eft fi vrai , que fi vous laiffez tomber de la hauteur d'un pied feulement une goute de vif argent le plus nétoyé & purifié qu'il foit poffible , dans un vafe où il y en ait aufle de fi bien purifié , que la fuperficie en foitunie & polie com- me la glace d'un miroir ; vous verrez que la goute tom- bant fur cette furface polie , la ternira à l'endroit où elle entrera dans la mafle du vif argent , & y laiffera une tache vifble ; marque certaine que la goute , toute nette: qu’elle étoit, avoit été infe@ée de limpureté de l'air. C’eft ainfi que les goutes du vif argent verfé dans le tuyau , fe: couvrent de cette pellicule en coulant; mais par la chûte 184 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE des goutes les unes fur les autres, & par la preffion du vif argent , ces pellicules particuliéres crévent aïfément pour permettre une continuité dans le vif argent; & ces ordures ne pouvant pas s’accorder ni avec le mouvement ni avec la figure des particules du vif argent, font obligées comme des excrémens, de fe retirer hors de la fubflance intime du vif argent, & de fe mettre par tout à côté entre la furface concave du tuyau & la convéxe du mercure. Voilà donc toute la colonne mercuriale enveloppée de cette peau très-déliée comme d’un épiderme. Certes il y a beaucoop d'apparence que la chofe fe pafle, conmme je viens de dire; car le tuyau étant rempli de la forte, fi on vient à le ren- verfer pour en faire le Barométre en bouchant l'ouverture avec le bout du doigt, jufqu’à ce qu’elle foit enfoncée dans le vif argent contenu dans le vafe; on obfervera enre- tirant le doigt , que le mercure en defcendant dans le tuyau, laiffera en arriére des reftes de cet épiderme attachés aux côtés du verre de la partie vuide du tuyau , en forme d’écume de plomb fondu. 11 r’eft donc pas difficile de concevoir que le Barométre étant fait, la fuperficie horifontale & fupérieure du Cylindre mercyrial , doir être couverte d’une pellicule plus épaife que nulle autre partie de la fuperfcie de ce Cylindre, parce qu'elle s’épaiflit en partie par ces reftes qui demeuroient attachés à k partie vuide du tuyau ; & qui fe détachant en- fin, retombent fur le fommet de la colonne mercuriale ; & en partie par celles qui font au-deffous & qui font pouflées en haut par la pefanteur du mercure. Donc pour derniére conclufon , il me fuffit de dire; que cette pellicule qui occupe le deffus du mercure, quel- que déliée qu’elle paroifle à nos yeux, couvre fi bien les pores de la fuperfcie du vif argent, qu'elle ferme ou entié- rement ou en plus grande partie le paflage à la matiére du premier élement , qui feule par fon élancelement peut pro- duire de la lumiére : d’où il s'enfuit que dans les Baromé- tres remplis à l’ordinaire il n’en paroîtra point du tout, ou fort peu à force de grands balancemens, comme dans le mien DES SCIENCES. 18$ mien dont j'ai parlé ci-deflus. On ne doit pas trouver étrange , qu’une pellicule fi mince & fi délicate puifle em- pêcher les particules du premier élement de fortir des pores du vif argent, ou du moins de fortir avec tant d’a- bondance & de véhemence, vû que nous voyons tous les jours que lé vif.argent même pale aifément par les pores des peaux de prefque tous les animaux; mais que le paffage fe ferme entiérement , fi on n’en fépare pas cette taye ten- dre que les Médecins appellent Epiderme ou cuticule; quelle contradiétion y a-t-il donc qu'une pareille chofe ne puifle arriver dans notre fujet ? Tel eft jufqu'ici le raïifonnement que je faifois fur la caufe d’un effet fi étrange. On n’eft jamais mieux affüré qu'on ne s'eft pas trompé en raifonnant fur des chofes de Phyfique , que lorfque les expériences faites enfuite exprès, s’accordent avec les conclufions qu’on avoit tirées par le feul raifonnement. Or fi jamais raifonnement 4 priori fut confirmé dans toutes fes circonftances par le fuccès des expériences , Je puis dire que le mien a eu ce bonheur: car voyant bien qu’en conféquence de mes raifons, il faut que cette lumiére dans le Barométre foit très-vigoureufe, fi par quelque moyen on peut empêcher que la colonne mercuriale ne fe couvre de cet épiderme : pour ce fujet je me fuis avifé de deux maniéres, qui toutes deux ont très- bien réufli. : Voici la premiere. Je pris un tuyau de verre d'environ trois pieds & demi de long , ouvert par les deux bouts, que jeus foin de bien dégraifler & nétoyer par dedans, pour n’y laïffer aucune ordure ni humidité ; en ayant longé un bout dans le vif argent contenu dans un vafe Éée d'une petite hauteur , mais le plus obliquement que le bord du vafe le permettoit, en forte que l’angle quele tuyau faifoit avec l’horifon , comprenoit environ dix-huit à vingt dégrés ; cé qu'ayant fait , J'appliquai ma bouche à l'autre bout du tuyau, & je commençai à fuccer ; de certe maniére je fis aifément monter le vif argent jufqu’au haut, & en ayant même attiré quelques goutes dans ma bouche, 1700. . Aa 186 MEMOIRES DE LAcADEMIE ROYALE je fis figne à un de mes Ecoliers que avois inftruit à cela, de boucher promprement avec le doigt le bout d’en-bas enfoncé dans le vifargent. Il faut dire ici en paffant que j'ai acheyé d'élever le vif argent en fucçant d’un feul trait, de peur que fi je le faifois par reprife , il n’entrât dans le tuyau quelque peu d’haleine ou de falive. Le tuyau étant donc rempli de cette maniére , pendant que mon Ecolier tenoit fermé le bout d’en-bas avec le doigt, je fermois celui d’en-haut avec du ciment dont je me fers pour con- folider les verres caffés ou fendus. Après l'avoir bien fermé je dis à cet Ecolier d’ôter fon doigt de deffous le bout qui trempoit toujours dans le vif argent ; j'érigeai enfuite le tuyau perpendiculairement , & le vif argent defcendit à fon équilibre comme à l'ordinaire; mais J'eus le plailir de voir qu'il ne laifloit point d’écume attachée dans la partie vuide du tuyau, comme font les tuyaux remplis à la ma- niére ordinaire : ce que Je pris d’abord pour un bonfigne. En effet je prévoyois bien que cela devoitarriver; car de la maniére que le tuyau avoit été rempli, on voit bien que l'air n'a point touché le vif argent en montant dans le tuyau , fi ce n’eft feulement la premiere goute qui étoit comme le bouclier, à la faveur duquel tout le refte de la colonne mercuriale pouvoit monter fans prendre la moiïn- dre atreinte de l'air; mais cette feule goute , outre qu’elle ne pouvoit pas être beaucoup infettée , n'ayant pas fendu & pénétré l'air avec violence, comme fait une goute qui tombe , ne demeura pas dans le tuyau : car, comme j'ai dit, j'attirai quelques premieres goutes du vif argent jufque dans ma bouche. Ainf j’étois fur d’avoir un Barométre dont la colonne mercuriale étoit toute dénuée de cer épiderme fi funefte aux autres : Cependant pour faire l'expérience plus com- modément, fans encourir le danger de répandre du vif argent en le tranfportant ou balançant, j'ôtai le tuyau hors de ce vafe large, renant le bout d’en-bas fermé avec le doigt, & je le mis dans un vafe plus étroit & plus profond à moitié rempli de vif argent, Tout étant achevé, j'attem- DES SCIENCES ! 187 dois la nuit vec impatience , laquelle étant venue > Je pris mon Barométre ainli préparé , le tuyau à la main gauche , & le vafe dans lequel le bout d’en-bas trempoit à la main droite ; auffi-tôr que Je fus dans l’obfcurité ; voilà que J'ap- perçüs déja, fans avoir encore balancé le Barométre des éclairs fort vif, lefquels étoient caufés par un petit bran= lément qui étoit imprimé à la colonne mercurile par le mouvement de tranfport : mais quand je commençai, quoique fort doucement, à balancer le Barométre pour donner au vif argent une Dee un peu plus con- fidérable qu'il n’avoit par le feul mouvement de tranfport, il paroïfloit à chaque defcente une lumiére fi exquife, qu’el- le éclairoit les objets les plus proches, en forte que je pou- vois aflez bien difcerner à la faveur de cette lumiére , les lettres d’une médiocre écriture à Ja difancé d’un pied. Je Vous avoue que j'eus un grand contentement de voir que Févénement répondoit ff bien à mon attente ; d'autant plus que ce nétoit pas une expérience faire par hazard, mais que j'avois faite de propos déliberé, me fondant fur les principes de monraifonnement. Il fut encore direque cette lumiére paroifloit fi aifément, que les balancemens les plus infenfibles, qui à peine faifoient monter & defcen- dre le mercure de Pépaifleur d’un couteau , ne laïfloient pas de produire des éclairs très-vifs : les jours fuivans’ jai réitéré cette expérience avec trois ou quatre autres tuyaux que j'ai remplis de là même maniére; mais tous oht Air également leur effet avec beaucoup'de vivacité, fans avoir jamais manqué ; ce qui me Pit avancer hardimént, que tous les Barométres préparésainfi qué j'ai dit, montreront entout tems le Phenoméne arrivé dans'celui de M. Picard, & peut-être bien plès Fivémeniui 5, see til sui sl ge Des "La fRconde mäñtére dont je me ais” avifé pour remplit le tuyautde vif argent fans que KR éolonme mercutiale” {ot Sonvérte delà pellicule füfdite ; là voici en peu de mêlé. Je pris un tuyau bien nétoyé &ouvetr par un bout feule= ment, que je plongeai dans du vif argent conréng dans un vale ;'i&e que j'érigeal perpehidicutarement? dé forte Aai] BY 138 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qu'il n’y avoit encore que de l'air dans le tuyau. Pour tirer Pair hors du tuyau, voici ce que je fis. Je couvris le tuyau & le vafe dans lequel trempoit le bout ouvert, avecunre- cipient de verre fait en forme de cloche, qui s’étendoit par enhaut en une longue queue creufe par dedans , pou contenir le tuyau , comme le foureau contient la lame de l'épée ( ce recipient eft fait exprès, pour faire ces fortes d'expériences avec le Barométre } j'appliquai donc le re- cipient avec le tuyau & le vafe au-dedans, fur l'afiéte de cuivre de la pompe pneumatique ; par le moyen de laquel-' le je tirail'air du récipient, & ainfi en même tems celui du tuyau, qui ne pouvant fortir par le bout d'en-haut qui éroit fermé , fortoit avec un petit bouillonnement par le bout trempant dans le vif argent. Après avoir tiré Pair du récipient & du tuyau le plus exaétement qu'il m'étoit pof fible , je le laïfai rentrer dans le récipient, mais ne pou- vant rentrer dans le tuyau à caufe du vif argent du vafe qui l'en empêchoit, il poufa par fa preflion le vifargent dans le tuyau à la hauteur de vingt-quatre à vingt-cinq pou- ces, en forte qu'il en manquoit peu qu'il ne fut monté à la hauteur ordinaire du Barométre ; ce qui marquoit que l'air avoit été affez foigneufement tiré du récipient. Le vif ar- gent étant ainfi monté, j'ai jugé qu'il devoit être tout-à-fait dépouillé de fon épiderme , vû que le haut même de la colonne mercuriale n’avoit pû toucher à l'air, fi ce n’eft à ce peu qui étoit refté dans le tuyau , mais qui à caufe de fon extrême raréfa@ion , n’avoit pü en rien altérer le haut du vif argent, & beaucoup moins le refte de la colonne mercuriale , de laquelle la moindre partie n’avoit point été expofée à l'air en montant. En effet quand je fis l'expé- rience la nuit fuivante , la lumiére parut dans ce tuyau avec. la même force & de même que dans l'autre préparé de la maniére précédente. Par où l’on voit encore , que: Fair qui reftoit dans la partie vuide du tuyau , ne pouvoit point du tout empêcher que la lumiére ne parût; & qu’ain- li, fielle ne paroït pas, dans les Barométres remplis à la maniére ordinaire ; ce n’eft pas parce qu'ils ne font pas épu. DES SCIENCES. 189 rés d'air, mais uniquement parce que le vif afgent conte- nu dans le tuyau, eft enveloppé dans cette pellicule de maniére qu’elle ferme le paflage à la matiére du premier élement. Cependant j'ai trouvé par expérience qu'il n’y a enco- re rien de nuiïfible à l'apparition de cette lumiére , que l'humidité : car après avoir continué pendant quelques femaines de balancer tous les foirs un des Barométres pré- parés felon la premiere méthode , pour voir s'il y avoit quelque différence , foit dans la vivacité, foit dans d’au- tres circonftances ; & n'y ayant pù remarquer la moindre différence , à ma grande fatisfaétion , je m’avifai de verfer un peu d’eau dans le vafe d’en-bas pour en couvrir la fu- perficie du vif argent qui y étoit contenu, & puis j’élevai le tuyau tout doucement jufqu'à ce que le bout d’en-bas fortant du vif argent du vafe , parvint à Peau ; mais aufli- tôt que quelques goutes d’eau furent entrées dans le tuyau, je le replongeai dans le vifargent , & ces goutes montant en-haut couvrirent le fommet de la colonne mercuriale. J'étois done curieux de voir fi ce peu d’eau n’empêcheroit pas l'apparition de la lumiére : effe@ivement elle Fempê- cha fi bien qu'avec les plus violens balancemens, ik n’y eut pas moyen de produire la moindre trace de lumiére. J'ef- faïai après cela la même chofe avec l’efprit de vin rec- tifié, dans la penfée qu'étant inflammable lui-même , il aideroit peut-être plütôt à produire notre lumiére qu'à la détruire : mais en vain , car quelques goutes d’efprit de vin n’eurent pas plütôt occupé le fommet de la colonne mer- curiale , que la lumiére qui paroïfloit auparavant avec tou- te la vivacité pofñfible aux moindres fecoufles du tuyau, ceffa de paroïtre même aux plus grands balancemens. D'où je conclus que toute humidité & toute matiére hé- terogéne , fous ou boucher les pores du vif argent pour empêcher Pélancement de la matiére du premier élément, comme fait la pellicule ; ou du moins arrêter en partie.la grande rapidité avec laquelle le premier élement doit être mû pour exciter de la lumiére : car il eft vifible qu'une Aaïü] 1700. 12. Mai. 190 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE matiére étrangére occupant déja un peu d’efpace , immé- diatement au-deflus de la colonne mercuriale , là où fe doit faire le rendez-vous de la matiére du premier élement pour fe joindre enfemble , il eft , dis-je , vilible , qu’elle ne peut pas fe mouvoir conjointement , ni par conféquent avec la rapidité qui lui eft ordinaire , quand elle eft feule , fans pañler au travers des pores d'une matiére plus groffiére. Je n'arrête ici, Monfieur , pour vous donner le loifir d'y penfer aufli, afin que fi vous trouvez que mes penfées ayent quelque vrai-femblance , vous én fafliez part comme j'ai dit à l’Académie : je fouhaiterois que quelqu'un des Académiciens prit la peine de faire un ou deux Barométres de lune & de l’autre façon , & qu’on en confrontit l’effet avec celui du Barométre de feu M. Picard: jen appren- drai le fuccès avec plaifir : mandez-moi aufli fi vous fçavez de quelle maniére a été rempli ce Barométre de M. Picard ; car l’Auteur du petit Traité que j'ai allegué , dit que c’eft un tuyau recourbé. Or comme il eft difhcile de remplir les tuyaux recourbés par la maniére ordinaire , je commence à foupçonner qu'il a peut-être été rempli par le moyen du fuccement, felon ma premiere méthode , ou par le moyen de l'extraction de Pair , felon la feconde , ou par une fem- blable ; fi cela étoit, il donneroitun grand poids à mes pen: fées. Je fuis, &c. OBSERVATIONS SUR LES DISSOLVANS du Mercure. . À Par M HoMBERG. Uoique les efprits acides dont on fe fert pour diffoudre les métaux, ne foient que de deux fortes , fcavoir des eaux fortes & des eaux régales , cependant à confidérer les métaux par rapport à ces diffolvans, on les peut diftribuer DES SCIENCES. 19F en trois différentes claffes , fçavoir en ceux qui fe diffolvent par l'eau régale , en ceux qui fe diffolvent par l’eau forte, & en ceux qui fe diflolvent par Pun & par l’autre de ces deux diffolvans ; l'Or & l’Etain fe-diffolvent feulement par l’eau régale ; PArgent &le Plomb ne fe diffolvent que par l’eau forte, & le Fer & le Cuivre fe diffolvent également par l’une & par l’autre; le mercure a été crû n'être diffoluble que par l’eau forte feulement. Cependant en faifant réflé- xion- aux obfervations fuivantes , on verra que le mercure doit être rangé plütôt dans la claffe de ceux qui fe diffolvent par les deux diffolvans , que dans la claffe de ceux quine fe diffolvent que par les feules eaux fortes. Il eft vrai que le mercure étant mis fans préparation dans de Peau régale, ou dans lefprit de fel, qu'il ne s’y diffout pas tout-à-fair de la même maniére qu’il fait lorfqu’on le met dans l’eau forte ou dans lefprit de Nitre , mais en lui donnant quelque préparation auparavant; il s’y diffoudra même plus promptement qu'il ne fait ordinairement dans. les eaux fortes , & lorfqu’on doune un certain degré de for- ces aux eaux régales, il s’y diffoud fans aucune préparation mais dans une longue digeftion. Parmi les effais que j'ai fait pour adoucir les efpritsacides, jai verfé des eaux régales fur les métaux qui ne fe diffolvenc par les eaux régales, & j'ai verfé des eaux fortes fur es métaux qui ne fe diffolvent pas par les eaux fortes , je les ai mis dans une longue digeftion pour n'éclaircir de: certains faits dont je doutois pour lors, & en cette occafon j'ai verfé fur une once de mercure coulant, quatre onces: d'efprit de fel bien déflegmé, c’eft-à-dire dont le poids. comparé à celui de l’eau de la riviére, étoit comme 4. à 3, le mercure s’y eff calciné pendant les premieres 3. fe- maines en une chaux couleur d'ardoifes , laquelle s’y eft enfuite diminuée peu à peu , jufques à ce qu'après cinq mois de digeftion, j'ai vü que ce fédiment noir du mercure: ne s’eft pas diminué davantage ; j'ai ouvert pour lors le- vaiffeau , j'ai lavé ce fédiment , & après l'avoir féché , il s’en eft trouvé un peu plus d’un gros & demi; j'ai verfé 192 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE du nouvel efprit de fel deflus , & je l'ai remis en digeftion ; il ne s’eft point diffoud: je l'ai lavé encore & je l'ai mis en digeftion avec de l’efprit de Nitre qui l'a entiérement dif- foud. Cette derniére diffolution a blanchi le cuivre de la mê- me maniére que les diffolutions ordinaires du mercure font accoûtumées de faire , ce qui marque affez que cette chaux noire étoit encore du mercure , mais parce que l'efprit de {el n'a pas diffloud ce dernier gros & demi de mercure, après avoir difloud tout le refte d’une once entiére , il ya à préfumer que le compofé du mercure n’eft pas uniforme; ce que je prouverai dans un autre tems par des obferva- tions fort convaincantes, & qui conviennent parfaitement avec celle-ci. ; J'ai fait depuis les mêmes effais avec les eaux régales compofées, fçavoir d’eau forte avec du fel Ammoniac, d’efprit de Nitre avec de l’efprit de fel , & de lefprit de Nitre cohobé fur du fel commun , elles ont produit à peu près les mêmes effets, les unes plütôt les autres plus lente- ment; celle de l’eau forte & du fel Ammoniac a agi avec ébullition , toutes les autres n’ont donné aucune marque d’ébullition , elles ont toutes également commencé par cal- ciner le mercure , & l’ont diffoud enfuite ; je crois que lé- bullition dans la premiere eau régale n’eft pas provenue de la diflolution du mercure , mais plütôt du fel Ammoniac qui entre dans fa compofition , car nous obfervons toujours une ébullition , quand on met du fel Ammoniac dans l’eau forte, qui dure quelquefois pendant plufieurs jours , quoi- qu'on n'y ait mis aucun métail ; cette ébullition n’eft d’ordi- naire pas accompagnée d'effervefcence. Si l’on veut que la diffolution du mercure dans l’eau régale fe faffe plus promptement, il faut diffoudre dans cet- te eau régale un peu de fublimé corrofif avant que d’y mettre le mercure coulant. Apparemment le mercure du fublimé étant diffoud & mêlé dans l’eau régale en difpofe les pointes d’une maniére que le mercure coulant les re- çoit plus aifément & en eft plütôt pénétré , car on y ga- gne "er DES SCIENCES: 193 gne plus d’un tiers de tems; ces deux diflolutions fe fai- fant fucceflivement dans la même liqueur , ne fe précipi- tent point, au lieu que chacune ayant été faite féparément & confondues enfuite , fe précipitent ; mais en. les remet- tant en digeftion pendant quelque tems, la liqueur reprend fon précipité, & le tout redevient une diffolution fort claire. La raifon de cette précipitation eft apparemment que les deux diffolvans étant de différentes natures ; leurs pointes qui tenoient lemercure difloud, changeant de figure pendant leur confufion, lâchent pour un tems le corps dif- foud,mais ces pointes s’étant unies enfemble par la digeftion, produifent un diffolyant nouveau capable de redifloudre le mercure qu'elles avoient lâché, ou qui s'étoit précipité. Dans la fublimation du mercure en fublimé corrotif ,ilfe fait une diflolution parfaite du mercure par les fels acides du fel commun & du vitriol ; qui font un vrai diffolvant régal , & même onen peut retrancher le vitriol ;lemercure ne laiffera pas de fublimer en corsofif par le feul acide du fel commun , comme plufieurs Artiftes le font en y mêlant feulement une fimple terre argileufe pour empêcher le fel commun de fe fondre; en forte que l’on pourroit dire que le vitriol ne fert dans cette opération que feulement d’in- terméde terreux, comme fait le Bol ou l'Argile. - J'ai dit qu'il fe fait une vraie diflolution du mercure en le fublimant par le fel commun, ce qui fe prouve aifément en mettant du fublimé corrofif dans de l’eau commune où il fe fond de la même maniére que les Cryftaux d'argent & le vitriol s'y fondent, qui font des vraies diflolutions d'argent & de cuivre, & il s’y précipite de même par les fels Alcalis foit volatils ou lixiviels. Il fe trouve une différence très-confidérable dans les diflolutions du mercure faites par lefprit de fel commun ;! & dans celle qui fe fait par fa fublimation avec le fel com- mun; quoique dans l’une & dans l’autre l'agent & le pa- tient foient parfaitement les mêmes ; {avoir du mercure coulant & les fels acides du fel commun, je fuppofe une 1700. Bb 194 MEMOIRES DE L'ACADEMIE Rovyarr fublimation du mercure fans falpêtre & fans vitriol , com: me il y en a. Cette différence confifte en ce qu’on employe quatre ou cinq mois pour diffoudre une once de mercure par lef- rit de fel, au lieu qu'il ne faut pas plus d'une heure pour diffoudre la même quantité de mercure en le fublimant avec le fel commun. Il y a beaucoup d'apparence que cette différence pro- vient de ce que le mercure mêlé avec le fel commun & expofé au feu, s’éleve en fumée , c’eft-à-dire en parcelles très-petites , lefquelles érant de toutes parts enveloppées & attaquées à la fois par l'acide du fel , qui monteen même tems avec la vapeur du mercure , il fe trouve diffoud dans un moment, par la raifon que toute la mafle du mercure ayant été réduite, pour ainfi dire, en fuperficie par Péva- poration, laquelle ayant été touchée de toute part, & en même tems par le diffolvant qui a monté en vapeur avec lui, il n’a pas fallu plus de tems pour diffoudre toute la maffe du mercure, qu'il en a fallu pour diffoudre un feul des ato- mes du mercure qui compofoient la vapeur ; mais dans la diflolution par l’efprit de fel , il w’arrive pas la même chofe, une once du mercure coulant y eft en une mafle au fond d'une bouteille avec un diffolvant liquide qui le furnage. Ce mercure n’eft touché par le diflolvant qu’en untrès-petit en- droit à la fois, & comme un diffolvant n’agit que feulement fur la fuperficie qu'il touche, il lui faut beaucoup de tems pour difloudre une fuperficie après l’autre de la mañle à diffoudre , particuliérement lorfque le diffolvant agit fort foiblement, comme Pefprit de fel fait fur le mercure. Le mercure ayant été réduit de cette maniére en fubli- mé corrofif, il fe diffoud fort aifément par les eaux réga- les, apparemment parce que ce font des diffolvans qui font de la même nature du fel avec lequel il s’eft fublimé em premier lieu; il fe diffoud aufli par les eaux fortes mine- rales, fçavoir par lefprit de nitre , par l’efprit de vitriol & par l’eau forte commune, car les eaux fortes dans lefquelles DES SCIENCES. 19$ on met du fublimé corrofif, deviennent eaux régales par Tefprit du fel commun qui s’eft coagulé avec le mercure dans fa fublimation. Mais ce qui paroît étonnant , c’eft que les acides des vé- gétaux qui diflolvent le fer, le cuivre , le plomb, &c. que lon peut appeller à caufe de cela eaux fortes végétales, comme font le vinaigre diftillé & autres, ne diflolvent pas le fublimé corrofif , même en les faifant bouillir enfemble £ à moins qu'on n’y mêle du fel Ammoniac, ce qui les chan- ge en quelque façon en eaux régales ; peut-être parce qu'é- tant des acides très-foibles, comme on le peut voir par leur poids qui nexcéde prefque pas le poids de l’eau de la riviére , il a été befoin de les fortifier par un fel à peu près de la même nature que celui qui avoit diffoud le mercure dans fa fublimation ; cependant comme le fublimé corrofif fe diffout aifément dans l’eau commune, il paroït qu’il n’eft pas befoin d'un acide nouveau pour diffoudre le fublimé corrofif, & que par conféquenr le vinaigre diftillé contient en lui certaines parties qui empêchent cette diffolution, lef- quelles font vrai-femblablement des parties grafles ou hui- leufes qu’il a retenu du vinaigre qui en abonde, le fel Am- moniac abforbe non-feulement les parties grafles, & met la liqueur dégraiffée du vinaigre par-là en état d'agir libre- ment fur le fublimé, comme feroit à peu près l'eau com- mune , mais il aide encore le vinaigre de le difloudre plus promptement par fon homogeneité avec le fel contenu dans le fublimé corrofif. Une des raifons pourquoi on a cru que le mercure ne fe diffoud pas par les eaux régales , eft que la diffolution du mercure faite par les eaux fortes , fe précipite par le fel commun ; mais examinons cette obfervation , & nous trou- verons le contraire de ce qu’on en a voulu conclue. Diffolvez un gros de mercure dans un gros & demi d’eau forte, verfez dans cette diflolution de l’eau falée,le mer- cure fe précipitera en une bouillie blanche ; ce précipité érant édulcoré & fec, il s’en trouve la moitié environ du Bbij 196 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE poids du mercure que l’on avoit difloud , Le refte du mer- cure demeure diffoud dans les lotions , verfez dans ces lotions de l'huile de tartre, & vous aurez le furplus de votre mercure en précipité rouge, ou verfez-y de l’efprit de fel Ammoniac, & vous l'aurez en précipité blanc. Puis diffolvez un gros de mercure dans trois gros ou dans une demi-once d’eau-forte , verfez dans cette diffolu- tion de l’eau falée tant que vous voudrez, le mercure ne fe précipitera pas , verfez dans ce mélange de l'huile de tartre ou de l’efprit de fel Ammoniac, vous aurez des pré- cipités comme dans lobfervation précédente. Ces deux obfervations qui paroiffent fi différentes dans les mêmes fujets , ne fervent qu’à nous faire connoître qu'il faut plus d’eau régale que d’eau forte pour diffoudre la même quantité de mercure. : Dans la premiere obfervation, nous avons mis un gros & demi d’eau forte fur un gros de mercure , ce peu d’eau forte eft capable de diffloudre ce mercure, mais l'addition du fel commun, ayant changé cette eau forte en eau régale , qui difloud plus difficilement le mercuraique ne fait l'eau forte, il ne s’en eft pas trouvé aflez pour diffoudre cette même quantité de mercure , aufli voyons-nous qu’il ne s’en préci- pite que la moitié environ , l’autre moitié du mercure refte diflout dans le mêlange de l’eau forte & du fel commun. SUTT'E D ES. 0 B S ER ANTIDONNS fur les diffolvans du Mercure. Par M. HOMBERG. : fé montré dans mon dernier Mémoire que les acides des mineraux de quelque nature qu'ils foient, diflolvent le mercure : j'ai remarqué aufli que le mercure fe diffoud plus aifément dans quelques-uns de ces acides, & plus dif- ficilement dans d’autres , & même que Les uns le diffolvent DES SCIENCES. A". 197 éntiérement fans laifler aucun fédiment, & que les autres n’en diffolvent qu'une partie ; laiffant toujours un fédiment noiratre & indifloluble par cet acide , mais qui eft prompte- ment diffoud par d’autres acides; ce qui m’a donné occafion d'avancer que le mercure pourroit bien ne pas être homo- géne dans toutes fes parties : j'ai pronris de rapporter les au- tres obfervations que je pourrois avoir pour confirmer cette conjeture. Ces obfervations font tirées en partie d’une opération longue & pénible, que j'ai faite plufieurs fois pour purifier exactement le mercure; je rapporterai ici l'opération entiére pour mieux juger de la preuve que je prétends en tirer. Faites du régule de Mars felon les maniéres ordinaires , employez-y 9 parties d’Antimoine & 4 parties de fer , & purifiez le 3 ou 4 fois par le falpêtre ; fondez 2 parties de ce régule avec une partie de cuivre rouge fans y mettre de: fondant, le nouveau régule fera gridelin. Puis faites un Amalgame de 3 livres de mercure commun reflufcité du Cinabre, & d’une livre de ce régule de Mars & de Venus; ce qui fe fera aifément de cette façon. Chauffez dans un grand mortier de fer votre mercure jufques à le faire frémir, & en même tems fondez votre régule dans un creufet, puis couvrez le mortier d’an cou- vercle de bois, qui ait au milieu un trou dela groffeur en- viron d'un doigt; verfez votre régule fondu par ce trou dans le mortier fur le mercure, ce qui fe fera avec beau- coup de bruit, car le mercure pette & faute en l'air par la chaleur du régule fondu ; ramaflez tout ce qui fera fauté aux paroirs du mortier , & ce qui fe fera attaché au couvercle, & broyez promptement avec un pilon de fer dans le même mortier , jufques à ce que l'Amalgame foit doux & qu'il ne paroifle plus de grumaux fous les doigts. Mettez cet Amalgame en digeftion pendant huit jours dans un matras ; puis lavez-le dans plufeurs eaux chaudes, jufques à ce qu'il ne noirciffe plus l’eau, enfüite de quoi vous le fécherez. Bbi 198 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Difillez cet Amalgame fans addition par une Cornue de verre lutée, & donnez un grand feu à la fin pour faire paffer tout le mercure. Lavez le mercure qui en a été diftillé , & faites-en un Amalgame nouveau avec du nouveau régule , mettez en digeftion, lavez & difillez comme la premiere fois. Réiterez 10 fois ces amalgamations , lotions & diftilla- tions; l’eau dans laquelle vous laverez les Amalgames pen- dant les cinq ou fix premieres fois fera toujours falle; mais aprèsla fixiéme amalgamation & difüillation l’eau des lotions s'éclaircira peu à peu jufques à ce que dans la 9 ou 10 lotion l'eau ne fera plus falle du tout ni même trouble. Les eaux dans lefquelles on lave les Amalgames ne cef fent d'être troubles & noires qu'après la fixiéme amalgama- tion , après quoi elles font toujours claires, & il ne fe fépare plus de faleté du mercure. L'on pourroit m'objecter que Îa faleté féparée des Amal- games par les lotions , provient plütôt du régule que du mercure, parce que le mercure qu'on a employé à cette opération , ayant été reflufcité du Cinabre, paroit aufli pur qu'il le peut être ; mais le même mercure ayant été employé dans chaque Amalgamation avec du régule nouveau, mar- que que ces noirceurs ne viennent point du tout du régule, & qu'elles font caufées uniquement par le mercure, autre- ment il devroit y avoir eu dans le dixiéme Amalgame au- tant de faletés qu'il y en a eu dans le premier, parce que la même caufe, fçavoir le nouveau régule , auroit produit tou- : ns SEE get ed 2 À jours le même effet, c’eft-à-dire des faletés. J'ai ramaffé ces falerés & je les ai féchées ; c’étoit une matiére terreufe, légere ; gris de fouris , fans aucune faveur ni odeur; elle a rougi au feu fans fe fondre, mais avec du borax & du fubli- mé corrofif, elle a fait un émail feuillemorte traverfé de quelques rayes noirâtres. Il faut prendre garde en faifant cette opération, que l’eau pour les lotions ne foit pas trop chaude ; autrement l'A- malgame deviendroit trop liquide, & le mercure quitte- DES SCIENCES. 199 roit le régule , ce qui donneroit beaucoup de poudre noire péfante & qui eft le régule tout pur, laquelle fe difingue parfaitement d'avec la poudre grife qui fe fépare du mercu- re, en ce que l'une eft noire, pefante , aifément fufble au feu & qui fe coagule en régule ; au lieu que l’autre eft lé- gere , grife, & qui ne fe fond qu'en fe vitrifiant à un fort grand feu. Trois livres de mercure m'ont donné cinq gros & demi,de cette poudre grife; elle eft tout-à-fait diffé: rente du refte du corps du mercure , lequel, comme tout le monde fçait, eft fort volatile , s’attachant promptement à la fuperficie de tous les métaux ; fi on en exceptè le fer} & fi on en mêle un peu avec quelque métail fondu que ce foit,ille rend caffant, & en ôte la folidité ; mais la poudre grife eft très-fixe , elle ne fe mêle avec aucun métail & fi on les fond enfemble, elle fe vitrifie & furnage le mé: tail fans le rendre caffant. Il paroïît extraordinaire que du mercure qui eft tout volatile , il fe fépare par cette opé- ration une matiére qui eft fixe jufques à fe vitrifier dans le grand feu ; cependant quand on confidére que dans un Amalgame de plomb, d’étain & même d'argent , étanr pouflé vivement au feu, le mercure emporte une partie de ces métaux en s’évaporant , on fera moins étonné de voir que le mercure emporte avec lui dans les diflillations ordinaires , une matiére fixe & légere, fi on la confidére féparément, mais qui fait une partie de fon corps tandis qu'ils font encore joints enfemble , puifqu’on lui voit bien: emporter des métaux, qui font non-feulement des ma- tiéres fixes ; mais des matiéres fort pefantes , fans que: Pon puifle dire que ces métaux ayent été par-là volati- lifés ou changés en aucune maniére: car fi on rédiftille: à petit feu ce mercure qui a emporté quelque métail par un feu prompt & violent , il laïffera tout ce métail au fond de la Cornue. Il n’y a pas lieu de foupçonner , que cette poudre grife: foit une matiére étrangére au mercure commun, laquelle: s'y feroit introduite ou mêlée depuis qu'il feroit forti des: mines , parce que ces forres de mélanges s’en féparent par= 00 MEMOIRES DEILÂACADEMIE ROYALE faitement en le reffufcitant du Cinabre : il faut donc que ce foit une matiére qui fe trouve naturellement dans tout le mercure commun , & qui en faitune partie effentielle , la- quelle s’en peut féparer par cette opération. D'où il s'enfuit que le mercure dont elle a été féparée, doit être différent du mercure commun; ce qui m'a paru par quelques effets que j'en ai obfervé , & qui ne fe rencon- trent pas dans le mercure commun, que je pourrois rap- porter dans un autre tems. Nous fçavons que le foulfre agit puiffamment fur le mercure, c'eft ce qui m'a fait croire que ce pourroit bien être la matiére fulphureufe du régule d'Antimoine qui fer- viroit de diffolvant à cette matiére, qui fe fépare d'avec le refte du corps du mercure ; & que ce foulfre n’auroit au- cune action fur les autres parties du mercure, parce que la poudre grife étant une fois féparée par les $ ou 6 pre- mieres Amalgamations, le régule n’agit plus fur le mercure, & toutes les Amalgamations qu’on fait après la fixiéme , n’en féparent plus rien, c’eft-à-dire que les eaux dont on fait les lotions font toujours claires ; ce qui convient affez avec l'idée qu’on a du foulfre du régule d’Antimoine, c’eft- a-dire qu'il eft différent du foulfre brûlant de P'Antimoine crud; car ce dernier-ci difloud le corps entier du mercure, au lieu que le premier n'en diffloudroit que la partie fixe féparable par notre opération. L'on voit bien par-là que ce n’eft pas la fubftance entiére du mercure qui fe change par cette opération en une poudre grife , mais que c’eft feule- ment une certaine partie du compofé du mercure qui s’en empare ; & lorfque cette partie en a été épuifée , la même opération n’en fépare plus, & laiffle le refte du mercure fans le changer en aucune façon. Je fuis incertain de m'arrèter fur la maniére comment cette opération fe fait : il fe préfente deux opinions qui me paroiflent également probables. La premiere eft celle dont Je viens de parler, fçavoir que le foulfre du régule d'Antimoine étant introduit dans toute la mafle du mer- cure par l’Amalgansation , diffoud la partie du mercure que ce DES SCIENCES. -201 ce fouffre eft capable de diffoudre , qui eft cette poudre grife, & l'en fépare, laiffant le refte du mercure comme une matiére fur laquelle il n’a point d’aétion. Dans la fe- conde opinion il faut fuppofer le mercure une matiére li- quide qui contient dans les interftices de fes petites parties une matiéreterreufe, ou non encore tout-à-fait mercurifiée, laquelle eft toujours entraînée par le mercure, & ne s’en peut féparer que lorfqu'une autre matiére propre à s'intro- duire dans les interftices , chaffe la premiere & fe loge à fa place. L’on pourroit donc s’imaginer que dans le régule d'Antimoine, il fe trouve une matiére dont la figure eft capable d’être logée plus commodément dans les interftices du mercure , que n’eft celle que le mercure a retenu de fes mines, laquelle étant mife en mouvement , tant par les amalgamations que par le feu de la digeftion, s'introduit dans les interfices du mercure, les remplit, & en chaffe celle qui y étoit auparavant; & comme le mercure qui a Pañlé par cette opération augmente de poids, il y a lieu de croire que la nouvelle matiére qui s’eft introduite dans le mercure eft plus pefante que n’eft l’ancienne qui en a été chaflée, & que ce n’eft que par fon grand poids qu’elle a pû poufler & déplacer la premiere, comme il arrive toujours lorfque des matiéres liquides de différens poids fe rangent librement & fans contrainte extérieure. | J'ai attribué la caufe de cette féparation au feul régule, & non pas au fer ni au cuivre qui entrent dans ce régule, parce que j'ai fait la même opération avec du régule d’An- ümoine pur, fans fer & fans cuivre, qui a produit les mêmes effets; mais la raifon pourquoi j'y mêle du fer, eft que l’An- moine rend plus de régule quand on y ajoute un peu de fer; & la raïfon pourquoi j'y mets du cuivre, eft que l’a- malgame fe faitplus aifément quandil y en a, que lorfqu’il n'y ena point. 1700. Cc æ700: 17. Juillet. 202 MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE ROYALE DE LA STRUCTURE ET DU SENTIMENT , de la Mhëlle. Par M. pu VERNEY#. Our fatisfaire au defir de la Compagnie qui a bien voulu que je travaillaffe à éclaircir quelques difficultés pro- pofées dans une Affemblée fur le fentiment de la moëlle ;, & des os; voici les obfervations que j'ai faites. La moëlle eft un amas de plufieurs petites véficules. ” membraneufes très-déliées , qui s'ouvrent les unes dans les autres, & qui font remplies d’une matiére huileufe , cou- hante & liquide. Ces véficules font renfermées dans une: membrane qui fert d’enveloppe générale à la moëlle ; & cet« te membrane qui eft parfemée d'un très-grand nombre de: vaifleaux ,.eft d’une tiflure encore plus fine que la membrane: aragnoïde de la moëlle de l’épine. Le plus grand nombre de ces vaifleaux paffe dans Îæ cavité des os par des canaux particuliers creufés dans leur- partie folide. L'artére, la veine , & le nerf embraflés par- une même guaine, qui eft un allongement du périofte, font renfermés dans ces mêmes canaux. Ces vaïfleaux jettent à leur éntrée une infinité de rameaux qui arrofent tout ce: üflu véficulaire.. La moëlle ne fait qu'une feule mafle dans les endroits où l'os eft creufé en canal ; mais dans ceux où il eft fpon- gieux , elle eft partagée en plufieurs petites portions qui en: xempliffent les cellules. La faveur douce & agréable de ce fuc &t fa confiftance. onttueufe , donnent lieu de croire que c’eft un extrait de ce qu'il y a de plus délicat & de plus fin dans la portion hui-. leufe du fang qui eft continuellement filtrée dans ce tif xéficulaire.. Aer 1700 p. + - . Cr DT 1e DES SCIENCES 203 Les Anciens ont crû avec Hippocrate & Galien , que la moëlle fervoit de nourriture aux os ; & voici les raifons fur lefquelles ils fe fondoient. L'on ne voit point de vaifleaux fanguins fe diftribuer dans le corps de los; toutes les branches de ceux qu'on y dé- couvre , fe portent dans leurs cavités , où le fang qu’elles contiennent , s'épanche , fe cuit & fe digére ; & fe conver- tiffant en moëlle, devient par-là propre à la nourriture des os; on voit aufli qu’à mefure que les os font longs oudeftinés à des mouvemens violens, leur cavité eft plus ample & plus capable de contenir une grande quantité de fuc Haalee pour leur nourriture. Ces raifons qui ont quelque apparence , ne feront pas dif ficiles à refuter , quand on VU, remarquer, comme on le peut faire aifément ,que la partie folide des os des jeunes animaux , eft parfemée d’un très-grand nombre de vaiffeaux fanguins ; qu'il y a plufieurs os qui font tout-à-fait folides & dépourvûs de moëlle, comme les offelets de l'oreille , le bois des Cerfs & des Daims , & que cependant ces os ne laiffent pas de fe nourrir ; qu’il y a d’autres os qui font creux, & qui ne font revêtus que d'une membrane glanduleufe, comme les cavités qui fe trouvent entre les deux tables de Certains os du crâne, & qu'on nomme Sinus. On fçait auf que les feuilles offeufes qui tiennent lieu de diploë dans le crâne de l’Eléphant, font fans moëlle & tapiffées feulement d'une membrane parfemée de plufeurs vaiffeaux. Le creux des os dont lés pates des Homars & des Ecrevifles font compofées eft aufli fans moëlle, & n’eft rempli que des He qui fervent à leur mouvement; & cependant tous ces os ne laiffent pas de fe bien nourrir. On peut enfin remarquer que ce n’eft pas feulement pour enfermer & con- ferver la moëlle, que les os font creux, mais que c’eft prin- cipalement afin qu'ils foient moins pefans, fans en être moins fermes. Je füis convaincu par un grand nombre d’obfervations , qu'une :partie de cette matiére huileufe qui CR k ci] 204 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE moëlle , tranfpire continuellement ; & que s'infinuant entre les fibres du tiflu de l'os, elle les ramollit par fon onétuofité , & les rend plus fouples & plus fléxibles, & par conféquent moins caffantes. Cette facilité qu’a. la moëlle à tranfpirer, fe fait remar- quer même après la mort de l'animal ; & c’eft en effet Le plus grand obftacle qu’on trouve lorfqu'on veut blanchir les os, & en faire un Squelette; car fi lon n’a foin de les percer par un bout & d'en tirer entiérement la moëlle, fi l'on n’y feringue plufieurs fois des eaux propres à emporter cette matiére onétueufe , on voit dans quelque tems qu’un os qui paroifloit blanc d'abord devient extrêmement jaune enfüite; parce qu'à la moindre chaleur , la moëlle qui y eft reftée s’écoule par toutes fes parties extérieures. C’eft pour- quoi les ouvriers qui employent des os dans leurs ouvrages, ont la précaution de les fcier en long pour en ôter toute la moëlle , & même le tiflu fpongieux, afin que la blancheur de l'os n’en foit point alterée. On peut remarquer ici qu'il y a au-dedans de l'os plufieurs petits trous par où paflent quelques vaiffeaux qui viennent de la membrane de la moëlle , d’où l’on doit inférer que les os tirent leur nourriture du dedans aufli-bien que du dehors. Cela eft confirmé par la maniére dont fe nourriflent les deux tables du crâne : l'extérieure étant nourrie par les vaif feaux du péricrâne; & l’intérieure par des branches de ceux qui tapiffent la dure mere. On a vérifié en divers tems fur plufeurs animaux , que la quantité de la moëlle eft plus grande par rapport à la bonne nourriture & au repos qu'a pris l'animal, & nullement par rapport au cours de la Lune. es Anciens & les Modernes ont parlé avec tant d’incer- titude du fentiment que peut avoir la moëlle, que je me fuis crû obligé d’examiner par moi-même cette matiére avec beaucoup de foin ;ce que j’aifaiten deux différentes maniéres. La premiere, dans les Hôpitaux , où voyant panfer ceux qui avoient eu un bras ou une jambe coupée, je pouvois DT fee. ER A Pi ce DES SCIENCES. 20$ voir la moëlle à découvert; car toutes les fois que je la fai- fois toucher un peu rudement , le malade donnoit auffi-tôt des marques d’une nouvelle douleur. Mais comme cela ne me paroifloit pas encore aflez convainquant , j'ai eu re- cours à une feconde expérience qui ne m'a laiflé aucun fu- jet de doute: & vous vous fouviendrez , Mefieurs , que je fis fcier devant vous par le milieu, l'os de la cuiffe d’un ani- mal vivant; & ayant fait ôter les chairs & les membranes pour laiffer le bout de los entiérement à nud , comme tous ces ébranlemens & ces divifions caufoient des douleurstrès- cruelles à l'animal , j'eus la précaution d’attendre que cette douleur füt pañlée, & quelque tems après plongeant un filet dans la moëlle , vous vîtes que l’animal donna aufli-tôt des marques d’une très-vive douleur, ce qui fut réiteré plu- fieurs fois avec la même précaution, & avec le même fuc- cès; J'ajouterai à ces expériences, celle que nous avons des altérations & des maladies de la moëlle qui prouvent encore qu'elle a un fentiment très-exquis. A l'égard du fentiment des os, nous en traiterons dans un autre Mémoire. METHODE GENERALE Pour lesjets des Bombes dans toutes fürtes de cas propofés avec un Infirument univerfel qui fert à cet ufage. Par M. DE LA HIRE. Mr: Blondel fit imprimer en Pannée 1683. un Traité fort curieux & fort recherché, qui porte pour Titre l'Art de jetter les Bambes. Il y examine à fond cette matiére , & rapporte les pratiques & les Inftrumens qui ont été propofés par plufeurs fçavans Mathématiciens. Mais comme il y trouvoit des difficultés confidérables, il propofa à l'Académie fix ou fept ans avant impreffion de fon Livre, un Probléme dont la folution fervoit à ENS Fangle Cciu 1700. 24. Juillet. s06 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE par lequel il falloit faire le jet. La plüpart des Mathémati- ciens de cette illuffre Compagnie , donnerent leurs dé- couvertes fur cette matiére, & J’eus aflez de bonheur pour en trouver une qui étoit fort fimple , & qui pouvoit facile- mént conduire à la pratique. C’eft fur ce fondement , comme il ef très-facile à voir, que Monfieur Blondel don- ne la premiere conftruétion d’un Inftrument pour toutes fortes de jets dans le Chapitre premier du Livre quatriéme. Il propofe enfuite une feconde Méthode par le compas de proportion ; & enfin la troifiéme ef la conftruétion d’un Ænftrument pour le même fujet, lequel avoit été propofé par M. Caflini avec la Théorie du jet des Bombes. Cet Inftrument eft fort fimple & fort ingénieux. Mais il faut re- marquer que dans la defcription de ces Inftrumens, il ne dit point d’où il les a tirés , fe contentant feulement dans la fuite de rapporter les différentes folutions du Problème qu’il avoit propofé ; où l’on peut voir leur rapport avec la conftruétion des Inftrumens. J'ai donné dans mon Traité de Mécanique , un Inftru- ment très-fimple pour le jet des Bombes; car ce n'eft qu'un Equaire ordinaire qui porte fur l'un de fes côtés un. curfeur auquel eft attaché le fl d’un plomb : mais comme 1l faut faire-une opération fur l’un des côtés de cet Equaire où il y a quelques divifions , pour connoître par ce qui eft donné, le point où le fil du plomb doit pafler, pour met- tre le mortier ou le canon dans l’élevation qui lui convient pour tirer au but, ce qui eft une difficulté commune à tous les Inftrumens propofés par Monfieur Blondel, j'ai cherché une autré maniére plus facile, & j'ai conftruit un nouvel Inftrument que je propofe ici, dans Lens on ne fuppofe aucune connoïffance que celle de la force de la poudre, ou ce qui éft la même chofe, / Amplitude hori- fontale du jet de 45. degrés; ce qui étant une fois connu fért pour toutes fortes de cas où l’on fe fervira de la même poudre en la même quantité. La commodité de cet In- #rument eft de pouvoir fans aucun embatras y trouver DÉS SCIENCES 207 Pélevation ou l’abaiffement du lieu ou du but où l’on tire: par rapport au niveau, & de plus fi l’on veut, l’éloigne- ment de ce lieu , qui fontaufli des connoiffances qu'il faut avoir pour les autres Inftrumens qui fervent à mefurer les jets ; & on les trouve dans celui-ci fans qu'il foit befoin. d’avoir aucune connoiffance extérieure | & l’Inftrument: fera difpofé comme il faut pour l'opération; & c’eft à ce: qui me femble un très-grand avantage pour ceux qui doi- vent fe fervir de ces Inftrumens ; qui n’ont pour l'ordinaire aucune connoiflance des premiers principes de Géométrie, &t qui feroient bien embaraflés , s’il leur falloit faire une: régle de trois à chaque opération différente. Cet Inftrument ne confifte que dans une platine de: figure demi-circulaire BD qui a une régle ou.queue BE attachée fur le bord du cercle, laquelle répond au centre- € & dont le côté BE étant prolongé rencontre le centre: Cdu cercle: &eft perpendiculaire au diamétre 4CD du demi-cercle. On divife le demi-diamétre CD du demi-cer- cle en neuf parties égales ,. & l’on marque aulli fur CE. les mêmes divifions que fur CD. Chacune de ces divifions: repréfents 100. toifes, & l’on peut , fi lon. veut , les fubdi- vifer par de petits points en d’autres plus petites parties ,. mais 1l fera facile d'en juger à la feule ve, ce qui fuffit. pour ces fortes d'opérations. Par les divifions du diamétre: 7, 8 & 9.ontracera des demi-cercles qui auront leur cen-- tre en C. Au centre C de l'Inftrument , eft attachéeune régle CF laquelle eft fendue dans fon milieu. pour y pouvoir laiffer- couler un-clou G dont la tête eft tournée vers la platine ;. le milieu. de cette fente répond.au centre C du demi-cer-- cle. Ce même clou:G pale aufli dans la fente d’une autre: régle IH femblableà la premiere , en forte que ces, deux: régles peuvent être arrêtées ferme par ce même clou. avec: un petit écrou à oreilles , de quelle. longueur & dans quel: angle on voudra. A l'extrémité H de la régle IH il ÿ a une: petite platine: 208 MEMOIRÉS DE L'ACADEMIE ROYALE ronde & de la largeur de la régle, laquelle fera de quelque matiére blanche , comme d’argent , fur laquelle on a mar- qué un point noir qui répond au milieu de la fente de la régle. On marque aufli fur cette régle 1H dpuis le centre H du clou d'argent , les grandeurs C7,C8,Co. La régle CF qui peut tourner librement fur fon clou €, qui eft placé au centre du demi-cercle , peut être arrêtée ferme dans quelle pofition on voudra fur la platine du de- mi-cercle , par le moyen d’un écrou que l’on met à l'extrê- mité du clou , & qui ferre la platine & la régle l’un avec l'autre. 11 faut remarquer que les clous C & G doivent être ointus à leur extrêmité, & être un peu élevés au deflus de FA écrou. Au long du demi-diamétre CD, il y a fur la platine une fente dans laquelle pafle ou coule un curfeur O qui a une tête pointue , & à laquelle on attache le filet d’un plomb ; le milieu de cette fente doit être fur le diamétre CD du demi-cercle. Pour ce qui eft de l’ufage de cet Inftrument, il peut fervir d’abord comme d’une planchette pour déterminer la difance depuis la flation où eft le mortier jufqu’au but où l’on tire, fans qu'il foit néceffaire de fçavoir le nombre des toifes de cette diffance. Ce qui fe fait en prenant quel- que bafe de trois ou quatre cent toifes à côté du lieu où Von eft, & en mirant à quelqu'objet connu à cette diftan- ce par le clou C & par le curfeur G : on mirera aufli au but par les clous C & G , l’on arrêtera ferme la régle CF dans cette polition fur la platine, par le moyen de l'écrou qui eft en C. Enfuite on tranfportera l’Inftrument à la fta- tion à côté où l’on a miré d’abord; & l’on placera le cutfeur O au nombre des toifes depuis le point Cà l’autre fation ; & mirant aufli par le curfeur & par le clou C, on fera couler le clou G fur la régle CG , tant qu'en voie par le curfeur O & par le clou G, le but où l'on tire: alors on arrètera le clou G dans cette pofition , & la dif- tance CG fera dans les parties de CO le nombre des A es mt pe thé DES SCIENCES 20$ fes depuis la flation où l’on tire jufqu’au but; ce qu'il n’eft pas néceffaire de connoître , pourvû que le clou G foit arrêté fur la régle CF dans cette polition. Mais fi cette difance étoit donnée , il n’y auroit qu'à placer la régle CF fur la ligne CE & arrêter le clou G dans le nombre des toifes qui y font marquées. Maintenant pour avoir l’élévation ou l’abaiffement du but par rapport à l'horifon du lieu d'où lon doit tirer , il faut tenir la platine ferme dans la fituation telle que le fi- let du plomb P foit appliqué au point À, ou fur le dia- metre 4D , & faire mouvoir la régle CF, enforte qu'on voie le but par la pointe des clous CG. Il faudra alors ar- rêter la régle CF bien ferme fur la platine du demi-cer- cle. Ce font là les deux connoiffances qu'il faut toujours avoir avec la force de la poudre dans quelque méthode que ce foit. Pour ce quieft de la force de la poudre dans une certai- ne quantité , ou bien de la hauteur à laquelle le jet pour- roit s'élever en tirant vers le Zenith ; comme on ne peut pas le connoître par l'expérience, on fçait par la démon- ftration que le point de l’horifon où la Bombe peut arri< ver lorfqu'elle eft jettée par un angle de 45. degrés ou demi droit , eft toujours éloigné du lieu d'où on latire du double de l'élévation du jet vertical , c’eft ce qu’on appelle, l'amplitude du jet ; c’eft. pourquoi une feule obfervation faire de cette maniére & à fa commodité , peut fervir pour toutes fortes de cas. Par exemple ; fi le jet eft allé à 1600 toifes , le jet vertical ou à plomb , feroit monté à 800 toi- fes. Cet Inftrument pourra aufli fervir pour faire ce jet, comme on le verra dans la fuite. Maintenant pour la pratique des jets & l’ufage de lIn- frument, on place le Curfeur O fur le nombre des toifes du jet vertical, comme dans cette figure; fur le point de 900 toifes, fi le jet vertical eft de 900 toifes , ou bien l'ame plitude du jet de4$s degrés de 1800 toifes. Enfüite. on fera mouvoir la régle HI dans fa raineure furle clou G immo- bile fur CF, tant que la même divifion des 900 toifes de 1709 D d 210 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE cette régle HI convienne fur CE lorfque IH fera à peu près paralléle à AD , ou IH perpendiculaire à CE : ce qu'on connoitra, fi l’on fait tourner la régle 1H, & que fa divifon de 900 rafe la ligne CE. Alors, fi l’on fait tourner la régle 1H fur le clou G, la longueur GH demeurant toujours la même qu’on vient de trouver, lorfque le centre de la pla- tine H touchera le cercle OLL de 900 toifes , on arrêtera la régle LH bien ferme avec la régle CF par le moyen de Pécrou qui eft en G. Maintenant, fi l’on applique l'un des côtés de la queue BE qu'on fuppofe d'égale largeur par tout , au-dedans du mortier ou du canon , & qu'enfuite on l'éleve ou onfabbaifle autant qu’il eft néceffaire pour faire que le filet du plomb P pafle par le point L , le jet ira tom- ber au but propofé. Si le point H ne peut rencontrer fon cercle qu'en un point , il n’y aura qu’un feul jet qui pourra aller au but : mais s’il le peut rencontrer en deux points, cés deux points, comme L , ferviront à faire deux jets différens , de la même maniére qu’on vient de l'expliquer pour un , lefquels iront tous deux au même but. Enfin fi le point H ne peut pas rencontrer fon cercle, il n’y aura aucun jet qui puifle aller au but. DES SCIENCES. 211: DEMONSTRATION. La démonftration de cette pratique dépend d’une pro+ ofition de la Parabole que j'ai démontrée , & que M. londel rapporte de moi au chap. 7. de la troifiéme partie de fon Traité. Car le point G étant le but où l’on tre ÉCHpar ma conftru- étion GH étant. égale à la. diférence entre la hau- teur, du jet vertical CO & la hauteur du but G au-def- fus de lhori- fon qui pañle ar C, ou bien a fomme des mêmes , fi le point G eft au- deffous de Phorifon ; ou fous le niveau du. point C, c'eft-a-dire , fi GH eft perpendiculaire à lhorifon , la li: gne OH fera de niveau : c’eft pourquoi les points de ren- contre LL des deux cercles OL, HL, font les foyers des Paraboles qui pañleront par C & par G ; & c’eft cette figure que M. Blondel a feulement renverfée dans fon In- ftrument quarré : ce qui n’en change pas la conftruétion. Je dis maintenant que la ligne OL étant verticale ou à plomb , fera avec OH ou avec CE de mon Inftrument laquelle lui eft paralléle, Pangle que doit faire la direc: tion du jetau point C; fans qu'il foit AE faire de 1] 1700; 28. Août, av MEMoiR£s DE L'ACADEMIE ROYALE nouvelle opération ; & c’eft en cela principalement que con- fifte la fimplicité de cette pratique. Car fi lon mene LM perpendiculaire fur OH, & qu’on la divife en deux également en S, le point $ doit être le fommet de la Parabole du jet. Mais aufli par les propriétés de la Parabole, on fçait que la ligne LC étant menée & OC étant un diamétre , la touchante CN de la Parabole au point C, divifera l’'Angle OCL en deux également; & par con- féquent l'Angle OCN détermine l’Angle du jet , fO0Ceft confidérée comine verticale. Mais je dis aufli que l’An- gle HOL eft égal à l'Angle OCN, ce qui eft évident, puif- que les deux Triangles reétangles CON, OLM ont un Angle égal CON, OLM, les deux lignes ©, LM étant aralléles & coupées par la même OL. C’eft pourquoi dans dre , file filet du plomb pañfe par OL, il eft évident que OH ou CE ou quelqu’autre qui leur foit paralléle, don- nera linclinaifon du mortier , ou bien la ligne par laquelle le jet doit fe faire. ji On remarquera par les jets des Bombes ou des Boulets, que comme il y a prefque dans tous les cas deux points, comme LL, il y aura aufli deux jets différens qui vont au même but ; mais celui d’en-haut fera plus propre pour faire effort contre les Corps qui font pofés de niveau; & Pautre jet fera plus d'effet contre les Corps à plomb ; com- me des murailles. OBSERVATIONS SUR LES HUILES des Plantes. Par M. HOMBERG. UorQu’on trouve une portion d’huile dans toutes les Plantes qui ont été analyfées par le feu , il ya ce- pendant une grande différence, non-feulement dans la quantité de ces huiles, mais aufli dans la qualité, felon les DES SCIENCES 213 mañniéres & felon le tour de main dont lArtifte fe fert pour l'extraction de ces huiles. Nous voions qu'une Plante mife fans aucune préparation dans la Cornue , & diftillée brufquement , rend moins d'huile fétide , que lorfqw'on la diftille lentement ; & cette: même Plante fermentée , rendra plus d'huile effentielle, fi la Plante eft aromatique , que lorfqu’elle n'aura pas été fermentée. Il y a donc des moyens, felon lefquels on peut tirer pat la difüillation plus ou moins d'huile d’une Plante. J'ai fait plufieurs effais pour trouver quelqu'un de ces moyens qui füt commode, particuliérement pour lextra- étion des huiles eflentielles ; je ne rapporterai ici que ce qui a réufli, en négligeant ce qui n’a point réufli, ou ce qui demande encore du travail pour être perfe@tionné. Nous obfervons dans toutes les Plantes analyfées, qu'il refte une tête morte dans la Cornue après la difüllation ; & que cette tête morte diminue prefque toujours plus de la moitié ou des trois quarts de fon poids ; pendant qu’on la calcine dans un feu ouvert. L'on eft d'accord que cette partie de la têre morte , qui s'évapore dans le feu ouvert de la calcination, eft une portion de l'huile de la Plante, laquelle s’étant féchée trop tôt avec la partie terreufe & faline fixe de fa Plante , n’a pas pû en être féparée par le feu clos & foible de la Cornue. Puis nous obfervons aufli , que l'huile fétide d’une Plan: te ne vient jamais qu'à la fin de la diflillation , c’eft-à-dire, dans le tems que a partie la plus acide & le fel urineux fe féparent de la Plante ; en forte que ces trois principes différens paflent en même tems par le bec de la Cornue; enfin nous obfervons , lorfqu’il y a beaucoup d’acidité dans une Plante, avec un peu de fel volatile, qu'elle rend beau- coup d'huile , que fon huile eft liquide, & que la tête morte diminue peu à proportion dans fa calcination, comme l’on peut voir dans les analyfes du Melilot, de la Mauve , dela Brunelle, de l'Abrotanum , de la Pimperfelle, de la Sen- fitive, &c. & qu'au contraire , les Plantes qui rendent peu d'acide & peu de fel volatile, fourniffent de l'huile épaif- Ddi; 214 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE fe. & sen petite quantité, & beaucoup de tête morte, Îa- quelle diminue beaucoup dans la calcination ; c’eft-à-dire , que la plüpart de l'huile pour lors refle dans la tête morte, comme l’on peut voir dans les Analyfes de l'Heliotropium Dhiofcoridis, du Galega Ægypriaca, du Dracunculus où Ser- pentaria major ; du Calta palufiris , de Ambrofia maritima, de l’Afer Conyzoïdes, &'c. Ces obfervations m'ont fait pen- er que l’acide de la Plante, aufli-bien que fon fel volatile, pourroient bien aider à lextraétion des huiles & lui fervir de vehicule. Dans les effais que j'ai fait pour m'en éclair- cir,; jai employé l'acide feul fans fel volatile , & je les ai employé tous deux enfemble; le fel volatile feul ne m’a pas encore produit d'effet qui n'ait contenté, non plus que lacide mêlé avec le fel volatile: je n'en parlerai donc point ici, mais l'acide feul n’a pas mal réufñli. Le premier eflai que jen ai fait, étoit de mêler par: ties égales de vinaigre difillé & de l'huile fétide fort épaif- fe de quelques Plantes , c’eft-à-dire en confiftence de Sain- doux ; j'ai incorporé le tout dans autant de Sablon d'E- tampe qu'il falloit pour en faire des boulettes, je les ai mis dans, une Cornue, & je les ai difillé ; il-en eft venu d’abord le vinaigre chargé d’une forte odeur d'Empira- me & d’une couleur rouffe brune ; puis Fhuile, dans le commencement peu liquide , mais la plüpart fort épaifle ; le vinaigre ne paroifloit pas avoir diminué dans la diftilla- tion pour la quantité , mais il n’avoit plus de forces ; & l'huile avoit diminué près d’un quart. Je me fuis imagi- né que le peu d’acidité que le vinaigre difüllé contient, ma pas été capable de faire un grand effet fur cette huile ; car nous fçavons que fon poids w’excéde prefque pas le poids de l'eau de la riviére, ce qui prouve aflez qu'il n’eft chargé que de très-peu de fel acide; cependant comme fon aigreur s'eft perdue dans cette difüllation, j'ai.crû qu’elle eft reftée. dans l’huile , & que par conféquent les acides agiflent fur les huiles. Dans mon fecond effai , j'ai mêlé une partie d’efprit de fel avec deux parties d'huile fétide de Plantes fort épaif DES SCIENCES. 215 fes , il s’eft fait une légere effervefcence , laquelle étant pafée , j'ai incorporé le tout dans du fablon & j'ai diftil- lé ; il eft venu d’abord de l'efprit acide environ la quantité des deux tiers de l'efprit de fel que j'y avois mis, mais beau- coup inférieur en forces; l'huile qui en eft venue étoit pref- que toute liquide , & de noire & opaque, elle eft devenue d'un rouge foncé , mais tranfparente , & elle m’a paru un peu moins fétide : elle avoit perdu environ un cinquiéme de fon poids. 101 J'ai été affez confirmé par ce fecond eflai, que les aci- des violens des mineraux fe peuvent joindre aux matiéres huileufes des Plantes fans les détruire , & que leur effet y eft plus fenfible que celui du vinaigre diftillé : mais com- me la grande puanteur des huiles fétides des Plantes , les rend abfolument impraticables , je les ai abandonné ; & j'ai continué mes effais fur les huiles effentielles ou Aroma- tiques. Parmi nos Analyfes des Plantes qui rendent de l'huile ef- fentielle , je n’en ai trouvé aucune traitée de maniére: qu'elle ait pû me fervir, de comparaifon dans mes effais ; jai donc fait exprès une diftllation pour celà des graines de Fenoûil , felon les maniéres & Dion les régles ordinai- res, qui m'en a produit de Fhuile effentielle ; puis j'ai fait la même opération fur la même quantité de Fenotüil.,. à la réferve qu'en mettant tremper le Fenotül dans. l’eau: pour la faire fermenter , jy ai mêlé quatre onces d’efprit de fel pour chaque livre de graines ; la fermentation étant faite , j'ai diftillé ; il m'eft venu de cette derniére difillation: un tiers d'huile de plus que je n’en ai eu de la premiere; elles étoient également claires & odorantes ; ilm’a femblé même que cette derniére huile fentoit moins le feu. que ne- failoit la premiere. ee of oirévrett-2h Je fuis bien perfuadé que l’efprit de fel, non-feulement a augmenté dans notre graine la fermentation , laquelle nous fcavons être fi néceffaire pour. les difillations. de tou- tes les matiérés fpiritueufes ; mais auli-que s’érant joint aux parties huileufes , qu'il, Les a rendu plus liquides!, pour être. [PA 216 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE plus aifément enlevées par la chaleur , nous en avons vû un effet pareil dans notre fecond effai fur l’huile fétide , & la liquefaétion du Camphre en huile par les efprits acides, confirme encore cette penfée. |, J'ai confeillé autrefois à un Parfumeur qui difilloit l'huile effentielle des Rofes avec une très-grande peine, de macerer fes Rofes pendant quinze jours dans de l’eau aigrie par lefprit de vitriol avant que de les diftiller, il a trouvé par-là une augmentation d'huile de près d’un tiers, il me dit que de 100 livres de Rofes, il ne tiroit quelque- fois pas une once d'huile; ils ont une adreffe particuliére pour cette opération : ils fe fervent d'une veflie diftillatoire qui contient environ un muids, elle eft ouverte parun tuyau en haut, à caufe de la grande quantité d’eau qu’il faut fou- vent remettre dans la veflie fur les Rofes qui difillent, car l'huile ne monte qu’à force d’eau qui en enleve très- _peu à la fois : Cette veflie eft auffi ouverte par un robinet en bas pour changer aifément les Rofes épuifées , mais leur plus grande adreffle confifte dans la figure du vaiffeau qui reçoit cette huile ; il eft fait comme un matras à l’or- dinaire , de la penfe duquel fort un tuyau , comme étoient fait autrefois les vinaigriers & les huiliers qu’on fervoit à table ; ce tuyau monte depuis la partie baffe de la penfe, jufqu’au bas du col du récipient, où il eft recourbé en dehors ; l'effet de ce récipient qui ne contient ordinaire- ment que deux ou trois pintes, eft de recevoir commodé- ment plufieurs centaines de pintes d’eau-rofe fans le chan ger, ce qui perdroit la petite quantité d'huile qui s’y amafe ; cette eau fe décharge par ce tuyau dans un fecond récipient ; & comme l'huile eft plus légere , elle farnage cette eau & s'amafle dans le col du récipient à la hauteur de l'ouverture du petit tuyau, pendant que l’eau du fond du premier récipient , s'écoule dans le fecond à mefure qu’elle diftille. Comme ces Parfimeurs font myftére de ce récipient, J'ai été bien aife d’en donner ici la defcrip- tion, pouvant fervir commodément aux diftillations de toutes les huiles effentielles un peu précieufes. Je donne: ra DES SCIENCES. 217 rai une autre fois les effets que j'ai obfervés des fels urineux fur les huiles des Plantes. DCS TUTO N PHYSIQUE: S'il eff vrai que l'air qui entre dans Les vaifleaux fanguins par le moyen de la refpiration , Séchape avec les Vapeurs à les fueurs , par les pores infenfibles de la peau. Par M. Merv. T Ou les Anatomiftes conviennent aujourd’hui de la circulation du fang ; que les valvules du cœur , celles des artéres , & des veines qui font toutes difpofées en même fens en déterminent le cours, & que le pous ;, & la refpira- tion font les deux principales caufes de fon mouvement circulaire : mais quoique tous tombent d’accord que la ref. piration fert à l’entretenir , ils ont cependant des penfées fort différentes fur la maniére dont ils prétendent que l'air que nous refpirons y peut contribuer ; car les uns fe perfua- dent que Pair qui entre dans les poulmons, pendant que la poitrine fe dilate , enfle feulement leurs veficules & qu'il comprime par ce'gonflement leurs artéres & leurs veines , fans pénétrer dans la cavité de ces vaifleaux » &t fans fe mê- Îer avec le fang. Ainfi felon leur fentiment , l'air ne fervi- roit au mouvement circulaire du fang que par les preflions alternatives & réiterées qu'ils s’imaginent qu’il feroit far la mafle du fang , qui roule dans les vaifleaux du poul- mon : maïs l’opinion de ces Anatomiftes ne paroît pas vrai- femblable ; car cette compreflion fe faifant fur les extrémi-- tés des petites artéres pulmonaires, par lefquelles le fang doit forur , il eft évident qu’elle feroit plus capable de s’op- pofer à fa fortie qu’à la procurer : cette même compreffion fe faifant auffi fur les extrémités des petites veines du poul- mon, il eft encore vifble qu'elle s’oppoferoit au pafñlage du fang dans ces veines , au lieu de lui en faciliter l'entrée : d’ailleurs ileft certain que dans le Fœtus humain, les vai£- 1700. E'e 1700. 13. Nov. 218 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYare feaux des poulmons ne peuvent être prellés par le gonfle- ment de leurs véficules, puifque l'air n'y entre pas ; le fang circule cependant aufli librement parle poulmon du Fœtus, que par celui de l’homme adulte : puifque la mêmepropor- tion qui fe trouve entre les artéres & les veines pulmonai- res de celui-ci, fe rencontre entre les mêmes vaiffeaux dans. l'autre : or comme il paffe, de l'aveu même de tous les Ana- tomiftes modernes , beaucoup moins de fang par le poul- mon du Fœtus, que par ct d’un enfant nouveau né, ik y a toute apparence que dans celui-ci , le gonflement des. véficules du poulmon doit dilater fes vaifleaux au lieu de les comprimer ; aufli eft-il vilible que le canal de communica- tion qui fe trouve dans le Fœtus entre l’artére pulmonaire & l'aorte, ne fe détruit que parce qu'après la naïffance du Fœtus, les vaiffleaux du poulmon étant dilatés par le gon- flement que caufe l'air qui entre dans fes véficules qui en- vironnent fes vaifleaux , le fang qui pafloit auparavant par le canal de communication , a alors plus de facilité à cou- ler horifontalement à droit & à gauche dans les deux bran- ches dilatées de l’artére du poulmon, qu’à monter du tronc de cette artére dans l'aorte par le canal de communication; route que le fang de ce canal n’auroit jamais pü prendre, fi le gonflement des véficules du poulmon, étoit capable de comprimer fes vaiffeaux. D'autres Anatomiftes au contraire, aflürent que l'air que nous refpirons , s’infinue des véficules du poulmon dans fes vaifleaux pour pouffer le fang , & pour aider ainfi fa cir- culation en fe mêlant avec lui par des refpirations répétées; mais entre ceux qui admettent ce mélange de l'air avec le fang, je ne fçache perfonne qui fe foit avifé de rechercher fi Pair qui entre des véficules du poulmon par fes veines dans le ventricule gauche du cœur, après avoir été diftri- bué par les artéres dans toutes les parties , s’'échape par les pores de la peau avec les vapeurs qui fortent par fes con- duits , ou fi l'air rentrant des parties dans les veines , re- tourne par leurs canaux au cœur , & repafle après avoir achevé fa circulation , des artéres du poulmon dans fes DES SCIENCES. 219 wéficules pour prendre la route de la trachée artére, & fortir par le nés & par la bouche dans le tems de J'expira- tion toutes les fois que la poitrine fe referre. C’eft ce que je. vais examiner. Comme il peut paffer pour confiant, après Îes expé- riences & les obfervations de plufieurs fçavans Auteurs, qu'il s’exhale en un jour plus de matiére ou d’excrémens par les pores infenfibles de la peau , qu'il n’en fort en plufieurs par le nés, la bouche, l’anus , & la veflie ; il femble d’abord qu'il n’y ait pas lieu de douter, que l'air qui entre par le moyen de la refpiration dans les vaiffeaux fanguins , ne puifle, ou ne doive fortir par les pores de la peau avec la même facilité que les vapeurs & les fueurs s’échapent par ces conduits: cependant plufieurs obfervations femblent prouver le contraire. J’en rapporterai feulement trois des plus confidérables , & qui font le plus à mon fujet. Si l’on remplit d’eau Peftomach, le cœur, ou‘uelque gros tuyau d’artére ou de veine, l’eau fe filtre à travers les iaterftices des fibres charnues du cœur, pafle par les pores des membranes de l’eftomach , &séchape des artéres & des veines; mais fi l’on y renferme de l'air, il ne pourra s’en échaper, pourvû que Pon prenne la précaution de lier exatement les vaifleaux du cœur , les deux orifices de l'eftomach , & tous les petits rameaux d’une artére , ou d’une veine confidérable ; en forte que l'air ne puifle fortit par aucun des endroits qu’on aura hiés. La feconde obfer- vation, eft qu'après la mort les humeurs de l'œil fe diffipent à travers fes membranes; au contraire, fi l’on vuide, par le nerf optique , le globe de l’œil des humeurs qu'il ren: ferme, ce qui eft facile à faire, & qu’enfuite on le remplifle d'air, le netf optique étant lié, l'air reftera dans le globe de l'œil , & ne pourra fe diffiper , comme font les humeurs de l'œil par les pores de fes nrembranes : il paroît donc affez vrai-femblable par ces deux obfervations ; que l'air que nous refpirons ne doit pas s’échaper par les conduits ou pores infenfibles de la peau, comme font les vapeurs & les fueurs. C’eft ce que femble prouver vifiblement une troifiéme obfervation que voici. Eeiï 220 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Les animaux qu’on renferme dans la machine Pneuma= tique, s'y gonflent d'autant plus qu’on la vuide plus exaéte- ment de l'air groflier qu'elle contient , après quoi ils reftent gonflés, ce qui ne devroit point arriver , fi l'air pouvoit fortir par les pores de leur peau; car s’il s’échapoit par ces conduits infenfibles , ces animaux devroient fe defenfler immédiatement après la fortie , & alors les parties retom- bant fur elles-mêmes par leur propre pefanteur, oufe re- ferrant par leur reflort naturel , comme il leur arrive , lorf- que la peau fe crêve dans cette machine, leur corps devroit y reprendre un volume plus petit qu’il n’avoit avant que ces animaux y fuflent expofés. Or comme ils s’enflent tou- jours tant que la réfiftance de leur peau peut contrebalancer le reffort de l'air intérieur, répandu dans toutes les parties de leur corps, en gardant avec lui un jufte équilibre, il eft fort probable que l'air que nous refpirons , & qui.pafle des vélicules du poulmon par fes veines dans le cœur pour poufler le fang , en fe mêlant avec lui dans tous’ les vaif- feaux , ne s’en fépare pas pour s’échaper avec les vapeurs & les fueurs par les pores infenfibles de la peau. Pour détruire ce fentiment, l'on pourra peut-être m'ob- jeéter que la plüpart des poiflons qu’on expofe dans la machine Pneumatique, rendent beaucoup d’air de deffous leurs écailles ; ce qui paroït manifeftement , lorfque les poiflons vivans nagent dans l’eau pendant qu'ils font dans le vuide : mais fi l'on examine bien cette expérience qu'a fait voir M. Homberg dans l’Académie , on reconnoitra qu’elle ne fait que confirmer ce que Je viens de dire ; ear fi cet air qu'on voit s'échaper de deffous les écailles, for- toit du corps même du poiflon par les vaifleaux excrétoi- res de la peau , le poiffon qui s’enfle dans le vuide, devroit s'y defenfler après la fortie de Pair; mais au contraire , il refte enflé nonobftant cette grande quantité de bulles d’air qu’on voit fortir de deffous fes écailles ; il y a donc lieu de croire que c’eft plürôt l'air logé fous les écailles qui pro- duit fes bulles en fe dilatant , que l’air qui eft renfermé dans le corps même du poiflon. Une preuve de ceci, eft PT art Ve 2 0h PES se + TES ps De ci > DES SCIENCES. 227% que le poiffon qui dans le vuide a rendu une fois l'air qui étoit caché fousfes écailles, n’en rend plus par ces endroits, lorfqu’on le renferme une feconde fois dans le vuide , com- me l'a fair voir M. Homberg; cependant fon corps fe ren- fle de nouveau à chaque fois qu’on le remet dans le vuide. Si on oppofe à cette expérience, que la Vipere fe defenfle dans le vuide , qu'ainfi l'air doit fortir de fon corps par les pores de la peau ; j'avouerai que l'air fort du corps de la Vi- pere: mais Je nie que ce foir par les pores de la peau. En voici la raifon. Le poulmon de la Vipere forme un fac aveugle, long d'un pied, & d’un poulce de diamétre où environ; il eft donc évident qu'il doit contenir beaucoup plus d'air , qu'il n’y en peut avoir de répandu dans tout le refte des parties de fon corps. Cela étant, je dis que toutes les fois que dans le vuide, l'air du poulmon viendra à fur- monter par fon reflort l'effort des mufcles du larinx qui-le tiennent renfermé dans le poulmon , il doit ouvrir le larinx que ces mufcles tenoient fermé ; d’où il fuit que la Vipere doit fe defenfler, parce que l'air du poulmon s’échape alors par l’ouverture de la trachée artére : mais après fa fortie , les mufcles du larinx ne fe trouvant plus forcés par la di- fillation de Pair, ils doivent renfermer l'ouverture du la- rinx jufqu'à ce que ce qui refte d’air groflier dans le poul- mon venant à fe dilater de nouveau , refurmonte une fe- conde fois l'effort de fes mufcles ; c’eft aufli ce qui arrive fenliblement par les éruétations qu’on voit faire à l'animal ; & de plus, il n’y a que le ventre de la Vipere qui fe defen= fle, pendant que tout le refte de fon corps demeure gon- fé ; ainfi il n°y a pas d'apparence que l'air s'échape par les. pores de la peau , quoique la Vipere fe defenfle dans le vui- de. Ces expériences, loin de fervir de preuve pour la fortie: de lair par les vaifleaux excrétoires de la peau, fourniffent donc au contraire une conje@ure fort vrai-femblable , pour prouver que air que nous refpirons, ne peut pas fortir: par fes conduits imperceptibles. C’eft ce qui paroîtra en- core plus évident en expliquant pourquoi l'air n’a pas dû fortir par les pores de la peau, Eei 222 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Quoique Pair que nous refpirons ne tranfpire pas avec les vapeurs & les fueurs par les vaiffeaux excrétoires de la peau, on ne doit pas cependant conclure de-là qu'il ne forte point des vaifleaux fanguins, dans lefquels il s'in- finue : car comme chaque refpiration y fait continuelle- ment entrer de nouvel air, il eft aifé de comprendre que fi la même quantité d'air qui entre dans ces vaifleaux, n’en reffortoit pas par quelque endroit , il s’en amafleroit en peu de tems une fi grande abondance dans le cœur & dans les artéres, que la force des efprits animaux ve- nant à être furmontée par le reflort de l'air, ne feroit plus fufhfante pour la contration de ces parties, fans laquelle cependant le fang ne peut paffer dans les veines; de forte que l'air qui donne le premier branle au fang en entrant des véficules du poulmon par fes veines dans le cœur, fe- roit enfin ceffler la circulation du fang , s’il étoit retenu dans les vaifleaux ; il faut donc à mefure qu'il y entre, qu'il en reflorte par quelqu’endroit. Mais fi l'air qui com- mence à fe mêler dans les veines du poulmon avec le fang pour le pouffer dans le ventricule gauche du cœur, & de- 1à par les artéres dans tout le corps de l’homme , aban- donnoit le fang en paflant avec lui dans les parties, & s'échapoit avec les vapeurs & les fueurs par les pores de la peau, il paroit que le fang n'étant plus pouffé par l'air au-delà des parties , ne pourroit entrer dans les veines, ou’ que s'il y pañloit, il y refteroit en repos, ou manqueroit de mouvement; puifque les veines font non-feulement in- capables d’elles-mêmes d’une contraëtion affez forte pour le forcer à retourner au cœur ; mais qu’elles contiennent même moitié plus de fang , ou environ que les artéres; il faut donc puifque le fang circule dans les veines , que l'air y entre pour le poufler. Or comme il eft évident qu'il ne faut pas moins de force pour repoufler le fang des païties par les veines dans le cœur, qu'i en faut pour le pouffer du cœur par les ar- téres dans les parties, limpulfon de Pair qui eft l'une des caufës principales du mouvement circulaire du fang , doit DES SCIENCES 227 donc être auffi forte dans les veines que dans les artéres ; puifque les veines doivent rendre au cœur prefqu’autant ‘de fang , que le cœur en donne par les artéres aux par- ties , ce qui eft abfolument néceflare pour entretenir dans tous les vaifleaux une circulation continue. Cela étant, il eft vifible que l'air doit parcourir avec le fang tous les vaif- feaux, & qu'il doit après cela abandonner le fang , d’où il s'enfuit que la circulation de Pair doit finir où elle a com- mencé. L’air commence fon tour dans le poulmon , il doit donc le finir dans le poulmon. Aulfli voit-on que l'air qu'on fouffle par la trachée artére dans le poulmon, pafle de fes véficules par fes veines dans le ventricule gauche du cœur ; & que l'air qu’on fouffle dans le ventricule droit, repafe par les rameaux de l’artére du poulmon dans les mêmes véficules , d’où il s’échape au-dehors par l’âpre artére ;. ainfi le poulmon qui fert à l’entrée de l'air, fert aufli à la fortie. Par toutes ces raifons, il paroït fort vrai-femblable que les pores de la peau n’ont été formés d'une maniére propre à retenir au-dedans du corps les particules de l'air que nous refpirons, qu'afin de le renfermer dans les vaif feaux pour fervir par fon impulfion & par fon mélange, au mouvement circulaire du fang ; ce qu'il wauroit pù faire , sil étoit échapé par les conduits infenfibles de læ peau, avec les vapeurs & les fueurs. 1700. | #3. Nov. 224 MEMOIRES'DE L'ACADEMIE ROYALE DE S: :F'OSRNCE SYC'E INT I 2 DES ou des pefanteurs néceflaires aux Planetes pour leur faire décrire les orbes qu'on leur a fuppofés jufqw'ici. Par M. VARIGNON. Es anciens Aftronomes donnoient aux Planétes des viteffes uniformes fur les orbes circulaires qu’ils leur faifoient décrire. Copernic même ne croyoit pas que l’on pôt faire autrement: Her nequit , (dit-il , Revol. Lib. 1. pag. 3.) ut celefle corpus Jimplex uno orbe inæqualiter movea- tur. De forte que pour en expliquer les inégalités , ils ont été obligés de recourir à des Excentriques & à des Epi- cycles , de l'embarras defquels Copernic lui-même n'a pû fe délivrer tout-à-fait. ; Mais après lui, font venus des Aftronomes , qui avec un peu plus de Phyfique , n’ont fait aucune difficulté de faire mouvoir les Planétes avec des vireffes réellement différentes dans chacune , & même de changer leurs or- bes circulaires en Elliptiques, dont ils ont afligné deux efpéces. La premiere eft de Kepler , & c'eft lEllipfe ordi- naire , à laquelle Sethus Wardus ( quoiqu'il s'y tienne} croit pourtant qu’on pourroir encore fubftituer les orbes circulaires , en fe fervant de deux points pris à diffances égales du centre fur un de leurs diamétres, comme l’on feroit des foyers de cette Ellipfe. La feconde eft de M. Caffini , laquelle confifte à avoir des produits des droites tirées de chacun des points de fa circonférence à fes deux foyers , par tout égaux ; au lieu que dans l’Ellipfe ordinaire, c’eft la fomme de ces droites qui eft partout la même. On verra par le premier des deux Lemmes fuivans, combien le fentiment précédent de Copernic eft peu con- forme à la Mécanique des Cieux; puifque fuivant ce Lemme, DES SCIENCES. 225$ E.emme , les forces néceffaires aux Planétes vers le dedans de leurs orbes, pour les décrire & ne point s'échapper par leurs touchantes , doivent prefque toujours confpirer à les y mouvoir avec des vitefles réellement différentes ; & que fur une infinité de cas, il n’y en a qu'un feul où elles sy puiffent mouvoir uniformement. M. Newton & M. Leibnitz font les premiers & même les feuls que je fcache, qui ayent recherché ces pefanteurs des Planétes : les voici encore d’une autre maniére. Et par- ce que la plus grande difficulté confifte dans les mouve- mens variés de ces Planétes fur leurs orbes, je commen- cerai par les fyftêmes qui les fuppofent tels, &felon l'ordre qu'ils ont été imaginés, pour finir enfin par ceux qui Les fup- pofent uniformes, quoique les plus anciens; fur-tout ceux- ci ne faifant qu’un cas entre une infinité d’autres , ainfi qu'on le va voir par le Corol. 2. du premier Lemme fuivant. Soit donc pour cela. Définition. Dans une eourbe quelconque , j'appelle Rayons des Forces du Corps qui la décrit, les droites tirées de ce Corps au point où concourent les direétions de ce qu'il en doit avoir pour la décrire, fans autre fecours que celui d’une premiére impreflion à angle quelconque avec la premiére de ces direétions, & ne points’échapper par la tou- chante au point où il fe trouve, ainfi qu'il lui arriveroit fans de telles forces que j'appellerai Centrales, lefquelles font les feules que je lui fuppofe dans toute la durée de fon mouvement. L'EM ME "T Si l'on fuppofe qu'un Corps L , dont la force centrale tende .en C fuivant LC; décrive une courbe quelconque Q L M dans un milieu qui n augmente ni diminué fon mouvement , non plus que s'il fe mouvoit dans le vuide ; [a viseffe fuivant LM fui cette courbe , ne fera uniforme que lorfque tous les rayons LC des forces, feront perpendiculaires à cette même courbe. Elle fera au contraire toujours accélérée, tant que l'angle CL P féra aigu, © retardée tant qu'il [era obrus. 1700. FF Frs. L Fc. 11, 226 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE DEemonsT. Soient les rayons CL, C}, indéfiniment proches l'un de l’autre ; foit de plus décrit du centre €, Arc /R qui rencontre LCenR, duquel point R foit aufli R P perpendiculaire fur L/, Cela pofé, il eft vifible que fi la force centrale du Corps L ne faifoit d'impreflion fur ce Corps, que fuivant P R(hyp. ) perpendiculaire à la courbe QLM, & non fuivant la direétion LP de cette courbe , cette force le retiendroiït feulement fur cette même cour- be, fans l'y avancer ni retarder, ne faifant rien pour ni contre fon mouvement fuivant L/ : mais que fi elle lui en donne aufli fuivant L P , elle laccélerera; puifque ce qu'il lui en doit réfulter de vitefle en ce fens , la doit augmen- ter. Par la même raifon cette force centrale retarderoit le mouvement de ce Corps fuivant L O par l'impreffion qu’elle feroit fur lui à contre fens de L P. Or tant que le rayon de tendance L C eft oblique à la courbe , la force centrale du corps L vers C, n’agit pas feulement fuivant PR, mais aufli fuivant L P en faveur de fon mouvement vers M, fi l'angle RL P eft aigu ; ou contre ce mouve- ment , fi cet angle eftobtus. Donc aufli pour lors la force centrale tendante en C, accélerera ou retardera toujours ce mouvement, excepté lorfque cet angle fera droit. Ce gw'il falloit démontrer. Coroz. I Donc un Corps décrivant une courbe quelconque avec des forces centrales qui tendent toutes à un même point €, fon mouvement fur cette courbe ne fçauroit être uniforme, que lorfqu’elle eft un cercle dont C'eftle centre; puifque hors le cercle il n’y a point de courbe dont toutes les perpendiculaires concourent à un: même point. CoroL. II. Afin donc que le mouvement fur telle courbe 4 L M qu'on voudra, foit uniforme, il faut que les. forces centrales du Corps mû tendent fuivant les rayons de fa développée 4 C, c’eft-à-dire, que les rayons des forces foient ces rayons eux-mêmes LC de la développée; puif- qu'ils lui font tous & les feuls qui lui foient perpendiculaires. Ét en ce cas R & P fe confondant avec L, la force cen= TR ET nn dr nn D 0 DES SCIENCES. 227 trale tendante en C, ne fera plus d’impreffion fuivant la direttion de la courbe, mais feulement fuivant la perpen- diculaire L C: de maniére que le mouvement du Corps L fuivant L M, n’en fera plus accéleré ni retardé; ce qui ren- dra pour lors les Arcs L /( ds) parcourus, en raifon des tems(4#) employés à les parcourir, ou ds — dt. ScHoL. Entre plufieurs Regles que j'ai des forces cen- trales , tant centrifuges que centripetes , je ne me fervirai ici que de celle que je donnai le 31. Mars dernier à l'Acadé- mie. Et afin de ne rien fuppofer d’ailleurs, en voici la dé- monftration en peu de mots. LEM'ME IT Un Corps L décrivant une courbe quelconque QL M , srou- “ver fês forces centrales en général. S oLU T. Dans la figure premiére, foient encore du cen- tre C les rayons CL, CZ, indéfiniment proches l’un de l'autre , avec les Arcs LH, JR, dont le premier rencon- tre ZCen H, & le fecond, C L en R ; duquel point R foit encore aufli R P perpendiculaire fur L /. Soient de plus ÆAH= x, HCouLC=r,R/=d2,L]—=ds,1v—|la viteffe ( du Corps mû) en L fuivant LM, dr—le tems {inftant) que ce Corps met à parcourir L/, y=—fa force centrale en L, ou ce qu'il a là de pefanteur vers C Cela pofé , l’on aura dv pour l'accroiffement de vitefle, qui ré- fulte de cette force (y ) au Corps mû fuivant L/ pendant l'inftant dr; & dds pour ce que ce Corps parcourt alors d’efpace en vertu de cet accroiffement de viteffe. Enfin en prenant 4 C= 4, l'on auraauflia= x + r ; ce qui donne dx+ dr—0, ou dx——dr, en différentiant le tout pofitivement. A ce compte, la force abfolue (y ) en L vers C, étant à ce que le Corps mû en reçoit d’elle fuivant L/:: LR. LP::L/(d5). LR (dx). Cette force fuivant L 7, fera — Le. Or les efpaces parcourus avec des forces conftantes Ffi Fre. I, 228 MÉMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE & continuellement appliquées , telles qu’on conçoit d'or- dinaire la pefanteur , & telle qu’eft aufli toute force inftan- tanée , étant en raifon compofée de celles de ces forces & des quarrés des tems employés à les parcourir ; l'on Lryds à __ dsdds > Lol. aura auf dds — = xdr. Doncy= Ce qu'il fal- loit trouver. ScHoL. Si l’on ajoute à cette Figure 1. une courbe TD, dont les ordonnées HT( perpendiculaires fur AC) expriment les tems fuivant lefquels fe doit régler le mou- vement du Corps qu’on fuppofe décrire la courbe 0 LM; & qu'après avoir fait aux points correfpondans L,T, de ces courbes données { L, DT, les tangentes LN,TK, avec CN perpendiculaire à CL Fon imagine encore une autre courbe BO , qui ait par- tout fes ordonnées EXLNXHK : correfpondantes HB— << "*=*, dont E foïit une DCORATIL? grandeur conftante arbitraire, & BG fa tangente en B : l'on aura encore en général les forces centrales LNXHK° : PR Mais quelque fimple que cette formu- le paroiïffe pour être en grandeurs toutes finies, & quel- que facile qu’en foit effeétivement l’ufage , il faut pourtant avouer qu'il l'eft beaucoup moins que celui de la précé- dente : c’eft pour cela que nous ne nous arrêterons pas da- vantage à celle-ci, & que l’autre au contraire nous fervira toujours de Regle générale dans la fuite. ICPÉIGUEUE, dsdds;: ——tlhthedi(S J dxdr° AVERTISSEMENT. Voici quelques ufages de cette Regle dans les Problèmes fuivans , & felon l’ordre mar- qué ci-deflus , en prenant par-tout les tems (r) comme les aires 4 CL © (2) soudr=1d2, fuivant la Prop. DES SCIENCES. 229 . Seët. 2. Liv. 1. de M. Newton, De Phil. nat. Prince. Mar. PR OBDL'EM'E'"'E Soient, ainfi que le fuppofent M. Newton ; & M. Leibnitz avec Kepler, les orbes des Planétes, de véritables Ellipfés, dans le foyer commun defquels foit le Soleil. Ils agit de trou- ver quelles doivent érre les pefanteurs on les efforts de ces Pla- nétes vers le Soleil , pour leur faire ainfi décrire des orbes Ellipriques. À So LuT.Soit donc l'orbe d'une Planéte quelconque L; YEllipfe ALB, dont les foyers font C& D , au premier defquels foit le Soleil C. Toutes chofes demeurant les mé- mes que ci-deflus( Lem. 2.), fçavoir CE =r, la partie R / de Arc 2/(décritdu centre C)=—dz,4k=—x, AL, & y—= la force centrale, ou la pefanteur vers C'de la Pla- néte en L ; foit de plusle grand axe (de lEllipfe) 4 B— [A & la diftance ( des foyers) CD—=c. La nature de l’Ellipfe ordmaire , dont il s’agit ici, don- nera drVaa—ce—dzv cc—a a+ 4ar—4rr pour fon équation au foyer C, ou(en prenant bb—=aa—cc)bdr —dz Vaar—a4rr— bb. Donc 44ar — 4rrxdz— bbdr+bbdz:=bbhds,ou a ( Avert. } rrdz? __bbds 2bbdsdds rs. IT = 7 > Et en prenant dr pour conftante, —4adr à __4adx 24. dsdds —— (Sol. Lem. 2.) — ne OU EDR TS a ge OUR) Ye c'eft-à-dire (à caufe de la fra@ion conftante =) les forces. centrales, ou les pefantéurs de la Planéte L vers le So- leil ou foyer C, comme les 7; > Ou en raïfon réciproque des quarrés de fes diflances LC (r) àce foyer. Ce qw'il falloit trouver. Corox. I. La même chofe (y = ) fe trouvera pour l'hyperbole, dont C feroit le foyer intérieur ; puif qu'en prenant feulement 24= cc, à caufe qu'elle F fi Fie. LIE. 530 MEMoIRESs DE L'ACADEMIE ROYALE ac” a, elle aura aufli la même équation b dr —=dx Vaar+ 4rr—bbque l'Ellipfe précédente, excepté que — 4rr fe change ici en +4rr. G CoroL. IL. Sioutre cela on change les fignes de 4ar —4rr pour lhyperbole, dont © feroit le foyer ex. térieur, l'équation #dr— d2V4rr—#4ar—bb qui lui en réfultera, donnera aufli de même y— F- : c'eft- à- a dire, encore les forces centrales par rapport à ce foyer; en raifon réciproque des quarrés des diftances CL; avec cette différence feulement que ces forces feront ici centri- fuges ou de legereté, au lieu que dans l'Ellipfe, & à l’au- tre foyer de l'hyperbole , elles étoient centripétes ou de pefanteur. CoroL. Ill. Si l'on fait préfentement BC= m:alors trouvant aa—cc(bb)—4am— 24m m dans l'Ellipfe, & cc—aa(bb)—4am+4mm dans l'Hyperbole, ou de part & d'autre bb—4am, en faifant a ( 4B)) in- finie, comme dans la Parabole en laquelle fe changent alors l’Ellipfe & l’Hyperbole : l’on naura qu'à fubftiruer cette derniére valeur de 24 dans la formule y = : - de la Solution & du Corol. 1. pour avoir y= —— au foyer de cette Parabole , c’eft-à-dire encore, les forces centra- les tendantes à ce foyer, en raifon réciproque des quarrés de diftances CL (r) de ce même foyer au Corps qui la décrit. Coroz. IV. Ainf en général les forces centrales ten- dantes à quelque foyer de feétion conique que ce foit, font dans toutes ces fections en raifon réciproque des quarrés des diftances de ce foyer au Corps qui les décrit. ScHoL. Tout ceci eft conforme à ce que M. Newton & M. Leiïbnitz en.ont démontré à leurs maniéres : le premier dans les Prop. 11. 12. & 13. du Liv. 1. de fon excellent Traité, De Phil. nat. Princ. Math. Et le fecond dans le mois dé Février des Aëtes de Leipfik de 1689. DES SCIENCES. tx 237 , AVERTISSEMENT. Ï I. Il paroït par l’Avertiflement qui fuit la Regle précédente, que mon premier deffein étoit de ne chercher les forces centrales des Planétes que dans l’hypothéfe de Kepler, de M. Newton, & de M. Leïbnitz, comme la plus phyfique, en me propofant de: faire par-tout dir d+ ; mais ayant depuis fait refléxion que cette hypothéfe des tems r’eft pourtant pas la feule qui fe fafle en Aftronomie, voici comment je fatisfais à toures, en prenant feulement r dz conftant dans cetre Regle , ainfi qu'elle le fuppofe, quelles que foient d’ailleurs les hypo- théfes des tems, ou les valeurs de dr. PR O B ELEMENT LE Toutes chofes demeurant les mêmes que dans le Prob. 1.ex- cepté qu'on Juppoft ici les tems(t) g#'employe la Planére L à parcourir les arcs À L de PEllipfé ALB , en raifon des angles ADL , ou des arcs A EË décrits du foyer D comme centre, ainfi que Sethus Wardus le fappofe avec plufieurs Affronomes modernes qui ne retiennent ici de Kepler que fon Ellipfe ; c’eft à-dire, AË =t, on Ee=—dt:5i/ s'agit de trouver encore dans certe hypothéfe les efforts ou les pefanteurs de certe Planére 1, vers le Soleil C. Sozur. Soit de plus l'arc Lr décrit dufoyer D comme centre , & 4 D — m conftante. La propriété de l'Ellipfe ordinaire dont il s’agit ici, étant d’avoir DL+LC— AB. —DI+IC; &lesarcs/R, Lr, décrits (kyp.) des cen- tres C& D', donnant d’ailleurs DLHRC= Dr+1C, il refultera LR—/r. Et par conféquent aufli Lr—/R (hyp.)=d2. Or LD (a—r) DE ou AD (m)::Lr mm dz° 3 (dz). Ee( dr) = 7. Ce qui donne dr — = Mais dans la Solution du Problème précédent, l’on æ trouvé hdr—=d2V 4ar—4rr— bb, ou 4a r— 4rr. xdz=— bbdr +bbdz=bbds; Ce qui donne auf: cet 7 = ds, & d'où réfulte de plus 2 dsdds Fic, TIR Fie. LIL 232 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE 2 2 2— tdrdz +8ardzddz—8;drdz 8rrdzddz tr À > OÙ jdn » 2adrdz—4rdrdz + 4ardzddz—arrdzddz 3 PE M Ce 2 A UE dd SRE 2adrdz?—ardrd2— 4 adrdz"+4rdrdz" SEE Ne VAE" bhbdxdr zadrdz ( S'eaufe de Ax —— d r Solut. Lem. 2.) = phdxdr z . a Ha ( à caufe que ci-deflus d = "# bbde 2 PE mmdz )= 2aXa—# a—+r? bbmm = ee x D L:: c'eft-à-dire , que les forces centrales m tendantes en C, feroient ici comme les quarrés des diftan- ces de la Planéte L à l’autre foyer D de l'Ellipfe qu'elle décrit. Ce qgw'il falloir trouver. ScHoL. On voitaffez par les Corollaires du Prob. 1. comment tout ceci fe peut appliquer à l'Hyperbole & à Ïa Parabole. Voilà pour ce qui regarde l’Ellipfe ordinaire introduite par Keplét dans l’Affronomie : Voyons préfen- tement celle de M. Caffini. RR'O BLE M ET TEL Soit préfentement l'Orbe A LB des Planétes ; PEllipfe de M. Caffini, telle que C & D en étant encore les foyers pris fur fon grand axe AB , elle donne 'par-tout CL xL D = ACxAD—ACxCB, & fur laquelle ces Planétes fe meu- vent dans des tems'(t) qui foient encore comme les angles AD L qui répondent aux arcs À L parcourus , c'eft-a-dire, qui Joient en raifèn des ares circulaires A Ë décrits du foyer D com- me centre : de forte gwen prenant ces arcs AE pour ces tems (t); l'on ait encore Ee — dt. On demande les efforts ou les pefan- teurs néceffaires à ces Planétes vers le Soleil C , pour leur faire décrire de telles Ellipfes. SoLuTSoient encore CL=rs AL—:,A4h—x%x; Rl=4d?,; CD=t,& A DouCB= m; foit desplus A Cou BD=a. L'on aura par la fuppofition , à =m + c; & par la nature de cette Ellipfe, am(4DxBD) = x D L(CLx DL ): d'où réfulte LD="®, Ce qui par YO!/DES SCIENCES. 233. ar la Géométrie ordinaire (le calcul en eft plus long que difficile) donnera pour l'équation au foyer Cde cette Ellipfe, Batmt+8atmrt— 4 a m° cr? me TT — 2. ds 2a2m'c2r—a4mt+2at mr cr + 2e 76 — 78 xdr De forte qu'en prenant p=—84* mt+8Saammrt— 4aammecrr) &t q=— 2aammccrr — a*tmt+ 24ammrt — c+ roccr rs d ds®— pd RER Ep ai 2 ; d'où refulte lon aura auffi ds5°— q OT L'EZES . er van sou ds =} ne ce qui donne aufli AAUDTS LA p—axdpdz +ipdzddz — dp + dq x pda? a dqdz? — gdpdz! + p — q X 2pdzddz isa asp Ar APE ae (Averr. 2.ddx— q Li) SRE — grdpdz — 2ppdrdz2? + :pqdrdz* La dsdds prdg— LUI ere dre rs Donc dxdr? ?x2rdxdi? x d'z? ( à caufe de dx —= —dr Solution , Lem. 2.) ER CARE RROT ER PORTE TON Je: P —q" X2rdrdi? Or de ce En HO “7, l’on aura aufli fi différen: ou (Reg: ) y— tielle /r = + Et par Connie (LË— Tr) aamm dr? -14ds — aammdr —— = ds — Æ RAR RE Ant . De plus LD: Pins E D° à ou 2 D° (mm): 4Ifg it a r ##4d5— jamm d r° J 2 = DL ARE EN R ae 2 à Ês Ee(dr)= TS (dr: ds d 2?) — _rfdst— aammds +aammaz RTL lUure ni (à caufe de da 22% __priaammp+aammp—sammg des PrÉ — aammq À Pa anr P—qX aarr ” Donc en fubftituant cette valeur de d Fe dans la précé- dente-valeur- de y, lon aura la force centrale cherchée è SARL MEREREn ds EF anp rar er épardr. Te p—qXpri—aammax tar Mais füivant les valeurs précédentes de p & deg; l’on aura dp—32aammidr—8Saammecrdr, & d'q 1700. | Gg Fiç, III. 234 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE —=4aammeccrdr+8aammrdr — 4ctr dr +12 ccrsdr—8r7 dr. Donc en fubfituant ces valeurs de dp & dq dans la derniére valeur de y, lon aura enfin .. . $ +i6atmmar—4 at mmçccqr—2atmmecpri—4 4% mmpr __ dt+zaact pri—6aaccpr74+4aapr+aappr—aapgqr ? p—qgxXpri—aammaq pour Pexpreflion des forces centrales tendantes au foyer C de l'Ellipfe de M. Caffini, décrite dans des tems qui foient comme les angles 4 D L, ainfi qu'ille fuppofe. Ce qu'il falloir trouver. PR O:B EE ME "TV. Toutes chofes demeurant les mêmes que dans le Prob. 3. excepté qu'au lieu de fuppofer comme M. Caffini , les tems (t) fur AL en raifon des angles A DL , on les fuppofé ici à la maniére de Kepler , c’efl-a-dire , en raifon des efpaces ou des aires A CL, de forte que lon aura ici dt, comme les éfpaces L CI que la Regle fuppofe conffans , ou dt =rdz conflant. On demande préfentement les forces centrales tendan- tes aufoyer C de l'Ellipfe de M. Caffini, néceffaires à une Planete, pour lui faire décrire vette Ellipfe dans cette hypo- thefe des tems. SoLur. Puifque (Solur. Prob. 3.) ds — À PDAs ? PORTE SEA, 14 auf TT 4225 OÙ prr—qrr = UPS dds LA dz° > lon Donc ( dt étant fuppofée conftante ) ÈS Sert eat à el dé GES EU A Dose auf dsdae, dxdr? Bxp—q _ —ardp=rppdrtprdgæipadr ,, ou RE ces en (à caufe dx=- d#Solüt. Lem, 2.) — 2%?+22?4r—prég—2paar p—q Xirdr (à caufe que ci-deflus, Solut. Prob. 3.dp= 32aammr dr — 8samm ccrdr, & dj = 404 mm ccrdr + 8aammr dr actndr+12cc"dt—8r"dr) = DES SCIENCES. 23$ 16aammaqrt—q4aammecqrr+ph—L12aammechprr —4q4aammpriHictprt—6ccpr+aprs —9pq = — — fera rxp— s lexprefion desforces centrales cherchées pour cette hypo- théfe des tems pris à la la maniére de Kepler dans l'Ellipfe de M. Cafini. Ce qw’il falloit démontrer. PROBLEME V. Au lieu © Ellipfe , foir le cercle ALB , tel que l'Excentrique des Anciens , [ur le diamétre AB duquel foiens deux points C & D également difians de [on centre K , ©’ que nous appellerons fes foyers , à caufe qu'ils nous vont tenir lieu des foyers de PEllipfe. Concevons préfentement que les Planetes décrivent ces cercles dans des tems (t) qui foient comme les angles A LD correfpondans aux Ares À L parcourus , ainfi que Sethus Wardus le fuppofe : c'ejt-à-dire, de manière que l'Arc A E( décrit du foyer D comme centre ) foit==t , ou dt =E e compris entre les rayons DL, D1, indéfiniment proches lun de l'autre. I s'agit de trouver les efforts ou les pefanteurs de ces Planétes en chaque point L de ces Orbes vers le foyer C gwoccupe le Soleil, comme fait la Terre dans PExcentrique des Anciens. SoLuT. Après avoir fait aufli CL, C}, indéfiniment pores l'une de l’autre , & l'Arc / ( décrit du centre C) equel rencontre CL en R; foit le rayon FL, avec FG & FO perpendiculaires fur L C & L D prolongée ; foit en- core CL=r, Ah=x, AL=5s,; R/—d2, avec AD ou BC—b, D L=— m préfentement variable , D Fou FC =œcy & AF— a; doùréfultea—b+e. Cela pofé, l’on aura L/ (ds), R!(dz):: FL (a), LG="%, De plus, L/(ds) LR (dr)::FL(ay FG—= me. Donc CG (VF C—FG) FY cor, Donc aufi CL(r) = EVE ir, ou rds— Ggiÿ Fire, IV. 236 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE adz=Voecds—aadr;& enquarrant, rr ds — 2ardsde —ccds—aadr—aadz=ccds —aads,ou 2ardz =rraa— cc xds(foit2nn—r#r+ , l'on aura de même, ds? —#dd, ue, En faifant dz confante , f— FF das rdr dr? dzds+rdrddz e°, En faifant dr conftante, f—=9 , raid as r d4z? dt? l DES SCIENEES. 243 dz*ds?—#ds5ddr 3°, En faifant ds conftante, f— ARR eo EE rdrdzdé Ce fontencore là fix Regles, qui en y prenant ainfi dx, ou dr, ou ds pour conftantes, donneront les mêmes forces centrales que celles qui fe tirent de la Regle dont on s’eft fervi par-tout ci-deflus, en y prenant de même r dx pour conflante , & y pour les forces que l’on appelle ici f: l'Effai en eft aifé à faire ; ainfi ne nous y arrêterons- nous pas davantage , non plus qu'aux cas des ordonnées LC,1C, &c. paralléles entre elles , dont les Regles font celles-ci mêmes mutilées feulement chacune du premier terme du Numerateur de fa Fraction. Tout cela, dis-je, eft trop clair pour s’y arrêter davantage. PL PARENS. Au refte, je crois devoir avertir que dans l'Art. rs. du premier des Mémoires de l’Académie de 1699. pag. 9. en citant M. Leibnitz & M. (Jean) Bernoulli, Profeffleur à Groningue , pour avoir trouvé lamême équation que 7y donne de lHochrone Paracentrique, jai oublié d'y citer de même M. (Jacques) Bernoulli, Profeffeur à Bâle, lequel outre la conftruétion qu'il a donnée de cette cour- be au mois de Septembre des Aëtes de Leipfic de 1694. en avoit aufli donné au mois de Juin de ces mêmes Ales, la derniére équation de Part. 16. de ce Mémoire , avec une maniére d'en démêler les variables , laquelle réduit cette équation à la précédente, ainfi qu'on l'y vœt réduite dans l’art. 17. de ce même Mémoire, Hhi Préliminai- res. I. Utilité de ce Mémoire. 2e Ce que les Anciens ont connu, & ce qu'ils ont pen- fé des organes ge la voix. Voy. les no- tes ala Lerr, x 244 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE DURS EN PES ES POLAR Sur les Caufes de la Voix de l'Homme, & de fès différens Tons. Par M Doparrt. O N ne peut trop approfondir les ufages des parties, ni parler trop précifément fur cette matiére. Cette recherche & cette exa@titude ne fe termine pas à des dé- couvertes purement curieufes, & abfolument inutiles. On ne peut regarder comme tel un des principaux fon- demens de la Théologie naturelle , & d’ailleurs la con- noiflance exaéte des ufages, eft fouvent très-néceffaire dans la pratique de la Médecine. Car, par exemple, comment appliquer avec intelligence les remédes utiles aux maladies de la Voix, fi on attribue la Voix à des par- ties qui n’y ont nulle part, & fi on ne fçait précifément quelle eft la partie qui la produit. * a Il y a plus de 1500 ans que Galien a dit que la glotte eft le principal organe de la Voix. C’eft une petite ouver- ture en fente longue de 4 à 8 lignes, à extrémité du ca- nal de l’âpre artére au fond de la gorge. La figure de cet- te fente , lorfqu’elle s’eft mife en état de produire la Voix, femble être compofée de l’interfeétion de deux cercles égaux. ? Voilà le principal organe de la Voix, felon Ga-b lien , ° qui femble être le premier qui ait reconnu cette c vérité. Cependant il eft clair par tout ce qui nous refte de l'antiquité fur cette matiére , que Galien lui-même auffi- 4 bien que tous ceux qui l'ont précédé, * ont crû que l’äpre e artére contribuoit par fon canalau fon de la Voix. f Carils # ont comparé fon ufage à celui du corps d’une flûte , & il eft certain que tous les Grecs qui ont fuivi Galien ont fup- pofé cet ufage de lâpre artére dans toute la pratique de la Médecine pour les maladies de la Voix, Tous les Mo- dernes dont j'ai connoiffance, fans excepter les Anato- 8 DES SCIENCES. 24$ h miftes , Vefale même * qui femble avoir affe@té de contre- dire Galien en beaucoup d’autres chofes, & les Auteurs qui ont écrit d'Anatomie depuis Vefale dans ce fiécle , & jufques à ces dernierstems, ont crû , comme les anciens, que lâpre artére avoit par fon canal au moins quelque part au fon de la Voix. Le feul Fabrice d’Aquapendente, qui ï écrivoit fur la fin du feiziéme Siécle ,‘ ne s’eft point expli- qué fur cela , & en a parlé comme un homme qui craint de fe méprendre. Mais aucun autre de ceux qui ont écrit depuis Vefale jufqu'à Fabrice , ou depuis Fabrice jufquà nous (au moins que Je fçache ) ne l'a imité dans cette retenue. # À | Cette contradiétion enveloppée de la Théorie Phyfi- que avec elle-même, &lacontradiétion manifefte entre ce qu'il y a de vrai dans cette Théorie , & la Pratique de la Médecine n'ont engagé à démêler la premiére contra- diétion , & à approfondir la feconde. Et à cette occafon, je crois m'être apperçù de plufieurs chofes que je regarde comme autant de vérités peut-être inconnues jufqu’à pré- lfent,! certainement moins connues qu'il n’auroit été à fouhaiter pour éclairer la Pratique de la Médecine, & pour la vérité de la Théorie phyfique. Voici le Sommaire de ces vérités. 1°. S'il eft vrai, comme on n’en peut douter , que la glotte foit le principal organe formel de la Voix, elle en eft l'organe unique, & le canal de l'âpre artére n’y peut avoir aucune part formelle. 2°.Si lâpreartére n'a pas à l'égard de la glotte l’ufage du corps d’une flûte à l’égard de fa languette , la bouche doit avoir à l'égard de la glotte lufage du corps d’un autre inftrument à vent d’une efpéce inconnue à la Mufique. 3°. La bouche ni les narines n’ont nulle part à la pro- duétion de la Voix, mais contribuent beaucoup au fon de la Voix, c’eft-à-dire à fa force & à fon agrément. 4°. La bouche ne fait rien à la produétion des tons, mais il eft évident qu’elle les favorife en s’y proportionnant, s°. Les proportions. de la concavité de la bouche avec Hhij 3. Occafion & Plan de ce Mémoire. 12. Propofitions qui en font. tout le fujer. CA 3° $e T1. 4. 8. Principes d'où dépen- dent les véri- tés qui feront établies dans ce Mémoire. I. Ze 246 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE les tons font très-probablement des proportions harmoni- ques. Ce ne font pas les proportions harmoniques prochai- nement répondantes à chacun des tons de la Voix, mais des proportions harmoniques éloignées. 6°. L'ufage de la bouche en ceci n’a nul rapport à celui du corps des fütes , ni des haut-bois , ni à celui du corps des jeux d'Orgue à bifeau. 7°. 1] n’a nul raport à l’ufage de la plüpart des tuyaux des jeux d’anche de POrgue ; hors ceux d’un feul de ces jeux, & feulement pour le corps du tuyau & non pour Panche. 8°. La glotte feule fai la Voix & tous fes tons. 9°. La glotte n’eft pas une anche. 10°. Son ufagene peut être bien expliqué par celui de Fanche des haut-bois, & beaucoup moins par les anches de Orgue. 11°. Ni par aucun inftrument à vent qui foit en ufage pour la Mufique. | 12°. Tout l’effet de la glotte pour les tons dépend de la renfion de fes lévres, & de fes différentes ouvertures, ce qui comprend manifeftement la plus grande merveille qui foit dans les mouvemens volontaires, & par conféquent une des plus fortes preuves que la Phyfique puifle offrir à la Théologie naturelle pour rendre fenfible , & comme pal- pable la fcience & la puiffance infinie du Créateur. C’eft en abrégé ce que j'ai deflein d’expofer au juge- ment de lAffemblée. Si les Anciens " & prefque tous lesm Modernes fe font trompés en quelques-unes de ces chofes & n’ont pas appercü les autres, il eft certain que ce n’a été ni manque de génie , ni faute d'application, mais par un cer- tain éblouiffement dont les plus grands hommes font capa- bles. En effet un efprit médiocre avec un peu d'attention, peut voir d’un coup d'œil la vérité & les preuves de prefque tout ce qui vient d’être énoncé en rappellant ces chofes aux principes de Mufique & de Phyfique les plus vulgaires. Les voici. La Voix eftun fon. Tout fon eft l'effet d'un air battu violemment, DES SCIENCES. 247 La matiére de la Voix eft l'air contenu dans les poul- mons , pouflé de basen haut, du dedans au dehors. Le refonnement de quelque fon que ce foit, & par conféquent celui de la Voix, fuppofe la Voixdéja formée &c n’eft que la fuite du fon. Les corps refonnans qui font vifibles, font ceux qui étant frappés de l'air porteur du fon , font capables de re- fléxion & de reflort , & par conféquent de vibration. Les corps fonnans & refonnans vilibles, fonnent & re- fonnent fuivant leur dimenfion en longueur. C’ef cette dimenfion qui leur donne le ton. Les corps refonnans refonnent particuliérement felon . l'égalité où les proportions harmoniques de leur dimen- fion, c’eft-à-dire ; de leur ton avec le fon auquel ils répon- dent; & ils y répondent plus ou moins, felon le degré de cette proportion, depuis l’unifflon & les proportions har- moniques les plus proches, jufques aux proportions har- moniques les plus éloignées. Tout cela fe trouve vrai dans tous les inftrumens de Mufique , mais plus fenfiblement dans les Inftrumens à vent, que dans les autres. Voilà les principes de tout ce que j'ai à dire fur la Voix & fur les tons de la Voix. Pour trouver tout le refte des vérités expofées dans ce difcours, il n’y auroit, par maniére de dire, qu'à fe laïffer aller au cours des conféquences qui naiflent immédiatement & très-naturellement de ces Prin- cipes. Refte à les expliquer , pour en épargner la peine à l'Auditeur. J'ai dit que l’âpre artére ne fait rien au fon de la Voix, ni au refonnement ; & j'avois crû qu'il fuffifoit de le dire, À & qu'il ne falloit qu'un coup d'œil, pour voir cette vérité ou 6. I. L’âprearté- ne fait que rnir la ma - dans les principes. Mais ayant communiqué ce difcoursà"tiére de la ‘ . . ë . » VOoi des perfonnes éclairées, leurs obje&tions :m’ont fait voir qu'il ne fera pas inutile de prouver cette Propofition ; dont la vérité eft très-importante à la pratique de la Médecine dans les maladies de la Voix. Il la faut donc prouver au moins fommairement. ; 248 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE On ne parle & on ne chante qu'en rendant l'air. Le ca- nal de l’âpre artére ne peut produire aucun fon de Voix que par l'air qui y paffe de bas en haut dans l'expiration. II faudroit pour cet effet que l'air qui y pafle durant qu’on par- le ou qu'on chante, y paffät non-feulement avec viteffe, mais avec violence. Or cela n’ef pas ainfi. Lorfqu’en chan- tant on eft obligé de reprendre haleine, on refpire avec une extrême vitefle , & toutefois fans bruit, parce que la lotte eft relàchée ; mais dans le chant aétuel , on rend l'air entement, & avec un ménagement extrême. De plus, l'air en fortant des poulmons, ne trouve rien qui lui fafle obftacle ni violence depuis le fonds du poulmon jufqu’au bas de l’âpre artére, paffant infenfiblement des bronches plus étroits aux plus larges. Il en trouve encore moins de- puis le bas du large canal de l’âpre artére jufqu’à la glotre exclufivement. Jufques-là nulle violence , donc nul fon. Br Mais cet air ménagé & pouffé lentement jufqu’à cet en- feule ph droit venant à fe préfenter à la glotte, étreflie par fes lé- la voix. vres plus ou moins bandées pour produire la Voix ou fes tons, & y paflant avec une viteffe plus ou moins grande , mais toujours précipitée: l'air fait & fouffre violence dans ce détroit, & par lui-même & -par le détroit en plufieurs maniéres qui feroient trop longues à expliquer. " Voilàn donc l'endroit précis du fon. Il eft donc tout entier de la glotte & point du tout du canal de l’âpre artére , encore moins du canal du larynx. Mais peut-être ce canal aura-t-il quelque part au refon- nement. Cela fe pourroit, fi on chantoit en refpirant l'air, mais on ne chante qu’en l’expirant. Or l'air pouffé lente- ment pale de viteffe par la glotte dans la bouche avec le fon dontil eft porteur ; & c’eft la bouche qui refonne & ré- pond à ce fon, & le fon ne peutrebrouffer dans le canal de lâpre artére au travers & contre le cours du torrent d'air qui pale de vireffe de ce canal dans la bouche par la glotte. Enqueleas CE n'eft pas que ce canal ne fût très-propre au refon- le canal de nement; maisil faudroit pour cela, ou que la glotte füt l'âre aéré au bas de l’âpre artére, comme elle eft dans plufieurs ef péces DES SCIENCES 249 péces d’oifeaux de riviére, qui par cette raïfon ont une très-grande voix, ou que dans l’homme dont la glorte eft au haut de l’âpre artére , la voix qui fe forme par un cours d'air de bas en haut , & du dedans en dehors, fe formât par un cours d'air tout oppofé , & qu’alors la glotte füt affez bandée pour jetter un fon ; & c’eft ce qui arrive manifefte- ment dans les toux convulfives , nommées vulgairement Quintes. Car après avoir touflé à perte d’haleine, Pair pompé violemment de dehors en dedans, & de haut en bas par la poitrine au travers de la glotte convulfée étre- cie, Jette en pañfant au travers de cette fente un fon plus aigu que celui de la toux, & quelquefois à la quinte de celui-ci, ce qui peut être la raifon du nom. Ce fon formé par le cours précipité de l’air pompé violemment de haut en bas , étant porté dans le canal de Päpre artéré , elle y répond par un réfonnement fi éclatant , que fouvent il fe fait entendre des maïfons voifines, & d’un côté de rue à l’autre. Mais ce fon n’eft pas la voix dont il s'agit ; & ce même fon fait voir par la raifon des contraires , que le canal de lâpre artére ne peut être dans l’homme à l'égard de la voix, que ce que le porte-vent eft dans l'orgue, & que l'ufage du corps de l’Inftrument à vent ne peut être imité que par la double concavité compofée de celle de la bou- che & de celle desnarines. Fabrice appelle par cette raifon cette double concavité, Canal extérieur. I] Pappelle ainfi pour le diftinguer du Canal intérieur, c’eft-à- dire, de la trachée artére. Je crois avoir prouvé que ce canal intérieur n’a nulle part formelle à la voix. C'eft dans ce difcours la feule vérité qui foit de quelque importance à la prati- que de la Médecine pour les maladies de la voix. Le refte regarde la Phyfique &c les arcs qui fervent la Mufique pra: tique. ! Quelque différent que ce canal extérieur paroïfle de ce- lui de tout autre Inftrument à vent par l'inégalité des par- ties dont il eft compoté , la plûpart étant mollaffes &c fem- blant peu capables de réfonnement ; il eft clair & avoué 1700. Ii pourroit avoit part au réfon- nement. be La concavité de la bouche n’a nulle part à la produc- tion delavoix, oo MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE maiselleyré- qu'il y fait un grand effet au moins par le palais & par les pond au plus narines , & fur-tout par les narines. Cela fe connoit par commeleica= 1 - à à nal d’un Inf. l’altération du fon de la voix dans les rhumes de la tête, ÉATT à & quandil arrive par quelque accident ou par une négli- ; gence affettée que l'air ne paffe pas avec liberté par le nés ou n'y pañle point du tout. Et ceci bien confidéré fait . voir que la concavité des narines fait beaucoup plus que la < as Douche à l’agréement de la voix, & combien ef fauffe la beaucoupplus phrafe populaire, parler ou chanter du nés, puifque quand le lip nés eft bouché, le fon de la voix n’eft défagréable.que par- la boucheà Ce qu'on ne chante & qu’on ne parle que de la bouche ;, lsgéemew & que le fon qu’elle jette weft pas mêlé de celui que voix, les narines ont coûtume d'y contribuer , comme chacun peut connoître en chantant la bouche fermée. Car alors on chante vraiment & uniquement par le nés. Cependant le fon de la voix n’a rien de défagréable , au lieu que fi on chante de la bouche feule, le nés étant ferré, & par con- féquent fans que le nés ait aucune part au fon de la voix, alors le fon de la voix de l'homme tient de celui de la voix du Canard ; ce qui eft proprement ce qui s’appelle, parler ou chanter du nés. Ceafitvorx Et c’eft ce qui donne lieu d’entrevoir , que toutes Les dif- qu'encoreque férentes confiftances des parties de la bouche, même de Box par celles qui font les plus délicates & les plus flouettes , con- fimple, elleeft tribuent au réfonnement chacune en leur maniére & très- us ja différemment , en forte qu'on peut dire que c’eft de cette ‘efpéce d’affaifonnement de plufieurs différens réfonne- mens , que réfulte tout l’agréement de la voix de l'homme inimitable à tous les Inftrumens de Mufique. Les Orga- niftes femblent vouloir imiter cette induftrie, car on ne tire prefque jamais pour un feul Regiftre en jouant de or- gue , n'y ayantaucun jeu entre les 24. ou 25.jeux des gran- des orgues , même parmi les jeux du fon le pi agréable , que les Organiftes n'accompagnent exprès de quelque au- tre , & dont l’agréement n’augmente par le mélange d’un ou plufieurs autres jeux. Il y a donc raifon de confidérer la bouche comme lé DES SCIENCES. 2çi corps d’un Inftrument à vent, au moins pour les réfonne- mens. 4: Il y a beaucoup d'apparence que ce réfonnement ne ,C°"élonne confifte pas en une réfléxion fimple , comme pourroitêtre la proportion le réfonnement d'une voûte , mais un réfonnement pro- % 12 Profon- portionné aux tons jettés dans la bouche aprèsavoir été for- cavité de la més par les différentes ouvertures de la glotte. Carla con- ponce, fee cavité de la bouche & des narines , s’allonge &s’accourcit; voix. & elle s’allonge toujours à l’occafion des tons bas, & s’ac- courcit toujours à l’occafon des tons hauts. Jai crû long- tems être Inventeur de cette obfervation , ne l'ayant trou- vée ni dans les Anciens, ni en aucun Auteur de ce fiécle. Mais en remontant je l'ai vûe bien marquée dans Fabrice d'Aquapendante , qui l’a enfeignée dès la fin du feiziéme Pfiécle , ° fans que perfonne que je fçache ait depuis fait au- cune mention ni aucun ufage de cette découverte. Cen'eft point Cet Auteur s'eft pourtant trompé dans quelques circon- Ron re p P quelques circon- äestons, flances de l'ufage qu’il a donné à ce canal extérieur. Car ce n’eft point pour former des tons que ce canal extérieur s’allonge & s'accourcit , moins encore pour les accords de quinte , d’oétave & de double oftave , à la maniére de la mais pour s’y trompette ; comme Fabrice Fa crû. Mais c’eft feulement proportion- pour fe proportionner plus favorablement aux tons hauts, qu'il saccourcit & quil s’allonge pour les tons bas. La preuve en réfulte des principes pofés pour le fon , le réfon- nement, les vibrations & les tons. Cette preuve fe confir- me en ce que le canal s’accourcit & s’allonge de plus en plus à tout changement de ton ; quel qu’il foit, petit ou grand, & même quelque leger que foit le changement. Caril s’al- longe de plus en plus , en baïffant de demiton en demi ton, de quart de ton en quart de ton, jufqu’au ton le plus bas. Il Saccourcit de plus en plus en hauffant infenfiblement juf- qu’au ton le plus haut, & jamais le ton ne baïffle ou ne haulle pour peu que ce foit fans être accompagné de ces changemens, felon qu'ils lui conviennent , en forte qu'on les doit fuppofer dans les moindres changemens deton, comme on le voit fenfiblement dans tous les tremblémens; car ils font tous compofés de haut & bas, de l'intervalle liÿ Le canalex- térieur nes’al- longe ni s’ac- courcit par lui-même ; mais par l’ac- courciflement & l'allonge- ment de l'âpre artere. Preuve dé- monftrative, 1. Que l'âpre artere ne fait rien aux tons nonplusqu'au {on de la voix, & 2. Qu'elle n’eft pas un fimple porte- vent, 952 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE d’un ton ou d’un demi ton majeur ou mineur qui ne diffé- rent au plus que d’un 9°. de ton. Aufli voit-on le nœud du la- rynx hauffer & baïfer alternativement & fenfiblement dans tous les tremblemens , hauffant pour le demi ton d’enhaut, & baiffant pour le demi ton d’enbas. Or le larynx hauffant accourcir le canal extérieur & l’allonge en s’abaiffant. Voici comment ce changement de dimenfion arrive. L'âpre artére fe raccourcir; & fe raccourciflant s’élargit elle-même à l’occafion de tous les abaïflemens de ton qui exigent une plus grande dépenfe d'air, tels que font les tons graves. Au contraire l’apre artére eft allongée & ban- dée , & par conféquent étreflie par l’afcenfion du larynx dans le fond de la gorge de plus en plus, à mefure que les tons vont montant, & par conféquent dépenfant moins d'air. Cet accourciflement & cetallongementfe rendent fenfibles par le hauffement & baiffement du nœud de la gorge. Cet accourciflement de l’âpre artére pour les rons bas, & cet allongement pour les tons hauts , eft une preuve dé- monftrative , non-feulement que le canal de lapre artére ne fait rien aux tons de la voix, mais qu'il ne répond pas même à ces tons par lui-même ; puifqu'il s’allonge quand il devroit s’accourcir , & qu’il s'accourcit quand il devroit s’allonger, s'il formoit ces tons ou s'il y répondoit. Mais je dois ajouter que cela prouve en même-tems que le canal de l’âpre artére fait beaucoup plus que les porte- vens artificiels, puifqu'il s’accourcit pour allonger, & qu'il s’allonge pour accourcir la profondeur du canal de la bouche à proportion de toutes les différences deton, de demi ton, & de leurs fubdivifions. Cela fuppofe une manœuvre prodigieufe dans l'exécution des 6. parties de la Mufique vocale : car à ne compter que les feuls tons ou demi tons qui s'exécutent par ces 6. parties , on reconnoît que le feul canal extérieur repréfente , au moins dans les fix parties de la Mufique , les so. tuyaux qui répondent aux $o. marches qui rempliffent les 4. oétaves de l'orgue, y ayant autant de tons & demi tons aufquels il doit répondre felon le degré particulier de chacun de ces tons & demitons, DES SCIENCES 253 fans compter les fubdivifions vulgaires du ton & du demi ton qui font monter ce nombre à une fomme beaucoup plus grande, c’eft-à-dire au moins à 216. car chaque oc- tave eft une intervalle équivalent au moins à 6. tons, tout le clavier eft donc équivalent à 24. tons ; chaque ton eft divifé vulgairement en 9. commas , quelques-uns lui en donnent 11, d’autres beaucoup plus, comme on verra ci- après. Or 9. fois 24. font 216. Le porte-vent dontil s’agit, c’eft-à-dire l’âpre artére , produit tous ces différens accour- ciflemens en s’allongeant, & tous ces différens allonge- mens en s’accourciflant dans une proportion reglée & fi délicate dans l'étendue de chacune des fix parties de Mufi- que , que les différences de ces changemens de l’âpre artére dans l'étendue de 4. oftaves qui comprennent l'étendue de ces parties de la Mufique , ne vont au plus qu'à la neuviéme partie d’une ligne. En voici la preuve. Une oëftave entiére n’exige au plus qu'un demi pouce de différence d’afcenfion ou de defcente du nœud de la gorge d’un bout à l’autre , c'eft environ 2. pouces pour 4. oétaves. Or dans 2. pouces il y a 24. lignes , dans l'intervalle defquelles il faut trouver au moins 216. divifions , ce qui fait un neuviéme de ligne pour intervalle d’une différence à l'autre. On verra ci-après de combien on devroit augmenter ce nombre de fubdivi- fions, fi on vouloit defcendre dans le détail des fubdivifions non-feulement poffibles, mais aétuelles , qui s’exécutent tous les jours dans les chants fans qu’on y fafle aucune réfléxion. Voilà pour le porte-vent ou canal intérieur. 1 faut mainte- nant voir en quelle proportion le canal extérieur , c’eft-à- dire , labouche , répond à toutes ces différences. Dans les flûtes , dans les haut-bois, & dans l’orgue dont tous les jeux fe rapportent à l’un ou à l’autre de ces deux genres d’Infrument à vent, tout le ton vient de la lon- gueur. Ces longueurs mefurées , felon les proportions har- - moniques , font invariablement affe@tées chacune à fon ton. C’eft pourquoi les Organiftes défignent le ton par Pcette dimenfion. Le C. fol ut d’enbas du Claveflin p eft à l'uniflon d’un tuyau de 8, pieds dans l'orgue. Le C. fol ur Jiii puifqu’elle s’allonge & s’accourcit à proportion que le canal extérieur a bt- foin de fe pro- portionner à 216.degrés de ton dans toure l'étendue de la Mufique, 52 En quelle proportion la concavité de la bouche ré- pond aux dif- férens tons & demi tons de la voix & à toutes les fub- divifions de cesintervalles, 254 MEMPHIRES DE L'ACADEMIE ROYALE d’après en montant fonne 4. pieds, felon la proportion de l'oétave d'un à 2, & ainfi dans toutes les 4. oétaves du Cla- vier , 2. pieds, un pied, demi pied & à proportion de tous les autres accords. La quinte dans la proportion de 2. à 3. La quarte de 3. à 4. & ainfi des autres. pur mn Cette mefure précife du canal ne fe peut fuppléer dans pas dans les TOUS les jeux qui font du genre des flûtes , ni même dans D 4 des 6. jeux d’anche qui ont tous rapport aux haut-bois , définiesparles Comme dans les jeux de l’orgue , nommés ja Trompette, moindres le Clairon , les Cromornes. Ce n’eft donc pas-là qu’il faut nombres ; : ; ) c'etta-dire, Chercher la caufe des tons de la voix de l'homme. Ce n’eft premieres, pas dans les flûtes , parce qu'on n’y peut jamais fuppléer la longueur pour les tons ni dans les jeux d’anche qui vien- nent d’être nommés , parce qu'il faut de toute nécellité qu'ils ayent cette mefure précife , non pas pour le ton, mais pour jetter le fon qui les diftingue entre eux & d’avec les flûtes dans Le ton qu'ils fonnent. Or il eft impoffible de trouver dans l’homme de femblables mefures. Preuve. La preuve en eftbienaifée. Le canal extérieur de l’hom- me, c'eft-à-dire la concavité de la bouche mefurée depuis les lévres jufqu’au fond de la gorge , ne peut avoir que qua- tre pouces & demi ou cinq pouces au plus quand les lé- vres font avancées , comme quelques voix de baffle les avancent quand elles veulent fonner leurs tons les plus bas. Le larynx dans fon plus grand abbaïffement qui accom- pagne toujours le fon le plus bas , n’y peut guere ajoûter qu'un pouce de profondeur. Pofons donc 6. pouces. Or les voix de Bafñfes bien creufes peuvent aller jufqu’à Punif fon d’un tuyau de 8. pieds de long , 16. fois autant que la profondeur de leur canal extérieur. On ne peut donc com- parer celui de l’homme au corps d’aucun des Inftrumens ; où la longueur ne peut être fuppléée. ni: Refte donc à voir fi nous trouverons cette comparaifon It se dans les jeux de la Regale à vent , a ou dans le jeu nommé q portions har- /’0ix humaine dans les grandes orgues. Fes Ces jeux font à l'union des plus grands jeux d’anche de l'orgue, dont le C. fol ut d’enbas a 8. pieds de long. DES SCIENCES. 25$ Cependant le plus long tuyau de la régale à l’uniffon de ce C. fol ut, n'a au plus que 4. pouces , & le plus long dans la voix humaine de l’orgue n’en a que 6. On peut donc dire que le canal extérieur de la voix de l’homme a quelque proportion avec ces jeux, & qu'il eft dans une dimenfion moyenne entre l'un & l’autre. Mais comment fe peut-il faire que ce jeu dans l'orgue foit à l’uniffon des grands jeux d’anche ? C’eft que dans ces jeux , l’anche fait tout leton, & le tuyau ne fait que favorifer le fon, au lieu que dans les autres jeux d’anche qui ont les grandes dimenfions , le ton n’eft pas feulement celui de l’anche, mais encore celui de la dimenfon du tuyau. Cela fe voit par l'accord de ces grands tuyaux d’anche qui confifte à ajufter le ton de l'anche au ton du tuyau. Cet ajuftement confifte à donner à la languette de l’anche aflez de lon- gueur pour égaler fes vibrations qui font comme celles des pendules à celles du tuyau, qui font comme les vi- brations des cordes bandées. Voilà la raifon de la dif: férence des grands jeux d’anche, & de celui qu'on ap- pelle voix humaine. Rien ne peut être comparé dans l’homme aux corps des tuyaux du jeu d’anche que tout le canal de la concavité de la bouche & des narines; car le tuyau très-court compofé de la partie du larynx qui eft au- deflus de la glotte , n'ayant guére que demi pouce, & étant incapable d’allongement & de raccourciffement, ne peut feul entrer en comparaifon avec le corps des tuyaux du jeu de voix humaine. Mais en quelle maniére le tuyau favorife-t-il le fon > même dans le jeu de voix humaine ? Eft-ce feulement en l'augmentant ? Eft-ce encore en s’y proportionnant C’eft certainement en la premiere maniére , car le ton de ces jeux eft fort éclatant. Et c’eft encore, & plus que probablement, en s’y proportionnant. Car dans la Rega- le, les tuyaux depuis le bas du clavier jufques au haut, vont diminuant infenfiblement depuis 4 pouces qui font 48. lignes jufques à peu plus de 12. lignes felon le progrès du fon le plus grave au fon le plus aigu; & dans la voix 256 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE humaine de l’orgue , les tuyaux vont en baïffant infenfible- ment depuis 6. pouces environ jufques à 4. pouces ou en- viron, felon le même progrès. qe ne Ce neft véritablement qu’en tâtonnant que les Faéteurs proportion ef arrivent à cette proportion. Mais cependant on y arrive, dérerminée & ou on en approche. Car c’eft ce qui fait la différence des pre D bons & des mauvais Ouvriers, des bons & des mauvais Set & par PONS e a ; des bons es m quel moyen ouvrages. Mais ne pourroit-on pas arriver à connoitre & parvenir à la à déterminer cette proportion ? Cela ne me paroït pas im- décerminer … poflible , fi on la cherche dans des diaparons aufli éloignés 5 Neal qu'il faut pour comparer les petites dimenfions avec les Faëeurs de grandes en quelqu’une des proportions harmoniques, &c Regal ävent. Leut-être en viendroit-on à bout ; de forte qu’on pourroit donner aux Faéteurs d’orgue une pratique certaine pour les jeux de Regale & de voix humaine en examinant les tuyaux de la Regale d'anche, comme fi c’étoirune Regale de percuflion. 3. Conf- En attendant que quelque autre plus habile & moins quencés de occupé que moi , éclaircifle cette difficulté, il me fuffit de fur l'efer du conclure trois chofes. La premiere que le canal extérieur ns exé- augmente ,tempere & modifie le fon, felon des proportions eur. LS . se éloignées , comme celles des tuyaux de Regale & de voix 1. Confé- . 3 u 5 HE Dhence: humaine dans | orgue; qui ne font connues jufqu’ici que par la feule expérience. L4 l_R802 2. Conf- La feconde conféquence eft que le canal extérieur ne guence. fait rien au ton; mais il faut avouer que fon effet eft pro- digieux pour le réfonnement, & cela fe connoït fur-tout par les voix de baffe. * Car j'en ai entendu plufieurs qui faifoient fonner les voûtes des Eglifes , ce que je n’ai pas L… Obfervé des tuyaux d'orgue de 8. pieds de long. ee Ils’enfuir de ce que le canal extérieur ne fait rien au ton; que tous les tons viennent de la feule anche de l’homme, c’eft-à-dire de la glotte. LaGleou. On la compare ordinairement à anche du haut-bois , verture de la & on a raifon , fi on ne confidére que l'ouverture de ER — June & de l’autre ; mais comme l'effet de l’anche du haut- "bois vient pour le moins autant de fa profondeur que de on * DES SCIENCES. 257 fon ouverture, cette comparaïfon n'expliquera jamais l’u- fage de la glotte ; & de plus, ileft certain que lanche des hautbois na nulle part au ton de cet Inftrument qui vient tout entier de la longueur précife du haut-bois, mais feu- lement au fon, puifque fans anche, il ne parleroit jamais. C’eft donc l’anche qui lui donne le fon > Mais point du tout le ton, puifque lInftrument ne parle qu’au ton de fa pro- pre longueur, & point du tout au ton de la longueur ou profondeur de fon anche; car le ton de l’anche ef infini- ment éloigné de celui de f'Inftrument. Voilà pour lanche des haut-bois. Ce qui regarde les anches des jeux d’anche de l’Orgue. Le reflort de cuivre nommé > Languette , qui fait fes vi- brations fur le demi-tuyau de ces anches de Orgue , nom- mé, Echaltte, a bien une diftance déterminée qu'on peut I. Ce n’eftpas comme l’an- che du haut- bois > Se ni comme l’anche de l'Orgue, -confidérer comme une efpéce d'ouverture ; mais cette ou- verture ef très-différente de celle de la glotte. Il eft capa- ble par fa fruéture de vibrations fenfibles à la vûe , au lieu que le fremiffement de l’anche d’un haut-bois n’eft fenfible qu'aux lévres du Joueur. Ces deux fortes d’anchs ont une profondeur très-confidérable, & ceft par cette profondeur qu’elles ont tout leur ton. On ne peut donc en faire aucune Comparaïfon avec la glotte , pour ce qui regarde la pro- duétion des tons. Car la glotte n’a nulle profondeur, que la double épaifleur d’une membrane & de Fécheveau de fibres charnues & tendineufes ; dont l'intervalle de ces deux membranes eft fourré , & tout cela enfemble ne forme pas à beaucoup près l’épaiffeur d’une ligne. Ce n’eft pas ailez pour tenir lieu de la profondeur de la moindre anche du plus haut-deflus; à plus forte raifon de l'anchela plus pro- fonde du baffonle plus creux. C’eft donc trop peu de pro- fondeur pour être comparée avec quelque autre anche que ce foit. Mais c’eft trop d’épaiffeur dans une :fi petite étendue; pour être capable de vibrations Proportionnées au grand effet de cette ouverture ; puifque ces vibrations jointes à certaine dimenfion d’ouverture > Vont dans certaines voix de 1700. Kk 3: ni par [a (eule dimenfion des vibrations de fes lévres, 4 €’elt par les vibrations de fes lévres ban- dées plus & moins, & par leurs différen- tes ouvertures mefurées fur le petitdiamé- tre de cette ouverture. 258 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE baffe jufqu’à l’'uniffon du C fol ut d’embas , ** c’eft-à- dire ; au ton qui réfulte des vibrations d’un tuyau de 8 pieds de long. Onne peut donc comparer la caufe qui meten branle les lévres de la glotte, qu’à celle qui fait refonner cette ef- péce dInftrument ( fi toutefois on le peut ainfi nommer) quiréfulte de l'effet d’un vent impétueux donnant dans le- papier entrouvert, qui joint un chaflis mal collé avec la: baye d'une fenêtre. J’appellerai cet Infirument , Chaffis bruyant , pour abréger. Il ne peut y avoir de vibrations dans la glotte, qui eft une: efpéce finguliére d’anche, que celle des lévres. Ces vibra- tions feront caufées par le frollement de l'air qui s'échappe avec violence d’entre ces deux lévres, & ces vibrations doi- vent être diverffées par les diférens dégrés d’approches ow d’éloignement mutuel de ces lévres diverfement bandées ê& contrebandées pour cet effet. On peut admettre ces vi- brations, & on peut même admettre dans ces vibrations ft courtes & fi preflées, une proportion mulicale indéfiniment éloignée avec les tons de la voix, femblable à-peu-près à celle qui fe doit fuppofer entre l'ouverture de l’anche d’un: baflon, ou de toute autre partie de hautbois, & le ton du: hautbois même. Les habiles Joueurs de haut-bois fçavent tailler leurs anches, felon cette proportion qui eft impor- tante pour tirer du corps de l’Inftrument tout Le fon dontil. eft capable , & qu’ils ne trouvent qu’en tâtonnant, guidés. par le feul ufage. Mais il ne feroit pas facile d'imaginer que les vibrations des lévres de la glotte, toutes proportionnées. qu'elles pourroient être au ton de la voix, auflibien que celle de l’anche du haut-bois, avee le ton du corps du haut-- bois, fuffent la feule caufe du ton; puifque , comme il 2: été dit & prouvé ci-deffus, le ton du corps du haut-bois ne. vient que de fa propre dimenfion , & point du tout de celle de for anche. Or il a été fuppofé ci-deflus , que le ton de: la voix dans l’homme ne peut venir de la dimenfion du corps de l’Inftrument, c’eft-à-dire , de la dimenfion de la profon- deur de la bouche & du nez. Il a d’ailleurs été prouvé , que: les tons de la voix de l'homme ne peuvent venir de la pro-- DES SCIENCES. | 35p fondeut de fon anche, c’eft-à-dire , de fa glotte, puifqu’elle men a prefque aucune ; & que quand elle en auroit autant que l’anche du haut-bois, elle ne pourroit feule produire les tons dont il s’agit, non plus que celle du haut-bois les tons du corps de cet Inftrument. Que refte-t-il donc? La bouche a trop peu de profondeur pour produire les tons qu'on remarque dans la voix de l'homme, la glotte a en- core infiniment moins de profondeur. On ne voit donc que la feule ouverture de la glotte jointe aux vibrations des lévres plus ou moins preflées, à proportion qu’elles font plus ou moins bandées, qui puifle produire les tons de la voix. Et voilà en quoi confifie cette efpéce inconnue d’In- frument à vent, fi ancienne dans la mature , puifqu’elle l’eft autant que le genre humain , & toutefois fi inconnue dans la Mufque des Inftrumens à vent, & fi inimitable à toute l'induftrie des hommes. L'Art qui a fçû tirer les Flûtes, les Orgues , les Cromor- nes & les Haut-bois, du fon que le vent produit, lorfqwil eft poufé fortuitement dans des Rofeaux & des Chalu- meaux , n'a pû rien tirer d’agréable du fon d'un Chaffis bruyant, quoiqu'il y ait obfervé tous les tons par le feul mou- vement d’un vent violent & orageux ; & par les feuls de- grés d’une vitefle inégale , la moindre produifant les tons de bañfe les plus bas, & la plus grande ceux de deflus les plus hauts, & tout cela par une feule ouverture , & par fes différentes vibrations. Mais ce que l'Art n’a ofé tenter juf qu'à préfent, le Créateur Pa fait; & par un cours tranquille d'air préfenté à une feule ouverture, diverfement modifiée, le même Créateur a fait dans la feule glotte de l’homme, fecondée du feul canal extérieur , le plus fonore, le plus agréable, le plus parfait & le plus jufte des Inftrumens , ou pour mieux dire , le feul jufte dans ce grand nombre d’In- frumens, foit artificiels, foit naturels. Car tous les autres d foit à vent, foit à cordes, excepté le violon feul, font faux en comparaifon de la voix; même les Inftrumens les mieux accordés. Kkij Refléxions fur la glot- te confidérée comme In- frument à vent. J. Explication cet ment, fommaire de Toftru- 2: Explication plus étendue de la Mécha- nique du mé- me Inftru- ment, & de fes trois diftc- rences d’avec le Chaffis. Premiére différence. Le Chañis bruyant ayant toujours la même ouver- ture , ne peut changer de ton que par Pimpulfon plus ou moins forte de l'air extérieur. L’Inftrument de la voix fe dilate & fe re- treflit a volon- té, & par-là fait la diffe- rence destons 260 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Cependant on ne peut comparer cet Inftrument fi par- fait pour la Mufique , qu'à l’Inftrument du monde le plus impraticable & le plus oppofé à la Mufique. Il faut donc en faire fentir la différence. L’Art du Créateur dans la fimpli- cité de cette Méchanique, & dans la multiplicité prodi- gieufe de fesufages, mérite toute notre attention, puifqu’on peut efpérer de découvrir une partie de cette admirable Méchanique. La différence du Chaffis bruyant & de l’Inftrument de la voix de homme, confifte en ce que ouverture du pre- mier étant toujours la même & incapable de fe modifier d'elle-même , elle ne peut changer de ton quepar une im- pulfon externe qui ne peut produire les tons les plus hauts que par une extrême vitefle qui dépend toute entiére de la feule quantité de l'air qui fe préfente à paler par l’ouverture, & de la violence de limpulfion qui caufe cette vitefle, & de Pagitation qu’elle caufe dans les lévres de cette ou- verture. Au contraire cette impulfion ne peut caufer les tons les plus bas que par une moindre vitefle d’une quantité d’air égale à la premiére, mais pouflée par un vent moins précipité dans la même ouverture , incapable d'augmenter ou diminuer par elle-même. D'où il s'enfuit que les tons aigus jettent toujours inévitablement un fon d'autant plus fort, qu'ils font plus aigus, & les tons graves fonnent d’au- tant plus foiblement, qu'ils font plus graves; fans que cela puiffe jamais être autrement , parce que la viteffe donne le ton à cet Inftrument, & que la force vient de la quantité d'air forcée. Or à l'égard de cet Infirument, la vitefle de l'air, la fréquence des vibrations dans les lévres de louver- ture , & la quantité de l'air doivent être toujours jointes pour produire les tons hauts, & féparées pour produire les tons bas. Au lieu que la glotte humaine ayant été rendue ca- pable de s’ouvrir & de fe ferrer plus ou moins, & la poitrine capable de pouffer l'air avec plufeurs degrés de force, la voix humaine eft rendue plus forte ou plus foible , comme on Veut en chaque ton, & en tous les tons.de fon étendue DES SCIENCES. 261 naturelle, en la maniére qui fera dite ci-après. Voyons donc d’où dépendent les mouvemens qui pro- duifent les tons de la voix humaine, & puis nous cher- cherons ce qui fait les différens degrés de force dans cha- que ton. La glotte humaine mife en état de former la voix, n’eft capable que d’un mouvement propre, c’eft celui de fes ké- vres qui confifte à s'approcher lune de l'autre par la con- trattion de leurs fibres qui eft toute leur aétion. Comme ces fibres font attachées fortement par leur extrémité antérieu- re, & fortement arrêtées par leur extrémité poftérieure & qu'elles font enfermées , chaque écheveau de chaque côté dans le pli d’une membrane double & affez forte, dont le reflort tend à éloigner les lévres l’une de l’autre ; tout le mouvement que peuvent faire ces fibres, en fe contraétant pour approcher les lévres , eft de diminuer leur courbure en forçant le reflort des membranes. Abfolument parlant, elles ont, quand on veut, affez de force pour changer en ligne droite la courbure naturelle qui tient les lévres de la glotte toujours entrouvertes pour la refpiration &c pour la voix, mais alors elles fe touchent l’une l’autre dans toute leur étendue, & fe touchent de forte & avec tant de force & de juftefle , qu'alorsun atome d'air ne fe peut échapper du poulmon, quelque quantité qu'il en contienne, & quel- que effort que puiffent faire tous les mufcles du bas ventre contre le diaphragme, & parle diaphragme contre ces deux petits mufcles ; mais alors comme la refpiration eft fuppri- mée , il ny a point de voix. On voit au moins par-là que fi ces fibres font capables d'une aëtion affez forte pour pro- duire le contaét mutuel des lévres de la glotte , elles le font à plus forte raifon pour s'approcher infenfiblement l'une de l'autre, & qu’elles ne font capables que de cela, & que la fermeté de leur attache devant , & de leur arrêt en arriére contribuent de telle forte à les en rendre capables, que fans cette attache & cet arrêt, elles ne ferviroient, ni à la voix, niau chant, ni à d’autres ufages moins nobles à la vérité; mais infiniment plus importans , plus fréquens & kuy & du fort & foible en cha- que ton, Cet Inftru- ment eft un fphinéter re- &iligne, capa- ble de s’étref- fir fans s’ac- courcir. Force de ce mouvement , qui dépend de deux tendons très-déliés. 262 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE plus néceffaires. Il eft pourtant vrai qu’elle contribue à fa dilatation pour les tons bas de la voix, mais ce n’eftqu’en fe relâchant & en obéiffant aux mufcles dilateurs du larynx pour lestons les plus bas. Cela pofé, nous avons déja droit de préfumer que les différens degrés d’entre-ouverture des lévres de la glotte produifent les différens tons de chacune des fix parties qui compofent la pleine Mufique ; fçavoir , Bafle , Baffe-Taille, Taille, Haute-contre , Bas-deflus & Deflus. Et voici com- ment. La voix ne peut être formée que par la glotte , com- me il a été prouvé; les tons de la voix font des modifica- tions de la voix; ils doivent donc être produits par les mo- difications de la glotte. Or la glotte n’eft capable que d’une feule modification ; cette modification eft l'éloignement & Papprochement mutuel de fes lévres. Ce doit donc être par-là qu’elle produit les différens tons de la voix. Cette mo- Variation dification comprend deux circonftances. L'une capitale & be cg, Premiére pour la produétion de la voix. L'autre qui n’eft blede fabdivi- qu'une conféquence de celle-là, mais une conféquence fi Le néceffaire & fi infaillible , que la premiére ne peut être fans vresde laglor. la feconde. La premiére eft que les lévres depuis le plusbas En ne ton jufques au plus haut, fe bandent de plus en plus ; la fe- de parcelles, Conde, que plus elles fe bandent, plus elles s'approchent. Il s'enfuit de la premiére que leurs vibrations feront d’autant plus fréquentes , qu’elles approcheront de leur ton le plus haut, & que la voix fera jufte quand les deux lévres feront également bandées, & faufle quand elles le feront inégale- ment, ce qui s'accorde parfaitement avec la nature des In- frumens à cordes ; il s'enfuit de la feconde, que plus elles haufleront de ton, plus elles Sapprocheront, ce qui s'ac- corde parfaitement avec les Inftrumens à vent gouvernés par des anches. Les degrés de contention dans les lévres font la premiére & principale caufe des tons, mais leurs différences font peu fenfbles & difficilement aflignables. Les dégrés d'approche ne font que des fuites inféparables de la contention , premiére caufe destons, mais il eft plus aifé de concevoir & d’afigner ces degrés. Tenons-nous- | DES SCIENCES. 263 en donc là ; pour donner une idée plus précife de la cho- | fe , & difons, cette modification confifte dans une ten- fion ,: d’où s’enfuit la fubdivifion nombreufe d’un inter- valle d’une très-petite érendue , mais quelque petite que foit cette étendue, elle eft ,phyfiquement parlant, capa- : ble d’une fubdivifion infinie. Voilà la préfomption , mais voici les preuves fenfibles. ILeft impoffible de voir comment fe fait cette fubdivi- Preuve de D'ÉERS SR £ ces fubdivi- fion , mais il n'eft pas difiicile de le fçavoir avec une en- ficns. | tiére certitude, & même de le déterminer jufqu’à un cer- tain point. 1. Chacun peut voir fans diffeétion les différen- x. Preuve: ces d'ouvertures de larynx dans les différens fexes, & ** dans les différens âges de chaque fexe. *** On trouvera moins d'ouverture de glotte & moins de profondeur de canal extérieur dans les âges & dans le fexe les plus pro- pres à chanter le deflus , & on trouvera tout le contraire dans les âges & dans le fexe le plus propre à produire les tons ; qui demandent plus d’air & moins de viteffe dans le mouvement, c’eft-à-dire, à chanter les parties du miliew & les baffes. 2. Chacun peut fentir manifeftement en foi- 2. Preuve: même le reflerrement de cette ouverture, faifant reflé- xion fur ce qui fe paffe dans fa gorge , toutes les fois qu’il veut pañfer du filence à la parole , & de la voix de la pa- role à celle du haut, & fur-tout aux tons hauts de fon éten- due muficale ; car ces deux voix font très-différentes, mê- me fans changer de ton. 3. On fent aufli la différence des 3. Preuve: degrés de ce refferrement depuis le fon moyen. de Féten- due de fa voix jufqu’aux plus hauts , fur-tout quand on pañle immédiatement d’un ton au-deffus du moyen à la quarte, à la quinte, ou à la fixiéme au-deflus , & particuliérement- quand cette fixiéme éft forcée. 4. On voit les ouvertures 4 Preuve: des anches des différentes parties de Mufique dans le haut-- bois, & on obferve que les anches de baffon de haut- bois font pour le moins doubles des ouvertures desanches: de deflus, & à proportion plus grandes que celles des an- ches de la partie du milieu. 5. On fçait que pourtirer le fon de quelque anche de haut-bois que çe foi, il faut la ferrer: 5. Preuve: Conféquen- ces de ces preuves. 1. Confee quence. 2. Confk- quence. 3. Confé= quence. Seconde dif- férence. 264 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE entre fes lévres jufqu’à un certain point, ce qui ne fe peut fans diminuer fon petit diamétre. 6. On fçait enfin quefi on embouche lanche féparée de l'Inftrument, quañd un prefflement moderé des lévres l’a mife en état de jetter fon ton naturel, fi on vient à la ferrer davantage le ton eft hauñé, de forte qu'un homme habile & exercé à jouer du haut-bois, lui peut faire jetter fucceflivement plufieurs tons différens. J’ai vü M. Filidor pere, parcourir de fuite tous les tons & demi-tons d’une oétave , & par-delà fur une anche de baflon féparée du corps de lInftrument. Il eft donc certain que les différentes ouvertures de la glotte produifent ou au moins accompagnentinféparable- ment différens tons tant dans les Inftrumens à vent natu- rels, comme la glotte humaine, que dans les Inftrumens à vent artificiels , comme les différentes parties de la fym- phonie des haut-bois & en une autre maniére dans les dif férens tuyaux des jeux d’anche dans POrgue. Il eft encore certain que la diminution de l'ouverture hauffe le ton de la glotte & des anches, & que Paugmen- tation de cette ouverture baiffe le ton. Il eft enfin certain qu’une moindre ouverture hauffe le ton, parce que l’air y paffe plus vite, & par conféquent avec plus de violence, & qu'une plus grande ouverture le baïfle , parce que l’air y pafle moins vite, & par confé- quentavec moins de violence. Et de-là vient que fi on donne le vent plus foiblement à quelque anche que ce foit , le ton baïfle; & qu’il hauffe quand on poufle le vent plus fortement. Et c’eft pour cela que les jeux de flûte & d’anche de l’Orgue fonnent également & jufte que ceux qui font embouchés par des Joueurs de flûte & de haut-bois, parce que l’impulfion de Pair ne varie pas dans l'orgue étant gouvernée par les poids invariables qui baif- fent les fouffiets, au lieu que les Joueurs de flûte & de haut-bois, pouffent l'air, tantôt plus tantôt moins, de for- te que fouventils fonnent faux. Cette viteffe du pañlage de l'air par la glotte, ne fuppo- fe nulle précipitation dans le cours de l’air contenu dans le DES SCIENCES. 265 le porte-vent de l'homme, c’eft-à-dire, dans le canal de du Chaïis & l'âpre artére. Au contraire elle fuppofe dans ce canal un Éd se cours d'air paifible & égal dans toute forte de tons. Ce- fente à celle- pendant les différens tons de la glotte viennent des dif. f frs impé- férens degrés de viteffe de l'air fortant par cette ouverture. Mais c’eft parce que cette ouverture s'ouvre plus ou moins. Or fi une même quantité de quelque liqueur que ce foit pouflée par la même force dans un même tuyau, fe préfente fucceflivement à des iflues ou adjuftoirs de dif- férens diamétres , elle pafera beaucoup plus vite par l’ad- juftoir de moindre diamétre , que par celui du plus grand. Cela fe voit très-fenfiblement par les différens adjuftoirs s des Fontaines Jjailliffantes. $ Or la glotte eft un adjuftoir qui fe diverfifie lui-même à l'infini par la facilité qu'il a d'augmenter fon diamétre & de le diminuer en tout degré entre les extrêmes de fon augmentation & de fa diminu- tion. C’eft affez parlé de la caufe de la diverfité des tons pour mettre dans quelque évidence la premiere merveil- le de lInfirument de mufique naturel donné à l’homme. Car on voit affez que le poulmon de l’homme érant un aflez petit réfervoir d’air pour donner jeu à cet artifice d'air nommé, la Voix muficale , durant de longs ports de voix, ou de longs paffages compofés de doubles & triples croches qui ne foufirent nulle interruption & nulle reprife d’haleine , il étoit befoin d’un extrême ménagement dans la dépenfe de l'air en réferve pour ne pas demeurer court, - & lon voit en même-tems que le Créateur a prévenu cer inconvénient par le feul expédient de rendre la glotte capa- ble de s’étreflir & de fe dilater. La feconde merveille de la glotte , qui fait fa troifiéme moigeme différence d’avec le Chaflis, eft d’avoir été rendue capa- diférence du ï ble non-feulement de produire tous les tons de RE cl de la voix , mais encore tous les degrés de fort & de foi- le-ci peut af- ble dans chacun de fes tons, & cela, par le même expé- Pre dient de rendre la glotte capable de s’étreffir & d’être di- & fortifier les latée. Et voici comment. Le fon dépend de la vîteffe ; Le 1° 2. 1700. L1 % Par quel ex- pédient ? 8. Refléxions fur trois gran- des merveilles remarquables dans les cau- fes de la voix de l’homme. 266 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ton, du degré de la viteffe de l'air s’échapant par la glot- te & de l’intervalle de fes vibrations; la force, de la quan- tité de l'air augmentée ; la foibleffe , de la quantité de l'air diminuée. Comment donc peut-on conferver le même ton & augmenter la quantité de Pair ? car une plus grande quantité d'air paffant par la même ouverture , doit pafler plus vite, & par conféquent hauffer le ton. Or nous fup- pofons que le ton eft toujours le même , foit que le fon foit plus fort, foit qu'il foit rendu plus foible. C’eft que la glotte fe dilate pour laïfler échaper plus d'air, & fe reflerre pour en laifler échaper moins, &c fe dilate préci- fément autant qu'il faut pour le degré de force qu’on lui veut donner, & fe eue précifément autant qu'il faut pour pafler du fort au foible fans changer le ton. Car il eft abfolument indifférent pour la vitefle de l'air, ou que plus d'air fe préfente à la glotte dilatée autant qu'il faut pour laifler pañler cette quantité d’air de la même vitefle qu'auparavant pañlant du foible au fort, ou de la reffer- rer précifément autant qu’il faut pour conferver le même degré de vitefle à une moindre quantité d’air paffant du fort au foible. C'eft dans cette proportion & dans cette juftefle que confifte la merveille de cette manœuvre, dont lefuccès, pour maintenir le ton dans le changement de force, dé- pend d’une compenfation que l'intelligence humaine n’eft pas capable de déterminer à beaucoup près, aufli jufte que l'inflinét l’exécute. Il ne faut qu'un peu de réfléxion pour développer cette double merveille de la produétion des tons , & du fort & foible dans chacun des tons, & pour faire fentir outre cela combien les mouvemens volontaires de la glotte , nécef- faires pour produire les différens tons en tout degré de force , font admirables dans leur délicateffe, dans leur jufteffe & dans leur promptitude, & combien ils font com- pliqués dans le cas du fort & du foible dans le même ton. Cependant on connoît par expérience & par le jugement d'une oreille jufte & exercée combien ils font faciles , prompts , fürs & juftes nonobftant cette complication. DES SCIENCES 267 Ce font trois circonftances différentes , délicatefe , juftefle - & promptitude , qu'il faut confidérer féparément pour ne rien confondre. On entrevoit déja toutes ces fuites, mais on s'appercevra par ce qui fuit, de la différence qu'il y a entre concevoir en gros les ouvrages naturels & les fuivre en détail. Pour connoître donc jufques à quel point va la délica- tefle des mouvemens qui produifent les tons, il ne faut que confidérer ce qui fuit. Il faut fe fouvenir que l'ouverture d’une anche de baffe de haut-bois embouchée, n’eft au plus que d'une ligne, & que celle d'un deflus embouchée, n’eft au plus que de demi-ligne. Il eft plus que probable qu’à l'égard des ou- vertures , on peut faire la comparaifon de la glotte hu- maine à l'ouverture de l’anche d’un haut-bois. On peut donc juger des dimenfions de l’ouverture de la glotte hu- maine en ation par la dimenfion d'une anche de haut-bois. Le preflement moderé des lévres du Muficien qui em- bouche cette anche, lui ôte quelque chofe de cette ou- verture , & il eft certain que dans toute anche & dans la glotte d’une voix de deflus , comme de toute autre voix , le retrécifflement néceffaire pour produire le plus haut ton, doit laiffler encore quelque diftance entre les deux lévres de la glotte pour le pañlage de l'air, car fans cette diftance il n’y auroit point de voix. Voilà donc le petit diamétre d’une glotte de deflus réduit par ces deux retranchemens environ à un quart de ligne , mais je veux bien lui laiffer la ligne, entiére comme à une anche de Baf- fon. Je ne donne d’abord à cette voix de deflus que deux oûtaves. On en peut mettre davantage pour ce premier ordre de divifons, fans y rien affecter. Car j'ai un exem- ple vivant de plus de feize tons entiers d’étendue de voix leine , fans compter les tons forcés haut & bas. On ne Ée compte pasen Mufique, mais on pourroit les compter en Phylique; car enfin ce font des tons moins agréables à la vérité, mais pourtant très-juftes & très-fenfibles , pro- duits par la glotte. Je veux pourtant bien PH cet avan- AU: Lili 1. Merveille dans la délica- tefle des mou- yemens qui produifent les tons. Jufqu’où va cette déli- cateffe. 1. Desré de fubdivifon dans le petit diamétre de la glotte en 12. parties. 2. Depré de fubdivifion en 1204, 268 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE tage , pour ne donner aucun lieu de penfer qu’onaffeête le merveilleux. Quand l'exemple de cette étendue feroit unique, il n’en eft pas moins vraf, ni la fubdivifion moins effe&tive & moins actuelle , mais on trouve affez de femblables exemples quand on les cherche, j'en connoiïs deux autres , l’un en Deflus, Pautre en Bafle prefque d'une aufli grande éten- due.+ Les voix de baffe ont ordinairement plus d’étendue + que les voix de deflus. On pourroit donc compter dans l’exemple de ce deflus feize tons entiers & quelque chofe de plus. Mais comme ces exemples ne font pas communs, contentons-nous d’une érendue moins extraordinaire qui eft de douze. Voilà déja Fouverrure de la glotte qui n'a, même celle d’une Baffe, qu'environ une ligne de petit diamétre divifée en douze par- ties. L'art divife une ligne en fix dans les mefures vulgai- res, pour l'exactitude & la facilité du toifé. On peut donc aifément comprendre que la nature le peut divifer en douze. On fçait même qu’elle le divife aétuellement en douze, puifque l'étendue ordinaire de a voix va à fournir deux octaves qui font douze tons entiers, & on comprendroit encore une plus grande divifion , fi on avoitun femblable fondement de la croire, puifque l'art même peut divifer la ligne en plus de trente-deux parties. Aufh efl-ce un axiome, comme il a été dit, que toute quantité eft, phyfiquement parlant , divifble à l'infini. à Voyons donc s'il y a quelque fondement de croire en ceci une plus grande fubdivifion. Cela me paroit indu- bitable , fi un ron fe peut fubdivifer. Or tout le monde fçait qu'il fe fubdivife premierement en deux demi-tons , puis en neuf ou onze parcelles que la Théorie de la Mufi- que appelle , Comas , comme il a été dit. Les Phyficiens le peuvent divifer prefque autant qu'ils veulent. Car fi deux chordes étant à Puniflon parfait fur un monochorde ;, on accourcit l’une des deux d'une 2000. partie de fa longueur, une oreille jufte s’apperçoit de la Batisnbé qui n’eft que B 4m partie d'un 49m, c'eft-à-dire , 2 de ton ; L'expés DES SCIENCES. 269 rience en a été faite par M. Sauveur. Or une voix jufte qui a entonné à l’uniflon des deux avant la diflonance , entonnera fur le chant le fon de la chorde accourcie. Aufli ai-je oui dire à un Mathématicien illuftre, qui eft tout _enfemble très-bon Mufcien & pour la voix , & pour plu- fieurs fortes d’Inftrumens , ce que j'ai éprouvé cent fois en moi-même que la fubdivifion d’un feul ton, pris par l'aniflon & conduit par nuances infenfibles jufques à un autre ton prochain, n’a prefque pas de bornes. Il faut pourtant la borner quand ce ne feroit que pour fe rendre intelligible & laifler quelque idée de tout ceci. Le Ma- thématicien que je viens de citer, divife l’oétave en 810. parties égales. L’oftave eft équivalente à 6. tons entiers & un peu plus. Les comptant égaux, c’eft pour. chaque ton 135. parties égales. Ce n’eft pas un calcul en l'air pour la fpéculation pure, c’eft une divifon effective exécurée fur un Monochorde inventé & conftruit pour l'accord du Claveflin fans tâtonner , & vérifié par la pratique. Et en effet on s’en fert pour accorder cet Inftrument par l’unif- fon avec les différentes divilions de ce Monochorde dé- terminées par les nombres affe@tés à tous les tons , ou juftes comme les oétaves , ou temperés comme toutes les autres marches du clavier. Je pourrois donc fuivre ce cal- cul, mais je me contenterai de celui de M. Sauveur, il donne à chaque intervalle d’un ton à l’autre , c’eft-à-dire au ton moyen 40. parties qu'il appelle , Heptamérides , cela fait pour deux ottaves, c'eft-à-dire pour 12. tons. 602. Heptamérides. Ces Heptamérides font très-fenfibles , car c'eft précifément la différence d’une quinte temperée pour Faccord du Claveflin ou de l'Orgue à une quinte jufte. Or il n’y a point de Muficien qui n’entonne aïfément cet- te différence, puifqu'il n’y a point de voix jufte qui n’en entonnêt la 4. partie à l’uniflon de quelque Inftrument, comme jai dit, mais contentons-nous de la moitié dou- blant donc le nombre 602. nous aurons le nombre 1204. Voilà le fecond ordre de fubdivifion dans l'intervalle dé moins d'une ligne. Voicile 3°, FHPTOTEUEE JOIE Ltiÿ 3. Depré de fubdivifon en 9632. parties. Ces parties fonc propor- tionnelles, in- égales. 270 MEMorres DE L'ACADEMIE ROYALE Le fon de la voix dans chacun de ces tons peut être affoibli par des nuances infenfibles. Cet affoibliffement uppofe néceflairement & démonftrativement , felon ce qui a été dit, qu’on modére le vent, & que la glotte fe reflerre. Tous les Joueurs de haut-bois le pratiquent ainfi & ne peuvent faire autrement , comme on voit par la pra- tique , & même par la Théorie. Car ce plus & moins ne change nullement le ton. Delà vient un 3°. ordre de fub- divifion dans l'intervalle de moins d’une ligne, & cet or- dre confifteà multiplier le nombre précédent de tons dif- férens , & par conféquent d’autant de diminutions diffé- rentes d’un diamétre de moins d’une ligne par le nombre des nuances d'affoibliffement. Or ces nuances font innom- brables en rigueur, au moins eft-il imporflible d’en déter- miner le nombre. Réduifons-le pourtant à un nombre précis , & contentons-nous de 4. Difons donc : quatre fois 1204. font 4816. Mais ce n’eft pas tout, car toutes ces di- vifions dans le petit diamétre de la glotte fuppofant l’appro- che mutuelle de fes deux lévres , il s'enfuit delà qu’elles doivent partager également entre elles ces degrés d'appro- che quelque délicats qu'ils puiflent être. Doublons donc le nombre 4816. & difons, deux fois 4816. font 9632. Si quelqu'un trouve ce calcul outré, qu'il confidére qu'il s’agit ici de la glotte d’un deflus qui ne peut guére avoir dans la voix actuelle qu'un quart de ligne d'intervalle, ce qui qua- drupleroit le nombre ci-deflus. Voilà donc un diamétre de moins d’une ligne divifé ac- tuellement en 9632. parties. Ce nombre de fubdivifons d'un fi petit intervalle paroïît furprenant. Cependant il me paroït bien prouvé, & il eft certainement beaucoup moindre & moins merveilleux que celui que le Créateur y a produit, Car outre que j'ai donné l'ouverture de l’an- che du Baffon à l'anche de deflus, j'ai abandonné à cha- que degré de fubdivifion des nombres de multiplication beaucoup plus grands , que ceux fur lefquels j'ai compté. Et outre cela, j'ai fuppofé les parties égales au lieu qu'il eft certain qu'elles font inégales. Mais de quelle mégalité, DES SCIENCES. 271 & en quelle proportion ? Car il femble qu'on peut enco- re aller jufques-là, puifqu’on doit confidérer les lévres de la glotte, comme des chordes bandées. Or quoique, fe- lon le calcul de M. Sauveur, les 30 1. Heptamérides de l’oc- tave foient des parcelles égales entre elles ; néanmoins ces divifions étant appliquées aux chordes, l’étendue des chordes eft divifée inégalement par cette application ; de forte que la premiere Heptaméride occupe fur la chordeun plus grand efpace que la feconde , la feconde que la troifié- me , la troifiéme que la quatriéme , & ainfi de fuite jufqu’à la derniere. Cette inégalité eft réglée dans la proportion de 435. à 434. & cette proportion eft démontrée par le même Auteur. Cela étant, la premiere Heptaméride occupera une 435€. partie de toute la chorde, & la feconde, un 435e. du refte de la même chorde, & la 3°, un 435çe. de la même chor- de ; moins l’efpace occupé par la premiere , & la feconde Heptaméride , & toujours ainfi depuis la plus baffle Hepta- t méride jufques à la plus haute. | ; u Tout cela eft fort comprehenfible : “ mais qui peut com- prendre fans ladmirer , 1. une divifion aétuelle fi innom- brable en un fi petit intervalle , & fi inégale dans fes parties ; & 2. une inégalité fi proportionnée entre des parcelles fi innombrables , & fi inégalement inégales ? C'eft ce que j'avois à dire fur la délicateffe des mouve- mens des deux lévres qui conflituent l’ouverture nommée glotte & qui la refferrent pour la produétion des tons & par- celles de tons. Il faut maintenant dire un mot de la mer- veille qui s’enfuit de la jufteffe. On peut dire en un mot fur la jufteffe de la voix, 2. Merveille, que ces mouvemens étant aufli délicats qu'ils font né- nn ceffairement , pour produire leur effet , doivent être & teffe. font effeétivement très-précis dans cette délicatefle ; & fi précis qu'il eft impoflible qu'ils s'écartent du plus au moins; ou du moins au plus d’une petite partie du dia- métre d’un filet de foye qui eft plus de 7. fois moindre que celui d’un cheveu , étant impoflible qu'une oreille jufte & 3. Merveille, la promptitu- de. 9. Réflexions fur l'avantage qu’on peut ti- rer de ces mer- veilles pour la Théologie na- eurelle. °72 Memoires DE L'ACADEMIE ROYALE fine ne s'en apperçüt; car Pintervalle d’une ligne ne con- tient au plus que 25. fois le diamétre d'un cheyeu médio- crement fin, d'où il s'enfuit que chacune des divifions fup- pofées par la derniére multiplication eft moindre que la 3842. partie du diamétre d'un cheveu. Le diamétre d'un filet de foye plate, n’eft au plus que la 7e. partie du dia- métre d’un cheveu. Je dois cette précifion à l’adreffe de M. Homberg qui en a bien voulu faire l'expérience à ma priére ; j'ai donc reconnu par mes yeux un fait d’où il s’en- fuit que la 4. partie du diamétre d’un brin de-foye , feroit égale à chacune des fubdivifions de la glotte du 3°. degré, fi ces fubdivifons étoient égalesentr’elles. Ainfi fi on y fait quelque faute inconnue à l'oreille , elle ne fçauroit être que de beaucoup moins d'un $4£ de diamétre d’un filet de foye, puifque les derniers degrés de fubdivifion font fenfibles à l'oreille, & que chacun eft égal au plus au $4. d’un fi petit diamétre , & la plüpart incomparablement moindres. Voilà pour la jufteffe. Pour la promptitude avec laquelle les deux lévres de la glotre fe mettent en état de produire des mouvemens fi délicats & fi précis, il fuit de confidérer qu'une voix jufte conduite par une oreille fine, prend quelque ton que ce foit dans fon étendue fans héfiter , & que ce ton pris, elle parcourt tous les tons & les intervalles du mode paf- fant de l’un à l’autre, fouvent avec une vitefle de triple croche tant que l’haleine peut fournir dans de longs paffa- ges, & d’un bout à l’autre d’un air durant plufieurs mefures dans les diminutions. Ces trois circonftances font merveilleufes & toutefois très-comprehenfibles ; mais il en réfulte très-manifefte- ment ce qu'on appelleroit , miracle, s'il n’étoit ordinaire, & qu'on doit par conféquent regarder philofophique- ment comme un miracle. On me permettra donc de l’ap- peller ainfi. Ce miracle connu de tout le monde depuis qu'on s’eft avifé d'y faire réfléxion eft perpétuel , général ë& aufli certain que tout ce qui vient d’être dit, mais in- finiment plus admirable , parce qu'il eft abfolument incon- cevable DES SCIENCES. 273 cevable en nature. On le trouve pourtant dans tous les mouvemens volontaires, mais il éclate en ceux-ci plus que dans tous les autres , & c’eft pour cela que j'y appli- que cette réflexion qui eft devenue vulgaire depuis M. Defcartes. La voici: L'effet de tous ces mouvemens fi délicats, fi juftes & fi prompts, eft commandé par une intelligence créée qui ne connoït pas ces mouvemens , qui par elle- même n’a nul pouvoir {ur les Inftrumens qui les exécutent, qui ne connoït en nulle maniére ces Inftrumens, ou qui n'y fait nulle attention, quine conçoit en nulle maniére les mouvemens qui doivent produire cet effet, & qui n’a pourtant qu'a vouloir l’effer, pour fe faire obéir par les caufes méchaniques qui les produifent d'une maniére qu’elle ignore , c’eft-à-dire , par des parties inconnues qui ne connoiflent ni l'intelligence qui leur commande »nice qu'elle leur commande. Ce miracle fe trouve , comme j'ai dit, dans tous les mouvemens volontaires ; mais on peut affürer qu'il ne fe voit en aucun de ces. mouvemens d’une maniére fi merveil- leufe , que dans ceux qui appartiennent à la Mufique , tant infirumentale que vocale. Il fera facile de s’en convaincre de plus en plus, en confidérant à l'égard des Inffrumens ce qui s'exécute par un feul homme, & ce qui fe doit pañler dans la tête de cet homme , jouant des diminutions fur le Luth, préludant à l'improvifle fur l'Orgue , accompagnant d'oreille fur le Thuorbe, fur le Claveflin, &c. mais fur- tout en examinant , fuivant ce Mémoire, ce qui fe pafle dans lInftrument de la voix. MER Toutes ces réflexions & plufeurs autres que Je fupprime, peuvent aifément venir en l'efprit de tout homme atten- üf, & cependant à proportion de l'intention de ceux qui voudroïent y entrer, elles peuvent devenir très-utiles. Car leur effet naturel doit être d'élever l'efprit jufqu'à ce qu'il ya de plus grand dans la Théologie naturelle ; qui eft la plus importante & la plus noble de toutés les connoiffan- x ces humaines. x 1700. Mm 274 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE C'eft ce que j'avois à dire fur les caufes de la voix & des tons différens qu’elle peut produire dans le chant, Je ne prétens pas avoir épuifc cette matiére, Ÿ mais je crois n’a- y * voir-rien dit que de vrai. Les merveilles que j'ai expofées font grandes, fi les caufes que j'ai rapportées font vraies. Si elles ne l'étoient pas, il y auroit d’autres caufes plus ca- chées, & peut-être hors la portée de l’efprit humain, & alors l'ouvrage du Créateur n’en feroit que plus admirable. NOTES SUR LE MEMOIRE PRECEDENT. a ts traiter avec intelligence. . . . . . Quelques perfonnes : d’ailleurs très-intelligentes ont cfû que ce quil peut y avoir de nouveau dans ce Mémoire fur l’établiflement, non tant du prin- cipal , que du feul organe du fon de la Voix ; & fur l’exclufion de tout autre organe, même du canal de l’âpre artére, alloit à rendre curable toute maladie de la Voix, & que je l’avois voulu faire en- tendre aïinfi. Mais rien n’eft plus éloigné de ma penfée. Les vérités que j'efpére établir ici fur cet article, peuvent éclaircir la pratique de la Médecine, mais non en aflurer le fuccès ; épargner des remédes. fuperflus , mais non en indiquer de décififs. b L'interfection de deux cercles égaux. . . . : + Quand il fuffit de refpirer ou de parler bas , ou de fouffler , cette ouverture eft à-peu-près comme un triangle ifofcele mixte, à - peu - près reétiligne par la bafe ; curviligne parles deux côtés. Alors le mufcle aritænoiïdien eft relâché, & les deux côtés écartés au fond de la gorge, forment la bafe de ce. triangle ; mais quand on veut former la Voix, alors le double mufcle aritænoïdien s’accourcit , & les deux côtés du triangle écartés, fe joi- gnent enfemble au fond de la gorge, & fe fixent au bord inférieur de Varitænoïde ; comme ils font toujours joints en devant, où la pointe de l'angle antérieur eft fixe vers le bas du Thyroïde. Voyez la Fi- gure fous le renvoi r. | e_ Voila le principal organe de la Voix , felon Galien. . . . . Voyez WII. de l'Ufage des Parties, Ch. 13. &'en d'autres endroits , comme VII. Ch. $. VIII. Ch. 1. XIII. Ch. 6. où il dit que c’eff le larynx, fans défigner autrement la glotte. d Cependantil eff clair que Galien lui-même . . . . . au méme Ch: $S- du Livre VII. de l'Ujage des Parties. DES SCIENCES 27$ & Tous les Médecins qui l'ont précédé. . .... On peut compter vingt-quatre de ces Auteurs , la plüpart plus anciens que Galien, quelques-uns fes Contemporains, qu’il cite au Livre VIL de la Com- bofition des Médicamens, felon la différence des Parties. Tous ces Médecins nomment, Arrériaques, lesremédes qu’ils ordonnent pour l’enrouement, & la diminution ou perte de Voix, & tousceux qu'ils ordonnent pour l’augmenter & la fortifier en faveur des Crieurs publics, des Comédiens & des Orateurs qui avoient fouvent alors à parler dans les A ffemblées du peuple , en place publique, même en plein champ. Or ces Médecins comptoient tous que la Voix étoit l'effet du fon de l’âpre artére, car les plus anciens Médecins ne connoifloient point d’autre artére ; & c’eft pour cela qu'ils appel- loient cesremédes, Artériaques. Auff s’étoient-ils perfuadés après Hippocrate, qu’une partie de ce qu’on avale de liquide füintoit dans le canal de l’âpre artére. Hippocrate le prouvoit par une expérience que M. Mery a faite à ma priere, &qui vérifie celle d'Hippocrate, (Voyez le Livre d’'Hippocrate , du Cœur.) Galien adopte la même expérience & la même doétrine, & donne des expédiens pour faire qu’une partie de ce qu'on boïtentre dans l’âpre artére , fans exci- : ter la toux. ( Voyez VIII. des Dogmes d'Hippocrate & de Platon, Ch. 9. ® ailleurs , comme VI. de l’Ufage des Parties. VII. de la Compofition des Médicamens particuliers. ) Tout cela peut bien être mis enufage pour les maladies du canal de lâpre artére,, mais feroit inutile pour retablir ou pour augmenter la Voix. Car pour les effets des remédes qu’on ordonnoït alors en vûe de les introduire dans lâpre artére, & de remédier à l’enrouement & à la perte de Voix ou d’augmenter la Voix, il eft plus raifonnable de les attribuer ou à l’impreffion qu’ils faifoient fur le palais & fur le fond de la bou- che, où même aux exercices qui accompagnoïent ces rémédes pour l'augmentation de la Voix, qu’à leur introduétion dans l’âpre ar- tére, comme on va voir dans la fuite du texte, On peut voir un détail curieux & utile des exercices de la Voix, felon les Anciens, & de leur effet en plufieurs maladies , dans un fragment dAntyllus qu’on trouve dans les Colle&tions d'Oribafe, L. VI. Ch. 8. On fera bien aufi de lire le Ch. 9. & le Ch. 10. On verra par tous ces endroïts qu’on faifoit beaucoup d’exercices parti- culiers, non-feulement pour fortifier la Voix & dilater les bron- ches , mais auffi pour remédier à plufieurs maladies dé poulmon, & à plufieurs autres qui femblent n’y avoir qu’un rapport très-éloigné, comme foiblefles & aigreurs d’eftomach, indigeflions, appetits dé- reglés des femmesigroffes, &c. ( Woyez Gaken; de la Conferva- tion de la Santé, EL. Chap, 13. Aëce , Livre IL. Chap: 5. Paul d'Ægine , Liv. L Ch. 19.) Mn ji CA Css a 276 MEMOIRESDE L’'ACADEMIE ROYALE À cette occafion je dois dire, qu’on feroit bien de lire les Anciens un peu plus qu’on ne fait, & particuliérement fur le régime & fur les exercices; car il eft certain qu’ils nous étoient très-fupérieurs en cela & en beaucoup d’autres Arts, non moins importans, com- me ils nous font inférieurs en beaucoup d’autres connoiffances. Or il ne feroit pas impoffible de profiter de ce qu’ils ont de bon en l’'a- juftant avec nos mœurs, qui font fort différentes des leurs. Sçavoir fi cette différence eft à leur avantage ou au nôtre; on en jugera après avoir étudié leurs Hiftoires. Voyez Mercurial, Lévre III. de [a Gymnaffque , Ch. 7.& VT Ch.s. Que l'apre artérecontribuoit par fon canal au fon de la Voix . v. Galien, WII. de PUfage des Parties , Ch. 3. 4. 6. &” ailleurs. Dans toute la Pratique de la Médecine pour les maladies de la Voix ...... v. Galien, VII. de la Compofition des Médicamens, Jelon la différence des Parties, Ch. 1. 2. voyez aufli Oribafe dans fes Collections, Livre VI. Chap. 8. Paul d’'Ægine, Livre III. Ch. à au commencement © au troifiéme Arricle. Aëce, Livre VIIL hap. SI. Prefque tous les Modernes... Vefale même. ..... v. Vefale, De la Structure du Corps humain , Liv. I. ch. 38. VI. ch. 4. Sur la fin du XVI. Siecle. .... C’étoit l’an 1600. voyez for Fpitre dédicatoire à Léonard Donatt, & dans le corps du Livre. I] y a des fautes dans ce Livre, comme 1l y en peut avoir dans les meil- leurs Auteurs, mais d’ailleurs 1l mérite fort d’être là. Il y a peu d’Auteurs auffi attentifs & qui fuivent aufli-bien leur fujet. Les Auteurs qui ont écrit depuis Vefale, tant Praticiens, qu’ A- natormif}:s. Je citerai ici quelques-uns des plus célébres Praticiens & Anatomiftes modernes. Praticiens. Fernel, Ezv. E ch. 8. Houlier, fur lAphorifme 40. dela II. Seét. Barthelemi Perdulcis, Liv. XIII. ch. 15 de fon Cours de Médecine. Sennert. Liv. IL. Part. II. ch. 1. Bonnet, des Maladies, Liv. II. Se&. XVIEI. ch. 15. Le même Auteur, dans fon Polyalthes , Liv. II ch. 32. Du Catarrhe, [ur la Médecine de Jonfton , not. 34. Ettmuller dans [a Pratique, ch 13. fousle Titre des Maladies de la Voix, © fous un autre Titre del’En- rouement. Anatomiftes. Fuchfius, Il. Part. de fon Epitome de la Stru- ture du Corps humain, Liv. W. ch. 3.155 1. Du Laurent, Liv. IIL. ch. 19. 1599. Caflerius, du Larynx, Liv. EL de l'action du La- rynx, ch. 13. pag. 148. ch. 26 pag. 175.177. Liv. LIL. des Uja- ges du Larynx, ch x. pag. 180. de l'Edition de Ferrare 1601.On pourroit ajoûter, fi l’on vouloit, fon Maïtre Fabrice d’Aquapen- dente , au moins dans la II Part. ch. 6. pag. 111. de l’Edit. fol. de 1673. fi on ne voyoit par les citations de Galien qu'il accumule en DES SCIENCES. 277 cet endroit, que c’eft plutôt par refpeët pour un fi grand nom, fi äutorifé dans ce tems-là , que de fon mouvement, qu'il entre dans la penfée de cet Auteur. Gafpard Baubhin, Inflitutions Anatomiques , de la Poitrine, pari 35.136. dela IV. Edition de Bale; in-oétavo. 1609. Riolanle fils, Anthropographie, Liv. IV. ch. 11. pag. 291. de l'Edition de 1650. Manuel Anatomique, Liv. IV. ch. 14. Bar- tholin , Liv. II. ch. 10. de Fiffula Pulmonum. Bourdon, du Ventre moyen; ch. 5. 1676. Diemerbroëk, Anatomie, Liv. IL. ch. 14. pag. 327. Edit. de Lyon de 1683. premier ©* [éptiéme à linea. Anatomie de l’homme par M. Dionis, W. Démonfiration , pag. 332; 349; 350. Verduc, de l’Ufage des Parties , Tom. IE. ch. 12. 1096. Peut-être inconnues jufqu’a préfent . . . ... Un célébre Profef- feur en Anatomie m’a donné avis que M. Perrault de cette Acadé- mie , avoit enfeigné dans fes Effais que la glotte étoit l’unique or- gane de la Voix, & que le canal de l’âpre artére n’y avoit nulle part, & que M. Bernier avoit enfeigné les mêmes vérités, ainff que plufieurs autres Auteurs. Si M. Perrault en a parlé, ce doit être dans le traité du Bruit, Tom. II. de [es Effais, Part. IL. ch. 12. depuis la page 142. à la fin, jufqu’a la pag. 146. inclufivement. Si c’eft avec fondement que ce Profefleur célébre y a trouvé que la glotte eft l'unique inftrument de la Voix , & que le canal de läpre artére n’y a nulle part formelle , d’autres l’y pourront trouver com- me lui. En ce cas je confens que tout ce que j'ai dit en public, & ce que je donne dans ce Recueil fur ce fujet, ne foit regardé que comme un fimple Commentaire de cet endroit des Effais, Ce feroit la moindre juftice que je dûffe à un Auteur d’un firare mérite, dont je fais gloire d’avoir été Difciple deux ans de fuite, & à qui je dois, comme à fon illuftre frere , l’honneur d’être d’une Académie, dont je voudrois être digne. Pour M. Bernier, je n’ai rien trouvé dans fon Abrégé François de la Philofophie Epicurienne de feu M. Gaf fendi, fice n’eft au Tom. VII. de cet Abrégé, pag. 625. de la premiére Edition, in- 12. Voicifes paroles, Les mufcles du La- ryax fervent à la Voix en tant que par les cartilages .. ... ils ref- férrent ou dilatent la languette pour produire la Voix aiguë ou grave, comme j'ai dût ailleurs. Jene fçai où cet ailleurs nous renvoye ; mais s’il ny a autre chofe que ce qui eff ici en abrégé , il n’y a rien de plus que ce que j'ai cité ci-deflus de Galien, qui établit la glotte ou languette, principal inftrument de la Voix. Or c’eft fi peu dire qu’elle eff le feul inftrument de la Voix, que c’eft infinuer le con- traire. Je n’y vois nulle exclufion de Pâpre artére , comme y ayant quelque part par fes anneaux cartilagineux. Ainfi le feul avantage que M. Bernier ait fur Galien, eft: de ne s'être pas déclaré pour Mmi} \ 278 ME£EMoIïIREs DE L'ACADEMIE ROYALE VPäpre artére, non plus que Fabrice d’Aquapendente , Spigelius, Verheyen , & peut-être quelques autres qui ne font pas venus à ma connoiflance, É m. Siles Anciens © prefque tous les Modernes [e [ont trompés . .… ce n'a été ni manque de génie ..... On le voit parfaitement par la le@ure du Livre de Galien, de la diffeétion des Inftrumens de la Voix, chap. 2. Car quoique ce paflage n’exclue pas nommément l’âpre artére de toute part au fon de la Voix, il eft impoffible d’aller plus droit au but que ce grand Auteur y a été en cet endroit, pour faire entendre fans le dire, que la glotte feule fait la Voix. Cepen- dant outre que c’eft un paffage contre plufieurs autres, il revient au chap. 6. à dire, que la tête de l’âpre artére par la furface interne de fes cartilages eft caufe de la Voix; ce qui remet les chofes qu'il vouloit éclaircir dans la confufion où elles font demeurées depuis. Peut-être avoit-il parlé plus diftinétement dans les Livres qu’il avoit faits de la génération de la Voix , & qu'il cite, Liv. VII. De l’ufage des parties , chap. $. Mais ces Livres-là font perdus. Celui-ci ne fe trouve imprimé qu’en Latin. C’eft un des ouvrages de Galien qu’on lit Le moins, quoiqu’il mérite fort d’être lù. n L'air fait © fouffre violence . . . en plufieurs maniéres, a féroient trap longues à expliquer . . ... Toutes ces maniéres réful- tent de ce qui fuit. La double membrane dont l’entrouverture con- flitue la glotte, eft dans fa partie inférieure qui regarde le canal de lâpre artére contournée en voûte en riers-point, dont la clef eft un angle aigu curviligne, vû par le'concave ; d’où il s’enfuit que Pair étant un liquide, la canne de l’âpre artére doit être confidérée comme un tuyau de fontaine; le Larynx comme un ajuftoir; fon ouver- ture, c’eft-à-dire , la glotte , comme celle de l’ajufloir ; la force avec laquelle l'air eft pouffé , comme la charge du réfervoir ; Pair pouffé par cette force au travers de la glotte, comme un jet d’eau. Or chacun fçait que les jets d’eau lancés au travers d’un ajuftoir à plomb, terminé par une platine bien plane & bien de niveau & percée d’un trou percé à plomb , bien rond & bien limé , font leur baguette nette, & maintiennent fa rondeur à: une hauteur d’autant plus confidérable, que la charge ef plus grande, comme au contraire les ajuftoirs coniques en dedans , dont le diamétre va diminuant juiqu’à l’iflue, forment des jets dont la baguette s’éparpille en goutes beaucoup plus près de l’ajuftoir à charge égale, & encore plus près, fi la charge eft moindre. Il eft probable que la raifon de cette différence entre les deux efpéces d’ajufloir, eft que les parties d’eau qui fe pré- fentent à fortir de l’ajuftoir conique, les unes vers l’axe du jet fe pré- fentent pour fortir diréétement de bas en haut, les autres contrain- DES SCIENCES. 278 . tes par les côtés inclinés de l’ajuftoir font effort de droite à gauche, & de gauche à droite, & ainfi dans toute la circonférence du jet; de forte que les parties d’eau qui font à la circonférence, jaïlliffent avec une tendance mutuelle à fe traverfer les unes les autres, ou à rejaillir les unes contre les autres. Il eft aifé d'appliquer ceci à un ajuftoir dont le dedans feroit par dedans voûté en tiers-point, & l'iffue compofée de deux fegmens de cercle appliqués l’un à l'autre, Car le contrafte des parties de la circonférence du jet les unes contre les autres , & contre l'axe du jet, doit être d’autant plus grand , que les parties font inclinées les unes contre les autres, que celles d’un jet d’eau formé par un ajuftoir conique. IL feroit aifé de voir l'effet d’un ajuftoir de cette figure intérieure fous une médiocre bauteur de réfervoir. Mais il n’eft pas difficile de prévoir qu'il pourroit s’éparpiller prefque dès la fortie de droite à gauche , de gauche à droite , fur-tout ce jet n’étant qu’une lame d’eau très- mince , & la charge médiocre. Or ce qui doit arriver à Veau , doità. plus forte railon arriver au jet d’air pouflé de bas en haut au travers de lajuftoir de l’âpre artére. Car les parcelles d’air ont moins de liaifon entre elles que celles de Peau; & la comprefion de l'air par la poitrine ne peut être comparée qu’à une charge d’eau très-médio- cre. De forte qu’on ne peut préfumer, fur-tout en cette figure de jet lancé par une force aufi médiocre , que les parties autour de Paxe entraînentbien-loin dans fon cours les parties latérales du jet. Voilà pour le contrafte & le brifement de l'air qui fait le fon. Or il eft aifé de comprendre que la feule fortie de ce jet d’air entre deux Kvres bandées capables de reffort, doit y cauferdes vibrations plus: ou moins preflées, à proportion qu’elles fe trouveront plus ou moins: bandées ; mais ceci regarde les tons dont il fera parlé ci-aprés. J’abandonne le refte de cette Théorie à l'intelligence du Leéteur. Ce peu lui fuffira, & n’auroit fait qu’allonger le difcours , fans in£- truire davantage l’Auditeur dans une Aflemblée publique , où d’ailleurs il n’eft pas permis d’ennuyer des gens dont la préfence honore l’Académie, & que la foule & leur propre honnêteté em- pêchent de fe retirer avant la fin de PAflemblée. . © Je l’a trouvé bien marquée . . .... C’eft dans la III. partie du Livre qu’il a fait du Larynx organe de la Voix, chap. 2. pag 133, de l'Edition de Theodore de Bry, in-fol. 1607. vers la fin de La page, ildit, que perfonne jufqu’a lui n'avoir connu cet ufage, & il a rai- fon. Mais il ne prévoyoit pas qu’on feroit cent ans {ans en parler, & fans lui en rendre l’honneur qu’il a mérité. Caferius {on difci- ple a dit, comme «en paflant , un mot qui fait croire qu’il en a eu connoiffance , mais fans rien appuyer, ni même nommer Fabrice fon Maître; tant ileft vrai qu’il n’y a rien de folide à efpérer pour 280 MEMOIRES DE L'ACADEMIE' ROYALE les Inventeurs dans ces recherches, que la connoiffance & la com- munication de la vérité. Le pal[age de Cafferius ef} au Livre IL. du Larynx, chap. 18. pag. 156. de l'Edition de Férrare, 1601. in fol. p C.folut d'embas du Clavef]in ...... C’eft le ton le plus bas des quatre oélaves qui font prefque toute l'étendue du Clavier, excepté le G. re fol à la quarte au-deflous de ce C. fol ut, Ce G. re fol eft dans la plûpart des grands Clavellins, la premiére marche du Claveflin, à compter de gauche à droite ; ce que J'ajoûte pour ceux qui voudront entendre le {on du C. foi ut d’embas, & qui n’ont pas de connoiffance du Clavier. a Regaleavent...... Je l'appelle ainfi pour la diffinguer d’un autre {nftrument que les faileurs d’Inffrumens appellent Regale, & que j'appelle ci-après, Regale de percuffion , pour le diftinguer de celui-ci, parce qu’on joue de cette Regale, en la frappant d’une boulette enfilée du bout d’une petite baguette. Cet Inftrument eft compofé de huit ou quinze bâtonnets de femblable diamétre , mais de différentes longueurs , déterminées felon les proportions harmo- niques des tons & demi-tons d’une ou deux oétaves, Ces bâtonnets {ont enfilés & rangés de fuite, felon l’ordre naturel de ces tons & demi-tons avec des grains de chapelet entre deux qui les empêchent de s’entretoucher. M. Perrault appelle cet Inftrument C/aquebois (IL. partie du Bruit, re 12. pag. 177.) & le range avec beau- coup de raifon entre les Inftrumens qui femblent n'avoir point de fon imitable à la Voix, examinés en détail , & qui ont tous les tons étant examinés fucceflivement dans toutes leurs parties. J'ai entendu des Voix de baffe qui faifoient refonner les voûtes des Eglifes.,.... On conñoït le refonnement de la bouche par une expérience moins forte à la vérité, mais plus vulgaire. C’eft celle de ce petit Inftrument , nommé Trompe a laquais , ou Trompe de Bearn: car fi le tenant d’une main, on bat de l’autre le reffort qui fait tout le fon de cet Inftrument , il ne fera prefque nul bruit. Mais fi on tient le corps de cet Inftrument entre fes dents, dès qu’on battra le reflort avec la main, il produira dans la bouche un bourdonnement fonnant, qui fe fait entendre d’aflez loin, & fur-tout les tons les plus bas. (V. M. Perrault, Effais du Bruit, IL. partie, pag. 181.182.183.) Jecite cet endroit pour donner lieu de connoî- tre en quelle maniére un refonnement plus fort que le fon qui lexcite peut donner à.un fon uniforme destons différens , qui ne font diffé- rens que par la variation du refonnement: car cela fe voit plus claire- ment dans ce petit Inftrument , que dans le haut-bois, parce qu’on entend tout enfemble & le ton du reflort qui eft toujours égal à lui- même , & produit un faux-bourdon, & les tons du refonnement qui eft celui dela bouche ; qui, felon qu’elle eft plus ou moins ouverte pat DES SCIENCES. 281 par les divers mouvemens des lévres ; moins profonde ou plus pro- fonde par les différens degrés d'approche ou de retraite de la langue, fait des tons différens du raifonnement , du plus haut au plus bas de {on étendue muficale. **_ Voix de balle à l’uniffon du C. fol ut d'embas. .... Par exem- ple, celle de M, Roffignol autrefois Muficien de l'Opera de M. de Sourdeac , & préfentement encore M. du Four Muficien de la Cha- pelle du Roi. #**._ Chacun peut voir fans diffeéfion les différences d'ouverture de la glotte, felon les différens âges dans les deux fexes. . . .. M. Mery l'un des Anatomiftes de la Compagnie m’a communiqué en différens tems de 12 à 15 ou 16 larynx des deux fexes, depuis la naiffance jufqu’à l'âge décrepit. J’ai mefuré les ouvertures des glottes, j’en ai examiné la fituation par rapport aux cartilages tant antérieur que po- flérieur, & fa compofition, & j'ai confideré à loifir les attaches des mufcles propres & communs du larynx tant intérieurs qu’extérieurs. C’eft des réflexions que j'ai faites fur la fruéture de ces parties, que j'ai tiré tout ce que j'ai dit par rapport à la fituation, la com- pofition & la fruéture de toutes ces piéces. Comme la plus grande & la principale partie de tout cela eft fort différent de tout ce que j'ai autrefois là dans les Anatomiftes , j'ai prié M. Mery d’exami- ner de nouveau cette partie , & fur-tout la compofition de la glotte que je m’ai eu le loifir d'examiner par la diffeétion que dans deux larynx, où je lai trouvée conforme à elle-même dans toutes les circonftances effentielles , la difféquant par le dedans du larynx en- tr'ouvert par les cartilages poftérieurs. Elle étoit formée, comme j'ai dit dans le Mémoire, d’un écheveau de fibres prefque charnues dans l’un des deux fujets, & dans l’autre tendineufes , très-fortement atta- chées en devant versle bas du cartilage antérieur , & par derriere tout au bas des cartilages poftérieurs. Les mulcles extérieurs propres du larynx, naïffent tous du cercle cartilagineux, fur lequel les autres car- tilages tant l’antérieur que les poftérieurs, font fondés & ont tout deur jeu. Ces mufcles extérieurs font attachés au bord inférieur des cartilages mobiles ; leurs fibres dirigées de bas en haut s’écartent obli- quement du milieu des deux faces oppofées antérieure & poftérieure du cartilage annulaire, pour s'attacher aux parties latérales inférieu- res du cartilage antérieur , & des cartilages poftérieurs. Quant aux mufles intérieurs du larynx , il paroît que les Auteurs les ont peu examinés jufqu’à préfent (Vi! Diemerbroëck, L, II. c. xs. defon Ana- tomie, pag. 330. de l'Edition de Lyon 1683. où il cite Riolan fur l'origine de ce mucle, fans dire de quel Ouvrage il a tiré le fentiment qu'il lui attribue.) Jene fçai que Riolan qui ait dit; que dans l’hom- 1700. Nn 282 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALG me la glotte eft formée par l'extrémité du mufcle Thyroarytænoidien (Anthropographie, liv. IV. 6. 11.pag. 291; )maïsil n’en dit pasdavan- tage. Ce qu'il appelle extrémité du mufcle Thyroarytænoïdien, ef ce que j'appelle ci-deflus écheveau de fibres tendineufes. Elles font di- rigées comme la glotte d’avant en arriére , & appuyées fuivant la mé- me direction d’un plan de fibres charnuës paralleles à ces fibres tendi- neufes. Quant au mufele Thyroarytænoïdien, M. Mery m'a fait voir par la diffeétion qu’il en a faite à ma priére, qu’il eft compolé de plu- fieurs directions très-différentes de celle des fibres tendineules & charnuës qui forment la glotte , & les direétions qu’il a remarquées dans le mufcle Thyroarytænoidien font aflez différentes entre elles pour établir plufieurs mufcles , où au moïns un mulcle compolé de trois directions très-différentes. Il m'a fait voir aufli au-deflus de FPécheveau tendineux longitudinal de la glotte , un plan de fibres charnuës tranfverfales , qui pourroient bien ètre une des caufes qui maintiennent le cintre du contour de la glotte , & fervir d’antago- nifte à l’écheveau & au plan longitudinal , fans compter le reflort qui peut être dans la membrane qui couvre & enveloppe tout cela. Mais tout ceci demande un plus grand examen ; car je ne fuis pas en- core aflüré , fi l’écheveau tenidineux qui eft une chorde très-forte , quoique très délicate , fait un mufcle à part bien circonferit & diftin- gué du plan charnu qui l'accompagne dans la même direëétion. M. Mery foupçonne cet écheveau tendineux de n’être qu’un fimple liga- ment ; en effet l’attache de ces fibres a deux cartilages oppofés, & la ftru@ure ordinaire des mufcles font pour lui. Mais la néceflité indifpenfable d’un mouvement de tenfion dans cet endroit , peut ju- ftifier une ftruéture extraordinaire qui ne peut manquer au befoin à la méchanique du Créateur, & dont on voit tant d’autres exemples dans lAnatomie comparée. En attendant que M. Mery démêle tout cela , il me femble que j'en conrois aflez pour ofer dire qu'ik _me paroît certain que l’ufage des mufcles extérieurs du larynx à l’é- gard de la voix , & de tenir ferme la caïflecompofée des cartilages du larynx & la mettre en état de donner un fondement fuffifant au jeu des mufcles propres de la glotte, qui font feuls capables de faire la ma- nœuvre de cette merveilleufe ouverture en la bandant de devant en arriére , & la contrebandant par les côtés dans tous les dégrés né- ceffaires à la voix & à tous les tons dont elle eft capable. Ce qui fera tenu pour prouvé à qui confiaérera bien les fuites de la mécha- nique que je viens de décrire. : Il eft vrai que l’endroit de l’infertion des mufcles extérieurs aux cartilages antérieurs, & aux cartilages poftérieurs , ne leur donne pas grand force pour tenir la caifle du larynx en état ; car ces mu£- ! DES SCIENCES. 283 cles ne s’attachent qu’au bord inférieur deces cartilages, car c’eft-là précifément le centre de leur mouvement en avant & en arriere, qui feul peut concourir à contrebander la tenfion volontaire de la glotte fur deux anches, mais 1°, Cette fituation des mufcles feroit beaucoup moins propre à dilater & à reflerrer la caifle , qu’à la tenir en état. 2°. Le cartilage antérieur a outre fes deux mufcles extérieurs propres le contaét ou attache au même endroit des deux grands mufcles bron- chiques, ce qui lui fert d’un puiffant arrêt contre la tenfion de la glot- te. Les deux cartilages poftérieurs n’ont pas un femblable avantage, mais ils en ont moins befoin, parce que le point fixe de la glotte en arriere, eft précifément au centre du mouvement de ces cartilages , contre l'arrêt defquels afsûré par deux mufcles fort charnus, il ne peut avoir que peu d'effet, au lieu que le point fixe de la glotte en devant, quoiqu’attaché aflez près du centre du mouvement du cartilage Thy- roide, eft beaucoup plus éloigné du centre de ce mouvement, & fe- roit par conféquent plus capable de forcer l'arrêt de ce cartilage, s’il n’étoit afsûré parquatre mufcles beaucoup plus forts que ceux qui ban- dent la glotte. Carencore que ces derniers foient plus en force par leur fituation, ils peuvent n’avoir pas befoin de toute leur force pour les ufages de la voix , & quand il feroit vrai qu’ils en euffent beloin, ce qui n’eft pas, il feroit difficile que deux petits mufcles furmontaf- {ent l'effort de fix mufcles, dont les quatre moindres font par leur corps au moins aufi forts , & les deux autres incomparablement plus forts. Et en effet ces fix mufcles tiennent contre la glotte dansla fuppreffion volontaire de la refpiration , qui dépend d’une aétion de la glotte incomparablementplus forte que celle d’ou réfulte la voix. Quelque petite que foit cette étendue , elle ef? phyfiquement parlant capable d'une fubdivifion infinie . .. . Cela n’a pas befoin de preu- ve en Phyfique , ni en Métaphyfique. Les Epicuriens & quelques Cartéfiens n’ont pas laiflé de le difputer. Mais il eft inutile de con- tefter pour établir des vérités claires par elles-mêmes. Cependant il eft bon de fçavoir jufqu’où lart peut aller dans la divifion des furfaces. Car comme cela pale l'imagination de tous ceux qui n’ont pas vû l’effet, on fera moins furpris de voir ci-après une ligne ac- tuellement divifée en plus de 9600 parties. Les Ingénieurs pour les Inftrumens de Mathématiques , divifent le pouce en plus de 400 parties égales & très-vifbles , d’où il s'enfuit qu’ils peuvent divifer aétuellement l'intervalle d’une ligne en 32 + Ceft l’art tout feul aidé de beaucoup d’indufirie qui fait cette divifion qui peut pafler pour grofliére , puifque les yeux peuvent appercevoir chacune des parties de cette divifion. Ainfi les yeux aidez du Microfcope pour- roient dans chacun de ces petits intervalles multiplié 300 fois ; comme n1] 284 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ileft aifé, défigner des parties 300 fois plus petites, ce qui iroït à plus de 9600 parties égales dans une ligne. Mais l’art aidé de la pature va bien plus loin par les mains des Batteurs & Tireurs d’or, qui fans y penfer , & avec des Inftrumens fort grofliers , divifent une ligne d’or , les Batteurs en plus de 30034 parties égales , & les Tireurs d’or en plus de 1232270 parties. On en peut voir la démonf- tration dans la Phyfique de feu M. KRohault , Iapartte, c. 9. pag. 53. © $4. de l'Edition de Paris ,in-quarto , 1671. Ce ne fera donc pas là la difficulté , mais de fcavoir , fi jai eu raifon de dire que la feule ouverture de la glotte fait feule le fon, & , par fa dilatation & fon rétreffifflement , les tons de la voix. Un fçavant homme de mes amis grand Mathématicien n’en convient pas. Il ajoûte à l’ouverture de la glotte les vibrations de fes lévres ; & à ces deux caufes deux autres caules , le raccourciflement dela glotte , & les mouvemens de l’épiglotte confiderée comme faifant à l'égard de ka glotte ce que font ces avances d’étain ou de plomb, que les Faéteurs d’orgue nomment , Oreilles , & qu'ils appliquent aux deux côtés de la lumiére de quelques tuyaux de tous les jeux d'orgue à bifeau , & fur tout dans les jeux nommés , Hütes & Doublette. Nous convenons pour les deux premiéres caufes , qui dans le fonds n’en font qu’une. Toute la difficulté w’eft que fur les deux derniéres. Sur cela, je dis, 1. Plus il y aura de caufes, plus il y aura de combinaifons d’aëtions & de degrés d’aétion dans les caufes, & par conféquent plus la méchanique de l’organe de la voix , & fes effets feront admirables & difficiles à expliquer , ainfi on n’épargne rien pour la difficulté par cette multiplication. Mais nous n’avons droit ni de multiplier les caufes, ni de diffimuler les difficultés. Il s’agit donc uniquement de rechercher & de recon- noître la vérité. Or les deux cauies prétenduës ne font fondées que fur deux erreurs de fait. À légard de la premiére, je dis, que la glotte étant arrêtée à fes deux extrémités , ne fe raccourcit point. Si elle pouvoit être raccourcie, ce feroit par Papproche mutuelle: des cartilages avant & arriére. Or cela étant elle feroit relâchée , elle ne feroit donc pas en état de produire la voix. Elle n’eft mile en cet état que quand elle eft contrebandée par lation des mufcles extérieurs , qui jotant [ur ka bafe du larynx ( le cartilage annulaire ou Cricaïde ) tendent par leurs attaches au cartilage antérieur ( Thy- roïde ) & au cartilage poftérieur ( Arytænoïde } à les éloigner Pur de l’autre de devant en arriére , pour donner par devant & par derrié- re un fondement ferme à la tenfion particuliére & volontaire des lé- vres de la glotte. Ces cartilages font donc à peu près en cet état l'effet d’un tambour ; fçavoir le larynx , l'effet de la caiffe du tambour; les DES SCIENCES. 285$ mufcles l'effet des cordes nommés , Tirants , qui tiennent en état la peau du tambour , comme tous les Nœuds qui bandent la peau, font enfemble l’effet des fibres des lévres de la glotte. On voit bien qu’il ne faut pas prendre ces comparailons à la rigueur. Voilà pour la premiére erreur de fait. Quant à la feconde , qui eft le mouvement prétendu de lépiglotte contribuant aux tons bas pat fon approche vers la lumiére de la flûte , c’eft-à-dire , vers la glotte, il eft certain & avoué par tous les Anatomiftes les plus exaëts , que ce cartilage n’a point de mouvement volontaire & actif dans l’homme. Or la caufe de la voix eft une aétion , & cette aétion eft volontaire. Nous voici donc revenus à la fimplicité de l'organe que j'ai expolée ; qui eft l'ouverture des lévres bandées. On en fera deux caules, fi on veut ; pourvû qu’on confidére & qu’on avouë que les différentes ouvertures font l'effet des différens bandemens , & que les différens bandemens font inféparables de la différence des ouvertures. Pour en donner quelque idée, j’ai joint la Figure fuivante où la ligne extérieure marque l'ouverture de la glotte , & les lignes ponc- tuées intérieures. , trois différens dégrés d’approche mutuelle des deux lévres. Ces trois. degrés donneront lieu d'imaginer Les autres degrés qui font prefque innombrables. L'ouverture de la glotte eff. ici beaucoup plûs grande qu’il ne faut par proportion à l’ouverture. naturelle , c’eft feulement pour éviter la confufion des lettres & des lignes. | Explication de la Figure. Je fuppofero. Que la Figure 4 D B DA repré- fente la glotte autant ou- verte qu'il eff néceffaire pour former ke fon le plus grave , 2°, Qu’enfui- tela glotte fe refferre en EE fuivant lesarcs 4EEB. #EB pour former un fon plus aigu , 3°. Que fuccefivement elle fe refferre en FF en GG & ainfi de fuite pour former des fons de plus en plus aigus. Dans ces différentes fituations., ces. arcs peuvent être confidérés comme des arcs de parabole , qui forment avec la droite ACB. de doubles fegmens qui repréfentent des. maniéres- d’ajuftoir par où l'air fort. Il eft évident que l'air étant pouflé avec. la même viteffe la quantité qui en fort eft proportionnée à l'ouverture de k glotte, c'eft-à-dire , à la fuperficie des doubles fegmens., laquelle eft.pro- portionnée aux axes DD, EE, FF, GG. Nani; 286 MEMOIRES DE LACADEMIE ROYALE Si l'on fuppofe enfuite que l'air qui fort , forme un fon aigu de plus en plus par intervalles égaux , on peut fuppofer alors que les lévres de la glotte bandées plus ou moins, étant confidérées comme des chordes bandées , ces chordes s’accourciflent inégalement pour hauffer le ton par intervalles égaux. Cette inégalité d’accourcifle- ment dans les chordes pour hauffer le ton ; eft vifible fur le Mono- chorde. Or de cette inégalité dans l’inftrument de la voix , rélulte une autre inégalité dans la diminution du petit diamétre de fon Ouvetture, On peut donc fuppofer que ces axes DD , EE; ou leur moitié DC, EC, FC, GC; diminuent en proportion con- tinuë , dé forte que fi l'ouverture de la moitié de la glotte DC forme un fon & l'ouverture EC en forme un plus aigu d’une heptamé- ride, on à lieu de croire que DC eft à EC comme 435 à 434. où que DE eft — de DC. Par la même raïlon, fi l'on hauffe derechef d’une demi - heptaméride , la glotte venant en FF f reflerréra de la quantité EF qui fera auffi —— de EC & ainfi de faite , comme il a été dit dans le texte. f Celafe voitpar les ajufloirs de différens diamétres préfentés fuccef]i- vement au même tuyau à même hauteur de référvoir .... On peut voir fur toute cette matiére le Traité du mouvement des eaux & au- tres fluides , III. & IV. Partie, compolé par feu M. Mariotte. Ÿ J'en connois deux, l’un en Deffus , l’autre en Baffe.…. le Deflus eft Mademoilelle de la Lande , fille de M. de la Lande , Sur-Intendant de la Mufique du Roi. Elle a une tierce mineure au-delà des deux oétaves , & tout cela d’une voix pleine, aufhi forte , aufli nette & auffi douce , en À mi la d’enhaut, qu’au milieu'de fon étenduë, fans compter deux grands tons un peu moins naturels , Pun plushaut, qui eftle B, fa fs, mêmele C, fol ut, en forçant , l’autre en bas, qui eft la Clef d’F, ut fa. La Bañle eft M. du Four , Muficien de la Cha- pelle du Roi, dont j'ai parlé ci-deffus fous la notte ** t Depuis la Lu baffe heptaméride jufqu’à la plus haute : . . Celle-ci fera la 301. dans une 6&ave , par conféquent la 602 dans les deux oétaves que je donne à la voix, & la 1204. demi-hepraméride, puifqu'il a été dit & prouvé par expérience qu’une oreille jufte diftingue = d’heptaméride de différence de deux chordes d’accord à Vuniflon dont lune a été accourcie fur le Monochorde de moins d’une 2000 partie, & qu’une voix jufte peut entonner & luniflon & la différence. u Mais quipeut comprendre [ans P'admirer une divifion fiinnombrable +» fe inégale dans fes parties !. fiimégalement inégales . .. . Elles font entre elles incommenfurables géométriquement parlant , mais on les doit regarder comme commenfurables , cat il s’agit d’un art DES SCIENCES. 287 pratique ; & par conféquent difpenfé de la rigueur géométrique. Cependant cela fuppole 1204 degrés de fubdivifion d’un fort petit intervalle , qui va toujours diminuant, & qui à.chaque degré de diminution eft toujours divifé en 43$ parties’, ou plutôt en 870 à compter comme je fais, les degrés d’approche par demi- hepta- mérides. Il faudroit donc pour eflimer & diftinguer, ces diminu- tions:& leurs proportions, depuis-les plus bafles demi-heptamérides, juqu’aux plus hautes, qui font aufh jufles les unes que les autres dans la pratique, 1. Divifer toute la chorde en 870 pour avoir là premiere demi-heptaméride, 2. Diviler cette premiere en 870 & en donner 869 à la feconde , 868 — à la troifiéme ; :867. plus = plus >, à la quatriéme , & ainfi jufqu’à 1204. opera- tions, les dénominateurs des fraéions augmentant à chaque opération de trois chifres , ce qui produiroit une fomme qui pafle toute imagina- tion humaine. Je dois ce celcul à M. Sauveur, La Théologie naturelle .,...la plus noble des connoïiffances hu- maines ...... Cependant un Auteur de réputation & de beau- coup de mérite ; dans -un Ouvrage imprimé ; digne d’ailleurs de Pattention du public , a erû pouvoir dire ce qui fuit : On #4 plus aucune idée du véritable Philofophe, depuis qu'on prodigue cet augulfie titre a des gens curieux © otfifs , qui fe bornent a connoître qu:lques fecrets de la nature , © qui palfent leur vie à faire des expériences fur l'air © [ur les vertus de l'Auman. Je ne puis me per- fuader que l’Auteur ait eu deflein d’infpirer au public du mépris pour la Phyfique ; & pour ceux qui la cultivent, comme on fait depuis Bacon & Defcartes. Mais le public aura peine à ne pas croire .que le {ns naturel de ces paroles défigne, non feulement les Phyficiens , mais les meilleurs Phyficiens , c’eft-ä-dire , ceux qui étudient la nature d’une maniére utile aux arts qui en dépendent , avec les précautions néceflaires pour s’aflürer de la vérité, & qui, pour ne pas perdre le tems ; me s'appliquent. dans la Phyfique qu’aux re- cherches qui font àl la portée des hommes ,. & fe renferment dans les bornes de la: raifon, & des fens.. J'avoue que cette ma- niére de cultiver la Phyfique me paroît fi raifonnable , & même fi philofopbique , que je ne puis comprendre comment l’Auteur auroit pü regarder de tels Phyficiens comme indignes du nom de Philofophe ; &: comme des gens curieux & oififs, qui pañleroient leur vie à des chofes inutiles. Cependant il. donne pour exemple de ces inutilités:, faire: des expériences fur air. & fur les vertus de l'Ai- man. Ilferoit pourtant difficile de trouver deux exemples plus pro- pres à démontrer que la Phyfique eft très-utile, non feulement à la Théologie naturelle, àlaquelle elle a toute entiere un rapport néceflai- 288 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE re & naturel, mais à la Société civile ; & quelquefois même à {a Religion. La moins importante de ces deux recherches ; qui eft cel- le de la nature de l'air, c’eft-à-dire de fon mouvement, de fa pe- fanteur & de fon reflort , eft très-utile à la Méchanique , à la Na- vigation , à la Médecine, à la Chirurgie, & les nouvelles décou- vertes qu'on y a faites, fervent à réloudre un nombre infini de Problèmes qui éclairent tous ces Arts. Et quant à l’Aiman, la Bouflole feule fait le commerce des deux Hémifphéres , & fert à la communication de l'Evangile d’un Hémilphére à l’autre. Ce- pendant la Bouflole n’eft qu'une conféquence de deux feules d’entre les innombrables propriétés de l’Aiman. Socrate que l'Auteur ne méprifera pas , n’a pas méprifé fembla- bles recherches. Ariftophane l’avoit voulu rendre méprifable aupeu- ple d’Athenes fous l’idée exagérée d’un Vieillard qui s'applique fé- rieufement à des bagatelles. (W. Ariffophane A&.I. Scene 2. € 3. des nuées. ) Ces bagatelles étoient pourtant le Ciel & les plus petits Infec- tes ; les plus grands & les plus petits corps de la nature, & par con- féquent les plus admirables. Aufli Socrate ne s’en défend-il qu’en difant : qu’il croyoit ces recherches au-deflus de lui. ( W. Apologie de Socrate dans Platon.) & jene m’en étonne pas. La Phyfique étoit en- core fi jeune de fon tems parmi les Grecs , qu’on peut dire , qu'il n’y a guére plus de 1 50. ans qu’elle ne faifoit encore que bégayer. Platon que l’Auteur eftime tant, & avec tant de raifon, ne paf- fera pas chez lui pour indigne de l’augufre titre de Philofophe , par- ce qu'il eft Auteur du Timée , qui n’eft autre chofe qu’une Phyfi- que théologique, célefte & fublunaire , & l’Auteur ne l’en croit pas moins Philofophe. Platon y fait intervenir ; comme par tout ailleurs , le Héros de la Philofophie. C’eft Socrate qui donne la pa- role à Timée , c’eft lui qui l’exhorte à expliquer l’origine, PAu- teur, la ftruéture du monde, des créatures intelligentes , de l’hom- me, des animaux & des Plantes ; & il l'écoute avec beaucoup d’at- tention difcourir de tout cela. Il eft vrai que le Timée n’eft qu’une “petite partie des Ouvrages de Platon , que Timée ne s’eft pas borné a rechercher quelques fecrets dela nature, & que Platon n’a paspaf]é fa vie à faire des expériences : maïs tant pis pour fa Phyfique. re. II feroit à fou- haiter que Timée fe fütun peu plus borné qu'il n’a fait ; qu’il n’eût pas entrepris d'expliquer la nature des ames par des figures ; & s’en fût te- nu à ne chercher dans la nature que ce que les hommes y peuvent trou« ver, qu'il eût un peu plusfait d'expériences anatomiques ; & fur tout que Platon, plus fage & plus folide que Pythagore, fe füt appliqué à. chercher des régles pour diftinguer dans la Phyfique le poffible de Yimpoffible , les chofes qu’on peut efpérer de trouver , de celles qu’on peut 22 ac. FLee de l'aca GX Figure du Soleil avec les taches au mos de Novembre 1700 C. Centre du Soled B. Bord du Sole _ DES SCIENCES. 289 peut s’affüref que nul homme ne trouvera jamais. Car c’eft fur ces -derniéres que tombe tout le: mépris que Socrate montre de tous les Philofophes qui l’avoient précédé , uniquement appliqués à la Phyfi- que, cherchant l’impoffible comme le poffble , l'un & l’autre fans régle & fans conduite, & affürant avec une égale témérité ce qu’ils fçavoient le moins, & ce qu’ils croyoient le mieux fçavoir. (Voyez Xenophon, Apologie de Socrate.) 2°, Quant au refle : qui eft-ce qui paffe fa vie à des fpéculations & à des expériences phyfiques ? Les Médecins même qui font obligés de s’y appliquer autant qu’elle peut être utile à leur Art , donnent incomparablement plus de tems à la pratique de la Médecine , & aux autres devoirs de la vie. Les Profefleurs en Philofophie ne donnent qu’un quart de leur tems au plus à enfeigner la Phyfique. L’Auteur croiroit-il qu’un Médecin & un Philofophe de profeflion en fuffent moins Philofophes pour faire leur devoir en recherchant ce qu'ils doivent connoître, & en cultivant ce qu’ils doivent enfei- gner ? Si un particulier maître de fon tems fe promenant, ou voya- geant, ou converfant avec fes amis, s’occupe à faire des réflexions fur la puiffance infinie, & fur l’art inconcevable du Créateur de la nature, fera-t-1l un curieux méprifable, parce qu’il ne détourne pas fes yeux des merveilles qui fe préfentent à lui d’elles-mêmes , & à tous momens; & fera-t-il oif5f, parce qu’il s’occupe dans fon loifir ? D'ailleurs, quel tems faut-il pour faire des découvertes confidé- rables dans l’'Hiftoire & dans les caufes naturelles? Ce tems eff très- fouvent fi court qu’on ne peut ni le marquer ni le mefurer. Un coup d'œil, une réflexion très-fimple, très-facile & très-naturelle, fuffifent pour découvrir une vérité inconnue, pour en tirer des conféquences , pour imaginer des expériences décifives ; & tout cela faifant chemin, au milieu des affaires, & dans tous les états de la vie. Tout le travail & tout le tems-eft d'exécuter & d’écrire. Mais comme les loix n’y forcent perfonne , elles ne le défendent à perfonne. Et cela étant, je ne crois pas que perfonne fût en droit de blâmer quelqu'un qui pafferoit [a vie à des recherches innocentes qui peuvent devenir très-utiles à la Société civile, & je crois même qu'il feroit à fouhaiter qu’il:y éût un peu plus de Phyficiens qu'il n’y en a; occupés de cela feul, fans préjudice des devoirs de la Religion & de la Société. Les Médecins & les Philofophes de pro- feflion en profiteroient ; & ces: Phyficiens. éloignés du tumulte des affaires, des intérêts fordides.& de l'ambition, contents d’un hon- nête néceflaire, employant une partie de leur fuperflu à la recherche de la vérité phyfique, n’en feroient que plus Philofophes. … ; - Mais j'ai fouvent remarqué qu’une partie de ceux qui ont du goût pour léloquence & pour les affaires, n’ont que du dégoût pour 1700. Oo 2900 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE lesfciences exaétes & pour les Arts; peut-être parce que ces chofes demandent beaucoup d’attention ; qu’on ne les trouve pas dans fon imagination , & qu’elles ne tiennent point aux paflions qui remuent ordinairement les hommes. Cependant les. Sciences ne fe combattent &ne fe méprifent point les unes les autres , au contraire elles s’ai- dent & fe mettent mutuellement en honneur. On peut donc être Phyficien fans être ignorant dans la Morale, & on peut être fça- vant en Morale , fans en être moins Phyficien. Et en effet, j’ai connw deux hommes , tous deux grands Mathématiciens. & grands Phyfi- ciens, & pourtant grands Philofophes, au fens que Auteur l’en- tend , c’eft-à-dire, très-fçavants dans la Morale , très-réglés dans leurs mœurs, & très-fidéles à tous les devoirs de la vie civile & de: la Religion. Jeles:ai vûs de plus tous deux arrivés au dégré le plus: fublime de la dialeétique & de Péloquence , fans y avoir donné aucun tems.exprès., & prefque fans s’en appercevoir. Cela étant , je fuis perfuadé que PAuteur n’en feroit pas moins ce qu'il eft, philofophe, éloquent , utile au public, en un mot, eftimable par une infinité d’endroits, quand il auroit donné quelques momens.& une partie des talens de fon efprit à quelques recherches Phyfiques. Car elles lui auroient au moins fait connoître qu’il ne faut pas y: paffer fa vie pour parvenir à la connoiffance de la vérité en plufieurs: chofes importantes , & pour fe mettre en état de la communiquer. Mais fans entrer dans ces recherches , il n’a befoin que d’un peu de: réflexion pour reconnoître qu’on ne profane point l’augufle titre de: Philofophe, en le donnant aux Phyficiens ; quand il aura confidéré que l'application qu’ils donnent à la Phyfique , les dégrade fi peu , que lEcriture Sainte même , dans un de ces Livres qui renferment toute la Sagefle morale , politique & civile, exhorte tous les hommes: à confidérer , chacun felon fa portée, les Ouvrages que le Créateura faits fur tout , afin qu’ils les confidéraffent , & qu’en les confidérant, ils appriffent au moins à.le connoître , à admirer & à le craindre ,, (Eccl. III. 14.) C’eft ce que l’Auteur a vû fans doute , non-feule- ment dans les endroits qu’il trouvera cités ici, mais en une infinité d’autres qu'il fuppléera fort ailément. Voyez, Pf. XVIII. 2. 6. 7: XXVII. 4. 5.6. LXV.3. LXXVT. 12. P[. XCI. 5. 6. CII. CX: 2. 3.6.CXXXVIIL 14.15.16. CXLIE 5. CXLIY. 4. CXLVTL 154 16. 17.18. CXLVTUIL Dan. IIT. 57. Éc. Rom. I. 18. 19. 20. 21... Je ne prétens pas avoir épuifé cette matiére.. Après tout ce qui aété dit, il refteroit encore à rendre raifon, 1°. De la force de la voix humaine, qui femble être au-deflus de toute proportion, com- parée avec les dimenfions de fon canal & de fon anche. 20. De fes tons, qui femblent n’être pas fuffifamment expliqués. par l'ouverture: de la glotte & par les vibrations de fes lévres, DES SCIENCES. 291 À l'égard de la premiére difficulté , la force de la voix n’exige pas en rigueur la profondeur du canal. Le fifflet humain a fouvent un fon très-perçant , fans aucune profondeur , puilqu’il fonne immédiate- ment dans l’air vague , battu par Pair qui fort des lévres froncées & entrouvertes en glotte, Quant à la feconde difficulté , le canal'de la voix ayant pas la dimenfion proportionnée aux tons, fur- tout des voix de baffe 3 ce canal n'ayant pas aflez de dimenfion pour donner le ton & dominer l'anche de l’homme: il femble qu'il faudroit, pour donner le ton, que l’anche dominät le canal, c’eft-à-dire, qu’elle feule donnât le ton, comme il arrive dans la voix humaine de l'orgue où la languette a affez de longueur pour fuppléer les intervalles des vibrations d’un tuiau de melure par rapport au ton que fa longueur lui donne. Car les vibrations de la languette d’un tuyau de Regale, font comme celles des Pendules, au lieu que celles des tuyaux font comme celles des cordes bandées , ceft-à-dire, beaucoup plus vites & plus fré- quentes à longueur égale , que celles des Pendules; de forte que les intervalles des vibrations d’une courte languette de Regale peuvent être égaux aux intervalles des vibrations d’une longue corde ban- dée , qui font celles d’un tuyau de mefure. Mais les vibrations de la glotte tiennent de celles des cordes bandées. Or comme ces deux cordes font très-courtes, fi elles étoient faites pour fonner , elles ne devroient produire par elles-mêmes que des tons très- aigus & très-foibles.. Elles font donc très-éloignées de fuppléer un canal de mefure. Voilà la difficulté qui ne détruit ni le fait ni les caules pro- pofées , mais qui ne laïffe pas de demander un éclairciffement. On dira, peut-être que la confiftence de ces cordes fupplée pour les vibrations la longueur qui leur manque. Car dans les In- ffrumens à cordes de métail, les cordes d’or & les cordes de fer pañlées à la même filiére ; bandées par des poids femblables ; & mefurées d’une longueur égale, fonnent à plus d’une quinte l’une de l’autre, celle de fer à la quinte d’enhaut , & celle d’or fin à la quinte d’enbas. (Voyez , Harmonie univerfelle du P. Merfenne, div. III. des Trffrumens a cordes, propofition 19. pag. 151. de Edit. fol. 1637.) Les Muficiens difent que cela va jufqu'à l’oëtave ; & cela eft vrai, harmoniquement parlant, mais non en rigueur méchanique. Quoi! qu'il en {oit , il eft probable qu'il y'a indéfiniment plus de différence de confiftence.entre-les cordes d’or & celles des lévres de la glotte ;: qu'entre les cordes de fer & celles d’or, quoique celles-ci foient d’un métail beaucoup plus doux & plus liant que le fer. On pourra dire encore quela confiftence fi compofée du canal extérieur poufroit fuppléer la profondeur en quelque maniére. Car fi les vibrations des’ tuyaux d'orgue font comme celles des cordes Mn il pour- o i 292 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Toit être qu’un tuyau d’orgue compolé d’une lame d’or , auroit up autre ton que celui de la dimenfion ordinaire , & fi la différence de ton répondoit à celle qui fe remarque dans les cordes, il ne feroit pas impoffible qu’à deux tiers de longueur , il jetteroit au moins le ton de la quinte au-deflous d’un tuyau de longueur & de métail or- dinaire, Mais cela ne me fatisfait pas, 1. à caufe des énormes diffé- rences qu’il faut fuppoler. 2. Parce que les lévres de la glotte ne font pas des cordes faites pour fonner, mais pour frémir, & pour brifer Pair; ce qui fuffit pour le fon, & pour varier les tons par les différens brifemens. 3. Parce que la différence des tons dans les cordes, de métail, ne vient pas feulement de leur confiftence, mais de plufieurs autres circonftances qu’on ne peut appliquer aux lévres de la glotte. Jereviens donc à dire comme dans le Mémoire, que la complication: de Pouverture de la glotte & du reffort des lévres bandées, peut ren- dre les tons indépendans , & de la profondeur du canal , & de la lon- gueur des cordes. Carle feul brifement de Pair fuffit pour Le fon, & Vair mû de vitele dans l’air le peut brifer fufifamment pour produire un fon, & aflez différemment pour produire les tons. Sçavoir com- ment tout cela fait une fenfation, c’eft moins une queftion qu’une efpéce de myftére phyfique qu’on démontrera inconcevable en natu- re. Mais le fait me fuffit. En effet, j’ai fait faire une anche d’orgue, comme pour un tuyau de Regale de fix pouces, à laquelle je n’ai fait ajoûter que la chappe néceffaire pour l’emboucher, fans aucun tuyau. Cependant cette anche fonne huit pieds, On fit l’expérience dans: VAffemblée publique. Voilà pour le canal. On s’en peut donc pafler abfolument. Quant à la longueur des cordes, on fçait que M. Marius fait des Claveflins brilés, qui déployés n’ont que deux pieds & demi dans leur plus grande longueur , & dont les baffes de leton guip- pées ou furguippées , ou de cuivre, ou d’argent , ou d’argent doré pour baïffer de ton de plus en plus, font à l’uniflon des bafles les plus longues des Claveflins de fept pieds de long, d’où il s’enfuit que: par cet artifice, 1 fonne comme 3. Il prétend même que cela peut aller infiniment plus loin qu’il na eu befoin de le pouffer. Ainfi la longueur des cordes pourroit être fuppléée jufques à un certain point, Il ne s’agiroit donc plus dans cette difficulté que du plus & du moins. Mais fans avoir recours à ces fupplémens, il fuit de répéter ici, que dans l’inftrument de la voix de l’homme les tons font indé= pendans de la mefure du canal & de celle des lévres, confidérées comme une efpéce de cordes. Et il faut bien que cela foit ainfi, puifque l’effet de l’inftrument de la voix de l’homme ne peut être ré- voqué en doute. En effet, j'ai depuis peu obfervé qu’un Chaffis bruyant a fonné plus de huit pieds, malgré la difproportion de fes DES SCIENCES. 297 lévres & de fa profondeur, qui apparemment étoit très-peu de chofe, ou commerien. Or il eftdit dans le Mémoire, que ce Chañlis ef ce qui reffemble le mieux à l’organe de la voix. I1 faut donc que dans l’'inftrument de la voix de l’homme les vibrations des lévres de la glotte donnent le fon, comme l’anche le donne au corps du haut- bois; & que les vitefles & les quantités de l’air mû à travers de la glotte, donnent les tons & dominent les frémifflemens de la glotte, comme les dimenfions du haut-bois dominent les frémiflemens de fon anche, & forment les tons de l’inftrument. Auf fuis-je perfuadé que dans tous les Inftrumens de mufique , tous les tons ne viennent que des quantités , & des dégrés de vitefle de l'air brifé. OBSERVATION DES TACHES DU SOLEIL qui ont paru au mois de Novembre 1700. Par M. DE La HIRE. L2 E 9. de ce mois en obfervant le Soleil à midi, je re- marquai fur fon difque une grande tache compofée de plufeurs petites jointes enfemble , comme elles font ordinairement, & comme on les peut voir dans les figu- res. Il y avoit quelques jours que je n’avois pû voir le Soleil pour Fobferver; ainfi je ne fçaurois dire fi cette tache à commencé de paroître avant ce jour. On n’en avoit point vû depuis le mois de Mai 1695. & celle qui parut alors avoit à peu près la même figure que celle-ci: mais on ne fçauroit affürer que ce foit la même. Cependant fi lon fuppofe, comme je lai propofé autrefois, qu'il y ait dans la matiére fluide du Soleil un corps qui foit irrégulier, qui nous fafle paroître des taches en fe montrant quelque- fois par différens côtés, & en tournant dans cette matiére d’un mouvement égal, on trouvera entre l’obfervation du mois de Mai 1695. & celle-ci, 73 révolutions de la tache de 27 jours 7" 7’ chacune, qui eft à peu près le tems qu'on a déterminé pour la révolution de ces taches aurour du Soleil, ou du Soleil lui-même fur fon axe. Il y auroit plu- fieurs remarques à faire fur ces taches ; mais on pourra voir ce qui en a été expliqué en plufieurs rencontres fem- blables. On avertit feulement ceux qui Rp la curiofité o ii] 1700. 13. Nov. 4 7004 37. Nov. TA 294 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE pour ces fortes d’obfervations, que cette tache pourra re- paroître au bord Oriental du Soleil le 28. de cemême mois. OBSERVATION DE LA CONJONCTION inférieure de la Planete de Venus avec le Soleil, faite à lObférvatoire Royal. PAR DM DE. LA HiRE T Outes les obfervations des Planetes que les anciens Aftronomes ont pû faire pour avoir leurs véritables politions , n’ont été que par le moyén des armilles & par’ leurs diftances entre les étoiles fixes. Tycho Brahé dans ces derniers tems ayant fait tout fon poflible pour perfec- tionner l’Aftronomie ancienne, fe plaint avec raifon de ne pouvoir pas mettre en exécution les vües qu'il avoit pour connoître les véritables diftances des Planetes au Soleil, que par des détours quine peuvent jamais parvenir à une. grande jufteffe. Il fe plaint de fes Horloges qui étoient fort défettueufes , quoiqu'il en eût fait faire un grand nombre fur les principes qui lui étoient alors connus ; il ne lui reftoit donc que fes quarts de cercle qui étoient grands & fort bien divifés , & dont il tiroit tout lavantage qu'on en pouvoit efpérer avec les pinnules ordinaires qu'il avoit tâché de corriger. Mais depuis la découverte des Lunetes d'approche, & l'application qui en a été faite aux quarts de cercle & aux autres inftrumens , dans les premiéres années de l'érablifflement de l’Académie Koyale des Sciences, avec les Horloges à Pendule découvertes & reétifiées aufli à peu près dans le même tems, on fe trouvoit en état de fonder une nouvelle Aftronomie, tant par la jufteffe de ces Horloges avec lefquelles on peut connoître certainement le tems à moins d’une feconde, que par les fecours des Lunetes qui pouvoient fervir à ob- ferver les Aftres en plein jour. J1 y a vingt ans environ qu’ayant confidéré que ces avan- tages nous fournifloient des moyens de perfettionner l’Af tronomie au-delà de tout ce qui avoit été fait jufqu’alors, je PLeNTL - ae Ce 7702 2 di l'Acad 7 Y 4 94 2 : ; Fe côte de Z, Ch rene Heon 77 CA urseqU 4 7 ddy ey fe rev. Be pe je de leon du cé tie 0727 Her] 2p 2npusddy fact Berey DES SCIENCES. 29$ m’appliquai avec un très-grand foin à mettre en exécution le deffein que j'avois formé de corriger les Tables Aftro- nomiques qui convenoient le plus juftement avec le ciel. Et ayant obtenu de Sa Majefté les fecours qui étoient né- ceffaires pour ce fujet, je commençai à établir dans lOb- fervatoire un grand quart de cercle mural garni de fes pinnules à Lunetes , & le placer exaétement dans le Plan du Méridien. Ce füt alors que je découvris parles pinnules à Lunete de ce quart de cercle des étoiles fixes dans le Méridien avec le Soleil, & entr’autres l'étoile du grand Chien , que j'obfervois aufli avec les pinnules à Lunete du quart de cercle portatif de trois pieds de rayon. Cette dé- couverte que perfomne n’avoit faite avant moi, me donna lieu de comparer par le moyen de l'Horloge à Pendule immédiatement le Soleil à cette étoile, & par confé- quent d’en avoir exaétement lafcenfion. droite ; & avec: les hauteurs du Soleil à midi, obfervées aufli avec ces mêmes quarts de cercle, j'en déterminois la déclinaifon. Je ne parle point des autres élémens néceflaires pour ces déterminations , lefquels étoient connus d’ailleurs par des obfervations faites avec les mêmes inftrumens, comme la. hauteur du Pole, celle de l'Equateur, lObliquité de l'E- cliptique , & les réfra&tions. Ainfi après avoir continué ces ebfervations plufieurs années de fuite, j établis les Tables. du mouvement du Soleil , fans avoir égard à aucun fyf- tême. Cefont ces mêmes Tables du Soleil queje fis im- primer en 1686. & qui fe font toujours trouvé confirmées par toutes les obfervations que j'ai faites depuis. Je n’appliquois aufli dans les mêmes tems à obferver toutes les Planetes par la même méthode, & je les aivües. pendant le jour, le Soleil étant fort haut fur lhorifon. Mais pour Venus, je l'ai toujours obfervée dans fa conjonétion: quand elle n'en éroit inférieure avec le Soleil, éloignée que: de deux dégrés toutau plus, foit à l'Orient & à l'Occident ,. ou au Septentrion & au Midi. Ces obfervations qu’onn'a-- voit point encore faites , m'ont donné la pofition de Venus: avec autant de jufteffe que fi je l'avois vüe dans le Soleil. 296 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE L’obfervation que je rapporte ici eft de cette nature; & pour avoir plus exaétement le tems de fa véritable conjonétion & fon lieu , je l'obfervai quelques jours avant qu'elle füt jointe au Soleil ; & quelques jours après. Par ce moyen je déterminai la différence afcenfionelle de cette étoile au Soleil, & femblablement fa différence de déclinaifon ; en forte que l’afcenfion droite & la décli- naifon du Soleil étant connues dans le tems de ces obfer- vations, celles de Venus le feront aufi. Venus étoit alors rétrograde, comme elle eft toujours dans fa conjonétion inférieure , & avec une Lunete de feize pieds de longueur on la voyoit trois fois plus grande qne la Lune avec la vûe fimple : car fon diamétre étoit alors d’une minute, & la Lunete augmentoit le diamétre de 90 fois. Elle paroifloit en croiffant délié, à peu près comme la Lune quand elle a deux jours, & les cornes étoient horizontales dans le jour de la conjonétion en afcenfion droite. Je remarquai aufli avec la même Lunete qui eft très excellente, que la partie intérieure du croiffant avoit des inégalités beaucoup plus confidérables que celles de la Lune; ce que j'ai aufli obfervé d’autres fois : d’où l’on peut juger que cette Pla- nete a des taches comme toutes les autres Planetes. Il y a un très- grand avantage d’obferver cette Planete en plein midi: car comme la lumiére du Soleil lui ôte la plus grande partie de fon brillant qui eft fort grand, on la voit très-bien terminée & fort nette , & fans les couleurs qu'on y apperçoit ordinairement , quand on l’obferve le feir ou le matin, fans mettre entre l'œil & la Lunete un verre un peu coloré. Voici les obfervations que j'en ai faites, dont je ne rapporte que quelques-unes des plus proches de la con- jonction & des plus exaêtes , lefquelles font néceffaires pour la détermination de la conjonétion. | Le 24. Août 1700. le centre de Venus pafñla au Méri- dien après midi à o 4145" & fa vraie hauteur méri- dienne étoit de 39° 36 52’. Le 27. füivanr le centre de Venus paffa au Méridien après midi DES SCIENCES. 297. midi à oh, 24. 47. & fa vraie hauteur méridienne étoit de 39°. 48.53. e premier Septembre 1700. le centre de Venus pañla au Méridien avant midi à 11°. $5”. 21°. Sa vraie hauteur méridienne étoit de 400. 33.20". Le 3. Septembre fuivant, le centre de Venus pafñfa au Méridien avant midi à 11P. 43° 32°. Sa vraie hauteur méri- dienne étoit de 41°. 57.11". Le 4. Septembre fuivant, le centre de Venus paffa le matin au Méridien à 11, 37. 41. & fa vraie hauteur méri- dienne étoit de 41°. 11. 1°. Si Pon examine ces obfervations qui font fort juftes , & qu’on prenne les parties proportionnelles, on trouvera que le centre de Venus devoit paffer au Méridien le 3 1. d'Août après midi à oh, 1°. 16”. & comme le mouvement diurne de Ÿ enus en afcenfion droite , étoit ce jour-là de $'. 55". comme on le peut connoitre par les obfervations que je viens de rapporter, on trouvera que le centre de Venusa été Joint au centre du Soleil en afcenfion droite, ou ce qui eft la même chofe, que le centre de Venus s’eft trouvé dans un même cercle méridien que le Soleil le 3 1. d’Août à sh. 8. 18”. du foir. Par les différentes hauteurs méridiennes de Venus on trouve, en prenant les parties proportionnelles, que dans le tems de fa véritable conjonétion en afcenfion droite, elle devoit être élevée fur l’horizon du lieu qui auroit eu même latitude que l’Obfervatoire, & où elle pañloit alors au Mé- ridien 400. 24. 46". Mais la hauteur de l’Equateur de ce lieu étant la même que celle de l’'Obfervatoire , comme je l'ai déterminée de 41°, 10°. 0”. il s'enfuit que dans ce même tems la déclinaifon de Venus étoit auftrale de 45”. 14. Ce qu’on trouve aufli par les hauteurs du Soleil. Sur ces principes & fur ce que nous avons déterminé de lobliquité de l’Ecliprique , on trouvera par le calcul ordinaire le tems & le lieu de la véritable conjon&ion de Venus & fa latitude. 1700. sat Pp 1700. 21. Dec. 1700. 22. Déc. 298 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE Par M. DE LA HIRE. E ne pus voir le foleil que deux jours après le 28. du J mois de Novembre, auquel jour j’avois calculé que les taches du Soleil qui avoient paru vers le milieu de ce même mois, devoient reparoitre , Je cherchai avec foin s'il n’y avoit point quelque refte des taches, ou même quel- ques facules, comme on voit ordinairerñent , après que les taches ont difparu ; mais je n’y pus rien remarquer ni les jours fuivans. SUR L'ACIDE DE L'ANTIMOINE. Par M HOMBERG. Onfieur Charas a donné une maniére pour tirer M liqueur acide de l'Antimoine , que voici. I met l’Antimoine minéral en poudre ; il y mêle trois fois autant de fable commun, & le diflille à grand feu par la cornue dans un gros ballon à demi plein d’eau de rivié- re, qu'il reétifie enfuite par une feconde diflllation : il provient fouvent de cette opération une liqueur acide , & fouvent aufli il n’en vient point. Monfieur Charas pré- tend que la réuflite de cette opération confifte dans l’ad- miniftration du feu par les dégrés qu’il convient à cette opération , & qu'en obfervant ces dégrés, l’on doit tou- jours réuflir. Cette opération eft décrite dans le Traité de l'Antimoine de Jean Agricola, imprimé à Leipfik en 1639. J’ai fait cette opération plufieurs fois , mais je ne l'ai pas trouvée vraie dans toute fon étendue: elle produit bien quelquefois un acide, mais cet acide ne vient point de l’Antimoine , ik vient feulement d’une terre blanchâtre & argilleufe , qui fe trouve prefque toujours dans l’Antimoine minéral, la- quelle donne un efprit acide par la forte difillation , comme DES SCIENCES 299 Pargille le donne ordinairement ; mais lorfqu'on choifit de l’Antimoine minéral pur & fans mélange de cette terre blanchôtre, ou que l’on prend de l’Antimoine com- mun du plus pur, c’eft-à-dire , fans fcories , on n’en tirera aucun acide , quelque dégré de feu qu’on lui donne. On ne peut donc pas produire cet acide comme un vinaigre d’Antimoine. Pour moi, je fuis perfuadé que l'acide de l’Antimoine ne différe pas de l’efprit de foulfre commun; & comme l'Antimoine abonde en foulfre brûlant , qui eft femblable au foulfre commun, je crois que cet acide n’eft autre chofe que Flefprit du foulfre brûlant ou du foulfre commun qui eft dans l'Antimoine , & que la partie réguline de lAnti- moine , qui eft le vrai Antimoine , n'y contribue en rien. Je ne dis pas ceci fans raifoh: car j'ai fait l'acide de TAntimoine fans addition , & même par différentes ma- niéres , avec des peines fort grandes: je l'ai employé en différentes opérations ; je l’ai toujours trouvé parfaitement femblable à l’efprit.de foulfre commun, c’eft-à-dire, qu'il n'a rien fait que l’efprit de foulfre n’ait fait parfaitement de même. . Voiciune des maniéres dont je me fuis fervi pour tirer cet acide. J’ai pilé lAntimoine en poudre menue; je l'ai mis dans une poële plate de terre non vernie d'environ un pied de diamétre ; j'ai couvert cette poële d’un pot de terre fans fond; j'ai adapté trois aludels fur ce pot de terre, & jai couvert l'ouverture du dernier aludel d’une grande cloche de verre , dont les bords étoient foutenus environ trois ou quatre lignes au-deflus d’un réfervoir d’eau qui étoit affez chaude pour fumer & pour humeéter la cloche en dedans: Peau qui découloit de la cloche retomboit dans le réfervoir. J'avois fait un trou de la largeur d’un doigt environ au milieu d’un pot de terre , par lequel javois paffé le manche d’une cuillere de fer pour remuer l’Antimoine deffous cette cloche, comme lorfqu'on calcine l’Antimoine pour en fire du verre: j'ai eu par ce moyen des fleurs d'Antimoine Ppi 1700. 18, Août, 300 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE dans les aludels, un peu d'acide dans l’eau fous la cloche de verre , & mon Antimoine calciné dans la poële fous le pot de terre. On tire peu d’acide de cette maniére , mais on peut être sûr qu'il eft fans mélange : il arrive aufli fort fouvent qu’on n’en tire point du tout; mais cela dépend premiérement de l'exaétitude de l’Artifte, fecondement & principalement de la température de l'air & du tems qu’on fait cette opé- ration ; plus le tems eft froid & humide, plus il s’en tire, & dans un tems chaud & fec il ne s’en tire point du tout. Il faut généralement obferver ici toutes les circonftances qu'on obferve quand on fait l'efprit de foulfre per Cam- panam , & compter que cette opération eft encore plus dificile, que n'eft celle de lefprit de foulfre commun fans addition. O:B SERV 4 TA ON SUR UNE NOUVELLE ESPECE DE HERNIE. Par M. DE LIiITRe. Acc le 30. Juin 1699. le Cadavre d’un homme fort charnu , mort fubitement à l’âge de quarante-huit ans, avec une Hernie à l’aine gauche, quiavoit commencé après un effort, cinq ans avant fa mort, & qui étoit infenfible- ment defcendue jufqu’au fond du Scrotum. Parcourant les inteftins grêlés de ce Cadavre les uns après les autres, & étant parvenu vers la fin de l'Ileon, je m'apperçus qu'il étoit arrêté par une de fes parties dans le fac de la Hernie; j'eus de la peine à J'en retirer , quoiqu'il n’y fût retenu par aucune adhérence. La circonférence entiére du corps de Pinteftin ne for- moit pas cette Hernie , comme il arrive ordinairement ; mais feulement la partie oppofée à celle qui eft attachée immédiatement au Méfentere. Cette partie d’inteftin avoit DES SCIENCES: 301 d'abord été engagée dans les anneaux de laine, à l’occa- fion d'un relâchement, que effort dont j'ai parlé avoit caufé au Péritoine en cet endroit; enfüuite elle fut infenfi- blement pouffée feule le long de l’apendice du Péritoine, par la contraétion alternative des mufcles du ventre & du diaphragme , par la pente du lieu, par le mouvement ver- miculaire des inteftins , & par la pefanteur de la matiére contenue dans la cavité des inteflins ; parce que les parois des anneaux de cet homme fort charnu ayant fortement réfifté à leur écartement , avoient refufé l'entrée au refte de la circonférence du corps de l’inteftin. Cette réfiftence avec les autres caufes dont je viens de parler, n'a pas empêché la continuation du canal inteftinal vers l’anus, par la partie attachée immédiatement au Méfentere , la- quelle demeurant libre & fans compreflion dans la capacité du ventre, avoit encore confervé la forme de canal. Elle a aufli donné lieu à l’alongement de la partie de l'inteftin engagée dans les anneaux, laquelle étoit preffée extérieurement par les parois de ces anneaux, & pouflée en bas par les caufes déja rapportées, avoit en s’alongeant formé une efpéce d'apendice à cet inteftin. Et enfin à l'augmentation du diamétre de la partie du corps de l’inteflin , placée au-deflus de Papendice , laquelle étoit plus groffe que celle qui étoit au-deffous; & cela par le fréquent obflacle , que la matiére ( qui refluoit de l'apen. dice dans le corps de fon inteftin) faifoit à celle qui defcendoit du côté de Feftomach, pour fe porter vers Panus, L’apendice de lIleon (qui formoit la Hernie) étoit un canal membraneux de figure conique, dont la bafe étoit placée à fon extrémité inférieure ; il étoit long de quatre pouces, fur un pouce quatre lignes de large du côté du corps de cet inteftin, & de deux pouces du côté oppofé. Son extrémité fupérieure à l'endroit des anneaux, étoit ap- platie par les côtés, convexe devant & derriere , & ouverte dans la cavité de l'Ileon. L’extrémité inférieure étoit groffe, ronde & fermée ; on y remarquoit deux boffes rondes, lune PPp iï 302. M£MoIREs DE L'ACADEMIE ROYALE à droite & l’autre à gauche, chacune d'environ quatre lignes de diamétre. Les parois de cette apendice étoient très-minces , & on n’y remarquoit, ni fibres charnues, ni glandes ; mais feule- ment quelques vaiffleaux, qui étoient fi déliés qu'à peine ils tomboient fous les fens ; cependant on en remarquoit un grand nombre des uns & des autres dans le corps de l'inteftin : ftruéture entiérement différente de celle de l'apendice naturelle au cæcum ; puifque la bafe du cone qu’elle forme, ef fituée à fon extrémité fupérieure , & que l'épaiffeur de fes parois, la groffeur & le nombre de fes fibres charnues , de fes vaifleaux & de fes glandes, font aufli confidérables , à proportion que dans le corps de lin- teflin cæcum , dont elle dépend. L’extrême différence qui fe trouve entre l’apendice na- turelle au cxcum, & l’apendice contre nature à l’ileon, me femble une preuve que la derniére apendice na pas été faite avec fon inteftin dans le tems de la premiére conformation, mais fort long-tems après, & de la maniére dont je viens de l'expliquer. D'ailleurs 1l n'efl pas concevable qu'un gros & long bout d’inreflin, beaucoup plus libre & plus flotant dans la vafte capacité du ventre , & moins foutenu que le corps des inteflins , puifle s'engager dans une maniére de fente , fer- mée intérieurement par le Péritoine , extérieurement par la peau & par d'autres membranes, & munie par les côtés de quantité de fibres charnues &c tendineufes des mufcles obliques & tranfverfes du ventre ; puifque toutes ces par- ties tendent fans cefle non-feulement à repoulfer les corps qui font effort pour entrer dans les anneaux de ces muf- cles , mais encore à les en chaffer, quand ils ont une fois commencé à s'y engager. Ce qui devroit d’autant moins arriver dans le corps dont il s’agit, que fes mufcies étoient beaucoup plus gros & plus forts , que l’homme n’a accou- tumé de les avoir. Enfin cette conjeéture paroït confirmée par une autre obfervation que j'ai faite fur un homme mort d’une fiévre DES SCIENCES: 307 maligne à l’âge de trente-quatre ans. Cet homme depuis trois ans avoit à l’aine droite une Hernie fans étranglement. Cette Hernie étoit pareillement faite par une apendice de l'inteftin Ileon , laquelle fe trouvoit feule engagée dans les anneaux, pendant que le refte de la circonférence du corps de l'inteftin étant demeuré libre dans la cavité du ventre, avoit confervé la forme de canal. Cette apendice étoit life & unie, de figure conique ; eile avoit fa bafe du côté du corps de l'intefin ; elle éroit applatie devant & derriere un peu au- deffous des anneaux, vraifemblablement par le brayer d'acier, que cet homme portoit nuit & jour depuis deux ans : elle étoit longue de trois pouces huit lignes , large d’un pouce deux lignes en fon commencement , & de dix lignes en fa fin. La conformation. différente de l’apendice des Ileons de ces deux hommes provenait fans doute de ce que la ma- tiére contenue dans ces apendices avoir eu plus de facilité à dilater leurs parois & les tégumens de l’aine & du Scro- tum , en ligne droite dans l’une , & vers les côtés dans l’au- tre ; & Les bofles que j'ai remarquées dans la premiére apendice, étoient l'effet du long féjour , que la matiére qu'elle contenoit avuit fait en différens enfoncemens du Scrotum, comme autant de moules. Avant ces deux obfervations, j'avois été appellé avec un Chirurgien, pour voir un homme qui avoit une tumeur à l’aine gauche, dont il mourut dans l’efpace de cinq jours. Quelque attention que le Chirurgien & moi. eufliors pù faire à toutes les circonftances de cette maladie, nous nous trouvâmes très-embarraflés l'un & lautre , lorfqu'il fut queftion de déterminer, fi cette tumeur étoit une véritable Hernie , fi elle étoit feulement faite d'inteftin, & s’il yavoit de l’étranglement ; parce que cet homme pendant tout le cours de fa maladie avoit eu le ventre libre ;.& qu'à peine il avoit eu quelque envie de vomir. Dans cette incertitude nous demandâmes du fecours ; mais par malheur ce fecours ne voyant pas plus clair que nous dans cette maladie , ne fut pas d'avis qu'on fit l'opé- 304 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ration à cet homme, du moins dans le rems qu’elle: auroit pà lui être falutaire : car en prévenant la gangréne , qui fur- vint le quatriéme jour de la maladie , nous l’aurions sûre- ment fauvé. Après la mort de cet homme je demandai aux parens la permiflion d'ouvrir fon Cadavre , pour m’affürer de la nature de cette maladie. Mais foit à caufe de la nouveauté du fait, foit par le dérangement, la noirceur & la puanteur des parties, qui avoient été le fiége de la maladie, il me fut impoflible de tirer de cette ouverture tout l'éclairciffement que je m'en étois propofé. J’avoue même que tout ce que Je remarquai dans ce Cadavre, ne me donna alors * que des notions fort obfcures & très-confufes de cette ma- ladie. Je ferois encore dans le même embarras , fi les deux obfervations que j'ai faites depuis, ne men avoient tiré. Car en rappellant les idées que j'avois pà me faire fur cette ma- ladie dans ce tems-là , & les conférant avec les préfentes, elles m'ont fait toucher au doigt, que l’Ileon de cet homme, de même que ceux des deux autres , avoit une apendice , qui ayant fait dans ce dernier une Hernie avec étranglement, avoit été la véritable caufe de fa mort. On peut aifément comprendre qu'il doit arriver un étran- glement dans de femblables apendices engagées dans les anneaux des mufcles du ventre. 1. Lorfque la matiére contenue dans la cavité de ces apendices eft trop épaifle , trop grofliére , trop vifqueufe, trop abondante, &c. parce qu'il faut qu’elle monte contre fon propre poids, & par la même route qu’elle eft defcen- due; fur-tout fi l'extrémité fupérieure de ces apendices eft beaucoup plus étroite que l’inférieure. D'ailleurs les fibres charnues de ces apendices n’étant plus capables d'aucune contraétion à caufe de leur extrême extenfion , ne pouvoient plus contribuer à faire monter dans la cavité du corps de l’Ileon la matiére tombée dans la cavité des apendices. De plus ces apendices étant fituées dans laine & dans le Scrotum , manquoient du fecours; que les mufcles du ventre & du diaphragme communi- quent DES SCIENCES: s0$ quent aux parties renfermées dans cette grande capacité pour faire couler les matiéres, que chacune contient, vers les endroits, qu'il eft convenable. C’eft-pour-cela, que dans ces fortes d'indifpofitions l'homme eft obligé de preffer dou- cement avec la main.de bas en haut fucceflivement Papen- dice de l'Ileon , lorfqw’elle eft pleine, pour en vuider la matiére dans la cavité du corps de l’inteflin. 29, T1 furvient un étranglement à ces apendices, lorfque les humeurs renfermées dans leursmembranes S'y trouvant trop fermentées , trop rarefées , trop âcres ,trop grofliéres, &c. y caufent une fluxion, de la tenfion, de la douleur, une inflammation, un apoftême , &c. 3°. Lorfque les mêmes accidens arrivent aux anneaux de laine. 4°. Lorfqu’il y a dans le voïfinage de ces apendices quel- que tumeur , ou un corps étranger, qui venant à les com- primer, empêche , que le fang & la lymphe n’en revien- nent, & que la matiére tombée dans leur cavité ne fe dé- charge dans celle du corps de l'inteftin Ileon. | s°. Lorfqu'un coup, une chute, un brayer trop dur, trop ferré, &c. font à ces apendices une compreflion, une con- tufion , une playe, &c. confidérables. Pour rendre cette nouvelle obfervation de quelque utili- té dans la pratique de la Médecine, j'ajouterai à la defcrip- tion ; que Je viens de faire , les fignes pour connoître cette efpéce particuliére de hernie accompagnée d’étranglement, & les moyens, qu’on peut employer pour la guérir ; afin qu'à l'avenir on garantiffe de la,mort ceux, qui auront le malheur de tomber dans une pareille maladie, Les fignes diagnoftics de cette hernie particuliére accom-: pagnée d'étranglement , peuvent être divifés en ceux, qui la font connoitre ayant l'opération, -& en ceux, qui. la font connoître pendant l'opération. | Les fignes diagnoftics, qui font connoître cette hernie particuliére avant opération font, nmos 291 2rel 19. Que le malade va à la felle pendant tout le cours de la maladie ; parce que le çanal inteftinal n'étant point EIO 4 306 MEMoIRËES/DE L'AICADEMIE ROYALE intercepté , les éxcremens ont la liberté de le parcourir d'un’bout à l'autre. ‘20, Que le malade ? Wa point de hocquet ; Où rrès-rare: ment. 3°. Qu'il ne vomit Es ou incompariblement moins guè dans les hernies ordinaires , & jamais de matiére fecale. 4°, Que le ventre du malade n'eft ni gros , nitendu, ni plein de vents ; comme dans les hernies ordinaires. 5°. Que la tumeur de l’aine fe forme plus léntement , & ne devient jamais figroffe. 6°. Que Pinflammation , la douleur, la fiévre , & les au- tres accidens , qui accompagnent cetté efpéce particuliére de hernie, ob plus long-tèms à fe manifefter , & ont moins de ience L Les fignes diagnoftics, qui font connoître cette hernie particuliére pendant l'opération ; font, Û ) 19, Que dans les hernies ordinaires la circonférence en- tiére du corps de l'inteftin eft engagée dans le fac de la hernie, & qu il n'y en sig une AE dans FE hernie parti: géféres Le 20. Que la portion dire ii ;qui fait La her. ordinaire, fe trouve double dans le fac en maniére d'arc; au lieu que dans l'efpéce particuliére , dont il s’agit , cette portion eft fimple ; fituée See CRIER Ê & terminée te un bout très-diftinét. 7301 Que la hernie ordinaire eft fouvent filé par l’inteftin & par lépiploor tout enfemblé: & que’ la particuliére eft toujours faite par le feul inteftin. Quant au pronoftic de la hernie particuliére , il eft tou joufs- funeñe, Horfqw elle eft accompagnée d’ étranglement, fur:tout fi apres avoir tenté inutilement les remédes généraux, & particuliers y jôn n’a recotirs À l'opération avant que la #an- gréne ait fait un grand progrès. L'opération eft pour lordi- naire plus facile & moins LE NE dans cette hernie , que dans les communes, | 6 verntes Mlle AANONER La maniére paticuhére de fité lo pet re éerte nt ‘de hernie doit être diféfente, {lon les différens QUI D,E,S. SCIENCES. ; 30% états, où fe trouve l’apendice d'inteflin. dans le tems de l'opération. és Cette apendice peut être légérement alterée > OU gan- grénée. La gangréne peut feulement intérefler la partie in- férieure. de lPapendice , ou la partie inférieure & la moyen- ne tout enfemble , ou bien l’apendice toute entiére ; avec quelque portion même du corps de l'inteftin., D'où il s’en- fuit néceffairement , qu'on doit pratiquer dans cette ma: ladie quatre fortes d'opérations très-différentes les unes des autres. Si l'altération de l’apendice ef légere , il Aut la décour- vrir à nud en coupant doucement avec un Biftouri, les membranes qui la couvrent ; difiribuer dans le canal de l’inteftin , une partie de la matiére contenue dans la ca- vité de l’apendice , au cas. qu'elle y foit en trop. grande quantité ; détacher les adhérences, s’il .y,en à; faire, une incifion aux anneaux de l'aine, fi leur ouverture n'eft.pas fufifante pour permettre la redudion .de l’apendice ; la re: poufler doucement dans la capacité du. ventre, & l'y con- tenir enfuite , au moyen d’une tente, d’un bandage & d'une fituation convenables. Ah : La playe du ventre étant une fois bien cicatrifée, on n’a pas lieu de craindre , que cette apendice retombe, & fafe une hernie femblable à la premiére: ce qu’on ne peut pas affürer d’une portion d'inteflin, qui a déja fait une hernie. Lorfque l’apendice eft feulement gangrénée. dans fon extrémité inférieure , .& qu'il refte encore au-deflus deux travers de doigt de fain , il faut faire une ligature un tra- vers de pouce au-delà de ce qui, eft gangréné ; couper l'as pendice un peu au-deffous de la ligature , & remettre le refte dans la capacité du ventre. On tiendra le fil de la ligature qui pend ,'aflujetti extérieurement aux environs de la playe, jufqu'à .ce que la partie liée fe {épare du refte de l’apendice pour la retirer alors du ventre-par le moyen de ce fil. | | , L'or Cette féparation étant faite , le Chirurgien doit travail- ler à guérir la playe ; obfervant durant le cours de la ma- Qqÿ 308 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ladie, que le malade foit toujours couché les feffes un peu élevées ; qu'il prévienne & évite tout ce qui peut ébranler , comprimer & étendre avec violence les parties contenues dans le ventre , par exemple , la toux , l’éternu- ment , le hocquet, le vomiflement , &c. qu'il prenne très- peu d’alimens , maïs fort nourriflans ; crainte que par trop de volume, ou trop de pefanteur , ils ne faffent feparer la portion liée de l’apendice, avant que les parois de la partie, qui refte , foient fuffifamment colées & unies entre- elles; ce qui cauferoit infailliblement la mort au malade par l’épanchement des matiéres dans. la capacité du ventre, épanchement , qui fuivroit néceflairement l'ouverture de ce bout d’apendice ; puifque fa cavité eft continue à celle du canal inteflinal. Le malade au contraire na rien à craindre de ce même bout d’apendice fermé à l’occafion de la ligature , parce que le canal du corps propre des inteflins , n'étant point intercepté dans aucune de fes parties , il refte encore aux excremens & à la matiére de la nourriture , un pañfage libre, depuis le pylore jufqu'à l'anus ; au lieu que la mort feroit certaine , fi dans les hernies ordinaires , on lioit le bout du corps de l'inteftin, qui eft continu à l’eftomach. Déand la languette de l’apendice s'étend prefque juf- qu'au corps de l'inteftin, le Chirurgien en doitretrancher tout ce qui eft mortifié. Mais auparavant il donnera à te- nir les parties de l’inteftin , qui doivent faire deux bouts après l’amputation , de peur qu'ils ne rentrent dans la ca- vité du ventre. Enfuite le Chirurgien examinera avec foin lun & l’autre de ces deux bouts, pour diftinguer celui qui tient encore au duodenum , d'avec le bout qui eft continu au rectum. On reconnoiît le bout d’inteftin continu au duodenum. 1°, Par un mouvement vermiculaire , qu'on y remarque après l'amputation. 20. Par quelque matiére , qui fort de tems en tems par ce bout d'inteftin. 3°. Parce que fes parois ne s’affaiflent pas entiérement, DES SCIENCES. 309 ou fi quelquefois elles s’affaiffent , elles font relevées peu de tems après par l'effort , que fait la matiére pour fortir par ce bout d’inteftin. On connoît le bout continu au retum. 1°. Parce qu'on n’y obferve aucun mouvement periftaltique. 20, Parce quil ne fort par ce bout d’inteflin aucune ma- tiére , fur-tout après qu’on en a une fois exprimé celle , qui s’y eft trouvée dans le tems de l'opération, à moins que par un mouvement antiperiftaltique , une partie de la matiére déja defcendue , ne retrograde pour fortir par ce bout d'in- teftin. En ce cas on m’objettera , que le dernier figne ; que je viens de rapporter , pour faire connoître le bout d'inteftin continu au reétum , eft entiérement inutile : mais on ne per- ‘fiftera pas long-tems dans cette objeétion ; fi l’on fait réflé- xion ; que le mouvement periflaltique des inteftins eftun mouvement moderé , égal & régulier ; & que l’antiperiftal- tique eft un mouvement violent , inégal & irrégulier ; que la matiére qui fort de 'inteftin par un mouvement periftal- tique , fort doucement & d’une maniére uniforme ; au lieu que la matiére , qui fort par un mouvement antiperiftaltique, fort avec impetuofité, & comme par fecouffes , qui ne gardent entre elles aucune proportion. Ces deux bouts d'inteftin étant bien diftingués l’un de l'autre , il faut lier le bout continu au reûtum , enfuite le re- pouffer dans la capacité du ventre, ayant foin de tenir le fil aflujetti extérieurement aux environs de la playe, jufqu’à ce que la partie liée foit féparée du refte. On lie le bout d’inteftin continu au reftum. 1°. Parce qu’il ne doit plus rien recevoir par cette embouchure des autres inteftins ; continus à leftomach; puifqu'il en efttout- à-fait féparé. 20. Afin que dans la füie il ne puiffe plus rien s’épancher de la cavité de cet inteftin dans la capacité du ventre ; ce qui pourroit arriver , lorfque cette portion d’inteftin fe trouve- roit dans une fituation fort inclinée, ou qu’elle viendroit à fouffrir quelque forte compreflion, ou à tomber dans des mouvemens convulfifs. Qai 310 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE A l'égard du bout d'inteflin continu à l’eftomach; on pañlera avec une aiguille trois fils féparément à trois lignes de fon bord , lefquels partageront fa circonférence en trois parties égales. On nouera enfemble les deux bouts de cha- cun de ces fils pour en faire une anfe , qui tienne fufpendue l'extrémité de cet inteftin au bord interne de la playe du ventre , jufqu'à ce qu’elle sy foit colée; ce qui arrive par le moyen des parties vifqueufes de la lymphe & du fuc nour- riciet, qui coulent des membranes de l'inteftin coupé , & des lévres de la playe des parties contenantes du ventre. Le Chirurgien en travaillant à faire cicatrifer cette playe; doit avoir foin d'y conferver une ouverture proportionnée à l'embouchure du bout d'inteflin adhérant à fa circonféren- ce; afin que la matiére fécale, qui n’a alors d'autre voie pour fortir du corps, que celle-là ne trouve jamais dans ce paf= fage aucun obftacle à fa fortie. J'ai connu:trois hommes & une femme ; qui rendoient par ce feul endroit leur matiére fécale ; parce qu’à l'occalion d'une hernie ordinaire accompagnée d’étranglement ; la nature , ou le Chirurgien .avoient fait coler au bord dela playe , le bout d'intefün continu à l’eftomach. o} Cette derniére opération ef à la vérité fuivie d'incommo= dités très-fâcheufes: mais après tout la vie quelque trifte & quelque dégoûtante qu’elle foit, n’a rien à beaucoup près ; de fi affreux & de fi terrible que la mort. Miférum remes dium tolerabile reddit auflerius malum.. Celle. L4 DES SCIENCEISs 311 DESCRIPTION DE L'URETHRE DE L'HOMME, démontrée à l'Académie le troifiéme Juillet 1700. Par M. DE LIiTTRE.. ?Uréthre de l'homme eft un canal rond, recourbé du L côté du ventre depuis le cou de la veflie, où elle com- mence ; jufqu’à la partie inférieure dés os pubis , & pen- dant depuis les os pubis jufqu’à extrémité du gland , où elle finit. Ce canal eft long de douze à treize pouces ; il eft lacé fous les deux corps caverneux depuis l'endroit de eur union jufqu'au bout de la verge; il eft couvert de la même peau que les corps caverneux & forme trois tumeurs, dont l’une eft fituée en fon commencement ;, & fe nom- me la Glande proftate; la feconde eft un pouce en decà de la premiere, & s'appelle la Bulbe de luréthre; & on donne le nom de Gland à la troifiéme , qui termine ce canal. à -L'uréthre eftcompofée de membranes, de glandes, d'une fubftance fpongieufe , de mufcles & de vaiffeaux. L’uréthre a deux membranes, qui font minces & d’un üflu fort ferré. La membrane extérieure couvre le dehors de l'urérhre , & le dedans du prépuce , & l’'intérieure tapifle feulementle dedans de ce canal. Ces deux membranes laif fent entr'elles un efpace , qui eft rempli de glandes & d’une fubftance fpongieufe. 15 La premiere glande renfermée entre les membranes de: Vuréthre du côté de la veflie, eft glande proftate. Cer- te glande ef ipas double comme on dit; puifqu'elle ef continue en toutes fes parties. Elle ‘eft placée à la racine de luréthre; fa figure eft conique & reflemble à un petit cœur; elle-eflongue d’un pouce trois lignes & enveloppe ce canal dans toute fa longueur, & elle eft épaifle de {ept lignes ; fa bafe;, qui‘eft du-eoré de la veffie, eft large! dun « 312 MEMoïREs DE L'ACADEMIE ROYALE pouce quatre lignes; & fa pointe , qui eft du côté du gland, a neuf lignes de largeur ; elle eft enveloppée de fibres muf- culeufes & compofée d'environ douze petits facs , qui n’ont entr'eux aucune communication par leur cavité , & qui fe terminent dans le canal de luréthre autour du Verumon- tanum par autant de tuyaux gros comme des foyes de porc. Il y a dans chacun de ces facs quantité de petits grains glanduleux , dont les conduits excrétoires ( qui ont chacun un fphinéter à leur extrémité) ouvrent dans la cavité deces facs & y dépofent la liqueur, qu'ils filtrent , comme dans autant de refervoirs. Cette liqueur peut être de quelque ufage pour la génération en fe mélant avec la femence dans le baflin de l’uréthre pendant le coït; elle peut encore fervir à enduire la fuperficie intérieure du canal de luré- thre , pour rendre à la femence & à l'urine ce pañage plus coulant & plus aifé, & le garantir de l’acrimonie de ces deux liqueurs. La deuxiéme glande placée entre les deux membranes de Puréthre immédiatement après la glande proftate du côté du gland , eftune glande qui n’a point de nom, par: ce qu'elle n’a point encore été décrite. Cette glande eft d’une couleur de rouge foncé ; elle forme autour de l’uré- thre une efpéce de bande unie, large d’un pouce & épaif- fe de deux lignes,& perce la membrane intérieure de l’uré- thre dans toute fa circonférence par un grand nombre de conduits excrétoires , qui verfent dans ce canal la li- queur , que la glande filtre, Cette liqueur eft un peu mu- cilagineufe , & par conféquent propre à enduire le canal de luréthre. L’efpace , qui refte entre les deux membranes de luré- thre depuis la derniere glande , dont je viens de parler, juf= qu’à la fin de ce canal, eft occupé par une fubftance fpon- gieufe , compofée d’un très-grand nombre de fibres muf culeufes. Ces fibres s’entrecroifenten différentes maniéres, & laïffent entrelles quantité de petites celules ; dans lef- quelles une grande partie de capillaires des arteres fe rers minent; DES SCIENCES 313 Hinent, & d’où naît un pareil nombre de Veines. Cette fub- fance fpongieufe en fon commencement s’éléve en dehors, principalement par la partie inférieure; elle forme une tu- meur , ou bulbe , longue d’environ un pouce, de figure conique, dont la bafe, qui eft du côté de la Veflie, a8 li- gnes d’épaifleur ; & la pointe, qui eft du côté du Gland, en a 4; & depuis cette Tumeur jufqu’au Gland, elle eft épaiffe d’une ligne & demie dans les deux côtés & au- deflous, & d’une demie ligne feulement le long de la par< tie fupérieure. Enfin la fubftance fpongieufe contenue entre les deux Membranes de l’Urethre , a dans le Gland s lignes d'épaif feur à l’endroit de fa bafe, qu'on appelle Couronne, & 2 lignes dans le bout oppotfé. La fubftance fpongieufe de lUrethre de même que celle des corps caverneux en fe rempliffant de fang. & d’efprits animaux, donne à la Verge toute la roideur & toute la ten- fion, dont elle a befoin pour être propre à la Génération. A Membrane, qui couvre le dehors du Gland, eft ex- trèmement finie , apparemment parce qu'elle fe fépare au commencement du Gland en deux parties, dont l’exté- rieure tapifle te dedans du Prépuce. Le frein qui attache fortement le Gland au Prépuce par fa partie inférieure, n’eft autre chofe que la Membrane extérieure du Gland, qui eft double en cet endroit. La partie de l’Urethre, qui fait portion du Gland , eft retrouflée par fa partie poftérieure fur l'extrémité antérieure des deux corps caverneux , & les couvre exaétement de tous côtés. On remarque autour de la Couronne des corps gros com- me une foye fine de Porc, longs d’une demie ligne, de f- gure prefque cylindrique , pofés parallélement fur cette Couronne, felon la direétion du Gland, & éloignés les . uns des autres d’un tiers de ligne. On entrevoit à l'extrémité oflérieure de chacun de ces corps un petit trou , par où j'ai fouvent fait fortir une matiére blanche & épaifle, quien fortant fe forme en filets, comme celles qu'on exprime des 1700. 111: 4 4 314 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE Glandes des paupiéres. Ce qui prouve évidemment, qué les petits corps de la Couronne du Gland font des Glandes aufli-bien que celles des Paupiéres, &non pas les Mame- lons de la peau gonflés, comme quelques-uns croyent; puifqu'il ne fort aucune matiére par les Mamelons de la peau. D'ailleurs ils font 4! fois plus épais que la Membrane, qui couvre le dehors du Gland, &ils font toujours fort fen- fibles dans tous les Glands de l’homme autour de la Cou: ronne , jamais autre part & toujours à-peu-près dans le mê- me nombre. D'où on peut conclure, que ces petits corps font dans l'homme la véritable fource de la matiére blan- che & onétueufe, qu'on remarque entre la Couronne du Gland & la racine du Prépuce ; d’autant plus qu'avec le Mi- crofcope même on n’apperçoit dans le Prépuce rien, qui ait la moindre apparence de Glande. D'ailleurs toutes les fil- trations connues fe faifant par des Glandes, il faut abfolu- ment , qu'il y enaïit dans le Prépuce ou dans le Gland pour filtrer la matiére blanche & onétueufe, dont je viens de par- ler, laquelle en huilant le Gland & le Prépuce, empêche que ces deux parties ne fe defféchent & ne fe collent l'une à l’autre. La fuperficie intérieure du canal de PUrethre eft liffe & uniforme par-tout hormis vers fa racine, où l’on trouve une petite éminence & deux petkes canelures. ‘ La petite éminence ef fituée verticalement au milieu de la partie inférieure de la racine de ce canal à 6 lignes du cou de la veflie; elle reffemble à une petite crête de Coq, & on l'appelle communément le Verumontanum. On re- marque à chacun des deux côtés de cette éminence un trou de figure un peu ovale & large d'environ une ligne, Ces trous ne font autre chofe que l'embouchure des deux conduits excrétoires communs des véficules féminaires, lef- quels après avoir traverfé la partie fupérieure de la Glande proflate , fe terminent dans la cavité de l'Urethre pour y verfer la femence dans le tems du coiït. | Les deux canelures de l'Urethre font auffi placées à la : s £ DES SCIENCES, 31ç partie inférieure de ce canal, de forte que le commence- ment de chacune répond à un des trous du Verumontanum; elles font féparées l'une de Pautre par une fimple ligne formée par lallongement du Verumontanum ; leur pro- fondeur eft fuperficielle ; elles ont 8 lignes de longueur fur une de largeur , & fe portent du côté du gland, en diminuant peu-à-peu de leur largeur & de leur profondeur. Le Canal de l’Urethre forme en fon commencement une efpéce de baflin, qui a environ un pouce de longueur fur 5 lignes de largeur. Le due fuivant de la cavité de ce Canal n’eft large que de deux lignes, & le refte left de près de trois. Entre la Membrane extérieure de l’'Urethre & les Muf= cles accélérateurs de la Verge, on trouve deux Glandes, une de chaque côté , que M. Couplet a décrites , & que j'ai démontrées le premier à la Compagnie. Ces Glandes ont chacune un Conduit excrétoire commun , long de deux pouces, & gros d’une -demie ligne , lefquels dès leur naif- fance , percent la Membrane extérieure de l’Urethre ; en- fuite ils rampent dans fon tiffu fpongieux , & percent enfin la Membrane intérieure de ce Canal par fa partie inférieure, 1 pouce 8 lignes en decà du Verumontanum, & environ une ligne à côté lun de l'autre, D’où il fuit , que la liqueur que ces Glandes filtrent , ne coule pas dans la cavité de FUrerhre dans le tems de l’érgétion de la Verge; parce que leurs conduits contenus dans le tiffu fpongieux de l'Ure: thre font affaiflés par le Sang &t les Efprits animaux, dont alors ce tiffu eft beaucoup plus rempli, que hors du tems de léreétion. Par conféquent la liqueur filtrée par ces Glan: des n’eft pas deftinée pour la Génération, mais pour hu- meéter & enduire le canal de l’'Urethre. On trouvera dans Je Livre de M. Couplet la defcription dune troifiéme Glande qui appartient aufli à l’Urethre. L'Urethre eft dilatée par trois Mufcles, & refferrée par deux. L'un des Mufcles dilateurs de l’Urethre, naît de la ” partie inférieure & antérieure du Redtum, & s'attache par KRri $16 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE fon autre extrémité à la partie inférieure & poftérieure de TUrethre. Et les deux autres Mufcles dilateurs naïffent chacun de la partie intérieure de la tubérofité d'un des Os Ifchium, & s’inferent chacun de fon côté à la partie la- térale & poftérieure de l’Urethre. L'Urethre eft refferrée par les deux Mufcles accéléra- teurs, dont une partie naît du Sphinéter de l'Anus , & l'au- tre, qui eft beaucoup plus confidérable, naît de la partie inférieure & pofñtérieure de l’Urethre, & s'inferent chacun à la partie latérale inférieure du corps caverneux de fon côté vers la racine de la Verge. J'ai remarqué dans plufeurs Cadavres, qu’il fe détache de la partie antérieure de chaque Mufcle accélérateur quel- ques fibres charnues , qui après avoir rampé fur les côtés de la Verge, fe terminent au Prépuce. Ainfi dans le Coit, & lorfqu'on urine, ces Fibres fe mettant en contraction tirent le Prépuce du côté de la racine de la Verge, & dé- couvrent le trou de l’Urethre, pendant que le refte de ces Mufcles en fe contraétant aufli en même tems, poulfe l'u- rine ou la femence pour les chaffer hors de ce canal. L’Urethre reçoit fes nerfs des dernieres paires facrées ; fes Arteres viennent des Hypograftiques , & les Veines vont fe rendre dans les Hypogaftriques. Les Tuniques des Veines de l'Urethre & celles des Veines du Corps caver- neux dans leur tiflu fpongieux font percées de quantité de etits trous , de même que les Tuniques des Veines de la Rire , principalement de Veau, vraifemblablement pour faciliter le retour du fang dans le tems de l’érettion , parce qu'alors il eft difficile à caufe de Pextrême tenfian de la Verge. Fin des Mémoires.