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BMPSIOIRE ; D°E 1 | LACADEMIE REP LE DES SCIENCES.

ANNÉE M DCCXLIX. Avec les Mémoires de Mathématique & de Phyfique,

pour la même Année.

Türés des Repiflres de cette Académie.

ARR TAC MR,T S DE L'IMPRIMERIE ROYALE.

MED CE EE EC

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Lab On D 3 dteré LR ReE M

pau He REINE

POUR

L'HISTOIRE.

PHYSIQUE GENERALE.

UR les grands Froids obfervés en Sibérie. Page r Sur un Elecfrométre. T Sur l'effet de l'Eedricité appliquée à la guéri rifon de el

maladies.

Obfervations de Phyfique générale. 27

ANATOMIE.

Sur les ufages du grand nombre des dents du Requin, 90

Sur la firuélure des vifcères glanduleux, & particulièrement fur celle des reins & du foie. 92

Obfervations Anatomiques. 104

CH YVM I E.

Sur une nouvelle efpèce de Teinture bleue. III

B\O;:T'AUN 1:Q U E

Sur la tranfpiration infenfible des Plantes. 143

Obfervations de Botanique. 147

TL ANBELE

ASTRONOMIE.

Sur les élémens de la théorie du Soleil, 149 Sur les Réfraëtions. 152

ME CT: AN; IS QERE;

Sur un nouveau principe général de Méchanique. 177 Sur le principe de la moindre action. 179 Machines on inventions approuvées par l'Académie en 1749.

182

Eloge de M. Amelor. 188

10:0:0:0:0:010:0:0:0:0:0/0:0:0:0100:0:0:0:0:0:0:0:0:0:0:0:0:01

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POUR

LES MEMOIRES.

O BSERVATIONS du thermomètre, faites pendant les grands froids de la Sibérie. Pa M. Derisee.) : Page

Recherches de Statique & de Dynamique, L'on donne un nouveau principe général pour la confidération des corps ami- més par des forces variables, fiivant une loi quelconque. Pax

M. le Marquis DE COURTIVRON. 15 Expériences de l'Eledricité appliquée à des Parabtiques. Par Mr: MoraAnDp & NoOLLET. 28

Elémens de la théorie du Soleil fur la fin du quinzième fiécie, déterminés par les obervations de Walihérus. Pax M. Y Abbé DE LA CAILLE. 40

ARTICLE I. De la hauteur du Pole à Nuremberg, à de l'obliquité de l'Ecliptique au temps des obfervations de

Walthérus. ARTICLE Il. Recherche du lieu de l'apogée du Soleil, au temps des obfervations de Waltherus. SK ARTICLE III. Recherche du mouvement de l'apogée du Soleil. « S7 ARTICLE IV. Recherche de la grandeur de l'année folaire moyenne. ibid. Arricce V. Recherche de l'époque du moyen mouvement du Soleil au commencement de l'année 1 $ 00. 58

ARTICLE VI. Recherche de la plus grande équation du

Soleil, à par conféquent de l'excentricité de fon orbite. $9

Mémoire [ur l'Ekdricité, contenant la defcription d'un Ele&tro- mètre, ou d'un inffrument fervant à melurer la force élelrique.

Par M. le Chevalier d'ARCY. 63 , * ii)

T ABAUE Second Memoire fur les Réfradions affronomiques , obfervées dans la Zone Torride ; avec diverfes remarques fur la ma- nière d'en conffruire les Tables. Par M. BOUGUER. 75 ARTICLE I. Réfraélions affronomiques obfervées en bas au niveau de la Mer, à en haut dans la Cordeliere. pare

ARTICLE I]. Examen des hypothèfes propres à repréfenter dans la Zone Torride les réfraétions aflronomiques pour le niveau de la mer, à" pour les lieux diverfement élevés au deffus. 84

ARTICLE III. Remarques à Obfervations fur les varia- tions que recoivent les Réfractions affronomiques par les différentes affections de l'atmofphére. 102

.

Hifloire des maladies E pidémiques de 1 749, obfervées à Paris,

en même temps que les différentes températures de l'air. Pax

M. MaLouIn. 113 Conffruttion d'un nouveau Tour à filer la foie des cocons. Par M. DE VAUCANSON. 142 Recherches fur les ufages du grand nombre de dents du Canis Carcharias. Par M. HÉRISSANT. 155 Defcription de deux efpèces de nids finguliers fais par des Chenilles. Par M. GUETTARD. 163

Objervation de l'éclipfe de Lune du 2 3 Décembre 1 749- Par * Mrs Cassini DE THury & MARALDI. 206

Obfervations fur les pernicieux effets d'une efpèce de Champi- gnons, appelée par les Botanifles, Fungus mediæ magnitu- dinis totus albus. Vaillant, 17, page 63. Par M. LE Monnier Médecin. 210

Obfervations Botanico- Méteorologiques faites au château de Denainvilliers proche Pluviers en Gätinois pendant l'année

1748. Par M. Du HAMEL. . 224

Memoire fur une nouvelle efpêce de Téinture bleue, dans laquelle il n'entre ni Paffel ni Indivo. Par M. MACQUER 2 55

Second Mémoire fur la tranfpiration infenfible des Plantes. Pax M. GuETTARD. 265

=

T À BULME Occultations de quelques Etoiles par la Lune, obfervees pet- dant l'année 1 749. Par M. L@Monnier le Fils. 318 Obfervation de l'échipfe de Lune du 2 3 Décembre 1 749. Par M. LE MoNN1ER le Fils, 319

Obfervation de l'éclipfe de Lune du 2 3 Décembre x 749» faite à Paris dans l'hôtel de Clugny. Par M. DE L'IsLe. 320

Cinquième Mémoire fur les glandes des Plantes, & le quatrième fur 1 ‘ufage que l'on peut faire de ces parties dans l'établiffe. ment des genres des Plantes. Par M. GUETTARD. 322

Olfervation de l'échipfe de Lune du 2 3 Décembre 1 749, faite à l'Obfervatoire royal de Paris. Pa: M. DE Foucury. 378

Phafes obfervées en Ecoffe avant & après le milieu de l'éclipfe du Soleil, le 25 Juillet 1748, au Château d'Aberdour.

Par M. 1e Monnier le Fils. 379 Obfervations anatomiques pour l'hifloire du Fœtus. Par M. DE LA SÔNE. 385

Sixième Mémoire fur les glandes des Plantes, à le cinquième fur l'ufage que l'on en peut faire dans l'établifement des

genres des Plantes. Par M. GUETTARD. 392 Æxpériences à Obfervations faites en différens endroits de l'Italie. Par M. l'Abbé NOLLET. ' 444 ARTICLE I. Efeéricite. 445$ ARTICLE II. Vaiffeau de yerre qui paroït s'être rempli

d'eau par fes pores. 460 ARTICLE III. Botanique à Apriculture. 466 ARTICLE IV. Maçonnerie à Architeture. 473 ARTICLE V. Obfervations météorologiques, à fur le éempérature de certains lieux. 483

Sur la Strudure des Vifcères nommés glanduleux, & particu- lièrement [ur celle des reins &r du foie. Pa M. FERREIN. 489

s Anffruétion [ur les moyens de vérifier les principaux faits rapportés dans ce Mémoire. 52:

TABLE. | ; Réflexions Jur le principe de la moindre ation de M. de Mau- pertuis. Par M. le Cfevalier d'ARCY. 531 Oëfervations météorologiques, faites à l'Obfervatoire royal. pen- dant l'année 1749. Par M. DE FoucH*. 53 Memoire fur la caufe des mouvemens du cerveau qui paroiffent

dans l'homme 7 dans les. animaux trépanés. Par M. DE LA MuRE, de la Société Royale de Montpellier. .s 4x

Fautes à corriger dans l'Hiffoire de 1 746. Page 129, ligne 5, pour lui procurer [a paix", Lifèz pour leur procurer la paix. Dans les Mémoires de 1746.

Page 127, ligne 24, pour couper le bois, lifez pour couper le lait.

Fautes à corriger dans "Hifloire de 1749 +

Page 8,ligne 9, s'approcher d'abord, lifez s'approcher du bord. Page 27, ligne 24, de la Pozzolane, liféz la Pozzolane,

Page 46, ligne 16, auquel leur nombre, lifez auquel le nombre.

Page 74; ligne 14, les a tentées, Afez l'a tentée.

Page 117, ligne 25, ou craie, lfez ou avec une craie.

Page 124, ligne ro, le foufre paroît être de toutes les fubftances celle qui

ae plus d’affinité avec le fer, /ifez le-fer paroît être de toutes les fubftances métalliques celle qui a le plus d’affinité avec le foufre.

Page 139, ligne 2, qui n’y exifle point, /fèz qui n’y exifloit point. Page 140, ligne 27, par degré, lifeg par degrési Dans les Mémoires de 1749. Page 17, Février 1738: Au plus grand froid, .ifez Févrierr738 au plus grand froid [ fans point après 1728, & fans capitale au mot Au]. Page so>, ligne 29, ces vaiffeaux font tous de même groffeur fans aucune divifion , lifez ces vailleaux , je veux dire ceux que jai aperçûs, paroiflent de même gerofleur & fans divifion. PHOER

Page 510, ligne 10, n'ont paru s'implanter u'anfverfalement-dansiles coë, ticaux, lfez me paroiflent une çontinuation des vaifleaux corticaux.

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$. F3.

HISTOIRE

HISTOIRE

L'ACADEMIE ROYALE D CIE NNC'ES

Année M. DCCXLIX. HOMO D OO OMOKOOMOOMOOOHOOMOKOMOKO!OHOK

PHYSIQUE GENFRALE.

CRE NE LSNCNREAN D 'S 0 FTROT DS OBSERVE S EN SIBERIE.

J1EN ne froit peut-être plus incertain dans fa V. les M. 2] Phyfique que le degré du froid & du chaud, PT: f1 on étoit réduit à s’en rapporter au feul témoi- gnage des fens : indépendamment des caufes

2= particulières qui peuvent faire varier les impref- fions qu'en reçoivent nos organes, il eft au moins certain que le fentiment ne peut faire remarquer que les grandes

A

Hi. 1749.

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2 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE différences, ni les exprimer que d’une manière affez vague, &c par les effets qu'elles produifent : if ne faut pas s'en étonner, les fenfations ne fourniffent aucune idée diftinéte, & il a que les idées qui puiflent fe rendre par des paroles: I a donc fallu imaginer quelque moyen de réduire les eflets du froid & du chaud à des mefures exactes & précifes, pour en pouvoir faire la comparaifon, & ce moyen eft le thermo- mètre : avant l'invention de cet inftrument, on ne con- noifloit les différens degrés de froid que par leurs fuites, & c'eft de cetie manière que quelques Hifloriens ont con- ferver à la poftérité le fouvenir de quelques hivers mémo- rables. Calvifius rapporte, par exemple, que Jan 859 de Vère Chrétienne, la mer Adriatique gela de telle forte, que Yon pouvoit aller à pied de la terre ferme à Venife. La mème chofe arriva, felon Sydenham, en 1709; & comme alors on avoit des thermomètres, & qu'heureufement celui dont fe fervoit M. de ia Hire s'eft confervé jufqu'à préfent, on l'a comparé à ceux que Finduftrie des Phyficiens a réduits à n'avoir tous qu'une même marche, & on a favoir que le degré de froid qui, à Paris, avoit répondu à 1 $ + degrés au deflous de la congélation dans le thermomètre de M. de Reaumur, s’étoit fait fentir à Venife de manière à y faire geler l'extrémité du golfe Adriatique, cette ville eft fituée. Le degré. de froid de 1709 a été long-temps le plus grand dont on ait eu connoiffance dans ce climat; en effet, les funeftes fuites qu'il eut, & qui n'en avoient que trop confervé la mémoire, donnoient lieu de penfer qu'un plus grand degré de froid feroit capable de détruire tous les êtres organifés du climat il fe feroit fentir, & on étoit encore confirmé dans cette idée par celui qui avoit été obfervé en Iflande en même temps, qui ne s’eft pas trouvé même fi grand que celui qu'on avoit éprouvé à Paris lorfqu'on a réduit les degrés du thermomètre qui avoit fervi à cette obfervation, à celui auquel il répond fur les thermomètres d'aujourd'hui. Mais depuis que les Obfervateurs fe font multipliés, & que le génie des Sciences s’eft communiqué dans les parties

IVHENEUSTT OS TENUE MEiESs.

les plus feptentrionales de l'Europe, on a que ce degré de froid qu'on regardoit comme le plus fort que des êtres organilés puflent foûtenir, étoit bien éloigné de celui qu'on éprouvoit tous les ans dans certains climats, fans que les hommes, les animaux ni les plantes du pays en fuflent trop maltraités , & qu'il w’approchoit pas même de celui qu'on obferve dans d’autres régions. C'eft l’hifloire de ces froids extraordinaires , qui fait la matière du Mémoire que M. Delifle a lu à f Académie fur ce fujet.

Avant de rapporter le précis des obfervations qui le com- pofent , il eft bon de dire un mot des inftrumens avec lef. quels elles ont été faites. Les thermomètres à efprit de vin n'étoient certainement pas propres à cet ufage : cette liqueur, qui dans ce climat eft toûjours incapable de fe glacer, gèle en mafle dans les. pays feptentrionaux pendant la rigueur de l'hiver ; il n’y a que ceux de mercure qu'on y puifle employer. Le défaut de foûterrains aflez profonds pour conferver à peu- près la même température , avoit empêché M. Delifle de fe fervir en 1732, dans la conftruction des thermomètres de mercure qu'il fit à Péterfbourg, de la méthode qu'il avoit em- ployée à Paris pour conftruire ceux d'efprit de vin. Cette mé- thode confiftoit à expofer fucceflivement fes thermomiètres à la température des caves de l'Obfervatoire, & à la chaleur de l'eau bouillante, puis partager en cent parties l'intervalle entre ces deux termes, quel qu'il pt être; mais obligé d'y renon- cer, il imagina de prendre tous fes degrés au deflous du point le mercure {eroit porté par l'eau bouillante, en fup- pofant toûjours la mafle de mercure augmentée par cette cha- leur d’un certain nombre de parties, ce qui, comme on voit, donnoit des degrés inésaux dans les diflérens thermomètres mais toûjours proportionnels, & qui fe peuvent rapporter à ceux du thermomètre de M, de Reaumur.

Le premier ufage de, ces, thermomètres fut. d’oblerver à Péterfbourg le froïd du.27 Janvier 173 2, les thermomètres expoiés à, l'air, libre, defcéndirent au degré qui répond au 27° au deflous de la‘ congélation dans celui de M. de Reaumur.

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4 HisToiREe DE L'ACADÉMIE ROYALE

, En confidérant que le froid de 1709 n'a fait defcendre ce dernier qu'à 1547, on jugera aifément de la rigueur de la faifon à Péerfbourg: c'eft le premier froid de cette efpèce qui ait été obfervé exaétement ; mais, quoiqu'il nous paroiffe extrême, & que pendant qu'il dura perfonne ne püt s'expo- fer à l'air, même avec les meiïlleures-fourrures , cependant M. Delifle a appris qu'en 1747 & au commencement de 1748 on en avoit obfervé un plus fort à Péterfbourg , le thermomètre y étant delcendu au degré qui répond au 30:° de celui de M. de Reaumur.

Quelque grand cependant que paroifle ce dernier degré de froid, il n'eft encore que médiocre fi on le compare à celui qui a été obfervé dans diflérens endroits , & dont M. Delifle a dreffé une table, dans laquelle le froid de 1709, qui s'y trouve compris, eft le moindre terme. Les voyages ordonnés par lImpératrice de Ruflie, pour la recherche de la communication de lAfie à l'Amérique, ont fourni un grand nombre de ces obfervations ; les autres ont été tirées de différentes relations.

Le plus grand froid obfervé en Europe, qui fe trouve dans cette table, eft celui qu'éprouvèrent en 1737 Mrs les Académiciens qui allèrent en Lapponie, pour mefurer le degré du Cercle polaire ; le thermomètre y defcendit au 37.° degré de celui de M. de Reaumur : lorfqu'on ouvroit la chambre chaude dans laquelle ils étoient enfermés , Fair de dehors convertifloit fur le champ en neige la vapeur qui y étoit contenue, & en formoit de gros tourbillons ; & enfin on ne pouvoit s'expoler à l'air extérieur, fans éprouver un froid qui fembloit déchirer a poitrine.

Probablement on a éprouver un froid approchant à Québec en 1744 M. Gautier eftime que fon thermomètre étoit defcendu au 33.° degré de celui de M. de Reaumur; nous difons eftime, car le mercure étant rentré dans la boule après le 3 2.° degré, ïl n’a avoir le dernier terme du froid que par eftimation. Un froid prefque pareil s’eft fait fentir en 1746 à Aftracan, le thermomètre y eft defcendu au 24+ degré au deflous de la congélation.

DHES MS c' L'ÉMNNICHELS #18

Ce qu'il y a de fingulier, c’eft que Québec & Aftracan font placés à peu près fous les parallèles de 46 ou 47 degrés, qui répondent au milieu de la France ; preuve bien évidente que le degré de froïd ne dépend pas toûjours de la latitude du lieu on l'obferve. On en fera encore mieux convaincu , en faifant attention qu'à Kirenga , fur les frontières de la Chine, le froid a été oblervé de 66 + degré du thermo- mètre de M. de Reaumur, quoique cette ville ne foit qu'à la latitude de 57% 30” qui revient à peu près à celle de: Riga & du nord de l'Ecofle, on n'éprouve rien de pareil.

Le plus grand froid qui fe trouve marqué dans la table de M. Delifle, eft celui qui a été obfervé à Yenifeisk en Sibérie le 16 janvier 1735 au matin, le thermomètre a baiflé pendant quelques heures à 70 degrés au deflous de la congélation : nous difons quelques heures, parce qu'effec- tivement deux heures auparavant & deux heures après il étoit beaucoup plus haut. "

Ce dernier froid eft le plus. grand qui foit dans la table de M. Delifle, parce que c'eft le plus fort qui ait été obfervé jufqu'à préfent ; mais à en juger par les effets, on en trouvera peut-être d'aufli terribles rapportés dans plu- fieurs voyages.

H y a, par exemple, tout lieu de croire que ce fut à un froid pareil que fut expofé le Capitaine Willougly , Iorfque cherchant en 1553 le chemin de la Chine par la mer feptentrionale, les glaces l'arrétèrent à Arzina en Lapponie fous la latitude de 69 degrés, il fut trouvé mort avec tout fon monde l’année fuivante:

Les Hollandois qui, en cherchant le même paffage, furent obligés de pañler l'hiver à la nouvelle Zemblen 1596, ne fe garentirent de la mort, que la rigueur de la faifon leur auroit infailliblement caufée, qu'en s'enfermant dans une hutte qui n'avoit aucune ouverture, & dans laquelle ils entre- tenoient un feu continuel ; malgré ce fecours, ils eurent bien de la peine à s'empêcher d'avoir les pieds gelés ; leurs habits & leurs fourrures étoient continuellement couverts.

À iij

6 H1STOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE de glace, & le vin {ec de Cherès, y étoit {1 parfaitement gelé en mafle, qu'il fe diftribuoit par morceaux.

Mais à en juger fuivant les précautions qu'on a coûtume de prendre contre le froid dans Jes pays {eptentrionaux, & que M. Delifle qui les a priles long-temps fait mieux que . perlonne, nous ne connoitlons rien de comparable au froid qu'a éprouvé le Capitaine Middleton dans l'habitation des Anglois à la baie d'Hudion, fous la latitude de 574 20”.

Les maifons de cette habitation font bâties de pierre, & leurs murailles ont deux pieds d'épais ; les fenêtres font très- étroites, & garnies de volets épais que l'on ferme pendant 18 heures au moins chaque jour. On y allume quatre fois par jour de très-grands feux dans des poêles faits exprès, & dont on ferme exactement les cheminées dès que le bois eft réduit en charbon , on ne s’éclaire la nuit qu'avec des bou- lets de vingt-quatre, rougis au feu, & fufpendus devant les fenêtres. Malgré toutes ces précautions, toutes les liqueurs, fans en excepter l'eau de vie, gèlent jufque dans les plus pe- tites chambres & les mieux échauflées, & tout l'intérieur des chambres & les lits fe couvrent d’une croûte de glace épaifle de plufieurs pouces , qu'on eft obligé d'enlever tous les jours.

- De quelques fourrures qu'on foit enveloppé, nul ne peut, pendant ce rigoureux. froid, s’expoler à air extérieur fans rifquer de perdre, en rentrant dans les lieux chauds, la peau de {on vifage & de {es mains, même d’avoir quelquefois les doigts des pieds & des mains gelés. Les lacs d'eau dor- mante qui n'ont que dix à douze pieds de profondeur , gèlent jufqu'au fond : la mer gèle à peu près de la même épaif- feur; quoique la glace ne foit que de huit à neuf pieds à lembouchüre des rivières & auxwendroits la marée eft forte, ces mafies énormes de glace fe fendent quelquefois avec un bruit horrible, & qui égale celui du plus gros canon.

Quant à la terre, M. Middleton croit qu'elle n’eft jamais entièrement. dégelée, car ayant fait fouiller à la profondeur de cinq à fix pieds pendant les deux mois d'été, il la trouva gelée & blanche comme la neige, lidess

À

DNEMS AS C:1'E NUCHE LS 7 I y a donc tout lieu de croire que le froid qu’on éprouve à la baie d'Hudfon eft pour le moins auffi grand que celui qu'on relfent en Sibérie; mais, pour en être parfaitement für, il faudroit avoir des obfervations du thermomètre à la baie d'Hudfon, & nous n'en avons pas encore : ce qu'il y a de certain, c'eft que, quelque plaufibles qu'aient être les rai- fons qu'on avoit de croire qu'un froïd beaucoup plus grand que 1709 ne laïfleroit fubfifter ni animaux ni plantes, l'ex- périence a décidé le contraire ; les aflertions phyfiques qui ne font pas immédiatement fondées fur les faits, font fujètes à éprouver un pareil malheur.

SUR UN ELECTROMETRE. P LUS on eft au fait de la Phyfique expérimentale , & plus

on eft perfuadé qu'on ne peut apporter trop de préci- fion dans l’examen & la mefure des effets dont on cherche les caufes. Comme il eft extrémement rare que plufieurs ne concourent à un phénomène qui paroït fimple à la première infpection, il eft d'une importance extrême d’avoir des moyens de difcerner les plus petites différences, qui fouvent font les feuls moyens par lefquels linduftrie des Phyficiens puifle parvenir à dévoiler les fecrets de la Nature. Ce motif a déterminé Mrs le Chevalier d’Arcy & le Roy à chercher le moyen de mefurer la force de l'électricité par

celle de quelques-uns de fes effets. Comme dans une matière

aufi neuve & aufli délicate H étoit néceffaire de diftinguer jufqu'aux moindres changemens qui pouvoient y arriver, il faloit que l'inftrument füt extrêmement mobile, & qu'il pût obéir fans aucun faut aux variations fubites dont la force qui lanimoit pouvoit être fufceptible : ce font ces deux qualités que Mr d'Arcy & le Roy ont cherché à réunir dans leur électromètre.

Une efpèce de pèfeiqueurs, compolé d’une fiole de verre de forme ovale, dont le col eft une longue verge cylindrique,

V. les M. p. 63.

8 HiSTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

eft reçû dans un vaifleau auffi cylindrique rempli d'eau, & dont l'ouverture eft fermée par une plaque ronde de métal ; cette plaque eft percée en fon milieu d'un trou rond plus grand qu'il n'eft néceflaire pour pañler le col de l'électromètre, & il doit être retenu au centre de cette ouverture par un carré de quatre fils d'argent très-fins attachés fur la platine dont nous venons de parler, qui lui laïflent la liberté de fe mouvoir & de gliffler de haut en bas de bas en haut, fans lui permettre de s'approcher d'abord de l'ouverture de la platine: ce col doit être aufli terminé par une platine ronde de métal, qui y eft attachée perpendiculairement par fon centre. L'électro- mètre a dans fon intérieur une petite quantité de mercure, qui fert, pour ainfi dire, à le lefter & à l'empêcher de s'in- cliner; elle doit étre telle que le tout étant en repos, fon fond touche prefque celui du vaifleau qui le contient.

Dans cette fituation, la plaque qui ferme l'ouverture de ce vaifleau eft le plus près qu'il eft poffible de celle qui tient au col de l'éleétromètre, & le tout demeurera en cet état tant qu'aucune caufe étrangère ne rompra cet équilibre; mais lorfqu'on communiquera l'électricité à toute cette machine, alors les deux platines, devenues électriques, tendront mutuel- lement à s'écarter, & cette répulfion fera le même eflet que fi le poids de l'életromètre étoit diminué relativement à celui de l’eau; il s'élevera donc jufqu'à ce que le poids de la partie du col qui fera fortie de l'eau, foit égal à fa force répulfive communiquée aux deux platines, & par conféquent les diffé- rentes afcenfions de la platine feront proportionnelles à cette force.

La difficulté étoit de mefurer les mouvemens de cet inf- vument : un corps éleétrique ne peut fe trouver dans le voifinae d'un qui ne l'eft pas, fans lui communiquer une partie de fon électricité, & l'Obfervateur eût fûrement abforbé une partie de celle de l'éleétromètre lorfqu'il s'en feroit appro- ché pour mefurer fon élévation.

Mrs d'Arcy & le Roy ont trouvé un remède à cet incon- vénjient ; un cadre fermement arrêté à quelque diftance de

l'éleétroniètre,

DES ScirENCESs. ÿ Yéleromètre, contient une glace qui n'eft qu'adoucie, & ur laquelle on à marqué plufieurs lignes horizontales à égale “diftance les unes des autres: cette glace reçoit l'ombre de l'éleétromètre, qui y eft renvoyée par une grofle bougie, & TObfervateur peut melurer fur cette glace le chemin qu'a parcouru la platine, fans craindre de dérober l'éleétricité de Yinflrament : il eft vrai que par ce moyen ce n'eft pas l'éé- vation abfolue de la platine qu'on melure, mais une quan- tité qui lui eft toûjours proportionnelle.

Un avantage confidérable du nouvel inftrument, eft qu'on : peut le conftruire de manière que fa marche {it précifément égale à celle d'un autre déjà fait; car l'aétion de l'inftrument dépendant de Ia grofleur du cylindre de métal qui lui fert de col, il fera toüjours poffible d'y employer des cylindres de même groffeur; il y a plus, on pourra toûjours prendre pour degré l'enfoncement occafionné par un poids conftant, par exemple, de huit grains, & par-là l'éeftromètre jouira ‘du même avantage que le‘thermomètre de M. de Reaumur: on pourra par fon moyen comparer la répulfion électrique obfervée dans des endroits diflérens.

Non feulement l'dettromètre peut fervir à la meftre dont nous venons de parler,‘ mais. il peut encore être employé comme inftrument pour faire un grand nombre d'expériences électriques très-commodément & avec une grande précifion ; propriété qui n'eft pas moins importante que celle de me- furer la force de la répulfion élerique.

IL 2, par exemple, fervi à rechercher fi l'électricité d'un corps eft comme fa mafle comme fa furface : pour cela on a polé au deflus d'un éleétromètre une efpèce de calotte de fer battu : l'électricité, excitée par un même globe, a été communiquée en même temps à cet électromètre & à un autre ; on a exactement remarqué à quelle hauteur montoit chacun des deux inftrumens , Enfuite, tout reftant en cet état, on’ a verfé dans la calotte de fer aflez de mercure pour que l mafle fût multiplie. plus de foixante fois : cependant, malgré lénorme différence , de jeu de Finftrument fut

Hit 1749. . B

* Vy. Hi. H747 be 10

%o HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

précifément égal plus de cinquante fois qu'on répéta cetté expérience, l'autre électromètre fervant de témoin que la force répulfive communiquée par le globe étoit toûjours de- meurée la même.

Il feroit aflez naturel de penfer que cette expérience prouve inconteftablement que l'électricité fe communique fuivant les furfaces, & non felon les mafles; mais fi on veut bien faire réflexion que f'éleétromètre ne melure que la force répulfive de l'électricité, & fe rappeler les règles que nous avons don- nées en 1747 *, d'après M. l'Abbé Nollet, pour juger du degré d'électricité d’un corps, dont la principale eft de ne jamais s'en rapporter à un feul effet lorfqu'on peut en examiner plufieurs, on ne fera pas furpris que Mrs d’Arcy & le Roy ne fe foient pas preflés de tirer cette condlufion de leur expérience.

Une feconde expérience, dans laquelle l'éleftromètre a fervi comme inftrument, a été de voir frun corps tranfmettant fon éleGtricité à un autre, lui en tranfmettoit toûjours la mème quantité, quel que füt le volume du conduéteur. Pour cela l'élettricité du globe aété conduite à un des électromètres avec une chaîne, & à l’autre fucceflivement avec des fils de fer d'inégale grofieur; & quelques changemens qu'on ait faire à da groffeur (des fils, la répulfion éleétrique & l'afcen- fion de linftrument ont toüjours été les mêmes.

On pourroit peut-être objeéter que l’éleétromètre pour- roit être plus ou moins repouflé par le fond du vafe devenu électrique, à raifon de fes différentes diftances à ce fond, fans que pour cela la quantité d'électricité füt changée; mais pour peu qu'on y faffe réflexion, cette objeétion fe réduira bientôt à rien, étant conftant par d'expérience, qu'un corps entièrement plongé dans un fluide, ne reçoit aucun mou- vement par l'électricité.

Quant à la fenfibilité de T'inftrument , comme elle dé- pend du diamètre de la verge cylindrique, elle eft, pour ainfr dire, à volonté; celui de Mrs d’Arcy & le Roy a obéï à une électricité fi foible, qu'on ne pouvoit tirer du corps éledlri- que que des étincelles à peine fenfibles.

n'iéssuiSr CrE N'ACHEIS : tr Le plus grand inconvénient que powrroit éprouver le nouvel inftrument, feroit l'inégalité des degrés ! qui naitroit de fes différentes poñitions à d'égard du cadre & de la Han- terne ; mais ileft extrémemient aifé: de faire évanouir cette difficulté en prenant toûjours pour degré, comme nous l'avons dit, l'efpace qu'un poids conftant, comme huit grains, aura fait parcourir à l'ombre de linftrument fur le cadre, quel que puifle être cet efpace; par ce moyen l'électromètre deviendra propre à comparer des différens degrés de force répulfive de leGricité En pareïlle matière, on ne peut trop avoir de fecours, ni trop de reconnoiffance pour ceux qui emploient leurs veilles à les procurer.

SUR L'EFFET DE L'ELECTRICITE :APPLIQUE'E A LA GUE'RISON

DE QUELQUES MALADIES. EL. A propriété qu'a l'éleftricité d'accélérer l'écoulement

des liqueurs dans les tuyaux capillaires & l'accroif- fement des plantes, & d'augmenter da tranfpiration du corps animal, de laquelle nous avons parlé l'année dernière *, ont naturellement faire efpérer qu'elle pourroit être un puiffant remède contre la paralyfie , dans laquelle on éprouve de fi favorables effets des fecouffes queles remèdes peuvent exciter dans le genre nerveux. Ce fentiment paroït d'autant mieux fondé, que les remèdes ordinaires ne: peuvent agir wils ne faflent impreffion fur tout le corps animal , au lieu que Yélectricité peut avoir le double avantage d'agir très- Vivement fur les nerfs fans y laifler d'impreffion ficheufe, & de pouvoir être appliquée comme un topique à da feule partie qui en a befoin, fans intéreffer le refte du corps, & fans caufér aucune fatigue au malade. Ce fut dans ki vüe de vérifier un fait fi intéréflant, duquel même on citoit déjà quelques exemples, que M*: Morand & l'Abbé Nollet, à qui cette idée n'étoit rien moins que nouvelle, demandèrent

B à

V. les M.

p.28.

* Voyez Hif. 2748p. 1.

2 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE

à M. le Comte d’Argenfon qu'il leur fût permis de faire à Yhôtel royal des Invalides les expériences néceflaires pour s'affurer de la vérité fur un point fr important. La prudence des deux Obfervateurs ne laifloit aucun rifque à craindre, & le zèle du Minifltre pour tout ce qui peut intérefler les hommes en général & les foldats en particulier, ne lui per- mit pas de balancer un moment pour accepter leur propo- fition.

En conféquence, de fes ordres, les expériences furent faites aux Invalides dans une falle bafle , les Officiers de cet hôtel fe firent un plaifir de procurer aux deux Acadé: miciens tous les fecours qu'ils pürent defirer. M. Morand le cadet, Secrétaire général des Invalides, fe chargea d’aflifter à toutes les opérations, & d'en tenir un regiftre exact.

Les malades étoient affis fur une efpèce d'efcarpolette-; formée de cordons de foie attachés au plafond, les pieds polés d'abord fur .un gâteau de réfine, &. enfuite fur des cordes ordinaires attachées aux deux côtés de fefcarpolette, On voit par cette defcription qu'ils étoient parfaitement iolés : l'électricité du globe leur étoit conduite par des chaïnes de fer. On les tenoit en expérience chaque jour deux heures le matin, 6 autant l'après midi; les membres afHigés étoient nus, & on tiroit des étincelles, tantôt d’un endroit, tantôt d'un autre, en y préfentant un morceau de métal ; enfin de temps en temps on fit éprouver à quelques-uns des ma- lades, la commotion électrique de l'expérience de Leyde.

Des quatre malades qui furent choïfis pour ces expé- riences, le premier fur lequel M's Morand & l'Abbé Nollet avoient déjà fait quelques épreuves en 1746, & qui étoit très-vieux & très-infirme , tomba malade pendant le cours des expériences , & mourut d'une maladie fr éloignée d'y avoir le moindre rapport , que cet exemple n'intimida perfonne, & n'empêcha aucun des trois autres d’éprouver les mêmes procédés,

Le fecond ne fut éleGrifé que pendant environ fix jours; parce qu'on saperçut que les jointures des parties affigées

DIEMS US) IC LE NCIS: 13 étoient nouées, ou pluftôt ankiïlofées ; ce qui mettoit un obftacle invincible aux bons effets que on pouvoit attendre de l'électricité. h

Le troifième étoit âgé de 27 ans, paralytique de tout le côté droit à la fuite d’un coup de feu qui lui avoit brülé l'œil gauche, ce qui, malgré fa fmgularité apparente, devoit naturellement arriver, les nerfs fe croifant dans le cerveau, & paflant d’un côté à l'autre avant d'arriver à leur origine: il reflentoit depuis cet accident une douleur continuelle au vifage, & fur-tout vers les finus furcilliers , la main gauche & les doigts étoient fans mouvement, & la partie malade étoit abfolument privée de tout fentiment.

Dès les premières expériences, es mufcles paralytiques , defquels on tiroit des étincelles , commencèrent à agir. On étoit maître de faire fléchir ou redreffer quel doigt l'on vouloit, en tirant l'étincelle du mufcle qui y répondoit. Au bout de cinq à fix jours, on a remarqué que ces mouvemens deve- noient plus fenfibles, fur-tout quand on avoit la précaution de lui entretenir la main afHigée chaude, foit à l'aide d'un manchon de peau d'agneau qu'il portoit pendant la journée, foit avec des ferviettes chaudes dont il fe fervoit pendant tout le temps de l'expérience.

. Au bout de vingt-deux jours, on commença à lui faire éprouver la commotion de l'expérience de Leyde; il dit qu'il avoit reffenti une fecouffe vive dans le bras le {en- timent étoit éteint, & les mouvemens furent auffi plus mar- qués qu'ils ne l'avoient été par les étincelles. H effuya aufii dans le cours des expériences, des fueurs & des picotemens, & on vit fe former fur fa peau des rougeurs & des ampoulles pleines de férofité.

Il eft bon de remarquer qu'aucun de ces mouvemens m'étoient volontaires : ils ne s’exécutoient que par la contrac- tion des mufcles, au moment que lon en tiroit l'étincelle : cette circonftance fit foupçonner que les mufcles agifloient d'une façon abfolument pañlive, & de la même manière que ceux d'un cadavre appliqué aux mêmes expériences. Il étoit.

B üij,

14 Histoire DE L'ACADÉMIE Royare

aifé de s'en éclaircir ; on y appliqua le bras d'un mort, on en tira des ctincelles très-foibles, & jamais on n'y put occafonner aucun mouvement. Ïl eft donc bien conftant que les mufcles n’agiflent point dans ces expériences, d’une façon abfolument pafñve, & qu'ils y font affectés d'une efpèce de fenfation qui les met en jeu.

Enfin, après cinquante jours d'expériences , le malade voyant que tous les mouvemens involontairés qu'on exci- toit ne rappeloient point en lui le volontaire qu'il defrroit de rétablir, ne voulut plus fe prêter aux expériences; & quoiqu'il n’en eût éprouvé aucun mauvais effet, il refufa abfolument de les continuer.

Le dernier fur lequel on fit des expériences étoit âgé de quarante-huit ans, paralytique depuis dix-fept, & cette pa- ralyfie avoit commencé par une foiblefle dans les membres fans attaque d’apoplexie en forme ; circonftance qui influa dans le choix qu'on fit de ce malade, étant important de s'aflürer fi l'électricité agiroit de la même manière fur des paralyfies qui auroient des caufes différentes.

Dès la première fois qu'il fut éledrifé, on remarqua que le mouvement de fes doigts étoit beaucoup plus fenfble

u'on ne lavoit obfervé dans les autres malades, & que l'électricité communiquoit plus de chaleur aux parties afHigées.

Deux jours après il fentit pendant la nuit de la douleur dans fon bras malade, & le même jour on obferva dans toute ‘étendue de lavant-bras des taches rouges, des ampoulles & des véficules plus fortes qu'à l'autre malade.

Les fecoufles de la commotion électrique lui parurent plus fenfibles dans le bras malade que dans le faim, & cette différence s'eft foûtenue toutes les fois qu'on a répété l'expé- rience. Du refte, il a préfenté tous les mêmes phénomènes que l'autre malade, & après avoir fubi les expériences élec- triques pendant quarante-un jours fans en reffentir aucune incommodité, & fans qu'il parût que tous les mouvemens involontaires l'euflent mis én aucune façon à portée d'en exécuter de volontaires, on ceffa de l'électrifer.

DES SCIENCES. 15

Ces expériences ne paroiffent pas être favorables au fyflème des guérifons électriques, cependant les variations qu'on y a remarquées dépendent peut-être de tant de circonftances in- connues , qu'on ne doit pas fe prefier d'en rien condurre ; elles doivent feulement nous tenir en garde contre les faits merveilleux qu'on s’eft peut-être trop prefflé de rapporter ; cette réferve eft d'autant plus néceflaire, que dus le nombre de ceux qu'on a le plus pofitivement aflurés, il s’en trouve que l'expérience a conftamment démentis. On avoit avancé, par exemple, comme un fait certain, que l'éledrifation accé- ère le mouvement du pouls, & cela peut en effet être arrivé à quelques perfonnes à qui Fappareil éleétrique en avoit impofé aflez pour les effrayer; mais M. Morand ayant refté fur l'efcarpolette pendant des heures entières, & ayant fouflert qu'on lui tirât des étincelles de toutes parts, il n'a jamais apercevoir la moindre différence de vitefle dans fon pouls; d’autres perfonnes ont fait la même expérience avec le même fuccès.

Toutes ces expériences conduifent à un même point de vüe, peu favorable à l'impatience naturelle de l'efprit humain, mais qui n'en eft pas moins vrai; c'eft qu'on ne peut trop faire d'expériences avant que d'entreprendre d’en tirer des réfultats, ni trop fe défier en Phyfique du merveilleux & des fyfièmes précipités.

On en fera encore plus perfuadé fi on fait attention que des faits, fur la certitude defquels on auroit en quelque forte compter, fe font trouvés entièrement faux dès qu'on a voulu les rappeler à des expériences prudemment conduites.

Un des principaux objets du voyage que M. Y Abbé Nollet entreprit cette même année de faire en Italie, étoit de véri- fier par lui-même & par des expériences bien conflatées, les merveïlleux effets qu'on attribuoit depuis quelques années à l'électricité, & de la vérité defquels le nom de ceux qui les publioient fembloit être un für garant. Ces faits furprenans pouvoient en général fe réduire à trois principaux; la tranf miflion des odeurs à travers un tube ou un globe élerifé

V.les M, P: 4dde

16 HisTorre DE L'ACADÉMIE RoyALr & fermé comme hermétiquement; des perfonnes de tout âge & de l'un & l'autre sèxe purgées lorfqu'elles fe faifoient électrifer en tenant à la main des purgatifs violens, comme un morceau de réfine, de fcimmonée, de gomme gutte, &c. enfin des rhumatifmes goutteux & invétérés, des fciatiques, des paralyfies , des ankylofes & quantité d’autres maladies guéries ou très-confidérablement diminuées par l’éectrifation, foit avec un cylindre de verre vuide , foit avec un pareil vaiffeau rempli de drogues appropriées à la maladie, 4 Des faits de cette nature étoient bien capables de piquer la curiofité de M. l'Abbé Nollet, tant par eux-mêmes que par l'utilité qu'ils laifloient entrevoir ; auffr n'eut-il rien plus à cœur en arrivant à Turin que de voir M. Bianchi, premier auteur des purgations électriques, & d'obtenir de lui que quelques-unes de ces expériences, qui avoient été tentées à Paris & toüjours fans aucun fuccès, fuflent répétées entr'eux & fous fa direction. Elles le furent en effet fur M. l'Abbé Nollet lui-même & fur cinq autres perfonnes, tenant à la main un gros morceau de fcammonée. L'effet en fut tel qu'il l'avoit foupçonné, il n'en reffentit aucun qu'il pût attri- buer à cette caufe; des cinq affiftans, trois n'éprouvèrent au- cune purgation ; les deux autres dirent qu'ils avoient eu pen- dant la nuit quelques mouvemens de colique & quelques éva- cuations, mais l’un des deux étoit dans l'ufage des bouillons de chicorée, qui, probablement , avoient eu plus de part que l'élethricité à ce qui lui étoit arrivé; & le fecond chargea fon récit de particularités fr peu vrai-femblables, qu'il détruifit ju qu'à la moindre confiance qu'on eût avoir en fes difcours. Le lendemain, l'expérience fut répétée fur fept perfonnes que M. l'Abbé Nollet avoit choïfies avec foin, d'une efpèce à n'avoir aucun lieu de fe défier de leurs difcours. Elle eut le même fuccès, perfonne ne s’aperçut d'aucun effet de la purgation éleétrique, un feul foupçonna qu'il avoit en reffentir quelques-uns pendant la nuit; mais les faits qu'il aléguoit étoient fr équivoques, qu'on n'en püût tirer aucune iduction en faveur de la purgation électrique.

Le

n

DES ScrEeNces T9

-Le furlendemain, l'électricité étant plus forte que les jours: précédens , les expériences furent encore répétées; les per- fonnes qui y furent expofées, tenant à {a main un morceau de fcammonée neuve, & Félectrifation durant, comme dans les expériences précédentes, pendant quinze minutes, le fuccès en fat parfaitement le même, & perfonne ne reflentit rien. qu'il pôt attribuer à l'électricité,

Le même jour, on tenta l'expérience de fa tranfmiflion des odeurs le Jong d’une barre ou d’une chaîne éleétrifée; on appliqua un linge enduit de baume du Pérou fur la verge de

r qui recevoit l'électricité du globe, on y attacha le bout d’une chaine de fer qui devoit tranfmettre l'odeur à fon autre extrémité, garnie d’une boule de métal; mais on l'y attendit inutilement, & il ne s'en tranfruit pas la moindre quantité fenfible.

Le peu de fuccès de ces expériences fut attribu@à ce que Péleétricité étoit trop forte : il étoit aifé de s'en éclaircir ; on les recommença avec la machine même de M. Bianchi, & l'électricité fe trouva aflez foible pour qu'on eût peine à tirer des étincelles fenfibles de la chaîne qui fervoit de conduc- teur, ou de la perfonne électrilée; malgré cette diminution de force, les expériences ne réuffirent pas mieux, & perfonne de ceux fur qui elles avoient été faites, n’en reffentit aucun effet pendant les trois jours fuivans : il eft vrai que la nuit du troifième au quatrième, M. l Abbé Nollet fut incommodé d'une indigeftion & de douleurs de colique; accidens qu'il regarda, avec raifon, bien moins comme des effets de l’éec- tricité, que comme caufés par des radis qu'il avoit mangés la veille, & par un verre de limonade à la glace qu'il avoit bû; deux chofes que a délicatefle de fon eftomac ne lui permet: guère de prendre impunément , avec quelque fobriété qu'il puifle en ufer. |

Le peu de temps que M. l'Abbé Nollet avoit à refter à Turin , l'embarras de trouver des malades de maladies conve- nables, au témoignage defquels on!pût {e fier, & qui gouluffent fe prêter aux expériences, l'empéchèrent de tenter

Hifl. 1749. Ce

138 Hisroire DE L'ACADÉMIE RoYaALr des guérifons femblables à celles que M. Bianchi penfe avoir opérées, foit par le moyen de l'électricité fimple, foit en employant les intonacatures , des drogues appropriées à la maladie, enfermées dans les vaifleaux de verre qu'on élec- trifoit par frottement; mais il eut la curiofité de recher- cher les prétendues guérifons & ceux qui en avoient été les fujets ou les témoins , & il réfulta de fon examen, que fur cet article on avoit été la duppe de l'imagination des malades ou de quelque circonftance étrangère, & que les prétendues guérilons électriques de Turin ont été crues & regardées comme certaines avec un peu trop de précipitation. De Turin M. l Abbé Nollet fe tranfporta à Venife, un de fes premiers foins fut de fe faire annoncer à M. Pivati, & de lengager à lui faire voir comment il faifoit pafler par le moyen de électricité les odeurs à travers un vaifleau @e verre bien clos, & comment les matières en- fermées dans ce même verre perdoient une portion fenfible de leur oids par l’électrifation. Le jour fut pris, & M. PAbbé Nollet trouva chez M. Pivati une compagnie nom- breufe qu'il crut n'avoir été convoquée que pour avoir plus de témoins de fa conviétion : il fe trompoit cependant, M. Pivati lui avoua que l'expérience de la tranfmiffion des odeurs ne lui avoit jamais réufli que deux fois, quoiqu'il eût fait à ce fujet un grand nombre de tentatives ; que le vaiffeau dont il s’étoit {ervi les deux feules fois qu'il avoit réuffr, étoit caflé, & qu'il n’en avoit pas même les morceaux ; que quant à la diminution de poids des matières enfermées dans le verre, il y avoit trop de monde dans fon laboratoire, & il faifoit trop chaud pour qu’il pût tenter cette expérience avec quelque apparence de fuccès. M. l'Abbé Nollet parla enfuite des guérifons électriques rapportées dans les ouvrages de M. Pivati, & en particulier de celle de l'Evêque de Sé- bénico, mais il fe trouva qu'il n'étoit nullement guéri, & précifément dans le mème état qu'avant d'avoir été éledrilé ; enfin il prit congé de M. Pivati, l'avertiflant qu'il alloit attendre pendant huit jours qu'il devoit encore paffer à Venile,

LU

DES SCIENCES. 19 que de meilleurs vaiffeaux, des drogues plus nouvelles & ua temps plus favorable le miflent à portée d'être témoin de quelques-unes defes expériences, mais il attendit inutilement, & partit de Venife fans avoir rien en ce genre qui püt lui confirmer aucun des faits qui avoient été publiés.

Au défaut de ces expériences qui ne furent point faites en préfence de motre Obfervateur, il en cite d'autres faites chez le même M. Pivati par M. Somis, Médecin de fa Faculté de Turin; celui-ci eflaya de toutes les intonacatures, même d'une que M. Pivati regardoit comme très-dangereufe & très-afloupiffante, parce que le vaifleau contenoit deux gros d'opium : mais après une très-Jongue éleétrifation, & qui ne produifit d'autre effet que de le fatiguer inutilement, lui-même & un des afliftans fe firent éle@rifer, tenant chacun une once & demie d'opium dans la main, C'étoit braver te Morphée de M. Pivati ; mais il fut infenfible à cette efpèce d’infulte, & les deux Phyficiens ne dormirent ni plus, ni moins, ni pluftôt qu'à leur ordinaire.

Suivant le projet de voyage qu'avoit formé M. f Abbé Nollet, il devoit pafler à Florence ; il n'oublia pas d'y voir M. Verati, & d’avoir avec lui des conférences détaillées fur l'électricité médicale, & fur la tranfmiflion des odeurs. La réponfe de M. Verati fut fimple & précife : il dit à M. YAbbé Nollet qu'il lui avoit paru par plufieurs expériences que lodeur du baume du Pérou qu'il avoit employé , s'étoit échappée du vaifleau qui le contenoit ; il montra en même temps ce vaifleau, qui n'étoit fermé que par des cou- vercles de bois quife pouvoient ôter ; & fur objection que lui fit M. AbbélliMollet que les odeurs avoient fe tranf mettre bien plus äifément par les pores du bois que par ceux du verre, il en convint de bonne foi, & promit de fufpendre fon jugement jufqu'à ce que de nouvelles expé- riences euflent levé tous fes doutes ; qu'il n'avoit eu que deux exemples de perfonnes qui euflent été purgées après Y'éleétrifation faite à la manière de M. Bianchi, & que ne voyant aucune autre caufe qui eût,pà opérer se cflet, il

1]

0 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE p'avoit pas héfité à l'attribuer à l'électricité , mais qu'il l'éprou- veroit de nouveau fur un nombre fuffifant de perfonnes, &c que fi l'expérience ne répondoit pas à idée qu'il en avoit. conçue, il étoit prêt à réformer ce qu'il en avoit dit dans fon ouvrage; qu'enfin les dix guérifons électriques dont il y fait mention étoient arrivées de la même manière & avec les mêmes circonftances qu'il les avoit déerites. En eflet, M. l'Abbé Nollet vit lui-même le Religieux qui avoit été le fujet de la cinquième de ces guérilons. Au refte, on voit par le détail que M. Verati en a donné, qu'elles fe font faites par degrés & dans l'ordre de la Nature, & non par une opération fubite & prefque miraculeufe ; aufli M. l Abbé Nollet n’a nulle peine à les admettre.

Toutes les perquifitions qu'il put faire dans toutes les villes d'Italie par lefquelles il pafla, ne lui ofirirent rien qui fût favorable aux intonacatures ni aux purgations électriques, & il paroït prefque für que M. Pivati a été trompé par quelque circonftance qu'il n'a pas aperçüe : il ne faut pas même chercher trop loin cette circonftance ; en examinant le vai feau qui lui avoit fervi dans les deux feules expériences qui avoient réufli, il fe trouva fèlé d’un bout à l'autre; il n’eft dofc pas étonnant qu'il ait laïflé échapper des particules des matières qu'il contenoit, qui en aient tranfmis l'odeur & diminué le volume ; & fi quelques perfonnes ont été guéries en employant pour les électriler des vaifleaux remplis de- drogues, tout ce qu'on peut leur accorder de plus, c'eft de m'avoir pas nui à l'électricité.

On avoit afiuré M. Abbé Nollet que l'émail de Venife ne s'électrifoit pas par frottement; étant + cette ville, il en fit l'expérience, & réuffit parfaitement à l'électrifer. Hréfulte de ce fait la confirmation d’une vérité déjà connue, que les métaux qu'on vitrife pour donner à l'émail les différentes couleurs qu'on fouhaite, deviennent fous cette forme fufcep- tibles d'être éleétrifés par frottement, quoiqu'on ne puiffe leur communiquer l'éleftricité de cette manière, lorfqu'ils font fous celle qui leur eft naturelle, |

TPDPENSIAS © LE NNGNE re: 21

femble que dans l'étude de fa Nature, la fortune fe faffe un jeu d'offrir aux Phyficiens des faits qui femblent fe con- tredire; on vient de voir les raifons que M. Abbé Nollet a eues de rejetter la tranfmiffion des odeurs & de la vertu de certaines drogues à travers les pores du verre : on fait qu'on conferve les liqueurs les plus fubtiles, dans des vaifleaux de cette matière; cependant le hafard lui a offert en paffant à Turin, un fait qui paroïît prouver que l'eau fe peut infinuer dans un vaifleau fermé hermétiquement. On lui préfenta un fragment du pied d'un verre, creux en dedans, fermé de toutes parts, & dans lequel on voit diftinétement une liqueur femblable à de l'eau, fans qu'on puifle deviner par où, ni comment elle s’y eft introduite: ce fragment fut donné à M. l'Abbé Nollet par le P. Garo, Correfpondant de F'Aca- démie, qui le gardoit depuis Jong-temps, & il avoit été trouvé au fond d'un puits que lon curoit..

La première idée qui fe préfenta à M. l'Abbé Nollet, fut que cette efpèce de phénomène étoit l’ouvrage de l'Art; muis il Va inutilement expofé à l'action de l'eau & des acides, & même à celle du feu: il Ya foigneufement examiné avec les plus fortes loupes, fans qu'aucun de ces moyens ait manifefter la moindre ouverture par le fluide qu'on voit dans l'intérieur de ce morceau de verre, ait s’y introduire. Tout ce qu'on pourroit foupçonner, c'eft que ce verre ayant perdu une grande partie de fon poli, la pefanteur de l'eau, aidée du poids de latmofphère, auroit forcer les parties les plus ubtiles de l'eau à enfler quelques pores moins étroits que les autres; mais En ce cas, pourquoi faction du feu ne la feroit-il pas fortir par la même voie? il vaut donc mieux attendre que quelque heureux hafard nous mette entre. les mains l'explication de cette efpèce d'énigme, que de vou- loir la deviner: c'eft une matière à expériences, & on peut ètre für que M. f Abbé Nollet ne les négligera pas. . La relation de fon voyage qu'il lut à l'Académie à fon. retour, ne contient pas feulement les recherches qu'il avoit faites fur Féleétricité, elle offe un grand nombre d'autres.

C üÿ,

22 HisroiRe DE L'ACADÉMIE ROYALE obférvations, nous ferons même obligés de féparer celles qui font impriméés dans ce volume *, pour nous aflujétir à Ja loi que l'Académie s'eft prefcrite, de préfenter les objets qui entrent dans fon Hiftoire, fuivant l’ordre des différentes Sciences auxquelles ils appartiennent.

Celles qui ont pour objet la nature des différens matériaux qu'on emploie dans les bâtimens, ou pluftôt leur différence d'avec ceux de même efpèce dont on fait ufage ici, & les réfle- xions de M. l'Abbé Nollet fur la température de l'air qu'on obferve en Italie, doivent appartenir à la Phyfique générale, & nous allons en rendre compte dans la fuite de cet article.

On trouve dans le Piémont & dans beaucoup d'autres endroits de l'Italie, une efpèce de chaux qu'on nomme forte, parce qu'en effet on bâtit plus folidement, en lemployant, qu'en fe fervant de la chaux ordinaire, La pierre avec laquelle on la fait, fe tire de la carrière par gros morceaux figurés naturellement comme des cailloux; elle eft parfemée de petites lames brillantes, & contient fouvent des mafles ou des couches d’une efpèce de cryftallifation imparfaite, aflez femblable à du marbre blanc; la pierre même, dont Ja couleur eft grife & quelquefois noire, pourroit par fon grain & fa dureté être prife pour du mauvais marbre.

Cette pierre fe calcine comme la pierre ordinaire, fi ce n'éft qu'on en met une moindre quantité dans le four ; elle paffe par la calcination du gris brun au café, de au roux, & enfin à un blanc fale ou jaunâtre, & c’eft-là qu’on tâche de l'arrêter ; elle ne vaudroit plus rien, fi on la faïfôit devenir tout-à-fait blanche. ke

Les portions de cette fubftance blanche & brillante que contient a pierre, peuvent auffr fe calciner, mais il leur faudroit un plus grand degré de feu & qui gâteroit abfo- Jument la pierre; elles y reftent donc comme parties inutiles qu'on tâche d'en féparer, & la chaux qui en contient le plus, eft la moins bonne.

* Il n’y a qu’une partie des obfervations de M. l'Abbé Nollet, imprimée dans ce volume, le refte eft réfervé pour le fuivant.

DES SCIENCES. 2

La chaux forte neft pas auffi friable que la chaux ordi-

_naïre ; les morceaux de pierre paroiffent entiers, leur grain eft auffi fin qu'avant {a calcination, & ils peuvent réfifter à un choc affez fort.

Cette chaux ne s'éteint point dans une grande quantité d'eau ; on n'en jette deflus à la fois que ce qu'elle en peut abforber fans qu'il en refle rien dans le baffin, & ce n’eft qu'après que les arrofemens réitérés l'ont fuffifamment ouverte & divifée, qu'on y en jette aflez pour lui donner la confif. tance d'une bouillie un peu claire qu'on bat & remue comme la chaux ordinaire avant de la faire couler dans la foffe qui la doit recevoir.

Cette chaux communique un plus grand degré de chaleur à l'eau dans laquelle on léteint, que la chaux ordinaire : un thermomètre à mercure que M. l'Abbé Nollet.y a plongé, eft monté à 150 degrés, & auroit probablement été plus loin s’il avoit eu plus d’étendue ; peut-être, fi on l'éteignoit en plus grande eau, elle donneroit moins de chaleur.

I feroit inutile d'en éteindre plus qu'on n'en peut em- ployer dans un mois; elle fe durciroit dans la foffe on. la conferveroit , quand mème, pour prévenir cet accident, on Ja tiendroit fubmergée.

La chaux forte mélée avec un fable convenable, tel que celui dela Doire en Piémont ou de Ia Pozzolane, com- pofe un mortier qui s'attache fortement aux pierres qu'on y méle, devient auffi dur qu'elles-mêmes, & réfifte parfai- tement à l’eau. Pour conftruire des voûtes, on n’eft point obligé de placer les pierres comme les voufloirs de pierre de taille, on les jette pêle-méle avec le mortier fur un bâtis de planches qu'on a fait pour les foûtenir, quelques jours après on détruit ce bâtis, & la voûte fe trouve folide.

La pierre de laquelle font conftruits prefque tous les beaux édifices de Rome, fe nomme 7raertin, & fe tire de Tivoli & des environs ; elle eft entre-coupée par des lits horizontaux, d'environ un demi-pouce d’épaifieur,, d’une matière cryftalline, | & qui, lorfqu'on la fépare, repréfente affez bien les alvéoles.

24 HisToire DE L’ACADÉMIE ROôTALE d'une ruche d'abeilles : pour peu qu'on foit au fait de ce qui fe pafle dans fa formation des fldaéti es, on n'aura pas de pêine à reconnoître ces couches pour être de la même ma- tière, mais la difficulté eft de favoir pourquoi cetie elpèce de ftladtite eft formée en petits creux, au lieu que les flalac- tites ordinaires le font en relief. M. l'Abbé Nollet trouve fa raifon de cette différence dans la fituation des couches cry tallines : les flalactites ordinaires fe forment à la voûte des grottes ; chaque goutte d'eau chargée des particules de pierre laifle, en s'évaporant dans l'air, la pierre qu'elle tenoïit attachée à la voûte, & la fomme de tous ces dépôts forme nécef fairement une pyramide la pointe en bas ; mais la liqueur qui coule à travers les bancs du travertin, ne trouvant point à s'évaporer , l'eau fe filtre au travers du banc inférieur, & laiffe les parties pierreules à fa furface, d'où il fuit que le dépôt doit fe faire dans l'ordie précifément inverfe de celui des ftahélites ordinaires, & par conféquent en creux dont les rebords iront, en s'élevant peu à peu, rejoindre le deflous du lit fupérieur. «

Il y a peu de perfonnes qui n'aient entendu parler de fa fameule tour de Pife, qu'on prétend avoir été conftruite exprès hors d’aplomb; cependant M. l'Abbé Nollet l'ayant examinée, h'en juge pas de même ; il regarde au contraire cette incli- naifon comme un accident qu'il faut attribuer à ce que le terrein eft d'autant moins folide, qu'il approche plus de Arno, rivière qui traverfe la ville : tous les édifices qui en font voifins fe fentent de ceite différence de folidité, & font plus ou moins inclinés de ce même côté; les aflifes de la tour font inclinées, & il paroïit même qu'on s’eft aperçu de ce déverfement avant qu'elle fût tout-à-fait conftruite, puif- qu'il y en a une partie qui fait angle avec la première & a une moindre inclinaifon. La même chofe eft arrivée à une vieille tour qu'on avoit deflinée à placer un Obferfatoire, & qu'on voulut pour cet effet élever; dès qu'on commença à

-augmenter fa hauteur; lastour déjà penchée-s'inclina davan- tage, & on fut obligé de placer ailleurs les inftrumens qui exigent

tit s0S:c:1.E Nic ss 2 exigent d'être placés folidement ; ainfi l’inclinaifon de la tour de Pile eft purement accidentelle, & n'a jamais entré dans le deffein de l'Architecte: ce n’elt pas cependant que cette efpèce de jeu n'ait été quelquefois affecté ; on voit à Flo- rence une tour carrée, confidérablement inclinée, mais ce n'eft qu'à l'extérieur, le dedans eft abfolument à plomb, les aflifes horizontales, & on voit bien que cette couftruétion eft l'ouvrage de l'art.

On eft communément perfuadé que les chaleurs qu'on éprouve pendant l'été en Italie font infiniment plus fories que celles que nous reflentons fous notre climat, heureufement pour l'éclairciffement de ce point, elles furent extrêmes en 12? , on affura M. F Abbé Nollet que de mémoire d'homme n'en avoit pas reflenti de plus grandes ; cependant le thermomètre de M. de Reaumur, mis à l'ombre, n’a jamais monté plus haut que 30 degrés ; terme qu'il atteint ici ‘dans les grandes chaleurs : il y a donc plus que de l'apparence que les chaleurs d'Italie ne font plus fenfbles que les nôtres qu'à caufe de leur durée qui eft quelquefois de deux mois fans interruption, & non à caufe de leur force, qui, comme on voit, neft pas plus grande. |

Ces chaleurs fi. incommodes ne fe font au refte reflentir que dans les endroits peu élevés, la chaleur eft bien moindre fur les montagnes ; la route de M. l'Abbé Nollet le con- duifoit naturellement à traverfer Apennin, & comme la pente eft infenfible, ou du moins très-douce, il eut befoin de l'expérience du baromètre qu'il fit au fommet il trouva le mercure à 25 pouces 9 lignes +, pour fe perluader qu'il ne devoit attribuer qu'à l'élévation du lieu il étoit a diminution de chaleur qu'il éprouvoit, & qui lui faifoit quelquefois regretter le foir & le matin de n'être pas vêtu plus chaudement,

Lorfque ces grandes chaleurs commencent à diminuer, on éprouve dans tout le plat pays une viciflitude très -in- commode de chaud & de froid; le thermomètre marque yers les trois heures après midi, vingt-quatre ou vingt-cinq

Hifl 1749 .

26 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE degrés, & la nuit il fait aflez froid pour avoir fouvent befoin de feu.

C'eft à cette alternative de chaud & de froid que M. Y Abbé Nollét croit qu'on doit attribuer cette intempérie dont on efraie tant les voyageurs depuis Florence jufqu'à Naples, & dont un grand nombre d'exemples ont conftaté les funeftes effets : on attribué communément ces accidens à une mali- gnité répandue dans Fair, & dont on ne peut fe garantir qu'en allant fans dormir, & vivant fobrement : fans contefter la dernière condition, toûjours très-bonne en elle-même, & que la rareté des bonnes auberges dans cette partie de la route, force de pratiquer, il croit avec beaucoup d'apparence, que les voyageurs qui vont la nuit, dormiroient D 2 ment, s'ils avoient des chaifes bien fermées, au lieu des m rables voitures qui font en ufage, & qui laiflent ceux qui y font, également expofés aux ardeurs du {oleil pendant le jour, & à la rigueur du froid pendant la nuit. |

Dans le féjour que M. l'Abbé Nollet fit à Rome, il eut la curiofité d'examiner les caves de monte teflacio, qui font renommées par leur fraîcheur : on prétendoit que cette fraîcheur étoit plus grande & plus durable que celle de la glace, quand une fois elle étoit communiquée au vin; il jugea bien qu'il y auroit beaucoup à rabattre de cette mer- veille, mais il crut devoir s'aflurer de ce qu'elle avoit de réel. La colline fous laquelle ces caves font placées, n’eft qu'un amas de morceaux de tuiles & de pots cafés, & c'eft de-là probablement qu'elle tire fon nom ; les caves s’enfoncent à peine de vingt toifes fous la colline, on y entre de plein pied; les portes en font grandes, fouvent ouvertes, & expofées aux rayons du foleil; malgré toutes ces circonftances, le thermomètre s'y fixa à neuf degrés au deflus de la congé- lation, terme bien éloigné de ce que l'on difoit, mais cependant d'autant plus capable de caufer de admiration à un Phyficien, que dans les catacombes de Saint-Sébaftien l’on defcend près de trente pieds, l'on entre rarement, & qui s'avancent bien loin fous des bâtimens & autres lieux couverts, le même

énamattt.. +

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DES ScrENC'ESs. 27 thermomètre s'éleva à 13 degrés & demi. Il paroït donc que la nature du terrein de la colline eft la caufe de cette inégalité, & que par conféquent la terre cuite pourroit étre de nature à s'échauffer moins que d'autres matières; ce n’eft encore ici qu'un foupçon, mais qui peut donner lieu à des expériences curieufes, & peut-être utiles en bien des occafons. La Phyfique qui fait fi bien détruire les fauffes merveilles, fait aufir employer les fmgularités remarquables de la Nature, à l'avantage de la fociété.

OBSERVATIONS DE PHYSIQUE GENERALE.

I. M Geoffroy a fait voir un aflez gros morceau d'ivoire . dans lequel on avoit trouvé, en le fciant, une balle de plomb, profondément engagée; il y avoit dans tout le trajet de Ja balle, plufieurs écoulemens de fuc offeux, qui y formoient des efpèces de fhlactites. true I I. Le 19 Février 1749, un peu avant midi, on reflentit à Londres un tremblement de terre; M. Folkes qui en a envoyé la relation à M. de Reaumur, étoit alors dans fon cabinet avec M. Trembley: ils fe fentirent élever de terre, & prefque dans le moment même retomber avec un choc confidérable & un bruit femblable à celui d’un très-gros poids qui tomberoïit, & que M. Folkes attribue au mouvement même qu'efluya la maifon. Cette fecoufle {e fit fentir dans toute la ville de Londres & à quatre lieues aux environs ; on efpéroit avec d'autant plus de vrai-femblance en être quitte, que depuis 1692 on n'avoit rien reflenti de pareil à Lion- dres; cependant le 19 Mars fur les deux heures du matin, on effuya une feconde fecouffe, & deux heures après, une troi- fième encore plus violente: cette dernière fut fi forte que, flon Fexpreffion même de M. Folkes, il fembloit que les

D j

» Voy. Hift. 1746, p. 24

28 HisToiRE DE L'ACADÉMIE RoYaLeE

maifons ne fuflent que de carton, tant elles furent violemment ébranlées; elle fe fit fentir dans un plus grand efpace que la première, & qui s'étendoit à environ fix lieues autour de la capitale. La direétion du mouvement dans cette dernière:

fecouffe, parut à M. Folkes fort différente de celle qu'il avoit

obfervée dans la première; au lieu que dans celle-ci il avoit éprouvé la même fenfation que fi on l'eût élevé, & enfuite laiflé retomber, dans a dernière ïl lui fembloit être fecoué à plufieurs repriles, par un mouvement horizontal & très- prompt. L'eau de la Tamife fut extrêmement troublée, & dans un endroit il" y avoit des poiffons dans un canal, à Vinftant du tremblement ils fautèrent tous ou furent jetés en l'air, plus d'un pied & demi hors de l'eau: quelques per- fonnes crurent avoir entendu un grand bruit, comme d’une décharge de canon; mais M. Folkes penfe qu'il n'y en a eu d'autre que celui que produifit la fecouffe des maifons : heu- reufement ce tremblement a caufé plus d'épouvante que de dommage; Londres en a été quitte pour quelques cheminées qui ont été renverfées en différens quartiers de la ville, plus heureufe en ce point que Lima, du défaftre de liquelle l'Académie a donné en 1746 * une relation confirmée depuis par celle que lui a envoyée cette année D. Jofeph Eufebio de Llano y Zapata. IT

M. Hellot a fait voir un morceau de bois interrompu en différens endroits par des pyrites fulfureufes ordinaires, qui ont végété & fourni une quantité confidérable de petites: aiguilles blanches, d'un goût vitriolique ferrugineux; une partie de ce morceau de bois étoit convertie en jayet très- noir, dur comme le jayet ordinaire, & qui prenoit un auffx beau poli. Le refte de ce morceau étoit encore bois, & les. petits copeaux qu'on en féparoit, brûloient comme du bois ordinaire, & fans répandre d’odeur fulfureufe : ce bois fait partie d’une couche d'arbres renverfés qui forment un lit aflez étendu à vingt-deux pieds de profondeur, dans un terrein bas au fud-oueft du mont d'Or en Franche-comté. Tout ce

DELSA SIC TE N'CES: 29 local eft tiré de l'étiquette avec laquelle cette pièce fut en- voyée à M. Hellot.

.

ous renvoyons entièrement aux Mémoires, L'Hiftoire des Maladies épidémiques obfervées à V. les M. Paris en 1749, en même temps que les différentes tempé-, P- 113. _ratures de fair : par M. Malouin.

La Defcription de deux efpèces de nids finguliers faits par des chenilles : par M. Guettard.

Les Oblervations Botanico- météorologiques faites au p. 224. château de Denainvilliers, proche Pluviers en Gâtinois : par

M. du Hamel.

Et les Oblervations météorologiques faites à Obferva- p. 530. toire Royal pendant l'année 1749.

M de Mairan avoit annoncé en 1747 *, à da fm des 5x mm . Eclairciffemens fur le Traité de l’Aurore boréale, def de/'Acad. amée

quels il avoit donné#pour lors la première Partie, que la *7#77#35-

fuite de ces mêmes Ecluirciffemens paroîtroit dans les volumes

fuivans: différentes raifons l'ayant engagé à donner une féconde

édition de fon Ouvrage, il a jugé plus à propos de les y faire

entrer, & c'eft pour cette raifon qu'on ne troëvera pas cette

Suite dans les volumes de l'Académie.

ne. année, parut un Ouvrage de M. de Reaumur,

intitulé, Art de faire éclorre 7 d'élever en toute faifon

des oifeaux domefliques de toutes efpèces, foit par le moyen de la

chaleur du fumier, foit par le moyen de celle du feu ordinaire. On connoïfloit depuis long-temps l'induftrieufe manière

que les Egyptiens avoient inventée pour fuppléer à f'incu-

bation par l'action modérée d'un feu fagement ménagé; mais

quoique les Auteurs les plus anciens en euflent fait mention,

perfonne ne s'étoit avifé d'en donner une defcription exacte,

moins encore de tranfporter dans d'autres pays un art auffi

utile, & dont les Egyptiens ont confamment joui jufqu'à

D ii

o Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE préfent , à lexclufion de tous les autres peuples, fr on en excepte les tentatives qu'un grand Duc de Tofcane fit peur V'établir dans fes Etats. Ce n'eft pas cependant que les mo- dernes aient été auffi négligens que les anciens à nous Jaïfer la defcription de ces fours, nos Voyageurs en ont donné quelques-unes; Monconys , Thévenot, Vefling & le Père Sicard nous en ont même laïffé d’affez détaïllées ; mais indé- pendamment des différences qui fe trouvent dans leurs Rela- tions, & qui proviennent probablement de ce qu'ils ont décrit des fours différens, une autre raïfon a encore rendre Jeurs Ouvrages défeueux ; ils étoient eux-mêmes perfuadés que cet art, pratiqué en Egypte depuis fi longtemps, étoit inconnu aux Égyptiens mêmes, & cette raïfon a les em- pêcher d'apporter une grande attention à décrire les chofes néceflaires à la pratique d'un art qu'ils defefpéroient de pou- voir nous tranfmettre: en effet, cet art n'eft pas indifférem« ment exercé par tous les Egyptiens, les feuls habitans d'un village nommé Bermé, fitué à vingt lieues du Caire, dans le Delta, font en pofleffion de l'exercer, & ïls en font un myftère qu'ils font parvenus à fane regarder comme impé- nétrable.

Ce n’eft pas cependant fur la ftruéture du four que tombe ce fecret, quéMles Berméens ne révèlent qu'à leurs enfans, if eft libre à tous les Etrangers d'en examiner la ftruéture exté- rieure, & même d'y entrer quand ils font vuides : le fecret des Berméens ne confifte que dans ce qui fe paffe au dedans de ces fours lorfqu'on leur a confié les œufs; c'elt aufli dans ce temps que l'entrée en eft févèrement interdite non feule- ment aux Etrangers, mais encore aux Égyptiens, & même au propriétaire du four. |

Heureufement, les defcriptions que les différens Voyageurs modernes nous ont données de ces fours, que les Egyptiens nomment mamals, ne {e contredifent point, & il a été facile à M. de Reaumur de les concilier. A l'égard du prétendu myf tère des Berméens, on ne fera pas étonné qu'il n'en aït pas été un pour un Phyfcien auffi éclairé ; la fhruéture des mamals

DHELSLS.C 1 E NACIE S étant connue , il ne pouvoit être queftion que de l'arrange- ment des œufs, & du degré de chaleur qu’on devoit leur faire continuellement éprouver. Des expériences faciles pouvoient inftruire fur le premier point, & le thermomètre, inftru- ment inconnu aux Berméens, étoit un guide plus für que toute leur habitude pour régler le degré de chaleur qu'on doit entretenir dans les fours, qui ne doit pas différer beau- coup de celui que les œufs éprouvent fous Ha poule, & qui revient au 32. degré au deflus de la congélation dans celui de M. de Reaumur. SOU

Pour fe faire une légère idée des fours ou mamals des Egyptiens, qu'on s'imagine deux bâtimens de brique de 9 pieds de haut fur environ 38 de long & 12 de large; ces deux bâtimens laiflent entre eux une efpèce de rue de'3 pieds de large, fermée par fes deux bouts par la prolonga- tion des murs qui terminent les deux corps dont nous venons de parler, & couverte par une voûte appuyée des deux côtés fur leur longueur, ce qui forme entre eux une galerie de 3 pieds de large & aufir haute qu'eux. Ces deux bâtimens font partagés, par des murs qui les traverfent, chacun en huit chambres; & quelque petite que foit la hauteur totale de 9 pieds, chaque chambre eft encore coupée en deux, fuivant fa hauteur, par une voûte très-für- baiflée , percée dans fon milieu d’une ouverture ronde de 2 pieds de diamètre; en forte que chaque bâtiment contient deux rangs de chambres de 3 pieds de hauteur, dont les inférieures communiquent avec les fupérieures par l'ouverture que nous venons de dire qu'on laïfle dans la voûte qui les fépare ; efpèce d’appartemens peu commodes, comme on voit, pour les Berméens qui doivent y entrer, mais favo- rables au degré de chaleur qu'on doit y entretenir, & qui eft néceflaire pour faire éclorre les œufs.

Chacune des chambres, tant hautes que bafles, a pour porte un trou rond d'environ un pied & demi de diamètre, ce qui forme dans la galerie un double rang d'œils de bœuf de . chaque côté: fa galerie elle-même a pour porte une pareille

32 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE ouverture, qui eft la feule par laquelle on puiffe entrer dans le four manul. j

Les œufs font mis dans les chambres inférieures, étendus fur une natie ou fur un lit de bourre ou d'étoupe, & a porte qui communique de chaque chambre bafle dans la galerie, eft foigneulement bouchée avec un tampon de: pa- reille matière. Le feu s'allume dans les chambres hautes, & la fumée, qui fe rend dans la galerie par les ouvertures que ces chambres y ont, séchappe par des trous qui font à la voûte, & qu'on a grand foin de boucher dès que le feu eft éteint.

Nous difons dès que le feu eft éteint, car on ne l'y en- tretient pas continuellement, il y occafionneroit une trop forte chaleur; & même lorfque le four a acquis affez de cha- leur pour la conferver par lui-même, on cefle d'y en allumer: c'eft encore pour la même raïfon qu'on ne s'y fert ni de bois, ni de charbon dont le feu feroit trop vif, mais d'un mélange de fiente d'animaux sèche & de paille, qui revient aflez aux mottes que font nos tanneurs.

Dès que le temps auquel on doit ceffer d'allumer du feu dans le four, eft arrivé, on tranfporte une partie des œufs des chambres bafles, dans les chambres hautes; ces chambres devenues pour lors inutiles, leur offrent un emplacement qui devient avantageux, tant à la fortie du poulet, qu'aux vifites que les Berméens leur rendent fréquemment, tant pour les retourner, que pour ôter avec foin ceux qui {e font corrompus, & dont la vapeur & l’odeur pourroient être funeftes aux poulets qui font vivans dans les autres œufs.

Le temps néceflaire à chaque couvée eft dans le four comme fous fa poule, d'environ vingt-un jours; & comme on entretient la chaleur de ces fours pendant fix mois, chaque mamal peut amener à bien huit couvées, dont chicune eft d'environ quarante-cinq mille œufs: le Berméen qui eft char- de la conduite du four, doit fournir trente mille poulets à chaque couvée, les quinze mille autres ou périfient ou tournent à fon profit. Chaque four rend donc à fon maître

chaque

stat ant

lothéiæsil" 1"

DE SUIS © 1 E NOM. 33 chaque année, deux cens quarante mille poulets; ainfr, pour favoir ce que l'Esypte entière en fournit par cette méthode, il n'y auroit qu'à faire un dénombrement de tous les fours qui y font établis : cette propofition paroîtra fans doute d'une

‘exécution difhcile ; heureufement l'intérêt a fait faire aux

Turcs ce qu'il n'eft guère croyable que l'amour des Sciences en eût obtenu. Nous avons dit que chaque four. étoit conduit par un Berméen; lAga ou Commandant turc de Bermé, ne permet à fes habitans de s'abfenfer que moyennant une fomme qu'ils lui donnent, & on peut bien penfer qu'il ne néplige pas de tenir un regiftre exact de ceuxà qui il accorde cette permiflion: c'eft par ce regiftre que l'on a qu'il fortoit tous les ans de Bermé, trois cens quatre-vingt-fix Berméens, & que par conféquent il y avoit en Egypte un pareil nombre de fours qui travaïlloient; fi on multiplie ce ombre par celui des poulets que chaque four donne à fon maître, on fera effrayé de la multitude immenfe de ces ani- maux que l'induftrie des Egyptiens leur produit : on verra qu'indépendarament des poulets qui tournent au profit des Berméens, le nombre total de ceux qui éclofent dans les fours, eft de quatre-vingt-douze millions fix cens quarante mille poulets; avantage prodigieux, fr on fait attention que cette quantité immenfe de volaille n’eft pas feulement utile par la confommation qu'on en peut faire, mais encore par le nombre énorme d'œufs qu'elle produit.

C’eft à tranfporter chez nous un art auf utile, qu'eft deftiné Fouvrage de M. de Reaumur; mais indépéndamment de celui des Egyptens, fur fequel nous verrons bientôt qu'il a beaucoup enchéri, il y avoit en France une difhculté à vaincre ,sque n'ont pas les Egyptiens : placés dans un climat ils n'ont à redouter ni pluie ni froid, ils n'ont aucun foin à prendre des poulets que leur donnent leurs fours; les faire éclorre eft tout ce qu’il faut: fous un ciel moins favorable, les poulets exigent de nous d’autres foins ,& l’art de les con- ferver n'eft pas moins effentiel que celui de Les faire Éclorre.

. Pour fuppléer à lincubation des œufs, on peut, en France

Hif. 1749. LS

34 HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE comme en Egypte, employer fa chaleur du feu, il n’eft pas même nécefiaire d'employer des fours pareils à ceux des Egyptiens; ces fours occalionneroient une top forte dépenfe à ceux qui ne voudroient pas faire éclorre l'énorme quantité de poulets qu'ils donnent : mais voulüt-on travailler aflez en: grand, on. n'auroit pas encore beloin de recourir à la conf- œuclion égyptienne, ni d'allumer des feux exprès; nous avons un nombre confidérable d’étuves dans lefquelles il ne tient qu'à nous d'entretenir 4 chaleur convenable au moyen du feu qui eft,allumé pour d'autres ufages : il n'y a pour cela qu'à profiter du deflus des fours des Verriers, des Potiers, des Boulangers, des Patifiers, des fours banaux, en un mot de tous ceux qu'on chauffe au moins deux fois par femaine; on peut conflruire fur ces fours, à très-peu de frais, des étuves aufli propres que les fours d'Egypte à faire éclorre les poulets; des thermomètres placés en différens endroits, indiqueront fi Fair y eft trop chaud ou trop froid, & des ouvertures placées convenablement & fermées avec des couliffes, fervi- ront de regiftres pour modérer la chaleur, &J'entretenir au décré néceflaire., On placera dans ces étuves les œufs arrangés dans de grands paniers plats, & on les y laïffera jufqu'à ce que les poulets {oient éclos, fans autre foin que de les vifiter plufieurs fois le jour, tant pour veiller à ce que la chaleur y foit entretenue à peu près au 3 2.° degré du thermomètre de M. de Reaumur, que pour retourner de temps en temps les œufs, & Ôter ceux qui pourroient fe corrompre.

Nous difons à peu près au 32.° degré, car le degré de chaleur néceflaire pour fuppléer à lincubation des œufs n’eft pas un point indivifible : les expériences de M. de Reaumur lui ont appris que quand la chaleur feroit montée à 34 degrés ou defcendue à 28, il ne faudroit pas pour cela abandonner les œufs, fi elle n'étoit pas demeurée long-temps dans cet état, & il n'y a rien du tout à craindre quand a chaleur ne s'écarte pas de plus d'um degré au deflus ou au deflous du 32.°; il ft pourtant mieux qu'elle en approche toùjours le

plus qu'il eft poflble, à

DE S1S:-C LE Nc 35 + Ceux qui n'ont pas à leur portée des fours il y ait une chaleur aflez continue, peuvent {e procurer le même avan- tage en formant dans une petite chambre, qu'on aura foin de rendre très-bafle de plancher, une efpèce d’étuve qu'on échauffera par le moyen d'un poêle ofdinaire aflez petit; on ne doit pas même craindre en ce cas que le prix du bois qu'on fera obligé d'employer pour cette opération, augmente beaucoup celui des poulets : M. de Reaumur a’ trouvé, par expérience, qu'au prix même auquel le bois eft à Paris, le poêle de fon étuve n’en dépenloit par jour que pour environ deux fols fix deniers; dépeufe foible quoiqu'elle fe répète long-temps, fwr-tout fi on la répartit fur plufieurs ‘centaines de poulets que l’étuve peut contenir : on peut même dimi- nuer cette dépenfe, en rempliflant tout le haut du poële de morceaux de briques mal arrangés , foûtenus fur une grille; ces morceaux, éxpolés à l'action de la flamme, s'échauffent aflez pour conferver très-long-temps la chaleur, & difpenfer d'allumer du feu dans le poêle auffi fouvent qu'on le feroit fans leur fecours : cette étuve d'ailleurs fert à plus d'un ufige, & nous verrons bien-tôt que le même feu qui fert à faire éclorre une couvée de plufieurs centaines de poulets, fert en même temps à élever ceux de la couvée précédente, ce qui n'eft pas un petit avantage.

+ Une propriété de ces étuves, que nous ne devons pas pafler fous filence, & par laquelle elles different de celles que nous avons dit qu'on pouvoit conftruire fur les fours, eft que dans les étuves à poële l'air eft échauffé inégalement; le plus chaud eft toûjours près du*plafond, & le moins chaud voifin du plancher. Cette différente température donne lieu defaire éprouver aux paniers d'œufs, tel degré de chaleur qu'on juge à propos, en les fufpendant à différentes hauteurs; ce qui n'arrive pas dans les autres étuves 1a chaleur eft tranf- mife par le plancher inférieur.

«4 "ae M. de Reaumur n'a fait qué perfeétionner la ma-

nière de fuppléer à l'incubation par le moyen du feu, & Ja mettre à portée d'être employée en petit par chaque particulier E ïj

36 HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

fans occafionner une grande dépenfe, ce {eroit toûjours beau--

coup; mais ce qu'on va voir n'a plus aucun rapport à l'art des Egyptiens , & appartient en entier au Phyficien françois,

Perfonne n’ignore que le fumier, qui n'eft autre chofe que de la paille mêlée avec les excrémens des beftiaux , s’'échauffe, lorfqu'it eft mis en tas, jufqu'au point qu'au bout de quelque temps on ne peut tenir la main enfoncée dans le tas fans fe brûler: la même chofe arrive aux tas de feuilless de bruyères, &c. qu'on met pourrir pour faire du terreau : c'eft cette chaleur produite par la fermentation de ces matières, & qui refte communément inutile, que M. de Reaumur a trouvé moyen d'employer au lieu du feu ordinaire, pour faire éclorre des œufs.” .

Ses premières tentatives furent peu heureufes, Jes œufs placés dans l'intervalle de deux couches, devenu, au moyerr "de quelques planches qui le recouvroient, une véritable étuve, y reçürent pendant quelques jours le degré de chaleur qui leur étoit néceffaire, 8: commencèrent à fe développer; mais au bout de peu de jours, if en vit plufieurs fe corrompre, & aucun ne parvint jufqu’à l’entier développement, le pouler périt dans tous avant que d’être abfolument formé. Un Phy- ficien connoït la Nature, il fait que l'expérience eft fujète à démentir les raifonnemens les plus plaufibles, '& n'a garde

de fe rebuter, le mauvais fuccès d’une expérience ne fait que

Fanimer à en chercher la raïfon. M. de Rexumur trouva que ce qui avoit fait périr fes poulets n'étoit autre chofe que lhu- midité qui s’exhaloit continuellement des couches, & qui mettoit un obftacle invincible à Févaporation qui fe doit faire au travers de la coque de œuf, d'une partie de: l'humidité qu'il contient; car il ne fuffit pas que des œufs éprouvent pendant un temps déterminé un degré de chaleur égal à celui qu'ils recevroïent de la poule qui les couveroit, il faut encore que cette chaleur opère l'évaporation dont nous venons de parler, pour qu'elle ferve au développement du poulet, & cela eft fi vrai, que des œufs tenus dans de l'eau foigneufe- ment entretenue au 32° degré de chaleur pendant tout le

> rt

DES SCIENCES. femps néceffaire pour qu'ils püffent éclorre, n’ont pas donné moindre marque de développement : 1a même chofe eft arrivée à ceux qui avoient été vernis, ou feulement frottés

* de graïfle ou d'huile; leurs pores, bouchés par ces matières,

fe font refufés à l'évaporation , & par eonféquent au déve- loppement du poulet. M. de Reaumur rappelle en cet Ou- vrage la manière qu'il avoit déjà donnée de conferver les œufs, en les frottant aufli-tôt qu'ils font pondus, d'huile, de beurre,"de graifle, &c. & avertit en même temps que pour remettre cés œufs en état d'être couvés, il faut leur enlever cet enduit en les grattant avec un inflrument tranchant, avec un morceau de verre.

Pour mettre les œufs à l'abri de cette humidité qui eur eft fi funefte, il imagina un moyen auffi fimple ques fa- eile; un tonneau défoncé par un de fes bouts, & gami en: de dans d’une couche de plâtre, ou feulement de plufieurs feuilles de papier gris, & enterré dans le fumier jufqu'aux deux tiers de fa hauteur, devient un“four vertical qui reçoit la chaleur du fumier qui l'entoure, fans permettre aux vapeurs & pénétrer dans fon intérieur. Ce tonneau eft fermé er defius px un couvercle percé au milieu d’un affez grand trou, autour duquel il y en a de moindres, & chacun de ces trous eft garni d'un bouchon proportionné : ces ouver- tures fervent de regiflres pour modérer la chaleur lorfqu'elle en fera trop forte; & fr elle devient trop foible, on: y remé- diera bouchant tous les regiftres, & remettant fur le fumier qui entoure le tonneau une médiocre quantité de fimier chaud, qu'on tirera d’un tas qui fera tenu pour cet effet en réferve:

Les fours conftruits comme-noùs venons.de le‘dire, eurent

d'abord un: affez heureux fuccès: M. de Reaumur put fuivre

le développement du poulet depuis le moment auquel on

maperçoit qu'une goutte de fang animée du mouvement de

; ia & de diaftole, jufqu'au terme auquel il brife fa pri-

n; fpeétacle bien digne defllattention d'un Phyficien, &

qu'il eft impoflble de voir fans être frappé d’admiration ;.

enfin-il eut des poulets entièrement éclos & fans aucun accident. E iij,

@ Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE

Il eft vrai.que cet avantage ne {e foûtint pas également dans toutes les couvées, plufieurs furent malhigureufes, les poulets périfioient plus ou moins piès de leur terme, fans qu'on ei püt découvrir la caufe; elle ne put cependant fe - dérober long-témps aux recherchés de M. de Reaumur. Cette humidité que nous avons déjà vüe fr funefle aux premiers œufs qu'il avoit fait couver entre deux couches, avoit encore caufé la perte de ces derniers : le tonneau qui leur fervoit de four, fermoit à la vérité tout paffage à l'humidité du fumier; mais cette humidité, retenue dans le dieu étoit ha couche, qui étoit trop petit, trop bas & trop fermé, ren- troit dans le four par les ouvertures de fon couvercle qui lui fervent de regiftres, & y produifoit l'effet immanquable d'empêcher l'évaporation, & par conféquent le développe- ment,du poulet ; fouvent elle y.paroifloit fous la forme de gouttelettes qu'on remarquoit au couvercle fur les œufs, mais plus fouvent encore cette humidité fi pernicieufe ne fe manifeftoit par aucune marque extérieure. La méthode dont M. de Reaumur fe fert pour la découvrir, eft fimple; on fait que les vapeurs qui font répandues dans un endroit , fe com denfent à a furface de tout corps plus froid que.l'air de cet endroit ; il ne s’agit donc que d'introduire un œuf froid dans le four, les vapeurs , s'il y en a, s’'amafleront bientôt à fa furface, & y formeront une rofée très-fenfible; dès qu'on fera averti par ce moyen de leur préfence, on retirera les œufs du tonneau, & on éventera fa capacité & celle de tout le lieu la couche eft enfermée, avant que de remettre les œufs dans le four, pour en chafler foigneufement toute l'humidité qui peut y être contenue. Non feulement on peut & on doit chafler Fhumidité du four & de fon voifi- nage, mais on peut encore réufly à empêcher qu'il ne s'y en forme, & M. de Reaumur propole pour cela deux moyens. à A

Le premier eft de placerdles tonneaux fervant de fours & les couches qui les environnent, dans un endroit Fair ait un libre accès, comme un hañgar, ou qui doit aflez

DEUSALUS,c 1:æ Noces: 39 vafle & affez élevé pour que les vapeurs puiffent s'y diffi per; elles ne produiront alors aucun mauvais éflet, & les œufs m'éprouveront aucun accident de leur part. 3.

Le fecond moyen eft encore plus für, mais il exige un

four d'une conftruétion un peu différenie: une longue caiffe

de bon bois, de 7 pieds de long, de 2 1 pouces de large, &' de 2 $ pouces de haut, fermée de toutes parts excepté par un de fes bouts, devient le four propre à cette méthode, Cette caiffe eft garnie en dedans, comme les tonneaux, de plâtre ju de papier, & enduite én dehors de gaudron mêlé de one pilée, pour la mettre à l'abri de l'humidité; on la po fur un lit de fumier d'environ un pied d'épais, & on la recouvre d'une couche épaifle de la même gmatière, qui lui doit donner fa chaleur néceflaire: mais avant de placer la caifle, on a foin de percer le mur de fa pièce qui la con- tient, d'un trou aflez grand pour laïfler pañler fon extrémité ouverte, & on maçonne ce qui refie de jour entre la caïfle & les parois de «ette ouverture; par ce moyen, la gffeule du four eft abfolument à l'abri des vapeurs du fumier, qui. ne peuvent travemer le mur pour entrer dans la pièce elle eft: une efpèce de volet percé de plufieurs ouvertutes garnies de bouchons, fert à fermer cette gueule, & à con- ferver la chaleur dans le four.

. Les œufs y font placés dans un long tiroir porté par une efpèce de chaffis garni de roulettes qui permettent de le tirer hors du four, & comme‘la chaleur eft plus forte au haut de cette efpèce de four ‘qu'au bas, le chaflis eft garni d'entailles ou de taffeaux qui donnent Ja facilité de placer plus haut ou plus bas, la caïfle font les œufs, pour leur faire éprouver le degré convenable de chaleur.

De quelque moyen qu'on'fe ferve pour fuppléer à Fincu-

. bation, il eft eflentiel que“la chaleur foit conftimment en-

tetenue aux environs du 32° degré du thermomètre de

. M: de Reaumur; mais cet inftrument, qui eft entre les mains

de tous les Phyfciens, peut ne fe pas trouver de même dans tous les endroits on voudroit établir des fours à

40 HISTOIRE DE LACADÈMIE ROYALE poulets : les anciens thermomètres & ceux que les marchands qui courent les campagnes y portent quelquefois, feroient peut-être plus capables d'égarer fur le degré de chaleury que fervir de règle. M. de Reaumur donne un moyen de lever cette difficulté; quel que foit un thermomètre, il n'y a qu'à tenir la boule appliquée fur fa peau ou, pour le mieux, fous l'aiflelle, pendant environ un quart d'heure, pour ‘que la Jiqueur foit montée au degré de chaleur de la poule; on marquera donc cette hauteur avec un fil noué autour du tube, & ce fera le degré auquel il faudra que la chaleur du four fafle monter le thermomètre qu'on y introduira.

- Mais füt-on abfolument privé de tout thermomètre, il indique un ynoyen bien facile d'y fuppléer; un petit vaif- feu de verre mince, de quelque figure qu'il puifle être, eft le feul meuble néceffaire; on lemplit d'un mélange de trois parties de beurre fondu, & d'une de fuif: cet inftru- ment fi fimple devient un guide pour conduire la chaleur du fur il fera mis: fi les matières qu'il contient, demeurent folides, elle eft trop foible; fi elles font en parfaite fufion, elle eft trop forte; il faut, pour qu'elle foit au degré conve- nable, que l’alliage de beurre & de fuif ne foit ni folide ni tout-à-fait fluide, mais dans la confiftance d'un firop épais.

On voit bien par ce que nous venons de dire, que les fours exigent des foins & des attentions pour entretenir la chaleur au point elle doit être; on peut cependant s'en exempter: la chaleur éle-même peut ouvrir & fermer les repifkres, fuivant qu'elle fera trop forte ou trop foible. M. de Reaumur rapporte plufieurs moyens d'y réuflir, parmi lefquels nous ne pouvons paffer fous filence celui que S. A. S. Mon- feigneur le Prince de Conti lui a communiqué: ce Prince, qui s’eft intéreffé au nouvel art, & en homme d'Etat & en Phyficien, a imaginé que le reflort de l'ai, mis en jeu

par Ja chaleur du four, pouvoit être employé à produire cet effet. Pour cela on prend une bouteille de verre à large col, & on garnit ce col d'un tuyau {e plus gros qu'il foit poffible d'y introduire; ce tuyau eft exactement mafliqué au goulot, & va

VAT MESM ASC 1 E N'CHR 1 41 & va jufqu'à une petite diftance du fond de la bouteille: cet inftrument fi fimple ainfi préparé, on y verfe de l'eau juf- qu'au tiers ou environ de fa hauteur; & comme fa conftruétion ne permet pas à l'air qui y eft contenu, de s'échapper, il refte enfermé dans la partie comprife entre le haut de la bouteille, le tuyau & l'eau, fur la furface de laquelle il appuie par fon reflort. Si, dans cet état, le vaifleau eft mis dans un four à poulets, la chaleur augmentant le reflort de l'air, il appuiera davantage fur la liqueur qu'il forcera de s'élever dans le tube, & de foulever avec elle un morceau de liège nageant fur fa furface, lequel, foit direétement, foit par des renvois, répond aux bouchons des regiftres, & fert à les foulever, dès que la chaleur devient plus forte que celle pour laquelle on a réglé Zinftrument, c'eft ainfr que par cet ingénieux moyen, la chaleur.elle-même prévient le danger auquel elle expoferoit les œufs. |

Le défaut de chaleur feroit auffi funefte aux poulets que fon excès, f1 quand on s'en aperçoit, on n’y remédioit promptement: nous avons dit qu'on réchaufloit les fours avec du nouveau fumier, mais fr ce moyen dans quelques cas, aagifloit pas afflez promptement, on aura recours à la chaleur du feu ordinaire; un peu.de cendres chaudes, mifes dans un vaifleau capable de les contenir, & prudemment introduites dans e four, fera monter très-promptement {a chaleur jufqu'aw point on la defire.

: Un autre danger auquel on doit encore fouftraire les poulets qu'on fait éclorre dans Les fours, eft celui auquel les expoferoit la vapeur des œufs qui s'y corrompent ; l'attention de M. de Reaumur à les faire enlever de fes fours, lui a valu une obfervation également curieufe & intéreflante: les uls œufs qui {e corrompent, font ceux qui ont été fécondés; le germe, ce principe de vie qui eft en eux, eft aufii leur principe de corruption. Il a gardé des œufs venus de poules privées de coq, pendant un temps & par une chaleur fufhfante pour gâter les meilleurs œufs fécondés, fans que jamais ces œufs aient pris d'autre goût que celui que doivent avoir de bons

Hif!. 1749 .F

42 HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

œufs qui ne font pas frais; on peut donc, en privant Îes poules de coq, avoir des œufs qui ne feront point fujets à fe gâter, ou qui le feront beaucoup moins que les autres, nouveau moyen à ajoûter à ceux que M. de Reaumur avoit déjà donnés de s'en procurer.

Lés poulets une fois éclos n'exigent plus aucun foin des Egyptiens, la fécherefle & la chaleur de leur climat ne laiffent aucun accident à craindre; mais il leur faut ici un fecours étranger pour les défendre pendant leur premier âge, du froid, de l'air & de la pluie : ce fecours leur eft ordinairement donné par la mère qui les a couvés, qui de temps en temps les raflemble fous fon ventre & fous fes aîles pour les ré- chauffer; nos poulets nés fans mères, en font abfolument privés: dans quelques cantons on donne les poulets à con- duire à des chapons ; quelques dindons même prennent goût à cette occupation qui femble leur être fr étrangère. La ma- nière d'enfeigner aux chapons à faire en cette occafion les fonctions de poules, eft une efpèce de myftère entre les mains des gens de campagne qui en ont le fecret, & fouvent ceux qui s'en croient pofleffeurs n'ont qu'un affemblage de pra- tiques inutiles, avec lefquelles ils tourmentent leurs malheureux élèves, plus qu'ils ne lesinftruifent: heureufement M. de Reaumur a eu de meilleurs mémoires, & il s’eft bien gardé de les tenir cachés. Pour inftruire un chapon à conduire & à couver des poulets, on l’enferme feul pendant un jour ou deux, dans un baquet couvert de planches, le retirant cepen- dant plufieurs fois par jour pour le mettre fous une cage il trouve à manger; vers le troifième jour, on lui donné quelques poulets pour compagnie, on les retixe enfemblé du baquet aux heures du repas, pour les mettre fous la cage: fr le chapon les reçoit mal, on les ôte & on le remet en folitude pour un jour deux; en répétant ces leçons quel- ques jours , on parvient à accoûtumer le chapon à fervir de mère aux poulets, dont on augmente peu à peu le nombre, & quand il a une fois reçû cette inftrution, elle dure toute fa vie, ou fi un long efpace de temps lui en faifoit perdre

+ D'E-S, S CIE N CES 43

Fhabitude, un petit nombre de jours feroit fufffant pour {a lui faire reprendre. .+ Les coqs eux-mêmes font auffi propres que les chapons Aucet exercice; un de ceux que M. de Reaumur faifoit inf trüire, n’avoit que l'apparence de chapon, & étoit un véritable coq; il-réuflit cependant également bien: on peut même aflurer que les coqs s’attachent aux poulets, & que fi leur état leur caufe dans une baffe-cour quelques diftraétions, elles ne-font que momentanées, & ne nuifent point au petit trou- peau qui leur eft confié.

Mais voici quelque chofe de plus facile; les poulets peuvent fe pañler d’être couvés par des animaux , au moyen d’une ma- chine très-fimple, inventée par M. de Reaumur, & qu’il nomme avec raifon mére artificielle, puifqu’elle leur procure les mêmes avantages qu'une mère naturelle, fur-tout quand on la joint à une efpèce de cage qu'il nomme pouffinière.

Les poulets ont befoin d'être conduits pour. qu'ils ne s'égarent point & qu'ils trouvent facilement leur nourriture, & d’être couvés pour les mettre à l'abri du froid & de la pluie, & leur ménager, fur-tout fur le dos, un degré de cha- leur que la pofition de leftomac des oifeaux leur rend né- ceffaire ou au moins très-utile après leur repas.

+ Le four qui a fait éclorre les poulets, peut leur fervir pendant les premières vingt-quatre heures, d'une retraite utile; on les y remet dans un panier différent de celui qui contient les œufs, & comme pendant ce temps ils n'ont befoin ni de promenade nf de nourriture, ils'achèvent de sy délivrer d'un refte de blanc d'œuf qui tient les barbes du duvet qui leur fert de plumes, collées les unes aux autres: celtemps paflé, ils ont befoin de prendre l'ait, de manger, de boire, & d'exercer leurs jambes. Voici comment M. de Reaumur leur procure tous ces avantages.

+ Le Jogement qu'il leur prépare eft une 1ongue boîte dont une desgfaces eft grillée, & dont le deflus eft attaché par des charnières, & fe 1ève comme un couvercle; cette caifle eft garnie de deux longs augets deftinés à donner à manger

Fi

44 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE & à boire aux poulets, & dont le deflus eft fermé par des barreaux affez ferrés pour que les poulets ne puiffent y pafler ue la tête, & qu'ils ne puiffent aller falir leur boiffon ni leurs alimens. Le fond de la boîte fera encore, fi on veut, garni d'une couche peu épaifle de fable, deftinée à tenir les poulets plus proprement , & à leur faciliter l'exercice de gratter, qu'on fait ètre fi familier à ces animaux.

Cette boîte, que M. de Reaumur nomme pouffinière, four- nit aux poulets une promenade fuffifante, & une nourriture commode; lorfqu’il fait beau & chaud, ïls y jouiffent de l'air & du foleil, & lorfqu'il fait mauvais temps, on les retire dans des lieux plus chauds, & ils foïent à l'abri des injures de la failon.

La pouffinière ainfi conftruite eft un logement fufhfant aux poulets, ils y trouvent de quoi fe nourrir, fe promener, &c. mais ils n’y trouveroient pas avantage d'être couvés, fi on n’y ajoûtoit une pièce effentielle à leur bien être, une de ces mères artificielles dont nous avons parlé.

Pour s’en former une jufte idée, qu'on s’imagine un de ces pupitres fur lefquels on écrit; les deux côtés rampans font compolés de planches taillées fuivant cette forme, & garnis de peaux d'agneaux la laine en dedans: le deffus n'eft autre chofe qu'un chafhis fous lequel eft tendue une pareille peau dont la laine eft auffr en dedans de la boîte, & les deux longs côtés, tant le plus haut que le plus bas, ne font fermés que par la prolongation de la même peau qui y forme deux elpèces de rideaux traînans jufqu’à terre; cette efpèce de boîte et placée au bout de la pouflinière, &, pour y entretenirume. chaleur convenable, on place au deflous de {a partie de la pouffinière qui lui fert de fond, une petite terrine dans la- quelle on met une pellerée de cendres chaudes, & qui y eft enfermée dans une boïte qui en retient la chaleur, ou dans un petit creux fait en terre au deflous de cet endroit dela pouffinière : ces cendres chaudes, renouvelées au plus trois fois par jour, fufhront pour donner à la mère artificielle le degré de chaleur néceflaire dans les temps les moins favorables,

, DES SCIENCES.

. * C'eft fous cette mère que les poulets ont bientôt appris d'eux-mêmes à aller chercher la chaleur dont ils ont befoin: ils s'y enfoncent jufqu'à ce qu'ils aient rencontré la hauteur à laquelle le deflus de la boîte touche leur dos; ils y reçoivent de cette peau lâchement tendue, la compreflion douce & molle qu'ils auroient reçûe de {a poule; en un mot, ils ÿ font couvés aufli-bien, aufli utilement, & auffi agréablement

| pour eux, que fous la meilleure couveufe.

* On juge bien que füuivant l’âge des poulets on doit avoir des mères & des pouffinières de capacités différentes; mais qu'on ne devineroit peut-être pas fi aifément, c’eft qu'on met la vie des poulets dans le plus grand danger, fi le fond de la mère eft fermé ou trop bas pour que les poulets puiflent pafler en fe baiffant. L’envie de profiter de 11 cha- leur & d'être mieux couvés , les engage à {e preffer au fond de la mère, & ceux qui y font arrivés les premiers courent un rifque évident d'être étouffés par ceux qui s'efforcent d'y parvenir; c'eft pour cela que le fond de 11 mère doit étre affez haut pour, leur livrer pañage, quoique difficilement, qu'il n'eft fermé que d'un rideau de peau, & que la mère doit être placée dans la pouffinière de façon qu'il y ait tout autour un efpace qui puiffe fervir de chemin aux poulets.

Quand nous avons dit qu'on devoit changer les poulets de pouffinières fuivant leur âge, c'eft principalement de leur groffeur que notis avons voulu parler; rien n'eft fi dangereux que, de laifler les petits mêlés avec les forts: l'équité & la modération ne font guère plus pratiquées chez eux que chez les hommes, & les plus forts ne font nulle difficulté d’aflarer leur bien être aux dépens des plus foibles, ils les piétinent & les écrafent fans pitié: on doit donc ne laiffer enfemble que ceux qu'une force à peu près égale met à abri des infultes réciproques , & c'eft encore pour cette raifon qu'il eft néceffaire de fe pourvoir de plufieurs pouffinières.

» Ceux qui fe feront fervis d'une étuve échauffée par un pole pour faire éclorre leurs poulets, pourront fe {ervir de la

- même pièce pour les élever; mais: il faudra que la mère foit

46 Histoire DE L'ACADÉMIE Royaze

d'une autre figure: on lui donnera celle d'un anneau circu- lire qui entourera le poële excentriquement, afin que les poulets y puiflent éprouver différens degrés de chaleur; plu- fieurs pouffinières aboutiront à cette mère commune, qu'on pourra partager en autant de parties qu'on le voudra par des cloïfons qu'il fera facile d'y mettre & d'en ôter; ils au: ront la liberté d'en fortir & de courir dans la chambre ils trouveront à manger & à boire; & la nuit on les reti- rera foigneufement dans les pouflinières, qu'on fera exact à fermer, pour les mettre à l'abri de l'invafion des rats & des fouris, qui les metroient certainement en danger.

La nourriture des oifeaux domeftiques eft certainement un objet dans l'économie d'une campagne : on pourroit peut- être fe perfuader que les volailles extrêmement muitipliées deviendroient auffi extrêmement difficiles à nourrir, & que je prix auquel {eur nombre porteroit leur nourriture, feroit évanouir {e profit qu'on tireroit de la multiplication de leur efpèce. M. de Reaumur a foigneufement prévenu cette ob- jeétion ; les poulets & les autres oïfeaux de bafle-cour s’ac- commodent d'un très-grand nombre d'alimens, la mie de pain & le millet fufhifent pour leur première nourriture ; devenus plus grands, ils mangent du blé, de f'avoine, de lorge, du farrafin ou blé noir, du mays ou blé de Tur- quie, de prefque toutes les herbes & graines potagères, de plufieurs herbes fauvages , des viandes cuites que nous mangeons, & même de celles que nous ne mangeons pas, comme du mou de bœuf, de la ratte, des infectes prefque de tout genre, &c. il feroit bien difficile qu'on ne püt raf fembler affez de quelques-uns de ces alimens pour fufhre à la plus nombreufe bafle-cour; mais les expériences de M. de Reaumur apprennent à économifer ceux de ces alimens qui peuvent coûter quelque chofe au maître, comme les difié- rentes efpèces de grains: les volailles les mangent également bien , foit qu'on les leur préfente cruds crevés dans l'eau bouillante, c'eft-à-dire, aflez gonflés pour avoir rompu leur enveloppe ; dans ce dernier état, il faut moins de la plufpart

jé, D'Efs" Sc LE Nice 's 47 &es grains que {ous la forme sèche pour les nourrir également bien. Ïl y a à gagner un cinquième fur le froment, deux cinquièmes fur l'orge, & environ la moitié fur le blé de Turquie: on ne gagneroit rien à faire crever le farrafn & Yavoine, & on perdroit un peu en faifant crever le feigle, Non feulement M. de Reaumur propofe des moyens de diminuer la confommation que font les volailles des alimens qu'on a coûtume de leur donner, mais il offre encore le moyen de leur faire partager l'immenfe quantité de nourri- ture que la main de l'Auteur de la Nature a préparée à ceux des oileaux fauvages qui ne vivent pas uniquement de grain, ceft-à-dire, les vers de terre. On a peine à fe figurer le nombre prodigieux de ces infeétes dont la terre eft peuplée, les grains des moiflons les plus abondantes le font peut-être . moins que les infeétes qui font cachés dans le champ même on moiflonne; il ne dépend que de nous de faire par- tager à nos oifeaux domeftiques cet aliment, qui eft plus de leur goût qu'aucun de ceux qu'on peut leur offrir : deux enfans fufhfent pour cette récolte. Les vers favent qu'ils ont un ennemi redoutable qui, comme eux, habite fous terre, & y creufe une infinité de galeries tortueufes pour les ren- contrer & les dévorer; cet ennemi eft Ia taupe, dont les moindres mouvemens dans la terre Îes déterminent à fuir. Un des enfans eft muni d'une fourche à trois dents, qu'il enfonce en terre dans un endroit frais & humide: alors en faïfant aller & venir le manche en avant & en arrière, il excite dans la terre une commotion qui a ref- femble à celle qu'y excite la taupe en fouillant : les vers effrayés fortent de leur trou, & en voulant éviter une taupe qui nexifle point, ils tombent entre les mains de d'autre chaffeur qui les attend : on excite la méme commotion dans la terre en piétinant fortement avec des fabots. : On peut encore faire une grande récolte de vers en fuivant un Jar- dinier qui retourne {on jardin, ou la charrue d'un Laboureur: on peut même aflurer qu'en faifant une chaffe conftante de vers dans fes prés & fes jardins, on gagnera de plus d'une

48 Histoire DE L'ÂACADÉMIE ROYALE

façon ; car en diminuant le nombre des vers, on en éloignera auffi les taupes, qui n'y trouveront plus une nourriture auffi abondante. |

Non feulement l'ouvrage de M. de Reaumur nous donne Je moyen de tranfporter chez nous l'art des Egyptiens, mais cet art, joint au moyen qu'il nous a donné de conferver les œufs fans altération, peut tranfporter les oifeaux d’un pays à un autre, même de l'extrémité de la terre, puifqu'on pourra toûjours faire venir en œufs propres à être couvés ceux que leur délicateffe ou la difficulté de les nourrir ne permet pas de faire venir vivans. Toutes les perfonnes qui feront cu- rieufes de voir leur terre peuplée de perdrix, de faifans & de toutes fortes d'oifeaux , pourront à loifir amafler des œufs & les faire éclorre dans fa faifon convenable, fans avoir rien à craindre des accidens qui font fi fouvent manquer les cou, vées : les environs des grandes villes pourront leur fournir la volaille nécefaire à leur confommation, fans qu'il faille la faire venir à grands frais des provinces éloignées ; enfin . on ne dépendra plus du caprice des couveufes, ni des temps la Nature leur donne l'envie de couver, & on pourra avoir en tout temps de la viande nouvelle avec une facilité prefque égale; tous avantages dont on avoit jufqu'ici été privé, & dont il ne tiendra qu'à nous de jouir.

Mais indépendamment de cette utilité morale, le nouvel art offre un beau champ aux obfervations phyfiques : une bafle-cour n'eft pas f1 effentiellement dévouée à la malpro- preté & à la rufticité qu’on fe limagine communément, elle eft fufceptible d'une forte d'élégance; on peut la décorer d'efpèces de berceaux qui feront de véritables cages, autour defquelles on ménagera un paflage commode & à l'abri de la boue & du fumier ; à l'aide de ces différens logemens, on pourra faire une infinité d'expériences curieufes fur les mélanges des différentes efpèces d’oifeaux, fur {eur nourriture & fur une infinité de points intéreffans, vérifier fr l'inftinét eft abfolument inné aux animaux, ou s’il ne dépend pas d’une forte d'éducation, fi on pourroit apprivoifer des oifeaux de

proie

DES SctrEnNceEs. 49 proie avec les animaux domeftiques, & guérir ceux-ci de {a frayeur qu'ils en-ont naturellement: fi on pourroit introduire dans les alimens qu'on offre aux volailles, des matières ou des plantes capables de donner différens goûts à leur chair: fur la manière de prévenir ou de retarder la mue, & par conféquent le temps les volailles ne pondent point, en les dépouillant, avant le temps, de leurs plumes; & fur le changement, foit naturel, foit artificiel, qui arrive à chaque mue dans eur couleur; enfin on peut dire que ce Mémoire de M. de Reaumur peut être regaidé comme l'efquifle d’un grand nombre d'Ouvrages intéreffans dont il ne fait qu'in- diquer le füjet.

Le livre de M. de Reaumur à eu le fort de t s bons Ouvrages ; il a été goûté du Public, & la première édition très-rapidement enlevée, une feconde à Paru avant que cette Hifloire ait être donnée au Public. On juge bien que cette feconde édition seft trouvée augmentée de plufieurs obfervations que nous n'avons fait aucune difficulté de Joindre. aux premières ; mais M. de Reaumur la encore enrichie de deux morceaux eflentiels : le premier eft un abrégé de tout lOuvrage, dans fequel il a foigneufement retranché tout ce qui »'étoit que curieux, pour fe borner abfolument à la pra- tique de cet art, & qui peut fervir de guide à tous ceux qui ne voudront que l'exercer ; le fecond eft un Mémoire entier fur la manière d'engraifler la volaille. -

On fe tromperoit fi on s'imaginoit que pour"engraiffer a volaille ‘au point atiquel notre délicatefle nous fait fouhaiter qu'elle le foit, il fuffife de lui procurer des alimens, même de œux qui lui font les meilleurs & les plus agréables, autant qu'elle en voudroit; on ne parviendroit qu'avec un temps très-long & de très-grands ffäis, à mettre celles qu'on traite- roit ainfi, dans l'état on les nomme grafles.

On.en engraiffe dans plufieurs endroits du royaume, mais ceft dans la province du Maine qu'on réuffit le mieux, & en particulier dans le bourg Qu'on nomme Mézeray : M. Baufflan Dubignon, Notaire royal, & Procureur fifcal de la

He 1749. . G

o Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE ville de la Suze, qui n’en eft qu'à une lieue, a envoyé à M. de Reaumur un Mémoire détaillé de. cette opération; c'eft ce Mémoire qui a fervi de bafe à l'addition dont nous parlons.

Toutes les volailles ne font pas propres à être engrailfées, on doit choifir par préférence celles qui ont les plumes rouffes ou noires, les blanches & les grifes ne paffent pas pour être auflrbonnes ; mais fur-tout on doit avoir une extrême atten- tion à ne prendre que celles qui ont les pattes noires, celles qui ont les pattes Jjaunesme peuvent jamais devenir ce. que Jon nomme de la viande blanche.

Les volailles qu'on veut engraifler doivent avoir cinq à fix ne ce font des poulettes, on les féqueftre de bonne heure du commerce des autres volailles, & fur-tout des coqs, dont le fouvenir pourroit interrompre la tranquillité dont elles ont beloin ; mais fi ce font des coqs qu'on veuille engraifier, il faut les prendre beaucoup plus tôt; car chez les oïfeaux, & fur-tout chez les poules, les mâles font plus précoces que les femelles. On parvient auffi à engraifler de vieilles volailles, mais elles font toûjours dures, & ne valent rien à manger.

Le choix des volailles qu'on doit engraiffer étant fait, on les met fous une de ces cages d’ofier connues dans toutes les campagnes, chaque cage en contient environ une douzaine.

La chambre dans laquelle on les place, ne peut être trop obfcure : on cherche à leur Ôter tout defir de fortir & de remuer, ceft pour cela que non feulement on obfcurcit Ja chambre & qu'on couvre même la cage d'un tapis épais, mais qu'on a encore un foin particulier d’éloigner affez ces endroits des autres poules, pour que celles qui y font enfermées ne les entendent point.

: Le lit fur lequel elles font couchées, eft compolé de feuilles de fougère, ou, à leur défaut, de paille; mais en ce dernier cas il faut bien prendre garde qu'il n'y ait des, épis, les volailles fortiroient, pour les becqueter, de Finaction qu'on en exige, & elles en pourroient avaler, ce qui les met- troit en danger de périr. On pourroit peut-être effayer de

DlEWs N S'c 1 Er Nécieis N: 4 communiquer du fumet aux volailles, en eur formant un lit de plantes aromatiques; mais l'expérience n'en a pas en- core été faite, & M. de Reaumur ne donne cette idée que comme une vüe qu'en peut fuivre. .

On empäte les volailles deux fois par vingt-quatre heures, à douze heures June de l'autre : leur repas eft compofé de boulettes oblongues de la grofleur d'une médiocre olive, faites d'une pâte de farine de blé noir ou d'orge, mélée avec celle d'avoine. La proportion dans laquelle ces farines font mélées, n’eft ni déterminée ni bien importante, il faut feulement éviter d'y faire entrer du feigle, du moins en quantité confidérable, & d'y employer du mays ou blé de Turquie; on affure que ce dernier rend jaunes fa graïfle &c la peau des volailles : on y peut introduire un peu d'ivroie, pour les déterminer au repos & au fommeil qu'il faut leur procurer. Ces farines font uniquement détrempées avec de Veau tiède, & réduites en une pâte dont on fait les boulettes oblongues dont nous avons parlé, & qu’on nomme les pétons,

Chaque poulette avalle communément à fon repas envi- ron trente ou quarante pätons, qu'on fait tremper un peu dans du lait mnt chauflé; ce lait doit auffi être leur boiffon , mais à fon défaut on peut y fubftituer du bouillon: il eff vrai qu'il n'y a pas d'épargne à leur en donner, parce que les poules privées de lait confomment plus de farine que celles à qui on ne l'épargne pas?

La plufpart des volailles fe prétent volontiers à ce repas, il y en a cependant qui s'y refufent : on ne doit, en ce cas, faire aucune difficulté de leur faire avaler les pâtons de force, & de les conduire, en preffant doucement le col, jufque dans leur jabot; mais on ne doit jamais leur faire commencer un repas qu'on ne fe foit afuré de la digeftion du précédent, en tâtant le jabot; car fi on n'y fent aucuns pâtons, on peut être für que la digeftion eft faite; fi au contraire on y en trouŸe, on rendra le repas plus léger, & on les fera boire davantage; on peut même , en ce cas, mêler dans la pâte un

peu de cendre bien faflée, Gi

52 Histoire DE L'ACADÉMIE RoraALE

Au bout d'environ trois femaines, la volaille à pris toute la graifle qu'elle peut prendre, & on doit l'employer promp- tement, car elle dépériroit en peu de temps; cette graifle

u’on leur a fait prendre n'eft rien moins qu'un état de fanté, elle eft le figne prochain d'une maladié très- dangereufe; ces beaux foies gras dont on ef fi friand, font, à parler phy- fiquement, des foies engorgés de la plus monftrueufe obftruc- tion qu'on puifle voir, & prêts à faire périr dans peu les animaux qui les portent. Ï1 ne faut donc pas donner à la maladie le temps de fe déclarer; dès que l'animal en eft venu A, non feulement il n’engraïfleroit plus, mais il dépériroit, & feroit très-long-temps à guérir & à fe remettre.

Ce que nous avons dit du lit qu'on donne aux volailles, peut, à plus jufte titre, s'appliquer à leur nourriture; on pourroit tenter d'y mêler des plantes aromatiques , des épi- ceries, des truffes, &c. pour en faire palier le goût jufqu'à leur chair. M. de Reaumur a fait entrer de l'ail dans la pâtée de plufieurs poulardes, dont la chair avoit eflectivement un goût d'ail bien marqué; &c S. A, S. Monleigneur le Prince de Conti lui a afluré, qu'une volaille nourrie d'une pâtée on avoit fait entrer des épluchures de truffes, en avoit auffi pris le goût: on pourroit donc faire fur ce fujet des effais & des tentatives, avec une efpérance afflez grande d'y réuflir.

Ces expériences ne font pas les feules qu'on puifle tenter fur cette matière, l'art*d'engraifler les volailles n'a été ju£ qu'ici conduit que par tâtonnement, & confervé que par une groffière tradition ; la Phyfique ne la point encore éclairé, & il n'y aura certainement qu'à gagner à la connoïfflanee qu'elle en prendra.

On n'a point aflez examiné tout ce qui concerne les dif- férens grains qu'on émploie, leur quantité, leur mélange, sil ne feroit pas plus avantageux de leur donner ces farines en bouillie cuite qu'en pâte; tous fujets d'autant d'expériences, que M. de Reaumur ne fait qu'indiquer : on peut fe repo- fer fur lui de toutes ces recherches, plus longues & plus délicates qu'on ne simagine communément. Nous avons

DES 'S c'r'E NCIS: s * rendu compte d'une partie de celles qui font contenues dans fon Ouvrage, mais il faut être accoûtumé aux expériences pour connoître tous les détails pénibles dans lefquels ila été obligé d'entrer, & tenir compte au Phyficien de ce que lui a coûté f'envie d'être utile à fe; concitoyens.

Mrs E. mème année M. de Mairan donna fa quatrième

y édition de fa Differtation fur la Glace, Exphcation plyfique de la formation de la Glace à de fes divers phéno- mênes.

IL n'eft probablement aucun phénomène dans la Nature afez ifolé pour que fon explication ne fuppofe pas celle de plufieurs autres, & fouvent l’établiflement d'un fyftème gé- néral du monde; telle eft en particulier l'explication des phé- nomènes de la glace : il feroit peut-être impofñfible d'en rendre raifon fans employer F'exiftence d’une matière fubtile dont la préfence, du moins en quantité fuffifante, püût donner la fluidité aux corps les plus durs, & dont {a privation totale, ou même la diminution exceflive, remit les plus ‘fluides dans l'état de folidité. A la vérité ’exiftence de cette ma- tière n’eft pas démontrée, mais elle femble fe déceler par tant d'eflets, qu'on ne peut en regarder la fuppoftion que comme le fyftème le mieux appuyé qu’on puifle faire. C’eft à juftifier ce mot de /yffême qu'eit employée la plus grande partie d’une préface que M. de Mairan a mife à la tête de cette édition de fon Ouvrage, qui eft la quatrième; car la Differtation fur Ja Glace a joui de l'honneur qu'un livre peut tirer de la multiplicité des éditions, & qui eft accordé f5 rarement aux ouvrages de Phyfique. d

On a certainement donné trop aux fyftèmes, lorfque la Philofophie de Defcartes fit changer abfolument de face à la

* Phyfique; on les profcrit peut-être aujourd’hui trop univer- fellement. L’efprit humain eft fujet à ces fortes d’ofcillations, dont, pour Fordinaire, les deux extrémités font également wicieufes, la raifon feule s'arrête au jufte milieu. En effet, qu'ont été autrefois les points les plus certains aujourd’hui dans Ja.

G ii

s4 HisToire DE L'ACADÉMIE Royare Phyfique?, de véritables fyflèmes, que a fagacité de quelques grands hommes avoit fondés fur un petit nombre de faits, &. qui les ont mis en état d'imaginer les expériences nécef- faires pour s’aflurer de la vérité. Auroit-on les profcrire dans le temps qu'ils n'étoient pas encore revêtus du degré de certitude fufhfant pour être regardés comme principes phyfiques? On y. auroit certainement perdu ; nous n'aurions ni la connoiflance de la pefanteur & du reflort de l'air, ni l'arrangement des corps célefles, ni une infinité d’autres con- noiflances aujourd’hui certaines, & qui ont commencé par être fyftèmes : d'ailleurs, 'efprit humain a befoin d'être excité, fouvent il ne produiroit pas tout ce dont il eft capable, s'il n'afpiroit à quelque chofe de plus. Les plus belles décou- vertes de Képler font dûes à l'attachement qu'il avoit pour une certaine proportion harmonique qu'il croyoit régner dans la Phyfique célefte. Combien l'envie de donner des preuves du principe que M. Newton emploie dans fa Phy- fique, n'a-t-elle pas occafionné de découvertes! Enfin un fyftème eft, felon M. de. Mairan, dans l'étude de la Phyfr- que, ce qu'eft la règle de faufle pofition dans l’Arithmétique; il n'y a pas plus de rifque à employer l'un que l'autre, & il n'y a d'inconvénient qu'à en mal ufer. On ne doit donc pas lui contefler le principe d’une matière fubtile qu'il em- ploie, principe reconnu, de prefque tous les Phyficiens, & que M. Newton lui-même, plus intéreffé que perfonne à ne le pas admettre, n'a s'empêcher d'adopter comme M. de Mairan l’adopie lui-même, c'eft-à-dire, comme un fuide actif infiniment fubtil, répandu dans les cieux à fur la terre par Jon élafficité, 7 traverfant librement les pores de tous les corps. C'eft en eflet de la fuppofition de cette matière que part M. de Mairan pour l'explication des phénomènes. de la Glace,

Il ny à peut-être aucun corps fur la terre qui ne foit fufceptible d'être mis en fufon, c'eft-à-dire, dans l'état de liquidité, du moins les expériences du miroir ardent fem- blent autorifer à le croire; comme il n’y en a aufi peut-être

k;

DES SCIENCES. s5 aucun qui ne puiflé pafler de l'état de liquidité à celui de corps folide, fi on le dépouille fuffifamment de la matière qui entretenoit fa fluidité; c'eft donc le plus ou le moins de cette matière qui fait prendre aux. corps ces deux formes fi diffé- rentes. Pour mieux fentir en quoi confifte cette différence, il faut tâcher de fe former une jufte idée de ce qu'on appellé dans les corpsg liquidité,

Un corps peut en général être ou folide ou fluide; s’il eft folide, toutes fes parties intégrantes font exaétement appli- quées les unes contre les autres, & non feulement n'ont aucun mouvement refpectif, mais méme n’en font pas fuf- ceptibles, à caufe de l’efpèce d'engrénage qui les unit. Qu'on fuppofe maintenant ces parties defunies, elles deviendront mobiles les unes à l'égard des autres, & le corps aura pañfé de l'état de folidité à celui de fluidité : veut-on s’en former yne image jufle, quoique groflière? qu'on fe repréfente un morceau de bois d’abord dans fon entier, & enfuite réduit en rapures, omaura dans le premier cas un corps folide, & dans le fecond un tas de pouffière qui fera un véritable fluide.

Les parties du corps fluide font fufceptibles de tout mou- vement étranger, mais elles n’en ont aucun par elles-mêmes, &elles ne fortiront jamais de leur état d’inaétion ; ft on veut rendre ce corps fluide un véritable liquide, if ne faut qu'y intro- duire un autre fluide plus fubtil qui foit en mouvement, & qui puifle, en fe gliflant dans les intervalles des parties du fluide, les foûlever, les empêcher de sunir, & leur com- muniquer fon mouvement. Dans la fuppofition que nous avons faite, il n'y. a qu’à introduire de l’eau en quantité fuff- fante dans le tas de rapures, pour en compofer un tout capable de fe répandre, de couler, de mettié fa furface de niveau s'il eft contenu dans un vaifleau, & dont les parties n'auront aueune adhérence les unes aux autres; en un mot, ce fera un véritable liquide.

* Si on imagine préfentement que l'eau foit retirée de ce compofé, il rentrera dans l’état de pouflière ou de fimple fluide; & fi on l'enveloppe d'une toile qui le ferre fortement,

6 HiSTOoIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE il reprendra la folidité, & ne différera de ce qu'il étoit avant d'être rapé, que parce que la preffion de la toile ne fera pas fuffifante, & que l'irrégularité des particules rapées ne leur permettra pas de fe joindre aufli exactement qu'elles l'étoient dans le morceau de bois; auffi le nouveau folide aura-t-il un volume plus confidérable : appliquons cette image groflière à la congélation de l'eau. o

Les particules intégrantes de l'eau font la rapure dont nous avons parlé, à cela près que leur figure eft probablement uniforme, plus propre à s'arranger, & qu’elles font d'une pes titeffe de laquelle l'imagination eft efrayée : M. Nieuwentyt, cité par M. de Mairan, démontre que la pointe de l'aiguille la plus fine pourroit porter treize mille de ces parties.

Malgré leur extrème petitefle , les parties élémentaires de Veau font peut-être encore plus groffières à l'égard la ma- tière-fubtile qui fe meut dans leurs interftices, que l'eau elle- même ne left à l'égard de notre rapure de bois; elles feront donc foùlevées, mües en tout fens, & maintenues dans une véritable liquidité par la matière fubtile, dont l'agitation & le reflort ne leur permettront de fe joindre que rarement, & pendant de courts intervalles.

Nous difons müûes en tout fens, car indépendamment du mouvement tranflatif de la mafle entière des-liquides, ils ont encore un mouvement inteftin & refpeGif de leurs parties les unes à l'égard des autres; ce mouvement, pour échapper à nos fens, n’en eft pas moins réel, le prompt effet de l'eau fur les fels & des acides fur les métaux, en eft une preuve bien certaine ; mais M. de Mairan y en ajoûte une d’un autre genre & bien ingénieufe. Les parties des liquides ne réfif- tent à l'évaporation que par leur mafle & leur adhéfion mu- tuelle ; fa maffe fe comnoït par le poids, & l’adhéfion des parties par d’autres expériences: cela pofé, s'il n’y avoit pas un principe inteflin d'évaporation , des liqueurs différentes expolées pendant le même temps à l'air dans des circonf tances & des vaifleaux abfolument femblables, devroient s’é-

vaporer en raïfon inverfe compolée de leur pefanteur & de L l'adhéfion

DES y $C 1E NCMES. s7 Yadhéfion de leurs parties ; cependant les expériences que M. de Mairan a faites fur l'eau & fefprit de vin, ont donné l'évaporation de ces liqueurs dans la raifon de 8 à r, quoique celle qui fe tire de leur pefanteur & de leur liqui- dité ne foit que de $ à 4: il y a donc dans l'intérieur de ces liqueurs un principe de mouvement qui eft beaucoup plus grand dans l'efprit de vin que dans l’eau commune, & qui influe beaucoup fur leur évaporation. C'eit par cette ingénieufe méthode que M. de Mairan parvient à faire con- noître combien de part ce principe y a.

li f préfente ici naturellement une objection tirée de fa quantité même de l'action du mouvement inteftin des fiqui- des : comment eft-il poflible que cette quantité de mouve- ment qui exifle fans celle dans l'intérieur d’un liquide, ne defunifie pas toutes fes parties, & ne les diffipe pas en très- peu de temps? Pour peu qu'on fafle attention à la force d'inertie des parties intégrantes, qui oppofe une réfi au mouvement , & que l'on confidère d'ailleurs que la matière fubtile n'eft ni en auffi grande quantité, ni dans un mouve- ment auffi libre au dedans de la liqueur qu'au dehors, & que par conféquent celle du dehors doit avoir plus de force pour retenir les molécules extérieures fur lefquelles elle agit, que celle du dedans n'en a pour les foulever, on verra que les liqueurs ne s'évaporeront que lentement, & d'autant plus lentement, que ceite diflérence ent e la liberté de mouve- ment de la matière fubtile du dehors & du dedans fera plus grande; fi au contraire elle eft très-petite, la liqueur fera fr facilement évaporable, qu'elle fe diffipera prefque fur le champ: on en peut voir un exemple dans la préparation chymique qu'on nomme her; elle eft d'une fi grande füubtilité, que le doigt qu'on en a mouillé eft {ec fur le champ, & que les gouttes qu'on laiffe tomber d'un peu haut {e diffipent avant que d'être arrivées à terre.

La nature des fluides une fois établie, il n'eft plus diff- cile d'imaginer comment fe fait la congélation, il ne faut en eflet pour cela que concevoir que par quelque moyen la

* if 1749. "1

? Voyez Hif. 1719: P:3:

58 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE quantité, le mouvement & l'élafticité de la matière qui coule entre les parties intégrantes d’une liqueur, foient détruits, ou beaucoup diminués ; bien -tôt ces parties s’appliqueront les unes fur les autres, y feront retenues par l'effort que la ma- tière fubtile du dehors fera contre celles qui feront à lexté- rieur, & le fluide deviendra folide, ou, comme on parle communément, fera glacé.

Il n'eft pas auffi facile d'affigner la caufe qui opère cette diminution de matière fubtile dans l'intérieur de la Jiqueur, que de juger que la congélation en eft la fuite ; celle qui fe préfente la première, eft la différente pofition du foleil en hiver & en été, & la différence de la longueur des jours, qui en eft une fuite, & il eft certain qu'elle y influe confi- dérablement ; mais fi on veut la rappeler au calcul, on verra bien-tôt qu'il s'en faut beaucoup qu'elle ne foit la feule.

Eu effet, labaiffement du foleil ne contribue au froïd autre manières; la première, en diminuant la durée du jour naturel; Ja feconde, parce que les rayons tombant plus obliquement fur le terrein, un même efpace en reçoit moins que quand ils y tombent perpendiculairement ; la troifième, parce que cette obliquité augmente les ombres, & fait qu’une plus grande partie du terrein n'eft ni éclairée ni échauffée; & enfin parce que Îles rayons du foleïl, plus obliques, ont une plus grande épaifleur de l'atmofphère à traverfer, & qu'il s’y en perd un plus grand nombre. Nous n’infiftons pas davantage fur ce détail, dont l'Académie a rendu compte au Public d'après M. de Mairan même, dans fon Hiftoire de 1719 *; ruais toutes ces caufes mifes en jeu fuivant lin- tenfité qu'on leur connoït, il en réfulte que la chaleur du foleil en été eft à celle qu'il donne en hiver, comme 66 eft à 1: or, par les expériences de M. Amontons, la chaleur obfervée en été eft à la chaleur obfervée en hiver, comme 6o eft à $1+, ou dans la raifon de 8 à 7. Il y a doncun fonds de chaleur inhérent à Ja terre, & indépendant de celle qui lui eft communiquée par le foleïil, & le calcul donne ce fonds de chaleur de 3 92 parties, auxquelles joignant 66,

DES SCIENCES. 9 on aura fa chaleur d'été exprimée par le nombre 45 8; & en ajoûtant 1 au même nombre, celle d'hiver exprimée par 393: nombres qui font dans la proportion de 8 à 7 que deman- dent les obfervations de M. Amontons: nous alfons examiner d'où peut venir cette chaleur étrangère à celle du foleil.

La première idée qui fe préfente, eft que la terre ne dif- fipe pas en hiver toute la chaleur qu'elle a reçüe du foleil pendant l'été, mais qu'elle en tient en réferve une portion qui forme ce fonds de chaleur dont nous avons parlé; cependant un grand nombre d'expériences font voir que cette caufe ne peut avoir lieu, du moins qu'elle n’eft pas la feule qui concoure à cet effet.

Si le fonds de chaleur que conferve Ia terre ne veneit que de l'aétion des rayons du foleil, il eft certain que cette chaleur fe feroit beaucoup plus fentir près de fa furface qu'à une plus grande profondeur; que les lieux les plus élevés & les plus expofés à l'action du foleil feroient auffi les plus échauffés, & qu'enfim les eaux de la mer ne recevant de chaleur que jufqu'à la profondeur à laquelle les rayons du foleil peuvent les pénétrer, le fond devroit être, à une grande profondeur, beaucoup plus froid que la furface: rien de tout cela n'arrive, & on obferve précifément tout le contraire, La chaleur qui , jufqu'à une certaine profondeur, fe foûtient à un même degré, ceft-à-dire, au 10+ au deflus de la congélation du thermomètre de M. de Reaumur, va enfüite en augmentant à melure qu'on defcend davantage: M. de Genfanne a obfervé dans la mine de Giromagny en Alface, que le même thermomètre qui jufqu'à cinquante-deux toifes sétoit foûtenu à ro degrés, étoit monté à mefure qu'on senfonçoit plus avant, & qu'au fond de la mine, à la pro- fondeur de deux cens vingt-deux toiles, il étoit monté juf- qu'à 18 degrés; on n'oblerve point froid rigoureux qui devroit régner au fond de la mer, fi elle n'étoit échauffe que par les rayons du foleil, puifqu'ils ne la pénètrent pas au delà de quarante-deux toifes * : bien loin delà les obfer-

vations de M. le Comie Marfigli femblent indiquer que fa H ji

* Effui d'Oy- tique fur la gra- dation de la lu- mére, par M.

Bouguer, p. 85.

6o Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE température eft prefque toûjours égale, & à peu près la même que celle de l'air que nous appelons tempéré. I y a donc fous Ja mer un principe de chaleur, indépendant des rayons du’ foleil, & qui‘lentretient dans cette température, fans quoi fon fond, à deux, trois mème quatre cens brafles, feroit d'une froideur infupportable, & peut-être toûjours glacé. Bien Join que les lieux les plus élevés foient auffi les plus échauffés du foleil, il eft au contraire connu de tout le monde que les montagnes qui s'élèvent à une certaine hauteur, que les obfervations de M. Bouguer ont fixée fous la Ligne, à 2400 toifes, ont leur fommet toujours couvert de glace & de neige que lardeur du foleil ne peut jamais fondre, & qu'en Sibérie qui, fi on s’en rapporte aux rivières qui y prennent leur fource, eft peut-être le plus haut pays du monde, on éprouve un froid exceflif & infiniment fupérieur à celui qu'on refent dans plufieurs endroits fitués fous le même parallèle. On peut donc raifonnablement conjecturer que la chaleur qui s'élève du fond de la terre, arrive plus difficilement à ces lieux plus élevés, & que plufieurs caufes locales telles que des bancs de rochers, des nappes d'eau foûterraines, ou même dans certains endroits des nappes de glace, interceptent fon action, & produifent par cette fuppreflion le froid énorme qu'on reffent dans des lieux qui femblent les plus expolés à l'action du foleil.

Quand on n'auroit pas d’autres preuves de l'exiflence d'un feu, finon central, du moins foûterrain & très-profond, ce que nous venons de rapporter fufhroit pour en établir la néceffité; mais combien de raifons ne trouve-t-on pas encore pour venir à l'appui de ce fentiment, les volcans, les trem- blemens de terre, les éruptions partant du fond de la mer;

° Vy. Hif. qui quelquefois produifent des ifles & des écueils?, quel- Fe ra P:23+ quefois la couvrent de pierres ponces b dans l'étendue de Je Eee plufieurs centaines de lieues, & plus fouvent encore de mor-

ceaux de bitume ! à quoi peut-on raifonnablement les attribuer fr on n'admet pas une immenfe quantité de feu profondémen enfeveli fous terre, & qui, fuivant différentes circonftances

M'OTE Sc T'E MEE;S 61

fe fait jour, tantôt par un endroit, & tantôt par l'autre? La propriété qu'ont les tiges des plantes de s'élever toû- jours perpendiculairement à horizon, quelque incliné que foit le fol fur lequel elles fe trouvent, paroît n'être qu'une fuite de ce feu foûterrain, dont les vapeurs s’élevant conti- nuellement, enfilent les canaux des jeunes tiges encore fou- ples, & les forcent à prendre leur direétion vers le zénith: les mêmes vapeurs entrent peut-être pour beaucoup dans les variations de hauteur du baromètre, & contribuent par des augmentations fubites de leur quantité, aux grands changemens qu'il éprouve dans les tempêtes, les tremblemens de terre & les éruptions des volcans ; ce qui paroït encore plus con- firmer cette idée, c'eft que fur les hautes montagnes les émanations du feu foûterrain fe font moins fentir que par- tout ailleurs, le baromètre a aufli moins de variation dans fa hauteur, & que d’ailleurs les tremblemens de terre, en quelque faïfon & fous quelque climat qu'ils arrivent, font toûjours fuivis d’une plus grande chaleur qui ne peut être attribuée qu'aux vapeurs du feu foûterrain qui fe font échap- pées en plus grande quantité pendant la durée du tremble. ment : ne pourroit-on pas même attribuer à des éruptions fubites, mais moindres, de ces mêmes vapeurs, les chaleurs qui furviennent quelquefois fans caufe apparente? on en tirera encore l'explication d'un phénomène qui, quoique très-com- mun, n'a peut-être été que peu oblervé par les Phyficiens. Après les grandes gelées, lorfque la terre commence à {ortir de fon inaétion, la furface devient fenfiblement chaude, quoi- que fouvent les nuages n'aient pas permis au foleil d'y con- tribuer; les gens de la campagne difent alors que la terre s'ouvre & travaille: à quéi peut-on attribuer plus raiformable. ment cette chaleur qu'aux vapeurs du feu foûterrain, qui “ayant été retenues long-temps par felpèce de croûte que for- moit la gelée, fe répandent alers avec plus de force & d’abon-

“dance dès qu'elles ont le pañfage libre? Il réfulte de ce que nous venons de dire, que l'exiftence d'un feu foûterrain & très-profond eft plus que probable, H ii

62 HisrTorre DE L'ACADÉMIE ROYALE

& que l'on doit lui attribuer ce fonds de chaleur indépendant du feleil, que les expériences & le calcul nous indiquent : or la fuppofition des vapeurs chaudes que ce feu exhale, étant admife, il eft évident qu'on ne peut les fupprimer en tout ou en partie, fans que la chaleur qui en réfultoit fur la terre & dans l'air, n’en foit diminuée, ou, ce qui revient au même, le froid augmenté; le froid furvenu par différentes caules à la furface, devient caufe à fon tour en reflerrant les pores & arrétant de plus en plus les vapeurs foûterraines , ceite retenue de vapeurs eft fuivie immanquablement de gelée, quand toutes les autres circonftances requiles de la faifon & du climat y concourent, & la gelée dure autant que ce con- cours de circonftances; bien entendu cependant que dans les climats extrêmes, foit pour le chaud, foit pour le froid, les caufes locales abforbent l'effet de celle-ci, à moins que des circonftances particulières ne la faffent reparoître ou n'en marquent la fupprefion, comme il arrive fur les hautes mon- tagnes fituées {ous la Ligne, on éprouve un degré de froid très-étranger au climat, & qui n'eft vrai-femblablement qu'à la fuppreffion des vapeurs centrales, caufce par la hau- teur & la texture intérieure de ces montagnes.

Non feulement la diminution de faction du foleil & Ia fuppreffion des vapeurs contribuent, comme caufes générales, à la gelée, mais il y a encore une infinité de caufes locales qui y concourent; les fels dont certains pays abondent, le nitre fubtil qui fe trouve dans Fair, les corpufcules vitrio- liques qu'exhalent les mines & les fonderies, deviennent des caufes particulières qui produifent un degré de froid très- confidérable dans des climats qui fembleroient en devoir être exempts par leur fituation. I y a des provinces dans la Chine, auffi proches de l'Equateur que le Portugal & {a Sicile, il ne faut que creufer la terre de trois quatre pieds pour en retirer des monteaux de glace, même pendant les mois de Juillet & d'Août; effet qu'on ne peut attribuer qu'au falpètre que ce terrein contient en très- grande abon- dance: enfin les vents chargés de ces mêmes corpufcules

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falins, deviennent encore une cul accidentelle de froid dans tous les pays ils les portent. Le froid agit différemment für les différentes liqueurs; celles dont les parties intégrantes font plus grofles, plus rameufes, moins polies ou plus denfes, fe gèlent plus facilement que celles qui ont des qualités contraires; les huiles grafles, par exemple, fur-tout fhuile d'olive, gèlent à un degré de froid très-médiocre, & M. de Mairan tire de-là un moyen de reconnoître fr on 'a fophiftiquée en y mélant de l'huile de pavot, dont le goût feul ne pourroit la faire reconnoître; Ü ny a qu'à expoler à un médiocre froid celle qu'on foup- çonne d'être altérée, l'huile d'olive gèlera la première, & celle de pavot demeurera affez fluide pour qu'on puiffe l'en féparer. Les recherches phyfiques offrent prefque toûjours, indépendamment de la curiofité, quelque utilité accefloire, qu'on ne cherchoït pas direétement.

Le mercure, les efprits acides & les liqueurs fpiritueufes font au contraire les fluides qui fe gèlent le plus diffcile- ment; lefprit de vin ne gèle jamais à Paris, mais il eft certain qu'un plus grand degré de froid eft fufffant pour le geler. Les Académiciens qui ont fait le voyage du Cercle Polaire, ont éprouvé que l’efprit de vin de leur thermomètre s'étoit gelé à un froid très-ordinaire en Lapponie, & peut- être n'y a-t-l aucune liqueur à laquelle un degré de froid fuffifant ne fit perdre fa liquidité; celle que les efprits acides confervent fi obftinément, eft peut-être dûe à {a forme de leurs parties, qu'on fuppole figurées comme des {ancettes liffes, dures & tranchantes, & qui, comme des coins, font €flort contre celles de leurs voifines qui feroient prêtes à fe joindre. Le mercure au contraire pourroit bien n'avoir la propriété de ne pas fe geler, du moins au degré de froid que nous connoiflons, que parce que fes parties font extré- mement petites, rondes, dures & polies ; ce qui ne peut leur permettre de fe joindre, & livre toûjours des patiages faciles à la matière fubtile que nous avons fuppolé fe mou- voir dans l'intérieur de tous les liquides.

64 HisTorRe DE L'ACADÉMIE ROYALE Il y a des fluides qui offrent un phénomène différent, & qui femble fe refufer à l'explication que nous venons de donner; ce font ceux qui font fujeissà la coagulation : ils font fufceptibles de deux fortes de congélation, {1 on peut fe fervir de ce terme; ils gèlent, comme les autres fluides, par un froid confidérable, mais les uns, comme le lang » per- dent une grande partie de leur liquidité, par un froid très- médiocre, & les autres, comme le blanc d'œuf, s’épaifliffent par l'action du feu ; cependant, fi on veut y faire une attention férieufe, on verra que ces fluides rentrent dans la règle gé- nérale, & font voir dans leur coagulation une image de ce qui fe pafle dans fa véritable congélation. Le blanc d'œuf & les corps qui lui reflemblent, ne font rien moins que des corps fimples, ils ne doivent leur liquidité qu'à une por- tion de matière aqueufe qui tient les autres parties féparées, & fait à leur égard, quoique très-groflièrement, le mème efet que fait la matière fubtile dans les véritables fluides ; cette eau eft enlevée par le feu, comme la matière fubtile eft chaffée des pores des liquides par le froid : il doit donc arriver aufli que les parties privées de ce qui failoit leur principale fluidité, s’uniffent les unes aux autres, & prennent une efpèce de folidité. A l'égard des fluides qui, comme le fang, fe coagulent à un très-petit degré de froid, ou pluftôt qui ont befoin d’un aflez grand degré de chaleur pour fe conferver liquides, ïls font compolés de parties pefantes, nageant dans une liqueur mucilagineufe dans laquelle le feul mouvement les foûtient : aufli dès que la liqueur cefle d’être animée par une fufhfante quantité de chaleur, ou, ce qui eft peut-être la même chofe, de matière fubtile, la liqueur fe fépare, & les parties les plus pefantes, tombant au fond, y forment par leur union, un véritable coggulum. Ces liquides en apparence fi contraires à l’hypothèfe de M. de Mairan, & dont cependant la congélation s'explique fi naturellement par fon moyen , doivent fervir d'exemples pour y rame- ner les autres fluides qu'on ne peut examiner tous en détail; pañons préfeniement à la congélation de l'eau que M. de Mairan

DES SCiENCESs. 65 Mairan a eue principalement en vüûe dans cet ouvrage.

Les fluides ne font pas compofés plus que les folides, de parties qui foient abfolument égales en groffeur, en figure & en mobilité; dès que la matière fubtile eft diminuée juf- qu'à un certain point dans l'intérieur de l'eau, celles de fes parties qui font les plus groffes, les plus raboteufes & les moins mobiles, s’accrochent les unes aux autres, & forment, en s’uniffant, les premières molécules de glace. Les intervalles qui {e trouvent entre ces premières parties jointes, deviennent des canaux conftans dans lefquels la matière fubtile doit avoir un mouvement plus libre que dans les interftices des parti- cules voifines & prêtes à s'unir; elle doit donc enfiler ces canaux, d’où il réfultera qu'en abandonnant ces particules d'eau déjà très-prêtes à fe geler, elles fe convertiront en glace, qu'elle les forcera à s'arranger dans Ja direétion des premiers canaux , fuivant laquelle elle fe meut, & par con- féquent à former des filets en ligne droite; ceft effective- ment ce qu'on voit arriver dans la congélation de l'eau, qui commence toûjours par de pareils filets.

Nous difons dans a congélation de l'eau, car dans les fluides dont les parties ne font pas longues & droites comme celles de l'eau, mais rondes ou rameules, la congélation doit fe faire différemment, & les premiers glaçons feront des pelotons pluftôt que des filets; c'eft auffr ce qui arrive aux liquides dont on peut foupçonner que les parties intégrantes font ainfi figurées. *

Les premiers filets de glace font couchés à la furface de Yeau, tant parce qu'il eft naturel que la congélation com- mence à la furface qui eft toûjours plus froïde, que parce qu'en quelqu'endroit que fe forment les filets, leur lévèreté refpective à l'égard de l'eau les y feroit toüjours monter ; on les trouve prefque toûjours adhérens par un de leurs bouts aux parois du vafe qui les contient, & cela pour deux rai- fons; la première eft que l'eau doit y étre plus froide & fes parties y avoir moins de mouvement à caufe de leur adhé- fon à ces parois; la feconde, parce que tout corps flottant fur

Hifl. 1749" 3 . I

66 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE

eau dans un vafe qui n'eft pas plein, fe porte de lui-même vers les parois du vaifleau , fi elles font de nature à étre mouillées par l'eau, & cette dernière raifon paroît avoir fr grande part dans l'explication de ladhéfion des filets de glace aux parois du vafe, que fi on Ja fait cefler en frottant, par exemple, le dedans du vaifieau, de graifle ou de fuif, l'effet difparoït abfolument.

A ces premiers filets de glace déjà formés, il s'en joint bien-tôt de nouveaux; à ces feconds il s’en ajoûte d’autres, jufqu'à ce que l’eau fe trouve couverte d'une pellicule de glace.

Avant que l'eau commence à fe geler, & lorfqu'elle en eft fort près, on remarque qu'il s'en fépare beaucoup d'air qui fort en bulles plus ou moins groffes, qui viennent crever à fa furface.

La fortie de ces bulles d'air, la contiguité des parties de l'eau qui font prêtes à fe joindre, & la diminution de la matière fubtile dans fon intérieur, tout cela fembleroit exiger que le volume de l'eau diminuât à mefure qu’elle approche de la congélation; il arrive cependant le contraire: fi on met de l'eau dans un long tuyau, & qu'on marque l'endroit fe trouve fa furface lorfqu'elle eft dans un lieu tempéré, on verra, en lexpofant au froid, que cette furface defcendra fenfiblement; mais dès que l’eau approchera de la congélation, elle remontera affez promptement & s’élevera au deflus de l'endroit elle étoit d’abord; preuve évidente que fon vo- lume eft confidérablement augmenté.

Cette augmentation de volume, fi contraire à ce qui fembleroit devoir arriver, a trois caufes; la première eft le développement de l'air contenu dans l'eau: pour concevoir comment ce développement de l'air peut augmenter le vo- lume de l'eau, quoiqu'il en forte une quantité confidérable, il faut faire attention que l'air qui exifte dans l'eau, y eft dans un état bien différent de celui de latmofphère; il y a grande apparence qu'il y eft fans reflort, & que fes parties rempliflent une portion des plus grands intervalles de celles de l'eau, du moins eft-il bien für que quand on l'en tire

D'ES%6 cr EN GES. 67 -par le moyen de la machine pneumatique, Feau ne change -pas fenfiblement de pefanteur fpécifique, ni par conféquent -de volume, le pèfe-iqueur s’ysfoutenant précifément au même degré; ce qui n'arriveroit pas fi l'air qu'on en a tiré y avoit occupé d’autres efpaces que ceux qui reftent feulement remplis de matière fubtile après fa fortie. Cet air ainfr caché .dans l'eau, eft nommé par quelques Phyficiens air diffous ou abforbé, pour le diftinguer de celui que nous refpirons, qu'ils nomment de l'air en maffe. Si on imagine un faifceau de baguettes entourées chacune d’une légère couche de brins de laine, on aura par cette comparaifon une idée affez nette de l'état l’on fuppofe Fair dans l'eau , fans reflort, & n'aug- mentant pas fenfiblement fon volume, comme Ja laine, dans l'état nous venons de la dépeindre, eft fans reflort, & naugmente prefque pas celui du faifceau de baguettes ; mais qu'on retire cette laine, & qu’à l'aide des cardes on a réduife en gros flocons, alors elle occupera un volume confidérable, reprendra fon reflort, & deviendra une image naïve de l'air en mafle.

Il n'eft donc pas étonnant que quoiqu'il foit forti beau- coup d'air de l’eau qui eft prête à fe geler, le peu qu'il y en refte dégagé & en mafle y occupe plus de place que le tout n'en occupoit quand il y étoit diflous, & que par confé- quent le volume de l'eau en foit augmenté ; explication d'au- tant moins forcée, qu'on a en Phyfique plufieurs exemples de fluides compofés de deux ou plufieurs liqueurs dont la mafle fe trouve moindre que la fomme de celles qui entrent dans leur compofition. Non feulement ce volume fera aug- menté par la place qu'y occupera l'air dégagé de l'eau, mais encore par l'efpèce de dérangement qu’il aura caufé aux par- ties de l'eau en fe dégageant; ces parties, qu'on fuppofe ordi- nairement longues & roides, auront été jetées de côté & d'autre, & par conféquent occuperont plus de place qu'elles n'en tenoient quand elles étoient dans leur arrangement natu: rel: c’eft la feconde caufe de l'augmentation du volume de

l'eau. : li

68 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

La troifième caufe de cette augmentation dépend d'un principe tout différent, & que les obfervations de M. de Mairan lui ont fait découvrifs Lorfqu'on examine la pelli- cule de glace qui commence à couvrir l'eau d'un vaifleau qui fe glace, on aperçoit que les filets donttelle eft con:- pofée repréfentent une campagne diverfement fillonnée, & fouvent quelque chofe d'aflez reflemblant aux barbes d'une plume à écrire : tout le monde a remarqué ces apparences, & n’y a qu'une bizarrerie fans aucunes règles; M. de Mai- ran a cté plus loin, & a trouvé que tous ces arrangemens fi bizarres en apparence fuivoient cependant une loi conf tante, & que tous les filets de glace fe joignoïient les urs aux autres, en faifant toüjours entre‘eux un angle de 60 degrés. La même cho!e s'obferve dans les petits Hocons de neige, qui, vüs à la loupe, repréfentent toüjours des efpèces de fleurons à fix feuilles, dont chacune a des barbes qui font avec la côte principale le même angle que les côtes mêmes font entre elles.

Cette uniformité d’angles n’eft pas de ces chofes qu'on peut attribuer à l'imagination, il eft extrèmement aifé de s’en convaincre : un triangle équilatéral coupé dans une carte, fera un calibre propre à melurer ces angles, & on verra avec étonnement qu'ils feront tous égaux à ceux du triangle ; bien plus, M. de Mairan a remarqué que lorfqu’on fait geler de l'eau dans un vaiffeau rond, ceux des filets de glace qui tien- nent par les deux bouts aux parois du vaïfleau, y font toûjours la corde d'un arc de 120 degrés, ou, ce qui revient au mème, du tiers de la circonférence, d'où il fuit qu'ils ren- contrent cette circonférence, ou du moins la tangente, au point ils la coupent, fous un angle de 60 degrés.

Les congélations des liqueurs lixivielles ou urineufes don- nent encore cet angle d'une manière plus conftante, non que ces fels y contribuent direétement, car fi cela étoit, différens fels donneroient différens angles, mais probablement parce qu'en embarraffant davantage le paffage direct de la matière fub- tile, elles laiflent une plus grande liberté aux parties intégrantes

DES S c r'E Nicieiis. 6 de l'eau de s'arranger conformément à la tendance qui leur eft propre. Ù

Quelque fingulière que foit cette tendance des parties de l'eau à s'unir fuivant le même angle, il feroit encore bien plus fingulier que cette propriété füt tellement particulière à Teau, qu'on n'en trouvât point d'exemple dans la Nature, auffi ne l'eft-elle pas : on fait que les fels affeétent certaines figures dans leurs criftallifations, que Jes globules du fang font compolés de parties qui $arrangent toûjours de la même manière. M. de Mairan a encore obfervé une femblable uniformité d’arrangement dans les fibres métalliques de cer- taines pyrites, on l'obferve dans le criftal de roche & dans celui d’Iflande; en un mot, il paroît par un grand nombre d'exemples, que ces arrangemens de parties, uniformes & conftans, ont lieu en bien des cas, & entrent dans le plan général de la Nature.

L'explication de cette tendance n’eft pas aifée à trouver, en vain voudrok-on, dans le cas préfent, employer celle que Defçartes avoit donnée de la figure d'étoile à fix pointes qu'affeéte la neige; ce grand Philofophe fuppofe que cette

figure n'eft dûe qu'à ce que fix fphères en entourent exac- _ téMent une, & que par conféquent le premier globule glacé étant touché immédiatement par fix autres, donne néceffai- rement naiflance-à fix rayons; mais il n’a pas pris garde que par ce méchanifme il devroit fe former non des étoiles planes, mais des boulettes hériffées qui. dégénéreroient bien-tôt en pelotons : d’ailleurs , dans cette idée, pourquoi les barkes qu'on voit à ces rayons aflecteroient - elles de faire toûjours avec eux le même angle de 6o degrés! Enfin cette expli- cation ne pourioit au plus fervir que pour l'eau, dont les parties s’arrangent de cette manière; mais elle deviendroit inutile pour expliquer la formation d'une infinité de corps qui font voir un arrangement conftant de parties, quoique fous un angle différent de celui des parties de l'eau.

Cette tendance des parties de l’eau à s'affembler füuivant des angles de 60 degrés, eft regardée par M. de Mairan

[ii

70 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE comme une des principales caufes de l'augmentation de volume qu'elle prend en fe gelant; un mème nombre de cylindres ou de parallélépipèdes occuperont certainement un bien plus grand efpace fi on les affemble fuivant un angle quelconque, que fi on les tient parallèles Îles uns aux autres : on peut même s'aflurer, par une expérience facile, que cette caufe contribue plus que le dégagement de l'air, à l'augmentation de volume de l'eau qui fe glace: il n'y a qu'à faire geler de l'eau purgée d'air, foit par l'ébullition, foit par le moyen de la machine pneu- matique, & on verra que la glace aura acquis, à peu de chofe près, le même volume que celle qu'on auroit faite avec de l'eau ordinaire; elle nagera toûjours fur l'eau, preuve évidente & la moins équivoque de fon augmentation de volume. La force d'expanfion qui rélulte de cet arrangement des parties de l'eau, eft immenfe; tout le monde a entendu parler de la fameufe expérience de M. Hughens, répétée depuis par M. Buot, dans laquelle un canon de moufquet épais, qui étoit rempli d'eau & bien fermé, creva par le feul effort que l'eau fit en fe gelant. M's de Académie de Flo- rence ont faitacrever plufieurs vaifleaux par ce même moyen, la plufpart de ces vaifleaux étoient fphériques, & M. Muf fchenbroek ayant calculé l'effort néceflaire pour faire crever lun de ces vaifleaux, il a trouvé qu'il avoit fallu une force capable de foülever un poids de 27720 livres: on n'a que trop de preuves que les petites particules d’eau qui fe trou- vent dans les fibres des arbres, fufhfent pour détruire tout leur tiflu, lorfque la gelée peut y pénétrer; ce fut de cette manière que la plus grande partie des oliviers de Languedoc & de Provence périrent en 1709, parce que la gelée avoit été précédée d'une fonte de neige qui les avoit imbibés, les plus vieux & les plus forts furent les plus maltraités, parce que : leurs fibres dures & roides fe prêtèrent moins à l'extenfion qu'en exigeoit l'eau qui fe glaçoit dans l'intérieur de ces arbres ; c'eft encore par la même raifon que les pierres trop récentes & qui n'ont pas eu le temps, avant l'hiver, d'évaporer l'eau qu'elles contiennent, périffent par la gelée: les marbres même

DMEMSIN'S\C LE NCIS: 71 n'en font pas exempts, lorfque le petard avec lequel on les a rompus dans la carrière, y a produit de petites fentes par lefquelles l'eau peut s'y infinuer.

Non feulement l'eau reçoit cette augmentation de volume par la gelée, mais par tout autre moyen qui divife fes par- ties : on fait aflez, & plufieurs de ceux qui ont fait conf truire des terrafles ne le favent que trop, quel eft l'effort énorme que la terre fait contre les revêtemens qui la foû- tiennent; cet effort n'eft qu'à la facilité qu'a l'eau de s'infinuer dans la terre, & de fe trouver par ce moyen divife en très- petites parties ; la même chofe n'arriveroit pas fi {a terraffe n'étoit que de fable, parce que l’eau ne pénétrant pas . les molécules du fable, elle ne s'y trouve pas divifée en affez petites parties pour que leur force expanfive puiffe s'exercer. C'eft cette même force qui parvient, à la longue, à déplacer des marches de jardin & d’autres pierres très-pefantes ; un peu de pouflière terreufe s’infinue dans les joints, & donne lieu à l'eau qui y pénètre de fe fubdivifer aflez pour fe dilater; fon effort écarte un peu les pierres, la fécherefle fait diffiper l'eau , de nouvelles parties de terre qui s’y introduifent, occa- fionnent un effet femblable au premier, & ces efforts réitérés parviennent à déplacer très-fenfiblement des mafles énormes.

Cette force expanfive de l'eau paroït encore bien évidem- ment dans la manière dont on fépare du rocher les meules de moulin : on taille ce rocher en forme d’un cylindre qui contient plufieurs meules dans fa hauteur; pour les féparer, on perce tout autour des trous, dans lefquels on chafle à coups de marteau des coins de bois blanc féché au four; on imbibe enfuite ces coins avec de l'eau, & peu de temps après le rocher fe fépare de lui-même, uniquement par la force expanfive de l'eau, à laquelle le bois ne contribue qu'en divifant extrêmement fes parties.

Ce que nous venons de voir que la terre & le bois pou- voient opérer, le feu lopère auffi à l'égard de l'eau, il en fépare les parties; aufli, dans cet état, acquièrent -elles un. volume 14000 fois plus grand, & une force inconcevable-:

72 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE | tout le monde connoît celle de l'eau réduite en vapeur, & fait que c'eft de cette force expanfive qu’on a tiré le principæ de mouvement de l'ingénieufe pompe à feu. Enfin il fuit de tout ce que nous venons de dire, qu'au lieu que Fair mélé avec un grand nombre de matières y perd le reflort qu'il avoit, l'eau au contraire, dès que fon mélange avèc d'autres corps divife fuffifamment fes parties, en acquiert un qu'elle avoit pas: peut-être ces deux eflets oppofés dépendent-ils d'une même caufe qui agit différemment fur des parties de. figures différentes, au moins remarque-t-on qu'il faut que Vair & l’eau foient dans l'état de fluidité, & non de liqui- dité, pour pouvoir exercer leur reflort; & quelle que puifle être la caufe de ce phénomène, il eft au moins très-pro- bable que la force expanfive que l'eau acquiert dans tous les cas dont nous avons parlé, eft düûe à a tendance qu'ont {es parties à s'unir fous un angle de 60 degrés.

I eft hors de doute que la congélation de l'eau doit rece- voir différentes modifications, fuivant l'état de celle qu'on expofe à la gelée. Plufieurs Phyficiens, par exemple, ont afluré que l’eau qui avoit bouilli fe geloit plus promptement, & fe refroidiffoit davantage que d’autre eau à un même degré de froid; on avoit même pouflé cette merveille jufqu'à foù- tenir que de l’eau qui vient de bouillir & qui n’eft pas encore refroidie, fe geloit plus promptement & plus facilement que de l'eau froide qui n’avoit pas bouilli. Il eft aifé de juger que cette dernière propofition n'eft pas vraie, la raifon feule dite le contraire; aufir l'expérience qu’en a faite M. de Mairan l'a-t-elle pleinement démentie : l'eau qui avoit bouilli n'étoit pas encore refroidie, que d'autre eau, expofée au même froid & dans les mêmes circonftances, étoit abfolument glacée. La raifon ne paroît pas profcrire la première propofition avec la même févérité, il femble même qu'il foit affez naturel que l'eau que l'ébullition a privée de la plus grande partie de fon air, ait plus de facilité à rapprocher fes parties, & par con- féquent à fe geler; mais cependant ce qui paroît au premier coup d'œil fi naturel, n'entre point dans le plan de la Nature,

&

PORN

* ; BIENS SC 1 E NICE À 7Y & M. de Mairan,s'eft afluré par l'expérience, què.de l'eau qui a bouilli, & qu'on a laiffé refroidir au même degré que de l'eau ordinaire qui n'a pas bouilli , ne fe gèle ni plus ni moins promptement qu'elle; phénomène qui a d'autant plus de quoi furprendre ,«qu'il femble queW'action du feu l faire évaporer les premières les parties de l'eau qui étoient les plus fubtiles & les plus mobiles : il fat donc que l'eaugne,contienne pas de ces parties plus fubtiles que les autres, Ou que, ces parties foient unies avec les plus grof- fières de manigre à n'en être pas dfément féparées ; on pour- roit peut-être tenter quelques éxpériences fur cette immuta- bilité del'eau , au moyen du digefteur de Papin, mais M. de

Mairan ne fait qu'indiquer ces expérienees, qu'il n'a pas eu

occafion de faire. | Fe Le mouvement tranflatif de l’eau doit encore apporter changement à la congélation ; l'eau des rivières ne gèle fü-

_rement pas de même manière que celle des étangs: il ne

faut que regarder les glaçons qui couvrent les uns &e les autres, pour s'en aperçevoir. On a été long#temps en doute fi les rivières commençoient à fe geler par la durface eu par le fond, mais cette queftion n'en eft plus une; il eft pré- fentemeñt bien für qu'elles commencent, comme les autres eaux à fe geler par la furface, 8 nous renvoyons le leteur* à ce quisen a été dit par M. de Mairan mème en parlant des expériences de M. l'Abbé Nollet fur ce fujet. * | LS le-mouvement tranflatif de l'eau change quelqué chofe à la manière dont elle fe gèle, le repos*abfolu de fa mafle produit encore un effet bien plus fingulier; il empêche qu'elle ne fe gèle, quoiqu'expofée à un froid beaucoup plus

grand qu'il ne faudroit naturellement pour produire cet effet:

on doit ce phénomène à M. Fahrenheit ;. il avoit rempli

d'eau la boule dur thermomètre, *& après en avoir chaflé

Yair, il l'avoit fcellée hermétiquement: if expofa ce vaiffeau

au froid, & fut extrémementurpris de voir que, qüoique

TeéMthermomètre fût defcendu au degré de fon thefmomètre

quirépond au 11° depré au deflous de Ix congélation de Hifl 1749. .K

* Vo. Hifi 17433 P: 8e

A

74 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE M. de Reaumur, l'eau de ce vaifleau étoit cependant parfai- tement liquide; il attribua aufli-tôt ce phénomène à labfence de l'air, & en eflet ayant café avec une pince le bout du tuyau, l'eau fe gela dans l'inflant; mais ayant répété plufieurs fois cette expéience, il fe convainquit qu'il s'étoit trompé, & qu'il avoit attribué à la préfence de l'air ce qui n'étoit & u'au mouvement qu'il avoit imprimé à Ja liqueur. Plufeurs célèbres Phyficiens ont depuis fait cette expérience , & toù- jours avec le même fuccès; l’eau qui, lorfqu'elle étoit parfai- tement tranquille, avoit réfifté à un froid beaugçoup plus grand qu'il ne falloit naturellement pour la geler, s’eft remplie de lames de glace au moment même qu'elle æ été remuée oustouchée avec quelque corps qui eût pris la température de l'air. M. de Mairan lui-même les a tentées plufieurs fois, & toüjours Ja même chofe eff arrivée : une circonftance bien fingulière accompagne ce phénomène, s'il y a un thermomètre placé dans cettelau non gelée, on le. verra defcendre peu, à peu au même degré que ceux qui font expolés à l'air libre; mais dans Finftant même que l’eau fe gèle, il commence à re- monter, & revient jufqu'au terme de la congélation; ce qui prouve que cette eau diminue de froideur en fe plaçant, propofition fi paradoxe, qu'elle a beloin de toute d'autorité de l'expérience, pour être crue. « "

Ce fait fi fmgulier rentre pourtant comme de lui-même, dans l'hypothèfe de M. de Mairan; Ja matière fubtile fe meut, felon lui, plus aifément dans a glace que dans l'eau, parce que les routes qu'elle s'y eft faites, ne Pont plus dérangées par le mouvement des parties: un grand repos de mafle peut produire à la longue, à peu près le même effet, & tant que cette difpofition fe foûtiendra, on ne doit pas craindre que la matière fubtile diminue de quantité dans, l'intérieur de Véaü, ni par conféquent qu'elle fe glace. Mais fi, par une légère commotion, l'on détruit cet arrangement, alors la ma- tière fubtile abandonne l’eau dans laquelle elle étoit contenue, & cette eau fe glace dans l'inftant. F4 même chole doit #en- core arriver, fi au lieu d’ébranler l'eau on la touche, quelque

DES SCIENCES. 75 légèrement que ce foit, avec un morceau de glacé, of offre à la matière fubtile qui étoit dans l'eau, un pañfage libre par lequel elle fe diffipe dans l'inftant. 2 + = Aucune expérience ‘bien conftatée ne prouve que l'eau gèle à un moindre froid que celui qu'elle éprouve ici pour {e geler; ceux qui ont prétendu le contraire ont certainement été trompés par quelque circonftance qui leur 2 échappé: mais la glace ne fond pas toûjours lorfque la température de V'air fait monter le thermomètre.de quelques degrés au deflus de ce terme.

Puifque le repos, de la maffe de feau contribue à l'em- pècher de fe geler, il femble qu'une violente agitation de cette mafle devroit la refroidir; cette violente agitation feroit cependant très-difficile à lui donner, fans .occafionner dans fon intérieur des mouvemens inteftins peu favorables au refroidiflement: mais neñpourroit-on pas, en laïffant l'eau, tranquille , da faire choquer par un air agité? & cet air ne devtoit-il pas produire l'effet de déranger des canaux par lefquels la matière fubtile paffe dans Fintérieur de l'eau, & par conféquent de faire diminuer fa chaleur? ,

* Pour gen aflurer, M. deMäiran ayant laiflé quelque temps un thermomètre tremper dans de l'eau, pour qu'il en prit la température, l'en agetiré, & pendant qu'il étoit encore mouillé, il a foufflé RSR boule avec uit foufflet, Ia liqueur, du thermomètre à baïffé fenfiblement : voyant"que cette eau inhérente au thermomètre: fe diflipoit trop promptement pér le vent du foufflet, il a.enveloppé cette boule d'un linge trempé dans la même eau, & en continuant de fouffler, la liqueur du thermomètre a baiffé davantage. Cette expérience a fait naître à M. de Mairaït l'idée de rafraichir de l'eau dans un vaifleau enveloppé d'un dinge mouillé & fufpendu.dans un endroit äl fût expofé à un courant d'air ; il l'a fait, & l'expérience a réuffi, l'eau s'eft refroidie de 2 deprés : ce qu'il y a de finguliér, c'eft que les réflexions de Ms de Mairan l'aient précifément conduit à la pratique que la néceflité a fait intro- duire en ufage à la Chine & au Mogol. Celle du Mogol Ki

F ' L La

76 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE

eft abfolument la même, & celle de la Chiné n’en difiere qu'en ce qu'au lieu d'envelopper. d'un linge mouillé le vaif- feau qui contient l'eatfflqu'on veut rafraichir, on de conftruit d'une terre poreufe, à travers laquelle il en pafñfe aflez pour entretenir fa furface toûjours mouillée: peut-être en fe fer- vant de ce moyen dans des temps la température de Fair eft peu éloignée de la congélation, Ton pourroit faire refroïdir afez l'eau pour la faire prendre, & c'eft, felon M. de Mairan, la raifon pour laquelle il neige fouvent à un degré de froid un peu moindre que celui qui eft néceflaire pour faire geler d’eau, Les particules de vapeur qui ne font que de l'eau extrème- ment divifée, chaflées & agitées dans un air dont'la tem- pérature eft peu différente de la congélation, s'y refroidiffent aflez pour prendre & paroître fous la forme de cette glace extrémement raréfiée que nous nommons neige. :

* Le volume de la glace eft, comme nous avons dit, plus grand que celui de l'eau qui la produit: les expériences de M. Boyle lui ont donné cette différence dans le rappoñt de 1 à 9; celles que M. de Mairan a faites, en faifant enfoncer un glaçon dans l'eau, & voyant de combien de poids ile - falloit charger pour cela, hf ont donné cette diflérence moindre \ mais variable ; il l'a trouvée tantôt dans le rapport - de 19 à 18, ou der à 19, tantôtdans celui de 1 à 14;

+ mais il réfulte toujours delà que le volume de la glace ordi- naire eft plus grand que celui de l'eau qui la produit. L'eau purgée d'air dans la machite pneumatique augmente moins de volume en fe selant, les expériences de M. de Mairan ne donnent cette augmentation que d'un vingt-deuxième, & on ne doit pas s'en étonner , cette eau a perdu une quantité d'air confidérable, qui , en fe dévelôppant dans la congélation, auroit certainement beaucoup augmenté fon volume.

Le volume de la glace continue encore à augmenter après qu'elle s’eft formée, M. de Mairan s'en eft afluré par cette expérience ; il a fait geler de l'eau dans un vaiffeau, & quand la croûte de vlace a été formée, il a percé le fond du vai£ {au pour laifler écouler feau qui reftoit fluide; & l'ayant.

*

Des S c 1E NME. 77 ofé de nouveau à la gelée en cet état, il a remarqué que la ‘glace s'étoit fenfiblement arquée, & form e voûte plus convexe, ce qui ne pouvoit venir que de fon augmen- tation , à laquelle les parois du vaifleau n'avoient fe prêter; c'eft auffi à cette caufe que M: de Mairan attribue ces félur qui fe font avec tant de bruit dans la glace qui couvre lés marais, les lacs & les grandes pièces d'eau. Enfin l'expé- rience de Ia balance hydroftatique décide nettement en faveur de cette augmentation; le même morceau, qui-m'étoit au moment de fa congélation que d’un quatorzigmte plus léger que l'eau, ayant été huit jours après mis en expérience, fe trouva plus * + que ce fluide dans la raïfon de 122à rx, preuve évidéñte déW'augmentation de fon volume.

On ne peut rien affirmer de bien pofitif fur la dureté de la glace en général: M. de Mairan a trouvé, en faifant rom- pre plufieurs cylindres de glace par des poids qu'il leur faioit foûtenir , que la réfiflance de a glace étoit à celle du marbre comme 1 eft 10; mais ces expériences font fujètes : à un grand nombre de variations dans le climat même on les fait, & on n'en peut ablolument rfen conclurre pour Ja dureté de Ja glace des autres climats. Il paroît ici que plus la glace s'eft formée tranquillement & fentement, plus auffi elle eft dure & compaéte; cependant ceux qui ont voyagé au Spitzherg ont trouvé que la glacesy' étoit beaucoup plus fpongieufe que la nôtre, & cependant beaucoup plus dure ; elle gagne apparemment plus par la rigueur du froid, qu'elle ne perd par la promptitude de la congélation. Un fait que apporte M. de Mairan, prouve bien quelle eft la dureté & la ténacité.de la glace qu'on trouve en Mofcovie : on bâtit «à Péterfb te 1 de 1740, un palais de glace

conftruit fuivant les règles de la plus élégante architedure ;

& pour poufler le prodigé jufqu'au bout, on mit au devant

fix pièces de €anon de même matière avec leurs affuts auf

de glace: ces pièces étoient du calibre de celles qui portent

ordinairement trois livres de poudre , il.eft vrai qu’au lieu de

tjs livres on ne leur en donna que trois PEER ; mais ul}

783 HISTOIRERDE L'ACADÉMIE ROYALE enfin on les tira, & le boulet d'une de ces pièces perça à foixante pas'une planche de deux pouces d'épaiffèur. IL faat que la glace du Nord foit bien autrement tenace que la nôtre, pour qu'un canon qui, vrai-femblablement, n’avoit pas beau- > coup plus d’épaifleur que les canons ordinaires , ait réfifter à l'explofion de trois quarterons de poudre: ce fait peut rendre croyable ce que rapporte Olaüs Magnus, des fortifications de glace dont il affure que les nations feptentrionales favent faire ufagewdans le beloin. és " Puifque Haglace eft plus fégère que leau d'environ un douzième, il eft clair qu'elle pourra porter fans s’enfoncer tout corps moindre qu'un douzième du, poids de la glace; mais fi elle eft adhérente à des corps {ôides comme celle d'une rivière l'eft à fes bords, alors comme par l'effort qu'élle fait pour {e dilater, elle fe courbe & devient une véritable voûte qui a ces corps folides pour appui, elle peut porter des poids bien plus confidérables. La Société Royale ayant fait mefurer en 1683 la glace de la Tamife lorfqu'on a traverfoit en carrofle, elle,ne fe trouva que de onze pouces d'épaifleur : il fat donc bien prendre garde à cette circonf tance lorfqu'on veut fe fervir de la glace comme de pont, & c'eft certainement faute d'y avoir eu égard que Charles Guftave, allant de Fionie en Zélande fur les glaces de Ia mer Baltique, perditame centaine de cavaliers de fon armée, I n'eft pas aifé de rien dire ‘de précis fur la. froideur, de la glace, on peut feulement conjeéturer que, comme tous les, corps folides, elle prend à la longue la température de l'air elle fe trouve; ainfr elle doit augmenter de froideur lorf- que la gelée augmente, & en perdre aüffi Re “is quand elle diminue. s 4 La glace ne paroït pas avoir d'autre goût ni d'autres qua: lités que l'eau qui la produit; & f1 dans quelques cas elle produit une fenfation différente, cet eflet eft à fa froi- deur, qui caufe une contraction fubite dans les nerfs, c'eft probablement à cette crifpation qu'il faut attribuer les guéri- {ons qu'elle a quelquefois opérées.

AUE,S ; S*C 1 EN CE s. 79 “La ET la glace eft communément moindre que celle"de l'eau, fur-tout vers fa furface, & c’eft une füite néceflaire des bulles d'air, des petites félures qui s'y rencon- trent en plus grande abondance, & du dérangement de parties qui y eft plus grand: les glaces des mers du Nord différent en ce point beaucoup des nôtres, elles font beaucoup moins tranfparentes, mais de plus elles ont une couleur bleue que n'ont point celles de notre climat. Il eft vrai que ce bleu pourroit bien être produit par la réflexion d'un aïftplus épais, & peut- ètre aufli eft-il à la couleur des eaux; mais ce qu'il y a de

lus particulier, c'eft que lorfquele temps eff pluvieux , fe Bleu de Ha*partie fupérieure de ces glaçons eft plus pâle, & que vües deflous l'eau, elles paroiflent vertes : cette dernière circonftance ne paroïÿ pas difficile à expliquer, s'il eft vrai, comme quelques Auteurs le rapportent, que l'eau ces mers paroifle jaune à ceux qui s’y plongent ; «car fi la glace eft bleue par elle-même, il eft impoffible qu'à travers un pareil milieu elle ne paroifle verte,

La réfraétion de a glace eft un peu moindre que celle de l'efu, ce qui eft une fuite naturelle de ce qu'elle eft plus lépère & moins compacte; mais elle eft affez régulière pour qu'une lentille de glace raflemble les rayons du foleil au point de brüler & d'allumer de la poudre au plus fort de l'hiver: c'eft à une caufe à peu près pareille que M. de Mairan croit devoir attribuer les marques de brûlure qu'on voit fur les fleurs & fur les plantes au printemps, lorfqu'après une gelée “blanche le foleil {e montre un peu trop vivement.-Les petites gouttelettes fphériques qui s'y raflemblent, deviennent autant de lentilles dont le foyer eft très-court, & qui portent les rayons raffemblés du {oleïl, fur la plante qui ne peut man- quer d'en être brûlée; c’eft 1à, felon lui, la caufe desces points noirs, qu'on y obferve: en ce cas, lorfque les jardiniers difent que ces gelées ont brülé les fleurs de feurs arbres, ils difent vrai, quoique de un fens bien différent de ce qu'ils ima- ginent. «

Quoique la glace foit un corps folide, ellew'eft cependant

$8o HistTommEe DE L'ACADÉMIE ROYALE pas à l'abri de l'évaporation ; mais ce qu'il y a de fingulier, c'eft que cette évaporation eft d'autant plus grande que le froid eft plus violent. Selon les obfervations que M. Gau- teron fit en 1709 à Montpellier, elle perdoit alors un quart de fon poids en vinÿt-quatre heures ; évaporation prodigieufe, fi on fait attention que celle de l'eau, qui naturellement pa- roîtroit devoir être plus grande, feroit cependant beaucoup moindre dans un temps égal; mais on ceflera bien-tôt de s'en étonner, en confidérant que la glace eft expofée à l'air de tous les côtés, au lieu que l'eau n'en peut être touchée que par funface; que la furface de la glace eft hérifiée d'une infinité d'inégalités que celle de Feau n'a point, & qui don- nent prile à l'air; que les bulles d'air qu'elle contient, & qui font en plus grand gombre à fa furface que par-tout ailleurs, tendent par leuï élafticité à en détacher les parties ; toutes raifons .qui font que quoique la glace réfifte par fa’ dureté plus que l'eau à l'effort que l'air fait pour en enlever les paties, cependant il doit en emporter de plus confidérables & en plus grand nombre qu'il ne peut faire lorfque l'eau eft dans fon-état de liquidités L'évaporation de la neige eft beaucoup plus grande & plus rapide que celle de layglace, & cela ne doit. pas fur- prendre ; la neige n'eft qu'une glace beaucoup moins folide, & compofée d'une infinité de petits filets de glace qui, par la tendance qu'ont les parties de l'eau à s'aflembler fous des

angles de 6o degrés, forment prefque toujours des étoiles.

ou des fleurons à fix pointes : il n'eft donc passétonnant que cette efpèce de glace, moins dure par elle-même, & qui préfente à l'air une furface bien plus grande, foit auf fuf- ceptible d’une évaporation plus prompte & plus grande; il arrive auffi que par la même raifon elle,ne fait jamais le même effort que la glace pour fe dilater & pour rompre les vaifleaux qui la contiennent. La neige Se: comme l'eau, conferver la faveur & le goût de la vap e laquelle elle a été formée; & comme, pour l'ordinaire, les vapeurs aqueufes contiennent peu d'autres matières que des parties d'eau, î

DES SCIENCES. a: | eft rare que la neige ait un autre goût une autre faveur que celle de Feau commune, à moins qu'elle ne l'ait prife de la terre fur laquelle elle a. féjourné. |

Quelques Auteurs ont prétendu que la neige étoit excel- lente pour dégeler les membres & les fruits gelés par un trop grand froid ; mais ül y a bien de l'apparence qu'elle wagit dans cette occafion que comme auroit faire toute autre eau un peu moins froide que les membres ou fruits gelés ; nous aurons dans peu occafion de parler de cette elpèce de phénomène.

L’afloibliffement & la diminution de la matière fubtile dans intérieur de l’eau ont, comme nous avons vüû, fervi à former la glace; une plus grande quantité & un plus grand, mouve- ment de cette matière ferviront de même à la détruire. Le contact des corps voifins fufht pour la fondre, fi ces corps font moins froids qu'elle, c'eft-à-dire, s'ils font en état de fournir affez de matière éthérée, & de lui communiquer aflez de reflort & de mouvement pour la faire pénétrer dans les interftices des parties de la glace.

L'application de tous les corps folides n'opère pas égale- ment la fonte de la glace; il paroît par les expériences de M. Hagugnot, de la Société Royale des Sciences de Mont- pellier, que la glace fond plus vite fur le cuivre que fur aucun autre métal, & plus vite fur un fer à repañer que für un fer ordinaire: la raifon de ce phénomène eft peut- être que le cuivre, & fur-tout le jaune, eft de tous les métaux celui qui fe dilate, & par conféquent eft pénétré plus aifément par la chaleur, d'où on eft en droit de conclurre que la matière fubtile y trouve des routes plus libres que dans tout autre métal ; peut-être que le fréquent ufage qu'on fait du fer à repafler, le met auffi dans le même cas.

À Tégard des liquides & des fluides, il paroît en général que leur efficacité à fondre la glace fuit à peu près la propor- tion de leur: mouvement inteftin, de la groffeur & de la folidité de leurs parties intégrantes ; c'eft-à probablement la raifon pour laquelle Ja glace fond plus aifément dans l'eau

Hifl. 1749. ARE

82 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE

que dans l'air à la même température, & plus prompte- ment dans de l'eau tiède qu'à une diftance du feu à laquelle on auroit peine à tenir la main; il y a d'ailleurs bien de Yapparence que l'air fe refufe plus que bien d'autres corps au paflage de la matière fubtile, puifqu'un morceau de glace qui eft 6 minutes 24 fecondes à fondre à l'air libre, eft abfo- lument fondu en 4 minutes dans la machine du vuide.

La glace eft communément beaucoup plus de temps à fe fondre qu'elle n'en a employé à fe former; c’eft à cette. propriété que nous devons la pofhbilité d'en conferver jufque ‘dans les chaleurs de l'été: ce feroit une erreur que de s'imaginer que la température des glacières füt au deffous du terme de la congélation, bien loin de-là, leau qu'on y porteroit s’y maintiendroit toûjours fluide; mais il fufht que la température des glacières ne foit que peu au deflus de ce terme, pour que la glace qu'on y entaffe par grofles maffes ne sy fonde que très-lentement, en forte qu'il en refle affez pour notre ufage; pour peu qu'on y veuille réfléchir, cette propricté de la glace n'aura plus rien de furprenant. La matière fubtile doit avoir bien moins de facilité à defunir des particules exaétement jointes , qu'elle n'en a eu à s'échap- per d’entre ces mêmes particules, lorfqu'elle les tenoit flot. tantes & féparées ; il doit mème arriver que dans cer- tains pays, ou par des circonftances locales, la chaleur ne puifle détruire en été toute la glace que le froid a formée en hiver, & qu'il fe trouve par conféquent des amas de glaces auffi anciens que le monde,

H feroit peut-être bien difficile de retrouver dans la deftruc- tion de la glace précifément les mêmes phénomènes en ordre contraire à celui qu'on a obfervé dans fa formation ; cepen- dant il y a bien de l'apparence que les parties qui fe font gelées les premières avoient plus de difpofition que d’autres à s'unir, & feront les dernières à fe féparer; en effet, fi on fait fondre lentement morceau de glace très-mince, on pourra obferver que les premiers filets de glace qui s’y font formés fubfifte- ront fouvent encore lorfque tous les intervalles qui font

# DES SCIENCES 83

_ entre eux feront dégelés, & qu'ils formeront une efpèce de réfeau très-reconnoiffable; maïs il faut pour cela que la lame de glace foit très-mince; dans un morceau un peu épais, mille hafards feroient difparoître infaïlliblement cette apparence. Lorfque le retour du foleil vers nous, les vents plus doux & plus chauds, l'affaiffement & la précipitation dés corpuf. cules falins qui étoient dans Fair, & une plus grande quan- tité de vapeurs forties de la terre, rendent {a douceur du temps univerfelle dans un certain canton, l’adouciffement que produifent toutes ces caufes, fe nomme déocel; le dével eft ordinairement accompagné d'un phénomène affez fmgulier , on fent, lorfqu'il commence, une efpèce de rédoublement de froid très-incommode, quoique cependant le thermomètre remonte: cette apparence n'eft dûüe qu’à la grande quantité de particules d’eau à peine dégelée que l'air contient alors; ces particules, par leur denfité & par leur application immé- diate fur la peau, excitent en nous une fenfation que l'air plus froid & plus fec, tel qu'il étoit avant le dégel, n'y pou- voit exciter ; quelquefois cependant l'augmentation de froid eft réelle: lorfque le dégel s'étend à la foisfur un pays con- fidérable, & que toute la neige & Ia glace y fondent en même temps, il eft prefque, impoïfible que cette fonte ne refroïdifle Fair environnant, & n’y produife pour un temps aflez court un redoublement de froid; c’eft‘ainfi qu'on eft prefque toüjours averti à Paris, par des vents de fud très- froids, de la fonte des’neiges fur les montagnes d'Auvergne & des autres provinces méridionales.

Les gelées & les dégels femblent, au premier coup d'œil, n'avoir aucun temps déterminé ; cependant, à les examiner pendant un grand nombre d'années, on trouveroit peut-être d ete mafle d'obfervations plus de régularité qu'on ne { J'imagine : en général, on fait qu'en ce climat les grandës chaleurs & les grands froids ne fe font ordinairement fentir qu'un mois ou fx femaines après les Solftices d'été ou d'hiver. On pourroit peut-être affigner auffi une- certaine durée moyenne aux grandes gelées car il faut bien diftinguer

L ij

84 Histoire DE L'ACADÉMIE RoYaLe celles-ci, qui font en quelque forte gelées du climat, &, s'il n'eft permis d'ufer de ce terme, aligees, des gelées acciden- telles & variables. Suivant cette idée, 4l doit y avoir. vers le Sud un parallèle fous lequel il ne gélera point dutout, & vers le: Nord un autre parallèle fous lequel il ne dégélera point; on pourra prendre fur tous les autres une partie de leur circonférence proportionnelle au temps que dure fa gelée, & fi par les extrémités de tous ces arcs de parallèle on mène une courbe fur la furface du globe, on aura un efpace com- pris entre ces deux courbes, qui exprimera, relativement à la furface du refte de l’hémifphère, les fommes moyennes du . froid & du chaud qui y règnent : on voit bien que cet efpace doit aller.en diminuant & en pointe vers le Sud, & que les deux courbes doivent s’y rencontrer fur le parallèle la gelée commence à n'avoir plus lieu ; comme aufli qu'elles doivent s'écarter vers le Nord, & comprendre abfolument le dia- mètre du parallèle il ne dégèle jamais; idée abfolument neuve, & qui pourra fervir à ramener cette matière à des termes plus précis, dès qu'on aura des obfervations fufhfantes pour établir cette efpèce de chafis phyfico-géographique, puifque ces courbes, tracées avec un nombre fufhfant de points, pourroient fuppléer aux obfervations qui manque- roient dans plufieurs endroits de la terre.

On, voit communément pendant le dégel, les murailles chargées d’une efpèce de neige ou de frimat qui s’y attache, & qu'on n'y remarque point pendant la gelée; la raifon de cet eflet eft que les corps folides s'échauflent moins promp- tement que l'air, & que ces murailles confervent encore quelque temps après le dégel, un degré de froid fufhfant pour geler les particules d'eau dont l'air eft chargé: elles font alors précifément dans le même état que les feaux damsle£

els on a mis de la glace, pour faire rafraichir du vin, qui condenfent à leur furface extérieure, la vapeur qui étoit con- tenue dans Fair; & fi ces vapeurs étoient prifes dans un degré de froid égal à celui des partichles qui font dans fair au moment d'un dégel, il y a bien de l'apparence qu'on les

IDAE4SUS » C E INLOHENS. 85 verroit de même paroître autour de ces {eaux fous Ia forme de neige. à

La même caufe produit encore ces réfeaux de glace qu'on obferve aux vitres des fenêtres; l'humidité de l'air de la chambre s’y attache, & comme ces carreaux font continuel- lement relroidis par fair extérieur, elle s'y gèle: jufque-[à tout rentre dans les principes que nous avons pofés, mais ces mêmes principes font infuffifans pour expliquer les con- tours curvilignes qu'on obferve quelquefois fur ces mêmes vitres: la tendance des parties de l'eau à sunir fous des angles de 6o degrés, peut bien les arranger en étoiles, en plumes, &c. mais jamais en rinceaux curvilignes, & qui femblent être l'ouvrage d’une main hardie. Ce phénomène embarraffa long-temps M. de Mairan, & cela d'autant plus que quoiqu'il eût foigneufement cherché à l'obferver, il ne Yavoit jamais voir que deux fois; à a fin il fe fouvint que ces deux feules fois il avoit fait laver fes vitres peu avant le froid, & cette circonftance lui donna l'explication du phé- nomène, du moins il préfume qu'il n'en a pas d'autre: les vitriers, pour fécher les vitres qu'ils viennent de laver, y paflent avec une brofle, du fable fin, & l'y conduifent en faifant avec cette brofle plufieurs circonvolutions fur le verre: or il eft impoflible que ces grains de fable n’y graventspar leur frot- tement un grand nombre de petits traits ou fillons qui tous fuivront les contours que la broffe aura décrits. Ces fillons font trop petits pour que nous les puiffions apercevoir, mais ils ne le font pas aflez pour que les parties de l'eau ne puiffent s'y loger, & nous retracer par leur arrangement, lorfqu'elles s’y gèlent, les contours que la main du vitrier y 4 marqués: la même chofe n'arrivera plus lorfque, pendant un efpace de temps confidérable, ces éfpèces de fillons auront été comblés

ar un nombre prefqu'infini de petites particules de différentes | ds que l'air y charie continuellement; d’où il fuit que ce phénomène ne peut guère s'obferver que fur des vitres aflez récemment nettoyées. * Nous n'avons parlé jufqu'ici que de la glace formée par , Mad

86 Histoire DE L'ACADÉMIE RoYALE

les caufes générales, mais l'art a auffi trouvé le moyen de s'en procurer : On fait aflez que dans le fort même de l'été, cette ingénieufe invention nous prôcure des rafraïchiffemens qu'il fembloit que la Nature nous eût entièrement refufés.

La glace feule, telle que nous a confervons dans nos gla- cières, ne fufhiroit pas pour cet effet; il a fallu y ajoûter un fecours étranger, ce fecours eft celui des fels, ils accélèrent tous plus ou moins la fonte de la glace: M. de Mairan s’eft affuré par fes expériences, qu'un morceau de glace qui nee fondoit que dans l'efpace de cinq heures & demie lorfqw’il étôit. tout feul, fe fondoit tot:lement en moins d’une heure lorfqu'il étoit environné de fel marin; les pointes du fel font autant de petits coins qui écartent les partiés de la glace, & en accélèrent la féparation. Cela pofé, qu'on imagine un vaiffeau plein d'eau, entouré de glace & de fel mélés enfémble; dans la fonte fubite de la glace que le fel occafionnera, fes parties fe trouveront plus écartées qu'elles ne l'auroient été dans la fonte ordinaire; il fe fera donc des efpèces de vuides entre elles, & la matière fubtile contenue dans l’eau du vafe qui y fera plongé, s’'échappera pour s'y loger, d'où il arri- vera néceflairement que cette eau ayant perdu celle qui lui étoit néceflaire pour entretenir fa liquidité, fe glacera.

Le contrâfte arrivera précifément fi on plonge un fruit, un membre gelé, dans de l’eau aflez voifine de la congéla- tion ; la matière fubtile contenue dans l'eau encore fluide, s'introduit dans le corps gelé, elle Ÿ rétablit le mouvement, & l'eau qui s'en trouve privée fe glace autour, ce qui a fait dire que la glace fortoit du corps gelé pour fe ramaffer à 1 furface; mais il faut obferver avec grand foin que l'eau qu'on emploie foit très-voifine de la congélation, de l'eau plus chaude introduiroit à la fois trop de matière fubtile dans le corps gelé, & y détruiroit abfolument lorganifationqu'on veut conferver. Ce remède fr fimple eff connu dans tof les pays feptentrionaux , & même, pour ne pas”fe tromper à la température de l’eau, on y emploie communément Ia neige; ce fut ainfr qu'on dégela un doigt & une oreille au

DES Sciences. 87 roi d'Angleterre Jacques LT pendant que ce Prince étoit en Norwège.

La glace artificielle n'a rien qui la diflingue de la glace ordinaire formée rapidement ; il ne paroït point qu'elle charge des particules des fels qu'on emploie, qui en effet auroient bien de la peine à pénétrer le vaiffeau qui la contient.

Puifque les {els ne contribuent à la congélation artificielle qu'en faifant fondre la glace avec laquelle on les méle, il eft

naturel que ceux qui occafionnent la fonte la plus prompte,

produifent le plus grand degré de froid; c'eft aufi, à très- peu près, ce que lon obferve. Le fel marin, qui eft celui de tous qui fait fondre la glace le plus vite, occañonne le plus grand degré de froid; ce fel, & fur-tout le fel gemme, qui eft, comme on fait, de même nature, a fait defcendre le thermomètre à.17 degrés au deflous de la congélation.

IH y a grande apparence que les {els n'accèlèrent la fonte de la glace qu'en fe fondant eux-mêmes, du moins M. de Mairan n'a-t-il jamais s’aflurer du contraire par aucune expérience.

Non feulement les {ls ont la propriété de contribuer à {a congélation étant mélés avec la glace, mais difflous*dans l'eau ils la refroidifient confidérablement ; le {el ammoniac, qui à cet égard eft le plus efficace de tous, refroidit l'eau dans laquelle on le diflout, au point de faire baifler le thermo- mètre qu'on, y plonge, de 4 degrés: la dofe eft d’une livre ur trois ou quatre pintes d'eau ; d'où il fuit que fi cette eau étoit voifine de la congélation, elle pourroit être employée à congélation artificielle; & que puifque l'on peut à chaque opération la refroidir de 4 degrés, on peut, en employant des mafles d'eau ainfi fucceflivement refroidies, parvenir à faire la congélation artificielle fans glace ; on pourroit même en rafraichiffant leauspar le moyen d'un courant d'air comme nous avons dit ci-deffus *, & pre- nant fe temps leau n'eft pas fort éloignée de Hi congx-

“lation, fe procurer de la glace artificielle fans fels & fans glace C'eft par cette réflexion que M. de Mairan termine

* Foy. 2. 75:

3V. Mém. de d'Acad, 1747, P. 102.

b Voyez Hif. 1747 Pt

Voyez Mém. 1747/P:143°

88 HisroirE DE L'ACADÉMIE ROYALE

fon Ouvrage, qu'on peut en quelque forte regarder comme neuf, quoiqu'il ait pour but l'explication d’un phénomène obfervé depuis le commencement du monde, & fur lequel prefque tous les Phyficiens avoient écrit : lefprit d'ordre & d'obfervation qui y règnent, ont produire néceffairement la clarté & la précifion qu'on y remarque. *

L parut encore cette même année un ouvrage de M. l'Abbé .

Nollet, intitulé, Recherches fur les caufes particulières des phénomènes életriques, à fur les effets nuifibles avantageux qu'on en peut attendre.

Cet Ouvrage eft partagé en cinq Difcours, le prémier eft uniquement deftiné à répondre aux obje‘ions qu'il avoit efluyées, & aux critiques qui avoient été faites de fon Ou- vrage , defquelles nous avons cru d'autant moins néceffaire de parler dans cette Hifloire, que l'expérience a prefque par- tout décidé en faveur-de M. l'Abbé Nollet,

Les quatre Difcours fuivans forment donc, à proprement pader, le corps de cet Ouvrage; ils font prefque entièrement compofés des expériences & des raifonnemens qui fe trouvent dans ‘plufieurs Mémoires du même Auteur, actuellement im- primés parmi ceux de l’Académie, mais qui ne l'étoient pas encore lors de la publication de ce Livre. Nous ne ferons donc que renvoyer le lecteur à ce que nous en avons déjà dit dans FHiftoire de l'Académie, & que nous ne pour-* rions ici que répéter.

Le fecond Difcours traite de la règle qu'on doit fuivre pour juger fr un corps eft électrique, & s'il left plus ou moins qu'un autre; il eft entièrement tiré d'un Mémoire de M. l'Abbé Nollet imprimé en 1747*, duquel nous avons rendu compte dans l'Hiflofre de cette même annceb, à laquelle nous prions le lecteur de vouloir bien recourir.

Le troifième Difcours contient des'recherches fur les cir- conftances favorables ou nuïfibles à l'élettricité; c'eft encore l'abrégé d’un autre Mémoire imprimé en 1747 ©, & dont

. nous

mous avons parlé dans lHifloire de l1 même année:,

Le quatrième Difcours eft employé à examiner fi l’élec- tricité fe communique en raïfon des maffes ou des furfaces, fr une certaine figure ou une certaine dimenfion du corps éleétrifé peut contribuer à rendre fa vertu plus fenfible, & fi l'éleétrifation, continuée long-temps, ou fouvent répétée fur la même quantité de matière, peut en altérer les qua- lités, ou en diminuer {1 mafle: tous objets traités au long dans un troifième Mémoire aufir imprimé en 1747 b, & dont nous avons alors parlé dans l’Hifloire <.

Le cinquième & dernier Difcours contient l'examen de l'effet de l'éleGtricité fur les corps organilés , auquel M. Ÿ Abbé Nollet a joint une courte hiftoire.des merveilles qu'on pu- blioït en Italie, fur des guérifons & des purgations opérées par l'électricité. Nous avons-rendu compte du premier objet année dernière d, en parlant d'un de fes Mémoires fur la même matière®; & après ce que nous avons dit cette annéef du fecond, nous croyons abfolument inutile d’en parler davan- tage. Nous n’ajoüterons rien ici que ce que nous avons déjà dit, que dans ces recherches M. l'Abbé Nollet n’a eu d'autre but que d'accélérer la publication de quelques-uns de fes Ouvrages déjà communiqués à Académie, & que des cir- conftances particulières lui faifoient {ouhaiter de voir promp- tement entre les mains du Public.

He 1749. ° M

DES US © 1 E N°c'#e 89

: Voy. Hif. 1747 P: 12e

P Voy. Mén, 1747»P.207- < Voy. Hif. 1747, P:25.

À Voye Hif. 1749, p. 1: Voy. Mém: 1748,p.1 64 £ Voy. ci-defu'; POS 1 Se

i V. les M. Pe 155:

90 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

OO OO OO OO OO OO ANATOMIE. SUR LES US ACCES

DU GRAND NOMBRE DES DENTS

DU REQUIN.

[: eft difficile de fe refufer à l'admiration, lorfque dans l'étude de la Phyfique, on voit le nombre prodigieux de reflources qui font préparées pour remédier aux accidens dont les différentes parties du corps animal peuvent être menacées: les animaux terreftres qui {ont pourvûs de dents, ont juf-

u'à un certain âge, l’efpérance de voir celles qu'ils perdent, Me ileft même, dans plufieurs efpèces, d'une né- ceflité abfolue qu'elles fe renouvellent, lorfque l'animal a paflé le temps de fa première jeunefle; mais ce renouvellement ou ce remplacement ne fe fait que par le développement des germes qui fe trouvent dans les alvéoles, & qui croiffent & durciflent lentement pour remplacer les dents qui ont été perdues.

Il eft cependant un animal bien autrement favorifé de la Nature en ce point ; il eft vrai qu'il n'eft pas du nombre des animaux terreftres, c’eft un poiflon, & mème un des plus voraces; fa gueule armée d'un appareil de dents formi- dable par lui-même, en contient encore plufieurs toutes for- mées, prètes à prendre la place de celles que la vieilleffe ou les accidens lui auroient enlever.

Ce poiflon ef le canis carcharias ou requin ; Sténon aflure avoir compté plus de deux cens dents à un de ces poiflons, & il ajoûte en même temps qu'il ne voit pas quelle utilité Fanimal peut tirer de ce nombre de dents dont {a plus grande partie eft placée à la face interne de 11 mâchoire, & recou- verte de chairs mollafles & fongueufes.

IE SMS -C 1 ENIC ES | gt «Cette fingularité invita M. Hériffant à vérifier f’obferva- tion de Sténon; il examina plufieurs tètes de ce poiflon, & trouva que l'obfervation étoit exacte, mais il trouva de plus, ce que Sténon n'avoit pas rencontré, l'ufage de toutes ces. dents prétendues inutiles, & a manière dont elles prennent la place de celles qui viennent à manquer.

Les dents du requin font plates & de figure triangulaire, elles ne font point engagées, comme celles des animaux terreftres, dans une cavité pratiquée dans Los de la-mächoire; cet os eft entièrement recouvert par une épaifle membrane à laquelle les dents font fortement attachées par leur bafe.

Derrière chacune des dents qui garnifient le contour de la gueule du requin, il y a une rangée d’autres dents couchées les unes fur les autres & fur la face interne de a mâchoire, à peu près comme les feuilles d’un artichaut; la pointe de ces dents eft tournée vérs le bas de la mâchoire, & elles font recou- vertes d'une chair fongueufe & mollaffe qu'il faut enlever pour les apercevoir : les plus intérieures même, fur-tout dans les jeunes requins , font membraneufes & prefque femblables, pour la confiftance, aux dents naiflantes d'un fœtus humain.

Lorfque l'animal a perdu quelque dent, la membrane s'étend vers le vuide qu'elle laifle, & par-là une nouvelle dent fe redrefle & vient prendre la place de celle qui a été ôtée: il eft aifé de remarquer les dents qui ont été ainfr renou- velées, car celles qui ne l'ont point été, font placées de manière qu'un de leurs bords eft recouvert par la dent qui les précède, & l'autre recouvre celle qui les fuit, au lieu que les dents qui ont été renouvelées, font recouvertes des

deux côtés par celles qui les joignent, & il eft aifé de voir que venant du dedans de la gueule au dehors, cette pofition leur eft inévitable: on peut même voir combien de fois elles ont été renouvelées, car on en trouvera d'autant moins dans la colonne de dents de réferve, qu'il y en a eu davantage de remplacées. On voit de plus en dehors du rang extérieur de dents, fur la membrane qui les porte, les impreffions de celles qui n'exiftent plus, & qui font aflez femblables aux M ji

V.les M. p- 489.

* Voy. Hif. 474$ P.9"

92 HIisTorREe DE L'ÂACADÉMIE ROYALE vefliges qui reftent au fond d’un artichaud dont on a Ôté les feuilles. -

C'eft par cette méchanique que les dents du requin, plus expolées peut-être à fe rompre que celles d'aucun animal, par les efforts qu'il fait pour attaquer & pour déchirer fa proie, peuvent être promptement remplacées Jorfqu'elles viennent à manquer; peut-être n'eft-il pas le feul à qui cette propriété ait été accordée, mais c'eft au moins le feul exemple qu'on ait eu jufqu'ici de ce fmgulier renouvellement.

SUR Re LA STRUCTURE DES VISCE'RES GLANDUL EUX,

Et particulièrement fur celle des reins à du foie.

OUS avons dit en 1744*, en parlant d'un Mémoire

de M. Bertin fur la ftruéture des reins, qu'il y avoit en général deux fentimens fur la ftruéture de cet organe & des autres vifcères glanduleux.

Le premier eft celui de Malpighi qui prétend que ces organes {ont compolés de glandes munies chacune d'un canal excrétoire, par lequel s'échappe la liqueur qu'une infinité de vaifleaux fanguins qui fe rendent à chaque glande, dépofent dans fa capacité par des canaux imvifibles.

Le fecond eft celui de Ruÿfch, fuivi en ce point par Vieuffens; felon cet illuftre Anatomifte, les vifcères qu'on. nomme glanduleux, ne le font point; ils font abfolument vafculeux, & cela dans le fens le plus étroit, c'eft à-dire, abfolument compolés de vaiffeaux fanguins, artériels & vei- neux, fans aucune fubftance diftinéte & féparée de ces vaif- feaux ; il prétend que les tuyaux prétendus excrétoires, ne font autre chofe que le prolongement de quelques rameaux artériels, & ce dernier fyftème femble être le plus généra- lement reçû.

Ce qu'il y a de fingulier, c’eft que dans le rein on trouve

} Nue ni

| mNEUS IS © 1 N'c'EMgN 93 en quelque forte des preuves de l'un & de autre: auffi M. Boerhäave n'a-t-il pas héfité à reconnoître dans cette partie la réalité des deux fyftèmes: il fe fait, felon lui, dans le rein, deux fortes de filtrations, & il y trouve deux efpèces de canaux.excrétoires ; les uns viennent, fuivant le fentiment de Ruyfch, des rameaux artériels, & les autres, fuivant celui de Malpighi, des grains glanduleux.

M. Ferrein s'élève aujourd'hui prefqu'également contre l'une & l'autre hypothèfe, & par conféquent contre celle de Boer- haave qui en eft un compofé; ces parties font, felon lui, un afflemblage merveilleux, non de glandes, comme le prétendoit Malpighi, non de vaifieaux fanguins, comme l’aflure Ruyfch, mais de tuyaux blancs cylindriques différemment repliés, qu’il a vûs fenfiblement dans les reins, qu'il croit avoir bien certai- nement remarqués dans le foie & dans les capfules atrabi- laires, & qu'il croit devoir reconnoitre dans d’autres vifcères. Nous allons préfentement dire un mot des raifons qui l'en- gagent à rejeter les opinions de Ruyfch & de Malpighi.

Si les organes en queftion n'étoient, comme le prétend.

Ruyfch, qu'un affemblage de vaiffeaux fanguins, leur fub{-

tance paroîtroit toüjours rouge à la loupe & au microfcope, fur-tout lorfqu'on les prendroit dans le temps & les circonf- tances les vaifleaux doivent être le plus remplis de fang; cependant, & dans ces eirconftances même, M. Ferrein a toûjours la fubftance propre de ces organes, parfaitement diftincte des vaifleaux fanguins, d'un blanc un peu tranf- parent, prefque femblable à une gelée; il a rempli les vaifleaux artériels & veineux d'une injection rouge très-pénétrante, fans que la couleur blanche de cette fubflance en ait fouffert la moindre altération.

Quelle eft done la caufe qui a faire ïllufion à un Ana tomifle auffi exact que Ruyfch? M. Ferrein en foupçonne deux : la première eft que l’'injeétion dont il {e fervoit, chappoit, comme il l'avoue lui-même, en manière de rofée par les pores des vaifleaux , & que par ce moyen elle teignoit la fubflance propre des parties, d'une couleur qui leur étoit

M iij

94 Hisroire DE L'ACADÉMIE Royaze

étrangère; & la feconde, qu'il ne failoit ordinairement fes:

démonftrations & fes études que fur des pièces préparées qu'il confervoit : or la fubftance blanche de ces vifcères fe retire, s’altère, & difparoît même entièrement dans les pièces sèches. Hn’eft donc pas étonnant que Ruyfch, ne voyant plus cette fubftance, ou la voyant teinte d’un rouge qui lui eft étranger, ait afluré que les organes en queftion n'étoient com pofés que de vaifleaux fanguins.

Les obfervations de Malpighi paroiffént à M. Ferrein dignes d'une plus grande attention que celles de Ruyfch; mais il penfe qu'il ne s'eft pas moins écarté du vrai que lui dans ce qu'il croit avoir remarqué de ha ftruéture du cerveau, du foie, de la rate & des reins.

La cuiflon que cet illuftre Anatomifte, & ceux qui Font fuivi, croyoient néceflaire pour examiner le cerveau , faifoit néceflirement retirer ce vifcère & le rendoit friable; il s’en détachoit des parties irréculières, auxquelles il n'a fallu qu'un peu d’imagiration pour donner la figure & le nom de glandes; celles qu'on attribue au foie ne font que des lobules encore revêtus d’une membrane qui foûtient la fubftance molle de cet organe, & dans lefquels on ne trouve aucune cavité: celles des reins & de Ja rate ne paroiffent pas à M. Ferrein plus folidement établies. s

I eft bon cependant d’éclaircir un fait qui paroît favorifer le fentiment de Malpighi, & même celui de Ruyfch : il a oblervé dans quelques-uns.des vifcères dont nous parlons, des points rougés, ronds, circonfcrits en apparence, & qui re£ femblent beaucoup à des glandes : ils ne forment pas précifé- ment la fubftance, ou le fond principal de la fubftance de ces organes, ils y paroiflent feulement répandus de diftance en diftance; fi on les examine avec attentions & en employant des verres aflez forts, on découvre que ces points font difé- remment compolés; les uns ne font autre chofe qu’une fimple continuité de la fubftance blanche du vifcère, qui fe trouve en apparence plus colorée que le refte par une plus grande quantité de vaifleaux fanguins : les autres ne font produits

ADESUNS ‘c 1 EN: ChENSr | °$ que, par deux trois petites branches artérielles qui {e plient & fe replient fur elles-mêmes, puis fe redreflent pour conti- nuer leur chemin. . !

On n'a dans f Anatomie moderne que deux exemples d'or- ganés abfolument compolés de tuyaux ; mais ce qui eft bien digne de remarque, c'eft que les tuyaux qui forment ces organes ne font nullement des vaifleaux fanguins; le premier de ces exemples eft à Graf, & c'eft le tefticule, qui eft compofé de tuyaux blancs cylindriques différemment repliés; le fecond à été fourni par M. Ferrein lui-même, & c'eft luvée, qui eft formée de vaifleaux artériels & veineux par- faitement blancs, & qui ne charient que de Ia limphe..

Une femblable compofition ne parut pas à M. Ferrein devoir être bornée à ces deux parties , il foupçonna qu'elle pouvoit être employée dans d’autres vifcères, & rechercha {oi- gneufement fi elle ne l'étoit pas dans le foie & dans les reins; il n'y découvrit d'abord qu'une infinité de particules, blanches dans la fubftance corticale du rein, & jaunâtres dans le foie, qui étoient pour la piufpart irrégulièrement rondes & oblon- gues, & qui lui parurent, au premier afpect, être des glandes; mais bien des raifons, & fur-tout leur nombre, qui étoit de plufieurs milliers dans l'efpace d’une ligne, le firent douter que ce fuffent de: véritables glandes, & ïl refta feulement convaincu. que ia fubftance du foie & celle de la partie cor- ticale des reins étoient compofées dela même manière.

Enfin un heureux hafard lui mit entre les mains la folu- tion de cette difhculté; en difféquant un foie obftrué, il remarqua que tous ces points qu'il avoit remarqués {e pré- fentèrent à lui, non plus comme, des glandes, mais comme des inflexions de filets blancs extrémement déliés, qui fem- bloient fucceflivement tracer plufieurs figures pareilles. Cette découverte Vanima à rechercher fi la même ftruéture ne fe montréroit point dans d’autres foies ; il la vit dans plus d’un, quoique pas avec aflez de certitude pour fe fatisfaire; mais ayant ‘examiné des reins, il y trouva ce qu'il cherchoit, avec Ja plus grande évidence & la plus conflante uniformité ; il vit.

96 HIsToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

que tous ces grains qu'il avoit obfervés n'étoient que les points les plus faillans des inflexions, que font fans ceffe les tuyaux blancs qui compofent la fubftance corticale du rein, & qu'il nomme pour cette raifon #uyaux blancs corticaux.

Cette clef une fois trouvée, la ftruéture des reins & du foie n’eft plus un myflère, & nous allons tâcher d'en donner uné légère idée d'après M. Ferrein.

Les reins font fimples dans plufieurs animaux, comme dans le mouton ; alors la fubftance corticale forme une efpèce d'écorce fort épaifle qui occupe feulement la circonférence du rein: la fubftance médullaire ou fibreufe en eft envelop- pée, & elle eft compofée de traits en manière de fibres qui paroiffent fe terminer au baffin.

Dans d’autres animaux, chaque rein eft compolé de plu- fieurs petits reins fimples, ou feulement contigus, & formant une efpèce de grappe, ou vraiment continus & réunis en un feul tout.

Dans Fun & l'autre cas, chaque petit rein eft enve- Joppé de fa fubflance corticale, qui en enferme une autre plus rouge repréfentant une efpèce de globe plus ou moins régulier, & dégénérant en une partie qu'on nomme papille, à caufe de fa reffemblance avec celle des mamelles : cette fubftance intérieure fe nomme médullaire à fibreufe.

Le rein de fhomme eft de cette dernière efpèce; if eft compolé de plufieurs petits reins qui ont chacun un globe de fubflance médullaire, couvert par -tout d'une enveloppe coïticale, excepté du côté qui fe termine à une papille.

Pour fe former une jufte idée de la compofition du rein; qu'on imagine environ vingt-trois reins fumples dont le globe médullaire foit enveloppé par-tout de Ia fubftance corticale, excepté à l'endroit de la papille; qu'on retranche à chacun de ces reins une partie de leur enveloppe corticale, pour en faire des efpèces de voufloirs qui fe puiffent joindre, & que les papilles fe trouvent toutes en dedans, alors on aura un aflemblage aflez femblable au rein de l'homme, fi ce n’eft

se

DES SCIENCES 97 que des vingt-trois reins fnnples que nous avons fuppolés, il y en a plufieurs qui s'uniflent enfemble pour former un des voufloirs dont nous avons parlé, qui ne font qu’au nombre de douze. {

Il fuit de cette conftruétion, que la fubftance médullaire du rein total aura pas une figure globuleufe, mais elle formera au dehors, au moins dans le fœtus, autant d'émi- nences qu'il entre de globes particuliers dans fa compofition, il y aura aufli dans la cavité du rein un pareil nombre de papilles ; il fuit encore que la furface qui fépare la fubftance corticale & la médullaire, ne fera ni uniforme ni parallèle à la furface extérieure du rein, mais que les deux fubftinces paroïîtront entrer l’une dans l’autre, en forte qu'il y aura.des prolongemens de {a fubftance corticale qui préfenteront aux yeux une efpèce de pyramide dont lasbafe eft à Ia circon- férence du rein, & la pointe tournée vers fa cavité, & d’un autre côté, des prolongemens de la fubftance médullaire dans la corticale.

La furface extérieure. du rein paroît compofée d’une infi- nité de gros points blancheâtres d'environ deux cinquièmes de ligne de diamètre, & de figures différentes; ces points qui ont tant de fois été pris pour des glandes, font féparés par des interftices rouges ; ils font la bafe d'autant de pyra- mides blancheätres qui vont de la furface de chaque rein fimple jufqu’à la papille : elles forment la fubftance corticale par leur portion li plus large, & la médullaire par la plus étroite, leur affemblage compofe toute la fubftance du rein. Les interftices rouges dont nous avons parlé, les accompagnent & femblent marquer la féparation qui eft entre elles; nous difons femblent marquer, parce qu’en effet cette féparation n'eft pas réelle, & que la fubftance blanche des pyramides y exifle, mais y eft feulement cachée par les vaiffeaux fan- guins qui sy trouvent en plus grande quantité: cette partie rouge eft un peu moins marquée dans la partie corticale que dans la fubftance médullaire. © En difféquant des reins humains, M. Ferrein a été aflez

Hif. 1749. . N

983 HIisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE heureux pour apercevoir les prolongemens de la fubftance médullaire qui pénètrent la corticale ; ils y font reçüs dans autant d’enfoncemens qu'il nomme loges corticales, & ces loges font terminées par une efpèce de voûte vers la furface extérieure du rein. Ces prolongemens forment les axes ou le noyau des pyramides dont nous venons de parler, & leur nombre eft précifément le même que celui des pyramides.

Tout ce que nous venons de décrire s'aperçoit aifément à la vûüe fimple; mais pour examiner la ftruéture intérieure de chacune de ces parties, il faut employer la loupe & le microfcope.

On voit alors que les points blancheîtres font formés par Yaflemblage d'une infmité de tuyaux blancs cylindriques, & que les interftices rouges qui les féparent, contiennent auff de ces mêmes tuyaux, mais en moindre nombre. En ou- vrant la fubftance du rein, on y voit la même chofe; les tuyaux blancs fe retrouvent, quoiqu'en plus petite quantité, dans les intervalles rouges qui féparent les pyramides ; en un mot, ils forment toute la fubftance corticale , à l’exce tion des prolongemens de la fubftance médullaire ; ïls fe replient & fe grouppent en mille manières, qui préfentent même aux yeux un fpectacle qui n'eft pas fans agrément ; mais ils ne forment, par leur affemblage, rien qui ait l'appa- rence de glandes. Ces vaifleaux font tous de même groffeur & fans aucune divifion ; leur diamètre égale celui d'un brin de coton non filé, & M. Ferrein les a fouvent accom- pagnés de vaiffeaux fanguins encore plus déliés, & qui fe perdoient dans les parois de ces vaifleaux corticaux.

L'intervalle qui refte entre tous ces tuyaux corticaux , eft, felon M. Ferrein, deftiné à loger les artères & les veines qui y apportent le fang & l'en remportent; mais de plus, il y a bien nettement difcerné une fubftance gélatineufe, tranfpa- rente; telle en un mot, que malgré l'efpèce de ridicule qu'on a voulu jeter fur cette idée des Anciens, il n'a fe difpenfer de la reconnoïître pour une efpèce de parenchyme. Ce n'eft pas même dans cette feule partie qu'il a découvert une pareille

MES MSC LE Nc es; 99 fübflance ; il Fa obfervée dans l'uvée & dans le teflicule, ‘où elle fert à foûtenir les vaiffeaux blancs qui compofent ces parties, & dont elle femble jufqu'ici être la compagne infé parable. |

La longueur de ces vaifleaux, en les concevant mis au bout les uns des autres, eft immenfe , un efpace d’une ligne carrée peut en contenir au moins deux mille cinq cens, d'où M. Ferrein infere, par un calcul facile, que fi on affembloit bout à bout tous les tuyaux blancs qui compofent la fubftance corticale d’un rein humain, ils formeroient uue longueur de 60000 pieds ou de 10000 toifes, ou enfin de cinq lieues. C'eft au moyen de cet appareil merveilleux de tuyaux que Purine fe fépare du fang; mais comme, pour fe rendre de a

. fubftance corticale au baflin du rein, cette liqueur doit tra- verfer néceflairement la partie médullaire, nous allons tâcher de déméler fa ftuéture, & d'en donner l'idée d'après les obfervations de M. Ferrein.

La partie corticale du rein, compofée, comme on a dit, de vaifleaux blancs, donneit au moins lieu de foupçon- ner que la partie médullaire pourroit bien être formée de pareils tuyaux, & invitoit M. Ferrein à s’aflurer fr cette idée étoit vraie; il le fit, & à peine eut-il jeté les yeux armés d'une forte loupe, fur cette partie du rein, qu'il reconnut que ce qui avoit été regardé comme des vaiffeaux fimples ou des fibres, étoit un amas prodigieux de petits tuyaux, les ans blancs, les autres rouges, tous extrêmement déliés, mais diftinéts & détachés les uns des autres: il eft vrai que ces : tuyaux ne paroïffent pas également dans tous les reins, mais

_les expériences faites fur la partie corticale lui avoient appris que la circonftance la plus favorable pour les voir, étoit de choifir des reins d'un fujetun peu âgé & mort d'une longue maladie. |

Les vaifleaux rouges font évidemment des vaiffeaux fan- guins, ce font eux que Ruyfch, qui ne les avoit jamais vi que remplis d'injection, prenoit pour les tuyaux uri- maires ; mais ils n’en font nullement, ce font les tuyaux blancs

Ni

100 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

qui font cette fonétion : ces tuyaux paroiflent- exactement cylindriques, ils font bien plus déliés que les tuyaux corti- caux, leur blancheur eft aufli moindre que celle de ces der- niers; mais ce qu'il y a de plus étonnant, c'eft le nombre de leurs circonvolutions ; ils vont, en ferpentant continuelle- ment, fouvent mème en {e recourbant plufieurs fois fur eux- mêmes, & formant de petites mafles irrégulières, fe rendre de la circonférence du corps médullaire vers la papille : ils prennent naiflance du corps cortical. Chacun de ces prolon- gemens de fa partie médullaire, qui pénètre la fubftance cor- ticale, & delquels nous avons parlé ci-deflus, n'eft qu'un failceau de ces tuyaux ferpentans qui partent de l'intérieur de la loge corticale, les prolongemens font reçüs, les uns du fond & les autres des côtés ; il en part des autres endroits par lefquels la fubftance corticale touche la médul- lire. Les affemblages de ces tuyaux paroiffent aller toüjours en fe rétréciflant depuis la circonférence du corps médul- laire jufqu'à la papille, mais le diamètre propre de chaque tuyau ne diminue pas : il eft done néceflaire qu'ils fesjoignent & s’'abouchent les uns aux autres.-C'eft ce que M. Ferrein n'a obferver immédiatement dans le rein humain, mais if Fa plufieurs fois dans celui des oifeaux ; ce qui eft bien fingulier, c'eft que dans l'homme , la même jonétion de tuyaux doit néceffairement avoir lieu; les troncs ne pa- roiffent pas plus gros que les rameaux qui s'y jettent; cha- cun de ces troncs ne s'ouvre pas immédiatement dans la papille ; comme on favoit penfé, en prenant les faifceaux de ces vaifleaux blancs pour les tuyaux urineux, mais chaque ouverture de la papille répond à une efpèce de cul-de-fac d'environ une ligne & demie de profondeur, dans lequel un nombre prodigieux de ces tuyaux va s'ouvrir.

Telle eft donc la compofition admirable de l'organe def. à féparer furine; un nombre prodigieux de vaiffeaux fanguins très-vifibles, quoique plus déliés encore que ceux dont nous venons. de parler, fe terminent dans les parois des vaïfleaux blancs corticaux, & y dépofent furine, qui eft

RAMPBNEISMISIC TE NCIS 101 obligée de fuivre leurs fongs détours avant que de pañér dans les tuyaux ferpentans qui la conduifent aux papilles.

H n’eft pas toûjours aifé d'apercevoir tout cet appareil de vaiffeaux dans le rein de l’homme, il faut, comme nous Favons dit, choïfir les circonftances les plus favorables : M. Ferrein a cherché à revoir les mêmes organes dans les reins de différens animaux, &' il n'en a point trouvé, parmi les

uadrupèdes, de plus propres à bien voir toute la ftruélure de nous avons parlé, que ceux du cheval mortifiés peñ- dant quelques jours, & enfuite macérés; ils offrent à la vüe armée d'une forte loupe, & aidée de la lumière la plus vive du foleil , tout l'appareil dont nous avons parlé.

Mais de tous les animaux que M. Ferrein a difféqués, il n'en eft point dans lefquels on puiffe voir la texture intérieure des reins avec tant de facilité que dans les oifeaux, fur-tout fi on a-foin de les laïfler mortifier plufieurs jours, & qu'on ne travaille à cet examen qu'un peu avant que les entrailles commencent à fe corrompre.

Les reins ne font pas difpofés dans ces animaux comme dans les quadrupèdes, ils font fort. longs, fort larges, & placés immédiatement fous la partie de Fos du dos qui s'étend depuis la poitrine de l’oifeau jufques au croupion: ces reins n'ont point de baflin, & l'uretère a un très-grand nombre de branches qui partent des différentes parties de ces reins, le long defquels elle eft comme couchée; toutes ces bran- ches rameaux font ici la même fonction que les calices dans les autres animaux.

On retrouve dans les reins des oïfeaux les mêmes tuyaux que dans les reins l'homme, mais cependant avec quel. ques différences; les vaifleaux corticaux, par exemple, y font différemment repliés & entaflés les uns fur les autres : les vaifleaux médullaires au contraire font difpofés par faifceaux, & fans faire que de légères inflexions, les uns & les autres ne laiffent entr'eux que l'efpace néceffaire pour loger les vaif- feaux fanguins & une petite quantité de parenchyme. On pourreit cependant fe tromper fur leur nombre, on voit

N ii

102 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYaALE

dans quelques reins des efpaces qui en paroïffent dénués, & cette apparence vient probablement de ce que la matière blanche qui les rend ordinairement fenfibles, ne s'y elt pas arrêtée; mais fi on examine d’autres reins de la même efpèce, on retrouvera ces mêmes endroits aufir remplis de vaifleaux que les autres. Les tuyaux des reins des oifeaux different encore de ceux du rein de homme en un point bien effen- tiel; ces derniers font par-tout de même calibre, au lieu que chez les oifeaux, les tuyaux qui compofent le rein, forment en s'uniflant, des efpèces de troncs qui groffifient peu à peu, & fe terminent enfin aux vaifleaux médullaires qui n’en font

une continuation.

Une autre différence du rein des oifeaux d'avec Île rein humain; eft que les tuyaux médullaires y font plus gros que les corticaux, au lieu que dans Fhomme ils font au contraire plus fins; ils fe réuniflent en avançant vers les branches des uretères, & à mefure que leur nombre diminue, leur calibre

. augmente.

Les tuyaux de la fubflance médullaire fe terminent dans Yhomme, non immédiatement à la papille, mais dans des efpèces d’enfoncemens qui répondent aux ouvertures dont elle eft percée; dans les oifeaux il n'y a point de papilles, mais les troncs des vaifleaux médullaires fe rendent dans quelques petits troncs très-courts, qui communiquent aux branches Furetère, & qui font la fonétion de ces enfon- cemens dont nous venons de parler.

Jufqu'ici nous n'avons prefque parlé que de Ia ftruéture du rein, qui, comme on a vü, eft prefque entièrement compofé de tuyaux blancs ; il étoit bien naturel de penfer que la même compofition vafculeufe auroit lieu dans d'autres parties : M. Ferrein l'avoit déjà obfcurément aperçüe dans le foie humain, & la comparaifon qu'il a faite du foie & du rein des oifeaux, la confirmé dans cette opinion; il a remarqué dans le foie de plufieurs oifeaux, des parties fi femblables à celles de leurs reins, qu'il lui eft quelquefois arrivé de prendre les unes pour les autres: il eft vrai que

BRErSMNS.C I 'E. Nrcieté 103 les vaifleaux du foie qui compofent ces parties, ne font pas à beaucoup près auffi aifés à voir que ceux du rein; mais enfin on en aperçoit quelques-uns, &, ce qui eft effentiel, ceux qu'on aperçoit, paroiffent difpofés de la même manière que ceux du rein humain : il y a donc lieu de croire que lanalogie qui fe foûtient dans tout ce que nous pouvons voir, fe foütient aufli dans ce que nous ne voyons pas.

M. Ferrein a obfervé encore les mêmes chofes dans les caplules atrabilaires de l’homme ; ces capfules ont, comme les reins, une fubftance corticale qui en enveloppe une médul- laire, & cette fubftance corticale fe divife & fe fubdivife en plufieurs lobules, dans lefquels on aperçoit des particules toutes femblables à celles qu'on remarque dans le foie de l'homme & dans celui des oifeaux; ces particules ne font nullement des glandes, & M. Ferrein même a bien cer- tainement à la furface interne de cette partie corticale, des vaifleaux cylindriques différemment repliés & entaflés les uns fur les autres.

Tous les organes dont nous venons de parler, font extré- mement déliés & difficiles à découvrir; ce n’eft qu'en pro- fitant de toutes les circonftances favorables, qu'on y peut parvenir. Pour prévenir l'embarras dans lequel fe pourroient trouver ceux qui voudront vérifier par eux-mêmes les décou- vertes de M. Ferrein, il a joint à fon Mémoire une inftruc- tion qui contient toutes les chofes auxquelles il eft néceflaire d'avoir égard, & que fon travail & fon expérience lui ont apprifes;: i épargne généreufement la même peine à ceux qui voudront fe livrer à ces recherches. y

De tout ce que nous venons de dire, il réfulte que la

- ruéture des vifcères nommés glanduleux a été jufqu'ici bien

peu connue; Fidée des vaiffeaux fanguins, dont on veut, après M. Ruylch, que la plufpart des organes foient compo- és, a écarté celle d’une fubftance particulière qui conftitue {cle une grande partie du corps humain, & a fufpendu par des recherches qui certainement auroient perfectionner Vana- tomie, l'économie animale & la médecine. Un des grands

104 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE inconvéniens des fyflèmes eft que non feulement ils ne mènent pas toûjours à la vérité, mais que fouvent même ils en cachent en quelque forte les routes, & empêchent d'y parvenir.

OBSERVATIONS ANATOMIQUES. Es

N jeune homme d'Auxerre avoit eu de tout temps la

vüe très-tendre, & l'ouverture des prunelles placée excentriquement & tout au haut de Firis ; une extrême faci- lité d'apprendre dont il avoit été pourvü par la Nature, engagea fes parens à le mettre au collège, & il ne fe porta aux études qu'avec trop d'ardeur: tout-à-coup il s'aperçut d'un petit nuage mouvant qui paroïfloit fur fes livres, & lempéchoit d'en diftinguer les caraétères ; il prit cet accident pour un éblouiffement , mais voyant qu'il ne fnifloit point, il's'adreffa à M. Berryat, Médecin de cette ville, & Correfpondant de l'Académie. L'œil droit, qui étoit le malade, ne lui parut atteint que d'une légère ophthalmie, à laquelle on ne pouvoit attribuer le nuage en queftion, du refte nulle tache à fa cornée , qui paroifioit parfaitement faine & entière; cepen- dant, à force d'examiner l'œil malade, il aperçut dans la chambre antérieure, & au milieu de l'humeur aqueufe qui la remplit, un corps rond, {olide, d’une certaine épaifieur, mais tranfparent, & par-à prefque imperceptible ; il fe con- tenta pour lors de prefcrire les remèdes néceffiüres pour faire difparoître linflammation , efpérant découvrir enfuite avec plus de facilité & de certitude ce qu'étoit le mal, & ce qu'on pourroit faire pour y remédier. Le malade étant venu pour

quelques affaires à Paris, fuivit le confeil que M. Berryat

lui avoit donné, & s'adreffa à M. Ferrein; celui-ci eut bien- tôt reconnu que le corps étranger étoit le criftallin même forti de fa place ordinaire, & paffé dans la chambre anté- tieure de l'œil : les eflorts que la fituation fingulière des

prunelles

corinne

: 4 5 Le

DUEUSNASILC 1 EN! CHEUS 10 prunelles de ce jeune homme l'avoit forcé de faire pour lire affidument, l'avoient probablement déchatonné , il avoit été enfuite chaflé," par l'ouverture de la prunelle, jufque dans la chambre antérieure il fe trouvoit, & l’efpèce d'immo- bilité dans laquelle on le voyoit, ne venoit que de la pref- fion que la cornée exerçoit fur lui. M. Bérryat, informé par le malade, à fon retour, de cet accident fi fingulier, examina l'autre œil, & y furprit le criftallin qui ne failoit encore que commencer à fortir; pour lors l'ophthalmie étoit diflipée, & le malade prefloit beaucoup pour que l'on attaquät direc- tement le mal qui offenfoit fa vüe ; mais M. Berryat lui fit comprendre qu'il pouvoit y avoir du danger à tenter la réfo- lution du criftallin, & quil valloit mieux fe contenter d'é- loigner Finflammation par des remèdes éonvenables, & fe repofer du refte fur la Nature. Ce fage confeil fut fuivi du fuccès le plus complet; fans employer d'autres remèdes qu'un régime convenable, & un emplâtre véficatoire, l'œil le plus malade fe trouva beaucoup mieux ,. mais pendant ce même temps le criftallin de autre acheva de pafler dans la chambre antérieure, & les deux yeux fe trouvèrent atteints de la même maladie ; cependant le même régime & Je même emplâtre continuèrent à produire leur effet, les deux criftallins s'éclair- cirent & diminuèrent de volume, en forte qu'ils ne s’éten- doient plus fur les pupilles: Le malade voyoit, avec cette fingulière circonftance que les objets éclairés du {oleil étoient ceux qu'il voyoit le moins; ils afleétoient fes yeux comme le foleil regardé direétement affecte des yeux bien fains; mais ayant négligé lemplâtre véficatoire, & s'étant expolé à un foleil trop vif, l'œil droit fut faifi d’une inflammation qui réfifta à tous les remèdes, & le malade perdit ab{olu- ment l'ufage & la vûe de cet œil: le criftallin devint en huit jours abfolument opaque, & fi gros qu'il empliffoit toute la chambre antérieure ; heureufement autre œil n'eut point de part à cette inflammation, & il eft demeuré à peu près dans le même état. Le malade peut lire fans verres les titres des livres, il diftingue de même tous les objets plus

Hif 1749. .

106 HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE gros, pourvü qu'ils ne foient pas trop éclairés; mais pour ceux qui font plus petits, il ne les aperçoit en aucune façon, S& les objets trop lumineux continuent à l'éblouir : ce fait mérite d'autant plus d'être remarqué, qu'il paroît jufqu'à préfent unique, & qu'il eft par conféquent utile qu'on en connoifle la poflibilité. INA

M. de Reaumur a fait voir un œuf de poule dont la coque étoit comme hériflée d'une infinité de petits corps blancs de la grofleur à peu près d'un grain de millet: ces petits corps, vüûs à la loupe, avoient la figure d'un œuf; ils étoient revêtus d'une coque de la même nature, & on trouva dans tous ceux que l’on ouvrit, une efpèce de mucilage femblable à du blanc d'œuf. d

EIRE

Une petite fille, de Breft, êgée de fept ans en 1740, avoit eu à l’âge de cinq ans la petite vérole, à la fuite de laquelle il fe fit un dépôt critique à la région iliaque droite, environ deux travers de doigt au deffus de la crête de Vos des iles ou de la hanche : la misère dans laquelle vivoient les parens de cet enfant, les empêcha d'en avoir le foin né- ceflaire, & pendant la maladie, & pendant la durée de ce dépôt ; comme cependant le volume de la tumeur étoit con- fidérable & faifoit fouffrir l'enfant, ils y appliquèrent un emplâtre garni d'un onguent qu'une Demoilelle de Breft prépare & diftribue gratuitement aux pauvres; la tumeur souvrit dans les vingt-quatre heures, & il en fortit beau- coup de pus : on continua les emplâtres, & au bout de quel- ques jours on s'aperçut qu'il {ortoit, outre le pus, des vents & des excrémens, preuve évidente que l'inteftin étoit percé. Voyant après un long temps que l’'ulcère ne fe fermoit point, ils abandonnèrent les emplâtres, & fe contentèrent d'y appli- quer un linge blanc ; quelque temps après on vit {ortir par lorifice de l'ulcère un petit cordon de poils comme des cheveux, cependant la Nature acheva la guérifon, & lulcère fe ferma. Il y avoit environ fept mois qu'il étoit cicatrilé,

DPENS M SIC'T E NCIS 107 lorfque les parens s’aperçürent qu'il fortoit par anus un cordon de poils femblables à des cheveux ; au commence- ment, cs poils fortoient & rentroient, enfuite ils ne ren- trèrent plus entièrement, & il en pafloit toûjours {a lon- gueur de trois pouces : ce cordon de cheveux a environ un pouce de grofleur , il remplit tout lorifice de fanus, & caufe de temps en temps à l'enfant des difficultés d’aller à {a felle. La malade étant en cet état, M. de Courcelles, qui a écrit ce fait à M. du Hamel, & qui lui a fait voir cet enfant dans un de fes voyages à Breft, fut confulté par les parens; le récit qu'on lui fit de la maladie & de tout ce qui s’étoit paflé, lui donna lieu de foupçonner que ces poils tiroient leur origine de la peau voifine de la cicatrice, & que c'étoit les mêmes qui avoient paru par l'ouverture de l'ulcère ; les panfemens les avoient déterminés à fe porter vers la cavité de linteftin, la chaleur & l'humidité du lieu les avoit fait végéter extraordinairement, &es excrémens les avoient en- traïnés vers l'anus. En effet, M. de Courcelles obferva que lorfqu'on tiroit le cordon en dehors, l'endroit de la cicatrice s'enfonçoit, & qu'en y portant une main, on y reffentoit toutes les petites fecoufles que l’on donnoit au cordon ; il faut en ce cas que ce cordon de cheveux ait plus de demi- aune de long pour fuivre toutes les circonvolutions de l'in- teftin depuis la cicatrice jufqu'à l'anus: on pourroit peut-être foupçonner que ces cheveux feroient attachés à une appen- dice charnue qui fe feroit étendue: dans F'inteftin', à peu près comme les crins de la queue des chevaux font attachés à fa partie charnue de cette queue, ce qui diminueroit extréme- ment leur longueur; mais, quelque attention que M. de Cour- celles & M. du Hamel y aient apportée, ils n'ont rien apercevoir qui dénotàt cette appendice. L'enfant fe porte bien d’ailleurs, & ne reffent d'autre incommodité que d'avoir quelquefois de la difficulté d'aller à la felle, Jorfque les che- veux fe collent à la marge de l'anus, & empéchent par - la fortie des excrémens ; mais on y remédie en fomentant la partie avec de l'eau tiède. Cette obférvation femble indiquer

O ji

108 HisToiRe DE L'ACADÉMIE ROYALE

que les poils qui font répandus fur toute l'habitude du corps, font de même nature que les cheveux, & n’en different que par leur diflérente manière de végéter, à peu près.comme une plante diflere d’une autre de la même efpèce fuivant le terrein gras ou maigre elle fe trouve ; elle prouve encore d’une manière bien certaine, que les plaies de l’'inteftin ne font ni mortelles ni incurables.

IA re

M. le Comte, Médecin à Rethel, a envoyé à l’Académie le détail fuivant, de l'accident arrivé à M. le Chevalier de * * * Brigadier des armées du Roï, & de la manière dont il a été

uéri.

Le 10 Janvier 1749, M. le Chevalier de * * * reve- nant de la chaffe, fut attaqué par un gros chien de cour qui s'élança d'abord fur lui, le mordit au bras droit, & le couvrit de bave & d’écume, fans cependant qu'il y eüt de plaie aux endroits mordus, mais feulement une douleur fup- portable qui dura jufqu’au lendemain au foir. Le Piqueur de M. de *** qui le fuivoit, & qui vit le chien venir à lui en chanchelant & écumant, jugea que cet animal pouvoit être enragé, & le tua d'un coup de fufil.

M. le Chevalier de * * * avoit prefque oublié cet acci- dent, lorfque vingt-un jours après, étant encore à la chañe, il fe trouva mal & perdit connoiffance; fes gens l'aflurèrent que pendant le temps de fa fyncope ils lui avoient faire des grimaces extraordinaires : cette circonftance lui donna quelques foupçons, qui cependant ne lempèchèrent ‘pas d'aller fouper hors de chez lui, il ne rentra qu'à environ une heure du matin, fe coucha en arrivant, & s’endormit ; deux heures après il réveilla toute la muifon par des cris affreux, & ceux qui coururent à fa chambre le trouvèrent hors de fon lit fans connoïffance, & étendu fur le plancher : ces fymptomes ne firent que trop aifément juger de quelle maladie il étoit atteint, & lui-même pria qu'on fattachit ; cette précaution étoit fi néceflaire, que moins de trois heures après il effuya un fecond accès plus violent que le premier,

MNENENNS C1 E N'CNESS 109 & il fortoit du quatrième lorfque M. le Comte arriva. Le malade lui rendit compte de ce qui s'étoit paflé, & finit par lui dire qu'o lui préparoit un remède avec lequel il avoit guéri non feulement des chiens mordus par d’autres chiens enragés, mais encore plufieurs perfonnes , entr'autres une fille de dix-fept ans, mordue par un bœuf enragé, & qui avoit eu déjà deux accès. M. le Comte craignant qu’un plus long difcours ne fatiguët Ie malade, l'interrompit pour lui demander fi après fes foiblefles il ne prenoit pas quelques liqueurs fpiritueufes, comme de l'eau des Carmes ou autres ; à ces feuls mots d'eau & de liqueur le malade pälit, & fon vifage fut agité de convulfions, qui pourtant n’eurent aucune fuite & ne durèrent qu'une minute ; cette horreur pour les liquides, qui, comme on fait, eft tellement un des fignes caraétériftiques de la rage, que les anciens Médecins Ia nommoient de 4ydrophobie, ou peur de l'eau, fit voir à M. le Comte que la maladie n'étoit que trop bien caradérifée ; & quoiqu'il n'eût pas grande confiance dans la vertu du remède, comme cependant il n’en connoifloit point d’autres defquels il püt attendre un effet plus für & plus avantageux, il confeilla à M. le Chevalier de * * * de s'en fervir.

Ce remède confifte à faire prendre à ceux qui ont été mordus, mais qui n'ont encore efluyé aucun accès de rage, quatre gros de poudre d’huître mâle calcinée au feu, dans un demi-{etier de vin blanc, & de réitérer le remède au bout de vingt-quatre heures ; pour ceux qui ont déjà efluyé des accès, il faut le leur faire prendre trois fois, de douze heures en douze heures, toüjours à la même dofe, mais dans un véhi- cule différent; au lieu de méler les quatre gros de poudre avec du vin, on les mêle avec trois œufs frais, dont on fait une omelette; on ne doit pas boire en la mangeant, ni même pendant tout le temps qu'on fait le remède.

M. le Chevalier de *** Je prit effetivement, quoi- : qu'avec beaucoup de peine & de répugnance, ce qui n'em- pécha pas un cinquième accès, qui fut fuivi de huit autres dans l'efpace de feize heures.

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V. les M. p- 210.

p. 385-

110 HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

M. le Comte, qui en a été le témoin, dit que tous ces accès étoient annoncés par le malade même, qui difoit d'une voix étouflée, retirez vous; aufli-tôt fes yeux fe renverfoient & s'enflammoient , fon vifage & le 1efle de fon corps étoient agités d'affreufes convulfions, il cherchoit à mordre de tous côtés & aboyoit comme un chien, la bouche s'emplifloit d'écume, la voix devenoit rauque & prefque éteinte; à tous ces accidens fuccédoit une foiblefle dans laquelle le malade ne paroifloit pas différent d'un mort, & qui fe terminoit par une grande inquiétude qu'il témoignoit d’avoir mordu quelqu'un pendant fon accès.

I y a cependant bien de fapparence que le remède avoit fait fon effet, car fans cela tant & de fi violentes fecouffes auroient emporter le malade, qui cependant en a été quitte pour 1efler pendant quatre mois dans une impuiflance pref- que abfolue de marcher ni de faire aucun mouvement, & les eaux de Plombières ont mis la dernière main à fa gué- rifon. L'importance de la matière a déterminé l Académie à publier l'hiftoire de cette guérifon avec toutes fes circonf- tances.

OUS renvoyons entièrement aux Mémoires, L'Ecrit de M. le Monnier, Médecin, fur les mau- vais effets d'une efpèce de Champignon. Et les Oblfervations anatomiques pour fervir à l'hiftoire

du Fœtus : par M. de la Sône. .4

LE 4°, Lr

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1 DES ScieENcESs. III 20:0:0:0:0:0:0:0:010:0:0:0:0:0:0:0:0:0:010:0:010:01010: 010100: CELL X Mi E.

SUR UNE NOUVELLE ESPECE DE TEINTURE BLEUE,

À Teinture enrichit la fociété d’une infmité de chofes

utiles & agréables; c’eft à elle qu'on doit en partie ces belles tapifferies qui peuvent aujourd’hui le difputer à a Peinture, & qui ont même fur elle avantage d'une plus grande durée & d’une plus grande flexibilité: fans les couleurs que l'art de la Teinture:a imprimer folidement aux laines & aux"foies qui les compofent, ces chefs-d'œuvre de l'art que nous admirons, n'auroient jamais être exécutés.

Les couleurs de la teinture font extrêmement différentes de celles quon emploie dans la Peinture; ces dernières ne font ordinairement que des poudres qui n’ont d'autre adhé- rence à Ja toile ou aux autres corps fur lefquels on les applique, que celle que leur donnent Fhuile ou la gomme avec lef- quelles elles font mêlées.

Comme les couleurs de la teinture doivent tenir bien plus folidement fur les corps auxquels elles font appliquées, il faut que la matière colorante foit divifée en parties extré- mement fines, que ces parties puiflent s'enchäffer en quelque (rte dans les molécules d’un fel moyen, dans la folution duquel on trempe l'étofle, que ce fel foit indifloluble à l'eau froide, & indeftruétible par l'aétion de Fair & du foleil.

: On voit par-là que le plus grand nombre des couleurs de a Peinture ne peuvent être employées à teindre des étoffes;

indépendamment de la groffièreté de leurs molécules, elles pourroient encore n'avoir pas la propriété de fe joindre au cryftal de tartre ou au tartre vitriolé, qui font les deux feuls {els auxquels on connoiffe la propriété d'être inaltérables à Veau & au foleil.

ET AT SD SUR TR ART GET

4%

V. les M, P- 255-

112 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

H y a pourtant quelques couleurs qui peuvent évalement fervir à l'un & à l’autre de ces arts; la cochenille, par exemple, fournit également le carmin & écarlate, mais ce nombre eft certainement le plus petit, & c'eft un avantage confidé- rable pour la teinture, que d’acquerir des couleurs nouvelles, fur-tout f1 elles doivent être plus brillantes & aufli folides que celles qu'on avoit déjà...

En voici une dont la Chymie avoit enrichi la Peinture depuis quelques années, dont lhabileté de Mrs Geoffroy

avoit en quelque forte dérobé la compofition à la Prufle, &:

que M. Macquer tranfporte de la Peinture, dans laquelle feule on en avoit fait ufage, à la Teinture.

Le bleu de Prufle dont nous voulons parler ici, eft com- pofé de la terre de lalun &c des parties ferrugineufes du vi- triol verd, précipitées par un {el alkali auquel on a uni, par le moyen du feu, le phlogiftique ou principe inflammable.

Ceite compofition parut à M. Macquér porter tous les caractères d’une teinture de bon teint; en eflet la diflolution d'alun & de vitriol devoit être un mordant très-propre à difpofér les pores des étofies à recevoir les atomes colorans; & la fécule qui fe précipite lorfqu'on méle la diffolution des fels avec la lefive alkaline, étoit fuffifamment fine & déliée, & très-propre à entrer dans la compofition du tartre vitriolé,

ue Funion de l'acide vitriolique avec l'alkali fixe contenu dans la leffive, ne pouvoit manquer de former.

Pour y parvenir, il prit le parti de faire fur l'étoffe même, les différens mélanges néceflaires à la compofition du bleu

de Pruffe; il fit bouillir pendant une heure, un écheveau de

fil, un de foie, un de coton, & un morceau de drap blanc, dans {a diflolution d’un & de vitriol; enfuite il les trempa dans la leffive alkaline chaude & prète à bouillir: il fe fit une efervelcence, la liqueur parut verte, & les échantillons en fortirent teints d’une couleur grifatre ; mais ayant été plongés dans de l'eau bouillante, dans laquelle il y avoit affez d'acide vitriolique pour la rendre aigrelette, il s'excita promp- tement une nouvelle effervefcence, la liqueur devint bleue,

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HAEMSNS: C 1 E NefEMS II & les échantillons en fortirent teints du plus beau bleu, à cela près que la liqueur n'étoit égale que fur les écheveaux, & que le drap étoit teint très-inégalement, & de plus un peu rude au toucher.

Cette couleur réfifta peu au débouïilli du favon auquel M. Macquer fe hâta de la foumettre, mais elle foûtint parfai- tement celui de lalun; ce qui lui fit voir qu'elle étoit de bon teint pour la laine & pour la foie: un fi favorable fuccès l'encouragea à fuivre fon entreprife, étant une fois afluré de la bonté de la couleur, il avoit alors pour objets de fon travail, de trouver moyen de l'appliquer également fur toutes les parties de l'étoffe, de rendre ceite étoffe douce au tou-

* cher, de pouvoir donner à volonté les différentes nuances

de bleu qu'on defre, enfin de travailler avec Île moins de frais & de dépenfe qu'il feroit poffible.

H tenta d'abord de varier le procédé en faïfant bouillir l'étoffe dans la leffive alkaline avant de la paffer dans la {o- lution d'alun & de vitriol, mais il fut bien-tôt obligé de renoncer à cette manière de teindre : la couleur n’en étoit pas plus belle, & l'alkali ne trouvant point fur l'étofle, d'acide vitriolique avec lequel il püt fe joindre, & qui füt capable d'arrêter fon action, en avoit confidérablement altéré la bonté.

Cette méthode n'ayant pas réuffi, M. Macquer penfa à employer le bleu de Prufle tout fait, comme on emploie les autres ingrédiens des Teintures; pour cela, après avoir difpofé fon étoffe en Ia faifant bouillir à l'ordinaire dans une diflolution d’alun & de tartre, il fa paffa dans un bouillon d'eau chargée de bleu de Pruffe : elle s'y teignit, & même très-également, elle étoit douce au toucher; mais la nuance étoit peu foncée, & de quelque façon qu'il ait s'y prendre, il lui a été impoffble de la rendre plus forte.

En chargeant lalkali fixe de phiogiftique, beaucoup plus

_ que dans l'opération du bleu de Prufle ordinaire, & en . employant une diffolution d'un & de vitriol auffi chargée

“qu'elle le puifle être, on obtient une couleur belle & bien

+ foncée; mais la quantité des {els altèrent la bonté & la

Hifl. 1749. AE

114 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE {olidité de l'étofle, le feul remède qu'a trouvé M. Macquer à cet inconvénient, eft d’afloiblir la leffive alkaline & les autres liqueurs falines, avec quatre fois leur poids d’eau : en trempant plufieurs fois les échantillons dans ces eaux, fuivant l'ordre du premier procédé, on parvient par ces teintures réitérées, à donner à l’étofie telle nuance de bleu qu'on veut, fans altérer fa bonté.

Il faut obferver de tremper à chaque opération partiale létofle dans la liqueur acide, & de remettre de nouveaux fels, tant dans la leffive, que dans la diflolution d'alun & de vitriol, & dans la liqueur acide; il faut même, fi le nombre d'opérations partiales va jufqu'à fix, renouveler toutes les li- queurs à la troifième, fans quoi les immerfions réitérées de l'étofie les méleroient, & l'effet n'en feroit pas fufhfant.

Si on fuivoit exactement dans cette teinture, les procédés indiqués pour faire le bleu de Prufle, elle pourroit devenir d'un trop haut prix ; heureufement on peut fubftituer fans aucun inconvénient d'autres drogues à celles qui font trop chères, il y en a même qu'on y fubftitue avec avantage du .côté de la couleur.

La nouvelle teinture eft autant au deflus du bleu de pañtel ou d'indigo, que l'écarlate eft au deflus du rouge de garence; elle teint l'étofle jufque dans le cœur, ce que ne fait pas la teinture bleue ordinaire; elle eft folide, & réfifte autant à fair & au foleil qu'aucune autre teinture; elle n'altère point la bonté de l'étofie, quand on la fait avec les précautions que nous avons indiquées : M. Macquer s’eft afluré de ce dernier point en fufpendant des poids à des fils, jufqu'à les faire rompre; ils en ont toüjours porté autant après avoir été teints qu'auparavant ; enfin les expériences de M. Macquer donnent les moyens de rendre cette teinture peu coûteule, toutes les drogues qu'il y fait entrer étant à très-bon marché.

Voilà donc l'art de la Teinture enrichi d'une nouvelle efpèce de couleur plus belle & plus brillante que celle qu'elle avoit; il ne s’agit plus que de la mettre en ufage & de tra- vailler en grand. M. Macquer offre fes coneils & fes avis

à

DES" 1S;c 1 EN: CES. 1 . à ceux qui voudront l'entreprendre; fon but eft de rendre _ fa découverte utile autant qu'elle pourra l'être, & il fe fait un plaifir d'y contribuer en Phyficien & en citoyen.

ie année parut un Ouvrage du même M. Macquer, intitulé, E'lémens de Chymie théorique.

Le but qu'il s'eft propofé dans cet Ouvrage, a été de développer les principes fondamentaux de la Chymie, d’une manière claire & précile, tant en faveur de ceux qui veulent s'adonnét à l'étude de cette fcience, que de ceux qui ne veulent qu'en prendre une idée nette, quoiqu'abrégée; dans cette vüe il a réfervé pour un autre Ouvrage la pratique de la Chymie, & s'eft contenté de renfermer dans celui-ci {a

i partie théorique.

Pour parvenir à la netteté qui donne le prix aux Ou-

vrages de cette efpèce, M. Macquer s'eft impofé la loi de ne Ê fuppofer aucune connoiflance chymique dans fon leéteur, & de le conduire des vérités les plus fimples aux plus compofes.

Suivant cet ordre, il commence fon Ouvrage par l'examen des fubftances les plus fimples, & qu’on regarde comme les élémens qui entrent dans la compofition de toutes les autres : ces élémens font, felon lui, au nombre de quatre, l'air, l'eau, la terre & de feu, non qu'il regarde ces corps comme 2bfo- lument fimples, mais parce qu'ils font au moins {es plus fimples que nous connoiflions, & qu'il n’a pas été jufqu'ici poflible à Y'art de les décompofer.

L'air & l'eau font des principes volatils, c’eft-à-dire que Yaétion du feu les enlève aux corps qui les contiennent, & les fait difliper en vapeurs; la terre au contraire réfifte à fon action quand elle eft pure, nous difons quand elle eft pure, car il faut bien fe fouvenir que la terre dont il eff ici queftion n'eft pas celle qui eft propre à la végétation: cette dernière n'eft nullement un corps fimple, mais un compofé d'un très-grand nombre de matières; on n'appelle en Chymie du nom de terre que ce qui refte d'un corps lorfqu'on lui a fait éprouver l'action du feu la plus vive,

Pi

116 HisToIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

Le feu eft le feul élément a@if; nous ne connoiflons de feu proprement dit, que celui des rayons du foleil, mais ce feu pur & élémentaire ne peut être retenu par aucun corps, il es traverfe tous avec facilité, & il échapperoit toûjours à nos yeux s'il nempruntoit, pour ainfi dire, un corps pour fe rendre vifible: de-1à naît la diftinction entre le feu pro- prement dit, & ce que les Chymiftes appellent phlogiflique matiere inflammable , qui neft autre chofe que le feu élémentaire joint à une fubflance qui nous elt inconnue, Ce n'eft que fous cette dernière forme que le feupeut en- trer dans la compofition des corps; car fous celle de {eu élémentaire, il s'échapperoit par tous leurs pores, & n'y pourroit être retenu.

Lorfque deux fubftances fe trouvent contigues lune à l'autre, il arrive quelquefois qu'elles fe joignent, & alors on dit qu'elles ont entre elles un rapport une affinité; fr, dans cet état, on prélente à ce nouveau compolé une troi- fième fabflance qui foit plus propre à s'unir à lune des deux premières que celle qui y étoit jointe, le corps fe décom- pofera, & da nouvelle fubflance suniflant avec celle qui lui eft la plus propre, il {e formera un corps différent du pre- mier. C’eft-À le fameux pr incipe des affinités, fr connu aujour- d'hui dans la Chymie, principe duquel la caufe phyfique eft jufqu'à préfent inconnue; mais fr par ce défaut il perd Fa- vantage de pouvoir fervir à l'explication des phénomènes, on ne peut au moins lui contefler celui de fervir de règle, & en quelque forte de fil pour fe conduire dans le labyrinthe fouvent embarraflant des opérations chymiques, & d’être le principe de fait & d'expérience le plus fécond qui foit peut- être dans toute la Phyfique.

De l'union des élémens dont nous avons, parlé, il naît d’autres corps moins fimples qu'eux, mais qui font encore eux-mêmes principes à l'égard des autres corps plus com- pofés ; M. Macquer nomme ces corps principes fecondaires.

De ce nombre font les fubftances falines, qui ne font, felon lui comme fuivant Becker & Stahl, qu'un compofé

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DNE SMS: C 1 E NACRE 117 de terre & d'eau; ce n'eft pas qu'à toute rigueur on puifle

aflurer qu'il n'entre pas autre chofe dans leur compofition,

mais cet autre principe eft inconnu jufqu’à préfent.

La différente manière & la différente proportion fuivant lefquelles l'eau & la terre fe combinent pour former les fels, conftituent leur différente nature; les acides contiennent plus d’eau & moins de terre, les alkalis plus de terre & moins d'eau, & la jufte combinaïfon des uns & dés autres forme les {els neutres.

On ne connoit dans la Nature que trois acides minéraux, & celui qu'on retire des fubflances végétales ; il y a bien de l'apparence que ces acides ne font au fond que le même combiné avec différentes fubftances.

La première efpèce d'acide eft le vitriolique, ainfi nommé parce qu'on le retire en plus grande abondance d’une efpèce de minéral nommé virriol, que de tout autre corps: quand cet acide eft mêlé avec peu de phleome, on le nomme Aile de vitriol, non qu'il ait aucune des propriétés de l'huile, mais à caufe d'une certaine onétuofité qu'il fait apercevoir ; fr au contraire il eft mêlé avec beaucoup d'eau, il fe nomme efprit de vitriol; enfin lorfqu'il eft privé de phlegme au point de n'être plus fluide, on le nomme Auile de vitriol glaciale.

L’acide vitriolique peut fe combiner avec différentes fub- flances, & former avec elles des compofés différens; uni avec une terre abforbante ou craie qui ait fouffert Faétion du feu, il forme un fel qu'on appelle 44m; combiné avec certaines terres , il forme un {el pierreux qu'on nomme /é/é- nite; uni avec un fel alkali fixe, il en forme un autre appelé tartre vitriolé ; enfm uni avec le phlogiftique, il forme ce qu'on appelle du foufre commun ; toutes fubftances qui ont des propriétés très-différentes dont M. Macquer donne une idée, & qu'on peut varier extrêmement, fuivant les différentes affi- nités qu'a l'acide avec ces différentes bafes.

. On ne fait pas au jufte en quoi l'acide nitreux differe eflentiellement de celui du vitriol : il eft affez probable que c'eft le même acide, mais combiné, par le moyen de {a

Pïi

118 HisToIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE putréfaction , avec une certaine quantité de phlogiftique ; il peut s'unir avec une terre ablorbante, & alors il donne par la criftallifation des figures rhomboïdales irrégulières ; joint avec le limon , il forme un autre fel moyen qui ne fe crif- tallife point, & fe fond à l'humidité de fair; mais fr on préfente à l'acide nitreux un alkali fixe, il abandonne ces bafes terreufes pour former avec ce dernier un nouveau fef neutre qu'on nomme #itre falpétre, qui fe criftallife en longues aiguilles, & excite une impreffion de froid fur la langue.

Nous avons que lacidewvitriolique s'unifloit avec le phlogiftique pour former le foufre ; facide nitreux s'y unit auffi, il faut même qu'il ait avec cette fubftance une affinité plus grande qu'avec l'alkali fixe; car dès qu'il touche le phlo- giftique allumé, il abandonne fa bafe, s'entlamme, brûle & fe diffipe avec grand bruit: cette inflammation fubite fe nomme ulmination détonnation, elle eft un des caraétères diftinc- tifs de l'acide nitreux.

L’acide nitreux féparé de fa bafe, & joint à un peu de phleume, forme une liqueur d’un jaune rouge qui envoie inceflamment des vapeurs de la même couleur & d'une odeur forte & pénétrante, on la nomme cfprit de nitre fumant, ou eau forte citrine.

Le troifième acide eft celui qu'on tire du {el marin; on ignore auffi en quoi il differe du vitriolique: quelques Chy- mifles prétendent que cette diférence ne confifte que dans l'union d'une petite quantité d'une terre qu'ils ont nommée mercurielle. Quoi qu'il en foit, cet acide a, conme les autres, une-moindre affinité avec les terres abforbantes qu'avec l'al- kali fixe avec lequel il forme des cryflaux cubiques; mais apparemment que fon afhnité avec cet alkali eft moindre que celle des acides vitrioliques & nitreux, car ils le décom- pofent & forment avec fa bufe alkaline, le premier, un {el neutre connu fous le nom de /e/ de Glauber, & le fecond, un nitre qui differe du nitre ordinaire en ce qu'il attire l'hu- midité de Fair, & par la figure de fes cryflaux qui font de

DIEUS MS, c 1 E NC UNS 11 vrais parallélépipèdes ; d'où on peut conclurre que l'alkaïi qui fert de bafe au fel marin, eft un peu différent de l'alkali fixe ordinaire: cette efpèce de nitre fe nomme gradrangulaire.

L’acide du fel s'unit au phlogiftique comme acide vitrio- lique, mais l'efpèce de foufre qu’ forme eft fingulière, elle prend feu d'elle-même dès qu'elle eft expolée à l'air; c’eft le fameux phofphore connu fous le nom de pho/phore de Kunkel ou d'Angleterre.

On peut aufli avoir l'acide du fel marin joint à un peu de phlegme qui lui donne Ia forme de liqueur; cette liqueur eft d'un jaune citron, elle jette continuellement des vapeurs blanches fort épaifies, d’une odeur aflez agréable, & qui approche de celle du fafran : on le nomme e/prit de [el fumant.

Si au lieu d’unir lacide du fel marin avec fa propre bafe, on l'unit à un alkali fixe ordinaire, il naît de ce mélange un autre fel neutre connu fous le nom de /e/ fébrifuge de Syhius.

Lorfque les pierres ou les terres ont fouffert l'action du feu jufqu'à un certain point fans entrer en fufion, ce qui refte fe nomme chaux ; nous difons fans entrer en fufion, car toutes les terres fe divifent en général en fufibles & en cal- cinables : les premières ne peuvent fupporter une violente action du feu fans pafler à l'état de fluidité, & enfuite à celui de vitrification ; les autres fouffrent la plus vive action du feu fans fe fondre, & ne font que fe réduire en chaux.

En cet état les pierres, même les plus dures, comme les marbres, ont perdu leur poids & leur dureté ; elles ne font plus qu'une matière légère, poreufe, friable, qui abforbe l'eau qu'on jette deflus avec une effervefcence violente & accompagnée de chaleur ; en un mot, elles font réduites à être de véritable chaux, dont tout le monde connoît les propriétés.

La chaux combinée avec l'acide vitriolique sy diflout, & il en réfuite un fel neutre félénitique; unie avec l'acide nitreux qui la diflout auf, elle forme un fel neutre qui ne fe criftallife point, & qui a la fmgulière propriété d'être volatil,

20 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE c'eft-à-dire, aifément enlevé par le feu, quoique compolé de deux matières, dont une, qui eft la chaux, eft peut-être Ja plus fixe que l'on connoifle; & l'autre, qui efl l'acide nitreux, ne fe volatilife que par addition du phlogitique; a chaux combinée avec l'acide du fel marin, donne encore un fef d'une efpèce fingulière & très-avide de l'humidité de l'air.

Enfin mélée avec les alkalis, elle augmente beaucoup leur caufticité; c'eft avec une leffive alkaline, dans laquelle on a fait bouillir. de la chaux, & qu'on a enfuite fait évaporer, qu'on fait a compolfition nommée pierre à cautère , & dont on fe fert en Chirurgie pour faire des efcarres fur la peau & . Ja cautérifer.

Les fubftances métalliquès font compofées principalement d'une terre vitrifiable unie avec le phlogiftique; il y a pour- tant lieu d'y foupçonner un troifième principe qui refte uni à la terre dans la vitrification, car les verres métalliques peuvent être remis en l'état de métal par l'addition du phlo- giftique, & c'eft ce qu'on appelle reflufciter revivifier le métal ; au lieu. que par l'union du même phlogiftique avec toute autre terre vitrifiée, on ne peut obtenir aucun métal ; preuve évidente que le verre métallique contenoit, outre la terre, quelque chole d’effentiel à la compofition du métal.

Les fubftances métalliques font en général de deux efpèces; les unes ont, outre le brillant, la pelanteur & a fufbilité, la propriété d'être malléables, ceft-à-dire, de fouffrir le marteau, de s'étendre & de fe ployer fans fe cafler, & ce font les métaux proprement dits; les autres au contraire font privées de cette dernière qualité, & on les nomme demi-métaux.

Les métaux fe divifent en parfaits & imparfaits; les mé- taux parfaits ne reçoivent du feu aucune altération , quelle que puifle être fa violence ou fa durée: il n'y a que for & l'argent dans cette clafle.

Les métaux imparfaits perdent leur phlogiftique par lac- tion du feu; ils font d’abord réduits en une pouflière terreufe que l’on nomme chaux, & par un degré de feu plus violent, cette poudre fe change en verre.

Les

md 2

DES ASC LE N-CARS 12fr -" Les métaux ont de l'affinité avec les acides, mais tous les métaux n'ont pas de l'afhnité avec tous les acides ; l'or, par exemple, n'en a aucune avec J'acide du nitre tant qu'il eft feu, &. en a une grande avec une liqueur compofte de cet acide & de celui du fel. Lorfqu'on met un métal avec l'acide qui lui convient, il s’y joint, il s’excite dans la liqueur une efpèce d’ébullition accompagnée de vapeurs & de fifle- ment, &. le métal difparoit abfolument : on dit alors qu'il eft diflous, & il a acquis par cette diflolution & par fon mélange avec l'acide, la propriété de fe joindre à l'eau, quil n'avoit point fous fa forme métallique.

Comme les acides ont plus d'afhnité avec les terres abfor- bantes qu'avec les fubftances métalliques, on les peut obliger à lâcher le métal qu'ils tenoïent, en leur préfentant de ces terres: le métal alors fe précipite fous la forme d'une pouf fière au fond de Ja liqueur, on le nomme en cet état magif tére ou précipité; & comme ils ont été privés de leur phlo- giflique par l'action de l'acide, de même qu'ils l’auroient été par celle du feu, on leur donne auffi le nom de chaux.

Une propriété aflez fmoulière des fubftances métalliques, eft qu'elles ne peuvent contracter enfemble aucune union fr elles ne font précifément dans le méme état; en forte, par exemple, que celle qui a fon phlogiftique ne pourra jamais fe joindre à aucun verre métallique, pas mème au fien propre,

On compte ordinairement fix métaux, dont deux parfaits,

ui font For & argent, & quatre imparfaits, le cuivre, Yétain, le plomb & le fer, quelques-uns y ajoûtent le vif argent; mais comme cette fubftance métallique eft 2bfolument privée de fa malléabilité, femble plus convenable d'en faire un corps métallique d'un genre particulier. L'or, comme nous Javons dit, eft inaltérable à l'action du feu; il y a même lieu de penfer que lorfque M. Homberg a cru l'avoir vitrifié au foyer du verre ardent, ce favant Chymifle a été trompé par quelque circonftance à laquelle il n'a pas fait attention’: aucun acide pur n'a de prife fur l'or, mais le mélange de l'acide du nitre & de celui du fel le diflout parfaitement: ce

Hi 1749:

122 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE mélange des acides fe nomme eau régale. Si on précipite Vor diflous de cette manière, par un {el alkali fixe ou volatil, & qu'on fafle fécher lentement ce précipité, un degré de chaleur aflez modéré le fait difiper en l'air avec un très-grand fracas : on nomme pour cette raifon cette préparation, or ful- minant; on ne peut lui faire perdre cette propriété, quoiqu'on lave ce précipité dans beaucoup d'eau.

Le foufre feul n'a point d'aétion fur l'or, mais mêlé avec un alkali, il s’y unit {1 intimement que le compolé fe diflout dans l’eau, & que For pafle au travers du papier gris, fans fe féparer de la liqueur.

L'argent tient le fecond rang parmi les métaux; il eft, comme l'or, inaltérable par l'aétion du feu, mais il eft moins. pefant que l'or, & plus de diffolvans ont prife fur lui.

Celui qui en a le plus, eft l'acide nitreux; il diflout une quantité d'argent égale à fon poids, & Fargent devient alors une bafe pour cet acide: il forme avec lui un fel qu'on nomme des cryflaux de lune, Ce {él eft d'une fi grande cauf ticité, qu’il brûle la peau prefque comme un charbon ardent; - fe fond à uné chaleur modérée, & prend alors une couleur noire, & c'eft la pierre infernale dont on fait tant d'ufage dans la Chirurgie.

Ce métal s'unit avec l'or par la fufion, & on ne l'en peut

féparer par le moyen du feu feul, auquel ils réfiflent égale-

ment; mais comme l'acide nitreux agit fur l'argent, & n'agit point fur l'or, il n’y a qu'à expoler le mélange à l'aétion de cet acide, ce qu'il y a d'argent fe difloudra, & l'or demeu- rerà pur au fond de la liqueur: cette opération eft ulitée & fe nomme X départ.

Le cuivre n’eft pas au rang des métaux parfaits, mais c’'efé celui qui en approche le plus ; il réfifte à un degré de feu. affez violent, mais enfin il perd fon phlogiftique & fe réduit en une chaux qui le vitrifie très-diffcilement fans y rien ajoûter; il unit par la fufon à l'or & à l'argent, & leur communique une plus grande dureté & une plus grande- fermeté, mais on peut l'en féparer par le moyen du feu, qui

on dn.

DES SCIENCES 12% décompofe le cuivre, & ne décompole ni fun ni l'autre des métaux parfaits.

Le cuivre eft diffoluble dans tous es acides; les fels neutres, & même l'eau, ont ation fur lui, c’eft ce qui le rend fi fufceptible d'une rouille verte ou bléuâtre qu'on nomme verd de gris, & qui eft un poifon très-pernicieux : l'acide vitrio: lique, joint avec le cuivre, forme un {el métallique de couleur bleue, qu'on nomme vwirriol Dleu ou de Chypre.

Lorfque le cuivre a été diflous par un acide, on peut le précipiter; alors il eft réduit en une chaux qu'on ne pourroit revivifier fans y ajoüter quelques matières qui continffent du

hlogiftique : ces matières fe nomment fx, parce qu’elles faci- Aitent {a fufion & la réduction de la chaux en métal coulant ; elles font compofées de poudre de charbon & de fels alkalis fixes.

Le fer eft moins pefant & moins duétile que le cuivre: on peut l'examiner dans deux différens états; après la pre- mère fufion qui a féparé de fa mine, c'eft une matière dure, caffante, aifément fufible & nullement malléable; mais Jorfqu'une feconde fufion la dépouillé des parties étrangères, & que le marteau a rapproché fes parties, il acquiert la ducti- lité, & ne peut plus être mis en fufion que par un feu de la dernière violence.

On peut augmenter la quantité de phlogiftique du fer en le fondant, ou le tenant même au feu entouré avec des matières qui en contiennent ; alors il devient ce qu'on appelle acier, & fufceptible de prendre une dureté extrême, lorf- qu'étant rouge on le plonge dans l'eau froide, ce qu'on appelle le tremper.

Le fer, dépouillé de fon phlogiftique, devient une terre rougeitre, qui, contre l'ordinaire des chaux métalliques, fe fond plus aifément que le fer même, & qu'on peut réduire en fer par l'addition d'un nouveau phlogiftique; if n'eft pas même néceffaire de la fondre pour cela, elle reprend fa forme métallique dès qu'elle eft rouge.

Les acides préfentent avéc fe fer à peu près les mêmes

phénomènes qu'avec le cuivre; mais lorfque ce métal ef

Q ÿ

124 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoyaLeE diflous par l'acide vitriolique, il s'élève des vapeurs qui font très-aifément inflammables : il forme aufli avec cet acide un fel métallique de couleur verte, qu'on nomme viriol verd, vitriol de Mars couperofe.

Non feulement le fer eft attaqué par les acides, mais Feau même a prife fur lui & le décompole, c'eft ce qui lui donne une fi grande facilité à {e rouiller : la limaille de fer expolée à la rofée, fe convertit entièrement en rouille, & prend le nom de fafran de Mars préparé à la rofee.

Le foufre paroît être, de toutes les fubftances, celle qui a le plus d’affinité avec le fer; elle eft fi grande, que quand on frotte du fer rouge avec un morceau de foufre, il entre auffi- tôt dans la fufion la plus parfaite.

L'étain eft de tous les métaux le plus léger , il a pas une grande duétilité; mais ce qui le caraétérife eft un petit bruit qu'il fait entendre quand on le plie, & qui fe nomme pour cette raifon le cri de l'étain: ne lui faut qu'un affez foible degré de chaleur pour entrer en fufion, il perd fr aifément {on phlogiftique, que lorfqu'il eft fondu fa furfice fe couvre continuellement d’une pouflière grife qu'on nomme chaux d'étain, & qui reprend fa forme métallique avec autant de facilité qu'elle l'a perdue, par l'addition d’une matière grafle, Cette chaux ne fe vitrifie point tant qu’elle eft feule; mais en la mélant avec quelqu'autre fubftance ailée à vitrifier, on en forme un verre blanc & opaque que lon nomme émail: on peut faire des émaux de différentes couleurs, en y ajoû- tant différentes chaux métalliques.

L’'étain s'unit aifément avec tous les métaux, & il poflede à tel point la propriété de les rendre caffans (excepté cepen- dant le plomb) que fa feule vapeur, lorfqu'il eft en fufion, fufhit pour cela ; For & l'argent, quoique les plus duétiles, font ceux qu'il altère le plus à cet égard.

Il sunit à la fuperficie du fer & du cuivre, & de-lx Fétamage & le fer blanc; & mêlé avec le cuivre au poids d'un dixième, il forme un métal dur, caffant & fonore, qu'on appelle ronge; enfin ce métal eft beaucoup moins

DNEïsS c:r E NICE 12$

- füfceptible de faction de l'eau que le fer ou le cuivre, &

c'eft pour cette raifon que l'étamage préferve ces deux métaux de la rouille.

Le plomb eft le dernier des métaux imparfaits; il eft, après Tor & le mercure, la plus pefante des fubftances métalliques, mais il en eft auffi la moins dure & la plus facile à fondre; lorfqu'il eft fondu , il fe forme à fa furface, comme à celle de l'étain , ne pouffière noirâtre, qui n'eft autre chofe que du plomb même privé de fon phlogiftique & réduit en chaux; cette chaux pouffée au feu, devient blanche, jaune & en- fuite rouge; en cet état elle s'appelle mirium, & on s'en fert dans la Peinture; elle eft extrémement difpolée à entrer en fufon & à fe vitrifier : le plomb vitrifié à demi, fe nomme litharge.

Non feulement le plomb eft de tous fes métaux celui qui fe réduit en verre avec le plus de facilité, mais il commu nique cette propriété aux autres métaux auxquels on le mêle; il leur en communique même une feconde, qui eft de pañler avec lui au travers des creufets, & c'eft fur ces deux pro- priétés du plomb qu'eft fondé Fart de l'affinage de l'or & de l'argent : on met le mélange de ces métaux avec d’autres matières métalliques dans un‘creufet poreux nommé coupelle, & on y ajoûte une aflez grande quantité de plomb; ce der- nier fe vitrifie, vitrifie avec lui tout ce qui m'étoit pas or ou argent, & l'entraîne au travers de la coupelle, dans laquelle ces deux métaux reflent feuls & dégagés de tout ce qui {eur étoit étranger.

Le plomb fe diflout par Facide vitriolique lorfqu'il eft bouillant, & par l'acide nitreux; mais l'acide du fel marirx ne le diffout qu'imparfaitement, & la diffolution. n’en eft jamais claire : eau n'a pas plus d’aétion fur lui que fur l’étain, ainfi ce métal eft beancoup moins fufceptible de rouille que le fer ou le cuivre.

Le mercure ou vifargent n’eft, à proprement parler, métal ni demi-métal ; il fui manque, il eft vrai, la malléa- bilité, mais il a d’ailleurs le brillant, l'opacité, & fur-tout {a

Q ii

126 HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE : pefanteur métallique, car c'eft, après l'or, le plus pefant de tous les corps que nous connoiffons : on pourroit donc Îe regarder comme un véritable métal, auquel il ne faut, pour être en fufion, que le degré de chaleur qui refte toüjours fur la terre; à ce compte, peut-être dans la planète de Saturne le vif-argent feroit-il un métal très-dur & très-malléable. On n'a jamais jufqu'ici le priver entièrement de fon phlogif- tique; car tout pefant qu'il eft, il eft fr volatil, qu'il s'exhale au feu, fans cependant fe décompoler , à une chaleur bien au deflous de celle qu'il faudroit pour le faire rougir.

Le mercure s’unit avec tous les métaux , excepté le fer, & les diflout ; le mélange, qu'on nomme amalgame, eft d'une confiftance molle & même fluide, fuivant la proportion dans laquelle on y a mis le mercure; & comme il eft moins fixe qu'aucun métal, on fe fert de cette propriété pour féparer fur-tout For & l'argent des terres qui les contiennent ; le mercure s'en faifit & s'y joint, on en enlève le fable par des lotions; & en faifant évaporer ou diftiller le mercure, on a l'or ou l'argent féparé de fa mine.

Le mercure {e diffout dans tous lés acides, l'acide vitrio- lique le réduit d'abord en une poudre blanche qui devient jaune lorfqu'on y ajoûte de l'eau; cette poudre fe nomme turbith minéral: Yacide nitreux l'ayant diflous, fr on fait éva- porer cette diflolution jufqu'à ficcité, on trouvera le mercure fous la forme d'une poudre rouge qu'on nomme précipité rouge, & fi on ajoûte à la diflolution du mercure celle du cuivre par le même acide, le précipité fera verd ; ces deux précipités font cauftiques.

. Le vif argent diffous dans Fefprit de fel, fe criflallife, & fait un fel métallique difpofé par longues aiguilles en forme de poignards; ce {el eft un poifon, & le plus violent corrofif . qu'il y ait en Chymie: la propriété qu'il a de fe fablimer aifément fans fe décompoler, Fa fait nommer /ublimé corrofif fi on mêle le fublimé corrofif avec l'étain, on a, en diftillant, une eau qui jette toüjours une épaifle fumée; on la nommé Bqueur de Libavius, du nom de fon inventeur.

TUIDES ScrENCEs 12? » Ce qui rend le fublimé fi corrofif » ft probablement qu'il contient beaucoup de parties de l'acide qui ne font pas en- gagées par le mercure; car en fe fublimant encore avec de nouveau mercure, il en prend une aflez grande quantité, & perd fa caufticité; on le nomme par cette raifon fublimé doux, aquila alba : on le prend intérieurement, & füivant {a dofe il eft purgatif ou émétique; enfin par des fublimations réitérées on l'adoucit encore, & c'eft alors ce que l’on nomme Panacée mercurielle.

Si on mêle le mercure à froid, ou à une chaleur très- douce, avec le foufre, il fe forme de ce mélange une poudre noire qu'on nomme æfhiops minéral; à une plus forte cha- leur, il fe fublime une matière rouge, pefante, & qui paroît n'être qu'un aflemblage d'aiguilles brillantes ; cette compofi- tion fe nomme cinabre, & c'eft fous cette forme qu'on trouve ordinairement le vif-argent dans les entrailles de la terre.

Le mercure eft, comme on vient de le voir, fufceptible- de bien des formes: mais ce qui eft bien digne d'attention "e & qui lui eft particulier, c’eft que toutes ces formes ne font que des déguifemens, & non des changemens réels. Aucune des opérations dont nous venons de parler ne le décompole,, & on peut toûjours retirer le vif-argent pur & coulant de toutes les préparations mercurieiles.

L'antimoine tient le premier rang parmi les demi-métaux., il paroît compo de longues aiguilles appliquées latéralement les unes aux autres ; il a le brillant métallique, quoique très- obfcur; il fe fond aifément, mais il fouffre en aucune manière le marteau, & on le pulvérile pluftôt que de l'étendre,

L'antimoine n'eft pas un corps fimple, il -eft compolé de: foufre commun que le feu lui enlève facilement, & d'une

partie métallique d’une couleur blanche aflez éclatante: qu'on

homme révule d'antiroine.

Ce régule fe fond aément, mais if ne réfifte- point à Faction du feu lorfqu’elie eft violente : il fe diflipe en une efpèce de farine qui s’attache aux corps froids qu'elle ren: contre, & qu'on nomme Jleurs d'antimoine,

128 HisToire DE L'ACADÉMIE ROYALE

Avec un beaucoup moindre degré de chaleur on réduit l'antimoine en une poudre grife & fans aucun brillant, qu’on nomme chaux d'antimoine ; cette chaux n'eft plus volatile, par un feu très-violent elle fe convertit en un verre jaune, couleur d'hyacinthe, qu'on nomme verre d'antimoine: ce verre & la chaux d’antimoine peuvent reprendre leur forme mé- tailique, en leur rendant le phlosiftique qu'on leur avoit enlevé.

Le régule d'antimoine peut difloudre les métaux; il en facilite la fufion, mais il les rend tous aigres & caflans; lorf qu'il eft uni avec eux, & qu'on poufle ce mélange au feu, il les enlève tous, excepté l'or, & les fait diffiper en vapeurs, ce qui l'a fait nommer Ze loup dévorant des métaux. Seul il ne s'amalgame point avec le mercure; l'acide vitriolique & l'acide nitreux le divifent pluflôt qu'ils ne le diflolvent, mais l'acide du fel marin le diflout aflez bien, fur-tout fi pour y parvenir on mêle le régule avec le fublimé corrofif, & qu'on fafle diftiller le tout; il s'élève une fubftance blanche, épaifle, peu coulante & extrêmement corrofive, compofée de l'acide qui a abandonné le mercure, & du régule: cette fubftance ‘{e nomme beurre d'antimoine. Ce beurre mélé avec l'efprit de nitre & enfuite diftillé, donne une efpèce d'eau régale qui tient encore du régule diflous ; on la nomme cfprit de nitre bézoardique : on fait pafler de nouvel efprit de nitre fur la poudre qui refte après la diflolution, on la lave enfuite avec de eau, & ceft ce qu'on appelle bézoard mineral,

Le beurre d’antimoine mêlé avec l’eau, devient aufi-tôt trouble & laiteux, & il {e fait un précipité qui tient cepen- dant encore beaucoup d'acide; on le nomme wercure de vie, apparemment par antiphrafe ou contre vérité, car c'eft un violent corrofif & un grand poifon.

Le véritable diflolvant de l'antimoine eft l'eau régale, &c on obtient par fon moyen une diflolution claire & limpide de ce demi-métal.

Le régule d'antimoine expofé au feu avec le nitre, détonne & fe dépouille de fon phlogiftique; la chaux qui refte après

celte

(ME rSMSTC LE NUC EUS: 129 cette opération, fe nomme, à caufe de {es vertus médicinales,

* diaphorétique minéral; alkali du nitre qui refte après l'opé-

ration, contient encore une portion de la chaux : on {a pré-

_cipite par le moyen d'un acide, & on lui donne fe nom de matière perlee.

Tous les métaux ayant avec le foufre de l'antimoine,

une affinité plus grandesque celle de fa partie réguline, on peut, en Îes fondant avec ce minéral, en féparer le foufre & le réduire en régule; mais comme il refte toûjours quel- que peu du métal dont on s'eit fervi, joint à ce régule, on le caraétérife par le nom de ce métal, & on dit régule d'an- timoine martial, de Vénus, &c. * Si on expofe au feu l'antimoine mêlé avec le nitre, il fe fait une détonition, & on trouve au fond du creufet la partie réguline de l'antimoine, fous la forme d'une mafle à demi vitrifiée & femblable, pour la couleur, au foie d'un animal: on la nomme pour cette raïfon foie d'antimoine.

L’antimoine fondu avec un alkali fixe, ne donne point de régule, maïs il fe réduit en une maffe d'un jaune rou- geître, diffoluble dans l'eau; & fi on verfe un acide dans cette diflolution, il fe précipite une poudre d’un jaune mélé de rouge, qu'on nomme foufre doré d'aitimoine.

Enfin fi on fait bouillir ce minéral dans un alkali fixe, réduit en liqueur, cette liqueur attaque, à mefure qu'elle le diflout elle devient trouble & rougeñtre ; & lorfqu'on la laifle refroidir, elle dépole au fond du vaifieau une poudre rouge qui eft le fameux 4ermés minéral. uLe bifinutk, qu'on nomme aufli étain ‘de glace, a Ia même

3 f 1 , . - , ,. apparence que Je régule d'antimoine, fi ce n'eft qu'il eft un

peu moins blanc, tirant fur le rouge & faifant même quel- ques iris; il entre en: fufron à une chaleur très-douce, & long-temps avant de rougir. Le feu violent le volatilife; un degré de feu convenable le dépouille de fon phlogiftique & le réduit en une chaux vitrifiable: cette chaux & ce verre peuvent, comme les autres, reprendre leur forme métallique £n deur rendant le phlogiftique que le feu leur avoit enlevé,

Hifl 1749: | : R

130 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE Le bifmuth fe méle par la fufion avec tous les métaux, 3 aide à fondre ceux qui ne le font que difficilement, ni les blanchit, mais il leur enlève la malléabilité. Ml s'amalgame qu ‘imparfaitement avec le mercure, ce dernier s'en fépare après un certain temps, & le bifmuth xéparoit fous li fo:me d'une poudre; mais il a la propriété de difpofer le plomb à à s'amalgamer parfaitement avec le mer- ‘eure & à pafler même avec lui par la peau de chamois: ce qu'il y a de fingulier, c'eft que le bifmuth fe fépare de l'a- malgame en laiflant au plomb une propriété qu'il na pas lui-même.

Le bifmuth ne fe diflout point dans l'acide vitriolique ; mais l'acide nitreux l'attaque avec une grande effervefcence’ & il jette pendant la diflolution, une grande quantité de vapeurs : Jaddition d'un alkali ou mème de l'eau fait préci- piter de cette diflolütion une poudre très-blanche, qu'on nomme magiflère de bifmuth.

+ L’acide du fel marin & l'eau régale ont auf. action fur le bifmuth, mais beaucoup moins que l'éfprit de nitre; i ne détonne point avec le nitre, mais cependant ce fel Jui enlève promptement fon phlogiftique, & le réduit en une chaux vitrihable: il sunit au foufre par la fufñon, il fe fait par ce mélange un compolé qui paroît formé d'aiguilles cou- chées les unes fur les autres, & il s’en fépare avec la même facilité fans intermède; le feu confume ou fublime le foufre, & le bifmuth refte feul.

Le zinc differe peu à la vûe du bifmuth, on ne le dif- tingue qu'à un petit œil bleuâtre & parce quil eft plus dur, muis il en difiere beaucoup par fes propriétés.

Le zinc fe fond au feu dès qu'il commence # rougir; à un feu plus violent il s’enflamme & brule: comme une matière huileufe, il exhale en même temps une grande quantité de fleurs fous la formée de flocons blancs, il peut. même pafler tout entier fous cette forme : on a nommé ces fleurs pompholix &. laine philofophique: On les: regarde: comme le zinc dépouillé de fon: phlogiftique;. cependant on æ eu bear

48 DES Scie nNCEIS. 134 jufqu'ici leur én rendre, perfonne n’a les faire réparoître

fous la forme de zinc: elles réfiftent, fans s'élever , à la plus

violente action du feu, & fe peuvent même vitrifier, fur- tout fi on y ajoûte un alkali.

Si on applique au zinc un feu {üubit & violent, il fe fu-

blime fous fa forme mttallique, n'ayant pas le temps de décompoler & de fe réduire en fleurs.

IL sunit à toutes les fubflances métalliques, excepté le bi. muth, & comme il eft très-volatil, il les enlève fous la forme de fublimés ; on nomme ces fublimés qui fe trouvent dans les fourneaux on traite les mines qui contiennent du zinc, cadmie des fourneaux : on donne même ce nom à toutes les fublimations métalliques qui fe trouvent dans les fourneaux on fond les mines. Ce nom de cadmie des Journeaux fert à diftinguer cette fubftance, d'une pierre qu'on appelle cadmie uaturelle calamine, qui contient le zinc mêlé avec du fer, & une fubftance pierreufe: c’eft en mélant cette cadmie naturelle, ou, pour le mieux, le zinc même au cuivre rouge, qu'on fait le laiton ou cuivre jaune, & avec quelques additions, les com- pofitions qu'on nomme tomba, Jimilor & métal de Prince.

Le zinc eft difloluble par tous les acides, & fur-tout par l'efprit de nitre; il a avec l'acide vitriolique une plus grande affinité que le fer ou le cuivre: c'eft pourquoi fr on le mêle avec la diflolution du vitriol verd ou bleu, l'acide abandore ces métaux pour fe joindre au zinc & former avec lui url vitriol qu'on nomme vifriol de zinc: expolé au feu avec le nitre, il détonne violemment, & il s'en élève les mêmes flèurs blanches dont nous avons déjà parlé ; le foufre n'a aucune action fur lui. -

L'arfenic eft le dernier des demi-métäux dont M. Mac- quer parle dans fon Ouvrage; mais comme nous avons déjà parlé de cette matière d'après M. Macquer même, nous ren. voyons le lecteur à ce que nous en avons dit *. |

L'huile eft une fubftance onctueufe qui s'enflamme avec fumée, & ne fe peut difloudre dans l'eau: elle eft compofée

* Voyez Hif. 1746, p.59, Ÿ 1748, page ÆA

du phlogiftique uni à l'eau par le moyen d'un acide, & mélé : q P }

d'un peu de terre, R ij

* les Mém, de Acad, année 1737:P.342

732 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE

La propriété qu'a l'huile de fe brûler, y démontre fa pré- fence du phlogiftique; celle de l'acide fe manifefte_ par les criflaux de fels neutres qui s'y forment en y mélant un alkalÿ, & par la propriété qu'elle a de ronger & rouiller les métaux, enfin par la diftillation l'on en retire l'eau & la terre qu'elle contenoit : il pourroit même {e faire qu'il entrât quelqu'autre élément dans la compofition de l'huile, car jamais, en com- binant ceux dont nous venons de parler, on n'a produire de l'huile artificielle.

Lorfqu'on diftille les huiles, elles paflent prefque toutes entières du vaifleau qui les contient, dans le récipient; if refte cependant une petite quantité de matière noire qui ré- fifle opiniätrément à Faétion du feu, tant qu'elle n'a point de communication avec l'air extérieur: cette matière n'efk qu'une partie du phlogiftique unie à la terre la plus fixe, on la nomme charbon, & elle ne diflere que du plus au moins du charbon de bois dont on fe fert.

Le charbon ne donne qu'une petite flamme bleuâtre, ik n'en refle qu'une cendre qui eft la terre du mixte unie avec une certaine quantité de fel alkali qu'on en peut retirer en R leflivant avec de l'eau; alors la terre refte abfolument pure. Le charbon eft inaliérable & indeftru&ible par tout autre corps que par le feu; les acides les plus forts & les plus con- céntrés n'ont pas fur lui la moindre aftion., à moins qu'ik ne foit embrafé: avec l'aide du feu l'efprit de {el sunit au charbon & fait avec lui une efpèce de foufre très-inflam- mable qu'on nomme phofphore, & dont M. Heïlot a donné k compoftion en 1737 *. L'acide nitreux pur n'attaque point le charbon, mais s'il eft joint à une-bafe alkaline, ik s'unit avec lui dès'qu'il eft enflannné, & s'envole rapide ment avec une forie détonation,

Les acides du nitre & du vitriol agiffent fur les huiles;

. mais bien différemment fuivant la quantité de phleyme qu'ils

comtiennent; quand. ils en contiennent beaucoup, ls n'ont fur elle aucune action : très-concentrés, ilsles diffolvent avec une fi grande violence, qu'ils les enflemment ; ils forment

DNENSNAS (CC LE NACHELS 133 avec elles des compolés d'une confiflance épaiffe qui, s'ils contiennent aflez d'acide, font diflolubles dans l'eau. Les alkalis produifent auffi ce dernier effet, & le compofé. qui en rélulte, fe nomme favon; enfin le mélange des acides avec les huiles, les épaiflit jufqu'au point d'en former des corps prefque folides ; la diftilation au contraire les rend plus légères & plus limpides.

On diftingue en général trois efpèces d'huiles, les miné- rales, les végétales & les animales.

On ne connoît qu'uñe feule efpèce d'huile minérale, c’eft- à-dire, qui fe tire des entrailles de 1 terre; on fa nomme pétrole , elle a une odeur forte & gracieule, & elle eft de cou- leur jaune: il y a des minéraux qu'on appelle biumes, dont on peut retirer par la diftillation une grande quantité de cette huile; en efet les bitumes ne font que de lhuile de pétrole unie à un acide, & on en. produit d’abfolument femblables par le mélange de cette huile & de vitriolique. -

Les huiles végétales font celles qui fe tirent des. différens végétaux; il y en a prefque autant que de plantes, elles fe- divifent en deux efpèces, les huiles graffes & les huiles effen- tielles.

Les huiles grafles fe tirent des corps qui les contiennent en les écrafant & les mettant en prefie; elles n’ont que peu d’odeur & de faveur, élles font douces & onctueufes au- tou- cher; & comme-elles reffemblent plus que d'autres à de 14 graifle, on leur a donné le nom d'huiles grafles; elles sépaif- fiflent à l'air avec le temps, & prennent une faveur âcre & une odeur defagréable, quelques-unes fe congèlent au moindre: froid.

Les huiles effentielles fe tirent auffi de certaines plantes: par l'expreffion ; mais communément on force les végétaux. à les donner par le moyen de leau bouillante, chaleur que: les huiles grafles ne pourroient foûtenir fans s’'altérer beaucoup ;; elles font plus légères, plus claires, d'une faveur plus âcre, &c elles confervent l'odeur de la plante d’où elles font tirées.

Au bout d'un temps plus moins grand, elles perdent: Rif,

134 HisTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYALE leur odeur pour en prendre une forte & defagréable; elles * changent aufi de confiftance, & deviennent femblables à ce qu'on nomme baume réfine ; aufli les baumes & les réfines fe décompolent-ils par la diftillation, en huile effen- tielle, & en une matière toute femblable à celle qui refte après la diftillation par laquelle on a rendu la limpidité à de l'huile effentielle épaiflie. È

Lorfque la chaleur de Feau bouillante ne peut plus tirer d'huile effentielle des végétaux, on peut, en donnant un degré de feu ‘plus fort, en faire fortir une’ grande quantité d'huile noire, pefante & fétide ; mais il y a bien de l'apparence que cette huile fétide n’eft que de l'huile graffe ou effentielle brûlée & altérée par l'aétion du feu ; on peut même, par des diftilla- tions réitérées, leur rendre une partie des propriétés des huiles effentielles, on peut, par le même moyen, rendre les huiles graffes femblables aux eflentielles, mais on ne connoïît point d'opération qui puifle rendre les huiles effentielles femblables aux huiles grafles.

Les huiles animales font celles qu'on retire par la diftilla tion, des parties du corps animal, & fur-tout de la graifle; elles font d’abord affez épaifles & fétides, mais par un grand nombre de reétifications on leur donne de la fluidité, & on diminue leur mauvaife odeur.

Lorfqu'il s’excite entre les parties infenfibles du corps un mouvement duquel il réfulte un nouvel arrangement de ces parties, ce mouvernent s'appelle fermentation ; tous les corps, excepté les métaux, en font fufceptibles dès qu'ils font mélés avec une fufhifante quantité d'eau : fi la fermentation fert à dégager du corps une liqueur fpiritueufe, on la nomme fermentation fpiritueufe; fi elle tend à en dégager T'acide, on la nomme fermentation acide ; enfin fi ce mouvement en dégage un fel afkali volatil, on la nomme fermentation pu- tride de putréfation. Files peuvent être regardées, avec d'autant plus d'apparence, comme les irois devrés d’une mème fermentation, qu'elles peuvent $'exciter fucceflivement dans le mème fujet.

VE SunS ue r'Et Ne En 2 135$ = Lorfque des matières végétales, comme des fucs de fruits, des graines, des farines imbibées d’une fufhfante quantité d'eau, commencent à fermenter, il s'excite d’abord une cha- leur fenfible; elles fe troublent, fe chargent d'écume, & exha= dent des vapeurs très-nuifibles ; lorfque tous ces phénomènes commencent à diminuer, il faut, fi on ne veut pas que la liqueur s'aigrifle, arrêter 12 fermentation, foit en bouchant exactement le vaifleau, foit en le tranfportant dans un air plus froid; alors la liqueur a pris une faveur Piquante, mais agréable & fans acidité, & elle eft devenue ce qu'on appelle du vin; fur quoi il eft bon. de iemarquer que quoique dans lufage ordinaire on ne donne ce nom qu'à la liqueur tirée du raifin, ce mot, en Chymie, eft générique, & s'applique également à toute liqueur qui n'a efluyé que le premier degré de fermentation. | ,

On tire du vin, par la diflillation, une liqueur che, jaune, inflammable, qu'on nomme ea de vie, c'eft la partié fpiritueule du vin, & le produit de la fermentation: mais cette partie eft encore chargée de beaucoup de phleume, & lorfqu'on en à dépouille par des. diftillations réitérées ; elle prend le nom d'efprit de vin ow d'efprit ardent ; en cet état, la liqueur fe brüle fans laifler échapper la moindre fui ginofité, & fans laiffer aucun charbon : elle diffout les huiles cflentielles, mais elle ne touche pas aux huiles grafles, à moins qu'elles n'aient été atténuces par des diflillations réi- térées.

L'efprit de vin n'a que per ou point d'aétion: fur les alkalïs fixes, c'eft pourquoi on emploie ces fels bien. defléchés à le: reclifier, c'eit-à-dire, à le dépouiller du phlegme qu'il peut contenir, que ces {els abforbent fans toucher à la partie {pi- ritueule : Fefpiit de vin, ainfi privé de fon phlegme, fe nomme é/rit de vin alkoolife.

L'e'prit de vin n'a aucune prife fur les gommes, mais if diflout les réfines, & forme avec elles, par cette union, une liqueur plis “paifle qui f defsèche à l'air, & qu'on nomme vernis on jait encore.une autre. efpèce-de vernis en diflolvant,

136 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE par le moyen du feu, des réfines dans huile; ce vernis ne s'altère point à l'eau, & on le nomme vernis gras

L'efprit de vin fe mêle avec l'eau & avec tous les acides, qui perdent par ce mélange une partie de leur acidité, & prennent le nom d'acides dulifies ; fon union avec l'acide vitriolique fournit un moyen de le déphlegmer aflez pour le réduire en une liqueur plus fubtile & plus inflammable qu'il n'étoit lui-même, fi fubtile, qu’elle s'évapore prefque au même moment qu'on l'expole à l'air, elle diflout rapidement les huiles , fe faïfit avec promptitude de Tor diffous dans l'eau régale, & n'eft point mifcible avec l'eau; on la nomme éfher. On retire encore cette liqueur de lefprit de vin par le inoyen de lelprit de nitre; on doit le procédé par lequel on lob- tient avec cet acide, à M. Navier, Docteur en Médecine, & Correfpondant de l'Académie.

Si on n'arrête pas la fermentation au premier degré nécef- faire pour produire le vin, il s’en excite bien-tôt une feconde, après laquelle la liqueur eft changée en un acide qu'on romime vegetal, pour le diftinguer des acides minéraux dont nous avons parlé jufqu'ici; la liqueur prend alors le nom de vinaigre. La diftillation n’en enlevera plus aucune liqueur fpi- ritueufe, mais une liqueur plus acide que la première, & qu'on nomme vinaigre difillé ; cet acide a les mêmes pro- priétés que les acides minéraux, il s’unit avec les alkalis, les terres abforbantes, les fubftances métalliques, & forme avec ces matières des combinaifons falines neutres, avec cette différence que comme il a avec elles moins d'affinité que les acides minéraux, ces derniers décompofent tous les fels qu'il a formés.

L’acide du vinaigre ft toüjours chargé de parties huileufes qui émouflent fon activité, & le rendent moins puiffant que les acides minéraux; on peut l'en dépouiller, & le rap- procher de ces derniers par dés diftillations réitérées, ou'en Vexpofant à une forte gelée, qui réduit en glace les parties aqueufes & huileufes, & n’épargne que l'acide; on le nomme

en cet. état vinaigre concentré par la gelée. L'aci

à

:

+

DE SNS C E Nic Ets: P32

. L’acide du vinaigre fe joint à différentes terres abforbantes, avec lefquelles il forme des compolés falins qui ont divers noms, fuivant les matières qui font entrées dans leur com- poñition : il diflout parfaitement le plomb, &, forme avec lui un fel neutre dont la faveur eft douce & fucrée, & qu'on nomme pour cette raifon fucre de Saturne. La feule vapeur du vinaigre calcine même ce métal, & le réduit en une elpèce de chaux très-blanche qu'on nomme cérufe ou blanc de plomb, fuivant qu'elle eft plus ou moins fine; il ronge aufli le cuivre, & le réduit en une rouille d'un beau verd qu'on nomme verd de gris, & dont on fe fert dans la Peinture.

Le vinaigre n'eft pas le feul acide qu'on retire du vin, on en trouve-encore un à peu près de la même nature dans un compolé falin mêlé de parties terreflres & huiïleufes, qui sattache aux parois intérieures des vaiffeaux qui ont contenu du vin pendant un certain temps, & qu'on nomme ordi- hairement fartre.

. On purifie le tartre des matières terreufes & étrangères qu'il contient, en le faifant bouillir-dans l'eau avec une elpèce de terre propre à cet ufage; lorfqu'il eft purifié, il paroît à la furface de la liqueur une crême blanche & criftalline qu'on nomme crême de tartre, & on trouve au fond de li même liqueur, lorfqu'elle eft refroidie, des criftaux tranfparens qu'on appelle criflaux de tartre ; cette crême & ces criflaux ne font que le même fel fous deux formes différentes : ce fel a toute l'apparence d’un fel neutre, il ne left cependant point, ce n'eft qu'un véritable acide peu différent de celui du vinaigre, & qui ne doit fa forme concrète qu'à la terre & l'huile qui y font jointes en afez grande quantité; c'eft aufi cette même huile qui fait qu'il ne fe diflout que très-difficilement dans Jean, à moins qu'elle ne foit bouillante & en grande quan- tité, encore la plus grande partie s'en fépare-t-elle dès que Veau refroïdit, & tombe au fond fous la forme d'une poudre blanche. ,

: La calcination à feu nud dépouille le tartre de fon huile & d'une partie de fon acide, ce qui refte fe joint à la terre,

Hifl. 1749. . S

138 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

& forme un alkaïi qu'on nomme /e/ de tartre; ce {el attire vivement l'humidité de Fair, & fe réfout par fon moyen en une liqueur onétueufe qu'on nomme improprement /uile de tartre par défaillance. Cet alkali peut fe combiner avec l'acide du tartre, & il forme avec lui un véritable fe! moyen diffo- luble dans l'eau, qu'on nomme artre tartarifé, & plus com- runément /e/ végétal,

L'acide du tartre peut auf s'unir à l’alkali de la foude, & forme par cette union une autre efpèce de fel végétal appelé /e7 de Seignette, du nom de fon auteur; ces deux fels font des pur- gatifs connus & ufités. joint encore le même acide avec les terres abforbantes & les fubftances métalliques, & les fels neutres qui réfultent de ces mélanges font diflolubles dans l'eau; fingularité remarquable, fr on fait attention que ces matières, que l'eau ne diflout point, communiquent au tartre une propriété qu'elles n’avoient point elles-mêmes, & dont il étoit privé.

On tire de l'acide de bien d'autres fubflances végétales que le vin, mais ces diférens acides, même ceux qu'on peut tirer des matières animales, ne different pas aflez de celui du vin pour conftituer une clafle particulière, & être exa- minés en détail. ÿ

La troifième efpèce ou peut-être le troifième degré de fermentation, eft la fermentation putride; tout corps qui a éprouvé les deux premières efpèces & qui eft abandonné à lui-même avec un degré convenable de chaleur, paffe enfin à la dernière, ou, ce qui eft la même chofe, fe pourrit: if y a même des corps qui font fufceptibles de pourriture fans paroître l'être des deux autres efpèces de fermentation; mais il fe pourroit qu'ils les fubifient {1 rapidement, qu'on ne s'en aperçût pas. Ces fermentations fi courtes &: f1 rapides feront, fi lon veut, dans la Chymie, ce que font les points multiples dans la Géométrie; le raifonnement feul fera con- noître leur exiftence.

H s'excite dans cette dernière fermentation un mouvement inteflin, femblable à celui qu'on remarque dans les premières,

DES SCIENCES. 139 & fi l'on examine un corps qui l'ait éprouvé, on remarque qu'il contient un principe qui n'y exifle point auparavant, une matière faline, très-volatile, qui afieéte l'odorat vivement & defagréablement, & qui même quelquefois irrite affez les yeux par fon âcreté pour en tirer des larmes.

Ce principe falin fe préfenie, fuivant la manière de l'ex- traire, ou fous la forme d’une liqueur, ou fous celle d'un fel concret; on le nomme dans le premier cas, efprit volatil urineux, & dans le fecond, /e7 volatil urineux: cette épithète d'urineux vient de ce qu'on tire une grande quantité de ce {el de Yurine putréfiée, & qu'il en a l'odeur.

Les aikalis volatils fe reflemblent tous, de quelque fubftance

qu'ils aient été tirés; on les peut regarder comme le même

fel. Ce fel eft compofé, comme l'alkali fixe, d’une portion d'acide engagée dans une portion de la terre du mixte dont on le tire; mais de plus il contient une affez grande quantité d'huile qui ne fe trouve point dans lalkali fixe, & à laquelle celui-ci doit probablement fa volatilité; car on parvient, par de certains procédés, à volatilifer les alkalis fixes, en leur joignant une matière graffe.

L'alkali volatil fe joint aux acides avec violence & ‘ébul- lition, & forme avec eux des fels neutres qui font diffé- rens fuivant les différens acides qui font entrés dans leur compolition; celui de ces fels qui a pour acide celui du fel marin, fe nomme fel ammoniac, & les autres, par analogie avec celui-ci, fels ammoniacaux.

Souvent la fubftance huiïleufe fe trouve jointe à lalkali volatil en fr grande quantité, qu'elle le déguife & le rend impur; en ce cas on lui en enlève une partie en le diftillant plufieurs fois fur des terres abforbantes qui retiennent l'huile fuperflue; on appelle cela redifier l'alkali: par cette opération, il devient blanc, de jaune qu'il étoit, & prend une odeur plus pénétrante & moins fétide; mais il faut bien prendre garde de pouffer Ia rectification trop loin, fur-tout fi on emploie la chaux; on parviendroit à la fin à le décompofer entièrement.

Si

140 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

L'alkali volatil a prife fur plufieurs fubftances métalliques, nuis fur-tout fur le cuivre, dont il fait une diflolution d'un très-beau bleu, auffi fert-il comme de pierre de touche pour le difcerner; & en quelque petite quantité que ce métal fe trouve combiné avec d’autres matières, il ne manque pas de le déceler, & de le faire paroître coloré en bleu.

L’alkali volatil n'eft pas toûjours le produit de la fermen- tation, on en retire fouvent des matières qui ne l'ont point éprouvée, mais en ce cas c'eft par le moyen du feu. Le tartre, par exemple, qui, calciné à feu ouvert, ne donne que de Valkali fixe, donne une affez grande quantité d'alkali volatit par la diflillation ; mais on reconnoît aifément celui que le feu produit, à ce qu'il ne s'élève qu'après le phlesme, l'acide, & même l'huile épaifle du mixte; au lieu que celui qui sy trouve tout fait, étant infiniment plus volatil que toutes les fubftances dont nous venons de parler, s'élève aufli le pre- mier, & par une moindre chaleur.

Les principes dont nous venons de parler, entrent plus ou moins dans la compotition de tous les corps, ce n'eft que parce qu'on a eu l'art de les en tirer, qu'on a qu'ils y étoient ; cet art de décompofer les corps fe nomme en Chymie analyfe, & M. Macquer emploie un chapitie de fon Livre à en donner une idée. |

La méthode la plus générale eft d'expoier les corps qu'on veut analyfer, à l'attion du feu dans des vaiffeaux propres à raflembler ce qui s'en exhale; en donnant le feu par degré, on aura fucceffivement & féparément tous les principes qui entrent dans leur compofition, fuivant l'ordre de leur volatilité; cette opération fe nomme dffil/ation, & ce qui refle au fond du vaifieau ayant été calciné, on en retirera, avec de leu chaude, ce qu'il contiendra de fel fixe; cette dernière opération s'appelle leffive.

Mais comme les principes de plufieurs mixtes, & fur-tout des végétaux, font fouvent altérés par l'aétion du feu, on les en retire par la fimple expreflion, ou en les broyant, ce quon nomme #rituration. On tire encore différens fucs

or Sh Si CIE: NICABLS UT 141

par la feule ébullition, & c'eft la meilleure manière de pré-

parer les fucs qu'on veut tirer du corps animal.

Les corps métalliques, compolés de parties plus dures, plus pefantes & plus difficiles à féparer que célles des végétaux & des animaux, ne fe peuvent analyfer que par le moyen du feu, qu'ils peuvent d'ailleurs fupporter fans danger d’en être détruits. À L

On trouve ordinairement les métaux mêlés & unis avec différentes efpèces de fables, de pierres, demi-métaux, foufre, &c. lorfque le minéral y eft en affez grande quantité, on nomme ces compolés mines ; & quand au contraire il y eft en trop petite quantité pour payer les frais de l'opération, on lui donne le nom de pyrite marcaffite.

La première opération néceflaire eft de féparer ce qui eft réellement métallique de ce qui n’eft que terreux; pour cela on réduit Ja rine en poudre, & on la lave dans un courant d'eau : l'eau fe charge des parties terreufes, qu'elle entraîne, & laiffe au fond les parties métalliques, que leur pefanteur y retient.

Le métal privé de Ia terre avec laquelle il eft mêlé, refle encore mêlé de plufieurs fubftances toutes plus volatiles que lui ; on expofe donc la mine à un feu trop foible pour fondre le métal, mais fufhfant pour faire évaporer ces matières étran- gères, & c'eft ce qu'on nomme #orréfier ou rôtir la mine.

Le minéral, en cet état , eft expolé à l’ation d’un feu affez vif pour le fondre & pour vitrifier la terre ou les autres matières dans lefquelles il eft encore engagé; on y ajoûte quelque matière, comme,spar exemple, du charbon, qui puifle lui fournir le phlogiftique dont il a befoin, & il fe précipite au fond du creufet fous fa forme métallique, tandis que les autres matières nagent deflus fous la forme de verre ou de demi-vitrification qu'on nomme fries ; le culot mé- tallique prend. alors le nom de régule.

On a s'apercevoir que dans tout cet Ouvrage, M. Mac- quer part prefque toujours du principe, qu'un même corps a plus de difpofition à s'unir à Jun qu'à l'autre, & que cette

Si

* Vy. Hif. u718, p.36

142 Histoire DE L'ACADÉMIE Roïaze difpofition a différens degrés; en forte qu'un corps qui en abandonne un fecond pour un troifième, abandonne auffi ce troifième pour un quatrième, s'il a -plus, de difpofition à s'y joindre qu'aüx deux autres: ce font ces difpofitions, quel qu’en foit le principe & leurs différens degrés, qu’on nomme rapports affuiités : feu M. Geoffroy le Médecin, en donna en 1718 une Table que M. Macquer a inférée dans fon Ouvrage, & dont il donne une explication nette & précife ; mais cette matière a été traitée pour lors, & nous prions le lecteur de vouloir bien recourir à ce qui y en a été dit *.

La defcription des fourneaux & des vaifleaux fervans aux opérations de Chymie, termine l'Ouvrage de M. Macquer ; cette Partie ne le cède aux autres ni en netteté ni en préci- fion, mais elle a pour le moins autant befoin d’être préfentée aux yeux du corps qu'à ceux de l'efprit, & il fgroit extré- mement difficile d'en donner une jufte idée fams-le fecours des figures, & fans fortir des bornes de cette Foires nous avons même d'autant moins héfité à la pañfer fus filence, qu'elle rentrera néceflairement dans le détail des opérations qui compofent une Chymie pratique que M. Macquer a donné au Public depuis la publication de cet Ouvrage, & dont nous aurons occafion de parler dans les volumes fuivans.

DIE SAS C 1 E CSS 143

BOTANIQUE.

SUR LA TRANSPIRATION INSENSIBLE D'E SN TP LTANNT" ES.

N OUS avons rendu compte l'année dernière *, des expé-

V. les M.

riences de M. Guettard, fur la tranfpiration infenfible P+ 265.

des Plantes, & nous avons fait voir 1.° l'extrême inégalité de {a tranfpiration de certaines plantes ; 2.° l'augmentation que l'action aétuelle & directe des rayons du foleil caufoit à cette tranfpiration; 3.° que la tranfpiration n’eft pas égale dans toutes les parties des plantes, & que la furface expolée au foleil tranfpire plus que celle qui ne left pas; 4.° enfin que les plantes qui gardent leurs feuilles pendant l'hiver, doivent tranfpirer moins dans cette faifon que dans l'été,

Nous avons à parler cette année, de la fuite des mêmes expériences que M. Guettard a continuées, & de ce quelles

- lui ont appris fur ceite matière.

Les premières expériences lui avoient fait connoître, comme nous avons dit, que, toutes chofes d'ailleurs égales, une plante tranfpiroit plus lorfqu'elle étoit expofée aux rayons du foleil, que quand elle en étoit privée; il a voulù voir ff, comme il y avoit bien de Fapparence, la tranfpiration fouf- friroit en détail les mêmes augmentations & diminutions que faction du foleil : il falloit pour cela être attentif à recueillir chaque jour la liqueur qui en avoit été le produit ; il s'eft effectivement trouvé que, felon que l'action du foleil aug- mente ou diminue, la tranfpiration des plantes varie aufñir, & de la même manière. Il étoit affez naturel de le préfumer, mais on nen étoit pas abfolument für, & l'expérience eft

la feule démonftration de la Phyfique.

* Vo. Hifi. 1748, p. 78

144 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

I eft même bien für que les variations de l'action du foleil contribuent prefque feules à celles de la tranfpiration des plantes, quoiqu'on eût quelque droit de foupçonner que la quantité d’eau qui tombe fur la terre, y entre pour beau- coup; il s'eft trouvé par un de ces heureux hafards qui ne font que pour les Obfervateurs attentifs & laborieux, que le temps de la plus vive action du foleil n'a pas été de même celui des plus grandes pluies. M. Guettard a mis cette circonftance à profit, & s’eft afluré que l'augmentation de la tranfpiration avoit toûjours fuivi le rapport des différentes intenfités de l'action du foleil, & jamais celui des quantités de pluie qui étoient tombées ; il femble même qu'une trop grande quan- tité d'eau nuile à fa tranfpiration, du moins eft-il certain que lorfqu'après une pluie abondante, le foleil vient à fe dé: - couvrir, ce n'eft jamais le premier jour que la tranfpiration eft la plus grande, mais les jours fuivans.

Puifque les plantes ont des pores par lefquels elles peu- vent exhaler une prodigieufe quantité d'humidité, il feroit très-poffible qu'elles en euflent aufli de propres à tirer celle qui voltige dans l'air, & qu'une grande partie de ce qu'elles rendent par la tranfpiration eût été pompée par ce moyen, & ne vint pas de leurs racines. Pour s'en aflurer, M. Guet- tard enferma toutes les branches d’un oranger de cinq ans dans un globe de verre, & il enferma de même deux branches de deux autres orangers dont les autres branches étoient ex- pofées à l'air: fr les arbres pompoient beaucoup de l'humidité de Fair par leurs feuilles, il devoit arriver deux chofes; la première , que l'arbre totalement enfermé, donnât moins de tranfpiration que les branches de ceux dont les autres branches étoient à Fair libre; & la feconde, que l'arbre totalement enfermé & privé de ce qu'il devoit tirer de air par fes feuilles, donneroit quelques marques de dépériffement : ni Fun ni l'autre n’eft arrivé. Il eft vrai que M. Guettard n'a saflurer par un calcul exact, de la quantité de tranfpi- ration des branches de ceux des orangers qui étoient libres, parce que ces arbres avoient fouffert d’un rencaiflement qui

avoit

ina FR is

MURCDEE SES © ïi.r N C'ÉE f4s avoit précédé les expériences; mais au moins eft-il biet

- certain que l'oranger enfermé a tranfpiré par jour à peu près

le poids de fes feuilles, & qu'il n'a pas paru foufftir de cette longue prifon; preuve évidente que les feuilles ne tirent pas tant d'humidité de air qu'on le penfe communément. : La différence entre la tranfpiration des plantes expofées au folel, & de celles de même efpèce mifes dans un lieu’ frais, comme une cave, eft encore plus marquée; celles qui étoient à l'air & au foleil ont donné la quantité de tranfpi- ration ordinaire, pendant que celles qui étoient à la cave n'en ont donné qu'une à peine fenfible, M. Guettard à réuffr de même à diminuer {a tranfpirätion des plantes ‘en les cou- vrant feulement d'une ferviette ou de tout autre corps qui y donne de l'ombre ; il ef même parvénu à diminuer la tranf: . Piration dans quelques parties d'une plante, feulement en {es mettant à l'ombre pendant que le refte de la plante étoit expolé au foleil & tranfpiroit à l'ordinaire: toûjours {1 plante ou les parties de {a plante expofées aux rayons du foleif ont tranfpiré davantage. C'eft probablement à cette caufe qu'il faut attribuer la blancheur des plantes qu'on lie ou ‘qu'on porte à la cave; on arrête parlà leur tranfpiration: leurs véficules fe gonflent de cette eau qui y-eft retenue, & elles acquièrent par ce moyen le double avantage d’être plus blanches & plus délicates. " es fruits foümis aux expériences de M. Guettard ont donné précifément les mèmes réfültats que les feuilles, fi ce n'eft qu'ils tranfpirent beaucoup moins: deux grappes de raifin à peu près pareilles & fur le même cep, ont été enfermées dans deux poudriers pareils & de même verre, mais lune a été expofée au foleïf, & l'autre tenue à l'ombre: cette der- nière ne tran{pira prefque point, & devint beaucoup plus grofle & plus belle que celle qui avoit été enfermée dans le poudrier expolé au foleil, & que celles qui étoient reftées expofées à l'air libre. I! fuit de-à que les facs dans lefquels quelques perfonnes envéloppent leurs raifins pour les garantir des mouches &

Hif. 1749: | Î M) à

146 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYaALeE

des oïfeaux, ne leur fervent pas feulement à cet ufage, mais augmentent encore la beauté de leur fruit; que la pofition ordinaire des fruits fous des feuilles qui les cachent, a été probablement affectée par l'Auteur de la Nature pour aug- menter leur grofleur & leur beauté; & qu'enfin rien n’eft plus avantageux que des temps fombrés qui puiffent fufpendre la tranfpiration du fruit pendant qu'il mûrit.

Les feuilles & les parties herbacées paroiffent être le prin- cipal organe de la tranfpiration des plantes; les fruits, comme nous venons de le dire," tranfpirent beaucoup moins : cette différence mème eft très-grande; les feuilles dépenfent par jour plus que leur poids par la tranfpiration, le raïfm n'a donné que la quatorzième partie du fien. Nous avons l'année dernière que le bois tranfpiroit fort peu: M. Guet- tard a fait des expériences pour s’aflurer de la tranfpiration des fleurs, & il a trouvé que leur tranfpiration alloit au plus au cinquième de celle des feuilles.

Les arbres qui confervent leurs feuilles en hiver, étoient trop propres à être foûmis à ces expériences, pour que M. Guettard pût néglicer de le tenter ; leur tranfpiration pouvoit être examinée l'hiver comme l'été, &il eft conftant, par cet examen, que quoique ces arbres pouflent & fleuriflent, même en hiver, leur tranfpiration , comparée à celle de l'été, eft prefque nulle; un laurier-thym a donné en deux jours d'été prefque la même tranfpiration qu'en un mois d'hiver.

Nous avions dit l'année dernière, que la liqueur que don- nent les plantes par la tranfpiration , ne diféroit pas fenfr- blement de l'eau commune, maïs il faut que pour pafler par fes pores elle fe réduife en vapeur: celle qui eft dans l'inté- rieur de la plante fous la forme d’eau, n'y fert que de réler- voir ; mais fi elle y étoit en trop grande quantité, bien loin de fervir à la tranfpiration, elle y nuiroit, elle rendroit le total trop difficile à s'échaufler au point néceflaire, & de-là vient que les plantes les plus fucculentes, & celles qui ont des feuilles épaifles, font affez communément celles qui dé- penfent le moins par a tranfpiration infenfible.

DES SCIENCES. T4 . Telle eft en général la fuite du travail de M. Guettard, qu'on peut voir fans aucun embarras dans des Tables qu'il - a jointes à fon Mémoire, & qui prélentent d'un {eul coup d'œil-toutes fes expériences. On n'avoit prefque fait jufqu'ici qu'effleurer cette partie de la Phyfique, on voit combien elle, gagne à être approfondie; ce que nous en avons rapporté eft bien propre à faire fouhaiter que des expériences qui peuvent devenir aufli intérefiantes, foient continuées: c'eft ce que M. Guettard promet, & on peut s’affurer que cet enga- gement fera rempli; des expériences heureufement commen-

cées ne laiflent pas ordinairement un Phyficien tranquille. *

OBSERVATIONS DE BOTANIQUE.

N°:: avons parlé à l'article de cette Hifloire qui con- cerne a Phyfique générale, de ce qui appartenoit à cette Science dans la Relation que M. l'Abbé Nollet a donnée V. les M. d'une partie de fon yoyage d'Italie : nous allons rapporter P: 466. quelques obfervations tirées de cette même Relation, & qui regardent la Botanique. à -

On eft communément perfuadé qu'on fait périr un arbre en le dépouillant de fes feuilles mefure qu'il les produit ; - on n’ofe, ni en France ni en Piémornit, cueillir que les pre- mières feuillès des müriers, on leur laiffe foïgneufement celles qu'ils repouflent après cette première récolte, & on croiroit détruire ces arbres en les leur ôtant; cependant M. l'Abbé Nollet a qu'en Tofcane on dépouilloit régulièrement les müriers deux fois par an, & que même une année que les premiers vers avoient manqué, on permit de faire une troi- fième récolte; par ce moyen les Tofcans font prefque autant . de foié que les Piémontois avec la moitié moins de müriers, parce qu'ils élèvent. deux familles de vers au lieu d’une: peut-être le fol ou le climat leur procure t-il cet avantage, mais un fujet auffi important mériteroit bien qu'on s'afurât fi on ne pourroit pas fans rifque tranfporter ailleurs la même

| Ti

V. les M. pag. 322 & 3924

148 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE prätique, & fi les Tofcans n'en feroient pas plus redevables à leur efprit qu'à la Nature.

117

On fe fert dans le royaume de Naples de feuilles Fes myrtes, qui y font très-communs , au lieu de tan pour pré- parer les cuirs ; on pratique la même chofe en Calabre: on voit bien que ce:te plante très-aftringente eft propre à faire le même effet que l'écorce de chêne, peut-être trouveroit- on quelque plante auffi ftiptique qui feroit aflez commune pour l'employer avec profit au ue ufage.

I I.

. On voit dans le Piémont & dans le Boulonnois une efpèce de chanvre qui devient d’une grandeur extraordinaire , * ce chanvre monte jufqu'à tois toiles de hauteur; on ne Pemploié pas ordinairement à faire du linge, mais il etrès- on pour les corderies ; on le tille, bien on le broie avee une meule de pierre femblable à celle dont on fe fert à écrafer les pommes pour en faire du cidre; le bois du dedans. eft affez fort pour qu'on en fafle des cannes, que les Dames du pays préferent aux autres à caufe de deur légèreté pour en faire ufage à la campagne.

E V.

On ne laifle communément en Piémont le foin fur le pré que vingt-quatre heures, on l'entafle enfuite fous des hangars ou FA des granges, de manière qu'il forme une mafle très-dure qu on eoupe avec un inftrument tranchant quand on en a beloin ; cependant, foit que le foleil agifle plus vivement qu'ici far le foin, foit que nous laiffions le nôtré trop long - temps fur le pré avant de le ferrer, ül m'arrive aucun acedeñté à ces foins entaflés; bien loin. DEA ils confervent un œil plus verd & une odeur plus forte que ceux de ce pays-ci.

renvoyons entièrement aux Mémoires, Les cinquième & fixième Mémoires de M. Guettaïrd, fur les filets, glandes ou poils des Plantes.

CONS

MIE SV S1C LE N: CHR 149

RENE ASTRONOMIE.

SUR LES ELEMENS DE LA THEORIE DU SOLEIL. L : élémens qui entrent dans la conftruction des Tables

aftronomiques , font en général de deux efpèces, la pofition des aftres, & leurs mouvemens: l'exactitude à Ja- quelle les Aftronomes modernes ont porté les obfervations, laifle peu de chofe à defirer quant aux pofitions; les mouve- mens ne peuvent pas être déterminés avec la même facilité, On ne les peut conclurre que de la comparaifon de plufieurs obfervations qui doivent être éloignées les unes des autres le plus qu'il eft poffible, afin que l'erreur, s'il y en a, de- vienne infenfible en fe partageant fur un grand nombre de

révolutions; d’où il fuit qu'on eft obligé de recourir aux

obfervations des Anciens: ces obfervations ne {ont pas à beaucoup près auffi exactes que celles que Fon fait aujour- d'hui, & comme F'Aftronomie à toûüjours avancé, quoique lentement, vers la perfection , il eft extrémement difficile de déterminer s’il y a plus à gagner pour lexaétitude de Ja dé- termination des mouvemens en employant des obfervations plus anciennes, mais moins précifes, ou en fe fervant d’autres qui, avec moins d'ancienneté, paroiffent avoir été faites avec une plus grande précifion.

C'eft de cette fource que font dérivés les différens fen- timens des Aftronomes fur la grandeur de l’année folaire, fur la variation ou Fimmutabilité de l’obliquité de l'Ecliptique, & fur le mouvement de l'apogée du Soleil, que les uns font réel & de plus d'une minute, & que les autres ne regardent que comme apparent & produit par la précefion des Equinoxes.

On ne peut cependant avoir des Tables du Soleil exactes

» Tiÿ

* Almagefie de Prolémée, liv. V, chap. XII.

1$0 HisToiRE DE L'ACADÉMIE RoxALE qu'autant qu'on faura au jufte déterminer ces élémens qui font eflentiels à leur conftruction. MS

M. l'Abbé de la Caille a cru pouvoir parvenir à cette importante détermination, en. comparant fes propres obler- vations à celles qui furent faites {ur la fin du quinzième fiècle par Régiomontan & Waltherus, & dont l'exaétitude lui a paru fuffifante.

Waltherus étoit un riche bourgeois de Nuremberg ; le commerce qu'il lia avec le célèbre Régiomontan, lui infpira goût de l’Aftronomie: il fit fabriquer des inftrumens, & commença, de concert avec Régiomontan, une fuite d'ob- fervations que Schonerus nous a tranfmiles, avec la defcrip- tion de l'inftrument qui lui fervoit aux obfervations du Soleil.

Cet inftrument étoit femblable à celui que décrit Ptolémée dans fon Almagefle*, & qu'il nomme Régles paralladiques; c'eft une efpèce de triangle ifofcèle, dont l'angle eft renfermé entre deux côtés conflans qui peuvent prendre entre eux toutes les inclinaifons poffibles: le troifième côté fert de bale au triangle, & eft la corde de tous les angles que peuvent faire entr'eux les deux autres. Ce dernier côté étoit aflujéti dans une fituation verticale, & divifé en parties égales: ro0000 de ces parties étoient épales à la longueur de chacune des deux autres règles, dont la fupérieure étoit garnie de pinnules.

Waltherus fe fervit de cet inftrument pendant trente années, au bout defquelles il fit conftruire un gnomon qui lui fervit à vérifier fon ancien inftrument; mais il n’en jouit pas long- temps & mourut l'année fuivante, qui étoit 1 504.

© Par la comparaifon des hauteurs folfticiales obfervées par Waltherus pendant quatorze années, tant au Solftice d'été qu'à celui d'hiver, M. FAbbé de la Caille trouve que, toutes réduétions faites, l’obliquité de l'Ecliptique étoit alors entre 239 29° 23", & 234 29° 42", fans qu'aucune des qua- torze années la donne hors de ces limites, ce fera donc, en prenant un milieu, 234 29° 30" que donneront les obfer- vations de Walthérus, avec un accord que le hafard feul ne pourroit produire. Sion joint à cela que tous les Aflronomes

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: QUE SIMSIT 1:E°N CG ENST; 44 rot du fiècle dernier l'ont faite de 234 29’ o", & que nous la trouvons aujourd'hui d'environ 234 28’ 30", on aura bien de la peine à refufer à l'Ecliptique un mouvement très- lent, mais cependant fenfible, par lequel elle s'approche de. l'Equateur.

_ Les mêmes obfervations des Solftices, comparées entr'elles & avec les temps qui fe font trouvés entre les unes & les autres, ont donné la pofition de l'apogée du Soleil, au 1 2 Mars 1696, dans le degré 56 minutes & 3 3 fecondes du Cancer; détermination d'autant plus exacte que, pour n'a- voir le lieu d'apogée qu'à x dre près par la méthode que M. l'Abbé de la Caïlle a employée; ä faudroï s'être trompé de près d'une heure trois quarts dans l'intervalle de temps éntre deux Solftices confécutifs, ‘erreur dont les obfervations de Waltherus ne paroiflent pas fufceptibles.

Cette pofition de l'apogée comparée à celle qui réfulte, pour 1744, des obfervations de M. 1'Abbé de la Caille, qui eft 84 30° 24" du Cancer, donne fon mouvement annuel de 1” 4" 49", bien différent des 5 1” que donne la préceffion des Equinoxes : il en faut donc revenir à donner à J'apogée un mêuvement propre & différent de celui des Fixes.

L'intervalle du temps écouléentre les Solftices obfervés par Valtherus, & ceux que M. l'Abbé de la Caïlle a obfervés lui-même, a encore fervi à trouver da durée de l’année folaire moyenne qui eft, felon cette détermination, de 36 5 jours “$ heures 48 minutes 46 fecondes, & le mouvemént du Soleil par conféquent, de of .o4 46’ 8" en cent années juliennes. à Wu Le mouvement moyen & de lieu de l'apogée déterminés, il eft facile d'en déduiré une époque du mouvement moyen : ‘M. l'Abbé de Caille trouve qu'au commencementde 1 S00, le mouvement moyen Soleil étoit de of 194 25° 36”.

La recherche de la plus grande équation du Soleil, & par conféquent de fon excentricité, pourroit également fe faire ‘avec les obfervations de Waltherus &: celles des Modernes. M. l'Abbé de la Caiïlle l'a tirée des obfervations de Waltherus

V. les M.

P- 75: * Voy. Hi. W739 P. 45°

x$2 Histoire DE L'AcADÉMIE RoyaLe

par la méthode ordinaire qui confifte à prendre des obfer: vations faites des deux côtés de la ligne des apfides, vers les moyennes diflances: comme alors f'équation eft conftamment Ja même pendant un temps confidérable, on a, par le lieu vrai du Soleil obfervé de chaque côté, l'arc que cet aftre a parcouru par fon mouvement vrai, & par le temps qui s'eft écoulé entre les deux obfervations, celui qu'il auroit parcouru par fon mouvement moyen; la différence entre ces deux. arcs donne précifément le double de la plus grande équation. Les oblervations de Waltherus ont donné par cette méthode, la plus grande équation du Soleil ACTE CP MR conféquent l'excentricité de 16716 parties de celles dont le rayon de lorbe annuel contient 1000000, très-appro- chante de celles qu’on trouve aujourd’hui: ce qui prouve fans replique la bonté & l'exactitude des obfervations de Wal- therus, & combien M. l'Abbé de la Caille a fagement fait de les mettre en œuvre.

SUR:LES REFFRACTIONS pme a rendu compte au public en ee 9*;

des recherches que M. Bouguer avoit faites fur les ré- fraétions, pendant fon voyage à fEquateur; il réfultoit de fes obfervations que, contre l'opinion généralement reçüe, la réfraction eft d'autant moindre, que l'Obfervateur eft plus élevé. Le fecond Mémoire, dont nous avons à parler ici, contient quelques faits fmguliers qui n'étoient pas compris dans le premier, & de plus, tout le géométrique & toute Ja théorie qui l'ont guidé dans cette occafion.

Nul pays n'étoit aufli propre que le Pérou aux recherches que M. Bouguer avoit entrepriles ; il avoit, pour ainfi dire, fous la main, & à une très-petite diflance les uns des autres, des endroits au niveau ou prefque au niveau de la mer, & les plus hautes montagnes qui foient peut-être dans le refte du monde. à

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DES SCIENCES. 153 * Le féjour qu'il fit fur une de ces montagnes nommée Chimborago, dans un endroit élevé au deflus de la mer de 2388 toiles, lui procura lobfervation d'un phénomène bien fingulier ; l'extrême élévation de ce pofle lui permettoit de découvrir le Soleil non feulement à l'horizon, mais encore plus d'un degré au deffous : il fut extrêmement furpris de voir que la réfraction, qui, lorfque le Soleil étoit à l'horizon, n'avoit été oblervée que de 19 minutes & demie, fe trou- voit de 24 minutes & un tiers immédiatement au deflous; après quoi elle augmentoit régulièrement, comme {1 elle eût fait un faut en paffant de l’hémifphère fupérieur dans l'in- férieur.

Quelque étonnante que fût au premier coup d'œil cette augmentation fubite de la réfraction, la furprife de M. Bou- guer ne dura pas long-temps, & il en eut bien-tôt trouvé la caufe. Lorfque d'un dieu fitué au bord de la mer on obferve le coucher du Soleil, toute réfraétion à part, il eft clair que le rayon par lequel on le voit, eft une tangente au globe terrellre, & que par conféquent, en partant de l'œil, il va toüjours en s’écartant du globe, & qu'il s'élève & rencontre toûjours des couches de l’atmofphère de ‘moins en moins épaifles. Mais fi d’un lieu fort élevé on obferve le Soleil au-deflous de l'horizon, alors le rayon qui pait de l'œil de fObfervateur n'eft plus une tangente, il s'approche d'abord du globe de la Terre jufqu'au point dont la verticale eft perpendiculaire à fa direction , enfuite il rentre dans le pre- mier cas, & à compter de ce point, il devient tangente : il doit donc efluyer en quelque forte deux réfractions; fa première, égale à {a réfraction horizontale qu'obferveroit celui qui feroit placé dans ce fecond point, & c'eft cette partie que M. Beuguer appelle de fon véritable nom de Réfracion aflronomique ; & a feconde, eu égard au trajet sn fait depuis l'œil jufqu'à ce point, senfonçant toûjours

ns des couches de l'atmofphère de plus en plus épaïffes, & ceft ce que M. Bouguer nomme Réfradlion terreffre; cetie dernière, comme on voit, n’a pas lieu dans toutes les hauteurs

Hifl. 1749. 1

x$4 Histoire DE L'ACADÉMIE RoYaLe oblervées au deflus de Fhorizon : il n'eft donc pas étonnant que les rayons éprouvent, en paflant au defous de l'horizon, une augmentation fubite de réfraétion, puifqu’ils s'y trouvent tout-à-coup affeétés d’une nouvelle caufe d'inflexion qui-les y attendoit, pour ainfr dire, au paflage,

Puifque les couches qui compolent notre atmofphère vont en diminuant de denfité à mefure qu'elles s'élèvent, les rayons ne doivent pas les traverfer en ligne droite; & de plus, la réfraction fera d'autant moindre à hauteurs égales du même aftre, que le pofte de l'Obfervateur fera plus élevé: on peut donc, au moyen des réfractions horizontales obfervées par M. Bouguer à des hauteurs très-différentes, trouver la pro- portion dans laquelle décroït a denfité de ces couches, & le terme auquel elles ceffent d’agir fenfiblement fur les rayons, ou, ce qui revient au même, les bornes de l'atmofphère réfraétive; ces bornes font, pour la Zone torride, de $ 1 58 toiles; en forte que s'il étoit poflible de fe placer à une pa- reille hauteur, on n’obferveroit plus aucune réfraétion hori- zontale. Pour avoir celle qu'on trouveroit fous ce même climat à telle hauteur qu'on voudroit propofer , il faudra fuivie la loi que les obfervations femblent indiquer; les ré- fractions obfervées fe font toùjours trouvées proportionnelles aux racines carrées de l'excès de 5158 toiles fur la hauteur de chaque pofte. x

Les réfractions très-fenfibles à de petites hauteurs, dimi- nuent aflez rapidement, en forte que celles qui font dûes aux points élevés de $o degrés & au deflus, font très-petites: on court cependant autant & plus de rifque de fe trompér en déterminant immédiatement ces réfraétions, qu'en obfer- vant celles qui font dûes aux petites hauteurs ; heureufement les obfervations de M. Bouguer l'ont aflez inftruit fur la marche des réfraétions, pour qu'il ait fubflituer à des opérations incertaines une théorie plus füre, qui, partant des obfervations qu'il eft poffible de faire, donne par un calcul facile lés points qui échapperoient aux recherches aftrono- miques.

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DES SCIENCES. 155 * Nous fupprimons ici tout le procédé géométrique que M. Bouguer a employé pour choifir la méthode qui doit fervir à déterminer la nature de la courbe que le rayon décrit dans l'atmofphère, & la proportion de la réfraétion horizon- tale à celles qui appartiennent aux différentes hauteurs: nous allons feulement eflayer d'en préfenter d'efprit & les réfultats.

La hauteur de latmofphère étant déterminée, il eft quef tion d'avoir la proportion dans laquelle es couches de l'at- mofphère diminuent de denfité ; les obfervations faites à diffé- rentes hauteurs au deflus de {a mer, ont fervi de domxes, & M. Bouguer croit qu'on peut légitimement repréfenter Y'augmentation des dilatations, & par conféquent la diminu- tion du pouvoir réfractif, par les arcs d’une parabole d'un degré plus ou moins élevé.

Heureufement, dans cette recherche, un grand nombre d'objets qui auroient introduire de f’embarras dans le calcul, s'évanouiflent, ou peuvent être, pour parler plus jufte, impunément négligés.

Les couches de l'atmofphère font, à a vérité, d'une den- fité différente fuivant leur hauteur, mais cette différence de denfité eft très-petite; & quoiqu'on foit obligé d'y avoir égard, elle haifle le choix d'un grand nombre d'hypothèfes

i la repréfentent aflez bien : fa courbure des rayons de lu- mière eft de même affez petite pour qu'on puifle confondre leur longueur avec leur tangente ou leur corde; on peut même, lorfque ces rayons font horizontaux, négliger la diffé- rence qu'il y a entre leur longueur &c eur progrès horizontal, “& toutes ces remarques donnent au calcul une facilité extrême dont îl feroit privé s’il falloit abfolument le traiter fuivant ‘toute da rigueur mathémagique. Il y a peut-être un peu à Lperdre fur da précifion géométrique, mais la véritable élégance d'une folution eft d'être fimple ; l'Aftronomie offre aflez de difficultés réelles, fans en aller chercher d'imaginaires, & “qui 1fauroient pour but qu'une exactitude inutile. Retranchant donc tout ce qui pourroït être étranger à da

—queftion, M. Bouguer trouve qu'en quelqu'endroit que foit Vi

156 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoyaLe

placé l'Obfervateur, ft on tire de fon œil une ligne droite faifant avec l'horizon un angle quelconque, & qui aille fe terminer à l'extrémité de l'atmofphère réfractive, & que de Yextrémité de cette ligne on en mène une au centre de la Terre, la réfraction fera toûjours, à très-peu près, propor- tionnelle, non à hi longueur de cette fécante, mais à l'arc de la circonférence de la Terre, compris entre la verticale de lObfervateur & cette ligne, que nous venons de fuppofer aller au centre de la Terre.

On peut employer encore la méthode de M. Bouguer pour déterminer avec précifion l'inflexion que fouffrent en traverfant latmofphère, les rayons qui terminent le cône d'emb:e dans les écliples de Lune, ce qui ferviroit à fixer plus exaélement les limites de la pénombre.

La denfité de l'atmofphère eft la caufe phyfique de la réfration, mais ce n’eft fürement pas une caufe invariable, auffi voit-on quelquefois les réfractions éprouver des inéga- lités prefque fubites, qu'on ne peut raifonnablement attribuer à autre chofe. M. Bouguer n'a pas négligé de s'aflurer, non pas de ces variations momentanées qui ne peuvent être. ré- duites à aucune règle, mais de celles qu'on pouvoit foup- çonner d'être aflujéties à quelque loi; il a recherché, par exemple, fi la réfraétion de la nuit étoit plus grande que celle qu'on ob'ervoit pendant le jour, & il l'a en effet pre que toûjours trouvé pus forte d'environ un fixième un feptième, pourvü cependant qu'il ne s'agifle que de hauteurs au deflus de 7 à 8 degrés.

Les variations diurnes des réfraétions ne font probable- ment dües qu'à la dilatation des couches les plus bafles de - latmofphère : M. Bouguer fait voir qu'une dilatation totale & proportionnelle de toutes ces couches ne produiroit aucun effet fenfible fur la réfraétion ; d’ailleurs, les expériences baromètre, faites à des hauteurs confidérablement diflérentes, ne manqueroient pas de l'indiquer, & M. Bouguer ra rien obfervé de femblable ; enfin, toutes les caules phyfiques doivent concourir à exciter cette dilatation pluftôt dans la

MIENSINS: C1 E NIC'EUS L partie baffe de l'atmofphère que dans celle qui eft élevée; le raifonnement eft parfaitement d'accord en ce-point avec l'expérience.

Une dernière caufe d’inégalité dans les réfra@tions, feroit l'inégalité de courbure du méridien & du cercle perpendicu- laire, réfultante de lalongement de la Terre vers {es poles; il réfulteroit delà que la ion obfervée au Levant ou au Couchant, feroit plus grande que celle qu'on obferveroit à même degré de hauteur au Nord ou au Midi, puifque l'atmo-

_fphère, dont la courbure fuit affez celle de la Terre, en auroit effectivement une plus grande; mais on peut être tranquiil fur cette différence. Par le calcul de M. Bouguer, elle nal- tère, dans le cas le plus favorable, la réfraction horizontale que de 7 fecondes fous l'Equateur, & par conféquent devient phyfiquement nulle à de plus grandes hauteurs, fur-tout fi on obferve dans d’autres dlimats.

M. Bouguer avoit donné en 17 39 une Table des réfrac- -

tions, calculée pour Quito, qui eft 1479 toiles au deflus de la mer, & pour les endroits $00 toiles plus hauts ou plus bas que cette ville; les calculs qu'il a faits depuis, lui ayant fait apercevoir quelques erreurs dans cette Table, il a mieux aimé la donner à fa fin de fon Mémoire toute corrigée, .que d'indiquer fimplement les correétions. Combien de chofes inconnues fur une matière aufi importante, & qui avoit été déjà traitée tant de fois! pourra-t-on quelque j jour fe flatter d'avoir porté la connoiflance de quelque partie des Sciences au point de n'avoir plus befoin d'y revenir?

IN renvoyons entièrement aux Mémoires, L'Obfervation de FEclipfe de Lune du 23 Dé- cembre 1749 : par Ms Caffini de Thury & Maraldi.

V. les M.

p. 206.

L'Obfervation de quelques Occultations d'étoiles fixes p. 318.

pa la Lune: par M. le Monnier.

L’Obfervation de lEclipfe de Lune du 2 Décembre p. 319.

1749: par M. le Monnier, V ii

V. les M. P- 320. p- 378: P: 379:

° Voy. Hif. 2744 P.35

158 Hisroïre DE r'AcADÉMiE RoraLe

L'Obfervation de lEclipte de Lune du 23 Décembre 1749 : par M. de l'Ifle.

La même: par M. de Fouchy.

Et les Phafes de l'Ec'iple de Soleil du 25 Juillet ri obfervées en Ecotie: par M. le Monnier.

ETTE année parut un ouvrage de M. Bououer, intitulé, J La figure de la Terre déterminee par les obfervations de Mrs Bouguer à de la Condamine , envoyés par le Roi an Pérou pour obferver aux environs de l'E‘quateur, avec une rela- tion abrégée de ce voyage, dc. publié par ordre de l’Académie, Quelque intéreflante que foit la première partie de cet Ouvrage, qui contient la relation du DE la defcription du pays, fes produétions & les mœurs de fes habitans, nous n'en dirons rien ici, tant parce que nous en avons rendu compte en 1744*, en parlant de l'abrégé de ceite même relation que M. Bouguer lut à fon retour, que parce que nous avons cru plus-utile de préfenter avec quelque détail ce qui concerne les travaux des deux Académiciens, & les conclufions qu'on en a tirées, que nous ne pümes qu'effeurer en 1744. Le premier pas à faire étoit de fe déterminer fur le choix des opérations qu'on vouloit entreprendre; les obfervations de M. Caffini donnoient la grandeur du degré du méridien meluré en France, & la première idée qui fe préfenta, fut de mefurer quelques devrés de l'Equateur, en même temps qu'on en mefureroit auf quelques-uns du méridien dans le voifinage de l'Equateur; on pouvoit auffi mefurer une plus grande portion du méridien, & omettre la mefure de l'E- quateur ; chaque parti fninoé avoir fes avantages & fes inconvéniens: c’eft à les difcuter qu'eft employée toute Îa première feétion de l'ouvrage de M. Bouguer ; on n'avoit alors que le degré de France, & celui qu'on aHoit chercher auprès de l'Equateur, fur lefquels on pût compter. La Géo- métrie enfeignoit qu'une infinité de fphéroïdes pouvoient avoir les degrés de l'Equateur & ceux du méridien à une latitude déterminée dans un certain rapport, quoique les autres degrés

DES SCIENCES. Li

& la figure entière du fphéroïde fuffent très-différens ; d’un autre côté, la mefure du degré de Equateur, jointe à celle du degré du méridien proche de ce cercle & de celui qu'on avoit en France, pouvoit déterminer immédiatement {a pro- portion entre l'axe de la Terre & le diamètre de Equateur: ain{r il ne refloit, pour fe déterminer dans une pareille occa- fion, que d'examiner de quelles erreurs l'une & l'autre thodes pouvoient être fufceptibles.

On voit aifément qu'une pareille mefure eft néceffairement fufceptible d'erreurs de deux genres différens, de celles qui peuvent entrer dans la melure géodéfique ou aétuelle de l'étendue terreftre qui répond à un degré, & de celles qui peuvent affecter la partie aftronomique ou la mefure de lam- plitude de cet arc.

Les premières erreurs peuvent être fuppoées égales dans la mefure géodéfique du degré du méridien & de celui de TEquateur, quoique cependant la difpofition locale rendit celle de ce dernier bien plus difficile; mais il n'en eft cer., tainement pas de même de la mefure aftronomique de une & de l'autre efpèce de degré: celui de f'Equateur fe doit mefuer par le temps ,-& celui du méridien par les diffé- rences des hauteurs méridiennes d'un même aflr. Or il ne faut être que médiocrement verfé dans l'aftronomie pour favoir que toutes les melures qui dépendent du temps, font fujettes à bien plus d'erreurs que celles qu'on fait immédia- tement des arcs de cercle; une feule feconde de temps équi- vaut à 1 $ fecondes de degré, & quelque parfaites que foient aujourd'hui les pendules, quelque attention qu'on apporte à

“les régler, on ne peut fe flatter qu'il n'échappe spas une erreur de plus d'une feconde dans chaque opération ; pour . peu qu'elies fuffent multiplies, elles pourroient abforber aifé- ment la différence dont on vouloit saflurer, au lieu que la mefure des degrés du méridien ne hifloit ren de pareil à redouter, les erreurs dont elle peut être fufceptible étant infi- niment moindres; & en la comparant aux degrés qui avoient été mefurés en France, & à celui qu'on alloit en même temps

160 HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE mefurer fous le Cercle Polaire, on pouvoit fe flaiter de par- venir à une précifion à laquelle la meiure du degré de F'E- quateur ne pouvoit rien ajoûter. Ce furent ces raifons qui déierminèrent apparemment M. le Comie de Maurepas à défendre aux Académiciens déjà arrivés au Pérou, d'entre- prendre la mefure des degrés de l'Equateur, & à leur pref- crire de fe borner à la mefure de ceux du méridien; ce que nous venons de dire fur cette matière doit fufhre pour faire voir la fagefle de cet ordre.

Le premier pas que les Oblervateurs avoient à faire, étoit fa melure de la bale qui devoit fervir, pour ainfi dire, de fondement à tout leur édifice., Nous avons dit en 1744, que toute l'opération avoit été faite dans la vallée de Quito ou dans la plaine qui eft enfermée dans la duplicature du fommet de la Cordélière, & dont la direétion eft à peu près nord & fud; le terrein dans lequel on la plaça, eft à en- viron cinq lieues de diftance de Quito : l'extrémité du nord fe trouvoit à peu près par 6 minutes de latitude auftrale, près d'un endroit nommé Carabourou ; l'extrémité fud étoit par 12 minutes 20 fecondes, & fe nomme Oyambaro. Toute la plaine en général, dans laquelle la bafe fut tracée, fe nomme la plaine d'Farouqui, du nom d'un aflez gros bourg qui y eft fitué; ce terrein avoit, ‘en allant du nord au midi, une pente d'environ 126 toiles fur la longueur de la bafe, dont la direction étoit nord 194 26" à l'oueft; on pafla plufieurs jours à l'aligner & à tout difpofer pour la mefure: enfin on la commença, & les Obfervateurs fe féparèrent-en deux bandes, dont les uns meluroient en allant du terme le plus feptentrional de la bafe au plus méridional, &c les autres, du terme le plus méridional au plus feptentrional.

Les inégalités du terrein ne permettoient pas de pofer les perches qui fervoient de melure, parallèlement à fa fürface; on auroit eu au lieu d’une ligne droite, la mefure d'une courbe irrégulière qui eût été beaucoup plus longue; pour remédier à cet inconvénient, M. Bouguer & fa compagnie plaçoient les perches toûjours horizontalement, & fe fervoient d'un fil

à plomb

D'E S'"SCIE N CE'S 161 à plomb pour poler celle qui devoit fuivre, logfque fon extré- mité étoit trop bafle pour toucher celle de la précédente. On voit aifément combien cette manœuvre étoit pénible, & nous ne craignons point d'exagérer en difant que M. Bou- güer & troupe fe traînèrent, prefque en rampant, d'un bout de la bafe à l'autre.

L'autre troupe fe fervit d’un moyen peu différent : M. Godin qui étoit à la tête de celle-ci, foûtenoit fes perches fur des chevalets, & ne fe fervoit du fil à plomb que quand la der- nière commençoit à être trop haute pour y pouvoir atteindre: on voit aifément que ni les uns ni les autres ne décrivoient par ce moyen une ligne droite, mais des elpèces de mar- ches d'efcalier plus moins hautes, qu'il falloit enfuite réduire à une ligne droite aflant d’une extrémité de la bafe à l'autre. Ce fut l'ouvrage d’un long & pénible travail, mais enfin on en vint à bout, & malgré la différente manière d'opérer, il {e trouva que la différence de la longueur me- furée par chacune des deux compagnies, n'alloït pas à trois pouces fur 6272 toiles qu'avoit la bafe, que des raifons de convenance firent enluite étendre jufqu'à 6274.

Lorfqu'en forma le projet de la mefure des degrés du méridien voifins de l'Equateur, on étoit bien perfuadé que les pointes les plus élevées des montagnes de la Cordélière épargneroient un travail immenfe, en procurant le moyen de faire des triangles extrémement grands, & par conféquent en petit nombre; mais il y eut bien à rabattre de cette idée quand on voulut reconnoître ces poftes dans lefquels en s'étoit propoié d'opérer. La plufpart de ces pointes font ou inacceflibles, ou d'un très-diffcilé accès; on y eft expolé âu froïd le plus vif, aux tempêtes continuelles, & prefque toûjours enveloppé de nuages qui en dérobent la vüe, en forte qu'il fallut abandonner abfolument ce projet, & fe ré- duire à opérer fur des pointes moins hautes, quoiqu'elles le faffent encore de 7 à 800 toifes au deffus du fol de Quito. €e parti étant pris, il fut queftion d'abord d'examiner quelle pourroit être la fuite de triangles la plus avantageufe, de

Hi. 1 749. - X

162 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYazr former, pour ainfi dire, le fyftème de toute l'opération & de planter les fignaux qui devoient être aperçus d’un pofle à l'autre,

Les triangles étoient au nombre de trente-deux, & on avoit eu tout le foin poffible de les choifir, de manière qu'ils puflent jouir des plus grands avantages que le local pouvoit leur permettre. On penfa enfuite à l'examen des * inftrumens : ceux qui n'ont jamais fait que des opérations médiocres de Géométrie pratique, auront peut-être peine à fe perluader que l'examen d’un inftrument fait avec le plus grand foin & par le meilleur ouvrier, ait de quoi occuper pendant plufieurs femaines un Oblervateur exaét & Jabo- rieux: c’eft cependant ce qui arrive ordinanement, & ce qui eft arrivé en particulier à M. Bouguer; rien n'eft plus facile que d'éviter les erreurs groflières dans la pratique des Ma- thématiques, & rien n'eft peut-être plus dificile que de fe défendre des petites : il étoit cependant d'une conféquence extrême de s’en garantir dans cette occafion, elles auroient fait abfolument difparoître toute l'utilité qu'on pouvoit atten- dre de l'opération qu'on alloit faire.

Par larrangement des triangles il fe trouvoit que tout leur affemblage étoit comme fufpendu en l'air, 6 à 700 toifes au deffus de la vallée de Quito, les ftations fe trouvant des deux côtés fur les pointes les plus bafles des montagnes qui bornent cette vallée à left & à l'oueft. On prit la même précaution que pour la mefure de la bafe; on forma deux compagnies qui campoient, à la vûe l'une de l’autre, fur les deux Cordelières oppofées, & de deux en deux flations les deux compagnies changeoient réciproquement de pofle, afin que chacun püt s’aflurer par lui-même de la mefure de deux angles de chaque triangle, & ne dût à l'autre compagnie que la mefure du troifième, qu'il pouvoit déjà favoir. Chaque Académicien avoit fon quart-de-cercle, & obfervoit fuc- ceflivement le même angle; par conféquent la mefure de chaque ang'e étoit décidée fur e lieu même avec-la plus grande exactitude. Les trois angles de chaque triangle ont ioüjours été déterminés inmédiaeinent ; enfm aucune des

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DES Score NcEis 16% précautions néceflaires pour affurer une mefure, ne fut né- gligée en cette occafion. - |

On s'imaginera ailément que toutes les pointes des mon- tagnes étoient les flations, ne fe trouvoient pas dans un même plan, il falloit cependant les y réduire ; on fe fervoit ordinairement pour cette réduétion , de la fimple trigono- métrie rectiligne : M." Bouguer a imaginé d'y employer a trigonométrie fphérique; & quoiqu'en général de calcul de cette dernière elpèce de triangles foit plus Iong que celui -des triangles rectilignes , il y a confidérablement à gagner du côté de la facilité. La réduétion des angles au centre des fignaux, fut encore la matière d’un examen particulier ; on fait que dans des occafions pareilles on obferve le plus près qu'on peut du fignal qui a fervi de point de vifée dans la mefure des autres angles, muis qu'on nobferve jamais au lieu propre de ce même fignal, qui, en occupant entièrement {a place, en interdit auf d'accès. M. Bouguer a examiné les manières qui étoient en ufage pour réduire ces obfervations au centre mème du fignal, & pour trouver l'endroit du quart- ‘de-cercle qui devoit répondre au point qui fervoit de centre à chaque flation, & il a donné le moyen de découvrir plu- fieurs erreurs qui fe pouvoient gliffer dans cette opération, &, ce qui importoit encore plus, celui de les éviter.

Tant de précautions ne pouvoient manquer d’aflurer le fuccès d'une opération , auffi l'exaétitude de cette melure a<-elle été portée au plus haut point: il fe trouvoit au terme méridional une praifie propre à mefurer une nouvelle bafe ‘qui devoit fervir de vérification à tout l'ouvrage: elle fut mefurée avec le même foin & de la méme manière que d'avoit été la première, & la melure actuelle ne différa que de deux pieds de la longueur conclue au moyen de trente- deux triangles, de la première bafe, qui étoit à foïxante lieues; preuve convaincante & fans réplique de la précifion avec daquelle Les Obfervateurs avoient opéré, & que les erreurs me font.pas affez à craindre fur un : longue mefure pour qu'on doive fe reftraindre à une plus courte,

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164 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

On ne fera certainement pas furpris que les Obfervateurs n'aient négligé aucune occafion d'aflujétir à la direction de la méridienne une fuite de triangles qui avoient pour but la mefure de la Terre, aufli prirent-ils à tâche d'examiner la direction de ceux des côtés de ces triangles dont on püt comparer la fituation avec le Soleil couchant, ou dont on

üt avoir la direction par d'autres moyens; on les Jia auffi à la pofition de Quito & de tous les lieux voifins dignes de remarque; ce qui a dû, vrai-femblablement, compoler la première carte de cette contrée, levée avec une pareille exac- titude, elle fera probablement encore long-temps unique de cette efpèce.

Toute la partie géodéfique de l'opération paroifloit achevée, il y manquoit encore cependant une détermination eflen- tielle, & fans laquelle tout ce qui avoit été fait demeuroit inutile. Nous avons dit que le plan dans lequel étoient. à peu près compris les triangles qu'on avoit melurés, étoit à 6 ou 700 toiles de hauteur au deflus du fol de Quito, c'eft-ài-dire, d'environ 2000 toiles plus élevé que le rivage de la mer; fi donc on avoit appliqué la melure aftronomique à l'étendue que lon avoit melurée, on auroit eu, non le degré de la Terre, mais le degré d'un cercle parallèle à fa furface, & dont le rayon auroit excédé de 2000 toifes celui du globe: il falloit donc réduire la diftance mefurée, pour ainfi dire, en l'air, à celle qui lui devoit répondre à la fur- face du globe prife au niveau de la mer, & pour cela s'y tanfporter, & mefurer la hauteur abfolue de quelqu'une des montagnes dont on s'étoit fervi, car on connoiffoit déjà leur différence refpective de hauteur. Cette obfervation, dont M. Bouguer fe chargea feul, lui coûta plus d’un mois de voyage, & plus de deux de fatigues & de dangers, pour attendre dans une ifle déferte un moment les nuées lui puffent per- mettre d’obferver la hauteur du fommet d’une de ces mon- tagnes : cette oblervation, en donnant la hauteur abfolue de cette mafle de montagnes fur laquelle on avoit opéré, mit en quelque forte {a dernière main à la mefure géodéfique.

DES SCIENCES. 165 + Si cette mefure avoit exigé tant de précautions, on ima- gine bien que celle de l'amplitude de l'arc du Ciel qui répon- doit à cette partie mefurée, n'en exigeoit pas de moindres.

On fait que le moyen le plus für & le plus ufité pour déterminer à quel arc du Ciel répond un efpace mefüré fur la terre dans la direétion du méridien, eft d’obferver a diftance de la même étoile au zénith de chacune des extré- mités de cet efpace ; la différence ou la fomme de ces deux diftances eft exactement Farc du méridien, qui répond à l'e£ pace mefuré: on doit choifir pour cette recherche une étoile proche de ces zéniths, tant pour éviter l'irrégularité des réfraétions, que pour pouvoir procurer à l'inftrument l'avan- tage dont nous allons parler.

Puifque l'étoile doit être voifine du zénith, il eft inutile que l'inftrument ait un grand arc; par-là il devient moins embarraffant, & on peut augmenter fon rayon fans craindre de le rendre plus difficile à tranfporter. Une feule règle de fer foûtenue d'une règle de champ à laquelle on attache folidement la lunette, eft fufhfante pour former le corps de l'inftrument, & porter le centre avec le petit limbe dont on a befoin, & qui ne doit contenir que quelques degrés, avec les points de dix en dix minutes; un micromètre adapté à fa lunette, donne les autres divifions. M. Bouguer même trouve que la divifion en decrés n’eft nullement néceflire, deux points marqués fur l'arc à égale diftance de celui qui eft indiqué par le rayon parallèle à la lunette, fuffront fi on a l'attention de les placer de manière que leur diftance à ce dernier point foit une partie aliquote du rayon.

H eft abfolument néceffaire que la lunette foit exactement parallèle au plan de l'inftrument; fans cela, l'obfervation de- viendra toûjours défectueufe, puifqu'il fera impofible de remplir les trois conditions néceflaires pour la rendre bonne, favoir, que l’inftrument {oit vertical, que fon plan foit dirigé dans celui du méridien, & que l'aftre pale à la croifée des filets à l'inflant précis de f4 médiation. La plufpart des Aftro-

-‘nomes s’étoient jufqu’ici contentés de cette dernière condition, Xi

166 HisToiRE DE L'ACADÉMIE RoraLe jointe à celle de tenir linftrument vertical ; mais M. Bou- guer démontre que celle de tenir le plan du lecteur dans celui du méridien, n'eft pas moins néceflane, & qu'en Ja négliseant, on court rifque de tomber daus des erreurs groffières.

La matière qui entre dans la conftruction de ces inftru- mens, eft encore un objet important & qui mérite d'être difcuté; on fait que les métaux font fufcepiibles de s’'alonger par Paétion de la chaleur : fr: un inftrument étoit entièrement compolé du même métal, cette augmentation ne pourroit apporter aucune variation dans la mefure des angles, puilque touies les parties s'étendant également, le rapport qui doit être entrelles, fubfifteroit toujours le même; mais comme ordinairement ils font compolés partie de fer & partie de cuivre, & que ces deux métaux éprouvent des dilatations différentes, il en doit néceffairement réfulter un changement de figure, & une erreur réelle fur la melure des angles.

Le calcul même donnoit cette erreur afiez confidérable, mais M. Bouguer ayant pris des angles le matin avec un quart-de-cercle, Je laiffa expolé à l’ardeur du foleil, jufqu'à ce qu'il füt devenu aflez chaud pour ne pouvoir plus être touché impunément; en cet état, il reprit les mêmes angles, & au lieu d'une erreur de 28 fecondes qui étoit indiquée par le calcul, il n'en trouva qu'une de cinq fecondes fur tout l'arc de 90 degrés; erreur qui, partagée fur et arc, n'en laifle aucune fenfible à redouter pour les feéteurs qui n’ont qu'un très-petit arc, & qu'on a foin de tenir toujours à ombre. On pourroit foupçonner avec plus de raifon que le tuyau de lunette qui eft de cuivre, s'alongeant beaucoup plus que le rayon, cauferoit à celui-ci quelque inflexion; mais comme ces tuyaux font ordinairement de deux pièces qui ne font qu'entier l'une dans l'autre fans ètre foudées, leur extenfion eft abfolument libre & indifférente au rayonde linftrument.

On doit donner au feéteur une lunette égale à fon rayon, &. fi quelques Aftronomes ont cru y en devoir adapter une

DPENSMS Cr E N'C PE 167 plus courte, dans a perfuafion que la collimation feroit encore portée à plus d'exactitude que la divifion n'en pourroit donner, ils n'ont pas fait attention qu'on pouvoit, avec des loupes, augmenter prefque à volonté l'exactitude de cette dernière partie de l'opération; mais de plus ils ont négligé une autre caufe d'erreur encore plus importante : le feul poids de 1a Barre qui compole le feéteur, lui occafionne une flexion qui

ut être à la vérité négligée par rapport au rayon même; mais fi la lunette eft plus courte que le rayon, elle ne de- meure plus parallèle à ce rayon, elle fuit la tangente de la courbure qu'a pris la barre, & produit par-là une erreur tout autrement à craindre que la première.

Le parallélifme de l'axe de la lunette à celui du feteur, neft pas une condition moins eflentielle à fa bonté; faute de ce parallélifme, la lunette décrit dans le ciel un cone au Tieu d'unplan, & il eft impofñfible de faire accorder le temps de la médiation de l'aftre, avec la pofition du limbe dans le plan du méridien : il faut de plus que lune des foies foit parallèle, & l'autre perpendiculaire au plan de linftrument, toutes conditions dont M. Bouguer avertit, & qu’il donne le moyen d'obtenir, parce que fouvent céux qui conftruifent les inftrumens n’y ont aucun égard, & que cependant elles font abfolament néceflaires à la jufteffe de l'opération. Ces foies dont nous venons parler, doivent être miles exac- tement au foyer confmun de l'objeétif!& de l’oculaire; fans cela elles ne concourroient pas avec l'image de l'objet qui fe fait en cet endroit de la lunette, & qu'elles doivent me- fürer, & il en réfulteroit que, fuivant la différente pofition de l'œil de l'Obfervateur, il les verroit répondre à différens points de l'objet : de-là naît, felon Bouguer, une des plus dangereufes erreurs dont les obfervations aftronomiques puiffent être fufceptibles. Lorfqu'on parle du foyer abfolu dun verre, on fuppole, fuivant les loix de la Dioptrique, que les rayons qui viennent de chaque point de l'objet fur a furface de ce verre, foient parallèles entr'eux, ou, ce qui revient au même, que la diflance de l'objet au verre foit

168 HisToire DE L'ACADÉMIE ROYALE phyfiquemient infinie; fi elle étoit moindre, la peinture ne fe feroit plus au même endroit, & le foyer feroit reculé: or il n'arrive que trop fouvent qu’en ajuftant les foies au foyer de la lunette, on prend des objets trop prochains, & que par conféquent on les place dans un endroit différent de celui fe fera la peinture des objets céleftes, lorfqu'on y dirigera la lunette. Il y a plus, le lieu de cette peinture eft variable; lilluftre Newton a fait voir que chaque trait de lumière eft un compofé de rayons de différeñtes couleurs, & différemment réfrangibles : d’où il fuit qu'il fe forme au foyer d'un verre, plufieurs images du même objet, placées les unes derrière les autres, & comme enfilées par l'axe op- tique de la lunette. À mefure qu'on, enfoncera l'oculaire ou qu'on le retirera, fon foyer répondra à une de ces images qui fera la feule qu'on verra diftinétement, & par conféquent Je foyer de la même lunette fera différent pour ceux qui auront la vüe longue & pour ceux qui auront à vüe courte; & fi les foies paroiflent aux uns bien placées, elles ne le paroïtront pas aux autres.

Le foyer des lunettes eft encore fufceptible d’une autre efpèce de variation; l'atmofphère eft différemment colorée la nuit & le jour: pendant la nuit, les rayons bleus dominent; pendant la journée au contraire, ce font les rouges ou orangés: d’où il fuit que l'image la plus vive qui conftitue le foyer du verre, fera plus près pendant le jour, & plus loin pen- dant la nuit; ce jeu peut, fuivant les obfervations de Mrs Bou- guer & de la Condamine, aller dans de certaines circonftances à plus d’un pouce dans une lunette de douze pieds ; elle fera moindre dans une lunette plus courte, & cette variation doit engager les Aftronomes à n'augmenter qu'avec une prudente modération, le rayon des inftrumens, auquel, comme nous l'avons dit, les lunettes doivent être égales pour ne pas rifquer de perdre du côté de la collimation, plus qu'ils n’auroient gagner de celui de Ja divifion.

Ce feroit certainement avoir rendu un grand fervice aux Afltronomes, que de leur avoir indiqué tant de fources d'erreur

dans

F'æ ET

0e DES SctrEeNcEs 169 dans un point important on ne sétoit pas encore avilé d'en foupçonner. Mais M. Bouguer rend encore un fervice bien plus effentiel à l Aftronomie, en enfeignant les moyens d'éviter ou du moins de diminuer ces erreurs autant qu'il eft poffhble; le premier de ces moyens eft de placer toûjours Yaftre qu'on obferve, le plus près qu'il eft poffible du centre de la lunette, afin que le rayon par lequel il eft vü, foit moins oblique; le fecond, que M. Bouguer ne propofe que comme une vüe dont on pourroit profiter, feroit de fe fervir d'objectifs colorés; par ce moyen, il ne fe formeroit plus de ce chef qu'une feule image, & on anéantiroit toutes les va- riations qui viennent de leur multiplicité; enfin le troifième eft de diminuer beaucoup l'ouverture de Fobje“if; on dimi- nuera par-là l'efpèce de parallaxe ou de jeu que la diftance des fils à l’image pourroit produire, & on prendra, aufft exactement qu'on le pourra, le milieu du petit balancement de l'aftre au deflus & au deflous du fil, pourvû cependant que l'objedif ait été bien centré, c'eft-à-dire, que le point de fa plus grande épaifleur concoure avec l'axe du tuyau; fans quoi le mouvement réel de l'image ne fe feroit plus fur le rayon qui paffe par le miliea, & feftimation qu'on feroit du milieu de fa courfe ne pourroit qu'induire en erreur : heureufement on a des méthodes pour saffurer fr l'objectif eft centré, & M. Bouguer même en propofe une nouvelle.

Quelques Obfervateurs fe fervoient, pour éviter ce mou- vement des fils fur l'objet, d'une plaque percée d'un très- petit trou qu'ils interpoloient entre l'œil & oculaire, & qu'ils aflujétifloient folidement au tuyau; & il eft vrai qu'en fuppofant que fe mal vint uniquement d'avoir mal placé les foies, & que leur éloignement du foyer pût être regardé comme conftant, ce moyen rendroit aufli l'erreur conftante: mais comme nous avons vû, le mal vient prefque toûüjours de la variation que fouffre la pofition du foyer, & dans ce cas, Îe petit diaphragme propolé ne feroit que diflimuler le mal,

Hif. 1749. .Y

170 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE & empécheroit d'y remédier par l'eftime du mouvement de l'objet fur le ul, que la péuteñe de l'ouverture ne permettroit pas d’oblerver. Nous ne dirons prefque rien ici de la graduation de l'inf- trument; nous en avons donné le principe d'avance, en difant que M. Bouguer fe contentoit de marquer fur le limbe, des points dont la diftance füt une partie aliquote, non de la circonférence du cercle, mais du rayon; un calcul facile donne la valeur de cette diftance en degrés, & le micromètre celle des portions intermédiaires; cette opération eft fi fimple, que l'opérateur peut l faire à fon gré fur le champ & fans aucun embarras : avantage que n’a pas la divifion en degrés, qui eft par elle-même très-dificile, & qui demande une main très-exercée, fur-tout quand on n'a pas un arc dont Ie rayon donne immédiatement la corde, Un inftrument dans lequel on n'a pas rempli toutes es conditions dont nous venons de parler, eft fouvent impof- fible à placer dans le plan du méridien, puifque fi l'axe op- tique de la lunette n'eft pas parallèle au plan de l'inftrument, ils ne pourront être à la fois tous deux dans celui de ce cercle; mais les ayant toutes fcrupuleufement obfervées, l'o- pération devint extrèmement fimple. M. Bouguer saflura d'une ligne méridienne marquée par un cheveu qui étoit tendu fur deux crampons attachés aux murs oppolés de fon obfervatoire; alors il n'étoit plus queftion que de faire con- courir le limbe de l'inftrument avec ce fil, ou du moins de le lui rendre parallèle; ce qui fe pouvoit toüjours exécuter avec la plus grande précifion, & il l'arrétoit en cette fitua- tion, au moyen d'une règle & de quelques vis qui tenoient à une efpèce de banc fermement fixé au deffous, à cette in- tention ; alors la lunette fe trouvoit dirigée d'elle-même dans le méridien, & on étoit für que l'étoile paloit par le fil qui repréfentoit ce cercle, à l'inftant de fa médiation; ce qu'on m'auroit obtenir fans toutes ces attentions, M. Bouguer fais même voir que, faute de les avoir, on court rifque de

D'ES SciEenNceEs. 17T # trompér énormément; ce qui fans doute n’eft jufqu'ici que trop fouvent arrivé.

Toutes ces précautions n'avoient été prifes que pour aflurer de la manière la moins équivoque, la précifion des oblerva- tichs aftronomiques qu'on alloit faire; ces obfervations étoient en général de deux efpèces, les unes relatives à la melure de la Terre, qui étoit le principal objet de la miffion des (Académiciens, & les autres à l'éclairciffement de plufieurs queltions aflronomiques importantes, & ‘en particulier de Tobliquité de l'Ecliptique.

On ne pouvoit certainement choifir de circonftance plus . favorable pour cette dernière détermination que le féjour des Académiciens dans un lieu le Soleil ne s'éloignoit pref- que du zénith que de ce dont il s'éloigne de l'Equateur; cette élévation ne laïfloit à craindre aucune de ces irrégularités que R parallaxe & la réfraction peuvent introduire dans nos obfervations, aufli M's Bouguer & de Condamine ne né: gligèrent-ils rien pour s'aflurer d'un élément auffi important.

- Tous les Aftronomes favent qu'on obtient 11 hauteur folfti- ciale du Soleil non feulement en obfervant la hauteur méri- dienne du Soleil le jour du folftice, mais encore par l'obfer- vation de cette hauteur, faite peu de jours devant ou après Je folftice, en ajoûtant ou fouftrayant une petite quantité qui ft au temps dont l’obfervation précède ou fuit le folftice, comme les abfciffes d’une parabole font à fes ordonnées. C’eft en employant cinq obfervations de cette efpèce de Ia diftance du Soleil au zénith, faites aux environs du folftice auftral en. 1736, & cinq autres pareilles, faites avec le même foin au folftice boréal en 1737, & après les avoir dépouillées des erreurs de linftrument, de la parallaxe & de la réfraction, que M'° Bouguer & de Ja Condamine établiffent Farc du.

. méridien compris entre les deux tropiques, de 464 56’ 56",

& par conféquent Fobliquité de l'Ecliptique, de 23428’ 28",

en 1737. |

» Une des premières difhcultés qu'éprouvèrent nos Obfer: Y'

172 HisTOiRE DE L'ACADÉMIE RoyaALe vateurs dans la détermination de l'amplitude de leur are, fut une variation fenfible, & fouvent prefque fubite, qu'on obfer- voit dans la pofition des étoiles, même les plus proches du zénith; on voyoit effectivement les étoiles auxquelles étoient pointées des lunettes fixement attachées à une muraille, pafler tantôt au deflus & tantôt au deffous du fil: M. Bouguer ne fut pas long-temps à trouver fa caufe de ce fingulier effet; les murailles ne font bâties à Quito que de grofies briques cuites ou pluftôt féchées au Soleil, qui ne peuvent manquer d'attirer puiffamment l'humidité, & de varier par conféquent de figure & de pofition ; c'étoit cette variation qu'on tranf- portoit dans le ciel, & qu'on attribuoit aux étoiles auxquelles les lunettes étoient pointées, & il falloit abfolument en con- noître la caufe pour voir qu'on n'avoit rien à en appré- hender pour les obfervations faites avec le fecteur.

Les pluies qui durèrent pendant un an , prefque fans aucune interruption , & quelques changemens qu'il fallut abfolument faire à l'inftrument, retinrent auffi M. Bouguer près d’un an ; & les fréquens tremblemens de terre l'obligèrent à ufer d’une pré- caution fingulière, qui fut de retourner toüjours l'inftrument deux fois dans chaque opération , pour s’aflurer s’il donnoit 1a feconde fois la même quantité que la première.

Avec toutes ces précautions, & un grand nombre d’autres que nous fommes obligés de fupprimer, M. de la Condamine obtint pendant les mois de Novembre & Décembre 1742 , & Janvier 1743 ,un grand nombre de diftances de l'étoile « d'Orion au zénith, qui, corrigées comme elles le devoient être, donnent la vraie diftance entre cette étoile & le zénith de Mama Tarqui, terme auftral de l'arc mefuré, de 14 41° cs

Pendant le même temps, M. Bouguer obfervoit à Corchef- qui, terme feptentrional de l'arc mefuré, la diftance de Ja même étoile au zénith de ce lieu, & la trouva de 14 25° 46", mais de l’autre fens, en forte que l'endroit l'étoile auroit été ob- fervée verticale, étoit placé entre les deux termes de Tarqui & de Cotchefqui, & que l'un des deux obfervateurs la voyoit

A

n

D'ESASIC TE N Cas. 173 * &u fud, pendant que l'autre l'obfervoit au nord. La fomme de ces deux diftances eft 34 1”, valeur en degré de l'arc meluré géométriquement , & trouvé au niveau de Carabou- zou, la plus baffle des flations, de 176940 toiles; d'où il fuit que le degré du méridien près de l'Equateur feroit de 56767 toiles : mais comme Carabourou , quoique la plus bafle des flations, eft encore élevé de 1 22 6 toiles au deffüs du niveau de la mer, il faut, pour réduire le degré à Ja va- leur qu'il auroit à cette dernière hauteur, le diminuer de 2 1 toiles deux cinquièmes, ce qui le fait de 56746. Enfin il faut y ajoûter 6 à 7 toifes pour compenfer le petit alon- “gement que l'étalon de la toile a fouffrir par la chaleur du climat ; & toutes ces’ compenfations faites, on trouve Ja grandeur abfolue du degré du méridien voifin de l'Equa- teur, de 56753 toifes, & par conféquent le rayon de la curvité du méridien dans cet endroit, de 3251707 toiles, ou de près de 1478 lieues communes de France, de 2200 toifes chacune.

En faifant ufage de cette. mefure du degré du méridien près de l'Equateur, & de celles qui ont été faites en France & fous le Cercle polaire, on a des donnces qui peuvent fuffre pour déterminer la véritable figure de la Terre; c’eft à quoi eft employce la fixième Seétion de l'Ouvrage de M. Bouguer. Nous allons tâcher de donner une lécère idée de fa méthode,

La Terre n'ayant pas une figure fphérique, il eft clair que toutes les directions de la pefanteur, qui doivent être perpen-

diculaires à la furface, ne tendront pas vers le centre, mais

qu'elles feront au contraire tangentes aux différens points d’une courbe qu'on peut fuppofer décrite au milieu du globe. M. Bou- guer nomme cette courbe, /4 gravicentrique, & il eft évident que cette courbe étant une fois déterminée, donnera néceflai- rement la courbure extérieure du méridien. M. Bouguer l'exa- mine dans plufieurs hypothèles, en fuppofant que les degrés du méridien vont en croiflant, fuivant la proportion d'une puiflance des degrés de latitude, comme des carrés, cubes, &c.. Y ii

° Vy. Hifl 4744 P. 45

174 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE de ces mêmes finus. Il eft clair que de toutes ces hypothèfes poflibles il n’y en a qu'une qui foit la vraie, & que le moyen de la reconnoître, eft d'examiner fi en partant du degré voifm de l'Equateur elle donne les degrés de latitude égaux à ceux qui ont été melurés en France & en Lapponie. Ce qu'il y eut de fingulier, c'eft que cette efpèce de théorie fit foupçonner à M. Bouguer l'erreur qui s'étoit gliflée dans la bafe de M Vabbé Picard, & dont nous avons parlé en 1744*,. Enfin toutes corrections faites pour cette erreur, il trouva qu'en fup- pofant que les degrés du méridien euflent un accroiflement proportionnel aux quatrièmes puiffances des finus des latitudes, on repréfentoit toutes les obférvations avec la plus fcrupuleufe exactitude ; que le rapport entre l'axe de la Terre & le dia- mètre de l’Equateur étoit exprimé par 178 & 179, & que. par conféquent la Terre étoit plus élevée à l'Equateur qu'aux poles, de 1 83 24 toiles, ou d’un peu plus de huit lieues.

Puifque la Terre n’eft plus une fphère, tous fes grands cer: cles ne feront plus égaux entreux. M. Bouguer donne moyen de déterminer la valeur de leurs degrés, il la donne même toute calculée avec celle des degrés du méridien pour le grand cercle qui lui eft perpendiculaire, & il donne dans la même table la mefure des degrés de chaque parallèle.

Aucun des cercles qu'on fuppofe décrits fur la Terre, ne confervant la proportion que lui donnoit l'hypothè{e de la Terre fphérique, les lignes obliques que décrivent les vaifleaux, &

w’on nomme Loxodromies , auront aufii des parties, de valeur

différentes de celles qu’on leur avoit attribuées dans la première fuppofñition. M. Bouguer donne dans deux différentes tables les corrections qu'il faut faire aux tables qui expriment les valeurs des différentes parties de ces lignes. En prenant fur lui tout le géométrique de cette théorie, il remet la pratique dans un état aufli fimple qu'elle étoit avant qu'on fût que la Terre n'étoit pas une fphère. Ceux qui le voudront , pour- ront profiter de fon travail prefque fans sen apercevoir.

On imaginera aifément que les Académiciens voyageurs

k ME MAS .C LE N.C-.E6S 175 ae négligèrent pas d'obferver les différentes longueurs du pen- dule dans les différens endroits & aux diverfes hauteurs äls {e trouvèrent ; nous fupprimons le détail de leurs opéra- tions , dont le public a déjà été informé* , nous dirons feu- Jement qu'il paroït en général que la plus grande force cen- arifuge, caufée par l'élévation de la Terre fous l'Equateur, ne -paroït pas fufhfante pour repréfenter les raccourcitiemens -obfervés du pendule à des hauteurs très-difiérentes, même dépouillées de toutes les altérations phyfiques qu'il peut rece- woir. M. Bouguer croit en pouvoir trouver Ja caule dans l'é- tendue immenfe des montagnes de la Cordelière, qui peuvent fournir plus par leur attraction à la pelanteur du pendule, qu'il ne perd par fon élévation.

Cette idée conduiroit afez naturellement à penfer que des mafles fi énormes pourroient auffi caufer quelque dévia- tion latérale à un fil à plomb qui feroit dans leur voif- nage : M. Bouguer s'aflocia M. de da Condamine dans cette recherche; ils firent des obfervations de lavhauteur d’une étoile au nord & au fud de la même montagne; il eft cer- tain que fi la montagne avoit exercé une attraction fenfible fur le plomb du quart-de-cercle, les hauteurs obfervées au fud de la montagne auroient été altérées en plus, & celles qui auroient été obfervées au nord, altérées en moins, & qu'on auroit eu par conféquent le double de la variation; il eft vrai que le fuccès de l'opération ne répondit pas à leur attente,

au lieu d'une minute que le calcul qu'on avoit fait des di- menfions de la montagne, avoit donné, il ne fe trouva que:

7 fecondes. II ne faut cependant pas fe preffer de rien con- clurre de cette obfervation contre la réalité de l'attraction ; la plufpart des montagnes du Pérou ont été ou font encore volcans, & celle de Chimboraço en particulier lavoit été autrefois : il fe peut donc très-bien faire que cette mon- tagne oit prefque entièrement creufe en dedans, & que cette circonftance que M's Bouguer & de la Condamine n'ont apprife que depuis leur obfervation , ait fait abfolument

* Voyez Mém. 1735 PS 29

176 Histoire DE L'ACADÉMIE RorALE difparoître toute la déviation que la montagne pouvoit caufer au plomb de l'inftrument.

Telle eft en général lid'e très-abrégée de l'ouvrage de M. Bouguer; nous avons été forcés de fupprimer une infinité de recherches phyfiques & géométriques extrêmement cu- rieufes par elles-mêmes, particuliérement fur la pelanieur & la force centrifuge, mais qui n’étoient nullement fufceptibles d’étre abrégées, & auxquelles nous ne pouvons qu'exhorter le leéteur à recourir: le calcul géométrique bien ménagé, eft peut-être le point de vüe le plus raccourci, “fous lequel il foit donné aux hommes de préfenter leurs idées,

MECHANIQUE.

be. prés e CET

MECH NIQUE.

SUR UN NOUVEAU PRINCIPE GENERAL DE MECHANIQUE. : Méchanique eft en général compolée de deux parties;

celle qui confidère les cor ps dans l'état d'équilibre, & les forces néceñaires pour les y maintenir, fe nomme Satique ; celle au contraire qui confidère un affemblage de corps agif fans les uns fur les autres, de manière que le tout foit en mouvement, fe nomme Dynamique,

La Statique a été la feule que les Anciens aient cultivée avec quelques fuccès, comme en eflet elle eft la feule fur laquelle l'ancienne Géométrie puifle avoir quelque prife, au lieu que la Dynamique ne peut aller Join fans l'ufage de l'analyfe moderne, qui feule peut confidérer les corps aéluel- lement en mouvement , &: réfoudre facilement tous les pro- blèmes qui y font relatifs, fur-tout fi on emploie certains théorèmes g néraux, comme la confervation des forces vives; Ja permanence de vitefle & de direction du centie de Eaux commun, &c.

Voici un nouveau principe général que propofe M. le Mar-

uis de Courtivron , il eft fingulier en ce qu'il appartient également à fa Statique & à la Dynamique, & qu'il indique; entre les queftions qui appartiennent à ces deux Sciences, un rapport duquel on n'avoit pas encore aperçu l'exiftence.

Ce principe général eft que de toutes les fituations que prend fucceflivement un fyftème de corps animés par des forces quelconques, & liés les uns aux autres par des fils,

des leviers, ou tel autre moyen qu'on voudra fuppoler, celle

le fyflème a la plus grande fomme de produits des mafies par le carré des viteffes, c'eft-ä-die; la plus grande force

Hifl. 1749. HZ

178 HiSTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE vive, eft la même il le faudroit placer en premier lieu pour qu'il reflàt en équilibre,

Rien n'eft plus facile que de démontrer ce principe, fi on admet la théorie des forces vives; en effet, toute quan- tité variable qui croît par degrés infiniment petits, devient la plus grande qu'il eft poffible dans le même moment elle cefle d'augmemter : or le fyflème de cotps reçoit l’accroif: fement de fa force par les réfultats des preffions agiffantes qui Faccélèrent continueliement; if aura donc atteint fon maximum de force lorfque la fomme des preffions fera nulle, c'eft-à-dire, lorfqu'elles fe feront équilibre les unes aux autres.

Ce raifonnement eft extrèmement fimple, mais il n'eft concluant que pour ceux qui admettent le principe des forces vives, & ce principe eft, comme on fait, contefté par plu: fieurs habiles Mathématiciens.

Pour ne pas faire dépendre la vérité de fon principe, de celle de la théorie des forces vives, M. de Courtivron le démontre rigoureufement en plufieurs cas qu'il examine, & cela d'une façon tout-à-fait étrangère à la queftion des forces vives.

H réfulte de fes démonflrations, que de quelque manière qu'on fuppole des corps attachés enfemble, foit par des fils, foit par des baguettes , l'action totale de tout le fyflème de corps {era toûjours la plus grande, ou, ce qui revient au même, que les poulies ou les points d'appui éprouveront toüjours le plus grand eflort lorfque la fituation des corps fera telle qu'ils {e feront mutuellement équilibre, & que pour lors la fomme du produit des maffes par les vitefles fera la plus grande.

Ce principe fait voir, comme nous f'avons déjà dit, une relation immédiate entre l'équilibre & le mouvement, à laquelle perfonne n’avoit encore fait attention; mais de plus, il fera d'une commodité infinie pour la folution d’un très- grand nombre de problèmes : les méthodes ordinaires ne don- nent fouvent le point de l'équilibre qu'avec quelque circuit, & le nouveau principe l'indique avec facilité. Quelquelois le calcul néceffaire pour déterminer la vitelle d’un fyftème de

| DSC T Et CEE 179 corps eft affez compliqué, alors il fera toû'ours aifé de véri- fier Fexprelion de ceite vitefle, en examinant fr le cas elle { trouve la plus grande, eft auffi celui de l'équilibre: enfin, on fait que sil eft quelquefois plus facile de trouver la viteffe que le point de l'équilibre, dans d'autres occafions Féquilibre fe trouve plus facilement que la viteffe. Le principe de M. de Courtivron donne le moyen de faire toûjours fervir celle de ces quantités qu'on aura trouvée, de preuve à fa corref- pondante, & par-là diminue prefque de moitié les difficultés qui peuvent fe rencontre: dans la folution de ces problèmes: Ja connoïflance des principes généraux dans les Sciences, y introduit prefque infailliblement la clarté & la facilité.

PERS DE PRINCIPE DE LA MOINDRE ACTION.

: + rl NE n'ignore aujourd'hui que plufieurs Philofo- phes ont tenté d'expliquer les phénomènes de la Nature par le moyen des caufes finales; on tâche de tirer de quel- ques faits connus, la loi générale que l'Auteur de la Nature femble s'être prelcrite dans l'exécution de fes ouvrages, & cette loï une fois établie, fert enfuite d'un principe fécond duquel on déduit l'explication des autres faits que l'on obfèrve, Dans cette méthode, on fubftitue aux principes méchaniques des principes d’un ordre différent; mais l'enchaïînement refte le même, & les explications dépendent toüjours de l'exacte vérité du principe: il eft vrai, & c'en eft le principal avan- tage, que comme les vérités métaphyfiques fe déduifent na: turellement & facilement les unes des autres, rien n’eft plus clair & plus précis que cette façon d'expliquer; elle à d'ail: leurs un autre avantage, elle donne prefque dans tous les cas, prife au calcul, ce que ne font pas toûjours les explications phyfiques : il n’eft donc pas étonnant que les plus grands Mäthématiciens aient effayé de s'en fervir, & de découvrir ces principes fi féconds & fr lumineux.

Zi

V. les M. P- $31-

* Vo. Hif. 1744 P-53:

180 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYALE

Nous avons rendu compte en 1744*, d'une Difertation de M. de Maupertuis dans laquelle il en établifloit un. de cette efpèce, & de l'application qu'il en avoit faite aux phé- nomènes de la réfraction de la lumière. Ce même principe connu dans le monde mathématicien fous le nom de Principe de la, moindre adtion, eft aujourd'hui attaqué par M. le Che- valier d'Arcy: felon M. de Maupertuis, lorfqu'il arrive quel- que changement dans la Nature, la quantité d'action néceflaire pour opéier ce changement, doit toùjours être la plus peiite qu'il eft poffible, & cette action eft le produit de la maffe des corps par leur vitefle & par l'efpace qu'ils parcourent.

M. d'Arcy prétend au contraire premièrement, que l’ation des corps n'eft point proportionnelle à la mafle multipliée par la vitele & par l'efpace parcouru , & la preuve qu'il en apporte eft qu’en partant de ce principe, dans une fuppofition qu'il fait, on arrive à une conclufion abfolument contraire à ce que donnent les loix du mouvement, dont perfonne ne révoque la certitude en doute.

Secondement, en admettant même la définition que donne M. de Maupertuis de l'action des corps, M. d'Arcy trouve que la quantité de cette action que la Nature emploie à chaque changement, n’eft point un minimum ; & que fi dans quelques cas elle eft dans cette condition, le principe de la moindre action ne peut fervir à en donner fa preuve, ni être démontré lui-même qu'autant qu'on en fuppofera d'autres qui non feu- lement en font indépendans, mais qui feuls fufiroient pour la démonftration, fans avoir aucun befoin de ce dernier, d'où il fuit qu'il n'eft ni général ni aufir utile qu'il le paroît au. premier coup d'œil.

La loi du repos ou de l'équilibre que M. de Maupertuis. tire du principe de la moindre ation, n'a pas paru à M. d'Arcy plus folidement établie, à moins qu'on n'introduife dans le problème une fuppofition ablolument étrangère & tout-à-fait gratuite.

En général, il lui paroït que quelles que fuffent les loix de la Nature, on pourroit trouver une fonction des mafles

DES SCIENCES. 181 & des vitefles qui, étant fuppolte un minimum, les repréfen- teroit; mais cetie propriété ne fuffiroit pas pour donner le nom d'atfion à cette fonétion, ni pour élever au rang de principe métaphyfique ce qui ne feroit en ce cas qu'une pure hypothèfe de calcul.

Au principe de la moindre aétion que M. d'Arcy rejette pour les raifons que nous venons de rapporter, il en fuLftitue un autre qu'il croit à l'abri de toute objection.

Il nomme adion d'un corps autour d'un point, la mafle multiplie par la vitefle & par la perpendiculaire tirée de ce point fur la direétion des corps; d'où il fuit que fi deux corps en mouvement agjiflent. fur un troifième en repos, dans des fens différens, le mouvement produit dans ce troifième corps fera toûjours égal à celui qui feroit produit par l'ac- tion de lun des deux premiers, moins l'action de autre,

Cela fuppoé, le principe de M. d'Arcy eft que route l'attion (exiflante dans la Nature dans un inflant quekonque) autour d'un point donné, étant produite dans un Jeul corps donné, la quantité d'aétion de ce corps fera toijours la même autour de ce point.

Nous ne rapportons point ici la démonftration de ce prin- cipe que M. d'Arcy 4 donnée en 1747*; nous dirons feu- lement qu’on en tire avec la plus grande fimplicité, le principe de la confervation des forces vives, le cas du repos, les centres d'ofcillation ou de percuffion, la loi de la réfraction de la lumière, & qu'on en peut faire encore un grand nombre d'autres applications, dont quelques-unes l'ont déjà été dans le Mémoire que nous venons de citer. Ces applications affurent au nouveau principe la gloire de la fécondité, c'eft du temps & de l'examen le plus rigoureux qu'il doit recevoir celle de l'entière certitude & de la plus grande univerfilité.

renvoyons entièrement aux Mémoies, La Defcription d'un nouveau Tour à tirer la foie:

par M. de Vaucanfon.

* Voy, Mem. 1747:P.344-

V. les M. p: 142.

182 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

MACHINES ou INVENTIONS APPROUVEES PAR L'ACADEMIE EN MDCCXLIX, 1 L. bis E Pendule dans laquelle M. Rivaz a fait plufieurs

changemens qu'il a cru pouvoir contribuer à fa régu- larité de fon mouvement; cette pendule diflere des pendules ordinaires par le poids de fa lentille, par la petitelle des arcs que décrit le pendule dans fes vibrations, par li manière dont il eft fufpendu, qui permet toüjours au pendule de faire fes ofcillations dans un plan vertical, quoique l'horloge forte de fon aplomb, & par un échappement nouveau qu'il emploie dans quelques-unes. La grande pelanteur du pen- dule & la petitefle des arcs qu'il décrit, donnent à M. Rivaz le moyen de ne point augmenter la force motrice propor- tionnellement à la groffeur de la lentille; il emploie une nou- vellé manière de faire marquer le temps vrai, & enfin une compolition de la verge du pendule, que les expériences ont montré inaltérable à un devré de chaleur infiniment fupé- rieur à tous ceux qu'on peut éprouver dans quelque climat que ce foit : au moyen de tous ces changemens, M. Rivaz peut aifément faire aller un an entier une pendule à reflort, fans qu'on {oit obligé de la remonter; elle ira avec autant de juftefle que fi elle n'alloit que le temps ordinaire. Quoique plufieurs de ces moyens aient déjà été mis en pratique dans différentes occafions, l Académie a cru que l'ufage & l'aflem- blage qu'en faifoit M. Rivaz, étoient nouveaux, & méritoient fon approbation. LE Une Pompe pour les incendies, préfentée par le fieur Brunet, Fondeur à Rouen; cette pompe n'eft pas nouvelle pour le fond, mais le fieur Brunet y a fait plufieurs chan- gemens qui ont paru en rendre l'ufage plus commode &

9 A plus utile: les foupapes peuvent sôter & fe remettre, parce

8

DES SCIENCES 183 que les pièces qui les portent fe démontent à vis, ce qui donne une plus grande facilité de les raccommoder quand il eft nécefaire; les tuyaux ne font point unis par des cuirs, mais par des genoux de cuivre qui leur laiflent la liberté de tourner en tous fens, & en ce point. la pompe du fieur Brunet eft femblable a celle du fieur Tilhaye, que l'Aca- démie approuva en 1746 ; mais la manière dont le fieur Brunet unit & contient les pièces qui forment ces genoux, a paru plus füre & plus fimple. ,

TIL

Une Sphère mouvante de M. Paflement , dans laquelle les révolutions des Planètes, fuivant l'hypothèfe de Copernic, font afiez précifes pour ne pas s'écarter d'un degré en deux ou trois mille ans : cette fphère tire fon mouvement d'une pendule qui efl au deflous, qui eft à répétition & à fonnerie, qui marque le temps vrai & le temps moyen, le quantième du mois, celui de la Lune, fes phales, en un mot qui fait tout ce que pourroit faire une bonne pendule qui n'auroit point un fyftème de Planètes à faire mouvoir. Cet Ouvrage a paru entrepris avec toute l'intelligence poffble, & exécuté

avec la dernière précifion.

I V.

On eft affez généralement inftruit que parmi les fourds « muets de naiffance il y en a un grand nombre qui ont l'organe de la parole très-bien conformé, & qui ne font muets que par l'impofñbilité le défaut de f'ouïe les met d'avoir aucune idée des fons, & d’acquerir aucune des con- noiflances qui doivent venir par leur moyen. M. Pereire a fait voir à l'Académie deux jeunes fourds & muets de naïffance qu'il a inftruits à concevoir ce qu'on veut leur faire entendre, foit au moyen de l'écriture, foit par des fignes dont il fe fert avec eux, & à y répondre de vive voix ou

par écrit; ils lifent & prononcent diflinétement toutes {ortes

d'expreffions françoiles, ifs donnent des réponfes très-fenfées à toutes les queftions qu'on leur fait, ils exécutent prompte- rent ce qu'on leur propofe de faire, ils donnent aux noms

184 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

le genre & le cas qui leur conviennent, conjuguent les verbes, & font lufage propre dés pronoms & des adveïbes, des prépolitions & des conjonétions ; ils favent les règles d'arith- métique, & connoifient {ur la carte les quatre paities du monde, les royaumes, les capitales, &c. enfin il paroït que M. Pereire leur a donné, avec la parole, la faculté d'acquerir les idées abfraites dont ils avoient été privés jufque-là.

Il fe fert, comme nous l'avons dit, pour leur communiquer {es penlées, de l'écriture ou de fignes qu'il leur fait avec la main, & defquels il a compofé un alphabet dont l’ufage eft bien plus prompt que celui de l'écriture; il efpère même pou- voir inftruire fes élèves à entendre, par le feul mouvement des lèvres & du vilage, ce qu'on voudra leur dire, pourvü cependant que ce foient des perfonnes qui aient avec eux une habitude journalière : les autres feront toujours obligés de fe {ervir de l'écriture ou des fignes dont nous avons parlé.

Quoique l’art dont nous.venons de parler ne foit pas abfo- lument nouveau, & que M's Wallis, Amman, Emmanuel Ramirès, Pierre de Caftro, le Père Vanins, de la Dorine Chrétienne, & peut-être encore beaucoup d'autres, l’aient pratiqué avec fuccès; comme cependant les progrès des élèves de M. Paeire démontrent la bonté de la méthode dont il fe fert, & dont il s’eft réfervé le fecret, Académie a cru qu'on ne pouvoit trop l'encourager à cultiver un art qui peut rende à la fociété un grand nombre de lujets qui lui feroient demeurés inutiles fans ce fecours : c'eft en queïque forte les tirer, par une héreufe métamorphole, de l'éat de fimples animaux pour en faire des hommes.

E Parlement ayant fait l'honneur à l'Académie, par fon anèt du 2 Juillet, de lui demander fon avis fur deux Machines propolées par le fieur Amy, Avocat au Parlenient de Provence, dettinées à l'élév ition & à la filtration des eaux, la Compaynie a trouvé que quoique la première Machine ui doit fervir à élever des eaux ne differe point, pour le ss ? de celle du fieur Joly, de Dijon, imprimée dans le Recueil

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DES Sciences :18$ Recueil des Machines approuvées par l Académie, tome Ir, page 75, cependant M. Amy avoit contribué , par les chan- gemens qu'il y, avoit faits, à la rendre d'un ufase meilleur & plus commode. Qu'à l'égard de la feconde, deftinée à la filtration de l'eau, les fontaines que M. Amy conftruit fur ce principe, ont paru commodes, faciles à nettoyer & à tranf porter, exemptes du verd de gris par la matière dont elles

ont confites, qui eft l'étain, le plomb ou la terre, &

qu'elles ne pouvoient être qu'utiles & avantageufes.

ut même année l'Académie fut confultée par M. Coulon, Grand-maître des Eaux & Forêts de France, au département de Metz & des frontières de Champagne, fur une conteftation müe entre deux Arpenteurs au fujet de la manière de mefurer les terreins dans fefquels il y a du haut & du bas; un prétendoit qu'on ne devoit avoir aucun égard à ces inégalités du terrein, & qu'il devoit être mefuré comme s'il étoit parfaitement de niveau ; l'autre au contraire foûte-

noit qu'il falloit développer toutes les finuofités du terrein,

& que c'étoit au défaut de ce développement qu'on devoit attribuer {a différence qui { trouvoit entre la mefure qu'il avoit faite d'un très-grand terrein, & celle qui réfultoit des opérations du premier.

L'Académie crut qu'avant tout il falloit examiner quelle étoit la pente fa plus grande qu'on pât fuppofer à un terrein, tant pour qu'il püt fe foûtenir lui-niême, que pour qu'il fût pofhible d'y aller couper le bois & le débarder, &-voir dans cette hypothèfe quelle feroit la différence qui réfulteroit de Tune ou de l'autre manière de mefurer,

Une montagne qui a quatre pouces de pente par toile, fait un chemin roide, mais que cependant les voitures char- gées peuvent defcendre fans enrayer ; Île rapport de fa furface à fa bafe eft celui de 2003 à 2000.

À fix pouces de pente par toife, la pente devient extré- mement roide, & on ne peut abfolument la defcendre fans

Hif : 749" , Aa

"186 HiSTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE enrayer ; néanmoins le rapport de la furface à la bafe m'eft encore que celui de 301 à 300.

Enfin fi on fuppofe à la montagne une pente d'un pied & demi par toife, elle fera impraticable aux voitures & aux chevaux, les hommes même auront peine à y monter : un pareil terrein ne pourroit produire de bon bois, & feroit fujet à s'ébouler, à moins qu'il ne fût foûtenu par un grand nombre de rochers; alors fa furface feroit à fa bafe comme 103 eft à 100.

Mais il faut bien prendre garde que pour qu’il fe trouve une différence de —2— entre la fuperficie inclinée du terrein & fa bafe horizontale, il faut que toute la forêt qu'il s'agit de mefurer, ait l'énorme pente que nous venons de lui fup- pofer, & ce cas n'eft peut-être jamais arrivé: il fe trouve au contraire ordinairement une grande partie du terrem ou abfolument plat, ou n'ayant qu'une médiocre pente, & tous ces hafards compenfés autant qu'ils peuvent l'être, il réfulte que la mefure horizontale d'un terrein, c'eft-à-dire, celle dans laquelle on n’a eu aucun égard aux inégalités, ne peut différer de celle qu'on en auroit faite par le développement, que d'environ -=; erreur qui n'eft d'aucune conféquence, puifque les arpentages qui ne different que de cette quantité les uns des autres, font reconnus pour bons, & qu'il eft prefque impoflible que les petites erreurs inévitables dans les opérations partiales, n’en produifent une plus confidérable qu'un centième fur le total.

Cela pofé, ne fe trouvant aucun rifque à employer une méthode pluftôt que l'autre, l'Académie a cru devoir donner la préférence à la méthode de mefurer horizontalement, d'au- tant plus qu'elle eft la feule par laquelle on puifle rapporter la figure d’un terrein fur un plan, & qu'on ne court aucun rique de faire un tort fenfble aux particuliers, en mefurant fuivant cette méthode. Plufieurs queftions qui ont été faites à l'Académie fur cette matière, lui ont donné lieu de penfer qu'il feroit peut-être important que le public füt inftruit de ce qui en étoit, & l'ont déterminée à publier fon avis, avec cet abrégé des motifs fur lefquels il eft fondé.

DES) SC 1 E N'C' ES 187

ANS le nombre des pièces préfentées cette année à

l’Académie par divers Savans, elle a jugé les fix füi- vantes dignes d'avoir place dans le recueil de ces ouvrages qu'elle fait imprimer.

Sur le Sel de fa chaux. Par M. Nadault, Avocat général à la Chambre des Comptes de Bourgogne, & Correfpon- dant de l'Académie.

Sur la hauteur du Pole de Berlin. Par M. Grifchow, Secrétaire de l'Académie impériale de Péterfbourg, Corref- pondant de l’Académie.

Sur les Ganglions. Par M. Tarin.

Sur les articulations des Os de Ia face. Par M. Bordeu, Docteur en Médecine , Infpeéteur des eaux minérales du Béan, Correfpondant de l Académie.

Sur une nouvelle Nébuleufe. Par M. le Gentil de la Ga- laizière.

Sur une Quadrature par approximation. Par M. l'Abbé Outhier, Chanoïne de l'Eglife de Bayeux, de l'Académie de Berlin, Correfpondant de l'Académie.

fujet du Prix propofé pour cette année 1749, étoit la meilleure manière de déterminer, lorfqu'on eff en mer, Jes Courans, leur force à leur direétion. L'Académie a trouvé que cette queftion avoit été à peine effleurée dans les recher- ches qu'elle avoit reçues ; c'eft ce qui l'a déterminée à pro- pofer une feconde fois le même fujet pour l'année 175 1.

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138 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE

PL O.G'E

DENM:. NA M E Lo TE

EAN-JACQUES AMELOT, Seigneur de Chaillou;

Chiîtillon, & autres lieux, Miniftre, Secrétaire d'état, & Commandeur des ordres du Roi, naquit à Paris le 30 Avril 1689, de Denys-Jean Amelot, Seigneur de Chà- tillon, Confeiller au Parlement, & de dame Philberte de Barillon fon époufe.

La maifon de laquelle fortoit M. Amelot, eft très-illuf- trée ; elle compte plufieurs Ambafladeurs, des Confeillers d'Etat, des Préfidens à mortier, des Archevèques, & la branche de laquelle celui dont nous faifons l'éloge, tiroit fon origine, peut en particulier fe parer des alliances qu'elle a avec les maifons d'Etampes, de Béon, de Brüiart, de Sau- lins, & du Deffand de la Lande,

On remarqua en lui, dès fon enfance, beaucoup de pé- nétration & un amour fingulier pour le travail; il fit fes pre- mières études comme ordinairement on ne les fait point, c'eft-à-dire, par goût & avec plaïfir, en un mot, comme fr, par un privilège extraordinaire, il lui eüt été accordé d’être homme avant que d'avoir été enfant : il les pouffa même juf qu'aux Mathématiques, chofe plus rare alors qu'aujourd'hui, où, graces au goût de notre fiècle, les élémens de ces Sciences font devenus une partie effentielle de la Philofophie, & même de belle éducation.

I entra à l'âge de vingt-trois ans dans la magiftrature, & fut reçu Avocat général aux Requêtes de l'Hôtel; mais bien-tôt après, M. Amelot, {on parent, nommé Ambaffa- deur à Rome, fouhaita qu'il l'accompagnät, & au bout de’ quelque temps, le chargea de venir rendre compte au feu Roi de l'état d'yne négociation délicate; comnuiflion qu'il

Li

DES SCIENCES. 189 m'auroit certainement ofé lui donner, s'il eût été moins für de fa capacité & de fa difcrétion.

M. Amelot trouva en arrivant, le feu Roi malade de la maladie dont il mourut, & ne püt par conféquent lui rendre compte de fa commiflion; il y perdit certainement du côté de l'honneur, mais aufli cette circonftance lui valut l’eftime & l'amitié de M. de Torcy, auquel il fut obligé de s’adreffer. Ce fage Miniftre n'eut pas beloin de toute {a pénétration pour connoître tout le mérite du jeune homme, & f'atta- chement qu’il prit dès-lors pour luï, a duré autant que fa vie.

M. Amelot, en prenant la charge d'Avocat général des Requêtes de l'Hôtel, n'avoit pas prétendu s'y borner; au bout de cinq années d'exercice, il pafla au Confeil en qualité de Maitre des Requêtes, & fut bien-tôt après nommé à l'inten- dance de la Rochelle.

I y demeura jufqu'en 1726, & le Roi ne l'en 6ta que

our le mettre fur un plus grand théâtre, en lui accordant Yagrément d'une charge d’Intendant des Finances, & c'eft le pofte qu'il a occupée plus long-temps.

L'ordre qui s'oblerve dans ladminiftration des Finances, exige qu'un grand nombre de perfonnes y foient employées, fans que la plüpart aient fouvent la moindre connoiffance du rapport que leur fonétion doit avoir avec le fyflème gé- néral; il eft cependant néceffaire que toutes ces pièces, tra- vaillées, pour ainfi dire, féparément, puiffent fe rejoindre & former un tout. I faut donc que ceux qui connoiflent le plan & les vües du Prince & du Miniftre, travaillent con- tinuellement à entretenir cette harmonie, & à donner, pour ainfr dire, la vie & le mouvement à tout ce grand corps. Us doivent non feulement prévenir les defordres que Figno- rance pourroit caufer, mais être toûüjours en garde contre es abus que les paflions introduifent parmi les hommes, fou- Vent même fans qu'ils s’en aperçoivent; veiller à ce que des fonds deftinés à des dépenfes néceflaires, ne foient point détournés. à d’autres ufages ; favoir en même temps contenir dans de juftes bornes l'avidité des exaéteurs, & obliger les

Aa ii}

190 HisToiRE DE L'ACADÉMIE Royare |

citoyens de s'acquitter de ce qu'ils doivent à l'Etat; oppofer des raifons à l'intérêt, & s’en faire écouter; favoir quelque- fois en fubffituer de plaufibles & d’apparentes à d’autres plus réelles, mais qui découvriroiïent des vües dont on eff inftruit & qu'il n’eft pas à propos de faire connoître; fervir en quelque forte de tuteur & de père à des Communautés nombreules, même à des villes entières; voir plus clair qu'elles-mêmes dans leurs propres afaires; prévenir les effets de la mauvaife adminiftration, ou y remédier; fixer avec juftice & fagefle les dépenfes & les impofitions de plufieurs Provinces, & avoir égard à une infinité de circonftances fouvent locales, qui doivent les faire varier; être les organes du Prince & du Miniftre à qui la fuprème adminiftration des Finances eff confiée, aflifler enfin en qualité de Juge à ce refpectable Tribunal, à la juftice & à la prudence duquel eft renvoyée {a décifion des plus grandes affaires. ‘Telles & plus nombreufes encore font les importantes & laborieufes fonétions d’un Inten- dant des Finances, & nous ofons prendre le Public même à témoin de la manière dont M. Amélot s’en eft acquitté.

Après plus de onze années de l'exercice de cette charge, le Roi l'éleva enfin au plus grand honneur auquel il püt pré- tendre; 1 fut nommé Miniftre & Secrétaire d'Etat, ceft-à- dire, admis dans le petit nombre de Sujets choifis auxquels Je Souverain confie en quelque forte la diftribution de fes graces, & avec lefquels il daigne partager la glorieufe occu- pation de rendre fes Peuples heureux.

Des fonctions auffi nobles & auflr utiles méritent bien d'être accompagnées des plus grands honneurs & des plus grandes récompen{es , auffi M. Amelot fut-il fucceflivement nommé Confeiller d'Etat, Sur-intendant des Poftes, & Prevôt-maître des cérémonies des Ordres du Roiï.

Au milieu de tant de dignités & d’occupations fr brillantes; il conferva toûjours le goût des Sciences & des Lettres ; ik étoit dès année 1727, de l'Académie françoife; il fouhaita d'entrer parmi nous, & y obtint le 16 Décembre 1741 Ja place d'Honoraire vacante par la mort de M. le Cardinal de Polignac.

RAT lo SUASÉC.I.E NCUELS 191

- La confiance que le Roi avoit dans la probité & dans la capacité de M. Amelot, l'avoient appelé au Miniftère; des circonftances particulières parurent demander qu'il donnût fa démiffion, ïül le fit & fe retira, mais avec tous les hon- neurs & toutes les diftinétions qui peuvent accompagner un Miniftre dans fa retraite, & rendre un témoignage authen- tique de fa bonne adminiftration & de la fatisfaétion de fon Maitre. ;

Les grandes places, les occupations & Îles honneurs qui les accompagnent, font pour les hommes ordinaires un tor- rent qui les entraine loin d'eux-mêmes; le Sage n'y voit que des foins & des travaux dont le feul amour de l'ordre & du bien public peut diminuer le poids à fes yeux ; auffi les premiers, dépouillés de cette efpèce de tourbillon étranger qui les environnoit, fe trouvent dans un vuide affreux, au lieu que la retraite ne laïfle au dernier qu'un loifir utile, que la Philofophie fait bien-tôt remplir par des occupations éga- lement utiles & intéreflantes.

Telle fut la vie de M. Amelot rendu à lui-mé&me; les Sciences, qu'il n'avoit ceflé de cultiver au milieu de fes plus importantes affaires, devinrent, par un jufte retour, le charme de fa vie privée; maître de fe livrer à fon goût, il recueil- loit avec foin les obfervations qu'il jugeoit dignes de la curio- fité de l’Académie : le volume qui va paroïtre * en contient deux qu'il lui a communiquées; d'un autre côté, il cultivoit les Belles-Lettres, & cela dans le fens le plus étendu; non feulement il poffédoit parfaitement da langue latine, mais ïl entendoit très-bien le grec, il avoit même une aflez grande

. connoiffance de hébreu. Toutes ces différentes études étoient

encore ennoblies chez lui par un motif-plus refpe‘table, if les faifoit fervir À infpirer lemême goût à un fils, de l'édu-*

. cation duquel il faifoit fa principale occupation: ayant fi bien . rempli le devoir d'un bon Citoyen, il n'avoit rien plus à

+ Cela étoit vrai le r2 Novembre | de 1745, qui contient, pages rG 1749, que cet Eloge fut prononcé, | & 28, deux Obfervations de M, on étoit à la veille de publier le vol. | Amelot.

192 HisT: DE L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES. cœur que de mettre un autre lui-même en état de rendre à fa patrie de pareils fervices. |

Soit que les travaux forcés, inféparables des grandes affaires dont avoit été chargé M. Amelot, euflent ufé fon tempé- rament, foit qu'il fe füt livré avec trop peu de ménagement aux études qui leur avoient fuccédé, il tomba peu à peu dans un état de langueur dont il mourut le 7 Mai de cette année, âgé de 60 ans.

I avoit été marié deux fois; la première en 1716, avec Dame Anne- Pauline de Bombarde, dont il a eu Madame 1 Marquifed'Arménonville; & la feconde en 1726, avec Dame Marie-Anne de Vougny, de laquelle ïl a laiflé Ma- dame la Marquife de {a Force, un fils & une fille,

H étoit d'un caractère doux & modéré, d'une égalité d'ame à toute épreuve, n'eftimant l'autorité que par le pou- voir qu'elle lui donnoit d'obliger, & n'en laiflant jamais échapper les moindres occafions, trop précieufes en effet pour être manquées par quiconque fe pique d'être homme & de favoir penfer.

Sa place d'Académicien honoraire a été remplie par M. le Comte de Maillebois.

MEMOIRES

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. MEMOIR ES

- MATHEMATIQUE

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à -

DE PHYSIQUE,

MERE SD EME URIE GISTRES de l'Académie Royale des Sciences,

De l'Année M. DCCXLIX.

à

à * | OBSERVATIONS DU THERMOMETRE,

Er à Faites pendant les grands froids de la Sibérie. Par M. DELISLE.

ANT que l'on eût la connoiffance & l'ufage des 12 Nov. > l'hermomètres, on ne pouvoit défigner les plus 1749: grands froids & les extrêmes chaleurs qui ont mérité d'être confervés à la poftérité, que par le fentiment général

Mém. 1749. À

2 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE qu'ils produifoient fur les corps animés, & par leurs effets fur les corps inanimés. .

C'eft de cette manière que les Hiftoriens n’ont parlé des plus grands froids que lorfque les hommes & les animaux en font morts, que les arbres & les plantes en ont été gelés,, quand la terre a été plus qu'à l'ordinaire couverte de neige,

ue les rivières, & quelquefois les mers, ont été prifes, &cc.

Calvifius en rapporte plufieurs exemples, entrautres celui de Fan 859 de J. C. dans lequel la mer Adriatique gela de: telle forte que l'on pouvoit aller à pied de la terre ferme à Venife; d’autres rapportent la même chofe cinq ans après, & ajoûtent que lon y pouvoit pafler avec des chevaux & des voitures chargées. Suivant Sydenham, la même chofe arriva encore dans le grand hiver de 1709, la mer Adria- tique ayant été gelée aux environs de Venile; mais il y eut cet avantage particulier dans les oblervations de ce dernier hiver, que l'on avoit des thermomètres par le moyen def-

uels nous fommes en état de comparer le froid rigoureux

w'il fit alors dans toute l'Europe, avec celui des autres hivers qui ont été obfervés depuis avec les mêmes thermomètres, ou avec d’autres thermomètres comparables.

L'un des plus anciens thermomètres que l'on puifle com- parer avec ceux dont on {e fert préfentement, eft celui que M. de la Hire fit faire par le fieur Hubin il y a plus de foixante-dix ans; il eft rempli d’efprit de vin coloré & fcellé hermétiquement; la boule a environ 2 pouces de diamètre, & le tuyau près de 4 pieds de loneue une ligne à peu près de diamètre intérieur.

M. de la Hire n’a eu attention dans la conftruction de ce thermomètre qu’à le rendre propre à marquer {enfiblement tous les changemens qui pouvoient arriver dans la tempéra- ture de l'air, depuis le plus grand froid que lon puifie éprou- ver à Paris, jufqu’à la plus’ grande chaleur, en expofant même ce thermomètre aux rayons du Soleil: mais quoique cette conftruétion ne fufhife pas pour en faire des thermomètres tels que l'on les demande à préfent, c'eft-à-dire, imitables

MR ISIC 1 E Nic EPS

fins communication, & marquant les mêmes degrés aux mêmes températures de chaud & de froid ; cependant comme cet inftrument s'eft confervé jufqu'ici, lon peut rapporter {es degrés à ceux des nouveaux thermomiètres que l'on conftruit à préfent: ce qui nous met en état non feulement de com- parer les plus grands chauds & froids que nous éprouvons tous les ans, avec ceux qui font arrivés depuis plus de foixante- dix ans, mais auffi d’avoir quelques idées de la force de ces froids & chauds par l'effet qu'ils font fur la liqueur dont cet ancien thermomètre & les nouveaux font compofés.

Pour ne parler ici que des extrêmes froids de air naturel, les plus grands que l’on ait 6bfervés jufqu’ici avec cet ancien thermomètre de M. de la Hire, font ceux des années 1 6 95» 1709 & 1716. Ï ny a pas long-temps que l’on ne con- noïfloit pas de plus grand froid que celui de 1709 à Paris;

car quoique celui de 1716 Fait un peu furpañfé, la durée

de celui de 1709 & fes fuites füneftes Font rendu le plus remarquable : cependant comme l'on favoit que dans les pays feptentrionaux le froid y eft ordinairement plus grand que dans les méridionaux, lon crut avoir un des, plus grands froids qui füt peut-être dans la Nature, en obfervant celui de 1709 dans FIflande. :

M. Fahrenheit, qui avoit déjà cherché à faire avant ce temps-là des thermomètres d’efprit de vin & de mercure qui puñlent fervir à marquer les plus grands froids poffibles, avoit commencé la divifion des fiens, ou {e point de zéro, bien au deflous de la première congélation de l'eau, favoir, au point d’un froid artificiel formé par un mélange d’eau, de glace pilée & de fel ammoniac, ou feulement de fel marin, fans avoir fpécifié particulièrement la dofe de chacun de ces ingrédiens. |

Le froid artificiel caufé par ce mélange , ne s’eft pas trouvé f grand que le froid naturel de l'année. 1709 , oblervé en Iflande, lequel à même été tant foit peu moindre qu'à Paris.

. Mais pour fixer davantage l'imagination fur la force ces différens froids, & de ceux que j'ai à rapporter dans fa AN A ij

2 Voy. Boerk. Chym. Exp. HI, Coroll. IV, page S5, édit. Par.

b Voy. Mém. Acad. 1740, ?. 548.

. MÉMOIRES DE L'ACADÉMrE ROYALE fuite, il eft néceflaire de les exprimer par des nombres; ce que lon peut faire fuivant les degrés des thermomètres de M. Fahrenheit, ou de ceux de M. de Reaumur, ou enfux des miens. J faut d'abord employer ceux de M. Fahrenheit, qui commencent, comme Jai dit, à zéro, qui eft le froid artificiel formé par le mélange rapporté ci- deflus; depuis ce terme, les degrés de chaleur vont en augmentant juf- qu'à celle de l'eau bouillante, qui répond à 212. Le point de la première congélation répond à 32, c'eft fur cette divi- fion commençante à zéro que le froid de 1709 en Iflande a répondu à un degré au deflus de zéro?, & le plus grand froid obfervé la même année*par M. Boerhaive dans le Jardin botanique de Leyde, à $ degrés ; ou bien ff lon aime mieux rapporter ces degrés de froids au thermomètre de M. de Reaumur, fur lequel le froid de 1709 a répondu à Paris à 1 $+ degrés b au deflous de la congélation, celui de Leyde fera à 12, celui d'Iflande à 14, & enfin le froid arti- ficiel de M. Fahrenheit à 142.

Voilà quels ont été les plus grands froids, tant naturel qu’ar- tificiel dont on avoit connoïfiance alors, ou que l'on ait déterminer exactement jufqu’à ce que la rigueur de l’hiver de 1729 fit faire à M. Fahrenheit de nouvelles tentatives pour produire un froid artificiel plus grand que celui qu'il avoit fait d'abord, & cela parce que l'expérience du froid artificiel réuffit d'autant mieux, que le temps dans lequel on la fait eft de lui-même plus froid.

M. Fahrenheit, pour produire le plus grand froid artifi- ciel qui lui étoit poflible, prépara un thermomètre de mer- cure capable de marquer un froid exceffif, comme, par exemple, qui pût aller jufqu'à 76 degrés au deflous de zéro de fa divifion, ou plus de 48 degrés de celle de M. de Reaumur au deflous de la première congélation; mais cette grande étendue lui fut inutile, n'ayant pouffer le froid artificiel qu'à 40 degrés de fa divifion, ou le 3 2.° des ther- momètres de M. de Reaumur : on fait de quelle façon M. Fahrenheit a fait fon expérience du froid artificiel, M. Boer- haave l'ayant décrite dans fa Chymie,

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Comme l'efprit de nitre dont M. Fahrenheït vouloit {e- fervir pour produire fon froïd artificiel devoit être lui-même aflez froid, avant de l'employer il lenferma dans des tuyattx de verre qu'il mit dans de la glace pilée, & qui donna à cet efprit la température de la première congélation de l'eau ; ayant enfuite mis de même fon thermomètre dans un vafe rempli de glace pilée pour lui donner la même température, il verfa promptement un des tuyaux d’efprit de nitre fur La glace broyée il avoit mis le thermomètre, dequel baïffa aufli-tôt confidérablement, & la glace fe fondit en partie: il vuida la liqueur fondue, & verfa dans le refte une feconde dofe d'efprit de nitre, qui fit encore defcendre le thermo- mètre plus bas, & fondit encore une partie du mélange; ayant verfé ce qui étoit fondu, ïl jeta de nouveau dans le refte une troifième dofe d’elprit de nitre, puis une quatrième, qui firent le même effet que les deux premières, en faifant toûjours. baifler le mercure du thermomètre de plus en plus, jufqu’au point que j'ai dit ci-deflus.

M. Fahrenheit obferva qu'à ce dernier degré de froid Fefprit de nitre s'étoit comme gelé lui-même, ayant formé für les bords du vafe fur lequel il avoit jeté, des criftaux aigus d'un demi-pouce de longueur, qu'il falloit en détacher & fecouer pour les faire tomber fur la glace; mais qu'auffi-tôt que cet elprit avoit touché la glace, il fe fondoit avec elle, & le thermomètre defcendoit au degré que j'ai dit.

J'omets ici, pour n'être pas trop long, plufieurs circonf- tances de l'expérience de M. Fahrenheït, & les diverfes ten- tatives qu'il avoit faites précédemment, tant avec de l'efprit de nitre que de l'efprit de fel marin & des cendres gravelées, n'ayant cru devoir rapporter ici que celles par lefquelles it avoit produit le plus grand froid qu'il lui a été poñlible.

M. Boerhaave, en rapportant ces expériences, ne peut s'empécher de s'étonner d'un fi grand froid, que l'on n’au- roit pü, dit-il, imaginer : fi dans le plus grand froid naturel, ajoûte-t-il, qui fait defcendre le thermomètre de Fahrenheit à zéro, les hommes, les animaux & les végétaux périffent,,

6 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

quels effets prodigieux dans la Nature ne devroit-on pas attendre fi fon y éprouvoit un froid naturel auffi fort que celui que M. Fahrenheït a fait artificiellement! Mais nous allons bien-tôt voir de combien les froids naturels que l'on éprouve en Sibérie furpaffent ceux que M.'s Boerhaave & Fahrenheït ont connus & éprouvés.

Comme c'eft principalement à moi que l'on eft redevable de la mefure précife de ces grands froids, par le foin que je me fuis donné de régler des thermomètres qui fuflent propres à les mefurer, je me trouve obligé de rapporter ce que j'ai fait fur cela.

H ya plus de vingt-cinq ans que j'avois fait faire à Paris pour l'ufage de mes obfervations aftronomiques quatre grands thermomètres d’efprit de vin, que j'avois mis à l'expérience de l'eau bouillante, & enfuite aux caves de l'Obfervatoire. Ayant marqué la hauteur de la liqueur , dans ces deux dif- férentes températures , j'ai divifé cet intervalle en cent parties égales, que j'ai commencé à compter depuis Ja hauteur de l'eau bouillante ; lon peut voir dans les Mémoires de F'Aca- démie de l’année 1724, (p. 31 8.) les oblervations que j'ai faites avec ces thermomètres, fur les accroiffemens & dimi- nutions du froid dans la grande éclipfe totale du Soleil du 22 Mai de la même année.

N'ayant tranfporter mes thermomètres en Ruflie ni en conftruire d’autres fur les mêmes principes, faute de fouter- rains aflez profonds, pour que la température s'y püt confer- ver prefque la même pendant toute Fannée, & ayant outre cela trouvé trop de difficulté à régler à l'eau bouillante des thermomètres d’efprit de vin ; je me déterminai enfin l'an- née 1732, à en conftruire de mercure, fur lefquels je com- mençai ma divifion au terme de l'eau bouillante, comme javois fait à Paris dans mes thermomètres d’efprit de vin. Mais ne trouvant point de fecond terme auffi fixe, ni auffi bien déterminé que ce premier, je compris aifément que je pouvois m'en pafler & que je n’avois qu'à fuppofer que le volume de mercure dilaté par Ja chaleur ‘de F'eau bouillante

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fût divifé en dix mille ou cent mille parties, prendre ces parties pour mes degrés, qui par conféquent auroient été des degrés de la condenfation du mercure au deflous de l'étendue qu'il a dans l'eau bouillante. Cela me parut fufi- fant pour conftruire des thermomètres qui pouvoient mar- uer exactement toutes fortes de températures de froid &

de chaud au deffous de la chaleur de l'eau bouillanie.

J'avois heureufement achevé plufieurs de ces thermomè- tres à la fin de l'année 1732, lorfque j'eus occafion d'ob- ferver à Péterfbourg un des plus grands froids qu'il y puiffe: faire, il eft arrivé le 27 Janvier 1733, ( nouveau ftyle ) à fept heures du matin, lorfque mes thermomètres font defcendus un peu plus bas qu'à 2000 degrés, dont il y en avoit cent mille dans le volume du mercuré étendu par 1a chaleur de l'eau bouillante; ou, ce qui revient au méme, le mercure a été par ce grand froid condenfé d'un peu plus de la cinquantième partie de fétendue qu'il a dans l'eau bouillante. Mes thermomètres étoient expolés à fair libre: en dehors d'une fenêtre qui avoit en face le nord-eft, le vent étoit alors à left médiocrement fort, & 1a hauteur du mercure dans le baromètre fimple expofé au même froid, étoit de 28 pouces 8 + lignes du pied de France.

Cefroid qui eft peut-être le plus grand froid naturel que l'on eût jufqu'alors marqué exactement, répond à 27 degrés au deflous de a congélation dans le thermomètre de M. de Reaumur; d’où l'on voit de combien ce dernier froid a être plus fenfble que celui de 1709 ;'qui, comme j'ai rapporté ci-deflus, n'a répondu qu'à 1 $ + degrés : auffi étoit-il impofhble de refter expolé à ce froid le vifage dé- couvert pendant une demi-minute, la refpiration y auroit manquer fr l'on y füt refté plus long-temps, ce n'étoit qu'au travers des vitres de la fenêtre d'une chambre échauffée que je pouvois regarder mes thermomètres ; perfonne ne pouvoit impunément s’expoler à fortir des maifons, quelque couvert qu'il fût de bonnes fourrures.

Pendant les quatorze années que je fuis encore refté en

MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE. Ruffie après ce grand froid, & dans lefquelles j'ai continué d'y obferver affidument la température de l'air extérieur avec les mêmes thermomètres, je n'ai obfervé que deux fois un aufli grand froid, favoir les années 1740 & 1747; ce qui n'avoit fait croire que c’étoit à peu près le plus grand froid que lon püt éprouver à Péterfbourg : mais lon a appris, par les nouvelles publiques, qu'il a été fur la fin de J'année dernière, & au commencement de la préfente trois jours durant confidérablement plus grand ; mes petits ther- momètres étant defcendus jufqu'à 206 de mes degrés, ce qui répond à 30 de ceux de M. de Reaumur.

Pour rendre plus facile la comparaifon des froids dont je viens de parler, avec ceux qu'il me refte à décrire, je les ai exprimés dans fa table que l'on voit ici. Les divifions qui font dans {a première colonne à gauche, montrent les degrés du thermomètre de M. de Reaumur qui vont en delcendant au deflous de ë première congélation. Les de- grés répondans de mon thermomètre font dans la dernière colonne à droite ; ils vont aufli en defcendant au deflous de la chaleur de l'eau bouillante : ces degrés font ceux dont if n'y a que dix mille dans le volume du mercure étendu par la chaleur de l'eau bouillante. Les douze colonnes qui remplif- fent le milieu de cette table, font deftinées à marquer les plus grands froids qui ont été obfervés, foit au thermomè- tre de M. de Reaumur ou au mien, dans les différens lieux marqués fur cette table, l’on y voit les années que ces froids ont été oblervés, & ces années font écrites vis-à-vis des degrés du thermomètre de M. de Reaumur & du mien , aux- quels ces froids ont répondu. L'on voit, par exemple, dans la feconde colonne qui eft pour Paris, qu'à l'année 1709, qui eft celle du plus grand froid que l'on y ait obfervé, le thermomètre étoit à 1 $ + deurés du thermomètre de M. de Reaumur : dans la troifième colonne le plus grand froid arti- ficiel que M. Fahrenheït ait faire, répond à 3 2 degrés du mème thermomètre, & enfin le plus grand froid de Péterf- bourg qui eft arrivé cette année y répond à 30, &c.

Outre

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| D'ENSYIS © 1 E N°C 4 Outre Jes grands thermomètres que j'avois conftruits à Péterfbourg , avec lefquels j'ai fait les obfervations dont j'ai parlé, j'en ai conftruit une grande quantité de petits réglés fur le même prigcipe, & qui ne différoient des grands qu'en

de]

.æe que le volume du mercure étendu dans l'eau bouillante

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n'étoit divifé qu'en dix mille parties , au lieu qu'il l'étoit en cent mille dans les grands. J'ai envoyé de ces petits ther- momètres dans toute l'Europe, pour que fon y püt faire des obfervations correfpondantes à celles de Ruffie. J'ai auffr communiqué, tant à | Académie, qu’à la Société de Londres, à celle de Prufle & ailleurs, le principe fur lequel j'avois conftruit mes thermomètres : ce qui ayant été imité, s'eft trouvé bien réuflr; plufieurs perfonnes qui en ont fait l'ex- périence n'ayant écrit que les thermomètres qu’ils avoient conftruits fur mon principe, fe font trouvés parfaitement d'accord , & marquer préciflément les mêmes degrés que ceux qu'ils ont reçüs enfuite de moi.

Ce qui n'avoit principalement excité à faire de ces ther- momètres, étoit que la Cour de Ruflie avoit réfolu de renvoyer M. je capitaine Beering pour Îa recherche du chemin de l'Afie à l'Amérique, fur les Mémoires que j'en avois préfentés à fimpératrice Anne, & que mon frère s'étant oflert de fe joindre à cette expédition pour avoir occafion de faire des obfervations aftronomiques & phyfi- ques dans toute l'étendue de la Sibérie, c'étoit un bon moyen pour procurer des obfervations météorologiques dans toute l'Afie feptentrionale, comme celf eft effectivement arrivé,

Le plus grand froïd dont je fache que fon eût connoif fance en Europe, depuis ceux que j'ai rapportés ci-deflus, eft celui qu'ont obfervé M.rs les Académiciens qui ont été en Suède pour la mefure du degré fous le Cercle polaire. M: de Maupertuis rapporte dans la relation de ce voyage, que les thermomètres d’efprit de vin étant gelés , un thérmo- mètre de mercure réglé fur les degrés de M. de Reaumur, étoit defcendu à 37 degrés au deflous de la congélation au mois de Janvier 1737, ce qui répond à 219 de mes petits

Mém, 1749, De: à 05

3 Voy. Mém. 2744P.139

b W, Tomelr, T- 257:

10 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE thermomitres : ce froid eft extraordinaire dans ce pays, & s'y fait que par degrés; un de fes principaux efets que M. de Maupertuis rapporte, eft que lorfque l'on ouvroit la porte d’une chambre chaude, l'air de dehors convertifloit fur le champ en neige, la vapeur qui s'y trouvoit & en formoit de gros tourbillons blancs ; que lorfque lon fortoit, l'air fembloit déchirer la poitrine, &c.

Ce doit être un froid approchant que lon a éprouvé à Québec fur la fm de Janvier 17432; M. Gautier ayant marqué que dans fon thermomètre qui étoit rempli de mer- cure, & réglé fuivant la divifion de M. de Reaumur , le mer- cure eft deicendu le 29 Janvier de la fufdite année à 32 degrés au deflous de zéro, ou de la première congélation. Ï a fait encore plus froid les jours fuivans, mais M. Gau- tier n’en a marquer exactement la quantité, tout le mercure étant rentré dans la boule: il eflime qu'il auroit marquer 33 degrés. Le 11 du même mois, tout le mercure étoit encore entré dans la boule, fans que M. Gau- tier en ait marqué ni eftimé la quantité : l'on fait que Québec eft fous la latitude de 464 $ 5”, qui eft le parallèle du mi- lieu de la France; ainfi l'on devroit s'étonner que le froid y füt fi grand, fi on ne favoit déjà d'ailleurs qu'il fait quel- quefois plus froid dans des lieux plus méridionaux que dans d’autres plus feptentrionaux. L'on a encore un exemple remar- quable dans les obfervations qui ont été faites à Aftracan ik y a trois ans avec mon thermomètre, & que j'ai communi- quées à la Société royale de PrufleP; dans cette ville, qui n'eft que d'un demi-degré plus méridionale que Québec, & qui, par conféquent , eft encore fous le parallèle de la France, le froid y a duré beaucoup plus long-temps, & a été beau- coup plus grand que lon ne la jamais éprouvé en France: Le plus grand froid eft arrivé à Aftracan le $ Janvier 1746, à 8 heures du matin, mon thermomètre étant defcendu à 195 degrés, ce qui répond à 24+ du thermomètre de M. de Reaumur. x

Mais ces froids, quelque grands qu'ils nous paroïfient,

TE qu

DES SCIENCES ri ñe font rien en comparaifon de ceux que l'on éprouve quel. quefois en Sibérie ; que pourroit-on penfer, & que ne devroit- on pas craindre d'un froid qui feroit defcendre mes thermo- mètres jufqu'à 281 degrés, & ceux de M. de Reaumur près de 70 degrés au deflous de la congélation ? C’eft cependant jufqu'où le froid a été obfervé avec mes thermomètres, & cela au milieu de Ja Sibérie, dans un lieu habité, & dont {a hauteur du pole eft d'un degré & demi moindre qu'à terfbourg. Ca été Le 16 Janvier 1 735 (nouveau ftyle), à 6 heures du matin, que ce froid horrible s'eft fait fentir à Yenifeisk; mais s'il a été le plus grand que j'aie appris jufqu'ici qui ait été mefuré exactement avec mes thermo- mètres, les obfervations faites pendant plufieurs années en quantité d'autres lieux de Ia Sibérie, jufqu'aux frontières de la Chine, ont fait connoître des froids qui en ont fort appro- ché, quoique dans des lieux aflez méridionaux. |

Il n'eft pas rare de voir jufqu'aux frontières de {a Chine; mes thermomètres defcendre à 206 degrés, ou ceux de M. de Reaumur à 30, autant que le froid extraordinaire de cette année a été à Péterfbourg ; mais quelquefois il y defcend beau- coup plus bas, comme il eft arrivé à Kirenga fous la latitude de 572, le thermomètre s'étant tenu prefque toutes les nuits & tous les matins pendant cinq mois entiers, depuis le commencement d'Oftobre 1737, jufque vers la fin de Février 1 73 8. Au plus grand froid que je viens de dire que Ton éprouve à Péterfbourg, il eft defcendu le 2 7 O&tobre 1737 à minuit, à 270 degrés; le 11 Décembre, à 3 heures après midi, il étoit encore à 2 s4;le'2 9, à 4 heures après midi, à 263 ; & enfin le 9 Janvier 1735, à la méme heure, à 275, qui répond à 66 + des degrés de M. de Reaumur au deflous de la congélation, & c'eft le plus grand froid qui ait été obfervé dans ce lieu pendant le peu de temps que l'on en a fait les obfervations. ;

L'on n'avoit pas encore commencé les obfervations à

Kirenga Jorfque lon a obfervé à Yenifeisk l'exceflif froid

ont j'ä parlé ci-deflus ; mais dans ce dernier lieu, le

B à

SU Hakluit, #ol.I1, p.23

72 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyALE thermomètre qui étoit defcendu au plus bas, à 28 1 devrés, à 6 heures du matin le 16 Janvier 1735, étoit une heure auparavant à 262; à 8 heures, il eft remonté à 250, à laquelle hauteur il eft refté jufqu'à 6 heures du foir; d'où lon voit que ce n’eft que pendant fort peu de temps que le thermomètre refle au plus bas que je viens de marquer.

I y auroit bien des réflexions à faire fur la nature &c {a caufe de ces prodigieux ‘froids ; mais comme ïl faudroit entrer dans un plus grand détail qu’il ne convient ici, je finirai par rapporter quelques effets généraux des plus grands: froids que lon a éprouvés dans d'autres lieux de la terre, par lon pourra juger, au défaut d’obfervations exactes. faites dans ces endroits avec des thermomètres, de combien les froids que l'on y reffent approchent plus ou moins de- ceux de Sibérie.

Les froids dont j'ai parlé jufqu'ici étant capables de faire mourir ceux qui y feroient expolés fans feu, l'on ne peut douter que ce ne foit à de pareïls froids qu'a été expolé le capitaine Hugues Willougly, avec tous les gens de fon équi- page, lorfqu'étant allé chercher en 1 $ $ 3 * le chemin de Ia. Chine par la mer feptentrionale , il fut arrêté par les glaces. dans un port de la Lapponie nommé Arzina, fous la lati- tude de 69 degrés, il fut trouvé mort avec tout fon. monde l'année fuivante.

Les Hollandois qui, étant allés de même chercher le che- min de la Chine par la mer glaciale, furent obligés d’hi- verner à fa côte orientale de la nouvelle Zemle l'an 1 596,. fous la latitude de 76 degrés, ne purent fe garantir du froid qui les auroit tous fait mourir, qu'en s’enfermant dans une- cabane qu'ils avoient conftruite avec des bois que les glaces. avoient par bonheur entraînés, & par le moyen d'un feu continuel qu'ils entretenoïent , tant avec ce bois qu'avec de ka houille qu'ils avoient apportée de Hollande; mais avec ce fecours ils eurent bien de la peine de s'empêcher d'avoir les pieds gelés auprès du feu : leur cabane, quoique prefque- enfévelie fous la neige, & fans aucune iflue pour la fumée,

"

4 DES S 1e N CES 13 afin de mieux conferver la chaleur du feu, étoit cependant en dedans couverte de glace de Fépaiffeur d'un doigt ; leurs habits & fourrures étoient auffi couverts de glace : le vin fec de Chérez étoit devenu par la gelée dans la même cabane, auffi dur que du marbre, & fe diftribuoit par morceaux. Hs ne parlent point d'eau de vie ni d'autres liqueurs plus fortes, m'en ayant peut-être pas alors.

Mais, fuivant la connoïffance que j'ai de la manière dont on {e garantit des plus grands froids en Ruflie & en Sibérie, &. de ce que l’on éprouve dans les chambres chaudes pen- dant les plus grands froids, je ne penfe pas qu'il puifle y en avoir de plus grands que ceux dont le capitaine Midäle- ton a fait le récit à la Société royale de Londres, les ayant éprouvés dans l'hubitation des Anglois à la baie de Hudfon, fous la latitude de 57 + degrés.

Quoique les maïlons dans lefquelles on:eft obligé de s’en- fermer pendant cinq à fix mois de l’année foient de pierre, dont les murs ont deux pieds d'épaiffeur; quoique les fenêtres foient fort étroites & garnies de planches fort épailles, que Yon ferme pendant dix-huit heures tous les jours; quoique Ton faffe dans ces chambres de très-grands feux quatre fois par jour dans des grands poëles faits exprès, & que fon ferme bien les cheminées lorfque le bois eft confommé,. & qu'il n’y refté plus que de la braife ardente, afin de mieux conferver la chaleur, cependant tout, l'intérieur des chambres & les lits fe couvrent de glace de l'épaiffeur de 3 pouces, que Ton eft obligé d'ôter tous les jours. L'on ne s'éclaire dans. ces longues nuits qu'avec des boulets de fer de 24, rougis au feu & fufpendus devant les fenêtres : toutes les liqueurs gèlent dans ces appartemens, & même l’eau de vie dans les plus petites chambres, quoique on y fafle continuellement. un grand feu.

Ceux qui fe hafardent à l'air extérieur, quoique couverts de doubles & triples habillemens & fourrures, non feule-- ment autour du corps, mais encore’ autour de la tête, du col, des pieds & des mains, fe trouvent d’abord engourdis

14 MÉMOIRES DE LACADÉMIE ROYALE

par le froid, & ne peuvent rentrer dans les lieux chauds qué la peau de leur vifage & de leurs mains ne s’enlève, & qu'ils n'aient quelquefois les doigts des pieds gelés.

L'on peut encore juger de la rigueur du froid extérieur, fur ce que le capitaine Middleton rapporte que les lacs d’eau dormante qui n'ont que 10 ou 12 pieds de profondeur fe gèlent jufqu'au fond, ce qui arrive aufli à la mer qui fe gèle de la même hauteur que lon vient de dire; quoique la glace ne foit que de o à 10 pieds d'épaifleur dans les rivières qui font les plus près de la mer, & la marée eft forte.

Le grand froid fait fendre quelquefois cette glace avec un bruit étonnant, aufli fort que celui du canon.

A l'égard de la terre, M. Middieton croit qu'elle n’eft jamais dévelée jufqu'au fond, parce que l'ayant creufée juf- qu'à la profondeur de $ ou 6 pieds pendant les deux mois que dure Fété, il avoit trouvée encore gelée & blanche comme de la neige.

Voilà des eflets plus grands que ceux que lon éprouvé ordinairement en Sibérie; ce qui feroit croire que les froids de la baie de Hudfon & du voifinage, font pour le moins auffi grands que les plus grands de la Sibérie : c'eft ce dont on ne pourra s’affurer exactement que par des obfervations faites avec des thermomètres réglés comme l'ont été ceux dont on s'eft fervi en Sibérie,

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ls plus grands Froids “berte C2 aulleurs a de LAe.R des Sex7go. Lage14 DIT.

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DES SCIENCES 15, | ROENICNEEUR C H ES

D E î STATIQUE ET DE DYNAMIQUE,

l’on donne un nouveau principe général pour la confidération des corps animés par des forces variables, fuivant une loi quelconque.

Par M. le Marquis DE COURTIVRON.

: problèmes les Géomètres examinent les effets 13 Juin” des forces fur les corps, font de deux fortes. Dans les 7750: Premiers, plufieurs corps en agiflant les uns für les autres ont des forces égales & fe font équilibre: dans les feconds, des actions ne fe détruifant pas mutuellement, le fyftème total eft en mouvement; les premiers de ces problèmes compofent la fcience qu'on appelle Jiatique , les feconds forment celle à laquelle on a donné le nom de Dynami- que. La Statique a été cultivée des Les temps {es plus reculés, & pouvoit faire quelque progrès avec la feule Géométrie des Anciens ; la Dynamique demandoit au contraire 1a théorie des lignes courbes, le calcul infinitéfimal, & toutes les découver- tes de cès temps modernes : la Géométrie à tellement enrichi cette dernière partie de la Méchanique » qu'une infinité des plus beaux problèmes de cette fcience Peuvent être réfolus par des Analyftes peu exercés à la théorie des forces, pourvû qu'ils emploient de certains théorèmes généraux connus de tout le monde, tels que la confervation des forces vives ï 13 permanence de vitefle & de direction du centre de gra- vité commun, &c. Si ceux qui aiment à confidérer à priori la nature des. queftions de méchanique , ne fe contentent pas des folutions

à tirées de ces feuls principes , & qu'ils les regardent comme:

420 ls

16 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE indireétes , ils en reconnoiffent cependant l'utilité, & s'exer- cent volontiers à chercher de pareilles vérités générales, qui femblent fi propres à faire connoître la marche & les loix de la Nature dans toutes fes opérations. à

Je me propole de faire voir dans ce Mémoire, l'obfer- vation conftante d'un nouveau principe, qui, indépendam- ment de l'utilité qu'il peut avoir pour des folutions de pro- blème, montre un rapport entre les queftions de Statique & de Dynamique, qui n'a paru fatisfaifant pour ceux qui s'attachent aux confidérations métaphyfiques.

Ce principe général eft, que de toutes les fituations que prend fucceflivement un fyflème de corps animés par des forces quelconques, & liés les uns aux autres par des fils, des kviers, ou par tel autre moyen qu’on veuille fuppoler, celle le fyftème a la plus grande fomme de produits des mafles par les quarrés des vitefles, c'eft-à-dire, la plus grande force vive, eft la même fituation que celle il le faudroit pla- cer en premier lieu pour qu'il reftät en équilibre.

La métaphyfique générale de ce prinçipe eft affez fimple, une quantité variable quelconque qui croît par degrés infmi- ment petits, devient la plus grande dans le même inftant elle cefle d'augmenter , c'eft-à-dire, fon accroifflement & par conféquent fa caufe font zéro. Or un fyftème de corps dont la force entière augmente continuellement parce que les réfultats des preflions agiffantes fait accélération , aura atteint fon maximum de force, lorfque la fomme des pref- fions fera nulle, comme il arrive lorfqu’il a pris la fituatiom que demande l'équilibre.

Ce raifonnement pourroit ne fatisfaire que les partifans des forces vives ; ce n'eft point aflez, je veux le rendre pé- remptoire, & je penfe d’ailleurs qu'il a befoin d'être déve- loppé : pour y parvenir, je vais examiner divers cas de mon principe, & le démontrer rigoureufement dans tous.

PREMIÈRE APPLICATION.

Confidérons deux corps #1 & JN animés par la gravité uniforme,

se

+

ETS +

Let. Le 2

ÿ DES SCIENCES 17 uniforme, & liés l'un à l'autre par un fil, & placés chacun fur une corbe donnée, 41 fur 420, N fur NL, chacun de ces corps étant empêché de tomber librement le long de ces courbes par l'inextenfbäité du fil qui les joint, & qui pafle autour d'une poulie 7 Y, dont la courbure quelcon- ue eft donnée, nous chercherons premièrement les viteftes avec lefquelles ils fe meuvent un & l'autre, l'un en defcen-

dant de Wen #, & l'autre en remontant de A/en mn. Soient l'horizontale AQ, & la verticale QN, les deux co- ordonnées de la courbe ZN; PB & MP, celles de la cour- be MO ; Nn & Mm, les deux petits côtés des courbes païcourues en même temps; MTV N, mtun, les deux fituations confécutives du fl; A4D & Dm, les élémens des co-ordonnées BP, PM; NE, En, ceux des co-ordonnces AQ, QN;mR, NS, deux perpendiculaires abaiflées de .m & de N fur le fil, lefquelles retranchent de ce fil les elpaces AR & Sn, qui font égaux en vertu de fon inex-

tenfibilité, | Cela polé, & ayant pris de plus la verticale # 4 pour repréfenter la gravité, &{la droite mo far le fi pour ex-

primer fa tenfion, on fra PM—Yy, Mm—ds,

QN=—=p, Nn— dr,

RM= sn 47,

à

mh = g. . Pour trouver alors {a force accélératrice qui fait mouvoir

le corps #7 fur la courbe 410 , on décompofera fuivant a direétion fm, tant la gravité que la force avec laquelle le _ fil le tire füivant mo, & on prendra Ja différence de ces deux forces décompofées ; T' étant la force ou tenfion du

; ù FR ; fi pour faire mouvoir la mafle A7 D: fera la force accé-

Iératrice de 7 dans la direétion du fil: abaïffant donc 04

perpendiculaire fur Je prolongement de Am", on fabitituera

les forces 04 & m4 à la force mo, & comme Îa force 04

eft confumée par la réfiftance du plan Mm, la force "14 Mém. 1 749. . C

18 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE fera la feule partie de la force accélératrice du fil que Ton doit confidérer, & cette force à caufe des triangles fem- blables AZR m, m ko, fera exprimée par =. x =, ou TE. ; menant de mème 3 parallèle à 7m, & lui abaiflant fa perpendiculaire mi, hi mh x _ = =. , à caufe des triangles femblables 47 Dm, mhi fera la feule partie de la gravité qui agit dans le fens Am, le corps 4 a la liberté de fe mouvoir; on aura donc par ces deux confidé- Tar gdy MAC TE M ira vers O fur la courbe 410 , & en fuppofant que v foit la vitefle avec laquelle il parcourt A/m , le principe gé- Tdz gdy ; ds MARQUE RTE Fa = do, Tdy gMdy Modo.

Si on divife de méme la tenfion par la mafle N,

rations pour la force avec laquelle le corps

néral des forces accélératrices donnera f

Trié : on aura —> pour la force retardatrice du corps AN dans la

direction du fil, & cette force décompofée fuivant la di- rection g N du petit côté Mn de la courbe 7 N, donnera par les triangles femblables fg N, Nsn, pour la force La

; a co d re tangentielle du fil RUE

, laquelle étant retranchée de

d 7 3 3 : 3 LUE LL. qui exprime de même la partie de la gravité qui agit gap Tdz dr Ndr lératrice réfultante qui fait defcendre le corps !V le lon

q Ï 8

de Mn; nommant alors + la vitefle de ce corps, on aura Tdz

fuivant /Vy, on aura

pour la force accé-

me à AAA gap .par le principe des forces accélératrices Ts FPTZ dr

du, gNdp Tdz; = Nudu; & en ajoû-

tant cette équation avec la première, on en tirera

DNEMSUNSLC IE. N, CVENS. 19 geNdp gMdy = Mvdw + Nudu, ou, en intégrant, 2gNp 28 My = Mvv + Nu; dans laquel'e il ne faut point ajoûter de conftante fi on fuppole les corps 471 & N fans mouvement au commencement : cette équation, qui auroit fe trouver tout de fuite par le principe de {a conférvation des forces vives, & auquel on peut fubftituer le principe des tenfions de M. Jean Bernoulli que je viens d'employer, fufhroit pour trouver la vitelte des corps À7 & N, à l'aide des équations des courbes 420, IN,TY, & de la proportion # : dr : ds que donne le fynchro- nifme de lafcenfion Â/m & de la delcenfion Vz,; mais je ne m'arréterai pas à le prouver, & je paerai à la démonf- tration de mon théorème, qui apprend en cette rencontre que la quantité des forces vives Mvv + Nuu eft un taximum lorfque le fi a la fituation dans laquelle les corps M & AN {e feroient équilibre pour y parvenir. Je ferai remar- quer que f1 A7 & N, foûtenus par les fils 227, VN, & par les courbes 470, Z N fe font équilibre, il faut que le poids du corps 47, c'eft-à-dire, fa mafle 47 multipliée par la force mh, donne, étant combiné avec la force que le fil #10 à alors, une diagonale #14 qui {oit perpendiculaire en #7 à la courbe 470, pendant que la mème force du fil appliquée en À donne avec le poids de V une diagonale perpendicu- laire à la courbe / N; ou, ce qui revient au mème, il faut que la partie de la force du fil qui agit füivant A/m, foit égale & oppofée à la partie du poids qui agit dans le même fens. Donc en appelant @ la force ou tenfion que le fil

pd gMdy

a dans cetie rencontre, on aura = » ds ds

g May à aNap :

9—= 7; on aura de même @ gen Pa la

condition qui apprend que la tenfion du fil décompofée fui-

.vant la courbe W/ doit être égale au poids g N, décompolé

fuivant la même direction : égalant donc ces deux valeurs de

©, on aura g Mdy = gNdp, gNdp g Mdy = 0,

ou 2gNdp 29 Mdy o. Or ceite quantité eit Ja C ï

20 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE différence de la valeur 2 g Np 2 4 My de la fomme des forces vives : donc cette quantité eft alors un #aximum.

SECONDE APPLICATION.

Suppofons maintenant le fil À 47 NO B fufpendu à deux clous À & B, chargé de tant de poids que l'on voudra, animés par des forces accélératrices qui fuivent des loix quel- conques données, tant par rapport à la direction que par rapport à la grandeur de leurs actions.

Je dis que fr on ne leur donne pas la fituation qu'ils doivent avoir pour refter en équilibre, il arrivera que de toutes les fituations différentes qu'ils prendront en cédant aux forces accélératrices qui les animent, & aux impulfives que on peut leur donner au commencement, celle la fomme de leurs forces vives fera la plus grande, fera auffi la mème que celle qu'il auroit fallu donner au fil pour que les poids reftaffent en équilibre.

Soit À AM NO B une fituation quelconque du fi, & AmnoB la fituation confécutive; Mm, Nn, Oo, les petits côtés parcourus par les corps A2 NO dans un même inftant; MD & md, Ne&ne, OF & of, les directions des forces accélératrices en Am, Nn, Oo, que je fuppoferai, pour fixer l'efprit, perpendiculaires à des courbes données Dd, Ee, Ff. Soient de plus 474, ni, Ok, des perpendi- culaires abaiflées de M, N, O für les droites dm, en, of, &MR,nS, o V des mêmes points fur les droites #12, no;

enfuite foient faits Mm ds, Nn dr, Oo = db, mb dis Ni drole MR NS = dp, nT ou OV = dg,

la force en À d@,

hi force En N = 7,

la force en O +;

RE AS

Er ?

DE SNISIC 1 E Nc Eté 27 la viteffe du corps Æf par Mm ,

celle du corps N par Nu y, celle du corps © par Oo =

on aura, en décompofant chacune de ces forces fur le petit ? dx

,

côté fur lequel elle agit, les forces tangentielles

s

7 dy MAT ne 77; je mets le figne parce que cette valeur

s'oppofe par ceite figure à la direction du mouvement du Corps: multipliant chacune de ces expreffions des forces tangentielles tirées des feules forces accélératrices, par Fexpreffion de F'inf- tant pendant lequel elles s’exercent, on auroit es équations

pd+ ds i Tdy dr Ÿdz = X— = dy, & —— TT ds À v Su dr > 10 dh és

@ dx = vdv, 7 dy = ydy —Ydy = WaW

Si les corps n'altéroient pas leur mouvement, en forte que la fomme des forces vives dans ce cas fera 2 A fedx + 2 Nf7 dy 20 /fY 47, on voit bien que le terme O [YF dy doit avoir le figne —, puifque la force Y, agi fant du fens oppofé à la direction du corps O, ce qui fait la fomme des forces vives, doit étre la fomme des effets des forces qui accélèrent moins la fomme des effets des forces qui retardent ; mais cette fomme, par le principe de la confervation des forces vives, doit étre la même, foit que les corps aient agi les uns fur les autres , foit qu'ils n'y aient pas agi, pourvü qu'ils aient parcouru les mêmes elpaces; donc, fans que &v foit égal à 2 f@4x, ni y” à 2/xdy, ni WW à 2/%d7, on aura Mvv + Nyy + OWW = 2M/q4dx + 2 Nfrdy 2 OfY dy. U s'agit maintenant de voir que cette quantité eft un maximum lorf que le fif eff dans la fituation que demanderoit l'équilibre des corps dont il eft chargé.

Nommons maintenant 7 & 7” les forces avec lefquelles les fils A1 N & NO font tendus lorfque les corps font en équilibre; il eft dair qu'au point #7, la force 7 qui tire,

Ci

dq

W

22 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

fuivant 47 N combinée avec le poids @ 47, dont la direc- tion eft D AZ, doit donner pour direftion compofante une droite oppolée à À 1, ou, ce qui revient au même, que la partie G L avec laquelle le fil tire le corps 47 dans la direction » A, doit être égale & contraire à la partie A 1 de la force @ A1, qui agit fuivant le même petit côté Am; mais les triangles femblables 41 LG, m Mr donneront G L

“La & les triangies femblables A14 m, M HI donne-

ep Mdx ds De même en ©, la tenfion du fil NF, combinée

avec la force FO, doit donner pour direction commune

» Her Ares celle du fl BO, ceft-i-dire, que la partie 2 u de Ja

tenfion du fil O N, qui agit fuivant Oo, doit être égale

ront 1 ; donc oMdx = Tdp.

. RO : 2 . . à la partie du poids qui agit dans la même direc-

tion, ce qui donne l'équation 7°dg OY4dz en N,la tenfion du fil AN, la tenfion du fl NO, & le poids æ /V devant fe détruire réciproquement , ïl eft clair que deux de ces trois forces décompofées dans une direction quelconque , doivent étre égales & oppofées à la troi- fième décompolée dans la même direétion. Décompofant donc la tenfion & le poids + N, fuivant le petit côté ÎNn de la courbe fuppofée décrite par le corps A lorfque le fyflème fe meut, on aura pour la fomme de ces deux

» T'dp N7 dy + 7

forces ed & comme la tenfion 7” décom- » à

dq

pofée dans le même fens devient , on aura l'équa-

tion __. =— TE 4 ou T'dg = Tdp + mr Ndy, Nrdy = T'dqg Tdp. Si Yon ajoûte maintenant les deux équations @ Mdx = T'dp, Nxdy = T'dq Tdp,& qu'on en retranche l'équation

ndlr Le ET + >: 1-0

mad. cos DS

Ce

DI ENS C 1, E NRC EE 23 OY dy T'dg, on aura 8 Mdx N x dy OY dy 0, & par conféquent la quantité 2 Ad» + 2/N7 dy 20fYdz qui eft la fomme des forces vives que nous venons de confidérer, {era un Hiaximum , comme il le falloit prouver. Si on ne vouloit Pas avoir recours à la confervation des forces vives, pour trouver l'expreffion des fomumes des mafies par les quarrés des vitefes, on y par- viendroit ficilement de la manière füuivante, en employant le principe des tenfions. Soient + & #’, les tenfions de: fils MN & ON lorfqu'ils fe meuvent, il eft clair que Ja force pdx 1 dp

x -

AM ds ?

totale tangentielle du corps 44 fra

FEU > ds 3

& que ceite force multipliée par linftant —— donneroit

Yinciément Zv, c'eftà-dire, qu'on auroit équation @ x t

y dP—=Vdv, ge Mdx tdp = Mvdy;

7 dy

de même la force tangentielle totale en A, feroit tdp—rd 77 När

T7

+

1, qui étant multiplié par l'inftant , expri-

dr : à De . alors par ED feroit égal à l'incrément /v, ce qui don-

neroit l'équation Max dy + rdp dy = Nyd);

. : Ydz dg enfin la force tangentielle en © feroit ue

& elle donneroit en la multipliant par d'inftant rue & en Végalant à ZW, équation OYdz;+dq3=0WaW; ajoütant alors les trois équations

Me dx 1dp— Mvdx,

Nrdy + tdp 1dq = Nyd,

OYFdyz + dg OWaW

il vient Féquation Me dx + Nrdy OYdz = Mvdv + Nydy + OWdW, qui donne pour

24 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

la fomme des forces vives, Mvv + Nyy + OWW, la même quantité 2 Mf@ dx + 2 Nfr dy 20 [x dy que ci-deflus.

TROISIÈME APPLICATION.

Soit A BC un levier mobile autour du point €, & chargé à fes extrémités de deux corps 4 & 8, animés par des forces accélératrices que l'on fuppofera chacune tendre à un centre de force, & fuivant des fonctions quelconques de la diftance à ce centre, ou variables fuivant quelqu'autre maniere donnée. Je dis que les corps À & B ain attachés l'un à l'autre, cédant aux impreffions des forces accélératrices, auront acquis enfemble la plus grande force vive lorfqu'ils feront arrivés dans la fituation AC N, dans laquelle les poids des corps A & N, ou, ce qui revient au même, les mafes M & N muitipliées par leurs forces accélératrices & leurs bras de levier, fe font équilibre ; ayant marqué la fituation mon, que le levier prend l'inftant d'après celui ïil étoit en MCN, & tiré les lignes MF, NG,mF,nG, aux centres de force F&G, & tiré les petites perpendiculaires mR, NS, pris les droites M H & NI, pour repréfenter les forces accélératrices en 41 & N, & abaiïflé de A & de / les perpendiculaires À O & 1P fur les prolongemens des petits côtés Mm, Nn; on fera le rayon

ME, NC =;

MF‘ ES%;, NGC —= y,

MR —=—dx, S'aidy,

MAX, MT

Mm = dr, Nn' A5 Z

Cds LE & lon aura —— pour la force 4/0, qui anime le

corps À dans le fens de la direction il fe peut mouvoir Jorfqu'il eft en di, & par conféquent a x À x 4 =

exprimera

- doivent fe faire équilibre, on aura

entre les angles 41 Cm, NCn donne ——

DNESNSLE.T E NICENS . 2$ ékprimera l'effort du corps pour faire tourner Je levier. | Ydy ds

On aura de même pour a force P N qui anime

Je corps B, dans le fens il fe peut mouvoir lorfqu'il eft

Ydy

en N, & ne

x b x B fera par conféquent l'effort de ce

“même corps pour faire tourner le levier ; don les deux corps

BiYdy AaXdx

£ d'SDNNTE dr

5Ydy As. «AT Hi 0, ou fimplement BF dy

ue AXdx>x 0, en remarquant que l'égalité néceffaire

a r ds dr” Telle eft donc l'équation qui doit avoir lieu lorfque AC N eft la fituation qu'on doit qe” au levier pour qu'il foit équilibre. If s'agit de proùver maintenant, que fi le levier au lieu d'avoir été placé d’abord dans cette fituation d'équi- libre, a été placé dans toute aûtre AC B, il donnera par

fon mouvement aux corps A1 & Nla plus grande te 4 }

forces vives, lorfque la même équation 4 X dx + BY

= 0 aura liéu, c'eft-à-dire, lorfque ces corps feront arri- vés à la fituation MC N, les efforts de rotation {& dé- truifent réciproquement. On pourroit s'en aflurer tout de füite ent employant la confervation des forces vives, car en nommant 4 la vitefle qué le corps auroit acquife en tom- bant librement par À 4, il eft clair que l'on auroit par le Xd x dr

x T v

principe des forces accélératrices 4%, PS . s

OW— 2 dx 2vdv; & par conféquent, que la force

vive aéquife en tombant par À #1, ou la fomme des effets sl preflion # fur le. ps À pendant cætte chûte, feroit AVT, 2 AL Retranchant enfuite de cette quantité la force perdue à faire remonter le corps B par l'arc BN, Celt-à-dire, la

fomme des effets de la preffion Ÿ pendant l'afcenfion par

Mém,r 749. D

+8

26 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Jarc B N, laquelle feroit, par la même raïfon, 2/BYFd4ÿ, on auroit 2/AXdx 2/BYdy pour la force vive totale du fyftème, & il eft clair que cette quantité fera un #aximum lorfque AX dx + BYdy fera = 0; ceft- à-dire, lorfque le levier aura la fituation AC N que demande Féquilibre: fi lon ne veut point faire ufage de la conferva- tion ‘des forces vives, on parviendra de la manière fuivante. à démontrer lé*ménie théorème.

Ce qui fait que les corps À & B, en décrivant les arcs AM, B'N, altèrent réciproquement leurs ARE à l'inflexibilité du levier À BC. Voyons comment {a force qu'a ce levier dans chaque fituation 47C N pour s’oppoler au mouvement des corps, agit fur chacun d'eux, Pour fixer lefprit, regardons cette force commé une lame inextenfible qui tiendroit les deux branches du levier ; que repréfente

\ t la tenfion de ce feflort à la diftance 7 du centre €, ve fera

fa force à la diftance Ac, qui, étant divifée par la maffe à mouvoir, donnera —— pour la force rétardatrice du corps

A, produite par le levier, c'eft-à-dire, qu’en retranchant cette Ydx dr même corps réfultante de la force dirigéé au centre Æ, on

Xdx

dr ; & par conféquent le principe ordinaire des forces accélé-

. Xds ; ratrices donnera /: —— 77) dr de not

quantité de

qui exprime la force accélératrice du

Aura

pn pour force entière qui agit fur À,

dr

d : Fa AXdx “— Avd®; v exprimant alors

la viteffle réelle du corps À, defmême —!- exprimera ‘a

5

force qu'a le levier en AN pour accélérer le corps’B: retran- Y4 cas

chant-de cette force la force . » qui vient de la force

+

( DE SN IOIC t'E NW 'C'EUS 27 tendant au centre G&, & nommant v la vitefle réelle de £ Ydy ds

Ben N, On aura TE AE BR

Ed,

: | D re BY dy = Bu u; ajoûtant maintenant les deux

équations = À Xdx # Avdv, ° . Lu fe BYdy + 2 Budu, oi __ & remarquant que = “2, on aura = À Xdx

- D

BYdy = Avdy + Budu, [— 2Axdx = /2BYdy —:Avv +4 Buu, comme ci-defus. ne fera fans doute point inutile d'ajoûterMim mot ur lufage dont peut être le nouveau principe que, je viens démontrer ; fi cette loi métaphyfique, dont les Mathéma- tiques démontrent laänéceflité, nous prouve une relation entre équilibre & le mouvement qui a quelque chofe de piquant, l'emploi qu'on en pourra faire dans la folution des problèmes fera d'une commodité marquée, & je crois devoir

> faire obferver. La fituation de l'équilibre, qui, parles méthodes connues, ne peut fouvents s’obtenir qu'avec quel- que circuit, fetrouve d'abord avec facilité; & dans d'autres _ cas le cale qui déterminela viteffe d'un fyftème de corps eft aflez compliqué, le théorème donne un moyen très- fimple de vériñer l'expreffion de cette vitefle, en examinant fi fon maximum s'accorde avec la fituation de l'équilibre: dans quelques ças il eft ifé de trouver la vitefle, & dans d’autres de trouver libre ; lune ou l'autie de ces

| ue trouvée, fert de preuve à correfpondante.

de .

21 Août 1748.

28 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

EXPERIENCES DE L'ELECTRICITE APPLIQUEE À DES PARALYTIQUES.

Par M MorAND & NoOLLET.

N OUS avions eflayé au mois de Février 1746, d'ap- pliquer PElectricité à un paralytique, lorfque des circonftances étrangères au fujet interrompirent nos expé- riences ; & nous nous contentâmes d'annoncer à l’ Acadé- mie, qu'après trois applications d'environ une demi-heure chacune, employées à tirer des étincelles de Ja partie affli- ge, & donner quelques commotions au malade, il s’étoit plaint de douleurs aflez vives à un bras qui lui étoit abfo- lument infenfible depuis treize ans. M. de la Sône étoit aflocié avec nous däns ce premier efai.

L'hifoire publiée par M. Jalabert, Profefleur à Genève, fur la guérifon d'un paralytique par le moyen de l'électricité, ayant réveillé notre émulation , nous demandämes à M. le Comte ,d’Argenfont la permiflion de faire des expériences fuivies fur des Soldats paralytiques, à l'Hôtel Royal des In- valides, en préfence de M. Munier Médecin, & de M. Bouquot Chirurgien-major; le Miniflre ayant bien voulu fe prêter à une tentative dont, fuivant les époques connues, nous croyons que la première idée nous eft dûe, nous ne pouvons pafler fous filence l'accueil qu’il nous fit, en don- nant publiquement les marques es plus tendres de fon amour pour le#Soldat, & de fon zèlé pour le bien public.

En conféquence, on nous procura toutes les commodités

dont nous avions befoin pour nos expériences. M. le Gou- verneur , les Supérieurs, & les Officiers de fanté s’empref-

. sèrent de feconder les intentions du Miniftre, & M. Morand

le cadet, Secrétaire général dudit Hôtel, fe chargéa, en affif- tant deux fois pangjour aux expériences, d’oblerver ce qui fe pafleroit. Pour faire ces expériences, ona pris une efpèce de

Mem. de L'Ac.R. des Se2749 Lag.28.Pl2,

hmmiap.

ns.

Aer. de l'AcR: des Sesvygy Pay 28 PL,

honneur

Mer. de LA R. ds Je1749. lag. 28, 21. 3,

l'Aigram Jeupp,

em. de Le R des Se-1739 Pao 28 PL. 3

Jhgnam J'ufp

Men, de l'Ac.R.des Se,1749 Pag.28.P1.4

210) » 281 " Eu fr vo

! DES SCIENCES 2 grande falle au raiz de chauffée, l'on a placé une machine électrique, avec tout l'appareil connu : on mit en expérience

endant les deux ou trois premiers jours deux hommes à la * fois, chacun affis fur une efpèce d’efcarpolette fufpendue avec des cordons de foie, les pieds appuyés fur des gâteaux de réfine; &enfuite (ce qui a été continué jufqu’à la fin) les pieds furent pofés fur des cordes ordinaires attaches aux deux côtés de l'efcarpoleite : on conduifoit l'électricité, du globe de verre aux malades, par des chaînes de fer. Te

Les membres affigés des paralytiques étoient tout nuds, ils reftoient en expérience deux heures le matin, & deux à trois l'après-midi ; on approchoit fucceflivement en diffé-

“rens endroits de la partie affligée, un morceau de fer, une

tingle, ou une clef, ce qui excitoit fur le champ la fortie

des étincelles plus ou moins vives, c’eft ce que nous appeï-

erons dans la fuite de ce Mémoire, éledrifer ; lorfqu'il sa gira de commotion donnée , on aura foiñ d'en avertir.

* Ces expériences ont été commencées le 9 Avril 1748.

Entre vingt paralytiques , préfentés par le Médecin & le

Chirurgien - major de l'Hôtel, on en a choïfi quatre, en- . tfâutres * celui fur lequel on avoit fait quelques expérien- ces en 1,746. Cette fois-ci il eft tombé malade dans le cours des nouvelles expériences, & eft mort à la fuite d'une fièvre tréséviolente, s'étant plaint, pendant le peu de temps qu'il a été malade, de douleurs#par tout le corps. :

Cette aventure ne fit peur à perfonne, parce que l’on ne put trouver aucun rapport entre les effets fenfibles de l’élec- tricité dont on faifoit les expériences, pour ainfi dire, en public, & la maladie dont le paralytique mourut. D'ailleurs le fujet étoit très-vieux & fort infirme.

Des trois autres paralytiques, on a mis en expérience un Soldat ? âgé de quarante-neuf ans, paralytique de la moitié du corps du côté gauche depuis trois ans, à la fuite d'une plaie de tête du côté droit ; n'ayant que la moitié de a flexion des quatre doigts de Ia même main & le pouce toûjours droit fans le poavoir fléchir à volonté.

+ P D ü}

À

2 Antoine- Matthieu Ger- mineau.

b Louis Daleür, dit Saint-Lours.

* Antoine Bardoux, dir Beau-féjour,

30 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYaLE * Le 9 Avril, on a commencé à l’éleftrifer dans la direc-

tion des mufcles extenfeurs du pouce paralytique, & en y

a remarqué fur fe champ des treffaillemens, & comme des mouvemens convulfifs.

Le ro au matin, on a aperçu quand on l'éleétrifoit, des mouvémens mufculaires dans toute l'étendue de fon bras, & même dans le pouce.

L'après-midi , on a remarqué dans le pouce, un peu plus de flexion que le matin. "Tu

Le 1 # au matin, on a remarqué la même chofe que le joûr précédent. : SITE

L’après-midi, on a oblervé de plus que le matin, une

tranfpiration fenfible dans da main, & plus forte dans le :

pouce. .

Le 12 au matin, on n’a rien remarqué de plus que le jour précédent, excepté que le bras électrifé a paru couvert de petites taches rouges, comme dés morfures de puces.

L'après-midi, on a rerñarqué dans le pouce un mouve- ment plus fenfible, & de la tränfpiration dans les deux mains; de plus, étoient lestaches rouges au bras, des élevures ou ampoules femblables à celles qu'excitent es piqûres de coufins.

Le 13 au matin, & l'après-midi, tout a été comme le jour précédent; quelques ampoules fe font trouŸées pleines d'une eau claire. LE

Le 15 il n’y a eu rien de plus, & le 16 on a ceflé de ’électrifer, parce que malade examiné de nouvew , on lui a trouvé les jointures nouées, ou plûtôt ankylofées.

Voicr le journal dés expériences faites fur les deux autres paralytiques. 1

Le ro Avril, on a commencé à élettrifer un homme * âgé de vingt-fept ans, paralytique de tout le côté droit à fa uite d'un coup de feu qui lui a brûlé l'œil gauche ;*il a toüjours eu dépuis une douleur continuelle dans toute la face, & fur-tout vers les finus furcilliers : il avoit fa main & les doigts fans mouveméns, & il étoit abfolument privé de fen- timent dans la partie malade,

TE

PNG HN: 8 lc à = pr ct rig ju a été éleéhrifé fuiyant da direction du mule fléchifur propre du petit doigt de la main droite; l'on 4 obfervé qu'il s'eft ungpeu contraclé en s'écartant des autres, & que les trois au doigts de la même main avoient auffi (des difpofitions à s'écarter mutuellement.

Le 11 au matin & faprès-midi, les mouvemens id doigts auriculaire & annulaire de la main ont paru plus marqués, & les doigts plus flexibles.

Le 12, on 3 remarqué 1 vement fnfble Ha Je doigt du milieu , ainfi que dans fannulaire & le d'a doigt.

L'après-midi, on a remarqué de plus, que favant-bras étoit couvert de rougeurs, & que la peau étoit très-rude; effet qui a toûjours été cbfervé depuis.

Le 13 & le 14 tout a été. de, même.

Leu 5 au matin, la mème chofe dans les trois doigts ; & pour la première fois, l'index s'eft remué en s'écartant des autres doigts. !

- Le“mëme jour, ‘Yaprès-midi, on a ratrarqué un peu plus à mouvement que les jours précédens au petit doigt, à annulaire & au médius, & un peu «de difpofition au doigt index & au pouce à fe mouvoir en s’écartant des autres.

Le 16 au matin, on a remarqué un grand mouvement dans tous les doigts, & même plus qu'à l'ordinaire; il a dit avoir fenti un engourdiffement dans le pet doigt, & on a obfervé auffi qu'il lui faHloit tenir {a main extrémement chaude au moyen d'un manchon de peau d'agneau qu'il portoit pen- dant la journée, # de ferviettes chauffées pendant tout le temps que duroi expérience ; avec cette précaution, l'élec- tficité agifloit plus vivement. n 1:26 1IÈ

L'après-midi, comme le matin.

Le 17 aumatin, il a paru plus de liberté dans les 16e yemens des doigts, fur-tout dans le petit & dans l'index.

. L'après-midi, on n'a rien remarqué de plus que le matin.

Le 18 au matin, on a remarqué des mouvemens plus vifs qu'à ordinaire dans Les doigts du lien l'ânnulaire & le petit doigt.

- 32 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE * L'après - midi, ils l'ont été moins,

Le 19 au matin, on na rien remarqué de plus que Îa veille.

L’après-midi, on a remarqué du mouvemeñt,dans le poi- gnet, & plus qu'à l'ordinaire dans les doigts.

Du 20 aw26, les mêmes mouvemens ont été obfervés, & celui du petit doigt plus fort qu'à l'ordinaire.

Du 27 Avril au premier Mai, la même cho'e.

Le 2 au matin, on lui ra éprouver pour la première fois la commotion de l'expérience de Leyde, en tenant lui- méme la fiole qui contenoit l'eau dans laquelle trempoit un fi de fer à-plomb; il a dit avoir reflenti dans le bras il n’avoit point de fentiment,"fur-tout à l'épaule du même côté une fecoufle vive, qui s'eft fait apercevoir extérieure- ment par une très-grande agitation de toute la partie ma- lade; & les mouvemens d'extenfions ont été plus vifs que par l'effet des fimples étincelles.

Après lui avoir donné la commotion, on eft révenu aux étinéelles fimples pendant un quart d'heure, & on a fini par lui redonner encore la commotion, pendant laquelle on a obfervé les mêmes chofes.

L’après-midi, les mêmes expériences {e font faites, comme Je matin, en préfence de M. le Comte d’Argenfom, & on a remarqué les mêmes mouvemens que le matin.

Le 3 au matin, il a fenti par la commotion des picote- mens dans l'épaule malade qu'il n'avoit pas coûtume de fentir, & il a eu les mouvemens ordinaires du poignet & des doigts. M E’après-midi, il a fenti par la commotiongdes picotemens daus l'épaule malade plus vifs que le matin, & il a eu de plus grands mouverens dans le poignet & dans les doigts, occafionnés par des étincelles. -

Le 4 au matin, comme le jour précédent.

« L'après-midi} la commotion s'eft fait fentir dans l'épaule malade plustforte que le matin, & même lui a caufé de la fueur, tant fur la partie malade qu'au vifage.

Le

VIDE SMS T NC F8 Di 27 - Le 6 au matin, comme le jour précédent, à la dernière circonftance près. . L'après-midi, 12 commotion à été très-{enfible, & Les picotemens dans l'épaule ont été plus vifs.

Le 7 au matin, on a remarqué les mêmes mouvemens dans les doigts, un peu plus forts dans celui du milieu, {a commotion a été plus forte qu’à l'ordinaire.

IL s'eft agité une queftion fur la contraction des tendons dans les membres paralytiques, à l’occafion de laquelle on a mis en expérience le bras d'un mort; on en à tiré des étincelles foibles, mais ä n'a point eu de mouvemens.

L'après- midi, mêmes remarques. que le matin, & les commotions aufli fortes.

Le 8 au matin, l'dedricité & les commotions n’ont pas été fi vives que la veille.

_Laprès-midi, elles ont été un peu plus fortes que Ie

matin.

Le 9 au matin, l'électricité a été aufi forte qu'à lordi- maire, & il a eu trois commotions auffi fortes que les pre. mières.

L'après-midi, éleéhricité à été plus fôrte qu'à lordi- naire, & il a eu auffr fix commotions plus vives.

Le 10 au matin, on a remarqué des mouvemens dans le poignet & dans les doigts plus forts que la veille; il a eu trois commotions aufli fortes, & il a dit avoir fenti de plus la fecouffe dans la tête, ainfi que dans l'épaule,

+ L'après-midi, tout a été à peu près comme le matin, Le 11 au matin, on n'à rien remarqué de, plus que Îa

_ veille.

- L'après-midi, féledricité & les. commotions n'ont pas

_ ééfi fortes que le matin; on a rémarqué une rougeur fur Je deffüs de la main, & für la jointure du doigt annulaire.

Lezr3; au matin, léledricité & les commotions ont été fort foibles. \ L'après-midi, l'edricité & les commotions ont été plus fortes que le matin: ce qui a continué le 14 &lers.

Meém. 1749: UE

34 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Le 16 au matin, léleétricité & les commotions n’ont pas été bien fortes; on a cependant remarqué un mouvement confidérable dans le poignet & dans les doigts, occafionné plus par les commotions que par les étincelles fimples.

L'après-midi, on n’a rien remarqué de plus que le matin.

Le 17 au matin, on a cefié les étincelles fimples; les mou- vemens du poignet & des doigts étoient plus forts par les commotions, mais les fecoufles dans l'épaule n'ont pas été fi vives.

L'après-midi, comme le matin.

Les 18, 19 & 20, mêmes remarques.

Le 21 au matin, les commotions ont été un peu plus fortes, ainfi que l'après-midi.

Le 22 au matin, les commotions & les fecouffes ont été plus fortes qu'à l'ordinaire, ainfi que les mouvemens des doigts & du poignet; ce qui a paru de même l'après-midi, & a continué avec un peu plus moins de vivacité juf- qu'au 28 au matin.

L'après-midi, les commotions ont été très-fortes; on a obfervé au moment de la commotion des mouvemens beau- coup plus confidérables qu'à l'ordinaire dans tous les doigts, ainfi que dans le poignet.

Le 29, de même.

Le 30, le matin & Faprès-midi, la commotion a été très-foible; on a cependant remarqué diflérens mouvemens dans les doigts & dans le poignet.

Le 3 1 au matin, quoique la commotion n'ait pas été bien forte, les mouvemens du poignet & des doigts ont été plus forts que la veille. à

L’après-midi, la commotion a été très-foible, & les mou- vemens du poignet & des doigts n'ont pas été vifs.

Tous les mouvemens dont il a été parlé dans ce Journal n'étoient point volontaires; ils étoient excités par l'effet de l'életricité, foit fimple, foit par commotion; ils accompa- gnoient le moment de l'étincelle; ils étoient répétés chaque fois qu'on en tiroit de nouvelles, & fe faifoient dans la

D EM 64 I E Nc ms 35 direction du mufcle le long duquel on travailloit : ces doigts fe féchifloient lorfqu'on tiroit des étincelles de Ja partie ‘cor- refpondante aux mufcles fléchifieurs, foit qu'on attaquât le tendon ou la tête des mufcles; & il en étoit de même de l'extenfion. De!

Lorfqu'on travaïlloit fucceffivement & rapidement fur les fléchiffeurs des cinq doigts, le malade fembloit jouer de lé- pinette, & il y avoit de ces mouvemens qui faifoient plier le poignet.

Mais comme tous ces mouvemens ne rappeloient point le volontaire, le paralytique s’eft laffé des expériences, &c on eut même quelque peine à fy engager les derniers jours.

Au furplus, interrogé plufeurs fois pendant le cours de ges expériences, fi depuis qu'il les éprouvoit il s'étoit aperçu de quelque dérangement dans fon fommeil, fon appétit, {es digeftions & autres fonctions naturelles, il a toüjours répondu que non.

Ce malade avoit été en expérience pendant cinquante jours.

Le fecond *, âgé de quarante-huit ans, étoit paralytique de tout le côté gauche depuis dix-fept ans : cette paralyfie -a commencé par foiblefle dans les membres, fans attaque d'apoplexie en forme. .

Le 16 Avril après midi, il a été éledrifé, & on a oblervé des mouvemens dans les doigts plus fenfibles que dans les autres malades éleétrifés ; on s'eft aperçu qu'ilavoit plus de chaleur dans les parties que les autres,

Le 17, comme le jour précédent.

Ler8 au matin, on a obfervé des mouvemens plus mar- qués qu'à l'ordinaire, fur-tout dans lannulaire & dans le petit doigt, & il a dit avoir fenti, la nuit du 17 au 18, de la douleur dans toute l'étendue du bras. L'après-midi, on a remarqué les mêmes mouvemens que le matin, plus vifs dans le doigt du milieu du côté de l'ex- tenfion; de plus, on a obfervé dans toute l'étendue de l’avant- bras des taches rouges, des ampoules & des véficules plus fortes qu'à fon compagnon.

w Sébaftien : Quinfon, de Bcaupré.

36 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE

Le 19 au matin, il a dit avoir fenti du mouvement dans: le pouce, qui fembloit vouloir s'étendre, & la nuit précé- dente de la douleur dans le genou : les mouvemens ont été les mêmes pendant l'éleétricité. 7

L’après-midi, on a remarqué de la contraétion & de l'ex- tenfion dans le poignet, & plus qu'à l'ordinaire dans les: doigts.

Le 20, comme le jour précédent.

Le 21, il ne fut pas électrifé.

Depuis le 22 jufqu'au 28, mêmes obfervations..

Le 29, il ne fut point électrife. k

Le 30, mêmes remarques que les précédentes.

Le premier Mai Faprès-midi, les mouvemens ont paru un peu plus forts que le matin. :

Le 2 au matin, il a éprouvé pour la première fois a commotion, pendant laquelle il a dit qu'il en reffentoit les fecoufles beaucoup plus fortes dans le bras malade que dans le bras fain avec lequel il foûtenoit la bouteille, ce qui seft fait aufli remarquer par des mouvémens involontaires dans la partie malade; après lui avoir donné la commotion, on eft revenu aux étincelles pendant un quart d'heure, & on a fini par lui redonner eneore la commotion, pendant laquelle on a obfervé la même chole,

L'après-midi, en préfence de M. Je Comte d’Argenfon; les mêmes expériences ont été faites, & on a remarqué les mêmes chofes que le matin. ÿ

Le 3 au matin, il a fenti la commotion plus forte dans. l'épaule affligée, & les étincelles fimples lui ont occafionné les mouvemens ordinaires ; il ne fut point életrifé l'après- midi,

Le 4 au matin, les fecoufles que la commotion- a occa: fionnées à l'épaule malade, & les mouvemens du poignet & des doigts excités par les étincelles, ont été les mêmes que la veille.

L’après-midi, les doigts de a main malade paroifloient

un peu plus étendus qu'à l'ordinaire. .

| D Æ SNMNSIC 1 EN C'EUS 327 . Le 6 au matin, on a remarqué fes mêmes mouvemens des doigts, & les mêmes fecouffes de l'épaule.

L'après-midi, la commotion a été plus {enfible que le’ jour précédent à l'épaule malade.

Le 7 au matin,: on a obfervé les mêmes mouvemens des doigts ; les commotions n'ont pas été fi fortes que la veille, ce qui a continué dans fe même état à peu près jufqu'au r s au foir.

Le 16 au matin, l'éledricité & les commotions n’ont pas été fi fortes; on a cependant remarqué des mouvemens dans les doigts & dans le poignet plus forts par les commotions que par les étincelles.

L'après-midi, comme le matin,

Le 17 au matin, on a ceffé de tirer des étincelles fimples, parce qu'on a obfervé que par la commotion les mouve- mens du poignet & des doigts étoient plus forts que par les étincelles.

L'après-midi, on a remarqué les mêmes chofes.

Le 18 matin, il a eu la commotion plufieurs fois, & il à dit avoir fenti la nuit précédente de la douleur & des picotemens dans le bras malade.

: L'après-midi, on n’a rien remarqué de plus que le matin.

Le 20 au matin, les commotions ont donné des fecouffes. affez vives dans l'épaule malade, & les mouvemens du poignet & des doigts ont été à l'ordinaire. |

L'après-midi, la même chofe.. |

Le 21, matin & foir, les commotions ont été plus fortes que la veille.

Le 22, matin & foir, les commotions ont été plus fortes qu'à ordinaire, aïnfi que les fecouffes ; les mouvemens des

doigts & du poignet n'ont pas été plus vifs. Le

Le 24, les mouvemens du poignet & des doigts ont été

plus forts qu’à l'ordinaire. k

. Le 25 au matin, les commotions & {es mouvemens ordi- maires n’ont pas été fi forts que la veille. _. L'après-midi, les commotions ont été très-fortes.

38 MÉMoiIRes DE L'ACADÉMIE RoyaLeE

Le 27, matin & foir, les commotions ont été aufi fortes _que le jour précédent, & les mouvemens du doigt annu- laire & du petit doigt plus forts qu'à l'ordinaire.

Le 28 au matin, les commotions & les mouvemens du poignet & des doigts ont été plus forts que le jour précé- dent, | L'après-midi, les commotions ont été très-vives; on a remarqué au moment de la commotion un grand mouve- ment dans le doigt annulaire & le petit doigt, & des veflies pleines d’eau qui ont paru fur l'avant -bras. $

Le 29 au nutin, les commotions ont été aufir fortes que la veille, ainfi que les mouvemens du poignet & des doigts.

L’après-midi, les commotions n'ont pas été fi fortes que . le matin.

Leo, les commotions ont été très-foibles; cependant les mouvemens des doigts & du poignet ont été obfervés comme à l'ordinaire. |

Le 31, les commotions ont été très-foibles, ainfi que les mouvemens des doigts.

Le premier Juin, de même. Ce jour a fini les expé- riences, par les mêmes railons que nous avons rapportées en parlant de l'autre malade.

Celui-ci ayant été interrogé comme l'autre’ pendant le cours ‘de ces expériences, fi depuis qu'il les éprouvoit il s'étoit aperçu de quelque dérangement dans fon fommeil, fon appé- tit, {es digeftions & autres fonétions naturelles, il a toûjours répondu que non. x

Ce malade avoit été en expérience quarante-un jours.

Les effets de l'électricité font fi finguliers, & leur varia- tion dépend de tant de circonftances, que nous nous en tenons fimplement à l'hiftoire de nos expériences, fans en rien inférer ni pour ni contre l'électricité médicale,

Nous croyons cependant pouvoir aflurer qu'il y a beau- coup à rabattre des merveilles que l'on en à publiées dans es pays étrangers. Les Auteurs qui ont écrit fur cette matière, ont prefque tous annoncé, par exemple, que léle&rifation

D E SSUC 1'E Nc Es, 39 accélère le mouvement du pouls; & fi cela étoit vrai, il faudroit en conclurre que c'eft un très- grand remède: il { peut qu’elle ait produit cet effet fur des gens du peuple choifis à l'aventure pour cette opération, qui auront été effrayés par Yappareil & les phénomènes de l'électricité ; mais qu'on expofe des Phyficiens à cette expérience, nous fommes per- fuadés que l'életrifation n’altérera leur pouls en aucune façon. M. Morand seit tenu fur l'efcarpolette pendant des heures entières , fouffrant qu'on lui tirât des étincelles de toutes parts, en préfence de plufieurs Académiciens ; on comptoit tout haut les foixante fecondes de chaque minute, & M. Mo- rand, fa main droite fur le pouls de fa main gauche, comp- toit toüjours pendant chaque minute quatre - vingt - quatre pulfations ; & quelquefois , Mais fort rarement, quatre-vingt- trois ou quatre-vingt-cinq. Le nombre 84 faifoit celui des batiemens de fon pouls ordinaire, & tel qu'il avoit avant

Yexpérience : la même, répétée par d’autres, ne nous a rien

appris de plus à cet égard.

26 Février 1749.

40 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

ENBDEMM E N.,S DE LAIT E, OR LE: D OL OPEN SUR LA FIN DU QUINZIEME SIECLE,

Déterminés par les obfervations de Walthérus,

Par M. l'Abbé DE LA CaAïLLe.

loccafion de fa nutation de l'axe de la Terre, qui exige une nouvelle équation dans les Tables aftrono- miques, j'ai eflayé de conftruire pour mon ufage des Tables du Soleil, déduites de mes obfervations. J’avois un très-grand nombre de pofitions du Soleil à l'égard de Procyon , d’Arc- turus & de la Lyre. J'avoue que je n'ai pu me fatisfaire en- tièrement. Ce qui m'a principalement arrêté, ce font les différens fentimens des Aftronomes fur les élémens les plus importans de la théorie du Soleil, & qu'un Obfervateur ne peut déterminer par fes propres obfervations : telles font la grandeur de l'année folaire, que les uns font plus longue, d'autres plus courte, & que M. Euler ne croit pas conftante; lobliquité de J'Edliptique, que les uns veulent conftante, les autres décroiffante ; le mouvement de l'apogée du Soleil, que les uns font réel & de plus d'une minute par an, & les au- tres apparent, & feulement de $ 0 fecondes, comme les Fixes. I faudroit donc, pour établir quelque chofe de certain -deflus, avoir des obfervations faites avec précifion dans des temps fort éloignés , mais nous n’en avons pas de plus anciennes que celles qui furent commencées par Régiomon- tanus, & continuées par Walthérus, à la fin du quinzième fiècle, Heureufement elles ont été faites avec plus d'exaéti- tude qu'on n'en n'auroit ofé efpérer, pour les premiers effais d'obfervations faites au commencement du renouvellement des Sciences. Je les ai examinées avec foin, & calculées

prelque

D! eu SMASMNC) LE NC ENS 41 prefque toutes plufieurs fois, je n'ai pas lieu de me repentir. d’avoir efluyé l'ennui d'un travail aufi rebutant , j'y ai trouvé beaucoup plus de précifion que je ne my attendois, elles ont diffipé une partie de mes doutes, & je fuis perfuadé que lorfqu'elles auront encore quelques années d'antiquité, elles contribueront beaucoup à lever toutes les difficultés fur les trois points importans qui partagent les Aftronomes, & qui arrétent ceux qui favent fe meitre en garde contre le£- prit de parti.

C'eft pour faire un peu mieux connoître le prix de ces obfervations, & en même temps, pour épargner dans la fuite la peine d'un fecond travail, que je préfente aujourd’hui à la Compagnie le réfultat de mes calculs.

Walthérus étoit un riche bourgeois de Nuremberg. La connoiffance qu'il fit-avec le célèbre Régiomontanus, lorf qu'il vint fixer fon féjour dans cette ville, lui infpira du goût pour l’Aftronomie. Régiomontanus l'inftruifit des con- noiïffances néceffaires, & Walthérus fit conftruire avec beau-

_coup de foin, & fous la direction de Résiomontanus , diffé

rens inftrumens propres aux obfervations aftronomiques. L'inftrument qu ‘ils deffinèrent aux obfervations du Soleil, étoit femblable à celui que Ptolémée a décrit dans fon Al- magefle, fous le nom de Regles paralladiques. C'eft une efpèce de triangle ifofcèle, dont l'angle enfermé entre les deux rayons ou côtés égaux, & qui font toüjours conftans, eft variable felon tous les degrés ; il eft fous-tendu par une bafe divilée en parties égales, dont les rayons en contien- nent 100000 : d'où l'on voit que le nombre des parties de cette bale compris entre les deux rayons, eft la corde de l'angle qu'ils renferment. Cet inftrument qui paroît avoir été conftruit vers le com- mencement de l'année 1 472, étoit de laiton; fes deux rayons, au rapport de Schonérus qui en a fait la defcription, & à qui nous devons la publication des obfervations de Walthé- rus , avoient chacun quatre coudées de longueur , Ja bafe di-" vike en avoit fix. Un des rayons étoit it affijéri dans une

Mén. 1749. ;

42 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE fituation verticale déterminée par un à-plomb, & l'autre portoit des pinnules par lefquelles on failoit pañler l’image du Soleil, en le dirigeant exactement à cet aflre dans le temps de fon paflage au méridien. La règle divifte donnoit alors la corde de la diftance du Soleil au zénith, & ce font ces cordes que Walthérus a oblervées pendant environ trente années, de- puis 1475 que Régiomontanus fut appelé à Rome, jufque vers le milieu de l'année 1 503 *: alors il fit conftruire un gnomon avec lequel il obferva, & qui lui fervit à vérifier fon ancien inftrument ; Walthérus mourut l’année fuivante.

Dans les premières années, Walthérus ne marquoit guère les circonftances de fes obfervations , fi.ce n'étoit lorfqu'il ÿ en avoit de douteufes, ou de plus exactes que les autres : dans la fuite, c'eft-à-dire, pendant les quinze dernières années, il a prefque toâjours accompagné chaque obfervation d’une note fur fa précifion, & fur l'état de l'atmofphère au mo- ment qu'elle a été faite.

AR AUEdGUEL HAE

De la hauteur du Pole à Nuremberg, à de l'obliquité de l'E‘chprique au temps des obfervarions de Walihérus.

J'ai déterminé ces deux élémens par la comparaifon des hauteurs folfticiales : j'ai pris toutes les hauteurs du Soleil obfervées dans l'efpace de neuf à dix jours avant ou après. le Solftice, & qui ne font marquées ni douteufes, ni mé: diocres ; je les ai réduites chacune à la hauteur folfticle, en Ôtant ou en ajoûtant ce qui devoit s'en manquer, felon. le calcul des Tables du Soleil, dont les élémens {ont déduits des obfervations mêmes de Walthérus, & que je détaillérai

* L’obfervation du 17 Septembre } qu'au 18 Septembre fuivant, il dif- 1496, elt marquée cum novo inf- | tingue les inftrumens avec lefquels 2rumenro; mais Walihérus ne dit pas | chaque obfervation a été faite; &au fi toutes les fuivantes ont été faites | 18 Septembre il dit que toutes les avec ce nouvel inflrument, au lieu | fuivantes ont été faites avec le gno-- que depuis le 11 Août #503, juf- | mon.

4

DES SCIENCES 43 dans {a fuite : cette réduction, j'ai eu égard: à Ja nuta- tion de l'axe delà Terre, afin de ne rien négliger & pour en pouvoir condurre lobliquité moyenne de l'Ecliptique. Voici ces eblervations.

TABLE des hauteurs du Soleil vers Le tropique du Cancer.

HaAuTEuRs | DISTANCE HaurTeurs| MiLieux

Haut. folfticiale

au Tropique. folficiales. de chaque année

& en29Y% 8 onc nutation à 4". 10:

44 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

ANNÉES. Juin. FA É ne ts | dl hi MT obfervées. Tropique. folfliciales. | de chaque année. EE dE Dm sn ms 1489. Abe An 2 usure, | 643.52 2CB- 20.0 25 11341. 64% 3. 02 SA 63: 15 240:3/6810106 3132 [64 344 17 8 Cenod 7- | 63e NOR ZA NE COMITE 3 EU nutation 2°. 9. |54* ©. 32102 1. | 64: 21 ju. CEE RTE 10. [64 #&. 146.110: 54.164..:2. d SN LP AE en EPS PET RER ES 1221104: Me. M2) DIOE MCE 64: 3- MER CHE 1490. 11.164 0838 oO 23) PRET 35. ä Cen2o» Wa N64 MM NTo MO MEz. #04 TA nutation + 2°”. j CPR REP TUE 26. 164.13. es 3e 24: 2 |63:+48. :n1.f1 5. 017..l64:t3, Ne EM EMA. 1491, 14 |64.002: 50.|Wo024..164-4304ut8: + LUE É 63-459. 18.103058. 64.13 nn 64; ae nutat. +14". À os. D AE 1492. 4. |63. 50. ‘so.|12. 44. |64. 3. 41 s. [63 54. o.| 9: ‘44 [64 3. 51. 66356. hs 7 0.) 64-Sn2r cæenmitd 7.163. 58. 14.| 4 53 64:03. NUtALION + 7 8. 64. ©. 21. 34 4 64. 2e 2 3. 39. 9. [64 1. :50.| 1: 38. | 64.131 44. 104 164.403. {10.102 47. 1164. 53,0 58. 11: |64. : 3. 036.1: 0: : 18: 164. 34) su. 125064. 36. 0610: .k04. 43434 1494. 81638 8e 460" 30052. F64. ur. 110. 104 2.010. "6. :| 04-0270 39 Caen3dk 12, |64. 3. 10.| o: ‘1. [64 3. 20 PRE CE | porarion RE RE ET RO Grue ds 14,1 | 64/7 270.) ol 4 [TOM Be) LE PRESENT TE CS D OR NE PU EEE

D-ES. SCIENCES. 45. MILIEUX & Haut. foliticiale

de chaque année.

. |Haureuns |DISTANCE | HAurEeurs ANNÉES. Juin.

obfervées. folfticiales!

Tropique.

PRO Cacen:3n nutation +- 9".

A C&en4fi a nutation + 5”.

1498. *

Caemisds nutation + 2”,

Vas fre

CA en26d H nutation 1”,

14.

1

Us SO:

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46 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

t L . lHAurTeuRs.| DISTANCE |HAureunrs| MILIEUX ANNÉES. Juin. au & Haut. folfticiale!

obfervées. Tropique. | folfticiales. | de chaque année. EEE PARMI QUE LS | DIT NT ART EU) CERN SEE . | 2. M: S. MH. S. D. M. S. D. M. Ss. 63:139- 39.124 2. 1645.37. 63. 43. 10.119. 47. |64. 2. 53. 64-11g. 32.| 2: 55.164083.) 23; Gen de 15910 Le 35e 64e 13.1 3100 cemn7 x « [é4e..t8h +n0.l 01:28. 164. 3/44: ET dont 64. 3. 32] 0. 7e 164. 3. 35. \64. 3. 30. 64. 3. 47: 0. 1: 64 3. 44. 64." 3. 132.| 0. ro. lg. 47. 64-* 2.734.) 1: 2. F64.03.) 372: 64 1. 10. 2. 8. 64. 3. 14. 64. 0. o.| 3:39. [64.3 au LSOI. …« |63. 53. 46.|[10. n3. 64. 3, 53. cœen18to 6.163. 56. 5. 7: 35-64. 3. 34.0 64. 3. 42 mutation 6”. 64-04. x21-|03-.014..|64-%3r1 30:

Milieu entre ces 92 obfervations, 6413.22",

PU Un. eee St Se

On n’a pas rapporté ici les obfervations de l'année 1496, parce qu'il y a une erreur manifefte dans la date des trois premières , & qu'on peut la corriger fans quelque fup- pofition.

On n'a pas mis ici celles de l'année 1 503, parce qu'elles ont été faites dans un autre endroit de la ville que les pré- cédentes ; c'elt ce qui paroït par ces mots qui font à la tête des obfervations de année 1.50 3, in nov4 domo : on trouve auffi, en prenant un milieu entre les onze cbfervations faites depuis le $ Juin jufqu'au 17, après les avoir réduites comme ci-devant, que la: hauteur folfticiale étoit de 644 4’ 34", ce qui excède de plus d'une minute la moyenne qu'on vient de trouver de 644 3’ 22", & d'environ une demi-minute,,

1 A E: SPA AC: À E NT C EME 47

: la plus grande de toutes celles qui font marquées ci- deffus année par année. D'où l'on voit que le lieu les dernières ob'ervations de Walthérus ont tté fines, étoit plus au midi que l'endroit il avoit fait les précédentes,

HaurTEurs du Soleil vers le tropique du Capricèrne,

i ' 1 Haureurs | DISTANCE | Haureuns MILIEUX ANNÉES. Décemb. sp au ee | & Hat. folfficiate obfervées. Tropique. folfticiales. de chaque année.

157-0219 MUR APTE 46. 17. 34. #0.1261 ;30. AE A 26.| OLIS: [17. 1ÿ. 34. _9: 34. er: Pareil 17e 17. M$. 34.| 84 13. 17 18. 46.11, 12.

VRP L ES Een, 1.

; - : ,

HS D ME Co M ER AN Arme

7 e2 6.) ON 97.17. 74 210,

17. 7%. 26.| o 31. |17. 74 ‘1.f 17 7 28

17. 28-22 la 41271 24.

17. 7: 54] 0 8 17. 7. 49. 17. 7. 49

17.415... 34) 1921460 1a57.1161 5.

17: 0134 126.1 6:34. [17 6 49

1 dt Ma Use 44 m9 17.081 0: 17207260 OEM 722 dan 77. la, 1 Lraigin sise alfa. in 26, ñ 17. 18. 144,| Forges Pure M6 5h

17.017 17 #9: [n7r 6131

48 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

HauTeuns/|DISTANCE |Haureurs| - MIÉIEUX & Haut. folfticialé

ANNÉES. Décemb. ; au RES obfervées. Tropique. folfticiales. | de chaque année. RRRESSE ENPATEREREE RUD | CT EDEEUTE ET 7 PIPEREETIEEPRET EIRE Joie ODA ESNONEM. S. 1491. 197: LR Su26.), Le 2 caenziim NO MO. S LE 2.054 nutation Re —_—_—_—_—— Î 1494: eu) | tr 2 9: caen23m 14 [17. 26. 45. nutation 9". 1495- 15.1|17-.047 3318028" CA en 34 m nutation 8". REIN ES GR 2) 1496. 10. |1 24| Oo. 47:

nutation 6”.

1498. ke 33° |17. 7. 214] 17. 7. 21. caemnsis

nutation 0”.

Dior

Caenr4ia NEA NIORT Oo, Il |

1S0O1I. 6.

Cacn83 | 10, nutation +- 7".

20.917074 47. LeA

21077 : ASUS

Milieu entre ces 31 obfervations,

17/6

EL dé) Parmi ces obfervations, Walthérus dit que celles qui

ont été faites dans les circonftances les plus favorables, font

celles du 13 Décembre 1478, des 7, 13 & 14 Décem:

bre 1487, du 12 Décembre 1490, des 15 & 16 Dé-

cembre 1491, du 11 Décembre 1496, & du 10

cembre 1$01. Si donc on prend un milieu entre toutes celles-ià, on A la hauteur apparente du Soleïl dans le Solftice, de 174 74 5".

J'ai omis les obfervaions du mois de Décembre 1503,

par

DES

\5

SÉGHLE- CES

par la même raïfon que pour celles du Solftice d'été : nr leurs les quatre obfervations qu'on en a, ont été faites avec un gnomon, dont Walthérus ne donne ni la defcription ni les dimenfions ; & ces quatre obfervations réduites comme les précédentes, donnent par un milieu la hauteur folfticiale apparente du Soleil, de 174 12”.

Calcul de lobliquité moyenne de l'Echiprique, à de la hauteur du Pole à Nurembere.

T Je fuppoferai la réfraction moins Îa parallaxe de 3” 0" pour Ja hauteur folfticide d'hiver, & de 22 fecondes pour

celle d'été,

Hauteur folflic. vraie.

4

Hauteur folflc. vraie.

Décembre 1477.... 174 39 Décembre 1490.... 174 4 2"

Juin 1478. ...... CAMES NOT Giner Alors Re) ME GRAN 2 NE) Différence . ...... ASS D ML 2 MN Différencers trees 2e 460% 58.115152 Obliquité de l'Eclipt.. 23. 29. 36. Obliquité de l'Eclipt. 23. 29. 27. Hauteur de lEquateur. 40. 34 15. Hauteurdel Equateur. 40. 33. 29.

Juin 1487 ..m.. 64 3. 27. Juin r401....... 64 2. 57. Décembre 1487... 17. 4. 18. Décembre 1491.... 17. 3. 53. Diféicen. . :... 46. 59. 9. Différence... ..... 46. 59- 4. Obliquité de l'Eclipt… 23. 29. 34. Obliquité de l'Eclipt.. 23. 29. 32. Hauteur del'Equateur. 40. 33. 52. Hauteur de l'Equat.. . 40. 33. 25. Décembre 1487.... 17. 4. 18. Décembre 1491 ... 17. 3. 53.

Juin 1488....... CAUB 9 Inn 14020104 M0)64. 3. 17. Différence . . . . . .. 46. 59. 21 Différence . ...... 46. 59. 24.

Obliquité del'Eclipt. 23. 29. 40. Obliquitédel’'Etclipt. 23. 29. 42.

Hauteurdel' Équateur. 40. 33. 58. Hauteur de l'Equat... 40. 33. 35. Juin DO C4 RL UT UANT 404. 1e. Le GA 2 A7:

| Décembre 1400... 7. AM 2. Décembre 1494: 17. 3. 38: @ Différence 2. 4. 46.50 o MN Diférence-tisel te 46. 59. 9. —… Obliquité de l'Eclipt.. 23. 29. 30. Obliquité de l'Eclipt. 23. 29. 34. à Hauteur del’Equar. « 40. 33. 32 Hauteurdel'Equat... 40. 33. 12.

Mém. 1749 . G

/

so MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Hauteur folflic. vraie. Hauteur folflic, vraie,

Décenbre 14942. 7 SO MNTtIn ns ox ee *. 644: 20

Juin 1495.

Différence. . ..

she) ee O4 MN MNIDécembre 1501 07. IN AE

AMIS Différence: Le 46. 58. 46.

Obliquité de l'Edclipt. 23. 29. 30. Obliquité del'Eclipt. 23. 29: 23. Hauteur del’Equateur. 404 33. 8. Hauteurdel Equateur. 40. 33. 57.

Décembre 14964 47. 3. 28.1 Juinmilieu.,. . Ke. 62. W3 Me; Juin 1407 tete C4. 12-024. Décembre millentt-r 77 NPA RO: Diférenceniiini-i-l.0460 09-86; DE DiHÉrEncE CNT A AC EU

Obliquité de l'Eclipt.. 23. 29. 33. Obliquitéde l'Edlipt.. 23. 29. 27. Hauteur deJ'Equateur. 40. 20 0NLEe Hauteurdel'Equateur. 40. 33. 33°

On voit que je n'ai employé ici aucune hauteur folfti- ciale qui nait été déterminée par le moyen de deux ob- fervations au moins, & que je n'en ai comparé aucune qui füt obfervée dans un intervalle de plus de fix mois.

H réfute donc, en prenant un milieu entre ces douze calculs, que l'obliquité moyenne de l'Edliptique, étoit fur la fin du quinzième fiècle, de 234 29° 32"; & que la hau- teur du pole au lieu Walthérus obfervoit,étoit de 494 26’ 25": c'eft le complément de la hauteur de l'Equateur, moyenne entre ces douze réfultats.

Réflexion fur l'obliquité de LE chprique, qui réfulte des

calculs précédens.

On à tant écrit depuis cent ans pour & contre la dimi- nution réelle de l’obliquité de l'Ecliptique, qu'il feroit très- difficile de dire quel eft le fentiment le plus fuivi. Sans pré- tendre décider ici la queftion, je crois qu'on eft bien fondé à admettre une diminution très-petite à la vérité, mais affez {enfible, pour mériter qu'on y ait égard, dans les réductions que nous faifons aux obfervations anciennes. Je rétablirai pas ce fentiment fur les oblervations des Grecs, des Chinois & des Arabes, comparées aux nôtres, quoique celles des der- niers méritent d'être difcutées attentivement , avant que de

DES SCctEnNcEs. SI les rejeter ; mais fur cet accord fi parfait de toutes les obler- vations de Walthérus, qui donnent lobliquité moyenne de lEdliptique entre 234 29' 23", & 234 20° 42": en forte

‘on ne peut la réduire à 234 28° 30", telle que nous l'obfervons préfentement , à moins qu'on ne fuppole la ré- fraétion que d’une minute à la hauteur de 17 degrés. Ajou- tez à cela que tous les Aftronomes du fiècle pañlé fe font accordés à faire l'obliquité de l'Edliptique de 234 29° 0”, & à préfent tous s'accordent à la faire plus petite d'environ

une demi-minute. Je minfifterai pas davantage fur ce fujet,

parce que tous Îles calculs des oblervations de Walthérus, que je rapporterai dans la fuite, feront indépendans de cette minute de différence.

ARTICLE IL

Recherche du lieu de l'apogée du Soleil, au temps des obfervarions de Walrhérus.

Pour déterminer le lieu de fapogée du Soleil, j'aï calculé les momens de deux Solftices confécutifs, fur les obferva- tions de Walthérus : j'en ai déduit la pofition de la ligne des apfides du Soleil, comfifie on verra dans la fuite.

Voici la méthode que j'ai fuivie dans le calcul des Solftices. * Sur deux hauteurs du Soleïl à peu près égales, obfervées l'une avant & l'autre après le Solftice, j'ai calculé les vrais lieux du Soleil, en y employant {a réfraction & la parallaxe de la Connoiflance des Temps, la hauteur du pole * & Yobliquité de Ecliptique déterminée dans l'article précédent. Oron fait que pour le calcul des Solftices, il n’eft pas abfo- lument néceffaire que tous ces élémens foient exactement connus , il fuffit de fe fervir des mêmes dans les réductions

—. de chacune des deux obfervations. Je me fuis fervi aufli des

* Dans le calcul des obfervations |: obfervations ont été faites, paroît être des années 1503 & 1504, on a | plus au fud d'une minute que celui

fuppofé la hauteur du Pole de 494 | Walthérus demeuroit dans Les an-

25° 25", parce que le lieu ces | nées précédentes.

G ï

52 Mémoires DE L'ÂCADÉMIE Royarr Tables du Soleil de M. Caffini, après avoir fait quelque correction au lieu de l'apogée pour le rendre plus conforme à celui que j'ai déduit des obfervations de Walthérus.

Par le mouvement diurne du Soleil déduit des Tables ; j'ai cherché des deux inftans, & les lieux le Soleil avoit , felon les obfervations, être à égale diftance du colure des Solftices. La moitié de l'intervalle entre ces deux inftans étant ajoûtée au premier, J'ai eu le moment le Soleil auroit atteint le colure, fr fon mouvement eût été uniforme, ou fi fon apogée eût été précifément" dans le colure. J’appelle ce moment % temps du Solflice moyen. J'ai calculé fur les Ta- bles les vrais lieux du Soleil pour les deux mêmes inftans, & en ajoûtant la moitié de leur différence au premier de ges deux lieux, jai eu le point (que j'appelle % eu du Solflice moyen ) le Soleil eût été dans l'Ecliptique, fr fon mouvement eût été uniforme, ou fi fon apogée eût été dans le colure. Enfin j'ai pris la différence entre ce lieu & le vrai lieu du Soleil calculé fur les Tables pour l'inftant du Solftice moyen, je lai réduite en temps, à raïfon du mou- vement horaire du Soleil au temps du Solftice, & j'ai eu: la différence entre le temps du Solflice moyen & celui du. vrai Solftice.

Cette méthode qui eft à peu près la même que celle que: M. de la Hire a rapportée dans les préceptes de fes Tables aftronomiques , étoit au temps des obfervations de Walthé- rus, bien plus fûre qu'elle n'eft à préfent , parce qu'alors Yapogée du Soleil n'étoit éloignée du colure des Solftices, que d'environ quatre degrés.

M. de la Hire, & prefque tous-les Calculateurs concluent direftement le temps du Solftice moyen par la comparaifon feule des hauteurs du Soleil, & par le mouvement diurne du Soleil en déclinaifon , tiré de l'obfervation , autant qu'il eft poflible. Je l'ai conclu par les longitudes du Soleil dé- duites du calcul de ces hauteurs, parce que l'Edition des ob- fervations de Walthérus faite par Schonérus en 1 544, n'eft pas exempte de fautes d'impreflion.: Edition que Snellius.

alle Bee n 0 Let ie ee al 0e

D'E SMISNC tr N'c'ENS s en donna en 16:18 ‘eft encore moins exaéle, elle con- tient les fautes de Fancienne, même celles quitauroient être corrigées par Ferrata de Schonérus, & on y en a ajoûté de nouvelles. On y trouve des chifires vifiblement tranfpofés , des dates faufies, dont on s'aperçoit par k différence d'un degré entier, ou même de deux entre les lieux du Soleil calculés fur les Tables, & ceux qu'on calcule fur ces Obler- vations, de forte que m’étant affüré par un très-grand nombre d'expériences que le calcul des Tables de M. de Caflini ne s'écartoit jamais de plus de 4 à 5 minutes du lieu du Soleif déduit des obfervations de Walthérus hors du temps des Solftices, & qui ne font fufceptibles d'aucun foupçon d'erreur

de la part de l'Obfervateur ou du Copifte, j'asrejeté com-

me fufpectes toutes celles qui donnoient une différence de plus de + de degré.

Pour le Solflice d'hiver de 1487.

Par les hauteurs du Soleil du 23 Septembre 1487 & du 2 Mars 1488, j'ai conclu les lieux du Soleil dans 84 so’ 15" = & 214 21° 52" X, le temps du Sofftice moyen le 12 Décembre à 9h 44° 32" + temps moyen, & le temps du Sofftice vrai Le 12 Décembre à 12h 22’ 32" temps moyen.

Le 6 Oétobre 1487, la hauteur du Soleil à midi fut obfervée de 314 $” 34", d’où j'ai conclu la longitude dans. 234 44 30" =, & par celle du 17 Février 1488, qui fut de 31445" 12", j'ai conclu la longitude dans 74 21° 10" X, & le temps moyen du Solftice vrai le 12 Décenr- bre à 12h 48° 46". |

Prenant un milieu entre ces deux déterminations, on 2. le temps moyen du: vrai Solftice d'hiver à Nuremberg le 32 Décembre 1487 à 12h 35'2.

On trouve encore dans les obfervations de Walthérus ; deux qui ont été faites à égales ‘diftances du Solftice, l'une le 22 Novembre 1487, fautre le 3 Janvier 1488 : j'ai: rejeté la première Qui d'ailleurs n’eft accompagnée. d'aucune:

G ü.

1 54 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE circonftance dans le livre de Schonérus , parce qu'il y a près de 1a minutes de différence entre le calcul des Tables du Soleil, & fon vrai lieu conclu {ur cette oblervation.

Pour le Soiflice d'été de 1488.

Temps moyen du Solflice vrai

Hauteur du Soleil. Vrai lieu obervé. le 11 Juin. 1488. le 24 Mars. .. 45% 44 42°... 13% 59"89 à 2où 58 25" û MONTS 90 1488. le 31 Août... 45. 43. 44 16. 58. 30 m$

le 27 Juillet .. 57. 29: 30....: 13. 6. 68@

1488. le 7 Mai... 59. 48. 23..... 25. 44 29 © le 16 Juillec.. 60.82. 56..... 2.29. $88&

21. 207000

fe

1488. le 29 Avril... 57. 48. 49..... DOS 2. 21 We à 120! daap

1488. le 14 Mai... 61. 15. 28..... 2. 24. 12 NE à 21. 44 33

le 9 Juillet... 61. 35: 42..... 2$: $0. 17 &

Par un milieu entre ces quatre déterminations, on a le

temps moyen du Solftice vrai à Nuremberg le 11 Juin 148004218525 "4

Pour le Solflice d'été de 1 503. Temps moyen du Solflice vrai Hauteur du Soleil. Vrai lieu obfervé. le 12 Jun. 1503. le 28 Mars. + AA Te ee ROPA2 Ai ue à 12h 45' 207 le 28 Août. .. 47. 8. 19.4. 13. 22. 41 m

le 18 Avril... $4 25. 24..... 6. S1. 37 ©

À see à 12: 22. 40e le 7 Août... 54. 28. 18..... 22. $9. 32 8

2

mt à.

le 2 Août... 55. 59e : $-sse «18. 14 23

le 25 Avril. .: 56. 31. 24..... 13. 31. 406 ©

le 31 Juillet... 56. 34. 27..... 16. 18. $ A

le 23 Avril .. 55, 56. 40..... 11. 37: US à 12. 26 4 bon à 12. $9. 46.

Je 26 Avril. . + 56. 49. 20..... 14 31. 53 ©9.,, à 12. 36. 46. le 30 Juillet. . 56.151. dd. 15e 20 O RS

le 27 Avril 7 6 MON NL 28030 4 13 10. 20.

le 29 Juillet... 57. 9. 4.... 14 20, 48 &

À

D'E S2ISNE TE N CE S

it RS Outôbre.

uteur apparente du ©.

De le Solflice d'hiver de 1 $ 03.

Lieu du © obfervé.

Par un milieu, on a le Solftice d’été à Nuremberg le 12 Juin 1503, à th so’ temps moyen.

» *

Temps moyen du Solflice vrai Hauteur du Sole. Vrai lieu obfervé, le 12 Juin,

2503. le22 Mai... 624 31° 20°.... 9% 347 me Et à 1h43; oo" le 4 dJuiller.. 62. 32. O0..... 20. 21. 19 &

le 24 Mai... 62. 48. 17... 11. 32. 36 ane. SU S x

le 2 Juillet... 62. 49. 0..... 18. 22. 6S 55° #

le 28 Mai... 63. 16. 24 He PRE ua à3. 35: Dos

le 28 Juin... 63. 17. 17... 14 30. 18 S

Temps moyen du vrai Solflice Le 12 Décembre,

F503. 324 26° 46"..æ 20° $0° Soi APE à 10h 12° 40°

r504. le 20 Février.. 32. 57. 20..... 10. 29. 32 X) | è »

1503. le 8 Octobre. 31. 20. 42..,... 23. 47. 28 1 à 10. 14 30e

1504. le 1$ Février. 31. 5. 21..+... S- 30+ 54 X

1503. le 13 Octobre. 29. 32. 10.. 28. 46. 43 49 ER

2504. le ro#février.. 29. 16. 15..... Oo. 28. 27 à 7e

2503. le 4 Nov. .. 22. 36. 4..... ZONE MON A Er. 3. 40

1504. le 20 Janvier. . 22. 38. 18..... DR7 US Li

7503. le 12 Nov. .. 20. 39. 16..... 28. $3. 53 “à Fin 8 ser

1504. le 10 Janvier.. 20. 15. 4@.... 29. 15. 53 #

2503. le 76 Nov. .. 19. 48. 15..... 3. 1. 38 #9 1 à ue

F504. le 8 Janviér.. 19. SO. 49....: 27. II 35 «| ae

x503. le 17 Nov. .. 19. 36 “48 Ds eIer 4 % 2%}... 3 jo. 4

z504. le 6 Janvier.. 19. 27. 26..... 29e Te 4 A Ton

= Par un milieu, le temps moyen du Solflice vrai le 1z

Décembre 1503, à roh 20'1.

56 MÉMOIRES DE L'AÂCADÉMIE ROYALE Calcul de la pofition de l'apogée du Soleil.

Pour déterminer la polition de la ligne des apfides, j'ai dreffé {a Table fuivante.

Temps moyen que le © emploie Temps moyen que le © emploie

Anomalievraie à parcourir 1804 o’ 31“+, à parcourir 18od o’ 31°+,

du Soleil, en paflant par Jon apogée, en paffant par fon périgé, Anom. vraie Q* Of CLEAN PTS PE Se. Ur HUBERT LSTOCQS TE. UNS OS ©: Sr RE NIT 0: 11462, NOM °n3 MASON: "ee 20 Os 27 DBZ. 110.) 0247 Ne MR UE ENTIER De GC. 20. 2. PERL 10 RMC OA ten 18e." 211040 TO NB NO EURE Ce OS. heu 182. 23.008. M ANG C ASS RE

Gr 2807. 0% Shen BRENT TE 2 Tee ei 2

La conftruction de cette Table n’a aftcune difficulté , il fuffit d'avertir qu'elle convient à une excentricité du Soleil, depuis -2£7— jufques à 42.

Cela polé, il fuit des calculs précédens, que le Soleil a employé 1 82i 8h 39° + de temps moyen à aller du Solftice d'hiver 1487 au Solftice d'été 1488, c'efkà-dire, à par- courir 180 degrés : y ajoütant 1 + pour lestemps que le Soleil emploie à parcourir 3 1" + au jour du Solftice d'été, on a 182i 8h s 3" pour le temps moyen que le Soleil a employé à aller de od o' 0" #, à od 31" +5: ce qui, {lon la Table précédente, fuppole que dans cet intervalle ä a paflé par le périgée, & qu'il devoit avoir $f 264 10° 24” d'anomalie vraie lorfqu'il étoit dans o4 0’ 0" +, c'eft-à-dire, le 12 Décembre 1487. Donc le lieu de l'apogée du Soleil étoit alors dans 34 49° 36" s.

De même l'intervalle du Solflice d'été 1 503 au Solftice d'hiver fuivant, a été de 182i 218 30' +: y ajoûtant 13°+, on a 182i 216 44’ pour le temps que le Soleil a employé à aller de 294 $9° 28" 2 H à od o'o"%: ce qui fuppole, {elon la Table, une anomalie vraie de 44 +, Donc le 12 Juin 1503 l'apogée du Soleil étoit dans 44 2°30"S. |

En prenant un milieu entre ces deux détermination,

on

Di Es SUR) 1 E Ni C ErSA

Fi on trouve que le 12 Mars 1496, l'apogée du Soleil es dans 3.56 33° a AS «left aifé de voir à l'infpeétion de Ia Table, qu'il faudroit s'étretrompé de 1h 3 8’ dans l'intervalle entre deux Solftices confécutifs , pour n’avoir le lieu de l'apogée qu'à 1 degré près.

ARTICLE ÏIIlL. à Recherche du mouvement de l'apogée du Soleil.

Par des obfervations fort exactes, rapportées dans les Mé- moires de l’Académie {année 1742, page 141), j'ai trouvé …— l'apogée du Soleil en Juin 1744, dans 8d 31° 35"s, & én Décembre 1743, dans 84 29° 13"; on peut donc fup- pofer qu'il étoit en Mars 1744, dans 84 30° 24", & par conféquent que dans l'intervalle de 248 anneés il s’eft avancé de 44 28*: donc fon mouvement annuel feroit de 1 [2 OR

Il fuit de que l'on ne doit plus fuppofer, comme font encore plufieurs Aftronomes, que le mouvement de l'apogée _ du Soleil n'eft autre chofe que f'eflet de Ja prgceflion des . Equinoxes: car fi l'on fait cette préceflion de $ 1 fecondes . paran, l'apogée n'auroit s'avancer dans l'intervalle de 248

années, que de 34 24° s1": doncenrso3, il auroit être dans $4 5’ + &: donc felon la Table précédente, l'in- tervalle du Solftice d'été au Solftice d'hiver eût être de 182i23" 14’, au lieu qu'on la trouvé de 182i 21h 30°21: | la différence qui eft de 18437 eft trop grande pour qu'en _ puiffe la rejeter fur l'incertitude des momens des Solftices, conclus par les obfervations de Waltherus.

Fe AR THGULNE.. L V. CEA as " Recherche de la grandeur de l'année folaire moyenne.

% + En réduifant le moment du Solflice du 12 Décembre 4 1487 au méridien de Paris, plus occidental que celui de

|

FA Men. 1749: EL

*V les Mém. de l'Académie, an.

1741,p.209.

53 MÉMOIRES DE LACADÉMIE ROYALE | Nuremberg, de 34° 56”, on a le temps moyen du Solftice à Paris, le 12 Décembre 1487, à 12° 44". M. Caflini a déterminé le temps vrai du Solftice d'hiver à Paris le 21 Décembre 1741 à 4h 47 36"*, à 4h 46° 3 5" temps moyen. L’intervalle entre ces deux Solftices , eft de 92771 16h 15° 51”, lequel étant divifé par 254 années, donne la grandeur de l’année folaire apparente, de 3 6 5i 5" 49° 40"; dont il faut Ôter $0” + pour la différence entre l'année folaire apparente & l'année moyenne : refte la grandeur de l'année folaire moyenne, de 365i 5h 48' 49" +.

Réduifant de même le temps du Solflice d'hiver de 1 503 au méridien de Paris, & en le comparant avec celui du même Solftice de 1741, on a précifément la même année folaire moyenne, de 365i 5" 48" 49" +.

Faifant encore la même réduétion au temps du Solftice d'été de 1487, & le comparant au temps moyen du Solf tice, que j'ai déterminé en 1747 le 21 Juin à 10h 34°31" à Paris, on aura un intervalle de 945 97i 13h $4’ 14" entre ces deux Solflices, ce qui donne l'année folaire apparente de 365i 5 47° 56", à laquelle il faut ajoûter $ 0” + pour la différence éhtre l'année apparente & l'année moyenne, & celle-ci fera de 365i 48" 46"+

Enfin par une femblable comparaifon entre le Solftice d'été de 1503 & celui de 1747, on trouvera l'année fo- laire moyenne de 365i 48° 37" 2.

Par un milieu on la peut étblir, felon les obfervations de Waltherus, comparées aux plus récentes, de 365i 5h 48" 46", & par conféquent le mouvement moyen du Soleil en cent années Juliennes , de of od 46° 8”.

AMRÉFT C'LE AN

Recherche de l'époque du moyen mouvement du Soleil au commencement de l'année 1500.

En réduifant les temps moyens des Solftices déterminés ci-deflus, du méridien de Nuremberg à celui de Paris, &

en f fervant de la poftion & du mouvement de l'apogce, trouvés dans des articles précédens , le calcul de l'époque de x500 eft aifé.

CE AL

( | oi 21 s4/ MSC) 4 E AN CI EL SA s9 |

JZezz Déc. r487,\ Lerr Juin r488, Le f2 Jun#so Lerz Déc. rço d 12h 44" 1 äzih 407 271. 4 ä rh i15° Fu3 à oh 45° MA

(4 (24

Vrais lieux du Soleil. . . [of od o’ o"| 3f 0 o”| 3f od o”|of of 0 o Vrai lieu de l'apogée. . . :|3. 3-46. 38 | 3. 3.47. 12 | 3. 4. 4.24 |3. 4. 4. 5$ Donc anomalie vraie du ©, 26. 13. 22 | 11.26. 12. 48 {ir 25. 55.36 À$. 25. 55. $ Equation du centre. . . . + 7. 32 + 7.45 # 8.20 + 8. 9 Donc lieux moyens du ©.|9. o. 7. 32 | 2.29. 52. 15 | 2. 29. 51, 40 lo. o. 8. 9 Lieux moyens felon les Tab.|9. o. 7.46 | 2.29. 52. 23 | 2.19. 53. 16 |9. o. 9.32

Erreur des Tables . . . .. + 0. 14 +o. 8 + 1. 36 + 1.23 Ep. de 1500 fclon les Tab419. 19.26.26 | 9. 19. 26.26 | 9. 19. 26. 26 |9. 19. 26. 26 Epoque corrigée. . . . . . 9+ 19. 26. 12 | 9. 19. 26. 18 | 9. 19. 24. 50 (9- 19.25. 3

‘Par un milieu , époque de 1 500 fera gf 194 25° 36".

| AURGTPICALE . . WI. Recherche de la + su équation du Soleil, à par

conféquent excentricité de fon orbire.

J'ai cherché la plus grande équation par la méthode Ja plus exacte que nous ayons : elle confifte à déterminer par les obfervations les vrais lieux du Soleil dans les deux temps de l'année il pafle par fes diftances moyennes : (c'étoit, lors ds bla de Waltherus, vers le 1 $ ou 16 Mars, & le 16 ou 17 Septembre ); on en conclud le mouvement vrai du. Soleil pendant l'intervalle d'un pañfage à l'autre; fa VE différence avec le mouvement moyen du Soleil pendant :ce _ même intervalle, eft précifément le double de la plus grande équation du centre, fi les deux lieux du Soleil font à-un demi- degré près des points des diftances moyennes: s'ils en font éloi- nés. de quelques degrés, la diflérence eft un peu moins que : double de la plus grande équation; mais on ne daiffe pas l.conclurre très-exaétement , même par des lieux du Soleil Ù fervés à quatre ou cinq degrés près des diftances moyennes. …_ Pour cel, on calcule fur des l'ables du Soleil, (quelles qu'elles _ fient, pourvû que le lieu de Fapogée ne foit pas écarté de:

CAE 1476.

2477 1478.

1487. 1488.

1480.

1491. 1498.

L4909> xSo1.

6o MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE fon vrai lieu dans le ciel de plus de 1 5 à 20’) les deux vrais lieux du Soleil au moment des deux obfervations ; on cherehe la plus grande équation du Soleil par ces deux lieux calculés comme ff c'étoit deux lieux obfervés dans les diftances moyen- nes; on la trouve plus petite que celle qui eft dans les Tables; on en prend la diférence, & on l'ajoûte à la plus grande équa- tion déduite des deux lieux du Soleil obfervés réellement.

Je n'ai omis ici aucune des obfervations de Waltherus, faites dans les circonftances propres à déterminer la plus grande équation du Soleil, & lon peut s'aflurer que je vais

rapporter fidèlement tout ce qui en réfute. Voici d'abord les obfervations.

Temps moyen: Hauteur app. obfervée di ©. Vrai lieu du So/eil. 1:54 S Ept.ua abs 2 NS ES OEM Cr ROUE Te A 16 Mars. a 0 MM ADN BIN ES QUI ES PIE SAME 12RSEpE A2) NA ncIe 40: 42-0341 11, 20240 Mn 6Ep LOEMArs D. a MO NB ele Net 41023 2: ET 207 54-0)C N'OPSCPLe NAS NTIe AN eR 39 ve, 3. 16. 48 1 20MAS RE A OS NN SEE TS 40. 48. 50. 6.135137 12" SEPL 40282049 3e celui 40. 55. 48 29: 6. 54m 171 SEPT 24 23 052 ITS NE 2, 54. 24 174Mars RO O ele fee 43 0. 56 6. 7-0 AB 13 SCPI EE PAR 40., 17. 106%. nt 0.143 Naute L'ANSCPE EL UNS A Ne CRE #. 1. 42. 52 17 Spread no 138443: 4007 el. NAN 0. re LME AU RO NEA. ee AZ Le 150 1. 58 30Y M 1 ES p ICE Me MM ON EE dE TON CE OMRE E7 2 HR 4 TOME A OMIS el AO AIS 7:15 4.020109 13 Marse it MO M 7 ALT e AT MNO ALU 1. 28. 260 14 Sept 252 EN 255 End VO ET 0. 59. 12 © AE NE ec EN CL DE Ac Ch oc 4. 13. 24 18/Sepe az: nn ee 8. 70.12 $+ 13. 8 LAMMATS TS AM Oo NRA ete 41. 35,25 2 32237 y 17:Mars. 4 LONG 42. 157 M Sa SE 20 14 Sept Ja agi) lea Ur SL 1. 34 15 18 Sept... à 23. $0o. 4 38 23. ÿ1..., $. 28. 50 2

aol É'SNÈSIC'A E Nr GENS 61 Voici maintenant Le calcul de l1 plus grande équation.

#

145. 15 Sept. 61 14 51° 24" 1477. Sept. 16... GT 38 16° 48" 1476. 16 Mars.. Oo. 5. 4. 55 1478. Mars 12.. 0. oo. 35. 37 Mouvement vrai. . We 3. 13. 31 Mouvement vrai. . . MN EN Mouvement moyen. 5: 29: 23. s

53 Mouvement moyen. DEEE Dience gant DIfC EN. u8te 2 2e 3- 49. 43 Moitié. ....... 1. $4. 47 Moitié..,….... FHIS AISNE Correttion, .. ... + 1 Correction. . ..,. + 62

Pius grande équation. 1, 54. 48 Plusgrandeéquation. 14:ÿ41 58

1476. Mars 16.. 0. S$. 4. 55 1478. Mas 12.. 0. oo. 35. 37

Sept 12. : 5:29. 40. 6 14784 Sept. 12. s. 2 6. 54.

Mouvement vrai... 5. 24. 35. 11 Mouvement vrai... HÉCFrarES Mouvement moyen. $. 28. 23. 17 Mouvement moyen. 6. #2. 20. $

L Différence. ..... 3. 48. 6 Différence... ... ERA TS

MOIRIÉ 2 ste ee Bel $de, 13 "Méitiétesm-. 1. $4 24

Correction. ... . .. + 6

Plus grande équation. 1. $4+ 91 Plus grandeéquation. 1,905 40,318 6

è | 3476. Sept. 12.4. $. 29. 40. 1487. Sept. 16... 6 : 3477. Mars 11..11. 29. $4 oO 1488. Mars 17... © Mouvement vrai... 6. o. 13. $4 Mouvement vrai... 6. 3, 13. 24. | Mouvement moyen. $. 26. 26. 32 Mouvement moyen. 5

Différence . . . .. ° 3. 47: 221 Différence. . 1." 3. 49. 33 À Moïtié. 42 da. 1, 53. 4r Moitié......... 1. 54. 462 1 Correction. 3! RON + 13 Correction. ...., ÊEE ;

Plus grande équation. x. 53. 54 Plus grandeéquation. 1. ÿ4 47

…. 21477. Mars r1..11. 29. 54. © 1488. Mars 17.. o l Sept. 16.. 6. 3. 16. 48 Sept. 17..: 6 _ Mouvement vrai... 6: 3. 22. 48 Mouvement vrai... 5. 28. 30. 49 Mouvement moyen: 6. 7. 15. 42 Mouvement moyen: 6 Différence . ..... 3.152 54 Différence. . .... LL PTE RAOMIQRÉ 2... 1. $6. 27 Moitié........ FA Gorrection...... + 9 Correction. ..... + 1E Plus grande équation. 1, 56. 36 Flusgrandeéquation. AN VMETE ( il

62 1488. Sept. 14... 1489. Mars 15... Mouvement vrai... Mouvement moyen. Différence Moitié

Plus grande équation.

1488, Sept. 13...

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Mouvement vrai... Mouvement moyen. Différence Moitic Correttion. . ....

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Plus grande équation.

1488. Sept. 17... 1489. Mars 19... Mouvement vrai. . . Mouvement moyen. Différence..1.0100.re Moitié-s"crtlire Correction. . ....

Plus grande équation.

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Sept. 14.. Mouvement vrai. . Mouvement moyen. Différence Moitié Gorreclion 1-10.

Plus grande équation.

MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE

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Sept:141 16. CNRS ARTS Mouvement vrai. .. 5. 25.35. 55 Mouvement moyen. 5. 29. 22. 41 Différence as: 1 3+ 46. 46 Montrer trie NOR) Correction. . .... + 1 Plus grande équation. SU 145 a Mars 17 . 120.105 58 20

Scpt.18.. 6. 5:28. 50 Mouvement vrai. . Fe 29. 30. 30 “Mouvement moyen. 6. 3. 19. 12, Différence .. . on. Be Be, 48 Moitié ." ..-... Me TETE Correction DEEE + 12, Plus grande équation. 54,93

Prenant un milieu ‘entre tous ces rélultats, on trouve da

ea

DIE: SMASUE à E Ne © EASE y à M 63 plus grande équation du centre du Soleil, qui réfulte des oblervations de Waltherus, de 14 54 55"; & par confé- quent l'excentricité de l'orbite. du Soleil ; de: 1671 6 parties, dont la diftance moyenne en contient 1000000, à peu près telle qu'on la trouve encore aujourd'hui , mais beaucoup plus petite qu'elle; n'avoit été déterminée par Tycho & par tous les Aflronomes. qui ont fait des Tables. du Soleil fur fes obfervations.

| ME MOIREY* D AE DA AN 29 08 8 8 1

Contenant la defcription d’un Eïeétromètre, ou d'un infrument férvant à mefurer la force életrique.

Par M. le Chevalier D'AR c +.

Qui: STRUMENT dont il eft ici queftion , a été ima- R 3 giné il y a plus d'un an & demi par M. le Roy & moi, Perfuadés lun & fautre , que deux amis qui travailleroïent de concert à quelque partie de la Phyfique, réuffiroient mieux par les fecours mutuels qu'ils fe Préleroient, que s'ils tra- vaïlloient chacun de leur côté; nous nous fommes affociés Pour faire des expériences fur 'Elelricité, Ainfi l'on doit regarder tout ce que je dirai dans ce Mémoire, comme appartenant également à tous les deux.

_ L'éedtricité qui n’étoit il y a dix ans que Yobjet de Ja curiofité de quelques Phyficiens , ayant excité celle de toute

l'Europe, depuis la fameufe expérience de Leyde ; on s’eft _ empreffé de chercher la caufe de tous les effets extraordi-

r6 Avril 1749.

‘naires qu’elle produit : de à eft venu cette foule de Traités,

‘où l'on ne Promet pas moins que d'expliquer clairement la vg * Ce Mémoire eft imprimé fous le nom de M. d’Arcy feul, quoiqu'il appartienne éoalement à M. le Roy; parce que, lorfque M. d’Arcy en a # la“leéture , M. le Roy n’étoit pas encore de l’Académie.

64 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

caufe de l'électricité. Mais, fon en excepte celui de M. Abbé Nollet, & ceux de quelques habiles gens, toutes ces belles promefles s’évanouiflent , & toutes ces explications fe rédui- fent à mille fuppofitions vagues & gratuites, qu'un homme fenfé n’adoptera jamuis. Ce qu'il y a de fingulier, c'eft que dans plufieurs de ces Traités, on s'aperçoit que leurs Auteurs ne fontpas mème bien inftruits des phénomènes qu'ils veu- lent expliquer. -

Des Phyficiens plus fages ont interrogé Ja Nature ; ils ont fait un grand nombre d'expériences pour tâcher de pénétrer la caufe des phénomènes électriques, caufe qui femble à chaque moment vouloir {e dévoiler à nos yeux, & qui cepen- dant n'en eft pas moins cachée. Mais, fi j’ofe le dire, ils n'ont pas fuivi la véritable route ; entraînés par la fingularité des phénomènes nouveaux qui fe préfentent à chaque inflant , ils ne fe font pas affez attachés à bien conflater la nature & le rapport mutuel de ceux qui étoient déjà connus. A Ja vé- rité, les phénomènes de l'électricité font fr propres à piquer la curiofité, que cette conduite ne doit pas furprendre ; mais il eft arrivé de là, que d'un grand nombre de nouvelles découvertes on a tiré peu de lumières fur la caufe des phé- nomènes. Il eft de certaines règles qu'un Phyficien doit fuivre dans fes expériences , & qui doivent être comune la bafe de toutes {es tentatives. L'identité des circonftances en eft une des plus effentielles à obferver, fur-tout dans l'électricité, qui eft fi changeante , tantôt foible, tantôt forte ; le feul chan: gement de pofition de la main par rapport à l'équateur du globe que l'on frotte , l'augmente, ou la diminue. Or fr le Phyficien n'eft pas en état de mefurer, ou au moins de con-. noître ces changemens, il fera, comme on le verra dans un moment, expolé à tirer de ces obfervations mille conféquences faufles, quoiqu'elles lui paroiïflent bien déduites. 1 réfulte de ces réflexions, qu'un Æ’kéfromètre, un inftrument qui pourroit mefurer ou indiquer les variations de la force élec- trique, feroit d'une grande utilité dans l'obfervation des phé- nomènes de l'électricité.

Cette

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nés.

DIE SASNE I E N/GEÏS 6 * Cette remarque paroîtra plus importante, ff l'on fait atten- tion à la différence des opinions qui partagent les Phyf- ciens fur la caufe de plufeurs de {es phénomènes ; différence qui paroit ne devoir être attribuée qu'à l'impofhibilité ils étoient de connoître les variations de la force électrique, n'ayant aucun moyen précis de Ja mefurer : car fi fun fait fes expériences avec une éledricité plus forte que l'autre, cette différence dans {a force peut en produire de très-confi- dérables dans les faits. Une expérience que je vais rapporter, rendra ceci fort fenfible.

Si l'on préfente un corps léger à une certaine diftance d’un corps foiblement électrique , il fera attiré; fi le corps devient fortement électrique, & que vous préfentiez de nouveau, à la même diftance, le corps léger , il fera repouñlé. Voilà deux eflets qui paroiflent contradiétoires ; on pourra donc égale- ment foûtenir qu'un corps électrique attire des corps légers à trois ou quatre pouces de diftance, ou qu'il les repoufle: de à on peut s'étendre à Finfini dans un détail d'explications vagues ; cependant le fait eft fort fimple , il n'eft qu'une conféquence d'autres faits déjà connus. Tous les corps éga- lement électriques fe repouffent, c'eft-à-dire, font effort d’une manière quelconque pour s’écarter ; ils ont de plus une atmofphère électrique : on fait qu'un corps entièrement ifolé, s'éleétrile par le feul voifinage d'un autre corps élefrique; or plus un corps eft électrique, plus cette atmofphère s'étend à de grandes diflances ; par conféquent dans le premier cas le corps léger n'étant point électrique doit être attiré, & dans le fecond , l'étant fortement parce qu'il {e trouve plongé dans l'atmofphère du corps électrique, il doit être repoufñlé. Un Eleftromètre auroit bien-tôt décidé la queftion , puifqu'il feroit voir que l'éleétricité n'étant pas la même dans ces deux expériences , ces phénomènes n’ont rien d'extraordi-

_ maire, & qu'ils ne font que les fuites d’autres phénomènes déjà connus. «On ne finiroit pas fi on vouloit s'étendre fur | toutes les expériences de cette efpèce.

» importante queftion qui a été agitée entre d'habiles Mém. 1749. vol

66 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE gens, & qui fe préfente d’abord à lefprit ( favoir, fi la force électrique eft comme le nombre des particules de ma- tière, ou comme la furface des corps), paroît encore impof fible à décider fans cet inftrument: en eflet, comment réfoudre cette queftion , fans connoître exactement la quantité de la force électrique ?

Je ne dois pas oublier que d’habiles Phyficiens eftiment la force de l'électricité par la diflance à laquelle on tire les étincelles, & par leur éclat; mais on fent facilement que si y a des cas cette manière de leftimer puifle être employée, il y en a un grand nombre elle ne conviendroit pas, & que fans une ans plus précife on ne parviendra jamais à rien établir de général & de certain fur les loix d'attraction & de répulfion.

I eft à propos même de remarquer, que la détermination de ces loix eft d'une plus grande importance qu'on ne le croiroit d'abord; & que fi elles étoient une fois bien connues, elles pourroient jeter un grand jour fur la caufe de Félectricité,

Je ne m'étendrai pas davantage fur la nécefité de cet inf trument, j'imagine l'avoir aflez bien montrée. Auffi M. le Ro & moi reconnûmes, qu'avant de rien entreprendre fur lélec- tricité, notre premier objet devoit être de le chercher. La chofe nous parut d'abord fi hérifiée de difficultés , fur-tout par l'inconflance momentanée de l'électricité, que nous crü- mes qu'il étoit impofñlible d'y réuflir; cependant après plu- fieurs tentatives, nous parvinmes à exécuter l'inftrument , dont voici la,defcription.

Un grand vafe À B plein d’eau, contient une bouteille D de verre, que les Marchands appellent œuf philofophique; à l'extrémité du col de cette bouteille eft adaptée une verge } parfaitement cylindrique, d’une ligne de diamètre, & de 1 2 pouces de long. Le vafe À B eft recouvert en haut par une plaque de laiton À, qui s'applique parfaitement deflus; cette phque eft percée d’un grand trou à fon centre, qui eft auff celui du vale, afin que la verge puifle pañler à travers très- librement. A l'extrémité fupérieure de la verge eft une petite

be D E SON : C'ENS 67 plaque circulaire Z de laiton, de 14 lignes Z de diamètre, J'ai déjà dit que le vafe À Z elt plein d'eau , l'œuf y eft plongé à une certaine profondeur , qui doit être telle, que Finftru- “ment étant en repos, c'eft-à-dire, n'étant pas électrique, extrémité inférieure de l'œuf foit aflez près du fond du vale, fans cependant y toucher. Pour que l'œuf & la verge foient “toûjours dans une fituation verticale, on lefte l'œuf avec du mercure, par ce moyen le centre de gravité étant fort bas, le tout {e tient perpendiculaire à l'horizon, & éprouve, en hauf- | fant ou baïflant le moins de balancement qu'il eft poffible :

-comme cet œuf, s'il n’en étoit empêché, iroit vers les bords

du vafe, & nageroïit tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, on a

‘été obligé de le déterminer au centre, de la manière fuivante.

ciné à 2

d'argent fort déliés, tels que ceux des micromètres ; cette croix eft formée par des fils doubles qui laiffent entre eux au centre de la plaque, un petit efpace carré, qui étant plus grand que le diamètre de la verge, lui permet de monter .& de defcendre entre ces fils, fans éprouver aucun frottement -fenfble, & cependant fans l’écarter du centre: il arrive même “un fait fort fingulier, c’eft que lorfque toute la machine eft bien électrique, la verge eft contenue au milieu de ces fils, prefque fans y toucher, parce qu'étant électrique comme eux elle les évite continuellement. _ Après cette defcription de Finfrument, on imagiuera fans peine la manière dont il fait fon eflet, fur-tout fi l'on fait attention à ce princique d'hydroftatique fi connu, qu'un -çorps plongé dans eau, furnage s’y enfonce felon qu'un se d'eau, femblable à celui qu’il occupe, eft plus léger ou plus pefant que le corps même ; il fuit de ce principe, + qu'un volume d'eau égal à celui de l'œuf & de la partie _ de la verge qui trempe dans l'eau, lorfque le tout eft en - repos, pèfe autant que l'œuf, la petite plaque & toute la verge: conféquemment, fi Je tout s'élève d'un pouce, la puiffance qui le foûtiendra à cette hauteur, foûtiendra un poids égal à "un volume d'eau de la groffeur de la verge, & d'un pouce

Ti

Sur la plaque Æ dont j'ai parlé, font fixés en croix des fils .

\

68 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

de haut, puifque le volume d’eau que l'œuf & fa VErge occu- pent alors, eft diminué de cette quantité. Si donc diffé- rentes puiffances le foûtiennent à 1, 2, 3, 4 pouces, &c. de hauteur au deflus du point de repos, ces puiffances feront entre elles comme ces nombres, c'efl-à-dire, doubles, triples, quadruples, &c. on verra dans un moment que l'éledricité produit le même effet fur l'Eleétromètre, c'efl-à-dire, qu’elle fait la fonction d'une puiffance qui le foûtiendroit à 1, 2, 3, 4 pouces, &c. au deflus de fon point de repos, & par conféquent, qu'avec cet iuftrument on eft en état d’eftimer tous {es diflérens degrés de force. Que l’on fuppofe à pré- fent toute la machine compolée du vafe À B, de l'œuf, &c. polée comme elle eft en © dans la figure 2.° fur un réci- pient de verre, ou fur quelqu'autre matière qui ne laiffe point pañler l'éleétricité, & que le vafe À B devienne électrique, la verge V le deviendra aufi, comme la plaque Z. Or tout le monde fait que les corps électriques fe repouffent ; ainfr la petite plaque L & la verge F étant repouflées par la grande plaque A, s'éleveront néceflairement plus ou moins, felon que l'éleétricité fera plus forte ou plus foible. L'éleétri- cité fera donc alors, comme je fai dit plus haut, la fonc- tion d’une puiffance qui foûtiendroit Finftrument à une cer- taine hauteur; mais comme ces puiflances font proportion- nelles aux hauteurs de Finftrument au deflus du point de repos, ces mêmes hauteurs feront auffi proportionnelles aux différentes forces électriques, ce qui prouve ce que j'ai avancé, que notre inftrument mefure exaétement tous les différens degrés de la force éleftrique : il eft donc un véritable Elec- tromètre; mais il y a plus, cet Eleétromètre peut être employé comme inftrument, foit pour faire un grand nombre d’expé- riences fur l'électricité, foit pour déterminer les loix d’attrac- tion, de répulfion, de difiufion, ou de tranfmiflion, &c. des corps électriques; propriété qui n’eft pas moins impor- tante que celle de melurer la force électrique. :

DES SCIENCES. 69 Manière de [e fervir de l'E‘lc&romitre.

Les corps électriques ayant cet inconvénient, qu'on ne peut en approcher fans leur dérober l'électricité, il eft clair- que fi l'on étoit aflez près de l'Eleétromètre pour juger de fes mouvemens avec précifion, on déroberoit fon élericité. Cette railon nous a déterminés, après un grand nombre de tentatives, à les obferver de la manière fuivante. Dans une partie de la chambre nous plaçons une grande lanterne, on met une groffe bougie qui projette fa lumière par un trou fur les Electromètres placés en Æ (on n'a point repré- fenté dans le deflein cette lanterne, pour ne point faire de confufion, on n'a repréfenté que le jet de lumière); derrière ces Elettromètres et un cadre Q très-{olide, dont toute la parte À eft de bois ; elle pourroit être de toute forte de matière opaque: dans ce cadre font coupés deux reétangles ou fenêtres À 7; ces fenêtres font remplies par des glaces G qui ne font qu'adoucies ; fur ces glaces, on a marqué des divi-

fions très-précifes avec de l'encre de la Chine bien noire. P.

Ce cadre eft toüjours placé de façon que la projection des Electromètres tombe fur ces glaces; & l'extrémité D de

Ja verge étant faite en cone, elle y forme une ombre très-

nette. Or comme ces glaces font tranfparentes, Obferva- teur placé derrière en Æ, voit de la manière la plus diftincte toutes les différentes élévations de l'Eleétromètre, & par-là eft en état de juger avec la dernière précifion de toutes fes variations ; on voit que le plan du cadre étant perpendicu- laire à l'horizon, & que l'Electromètre hauffant & baïflant dans un plan parallèle , l'élévation & labaiflement des ombres font toëjours proportionnels à ceux des Eleétro- mètres. Quant aux chaînes de métal 41, on imaginera aifé- ment qu'elles fervent à tranfmettre l'électricité de la barre

-de fer ou de tout autre corps électrique, aux Electromètres :

le cadre Q, au lieu des deux, fenêtres, pourroit n’en avoir

qu'une, cela fufhroit pour l'Eleétromètre ; mais comme j'ai

dit plus haut qu'il fert auffi d'inftrument, il falloit pouvoir I iïj

70 MÉMOIRES DE L’'ACADÉMIE ROYALE obferver au même inftant l'inftrument avec lequel on faifoit des expériences, &l'Electromètre, pour s'aflurer par ce dernier que l'électricité étoit toûjours la même, ce qui ne fe pouvoit faire qu'en raflemblant leurs ombres très-près l'une de l'autre.

On voit par la conftruétion de l'Eleétromètre, qu'il a les propriétés eflentielles à un inftrument de cette efpèce:

Car 1.” la force éleétrique étant trèsfoible ‘il faut un in£ trument très-mobile & fort fenfible ; aufli un poids de 8 grains pofé fur la petite plaque le fait-il baïfler de plus de 4 pouces.

2. La force éleétrique étant fort changeante, il faut un inftrument , lequel n’agiffant pas par faut, foit en état de donner à chaque inftant fes variations ; or l’inftrument ten- dant toûjours au repos, & n'étant foûtenu hors de cet état que par la répulfion des plaques, il baïifléra au même inftant que cette répulfion diminuéra, il hauflera de même au méme inftant qu'elle augmentera : l'evpérience nous a prouvé mille fois cette propriété de notre Eleétromètre, l'ayant toù- jours haufler & baifler à la moindre variation de la force, Enfin il eft univerfel, car on voit que le véritable Eleétro- mètre eft la verge cylindrique , qui détermine par lenombre de fes parties élevées au deflus du point de repos, la quan- tité de la force électrique: or il n'eft pas difficile d'avoir une verge cylindrique d'une ligne de diamètre. [ eft vrai que le diamètre de la petite plaque L, & fa diflance à la grande Æ au point de repos, peuvent produire quelques diffé- rences dans la répulfion, mais ïl eft facile d’obferver toutes ces proportions, de forte que tout le monde pourra faire un Electromètre qui s’élevera de la même quantité que le nôtre pour la même force électrique: cette propriété me paroît une des plus remarquables de notre inftrument ( femblable en cela au thermomètre de M. de Reaumur, que toute l'Eu- rope a adopté). Comme j'ai dit que notre Electromètre pou- voit tre employé comme inftrument , je vais, pour en donner une idée, rapporter quelques expériences que nous avons faites. Voulant découvrir f1 l'éleétricité eft comme la malle ou comme la furface des corps, nous nous y primes

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A D & SSL 1 'E Nu CLENSS FE de la manière fuivante. L'inftrument Æ fervoit d'Elero- mètre, l'autre / étoit deftiné pour faire l'expérience; au deflus de ce dernier étoit fufpendue perpendiculairement à une dif tance de 10 pouces une calotte portion de fphère PS: cette calotte étoit de fer battu, mais très-mince, & d'une figure fort régulière : elle recevoit l'électricité de la barre électrique par un fil d'archal; & fufpendue à des loies, elle la confervoit. La chaîne, qui dans la figure 2 communique aux deux inftrumens, ne communiquoit dans l'expérience qu'à l'Ele‘tromètre, de forte que l'inftrument n’étoit point éleétrique. Une perfonne obfervant fr le cadre la hauteur à laquelle l'edtricité avoit fait monter FElectromètre , une autre obfervoit l'élévation de l'inftrument; & plufieurs expé- riences réitérées nous ayant afluré que l'élévation de l'inftru ment étoit la même pour la même électricité (ce que notre Electromètre nous enfeignoit) on mit en écrit les hauteurs l'Electromètre & l'inftrument s’étoient élevés; cette expé- rience faite, on verfa dans cette calotte aflez de mercure pour que la mafle füt multipliée plus de foixante fois. On recom- mença l'expérience, fa même perfonne obfervant toujours lEle‘tromètre, pour s'affurer que la force électrique étoit Ja mème que dans l'expérience précédente, tandis que l'autre obfervoit la hauteur à laquelle l'inftrument s’'élevoit ; après avoir obfervé pendant un certain temps, nous trouvâmes que l'inftrument s’étoit élevé dans les deux expériences précilé- ment de la mème quantité, c'eft-à-dire, que le mercure n'avoit produit aucun effet, au moins apparent. Comme on peut fe tromper, & qu’on fe trompe en effet fouvent, nous avons répété cette expérience plus de cinquante fois, trou- vant toüjours la même chofe : ceci fembleroit indiquer que quant à l'attraction des corps éeétriques, elle eft comme les furfaces; mais la queftion n’eft pas décidée, car le feu & les: étincelles que l’on tire d'un corps électrique pourroient fuivre une autre loi. Il eft für qu'un morceau de métal quelconque doit avoir une certaine épaïfleur, pour que du côté du tranchant on en puiffe tirer des étincelles qui éclatent ;

M

72 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

fans cela, vous n'en tirez qu'une elpèce de feu qui refemble fort à celui que l'on tire du bois électrique, de quelque grof feur qu'il foit ; cependant fi lon tire des étincelles du milieu d'une plaque de tôle, ces étincelles feront très-fartes, & je puis dire que celles que l'on tiroit de la calotte avec ou fans mercure, ne paroifloient différer en aucune façon. Malgré que le plus moins de mafle dans tel ou tel corps en par- ticulier n’augmente ni ne diminue fon éledricité, on pourroit imaginer que l'augmentation de la male totale des corps élec- triques pourroit en général augmenter l'éleétricité; mais des expériences que j'ai faites, trop longues à rapporter, m'ont encore fait voir que cela ne change rien.

J'ajoûterai encore une expérience nous avons employé YElectromètre & l'inftrument, c'étoit pour favoir fi un corps tranfmettant l'électricité d'un corps éleétrique à un autre corps, lui en tranfmettoit toüjours la même quantité, de quelque volume qu'il füt. Tout difpofé comme dans la figure 2, excepté que l'inftrument avec lequel nous voulions faire notre expérience, au lieu de communiquer à la barre de fer par une chaîne, ÿ communiquoit par un fil de fer très-délié, nous életrifimes la barre de fer, & nous nous mimes à obferver l'Electromètre & l'inftrument ; après les avoir bien obfervés, nous cottämes leurs différentes hauteurs, enfuite nous fubftituâmes au fil délié un autre fil beaucoup plus gros; & obfervant de nouveau l'Eleétromètre & l'inf trument, nous ne trouvames pas le moindre changement : la même expérience, répétée plufieurs fois fur d’autres fils, nous a toüjours donné le même réfultat.

Les objections que lon peut faire contre notre Eleétro- mètre, font de trois fortes, contre fa füreté, fon univerfalité, & la manière de s’en fervir.

On demandera 1.” fi l'œuf qui trempe dans l'eau n’eft pas plus moins repouffé par le fond du vale, ce qui feroit que lElectromètre s’éleveroit tantôt plus, tantôt moins, fans que la force füt changée: je répondrai qu'un corps cntièrement plongé dans un fluide ne reçoit aucun

mouvement

DES SCiEeNCcESs. 7m mouvement par l'électricité ; c'eft un fait d'expérience.

On demandera 2.° fi les corps qui tranfmettent l'éleétri- cité à { Elettromètre, différant ou par leurs mafles ou pardeurs furfaces, ne produiront aucune erreur, ceft-à-dire, fi f Elec- tromètre ne donnera pas différentes hauteurs pour la même force électrique : l'expérience que j'ai rapportée il y a un inftant décide ‘la queftion, puifqu'elle fait voir. que des fils de fer de groffeur très-différente ont tranfmis la même quan- tité d'électricité. Il fuit de cette expérience, que l'électricité a la propriété des fluides, qui, par les loix de prefion, fe répandent toûjours également, quels que foïent les canaux de communication.

De plus, il fuit de cette propriété que le moindre chan- gement de l'électricité dans un corps compofant la mafie de ceux qui font électriques ; fe fait fentir également fur toute cette mafle, ce qui donne la folution d'une autre ob;ettion qu'on pourroit faire fur les vafes de verre que nous em- ployons pour foûtenir nos Eletromètres. On nous dira qu'é- tant plus ou moins fecs, ils pourroient perdre l'électricité &c faire baifier l'Electromètre, fans que l'électricité füt cependant changée dans les autres corps électriques ; mais par la pro- priété quæje viens de rapporter, il eft clair que fi un des fup- ports laiffé pafler l'électricité, la force diminuera également toutes parts, de forte que ce fera pofitivement comme ff on avoit une électricité moins forte: c'eft ce que les ‘faits nous ont prouvé nombre de fois d’une manière inconteftable.

Enfin on pourroit craindre, malgré ce que j'en ai dit, que Y'inftrument n'étant pas affez {enfible, il ne*fit tirer de faufles conféquences ; l'expérience fuivante fera évanouir cette idée.

La barre de fer qui reçoit l'éleétricité du globe, en fut. placée à une diftance de plus de 20 pouces : on établit enfuite “une communication entre cette barre & l'Flectromètre; &c » Ja chambre étant bien obfeurcie, on fe mit à élecrifer. L'électricité que la barre recevoit par ce moyen étoit fi foible, qu'à peine pouvoit-on reconnoître, en tâchant d'en tirer des étincelles, fi elle étoit électrique; & fi lon en tiroit, elles

Mém. 1749. . K

1". bd.

MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYyALE étoient fi foibles & fi peu fenfibles, qu'elles ne méritoient pas ce nom : malgré cela notre Electromètre; qui commu- niquoit avec la barre de fer, ne laïfla pas de s'élever de plus d'un degré; preuve certaine de fa fenfibilité, & qu'il donneroit des différences dans des expériences, cependant les forces ne différeroient que de la quantité dont la barre de fer étoit électrique : quoi qu'il en foit ; cette fenfibilité peut être encore augmentée en diminuant le diamètre de la verge.

La plus forte objection qu'on puifie faire contre l’univer- fuité de notre inftrument, eft la différente denfité de l’eau dans les différens climats: je réponds que faifant une verge qui defcende de 4 pouces pour 8 grains, on aura un Elec- tromètre qui donnera les mêmes degrés de l'électricité que le nôtre.” On pourroit objecter que dans un pays chaud une pareille verge feroit plus repouffée, puifqu'elle feroit plus

grofle que la nôtre; mais comme da verge n'eft repouflée * que par fa circonférence, on voit que cette addition de force fera peu fenfible; & de plus, que la répulfion de cette verge fera très-peu de chofe en comparaifon de celle de la plaque.

On pourroit dire encore que les diférentes pofitions de VElectromètre, par rapport au cadre & à la lanterne, chan- geroient les hauteurs apparentes; mais c'eft une ghofe qu'il eft facile de vérifier par l'expérience fuivante. Electro- mètre étant placé, & le tout arrangé comme pour faire des expériences, chargez la petite plaque de l'Eleétromètre de 8 grains, par exemple, & voyez de combien de degrés cela fait defcendre l'Eleétromètre fur le cadre; la fomme de ces degrés, comparée à celle qu'un même poids aura fait parcourir à un autre Eleétromètre fur lequel on aura fait la même expé- rience, donnera leur rapport précis. Malgré ce que je viens d'avancer, je ne me flatte pas que cet inftrument foit à fa plus grande perfection, peut-être même que d'habiles gens fichant que la chofe a été tentée & exécutée, tâcheront de Ra porter à un plus haut degré de juftefle.

- FT | 7 .

Mende L'40,8 des Se1749 lag. 74 PL 5."

gra del. et Seulp

D E SMS IC 1 E Nc Ets 75

BOZCOND MEMOIRE

SUROULES

REFRACTIONS ASTRONOMIQUES,

Obférvées dans la Zone Torride; avec diverfes remar- ques Jur la manière d'en conftruire les T'ables*,

244 . Par M BouGuER.

4 OO: étoit perfuadé en Europe, lorfque nous partimes pour | le Pérou, que les Réfractions aftronomiques devenoient

plus grandes à mefure que l'Obfervateur s'élevoit au deffus du niveau de la mer: ce ne froit pas aflez de dire que ce fentiment étoit prelque général , car il n’y avoit fur ce fujet qu'un feul avis, & perfonne ne penfoit à en douter. C'eft ce qui m'nvita à ne pas abandonner fi tôt l'examen des réfractions, après que j'eus reconnu qu'elles changeoient dans un fens contraire à celui qu'on avoit cru: je me propofois de mettre la vérité dans un plus grand jour, en même temps que je ne perdois pas de vüe les autres utilités que pouvoit avoir mon travail. Je vais rendre compte de mes dernières recherches au Pérou fur ce fujet, & je commencerai aufli à fatisfaire à un engagement que j'avois pris; je propoferai . des expédiens auffi exaéts que commodes pour conftruire es Tables anaclaftiques, en attendant que Îes obfervations que je fais de temps à autre en France depuis environ deux ans, me donnent ccafion de traiter cette matière

tous les moyens de calcul que nva fourni Ja folution ana- lytique que j'avois déjà donnée de ce problème dans une pièce publiée en 17209.

J'ai continué à renfermer ordinairement mes obfervations

‘#Le premier Mémoire eft dans le volume de 1739, re 407 & füive 1]

76 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

entre l'horizon & 12 deprés de hauteur; à plus forte raifon n'ai-je jamais entrepris de déterminer d'uné manière immé-. diate les réfraétions pour. les endroits du ciel voifins du zénith, comme quelques Aflronomes ont quelquelois tenté de le faire. Outre qu'il et difficile de s’aflurer de l'état d'une horloge à moins d'ung demi-feconde, & qu'on peut fe trom- per ailément de ce petit intervalle de temps dans chaque obfervation, l'on a encore plus à craindre de l'imperfection du quart-de-cercle lorfqu'on entreprend de mefurer de grands arcs : la difhiculté de caler & de difpoler l'inftrument fe fait peu fentir lorfqu'il s'agit des moindres hauteurs, au lieu qu'elle devient extrêmement nuïfible dans les autres occa- fions qu'elle fait perdre, ou qu'elle rend moins favorables. La moindre incertitude {& on y eft toüjours fujet) fur la latitude du lieu on obferve & fur la déclinaifon de l'aftre, empêche encore de tirer alors des condlufions füres : il eft certain qu'on ne peut pas, eu égard à tout, répondre de 1 s ou 20 fecondes. Or des opérations qui ne font pas fufcep- tibles de plus de précifion, font-elles propres à nous faire découvrir des quantités qui font prefque imperceptibles, & effectivement plus petites que les erreurs qu'on peut com- mettre ?

Il n’eft qu'une feule manière d'aflurer nos progrès en Aftro- nomie , c'eft de favoir proportionner nos recherches à l'exäc- titude des moyens que nous employons, c'eft de ne prendre pour objets de nos éxamens que ceux auxquels nous ‘pou- vons réellement atteindre. Lorfqu'on fe borne à ne déter- miner immédiatement que les feules réfraétions pour les moindres hauteurs, on peut toüjours fe tromper ; mais les erreurs, en es fuppofant les mêmes, fe trouvent relativement plus petites : cependant ces réfractions, affez grandes pour pouvoir être facilement obfervées, mettent en état de con- clurre celles qui appartiennent aux autres hauteurs, & qui échappent, par leur petiteffe, à toute l'adrefle des Obferva- teurs, de mème qu’à la délicatefle leurs inftrumens : neuf

u dix fecondes de différence fur les premières ne produifent

s

D EMA CI E NC ENS

aucun effet confidérable fur les dernières, lorfqu’on les infère des autres par le calcuk Enfin, ce qui prouve d'une manière inconteitable qu'on ne peut pas {e tromper en cherchant ainfr par induction les réfractions pour les grandes hauteurs, c'eft qu'on parvient toûjours fenfiblement aux mêmes réfultats, queique progreflion qu'on fuppole qu'elles fuivent, pourvû qu'on foit attentif à ne pas employer certaines hypothèfes qu'un examen même groffier du fujet montre qu'il faut exclurre, comme on le verra dans la fuite de ce Mémoire.

E

Réfrattions affronomiques obfervées en bas au niveau

de la Mer, à en haur dans la Cordelière.

Convaincu comme je l’étois qu'il falloit dans cette ma- tière faire tout dépendre des réfraétions pour les petites hau- teurs, j'ai en réitérer encore davantage les obfervations. Je defcendis vers la côte en 1740, pour déterminer la hau- teur abfolue de la Cordelière au deflus du niveau dela mer, comme je l'ai dit dans les Mémoires de 1744 & de 1745, & dans le livre de la Figure de la Terre. Je traverfai la Cor- delière occidentale, & je n''arrêtai dans une ifle de la rivière des Emeraudes, nommée alors l’ifle de l’/nca, mais appelée depuis ceMitemps-là l'ifle de l'Obférvatoire, qui eft environ 40 toiles au deffus du niveau de la mer: j'y avois une pen- dule toûjours réglée; & le Soleil ayant paru quelques foirs en fe couchant, j'en profitai pour l'obferver. Les réfractioné que trouvai, & que j'infère dans, la page fuivante, doivent étre un peu augmentées pour être réduites au niveau dela mer, & d'ailleurs rien ne m'aflure que j'aie obtenu les quantités moyennes ; ainfi , bienoïn d’être frappé paï les légères diffé- rences qu'il y a entre elles & celles qu'on voit dans la Table publiée en 1739, j'ai être fatisfait au contraire de trouver

fenfiblement la même chofe toutes les fois que les lieux dans

lefquels jobervois étoient à la même hauteur. : Ki

78 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

RÉFRACTIONS obfervées dans l'ifle de l'Inca, prefque au niveau de la mer.

HAUTEURS apparentes .

IP

7 derés. $ 30" le 3 Juillet.

6. le ON AA IE Peloiore A ON OE

Deux ans auparavant, au mois de Décembre 1 73 8, j'avois obfervé les réfractions dans un endroit 344 toiles plus haut que la Croix de Pitchincha, & qui eft élevé de 2388 toiles au deflus du niveau de fa mer ; c'étoit fur Chimboraço, ou précifément au bas de la neige dont tout le fommet de cette montagne, haute de 3217 toiles, eft continuellemehit couvert: je vis dans cet endroit non feulement le Soleil fe coucher, je.le vis confidérablement au defious de l'horizon. Je rap- porte ces oblervations / Voy. page fuiv.) telles que je les com- muniquai dans le temps à M. Godin : elles furent faites én prélence de M. de la Condamine, qui même y prit part, en regardant fouvent fur le limbe de mon quart-de-cerclé pendant que j'étois occupé à la lunéfte : fr on les compare avec celles de l'ifle de l'Inca ou de l'Obfervatoire dans la rivière des Emeraudes, on fentira tout d'un coup la grande différence qu'eft capable de produire lélévation de l'Obfer- vateur, lorfque du niveau de la mer il { tranfporte fur les plus hautes montagnes.

DE si c'y E N'c'e/s Obfervations faites & Chimboraço, 2 3 88 toifes

au deffus du niveau de la mer.

RCE TS EU ET ETS | ñ , LA RÉFRACTIONS HAUTEURS| RÉFRACTIONS aftronomiques,

HAUTEURS

| apparentes. apparentes. aftronomiques.

Le ee Te TT Te S Décembre 1738.

Décembre 1738.

BUS LADA 1403 20e 1 32ufûir BeN2A ETS 11.024 46.1etr4. j A2. 12e 4. 44 le 14 | À La 5 4. 20. le 15 of 78 9. le 13 se 43. le 13 20 VE. der SAME CEST DRE LT N34- 114 SAS" TS No. 2 Se MC TS EE 6. 59. le 13 es 6. 37. le 14 EVER

15

EDR Cu |34- 47. le 14 *

: = QE

Ces dernières obfervations fourniront encore le fujet d’une autre remarque qui paroitra très-digne d'atténtion, c'eft l'aug- mentation fubite de Ja réfraMon aftonomique par le paflage

_ du Soleil dans la moitié inférieure du ciel. La réfraction

n'étoit à l'horizon que de 19° 45", &-elle fe trouva de 34’

47" lorfque la dépreflion apparente étoit de 14 17’; elle

f trouva mème déjà de 30 minutes lorfque l’abaiffement apparent étoit d'un degré : quelque fingulier que paroifle cet eflet, il eft très-facile, lorfqu'on y penfe un peu, d'en découvrir la caufe. Si du haut d'uge montagne on regarde

8e MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

un aftre au deflous de Fhorizon, la réfraction aftronomique

fe trouve néceilairement compliquée, & il y en a une partie,

qui eft même très-grande, qu'on peut confidérer comme

réfraction purement terreltre. s Suppofé que la déprelfion apparente foit, par exemple,

d'un degré, le rayon viluel que je fuppole, pour la facilité

de l'explication, partir de l'œil pour aller à f'aflre qui paroït un degré au defous de l'horizon, fait en defcendant in.en- fiblement un très-long tra,et dans l'atmofphère : il fait une vingtaine de-lieues en s’approchant peu à peu de la Terre, avant que de devenir comme horizontal, comme tangente, ou à la Terie ou à quelqu'une des couches de l'amotphère qui nous £nvironne. Le rayon fait enfuite un trajet de même Jongueur en s'élevant, avant que de parvenir à la même incli- naifon, mais en fens contrane, d'un devré qu'il avoit en fortant de mon œil: or ce rayon doit, dans ce double trajet, fouffrir une tiès-grande courbine, & outre cela il doit encore fe courber au delà, en avançant vers les limites de l'atmo- fphère. Cette dernière flexion cit la réfrgétion aftronomique pour 1 degré de hauteur apparente; & fi on la zetranche des 30’ 1” tiouvées pour la réiraétion aftronomique qui appar- tint à 1 degré d'abailement, il viendra 1 6’ 7" pour la réfra- tion terieltre dont il a été queltion ; quantité qui paroît exceflive, mais qui le paroïîtra moins fi on fait atiention à la longueur du tra et, qui eft de plus de 40 lieues.

Tout ceci deviendra plés fenfible, fi l'on jette les yeux fui la figure 1. L'arc BD reprélente une partie de la cir- conférence de la* Terre, dont eft le centre : le point À eft le fommet d'une haute montagne, auquel vient {e rendre le rayon de lumière S #7 L G À qui part d'un aftre S qu'on voit au deflous de l'horizon À f; ce rayon, rendu courbe par la réfraction, frappe l'Obfervateur comme s’il fuivoit la ligne dreite Æ°A. L'angle de: la dépreffion appa- rente eft /AF, au lieu que l'abaiffement vrai et marqué par l'angle que forme l'horizontale À H avec une ligne droite SA, tirée de Faftre àgoœil, ligne qu'on peut, à caufe du

prodigieux

l

| } | ' U ÿ ; h

L %

4

.

D'E SMSUCTI'E Nc ESA 81 prodigieux éloignement de l'aftre, confondre avec S AZ, ou regarder comme parallèle à la portion S A7 du rayon, qui eft droit depuis l'aftre jufqu'à fon entrée dans l'atmofphère dans la matière réfractive. I eft vrai que S 47 étant pro- longée en ligne droite, bien loin de venir fe rendre à nous, doit pafler plus d’une demilieue ou trois quarts ‘de lieue par- deflus notre tête; mais cette quantité verticale ne foûtient

à J'aftre un angle fenfible, & cet angle n'eft guère à l'égard de la Lune que d'une feconde ou d’une feconde & demie: il faudroit donc, dans fa rigueur, augmenter la paral- laxe de cette planète vers l'horizon, puifque c’eft à peu près la même chofe que fi le femi-diamètre de la Terre étoit un peu plus grand. Lorfque T'ycho rendoit la réfraction aftro- nomique plus grande pour l4 Lune que pour les étoiles fixes, il faïoit tout le contraire, & il étoit bien éloigné d'obferver ce que nous difons ; car pour fuppléer à une augmentation dans la parallaxe , il faudroit diminuer à réfraétion, à caufe des effets contraires qu’elle produit fur la hauteur de l'aflre. Nous revenons à la réfraction aftronomique proprement dite : elle eft la fomme de toutes les petites courbures que fouffre le rayon en traverfant l'atmofphère; elle eft le changement de direction de la courbe AL A, décrite par le rayon de lumière. '

Ce que nous venons de dire convient aux réfraétions qui appartiennent aux dépreffions comme- aux hauteurs appa- rentes ; mais fi nous nous bornons à obferver du fommet A d'une montagne Faftre S lorfqu'l nous paroït un degré au deflous de l'horizon, il eft évident que la partie la plus bafle À G L du rayon eft égale de part & d'autre du point

G, qui eft abfolument le plus bas ou Îe plus voifin de la Terre; & que linclinaifon en L fera la même qu'en À, fr des points Z & À font également élevés. Il fuit de que ete au lieu d'être fitué en À, étoit placé en L

le chemin du rayon, & à la même hauteur au deflus du niveau de Ja mer que le point À, faftre S, au lieu de paroïtre un degré au deffous de l'horizon , : paroîtroit un degré Mém. 1749. . L

Fig. Le

Fig. 1.

82 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

au deflus; & la courbure foufferte par. la partie L M tra- verfant le haut de l'atmofphère, feroit la réfraction aftrono- mique qui appartiendroit à un degré de hauteur apparente.

- Cette réfraction fur Chimboraço eft de 13" 54", & elle eft égale à l'angle X N M que fait la direétion Æ L, qu'a le rayon en L, avec celle S AZ N qu'il a en 42 au haut de F'at- mofphère : mais le rayon foufire une feconde courbure depuis L jufqu'en À, & qui eft même plus confidérable que la première; elle eft de 1 6” 7", & exprimée par l'angle LE F que forment les deux tangentes dans les points À & L de la ligne courbe que trace le rayon : ainfr on voit clairement que la réfraction aftronomique pour un degré d'abaiffement apparent doit être plus grande que la réfraction aftronomique pour un degré de hauteur aufli apparente, de toute la cour- bure ou de toute la réfraction que fouffre le rayon dans le trajet L À en defcendant ou en s’approchant de la Terre depuis L jufqu'en G, & en s'élevant enfuite infenfiblement depuis G jufqu'en À. C'eft toûjours la même chofe lorfque l'Ob- fervateur eft placé dans un pofte très-élevé, & qu'il voit un aftre au deffous de l'horizon : la réfraétion aftronomique pour cette dépreffion apparente eft toüjours formée de deux parties, de la réfraétion aftronomique qui appartient à la hauteur appa- rente égale à la dépreffion, & outre cela de la réfraction ter- reftre que fouffre le rayon de lumière en parvenant prefque horizontalement à l'œil depuis l'autre point qui eft également élevé au deffus du niveau de la mer.

Si l'on prend le milieu entre les réfraétions pour un degré de hauteur & pour un degré de dépreflion, où, ce qui revient au même, fi l'on ajoûte à la réfraction aftronomique pour un degré de hauteur la moitié de la courbure que fouflre le rayon dans le trajet LA, il viendra 19° $7 ou 58", & il eft évident qu'on aura la courbure du rayon A7 L G, depuis Fentrée 41 dans latmofphère jufqu'au milieu de L A; & qu'ainfi on aura a réfraction aftronomique horizontale pour FObfervateur qui féroit placé en G : mais comme ce point G eft plus bas que le fommet À de 4 montagne, on ne doit

1!

B so LE NC EU, 8 point s'étonner fi cette même réfraction eft de quelques fécondes plus grande que la quantité moyenne 19° 45" que j'ai trouvée fur Chimboraço, lorfque l'aftre paroïfloit à l’ho- rizon. Ceci au contraire s'accorde avec toutes mes autres obfervations, {efquelles m'apprennent conftamment, comme on le voit, que plus on eft élevé au deflus de la furface de la mer, plus les réfraétions aftronomiques font petites.

Nous apercevrons plus aifément la manière graduée dont fe fait cette diminution, en nous bornant à la feule confidé: ration des réfraétions horizontales obfervées immédiatement dans différens poftes, ou déduites au moins d'obfervations faites fur des aftres très-peu élevés au deflus de l'horizon. Au niveau de la mer, la réfraction horizontale s’eft trouvée de 27 minutes; à Quito, qui eft élevé de 1479 toifes dans l'endroit j'obfervois, elle a été déterminée de 22° 50"; à la croix de Pitchincha, qui eft 565 toiles au deflus de la ville, & dont la hauteur abfolue eft de 2044 toiles, elle s'eft trouvée de 20° 48"; & fur Chimboraço, à la hau- teur de 2388 toiles, elle n'étoit que de 19° 45". Voilà un aflez grand nombre de termes connus pour qu’on puiffe cher- cher avec quelque efpérance de fuccès l'échelle que ces réfraétions fuivent dans leur diminution, & il eft certain que la Phyfique ne peut pas manquer, de même que l'Aftrono- mie, de profiter d’un pareil examen.

Si lon compare les quatre termes avec un peu d'atten- tion, on verra qu'ils font fenfiblement comme les racines carrées de Fexcès de $ 1 53 toifes fur la hauteur de chaque pofte au deffus du niveau de la mer, c'eft-à-dire, que pour trouver affez exactement dans la Zone torride la réfraction aftronomique horizontale pour tous les divers points de #at- mofphère, au moins pour tous ceux qui font acceffibles par le moyen des montagnes, il fuffit de faire cette fimple ana- ogie , la racine carrée de $158 toiles eft à 27 minutes, réfraction horizontale au niveau de la mer, comme la racine carrée de l'excès de 5158 toiles fur la hauteur du pofte propolé , fera à la réfraction horizontale requile.

Li

84 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE PE

Examen des hypothèfes propres à repréfenter dans la Zone torride les réfractions affronomiques pour le niveau de la mer, à pour les lieux diverfement élevés

au deflus.

Ce font autant les faits obfervés avec foin que les remar- ques purement fpéculatives qu'on trouvera dans la Pièce pu- bliée en 1729, & que j'ai déjà citée, qui m'ont fait décou- vrir l'analogie que je viens de rapporter, & dont on verra la raifon plus bas. Lorfque je tâchois de découvrir la nature des lignes courbes que décrivent les rayons de lumière en tra- verfant notre atmofphère, je n’avois de ce problème que . des folutions extrémement trop limitées, comme l’étoient toutes celles l'on fuppoloit que les couches de l'atmofphère font fenfiblement des furfaces planes : je ne connoiflois pas alors la folution que M. Taylor a mife à la fin de fon livre ÂMethodus incrementorum direla © inverla; mais la marche analytique qu'a fuivie ce favant Anglois eft tout-à-fait diffé- rente de la mienne, & il fe pourroit faire que la manière dont j'ai envifagé ce fujet fût plus propre à en aplanir toutes les difficultés, & à nous conduire plus loin. Après avoir réfolu le problème généralement, je me fuis arrèté à un cas particulier, mais qui eft encore affez étendu pour en renfer- mer une infinité d’autres : j'ai fait voir principalement que ft les dilatations de la matière qui caufe la réfration & qui eft répandue dans l'air, font proportionnelles à une puifflance quelconque des diftances au centre de la Terre, les réfrac- tions aftronomiques font toüjours une certaine partie du che- min que fait le rayon réduit à l'horizon , ou projeté par des lignes verticales fur la /circonférence de la Terre : il n'im- porte même que le raÿon de lumière foit horizontal ou in- cliné, ni qu'on le confidère en entier, ou qu'on n'examine qu'une de fes parties, pour que cette propriété ait lieu. Si le rayon eft incliné, il {era plus long, fuppolé que fon progrès

D E%S CG1E NC E,8 85 mefuré fur la circonférence de la Terre foit le même, ou qu'il foit intercepté entre les mêmes lignes verticales ; mais fi le rayon eft plus long, & s’il doit, à caufe de fa longueur, fouffrir une plus grande courbure, il rencontre d’un autre côté les couches de latmofphère fous de plus grands angles, ce qui fait une compenfation exacte à l'égard de la réfrac- tion, laquelle eft toûjours la même partie du trajet horizon- tal, & une partie qui dépend du degré de la parabole qui

marque les dilatations. Le - En général, fi l'on défigne les dilatations de la matière réfraétive en chaque endroit de 'atmofphère par 7, & par y les diftances au centre dela Terre, & que z doive être élevée à la puiflance #1 pour fe trouver proportionnelle à }, qu'on _ aitg” —}y; pour l'équation de toutes les paraboles qui peu- vent#marquer l'état de la matière réfraétive, ül faudra divifer | continuellement le progrès horizontal des rayons par pour » avoir la quantité de leur réfraction ou de leur courbure. La propofition étant générale, elle convient aux parties d'en haut du rayon comme à celles d'en bas, & il n'importe que le rayon . vienne fe rendre à la Terre, ou qu'il pale à une élévation confi- dérable au deflus. Je pourrois renvoyer à la pièce citée, pour la démonftration de ce théorème, dont on peut faire un grand ufage ; mais j'ai cru que je devois, pour la fatisfaction des lecteurs, l'établir derechef, & je le puis faire d’une manière plus directe, &, fi cela fe peut dire, plus élégante que celle que j'avois employée. Toutes les fois qu'on parvient par de longs circuits à des propofitions très-fimples , il doit y avoir d'autres chemins qui y conduifent : il n'eft pas poffible qu'une vérité qui fe réduit à des rapports peu compliqués , ne foit pas fufceptible d’une démonttration très-courte. La circonférence de la Terre eft repréfentée par 40, dont Ceft le centre. D N repréfente la furface fupérieure de l'atmofphère; l'air ou la matière réfradtive peut. s'étendre beaucoup plus loin, mais cette matière ne produifant plus. haut que des effets infenfbles pour nous, nous pouvons la . confidérer comme non exiftente au deflus de cette furface : L ii

nm sf

ce

Sn nd de

dur,

F

Fig. 2.

Fig. 2.

86. MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE

{es dilatations en chaque endroit des couches fphériques AO, FP, D N, font exprimées par les ordonnées AB, FG, D1 de la courbe B G 1, dont la verticale C D eft Yaxe.: NH fe pourroit.fort bien faire qu'il n’y eût point de matière réfrac- tive, & que les réfractions répondiffent , non pas aux dilata- tions de l'air groffier, mais à une certaine fonction de ces dilatations que notre courbe BG J repréfentt. Ce féroit toûjours la même chole pour nous + nous ferions même tentés d'admettre cette feconde hypothèle, mais nous continuerons néanmoins à défigner fous le nom de matière réfractive cette fonction que nous ne connoïflons pas affez, des dilatations ou denfités de l'air groflier. En un mot, les ordonnées de la courbe B G 7 que nous ne confidérons qu'en général, & que nous ne prenons point encore pour une parabole, marquent le rapport du finus d'incidence & du finus de réfraétion, lorfque le rayon de lumière paffe d'une couche’ fphérique à celle qui eft immédiatément au deflous.

Le rayon de lumière N P À fait en Pavec la verticale PC l'angle C P L,, cet angle eft celui d'incidence ; mais le rayon fe courbant en P à caufe de l'augmentation continuelle de denfité que reçoit le milieu à mefure que fes couches font plus voifines de la Terre, ce rayon fuit la direétion P7, & fa cotrbure, ou a réfraction aftronomique, eft marquée par Vangle L PI Or fi on abaiïfle du centre C les perpendicu- laires L & C1 fur les deux différentes direftions confécu- tives du rayon, ces perpendiculaires feront proportionnelles aux ordonnées correfpondantes FG & f3 de la courbe B G1. On pourra dire la même chofe de tous les autres points de la Solaire courbe tracée par le rayon de lumière; &c il fuit de que les perpendiculaires CL, C M, &c. abaifées du centre de la T'erre fur les tangentes à la courbe décrite par le rayon, font continuellement proportionnelles aux ordonnées FG, AB, &ec. de la courbe des dilatations de la matière réfrattive: c’eft ce que j'avois pris pour lemme en 1729, & ce qui nous en fervira encore ici.

Je ne me contente pas de confidérer les perpendiculaires

‘ont SMS Cr « NT c ENS 87 CM,CI, CL, &c. comme proportionnelles aux ordonnées AB, fg, FG, &c. je les fuppofe exactement égales les unes aux autres. Cette fuppofition doit être toûjours permife, puifque rien n'empèche de faire augmenter ou diminuer proportionnellement toutes les ordonnées de Ja courbe B G Z. Je fais attention après cela que le petit angle L P H que forment deux tangentes confécutives en chaque point P, & qui eft l'élément de la réfraction aftronomique, dépend de deux chofes, de la longueur de P £ qui lui fert de côté, & de la grandeur de L H qui le foûtient, & qui eft égale à GW, puifque L & C]J font égales à FG & fg. On peut expri-

mer ce petit angle par

LH GW L | À FL 57 au lieu que le petit

angle PCp qui répond à larc Æe, progrès horizontal de

. . ; ainfr, pour décou- ?

vrir Le rapport qu'il y a entre la réfraction que foufre Je rayon de lumièrefen parcourant la partie infiniment petite Pp de fa courbe, & le progrès horizontal £'e, ou le petit angle PCp, nous n'avons qu'à chercher le rapport qu'il y a entre

la Solaire, doit être exprimé par

les deux factions . & Le.

Je remarque d’abord que Îe rapport entre les deux frac- tions ne changera pas, fi on les augmente ou diminue pro-

É: portionnellement. Qu'au lieu de divifer la petite ligne GW

cWw cw | IT Eten dE Ra première fraction fe trouvera changée felon le rapport de LC à PL; mais qu'au lieu de divifer pS par pC pour

: , je prenne PS pour la divifer toüjours par pC,

par P L je la divife par LC, j'aurai

avoir SL LPS / jaurai & Ia feconde fraétion fe trouvera auffi changée

dans la raifon de LC à PL, puifque le grand triangle C L P & le petit p S P font femblables. Aiïnfi la réfraction aftro- nomique & le progrès horizontal qui étoient exprimés par

88 MÉMoIRESs DE L'ACADÉMIE RoÿALE

ru cW ps Axe |

les frations ——— & PAL le peuvent être également par PS cw f

ces«deux autres ——— & PT LT & ———, quand

on fe borne à leur rapport. Enfin, fi l'on tire par le point G de la courbe des dilatations de la matière réfractive la tan- gente GQ, jufqu'à ce qu'elle vienne rencontrer la verticale DC qui fert d'axe à cette courbe, on pourra fubflituer à cw Ff SF cette autre G égale: il y aura donc éncore même rapport entre la petite courbure que foufire le rayon de lumière & fon progrès ré- EP FQ tions qui ont même numérateur, font lune à l'autre en raifon inverfe de leurs dénominateurs; elles font entr'elles comme FC'eftà FQ, & il fuit delà qué les deux élémens que nous examinons font auflr comme ces deux lignes, c'eft-à-dire, qu'en général ls petits angles dont la réfration affronomique eff compofee , ou qui lui fervent d'élémens, Jont continuellement aux progrès réduits à l'horigon du rayon de lumière, comme les abfaffes FC de la courbe des dilatations de la matière réfrac- tive font aux fous-tangentes correfpondantes F Q.

Il eft encore une autre quantité dont la confidération eft importante, & qui fuit une loi très-fimple que nous pou- vons découvrir aifément ; c’eft le changement d’inclinaifon du rayon de lumière par rapport aux verticales qu'il coupe fucceffivement, le changement que foufire l'angle P L en devenant C 4 A, lorfque le rayon avance vers nous. Si la courbe B 7 des dilatations de la matière réfraétive eft donnée, l'angle de finclinaifon de la Solaire le fera auffi pour chaque diflance PC au centre de la Terre, puifqu'il fufhra, pour avoir cet angle, de former un triangle rectangle CPL, dont Fhypoténufe CP fera connue de même que le côté C L: ces deux lignes font égales à l'abfcifle & à l'ordonnée correfpondantes de fa courbe des dilatations. Lorfque l'angle

élémentaire

la place de la fraction

qui lui eft

- A L e L F duit à l'horizon, qu'entre & ne Or ces deux frac-

"2

Lo) SM LE NS GET 89 * INR LP] de la réfraction eft exaétement égal au petit angle PC p qui exprime Îa grandeur du progrès horizontal, la Solaire fait un angle conftant avec les verticales P C, pC, & le changement de l'angle d'inclinaifon eft abfolument nul; mais f1 les deux angles L P/ & PC p ne font pas égaux, le changement d'inclinaifon fera égal à leur différence. Ainfi puifque le rapport des deux petits angles L P/ & PCp eft continuellement exprimé par les ablcifles FC & les foûtangentes ÆQ de la courbe des dilatations, le change- ment infiniment petit d'inclinaifon de la sobre par rapport aux verticales, doit être exprimé en même temps par CQ, partie de l'axe de la courbe des dilatations, interceptée entre le centre C & la tangente G Q.

C'eft une propriété des paraboles de tous les genres, que dans tous les points de la courbe, le rapport entre les abfcifes, les foûtangentes & les lignes C Q eft conftant. IA fuit de que dans ha multitude infinie différentes hypothèfes que peuvent repréfenter toutes ces lignes courbes, les élémens que nous venons de confidérer font continuellement propor- tionnels , & par conféquent les quantités fenfibles qu'ils for- ment par {eur addition continuelle, doivent conferver auffr toûjours le même rapport. Que la courbe Z Z foit donc une parabole ordinaire ou d'un degré quelconque #1, la courbure ou la réfraction que fouffrira “la Solaire dans chaque partie de fon trajet N P ou PA, fera à fon progrès réduit à l’ho- xizon ou aux arcs O E, E À, dans un rapport conftant ; ce rapport fera égal à celui des abfciffes & des foûtangentes de la courbe B /: on aura pour les expofans de ce même rapport, l'unité & "m, & le changement d’inclinaïfon fera exprimé en mème temps par #— 1.

. H doit être felon cela très-facile de confhruire la Solaire ou a courbe tracée par le rayon de lumière. La longueur des verti- çales CN, CP, &c. étant donnée, l'indiinaifon du rayon par rapport à ces verticales le fera également, comme nous l'avons déjà vu : le changement d’inclinaifon {era donc auffi donné. : » Ce changement, fi nous confidérons la courbe entière À N

Mém. 1749: . M

Fig. 2.

90 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

tracée par le rayon de lumière, fera la différence entre l'angle CA M du complément de la hauteur apparente de l'aftre, & l'angle CN K qui eft l'inclinaifon qu'a le rayon, eu égard à la verticale CN, lorfqu'il entre dans l'atmofphère. Les finus de ces deux angles ont un rapport conftant; ils font toûjours Jun à l'autre, dans toutes les hypothèfes imaginables. en raifon directe de B A & de ZD, & en raifon inverfe de AC & de NC: or la différence entre ces angles étant trouvée, il ne refte plus, fi la courbe B 7 des dilatations eft une para- bole du degré », qu'à faire cette fimple analogie ; m-— x eft à m comme le changement d’inclinaifon eft à l'arc O Æ, ou O À de la circonférence de la Terre , intercepté entre les verticales; & il n'y aura qu'à multiplier le même changement

,. ÊTRE L . | d'indlinailon par ——— pour avoir la réfraétion ou la cour-

bure du rayon.

On réuflira de cette forte à fe former une fuite infinie de lignes courbes, qui jouiront de cette propriété fingulière, que la courbure de chacun de leurs arcs 4 P ou P N aura un rapport conftant avec l'angle AC P ou PCN, que cet arc foûtient au point ©: La Géométrie élémentaire nous apprend que le cercle tient lieu de deux de ces lignes courbes. La courbure de ces arcs eft égale aux angles qu'ils foûtien- nent, ou en eft double, felon que ces angles ont leur pointe au centre, ou à la circonférence ; mais dans le premier cas le cercle ne doit être regardé que comme une logarithmique fpirale. Les paraboles ordinaires nous préfentent encore une de nos lignes, celle dont la courbure des arcs eft la moitié des angles qu’ils foûtiennent au foyer ; mais nous pouvons deformais tracer une infinité d’autres courbes dans lefquelles on mettra un rapport conftant, & quel rapport on voudra, entre la courbure des arcs & les angles qu’ils foûtiennent; & toutes ces courbes À !V qui auront chacune une parabole B 7 d'un certain degré pour génératrice, feront géométriques auffi-tôt que le rapport propolé fera de nombre à nombre, pourvû

qu'on excepte le rapport d'égalité; car dans ce dernier cas

( DES SCIENCES. o1 les courbes cherchées deviendroient des logarithmiques fpi- Tales, comme on le fait d'ailleurs, & comme on le verra dans un inftant.

Suppolé qu'on élève aux points P des perpendiculaires à la courbe 4 N, & que ces perpendiculaires deviennent les hypoténules des triangles rectangles en C qu'on achevera, on démontrera aïfément que ces perpendiculaires ou hypo- ténufes auront encore un rapport donné avec les rayons des cercles ofculateurs au point ?; & que la füite infinie des lignes courbes À AN n'en comprendra que de géométriques , fi le rapport des perpendiculaires & des rayons des cercles ofeula-

“teurs eff rationnel, pourvû que ces lignes ne foient pas égales ;

les perpendiculaires feront continuellement aux fecondes lignes comme les abicifles FC aux foûtangentes Æ Q de la géné- ratrice B 1.

I ne fera pas plus difficile de réduire 1e même problème à la quadrature des courbes , lorfque B Z ne fera Pas portion d'une parabole d'un degré plus moins élevé, mais une courbe quelconque donnée. Si les changemens d'indinaifons

‘de la Solaire font exprimés par des arcs d'un cercle qui ait

pour rayon le rayon de la Terre, il n'y aura qu'à prendre fur une ligne droite Xdes parties égales à ces arcs. Les parties ‘infiniment petites Vw de cette même ligne droite répon- dront aux changemens infiniment petits d’inclinaifons de {a Solaire ; & fi on élève à chaque point } une perpendicu-

Jaire VZ qui foit évale à a _ ; & qu'on faffe pañer une ligne courbe par tous les points Z, l'aire des petits

QFxCA

rectangles élémentaires Zv, fera xVo,; &fi

Lie j F k on divile cette aire par C À, on aura = x Va, qui eft

Ja valeur du progrès horizontal infiniment petit £e, à caufe

de l'analogie continuelle que forment C Q & Ia loütangente

de la courbe des dilatations d’une part, & de lautie le

changement d'inclinaifon Vw de fa Solaire & le progrès M ji

Fig, 2,

Fig. 2.

2 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE 2: 2er ÆEe meluré fur la circonférence de la Terre. Ainfi en divifant la fomme des rectangles élémentaires, ou les qua- drilatères curvilignes finis Z 4, À X, par le femi-diamètre CA, on aura les progrès horizontaux O £, O À, qui font d'une grandeur fenfible.

Il feroit inutile de nous occuper plus Jlong-temps de ces recherches abftraites ou générales, nous allons examiner les chofes de plus près, en tâchant de les confidérer dans leur état actuel ou phyfique. La première remarque qui fe pré- fentera à nous, c'eft que la courbure de la Solaire, ou des rayons de lumière qui nous viennent des aftres, eft toüjours renfermée dans des limites fort étroites. Ces rayons traver- fent notre atmofphère dans toutes fortes de fens, & ne for- ment jamais de courbes rentrantes, ce qui donne l’éxclufion à une infinité de différentes hypothèfes, & montre que la Nature a pris foin de ne répandre que très-peu d’inégalité dans les denfités de la matière réfraétive. Si les dilatations croiffoient comme les carrés des diftances au centre de la Terre, ou fi la courbe B 7 / Fig. 3.) étoit un arc de parabole ordinaire dont C füt le fommet, & D C la tangente, les abfciffes À C feroient doubles des foûtangentes 4 Q ; & par conféquent la réfraction aftronomique, au lieu d’être moindre que le progrès horizontal, feroit au contraire deux fois plus grande. C’eft dans ce cas que la Solaire feroit un arc de cercle, & le centre du cercle feroit fitué fur la perpendiculaire Q W, au milieu de À C ; la réfraétion ou la courbure de chaque Solaire À N feroit exprimée par toute la grandeur de cet arc, au lieu que le progrès horizontal 40, ou l'angle ACN, n'auroit pour mefure que la moitié du même arc A N. On voit bien qu'une pareille hypothèfe rendroit la courbure des rayons exceflive, principalement vers lhorizon : un rayon vifuel horizontal, au lieu d'être une ligne très-peu différente de la droïte, deviendroit, s’il ne trouvoit aueun obftacle, un cercle À R CS qui pafferoit par le centre de la Terre.

On voit donc que ceux d’entre les Phyficiens qui ont cru que les finus d'incidence & de réfraétion fuivoient le rapport

js de 5

$

2

*

NT PE FU.

EUSUNO IC 1 EN: QUES 93 des dilatations ou des denfités de fair groffier , n'avoient pas affez examiné ce fujet. Bien loin que les dilatations de la matière réfractive augmentent dans un auf grand rapport, il eft certain qu'elles n’augmentent pas même felon la raifon

. fimple des diftances au centre de Ja Terre, c'eft-à-dire, que

fi l'on pañle du niveau de la mer fur le fommet d'une mon- tagne élevée, par exemple, de Ja millième partie du rayon de la Terre, il s'en faudra beaucoup que la différence des dilata- tions de la matière réfraétive foit d’une millième partie, & elle fera même beaucoup plus petite. Si les dilatations fuivoient le rapport des diflances, l'équation générale 7m y, fe changeroit en 7 y, l'expofant » deviendroit égal à unité, & la courbure des rayons de lumière fe trouveroit égale à leur progrès horizontal ; le changement d’indlinaifon qui eft pro- portionnel à m— 1 deviendroit nul; chaque rayon feroit le même angle avec toutes les différentes verticales qu'il ren- contreroit, & ü fuivroit toûjours exaétement une logarithmi- que fpirale en traverfant l'atmofphère. Or il en réfulteroit un inconvénient femblable à celui que nous avons déjà trouvé: nous ne verrions jamais les afres à l'horizon; car les loga- rithmiques fpirales qu’on rend perpendiculaires aux verticales ou aux lignes droites tirées de leur pole, qui eff ici le cen- tre de la Terre, fe changeroïent en cercles exa@ts. Ainfi, fi cette hypothèfe avoit lieu, & fuppolé que Fair füt affez diaphane & qu'on Ôtât tous les autres obftacles, lorfqu'un Oblervateur jetteroit les yeux vers l'horizon, fa vûüe ne s'éle- veroit pas, elle fouffriroit trop de réfraction ; elle s’étendroit circulairement tout autour de la Terre, & elle ne feroit bornée que par l'Obfervateur même, qui fe verroit le dos.

On doit rejetter à plus forte raifon toutes les autres hy- pothèfes qui fuppofent l'augmentation des dilatations encore

plus grande, puifqu'elles rendroïent les rayons de lumière -encore plus courbes, & que nous nous trouverions continuelle-

ment privés du fpeétacle que nous offre le ciel, fi l'on ex-

cépte la partie qui eft vers le zénith. Suppolé que les dilata-

tions n'augmentafient que comme les racines carrées des M ii

Fig.

Fig. 2.

94 MÉMOIRES DE L’'ACADÉMIE ROYALE

diftances au centre de la Térre, ou environ deux fois moins à proportion que ces diflances, la courbe 2 Z fe oit un are de parabole ordinaire dont le point C feroit le fommet, & DC l'axe, les réfraétions feroient alors deux fois moindres qué le

progrès horizontal de chaque rayon. Dans ce cas, les So/aires .

AN feroient aufli des arcs de parabole dont le point © {e- roit le foyer ; car c'eft une propriété de ces lignes courbes, comme nous l'avons déjà dit, que la courbure de leurs dif- férens arcs À N, elt la moitié des angles AC N qu'ils fou- tiennent au foyer €. Mais la courbure feroit encore beaucoup trop grande pour repréfenter, même groffièrement, les cir- conftances du phénomène.

Nous devons aufii re;etter une infinité d’autres hypothèfes

ui font formées contre toutes les règles, mais dans un autre fens. On fuppofe, par exemple, que les rayons de lumière fuivent une certaine courbure déterminée, & on n’a pas exa- miné sil falloit même loi pour faire décrire aux rayons ces lignes courbes, lorfque l'aftre étoit proche de l'horizon , & lorfqu'il étoit élevé. Il eft clair qu'en fe difpenfant d'entrer dans cet examen, on a attribuer fans y penfer des états très-différens à la matière réfractive, Jorfqu'on devoit le fup- pofer abfolument le même: on a péché contre l'unité d’hy- pothèfe. Si ia Solaire À N / Fig. 3.) eft un arc de cercle dont le centre eft fur la droite Q W, cette Solaire dépend d'un arc B 1 de parabole ordinaire, dont le fommet eft en ©, & dont DC eft la tangente; mais fi lon fuppofe en même temps qu'une autre Solaire, toûjours arc de cercle, n’a pas fon centre fur Q W la courbe B 7 des dilatations fera bien toûjours une parabole, mais fon fommet ne fera plus en €, ce qui rendroit la loi des dilatations toute différente; & la différence pourroit être {1 grande qu'elle ne füt pas tolérable.

Nous n'infiftons pas davantage fur la manière de donner lexclufion aux hypothèfes peu exactes: il fufht de confidérer que l'augmentation des dilatations eft extrêmement petite, & que néanmoins elle eft réelle, & qu'il n'eft pas permis de la

fuppoler nulle. L'ordonnée D Z n'eft plus grande que 42

D''ÉUsS SCT. E Nc: 95 que de très-peu, mais elle eft plus grande, puifque les rayons de lumière ne font pas parfaitement droits, & qu'ils {ont courbes fur toute leur longueur. On eft malgré cela peu gêné dans le choix qu'il faut faire d’une hypothèfe: pourvü qu’on ne {€ ferve pas de celles qui fatisfont trop mal aux faits les plus fimples , toutes les autres fe trouveront d’une exactitude fufffante , fi on ne les applique principalement qu'aux feules réfraétions pour les grandes hauteurs, & qu'on n'entreprenne de déterminer les réfractions proche de l'horizon, que par le fecours des obfervations immédiates. Enfin, quelle que foit la courbe dont B J eft une portion, l'arc 2 Z {era toüjours prefque droit, & très-court, à caufe du peu d'épaiffeur de l'atmofphère; c’eft pourquoi on peut le confondre avec un petit arc de parabole, & cet arc appartiendra à une parabole d'un degré plus ou moins éevé, felon qu'il approchera plus ou moins d'être parallèle à la verticale À C; prolongeant 2 jufqu'en Q, le rapport de 4 Q à AC marquera le genre de la parabole. Nous favons déjà que la foûtangente À Q ne doit pas être moindre que À C, ni égale, & que ce ne feroit pas affez qu'elle fût double; mais À Q étant fept à huit fois plus grande que AC, les réfrations ou les courbures des rayons deviendront fept à huit fois plus petites que la longueur de leur trajet projeté fur la circonférence de 1a Terre, & alors on ne fera plus guère éloigné du vrai.

Toutes ces chofés étant fuppolées, nous pouvons repré- {enter avec facilité non feulement les réfraétions aftronomi- ques pour tous les endroits qui font au niveau de la mer , mais aufli pour ceux qui font à une grande élévation au deffus. Puifque les rayons de lumière ne reçoivent que très- peu de courbure, on peut confondre leur longueur avec celle de leur tangente ou celle de leur corde, & on peut outre cela, fi ces rayons font horizontaux, négliger la différence qu'il y a entre leur longueur & leur progrès horizontal, me- furé fur la circonférence de la Terre, à caufe du peu de Tapport qu'il y a entre la hauteur des montagnes les plus élevées & le femi-diamètre de notre globe. Aiïnfi on voit

Fig. 2.

Fig. 2.

96 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

évidemment que les réfractions aftronomiques horizontales pour les lieux plus ou moins hauts doivent être, à très-peu près, proportionnelles à la longueur des lignes droites tirées horizontalement depuis l'œil de l'Oblervateur jufqu'aux con- fins de Fatmofphère, ou de la matière réfraétive ; & elles doivent en même temps, à caufe de la propriété du cercle, fuivre fenfiblement le même rapport que les racines carrées des finus verfes, ou des diftances de l'Obfervateur au haut de la matière réfractive. Les $ 1 58 toiles dont nous parlions à la fin du premier article, lorfque nous comparions les réfrac- tions horizontales obfervées au bord de la mer & dans des pofes très-élevés, comme Pitchincha & Chimboraço, n'é- toient donc autre chofe que la hauteur jufqu'à laquelle la matière réfractive produit des effets fenfibles. L'accord qui {e trouve ici entre la théorie & les obfervations, montre affez que fi nous avons fait différentes fuppofitions qui ne font pas abfolument vraies, & que fi tout ce que nous avançons aétuel- lement n’eft pas d'une précifion rigoureule , on peut néan- moins, dans une infinité de rencontres, fe fervir des règles que nous propolons , & rien n'empêche d'en étendre lufage juf- qu'aux réfractions qui appartiennent à toutes les hauteurs appa- rentes des aftres.

En quelque endroit de l'atmofphère que foit placé FOb- fervateur, on n'a qu'à tirer de fon œil jufqu'aux limites de la matière réfractive une ligne droite qui faffe avec l'horizon un angle égal à celui de la hauteur apparente propolée; ou, pour plus d'exaétitude, il n'y a qu'à diminuer cet angle d'en- viron la moitié de la réfraction, qui eft toujours affez connue d'avance; après cela la réfraction fera proportionnelle non pas à la longueur de cette ligne, mais à la longueur de fa projection fur la circonférence de la Terre, ou à l'angle qu'elle foûtient au centre.

Suppolé que B D E foit la circonférence de la Terre, & GNH la furface fupérieure de la matière réfraétive élevée de BG, qui eft d'environ $ 1 58 toifes dans la zone torride; fuppofé de plus que l'Obfervateur foit en À, il n'y aura qu'à

conduire

D.

h

Pin" Cr La Li

D\ESWMSR OUT EMN'IC (ENS)

97 conduire les lignes droites À N, A», en diminuant de la

moitié des réfractions les angles de hauteurs apparentes VA A, n À H, comme nous en avons averti; & les arcs BP À & B qui font les projections de ces rayons fur la circonférence de la Terre, auront enfuite fenfiblement entr'eux les mêmes rapports que les réfraétions aftronomiques : ces arcs feront aux réfractions comme le degré de Ja parabole qui exprime les dilatations eft à Vunité: aïinfi il fuffhra de connoître 1, ou de connoître une des réfractions, pour avoir toutes les autres, & cela par un calcul extrèmement fimple ; il faudra feulement être attentif à ne pas conclurre les grandes réfrac- tions par les petites, mais à inférer au contraire les petites de lobfervation des grandes.

Si l'on compare la réfration aftronomique , obfervée lorf- .

e l'aftre eft à l'horizon, avec la longueur de 4 A, ou avec l'arc B D, on apprendra que "= eft à peu près 7. On doit remarquer aufli que: le peu d'épaifleur 2 G que nous attri- buons à la matière réfraétive, ne fait pas qu'on néglige abfo- lument la réfraction que caufent vrai-femblablement les couches plus hautes de l’atmofphère. Si lon place trop bas tirhce GA, onrend trop court, ïl eft vrai, le trajet de tous les-rayons dans la matière réfraétive; mais on fait, par une. conféquence néceffaire , la réfraction aftronomique une plus grande partie de ce même trajet, ou du progrès hori- zontal, ce qui produit une efpèce de compenfation : on

charge chaque rayon 4 N fur une longueur moins grande,

de toute la courbure à laquelle il eft fujet fur un cours effec- tivement plus long; c'eft pourquoi on peut foupçonner que

la valeur de m que nous venons de marquer eft réellement

un peu trop petite. On pourra marquer affez exactement par le même moyen

la route que fuivent les rayons du Soleil dans l'ombre de {a

Terre, après qu'ils fe font rompus dans l'atmofphère; ce qui peut devenir de quelque utilité dans la détérmination des éclipfes de Lune. On à fouvent mal indiqué dans les livres

d'Afronomie le chemin que prennent ces rayons, & on n'a

* Mém. 1749. ° N

Fig. 4

8 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE pas diflingué afiez parfaitement les limites de Ja pénombre: Les rayons du Soleil qui paflent trop loin, ou à plus de 5158 toiles de diftance de nous, fouffrent une réfraction que nous ne connoiflons pas, & que nous pouvons négliger à caufe de fa petitefle : nous pouvons fuppofer que ces rayons paflent en ligne droite : ceux qui rafent prelque la furface de la Terre, doivent fe courber du double de la réfration aftronomique horizontale; ils doivent, dans fa zone torride, fe courber de $4 minutes; & à l'égard des autres, ils doivent . fouffrir des réfraétions ou des courbures fenfiblement pro- portionnelles à la longueur des cordes qu'ils parcourent dans la matière réfractive. |

Outre la méthode que je viens d'indiquer, & dont je me fuis fervi pour déterminer la valeur de », il y en a d’autres dont j'ai pu faire ufage au Pérou, & même en me difpenfant de confulter le ciel. IL fuffit, lorfqu'on monte fur les montagnes, de mefurer réciproquement leurs angles de hauteur & de dépreflion, & de comparer ces angles avec la longueur du rayon vifuel; mais pour que cette méthode réuflifle, il eft à propos que le rayon fe rende d’un fommet à l'autre, en pañfant à une grande hauteur au deflus de tous les endroits intermédiaires, & qu'il foit outre cela le moins horizontal qu'il eft poffble, afm qu'il fafle un plus grand angle avec les couches de l'atmofphère qu'il pénètre, ce qui le garantit des réfractions irrégulières. J'avois déjà employé, pour parvenir à cette détermination, dans les Mémoires de 1739, les angles de hauteur obfervé à Carabourou, & de dépreffion oblervé à la croix de Pitchincha : il me man- quoit de mieux connoître quelques élémens, & principale- ment l'amplitude de l'arc de grand cercle intercepté fur la furface de la Terre entre les deux poftes. La diftance hori- zontale de lun à l'autre eft de 109 5 2 toifes : elle vaut 11° 294"; & comme la différence d'inclinaifon fe trouva moindre, & ne fut que de 10° 2”, c'eft une marque que le rayon {ouflrit une réfraction de 272". I ne refle plus done qu'à divifer par cette dernière quantité le. trajet horizontal

D'ENSMMRE Tr E NiciEs | 31 292", pour avoir immédiatement la valeur de »; ï vient 7 +, ce qui ne s'accorde pas parfaitement avec la pre- mière détermination, qui avoit donné 7£, mais ce qui s'ac- corde avec la conjecture que nous avions faite, que cette valeur de 1 étoit un peu trop petite. Mais il eft très-naturel de pener auffi que la courbe des dilatations n'eft pas préci- fément une parabole, quoique d'un degré élevé; le rapport entre fes fous-tangentes & fes abciffes n’eft pas abfolument conftant , & fans doute que les fous-tangentes augmentent un peu plus à proportion que les abfcifles, à mefwre que l’on con- fidère des points plus hauts dans l’atmofphère. Cette remarque fe trouve confirmée par le réfultat que m'a fourni une troifième manière de déterminer la valeur de m, que je dois également à Îa rencontre des montagnes, mais qui eft fondée fur les feules obfervations aftronomiques. On eft obligé, dans les pays on ne trouve que des plaines, + d'avoir recours à quelque efpèce de tâtonnement ou d'appro- __ ximation pour découvrir le genre de la parabole qui marque e Fétat de la matière réfractive: on ne peut, en obfervant d'en : bas, s'aflurer que d’une partie des phénomènes, on ne voit pas tout; mais lorfque l'Obfervateur fe trouve dans un pays - de montagnes, & qu'il fe donne la peine de monter fort haut, il va, pour ainfi dire, fur les lieux vérifier les chofes par lui-même, & il peut examiner jufqu'aux fymptomes {es plus particuliers de la ligne courbe des dilatations. On fe fouvient qu'en même temps que la réfraétion & le progrès horizontal font dans le rapport de l'unité à l’expofant m, le changement d’inclinaifon du rayon eff comme # i. Or on a ci-devant que lorfque le Soleil paroifloit bas d'un degré fur Chimboraço, le rayon fouffroit une courbure de 16 7"en paflant jufqu'à moi depuis l'autre point, qui étoit …. éfalement élevé que mon œïl, & Finclinaifon du rayon _ étoit aufli d’un degré, mais en fens contraire; c'eft-à-dire, 4 le rayon fouffroit 1 6’ 7" de réfraétion dans un trajet qui faifoït changer fon inclinaifon de 2 degrés: mais fi on divile . R dernière de ces quantités par l’autre, il viendra 7 #2 poux

b |

* Voyez page 56 la Me. thode d'obferver fur mer la hau-

sur des Afîres,

100 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

la valeur de » 1, & on aura donc 8 #22 pour celle de,

au lieu de 7 + que nous avons trouvé en dernier lieu. Quoi qu'il en foit, on ne tombera dans aucune erreur fen- fible, fi l'on rend cet expofant conftant, pourvü qu’on faififle à peu près fa valeur moyenne.

On juge affez que le meilleur moyen pour découvrir cette dernière quantité, c'eft d'en fonder la recherche, non pas fur les réfractions terreftres ou partiales, mais fur les réfrac- tions ou courbures totales que fouffrent les rayons dans leur cours entier en traverfant toute la mafle d'air qui nous envi- ronne. Ce n’ft plus enfuite fe rapport entre la fous-tan- gente & l'abfcifle de fa courbe des dilatations qu'on découvre pour un point particulier de l'atmofphère, mais on déter- mine le rapport moyen qui,tient comme le milieu entre les autres, entre les plus petits & les plus grands, & qui eft le plus propre à les repréfenter tous, à produire le même effet, quant au calcul. J'ai donné ailleurs des féries qu’on peut employer pour cela avec fuccès, aufi-tôt qu'on a obfervé exaétement la réfraction aftronomique pour deux différentes hauteurs apparentes *; mais une autre voie peut-être auffi courte, & peu s’en faut que je ne dife prefque toûjours meil- leure dans la pratique, c’eft de fe permettre quelque tâtonne- ment, & on réfoudra ordinairement le problème, en fe con- tentant de faire deux ou trois différentes fuppofitions.

Lorfque le Soleil paroifioit à horizon fur Chimboraço,

a réfraétion aftronomique étoit de 19° 45", & elle étoit de

3" 37 ou 38" à 7 degrés de hauteur apparente : ces feules données nous fufñfent. Nous devons, felon ce que nous venons de dire, fuppofer que l’expofant #1 eft plus grand que 8 #1: nous allons d’abord le fuppofer de 9, ce qui nous

nous multiplierons les 1 185 fecondes de la réfraction hori- zontale : il nous viendra 94.80 fecondes ou 24 38° pour de changement d’indlinaifon du rayon de lumière; & fi lon ôte ces 24 38’ de 90 degrés, complément de la première hau- teur apparente, if viendra 874 22’ pour l'inclinaifon du rayon

D ESMARUC:É E :N) Gi 10 au haut de la matière réfractive. Or le même rapport qu'il a entre le cofinus de la hauteur apparente & Îe finus de cette inclinailon (rapport qui eft exprimé en logarithme par 4589); doit aufi fe trouver entre le cofinus de toutes {es autres hauteurs apparentes & le finus des inclinaifons corref. pondantes qu'a le rayon de lumière en entrant dans l’atmo- fphère. Si-Fon opère par les ogarithmes, en n’employant que 7 figures après la caraétériftique , il n'y aura donc qu'à ôter 45 8 9 du finus de 8 3, complément de 7 degrés, feconde hauteur apparente ; & on aura le finus de l'inclinaifon qu'avoit le fecond rayon en haut. Ce dernier angle fe trouvera de 8 24 31” 24, le changement d'inclinaifon fera de 28° 36"; mais fr on divife ce changement par 8, valeur fuppofée de m—1, il viendra 34", au lieu de 372", pour Ja réfraction qui appatient à 7 degrés; ce qui montre que l'hypothèfe que mous avons faite, n'eft pas ablolument exacte, quoïqu'elle approche beaucoup de l'être. Du On na qu'à fuppofer m = 97, & on trouvera, en ache- vant le calcul, que cette feconde hypothèfe réuflit parfaite- ment. On fera en état, après cela, de découvrir toutes les réfraétions aftronomiques, & «’en conftruire une table pour Chimboraço : il ne fera pas plus difficile de former d’autres règles fur le même modèle pour tous les autres poftes, pourvû qu'on y ait obtenu deux obfervations, fur l'exactitude defquelles on puifle. compter. On retranchera pour Chimboraço 4733 du logarithme cofnus de chaque hauteur apparente; on trouvera un certain nombre de degrés dont on prendra le défaut au complément de la hauteur apparente, pour avoir Je changement d'inclinaïfon du rayon; & divifant ce chan- gement par 8+, on aura au quotient la réfraction requife. La valeur que nous fommes obligés d'attribuer à lexpofant 1, juftifie, comme on le voit, l'augmentation que nous avons "prétendu qu'elle recevoit vers le haut de l’atmofphère. Tout - confirme que la courbe B Z, prefque droite, & quoique très- çourte, devient encore plus droite & approche d’être parallèle {on axe, beaucoup plus promptement qu'aucune parabole. 1]

102 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE 4 QE

Remarques à Obfervarions [ur les variations que reçoi- vent les Réfrattions aflronomiques par les différentes affections de l'armofphère.

Enfin, j'ai employé la théorie précédente, jointe aux obfer- vations, pour tächer de découvrir les effets que la matière réfraétive eft capable de produire par les changemens auxquels elle eft elle-même fujette : j'ai voulu voir d’abord fi les fraétions étoient fenfiblement plus grandes la nuit que le jour; & afin d'avoir moins d'erreur à craindre, je les ai obfervées, les unes & les autres, les mêmes jours & avec les mêmes inftrumens *. C’eft à quoi je me fuis principalement occupé à Quito au mois de mars 1742, pendant que le beau & fe mauvais temps étoient fujets à des alternatives continuelles : ce qui rendoit les réfraétions plus irrégulières qu’à l'ordinaire, J'obfervai la nuit, du côté de l'Orient, quatre étoiles, favoir, la queue du Scorpion, marquée À par Bayer, l'étoile auftrale 6 de Farc du Sagittaire, l'épy de la Vierge & ArGurus. Je gagnois beaucoup à obferver un plus grand nombre d'étoiles, qui, venant fe préfenter à moi fucceflivement dans Ja même nuit, me tenoient lieu de plufieurs jours d’obfervations fur le Soleil.

I me falloit quelquefois, pour me difpenfer de prendre des hauteurs correfpondantes, me fervir d’un expédient, mais de la bonté duquel j'ai eu occafion bien des fois de m'aflurer. J'attendois que les étoiles qui montoient fuffent parvenues à une hauteur confidérable, comme de 40 degrés, & quelque- fois de $0; je prenois leur hauteur en remarquant Pinftant que marquoit alors ma pendule, & je réfolvois enfuite , en cherchant l'angle au pole, le triangle fphérique formé par le pole, par le zénith & par l'étoile, triangle dont je connoïflois es troïs côtés : je répétois les mêmes opérations

* Le quart-de-cercle dont je me fervois toñjours avoit deux pieds & demi de rayon, & fa lunette fixe étoit fans micromètre.

Fr

D EUSN BIC) 1 E N'ES 103 peñdant plufieurs nuits, en même temps que je ne néoligeois pas l'ufage d'une lunette fcellée contre un mur, ce qui me faifoit connoître en deux ou trois jours l'état de mon horloge, par rapport au mouvement des étoiles fixes, fans que je me trouvafie obligé de favoir leur afcenfion droite, de com- parer leur pañlage par un quart-de-cercle mural que je n'avois pas, ou que je fufle obligé de prendre des hauteurs corref pondantes, ce qui n'eût été quelquefois impofñfible à caufe du voifmage de Pitchincha du côté de l'Occident, & parce qu'il pleuvoit chaque jour à certaines heures. IL eft vrai que j'étois obligé de fuppoler la réfraction connue pour les grandes hau- teurs apparentes ; mais fi je me trompois dans la fuppoñition que j'en faifois, je le reconnoiflois par f'obfervation immédiate de la réfraction pour les petites hauteurs, & j'en étois quitte pour recommencer mon calcul une feconde fois, pour y faire quelque légère modification. On ne peut pas éviter cés fortes de pétitions de principes dans la pratique de l’aftronomie; & fi elles font jamais plus permifes, c’eft dans la fphère droite, f’Aftronome jouit en même temps d'une infinité d’autres commodités, dont il eft privé par-tout aïlleurs.

-Nous rendrons tout ceci plus clair par un exemple; le 23 Mars 1742, à r0b o' 23" du foir à la pendule, Arc- tirs avoit 284 45° 45" de hauteur apparente, ou plütôt 284 44° 2" en retranchant 43" pour l'erreur du quart de cercle qui hauffoit les objets de cette quantité. Les Tables que j'ai déjà publiées indiquoient 6” pour la réfraction à cette hauteur, mais croyant qu'elle devoit étre plus grande pendant la nuit, je la fuppofai de 20”. Aïnfr je pris 284 42! 42" pour la hauteur vraie de Fétoile, & 614 17 18" pour fa diftance au zénith; j'employai 204 33° 58” pour fa déclinaifon , la latitude de Quito nrétoit connue, aïnfr les trois côtés du triangle terminé au pole, au zénith & à Fétoile étoient donnés ; & cherchant l'angle au pole, il mevint s9d 53", ce qui m'apprenoïit l'état de mon hor- loge par rapport au ciel étoilé pour ce temps-là. Je trouvait d'un autre côté, que l'accélération journalière d'Ar@urus par

104 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyaLe rapport à mon horloge, n'étoit que de 15", c'eft-à-dire, que la révolution des étoiles fixes fe faïloit en 23h 5745" de la pendule. Il n'appartenoit pas à un homme qui chan- geoit fouvent de demeure de perdre du temps à régler fon horloge fur le mouvement moyen du Soleil, ou fur la révo- lution diurne des étoiles, ce qui eût alors été beaucoup plus commode. J'obfervois en même temps l'étoile le plus près de l'horizon qu'il n''étoit pofhible, je le fis, par exemple, lorf- qu'elle n'avoit que 84 47" de hauteur apparente corrigée le même foir du 23, & l'horloge marquoit alors 8h 3 $"; ainfi Ardurus étoit 224 21° 37" plus éloigné du méridien . qu'à 10h o' 23", & cette étoile devoit donc être éloignée de ce cercle de 814 23° 30" à mefurer fur l'Equateur. Rélol- vant après cela le triangle fphérique dont je connoiflois deux côtés, & l'angle compris. au pole de 814 23° 30", je trou- vois le côté oppofé, la diflance vraie de l'étoile au zénith. La forme de nos Tables des finus & des logarithmes ren- droit le calcul peu exaét fi l'on fuivoit dans cette rencontre les procédés ordinaires de la Trigonométrie fphérique; mais il fuffit d'en être averti pour que les moyens qu'il faudra employer fe préfentent aifément. On feroit peut-être tenté de croire qu'on trouve toüjours avec une égale précifion par les règles vulgaires, le rapport qu'il y a entre les deux feg- mens dans lefquels On partage la bafe des triangles fphériques obliquangles ; au lieu que ce rapport eft ou indéterminé, ou prefque indéterminé , toutes les fois que le point d'où on abaifle la perpendiculaire eft éloigné d'environ 904 de Farc qui fert de bafe au triangle. Enfin j'ai trouvé qu'à 8h 31° $" de horloge, la hauteur vraie de l'étoile étoit de 74 5 46”, & comme la hauteur apparente étoit alors de 84 47", la réfraction étoit donc de 1". C'eft de cette forte que faute de hauteurs correfpondan- tes, je calculai toutes les autres réfractions pour la nuit du 23 Mars: mais je me contente de rapporter ici celles que me donna Ar@urus, parce qu'elles me fourniffent l'exemple des plus grandes que j'aie obfervées de nuit au Pérou, Lorfque

a

DES SCIENCES. 10$ par ces réfractions & par les règles que j'ai expliquées, j'ai cherché enfuite la réfraétion pour 284 44 de hauteur appa- rente, ilmeft venu, non pas pré- cifément 20", comme je l’avois fuppofé, mais tantôt plus & tantôt un peu moins, ce qui m'a appris

RÉFRACTIONS obférvées de nuit à Quito.

DHAUTEURS |pérrAcTIONS

doprarer que {a fuppoñition que j'avois faite rs re EE aflez exacte, & qu'il n'y avoit 8 4, 5 | point à retoucher à mes calculs en

8. 37. 4. #2: | revenant fur mes pas. Quelquefois

9e 50. | 4 18: Lies réfraétions nocturnes ont été 10. 29. 3: 57° Légales, ou même un peu moindres ï À Ja que celles de jour ; Mais prefque Poe, | 3 cie | 'oûjour elles ont été un peu plus

fortes. Tout confidéré, & à parler Be a, généralement , on peut aflurer qu'elles font plus grandes que de jour d'environ une 6.me ou 7.0 partie, pourvû qu'il s’'agiffe de hauteurs apparentes

au deflus de 7 à 8 degrés. On re rifque de fe trom-

per, fion ne mettoit pas cette r on, & peut-être faut-il

en mettre encore quelques autres.

On NS ge <

Selon toutes les apparences, les réfraétions aftronomiques font un peu différentes dans les divers temps de la nuit, par la même raifon que de jour elles fouffrent quelque change- ment du matin au foir. Sans doute qu'elles ne font jamais portées plus loin que quelque temps avant le lever-du Soleil :

_ c’eft alors que le froid eft {e plus grand ; l'atmofphère plus

condenfée doit avoir perdu le plus de fa hauteur, au moins

par fa partie inférieure , & il n'eft guère vrai-femblable que la

matière réfractive ne participe auffi un peu à cette altération. Nous difons qué le changement de dilatation fe fait princi- palement par en bas; car, que la matière réfraétive, ou que

_ Jatmofphère fe condenfe ou f dilate par-tout proportion- . mellement, un pareil changement ne fera pas capable d’un grand

effet, comme il eft facile de s’en convaincre, & comme nous allons le prouver : Yatmofphère étant plus dilatée, le progrès ME 1749 e O

106 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE horizontal des rayons deviendra plus grand, mais d'un autré côté il faudra diviler ce progrès par un plus grand divifeur , our avoir la réfraction ou la courbure des rayons; car le degré de la parabole qui exprimé l'état de la matière réfractive devient plus élevé à mefure que cette matière fe dilate. r Suppofé que la hauteur de fa matière réfractive augmente dans le rapport de À D à Ad (fig. 2.} la courbe B 7 pren- dra la fituation Bi, & la foûtangente F Q de cette courbe regardée comme parabole, augmentera dans le même rapport, ce qui caufera une augmentation propoitionnelle à #7, puifque l'abfciffe refe fenfiblement la mème. Mais le progrès du rayon horizontal de lumière ne fe trouvera pas augmenté dans le mème rapport, il n’augmentera qüe comme les racines carrées de A D & À d: ïl fuit donc de que Ia réfraction aftro- nomique horizontale doit changer comme V/m divifée par w, ou qu'elle doit changer conime V°m, ceft-à-dire, que la ré- fraétion aftronomique horizontale doit fe trouver plus petite en raïfon inverfe des racines carrées des extenfions que re- çoit la matière réfractiveghou qu'elle doit diminuer à peu près de la moitié du rt felon lequel augmentent ces extenfions, aufl-iôt que le changement eft peu confidérable, & que toutes les parties de l'atmofphère y participent éga- lement ; fi la dilatation augmente d'une 48.®e, Ja réfraction doit diminuer d'une 96.me partie; ft la dilatation devient plus grande d’une 100.6 partie, la réfraction doit dimi- nuér d'une 200.m€ . Haukfbée à trouvé en Angleterre que les plus grandes variations de volume, auxque les l'air d'ici-bas eft fujet d'une faifon à Yautre, ou du plus grand froid au plus grand chaud, étoient exprimées par 126 & 144 : fuppofé que toute la matière réfractive, depuis le niveau de mer jufqu'à la couche la plus haute, changeît d’extenfion dans ce rapport, qui eft le même que de 7 à 8, les réfraftions aftronomi- ques, par ce feul chef, variercient d'une 1 $."€ ou 16.me partie; mais le changement que j'ai obfervé qu'elles reçoivent

à Quito, eft confidérablement plus grand.

1 D.

"1

RtAtiDietSmScr te NTcuEIge ro + Si Yon en juge néanmoins par es pefanteurs de l'atmo- fphère, que le baromètre indique, l'état de l'air ne doit recevoir que peu d'altération dans la zone: torride; & on peut affurer, outre cela, qu'il eft fenfiblement le méme la nuit que le jour :‘on a l'avantage au Pérou, de même que dans tous les pays les montagnes font acceflibles, de déter- miner aifément la quantité précile de fon changement. Si tout Fair fe-dilatoit à la fois, & dans le même rapport, toutes fes parties changeroïent de place en s’élevant, & leur élévation’ augmenteroit proportionnellement : left vrai qu'en bas la péfanteur de l'atmofphère y feroit toûjours la même, puifque chaque colonne ne contiendroit toûjours que a même quantité d'air; mais ce ne feroit pas la même chofe dans les poftes très-élevés, car ce ne feroit plus enfüite la même portion de l'atmofphère qui répondroit à la hauteur de à même montigne, ce feroit une plus petite portion; & autant la colonne inférieure fe trouveroit moindre, quant à fa maffe ou à {on poids, autant la fupérieure deviendroit plus grande, & fe trouveroit plus pefante. Lorfqu'on eft, par exemple, fur le fommet de Pitchincha, la partie inférieure de l'itmofphère, ou {a colonne d’air de même hauteur que la montagne, a le même poids que 12 pouces de mercure, ou que 145 ou 146 lignes, différence des hauteurs qu'a le mercure dans le baromètre en haut & en bas au bord de la mer fi tout Fair fe dilatoit donc, je ne dis pas d’une 7.Me 8.m€ partie, mais d'une 48.me, on s’en apercevroit x Pitchincha; car une mufle équivalente par fon poids à trois lignes de mercure ( 48.me partie de 1 2 pouces), s'éle- veroit au deflus de la montagne, & le poids de 11 colonne fupérieure fe trouveroit par conféquent augmenté de cette même quantité : une diffrence d'une ligne & demie dans : le baromètre, indiqueroit. par la même raïfon une différence . qui feroit d’une 96. partie dans la dilatation de l'atmo- - fphère. Maïs puifqu'on n'éprouve point, avec le baromètre; de changement fi confidérable fur les plus hautes montagnes de la zone torride, & qu'à peine Ja hauteur du mercure y !

108 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE varie d'une ligne, c'eft une marque que les dilatations de l'atmofphère ne reçoivent que très-peu d'altération entre les

deux tropiques : or il faut en conclure que les différences

obfervées dans les réfraétions aftronomiques, puifqu'elles feroient encore deux fois plus petites, ne doivent pas être attribuées aux changemens de la matière réfractive, qui tom- beroient proportionnellement fur le total de la mafle, mais feulement à ceux que loufire la partie baffe ou la plus voifine du fol.

C'eft ce qui eft exaétement conforme à une remarque faite par M. de Mairan dans les Mémoires de 1727, que plus les vapeurs d'une certaine denfité forment une couche peu élevée au deflus de Ia furface de la terre, plus les réfrac- tions en font augmentées : il eft évident que ce doit étre auffi précifément la même chofe à l'égard des changemens de dilatations de l’atmofphère, foit qu'ils fe faffent en excès ou en défaut; ils doivent, toutes les autres circonftances étant

les mêmes, produire en bas de plus grands effets. I eft d'ail-

leurs très-facile de montrer que les variations ne peuvent avoir lieu qu’à peu de hauteur: l'air eft trop diaphane pour contraéter beaucoup de chaleur par Paétion immédiate des rayons du foleil qui le traverfent; il s'échauffe par le voifmage de la terre & par celui des corps qu'il touche : la chaleur qu'il a acquife doit enfuite fe communiquer de proche en proche, elle doit fe trinfmettre peu à peu aux couches fupérieures ; mais elle doit le faire toüjours affez lentement, pour qu'il furvienne en bas quelque changement tout contraire qui s'oppofe au premier progrès. Voilà pourquoi l’atmofphère ne peut pas fe dilater par-tout proportionnellement ; fes différentes

couches ne prennent pas le même degré de chaleur aflez vite,

pour pouvoir participer aux mêmes variations, & il doit régner en haut, dans tous les temps , un certain degré de froid: les plus grands changemens fe font donc toüjours en bas, ce qui y rend le paffage d’une dilatation à Y'autre moins gradué ou plus brufque. I en réfulte néceflairement des effets plus fenfibles à l'égard des réfraétions, & des effets qui dépendent

DES SCIENCES. : To prefque abfolument des circonftances locales : Je vent même doit caufer quelque variété, felon les endroits plus ou moins échauffés d'où il vient : c'eft ce qui fuit de notre explication, & ce qui rend les variations de la réfraction plus difficiles à foûmettre à des règles exactes & générales.

La réfraction aftronomique doit être encore füujette à une autre différence en chaque lieu, felon les diverfes régions du ciel qui attirent les repards de l'Oblfervateur. L'atmofphère imite à peu près la figure de la terre en chaque endroit; les diverfes couches dont elle eft formée , font plus ou moins courbes, felon les divers fens dans lefquels on les confidère; ainfi les rayons de lumière fe courberont différemment, felon qu'ils viendront de l'Orient ou du Septentrion. La courbure de la circonférence de la Terre fe trouvant plus grande dans le fens du méridien que dans celui du premier vertical, les couches de l'atmofphère font aufli, dans ces divers fens, comme des portioris de différens cercles ; elles font plus alongées de Orient à lOccident, & les rayons des aftres, qui ont la même direction, rampent, pour ainfi dire, plus long-temps dans ces couches, en même temps qu'ils les rencontrent fous de moindres angles, ce qui doit leur faire fouffrir une plus

ande flexion. La difficulté feroit extrême, pour ne pas dire infurmontable, fi lon ne vouloit découvrir ces excès de courbure, que par les feules obfervations aftronomiques; & il eft néanmoins d'une aflez grande importance de favoir jufqu'où ïls vont : mais en puifant dans la Phyfique, & en nous fervant des approximations que nous venons d'employer; & qui doivent encore mieux réuffir, lorfqu'au lieu de cher- cher des quantités abfolues, on ne travaille à découvrir que eur fimple difiérence, le problème. devient très-facile, & nous le réfoudrons auffi toûjours fans calcul. On { convain- cra par le court examen que nous allons en entreprendre, qu'on peut dans l'ufage ordinaire négliger toutes les inégalités que la caufe dont il s'agit apporte aux réfractions.

La petite partie B / de ligne courbe, dont les ordonnées (fig: 2) marquent l'état de la matièreréfraétive, eft conftamment

Oiij

110 MÉmorrEs DE L'ACADÉMIE RoYyaLe Ja même pour chaque feu, & fa tingente va rencontrer toû-

‘jours dans le même point Q le rayon de la Terre prolongé

tès-loin en deflous; ainfi la foûtangente de la courbe des dilatations confidérée dans le plan du méridien ou dupre- mier vertical, admet aucune différence: mais la courbure de la furface de fa Terre étant différente au point À, felon le côté vers lequel on fe tourne, c'eft {a même chofe que fr le centre C étoit plus haut ou plus bas. Lorfqu'on traite la courbe B / des dilatations comme une petite portion de parabole, le fommet C'n’eft donc plus dans même place & le deyré de la parabole n'eft plus le même, puifque l'arc B 1 appartient à une courbe, dont l'abfcifle FC fe trouve plus longue ou plus courte, quoique fa foûtangente FQ foit toüjours de mème longueur. Prenant l'unité pour cette foù- tangente, parce qu'elle eft conftante, & défignant par r le

. . x » . Li femi-diamètre ou l'abfcifle FC, nous aurons pour le degré

de la parabole pour la valeur de #1 dans l'équation générale zm y. D'un autre côté le progrès horizontal pris pour a mefure d'un angle (au moins lorfqu'il s'agit de réfraétions horizontales ), fuit fenfiblement la raifon inverfe de la racine carrée du femi-diamètre; car continuant à prendre r pour ce

femi-diamètre, la longueur abfolue du trajet horizontal du 1

rayon de lumière fera comme r?. Ce trajet ne fera autre

chofe que le finus À A qui eft proportionnel à la racine

carrée du femi-diamètre, lorfque le finus verfe À D eft conf

tant & très-petit; mais ce trajet ou ce finus étant divifé par LI

le femi- diamètre, donnera 7? pour Îe progrès horizontal

confidéré comme partie du cercle, ou évalué en degrés & mi- nutes, & lorfqu'il ne varie toûjours que par le changement

du femi-diamètre. C’eft donc la quantité Fire qu'il faut divifer par le degré ou par le genre de la parabole, ou par

—, pour avoir la quantité de la réfration : ainfi, eu égard

D EISÈS;C1E NC E:Ss. III

à tout, Ja réfraction horizontale aftronomique change comme la racine carrée du diamètre des cercles que forme la matière réfraétive; ce qui nous fournit une règle très -fimple pour déterminer pour tous Îes lieux combien la réfraction eft plus. grande dorfqu'un aftre eft vers lorient ou vers l'occident, que dorfqu'il eft vers le feptenirion ou le midi, ou dans tous les autres azimuths.

. Si nous nous fuppofons dans la zone torride, la diffé- rence des axes de la Terre étant d'une 1709: partie, {e rayon de l'équateur eft au rayon du cercle ofculateur du méridien comme 111 à 110, fi Jon donne au méridien {a courbure que nous lui avons attribuée dans les Mémoires de 1744; mais la réfraction ne change que felon a racine carrée de ce rapport, ou fenfblement felon la moitié, c’eft- à-dire qu'elle ne doit.être plus forte dans le fens du premier vertical que dans de fens du méridien, que d'une 22 1.me partie, au dieu quelle fuivroit fenfiblement Ie rapport des deux axes, fi fe méridien étoit une ellipfe ordinaire. La plus grande différence n’eft par conféquent que de 7 fecondes à horizon : elle doit devenir abfolument infenfible pour les aftres qui font très-élevés, & encore moindre lorfque FOB- fervateur eft dans les autres climats,

NOTA. Comme il manguoit quelques termes à la Table pour Quito, inférée dans les Mémoires de 1739, à que j'ai, outre cela, été obligé de changer un peu les différences pour ÿ 0 o toifes, Louis que j'ai mieux connu l'exatle élévation de la croix de Pitchin-

ha au deffus de la ville, j'ai cru que la meilleure manière d'indiquer ous les petits changemens néceffaires, étoit d'inférer ici la Table toute “corrigée pour les réfrattions qui fe font de jour.

3

112 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

TABLE des Réfradions affronomiques pour Quito, 1479 toifes au deffus du niveau de la mer, &‘ pour les endroits $ oo toifes plus élevés ou plus bas que cette ville.

Réfaë. | pour [Bauteurs| méga, | ?'oour | Hauteurs sootoifes.} *PP# suotoifes.] *PP2r-

16. 48 |\r. 12 40 1. 3 0.453 |. 4 OM | 0. 5 C2) 0: 6 | 5. so co. 41 D 35 Lo 56 | er 1 fo 20 7 4-50) 8 4 23 | o 9 3-MOFAN ENS 10 EN = 0. it 3.000] Fo: 12 | 2 so | o. 13 2.257000. 14 2-16241l 00. TR ET ET) OP TP 16 214070: 17 1. 58 | o. RO ME RL PS CT RE gr CE 2) 1e, 4]: 0 20 FR ONIRQ [ar Lecalo te ds 220 22 200 21} ras ulRo: 24 LUE 25 tour Q 26 1. 4

L'équation pour les 500 toifes doit être ajoûtée pour les lieux .qui font plus bas que Quito, & fouftraite pour Jes lieux qui font plus élevés,

L HISTOIRE

Men, de ZAe.R des Se:1749. Pag.u2. Pl 6.

Ale de Le. R dar Ve 1739 Pag.ns. Pl

"

3 DES SCIENCES. 113

Rour PAT O 1 RE DES MALADIES EPIDEMIQUES DE ; ZAR

Obférvées à Paris, en même temps que les différentes températures de l'air.

Pa M MaALzourIn.

. ; UOIQUE les Epidémies viennent quelquefois d'autres 13 Février NE : caufes, que de l'air, c'eft cependant à fes intempéries 1751: quon doit attribuer le plus fouvent ces maladies , comme je Jai prouvé au commencement de l'hiftoire des maladies épi- - démiques de 1748, après avoir expliqué, à l’occafion des . maladies populaires de 1747, les effets prodigieux du reflort _ & dela pelanteur de Fair fur le corps humain. * Les Anciens ne connoiïfloient point ces deux propriétés de air, fa pefanteur & fon reflort , quoiqu'ils connuffent leurs effets : c’eft une des connoiffances que la Médeéine a acquife î ve ces derniers temps; connoiffance très-utile dans la théorie, . & par conféquent dans la pratique de cette fcience. . Lorfque je dis que les Anciens ne connoiffoient point Ja _ pefanteur & le reflort de l'air, je parle de ceux qui ont vécu . danse fiècle d'Hippocrate & dans les fiècles füivans, car . cela avoit été connu auparavant : Empédocle rapportoit au ids de Fair, le phénomène du Siphon, l'eau demeure pendue pendant qu'on en tient Fouverture bouchée avec doigt : deegs 0yxos. Ariflot. de la Les anciens oblervateurs en Médecine avoient aperçu les “4: 7: ts de la pefanteur & du reflort de l'air fans en connoître caufe : c'eft des effets de la pefanteur de f'air dont parle ippocrate, lorfqu'il recommande / Epidem. lib. V1, fe. 8 ) l ver fi Fair eft plem, & s'il remplit plus moins, eppévoy uéloy Te % TO AG: parce que felon que Fair PXrieur qui nous prefle de toutes parts eft plus moins Me. 1 749. “ae Nerre

114 MÉMOIRES -DE L'ACADÉMIE ROYALE plein, c'eft-à-dire denfe, & plus ou moins pefant, l'air qui eft en nous, qui foütient ce poids de atmofphère, & qui tend toûjours à fe gonfler dans les vaifleaux, eft plus ou moins comprimé; de forte qu'on fe fent plus ou moins rem- pli (pour parler le langage d'Hippocrate) comme on lob- ferve, fur-tout par rapport à la tête, dans certains change- mens de temps.

Les anciens Médecins ont auffi aperçu les effets du reffort de l'air fans le connoître ; c'eft ce qu'Hippocrate exprime par opuoyze impetum facientia.

Le reflort de l'air contenu avec les liqueurs dans les vaifleaux du corps, eft continuellement excité par la chaleur naturelle, & en fe dilatant il fait effort contre les vaiffeaux & contre l'air extérieur qui le réprime par fon poids.

On a connu dans tous les fiècles les autres propriétés de Vair, favoir, la fécherefle & l'humidité, la chaleur & 1a froideur : les anciens Médecins onc même fait un grand ufage de ces connoiffances dans les recherches des caufes des mala- dies, & dans leur traitement.

I n’eft pôllnt, en général, de propriété de Yair plus facile à apercevoir que fon humidité & fa fécherefle, pour peu qu'elles foient fenfibles, parce que tout ce qui nous envi- ronne s'en reflent. I n’en eft pas de même de fa pefanteur & de fa légèreté, ni de fa chaleur & de fa froideur, fi elles ne font.à proportion plus fenfibles : d’ailleurs, le froid”& le chaud font des qualités relatives à ceux qui en jugent, at lieu que la fécherefle & l'humidité ne font pas relatives à nous, elles font pofitives. Il eft plus difficile de connoître avec précifion les degrés de la fécherefle & de l'humidité, que ceux de la froideur & de la chaleur, & ceux de la pefanteur & de la légèreté de l’atmofphère; c’eft pourquoi il n’eft point d'auffi bons hygromètres qu'il eft de bons thermomètres & baromètres.

Nous fommes continuellement dans l'air comme dans ur bain, qui, foit qu'il foit fec, foit qu'il foit humide, contribue: beaucoup à l'état de notre fanté.…

DE SMIC! EN CES 115$

En général, l'air fec eft plus fain que Fair humide : l'air fec

ft plus pur, il eft plus air, c’efl-à-dire, moins mêlé avec les

‘mañations des corps qui y tranfpirent; C’eft pourquoi Celfe pelle la fécheretle de l'air, la férénité du temps.

* Au lieu que fair humide eft plus chargé de différentes matières qui fe font élevées dans l'air avec les parties aqueufes, ce qui le rend plus fufceptible de corruption ; c’eft pourquoi l'humidité de Vair produit un plus grand nombre de maladies, mais celles qui viennent de la fécherefle font plus vives.

La féchereffe fait des maladies plus courtes, fur-tout dans es pituiteux, & dans les femmes, qui, en général, font d’un tempérament humide; & au contraire, elle rend les maladies À Fe grandes dans les hommes maigres & bilieux, parce que » a féchereffe, en cpaiffiffant la bile, lui donne le caractère de - la bile noire, qui eft la plus mauvaïfe.

L'humidité, au contraire, fait les maladies plus Jongues, en afloibliflant les fibres par relâchement, d'où réfulte le ralentiffément du mouvement progreffif des humeurs, dont À lès âcres font plus difflous par l'humidité; ce qui favorife le

mouvement interne qui en fait la pourriture : c'eft ce qui

fait que l'humidité peut produire toutes les maladies qui ._ viennent de cacochymie; elle fait aufi dés catarres, des » boufiflures & des hydropifies. Les maladies que caufe fa féchereffe, font la mélancholie, m. 11 confomption, la pulmonie, des éréfipelles & des inflamma- . tions bilieufes, fur-toyt des ophtalmies sèches, qui font caufées 4 par Ja féchereffe de la cornée, & par ’acrimonie l'humeur, e. laquelle eft d'autant plus forte qu'elle eft moins affoiblie par - beaucoup de liqueur. La féchereffe produit auffi l'ophtalmie | sèche ordinaire, c'eft-à-dire, qui eft fans fluxion d'humeur.

+ JANVIER.

L'air a été extraordinairement humide pendant ce mois; Iny a pas fait froid pour la faïfon, & cette température a é très-égale, Le thermomètre à prefqué tous les jours été à 6 degrés au Pi

116 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

deflus de la congélation ; il n’a pas été plus bas que 2 degrés le matin, & il eft monté jufqu’à 9 l'après-midi : le baromètre a beaucoup varié d'un jour à l'autre & dans chaque jour; la hauteur du mercure y a le plus fouvent été aux environs de 27 pouces & demi; il n'eft pas monté plus haut que 28 pouces : il n’y a été que le 1 $ & le 1 6 du mois : le temps étoit ces deux jours- comme il eft ordinairement dans les beaux jours d'Avril. Le plus bas le mercure foit defcendu, c'eft à 26 pouces 8 lignes; ce fut le 22, le vent étant fud-oueft, ce qui paroifloit annoncer de la pluie ; cependant ce jour-là Fair fut fec à Paris, & le ciel net & bleu. Le vent a prefque toûjours été fud-oueft pendant ce mois, ilsa quelquefois été fud & oueft, rarement nord, & il n'a été aucun jour nord-eft : il y a eu des ouragans extraordinaires, comme il

en a ordinairement dans le temps des équinoxes.

Il eft tombé dans tout le cours de Janvier 2 pouces 7 lignes & À de ligne de pluie en hauteur.

Quoique le temps n'ait pas été tel qu’il doit être dans cette faifon , il n’y a point eu de maladies épidémiques ; ce qui vient vrai-femblablement de ce que la température de l'air a, comme nous l'avons dit, été égale pendant ce mois ; on a depuis long temps obfervé que ces maladies font le plus fouvent caufées par les changemens fubits de {a température de l'air.

I y a eu dans le commencement de cette année, comme à la fin de la précédente, des rougeoles & des petites-véroles qui ont été bénignes. J'ai remarqué que dans ces rougeoles, il y avoit ce mois-ci plus de rougeurs aux parties inférieures qu'aux fupérieures : feu M. Bellot, dont j'ai déjà parlé dans le Mémoire de 1747 au fujet de la Suette, a fait la même obfervation.

I y a encore eu dans ce mois quelques maladies de [a peau; & prefque tous. les malades.ont eu: une difpofition ex- traordinaire à la fueur.

Mrs Cochu & Hazon, Médecins de la Faculté, ont obfervé auffi qu'il y a encore eu des maux de gorge, des dévoiemens opiniîtres & des fluxions à la tête avec fièvre.

Et E'SLOBLC 1 EN GRE 117 | » M. Petit, qui s'applique particulièrement aux maladies des | ‘yeux, comme fon père qui étoit de cette Académie, nous a fait remarquer qu'il y a eu ce mois-ci plus d'ophtalmies qu'il n'y en a ordinairement ; ce qu'il attribue aux vents qui * ont été extraordinairement violens.

M. Macquer a quelques malades de fièvres intermit- tentes, dont les accès n'étoient pas réglés; il a auffi des fièvres continues avec redoublement; ces fièvres n’étoient point dangereufes, quoiqu'opiniätres; il a obfervé que plu- fieurs de ces malades avoient à la fin de la maladie, les pieds, les mains & le vifage enflés.

. M. Bouvart a aufli des fièvres continues & dangereufes, . qui toutes ont été accompagnées d'embarras à la tête, plus À marqué par le délire que par lafloupiffement. Aucun des à malades qu'il a vüs, n'a eu de treflaillemens de tendons, ni ! autres mouvemens convulfifs; prefque tous ont eu des dévoie-

mens bilieux, qu'il a toüjours entretenus & augmentés par le fecours de Part, & qui fe font continués par delà le temps - de la convalefcence même, fans autre inconvénient que celui de retarder un peu le retour des forces.

IL eft entré à l'Hôtel-dieu pendant ce mois, 1941 ma- lades; il y en avoit le premier du mois, Lee

IL eft mort à Paris, dans le: cours de Janvier, 1 370 per+ fonnes ; 696 hommes & 674 femmes.

I eft pendant ce mois, 1925 enfans; 1022 garçons, 903 filles. De ce nombre 1925 enfans, il y en a eu 301 qu'on a apportés aux Enfans-trouvés; 1 57 garçons, 144

4

IH s’eft fait pendant ce mois 442 mariages. FEVRIER.

Dore 10 lignes le 16, qui eft le jour il. a defcendu: De plus bas: ;

118 MÉMOIRES DE L'ACADÉMTE ROYALE

Ï a fait un plus grand froid en Février qu'en Janvier; if y à eu un peu de gélée toutes les nuits.

La liqueur du thermomètre a le plus fouvent été, dans ce mois, entre 2 & $ lignes au deffus du terme de la glace; elle eft defcendue au defious le 8, le o & le ro ; elle a été à 6 2 le 9; il a neigé & grêlé ces trois jours, le vent étant nord.

Le temps avoit changé dès le 7, le vent étant venu tout- à-coup du nord-eft; alors il a commencé à y avoir dés rhu- mes, qui ont été fort communs pendant ce mois.

Le venty a prefque toüjours été fud-oueft, if a quelquefois été oueft, plus rarement eft; il n'eft venu du nord que les derniers jours du mois.

L'air a été humide en Février, & cependant il na pas. parû l'être autant, à proportion de la pluie qui y eft tombée en grande quantité ; il en eft tombé fa hauteur de 2 pouces 4 lignes +.

Il y a eu des giboulées dans ce mois, comme il a coûtume d'y en avoir dans le mois de Murs. 3

Le Soleil a lui plufieurs jours de fa fin de Février plus fortement qu'il n’a coûtume de faire dans cette faïlon, favoir, depuis le 20 jufqu'au 26; & il y avoit des gelées blinches les nuits fuivantes de ces jours-là : le temps étoit alors auffr beau qu'il l'eft dans les beaux jours d'Avril; le Soleil y étoit fort chaud, & le vent froid : il eft venu ces jours-là de left, du nord-eft du nord.

If a commencé alors d'y avoir des fontes de fa tête, des fluxions furles yeux, des fièvres catarreufes & desspleuréfres. M. Ferrein, qui a obfervé les mêmes maladies, a eu occafion de voir des maux de gorge avec fièvre aigue, & nombre d'éré- fipelles fur le vifage, les unes fans fièvre; d'autres avec fièvre ; & il nous a dit que le traitementordinaire dans ces cas y a bien réuffr. g

H y a eu aux environs de Paris, & particulièrement à Meudon, une maladie fort dangéreufe, dont on mouroit ordinairement en quatre jours, fouvent dans les vingt-quatre heures, & quelquefois même en cinq ou fix heures.

DES SCIENCES. TI +. Cette maladie prenoit par une fièvre, dont les accidens changeoient à chaque inflant elle étoit fans douleur de tête, il y avoit cependant quelquefois du délire; la plüpart de ces malades avoient une douleur errante dans les côtés, à l’efto- mac & aux reins; lorfque cette douleur quittoit ces parties , la poitrine s'embarrafloit, & quelques-uns mouroient une demi-heure après. ,

‘Plufieurs de ces malades ont rendu des vers ronds : tous

rendoient de furine de couleur & de confiftañce de firop de capillaire, & on y voyoit nager quelques parcelles blanches ; Jorfqu'on laïfloit repoler ces urines, elles devenoient plus rouges & plus claires, ce qui, fuivant Eugalenus, arrive aufii dans les maladies fcorbutiques. .. Le pouls de ces malades changeoit étonnamment en moins de trois minutes ; il étoit d’abord violent, puis il difparoïfloit tout-à-coup ; enfuite il revenoit en fautillant, & auffitôt il devenoit intermittent ; enfin il étoit continu, élevé & vif, comme dans les accès de fièvre ordinaire.

Il y en a eu qui ont été attaqués de cette maladie par un : relâchement de la luette, fans inflammation apparente de Ia. gorge, & ils avoient beaucoup de difficulté à refpirer.

On a remarqué que ceux qui n'avoient pas été faignés dans le commencement de la maladie, étoient en plus grand. danger; le fang qu'on tiroit, étoit comme du fang de poulet ; ceux qui n'en mouroient pas, quoiqu'ils n’euflent pas été faignés, tomboient dans une langueur qui faifoit croire qu'ils alloient mourir; & tout d’un coup ils revenoient, pour ainfr dire, de la mort à la vie Le Vicaire de Meudon a fait un détail bien. circonftancié: - de cette maladie dans deux lettres, qui n'ont été communi- —…. quécs par M. Macquer, à qui elles avoient été écrites. J'ai vi aufli de ces malades à Pafly dans le mois de Mars fuivant.

…_ H eft entré à l'Hôtel - dieu pendant ce mois, 1 679 ma-- ades ; il y en avoit le premier du mois, 3457.

left mort en Février, 12 92 perlonnes; 688 hommes: 604 femmes.

2... matt tr déillhe. “s

120 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Il eft dansle cours de ce mois, 1924 enfans; 994 garçons, 930 filles; de ces go 24 enfans, on en a porté aux Enfans-trouvés 312; 171 garçons, 141 filles.

Il s'eft fait pendant ce mois de Février, 60$ mariages.

MARS

Le baromètre # fort varié en Mars d'un jour à l'autre, & dans chaque jour; cependant les différences, par ces varia- tions, n'ont pas été grandes : le plus haut degré il foit monté, c'elt à 28 pouces 1 ligne; ce fut le & le 26 du mois, le temps étant ferein, mais froid, par un vent d’eft: le plus bas au contraire il foit defcendu, c'eft à 27 pouces 4 lignes; ce fut le 19, le ciel étant couvert, & l'air froid, par un vent de nord : dans le refle du mois, il a le plus fouvent été aux environs de 27 pouces 7 lignes.

Pour ce qui eft du froid, Fair a été affez doux pour la faifon pendant ce mois; le 1 5, le thermomètre eft monté jufqu'à 14 degrés au deflus de fa congélation, mais les derniers jours ont été froids, & alors il a gelé la nuit, & même le jour. Le 28 a été le plus froid, le thermomètre eft defcendu ce jour-là 3 lignes & demie au deffous du terme de la glace.

L’humidité a été fort grande en Mars; cependant le vent y a été nord-eft pendant feize jours, favoir, huit jours au commencement & huit jours à la fin; mais ce vent a été moins froid les huit premiers jours, parce qu'il étoit alors moins fort que les huit derniers, & parce qu'il étoit tempéré par un vent fud : le refte du mois, le vent a été fud-eft ou fud-oueft, & quelquefois ouef.

La quantité d’eau de pluie a été 1 pouce 9 lignes +.

Il y a eu ce mois-ci beaucoup de rhumes opiniâtres, & quelques pleuréfies qui ont été fort dangereufes.

H y a aufli eu beaucoup de mäux de gorge, dont plu- fieurs étoient éréfipélateux avec des boutons; quelques-uns vifoient à la gangrène, & tenoient des maux de gorge des enfans, qui font fi dangereux depuis quelques années. ô

DE SMS 1 EN CES 121

Ïl y a encore eu en Mars des rougeoles qui avoient le caractère qu'on leur a remarqué cette année, favoir, la durée des rougeurs, qui étoient exuraordinairement long-temps à s'éteindre, fur-tout au menton.

IL eft arrivé ce mois-ci, dans une des églifes paroïffiales de Paris, un accident qui peut fervir à faire connoitre les inconvéniens qui réfultent des enterremens dans les églifes. On avoit, pendant l'hiver de cette année, Ôté tous les bancs qui étoient dans l'églife de Saint-Euftache: on y creufoit, & on en enlevoit des terres pour faire des caveaux : on avoit exhumé pour cela tous les corps qui y étoient enterrés, ceux, mème qui n'y étoient que depuis peu de temps, & on les avoit tranfportés derrière ce qu'on appelle l'Œuvre ou la Fa- brique, on n'avoit pas mis beaucoup de terre, pour gagner de l'efpace; & pendant ce temps, les cadavres qu'on avoit eu à enterrer dans l'églife avoient été mis fous les Char- niers, dans un caveau qu'on n'avoit pas ouvert depuis très- long temps. |

Le 7 Mars, les enfans qui étoient au Catéchifme dans les Charniers, font tombés la plüpart, & prefque dans le même temps, en foibléfle : M. Ferret, Médecin de cette paroifle, qui y fut appelé aufi-tôt, n'a dit qu'ils avoient perdu con- noiflance, qu'ils avoient de vifage extraordinairement rouge; qu'il avoit obfervé qu’ils avoient un mouvement violent vers le milieu du corps, accompagné de quelques mouvemens con- vulffs aux bras & aux jambes; & lorfque fa connoiffance leur fut revenue, il les interrogea fur leur mal, & ïls répon- dirent qu'ils fouffroient de leftomac, & qu'il leur montoit comme un morceau à Ja gorge qui les empéchoit de refpirer. M. Ferret prit foin de ces enfans, qui lui furent recom- mandés par le Curé de la paroiïfle, & enfuite par M. le Premier Préfident ; plufieurs en ont été très-malades, mais aucun n'en eft mort.

Le dimanche fuivant, 9 du mois, pendant le Catéchifme

- qui fe faifoit dans le même endroit, il en tomba encore une

vingtaine dans les mêmes accidens; & environ une heure

Mém. 1749. -Q

iR

122 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE après, plufieurs grandes perfonnes fe trouvèrent mal pendant les vêpres aux environs des mêmes Charniers. Je paffai par- à dans ce temps, jy vis une fille & enfuite une femme qui tombèrent par terre fans parole, mais elles me parurent avoir confervé la connoïflance ; elles fembloient ne pouvoir refpirer, & avoir le gofier ferré; elles avoient le vifage rouge, & je leur remarquai tous les fymptomes que n''avoit rap- portés M. Ferret.

La femaine fuivante, plufieurs enfans fe font trouvés mal à Sainte-Perrine, qui étoit un couvent de Religieufes de Sainte-Geneviève , fur la paroiïfle de Saint-Laurent, proche la Villette : ce couvent ayant été réuni à celui de Chaillot, du même ordre, on en avoit exhumé les cadavres, & le terrein avoit été loué à l’Entrepreneur d'une manufaéture de rubans, lon fait travailler de petites filles. M. Izès, Mé- decin de Ia Faculté, y fut appelé: il n'a dit que les accidens n’y ont pas été fr grands qu'à Saint - Euftache.

J'ai oblervé qu'il n'y a point eu de grands garçons ni d'hommes attaqués de cela, qu'il n'y a eu que des enfans, ou des perfonnes du sèxe.

On a reçû à l'Hôtel-dieu, en Mars, 2079 malades : il y en avoit le premier jour de ce mois, 3579:

IH eft mort en Mars, 1 548 perfonnes; 828 hommes & 720 femmes.

Et ïl y eft 2200 enfans; 1088 garçons, & 1112 files : de ces 2200 enfans, on en a porté aux Enfans- trouvés, 400 ; 192 garçons, & 208 filles.

H ne s'eft fait que 36 mariages à Paris pendant le mois

‘de Mars. MUR UT EE:

Le mois d'Avril a, cette année, été auff tempéré qu'il l'eft ordinairement, par rapport au froid & à Fhumidité : il ‘a été moins humide à proportion que ne l'avoient été les “mois précédens. La hauteur de l'eau de pluie qui eft tombée pendant ce mois, n'a été que d'un pouce,

ÿ

DES SCIENCES. 123 Le thermomètre a le plus fouvent été, en Avril, aux environs de 8 degrés au dellus de la congélation; & le plus bas il foit refté, c'eft à 2 degrés, ce fut le premier du mois à la pointe du jour, le baromètre étani à 27 pouces 9 lignes, & le vent nord & nord-oueft : le plus haut au contraire il foit monté, c'elt à 14 degrés, ce iut le r du mois l'après-midi, le vent étant fud-ouelt, & le baro- mètre à 27 pouces 2 lignes. Le baromètre n’eft pas defcendu plus bas que ce point en Avril; il a fort varié pendant ce mois : il a le plus fouvent été aux environs de 27 + pouces; & le plus haut il oit

. monté, c'eft à 27 pouces 10 lignes: il n'y a été que peu

de temps, ce fut le 28 du mois, le vent étant füd.

Les vents ont fort varié auffr, ils font venus de tous côtés, & fouvent il y en a eu plufieurs en même temps.

Pour ce qui eft des maladies, un grand nombre de per- fonnes ont été prifes dans les premiers jours d'Avril, par un friflon avec des douleurs dans les bras & dans les jambes la fièvre chaude furvenoit, & duroit trois ou quatre jours: dans quelques-uns, cette fièvre a diminué dans les vingt- quatre heures , & a repris quelques heures après, en froid, ce qui faifoit une fièvre quotidienne; dans d'autres , la fièvre ne reprenoit qu'après un jour d'intervalle, ce qui faifoit une fièvre tierce. : :

H ya eu dans le même temps beaucoup de rhumes qui ont été fort opiniâtres, & même on en a quelques-uns dégénérer en fluxions de poitrine : il y a aufli eu quelques pleuréfres avec crachement de fang.

On 2 pendant ce mois beaucoup de coqueluches parmi les enfans, & cette humeur de catarre s'étant dépolée der- rière les oreilles , elle y à fait des tumeurs qu'on nomme ordinairement oreillons, lorfqu'il s'agit d'enfans,

On a remarqué qu'il y a eu une quantité extraordinaire

de perfonnes qui font tombées en fiblefé ; plufieurs ‘ont

même perdu connoiflance, & quelques - urnes ont eu. des

0 Q ÿ

124 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE Royazr étourdiflemens effrayans. If y a aufli eu dans ce temps des apoplexies & des morts fubites. 1

H eft entré 1818 malades à l'Hôtel-dieu dans le cours d'Avril: il y en avoit le premier de ce mois, 3575-

H eft mort à Paris pendant ce temps, 172$ perfonnes;

12 hommes, 813 femmes.

Et il eft 1 846 enfans; 945$ garçons, & 911 filles; de ces 1 846 enfans, on en a porté 303 aux Enfans-trouvés; 15 2%garçons, & 1 52 filles.

I s'eft fait 329 mariages.

M A L

Le temps a, en général, été fort beau en Mai, & il a été plus fec qu'humide ; il n'eft tombé de pluie que la hauteur de 8 lignes : il n'y a eu que le 29 qu'il a beaucoup plu, & il a tonné ce jour-là; il avoit auflr tonné & un peu plu A

Au refte, la température de l'air a été affez comme elle doit être dans ce climat, pendant ce mois, par rapport au chaud & au froid. I y a eu une petite gelée blanche & du brouillard la nuit du 11 au 12; mais la nuit du r4au15, il a gelé aflez fort pour faire cramdre que les vignes n'en fuflent endommagées.

Le jour le plus froid de ce mois a été le 1 5 : la liqueur du thermomètre étoit le matin de ce jour-là, à $ degrés au deflus de zéro, & dans la banlieue de Paris elle n'étoit qu'à 2 + decrés au deffus de ce terme, & feulement à 1 + degré à la campagne ; ce même jour, le baromètre étoit à 27 pouces

lignes , le vent venoit de loueft , & il a beaucoup grêlé.

Le 28 Mai a, au contraire, été le jour le plus chaud; le thermomètre étoit l'après-midi de ce jour-là, à 24 degrés, le baromètre à 27 pouces r 1 lignes, & le vent venoit de l'efl & du nord-ef.

Au refte, le baromètre a fort varié pendant ce mois, non fulement d'un jour à fautre, mais même du matin au foir;

Le

D'E SUS“G 1 E N C:ES 125 cependant il a le plus fouvent été aux environs de 27 pouces 8 lignes; le plus bas il foit defcendu, ç'a été à 2 7 pouces 3 lignes, ce fut le 17 du mois, le vent étant fud & fud- ‘oueft : il grêla & il plut un peu ce jour-là.

Le plus haut, au contraire, foit monté le baromètre, c'eft à 27 pouces 10 lignes, & il y eft monté plufieurs jours, qui n'ont pas été de fuite, parce que, comme je f'ai dit, la pefanteur de l'atmofphère a fort varié dans ce mois.

Pendant tout ce temps, les vents font venus de tous côtés; cependant ceux d’eft, de nord-eft & de nord ont dominé fur les autres, & j'ai obfervé que ces vents, qui font ordinaire- ment les plus froids, ont été les plus chauds ce mois-ci; ce qui eft d'autant plus furprenant, que l'hiver a été encore plus froid qu’à ordinaire dans les pays du nord; & au contraire les vents de fud, qui font ordinairement les plus chauds, ont été les plus froids de ce mois.

Il faut remarquer à cette occafion, qu'il y a eu beaucoup d'inflammations de poitrine pendant ce temps, & des rhumes opinñtres, avec chaleur de la poitrine. Les vents de nord ont, comme je l'ai dit, dominé dans ce mois-ci; mais fi ces vents de nord ‘ont caufé ces maladies de poitrine, ce n'a pas été par le froid, puifqu'ils ont été chauds: le froid a de tout temps été réputé très-contraire à la poitrine ; fi les fluxions de poitrine de ce mois ont été caufées par le froid, g'a été par les vents du fud qui ont été froids, & non point par ceux du nord qui ne l'ont pas été.

J'ai obfervé que tous ceux qui étoient ainfi malades de Ja poitrine fouffroient aufli de la tête, & que cette douleur de tête s'étendoit fur le cou. If y a eu plus de fluxions dans ce mois, qu'il n'y en avoit eu dans tout l'hiver.

I a régné dans tout le cours de Mai, beaucoup de maux de gorge, qui, comme les péripneumonies du commencement de ce mois, étoient accompagnés d’une douleur des parties æxtérieures de la tête & du cou.

On a auffi dans le même temps, de ces maux de gorge

_ éréfipélateux & gangréneux, qui n'avoient encore jufqu'alors

Q ii

126 MÉMOIRES DE L'ÂCADÉMIE ROYALE attaqué que les enfans, ou les jeunes gens; il y a eu dans ce mois-ci des perfonnes de toutes fortes d'âge qui en ont été malades. Ces maux de gorge étoient avec des boutons, & if s'eft exfolié des membranes du gofier, en touflant & en cra- chant: lorfqu'on leur regardoit dans fa bouche avec le man- che d'une cuiller, on leur tiroit fouvent de la gorge une lim- phe purulente, dès les premiers jours de la maladie.

I y a eu des fièvres printanières, fur-tout dans le com- mencement du mois, des tierces & des double- tierces.

Il eft entré à l'Hôtel-dieu, en Mai, 2026 malades; il y en avoit le premier jour, 345 6.

H eft mort à Paris pendant ce temps, 164$ perfonnes; 883 hommes, 762 femmes.

Et il y eft 2017 enfans; 1018 garçons, & 999 fes : de ces 2017 enfans, il y a eu 3 34 enfans trouvés; 1 82 gar- çons, & 152 filles.

I s'eft fait 396 mariages.

JT A

L'air a êté chaud, au commencement de Juin, comme il l'avoit été les derniers jours de Mai; le thermomètre eft monté le 4 Juin après-midi, jufqu'à 22 degrés au deflus de la con- gélation ; il n'eft pas monté plus haut dans ce mois : il y a eu ce jour-là def éclairs, du tonnerre, & une grofle pluie; ce qui a changé le temps. Le lendemain $, il a fait moins chaud ; & mème le 6, après une pluie qui a duré toute la nuit, il a fait un froid auquel on a été très-fenfible, ce froid a encore augmenté dans quelques-uns des jours fuivans. Le 27, le baromètre étant à 27 pouces & demi, & le vent ve- nant de l’ouett, le thermomètre eft defcendu à 7 degrés au deflus de 11 congélation ; c’eft le plus bas ül foit defcendu dans ce mois ; il a le plus fouvent été aux environs de 13 degrés fur les trois heures après-midi.

Pour ce qui eft de la pefanteur de Tatmofphère, elle a éxtraordinairement varié; elle n'eft pas reftée 24 heures la même, elle changeoit à tout inflant: le plus haut foit monté

CRE EE à

ap. 4 Le Be

PF ps ;

HALELNASEC IE N CES 127

le mercure dans le baromètre, c’eft à 27 pouces 10 lignes; ce fut le 20 du mois, le vent étant nord-eft, & le temps très- beau; & au contraire, le plus bas il foit defcendu, c'eft à 26 pouces 11 lignes, ce fut le $ du mois, le vent étant à loueft, & Vair humide. + Le vent a été plus fort en Juin qu'il ne left ordinaire- ment dans ce temps, & il a fréquemment changé; cepen- dant il a le plus fouvent été oueft ; il n'eft venu qu'un feul jour de left.

Au refle, l'air n'a pas été aufli fec qu'il Feft ordinaire- ment dans ce mois; il y a plu très - fouvent, la hauteur de l pluie tombée en Juin eft de 2 pouces 6 lignes <.

On a encore dans ce mois-ci, comme dans fautre, “des rhumes opiniâtres, des rougeoles & des fièvres; Ja pluf- part de ces rhumes ont auffi été avec embarras & fluxion dans la tête : j'ai obfervé que lorfque ces rhumes difparoifloient fans que les malades euflent eu quelques évacuations, i y fuccédoit des douleurs vagues dans les membres.

Il y a auffi eu à la fin de Juin, quelques rhumes qui n'ont pas été fi forts ni fi opiniâtres que ceux du commencement, & quelques-uns de ces rhumes ont été avec un léger mal de gorge. î

Les rougeoles ont, ce printemps, été avec enflure fluxion- maire du vifage, & les rougeurs ont été extraordinairement Jong-temps à {e difliper, fur-tout au menton. Je crois devoir ‘faire remarquer à cette occafion, que les maux de gorge éréfr- pdateux qui ont été communs dans Je même temps que les rougeoles, ont été accompagnés de rougeurs à {a poitrine, vers le cou, & aux bras; ces rougeurs étoient en boutons qui

‘blanchifioient lorfqu'on pañloit le doigt deflus, & enfuite ils redevenoïent rouges: ces maux de gorge commençoient pref que toüjours par un embarras dans da tête, une envie de “vomir, &un abattement de tout le corps; quelques-uns de ces

. -malades font même tombés en défaillance, & enfin les éle- Va Fe Vures avec rougeurs paroifloient au bras & au haut de Ja

‘poitrine; j'ai un de ces malades dans fequel tous ces

\

128 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALr accidens ont difparu, parce qu'il lui eft furvenu une enflure douloureufe à la main droite & au pied gauche,

On a auf, pendant ce mois, quelques éréfipelles fans mal de gorge; ces éréfipelles étoient avec enflure fur les yeux, & il y avoit fouvent des boutons fort douloureux fous les paupières. J'ai oblervé que l'éréfipelle diminuant confidéra- blement au bout de neuf jours, il fe faifoit auffitôt une ten- fion avec enflure aux mufcles du cou, plus particulièrement vers une des épaules , de forte que les malades fe plaignoïent d'y fentir comme des cordes tendues.

M. Vernage ma dit avoir dans la ville, quelques fièvres de toute efpèce, & M. Bourdelin beaucoup de fuxions de poitrine, à l'Hôtel-dieu.

Il eft entré 1602 malades pendant ce mois, dans cet hôpital; il y en avoit le premier jour, 3266.

I eft mort 1421 perfonnes; 745 hommes, 676 fenimes.

I eft 1880 enfans, 966 garçons, & 9 14 filles; de ces 1880 enfans, on en a porté aux Enfans-trouvés 3 1 156 garçons, & 163 filles.

IL s'eft fait 335 mariages dans le cours de Juin.

AT LL ENT

La liqueur du thermomètre eft montée en Juillet, jufqu'à 29 degrés & demi, elle y a été le 13 depuis midi jufqu'à cinq heures ; elle étoit ce jour-là dès le matin à 19 degrés; Y'air fe rafraichit extraordinairement & fubitement le {oir, de forte qu'on foupçonna qu'il avoit plu quelque part aux envi- rons de Paris; cependant le baromètre ne baïfia point dans ce temps, au contraire il monta d'un degré, c'eft-à-dire, de- puis 27 pouces 9 lignes jufqu'à 27 pouces 10 lignes, il refta encore le lendemain. On peut attribuer, peut-être, ce changement du chaud en froid, au vent qui, après avoir été pendant le jour eft & fud-eft, devint fubitement oueft de foir.

Au refte, le thermomètre a le plus fouvent marqué aux

environs

Sn #

D\'Eis) JSHC 1 E N\c\ps 129 environs de 15 degrés au deflus de zéro, étant obfervé le matin, à la pointe du jour, & au deflus de 20 degrés à trois heures après midi ; le degré le plus bas la liqueur ait été ce mois-ci, c'eft à 12 lignes au deflus de zéro ; ce fut le 2, le vent étant fud, & le baromètre à 27 pouces 8 lignes & demie; le ciel étoit couvert de nuages ce jour-là.

Le baromètre a encore varié beaucoup en Juillet, le 8 il a monté jufqu'à 27 pouces 1 1 lignes & demie; ce jour-là le vent étoit nord, & la liqueur du thermomètre à 15 degrés le‘imatin, & à 22 degrés l'après-midi : le plus bas foit defcendu le baromètre, c'elt à 27 pouces & demi ; ce fut le 22 après avoir fouvent varié ce jour-là, le vent étant nord-eff, & enfuite fud ; & le thermomètre marqua 56 + degrés le matin, & 23 + degrés l'après-midi : au refte, le degré aux environs duquel le baromètre ait le plus fouvent été, c'eft à 27 pouces 9 lignes.

Pour ce qui eft du vent, il eft prefque toûjours venu de Voueft ; il a été fud-oueft & violent les trois derniers jours de ce mois, & il n'a pas plu pendant ce temps, comme il pleut ordinairement, lorfque le vent vient de ce côté-R ; en général, il a peu plu pendant ce mois; la hauteur de la pluie n'a été que de 10 lignes.

I y a eu peu de malades dans tout le cours de Juillet ; on y a encore quelques éréfipelles : il y a eu auffr quel- ques fièvres bilieufes avec une douleur de tête continuelle, accompagnée de mal de gorge.

Dans le même temps, il y avoit des petites véroles &

: des rougeoles, & ces maladies n’avoient rien. d’extraordi- . maire, f1 ce n’eft, comme M. Vernage la obfervé auffi,

_ ques étoient feulement tardives à paroître : elles ne for-

$ toient qu’ après quatre joùrs de fièvre,

Fe eft entré à f'Hôtel-dieu, 1 677 malades: il y en avoit premier du mois, 3148.

- HW eft mort à Paris, en Juillet, 1 568 perfonnes ; 86a

40) 708 femmes. # * left 1830 enfans; 990 garçons & 840 filles : de Mn, 1749: . R

130 MÉMOIRES DE LÂCADÉMIE ROYALE ces 1830 enfans, on en a porté 388 aux Enfans-trouvés; 154 garçons & 1 34 filles.

Et il y a eu 449 mariages.

AOUST.

Le mois d'Aoùût a été fec, quoiqu'il y ait beaucoup ph, parce que la pluie a tombé en abondance chaque fois ; mais il a rarement plu, & l'air a été très-fec tant qu'il n'a pas plu. La hauteur de la pluie tombée dans ce mois, eft de 3 pouces 6 lignes +.

H a violemment tonné & prodigieufement plu prefque- toute la nuit du’9 au ro', le baromètre étant à 27 + pouces, & le vent venant de adsoueft

Le vent a extraordinairement varié pendant ce mois; cepen- dant on peut dire que c'eft de l'oueft qu'il eft le plus fou- vent venu,

Pour ce qui eft.de la température de Fair par rapport à 1? chaleur., elle a été affez comme elle a coûtume d’être. Le jour le plus chaud de ce mois fut le 8 : le thermomètre étoit ce jour-là, l'après-midi, monté à 22 degrés; & au contraire, le jour il foit defcendu le plus bas, c’eft le 27: il étoit ce jour-là, le matin, à x 1 degrés au deflus de la congélation. Ce mème jour, le baromètre étoit à 27 pouces 10 lignes À, & Je vent nord-eft: il avoit été nord la veille, & il le fut ST le lendemain 28 du mois.

Le baromètre a le plus fouvent été aux environs de 27 pouces 8 lignes : il a moins varié qu'il n’avoit fait les mois précédens ; il a même été flable, depuis le 16 jufqu'au 20, à 27 pouces 8 lignes. Le plus e il foit defcendu, c'eft à 27 pouces & un quart de ligne, ce fut le 13 : il plut beau- coup ce jour-là, le vent étant nerd-eft, nord & nord-oueft; & au contraire, le plus haut il foit monté, cet à 27

Es 10 lignes, ce fut le 6 & le 28 du mois.

H y a eu peu de malades en Août : on a encore au commencement des éréfipelles, des maux de gorge & des

f DU SMIC T. E N°7 CIE GE 121 maladies de la peau, pour lefquelles les remèdes rafraîchiflans ne réuflifloient pas aufhi-bien que les plantes amères. . On 2 auffi dans ce temps des apoplexies & des rhu- matifmes : j'ai obfervé que les malades de rhumatifmes ont été foulagés lorfqu'il leur eft forti une éréfipelle. IL a continué d'y avoir quelques petites véroles, & des rougeoles boutonnées, qui ont eu cette année un caractère difficile. 35 Vers la fin du mois, il y a eu des fièvres intermittentes, des quotidiennes, des double-tierces & des tierces, qui au refte n’avoient rien de particulier. La maladie qui a été la plus épidémique dans ce mois, ça été la dyfenterie: il y a eu des douleurs de ventre qui étoient avec dévoiement, avec des épreintes dans quelques- uns, & même avec flux de fang dans plufieurs; mais cette _ dyfentérie na pas été confidérable, ni par les x ni par la durée: j'y remarqué ceci de fingulier, c’eft qu'elle » a été plus rare parmi le peuple que parmi le refte du monde: . M. Bourdelin, Médecin de l'Hôtel-dieu, qui avoit à voir les malades de la falle de Saint Charles, il y a le plus . de miglades, &où fe voient le plus de maladies populaires, na - dit qu'il n'y avoit pas alors un feul malade de cette maladie _ dans cette falle: _ I eftentré à l'Hôtel-dieu, 1 614 malades: il n'y en avoit le premier du mois que 2898. | - Heftmortr471 perfonnes; 803 hommes, 668 femmes. . © H'eft 1894 enfans; 945 garçons & 949 filles : de cs 1894 enfans, on en a porté aux Enfans-trouvés, 302; 136 garçons & 166 filles.

_ [ya eu dans ce mois 306 mariages. 14 RE PURE DB RE. |

De mois de Septembre à été fort tempéré pour le chaud + ion le froïd ; cependant il a été plus chaud que froid.

jour le plus froid a été le 22 ; la liqueur du thermomètre

ft defcendue ce jour-là à 8 degrés & demi au deflus de la Ri

ae miel

fit use st ii ER ES,

= ee

132 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE congélation, le baromètre étant à 27 pouces 7 lignes, & 1e vent fud-oueft; & au contraire, le 2 & le 16 ont été les jours les plus chauds : la liqueur du thermomètre y eft montée jufqu'à 22 degrés au deflus du terme de la glace, le vent étant fud - oueft, "

Le baromètre a fouvent varié en Septembre, mais fes variations n'ont pas été grandes : il a le plus fouvent été x 27 pouces 8 lignes. Le 18 & le 19 du mois, il eft monté jufqu'à 27 pouces ro lignes & demie, & c'eft le plus haut il foit monté, le vent étoit alors nord-oueft: le plus bas il foit defcendu, a été le dernier jour du mois; il a été ce jour-là à 27 pouces 2 lignes & demie, le vent étant eft & fud-eft; les nuages étoient alors fort élevés, & cepen- dant il a. plu.

I a fait fec ce mois de Septembre, Vair n’y a été fenfi- blement humide que les trois derniers jours : il l'a été extraor- dinairement ces jours-là, fur-tout le dernier; c’eft ce qui a fait monter l'eau tombée pendant ce mois, à la hauteur de 2 pouces # de ligne.

Le 10, il y a eu-un peu de gelée blanche, & il a com- mencé à faire du brouillard, le vent étant nord-eft ,,& le baromètre à 27 pouces 9 lignes & demie.

Le vent fud-oueft, qui eft ordinairement le plus pluvieux à Paris, a été fec ce mois-ci, fi ce n'eft le 28 & le 29. I à beaucoup plu le 30, par le vent d'eft & par celui de fud.

Les vents n’ont pas été forts pendant ce mois, le plus ouvent il n’en faifoit point, ou il n’y en avoit que fur la terre, & point aux nues.

I s'eft fait un changement fubit de la température de- Yair dans le commencement de ce mois: le vent nord-eft. s'éleva tout d'un coup le 6, & continua de fouffler jufqu’au.. 10; ce vent ayant fubitement refroidi l'air, les corps.en ont été d'autant plus affectés, que leurs liqueurs étoient plus échauffées & épuifées par la chaleur & par la fécherefle qui avoient précédé, ce qui a produit promptement des

ta

DES" NSNCT E N°c ENS 133 maladies, favoir , des rhumes, des coqueluches, & des pleuréfies avec crachement de fang. Cela a occafionné auffi des rhumatifmes goutteux, felon les différentes conftitu- tions des corps qui ont été affectés par ce changement de temps. ;

Il y a encore eu quelques rougeoles boutonnées : ces rou- geoles avoient le même caractère qu'elles ont eu toute l'année, c'eft d'être difficiles à fortir & difficiles à fe diffiper. M. Che- valier, Médecin de la Faculté, a une rougeole de ce caractère, qui enfin étant paflée, eft revenue avec les mêmes accidens que la première fois.

On a beaucoup de petites véroles dans ce mois, mais il n'y en a eu aucune qui ait été dangereufe, quoique quel- ques-unes aient été confluentes,

On a encore dans le même temps quelques dévoie- mens avec épreintes : il y a auflr eu quelques dyfenteries qui avoient le même caractère que celles du mois précédent. É On a reçû à l'Hôtel-dieu 1674 malades: il y en avoit - le premier du mois, 2924. I eft mort 1 563 ses 8 20 hommes & 743 femmes. * I'eft 1902 enfans; 986 garçons & 9 1 6 filles : de ces 902 enfans, on en a porté aux Enfans-trouvés, 3 10; 163 garçons & 147 filles. - On 2 fait dans Paris pendant ce mois, 419 mariages.

D'CT'O:B'RE,

È L: au deflous de la congélation, & il gela, le vent étant nord-eft, . & eft; & le baromètre étoit entre 27 pouces 9 lignes, & …_ 27 pouces 10 lignes.

L'atmofphère a été plus pefant ce mois-ci, qu'il ne left ordi- nairement à Paris ; le mercure a le plus fouvent été dans le - baromètre à 28 pouces ; le plus bas il ait été, c'eft à 27: pouces & demi ; il n'y a été que le 1 0 au matin, le vent étant.

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134 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE nord-eft, & le foir même il remonta à 27 pouces 1 1 lignes & demie; la veille il étoit à 27 pouces 1 1 lignes.

Le plus haut, au contraire, foit monté le baromètre, c'eft à 28 pouces 3 lignes; ce fut le 22 du mois, le vent étant nord-eft & fort fec ; il avoit déjà été les trois jours pré- cédens à 28 pouces : il y a eu plufieurs morts fubites ces jours - Rà..

En général , l'air a été fec en Oétobre; il n'eft tombé dans tout le cours de ce mois, que la hauteur d’une ligne & un cinquième de ligne d’eau de pluie.

Le vent a le plus fouvent été eft & nord-eft, quelquefois oueft, rarement fud.

H y a eu quelques fièvres quotidiennes, des tierces & des double-tierces, & quelques continues qui prenoient le carac- tère de fièvres malignes. -

Il y a eu aufli des fièvres éréfipélateufes, & beaucoup de maladies de la peau. M. Poufle, Médecin de a Faculté, a obfervé que œux qui avoient mangé des fardines plufieurs jours de fuite, dans ce temps on étoit difpolé à avoir des maladies de la peau, ont eu une efpèce de galle ; ce qui peut être attribué à la falüre des fardines : on fait que l'air falé & Fu fage trop commun du fel donnent des maladies de Ja peau; c'eft pourquoi, comme on le croit communément , les Bre- tons & les Ecofiois font fujets à ces maladies.

Les petites véroles ont continué de régner pendant ce mois, mais elles n’ont pas été dangereufes, fi ce n’eft dans ceux qui avoient le fang fcorburique ou vérolique.

Le froid vif & fubit de la fin du mois, caufa aufli-tôt des pleuréfies. M. Baron de Monville a obfervé que ces pleuré- fies n'étoient pas aufli inflammatoires que le font ordinai- rement ces maladies. M. Chomel, Médecin ordinaire du Roi, a employé utilement les véficatoires pour ces pleuréfies, lorf qu'elles portoient à la tête, & que les accidens de la pleu- réfie cefloient; ces véficatoires rappeloient la douleur de côté & la toux, alors il reprenoit la méthode ordinaire de traiter les pleuréfies ; ce que j'ai pratiqué auffi quelquefois dans ces

D''eRs) SN L'E NICANSAREN, 135 occafions. J'ai obfervé que quelques-uns de ces malades ont été plufieurs heures fans fièvre, & qu'enfuite ils en étoient -repris tout d'un coup avec la plus grande violence, fur-tout les jours critiques ; ce qui eft un figne de maladie épidémique, comme on la fouvent obfervé depuis Hippocrate.

On à plus entendu parler cette année, de maladies de fein & de cancers, qu'on n'a coûtume ; j'ai fait cette remarque avec plufieurs autres Médecins, du nombre defquels eft M. Aftruc. -

ll eft entré à l'Hôtel-dieu, en Ofobre, 1 500 malades; _ il y en avoit le premier jour 3087.

I eft mort 1503 perfonnes; 821*hommes & 682 femmes. + Ieft 1887 enfans; 954 garçons & 933 filles; de ces 1887 enfans, on en a porté aux Enfans-trouvés 317, 172 garçons 14 5 filles. ? $ IH s'eft fait dans ce mois 370 mariages.

NON POE MB RCE.

Le mois de Novembre a été humide, quoiqu'il ait peu plu ; la hauteur de l'eau de pluie n'a monté dans ce mois; qu'à ro lignes & deux cinquièmes de ligne ; mais il y a eu beaucoup de brouillards, ils ont mémesété continuels les quinze » derniers jours ; ces brouillards ont été fort épais, mais ïls ne _ fentoient pas mauvais , ils ne piquoient point les YEUX , - comme on en a fouvent vü, ils étoient feulement très- humides & froids. | j

L'air a prefque toûjours été-obfcurci dans ce mois, parce

e le ciel a le plus fouvent été couvert de nuages, ou bien il faifoit du brouillard ; le foleil a été douze jours de Muïte fans paroître aucunement ; c'eft ce qui faifoit que fous vent l'après-midi le froid-n'étoit pas moindre que le matin. I yaeu prefque toutes les nuits dans ce mais, des gelées “blanches, qui ont été fortes; il a fait très-froid cette année en Novembre : la liqueur du thermomètre eft defcendue au Dore du terme de la glace, les fix derniers jours de

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1e F ce mois.

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136 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Pour ce qui eftdu baromètre, l’atmofphère a été léger les premiers jours ; le mercure y eft defcendu à 27 pouc. 2 +dign. & au contraire, dans les derniers jours, l'air a été fort pefant; le mércure a été à 28 pouces les fix derniers jours, & même le 29 & le 30 il eft monté jufqu'à 28 pouces 3 lignes.

Le vent a peu varié pendant ce mois, il eft venu de l'eft les fix derniers jours fans changer, & les fix jours précédens il étoit venu conftamment du fud ; les trois premiers jours du mois il a été oueft, & les autres jours il a été fud-eft ou fud-oueft ; il n’eft point venu du nord à Paris, dans tout le cours de Novembre.

I y a eu dans cetemps des pleuréfies ; & ces maladies ont été ou très-faciles à guérir ou très-dangereufes. |

On a auffi des rhumes & d'autres maladies catarreufes, comme des maux de gorge. M. le Monnier, Médecin de Yhôpital de Saint-Germain , m'a dit que ces maux de gorge

ont été fort communs ; & il a eu occafion d’obferver que l'humeur de ces fluxions s'eft quelquefois portée de la gorge fur les tefticules.

Il a continué d'y avoir des petites véroles, des fièvres catarrales, des dévoiemens & des dyfenteries.

H y a encore eu ce mois-ci des apoplexies. M. de la Sône a quelques perfonnes , dont les bras font devenus tout-à- coup paralytiques.

I eft.entré à l'Hôtel-dieu, 173 3 malades ; il y en avoit le premier du mois 3081.

Ï eft mort à Paris, 1533 perfonnes; 787 hommes &

46 femmes.

I eft 1864 enfans; 951 garçons & 913 filles : de ces 1364 enfans, on en a porté aux Enfans-trouvés, 2973 ‘747 garçons & 150 filles.

Le nombre des mariages qu'on a faits pendant ce mois,

monte à $ 49e DECEMBRE.

L'air à été affez tempéré en Décembre par FREE au roid:

24 HALLE LL 45 nos | M, E SIC: E CE.S 137 froid : j'ai remarqué qu'il n'étoit pas beaucoup moins froid Faprès-midi que le matin; le ciel a preique toûjours été couvert. Le jour le plus froid de ce mois a été le 12, le vent étant oueft, & le baromètre à 28 pouces : a liqueur du. thermomètre eft defcendie ce jour-là à 2 degrés au deffous du terme de la glace. | _ La pefanteur de fair a été grande pendant ce temps : Je ercure a très-fouvent été à 23 pouces & une ligne dans le baromètre, & il y a toüjours été au deflus de 274 pouces, fi c n'eft le 22 au matin feulement qu'il defcendit à 27 pouces, le vent étant fud-oueft: il pleuvoit, & l'efprit de vin étoit dans le thermomètre à 6 degrés au deflus de a congélation; il defcendit l'après-midi d’un demi-degré, pen- dant que le mercure remontoit dans le baromètre, & que le vent tournoit à l'oueft.

Les vents font venus de tous côtés en différens temps pendant ce mois ; cependant ils font le plus fouvent venus de l’oueft, rarement ils ont fouflé du fud.

Il a peu plu pendant ce mois: la hauteur de la pluie n’a été que de 7 # lignes. L'eau de la rivière a été très-bafle; cependant la fécherefle de l'air n'a pas été proportionnée à la petite quantité de pluie, & à celle de l'eau dans la rivière, parce que la hauteur de Ia rivière dépend de la pluie & des » fontes de neige, au lieu que l'humidité de l'air dépend auffi _ des vents & du foleil.

Di La dyfenterie qui avoit eu cours dans les deux mois der- niers, a beaucoup diminué dans celui-ci; il y a cependant eu beaucoup de dévoiemens.

à Ces dévoiemens paroifloient être caufés par une humeur catarreufe, qui a produit auffi dans quelques perfonnes une La fièvre fingulière. 3 ë Cette fièvre étoit avec douleur ou embarras dans Ja tête, & & quelquefois avec afloupiffement ; elle devenoit putride Lrfqu'elle étoit négligée. Prefque tous les malades de cette fièvre avoient mal à la gorge : ce mal de gorge prenoit dans ‘4 quelques-uns dès le commencement de la maladie, & dans

Min 1749. 15

è |

128 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE d’autres il furvenoit vers a fin. L’humeur qui caufoit ce mal de gorge, commençoit dans quelques malades par faire fentir de la douleur dans les entrailles avant que de fe portér à la gorge, & elle ne fe faifoit plus fentir dans les entrailles lorfqu'elle étoit à la gorge. Nous avons oblervé que lorfque avant la guérifon de la maladie elle quittoit la gorve, elle fe failoit auffi-tôt fentir dans quelqu'autre partie du corps.

Dans d'autres malades , cette humeur a commencé parde vifage, elle a caufé de Y’enflure; alors elle tomboit du vifage fur la gorge, enfuite elle abandonnoït la gorge pour fe jeter fur un côté de la poitrine.

Il y en a eu auxquels elle a attaqué d'abord le côté de la poitrine, & enfuite elle eft montée à la gorge.

Cette douleur de côté paroifloit ne point intérefler les poumons ni la plèvre : les malades ne toufloient point, & les mouvemens de la refpiration ne fe faifoient pas plus fentir ‘dans le côté douloureux.

Les faignées plus moins fréquentes, & faites en plus ou moins de temps, felon la vivacité de la maladie, y étoient utiles, & même néceflaires le plus fouvent : enfuite les décoc- tions de bourroche, laitue, chicorée fauvage & cerfeuil, ren- dues fixatives par le {el de duobus | & fur-tout la purgation, foulageoient les malades, & enfin les guérifloient. Le tartre ftibié, donné en différentes doles, felon les âges & les tempé- ramens, y aréufli, & il n'a prefque agi que par bas dans ces malades, parce qu'ils étoient difpofés au dévoiement, qui étoit auffi une maladie courante dans ce temps; & les malades de cette fièvre qui avoient le dévoiement décidé, n'avoient point le mal de gorge : ce qui eft extraordinaire, c'eft que, quoiqu'ils euffent le devoiement, ils avoïent en même temps l'embarras douloureux dans la tête, dont j'ai parlé. |

IL eft entré 1742 malades à l'Hôtel-dieu: il y en avoit le premier du mois 3151. |

ILeft mort en Décembre, 1776 perfonnes; 9 29 honimes & 347 femmes.

H eft 1764 enfans; 883 garçons & 881 filles : de

Wir," DT Hi SN SC: LE N, © nus 139. cès1764 enfans, on en a porté aux Enfans-trouvés 29 2; 142 garçons & 150 filles. | .. On na fait que 27 mariages dans Paris pendant tout le mois de Décembre.

RECAPITUL AT I0 Y: Hu KE:R.

. L'Hiver de 1749 a été humide; il n'y à point fait de ces gelées qui rendent fair {ec , cependant il a fait froid. Le jour le plus froid de cette année a été le 9 Février : la liqueur du thermomètre defcendit ce jour-là à°6 dégrés au deffous du terme de [a glace. |

PER. INT E M P.S

Le Printemps a été fort tempéré; il a cependant été plus fec que ne le doit être cette faifon pour les biens de 1a terre, fur-tout dans ce pays.

ENENEEN

L'Eté a été fec auffi, mais il na pas été fi tempéré que le Printemps; il y a fait extraordinairement froid & très-chaud. Le commencement de cette faïfon à été froid : Le 2 7 Juin, la liqueur du thermomètre eft defcendue à 7 degrés au deffus du terme de la glace; & au contraire, le 1 3 Juillet clle eft montée à 29 + degrés. If faut remarquer que les productions de la terre du commencement de l'été ; comme font les cerifes & les pois, n'ont été ni abondantes, ni auffi bonnes qu'à Fordinaire.

À AUTOMNE

L'Automne 2 été plus sèche qu'humide : les vents de Léquinoxe n’ont pas été fenfibles. 1 n'y a point eu de fruits cette automne, ou il y en a eu peu.

& RÉSU1ITAT. : En général, Fannée n'a été ni humide ni sèche : 1a Si

140 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE quantité d'eau de pluie a été en hauteur de 1 9 pouces + de ligne. Les rougeoles ont eu cette année un caraétère difficile pour fortir & pour fe difliper, fans cependant avoir été extraordinairement dangereufes : les taches rouges étoient long-temps à { diffiper, fur-tout au vifage.

Les enfans ont été fujets cette année, fur-tout dans l'hiver, à des douleurs fourdes dans le ventre, dont.ils fe trouvoient foulagés lorfqu'il leur fortoit des boutons au corps, ce qui eft arrivé à un grand nombre : ces boutons étoient formés par une humeur fluide un peu jaunâtre, contenue fous l'épi- derme.

Il eft entré à l'Hôtel-dieu dans le cours de l’année, 21082 malades : le mois il y en eft moins entré, c’eft en Otobre; & au contraire, le mois de Mars eft celui il y en eit le plus entré.

Le mois il eft plus mort de monde à Paris cette année, c'eft en Décembre; celui au contraire il en eit moins mort, c'eft en Février.

Il n'y a point eu de mois il ne foit mort plus d'hommes que de femmes : il n'eft mort dans le cours de cette année que 8743 femmes, pendant qu'il eft mort 9 864 hommes, de forte que le nombre des hommes morts eft à celui des femmes mortes cette année à Paris, à peu près comme 8 eftà 7.

Il faut remarquer qu'un nombre quelconque de femmes vivent plus qu'un pareil nombre d'hommes, felon le rapport de 18 à 17, comme on l'a obfervé en Angleterre, fuivant _ce qui eft écrit par M. de Montmor, de cette Académie,

dans fon Analfe fur les jeux de hafard.

Le nombre total des perfonnes mortes à Paris pendant l'année 1749, monte à 18607, en y comprenant les morts des maifons religieufes & ceux des Religionnaires.

Il eft pendant ce temps 22933 enfans, dont on en a porté 3775 aux Enfans -trouvés.

I eft plus de garçons que de filles, tant enfans légi- times qu'enfañs-trouvés : il eft 13742 garçons, pendant

BR SOUS T EN COPINE rar qu'il n'eft que 11191 filles. Or HDi 569, qui eft à très-peu près la même chofe que 57, ou que 19 à 20. Ainfi il eft cette année 20 garçons pour 1 9 filles environ. M. de Parcieux, de cette Académie, rapporte#dans fon ÆEfai fur les probabilités de la durée de la vie humaine, une fupputation faite à Paris, dans la paroiffe de Saint Sulpice, de trente années confécutives, il eft 24 garçons pour 23 files ; & une autre fupputation faite pendant quatre-vingt- deux ans de fuite à Londres, il eft 18 garçons pour 17 filles : de forte qu'on peut dire qu'en Europe, commu- nément il vient au monde plus de garçons que de filles.

H eft plus d’enfans en Mars qu'en aucun autre mois de Pannée; & au contraire, celui il en eft moins né, c'eft - en Décembre,

IL s'eft fait moins .de mariages en Décembre que dans aucun autre mois; & au contraire, c'eft en Novembre qu'il s'eft fait plus de mariages : il s'en eft fait cette anne, en tout, 4263.

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12 Nov. 3749+

142 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

CON SPTERLU. CT RON D'UN NOUVEAU TOUR A FILER LA SOIE

DES COCONS

Par M. DE VAUCANSON.

Li grand ufage l'on eft en France & dans prefque tous les pays étrangers, de porter des étoffes de foie, fait affez voir combien il eft important pour le gouvernement d'en augmenter & d'en perfeétionner la matière première.

H fe fabrique dans le royaume pour neuf à dix millions de foie par an, & fon eft encore obligé chaque année d'en tirer de l'étranger pour quatorze à quinze millions, pour ali- menter nos fabriques.

On emploie dans ces fabriques deux efpèces de foie dif- férentes, l'une fert à faire la chaine des étoffes, & l'autre fert à en faire la trame.

Celle qui fert à faire la chaîne eft la plus précieufe, parce qu'elle eft la plus travaillée, & c'eft cette qualité de foie que nous tirons principalement de l'étranger, parce que très-peu de gens ont eu jufqu'à préfent l'art de faire en France des foies affez belles pour avoir être employées à cet ufage.

Ce font les Piémontois qui nous la fourniffent, parce

ue ce font eux qui la travaillent le mieux, & qu'ils font même les feuls en Europe qui ka fachent bien travailler.

Tous les Etats du Nord il y a des manufaétures d’é- toffes de foie, font pareillement obligés d’avoir recours à eux pour la chaîne de leurs étoffes ; ils la leur vendent, ainfi qu'à nous, toute ouvrée & préparée, & ils fe réfervent par-là une main-d'œuvre qu’ils nous font payer d'autant plus cher aujour- d'hui, que la confommation des étoffes de foie augmente de plus en plus, ainfi que le nombre des fabriques étrangères.

Je ne crains point d'avancer que le produit de la foie

DES SCIENCES. 14 pourroit monter en France à un grand tiers de plus qu'il ne monte effectivement, foit par l'augmentation de fa qualité & par conféquent de fon prix, foit par la diminution du déchet, fi on tiroit de la matière tout le parti que l'on en peut tirer en la wavaïllant comme il faut; & ce qui con- firme mon opinion, c'eft que dans les endroits l’on fabrique la foie le plus mal, & elle eft moins eftimée, j'en ai fait faire à ne la pas diftinguer des plus belles. = Pour faire voir le peu de parti qu'on a tiré jufqu'ici de la foie qui vient chez nous, & l'avantage confidérable qu'on en retireroit en la travaillant autrement qu'on ne fait, ïl faut premièrement remarquer que la foie fe fabrique d’abord fous une efpèce générale qui eft {a grèze; on entend par foie grèze la foie fimplement tirée des cocons par le moyen d'un tour propre à cet effet. _ Cette foie grèze reçoit enfuite différentes fortes de pré- parations propres aux manufadtures, on en fait de l’organfm ou on en fait des trames.

L'organfin n’eft autre chofe que deux, trois, & quelque- fois quatre brins de foie grèze tordus chacun en particulier fur un moulin, & retordus après tous enfemble fur un autre moulin, & cela pour leur donner une force & une elafticité propres à obéir aux différentes extenfions qu'ils foufirent far le métier lors de la fabrication de l'étoffe. Ces différens brins de foie grèze ainfr tordus & retordus, fe nomment organfin ou foie organfnée, & font toûjours employés pour faire Ji chaîne des étoffes.

La foie pour trame eft ordinairement compofée de deux ou trois brins de foie grèze qu'on met pareïllement für le moulin pour y être tordus très-lévèrement enfemble; mais comme elle ne fouffre aucun effort fur le métier, les brins men font jamais tordus féparément.

La trame eft auffi compofée quelquefois d'un feul brin de foie grèze tordu fur lui-même, que l'on nomme poil.

Comme ces trois efpèces particulières de foie ne font, à Proprement parler, qu'autant, de différens apprêts donnés à

ne

144 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

la première efpèce qui eft la grèze, c'eft de cette première opération que dépend principalement la bonté des trois autres, & c'eft précilément cette première fabrication en foie grèze qui eft mauvaife en France, & dans laquelle uniquement les Piémontois ont lavantage fur nous pour la fabrication des organfins.

L’efpèce de foie la plus chère eft donc l'organfin, parce qu'outre qu'elle eft compofée de la plus belle matière, c'eft- à-dire, des cocons les plus fins, elle eft encore plus travaillée dans fes fecondes opérations, & l'excédant de fon prix eft toüjours d’un tiers fur celui de Ia trame.

Si notre foie dans fa première opération étoit travaillée comme il convient, on pourroit en faire de l'organfin, & gagner ce prix confidérable qui n'eft que fur la main-d'œuvre, & que nous payons argent comptant aux Piémontois, qui plus avifés que nous ne font prefque que de l'organfin, parce qu'ils ont fenti que le double apprêt qu'on eft obligé de donner à de la fimple foie grèze, une fois bien tirée, pour en faire de l'organfin, ne leur coûte pas le furplus du prix auquel cet organfin eft acheté au defius de la trame.

I! y a de plus une perte réelle de matière dans la manière dont on tire chez nous la foie des cocons : une même récolte donne toûjours des cocons de plufieurs qualités différentes, elle en donne de fins, de demi-fins, de fatinés & des dou- bles: les cocons fins font ceux dont le tiffu préfente à leur fuperficie un grain très-fin & très-ferré, les demi-fins ont Xe grain plus lâche & plus gros, les fatinés n’en ont point du tout, & les doubles font ceux deux vers ont travaillé & fe font enfermés enfemble.

Chaque qualité de cocons donne une foie différente ; les fins donnent la plus belle, les demi-fins tirés avec preçau- tion, c’eft-à-dire, avec une eau moins chaude, en donnent une peu différente; les fatinés en donnent une de beaucoup inférieure, & les doubles n’en fauroient donner qu'une très- mauvaife, qui n'eft prefque jamais d'aucun ufage dans {a fa- brication des étofles. û

. On

D. HUsN 4 GAC 1 E NC: ENS 145 * On a fait jufqu'ici tout ce qu’on a pour perfuader ceux qui font tirer de Ja foie, qu'il falloit tirer chaque qualité de cocons féparément, qu'il y avoit beaucoup à gagner par la qualité de la foie qui en rélultoit; mais on n’eit pas encore parvenu à leur faire entendre raïfon là-deflus. [1 y a beau- coup d'endroits l’on tire tous les cocons péle-méle fans aucun triage, & par-tout ailleurs on fe contente de tirer féparément les doubles & les fatinés ; les fins & les demi-fins font toûjours mis enfemble dans la même bafine, en forte qu'on gâte les beaux par le mélange des inférieurs, qui eux-mêmes n'en font pas mieux tirés, parce que chaque qualité de cocons exigeant une eau d’un degré de chaleur différent, il arrive que quand l'eau eft au degré de chaleur convenable pour les cocons fins, elle fe trouve trop chaude pour les demi-fins qu'elle fait monter en bourre, & que fr Jon veut les purger comme il convient, on perd alors {a plus belle foie qui s’enlève des cocons fins; fi au contraire on tient l'eau d'un degré de chaleur plus modéré & conve- mable pour les demi-fins, la foie des fins ne fe détache plus

ue très-difhicilement, d'où il s'enfuit un déchet très-confi- dérable, indépendamment de la mauvaile qualité de foie que Yon fait. | | Ê

On fera peut-être furpris de ce qu'une nation auffi active &c auffi induftrieufe que la nôtre, foit reftée auffi long-temps dans l'ignorance relativement à cet objet, & que le propre intérêt des particuliers ne les ait pas engagés à fe perfectionner & à initer d'auffi proches voifins.

I eft bien aïfé de fentir que c'eft l'effet d'unes mauvaife habitude contraétée dès les commencemens, & qui n’a point changé, parce que la befogne eft reftée entre les mains des gens de la campagne, incapables de fe corriger d'eux-mêmes, &ordinairement peu difpofés à fe laifer inftruire.

J'ai cru que le meilleur moyen étoit de fuppléer à {eur ‘ignorance & à leur négligence, en corrigeant & en perfec- tionnant le tour dont ils fe férvent pour cette opération. » Ce tour ft celui dont ils fe fervent pour tirer la foie Mëm. 1749. . "LR

146 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE des cocons par le moyen de l'eau chaude; il eft formé par un bâti de bois qu'on nomme le banc du tour; fa fongueur eft d'environ 4 à $ pieds fur 2+ de large; il a 2 pieds de hauteur fur le devant & 22 fur le derrière; fur une traverfe de devant, il y a deux filières de fer à fix pouces environ de diftance lune de Fautre, & fur le derrière il y a un de- vidoir de deux pieds de diamètre pour recevoir la foie; ce devidoir eft mobile fur les deux extrémités de fon axe par le moyen d'une manivelle; voici comment fe fait l'opération.

Sur le devant du tour eft une bafline de forme ovale remplie d'enu, pofée fur un fourneau; la femme qui doit tirer la foie & qu'on nomme la tireule, eft aflife devant cette baffine; quand l'eau eft prefque bouillante, elle y jette dedans deux ou trois poignées de cocons, & avec une petite elpèce de balai fait avec des branches de bruyère les plus fines, dont toutes les pointes coupées forment un plan droit, elle enfonce légèrement tous les cocons dans l'eau & à plu- fieurs réprifes, ce qu'on appelle faire la battue.

Quand les cocons font bien détrempés, tous les brins s’at- tachent aux pointes du balai, alors la tireufe prend ces brins avec la main, & les enlève jufqu'à ce qu'ils viennent bien nets, ce qu'on appelle purger la foie.

. Quand la tireufe voit tous ces brins de cocons bien pur- gés, elle prend quatre, cinq, fix, & quelquefois, fuivant 4 groffeur de la foie que on veut faire, douze & quinze de “ces brins qu'elle paffe dans le petit trou d’une des filières ; elle en paffe le même nombre dans le trou de la feconde, & tous ces brins de cocons, au fortir des deux filières, ne: forment plus que deux fils de foie.

Une feconde file prépofée pour faire tourner le devidoir,. & qu'on nonime la tourneule, prend alors ces deux fils de: foie pour les attacher fur le devidoir qu'elle fait enfuite tourner d'une très-grande viteffe au moyen dela manivelle; ces deux fils de foie viennent s'y coucher & y former deux écheveaux féparés à ‘la faveur d'un guide pour chaque fil.

Les deux guides font faits avec deux petits fils de ‘fer de

D Es. Sc 1E N CES... 147

quatre pouces de longueur, dont une extrémité eft plantée ndiculairement. dans une règle bois à fix pouces de pq lun de:lautre; & l'autre extrémité eft recourbée en. forme: d'anneau* dans lequel on pañle le fil de foie: la règle qui porte ces. guides fe meut horizontalement & pa-. ralllement à l'axe du devidoir, & comme fon mouvement eft de droit à gauche, on a nommé cette pièce du tour, le va à vient. :

A mefure que chaque cocon fe développe, la tireufe a foin d'en fournir de nouveaix pour conferver toûjours fa mème égalité au fl de foie dont la grofleur lui eft aflignée. par deux nombres, comme de quatre à cinq, de cinq à fix, ou de fix à fept cocons, & de même en augmentant.

- Comme chaque fil de foie compofé de plufieurs cocons arrivoit fur le devidoir fans faire Corps; c'eft-à-dire, fans être liés les uns avec les autres, on imagina d'abord de faire. pafier chaque fi de foie, au fortir des filières, fur la circon+ férence de deux cylindres, foit pour occafionner une preflion de tous les brins, dont la gomme dont ils font chargés eft encore aflez liquide pour fe coller, foit pour en exprimer Thumidité, & les faire arriver par ce moyen bien fecs & bien liés enfemble fur le devidoir: les cylindres dont on fe fervoit étoient fimplement des bobines pafées fur une-broche de fer, c'eft pourquoi on appela cette façon de tirer la foie, tirer à {a bobine.

® La preffion faite fur ces cylindres ou bobines n'étant point aflez forte, & donn x fils de foie une forme plate, dont les brins 6 étoïent point encore aflez liés, aflez fecs.&c: aflez unis, on fupprima les bobines, & à leur défaut on _ imagina de croifer, au fortir des. flières, les deux fils de Joie Jun fur l'autre un certain nombre de fois.

Cette méthode réuflit à merveille, la foie reçut Séalbrs une qualité bien différente; de plate qu'elle étoit parle moyen an, elle devint ronde au fortir des croifures; les brins, quoique joints parallèlement les uns fur les. autres, parurent bien liés enfemble, & ne faire qu'un même corps, + ds

148 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Elle arriva aufli plus sèche & plus nette fur le devidoir; dès: ce moment les Piémontois tirèrent toutes leurs foies de cette: manière, que l’on nomma tirer à la croifade.

Après la découverte des croifures , les Piémontois ajoù-- tèrent plufieurs autres perfections à leurs tours à tirer la foie.

Les guides qui conduifent les fils de foie fur le devidoir,. recevoient leur mouvement par une poulie dont l'axe étoit: fixé fur une traverfe du tour, & cette poulie étoit müe par une corde fans fin qui partoit d’une autre poulie fixée fur Jun des bouts de l'axe du devidoir, d'où elle recevoit {om mouvement.

Ce mouvement, qui doit être en telle proportion avec chaque révolution du devidoir pour que les fils de foie chan- gent continuellement de place, & ne {e repofent pas les uns fur les autres, étoit toûjours dérangé par les différentes varia-- tions de la corde fans fin.

Les Piémontois ont prohibé ce mouvement à corde, & y ont fubftitué quatre roues en engrénage d'un nombre de- dents déterminé, pour que la proportion du mouvement des guides fût toüjours conftante avec chaque révolution du: devidoir. g

Is ont auffi augmenté la diftance: des guides. au: devidoir, qu'ils ont fixée à 3 pieds 2 pouces de notre melure, afin que: les particules d'eau qui accompagnent les fils de foie euffent le temps d’être frappées par l'air, & de s'évaporer davantage:

Toutes ces règles, & plufieurs autres concernant le tirage des foies, font portées dans un règlement que le roi de: Sardaigne fait oblerver dans toute la rigueur. ,;

Quoique les tours à la croifade des Piémontois aient paflé. jufqu'à préfent pour les meilleurs, je les ai trouvé encore. fufceptibles d’être fimplifiés & perfectionnés.

J'ai fupprimé les quatre roues par lefquelles les guides reçoivent leur mouvement de l'axe du devidoir ; comme elles, font faites en bois, elles font fujètes à beaucoup d'inconvé- niens : les dents sufent & fe caffent aifément ; l'arbre qui: communique le mouvement du devidoir aux guides, & qui:

Das Micur EN: Cm 149 eft auifr de bois, eft très-fujet à fe tourmenter à caufe de fa longueur, qui eft de trois pieds; en forte qu’il faut toûjours avoir un double de toutes ces pièces, pour en changer au premier accident, afin de ne pas interrompre le cours du tirage; ce qui occafionne un plus grand entretien, & par cunléquent plus de dépenfe.

J'ai remis en ufage la corde fans fin, en rendant mobile la traverfe qui porte la poulie des guides, à 11 faveur d'un poids de quatre à cinq livres qui tire d’une force con{tante- cette traverfe du côté oppolé à la corde fans fin : la poulie, ainfi que la traverfe & le, poids, obéiflent toûjours aux moindres. variations de la corde, d’où il s'enfuit un mouve- ment toüjours régulier pour les guides, qu'on proportionne avec celui du devidoir par la différence des diamètres des. deux poulies.

J'ai trouvé que la proportion de vingt-deux parties & demie pour la poulie du devidoir, & de trente-fept pour poulie des guides, étoit la plus avantageule pour bien diftri-

buer la foie fur le devidoir.

_ Les croifures des deux fils de foie fervent non feulement, comme je l'ai dit ci-deflus, à exprimer les parties aqueufes, & à lier les différens brins de cocons enfemble pour n'en. former qu'un feul, elles fervent encore à rendre la foie bien. nette & bien unie, parce que. les moindres faletés & les. moindres petits bourrillons. qui viennent avec les brins de. cocons lorfqu'ils mont pas été fufhfamment purgés, s’arré- tent à la croifure., & ne pouvant paffer outre, ils font caffer: les fils de foie.

- Mais. comme les tireufes craignent cet accident, parce: qu'elles font alors obligées de recommencer les croilures.. opération qui n'eft pas aifée, elles font un très-petit nombre de ces croifures, crainte de récidive : Ha foie arrive pour lors fur de-devidoir beaucoup moins sèche, beaucoup moins nette: & beaucoup moins, forte, parce que les différens. brins {e- trouvent moins liés & moins adhérens. .

On leur recommande cependant de croifer beaucoup; elles:

T üÿ,

150 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

font même aflreintes par les règlemens en Piémont, maïs elles n'ont aucune règle pour s’aflurer du plus ou du moins : il eft impoffible à une tireufe de faire toüjours le même nombre de croilures, parce qu'elle eft obligée de les faire en roulant les deux fils de foie avec le bout du doigt index fur le pouce, dont le taét eft entièrement perdu par l'eau bouillante dans laquelle elle eft obligée de mettre fes doigts à chaque inflant; fi elle en fait trop, les fils de foie ne peuvent plus gliffer fun fur l'autre, & il faut abfolument recommencer; fr elle en fait trop peu, elles ne produifent pas tout leur effet, & c'eft ce qui arrive le plus fouvent.

J'ai levé cet inconvénient dans mon nouveau tour, en donnant à la tireufe un moyen prompt &t facile de faire tel nombre de croifures qu'il lui fera pieicrit, & cela fans tou- cher au fil de foie.

Entre les filières & les guides, j'ai placé un cercle de bois d’un pouce de large fur 8 lignes d’épaiffeur, dont le dia- inètre, pris des bords intérieurs, eft de 6 +: pouces, égal à la diftince qui eft entre les deux filières. Ce cercle eft placé au milieu de la largeur du tour, foûtenu par {es bords exté- rieurs fur trois roulettes montées fur un petit chaffis de bois: fur le bord extérieur du cercle efl une canelure dans laquelle pañle une corde fans fm qui vient fe rouler fur une autre poulie de même diamètre, dont une extrémité de fon axe porte une petite manivelle qui fe trouve à la portée de la main droite de la tireufe: le chaflis qui porte le cercle peut fe hauffér ou baïfler, afin d'avoir la facilité de tendre plus ou moins la corde fans fin.

Quand la tireufe a paffé dans les deux filières fe nombre des brins de cocons qui doivent compoler les deux fils de foie , la tourneufe les prend auffi-tôt des mains de la tireule, & elle pafle chaque fil de foie dans une petite boucle de fer ou d'acier plantée dans le bord intérieur du cercle, & enfuite dans 11 boucle des guides, pour arriver jufqu'au devidoir fur lequel elle les attache; & c’eft pendant qu'elle fait cette opé- ration que la tireule fait fes croifures, en tournant fimplement

48 DE SAME. EN -CUE EL ne DE. a petite manivelle dont je viens de parler. Chaque tour de . manivelle fait faire deux croifures, la première fe trouve-entre - les filières & le cercle, & la feconde entre le cerde & les guides: en faifant douze tours: de manivelle, les deux fils de foie fe trouvent croifés douze fois devant le cercle & douze * fois derrière; nombre que l’on augmente ou que l’on diminue fuivant la groffeur de la foie que l’on fait. Outre Ja grande facilité & l'extrême précifion avec le£ elles fe font ces croifures, on a encore l'avantage d'en faire le double, fans que cela empêche en aucune façon les fils de foie de glifier l'un fur l'autre, parce que ce plus grand nombre -{e trouve partagé en deux parties; ce qui forme deux croi- fures éloignées d’un pied environ l'une de l'autre. Si la foie reçoit fes principales perfections de l'eflet des croïfures, il eft aifé de concevoir que plus on pourra fans inconvénient augmenter le nombre de ces croifures, plus on fera une foie parfaite. En effet, fi la preffion que font les croilures fur les deux fils de foie, fert à unir & à lier les différens brins de cocons “qui les compofent, il eft certain que plus il y aura de croi- ‘fures, plus la cohéfion des brins fera grande, & que par conféquent le fil de foie aura plus de force; mais comme des croifures, par cette nouvélle méthode, pourront toüjours “être en même nombre, il en réfultera toüjours une égalité + :de force dans la foie, qui eft une des qualités principales |: “qu'elle doit avoir. - Si la preffion des croïfures contribue à la netteté des fils de foie en s’oppofant au paffage des bourrillons, il eft indu- bitable que ce qui aura paffé dans la première croifure, pourra s'arrêter dans la feconde, & ce fera toûjours une barrière de -plus qui empèchera les fils de foie d'arriver fur de devidoir _: avec le moindre corps étranger; le nombre des croifures étant “toüjours égal, les obftaclés feront toûjours les mêmes, d’où # réfultera une foie toûjours également nette & toûjours également unie. Si la preffion des croifures fert encore à exprimer les

152 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE particules d’eau dont les brins de cocons font toûjours enve- loppés au fortir de la bafline, il et conftant que plus il aura de croifures, plus il y aura de preflion, & par as À quent plus de particules d'eau en feront détachées; celles qui n'auront point été enlevées par la première croilure, le feront par la feconde : on voit auili très-fenfiblement quantité de particules d’eau s'enlever en forme de brouillard de fa feconde croilure, fans laquelle ces particules d'eau feroient arrivées avec les fils de foie fur le devidoir, & auroient {ervi à les coller les uns fur les autres; inconvénient très-dangereux pour le devidage des écheveaux, parce qu'outre la longueur du temps qu'on eft-obligé d'y mettre pour venir à bout de les devider, les fils collés s’écorchent ou fe caffent très- fouvent.

Indépendamment de toutes les perfeétions que la double croïfure donne à la foie, elle fournit aufit à la tireufe le moyen de donner aux deux fils de foie le plus d'égalité qu'il eft poflible.

La tireufe n’a d'autre moyen pour s’aflurer de l'égalité des deux fils de foie qui fe font en même temps, que de les tirer chacun avec le même nombre de cocons; mais lor{que les cocons tirent à leur fin, c’eft-à-dire, lorfqu'ils font pref- que tous développés, ils fouriflent des brins beaucoup plus foibles; fouvent deux, trois, & quelquefois quatre de ces brins n'en valent pas un de ceux qui commencent à fe développer: la tireufe eft alors guidée par la dernière croilure, qui fe porte dans l'inftant du côté oppolé au fil le plus foible, & elle eft avertie par-là qu'il faut y jeter des brins de cocons, jufqu'à ce que la croifure foit revenue dans le milieu.

Cette double croifure ne pardonne aucune faute ni aucune négligence dans l'opération du tirage: fr les cocons n’ont pas été auparavant bien triés pour être tirés féparément, & fi la tireufe dans fes battues n'en purge pas les brins jufqu'à ce qu'ils viennent bien nets & ‘entièrement dépouillés de toute leur mauvaife foie, la moindre côte, ou le moindre petit flocon de cette mauvaife foie, fera cafler les fils à

l'arrivée

mi E:SAMSLC TE ,N) CHEN 153 l'arrivée des croïfures; & fi elle n’a pas foin de même de fournir des brins aux fils trop foibles, la croifure fe portant trop du côté oppolé, .emportera le fil foible, & le fera auffi caffer.

+ J'ai placé entre les filières & Ia première croifure, une fourchette qui contient fes deux fils de foie, & qui empêche que la croifure ne fe porte plus d'un côté que d'autre, Les ouvrières qui ne font que commencer, pourront s'en fervir jufqu'à ce qu'elles foient exeïcées à jeter prompiement le brin; cette fourchette leur donnera plus de temps pour fournir des cocons au fil foible, qui eft toûjours emporté par le plus fort, ce qui occafionne fouvent Ja rupture des deux fils. - Je fuis bien perfuadé que les mauvaifes ouvrières ne trou- veront pas d'abord ce nouveau tour à leur fantaifie, & qu’elles diront qu’il fait cafler la foie plus fouvent que les autres; mais il faut commencer par leur apprendre que ce tour a été imaginé exprès pour faire caffer tous les fils qui auroient arriver fur le devidoir avec quelque défaut, & que quand elles fe feront habituées à bien trier les différentes efpèces de cocons , à les bien purger à la battue, & à entretenir foi- gneufement l'égalité des brins, ce tour ne Fa paroïtra plus faire caffer la foie auffi fouvent ; elles verront au contraire

b:- : le pr: FE

qu'il eft bien plus aifé & bien plus commode que leur tour ordinaire, indépendamment d'une foie bexucoup plus belle & beaucoup meilleïre qu'elles feront.

On voit en efét;, par tout ce que j'ai dit ci-deflus, com- bien le tour à la double croifade a d'avantage fur le tour ordinaire ; il donne à la foie une plus grande force, en joi- gnant par une preffion double les diférens brins qui l1 com- pofent; il la rend nette & unie, en s’oppofant doublement au ice des corps plus groffiers ; if en détache les parties aqueufes par une double compreffion ; il affure l'égalité de _ chaque fil de foie par la direction de fes deux croifures; il donne à la tireufe un moyen très-facile pour croifer, & pour croifer avec précifion ; il ne fouffre aucune négligence, il exige au contraire toutes les précautions préalablement

Mém 1749, . V

554 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE néceffaires à cette opération; enfin il empêche qu'on ne pâte une matière aufh précieufe, pour le remplacement de liquelle on eft obligé de fortir tous les ans une fi groffe fomme d'argent du royaume.

Plufieurs expériences ont confirmé ce que je viens d’a- vancer en faveur de ce nouveau tour: on a fait éclorre des vers à foie cet été dernier à quatre lieues de Paris, près le village de Mai; les cocons qui en font provenus ont fourni de quoi faire cinquante livres de foie, qu'on à fait tirer fur quatre tours à la double croifade.

Cette foie a été mife par les connoiffeurs à côté de tout ce qui fe fait de plus beau en Piémont, pour ne pas dire au deflus ; & c'eft fur cette foie que j'ai fait quantité d’expé- riences pour m'aflurer de fa prééminence fur celle qu'on a auffi fait tirer fur un tour ordimuaire dans le même lieu, par les mêmes tireufes, & avec les cocons de la même récolte.

Dieés MSAo Tr Et NC UBSPMUNT 165

RABEAPENR CH ES SUR LES USAGES DU GRAND NOMBRE DE DENTS

DU CANIS CARCHARIAS.

Par M. HÉRISSANT.

TÉNON dit * que le grand chien de mer, appelé en Jatin Canis Carcharias , a plus de deux cens dents, & qu'il lui en croit tout le temps de fa vie.

.… Ce fameux anatomifte s'eft contenté de nous rapporter ce fait, en nous avouant finçèrement qu'il ne voyoit pas de quel ufage pouvoit être un fi grand nombre de dents, dont la plus grande partie eft recouverte de chairs fongueufes & molles à la face interne des mächoires de cette elpèce d'animal. |

Voulant vérifier moi-même obfervation de Sténon fur le grand nombre de dents de l'animal dont il eft ici queftion, je cherchai à me procurer une certaine quantité de mâchoires de cette efpèce de poiffon de mer, pour tâcher de découvrir la raïfon pour laquelle lAuteur de la Nature avoit ainfi placé une grande quantité de dents à leur face interne.

. Ce n'eft qu'après plufieurs obfervations & plufieurs réfle- xions, que je crois être enfin parvenu à la découverte que je cherchois; découverte d’ailleurs qui femble d'autant plus mériter notre attention, qu'elle nous offre une théorie nou- velle touchant la méchanique fingulière par laquelle les dents de certains poiffons fe renouvellent en peu de temps, & toutes les fois qu'il y en a qui viennent à manquer par quelque œufe que ce puiffe être.

On fait que:les dents de la: plüpart des: animaux font fl #Voyez dans fon Specimen Myobogfz , Canis Carchariæ Le caput

Z-

1$ Juin 1749:

\

156 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE implantées dans la fubftance offeule des mâchoires, & que lorfque celles qu'on nomme vulgairement deuts de lait dans la jeunefle, viennent à tomber, elles font remplacées par d’autres dents provenantes de germes dont le développement & laccroiflement fe font peu à peu dans les alvéoles, chacun de ces germes eft renfermé féparément. ss

I n’en eft pas de même du Canis Carcharias Requin , &c. dont les dents ne font pas implantées dans la partie offeufe ou cartilagineufe des mâchoires, mais naiffent, comme on * fait, d'une forte membrane fur laquelle elles font couchées, arrangces & articulées, pour ainfi dire, à peu près de même que les feuilles d'artichaut le font fur ce qu'on nomme com- munément le fond.

Lorfque quelques-unes des dents de cet animal viennent

à tomber d’elles- mêmes, ou à être arrachées de force, elles ne font point remplacées par d'autres qui pouflent & qui fortent fucceflivement du fond des cavités alvéolaires er conféquence de germes qui y font renfermés, comme dans Fhomme, &c. mais ce remplacement fe fait par des dents déjà toutes formées, lefquelies fe renverfent feulement du dedans de la cavité de la gueule vers le dehors , pour venir occuper la place de celles qui fe rencontrent de manque au rebord des mächoïes, ou aux environs; en forte que les dents mêmes du dernier rang, c'eft-à-dire, celles qui font les plus proche voifines de la bafe de ces michoires, auffr- bien que toutes celles qui font pareillement recouvertes par les chairs fongueufes & mollafies qui fe trouvent à la face interne de ces mêmes mâchoires , paroiflent n'être fituées en cet endroit que comme dans un lieu de référve, pour fervir à remplacer un jour celles qui pourroient venir à manquer dans les premiers rangs, ceft-à- die, celles qui ne font pas recouvertes naturellement par les chairs fon- gueules & mollales dont je viens de parler.

Cette manière par laquelle de nouvelles dents à toutes formées fuccèdent à celles qui fe trouvent de manque, s'exécute

en peu de temps, au lieu que celle qui fe fait par le moyen

: j À 3

D'E SD CIENCES. 157 germes qui croiffent du fond des alvéoles, eft très-longue., C'eft peut-être pour cette raifon que l’Auteur de la Nature Va employée en faveur de certains poiffons, qui font fouvent expolés à perdre de leurs dents par les violens efforts qu'ils font obligés de faire, foit pour mettre en pièces la proie fur faquelle îls fe jettent avec avidité, foit pour fe défendre ou pour attaquer, &c.

- I fuffit d'examiner avec attention différentes mächoires du Canis Carcharias , pour être convaincu que les dents qui fe trouvent placées le long de leur face interne fe renverfent fucceflivement du dedans de la gueule en dehors, afin de prendre la place de celles qui font tombées, & qui étoient placées au rebord / À, planche 1), à fes environs. Les obfervations que l'on pourra avoir occafion de faire fur cei- taines mâchoires de Requin, auront plus moins de rapport à celles que j'ai faites, & dont voici les principales.

Les mâchoires de Requin qui me font tombées entre les mains, étoient de deux efpèces. La première / planche Lér 11), avoit plufieurs rangées de dents difpofées par colonnes le long: de la face interne / AB, pl. 11) de chaque mâchoire, tant fupérieure qu'inférieure D. Ces dents étoient plates & triangulaires , comme on fait: elles avoient leurs bords [£F, Pl. 11) dentelés, de crainte peut-être que l'émail venant à fe fendre {ur ces bords, la félure ne gagnât d’une extrémité de Ja dent à Pautre, &c.

Les dents de la mâchoire fupérieure étoient plus larges que

celles de la mâchoire inférieure, qui étoient plus éfilées fur les

côtés: toutes ces dents qui fe terminoient par une pointe (PA, planche 11), voient chacune une bafe G affez épaiile, au moyen de laquelle elles étoient folidement attachtes fur la forte membrane qui recouvroit toute la face imeine des "mâchoires. Cette membrane /a, p/. 7), après avoir paflé par-deflus le rebord 4 des mâchoires, {e prolongeoit & s'éten- doit jufque fur leur face externe / , planche 1), à melie que és dents du dedans de la gueule avoient fervi à semplacer celles qui fe font trouvées de manque au rebord de ces mächoires. | V ü

158 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

IL faut diftinguer deux faces à chaque dent du Requin de la première elpèce, dont lune / #4, pl. 11) eft légèrement convexe, & l'autre (/, même planche ) eit évèrement aplatie. :

Ces dents doivent êue confidérces fous deux états diffé- rens dans le temps qu'elles font encore attachces aux mâchoires. lily en a qui font obliquement redieïlées /c, pl. 1, & K, pl. 11): y En a d'autres qui font couchées, & appliquées intimement les unes fur les autres / L, pl. 11). Celles qui font obliquement redreiltes, garniflent pour la plüpart le rebord / À, pl. 1) & les environs: ces dents peuvent être aperçües fans le fecours de la diffection; leur face lévère- ment aplatie regarde l'extérieur de la gueule, & leur face convexe eft tournée du côté de l'intérieur.

Les dents qui font couchées & appliquées les unes fur les autres , ne peuvent être aperçües, pour la plüpart, qu'après avoir enlevé les chairs fongueufes & molles dont parle Sténon, & fous lefquelles ces dents font cachées : elles font fituées le long de l'étendue de toute la face interne de chaque mâchoire ( Voy. pl. 11): leur face aplatie eft tournée du côté de la cavité de la gueule, & leur face convexe /O, pl. 11) regarde la furface interne des mâchoires.

Ce que je viens de dire des dents de la première efpèce de Requin, doit s'entendre de même par rapport à celles de la feconde efpèce planche 111) ; avec cette différence cepen- dant, que ces dernières ont un de leurs bords fort échancré (A, planche 111), ce qui fait qu'elles fe terminent par une pointe { B, même planche) dont la direction eft telle qu'elle regarde obliquement de devant en arrière. On doit oblerver de plus que les dents qui font les plus voifines de la bafe des mächoires de chacune de ces efpèces de Requin, font membraneufes dans le commencement de leur formation; qu'étant dans cet état, elles renferment dans leur intérieur une matière mucilagineufe prefque femblable à celle qui fe trouve

dans l'intérieur des. dents qui commencent à fe former dans

Je fœtus humain, &c. que.ces mêmes dents membraneufes fe durciffent à mefure qu'elles croiffent & qu'elles vieilliffent; &

k nimisnieé 1 Er NC 159 qu'enfin elles ont leur pointe nichée dans une efpèce de rigole (L, planche 111) qui fe remarque vers la bafe de chaque mâchoire.

Les mâchoires du Canis Carcharias {ont compofées chacune d'une feule pièce dans un äge avancé, & de deux dans jeuneffe , lefquelles font jointes enfemble à l'endroit de a fymphyfe du menton par une partie prefque femblable à celle que certains Anatomiftes ont obfervée entre les deux pièces de la mâchoire inférieure des jeunes fujets humains, & qu'ils ont regardée comme étant cartilagineufe; mais M. Hünauld, qui a de plus découvert une femblable partie * entre tous les os du crâne & de la face, {1 regarde comme membraneufe par rapport à ces os.

La mâchoire fupérieure du Canis Carcharias eft terminée poftérieuremént par deux condyles /Z, planche 1 ), dont la direction eft oppofée à celle qu'on reconnoît aux condyles de la mâchoire inférieure de homme, c'eft-à-dire que leur extrémité interne {Æ’, planche 1), eft tournée en devant, & que leur extrémité externe /L, même planche), regarde en arrière.

Ces deux condyles font recüs dans des cavités glénoïdes qui terminent les deux branches de la mâchoire inférieure de cet animal; ce qui eft encore une conformation différente de ce qu'on obferve dans Fhomme.

H fuit de cette difpofition particulière des condyles de la mâ- choire fupérieure du Carcharias, que lorfque cet animal ouvre fa gueule direétement, laxe du mouvement fe trouve principale ment en une ligne qui pafleroit de l'extrémité externe d’un condyle à l'extrémité externe de l'autre, fans-pour cela traverfer toute la longueur de ces mêmes condyles. Dans fhomme au contraire, cet axe qui eft mobile {e trouve pringpalement dans une ligne qui pafleroit de l'extrémité interne d'un condyle à l'extrémité interne de l'autre; de manière que lorfque nous abaiflons la mâchoire inférieure naturellement & fans effort, l'extrémité externe des condyles décrit une petite portion de cercle d'arrière en devant, pendant que l'extrémité interne de ces mêmes condyles roule, pour ainf dire, autour

XV es Mém. de Acad, année

1730,P.55 8.

160 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE d'elle-même dans la cavité du cartilage interarticulaire qui eft polé entre les condyles & les cavités glénoïdes, lequel carti age fait en même temps, comme on fait, un petit mouvement de gliffade en avant, fans pour cela que les condyles ni ce cartilage interarticulaire fortent des cavités glénoïces fufffam- ment pour fe porter fort en avant fous les éminences tranf- verfales des os des temples, conune pour fe mettre dans un état de luxation impariaite - ce qui peut néanmoins arriver dans le cas l'ouverture de la bouche eft exceflive; mais je parle ici de état naturel. C'eft cette petite portion de cercle que décrit en devant extrémité externe des condyles de la mâchoire inférieure de l'homme, qui occafionne pour la plus grande partie le petit enfoncement que lon fent fe former plus ou moins, fuivant le degré d'abaiffement, der- rière les condyles, lorfqu'on a eu la précaution d'y pofer le bout du doigt pendant le temps qu'on abaiffe la mâchoire inférieure: c'eft aufli ce petit mouvement en avant & un peu en embas des extrémités externes des condyles de cette même mâchoire, qui en peut impofer quelquefois en faifant croire que les condyles defcendent fort en avant fous les éminences tranfverfales des os des temples, comme pour fe luxer im- parfaitement. Au refte, fi lon fait bien attention à l'obliquité des condyles, qui eft plus ou moins confidérable fuivant les fujets, il fera facile de fe convaincre de la vérité de ce que je viens d'avancer, fur-tout fi l’on examine de près le jeu de fa mâchoire inférieure fur une tête nouvellement décharnée fans en avoir forcé les Jigamens.

Préfentement je reviens au Requin, & pour prouver qu'il y a réellement des dents* qui fe renverfent du dedans de la gueule vers le dehors, pour venir remplacer celles qui au- roient avoir été arrachées, il me refte à mettre ici fous les yeux quelques obfervations qui ont beaucoup de rapport à ce qui a été dit ci-deflus.

La première de ces obfervations fait voir, s'il y a quelque

# Ces dents font celles qui fe trouvent recouvertes par les chairs fon-

gueufes dont j'ai déjà fait mention ci-deflus, PAT ° dent

D'ÉSASIE Er E NC 538 16r dent de tombée, que la dent Æ, par exemple, planche I, eft recouverte latéralement par les bords des dents D & F, au lieu d'être placée à l'ordinaire comme Ia dent G, dont un des bords eft recouvert par la dent Æ, & dont l'autre bord recouvre au contraire celui de la dent voifine C On obferve la mème. chofe aux denis Æ, 7, M, pl. 11.

La feconde obfervation montre clairement que plus les dents fe font renouvelées de fois, moins le nombre des dents qui reftent eft confidérable à chaque colonne (voyez la colonne qui répond à la dent G, pl. 11).

La troifième obfervation ne permettra pas que l'on révoque en doute ce renverfement des dents, fi lon en furprend, pour ainfi dire, plufieurs dans différens degrés de renverfe- ment; par exemple, les dents 2, H, pl. 117, commencent à fe foûlever de deflus celles fur lefquelles elles étoient cou- chées ; de plus, la dent F eft foülevée encore plus fenfible- ment; enfin les dents À, Æ, G, font prefque tout-à-fait redreflées : ces degrés de renverfement fe remarquent afez communément & d’une façon plus fenfible, aux dents de la mâchoire inférieure, & ils font tantôt plus & tantôt moins apparens, fuivant qu'il fe rencontre plus ou moins de dents tombées (voyez 1, O, K, pl. 11).

La quatrième obfervatiomachever: de nous confirmer {a réalité de ce renverfement, en nous faifant voir que les dents tombées laiffent après elles fur la membrane qui les foute- noit, des impreflions qui reffemblent affez bien à celles qui reftent fur le rebord d'un fond d’artichaut dont on a arraché les feuilles. Quelquefois ces impreffions gagnent infenfible- ment depuis l'endroit les dents fe trouvent naturellement redreffces jufqu'à la furface externe des mâchoires / voyez 2, planche I ).

Préfeniement fr fon fe rappelle tout ce qui vient d'être dit, je crois qu'on ne pourra s'empêcher de convenir que

. toutes les dents, même celles qui font recouvertes par

les chairs fongueufes & mollafles dont Sténon parle, ne font placées à toute Ja furface interne des mâchoires du

Min. 1749: MES

162 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Canis Carcharias , que pour fervir à remplacer celles du rebord de ces mâchoires, lorfqu'elles viennent à manquer. Ces dents fe dégagent peu à peu des chairs molles & fongueufes qui les recouvrent, en gagnant comme de concert avec la mem- brane qui les fupporte jufque vers le rebord À, p/. 1, elles fe trouvent alors à découvert & redrefiées pour les ufages auxquels elles font deftinées.

EXPLICATION DES FIGURES.

Partatn ec "anNEMg

C:rre planche repréfente une moitié de la mâchoire fupérieure & de l'inférieure du Canis Carcharias ou Requin de la première efpèce, vûe extérieurement , ou en dehors de la gueule,

PAT A NICRH ENT

Cette planche repréfente une moitié de la mächoire fupérieure & de l’inférieure du Requin de la première efpèce, vüe intérieurement ou en dedans de la gueule, pour montrer les dents dont leur face interne eft garnie. Les chairs fongueufes & mollafles font enlevées.

PLANCHE I1IE

Cette planche repréfente une moitié de la mâchoire fupérieure du Requin de a feconde efpèce, vûe pañifa face interne, pour faire aper- cevoir les différens degrés de renverfement des dents. Cette moitié de mächoire n’eft pas dans fon entier.

Dem. de lA4e_R. des S, c2749 Pag.16 Li 7.

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MermidelAc.R des Se.27g9 Lag-102 .

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Mem de LAcR. des Se2749 Lag.162-P1,9.

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Mem de LAcR des Sez7gg Pag 162 Pl 0.

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DES SCIENCES | ré,

D ERSREROU PT L'ON DE DEUX ESPECES DE NIDS SINGULIERS*

| DPAÏPMMPARIDESCHENILLES. !

Par M GUETTAR D.

EF NTRE plufieurs morceaux d'hifloire naturelle que M. le duc d'Orléans a reçûs cette année, & qui lui ont étéen- -voyés par M. Lieutaud Chirurgien, & par M. le Juge, Con- f {eiller au Confeil Supérieur de l’ifle de France, il s'eft trouvé deux elpèces de nids fais par des chenilles, dont {a conftruc- tion eff affez fingulière pour mériter d’être décrite. Ceux d’une efpèce font chacun l'ouvrage d'une fule chenille : ceux de l'autre font dûs chacun à une nombreufe famille d’une autre efpèce de ces infectes. Les chenilles qui conflruifent les pre- miers, font entrer dans ces nids de petits morceaux de bois arrangés dans un certain ordre : il n’y a rien d'étranger dans ceux des autres ; ils font de foie pure, & d'une foie affez forte. Nous connoiffons, il eft vrai, par les Mémoires de M. de Reaumur fur les Infetes, plufieurs nids de ces animaux * qui refflemblent en cela à ceux dont: il eft ici queftion : il ne faut, pour en avoir quelque exemple, que fe rappeler les coques de différentes chenilles qui fe dépouillent de leurs poils pour aflermir les parois de ces coques, ou qui les enduifent de terre ou d'autres matières, comme de petits morceaux de feuilles defléchées : on peut encore trouver de ces exemples, & qui fe rapprocheroient encore plus de nos nids, dans les fourreaux de plufieurs teignes aquatiques, qui font en partie compofés de coquilles, de grains de fable, de feuilles sèches -ou de bätonnets, arrangés avec ordre & avec une efpèce de fymmétrie. Les nids des chenilles communes, & für-tout ceux _des proceffionnaires, dont la conftruction eft fi bien décrite 21 #Ges nids font du Fort-Dauphin, ifle de Tr 1 ÿ

7 Mars 1750.

À + 164 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE & avec tant d'art dans fes Mémoires cités ci-deffus, peu-. vent auffi fe comparer avec ceux dont je veux parler; mais.

quoique ces nids foient très-artiflement faits, & qu'ils femblent demander beaucoup de vües dans les animaux qui les conf-

uifent, on peut dire qu’une feule propriété qu'ont ceux dont il s'agit ici, & qui manque aux autres, paroït exiger plus de:

précaution de Ja part des chenilles qui les ont faits. Ces nids {ont fufpendus à des branches de différens arbres, & tiennent en cela des nids de plufieurs efpèces de guêpes qui ne nous ont été bien connues, & autant qu'elles méritoient de l'être, que depuis ce que M. de Reaumur nous a donné fur leur conf- truction. Ce feroit peut-être trop avancer que de dire que les nids que nous voulons décrire font düs à des ouvrières auffi adroites que le font les guépes, & fur-tout les guépes carton- nières; mais ce ne le fera pas trop, fans doute, que d’aflurer que s'ils manquent de certaines fmgularités que fon admire avec raifon dans les nids de ces mouches, ils ont les leurs, qui ne méritent pas moins que nous nous yarrêtions. II faoit que la chenille, qui fe renferme feule dans fon nid, fût fe pré- cautionner contre le ballottement qui pourroit lui arriver dans les mouvemens dont fon nid feroit fürement agité par ceux de l'air. Les chenilles qui fe renferment en grand nom-

bre, avoient cet inconvénient à prévoir, & de plus, celui qui.

pouvoit arriver de leur nombre fi les coques n’avoient pas

telle ou telle forme, fi elles n'étoient pas attachées les unes.

aux autres. On verra, lorfque j'aurai entièrement fait la def cription de ces deux efpèces de nids, qu'il réfulteroit un incon- vénient encore plus grand de la conftruétion même de ces nids, fi les chenilles ne le prévenoient pas, quoiqu'en même temps ne demandit à l'être qu'avec certains ménagemens.

Ce font ces différentes confidérations qui n'ont engagé à décrire ces nids, lorfque je me fus principalemeut aperçü qu'ils avoient paru attirer Fattention de S. A. S. qui approuva volontiers que je communiquaffe mes obfervations à l'Acadé- mie, & qui en même temps me fit l'honneur de me dire qu’elle fe regardoit comme étant de ce Corps, par les difiérens

* MRC SN c

D ESNSNC T EN CUS 165. Membres qui lui étoient attachés, & qu'elie lui feroit volon- tiers connoïtre, par mon moyen, ce qu'elle pouvoit pofléder d'intéreffant en hiftoire naturelle. Ces nids le feront fans doute pour ceux qui aiment cette fcience, non feulement par leur fingularité, mais encore en ce qu'ils,ne font, à ce que je crois, décrits par aucun Auteur.

Ceux qui ne font conftruits que par une chenille, font plus longs que larges ; ils ont la forme d'un fufeau un peu moins alongé par la partie fupérieure que par Finférieure: celle-ci finit par une efpèce de tuyau cylindrique formé par le rétréciflement que le nid fouffre dans cet endroit ; l'autre a un collet, au bout duquel if y a un anneau*qui pafle dans

la branche à laquelle le nid eft fufpendu. Ce nid eft, à pro-

* prement parler, compolé de trois plans ; Fun eft formé par

une toile foyeufe qui recouvre extérieurement tout le nid, le fecond par un affemblage de bâtonnets, & le troifième par une coque qui eft de foie. Les bâtonnets ne paroiffent donc point à l'extérieur, comme dans les fourreaux des tei- gnes aquatiques : il eft facile cependant de s’'aflurer qu’il doit entrer dans ces nids une autre matière que de la foie; ils paroiffent avoir des efpèces de prolongemens de côté & d'autre, qui font attribués, lorfqu'on touche ces nids, à toute autre matière qu'à de la foie: fi on les met à décou- vert, & qu'on enlève ainf la toile foyeufe qui les recou- vroit, lon voit que ces petits bâtons manquent fur la partie du nid qui forme le tuyau inférieur, & fupérieurement fur le tiers ou environ de ce nid. Cette dernière partie n'eft, pour ainfi dire, point frappée, les brins de foie font pref- que fans liaifon, ou du moins ils en ont une qui eft beau-- coup plus lâche que le refte : les bâtonnets font pofés hori- zontalement , & prefque parallèlement les uns aux autres; ils ne font ordinairement attachés que par le milieu, les deux extrémités reftent libres; ce qui ne pouvoit être autrement, à moins que la chenille w’eût choïfi des bâtonnets verds & flexibles, qu’elle eût alors prendre fur les arbres mêmes: comme il y a tout lieu de penfer qu'elle fe fert de ceux. qui X üj

*V. Mém. de l'Acad. 1745, Fr. 268.

166 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE font tombés de ces arbres, elle ne pouvoit leur faire prendre la courbure néceflaire pour que ces bâtonnets fuffent attachés dans eur longueur, ce qu'elle auroit été obligée de faire fur une coque dont la feétion horizontale et un cercle. Ces bâtonnets inflexibles ne pouvoient donc être que comme autant de tangentes à ces cercles : il femble que la chenille en a été inftruite, elle ne les attache prefque que dans le point du contact: s'ils ne le font donc que dans une fi petite étendue, il ne faut pas croire pour cela qu'ils puiffent fe déta- cher; les brins de foie font tellement multipliés , qu'ils for- ment un lien aflez large & affez fort pour retenir exaéte- ment chaque petit bâton : outre cela, il me paroït que la parois interne de la toile qui les recouvre y eft tellement atta- chée, qu'elle augmente encore cette Hiaifon ; ce qui fe fait aifément fentir lorfqu'on enlève entièrement cette toile exté- rieure : on ne peut le faire qu'en caflant des brins de foie, comme lorfqu'on les détache de la coque intérieure. Les bâtonnets des plus grands nids font lifies, fans poils ni épines; ils font d'un blanc fale, parfemés de petits points oblongs, que j'ai cru pouvoir regarder comme des glandes, & que j'ai appelé glandes lenticulaires * : ceux des petits font bruns, couverts de poils ou filets coniques d'un jaune foufré, & garnis d’épines affez grofles & aflez roides, dont la bale eft aplatie, & qui font aflez femblables à celles des ronces. Lorfqu'on a enlevé ces petits bâtons, il refte une coque d'un blanc fale & fouetté de marques brunes & tranfver- fales, qui ont été occafionnées par ces petits bâtons. Les pa- rois internes font lifles & comme enduites de quelque ma- tière gommeufe ou réfineufe; il part de ces parois des fils de foie qui forment une elpèce de réfeau au milieu duquel la chryflide fe trouve placée: l'orifice interne eft bouché par une mafle confidérable de foie d'un tiflu lâche & facile à divifer. Cette coque ainfi dépouillée de fes bâtonnets & de la toile qui les recouvre, n'eft tout au plus que de la moitié de la groffeur du nid; les plus petits de ces nids font, dans leur plus grand diamètre, d'environ un pouce &

D EISMOIC 1 E N'C ES 167 démi, les plus gros d'environ deux pouces. Les coques des premiers ne font donc que de trois quarts de pouce en lar- geur, celles des feconds d’un pouce; des coques de cette largeur & qui ont toute la longueur du nid, c'eft-à-dire, dans les plus petits de trois pouces & demi, & dans les plus grands de quatre pouces, de telles coques ne laiffent pas d’être encore aflez confidérables, & il faut que la chry- falide qui sy renferme, le foit aufir, fur-tout fi, comme celle-ci, elle remplit prefque entièrement {a coque. Malgré cela, fon ne peut guère s'empêcher d’être frappé d’abord de la différence du volume de la coque comparée avec toute la maffedu nid : on s’attendoit à avoir une coque beau- coup plus grofle, mais fon volume eft confidérablement augmenté par les petits bâtons, qui n'étant pas attachés dans toute leur Jongueur, occafionnent aïnft des prolongemens qui tendent la toile qui les recouvre, ce qui donne de la capa- cité & de l'étendue à tout le nid; propriété qui w'eft pas fans doute inutile dans un nid auffi artiftement travaillé, & tout femble avoir été prévü.

En eflet ce nid étant fufpendu , il y avoit à craindre que les mouvemens qu'il doit foufirir de ceux dont l'air fe trouve fouvent agité, ne fiffent continuellement ballotter Ja chryfa- lide; cet inconvénient fe trouve levé par le réfeau qui entoure cette chryfalide, & auquel elle eft encore attachée par deux crochets qu'elle à à fa partie poftérieure ; ainfi affermie, elle fuit tous les mouvemens que la coque peut recevoir, & elle n'eft point portée tantôt d’un côté, tantôt de l'autre, & dans un fens conträfre à celui de fa coque; ce qui feroit indubitable- ment fouvent arrivé fans cette précaution. Si la chryfalide avoit à craindre que fon état de repos fût troublé par des fecoufles rétérées, elle avoit encore plus à appréhender une efpèce d'infecte qui doit vivre fous la forme de ver aux dépens d’autres infeétes & s’en nourrir, je veux dire, les mouches ichneumons : l'on fait que les femelles de ces mouches dé- pofent leurs œufs dans les nids de prefque- tous les infeces, quelles les placent fouvent dans le corps de plufieurs, &

168 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE même dans leurs œufs: il pouvoit donc facilement arriver que la chenille du nid de laquelle ii s'agit ici, n'évitât pas. un fi cruel ennemi, fi elle ne favoit pas fermer l'orifice interne de fa coque; cet orifice eft donc bouché, & il left même avec certaines précautions : cette efpèce de bourre foyeufe dont j'ai parlé, eft le bouchon dont la chenille seft fervie, & elle la rendu aflez gros pour qu'il pût réfifter en- tièrement aux eflorts d’un animal auffi confidérable que celui qui pouvoit entrer dans fa coque, dont l'ouverture extérieure, qui n'eft pas fermée, eft de plus de deux ou trois lignes, & peut encore devenir plus grande par la facilité que Fani- mal trouveroit à la dilater en forçant les parois du tuyau, qui cèdent aifément malgré leur tiffu ferré. La chenille pré- vient ceci en faifant la mafle foyeufe affez large pour boucher exactement l'orifice interne, & aflez longue pour qu'elle ne foit pas elle-même à portée de l'animal qui pourroit parvenir jufqu'à cette ouverture.

Mais fi cette efpèce de diaphragme ou de valvule met ff bien à couvert la chryfalide, n’y a-t-il pas lieu de craindre qu'il ne devienne auffi un obflacle invincible pour le papillon, lorfqu’il devra fortir de cette coque ? quand le tiflu de ce bouchon feroit auflt fort que celui de la coque, quand il le feroit même beaucoup plus , il n’y a pas de doute que l'infeéte ne trouvât moyen de fortir de cette coque: la Na- ture Jui auroit appris quelque art pour Fouvrir, ou Fauroit fourni de quelque liqueur pour Famollir & la rendre ainft plus facile à percer, comme elle Fa fait pour plufieurs autres efpèces d'infectes. Il paroït que tout ce que celui-ci fait exécuter, ne conffte qu'à écarter. & à diviler la bourre foyeufe qui doit lui être facile à pénétrer, quoiqu'elle doive être d’un difficile accès aux autres infectes qui ne cherchent qu'à lui nuire: fa fortie eft encore facilitée par la fituation dans laquelle la chryfalide fe met. Quoique la partie fupérieure de la coque foit moins frappée que le refte, qu'à la rigueur le papillon auroit aifément pénétrer à travers à caufe de fon tiflu lâche, il étoit cependant plus naturel qu'il fortit

par

IDE, SA ASCII EN CES: 169

par ha partie inférieure qui ne fe trouve bouchée que par de

la bourre. Auff la chryflide eft-elle placée la tête en bas, &

‘enfoncée même un peu dans Ja bourre; par-là le papillon n'eft

point obligé de retourner, quoique, s'il eût été néceflaire qu'il le fit, il n'eût pas été fans doute plus embarraflé à exé- suter .ce mouvement fans en fouffrir, que quelques autres à qui cela arrive dans de pareils cas.

Quoique. j'euffe fous les* yeux dans le: fecond nid qui 214 décrit plus bas, & qui eft à une nombreufe famille de chenilles, quoique j'eufle, dis-je, un exemple d'un nid fufpendu & dénué du plan de petits bâtons dont celui-ci eft entouré, j'ai toûjours été porté à croire que ce plan pouvoit être fait pour défendre encore la chryfilide, & la mettre à cou-. vert de quelques infultes. Nous avons appris par les mé- moires de M. de Reaumur, quel goût les oifexux de nos campagnes, les chardonnerets, par exemple, ou les moineaux francs, ont pour les chenilles communes ; ces oifeaux dé- chirent & mettent impunément en pièces ces nids pour en tirer les chenilles qui y font renfermées, & dont ils fe nour- riffent fur-tout en hiver. Ces oïfeaux ne peuvent pas fans CRE. fi aifément détruire les nids de nos chenilles, munis

comme, ils font de petits bâtons liés étroitement & affez près. les uns des autres pour former un lit continu : & c'eft, je, crois, pour de femblables vües que. ce pln eft conitruit, plütôt que pour remplir le peu de foie que la chenille fourniroit, comme on peut aifément le penfer. IL ef en eflet difficile de taxer d’ indigence un infeéte. qui peut fe filer une coque telle que celle il f renferme, qui peut, la boucher d'une maffe auffi confidérable que left celle dont,

jai parlé, qui peut de plus recouvrir le plan de bâtonnets _qu'il a liés, par de la foie, d'une toile auffi ferrée & auff, forte que l'eft, celle dont il eft enveloppé. Ce n'eft donc

trop prêter à notre infecte que de dire qu'il a ; précautionner contre, des..ennemis plus forts que ceux it nous avions d'abord parlé, & tels que peuvent être des,

| oi eaux , qui. par leur bec fort & robufte font plus a Y

-

Mém, 1 749: N À

170 MÉMOIRES DH L'ACADÉMIE ROYALE

cap. b'es de déchirer un nid fait feulement de foie, ou, comme celui des chenilles communes, muni feulement de feuilles qui fe defsèchent promptement, & qui deviennent encore par-là plus aifées à dépecer, mais qui peuvent bien faire de vains eforts contre un nid défendu comme left celui-ci, étant fur-tout fufpendu, & donnant par-là moins de prife à ces animaux, en ne fourniflant pas un appui folide ils puiflent fe placer. Cela étant, il faut avouer que cette chenille emporté en prévoyance fur celles qui conftruifent Vautre nid, qui peut être expofé aux mêmes dangers, & par conféquent les chryfalides qui y font renfermées.

Un infecte qui fait fe précautionner contre tant de périls, ne devoit pas fans doute être mal-habile dans un point auf effentiel que left celui de la fufpenfion de fon nid. Puifque ce nid devoit être ainfi attaché, ïl devoit l'être de façon qu'il ne püût aifément fe détacher, & que cependant il püt céder à toutes les agitations il pouvoit être expolé : c'eft ce que l'animal a prévü; fi attache eût été trop lâche, le nid auroit couler le Iong de la branche, & fouvent tomber par terre; fi elle eût été trop ou trop peu ferme, elle auroit fe défaire ou fe caffer. Inftruits comme nous le fommes, Je crois que nous ne pourrions pas mieux agir que cet infette, & que nous ne pourrions guère poufler l'attention plus loin que lui: fi nous avions un pareil corps à fufpendre, nous le ferions fans doute au moyen d’un anneau qui embraffe- roit exactement celui nous voudrions V'attacher: nous pañlerions une corde dans cet anneau avant que de l'arrêter; & fi, pour plus de füreté, nous nous fervions de plufieurs de ces cordes, nous les attacherions enfemble par d'autres cordes tranfverfales, & nous en formerions ainfi un faifceau d'autant plus fort, que les cordes feroient plus multipliées. C’eft ce que notre chenille fait; & s’il y a quelques difié- rences, elles ne tournent qu'à l'avantage de fon induftrie, Elle forme un anneau qui ferre la branche avec la dernière exactitude : les derniers brins de fils qui le compofent, ou ceux qui font à l'extérieur, ne font pas entièrement le tour

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DA S'HOMMCRUE 1 CESAM v7 x

de Ja branche, les deux bouts font alongés & rapprochés fun de l'autre vers le milieu du deflous de lanneau, & y font réunis par des fils tranfverfaux ou obliques. Cette efpèce. de ficelle eft continue avec la partie fupérieure & peu ferrée du nid ; ces brins de foie, ,de convergens qu'ils étoient, font devenus divergens, & cela pour former le corps du nid. Cette continuité intime du nid avec la ficelle foyeufe ou le collet, & de celui-ci avec Fanneau, rend le tout encore plus folide & plus für, de forte qu'il n'eft guère poflble de lui donner plus de folidité; folidité cependant qui eft tellement combinée avec la flexibilité, que le nid peut aifément fuivre les moindres impreflions qu'il reçoit de Yair, ou de telle autre puiflance qui agiroit fur lui. Cette aïfance à fe mouvoir eft augmentée par le tiffu lâche de la partie fupérieure du nid; la toile qui le recouvre extérieu- rement, & la coque, ont cet endroit beaucoup moins frappé que le refte, de façon qu'il y a moins à craindre que le collet ne rompe, ce qui auroit arriver fi ce collet & le nid euflent été d'un tiflu également ferme dans toute leur étendue. Lorfque ce nid eft entièrement fini, & que la chenille sy eft renfermée pour n'en plus fortir fous cette forme, on. peut dire qu'elle a fait tout ce qu'on pouvoit attendre pour que fon état de repos ne füt point troublé: mais comment cette chenille s'y prend -elle pour faire un nid il entre tant de vües & tant d'adrefie! Nous avons bien tiché de découvrir ces vüûes, en débâtiffant , pour ainfi dire, ce nid, & en mettant tous les matériaux fous les yeux : tâchons maintenant de mous reprélenter cette chenille en travail, &c.

employant pour le conftruire toute l'adrefle qu'elle doit avoir.

Elle pouvoit sy prendre de trois façons, commencer par

fire l'enveloppe extérieure, placer enfuite les petits bâtons, | & finir par l& coque; ou bien faire tout le contraire, ou confhuire les trois plans em même temps. Je crois que c'eft, _ déceitedernière façan qu'elle s'y prend, quoique, à la rigueur, . ine füt pas impofhble qu'elle le fit de fune ou de l'autre - _ manière; mais elle touveroit fans doute plus de difficulté à

Y ÿ

172 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

arranger les bâtonnets fr elle commençoit par l'enveloppe, & elle fuivroit, en commençant par la coque, une voie toute contraire à celle qué toutes les autres chenilles fuivent dans la conftruction de la leur; ce qui n’eft pas probable, la conformité de tous ces infectés dans le plan général de Ha conftruétion de leur coque, outre que l'union des extrémités du nid de notre chenille eft trop intime pour que tout n'ait

as été fait en même temps.

Cela fuppolé, voyons comment cette chenille exécute ce qu'elle a à faire, & tàchons de la fuivre dans fon travail. On ne peut avoir de doute fur la partie par laquelle elle doit commencer, c'eft fürement par l’annéau : elle peut le faire en tournant plufieurs fois autour de la branche, & en y laïffant un fil à chaque fois, ou bien, en fe tenant fixe fur un endroit de cette branche, elle portera fa partie anté- rieure tantôt d’un côté tantôt d’un autre, ‘en la courbant affez pour émbrafler cette branche & en faire le tour. Cela ne doit pas être difhcile pour une chenille auffi grofie que le doit être celle qui fait un nid fi confidérable, & dont la chryfalide eft fi grande : elle attachera donc le bout d'un fil dans un endroit, & en retirant fa partie antérieure elle lui fera faire le tour de‘la branche, en la ramenant de l'autre côté elle collera l'autre bout du fil au même endroit, ou à peu près, elle a attaché l'autre; enfuite elle fera la même chofe en fe repliant dans le fens contraire au premier, & tirera un nouveau fil qu'elle placera de même, ce qu'elle répétera autant de fois qu'il fera néceflaire pour achever cet anneau , & lui donner une largeur & une épaifleur propor- tionnées à la mafle du nid, & qui foient telles que le nid foit attaché fürement. L’anneau fait, il lui eft facile, fans fe déplacer, de filer le faifceau auquel le nid fera fufpendu : elle n'a qu'à attacher dans toute la partie inférieure de Fanneau des fils qu'elle Jaiffera d’abord libres, & qu'elle réunira enfuite par des fils tranfverfaux, comme nous l'avons dit plus haut : elle pourroit encore le faire en donnant aux fils qu'elle attache- roit aux côtés de l'anneau, la forme d’anfe à panier, ce qu'elle

‘% CE PAANDMETS MSNENTE N'CrESl 4572 “ontinueroit ainfi, en faifant ces anfes proportionnellement # plus petites fuivant qu'elle alongeroit le faifceau ou collet: mais la première façon me paroit plus conforme à ce que l'on remarque en examinant la partie même du nid, ce qui nous

a fait penfer qu'elle étoit celle que l'infecte choififfoit, Quels que foient les moyens que cette chenille emploie

pour faire lelien qui foûtient le nid , elle n’a, lorfqu'il eft fait, exécuté que le plus aïfé; elle doit maintenant‘travailler, pour aïnfr dire, en fair, à moins qu'on ne voulût qu'elle füt tel- lement choifir un lieu commode pour fon travail, qu'il y eût quelqu'endroit voifin de ce lieu, comme une autre branche, ou le tronc de Farbre, ou tout autre corps fur lequel elle pût fe placer. Ce feroit fans doute a manière la plus aifce,

& celle que nous choifirions préférablement dans des ou- vrages femblables ; mais les infectes placés dans les fituations

les plus defavantageufes & qui demandent le plus de peine, favent toûjours exécuter ce qu'ils doivent faire: noire chenille pourroit à la vérité, étant pofée fur un corps qui feroit au bas de la branche fon anneau eft fait, commencer à filer fon nid en alongeant le faifceau de fils. On conçoit qu'elle m'auroit pas befoin de beaucoup d'adreffe pour cela, mais je “crois qu'une chenille dont le nid doit être fufpendu, doit favoir le conftruire indépendamment de tout autre échafau- dage que les premiers fondemens de ce nid ; je penfe donc qu'elle quittera en partie la branche elle eft attachée, qu'elle ne s'y tiendra, par exemple, que par les pattes pof- térieures, & qu'elle s’avancera fur le faifceau fe tenant

- accrochée par les pattes écailleufes , elle pourra facilement

_ commencer le haut du nid, fur lequel elle s'avancera à pro- _ portion qu'il prendra de l'étendue : lorfque cette étendue _ fera telle qu'elle pourra s’y placer entièrement, dlle travaillera

2 sr à former ce que fon peut appeler proprement le nid. È : Jufqu'à préfent la chenille n'a été obligée que de tirer de _ fon propre fonds une matière qui lui a été donnée affez abon- _ damment, mais il faut maintenant qu'elle fache trouver ces à petitsmorceaux de bois dont il a été parlé dans la defcription d Yi

174 MÉMoIREes DE L'ACADÉMIE ROYALE

du nid: il faut, ce qui demande encore plus d'adreñe, qu'elle fiche les monier à la partie du nid qui eft déjà faite, & qu'elle ait celle de les placer exaétement : tout ceci fe fera. fans beaucoup de peine; la chenille fe deicendra jufqu’à tere au moyen d'un fil qu'elle attachera à la partie du nid qui eit déà faite; là, fans quitter fon ff, elle cherchera un petit bäxon, & probablement elle ne fera pas long-temps fans en trouver; faifie d'un de ces bâtonneis, elle le tiendra exacte- ment ferré entre fes pattes de derrière & celles du milieu, & le couchera le long de fon ventre; enfuite elle remontera - ainfi chargée, par le fil qui lui a fervi à defcendre; arrivée au haut de ce fil, & par conféquent à la partie du nid il eft attaché, elle fixera dans cet endroit le bâton qu'elle porte & ce fera fur-tout par le milieu, & le placera horizontale- ment. C'eft fans doute ce qu'elle a faire, puifque ceft ce qu'on obferve avoir été rcellement fait, comme il a-été dit dans la defcription du nid; mais comment concevoir que cette chenille parvienne à fon but, {1 elle refte fufpendue à fon fil comme nous l'avons laiflée? ce n'eit pas cependant que je penfe qu'elle y refte, il lui feroit impoffible de par- venir à {es fins ; elle n'auroit attacher ce bâtonnet, & fe tenir en même temps fufpendue au til qui lui a {ervi d'é- chelle; en remontant elle devide ce fil entre fes quatre der- nières pattes écailleufes, & en fait un petit peloton. Il ne lui feroit pas facile, en tenant ce peloton, de faire paffer par- deflus, le petit bâton qu'elle tient entre fes pattes membra- neufes & les poftérieures; il faut donc qu'elle fe décharge de fon peloton de foie, mais alors elle manque d'appui, & fi elle ne s'étoit pas auparavant mile en füreté, elle tom- beroit infailliblement; elle a fe précautionner contre cette chûte. Ce qui eft fait de fon nid a aflez la forme d'une calotte fphérique, & eft afiez étendu pour lui procurer un. endroit commode elle puille fe placer, foit en dehors, foit ex dedans, & elle peut d'autant plus facilement s'y attacher, que cette calotte eft d'un tifflu lâche & n'eft, pour ainfi dire, qu'une efpèce de bourre; il eft ainfi très-aifé à cette chenille,

DE SURMMCITUE N'C EE 175$ de fe cramponner au moyen des crochets dont fes pattes font armées. Lorfqu'elle eft donc arrivée à cette partie de fon nid, elle doit sy mettre de façon à n'avoir pas beau- coup de peine à attacher le petit bâton qu'elle apporte, foit qu'elle fe place fur le deffus de la calotte fphérique, foit que ce foit en deflous; fi elle choiïfit lune ou autre

‘fituation, il n’y a nulle difficulté : placée horizontalement

près de la circonférence de cette partie, elle dépofera le peloton de foie qu'elle attachera à la calotte; enfuite elle fera un peu couler le bâtonnet en avant, le détachera ainfi de fes pattes poftérieures, & le fixera au moyen de plu- fieurs fils qu'elle faura multiplier autant qu'il eft néceflaire pour faire un Ken aflez fort: elle l'affurera encore plus en faifant tout de fuite, comme je le penfe, la partie de la toile qui doit le recouvrir extérieurement, & celle de 11 coque qui le fera intérieurement. Ce bâtonnet étant placé, la che- nille doit travailler à en placer un autre; elle s’y prend fans doute de la façon qu'elle a employée pour fixer le premier, & je crois qu'elle le fait en alongeant fa coque circulairement en tout fens; par-là elle trouve de plus en plus de la facilité dans fon travail, & elle a plus d'étendue pour fe procurer une fituation commode, Mais, quelle que foit cette facilité, elle ne peut pas abréger beaucoup le temps qu'il faut qu'elle em- ploie à aller chercher les bâtonnets: chacun exige un petit voyage, ce qui doit demander un certain temps: on compte dans un nid des moins gros, au moins une centaine de ces petits bâtons ; ainfi c’eft une centaine d’allées & de venues qu'elle eft obligée de faire, & qui feront plus ou moins longues, fuivant que la branche le nid eft attaché, eft plus ou moins élevée: lorfque tous les Lâtous font placés, il faut alors boucher le nid. Quand la chenille trouveroit le moyen de l'exécuter avec de pareils petits bâtons, ce qui ne lui feroit pas facile, le papillon auroit beaucoup de peiné à rompre cette digue, ou pluftôt ne le pourroit pas; fi elle le fermoit

fubitement avec un bouchon de foie ou par une toile, peut-

être quelle pourroit être trop expofée dans l'état de chryfalide

176 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

à quelques-uns de fes ennemis: que fait-elle donc! Elle alonge coque de telle façon qu'elle forme un canal à peu près cylindrique, l'ouverture eft'ainfi déjà beaucoup diminuée, la chryfalide fe trouve moins à portée de l'action des animaux dont elle peut avoir quelque chole à craindre, & il doit leur être plus difficile de s'introduire par ce canal dans le nid, que fi ce nid en étoit privé: quelques-uns pourroient cependant forcer cet obftacle, leur petitefle pourroit le leur permettre; notre chenille oppofe à ceux-ci la mafle foyeufe dont j'ai déjà parlé, elle ferme exactement l'orifice interne du canal, & met ainfi la chryfalide à couvert de toute furprife; & fi, quelquefois cette chryfalide ne laiffe pas d'être dévorée par des vers de quelque mouche ichneumon, il faut que la mouche ait dépofé fes œufs avant la clôture parfaite du nid, ou fur la chenille même, avant qu'elle fe füt renfermée dans fon nid. Il faut avouer qu'il entre déjà beaucoup de foie dans ce nid, & qu'une chenille qui a fournir à tout, doit en être bien pourvüe; elle peut encore cepen- dant en trouver, & même une aflez bonne quantité : je crois qu'il lui refle à affermir les parois internes de fa coque, & qu'elle le fait en y ajoûtant quelque couche de fils, & peut- étre en les enduifant d'une matière réfineufe ou gommeufe, le liffe & le luifant de ces parois : enfin elle doit en- core filer ce réfeau au milieu duquel elle fe trouve placée, & au moyen duquel elle eft exempte de tous les balotte- mens qu'elle pourroit fouffrir fans lui, dans les mouvemens dont fa coque pourra être agitée,

Avant que de dire quelque ehofe de la chenille qui fait. conftruire ce nid, je crois devoir décrire celui qui eft fait par une famille entière de ces infectes : la première a beau- coup de rapport, à ce que je crois, avec celles-ci, & je pen{e. qu'elles font de même genre; j'en rapporterai les raifons.

. Le nid dont il va donc être maintenant queftion, con- vient en plufieurs chofes avec le précédent; il eft comme, lui fufpendu à une branche d'arbre; comme lui il a par: embas un canal ou tuyau dont lorifice extérieur eft ouvert,;

in “He & l'intérieur

4 DIE: 54 MSC AE Ni C ENS 17

& l'intérieur fermé par une bourre foyeufe. Le dernierniddiffère

_ du premier en ce qu'il n'a pas la figure d’un fufeau, mais celle d'un cone renverfé & comprimé de devant en arrière; en ce qu'il n'entre point de petits bâtons dans fa conftruétion, qu'il eft entièrement de foie, & qu'il eft, comme on le fait déjà, l'ouvrage d’un grand nombre de chenilles, qui doivent, à ce que je crois, le faire, non pas comme la précédente dans le temps précifément de la métamorpholfe en chryfalide, mais quelque temps auparavant : il leur fert probablement jufqu'à ce temps, de retraite dans ceux elles ne peuvent refter dehors. Je crois qu'elles conviennent en cela avec les chenilles proceflionnaires, arce que, comme elles, elles fe tiennent féparées fur les arbres, jufqu'à ce qu'elles doivent fe métamorphofer; qu'en attendant elles vivent en {olitude, & que lorfque le temps de la réunion eft venu, elles travaillent alors à la conftruction du nid: elle ne doit pas tant leur coûter que celle du nid précédent coûte à la chenille qui le fait. IL faut fans doute beaucoup plus de temps à cette dernière; il faut qu’elle fourniffe beaucoup plus de foie: en eflet, fi l'on compare ces nids enfemble, le pre- mier fera au moins la quatrième ou cinquième partie du {e- cond ; celui-ci a dans un de fes plus grands diamètres, c'eft- à-dire, à fa bafe, un demi-pied de longueur & un peu plus dans un de fes plus grands côtés, c’eft-à-dire, depuis l'extré- mité inférieure du canal jufqu'à un des bouts du grand dia- mètre la bafe : le plus petit de cêtte bafe eft environ de deux pouces. Nous avons que la longueur du premier nid eft de trois ou quatre pouces , fur deux ou environ de largeur dans fon plus grand diamètre ; ainfr il eft aifé de voir que je n'ai mis qu'au plus bas la mafle de ce dernier nid; ce que je n'ai fait que parce que ce nid ayant la forme d'un fufeau, . il perd de chaque côté fur fes diamètres, au lieu que Îa - forme conique de l'autre n'occafionne de perte que d'un feul de fes côtés : laïffant fubfifter la fappofition que j'ai faite, il fudroit au moins cinq chenilles du fecond nid pour faire le premier, en fuppofant qu'elles foient égales en tout, au lieu quelles doivent être la moitié moins grandes, cette

© Mén. 1749: se

178 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyaLE

proportion étant, à peu de chole près, celle qui fe trouve entre les chryfalides. 11 faudroit donc dix des fecondes chenilles pour'en remplacer une feule des premières; ainff la conftruétion de leur nid doit beaucoup moins leur coûter qu'à celles-ci, d'autant plus que dans le plus petit des deux nids qui ont été envoyés, le nombre de ces chenilles monte à cent vingt ou cent trente, & qu'il va bien à cent cinquante dans le fecond. Quoiqu'à tout prendre, ces chenilles ne foient pas auffi induftrieufes que les autres, elles ne méritent peut-être pas moins que nous les fuivions dans les procédés qu'elles peuvent mettre ufage. Ce nid eft fans doute lou- vrage de toute la famille, mais qui travaille en différentes bandes; une fuite de ces chenilles arrangée fur la branche à laquelle le nid fera fufpendu, travaillera à former fattache, à peu près comme la chenille du précédent nid: je dis à peu près, car fi lon s'y prenoit aflez adroitement en tirant la branche, pour que la partie du nid qui lembraffe ne fe déchirât pas, cette partie ne formeroit pas un anneau auffi régu- lier que l'eft, comme nous l'avons vü, celui du premier nid. La foie a été peut-être employée avec moins d'art, mais elle Va fürement été pour la fûreté commune; non feulement une aflez groffe branche, mais encore plufieurs petites qui en fortent, fe trouvent prifes & entourées par cette attache, qui devient certainement par plus ferme & plus füre: cette attache ayant donc" été ainfi commencée par une partie des chenilles , une autre viendra par fon travail en augmenter la folidité, & elle fe perfeétionnera par toute la fociété. Cette païtie importante étant finie, chaque chenille concourra de même à former le corps du nid; elle pourra aifément y travailler en fe tenant fur ce qui fera déjà fait. Pour bien entendre comment cela peut s’exécuter, fuppofons l’attache entièrement faite, elle comprendra alors toute {a bafe du nid, une partie des chenilles s'y placera auffi à l'aife que fur la branche, en s'y rendant plufieurs enfemble, ou l'une après l'autre, & chacune l'alongera un peu en filant horizontale- ment. Si plufeurs chenilles travaillent en même temps, il

DE SHÉMENE NE BASE T7 doit néceflairement arriver que polées fur les différens côtés de attache, le nid s'alongera en tout fens & prendra ainfr une figure fphérique ; fi elles travaillent les unes après des autres, ce que je ne penfe pas, & que chacune faffe à plu- fieurs reprifes une partie de fa tâche, lorfqu'’une aura travaillé à droïte ou à gauche, une autre placée intérieurement ou extérieurement fur ouvrage de celle-ci, Falongera un peu, & de cet enfemble le nid prendra la grandeur & la figure qu'il a: cette figure ne doit-elle pas en effet être la fuite de cétravail! Lorfqu'il a été commencé , les chenilles bien four- nies de matière foyeufe pouvoient faire un morceau con- fidérable du nid toutes les fois qu'elles travailloient; peu à peu la matière s’épuife, chaque chenille ne peut par confé- quent appliquer qu'une pièce moins large & moins longue; le nid fe rétrécira ainfi, décroitra infenfiblement & prendra conféquemment une figure conique. On trouvera fans doute que Jj'accorde à ces chenilles beaucoup moins de vües & de prévoyance qu'à celle qui fait le premier nid, & l'on aïimera | peut-être mieux croire que, comme celle-ci fait ne donner d'abord au fien qu'une certaine largeur, qu'elle augmente _ infenfiblement jufqu'à fa moitié, & qu'elle diminue enfuite dans les mêmes proportions que celles de Ia partie fupérieure; | on aimera, dis-je, mieux croire que ces chenilles favent

donner au leur la forme d'un cone aplati, comme la pre- mière donhe au fien celle d'un fufeau; d'autant plus qu'il faut que les premières ménagent tellement leur foie, qu'elles en aient pour leurs coques, & pour le réfeau & la bourre dont elles font entourées, & au moyen defquels ces coques font attachées aux parois internes du nid, à moins qu'il ne foit vrai, comme nous avons fuppolé, que le nid foit fait - quelque temps avant que les chenilles fe métamorphofent , & que ce temps foit aflez long pour que les chenilles puif- ent fe fournir de nouveau de matière foyeufe. . Pour éviter toutes ces fuppofñitions, on aimgroit peut-être encore mieux faire celle-ci, & dire que ces chenilles ne conftruifent leur nid que dans le temps ht”: qu'elles ij

180 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE vont filer leurs coques; que la toile qui forme le nid, n’eft qu'une partie de chacune de ces coques; & que les chenilles favent s'accrocher les unes aux autres de façon qu'elles peu- vent travailler fans fe nuire, & s'arranger fur plufieurs lignes qui décroiflant proportionnellement, doivent naturellement donner au nid la figure que nous lui voyons. Cette fuppolition feroit probablement celle qu'il faudroit faire, & elle feroit la plus naturelle fr le nid, au lieu d’être fufpendu; étoit au contraire appliqué, comme celui des proceflion- maires, fur une grofle branche ou fur le tronc de quel- que arbre; elle m'a même beaucoup plu d'abord, mais après l'avoir approfondie , j'ai cru qu'elle emportoit avec elle trop de difficultés pour qu'elle pût être admife: en effet, comment imaginer que ces infectes puiflent s'accro- cher les uns aux autres, & malgré cela fe donner tous les mouvemens néceflaires pour filer? Si on vouloit que cela ne fût pas impoflible, & qu'une partie étant placée fur fa branche elles doivent fufpendre le nid, porte fur le dos chacune une de leurs compagnes qui feroient chargées chacune d’une autre, & ainfi de fuite, & qu'attachées feu- lement par les pattes poftérieures, elles euflent aflez de liberté pour fe donner les mouvemens néceffaires, il arri- veroit dès-lors que l'ouvrage ne feroit pas également diftribué à chaque ouvrière; celles qui feroient à la partie fupérieure auroient la conftruétion de toute lattache à fairé outre leur portion du nid; celles qui feroient à la partie inférieure feroient obligées de l'alonger, de faire le canal par lequel il finit, & trois ou quatre qui feroient à Vorifice interne; devroient filer la maffe confidérable de foie qui le bouche: mais l'on fait que les infectes qui doivent tirer de leur propre fonds la matière dont leur nid doit être compolé, font aflez : économes pour n'en guère faire fun plus que l'autre, & fe diftribuer aflez également ce qu'ils ont à exécuter.

La conftruétion du nid étant donc fuppofte finie quel- * que temps avant celui de la métamorphole des chenilles en chryfalides, ce temps étant venu, il eft facile de s'imaginer

\ =

DVE S'NSCIE Nc ES NbAN rêr comment le réfeau & les coques fe filent : les chenilles étant entrées dans le nid pour n'en plus fortir fous cette forme, doivent fonger à lui donner un peu plus de confiftance ,

elles doivent fermer lorifice interne du canal inférieur :

cela étant fait en commun, chacune prendra fa place fur une des parois du nid, elle filera la bourre qui entoure chaque. coque, & elle commencera à un endroit de la paroi op- pofée; chacune concourra ainfi à former le réfeau qui ne fera qu'une continuation de celui qui entoure les coques, &

au moyen duquel elles ne font, pour ainfi dire, toutes, qu'une

mafle qui eft ainfi à l'abri de tout balottement. On conçoit fans peine que lorfque chaque chenike aura fait une partie de ce réfeau, elle pourra aifément fe retourner dans cette portion, & sy attacher de façon qu'elle puiffe filer l'autre ; elle doit agir en cela comme toutes les autres chenilles; elle travaillera enfuite au corps de la coque qui fera néceflairement pole horizontalement, & qui aura la figure qu'on lui trouve: cette figure eft dans plufieurs celle d’une petite nacelle qui feroit pontée, & dont les côtés feroient aplatis. En effet, la partie fupérieure de ces coques eft courbée en arc, les côtés font un peu comprimés , & la bafe eft plate, un peu concave cependant ; les coques qui ont cette figure font ordinaire- ment celles qui font dans le milieu, celles des côtés font. pluftôt en forme d'œufs ; leur côté, celui principalement qui eft extérieur, eft moins aplati: les différentes figures de ces coques ne viennent fans doute que de ce qu'elles font plus ou moins preffées les unes contre les autres ; celles du milieu fétant plus que les autres, leurs côtés font moins bombés, & la concavité de la bafe de June n’eft auffr- dûe qu'à la compreflion de la partie fupérieure de la coque qui la précède. Ces coques mont pas la figure la plus propre à permettre qu'on en renfermât un grand nombre dans le plus petit efpace, comme on peut le déduire du problème qui a été réfolu à l’occafion des alvéoles des abeilles, & il doit certainement refter des vuides entre ces coques : il y en auroit réellement & d'affez confidérables, {1 les Zi

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182 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYaArr

chenilles ne les avoient pas empêchés autant qu'il étoit en elles:

les coques,font très-proches les unes des autres, & le peu de jour qui auroit refler fe trouve rempli par la bourre qui les entoure. Tout ceci n'eft fans doute que relatif à.ce grand nombre de coques qui devoient être renfermées dans

un nid, dont l'étendue & la capacité paroifient d'abord ne:

devoir pas fuffire pour contenir des coques aufli grofles &, auffi multipliées qu'elles le font; leur fituation horizontale femble demander plus de vües & de prévoyance: fi elles euflent été perpendiculaires & qu'elles euflent formé ainft plufieurs plans, il auroit fallu que toutes ces chenilles fuflent forties de leur état de chryfalides dans un tel ordre, que ce

changement eût commencé à fe faire par celles d'en bas, &

ainfi proportionnellement jufqu'en haut, pour que les papillons euffent trouvé moins de réfiftance à pénétrer les coques, fr cela eût été poffible; quoique, dans la fuppofition que cette métamorphole fe fit dans cet ordre, les coques, toutes vuides qu'elles feroient, ne pourroient être encore qu'un obflade infurmontable au papillon qui voudroit fe tirer de la fienne, fi elle étoit dans quelques-uns des plans intermédiaires. Cet obflacle fe trouve levé par la pofition des coques ; chaque papillon peut fortir quand le temps de ce dernier change- ment eft venu, il lui fuffit de percer un des bouts de fa coque, & l'endroit de la toile qui forme le nid qui en eft proche, & il ne doit pas trouver en cela beaucoup de difficulté, le peu d’épaiffeur de l'une & de l'autre: le tiflu eft en effet tel qu'il permet qu'on voie la chryfalide très-facilement au travers ; & celui de la toile, quoiqu'un peu plus ferré, ne left pas affez pour réfifler beaucoup à la preflion répétée du papillon qui veut fortir, & qui peut même être fourni d’une liqueur pro- pre à amollir cette toile, & ainfi à en faciliter la féparation, qui doit devenir moins diflicile à proportion qu'il ef forti plus de papillons, fur-tout fi cette fortie fe fait, comme je le penfe, toûjours du même côté. Les chryfalides font pofées toutes non feulement dans le même plan, mais elles ont toutes la tête tournée du même fens, ainfi il n'y a nulle raïfon

LE 0 À DES ScrEeNcEs. 18) pour que quelques-uns de ces papillons {e retournent afin de M. si dunid par le côté oppolé à celui que les autres atta- | quent pour le faire; Je penfe donc que cette fortie fe fait du _ même côté, qu'elle fe fait prefque en même temps ; je dis prefque en même temps, parce que des chenilles qui fe ren- ferment enfemble & dans un temps précis, ne doivent pas refler fous la forme de chryfalides beaucoup plus les unes que les autres, fur-tout fi elles font également expofées à un même degré de température de L'air, comme celles-ci le font, ayant même, felon que je viens de le dire, la tête tournée toutes du même côté, + De la comparaifon que l'on peut faire maintenant de ces de efpèces de nids, par la defcription qui en a été donnée, il fuit que ces chenilles conviennent en plufieurs chofes : ExXpo- fées aux mémes inconvéniens & aux mêmes dangers , élles _devoient favoir employer des moyens propres à les prévenir, ii fuflent femblables , ou à peu près; & {1 je nai pas infifté ‘ce point en décrivant la féconde elpèce, c'eft qu'il auroit S füperflu & inutile de le faire. Des chenilles qui fe reflem- -blent tant par leur indufrie, fe reflemblent-elles encore par e genre! font-elles du même, ou d'un totalement différent ? S'il m'eût été poffible de voir les chenilles ou les. papillons *, J'aurois réfoudre entièrément cette queftion: mais je mai tout au plus trouvé que les dépouilles des chenilles, & les chryflides vides & defféchées : malgré ce peu de 48 fecours, je crois pouvoir avancer que les chenilles, & par conféquent les papillons, font d’un même genre. Pour faire comprendre mon idée, je dois pofer un Principe, que je _ crois convenir non feulement aux chenilles, mais même à tous les autres animaux de cette clafe. Les infeétes qui , en changeant de première forme, en. prennent une qui les fait placer dans le même genre, ne * M. le Juge ma, depuis la lec- | blancs, avec ture de te Mémoire , appris par une | grifes, & qu'ils font fort reffembians, ettre qu'il m’a fait l'honneur de m°é- pour la forme, à ceux des vers à.

e 16 Décembre 17S1, qe les | foie. Ce font les termes de M. le. ons qui fortent de ces nids font | Juge.

quelques petites taches

184 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE peuvent être, lorfqu'ils ont la première, de genres différens; & lorfqu'on veut décrire ce genre, il faut y faire entrer la defcription de tous les états par l'infecte pañle.

Pour prouver ce principe, il fuffira de le faire voir dans quelques genres, & de faire fentir que l'on pourroit même l'étendre jufqu'à la façon dont ces infeétes fivent en général travailler & fe précautionner contre plufieurs inconvéniens qu'ils ont à prévenir.

Je pourrois fuppoler ici la connoïffance des parties com- munes aux papillons, aux chryfalides & aux chenilles, de quelque genre qu'ils foient; mais j'ai cru qu'il feroit plus ‘commode d'en rappeler les idées, afin de ne faire entrer dans chaque genre qué ce qui feroit effentiellement différent. On s'apercevra aifément dans ce morceau combien je fuis redevable à ceux qui ont écrit fur cette matière; on recon- noîtra facilement combien je dois à Lifter, à Mlle Merian, à Eléazar Albin, & fur-tout à M. de Reaumur : je ne cherche point à le diflimuler, mon but n'étant que d'établir une vérité à laquelle on ne fait pas affez attention, quoiqu'elle {oit, pour ainfi dire, prouvée par les ouvrages de ces Auteurs, & qui ne demande qu'à être montrée fous un coup d'œil plus général quoique moins étendu.

Ceci fuppolé, je dirai donétque les papillons, de quelque genre qu'ils foient, conviennent en ce qu'ils ont deux an- tennes, deux yeux à réfeau, une tromp qui ne fe roule point {ur elle-même, ou qui le fait plus ou moins, ou qui eft remplacée par un corps qui en fait les fonétions, & qui, comme elle, eft placé entre deux efpèces de lèvres fituées au devant de la tête, plus larges par le bas que par le haut, garnies ordinairement de poils coniques tournés vers la partie fupérieure; fix pattes, attachées au corfelet deux à deux, & dont les paires antérieures font plus courtes que celles qui les fuivent ; deux ( ou quatre) ftigmates fur le corfelet, polés obliquement & latéralement, deux à chaque anneau fembla- blement pofés; quatre aîles, qui font des elpèces de triangles recilignes, curvilignes ou mixtilignes, couvertes de petites

| écailles

+

DES SCTENCES 185 écailles ou petites plumes qui les rendent opaques, attachées upérieurement au corfelet, qui eft écailleux : le corps eft ovale, compolé de plufieurs anneaux couverts de petites écailles, & ordinairement de poils.

Les chryfalides font coniques, ou ont la forme d'un fufeau; elles font compoltes de plufieurs anneaux, elles ont fupé- rieurement & antérieurement les deux antennes du papillon qui en doit {ortir, fa trompe & fes pattes couchées Jongitudi- nalement & renfermées dans une efpèce d'étui ou d’enve- loppe; les ailes font également pliées & enveloppées, & elles fe remarquent par deux petites éminences placées fur le dos: on voit encore fur les côtés les fligmates de la chenille, anté- rieurement & inf.rieurement des mamelons extrêmement courts, occafionnés par fes pattes qui fe {ont retirées.

Les chenilles ont douze anneaux, ordinairement membra- :neux; elles ont une tête qui ne fe contracte pas, qui eft recouverte latéralement de deux écailles fortes qui ont ja - forme d’une calotte fphérique & creufe, antérieurement d’une |! écaïlle triangulaire dont le fommet eft tourné vers celui de

la tête, inférieurement de cinq mamelons coniques dont celui

: du milieu qui eft une filière eft ouvert dans fon bout fupé- | rieur, d'un trou par lequel le fil fort; deux des quatre laté- : raux font armés à l'extrémité fupérieure d’une pointe aigue - & roide qui fait les fonctions de dent; les deux autres qui {ont plus extérieurs, manquent de cette dent & font mols n & flexibles: au deffus de ces différens corps & au bas de Yécaille triangulaire, eft placée une autre écaïlle tranfverfale, platte & échancrée à fon côté antérieur. Les pattes varient pour le nombre, qui eft de huit jufqu’à feize inclufivement ; toutes les chenilles conviennent par les fix antérieures, qui {ont placées deux à deux fur les trois premiers anneaux; elles _ font écailleufes, les autres font membraneufes & fituées aufi par paires fur les uns ou les autres neuf anneaux qui reftent; glles font armées d’un cercle ou d’un demi-cercle de petits | ongles ou petites grifles; les ftigmates font plus conftans en …— nombre, il y en a neuf de chaque côté, dirigés obliquement

Mém. 1749. . Aa

186 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE & tranfverfalement; ils font ovales, pofés fur le premier & Je quatrième anneau jufqu'au dernier exclufivement.

Cette defcription générale fait déjà fentir qu'il y a des difiérences entre les chenilles, comme il y en a entre les chry- flides & les papillons. Il refte à faire voir qu'une différence dans lun ou l'autre état de ces infectes en entraîne néceffai- rement une dans les deux autres; c'eft ce qui pourra être prouvé par les genres fuivans d'une manière affez évidente, fr, faute d'obfervations encore afiez détaillées , il ne left pas d'une fiçon entière & complète.

Genre I. Les papillons qui ont des antennes en maflue, une trompe

Pemplides. youlée en fpirale, les deux premières pattes très-courtes & fringées, les aîles triangulaires & mixtilignes, dont le côté intérieur des inférieures forme une gouttière, viennent d'une chryfalide qui a la forme d'un fufeau, c'eft-à-dire, renflée dans fon milieu; de façon cependant que la partie poftérieure eft plus alongée, que l'antérieure eft échancrée, & que le milieu eft relevé de plufieurs petites éminences ou apophyfes rangées longitudinalement fur deux ou plufieurs lignes.

Elles font fufpendues à une touffe de foie en réfeau par la partie poftérieure, au moyen de deux crochets.

La chenille a feize pattes, dont les membraneufes ont un demi-cercle de crochets, les anneaux font chargés de mame- lons qui portent des poils auffi roides que des épines, & qui font le plus fouvent ramifrés.

Sous ce genre font rangés les grande & petite tortues, le papillon de l'ortie, celui de la bédaude, la belle-dame, l'ami- ral, celui à yeux de paon, les nacrés, rapportés par différens Auteurs; & les fuivans, tirés du fecond volume par M.le Mé- rian, favoir, celui du nefflier, le grand atlas, celui des palmiers, ceux de l'arc, celui du prunier, celui du papo, celui de la coronille, celui du ricin, celui du guayavier. :

Genre I Le papillon du fecond genre ne diffère de celui du pré- Pomphalodes cédent qu'en ce qu’il a les fix pattes proportionnellement iné- gales & fans franges.

La chryfdide, en ce que fa partie antérieure n'eft pas

che ous sat tin MCE

à

BIIE SCA E IN es 187 échancrée, mais feulement alongée en pointe; en ce qu'elle n'a pas ordinairement des éminences ou apophyles, & qu'elle eft liée par un ff qui lui paile un peu plus haut que le milieu du corps.

La chenille, en ce qu'elle-n'eft pas épineufe, mais le plus fouvent chagrinée feulement de petits mamelons qui portent ordinairement des poils’communément très-courts.

On peut placer ici le papillon du chou, celui de Ja plus belle chenille de cette plante, de différens- Auteurs ; 1e nou- veau vaivode , celui de lépine blanche, le foufré, cités par Eléazar Albin ; le papillon d’un blanc noir de Cambridge, le papillon de Lifbonne mêlé de noir & de jaune, le jaune de Surinam, rapportés par Pétiver ; les fuivans, qui le font par Mille Mérian //vo1. 2), favoir, ceux du cafchou, du roucou & du manioc, & celui que Sloane a caraétérifé par peti- tele, fes ailes jaunes , & dont l'angle extérieur eft brun.

Le papillon du troifième genre convient par les pattes & l trompe, mais il diffère par un appendice plus ou moins long qui forme une efpèce de queue aux aïles inférieures, qui, de plus, ont leur côté intérieur plié de façon qu'il recouvre le dos de l'infee lorfqu’il eft en repos.

La chryfalide eft avec des apophyles: elle a moins a forme d'un fufeau que celle d'un cone dont la bafe feroit tronquée obliquement de devant en arrière, & dont les côtés de cette bafe feroient un peu aplatis: elle eft attachée horizontalement, comme Îa précédente.

La chenille eft chagrinée de mamelons fans poils, ou avec des poils épineux ; mais elle fe dittingue principale- ment par une efpèce de corne mobile, que l'animal peut faire rentrer & fortir, & qui eft polée fupérieurement entre le col & le premier anneau.

Les papillons fuivans font de ce genre, favoir, les papil-

ons à queue, flambés ou non, de différens Auteurs : ceux

qui font rapportés par Mie Mérian, dans fon fecond volume,

aux Tables xx1X, xL111 (qu'elle appelle le Page de 4a

Reine), 1X, XVII, XXXI, LXVII; celui du n.° 508 Aa ij

GENRE IN, Pterigurus, Papillon à queue,

GENRE IV. Pyrallis Papillon

épervier.

GENRE V. Æntaphius,

Papillon à tête de mort.

188 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyaAtE

du Cabinet de Pétiver; celui de page 217 de l'Hifloire de la Jamaïque, px Sloane.

Le papillon de ce genre diffcre beaucoup des papillons des trois genres précédens ; fes antennes font prifmatiques, la trompe eft platte, les ailes inférieures font beaucoup plus courtes que dans les autres papillons; le dos n’eft pas ordi- nairement recouvert par les ailes, qui font pofées parallèle- ment lorfque Fanimal eft en repos.

La chryfalide eft pluflôt conique qu'en fufeau, quoiqu'elle foit cependant un peu plus renfiée vers le milieu ; elle-eftliffe, alongée , & .déliée à fa partie poftérieure; elle ne fe fufpend ni ne s'attache comme les précédentes, ni ne fe fait decoques comme la plufpart des fuivantes, mais elle refte à découvert, ou elle eft cachée en terre; toutes celles d'Europe font ainfr fous terre, au lieu que celles d'Amérique reftent à l'air.

La chenille eft chagrinée , non velue; elle porte fur le dernier anneau une corne cartilagineufe recourbée de devant en arrière.

Ce genre renferme le papillon de la belle chenille du tithy- male, celui de Ka chenille-fphinx de M. de Reaumur, celui de la chenille appelée l'éléphant par Goedaert, ceux des Tables VIII, X, LVI1, par Eléazar Albin; ceux du fecond volume par Mile Mérian, & des Tables 111, v, XIV, XXXII1, XXXVILI, XLV, XLVI, LV, LVII, LXI, LXII, EXIV ; Celui que Margrave appelle panoponamueu, & qui eft celui du 25, page 219 de l'Aifloire de la Jamaïque par Sloane.

Le papillon de ce genre diffère de celui du précédent, en ce que les antennes, qui font auffi prifmatiques, font com- pofées de lames, ou fi Fon aime mieux, {ont fillonnées en manière de rape; en ce que fa trompe eft ronde, épaifle, & ne fait que deux ou trois tours; en ce que les ailes font pen- dantes, qu'elles ne font prefque pas triangulaires, c'eft-à-dire, que les bouts de leur bafe font tellement arrondis, qu'ils ne font qu'une courbe continue avec les côtés; & que les infé- rieures ont le côté interne plié lorfque l'animal eft en repos.

La chryfalide eft conique, & ne diffère de celle du genre

) pie sc 1 E NACLENS 189 précédent que par les différences qui peuvent venir de celle de la trompe, des antennes, des aïîles, de la pofition & de la courbure de la corne que porte la chenille: elle fe tient en terre,

La chenille fe diftingue par cette corne cartilagineufe qui eft

"ps L Re pofée fur le bout du corps, recourbée de derrière en devant,

& qui eft comme compofée de plufieurs petits corps ronds, ou de plufieurs petits grains.

Ce genre ne renferme qu'une efpèce *, qui eft Je papillon à tête de mort, cité dans le vol. [, page 203, & vol. IT, page 289 & fuiv. de M. de Rewumur ; à la Fable vi, à, 4, c, d, n. 9 d'Eléazar Albin, & à la Table x xv, vol. I de Mie Mérian.

Les antennes du papillon de ce genre font coniques, noueufes , contournées ; celles du mâle font chargées de poils qui forment des pinceaux, celles de la femelle le font d'é- cailles ; la trompe n'eft compolée que de deux corps cartila- gineux qui forment un triangle ; les aîles font grandes & parallèles dans le mäle, très-courtes dans la femelle, qui a le <orps couvert d'écailles plus grandes que celles du mâle.

La chryfalide eft conique, de façon cependant que la partie antérieure eft beaucoup plus grofie que la poftérieure, & que le rétréciffement ne fe fait pas infenfiblement : elle eft renfernke en terre fans coque.

La chenille n'a que dix pattes, les fix cartilagineufes, deux membraneufes qui fortent du neuvième anneau, & les deux poftérieures : les anneaux font peu diftinéts, très-étroits, les trois premiers & les trois derniers fur-tout.

Je ne place encore fous ce genre que le papillon de la che- nille arpenteufe du chène, du noïfetier, &c..{ Reaum. vol. IL, p. 370€ Juiv.) celui de l'arpenteufe du tilleul {idem ibid. p. 371); celui de l'arpenteufe de l'abricotier / id, ibid, pages 373 374); ceux des Tables xcr& c par Eléazar Albin.

* Dans un envoi poftérieuraà celui | différente de celle-ci, & dont la che- qui renfermoit les nids dont il s’eft | nille eft auffi armée d’une corne fur agi dans ce Mémoire, M. le Juge a | fapartie poftérieure, & qui ferecourbe mis une efpèce de papillon de ce genre | ésalement de derrière en devant.

A a ii}

GENRE VI. Geometra, Géomètre.

GENRE VII. Thips,

GENRE VIII. Tinea,

Teigne.

r90 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Les antennes du papillon de ce genre font coniques, courbes, velues d'un côté, & comme compofées de lames ; la trompe n'eft formée que de deux corps déliés, fins comme des cheveux, & éloignés lun de l'autre; les aïles font pendantes en toit arrondi, ce qui vient de ce que le côté interne des ailes eft beaucoup plus court que l’extérieur, & que l'angle formé par le premier & la bale, fe trouve ainfi plus rapproché du milieu de l'aile, & plus élevé.

La chryfalide eft conique, fes anneaux font armés de petits crochets : elle eft renfermée dans une coque.

La chenille eft armée de crochets au bord inférieur des anneaux, dont le premier eft fupérieurement cartilagineux.

Ce genre renferme le papillon de la chenille qui ronge le peuplier, le frêne, forme, le chêne / Reaum. vol. 1, pp. 3 0 9 310; vol. I, p. 468); celui de la chenille qui ronge le pommier (id. vol. 11, p. 469 & Juiv.); celui de la chenille qui ronge forme (id. ibid. p. 471); celui de la chenille qui ronge les têtes du chardon à foulon (id. ibid. p. 474); cœlui de la chenille qui ronge les tiges l'aulnée /ici. ibid. p. 473); celui de la chenille qui ronge les tiges de laitue, /id. ibid, pages 471, 472).

Les antennes du papillon font coniques, fa trompe com- pofée de deux petits corps éloignés l'un de l'autre, & recourbés en dehors; les ailes font arrondies par le bas; elles font paral- lèles, & recouvrent le corps dans Pétat de repos.

La chryfalide eft conique, life, renfermée dans une coque de foie qui refte dans le fourreau que la chenille s’étoit fait.

La chenille fe diftingue fur-tout par les deux premiers anneaux , qui font cartilagineux; par les pattes membraneufes, qui ont un cercle de crochets, & par le fourreau qu'elle fe fait.

Le nombre des teignes eft grand : on peut voir les fui- vantes dans les Mémoires de M. de Reaumur fur les Infeétes, favoir , la teigne à fourreau en crofle, à chaufle d'hypocras, à tuyau couvert de brins de tiges de chiendent, à fourreau à oreilles, à pan ou des murs, à pan ou des arbres, fait de brins

jh 1175

ne SSIClr EN CES 191 de genêt, angulaire ou du chène; la teigne des pelleteries, la grande & petite faufle teignes de la cire, celle du cho- colat, celle des grains, celle des cuirs, celle de la laine; Ja teigne de l'eupatoire & arroche à fourreau angulaire, celle du chuis, celle du cerifier à tuyau en forme de poiffon, celle du pommier à tuyau femblable au précédent, celle de Forme dont le fourreau eft en forme de poiflon & à boffe, celle de f'aftragale, la falbalas, celle en manteau & du chêne.

Le papillon a des antennes coniques , la trompe fait plu- fieurs tours de fpirale, les ailes font parallèles au plan de pofi- tion; elles font larges par le haut, de forte qu'elles forment un paralélogramme pluftôt qu'un triangle.

La chryfalide eft conique, life & enfermée entre‘les feuilles qu'elle rapproche & qu'elle tapifle de fils de foie.

La chenille fe diftingue par les huit pattes intermédiaires, qui ont un cercle complet de crochets ; elle s'agite & fe donne des mouvemens violens lorfqu'on la touche.

Les papillons fuivans font de ce genre; le papillon de a chenille qui lie les feuilles du chêne, de celle qui lie les feuilles du poirier, de la ronce & du nefier, celui de la lieufe du faule, de la lieufe du fenouil, de la rouleufe des feuilles du chêne, celui de la teigne du poramogeton, celui de la teigne aquatique; ces papillons ou chenilles font cités dans les Mémoires de M. de Réaumur : les fuivans font d'Eléazar Albin, favoir, ceux des Tables XXXvI, LXXII, LXXIII.

Le papillon fe diftingue principalement de ceux du genre

récédent, par fes ailes pendantes, frangées, & qui fe réu- niflent dans l'état de repos vers le bout du corps, à peu près en queue de coq; les antennes font coniques.

La chryfalide eft eonique, aigue; elle eft renfermée dans une coque qui a la forme d’un fufeau, & qui eft cachée entre les membranes des feuilles des plantes dont la chenille a mangé le parenchyme.

La chenille n'a que quatorze pattes, les fix antérieures, & fix intermédiaires pacées de façon qu'entre leur dernière paire: & la paire des poftérieures il y a trois anneaux interpolés,

GENRE IX. Ex. Papillons lar- ges d’épaules ouchapiers, & ceux des che- nilles lieufes,

GENRE X.

Pyraufta,, Mineufe.

GENRE XI. Acia,

GENRE XII Supera.

?

192 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Sous ce genre font rangés les mineurs en grand de l'orme, du pommier, du chêne, du poirier, du noïfetier, celui de la rou- leufe de l'ofeille, du pommier, de celles qui vivent en fociété fur le lilas, fur le troëfne, rapportés par M. de Reaumur.

Le papillon de ce genre a les aîles arrondies à leur bafe; elles font droites & éloignées les unes des autres lorfque l'animal fe tient en repos; le dos & les épaules font chargés de touffes de

oils, les antennes font coniques, la trompe eft en fpirale.

La chryfalide eft conique, elle eft armée de deux crochets à fa partie poftérieure ; la trompe efl longue & tournée du côté de la tête; la chryfalide ef renfermée dans une coque qui eft en terre.

La chenille n’a que douze pattes, les fix cartilagineufes quatre membraneufes, & les deux poftérieures. k

Ce genre ne renferme encore qu'une efpèce qui eft le papillon appelé gamma, à caufe d’une tache blanche qui eft fur chaque aile fupérieure, & qu'on a dit reflembler à cette lettre grecque.

Le papillon a des antennes coniques, à grains, droites ou contournées, lifles ou chargées de pinceaux; a trompe ne fait fouvent que deux ou trois tours de fpirale, fouvent

uatre & davantage.

La chryfalide eft conique, lifle; elle eft enfermée dans une coque de foie pure ou rembourrée de terre, qui refte à fair, ou qui eft cachée en terre ou entre des feuilles.

La chenille n'a que dix pattes, les fix antérieures, deux membraneufes, & les deux poftérieures.

On pourroit peut-être féparer ce genre en plufieurs, peut- être en quatre; les différences obfervées dans les papillons & dans plufieurs chenilles, pourroient fufhre pour cela.

Je rangerai cependant fous ce genre le papillon dont la chenille vit de plufieurs arbres, & qui eft décrit à la page 350 & fuivantes du fecond volume des Mémoires de M. de Reaumur, & les fuivans qui font tirés de l'ouvrage d'Af- bin, & qui font gravés aux Tables XXXIX, XL, XLIV,

XLV, XLVII, XLIX,-XCI, XCII, XCIII, XCVII, Ce Les

D'E SN r E N C'E'S. I

28: Les antennes du papillon font à plumes, feulement d’un

côté; la trompe n’elt compofte que de deux filets très-courts; les aîles font pendantes, & elles font le dos d'âne par leur réunion lorfque l'infeéte eift en repos.

La chryfalide eft conique ; la trompe eft couïte, les anneaux

ont deux rangs de crochets recourbés de devant en arrière;

la coque eft “double, l'extérieur eft de terre, l'intérieur de brins de bois liés par de la foie, & doté aufli par quelque liqueur.

La chenille a quatorze pattes, les fix cartilagineufes, Îles huit intermédiaires, & au lieu des deux poftérieures, elle a deux longues cornes renfermées dans un tuyau cylindrique,

GENRE XIII Pfora.

que l'animal fait {ortir ou rentrer à volonté dans ce tuyau:

la tête peut fe retirer fous le premier anneau.

Sous ce genre fe rangent la chenille-poiflon, les chenilles- chevaux marins, aïnfi appelées par M. de Reaumur , {a chenille-araignée d’Aldrovande, celle qui vit fur le faule, citée par M. de Reaumur, { vol. 11, page 275 ), celles de la Table Lxv, par Eléazar Albin.

Les antennes du papillon font à plumes dont les barbes font aufli des plumes; la trompe manque ou eft extrème- ment courte; les aîles font parallèles au plan de pofition lorf- que l'animal eft en repos.

La chryfalide eft conique, fans trompe, renfermée dans une coque de foie.

La chenille a feize pattes; elle fe difissue principalement

par (douze) tubercules dont les anneaux font chargés; ces LENS le font eux-mêmes de poils plus ou moins longs, arrangés en rayons.

Ce genre renferme les papillons, grand, moyen & petit paon, ceux qui font rapportés par Mile Merian dans le fecond volume de fon ouvrage, aux figures 6, 11, 12, 22, 63, 65 & 211; la très-grande phalène à à plume du Cabinet de Pétiver, 7, 8, c. 209, M. P. 789; la phalène à plume, de Mariland, qui eft verdâtre, & qui a une queue, Petiv. Gazophyl. 14, $,«& 543; la wès-grande phalène

Mém, 1749: . Bb

GENRE XIV4 Seres, Papillon

paon.

194 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE d'un brun-obfcur, appelée Chufan, &c. Petiv. Gaçophyl. 1 8, 3, « 212, & celui.de la Table xx1x, no 3. Genre XV. , Les antennes font femblables à celles du genre précédent, res la trompe eft compofée de deux corps cartilagineux qui for- PE % ment un triangle; les ailes font parallèles au plan de pofi- tion, l'animal étant en repos. )

La chryfalide eft conique, à la trompe courte; elle eft renfermée dans une coque entièrement de foie, ou à grandes. mailles, mais qui font remplies par quelques corps étrangers, ou bien la coque en eft recouverte, ou eft enduite en dedans d'une liqueur gommeufe ou réfineufe qui fe deffèche,

La chenille, qui a feize pattes, fe diftingue fur-tout par les anneaux qui font chargés de (douze) tubercules qui font liffes ou garnis de poils fimples ou éunis en pinceau.

Ce genre eft des. plus abondans; il renferme le ver-- foie ordinaire, le papillon de la chenille ziczac, ceux de la chenille du cerifier & de l'aubépine, du pommier, ceux de la livrée, de la millepied, de celle à oreille du chène & de l'orme, de la commune, de celle du poirier, du prunier, du faule, &c. des proceflionnaires ou évolutionnaires , de la lièvre, de celle du pin, fe papillon-feuille sèche, des chenilles à broffes du châtaignier, du prunier, du chiendent, de lhé- riflone ou de la martre, de celle du gazon & de celle du pommier. Tous ces papillons font décrits par M. de Reaumur dans le premier ou le fecond volume de fes Mémoires. fur les Infectes; les fuivans font tirés d'Eléazar Albin, favoir, ceux des Tables XXVI, LXXXIX, XC; ceux des Tables x1v, XIX, XLVII, LVII, LVII du fecond volume de Mie Merian, font auf de ce genre; enfin les deux dont il aété queftion, & dont les nids ont été décrits au commencement de: ce Mémoire; L à

On peut voir maintenant fort aifément ce qui m'engage à ranger ces chenilles fous ce genre; leurs dépouillés font chargées de poils, les chryfalides font coniques, elles font renfermées dans une coque de foie pure ou recouverte de petits bâtonners : leurs nids, il eft vrai, ont la fingularité

{

DIE SUISNC LE N CE S ME 195 d'être fufpendus avec beaucoup d'art, ce que lon na pas éncore vu dans d'autres efpèces, mais celles-ci emploient pour faire le leur quelque adrefle qui, pour n'être pas auffr grande, fe rapproche en quelque forte de celle des premières. Les communes forment un nid pofé entre une fourche de branche d'arbre, les proceffionnaires l'attachent le long d’une grofle branche d'une tige d'arbre , les autres le long des arbres ou des murs, ou des pieux, ou de quelques autres corps femblables, & toüjours à l'air; ainfi je crois qu'on ne doit faire aucune difficulté de ranger ici Les papillons qui viennent des chenilles qui font le premier nid, & qu'un peu plus un peu moins d’induftrie dans les uns ou les autres ne doit pas féparer des infeétes qui fe rapprochent par tant d’autres endroits.

On pourroit, à ces quinze penres, en ajoüter encore, à ce que je penfe, au nioins quinze autres; mais comme je nai pas encore pü, par moi-même, ou par quelque ouvrage imprimé, déterminer entièrement leur caractère, & que la defcription des papillons, des chryfalides ou des che- nilles manque, ou eft trop imparfaite, je me fuis contenté, ne voulant pas faire un fyftème fuivi, de rapporter les pré- cédens. Ce n'eft pas que l'on doive avoir du doute fur l'un ou l'autre état des infectes des genres que je n'ai pas faits: par exemple, on ne peut pas douter que le papillon à corne de bélier n'en doive faire un; fes antennes, qui font con- tournées & compriméés de haut en bas, fuffifent certaine- ment pour le bien caractérifer, mais fa chryfalide & fa che- nille ne font pas déterminées. Celui de la page 278 & 279 du premier volume de Mémoires de M. de Reaumur, & celui du Cabinet de Péti-

ver, page 229, qui y eft appelé petit papillon à aïles pen-

intes, & dont le corps & les aîles font entièrement verds

ou bleus, & qui n'eft peut-être qu'une variété du premier,

ient de ce genre. Mers! Q Le papillon-bourdon, dont les antennes font en maflue,

velues par Je bout, & comprimées latéralement ; doit faire :

Bb ÿ

GENRE XVI ÆHepialus, Papillon à

corne de bé=

lier.

GENRE XVIK

Pfaluges, Papillon- ourdon.

ét

196 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

un autre genie; mais on ne peut encore apporter pour caractère de la chenille, que la petite différence qui fe trouve dans la corne qu'elle porte fur le dernier anneau : cette corne eft droite, au lieu que dans les chenilles des papillons-éper- viers, au genre defquels celui-ci a beaucoup de rapport, elle eft courbe de devant en arrière; ce qui ne paroîtra pas fans doute fuffifant pour bien caraétériler ce genre.

J'y rangerai le papillon -bourdon ordinaire / Reaum. vol, 1, pages 89, 90, 276); le papillon-mouche (id. ibid. p. 277); le papillon -bourdon de la Caïoline, qui eft très- grand, & de couleur de fer, rapporté par Pétiver dans fon Cabinet, p. 32,7, & 549; & la phalène- bourdon à corps noir, petit, & qui eft jaune à fon bout poflérieur (id, ibid. p.421 60 54).

La forme des chenilles - Hope annonce une différence

Gewre XVIII effentielle dans les papillons & les chryfalides : ces chenilles ne

Tylus, font pas, comme les autres, d’une forme cylindrique, mais

E ES les anneaux font plats en FATERNE arrondis en defilus, &

portes. anguleux fur les côtés; le bout poftérieur du corps fe ter- mine en pointe.

La chryfalide tient un peu de cette figure irrégulière; elle eft plus grofle poftérieurement qu'antérieurement, au rebours de ce qui devroit, à ce qu'il femble, ‘arriver, la partie pof térieure étant plus grêle dans la chenille, & l'étant toujours dans les chryfalides “de tous les autres genres ; celle-ci eft atta- chée par le corps au moyen d'un fil qui lui paffe tranfver- filement en deffous; elle a ainfr, de ce côté, du rapport avec celles des papillons à queues.

Celui qui vient de ces chryfalides en a auffi beaucoup avec ces derniers, il leur reffemble même par l'appendice des aïles iférieness mais outre que l'aile eft plus arrondie par le bas, que fon contour n'eft pas le même, je crois devoir penfer qu'il a d’autres différences, qui, étant décou- vertes, caractériferont bien ce genre.

H renfermeroit les papillons des chenilles - cloportes du chêne, du baguenaudier, rapportés par M. de Reaumur; ceux

Ai ts me

=

UE SUMBNE) D E C' ETS 197 qui le font par Eléazar Albin, aux Tables v & n11. Je ne puis encore me perfuader que le papillon de la che- Genre XIX. nille qui vit de la mauve, ne faffe pas un genre différent; ce Muches, papillon cependant convient avecdes trois ou quatre premiers genres, par {es antennes, fa trompe, les barbillons elle eft renfermé, par fes pattes : on ne lui connoîit de différence que par la pofition de fes aïles, qui font horizontales, ou qui ne fe relèvent qu’un peu en s’inclinant vers le corps. La chryfalide eft conique, life, recouverte d’une matière farineufe; elle eft renfermée dans une coque à très-grandes mailles, placée entre des feuilles rapprochées les unes des autres par des fils de foie. Ces difiérences dans la chryfalide, la propriété de faire une coque, m'empêcheront toûjours de réunir ce genre avec un de ceux auxquels il a.du rapport. -: H n’y auroit encore de ce genre que le papillon décrit à la page 272 du premier volume des Mémoires de M. de Reaumur. Les papillons-damiers ont encore plus de rapport avec Genre XX.. Je premier genre que le précédent, car ils ont même la pre Tenrorium, . mière paire des pattes très-courte, mais elle n'eft pas fran- Papillon des. gée: cette différence eft à fa vérité bien petite, mais ft on Era la rapproche d’un certain port qui fait tout d’un coup recon- noître ces papillons, je crois qu'elle doit engager à en faire un genre féparé. Les aïles de ces papillons font plus arrondies par le bas, leurs côtés font plus droits & plus égaux que dans les aïles des papillons du premier genre.

Celui-ci contiendroit les papillons dont les chenilles vivent de chiendent, & décrits aux pages 271, 431 du premier volume des Mémoireséde M. de Reaumur; ceux des fig.

718%) 32, 33% 681du fecond volume de M.lte Mérian.

La propriété d'avoir les ailes divifées en plume, ne laiffe Genre XXI. "aucun doute fur Ja féparation que l'on doit faire de ces pa- Æryopteris, …_ pilons: elle les diftingue facilement: de ceux qui, comme al es : _ eux, ont des antennes coniques, une trompe qui fait plu- Tee …_ ficurs tours, fix pattes inégales.

+

Bb iij

198 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE

Mais la chryflide, qui eft conique , & qui eft liée horizontalement par un fil qui lui pafle plus haut qu'aux autres qui font auffi liées, me paroît être déterminée par cette propriété, trop généralement, de même que la chenille par fes {eize pattes & par fes anneaux qui ont des tubercules.

Ce genre feroit déjà compofé de fept elpèces rapportées par Pétiver, aux Tables LXvI, 10, 11, 12; LXVI, 6,7, 3; & de celui qui a des aïles tachetées, cité par M. de Reaumur /vo/. 1, pages 324 © 32 s), qui parle auffi des deux premiers de Pétiver.

Le nombre des genres fe multipliera fans doute, & eft peut- être déjà augmenté par les obfervations de quelques Auteurs que je n'ai pas rapprochées ; mais ne n'étant propolé que de donner quelques exemples pour chaque genre, je n'ai pas voulu les trop étendre, n'ayant principalement eu en vüe que de faire faire attention encore plus qu'on ne fait aux rap- ports qui fe trouvent entre les papillons, les chrylalides & les chenilles du même genre; rapports qui ne font pas encore auffr bien établis qu'ils le peuvent être, & qu’ils le feront probablement dès qu'on s'attachera à remarquer les plus pe- ttes différences.

Ces recherches paroïtront fans doute à bien des perfonnes de vraies minuties; ce font cependant ces minuties qui, n'étant point connues, laifleront toûjours le Naturalifte exaét dans l'incertitude, & qui lempêcheront de découvrir l’ordre: qui a été mis entre ces êtres, & la liaifon infenfible qui les unit les uns avec les autres : c’eft fouvent cette petite pro- priété, qui échappe par fon peu d'apparence , qui fait ce chaïnon qui entretient l'unité dans la chaîne, & ce n’eft que lorfqu'on laura trouvée qu'on en verra la continuité, qui eft tout ce que doivent chercher ceux-là même qui ne veulent confidérer ; comme ils sénoncent , les êtres qu'en grand: ceft ne vouloir fouvent en connoître que ce qu'il y a de plus petit que de ne s'arrêter qu'aux propriétés les plus appa- rentes, & que l'Oblfervateur le plus fuperficiel découvriroit aifément : on ne faura toûjours par-là que très-groflièrement

DES/SCIENCES 199 l'Hifloire Naturelle ; on travaillera beaucoup, & l'on avan- cera peu cette fcience, dont le point de perfection eft de découvrir l'ordre véritable, celui que a Nature a fuivi. Plus on approchera de cet ordre, & plus on verra que tout a été fait fuivant certaines loïx & certains principes, & l'on s'affu- rera que ces loix n’ont été fuivies que pour procurer à ces êtres tout ce qui étoit néceffaire pour leur confervation : par- B on parviendra jufqu'à pouvoir prédire ce que doit faire tel outel animal, en connoiffant bien exaétement fes parties,

- dès qu'elles feront femblables à celles d’un autre dont l'in-

duflrie fera connue. A l'aide de ces lumières, l'Hiftoire Natu- relle deviendra une vraie fcience; elle aura des principes inva- riables, ou pluftôt on aura développé ceux qu'elle a déjà , & ceux que l’Auteur de la Nature s'eft propolés, lui qui a auff bien fait les clafles & les genres que les elpèces, les uns & les autres ne dépendant pas plus de nous ques les efpèces elles-mêmes. Nous avons bien imaginé les noms de dclafle, efpèce, individu , mais ce n'eft qu'après avoir remarqué qu'un certain nombre d'êtres avoient des propriétés qui, en les rap- prochant entr'eux, les diftinguoient & les féparoient de plu- fieurs autres qui formoient des genres différens par d'autres propriétés qui n'étoient pas femblables à’celles -ci: de l'on a dit que le tigre & Ja panthère étoient d'un genre; que le chat- pard, le chat, le lynx, étoient d’un autre; qu'un troifième étoit formé de la martre, de la belette, de l'hermine: & pour ne pas fortir.des animaux dont il,s’eftagi dans ce Mémoire, nous ne pouvons pas davantage féparer les chenilles d’un des genres quenous avons décrits plus haut, pour les faire paffer dans un autre, que nous pouvons les ranger avec les lions & les renards. Tous ces animaux ont été faits fur des modèles & fuivant des vües bien différentes ; ils ont reçû tout ce qui

Jeur étoit néceflaire pour parvenir aux fins qu'ils devoient

employer pour fe conferver, & ces moyens ne font autres que les parties qui leur ont été accordées. Lorfque ces parties

# reffemblent en général, nous difons que les animaux qui

les ont font du même genre : nous diflinguons les efpèces

200 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

par des qualités particulières, quoiqu'effentielles à ces parties, & les individus par celles qui leur font accidentelles. Il eft donc vrai de dire que quoiqu'il n'y ait eu de créé que des individus, & qu'il n'y ait pas d'êtres particuliers qui confti- tuent ce que l'on appelle clafle & efpèce, l'on a fait avec juftice ces diftinctions, ou pluftôt qu'elles ont été faites par l'Auteur de la Nature indépendamment de nous.

H auroit fans doute, avant ce temps, paru ridicule à toute perfonne, même la moins inftruite, d'entrer dans une fem- blable difcuffion, & de s'attacher à la prouver; mais de même que les loix de la Nature font invariables, que tout a été fait fuivant un plan régulier, que tout a été diftribué fuivant certains genres & certaines clafies, il n'arrive de même que trop fouvent à ceux qui cherchent à s'inftruire dans l'Hiftoire Naturelle, d'y porter une confufion & un defordre qui n’exiflent que dans leur efprit, & qui n'ont pour caufe que leur peu de connoiflance. H faut avoir fait un certain progrès dans cette fcience pour foupçonner tout l'arrange- ment qui y a été mis: graces aux travaux d'un grand nombre d'excellens oblervateurs en tout genre, nous commençons à l'entrevoir: Von fait qu'indépendamment des rapports que les êtres peuvent avoir avec nous & avec notre bien être, ils en ont entreux, & que de ces rapports comparés les uns avec les autres il réfulte une fuite de clafles & de genres, qui mis ou pluftôt laiflés dans leur place naturelle, forment un tout dans lequel homme même fe trouve placé. L'on commence à avoir des preuves de ce que les Anciens avoient foupçonné, fondés non fur les connoiffances pro- fondes qu'ils euffent acquifes dans l'Hiftoire Naturelle, Jon ofe dire qu'ils n’étoient que fuperficiels, fi on les com- pare avec les modernes, mais fur un préjugé avantageux pour l'ordre que lon foupçonne prefque malgré foi, lorf- qu'on a étudié jufqu'à un certain point lHifloire Naturelle, & que l'on ne veut pas fe refufer à ce que l'on voit & à ce qui fe préfente de foi-même: en eflet on commence à voir que lon peut defcendre depuis homme jufqu'aux êtres

inanimés,

Dte sci E N'CES 207

* inanimés, ou remonter depuis ces êtres jufqu'à homme, de

F L

façon qu'il s'y trouve une continuité qui n'éft point inter- xompue, &: qu'au contraire les genres & les clailes font liés les uns aux autres d'une manière infenfble: ceite vérité ne demande même, pour être bien prouvée, que des obfer- vations multipliées, & plus recherchtes quelles ne l'ont été jufqu'à préfent. Nous en favons cependant déjà afez pour

_n'êue plusteffrayés de cette vérité, & pour ne pas ignorer

que fi elle n'eft pas encore dayte de tous les appuis dont elle abeloin, elle en a cependant aflez pour que nous puiflions preflentir ceux qui lui manquent ; Nous €QMinENÇoNs mème à connoître ce qui peut être elientiel ow non à ces êtres; nous ne fommes plus arrêtés par les différences, quel uefois éole , qui fe trouvent entre deux elpèces d'un même genre, loit du côté de la grandeur, foit du côté de la force, de l'adefle, de la douceur : on ne feroit pas plus étonné de voir, citrouille à côté du chêne, s'il étoit vrai que ce

: à fon lieu, qu'on ne left de voir quelquefois dans le

même genre une elpèce qui sélève en arbre; tandis qu'une autre m'eft pas plus haute que fa main, comme parmi les plantes on J'obferve entre les cornouillers. Dans les animaux, une efpèce’aura la grandeur de l’homme, ou elle la furpañlera même, tandis qu'une autre n'aura pas un pied ou deux de hauteur, comme cela fe voit entre I& cerfsordinaire & celui de Guinée *, entre les grands finges & celui de la rivière des Amazones qui a la + rouge & le corps blancheïtre ; on voit fans être füurpris des animaux aufli diférens par la force, ladrefle & la douceur, que le loup, le renard & le chien, réunis fous un même genre: ce n'eft point réellement par des qualités qui peuvent changer que fon doit établir ces genres, mais par celles qui font invariables, ou qui ne varient

que dans des cas extraordinaires. De plufieurs glands venus En e

* A: Linnæus prétend que le petit | différence ne fera pas alors fi grande cerf de Guinée eft une efpèce. de | d'efpèce à efpèce, quoique confidé- chèvre, je foufcrisvolontiers au fen- | rable cependant. * timent de cet habile Naturalifte : la

Mém. 1 749. | «: Ce

202 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

du même chêne, les uns pouffent jufqu’à des hauteurs de trente, quarante ou cinquante pieds, d’autres ne s'élèvent pas plus d'un pied ou deux, mais les fleurs ne changent pas pour cela, le tiflu des vaifleaux refte le même, ou ne varie que dans des chofes accidentelles. On a des loups adoucis, des renards privés, &

3.2 A . - ne prendre que ce qu'on leur donnoït; on a au contraire

des chiens, de privés devenir fauvages & féroces; mais ces chan- gemens ne dépendoient pas de changemens qui fetfüffent faits dans quelques parties de ces animaux , qui font {es feules chofes qui peuvent fervir à les bien faire connoître, quoiqu’en général on puifle dire qu'ils*convienneñt même du côté de ces autres propriétés. Ces animaux doivent naturellement vivre de ra- pine, ils‘doivent chafler ceux qui leur ont été accordés pour leur nourriture , voilà la propriété générale & eflentiellé# mais ils le font avec plus moins de force & d’adrefe, voilà €e qui eft accidentel, & qui peut varier, comme il varie réelle- ment, fuivant les befoins de ces animaux : d'autre ;*ati con- traire ne change point, dès que ces animaux feront aban- donnés à eux-mêmes ; elle eft aufli invariable que leurs parties mêmes, dont l'examen apprendra toûjours, indépendamment de ce qu'on pourra favoir de leur façon de vivre, ce qu’en général ils doivent faire; & c'et même ainfr que les An- ciens raifonnoient le plus fouvent. Les pattes de tel ou tel animal font armées de doigts, d'ongles ou de fabots, ou ils n'ont ni lun ni l'autre; leurs dents font faites de telle ou telle façon, donc ils doivent faire telles ou telles chofes, & vivre de telle telle façon : raifonnement qui n'emporte pas avec lui une conviétion entière, mais qui eft plus que probable, & qui ordinairement fe confirme par l'hiftoire de ces animaux, HET

Bien loin donc de croire qu’il n'y a pas eu d'ordre établi entre les êtres créés, qu'ils ne font qu'autant d'individus qui n'ont püû, & qui n'ont pas même être rangés fous des chffes & des genres; qu'il cft indifférent de mettre à la

fuite de l'homme ou du finge, du lion ou du chien, une

mouffe ou une huître, je fuis perfuadé au contraire que l'affem-

un

DES SCIENCE S. 202 blage de tous ces êtres forme un tout qui fouffre ces divi- fions ; que c'eft bien, comme on le dit avec complaifance, une chaine qui n'efk qu'un cercle dont il peut être indiffé. rent de compter les chaïnons par qu endroit cu par un autre, mais ces chaînons fe font pas femblables en tout, ils {ont diftingués s uns des autres parun caractère fpécifi- que; qu'outre cela chaque chaînon eft lui-même compolé d'autres chaïînens qui ont leur caractère propre : de il ré- fulte bien un tout, mais ce n'eft pas un tout homogène, c'eft un-tout dont un.certain nombre de parties a été doué de certaines proprittés, tandis qu'un autre l'a été d'autres toutes différentes, quoiqu'elles t'ennent les unes aux autres par quelque endroit. C’eft pat un de ces endroits. que homme même sy trouve attaché, on ne peut difconvenir de cetie vérité, mais ilfeft feul de fon genre; & fi du côté de fa fübftance corporelle il tient aux autres êtres corporels, ïlen eft entièrement féparé par cette fubftance fpirituelle qui l'anime, qui le fait agir fuivant certaines idées réfléchies , différemment combinées , & qui ne (it pas toujours les mêmes : cogme les autres êtres corporels il n'eft pas néceffité à fuivre toù- jours un certain plan, qui, à Ja vérité ,.eft bien. diverfifié pour

_chaque genre, mais que chacun de ces genres. doit exécuter

fervilementg &. toûjours de la même façon. Regardons donc Yhomme comme devant entrer dans la compofition de la chaîne de tous ces êtres , mais regardons-le comme le point de réunion es deux bouts de la chaîne viennent aboutir: il faut, il eft vrai, pour que cette chaîne foit parfaite, qu'il f trouve dans -cet endroit, comnie les autres font au lie

qui leur a été affigné : fans lui la chaîne feroit interrompue; & fans trop fortir des:bornes de la Phyfique, l'on pourroit peut-être dire avec certains Philofophes anciens, qu'il tient

4 Lie chaine d'êtres tout fpirituels par ceite fubftance . <<. bla

L

Je qui l'anime. Mais, pour ne nous point écarter. dus point, de vüe fous léquel "nous favons jufqu'ici confidéré, ne faifons point dificulté de dire, quoique cela l'ait déjà été uné.infinité de fois, :qu'il,eft le premier des êtres terreftres,

Cci , M

204 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE que c'eft lui qui doit commencer ceite chaîne, comme étant celui qui doit commander à tous les autres qui la compo- fent; que fi on le regarde comme le dernier, ce ne peut êtie que parce qu'il eflsla fin pour laquelle tout a été fait : en le confidérant ainfr, il eft indifitrent de defcendre de lui au dernier des autré$t êtres, ou de remonter ce dernier jufqu'à lui; mais, quelque façon qu'on fuive, on ne peut le faire d’une manière vague & fans fuite, ceiteschaine n'étant point interrompue, mais une efpèce de chaînons étant liée avec une autre, un genre dvec un genre, une clafle avec une claffe, par des nuances infenfibles. Sans entrer dans un détail qui nous mèneroit trop loin, & qui pourroit être la matière d’un traité aflez confidérable, peut-on fe refufer à ces grandes différences connues de tout le monde, qui ont été mifes entre les animaux, les plantes & les minéraux ? ne voit-on pas enfuite les animaux fe fous-divifer en différentes dlaffes, de méme que les plantes & les minéraux! Ces premières & grandes divifions font liées enfemble par des êtres intermé- diaires qui tiennent des uns & des Mutres: les amphibies-qua- drupèdes ne joignent-ils pas les quadrupèdes avec les’ poif- fons, qui font liés aux reptiles par les amphibies reptiles? les oïifeaux ne le“ont-ils pas avec ces mêmes reptiles, par ceux de ces animaux qui s'élancent en Fair, & qui en quel- que forte oyt la propriété de pouvoir voler? ne le font-ils, pas avec les poiflons par ceux qui ont aufir une efpèce de vol, comme ils le font avec les quadrupèdes par ceux qui volent très-bien! La découverte des polypesine vient-elle pas e nous apprendre la liaïfon des plantes avec les animaux? & de ces plintes, n'y en a-t-il pas qui font aquatiques, d'autres qui vivent fur la terre, & d’autres qui, comme dit M. Boerhaave, font en quelque forte aériennes, en ne tenant à fa terre que par les corps fur lefquels elles vivent fgns en rien tirer? Dans la dlafle immenfe des infectes, n'y en ail pas qui rampent fur terre, d’autres qui habitent les airs, & d'autres les eaux? Mais bornons ici ce Mémoire déjà trop long, & qui ne l'efl devenu que par un morceau qui paroiwa

ki X

HN ET SMES) CUT E N'CIEUS 205 | peut-être déplacé, mais que je n'ai refufer à la convic- tion je fuis, que tout,a été arrangé avec le dernier ordre, que tout a été diftribué fuivant certains principes, & fuivant certains genres & certaines clafles.,

EXPLICATION DES FIGURES Ÿ PuAnNcCHE ÎÏ

A, le nid en fon entier, fufpendu à une petite branche d'arbre.

B, le même nid, auquel on à ôté la toile foyeufe qui le recouwroit , : afin de faire voir l'arrangement des bâtonnets qui revêtent en dehors la coque la chryfalide eft renfermée. ]

C, la coque dépouillée de ces bâtonnets.

PraAncure,.ËL

D, la même coque ouverte dans fa longueur, pour faire voir Ia chryfalide 7, & la bourre qui: fert de bouchon pour fermer en- tiérement la coque. «,

ÆE, cette chryfalide tirée de la coque.

F, partie de cette mémechryfalide, grofñe, pour rendre fes crochets Z æ & les ftigmates M plus fenfibles.

G, partie de la foie qui fert à fermer l'ouverture inférieure de Ia e coque, qui eft formée en tuyau. - H,' dépouille d'une chryfalide, qui eft peut-être d'une mouche r- ichneumon. « 1 PL AN CHE LIT.

« À, nid dans fon entier, fufpendu à une branche d'arbre. | B, coque ouverte dans fa longueur, pour mettre à découvert le réfeas D, aumilieu duquel la chryfalide eft placée. €, partie poftérieure la chryfalide, groffie pour fa inguer $ fes crochets E. ,

PLANÇGHE IV.

F, nid ouvert dans fa longueur , pour que l’on diftingue les coques: G, leur poñition & leur arrangement, & le réfeau A qui les embraffe, outre l'enveloppe commune Z,

I, la coque.

Æ, chryfalide tiiée de fa qe. Ÿ is. 2SY e - i" LE LL Ceci

Vu if

206 MÉMOIRES DE L' ACADÉMIE ROYALE

OBSERV'ATION D E L'ECLIPSE D'E ML UNE

4

Du 2; Décembre 1 749:

Par M5 CaAssiNI DE THURY & MARALDI.

1 jours qui ont précédé celui de Eclipfe ayant été très-favorables pour les obfervations aftronomiques, nous en avons profité pour vérifier plufieurs élémens nécef faires à la théorie de la Lune & à celle des écliples : le 22 Décembre, le ciel qui ävoit été couvert une partie de la journée, fe découvrit le foir, & nous permit de faire l'ob- fervation du paflage de la Lune au méridien , qui arriva à 11h 13" 242: la hauteur apparente du bord fupérieur de a Lune fut obfervée avec le quart-de-cercle mural, de 654 53” 0". +

Cette obfervation, qui ne précédoit que de vingt heures q 5 é

le temps devoit arriver Fécliple, pouvoit fervir # recon- noître fi le calcul de la* Connoïffance des Temps étoit exaét, ou, ce qui revient au même, di les élémens que l'on avoit empruntés des Tables étoient éxaétement connus: car il eft évident que quelle que foit l'imperfeétion des Tables, elles ne peuvent différer fenfiblement dans un intervalle de temps auf K que celui qui fe trouvoit entre lobfervation du paflage méridien & le moment devoit arriver l'éclip{e; & au cas que le lieu de la Lune calculé pour Fheure de l'ebfervation fe trouvât conforme au lieu oblervé, il y avoit à préfumer que la détermination des autres phales de l'écliple fe trouveroit à très-peu près conforme à l'obfervation.

Pour déduire la longitude & la latitude de 11 Lune: de lobfervation faite au méridien ,#fai fuppofé l'afcenfion droite du Soleil de 2714 28° 36", la parallaxe horizontale de Ia Lune de 56° 51", fon So ti vertical de 1 LS" SA

-

Men, de L'Ac.R. des J'ez749 Pay. 206 Pl10.

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Careme del.

Mer, de l'AcR des Se1749 Lag, 206 PI 11,

Aem, de L'4e-R der Sexo Pag206 LH.

Men. de L'10.R des Se2749 Pag,206.Pl 22,

JAigrem Jeu.

Monde Le R. das S1749 Pay, 206 -Pl 12, =

Lim de l'4e.R des So27gg Pay w6 NB,

.

Mm de Le R das Sozygg Pay WE Pl.

FL "ENT 4E NO LE | LAS Pons \ya MENU UD "ES CSMir £ ni ciel 207 l'obliquité de l'écliptique de 234 28° 30", & j'ai trouvé {a longitude de la Lune à 204846 45", & fa latitude de AU ONE 6": |

Ayant calculé felon les Tables de mon père, & felon celles de Flamfleed, la longitude & la latitude de la Lune pour l'heure de l’obfervation, l'on trouve la longitude de la Lune, felon les premières, de 204 47’ 42”, & felon les dérnières, de 204 46° 21"; la latitude, felon les premières, de 14 45" 51", & felon les dernières, de 14 4546"; ainfi, entre le calcul tiré de ces Tables & le réfultat de l’obferva- tion, il ne fe trouvoit pas une minute de différence, ce qui eft une précifion au delà de tout ce qu'on peut efpérer, & ce qui fembloit nous aflurer de l'exactitude des Tables de mon père dans Ja prédiction des phafes de l'écliple que fon devoit oblerver. ,

Heureufement le ciel a été très-favorable pour lobferva- tion : il ne fut pas facile, comme il arrive très-fouvent, de

_diftinguer au commencement de l'édipfe ombre d'avec la

pénombre ; cependant on peut aflez compter fur la détermi-

. natiôn des autres phafes, l'ombre ayant été très-bien terminée

À À

F L |

pendant toutle temps de l'édiipfe.

. Je me fuis fervi, pour faire cette obfervation, d’une lunette de 8 pieds, garnie d'un micromètre dont les réticules com- prenoïent exaétement le diamètre de la lune, & la divifoient en douze doigts ou parties. ji

. + À 6h 57 o" la pénombre commence.

il paroît que l’éclipfe commence, mais on ne dif tingue pas évidemment le terme de l'ombre.

un demi-doigt d’éclipfé. 2

SAR dans l'ombre.

doigt. 111 }

un doiot & demi.

l'ombre à Tycho.

deux doigts. LE

Tycho"dans l'ombre, "

l'ombre à mare humoyum.

208 MÉMOIRES DE LÂCADÉMIE ROYALE À 7" 28° 40" trois doigts. | 3$ 50 mare humorurlidans l'ombre.

43 oo quatre doigts. n'7 $ 5o cinq doigts & plus grade éclipfe. :

12 ÿ5o lombre à Langrenus.

23 12 Langrenus dans l'ombre. "

29 48 Capuanus fort. émerfion de Schikardus.

V5 Vo co so © © co co co co N]

25: 40 39 45 quatre doigts. # 48 20 Tycho fort de l'ombre. so 25 émerfion de Tycho. 52 135 trois doigts. 3 41 deux doigts. 12 40 un doit. 21 45 fn doutcufe, 22 15 fin certaine. La pénombre ‘eft encore fenfible.

Selon cette obfervation, la durée de l'écliple a été de 2h 22°: on trouve dûfli le milieu de l'éclipfe par la phafe d'un, doigt, à 8h 16° 50"; par celle de deux doigts, à 8h 10° 33”; par celle de trois doigts, à 8h 10° 27"; & par celle de quatre doigts, à 8h 1122" ® .

Comme le réfultat de cette obfervatiôn différoit confi- dérablement des temps marqués dans la Connoiïflance des Temps, le milieu de lécliple devoit arriver à 8h 18", c'efl-è-gire, 7 minutes plus td qu'il n'a été oblervé, j'at- tendis avec impatience le paflage de l1 Lune au méridien, qui arriva à 12h $8"+. La hauteur apparente des deux bords de la Lune fut oblervée, lune de 644 58" 25", & lauue' de 644 26° $0". Le diamètre de la Lune a employé 21"+ à pafier au méridien. J'oblervai auffi le paflage d'Arétuius au méridien, qui arriva 7h 43° 25"+ après le paf fage de la Lune; & fa Hauteur méricienne, de 6 14 40" 20".

Le calcul de cette obfegvation donne, en fuppofant la cenfion droite de la Lunede 944 5 26 28", & fa déclinaifon de 234 56’ 27", la longiiude de cette planète, 4% 27° 1 fa

& fa

DES SCIENCES. 209 & fa latitude de od 32’ 25° peu différent de celui que don- nent les Tables de mon père, favoir, de 44 27' 38", avec une latitude de od 33" o", & celles de Flamfteed, qui don- nent la longitude de cette planète au mème temps, de 44 27° 44", avec une latitude de od 32° 12°.

Cette conformité entre l'oblervation & les Tables prou- voit évidemment une erreur , non dans les hypothèles, mais dans le calcul de la Connoiffance des Temps : je jugeai donc devoir refaire le calcul, & je trouvai en effet tous les élémens différens, & tels que je les rapporte ici.

À 8% 4 42" temps de l'oppoñition.

D PME LE 2 commencement de l'éclipfe.

8 13 26

9 25 8

Grandeur 5ÿ doigts.

Ê Mém. 1729. 11 ltd

26 Nov. 1749.

210 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

OxBuSGELR F ‘À 2T. T'ONNS

Sur les pernicieux effets d'une efpèce de Champignons, appelée par les Botanifles, Fungus mediæ magni- tudinis totus albus. Vaillant, 17, page 63.

Par M. LE MONNIER Médecin.

UoIQUE l’hifloire nous ait tranfmis un grand nombre (@. d'exemples des mauvais effets des Champignons, nous ne voyons pas cependant qu'on foit aufli précautionné qu'on le devroit être contre un mets dangereux au point de nous Ôter la vie; & nous ne laïflons pas de voir de temps en temps plufieurs perfonnes devenir les viétimes de leur gourmandife & de ce funefte poifon.

Je n'examinerai pas {1 c'eft par un effet naturel de 'in- tempérance que nous fermons fi volontiers les yeux fur les dangers auxquels nous fommes expofés, lorfque nous cher- chons à fatisfaire nos appétits en général; je remarquerai feu- lement que, dans le cas dont il s'agit, on peut aufli attribuer la plufpart des accidens qui arrivent, à ce que nous ignorons véritablement quel'es font les elpèces de champignons qui empoilonnent, & quelles font celles dont on pourroit manger fans péril.

I feroit à fouhaiter que les Auteurs qui nous ont laiffé des hifloires des pernicieux effets de cette plante, euflent mieux fit connoitre les efpèces qui les ont produits, afin qu'on pût s'en préferver par la fuite; c'eft dans cette vüe que j'ai entrepris d'écrire 'hiftoire fuivante, dont les acci- dens furent occafionnés par l'efpèce que les Botaniftes appel- lent Æungus mediæ magnitudinis totus albus, le champignon blanc de moyenne grandeur, que M. Vaillant range ‘dans Ja chffe de ceux qui font feuilletés, avec une tige folide & fans anyeau, ol

DES MMNCNTRE NCA SAME 271

» Vers le milieu du mois de Septembre dernier, une famille de Saint-Germain qui vivoit à la campagne, mangea à. dîné d'un ragoût de champignons qui avoient été ramaflés: fous la châtaigneraie du village de Chambourcy : malheureu- fement ce ragoût fut trouvé fort bon; & perfonne n’en ayant été incommodé, on réfolut de s’en régaler encore une fois. Deux jeunes demoifeiles qui s’étoient fait un plaifir de cette artie, allèrent dès fix heures du matin en ramañler plein une corbeille fous la même châtaigneraie, parmi les bruyères: ni les remontrances que leur firent des payfans qui pafsèrent, fur la mauvaife qualité des champignons qu'elles cueïlloient, ni Fhiftoire qu'on leur rapporta de cinq perfonnes qui en moururent il y a quelques années dans un hameau du voi- finage, ne pürent les détourner de leur projet : une douzaine de ces champignons fut mife fur le gril, & mangée à déjeüné par les mêmes perfonnes qui les avoient cueillis : elles en apprétèrent elles-mêmes un autre ragoût qui fut fervi à table, & dont toute da famille, compofée de fix perfonnes, mange: en grande quantité, chacun s'efforçant de louer {a délicatefle & l’excelience de ce mets fi pernicieux.

Heureufement pour les domeftiques, le maître ordonna que ce qui en refloit füt réfervé, ce qui les garantit des acci- dens qui furvinrent bien-tôt à toute la familie.

Vers les quatre heures après midi, une des demoïfelles qui en avoit mangé à deux repas, fentit quelques maux de cœur dont elle ne fe plaignit qu'à fes compagnes : elle effaya de les diffiper en mangeant d'une compote de poires; les naufées fe calmèrent effectivement pendant quelques momens, mais elles revinrent le foir aflez fortes pour l'empêcher de fouper, tandis que tout le refte de la famille, ne fe fentant de rien, mange avec l'appétit ordinaire. Enfin, fur les dix heurés du foir, ces naufées fe changèrent en de grandes douleurs _ d'eflomac, de fréquens vomiffemens, des douleurs de coli-- que très-aigues, fuivies de felles bilieufes, & la malade tomba dans un grand accablement : ces fymptomes furent regardés comme les fuites d'une indigeftion ; on lui fit avaler quelques

Dd ij

212 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoïYALE verres d'eau chaude dont elle fe trouva un peu foulagée, ce qui fit que chacun s'en alla coucher. Cependant le devoie- ment & les vomiffemens continuèrent ; & trois autres per- fonnes plus âgées s’étant trouvé très-incommodées des mêmes accidens vers le milieu de la nuit, on fit moins d'attention aux accidens de la première, & ce ne fut que fur les fept à huit heures du matin qu'on fe foupçonna empoifonné par les champignons, & qu'on envoya chercher du fecours à Saint-Germain.

À onze heures du nmntin, je trouvai fa première de ces. malades fort abattue par la violence des vomiflemens & des. felles réitérées : le pouls étoit concentré, fréquent & foible: au point de-devenir imiperceptible; les extrémités fupérieures étoient froides, & elle n'avoit pas la force de fe lever pour fes befoins; enfin la manière dont elle étoit couche fur le dos, & la foibleffe de fa voix, exprimoient fon abattement.

Elle fe plaignoit fur-tout d'un gonflement douloureux vers le creux de l'eflomac : en y portant main je trouvai la région épigaftrique un peu gonflée, & j'y fentois les batte- mens de l'aorte auffr forts que fi la pointe du cœur eût frappé en cet endroit; au refte elle ne fentoit aucune douleur de tête, fon jugement étoit très-fain, & elle fatisfit. pleinement. à toutes les queftions que je lui fis. Je n'informuai fi elle avoit, rendu des champignons non digérés par haut ou par bas, mais je n'en püs être éclairci:

En confidérant 1 douleur & l'embarras qui me paroif- foient être dans les premières voies, aufli-bien que tous les fymptomes que je viens de rapporter, je compris facilement. que la caufe de ce defordre- étoit du genre des invitantes, & qu'ainfi la principale indication étoit de la combattre par. les remèdes relàchans & adouciffans : pour cet effet , je recom- mandai à la malade de boire très-fouvent de l’eau de poulet, ou de la tifane adouciffante faite avec la racine de guimauve & la graine de lin : j'ordonnai qu'on lui donnät de quatre en quatre heures un lavement fait avec la décoétion des herbes émollientes, & qu'on lui appliquât fur l'épigaftre le marc de

RE PERS

Die SNNB/C:1 = NICUENS 213 ces mêmes herbes en forme de cataplafme & de fomentation. Cependant, pour la mettre en état de foûtenir l'effet de ces remèdes, & pour ranimer un peu le pouls, je lui fis prendre d'abord un fcrupule de thériaque délayé dans un peu de bouillon. Quoique tous ces remèdes n'aient pas été exécutés avec toute l’exactitude-néceflaire, à caufe du nombre-des ma- lades & dutrouble que caufa cet accident, elle paffa néanmoins: le refte de la journée fans vomir ; elle n'eut que quatre ou cinq, felles, dans lefquelles elle rendit quelques morceaux de cham- pignons non digérés, & la nuit qui fuivit fut affez tranquille.

Le deuxième jour au matin, je trouvai les évacuations: du ventre un peu ralenties ; mais la cordialgie & l'accable- ment fubfiftant toüjours, je foupçonnai que {a plus grande: partie des champignons étoit encore dans les premières voies, & qu'il falloit fuivre les mêmes indications que h veille: c'eft pourquoi je prefcrivis les mêmes remèdes, & je reftai auprès d'elle tout le jour pour les lui faire prendre-plus régu- lièrement, Leur fuccès fut que la tenfion douloureufe du ventre: fe diffipa, que le pouls devint plus développé & moins: fréquent, & que le foir elle ne fe plaignit plus que d’une grande foiblefle : elle eut une évacuation bilieufe, dans laquelle: japerçus fept à huit morceaux de champignons.

Le troifième jour, Île calme ayant perfifté pendant toute la nuit, & ayant confidéré la nature des évacuations, l'état du pouls qui étoit encore devenu meilleur, enfin la peau ayant, paru un peu humide, & les urines ayant coulé plus libre- ment, je profitai de ce calme pour lui donner une méde- cine, compofée de deux onces de manne fondue dans 1a: décoction d'une demi-once de catholicum. Cette médecine, . qui fut foûtenue d'une ample boiffon d'eau de poulet, opéra. doucement , fit évacuer encore des champignons , & le foir. elle fe fentit bien dégagée, n'ayant plus ni. douleur :ni batte- ment dans la région de eftomac: elle prit un bouillon ordi-. maire avec plaifir; & après avoir rendu encore: fept à huit. morceaux de champignons , elle: s'endormit pendant huit. heures, fans interruption.

Dd üj.

214 MÉmeires L'ACADÉMIE RoyaLE

Le quatrième jour elle s'éveilla dans une affez bonne dif- poñtion, & fe fentant un peu d'appétit elle demanda un bouillon ; peu de temps après elle {e plaignit d'un grand étouffement, le tranfport la prit aufli-Ôt, elle ne reconnut plus la voix des perfonnés qui l'environnoient, & elle refufa opiniâtrément tous leurs fecours : fon caraélère naturellement doux & riant fe changea par cette frénéfie en une obftination outrée, & elle n'employa le peu de connoïffance qui lui reftoit, qu'à témoigner fa réfolution à ne plus rien prendre. Lorfque je la vis environ trois heures après ce nouvel acci- dent, elle avoit la refpiration très-irrégulière, entre-coupée de foupirs & de bâillemens continuels; elle avoit beaucoup d'a gitations & d'inquiétudes dans toutes les parties de fon corps; elle étoit pâle & froide au vifage & aux extrémités fupé- rieures, enfin fon pouls étoit à peine fenfble: j'eflayai en vain de lui faire prendre quelques boiflons, elle les refufa conftamment avec horreur, elle s'agitoit d'une manière tou- chante, lorfqu'on lui vouloit donner un lavement ou quel- que autre remède malgré elle.

En mettant {a main fur le creux de fon eflomac, je m'a- perçus que le battement de Faorte fe faifoit fentir auffi fort que les jours précédens : je fis appliquer fur le ventre des fomentations d'herbes émollientes, en attendant que j'eufle fait préparer un bain d'eau chaude dans lequel j'étois réfolu de la faire mettre pendant quelque temps.

Tandis que l'on préparoïit ces remèdes, je me rappelai que cette demoifelle m'avoit fouvent confulté fur des douleurs de bas-ventre très-aigues, & dont elle fouffroit beaucoup, Jorfqu'elle étoit fur le point d'avoir fes règles; elle les avoit ordinairement toutes les trois femaines, & fuivant ce qu'elle m'avoit dit aux premières queftions que jelui fis, nous ap- prochions de ce terme: elles lui prirent effectivement tandis que je faifois ces réflexions ; le calme qui fuccéda à cet évè- nement & qui dura deux ou trois heures, me fit croire qu'elles avoient eu beaucoup de part à ces violentes agita- tions, & que la malade feroit bien-tôt dans un meilleur

D E S WS/C 1 E ES 21$ “état ; cependant le délire continua, & les règles s'étant arré- tées, les agitations recommencèrent. Je lui fis mettre les pieds dans feau chaude pendant 30 minutes, les règles revinrent très-bien, elle fua beaucoup, fon pouls fe déve- loppa un peu, & les extrémités fupérieures réchauffèrent ; mais les règles s'étant encore arrêtées au bout de quelques heures, & les agitations ayant redoublé, je lui fis faire une faignée du pied, que je n'avois différée qu'en confidéra- tion des évacuations qui avoient précédé : les règles repa- rurent un peu, mais les autres fymptomés ne. diminuèrent point, la refpiration fut toute auffi pénible, 1e pouls ne fe développa pas, le battement de la région épigaftrique étoit plus fort que de coûtume, enfin la mâchoire fut fermée par les convulfions de fes mufcles : je réitérai la faignée du pied au bout de quatre heures, je fis renouveler & augmenter les fomentations émollientes, fans un meilleur fuccès: la ref. piration s'accéléra par degrés, & devint trèslaborieufe, les convulfions des mufcles de la mâchoire augmentèrent, enfin. tout fon corps fut teint en un inftant d'une jaunifie univer- felle, & elle expira fur les dix heures du matin, juffement à la fin du cinquième jour de f1 maladie. La jaunifle diminua fenfiblement après la mort, 1e blanc des yeux revint dans fon état naturel ; la bile qui le coloroit.,. fe ramaffa en une tache verte aux deux extrémités du dia- mètre horizontal de chaque prunelle.

À Touverture de fon cadavre je trouvai le péritoine, F'é- piploon & l'eflomac dans leur état naturel: ce dernier vif. cère avoit cependant quelques marques d’inflammation aux environs du pylore : le duodenum étoit fi gonflé dans fon origine, qu'il étoit plus gros que n'a coûtume d’être 'inteftin colum dans l'état naturel, & il étoit comme étranglé quatre ou cinq pouces plus bas que lorifice des canaux cholédoques & pancréatiques: c'étoit fans doute le gonflement de cet inteftin étranglé, qui me rendoit fenfibles les battemens de Faorte fur laquelle il étoit polé; les vaiffeaux de fes mem- branes étoient encore tous remplis de ang, & on voyoit

216 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE intérieurement fur fon velouté des taches pourprées avec quelques légères excoriations. La partie du méfentère qui répond à cette portion d'inteftin, étoit aufli enflammée & dans une tenfion extraordinaire; le foie paroifloit plus rouge -que dans état naturel, il étoit plus dur & plus gonflé qu'il n'a coùtume d'être : la bile renfermée dans fes vaifleaux auffi-bien que celle de la véficule du fiel, étoit d'un verd très-noir, au contraire de ce qui arrive communément dans les fujets très-gras, comme étoit cette demoifelle. Le canal cholédoque offroit un phénomène fort fingulier ; il étoit étranglé dans fon milieu par une bride membraneufe au point qu'il me fut impoñlible de faire pafler la moindre goutte de bile dans le duodenum, en preffant foit le foie, foit la véficule; entre le foie & l'obflacle, le canal étoit gonflé par ha bile; la portion comprife entre la bride & le duodenum, étoit vuide, blanche &tranfparente: c’eft fans doute l'étran- glement de ce canal, caufé par l'irritation des membranes, qui a occafionné la jauniffe univerfelle qui parut une demi-heure avant la mort: les vaifleaux de la région hypogaftrique ne parurent aucunement engorgés, excepté vers le fond de la matrice, il parut un peu de fang extravafé entre cette partie & la membrane qui l'enveloppe; toutes"les autres parties furent trouvées faines, & je n'ai aperçu aucune ma- tière dans toute l'étendue du canal inteftinal.

IL paroït par ce détail de la maladie & celui de l'ouver- ture du cadavre, que la mort a été occafionnée par une vio- Jente irritation des parties membraneufes, du duodenum, du méfentère, & d’une partie du foie, auffi-bien que par l'étran- glement que cette iritation a caufé dans les vaiffeaux de toutes ces parties; mais comment ces accidens ont-ils fe réveiller & .devenir en un inflant auflt graves & aufir funeftes, fur-tout après huit heures de fommeil & après tous les bons fignes qui avoient précédé? c'eft un problème qu'il n'eft pas facile de réfoudre.

La mère de cette demoïifelle, âgée d'environ quarante-cinq ans, d'un tempérament aflez robufte, mangea une quantité

a

D E'SNIMMNEUT E C ES 217 affez confidérable des mêmes champignons avec le refle de fa famille; elle ne reflentit aucune incommodité pendant le courant Ge la journée, elle foupa avec fon appétit ordinaire, & s'endormit tranquillement : elle fut réveille fur les trois heures après minuit par des douleurs d’eftomac & des vomif femens très-violens ; elle alla du ventre un grand nombre de fois, & ne rendit que des matières liquides & bilieufes, parmi lefquelles on ne remarqua pas de champignons. Je la trouvai fur les onze heures du matin dans un grand accablement, avec le pouls petit, foible & fréquent: le ventre étoit un peu élevé & tendu, mais les douleurs d’eftomac qu'elle reflen- toit ne provenoient, à ce qu'elle difoit, que de la fatigue du vomiflement : en eHet, elle vomifloit à chaque moment. Elle avoit avalé, un peu avant mon arrivée, une grande cuillerée d'huile d'olive, qu'elle revomit avec beaucoup d'efforts: au milieu de ces évacuations , fa langue étoit sèche & chargée, & marquoit beaucoup d'ardeur dans les parties intérieures.

Je lui fis prendre pendant toute cette première journée beaucoup d’eau de poulet, & quelques lavemens émolliens, en forte que les évacuations fe modérèrent un peu fur le foir; mais elles continuèrent pendant toute la nuit, & confervèrent toüjours la même qualité.

Le fecond jour, te dévoiement continua, la matière étoit crue & bilieufe; on continua à lui faire prendre beaucoup d'eau de poulet & de lavemens anodins, en forte que le foir les évacuations fe modérèrent, & la malade fut un peu mieux.

Le troifième jour au matin, tout paroiflant affez calme, elle prit un purgatif compofé de catholicum double & de manne : elle rendit plufieurs morceaux de champignons, mais le nombre des felles fut confidérable, & les dernières furent fort claires & fort fétides. Je lui donnai le foir quinze gouttes de laudanum liquide dans un peu d’eau de poulet, ce qui lui procura du fommeil, & fit qu'elle n'alla que deux ou trois fois pendant la nuit. :

Le quatrième jour au matin, elle eut plufieurs felles d'une

Mém. 1 749, . Ee

218 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

eau roufleûtre & très-fétide, accompagnée de raclures qui m’annoncèrent que le fang ne tarderoit pas à paroïtre, Je fis redoubler les boiflons adouciffantes & les lavemens anodins; mais, malgré tous ces fecours, le flux de ventre augmenta, & les matières devinrent entièrement teintes de fang. Le pouls refloit foible & imperceptible ; les extrémités conti- nuoient d’être froides, & la malade ne reflentoit plus aucune douleur ni mouvemens dans le ventre; cette partie étoit affez molle, excepté que vers la région épigaftrique il y avoit toüjours un peu de tenfion : elle prit encore le foir quinze gouttes anodines dans une portion légèrement cor- diale, & elle repofa paifiblement pendant la nuit ; mais le lendemain cinquième jour de fa maladie, malgré les lave- mens anodins & les boiflons adouciflantes , le flux de fang. continua avec plus de furie que la veille, la malade tomba dans un grand affoupiffement, fon vifage devint boufh, & j'aperçus dans fes yeux les traces d'une jaunifle qui s'étoit déjà répandue par tout fon corps : fes matières étoient teintes d'un fang noir, mêlé de raclures & de flocons mucilagineux parmi lefquels elle rendoit fouvent des grumaux de fang caillé qui dénotoient l'érofion de vaifleaux fanguins plus confidérables que les capillaires; elle fut toute la journée dans des foibleffes continuelles, elle devint prefque fourde, & quoiqu'elle eût les yeux ouverts & fixes, elle n’aperce- voit les objets qu'avec peine; enfin elle eut quelques accès de délire pafagers.

Je fis ce même jour une confültation fur fon état, avec M. le Gagneur Médecin de Verfailles, dans laquelle il fut convenu de donner à la malade quelques cuillerées d’une potion compolée de /lium de Paracelfe, d'efprit volatil de corne de cerf fueciné dans une eau légèrement cordiale: ce remède lui fut adminiftré dès le foir & pendant toute la nuit, fans aucun changement dans les fymptomes.

Confidérant donc que la malade étoit fort affoiblie par toutes le$ évacuations précédentes, que la quantité de fang qu'elle rendoit par gros caïllots augmentoit continuellement

DÉE! SMIC LT. E NYCELS 219 fa foiblefle, en même temps qu'elle défignoit un défaut de reflort dans les vaifleaux fanguins, que tous ces accidens fort graves n'étoient plus accompagnés d'aucun fentiment de douleur, enfin que le danger étoit des plus preflans, je me déterminai à employer les aftringens modérément ftiptiques dont j'efpérois du füccès, tant pour calmer cette violente hémorragie, que pour arrêter la pourriture gañgréneufe dont ces parties paroifloient menacées. Mais, pour avoir un meil- leur fuccès de ces remèdes, je crus à propos de faire pré- céder un émétique dont Faétion un peu vive réveillät le reflort des fibres engourdies, & fit détacher les matières qui pouvoient s'être arrêtées dans les glandes & dans les vaif- feaux depuis que ces parties avoient perdu leur aétion; pour cet eflet, le fixième jour au matin je fis prendre à la malade vingt-quatre grains d'ipecacuanha dans de la conferve de rofes: ce remède ne produifit aucun vomiffement, mais il fit évacuer par les felles une grande quantité de flocons glaireux, moins fétides que les précédens, le tout accom- pagné de fang qui ne coula pas néanmoins en une quantité plus confidérable qu'il n’avoit fait précédemment.

Environ quatre heures après l'effet de l'ipecacuanha, je donnai à la malade un verre d’une teinture de rofes rouges, faite avec affez d'efprit de vitriol pour la rendre auffi acide que la langue la pourroit fupporter.

Ce remède réuffit felon mes efpérances, & j'eus la fatif faction de voir le flux de fang diminuer confidérablement dans après-midi; cependant, pour ne pas fupprimer tout d'un coup l'évacuation des matières nuifibles, je fis prendre à la malade une bonne cuillerée d’une forte teinture de rhu- barbe faite à l'eau avec les cendres de bois neuf: l'évacua- tion fe foutint en eflet, & par le moyen de la teinture de rofes que je lui fs prendre fucceffivement après celle de rhubarbe, le fang difparut entièrement des felles le feptième jour à midi.

À mefure que ces évacuations devenoient plus rares, & que les matières fe rapprochoient davantage de l'état naturel,

Ee ÿ

220 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

le pouls fe relevoit & devenoit plus fenfible, lafloupiffement diminuoit, & l'ufage des fens fe rétablit peu à peu ; la malade eut dans la nuit quelques moiteurs que je regardai comme critiques, & qui furent fuivies de quatre à cinq heures de bon fommeil.

Le huit, les matières paroiffoient tout-à-fait bilieufes ; elle n'eut dans toute la journée que quatre felles de bonne qua- lité, & on continua l'ufage alternatif des teintures de rofes & de rhubarbe.

Le neuf, les matières continuèrent à couler de meilleure qualité; cependant la jauniffe & la boufhflure fubfiftoient toûjours : je fubftituai à la teinture de roles une tifane faite avec les racines de chicorée fauvage, de piflenlit & de fcor- fonère, auxquelles j'ajoûtai un gros de fel de Glauber par pinte de tifanne; elle eut tout le fuccès que j'en pouvois attendre, if furvint le dix un petit mouvement de fièvre qui dura huit à neuf heures, & qui fut terminée par un fommeil doux accompagné de fueurs. La nuit du onze, les urines coulèrent abondamment d'une eouleur jaune-foncée fans aucun dépôt; la jaunifle fe diflipa à la fuite de cette évacuation : enfin fe quatorze, la malade fut dans une parfaite convalefcence, & après avoir été purgée trois fois avec la manne & la rhubarbe, fa fanté s'eft trouvée auffi parfaite qu'auparavant.

La fœur de cette dame, âgée d'environ trente-fix ans, mangea aufli à diner fept à huit morceaux de champignons; elle ne reflentit aucun mal de cœur du refte de la journée, foupa à l'ordinaire, & dormit très-bien jufque vers les quatre heures du matin qu'elle fut éveillée par une violente colique accompagnée d'envie de vomir. Toute cette première journée fe paffa à vomir avec effort, & à aller à la {elle; elle prit de la thériaque, des lavemens émolliens & anodins, & une grande quantité de boiflons adouciflantes, & nonobftant tous ces remèdes elle efluya les jours fuivans à peu près les. mêmes accidens que fa fœur: elle eut de plus, que fes dou- leurs de colique furent prefque continuelies, & qu'elle fut

DES: SCIENCES 221 fort tourmentée d’une toux que lui caufe un ulcère au poumon gauche, dont elle eft afHigée depuis fept à huit ans ; cependant, après que fa maladie eut parcouru à peu près les mêmes périodes que celle de fa fœur, & qu'elle eut ufé des mêmes remèdes, tous les accidens difparurent, auffi-bien qu'une boufhfiure au bras & à la main gauche, dont j'avois tiré un mauvais pronoftic, en forte qu'elle eft aujourd'hui dans un état aufli tranquille que le permet une maladie du caraétère de la fienne.

Les trois autres perfonnes n’eurent pas des accidens auffi graves que ces premières ; le père de famille, âgé d'environ cinquante ans & fort robufle, fut pris à deux heures du matin

de violentes coliques avec des évacuations très-abondantes

r haut & par bas: il eut des mouvemens convulfifs dans les mufcles de l'abdomen, de forte que fon ventre s’enfloit pro- digieufement & fe contraétoit avec beaucoup de viteffe, & en lui caufant des douleurs infupportables : il éprouva de pa- reils mouvemens convulfifs dans les mufcles des jambes, des cuifles & de la gorge ; néanmoins, au moyen des énormes. évacuations qu'il eut la force de fupporter, il fut bien-tôt quitte de tous ces accidens ; ïl lui refta feulement un peu de jauniffe qui fe diflipa d'elle-même en peu de jours; il fit ufage des huileux, de la thériaque & des mêmes boiffons adouciflantes que les autres perfonnes.

La cinquième perfonne embpoifonnée fut une demoifelle: d'environ vingt ans, d'un tempérament foible & délicat, que la crainte des maladies de poitrine aflez funeftes à fa famille engage à obferver un régime fort exact; elle ne mangea que par complaifance un morceau ou deux de champignons, & fut jufqu'au lendemain à midi fans reffentir aucune incom- modité ; elle eut, comme lés autres, de violens maux de cœur, des vomiflemens, & le cours de ventre: fon pouls devint petit, foiblé, & prefque infenfible, & elle fouffrit beaucoup du gonflement & des battemens qu'elle reffentit dans la région épigaftrique. Tous ces accidens fe difipèrent. le même jour, à la réferve du dernier, qui perfifta pendant.

Le ii},

222 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE plus de quinze jours : elle fut pendant plus de trois femaines

fans fomimeil &c fans appétit ; {es rècles, qui ne s'étoient ja-

mais dérangées; ne revinrent qu'avec peine & après un rétard confidérable; elle reflentit de grandes douleurs dans les jambes & dans les cuifles, qu'on ne doit point attribuer au retard de fs règles, puifque ces fyrptomes parurent le premier jour de fon accident: la Nature, aïdée d'un régime bien régulier, fit évanouir peu à peu tous ces fymptomes. L’hifloire de la fixième perfonhe offre une circonftance affez fingulière; elle mangea autant de champignons que celle qui mourut, & néanmoins elle fut vingt-fix heures fans fe trouver incommodée : peut-être qu'une courfe fatigante qu'elle fit à pied pour aller chercher du fecours, fit qu'elie en fut quitte pour quelques naufées & pour un dévoiement modéré qui dura deux ou trois jours; elle eut auffi un gon- flement au creux de l'eftomac, & reflentit pendant plufieurs jours de violens battemens en cet endroit; elle fut foulagée

fois.

Par le récit que je viens de faire, il paroît que les cham- pignons de l'efpèce que les Botaniftes appellent, Fngus mediæ magnitudinis totus albus, font véritablement pernicieux, & peuvent caufer des accidens mortels; que ces accidens ne font pas les fuites d’une fimple indigeftion, d'un gonflement fpongieux de cette plante dans l'eftomac, non plus que d'une froideur coagulante que quelques-uns leur ont aitribuée, mais d'une irritation inflammatoire, caufée par le fuc de ce vé- gétal.

En vain on m'objeftera qu'ils n'ont aucun goût âcre ni piquant qui puifle les faire regarder comme dangereux, puif- qu'on voit tous les jours des matières du règne minéral qui n'ont aucun goût, produire dans l'eftomac ces fortes d'irri- tations. :

C'eft auffi en vain qu'on nr'objeétera que les fymptomes que je viens de rapporter, font ceux des maladies qui rè- gnent le plus communément pendant les mois d'Août &

de ces maux par les remèdes que j'ai indiqués déjà plufieurs

à |

D'Els MSNENI E NE: ES 223 de Septembre, favoir, le colera-morbus & la dyfenterie : je répondrai qu’il feroit fort extraordinaire qu'une famille com- polée de fix perfonnes fe ‘trouvât fi fubitement fujette aux influences d'une conftitution épidémique, qui ne { feroit fait fentir que fur ceux qui auroient mangé des champignons, & non point fur les domeftiques, ni fur aucune autre per- fonne du même village. Au refte, je conviendrai volontiers que cette maladie peut fe rapporter au colera-morbus & à la dyfenterie, pourvü qu'on m'accorde qu'elle a été immé- diatement caufée par le fuc empoifonné de nos champignons.

21 Mai 1749°

224 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

O EPEUR P À TO NS BOTANICO-METEOROLOGIQUES

Faites au château de Denainvilliers, proche Pluviers en Gâtinois, pendant l'année 1748.

: Par M. pu HAMEL. AV VERT IS SN ENMIE NUE:

| Mo Obfervations météorologiques font divifées en fept colonnes, [a première indique les jours du mois, fa feconde, le vent qui a régné le plus fréquemment, n'étant pas poffible de marquer toutes les variations qui arrivent dans le cours d’une journée. Les trois colonnes fuivantes font def tinées pour les obfervations du thermomètre, la première défignant les obfervations du matin, qui ont été faites à huit heures, fur quoi il eft bon de remarquer que le thermo-

mètre étant placé dans l'angle de deux murailles, fur une ter-

raffe expofte au nord, il marque 2 degrés ou 2 degrés + au deflus de zéro, quoiqu'il gèle, principalement quand les gelées ne font point continues: les obfervations du milieu du jour ont été faites à midi, & celles de la fin du jour, fur les onze heures du foir. On s'eft toüjours fervi du thermomètre de M. de Reaumur, & on part du point zéro, ou du terme de la glace: la barre à côté du chiffre indique que le degré du thermomètre étoit au deflous de zéro; quand les degrés font au deffus de ce terme, il n’y a point de barre.

La fixième colonne eft deftinée pour le baromètre; & les obfervations ne commencent qu'en Juin, parce qu'un acci- dent arrivé au baromètre d’oblervation nous a mis dans la néceffité de nous en procurer un autre.

La feptième colonne indique pour chaque jour s'il a tombé

de la pluie, de Ja grêle, de la neige, &c. JANVIER,

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[N.N.o. O0.

O le matin, S.à midi.

matin & foir| .

O. à midi S.

Z222Z20pZznnuum

THERMOMÈTRE. lat D) Matin | Midi. | Soir. Deré. Degrés.| Degrés. air 9 z Ê 92| 7 8 6

.. 5 3 ss 3 1 - F1 o + o ...—1 lo et ms ne à RE 4-82 7 —9 |[—7 |[—1o —8 |—8 |—9 —8 |—7 |—6 ailes o o |—2 = o .0 ot 1 |: = !! ...|—3 o 5 o (x 1 12 2:19 3 32| 2 2173 LE

2 3 I 241PE 3 4| 2 ©; = 2 Li 2 4 0: | 2

Baromètre

a eue, ee

. [petite pluie.

.| beau,

.| variable.

.|variablé.

-|givre la nuit, le jour variable. . | variable.

.| beau.

.| beau.

.|un peu de neige.

.|couvert, bruine après midi.

.|beau, gelée blanche.

. .ygrand brouillard le matin.

| gelée blanche le mat. brouillard tout le j. .| couvert ,-gelée à glace le matin. .|beau, gelée blanche.

. [brouillard & givre.

ETAT) DU! CIEL.

brouillard froid,

grand brouillard & solace.

couvert, petite neige. 2 ; CRETE variable le matin, beau après midi, gelée.

petite neige.

couvert, un peu de ncipe.

pluie, bruine, verglas, & dégel le foir. variable, gelée aflez forte, petite neige. gelée qui pénètre de 8 pouces en terre. couvert.

variable.

variable. couvert.

couvert le matin, arande pluie le foir.

Ü

OR EM LIT ER < EET RNECSNEE

226 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Le mois de Décembre 1747 ayant été fort doux, les blés étoient fufffamment forts au commencement de 1748 ; tout le mois de Janvier a été aflez froid, le thermomètre

n'ayant pas monté plus de trois degrés au deflus de zéro, & le 13, il étoit à 10 au deflous.

Les pluies ni la neige n'ayant point été abondantes, ce mois peut pafler pour fec.

Quoique le froid ait été affez vif, les blés n'étoient point fatigués ; il eft vrai qu'il ny a prefque point eu de verglas.

On commença le 27 à labourer pour les mars.

Il n’y a point eu de maladies régnantes, excepté le long de la forêt, il y avoit des petites véroles.

DES SCIENCES. 227 DRE RIT CE R

THERMOMÈTRE.

ETAT DU CIEL.

Matm | Midi. | Soir.

- [grand brouillard & givre tout le jour. -|gelée blanche.

.| variable,

RC Ut. pluie pendant [a nuit.

O +. . . .|grand brouillard, grêle & neige.

N. she o |... . .|temps fombre. N. o 4 o 1..... variable. N. E. 2 s 4 |... . .|variable. O. 4 6 FR RE variable. S. 2 6 $ |+- « . .| beau temps, gelée blanche, S. S 7 GREEN il a bruiné toute la journée. N. 4 7 33): + + - brouillard lematin, beau temps le foir. N. 3z3| $5 12e . . .|temps couvert le matin, beau le foir, NA 2 IN ON Sn beau temps, gelée à glace. : N. |—41) © |—2 |... . .|Pbeau temps. N. |—2 1 EI MENANE beau temps. N. 2 æ EX M CHCECMONS variable. N. = A 5} 0 CICR ON CS pluie froide. N. D ME © |... . .|variable. N. —2 IN 20 0e 0 variable , gelée blanche. N. |—3 Chi PRENSRS beau temps, dégel.

mi | Lai

EE NRC E neige & grand vent.

Nr Re re 0 beau temps. N. NI LA) ECO] CESSE grand brouillard , givre en verglas. SU CR Al ral beau temps. N. |—:12 . . . .| variable le matin, verglas le foir. N. N.

rm [ex]

. + + + . {neige la nuit & le matin,

s « + + .|variable.

a: Senepiés neige le matin.

FE 7

228 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Tout le mois de Février a été froid & fec; le thérmo- mètre a quelquefois monté à midi à 7 degrés au deflus de zéro, mais il a gelé prefque tous les matins, & le 27 le” thermomètre eft defcendu à 6 degrés au deffous de zéro; les gelées ont empêché d'avancer les labours des mars.

Vers la moitié du mois, on a commencé à tailler la vigne.

Les perce-neiges ont fleuri le 2, les noifetiers le 9: à la fin du mois, les blés étoient fort beaux : les petites véroles exceptées, il n’y a point eu de maladies régnantes.

Le fetier de blé pefant 240 livres, fe vendoit dix-fept à dix-huit livres.

DE) SMIC 1 E RechEfs 229 MARS. !

FILTTS ee S

Jours THERMOMÈTRE.

du | VENT. | am | Baromèrre ETAT pu CIEL. Mois. Matin | Midi.{| Soir. CEE EE et

Degrés. | Degrés. | Degrés.

1 N:ocl—2il 7 © |+.. . .[beaugemps, giboulées après midi. 2 N. o 1 |—:1 * * + *]variable. 3 N. o 5 © |* * : * :|beau le matin, neige après midi. 4 | N. —5$ |[—2 |[—7 * r * {neige la nuit, beau foleil le jour. $ S. —$ O4: sale grand brouillard. 6 | N.E. |—5 |—4 |—38 + * «+ «|temps beau, grand vent. 7. N. |—9 |—5 |—38 * * *]beau temps. 8 | N —10%—5$ |—6 |: * : + -|beau temps. 9 S. |—5 —22l o |: : + : +lcouvert, neige le main. 10 | N.O. o 2 o + + «]variable, Ia neige fond au foleil, II S. o 3 3 + + * -lbruine & pluie. L 12 | N.0O. 2 4 o + + + «| variable le matin, giboulées le foir. 13 S. (o] 323| 42l° * : + -|couvert, pluie froide, neige & grêle. | 14 ©. 4z\ 5 3 + »+ grand vent, pluie & grêle. 15 S. $s 7 7 | * * - -|couvert, pluie & grêle. 16 ©. $ 6 3 17 ©. 32103 1 |::+ + + -|grande pluie, neige fondue & grélots, 18 | N.O. Salt. 2 o * + -|pluie, neige & grêle. 19 | N.O. o:| 3 1 |... gelée à glace la nuit, brouillard. 20 N. o 4 2 variable. 21 N. (o] 4 o * | beau temps; gelée blanche, 22 N. o 2 £ gelée à glace très-forte. 23 N. —i1il 2 |[—1x -|temps fombre, neige, gelée à glace. 24 N. |—2 o |—12 -Ineige, gelée à glace. c 25 N. |—2 o |—2 - [neige. 26 N. |—1 |—1 o -|neige. 27 TON. o o o « |temps couvert, neige. 28 N. o 2 o + |petite neige. 29.11 N°0: o 3 I variable, gelée blanche. 30 | N. O. o 3 o - | variable, petite neige. 31 N. |—2 |—2 o . . [beau temps, vent hâleux. RER

FF

230 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Le vent de nord a régné pendant tout le mois de Mars, qui a été très-defagréable à caufe des pluies froides, de la neige & de la grêle qui font tombées très-fréquemment; il a gelé prelque tous les matins, & le 8 le thermomètre étoit à rod + au deflous de zéro ; les terres étoient couvertes de mares d'eau; les rivières ont débordé.

Il n'étoit pag poflible d'avancer les Jabours par le mauvais temps qu'il faifoit, & les ouvrages étant fort retardés, les fer- miers ont été obligés d'acheter des chevaux pour augmenter le nombre de leurs charrues; malgré cela, il étoit impof- fible de faire les mars dans les terres fortes.

Les troupeaux & les pigeons ont beaucoup confommé de grains; le prix du blé a monté jufqu'à vingt-une livres le fetier, & la même melure d'avoine fe vendoit fix à {ept livres.

Le froid empéchoit les vignerons de tailler la vigne, & les pluies de la labourer; ainfi les ouvrages des vignerons étoient auf retardés que ceux des fermiers.

Ces mauvais temps ont fait beaucoup de tort aux pota- gers; les laitues d'hiver, une partie des falfifis, les carottes rouges, ont été prefque entièrement perdues, mais les carottes jaunes n’ont point fouflert : beaucoup de fleurs de pèchers & d’abricotiers ont été endommagées dans leurs boutons.

Tout étoit très-retardé ; les boutons des poiriers commen- çoient cependant à blanchir, & on a eu bien de la peine à femer les oignons & les autres graines potagères.

Quelques perfonnes âgées ou attaquées de maladies chro- niques font mortes; mais il n’y a point eu d’autres maladies régnantes que des rhumes, qui n'étoient pas même dangereux.

-|pluie par ondées.

231

ETAT DU CIEL.

temps beau, ferein & hâleux. brouillard.

gelée blanche,

beau temps.

variable & lourd,

variable , petite pluie, couvert & variable, vent mol. variable.

variable.

variable, pluie & grêle. temps variable, gelée blanche.

- [grand brouillard le matin.

pluie continuelle.

couv. & hum. lem. beau le refte du jour. beau temps, ciel très-étoilé le foir.

beau temps, gelée à glace,

beau temps.

-|beau temps. .|couvert.

grand vent, tonnerre. -

petite pluie.

pluie & tonnerre.

temps couvert & bruine.

variable, grêle,

gelée, temps variable, grêle,

pluie & bruine.

forte gelée à glace, variable fans pluie.

D'E'SMISNC 1 E N'CHENS AP RUES THERMOMÈTRE. L Pr TS, | Baromètre Matin | Midi. | Soir. d Degrés.| Degrése| Degrés. 1 3 I SUR PENT 1 4 TRES fe dE Or À autre 4 9 CN PTS te 8 | 12 | 10 na IS- 0 811 14 GAINEREE EE 951 1541 10 |... .. 95| 10 TAN PERRET 811 ro ONE 7 | 10 ANS ee ite 4 8 GET æ 9 FO MORS $ 9 6 |... . .|pluie. 4 | 11 8 |. . 4 8 gif... 4 7 HUMAN TRES 3 $ CINEMA TAN PE CE dt 3 6 3 |-. . . .Ipluie. 7 9 7 ko... A) AE Me OI 4 6 Ci AMEN 4:| 4 2185 OU $ 8 $ [ee 0 $ 8 SAME 4:l 6 Al NUE 3 6 4 Je $ 8 SA ÉONPUENE 3 6 NME NME ES 3 8 hrs

232 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE |

Le commencement du mois d'Avril a été affez doux, le vent ayant été au fud-oueft; le thermomètre a même monté à 1 5 degrés au deflus de zéro, à midi; mais le refte du mois, par un vent de nord-oueft, il a gelé prefque tous les matins. Quoique le ciel ait prefque toujours été couvert, & qu'il foit tombé très-fréquemment de petites pluies, de la grêle & de la neige, la terre étoit très-sèche, parce que l'eau ne tomboit que

par cantons ou en petite quantité. Quoique ces vilains temps -

euffent prefque fufpendu la végétation, & qu'il n’y eût pas plus de verdure qu'en hiver, les pêchers & les amandiers étoient en pleines fleurs, qui n’étoient pas gelées, mais très-fatiguées. Les fleurs des cerifiers n'étoient point épanouies, néanmoins il y en avoit beaucoup qui avoient été gelées dès le mois de Mars: les poiriers étoient encore en boutons, & à peine la vigne avoit-elle commencé à remuer. Le 1 2, il n'y avoit encore que quelques fleurs de violette; ce même jour les abeilles cont- mençoient à travailler, on voyoit quelques papillons, & les cha- tons des noifetiers étoient épanouis. Vers le 1 $, on a fini de femer les avoines dans les bonnes terres de la plaine; dans ce temps la vigne commençoit à pleurer, & on entendit le rofit- gnol. Le 19, on commença à voir les fcarabées dont on fait f'onguent : le 21, on vit quelques hirondelles : le 26, nous eumes des nouvelles certaines que la maladie des beftiaux faïfoit du ravage dans le Berri; enfin le 30, on trouva des morilles. Excepté les avoines tardives, les autres étoient très-bien levées; les blés étoïent bas, mais bien verds dans les bonnes terres de la plaine; ils étoient fort clairs dans les terres fortes, & très- vilains dans les terres argilleufes, le long de la forêt, l'eau du printemps ayant endommagé la racine. Les feigles ne faifoient que commencer à monter en tuyau, & on n'avoit point encore d’épis. Les vignerons fe font preffés d'achever de tailler leurs vignes, & de leur donner la première façon. Le prix du beau blé a été de dix-huit à vingt livres, celui de l'avoine, de fix. Les rhumes ont continué; il y a même eu des fluxions de poitrine dangereufes, & les petites véroles ont toüjours régné fur le rein de la forit.

MAT.

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Degrés.| Degrés.

S. HA S. ©. $ 12 S. s<| 123 E. 6 | 15 ©. 14 | 12 S. 8 | 11 S? 112] 14 SE 11 | 11 S. 9 10 S. 95| 13 S. 112] 13 E> 13 16 S. 11 | 14 S. IL 15 S. 13 | 15 S: ul 7 E. 14 | 22 S.E. | 14 | 19 S. O. | 13 | 15 S*O: Hroxhurs N. O. | 10 | 16 S. 15 | 14 S. O. 10 | 14 N.N.O.| 9 | 12 N. 6 | 10 N. 6 9 N. 65, 12 N. 10 | 17 N. 15 | 20 N. 14 | 215 N. E. 4 22

Mém. 1749:

THERMOMÈTRE. nn. HN Matin | Midi. | Soir.

Degrés,

9

CE EEE ENS OP ES

Baromètre ETAT DU CIEL.

*

| oo

+ + + « . [pluie froide. » pe deite pluie. 52 EMSIEe temps beau, gelée blanche. + + + + [beau remps, tonnerre le foir. ++ «+ + -|pluie douce. +. + + +|pluie & bruine. stone tes pluie. ++ + + -|pluie abondante. -.|grande pluie & tonnerre, ss... variable. pluvieux.

[temps couvert,

À É L ; Lo

ss. variable, chargé de nuages. + -|variable & tonnerre.

+ + + .]variable,

+. + + + [beau & fc.

+ + + « +|beau temps. ++ + -|couvert &-lourd. + + + + [beau temps, nuages. ..« + + -|vent froid & hâleux, temps variable.

_le + « - -]pctite gelée.

+. + + «|remps nébuleux, vent froid & dur. ee beau temps, vent froid & häleux.

+ + + + [beau temps: ... « «+ -|beau & chaud. . + + - [beau temps.

. . lourd, tonnerre.

234 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Le commencement du mois de Mai a été frais; il a fait fort chaud vers le milieu, & très-froid vers la fin, il a même gelé.

If a plu fréquemment pendant tout le mois , mais ces pluies n'étant pas abondantes, la terre étoit toûjours affez sèche; au commencement les abricots étoient gros comme des fèves : les pêchers étoient en pleine fleur, de même que les amandiers.

Le 5, les charmilles commençoient à prendre de la ver- duie; les fleurs des pruniers s’épanouifloient, les grofeillers à grappe étoient en pleine fleur.

Le 6, on a forti les orangers, & on a commencé à manger des pigeonneaux de lies

Le 7, on vit ces petits fcarabées jaunâtres qui men Ko les hannetons.

Le ro, on vit des hannetons.

Le 12, notre rivière étoit débordée; les fruits à noyau étoient tout blancs de fleurs; les tilleuls d’Hollande étoient aflez verds, mais les tilleuls communs n’avoient pas encore de feuilles : les frênes, les noyers & les picéas commençoient à poufler, mais la vigne ne montroit point encore fon bour- geon.

Nous avons obfervé que quand on coupe une branche à un jeune noyer en Janvier Février, il fort quelques pleurs de l'endroit coupé; néanmoins ceux à qui on a coupé des branches ce printemps, lorfque ces arbres commençoient à poufler, n'ont point répandu de liqueur, quoiqu 'aflurément ils fuflent plus remplis de sève.

Le 15, la vigne étoit aflez fortie de fon bouton pour qu'on püt juger qu'elle ne produiroit pas beaucoup de raifin.

Le 17, les boutons du mürier commençoient à s'ouvrir, & on entendit chanter le coucou.

Le 18, les cerifiers, les pruniers & les poiriers défleu- rifloient , & les pêches étoient affez groffes pour s'être dé- barraffées de leurs fleurs ; les hannetonf étoient en affez grand nombre fur les érables & les merifiers, mais on ne

en siens -

mt ENG re É NT CHE 225 voyoit aucune forte de chenille; dans {es jardins bas les lé- gumes étoient dE par les limaces.

: Le 22, les fraifiers étoient en pleine fleur, les ormes mavoient point encore de feuilles, les blés montoient en tuyau, les feigles épioïent, & les pommiers étoient en pleine fleur.

Le 30, l'air s'adoucit, on entendit le loriot, les grillons, & le foir les chauve-fouris & les coufins voloient; on a beaucoup de ces petits papillons qui viennent ‘de la teigne du blé.

Les blés n’étoient pas beaux dans les terres fortes, dans les bonnes terres ils étoient fort verds, mais bas; le beau s'eft toûjours vendu dix-huit à vingt livres le fetier.

Les avoines étoient très-bien levées, mais il y avoit des vers ou des efpèces de chenilles qui en mangeoïent la moëlle, ce qui leur a fait bien du tort; c'eft pourquoi l'avoine fe ven-

* doit fept livres dix fols ou huit livres.

Le chanvre a levé très-promptement.

La vigne étoit très-retardée, & montroit très-peu de

raifin ; les grofeilliers à grappe qui étoient en fleur, ont beau-

| coup coulé : on a été obligé de refemer les fèves, les pre- mières ayant pourri. * I y a eu beaucoup de rhumes & de fluxions de poitrine

- dangereufes.

236 MÉMOIRES DE LACADÉMIE ROYALE JNOMIEN,

ETAT DU CIEL. Mois. Matin | Midi. | Soir. TEE Degrés. | Degrés. bise pouce. lign. De RAT ET i S. E. 1éMiree Tu6 + « orage. 2 S 168 firs + temps lourd. 3 S. 15 | 19° | 18 -|variab. aurore bor. depuis N, E. & O. 4 S. II 14 l'r2 - | variable. s @: T'AS II + - | variable. GANAN SOMMES 11 . -| variable. - S. 128) UCI -|nébuleux, g S. ANNTSMIErS . -|nébuleux. 9 Si 14 | 18 | 14 |. . . + .nébuleux & lourd, 10 S. O. 14 15 ren) COtA ERA variable. 11 S. O. 10 15 14 |- +. . .|variable, 12 S. 14 18 15 |[27. 9 |beau temps. 13 62 15 | 20 | 17 |27. 9 |beau temps. 14 SE? 17 | 21 15 |27. 8 |tonnerre, pluie, éclairs. 1$ S. 14 | 17 | 13 |27+ 9 [heau temps. 16 Si 13 16 13 127. 10 |variable. Ter S. 14 |....| 16 |27. 10 |beau temps. 1 8 S. 1$ 22:| 19 |27. 10 |beau temps. 19 | S.S.E. | 18 | 25/20 !27. Oo lgrand vent & brûlant. 20 N. Le REA 19 |27. 10 [orage la nuit, variable le jour. 21 12 18 | 242021 2 9 |variable. 22 S. 20 | 26 | 22 |27. 9+|brouillard, temps variable. 23 E. S. 214] 27 | 22 |27. 8 |beau temps. | 24 St 17 | 19 | 16/27. 7 |grand orage la nuit, variable le jour. 2$ N. 15 | 20 | 16 [27. 114] variable. 26 | N.E. | 17 | 20 | 18 |27. 10 |temps beau. 2 NIOMNNS 16 14 127. 11 |grande pluie. 28 | N.O. | 13 | 15 | 12 |27. 10 [temps couvert, petite pluie, 2 N. O. | 12 | 19 | 14 |27. 10 |variable, 30 N. 12 | 16 | 15 |27: 11 |variable. EE ORNE RE EE ER à CE GR ARE SE (EE |

HAE DE ISNMBNC. 1 EN, GIE, 237 Ce mois a été fort chaud, le thermomètre ayant monté

à 27 degrés au deflus de zéro.

Au commencement il a plu prefque tous les jours, & il

.eft même tombé des à-verles confidérables.

Le 3, il y eut une aurore boréale; fes feigles entroient en fleur.

Le s, on commença à faucher les premièrs fainfoins pour les vaches.

Le 6, il y avoit encore beaucoup d’hannetons.

Le 7, on travailloit à donner la feconde façon à la vigne,

Le 11, on vit des cantharides.

Le 12, il y avoit des fraifes qui commençoient à rougir; les acacias étoient en pleine fleur, & on feryit des pois verds pour la première fois ; les effains des abeilles com- mençoient à fortir.

Le 17, on fervit des fraifes, & on fauchoit les ns pour les chevaux. ;

Le 18, on commençoit à ne plus guère voir d'hannetons.

Le 20, les blés épioient, les avoines montoient en tuyau, les rofiers & les fureaux commençoient à fleurir, & on ferroit les fainfoins.

Le 21, la vigne entroit en fleur, & on entendit chanter la cigale, & prefque plus chanter le roffignol.

Le 23, les vignes étoient en pleine fleur; on commen- çoit à cueillir la fleur d'orange.

Le 25, quoique le thermomètre placé au nord ne fût qu'à 20 degrés au deflus de zéro, l'air étoit étouffant, & plufieurs chevaux & quelques ouvriers périrent prefque fu- bitement.

Le 27, on acheva de ferrer les fainfoins; comme ils avoient pouffé tard à caufe des fraïcheurs du printemps, l'herbe étoit baffle, mais bien fournie, & de très-bonne qualité.

re feigles commençoient à jaumir.

Le .30; on vit quelques cantharides, quoiqu'on n'en eût pas depuis plus de quinze jours.

. Les chaleurs & l'humidité de ce mois ont été très-favo- Gg i

238 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYAL» rables aux blés, aux menus grains, & aux vignes; le prix du blé a un peu baifé, il ne fe vendoit que quinze à feize livres, & l’avoine, cinq livres dix fols.

Les fermiers ont conne leurs labours ; les vignerons ont accollé leurs vignes, & achevé de donner la feconde façon; ils ont aufli commencé à arracher les oignons de fafran.

I n'y a point eu de chenilles, ainfi la verdure n'a été endommagée que par les hannetons, qui ont entièrement dé- pouillé les noyers & le haut des paliflades d'érable ou de charme; mais les petits bouquets de bois de la Beauce ont été abfolument dévorés par ces infeétes; les cantharides ont peu endommagé les frênes. .

La petit rivière d'Eflonne a toûjours été fort grofle: les grandes chaleurs ont fait périr, comme nous l'avons dit, quelques perfonnes de travail; au refte il n’y a point eu de maladie régnante.

DE S.ASLC.I1.EN C'EIS 239 + + MU LL LUE

THERMOMÈTRE. Baromètre

ETAT Du CIEL.

Matin | Midi. | Soir.

Degrés.| Degrés. | Degrés | pouce, ligre

I N. 13 17: | 14 |27. 11 |beau temps. 2 N. 15 | 19 | 14 127. 11 \variable, 3 N. 17 | 21 15 |27: 9 |orand orage, 4 | N°E. | 14 | 19 | 142127. B2|temps lourd, grande pluie mêlée de ton. $ N. 13 | 18 | 14 |27. 10 |variable. 6 N. 122] 20 | 17 |27. 10 |feau temps. 7 N. 16 | 23 18 |27. 10 |heau temps, vent hâleux. 8 N. 16 | 24 | 20 ec 10 |très-beau. F 9 N. 18 25 20 |27. variable & lourd, éclairs, orage au loin. 10 S. 18 | 24 | 18 |27. =| variable, éclairs, orage au loin. 11° | NS: 18 | 21%] 18 |27. 6|pluie pendant la nuit, variable. 12 |S. S. O.| 17 | 19 | r4 27. : [grande pluie. 13 S 13 | 16:| 14 |27. temps Couvert, petite pluie. 14 | S.O 15 | 19 | 16 |27: couvert, ondée le {oir.

D

15 [O.N.O.! 16 | 20 | 15 |27. temps couvert, -

16 S. ©. IS 19 16 |27. variable, 17 SC: 17 | 21 18 |27. 2 |variable, \ 18 E. 18 | 235| 20 |27. +|variable, tonnerre & éclairs le foir. 19 S. 16 | 20+| 17 |27. SZlvariable, tonnerre au loin. 20° S | 16 | 20i| 16 |27. variable. 21 S. 17 | 201) 17+|27. variable, tonnerre au loin. 22 S: 16 | 20 | 18 |27. 82 \variable. 23 | S.O. | 18 | 242] 19 |27. S=+ltonnerre, 24 S. 16 | 215] 17 |27. beau temps. » | 25 S: 16 | 20 | 17 ]27- 3 |nébuleux, éclipfe de foleil. 26 S. -| 15 | 18 | 16 |27. 6\orand vent, fombre & variable,

variable fans pluie.

grande pluie. variable.

27 | N.O. | rit rs 27e 28 1 1N:10::| rofirs tr 27: N 12 | 16 | r3 |27. 30 N. 14 | 17 | 15 |28. N 14 | 21 | 16 |27.

D

D Om Oo A NN] M O9 ip © A2 D 9 NN EX mio

beau temps fixe. beau temps fixe.

240 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Tout ce mois n'a pas été chaud quoique le thermomètre ait monté à 24 degrés au delfus de zéro, mais il eft quel- quefois defcendu à ro le matin: le baromètre a aufli beau- coup varié depuis 27 pouces 3 lignes juqu'à 28, & il eft. tombé de l'eauk très- “fréquemment ; le premier on fervit les guignes blanches.

Le 3, il tonna & il tomba aflez de grêle pour blanchir: la terre, les grains étoient gros comme des avelines ; les blés n'en ont pas été endommagés, mais les vignes l'ont. été: heureufement la nuée n'avoit pas grande étendue; les melons & plufieurs autres plantes potagères en ont fouflert.

Le 4, il tonna & il plut beaucoup; vers ce temps on s'aperçut, en examinant de près les avoines, que ce qu'on prenoit pour l'herbe de ce grain, étoit de l'ivroie, & qu'il y avoit plus de ce grain que d'avoine, qui faifoit fort mal mème dans les endroits que les vers avoient épargnés : dans les terres Léres, au lieu d'avoine, on ne voyoit que des , bluets & du navet fauvage, & ane les terres fortes il n'y avoit que de l'échium.

Comme les abeilles avoient fait de grandes récoltes, on travailloit à les faire fortir de leurs ruches pour les paper changer de panier & profiter de leur travail ; elles ne man- quoient pas de miel, car les avoines étoient autant de prés remplis de fleurs, & les premiers jetons pefoient déjà plus de 30 livres.

Le 8, on commença à faucher les prés.

Le 11, il y avoit des vers qui gâtoient les verjus dans les vignes le long de a forêt.

Le 14, on s’aperçut qu'il y avoit beaucoup de noir dans les blés.

Le 16, onsfervit les abricots .précoces.

Le 18 on commença à fcier les feigles, & on arrachoit le chanvre mile.

Le 24, les feigles étoient ferrés; on fauchoit les vefles & les lentilles.

Le 26, les abeilles tuoient les bourdons ; on fervit la

poire

TT

RURALE LES. LL de 4

na iD ES :S$SACI1EN c Sa : poire de mufcadet, &. cette. prune qu'on hâtive: on commença la moiflon des blés. | | On a été occupé pendant mois à donner la feconde fiçon aux guérets, à mener des us à couper & férrer ls feigles qui font beaux, mais dans fefquels il y à beaucoup d'ergot ; on a fait auffi les foins & ramaflé les pois & les vefles deftinés pour le fourrase: les pluies continuelles ont rendu ces ouvrages très-diffciles ; néanmoins {e vent deflé- chant beaucoup, ‘ceux qui ont été attentifs ont perdu peu de foin. "va RES TR Re Les vignerons ont planté {eur fafran, & donné la troi- fième façon à la vigne; Le peu de verjus qui reftoit, faifoit très-bien. rt 5 | On à changé les mouches de panier, &, comme nous. favons dit, elles avoient fait d'abondantes récoltes.

jours été très-groffe, & les étangs ont

La 111 2: appelle {a jaune

* La rivière a-toûj Il n'y a eu aucune maladie épidémique,

Mém. 1 749 . Hh

242 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE A'OUOES T.

ETAT DU CIEL.

beau temps fixe. beau temps fixe.

pluie continuelle après-midi. variable.

beau temps, vent frais. variable.

© q

variable fans pluie.

variable fans pluie.

18 |27. 11 |variable fans pluie, éclipfe de Lune.

20 |27. 10+| variable.

15 [27 9 [tonnerre & pluie, aurore boréale.

16 |27. 9 |variable.

16. [27.9 |beau temps fixe.

17 |27. 30 |beau temps avec nuages.

18 |27. 10 |beau temps avec nuages.

18 |27. 10 [grand vent, beau temps.

14 |27. 10+|orand vent hâleux, beau & frais. 9+| variable & froid,

2127. 7 [grande pluie.

9 |variable.

27. 10 |beau temps avec nuages.

18 |27. 10 |grand brouillard.

18 |27. 8 |brouillard, orage au loin.

ARR Le

mmmoOm

....127. 9 [grand orage. 17 [27 9%lvariable. 19 |27. 7 |variable, tonnerre, 271127. 72à|variable, tonnerre au loin. 16 |27. 9 |variable, brouillard. 15 |27. 8 |variable, brouillard. C]

grande pluie & vent. 16 |27. 9 |variable fans pluie.

2 nuuwz 22 22 22222272

DES SCIENCES 243

Le vent a prefque toüjours été au nord, le ciel couvert de nuages & l'air frais pendant tout ce mois; il eft tombé beaucoup d'eau, mais par de grandes à-verles qui n'étoient pas de longue durée; la fraicheur de l'air étoit favorable aux moiflonneurs : les grandes pluies lavoient le blé & empor- toient une partie du noir, & comme elles ne venoient pas fréquemment, le blé avoit le temps de fe fécher, & on le ferroit bien conditionné, L - Vers le 10, on vit beaucoup de papillons blancs de fa chenille du choux.

Le 11, il y eut une aurore boréale avec des colonnes fumineufes qui partoient du nord, & qui étoient fort brillantes malgré le clair de la Lune. à

Le 18, on fervit l'avant-pêche blanche & quelques figues.

, Le 22, on acheva la moiffon des blés.

Le 24, il tonna toute la journée, & Île tonnerre temba au bout du parc fur un cerifier qu'il écrafa.

Le 26, on ferroit les avoines; on ne trouvoit encore dans les vignes que quelques grains de raifin tournés.

Le 30, les choux commencoient à être très-endommagés par les chenilles.

Le 31, on acheva de ferrer les avoines.

Les fièvres tierces & double-tierces ont régné, pendant ce mois; il y a eu aufli quelques fièvres malignes.

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Le) É nl #

244 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE SEPTEMBRE

TA | Baromètre ETAT DU CIEL. Mois. Matin MMidi. | Soir. mms (nn, (ess ne | mn Degrés. | Degrés.| Degrés.| pouc, lign. S 19 | 1$ |27: 9 |variable, petite pluie. S 14 | 17 | 14 [27. 10 |orand vent, variable fans pluie. S. 12 | 17 |:332/27. 11 $|variable fans pluie. N. 122] 17 | 10228. beau temps. N N

.

10 | 16 |.111|27. 117

10, || 16%] 11127. 10 |

SERA EE OTTE beau temps fixe. ZA EIONI 147 272 MO

14 | 2o | ré1/27. at

15 À 20 | 15227. 11

16 | 22 | 172/27. 9 |beau temps.

16 | 21 | 16 |27. 10+%|variable & pefant, tonnerre. 15. 208 1155 |28: k

10

AE LS variable. 13:16 | 11428: 19 11 RSS ar | 2827 10 | 1554] 11 |28. 7 |beau temps avec nuages. TL 1S 114128. 6 variable, brouillard. 11 16 | 131128. 4-+|variable, couvert. 115/ 15 95128. S$ |temps couvert. 21 11 ls 9 |28. 9 |beau temps. 22 10 15 11 |28. 10 |beau temps.

CT =

13 15 10 |28. variable.

10 1410131268. brouillard. 11 | 14 2128. 10 |28. NE NO UE

beau temps,

29;

grand brouil. le matin, heau la journée. beau temps, petit brouillard.

O D ON On Lo

YU D D bb D D D h

DES SCIENCES. ur 245

Ce mois a été beau, frais & fec: “#4

Le 15, les feuilles des tilleuls commençoient à jaunir ; quelques vignes fe dépouilloient, néanmoins il ny avoit point de grappes il n’y eût encore quelques grains de verds, & à plufieurs grappes il n'y avoit que quelques grains de tournés.

Le 23, il y eut une belle aurore boréale dans le nord, fn rayons.

: Le 30, on commença à fervir le beurré.

On n'a point difcontinué de Jabourer , la terre n'étant point trop sèche pour ce travail; ils ont aufii voituré leurs fumiers.

Les beaux jours de la fin de ce mois ontété très- favo- TIRE à la vigne; les raïfms, contre toute apparence, ont paflablement müûri, & les brouillards de la fin du mois en ont attendri l'écorce.

« Le blé de femence valoit vingt-une livres, le blé de mouture dix-fept à dix-huit livres, l'avoine fix ou fepi. : Les maladies du mois précédent ont continué,

246 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE OCTOBRE.

Jours THERMOMÈTRE.

du | VENT. | | Mois. Matin | Midi. | Soir.

Degrés, | Degrés. Degrés.

Baromètre ETAT DU \C1EL

I N. 10 | 1314] 8 . 10 [brouillard épais.

2 Se 8 | 16 | 11 |27. 8 |beau temps.

3 8 | 15 9 |27. 9 beau temps.

4 | N.0O. 8 | 13 11 [27 9 [brouillard épais.

S SiO? 10 | 15 | 12 |27. 9 |beau temps.

6! S.O. | 42 l 15 | 114|27. 10 |brouillard.

F4 S. 12 | 15 | 12 |27. 10 |variable.

8 S. 8 | ss | 12 |27. 12 |beau temps.

9 S. 11 | 16 | 16527. 9 |beau temps. 10 N. 12 | 14 | 105|27. 10 |variable. EI N. 12 | 16 | 10:]27. 11 |beau temps. + 12 N. 12 | r4 | 10:|28. o|variable, : 13 N. 9 | 14 | 10 |28. beau temps. 14 SE 8 | 13 | ro |28. r |beau temps. 15 NN. 10 | 13 | 12 |28. 15 |variable. 16 N. 10 | 14 95128. 10 |variable. 17 N. Che ELITE) 8 128. ro {temps couvert, brouillard. 18 N. 7 | 22 7 |28. 11 |beau temps fixe. 19 N. 42i| 11 5:28. 11 |beau temps froid. 20 N. 3 9 4 |28. 9 |beau temps. 21 S. 12] $i] 2 |[28. 4 |gelée blanche, bruine. 22 N. I 4 |[—1 |28. x E|gelée forte. 23 NAN $ 3 [28. 2 |beau temps, gelée. 24 Nm 2 6 2 |28. 6 (beau temps. 25 S. o 6 3 |28. $ |variable. 26 5 3 7 5 |28. $ |variable. 27 S. 6 9 4 128. 2 |variable. 28 O. 2 7 s |28. $ |bruine, gelée blanche. 29 Oo: 7 9 s |28. 1 |pluie. 30 O. s 9 5 128. 6 |beau temps, 31 E. 4 9£| s5i|28. $s |beau temps, gelée blanche.

Î

Hi ESC, l'E NC, ES 247

Le vent de nord a continué pendant tout ce mois, qui s'eft paflé prefque fans pluie. . n Le re", on commença la vendange, Le 4, on cueilloit les fruits d'hiver. Le $, on commença à femer les blés. _ Le 13, on ne voyoit plus d’hirondelles. ! Lei 4, on fera les orangérs, qui avoient fort peu de fruits. Le 15, le fafran commençoit à fleurir. Le 19, on arrofoit les potagers comme en été.

| Les gelées ‘du 24 & du 25 ont beaucoup diminué le

produit des vignes blanches que nous avons dans Îa forêt lOrléans, qui n'ont été vendangées que le 29.

|. On acheva les femences avant la fin du mois ; le blé va- it dix-fept à dix-huit livres, & l'avoine huit à at livres.

DS CT de :

248 MémotREs DE L'ACADÉMIE Rorate NOVEMBRE.

» us THERMOMÈTRE. 8 à du | VENT. | a | Baromètre ETAT DU C1eEL, Mois. Matin | Midi. | Soir. D, Degré] Degré | Dar] paues dgne | I N. E. 7 | 112] 8 |28. 2 |temps variable, 2 E. _8 14 12 |26. 11 |variable, grand vent. 3 Gi 1! 14 | 11 |27. oO |variable. 4 S. 9 | 12 9 |27- 1 |variable. : s S. 10 | 12 8 |27. 6 |variable. 6 5: 9 | T2 8 |27. 6: variable fans pluie. 7 S: 9 | 10 8 |27. 7 |variable fans pluie. 8 S. 8 10 8 127. 6 |variable. 9 S. 8 II 6 |27. 6 |variable. 10 sb TAN 9 |27. 7 |variable. II S: 9zfM13z| 11 |274 +9 | beau temps. 12 Se EN Ps D 9 |27- 8 |orand brouillard. 13 SE 11 13 9 |27. 6 |variable. 14 Si ONE 9 |27. 6 {pluie & orage. 15 S; ZT O 6 |27. 7+|variable. 16 | N.E. 20525 3 |27- 11 [gelée blanche. 17 IN I 4 3 |27. © |beau temps, gelée blanche. 19, | UN. 9E: 3 $ 4 |27. 11 [variable & froid. 19 N: I S 2 |27. 10 |beau temps, gelée blanche. DONININÈNE 3 $ 3 |27. 10 |temps couvert. 21 N. ii 2 |—2 |28. 2-+|gelée à glace, grand vent. 22 N. |—4 o |—3:128. 2 |beau. 23 N. |—4 o |[—2 |28. 1 |beau temps, gelée. 2 N. E. |—2 2 o |28. 1 |brouillard, déoel. e 25 INR 2 o |28. 3 |petit brouillard. 26 NIET 3 1 |28. 3 |petit brouillard. 27 N. I S 3 |28. 2+|brouillard en bruine, 28 S) 3 5 | 4 |28. o |bruine. : 29 SE 4 6 3 [28. ro |brouillard. 30 S. 3 3 [28 7 [temps fombre.

DE S/NOSBQUMLE., N'C' ESPN 214

Ce mois a été aflez fec; le vent de nord a régné, & Fair a été très-froid vers la fin, puifque le thermomètre à def cendu à quatre degrés au deffous- de zéro, néanmoins ül a tombé affez de pluie pour faire lever les bleds.

. Le 1er, on vit des abeïlles & des guèpes voler, & on trouva quelques grillons.

Le 11, on vit des roitelets.e

Le 1 2, il y avoit quantité d'abeilles attachées à une efpèce de peuplier dont les boutons rendent un baume aflez fem- blable à celui du Pérou; & en fouillant pour planter des arbres, on trouva des hannetons à demi-pied en terre.

Le 14, il tonna.

Les fermiers travailloient aux entre-hivers, les vignerons paroient les vignes, & on ouvroit les trous pour planter les arbres, mais le fond de a terre étoit trop fec pour achever ces ouvrages.

ÿ 1 $ on, | me

250 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE DEL COE M B.R:E.

te THERMOMÈTRE. du VENT, | TR | Baromètre ETAT DU CIieEL. Mois, Matin | Midi | Soir. Lt Degrés. Dares | Darés pous. ligne | Dern T I S 72 S $ 1274 3j. [temps couvert. 2 O 3 2 |—2 |27. 7 |bruine. 3 O. |—1i| o [10 |27. a [variable. 4 S 1 4 3 127. 9 [fombre. S S 4 $ Je | 9 couvert. 6 S s 6 4 |27. 9 |fombre, bruine, gi O 4 ÿ 3 |27. 9 |variable. 8 | N.O. 3 $ 3 [28 o variable, 9 S: où: 19 1 |28. 11 |gelée blanche, aurore horéadle N. O. 10 5: o 4 6 |28. 11 |gelée blanche. 11 S: 6 8+ 8 |28. 10 lfombre, bruine. 12 S. 8 8 6+|28. 9 |fombre. 12 N. s 9 9 |28. 10 |variable, 14 S: 8 | 10 8 |28. 9 |variable. 1S S. 8 | 10 7 128. 9 |couvert, bruine. 16 | SO 3 9 5 |28. o jbeau temps. 17 S. 3 6 $ |28. o |couvert, bruine. 18 S. S 8 3 |28. 2 |beau temps. 19 || MSNO: S 8 6 |28. 2 |beau temps. 2 D: 6 7 6 |28. 11 |couvert, bruine. 2 S. 6 7 3 |28. 9 |variable. 22 510: 6 7 4 |28. 11 |variable. 24 SO: S 7 6 |28. 10 |couvert, bruine. 24 | S. O: 4 6 $ 128. 9 variable. 25 | S: S 6 5 |28. 7 |couvert, bruine. 26 S. 31] 61] 43/28. 6 |couvert, grand vent froid, pluie, 270 RSC NES 6 4 |28. 4 lorand vent & pluie. 28" |FS10: 3 s 4 |26. 11 |vent très-violent, pluie, 29 + 3 $ 4 |27. 6 |variable. 30 S, 6 7 85127. 6 |variable. 31 S. 9 | 10 6 |27. 7 |couvert, bruine.

HIA * TES 8 MS CST'E NC: E) SW) 2$1 Le vent ayant préfque toûjours été au fud,, Pair a été fort doux ; Je: ciel à tojours été, couvert, il af tombé de petites pluies très-fréquemment, quais qui n'ont pas mème gité les chemins. 1'Le baromètre a beaucoup varié;:il a monté à 28 pouces 9 lignes pendant que le temps étoit-couvért, & même qu'il tomboit un peu d’eau, & il eft defcendu par un grand vent d'oueft à 26 pouces 3 lignes.

Le o, il y eut une belle aurore boïéale avec je rayons. ke 26 encore uné aurore boréalé.

Le 28, il fürvint un coup de vent qui fit beaucoup de defordre; les blés ont pris beaucoup de force pendant ce mois: les petites pluies ayant attendri. a terre, principalement aux) endroits on avoit commencé d'ouvrir des trous, nous ayons beaucoup planté de toutes fortes d'arbres.

51 1)

c HT GBA FUON

Quoique le thermomètre n'ait pas defcendu au deffous de 10 degrés, Thiver peut pañler pour froid ; Le vent de nord a régné, & il a tombé peu d'eau.

Le printemps a été froid, humide & tardif

Le ventde nord ayant) régné pendant l'été, ‘éette faifon arété.aflez fraiche; mais gomme il. eft farvenu de fréquens orages, elle a ‘été humide.

L'automne a été belle & sèche; if eft furvenu en Oétobre des gelées aflez fortes qui ont fait bien du tort. > Le printemps étant frais, des blés dans cette faifon étoient fort-bas, mais da feuille en étoit affez verte, & on elpéroit

| tout des chaleurs ; mais quand, ils ont été épiés, on s’eft

aperçû qu'il y avoit beaucoup de grains noirs. Quoique la moiïffon Fa été chaude, les blés ont été ferrés aflez focs; cs les granges ‘ont été remplies,; «mais

1 Res igerbes rendant peu de, grain, da récolte n'excède, guère

Ii ij

2$2 MEMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE une bonne demi-année, & la qualité du grain eft médiocre; étant charbonné & mêlé de beaucoup de graine.

NE 16.LSE;S,

Les feigles ont été fort beaux, mais il y avoit beaucoup d'ergot, ce qui eft rare dans notre province.

AVOINES A

La récolte a manqué entièrement, fur-tout dans les terres fortes, il n’y avoit pas apparence de grains ; dans les terres de Beauce. on a plus recueilli d’ivroye que d'avoine, les vers dont nous avons parlé ayant fait un delordre con- fidérable, & le peu d'avoine qu'on a recueilli eft auffi Lé- gère De de KR paille; les fermiers font obligés de la mêler avec de la vieille pour nourrir leurs chevaux, & ils le font d'autant plus volontiers , que leur récolte ne peut pas leur fufhre pour les nourrir jufqu'à Pâques.

ORGES Le peu d'orge qu'on sème dans notre province a aflez bien réufir. ;

GROS LEGUMES

On à recueilli affez abondamment de pois, de fèves, de vefles, de lentilles, &c.

FOINS.

On a eu bien de la peine à fanner les foins, mais les prés en ont beaucoup fourni.

Les fainfoins étoient fort bas à caufe des fraïcheurs du printemps, de forte qu'ils ont fleuri au fortir de la terre, mais l'herbe eft de bonne qualité.

VINS

La vendange a été très-tardive, on n’a recueilli que deux à trois piècés l'arpent: les cuves’ ont tout d’un couv ‘eté uné

D ES MBLC,T EN CES 260 écume rouge qui s’eft affaiflée, néanmoins le vin ne s'eft pas fait promptement; fa qualité eft meilleure qu'on n'ofoit l'efpérer, il a aflez de couleur & un peu de qualité, graces aux beaux jours, du mois de Septembre; car à la fin d'Août on defefpéroit de voir mürir les raifins.

ROUE ETES

- I y a eu peu de fraifes, de pêches & d'abricots, bexucoup de ceriles, de prunes, de poires, de pommes, de coins, de néffles; il y a eu peu de noix, les hannetons en font proba- blement la caufe; il y a eu médiocrement de glands ; celui qui n'étoit pas ramaflé avant la fin d'Oétobre, a été perdu.

Les orangers ont donné peu de fleurs & de fruits, & comme les fleurs n'ont pas noué, nous n’aurons’ point d’o- ranges l'automne prochaine.

CHENEVIERES. On 2 eu beaucoup de chanvre, & de bonne qualité, SAFRAN. Les fécherefles des mois de Septembre & d’Oétobre n'ont

point été favorables aux fafrans ; mais les gelées du mois d'Oétobre ont fur-tout fait beaucoup de tort, les fleurs épa- nouies & celles qui étoient encore en terre ayant été gelées.

BP AR RE

Le bétail n'a point été attaqué de maladies; les moutons ont très-bien profpéré, de forte ge la chair en eft très-

grafle & très-délicate.

+ Quelques particuliers qui avoient acheté de vie qu'ont UE tirées des pays la contagion régnoit, ont perdu toutes leurs vaches ; mais au moyen d'une bonne police Ia contagion n’a point fait de progrès,

ABEILLES.

Les abeilles ont beaucoup produit, quelques Ron ayant été changées jufqu'à deux fois. Ii if

254 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE INSECTES |

Il y a eu beaucoup d'hannetons, qui n’ont fait de tort qu'aux noyers; il y a eu peu de cantharides, & nous re- marquons depuis deux ans qu'elles n’attaquent point le frêne à fleur: fi cette obfervation fe confirme, dans les années il y aura beaucoup de cantharides, on pourra profiter des agrémens de cet arbre fans avoir le déplaifir de le voir dé- pouillé par des infectes de mauvaife odeur.

On n'a été incommodé que par une efpèce de chenille qui a dévoré tous les choux-pommes à la fleur; il y a auffr eu peu de guépes & de fourmis, mais il y a eu beaucoup de teignes dans les blés vieux.

GT TE RS.

Il y a eu un peu de cailles, affez abondamment de per- drix, un peu de lièvres, beaucoup d'allouettes.

MALADIES.

I n'y a point eu de maladies épidémiques qui aient caufé aucune mortalité,

SEMIS ET PLANTATIONS.

Les humidités du printemps ont été très-favorables à Ja reprife des arbres; nous en avions beaucoup planté, & prefque tous ont bien repris & pouflé avec vigueur.

Les femis d'arbres ont aufli affez bien réufir.

ELEVATION pes EAUX

Les eaux ont toûjours été très-hautes dans les puits, dans les fources & dans la rivière.

D PO

DIE 1 ÉMMNEO TE NICE SC . 255$

ME MOTÏITRE Sur une nouvelle efpèce de Teinture bleue, dans laquelle il wentre ni Paflel ni Indigo.

Par M. MACQUER.

OUT le monde connoît les avantages que l'art de 1a Teinture peut procurer au. Commerce; if embellit & donne du prix à nos étofles, qui fans fon fecours {eroient privées de l'agréable variété qui fait leur principal ornement: cependant nous avons longtemps négligé, &, pour ainfi dire, oublié cet art fi utile. M. Colbert, aux foins & à la pénétration duquel il i'échappoit rien de ce qui pouvoit être avantageux à l'Etat, eft un des premiers qui ait porté fes vües fur cet objet important ; il a donné des loix à cet art auparavant abandonné au caprice des ouvriers : les Miniftres qui lui ont futcédé, n’ont pas eu fur ce fujet moins d'attention que lui; confidérant même, comme le remarque M. de Fontenelle, que cet art, ainfi que la plüpart des autres, étoit pratiqué par une infinité de mains, & qu n'y avoit point d'yeux

pour le regarder, ils ont intéreflé à {es progrès la feule fcience-

qui puïfle l'enrichir & le perfectionner, la Chymie. M. du

Fay de cette Académie, qui avoit acquis beaucoup de con

noïflances en diflérens genres, fut chargé par le Conleil de travailler fur Vart de la Teiïnture, & h. s'en acquitta avec fuccès ; mais une mort prématurée l'a empêché de poufier fes Aéenvenes auffi loin qu'il auroit faire s'il neut été ainfr furpris, prefque au commencement de cette carrière: M. du Fay a eu pour fucceffeur en cette partie M. Hellot , auffr de cette Académie; ce favant Chymifte eft le premier ait porté le flambeau de la Phyfique dans art obfcur e la T'einture, & qui ait raffemblé & mis en ordre, fuivant

. ks principes d'une théorie ingénieufe;, les phénomènes &c

16 Avril 1749.

256 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

les opérations bizarres de cet art : il a mis les Chymifles à portée de voir clair dans ce cahos ténébreux, & participera ainfi à toutes les découvertes qui feront faites en ce genre par ceux qui obfervent une méthode dans leurs recherches, & qui ne font des expériences qu'en fuivant des principes raifonnés. La théorie de l'art de la Teinture, que M. Hellot a donnéë dans les Mémoires de l'Académie, n'eft que l'ex- trait d'un ouvrage très-détaillé & très-curieux qu'il a fait fur cette matière.

ÆEncouragé par ces travaux préliminaires à cultiver un art qui m'avoit plus rien de rebutant pour les Phyliciens , je conçus dèslors l'efpérance de faire quelque découverte utile en ce genre: j'examinai d'abord fi la Peinture ne pouvoit pas communiquer à notre art quelques-unes de ces belles couleurs dont elle fe pare avec tant d'avantage, & je travaillai

dans cette vüe avec d'autant moins de fcrupule, que je fa-

vois bien que fi la chofe étoit poffible, je ferois à la Pein- ture cette efpèce de larcin, fans lui caufer le moindre dom- mage, les arts pouvant fe faire réciproquement les plus beaux préfens, fans que celui qui donne, rifque de s'appauvrir en aucune manière.

En pañant en revüûe les différentes couleurs, ma vüe fe fixa principalement {ur le bleu de Prufle, couleur: éclatante dont Ja Chymie vient d'enrichir la Peinture depuis quelques années, & que nous voyons tous les jours feconder f1 heu- reufement l'outre-mer dans nos plus beaux tableaux.

Les réflexions que je fis fur les opérations par le moyen defquelles on fait cette couleur, m'y firent apercevoir toutes les qualités d’une véritable teinture de bon teint, telle que M. Hellot la décrite dans fa théorie; la diffolution d’alun & de vitriol me parut pouvoir fervir d'un excellent mordant par le moyen duquel les pores & les fibres de l’étoffe feroïent difpofés à recevoir & à happer les atomes colorans, & je crus la fécule qui fe précipite lorfqu'on méle la diflolution des fels avec la leffive fulfureufe & alkaline, très-propre à s'appliquer fur l'étoffe à çaufe la fineffe de fes Puis

2.

De

b,'E sc I E N'CES 257 "Je commençai par faire bouillir pendant une demi-heure dans une diffolution d'alun & de vitriol préparée comme celle dont on fe fert pour faire le bleu de Prufle, un éche- veau de fil, un de coton, un de foie, & un morceau de drap, le tout blanc & propre à être teint; toutes ces ma: tières prirent une couleur citronnée, & il fe précipita au fond” du vaifleau une aflez grande quantité de terre jaune martiale: je trempai enfuite mes étofles dans la leffive alkaline & fut: fureufe préparée comme M.': Geoffroy l'ont prefcrit pour le procédé du bleu de Prufle; cette leflive étoit chaude & prète à bouillir: il fe fit aufli-tôt une effervefcence affez vive, la liqueur parut verdâtre, & les échantillons fe trou-

-vèrent teints en une couleur grife qui n'étoit pas belle; ils

ne reftèrent dans la leflive que pendant une minute, après quoi les ayant laïffé refroidir à l'air, je les trempai dans l'eau bouillante dans laquelle j'avois mêlé affez d'acide vitriolique pour lui donner une acidité légère & agréable au goût: à peine les échantillons furent-ils das cette eau acidule, qu'il s’excita une nouvelle effervefcence, & que la liqueur vin du plus beau bleu. Après avoir un peu agité les échantillons, je les retirai, & j'eus la fatisfaétion de voir qu'ils étoient teints eux-mêmes en une couleur bleue, la plus belle & Ja plus vive que j'aie jamais vüe: je les laïflai refroidir, puis je les lavai dans de l'eau froide à laquelle ils communiquèrent une légère couleur ; une feconde eau dans laquelle je les lavai, n'en prit prefque point, & enfin la troifième refta abfolu- ment blanche; ayant même exprimé mes échantillons, l'eau qui en découloit étoit très-claire & nullement colorée. Je laïflai fécher le tout à l'ombre, & quand ils furent fecs, je remarquai que la couleur (qui, lorfqu’ils étoient mouillés ; m'avoit paru foncée comme un bleu de roi) étoit beaucoup plus claire, & n'étoit plus qu'un bleu célefte, mais aufli beau,

auffi éclatant, & même. encore davantage que le premier. Les matières qui étoient en écheveau, me parurent teintes affez également, mais il n'en étoit pas de même du mor- ceau de drap dont la couleur étoit inégale, plus foncée dans

Mém. 17249: . Kk

258 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE des endroits que dans d’autres, & qui paroïfloit comme taché; il avoit encore le défaut d'être un peu rude au toucher

Je me hâtai de meitie ma nouvelle teinture à l'épreuve. & de m'aflurer de fa nature en lui faifant fubir les débouillis, auxquels, fuivant les ordonnances, doi\ent réfifler les iein- tures nommées de bon teint. Le premier débouilli par lequel je les éprouvai, fut celui du favon, & je fus très-peu fatisfait de voir que mes échantillons, après avoir bouïlli dans l'eau de favon le temps prefcrit, en fortirent aufii peu colorés que s'ils n'avoient jamais été teints; il faut pourtant en excepier le drap, qui avoit confervé une vilaine couleur verdâtre. Je les éprouvai enfuite par le débouilli d'alun ordonné pour la laine, & mes elpérances fe renouvellèrent en voyant qu'ils réfif- toient parfaitement à cette épreuve; que même la couleur, loin de s'altérer, n'en devenoit que plus belle: je conclus de-là que la nouvelle teinture étoit au moins de bon teint pour la laine, & par conféquent pour la foie, & je réfolus de faire de nouvelles expériences pour la perfectionner; mais des affaires qui me furvinrent alors, n''obligèrent de renvoyer à un autre temps ces expériences que j'avois commencées au mois de Mars 1748.

Au mois de Septembre de la même année, je fongeai férieufement à mettre cette découverte en état de pouvoir être utile: je me fuis propolé, pour y parvenir, de remplir les objets fuivans; 1.° de trouver le moyen d'appliquer la teinture également & uniment fur toutes les parties de l'é- toffe; 2.0 de la rendre douce au toucher; 3.° de diminuer les frais le plus qu'il feroit poflible; 4.° de pouvoir donner à volonté les différentes nuances claires & foncées; enfin d'en faire des effais en grand, parce qu'il fe trouve fouvent des différences notables, fur-tout dans ces matières, entre les expériences qui fe font en petit, & celles qui fe font en. grand : je vais faire en peu de mots le récit des principales expériences que j'ai commencées là-deflus.

J'ai d’abord effayé de varier le procédé, & au lieu de commencer par faire bouillir les étoffes dans la diflolution.

D'ES/ SC 1 Nc Eos 259 des fels, comme dans l'expérience précédente, je les ai treni- pées premièrement dans la defive alkaline, chaude jufqu'à n'y pouvoir tenir le doigt, & les y ai Jaifites pendant trois minutes, après quoi je les ai trempées dans la diflolution des fels, chaude au même degré: à peine y ont-elles été plongées, qu'il s'eft excité une effervefcence, & que la couleur bleue a commencé à paroître dans Ja liqueur & fur les étoflés;. mais cette couleur étoit pâle & d'une nuance defi- gréable, ce qui m'a engagé à les pañler dans l’eau acide de l'expérience précédente, qui leur a donné auffi-tôt fans effer- velcence tout le fond & toute la beauté de celle de cette éxpérience. .

. Ce changement dans la manipulation ne m'a pas paru en avoir apporté aucun pour Ja perfeétion de la couleur: elle avoit la même beauté, mais auffi Les mèmes défauts que la précédente ; elle en avoit même un de plus, c'eft que Îa laine & la foie avoient été un peu altérées par fa effive alkaline, ce qui n'eft point arrivé d'abord, parce que dans

_ la première expérience les étoffes étant impregnces d'alun &

de vitriol, ces {els leur avoient fervi de défenfifs, 1eur acide $'étant combiné avec Y'alkali de la leffive, &. en ayant émoufté lâcreté, au lieu que dans cette feconde expérience elles: fe font trouvé expolées fans aucun préfervatif à faction de cet alkali. Les étofles dans cette occafion n'ont cependant pas été fondues comme elles ont coûtume de l'être quand on les pafle dans une léffive alkaline auffi chargée que celle-ci, parce que f'alkali propre à faire le bleu de Prufle, c'eft-à-dire, cal- ciné avec des matières abondantes en phlogiftique, eft en quelque manière favonneux, & beaucoup moins cauftique que celui qui n'a pas recû cette Préparation.

Voyant donc que ce fecond procédé n'apportoit aucune perfection à ma teinture, J'ai cherché à appliquer cette cou- leur encore d’une autre manière ; au lieu de tremper fuccef

fivément les étoffes dans les liqueurs du mélange defquelles

maît le bleu de Prufle, J'ai voulu voir fi ce: bleu tout fait froit propre à teindre de même que Findigo & d'autres Kk ïi

260 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE couleurs de teinture. J'ai commencé par faire bouillir mes échantillons dans une difiolution d’alun & de tartre, pour les difpoler à recevoir la couleur, puis je les ai plongés dans de l’eau prête à bouillir, dans laquelle j'avois délayé du bleu de Prufle tout fait, oblervant de les faire pafler dans la tein- ture par un mouvement circulaire, en les tournant fur des bâtons, comme ont coùûtume de faire les teinturiers: mes échantillons fe font très-bien teints par cette méthode, & j'ai remarqué même que la couleur s’appliquoit dans cette occa- fion beaucoup plus également & plus uniment que dans les autres expériences ; elle avoit encore un avantage de plus, c'étoit d'être beaucoup plus douce au toucher; elle étoit d'ail- leurs aufli belle & auflr folide que celles dont j'ai parlé, mais aufli elle étoit moins foncée, fur-tout celle qui étoit appliquée fur le drap; & quoique je le replongeafie à plu- fieurs reprifes dans la teinture, & que je chargeafle cette teinture de beaucoup de bleu, la nuance demeuroit toüjours la nième. Il eft cependant effentiel de pouvoir charger la couleur de l'étofle autant qu'on le veut : j'ai donc pris le parti, fans néanmoins perdre l’efpérance de perfectionner ce dernier procédé, de reprendre mes premières tentatives, pour voir fr en les variant je ne pourrois pas parvenir à remplir les différens objets que je m'étois propofés.

J'ai d'abord eflayé de charger l'alkali de beaucoup plus de phlogiftique qu'on n’a coûtume de faire quand on le prépare pour l'opération du bleu de Prufle ordinaire; j'ai pour cela mêlé du nitre fixé par le tartre avec le double de fon poids de fang de bœuf defféché, & je l'ai fait calciner dans un creufet à l'ordinaire, jufqu'à ce qu'il n’y eût plus à la fuper- ficie de la matière qu'une petite flamme bleuâtre; jai retiré pour lors la matière du creufet, je lai pulvérifée dans un mortier, je l'ai remêlée avec encore autant de nouveau fang de bœuf, & je l'ai récalcinée comme la première fois : enfin j'ai réitéré cette manœuvre une troifième fois ; la matière fut enfuite leffivée avec le double de fon poids d’eau chaude, & j'ai opéré avec cette leflive comme dans le premier procédé,

DIE SCI E N'CUEUS: 267: en employant une diflolution chargée d'alun & de vitriol autant qu'elle pouvoit l'être: j'obtins par ce moyen une cou- leur fort belle & bien foncée; mais (comme fi, par une elpèce de fatalité, il eût été dit que je ne pourrois parvenir à aucun avantage qui ne füt balancé par quelque défaut) ïl s’en trouva un des plus confidérables dans les échantillons teints par ce dernier procédé, c’eft que la folidité & la bonté de l'étoffe avoient été altérées notablement ( inconvénient qui avoit été occafionné par la quantité de fels dont les liqueurs étoient chargées, & encore plus parce que j'avois été obligé de me fervir pour l'avivage d'une eau plus acide que dans les expériences précédentes ) : il fallut donc cher- cher encore d'autres nouveaux moyens ; après plufieurs ten- tatives, je n'en ai pas trouvé de meilleurs que d’'em-

ployer la leffive dont je viens de parler, mais afloiblie par

le quadruple de fon poids d'eau, & les autres liqueurs falines de même. En trempant fucceflivement l’étoffe, fuivant le premier procédé, dans les liqueurs ainfi préparées, elle ne fe trouve d’abord teinte que d’une couleur aflez légère ; mais en recommençant l'opération une feconde fois, elle prend une nuance plus foncée; la même chofe arrive à fa troifième fois : on peut lui donner ainfi du fond à volonté, même affez également, & fans rien faire perdre à ’étoffe de fa bonté. °

Il y a deux chofes à obferver dans ce procédé pour le faire bien réufflir ; la première eft de paffer l'étoffe dans la- cide à chaque fois qu'on lui donne une nouvelle nuance, car fi on fe contentoit de la, pailer alternativement & à plu- fieurs reprifes de la diflolution de fels dans la leffive alka- line, & qu'on ne Îa trempât dans l'eau acide pour l’aviver que lorfqu'on la croiroit fuffifamment chargée de couleurs, on ne la trouveroit après f'avivage prefque pas plus foncée

. que fi on ne l'avoit trempée qu'une fois dans chaque liqueur.

La feconde attention qu'il faut avoir, c'eft d'ajoüter une nouvelle portion d’alun & de vitriol dans la diffolution faline, dalkali fulfureux dans fa leflive, & d'acide dans, l'eau de

Kk ii

262 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE l'avivage, à chaque fois qu'on réitère les immerfions de l'étoffe: fi mème on veut avoir une couleur abfolument foncée, il faut tremper l'étofle jufqu'à fix fois, & renouveler entière- ment les liqueurs à la troifième immerfion, parce que l’étoffe, en pañlant d'une liqueur dans l'autre, les afloiblit, les mêle enfemble, & occafionne la précipitation du bleu, qui, comme nous l'avons dit, lorfqu'il eft fait, ne peut s'appliquer fur l'étoffe qu'en une certaine quantité,

L'article de la dépenfe eft encore un objet qui mérite attention. Comme cette teinture feroit chère fi on fuivoit exactement Îles premiers procédés qu'on a donnés pour faire ce bleu, j'ai cherché différens moyens d’économifer. M. Geoffroy propole, dans fon dernier Mémoire fur le bleu de Prufle, de fe fervir de lalkali de la foude au lieu de nitre fixé, parce qu'il coûte beaucoup moins, & il a trouvé qu'il pouvoit lui être fubftitué fans aucun inconvénient. J'ai voulu voir sil en feroit de même par rapport à cette couleur, em- ployée comme teinture, & l'expérience m'a appris que Falkali de la foude y eft auffr propre que celui du nitre fixé: j'ai même trouvé que tous les autres alkalis qui coûtent peu, comme les cendres gravelées , la potafle & les cendres de bois neuf, donnent des teintures bleues auffi belles qu'on

uifle le defirer.

L'acide qu'on eft obligé d'employer pour /avivage, eft éncore un objet de dépenle ; il eft même à craindre pour le peu qu'il foit trop fort, parce qu'il alière la bonté des étoffes : J'ai effayé de fubftituer les acides végétaux comme plus doux & moins coûteux, aux acides minéraux qu'on a coûtume d'employer, mais j'ai trouvé qu'ils n'y étoient pas propres, les parties huileufes dont ils font chargés les em- péchant apparemment d’avoir l'aétivité néceflaire dans cette occafion. M. Geoffroy donne aufli dans fon Mémoire un moyen de préparer le bleu de Prufle fans fe fervir d'acide ; il confifte à employer une vieille diflolution de vitriol verd, qui ait par conféquent beaucoup dépofé. Ce moyen nva réufft affez bien dans la teinture; j'ajoute ici qu'on peut parvenir

DES SCIENCES 26 au même but avec la diffolution de vitriol, fans être obligé d'attendre qu'elle ait vieilli; il ne faut pour cela que la faire bouillir pendant quelques minutes, parce qu'alors elle dépole en un inftant autant de terre jaune qu'elle en auroit dépolé en la gardant pendant plufeurs années. II faut avouer cepen- dant que la teinture dans laquelle on n’emploie que la diflolution de vitriol, foit que ceite diflolution foit ancienne, foit qu'on l'ait fait fimplement bouillir, n'eft jamais fi belle que quand on fe fert d'acide pour l'aviver; mais aufli, quand on emploie la diflolution de vitriol préparée de l'une ou Yautre manière, il faut beaucoup moins d'acide pour faire le bleu le plus beau. :

Je fupprime ici le détail d’une multitude prodigieufe d'ex- périences que j'ai faites fur cette matière, en variant de mille manières différentes les dofes de chaque efpèce de drogue, Jes degrés de chaleur & la durée du temps que j'ai employés dans mes différentes tentatives, parce que je ne pourrois entrer dans ce détail fans pañler les bornes prefcrites à nos Mémoires. 1

Je finis en rendant compte des principales propriétés de la nouvelle teinture.

Premièrement, elle eft aufi fupérieure en beauté & en éclat au bleu de paflel & d'indigo, que l'écarlate 'eft au rouge de garance. Cette couleur, comparée avec les plus beaux

É bleus faits fuivant la méthode ordinaire, les efface tellement qu'on a de la peine à croire que ces derniers foient teints en bleu.

Secondement, le bleu ordinaire ne teint que la fuperficie des étoffes foulées, & ne pénètre point dans l'intérieur, d'où äl arrive que les draps bleus montrent une corde blancheître quand ils commencent à s'ufer : la nouvelle teinture péné- trant l'étoffe dans toutes fes parties, n'aura pas cet inconvé-

mient, & les draps qui en front teints pourront s'ufer juf- qu'à être troués, fans avoir ce coup d'œil defagréable.

Troifièmement, elle eft de bon teint pour la laine & pour - a foie, & foûtient très-bien, comme je l'ai dit, le débouilli

264 MÉMOIRES DE L'ÂACADÉMIE ROYALE d'alun. La teinture écarlate ne foûtient pas mieux que la nôtre le débouilli de favon. L'épreuve la plus füre pour les tein- turés étant l’action de Fair & du foleil, j'ai expolé des échan- tillons de la nouvelle teinture en plein air, à lardeur du foleil, pendant les mois entiers de Septembre & d'Oétobre de l'année dernière ; pendant lelquels les jours ont prefque toüjours été fereins, & ces échantillons n’ont point été dé- teints : il eft vrai qu'au bout de ce temps leurs angles & leurs points faillans {e font trouvés un peu ternis & éclaircis, mais cetie efpèce d'épreuve ne doit durer, fuivant les ordon- nances, que douze jours, les meilleures teintures ne pouvant la foûtenir plus long-temps fans {e ternir & s'éclaircir con- fidérablement.

Quatrièmement, elle n’altère en aueune manière la bonté des étofles, pourvü qu'on prenne les précautions que j'ai indiquées ; pour m'en affurer, j'ai fufpendu à des fils teints fuivant cette méthode, des poids que j'ai toüjours augmentés jufqu'à ce que le fil fe rompit, & le fil de cette expérience ne s’eft caflé que lorfqu'il a commencé à foûtenir un poids qui faifoit rompre même fil avant qu'il eût été teint.

Cinquièmement enfin, en conféquence des moyens d’éco- nomie que nous avons propolés, la nouvelle teinture n'exi- gera pas beaucoup de frais : la foude, la potaffe, l'alun & fa couperofe font à très-bon marché ; la déperfe la plus confi- dérable fera la main-d'œuvre. Il y a tout lieu d'elpérer maintenant que cette découverte étant publique, fera bien- tôt perfectionnée, les gens de l'art, qui font en grand nombre, & dont plufieurs font très-intelligens, pouvant facilement en faire des expériences.

Je dois cependant avertir que je nai pas parlé dans ce Mémoire de quelques faits dont il feroit néanmoins de la dernière conféquence d’être inftruit, ft on vouloit faire des expériences fur cette matière, fur-tout en grand; mais comme ces faits n'ont fait entrevoir des chofes très-fingulières fur la nature du bleu de Pruffe, & que j'ai befoin de faire en- core beaucoup d’autres expériences pour me confirmer dans

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À Die SMS r EN-CEMAONL 265 les idées qu'ils n'ont fait naître, je me fuis déterminé à n’en parler que lorfque je ferai en état de donner une théorie bien établie fur la nature de ce Bleu. Comme cependant mon intention eft que ma découverte puifle devenir utile, & que c'eft le premier motif qui n'engage à la rendre publique, je communiquerai volontiers ces obfervations aux gens de l'art qui feroient dans le deflein de travailler fur cette matière.

SECOND MEMOIRE SUR : LA TRANSPIRATION INSENSIBLE

DEUST E PN LEA UN TE,

Pa M GUETTARD.

F #s Expériences que j'ai rapportées dans Îe premier Mémoire, il s'agifloit de la tranfpiration infenfible des Plantes, tendent à prouver, 1.° Qu'entre les plantes il yena qui tranfpirent beaucoup, tandis que d’autres, expofées à la même chaleur, plantées dans le même terrein, tranf- pirent beaucoup moins, & qu'il y en a même dont 1a tranf- piration eft prefque nulle. 2.° Qu'il eft néceflaire que les plantes foient frappées immédiatement des rayons du foleil pour que la liqueur tranfpirée foit la plus abondante qu'elle puifle être; & qu'une plante qui feroit dans un lieu plus chaud, mais privée des rayons du foleïf, tranfpireroit moins qu'une autre de même efpèce qui feroit dans un endroit ‘moins chaud , mais foumife à l'aétion des rayons de cet aftre. 3.° Que la tranfpiration n’eft pas égale pour toutes les parties des plantes, & même que la furface qui reçoit les rayons du foleil tran{pire plus que celle qui ne les reçoit pas. 4.° Que Mes plantes qui gardent leurs feuilles pendant Fhiver, & qui fleuriffent pendant cette faifon, doivent même tranfpirer moins ‘dans ce temps que dans l'été, SMém. 1749. . Li

} 7

Expérience.

266 MÉMdIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE L'Académie trouva ces expériences affez curieufes pour juger qu'elles méritoient d'être de plus en plus confirmées, d’être en conféquence répétées, variées, afin de lever aïnft tout le doute qui pourroit refter : l’Académie daigna même n'indiquer quelques-unes des expériences que l'on pouvoit faire; elle defira, par exemple, qu'au lieu de laïfler une branche en expérience pendant plufieurs jours fans Ôter du récipient la liqueur qui en avoit tranfpiré, je retirafle cette liqueur tous les jours, afm de pouvoir comparer par - aifément fa différente action du foleil fur une même plante, action qui devoit varier fuivant que le foleil feroit plus ou moins net. On demanda de plus que je tinfle une plante entièrement renfermée dans un globe, & que je n'aflurafie ainfi, fi une plante qui doit s'imbiber la nuit des parties aqueufes répandues dans l'air, ne fouffriroit pas étant févrée de cette eau. Je ne puis mieux faire fentir de quel poids de tels avis furent pour moi, qu'en me preflant de rapporter le rélultat de ces expériences, même avant de. donner le détail de celles qui ont été imaginées de nouveau. H convient encore que je dife auparavant que la plüpart de ces expériences ont été faites dans le mème jardin que celles du premier Mémoire; que l'on y a apporté les mêmes pré- cautions | & ordinairement le même appareil, excepté que faute de globes à trois becs on s'eft fervi plufieurs fois de ceux qui n'en ont que deux, & même de cucurbites, de

bouteilles ou de carafons, après que l’on eût remarqué que

pourvû que les feuilles ne trempañlent pas dans la liqueur

tranfpirée, il n’y avoit pas grand inconvénient à craindre: au.

refle, on n’a négligé aucun des fois dont on a été capable, & que pouvoit demander l'exaétitude fcrupuleufe. & philo= fophique du grand Prince qui a continué à s’amuler de ces

expériences, à en. propofer de nouvelles, à diriger même

celles que lon fe propofoit de faire. La première prouvera fans replique, que felon que l'action

du foleil varie, la tranfpiration fouffre une diminution

une augmentation plus ou moins grande; j'ai continué cetté.

î

i

| |

DE :S MOMENT EN CES 267 expérience un temps aflez long pour avoir un grand nombre de réfultats très-approchans, ou fi différens les uns des autres, qu'ils puffent fatisfaire entièrement fur ce point. En effet, je ne me fuis pas contenté de laiffer, comme dans es autres expériences , la branche qui avoit fervi à celle-ci,

endant huit ou quinze jours; mais J'ai pouffé k: patience & l'exactitude jufqu'à la continuer pendant trois mois, c'eft- à-dire, depuis le 6 Juin jufqu'au 3 1 du mois d’Août inclu- fiyement, ayant eu, excepté quelques j jours du mois d’Août, Jattention d’ôter tous les matins avant le lever du foleil, la liqueur qui avoit tranfpiré le jour précédent. Il fera facile de faire la comparaïfon des difiérens réfultats par la Table fuivante, & la feconde de la fin de ce Mémoire, qui renferment non feulement le poids de la liqueur, mais encore l'état de J'atmofphère confidéré du côté des nuages, de la pluie & de la chaleur, détermihé par un thermomètre expolé au nord & peu éloigné de Farbre dont une branche avoit fervi à cette expérience : cet arbre eft le fuftet ordinaire ;des feuilles de cette branche fe trouvèrent à la fin de l'expérience pefer 1 + gros 3 3 grains, de bois 1 gros $ grains, le total par conféquent 3! gros 2 grains. Une telle branche, ou pluftôt des feuilles d'un poids fr peu confidérable, prüifque le bois peut n'être compté pour rien, ou pour peu de chofe, donnèrent par la tranfpi ration pendant ces trois mois, 30 onces 1 8 grains ou envi ron de liqueur ; poids qui, à ce que je crois, auroit été encore plus confidérable, fi l'expofition étoit l'arbre eût été plus avantageufe, & s’il n’eût pas été à l'abri d'une mai: fon qui lui déroboit pendant quelque temps les rayons du Jeil. Comme il ne s’agifloit pas dans cette expérience de favoir jufqu'où pouvoit monter Ja tranfpirations, mais d'avoir feulez ent des réfultats que l'on püût comparer facilement les uns 2 les autres, j'ai cru que je ne devois pas être arrêté dans 1€ choix que j'ai fait deicet arbre, par fon expofition defavan+ eufe, puifqu'il me convenoit à plufeurs autres er. |

À

Liÿ

268 MÉMOIRES DE L' ACADÉMIE ROYALE

JUIN. JUILLET.

POIDS de la LIQUEUR.

Jours.

Onces, £TO5. grains.

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DES SCIENCES: 269: * Outre 11 conféquence qu'on a déjà tirée de cette expé- rience, on peut encore en déduire deux autres; 1.° en com- parant entre eux les poids de la liqueur tranfpirée pendant chaque mois, on peut conclurre que la tranfpiration a été moins grande pendant le mois de Juin de plus de deux tiers, &près de deux tiers dans le mois de Juillet, qu'elle n'a été dans celui d'Août; 2.° *{a quantité d'eau tombée en Juin s'étant montée à 2 pouces 9+ lignes, en Juillet à 2 pouc. 7 lignes, en Août à 1 pouce 7+ lignes, il fuit que ce n'eft pas felon le rapport de la quantité d’eau dont les plantes font abreuvées, que la tranfpiration fe fait, & que, comme je l'ai dit dans le premier Mémoire, une trop- grande abon- dance d'eau empêche la tranfpiration, puifque la quantité de cette eau a été une fois moins confidérable en Août qu'en Juillet, & que dans ce dernier mois elle a été, à peu de chofe près, égale à celle du mois de Juin. On peut donc dire en général, que ce n'eft qu'à l'action plus ou moins continue du foleï, que la tranfpiration des plantes eft dûe, cette action ayant été à peu près égale pendant. deux de ces mois, les jours nébuleux & ceux d’un foleil clair & net ayant été prefqu'en même nombre dans un & l'autre, au lieu que dans le mois de-Juillet il n’y a eu que deux ou trois jours d'un temps ferein, les autres ayant été nébuleux, couverts ou pluvieux; 3.° il paroît même qu’on peut dire que, lorfqu'après une pluie abondante ou des jours nébuleux ou un temps couvert, le foleil vient à reparoître, ce n’eft pas le premier jour que la tranfpiration eft la plus grande, mais les jours fuivans, & qu’elle peut continuer fur le même pied pendant un certain temps, du moins pour les arbres dont les racines font profondes, fi le foleil continue à agir. avec la même force, ils doivent toûjours trouver dans le ein. de la terre de quoi y fournir, la grande étendue de leurs fe: } 1 # On-eft redevable de ces obfèr- | fon goût pour l’Aftronomie, par fon ie à Dom Germain Charpen- | exactitude à conftruire des thermo- ier , Chartreux de la maifon de | mètres & à faire des expériences de

Paris : ce Religieux eft connu par | Phyfque, its LI ïï

ñ

Expérience.

270 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE racines, fur-tout s'il étoit vrai qu'ils püflent le faire fans tirer de l'atmofphère une partie de cette eau qu'ils perdent par la tran{piration, comme la feconde expérience pourroit le faire penfer.

Je l'ai d'abord exécutée fur un petit maronnier d'Inde qui avoit deux grandes feuilles &c une petite; toutes ces feuilles étoient entièrement dans le globe ; cet arbre y avoit été mis le 7 Juin à 7 heures du matin, on l'en a ôté le 4 Juillet à peur près à la même heure; if avoit donné $ + gros 1 8 grains de: liqueur ; on le remit tout de fuite en expérience; le 11, on Jen a retiré parce que les grandes feuilles étoient à moitié defléchées , les petites n'ayant pas cependant fouflert, on ne trouva aucune liqueur dans le récipient; pour les feuilles, elles peloient demi-gros 3 grains. Comme cette expérience pou- voit fouflrir quelque difficulté à caufe du defféchement des feuilles, & qu'on pouvoit réellement l'attribuer à ce qu'elles avoient été privées d’un air libre, aufli-bien qu'à quelques coups de foleil que je regardois comme la vraie caule, je fongeai dès-lors à répéter cette expérience & à la faire fur un arbre chargé de beaucoup de feuilles ; je ne la commença cependant que le 6 Août à midi, & afin que l'on püt avoir des réfultats dont la comparaifon füt facile, je mis en même temps deux branches d'arbre femblable en expérience, toutes les autres reftant à l'air; ces arbres étoient des orangers. Celui dont toutes les branches furent renfermées dans un globe, avoit cinq ans, aufli-bien qu'un des deux autres dont une branche fut introduite dans une cucurbité; le troïfième étoit un arbre d'environ cinquante ahs; la branche que Fon choïfit; fat mife dans un carafon. Le 18, à 77 heures du matin, on retira l’eau que'oranger renfermé dans le globe avoit donnée; elle fe montoit à 42 onces, le poids de celle qui avoit tranf- piré de la branche renfermée dans la cucurbite étoit de 2 onces moins 1 gros, la branche du troifième avoit tranf- piré 6 gros 12 grains: on remit le même jour, & dès qu'on eut fini de pefer ces liqueurs, les vaiffeaux à d’autres branches,

ais on choifit un autre petit oranger à peu près femblable

DES SCIENCESY/ 274 au précédent, & celui que l'on appelle communément pom- poléon ; ce dernier étoit environ de quinze ou vingt ans. Le 27, à Gtheures du matin, l'eau du premier pefoit 4 onces moins 14 gros, celle du fecond $+ gros, celle du pompoléon 6 gros. #4 : AN

Ces quatre rélultats me fufhfant pour faire la compäraifon avec ceux que j'avois eus de l'oranger renfermé entièrement dans le globe, je ne pouflai pas plus loin cette expérience par rapport aux autres orangers} mais comme j'avois princi- palement en vüe ici de voir fi le premier fe foûtiendroit dong-temps quoiqu'entièrement renfermé, je-continuai à le laiffer en expérience, & j'eus depuis le 21 jufqu'au 26 à 8 heures du matin, 4 onces demi-gros ; depuis le 26 juf qu'au 29 à 7 heures du matin, 4 onces 1 + gros; depuis le 29 jufqu'au 2 Septembre à 6 heures du matin, 4 onces 3 gros; le 2, 1 once 7 gros; le 3, demi-once; pour le- 4 & le $, une once; pour le 6 & le 7, 3 onces 2 gros; depuis

_ de 8 jufqu'au ro à onze heures du matin, 2 onces $ gros #8 grains; depuis le ro jufqu'au 15 à fix heures du foir, | 4 onces 2 gres; depuis le x. 5 jufqu'au 19 à une heure après midi, 4 onces 3 + gros; depuis le 19 jufqu'au 23 à dix heures du matin, 4 onces moins 3 gros : le total de fa. liqueur tranfpirée fe monte ainfi à 2 livrés 10 onces demi- gros 18 grains pour quarante-fept jours, ce qui fait moins _ d'une once pour chaque jour, fi lon divife également le _ total; mais il paroit qu'il n'en eft pas ainfi par les diffé- rens réfultats, & qu'il y a des-jours la tranfpiration eft beaucoup plus forte que dans d'autres, & lon verra par da Table météorologique , que ces. variétés dépendent de Yaétion plus ou moins grande du foleil. IL n'eft donc pas facile de favoir au jufte fi la tranfpiration dans ces arbres ef moindre ou plus grande que leur poids, cette tranfpira-. _ tion montant beaucoup au delà dans des jours d'un beau À ciel, & étant encore bien au deffous dans des jours nébu- . Jeux ou couverts. En effet, les feuilles de l'oranger renfermé dans le globe pefoient 1. once 2 gros, & même un peu.

pr

272 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE plus; ce que je reconnus en pefant une vingtaine de ces feuilles, dont le poids étoit de 2 gros, & en comptant le relte dont le nombre fe montoit à plus de quatre-vingts:

Il n'a paru inutile, faute de pouvoir faire un calcul jufte, de comparer la quantité de liqueur que cet oranger a donné, avec celle qui a tranfpiré des autres. Comme ces arbres avoient été rencaiflés, & que cette opération leur avoit mal réuflr, puifque tous perdirent bn l'hiver fuivant, je n'ofe- rois aflurer que ce que lôn a eu de liqueur fût réelle- ment celle qui tranfpireroit d'un arbre qui feroit en bon état, & qui ne feroit pas privé des petites racines que l'on avoit enlevées à ceux-ci, qui n'en avoient pas pouflé de nouvelles, comme on s’en aflura le printemps fuivant, en renouvellant leur terre; inconvénient qui n'étoit. pas arrivé à celui qui avoit été renfermé dans le globe, puifqu'on ne lui avoit pas donné de nouvelle caïffe.

On ne peut donc guère tirer de cette expérience d'autre conclufion que celle-ci, favoir, qu'un arbre dont toutes les branches font exactement renfermées dans un lieu qui n’eft pas acceffible à l'air, ne fouffre en rien, du moins fenfible- ment, de cet état forcé, & qu'ainfi les feuilles ne tirent peut- être pas de l'air autant d'humidité qu’on le penfe communé- ment. On pourroit peut-être croire que je n’avois pas fermé auffi exaétement que je le dis toutes les iflues par lefquelles Jair pouvoit s'infmuer ; mais cette objection, que j'avois prévüe, m'avoit rendu encore plus attentif qu'à l'ordinaire ; car outre les différens morceaux de papier collés les uns fur les autres, j'avois encore foin de les recouvrir de parchemin ou de veflie de cochon. L’on ne pourroïit donc objeéter maintenant que les inftans pendant lefquels j'ôtoisle récipient, & dire qu'ils fufhfoient pour donner un nouvel air chargé d'une quantité d'eau fuffifante pour qu'elle pût fournir Fhu- midité qu'on prétend être afpirée par les feuilles; mais outre que ce n'étoit réellement que des inftans pendant lefquels le globe refloit ouvert, on ne retiroit le récipient que de jour, &k lorfque le foleil ayant raréfié l'eau qui eft dans l'atmofphère;

l'air

DES SCIENCES. 273 l'air qui nous envirenne s'en trouve beaucoup moins chargé: au refte, que pouvoit être cette humidité pour un arbre qui

par l'étendue de fa tête remplifloit prefque le globe? & à -combien pourroit fe monter l'humidité'qui feroit mêlée avec un air renfermé dans un globe d'environ un pied dans fon plus grand diamètre! On n’objectera pas fans doute l'eau de la tranfpiration même, puifqu'elle fe ramafloit dans le réci- pient, & que ce récipient étoit renfermé en terre, & peu expofé ainfi à lation du foleil qui ne pouvoit par confe- quent faire élever cette eau dans le globe, & l'y foûtenir de façon que l'air du globe en fût toûjours chargé. Paflons donc à d’autres expériences, & rapportons celles qui regardent encore l'augmentation ou la diminution de la trânfpiration, füivant que les plantes font plus ou moins expofées au foleif. . Je penfai que rien ne feroit plus propre à donner beau- coup de jour à ce point, que de tenir des plantes dans une cavé, pendant que d’autres plantes de même efpèce feroient expofées au foleil ; ainfi je portai dans un de ces foûterrains un pot étoit planté un pied du geranium ou bec de grue d'Afrique qui s'élève en arbre, qui a des feuilles plates, 3. brillantes & qui reflemblent à celles de la mauve, & qui a Expérience. une très-belle fleur d’un rouge de carmin : un autre pot fut placé dans le jardin; & pour faire en même temps une com- paraifon des geraniyn d'Afrique avec ceux d'Europe, dont les feuilles font beaucoup moins épaifles, je mis auffi en expérience une branche du bec de grue appelé communément herbe à Robert, qui étoit plantée en terre. Je commençai cette expérience le 1 6 Juin; le 18, la branche du geraniumt d'Afrique du jardin étant caflée aux trois quarts, je Fôtai à 9 heures du matin; elle avoit donné un demi-gros de 1i- queur; les feuilles avec Îeurs pédicules pefoient 2 gros 18 gr. le bois, qui eft prefque herbacé, 1 + gros 8 grains. Je remis _ tout de fuite une autre branche en expérience; le 26, je - retirai la liqueur venue de ces trois plantes; je trouvai dans | Xe récipient du geranium dont je viens de parler, 1 gros _ 18 grains; fes feuilles fans les pédicules peloient gros Mem. 1749. °Mmn

274 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

46 grains; la branche & les pédiculess 2+ gros $ grains: Je n'eus dans le récipient de celui de la cave que 1 6 grains; les feuilles fans pédicules' peloient 1 + gros; la tige & les pédieules, 2 gros 1 $ grains: étonné du peu de liqueur que ces plantes avoient donné, je le fus encore plus lorfque je vis la quantité que l'on eut de herbe à Robert; elle fe montoit à 3 onces $ grains; les feuilles détachées du pédi- cule conumun pefoient un demi-gros 1x grains; la branche, les filiques, les pédicules communs, 14 gros 8 grajns. Craignant qu'une pluie furvenue dans le temps qu'avoit duré l'expérience, n'eût contribué à augmenter la liqueur par quel- que cas imprévû, je remis le 13 Septembre une branche de ce même geranium en expérience; le 1 $, il y avoit dans le récipient + gros de liqueur; la branche chargée de fes feuilles & fiiiques, peloit 1 gros 42 grains. Si l'on compare ces expériences, on trouvera à peu près le même réfültat, für-tout fi lon fait attention que eette plante n'étoit pas dans le mois de Septembre en auffi bon état que dans celui de Juin, approchant alors du temps elle alloit fe pañfer.

Je n'ai pas trouvé davantage de liqueur, & même encore moins, dans les vafes j'avois'introduit des branches de jafmin, de myrte, de romarin, & que j'avois portés à fa cave; les parois internes étoient feulement recouvertes d’une gère vapeur; la branche de jafmin commun chargée de fes feuilles peloit 26 grains, celle de myrte démi - gros, celle de romarin 14 gros 18 grains; celle-ci avoit été en expé- rience depuis le 30 Mai jufqu'au 6 Juin, les deux autres depuis ce dernier jour jufqu'au 13 du même mois.

Quoique les expériences que je vais rapporter n'aient pas été faites dans le même temps que ces dernières, Je crois devoir les placer ici, puifqu’elles n'ont été réellement faites qu'en vue de les comparer avec les précédentes. Le 29 Juillet, à une heure après midi, je mis en expérience le même jafmin & le même myrte dont il vient d’être parlé; je les phçai fur uné fenêtre expofée au nord, qui ne recevoit le foleil que fur le foir & pendant peu de temps. Le 6 Août, à 6 heures

DES SCIENCES. 275 du matin, la liqueur tranfpirée du jafmin peloit 43 grains; la branche chargée de fes feuilles & d'un petit bouquet de fleurs, 32 grains; celle du myrte, 48 grains; la liqueur, 1 gros 11 grains Une branche romarin qui étoit en tefre le long d'un mur qui la privoit du foleil levant & du foleil de midi, avoit tranfpiré depuis le 7 Juin jufqu'au 16 du même mois, 2 onces $ =#gros; fes feuilles peloient avec les jeunes branches elles étoient attachées, qui étoient herbacées, & avec les calices, 3 gros 24 grains ; la branche commune & ligneufe, 1 gros 20 grains: une branche d'un autre romarin qui recevoit le foleil depuis fon lever jufqu’à {off coucher, & planté également en terre, avoit tranfpiré depuis midi du 3 Juin jufqu'à la même heure du 16 de ce mois, $ onces 12 gros; les feuilles, les jeunes branches & les calicés pefoient 3 gros 18 grains; le bois, 1 gros 24 grains.

IL eft inutile que je faffe faire attention à Ja différence qu'il y a entre les réfultats de ces expériences, elle eft trop grande pour n'être pas aperçüe facilement; mais je dois rappeler ici un fait que l’on voit tous les jours, fans qu'on en rende, à ce que je crois, une raïfon fatisfaifante, Lorfque fon met dans la cave des plantes pour y pañer l'hiver, ou que l’on y cultive des chicorées ou d'autres plantes, elles y devien- nent blanches, elles s'y alongent plus qu'elles ne feroient dans un jardin. Je#crois trouver la vraie raifon de ce fait dans la tranfpiration arrêtée; la grande quantité d'eau qui s'amafle dans les véficules parenchymateufes de ces plantes, les gonfie, les étend & oblige ainfi les branches à prendre de Textenfion, & c'eft peut-être une des caufes qui les font blanchir, puifque ces plantes reportées à l'air libre & expolées au foleil prennent leur couleur ordinaire.

Ces expiriences viennent encore à l'appui de celles que Jai rapportées dans le premier Mémoire, par lefquelles j'ai tâché de faire voir quelle diminution confidérable ï y avoit dans Ja tranfpiration d’une plante mife à l'ombre; cette di- Mminution eft encore ici beaucoup plus grande, & elle n'eft M m ji

Ai

Expérience.

276 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

fans doute que la fuite de li privation totale des rayons du foleil. I ne peut guère y avoir de doute là-deflus; ceper dant je crois devoir encore rapporter quelques expériences qui ne ferviront qu'à confirmer cette vérité, d'autant plus qu'elles font de celles que l'Académie avoit defiré que je répétafle. »

Le 24 Avril, à midi,tje mis en expérience deux branches de caffis, chacune dans un globe; l'un de ces globes étoit couvert d’une ferviette appliquée précifément deflus, l'autre étoit à découvert: celle-ci avoit donné le 8 Mai, à trois heures du foir, 2 onces 2 gros 12 grains de liqueur ; la branche pefoit 1 gros 12 grains, chargée de fes feuilles, qui feules pefoient demi-gros $ grains. L'eau tranfpirée de la branche qui étoit dans le globe couvert, fe montoit à 6. gros jufte; le poids de cette branche chargée de fes feuilles étoit de 14 gros 3 grains; celui des feuilles féparées de la branche, de demi-gros. È

Le 28 Août, à 7 heures du matin, je fis cette même expérience fur des branches de l'hyfope commune ou des boutiques, chargées de fleurs; & au lieu de n'employer que deux branches, comme je viens de dire en parlant du caffis, j'en avois choiïfi trois, dont une étoit dans un globe décou- vert; l'autre dans un, couvert d’une ferviette qui l'enveloppoit exactement ; la troifième, dans un qui n'étoit qu'à l'ombre d'une pareille ferviette. Leendemain matin, à 6 heures, je trouvai dans le récipient du globe qui n'étoit pas couvert, 2 onces moins un demi-gros de liqueur ; dans celui du globe qui étoit à l'ombre de la ferviette, $ gros 12 grains; dans celui du globe enveloppé d'une ferviette, demi-gros ; les feuilles avec les fleurs de la branche de ce dernier globe, pefoient 3+ gros 24 grains; le bois, 12 gros 24 grains; les feuilles avec les fleurs de la branche du fecond, 2+ gros; le bois, 14 gros 18 grains; les feuilles avec les fleurs de la branche du premier, $+ gros; le bois, 3 gros. Malgré la différence confidérable dans le poids des branches, celle qui fe trouve dans Je poids de la liqueur tranfpirée left

4x ff

DES SCIENCES. 277 encore beaucoup plus, & elle ne peut que convaincre du point en queftion: cependant, comme le temps étoit au beau, & qu'il étoit précifément tel qu'on avoit defiré dans Y Aca- démie qu'il füt lorfque je répéteroïs cette expérience, je la fis de nouveau fur le même pied d'hyfope & avec les mêmes précautions, avec cette feule différence que le globe qui étoit à l'ombre feulement d’une ferviette, étoit un peu moins cou- vert de cette ombre que dans l'expérience précédente. Je commençai celle-ci le même jour 29, à 6 heures ? du matin; le lendemain 30, à fix heures & demie, auflt du matin, la branche du globe découvert, dont les feuilles & les fleurs pefoient enfemble demi-once 29 grains, le bois,

gros, avoit tranfpiré une once 6 gros jufte de liqueur;

celle du globe qui étoit à ombre d'une ferviette, en avoit donné 7+ gros; fes fleurs & fes feuilles peloient enfemble demi-once; le bois, 2 gros 24 grains; les feuilles avec les fleurs de la branche du troifième globe, peloient 3 gros 12 grains; le bois, 18 grains; la liqueur, 1 gros 4 grains: ici le poids des branches eft moins différent qu'il ne left ci- deflus, & celui de la liqueur l'eft beaucoup; ainfi la difficulté que lon pouvoit peut-être faire de la différente quantité de feuilles dont ces branches feroient chargées, tombe d'elle- mème & ne peut avoir Jieu. Ces expériences me conduifoient naturellement à penfer que l'on arrèteroit, felon qu'on le voudroit, la tranfpiration, dans telle ou telle partie d’une plante, & que, par exemple, fi l'on couvroit la partie inférieure d’une branche pendant que la fupérieure refteroit découverte, la première tran{pireroit beaucoup moins que la feconde, & que tecontraire arriveroit fi l'on faifoit l'inverfe.

Je choiïfis, pour cette expérience, une branche de l'efpèce de morelle que lon appelle communément 4/lcamara ou morelle, dont le fruit eft d’abord doux lorfqu’on le mange, & enfuite amer; les branches de cette plante étant très-longues, elles étoient commodes dans cetfé expérience qui en demande de telles: je fis donc pañler à travers un globe à deux yeux,

M m iij

+ $.° Expérience.

278 MÉMOIRES DE L’'ACADÉMIE ROYALE

une de ces branches, & je fis entrer la partie fupérieure dans un récipient de Glauber ; je laiffai ce récipient à découvert, & j'enveloppai d'une ferviette le globe à deux yeux. Je commençai cette expérience le 24 Avril, à midi; le 8 Mai, à trois heures du foir, je ne trouvai aucune liqueur dans le globe couvert; l'autre en avoit une once 2 + gros 12 grains; les feuilles de la partie de la branche qui étoit dans ce globe, pefoient 1 gros; le bois, 32 gros 3 grains; les feuilles de l'autre branche, demi-gros 3 grains; le bois, 4 gros 15 grains.

Je fis l'inverfe de cette expérience fur une autre branche du même pied de cette morelle; elle avoit été commencée le 28 Mai, à huit heures du foir; le 6 Juin, à 4 heures après midi, la partie de la branche qui n’étoit pas couverte, avoit donné 3+ gros moins $ grains; le poids des feuilles étoit de demi-gros, la moitié de ces feuilles étoit sèche; le bois péloit 1+ gros 18 grains; celui de l'autre branche pefoit 45 grains; les feuilles, 24 grains; la liqueur, 12 gros: mais comme les feuilles de fa partie de la branche qui avoit été couverte, avoient toutes fouffert, qu'elles approchoiïent d'un état de moififlure, & qu'elles fe détachèrent en tirant la branche du globe, cette expérience demandoit à être refaite.

Je la recommençai donc à l'heure même; mais comme le pied de cette morelle n'avoit plus de branche commode pour cet effet, je pris par préférence une branche de bryone ordinairé ; le 1 6 à onze heures du matin, la partie qui recevoit les rayons du foleil, c'eft-à-dire linférieure, avoit donné 2 onces 3 gros d'eau; les feuilles pefoient 1+ gros; la tige & fes attaches ou vrilles, 2 gros moins $ grains; la partie fu- périeure qui étoit à couvert, avoit tranfpiré 2 gros 1 8 grains; fes feuilles pefoient 1 + gros 6 grains; la branche, les vrilles & les fruits qui étoient fur cette partie, 4+ gros 23 grains. Cette expérience a donc eu la fuite que j'avois prévüe, & qu'il n'étoit pas difhicile de prévoir; il y a même eu des différences aflez grandes; mais pourquoi la partie inférieure de la branche de {a dulcamara va-t-elle rien tranfpiré, tandis

Le dal

D 'ESUISiC 1 EN CESR 279 que la fupérieure & celle de la bryone ont donné une cer- taine quantité de liqueur quoique couverte comme celle de Ja dulcamara ! eft-ce que la sève portée naturellement vers des parties fupérieures, y étant encore alors attirée par Ia chaleur, empêche qu'il ne s’en arrête affez dans {a partie inférieure de la branche pour fournir à une tranfpiration dont la matière tranfpirée puifle être ramaffée? ou n'eft-ce feule- ment que parce que le globe qui renfermoit la partie fupé- riêure, étoit moins exactement couvert que celui {a partie inférieure étoit renfermée? J'avois apporté un foin particulier à bien envelopper ces derniers globes; je les avois même recouverts non feulement d'une ferviette fimple, mais encore d'une autre pliée en double; eft-ce donc la première caufe que j'ai foupçonnée qui a produit cet effet! c'eft ce que je

Mnofe encore déterminer. Mais je crois qu'on peut, fans craindre d'être accufé de trop de précipitation, conclurre des expériences précédentes que la tranfpiration peut être diminuée confidérablement par l'ombre la plus légère, & qu'elle le fera prefque totalement par une ombre parfaite : peut-être qu’on pourra avec autant de füreté conclure de celle qui va fuivre immédiatement celle-ci, que, fuivant qu'il a déjà été dit dans le premier Mémoire, des plantes renfermées dans un lieu plus chaud que celui d'autres le font, peuvent tranfpirer cepen- - dant beaucoup moins, fi l'air de ce lieu ne peut pas f renouveler, & f1 la plante n'eft pas frappée#immédiatement par le foleil. Une nouvelle e‘pèce de chaîfis que M. le duc d'Orléans avoit fait faire en vüe d'y exécuter différentes expériences , fe irouva #rès-propre à celles-ci: comme ce chaffis étoit d’une étendue bien moins confidérable que celui fous lequel les expériences de l’année précédente avoient été faites, & qu'en tant feulement une vitre d'un des pan- neaux, que Jon pouvoit même remplacer par un morceau

. de papier au travers duquel on étoit le maître de faire pañfer €" nn branche que l'on vouloït tenir en expérience, il arrivoit par- R, ce qui ne pouvoit {e faire dans l'autre, que le chaffis reftoit

6.e Expérience.

280 MÉMoiREs Dr L'ACADÉMIE ROYALE entièrement fermé, & que l'expérience en étoit plus füre. Je plaçai donc fous ce chaffis, le 14 Juillet à 9 heures du matin, un pot dans lequel un romarin étoit plantés, je fis paffer une branche à travers une fenêtre de papier dont on ferma mème le plus exaétement qu'il fut poflible, l’efpace qui pouvoit refler entre les bords du trou & la branche; j'introduifis cette branche dans un globe qui étoit hors du chafis; un autre globe placé fous ce chaffis reçut une autre branche, les cols des balons furent bien bouchés. Le 26, à dix heures du matin, l'eau tranfpirée de la branche renfermée dans le globe du dedans du chaffis, fe montoit à 3 onces; le poids des feuilles étoit de 2 gros; celui du bois, de 142 gros 8 grains; la liqueur de la branche du globe extérieur étoit du poids de 6 onces 1 gros; les feuilles peloient 1+ gros 10 grains; le bois, demi-gros 19 grains. a Le 29 à midi, je répétai cette expérience avec le même appareil, fur deux branches d'un jafmin commun ; fa tranf- piration de Îa branche extérieure s’eft montée à 2 onces demi-gros; les feuilles avec leurs pédicules communs & un petit bouquet de fleurs pefoient demi-gros 20 grains; le bois, 24 grains: la branche intérieure avoit donné une once jufte; les feuilles avec les pédicules communs pefoient 1 gros moins 6 grains; le bois, demi-gros moins 4 grains : on cefla cette expérience le 6 Août, à fix heures du matin, Un pied de tamaris de Narbonne planté proche le chaffis, me fit venir la penfée de faire une troifième fois cette expé- rience; je la fuivis d'autant plus volontiers que la plante devoit ètre hors du chaflis, & que cela occafionneroït peut-être quelque différence que je ne pouvois pas prévoir: il arriva la même chofe qu'au jafmin & au romarin; la tranfpiration fut beaucoup plus forte dans la branche extérieure que dans la branche intérieure. Cette expérience ayant été commencée le 23 Août, à 7 heures du matin, je trouvai le matin 26, à huit heures, dans le récipient extérieur, 14+ once demi- gros de liqueur; ce récipient ayañt été aufli-tôt remis, le 30 à fept heures du matin, on eut 2 onces $+ gros de cette

AND E SMIC 1 EN CES 285 - cette même eau; les feuilles de la branche extérieure & les petites branches pefoient enfemble 1 gros 24 grains; le bois, demi-gros 1 6 grains: le poids de la liqueur de la branche intérieure étoit de 2 onces 3 gros; celui des feuilles & des petites branches, de 5 gros 1 6: grains, prifes auffi enfemble; celui du bois, de 22 gros 12 grains: fa tranfpiration fat beaucoup plus du double extérieurement qu'intérieurement , puifque la liqueur tranfpirée le fut, fans compter que le poids de la branche extérieure, étoit au deflous du tiers de celui de a branche intérieure.

On verra par a Table météorologique, que le thermo- mètre qui étoit en dedans du chaflis, a toûjours été plus haut que celui qui étoit en dehors; que s'il y a eu des mo- mens le premier ait été plus bas , ce n'a été réellement que pendant des inftans, & qu'en général il a toüjours monté plus haut que l'autre. J'ai avancé dans le premier Mémoire, . qu'il me paroïfloit que des plantes grofles, c'eft-à-dire, celles - dont les feuilles font épailes & remplies de beaucoup de fuc, tranfpiroient beaucoup moins que Îes plantes dont les feuilles étoient peu fucculentes : un pied de lefpèce de cierge que lon appelle communément queue de Jouris, qui avoit été placé fous le chaflis dont il a été parlé ci- deflus, me procura en même temps une double expérience. Je-fis far lui celle dont je viens de décrire l'appareil. Le 23 Mai, à 10 heures & demie du matin, la branche extérieure nävoit donné que 2 gros de liqueur ; linté- rieure, que 2 gros moins 16 grains, quoiqu'elles pefañènt + l'une, c'eft-à-dire l'intérieure, 7 gros moins 15 grains, _ Jautre, 7. gros 22 grains, & quoiqu'elles euffent été mifes

“en expérience le 18 du même mois, à quatre heures du | ir: il eft encore prouvé par cette expérience que la tranf- D poation a été moins forte en dedans du chaffis qu'en dehors; ce qui mérite ici principalement attention , ceft la petite quantité de liqueur que lon a eue pour quatorze jours . & demi. En général, la tranfpiration furpañle dans les autres | plantes le poids de la plante; mais dans celle-ci la tran{piration Mn. 1749. HN

A

Expérience.

8.e Expérience.

282 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE

n'a pü, dans un temps ft confidérable, monter même à un tiers de la pelanteur de la plante; de forte que fi l'on divi- foit le poids de la liqueur tranfpirée par le nombre des jours & par le poids des branches, l’on auroit prefque zéro pour le réfultat de chaque jour, ou, pour parler plus jufte, lon auroit quelques grains.

On peut tirer de cette expérience un principe de pratiqué pour la culture de ces fortes de plantes, ou pluftôt on peut en déduire la raifon du fait de pratique que l'on a connu dès que lon a cultivé ces plantes. On fait qu'elles demandent à être peu arrofées, qu'elles fouffrent beaucoup moins de l'être peu que de l'être beaucoup, & que ce qui fuffroit à peine à la plüpart des plantes pour chaque jour, leur fuffit pour des femaines entières. Ceci ne peut plus être éton- nant, dès que l’on fait que leur tranfpiration eft fi peu con- fidérable.

Cette conféquence ne fut pas a feule qui me parut fuivre de cette expérience: je penfai que les fruits, fur-tout les fruits dont la chair eft fucculente, devoient être dans le même cas, quand ils appartiendroient même à des arbres dont les feuilles tranfpireroient beaucoup; pour m'en aflurer, je mis fuccef fivement en expérience plufieurs fruits & des branches char- gées de feuilles.

Le 21 Juin, à une heure du foir,, j'introduifis une feuille de melon, appelé par les Jardiniers, Cantalupi de Hollande , dans une bouteille de verre, & un fruit dan$ le chapiteau d'un alambic aufli de verre : le 7 Juillet, à cinq heures du matin, la feuille qui pefoit un demi-gros 26 grains, avoit tranfpiré 2 onces 2 gros jufte de liqueur ; le fruit, un demi- gros jufte : il pefoit 7 gros moins $ grains. Ce fruit s'étoit un peu fané par fon pédicule avant le 7, ce qui avoit peut- être diminué la tranfpiration de quelques grains.

Le 7 Juillet, à fix heures du matin, je répétai cette expé- rience fur une grappe de raïfin mufcat, une grande feuille ancienne & une petite développée depuis peu, priles chacune {ur la même branche, & peu éloignées Fune de lautres

v. DES SCIENCES. 28 Le 23.à la même heure, on ôta la bouteille étoit la grande feuille, parce que celle-ci étoit devenue jaune, & qu'elle commençoit à fe faner ; elle avoit donné 2 onces 1 gros de liqueur, elle pefoit avec fon pédicule un demi- gros 24 grains. Le 21 Août, la tranfpiration de la petite feuille étoit de 1 once 14 gros : elle peloit environ 20 grains; je dis environ, parce que cette feuille s'étant fanée & étant tombée dans l'eau qui avoit tranfpiré, je fus obligé d’en choifir une autre à peu près égale, pour favoir fon poids, qui fut de 20 grains. Le 30 Août, à 1 1 heures du matin, fa grappe avoit donné 3 onces 6 gros d'eau, elle pefoit , avec fa queue, x once 6 gros. | Comme cette grappe avoit augmenté dans Îe temps de l'expérience, je crus devoir en remettre une autre à peu près dans toute fa groffeur, afin d’obvier aux difficultés que cela pouvoit occafionner. J'introduifis donc dans un grand pou- drier, le 2 Septembre, à fix heures du matin, une grappe de raifm prife fur le même pied de vigne que la précédente : le Jendemain la partie qui regardoit le foleil étoit devenue d'un jaune roufleätre, fans doute par faction du foleil fur elle. Le 32, à dix heures du matin, elle avoit tranfpiré une once jufte; elle pefoit 3 onces $ + gros 24 grains. Les fruits de calebaffe, de mélongène , étant aufii çom- modes qu’ils le font pour cette expérience, je ne pouvois -manquer de la faire auffi fur eux ; je la commençai le matin du 12 Septembre à 10 heures: Je 19 à 3 heures du foir, Ja calebañle, qui pefoit une once moins 41 grains, & qui :s'étoit défléchée en partie, avoit tranfpiré 3 gros moins 6 grains ; les feuilles qui peloient fans leurs pédicules 2 gros °24 grains, les pédicules & la branche 4 gros 31 grains, ‘avoient donné 3 onces moins demi - gros de liqueur : le fruit de la mélongène, qui peloit 1 + once 48 grains, en . -avoit tranfpiré 1 + gros, les feuilles étoient d’une demi-once moins $ grains, le bois & les pédicules des feuilles de

221 gros $ grains, la liqueur de 71 onces 18 grains: une

Fi >grenade que je mis en expérience à 5 pu: du foir.du n i]

284 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALr même jour 19, n'avoit donné de tranfpiration que r 2 grains le lendemain à la même heure, quoique le foleil eût été très-beau tout le jour, & quoiqu'elle pefit 2 onces moins 1 gros 24 grains.

Un autre fruit de mélongène, une fois plus gros que celui dont je viens de parler, ne donna pas la moindre goutte d'eau, quoiqu'il eût reflé en expérience autant que le pré- mier. Surpris de cette différence, je ne fus cependant pas long-temps à en trouver la raïfon, & j'appris même par que la tranfparence plus moins grande du vaiffeau de verre dont on fe fert, peut occafionner des différences confi- dérables ; le vaifleau employé dans cette expérience étoit une cucurbite de verre de Lorraine, femblable à celui des bouteilles À vin ordinaires: il eft vrai que l'opacité de ce vaiffeau étoit encore augmentée par l'ombre des feuilles de la plante, & que peut-être elles contribuèrent encore plus à arrêter Ja tranfpiration que le vaifleau même ; car il arriva la même chofe à une grappe de raïfin mufcat que M. le Duc d'Or- léans avoit fait mettre dans un grand poudrier de verre blanc, & qu'il avoit fait laiffer à l'ombre des feuilles , afin de faire groflir le fruit, puifqu'il étoit vrai que Fombre d’une ferviette empèchant la tranfpiration, celle des feuilles devoit produire le même effet: cette grappe devint réellement très-belle, les grains en étoient plus gros que ceux des grappes femblables attachées au même cep, mais plus expofées au foleil & à Fair libre, & même que ceux de la grappe qui étoit renfermée dans un poudrier, mais frappée des rayons du foleil ; auffi cette grappe: qui avoit été mife en expérience le 3 Septembre, & qui avoit refté beaucoup plus de temps que celle dont on a déjà parlé, n’avoit nullement tranfpiré. J'avois encore eu un pareil réfultat dans une expérience que j'avois faite fur un bouton de rofe, & fur une feuille de ce même rofier, compolée de trois petites feuilles : je crois devoir attribuer encore ce man- que de tranfpiration à une caufe qui eft toüjours la même, puifque ce n'étoit que parce que le papier dont le couvercle de chaque poudrier étoit fait, portoit ombre au bouton &.

DES SciIeNCESs. 285$ à fa feuille : le bouton fe développa, la rofe prit toute fa grandeur, les pétales fe détachèrent enfuite, cela fe fit dans

. l'efpace de dix jours, l'expérience ayant été commencée le

6 Juin, & finie le 1 6; la feuille, qui n'avoit pas beaucoup augmenté, ne fouffrit en rien.

Outre les conféquences phyfiques que l’on peut tirer de ces expériences , elles doivent rendre attentifs ceux qui en vou- droïent faire de femblables, à mettre dans la même fituation & la même expofition les parties des plantes qu'ils veulent foûmettre à ces expériences, puifque la petite différence qui pourroit fe trouver dans la pofition des feuilles, dans celle du couvercle des vaifleaux, peut tant influer fur le réfultat de l'expérience. Quant aux autres conféquences qui füivent de celle-ci, je crois qu'elles peuvent étre telles; favoir, 1.” Qu'il fuit de que la pratique de ceux qui renferment dans des facs de papier & même de gaze des grappes de raïfin, ne les met pas feulement à labri des oïfeaux, mais qu'elle augmente même par - fa beauté de eur fruit. 2.° Que 1a fagefie de Ja Nature dans la pofition des fruits fur les arbres, ils font ordinairement placés de façon qu'ils font à l'ombre des feuilles, fe reconnoït maintenant beaucoup plus, que l'on peut en rendre une raifon phyfique très-fenfble & très-fimple, Que dans le temps les fruits tendent à leur matu- rité, il eft à fouhaiter que le ciel ne foit pas toûjours trop net, & qu'il y ait des temps nébuleux, qui en empéchant la trop grande tranfpiration, faffent groffir le fruit en même temps qu'il mürit, & que ce n'eft peut-être pas tant l'eau que les pluies peuvent fournir qui leur fait prendre de l’ex- tenfion, que la fuppreffion prefque totale de 14 tranfpiration de ces fruits; je dis prefque totale, puifque l'ombre des feuilles étant la même, un temps couvert peut, à ce que je “pente, être équivalent à l'ombre d’un papier ou d’une fer- Wiette. Si nous confidérons l'expérience en elle-même, n’en tirerons-nous pas encore cette quatrième conféquence, que des fruits, du moins ceux que nous avons examinés, tranfpi- sent chaque jour beaucoup moins que leur deu , & que

n ij

e .

Expérience.

286 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE cette tran{piration eft même prefque nulle, ou fe réduit à peu de: chofe, puifque la première grappe de raifin qui peloit 1 once 6 gros ne tranfpiroit par jour environ que.24 grains, & que la feconde, dont le poids étoit de 3 onces $ gros 24 grains, avoit encore donné beaucoup moins, fa tranfpiration ne. montant pas à un gros par jour : il en eft ainfi des autres. J'ai cru pouvoir avancer dans le premier Mémoire, que: les plantes tranfpiroient peu par le bois, voilà une autre partie dont la tranfpiration eft aufli beaucoup au deflous de fon

poids. Les fleurs font, à ce que je penfe, encore de ce

nombre : les expériences que j'ai faites à ce fujet, femblent du moins conduire à le croire. Celle qui m'a paru la plus concluante, a été faite fur une fleur de fframonium à grandes fleurs blanches ; cette fleur peloit 2 gros 3 o grains, la liqueur s gros 18 grains : la feuille, dont le poids étoit de 14 gros, avoit tranfpiré $+ gros pendant un jour, l'expérience ayant été commencée le 19 Septembre à cinq heures du foir, & finie le lendemain 20 à fix heures aufli du foir.

J'avois déjà fait cette expérience fur le pavot des jardins: j'en avois, le 1 9 Juin, introduit une feuille dans un ballon à deux yeux, deux boutons à fleurs dans une bouteille à col très-court : le 29 du même mois, à fept heures du matin, ces boutons qui s'étoient développés, & qui en tout, c'eft- à-dire, le fruit, les pétales, les étamines, les pédicules, pe- foient 1 once 1 gros 30 grains, n'avoient tranfpiré qu'une

once moins 20 grains; la feuille, dont le poids n'étoit que

d'un gros, avoit tranfpiré 1 once 1 + gros. Le 8 Mai, à quatre heures du foir, j'avois, dans les mèmes vûes, tenté cette expérience fur le fpirea à feuilles crénelées:

les fleurs forment une grappe longue fur une branche char-

gée de très-petites feuilles & en petite quantité, d'autres branches ne font garnies que de feuilles ; ainft il étoit facile de faire cette expérience fur cet arbriffeau. Le 23 du même mois, à dix heures & demie du matin, la branche chargée de feuilles avoit donné 4 onces moins un demi- gros; celle qui l'étoit de fleurs, une once: ces fleurs, avec les

xIATO LE SNANGA'E N CEE 287 petites feuilles, peloient 28 grains, le bois 36 grains; les feuilles de l'autre branche, 33 grains fans leurs pédicules; ceux-ci & le bois, 42 grains.

Ces différences du poids des fleurs & des feuilles ne font pas aflez confidérables pour entrer en comparaifon avec celle du poids de la liqueur tranfpirée; aïnfi on ne peut guère, à ce que je penfe, s'empêcher d'admettre la propofition qu'il s'agifloit de prouver : on n'accorderoit peut-être pas fi faci- Jement celle par laquelle on prétendroïit que la tranfpiration ne {€ fait en raïfon des furfaces, que dans les parties fem- blables ; cependant m'étant propofé dans 11 dernière expé- rience d'examiner cette queftion, j'eus attention de mefurer la furface de la feuille de pavot & celle de fframonium, & de la comparer avec celle des fleurs. Rien n’étoit plus aifé, puif- qu'il ne s’agifloit que d'étendre ces parties les unes fur les autres : les pétales feuls du pavot en avoient beaucoup plus que la feuille; & fr on y eût joint les furfaces développées des fruits, des éramines & des pédicules, la différence auroiït peut-être été plus que du double. La fleur du framonium étoit au moins d'un quart plus grande que la feuille. La -petitefle des fleurs du /pirea a empêché d'avoir auffi exac- tement cette melure ; ainfi, s'il eft vrai que deux parties fem- blables d’une même plante tranfpirent en raïfon de leur fur- face, comme cela doit naturellement être, il eft, à ce que je penfe, également vrai que des parties diflemblables d’une même plante ne fuivent pas cette règle, & que pour que Yon puifle en faire une règle générale, il faut que la come paraifon foit de parties femblables & homogènes.

Venant de rappeler ce que j'ai dit dans le premier moire fur le peu de tranfpiration du bois dans les arbres, je rapporterai ici une expérience qui y a rapport. Je penfois “dès-lors que plus les parties ligneules feroient réellement Pois, plus cette tranfpiration feroit petite; & que dans les plantes les tiges font plus herbacées, ces parties tranfpire- roient, il eft vrai, moins que les feuilles, mais que leur tranf piration feroit plus grande que dans les arbres : c'eft ce dont

r0.® Expérience.

11. Expérience.

288 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE je m'aflurai par l'expérience fuivante. Elle fe fit fur l'armoife; dont une branche fut dégarnie de fes feuilles & des branches latérales, ayant eu foin de mettre fur les bleflures un mor- ceau de cire, afin qu'il ne fuintât de ces endroits aucun fuc: une autre branche étoit chargée de toutes ces parties.

L'expérience commença le 26 Juillet à midi, elle finit le 6 Août à pareille heure; la liqueur de la branche chargée de {es feuilles pefoit 24 onces, les feuilles avec les petites branches garnies de fleurs demi-gros 1 $ grains, le bois demi- gros 3 grains. Cette branche s’étoit fanée en partie, ayant été un peu détachée de la maïtrefle branche: celle qui avoit été dépouillée de fes feuilles, avoit tranfpiré 1 once 64 gros; elle peloit elle-même 2 gros moins 1 1 grains, poids qui eft plus grand que celui de l'autre branche chargée de fes feuilles, qui a donné une fois plus de liqueur. Ainfr cette différence ne vient, à ce que je penfe, que de ce que la partie ligneufe des branches tranfpire moins que les parties herbacées des feuilles.

Seroit-ce par une raifon femblable que les plantes & les arbres qui reftent toüjours verts, tranfpirent moins que ceux qui perdent leurs feuilles ? ces parties feroient-elles en quel- que forte plus ligneufes que ces mêmes parties des arbres ou des plantes qui les perdent l'hiver? il n’eft pas aifé de déterminer f1 cela eft, & quand on le pourroit, f1 cela feroit la vraie caufe qui empèche les feuilles de tomber: on en trouve une, comme je l'ai déjà dit dans le premier Mémoire, d'après les expériences que j'avois faites, & d'après celles de M. Hales, dans le peu de tranfpiration de ces plantes comparé avec celle des autres qui confervent leurs feuilles. Les expériences que j'ai encore faites depuis, concourent à prouver la même vérité.

Le 4 Juillet à huit heures du matin, je mis en expérience une branche de Puplevrum en arbre, à feuilles de faule, chargée de feuilles & de fleurs, une du Zuplevrum annuel, dont la tige femble percer les feuilles; & comme ces plantes font de li claffe des umbellifères, je fongeai à les comparer avec

quelques

Di E SRE: L'E N:'C/EUS UE 289 - quelques autres ; je choïfis pour cela l'angélique à feuilles d'ache de marais, & l'ache même; la branche de cette der- _nière étoit garnie de feuilles & de fleurs, la première n’avoit que des feuilles Le 10 du même mois à fix heures du matin, le Zuplevrum en axbre avoit donné 2 onces 6 gros de liqueur ; fes feuilles peloient 1 gros 11 grains; la tige & l'umbelle de fleurs, 14 gros $ grains: le /uplevrum ainuel avoit tranfpiré 8 onces 2+ gros; le poids des feuilles étoit de 3 gros, celui du bois"& des fleurs de 2 gros 8 grains; les feuilles du bas des branches avoient un peu fouffert 8B’étoient ün peu defféchées deux jours avant qu'on les eût retirées; il étoit arrivé à peu près la même chofe à celles de l'angé- dique; elles n’étoient cependant que fannées, elles peloient fans les pédicules, 2 gros; ces pédicules avec la branche, 2 + gros 24 grains; la liqueur qui en avoit tranfpiré, 11 onces ‘2+ gros; celle de Fache, 6 onces 6 gros; fes feuilles, demi-gros 24 grains; les tiges avec les branches & les um- belles, demi-once demi-gros. Ne fachant à quoi attribuer la grande quantité d’eau tranf _ pirée de F'angélique & de fache principalement, penfant . cependant qu'elle pouvoit venir de ce que la terre ayant été ambibée par les pluies qui étoient tombées les jours qui avoient précédé cette expérience, ces plantes pouvoient avoir beau- coup plus pompé qu'elles n'auroient fait dans un autre temps, & qu’elles ne devoient faire par la fuite en ne eur donnant point d'eau, je répétai cette expérience le 10 . du même mois à 7 heures du matin; le 14, à fix heures auffi du matin, la liqueur tranfpirée du &uplevrum en arbre fe montoit à 7 gros 12 grains; celle de annuel, à une once 45 grains; celle de langélique, à 6 onces 1 gros - moins 14 grains; celle de lache, à 4+ onces $ grains: fes feuilles pefoient 1 4 grains; les branches avec les umbelles, gros; les feuilles de l'angélique fans leurs pédicules, un ; la branche & les pédicules, demi-gros 16 grains; euilles du Ovplevrum annuel, un gros; les branches avec umbelles, demi-gros 8 grains; Ja branche & Fumhelle Mém. 1749: » Un

24°

Expérience.

290 MÉMOIRES DE L’ÂCADÉMIE ROYALE de Fautre buplevrum, demi-gros 10 grains; les feuilles; 25 grains. |

En comparant ces différens réfultats avec les précédens , il fera facile de s’aflurer que ces plantes ont pour le moins. autant tranfpiré. en dernier lieu que la première fois, & que le Ouplevrum en arbre eft celui qui l'a fait le moins, enfuite l'autre Buplevrum, puis Tache, & que l'angélique eft . celle dont la tranfpiration a été ka plus confidérable.

On pourra encore tirer la première de ces deux confé- Pre à expériences fuivantes, qui cependant n’avoienñt pas été faites dans cette vüe, mais pour tâcher de déterminer quelle étoit la tranfpiration des plantes & des arbres qui con- fervent leurs feuilles en hiver, & de pouvoir la comparer avec celle de ces mêmes plantes & arbres en été.

Ce fut d'abord fur le romarin que je commençai cette expérience; la branche dont je me fervis, n'avoit point de’ fleurs, mais plufieurs autres en avoient quelques-unes: cette: branche n'avoit tranfpiré depuis le 14 Janvier jufqu'au 3 Février, que 3+ gros 6 grains; fes feuilles attachées aux petites branches pefoient demi-once 11 grains; le bois, 1+ gros 14 grains: il faut obferver qu'il a prefque tous les jours plu par intervalle pendant tout le temps que l’ex- périence a duré, & que ce romarin étoit à l'ombre d'u mur qui le couvroit entièrement du foleil; nous avons dans une des expériences précédentes, combien ce même- romarin avoit plus tranfpiré dans le mois de Juin:

Je continuai cette expérience fur le buis, le cyprès & le urier-thym ; la branche de ce dernier arbre avoit des bou- tons à fleurs, prêts à épanouir ; depuis le midi du 25 Fé- vrier jufqu'à onze heures du matin du 12 Mars, le laurier- thym avoit tranfpiré 7 + gros; la branche peloit x gros 9 grains; les feuilles, 3+ gros 4 grains; celles du buis, 2 gros $8 grains; la branche, 2 gros 4 ‘grains ; la liqueur, 2+; celle du cyprès, 6+ gros; le poids des feuilles étoit de 6 gros moins 4 grains; celui du bois, 3 gros 18 graiñs.…

J'aurois bien defiré pouvoir faire l'expérience de compa-

DE SSL LE NC ES. 291 raïfon que je m'étois propolée, fur les mêmes pieds de ces arbres, & dans les places üls étoient en hiver; mais ces arbres ayant été déplantés & placés autre part, je fus obligé de choïfir d’autres pieds & expolés différemment ; malgré cet inconvénient je rapporterai cependant ce que j'ai obfervé fur le cyprès & le laurier-thym, n'ayant faire la même ghofe fur le buis, dont le pied étoit mort par la tranf plantation qu'il avoit foufierte. Le laurier-thym avoit donc tranfpiré depuis le 6 Août à fept heures du matin jufqu'à midi du 8, $ gros jufte; fes feuilles, dont a moitié étoit grillée, peloient 1 + gros 10 grains; le bois, demi-gros 10 grains: la branche de cyprès qui ne fut ôtée d'expérience que le 18 à 6 heures du matin, avoit donné 2 onces $ + gros; ayant été remife tout de fuite & ayant été Ôtée le 23 à fix heures du matin, elle donna 1+ once moins 48 grains; les feuilles pefoient 2+ gros ; le bois & les pe- tites branches ou pédicules communs des feuilles, 1 gros 24 grains.

On voit donc que, quoique ces arbres fleuriffent même dans fhiver, leur tranfpiration pendant ce temps, comparée . avec celle de l'été, eft prefque nuile, paifque le cyprès a donné pendant fix jours d'été beaucoup plus qu'il n'avoit fait pen- dant un mois d'hiver, & que le hurier-thym en deux jours a prefqu'autant donné que pendant ce même mois d'hiver.

J'avois encore entrepris cette expérience fur le bois gentil qui perd fes feuilles l'hiver, fur l'alaterne mâle & fur l'arroche _ à feuilles d’halime, mais ne l'ayant pas répétée l'été, elle eft * reftée imparfaite, je rapporterai cependant le réfultat de l'hiver : | ces plantes ayant été mifes en expérience le 12 Mars à . midi, le 26 du même mois la branche d’alaterne avoit tranf- _piré 3 onces 2 gros de liqueur; fes feuilles pefoient 64 gros 48 grains; le bois, 24 gros 1 8 grains: la liqueur tranfpirée de F'arroche, 3 onces demi-gros 18 grains; fes feuilles, 3 gros 18 grains; le bois, 1+ gros; la liqueur du bois gentil, 15 once 1 3 grains; les feuilles avec les fleurs, 3 gros ;

is, 6+ gros. -

Ooï

nas

Expérience.

14° Expérience,

292 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Une autre expérience qui a beaucoup de rapport avec celle-ci, que je n'avois cependant pas faite dans les mêmes vies, mais dans celle de voir fi les plantes tranfpirent plus lor que leurs feuilles font j jeunes que lorfqu'elles font plus ou moins avancées, cette expérience, dis-je, doit trouver ici fa place; elle fut fie fur une jeune branche d’amandier ordi- naire, les feuilles étoient d'un verd-clair: je la commençai le 10 Avril à neuf heures du matin; le 24, à dix heures. aufli du matin, cette branche avoit tranfpiré 3 onces 1 gros 6 grains; les Tes pefoient 1+gros 5 grains ; la branche, demi-gros $ grains. Une branche du même arbre & prife proche celle du printemps & à la même expofition, avoit tranfpiré depuis le re Septembre à fept heures du matin jufqu'à fix heures du matin du 3 fuivant, r once 6 gros 12 grains; les feuilles peloient 24 gros 12 grains; le bois, 1 gros 18 grains: ce n'eft donc pas fuivant que les plantes font plus ou moins jeunes, que la tranfpiration fe fait, puifqu'il n'y a nulle comparaifon entre la quantité de la liqueur tranfpirée au mois d'Avril & celle qui auroit tranfpiré dans le mois de Septembre, fi la branche eût refté en expérience autant de jours.

Je finirai ce Mémoire par l'expérience qui tend à prouver que la furface fupérieure des feuilles tranfpire plus que Fin- férieure, & par quelques autres fur la tranfpiration en général, qui n'ayant être placées dans fe corps du Mémoire, ne laïflent pas cependant de mériter attention: quant à la pre- mière, je vernis en deflus les feuilles d’une branche de gre- nadier, une autre en deffous, une troifième en deflus & en deflous, & pour fervir de terme de comparaifon complète, je laiffai les feuilles d’une quatrième fans la vernir; ce vernis étoit de Fhuile de lin: tout fimple qu'il étoit, H ne laïfla pas d'agir fur les feuilles, dès le lendemain elles devinrent plus ou moins noires. Ces branches ayant été mifes en ex- périence le 3 0 Août à midi, le 3 Septembre à dix heures du matin la branche non vernie avoit donné de liqueur, 3 + gros; {es feuilles pefoient 22 grains; le bois, 10 grains:

D E SMSNC) Tr Nc ElSI 293 a branche vernie en deffus & en deffous, avoit tranfpiré 1 gros F2 grains; les feuilles pefoient 1 gros; le bois, 34 grains ; la branche vernie en deffus avoit donné 1 gros 22 grains; les feuilles pefoient demi-gros 8 grains; le bois, 2 9 grains: la branche vernie en deflous a donné 3 gros moins 24 gr. les feuilles pefoient demi-gros 6 grains; le bois, 24 grains. Le réfultat de cette expérience confirme celui des expériences rapportées dans le premier Mémoire, & il paroît que réel- lement les furfaces des feuilles tranfpirent fuivant qu'elles font plus ou moins expofées à lation du foleil; ce qui mème n'eft qu'une conféquence des autres expériences, qui prouvent que les plantes qui font à l'ombre tranipirent beaucoup moins que celles qui n’y font pas. Si les expériences fuivantes ne prouvent pas ce point, elles contribuent du moins à faire voir que la tranfpiration eft communément très-grande dans les plantes; car une branche de fureau dont les feuilles pefoient 1 + gros, le bois demi- gros 14 grains, a donné depuis le 8 Mai à qüatre heures du foir, jufqu'au 23 à dix heures du matin, 5 onces 77 gros. Le 26 Juillet à fept heures du'matin, une branche de mauve ordinaire à grandes fleurs, & une de la guimauve Îa plus commune, ayant été mifes en expérience le 4 Août à fix heures du matin la liqueur tranfpirée de 11 guimauve pefoit 10 onces moins 3 gros 1 1 grains ; les feuilles fans les pédicules, gros; le bois, les pédicules, les boutons à fleurs, 6 gros 10 grains: la mauve avoit donné 2 onces 2 1 gros 10 grains; les feuilles fans les pédicules pefoient 1 + gros 12 grains; le bois, les pédicules & les fruits, une demi-once. Par la 17€ expérience, j’avois voulu m'aflurer plus particu- . lièrement fi un globe à deux yeux, dans lequel la liqueur zefloit tout le temps de l'expérience , n’étoit pas moins . propre que celui à trois, par un defquels la liqueur couloit dans un récipient! pour cela je mis dans deux femblables globes une branche d’aurone commun de la campagne, elle étoit garnie de plufieurs branches latérales chargées de boutons. à fleurs; la branche du globe à deux yeux pefoit 1 £ once; Oo iij

D TE" JE

FL

5. Expérience:

16. Expériences.

17. Expériences

294 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYaAzE

l'eau tranfpirée 1 $ onces; la branche de l'autre globe pefoit également 1 + once, fa liqueur 14 onces moins 3 gros. Si cette différence venoit des globes, l'avantage ne feroit pas pour le globe dans lequel la liqueur refte flagnante pendant l'expérience; mais cette différence ne vient, à ce que Je crois, que de ce que le globe à trois yeux étoit placé de façon qu'il n'avoit pas le foleil levant aufli-tôt que l'autre: au refte, cette expérience a duré depuis le 14 Août, onze heures du matin, jufqu'à midi du 21 fuivant, ce qui fait fept jours complets, pendant chacun defquels cette plante a tranfpiré beaucoup plus que fon poids; ce qui nous fait encore voir que la tranfpiration eff bien différente dans différentes plantes, quoiqu'elles foient plantées dans le même terrein, à la même expofition, & qu'ainfi on ne peut trop multiplier ces expé- riences, ft l’on veut avoir quelque chofe de bien exaét fur cette matière, qui peut fournir des vües utiles pour l'agricul- ture; utilité que je crois du moins entrevoir , & qui m'enga- gera à pourfuivre ces expériences.

rss

ED ne a+

D x SNSRG EE NE UE IS 295 T À B L ÆE dn Réuhat des Expériences *.

RTE EP D RE CE D ER UE MOIS NOMS POIDS POIDS & des de la des JouRs. PLANTES. liqueur tranfpirée.| BRANCHES.

EE LS PS 7 JUIN onces. gros, grains.| onces. gros. grains.

jufqu'au | Marronier d'Inde. ....| o. 52 18. 4 JUILLET.

Oranger, toutes Îles branches renfermées +. .

une dans une cu-

dont ! \ Cütbite. le he

o.| une dans un cara- fon EU

Pompoléon ÉMOE PTTETE

Oranger renfermé entier. HE E 8

Oranger renfcrmé dans

H GS) EC TD | ax LeN +

DE un tn [e] © [e]

une cucurbite . . ... Ovnis 22110:

| 21 26. 4. 4. o. 26 29. 4 17 0. 29 2 Sept. 4e 3e o. SG PÉRE HR eee o. A aa SAGE o.

. Oranger renfermé dans d é :!

4. nets: de . globe. “I, è » One ler à SAME o.

(ex u “+ On ne trouvera pas dans cette Table le poids de Ja liqueur tranfpirée , divifé: —rclativement à celui des branches & aux jours, comme dans celle du premier Mé-- ire : cette divifion ne pouvoit être faite ici, puifque les expériences font de nature ne le pas permettre, ou à ne le pas exiger,

296 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE S +

MOIS NOMS POIDS | POIDS & des de la des

JouRrs. PRIVANNIT:E S. liqueur tranfpirée,| BRANCHES.

à Geranium ou bec de grue] ‘"# erex “éraims.|'onces. gros. grains. “d'Afrique du jardin,

Juin.

16 ETS: branche caflée. . ..| o. Z 0.| o. 32 26. Bec de grue d'Afrique de

Aa CAVE EM PA 0. NON T 6.100 371:

16 —26. { Herbe à Robert. . . ... 3510005: |Mo NE nids: Bec de grue d'Afrique du

Jade CNRS chers | LRO RL: 100] o EE

30 Mar. Jafmin commun..| ©. o. o.| o. o. 26.

jufqu’au 6 Jurn. [dans la/Myrte commun. .| 0. ©. o.| o. &.-. cave. 6 13. Romarin. . . . .. 0.200. A 02) fo: ire MRos SEPTEMBRE

13 15. [Herbe à Robert. . .. ..| o 5+ o| o* 12 6.

29 JuiceET!Jafmin commun. .. ..[ o. 1 | o. o. 32. jufqu'au

6 AousT. |Myrte commun. . ....] ©. 1. 11.| o. SU Jurx. 7 16. [Romarin..........l 2. 52 di: 0. 421 8. 3 16. |[Romarin, ...... .s.s.[ 5+ 12 0. 0. 4206. 24 AVRIL|Cafflis couvert. ...... ONG 0.0. 2 RE jufqu'au s 8 Mat. découvee CT MN Mo TEE

Hylope commune à découvert. . | 2

AOUST.

bi pl«

Oo ©

à couvert. ...|] © a l'ombre. #1 "0-05 nn

28 209.

[e] [e]

PS eo [ee]

|[Hyfope commune : a decouvert. » .|- L. 6. CAO U20

AACOUVELT., + | OT D A IE: à l'ombre. .

D FE SAS C:1 Ë N'C'E 8 297 SG S

NOMS POIDS POIDS

& s des de Ja des Jours. PLANTES. liqueur tranfpirée.| BRANCHES. Lo te - REPORT ETS LE LD COR SEE CEE RER RES)

24 AVRIL jufqu’au 8 Mar.

la partie fupérieure dé- COUVETLC EE EN CNE Fu: 2 12, linférieure couverte...| o. o. o.

28 Mar |Morelle grimpante, jufqu'au part. infér. découverte...

6 JUIN. | part. fupér. couverte...

|: CH

NI Bin .

Bryone ordinaire, part. infér. découverte.

part. fupér. couverte. .

Morelle grimparte, dont OnCes. gros. onces, £TOS grains,

Romarin, dont une bran- che hors du chaffis. . .

fous le chaffis . ..

29 JUILLET Jafmin commun,dont une jufqu'au branche hors du chaffis.

6 AOUST, fous le chaffis..

Tamaris de Narbonne, dont une branche hors di) chats; 2f.1# sets 4.

fous le chaffis . ..,..| 2.

AOUST. 23 30.

Cierge appelé queue de

MAI. #| fouris, dont une bran- 8 23. che hors du chaffis. . .| o. [ fous le chafis . ..| o. Melon cantalupi de Hol- RÉEULLS Drame jufqu'au feu 025212 "Ron 0: 10 = 26. 7 Juiceer. HORS some den col D:1 7e ef:

Mem. 1749. "FD

298 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

MOIS NOMS POIDS POIDS & des de Ja des Jours. PILYAUNLTUE s. liqueur tranfpirée.| BRANCHES,

| Onces, gros. grains,

onces. gros, grains.

Raifin mufcat,

7 Mes grande feuille 2. 10 0.140 L 24 jui petite feuille. . ..] 1. 14 o.| 0. o. 20 30 AOUST. DTAPPE.s fe =. .…l) 3°, (6: el LS MO AANTCE ARR Grappe deraifin mufcat.….| 1. o. o.| 3. 5-2 24 Calchaffe, fruit . |. . .. .|: 3: 6 Mo. 1 —41. feuHe NE EE No No. NC T9; 12 19. | Mélongène, fruit. . . .. 0. 14 O.| o. 1548. feuilles 4e 11 a. 6E : [Autre fruit à l'ombre. ..| o. o. 19 20. 0. oo. 3 —19 & plus. O0. oO

JUIN.

FR ROC tre tte cotes AO: LO:

Stramonium à grandes 20 SEPT. fleurs blanches, fleurs...| o.

I feuilles.| o. s$

him *? *

=

Pavot des jardins, fleurs. |

. Le nl feuilles.| 1. 12 K Spirea à feuilles crénelées. branches à feuilles . . ..| 4. =. AUSSI T'NrOË

Lai"

D EUSNMS Gi E An CIE: 299 RS a ‘À | MOIS NOMS POIDS | POIDS Le & des de Ja des Jours. PLANTES. liqueur tranfpirée.| BRANCHES.

ECRIRE EEE SUP TENTE | FEU CEE ISERE ETS

| 26 JUILLET Armoife, branches avec| 25 gros. grains.| jonces. gras. grains.

| jufqu’au {es feuilles. 2... HONTE 0! t'15 "0200004 6 AOUST. |fans fes feuilles . . . . . . HAMRO ee 10. | 2e LT

| z

Buplevrun en arbre à feuil- i les defaulc 4/60). 20860110. 22 164

Buplevrun annuel dont les tiges percent la feuille..| 8. 22 o.| o. 5. 8.

JUILLET,

te Angélique à feuillesd'ache des marais. . . . . . .. 11. 27 O.No 4. 24: La rie DEN Le OS 6. 6 CO 24) Buplevrum enarbre, &c...| 0. 7. 12. 0. +35 10 14. Buplevrum annuel, &c...| 1: 0. 45.| o. 12 8. F Angélique, &c. . .. . .. 6. 1—14.| o. 1+ 16. AGHCANM et Moi 4 4 So huge LAS

“jufqu'au |[Romarin...... ltd 0e À 3 FÉVRIER. d È 25 FÉVRIER BOIS A alle ave az ER 0. 2: É juQuiaupe |Cyprés... "4% M0 0:16. -10. |) 1. 14 14 12 Mars. Laurier-thym .......| 0. 724 o| 0. 42 413; AOUST. : CPS Lauren thyr e pe el DS IMMRO Ion E2 Ye 2 MÉNO IEeS MNER EMI | JS OO NE 124 HO 232, |GYpresia el 1. 4—48.| o. 32: 24 JATAIGERO SRE 2 etai JAM2NANON MA LeMET Ze WO- L MARS. |Arrocheaàfeuilles d’halime hs 12: 26. & Enarbre te as anal Et L 18.| 0. 42 18 rh] rue PR CRE De AMIS TER 7 LEE

2 CRE ZE CEE CIS EE PE EE DIRES EST

300 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

MOIS & Jours.

AVRIL. l'O 24:

SEPTEMBRE. | 1 3.

30 AOUST jufqu'au 3USEPT.

MAI. 8 23.

26 JUILLET jufqu’au 4 AOUST.

AOUST. 14 21.

POIDS de la

liqueur tran{pirée.

OnCes. gros. grains,

Amandier ordinaire. . . .| 3. 1. 6.

Amandier ordinaire. . ..| 1. 6. 12. Grenadier verni en dette

des feuilles . . . . . HAE EME OR en deflous =. este te 0. 3 —24. en deflus & en deflous..….

NONNVETNI NET eee

Surcau he Rent SE

Mauve ordinaire à grandes

Guimauve la plus com- MINE NS = cac ais

Aurone de la campagne

dans le globe à deux HEC ES not Re

dans le globe à trois becs.| 14. 3.

POIDS des BRANCHES.

OnCeS. Bros. grains,

10:

I. 4710 ne + O0. 1. = 0.

DES Sir E N CES 307 TABLE METEOROLOGIQUEX.

PR EEE TR EEE ET EE EP REP EU C2 EE NRC LS DES

MOIS NOMS ETAT Le des THERMOMÈTRE. de Jours. PLANTES. L'ATMOSPHÈRE,

a8rm. à11hm. 18 MaA1r. Degrés. Degrés. Cierge intérieur . . .| 18%... 19 :| A midiil parut des nuages.

extérieur. 1116 1..1.% 112 ]

SUTE SN IR TE LO TES RTS

ashim. 11PÈm.

A2: Cierge intérieur . . . Sale elle 1210

, [Nuages dans Ta matinée.

z 9 extérieur. . .| 7 ....14+ Bureau it tnt red ul Cierge intérieur . . . Quel 24 20. : Re 6 13 Nuages & un peu de 1 À foleil. Liu Sureau. . .......1 61...16À UE 4 RAR AT area è nm. 112 | 21. Cierge intérieur. . .| 113... 312 ë 2 | Soleil net.

DE 2 extérieur. . . EERRNET SHTÉA Ta aie NA IN ro A No

22. Cierge intérieur . . .| 132... 37 extérieure rte ss 2;8 SurEaU un bete due pas era

Cicrge intérieur . . .| 142... 33

extérieur. ..| 1124... 25 2|Soleil net, Sureau. ........| 122... 23 M." Les Obfervations météorologiques, & fur-tout celles du baromètre, étant incomplètes: “dans les manufcrits de feu M. le Duc d'Orléans, qui m'ont été remis depuis fa mort, j'ai mieux: rapporter celles que j'avois faites pendant le cours des expériences furle thermomètre & l'état de l’atmofphère, & renvoyer pour celles du baromètre aux obfervations que l'on: pourras trouver dans les Mémoires de M.rs du Hamel & Malouin, d'autant plus que les petites diffé

ences qui pourroient réfulter de celle des lieux, ne font pas, à beaucoup près, auffi con@-- es que celles du thermomètre pourroïient être,

Ds

Pp ii

302 MÉMOIRES DE LACADÉMIE ROYALE

L Ce En | MOIS NOMS ETAT, & des THERMOMÈTRE. de Jours. PLANTES. L'ÂATMOSPHÈRE. ee ee ei à Mai. Les 24, 25,26, 27 & 28, fans expériences. 4; 29 V4 P à S"im. à midi. , Degrét. Degrés, 29: Eh: Morelle.. «5. Elise. 134... 26 |Soleil net. Romarine 1. Lien IGN. Fee 2) a ÿhim,. à 1" 30. Morelle te tu 12 .... 25 +|Soleil net. " Romarini.. 51.0. : 12e be 2 | pe More lle NOM 2 37 Soleil 8 _:|Solcil net. Romarini." + m2. 102-125 J #orelle \ D JUIN MOorcile Rates 13 +... 16 | Tonnerre à 11, 3 &4 ROmarin "1" 135 -.. 17|heures. c ash=im. a 2hf 3 ; Morellest. 1e eRer PES BA Soleil net. Romarini. MORT." | 19 Es state 23 s | à shlm. à 1h1f Moxclés rer.) 12% 1241|S0feil net Romain 27-04 12 es ie i2 4 du jardin. OMS O si . ere RD ER MIT | 4 ent | à Morelle ........ 133-+:+ 25 | Tonnerre & pluiexon: 4. ÎRomarin.. ... ..| ‘132... 25 lfidérable à 4 heures du Ai | foir. dujædin. uses. 272 1U0r MOCHE ER ane 9 14% $- Romarin.. . 44. 11 15 3 |Nébuleux tout Je jour. du jardin. ..| 107...147

pes

Dim S, LARMIILE NC Eu S 303

NOMS des THERMOMÈTRE. PLANTES.

ETAT de L'ATMOSPHÈRE.

RP EC EE TE

a5"mat. a1Mif. Degrés. Degrés. Jui. |Morelle 2: EMEA E EME 44 2... 122] Pluie le matin, qui a ceflé 10 r | vers les 9 heures du matin, le 6. Romaïin........ 9 ....14 9

£ ciel reftant couvert; le rcfle du jardin... 9 +... 14 |du jour a été nébuleux, on a

Furet 0e 1. | 10 +. 12 |[ewpeu de foleil. Romarin........ 8 °°. 14 | Nébulceux, avec des in- du jardin. «| 62.... 16 |tervalles aflez grands pen- ® | Fuftet CE NES dant lefquels le foleil pa- tie Re £ re Bryonel- 12 : 6 A ut eE a 5" mat. àunf.| Romarin. ....... He cle FAN Nébuleux , avec un peu 8. Romarin du jardin, 62... 15 |plus de folcil; une petite & maronnicr d'Inde. Pluie fur Îcs 4 heures du TO RENE Ro hbte ME SR EEA L à Bryone ........ | 5 .- 14% . ashm. aàunif Romenns ta: Se Li \ 9: Romarin du jardin, & d | Couvert, & de très-pe: maronnicr d'Inde..| $£...11+ tites pluies. ER Mn CIS CE Bryone set eat Satae LI Romarin........ CHA RELNSENTES S à s du ÿardi 8 18 Petite pluie le matin, SN ET 7777, [foleil le rete du jour avec EBICRR ET a eee 10 +... 14%lpeu de nuages. BINone rat aide Pia volets 17 Rorarine 2-0 84... 112 Couvert, excepté furles 4 du jardin...| 64....12 s heures du foir, de trés- Fuftct .....,....| 9 ‘+... 122|petites pluies ou brouillard 6: 11 (dans la journée. cho Te 2 TON QE

304 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

es ee | | | . MOIS | NOMS ETA& & des THERMOMÈTRE. de Jours. PLANTES. L'ATMOSPHÈRE.

SC ERA FRE CESR RTE AT agshmat. a1h2f. Desrés. Deyrés.

Romarin. .....,.. 8 ....122| Bruine à $ heures du du jardin... 6. 14 matin ; le refte du jour, s foleil fans nuages. HAE Eric 9 + 12 ) Bryone . ....... 6 ra Romafineés M ceci. 8 13 Un peu plus nébuleux du jardin. ..| 62 113 qu'hier ; plufieurs petites à bruines; il faut qu il yaiteu Fufletuls. et tie 1I 5 É # quelque efpace d'un foleil Bryone. ..-.... 6= 11=2|net.

14. k À 4 ROMANE Eee: Couvert, pluie affez forte,

quelques rayons de foleil )

meta diese à

CACRONLIE C'ICROMEC

"50 Romarine eur du jardin...

Comme hier, mais une pluie plus forte & à plu- fieurs reprifes.

…......

Pluie à plufieurs reprifes, mais moins forte qu'hier ; Le .

4 * + © |folcil plus confiant.

__......

Ris smieltie ee x

Euftetia 2 4ut Les, CU

Bec de grue..... san | Se Nuages éloignés, bruine

le foir pendant un initant.

Fab SM 1 E N) c'ElS CRE EEE ETES CEE PCSI TETE CA DER A M de 2 8e PCT

[MOIS NOMS & des Jours PLANTES.

(ENT SSRROM EC A TES

9 Bec de grue. ....| 6. Cave. ..44.7 217 9

8

Fete Rice ee cre 24.

CORRE LEE A

Mn. 1 749.

CEE

... 21

BecNdElTEUC Naf eee | LE7he Cayenne : 9. PUITS ICE 3 .

| LT Bec de grue. ....| 6 .. 9

3os

ETAT

THERMOMÈTRE. de

L'ATMOSPHÈRE,.

açshmat. a1Mif.

Degrés. Degrés. Fufier sal. O4) « p& «2.16 Soleil découvert a , 6%. ...202lIe jour, ou très-peu de Bec de grue. ..., : = LE GAVE RURAL". 4 DZ... F a 5" m. az2hf. 3 Zidère 20 , Euffetsone-s hate 29 Cnebtes. Bec de grue ,.....| 7 -...25 |

Enftetrssers Lette Le matin, ciel couvert ; Bec de grue. ... -.+. 18-|[foleil net l'après-diné; le Garenne à à CE -MEEUES £ foir, ciel couvert. Euftetretct ir - I 122] Ciel couvert tout le jour, Bec de grue . . 10 ....12 |le foleil na paru qu'un SAR NON 1 A SES LEE LAS inflant à fon coucher. LATE mer eu lraeuepes 10 . 14 é « Saba g 18 Ciel couvert le matin, SE GONE PRO n , Idécouvert l'après-midi. | Cave DRNMERNES SANS Dar. 97

c 154 Ciel couvert Ie matin, -* 15|enpartiedécouvert l'après- 9 midi.

1) Ciel découverte matin, nébuleux après - midi , .|mais les nuages pañoient

?|vite de deflus le foleil.

‘+ 15. | Beau foleil tout le jour; .. 22 |sil yaeuquelques nuages, se ils ont été rares.

2

+ Qq

06 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE 3

MOIS NOMS à Ci DE : A 2 14 & des THERMOMÈTRE, de L'ATMOSPHÈRE.

Jours. PLANTES.

CRAN QI RTE © | EE EE TERRE IEEE DRE | ILE EC SRE ESEREME TTL, | |Memre ar Dom DIE CNEREN ET MEET EEE a "mat. à 2h.f.

Dregrés. Degrés.

JU LIN ANNEES à dede Le 9 +... 10 | Depuis le lever du foleil juf- qu'a 8 heures du matin, beau

26. Bec de Hg ee 7 ciel qui s’eft couvert à 8 heures; CANENET uleeete le 9+ pluieenfuiteà plufieurs reprifes,

M le ciel reftant couvert, enfin AUVE. ets mo se «| eee let rg de la grêle.

AMMOILC. le fe eve stelallet-leisieraie 10

biere RE

+... 15 |Nébuleux tout le jour, mais les nuées ont peu couvert le foleil,

. . LA ka O0

2 27° Mauve. .. DT 20 & lorfqu'elles l’ent fait, ç'a été Armoife. + : «5%: «++. 19 |pour peu de temps. Fute er COR nr Oo Ciel couvert tout le jour, il ‘28. Nnve $ ....ux lapluà plufieurs reprifes & une rte À foisaffez fort ; le foleil à fon cou- Armoifessvaive te 8 .... 11 |cher a donné quelques rayons. PHITEL ee LUE llges. 14 | 29. Mantes SEE Me Nuages rares, il a plu Ex na le foir. ER RSR

Ciel couvert le matin, petite pluie , enfuitele ciel nébuleux; los NME pluie à 3 heures affez forte , le

ciel nébuleux, enfuite couvert entièrement.

2 +. 143| Ciel couvert le matin, 2... 18 |beau folcil & très-peu de 172 nuages l'après-midi.

Juurer, | Fuftet .. 1: Miuve: Atetmien :

Armoife.

. . . .

Beau foleil, petite pluie à 10 «+... 1$ |11 heures, une pluie confidé-

Fuftet . .

2. MAUVE Me re 8 .... 18 |rable furles 3 heures, ciel dé- : , [couvert enfuite, & bruine fur ATDIONE, Le tee 8 .... 17 les 6 heures du foir. Ciel couvert tout le jour, LS Fuflet....,....l 114... 5 excepté au lever du foleil ; il Mauve ELA 10%... 154[aplu à plufeurs reprifes, mais

ces pluies m'ont été que des| ++ T5 |bruines.

Armoife.

. . [e]

DE sMSC 1.E Nic: AIS 307

NOMS des THERMOMÈTRE. PLANTES.

ETAT de L'ATMOSPHÈRE..

PRET CRE a sh mat, a2hf. Degrés. Degré.

LA 2 . L « Re AL ue QI 1225118116 Ciel couvert le matin, Mauve. :.......| 114 nébuleux enfuite, beauk folcil l'après-midi.

Armoife. . ......| II Angélique . .....l....4... 24 ARE Deere elle eleppeielel 24 2

Fuflet......,..| 11 ....17 | Solcil net tout le jour, Angélique. ......| 9 .... 26 excepté vers midi il y a

fe ....26 leu quelques nuages qui bot ES fc) SE) 5 ont peu duré.

Soleil net le matin, nébu- Jeux l'après-midi, mais les nuages paffoient vite de deflus fon difque.

Bufteb al eus Que Anpélique . . . …..

sions à afeteie ; Soleil nébuleux à fon Angélique. HAE RTE lever, très-beau le refte

A'Acherse nee, à :|du jour.

PT 1 EC ONE LARMES Angélique. . ....

Très-beau foleil tout le jour.

2 2|Comme hier.

_......

Bullet. le Angélique. . ..... ARE HU EE à

Le foleil a été un peu pale tout Je jour, à caufe de nuages peu épais , mais étendus.

308 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

MOIS & Jours.

Jen reT.|Eufeneire ce ue

1$.

-Romarin intérieur. ..

NOMS des PLANTES.

Angélique. . ..... Adhets 40e Set

Le La ARMES TE c Fufiethetens rer

Anpgélique. . : .... tel MEN DATE

Ebftet nait. 5: à

Angélique. . .... ACHETE

extérieur. ..

FUÉet. 1 ee! Romarin intérieur... extérieur. .

Romarin intérieur, ., extérieur...

FHitet . italie Romarin intérieur, .. extérieur, ….

E T'ANF THERMOMÈTRE. de L'ATMOSPHÈRE.

Degrér. Degrés.

VOIS a Très-beau foleil tout le 12 31+|jour. 1

3 142 33: Comme hier. 5 34

TMS AE 14 .... 33 |Comme hier.

RME He ar

CHE TR OT Ciel nébuleux & prefque 14 couvert tout le jour, avec ire quelques petits grains de #2 pluie,

CA Ce ct ES 25

Ho che an 24.

1220

Très-beau foleil tout le HOMO EC jdbei

.| 14... 297

OMR de) 17 «4.4, 37 [Comme hier.

CRE RER)

s'mat, à midi.

1 hote ES) à Comme hier.

1 II

Ciel couvert jufque vers TO el 25 |lefoiroùil a etc ncbuleux, 13 ....21 |mais lc folcii pâle & rare,

E Dir SA ÏSMC 1 E NC: ES B30

MOIS N OMS EVE A T

& des THERMOMÈTRE. de Jours. PLANTES. : L'ATMOSPHÈRE. Ds 7 |

|

a $" mat, à1ihf.

Degrés. Degrés. 4

JUILLET. pole PP EN dE Ut OT Très-beau foleil tout le 19. Romarin intérieur. ..| 14 .... 3$ |Jour.

FA : extérieur. ..| 114... 28

Buffet... és UNDER PET 20. Romarin intérieur. ..| 14 .... 37 |Comme hier. extérieur. ..| 10 .... 28

Li Hier IN Tao skins E ; L Romarin intérieur. ..| 14 .... 37;|Comme hier. extérieur... 10 +... 31

ZI.

àsrm. à midi] EUfet EME LE Pau Ben fol Jufqu'a midi, Romarin intérieur. ..| 16 .... 35 |ciel nébuleux jufqu'aufoir. extérieur. ..| 13 +... 31

ashm. at1lrf

: £ 23. Cf the ec DV LEP C el couvert tout le jour, nf me 26 |Xcepté vers le foir quel- Romarin intérieur. ,.| 20 .... ques inftans. | extérieur. | 16 ..:./20 RE TOR MR CET REP es Ciel couvert le matin, | 34. R FAQ L ,. |enfuite nébuleux avec de A LOU EN NO OM longs intervalles , prefque | extérieur. 2 LD couvert l'après-midi. | 4 sh m w n 7 5 4 Ciel nébuleux le matin, pluie 4 25. LE LEE EN ANRT GRAN LOEB TERRE AT ns

en à-verfe fur le midi-jufque Romarin intérieur. | 17 ...,. 31, |vers 1"2, beau folcil enfuite

LE toute l'après-midi. EXTÉTIQUE, (MS Lane 1e 12722 l P

Fuftet NE A TT ep A ET Beau le matin, enfuite nébuleux, & même une petite pluie, beau l'après- |midi.

Romarin intérieur, | 15. ,,.. 28 extérieur: 2 MOWr. 4.22,

ie ve Loire >. Li dete “C'uimleiensar Der en.

310 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

MOIS Noms ETIAMR & des THERMOMÈTRE. de Jours. PLANTES. L'ATMOSPHÈRE,

a 5 mat, a11!m. Degrés. Degrés.

Fuflet...... HAE re | Frès-beau tout le jour. à jm. à midi! Couvert le matin, beau 1Fufter. . 1... F2 + + 18 Waprés-midi: ashm, aàa1ilm 2EURCE M ect ane LOST | Beau tout Je jour.

Nébuleux tout Îc jour, petite pluie fur les huit LOU à 7 TONER du matin.

alert LM 2, LE HE

Couvert tout le jour, petit pluie fur les 9 à 10 heures du 3 Fuftet . + 17 for; à 11 heures, à-verfe qui a continué par intervalles juf- qua minuit. AOUST. à ass ne Cicl nébulcux par grands 1-1 4 AlEuftet- CPE intervalles tout le jour. 2. a 11m. | Fuftet . ée.... 16 |Ciel nébuleux.

3 a shm. à 11m. Fuftet . FER LEE ONE Le)

4. dE AE ATP DAME 20

sl àstm. à midi! Nébuleux avec de grands Fuftet . 124... 20 intervalles.

2

ashm. à1ilm. Ka JET R9 OIIEr ÉLONONORE

ANNE

6. PUIEL = = SR lbe Amandier. . ....

Comme hier.

Cypréssversle 24.

DES

Fuftet ... Amandier.

Cyprès. . .

Fuftet. . .. Amandier. Cyprès. . .

Fuftet. ... Amandier. . Cyprès. . .

Fuftet . .. Amandier,

Fuftet ... Amandier. .

Amandier, . , .. CYPres AIRE SE

Aurone , ....

S:C T'E-N. C-E:S

THERMOMÈTRE.

as°m. à11hm.

Degrés. Degrés.

. 18 ‘27

+. 20

eo. 23 ss (5 29

10 .,.:. 24

NO 22

EL @

ETAT de L'ATMOSPHÈRE, .

Très-beau dès le matin.

Comme hier.

Soleil nébuleux à fen lever,

[peu après & toute la journée

19/2120 CE

LS . 16 US

17 1.9

16+

15. 18

3 13%

AUS

trés-beau ; ä-verfe furieufe de- puis minuit jufqu'à 3 heures du matin.

Ciel nébuleux, pluie fur les 4 ou $ heures du foir, qui

la continué par intervalles juf- 7 8

Nébuleux tout le jour.

Nébuleux tout le jour, & petite pluie par inter- valles.

Nébuleux dès le matin.

+ Ciel couvert prefque tout (le jour, il a plu à plufeurs reprifes & affez fort.

312 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

| MO . S NOMS E'TAMT des THERMOMÈTRE, de

Jours PLANTES. L'ATMOSPHÈRE.

RSC RENTRER ENMENRES

a sm. à 11m

Degrés. Degrét. Rs Fuftet. ss.) 11 ++.:15 |-Pluie à plufieursreprifes,

Lisp NOR 10 .... zo [le foi une à-verfe; le ciel

a été nébuleux dès le matin & prefque couvert.

Cyprés.. + ole see] à 9e + se LS Aurone . .... se .

Fuite -let-cieie Dee let nc Vote (DCE Amandier. . 1. ./.| 0 1.02 Ciclnébuleux le matin,

laffez beau l'après-midi.

: Ciel nébuleux au lever Amandier. . PASSES LOC foleil, découvertle refte Cyprés. ........| 10 .... 19 |du jour.

AUTONE sn eleterote NT Efieler ALI

Ë Fuftet . L'BAUMEN SENS

2 ——

2 ... 2 Al " lAmandier. SELS EI 29 Didi en NE Dir ere ra 2

TAurone . ...* 27 +23

|Fuftet .….. ... 1$ ee » 23 ati Leo gard lb ME PHOOIE. le) Comme hier, quelques

ICyprès. es... 13 die 42.23, [NUAgES le foir cependant. 2

JAurone .. ... Pt LR

UE prodoion eo 9 TOR me Al fra ......l 13 ....24 | Nébuleux le matin, affez beau le foir avec quelques nuages,

OR E SC 1 EN CES 213

nm EMINAUT

THERMOMÈTRE. de

L'ATMOSPHÈRE. à5"m. àâ11rm.| Degrés. Degrés. Huet... 2.0 142". M Nébuleux tout le jour Amandier. . .....| 131... 24 |avec de longs intervalles. Cyprest- re. re 0 NT CT nd NE MAN QES

LRS CRNE ER BuféE iansts 1 dm aairés

Amandier ox vigne... NL Nébuleux & pluie à onze GYPrES Ne 2... 13 |heures,couvertilerefte du Aurone.....:: . 4e; jour.

MAUVE UN CE 6.3 Hub tas

IAE tre rie 1-2 00e NES Han Î

Amandier. ...... Cyprès.........| 11 | Nébuleuxle matin, affez Mauve. ........| 12 .... 20 [beau l'après-midi. Tamaris externe :, |... ...: 25

interne". 2.27

Ed fe EE

Mauve. 3 22. L'ORAU VENTE Æ 9 ÎLe ciel très-beau. . Tamaris externe . . . = interne . ..

F2 ON AT ACTE Mauve. SL TQ À

Nébuleux le matin, pluie a cinq heures du foir par

Tamaris externe .., LOREN a-verfe, jufqu'a neuf.

interne . . | 1220.49

=

Le) . . . . =

Aa

Euftel te". PE Mauve... st te

DEL ie 0%--:19 |" Beau le matin, un peu Tamaris externe . ..| 10 .... 23 |nébuleux le refle du jour. 2

interne . . . MO NA

RE FRET LE 2 GE TER

MIRE

314 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

EE 2 TR RER D LEE DORÉ MOIS NOMS E FAT & des THERMOMÈTRE. de Jours. PLANTES. L'ATMOSPHÈRE. as" mat. a midi. Degrés. Degrés. AOUST. | Fuflet: 24, .....| 10... 15 ; Un peu nébuleux tout Dr NES de QE 8 Anar PR SE 7 Mauve. . a 2 jour.

Tamaris externe ... Deus. 24 interne 220410 1:1-.020

D tte ja 5" mat. aiihm. 28. Enffets. 5 ete NATION Sens Mauve ANNE HIATE F£o T EL 8 28 " ! amaris externe . .. -+++ 2% |Trés-beau tout le jour. interne ssl 44 vestes 311 T 4 INC AIO TE CORNE 18 29 RUN MATE 103-162 T'amaris externe. | 94.209 \ à Comme hier. interne meet 0222 mesh 26 pi 30 LIT 17 Tamaris externe . . .| 102... 33 1 s Comme hier. Interne MITA user

. 28 |Comme hier. SPA LU

SEPTEMB. Te Grenadier à fe ATHANTIEE de lef ete letel| Ne Le le oc lobe 19/4

34 Très-beau dès Ie matin.

| D'E s' USMovr N CMS! 315 ESRI EU 9 25 RU EEE NE DEL ER Mon LA GA SUIS D DD US Se CONNUE PNA En De PET PTT SEEN

MOIS NOMS ETAT & des THERMOMÈTRE. de Jours. PLANTES. L'ATMOSPHÈRE.

ES a Shm. à 11Pm.

Degrés. Degré. SEPTEMS. | Grenadier | M] rit: 342 1] Erès- (bé tout Ie jour. Th Amandier. . ..... 12 +... Or LUN 3; Grnadier FH 1 37: [Nébuleux tout le jour. Amandier : :..,.| 132,621 Grenadier:. 2,11: : 4 1 RPAE ; ca Nébuleux tout le jour, | mandier . . . . .. = & pluie la nüit. ANUS ÉRETAN CRORROR SE ER 1 21 BE Rainer LR NIET 14 |Nébuleux & nt 20 Ga Rate»: afaler 2e 7. ... 25 |Beau tout le jour. A Rate LT Beau tout Ie jour.

g: 2 Comme les deux jours ANA as bee DE,

9: Re AO DA .... 27:|Comme hier.

Comme RE Nues quelques M A OR cependant.

Raifin . . .. NE. MERE NEA

Un peu nébuleux & pluie le matin, petite pluie l'après midi.

h Li nn oRaïtin ee APN 115 1 M9

Soleil avec quelques

n2 NRA In. (Lee 5H arte À 9 ® [nuages tout le jour.

316 MÉMOIRES DE L' ACADÉMIE ROYALE

STRESS UE RER | Essen mom EST AY THERMOMÈTRE. de

L'ATMOSPHÈRE.

SEPTEMB. 13

Degrés. Degrés Raifindat eur, | AU SRE. +; Afez beau, peu denuages.

ashm. azcilm,

14. 2 5 Bec de grue A ENFNE" » LE tn] is Nébuleux & pluie fur Mélongène . . .... 11% ++:26 |les 7 ou 8 heures du foir. HI Galchañe rer LOS ete a 1215 a 5h mat. .-a2hif 4e Bec de grue . . . .. l'A Me EU ETS Mélongène ......| 154... 27 |couvert le matin, beau le Calebafe rer 13 4 24/00 D a 6P m. Re 16. Bécideigruet 112, 101... 30 L à Mélongène . .!.:..| 122 ..: 32 Beau foleil tout le jour, Calébaffe. . © To 02 a6bm. à11ihm Becidéforte 0" AT a ete PLIS Nébuleux, pluie à dix 17. |Mélongène.. .... 124.... 14 [heures du matin, & l'après- Grenadier:1:/21200 LOVE midi. MIE IdeUsTue ee DAMON EN Mélongène ......| 8 .... 21+1Affez beau tout le jour. Grenadier.. 5... ..| 62... 162 19. BéCirlergiuer ts cle 109 Mélongène. ......| 7 .... 27 |Beautoutle jour. Grenadiens 140 4e. 22% ;

iD?E so 1/E NIo ENS 317 RE 2 C2 ET

MOIS NOMS ETAT & des THERMOMÈTRE. de

Jours. PLANTES. L'ATMOSPHÈRE. RE EEE ERSE ES À | a 6hmat. àa2hf.

N Degrés. Dégrés, Sepreme. |Gxenadier. ......| 4 ....242|De même qu'hicr. 20° Stramonium NI JAN 4 ES 22:]

CN DENT ENS

Grenadier....... Stramonium. . ..... Ratfin ee eee

De même qu'hier.

Grenadien. 4}. 1."..)"HE 3 Comme les trois jours 3 précédens. RO ea een | Ant net 1 210 a 6" mat. Grenadier. ....... gs... | Temps couvert & grand}

23% 3 Stramonium. ...... 8 vent,

JE ENT VRP Ne D AR 9

TPE 4 . USA

Rr üj

17 Déc 1749e

318 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

O: CICROMAE:T A PONS DE QUELQUES ETOILES PAR LA LUNE, Obfervées pendant l'année 1749.

Par M. LE MonNtER le Fils.

He 22 Mars au foir, à 76 30° 3 6"+, immerfion de l'étoile f des Pléiades fous le difque obfcur de la Lune : le point de limmerfion n'étoit pas tout-à-fait à diftance égale des deux pointes du croiflant, À 7h 30° 48"+, immerfion de 4,

ui s’eft faite à une diftance de la pointe ou corne boréale, prefque femblable à celle dant l'étoile f avoit paru éloignée

. de la corne auftrale au temps de fon immerfion.

Imenerfions d'étoiles pour vérifier le SAROSs.

Comme le ciel ne s'eft découvert que par intervalles, je n'ai apercevoir limmerfion de » des Pléïades, qui a s'éclipler vers la corne boréale : j'avois remarqué feulement à 6h 18’ que l'étoile étoit fenfiblement dans un même ver- tical avec le bord obfcur ou oriental de la Lune.

Le 7 Avril au matin, à 1h 1 8"2, immerfion d'An- tares fous le difque éclairé, elle a paru s'avancer pendant quelques fecondes : c'étoit un peu plus loin de lt corne auf trale que de la corne boréale, vis-à-vis les montagnes d'A- frique & Pentadadylus.

Le 16 Décembre au doir, à 6h 31° 18"+, immerfion fous le difque obfcur de la 20. dans la conftellation des Poiflons, du Catalogue Britannique : c'étoit à environ 6o degrés de la corne boréale : l'émerfion à 432, dans la ligne tirée du centre de à Lune par la partie boréale de infula major; & à 7h 45'+, l'étoile paroifloit éloignée du bord éclairé de la Lune d’une diftance égale au grand dia- mètre de la tache infula major. J'ai comparé cette obfervation avec la correlpondante du 6 Déc. 1731, lorfque la Lune a écliplé x du Poiflon boréal à 7h 0" 25", cette étoile ayant employé pour lors 4 À 2 5” à traverfer le difque de la Lune.

Rte

Di FE SIMSNC.LE IN) GUEUS: 319

OR SERN. A T T'ON DEL ENENM'EPISES DE: LU NE Du 23 Décembre 1749.

Par M. LE MoNNIeER le Fils.

À minuit, le diamètre vertical apparent de la Lune, 31° 28"2+, & une feconde fois, 3 30"; ce qui, réduit à l'horizon, & ayant égard à la différ ence de réfraction, donne le diamètre apparent dela Lune, de 30°; 92 : Par les pañfages . des deux bords au méridien, 1 durée 140"2+ ou + donne le diamètre horizontal de 15"+ ou 20”, ce qui répond. à 30° s3” A 7h 3'ou 217 commencement de l'Eclipfe. 7: 18. 20“ le micromètre a donné Ia largeur de Ia portion obfcure de $Rév: 2 ça 7: 19. So le micromètre donnoit les pointes des cornes diftantes de 2 1 Rév: 2 par

8. 8=. la portion éclairée qui refloit, 1 9Rv: 1 8part 1 36"; donc la quantité de l'éclipfe 4feisis 7,

8. 142. ‘a diflance des pointes des cornes toit 3 oRé DE 281 SA

18. $o laport.éclair. quireftoit, 1 oRév:1 Sat 1 3 6".

8 9:11: 2, 20 Île micromètre a donné les pointes des cornes diftantes de 218%: 21P4r

2

4 20 Île micromètre a donné la largeur de la. Rate obfcure de 51% 2 par

9. 19%ou+ fin de léclipfe.. Par Je commencement & 11 fin, je trouve le milieu de Féclipfe à 8h r 10 20”. Par les deux Phafes correfpond. obfervées, à 8h 1 1’ 20" Et par la diftance des pointes des cornes, à 8. 11. $. Enfin ka plus grande quantité de l'éclipfe n'excédoit guère

LL

4e 55. ES as

320 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALr

OBSERVATION D EIRE IEP SE D'E CE UTERRE

Du 23 Décembre 1749,

FAITE À PARIS DANS L'HOSTEL DE CLUGNHF.

Par M. DE L’ISLE.

‘Ar eu de la peine à eftimer le conunencement de

lEcliple, qui m'a paru fe faire à 7h 0" de temps vrai, avec une lunette catadioptrique de 4+ pieds ; d'autres per- fonnes qui étoient avec moi, en ont jugé de même, avec des lunettes ordinaires ; if y avoit 10 ou 1 que la pénom- bre avoit commencé à paroître , l'entrée de l'ombre s'efl faite entre Tycho & Schikard.

Ayant voulu me fervir un peu avant l'écliple, du micro- mètre qui eft appliqué à ma lunette catadioptrique, dont les fils font de vers à foie, j'ai trouvé le fil mobile rompu; ce qui ma empèché de mefurer le diamètre apparent de Ia Lune avec cet inftrument, ainfi que le progrès de l'écliple ? par doigts ou parties du micromètre répondantes , comme je me l'étois propolé.

J'ai fuppléé à ces obfervations par celles du pañlage des bords de la Lune & des cornes de l'éclipfe par le fil hori- zontal & le vertical d'un quart-de-cercle de 43 pouces de rayon; mais comme ces -obiérvations, qui font en grand nombre, demandent beaucoup de temps pour être employées, je remettrai à une autre occafion de les rapporter, avec la mé- thode dont je me fuis fervi pour en conclurre le progrès de l'édipfe en doigts & minutes, avec la plus grande phafe,

‘La fin de léclipfé n'a paru fe faire à 9h 21° 30" de temps vrai, de forte que la durée de l'éclipfe a été felon moi de 2h 18° 30", & le milieu eft arrivé à 8h SEEN LISE

J'ai

à ESC 1 E N CES CR J'ai obfervé le pañfage du centre de la Lune par le méri- dien le 24 Décembre à oh 2°+ du matin, temps vrai: je crois cette détermination exempte de tout foupçon , tant à caufe de Ja régularité du mouvement de ma pendule, que par la certitude avec laquelle je connois la fituation de linflrument des paflages dont je me fuis fervi. J'ai auf obfervé que l'étoile de la troifième grandeur, qui eft dans le genou de Pollux, a paflé par le méridien 29° 43" après le centre de la Lune; & cela en temps du premier mobile, ou en temps d'une pendule qui eft réglée comme la mienne fur le mouvement propre des étoiles fixes, avançant par jour de 56" fur le moyen mouvement du Soleil.

Comme dans le temps de cette éclipfe je n’avois point encore appliqué le micromètre à mon inftrument des pañlages, ainfi que je l'ai fait dans la fuite, avec un demi-cercle fixe qui fert à mefurer les diftances des étoiles fixes & des planètes au pole, j'ai été obligé de me contenter de la hau- teur méridienne de la Lune, que j'ai obfervée avec mon grand quart-de-cercle de 43 pouces de rayon, dont la lunette eft garnie d’un micromètre qui me fert depuis trente ans : j'ai trouvé avec cet inftrument la hauteur méridienne apparente du bord fupérieur de la Lune, de 644 $7' 22”.

J'ai enfin mefuré très-exaétement le temps du paffage du diamètre de la Lune par le méridien, que j'ai trouvé de 21"+ du temps du premier mobile, en prenant le milieu entre ce que m'ont donné cinq difiérentes déterminations de ce pafage par cinq fils verticaux fixes, qui font dans la lunette de mon inftrument des paflages, deux de chaque côté du fil qui décrit le méridien : le diamètre apparent de la Lune , que j'en ai conclu par un calcul exact, eft de

0 CE 7 2

+ La hauteur de l'équateur à Hôtel de Clugny, eft

LAC ESS k

Mém. 1749. « SF

Chameælinum

Petit Lin.

Linun, Lin.

322 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

CINQUIEME MEMOIRE

SU RULES

CGEAN DE SV DES PLANTES. EXT. le: CHUNAUTSR IE ME

Sur Pufage que l’on peut faire de ces parties dans -l'établiffèment des genres des Plantes.

Par NE GG 0 E Tr ACRID:

1. Ath Vaillant & Micheli avoient fait un genre de la plante que le premier appeloit Chamalinum, & le fecond Linocarpum , c'eft-à-dire , petit lin, ou plante qui reffemble au lin par fon fruit: le fe , ileft vif , y reflemble en ce qu'il s'ouvre en cinq parties, mais il n’a que huit loges, au lieu qu'il en a dix dans le Jin; de plus le nombre des étamines, des piftilles & des découpures du calice, qui dans le lin eft de cinq, &'de quatre dans Da lin, avoit engagé les deux Auteurs cités ci-deflus, à ne pas réunir en- femble ces plantes, mais M. Linnæus a fit cette réunion. Je ne fai cependant fi le fentiment de ces deux Auteurs ne devroit pas prévaloir: le petit lin m'a paru toüjours lifle, au lieu que les lins ont des filets coniques & des glandes à cupule; celles-ci ne s'obfervent communément que fur le bord des découpures des calices, & les autres fur celui des feuilles, ou fur les tiges & les bniéhés: les uns & les autres de ces filets ne font pas à la vérité ordinairement bien com- muns, mais il y a deux efpèces leur nombre eft beaucoup multiplié : lune a même été diftinguée par le velu, & l'autre par le vifqueux de leurs tiges : le velu de la première eft formé par une grande quantité de filets longs & blancs, dont toutes les parties, excepté les pétales & les étamines, font chargées: le

. DE S'1$nc 1 E N CES 32 vifqueux de l'autre eft à la liqueur qui fort des glandes à cupule, dont les feuilles du haut des tiges & les calices font également fournis. Les cupules ne font pas moins commu- nes dans le lin velu, mais ne donnant pas apparemment autant de liqueur, ou en donnant une moins vifqueufe que celle de ce dernier, on n'en a pas été frappé : outre ces deux efpèces, qui font le 3 & le 6 du Pinax de Gafpar Bauhin, il y en a encore plufieurs autres l'on peut voir les mêmes chofes, mais en beaucoup moindre quantité; de ce nombre font les 1,2, 9, 10 & 12 efpèces, entre celles qui font dans le même ouvrage, appelées lins à larges feuilles, & entre celles qui font défignées par leurs feuilles étroites les 1, 2, 7. La pañlerine de Lobel, le Iin.de Portug:l à fleurs jaunes difpofées en épi, celui de Valence & celui des Alpes, cités dans les Inflituts, & l'efpèce du Corollaire qui reflemble par fes feuilles à la globulaire, le lin à feuilles étroites de Lobel, & celui que Moriflon appelle petit lin annuel de la campagne, & qui a les feuilles étroites & la fleur jaune, font peu différens des autres du côté des glandes & des lets : la pafierine cependant & celui de Valence ont les feuilles aflez rudes pour qu'on s'en foit aperçû au toucher, & qu'on l'ait fait entrer dans leur caractère fpécifique. C'eit ce que Micheli a fait auffi pour celui du n.° 119 du Cata- logue des plantes des environs de Florence, & M. Vaillant pour un qu'il appeloit lin de la campagne, qui eft rude au

- toucher, & qui a les feuilles larges & femblables à celles du gremil. Cette propriété n'eft düe qu'à la roideur des filets, qui ne vient qué de ce qu'ils font un peu plus petits que ceux des autres efpèces. Le troifième lin du Pinax, le fecond du Prodrome & celui des campagnes d'Angleterre qui eft vivace & qui a la fleur bleue, m'ont paru lifies ; il faut en | avertir, non pas que je croie qu'ils le foient, mais pour engager à examiner ce fait; ne les ayant que fecs, je _me puis pas dire qu'ils navoient pas perdu leurs filets & - leurs cupules : il ne reftoit aux fuivans que les cupules du . bord des découpures des calices; ces efpèces font le petit lin

Sf à

Faba, Féve. Vicia, Vefce.

324 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

de la campagne à fleurs jaunes, du Pinax de Gafpar Bauhin; celui que le même Auteur appelle œillet de la campagne, qu'il dit être lifle & très-petit ; celui du n.° 693 du Cata- logue des Plantes des environs de Rome & de Naples, par Micheli, & le 3 des Inftituts.

M. Linnæus a, dit-il, cent fois examiné les fleurs de la féve & de la vefce, fans pouvoir y trouver d’autres diffé- rences que celle d’avoir les femences ovales dans la féve, & arrondies dans la vefce : ce n'eft aufli que fur cette diffé- rence & fur la propriété que les vefces ont d'être garnies,de vrilles au bout de leurs branches, qui dans les féves ne finif- fent que par une petite pointe alongée, que M. de Tour- nefort avoit établi ces deux genres; mais M. Linnæus qui a toûjours négligé cette dernière propriété, a mème cru ne devoir pas faire ici attention à la première. Je laïferai cepen- dant fubfifter ces deux genres, dont les efpèces ont un port ff différent : les féves de plus paroiflent lifles au premier coup d'œil, & d’une fubflance grafle & épaille; lorfqu'on les examine cependant avec un peu plus de foin, on leur trouve quelques filets cryftallins au bas des pédicules, & des efpèces de très-petites larmes bataviques répandues çà & fur les feuilles & principalement fur leur bord; ces derniers filets, fi rares fur les feuilles, font en grand nombre fur les fruits, qui en font couverts orfqu'ils font peu avancés : c'eft par ces larmes bataviques que les féves diffèrent principalement des vefces, je ne les pas trouvées dans ces dernières plantes, Jes autres filets font très-communs, ordinairement longs, grèles & blancs, roufleîtres ou dorés. #

Les vefces que j'ai examinées font, les feize efpèces, & la plüpart de leurs variétés, du grand Catalogue des Plantes des environs de Paris, par M. Vaillant; les 1, 4, $ du corollaire des Inftituts ; celle qui porte des filiques dont une partie entre en terre, & l'autre refte à la furface; celle qui {e répand fur terre, qui a des feuilles larges & fans petites dentelures ; celle qui eft vivace, qui a beaucoup de grandes leurs, mèlées de bleu & de blanc; celles des 412 &

DE SMNNG. 1 EN c'e 32

973 du Catalogue des Plantes des environs de Rome & de Naples, par Micheli; celle du 230 du Catalogue des Plantes de Florence, par le même Auteur ; celle qu'ôn appelle lentille de Hongrie; trois de Morifon, dont lune eft Ja grande à feuilles en cœur, à eur rouge & fruit blanc qui refflemble au petit pois; la feconde, celle qui a une fleur d'un blanc mêlé de jaune, & qui a des filiques Yelues & pendantes ; la troifième vient fur les bords de la mer, elle a la fleur blanche & oblongue ; une de Cupani, que cet Auteur appelle petite vefce à fleur d’un bleu lavé, qui a de larges feuilles & des filiques cylindriques ; une de a Phytographie Britannique, elle eft défignée par la quan- tité & la grandeur des fleurs, & par fa propriété de venir dans les bois ; enfin, une qui eft démontrée au Jardin Royal fous le nom de vefce à feuilles étroites & à petites femen- ces rondes.

La couleur des filets eft dans la plûpart de ces plantes d’un affez beau blanc , dans quelques autres elle eft d’un doré brillant, favoir, dans la lentille de Hongrié, dans la feconde de Morilon, dans celle qui donne des filiques fur terre & en terre, dans celle qui rampe, qui a les feuilles larges & -fans petite dentelure, & dans les 7 & 8sdu Catalogue de M. Vaillant; ils font plus rouffeîtres dans les 1, 2 & 14 du même ouvrage; leur quantité eft ordinairement affez grande, plufieurs en ayant même fur toutes les parties, excepté les pétales & les étamines, & lorfque-les filiques en manquent, on à ordinairement fait entrer cette propriété dans la phrafe que l’on a faite pour défigner ces plantes ; quelques-unes cependant en ont très-peu fur toutes leurs parties, mais aucune n'en eft autant privée que es féves, comme je n'en fuis afluré par l’examen que j'ai fait de la grande & petite féve, & de la petite qui a le fruit noir: ces dernières plantes ont fur les feuilles des grains d'une matière qui en a tranfpiré, grains que j'ai aufli vûs dans les vefces que j'ai obfervées lorfqu'elles étoient vertes, & qui proba- blement fe trouveroient dans les autres, {1 on les examinoit

Si

326 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

dans cet état; mais ce que je n'ai obfervé dans aucunegefce, eft une tache noire qui eft placée à l'origine de chaque ftipule, ou petite feuille, qui, dans les féves, eft à la bafe des grandes;

* cette tache fe trouve conflammient dans cet endroit, vûüe à la

Agrimonia, Aigremoine. Agrimonoïdes.

loupe elle paroît chagrinée, ce qui ne vient, à ce que je pente, ge de plufieurs véficules parenchymateufes ‘qui font gonfléesii& qui peut-être font autant de petites glandes véfi- culaires qui prennent un certain volume,

Les filets en croffe dont les femences des aigremoines font hériffées, &'que M; de Tournefort avoit fait entrer dans le caractère générique de ces plantes , fans cependant en déter- miner la figure; ces filets, dis-je, font la feule différence que j'aie trouvée qui püt me faire féparer ce genre de celui de l'agrimonoïdes , que M. Linnæus lui a joint : les femences de ce dernier font même hériffées de filets cylindriques qui ne fe recourbent point par le haut comme les premiers; ces filets outre cela s'obfervent fur le deffus & le deffous des feuilles, fur les tiges & les calices, comme dans les aigremoi- nes ; ils font également, dans les uns & dans Fautre, mêlés avec des glandes à cupule fur le haut des tiges, fur les femences & fur des feuilles, avec des grains qui en ont tranfpiré. Cette grande affinité entre ces plantes ne doit- elle donc pas faire négliger la petite différence obfervée dans les filets des femences’ Je penfe au contraire que c’eft même cette affinité qui doit faire embraffer le fentiment oppolé, dès qu'elle ne fe trouve pas entière & complète, ainfi je rétablirois le genre de l'agrimonoïdes, qui ne contiendroit encore qu'une feule plante, & qui ne feroit peut - être pas moins fourni, quoiqu'il ne puifle pas l'être moins, que celui de laigrémoine , fi lon pente comme M. Linnœus. Cet Auteur croit que les trois efpèces des Inftituts & celle du Corollaire ne font réellement qu'une feule & même efpèce, étant feulement des variétés des unes & des autres, auxquelles on doit peut-être joindre le petit qui vient en Canada, qui ne differe que par la petitefle de fa fleur & de fon fruit : au refte, quoiqu'on en pente, ils font tous femblables du

Den. ce 1. D'UN

DE SUISNC 1 EN! C''ENSAN 32% côté des glandes & des filets, même quant à la quantité, proportionnellement cependant à leur grandeur.

Une partie des caflies a fur le pédicule commun des glandes à godet plus ou moins arrondies, une autre à des ftipules alongées à l'origine de ce pédicule, quelques -unes ont des glandes à godet & des flipules réunies, d'autres font privées des uns & des autres, mais elles ont-les tiges & les branches chagrinées de mamelons, d’autres font hériffées d'épines fur ces mêmes parties, ou n’en ont feulement qu'aux nœuds , les glandes à godet, les ftipules, les épines fe trou- vent réunies dans quelques-unes. Avant que de voir lufige que l'on peut faire de ces oblérvations par rapport aux genres de ces plantes, déterminons les plantes qui peuvent fouflrir cette divifion.

Les premières, c'eft-à-dire, celles qui ont des glandes à godet, fe fous-divifent en deux parties ; les unes ont ces godets placés à l'origine du pédicule conimun des feuilles, & dans la longueur de ce pédicule ; d’autres gn ont non feulement fur les pédicules communs, mais à la jonétion de chaque petite feuille. Les efpèces qui ont des godets fur le pédicule {ont la cafe d'Amérique, qui eft fans épines, qui a les fleurs jaunes & les filiques membraneufes ; celle de Madras, qui æ beaucoup de fleurs, lés feuilles de tamarin, les fliques larges & comprimées, & que Pétiver appelle waga; celle que Plukenet 1 nommée cafe non épineule, qui a fes fleurs à étamines, d'un jaune doré, & ramaflées en épi comme

celles du tamaris ; la feconde de Comelin, qui vient à

Malabar, & qui na pas d'épines : les godets font alongés & polés à moitié du pédicule, & de chaque côté dans celle- ci; la 2 & la 3 n'en ont qu'un, mais il ef gros & polé au tiers du pédicule; première & la 9 du Jardin Clifort en ont un, fuivant Linnæus, à la bafe du pédicule ; Ja 12 de ce même ouvrage, & la 4 du Jardin d'Upfal font entre la première paire des petites feuilles.

Les efpèces j'ai trouvé des ftipules , font Ja {nfitive des Indes, qui a plufieurs filiques courtes & larges , jointes - "1

Minof[a, Senfitive.

Acacia,

Cafe. Inga,

328 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYyaALE enfemble, & une petite fleur qui forme des têtes globulaires, celle que l'on appelle communément arbrifieau fenfible, celle qui porte le nom de fianne d'Ovellemont, celle qui dans Pétiver porte celui de waga fenfible de Madras, qui ef rameufe & qui a des jets ligneux ; celle de la Jamaïque & qui eft dite de Padoue, la caflie d'Amérique qui n'eft pas. épineufe, qui s'élève en fous-arbrifieau & qui a les feuilles de la grande fenfitive, & celle qui manque auffi d’épines, qui vient des Indes orientales, qui a les feuilles glauques en deflous, les fleurs jaunes & ramaffées en tête; les flipules ces plantes font des efpèces de petites lanières plates plus ou moins larges, placées à l'origine des pédicules communs. Linnæus rapporte que ceux dela troifième fenfitive du Jardin d'Upfal, font ovales & aigus; la huitième efpèce du Jardin de Cliffort a, felon lui, deux courts filets femblablement pofés, qui me paroiflent être de très-courts ftipules.

Ces flipules font à chaque nœud joints à deux épines dans la caffie d'Amérique à fleurs jaunes & en épi, & dans la petite fenfitive en arbrifleau, qui eft épineule & qui a les feuilles larges & femblables à celles de la caflie, & les filiques longues & velues.

Les fuivantes portent des glandes à godet mélées avec des épines; les épines y font deux à deux dans l'aiffelle des pédi- cules , ces plantes font {a caffie des Indes rapportée dans le Jardin de Farnèle, la waga des deux Indes, citée par Aldinus; celle des Indes orientales, & dont les épines ont été, à caufe de leur groffeur, comparées par Seba à des efpèces de corne; la vraie ou le fant d'Egypte, & une qui reflemble à celle des Indes, & qui a de très-petites feuilles : la glande eft pofée vers le milieu du pédicule de cette dernière, de lelpèce rapportée par Seba & de Ja première, & à la jonction de ce pédicule avec la tige de la vraie; elle eft placée au tiers des pédicules dont toute la furface eft hériffée d’épines, dans la waga de Madras qui a des feuilles de fenfitive & des filiques de 7ragera, dans la caflie des Indes orientales à fleurs d'un jaune doré, & à

étamines

à p' RE # K x Deus ni

%

+

DES ScrENCESs 329 Bin difpoles en épi comume dans le tamaris de Nar- bonne, dans la rampante à fleurs blanches & à feuilles fes plus petites de toutes. La fenfitive cexvr des plantes de Ceylan par M. Linnæus a, füivant cet auteur, la glande à la baf du pédicule; les épines font difperfées fur les tiges & les panicules de fleurs, & les pédicules en font privés, non feulement les pédicules communs, mais encore es par- ticuliers ; les tiges & les panicules en font hérifiées dans la 217, & la glande eft fur la bafe du pédicule.

C’e font encore des glandes à g gode: & des cpines qui s'ob- fervent dans les quatre affies qui fuivent ; les épines y font auffi deux à deux à chaque nœud des tiges & des branches, mais les glandes à godet ne font point pofées À à l'origine feulement de chaque pédicule; il y en a un plus grand nombre,

chaque bifurcation ou divifion de ce pédicule en eft fournie d'une: ces glandes font alongées en bilboquet dans la waga de Madras qui eft épineufe, qui porte fes fleurs en épi, qui a des feuilles très-petites & des filiques contournées; elles font * rondes dans la caffie d'Amérique à fleurs blanches & à feuilles de tamarin, dans celle d'Egypte à fruit court ; ellestfont larges, longues & vertes dans la caflie à fleurs jaunes & dont les épines font blancheîtres, très-fortes & très-longues, & dans celle d'Egypte à feuilles de fcorpioides légumineux, à filiques blanches , comprimées, divifées par un étranglement , & à fleurs jaunes. J'ai bien «conflamment une glande à godet _ alongé à la jonction des deux nervures principales des pédi- cules de la fauffe fenfitive de Fernambouc ; mais il m'a paru -que celles des pédicules parti manquoient fouvent.

La caflie d'Amérique qu fans épines & qui a des feuilles de fenfitive, a bien auffi des glandes à godet pofées dans les mêmes endroits que dans cette dernière; mais au dieu d’épines elle a de Tongs flipules qui font de même que . les épines deux à deux, & à l'origine des pédicules com- . muns: dans la caffie fins épines qui a les filiques larges, . comprimées & Îa fleur blanche, les ftipules {ont un peu plus hauts Que le milieu du pédicule, la glande à godet eft placée

Mëm. 1749: se

330 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE entre eux deux, & il n’y a que cet endroit qui en ait.

Toutes les plantes dont il a été jufqu'à préfent fait men- tion dans cet article, font avec des glandes à godet ou des ftipules fimplement, avec des flipules ou des glandes à godet ou des épines, maïs on n’y a pas ces trois parties réunies : C'eft ce que m'a fait voir une caflie d'Amérique de Y'Herbier de M. Vaillant, & qui y eft fans dénomination; il y eft feulement dit qu'elle vient en Amérique, qu'elle a été cultivée en 1719 au jardin du Roi, & qu'elle eft épi- neufe ; fa tige eft hériflée de ces épines, chaque nœud des branches a deux larges ftipules, & chaque pédicule fecondaire & commun eft entouré d'une glande à godet alongé.

Bien loin d’avoir trouvé toutes ces parties réunies dans la caffie à feuilles de lentifque, qui eft toûjours verte & fans épines, je n'y ai au contraire que des glandes à godet à chaque paire de feuilles; encore ces glandes ne font-elles pas le godet comme les autres, mais elles ne font fimple- ment que de petits mamelons fermés qui font femblables à ceux dont j parlerai plus bas, & à ceux que l’on remarque fur les pédicules de cette même plante.

Ce ne font plus des glandes à godet que les quatre fui- vantes m'ont fait voir, mais des cupules qui m'ont paru jau- nâtres dans la {enfitive ou arbrifleau fenfible, dans une que M. Vaillant penfoit étre celle d'orient, qui eft fans épines & qui a peu de branches, une fleur en épi & qui ef citée par Plukenet. Chaque nœud de celle-ci avoit deux larges ftipules ; celle que l'on appelle patte ou avane de Magellan, eft garnie de deux petit de chaque côté de tous fes nœuds au lieu de ftipulesÿ#& comme dans les précédentes, il y a des cupules fur les pédicules premiers & fecondaires , - jy ai de plus fur les feuilles des glandes véficulaires fans couleur. Le haricot des deux Indes, dont les feuilles font aïlées, le fruit grand & en forme de cœur, les lobes très- longs, noueux & ordinairement contournés ; le baguenaudier de Madras qui a des filiques, & dont les feuilles geflem- blent à celles de la fenfitive, que M. Vaillant plaçoit avec

DEN SMS TE NC El 321 les caflies, ont aufli des glandes véficulaires ; celles de ceite dernière plante n'étoient cependant que comme celles des fainfoins, elles n’y formoient qu'un pointillé roufleitre : celles du haricot étoient fans couleur, mais grandes & irrégulière- ment ärrangées : les pédicules du baguenaudier avoient outre cela beaucoup d'épines.

Si les mamelons dont j'ai parlé plus haut étoient réelle- ment des glandes à godet qui ne difléraflent des autres que parce qu'elles ne font pas évafées, on diroit avec vérité que les plantes fuivantes en font les plus fournies : les pédicules, les tiges & les filiques en font chagrinées; elles y font alon- gées en forme de lentilles, & elles reffemblent beaucoup à celles que j'ai appelées glandes lenticulaires, & qui s’obier- vent fur un grand nombre d'arbres. Les plantes dont il s'agit ici font la caflie d'Amérique à grandes feuilles à fili- ques contournées ; celle qui s'élève en arbriffeau, qui n’eft pas épineule, & qui a la fleur puipurine; la feconde des grimpantes, qui a des épis doubles & des filiques larges. Ces trois font du Père Plumier : la fuivante eft de Plukenet, qui la défigne: par les grandes épines qui font aux nœuds, qui reflemblent aux cornes des bœufs, & dont les filiques font alongées en trompe; celle de Bengale à feuilles de bon- duc & à fliques dontsle dos eft relevé de côtes; l'ongle de chat, qui eft la première fenfitive du Jardin de Clifort, & qui n'eft appelée ongle de chat qu'à caufe des deux épines qui font à chaque nœud : les pédicules, les tiges & les fili- ques font, comme je fai dit, chagrinés de mamelons; il n'y a que les filiques qui le foient dans celle de Java, qui n'eft pas épineufe, & qui a de grandes feuilles qui font relui- fantes : cette couleur ne leur vient que du nombre de leurs filets cylindriques , qui y font blancs, & fur les filiques, d'un fauve doré.

Quoique je n’aie pas parlé des filets cylindriques des autres efpèces que j'ai citées jufqu'ici, elles en font cependant toutes plus ou moins chargées; & fi je me fuis tus fur ce point, c'eft que comme cette propriété eft commune à toutes les

Tti

332 Mémoires DE L'ACÂDÉMIE RoÿaLe

efpèces , elle n'a me fervir à former les divifions que les ftipules, les épines, les glandes à godet, celles à cupule & les véficulaires m'ont fournies. Les filets font ordinairement blancs, quelquefois dorés, comme je l'ai rapporté de quel- ques-unes des précédentes : ils font fauves ou bruns dans la caffie de la Phytographie de Plukenet / Tab. cccxx x18fig. 1), & dans ‘la waga de Madras à feuilles de fenfitive & en plume, dont les filiques font grandes & comprimées, & qui eft citée par Pétiver. La première eft épineufe, comme il le paroît par fa dénomination : l'on a auffi fait entrer cette propriété dans celle des plantes fuivantes, qui, comme ces deux dernières, n'ont avec les filets tout au plus que des épines. Celles les uns & les autres s’obfervent, font fa fenfitive grimpante dont les tiges font flriées, épineules, fes pédicules en font aufir hérifiés ; 11 grande qui s'élève en ar- briffeau, dont les branches de chaque pédicule commun font réunies en rond; la waga de Madras à feuilles de fenfitive, & qui a de petites fleurs" en épi; la caflie de Madras qui a les feuilles de pois de Bedeau, & le fruit de pois chiches; celle que Flacourt appelle roüimeme en a tout le long des pédicules, elles y font deux à deux, & très- grofles par le

bas. Aucune n'en a plus que celle que lon a dit en ètre

hideufe, & qui eft auffi remarquable par grande fen- fibilité; fes filets même font pluflôt des épines, au moins ceux des côtes du defious des feuilles; les tiges & les pédi- cules en font prefque couverts. C'eft encore par de fem- blables filets que les côtes des aïlerons de celle d'Amérique qui s'élève en arbre, font rendues épineules; ceux des autres parties font longs, blancs, plus gros & moins roides. La tande-maraum, Vereweta-maraum , la mandhathya-manfieli du Jardin de Malabar, la cafie d'Egypte à filiques cendrées, qui eft pluftôt une efpèce d'intfia de Madras, fuivant Plu- kenet; celle de Madras à feuillés de buis, à filiques com- primées, citée par Pétiver; deux waga du même Auteur, qui viennent auffi à Madras, dont l'une a les fleurs en globe, es feuilles de fenfitive, la filique large, plate, membraneufe;

En

D'E:SNMRC 1.E N:C:E;S 333

. Pautre a les feuilles de féné, la filique large, comprimée, muis renflée à l'endroit des femences; celle d'Amérique qui

eft fans épines, & qui a les feuilles de pois de Bedeau; la fenfitive dont le mouvement eft tardif; celle ce mouve- ment n'eft pas fenfible, qui a les feuilles étroites, les filiques longues, peu larges, les femences quadrangulaires, qui vient EP EENR & qui eft citée par Breïnius ; toutes ces efpèces, depuis la rande-maraum, n’ont que des fllets blancs en plus “ou moins grande quantité, quelques-unes même en ‘ont fur les calices, d’autres néanmoins en font très-peu fournies fur toutes leurs parties; elles ne font cependant pas lifles au point le font les deux fuivantes, dont lune n'eft peut- être qu'une variété de celle qui a des femences quadrangu- laires, & qui n'en eft diftinguée que par fes filiques blan- cheîtres, & dont l'autre eft la rampante à fleurs blanches & à feuilles de carouge, encore fes pédicules font-ils épineux. J'ai obférvé cette rareté dans quelques-unes des précédentes, ou de celles qui ont des ftipules, des glandes à godet, &c. mais comme je crois que c'eft faute de les avoir vües fur pied qu'elles m'ont paru manquer de ces filets, je ne les défignerai pas.

Je finirai ces citations en difant que ce qui a fait carac- tériler quelques efpèces par la couleur glauque ou violette de plufieurs de leurs parties, n’eft qu'une matière qui approche de ces couleurs, & qui a tranfpiré de ces parties, comme de celles de l'efpèce dont j'ai déjà parlés de l'arbre épineux à feuilles très-menues & courtes, à filiques plus étroites que dans bien d'autres & d’un violet clair, & de celle à feuilles de tamarin & à fleurs blanches, dont il a déjà été queftion en parlant des glandes à godet : ces glandes jettent auf dans plufieurs une matière qui fe ramañe fur le godet en une’ goutte de liqueur claire & limpide.

Voilà des différences confidérables parmi ces plantes;

* mais qui feroit dans les principes de M. Linnæus, penferoit

que dès que ces plantes ne conviennent pas ce côté, il fautnégliger ces différences en établiffant leur genre, ne

) sen tenir qu'à ce qui eft conftant entrelles, & ainfi les

T't ii

Lepido-car- po-dendron.

Hypo-phyllo- carpo-dendron,

334 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE RoyaLr réunir toutes fous le même: qui deroit dans des principes contraires pourroit cependant fuivre aufli ce fentiment , s'il regardoit les flipules comme des glandes à godet très-alongées, les épines des nœuds comme des ftipules durcis, les mame- lons comme des glandes à godet qui feroient bafles & très- multipliées, les glandes à cupule comme des glandes à goget dont ce godet feroit porté par un pédicule, les véficulaires comme un fupplément à celles qui manquent, & il ne fépa- reroit tout au plus que celles qui n'ont aucunes de ces glandes, qui n'ont que les filets & des épines ordinaires. Peut-être ue ce fentiment vaudroit tout autant que l’autre; mais comme il y a des différences 'aflez remarquables dans les fruits, que le plus grand nombre de celles qui ont des glandes à godet font des caffies, que la plüpart de celles qui ont des ftipules font des fenfitives, on pourroit peut#ètre rétablir ces deux genres , & joindre aux fenfitives celles qui ont de grofies épines aux nœuds, aux caflies celles qui ont des mamelons & des glandes à godet, & même celles les flipules fe trouvent; & laiffant les autres enfemble, les joindre à linga, je n'ai que de courts filets blancs fur les pédicules & les côtes du deflous des feuilles, qui font les feules parties que j'aie examiner. Le doute M. Linnæus eft refté au fujet de la caffie qu'il appelle cæfa/pinoïdes dans le jardin de Cliflort, me feroit penfer que toutes les différences que j'ai trouvées dans les glandes pourroient réellement indiquer

des genres diférens : cette plante, dont il laiffe le genre .

indécis, m'a fait voir des filets blancs & courts fur les pédi- cules, à chaque nœud trois épines, & des glandes à godet alongées en pointe au bout de chaque dentelure des feuilles, ce qui paroit lui être partieulier, {1 réellement cette plante eft d'un genre diftingué : cette différence des glandes pour- roit faire penfer que les autres ne font point à négliger.

Les arbres dont je vais parler, conviennent en ce qu'ils ont une couleur d'un argenté ou d’un jaune - brun doré plus ou moins éclatant; de forte que, fuivant M. Linnæws , ils peuvent avoit été caufe de ce que l'on dit communément,

(

d'or ou d'argent, l'éclat qu'ont ces arbres lorfque le

D: PSC 1 E Ne ENS 35 qu'il y avoit dans les Indes des forêts dont les arbres 1.5 oleil donne fur leurs feuilles étant plus ou moins vif, & de l’une ou de autre couleur felon qu'elles font couvertes de filets à qui ces couleurs font dües. Ces arbres, fi riches en appa- rence , font ceux que M. Boerhaave appelle Æpido-carpo-den- dron , hypo-phyllo-carpo-dendron , c'eft-à-dire, arbre dont le fuit eft écailleux, & arbre dont le fruit vient deflous les feuilles. Cet Auteur avoit fait deux genres de ces arbres : M. Lin- nœus les a réunis, & y a même joint quelques efpèces des cono-carpo-dendron qui fignifie arbre dont le fruit eft en cone.

- Les plantes de ces genres que j'ai examinées, m'ont fait voir P

des variété que je me contenterai de rapporter fans rien dé- terminer fur ces fentimens diflérens, ne pouvant le faire faute d’obfervations bien complètes: je n'ai vü, parexemple, qu'une feuille du Zepido-carpo-dendron à feuilles arrondies, roides, & à fleurs portées fur un long & gros pédicule, & celles du Zeucodendros d'Afrique, ou de Farbye d'argent, dont le fommet

des feuilles eft crénelé, qui m'ont paru ifles & pointillées.

d’une grande quantité de petits mamelons blancs : celui qui a les feuilles petites, ramaflées en touffe & foyeules, le fruit long & gréle, a des filets coniques & blancs fur les tiges & fur les feuilles, & fauves fur les fruits. La première & la feconde efpèce de protea, qui font des cono-carpo-dendron de

M. Bocrhaave, font fournies d’une grande quantité de ces

filets blancs fur les feuilles & les tiges, qui en font d'un blanc argenté. Le /pido-carpo-dendron à feuilles oblongues, vertes, qui ont un liféré rouge, & dont les écailles du fruit font velues fur leurs bords & à leur pointe, font veir de petites plaques rayonnées ou faufles houppes fur les écailles des fruits, & des filets longs & grèles qui embraffent le bas des femences.

Ces arbres ont, comme fon voit, beaucoup de rapport par. les filets & par la couleur des parties ils fe trouvent, dans

‘ceux même qui mont paru lifles ; ainfi il peut bien fe faire

. que ha réunion qui en a été faite puiffe fubfifter: je nai cepen-

dantsobfervé les plaques à rayons que dans la dernière efpèce -de celles dont j'ai voir les fruits.

Cono-carpo- dendron.

Medica, Luzerne. MWedicago.

Fænum-græ- cum,

Fenugrec.

336 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoÿaLe

La filique des luzernes & des mcdicago {e contourne en tire-bourre, mais de façon qu'elle forme plufieurs tours ou circonvolutions dans les luzernes, & qu'elle n'en forme qu'un dans les medicago. M. de T'ournefoit avoit établi ces deux genres fur ces différences ; mais comme il arrive fouvent que le nombre des tours de la filique des luzernes varie beau- coup, qu'il y en a même des efpèces il n'y a fouvent qu'un tour à des filiques, tandis que d'autres en ont plufieurs, M. Linnæus a cru devoir ne faire qu'un genre des deux : il avoit même cru, dans le Jardin de Cliffort, pouvoir y join- dre le fenugrec, parce que fes filiques fe courbent en arc; mais dans fes ouvrages poftérieurs il à rétabli ce genre, & l'a appelé rrigonella. »

Si j'eufle trouvé fur les filiques de toutes les medicago les filets branchus que j'ai obfervés dans celle qui a le port d'un trèfle, dans celle qui reffemble à Ia vulnéraire ruftique & qui vient en Efpagne, dans celle qui a ce dernier port & qui eft de l'ifle de Crète, je n'héfiterois pas à féparer ces genres; mais plufieurs autres m'ont paru n'avoir que les filets cylindriques des autres efpèces. Ces dernières plantes font la medicago annuelle d'Italie, qui a plufieurs fruits; celle dont les feuilles font très-étroites , qui s'élève en fous -arbriffeau, & qui eft blanche; celle des bords de la mer, qui a trois feuilles, le port & les feuilles d’une luzerne & le fruit life, citée par Micheli; la luzerne de la campagne à fleurs jaunes, que M. Vaillant plaçoit avec les medicago, & deux fenugrecs que cet Auteur y rangeoit aufli : lun eft appelé fenugrec des Âlpes, à fleurs jaunes & à feuilles étroites, fans citation ; l'autre eft celui que Micheli dit être de la campagne, vivace, à fleurs jaunes & à feuilles étroites & incifées par le haut.

Plufieurs luzernes reflemblent à ces dernières medicago ,

un grand nombre d’autres portent fur les bords des circon-

volutions des filiques, de gros filets roides, un peu récourbés en croffe par le haut, & qui ont été comparés à des épines par da plüpart des Auteurs. Une efpèce, & elle eft la feule, m'a fait voir des glandes à cupule; ces différences font bien

réelles,

Die, SMMSACLI E NC: ES: réelles, mais {a reffemblance étant auffi grande qu'elle l'eft dans - Xe refte, il feroit fans doute téméraire de vouloir divifer ces plantes: plufieurs des luzernes qui ont été appelées luzernes difles, & du fruit defquelles on n'a pas fait mention, ont des mamelons plus ou moins #levés qui pourroient avoir été la bafe des filets épineux, ou l'être dûns certains cas. J'ai re- marqué fur les filiques de Ja plûpart de ces plantes, de petits grains d'un jaune doré qui pourroient être de petites glandes . véficulairé gonflées, ou peut-être de très-petites glandes à cupule, & ainfr celle jai de ces cupules n’en diffé reroit alors que parce que les fiennes fergient plus apparentes & plus élevées, & qu'elle en auroit non feulemeñt fur les fruits, mais fur les feuilles & les tiges; cette luzerne eft {a grande à deux fruits en vis & qui font rudes, citée par Morilon. Je ne rapporterai pas en détail Jes phrafes de toutes celles ou j'ai des filets roïdes, & de celles je ne les ai pas trouvés; il fuffira de dire que les premières font ap- pelées par les auteurs, fuzernes épineufes, les autres, luzernes difles, & que celles qui ont de gros mamelons, ont été ordinairement appelées {uzernes à fruit rudes. Les auteurs ont . même fouvent porté l'exactitude jufqu'à décrire dans leurs phrafes la direction des gros filets, dont une partie eft, dans » plufieurs efpèces, dirigée de devant en arrière, & une autre . dans un fens contraire: au refte j'ai examiné les 18 premières des Inftituts, & les 21, 22, 29, 31, 32, 36, 42; les deux du Corollaire, deux de Morifon, que Linnæus regarde comme des varietés de celle du n.° 1 1 du Jardin de Cliflort, & qui y font marquées Æ & X'; les fruits de ces deux dernières n'ont point les gros filets; les filiques de prefque toutes les autres de ce numéro en font hérifées; celles des fuivantes Je font@ffi: de ces plantes, les unes font rapportées dans ouvrage intitulé /ortus catholicus, & font la grande-luzerne fruits en vis, ovales & épineux, fa grande qui eft life, ni a quatre filiques à contours fiches & éloignés les uns es autres, celle à plufieurs fruits en vis & cylindriques ; ne gft de Micheli qui l'appelle très-petite fuzerne, qui vient ._ Mén. 1749 NE

Na

338 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE fur les rochers, qui eft lifle & qui a les feuilles en forme de cœur ; une autre citée par Rai, fous le nom de trèfle à fruit en vis & épineux, .& qu'il compare à de petits barrils; une de Morifon, qui eft celle du n.” 10 de la Table xv, A. 2; deux de l'Herbier de M* Vaillant, dont l'une eft de ce pays, à plufieurs petifs fruits épineux; l'autre eft défignée par fa blancheur, {on velu & fa fleur jaune ; la première eftavec le nom de Rende, la dernière fans citation. Celle du n.° 318 du Catalogue des plantes de Rome &t de Naples par Micheli, celle qui’eft life & qui a le fruit en toupie, citée par Bo- bart, la petite dont les fruits font en petit barril, ramaflés plufieurs*enfemble & qui font lifles, celle à petit fruit en vis, noir & épineux, démontrée au Jardin Royal, n'ont réel- lement point de gros filets épineux, mais de même que toutes les autres dont il a été queftion dans cet aticle, ils font hériffés de filets cylindriques plus ou moins longs, qui s'obfervent auffi fur les autres parties, c'eft-à-dire, fur les pé- dicules, les tiges & les feuilles.

Ce que j'ai rapporté plus haut du fenugrec, demande que je dife ici ce que j'ai trouvé dans fes difiérentes elpèces que j'ai examinées : toutes leurs parties, excepté les pétales & les étamines, ont les filets cylindriques plus moins abon- damment: ces elpèces font toutes celles des Inflituts en ne comptant pas celle d'Arabie, & la dernière qui n’eft pas de ce genre, mais qui eft une anonis ou arrête-bœuf, à caufe de fes glandes à cupure. J'ai encore la première efpèce du Corol- hire, le trèfle à filiquesou pied d'oifeau qui vient en Angle- terre, qui eft cité par Raï, & que M. Vaillant regardoit comme un fenugrec ; les trois fuivans font démontrés au jardin du Roi comme des fenugrecs; Fun eft de Sybérie, il reffemble au trèfle commun des prés, il s'étend fur terre, il a la Reu@Mburpre, difpofée en couronne; l'autre eft des campagnes de Crète, il: eft grand & porte plufieurs filiques. recourbées en corne; le troifième eft d'Egypte, 1 s'élève beaucoup, fes feuilles font dentelées, & ces dentelures finiflent, comme dans celui qui reffemble au melilot, par une partie épaifle & pourpre.

DE SMIC LE IN C'ENS 339

La plante que Commelin appeloit jafmin d’Afrique à feuilles de chêne vert, &c. & qui eft défignée par Linnæus fous le nom de Lantana, qui porte fes fleurs une à une, me fournira le premier exemple des nouveaux genres que je penfé pou- voir ètre formés: cette plante m'a fait voir quelque chofe de plus décifif que les plantes de Particle précédent, ce qui me fait penfer qu'elle doit être féparée des lantana mont- jolis auxquels elle a été jointe; elle a fur toutes fes parties, mème fur le pétale, une grande quantité de glandes à cu- pule pourpre, plus ou moins longue, qui porte une goutte de liqueur vifqueufe & fans couleur ; les filets de linté- rieur de la fleur paroiffent fimplement coniques & dirigés vers le centre : les mont- jolis ordinaires ont des glandes globulaires qui font ordinairement d’un beau jaune doré, ou d'un jaune brun, ou d’un couleur cerife, ou fans couleur déterminée, & au lieu des glandes à cupule on n’y voit que des filets coniques qui ont une certaine roideur, & qui font portés fur des mamelons compolés de plufieurs véficules, comme ceux des borraginées.

Les efpèces qui ont des glandes globulaires fans couleur, fi ce n’eft celle d'une eau claire & limpide, font la troifième &cla quatrième du mémoire donné en 1722 par M. Vaillant, qui appeloit en françois ces plantes du nom de wirobatier ; les filets de ces deux plantes font très-petits, fur-tout dans la troifième qui en eft plus fournie : ces filets font plus longs dans celle que l'on appelle dans lappendix du jardin de Leyde, viorñe d'Amérique odorante à feuilles d'ortie & à fleur d’un rouge de winium, dans celle qui eft appelée par Gronovius viorne d'Amérique à feuilles plus alongées, dans celle qui a les feuilles réluifantes & femblables à celles de la /corodonia, & la fleur jaune; ces filets font doux en comparaïfon de . œux du cinquième mirobatier du mémoire de M. Vaillant, üls font auffi portés fur un plus gros mamelon. Le mont-joli à feuilles de viorne & à fleurs écarlate a, outre ces filets, des épines, fur les côtes des feuilles; les filets des tiges du fecond mirobatier de M. Vaillant approchent auffi, par leur roideur

Vu i

Lantana ou Camara ,

Mont- joli.

Adlhafoda, Barleria, Ja Barlier.

340 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE beaucoup des épines; les glandes globulaires de celui-ci font dorées, elles ne font que foufrées dans l'efpèce appelée dans lherbier de M. Vaillant, viorne d'Amérique à fleur d'un bleu tirant fur le pourpre; celles du premier mirobatier du mémoire de cet auteur, font roufleitres; celles du 6, 7, 8, 9 & du mont-joli en arbrifleau, à feuilles de fauge, cité par le père Plumier, font d'un beau couleur de cerife: c'eft ordinairement fur le deflous des feuilles que ces glandes Sobfervent, de plus j'en ai dans cette dernière elpèce fur les tiges & les calices ; les filets font encore plus com- muns; les feuilles, les tiges, les pédicules , les: calices, les fleurs & le placenta mont paru dans la plüpart, pour ne pas dire dans toutes, en être chargés, & même aflez abon- damment.

Je ne pourrai rien dire d'auffi pofitif fur le genre fuivant ; que fur ce dernier; il me paroït cependant que ceux de Vadathoda & de la barleria contiennent quelques plantés qui pourroient peut-être en être féparées. J'ai obfervé dans le plus grand nombre des plantes que l’on range avec les adha- toda , des efpèces de glandes lenticulaires, femblables à celles de quelques aparinées, qui font plus ou moins alongées, & qui le font quelquefois à un point qu'elles forment de petites lignes fenfbles à la vüe fimple; j'en ai trouvé de pareilles dans l'adhatoda dont M. Linnæus propoloit de faire un nouveau genre auquel il vouloit donner le nom de prionitis. M. Van Royen a réuni cette plante aux barliers: j'ai à la vérité de ces glandes à une barlier; deux autres m'ont paru en manquer, & quelques adhatoda ; il faudroit peut-être regarder comme des adhatoda les plantes qui n’ont pas de ces glandes, comme des barliers celles qui en ont, & faire un nouveau genre des barliers qui en font privées: il eft vrai que l'on a remarqué dans les parties de la fleur des efpèces qui ont été miles au nombre des adhatoda & des barliers, & qui ont des glandes lenticulaires, des différences propres à les faire féparer; ainfi, malgré leur rapport du côté des glandes, ä faudroit peut-être en faire deux genres nouveaux ; ut

| 1!

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DE s VIe r EN CES 341 examen plus recherché de la fleur décidera Voici mes obfervations.

Les adhatoda je n'ai point de glandes fenticulaires, font l'efpèce de Ceylan, celle qui ne s'élève pas en arbrifleau, qui reffemble par fes feuilles à la circée, & qui a un petit fruit, celle de Madras à feuilles d'anet ; Ja barlier pyrami- dale à fleurs bleues, & le fecond ronoloumibi que M. Vail- lant plaçoit avec les barliers, m’avoient, de même que les plantés précédentes, que des filets coniques, articulés, courts & en une aflez grande quantité pour que les jeunes poufes, en foient un peu blanches. Je ne me fuis pas affuré fi ces plantes avoient des glandes globulaires ; elles ne m'ont point du moinséchappé dans l'adhatoda de Ceylan; elles y font d'un couleur d’eau brillante, & elles paroïflent au tranfparent n'être que des glandes véficulaires; j'en ai principalement obfervé fur les feuilles; elles font moins vifibles fur les autres partiés. |

La barlier dont#les feuilles reflemblent à celles de morelle, & qui a la fleur d'un rouge d’écarlafe, m'a fait voir non feu- lement de ces dernières glandes & des filets, mais des glandes lenticulaires ; les globulaires font d'un couleur d’or rouge; elles fe diftinguent ainfr facilement des lenticulaires qui y font, comme dans la plüpart des autres efpèces, d’un blanc verdâtre: des points bruns que l’on remarque non feulement fur les feuilles, mais fur les tiges & les*calices de l'efpèce d'adhatoda que M. Linnæus appeloit prionitis, me paroïffent être des globulaires, ou du moins en être le fupplément; ces points fe trouvent auffi fur les mêmes parties d’une efpèce du même genre qui vient de Malabar & qui eft épineufe, fur celles d’une autre efpèce du mème pays, qui a les feuilles

_ de vipérine, & fur celles d’une troifième qui vient de Ma-

dras, dont le bord des feuilles eft à dent de fcie, & qui

étant jeunes, font foyeufes en deflous: les deux premières fe

diftinguent principalement par quatre grandes épimes qui font

à chaque nœud, & les deux dernières par des glandes à

cupule pourpre, dont le bord des calices eft chargé : ces Ù Vuiij

342 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE cupules font plus communes dans celle à feuilles de chropo- dium qui eft d'Afrique, les feuilles, les tiges, les calices en ont un bon nombre ; celle qui par fes feuilles reffemble, felon Pétiver, à la champacca, & qui eft du fort Saint- George, ne manque pas aufli de ces cupules fur les mêmes parties, & de points bruns fur les feuilles, mais elle m'a paru être privée des glandes lenticulaires des autres, de même que celle de Madras, à feuilles de poivre d'eau ou curage qui n'avoit que des points roufleätres, fans cupules ni glandes denticulaires.

Ces dernières glandes font réunies aux filets dans plufieurs autres, qui font le petit arbriffeau impatient des Canaries, à feuilles de faule, ou arbre qui fait un bruit femblable à celui qui pafle par un endroit étroit; l'ehueboue des Indiens cité par Surian, ladhatoda de Madras à épi long, feuillé, & dont les bords font blancs; le cochibichi, Therbe confoude ou qui reflemble à la confoude pétrée de Lobel, & qué lon appelle auffi plante qui met les ferpens fuite; l'adhatoda des Indes, qui a la fleur blanche & les feuilles de faule june efpèce appelée dans l'Herbier de M. Vaillant, anonyme d’A- mérique à fleur en cafque.

Voilà bien des différences entre ces plantes, mais aucune : ne m'a fait voir celle de l'adhatoda de Madras à calice barbu & à feuilles velues en deflous, cité par Pétiver: cette dif- férence confifte en de Jongues épines dont les calices font hériflés; ces épines font chargées de courts filets tournés vers le bas, qui les font ainfi reflembler à de petites fcies dont les dents feroient très-éloignées : les filets des autres parties, telles que les feuilles, les tiges & les calices, ont une certaine roideur qui les approche de la nature des épines; les calices paroiflent pointillés de blanc, mais ce prétendu pointillé n'eft formé que par ceux d’entre les filets qui font très-courts ; cette plante n'a paru privée des glandes à cupule, des glo- bulaires & dès lenticulaires. Voilà encore un coup bien des différences entre des plantes qui ont été rangées fous un même genre; ces différences doivent-elles être négligées ou non?

La

D E SAMMAC l'E N C\E(S 343 ceux qui verront la fleur de ces plantes pourront le déter- miner.

Herman, & après lui Dillenius, n'ont pas trouvé le méme nombre de caplules dans les fruits des ficoïdes ; le premier a cru même devoir divifer ces plantes en ficoïdes" qui avoient le fruit à cinq caplules, & en celles qui l'ont à dix; le fecond en a mème trouvé qui n'en avoient que quatre; d’autres, felon Linnæus, en ont plus de dix. Dillenius n’a pas adopté, quoi- qu'il fait connue, la divifion qu'Herman avoit faite ; il a mieux aimé tirer la fienne de la figure des feuilles, de“leurs poils & de leurs épines; malgré ces différences, & fur-tout les premières, ces auteurs n'ont pas cru devoir faire des genres différens de ces plantes, & quéique Dillenius penchät vers €e fentiment, ayant encore remarqué quelques différences dans 1 fleur de plufieurs efpèces, il a penfé ne devoir rien innover. J'ai fait quelques remarques fur les filets, qui ne font pas les mêmes dans toutes les efpèces; je ne ferai pas plus hardi que ces auteurs, je rapporterai feulement ce que. j'ai vü.

I eft fngulier que l'efpèce j'ai trouvé une différence plus marquée dans les filets, foit aufli celle qui en äit, dans le fruit & fes ftyles & dans le calice, uñe plus grande & plus frappante ; ordinairement il y a cinq ftyles, cinq loges au fruit, cinq découpures au calice; celle-ci a huit ftyles qui font velus, ce qui eft particulier à cette efpèce, huit loges au fruit & cinq découpures au calice, dont deux font courtes, & trois qu'on prendroit pour des feuilles, tant elles font Jongues : les filets des furfaces des tiges, des calices & des feuilles de celui-ci font prefque des navettes; les efpèces de weffies dont ces parties font chagrinées, comme je le diraï plus bas, portent à chaque bout un filet conique & blanc . celui du bout fupérieur éft un peu plus grôs & un peuplus _ grand : ces deux filets ont, avec la veflie, la forme. d'un filet à navette dont le mamelon froit extrémement gonflé, & dont les côtés feroient inégaux; ces petits filets font mème - dans l'alignement des parties qui en font garnies comme les

Ficoïdes, Ficoïde.

344 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE navettes le font dans {es plantes elles s’obfervent. Le bout fupérieur des feuilles & des découpures du calice de la ficoïde dont il s’agit ici, fe termine outre cela par cinq ou fix longs filets blancs, qui ont fait donner à cès parties le nom de feuilles radiées par différens auteurs : qui connoi- troit les filets en houppes dont j'ai parlé plufieurs fois dans les Mémoires précédens, & qui examineroit les filets de cette ficoïde, les rangeroit d'abord avec les houppes; il ya cependant une différence eflentielle; les houppes font com- pofées de plufieurs filets portés fur un feul mamelon, au lieu que dans cette ficoïde chaque filet a fon mamelon, qui eft même aflez gros & qui eft ordinairement d’un brun jaunâtre: ces mamelons font près les uns des autrés, & par leur affem- blage ils repréfentent aflez bien une houppe: cette ficoïde eft celle de la figure 23 $ du Jardin d'Eltham par Dillenius, qui a fort bien fait repréfenter cette elpèce de houppe; & felon la figure & la defcription qu'il a donnée, les pédicules des fleurs font très-velus, vers le haut fur-tout.

Cette efpèce n'eft pas la feule qui foit velue, plufieurs autres ont des filets qui dans quelques-unes font même ar- rangés en houppes, comme dans celle-ci, mais je n’y ai point obfervé que les veflies des feuilles & des autres parties fe terminaflent par de petits filets qui les fiflent reflembler à des navettes. S'ils n’ont pas cette figure dans l'efpèce de Ia Table cexiv, figures 277 & 278 du Jardin d'Eltham, la leur n’eft pas moins fingulière; ils reflemblent aflez à un étui à pipe, leur groffeur eft confidérable, ils font blancs & en bon nombre; dans les autres efpèces qui en ont, leur figure eft ordinairement conique; leur longueur varie, ils font plus longs dans une efpèce, plus courts dans une autre. On peut voir des premiers dans celle de la Table cLxx1x, fig. 220 du même Ouvrage, & des feconds dans celle d’Afri- que à feuilles plates de plantain démontrée au Jardin Royal, & dans une de l'herbier de M. Vaillant qui y eft appelée ficoïde d'Afrique qui s'étend fur terre, qui ef ligneufe, qui a les feuilles triangulaires, glauques & qui finiffent par un poil

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; SÔD E SRMEC 1 E N C ES 345 “court & petit: les trois fuivantes n'ont paru en manquer, mais avoir à eur place des épines dans l'aiffelle des feuilles fur les feuilles même; elles font dans l'aiflelle des feuilles de l'efpèce de la Table cevint, fig. 265 du jardin d'Ef- tham; fur les feuilles dans celles des Tables cxcv, fig. 246, & cxcvir, fig. 249 du même Ouvrage.

Toutes ces plantes & celles qui fuivent, ont lune ou l'autre de leurs parties chagrmées d'un poñatillé plus moins appa- rent, qui, à la loupe, ne paroït être fornié que par, des veffies plus ou moins gonflées; elles le font même à un tel point dans cette efpèce qu'elle eft connue des perfonnes les moins verfées dans la Botanique, & qu'elle en eft appelée la glaciale : en effet, on diroit que ce font autant de petits grains de glace qui couvrent cette plante ; ce ne font, dans la vérité, que de petites veflies qui contiennent un fuc que l’on fait fortir en preflant un peu ces veflies, & qui par-là en impofe encore plus, & fomente le préjugé; préugé qui cependant ne fubfifte plus guère que parmi une certaine e’pèce de per-. fonnes, mais à la place de celui-ci il en a fuccédé un autre parmi les Obfervateurs même. On regarde communément ces veflies conne une maladie propre à cette plante ; idée qui peut être venue de la reflemblance que ces veffies peu- vent avoir avec celles qui s'élèvent fur la peau des hommes dans certaines maladies : pour moi je crois qu'il eft plus na- turel de penfer que ces veffies font, comme l'on dit, des glandes des animaux qui n'ont pas de vaifleaux excrétoires, ds glandes aveugles, & que dans le temps que la plante eft dans un embonpoint confidérable, ces glandes font rem- plies d'un fuc abondant qui les gone: il ne le fait cepen- dant pas autant dans les autres efpèces, mais ces plantes font

- plus moins couvertes d’une forte de eur blanche qui . met peut-être qu'une liqueur femblable à celle qui fe ranale » dans les vefiés de la glaciale , qui étant moins vifqueufe s'exhale de toute la fürface des feuilles &c $y condenfe.

= Quoi qu'il en foit, on peut voir de ces veffies peu gon- - flées & qui ne forment qu'un pointillé blanc ou powpre, Mim. 1749. LX

Trifelium.,

Trefle.

346 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

dans les ficoïdes du jardin d’Eltham, aux Tables cLxxxwv, fig. 277; CLXXXVI, fig. 229; CLXXXIX, fig. 223; CXCI, fig. 237; CxCIN, fig. 240; cxcvi, fig. 248; cxcIx, fig. 253; CCI, fig. 256, 257; CCVI, fig. 262 ; CCvII, fig. 264; coix, fig. 267, 268; ccx, fig. 269; CCxI, fig. 270; ccx1v, fig. 279, 280. On peut voir encore les Tables vI, VI11, X11, XV11, XX du jardin de Leyde, par M. Boerhaave, édit. 2 ; celle de la fig. 1 6, pag: 7, Décad. 2 de Ouvrage de Bradley fur les plantes grafles ; celle d'Afrique

qui s'étend fur terre, qui a des feuilles larges, de petites

fleurs argentées, qui eft annuelle, droite & gravée dans le Catalogue des Plantes du jardin de Nuremberg; celle qui eft appelée ficoïde aizoïde d'Afrique, qui eft petite, qui jette beaucoup de branches, qui a la fleur rouge en dedans, incarnat en dehors, & qui eft du jardin de Leyde. J'ai en- core remarqué les mêmes chofes dans plufieurs autres efpèces, que je ne rapporterai pas pour abréger, & faute de citations juftes. 1

Aucun genre de plantes n’a, à ce que je crois, plus fouffert de divifions que celui des trèfles ; prefque chaque Auteur fyflématique a cherché à en faire quelqu'une: ils fe-font atta- chés à la forme du calice, ou au nombre des femences, ou à la forme de a fleur, même aux poils. M. Linnæus a

imité M. de Tournefort, ou pluftôt il s'en eft tenu à ce

que ce dernier avoit dit, & il na, comme lui, fait qu'un genre de celui qu'on avoit féparé en fept, il y a même ajoûté celui du melilot. En ne m'arrêtant qu'aux filets, je {erois obligé de fuivre M. Linnæus, excepté cependant pour un feul trèfle qui demanderoit à être féparé, & que M. Vaillant

penfe être le trèfle d'Orient à tête cotonneule, rapporté dans

le corollaire des Inftituts: les tiges & les feuilles de ce trèfle n'ont bien que les filets ordinaires des papillonacées, mais les. têtes font chargées de gros filets branchus qui font divifés par des nœuds qui jettent plufieurs autres filets grèles & longs. Cette fingularité eft la feule qui, du côté des filets, mérite: quelque atention; car d'avoir plus ou moins de filets n'en:

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D\ E SNBSLC 1 E Ne C,E08 247 eft pas une qui puifle engager à {éparer des plantes qui cox- viennent par plufieurs autres endroits. Je ne fuivrois donc pas Rivin, qui penloit devoir faire un genre des trèfies ap- pelés pieds de lièvre, à caufe de la douceur dés poils dont les épis des fleurs font chargés: il eft vrai que ces trèfles étant les plus velus & ayant les filets les plus longs, ils peuvent par-là fe diftinguer aifément des autres, fur -tout de ceux qu'on a défignés par la figure ronde ou oblongue des têtes à fleurs. Ces diflérences ne font pas cependant affez effen- tieles pour s'y arrêter ; ainfi je confondrai tous les trèfles enfemble, & même les melilots, en avertiffant feulement que ceux-ci font peu velus, & que cependant, de même que dans les trèfles, on y trouve des filets fur les feuilles, les tiges & les calices.

Ceux des trèfles que j'ai examinés font, entre les efpèces rapportées dans les Inflituts, les 2 —— 1 r, excepté le 6°; de plus, les 1 $ 19, en fuppofant que celui dont l’épi de fleurs eft rond, n'eft qu'une variété de celui qui, en a un oblong; les 22, 24, 26, 27,28, 30, 31; le 32 n'eft peut-être qu'une variété ; les 33, 35; les 36 & 37 ne font probablement auffi que des variétés; les 38, 39, 41,42, 43 ; <ntre ceux du Corollaire, les 4, 7, 10; des melilots, celui du Corollaire, tous ceux des Inftituts , excepié celui d'Egypte, qu'on appelle a/chimelech dans ce pays. J'ai encore le melilot dun.” 129 du Catalogue des plantes de Florence, par Micheli, & celui du n.° 456 du Catalogue des plantes de Naples & de Rome, du mème Auteur; entre les trèfles de ce dernier Ouvrage, les 400, 401, 995 & 1400; entre ceux du premier, les210,211,21 > 217, 219 & 324; de plus, de trèfle & les deux melilots fuivans, cités par Morifon dans fon hiftoire d'Oxford, favoir, le trèfle à fleurs pourpres ra- maflées en pied de lièvre, qui eft velu, annuel, qui a les

feuilles arrondies & l'épi d'un rouge lavé; le melilot du - 9, page 162; celui de la fig. 6, Table xxin1, fe. 2;

| | |

Me trèfle à tête de houblon pourpre; celui à épi en pied de lièvre, ou femblable à épi du thym, & qui eft doux au X x ij

348 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

toucher ; le melilot qui eft fans odeur, qui a des feuilles étroites, dont la femence avoit été trouvée par hafard. Ces deux dernières plantes font du troifième fupplément au Jardin Catholique, première eft du deuxième. L’argenté du trèfle dont les découpures du calice font larges, & forment par leur affemblage une efpèce de petit bouclier, fuivant Profper Aipin, ne vient que du nombre de fes filets, comme le velu de celui que Plukenet appelle, dans fa Phytographie, le grand trèfle velu à petit épi en pied de lièvre. Les quatre fuivans en ont une moyenne quantité : ces trèfles font, celui que Jean Bauhin défigne par fes têtes ramaftes & qui font

roides ; ie grand pourpre, que l'on cultive, qui eft femblable:

à celui des prés, & qui eft cité dans le Synopfs des plantes par Raï; celui du cabinet de Boccone, & qui a l'épi en grappe; celui de Barrelier, dont les têtes font rondes, les

feuilles femblables à celles de la paquerette, les fleurs pour-

pres, qui eft petit & qui vient dans les prés; le très-petit melilot de Syrie, cité par Breynius dans fon Prodrome; & le lotier d'Egypte qui, fuivant Lippi, eft verd, rampant, à feuilles crénelées & étroites, à flipules frangés & fleur jaune ; le petit à follicule & à fleurs renverfées, de Barrelier:

deux trèfles démontrés au Jardin Royal & qui font d'Egypte, Fun a la fleur blanche & les épis en patte de lièvre, l'autre:

eft velu & a la fleur en épi pourpre & de difiérente figure; enfin le melilot à fleurs & femences petites, ramaffées en. un épi épais & petit, & qui eft des mêmes démonftrations.

Je ne fai fi on peut placer avec les melilots celui que

Pctiver dit dans les Adtes d'Angleterre en être un, venir des:

Indes & avoir une fleur blanche, & celui qu'il appelle dans fon Cabinet dela Nature, le très-petit melilot, qui s'élève un peu : ces deux plantes ont des filets en faufle navette; le fecond a même un pointillé femblable à celui des onobrychis. Seroient-ils, celui-ci du moins, du genre de ces dernières

plantes? je penferois volontiers, avec Dodon, que le trèfle

qui vient d'Amérique peut être rangé avec le trèfle bitumi- eux, & par conféquent ayec les p/Gralca, dont le bitumineux.

PUIVE

DFE SIMOMNET E N''c'EMSN 349 éft une efpèce, comme on la autre part. Dodon 12p- porte que ce trèfle d'Amérique a une odeur qui approche beaucoup de celle que le bitumineux répand ; outre une grande quantité de filets blancs, droits & fins dont les feuilles, les tiges & les calices font garnis, je lui trouvé des glandes véficulaires très apparentes d'un noir d'un foufre rouge, fur les mêmes parties, & de plus, fur les pétales. On a dans un des* Mémoires précédens, que le trèfle bitumineux a de ces glandes : il ny a donc pas grande difhculté à réunir ces deux trèfles fouis lélimême genre.

Une plante qui eft dans l'Herbier de M. Vaïllant, fous le nom de Æmonium, qui forme un réfeau, & qui a le nom de Flacourt pour citation, me paroït devoir faire un nouveau genre; fa fleur approche fans doute, fuivant M. Vaillant,

beaucoup de celle des Amonium, puifqu'il rangeoit cette plante:

fous ce genre : les houppes à cinq ou fix filets longs & roides dont les tiges font couvertes, me paroïffent demander que cette plante en foit féparée. Si les plaques blanches & rayonnées qui couvrent prelque toutes les parties de plufieurs dpèces de /imonium dont je vais parler, ne fe difloivoient pas auffi aifément, au moyen de*la falive, qu'elles le font, on pourroit penfer qu'elles ne font que des houppes imparfaites, . & que dès-là le limonium de Flacourt ne diféreroit de ce

côté qu'en ce que ces houppes ne feroient compolées que

de filets entièrement féparés; mais les plaques font difio-

lubles, & dès-à je ne les crois formées que par une matière

qui a tranpiré des glandes véfieulaires qui paroiflent aifé- | ment après ka diflolution de la nutière blanche; je crois | que ce fentiment eft d'autant plus vrai, que plufieurs /mo- _ nium n'ont point ces plaques, quoiqu'ils aient les glandes | véficulaires , qui conviennent même avec les autres en ce » qu'elles paroifient être d'un noir aflez foncé. Cette différence d'avoir ou de ne point avoir de plaques eft fi frappante dans certaines efpèces, que celles qui en ont eu font pre£ que toutes blanches, & d'un blanc qui a quelque chofe "d'argenté: malgré cette différence, je ne penfe pas cependant

Xx ii

%

Limonium.

Sratice,

so MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYaLE

qu'on puifie féparer ces plantes ; l'une ou l'autre de ces pro- priétés peut changer ; une plante chargée de ces plaques, peut s'en dégarnir; une qui n'en a pas, peut en devenir blanche; une tranfpiration devenue plus moins abondante ou plus ou moins ténue, pourroit faire ces changemens : ainfi je crois qu'il ne faut pas toucher à ce genre, & même qu'on peut, comme a fait M. Linnæus, y joindre celui des flarice, les glandes du moins ne l'empêchént pas, elles font les mêmes dans ces plantes, il y a de plus entr'elles la même différence qu'entre celles des Zimonium. J'ai trouvé dans une flatice les plaques qui manquent à toutes les autres que j'ai examinées; cette elpèce eft même privée des filets qu'on trouve ordi- nairement dans celles qui manquent de plaques, ce qui fe remarque aufli parmi les Æmonium : ainfi il y a entre ces plantes une conformité qui eft affez grande pour qu'on ne les fépare pas, dès qu'il y en a une par les fleurs pour le moins auft confidérable,

Cela fuppolé, je dirai que des ffatice rapportées dans les Inflituts, il n’y a que la dernière que je n’aie pas vue, & que l’efpèce qui vient en Portugal, qui a des feuilles fem- blables à celles de la fcorfonère, eft la feule qui m'ait fait voir des plaques: le nombre des /imonium elles fe trouvent eft plus grand; les efpèces qui ont des feuilles femblables à celles du plantain & qui font citées dans les Infituts & dans le Corollaire, font de ce nombre; ce font même ces plaques qui ont fait appeler les feuilles d’une elpèce, feuilles recou- vertes de bulles. L’efpèce dont les feuilles font comparées dans ce premier ouvrage à celles de la vipérine, n'a auffr fes feuilles fi rudes qu'à caufe des plaques dont elles font recouvertes; {a comparaifon que l'on a faite des feuilles de deux autres efpèces avec celles des oliviers ou des halimes, n'a encore que cette origine; les feuilles des oliviers & celles des halimes font chargées de houppes imparfaites d’un blanc argenté, qui reflemble par cette couleur aux plaques des /imo- nium. Les autres efpèces de ce dernier genre qui ont des

plaques & qui font des Inftituts, font le petit à feuilles de

DER N, MECS

D'E-SMÔNE TE NC E 5°! 351

aquerette & à tige de fenouil, elles font en petit nombre;

celui d'Efpagne, qui eft bleu & articulé; celui-ci eft de plus faupoudré d'une fleur blanche qui, nuée avec le fond de Ja feuille, donne à cette plante la couleur que lon à fait entrer dans fa dénomination: l'efpèce qui vient en Portugal & qui a les feuilles en lance, a bien aufli de cette eur outre les pla ques, mais elle n'y eft pas aufii abondante. La petite efpèce qui vient de Grèce & qui a des feuilles de bafilié, en eft toute blanche; celle de Portugal à feuilles d'oreille d'ours, en 2 aufli abondamment, & j'y de plus remarqué que fes glandes véficulaires font confidérablement gonflées ; elles fouf. frent la même chofe dans celui qui s'élève en arbriffeau, qui vient du cap de Bonne-efpérance, qui a les feuilles de glo- bulaire, la fleur grande & purpurine, fuivant M. Vaillant, qui l'a ainfi dénommé dans fon Herbier ; celui de Grèce à petites feuilles en lance & qui reffemblent à celles de 13

- paquerette, un autre du même pays & qui a des feuilles . fmblables, nrais qui forme un arbriffeau & qui eft pro/ifere, g: q P

ont les feuilles & les tiges chagrinées par ces gluides qui y forment de gros mamelons : ils ont cela de particulier dans éette dernière efpèce, qu'ils y paroïffent ouverts. La fleur blanche dont jai parlé, leur eft peut-être dûe en partie: cette fleur manquoit à celui du cap de Bonne- éfpèrance, mais ces mamelons portoient une petite plaque. J'ai encore trouvé de ces plaques dans celui du n.° $89 du catalogue des plantes de Rome & de Naples par Michéli, dans celui

. qui porte des galles, qui n'eft probablement qu'une variété

de celui à feuilles d’halime: dans celui que les Indiens ap-

_ pellent soullarabao, que Surian dit être venimeux, & qu'il

cite au n.° 60; elles font rares dans celui-ci, je n'en

que fur les jeunes tiges elles ne forment fouvent que de

petits grains arrondis; à leur place, le defflus & le déflous :

des feuilles ont un grand nombre de: glandes véficulaires un:

peu élevées. * Dans les fuivans, ces glandes ne prennent que peu point:

d'extenfion, elles y forment pluflôt de petites cavités, elles:

352 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

ne font point recouvertes de plaques, & on ne voit pas même fur les parties qui en ont, de fleur blanche qu'on puifle leur attribuer & regarder comme le fupplément aux plaques. Ces efpèces font, celle qui s'étend fur terre, qui par fes branches forme un réféau, & qui eft citée par Boc- cone; celle de Lxælius, qui a des branches de fenouil; la petite des bords de la mer, qui a des feuilles de paquette; celle de Narbonne qui eft aufli des bords de la mer, qui s'élève beaucoup & qui vient plus tard que celle que l’on appelle le grand des bords de la mer, qui lui eft femblable par les glandes.

S'il eft vrai que la plüpart des /monium ne foient-que des variétés de ce dernier, comme M. Linnæus le prétend dans le Jardin de Clifort, il fuivra de-là que des plantes je n'ai que des glandes véficulaires, peuvent avoir des plaques & de la fleur dans certaines circonftances, comme je fai même rapporté plus haut. Cet Auteur ne regarde que comme

des variétés celui qui a les feuilles de vipérine, celui qui 4.

les tiges de fenouil, celui dont les feuilles reflemblent aux feuilles d'olivier, celui d'Orient à feuilles de plantain, celui à feuilles d'oreille d'ours des Initituts, dont je parlerai plus bas, & plufieurs autres qu’on peut voir dans cet Auteur; mais comme il auroit toûjours fallu rapporter les différences que ces plantes avoient du côté des glandes, je les ai confidérées comme fi elles euflent été de vraies efpèces; & ne fachant pas fr le fentiment contraire eft bien établi, je continuerai fur le mème plan pour celles dont il me refte à parler. Ces efpèces ont, avec les glandes véficulaires & quelquefois les plaques, des filets plus ou moins grands & plus ou moins abondans; aucun n’en eft plus fourni que les deux étrangers à feuilles de ceterac, dont l'un eft annuel & l’autre vivace: * ces filets y font longs, blancs & coniques; il y en a für le bord externe des feuilles, fur les grofles nervures du deffüs & du deflous des feuilles, & fur les côtes des tiges. Is ne font guère moins abondans dans celui de Crète à feuilles de ge- nevrier, & dans celui d'Orient à feuilles étroites d'œillet,

qui

à ; £ à ë

DE SWS,C 1 É NC EjS 353 qui n'eft point épineux, qui a une fleur purpurine & en épi; celui de Grèce à feuilles d'hyfope, que M. de Tournefort a, comme les deux derniers, cité dans fon Corollaire, eft velu fuivant cet auteur: je n'ai pas fes filets, if pouvoit les avoir perdus, & je crois que cela peut arriver à plufieurs. J'en ai, par exemple, trouvé fur les tiges & les pédicules de celui d'Orient à feuilles de plantain, qui avoit été cultivé au Jardin Royal, tandis que fur le même, tiré de l’herbier de M. Vaillant, ils m'ont paru manquer & y être remplacés par beaucoup de plaques blanches ; ce qui peut être une fuite

de fa culture ou de la non culture que ces différens pieds peuvent avoir eue: il n'eft pas arrivé la même chofe à la très-petite efpèce des bords de la mer; dans l'un & l’autre état elle a confervé les courts filets que j'y ai trouvés fur les tiges ; les feuilles de celle d'Efpagne, qui font découpées, fimiflent par une longue pointe qu'on pourroit regarder comme un filet, mais ce font les feuls que j'y aie oblervés. Il fuit donc du détail de toutes ces oblervations, que les Zimonium & les ffatice conviennent par les glandes véficulaires, qu'ils peuvent avoir avec ces glandes des plaques blanches & argentées, de la fleur également blanche, ou qu'ils peuvent manquer des uns ou des autres fans varier fur les glandes véficulaires.

Des plantes qui conviennent avec les /monium, en ce que Ghobularia, leurs glandes véficulaires donnent une matière blanche qui Der refte fur la glande, & y forme une page fimplenient He renible un grain, feront le premier article de Ta troifième partie de ce Mémoire, ou de celle qui renfermera les obfervations fur les plantes dont la réunion des genres eft conftatée par le rapport des filets & des glandes; les plantes de ce premier article font les globulaires dont M. Niflole avoit féparé celle qu'on appelle herbe terrible, à caufe de fa forte vertu

pureative, & à qui il donnoit le nom d’a/ypum, qu’elle avoit . déjà porté anciennement. M. Linnæus a réuni cette plante - aux autres globulaires, comme M. de Tournefort l'avoit fait; « .dle a fur les feuilles, les tiges, les écailles des têtes, ces 4 Mém, 1749. . Yy

Petafites, Pérualite. Tffilago , Tuililage. Cacalia , Picd de che- val.

54 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE points blancs dont j'ai parlé, & qui s'obfervent également fur les mêmes parties de la globulaire des montagnes, qui eft très-bafle & qui rampe même fur terre, de celle d'Orient qui a les fleurs éparfes le long de la tige; celle-ci a encore une fleur répandue fur les mêmes parties: les points font plûtôt des plaques femblables . à celles des Æmonium, dans l'efpèce qui eft très-petite, qui vient fur les Alpes, & qui a des feuilles d’origan. La globulaire ordinaire & celle des Pyrénées, à feuilles oblongues & à tiges denuées de feuilles, ont les glandes fans cette matière, mais elles y font auffi abondantes & fur les mêmes parties; toutes ces efpèces font encore garnies de filets coniques en petit nombre fur les feuilles, les tiges ou fur les têtes compolftes de l'afflemblage des fleurs.

Aucune réunion n'aura été plus jufte que celle que M. Linnæus a faite des genres de a pétafite, du tuflilage, & du pied de cheval ou cacalia, f on ne veut pas s'arrêter aux différences de la fleur, obfervées par M's de Tournefort & Vaillant; ce que j'ai vü, concourt à établir de plus en plus la juftefle de cette réunion. Toutes les plantes de ces trois genres, citées dans les Inftituts, ne n'ont fait voir aucune différence confidérable; ce n'eft toüjours que du plus au moins; elles ont toutes fur le deffus & principalement fur le deflous de leurs feuilles, & fur les tiges, des filets à valvule de dif- férentes grandeurs, dont il fort par le bout fupérieur un fl cotonneux, femblable à ceux qui forment un duvet épais entre les filets; ce qui rend ces plantes ordinairement blanches, & d'autant plus blanches qu'elles ont plus de ce duvet: c'eft Ja même chofe dans le tuffilage des Alpes, à feuilles oblongues, dans celui des mêmes montagnes, à feuilles rondes, &qui, füivant Gafpar Bauhin, eft tantôt plus, tantôt moins blanc,

de forte que quelquefois il l'eft fi peu, qu'il en paroît lifle.

H y a encore peu de différence dans celui à feuilles de pirole, qui eft le fecond du Mémoire de M. Vaillant donné au pu- blic en 1720, & dans la cacaha des Alpes, à feuilles épaifles, lifles, anguleufes & vertes des deux côtés, rapportées dans

Linnæus a réuni fous le même genre toutes ces plantes qu

DES SCIENCES 355 l'ouvrage de Micheli fur les plantes des environs de Rome & de Naples; cette différence confifte en ce qu'il ne fort point de til cotonneux par le bout des filets, & qu'il ne fe trouve pas de duvet entre ces filets; je n’y en ai pas du moins obfervé. ;

La divifion que M. Vaillant a faite des jacobées en trois So/idago, genrés, au moyen de la figure des feuilles, feroit bien com- En LE mode pour établir ces genres, fi on pouvoit s'en tenir à ces os principes, & s'ils étoient aufi certains que ceux qu'on tire Jacobée. des fleurs; mais ils ont toüjours paru infufffans, & l'on a Jucobæoïdes, toûjours cru que dès que des plantes convenoient par les Jacoboïde. fleurs, on ne devoit pas s'arrêter à la figure ni à la forme Virga aurea,

des feuilles : c'eft ce qui eft arrivé pour les jacobées. M. Me Senecio ,

: a TAN \ ere Seneçon.

M. Vaillant avoit divifées, & il y a même ajoûté les verges yr0pæaf

d'or, en tirant du nombre de celles-ci & des jacobées quel- rrum, ques efpèces qu’il a fait pañler aux fenecons, & de celles-ci Jacobéaftre. aux jacobées, ou dont il a fait des nouveaux genres. En fui- fr; Attre. vant en partie M. Vaillant, je crois qu'il a eu raifon dans ces Hu changemens, & qu'il auroit peut-être en faire encore: j'ai Dnicum, déjà même fait voir dans le Catalogue des Plantes des envi- Doronic. rons d'Eftampes, que l'on pourroit réunir fous un même genre un certain nombre de jacobées qui ont une efpèce de filets que l’on ne rencontre pas dans les autres : ces fllets font ceux qui fmiflent par une cupule. La Plüpart des jacobées ou des verges d'or qui ont de ces cupules, ont été reconnues pour être vifqueufes au toucher, & on leur en a même donné le nom : ces plantes font, les 14, 17, 18,7 9 verges d'or du Mémoire de M. Vaillant, & la 21° jacobée du même Au- teur. Ces cupules font mélées avec les filets à valvules fur les feuilles , les tiges & les têtes de fleurs ; elles jettent une liqueur claire, limpide &, comme je F'ai dit, aflez vifqueufe pour qu'on s'en aperçoive au toucher.

M. Vaillant rangecit au nombre des confoudes farrafines, le fecond doronic à feuilles de plantain, & celui de Portugal

+ qui a auffi des feuilles de plantain, Si tous les autres doronics

Yyi

356 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

cités dans le Mémoire de M. Vaillant, excepté les 2, 4, 7 que je n'ai pas vüs, n’avoient pas également des cupules fur les mêmes parties mélées avec les autres filets ; f1 de plus ils n'avoient pas des glandes globulaires d’un foufré plus ou moins doré ou plus moins rougeâtre, comme les autres, auxquels il faut joindre celui des Alpes à feuilles arrondies couvertes d'un duvet cotonneux qui forme une toile fem- blable à celle d’une araignée, celui de Virginie à feuilles nerveufes, blanches en deflous, plus grandes que dans les autres, & dentelées fur leur bord ; fi, dis-je, tous ces doro- nics ne convenoient pas par les glandes & les filets, je pen- ferois qu'on pourroit les joindre aux jacobées & aux verges d’or vifqueufes; mais cette uniformité dans les doronics me paroïît empêcher cette réunion, d'autant plus que les jaco- bées & les verges d'or ne n'ont pas fait voir de glandes globulaires.

I faut encore Ôter du nombre des verges d’or de M. de Tournefort, & de celui des afler de M. Vaillant, les efpèces qui, felon M. Linnæus, font des erigeron , favoir, la verge d'or annuelle & de Virginie, les affer 43 & 44 de M. Vaillant, celui qui vient dans les campagnes , qui eft äcre, & qui a la fleur bleue, le feneçon de Buenos - aires à fleur purpurine , & qui a les feuilles de corne de cerf, auxquels on peut, à ce que je crois, joindre l'affer qui reffemble à celui des montagnes qui eft pourpre, ou à la globulaire. Les feuilles, les tiges, les têtes des fleurs, font plus ou moins garnies de filets, qui n'ont que deux ou trois valvules, qui ont une certaine roideur, qui ne donnent pas de fils cotonneux & qui n’ont que très-peu ou point de duvet entre eux, ni même de glandes globulaires.

Il eft vrai que cette dernière propriété ne péut pas encore être regardée conime capable de faire féparer des plantes elle fe trouveroit, de celles elle ne fe trouveroit pas. J'ai, par exemple, de ces glandes globulaires à plufieurs afler, & elles m'ont paru manquer à plufieurs autres; ceux des after de M. Vaillant elles fe découvrent, font les

DES SCIENCES 357 1, 15, 16; les efpèces d'entre ceux qu'il appelle aunées, font les 1,3, 6,7, 11, 13, 19 25,38, le 45 des Inflituts, & celui du n.° 23 du Catalogue des Plantes de Florence, par Micheli : ces glandes font ordinairement d’un jaune doré, dont le fond varie pour la nuance ; elles étoient cependant noirâtres dans la 15, & dans la 16 d'un joli verd d’émeraude, d'un brillant plus ou moins éclatant ; cou- leur que je ne me fouviens pas d'avoir obfervée dans les | glandes d'aucune autre plante; elles font bien fouvent verdä- tres, comme dans la 3 8°, mais elln’ont pas le beau couleur d'émeraude de celle-ci. Une plante que M. Vaillant penfoit être la jacobée d'Afrique à feuilles entières, ondées, blan- cheîtres , & à fleur d’un jaune d'or, m'a fait voir des glandes globulaires de ce doré, mais plus brillant que celui de la leur, avec les filets à valvule des autres, & fur les mêmes parties, c'eft-à-dire, fur les feuilles, les tiges, les écailles des têtes à fleurs.

Entre les affer je n'ai pas remarqué de glandes globu- laires, il y en a dont les filets font roides & petits, dans les autres ils font longs, gréles & doux, quelques autres m'ont paru Jifles: ces derniers font les 10, 11, 12, 19; je ne les crois cependant liffes, que parce qu'ils ont très-peu de

: fllets, ou qu'ils tombent très-promptement : les feconds font les 6, 7, 22, 33, 34, 35, 46, 47, celui de Canada à très-grandes feuilles de verges d’or, & celui des Alpes à fleurs jaunes , & à feuilles de conife ordinaire. Les premiers font les 2, 14, 17, 18, 20, 21,25, 26, 27, 29, 30, 35 39, 41, 45, qui ne diffèrent guère des fuivans, favoir , l'affer d'automne à petite fleur bleue, qui s'élève plus haut que bien d'autres, & qui eft des démonftrations du Jardin Royal; celui de Virginie, qui s'élève en fous- arbriffeau cité par Jonfton ; le plus petit des montagnes à . fleur bleue, rapporté dans les Inftituts; celui du Canada à

- feuilles très-étroites, à petites leurs jaunes & en umbelle;

. celui du même pays, qui a les feuilles très-étroites, ferratu-

} | F rées, & une fleur purpurine; celui de Ja Chine à larges feuilles,

1 Yyi

358 Mémoires DE L'ACADÉMIE RovaLE velues, très-grandes, à fleur d'un pourpre violet, & qui eft annuel; celui d’Acadie, qui eft très-haut, rameux, & à fleurs blanches, envoyé par M. Sarrafin pour le Jardin Royal, les trois précédens font aufli démontrés ; enfin la draba, qui reflemble à une conife, qui a les feuilles étroites , les fleurs jaunes ; dont les aigrettes s’'enlèvent aifément, & qui a été ainfi dénommée par Surian, & mile au nombre des affer dans FHerbier de M. Vaillant. |

On peut faire la mème divifion des aunées ; celles qui m'ont paru lifles font, leo, 31, 32, je n'ai que de très- petites pointes fur le bord des feuilles de la 28e: Jes 12, 14, 16, 17, 26, en ont qui font courts & roides ; celles ils font beaucoup plus longs &. plus doux, font les 4, 8,9, 16,38.

Trois efpèces différentes de celle-ci font blanches à caufe d'un duvet de cette couleur, qui tranfpire des furfaces même; lune eft la feconde, qui en avoit peu en deflus des feuilles, Von voyoit des filets ordinaires: la 27 &la 37 n'ont paru manquer de ces filets, mais être encore plus drapées du duvet cotonneux que la deuxième; ce duvet ne manque pas entiè- rement , à ce que je crois, aux autres efpèces, elles en jettent quelque peu, je lai du moins trouvé à plufieurs.

J'ai dit plus haut que l'on pourroit faire un nouveau genre des jacobées & des verges d’or qui ont des glandes à cupule ; Les affer & les aunées l’on trouve de ces glandes, ne feroient peut-être pas trop éloignées de ce genre. Ces aunées font la 1 8.€, j'en ai fur le haut des tiges, & elles font roufleîtres ; la 3 3.° qui en avoit fur les feuilles, les tiges & les têtes des fleurs : elles y étoient en grande quantité, balles & rougeîtres. Les mêmes parties en étoient auffi char- gées dans la 30°, & leur couleur étoit jaunätre. J'en fur le affer, & je fuis incertain fi le 3 r.° n’en a pas auf: au refte elles n’y auroient, comme dans le 4.°, qu'une couleur indéterminée d’eau claire, limpide & tranfparente. Ces cupules font foufirées & donnent une liqueur gluante dans Je très-petit «fer d'Egypte qui eft velu, qui jette beaucoup

h

DES SCIENCES. 359 de branches, qui a une petite fleur jaune; celui d'Acadie à feuilles femblables à celles du foleil, & qui eft des démonf. trations du Jardin Royal, celui qui a une grande fleur, qui eft rude, & dont les écailles des têtes font recourbées par la pointe , cité dans de Jardin d'Eltham, donnent auflr une liqueur vifqueufe , mais la cupule eft fans couleur déter- minée. F Revenons maintenant aux confoudes farrafimes, aux jaco- bées & aux verges d'or, dont nous nous fommes infenfible- ment beaucoup écartés : quoiqu'en général les confoudes farrafines & les jacobées donnent toutes un duvet blanc qui fuinte des parties mêmes qui en font couvertes ,: il y a cependant des elpèces ce duvet eft beaucoup plus abon- dant que dans d’autres, de forte que l'on pourroit divifer \ces plantes en deux fections, dont une féroit des efpèces qui en ont beaucoup, & la feconde de celles qui en ont peu. Les confoudes farrafines de la première {etion font les 1 FA 26,27; 2 9; les jacobées de la même fection font les 2, 4, 6, 32 36, 38 40 ; les confoudes farrafiines de: la feconde fection font les r 4, 6, 7, 10, 13 : cellesci n'ont prefque que du duvet, quoiqu'il foit peu abondant ; elles paroïflent lifles lorfque le peu qu'elles donnent eft tombé; elles n’ont que quelques courts filets , principalement fur 1e bord des feuilles ; {es fuivantes ont un peu plus de ces filets, quoïiqu'ils y foient auffi très-rares, de même que le duvet: ces plantes font les 1 5, 16, 20, 24, 26 confoudes farrafines ; leupatoire de la Table LXXXVI, fig. s de J'AI magefte de Plukenet ; l'Aieracium cotonneux à feuilles entières ‘du Cabinet de Boccone, que M. Vaillant plaçoit, dans fon ‘Herbier, au nombre des confoudes farrafines. Je n'ai pas même trouvé cette petite quantité de duvet & de filets dans da 11, mais une fleur blanche qui donne une teinte de blanc à toute la plante, excepté aux fleurons & aux demi: #leurons: cette fleur blanche ft fans doute analogue: à {+ matière qui forme le duvet dans les autres efpèces. Cette ma- ière ef apparemment plus ténue dans la onzième & moins

360 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE gluante, ce qui fait qu'elle ne peut pas fe tirer en un fif long & cotonneux. Les jacobées de la feconde partie varient peu auffr entr'elles, elles ont peu de duvet & de filets; c'eft ce qu'on peut voir dans les 1, 2, $, 10 14, 16, 17, 19, 20, 22, 24 27, 29, 32, 42; dans celle d’A- frique qui s'élève en arbrifleau, qui eft des bords de la mer, qui a des feuilles femblables à celles de l'arroche de l'ifle Marianne, & qui eft démontrée au Jardin Royal; dans celle qui donne beaucoup de fleurs & qui approche du feneçon par fes feuilles, fuivant Lippi; dans celle à umbelle qui a des feuilles d'ageratum , une fleur d’un jaune orangé, & qui vient de Mariland, fuivant Raï; dans celle du mont Etna qui a des feuilles d’un verd de mer & découpées, & qui eft rapportée dans le troifième fupplément au Jardin Uni- verfel ou Catholique. Je n'ai point obfervé, comme je fai dit plus haut, de glandes globulaires dans ces jacobées; mais Ja 10 &la 25 mont fait voir des efpèces de véficules dif perfées fans ordre fur les feuilles, & qu'on auroit dit être des gouttes d'huile extravafées entre les membranes de ces feuilles.

Les jacobées que M. Vaillant avoit défignées par le nom de jacobæoides, font encore bien femblables du côté des filets & du duvet, qui y font très-rares : la feconde en avoit un peu plus en deffous des feuilles que les 1, 3, $, que j'ai auffr examinées : la troifième m'a même paru liffe &, comme les autres, fans glandes globulaires. pa

Enfin, pour finir ce qui regarde les jacobées , je dirai que la première des jacobæaffrum , genre qui a été confervé par M. Linnæus, & qu'il appelle ofhonna ; je dirai, dis-je, que cette plante eft toute blanche de duvet, qui fuinte de toute fa furface, & des filets dont elle eft garnie. Je la crois privée de glandes globulaires.

Ces dernières glandes font en général peu communes parmi les verges d'or; j'en ai cependant trouvé dont la couleur n’é- toit autre que celle des feuilles, dans les 8, 9, 15 de M. Vaillant, dans les 18, 19, 25 de M. de Tournefort, dans

celle

DE: SAME NC, EUSE 361 celle Hi Canada, qui eft bafle & qui a des feuilles de fro- mium, dans la petite d'Amérique à feuilles de srachelium, dans une du même pays, qui a les feuilles plus étroites & les tiges rougeätres, & dans une du Canada qui eft très-haute, qui a une belle grappe de fleurs, & dont les feuilles & les tiges paroiffent liffes; elles ont à la vérité peu de filets, aufli- Dies que toutes les précédentes qui, pour la plüpart, paroiffent liffes au premier coup d'œil. Il n'en eft pas de même de celle de la nouvelle Angleterre, qui a les feuilles larges &c rudes; de celle du Canada, qui eft très-haute, & dont le deflous des feuilles eft blancheître; non feulement cette fur- face, mais encore la fupérieure, les tiges & les têtes à fleurs font toutes blancheïtres du nombre des filets qui les couvrent, & qui cependant ne jettent pas plus de fils cotonneux que les furfaces mêmes, ce qui me paroït commun à toutes les verges d’or, ou de n’en avoir que très-peu. On peut le véri- fier dans les efpèces fuivantes du Mémoire de M. Vaillant, qui font les 1—6, 10—13, 15, 16; dansles 28, 29 des - Inftituts; dans une que Sarrafin appeloit verge d’or du Canada, | à feuilles étroites & non ferraturées; dans trois qui viennent d'Amérique, dont une eft petite & à feuilles arrondies , ai- * gues & à dents fur leurs bords; la feconde n’en diffère que parce + ue fes feuilles ne font pas aigues & qu'elles font plus velues; troifième s'élève très-haut, elle porte une belle pannicule

de fleurs qui font plus grandes que celles des autres elpèces; * dans une*du Canada qui s'élève plus que les communes, qui “a des feuilles femblables à celles du petit faule, & dans une “qui ne diffère de celle-ci que parce que le haut de fes tiges ft rougeitre: les filets du deffus des feuilles y font beaucoup plus grêles que ceux du defloûs, ce que j'ai pa Hs obfervé dans toutes les efpèces de verges d'or. | 4 . Les obfervations que j'ai faites fur les feneçons, font moins générales; j'ai va dans l'ordinaire, des filets à groffes val- muules; ils font très-courts & avec des valvules moins ren- flées dans celui d'Amérique qui s'élève très-haut, & qui a des feuilles très-Jarges, dans le paring-cnakka du Jardin de

Mém. 1749: + Zz

:

rdt tt À

Gerarium,

Bec de grue,

362 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Malabar. La jacobée de Mauritanie, à feuilles de corne de cerf, que M. Vaillant plaçoit dans fon Herbier avec les feneçons, eft rendue blanche par un duvet qui n’eft guère moins épais que celui de a jacobée des bords de la mer, du genre de laquelle il faut peut-être la rapprocher : le fenecon qui eft très-haut, qui vient fur les montagnes, & qui a des feuilles” de limonium, eft un peu moins blanc que ce dernier; le duvet tombe vite, & l'on voit enfuite des filets courts d’où ce duvet fortoit en partie. Celui de Virginie qui fait larbriffeau & qui a des feuilles d'arroche, eft couvert de plaques blanches, diflolubles à la falive, & qui, à ce que je crois, viennent d’une matière qui a fuinté des glandes globulaires qui font deffous: les autres feneçons me paroiïflent avoir auffi de ces glandes ; je les ai du moins diftinétement aperçües dans le feneçon ordinaire, elles font en grande quantité & d’un jaune doré, & dans le paring-cnakka , elles font irrégulièrement placées. Il eft aifé de concilier ces irrégularités; je ne ferai pas cepen- dant cette conciliation , pour pañler à des plantes d’autres genres & d’autres claffes.

L’efpèce de diftinétion qui a été mife par la Nature même entre les becs de grue, a depuis long-temps féparé les Bota- niftes de fentiment fur ce qui devoit être afhrmé touchant 1 le genre de ces plantes: M. de Tournefort n’en a fait qu'un, que Rivin avoit voulu divifer en deux ; M. Vaillant, quine M laïfloit guère échapper l'occafion de faire de nouveaux genres, les avoit rangés fous plufieurs : M. Linnæus a fuivi le fenti- « ment de M. de Tournefort, que Dillenius avoit, dans le Jardin d'Eltham, propofé d'abandonner, en faifant revivre M Y'angien, auquel il n’ajoûtoit qu'un nouveau nom que Burman M a adopté, dans la sie De des plantes d'Afrique, en. établiflant le genre que Dillenius avoit encore laïflé indécis.. Burman appelle donc geranium bec de grue celles de ces: plantes qui ont des fleurs régulières, & pelargonium ou bec de cigogne celles dont les fleurs font irrégulières ; il ef en cela oppolé à Rivin, qui donnoit le nom de geranium as celles qui avoient les pétales de la fleur irréguliers, & celui

HpÉELS* BAGUE N C:EuS 263 de gruinalis à celles dont les pétales font réguliers ou égaux. - J'aurois bien voulu fixer les idées par mes obfervations, &ctrouver dans les unes ou les autres de ces plantes des glandes ou des filets totalement différens; mais au contrairé tout y -eft femblable, quant à la figure, la différence ne confifte que dans le plus ou le moins par rapport à la grandeur & à la _ quantité. Dans le nombre confidérable de geranium que j'ai examinés, je n'en ai point qui n'euflent des filets coni- ques & des glandes à cupule, ou que je ne düfle préfumer en avoir : la plus grande différence que j'aie trouvée, eft celle dont j'ai déjà parlé dans le Catalogue des Plantes des environs d'Effampes, à l'article du petit bec de grue à feuilles de cigue & qui eft couché fur terre, on y remarque de gros filets qui approchent de la forme d’une larme batavique qui feroit un peu évalée par fon gros bout. J'ai cru devoir les _ regarde” comme des filets à cupule un peu différens des ordinaires, mais qui ne l’étoient pas eflentiellement, & je _ crois devoir toüjours penfer de mème; ainfi je ne féparerai » pas ce geranium des autres efpèces. Ces plantes font les 2 5 du Jardin de Cliflort, excepté le } 23° queje n'ai pas eu en ma difpofition; à ces 25 il faut _ ajouter les 10, 13, 27,du Prodrome du Jardin de Leyde, : par Van Royen; les 1, 2, 3, 7 du corollaire des Inftituts; & » de ce dernier Ouvrage, les 11, 20, 26, 27, 375 42; Az: 955062, 64, 65; 70,71, 75: 79, 81; du Pinax . de Gafpaï Bauhin, les 2, 3 de ceux à feuilles d’anémone, -& le7 de ceux à feuilles de gigue ou de myrrhis ; le 20 du « Phytopinax du même Auteur; le 12 du Catalogue des . Plantes de Florence par Micheli; celui du n.° 568 fig. 1245 » des Oblervations par Barrelier; celui que Rivin a défigné par fon odeur defagréable; celui qui a une groffe racine, qui vient fur les rochers, & qui eft gravé dans le Catalogue des Plantes » de Montpellier par Magnol; deux de l'Hifloire des Plantes par Raï, qui viennent fun & fautre en Afrique, & dont e premier eft bas, a une racine en forme de rave, les feuilles Aifies au premier coup d'œil, les fleurs en umbelle, de couleur Zzij

364 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE de chair & flrices ; les fleurs du fecond font marquées de deux taches pourpres , les feuilles font découpées & reffem- blent à celles du grofeillier. A ce grand nombre il en faut encore joindre deux qui font cités dans les ouvrages de Pé- tiver, fous le nom de bec de grue d'Afrique qui reffemble à la tormentille à cinq feuilles, & de bec de grue fanguin à petites feuilles plus profondément découpées que dans les autres qu'on appelle fanguins ; deux qui font rapportés par Micheli, qu'il a appelés, Fun bec de grue columbin des mon- tagnes, qui vient fur les rochers, qui a une très-grande racine, de petites feuilies profondément découpées & une fleur d'un pourpre tirant fur le noir ; l'autre, bec de grue des Alpes à feuilles de coriandre, à grandes fleurs pourpres & à très- longues racines; un que Boerhaave défignoit par fes feuilles ‘en pattes de columbin, par fes fleurs d'un rouge lavé; celui ue Morifon dit être annuel, petit, venir dans les lieux hu- mides de la Bohème & avoir une fleur d’un pourpre violet ; un des environs de Memphis à feuilles de guimauve d'un verd de mer, plus épaifles que dans les autres, à fleurs d’un violet clair & d’un or éclatant en dedans; enfin les trois fuivans démontrés au Jardin Royal; lun avec le nom de bec de grue à feuilles de myrrhis, qui vient de la Chine & qui a une petite fleur couleur de chair; le fecond, avec celui de bec de grue à petites feuilles de myrrhis & à grandes fleurs rouges ; le troifième, avec celui de bec de grue fanguin qui eft de la Chine, qui a des feuilles larges & une petite

fleur. pa

Ïauroit été fans doute beaucoup trop long de rapporter en pailant de chaque efpèce ce en quoi elle diffère des autres, il fufira de dire en général queles efpèces qui viennent dans les. lieux humides, qui font appelées batrachioïdes , nYont paru. être les plus velues, avoir des filets des plus roides ; que les, kæmatodes fanguins en ont une quantité médiocre; que: ceux à feuilles de myrrhis & de cigue en font affez garnis, de: même que la plüpart des autres ; que ces filets font coniques, fimples; que les plus petits fe recouxbent ordinairement en:

à

DE SUNSNC 1 E Ni © ES: 365

__croffe par le haut ; qu'ils font encore fouvent couchés de haut en

Bas, fuivant la fongueur des parties qu'ils recouvrent ; que non feulementles tiges & les feuilles, maiscommunément les calices

& les filiques en font chargés; que les geranium d'Afrique font pour l'ordinaireles mieux fournis de glandes à cupule, & que ces glandes fe trouvent plus abondamment fur les tiges à fleur & vers le haut que dans tout autre endroit; qu'il fort de ces cupules, dans plufieurs efpèces, une liqueur dont la ténacité fe fait fentir lorfqu'on touche ces plantes, ou qui fe fait connoître par l’odorat, fur-tout dans les geranium à feuilles de cigue: cette odeur eft des plus douces dans celui qui a une fleur d’un jaune trifte; elle eft des plus fortes dans celui qui fent le mufc. Enfin il fufñra encore de dire en général que les cupules font fouvent fi bafles, qu'on les prendroit pour un grain d’une matière durcie, ou pour une goutte de liqueur; ce qui doit rendre attentifs ceux qui voudront s'aflurer de Fexiftence de ces glandes dans certaines efpèces : on devra auffi les chercher fur plufieurs parties avant que de prononcer fur leur exiftence ou fur leur non exiftence , une efpèce n'en ayant fouvent que fur une partie, tandis qu'une autre en fait voir fur plufieurs.

+ J'ai rapporté dans le fecond Mémoire fur Iefiglandes, les raifons qui n'ont fait adopter la féparation que M. Boer- haavea faite du diétame de Crète d'avec les origans auxquels H avoitété joint : j'y ai dit queles filets du diétame font bran- chus, au lieu qu'ils font fimplement coniques & articulés

dans les vrais origans ; leur reffemblance avec ceux des-mar-

jolaines me fera faire ici tout le contraire: je laifferai fub- fifler la réunion que-M. Linnæus à faite des genres de ces plantes, d'autant plus qu'elles ont toutes des glandes globu- laires ; que ces glandes y font même, pour lordinaire, d'un jeune doré plus ou moins foncé, qu'elles font communément

fur le deflous des feuilles & entre les nervures des calices, quoi- » qu'on en trouve quelques efpèces dont toutes les parties en. - font garnies. Les filets ne font pas moins communs, ils le - font même encore plus; il y a des plantes, & fur-tout entre

Zz

Origanum Origan.

Hajorana, Marjolaine.

Satureia, Sarriette.

Thymbra,

366 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE les marjolaines, qui en font toutes blanches ; les fleurs même en :

font chargées, ainfi que le dedans du calice. Ces filets font.

ordinairement courts, & couchés fuivant Ja longueur des parties

qu'ils recouvrent : c'eft ce que j'ai obfervé dans tous les ori-.

gans des Inftituts, excepté celui à feuille de pouliot, celui du

Canada à fleurs blanches & en umbelle, le dernier que je n'ai:

pas vü, & le diétame de Crète dont il a été parlé autre part. Celui qui a le moins de ces filets, m'a paru être l’efpèce qui vient fur Le mont Sipile; ils font un peu plus longs que ceux des autres dans celui qui eft petit, dont les feuilles font larges, & qu'on à cru être lifles; ils ne font pas cependant de fa longueur de ceux dont lefpèce, qui reflemble au diétame de Crète, eft hériflée. Ceux des marjolaines font des plus courts, du moins dans les deux premières du corollaire des Inftituts, dans l'ordinaire, dans celle qui a de petites feuilles, dans celle qui a les feuilles arrondies & qui eft étrangère, dans celle qui reflemble à l'ordinaire, qui eft annuelle & qui eft Ja marjolaine de Rivin. L’efpèce qui vient en Crète, qui reffem- ble à l’origan par fes feuilles qui font velues, qui fent la farriette & qui a des têtes à fleur plus grandes que n’en ont les ordinaires, & qui y font blanches ; cette efpèce, dis-je, fe diftingue non feulement para longueur de fes filets, mais par des glandes à cupule, qui, de même que les glandes globulaires, pren- nent une couleur d’or. J'ai obfervé ces cupules dans une autre efpèce de l'Herbier de M. Vaillant, elle eft appelée mar- jolaine du Canada à larges feuilles & à bouquets de fleurs ramaflées en têtes rondes, & dans une que je ne crois qu'une variété de la première. Cette petite différence deman- dera-t-elle qu'on fépare ces plantes des autres marjolaines? & cette odeur de farriette annonceroit-elle quelque rapport avec les plantes qui portent ce nom! Toutes les farriettes & les rhymbra même que j'ai voir, n'ont que des filets & des glandes globulaires femblables aux filets & aux glandes des marjolaines; les unes & les autres conviennent même par les propriétés que nous avons dit appartenir aux mar- Jolaines : c’eft ce qu'on peut voir dans la farriette des jardins,

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RTL LA

4

P . dans celle de Crète qui s'élève en arbriffeau & dont le bout des

L2

DES SCIENCES. 36

branches sèches forme des efpèces d’épines; dans celle d'Amé- rique qui eft ligneufe, qui a des feuilles étroites & dentées, &

1 eft démontrée au Jardin Royal; dans les deux 14ymbra du corollaire des Inffituts, qui ne font que des variétés de la pre- mière de ce dernier Ouvrage; dans celle d’Efpagne à feuilles de marjolaine & à feuilles arrondies, dans celle du même pays à feuilles de coris, & dans celle de Saint-Julien, qui font toutes citées dans ces mêmes Inflituts : une du Catalogue des Plantes des environs de Rome &jde Naples, par Micheli, qui ne diffère, fuivant cet Auteur, de celle de Saint-Julien que parce qu'elle eft plus grande & plus ligneufe, reffemble en. tout à celle-ci du côté des glandes & des filets. II en eft encore à peu près de même de celle de Virginie, citée par Her- man; de celle que Barrelier appelle /ymbra, qui vient en Efpagne, qui a des fleurs en épi, & qui doit être regardée comme a vraie #hymbra ; & d'une qui eft démontrée au Jardin Royal fous le nom de #ymbra d'Orient à feuilles arrondies & qui reflemblent à celles de ferpolet. M. Vaillant, dans fon Herbier, comme depuis lui M. Linnæus dans le Jardin d'Upfal, placoit le calament arbriffeau , qui, par fon port, fes feuilles & fon odeur, reffemble à la farriette, fous le genre de cette plante. Le premier regardoit encore comme une farriette le thym dont les fleurs font ramaffées en têtes rondes , à feuilles plus alongées que celles de l'ordinaire, & qui vient en automne; le fecond 1 met au nombre des cno- podium. Le calament d'Efpagne qui fait l'arbrifleau , qui a les

feuilles de marum ; celui de Crète à feuilles étroites ou très-

étroites, & celui qui eft très-petit, qui eft annuel & qui a

des feuilles de thym; le dinopodium de Crète qui forme un arbrifleau & qui a les feuilles en lance, étoient des thymbra

pour M. Vaillant. Le thym de la Pouille dont les fleurs font

blanches & ramaflées en tête, & qui a une odeur de téré- benthine; le sragoriganm de Mathiole, la hymbra d'Orient

; à feuilles étroites & à fleur rouge de Sherard, font aufi de:

<e genre, fuivant le même Auteur. Il mettoit au nombre des

Thymus, Thym. Serpillum,

Serpolet,

368 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE furieties celle qui vient fur les rochers, qui a de petites feuilles ramaffées par paquets ; celle de Sicile, citée par Boccone, & le ferpolet qui ent le citron, qui s'élève en arbrifleau & qui a le port du warum, dont l'odeur approche de celle du maftic. Toutes ces plantes varient peu du côté des glandes & des filets; ceux-ci font courts, blancs, tournés fouvent vers le bas des parties qui en font garnies, & qui le font ordinairement très- abondamment , ou pluftôt prefque toutes les parties de ces plantes, puifque les tiges, les feuilles, les calices, le pétale font réellement velus. Ces glandes font d’un couleur d’or plus ou moins foncé; elles s’obfervent fur les calices, quelquefois fur le pétale, toûjours en deflus & en ‘deflous des feuilles, comme dans toutes les farriettes & dans toutes les zhymbra ; ce qui n’eft pas également général dans les origans & les marjolaines. Cette dernière propriété rapproche les farriettes & les ymbra des rhyms & des ferpolets, qui ont auffi beaucoup d'analogie par la fleur les uns avec lés autres, comme il le paroït non feulement par les corrections que M's Linnæus & Vaillant ont voulu faire, & par la tranfpofition qu'ils ont faite de quelques-unes de ces plantes d'un genre dans un autre, mais encore par les différences que M. de Tournefort avoit ad- miles pour l'établiflement de ces mêmes genres; il avoit été réduit à les diftinguer par des diffrences peu eflentielles, telles que font celles d'avoir des leurs difpofées ou rangées de telle ou telle façon, ou d'avoir les tiges plus moins ligneufes, droites ou couchées fur terre. Les obfervations que j'ai faites fur les thyms & les ferpolets, concourroient donc à confondre non feulement ces deux genres enfemble, comme a fait Linnæus, mais même à les réunir avec les farriettes & les symbra; les glandes font dans les premières, de même que dans celles-ci, en deffus & en deffous des feuilles, fur les calices; elles y font même d’un couleur d'or ou d’un rouge d'ambre de Quito plus ou moins foncé: les filets font coniques, articulés ; on en remarque fur toutes les parties, c'eft-à-dire, fur les feuilles, les tiges, le pétale, für le dehors & même le dedans des calices dont les découpures forment avec

DD eo 0 DE shlkcr N'ES 369 avec les filets qu'ils portent, des efpèces de plume, dont les _ filets font les barbes, & la dentelure le tuyau. Les filets font fi abondans dans certaines efpèces, que l’on à fait entrer cette propriété dans leurs dénominations, & qu'on les a appelés ferpolets ou thyms velus ou très-velus : les ferpolets | que j'ai examinés font, fi on en excepte le dernier, tous ceux des Inftituts, & plufieurs autres du grand Catalogue des environs de Paris, par M. Vaillant, qui ne font peut-être que des variétés de l'ordinaire; de plus, une efpèce qui vient en Afrique, qui ef dit être très-velue, & qui a été démontrée en 1703 au Jardin Royal, fuivant ce que M. Vaillant en a écrit dans fon Herbier; celui de la campagne, qte Clufius croit être le 7ygis de Diofcoride; un que M. Vaillant appeloit marum, qui fent le maftic, & à petites feuilles; celui que Pétiver range au nombre des bafllics, & qu'il dit avoir les . Heurs petites & ramuaffées en un gros épi. De tous les thyms | rapportés dans les Initituts, il n'y a que les $, 6, 8, ro, | 11, que je n'aie pas vûs, les autres n'ont pas de grandes . différences entre eux, & il feroit même difficile de marquer celle qui peut fe trouver entre ces plantes & les ferpolets : il faut dire la même chofe pour les thyms fuivans, favoir, le thym d'Italie, qui eft verdâtre, dont l'odeur eft difgracieufe & qui tient de celle que l'on fent à l'approche d'un bouc, fuivant e rapport de Barrelier; l'hylope 1 de l'Hiftoire d'Oxfort par Morifon, & qui vient de Syrie, qui a les feuilles roïdes, velues, femblables à celles de la farriette, & les fleurs ramaflées en tête; celui d'Orient à fleurs blanches, & qui forme un petit arbriffeat épais, fuivant M. Sherard; un que . M. Vaillant penfoit être le #ragoriganum, & que Boccone dit . être lifle & venir dans la Pouille; quatre de l'Herbier de * M. Vaillant, .que cet Auteur dit former des têtes par la réu- nion de leurs fleurs, & qui font de Portugal; trois s'élèvent en arbrifleau, & un d'eux a les feuilles & es têtes à fleurs très-petites, l'autre a les écailles de ces têtes plus larges, le —… troifième diffère de ces deux-ci parce qu'il s'étend fur terre; les deux premiers pourroient bien être les efpèces 10 & 11 Min, 1749: . Aa

'

370 MÉMOIRES DE L'ACADÉMUE RoYALE des Inftituts, que j'ai dit n'avoir pas vües, & fi le n'étoit qu'une variété du 9°, dont il ne diffère, fuivant M. de Fournefort, que parce que fes têtes de fleurs font oblongues & non pas rondes comme dans le 96, il fuivroit de-à qu'il n'y auroit plus que deux thyms, de ceux qui font rapportés dans les Inflituts, que je n'aurois pas examinés; quant au quatrième de Portugal, & qui eft dit venir du petit royaume des Algarves, M. Vaillant compare fes feuilles au thym ordi- naire, & prétend que fes têtes à fleurs font plus arrondies. Clinopodium. I ne me refte plus qu'à parler des cnopodium & des Calamentha, calaments pour qu'on foit en état de comparer les plantes Calament. es genres, cités dans cet article, & qui ont été tranfportées dans les uns ou les autres des autres genres dont il a auffi été queftion. Nous avons déjà que les quatre derniers cala- ments des Inftituts ont été mis au nombre des farriettes ou des #hymbra ; M. Linnæus a fait, après M. Vaillant, un genre du calament appelé lierre terreftre; il ne refte plus que les fept premiers que l’on peut réellement féparer des autres, & celui que les Italiens appellent petite mentutia ou petit zepeta, & qui a l'odeur de pouliot. J’y ai du moins trouvé des glandes à cupule que je n'ai pas vües dans les derniers ; ces glandes garniffent fur-tout le haut des tiges & des calices ; elies font plus ou moins élevées, & elles jettent quelquefois une liqueur un peu vifqueufe: outre ces glandes, ils ont encore les filets coniques, articulés, & les glandes globulaires, qui fe colorent, qui deviennent d’un foufré plus ou moins clair, & qui, comme dans le lierre terreftre, ne font ordi- nairement qu'en deflous des feuilles. Je les ai trouvées fur l'une & l'autre furface dans le calament à feuilles de cno- podium d’Auftrafie & à odeur de pouliot, & dans le fixième

calament de l'Hiftoire d’Oxfort par Morifon, mais ils m'ont .

paru manquer de glandes à cupule. M. Vaillant avoit fait, dans fon Herbier, une divifion entre les chnopodium, il avoit rangé le plus grand nombre fous le nom d'acinos, quelques- uns fous l'ancien nom de chnopodium; H donnoit celui de brunelaftrum à une efpèce, & il en plaçoit une autre avec les,

D'E SORRC 1 E N°C ES) LL 7r moldavies; ceux qu’il appeloit acinos, font le chnopodium des montagnes, celui de {a campagne, à feuilles de baflic, celui qui ne diffère de ce dernier que parce que fes feuilles font plus laroes, celui qui n'en eft auffi différent que parce que fes feuilles font plus lifles, celui du corollaire des Inftituts, qui a les feuilles inférieures femblables à celles du bafilic, & les fupérieures à celles de l’hyfope, le calament à feuilles de bañlic & qui font blanches, le 4 & le 9 acinos de Y'Hiftoire d'Oxfort par Morifon, le cinopodium des Alpes qui fait {a rofe, & qui a des feuilles de farriette. Ces plantes n'ont des glandes globulaires qu'en deflous des feuilles; elles prennent une couleur d'un jaune doré, fouvent elles n'ont que celle des feuilles; les filets font affez courts, leur quantité varie ;

les efpèces qui ont été défignées par leur blancheur ou leur velu, font celles qui en ont le plus. Le nombre des chnopodium fe réduit à deux, à celui qui a les feuilles d’origan, & celui de Virginie, qui eft très-odorant, & qui a de petites fleurs d'un pourpre päle, fuivant M. Sherard; j'ai dans celui-ci des glandes globulaires fans couleur fur l'une & l'autre fur- face des feuilles, je n'en ai trouvé dans le premier qu'en deflous, mais il a des glandes à cupule fur les calices, que je penferois fe trouver auffi dans l'autre. Le calament défigné | dans le Jardin d’Elthäm par fon odeur, fa blancheur & fes . feuilles de menthe, a des glandes globulaires foufrées en def. _ fous des feuilles & fur les fleurs qui font auffi chargées de filets, de même que les tiges & les calices qui en ont auffr en dedans, ce qui eft peu différent dans toutes les autres _ efpèces, foit des acinos, foit des cinopodum: celui de Por- . ï a les fleurs verticillées & en épi, étoit le brune- _ Taffrum de M. Vaiïllant ; je n’y ai point de différences effentielles par rapport aux glandes. Les globulaires font fans . couleur en déflous des feuilles feulement ; les filets font très- Jongs, il y en a fur les feuilles, des tiges & les calices, ils - font très-courts dans le céropodium des Alpes a feuilles d'hy- fope; les glande: globulaires y font femblables à celles du —…. Drunelaffrum; elles prennent cependant une teinte d'un foufre "'ATa

Moldavica, Moldavie.

Lamium, Lamier.

72 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE clair fur les calices ; c'eft cette efpèce que M. Vaillänt ran- geoit avec les moldavies. vlrix

Les filets & les glandes des moldavies ne peuvent apporter aucun obftacle à cette réunion , les unes & les autres y font fem- blables; s'il y a quelque différence, elle n’eft que dans la quantité des glandes: elles m’ont paru plus communes dans les moldavies à feuilles de bétoine, qu'Amman diftingue l’une par fes petites fleurs d'un bleu pâle, Fautre par fes mêmes fleurs, qui font moins petites, bleues & pendantes, & dans toutes celles des Inftituts & du Corollaire, en exceptant celle à feuilles de lierre terreftre & celle à feuilles de lamier, qui, comme je vais le dire, peuvent être du genre de cette dernière plante. Quant aux vraies moldavies, elles ont des glandes fur le deflous des feuilles, fur les tiges, les calices , & même fur le pétale : ces glandes font ordinairement foufrées , fur-tout celles de la moldavie d'Amérique à trois feuilles, & qui eft d'une odeur forte. M. Vaillant en faifoit un nouveau genre, qu'il appeloit, avec Morifon, camphorofma, qui fignifie plante dont l'odeur eft celle du camphre. Cette odeur n'eft pas particu- lière à cette efpèce, toutes les autres en ont une femblable, & qui ne paroît en différer que par le moins de force & de vivacité. Les filets font les mêmes dans toutes ; ils font feu- lement plus rares & plus longs dans celles à feuilles de bétoine; ils font courts & beaucoup plus blancs dans les autres, & dans celles fur-tout qui ont des feuilles de faule.

Les deux efpèces que M. Vaillant plaçoit avec les lamiers, conviennent avec eux en ce que le fommet de leurs éta- mines eft chargé de courts filets blancs que je n'ai pas obfervés dans les moldavies ; pour cette raifon elles peuvent être réelle- ment placés avec ces dernières plantes : elles ont même encore plus de rapport, par les glandes globulaires, avec eux qu'avec les moldavies ; les leurs ne font pas en aufii grand nombre, elles font ordinairement peu fenfibles, principalement fur les feuilles, dont elles ont le plus fouvent la couleur. Je leur ai cependant trouvé, dans quelques-uns, une belle couleur dorée,

<onune dans celui d'Orient, que la quantité de fes filets a

DESUSSrENCESs. 73 fait appeler lamier blanc, & qui a auffi une fleur blanche

* dont la lèvre fupérieure eft crénelée, & dans celui qui n'en

. diffère que par fa fleur pourpre. | _ J'ai trouvé une différence plus confidérable dans quelques efpèces ; différence qui pourroit peut-être engager à les ôter de ce genre, & à les joindre à des ga/eopfis j'ai remar- qué la même chofe, tandis que d’autres en étoient privés. Cette différence confifle à avoir des glandes à cupule plate, foit fur le pédicule des étamines, foit fur le calice ou fur les tiges même; j'en ai trouvé fur les étamines dans celui d’O- rient qui a une grande fleur, qui dans un temps fent le mufc, & qui dans un autre fent mauvais; j'en ai fur les calices de celui qui a été diflingué par fon velu, qui a

des fleurs de cataire & une fleur d’un pourpre lavé; du pourpre qui fent mauvais & qui a quelquefois les feuilles profondé- ment découpées; de celui d'Italie qui eft très-grand & qui a une grande fleur pourpre. Le pourpre dont l'odeur n'eft pas fétide, & qui a les feuilles oblongues, m'en à fait voir fur les pédicules des étamines & fur les découpures des calices ; non feulement ces parties, mais encore Île pétale , a partie de la tige qui porte les fleurs & les feuilles qui font attachées à cet endroit, en font garnies dans les trois galeop-

Jis des environs d'Eftampes; dans les quatre & cinq ffachis,

auxquels il faut ajoûter le fecond galeopfis à calices dont le bout des découpures eft pointu , & à fleur jaunâtre ; dans celui des Alpes à feuilles de bétoine & à fleur panachée; dans le lamier à feuilles de chanvre, à grande fleur jaune, dont une Fèvre eft pourpre, & qui eft cité par Raï dans fon Synopfis. Celui qui eft d'Efpagne, qui s'élève en abriffeau & qui a des feuilles de reucrium, que M. Linnæus a féparé de tous les autres pour en faire un genre qu'il appelle prafum, que M. Vaillant, dans fon Herbier, appeloit molucago, ne n'a pau en avoir que fur les pédicules des étamines & fur les découpures des calices. Celui qui, felon M. de Tournefort, n'en diffère que par le velu qui y eft plus abondant, & parce quil vient dans l'ifle de Crète, m'a femblé n'en Aaaïiÿ

Galeopjis.

374 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE guère différer auffi du côté-des glandes à cupule, que jy ai trouvées fur les mêmes parties.

Je n'aflurerois pas que les cupules ne s’obfervaflent pas fur quelques parties des autres elpèces des lamiers & des galeopfis que je vais citer, mais je ne les y ai pas vues. Les lamiers font tous ceux des [nftituts & du Corollaire, excepté le dernier du corollaire ; de plus, les 1, 4, 8, 9 du Pinax de Gaf- par Bauhin; celui du n.” 690 du Catalogue des plantes de Rome & de Naples, par Micheli; celui du n.° $ 8 du Catalogue des plantes d'Italie & d'Allemagne du même Auteur; celui qu'il a dit fentir mauvais, venir fur les montagnes, avoir la lèvre fupérieure crénelée, la fleur grande & pourpre, les feuilles délicatement découpées; celui qui fent mauvais, qui a la fleur pourpre, les feuilles petites, aigues & la fleur grande, fuivant Plukenet dans fon Almagefle; celui que M. Sherard appe- loit marrubiaffrum, qui fent le mufc, qui eft panaché & qui a les fommités d'un jaune pâle; celui que le même Auteur dit être d'Orient, avoir la fleur & les fommités blanches ; enfin le lamier ordinaire à fleur blanche & qui a de grandes feuilles pleines de rugofités, qui n'eft, à ce que je crois, qu'une variété de l'ortie blanche ordinaire. Toutes ces efpèces & les premières conviennent entièrement en ce que les filets ont peu d'articulations, que fouvent ils n’en ont qu'une vers le bas, & au plus deux ou trois, & qu'ils s’obfervent fur le deflus & le deffous des feuilles, fur les tiges, le dehors & le dedans des calices, fur le pétale, &, comme je l'ai dit, fur le fommet des étamines.

Je crois que les galeopfis qui ont des cupules, & les fuivans, font lifles fur le fommet des étamines; qu'ils n'ont point de filets en dedans des calices, mais qu'ils font fem- blables aux lamiers pour le refle; que les filets y font les mêmes, qu'ils couvrent les mêmes parties ; que les glandes globulaires y font également peu apparentes & peu fréquentes, & qu'elles s'y trouvent plus en deflous des feuilles & fur les calices que fur toute autre partie. Les galeoofs qu'il me refte à citer, fe réduifent à celui de Canada, qui vient dans les

DE SÉMCIENCES MA marais , qui a des feuilles de bétoine & plus arrondies que celles de l'efpèce de nos marais, qui a les feuilles femblables à celui d'Arménie, qui fait l'arbrifleau , qui eft plus petit que l'ordinaire, & qui a des feuilles de zeucrium ; celui-ci eft de l'Herbier de M. Vaillant, l'autre a été envoyé au Jardin Royal par M. Sarrafin : celui d'Arménie pourroit bien n'être qu'une variété du prafum, & celui du Canada n'en être qu'une de celui de nos marais, & les glandes à cupules pour- roient m'avoir échappé dans l'un &.dans l'autre. I ne peut en avoir été de même de celui qui eft appelé ortie à fleur jaune, ny ai conflamment point de ces glandes, mais feu- lement celles du deflous des feuilles, qui jettent quelquefois une matière qui s'y durcit, & les filets des autres galeopfis, ce qui eft auffr commun à celui qui ne diffère de ce dernier que parce que fes feuilles font plus grandes & qu'elles font marquées de taches blanches.

M. Boerhaave avoit établi le genre de Ja ruifch fur ce que la découpure du milieu de la lèvre inférieure eft contournée

en fpirale; M. Linnœus à négligé cette différence, & a

réuni cette plante aux hyfopes, au nombre defquelles elle avoit été mife par quelques anciens Botanifes ; elle a, de méme que les hyfopes, des filets coniques articulés & des glandes globulaires : ces glandes font d’un verd clair dans les hylopes, elles y deviennent ,en paffant par cette couleur, d'un jaune doré & plus moins foncé , couleur que celles de Ja ruifch prennent peut-être auffi ; elles font dans toutes fur le deflus &le deflous des feuilles, j'en ai fur les tiges de plu-

* fieurs hylopes, propriété qui eft peut-être commune à toutes

les efpèces & à la ruifch. Ce qu'il y a de plus conftant, c'eft que les filets s’obfervent fur Lune & l'autre furface des feuilles, fur les tiges, fur les calices & le pétale; ils font ordinaire-

_ ment courts & blancs, mais es efpèces que l'on a défignées

par leur blancheur ou leur velu, non feulement en font plus fournies, elles en ont encore de plus longs, telles que font

Ruifchiana, la Ruifch.

Ebfpus, Hyfope.

. Thylope velue, à fleur pourpre, & qui a des feuilles de . - marum de Cortufus , ou de Fherbe à chat, cité dans le Jardin

ZLavandula, Lavande.

Stæchase

376 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE Üniverfel ou Catholique, & celle que Gafpar Bauhin n'a caractérifée que par fon velu : ordinaire, celle qui porte des fleurs des deux côtés des tiges, celle qui fent le mufc, la crépue, la petite à feuilles de myrthe, celle qui a la fleur rouge, rapportées toutes dans les Inflituts, ont beaucoup moins de ces filets, ils y font plus courts, & ceux des tiges

font ordinairement tournés vers le bas de ces parties. Quoique la réunion des lavandes & des ffæchas foit con- firmée par la reffemblance de leurs glandes &c de leurs filets, on pourroit cependant mettre une diftinétion entre ces plantes par rapport à ces parties. Toutes ces plantes ont des filets branchus & des glandes globulaires , mais les filets d’une partie, & c'eft la plus petite, font longs & jettent peu de branches, leurs glandes font rares , celles des autres font plus abondantes, & les filets font plus ramifiés & plus bas, de façon qu'ils font prefque appliqués fur les fur- faces qu'ils recouvrent. Les plantes de la première feétion font la lavande à feuilles découpées, celle qui les a encore plus finement découpées que cette première, le flæchas à fleur pourpre, & celui de Portugal à feuilles verdâtres &c cotonneufes. Les efpèces de a feconde fection font toutes les autres lavandes des Inflituts, le /kechas à larges feuilles & à fleur blanche, celui de Portugal à languettes grandes & panachées de pourpre & de couleur de rofe, du même Ouvrage, & celui d'Arabie qui a des Janguettes blanches, & qui eft cité par Magnol dans fon Catalogue des plantes des environs de Montpellier : les plantes de cette feconde feétion font blanches , comparées à celles de la première, la grande quantité de leurs filets leur donnent cette couleur, & la pre- mière des Inftituts que l'on a dit être cendrée, ne left guère plus que les autres , dans la dénomination defquelles lon n'a as fait entrer cette propriété. En effet, toutes ces plantes ont es filets fur le deflus & le deffous des feuilles, fur les tiges, les calices, & fur le pétale qui en a même intérieurement dans fon fond: les mêmes parties des plantes de la pre- mière fection en font bien garnies, mais leur petit AoES aifant

>

F1OD ESC 1 EN CE SM D faifant que ces parties. reftent prefque entièrement à décou-

-vert, elles paroïflent avec toute {eur couleur, d'autant plus

ue les branches de leurs filets font beaucoup plus rares, & .que plufieurs mêmés de ces filets en Jettent rarement, ou que ces branches ne reftent pas lono-temps, ce qui doit fur- tout arriver à ceux: du haut des tiges ,où il eft rare d'en trouver avec ces branches; elles font ordinairement fimples, mais elles m'ont paru fe divifer en deux dans la lavande à feuilles étroites; l'arrangement de ces branches fait que le haut des filets paroït rayonné dans la lavande à feuilles larges, & dans celle qui a des feuilles femblables, qui vient en Efpagne & que l’on a en partie défignée par fon cotonneux : au refte, 3 branches fortent irrégulièrement de tous les côtés du corps des filets.

Ordinairement les glandes globulaires font fans couleur : elles étoient dans les deux dernières plantes que viens de citer, d'un foufre plus moins lavé, d'un pourpre foncé dans celle de Portugal, & un peu moins dans celle des Indes à petit épi : ces glandes fe trouvent communément en deflous

-des feuilles | quelquefois on en voit fur Les tiges, fur le calice,

& même fur le pétale; elles font, comme je l'ai dit, rares dans les efpèces qui font auffi peu fournies de filets, mais entre ceux-ci J'ai remarqué fur le ffæchas de Portugal, & fur les lavandes à feuilles plus ou moins découpées, des

landes à cupule, dont fa cupule étoit fans couleur & le pédicule de différente grandeur ; ces glandes ne font peut- être que le fupplément aux glandes globulaires, comme je Tai déjà infinué dans quelques-uns des Mémoires précédens.

.

Mém. 1749 ; . Bbb

378 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE

OBSERVATION DE L'ECLIPSE DE LUNE Du 23 Déc. 1749, faire à l'Obfervaroire Royal.

Par M. DE Foucur. :

Le temps a été extrêmement favorable à l’obfervation de cette Eclipfe, & l'ombre a été très-bien terminée. Voici les phafes obfervées réduites au temps vrai. A 6% 59 ? on voit le bord de la Lune Ofcurci d'une de très-épaifle. 10” je doute fi l'éclipfe eft commencée, . 55 je juge l'éclipfe commencée. 15. © lombre au bord de Tycho. 17. 8 l'ombre au boïd de Mare humorum. 18. o tout Tycho dans l'ombre. 24. 5o Ariflote éft dans l'ombre. 33. 19 tout Mare humorum eft couvert. 38. 40 Gaffendi dans l'ombre. 48. 54 l'ombre à Catharina. tout Catharina dans l'ombre. st. 35 l'ombre à Mare neétaris. 54 48 l'ombre à Petayius. 10. 53 l'ombre à Langrenus. 19. 36 l'ombre au milieu de Langrenus, . 23. 39 tout Lanprenus dans l'ombre. 29. 10 tout Mare humorum eft forti. 40. 56 Catharina fort. 47. 42 Tycho commence à fe découvrir. 49. 36 tout Tycho eft forti. 57+ 35 tout Mare neétaris eft forti. 9. 51 Petavius eft forti. 20. 48 fin incertaine. 9+ 21. so fin de l’écipfe.

La grandeur a été obfervée de 5 digtss ELA

Eu em =

À

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9 g œ Go æœ ce œ co NN NN M NN M NN NN LA b D

DENSMANIC LE NC Ep 379

PHASES OBSERVEES EN ECOSSE AVANT ET APRES LE MILIEU

DE LEO BPS-E DU SO. LE IL, Le 25 Juillez 1748, AU CHASTEAU D'ABERDOUR,

Par M. LE Monnier le Fils

UELQUES confidérations m'avoient fait diflérer jufqu'ici 27 Janvier

OO: publier ces Phales, dont l'original a été dépolé il y a 1753: bien long-temps entre les mains du Préfident de la Soc. Royale de Londres. Elles n'avoient auffi engagé d'abord dans quelques difcuffions fur les latitudes ou hauteurs du pole d'Edimbourg & de Berlin, que je trouvois fenfiblement défettueufes : celle-ci étoit marquée dans l’almanach de Berlin pour cette année-là, de $ 24 3 6”, & l'on yétoit parti de cette fuppofition pour faire Je calcul de Ja trace générale de l'éclipfe annulaire publiée prefque en même temps que diverfes phafes * de la même éclipfe im- primées à Nuremberg. Or pendant mon féjour à Londres, immédiatement après mon retour d'Ecofie, j'entrepris, de con- cert avec l'éditeur des tables de M. Halley, de vérifier à l'aide des obfervations de l'écliple, fi les tables dont je viens de parler, . donnoient l'élipfe annulaire à Berlin, & il fut décidé qu'il fal- _ loit néceffairement (puifqu’on y avoit l'anneau formé pen. dant 1” 22") changer la latitude de cette ville, & la diminuer au moins de 4 à 5". Cela fut confirmé à Berlin l'hiver d’après léclipfe, lorfqu'on commença à établir cette latitude de 524 31° 30", & aux années fuivantes de 524 31° 0", comme * Ces phafes, qui nous ont été | donnent Péclipfe prefque centrale à communiquées par l’auteur de PAvis | Berlin & à Aberdour, au lieu que aux Affronomes, dans l’aflemblée de | l’un & l’autre lieu fe trouvent proche

l'Académie, fe font prodigieufement | le terme auftral de Féclipfe annu- écartées de l’obfervation; car elles | laire. . Bbb j

opens Lee". 7 à

* Latiiude cer-

Tige en 1749) 64 02’ 2. 4903" 1%

380 MÉMoIREs DE L'ACADÉMIE RoYALE cela fe voit dans les Almanachs & Mémoires des années 1747 & 1748 ; favoir, aux articles l'on a inféré quelques Mé- moires qui y ont cté lüs en 1749 & 1750. Enfm, cela vient d’être-confirmé en dernier lieu par les obfervations de M. de la Lande, faites avec un plus grand inftrument, & qui à établi, l'automne dernière, cette latitude de 524 31° 10 à 15

Mais s’il a fallu diminuer en cette occafion la latitude qu'on affignoit à l'Oblervatoire de Berlin, ä a fallu au contraire, comme cela eft prouvé dans nos Mémoires de l'année 1748, augmenter d'environ 2'2, celle qu'on attribuoit à la latitude d'Edimbourg ; ainfi dès la fm de Septembre 1748, à mon départ de Londres, j'étois déjà fondé à fuppofer la latitude du château d’Aberdour, qui étoit le lieu de notre obfervation, & qui eft de 6 minutes au nord d'Edimbourg, de $ 64 4”. *

Voici préfentement les trois premières des fept phafes que j'ai annoncées, & qui furent mefurées un peu avant le milierr

de l'éclipfe.

A gh 58° 10” ' ORTLOPT 7 ARE 10. 01. 30 PlapartieduSoleilquirefloité8. o1. = 6. 36% 10. 04. go 7 00 —= 46

A 1oh 11'+, lorfque le diamètre de la Lune paroïfloit tout entier fur le difque du Soleil, les pointes des cornes étoient prefque verticales; j'ai continué de mefurer enfuite le diamètre de la Lune jufqu'à roh 26, & dans l'inter- valle j'ai voulu effayer de mefürer une phafe particulière, c'eft-à-dire, la partie qui refloit du difque lumineux du So- leil, à l'endroit de fa plus grande largeur. Mais j'ai toujours déclaré qu'étant occupé à ramener les fils à l'intervalle qui convenoit au diamètre de Lune, j'avois me tromper, & n'être pas affez attentif à marquer le temps de cette phale. Je trouve fur mon brouillon qu'à 10h 30’ de ma montre, laquelle avançoit de 8' oo", j'ai compté à cet inflant 3%" o4"® qui répondent à 233"; & mayant pas de raifon affez forte pour abandonner cette phafe, on peut, fr lon veut,

DE SWSNC TE NC ETS #7 admettre pour l'inftant de 'obfervation, 10 21’ de temps vrai. Au refte, je ne la compte pas parmi les fept phales que j'ai déjà dit avoir mefurées, & dont voici les quatre qui ont fuivi le milieu de l’éclipfe, c'eft-à-dire, immédiatement après les principales opérations que je m'étois propolées, & que je venois d'achever, fur la mefure du diamètre apparent de la Lune.

À 10! 35! 20! SRév 23Pt 7 04" pes 45-.4$ la partie du Soleil qui reftoit CAT ON ROSE 10: 38. 40 ( | 9: 34 8. 07 10. 40. 45 | 10. 1287 8. 50

Le milieu de l'éclipfe * déduit des phafes Fr, 2,4 & 5, a arriver à 10h 17° 48 ou 31".

A midi, le diamètre apparent du Soleil ayant paru fous un intervalle de 3 8% 1 6%, & l'ayant fuppofé de 3 r' 40", je conftruifis auffi-tôt ma première Table de la valeur des parties de mon micromètre, dont une Révolution contient 40 parties.

Or cette première Table m'a donné pour la valeur du diamètre de la Lune, lorfqu'à 10h 25 & 26’ je voyois cet aftre courir entre les deux fils parallèles à l'équateur, la dif- tance de 36" 062% 29° 49"+

Il me refte donc à indiquer ici les corrections que lon doit faire à cette première Table, & cela en y employant tout ce que j'ai découvrir par le moyen de 1a bafe me- furée quelque temps après au château de Dalmahoy, à

- Fextrémité de laquelle j’avois appliqué la même lunette,

J'avertirai cependant ici qu'avant de quitter le château

. d'Aberdour, j'eus foin d'examiner foigneufement s’il n’y auroit

pas eu au temps de Fobfervation de l'édipfe quelque correc-

tion à faire à l'index des parties du micromètre, & cela par

le moyen de deux mires placées fur un obélifque fort éloigné " x

# Le Lord Comte de MORT ON lavoir eftimé à xoh. 25'7, &

M. Short à 10h 25’ de la pendule, c’eft-à-dire, à 10h 177, ou 10" 17

feulement de temps vrai. É Bbb iij

382 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE & en face d'une maïfon particulière ma lunette fut tranf- portée. Ayant donc fait parcourir au curfeur (tant en allant u'en revenant) le même intervalle qu'occupoient auparavant {es fils parallèles du micromètre, je ne trouvai aucune diflé- rence ou qui allât à plus d’une partie pour l'erreur de l'index.

Dans la mefure de la bafe, je me fuis fervi de perches de fapin fort droites & de 10 pieds de long, & je me diri-

eois horizontalement le long d'un grand cordeau, qui fervoit à n'aligner. Ces perches ont deux à trois fois été placées le plus de niveau qu'il m'a été poflible; car elles étoient en Vair dans une direttion parallèle au grand cordeau & dans un même plan lorfqu'il y avoit quelque léger enfoncement, & je calois lune des perches avec des moëllons mor- ceaux de bois lorfqu'il y avoit un peu de pente, & me fer- vois du fil-à-plomb pour les placer dans un plan vertical, en forte que extrémité de l'une füt à plomb au deflous de l'extrémité de l'autre: au refle, le terrein étoit généralement fort uni.

On remarquera de plus que je n'ai eu aucune inquiétude du côté de la longueur des perches, les ayant faites parfaite- ment égales, & m'étant peu foucié de leur donner Ia lon- gueur abfolue de 10 pieds; car il fufffoit que la petite bafe oppolée à la lunette en fût une partie aliquote, & c'eft à quoi j'ai eu toute f'attention poflible, m'étant fervi des mêmes perches pour fixer la diftance des deux mires plantées fur de gros poteaux. Ces mires faifoient, comme je fai dit, un Angle droit avec la ligne de 2$70 pieds que j'avois mefurée depuis le verre objectif jufqu’à un des poteaux. On voit affez d’ailleurs qu'il importoit peu que la ligne füt parfaitement horizontale, pourvû qu'on püût parvenir à connoître fe rap- port de la longueur de cette bale à la diftance des mires.

La plus petite diftance de la bafe ou de la plus proche des deux mires à l'égard des fils du micromètre étant donc de 30947"%%,5, & à l'égard de l'objectif de 308407", on trouve que 14287 mir {ou 35%" 28"*) font à 1423%,04 dans le même rapport, & que par conféquent

r10p 18 C TE Nc hs 383 fi la longueur de la lunette pour les objets terreftres étoit de 107%, 5, le foyer qui convient aux objets infiniment éloi- gnés auroit été feulement de 107,1266 pouces, ce qui fait, fur la longueur du foyer de mon objectif, environ 4Mignes ou 0"*,3733 de différence entre la peinture des objets céleftes & de ceux qui font fitués à la diflance étoient les mires. Or il fuit de que fi j'avois changé la longueur ._ de ma lunette, les angles auroïent varié de 6"+ feulement; mais ce fera, à une fraétion de feconde près, la même quan- tité dont il faut augmenter ou diminuer es angles, foit que l'on laiffe la lunette au même état dans les. deux cas (n'y ayant pas de parallaxe qui füt fenfible dans les fils), foit qu'on l'eût alongée, comme il convenoit, d'environ un tiers de pouce ou de 0"*,3733, & qu'ainfi l'on eût rabattu s"" d'une quantité oblevée & plus grande que 1428, la- quelle auroït convenir dans une pareille opération à la diftance apparente des mires.

Négligeant donc cette correétion ( puifque la parallaxe des fils Wétoit pas fenfible, la longueur de la lunette étant refiée la mème, foit pour les objets célefles, foit pour obferver l'angle formé par les deux mirés), j'en ai conclu que 3 $ ** 29%, ou plus exactement 3 5" 28" 142 8°" répon- doient à 29° 2 s'+ Or puilque l'angle fous lequel je voyois les deux mires étoit de 17°" ou de 20"+ plus petit que le diamètre de la Lune obfervé le jour de l'éclipfe à 10h 25 & 26, il n'a été facile d'en conclurre pour lors que le dia- mètre devoit répondre à 29° 46"+, & non pas à 20’ 49". Qu'ainfi j'avois fuppofé le diamètre apparent du Soleil trop grand de 3” dans la conftruction de la Table dont je me fuis fervi ci-deflus pour les Phafes : enfin ül fera facile defor- mais d'y avoir égard. ù

Je fmirai en déclarant que deux des phafes obfervées don- nent graphiquement la Lune toute entière fur le Soleil; mais que la plus grande partie donne le difque de la Lune au moins 2”+ au dehors du Soleil; enforte que, felon l'opéra- tion graphique, nous aurions été placés, à très-peu de chofe près, au terme auftral'de l'éclip{e annulaire.

84 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Or la règle pour trouver la diftince des centres du Soleil & de la Lune au temps de la plus grande quantité de l'éclipe, confifte à ajoüter, à la différence des demi-diamètres, la flèche de la partie de la Lune qui excède. C'eft pourquoi fi nous euflions été précifément au terme auftral, l’on eût eu o’ s7" pour la diftance des centres; mais fi l'on y ajoûte, comme il a été dit ci-deflus, la quantité qui convient, parce que nous étions plus au fud, nous aurons au moins 00”* pour la diftance la plus pétite des centres : ici on a négligé entièrement l'effet de l'atmofphère.

* Dans la fuppofñtion que le bord |} les pointes des. cornes prêtes à fe de la Lune auroït un peu excédé le | réunir; au lieu que, felon M. Short difque du Soleil au temps de la plus | & moi, ces pointes ont paru dif. grande éclipe, on ne fauroit guère | tantes de + ou & de la circonférence fuppofer d’atmofphère qui foit fenfible | de la Lune, ce qui forme dans le autour de la Lune; car le diamètre | cas préfent un angle au moins de du champ du grand télefcope étant | 9", & n’a s’apercevoir dans le de 8’+, on y auroit bien vite aperçû | grand télefcope.

OBSERVATIONS

D EUSSMBIC 1 EN CES 385

a À

. OBSERVATIONS ANATOMIQUES

y POUR L'HISTOIRE. DU FŒETUS

Par M. DE LA SÔNE. I.

Fœtus a les mêmes vifcères que l'adulte, mais on fait 7 Man que plufieurs de ces vifcères diffèrent par leur volume , 1744 par leur figure, & quelquefois par leur ftruéture : tels font

le cœur , le thymus, les reins, les glandes furrénales, le foie

& quelques autres. Plufieurs auteurs ont déjà recherché ces différences, & en ont compolé des Traités; il faut donc fe contenter de fuppléer à ces Traités en expofänt les nouvelles particularités qui fe préfentent dans les diffeétions du Foetus:

celles que je donne ici ont été faites fur plufieurs fujets. Je

| dois avertir que dans ces obfervations je fuivrai la divifion

_ que M. Winilow a faite des parties dont je parlerai.

M. Winflow a fait voir que dans l'adulte l'eftomac n'eft : point fitué comme il eft repréfenté dans la plufpart des figures _ anatomiques, c'eft-à-dire, que fon fond ou fa grande cour- _ bure n'eftpoint dans une direétion horizontale, de manière que fes deux orifices foient auffi dans Ja même direction , mais . Je pylore eft pius bas & un peu plus en devant que l'orifice _ voïfin du diaphragme. Dans le fœtus cette inclinaifon des - deux courbures de l'eftomac s'éloigne encore plus de Ja direc- . tion horizontale; car je l'ai tojours trouvé comme verticale, c'eft-à-dire que les deux orifices font comme perpendicu« laires un fur l'autre; ce qui sobferve très-facilement en foulevant un peu le foie, & en regardant en deffous fans - déranger les autres vifcères : alors l'eflomac paroît très-bien * dans la firuation que je dis, parce qu'il eft ordinairement Mém. 1749. CGce

Expofit, anat, n°431

386 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE rempli d'une liqueur épaifle & glaireufe, fur -tout quand le fœtus eft avancé.

L’eftormac fitué de cette manière fe trouve entièrement dans lhypocondre gauche, & eft abfolument couvert par le foie : ilm'a paru que c'eft le foie qui le tient dans la fituation que J'ai dit, car fon petit lobe s’avance fort avant dans l'hypocon- dre gauche, & fouvent même anticipe un peu fur la rate: or comme il a plus d’épaiffeur que dans l'adulte , fa partie infé- rieure ou poftérieure fait une faillie qui paroît occuper dans Pépigaftre une partie de la place de l'eftomac; mais lorf que ce petit lobe s'amincit & fe retire vers l'épigaftre dans l'adulte, il laifle plus de liberté à l'eftomac, qui fans doute prend alors en grofliffant, la fituation que lui donne M.

Winflow. . I LE Les glandes furrénales font deux parties qui paroiffent prin-

cipalement deftinées pour le fœtus. Il paroïit qu'Euftachi eft le premier qui les ait connues diftinétement : elles ont attiré Vattention des plus célèbres Anatomiftes, qui y ont cherché de quoi autorifer ou détruire différens foupçons qu’on a eus fur leur ufage. Malgré toutes ces recherches, on eff fi peu avancé, qu'on ne s'accorde pas même encore fur leur ftruc-

‘ture. Leur fituation , leur figure, & peut-être leur ftruéture,

différent le plus fouvent dans le fœtus & dans l'adulte. Voici ce que dit en général de leur fituation M. Winflow, qui en a parlé plus exactement que tous fes Anatomiftes qui l'ont précédé. Elles font placées fur l'extrémité fupérieure de chaque rein un peu obliquement , c'eff-à-dire , plus vers le bord interne & la finuofité du rein, que vers le bord externe 7 la gibbofie: J'ai obfervé en général, que dans le fœtus elles font placées, comme le dit M. Winflow, fur l'extrémité fupérieuredu rein, mais que leur bafe defcend beaucoup plus fur la face anté- rieure de ce vifeère, & qu'elle s'étend ordinairement jufqu’à Féchancrure la finuofité par fon extrémité interne qui salonge prefque en forme de languette en faifant un contour particulier comme demi-circulaire. On conçoit donc qu'elle :

LL COŸE SNS TE NC FUSION 387 occupe plus d’efpace fur la face externe du rein que fur fon extrémité fupérieure , & qu'elle couvre & cache une portion affez confidérable du rein. Par-là, en confidérant ce rein & la

nde furrénale en fituation, le rein paroït plus petit qu'il ne l'eften effet, & c'eft peut-être ce qui a fait avancer à plufieurs Anatomiftes, que dans le fœtus les glandes furrénales font aufli grofles & même plus grofles que les reins, ce qui, felon M. Morgagni, arrive très- rarement , &toüjours par une confor- mation extraordinaire. Ces glandes vües encore en fituation paroïffent comme femi-lunaires, & quelquefois comme écrafées; ce font les deux figures qui m'ont paru les plus conftantes, mais elles changent toûjours quand on tiraille ces parties en les difféquant pour les détacher. Il paroït à la face antérieure une finuofité femi-lunaire, qui divife cette face comme en deux demi faces, à peu près, dit M. Winflow, comme la aervure d'une feuille d'arbre en divife la largeur : ele paroît très-bien à travers les membranes qui la recouvrent. En ôtant ces membranes, j'ai reconnu que cette finuofité eft plus ou moins profonde, & qu'elle forme comme un pli qui dimi-

_ nue l'étendue en hauteur de cette face antérieure : ce pli eft

quelquefois très-enfoncé, & j'ai obfervé qu'il étoit fait & entretenu par une efpèce de tiflu cellulaire affez fin, qui retenoit les parois repliées-de la finuofité ; mais ce tiflu cel- lulaire ne m'a paru exifter que lorfque la finuofité eft très- profonde , ce qui n'arrive pas toüjours. J'ai remarqué qu’il paroît auffr fouvent une finuofité ou un pli fur la face pofté- rieure de ces glandes, mais celle-ci n’eft jamais fi profonde

_que la première. Ces glandes font enveloppées avec les reins

dans une membrane commune , qui eft l'adipeufe : ceci me doit s'entendre que pour le contour de ces parties, ‘car a membrane adipeufe fournit une production ou un alonge- ment qui fe glifle entre la fommité du rein & la bafe de

Morgagn. Epifl. anatem, XX.

Expoft. aat; Mo434"

ces glandes , ce qui leur fait une cloïfon , & par conféquent :

une efpèce de fac particulier elles font renfermées. Par

le moyen de cette membrane adipeufe, elles adhèrent aux

parties voifines, c'eft-à-dire, fouvent au foie & à la rate, Ccci

Epifl. anatom. XX

-

Expoft. anat. at 445.

Esxpofit. ana. De 434

388 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

& conftamment au diaphragme ; il m'a paru que cette adhé- rence de la glande furrénale gauche avec le diaphragme étoit fouvent faite par un tiffu cellulaire, plus fin & plus ferré, de manière qu'il y avoit quelque difficulté à féparer ces parties. Euftachi, dans fon Traité des reins, dit que ces cap- fules font d'inégale groffeur dans le foetus ; effeétivement il m'a paru que la glande droite étoit fouvent plus groffe que la gauche. J'insère ici cette remarque, parceque M. Morgagni, en parlant d’une remarque femblable d’Euftachi , paroït defirer qu'on réitère fà-deflus les oblervations. Outre la membrane adipeufe commune, les capfules ont encore une enveloppe particulière. On trouve quelquefois, dit M. Winflow, certe tunique (particulière) foulevée par une couche graiffeufe fort inégale, à qui la rend grenue , à quelquefois fait paroître ces capfules très-pâles , à comme une efpèce de corps graiffeux. On voit que la defcription donnée ici par M. Winflow eft générale, & a plus de rapport à l'adulte. J'ai remarqué en difléquant cette membrane, qu'elle eft compofée de deux lames bien diftinétes, unies par un tiflu cellulaire ; & dans ce tifflu il y a plufieurs grains de véritable graifle, femés en différens endroits. Après avoir enlevé cette première lame, il eft refté fur la feconde, plufieurs de ces grains : eette feconde lame eft intimement attachée à k partie corticale des capfules. Dans l'adulte, la graifle devient ordinairement abondante dans la duplicature de cette membrane particu- lière, & par là, la glande furrénale fe trouve enveloppée de graifle. Le tifflu cellulaire de la membrane adipeufe qui fe glifle entre le rein & la capfule, fe remplit encore de graifle dans adulte. H faut donc concevoir deux difiérentes cou- ches de graiffe, qui, dans l'adulte, tendent à éloigner du rein la capfule. La bafe des glandes furrénales eft quelquefois plus large qu'elle ne le paroïît ; j'en dirai la raifon dans un moment. On trouve, dit M. Winflow, 4e long de la face infe- rieure fous la bafe , une efpèce de raphé ou couture : cette couture paroît très-bien lorfqu’on examine la bafe fans Ôtéer la première lame de la membrane propre; mais en l'ôtant, j'ai remarqué

ane maibidaté ol nb," |: ‘té. D

AINVORENSNIÈRE 01 E NICE ISQMÈNL 389 que ce qui fait paroître le plus cette couture, c'eft princi- palement un pli plus moins grand, qui rétrécit la bafe dans prefque toute {a longueur. Ce pli cette finuofité varie en grandeur, & j'ai que lorfqu'elle étoit profonde, ce qui arrive quelquefois , elle étoit faite & entretenue par une petite produétion du tifiu cellulaire des deux lames de a membrane propre; dans ce cas-là, ce qui paroït être le raphé ne fauroit être que le pli, car le raphé ne peut être apparent que quand on a détruit le pli, en détruifant le tiffu cellulaire qui le forme. En général, le pli plus ou moins grand paroît concourir à former fa couture ou le raphé, qui par lui-même a peu d'étendue, & occupe le milieu de la bafe. On voit donc que la bafe doit être quelquefois plus grande qu'elle ne le paroït à caufe de ce pli, & que ces variations, jointes à celles qui arrivent aux plis des deux furfaces dont j'ai parlé, empêchent de déterminer bien précifément la figure de ces parties. J'ai dit qu'après avoir enlevé fa première Jame de la membrane propre, j'avois de la graiffe grenue, répandue & attachée en différens endroits fur Ja furface de la feconde lame, & j'ai rapporté à ce fujet un paflage de M. Winflow, dit, qu'on trouve quelquefois la tunique { particulière des capfules) foulevée par une couche graiffeufe qui la rend grenue. On a donc cru que ces grains apparens n'étoient que graif- feux ; mais outre cette graïfle qui, principalement dans le

fœtus, eft grenue, j'ai obfervé d’autres grains dont je ne crois

pas qu'on ait donné la defcription. Sur la feconde lame de la membrane particulière des caplules, j'ai remarqué parmi les grains graifleux, qui fe détachent aifément, d’autres grains moins blancheîtres, intimement adhérans à cette lame avec laquelle ils font corps , diaphanes, rudes au ta, plus. ou moins gros, les uns femblables à de petits mamelôns, & quelques -yns un peu alongés. Ces grains mamelonnés {ont en aflez grand nombre : je les ai trouvé difperfés fur toute da furface des capfules; ils étoient en plus grand nombre à la bafe, principalement vers le pli ou le raphé, & dans 1a finuofité de Ja face antérieure : j'en ai auffi fur la convexité Ccc ii

390 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

ou grande courbure, & aux extrémités : en les preffant, je n'ai pas remarqué qu'il en fuintât de liqueur; en preflant encore entre les doigts un de ces petits grains, j'ai ouvert avec la pointe d'une lancette, il en eft {orti un peu deliqueur blancheître & gluante, & le grain s'eft affaiflé. H ma para que ces grains communiquoient avec la partie corticale des caplules, & que l'efpèce de liqueur qui en fortoit, étoit différente de celle qu'on trouve le plus fouvent dans Vintérieur des capfules. Ces grains étant prefque toûjours confondus avec la graïfle , & recouverts de la première lame de la membrane propre des caplules, ils ne font pas appa- rens à moins qu'on n'ait enlevé cette première lame : de plus ils varient en grandeur, & fi ceux qui pourroient paroître en différens endroits de la furface à travers la première lame font trop petits, ils ne feront pas fenfibles. Peut-être ce qui a empêché le plus qu'on n'ait bien aperçû ces efpèces de mamelons, c'eft qu’il paroït par les ouvrages de ceux qui ont traité des glandes furrénales, qu'on a négligé de féparer les deux lames de leur membrane propre : au refte, dans les recherches que j'ai faites, il m'a paru que pour bien voir ces grains mamelonnés, il faut les chercher dans les fœtus qui font prefque à terme; dans un fœtus peu avancé, je les ai fort petits & pas en fi grand nombre : je n'ai pas fait aflez d'obfervations pour donner là-deflus des généralités bien conftantes. Depuis que j'ai remarqué ces grains ma- melonnés pour la première fois, j'ai difféqué trois fœtus pref- que à terme, je les ai trouvés conftamment fur les deux glandes furrénales. Je ne prétends pas aflurer par -1à que cette obfervation foit invariable , mais fr dans les recherches multipliées on les y apercevoit le plus fouvent , peut-être on pourroit en tirer des induétions pour déterminer l'ufage des glandes furrénales. En lifant les écrits de différens Auteurs, pour voir fi je ne trouverois rien qui eût trait à cette obfer- vation, j'ai trouvé que M. Morgagni, dans fa vingtième lettre anatomique fur Valfalva, parle de tubercules qu'il a vôûs fur la furface de quelques glandes furrénales dans les

dattes de dec Soft Cet 5 en à no “ie 7 D

DESISCIENCES. 391 adultes; mais comme il, ne dit pas ce que c'eft que ces tuber- cules, qu'il ne {es décrit point, & qu'il n'a fait cette remarque que dans l'adulte, j'ai cru devoir décrire les grains ou tubercules que j'ai vüs dans le fœtus, & que je n'ai même vûs que là.

L'obfervation fuivante a quelque rapport avec Ia précé- dente, en ce qu'il y eft encore parlé des glandes furrénales du fœtus ; mais comme c'eft un fait particulier qui a auffi rapport aux reins, J'ai cru devoir la féparer. En difféquant les reins & les glandes furrénales d'un fœtus d'environ fix mois, j'ai obfervé qu'il fortoit de la partie fupérieuxe des deux reins fous la bafe des glandes furrénales, un vaiffeau qui fe ramifioit fur toute la membrane propre des reins : dans un des reins, il en fortoit deux; il en fortoit encore deux de l'échancrure ou finuofité d'un de ces reins, & après être fortis, ils fe réunifloient & alloient aufli fe répandre & fe ramifier fur la furface de la membrane propre des capfules.. Je crois qu'il y a quelque obfervation qui approche de celle- ci, mais comme Îe cas n'eft pas ordinaire, & qu'il peut concourir à faire voir le commerce & le rapport des reins & des glandes furrénales, fur-tout dans le fœtus, jai cru. devoir la rapporter.

24 Février 1751.

Coronilla,

Coronille.

ÆEmerus.

Securidaca,

392 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoïrALE

SIXIEME MEMOIRE

SUR D'ES

GÆAANNPESR DE S': PL AN FES, ET LE CINQUIEME

Sur l'ufage que l’on en peut faire dans l'établiffe- « nent des genres des Plantes.

Par M. GUETTARD.

FE. coronilles ne font, dans M. Linnæus, qu'un genre avec l'emerus & la fecuridaca : la différence que j'ai re- marquée entre ces plantes n’eft pas confidérable, puifqu’elle ne confifte qu'en ce que les coronilles m'ont paru manquer des filets en fauffe navette de l'emerus, & des cylindriques de la /e- curidaca: Yune & l'autre en ont même très-peu ; je n'en ai dans la fécuridaca que fur les jeunes feuilles, & fur le deflous de celles de l’emerus. Je n'ai jamais trouvé ce peu de filets dans Jes coronilles , elles font d’une fubftance plus ferrée & plus diffé que les plantes des deux autres genres. Cette conformité devient encore plus grande par le pointillé brun-roufleitre dont les feuilles & le calice font parfemés : ce pointillé eft femblable à celui des fainfoins & des graves, & je le crois auffi formé par de petites glandes véficulaires; ce qu'il y a de différent dans les coronilles ne confifte que dans une fleur blanche, qui eft dûe, à ce que je crois, à ces petites glandes. Je n'ai qu'un emerus, & c'eft le feul des Inftituts de Bota- nique, le fecond n'étant qu'une variété, & le troïfième un aril ou indigo, comme je l'ai dit à l'article de ces plantes. La fécuridaca des Inftituts eft aufli la feule que j'aie exa- mince , elle eft peut-être aufli la feule de fon genre. Celui des coronilles eft plus nombreux : j'ai toutes les efpèces

rapportées

DE SN2S C 1 E N-c E“s:* 93 rapportées dans es Inftituts & le Corollaire, excepté celle qui vient dans l'ifle de Crète & qui eft argentée, laquelle pour- roit bien être du genre des indigo , la couleur argentée dépen- dant peut-être de celle des navettes dont elle pourroit être couverte. Outre ces elpèces | j'ai encore examiné la petite coronille à filiques longues & gréles, qui vient en Italie & en Allemagne; celle qui eft le premier pohgala de Valence rapporté par Clufius, & le petit baguenaudier à filiques de Gafpar Bauhin : ces plantes m'ont auffi paru lifles, & fem- blables aux précédentes par ce côté. Une feule, qui fe trouve dans l'Herbier de M. Vaillant fous le nom de coronille her- bacée à fleur d'un pourpre pâle, & qui peut-être n'eft qu'une variété de celle dont les fleurs font de difiérentes couleurs fur le même pied; cette feule, dis-je, m'a fait voir quel- ques filets cylindriques longs & droits ‘für les Pédicules; fi cela eft conftant, peut-être feroit-elle, de même que celle dontelle n'eft peut-être qu'une variété, réellement une efpèce de /ecuridaca ; les feuilles ne font pas même, dans l'une & l'autre, auffi épañfles & auflr luifantes que dans toutes les autres efpèces.

C'eft encore fur une différence bien petite que je pro- pofe la féparation de Ja granadille & du murucyja, que M. Linnœus à réunis. Les granadilles m'ont fait voir des filets coniques, que je penfe être à valvules, & des ftipules ou des glandes à godet, qui n'ont paru manquer dans la murucuja. Je crois que cette plante eff lifle & privée de glandes à godet, à moins quon ne voulût regarder les petits mamelons un peu élevés dont les côtes des tiges font chagrinées, comme fuppléant aux ftipules & à ces dernières glandes : ce fenti- ment ne feroit peut-être pas à rejeter, d'autant plus que dans les granadilles les ftipules varient de figure , que plufieurs efpèces manquent de glandes à godet, qui fe trouvent jointes aux ftipules dans d’autres. On pourroit peut-être dire que ces parties ne font faites que pour fe remplacer les unes les autres, & qu'il en eft peut- être ainf des. mamelons de la Ærucuja.

Miém. 1749. . Ddd

Granadilla, Granadille.

Murucuja,

394 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE

Les granadilles je h'ai trouvé que des ftipules, font f'arbre à feuilles de coudrier ou d'avelinier, qui a des vrilles, & qui vient en Amérique; le nanallou rapporté par Surian au n.°73; la caapeba feconde du même Auteur, au n.° 202; la granadille dont les feuilles font à trois pointes, & qui a uné petite fleur jaunâtre; & celle dont les feuilles font échan- crées en forme de corne, qui a le fruit à fept pans & qui eft aigu de chaque côté.

Les ftipules de ces plantes font ordinairement coniques, pofés dans l'aiflelle des feuilles, un de chaque côté du pédi- cule; quelquefois ils font plats, triangulaires , deux à deux de chaque côté du pédicule, & placés comme les coniques: jen ai de tels dans Farbriffeau à feuilles de coudrier ou d'avelinier. Ces flipules ne font pas aufii fimples dans les granadilles dont l'odeur eft fétide, qui ont les feuilles velues, à trois pointes, la fleur blanche ou d'un pourpre panaché : ces deux plantes en ont des plus compolés; ils font bran- chus, & chaque branche eft une glande à cupule un peu foufrée qui jetie de la liqueur; ils font placés non feulement à l'origine des pédicules, mais encore dans leur longueur, is font moins ramifiés; les dentelures des feuilles finiflent par une glande à cupule femblable à celles des flipules, & lon en voit auffi. quelques-unes fur la nervure principale du deflous des feuilles. Quoique ces glandes faflent un effet aflez fingulier dans cette plante, cet effet n’approche cependant point de celui que produit une efpèce de bouquet de feuilles qui embraffele fruit ; ces feuilles ne font, à proprement parler, qu'un compofé de glandes à cupule femblables aux précé- dentes ; elles font portées fur un pédicule commun divifé en pluffeurs autres qui fe foudivifent encore : ce font des feuilles dont les nervures finiflent par une cupule, & qui ne font point liées entr'elles par la partie parenchymateule des feuilles ordinaires. L'odeur defagréable de ces plantes n'eft fans doute en grande partie occafionnée que par la matière vifqueufe qui fort de toutes ces glandes.

Les granadilles j'ai trouvé des ftipules & des glandes

DES SCc1ENcrs. 239$ à godet, font la granadille à feuilles de lierre, à fleurs & fruits très-petits, celle dont les fruits font petits & ramañés en grappes, celle dont la fleur eft d’un rougeître clair & dont les feuilles font échancrées de façon qu'elles forment deux cornes. Les glandes à godet font dans celle-ci très-baffes, & placées non à “origine des pédicules, mais fur la furface inférieure des feuilles. La granadille dont les feuilles font réunies plufieurs fur un même pédicule, & dont le fruit eft ovale, a des ftipules qui font un peu découpés, & chaque découpure fit par une partie qui forme une glande à godet: les dentelures de fes feuilles en ont de femblables, mais leur pédicule étant plus alongé, elles font ainfi des filets à cupule. Les flipules de celle qui a des feuilles étroites à trois pointes, les fleurs vertes & très-petites, ont la forme d’une anche d'inftrument à vent, & Je crois qu'elle a parmi fes filets ordinaires des glandes à cupule petites & baffes. Les efpèces dont les feuilles font femblablés à celles de la der- mière, & qui ont le fruit en forme d'olive, font auffi gar- nies de femblables ftipules ; celle qui a des feuilles d'andro- fème & le fruit de la groffeur d’une jujube, celle qui eft à large feuñfle & dont le fruit a la forme d'une pomme, la fleur de la paflion ordinaire, celle de Surinam à feuilles oblon- gues & à dent de fcie, font peu différentes : la dernière avoit fur chaque pédicule deux glandes à godet portées fur un pé- dicule élevé, & les dentelures des feuilles épaifles, qui for- moient ainfi de ces glandes. Je n'ai que les feuilles de Youairaoua troïfième de Surian, n.° 814, & de la granadille à plufieurs feuilles fur un pédicule, & dont le fruit eft en forme de coloquinte; leurs pédicules avoient des glandes à godet, mais je n'ai m'afflurer de l’exiftence des flipules. Il y a lieu de penfer qu'elles n'en ont pas privées, & qu'il eft mème plus général que ce genre de plantes en ait, qu'il ne left qu'il ait des glandes à godet: au refte, on peut regarder les ftipules comme des efpèces de ces dernières glandes, qui font plus moins alongées, & les cupules ne font même que des godets portés fur un long pédicule. Ainfi ‘on peut

Dddij

Achyroplorus. ÆHypochæris.

396 MÉMOIRES DE L'ACADÈMIE ROYALE

dire en général que ces plantes ont toutes des glandes à Vaiflelle de leurs feuilles ou fur leurs pédicules, & que ces glandes varient feulement par leur figure & leur pofition : les plantes dont les pédicules font chargés, ont des glandes un peu plus près ou un peu plus éloignées de l'infertion du pédicule; mais ce font des varictés bien difficiles à déterminer, il m'a paru du moins que dans une même plante la pofition de ces glandes fur les pédicules n’étoit pas toüjours précifément la même.

Le grand nombre des granadilles na fait voir les filets ordinaires ; celle à fruit ovale, celle qui Fa femblable à une coloquinte, & celle qui eft appelée dans l'Herbier de M. Vail- lant murucuja à une feule feuille & à petite fleur pâle, m'ont paru liffes. Si cela eft conftant, la murucuja oxdinaire fe trou- veroit encore plus rapprochée des granadilles, & demanderoit peut-être, comme M. Linnæus le veut, à être confondue avec elles.

Quoique Ia différence que j'ai obfervée entre les filets des achyrophorus & ceux des Aypochæris, ne confifte qu’en. une roideur qui les feroit prendre dans les premiers pour des épines, au lieu qu’ils font beaucoup moins roïdes dans les feconds, je ne laiflerai pas cependant de crdïire qu'on pourroit féparer ces deux genres ; il eft même fingulier que cette petite différence fe trouve entre des plantes qui en ont une autre du côté des femences qui portent une aigrette de filets fimples dans les achyrophorus, & de plumes dans les hypochæris. Les elpèces d'achyrophorus que j'ai examinées, font des fept citées par M. Vaillant dans fon Mémoire inféré dans le volume de l'Académie pour Fannée 1721, p. 214. Toutes ces plantes ont des filets fur les feuilles, les tiges, les écailles des têtes des fleurs ; ils m'ont cependant paru quelquefois manquer fur les feuilles , principalement des efpèces qu'on a défignées par leur douceur au toucher. Ces filets au refle font, comme je l'ai dit, roides, à valvules peu marquées, & manquant à leur bout fupérieur de ces fils cotonneux que l’on obferve dans beaucoup d’autres; je n'ai même de duvet que fur les feuilles, Les Aypocharis que

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D'ÆENSMBNIC I E NC: ES 397 jai eu entre les mains, font les deux rapportées dans le Catalogue des plantes des environs d’Eftampes, & les autres citées dans le Mémoire de M. Vaillant , dont je viens de faire mention. Toutes ces plantes ne varient pas beaucoup du côté des filets, elles conviennent mème en ce qu'ils tombent promptement, en forte qu'on n'en trouve fouvent que fur la tête formée par l'amas des fleurs, ou fur les feuilles, ou fur les tiges.

J'ai déjà propofé dans le fecond Mémoire, le rétabliffe- ment d'un gehre que M. Linnæus avoit réuni aux verveines; je crois pouvoir faire encore ici la même chofe. Les filets du genre qu'il s'agit de rétablir, ne font pas auffi différens de ceux des verveines, que le font ceux du premier : celui- ci en a qui font la navette, au lieu qu'ils ne different dans

Yautre des filets ordinaires des verveines, que parce qu'ils

fe courbent en croffe par le haut. M. Houfton avoit appelé ce genre du nom d'un Botanifte Anglois, nommé Blair, il le diftinguoit par fes femences épineufes, & par fon calice, qui eft renflé. Les épines dont M. Houfton parle, ne font, à ce que je crois, que les flets en crofle, que j'ai obfervés, & que j'ai principalement trouvés dans la verveine du Mexique à feuilles de rrachelium & à fruit de gratte- xon. Non feulement les femences de cette plante, mais toutes fes autres parties , excepté l'intérieur du calice & les étamines, en font chargées ; & ce qui peut avoir empêché qu'on ne les ait remarqué fur ces parties, ne vient peut-être que de ce qu'ils font plus apparens fur les femences, ils font plus gros & plus longs. Les sherards, excepté la première, rapportées par M. Vaillant dans fa defcription de deux nouveaux genres, pourroient être de celui-ci : j'ai du moins des filets à crofle fur le bord des feuilles de la verveine d'Amérique à feuilles de teucrium , à fleurs de prime-verre, à filiques & femences longues , & qui eft la feptième sherard de M. Vaillant. Les mamelons qui portent ces filets font gros, argentés & compolés de plufieurs véficules comme “ceux des aparinées, ils forment aux feuilles un liféré d'un. Ddd iij

Verbena, Verveine..

Blairia.

98 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE blanc argenté. C’eft fur de femblables mamelons que font portés ceux de la verveine de Curaflau à feuilles de menthe, & dont les fleurs partent de l'aiflelle des feuilles ; mais ces filets ne n'ont pas paru fe recourber par le haut. Le couri- Lium ou verveine mâle, à fleurs violettes, à feuilles crépues & dont le fruit eft alongé en forme de corne, eft femblable par fes filets à la feptième sherard ; c'eft peut-être au refte la même plante. Celle que Plukenet appelle dans fon Al- magefte, plante d'Ethiopie, qui reffemble au #himelea, & qui a des feuilles femblables à celles du polium jaune des montagnes , étoit aufli au nombre des sherards dans lHer- bier de M. Vaillant ; elle eft drapée de longs filets blancs. Je n'ai les femences que de la première efpèce, ainfi jene fais fi celles des autres font hériflées de filets, & fi ces filets font à crofle : fuppofé que cela fût, je les mettrois fans héfiter au nombre des blairia, & quand ïls ne le feroïent pas dans celles qui en ont de femblables fur quelques-unes de leurs autres parties, je ne laïflerois pas de regarder ces plantes comme des efpèces du mème genre. Je n'ai trouvé des glandes à cupule que dans la première, elles font plates, tranfparentes & grofies, elles s’'obfervent fur les calices & fur les feuilles de l'épi des fleurs; fr je ne les pas aperçües dans les autres, cela ne vient peut-être que de ce que je ne les ai vües que sèches, & que ces glandes n'ayant pas de couleur bien déterminée, elles font difficiles à faifir ; j'ai cependant découvert fur fes feuilles quelques mamelons pour- pres, qui pourroient en ètre, ou des glandes globulaires qui y fuppléeroient.

Les filets des verveines diffèrent peu, comme je l'ai dit plus Haut; ils font coniques , à articulations, ils ont même une certaine roideur & font portés, comme ceux des plantes précédentes, fur des mamelons compofés de plufieurs véfi- cules. Elles ont outre cela des glandes à cupule mélées avec ces filets, & des glandes globulaires ordinairement d'un couleur d'or ; les feuilles, les tiges, les calices en font com- munément chargés, mais des efpèces en ont fur une partie

DIE SNSNC. 1 E CE, S 399 plus que fur une autre, & il arrive quelquefois que quelques- unes de ces parties en font privées. J'ai fait ces différentes obfervations dans toutes les verveines rapportées dans les Inflituts. Les efpèces dans la dénomination defquelles on a dit qu'elles étoient plus rudes qu'à l'ordinaire, ou que leurs feuilles étoient femblables à celles de l'ortie, font réellement celles les filets font les plus roides. J'ai encore ces mêmes chofes dans celle qui s'élève très-haut, dont les fleurs font en épi, comme dans la lavande des Canaries, & qui vient de Buenos-aires. J'ai trouvé peu de différence dans une- que M. Vaillant penfe être celle de Memphis, dont les feuilles font petites & qui -s’étend fur terre, & dans une autre rapportée fous le nom de mercuriale en arbre, & qui a des épis.

I fuit de ces obfervations, que les #airiæont beaucoup de rapport avec les verveines, & que les unes & les autres

_femblent approcher des borraginées par la roideur de leurs

filets, & par les mamelons fur lefquels ils font portés.

Les tarchonanthes & le partheniaffrum ont auffi beaucoup de rapport entre eux; ce qu’ils ont de commun eft d’avoir des glandes globulaires dorées, dont les feuilles, les tiges ou les calices font garnis. Le partheniaffrum appelé par Rai, matri-

_caire d'Amérique à feuilles d'ambroifie à petites fleurs blan-

ches, a de plus des filets longs à valvule, & au haut des tiges, des glandes en larme batavique. La tarchonanthe appe- ée dans les Inftituts conife d'Amérique en arbriffeau, à feuilles arrondies, nerveufes, & à fleurs en épi, eft auffr hériffée de filets, mais qui font plus roides, & elle eft privée de glandes en larme batavique, qui manquent auflr, & les autres filets, à la tarchonanthe qui eft dans les Infti- tutsfous le nom de conife d'Afrique qui s'élève en arbriffeau, qui a des feuilles de fauge & une odeur de camphre; à la

. place de ces filets’, toute la plante eft blanche de duvet qui - paroïît en fuinter, & qui y formeune efpèce de drappé affez fort. À la rigueur, ces plantes peuvent refter enfemble, » puifque convenant entré elles d'un côté, elles différent toutes

Parthemaftrun.

Tarchonanthos, Terchonanthes

400 MÉMoirEs DE L'ACADÉMIE RoïaALE les trois par un autre, & qu'il peut y avoir en cela quelque compenfation.

Sedum, M. de Tournefort avoit fait deux genres des joubarbes & Joubarbe, ge orpins : M. Linnæus, en réuniflant ces deux genres, a Sempervivun , sis | à AS atLasbess Re sets a J Grande jou- paré quelques-unes des joubarbes & des orpins, dont ila

barbe. formé des genres féparés, quoiqu'il penfe cependant que non Anacampferos ; feulement tous ces genres ne devroient en: faire qu'un, mais

Orpi u'on y devroit encore joindre les rondefles de M. de Tour- core nefort , les craffule, les tillea & es rhodiola ,-qu'il avoit diftin- Craffula. guées lui-même en plufieurs genres. [lui paroît que le carac-

Tillea, (ère générique de ces plantes confifte dans le necfar, qui eft Rhodiole COMPofé de cinq petites glandes, chacune pofée à la bafe

de chaque embryon, & que l'en ne doit pas ainfi avoir égard au nombre des étamines. Je n'ai pas trouvé une grande différence entte ces plantes du côté des filets & des glandes ; ces plantes conviennent encore en ce qu'elles font d’une fubf- tance grafle & fpongieule , ainfi on ne peut difconvenir qu'il n'y ait un grand rapport entre elles : je détaillerai cependant mes obfervations, on décidera fi elles peuvent contribuer à conflater June ou l'autre opinion, c'eft-à-dire, la réunion ou la féparation de ces genres.

Les orpins m'ont tous paru lifles & couverts d'une fleur blanche fur leurs feuilles & leurs tiges, qui fort, à ce que je crois, de très-petites taches rougeâtres ou blanches dont ces parties font pointillées : le bord des feuilles eft auñli pour F'or- dinaire légèrement crénelé. Voilà tout ce que j'ai obfervé dans toutes les efpèces, excepté la dernière, des orpins, rap- portées dans les Inftituts, & de plus, dans celui à fleurs Jaunes cité par Amman.

Les rondeffes ont le pointillé & la fleur des orpins, mais elles m'ont paru différer de ceux-ci par des glandes à godet, qui font placées ordinairement en deflous des feuilles, quelquefois fur lune & autre furface, & toujours à chaque dentelure: ces glandes forment de petites cavités circulaires, bordées quelquefois d'un pourpre clair. Je n'ai trouvé des

glandes en deffus & en deflous des feuilles, que dans la rondefle

DÉESSMMSNE:T E NC EUS: 401 rondelle d'Afrique à feuilles épaifles, larges, découpées, & à fleur d'un jaune d'or ; la grande & fes variétés, celle de Por- tugal, celle qui a une racine longue & rampante, celle d’A- frique qui s'élève en arbrifleau, qui a les feuilles orbiculaires & ceintes d’une bande pourpre, & celle de Crète à fleur jaune, petite & à racine ronde, ne m'ont paru en avoir qu'en deflous. La grande qui s'élève en arbriffeau, qui vient d'Afrique, qui a des feuilles orbiculaires d’un verd de mer, dont le tour a un liféré pourpre, & qui font marquées de

| taches vertes; celle d'Afrique en fous-arbriffeau, à feuilles longues & étroites & à fleurs jaunâtres ; celle du cap de Bonne- efpérance à feuilles épaifles, larges & demi - globulaires, font chagrinées fur les feuilles de mamelons plus élevés que dans les autres, & qui ne font peut-être qu'un plus grand nombre de glandes à godet, ou le fupplément à ces glandes, qui manquent dans ces efpèces, dont les feuilles ne font :pas dentelées. Il en eft peut-être de même pour celle des bords de la mer à feuilles de joubarbe, à leur couleur de chair & . à racines fibreufes ; les calices & leurs pédicules font chargés de gros mamelons qui font la glande à godet : les filets du bord des feuilles de celle de Crète à feuilles oblongues & | frangées, n'eft peut-être encore qu'un pareil fupplément ; ces » filets, au refte, font courts, gros & tournés vers le bas destfeuilles.

Les craffula font bien femblables aux rondefles, elles ont

* comme elles de Ia fleur, le pointillé & les glandes à godet -en deffus & en deflous des feuilles, ou feulement en deffous. Les deux fuivantes en font voir {ur l'une & l’autre furface, favoir , celle qui s'élève en fous-arbriffeau & qui a des feuilles épaifles & femblables à celles de la joubarbe, une qui ne diffère de celle-ci que parce qu'elle eft rampante, & une qui a des feuilles d'orpin. Je n’en ai trouvé qu'en deffous dans lorbiculaire qui eft rampante & qui a des feuilles de grande joubarbe, mais ces feuilles font bordées d’un rang de courts gros filets, dont la pointe eft tournée vers le bas des ailes : l'efpèce qui s'élève très- haut, dont les feuilles font Mém. 1749: : Eee

402 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE comme traverfées par la tige, n'a paru en manquer, mais avoir les feuilles très-chagrinées de mamelons un peu’élevés, & couvertes de beaucoup de fleur, ce qui pourroit compenfer les glandes à godet,

Les gr andes & les petites joubarbes ont du côté des glandes plus d'analogie que n ‘en ont les orpins avec les rondeffes : je n'ai j jamais trouvé dans les orpins & les rondefes les glandes à cupules qui s'oblervent dans les grandes & petites joubarbes, & qui n'y paroiflent fouvent manquer que parce que, lorlqu' on examine ces plantes, elles font un peu trop avancées. J'ai de ces cupules dans toutes les efpèces de grandes joubarbes. dont M. Linnæus parle dans fon ouvrage intitulé Jardin de Cliffort, & qui font également ainfi appeées par M. de Tournefort. Ces plantes ne varient guère entre elles que par le nombre des cupules, qui eft plus grand dans les unes

ue dans les autres : celles qui ont porté le nom de grandes joubarbes velues, font celles qui en font le mieux fournies; c'eft la même chofe dans les petites : certaines en ont un grand nombre fur prefque toutes leurs parties , pendant que d'autres em ont très-peu; une de celles j'en ai le plus, eft l'efpèce appelée cpæa, elle ef du nombre de celles qui font rapportées dans le Catalogue des Plantes des environs d'Ef- tampes, auxquelles il faut ajouter celle du n.° 39 1 des plantes de Suède par M. Linnæus, que j'ai trouvée aux environs d'Ef- tampes depuis limpreflion du Catalogue des Plantes de cette vile. Les autres efpèces que j'ai encore examinées, font la petite joubarbe à feuilles de coris, Vépineufe ou létoilée à fleurs blanches, celle qui a les feuilles arrangées en rond, celle des Alpes à fleurs piles, celle des marais un peu vélue & pourpre, enfin deux efpèces que Micheli cite, l'une dans fon ouvrage fur les plantes de Florence, qui eft la petite. joubarbe des montagnes à quatre feuilles AE à fleurs blan- ches, & l’autre san celui des plant es de Naples & de Rome, qui eft la petite Joubarbe âcre à feuilles arrondies, fleurs jaunes & caplules qui finiflent par une pointe roide,

Quant à la s/æa que jai examinée, qui eft la petite. M

1]

D HIS NC 1 E NT CES 403 joubarbe ou fa très-petite renouce, qui reflémble à une moufe, felon Boccone, elle m'a paru entièrement lifie,

On voit par ces oblérvations que {1 l'on vouloit joindre quelques-uns de ces genres enfemble, les grandes & petites joubarbes devroient plütôt l'être que les orpins avec les petites, comme a fait M. Linnæus ; les éraffula & les rondeffes pour- roiïent l'être enfemble, & les orpins avec la hodiola, qui l'étoit déjà dans les Inftituts.

Les genres dont je vais parler, & que je crois pouvoir féparer, font tirés d'une dlafle il fe trouve une grande conformité dans les filets : tous ceux que je connois en ont en houppes, & les deux dont il s'agit en ont par confé- quent de femblables; toutes leurs parties en font même hériflées, excepté les étamines, & quelquefois le pétale. L'un de ces genres eft le kermia, & Vautre, le malva-vifcus. Le nom de ce dernier lui vient, à ce que je crois, de cequ'ila beaucoup de rapport par fa fleur avec les mauves, & que cette fleur eft vifqueufe au toucher; ceft par cette dernière pro- priété que je crois qu'il fe peut diftinguer du #efmia, Cette vifcofité ou glu eft dûe à une matière qui fuinte de glandes à cupule d’un rouge pourpre, qui garniflent le pétale. Je n'ai point de femblables glandes fur les eñmia ; par confé- quent fi l’on réunit cette différence à celle qui fe trouve dans de fruit, je penfe que la féparation de ces genres pourra fe faire, d'autant plus que celle du fruit n'eft pas petite. Ce fruit eft dans le ketmia une capfule ovale à cinq loges ou plus, qui contiennent beaucoup de femences, au lieu que dans le malva-vifcus c'eft une baie à cinq loges, il eft vrai, mais qui ne contiennent chacune qu'une feule femence.

Je n'ai qu'une feule efpèce de ce dernier genre, qui ft Le mala-vifeus en arbre à fleurs rouges fermées, & qui €ft rapporté par Dillenius dans fon Ouvrage intitulé Jardin

d'Eltham. Je n'y ai trouvé les houppes qu'en petite quan-

mité ; les filets qui les 'compofent font courts, vérdâtres, & "chaque mamelon en porte quatre, cinq ou fix ; ils tombent promptement, & la plante paroit alors iffe.

Eeei

Malva-vifeus, Ketmia,

404 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Le nombre des kermia que j'ai examinés eft beaucoup lus grand ; les efpèces rapportées dans les Inflituts font cel- les de Syrie & {es varictés; leurs houppes, de même que dans le malva-vifeus , tombent promptement; leurs filets font courts, ils ont une certaine roideur, & chaque mamelon peut en porter fix, fept ou huit. Les efpèces à feuilles de peuplier & qui font d'Afrique, dont l'une a les feuilles plus blanches en deflous que fautre, & la tige verdäue, ne dif- fèrent entre elles que parce que les houppes reftent appa- remment plus fong-temps fur le deflous des feuilles de cette dernière, que les filets font plus blancs, & qu'elles tombent promptement des tiges. Je n’y ai obfervé que ces différences; les houppes au refte y font amoncelées, leurs filets font roides, fur-tout ceux des plus grofles qui n’en ont que trois quatre fituées. horizontalement ; les autres font com- pofées de dix, onze douze, & peut-être plus : celles de l'efpèce qui vient dans les Indes, & qui a les feuilles fem- blables à celles du tilleul, font bien moins touffues; je ne leur ai que deux ou trois filets au plus, & très-fouvent le mamelon n'en porte qu'un; ces filets font roides, & le mamelon pourpre. Si ces houppes ont peu de filets, elles font du moins plus communes que celles du kermia à feuilles de coton & d’un goût d'ofeille, qui vient dans les Indes: . les calices & la gouttière du pédicule de quelques feuilles, font les feules parties qui m'en ont fait voir : les fruits font hériflés de filets coniques , longs, roïdes & abondans, ceux des bords font portés fur un mamelon beaucoup plus gros que celui des autres. La rareté de ces houppes ne paroît cependant venir que de ce que je n'ai pas cette plante lorfqu'elle étoit jeune : le kermia de la Chine à fruit arrondi & fleur fimple, les conferve bien plus de temps. Cette plante eft couverte de petites houppes blanches, qui jaunif- fent en vieilliffant, & dont les filets fe montent dans chacune à plus de dix ou douze. Il en eft à peu près de même dans celui d'Amérique à très-grandes feuilles en forme de cœur, & qui a la fleur de différentes couleurs, & dans celui qui.

+.

D'EFISMNBNC TE N er 40 40

a les tiges rudes, velues, le fruit étoilé & les feuilles en Jance. L'âpreté des tiges de ce dernier ne vient, à ce qu'il me paroît, que de ce que lés filets des houppes y font plus roides que fur les feuilles. Je ne fais pas fi fon fruit n'eft ap- pelé étoilé que parce qu'il a des houppes qui pourroient avoir été comparées à de petites étoiles, mais je fais que cette comparaifon a été employée par Ferrarius, pour les houp- pes de celui de la Chine. Cet Auteur, qui a donné une defcription fi pompeufe de cette plante, avoit oblervé ces houppes au moyen du microfcope, fur les feuilles &. fur les en. il a même fait graver ces femences, qui por- tent chacune une de ces houppes, qui eft compolée dans cette figure d'une trentaine de filets, nombre qui eft plus grand que celui que j'aie jamais trouvé à des houppes fem- blables; fouvent même, eomme je ai dit dans cet article & plufieurs autres fois, il n'y en a que deux, trois ou quatre. On peut encore avoir un exemple de cette variété dans celui d'Egypte, dont les femences fentent le mufc, & qui eft communément appelé abelmofch. Les houppes que J'ai vües dans cette plante n'ont que trois ou quatre grands filets horizontaux , roides, & qui font fouvent difpofés de façon qu'ils forment une X; elles font ordinairement placées fur es nervures du deflous des feuilles : le refte de la plante, qui eft très-velu, ne doit cette propriété qu’à un grand nom- bre de filets fimples, coniques, qui font un peu roides & d’un blanc fale. Je n'ai pas trouvé une grande différence dans le Retmia des Indes à grandes feuilles de vigne, nommé ordi- nairement /abdariffa , dans celui qui ne diffère de ce dernier que par fon fruit alongé en une efpèce de corne, dans celui d'Egypte qui a aufli des feuilles de vigne, mais dont fa

eur eft petite, dans la bamia mufquée de Malabar, citée par Pétiver & par Raï, dans le guingombo , dans celui d’A- mérique qui eft velu, qui a la fleur jaune & les femences.

mufquées. Quoique les filets de toutes ces plantes aient une- certaine roideur, elle n'eft pourtant pas telle qu'elle puifle-

leur faire donner le nom d'épines, comme on fa fait poux: 4 Ece ii

406 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE ceux du ketmia à trois grandes feuilles anguleues, à fruit velu & dont la forme approche de celle d'un bouclier, & à ceux du Æetmia d'Amérique qui eft dit épineux, qui a une fleur tès-ample & d'un rouge de carmin. Ces deux efpèces font hériffées des houppes & des fimples filets, des précédentes ; mais leurs tiges & les pédicules de leurs feuilles le font de plus par des elpèces d’épines qui ne font, à ce que je crois, que de ces gros filets qui fe font tellement durcis, qu'ils ont acquis la dureté & la roideur des épines. L’abel. mofch cité plus haut, le kezmia d'Afrique à feuilles de peu- plier, & le commun à veffies, ont aufli des houppes qui forment une X; mais on voit, à la place des longs filets de plufeurs des précédens, un grand nombre de houppes beau- coup plus petites, & qui font formées de cinq, fix, fept filets plus petits & moins roides: ce hermia d'Afrique à veflies eft bien femblable, par les filets, au commun qui porte aufii des veflies, les fiens font feulement un peu plus doux; le refte y eft fi égal, que j'ai même remarqué dans fun & l'autre des filets en larme batavique qui m'ont paru jeter de la liqueur par le haut, & ne difiérer entre eux que parce qu'ils font pourpres dans l'ordinaire & blancs dans celui d'Afrique.

Toutes ces elpèces de ketmia font, comme je fai dit au commencement de ces citations, rapportées dans les Inflituts de M. de Tournefort, & ils en font le plus grand nombre: les füuivans ne s’y trouvent pas, mais ils font dans les ouvra- ges de Pétiver, de Surian, ou dans ceux qui font intitulés Jardin d'Eltham par Dillenius, & Jardin de Eyftet par Beflerus. Ces £etmia reflemblent par les houppes aux uns ou aux autres des précédens; les uns ont feulement des houppes à plufieurs filets, les autres en ont, avec celles-ci, d'autres qui font üne ou la croix de Chevalier ; les premiers font ceux de Malabar à fleur de différentes couleurs , fimple ou double; le chouchourou des Indiens, ou #1ahot noir; les feconds font celui de Ceylan à fleurs jaunes, à feuilles blancheätres & beau- coup velues; l'efpèce dont les feuilles reffemblent à celles du

D: s/MSLC 1 É Nic ENS: 407 manioc, qui font dentelées, & qui a une grande fleur de couleur de foufre. Il faut ajoûter à ceux-ci lefpèce du n.° s du Jardin de Florence par Micheli, & le petit des marais à feuilles anguleufes, petite fleur purpurine , -aplatie & à cinq pans, cité par Zannichelli.

Le grand nombre de ces kefmia , qui prouve fi bien le rapport des plantes par leurs glandes, peut m'exempter de parler de quelques efpèces dont je nai eu que des noms iucertains : M. Vaillant, par exemple, en avoit placé dans fon Herbier deux fous ce genre; une lui avoit été envoyée par M. Lippi, & l'autre porte le nom de guimauve aby- tilon des Indes : ces deux phuites avoient auffi les houppes à plufieurs filets doux & blancs. Une efpèce qui mérite plus qu'on y fafle attention, eft celle que Plukenet appelle alcée des Indes, ou fecondë efpèce de ragapu du Jardin de Ma- Jabar, à feuilles très-étroites, qui reflemblent à celles du flæchas dont les feuilles font en dent de fcie; les feuilles & les tiges de cette plante, lorfqu'elles font jeunes, font couvertes d'un

and nombre de petites houppes; les calices, les nervures des feuilles & les fruits ont des filets fimples , longs, roides & qui font portés fur un mamelon aflez gros. Cette plante convient ainfr aflez avec quelques-unes des précédentes; mais les fruits ont de plus des houppes qui font à moitié décou-- pées, & qui reflemblent par-là à ces plaques dont j'ai parlé plufieurs fois dans les autres Mémoires.

Cette dernière elpèce, & la plufpart de celles qui la pré- cèdent, pour ne pas dire toutes, m'ont fait voir {ur le deflus ou le deffous de leurs feuilles plus ou moins de véficules d'un aflez beau noir, que je crois être des glandes : le ragapu en a même la fleur parfemée, particularité que je n'ai pas obfervée dans les autres efpèces, & qui le rapproche des cotons dont la fleur eft ainfi marqué: de ces taches noires, mais qui y font mélées avec d’autres d'un beau couleur de rofe, comme je le diraï en parlant des cotons. Le nombre des véficules aug- mente dans les kermia à proportion que celui des houppes: diminue, ce qui pourroit bien ne venir que de ce que ces

Taraxaconoïdes,

Houfoir de plumes.

408 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE véficules ne font que les mamelons des houppes, d'autant plus que ces mamelons font noirs dans plufieurs efpèces. Je crois cependant qu'il y a aufli des véficules, indépendamment des mamelons qui portent les houppes.

Il faut fans doute rétablir le genre de raraxaconoïdes ou houfloir de plumes, que M. Vaillant avoit fait, & qu'il avoit diflingué du piflenlit par la couronne de plumes qui eft portée par les ovaires; mais toutes les efpèces rangées fous le genre des houfloirs de plumes font-elles réellement de ce genre? les obfervations fuivantes ferviront peut-être à décider cette queftion. Excepté les $, 6, 7, 9 efpèces rapportées dans le Mémoire de M. Vaillant, toutes les autres ont des filets divifés par le haut en fourche à deux ou trois bran- ches, au lieu que ceux de ces quatre font fimples, coniques & à valvules. Une différence auffi grande ne peut pas laiffer fubfifter ces plantes fous le même genre; mais auxquels doi- vent-elles être jointes? ou bien en doivent-elles former de nou- veaux? je fuivrois plus volontiers ce dernier fentiment. Les houfloirs de plumes qui ont des filets fourchus approchent beaucoup des Ae/minthotheca herbes aux vermiffeaux, mais la forme du calice de celles-ci empêche leur réunion : le bou- quet de feuilles qui l'embraffe ne fe voit pas dans les houf- foirs de plumes. Celles de ces plantes qui ont les filets fimples, femblent convenir avec les pifenlits, les ypochæris ou les balais étoilés, mais ces trois genres ont des diftinétions très-frap- pantes ; le premier n’a fur fes ovaires qu'une couronne de poils, le balai étoilé a des ovaires de trois efpèces, & le pla- centa de l'Aypochæris eft chargé de balles, au lieu qu'il eft ras dans les autres. Il refle donc non feulement à rétablir le genre de raraxaconoïdes, mais encore à en former un nouveau.

Au refle, les filets fourchus s'obfervent fur le deflus & de deflous des feuilles, fur les tiges, & même aflez fouvent fur les écailles qui forment les calices. Ces elpèces d’épines font roides, les plus grandes ne {e divifent ordinairement qu'en deux branches, les moyennes fouvent en trois, & même

en quatre, comme dans la première efpèce du Mémoire

de

L D'MMSMS) C'1 E NC ES 409 de M. Vaillant. Entre ces fileis on en aperçoit d'autres qui font blancs & petits, qui'fe forment & tombent aife- ment; je ne fais pas même s'ils ne feroient pas une matière qui auroit fuinté des furfaces, & qui fe feroit durcie.

La roïdeur & la quantité des filets fourchus fait aifément diftinguer au fimple toucher , les plantes qui en font hériffées, des autres qui n'en ont que de fimples, lefquels font même doux, flexibles & en petite quantité. Je n'en ai que fur les tiges ou fur les feuilles ; aufli eft-il arrivé que la plufpart des Auteurs qui ont donné des fynonymes à ces dernières plantes, ne les ont point diftinguées par la rudefle de leurs feuilles ou de leurs tiges, comme ils ont fait en parlant des premières.

Je crois qu'il faut auffi faire une divifion dans le genre du pifienlit, & ôter du nombre des plantes placées fous ce genre par M. Vaillant, la dernière efpèce qui eft très-velue & qui a les feuilles femblables à celles du chiendent & onduiées. Le velu de cette plante n'eft pas formé, comme celui des autres efpèces, par des filets coniques à valvules, mais par des goupillons & des filets en plume qui couvrent les feuilles & les tiges; ces filets font fauves: ceux des têtes

Dens leonis, Piffenlit.

de fleurs font à cupule, dont le bas du pédicule eft d'un

brun noiratre. J'ai trouvé dans l'Herbier de M. Vaïlant une plante fous le nom de grande pilofelle de Mathiole, & ran- gée fous le genre des«dents de lion, qui ne différoit de la précédente que parce que ces filets en plume étoient moins abondans. Je ne fais fi c'eft la onzième efpèce de fon Mé- moire, mais il me paroïtroït que cette dernière feroit fembla- ble par les files ; elleeft du moins appelée dent de lion très- velue à feuilles de pilofelle. Cette propriété d’être très-velue, me {emble annoncer des filets pareils aux précédens.

Au refle, toutes les autres efpèces, excepté la huitième que je n'ai pas vüe, mont que très-peu de leurs filets; je n'y en ai trouvé que fur des feuilles fur les tiges, & en petite quantité: les 7, 9, 10 cependant portent fur les tètes des fleurs des: glandes à cupule, dont de bas du pédiculeeft

Mém, 1749: nat

410 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

d'un brun noirâtre, & la 9 a de plus fur fes feuilles, fes tiges & les têtes des fleurs, une matière cryflalline blanche, qui fe diflout dans la bouche, & qui rend cette plante d'un blanc que M. de Tournefort a exprimé dans la déno- mination qu'il a donnée de cette plante : il l'appelle dent de lion d'Orient à feuilles légèrement découpées, velues & blanches. Le velu eft encore augmenté par de gros filets roides jufqu'à un certain point, qui font placés fur le bord

des feuilles, & que je n'ai pas oblervés dans les deux autres.

qui mont même paru lifles, ayant fans doute perdu ceux dont ils étoient garnis. Cette diflérence dans ces trois derniè- res plantes demanderoit-elle qu'on les féparit du genre des piflenlits? fr une autre qui fe trouve dans leurs ovaires pa- roifloit fufhre, je n'y trouverois aucune difhculté. Ces ovaires y font feulement ftriés, de même que dans les deux efpèces qui ont des plumes & des goupillons; œux des autres font à côtes hériflées de petits mamelons roiïdes. M. Vaillant avoit parlé de cette différence dans la defcription qu'il a faite du genre de ces plantes, mais il n'y avoit pas déterminé les efpèces qui avoient l'un ou lautre de ces ovaires.

Je haiffe aux obfervations que lon pourra faire fur ces plantes , à déterminer de quel genre elles font, d'autant plus

que mes obfervations ne font pas complettes; mais je penfe

qu'on doit Ôter des piflenlits, les deux efpèces couvertes de goupillons, de plumes & de glandes, à cupule, & je crois qu'on ne doit faire aucune difheulté de les réunir aux /iera- cum herbes à l'épervier, ces dernières plantes ayant des

filets femblables, leurs ovaires étant flriés, chargés d’une

couronne de poils & articulés fur un placenta ras comme dans les piffenlits. L

J'ai parlé, dans le détail des obfervations que je viens de tapporter, de plufieurs genres des chicoracées, auxquels J'ai comparé ceux dont il s’eft principalement agi dans cet article. I ne feroit peut-être pas hors dé*propos de dire plus au long ce que j y ai remarqué ; j'ai cru néanmoins devoir atten- dre à le faire, que je fois parvenu au genre de leurs filets,

DE SMID C 1'EN CEA AIT afm de pouvoir remplir dans ce Mémoire ce que je n'y füuis propolé, c'eft-à-dire, d'y finir ce qui regarde les filets par rapport aux genres des plantes : j'ajoüterai cependant ici ce que j'ai dans les taraxaconaftrum , balais étoilés de M. Vaillant, leur petit nombre.

Les efpèces de ce genre fe réduifent à trois, qui font Ia dent de lion à feuilles grèles & fines, la petite à feuilles radiées, dont celle qui a des feuilles d'herbe au chantre, & celle de Grèce à feuilles femblables, mais épaifles & luifantes, font, {lon M. Vaillant, des variétés; la petite herbe à l'éper- vier qui s'étend fur terre & qui a des têtes femblables à celles du rragopogum ou barbe de bouc: ces trois plantes convien- nent en ce qu'elles ont des filets coniques à valvules ; je ne leur en ai que très-peu, & feulement fur la côte du milieu -du deflous des feuilles ; mais fi ces filets font rares, elles ont en revanche fur les feuilles, les tiges & les têtes à fleurs ,. des mamelons aflez gros, élevés, qui n'ont paru jeter une Jiqueur dans celle qui a les feuilles radiées, que j'ai obfervée orfqu'elle étoit verte; ces mamelons s'alongent quelquefois de façon qu'ils forment des efpèces de glandes à cupule; lorfqu'ils font defléchés, ils reffemblent à des veflies blanches, Æ& c'eft l'état je les ai vüs dans les deux autres plantes.

J'ai obfervé dans les bacchantes que M. Linnæus a jointes zaux fantolines, prefque tout ce que je viens de rapporter des dents de lion & des balais étoilés ; une partie a des filets fim- ples à valvules, une autre des houppes à plufieurs filets; fi donc les fantolines devoient être réunies aux bacchantes, je ne crois pas que celles qui ont des houppes puflent l'être. La troifième & la quatrième du Mémoire de M. Vaillant (Mém. 1719,p. 317), que M. Linnæus ne regarde que comme une efpèce, font de ce nombre. Ces plantes font la coma aurea d'Afrique, qui s'élève en arbrifleau, & qui a

des fêuilles de paffe-pierre ; les feuilles de l'autre font de cou- leur de verd de mer, & découpées en trois par le bout fupérieur. M. Linnæus tient que l’aurone d'Afrique à feuilles

découpées & blanches, & qui porte des fleurs d’un jaune d'or, F£f i

Taraxace- naftrum,

Balai étoilé.

Santolinas Santoline.

Baccharis, Bacchante.

412 MÉMoirEs DE L'ACADÉMIE RoYyALE

& rangées en umbelle, n'eft encore qu'une variété des pré-

cédentes. Quoique j'aie oblervé quelques petites différences

dans ces plantes, elles ne font pas cependant affez confidérables- pour que l'on puiffe déterminer par leur moyen, fi ces plantes {ont réellement des efpèces diférentes les unes des autres, ou fr elles ne font que des variétés. Celle qui a des feuilles de pañfe-

pierre, a des houppes bien formées, dont les filets font exaéte- ment féparés: dans celle qui a des feuilles d’un verd de mer, ces

houppes n'ont paru n'être découpées qu’en partie, leurs filets étant joints enfemble jufqu'aux trois quarts de leur fongueur,

de forte qu’elles forment comme des plaques .portées fur un

mamelon; Jai trouvé ces plaques plus découpées dans un

pied defféché. Jefuis refté incertain fur les houppes de l’aurone- d'Afrique; fes feuilles & fes tiges font couvertes de longs: fileis, grêles & fauves, qui peut-être fortent du milieu- d'autant de houppes que je n'ai exactement déterminer. La deuxième bacchante de M. Vaillant, qui {lon lui ne: diffère de la troifième que parce qu'elle eft annuelle, m'a aufli laiflé dans l'incertitude, elle n'a paru entièrement liffe; je n'y ai pas même le duvet ni les glandes globulaires que J'ai obfervées dans les précédentes, elles font d'u beau jaune d’or ou couleur de karabé de Quito. Toutes ces plantes pourroïient donc, malgré ces petites différences, n'ètre qu'une feule & même efpèce : celle qui m'a paru life: pourroit avoir perdu fes filets, ou n’en avoir pas eu, en-confé- quence de quelques maladies; celle les houppes étoient

à moitié découpées , n'en avoit peut-être de telles que parce:

qu'elle étoit encore jeune; celle qui a de longs filets feroit. peut-être* pluftôt une vraie efpèce. I fuit toûjours de ces obfervations, que le genre des bacchantes doit être rétabli. & féparé de celui des fantolines, & que celles delün & l'autre genre qui ont de femblables houppes, en font des efpèces; ainfi je: crois que les. deux plantes fuivantesique : M. Vaillant avoit placées dans fon Herbier fous le genre des bacchantes, en font réellement. IL appeloit l'une bacchante velue, dont les feuilles inférieures font découpées ; elle lui.

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Ag Li tr

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DE SMSNC 1 E NC E 5 4&1T avoit été envoyée fous ce nom par M. Sherard: l’autre porte celui de chryfanthemum, qui reflemble à la conife qui vient d'Ethiopie, qui n'a pas de demi-fleurons, & dont les feuilles reflemblent à celles de la marjolaine : cette dénomination eft de Breynius. Les houppes de cette plante ont des filets courts, . du milieu defquels il en fort un beaucoup plus long ; ces filets fent fauves, ils font blancheîtres dans l'autre efpèce, & c'eft l- toute la différence que j'y aie trouvée; lorfqu'elles font tombées, on voit aifément les glandes globulaires de lune: & de l'autre, & peut-être même qu'elles ne font, comme dans les précédentes, du moins une partie, que les mame- lens de ces houppes. La proximité du genre des bacchantes & des conifes me fait penfer que la vingtième conife de: M. Vaillant eft aufli une bacchante: cette plante eft le fonouri. de Flacourt; jy ai quelques filets & quelques houppes;' dont la rareté ne venoïit, à ce que je crois, que de ce qu'elle en avoit perdu la plus grande partie. La petite jacobée-d’A-- frique qui s'élève en arbriffeau, qui a des feuilles d’axrone ou de pale - pierre, eft encore de ce genre, peut-être même:

- meft-elle qu'une variété de celle des plantes précédentes qui. a des feuilles pareilles, & n'en diflère-t-elle que par a. grandeur : fes: houppes font très-1bondantes, les feuilles & les. tiges en font comme cendrées; leurs filets ont quelque chofe: deroïde, & font en aufli grand nombre que ceux des autres. elpèces.. É

I ne me refte plus à parler que de la première & de fa fixième efpèce pour avoir rapporté ce que j'ai dans toutes. celles de ce genre; ces deux-ci me paroïflent non feule-

> ment être bien diftinétes des autres, mais encore n'être-pas du: même genre ; l'une, qui eft le graphalium maritime, n’a que: du duvet fur fes feuilles, fes tiges & fes calices, de façon. qu'elle en eft aufli drapée que le plus velu des autres grapha- lium ; ce duvet étant ôté, on aperçoit des glandes globulaires : - l'autre, qui eft la bacchante d'Egypte à feuilles de feneçon.. a-de longs filets à valvule à la place du duvet, & je n'y ai pas: trouvé de glandes globulaires, Celle-ci feroit donc, à ce que:

Fff ü,

Santolinoïdes, ‘Santolinoïde.

Chryfocome ,

Coma aurea,

414 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

je crois, mieux rangée avec les coma aurea, & Yautre avec les gnaphalium.

Quant aux fantolines, elles m'ont paru affez femblables les unes aux autres par rapport aux glandes : c'eft à peu près la mème chofe dans toutes; un peu plus ou un peu moins de glandes globulaires d'un beau jaune d'or, & du duvet blanc qui en fort peut-être, voilà tout ce que j'ai remarqué de différent dans lune ou l'autre de toutes les efpèces rapportées dans le Mémoire de M. Vaillant, & dans celle que M. Boer- haave défigne par la blancheur de fes parties & par fon odeur de camomille. »

Le nom de fantolinoïde que M. Vaillant a donné à un des nouveaux genres qu'il a faits, & que M. Linnæus a con- fervé, défignant f'affinité qu'il y a entre ces deux genres, jai cru devoir parler ici de ce dernier, d'autant plus que le nombre des efpèces qu'il renferme n'eft pas grand : elles fe réduifent à quatre; lune, qui eft la camomille des Alpes à feuilles de verd de mer & comme argentées, & à fleurs jaunes fans demi-fleurons, n'a paru avoir du duvet, des glandes d'un foufre doré fur les feuilles & les tiges; la fantolinoïde vivace à feuilles de camomille & à tige rameule, la petite cotule de Crète à feuilles de camomille, & dont la tête eft penchée, ne n'ont paru en différer que parce que les glandes n'y font pas bien apparentes; elles le font encore moins dans la cotule à fleurs jaunes & fans demi-fleurons, mais celle-ci eft chargée d'un grand nombre de filets grèles & droits fur les parties femblables à celles des plantes précédentes.

J'ai dit, en parlant des bacchantes , que quelques-unes ont porté le nom de coma aurea, aïinfi ne fera pas mal de placer ici ce que j'ai remarqué dans ces plantes, on pourra par les comparer plus aïfément. Je n'y point trouvé de houppes, mais feulement les filets les plus communs de cette clafle, & ordinairement des glandes globulaires d’une couleur de foufre doré. Les filets font extrêmement courts dans lef pèce qui a été appelée par M. de Tournefort, conife à feuilles de linaire: celle d'Afrique qui s'élève en arbrifleau, & qui

DES SCIENCES. 415$ a des feuilles de romarin, m'a paru life; la plante appelée par Commelin petit coma aurea d'Afrique, qui s'élève .en arbriffeau , qui a les feuilles étroites & femblables à celles de la linaire, eft hériffée d'un grand nombre de filets roides & blancs; l'efpèce que l'en appelle communément eftragon du Cap, ou coma aurea qui s'élève en arbrifleau, qui ales feuilles d'un verd de mer, divifées en plufeurs digitations, odorantes

& épaifles, en a qui font argentés, longs & en grande quan-

tité. Les trois premières de ces plantes font les trois efpèces de coma aurea du Jardin de Clifort; la dernière eft démontrée au Jardin Royal fous la dénomination que j'ai rapportée. Je finirai ici la première partie de ce Mémoire, c'eft-à- dire, celle qui renferme les genres que l'on pourroit rétablir; je commencerai la. feconde, c'eft-à-dire, celle je parlerai des genres nouveaux que lon pourroit faire, par détailler ce que j'ai obfervé fur un grand nombre de plantes, entre lef- quelles il y en a quatre qui, femblables aux autres d'un côté, en diffèrent par un autre. Il eft vrai que cette différence pourra paroïtre bien petite, & j'avouerai qu'elle me le paroît auffi à moi-même; cependant je ne puis la pafler fous filence,

_€e fera aux Botaniftes à décider de quel poids elle pourra être.

Ces quatre plantes font des efpèces d’Aehchryfum ou immor- telles ; comme toutes les autres que j'ai examinées, elles {ont plus ou moins couvertes d'un duvet blanc; elles ont outre cela , & voilà le côté différent, elles ont, dis-je, fur quelques- unes de leurs parties, des glandes à cupule ronde, & ordi- nairement d'un jaune doré. Jen ai remarqué fur le bas des tiges dans limmortelle de Sicile à feuilles verdâtres de l'un & de l'autre côté, & qui n'a qu'une fleur au bout de chaque pédicule. Le deflous des feuilles du graphalium de Portueal à tête argentée en eft garni, elles y font très-bafles ; lim mortelle à larges feuilles, qui eft droite & qui a les fleurs ramafiées par bouquet, m'en a fait voir fur le defius & le deflous des feuilles; elles ont la cupule d'un foufre verditre. Aucune de ces trois n’en eft fr bien fournie que l’immor-

telle d'Afrique qui fent mauvais & qui a de très-grandes.

Helychryfinrs. Immortelle,

L1

Fckchryfoides, Helichryfoïde,

416 MÉMOÏRES DE L'ACADÉMIE ROYALE feuilles ; on en trouve fur le deffus de ces parties & für des tiges : il fort de ces glandes une liqueur vilqueufe, fur-tout de celles de la dernière. Je ne fais fi limmortelle d'Orient qui, füivant M. de Tournefort, eft glutineufe, & qui a des feuilles de lavande, jette une liqueur femblable à celle des plantes dont je viens de parler: je n'y point de glandes à cupule, ni rien qui pût me faire connoître cette glu, pas même les glandes globulaires dorées que j'ai obfervées dans la troifième des précédentes, & dans celle d'Afrique à umbelle, qui eft jaune & odorante, ellés étoient en bon nombre, & d'une couleur de foufre rougeitre.

Toutes les autres efpèces font plus ou moins drapées de duvet; de cinquante-une efpèces rapportées dans le Mémoire de M. Vaillant, iln'y en a que onze que je n’aie pas vües, favoir, les 3,112, 13,466, 24h03 018 6420 Mme duvet recouvre ordinairement les tiges & les feuilles, fur-tout en deflous ; les têtes font communément liffes, mais e!les font couvertes de bourre dans la 29.8, qui eft l'immortelle blanche, cetonneufe & à feuilles arrondies, & dans li 47e, qui eft appelée par M. de Tournefort flago des Alpes à têtes garnies de feuilles. Les immortelles 48 & 49 en ont aufli fur ces mèmes parties ; lune eft le gnaphalium des Alpes à grandes fleurs & à petites feuilles, & l'autre eft celui à larges feuilles qui vienten Ethiopie, qui a la fleur couleur de role & les calices épineux, c'elt-à-dire que leur bout fupérieur eft un peu roïde : le duvet eft communément d'un aflez beau blanc: 4 étoit fauve dans le graphalium d'Afrique qui n'a pas d’odeur, & dont les fleurs font blancheïtres. Le plus grand nombre des immortelles citées dans le Mémoire de M. Vaïllant, font de celles des Anflituts; plufieurs de ce dernier Ouvrage ont été placées par M. Vaillant fous d’autres genres: j'en parlerai lorfqu'il s'agira de ces genrés.

Ce même Auteur en a formé un nouveau qu'il a appelé helichryfoide, que M. Linnœæus a réuni aux immortelles. J'ai les trois efpèces dont le genre de M. Vaillant eft com- pofé; la feconde, qui reflemble au tamaris, qui Pers fes

eurs

d

ar

DM SAS ,C L'E :N: CRE 417 fleurs au haut des rameaux, & la troifième qui a fes fleurs difpofées de même, les feuilles femblables à celles du genièvre, en grand nombre, & recourbées en crochet, font celles qui m'ont paru avoir le moins de duvet ; il y en a un peu {ur les feuilles & les tiges : la première, qui a le port de tamaris & fes fleurs en épi, l'abrotanoïde d'Afrique à feuilles très-petites & très-courtes, & qui porte aufli fes fleurs en épi ou ra- maffées en boule au haut de fes branches, en font beaucoup plus couvertes, la première fur-tout, fes feuilles, fes tiges, fes têtes à fleurs en font drapées. M. Linnæus l'a reportée au nombre des abfynthes, M. de Tournefort l'avoit placée: la quantité de fon duvet la rapproche beaucoup des abfynthes, qui en font ordinairement toutes blanches ; mais indépendam- ment du caraétère établi par M. Vaillant, cette plante, fr femblable aux autres hélichryfoïdes par fes feuilles étroites, renverfées, qui reflemblent à celles des genièvres ou des bruyères, & qui, outre le duvet, ont encore un argenté qui leur eft propre, lequel ne vient point de ce duvet ni de quel- qu'autre matière qui en tranfpire, me fait penfer que fi le genre d'hélichryfoïde doit fubffter, elle en. eft réellement une efpèce. L’immortelle d'Afrique qui s'élève en arbriffeau

&. qui a des feuilles de «ris, pourroit bien en être auffi une .

autre; elle refflemble beaucoup à celle-ci par fes feuilles & fon duvet.

Ces propriétés ne feront pas fans doute admifes par les Botaniftes qui ne veulent avoir que des caractères tirés des parties de la fleur, & ils ne feront aucune difficulté de réu- nir. ces plantes aux immortelles, d’autant plus qu’elles ont comme elles du duvet, qui ne differe que par la quantité. Sur

ces principes ; qui font réellement les plus fürs, il faudra,

auffi y laifler les f/ago ou. herbes à coton, & les graphalium

ou fraifces, que M. Linnæus y a réunis; je n'y ai rien ob-

fervé, qui fût contraire à ce fentiment. J'ai examiné toutes

les herbes à coton du Mémoire de M. Vaillant, excepté la

2, & la 6 ; elles m'ont paru toutes couvertes de duvet, même

fur les têtes à fleurs, ce qui a probablement donné ocçcafion Mëm. 1749: ": . Geg

Filago,

Herbe à coton.

Gnaplalium, Fraifée.

Helianthemun , Hélianthème,

Ciflus, Çilte.

418 MÉMOIRES DE L’'ACADÉMIE RoYALeE

aux noms françois & latin qu'elles portent, ce duvet étant une efpèce de coton, dont il feroit poffible de faire un fil qui approcheroit beaucoup de celui de coton, & ces plantes étant déjà connues pour fort bien fervir dans les lampes à la place du coton ordinaire. Je n'ai que la première & Ja feconde elpèce de graphalium du Mémoire de M. Väillant, mais j'en ai trouvé une ‘autre dans fon Herbier, qui y eft appelée fraifée couchée fur terre, cotonneufe & à feuilles très-étroites : elles étoient aufit drapées de bourre ou de duvet que les herbes à coton , & différoient peu entre. elles,

La propriété d’avoir du duvet & d'être privés de filets à valvule, convient donc à tous les genres que M. Linnæus a réunis fous celui de gnaphalium ; & fi cette grande unifor- inité doit engager à les y laïfler, celle d’avoir des glandes à cupule me paroïît demander qu'on en fépare les plantes élles ont été obfervées, & peut-être qu'on y joigne celles qui ont des glandes globulaires, pourvü cependant que ces dernières glandes ne foient pas communes à toutes; je ne les rencontrées que dans les plantes dont j'ai parlé, il y a peut- être des circonflances elles paroiffent dans les autres.

Il n’eft pas moins général aux plantes dont je vais parler, d'avoir des houppes prefque fur toutes leurs parties, qu'il ne left aux plantes précédentes d'avoir du duvet; mais comme dans le grand nombre de celles-ci, il s'en eft trouvé quelques- unes qui fe diftinguent des autres par des glandes à cupule, il y en a aufi parmi les hélianthèmes dont il va être que£ tion , qui different des autres par de femblables cupules. Les immortelles à cupules ne manquent pas de duvet, &parfà elles fe rapprochent des autres ; nrais les hélianthèmés qui font garnis de ces glandes , font entièrenient privés des houppes qui font fi abondantes dans les autres. mt

Les hélianthèmes qui manquent de houppes & qui ont les glandes à cupule font l'hélianthème à petites feuilles lifles, à fleurs jaunes, & qui s'étend für terre : il y a des filets courts & coniques fur toutes les parties, excepté les pétales, les

DT ESS IC 1 E N'C/EÈS 419 étamines & les piftilles; les plus longs s’obfervent fur le bord des calices, ils font portés par un mamelon conique & pourpre. Ceci eft tiré de ce que j'ai rapporté à l'article de cette plante dans fe Catalogue de celles des environs d'E£ tampes; je n'y ai point parlé des glandes à cupule, je ne les avois pas obfervées alors ; mais les ayant vües depuis bjen diftinétement dans d’autres efpèces, J'ai été mis fur la voie pour les trouver dans celle-ci, & je crois en avoir réelle- mnt remarqué parmi les autres filets. Une de celles je les aie le mieux diflinguées, eft l'hélianthème à feuilles blan- ches femblables à celles du thym ; elles y étoient en grande quantité, méêlées avec des filets femblables à ceux du pré- cédent: ils font plus petits que les glandes à cupule, qui font d'une moyenne grandeur, & qui ont la cupule pourpre. Celui de Marleille à feuilles de coris m'a paru life, excepté fur les calices & le haut des tiges il y avoit des cupules pourpres en grand nombre. Je n'ai point trouvé ces glandes fur un pied de cette plante cultivée dans le Jardin du Roi, il m'a paru entièrement lifle, la louppe m'y fit feulement apercevoir une fleur blanche répandue fur les feuilles. L'e£ pèce qui vient fur les rochers, qui a auffi des feuilles de coris liffes & plus oblongues que dans l'autre, & dont le haut des tiges eft velu, fuivant la dénomination de Micheli rap- portée dans le Catalogue des plantes de Rome & de Naples ; cette efpèce, dis-je, n'a effectivement paru lifle, excepté fur les calices & les fruits, j'ai remarqué des filets de diffé- rentes grandeurs, les plus longs font à cupule; ceux du haut des tiges, dont il eft parlé dans la phrafe de Micheli, étoient probablement tombés. La plante fuivante eft peut-être quel- quefois dans le même cas: cette plante eft l'hélianthème à petites feuilies lifles, à fleurs jaunes & qui fe tient droit ; je n'en ai que fur les calices, le bord des feuilles avoit des filets fimples très- courts. M. Vaillant avoit placé cette plante dans li même feuille que celle qui, fuivant Barrelier, eft peut-être le grand hélianthème à feuille de thym & à fleurs jaunes : celle-ci a des glandes à cupule fur le haut des

Gggi

420 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

tiges & fur les calices en grande quantité, ainfi que fur les feuilles cette quantité eft moins confidérable : cette plante peut ainfi fe trouver dans différens états par rapport aux glandes à cupule. Ce n'eft pas fur le nombre de ces glandes que je fuis refté indécis dans efpèce qui a des feuilles de thym, qui eft velue, qui à la fleur june & un gros fruit, rapportée par Micheli dans Ouvrage cité ci-deflus, mais c'eft fur lexif- tence des houppes. M. Vaillant paroit croire que cette plante eft l'hélianthème de Crète à feuilles de linaire & à fleur'de couleur de fafran, fuivant la dénomination de cette plante, donnée dans le Corollaire des Inftituts par M. de Tournefort, Ces plantes n'ont paru fe reffembler parfaitement, les jeunes feuilles de la dernière cependant font blanches en deflous de filets parmi lefquels je crois avoir obfervé une houppe; fi cela étoit, je la croirois différente de autre j'ai trouvé fur toutes les parties, excepté fur les pétales & les étamines, un grand nombre de filets plus ou moins longs qui mepa- roïflent à cupule ; fi au contraire cette plante manquoit de houppes , elle pourroit être à la rigueur la même plante,

quoique je n'y aie pas trouvé de glandes à à cupule, ces glandes pouvant alors être tombées.

Il refle, je l'avoue, quelque doute fur les obfervations que je viens de détailler, je crois cependant qu'on peut en con- clurre que les plantes qui en font Fobjet n'ont pas de houppes, excepté peut-être la dernière, & qu'ainfi elles peuvent être féparées des fuivantes qui en ont toutes, mais point de glandes à cupule,

Ces houppes ne font pas les mêmes dans toutes les efpè- ces; elles font à filets bien diftinéts & bien féparés les uns des autres dans le plus grand nombre, mis ils le font très-peu dans quelques autres; ces houppes y forment pluftôt des plaques flriées, femblables à celles dont jai déjà parlé plufieurs fois dans les Mémoires précédens. Les plantes lon rencontre de ces plaques, fe reflemblent encore par la forme des feuilles; [a plûüpart ont été appelées hélianthèmes à feuilles d’halime ou de pourpier de mer. De

D'EISUSLE 1 E Ne ENS 421, toutes Îes efpèces qui font rapportées dans les Inflituts fous un & l'autre de ces noms, il n'y a que celles de Portugal & d’Efpagne à très-grandes feuilles blanches & nerveufes, j'aie des houppes à filets féparés ; toutes les autres ont de ces plaques fur l'une & l'autre furface des feuilles &cwüur les tiges : celles qui font placées fur les groffes nervures des feuilles ou des tiges’, font portées fur un mamelon d’un jaune foufré & plus gros que ceux des autres; les fruits en ont de femblables dans quelques efpèces ; elles y font plus régulières dans quelques autres. J'ai de ces dernières fur les fruits de celle qui a des feuilles obtufes & moins longues que dans quelques efpèces. Les fruits de celle qui a les feuilles échancrées & larges, font couverts de plaques fembla- bles à celles des autres parties : ces houppes imparfaites font toûjours d’un bel argenté, ce qui fait paroïtre ces plantes, à Ja vûe fimple, plus ou moins blanches, fuivant la quantité de ces houppes , qui n’eft pas beaucoup diflérente dans tou- tes. On n'obferve ordinairement dans ces plantes que lune ou l'autre efpèce de ces houppes, mais quelques-unes ont auffi, en petit nombre cependant, des filets coniques fim- ples: j'en ai de femblables fur les côtes des fruits du petit hélianthème à feuilles de pourpier marin aroentées : le fecond cifte à feuilles d’halime, rapporté par Clufius, en por- toit de deux efpèces, de très-longs qui étoient blancs, & d’autres moins longs & pourpres, fur les calices & les pédi- cules. Le fruit de l'efpèce qui vient en Efpagne & qui a les feuilles étroites, étoit chargé des uns & des autres, & les pourpres étoient les plus communs. Ces différences font petites, & ne doivent étre regardées que comme peu effentielles ; peut-être même que qui verroit les autres efpèces avant qu'elles fuffent defféchées, y trouveroit ces filets ; pour les houppes, elles ne manquent jamais. Outre toutes ces plantes, J'ai encore celle d'Italie à feuilles d'halime & à grandes fleurs jaunes, qui eft rapportée dans FOuvrage de Barrelier; j'y ai remarqué les mêmes chofes que j'ai vües dans celle à feuilles de pourpier de mer.

Gegiÿ

422 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Les efpèces qui m'ont paru approcher le plus des précé- dentes par les houppes, font celles qui viennent en Por- tugal, qui ont les feuilles femblables à celles du polium, & plus ou moins larges, & celle qui vient auffi en Por- tugal, qui reflemble par fes feuilles à la marjolaine, & qui a une fleur jaune, marquée d’une grande tache pourpre. Leurs houppes font petites, à petits filets. argentés : c’eft encore par ces houppes argentées que l'efpèce qui a les feuilles de marum & blanches, les bouquets de fleurs très-velus, & ui vient auffi en Portugal, fe rapproche de celles qui ont les feuilles d'halime; mais elle eft diftinguée des précédentes & de toutes les autres, par de gros filets qui paroiflent être des glandes à cupule, qui font mélées avec d’autres filets coniques blancs, mais fimples, fur le haut des tiges, le deffous des feuilles & les calices. Les autres efpèces man- quent de ces fortes de cupules, mais elles ont les filets fimples, & fur l'une ou l'autre de ces parties. Les houppes des hélianthèmes dont je viens de parler, font compolées de plus de dix ou douze filets; les plaques mème, f1 elles fe divifoient en autant de filets qu'elles ont de flries, formeroient des houppes compolées au moins d'autant de filets; mais il y a des efpèces l’on n'en voit guère que 3, 4, 5 aifés à diflinguer de ceux qui forment les autres houppes par leur longueur, qui eft bien plus confidérable. Les hélianthèmes de Portugal à feuilles de plantain , de Duplevrum de globulaire, celui de Crète qui a aufli des feuilles de plantain, celui à feuilles de ronurin, reluifantes en deffus & blanches en deflous, & celui dont les feuilles font petites & qui reflemblent à celles de la pilo- felle, en ont de femblables : elles font en petit nombre dans toutes, mais il y a une aflez grande quantité de filets fm- ples & coniques. Il en eft à peu près de même dans l'efpècé qui a les fleurs marquées d’une tache pourpre; celle dont les feuilles font femblables aux feuilles du ferpolet, qui a une grande fleur odorante & d’un jaune d'or, lui reflemble beaucoup de ce côté. Quelques autres qu'il eft inutile de

D ENSNUS"C 1 EN C #8 423 citer, en approchent auffi : il fuffra de dire qu'ayant toutes les efpèces rapportées dans les Inftituts & leur Corol- laire, celles-ci font du nombre, qu'elles ont des houppes, & fouvent des filets fimples plus ou moins grands.

Ces hélianthèmes des Inftituts & du Corollaire ne font pas les feuls que j'aie examinés, j'en ai encore un de Raï, un de Micheli, un de Lippi, quatre de Barrelier, & trois qui font démontrés au Jardin du Roi, & qui viennent d'Egypte. Celui de Raï eft le petit cifte des montagnes à feuilles de polum & qui eft d'Angleterre ; fes houppes font petites, blanches, très -abondantes, & je n'y en ai que de telles. Celui de Micheli avoit des filets fur les grofles nervures des tiges & des calices, & les houppes de la précédente : Micheli Fapplle hélianthème des Alpes qui eft droit, blanc, à fleur jaune, & qui ne diffère de f’or- dinaire que parce qu'il eft plus grand. Celui de Lippi reflem- ble à l'efpèce citée par Raï, il s'appelle hélianthème d'Egypte à feuilles de thym & à racine rouge. Les quatre de Barre-

. Jier font le cifte-ledon à feuilles de marjolaine, celui qui a

des feuilles velues, reflemblantes à celles de ferpolet, qui a une fleur pâle & quiseft d'Italie ; le jaune à feuilles de thym, mais plus dures que dans d’autres efpèces qui ont de fem- blables feuilles; & celui qui s'étend fur terre, qui a les feuilles velues, & qui conviennent par la figure: avec celles de

Yhyfope. Ces quatre efpèces ne diffèrent entre elles que par

le plus ou le moins de houppes & de filets fimples : les trois du Jardin Royal font dans le même cas; on les a dé- nommés, l'un hélianthème à feuilles étroites & à fruit en veflie ; le fecond, hélianthème rameux, qui a une petite fleur; le troïfième à été défigné par la largeur de fes feuilles & par fes femences de couleur de chair : ils font annuels tous trois.

La réunion que M. Limæus a faite des hélianfhèmes avec les cifles, demande fans doute que je parle ici de ces derniers. J'ai déjà dit dans un autre Mémoire, à l’occafion du nouveau

genre que M. Linneus a établi, & qu'il appelle-k4r, que

Ciflus, Cifes

LL

424 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE tous les ciftes que j'avois examinés étoient garnis de houppes; Jeurs parties en font autant drapées pour le moins que dans les hélianthèmes, &, de même que dans ces derniers, toutes les parties, excepté les pétales & les étamines, le font ordi- nairement, fur-tout dans les efpèces qui ne jettent pas de cette matière vifqueufe & gluante que lon a appelée /ab- danum. Cette différence fournit naturellement une divifion our ces plantes; je l’admettrai du moins, & je parlerai d'abord des. efpèces qui ont cette propriété. L'efpèce fa plus connue, & qui left depuis long-temps, puifqu'elle l'étoit du temps de Diofcoride , & même, felon M. de Tournefort, celui d'Hérodote, eft celle que M. de Tournefort appelle cifte Zabdanifère à fleurs pourpres, & qui vient en Crète. Cet. habilé Botanifte dit à la page 90 du tome [ de fon voyage dans le Levant, que « le Zbdanum tranfude au travers de Îa tiflure de fes feuilles, comme une fueur grafle, dont les gouttes font luifantes & aufi claires que la thérébenitine » J'ai obfervé une glu femblable fur les feuilles de plufieurs autres efpèces; elle ne n'a pas paru fortir des furfaces mêmes, mais de gros mamelons élevés qui font, à ce que je crois, la fonction des glandes à cupule de quelques autres efpèces qui jettent une pareilie liqueur. J'ai trouvé de ces cupules fur les tiges de celui de Crète, je crois qu'elles donnent auff de la glu, & que c'eft peut-être celle dont M. de Tournefort parle, quoiqu'il pût cependant fe faire, qu'il en tranfudèt auffi des furfaces mêmes des feuilles ou des tiges; le poids de deux ou trois livres qu'un homme peut en ra- mafler par jour, femble l'indiquer. Ces glandes fe trouvent auffi fur les tiges, le bord des calices & les fruits du cifte- ledon de Galpard Bauhin, & fur les grofles nervures du deffous des feuilles du cifte femelle à feuilles de fauge, qui s'élève & qui porte {es tiges auffi élevées & droites. M. de Tournefort penfe que le cifle-ledon à larges feuilles, qui vient dans l'ifle de Crète, & qui eft décrit par Jean Bauhin, eft différent de celui de cette ifle fur lequel on ramañfe le labdanum. Je n'ai pas trouvé de glandes à cupule dans ce ; dernier;

se

| DES SCIENCES 425. dernier, mais il m'a paru qu’il fuintoit du defus des feuilles, &, je crois, des mamelons, une liqueur vifqueufe. Le deffus dés feuilles & les tiges donnent encore une femblable matière , qui fort aufli de pareils mamelons, dans les ciftes labdanifères d'Efpagne à feuilles de faule, & à fleur fimple- ment blanche ou marquée d’une belle tache pourpre: Il en eft de même par rapport au cifte-ledon à grandes ou petites feuilles de peuplier noir ou de laurier; celui-ci net, fui- vant M. Linnæus, qu'une variété de ceux d’Efpagne à feuilles de faule. Le cifte labdanifère de Montpellier donne réellement aufli de cette matière, & elle fort de parties femblables à celles des æfpèces précédentes : celui de Florence, cité par Micheli, doit en donner aufli ; & quoique je n’y en aie pas , je ne doute pas qu'il n’y ait un temps pendant lequel cette plante en laifle échapper, puifque Micheli lui a donné le nom de labdanifère. L'Herbier de M. Vaillant renferme deux ciftes;

un fous le nom de cifte-ledon d’'Efpagne à feuilles de roma-

rin, blanches en deflous, à fleurs de Ja même couleur & comme difpofées en umbelle : M. Vaillant penfe que c'eft le cifte labdanifère à feuilles étroites de Gafpar Bauhin, & il le cite comme rapporté par M. de Tournefort, quoiqu'il ne foit pas dans fés ouvrages imprimés; l'autre eft appelé cifle-ledon des bords de la mer de Béotie, à feuilles de ro-

marin & blanches des deux côtés. J'ai fenti au toucher que

le premier étoit gluant, & qu'il avoit fur fes feuilles une ma- tière blanche & farineufe qui me parut être le {1bdanum deffé- ché; cette matière n’eft pas feulement en farine dans celui de Béotie, mais elle forme fouvent des plaques plus ou moins grandes, qui fe font réduites en petits grains fur les anciennes feuilles. Je n'ai point de cette matière fur le cifteledon à feuilles étroites de Gafpar Bauhin, que M. Vaillant penfe être le premier, ni fur ceux à feuilles de romarin velues ou non velues, qui font des Inftituts; ces plantes feroient-elles donc des efpèces différentes? elles m'ont paru fe reflembler toutes beaucoup, & la différence d’avoir ou de ne point avoir de réfine, n’éft peut-être qu'un accident qui peut, comme il Mém, 4174. 9 . h

e

426 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

le paroïit, venir d'une tranfpiration plus ou moins abon- dante. J'ai attendu à parler d'un hélianthème qui donne de la réfine, que j'eufle rapporté ce que j'avois fur les cifles,. cet hélianthème étant le feul j'en euffe trouvé; les feuilles, les tiges & les calices en laiffent fuinter une qui eft jaune: ceite efpèce a les feuilles blanches en deflous, & femblables à celles du petit myrte; elle eft du nombre de celles qui ont des houppes.

Il n'y a point, comme je l'ai dit plus haut, de diftinc- tion entre les ciftes par rapport à ces houppes, f1 ce n’eft qu'ils en ont feulement plus moins. Les efpèces qui don- nent une réfine fenfble, en font le moins chargées, fur- tout en deffus des feuilles & fur les tiges ; elles en laiffent voir cependant quelques-unes, ce qui fait que l'on peut dire en général que toutes les efpèces en font garnies fur toutes leurs parties, excepté les pétales &c les étamines. Ces houppes font ordinairement blanches, compolées de plus de dix douze petits filets, &, comme dans les hélianthèmes, horizontaux, c'eft-à-dire qu'ils font prefque appliqués fur la furface des parties qui en font couvertes ; celles qui font fur les côtes ou nervures principales des feuilles des tiges, les portent cependant droits & élevés : elles n’ont ordinairement que de ces filets, mais j'en ai fortir un beaucoup plus long & qui étoit droit, du milieu de ces petits, dans le cifte femelle, qui n'eft point couché fur terre, & dont les branches font éle- vées. On obferve encore ordinairement parmi les houppes, des filets coniques fimples comme dans les hélianthèmes ; cés filets font auffr plus longs que ceux des houppes, & ils font communément placés fur les côtes ou principales nervures des tiges ou des feuilles. |

Excepté Ie cifte mâle de Portugal à feuilles très-grandes &c blanches, & les deux efpèces à feuilles de fauge dont je n'ai pas parlé, j'ai v toutes les autres des Inflituts & du Corollaire, dans la fuppofition cependant que celui à feuilles d'olivier, que je n'ai pas vü, n'eft qu'une variété du cifte labdanifère de Montpellier comme M. Liæus le prétendÿ & que celui

ml tete 6 dE D gt ii CR SR es éd

AR: TOR EAMBBNG TE N CE: MEN 427 ‘d'Orient à grande fleur pourpre, & qui donne du labdanu, que je n'ai pas aufli examiné, n'eft qu'une variété du labda- nifère de Crète. Outre ces efpèces, J'ai encore le cifte femelle à feuilles de fauge, qui n'eft, felon M. Linnæus, qu'une variété de celui qui eft droit & qui porte fes tiges

élevées, & le grand cifte à larges feuilles blanches, remar-

quables par trois groffes nervures, dont les fleurs font pour- pres, qui vient dans l'ifle Pico, & qui eff cité dans Ÿ Afma- gefte de Plukenet : ces deux plantes font autant garnies de flets coniques & de houppes que toutes les autres, & en diffèrent ainfi très-peu de ce côté.

M. Vaillant avoit beaucoup travaillé à former de nou- veaux genres, dont il avoit tiré les efpèces d’entre les grandes

“centaurées , les jacées, les bluets ou les chardons, & je crois

que €ès genres ne peuvent que jeter beaucoup de clarté, & donner beaucoup de facilité pour défigner, fans de grandes dénominations , les efpèces de ces genres. M. Linnæus a né- gligé toutes les différences {ur lefquelles M. Vaillant avoit

établi fes nouveaux genres, & il a ainfi réuni fous un {eul,

qu'il appelle centaurea , les grandes centaurées de M. de T'our-

_nefort, dont une partie forme les rhapontics & les rhapon-

ticoïdes de M. Vaillant; les jacées de ces deux Auteurs, les.

bluets du dernier, & ceux de M. de Tournefort, dont quel- ques-uns font des ambrettes de M. Vaillant; les chaufle-trappes de celui-ci, fes chardons étoilés ou calcitrapoïdes, & {es cro- codilium En réuniflant toutes ces plantes, M. Linnæus a cependant établi un nouveau genre, qu’il a appelé /érratula, farrette, dont les efpèces font tirées principalement d'entre les rhaponticoïdes de M. Vaillant. Je crois ce genre jufte- ment formé, & je penfe même qu'il fant encore en faire un nouveau, dont les efpèces font auffi des rhaponticoïdes, fui- want M. Vaillant. j :

Comme les propriétés fur lefquelles: ce dernier Auteur

_ établifloit ces genres, font principalement tirées des:poils, des _“aigrettes de poils fimples ouen plumes qui font portées par

les ovaires, ou des épines que je regarde comm :des poils Hhh ij

Centaurium majus,

Grande cen- taurée. Jacea, Jacée. Cyamus, Bluet. Calcitrapa , Chauffe-trappe Calcitrapoïdes, Calcitrapoïde, Rhaponticum , Rhapontic. Rhaponticoïdes, Rhaponticoïde; Armberboi, Ambrette. Crocodilium,

Serratula , Sarrette.

ÿ M

s ÿ

y ÿ

428 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE

durcis, & que ces diflérences font dans les principes que j'ai tâché d'établir, j'ai cru les devoir rappeler ici. « Le crocodilium a fes ovaires velus, couronnés de plumes, & placés entre les poils du placenta; le pureau des écailles eft becqué d’un fimple piquant, & bordé d'une pellicule ou feuillet fatiné, Les ovaires des chauffe-trappes font liffes, à tête nue ou cou- ronnée de poils, & nichés entre ceux dont le placenta eft hérifié ; les écailles des calices ont à leur bout un piquant en- denté ou bordé de cils, & terminé par un fimple piquant, ou armé de plufieurs piquans, dont celui du milieu eft plus fort & plus long. Les calcitrapoïdes ne diffèrent des chauffe- trappes qu'en ce que le pureau des écailles de fon calice eft terminé par plufieurs aiguïllons difpofés en rayons, lefquels forment conjointement comme un demi-cercle ou une main ouverte. Les rhaponties ont les ovaires à tête lue ou couronnée de poils ou de plumes; le placenta eft velu, les écailles font bordées d’une pellicule ou feuillet fatiné qui fe découpe fouvent. Les rhaponticoïdes ont les ovaires cou- ronnés de poils; le placenta eft velu, le pureau des écailles finit dans quelques-unes par une languette mollafle, fans dé- coupures. Les ovaires des ambrettes font velus, à tête nue dans quelques elpèces, couronnés à l'antique dans quelques autres, & nichés entre les poils du placenta; le pureau des écailles eft entier, ou il finit par une languette mollaffe & entière, Dans les jacées, les ovaires font à tête nue ou à tête cou- ronnée de poils, & nichés entre ceux du placenta; le pu- reau des écailles eft bordé de cils, ou orné d’un panache: il eft fec & frangé dans quelques autres ; d'autres n'ont point cette partie, mais des becs plats, pointus & finement endentés. Ces parties font femblabies dans le bluet; les ovaires de quel-

ques efpèces font couronnés de plumes, mais ils different des

jacées par les fleurons ».

Si fon compare maintenant ces obfervations les unes avec les autres, on voit que le placenta eft velu dans tous les genres, que les ovaires du crocodilium & des ambrettes le

font auffi, que ceux des chaufle-trappes & des chardons étoilés

DESVSCIENCES 429 font lifès , & probablement les autres, du moins M. Vait- lant le laiffe à penfer par fon filence. II feroit à fouhaiter

ue cet Auteur eût déclaré pofitivement le fait, qu'il eût dit auffi quelles font les efpèces de rhapontics & de rhaponti- coïdes qui ont les ovaires nus couronnés de poifs ou de plumes ; il eft même étonnant qu'il ait gardé le filence 1à: deflus, puifque cela pouvoit contribuer plus que toute autre chofe à bien conftater fes genres, ou à en établir encore de nouveaux: je n'ai pas lever ces doutes, mais j'ai tout ce que M. Vaillant a dit fur le pureau des écailles des têtes à fleurs, & je crois que des différences auffi confidérables doivent entrer pour quelque chofe dans le caractère généri- que, dans les jacées fur-tout, les filets forment fouvent avec le pureau de très-jolies plumes, qui par leur affemblage font une efpèce d'ornement à ces têtes, J'ai de plus obfervé des différences dans les filets de quelques genres, fur-tout dans celui de la farrette, que M. Linnæus a fait, & dans les plantes du nouveau que je propole. + Je commencerai par celui-ci, peut-être n’y a-t-il encore qu'une plante de ce genre qui foit connue; c’eft Je vingt- unième rhaponticoïde de M. Vaillant, ou la jacée annuelle à fleurs pourpres, à feuilles découpées, & dont les décou- pures ont leurs bords garnis de petites pointes. J'ai fur de deffus des feuilles, vers le bord, des filets coniques, courts, à valvules, & qui s'évafent par le haut en quatre, cinq, fix petites lanières recourbées à peu près conume celles des filets dont les fruits des cynogloffes font hériffés, chaque découpure des feuilles finit par un filet roide & fimple : lorfque les tiges font jeunes, elles font couvertes de filets qui forment de petites houppes, & des goupillons; de plus, de deffous des feuilles a des glandes globulaires affez groffes & d’une couleur d'eau: je w’ai pas les houppes & les gou- pillons dans celle qui ne diffère de la précédente que parce qu'elle a les feuilles marquées de taches blanches, mais des filets cryflallins fimples fur le haut des tiges; peut-être ne font-ils que du duvet, ou, ce que j'aimerois mieux penfer,

Hhh ij

430 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

des houppes & des goupillons mal formés; je le croirois d'autant plus volontiers que cette plante n’eft qu'une variété de l'autre, & que ce qui la fait varier ne vient que des taches blanches des feuilles que l'on ne doit regarder que comme une efpèce de maladie; au refle, j'y ai trouvé toutes les autres parties de la première , & des glandes globulaires entre les nervures des tiges elles font un peu verdâtres.

Quoique la différence que j'ai obfervée dans le onzième rhaponticoïde de M. Vaillant, ne foit pas auffi grande que celle du genre précédent, je crois cependant que fi elle fe trouve réunie à quelques autres des parties de la fleur , elle pourra contribuer à établir encore un genre nouveau. J'ai déjà obfervé que cette plante eft une de celles dont le pureau des écailles finit par une languette molle & douce ; mais

elle a cela de fmgulier, qu'elle porte de gros mamelons alongés

fur les côtes des feuilles & des tiges : ces mamelons forment par le bout fupérieur une cupule ronde affez groffe, & d'un jaune fale ; je n'ai point obfervé dans toutes les plantes fui- vantes de femblables glandes : la précédente convient bien avec elles par le duvet blanc qui fuinte des têtes à fleurs & de J'entre-deux des groffes nervures des tiges & des feuilles; mais les mamelons de ces dernières ne font pas auffi élevés & n'y forment pas des cupules, ils ont feulement la forme des glandes plobulaires, très-gonflées cependant; ces plantes font le rhaponticoïde à feuilles de chêne vert, fur lequel on trouve f'infefte appelé kermès : fes mamelons ou glandes globulaires font d'un rougeître foncé; ils font encore plus élevés, & ils approchent plus de ceux de la première efpèce dans-le rha- ponticoïde en arbrifieau à feuilles de caprier, relevées de trois nervures, & qui vient dans les ifles d'Hyères : les tiges, les feuilles & leurs pédicules en font chagrinés, les uns font blancs, & les autres d'un foufre doré. Le bluet à longues

feuilles qui s'élève en arbre, & qui eft décrit par Profper Alpin dans fon Ouvrage des plantes exotiques, eft placé dans l'Herbier de M. Vaillant avec les rhaponticoïdes: cette

EN mSISNC 1 E N'CHENS 431 plante a du duvet fur les tiges, des mamelons glandes globulaires élevées, aflez grofles & d’un foufre doré; celles des feuilles font noirâtres ou fans couleur déterminée, & moins élevées que celles des tiges. J'ai remarqué de plus que le pureau des écailles des têtes à fleurs ne s’alongeoit dans toutes ces plantes qu'en une pointe courte & moufle, que leurs ovaires portoient des aigrettes à plume, dont les bar- billons étoient très-courts, & qui étoient ordinairement blanches, mais d’un beau couleur de cerife foncé dans le petit rhaponticoïde, dont les feuilles reflemblent à celles du caprier. Dans le nombre des autres efpèces que j'ai examinées, les unes ont des glandes globulaires , les autres n'ont paru n’en point avoir ; peut-être que les unes pourroient être réunies avec les précédentes , les autres en être féparées; celles qui ont des glandes globulaires font les 12, 24, 25, 26, 28 efpèces ; les glandes font Verdâtres dans Ja 12, foufrées dans les autres, & quelquefois avant que de prendre cette couleur elles pañlent par celle d'un blanc de lait affez beau. J'ai plus du duvet fur quelques-unes des parties de ces plantes, les 24, 25, 26 en étoient blanches, la dernière en avoit peu, 1 28 ne m'en a point fait voir; mais ces deux plantes avoient des filets à valvule qui doivent, à ce que je crois, en donner lorfque la plante eft fur pied, & peut-être que le duvet des autres n'eft que le fupplément aux filets de celle-ci : le pureau des écailles finit par une feule pointe douce dans toutes, excepté dans la troifième, il finit par deux ou trois qui font petites.

Plufieurs des autres elpèces m'ont paru n'avoir que du duvet, telles que font les 10, 13, 27, l'argyrocome du cap de Bonne- efpérance à feuilles de thym, qui eft cité dans fe Mémoire de 1718, à l'article des Immortelles, & le hameæpeuce de Profper Alpin, qui eft dans l'Heïbier : toutes ces plantes ont prefque toutes leurs parties drapées d'un duvet blanc & épais.

M. Vaillant a regardé comme des rhaponticoïdes une patie des grandes centaurées de M. de Tournéfort, & de Yautre il en a fait des rhapontics, auxquels il a joint quelques

432 MÉMOIRES DE L’'ACADÉMIE ROYALE efpèces de jacées du même Auteur & de quelques autres. Toutes les grandes centaurées ont beaucoup de rapport entre elles ; j'en parlerai donc en même temps , & enfuite des Jacées que M. Vaillant a placées fous le même genre. Les grandes centaurées ont fur les feuilles & les tiges des filets à valvule, d’où il fort un brin de fil blanc femblable au duvet qui couvre plus ou moins les mêmes parties, qui ont encore outre cela les glandes globulaires d’un beau couleur de foufre doré pour l'ordinaire; excepté les deux dernières grandes cen- taurées des Inftituts, & celle qui a de larges feuilles décou- pées, & qui s'élève peu, j'ai toutes les autres des Inflituts, & celles du Corollaire, en exceptant auffi la quatrième. Les efpèces qui ont le plus de duvet, font celles que l'on a com- parées au bouillon blanc, à l'artichaut ou à l'aulnée; celles il y a le plus de filets à valvule, l'ont été au pin, au -pañlel ; celles qui font les plus lifles, ont les feuilles décou- pées ; lorfque l'on preffe la tête, formée par l'affemblage des fleurs de ces dernières, on en fait fortir une liqueur dlaire, limpide & douce, qui reflemble aflez à une eau de miel légère; elle eft fournie par les glandes globulaires du deffous des écailles des têtes : ces glandes s'obfervent auffi fur les feuilles & fur les tiges, elles y font ordinairement d’un beau couleur de foufre doré: elles m'ont paru d'un beau blanc. qui avoit quelque chofe de brillant, dans les deux efpèces à feuilles d'aulnée ; elles font affez apparentes dans la plufpart, mais je ne les ai point trouvé plus grofles & plus élevées que dans celles d'Orient à feuilles de paftel : les mamelons qui portent les filets à valvule, y font même plus gros que ceux des autres efpèces.

Les autres rhapontics de M. Vaillant, qui, avant lui, avoient été mis au nombre des jacées ou des bluets, ont auf du duvet, des filets à valvule qui donnent un brin de fl, & des glandes globulaires. Les efpèces qui ont été com- parées aux bluets ou aux immortelles, font les plus drapées de ce duvet, & ont moins de filets à valvule : les glandes globuhires font ordinairement verdâtres dans les elpèces qui

ont.

D RMS AE IN CESÉVINMN 429 sont les écailles des têtes argentées, & d’un foufre doré dans des autres. La couleur! verdâtre d’une partie de ces glandes

. n'eft peut-être que l'état elles paffent avant que de prendre

Yautre couleur; car je les ai trouvé verdâtres dans la petite jacée qui s'étend fur terre, qui eft à fleur pourpre, & qui, felon M. de Tournefort, n'eft peut-être qu'une variété de Îa jacée ordinaire des prés, ces glandes font d'un foufre rou- gettre ou doré: l'argenté des écailles des efpèces qui en ont de femblables, leur eft propre, &.n'eft ni au duvet ni à quelqu'autre matière qui tranfpire de leurs. furfaces.

I1 fe trouve par ce queljai dit dans cet article, que j'ai parlé de tous les rhapontics & de la plufpart des rhaponti- coïdes de M. Vaillant. Les efpèces de ce dernier genre dont il n'a pas encore été queftion , n'ont fait voir des filets à valvule, d'où il fort rarement un brin de fl, peu de duvet & point de glandes globulaires. Quelques-unes de ces plantes compofent en partie le.-genre de farrette que M. Linnæus a formé : la quatorzième & la feizième efpèce de rhaponti- coïde font de ce nombre. Je crois Que l’on pourroit y ajoû- ter la huitième, & fur-tout la dix-neuvième, peut-être même la feptième & la cinquième. Cette dernière differe de toutes ces-plantes, -en ce que. fes. filets: font. couchés, argentés & foyeux, & que les feuilles , les tiges. &.les écailles des têtes à fleurs en font drapées , au dieu que les, filets des autres ont une efpèce de roideur & qu'ils font .en petit nombre. Je mai point encore de glandes. globulaires, dans la vingtième, mais de petites cavités qui pourroient cependant en-faire les. fonctions :_ fes filets font longs, ils jettent un fl femblable au duvet des efpèces qui en donnent, & que je n'ai pas obfervé dans celle-ci. IL eft fingulier que les ef- pèces de rhaponticoïdes que M. Linnœus a tirées d’entre celles de ce genre, n'aient point de glandes globulaires, tandis que les autres en font. fournies; je penfe en conféquence, que celles je ne; les ai, pas trouvées, pourroient être aufit des farrettes,. La feconde efpèce de M. Linnæus eft le crfum dés: Alpes: à feuille de bon-henri : je n'ai point va de

Mém. 1749, » lii F

MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyaLre glandes globulaires fur cette plante, mais beaucoup de du- vet fur toutes fes parties, comme dans les autres cirfiuns , dont il eft différent par les dentelures de fes feuilles, qui n'ont tout au plus qu'une petite pointe moufle, & laquelle n'eft pas piquante comme les pointes des vrais cirfrum , dont je parlerai à l'article de ces plantes. Si ce arfium eft réellement une farrette, quelques-unes auront donc beaucoup de duvet, mais il pourroit fe faire que le genre de cette plante ne fût pas encore bien déterminé.

Quand M. Linnæus n'auroit pas réuni les jactes & les bluets aux grandes centaurées, les citations fréquentes que j'ai faites de plufieurs efpèces des premières, demanderoient que je parlaffe ici des autres efpèces. Les jacées rapportées dans le Mémoire de M. Vaillant, m'ont toutes fait voir des glandes globulaires, excepté la dernière; mais celle-ci, comme toutes les autres a du duvet & des filets à valvule, d'où il fort un fil femblable au duvet. Les efpèces que lon a défignées par leur couleur blanche cendrée, font celles qui ont moins de filets & plus de duvet: elles en font même drapées fur les feuilles & les tiges.» Les glandes glo- bulaires font verdâtres dans la plufpart, d’autres les ont d’un beau couleur: de foufre doré, comme les 7,8, 11, 23,26; elles le font un peu moins dans les 2, 15, 19, 21 ; elles étoient rougeätres dans a première; Ja 9 & la 10 en avoient d’un couleur d’eau clair, & toutes les autres d'un verd file & obfcur. Ces différentes . couleurs font-elles permanentes ou feulement paffagères ? c'eft ce que je ne puis déterminer; il y a même lieu de penfer par ce que j'ai dit autre part plus d'une fois, que ces couleurs ne font que les différens états ces glandes fe trouvent fuivant qu'elles font plus ou moins avancées, ou que a liqueur qu'elles eontiennent eft plus ou moins perfeétionnée. La variété de la feptième éfpèce peut encore le prouver, puifque fes glandes étoient blan- ches, & que celles de l’efpèce dont elle n'eft qu'une variété, étoient d'un foufre doré : cette efpèce étant fur pied eft gluante au toucher; cette glu vient d'une matière vifqueufe

| DfElS Se: 1E Nec LES DLL 405

i füinte des glandes globulaires. Je n'ai rien de fem- blable dans les efpèces précédentes, même dans celles que j'ai examinées avant qu'elles fuffent defléchées: je penfe cependant qu'il peut y avoir un temps cette glu paroïtroit.

Les jacées du Mémoire de M. Vaillant ne font pas les feules que j'aie examinées; J'en ai trouvé quelqües autres dans ’'Herbier de cet habile Botanifte, qui ne font pas citées dans le Mémoire , favoir, la feconde jacée de Sicile à feuilles légèrement découpées, de Boccone; une de Micheli, qui vient fur les montagnes, qui a la fleur pourpre, les feuilles découpées , verdâtres & rudes, & les écailles des têtes en plumes noirtres ; une de Lobel, qui vient fur les montagnes des environs de Narbonne; celle de Portugal à feuilles Iévè- rement découpées ; celle qui eft très-rameufe, qui a la fleur * pourpre & couronnée ; une autre appelée miacanthos à feuilles petites, découpées, blancheïtres, à tige rude, à tête petite, conique, armée de petites épines rougeätres ; & une autre fous le même nom, qui ne diffère de fa précédente que par fes feuilles, qui reflemblent à celles de la chicorée fauvage, & par fes têtes oblongues. Toutes ces plantes ont des glan- des vérdâtres, excepté la dernière elles font foufrées : les trois fuivantes font démontrées au Jardin Royal fans cita- tion ; Vuneeft la jacée à tête épineufe; la feconde eft celle d'Italie à feuilles découpées & à fleur d'un pourpre fale; la troifième à auffi les feuilles découpées, mais la fleur. grande & jaune, & les calices reluifans ; je crois leurs glandes ver- dâtres. Ces plantes & celle d’Auftrafie dont il fera parlé plus bas ont, avec les glandes, du duvet & des filets qui, à ce que je crois, jettent un brin de fil par leur bout fupérieur. Ces filets & ce duvet font plus ou moins abondans, mais aucune ne m'en a fait moins voir que celle d'Orient, qui porte fes branches éparfes en tout fens, qui a le port de carthame & la fleur jaune & grande; elle eft prefque life, fes têtes feulement ont un peu de duvet & quelques filets. La jacée du cap de Bonne-efpérance , à petites feuilles velues & à têtes vifqueufes, citée par Pétiver, donne une

liii

436 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE matière réfimeufe qui paroît en fuinter ou fortir de petites crevafles ; car je n’y ai pas de glandes, ni même fur les autres parties. |

Les écailles des têtes des jacées font découpées en plu- fieurs petites lanières , dont les unes font fimples & les autres forment de petites plumes, c’eft-à-dire que chaque lanière porte fur fes côtés de petits filets, qui font comme les barbes d'une plume. J'avois toüjours cru devoir regarder ces lanières. & ces plumes comme des efpèces de filets qui pourroient donner iflue à quelque liqueur, muais je n'avois ofé jufqu'ici avancer ce fentiment, n'ayant jamais rien fortir de ces filets; ce qui nYavoit toùjours échappé, s'eft montré dans la jacée d’Auftrafie à tête garnie de plume : plufieurs des barbes de ces plumes portoient un grain réfineux blanc qui me parut en avoir fuinté. Cette obfervation fait, à ce qu'il me femble, connoître la vraie fonétion de ces filets, & m'engage à rappoxtér les efpèces de jacées qui ont de ces plumes ou des filets fimples; ceux-ci donnent, par leur ar- rangement fur le bord des écailles, Ta figure d’une crête de coq aux écailles ils fe trouvent. Les efpèces qui ont de ces écailles, font la première & la feconde efpèce; dans la pre- . mière , les filets font roides & prefque épineux; la 8 & la 9 en ont de doux comme ceux de la 2, qui font femblables à ceux des 1 1 & 12, des 15 23, des 25 & 26, excepté cependant la r9, ils ont aufir quelque roïdeur. Les autres efpèces ont des plumes dont les barbes font affez apparentes: elles font très-courtes dans la 3 : la variété la 7 n'a pas les plumes de l'efpèce dont elle eft regardée comme une va: riété, fes lanières font fimples: jai dit plus haut que fes glandes globulaires étoient différentes , ainfr elle pourroit être une vraie efpèce. La 27 a fimplement de petites pointes moufles par le bout fupérieur & fans filets latéraux; elle m'a pu ne point avoir de glandes globulaires, elle pourroit ainfi ne pas être une jacée, Je n'ai pas les écailles de la 25, ne l'ayant pas trouvée en fleur.

Parmi les efpèces qui ne font pas rapportées dans le

DNEUSMANNC 1 E N.C_ ES 437 Mémoire de M. Vaillant, il y en a auffi qui ont des plu- mes, & d’autres qui en font privées: de ces dernières font toutes les efpèces dont j'ai parlé, excepté celle d’Auftrafie, celle qui a les feuilles découpées, la fleur jaune, grande & le calice reluïfant, & l'autre qui eft auf à feuilles découpées, qui a la fleur d'un pourpre file, & qui vient en Italie. M. Vaillant n'ayant pas cru devoir diviler ces plantes & en faire deux genres, je l'imiterai; ceux qui penferont que ces diffé rences fufhfent pour les établir, pourront les faire, jy ferois cependant conduit par les principes que j'ai cru pouvoir fuivre.

On peut également divifer les bluéts en deux fetions; ceux qui ont les écailles à fllets fimples , font le premier juf- qu'au cinquième inclufivement, le huitième, & l'efpèce des jardins, qui n’eft, fuivant M. Linnæus, qu'une variété de celui de la campagne. Ceux qui ont des plumes font les deux efpèces à tête garnie de plumes, c’eft-à-dire, les 10 & x1 du Mémo M. Vaillant, les 12 & 13, dont l'une eft comparée à l’armoile, & l'autre à la giroflée, La 14, qui eft le bluet à feuilles d'herbe à l’épervier, diffère des uns & des autres, parce que fes écailles ne portent que plufieurs gros filets roïdes au. bout fupérieur du pureau.

H y a encore quelque différence par rapport au duvet, aux filets & aux glandes globulaires ; les uns, comme les sbluets de la campagne & des jardins , les 7, 10, 13, ne “m'ont paru avoir que du duvet qui couvre leurs feuilles & leurs tiges, ou tout au plus de gros mamelons courts fur les côtes. des tiges, d'où äl fort aufli un brin de fil. Les filets font mieux déterminés dans les autres efpèces, ils fe trouvent réunis au duvet, & feulement dans Les 3, 4, 853 ils y font même gros & à valvules éloignées les unes des autres, & bien diflinctes ; ils le font de façon dans une efpèce trouvée en Egypte par M _Lippi, qui eft petite, rameule, à tige aîlée, à petite fleur pourpre, & qui n'eft pas rapportée ( dans le Mémoire de M. Vaillant, qu'ils reflemblent à petits chaînons, ou à des efpèces de chapelets. Les glandes globuaires & le duvet font dans ceux à feuilles d'herbe à l'épervier & de

Ti ü

438 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE giroflée : la couleur des glandes eft d'un foufre doré; elles font fans couleur déterminée dans celui des Alpes à tête garnie de plumes, & à feuilles longues, étroites & à dent de fcie; elles y font jointes au duvet & auxe filets à valvule. Ces différences font-elles conftantes? &, cela fuppofé, devroient- elles faire féparer ces plantes? c'eft fur quoi je ne puis décider. M. Vaillant a déjà dit que les ovaires de certaines efpèces étoient nus, que ceux des autres portoient une aigrette de plumes ; mais quelles font les efpèces qui ont les uns ou les autres? il ne la pas appris, & je n'ai pas acquis cette connoiffance.

M. Vaillant a déjà Ôté d'entre les bluets de M. de Tour- nefort quelques efpèces qu'il a jointes à une jacée du même Auteur, pour former le genre qu'il appelle amberboi am- brette. La première & la feconde efpèce ne m'ont fait voir que du duvet fur toutes leurs parties; la jagée, qui eft celle à feuilles de roquette & velues, en a peu, mais on y voit des glandes globulaires foufrées, couleur qui domine dans celles des iètes elles font auffi plus groffes que fur les autres parties,

ui ont de plus quelques filets à valvule. La jacée qui ref- femble au bluet, qui a les tiges aîlces, & qui eft de Boerhaave, eft femblable en tout à la précédente; mais fes écailles font fimples comme dans les deux premières, & ne finiflent pas par une longue épine comme celles de {a première jacée.

Il ne me refte plus de tous les genres que M. Linfæus a réunis avec les précédens, que les chauffe-trappes, les char- dons étoilés ou calcitrapoïdes, & le crocodilium ; ce dernier ne renferme que deux elpèces: j'ai la feconde, elle eft prefque fans tige, fes feuilles reflemblent à celles de la chauffe- trappe, elles font épaifles & couvertes de duvet, de même que les tiges, & je n'y ai trouvé ni glandes globulaires, ni filets à valvule.

Les chaufle-trappes font en bien plus grand nombre ##M. Vaillant en comptoit trente-quatre efpèces ; je les ai examinées à l'exception de huit, qui font les 2, 4, 6,732, 14, 10 31; elles diffèrent peu entre elles du côté du duvet, des

DA ESEISNC 1 E NICE: se 439 filets & des glandes; le duvet couvre plus moins les feuilles & les tiges; les filets jettent un brin de fil de fa nature du duvet, & ils font d'une longueur & d’une groffeur peu diffé- rentes. Les glandes globulaires m'ont paru d’un beau couleur de foufre doré dans les dernières efpèces, à compter depuis la 21.° indufivement , jufqu'à la dernièré ; elles étoient p'uftôt claires & blanches dans les autres : ces glandes fe trou- vent fur les feuilles, les tiges, & même fur les écailles des têtes. Il y a un peu plus de différence entre ces plantes du côté des épines dont le bord, des écailles eft armé; dans les unes, ces épines. font plus longues & en plus grand nombre

ue dans les autres; elles font dans d’autres efpèces pluftôt des filets fimples & moufles que des épines, & ceft ordi- nairement dans celles qui ont été mifes par diflérens Auteurs au nombre des jacées; il en eft toujours ainfi, à moins que és Auteurs n'aient averti que les écailles étoient épineufes.

- Il faut joindre aux efpèces de chauffe-trappes du Mémoire de M. Vaillant, les deux fuivantes que j'ai encore obfervées, favoir, celle qui a les feuilles entières, la fleur pourpre, & celle à fleur jaune, qui a les têtes armées d’épines plus groffes & plus grandes qu'à l'ordinaire, & qui eft auf épineufe fur : fes autres parties. Ces deux plantes font démontrées au Jardin du Roï ; elles conviennent en tout avec les dernières des pré- cédentes : j'ai de plus dans la -lernière de celles-ci, quel- ques glandes globulaires fur le deffus des feuilles, qui don- noient une liqueur vifqueufe, claire & limpide.

Les chardons étoïlés ou calcitrapoïdes ont encore beau- coup de rapport, non feulement entre eux, mais avec les chaufle-trappes : comme celles-ci , ils ont du duvet, des filets & des glandes globulaires verdâtres, ou d’un foufre doré, qui fe trouvent fur les feuilles, les tiges & les têtes. Ces dernières paîties ont aufli des épines dans plufieurs efpèces, pour ne pas dire dans toutes , indépendamment de celles des feuilles & des tiges. Je n'ai fortir de liqueur des glandes globu- laires, que dans la première elpèce, qui eft le chardon de Crète à feuilles rave ; non feulement celles du deffus des

440 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyaLE feuilles, mais encore celles du deflous & des tiges en don- nent, & cette liqueur eft, comme celle de la chauffe-trappe dont j'ai parlé, claire, limpide & vifqueufe.

Les chardons étoilés cités par M. Vaillant , font au nombre de 17: j'en ai 13, les quatre que je n'ai point examinés font les 2, 4, 7, 12, mais le 4 &le 12 ne font peut-être que des yariétés du troifième, ils n'en diffèrent du moins, fuivant Barrelier, que par le plus ou le moins de grandeur.

Je remarquerai, avant de finir cet article, que la vinot- deuxième chauffe-trappe, qui eft la jacée à fleur jaune, à tête épineufe, tige aîlée & feuilles aïgues de chicorée, & Ia trente- quatrième qui eft e chardon de Malte à feuilles de roquette & à fleurs jaunes, ont des glandes à cupule fur le bord des écailles des têtes; elles font petites dans la première efpèce, plus groffes dans la feconde, & comme compofées de grains, dont le dernier eft plus gros & femble s’évafer en cupule par le haut: je ne puis dire sil y en a de femblables ou quelque chofe d'équivalent dans les autres efpèces, & dans les chardons étoilés ; fr cela étoit, ce feroit peut-être une raifon pour féparer ces genres de ceux auxquels on les a joints, car il faut avouer qu'ils ont tous beaucoup de rapport, non feulement par la fleur, mais encore par les glandes & les filets; & si! y en a je n'ai pas trouvé les glandes globulaires , ce n’eft peut-être que faute d'avoir examiné des plantes elles fuffent affez gonflées pour être apparentes : fr donc les chaufle-trappes avoient des cupules, ces cupules -féroient une différence bien fenfible, & qui, jointe à celle d'avoir des épines , me paroîtroit fuflifante pour bien diftinguer ces genres, de forte qu'a- lors, au lieu de réunir ces genres à ceux auxquels on les a joints, il faudroit s'en tenir à ce que M. Vaillant a fait 1à- deffus, ou M. de Tournefort, en admettant quelques chan- gemens dans ceux que M. Vaïllant a formés, & en établiffant le genre que j'ai propolé au commencement de cet article, ka figure particulière des filets de fes. plantes qui s'évafent

pa

DES SCtENCE!Ss A4 par le haut en plufieurs petites parties recourbées, qui forment des houppes ou des goupillons. ? La longueur de ce dernier paragraphe m'obligera à ne Quercus, rapporter qu'un exemple des genres dont Aa réunion eff Chére- conftatée par mes obfervations , & ce feul exemple formera ae 1 la dernière partie de ce Mémoire. Je tirerai cet exemple du l genre du chêne , auquel M. Linnæus a joint ceux du chêne vert & du liége : jamais conformité n'a été plus grande que celle des efpèces qui compofent dans M. de Tournefort ces trois genres ; elles ont toutes fur les jeunes poufles & les feuilles, fur-tout en deflous, & #principalement lorfqu'elles font nouvelles, des houppes compofées de plus de cinq ou fix petits fllets , qui ne varient même guère pour la cou- leur, qui eft ordinairement blanche, mais, dans les feuilles avancées, un peu jaunâtre; c'eft ce qu'on peut voir éomme moi dans les chênes qui ont le fruit porté fur un long ou court pédicule; dans celui qui ne s'élève pas au delà d'un pied ; dans celui d'Afrique, dont le gland eft très -long ; dans la femelle à large feuille; dans celui de Virginie à veine rouge; dans celui à larges feuilles, & qui eft toüjours vert; dans celui qui eft le hètre des Grécs & de Pline; dans les rouvres 1,2, 3, 4, $ de Clufus; dans tous les chènes verts des Inflituts, à l'exception du dernier & de celui de Montpellier, dont les feuilles font cotonneules des deux côtés, que je n'ai pas examinés ; & dans les deux efpè- ces de liége de ce même Ouvrage , auxquels il faut joindre le chêne dont le gland eft très-gros, & porté fur un long pédicule, du Catalogue des environs de Paris; celui à qui Jean Bauhin donne fimplement le nom de hêtre ou de chêne; celui que Plukenet appelle arbre très-élevé à feuilles de châ- taignier & qui vient en Virginie; celui du même Auteur & de fa Phytographie, ainfr que le précédent, qui a les feuilles divifées comme celles de leféulus, & qui {ont grandes & épineufes ; celui de Virginie à feuilles longues & femblables” à celles du faule, qui eft cité par Plukenet; la phyfodrys blancheître à larges feuilles, dont les épinés font moufles &

Mém. 1749. . Kkk

Suber, Liége..

442 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

qui eft la première efpèce de ce genre dans Gafpard Bauhin, les prétendues épines de cette dernière efpèce ne font , comme dans les chênes verts, que le prolongement des dentelures .des feuilles , qui eft dur & roide: c'efl à un tel prolonge- ment que les épines des calices ou cupules du gland de celui que Gafpard Baubin a défigné par cette propriété, font auffi dûes ; en effet, ces prétendues épines ne font que le bout des écailles de cette partie, qui fe font étendues, recourbées & durcies. Celui d'Orient à larges feuilles, qui a de très-gros glands & une cupule chévelue, ne doit cette prétendue che- velure qu'aux écailles du ealice, qui font aufii alongées plus qu'à l'ordinaire, mais qui font plus fmes & plus douces : je crois que c'eft à quelque chofe de femblable que celui dont le fruit eft gros & le calice chagriné de mamelons, celui d'Orient à feuilles de châtaignier, dont le gland eft fo dans la cupule, qui eft épaifle & écailleufe, & celui de Bourgogne à calice velu, doivent ces propriétés de leurs cupules , énoncées dans les dénominations. Je ne puis cependant l'aflurer que par induétion , n'ayant pas ces fruits, mais je crois qu'il y a tout lieu de le penfér, après ce que J'ai obfervé fur les précédens : au refle les feuilles & les jeunes poufles de ces dernières efpèces font auffi couvertes de houppes femblables à celles des premières, & les cupules ou calices de toutes, ceux même des chènes verts & des liéges, font ordinairement hériffés de poils fimples, pluftôt cylindriques que coniques , plus ou moins longs & abondans ; on en trouve même juf= que fur le gland lorfqu'il eft jeune, je l'ai du moins ainfi obfervé dans quelques efpèces.

S'il étoit vrai que l'arbre que Plukenet appelle dans fon Almagefte chène de Virginie, à feuilles oblongues, avecides finuofités & fans finuofités, fût réellement un chêne, luni- formité prétendue dont j'ai parlé plus haut fe trouveroit démentie, puifque je n'ai fur les feuilles de cet arbre que des filets fimples, longs & en moyenne quantité, & des elpèces de glandes véficulaires ; mais n'ayant réellement que des feuilles de cet arbre, je ne puis pas déterminer au

D MMS US LE Ni d'ENdE 443 jufte fi c'eft un chéne ou non : je pencherois cependant plus

à croire que ce n'en eft pas un; mais ne fuivrois-je pas en

cela pluftôt un préjugé, que ce qui eft réellement? Laiflons donc aux obfervations que lon pourra faire, à éclaircir ce point, & difons que quant aux chênes dont le cuaétère eft bien déterminé, ïl y a lieu de penfer qu'ils feront voir tous des houppes femblables, Pourvü*cependant qu'ils foient dans un état fain; car il arrive fouvent que lorfque Jeurs feuilles font piquées de quelques infèdtes, & qu'il sy forme des’ galles, (on fait qu'il ya peu d'arbres qui oient plus fujets à l'être que celui-ci), il arrive, dis-je, alors que les feuilles font liffes & entièrement privées de houppes : on en trouve cependant quelquefois {ur les galles même. & c'eft dans cet état que Malpighi en a fait graver quelques-unes, qu’il difoit être des filets branchus : mais examinées avec foin, ellés ne m'ont jamais paru que des, houppes für les galles même que cet Auteur décrit: enfin, pour finir cet article & ce Mémoire, quelle que foit la variété qui arrive dans les feuilles de ces arbres, on trouve toüjours les houppes, Je les du moins obfervées dans plufieurs variétés du chêne

grdinaire.

444 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

EXPERIENCES rr OBSERVATIONS FAITES ; EN DIFFERENS ENDROITS DE L'ITALIE,

Par M. l'Abbé NOLLET.

LA

: ERdE ent eft un pays fi connu, & le temps que j'avois

-j à employer pour le parcourir a été fr court, que je me croirois exculable de n'avoir fait ce voyage que pour moi- même, c'eft-à-dire, d'y avoir feulement admiré ces merveilles de la Nature & de Fart qui fe préfentent en aflez grand nombre pour occuper entièrement un fpectateur preflé de paffer outre, mais que tout le monde connoït, foit pour les avoir vües, foit pour avoir les livres qui en parlent. Mes plus longs féjours, excepté deux mois & demi pendant lef quels j'ai demeuré dans le Piémont, m'ont point pañlé trois femaines , & plufieurs ont été bornés à huit ‘ou dix jours; il n'eft guère poffible de fe livrer à des recherches un peu pro- fondes, quand on eft obligé de changer auffi fouvent d'objet

Cependant, comme la Nature dans cette belle ar du monde eft très féconde en phénomènes, je mai la confidérer, même brièvement , fans faire quelques remarques qui ont excité mes réflexions, & qui n'ont porté à faire des épreuves. Ce font ces remarques, ces réflexions & ces épreuves, que j'ai raflemblées dans ce Mémoire pour me les retracer à moi-même, & pour en faire part à ceux qui les jugeront dignes de quelque attention : à l'exception des faits dont je crois n'être fuffifamment affuré , je préfente tout le refte , bien moins comme des vérités arrêtées & dégagées de toute incertitude, que comme des connoïflances ébau- chées que je foûmets très-fincèrement à la faine critique de perfonnes plus éclairées que moi, & qui auront plus de loifir que je n'en ai eu, pour découvrir & examiner de tout point les circonftances les plus difficiles à pénétrer.

1

M MMS LE: RE NC ENS 445

Sans avoir égard à Fordre des temps, je réunirai fous des

titres communs toutes les matières d’une même efpèce, ou

qui auront beaucoup de rapport entre elles; des faits analo-

gues ainft raflemblés fous le même point de vûe, feront

mieux juger de la valeur des réflexions qui les accOMpa- gnent, & de la juftefle des conféquences qu'on en à tirces.

AER'TWIICÉE UPREMIER. Ete@riciré.

Un des principaux objets que j'avois en vüe en partant pour fltalie, c'étoit de voir par moi-même ces effets fi fin- guliers attribués depuis quelques années à la vertu électrique, & publiées par des perfonnes dignes de foi. Pouvois-je n'être pas extrèmement furpris de voir que toutes ces merveilles fuffent comme réfervées pour un feul pays? (car fi l'on excepte feulement M. Winkler, qui dit avoir fait avec fuccès les mêmes expériences à Leipfick, perfonne que je fache, ni en Allemagne, ni en Angleterre, ni en France, n'a rien de femblable, quoiqu'on y ait eflayé par -tout avec beaucoup de foins & d’obftination ). Un étonnement fi bien fondé excitoit en moi le defir inexprimable de voir les faits, & de les examiner par toutes les faces, pour ap- prendre, sil étoit poffible, à quoi il tenoit qu'ils ne fe fiflent voir ailleurs que dans F'Italie.

Ces faits peuvent fe réduire à trois principaux, favoir, 1 Ja tranfmiflion des odeurs à travers un cylindre un globe de verre électrifé par frottement, & bouché comme herméti- “quement ; 2." des perfonnes de tout âge & de tout sèxe, purgées, lorfqu'elles fe faifoient éledrifer ayant dans la main certaines drogues, comme la réfine de fcammonée, gomme gutte, &c. 3.° des rhumatifmes goutteux & invétérés, des fciatiques, des paralyfies, des ankiloles, des tumeurs & quan- ité d’autres maladies totalement enlevées, confidérable- na diminuées par une feule éleétrifation, ou par deux trois feulement, taniôt avec un cylindre de verre fimplement

KKk ij

1."

Expérience.

446 MÉMOIRES DE L'AGADÉMIE ROYALE frotté, tantôt avec un pareil vaiffeau rempli de drogues con- venables à la guérifon du malade.

Tous ces merveilleux eflets vinrent à notre connoiffance, d'abord par des lettres particulières dont plufieurs me furent adrefées dire‘tement, eu communiquées par les perfonnes qui les.avoient reçües ; enfin le Public en fut inftruit par des Ouvriges imprimés #, l'on trouve l'origine, les progrès & tous les détails de ce qui s'eft pañlé à cet égard, première- ment à Venile, & enfuite à Bologne & à Turin.

1. Je neus rien plus à cœur, lorfque je fus arrivé à Turin, que de vifiter M. Bianchi, célèbre Médecin Anato- mifle, & premier auteur des Purgations éleGtriques, & de hui demander que ces expériences dont il nr'avoit envoyé la life, & qui n'avoient fi mal réuffi à Paris, fuflent répétées entre nous & fous fa direction. J'obtins facilement de fa complai- fance ce que je demandois; nous primes jour, & le Père Garo ? fit porter chez M. le Marquis d'Ormea, nous convinmes de faire nos expériences, fa machine d’éledricité, qui eft tout-à-fiit femblable à celle que j'ai décrite dans mon Effai.

Le 21 du mois de Mai de l'année précédente‘ 1749, fur les quatréheures, par un temps frais, mais incertain, M. Bianchi ayant apporté un morceau de fcammonée & un autre de gomme gutte, dont chacun étoit à peu près de la groffeur

2 Della Ellettricità medica, let- tera del chiariffimo fignore Gis- Francefco Pivati, Academico dell Academia delle Scienze di Bologna, al celebre fignore Francefco Maria Zanotti, Segretario della fleffa Aca- demia, in-8.° imprimé à Lucques en 1747, & réimprimé à Venife en 1748. Offervaziont fifico - me- diche intorno alla elleétricita , dedi- cate all’ illuftriffimo ed eccelfo Se- nato di Bologna da Gio- Giufèppe Verati, publico Profèffore nella Univerfità à7 nell’ Academia delle Scienze dell infhituto Academico benedertino', in-8.° imprimé à Bou-

logne en 1748. Rifleffioni fifiche Jopra la medicina eletrrica del fignor Gio- Francefto Pivati, Academico dell Academia delle Scienze di Bo- logna, è7c, petit in-fo2. imprimé à Venife en 1740. Lettera del fignor Canonico Brisoli, fepra la ma- china eletrica, imprimé à Vérone en 1748. )

b Relioieux de l’ordre des Mini- mes, ancien Profeffeur de Philofo- phie en l’Univerfité de Turin, & fort appliqué depuis long-tempssà fa Phyfique expérimentale : il eft depuis trois ans Correfpondant de lAcadé- mie Royale des Sciences.

de. sd co cèrities ste

a

D MANS CL E ANT C ES 447

d'un œuf de poule, je pris le premier dans la main droite,

& ayant la gauche prefque appliquée à la furface du globe de verre, & les pieds fur un gâteau de réfine, on m'éleétrifa pendant 1 $ minutes fans interruption : ce jour-là Féledricité étoit médiocrement forte.

Après moi lon électrifa de même un jeune homme de vingt-deux ans, d’une complexion aflez délicate, que j'avois pris depuis quelques jours pour me fervir. ba :

Enfuite on fit la même chofe pour une fille de feize à dix-fept ans, d’une foible complexion, mais qui n'avoit alors aucune inconmodité,

Après cela on fit la même épreuve fur le Père Bécaria, Profeffeur de Philofophie en l'Univerfité , âgé d'environ trente-cinq ans, d’un tempérament fec & bilieux.

On électrifa encore de la même manière un Aide de cui- fine de la maifon, âgé de vingt-quatre ans, qui ne paroifloit point malade.

Enfin on fit la même épreuve fur un autre domeftique, homme robufte & ägé de quarante ans ou environ, & l'élec- tifation dura pour chacune de ces cinq perfonnes, autant de temps qu'on l'avoit fait durer pour moi, 5 $ minutes de fuite.

Je ne reffentis en moi aucun effet que je’ puffe attribuer à l'électricité, aucun mouvement extraordinaire, aucune dou-* leur d’entrailles. Il en fut de même du Père Bécaria, du domeftique âgé de quarante ans, & de la jeune fille ; mais le jeune homme de vingt-deux ans, interrogé après les autres, a dépofé qu’il avoit eu pendant la nuit deux évacuations avec quelques mouvemens de colique; & l'Aide de cuifmne, à qui l'on fit de pareilles queftions, répondit qu'il en avoit eu auffi une très-copieufe, comme s'il eût été purgé.

Ces deux dernières dépofitions furent écrites, comme les autres, fur le champ, & je commençois à les regarder comme très-importantes, lorfque j'appris par aveu même du dernier dépofant , qu'il prenoit depuis quelques jours des bouillons de chicorée, pour une indifpofition dont il n'avoit point parlé jufqu’alors. Le jeune homme qui difoit avoir eu deux

2.° Expérience. * 22 Mai

1749:

Expérience,

448 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE : évacuations, me rendit fon témoignage plus que fufpect par des fingularités qu'il voulut y ajoûter quelques heures après, & depuis ce temps-là il fe conduifit fur différens fujets de manière à m'Ôter toute croyance en fes paroles.

Ce que je venois d'éprouver de la part de ces deux domelf- tiques, dont lun m'avoit laiffé ignorer pendant quelque temps l'ufage actuel qu'il faifoit de fes bouillons de chicorée, & l'autre avoit montré tant de goût pour le merveilleux, qu'on devoit prudemment douter de tout ce qu'il avoit dit; cette aventure, dis-je, me rendit très-délicat fur le choix des fujets que je devois admettre à nos expériences ; je déclarai que je n'y voulois recevoir ni enfans, ni valets, ni gens du bas peuple, mais feulement des perfonnes raifonnables, & d'un état à ne me laifler rien à craindre fur la certitude des faits dont ils auroient dépolé. -

Le lendemain * de notre première expérience, je fus encore éleétrifé pendant 1 $ minutes de fuite comme je lavois été la veille, tenant dans la main un gros morceau de fcammonée; & après moi on fit la même épreuve fucceflivement fur M. Scherra Docteur en Médecine, M. Verne Démonftra- teur en Anatomie ; M. le Marquis de Sirié, M. l'Abbé Porta Profefleur de l'Univerfité, le Précepteur des enfans de M. le Marquis d'Ormea, & celui des jeunes M's Doza. Ce jour-là l'électricité étoit paffablement forte.

De toutes ces perfonnes électrifées, aucune ne reflentit de douleurs dans le ventre, aucune n’éprouva d'évacuation qu'elle püût attribuer à la vertu électrique; mais, pour dire fcrupu- leufement tout ce qui vint à ma connoiffance après maintes queftions, le Précepteur des jeunes M'° d'Ormea déclara qu'il avoit rendu quelques vents plus qu'à fon ordinaire, & qu'il croyoit aufli avoir un peu plus uriné: ainfi de fept per- fonnes il n'y en eut qu'une qui foupçonnät Félectricité d'avoir eu quelque effet fenfible fur elle, & ce foupçon, comme l'on voit, étoit des plus légers.

Le 23 Mai, l'électricité étant plus forte que les jours précédens, nous choisimes un morceau de fcammonée neuve,

bien

a 0 AY DES SM Co L'E Ni G Er fo na 449 bién odorante, & qui. peloit 4 onces; M. le Marquis d'Or- me, M. Allion Docteur en Médecine. les deux Précepteurs nommés ci-deffus, le Père Garo, M. le Come Ferrero, & moi, nous primes Fun après l'autre e morceau de fcammonée, & nous nous fimes éleSrifer. pendant 1 $ minutes de fuite, comme on avoit: fait dans les autres expériences.

. Deux ou trois jours fe pafsèrent,, & perfonne ne reffentit abfolument rien qu'il püt attribuer à KR vertu électrique.

. Le même jour nous eflayâmes de répéter une expérience que M. Bianchi n'avoit annoncée par l'écrit dont j'ai, parlé plus haut, & qui ne n'avoit pas réufli à Paris, il s'agifloit d'une tranfmiffion d'odeur qui devoit fe faire le Iong d'une chaîne d'une barre de fer électrifée; l'un de nous prépara & appliqua un linge enduit de baume du Pérou fur la verge de fer qui recevoit l'électricité du globe; on attacha à cette verge le bout d'une chaîne de fer, qui s'électrifa par. com munication ;: & nous attendimes que l'odeur du baume fe, tranfmiît à l’autre bout, pendoit une boule de métal; mais nous f’attendimes initilérnent, perfonne n’y put recon- uoître le plus léger figne de cette tranfiniffion.

- M. Bianchi voyant conume moi que les réfultats de toutes ces expériences ne s'accordoient pas avec ceux qu'il croyoit

‘avoir eus par de paflé, me dit que cette différence pouvoit

bien venir de ce que nous employions une électricité trop forte” parce que celle dont ä avoit fait ufage, & avec laquelle il avoit réufli, lui avoit toüjours paru plus foible. Je me prétai à cette raïon, n’en. voyant point d'autreique je puñle lui rendre plus plaufble ; :&cpout remettre la manipulation däns fes prerhières circonftances, nous primes jour, & nous

nous affémblämes: au ombre: de quatorze chez. M. Bianchi,

nous: étions attendus; &-où nous fmes éleilés lun

après l'autre, par lui:même, autant-de temps. qu ik le jugeu,

à-propos, tantôt avec la fcaimmonée, tantôt avec, da. gormime gntte dont ik avoit choifr les morceaux. La. mächine dont om, fitiufage ce jour-là étoit da:même dont M: Bianchi s'eft toû- id, fervi :dans fes propres éxpériences : elle confifté,en un, Em 1749: LH :

Expérience:

4so MÉMoiREs DE L'ACADÉMIE ROYALE cylindre de verre creux, de trois pouces de diamètre, & d'u demi-pied ou un peu plus de longueur, monté entre deux fupports fur une planche que l’on attache à une table avec des vis. On fait tourner ce vaifleau cylindrique immédiatement avec une manivelle qui a au moins quatre pouces de rayon, de forte que la main qui a fait aller tourne avec plus de vitefle que la furface du cylindre de verre qu'elle met en: mouvement, | Cette machine a cela de commode, qu'une feule perfonne- peut mener d'une main la manivelle, & tenir Pautre appli- quée à la furface du vaifleau de verre pour le frotter; mais on n'aura pas de peine à comprendre que l'électricité ne peut jamais être que très-foible avec un pareil cylindre & un tek frottement ; aufir le fut-elle ce jour-là tellement qu'à peine pouvoit-on tirer des étincelles fenfibles de la chaîne de fer par liquelle on communiquoit l'életricité, ou dela perfonne. qu'on électrifoit, mais c'étoit précifément ce qu'on vouloit. Ces expériences furent faites lejeudi 29 Mai, entre quatre: & fix heures de l'après-midi, par un temps fort chaud &c' bien ferein. Le dimanche au foir toutes les perfonnes qui: avoient été élecrifées | ayant été interrogées, répondirent fans héfiter, & d'une manière tout-à-fait abfolue, qu'elles n'avoient rien’ reffenti qu'on püt attribuer à ces épreuves: ces per- fônnes étoient M. le Marquis d'Ormea, M. de Tignola Off- cier d’Artillerie, M. le Marquis de Sirié, M. le Comte Ferrero, le Père Becaria, Ie Père Garo, M. le Doéteur Alion, M. Verne, M. le Doéteur Scherra, M. F Abbé Porta, les! deux Précepteurs, la jeune fille dont j'ai déjà parlé, :& moï: La nuit fuivante, c'eft-à-dire, celle:du dimanche au fundÿ!, : je fus incommodé d’une indigeftion, & je reflentis des dou-: leurs de cofique; mais je fongeai bien moins à Îles attribuer à l'électricité dur jeudi, qu'à des radis que j'avois mangés la veille à diner; & à un très-grand: verre de limonade-frappée: slace que j'avois peu de:temps après & contre mon, ordinaire: cependant, comme quelques perfonnes ont voulw sbufer de ce faitpour-dire que l'électricité n\'avoit purgé &c:

Le RS ne ile Let in

- De SS.c 1 E Nc ES 4st ‘que je n'avois pas eu la bonne foi d’en parler, je crois devoir

Lors TS ie à ajoûter ici pour ma juflification, que j'ai eu toute ma vie

leftomac délicat, que je ne puis prendre ni glace ni liqueurs fortement refroidies, qu'avec beaucoup de circonfpe“tion, & toûjours au rifque d'en être incommodé; que les mêmes radis, qu'on nomme ravanelle en Piémont , malgré mon atten- tion à n’en manger que fobrement, m'ont caufé plufieurs fois de mauvaifes digeftions pendant le féjour que j'y ai fait, & dans des temps il n'étoit pas queftion d'expériences éleftriqnes; enfin, qu'un délai de trois jours & davantage m'avoit paru fufhfant pour n'avoir plus à tenir compte à la vertu électrique de ce qui pourroit n''arriver.

L’extrème circonfpeétion avec laquelle je voulois choifir les fujets pour toutes nos expériences, la difficulté de trouver & de tranfporter des malades d'une certaine condition, & d'un génie à ne laifler rien à craindre de la prévention & d'une imagination échauffée, celle de concilier mon temps avec celui que pouvoit m'accorder un Médecin fort occupé des travaux de fa profeflion, tant d’obftacles m'empéchèrent d’en- treprendre avec M. Bianchi des guérifons femblables à celles qu'il croit avoir opérées par le moyen de 11 vertu élettrique, foit en a faifant agir feule, foit en lui aflociant les intonaca- zures, c'eft-à-dire, certaines drogues appropriées à l'état du malade, & renfermées dans les vaifleaux de verre élettrifés par frottement; mais j'ai marqué la plus grande curiofité de voir les perfonnes qui avoient été précédemment guéries ou confidérablement foulagées par cette voie; j'ai interrogé fur cela des gens de Fart qui avoient été témoins des expériences, & qui étoient encore à portée de voir tous les jours une partie des fujets cités dans le manufcrit que je tiens de M. Bian- chi, & dont l’hiftoire fe trouve tout au long dans fe neuvième chapitre d'un Ouvrage de M. Pivati *, Je me fuis même tanfporté chez le Cordonnier dans la boutique duquel avoit travaillé le garçon de vingt-un ans dont il eft fait mention à lapage 1 10 du livre que je viens de citer, & à la page 419

# Rifleÿioni fiche fopra la Midecina elertrica, A "Ti Page 1494

l 1}

*Ler.er Août

3749

52 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

de mes Recherches. L'obligation de dire vrai, à laquelle if convient à des Philofophes encore plus qu'à toute autre per- fonne de facrifier tout refpeét humain, ne me permet pas de diffimuler que mes recherches, faites avec toute la dili- gence poffible & fans autre intérèt que celui de favoir Ja vérité, m'ont äffé voir aflez clairement qu'on avoit beau- coup exagéré les faits: je fuis prêt à croire que c'eft la faute des malades, qui, prévenus peut-être par un trop grand éfpoir & poffédés par une efpèce d’enthoufrafme, en ont dit & fait écrire beaucoup plus qu'il n'y en avoit. On auroit bien des exemples à citer de pareïlles ilufions; mais, quoi qu'il en foit, je ne puis m'empêcher de croire que la plufpart des guérifons électriques de Turin n'ont été que des ombres paffagères qu'on a prifes avec un peu trop de précipitation ou de complaifance, pour des réalités.

2. Je portai à Venife la même curiofité & le même defir de n'inftruire au fujet de la tranfmiflion des odeurs, des intonacatures & des guérifons foulagemens opérés prefqué fubitement par la vertu électrique. Un de mes premiers foins fut de chercher des connoiffances ou des amis qui voulufient bien m'annoncer à M. Pivati, & obtenir de lui qu'il reçût dans fon Laboratoire, & qu'il eût la complaifance- de fitisfaire l'empreflement que j'avois de lui voir faire pafler les odeurs au travers d’un vaifleau de verre bien clos, ou fairé diminuer fenfiblement par lélectrifation quelques drogues qu'il auroit pareillement renfermées. M. Angelo Quirini, gentilhomme Vénitien, fort ami des Sciences, & toüjours prèt à aider ceux qui sy appliquent, me rendit ce fervice parmi bien d’autres dont je fuis redevable à fa politeffe & à fon amitié; if prit jour * avec M. Pivati, & me conduifit chez lui, nous trouvämes une nombreufe compagnie, dans laquelle il y avoit plufieurs perfonnes de diftinétion, & entre autres M. Antoine Mocenigo , autrefois Ambafladeur en

* Recherches fur les caufes particulières des phénomènes éle@r, p, 4192 on a traduit Ponnetier pour Cordonnier, en prenant le mot italien Ca/ce- sario pour celui de Ca/zolaio, qui n’étoit pas bien lifible dans le manufcrit,

| D ÉISMS LC 1 EN C ES 452 France, M. l'Abbé Hortez, &c : à la vûe de cette grande aflemblée, je crus ( & j'avois quelques raifons de le croire)

ue ma Curiofité ayant été foupçonnée mécroyance & d'obftination à douter, on avoit convoqué du monde pour être témoin de ma conviction. J'aurois bien voulu acheter à ce prix le plaïfir de voir un phénomène, pour la vérification duquel j'ai pris tant de péines inutiles ; le moyen de le faire réuffir eût été fans doute quelque nouveauté pour moi, aufft curieufe elle-même que effet qui en auroit dépendu. Mais quelle fut ma furprife & quels furent mes regrets, quand M. Bivati me déclara nettement, en préfence de toute la compa- gnie, « qu’il n'entreprendroit pas de me montrer la tranfmiffion des odeurs ; que ce phénomène ne lui avoit jamais réuffi qu'une fois ou deux, comme il Favoit dit dans fa première Léttre imprimée à Lucques *, quoiqu'il eût fait depuis bien des tentatives pour répéter cette expérience avec le même verre & avec d'autres; que ce cylindre de verre avoit péri depuis, & qu'il n'en avoit pas même gardé les morceaux »!

- Maïs au moins, lui dis-je, ne poumrois-je pas vous voir faire ufage des intonacatures ? ne pourrois-je pas peler Je vaif feau devant & après, pour reconnoître avec vous qué la ma- tière inclufe diminue fenfiblement? « Pour ce dernier fait, me répondit-il, il m'a réuffi bien des fois; mais il y a trop de monde ici, il y fait trop chaud, l'électricité fera trop foible pour cela ». H avoit peut-être raïfon; mais pourquoi avoit-il fait venir une fi nombreufe compagnie?

H fut queftion enfuite des guérifons rapportées dans les ouvrages de M. Pivati, & fur-tout de celle de l'Evêque de Sebenico b; il m'avoua, & je le favois déjà de très - bonne part, qu'il n'étoit pas guéri, & qu'il étoit depuis l’électrifa- tion comme il avoit été auparavant.

Enfin je quittai M. Pivati en lui difant que j'étois encore à Venife pour huit jours, que je le priois très-inftamment de raflembler fes meïlleurs vaifleaux, de renouveler fes into- nacatures, & de me faire avertir pour les aller voir fi elles réuffifoient , afin que je fufle en état de les publier comme

À LIT üj

éc * Page 3 7:

b Della Eterz #icità medica Lettera XXX,

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LETTRE de M.Somis, datée du 15 Nov. 1749: »

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454 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE témoin oculaire, & je lui parlois avec beaucoup de fincérité, M. Pivati me le promit, mais comme il ne pra rien fait dire, j'ai compris qu'il n'avoit rien à me montrer. M. Somis, Docteur en Médecine de Ja Faculté de Turin; étant allé à Venife peu de temps après moi, eut auffi da curio- fité de voir chez M. Pivati, au mois d’Août dernier, les “efiets attribués aux intonacatures : je crois devoir rapporter ici la leitre qu'il ma écrite à ce fujet, & que j'ai traduite littéralement. « Voici, Monfieur, en peu de paroles fe récit de ce que j'ai obfervé à Venife chez M. Pivati au mois d’Août dernier. Le 25 après diné, il n''électrifa, en fe fervant d’un fimple tube (ou vaiffeau de verre cylindrique) long de $ onces +, & d'un peu plus de 2 encesb de diamètre, en me faifant tenir dans la main une once de fcamimonée: il commença à m'éleftrifer à s heur. 37 min. de France, & il ceffa à $ heur. $ 4 min. pen- dant tout ce temps-là on me tira des étincelles de la main dans laquelle j'avois la fcammonée. Cette expérience fe fit en pré- fence de M. Abbé Barberigo, des RR. PP. Bertinelli & Magrini, Jéfuites, du Doéteur Grampini, & de plufieurs autres perfonnes : je n’aperçüs en moi aucun changement, ni ce foir-là, ni les jours fuivans. Le 29 du même mois, je re- tournai chez M. Pivati, je trouvai un gentilhomme de la maifon de Sorenzo, deux Officiers efpagnols, deux autres nobles Vénitiens, un Médecin, & quelques autres perfonnes de diftinction: M. Pivati avoit préparé une intonacature pour une épreuve qu'il regardoit comme très-dangereule ; cepen- dant l'opinion qu'il en avoit ne m'empécha pas de lui dire que je voulois que cette épreuve fe fit fur moi-même. II commença donc à m'électrifer à $ heures 3 $ minutes après midi, & cefla à $ heures 57 minutes, parce que la corde de {a roue fe dérangea; cette corde ayant été rajuftée, on recommença à m'électrier à 6 heures 5 minutes, & l'on finit à 6 heures 14: cette fois-là on me tira encore continuelle-

*.8 pouces mefure de France. » Environ 3 pouces ? melure de France:

| DE SNS} CI É Nc Es rent des étincelles du front. Le vaifleau de verre dans lequel « on ‘avoit fait l'intonacature, étoit à peu près de la longueur « & de la largeur du premier. L'expérience étant faite, je priai « M. Pivati de me dire de quelle matière le tube étoit rem- « pli, d'autant plus qu'il luï étoit échappé de dire aux Officiers « elpagnols w'ils me verfoient bien-16r dormir; & i me répondit « qu’il avoit mis dans ce tube 2 onces 7 gros de benjoin, & « deux gros d’opium. Je le priai de vouloir bien encore faire « une autre expérience, en nous électrifant, M. l'Abbé Barbe- « rigo & moi, tandis que nous aurions dans fa main une once « & demie d’opium, & il y confentit. Il éleétrifa donc d'abord « M.FAbbé, & moi enfuite, en nous faifant tenir l'opium, « c'eft-à-dire, une once & demie dans la main, & tirant des « étincelles de cette main pendant l'efpace d’une demi-heure, « ayant commencé à 6. heures 18 minutes, & finiffant à 6 « heures 48 minutes. I fe fervoit pour cette feconde expérience, « du même cylindre de verre dont il avoit fait ufage le lundi « 25: M. l'Abbé & moi avons dormi comme à notre ordi: « naire, c’eft-à-dire, ni plus ni moins. Voilà, Monfieur, les «

‘expériences. que jai faites à Venife: avec M. Pivati. En «

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paffant par Plaifance, lorfque je revenois, j'eus une conver- « fation avec le Docteur Cornelio:, qui m'aflura en préfence « du Docteur Riviera qu'il avoit aufii effayé très-fouvent de « purger quelqu'un par fewmoyen de l'électricité, mais: qu'il « n'avoit Jamais réuffi qu'une feule fois à l'égard de fa fer- « vante, à qui. il avoit fait tenir de la rhubarbe; mais que « comme il n’avoit jamais cet effet avoir lieu fur aucune « autre) perfonne, il croyoit que c'étoit par quelqu'autre caufe < que céla étoit arrivé à-fa fervante. Voyez, Monfieur, fr je « vous fuis bon à quelqu'autre chofe, & je vous protefte avec « fmcérité que vous me trouverez toûjours prêt, &c. »

On voit donc par cette lettre, & par le récit que j'a fait auparavant, de ma vifte à M; Pivati, que je n'ai vérifier à Venife aucun des faits qui intérefloient ma curio+ fitéi; je puis ajoûter encore ( & je le dois fans doute, pui£ que jeime fuis engagé à dire exactement tout ce que j'ai pi

456 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

. tirer de mes recherches à ce fujet) que de toutes les per+

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fonnes du pays qui ont été chez M. Pivati pour s'infhruire ex vilu, & que jai interroger, je n'en ai trouyé qu'une qui n'ait certifié les faits pour les avoir vüs; c’étoit un Doc- teur en Médecine, ami de M. Pivati, que je trouvai chez lui, & qui dit l'avoir prefque toujours aidé dans fes expé- riences. ;

3. De Venife je paflai à Boulogne, je fis fa connoif: fance de M. Verati, Docteur en Médecine, &wMembre de l'Académie de l'Inftitut. Les fréquentes converfations que jeus avec lui, me prouvèrent bien que c'étoit un hommé éclairé, fage & plein de candeur, comme on me avoit an- noncé : je lui expofai avec confiance les doutes que j'avois tou- chant la tranfmiflion des odeurs, fur l'effet des intonaca- tures, fur les purgations électriques , & fur les guérifons prefque fubites. |

M. Verati me répondit, 1.° « Qu'il avoit fait plufieurs épreuves, par le réfultat defquelles il lui fembloit que l'odeur du baume du Pérou s’étoit tranfmife du dedans au dehors d’un vaifleau. cylindrique de verre, qu'il me montra », & qui, ce jour-là, ne nous fit rien fentir, quoique nous l’euflions frotté fortement avec la main. Maïs fur ce que je lui repréfentai que ce vaifleau métoit bouché que par des couvercles de bois affez minces, qu'on pouvoit ôter au befoin pour faire entrer ou fortir les matières odorantes, & qu'il pouvoit être arrivé que ces odeurs, pouflées par la chaleur, euflent paflé par les pores du bois : il me répondit « que cela étoit :pof= fible, & que quoique les apparences l’euflent porté à croire la tranfmifion de ces odeurs par les pores du verre, il avoit cependant fufpendu fon jugement fur cet effet, de même que fur les intonacatures, jufqu’à ce que de nouvelles épreuves faites avec plus de précautions euflent diffipé tous fes doutes. 2.° Que par rapport aux purgations électriques, : il avoit dans fa maifon un valet & une fervante qui avoient'été purgés par cette voie; que ces deux pérfonnes du moins avoient éprouvé après l'éleétrifation faite à la manière de M. Bianchi,

ce

DÉENSMSUC 1. E, HS 457 ce qu'on éprouve quand on a pris une médecine ; que cet eifet n'ayant eu nulle autre caufe apparente que l'expérience qui avoit précédé, le grand nombre de faits de cette efpèce arrivés à Turin avoit déterminé à croire que ce qui étoit arrivé à fes deux domeftiques étoit une fuite naturelle de cette élec- trifation; qu'au refte il éprouveroit cela de nouveau fur un nombre fufhfant de perfonnes d'un autre état; & que fi ceite manière de purger ne foûtenoit pas l'idée qu'il avoit prife d'elle, ä réformeroit avec franchife ce qu'il en a publié dans fon Ouvrage imprimé en 1748 ». 3.° Enfin M. Verati n''af- fura que les dix guérifons rapportées dans le même Livre dont Je viens de faire mention, s’étoient faites exactement de la même manière qu'elles y font décrites, & elles le font avec beaucoup de figefle, & avec une fimplicité qui an- nonce le vrai. La cinquième me fut racontée & certifiée par le Religieux même qui en fut le fujet, un jour que j'illois voir leR. P. Trombeili, Abbé de la Maiïfon il eft. Ces guérifons ne font pas de celles qui me font peine à croire: on voit au moins qu'elles fe font faites avec progrès; on y voit le mal {e défendre, pour ainfi dire, contre le remède, ne céder que peu à peu; & la Nature ne paffe pas comme fubitement d'un état à un autre tout-à-fait différent, par le moyen d'une électricité à peine fenfible. Je dis que ces gué- rifons ne me font pas de peine à croire, parce qu'il me paroit aflez naturel, & je l'ai dit il y a fong-témps*, «qu’un fluide auf aétif que la matière élerique, & qui pénètre dans notre corps avec tant de facilité, y produife des chan- gemens en bien ou en mal ».

Je n'ai rien appris dans les. autres villes d'Italie qui n'ait encore fortifié mes doutes, contre les phénomènes d'élec-

‘tricité que j'avois eu deflein de vérifier dans le cours de

mon voyage : le Père la Torre, Profefleur de Philofophie

à. Naples; M. de la Garde, Directeur. de a Monnoie à

Florence , & fort occupé de ces fortes de recherches

_ * Dans un Difcours à la rentrée de l’Académie des Sciences, après

Pâques 1746. à É G Mém. 1749, + Mmm

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458 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE M. Guadagni, Profeffeur de Phyfique expérimentale à Piles M. le Doéteur Co BE nee: M. le Marquis de Maffei,. à Véronne; le P. Garo à Turin, tous avec des machines bien montées & bien aflorties, avec la plus grande envie: de réuffir, ont eflayé Aube de tranfmettre les odeurs, & l'action des drogues enfermées foigneufement dañs des: vaifleaux cylindriques fphériques de verre en les élec-: trifant ; tous ont effayé de purger nombre de perfonnes; &,. felon le témoignage qu'ils m'en ont rendu, jamais ils n’en font venus à bout, ou fe peu de fuccès. qu ‘Sont eu leur à paru trop équivoque pour en tirer des conféquences con- formes à ce que M. Pivati a cru voir dans {es expériences.

Je fuis donc comme certain de ce que je commençois 4 croire l'année dernière , lorfque je frs imprimer mes Recherches fur les caufes particuhères des phénomènes dedriques, je füis,. dis-je, comme certain que M. Pivati a été trompé par quel- que circonftance à laquelle il n'aura pas fait affez d'attention: ce qui me le fait croire plus que jamais, c'eft qu'il nv'a avoué lui-même que cette transfufion des odeurs & des drogues au travers des vaiffleaux de verre éleétrilés, ne s'étoit manifeftée- à lui qu'une fois ou deux immédiatement, je veux dire par une diminution fenfible du volume, & par des émanations qu'oir pouvoit reconnoître à l'odorat. Depuis que j'entends- l'Italien, j'ai été bien furpris non feulement de trouver cet

. aveu dans fa lettre imprimée à Lucques *, mais encore de- voir qu'il n'ait pas eu tout l'effet qu'il devoit avoir fur lef- prit de ceux qui ont été à portée d'en être inftruits. Pour moi, fi je l'avois plutôt, Je me ferois épargné une grande partie des pêines que jai prifes pour vcrifier le fait ; je m'étonne qu ‘on ait voulu bâtir fur des fondemens aufli peu. folides.

C'eft pourtant fur cette prétenduetranfmiffion, & avec un vaiflenu de verre qui s'eft trouvé fendu d’un bout à l'autre,

* Page 28. Un tale dileguamento fuccedito mi in un cilindro , non mi é poi veramente fucceduto in altri,,de’ quali mi Jon férviro per varie guas rigionie.. L°1

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| DE $\ $C IE N:C.E-5. 45 comme M. Pivati de dit dui-même*, cet, dis-je, fur ce fait, qui {elon moi xeft rien moins que ,certain Mon a fondé l'ufagé &les effets des intonacatures dont on ne-veut wien xabattre : mais comment concilier enfemble ces deux «<hofes, l'action ;prefque. immanquable des intonacatures far tant de malades qu'on dit avoir été :ou guéris ou confidé- aablement foulagés, d'une ‘part, &;de l'autre la tranfmiffion ï rarement fenfible des :odeurs propres à ces drogues, ren- fermées dans les vaifleaux avec defquels on électrife? Si c'eft swéritablement le-baume du Pérou ,,e-benjein, Je camphre, 4e foufre, &c. qui portés par la matière électrique ont pro- -duit toutes ces guérifons dont M. Pivati a rempli fes Ou- #wrages imprimés , pourquoi toutes ces matières fr fortement sodorantes ne fe répandent-elles pas copieufement &toûjours dans les lieux Von ifaitles expériences, & pourquoi ne “communiquent-elles pas leurs odeurs aux gens qui les reçoi- event ‘par voie d’électrifation? : |

Je fuis difpofé à, croire que léleGricité peut avoir guéri sou foulagé des malades; mais je ne trouve pas les preuves “de M. Pivati aflez fortes, ni aflez certaines, pour me faire «penfer que les intonacatures aient contribuer à ces bons æflets: je pente, (:& M. Verati ma paru lui-même affez «porté pour ce fentiment } que fi quelqu'un a été affez heu- eux pour opérer des guérifonsen éleétrifant avec des vaiffeaux garnis de drogues, tout ce qu'on peut dire en faveur de ces matières, c'eft qu'elles n’ont point empèché l'électricité d'agir.

M. Pivati montre dans la converfation une bonne foi & un defintéreffement qui feroient ‘bien capables de me tou- cher en faveur de fon opinion; mais parmi les faits. qu'il raffemble dans fes écrits pour fortifier fes preuves, j'en trouve qui ne font point aflez d'honneur à fa délicatefle, & qui spourroient le rendre fufpeét d'une trop grande crédulité : 1#]Ibid. p.27. Si confumo lama- | caposmnorto, che ne tenea pit odore steriayinterna-a; feenoche, fi.reduffe |, ne fapore. E fino.il vetro medefno mon offante, l'effere quafi ermetica- | quafi confunro fi apri da fe fteffo ir mente ferrato , alla fottiliezza diun | pit feffure per longo. if Sdilicato\foglio di carta àr come uni |: ? “alu

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3 Rifeffioni f- fiche fopra lame- dicina elettrica ,

p. 103.

bJhid. p.153.

460 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE voudra-t-on croire avec lui, par exemple, que la vertu électrique foit capable de remettre en mouvement une montre qui eft arrêtée, & de la régler quand elle feroit dé- rangce fans remède? La fudita effcacia { della elettricità) im dar giuflo movimento alle moftre di orologio o Jerme, o reflie, o ritardanti fenga remedio*. Voudroit-on croire conne lui, fur la foi d’une lettre particulière , dénuée d'autorité, & fans lavoir éprouvé, qu'une once de mercure fe foît évaporée entièrement par les pores d’un vaifleau de verre, avec lequel on électrifoit un homme, qu'elle lui ait rendu la peau de la couleur du plomb, & qu'il s'en foit fuivi une copieufe fali- vationb. Ce fait, qu'on dit s'être paflé à Naples, tout inté- réffant qu'il eft, y a fait fi peu de bruit, que je n'ai en avoir aucun indice, pendant le féjour que j'ai fait dans cette ville, après limpreffion du livre à eft cité.

4. J'ai eu occafion d'éprouver à Venife un globe de cette matière qu'on nomme émail, & dont on fait tant de jolis ouvrages dans cette ville. On m'avoit dit qu'il ne devenoit point électrique par le frottement, comme le verre & la porcelaine le deviennent; cependant, quand je le mis en expérience, il donna des marques très-fenfibles d'électricité, quoique ce jour-là le verre même ne séleérifàt qu'avec peine ; c'eft um fait de plus que j'ai cru devoir recueillir, & qui confirme ce que l'on favoit déjà, que les métaux vitrifiés s’éleétrifent par frottement, ce qu'on ne peut point faire quand üs font dans leur état naturel.

À RE Cd Eo FL

Vaiffeau de verre qui paroi s'être rempli d'eau

par.fes pores.

Après avoir contefté & même nié en quelque façon la transfufion des odeurs & de certains remèdes à travers les pores du verre, me fied-il: maintenant de propofer à croire que de tels pafages aient permis à l'eau, ou à une liqueur qui lui reffémble, de s'introduire dans un vaifleau de verre

DIEPSIMONC 1 E N'C' ES 461 bouché herntétiquement? S'il ne s'agifloit que de la poffibilité du fait, en confidérant d'une part {a fineffe ou la fubtilité plus ou moins grande des parties qui doivent pénétrer, & de Fautre le degré de pénétrabilité que peut avoir le verre, J'avoue qu'il faudroit tout Mier ou tout accorder, & qu'on pourroit même faire valoir des raifons de préférence en faveur des parties odorantes, dont tout le monde connoît Ia pro digieufe divifibilité ; mais ce n’eft point par des raifons prifes de la nature des matières tant pénétrantes que pénétrables qu'il faut aujourd'hui juger la queftion, c'eft par des faits -qui portent avec eux la décifion qu'on demande s'ils font vrais, parce qu'il n'eft pas poflible de les expliquer fans fup- pofér ceite pénétrabilité du verre dont il s'agit.

On a publié que la matière électrique fervant de véhi- cule aux odeurs, les faifoit fe répandre du dedans au dehors d'un vaiffeau de verre hermétiquement bouché, ou comme tel; fi cela s'étoit vérifié, on pouvoit conclurre en toute füreté que les pores du verre étoient perméables à ces fubftances. Le premier fait nv'a paru plus que douteux , & j'ai refufé de l'admettre ; je contefterai de même la conféquence, tant qu'elle fera tirée uniquement de la prétendue transfufion des odeurs; mais je crois qu'on la peut recevoir d'une manière même plus générale, s'il fe trouve d’autres faits plus certains qui a rendent aufft néceffaire.

Nous confervons les liqueurs les plus fubtiles, les plus pénétrantes, dans des vaifleaux de verre; nous tes croyons -en füreté quand nous avons pris par rapport aux bouchons toutes les précautions néceffaires ; en fuivant le préjugé éta- bli, une bouteille de verre bien bouchée ne peut ni fe vuider :ni fe remplir : à fexception de la lumière & de ces fluides fubtils qui paflent par-tout & que rien n'arrête, on eft en pofleffion de penfer & de dire qu'aucune matière ne pénètre

les pores du verre.

+ Ce préugé (fi den eft un) eft fi bien établi, que l'Aca-

démie regarda comme un -phénomène très-fingulier , & qu'on

-ne devoit croire qu'après l'avoir bien vérifié, Fobfervation Mu ii.

462 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE dont M. Dachery lui fit part en 1724, d'une bouteille de verre bouchée avec foin, & qui fe remplit d'eau douce étant « Hi. ær 4. plongée dans la mef à la profondeur de cent trente braffes 2: cad des Jre. Le fait, éprouvé depuis par M. Coffigny , à qui je d'avois 17256. 1. + bien recommandé lorfqu'il partit pour fe rendre à lifle de France, fe vérifia quant à l'introduction de l’eau; mais les circonftances furent différentes , il n'entra dans la bouteille qu'une très-petite quantité d'eau, toûjours falée, & le bou- chon ne parut jamais, après limmerfion, ni dans la même place ni dans le même état il étoit avant que d'êtrelfou- b fl. de l'A- mis à la preffion de la merb; de forte qu'après ces expé- cn + riences on eft auffi bien fondé à croire que l'eau s’eft infinuée par les pores du bouchon & des matières qui le couvroient, qu'à inaginér qu'elle ait pénétré par les pores du verre. Le vrai moyen de teriminer cette queftion fans replique, feroit de voir un vaifleau de verre fcellé hermétiquement fe remplir de quelque liqueur , ou fe vuider en tout ou‘en partie; & c'eft ce que je-crois avoir rencontré par ‘hafard, aumoïns puis-je dire que j'ai dans la tige creufe d'un verre à boire une liqueur tranfparente comme de l'eau, qui me paroît ne pouvoir y être entrée que par les pores. Je tiens cette pièce du Père Garo‘dont j'ai déjà parlé dans'le premier artiele derce Mémoire, qui l'a gardée pendant plufieurs années, &'examinée de tout point avant que de me la donner ;elle fut trouvée au fond d'un puits qu’on écuroit dans un couvent de Religieufesà Turin: da perfonne qui da ramaffa n’en-fut que médiocrement tou- chée, & ne fentoit point afféz combien elle pouvoit intri- ‘guér les Phyficiens, pour être foupçonnée d'y avoir mis du myfère je puis ajoûter que-le Père Garo, des mains duquel ‘elle n’eft’point {crtie depuis, n’eft point homme à fabriquer de pareïlles-énigmes {Voy. la fig. 1e). Mais livrons-nous pour un moment à fa défiance, & fup- pofons que quelqu'un fe foit fait un plaifir d'introduire! cette “eau par quelque voie fecrète, afin de donner à deviner aux ‘Curieux. comment elle-eft entrée : eft-ce à la Verrerie en fa- “briquant fa pièce que cela a-pûfe faire, ou bien depuis quele verre refroidi-a pris fa confiftance ordinaire?

22

DIENMNSNC DE NIC'E NS 463 + On fait que les liqueurs ne fouffrent point, fans s'évaporer, ke: degré de chaleur qu'il faut pour tenir cette matière en

füfon, oi en état d'être travaillée; l'eau la plus bouillante

la refroidit tout d’un coup, & la met en morceaux : en un mot, il eft de toute impofhbilité de renfermer dans du verre- en état d'être foufflé , aucune liqueur connue, parce que quand elle feroit de nature à ne point faire éclater le verre- par fraîcheur, elle fe convertiroit au moins en une vapeur, laquelle, en fe dilatant, feroït crever fon enveloppe: - On ne peut pas dire non plus que la tige du verre dont il s'agit, ouverte par un bout pour recevoir la liqueur , ait été fcellée enfuite au feu de lampe: j'ai affez pratiqué cet inftrument d'Emailleur pour favoir que le verre n'y réfifte: pas quand il à été nouvellement mouillé, ou que la liqueur qu'il renferme fe trouve près de lendroit l'on applique le feu, comme cela feroit arrivé infailliblement avec le morceau dont il s'agit, & qui, de plus, ne laiffe apercevoir aucune marque fur laquelle on puiffe: foupçonner qu'il ait jamais été fcellé, depuis qu'il a été détaché de la patte & de la coupe du verre dont il faïloit partie. Tout ce qu'on pourroit done croire, c'eft que Fauteur de cette füpercherie auroit pratiqué en quelque endroit une ouver- ture qu'il auroit adroitement bouchée après. Je n’oferois dire ue d'autres yeux que les miens n'y découvriront rien de. emblable, & c'eft même par la crainte que j'ai de n'avoir point aflez fait à cet égard, que je foûmets la pièce même à fexamen de la Compagnie; mais je puis dire que j'y ai mis tous mes foins & toute mon attention, en la confidé- rant foit à la fimple vüe, foit avec la loupe, au grand jour & à toutes fortes de lumières, & que je n'ai rien aperçû qu'on puifle prendre pour une ouverture bouchée après coups. Le verre eft dépoli, on y voit des piqures & des flries comme en ont prefque tous les morceaux de cette efpèce qui ont été long-temps en terre; mais je ne vois ni fente ni trou qui, pénètre toute lépaifleur: j'ai mis ce verre tremper fuc- ceflivement dans de l'eau forte, dans l'efprit de vin, dans celui:

464 MÉMOIRES DE L'ACADÉMBE RoYaALE de térébenthine , pour voir fi ces différens diflolvans n’enleve- roient pas quelque enduit ou quelque particule de matière étrangère dont on fe fût fervi pour boucher des trous imper- ceptibles, & pratiqués à deflein; mais je n'ai rien décou- vert par cette voie, non plus que par la précédente.

I! me refte encore une épreuve à faire, c'eft de chauffer la pièce à un certain degré, pour voir fi la bulle d'air qui {e trouve enfermée avec la liqueur, venant à fe dilater deffus & à fa preffer fortement, ne l'obligera pas à fortir, & à dé- celer le chemin qu'elle a fuivi pour entrer; mais comme cette preffion intérieure pourroit rompre le vaifleau, j'ai été bien aife de le montrer entier avant que de m'expofer à le perdre *,

Après toutes ces épreuves, sil eft impoñlible de trouver d'autres paflages que les pores du verre pour dire comment la liqueur contenue dans ce petit vaifleau s'y eft introduite, le fait une fois admis doit paroitre & plus décifif & plus fingulier que celui des bouteilles plongées dans la mer; plus décifif, parce qu'il n'y a point ici de bouchon dont le déran- gement ou la porofité puifle laïifler aucune incertitude, aucun foupçon; plus fingulier, puifque pour en rendre raifon l'on ne peut pas alléguer la preflion énorme d’une colonne d'eau falée de cent brafles & davantage, par laquelle on peut rai- fonnablement fuppofer que les pores du verre ont été forcés, dans les expériences de M": Dachery & Coffigny.

I ne faut cependant pas croire que l'eau du puits (car if

a tout lieu de croire que ce qu'on voit dans le petit vai£ feau dont il agit n’eft rien autre chofe) fe foit introduite comme d'elle-même, & fans être pouffée par une force exté- rieure: indépendamment de l'eau du puits dont la hauteur étoit peut-être de huit à dix pieds au deflus du fond, celle qui touchoit Ja furface du verre étoit encore chargée du poids prefque tout entier de l'atmofphère, à quoi rien ne s’oppoloit

* Depuis la leéture de ce Mé- | fortir aucune partie de la liqueur, moire, j'ai chauffé à plufieursreprifes | ni en goutte ni en vapeur. Il eft la pièce de verre en queftion jufqu’au | prefque impoffible de porter l'épreuve point de ne la pouvoir plus manier | plus loin, fans faire crever le vail

avec les doigts nus, fans qu'il parût | feau (Woy, la fig. 2); : ans

DES SCIENCES. 465 dans l'intérieur du vaiffeau; car lorfqu'on a foufflé ce verre, le peu d'air qu'il contenoit étoit raréfié par un degré de chaleur confidérablement au deflus de celui qui, felon M. Amontons, raréfie des deux tiers l'air de l'atmofphère pris dans une température moyenne; je dis confidérablement au deflus, car lorfqu'on travaille le verre, il eft prefque cou- lant, &.M. Amontons faifoit fes expériences avec des vaif- feaux de cette matière, à peine rougis au feu.

Nous pouvons donc confidérer notre petit vaifleau au fond du puits, à peu près comme un récipient dans lequel on auroit fait le vuide avec une machine pneumatique; & cette confi- dération paroît d'autant plus légitime, que le peu d'air extrè- rmement raréfié, à préfent qu'il a repris une denfité propor- tionnelle à la fraîcheur du lieu il étoit, en faifant place à l'eau qui s'eft logée avec lui, fe préfente fous un volume qui cadre on ne peut pas mieux avec tout ce que je fup- pole être arrivé.

Si c'eft donc par les pores du verre que l’eau eft entrée (car j'ai peine à me familiarifer avec ce fait }, on doit penfer qu'elle a été pouffée par le poids de celle qui étoit au deflus du vaifleau, & par celui de l'atmofphère: il eft vrai que tout cela pris enfemble n'équivaut point à la charge d'une colonne d'eau de la mer, haute de plus de cent brafles; mais ne peut- on pas répondre, premièrement, que ce qui s'eft fait en un quart - d'heure de temps avec une fr grande preflion, feroit peut-être arrivé par un effort bien moindre qui auroit duré.

- beaucoup plus fong-temps; fecondement, que les bouteïlles

dont on s'eft fervi étoient bien plus épaifles, & d'un verre peut-être plus ferré que celui de notre petit vaiffeau ; enfin, que ce morceau de verre, comme je l'ai déjà dit, ayant perdu fon poli naturel, & cette première fuperficie qui eft la plus ferrée? on peut penfer que fes pores en font devenus plus perméables.

Quoi qu’il en foit, des vaiffeaux de verre qui fe rem- pliffent ainfi de liqueur fans qu'on puiffe dire que cela fe foit fait autrement que par les pores, rendent plaufible Topinion

Mém. 1749: . Nnn

466 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

de quelques Phyficiens, qui prétendent avoir oppolé en vain les meilleurs bouchons à l'évaporation de certäines matières fpiritueufes & fort pénétrantes : avec le temps elles fe font fait jour, difent-ils, par les pores des flacons, & j'ai cru moi-même en avoir rencontré quelques exemples ; je cher- cherai à les revoir, & je les examinerai avec moins de pré- vention qu'on n'en à communément pour croire que le verre neft pénétrable que pour la lumière & pour le feu; car fi des vaifleaux de cette matière peuvent fe remplir par les pores, pourquoi ne pourrojent-ils pas fe vuider de même?

AR H'ÉORIE STE

Botanique à Agriculture.

1. On fait aujourd'hui que les feuilles ne viennent point aux arbres feulemient pour les orner, mais que ces parties, en les rendant plus agréables à voir, entrent auf pour beau- coup dans l'économie végétale ; elles ont des fonétions d'où dépendent laccroiflement & la maturité des fruits, la falu- brité & même la vie du tronc & des branches. Quels dom- mages ne caufent point aux vergers & aux forêts, des in- fecles trop multipliés, qui dans certaines années les dépouil- lent de leur verdure! & quand l'expérience ne nous auroit point appris qu'en général on fait tort aux arbres en leur Ôtant les feuilles, n'eft-il pas naturel de penfer qu'on les expole à une forte d'épuifement, en donnant lieu au prompt renouvellement d'un grand nombre de leurs parties?

Cependant , Fufage lon eft de cueillir les feuilles des müriers dans les endroits l’on élève des vers à foie, & peu de mal qu'il en arrive après cette récolte, nous fait voir que la règle de conferver les feuilies aux arbres pour les mainienir en bon etat, n’eft pas fans exception, ou qu'on peut aflujétir les vegetaux, comme les animaux, à certains ufages, à certaines opérations qui ne font pas dans l'ordre de la Nature.

Quand je vis en Piémont tous les müriers reprendre leur

DES SCIENCES. 46 feconde feuille un mois après avoir été dépouillés de fa pre- mière, & reparoître à la fin de Juin avec la même vigueur & une verdure égale à celle que je leur avois vûe vers a fin de Mai; confidérant de plus que ce renouvellement fe voit toutes les années aux mêmes arbres, je me défis bien aifé- ment du préjugé j'étois fur le dommage que pouvoit caufer aux arbres la perte de toutes leurs feuilles, dans un pays & dans une faifon l'ardeur du foleil eft fort grande; j'allai même beäucoup plus loin, j'imaginai qu'avec la feconde feuille, & plus de deux mois temps fufhfamment chaud, fur lefquels on pouvoit compter encore après la Saint-Jean, il feroit peut - être poflible d'élever une fecondé famille de vers à foie, & de doubler par-là une efpèce de ia qui fait la plus grande richeffe du pays.

Mais cette penfée étoit combattue par quelques tra & fur-tout par la crainte d'épuifer les arbres, en les obligeant à réparer plufieurs fois la même perte. Je labandonnai en- tièrement, lorfqu'ayant demandé à quelques per {onnes que je croyois fort au fait de tout ce qui concerne la foierie, fr Jon n'avoit jamais penfé à mettre la feconde feuille à profit de a manière que je viens de dire, j'appris qu'on l'avoit effayé, mais infruétueufement, parce que les gens qui avoient eu, difoit-on, l’avidité de vouloir faire deux récoltes, avoient perdu leurs Paie hiver

Une réponie fi pofitive, faite par des perfonnes dignes de foi, & que je croyois bien inftruites, en m'ôtant juqu' au defir de n'informer ailleurs, m 'expofa à ne point avoir la connoiflance d’un fait aflez curieux, que le hafard m'a offert depuis ; mais je fui dois en quelque façon la certitude que jen ai, parce que prévenu contre, je n'ai voulu fe croire qu'après des témoignages irréfragables.

Dans la plus grande partie de la Tofcane, & principale ment aux environs de Florence, le terrein el partagé entre les mûriers & les oliviers; en réfléchiffant für La quantité de foie qu'on y fait, comparée à celle du Piémont fon ne cultive qu point d'autres arbres que des müriers, je

Nan ji

Ÿ 5749.

468 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

difois aux Florentins que j'étois bien furpris qu'avec fi peu de nourriture on püt élever tant de vers à foie chez eux. On me répondit qu'on en faifoit éclorre fucceffivement deux fa- milles, & que les arbres dépouillés deux fois de leurs feuilles, fourniffoient autant que s’il y en avoit deux pieds pour un.

Ce fait me fut confirmé par toutes les perfonnes à qui je m'adreffai pour en être inflruit, & j'en interrogeai un grand nombre; mais ce qui me le fit croire avec une entière con- fiance, ce fut une converfation que j'eus fur cela avec M. Le Comte de Richecourt, premier Miniftre de l'Empereur, en préfence de plufieurs Gentilshommes du pays: ce Seigneur, qui pouffa la politefle jufqu'à me conduire lui-même dans des manufactures je n'aurois entrer fans fes ordres, m'aflura que c'étoit un ufage très-établi en Tofcane d’em- ployer fucceffivement la première & la feconde feuille des müriers pour élever des vers à foie : Son Excellence ajoûta, que comme cette année * les premiers vers avoient manqué à caufe des mauvais temps qu'on avoit eus en Mai & en Juin, fur les repréfentations qui lui en avoient été faites, Elle avoit permis, en dérogeant à la règle, & fans tirer à conféquence pour l'avenir, d'élever des vers à foie avec la troifième feuille.

Cette troifième feuille, pour ce qui fe pratique ordinaire- ment, eft donc expreffément défendue; mais, le croira-t-on? ce n'eft point du tout dans fa vüe de ménager les arbres, & en voici la preuve. Dans tous les environs de Florence, il n'y a d’autres pâturages que le peu d'herbe qui croît dans les chemins le long des haies ; pour nourrir les bœufs, les vaches & autres animaux domeftiques, on ramafle jufqu'aux côtes de melons dans les rues, & ce qui fait la plus grande reflource, ce font les feuilles des ronces, de la vigne, des arbres, & parmi ces derniers il ne faut point compter l'olivier, parce qu'on en conferve la feuille à caufe du fruit qui ne fe recueille que fort tard, & parce que les animaux les plus preffés de la faim n’en veulent point manger ; mais celle du müûrier leur convient beaucoup, & tant qu'il y en a on ne la leur

J'DMEMSMEC IE NÜC2E 469 épargne point. Ainfr cet arbre, depuis le commencement de Mai jufqu'à la fin de Septembre, ne fait autre chofe que perdre fes feuilles & en reprendre de nouvelles, & cela dans un pays il eft expolé à la plus grande ardeur du foleil.

Cet exemple, autorifé par une longue expérience, ne devroit-il pas nous porter à faire au moins quelques efais dans nos provinces méridionales, pour tâcher d'augmenter la récolte de la foie, fans multiplier à proportion les müriers dont le nombre ne peut croître fans quelque préjudice à d'autres produétions néceflaires? Les grandes chaleurs n'y durent peut-être pas autant qu'en Tofcane; mais, probable- ment, ce n'eft pas de la plus grande chaleur qu'on doit attendre le bon fuccès de ces épreuves; & il fait affez long- temps chaud dans le Languedoc, dans Provence & dans le Dauphiné, pour y faire éclorre & pour y élever fucceffi- vement deux familles de vers à foie.

2. À propos des arbres qu'on dépouille de leurs feuilles, j'ai dans le royaume de Naples enlever celles des myrtes, qui fe trouvent en très-grande quantité le long des chemins & fur les collines incultes : des gens qui en font commerce en empliffent des facs dont ils chargent, des mulets ou des ânes, pour la vendre aux Tanneurs, qui s'en fervent au lieu d'écorce de chêne pour préparer les cuirs; j'ai appris depuis que’ la même chofe fe pratique en Calabre.

3- Dans le Piémont & dans le Boulonnois, on cultive des chanvres de deux efpèces; une eft un peu plus menue & plus bafle que ne le font communément nos chanvres de Picardie, & Yon s’en fert pour faire du linge; l'autre efpèce, beaucoup plus grofle & plus haute, s'emploie dans les cor- deries. Les Vénitiens fourniffent leur Arfenal des chanvres de Boulogne, & les Piémontois vendent les leurs aux Génois, qui en font grand cas. J’ai mefuré de ces derniers chanvres, dont la tige avoit par embas plus d'un pouce de diamètre, & un peu plus de trois toifes de hauteur ; comme le bois en eft extrêmement léger, fort blanc & luifant, les Dames en font des cannes pour fe promener dans les campagnes.

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470 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Les gros chanvres ne fe broient point avec une macque comme les autres, on les écorce brin à brin, ou bien on les brife avec une meule de pierre qui roule fur fon champ comme celle dont on fe fert pour écrafer les pommes dont on fait du cidre.

4 On fauche les prés communément trois fois en Pié- mont, on fane tout de fuite, & au bout de vingt-quatre heures le foin eft ferré: on n'eft point dans lufage de le botteler , on le met en pile fous des hangars ou dans des granges, & on l'entaffe de manière qu'il forme une maffe très-dure, que l’on coupe avec une efpèce de bèche tran- chante à mefure qu'on en a beloin, foit pour l'ufage de fa muifon, foit pour le vendre. Il femble que ces mafles de foin nouveau, fi fortement preffées , devroient s'échaufler; & s'il eft vrai, comme on le dit, que le feu prenne quelquefois de lui-même dans les granges, c'eft bien en pareil cas qu'on devroit le craindre. Cependant on nva bien affuré que ces accidens étoient inconnus dans le pays : apparemment qu'une journée de la chaleur qui y règne communément ,-fait autant fur le foin nouvellement fauché, que quatre ou cinq jours de.celle qu'on éprouve dans nos provinces feptentrionales, ou bien ( ce qui me paroït encore plus vrai-femblable)} nous laiflons peut-être nos foins fur le pré plus de temps qu'il n'en faudroit pour le mettre en état d'être ferré; ce qu'il y a de certain, c'eft que le foin de ce pays-là paroït plus verd à l'œil, & conferve une odeur beaucoup plus forte que celui qu'on voit communément ici.

Quand les prés ont été fauchés pour la dernière fois*de chaque année, on en coupe des gazons minces que l'on met en monceaux, & que l’on fait brûler avec quelques brouf failles ; il en réfulte une terre mêlée de cendres, que l'on répand enfuite dans a prairie : les Piémontois font grand cas de cette pratique, mais ils n’en ufent que pour les prés qui s'arrofent par des rigoles. |

s+ La moiflon du feigle & du froment fe fait de bonne heure dans les endroits du Piémont qui font en plaine; pour

Le D'ERSUSIC LIEN CES 471 ordinaire cette récolte eft faite à la Saint-Jean, & auffi-tôt la charrue retourne la terre avec ie chaume, dont on ne fait aucun autre ufage; on y sème tout de fuite du millet, qui fe recueillie au mois de Septembre.

6. On cultive aufli dans le Piémont, comme dans l'Italie, une grande quantité de blé de Turquie; mais comme cette plante ne vient bien qu'autant qu'elle eft fréquemment arrofée, on a place dans les endroits qui ont'peu de pente: on la difpofe en lignes droites & parallèles, & d'un rang à l'autre on laiffe un intervalle d'un pied ou environ, que l'on creufe én forme de fillon, ‘en relevant la terre de part & d'autre du côté des deux rangs de plantes : de temps en temps, felon le degré de féchereffe qui règne, on y fait couler de l'eau, que lon arrête par l'autre bout, afin que cet arrofement puifle pénétrer aflez avant dans la terre.

Le blé de Turquie fait beaucoup de profit à celui qui le cultive, à caufe du grand ufage qu'on en fait dans le pays. Les gens de campagne en font journellement une efpèce de bouillie qu'ils appellent polenra, & qu'ils regardent comme une très-bonne nourriture. Tout homme qui fait valoir une terre, ne manqueroit pas d'en employer une grande partie en blé de Turquie, sil en avoit la liberté, mais on croit que cette plante appauvrit & épuile le terrein; & pour prévenir ce dommage, le propriétaire qui paffe un baïl prend 1 pré- caution de fixer la quantité de blé de Turquie qu'on y pourra cultiver chaque année.

7. J'ai les rizières du Novarois, & c'étoit bien mon deffein de n'’informer de la manière dont on les conduit, mais je n’en eus ni le temps ni l'occafion; le riz n'étoit encore qu'en herbe, je navois aucune connoiffance dans le pays, & je favois qu'il falloit abfolument en avoir, & sy prendre de longue-main, pour tirér des éclairciflemens fur cette cul- tre, dont on fait myflère aux étrangers. Je fongeai feule- rent à m'affurer d'un fait qui fut caufe, ou que lon donna pour prétexte, du peu de fuccès avec lequel on eflaia il y a quelques années d'établir des rizières dans le Forès : on

-

472 MÉMOIRES DE L'ÂCADÉMIE ROYALE, prétendit alors que le féjour des eaux néce‘faires pour baigner continuellement le pied de cefte plante, étoit capable de corrompre l'air, & de caufer des maladies épidémiques. On ne fe plaint point de cette elpèce de contagion, ni dans Verceil, ni dans Novare, ni dans les villages des environs de ces deux villes; muis on convient aflez que les gens actuellement occupés dans les rizières s’en trouvent fouvent incommodés, ceux-là d’une manière, ceux-ci d'une autre, & les moiflonneurs du Piémont & du Monferrat qui par- tent de chez eux pour aller faire la récolte du riz dans le Novarois, comme nos payfans de Picardie ont coûtume de venir faire la moiflon du blé dans fIfle de France, s’en retournent le plus fouvent avec une maladie qu'ils appellent fièvre froide ou fièvre humide , & qui leur dure pendant tout l'hiver quand ïls n'en meurent pas.

8. L'Aftefan eft une des provinces du Piémont la terre montre le plus de fertilité; cependant il s'en faut bien que le {ol reffemble à ce que nous appelons communément bonne terre; c'eft une glaife dont la couleur eft d'un gris affez clair: il paroïît qu'elle eft mêlée de quelque fable, qui la rend plus légère, plus diffoluble, & qui la met à peu près dans l'état de celle qu'on prépare pour être cuite. Les habi- tans, fans aucun choix, & fans autre façon qu'un peu d’eau pour Famolir, en font des briques, des tuiles, des carreaux, &c. qui deviennent fort rouges à la cuiflon, & qui n'ont d'autre défaut que celui d’être quelquefois fort poreux & trop tendres : j'ai rencontré dans la même province des pièces de terre dont la couleur tirant fur le rouge, fembloit annon- cer une autre qualité; mais en ayant manié avec un peu d'eau, je l'ai encore trouvé grafle & fufceptible de recevoir & de garder toutes les formes qu'on auroit voulu lui donner:, c'eft un pays de collines, les eaux trouvent un prompt écoulement ; fans cela les chemins feroient abfolument impra- ticables, & il eft à préfumer qu'on ne tireroit pas un fi bon parti du terrein.

9- Prefque toutes les terres cultivées en Italie, font légères & fablonneufes ;

is # HÉSSeS L én

Li + D Ef Si C D'E NuCs ESA 473 & fablonneufes ; cependant j'ai remarqué qu'elles rapportoient beaucoup, & cela m'a donné lieu de réfléchir fur la ma- nière de les cultiver, qui ne reffemble point à la nôtre. Les Italiens comptent peu fur les pluies pour arrofer la terre; ils ont foin de l'humecter par des rigoles, ils difpofent le terrein en conféquence, & lon peut dire que cette nation een mieux qu'aucune autre, l'art de conduire les eaux courantes : la Nature lui en a donné des leçons, en lui mettant fous les ‘yeux tant de rivières & de torrens, dont le pays eft entrecoupé, & qu'on peut faigner, divifer & fubdivifer felon le befoin. On n’y voit*pas non plus, comme en France & ailleurs, de grandes plaines de blé, de feigle, ou de quelqu'autre menu grain; on sème & fon plante entre deux rangs d'arbres, qui foûtiennent des vignes en forme de treilles. En mélant ainfi des productions de différentes efpèces, il femble qu'on ait voulu modérer par des ombres bien mé- nagées la trop grande ardeur du foleil, & prévenir laridité d'un terrein très-difpofé par lui-même à s'échaufler & à fe defécher, "| DR TER TANT 4 AT NE TICHE AN: SE cs Maçonnerie à ArchireGure.

1. Dans le premier voyagé que je fis à Turin il y a dix aus, jentendis parler plufeurs fois d'une efpèce de chaux qu'on fait dans le pays, & avec laquelle on bâtit d'une ma? nière très-folide ; je voulois dès-lors en prendre connoiffänce, mais les occupations pour {efquelles j'avois été appelé, ne

m'en laifsèrent pas le loifir, & depuis ce temps-là je n'ai

retrouvé loccafion de fuivre cet objet que pendant le féjout que je fis en Piémont l'été dernier. Pour être inftruit comme je defirois, non feulement jai interrogé les Architectes & autres gens de l'art, mais j'ai eu de fréquentes converfi- tions & j'ai fait des expériences exprès avec M. Matthey, Méchanicien en titre de Sa Majefté le Roi. de Sardaigne. C'eft fur-tout à lui que je fuis redevable de la plufpart des : connoiffänces dont je ferai mention dans cet article. Mém. 1749: US GRSREES

74 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

On diftingue en Piémont deux fortes de chaux, lune qu'on nomme chaux douce ; affez femblable à la nôtre & qu emploie de même ; l'autre qui s'appelle chaux forte, & qui eft différente à bien des égards; c'eft principalement de celle-ci que j'ai à parler.

La pierre dont on fait la chaux forte qui s'emploie à Turin & dans les environs, fe prend en plufieurs endroits d'une chaîne de montagnes, qui s'étend depuis la petite ville de Montcaillier jufqu'à celle de Cafal: à caufe de Ja proxi- mité, on la fait venir communément de Supergue, lieu fort élevé, & célèbre par le vœu du Roi Viétor *. Cette pierre fe tire de la carrière par quartiers ou par morceaux naturel- lement arrondis, ou figurés comme de gros cailloux ; elle eft d’une couleur grife & quelquefois prefque noire, parfe- mée de petites lames d'un blanc brillant & fouvent entre- coupées par des couches, ou par de petites mafles de cette même matière, qui reffemble aflez à du marbre blanc ou à quelque criftallifation imparfaite : d'ailleurs la pierre, par Ja fmefñle du grain & par fa dureté, pourroit être regardée comme un mauvais marbre.

Jai cru pendant quelque temps que cette pierre étoit particulière au pays, & qu'on ne faifoit de la chaux forte que dans cette partie du Piémont, mais j'ai bien eu occafion de me defbufer depuis; on en trouve dans prefque tous les endroits de Fltalie qui font voifins des Alpes & des Apennins, j'en ai des chaînes de rochers tout entières, en paffant de Boulogne à Florence, & fur-tout à l'endroit qu'on nomme Pietra mala : il y avoit alors un grand nombre de travailleurs occupés à la réparation du chemin & des ponts qui font fur les torrens: je voyois que le même rocher mis en pièces ; fournifloit les pierres pour bâtir & la chaux pour faire le mortier. Dans toute la haute Maurienne,

* Vidor Amédée, père du Roï | Turin, fit vœu de bâtir dans ce régnant, étant allé fur la montagne :| lieu une églife fous Finvocation de de Supergue pour reconnoître lar- | la S.te Vierge, ce qui fat exécuté mée de France qui avoit invefti | depuis. 4

LA

4 D ES *S C 1 E N°C E 8 475 depuis Saint - Michel jufqu’à Lanebourg , on: ne rencontre autre chofe que cette elpèce de pierre, & je me rappelle qu'en vifitant ces montagnes arides & pelées qui font au deffus du mont Cenis, & qu'on peut regarder comme fa cime des Alpes, dans tous {es endroits qui n'étoient pas couverts de neige ou de glace, le roc paroifloit être de a nature de cette pierre, qui femble tenir beaucoup du marbre: Jen juge, non feulement par les caradières dont j'ai déjà fait mention, mais encore parce qu'on rencontré du marbre Par-tout elle fe trouve. Les torrens qui tombent des montagnes rempliffent les vallées par ils pañlent, des morceaux de pierres qu'ils ont détachés & entraînés avec eux; fi Ton y voit du marbre, on eft prefque für qu'il y aura auffi de quoi faire de Ja chaux forte. : Dans les environs d'Afti, du côté de Couftiole, j'ai va faire d'excellente chaux avec une pierre un peu différente de celle-ci : au premier coup d'œil, on la prendroit pour une glaife durcie; pour la tirer de la terre, il faut creufer bien fouvent plus de so pieds, & en faifant ces efpèces de puits, on trouve une pierre bife affez dure & d'un grain très-fin, avec laquelle on bâtit folidement , pourvû qu'elle foit enfermée fous quelque enduit, ou revêtue de briques, {lon 'ufage du pays; car dès qu'elle demeure expofée à l'air, de fuperficie en fuperficie, elle f réduit en pouffière, & s'ufe entièrement.

La pierre de Supergue fe calcine comme la pierre à chaux ordinaire, mais en moindre quantité; les plus grandes four- nées ne donnent pas plus de huit cens rubs * de chaux, & fon en fait beaucoup qui ne vont pas à quatre cens ; pour les premières on fait durer le feu trente-fix ou quaranté heures, & pour les autres dix-huit ou vingt feulement ; & comme les effets du feu dépendent non feulement de fa durée, mais auffi de fon intenfité & de la réfiftance plus ou moins grande des matières fur lefquelles on le fait agir, les

:* Le rub de Piémont eft de 25 livres de 12 ünces chacune, ce qui fait 19 livres moins 4 onces poids de mañc. ais Ooaiï

x

476 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

gens qui font cette chaux font attentifs à examiner les chan- gemens qui arrivent à la pierre, afin de fixer fa calcination dans l'état le plus convenable,

Ces changemens portent principalement fur le poids, fur Ja couleur, fur la confiftance; la pierre devient légère par la calcination, mais bien moins à proportion que la pierre à chaux ordinaire: quant à la couleur, elle paffe du noir ou du gris obfcur au brun de caffé brûlé, de-là au roux, au jaune, & enfm au blanc jaunâtre, qui deviendroit plus parfait fi lon poufloit davantage la calcination ; mais alors les parties n'auroient plus de liaifon, la pierre tomberoit comme en pouflière, & la chaux en cet état feroit de mau- vaife qualité. On a foin de la faifir, autant qu'on le peut, dans le degré qui précède immédiatement & qui eft défigné par ke blanc fale ou jaunâtre dont j'ai parlé. Les morceaux refroidis paroiffent entiers, le grain ferré & fin, comme avant la calcination, & quoiqu'on puifle les rompre ou les écrafer beaucoup plus aifément, ils font pourtant encore d'une con- fiftance à réfifter à un choc aflez fort.

Cette fubftance blanche & brilante qui fe trouve mélée par couches par grumeaux dans la pierre, fe calcine auffi, ceft pourquoi j'ai dit qu'on pouvoit la regarder com- me une forte de marbre; mais il lui faut un degré de feu plus grand, & qui le feroit trop pour la pierre à chaux ; ainfr pour l'ordinaire cette matière étrangère demeure dure ou imparfaitement cuite, de forte qu’on eft obligé de la féparer, & qu'on regarde comme une chaux de moindre valeur celle qui en contient beaucoup.

On r'éteint point la chaux forte avec beaucoup d'eau & brufquement comme la douce; il y a plus de précautions à prendre, & voici ce que j'ai pratiquer à cet égard. On fait fur le terrein avec du fable ou autrement, un baffin plat d'une grandeur proportionnée à la quantité de chaux qu'on veut éteindre à chaque fois : à quelques pas de on creufe une foffe, capable de recevoir tout ce qu'on en veut éteindre en pluñieurs fois & tenir prêt pour lufage. On jette dans

trs

DES SCIENCES . 47Y Je baffin une certaine quantité de chaux en morceaux ; on les arrofe le plus également qu'il eft poflible, & de ma- nière que toute l'eau s'imbibe & qu'il n'en refte point dans de baffn : quelques minutes après, quand on s'aperçoit que les morceaux commencent à sentrouvrir, on les arrofe encore & de la même façon, & cela fe réitère autant qu'il le faut pour empêcher d’une part. que la chaux ne fe con- vertifle en pouflière sèche, & de l'autre qu'elle ne foit noyée d'eau lorfq'eile eft encore en morceaux. + Lorfque les arrofemens ont ouvert & divifé fufffamment la chaux, on achève d'y verfer de l'eau autant qu'il en eft befoin pour lui faire prendre la liquidité d'une bouillie un peu claire, & quand elle a été remuée & battue comme Ja chaux ordinaire, pour achever fa diflolution, fon ouvre le bain, & par une rigole pratiquée exprès on la fait couler dans la fofle qui eft au deflous.

Il ne faut point éteindre de cette chaux plus qu'on n’en doit employer dans l'efpace d'un mois, car fi elle eft gardée plus long-temps, elle fe durcit dans la foffe, & on ne peut plus en faire ufage: on verra bien-tôt que l'eau même dont on pourroit la couvrir pour prévenir cet accident, feroit un mauvais préfervatif.

. En voyant éteindre cette chaux, j'avois remarqué qu'elle produifoit un degré de chaleur confidérable, & beaucoup plus grand, felon les apparences, que celui de la chaux douce: pour favoir au jufte ce qui en étoit, j'en fis éteindre plu- fieurs fois dans des terrines, en y tenant plongé sn ther- momètre de mercure. L'inftrument gradué felon les principes de M. de Reaumur, marqua cent cinquante degrés au deffus du terme de la glace, & refufa le fervice, parce qu'il n'a- voit pas plus d'étendue, ce qui me fait eroire que le mercure auroit encore monté davantage. Pour faire ces expériences, on ne mettoit de l'eau que par forme d’arrofement & feule- ment aflez pour convertir les morceaux en une poudre qui étoit prefque sèche; ce qu'on en eût verfé de plus auroit fans doute refroidi la chaux.

Ooo ii].

478 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

La chaux forte s'emploie à ‘Turin avec le fable de fa Doire *, qu'on y mêle dans la proportion de deux parties contre une de chaux pour les ouvrages de conféquence, & en plus grande quantité pour l'ordinaire, Ce fable examiné

au microfcope, n'a paru n'être pas de petits criftaux, mais:

des fragmens de pierres opaques de toutes efpèces, qui font entraînées par le torrent, & qui s'y brifent par les chocs continuels que caufe le mouvement précipité de l'eau.

Avec ce mortier on bâtit en toute occafion très - folide- ment; mais ce qui en fait le plus grand mérite, c'eft qu'il réuffit dans les lieux humides & fous l'eau même, de telle forte qu'après un certain temps il fait corps avec le moëllon le plus dur, & réfifte autant que lui au cifeau même du démolifieur, I eft d’un grand fecours dans le pays pour la conftruction des ponts, des digues, & de ces prifmes de maçonnerie qu'on oppofe à la corrofion & au choc des fleuves & de toutes les eaux qui fe précipitent des montagnes.

Dans le Piémont on bâtit prefque tout en briques, mais pour donner plus de gaieté & d'élégance aux édifices, on les recouvre, ordinairement d'un enduit de ce mortier dont je viens de parler, & pour dernière façon on les blanchit avec une légère couche de chaux douce, mêlée avec de la poudre de marbre blanc pañlée au tamis, que l'on applique & que lon unit avec la truelle, Ces enduits, outre qu'ils font plus beaux que le plâtre, font aufii bien plus folides ; j'en ai qui fubfiftent depuis plus de cent ans, en plein air à la plus mauvaife expofition, & qui font encore pref- que entiers & bien blancs. |

C'eft fur de pareils enduits qu'on applique la peinture Jrefque dans FItalie, elle eft f1 commune ; le maçon pré pare pour chaque demi-journée, la place fur laquelle le

intre doit exercer fon art; il faut que le pinceau fuive de près la trueke, fans quoi les couleurs ne feroient point reçües ni faïfies comme il eft néceflaire qu'elles le foient dans cette manière de peindre.

* Rivière formée par les terrens qui fe jettent dans la vallée de Suze, & qui pafle tout prés de la ville de Turin.

DES SCIENCES 479 «+ 2. À Naples on méle:avec la chaux le fable de Pouzzole, qu'on nomme pour cela poygolane, & qui, à caufe d’une certaine reffemblance, a fait donner le même nom à celui qui s'emploie à Rome pour les mêmes ufages; ces deux fables, qui ne diffèrent guère que par la couleur , le premier étant d'un gris cendré, & autre tirant beaucoup fur le rouge, ont ‘affez l'air de pierre broyée à peu près comme notre ciment. La furface des grains m'eft point diffe, mais pleine d'afpérité, & la moindre humidité les unit de manière qu'un monceau de ce fable qui a été quelque temps expofé en plein air, ne manque pas de fe durcir & de prendre une confiflance aflez forte. Les endroits d'où ä fe tire font des cavernes qui s’avancent fort profondément fous des collines, & qui au moyen de quelques piliers qu'on réferve d'efpace en efpace, ne s'écroulent pas plus qu'une carrière. Les cata- combes, par exemple, ne font autre chofe que des galeries foûterraines, pratiquées dans de pareil fable, ou dans des terres qui en contiennent beaucoup. - La pozzolane mêlée avec de la chaux forte, fait un mor- tier! fur lequel on fe fie beaucoup plus que nous n'oferions faire fur le nôtre : l'exemple le plus hardi que j'aie à citer, c'eft la façon dont j'ai conftruire des voütes à Rome. On forma avec des planches foûtenues par des piliers de bois, un plancher un peu bombé: on maçonna fur cette efpèce d'échaffaud une voûte de fept à huit pouces d’épaiffeur, âvec le mortier dont je viens de parler, & des moëllons que Yon mit péle-méle, fans avoir aucun égard à leur figure: einq ou fix jours après, on Ôta le bâti de planches qui étoit deflous , & la voire fe trouva folide. Les moëllons qu'on emploie pour cela, font des morceaux d'une pierre affez tendre & très-légère, qui fe tfouve par-tout dans les environs de h ville ou lon fouille, & qui eft connûé fous le nom de mollaffe : fa couleur ‘approche beaucoup de la pozzolane, on croiroîit volontiers que ce font des portions de ce fable qui fe font liées par l'intermède de quelque fac pierreux. 3. L'églife de S: Pierre & a plufpart des beaux édifices

480 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE de Rome font bâtis d’une pierre qu'on nomme travertine, & qui vient de Tivoli ou des environs : elle eft dure à peu près comme notre pierre de liais, mais un peu moins blan- che: d’efpace en efpace elle eft entrecoupée par des couches qui ont environ un demi-pouce d'épaifleur, & pleines de petites cavités arrondies, affez uniformes, & rangées fort près les unes des autres; de forte que quand la pierre, plus foible en ces endroits qu'ailleurs, vient à {e fendre & à s'ouvrir {lon le plan de ces couches, au premier coup d'œil on diroit voir les alvéoles d'une ruche d'abeilles (fig. > & 4). En examinant avec la loupe les cloifons qui féparent tous ces petits vuides les uns des autres, il m'a femblé qu'elles étoient d’une ma- tière criftalline, & de la nature de celle qui, après avoir filtré à travers la voûte d’une grotte , forme en deflous des concrétions tranfparentes : des gens de l'art, que j'ai inter- rogés à ce fujet, m'ont afluré de plus que ces couches hété- rogènes fe trouvoient toùjours fituées horizontalement dans la carrière, & qu'elles n'étoient point contenues entre deux plans parallèles ; comme on le pourroit croire en ne. confi- dérant que de petits blocs de travertine, mais. qu’elles alloient en diminuant d'épaiffeur jufqu'à certains endroits la pierre fe trouvoit pleine. ; Ces obfervations me font conjecturer que la mafle totale s'étant-entr'ouverte en plufieurs endroits, felon fon épaiffeur ou que formant d'abord plufieurs lits horizontaux, appuyés feulement en partie les uns fur les,autres, l'eau chargée d'un fuc pierreux aura filtré de couche en couche, & que les gouttes fe fuccédant les unes aux autres, & dépofant peu à peu autour d'elles:mêmes, à da furface inférieure, du lit de pigrre qu'elles alloient. quitter pour paffer dans le fuivant, auront enfin formé toutes ces, petites cloifons :qui, lient Prés fentement une couche avec l'autre. Nous avons tant d'exem: ples de ces filtrations & de ces dépôts aux plafonds des grottes, naturelles qu'on nomme caves gouttières, que mon explica

tion, à ce que je crois, ne manquera pas de vrai-femblance :

de ce côté-à; mais on pourra n'objeéter que les ftalactites rz & autres

D: EUSUNS © 1 E IN CS 487 & autres concrétions de cette efpèce fe font prefque toû;ours de relief, au lieu qu'ici j'ai à rendre raifon d'un vuide autour duquel il s'eft fait des parois.

: J'avoue qu'il y a dans ce cas particulier quelque chofe à déméler de plus que dans les autres: un peu de réflexion pourra difliper ce qu il ya d’obfcur. Quand une goutte d'eau, après.avoir percé la voûte d'une grotte, fe trouve chargée d’une matière qui s'y attache par une forte d’analogie, la partie aqueufe s'évapore de toutes parts dans l'air libre qui l'environne, & le dépôt qui fe fait forme déjà un petit relief: la goutte fui- vante s'étend deflus, y laifle ce qu'elle contient de propre à Sy attacher, & paie encore dans Fair du lieu par évapora- tion ; il arrive la mème chote aux gouttes fuivantes, & l’on voit bien par pourquoi la fomme de tous les dépôts qu'elles ont faits produit un folide, un corps plein. Mais fi lon fe repréfente de pareilles gouttes pendantes entre deux lits de pierre fort peu diftans Jun de l'autre, elles trouvent moins de facilité à s'évaporer dans l'air ambiant, qu'à péné- trer dans le lit inférieur auquel elles touchent déjà, il me femble qu'on doit convenir que le dépôt fe fera autrement que dans le cas précédent: les parties purement aqueufes s'en iront par les pores de la pierre inférieure, & les autres demeureront attachées à l'endroit pendoit la goutte, & Sy arrangeront felon la forme de fon arrondiffement ; de je vois naître une efpèce de calotte ou de petite coupole qui s'alonge peu à peu par les dépôts fuivans, & enfin les bords prolongés fe joignent au lit de pierre de deffous dans l'épaif- feur duquel leau s'écoule.

4. À Venife ä ny a ni carreaux ni parquet dans les appartemens ; dans toutes les maifons, dans les couvents mème & jufque dans les auberges , les planchers: font cou- verts d’une efpèce de fluc qui eft bien poli & prefque auff

dur que le marbre; les plus communs font feulement jafpés detoutes couleurs; ce qui des rend plus faciles à réparer ; les autres font faits par compartiments , j'en ai qui étoient deflinés & ornés de couleurs comme les plus beaux tapis.

Mén, 1749 « Ppp

482 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Ces planchers fe font avec la poudre de marbre, du ci- ment bien tamifé, de la chaux forte & du gips détrempés, les uns difent avec de l'urine, les autres feulement avec de l'eau : ils ne réuffiffent bien que fur des voûtes ou dans les raiz-de-chauflée, parce qu'il faut les battre à grande force pour leur faire prendre la confiftance néceffaire; on les frotte de temps en temps avec de l'huile de lin ou de noix, pour les entretenir luifans, & pour empêcher que l'eau qu'on y pourroit répandre n’y fafle tort.

5: La fameufe tour de Pife penche en eflet beaucoup vers le midi; mais je ne fais pourquoi l'on s’obftine tant à croire qu'elle a été bâtie ainfr, & de deflein formé: par quelle bizarrerie fe feroit-on accordé à vouloir qu'un édifice de cette importance fe préfentät d’une manière f1 choquante? Mais, fans remonter aux intentions & au goût de ceux qui en ont dirigé la conftruction, ne fuffhit-il pas de voir que les affifes des pierres font inclinées, & que prefque tous les bâtimens un peu élevés qui font de ce ménte côté, & qui ont été conftruits en différens temps, penchent auffi du même fens que la tour ? ces obfervations, que tout le monde péut faire, ne fufhifent -elles pas pour faire voir que c'eft l'effet du terrein, qui devient d'autant moins ferme qu'il approche davantage de Arno, rivière qui paffe au milieu de la ville? Je fuis perfuadé que la tour commença à perdre confidérablement de fon aplomb avant que d'être achevée, & que lArchiteéte bien loin d'être fatisfait de cet accident chercha à y remédier; car à cinq ou fix toifes près du fom- met, on voit qu'elle fe redrefle, & qu'elle ne fuit pas la première inclinaifon de la plus grande partie qui eft au deffous.

J'appuie encore cette conjedure fur un fait tout nouveau, que j'ai appris étant fur les liéux. La ville acheta il y a quel- ques années une vieille tour pour en faire un obfervatoire. M. Perelli qui en a la direétion, demanda qu'elle füt, non feulement réparée, mais augmentée en hauteur, afin de fe procurer un horizon plus découvert: la tour qui penchoit

DIEMSNUS :C LE N-C+E 6. déjà, s'inclina davantage lorfque fes fondemens furent chargés d'un nouveau poids, & le prudent Aftronome que je viens de nommer, de crainte que cet eflet n'augmentit par la fuite, prit Le parti de faire placer dans un bâtiment féparé & moins élevé, fon quart-de-cercle mural & l'inftrument à prendre les pañages des aftres.

On prétend que les Italiens ont eu autrefois du goût pour ces bâtimens hors d'aplomb, & l’on en cite quelques exem- ples, comme une tour carrée qu'on voit à Bologne près de celle qu'on nomme fa tour Afinelli ; laquelle en eflet eft inclinée feulement par dehors, tandis que fes parois (füi- vant ce que l'on m'a dit) font d’aplomb par dedans, ce qui marque bien le deffein qu'on a eu de la bâtir ainf ; mais il me paroït que ces exemples rares font moins es preuves du goût de la nation, que des monumens de quelques fantaifies particulières, peut-être occafionnées par accident arrivé à Pife, ou bien des coups de l'art par lefquels on aura voulu rendre raifon de ce fait, trop merveilleux aux yeux de bien des gens.

Al RIT CEE 2, V.:

Obférvations méréorologiques, à Jur la température de certains lieux.

1 Le printemps fut froid l'année dernière * en Piémont,

jufqu'à la fin de Juin; à peine le thermomètre de M. de Reaumur arriva-t-il dans le fort du jour à 13 ou 14 degrés au deflus du terme de la glace: j'ai appris qu'il en avoit cté de même plus avant dans l'Italie, & c'eft pour cette raifon que la récolie des foies fut fi mauvaile: les gens de Ja cam- pagne qui font tout par routine, firent éclorrela graine dans le temps ordinaire, & les müûriers retardés par des pluies froides, & gatés dans bien des endroits par la grêle, ne fournirent point aux. vers éclos la nourriture qu'il leur falloit. Les Piémontois qui ont plus d'arbres par proportion, &

* 1749. Cette partie ne fut ûe qu'au commencement de 1750.

Pppi

284 MÉMoiREs DE L'ACADÉMIE ROYALE quuue longue expérience de pareils accidens a rendu pus foigneux & plus habiles, fe font moins reflentis que les autres de cetie intortune: il n’y eût que les plus prefiés qui firent mal leurs affaires. à

2. Depuis le 4 de Juin jufqu'au 14, il fit des coups de vent terribles en diflérens endroits du Piémont, la grêle & le tonnerre firent aufli beaucoup de ravages, & les mon- tagnes fe couvrirent de neige beaucoup au deflous de celle qu'on y aperçoit pour l'ordinaire jufqu'à la fin du printemps. Ces vents pour la plufpart venoient de la mer, & avoient fort peu d’étendue en largeur, mais par-tout ils pafsèrent, il refta des marques mémorables de leur violence. La grande porte d’un château j'avois été quelques jours auparavant, fut emportée à plus de cinquante toifes de diflance fur un terrein prefque plat, & elle étoit cependant fr pefante qu'il fallut quatorze hommes pour la rapporter & la remettre en place ; toutes les maifons du même lieu furent découvertes, & lon voyoit des toits entiers emportés à cinquante pas du bâti- ment, & une grande quantité de murailles renverfées. En continuant mon voyage, j'ai trouvé entre Florence & Rome, de très-gros arbres déracinés & abattus par ces vents im- pétueux dont on fe reffentit aufli en plufieurs autres endroïts de l'Italie.

3. Les chaleurs commencèrent dans les derniers jours

de Juin, & furent exceflives pendant près de deux mois: à

Milan, à Venife & à Florence, ôn m'aflura que de mé- moire d'homme on n’en avoit pas éprouvé de plus grandes; cependant le thermomètre de M. de Reaumur n'a jamais été jufqu'à 30 degrés lorfqu'il étoit à Fombre : d’où lon peut conclurrè qu'en Italie, fi les chaleurs de l'été font plus incommodes qu'en France par leur durée, elles n'exce- dent point par leur intenfité celles que nous y reflentons quelquefois.

4. Lorfqu’en paffant de Bologne à Florence je me trou- vai fur lApennin, je crus que les chaleurs avoient ceffé, ou au moins qu'elles étoient confidérablement diminuées :

é DES Sci1ENCE'Ss 485 je ne penfois pas que j'euffe aflez monté pour devoir attribuer au degré d'élévation j'étois, le frais qui fe faifoit fentir pendant la journée, & qui le matin & le foir me faifoit regretter de m'être pas plus vêtu que je ne l'étois. Je n’avois point alors de thermomètre avec moi, mais je jugeai par une eftimation que je crois aflez jufte, qu'avant le lever & après le coucher du foleil la température de l'air étoit affez femblable à celle des caves, qui n'excède guère 10 degrés: c'en étoit 17 ou 18 au deflous de Ja chaleur que j'avois reffentie la veille au pied de la montagne. A l'endroit le plus haut de ma route, dans une auberse ifolée, qu'on nomme la Traverfa, fur la droite du Jogo en venant en Tofcane, je mis en expérience un baromètre portatif que j'avois, & le mercure fe fixa à 25 pouces o lignes +, par un temps ferein, qui duroit depuis environ 8 jours, & qui dura encore prefque autant après: c'eft un peu plus de 2 pouces 1 d'a- baiflement, car lorfque je fus arrivé à Florence, le méme baromètre marqua 28 pouces 3 lignes +, & je retrouvai dans la plaine la chaleur à peu près femblable à celle que J'avois reflentie au delà de l'Apennin.

s- Je partis de Florence pour aller à Rome le 27 Août, la chaleur commençoit à fe modérer : cependant le thermo- mètre fur les 3 heures après midi marquoit encore comme- nément 24 ou 25 degrés; mais un vent de nord qui furvint rendit les nuits très-froides, & au point que mon compa- pagnon de voyage * & moi nous fümes obligés d’avoir recours à des habits d'emprunt, & que plufieurs fois n'y pouvant plus tenir, nous fimes lever du monde aux auberges des poftes pour nous allumer du feu.

Pour moi je fuis bien tenté de croire que cette fameufe intempérie dont on effraie perpétuellement les voyageurs depuis Florence jufqu'à Naples, confifte principalement dans ces alternatives de froid & de chaud auxquelles on eft ex- pofé (& prefque toûjours fans précaution) lorfqu'on marche nuit & jour dans cette partie de l'Italie. On cite tant d'exemples

P pp ü

* Le P, Garo:

»,

486 MÉMOIRES:DE L'ACADÉMIE ROYALE de fes mauvais eflets, & l'on trouve tant de perfonnes {en- fées & non fufpectes de préjugés, qui les atteftent, qu'il n'eft guère pofhble de n'en pas croire quelque chofe; mais je pente qu'on étend trop loin la crainte qu'on en a: fi en certains lieux & en certain temps l'air devient mal fain, comme on le croit, par quelque mauvaile exhalaifon dont il fe charge, je ne faurois me perfuader que cela foit au point de furprendre & d'empoilonner, pour ainfi dire, un homme qui fait fa route, Le moyen de fe garantir, dit-on, de ces dangereufes influences, c'eft d'aller fans dormir, & de vivre fobrement: à ces deux précautions, que la rareté des bonnes auberges n'a rendu que trop aifées à prendre, j'en voudrois ajouter une qui, Je crois, pourroit difpenfer de la première; ce {eroit d'avoir une bonne chaife dans la- uelle on püt fe fermer pour fe garantir du froïd, au lieu de celles qui font en ufage dans le pays, & qui, n'ayant pour toute clôture que deux mauvais rideaux de cuir qu'on a bien de la peine à joindre, vous laifent le jour expolé à l'ardeur du foleil, & la nuit à la rigueur du froid.

Ce que l'on redoute fi fort pour les homines, il ne paroît pas qu'on le craïgne du tout pour les animaux, apparemment parce qu'on ne croit pas qu'il leur en arrive aucun mal: c'eft fur-tout dans les lieux bas, marécageux, inondés en certains temps de l'année feulement, que règne, felon l'opi- nion établie, cet air contagieux {cattiva aria) qu'on appré- hende de refpirer, même en paflant; mais comme ces mêmes endroits font prefque les feuls il y ait quelques pâturages, on y mène de dix lieues quelquefois & avec une pleine confiance, des troupeaux de bœufs, des buflles, des che- vaux, des moutons, &c. qu'on y laifle paître pendant plufieurs mois, & qui n'y contractent point de maladies; feroit-il donc vrai que l'air n’y devint mauvais que pour les hommes?

6. Les cabaretiers de Rome ont leurs caves près de la porte Saint-Paul & du tombeau de Ceftius, fous une colline

Re nn the, ar 2,2

Le cr"

Us D HS SCIENCES. 487

ñ porte le nom de monte teffaccio , parce qu'elle paroît s'être formée des débris de tuiles & de pots caflés qu'on y a portés, apparemment par quelque règlement de police: la fraicheur de ces caves eft très-vantée, & par conféquent exagérée par la plûpart de ceux qui en parlent; je voulus favoir au jufte ce qui en étoit. Le o Septembre 1749 après midi, la tem- pérature de Fair libre étant de 18 degrés au thermomètre de M. de Reaumur, je n'y tranfportai agec le Père Jacquier & le Père Garo, & ayant fait tirer du vin d'un tonneau dans un grand gobelet de verre que nous trouvämes dans le lieu même, jy tins plongé pendant cinq ou fix minutes un thermomètre de mercure qui fe fixa à neuf degrés & demi au deffus du terme de la congélation: la même chofe arriva quand je laiflai l'inftrument fufpendu en l'air pendant dix- huit ou vingt minutes, foit dans la même.cave, foit dans deux ou trois autres du même endroit, dans lefquelles nous répétimes ces expériences.

Nous apprimes par? à rabattre beaucoup de tout ce que la voix publique attribue de merveilleux aux caves de zonte teffaccio, dont la fraicheur pañfe dans fefprit de bien des gens pour être égale & plus durable que celle de la glace, quand une fois elle s'eft communiquée au vin; mais il refte pour certain qu'il y fait plus froid que dans nos foûterrains les plus profonds, & cela eft d'autant plus remarquable, qu'on entre prefque de plein pied dans ces caves qui sa- vancent à peine de dix-huit ou vingt toifes fous la colline: les portes en font grandes, expofées aux rayons du foleil, & aflez fouvent ouvertes dans la journée, parce qu'on y vient chaque jour chercher le vin qui fe débite en détail dans la ville.

7. Cette fraicheur paroït être une propriété particulière de cet endroit, & qui dépend, felon les apparences, de la nature des matières dont cette petite montagne eft formée. Je portai un thermomètre dans les catacombes de Saint-Sé- baftien l'on entre rarement, l'on defcend, autant que

».

488 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

je puis m'en fouvenir, plus de trente pieds, & qui s’'avancent fort loin fous des bâtimens & autres lieux couverts, & jy trouvai la température de treize degrés & demi, quelques jours après les expériences faites à #oute teffaccio. La terre cuite feroit-elle de nature à s'échauffer plus difficilement que les autres matériaux, ou bien les influences de l'atmofphère y cauferoient-elles des refroidiffemens qui n'auroient point lieu ailleurs? matière à expériences.

SUR

Mem. de UAc.R des Se 1749. Pag. 488,P1.13.#

Mem de l'AGR des Se 1749 Pau. ÿ88.PL.18 #

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grue del ct Sup

SUR LA STRUCTURE

DES

VISCERES NOMMES GLANDULEUX, - ET PARTICULIÈREMENT

SUR CELLE DES REINS ET DU FOIE,

Par M. FERREIN.

| Fab Vifcères renferment Îe principe de a vie & du

mouvement de la machine animale; ce font eux qui

; font confacrés à fa préparation des fucs qui font agir, &

lon ne fauroit connoître le méchanifme de cette préparation, fans avoir développé la ftruéture intime de ces organes; mais, rmalheureufement, la fcience des ftruétures, cette partie de PAnatomie, la plus belle & la plus importante, eft auffi {a plus délicate & la plus imparfaite de toutes. Harvée, Afellius, Pecquet, Bartholin, s’étoient immortalifés par leurs grandes découvertes, avant qu'on ceffât de regarder la fubftance des vifcères comme une liqueur coagulée.

Malpighi tenta le premier de découvrir ces petits objets

as Nature fembloit avoir piis plaifir à nous cacher depuis

tant de fiècles, & ce font fes recherches fur la ftruéture des vifcères, fur-tout du foie, de la partie corticale du cerveau & des reins, qui lont fait regarder comme l'inventeur de ce genre d’'Anatomie qu ’on peut nommer aralyrique. Malpighi prétend donc que ces organes font formés de

glandes, ceft-à-dire, felon lui, de petites parties ovales ou

fphériques, concaves, munies chacune d'un canal excrétoire: les vaifleaux fanguins qui sy répandent, fourniflent une liqueur particulière qui tombe dans la petite cavité par des tuyaux invifibles, & qui en fort par le conduit excrétoire. Les jugemens de ce'grand homme fembloient avoir acquis

Mém, 1749. + Qqq

"DES ScrEeNtTEs" 480

Jdée de Malpighis

Idée de Ruyfch.

Anatomifles qui les ont fuivis.

400 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

force de loi, lorfque le célèbre Ruyfch, aïdé d’injeétions extrêmement pénétrantes dont il s’eft toujours réfervé le fecret, fe préfenta pour le combattre, il nie l'exiftence de ces glandes, de ces cavités, & attribue une autre origine aux tuyaux excrétoires: il va plus loin, il Ôte aux organes dont nous parlons, & à une infmité d'autres, cette fubflance propre qu'on y avoit toüjours reconnue, & foûtient qu'ils ne font qu'un compofé merveilleux de vaïfleaux fanguins artériels & veineux , fans aucune fubftance diftinéte de ces vaifleaux : il prétend enfin que les tuyaux excrétoires font précifément des continuations de quelques rameaux artériels.

M. Ruyfch avoit dans fon cabinet une quantité immenfe de pièces anatomiques, la plufpart sèches; les préparations du foie, de la rate, des reins, &c. fuyent les armes qu'il employa pour convaincre les plus incrédules; ä les produïloit

aux yeux des Savans, qui n'y voyoient réellement à la faveur

des verres, qu'un affemblage curieux de vaiffeaux fanguins. Tels font les deux fyftèmes qui ont fait la plus grande partie de la gloire de leurs Auteurs, & formé la queftion la plus célèbre & la plus importante qu'il y ait eu en Anatomie depuis fon renouvellement; on connoït peu d’Anatomiftes ui n'aient pris part à cette grande difpute. Enfin les fuf- pue paroiffent fe réunir aujourd'hui en faveur de Ruyfch, du moins quant à fon objet eflentiel: on eft affez générale- ment perfuadé que le foie, la rate, la partie corticale du cer- veau, des reins, & plufieurs autres organes; ne font qu'un compofé de vaifleaux artériels & veineux, fans aucune fubf- tance propre & diftincte de ces vaifleaux ; mais en convenant fur ce point, on fe partage fur l'idée des glandes ; les uns abandonnant Malpighi, nient avec Ruyfch leur exiftence, & ne regardent les tuyaux excrétoires que comme des prolon- gemens de quelques rameaux artériels ; les autres voulant rap- procher ces deux Auteurs, prétendent que les vaiffeaux fan- guins de Ruyfch font employés à former eux-mêmes les glandes de Malpighi, dont la cavité donne naïflance aux tuyaux excrétoires. Ces deux fentimens partagent encore

ph

DL. SMAS:C: N'E/NiciE fs: 491 aujourd'hui Jes Savans ; & ce qu'il y a de bien fngulier, c'eft qu'on prétend trouver dans le rein, dans une feule & même partie, les preuves les plus décifives de l'un & de l'autre. On aflure que les glandes deftinées à filtrer l'urine s'y mon- trent clairement, & que la fameufe obfervation de M. Littre, rapportée dans nos Mémoires, met la méchanique de cette compofition dans tout {on jour. C'eft aufli dans le rein que le fyftème' de Ruyfch paroït wiompher; jamais la compofi- tion qu'il admet ne fe montra, dit-on, aufli diftinétement que dans la fubftance corticale de cet organe ; jamais on ne vit un arrangement aufir merveilleux des capillaires fanguins; enfin c'eft-là, de l'aveu des plus favans Anatomiftes, qu'on découvre fenfiblement l'un des plus grands myftères de l’Ana- tomie, ce que M. Ruyfch dit avoir cherché pendant quarante ans, favoir , la continuité des tuyaux fecrétoires avec les extrémités des artères.

Ces différentes obfervations ont paru fi convaincantes, que M. Boerhaive, l’homme du monde le mieux inftruit des expériences de Malpighi & de Ruyfch, n'a s’empé- cher de reconnoïtre dans le rein la réalité des deux fyftèmes: une partie de la fubftance corticale fe réfout, felon lui, im- médiatement en vaifleaux fanguins différemment repliés, fans qu'ils forment aucune glande : autre partie fe réduit en grains glanduleux qui paroiïffent eux-mêmes formés de vaifleaux fanguins. Il y a auffi, fuivant cet Auteur célèbre, deux fortes de tuyaux excrétoires ; les uns ne font qu'un prolongement de quelques rameaux artériels, les autres viennent de la cavité

des grains glanduleux. M. Boerhaave n’eft pas le feul de ce fentiment, & l’on aflure que cette double compofition paroît clairement dans des reins bien injectés.

On me taxera peut-être de témérité ff j'ofe m’élever contre fun & l'autre fyftème; je ne crains pas d’aflurer que la partie corticale du rein, que la rate, le foie & plufieurs autres parties, ne font compofés ni de vaifleaux fanguins ni de glandes; j'ai trouvé qu’ils font formés d’une fubftance qui leur eft propre, & que cette fubftance ne fe réfout nullement en

* _Qggqi

Mém, de l'A. cad. des Scienc. année 1705.

Réfutation de Pun & de l'autre fyflème.

Nouvelle ftrudture.

Réfutation du fyflème de Ruyfch.

492 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE artères & én veines, comme Ruyfch prétend lavoir démontré,

elle en eft au contraire très-diftinéte; j'ai aufli obfervé que la fubftance dont je parle n'eft pas non plus faite des glandes que Malpighi & tant d'autres Anatomiftes croient

avoir vües; en un mot, je prétends que ces parties font un aflemblage merveilleux de tuyaux blancs, cylindriques ; différemment repliés, que je démontre fenfiblement dans les reins, que j'ai vûüs, fi je ne me trompe, dans le foie, dans les capfules atrabilaires , & que je crois devoir recon- noître dans d'autres vifeères. Mais avant que d'entrer dans un détail 1à-deflus, j'examinerai fuccinétement les expériences de Ruyfch & de Malpighi.

Un organe qui ne feroit qu'un aflemblage de vaiffeaux fins, tranfparens, pleiris de fang , comme font les extrémités des artères & des veines, doit néceffairement paroïtre rouge, non feulement à la vûe fimple, mais encore au microfcope : c'eft auffi l'idée qu'on a du foie, des reins, de la rate, & en général des parties qu'on appeloit autrefois farguines. On fait à la vérité qu'elles font primitivement blanches , maïs on croit qu'elles ont un rouge emprunté qu'on ne peut leur ôter qu'en enlevant par des macérations ou par des injeétions aqueufes, les parties du fang qui leur communiquent cette couleur : les recherches que j'ai faites m'ont appris le con- taire; j'ai examiné ces différens organes dans l'état le rouge étoit le mieux marqué , j'ai employé le fecours des verres lenticulairèés & du microfcope, j'ai conftlamment dans toutes ces parties une fubftance d’un blanc un peu tranf parent, prefque femblable à une gelée, & fans la moindre teinte de rouge: pour lever toute forte de ferupule, j'ai examiné | ces parties, mais particulièrement le foie; les reins, la rate, lorfque les vaïfleaux devoient être le plus remplis, conime dans les’ cadavres récens, dans ceux qu'une mort violente avoit enlevés, dans un homme dont le foie étoit enflammé, dans des animaux que je venois de faire mourir, & dans d’autres qui vivoient encore ; j'ai toûjours da fübftance propre de ces organes parfaitement diflinéte des vaifleaux

)

DIESHLS C IE N C_E,s. 493 fanguins , & d'une couleur aufi blanche que s'il n'y avoit jamais eu dans le corps une feule goutte de fang, ou qu'on eût fait précéder les plus longues macérations. J'ai été plus loin; j'ai rempli les vaifleaux artériels & veineux d’une injec- tion rouge, que je crois, non fans raifon, auffi pénétrante que celle de Ruyfch; la couleur blanche de cette fubftance n'en a jamais fouffert la moindre altération.

Je ne connois qu'une partie dont j'aie trouvé, non fans furprife, la fubftance propre véritablement rouge ou teinte en rouge, au moins dans les petits enfans, c'eft la fubftance in- térieure des capfules atrabilaires.

On demandera d'où vient que dans quelques-unes des préparations de M. Ruylch, le foie, les reins & d’autres parties n’offroient rien de blanc, rien qui parût diftinét des vaifleaux fanguins injeétés? j'en vois deux raifons bien fen- fibles ; l'une eft que fon injection s'échappoit en manière de rofée, comme il 'aflure fouvent lui-même, par toutes les porofités des vaifleaux, & qu'elle teignoit Ja fubflance des parties : k feconde raïfon eft que M. Ruyfch faifoit {es obfer- vations & fes démonftrations fur des préparations qu'il con- fervoit depuis long-temps dans fon cabinet, & fingulière- ment fur des foies & des reins defféchés; c'eft lui qui nous Vapprend. Or je fais par expérience que la fubftance blanche - qui remplit les interftices des vaiffeaux fmement injectés, fe retire, s’altère, qu'elle s'oblitère même & difparoït entière- ment dans les pièces sèches. Je conferve des morceaux du foie & des reins defléchés, que j'avois remplis d'injection rouge, non fujète à s'extravafer comme celle de M. Ruyfch; cependant la feuke chofe qu'on y voit, à Faide même du microfcope, c'eft un aflemblage merveilleux de vaifleaux fanguins fans aucune autre fubftance, non pas même dans la partie intérieure ou rayonnée du rein : voilà précifément les pièces de conviction de M. Ruyfch. Si l'on fe règle, comme il veut d'exiger, {ur leur infpeftion fans aucun autre examen, le procès fera décidé en fa faveur, mais fur des pièces trom- peules ; j'y voyois avant le defsèchement, & je pouvois faire

Q qq ül

Réfutation du fyftème de Malpighi, . mais avec reftriétion.

494 MÉMOIRES DE L'ÂACADÉMIE ROYALE

voir à tout le monde, la fubftance propre de toutes ces parties, qui étoit très-blanche, très-abondante & très-diftincte des vaifleaux injectés, mais qui a totalement difparu depuis le defsèchement, Je ne crains pas d’affurer que dans ce grand nombre de parties que cet illuftre Anatomifte produit comme autant d'exemples de la ftruéture qu'il vouloit établir, il n'y en a pas une, foit dans homme, foit dans la femme *, qui ne fournifié une démonftration de ce que j'avance.

Je ne condamnerai pas auffi généralement les obfervations de Malpighi, il y a une grande différence à faire à cet égard; je fais par ma propre expérience qu'il ÿ a un grand nombre de parties qui juftifient ce que ce grand homme a avancé à leur fujet, & qui détruifent tout ce que Ruyfch a voulu lui oppoer ; mais J'en ai trouvé beaucoup d'autres dont la ftruc- ture s'éloigne de ce que Malpighi & les autres Anatomiftes croient avoir : tels font plufieurs des principaux vifcères, le cerveau, le foie, la rate, les reins, &c.

Le cerveau fe retire & devient friable par la cuiflon que Malpighi, Vieuffens, &c. faifoient précéder ; il fe forme à fa furface une infinité de gerçures qui, fe rencontrant diflé- remment & au hafard, préfentent, ou même font détacher des parties irrégulières de différente grandeur & figure, que fimagination a creufées , arrondies & façonnées : voilà les fameufes glandes du cerveau. Ceïles qu'on a attribuées au foie n’en ont pas même la figure, ce ne font que des lobules à plufieurs faces, comme ceux du poumon, enfermés de même dans autant de facs formés tous par une feule mem- brane continue qui lie, qui foûtient la fubftance molle & friable de cet organe. La cavité que d’Anatomiftes célèbres prétendent y avoir obfervée, n'a jamais exifté,

La rate humaine, examinée avec attention, éloigne encore plus l'idée de glandes, & même celle de Iobules.

La fubftance propre ou blanche du rein, qui, comme nous l'avons dit, eft très-abondante & très-diftinéte des

# Je ne comprends pas dans ma propofition toutes les parties de l’arrière- faix, & il en fera de même dans la fuite de ce‘Mémoire,

DES SctrEeEnNcEs. $ vaifleaux fanguins, n'eft compolé, ni de glandes, ni d'aucune forte de grains, foit folides, foit concaves: nous développe- rons bien-tôt fa ftructure ; on verra qu'elle n'a rien qui ne détruife les faits avancés par différens Auteurs, & que la fameufe obfervation de M. Littre ne peut être regardée, en rendant juftice à cet Académicien, que comme une produc- tion monftrueufe,

Je ne diflimulerai pas cependant quelques faits qui fem- bleroient rentrer dans le fyflème de Malpighi ou de Ruyfch. J'ai quelquefois dans les reins, dans la rate, &c. des fujets fort avancés en âge, une infinité de petits grains blancs, fermes, femblables à des glandes ou pluftôt à de petits tuber- cules à des concrétions lymphatiques ; ces grains ont une folidité qui ne fe trouve point dans les glandes : on ne peut ÿ découvrir aucune cavité. On ne les voit point dans Îes jeunes fujets, quoique leur groffeur dût les rendre très-fen-

les ; en un mot, c'eft un effet de l'âge qui produit fouvent de pareils changemens dans la fubftance des parties.

J'ai auffi une infinité de fois plufieurs points rouges, circonfcrits en apparence, qui fe montrent naturellement en manière de glandes dans quelques-uns des vifcères dont nous parlons, & qu'on ne fauroit regarder comme quelque chofe d'accidentel. Ces points ne forment nullement la fubftance propre de ces organes; ils y font feulement répandus un à un & de diftance en diftance, fans fe toucher jamais par aucun point: je les ai examinés attentivement, avec & fans les fecours des verres & des injeétions: la compofition m'en a paru différente. J'ai découvert dans plufieurs, la même fubflance blanche que par-tout ailleurs, fans qu'il y eût rien de cir- confcrit ou qui füt réellement diftin@ de ce qui les envi- ronne; la feule différence que j'ai trouvée, c’eft que les vaifleaux fanguins font plus nombreux dans l'étendue de ces points : voilà ce qui les fait paroître fi rouges quand on les examine fans le fecours des verres lenticulaires & même des meil- leurs verres, lorfque les parties ont perdu leur fraicheur: il n'y a donc ici ni glandes, ni grains, ni rien qui en ap- proche, ce n’eft qu'une fauffe apparence.

Mén. de L 4. cad, des Scienc. année 1 7 0 ÿ.

L'Anatomie n'a fourni juf- qu'ici que deux exemples bien

prouvés de la compofition

vafculeufe.

Mén. de l'A- cad. des Scienc, année 1741) &- 372"

496 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

J'avoue que j'ai trouvé auffi un grand nombre d’autres points de couleur rouge, véritablement compolés de vaifieaux fanguins, mais on n'y voit nullement cette multitude de capillaires entaflés les uns fur les autres, dont il eft f1 fouvent queftion dans les ouvrages de M. Ruyfch; ce font feulement quelques branches qui {e plient, fe replient fur elles-mêmes, & fe redreffent enfuite pour fuivre leur chemin. On com- prend bien que tout cela n'a rien de commun ni avec les glandes, ni avec les organes fécrétoires, ni même avec le fyflème de Ruyfch, qui prétend réfoudre en vaiffeaux fan- guins la fubflance propre des parties, & fur-tout celle des glandes ou des organes nommés glanduleux, au lieu que les vaifleaux dont nous parlons font parfaitement diftinéts de cette fubftance: celle-ci fubfifle dans fon entier en fuppofant même tous ces points rouges anéantis.

Il eft donc vrai qu'on ne voit rien dans les vifcères qu'on a nommés, qui juftifie ce que Malpighi, Ruyfch, & tant d’autres” Anatomiftes ont avancé.

Depuis le renouvellement de l Anatomie, on ne cefle d'aflurer que nos organes font formés de vaifleaux, foit rouges, foit blancs, & qu'on en voit la preuve dans une infinité de parties: on croiroit en lifant Ruyich, Vieufens, Hovius, &c. que rien au monde neft mieux démontré : il eft conftant néanmoins que nous n'avons que deux exemples bien avérés * de cetie compofition. Graaf a fourni le premier, qui ne s'étend pas même aux deux sèxes ; cet exemple eft celui du tefticule, qui, comme tout le monde fait, eft formé de tuyaux blancs, cylindriques, différemment repliés. J'ai fourni le {e- cond, en démontrant dans un de mes Mémoires que l'uvée eft compolte de vaifleaux blancs, artériels & veineux, qui ne portent qu'une lymphe.

On auroit tort de penfer qu'une pareille compofition ne

* Je ne compte pasici la fubftance | ils n’ont du moins jamais été dé- méduliaire ou rayonnée du rein: on | montrés, & qu'ils fonc bien diffé- verra dans la fuite de ce Mémoire, | rens des fibres ou traits rayonnés que fi elle eft compolée.de tuyaux, | qu’on a pris pour eux.

s'étend

rat dttèts. 2.

re Cec AS

3 DIEShIS C1ENCE Ss. 1 497 Sétend pas à d’autres parties; j'ai donc cru pouvoir foupçonner Jégitimement que la fubflance propre de plufieurs vifcères, comme le foie, la rate, la partie corticale des reins, &c. fi diffé- rente de ce que les Anatomiftes prétendent y avoir obfervé; étoit compolée de quelque genre de vaiffeaux blancs, tels que les précédens. Pour éclaircir mes doutes, j'examinai attenti- Vement avec le fecours des verres lenticulaires, ces différentes parties, foit dans l’homme, foit dans les animaux : la plufpart ne m'ofirirent qu'une fubftince comme pulpeufe, blanche, un peu tranfparente, femblable à une concrétion qui mon- troit à fa furface quelques, élévations en manière. de petits flocons; mais je découvris dans la partie corticale de plufieurs reins humains & dans le foie des enfans de cinq ou fix ans, une infinité de particules blanches dans le rein, jaunâtres dans le foie, les unes irrégulièrement rondes, au moins en apparence, d'autres oblongues, d'une finefle extraordi.. haire. Ces particules fe reflembloient parfaitement dans ces deux organes , quoiqu'elles fuffent encore plus délices dans le foie que dans le rein : je crus d'abord que c'étoient des petites glandes qui avoient échappé jufqu'ici aux recherches des Anatomiftes; mais ce qui m'en fit bientôt douter, ce fut leur figure & la difproportion que je trouvai entre les glandes que je connoïflois & ces petits,corps; il yen avoit plufieurs milliers dans l'étendue d’un feul lobule du foie, qui n’a pas, à beaucoup près, une ligne en tout fens, & que tant d'Ana- tomiftes ont pris pour une glande fimple : je reftai feulement perfuadé que fa fubftance du foie & celle de la partie. corti- cale des reins étoient de la même nature, & compofées de li même manière.

J'examinai par hafard un foie humain dont couleur & la confiftance marquoient aflez les embarras qui s'y étoient faits: quelle fut ma furprife, Jorfque ces petites parties fe pré- fentèrent en manière d’anneaux ou demi-anneaux, formés en apparence par l'inflexion d'un filet ou vaifleau blanc extré-

mement délié, qui fembloit tracer fucceflivement plufieurs.

figures pareilles ! Frappé d'une ftruéture fi extraordinaire, Mém. 1749. RTE

L'Auteur étend cette compofition fur d'autres parties.

+

498 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE niais qui ne fe montroit pas affez clairement, je cherchaï dans un grand nombre d’autres foies ; j'en trouvai plus d'un, . & particulièrement celui d'un enfant de fix ans, j'aperçüs les mêmes objets, les mêmes inflexions, mais jamais avec ce degré de netteté qui emporte une conviction pleine & entière. Je tournai mes vües du côté des reins, j'avois aperçû les petits points femblables à ceux du foie; j'en trouvai plu- fieurs je crus reconnoître, quoiqu'un peu! confüfément, mais toûjours avec un nouveau plaïfw, les filets ou vaifieaux blancs qui s'étoient offerts dans le foie, & qui me paroiïfloient tracer, par leurs circonvolutions, les mêmes figures. Enfin jeus recours aux reins des fujets avancés en âge, ce fut alors que ma curiofité fut pleinement fatisfaite; je vis auffr nette- ment & auffi diftinétement qu'il ft poflible de l'imaginer, ün afflemblage merveïleux de petits tuyaux blancs, médio- crement tranfparens , pliés en anneaux, en demi-anneaux, en rofettes, & en mille autres manières; ces tuyaux , parfai- tement diftinéts des vaiffeaux fanguins, forment toute la fub- ftance corticale du rein. J'aï examiné depuis ce temps-là un grand nombre d'autres reins, tirés de fujets humains âgés d'environ cinquante ans; j'ai parcouru Îa furface & tous les recoins intérieurs de la fubftance corticale; cette compofition, ces vaiffeaux, ces circonvolutions, ces figures, qu'on ne peut fe lafler d'admirer, fe font préfentées avec un ordre & une netteté qu'on ne croira jamais à moins d'avoir le fait. Les particules rondes ou oblongues, que j'avois aperçües auparavant, ne font que les points les plus faillans-des petites courbures ou inflexions que ces tuyaux font fans cefle en fe pliant en mille manières, tandis que les points voifins, un peu plus enfoncés, fe dérobent à la vüe, & interrompent, pour ainfi dire, à tout inftant la continuité apparente de ces vaifleaux, que je nommerai dorénavant z4yaux blancs corticaux. L'exiftence de ces tuyaux, que j'ai vüs aufli très-diftinc- tement dans les reins de tous les oifeaux, ou peu s'en faut, que j'ai eu occafion d'examiner, étant bien conftatée, je vais

TE 7 MS A

DAS SEC LE NT Æ 56 9 donner une idée exacte de ceux qui forment la partie corticale du rein humain; cela m'engagera à parler auffr- des tuyaux de Ja partie rayannée ouufibreufe, qui n'ont certainement , j'ofe le-dire, janrais été démontrés jufqu'ici, & qui qi très-différens de ceux que Bellini, Ruyfch & tous les Ana- tomifles! croient avoir vüs ; je-parlerai enfuite du rein, & plus fuccinétement du foie des oïfeaux, je finirai par les cap- files atrabilaives; je crois avoir aperçû la mêmie fhudture; ntais pour rendre ma defcription plus claire, qu'il me {it permis de donner en deux mots une idée générale du rein.

Les reims font fimples dans plufieurs animaux ; comme dans Je mouton; alors Ja fubftance corticale, qu'on nomme auf glanduleufe, forme comme une écorce fort épaifle, qui occupe feulement 4 circonférence du:rein: La fubftance mé- dullaire ou/fibreufe, comme Bellini, Malpighi & tant d’Ana- tomifles la nomment, eft: profondément cachée: fous la précédente, & forme ‘tout d'intérieur ; «elle :eft: compote de traits En manièré di fibres, qui paroiffent fe terminér au baffin. 9

“Dans plufieurs autres animaux, Chaque rein eft compofé d'un’ noïmbre plus moins confidérable: de petits reins fiples; j'en comptai plus de cent: cmquante dans un ‘poiffon d'üne grandeur, d'une figure, &, qui plus eft, d'une niture extraordinaires que je difléquai if ya long-temps; & que je crois être le bœuf-marin d’Ariftote: dans l'ours, le dauphin & ‘dans le poiflon dont je:viens de parler; les petits reins fimples, couverts châcun leur membrane particulière, font feulement contigus les uns aux autres en formant une efpèce de grappes mais dans d’autres animaux, ‘eommele phoca ou veau-marin de la) Méditerranée, Xes petits reins ; dépourvûs d enveloppe paticulière, s'aniflentienfemble &c fe continuent par leur furface corticalé pour former un feul' tout : j'en ai compté plus, décent vingt dans le phoca.

#2) Dans ‘ces différens animaux} chaque rein fimple, ou cm pofant , foit contigu feulement, foit continu avec les autres, a fa partie corticale répandüelen abondance tout autour de fa

Rrr ij.

Plan pour la fuite de ce Mémoire.

Idée générale: du rein:

Le rein eft æompofe de plufieurs reins

fimples.

Chaque rem fimple divifé en petites py= ramides,

soo MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE fubftance intérieure, qu'on nommie médullaire & fibreufe; celle-ci, d'une couleur plus rouge, repréfente, non une pyra- mide, mais un globe plus moins régulier, qui dégénère en une papille, dont le bout fe termine dans un calice ou: branche du baffin du rein. La fubftance corticale environne tout le globe médullaire, à l'exception de l'endroit qui forme la papille.

Le rein humain eft compolé, comme Malpighi & Tifon le remarquent, de plufieurs petits reins 4, 2, C, D, £ (fig. r © 2), unis latéralement par leur furface corticale. Pour s'en faire une idée jufte, concevons d'abord environ vingt-trois reins fimples ou compofans 4, B, C, D,E, dont le globe médullaire L, plus ou moins aplati, ft tota- lement enfermé dans la fubftance corticale ; excepté à l'en droit de la papille ; imaginons enfuite que la plufpart de ces reins Aa, Ee, {ont mutilés, qu'on en a détaché latérale- ment un fegment par-une feétion menée de la furface du grand rein: vers le baffin, en forte que le grand. fegment foit le feuf qui refte; imaginons enfin que ces fegmens Aa, E e:sunifient deux à deux, trois à, trois par les furfaces coupées, en forteque les parties médullaires de ces-reins fegmens de reins, ne faflent qu'un corps. Je dis préfentement que le rein humain: éft formé de deux fortes de petits reins, les uns véritablement fimples & tels que nous les avons fup- pofés d’abord, les autres compofés en quelque manière, parce qu'ils réfultent de: l'union ,de deux ou: trois fegmens, en forte que les vingt-trois reins que nous avons fuppolés au com- mencement , {e:réduifent, à douze environ. ss

La furface extérieure du rein paroït compote d'une infinité de particules ou-gros points blinchetres S {f2. 1,2 & 2), irrégulièrement ronds, quarrés, pentagones, hexagones, d'en- viron deux cinquièmes de ligne de diamètre; ces points, qui ont fourni jufqu'ici tant. de faufles. idées aux Anato- miftes, font environnés tout autour, & diftingués les uns des autres, par des interftices rouges: ces interflices fe trouvent marqués en certains endroits par les. ramifcations d'une

DIERSUBNC 1,E NC E sa sor veines (fig. 3), qui tracent alors des polygones plus réguliers. Ce font ces points blancheâtres qui forment les préténdues glandes de quelques Anatomifles, & cette apparence de go- bules aplatis dont parle M. Morgagni : fouvent un point femble fe confondre avec un fecond, celui-ci avec un troi- fième, & ainfi en continuant; ils forment alors des fuites qui repréfentent différens corps, par exémple, de petits vers répliés, & ce font-là les Orevifima corpora vermium inffar contorta de Malpighi. J'ai obférvé que ces points ne font autre chofe que les bafes d'autant de petites pyramides Lan- cheâtres T, T, T (fig. 1 à 2; voyeg auff fig. 4 & 5) qui com- pofent par leur affemblage toute la fubftance du rein. Ces Pyramides vont de Ia circonférence de chaque rein fimple jufqu'à la papille, elles fe terminent en pointe, après avoir formé la fubftance corticale par leur portion la plus large (fig. r 7 2), & la fubftance médullaire par la portion plus étroite X; elles paroiffent auffi diftinguées entre elles fuivant leur longueur , par des interftices rouges.

Si l'on faifit un rein avec les deux mains, & qu'on s’ef- force de le féparer en deux, en allant de Ia circonférence vers le centre, la féparation, fuit ordinairement le fil des pyra- mides, c’eft ce qu'on appelle fendre Le rein ; fi l'on vient enfüite à jeter les yeux fur les bords de la fente, on voit le profil des pyramides fuivant toute leur longueur, avec les interftices rouges, moins marqués dans l'étendue de la partie corticale que dans celle de la partie médullaire /Woy. les fig. 1 &7 2): Je ne dois pas laiffer ignorer ici que la divifion dont je yiens de parler, n'eft pas üne féparation réelle, que ces pyra- mides apparentes ne font pas en effet féparées les unes des autres, que la fubftance qui les forme fe trouve auffi-bien daris l'étendue des traits rouges qui femblent les féparer, que dans. de, corps même la pyramide; en un mot, les vaifleaux fanguins ramaffés en plus grand nombre, forment dans ces endroits des traits ou des lignes rouges de cachent dans leur étendue la fubftance blanche qui en fait le fond: on aperçoit néanmoins avec le fecours des verres, cette fubftance à travers

Rrr ii

Adrerf. anar. II}, animadverf. XXXIV, pag. 71e

Prolongemens du corps fibreux dans 12 fubftance corticale,

502 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE les vaifleaux fanguins, für-tout dans l'étendue qui répond à’ la partie corticale du rein; je ne regarderai donc la diftinc- tion des pyramides que comme une divifion apparente, 8e comme un moyen qui aide à déterminer plus précifément a fituation des vaifieaux & des autres parties du rein. Nous avons réconpu dans chaque petit rein la partie cor- ticale & Îa partie médullaire; on regarde la première comme l'organe fecrétoire de urine, & les traits fibreux de la der- nière comme autant de tuyaux excrétoirées de cette liqueur. Dans cette idée, il étoit extrêmement important de s’aflurer fi les traits fibreux de Ja fubflance médullaire percent à tra- vers Ja fubflance corticale, comme Malpiohi le croit, ils pénètrent dans fon intérieur pour aller puifer l'urine dans fa fource : il paroît que les Anatomiftes n'ont réuflir à véri- fier le fait, & qu'ils ont été réduits à fuppoler ce qui con- venoit le mieux au fyflème qu'ils avoient embrafié, J'ai été plus heureux dans cette recherche; après avoir fendu le rein fuivant la diretion des pyramides , c'eft-à-dire, en allant la partie convèxe vers la partie concave, j'ai fouvent partir de la circonférence du globe médullaire, & de diftance en diftance, une infinité de petits prolongemens C, C, (fig: 4) de figure cylindrique, & d'un cinquième de ligné ou envi ron de diamètre, Ces prolongemens vont en manière de râyons vers la circonférence du rein, en perçant lépaifleur la fubftance corticale 4 À dans l'étendue d'une ligne &' demie ou deux lignes, & fe terminent à environ demi-ligne de diflance de {a furface ‘extérieure du rein. Nous appellerons loges corticales ces efpèces trous ou canaux D, D'qu'oi conçoit dans Ja fubflance corticale pour recevoir les’ proloi- gemens ; ces loges font terminées par une manière de voûte près de la furface du rein. | Mel: +: Les prolongemens dont nous parlons font évidemment uné continuation des fibres vraies ou faufles du corps médullairé, ils forment chacun#l'axe le ‘noyau d'une pyramide, en forte que le nombre des prolongemens & des pyramides ét précifément Je même. dis: édit vas

DES SCIENCES. CE Tout ce que j'ai dit jufqu'ici ne regarde que la divifion & le mélange que j'ai obfervés dans les parties du rein ; tâchons à préfent de développer fa compofition intime, qu'on ne peut découvrir que par le moyen des verres lenticulaires ou du microfcope, Quand on jette les yeux fur la furface extérieure du rein dépouillé de fes enveloppes, on voit que les points blan- . cheâtres qui font les bafes S, S / fig. >) des pyramides, font formés par f'aflemblage de petits tuyaux blancs, cylindriques, dont nous avons déjà parlé, & que nous avons nommés «or- ticaux; on voit aufli, quand le rein n'eft pas trop rouge, que les interftices qui femblent féparer ces mêmes bafes font également remplis de vaifleaux corticaux un peu moins preflés qu'ailleurs ; mais ces tuyaux fe préfentent encore plus diftinétement quand on a féparé le rein en deux avec les mains, & qu'on examine les furfaces qui tenoient enfemble: on découvre alors ces tuyaux #, G (fig. s) différenunent repliés, dans toute l'épaifieur de la fubftance corticale À À, dans les interftices rouges ; comme dans le corps des pyra- mides, & Ton voit avec la dernière netteté qu’ils forment toute l'étendue de cette fubftance, à l'exception des prolon- gemens À du corps médullaire ; ils fe roulent, fe plient, s'en- taflent les uns fur les autres, & forment de petites mafles de différente grandeur & figure : ces maffes fe fondent enfemble, en fe grouppant d'une manière agréable à la vüe, mais fans jamais former ni grains ni pelotons qui aient figure de glandes, ou qu'on ait jamais pris pour des glandes ; car ce ne font-1à ni celles de Malpighi, ni celles d'aucun autre Anatomifte. Ces vaifleaux font tous de même groffeur, fans aucune divi- fion : leur diamètre eft un peu plus confidérable que celui des nouveaux tuyaux blancs que j'ai aperçus aufli, mais beau- coup plus obfcurément, dans le foie ; il difere peu de celui des petits brins de coton non filé. J'ai fouvent des vaif- feaux fanguins bien plus déliés que les #yaux blancs corticaux , ils fe perdent dans les parois de ceux-ci. e

Us ne laïflent entre eux de vuide que ce qu'il faut pour

Defcription des tuyaux blancs corlicaux,

Découverte d'un parenchyme.

Etendue pro- digieufe des vaifleaux blancs corticaux.

504 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

loger les artères, les veines, & ce qui doit néceffairement fe trouver dans un tout compolé de cylindres différemment repliés & entaflés les uns fur les autres. age $

Les Anciens reconnoifloient dans les vifcères un paren- chyme qui devoit fervir de foûtien aux vaifleaux ; les Mo+ dernes ont répandu fur cette idée une efpèce de ridicule, cependant j'ofe en quelque forte la renouveler ici. Jai aperçû une fubftance extrèmement diaphane en manière de gelée ou de parenchyme, entre les tuyaux blancs corticaux ; elle remplit leurs interftices & ceux des petits vaiffeaux fanguins, elle fert de foûtien aux uns & aux autres: je l'ai trouvée de même dans les interftices des nouveaux vaifleaux que je décrirai en parlant de la fubftance médullaire du rein.

Ce n'eft pas feulement dans les reins que j'ai cette efpèce de parenchyme, je l'ai obfervé dans les petits efpaces que les ramifications des artères & des veines lymphatiques dont l'uvée eft formée, laiflent entre elles: il eft d’une grande tranfparence dans les yeux bleus. J'ai fait la même obfervation fur le tefticule; les tuyaux féminaires qui font incompara- blement plus gros que les précédens, font féparés par une efpèce de gelée qui leur fert de foûtien.

La longueur des vaifleaux blancs vermiculaires, en les con- cevant attachés bout à bout, a quelque chofe de furprenant; pour en donner une idée, je les confidère comme des tuyaux droits, placés parallèlement les uns à côté ou au deflus des autres, formant un paquet ou un faifceau à quatre faces, chacune d’une ligne en largeur: voyons d'abord le nombre des tuyaux qui entrent dans ce faifceau. Le diamètre d'un de ces tuyaux ne va pas à la foixantième partie d’une ligne, on pourroit par conféquent en placer foixante au moins les uns à côté des autres fur chaque face du faifceau; mais comme ils ne doivent pas être plus prefiés qu'ils le font naturelle- ment dans le rein, je me contente d'en mettre $0; ce qui fait, en quarrant ce nombre, 2$ 00 tuyaux pour le faifceau entier. Maintenant coupons ce faifceau pour ne lui laifler qu'une digne de longueur , on aura 2500 lignes pour Îa

longueur

DhesMM6 cc LE AN: C ENS. 505

Jongueur entière des tuyaux compris dans un faifceau quarré, d'une ligne en tout fens, ou d'une ligne cubique: nous pou- vons donc dire que les tuyaux corticaux qui occupent l'étendue d'une ligne cubique de la fubftance corticale, font, à peu de chofe près, 2 00 lignes, c'eft-à-dire, 208 pouces 4 lignes, ou 17 pieds 4 pouces 4 lignes.

En compenfant les excès par les défauts, & en retranchant de la fubftance corticale les prolongemens du corps médullaire, j'évalue l'étendue de cette même fubftance corticale autour du corps médullaire, en la prenant au milieu de fon épaifieur, à un pouce quarré pour chaque petit rein compofant; ce qui fait 144 lignes quarrées, & je mets lépaifieur moyenne de la fubftance corticale#à 2 lignes qui, étant multipliées par 144, donnent 288 lignes cubiques pour le folide de la fubftance corticale de chaque rein compofant, &. par conféquent 720000 lignes, ou bien 6oooo pouces, ou enfin. $000 pieds pour la longueur des tuyaux corticaux de ce mème rein qui n'eft que la douzième partie du grand rein; ainfi la longueur des tuyaux du rein entier fera de 6oooo pieds. t. Telle.efl la flruéture, de la partie prétendue glanduleufe du rein, deftinée à. féparer du fang le fluide urineux , car, on convient que cette fonction lui eft réfervée; mais il refte. encore un point important à éclaircir, favoir, comment ce fluide déjà féparé, pafle des tuyaux blancs corticaux dans le baffin du rein : comme il ne fauroit le faire fans parcourir. l'étendue du corps médullaire, je ne puisme difpenfer de: parler de celui-ci. Me ty

L'autorité de Carpi qui-avoit mèlé plufieurs erreurs à 14: Subfance découverte des papilles n’a pas peu contribué à faire mé- re connoitre pendant Jong-temps lufage du corps médullaire ;,. on croyoit. après lui -que-lurine fe fépare du fang des, Idées veines de la papille. Fallope,& Euftachi furent fe mettre au 5 Anciens deflus du préjugé; ils affurèrent que l'urine étoit conduite des Moderne; dans les, papilles & dans le baffin, par, un grand nombre. de, rigoles ou de canaux, creufés dans l'étendue de-la fubftance,:

Mén. 1 749 de 0 à

Réfutation de ces idées.

506 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE intérieure du rein: Jeur fentiment refta prefque dans l'oubli jufqu'au temps de Bellini & de Malpighi. On avoit avant eux les fibres radieufes qui paroiflent fi fenfiblement dans toutes fortes de reins; on connoïfloit parfaitement les trous de la papille qui laiflent échapper l'urine dans le baffin; mais ce qu'on ne favoit pas, & qu'on crut apprendre de ces deux célèbres Auteurs, c'eft que chaque fibre fe termine à J'ex- trémité de la papille ou dans le baffin, par un orifice diftinét, ou, ce qui eft fa même chofe, que chaque trou de papille perce dans l'intérieur d'une de ces fibres: voilà ce que Bellini & Malpighi aflurèrent avoir obfervé, d'où ils concurrent que ces fibres étoient autant de tuyaux urineux. Cette ob- fervation a été reçue des moderné comme un fait que tout le monde peut aifément vérifier, & comme un principe dont il n'eft pas permis de s'écarter; on nomme ces fibres tuyaux de Bellini.

On me pardonnera fi je ne reconnois point cette dé- monftration ; je n'ai jamais douté que le corps médullaire du rein ne püt être compofé de tuyaux urineux, mais je n'ai me perfuader que ces fibres fuffent elles-mêmes au- tant de tuyaux; elles n'ofirent, quand on les examine, ni cette régularité, ni cette figure cylindrique ou conique, ni cette proportion qui fait naître l'idée de vaiffeaux ; elles ne repréfentent autre chofe que des fibres ou des paquets de fibres charnues, comme Bellini & Malpighi en conv ennent, & il ny a point d'Anatomifte qui ne les prit pour telles, fi des réflexions particulières ne s'y oppoloient pas: je dis plus, l'obfervation de ces deux hommes célèbres s'éloigne abfolument de la vérité, les fibres dont nous parlons ne vont pas jufqu'à l'extrémité de la papille, les ouvertures qu'on voit à celle-ci ne font nullement les orifices de ces fibres. J'ai découvert que ces ouvertures ne font autre chofe que les extrémités de quelques tuyaux en cul-de-fac, qui ne remontent pas plus haut que la papille, tant s'en faut qu'ils règnent dans l'étendue des fibres du corps médullaire: c'eft ce dont je xendrai bien10t un compte plus exaét. Si l'on avoit fait

BMENSEMMNLÉE. LE NUC ENS UMN So feulement attention au petit nombre de irous de la papille, & à la quantité prodigieufe des fibies du corps médullaire, on n'auroit s'empêcher de voir que le fentiment reçû n’a pour lui qu'un air de vrai-femblance,

Ces motifs m'engagèrent il y a long-temps à faire de nouvelles recherches {ur la ftruéture du corps médullaire : j'examinai, à laide des verres lenticulaires & du microfcope, plufieurs reins, foit de homme, foit des animaux ; tout ce qui me frappa le plus, c'eft que les fibres ou prétendus tuyaux de Bellini qui paroiflent fimples quand on les confidère avec les yeux nus, étoient compofés de traits moindres de diffé- rente groffeur, mais qu'on auroit encore pris pluftôt pour des fibres folides que pour des vaiffeaux.

Je connoïflois alors la ftructure de la fubftance corticale, je ne l’avois vûe diftinétement que dans des fujets âgés d’envi- : ron 50 ans;ñfe crus donc qu’il étoit à propos d'y avoir recours pour éclaircir mes doutes fur le corps médullaire. Je ne me trompai pas ; à peine avois-je jeté les yeux armés d'un verre lenticulaire, fur la fubftance dont nous parlons, que j'en dé- couvris la compofition intime, les vaifleaux dont elle eft formée; je vis diftinétement que les traits ou fibres appa- rentes qui m'avoient paru fimples dans les autres reins que j'avois examinés, foit avec les yeux nus, foit avec le fecours des verres, étoient réellement autant de paquets com chacun d’un très-grand nombre de vaiffeaux, les uns rouges, les autres blancs : tous ces vaiffeaux font extrémement déliés, mais parfaitement diftinéts & détachés les uns des autres, au lieu que dans les reins que j'avois vüs auparavant, ces tuyaux étoient comme fondus enfemble pour former les fibres ou prétendus tuyaux de Bellini.

Les vaiffeaux rouges que j'aperçüs, font des vaiffeaux fan- guins que Ruyfch, qui ne les connoifloit pas, & plufieurs Anatomifles, qui ne les ont vüs que pleins d’injetion, ont pris pour des tuyaux urineux formés par la continuation dés rameaux artériels, & c'eft à quoi fe réduit la fameufe décou-

verte de Ruyfch fur la prétendue origine des vaifleaux urineux, S{f ïj

Nouvelles obfervations.

Erreur de Ruyfch;

Découverte

vrais tuyaux urincux.

Ils pénètrent intérieur de la fubftance certi- gale,

508 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

Les tuyaux blancs #7, 1, 1 (fig. 5) que j'ai vûs auf en grand nombre dans chaque paquet, font les vrais tuyaux excrétoires de l'urine, très-différens non feulement de ceux de Ruyfch, mais encore de ceux de Bellini. Les Anato- miftes n’ont, j'ofe le dire, jamais aperçû que de faux tuyaux urineux, dont la defcription & les figures ne conviennent en rien aux véritables : ceux-ci paroiflent d’abord exaétement cylindriques, il eft certain au moins qu'ils ne perdent rien de leur diamètre en avançant de la circonférence de chaque rein fimple vers la papille; ils font d'une finefle extraordinaire, & bien plus grande que celle des tuyaux blancs corticaux ; ils ont tous à peu près le même diamètre, non feulement dans une pyramide , dans un même rein fimple, maïs encore dans tous les petits reins qui forment le grand rein. |

Ïs vont en ferpentant continuellement de la circonférence du globe médullaire vers la papille, ils par@ifient fe re- dreffer: on en voit plufieurs, L, L, L, L, qui, s'étant un peu avancés, fe recourbent, reviennent fur leurs pas en remon- tant vers leur origine, & fe courbent de rechef pour reprendre bientôt leur chemin vers la papille. On en voit aufli quel- ques autres qui ayant marché deux à deux, trois à trois, en ferpentant à l'ordinaire, ne fe courbent pas feulement comme les précédens, mais encore fe plient, fe replient à plufieurs repüies, fe roulent fur eux-mêmes, en formant non précifé- ment des grains, mais de petites mafles A1, M7 aflez irrégu- lières, après quoi ils fe redreflent, s'étendent & fuivent en ferpentant comme auparavant, le chemin de la papille: je nommerai les uns & les autres, tuyaux ferpentans, tuyaux mé- dullaires, nouveaux tuyaux urineux.

Ce n'eft pas feulement dans l'étendue du corps médullaire que j'ai oblervé ces tuyaux, j'en ai découvert un grand nombre dans l'intérieur mème de la fubftance corticale. J'ai dit plus haut que j'avois aperçû quantité de traits fibreux ou de prolongemens C’, C (fig. 4 à $) du corps médullaire 2, qui la traverfent prefque jufqu'à fa furface extérieure, & que. chaque prolongement occupe une efpèce de loge fort étroite,

DUEXSMS NC 1 E Nc £ Su sog creufée, pour ainfi dire, dans l’épaifieur de la fubftance cor- ticale. J’avois employé inutilement le fecours des verres len- ticulaires pour connoître la vraie compofition de ces prolon- gemens, je n'y avois aperçü que des traits qui fe préfentent en manière de fibres droites; mais lorfque j'eus recours aux reins des fujets dont j'ai parlé, je vis très-neitement que tous ces traits étoient formés comme les précédens, c'eft-à- dire, d'un grand nombre de vaifleaux, les uns rouges ou fanguins, les autres blancs ou urineux.

Les vaifleaux blancs Æ qui compofent chaque prolongement, naiflent fans confufion & à quelque diftance l'un de l'autre, d'autant de points intérieurs de la voûte & de toute la hau- teur de la loge corticale D D; bien-tôt ils fe rapprochent, defcendent en ferpentant, & forment un faifceau de la grof- {eur d'une foie de porc. Ces tuyaux abandonnent enfuite la fubftance corticale pour fe joindre aux autres tuyaux urineux, avec lefquels ils parcourent en ferpentant l'étendue du corps médullaire, mais en régnant toûjours fuivant l'axe de {a pyra- mide; plufieurs reviennent fur leurs pas, & reprennent en- fuite leur première route; d’autres fe roulent fur eux-mêmes dans le corps médullaire, & s'étendent de rechef pour fuivre le chemin de la papille; enfin ils ne different des autres que par le lieu de leur origine & la place qu'ils occupent. Ce- pendant on doit toüjours diftinguer deux ordres de vaif- feaux ferpentans ; les uns plus longs Æ, qui naïflent de la profondeur de la fubftance corticale ; les autres plus courts Z Z qui viennent feulement de la furface intérieure de cette fub- flance, & qui rempliflent tous les efpaces que les premiers laiflent entre eux.

Au refte, les tuyaux ferpentans ne refflemblent nullement aux vaiffeaux blancs corticaux ; is n'en diflerent pas feulement par leur difpofition, leur direction, les figures qu'ils for- ment, mais encore par leur groffeur, leur couleur, leur fub- ftance, &c. ils font beaucoup plus déliés, moins blancs que les vaifleaux corticaux, & ïs ont quelque chofe de plus fec: & de plus maigre, Avant que de finir fhiftoire des tuyaux.

S ff ii

Origine des tuyaux icrpentans,

Jis fe réuniffent en avançant.

s10 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE ferpentans, il nous refte quelque chofe à dire de leur origine & de leur aboutiffement.

Quoique ces tuyaux foient très-diftinéts & aifés à fuivre, fur-tout du côté de la circonférence du rein, il eft cependant difcile de voir à nu leur première origine : elle eft preique toüjours cachée fous les mafles des nouveaux vaiffeaux cor- ticaux, qui préfentent comme des touffes faillantes qui cou- vrent cette origine; cependant j'ai aperçü vers le fond & vers les côtés des loges corticales, quelques vaifleaux ferpen- tans qui m'ont paru s'implanter tranfverfalement dans les corticaux. NH eft donc bien certain qu'ils ne viennent ni des prétendues glandes de Malpighi ou des autres Anatomifies, ni des vaiffeaux fanguins que Ruyfch, Boerhaave & ceux qui les ont fuivis, ont pris pour des tuyaux urineux : voyons à préfent la manière dont les tuyaux ferpentans fe terminent,

Quoique les traits ou fibres apparentes qu'on voit dans le corps médullaire de chaque petit rein, {fe rétrécifient con- tinuellement à melure qu'elles avancent vers le centre de ce corps & vers la papilie, il n'en eft pas ainfr des tuyaux ferpentans qui entrent dans leur compofition : je me fuis bien convaincu qu'ils ne perdent rien de leur diamètre; il m'a même paru, après plufieurs examens, que ce diamètre eft un peu plus confidérable près de la papille; cependant ils y occupent tous enfemble un efpace dix, douze & quinze fois moindre que vers la circonférence du corps médullaire; c'eft que leur nombre diminue à proportion ; il {uffit même, pour s'en convaincre, de comparer la quantité des tuyaux qu'on voit vers la bafe d'une pyramide, avec la quantité de ceux qui {e préfentent près de fa pointe; la diflérence en eft frappante.

On inférera évidemment de-à que les tuyaux ferpentans fe réuniffent, à la manière des veines, en avançant vers fa papille : j'ai clairement le fait dans les oifeaux ; ce qu'il y a de fingulier, c'eft que dans l’homme les troncs ne font guère plus gros que les branches.

Bellini & les Anatomiftes modernes ont cru jufqu'ici que

DES SCIENCES. s1r fes trous qu'on voit au bout de la papille, ne font que les ouvertures de leurs prétendus tuyaux urineux: mais ce ne font pas même celles des vrais tuyaux que je viens de dé- crire, ils fe terminent avant que d'atteindre l'extrémité de la papille. J'ai obfervé dans celle-ei d'autres tuyaux en cul- de-fac qui forment ces ouvertures, je les nommerai vaiffleaux pepillaires ; ils font incomparablement plus gros & moins nombreux que les troncs mêmes des tuyaux ferpentans. Dans le cheval, ils reçoivent aïfément une foie de fanglier, & même un petit flilet; mais la foie & de flilet qui marchent d'abord fort aifément, font arrêtés tout d'un coup lorfqu'ils ont pénétré à 4, 6 & 9 lignes, car la profondeur de ces tuyaux eft différente : j'examinai il yafix ans, un rein humain dont quelques papilles étoient chargées de grains de gravier: les uns étoient légèrement adhérens à l'extrémité de la papille, les autres bouchoïent partie des orifices des vaiffeaux Papillaires que je trouvai fort dilatés : j’ôtai le gravier & j'introduifis dans “cinq ou fix de ces tuyaux, ‘des oies de Porc; je reconnus qu'ils n'avoient qu'environ uné ligne & demie de profondeur,

Quand on auroit pris chaque petite pyramide du rein pour un feul tuyau urineux, comme Bellini femble l'avoir fait, il feroit encore étonnant qu'on eût regarder les trous la papill comme les ouvertures particulières de ces différens tuyaux ; le nombre dés pyramides de chuque petit rein va à plus de fépt ou huit cens, & celui des ouvertures de la papille, fort aifées à compiér, à dix-huit ou vingt, plus ou moins. Que penfera-t-on donc fi l'on fait attention à la quantité réelle des vrais tuyaux urineux ? il fufhroit, pour sen faire une idée, d'ex:miner un (ul prolongement C (F8: 5 ) du corps m‘dullaire, Je veux dire, un feul des faif- ceaux qui naïflent de l'intérieur de la fubftince corticile, & qui occupent les loges dont j'ai parlé. On a que ces faif- ceux n'ont guère qu'un cinquième de liyne de diamètre, J'ai fouvent compté dix-huit tuyaux ferpentans l'un à côté de l'autre dans l'étendue de ce diimètre, fans parler d’un grand nombre de vailleaux fanguins qui trouvoient encore à

Defcription des vaiffeaux - papillaires.

Nombre des pyramides & des vaiffeaux ferpentans,

Arrangement fymmétrique des différentes parties dont on a parlé,

12 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

sy placer. Or la feétion du faifceau étant circulaire, pour avoir le nombre des tuyaux qu'il comprend, je quarre le cercle fuivant la proportion communément reçûe entre le diamètre & Ja circonférence, qui eft celle de 7 à 22, & j'ai par le calcul, 255$ tuyauxferpentans bien diflinéts pour cha- que faifceau de la grofféur d'une foie de porc ou environ; mais pour mieux juger de la proportion immenle qu'il y a entre le nombre total des tuyaux ferpentans de chaque petit rein & le nombre des ouvertures de fa papille, prenons les premiers à leur origine, ou fort près de la furface intérieure de la fubftance corticale ; j'évalue à peu près cette furface à un pouce quarré. On peut donc confidérer tous les tuyaux ferpentans de chaque petit rein comme formant un faifceau quarré, ou dont la feétion eft un quarré d’un pouce fur cha- ue côté; mais nous avons. que dix-huit de ces tuyaux placés lun à côté de l'autre, n'occupent en largeur, de Îa manière qu'ils font difpofés dans le rein, que l'étendue d’un cinquième de ligne ; il y aura donc mille quatre-vingts tuyauxs

lun à côté de l'autre fur chaque face du faifceau quarré dont . nous parlons, ce qui donne un million cent foixante-fix mille quatre cens pour. le, nombre total des tuyaux compris dans ce faifceau, c'eft-à-dire, dans chaque petit rein; mais quand on ne confidèreroit que les troncs des tuyaux urineux près de la papille, leur nombre fe trouve beaucoup moindre, il feroit fort ailé de faire voir que ce nombre va encore à plufieurs milliers, tandis que la papille n'a que dix-huit ou vingt trous. Maintenant, pour fe faire une idée de la difpofition &, de la fymmétrie des différentes parties dont nous avons parlé, il faut confidérer un rein fendu /fgg. r & $), en allant de fa furface vers les papilles. On voit d'abord dans F'épaifeur de la partie corticale À À (fig. 5) le profil des pyramides des loges corticales D, D & des prolongemiens C, C du corps médullaire qui les rempliflent: les /oges corticales, placées lune à côté de l'autre, féparées par des portions Æ, Æ de fubflance corticale, & réduites au fimple profil, repréfentent alors les : arches

| ï ; 4

DUELSMBIC 1 EN CES S13 arches d'un pont dont la voûte s'élève prefque juiqu'à fa furface extérieure du rein, & dont les piles s'appuient {ur Je globe médullaire. On découvre en même temps l'affem- blage des vaiffeaux corticaux Æ, G, dont les grouppes fail- lans femblent décorer les piles & le ceintre des arches: on voit les faïfceaux #7, A des tuyaux ferpentans qui rem- pliffent les /ges, defcendent vers le ‘corps médullaire, & enfuite vers la papille; on voit enfin les tuyaux Z, Z qui naif- fant du bas des piles, garniflent les intervalles des faifceaux précédens, & fuivent la même route : tout cela forme une ordonnance & une variété d’objets furprenantes, fur-tout fi lon y joint appareil des vaifleaux fanguins bien injetés.

Je priai il y a long-temps M. de Juffieu le cadet, de cette Académie , d'examiner des reins humains que je lui pré- fentai fans lui rien dire, & fans qu'il pût avoir jamais rien appris de ce que j'avois obfervé; à peine y eut-il jeté les yeux armés d’une lentille, qu’il aperçût diftinétement la com- pofition merveilleufe du rein, cet affemblage de vaiffeaux cor- ticaux avec leurs anneaux, leurs rofettes, leurs grouppes, &c. il vit de même les loges corticales & les faifceaux des tuyaux ferpentans qui les rempliffent ; il vit enfin les. inflexions L, L, L, L & les petites mafles #7, M que ces vaifleaux forment en fe pliant & fe repliant dans le corps médullaire. Voilà ce qu'il ne pouvoit fe lafler d'admirer, qu'il m'expli- qua de la manière la plus exacte, & dont il traça le deflein avec la plume avant qu'il eût appris de moi 1e moindre de ces faits : il y reconnut même le parenchyme, qui m'avoit pau plus difficile à diftinguer à caufe de fa grande tranf parence. |

Telle eft la compofition de l'organe fecrétoire & ‘excré- toire du fluide urineux : des vaifleaux fanguins très-vifibles, quoique plus déliés encore que les tuyaux*dont on vient de parler, fe terminent dans les parois des vaiffeaux Dlancs corti- caux, & leur fourniflent ce fluide qui elt enfuite.obligé de fuivre leurs longs détours avant que de paffer dans les zyaux ferpentans qui le conduifent dans les vaiffeaux papillaires.

Mém, 1749: SULUL

s14 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE A nn Comme les vaifleaux que j'ai décrits jufqu'ici ne paroif- médullares {ent pas toüjours dans les reins humains, je les ai cherchés du Pie des dans ceux de plufieurs animaux, tels que le chien, le maki +, quadrupèdes. Es A Efiée le mouton, le cochon, le bœuf, le cheval à &c; j'ai dans de Singe, quelques-uns de légères traces des vaiffeaux corticaux , & je les ai aperçus nettement dans les reins du cheval, après les avoir laiflé mortifier & amollir pendant plufieurs jours, & enfuite fait macérer; mais ces vaifieaux ne {e font fait bien diftinguer qu'à la lumière du foleil.

Dans plufieurs des animaux que j'ai nommés, les tuyaux ferpentans ne paroïfloient pas, on ne voyoit que les traits en manière de fibres qui compofent le corps méaullaire ; mais dans le cheval, ceux qui rempliffent les /oges corticales fe font montrés diflinétement. J'ai encore aperçu les vaifleaux ferpentans dans le corps médullaire du rein du cochon & du mouton; ils vont, Conime ceux de l'homme, de la circon- férence du rein vers la papille, en faifant plufieurs ferpentins ; quelques-uns reviennent aufli fur leurs pas, d’autres fe roulent différemment, & reprennent enfuite leur première route pour fe rendre dans les vaiffeaux papillaires, qui paroifient aflez diftinétement dans prelque tous ces animaux. “à

Vaifeaux Les vaiffeaux corticaux 8 médullaires font bien ue aifés à a+ apercevoir dans les oifeaux, pourvü qu'on les examine après les du ren avoir Jaiflé mortifier pendant quelques jours, & un peu avant ds oifaux. Que Jes entrailles commencent à fe corrompre; la matière grof- fière de leur urine prend corps, fe fige, blanchit de plus en

plus, & rend ces vaifleaux beaucoup plus apparens.

Je les ai vüs très-nettement dans le poulet, la perdrix,

* En luin, Ja griveb, Falouette, le ferin, & en général dans touslés Al oifeaux je les ai cherchés avec la précaution dont j'ai # parlé. L'appareil en eft fi curieux & fi propre à confirmer ce que j'ai dit la ftruéture du rein humain, que je ne

puis me difpenfer d'entrer dans quelque détail 1à-defus. . Les oifeaux ont deux reins fort longs & fort larges, placés entre l'extrémité inférieure des poumons & le croupion ; üls font aplatis , & l’une des faces, que je nomme antérieure, eft

DÉEUSIMNNC I E NiC EYS sis tournée du côté du ventre, l'autre du côté du dos. La partie fupérieure & la partie inférieure du rein, plus confidérables que le milieu, repréfentent chacune un lobe enchäffé du côté du dos, dans une cavité offeufe.

L'uretère À B (fig. 7), qui tient lieu de baflin, fort ordi- nairement du lobe fupérieur du rein, defcend le long de Ia face antérieure de cet organe, & Îa partage en deux portions inéoales: il eft formé d'abord par la réunion de plufieurs bran- ches, les unes plus groffes €, C, les autres moindres c, c, qui viennent du dedans du lobe fupérieur.

A mefure que luretère defcend, il reçoit de nouvelles bran- ches de différente groffeur D, D; d, d, & particulièrement une très-confidérable Æ’, qui eft prefque la feule qui revienne du lobe inférieur, au moins dans la perdrix, le pigeon & plufieurs autres oifeaux. Les branches les plus petites c, c; d, d, que je nommerai fimplement rameaux, reçoivent les faifceaux des tuyaux urineux , & peuvent être, par cette raifon, comparées aux calices du rein humain; mais les branches plus confidé- rables C, C; D, D, E, jettent, ou pluftôt reçoivent des branches moindres e, e, e, e, qui font le même office que les rameaux précédens ; elles tiennent lieu de calices, je les nommérai aufli rameaux.

La furface du rein des oifeaux eft -un véritable tableau changeant; tantôt elle paroît un aflemblage de lobules à plu- fieurs faces à peu près comme l'extérieur du poumon, tantôt elle repréfente, mais d'une manière exatte, les éminences & les circonvolutions de la furface du cerveau. Le premier cas arrive ordinairement lorfqu'on l'examine avec les yeux nus; ou avéc des verres de 6, 7 & 8 pouces de foyer, mais fur-tout lorfque les vaifleaux fangüins font vuides & que le rein eft un peu pâle; le fecond cas eft plus ordinaire quand on fe fert de verres de quelques lignes feulement de foyer, mais principalement lorfque les reins confervent encore leur couleur rouge. La manière dont:les vaifleaux fanguins fe

o es û diftribuent, n’a pas moins de part à cette refflemblance que la figure des interftices qui diflinguéent ces éminencés. ? 27 Ttti

LI »

L'uretcre & fes rameaux.

Surface du rein

Vaifleaux corticaux,

516 MÉMOIRES Dr L'ACADÉMIE ROYALE La divifion dont je viens de parler, ne fe borne pas à la furface du rein : on trouve dans l'intérieur un grand nombre de parties ou d'éminences figurées & diftinguées de même, & c'eft ce que le rein des oïfeaux a encore de commun avec le cerveau humain : voyons maintenant quelle eft fa compo- fition intime.

Les nouveaux vaifleaux que j'ai obfervés dans les reins des oïifeaux, font de deux fortes, comme dans l’homme ; les vaif- feaux corticaux , différemment repliés & entaflés les uns fur

les autres, & les vaifleaux médulläires difpolés par Jaifceaux,

fans faire que de légères inflexions. Les uns & les autres pa- roiflent ordinairement d'un blanc de lait, à [a manière des vaifleaux chyleux.

Les vaifleaux corticaux C, C (fig. €) font des tuyaux extrémement fins, cylindriques, qui fe plient, fe roulent en mille manières, mais différemment de ceux du rein humain : ils font dans un nombre prodigieux, fort ferrés les uns contre les autres ; ils ne laïflent d'autre vuide que ce qu'il faut pour loger les vaifleaux fanguins & une très-petite quantité de parenchyme tranfparent : ce font eux qui forment toutes les éminences , foit extérieures, foit intérieures du rein , à l’ex- ception d'un faifceau de tuyaux médullaires, qui, dans quel- ques oifeaux, comme la perdrix, fait le soyau de chaque éminence.

Dans la grive, dans l'alouette, &c. on les voit difpofés par sraluées parallèles qui traverfent les fommités des émi- nences ou Jobules qu'on remarque à la furface du rein; ces trainées, diftinguées par des petits vaifleaux fanguins, font un effet extrêmement agréable à la vüe, au jugement de M. de Juflieu le cadet, qui les a examinées avec moi.

On peut aifément fe tromper fur le nombre de ces vai

feaux; fouvent ils paroiffent laifler entre eux d’affez grands

interftices, c'eft qu'on ne voit alors que quelques tuyaux, fans doute parce que la matière blanche qui les rend fi fenfibles ne s'eft pas arrêtée dans les autres. Mais fi on parcourt fucceffivement les différentes parties de la furface d'un même

LA PNFENSIMER C: L'E NOCtEMNSAOELM, rx rein, ou qu'on réitère cette recherche fur d'autres oïfeaux de la même efpèce, on ne manquera pas d'en trouver quel- ques-uns lon verra tous ces intervalles remplis de vail- {eaux corticaux. Les oifeaux cela nreft arrivé le plus communément, font la grive & laloueite, quelquefois la perdrix & la poularde; cependant j'ai des reins d'alouette qui ne montroient qu'un feul vaifleau pôur chaque rrafnée, au lieu du grand nombre qui s'y préfente ordinairement. Lorfque la furface ou une partie de la furface du rein eft parfaitement remplie de vaifleaux corticaux, ils paroifient tous. extrêmement fins, de inème grofleur, fans divifion, & avec mille circonvolutions, mais ils cachent des petits troncs dans lefquels ils vont fe rendre à la manière des veines. Ces petits troncs extrémement nombreux font moins de cir- convolutions ; ils grofliffent peu à peu à mefure qu'ils re- çoivent de nouveaux rameaux, & fe terminent enfin dans les tuyaux médullaires qui n’en font qu'une continuation. Les petits #roucs corticaux, & quelques-uns des rameaux qui vont s'y rendre, paroiflent fouvent lorfque la furface du rein éft moins remplie, lorfque les vaifleaux les plus fuperficiels ne fe montrent pas , lorfqu'on partage le rein en allant de la circonférence vers le centre, & qu'on jette les yeux fur cette Jection. à Nous avons déjà dit que les vaifleaux #édullaires font di£ polés par faifceaux ( voy. la fig. 7 ): la fubftance intérieure du rein en*eft prefque entièrement formée ; chaque faifceau particulier répond à une éminence corticale , & reçoit les tuyaux ou les petits sroncs des tuyaux crticaux dont elle eft compofée. Dans quelques oifeaux , comme la perdrix , les faifceaux particuliers forment chacun l'axe ou le noyau d’une éminence , au lieu que dañs d’autres oifeaux le fufceau ne paroït qu'au deflous de l'éminence, comme le tronc d'un arbre au deffous de la toufle. Les faifceaux particuliers F, F, F;: G,G,G, qui reviennent d’un certain nombre d'éminences, fe rapprochent les uns dés autres en s’avançant vers l'inté- rieur du rein, & vont former un fafeau commun fou g,

Tttiij

Vaïffeaux médullaires

Offervations {ur le foie des oïifcaux.

518 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE qui fe termine dans Jun des rameaux de l'uretèré, qui tien- nent lieu de calces,

Après que les faifceaux particuliers*ont été formés par la réunion des vaifleaux corticaux , ils fe rétrécifient en manière de cone, à mefure qu'ils s'éloignent des éminences corticales, il en eft de même des faifceaux communs.

Les tuyaux médullaires font d'abord fort nombreux & fort fms, moins cependant que les tuyaux corticaux , & c'elt en quoi ils difierent de ceux du rein humain; mais ils fe réuniflent en avançant, pour former des branches plus confi- dérables , de manière que leur nombre diminue, & que leur calibre augmente à mefure qu'ils approchent des rameaux c,c; d, d ded'uretère. Tout cela fe montre avec une extrème netteté dans le rein des’ oifexux , & juftifie parfaitement ce que nous avons dit de la réunion des vaiffeaux médullaires du rein humain.

Le faifceau commun, qu'on peut comparer à l1 papille d'un rein fimple, ne finit pas comme dans les autres ani- maux ; les tuyaux qui le compofent, vont former en fe réuniffant , un de ces rameaux de Yuretère qui tiennent lieu de calices. Le rameau de Yuretère ne reçoit pas cependant autant de vaifleaux médullaires diftinéts & féparés qu'on en voit dans le faifceau commun; ces vaifleaux, quoique nom. breux, prêts à fe terminer, fe réduifent tout d'un coup & pour ainfi dire dans fe même inftant à quelques petits troncs, dont le nombre ne furpafle pas celui des faïfceaux particuliers qui compofent le faifceau commun ; ces troncs font fi peu de chemin avant que d'atteindre le rameau de uretère, qu'on ne les aperçoit qu'en y faifant une attention particulière: je crois pouvoir les comparer aux vaifeaux papillaires des autres reins. On voit à préfent l'analogie qu'il y a entre le rein des oïfeaux & le rein humain.

Nous avons déjà jugé que la compofition vafculeufe dont on a parlé devoit s'étendre à d’autres parties, & qu'elle fe montroit, quoique obfcurément , dans le foie humain ; les comparaifons que j'ai faites entre les reins & le foie des oifeaux, confirment beaucoup cette idée.

QUE SMS: C LE 'N CIE s19 Quand on examine les reins des oïifeaux, comme ceux de la grive, de l'alouette , tandis que les vaifleaux corticaux font le mieux remplis, bien fouvent on n'aperçoit qu'une infnité de particules blancheätres , irrégulièrement rondes ou oblongues en apparence : cela arrive lorfque le verre n’eft pas net , lorfqu'il eft d'un trop long foyer, lorfque le jour eft trop fombre, &c. é Le foie des oifeaux, par exemple, du canard, du pigeon, de la grive, de l'alouette, prend ordinairement dans plufieurs endroits, quelqués jours après qu’on les à tués, une couleur blancheätre ou jaunâtre, cachée auparavant par un grand nombre de petits vaifleaux fanguins : fi lon parcourt alors ces endroïts blancheîtres avec les yeux armés d'un verre fen- ticulaire, on voit le foie divifé en lobules qui paroiffent eux-mêmes formés d'une infmité de particules très-fmes , qui reffemblent parfaitement à celles que le rein fait aper- cevoir dans les circonftances dont je viens de parler: cette reflemblance va fi loin, qu'en examinant avec le fecours des verres, des morceaux du foie & des reins de la grive ou de l'alouette, il m'eft arrivé quelquefois de prendre les uns pour les autres. Il eft vrai qu'en confidérant le rein avec Fat- tention néceflaire, on découvre évidemment que ces particules forment des cylindres ou des vaïfleaux, au lieu que celles du foie paroifient interrompues & détachées les unes des autres; mais la même chofe arrive au rein lorfque la matière blanche de urine fe réduit en petits grumeleaux qui inter- rompent la continuité apparente du tuyau, comme je l'ai très-fouvent dans les oïfeaux dont je parle: ce cas eft fans doute plus ordinaire au foie & à la bile, & c'eft ce qui produit la difficulté de voir nettement Îles petits tuyaux dont je crois le foie formé, cependant j'ai quelquefois apercû , fur-tout dans le foie de l'alouette, plufieurs de ces particules. qui repréfentoient des cylindres fort courts, pliés en demi- cercle: j'en ai d’autres & en très-grand nombre, difpofées de manière que leur aflemblage paroïfloit former un tas de vaifleaux cylindriques, égaux en diamètre, & difpolés comme ceux du rein humain.

Obfervations fur les capfules atrabilaires,

520 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

La compofition des capfules atrabilaires me paroït à peu près la même : elles ont une fubflance corticale de couleur jaune ou citrine, & une fubftance intérieure , femblable à une gelée rougeñtre dans les enfans , & de différente cou- leur dans les autres fujets. La fubftance corticale eft formée de lobules qui fe divifent eux-mêmes en lobules moindres, diflingués les uns des autres par les ramifications des vaif- feaux fanguins , & que des Anatomiftes ont pris mal à pro- pos pour des glandes.

J'ai examiné , à F'aide des verres lenticulaires, les capfules atrabilaires de l'homme, mais fur-tout des enfans! & celles des quadrupèdes ; jai jeté les yeux , tantôt fur la furface extérieure , tantôt fur la furface intérieure de la partie cor- ticale : j'ai prefque toüjours une infinité de petites parti- cules entaffées les unes fur les autres ; qui paroïffent former toute la fubftance de chaque lobule ; ces: particules reffem- blent parfaitement à celles que j'ai obfervées dans le foie de l'homme & des oifeaux : ce ne font certainement point des glandes ; elles different totalement de celles qu'on voit ailleurs, & je puis bien affurer qu'en examinfint dans des enfans la furface intérieure de la partie corticale , il nr'eft arrivé quelquefois de voir comme plufieurs vaifleaux cylindriques différemment repliés & entaflés les uns fur les autres. J'ai été encore plus frappé de cette reffemblance , en examinant la furface extérieure de la capfule d'un maki; l'imagination n'avoit aucune part à ce que Je voyois.

On peut juger par tout ce qui a été dit, que la compo- fition des vifcères nommés glanduleux a été peu connue, & peut-être moins depuis quelque temps qu'elle ne l'étoit à da fm du fiècle paffé. L'idée de vaiffeaux fanguins, pouffée trop loin par M. Ruyfch, qui en avoit fait pendant foixante ans fa principale étude, a fait prefque oublier aux Modernes celle

- d'une fubftance particulière qui conftitue toutes les parties du

corps humain; c'eft ce qui a fufpendu les recherches capables de perfectionner ce genre d'Anatomie, fi propre à fournir les fondemens les plus folides de l'économie animale & de l'art de guérir. J'expoferai

DIELSSNC EN C E 5. s21

- J'expoferai dans un autre Mémoire la diftribution des petits

vaiffeaux fanguins du rein, qui forment un appareil extrême-

ment fmgulier & curieux: on verra alors origine des méprifes

de Malpighi & de Ruyfch; on y verra auffi ce qui a donné

Jieu à quelques Auteurs de réunir les deux fyftèmes, de recon- noître l'une & l'autre compolition dans le rein,

Iaflruétion fur les moyens de vérifier les principaux fairs rapportés dans ce Mémoire.

I n'y a point d'homme verfé dans la belle Anatomie, qui ignore qu'en fait de découvertes fubtiles ou qui ont befoin du fecours du microfcope, on ne vient guère à bout de les vérifier qu'après plufieurs tentatives réitérées; on fait même que cela demande qu'on foit exercé dans ce genre d'Anatomie & dans les obfervations wicrofcopiques, c'eft ce qui m'a dé- terminé à joindre ici cette n/fruction.

1.” Si l'on veut s’affurer que les parties qui paroiffent les plus colorées, comme la ratte, le foie, &c. ont une fub- ftance blanche qui ne prend jamais naturellement aucune teinte de rouge, on examinera ces parties au grand jour ou à fa lumière du foleil, tandis qu'elles ont encore toute leur fraî-

cheur: les fujets d’un âge peu avancé, qui n’ont pas été épuifés par les maladies, & les verres de quatre ou cinq lignes de foyer, font ceux qui conviennent le mieux pour cette recherche.

2. Si on veut voir Fétendue & les interftices rouges des petites pyramides dont j'ai dit /page 500) que le rein eft formé, on choiïlira des reins récens & bien colorés, comme font ordinairement ceux des jeunes fujets; on les fendra avec les mains fuivant la direction des pyramides, ceft-à-dire, en allant de la convexité vers Île finus du rein (page 501) & on regardera- les furfaces auparavant unies, avec {es yeux nus ou armés de verres les plus communs.

*3.° Si lon veut confidérer les bafes des pyramides, la figure ; la circonfcription de ces bafes, les ramifications vei- neufes qui règnent dans une partie de leurs interftices /page oo & fig. 3), on fera choix des mêmes reins; on les

Méên, 1749: + Vuu

522 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE dépouillera de leurs membranes, & l’on parcourra fucceffive- ment les différens endroits de leur furface pour trouver les variétés qu'il y a à cet égard; tout cela fe préfente auffr, mais moins clairement, dans les reins pris au hafard, pourvû qu’ils ne foient pas trop pâles & qu'ils foient encore aflez frais: on n'a pas befoin d’autres fecours que de ceux que j'ai indi- qués dans Farticle ci-deflus. :

Pour voir la fetion tranfverfale de ces pyramides, il faut couper le rein par tranches, parallèlement à fa furface extérieure; mais les reims doivent être bien choïifis, bien frais & bien colorés, parce que les pyramides font terminées moins exactement dans l'intérieur du rein, que les inter{- tices rouges qui doivent régner tout autour, font moins marqués & plus irréguliers.

5 Pour voir les prolongemens /C C fs. 4 & 5) du corps médulhire, qui traverfent prefque toute l'épaiffeur de la fubftance corticale /page $ o 2), il feroit inutile de couper le rein fuivant la direction des pyramides ; la feétion laiffe un wni qui empécheroit de reconnoître les prolongemens mélés avec la fubftance vraiment corticale, II faut donc féndre le rein avec les mains (page $ o 1) fuivant cette même di- rection, foit en allant de la convexité du rein vers le Jinus, foit en allant du finus vers la convexité. Mais par malheur, la féparation dans la plufpart des reins fuit les interftices, & par conféquent l'extérieur des pyramides, de manière que les prolongemens qui en forment feulement le noyau, fe F4 encore enfevelis dans la fubftance corticale, fans qu'il foit po fible de les voir; cependant il arrive fouvent, fur-tout quand ce font les reins des fujets avancés en âge, & en particulier quand les tuyaux qui les compofent font bien apparens ; if arrive, dis-je, que la féparation fuit l'intérieur des pyramides, & alors les prolongemens font à découvert, au moins dans cette partie de leur étendue qui eff la moins éloignée du globe médullaire ; c'eft ce qu'on reconnoîtra aïfément, parce qu'on verra les oges corticales D, D (fig. 4 à 5) en forme de fllons ou rainures, au fond defquelles on apercevra les

DES SCIENCES. s23} prolengemens féparés les uns des autres comme par des colonnes £, E, de fubftance vraiment corticale, plus faïllantes que les prolongemens : les verres de fix ou fept lignes de foyer font les plus convenables en cette occafion.

6. Si lon veut vérifier ce que j'ai dit de Ia ftruéture de la fubftance corticale du rein humain (page 49 8 $ 0 3), il eft néceffaire de favoir qu'elle varie beaucoup en appa- rence, fuivant les différens reins, quoiqu'on f'examine de la mème manière & avec les mêmes verres.

Dans les uns, & ce n'eft pas le plus petit nombre, Ja fubftance corticale ne fait paroitre qu'une concrétion blanche un peu tranfparente, avec quelques inégalités, fans aucune organifation évidente.

On voit dans d’autres reins une infinité de petits points {olides dont on croiroit que la fubftance corticale eft formée; cela m'a paru affez ordinaire dans les reins des fujets tout-à- fait jeunes.

Enfin il y a des reins l'on découvre diftinétement les vaifleaux corticaux; c'eft ce que j'ai dans la plufpart des fujets âgés de quarante-cinq à cinquante & foixante ans, fur- tout quand les reins étoient pâles & mous, comme il arrive fouvent après de longues maladies.

On examinera ces reins au grand jour, ou pluftôt à la lumière du foleil, avec une lentille de cinq ou fix lignes de foyer. Quelquefois ces vaiffeaux paroiffent à la furface du rein après lavoir dépouillé de fes membranes, mais on les voit mieux quand on a fendu le rein avec les mains, & qu'on jette les yeux fur 'épaifieur de fa fubflance corticale, principalement fur la portion voifine du corps médullaire, les tuyaux corticaux font un peu moins preffés. Après les avoir cherchés de cette manière dans deux ou trois endroits du rein, fi l’on ne peut pas les découvrir, on gardera ce rein pendant plufieurs jours, on le fera enfuite macérer pendant deux ou trois; on le fendra de nouveau, ou l'on rafraichira ancienne fente sil y en a quelqu'une, & l'on examinera derechef la. fubftance corticale avec toutes les précautions

Vuui

524 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE dont j'ai parlé. Je ne donne pas ces moyens pour infaillibles, mais ils n'ont réuffi plufieurs fois dans les recherches que j'ai faites fur les reins, foit de l'homme, foit du cheval: fi malgré cela les vaifleaux corticaux ne fe préfentent pas net- tement, il faut s'en procurer d’autres ; on trouve toüjours fur le nombre plufieurs reins humains ces tuyaux fe font voir très-diftinétement dans quelques endroits, & fouvent dans toute l'étendue de la fubflance corticale, avec leurs courbures, leurs circonvolutions, le parenchyme qui les foùû- tient, & tout ce qu'on en a rapporté: on obfervera qu'ils ne paroiffent guère plus ni guère moins nettement dans Fun des deux reins que dans l'autre.

7. Si lon veut voir les tuyaux médullaires , & en par- ticulier ceux qui compofent les prolongemens /pages 508, 5sog, fig 5); faut choifir les mêmes reins, & ufer des mêmes précautions que s'il s'agifloit des tuyaux corticaux. Remarquons ici que dans le cheval, les colonnes corticales qui féparent les faïfceaux des tuyaux ferpentans font fort étroites, & que dans le bœuf, les inflexions des tuyaux médullaires font beaucoup plus nombreufes & plus remarquables.

8.° J'ai aflez expliqué dans le Mémoire /page $ 14 à Juivantes ) la façon de s'y prendre pour voir aifément les tuyaux, foit corticaux, foit médullaires du rein des oïfeaux ; comme l'appareil en eft très-curieux, & qu'on peut y avoir recours quand on n'a pas le choix des reins humains ni la commodité de chercher dans eeux du cheval, j'ajoüterai ici les remarques fuivantes.

J'ai examiné plufieurs fois des reins de pigeon, de pou- larde, de perdrix, & d’autres oifeaux qu'on venoit de faire mourir, qui n'étoient pas encore mortifiés, je n'y ai point aperçu diftinétement les vaifleaux corticaux, ou je n'ai fait que les entrevoir; il n’en eft pas de même des vaiffeaux médul- laires /page $ 1 7), je les ai vûs très-fouvent en pareil cas avec les faifceaux particuliers & les faifceaux communs qu'ils forment en fe raflemblant ; j'ai à plus forte raifon les branches de l'uretère, & en particulier les rameaux qui tiennent lieu

A'OBMENSIMS: c LE N'C'EUS 525 de calices {page S1$ © fig. 7) ; la nuatière blanche de Turine qui les remplifloit en partie, me donnoit la facilité de les diftinguer.

J'ai dit que j'avois clairement les tuyaux corticaux

dans les reins de tous les oifeaux que j'avois examinés après qu’ils avoient été mortifiés, & un peu avant que les entrailles commençaflent à fe corrompre (pages $ 1 4 & S16);'cen'eft pas à dire pour cela qu'il foit queftion de faifir une heure pré- cife , les oifeaux qu'on vend dans les places publiques font ordinairement au point qu'il faut; cela demande en tenips froid huit & dix jours après qu'on les a tués. Ceft préci- fément en hiver que j'ai fait toutes ces expériences : j'ignore le temps quil faudroit pendant les chaleurs. On peut voir les vaiffeaux corticaux fans ouvrir le ventre ; il n’y a qu'à enlever du côté du dos, avec la pointe d’un couteau ou d'un mauvais fcalpel, une lame offeufe qui couvre la face poftérieure du rein, finon on vuidera le vente, & on détachera la portion de f'épine dans laquelle les reins font enchäffés ; on regardera enfüite Ia furface du rein avec une lentille de cinq, fix & huit lignes de foyer. Quand Mrs Les Commiffaires nommés par le comité de Y Académie pour “vérifier ce que j'avois avancé, vinrent chez moi, M. Guet- tard, après avoir diftinétement les vaifieaux corticaux dans les reins d’une perdrix, dit qu'il les apercevoit encore: avec les yeux nus : cependant, lorfque ce font de petits oifeaux comme l'alouette, fi je veux voir nettement ces tuyaux qui font d'une fineffe extraordinaire, je me fers d'une lentille de quatre lignes de foyer.

Dans la grive, dans l'alouette, & en général dans les petits oifeaux, il m'a paru que ces tuyaux fe montroient aflez également dans prefque toute l'étendue du rein: il n’en ef pas de même des gros oifeaux; comme leurs reins ont beau- oup plus de volume, toutes leurs parties n'arrivent pas en même temps au même point de maturité, fi je puis me fervir de ce terme; ainfi l'on y trouve fouvent des endroits rouges & frais, d'autres fales, pour ainfi dire, & jaunâtres..

V'uu ii

Fig. 1.

526 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE d’autres pâles & blancheïtres, fans mélange de rouge ou de jaune. Ce n'eft guère que dans ces derniers que les vaifleaux corticaux paroiflent diftinétement & en grand nombre, je pe prétends pas même faire une règle 1à-deflus.

Je ne dis rien ici fur la façon de voir ce que j'ai obfervé dans le foie & les caplules atrabilaires : le Mémoire même

fervira d'énftruction (pages 497, S18, $20). EXPLICATION DES FIGURES.

PLANCHE: KE

Ta figure première repréfente la moitié d’un rein humain partagé en deux par une fection verticale qui pafle par le milieu de a convexité & du finus du rein : la vûe tombe fur cette fettion.

À, B, C, D, E, les petits reins, dont l'union forme le grand rein.

F, G, H, I, lignes ou plans de féparation, que l’on conçoit entre les petits reins.

K, la partie corticale d’un des petits reins environnant le globe médullaire, excepté l'endroit de la papille.

L, le globe médullaire,, ou la partie fibreufe de ce petit rein.

M, fa papille qui paroît dans le fmus du rein , après en avoir feparé le baffin, les calices & la graiffe qui s'y trouvent naturellement.

A, a, deux fegmens d'autant de reins fimples, qui s’uniffent pour former un petit rein compofe.

E, e, deux autres fegmens de même nature, qui s’uniffent auffi de même.

Il y a encore d'autres fegmens cachés qu'on n’a repréfenter ici, N, O, deux autres papilles à la partie poftérieure du finus.

P, Q, étendue circulaire autour de chaque papille, qui n’eft point couverte de fubftance corticale.

R, la fubftance qui forme le refte de l'étendue du finus. S, S, les bafes des pyramides qui répondent à l'entrée & au

DES SCIENCES. 527 refte de l'étendue du finus, excepté l'efpace circulaire qui eft autour de chaque papille.

On a exprimé affez fortement ces bafes dans l'étendue du finus ou de la fubflance R, quoique naturellement elles n’y foient prejque pas marquées.

T,T,T, les petites pyramides qui vont de la circonférence de chaque petit rein vers la papille.

On les a repréfentées à defféin plus groffes qu’elles ne Sont naturel- Le

V, R partie corticale des pyramides. ZX, leur partie médullaire avec Ieurs interftices rouges, plus apparens que dans a partie corticale.

La figure deuxième repréfente un des petits reins fimples qui fervent à former le grand rein de la figure précédente,

On à marqué les mêmes parties par les mêmes lettres. X, la partie corticale. Z, la partie médullaire. M, la papille.

P, Q, étendue circulaire autour de Ia papille, fans fubftance corticale.

S, 5, bafes des pyramides qui répondent au finus du rein. T, T, les pyramides. V, leur partie corticale. ZX, leur partie médullaire ou fibreufe. La figure troifième repréfente une portion de furface du rein vüe avec une loupe. S, S, les bafes des pyramides.

JS, leurs interftices marqués dans la plus grande partie de Fétendue du rein par un affemblage de vaifleaux fan- guins prefque imperceptibles.

4, veine dont les ramifications fuivent exactement dans quel ques endroits les interftices des bafes des pyramides.

Fig, 2,

528 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE P'THAPNICIANE: TL

Fig. 4. La figure quatrième repréfente cinq pyramides avec les dimen- fions dix fois grandes comme dans le rein naturel; les pyramides paroiflent coupées près de la pointe.

A À, Y'épaifleur de a partie corticale du rein ou des pyra- mides.

B, la partie médullaire du rein ou des pyramides.

C, C, les prolongemens du corps médullaire qui pénètrent dans l’épaifleur de Ia fubftance corticale.

D, D, les loges de Ia fubflance corticale qui reçoivent les prolongemens du corps médullire.

E,E, la fubftance vraiment corticale qui remplit en manière de colonnes les intervalles des /oges ou des prolongemens.

Fig. ç. La figure cinquième repréfente les mêmes parties que la figure précédente, avec fes nouveaux vaiffeaux dont elles font compotées Les mêmes lettres y défignent les mêmes parties.

A, À, Yépaifleur de la partie corticale. B, ki partie médullaire ou fibreufe.

C, ©, les prolongemens du corps médullaire.' D, D, les loges

E, E, la fubflance vraiment corticale qui remplit les inter- valles des loges,

F; les vaiffeaux blancs corticaux qui forment tout l'extérieur, foit de chaque rein fimple, foit du grand rein.

G, les vaifleaux corticaux qui forment de même les inter: valles ou les colonnes qui font entre les prolongemens.

On n'a pas répréfenter ces vaiffeaux en auffi grand nombre, à Beaucoup près, qu'ils y font naturellement.

H, A, Îles vaifleaux ferpentans qui forment les prolongemens, & qui naiffent à de petites diftances l'un de l'autre, tant du fond que des côtés des loges corticales.

?,ë, les tuyaux férpentans qui naiflent du bas des colonnes, c'eft-à-dire, de la fubftance corticale qui remplit les intervalles des prolongemens.

L, L, L,L,

DAS MSNC 1 E N°C'E:Ss. 529 _Z,L, L, L, inflexions des vaifleaux férpentans qui reviennent fur leurs pas & reprennent enfuite leur chemin vers la : papille. ÿ M, M, petites males formées par quelques vaifleaux ferpen- tans, qui, après s'être roulés fur eux-mêmes, repren- nent, comme les précédens, leur chemin vers la papille. On n'a repréfenté ici qu'un trés-petit nombre de vaifféaux férpen- fans, en comparaifon de ceux qui paroiffent naturellement.

PLANCHE ÏÎI. Les figures fuivantes ont rapport au rein des Oifeaux:

La figure fixième repréfente une partie de la furface du rein des oifeaux, elle a été faite d’après celui de Ia perdrix, par le moyen d'un verre de fept lignes de foyer.

A, À, Îles éminences ou lobules de [a furface du rein, tels qu'ils paroïfloient quand on a deffiné cette figure, quoique dans d’autres circonftances ils repréfentent exac- tement Îles éminences & Îes circonvolutions du cerveau.

LA

B,B, leurs interftices.… C,C, les vaifleaux blancs corticaux tels qu'ils fe montrent

lorfque Ia furface du rein en eft bien fournie, mais on n’en a repréfenté ici qu’un certain nombre:

La figure feptième repréfente l’uretère & la portion de l’uretère qui tient lieu de baffin, les rameaux qui font office de calices, & les vaifleaux médullaires qui vont aboutir. dans ces rameaux.

La figure a été faite d’après le pigeon, & comparée aux reins de plufieurs autres oifeaux ; les dimenfions font grandes deux fois comme nature.

A B, laportion de l’uretère qui tient lieu de baffin, & qui defcend le Iong de Ia face antérieure du rein.

C;C, branches affez confidérables qui vont former le com- mencement de l'uretère. €, €, rameaux moindres qui contribuent auffi à le former. Les uns & les autres viennent également de l’intérieur du lobe fupérieur du rein. D, D, autres branches confidérables que l'uretère reçoit en defcendant,

Mém. 1 749: s LXX

530 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE d, d, rameaux moindres qu’il reçoit de même en defcendant, & qui tiennent lieu de calces, cs

E, branche plus groffe que les autres qui revient du dedans du lobe inférieur du rein. ? 5

é,e,e,e, petits rameaux tenant lieu de calices, qui fe rendent dans les branches plus confidérables.

FF, Fou G,G,G, les vaifleaux médullaires, pluftôt les faifceaux particuliers des vaifleaux médullaires, qui reviennent des éminences corticales après avoir reçû les vaifleaux corticaux,

fou 2, faüfceau commun formé par Ia réunion des faifceaux

précédens, qui va fe terminer dans un des rameaux de luretère.

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Mem. de LAe.R. des Se 1749 Pay. 530 Plg.

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Le | DES SCIENCES: 531 ——————————— RÉEREL EE XIONS

SUR LE PRINCIPE DE LA MOINDRE ACTION DE M DE MAUPERTUIS.

Par M. le Chevalier D'AR c x.

ju héfité long-temps à donner ces Réflexions au Public, on n'en fera pas furpris après ce qui vient de fe pafler fur ce même fujet; cependant j'ai cru que lorfqu'il étoit quef- tion de fintérêt de fa vérité, de pareilles confidérations ne devoient point arrêter, & que les vrais Juges en ces matières fauroient bien diftinguer ce qui eft produit par le defir de connoïtre la vérité, de ce qui n'eft qu'un effet de l'envie & de la jaloufie. Je fais qu'on dit il ya long-temps que les Savans & les Philofophes n'en font pas “toûjours exempts, & je fuis fâché d'être obligé d'en convenir: il eft vrai que rarement ces deux paflions fe montrent à découvert, mais les Sages nous diront qu'il eft facile de les reconnoître , malgré les déguifemens fous lefquels elles font mafquées ; tantôt c'eft par un moyen, tantôt c'eft par un autre; mais Le plus ordinaire, parce qu'il en a le moins l'air, & dont je füis fâché de dire que des Savans du premier ordre ne font pas exempts, c'eft celui de louer par une affedtation marquée un Auteur qui a travaillé fur une matière, fans dire un mot de celui qui en a le mieux écrit. Je me flatte que dans ce Mémoire on ne reconnoîtra rien qui puifle avoir l'air de la prévention, & qu'on ny verra que le langage d'un homme qui recherche uniquement la vérité: je prie donc le lec- teur , quelles que foient mes expreflions, de les regarder toûjours comme abfolument éloignées de vouloir offenfer; & fr elles font fimples, ceft que j'ai voulu éviter la lon- gueur de ce qu'on appelle les expreffions s AE qui, XX ij

532 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE felon moi, font toùjours plus offenfantes que le langage fincère de la vérité.

Principe général de M. de Maupertuis.

Lorfqu'il arrive quelque changement dans la Nature, la quantité d'acion néceflaire pour ce changement eff la plus petite qu'il foit poffible. La quantité d'adion eff le produit de la maffe des corps par leur vielle à" par l'efpace qu'ils parcourent, dc:

Cet énoncé général offre deux objets ; le premier, que laétion eft proportionnelle au produit de Ja mafle par a vitefle & par l'efpace parcouru ; le fecond, que la quantité de cette action, néceflaire pour produire un changement dans la Nature, eft un minimum, & que c'eft cette quantité d'ac- tion, qui eft la vraie dépenfe de la Nature, qu'elle ménage le plus qu'il eft poflible.

Examinons d'abord {a première partie de cet énoncé, & voyons fr l'action eft réellement. proportionnelle à la mafle par la vitefle & par l'efpace parcouru.

Si deux corps fe font équilibre, c'eft-à-dire, fi le repos fuit de leur choc direét, fins favoir ce à quoi l'action eft proportionnelle, il faudra de néceflité qu'elle foit égale dans les deux corps ;-car fi elle étoit inégale, il s'enfuivroit qu'une action feroit équilibre à une aétion moindre, c'eft-à-dire, que différentes quantités d'aétions produiroient un même eflet : or peut-on imaginer que deux effets égaux & femblables puiflent être produits par des quantités de caufes inégales ? 1 faut remarquer que ceci n'implique pas que l'effet eft propor- tionnel à fa caufe, mais feulement que le même effet eft toù- jours produit par une même quantité de caufe, à vice verfa.

Soient deux corps durs À & B parfaitement égaux , mar- chans dans des directions oppoftes avec des vitefles égales, il eft clair que le repos fuivra le choc des deux corps; enfuite fi un de ces corps À marchant avec la même viteffe dans la même direGtion eft choqué par le corps €, dont la male & la vitefle font différentes, mais tellement combinées

su

| D E:S/S$S C'I1E-N CE s. 33 que le répos fuit leur choc: je crois que on ne peut nier que l'action du premier corps Z ne foit égale à l’action du fecond corps €, puifqu'ils détruifent également la vîtefle du corps 4. Pouvons-nous avoir une autre idée de l'égalité de deux quantités, que de pouvoir fubftituer l'une à la place de V'autre fans rien changer? Mais fi le corps 2 marche avec deux de vitefle & parcourt deux d'elpace, & que marche avec un de vitefe & parcoure un d’efpace, je demande, par le prin- cipe de M. de Maupertuis, quelle eft la mañle du corps C!

Pour cela, l’action du corps 2 eft 2 par deux de vitefe & par deux d'efpace, & l'action du corps C eft C par un de vitefle & par ün d'efpace, & ces deux aétions font égales ; 4 B

donc, füivant fon principe, =

ou C— 4 B, ce

qui eft abfolument contraire à ce que l’on trouve par les loix

du mouvement, donc l'action n’eft pas proportionnelle à Ja

mafle par la vitefle & par l'efpace parcouru.

Pafons à préfent à un fecond objet, &, pour abréger, continuons d'appeler aétion ce que M. de Maupertuis appelle ainfr.

Cette feconde partie de l'énoncé eft que fa quantité d'ac- tion néceflaire pour produire un changement dans la Nature, ef la plus petite qu'il foit poffible, que c'eft cette aétion qui eft la vraie épargne de la Nature.

Si deux corps À & B marchent dans a même diretion avec les vitefles à & 2, lation des corps À & B fera Aaa + Bbb. Si après que ces corps fe font choqués ils marchent avec les vitefles x & 7, leurs actions, après le choc, feront Axx + Bzz,a,b,x & 3 exprimant les efpaces aufi-bien que les vitefles. Or la quantité d’aétion fera, ou égale, ou plus petite, ou plus grande après le choc qu'avant ; fi elle eft égale, c'eft le théorème des forces vives, qui n'aura pas lieu, dans les corps durs ; fi elle eft plus grande, elle aura augmenté de la quantité Axx + By Ab Aaa; fi elle eft plus

Xxx ii}

MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoïYaALe

petite, elle fera diminuée de la quantité

Aaa + Bbb— Axx By7, & cette quantité eft la quantité réelle-d'action perdue, & par conféquent eft celle employée par la Nature pour produire le changement arrivé; donc 2 Axdx + 2 B7d7 o, ou (en fuppofant dx dy, *x étant égale à 7 dans les corps durs, ou a— b=—7 x dans les corps à reflort) Ax-+ B7— 0, ce qui eft abfurde.

Ce n’eft donc pas même la partie détruite de cette quantité dans la Nature qui eft un minimum, voyons donc ce que M. de Maupertuis a trouvé. Suppofons que pendant que les corps À & B marchent dans la mème direétion avec les vitefles 4 & 4, que le plan fur lequel ils font marche avec la vitefle x, il eft évident que le corps À marchera fur ce plan avec une vitefle a x, & que le corps À marchera en arrière avec une vitefle x à, x étant plus grand que à & plus petit que 4, il trouve que À x (a x) + Bx(x b)° fera un minimum orfque la vitefle x eft telle que À x fa x) B x (x b), ceft-à-dire, lorfque les corps feront équilibre fur ce plan.

Or j'avouerai que je ne fais quelle autre conféquence on peut tirer de ceci, fi ce n'eft que APP + BQQ étant un minimum, & PP = Sodx & QQ = SAdx A + BA fera 0, & conféquemment que /Z & X étant des fonctions de x) lorfque AZ = BX, alors AZZ + B XX fera toûjours un sinimum & vice verfa; ce qui me feroit croire que lorfqu'on a trouvé AZ Z + BXX un minimum, on favoit que AZ = BX.

Au refle, un principe métaphyfique n'eft pas démontré par fon accord en réfultat des faits, avec des principes qui ne font pas eux-mêmes métaphyfiquement démontrés ; ainfi, quand la quantité que M. de Maupertuis indique pour exprimer l'action, lui feroit effectivement proportionnelle, quand mème la Nature, dans fes changemens , perdroit le moins poflible de cette ation, le principe ne feroit démontré qu'autant que lon fauroit, avant ce théorème, que lorfque

+ w .

DIE:SN SCcrENCESs. s35 deux corps marchent lun vers l'autre avec des vitefles en raifon renverfée des males, ils refteront en repos, ou retour- neront en arrière avec des vitefles dans la même raifon des mafles après le choc; & fi on fuppofe cette vérité connue, Ton n’a nul befoin de l'autre principe pour tous {es cas que M. de Maupertuis donne. .

Jur la loi du repos.

Répétons les mots de M. de Maupertuis.

Je confidère zci les corps attachés à un levier, & pour trouver le point autour duquel ils demeurent en équilibre, je cherche le point autour duquel, fi le levier reçoit quelque petit mouvement , la quantité d'atfion foit la plus petite poffible.

Soit C Ja longueur du levier, aux extrémités diiquel Joien? Placés deux corps dont les maffes Jout À & B: foi Z la dif- tance du corps À à ce point cherché, & C Z. la diflance du corps B.

Si donc on fuppofe que le corps À ait une petite viteffe V, & qu'il parcoure un efpace &, l'on aura la viteffet des

y C D C > » Q Corps —T & a l'efpace, & l'action des corps

fra A Va + C2 égale à zéro. Si donc je fuppofe a & V confant, l'on aura BVax2(C x (dr)xra— (C3) x 27d7—=0,ou7— C; ce qui ne donne point l'équilibre des corps: mais ce que M. de Maupertuis fait en exprimant la vitefle & l'elpace que parcourt le corps À, eft de fuppofer que le levier fe meut d’un mouvement angulaire conftant: fuppofition qui me paroît abfolument gratuite, puifqu'à chaque valeur de Z, l'aétion ou le temps néceffaire pour lui faire parcourir l'angle confiant, eft différent.

En général, quelles que fuffent les loix de Ja Nature, ü feroit aifé de trouver une fonction des vitefles & des mafles qui, étant un minimum , donneroit ces loix ; mais cela feroit-il fufffant pour donner le nom d'aétion à cette fonéion, &

, donc Ja difiérentielle fera

536 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE chercher à démontrer par-là des vérités évidentes par elles- mêmes, comme l'exiflence d’un premier Etre, &c!?

Après avoir montré fuccinétement les objeétions que lon peut faire contre le principe de la moindre ation, je vais donner un principe général qui, fi je ne me trompe, ne fera*pas fujet à aucunes objections.

J'appelle faction d'un corps autour d’un point, la maffe multipliée par la vitefle & par la perpendiculaire tirée de ce point fur la direction des corps.

Cette définition de l’aétion eft parfaitement d'accord avec celle que M. d'Alembert a donnée dans le dictionnaire de l'Encyclopédie; voici fes paroles : l'adion eff le mouvement qu'un corps produit ou qu'il tend à produire dans un autre corps.

Par conféquent fi deux corps en mouvement agiffent {ur un troifième en repos, mais dans des fens diférens, le réfultat de l'action des deux corps fera le mouvement produit dans le troifième corps, & ce réfultat fera égal à celui qui feroit produit par l'action d’un des corps, moins Faétion de l'autre.

€eci bien confidéré, mon principe général s’énonce ainff:

Toute lation (exiftante dans a Nature dans un inftant quelconque) autour d'un point donné, étant produite dans un feul corps donné, la quantité d’aétion de ce corps fera toüjours la même autour de ce point.

H feroit mutile de donner la démontftration de ce principe, l'ayant déjà donnée dans les Mémoires de 1747, fous cette forme: Principe général de Dynamique, qui donne la relation entre les efpaces parcourus &r les temps, quel que foit le fyfléme de corps que l'on confidère, à quelles que foient leurs actions les uns Jur les autres, Ce principe eft que la fomme des mafes de chaque corps par le feteur qu'il décrit autour d’un point fixe dans le mème temps, moins la fomtfne des feéteurs décrits en fens contraire, chacun multiplié par la maffe du corps qui le décrit, eft proportionnelle au temps.

L'on voit clairement que la feule différence eft qu'au lieu de fe‘teurs multipliés par les mafles, nous employons : la

place

L'DIERSMISNC 1 E NICE NS 527 place des fecteurs, les vitefles multipliées par les perpendi- culaires fur la direction; ce qui revient abfolument au même.

Soient deux corps À & B marchant avec les vitefles a

& B avant le choc, & avec les vitefles x & 7 après le choc,

Yon aura par le principe ci-deflus énoncé, que l'action des corps À & B autour d'un point quelconque ©, fera la mème avant ou après le choc, donc à AxaxOP+ BxbxOP—=A xxx OP+HBx% zxOP, & par conféquent À x (a x) = B x (7 —L),a— x, eft la vitefle perdue par le corps À, & 7 4 la vitefle gagnée par le corps 2; ceci eft vrai, foit que les corps foient à reflort ou qu'ils ne le foient pas.

L'on voit aifément que dans les corps à reffort a b— y x, Von aura a + x = b + 7, &en multipliant ces termes par les termes Axa—x—Bxy— b,\on aura À x {aa xx) = B x (4x bb), qui eft la propriété des forces vives.

La loi du repos des corps.

Que l'on fuppolfe que deux corps À & B viennent avec Ja même vitefle a frapper la verge PQ aux points P & Q, quel fera le point © qui fera tel que les corps 4 & B reftent en repos après le choc?

- Pour cela il faut que faction du corps À autour du point C, foit égale à action du corps B autour de ce même point, c'eft-à-dire qu'il faut que Aa x CP Ba x CQ, qui fera que C fera le centre de gravité.

Par la même méthode, lon trouveroit les centres d'ofcil- lation ou de percuflion, &c.

Paflons à préfent aux loix de Ia réfraction de la lumière.

Dans le Mémoire déjà cité, on a démontré qu'il étoit égal que les corps fuffent attirés vers le point autour duquel on cherche Faétion ou non, cela n'apportant aucun change- ment à la quantité de cette action.

Soit F'G la furface circulaire d’un corps diaphane & ho- mogène, au travers duquel pañle le rayon de lumière }{m,

Mém, 1749. - Yyy

Fig. Le

Fig. 3.

538 MÉMoiREs DE L'ACADÉMIE ROYALE

c2 fuppole la viteffe de la lumière en 41 w, & celle en N ”, l'action de la finface FG, ne peut être que vers le centre C; car quelque action que ce corps ait fur le corpufcule de lumière d’un côté de la perpendiculaire à Ja furface, il aura la méme action de l'autre: appelant donc M, la mañle d'un corpufcule de lumière, Jon aura par mon principe Mv x CR, Yaétion avant d'entrer dans le corps, égal à Mu x Cr, qui eft l'action dans le corps diaphane; mais Mm: MP:: Cm:CR&mN:NQ :: CM: Cr, &

en fubflituant au lieu de CR & Cr leurs valeurs , lon aura

Mr Mx PxCM __ MuxCmx NQ , vxMP __uxNQ, M m y mN G Mm TT mN

ce qui donne la loi de la réfrétion; lon auroit celle de la réflexion de 11 même manière.

Si au lieu de regarder le corps FG comme circulaire, c'étoit un plan, il eft évident par ce que nous avons déjà vû, que la vitefle de Ja lumière dans la direétion FG, eft la même avant comme après qu'elle eft entrée dans le corps diaphane, & par conféquent en nommant + la viteffe en A7, PERE ie ; donc, &ce

H feroit inutile de donner ici d’autres applications de ce principe, l'ayant déjà fait pour les trajectoires, &c. dans le Mémoire que nous avons déjà cité, ,

& u la viteffe en AN, l'on aura

Mer, de LA R. des Se:1749 Pag.538.Pl37,

Mem de Le R: das Secx7gg Pay 538. Pl27,

DIES SCIENCES 539

OBSERVATIONS METEOROLOGIQUES FAITES A.L'OBSERVATOIRE ROYAL PENDANT L'ANNEE M. DCCXLIKX.

Par M. DE Foucur.

Jur la quantité d'eau de Pluie.

+ pouc. lign pouc: lign: N Janvier. 1 $ Z | En Juillet... 1 i Février... 1 9+ Août...... I 104 Mars unie: 1 24 ‘Septembre., o 92 Avril ..... 2 of Oétobre.... 1 44 Mai cuesms 1 64 Novembre... 2 4% Jus. LA Tr NO + Décembre.. 1 2% RTE ) à

Obfernations fur le chaud ee le froid.

Le plus ne "ROIT à été uit ‘du 8 au 9 Février ; a liqueur de l'ancien thermomètre eft defcendue à 1 8 degrés, & celle du thermomètre de M. de Reaumur, à 64 À au deffous de la congélation.

La plus grande chaleur a été le 13 Juillet à une heure après midi ; la liqueur de l'ancien thermomètre eft montée à 83 degrés, & celle du thermomètre de M. de D ie à 29 + au deflus de la congélation.

<

Si ur le Baromerre.

Le 29 Novembre, par un vent deft & un brouillard Yyyi

540 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

aflez épais, le mercure eft monté à 28 pouces 6 lignes; & le 18 Février, par un vent violent de fud-fud-oueft, il eft defcendu à 26 pouces 4 lignes.

Déclinaifon de Aiguille aimanrée.

Les 10 & 11 Juin 1749, une aiguille de 4 pouces déclinoit de 164 30° vers le nord-oueft.

MESSIEURS DE LA SOCIETE Royale des Sciences établie à Montpellier, ont envoyé à l’Académie l'Ouvrage qui fuit, pour entretenir l'union intime qui doit être entre elles, comme ne failant qu'un feul Corps, aux termes des Statuts accordés par le "Roi au mois

de Février 1 70 6.

MEMOIRE SUR LA e CAUSE DES MOUVEMENS DU CERVEAU QUI PAROISSENT DANS L'HOMME ET DANS LES ANIMAUX TREPANES.

Par M. DE LA MUuURE.

LL. mouvemens du cerveau font connus depuis long- temps; les plus anciens Anatomiftes ont obfervé que ce vifcère paroifloit {e dilater & fe refferrer alternativement: les fractures du crâne, les caries de cette boîte offeufe, enfin le trépan appliqué fouvent à defein, les ont mis À portée de faire cette obfervation fur les hommes & fur les animaux. Cette vérité n’a cenendant pas été généralement reçüe ; ik s'eft trouvé des Obfervateurs qui ont voulu la détruire par les mêmes moyens dont on s’étoit fervi pour l'établir: d'au- tres, en convenant de l'apparence de ces mouvemens du Yyyil

12 Aoûs 1752

1e Expérience.

s42z MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE cerveau, ont foutenu qu'ils ne lui étoient point propres, mais qu'ils dépendoient de Ja pulfation du finus longitudinal, ou de celle des artères de la dure-mére, ou enfin du repos & de l'action alternatifs de cette membrane.

Les Auteurs ne fe font pas moins partagés au fujet de l'ordre que fuivent ces miouvemens comparés avec ceux du cœur ; plufieurs ont penfé que la contraction du cœur & la dilitation du cerveau fe failoient en même témps, quelques-

‘uns ont prétendu précifément le contraire; on en trouve auffr

qui ont cru remarquer quelque rapport entre les mouvemens de la refpiration & ceux du cerveau. M. Schligting a déter- miné ce rapport, & il a fait voir d'après un grand nombre d'expériences, que le cerveau s'élevoit pendant l'expiration, & s'abaifloit pendant l'infpiration. L L’explication de ces mouvemens a toûjours paru fort em- barraffante, j'ai tâché de la découvrir; les expériences peuvent feules nous guider fürement dans ces fortes:de recherches : je Jaifle au lecteur à juger fr celles que j'ai faites avec bewucoup d'attention, m'ont conduit à la véritable caufe; M. Schligting avoit foupçonnée b, & M. de Hallér La fimplement indi- quée dans une lettre qu'il écrivit à M. de Sauvages, & qui me fut communiquée vers da fin de Janvier dernier. Pour ne pas tomber dans l'inconvénient des perfonnes quelquefois . trop crédules qui mettent leur efprit à la torture pour expli- quer des phénomènes qui n'ont jamais exifté, j'ai cherché d'abord à m'aflurer de la réalité des mouvemens du cerveau & de leur correfpondance à ceux dela refpiration. 7 Le premier de Février 1751, ayant trépané un chien, le cerveau recouvert de la dure-mère parut évidemment s'élever & s'abaifler fucceffivement ; l'élévation s’obfervoit dans le temps de l'expiration, & fabaiflement dans celui de l'infpiration : plus la refpiration étoit forte, plus ces 2 Dans un Mémoire qu’ila donné b An ne expiratione cruer, aut fur les mouvemens du cerveau, pre-,| cer, vel uterque majori copië cere- mier volume des Mémoires préfen- | brum versus d7 in illud fortius pre-

tés à l’Académie par des Savans | MAEUT, ipfumque tumefaciat, Dans étrangers. :le Mémoire déjà cité? 1: ul

DES SCIENCES. $43 mouvemens devenoient fenfibles : ils Le frent encore davan- tage, lorfque on eut enlevé la portion de la dure-mère qui recouvroit {e cerveau. J'ai toûjours obfervé le rapport des mouvemens de ce vifcère à ceux de la refpiration, tel que je l'ai dans cette première expérience : il n’eft done pas douteux que le cerveau ne s'élève & ne s’abaife confor- mément aux obfervations de M. Schligting.

Après n'être convaincu de la réalité du phénomène dont je voulois chercher la raifon, Jeus recours à de nouvelles expériences pour la découvrir.

Le 3 de Février de la même année, Je liaï les troncs des artères carotides dans un chien robufte, & la ligature étant faite, Fanimal tomba dans lafloupiffement ; l'ayant trépané, je n'aperçus aucun mouvement fenfible dans le cerveau , même orfqu'il fut mis à nu par la difléction de la dure. mère; ayant délié les carotides, les mouvemens parurent dans _ Je même ordre que dans la première expérience.

Le 26 de Février, je fis lier les veines Jugukires au deflous de leurs bifurcations, après quoi lon appliqua une couronne de trépan; le cerveau couvert de fon enveloppe extérieure s'élevoit & s'abaifloit très-évidemment, fes mouvemens furent encore plus manifeftes après que l'on eut ôté la dure-mère, ils perfiflèrent également après que Jjeus fait délier des jugulaires.

Le fuccès de ces deux expériences m'embarraffa extré- mement, elles paroifloient favorifer ceux qui penfent que les mouvemens du cerveau dépendent de abord du fing à ce vifcère par les artères carotides: je ne pouvois pas cepen- dant concilier cette explication avec l'ordre des mouvemens, qui répondoient toûjours exactement à ceux de la refpiration, il falloit de nouveaux effais pour m'éclaircir fur ces contra- ditions apparentes; je me propolai bien d'en faire, mais je fus obligé d'interrompre le cours de ces recherches, que je me repris qu'au mois de Janvier t raies

1. Le7 de Janvier, après que l'on eut lié les deux jugu-

»

Expérience,

3-

Expérience.

e

aires d'un chien vigoureux, le plus près de la poitrine qui Expérience.

s.* Expérience.

544 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYyALE fut poffible, l'animal tomba dans un profond affoupiffement & ronfla beaucoup; on lui appliqua une couronne de trépan, le crâne étant ouvert il fortit une grande quantité de fang. J'aperçüs d’abord dans le cerveau des mouvemens d’élévation & d’abaiflement qui répondoient à expiration & à l'infpira- tion, ces mouvemens cefsèrent bien-tôt, le chien ayant ceflé de refpirer. 2.° Le chien étant mort, lui ouvris la poitrine & je lui foufHai dans les narines; j’obfervai dans ce moment que le cérveau s'élevoit lentement à melure que les poumons fe gonfloient, & que lorfque je ceflois de foufler & que Fair s'échappoit des poumons, le cerveau s’affaifloit fubitement: ces mouvemens paroifloient d'autant plus évidens que je fouf- flois plus fort, & qu'en mème témps je comprimois plus fortement la poitrine. s à Se La première partie de cette expérience me rapprocha de

-Jidée que fait naître M. Schligting, lorfqu'il demande fi le

reflux du fang vers le cerveau ne feroit point la caufe des mouvemens de ce vifcère: ils n’avoient pas fubfifté long= temps après la ligature des jugulaires, & ce qui en avoit para pouvoit être attribué reflux du fang par les veines vertébrales ; cependant la troifième expérience me fembloit encore décifive contre cette opinion. Je ne diflimulerai point que ce que j'avois obfervé, en foufflant par les narines du chien: après fa mort, me fit au moins pencher pour ceux qui’avoient cru qu'il y avoit des routes frayées de l'intérieur . du nez dans le crâne, j'arrangeois même déjà une explica- tion qui me paroifloit très-raifonnable; de nouvelles tenta- tives détruifirent tout-à-coup le fruit de mon imagination, que je croyois être celui de Fobfervation. 1. Le 8 de Janvier, je fis appliquer une-couronne de trépan à un chien d’affez belle taille; le mouvement du cer- veau parut, mais extrêmement lent & prefque infenfible, le chien ne refpirant prefque pas. j 2.° Je lui découvris les deux jugulaires, & j'obfervai qu'elles étoïent conflimment gonflées dans leur: partie fupérieure; HJAIS

de ss ste bn

LS

: DIE 8. SC L'E N-C ES. 545 mais er ‘ra partie inférieure vers le flernum, on voyoit un battement confidérable, pendant tout ce temps-là le chien refpiroit à à peine.

Lui ayant dec Ja partie latérale: du thorax & difiéqué les mufcles & les portions aponéyrotiques qui recou- vrent les. côtes, il fit des efforts violens, & :cria, beaucoup ; je vis alors manifeftement les mouvemens’ d'élévation & d'abaiffement du cerveau, qui répondoient à l'expiration &

* À linfpiration ( je manquai alors à obferver l'état des veines

jugulaires ds 4". Les deux jugulaires ayant été liées, les mouvemens

fubfiftèrent dans. la même force qu'auparavant. ..

5-”_ Ayant ouvert la poitrine du chien, & lui ayant ap- pliqué une nouvelle couronne de trépan après mort, je lui fouffai plufieurs fois dans les narines, en comprimant en même temps le thorax; le cerveau séeva. comme .dans les expériences précédentes, mais moins fenfiblement. vers la

n qu au commencement de .ce dernier eflai.

1. Le 9 Janvier je trépanai un chien vigoureux, & j'ob- fervai les mouvemens du cerveau à, l'ordinaire.

2 Je lui découvris les carotides qui étoient peu confi- dérables, & après les avoir féparées du nerf de la huitième paire,, je Jeur fis à chacune deux ligatures & les coupai entre- deux, j'examinai le cerveau, &. j'y vis les mouvemens comme auparavant.

L'animal étant mort, je Jui foufflai dans les narines,

- en comprimant en même, temps le thorax; le cerveau s'éleva

ærès- fnfiblement, mais je: m'aperçus que la même chofe amrivoit en. ne faifant autre. chofe que. comprimer ,& relà cher alternativement les côtes; par cette dernière manœuvre les mouvemens du cerveau paroifoient dans d'animal mort auffi fenfibles que dans le vivant; lorfque je comprimois les côtes le cerveau s'élevoit, lorfque je les abandonnois. à elles- mêmes il s'abaifloit : Jes poumons & le ventricule avoient été. difendus par J'air que: javais foufflé. dans les narines.

6.° Expérience,

st La trachée-artère ayant été; coupée tranfverfalement, :

Mén. 1749: 22%

546 MÉMoiïREs DE L'ACADÉMIE ROYALE

& a partie fupérieure bouchée avec le doigt, les mouve- mens du cerveau, excités par la compreffion du thorax, ont paru aflez évidens, quoiqu' un peu moindres “qu ‘auparavant.

s: * L'œfophage ayant été comprimé, le même mouvement a encore été aperçû, mais il métoit pas fi fenfible que dans la précédente circonftance ( 3.° }, quoique les côtes Le comprimées fortement.

La cinquième expérience n''avoit confirmé dans lidée j'étois, que le reflux du fang par les veines n'étoit point Ja

cufe des mouvemens du cerveau; ils fubfiftoient dans 1e temps que l'on n ‘obfervoit aucun reflux dans la plus grande partie des jugulaires , ils fubfiftoient fortement après Ja liga- ture des mêmes vaifleaux; d’ailleurs je me plaïlois à voir de nouvelles preuves de ce que J'avois déjà penfé fur la rentrée de l'air dans le cerveau par la voie du nez.

Je tirai beaucoup plus d’ivantage du dernier effai qué jai rapporté, les mouvemens du cerveau avoient fubfifté malgré la ligature des artères carotides; cela me fit croire avec raifon qu'il falloit que le chien ne refpirât pas fenfiblement dans le

cas de ma première expérience, & que c'étoit au défaut de

refpiration & non pas à Îa ligature des artères que devoit S'attribuer dans cette occafion le défaut de mouvement dans le cerveau: cette idée étoit d'autant mieux fondée, que dans ka cinquième expérience les mouvemens du cerveau avoient paru extrêmement foibles, & à peine fenfibles pendant un temps confidérable, fans qu il y eût aucune ligature faite aux vaifleaux, & fans que l'on eût obferver d'autre caufe que h foiblefle de la refpiration , laquelle étant devenue plug forte, avoit fait en même temps reparoître les mouvémens du cerveau.

Je fus defabufé de opinion qui m'avoit paru fi fdu fante, & qui ne n''avoit apparemment femblé telle, que par ce qu'elle avoit de paradoxe &. d'éloigné des idées ordinaires: Puifqu' en comprimant fimplement les côtes, & en les laiffant _ à elles-mêmes alternativement, jimitois dans l'animal mort les mouvemens qui Sobfervoient dans le vivant; puique la

nrrmllausr SCIE Nrcoris $47 mênie chofe arrivoit après avoir ôté toute communication de l'air des poumons avec la tête en coupant la trachée-artère, il ne métoit plus poffible de préfumer que le fyftème qui m'aVoit tant flatté, pût avoir un fondement raifonnable, & je vis clairement que l'élévation du cerveau, que j'avois aperçüe en foufflant par les narines, dépendoit fimplement de a preflion de la poitrine, qui fe faïloit en même temps. - Je revins à penfer que le reflux du fang vers le cerveau produifoit les mouvemens de ce vifcère, & je n'imaginai pas que la compreflion des côtes pût les exciter autrement qu'en occäfionnant une forte compreflion fur les vaiffeaux renfer. més dans la poitrine, & par conféquent un reflux vers les parties fupérieures : les objections contre ce fentiment, qui m'avoient arrêté jufque-là, commencèrent à me paroître. plus foibles; mais avant que de me décider entièrement, je crus avoir befoin de nouveaux faits.

1." Le 16 du mois de Janvier, ayant trépané un chien fort près du fnus longitudinal, le mouvement du cerveau paroifloit obfcurément, quoique le chien refpirât affez bien: on obfervoit une efpèce de tremblement au voifmage du finus, & un mouvement de pulfation dans le fmus même:

© 2.°. Ayant trépané le crâne un peu plus bas de façon que la feconde ouverture fe joignit à la première, J'aperçus très-diftinétement les mouvemens du cerveau dans les deux endroits découverts ; ces mouvemens devenoient plus forts lorfque l'on comprimoit des côtes dans-le temps de l'expi- ration. Je fis mettre à nu les veines jugulaires & les caro- tides; je fis lier ces artères chacune en deux endroits, & je les fis couper entre les ligatures: le mouvement du cerveau fubfifta Je même abfolument. | "Je liai les veines jugulaires, les mouvemens fubff tèrent & parurent même un peu plus forts; le cerveau fe gonfloit encore plus lorfque lon comprimoit les: côtes. "5." La fettion des nerfs de Ja huitième paire & des grands fympathiques, ne fit point difparoître. ces pu incl ZZ ij

Expérience:

8.e Expérience.

548 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

6.° Ayant coupé la trachée-artère & l’œfophage, ilrne parut point de changement dans l'élévation & fabaiflement. du cerveau; la fection de toutes les parties antérieures du’ col, excepté les jugulaires, n'en produifit point de fenfible. *

7. Ayant coupé les jugulaires, ouvert les artères & veines vertébrales, & mis à nu fa colonne des vertèbres, je preffar fortement les côtes, mais inutilement, je ne pûs oblerver aucun mouvement dans le cerveau; cependant le chien en- trant en convulfion, lon obferva quelques légers mouvemens qui difparurent auffi-tôt, animal étant mort.

8.° Après fa mort je lui foufHai dans les narines & dans fa trachée-artère, mais fans aucun effet, quoique lon preffât en même temps fa-poitrine avec beaucoup de force.

1. Le même jour j'enlevai une portion du crâne à un petit chien de deux trois jours au plus; j'obfervai dans fon cerveau les mêmes mouvemens que dans ceux des grands.

2. Le chien étant mort, je-preflai alternativement les côtes, & je fis reparoître par ce moyen les mouvemens du cerveau.

3." Ayant coupé toutes les parties ‘antérieures du col juf- qu'aux vertèbres, & par conféquent les veines jugulaires, if fut impoffible d’obferver des mouvemens dans le cerveau, quoique je fifle preffer la poitrine avec violence:

Ces nouvelles expériences me perfuadèrent de plus en plus que le reflux du fang étoit néceflaire pour les mouvemens du cerveau; ils cefloient totalement après avoir coupé les veines jugulaires & les vertébrales, & conféquemment après avoir Ôté toute communication de la veine-cave avec les veines fupérieures ; dans le petit chien, ik avoit même fuffr d'ouvrir les jugulaires; d'ailleurs la plus forte compreffion de la poitrine ne produifoit aucun mouvement du cerveau dans ces cireonftances: je fus donc convaincu dès-lors que:le reflux du fang par les veines étoit vraie caufe du phénomène qui m'avoit tant embarraflé; je voulus cependant voir ce qui fe pañloit dans l'intérieur même du crâne, dans le temps des touvemens du cerveau.

p'Es MASNCIT E :NUCLE S 549 1.° Ler0 du mois de Février, ayant trépané un chien des deux côtés du crâne, j'aperçus à l'ordinaire les mouve- -mens du cerveau. | 2.° J'appliquai à lun des côtés trois autres couronnes de trépan, le chien ne foûtint point cette opération & mourut: ayant découvert la voûte médullaire du cerveau, je preffai fortement les côtes. La voûte médullairé s'élevoit alors très- fenfiblement; le fmus longitudinal {e gonfloit en même temps, & principalement fur la fin de l'élévation de la voûte; une petite veine ouverte le long du finus donnoïit aufli dans ces momens un jet confidérable de fang : je réitérai plufieurs fois l'expérience, elle réuffit toûjours de même. 34° Je fis une ouverture au ventricule latéral ; je preffai les côtes, la voûte s'élevoit encore, le finus fe gonfloit, & le mouvement du cerveau paroiïfloit, comme auparavant, du côté du crâne qui n’avoit été trépané qu'une fois; en faifant celte ouverture, nous avions coupé plufieurs vaifleaux, qui ‘répandirent beaucoup de fang. | -1 Nous agrandimes la première ouverture en la pro- Aongeant poftérieurement, je découvris le. prefloir d'héro- phile, il fe répandit une très-grande quantité de fang'; je fis preffer les côtes avec force, il ne parut plus de mouvement dans le cerveau ni d'un côté ni d'autre : le fang jaïlifloit im- pétueufement des vaifleaux ouverts, & entraïînoit avec lui beaucoup de bulles d'air. -: Ayant difféqué les veines jugulaires. & les foûclavières, elles parurent prefque vuides de fang & pleines de bullés d'air. -. Cette expérience Fvoir clairement que lorfque le cer- veau s'élève, les fnus fe gonflent; que dans le même temps Je fang eft repouñlé des finus vers les veines du cerveau, qui sy ouvrent; & qu'enfin ce reflux du fang à lieu, lorfqu'en -comprimant les eôtes on imite ce qui fe pafle dans l'expira- tion. Le célèbre Riolan avoit obfervé qu’en ouvrant les. ven- tricules antérieurs du cerveau, on faifoit difparoître ces mou- vemens, & qu'en recouvrant ces ventricules avec la fubftance Yoifine du cerveau, on les faifoit bien-tôt reparoître. Dans le "ZLz2 uÿ

L Expériences

550 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE premier cas, on ouvre prefque inévitablement beaucoup de vaifleaux ; parà on prépare une iflue libre au fang repouffé vers les finus, & il eft impoflible alors qu'il reflue jufque vers les vénules répandues dans le tiflu du cerveau : dans le fecond cas, en rapprochant de tous côtés la fubftance mé- dullaire & corticale pour fermer les veniricules ouverts, on peut occafronner une compreffion fur les vaiffeaux coupés, qui les empêche de tranfmettre le fluide repoutlé vers les finus, avec la même facilité que dans la première circonftance; par conféquent le fang pourra refluer jufque dans la mafe du cerveau, & produire fa dilatation. Cette explication eft d’au- tant plus naturelle, que lon obferve qu'une ouverture mé- diocre des ventricules ne fuffit pas pour empêcher les mou- vemens, & que ce n'eft que lorfqu'ils font prefque entière- ment ouverts que l'on voit arriver ce qu'avoit remarqué le fameux Anatomifte que nous avons cité. L'air qui fortoit avec le fans, & que nous trouvâmes abondamment dans les jugulaires, s'étoit infinué fans doute par les ouvertures de ces vaifleaux coupés & defemplis par lhémorragie confidérable qu'avoit caufée notre opération; il n'eft pas naturel de penfer que dans f'efpace d'une minute ou deux tout au plus, Fair contenu dans le fang eût fe dégager de fon tiflu pour former ces bulles nombreufes que j'apercevois dans les jugu- laires & les foûclavières *, | Je n'avois plus de doute après ce que je venois d'obferver, mais on peut être fouvent très-convaincu d'une vérité, & manquer encore de moyens pour en convaincre les autres, pour peu qu’ils examinent fcrupuleufgment les chofes: j'étois

* M. Littre, dans les Mémoires | dent qui faudroir pour cela un temps

de l’Académie Royale des Sciences, année 1714, remarque qu’il atrouvé de l'air dans les veines de ceux qui étoient morts de perte de fang , par des ‘blefflures ou par des hémorraoies : il attribue ce phénomène à ce qu’a- lors l’air contenu dans le fang, plus lentement, fe dégase & fe ra- malle en bulles fenfibles ; il eft évi-

+

confidérable : d’ailleurs, fr cette caufe étoit la vraïe, pourquoi ne trouve- roit-on pas des bulles d’air dans les veines de tous les cadavres, puifque le repos du fang qui donne lieu, fui- vant M. Lire, au développement de cet air, a certainement lieu après la mort dans tous les cas imagi- nables

‘DES SCirNcCEs s5r dañs ce cas, & j'avois befoin de nouvelles preuves pour ‘établir fûrement mon explication; fi elle étoit jufte, je devois obferver une correfpondance exacte entre le gonflement des jugulaires & celui du cerveau, dans l'animal vivant; de plus, en preflant immédiatement la veine cave fupérieure infé- rieure de bas en haut, le mouvement du cerveau devoit pa- ‘oître : cela fuivoit D os de mes idées, mais il faloit démontrer que l'obfervation étoit d'accord avec elles.

1.° Ayant enlevé par le trépan une pièce de crâne dans un chien, j'ai obfervé les mouvemens du cerveau à l'ordinaire ; ils ont fubfifté malgré 1a ligature des veines jugulaires.

.” Ayant délié ces veines, j'ai évidemment que dans le an de l'expiration elles fe gonfloient dans toute leur étendue, & s’aflaifloient prefque entièrement dans celui de Vihfpiration : le chien étant afloibli, laffaiflement paroïfloit fe faire par fecouffe, & l'abaïffement du cerveau qui s’obfer- voit en même temps, paroifloit alors auffi fe faire par fecouffe. 73." Ayant coupé les veines jugulaires, ayant plongé le

| falpel dans l'intervalle des deux apophyfes tranfverfes des vertèbres du col, pour couper les veines vertébrales, le mou: vement du cerveau fubfiftoit encore auffi fenfble qu'aupa- Fa dt Ayant coupé l: trachée- artère, le mouvement du Eh n'étoit prefque plus fenfible, même lorfque l'on pref- foit médiocrement la poitrine; fi lon bouchoit avec le doigt

ha partie de Ja trachée-artère qui tenoit aux poumons, Je

mouvement redevénoit très-fenfible dans le cerveau.

S: * Ayant ouvert veine cave, en plongeant le fcalpel dans la poitrine au deflous de Ja première côte, on n'obfer- voit. plus aucun mouvement, même en preffant fortement à poitrine.

.6. Ayant ouvert la poitrine, un des affiftans prefla la ortion fupérieure de la veine cave de bas en haut, & l'on

remarqua dans Île cerveau un petit mouvement d’élévation:

lors de la preffion, & ün mouvement d'ibaiffement lorfque Fo on “ceffoit de preflers :

10.° Expériences

Tite Expérience,

552. MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE.RorALEe

1.” Le 17 Avril, je fis trépaner un chien qui.avoit reçû un coup fur la partie lupérieure de la tête, près de l'en- droit lon appliqua. la première couronne ; ayant enlevé une pièce du crâne, le cerveau fe porta en dehors , de ma: nière quil déborde boito oflule, J obfervai avec atten- tion cette portion du cerveau, je ne pûs. y remarquer aucun mouvement d'élévation ni d'abaiffement : la preflion même de la poitrine n'a pas paru faire une élévation bien fen- fee,

* Ayant appliqué le trépan de l'autre côté du crâne, a, or avec attention la partie découverte du cerveau, je ny ai point obfervé de mouvement ; cette portion, ainfr que la première, débordoit les os du crâne. ° L'animal ayant perdu beaucoup de fang, je vis pa- nes mais foiblement, les mouvemens ordinaires du cerveau. Ayant ouvert le bas-ventre, je preflai la veine cave de bas en haut; cette preflion produifit un mouvement très- fenfible du cerveau; ce vifcère s'élevoit au temps de {a pref fion, _& s'abaifloit lorfque je la difcontinuois.

5. Ces mouvemens devinrent bien plus confidérables, lorqu'ayant enlevé le flernum je preflai la veine cave fupé- rieure.

La dixième expérience découvre.en partie ce que je pré tendois démontrer; on y aperçoit une correfpondance exacte entre le gonflement des jugulaires & celui du cerveau : la- baiflement de ce vilcère fe fait au moment que ces veines fe defemplifent; & fi elles fe vuident par fecouffes, l'abaif. fement du cerveau participe à cette irrégularité, Cette expé- rience offre quelques phénomènes particuliers dont je donnerai l'explication dans la fuite de ce Mémoire, il ne s’agit ici que d'établir la vérité du reflux du fang comme caufe des mou- vemens du cerveau.

La onzième expérience démontre que le fang repouffé des veines caves vers le cerveau, produit l'élévation de cette partie; en même temps elle nous fait voir que les veines du cer: veau peuvent être quelquefois fi remplies de fang, que les

| mouvemens

%

LIAVPARSMET É re AG #01 53 mouvémèns ordinaires de la refpiration n’y produifent point les changemens que lon # coûtume d'y obferver. Rydley avoit déjà fait à méme remarque, qui n'eft pas inutile pour faire fentir que quoique ces mouvémens du cerveai ne pa- roïflent pas toüjours, on ne doit pas {e preffér rien con- clurre contre leur réalité; il eft une infinité de caufes étran- gères! à l'état ordinaire des animaux, qui peuvent les empècher de fe manifefter. } OL pr eSaN

Quoique mes derniers éflais püflent paroître fuffifans pour établir inconteftablement mon explication, je ne n'en füis pas contenté , & j'ai été récompenfé de mon opiniâtreté à chercher l'évidence. HORS

1.” Le 30 du mois d'Avril, j'ai fait trépaner une chienne affez vigoureufe , & après avoir enlevé la dure-mère je vis! les mouvemens ordinaires du cèrveau; ces mouvemens étoient affez foibles d'abord, mais ils’ fe rendirent bien fenfibles, la fefpiration étant devenue ‘plus forte. (PAM RRHIONR __ 24° Je fis mettre ànu les veines jugulaires, & j'obfervai _ leurs gonflemens & leurs affaiflémens, comme dans la dixième expérience, mais un peu moins mänifeftement; je fis lier ces veines, des niouvemens perfiftèrent dans le cerveau; je les coupai, & für le champ ces mouvemens diminuèrént confr: dérablement : ils augmentoient un peu lorfqu'il y avoit de fortes expirations. 7 | ile à 11 3197 J'ouvris le bas-ventre, je preffai fa veine cave de bas éh'haut, de cerveau s'élevoit &'Sabaifloit comme dans la onzième expérience. LGSe | ‘044% J'obfervai évidemment que la veine cave, dans le bas- ventré, fe gonfloit pendant Fexpiration, & fe defemplifloit pendant linfpiration; je fis couper la veine cave, le fang fortoit de l'extrémité fupérieure pendant l'expiration, il étoit réponipé peñdant l'infpiration.

8) s«” La’chienne tomba dans l'affoupiffement; elle refpiroit

fortement ,& 1e mouvemerit du cerveau ne paroifloit que

râreent &'foïblement ; cepéndant, dans ces dernières cir-

conftances, lorfque cerveau étoit portéen dehors, une petite Mém, 1749: . Aaaa

12.° . Expérience,

13°

Expérience.

554 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE veiné qui fe voyoit à fa furface,! fe gonfloit, & {e-vuidoit, RER le cerveau Saflaifloit. æ , Le 6 de Mai, je trépanai un jeune chien, joblenat les mouvenens du cerveau à l'ordinaire. Mk ° Je découvris une, des veines jugulaires , &:je. vis. très- | Ladies qu ’elle fe gonfloit dans toute fon étendue pen- dant d'expiration, & qu'elle fe defemplifloit dans fe temps de Jinfpiration. Des valvules qui fe trouvoient dans, ces-veines, ne s'oppofoient point au-reflux ‘du fang qui produifoit eur gonflement : les mouyemens du. cerveau. iparoifloient mani- feftement : fynchrones. avec. les, mouvemens. de cette. veine jugulaire; quand elle fe gonfloit, le cerveau, s'élevoit; quand elle fe vuidoit, le cerveau s'abaïfloit ; &: loxfqu' elle fe defem- plifloit par fecoufles ; le cerveau s’aff: aifloit de la même manière. ET J'ai ouvert. le bas-vente, Jj'ai-mis: à,nu la veine cave & les iliaques,, j'oblervois. chirement que.dans lelteps de l'expiration la veine cave & les iliaques, fe: gonfloient ,-&{e defemplifloient dans celui de_linfpiration., Une valvule qui fe wouvoit au ramçu, gauche de l'iliaque., mempéchoit. point que Je: fang ne refluät au delà pendant. l'expiration, la veine méfentérique,. qui étoit aufli expolée à motre yüe, ne nous a pau fouffrir:aueun, changement fenfble : ls chien, rcpirois

alors; tranquillement. pr Pendant qu'un des affiftans repardoit: se en ces: veau pour remarquer fon degré. d'élévation ; je fis couper la veine cave inférieure, & fade champ celui qui obfervoit de cerveau le vit saffaifler notablement; dans: là. “fuite. ik.ne {e-releva j Jamais au. mème point il étoit avant Jai fection de a veine cave, à qriee Ja relpiration demeuré toûjouss la, rt / "ri “bris «1 Après ve 36h de Fe je découvris l'autre veine Lt & ayant comprimé la poitrine; jevis. le fang refluer par les deux veines : le cerveau fe porta en dehors dans le même temps, il s'afflaifloit lorfque le fang ceffoit.d’ ‘étrerponiié vers les jugulaires; les ivalvules ne s'oppoloient pas ce reflux, <omme. je l'avois déjà. obfervé dans le vivants} 2 02fri08

LTDÉE SN ST 1h N CC 28 8: 0 Ma M 555 “Après des: faits tels que. ceux que je: viens de rapporter, il me paroît démontrétavec la dernière évidence que le reflux du fang: vers deicerveau efblà- véritable cafe dés mouve- mens diélévation de’ce:viléète, &c que fon: aflaiffèmenit n'eft: qu'ài lai facilité avec: laquelle le fang fe porte vers des: gros vaifleaux dela poitrine dans le temps de linfbiration : une fnmple leéture tant foit peu ‘réfléchie des expériences douziènie & treizième, doitconvai crée les plus fcrüpuleux: de la réalité de ce que je viens d'avancer ; je érois donc inutile de peler für les conféquences: que l'on peut tirer de’ces obfer- vations, elles fuffifent pour établir {olidement Ié-principe fur lequel j'ai appuyé mon .explication ; mais il refte encore à développer la caufe de ce reflux du fang ; à détailler un -pêu plus particulièrement la manière: dont 4: produit l'dévationr du cerveau, à diffiper quelques doutes Que ‘pourrôient Haïifler. certaines circonftances de quelques-unes res expériencés ; enfin il convient ‘d'examiner fr Foiv'peut appliquer au éorps humain tout ce qui fuit de ces’obfervations faites fa les

animaux. AN

D toi 1Q BOL XHOLUII SENS 1101)

D la caufe di reflux, du fans vêrs ‘les Veines L‘ ampdoso-euonHRÉTÉATES SE ÉHÉrnre au Les veines jugulaires fe gonflent pendant l'expiration, Ha veine cave inférieure & les iliiques rempliffent suffi dans le :même temps, & tous ces vaifleaux 1e vüident fe défema | pliffent 1or{que l'animal infpire: ce: font des!-faits: dont: lai vérité eff bien-conflatée: il: paroît qué Fon rie peut attris buer! ces phénomènes ‘qu'à lune dés: trois! éaufes fuivantes. A? On-pôurfoit croire’ que dans le temps de l'expiration le:fang coule avec difficulté au travers des Ivaiffeaux pülmoz naires'}° que ‘par conféquent il s’iceümule dans le ventricülé droit du cœur & dans l'oreillette correfpondante: ces cavités ne fe. defémplifflant point alors/ avec ta! thôme facilité qu'au- paravant, éffitént plus de iéfiflaticé au fang qui dôît y ‘aborder par des veines caves : l'effét: lcette réfiflance ef? le aième qué’celui d'une” ligaturé plus ou rioins ns d'où il fui aaa ij

56 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

que le fang doit fe ramafler dans les troncs des jugulaires, dans la veine cave inférieure & fes rameaux, & produire de gonflement de ces vaiffeaux tel que lobfervation le démontre: le contraire doit arriver pendant l'infpiration ; parce que: les poumons tranfmettent les fluides avec plus de facilité dans cette dernière circonftance. Cette explication paroît avoir fixé prefque tous les Auteurs qui ont recherché les caufes du gon- flement des jugulaires , qui, s'obferve, dans l’homme même en plufieurs occafions.

2.° La contraction du ventricule droit ou celle de lo-

* Lancii, reillette correfpondante, a fourni à quelques grands hommes*

Hombers.

la raifon du renflement alternatif des jugulaires & des autres. veines, qu'ils avoient obfervé dans des cas extraordinaires. Le ventricule droit;:fon oreillette & les troncs des veines-caves fe trouvoient fort dilatés dans les cadavres de ceux fur 1e quels. -ils avoient. obfervé ce phénomène ; ils ont penfé que le ventricule ou l'oreillette, en fe contractant fortement, pou- voit répouffer le fang vers le fyftème veineux : Jeur fentimentl étoit encore mieux fondé par les concrétions polypeules qu'ils voyoient en mème temps dans l'artère pulmonaire ; ne feroit- il pas poffible qu'une caufe femblable, mais moins puiffante dans l'état naturel, produisit ce reflux dont nous cherchons l'explication? 1:20 à esnisu sel 3.° Ce reflux ne peut-il pas être attribué à {a preffion faite fur les vaifleaux renfermés dans la poitrine, & ne peut-on pas démontrer que cette preflion doit être réellement plus, forte pendant l'expiration que pendant Finfpiration? + :: ,,, Une feule réflexion tirée de l'expérience, fuffit pour réfuter: la première explication; ce n’eft pas fimplement le,fang arrêté par:ün obftacle quelconque qui gonfle les vaifleaux au delà! defquels il ne peut pas couler; cef un fang que l’on voit refluer de la. poitrine dans les jugulaires & la veine cive du. bas-ventre;; L'œil. fuit les mouvemens rétrogrades de ce fluide: des troncs vers les rameaux qui s'y rendent: une caufe qui ne feroit qu'empêcher ou. diminuer le cours du. fang vers l'oreillette droite. & le cœur, *eft donc une caufe infuffifante,

pNENSMISTE IE N'o"E'S, S57 pour produire le phénomène tel qu'il a été obfervé.

On peut ajoûter à cette réflexion un raifonnement qui ne me paroît pas moins folide. L'hypothèfe dont je viens de démontrer l'infufffance, eft appuyée fur un fondement mal afluré, elle fuppole que le fang coule avec plus de facilité dans les vaïfleaux du poumon pendant l'infpiration que pén- dant lexpiration ; cela n'eft vrai que lorfque lon compare les poumons affaiflés avec les poumons diftendus par Y'air juf- qu'à un certain point ; ce n'elt plus la même chofe lorfque Yon compare entre eux les changemens fucceffifs que fouf- frent ces vifcères dans les degrés différens de leur dilatation & de leur affaiflement : l'action qui dilate les poumons n’eft point inftantanée, non plus que celle qui les refferre; dans le ipremier moment de l'infpirätion, les vaiffeaux dés pou- mons font moins développés que dans le premier moment de l'expiration , de même qu'ils font plus dibres :dans 1e der- nier degré dela dilatation de ces vifcères que dans le der- nier degré de leur affaiffement ; 14. facilité du pañfage croît pendant tout le temps que les poumons fe gonflent, elle décroït proportionnellement pendant qu'ils s’'affaiflent ; de manière qu'en confidérant les différens degrés de ces deux mouvemens ‘par rapport au plus ou moins de facilité qu'ils offrent-au cours du fang chaffé vers l'artère pulmonaire , il énréfulte beaucoup plus clairement que je ne faurois l'ex- primer, que cette facilité eft la même pendant le temps entier d’une infpiration que pendant celui de l'expiration qui fuccède: légalité du pouls dans ces deux temps prouve bien claire- ment Ja même vérité. -Letfentimènt de ceux qui voudroient expliquer le reflux du fang par l'aétion du cœur & de l'oreillette droite, ne fembleroit:-pas d’abord deftitué de vrai-femblance ; j'ai plufieurs: fois, & très-diftinétement, un refoulement du fang vers les véines'caves, qui correfpondoit aux contractions du cœur & de oreillette: il eft vrai que ce reflux ne s’étendoit à guère plus de trois ou quatre lignes dans la veine cave fupérieure, maison pourroit dire que dans les circonftances

Aaaa ii

553 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE de mes obfervations, l'aétion de l'organe vital étoit beaucoup, diminuce; cependant je fuis bien éloigné de croire que éette explication foit la véritable: le reflux du fang dans les veines n'a lieu que pendant l'expiration, & l'on ne peut nier ;qué: le: cœur & l'oreillette n'agifient fouvent pendant l'infpiration, laquelle pourtant ne prélente jamais ce phénomène. J'exa- minerai dans un autre Mémoire qui doit {ervir, de: fupplé:, ment à celui-ci, fi la caufe que je viens de réfuter par rapport à l'état ordinaire des organes vitaux, 4 avoir lieu dans les cas extraordinaires que J'ai indiqués. tie OS Je viens de faire voir que l'on ne peut attribuer le reflux du fang ni à la difhcuhé qu'il trouve à pafler au travers des poumons pendant l'expiration, ni à la contraction du cœur ou de l'oreillette droite ; ‘il femble donc qu'il n'y a point d'autre caufe de ce phénomène que la preflion que fouffrent les vaiffeaux renfermés dans la poitrine lorfqu'elle fe eflerre ;; il eft aifé de prouver que dans ce temps cette preflion, doit être plus grande que dans celui de linfpiration. Pour que les cellules pulmonaires puifient fe remplir d'air, il faut nécefai- rement que la capacité du thorax foit augmentée; les parois mobiles de cette cavité fuient, pour ainfr dire, devant es poumons qui {e gonflent, elles ne leur préfentent aucune réfiftance; d'air répandu entre la furface deces vifcères-& la plèvre, devient plus rare, il fe: forme un vuide dans 1èquel ils peuvent être: müs dibrement *, fans faire aucun effort:für,

ras )

# Dans cette explication , j’admets

de l'air dans la cavité dela poitrine; je crois l’exiftence de cet air démon-

trée par les expériences.de: M. Hales,

(Hæmafi, Exp, XII, 10). Je les ai répétées fouvent avec fuccès; j'ai auflf très-fouvent l’efpace entre Ja plèvre, & les poumons, comme Yavoit déja obfervé M. Morgagnt, & après lui plüifieurs modernes: les inftrumens -qui! paflent d’un: côté à Vautre de la poitrine fans blefler: les

démonflration de cet efpace. Pour

une légère. attention ,;.que quoi poumons, me paroïffent fournir une i

faudroit) pas moins reconnoître que

) [ )11D HO! 1 :

ôter lieu au fabrerfuge dont quelques= uns fe fervent pour éluder la force de cette dernière expérierice :, fa appliqué-plufieuxs fois: un petit en- tonnoir,plein d’eau à un des côtés de Ja poitrine, &'ÿai pouité des ftilets wavers l’eau d’un côté: de: la! poi= wine à l’autre; il m'eit arrivé twès- fouvent de ne point bleffer du tout lés poumons.‘ Quoï qu'il én'foit de lexiftence-de-cet-air, lil-paroîtrasrpar

y 2!

même on ne ladmettroit pas ,. n’en

Z

DES SCIENCES 559 les parties qui les environnent : le contraire arrive pendant l'expiration; les parois de da poitrine, en fe reflérrant, preffent fortement les poumons , dont le volume ne:peut diminuer aufli facilement qu'il s'étoit amgmenté , à caufe de la difi- culté que trouve l'air à s'échapper de la cavité fpacieufe des cellules pulmonaires, par la fente étroite: de la glotte; les poumons preffent donc alors les parties renfermées dans le thorax, &. par conféquent les troncs veineux. Je ne poufle

s plus loin les preuves que fournit le raifonnement ; ce que j'ai dit fufht fans doute pour établir une vérité qui n’eft peut-être conteftée d'aucun Phyfiologifte : expérience la rend encore plus fenfible; quand on ouvre un efpace ‘intercoftal dans un animal vivant, on voit les poumons pouflés avec force ‘autravers-de la plaie pendant expiration , ce quin'ar- rive jamais pendant l'infpiration. 1H eff! donc vrai que les troncs veineux des véiniés caves, renférmés dans a poitrine, font plus preflés dans l'expira- tion que dans Finfpiration ; il eft certainement poffible que cet excès de preflion fufhe pour faire refluer le fang vers le fyflème veineux fupérieur & inférieur, & je crois que l'on peut très-raifonnablement conclurre: ici de 1 puiffanice à l'adte; carion obferve que le fang reflue, &iŸoh ne voit point d'autre caufe de ce reflux que celle que je viens d’affigner, & dont on ne fauroit difputer la poffibilité.

‘ÆErmimitant le jeu de a refpiration , l'animal étant mort, on aperçoit. évidemment les mêmes phénomènes que dans le vivant ; fi fon comprime les côtes, le fang eft repoutfé vers des jugulaires & a veine cave du bas-ventre; f'on les aban- donne à elles-mêmes, ces -vaïffeaux fe defempliffent dans 1e

les parties qui font contenues dans la | ordinaires Fefprit de vin s'élève à Ja oitrine font moins preflées pendant | ‘hauteur de fix pouces dans un tuyau Finfpiration. M. Hales a mefuré la |. dont l’extrémité recourbée, eft fixée quantité du vuïde que j'ai fuppofé, | artiftement à un des côtés de la poi- par une expérience très-ingénieufe& |-trine; dans les infpirations laBorieufes trèssdélicate qu’il rapporte. dans, la | & difficiles, l’efprit de vin monte juf- Sud que des végétaux {page 216); | qu'à vingt-quatre & trente pouces... il obferve que dans les infpirations

s6o MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE moment : que la trachée-artère foit coupée & que l'on ne bouche pas fon extrémité qui tient aux poumons, quoique l'on prefle la poitrine, le reflux & les mouvemens du cerveau qui en dépendent ne font prefque plus fenfibles ; mais que l'on ferme exaétement cette extrémité de {a trachée-artère } & que l'on fafle par ce moyen que les poumons réfiftent-à la force qui tend à les reflerrer, le reflux & les mouvemens du cerveau paroîtront très-clairement. Ce font des faits que lon a remarquer dans la dixième expérience, &qui me femblent mettre fous les yeux le méchanifme du reflux tel que je viens de l'expliquer.

J'obferverai cependant que le mouvement d'expiration n'eft pas abfolument néceflaire pour que les troncs veineux de la poitrine foient preflés de façon: à faire refluer le fang vers les veines fupérieures, il fuffit qu'après avoir dilaté les poumons par l'infpiration, l'on oppole en fermant la glotte, un obftacle invincible aux caufes qui tendront alors à des affaïfler; car il eft évident, dans cette fuppofition, que les parois mobiles du thorax agiront aufit fortement qu'il fe puiffe contre les poumons, & les prefferont contre les troncs veineux avec plus d'énergie que dans les expirations ordi naires. C'eft ce qui arrive dans ceux qui font de grands efforts; on fait qu'ils mettent en jeu les mufcles du bas-ventre, & qu'ils retiennent en même temps leur haleine, ce qu'ils ne peuvent faire qu'en fermant exactement l'ouverture de la glotte: l'air retenu dans les cellules pulmonaires, raréfié par la chaleur, a plus de reffort; il peut'par conféquent, dans les circonftances dont il $agit, augmenter encore k preffion que fouffrent les troncs veineux.

De la manière dont le reflux du fang produit

l'élévation du cerveau.

Pour entendre aifément de quelle manière le reflux du fang vers les veines jugulaires & vertébrales produit l'éléva- tion du cerveau, il fuffit de rappeler quelques faits d’Ana- tomie, ù

ea Le

DES, SCIENCES. s6t 1." Le cerveau recouvert de la pie-mère ne touche point immédiatement la dure-mère, on démontre un efpace entre elle & ce: vifcère : Fernel Favoit oblervé ä y a Iong-temps, M. Schligting s'en eft convaincu par {es propres expériences ; celles que j'ai faites m'ont appris la même vérité. Ce n’eft pas ici le lieu d'examiner fi cet efpace eft vuide ou s'il eft rempli de quelque fluide élaftique, il eft certain qu'il exifte. 2.° Le cerveau porte fur plufieurs finus de 11 dure-mère, tels que les caverneux, les pétreux & les orbitaires.

Il y a une quantité confidérable d'artérioles & de veines fanguines répandues dans le tiflu du cerveau, fans en excepter la fubftance médullaire : l'iluftre M. Senac a ces vaifleaux fi preffés dans le cerveau d'une fille, qu'à peine pouvoit-on placer dans leurs interftices la tête d’une épingle.

Les vénules qui rapportent le fang du tiflu du cerveau, s'ouvrent dans les différens finus de la dure-mère. Ces faits étant admis, on conçoit que le gonflement ou l'élévation du cerveau peut dépendre de deux caufes, favoir, de la dila- tation des fmus fur lefquels porte ce vifcère, & de 1a dila- tation de toutes les petites veines qui entrent dans la com- pofition de fes différentes fubftances.

Quand on connoît la communication des veines jugulaires & vertébrales avec les finus latéraux, la communication de ceux-ci avec tous les autres finus de la dure-mère, il ny a aucune difficulté à concevoir que le fang repouflé par les jugulaires & les vertébrales doit gonfler tous les finus de a dure-mère, & par conféquent foùlever les portions du cer- veau qui font polées fur quelques-uns d’entre eux; je crois cependant que ceite première caufe n’eft pas celle qui produit principalement Félévation du cerveau, fon mouvement paroît top uuiformément répandu dans toute fa maffe. La dilata- tion des veines qui entrent dans le tiflu de ce vifcère, me femble être la principale caufe de fon gonflement : cette dila- tation dépend du reflux du fang de la cavité des finus dans les vaiffeaux veineux qui s'y abouchent : ce reflux ne paroîtroit peut-être pas vrai-femblable, fi l'expérience ne le démontroit

Mém. : 749. . Bbbb

Taité de la fracture ducaur,

tome II, p. 74+

562 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE

aux yeux; mais j'ai le fang jaillir d’une petite veine qui rampoit le long du finus longitudinal / 9: Expérience) toutes les fois que je preflois la poitrine & que ce fmus fe gon- floit. J'ai dans l'animal vivant qu'une veine qui ferpentoit fur da furface du cave, fe remplifoit / r 2.€ Expérience) aufli-1ôt que ce vifcère fe portoit en dehors, & qu'elle fe vuidoit lorfqu'il s'aflaifloit : le fang repouffé par les veines jugulaires & les vertébrales, peut donc refluer * jufque dans les vaiffeaux qui compofent le cerveau; & lorfque ce reflux aura lieu, ce vifcère, dont le volume augmente alors nécef- fairement, s'élevera plus ou moins, fuivant les différentes intenfités de la caufe que je viens d'expliquer. Cette même caufe fera voir clairement la raifon d’un phénomène que jobfervai dans la neuvième expérience : le finus longitudinal paroifioit fe gonfler, principalement fur la fin de l'élévation de la voûte médullaire; c'eft qu'alors les vaiffeaux du cerveau diftendus jufqu'à un certain degré, ne pouvoient plus réce- voir le fluide qui étoit repouflé vers le finus par la preffion conftante de la poitrine.

L'affaiffement du cerveau qui fuccède à fon éévation, ne renferme aucune difhculté : lorfque le thorax eft dilaté pen- dant l'infpiration , les troncs veineux de la poitrine ne font plus preffés; le fang pouffé par l'action du cœur & la preffion de l'air extérieur, fe précipite, pour ainfi dire, vers les veines

* Ce reflux du fang dans le tiffu même du cerveau, me paroît fournir une explication bien raifonnable du phénomène qu’obferva M. Schlig- ting dans le cerveau d’un chien vigou- reux: ayant introduit fon doigt dans l’intérieur de ce vifcère, & fait ex- citer des convulfions dans Panimal , en piquant la moëlle alongée, il fen- toit manifeftement un mouvement de pulfation autour de fon doist : ce mouvement étoit plus fort quand les convulfions étoient violentes, & di- minuoit à proportion qu’elles s’affoi- blifloient. Î n’a obfervé cette pulfa- tion qu’une feule fois, mais il aflure

qu'ayant tenté la même expérience dans d’autres chiens, il a fenti conf tamment l'intérieur du cerveau fe durcir au moment que l'animal étoit agité de fortes convulfions. J'ai fait voir dans larticle précédent com- ment les efforts d’un animal devoïent déterminer un reflux du fane plus confidérable vers les veines du cer- veau, & par conféquent occafionner une plus forte preflion fur une partie environnée de ces vaifleaux : fr ces oblervations de M. Schligting étoient bien confirmées, je les regarderoiïs comme une démontftration de l’ex- plication que je viens de donner.

D etis4 :S C1 E NICE: s4 563 caves; les jugulaires fe defemplifient, &, par une fuite nécef. faire, la: même chole arrive dans les fmus & dans les veines

i s'y ouvrent: le volume du cerveau diminue, & par con- féquent il s’affaiffe, jufqu'à ce qu'une nouvelle expiration pro- duife un nouveau gonflement. Dans le fœtus, les troncs veineux dela poitrine font conftamment preffés autant qu'ils peuvent l'être; la caufe qui fait changer fuccelfivement le volume du cerveau n'y a donc point lieu, & par conféquent ce vifcère doit être conçu fans aucune agitation jufqu'au temps que l'animal commence à refpirer : le premier mouvement de la refpiration eft celui qui dilate le thorax, qui diminue B preflion que foufirent les veines caves, & qui, par une fuite néceflaire, occafionne l’affaiflement du cerveau, comme je l'ai expliqué ci-deflus. I füit de ce que je viens de dire, que dans l'ordre des mouvemens du cerveau, le premier ef celui par lequel il femble fe reflerrer.

Explication de certaines circonflances de mes expériences, qui paroiffent peu d'accord avec la théorie que je viens d'établir.

1.” « La ligature des jugulaires n'empêche point les mou- vemens du cerveau , elle ne les diminue pas même fenfible- ment : il eft pourtant für que cette ligature intercepte une partie confidérable du fang dont le reflux occafionne le gon-

flement du cerveau ». e I eft vrai que la digature des veines jugulaires diminue la

quantité des fluides qui doivent fe porter au cerveau, mais .

auffi elle s'oppofe au retour des fluides vers le cœur, ellé produit donc néceflairement une diftenfion plus grande \des fimus ; ces cavités étant plus dilatées ; les orifices des vaifleaux qui s'y abouchent font plus duverts, & par conféquent-rece: vront plûs facilement le: fang qui fera repouflé par les véines vertébrales, ce qui fuffira pour foûtenir les mouvemens: du cerveau. sp 92 ie p 52

Cette réponfe devient d'autant plus fatisfaifante , que l'in cifion des jugulaires, qui produit un eflet de vu à»celui de

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564 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE

leur ligature, c'eft-à-dire, qui fait que les finus fe defem- pliffent dans une grande proportion, diminue notablement les mouvemens du cerveau; c'eft ce qu'on a remarquer dans les expériences 8. & 12.°

2.” « Les veines jugulaires & vertébrales étant coupées, les mouvemens du cerveau devroient cefler, fuppofé que leur caufe füt le reflux du fing; ces mouvemens ont cependant fubfifté dans l'expérience dixième ».

Dans la feptième expérience, les mouvémens cefsèrent après que l'on eut coupé les veines jugulaires & vertébrales, &: il fut alors impofhible de les faire reparoître par la com- preffion de la poitrine, quelque forte qu'elle füt; if y a donc tout lieu de préfumer que dans le dixième eflai, les veines vertébrales mavoient point été coupées, quoique lon eût plongé un fcalpel dans l'intervalle de deux apophyfes tranf- verfes des vertèbres du col. Cette préfomption fe changera en certitude, fi l'on fait attention que dans la même expé- rience on fit reparoître les mouvemens du cerveau , en comprimiant de bas en haut la portion fupérieure de la veine cave; cette dernière circonftance prouve évidemment qu'il y avoit encore une communication entre la veine cave & les finus de la dure-mère: cette communication ne fubfiftoit pas au moyen des jugulaires qui étoient évidemment coupées.

3.° « Dans la dixième expérience, les mouvemens du cerveau fubfiftèrent après que l'on eut coupé les jugulaires d'une manière auffi fenfible qu'auparavant; ce qui n’auroit pas s’obferver, au moins fuivant la réponfe que j'ai donnée à la première difficulté». :

Il y a toute apparence que la refpiration devint plus forte après que l'on eut coupé ces veines; nous obfervämes dans la douzième expérience, que les mouvemens qui: étoient diminués aufli-tôt après l'incifion des jugulaires, redevinrent plus fenfibles lorfque les expirations étoient plus violentes: ce que jai obfervé dans ce dernier cas, peut avoir ew lieu dans celui qui fert de :bafe à cette toifième objeétion:

4«?. « Dans la feptième expérience, les mouvemens: du

DLELS: LS C:1 E.N:C ES s6 cerveau qui avoient totalement ceffé après l'incifion des ju- gulaires & des vertébrales, reparurent lorfque animal, près d'expirer, entra en convulfion; quelle pouvoit être caufe de ces mouvemens? on ne peut pas attribuer au reflux du fang par des vaifieaux qui étoient certainement COUPÉS ».

Je réponds 1.” que ces mouvemens furent très-petits, &c ‘qu'ils ne fubfifièrent que quelques inftans; 2.° les pulfations que l'on obferve dans les finus ffur-tout des animaux afloiblis, peuvent repouffer alternativement le fang vers les veines du cerveau, ou les empêcher de fe defemplir en tout temps avec une égale facilité: laquelle de ces deux fuppofitions que l’on admette, il me paroît que l'on aura une caufe fuf- fifante de ces mouvemens très-foibles qui parurent dans le cerveau de lanimal , quelques momens avant qu'il expirât *.

Peut-on appliquer au corps humain tour ce qui fuir des obfervations faites fur les animaux ?

Il-neft pas douteux que le cerveau de l’homme ne foit fujet aux mêmes mouvemens que celui des chiens fur lefquels on a fait des expériences; M. Schligting rapporte plufieurs obfervations qu'il a faites lui-même fur des fujets humains, & qui répondent parfaitement à ce qu'il avoit dans les animaux. Riolan a obfervé la même chofe fur le cerveau d'un homme dont le crâne avoit été rongé vers la partie inférieure des pariétaux, par une carie vénérienne: la même caufe qui produit ces mouvemens dans les animaux, paroît avoir lieu dans fhomme, je veux dire, le reflux du fang vers les veines fupérieures, & dans le temps de l'expiration: ce reflux devient très-fenfble dans les expirations un peu

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* Ce n’eft pas feulement dans le | à cet égard aucune différence entre cerveau que j'ai les mouvemens | le cerveau & le cervelet: les mêmes d’élévation & d’affaiflement , je les | mouvemens auroient-ils lieu dans [a ai obfervés avec Ja même évidence | moëlle de l'épinef cela n’eft pas hors dans le cervelet d’un chien vivant, | de vrai-femblance, mais il me pa-

& jai les faire reparoître dans | roît difficile de s’en affurer, au moins.

Fanimal mort; -M. Schlisting avoit | dans les animaux vivans.

donc raifon.de penfer qu'il n’y avoit çà Bbbb iij

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= À

. *Effais dE’. dimbourg, t, II.

566 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE fortes & foûtenues; lorfque l'on crie, que l'on chante, qu'on parle même avec vivacité, les veines jugulaires fe gontlent évidemment : d'ailleurs, il femble que la ftruéture anatomiz que n'offre point dans l'homme des différences aflez confidé- rables pour que cette caufe n’y agifle pas aufli-bien que dans les animaux fur lefquels j'ai fait mes obfervations. L'on doit conclurre de toutes ces réflexions, que l’on peut appliquer au corps humain toutes leskconféquences qui fuivent de ce que jai obfervé fur les chiens; ces conféquences fe pré- fentent en foule, j'en choifirai quelques-unes qui me paroiffent avoir un rapport plus immédiat avec le reflux du fang que j'ai établi.

1. On connoit clairement pourquoi l'aétion de parler augmente la douleur de tête, pourquoi la toux produit le même eflet; dans ces deux cas il eft évident que le fang eft repouffé plus fortement vers les membranes du cerveau, qui doivent donc être alors plus diftendues, & par conféquent plus irri- tées : je remarquerai en pañlant que lon à dans une toux violente, le cerveau fi vivement porté en dehors, que les tégumens cicatricés qui tenoient lieu d’une portion du cräne, en avoient été déchirés *; cette obfervation fait fentir da grandeur des effets que peut produire le reflux du fang.

2... Dans les fraétures des os de la tête, après lapplica- tion du trépan, lorfqu'il e trouve du fang ou du pus épanché entre la dure-mère & le crâne, les chirurgiens, dans la vüe de procurer une évacuation plus prompte & plus abondante de ces matières, ferment la bouche & le nez du malade en lui ordonnant de fouffler ou expirer avec force; quelquefois ils lui prefcrivent feulement de retenir fon haleine en faifant en même temps les mêmes efforts qui font prdinaires dans les cas des felles difficiles & laborieufes: enfin, lorfque le malade n’eft point affez à lui pour entendre & fuivre les avis qu'on lui donne, quelques-uns conféïllent de lui mettre dans les narines des poudres fternutatoires : la raifon du faccès de ces différentes pratiques fe déduit clairement de la théorie des mouvemens du cerveau; elles produifent toutes

DES SCIENCES. 67 une preffion plus forte fur les troncs veineux de la poitrine; elles doivent donc occafionner un plus grand reflux du fang vers le cerveau, en augmenter davantage le volume, &, par une fuite néceffaire, exprimer les liqueurs qui féjournent entre la dure-mère & le crâne.

3.° I fuit encore de cette théorie, que la fubftance médul- lire du cerveau doit être dans une agitation continuelle, à caufe, des changemens qu'elle éprouve à l’occafion des mou- vemens fucceflifs de la refpiration; cette agitation paroît devoir contribuer à l'explication des ufages des nerfs, mais la manière dont elle y contribue ne nr'eft pas connue, & il me femble que l'on ne peut guère donner à ce fujet que des hypothèfes vagues qui ne contenteroient point des efprits raifonnables. |

Les expériences que j'ai rapportées, & dont je me füis fervi pour expliquer les mouvemens du cerveau, me paroif- fent encore fournir des Corollaires plus importans; elles éta- bliffent l'ufage des valvules dans les veines, elles font aper- cevoir la raifon de la différence de ces valvules, de leur pofition ; elles font connoître pourquoi elles ne s’'obfervent pas dans tous les vaifleaux veineux: ces mêmes faits jettent les fondemens d'une théorie nouvelle de a faignée, ils font fentir l'importance des effets que produit la re‘piration pour le mouvement du fang, ils donnent lieu à des idées qui pour- ront paroïtre paradoxes, au fujet des caufes de la circulation & de Ia progreffion du chyle, mais qui n’en font pas moins vraies ni moins folidement établies : ils peuvent fervir à l'explication d’un grand nombre de phénomènes.

Tous ces Corollaires ne peuvent être développés que dans un Mémoire à part, que je me propole de donner bien-1ôt comme une fuite de celui-ci.

Je finis en priant les lecteurs de vouloir bien excufer le: détail je fuis entré en rapportant mes expériences ; j'ai cru ne pouvoir m'en difpenfer par plufieurs raïfons, 1.° J’aurois ne rapporter dans mes effais que les circonflances qui étoient favorables à ma théorie, & qui étoient décifives en.

s60 Mn. DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES. fa faveur; par, je ferois devenu beaucoup plus court, mais auffi j'aurois manqué d'exactitude, & ceux qui répéteront mes expériences , pourroient avec railon me reprocher ma né- gligence, même m'accufer de mauvaile foi. 2.° Si lon fait attention aux principes fur lefquels j'appuie mes raifon- nemens, il fera facile de fe convaincre qu'il n'eft prefque au- cune circonftance dans mes expériences, dont je n'aie eu lieu de faire application dans ma théorie. 3.” J'ai cru que le récit fidèle de mes différentes tentatives ne feroit point inu- tile, en cela même qu'il feroit fentir par les doutes & les erreurs des faits que j'obfervois m'ont entretenu pendant quelque temps , combien il eft néceflaire de varier fes recher- ches & de réitérer les expériences avant que d'en pouvoir rien conclurre avec certitude.

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