l Relié par ZEZZIO , ® i rue du Foin-S- Jacques , ® *> N." i5. ® UNIVER5ITY OF PITT5BURGH DâLr v.i JDarlington jMemorial Library Digitized by the Internet Archive in 2009 with funding from University of Pittsburgh Library System http://www.archive.org/details/histoiredesarbre01mich / HISTOIRE DES ARBRES FORESTIERS DE L'AMÉRIQUE SEPTENTRIONALE. Se trouve à Paris ^ chez : L'Adteuu , place S. Michel , n". 8 ; Treuttel et Wurtz, rue de Lille, n". 17; même maison ^ à Strasbourg. Gabriel Du four et C^. , rue des Mathurins S. Jacques, n" 7. BossANGE ET Masson, rue de Tournou , n°. 6. Le Charlieu, à Bruxelles. y4 Philadelphie : Chez Samuel Bradford and Insk.eep, South 3.^ Street. HISTOIRE DES ARBRES FORESTIERS DE L'AMÉRIQUE SEPTENTRIONALE , CONSIDÉRÉS PRINCIPALEMENT SOUS LES RAPPORTS DE LEUR USAGE DANS LES ARTS ET DE LEUR INTRODUCTION DANS LE COMMERCE , AIWSI QUE d'après les AVANTAGES Qu'il.S PEUVENT OFFRIR AUX GOUVERNEMENS EJT EUROPE ET AUX PERSONNES QUI VEULENT FORMER DE GRANDES PLANTATIONS. Par F.« ANDRÉ -MICHAUX, Membre de la Société Philosopliique américaine de Pliiladelphie ; des Sociétés d'Agriculture de la même ville, de celles de Chaileston , Caroline méridionale j d'HolIowell , District de Maine j du département de la Seine , et de Seine- t't-Oise. . • .arbore sulcamiis maria , lerrasque adtnoyemu arbore excedificamus tecta . Plimi secdkoi: ]\^at. Hiit. ,\\h. wt. TOME I. PARIS, DE L'IMPRIMERIE DE L. HAUSSMANN M. D. CGC. XIÏI. A SON EXCELLENCE MONSEIGNEUR LE DUC DE GAËTE, MINISTRE DES FINANCES, GRAND-AIGLE DE LA LÉGION D'HONNEUR, etc., etc. MONSEIGNEUR, (o eàt ^ûuj /tej aciJÂôceà et AaT^ Ceà o-9^c/reJ c/e J^at^e ^xcelience j aue te9zt9^ca9ia^e, .J^ouJ av^eZ' ^lyotùcci acce cej na?na9^ecijeJ eJÂèceJ a aT^a^^eJ aac /eJ c&TnÂ&jentj Âuden t étaaôéej /i iccj Âa^^ /cccùÛè^e99ie9it ocôaTv- ne / avc^ct éaôl jcùjaciaoa^j; ^ouj /Ce y^aÂ/ia^t de/eu^ ycôtô/cté (/anj ceJ a^^tj et ao/nj /e caTn^^ TTze^ce y et av^o-c^ de^ o^enjecaneTnenJ ceT^ta^nJ ^ar /te âccij au Tnatnà d a^ "v^aTitaae (ydafr^'e leci^ ^zatcc9^aujatca?v^ e?n ^^T^ance. ^e 7ne ^atj efra^^cé j JiffiQa/iJetanecc^y^ ; de ^^emJiuiy^ cej ^aej et cntérêt aé^ié^at j et ce àt te ^y^éjccttat d 0'ûjer'i>atcanà éactej danj ouatée ce9itj /c'eucj c/e yia?^j , avec /o-aée / allentcam el /a Ae^^jénérance (/&nû Je ^uù ca/iaâ/e^(^cie J'ac /'Âai^^ieao^ ae .J-^ouj Â^éje^ter. J^(y namS^^ecije^ ej/iècej c/e arac^ej ^aej'aô 'Teccùecl^ce/ Âe7ic/ant mam^é^ Jo-a^ e?v^ ^6mé7^ô'yae, et ^cie Jac^^ac^ Jia^^vcTzcr à /' ^c/mùncjt9^atca7z c/e/ U^aT^êtj ^ /a Tneltrant à /lo^tée c/'en^ rccÂc9- /e ^a/ ^arejtceT^ c/e /'S77?Ac^e, c/ aT^Ue^ ^^acme9zt Ji^^écô'eaœ j acu ^e mccàj/i/ce^a^zû avec /e /em/ij , et attejterant à /accj /cj ^tèc/e^ / e/^ Ji^tt c/e Ji^évayance et ct;'a?7iéûa^ /It ence. ^eJÂect y ^e ^at^^e (OxceUeTice / OewîteuK , F.« ANDRÉ - MICHAUX. INTRODUCTION. J_jES nombreux voyages que de savans naturalistes ont faits depuis plus d'un siècle dans l'Amérique septentrionale, et les relations qu'ils en ont publiées, ont appris combien cette partie du nouveau monde étoit favorisée de la nature sous le rapport du règne végétal. Mais le but que l'on s'est proposé jusqu'ici paroit avoir été d'accélérer les progrès de la Bota- nique, et d'ajouter à l'embellissement des jardins en Europe , plutôt que d'étudier les propriétés des plan- tes, et de faire connoître les usages auxquels les bois d'Amérique peuvent être employés. Si parmi ces na- turalistes, quelques-uns se sont occupés de ce der- nier objet, ce n'a jamais été que d'une manière fort imparfaite ; et c'est en vain que l'on chercheroit dans leurs écrits des notions certaines et détaillées sur cette matière : on n'y trouveroit que quelques rensei- gnemens souvent inexacts et presque toujours incom- plets. J'ai essayé de remplir cette lacune , et cette partie si intéressante de l'histoire des végétaux de l'Amérique septentrionale a attiré toute mon atten- tion , dans les deux voyages que j'ai faits aux Etats - Unis , le premier en 1802 , et l'autre en 1806. L'ou- vrage que je présente au public est le fruit de mes recherches et de mes observations à cet égard. Déjà, en i8o5, j'ai lu à la Société d'Agriculture du département de la Seine un Mémoire dans lequel I. I 2 INTRODUCTION. j'avois réuni une partie des matériaux que je m'étois procurés jusqu'alors , et je m'étois efforcé de faire sentir de quelle importance il seroit pour la France d'introduire dans nos forets diverses espèces d'arbres de l'Amérique septentrionale , remarquables par la bonne qualité de leur bois , et par une végétation vigoureuse et accélérée. Quelque temps après, j'offris mes services, sous ce point de vue, à l'administration forestière, qui les accepta : je retournai aux Etats- Unis, et, malgré la difficulté des circonstances, j'ai fait des envois de graines qui ont donné d'heureux et abondans résultats , et j'ai eu la satisfaction de rem- plir les espérances que l'on avoit conçues de mon voyage. Suivant le plan que je m'étois tracé , j'ai dû , à mon arrivée en Amérique , consacrer presque tout mon temps à l'étude des arbres forestiers, considérés sous leurs différens degrés d'utilité dans les arts. Les con- noissances relatives à cet objet étoient principalement dans la possession des artisans , et ce fut auprès d'eux que je m'occupai de les recueillir, dans la vue de les répandre , non -seulement parmi les Européens, mais encore parmi les Américains des différentes par- ties de l'Union. J'ai entrevu, dès mes premières ten- tatives, toute l'étendue de la tâche que je m'étois imposée, et j'ai reconnu combien étoit juste la ré- flexion de M. Correa de Sera, dans son rapport à la Société d'Agriculture du département de la Seine , sur le voyage que je venois d'exécuter. « Quoique les y//' ( Sapin argenté) , Fir balsani, Sapin baumier), Balsam of Gilead tree (Baumier de Giléad); TABLEAU INDICATIF. '9 Noms bolaniquei Moms vulgaires empJoyé» dan» le» diverses partie» et américains. des Etat» Unis. Abies balsamifera. ( Dénominations ('gaiement en usage Sylver Tir, . . . . \*^^"^ ^^ partie la plus septentrionale 'des Etats-Unis. Juglans nigra. Black Vifalnut. J. catliartica. Butter mit. . ■^ Black walniit ( Noyer noir ), seule dri- Inomination dans les Etats du milieu et de l'ouest. Noyer noir , par les François des Il- linois et de la Louisiane. '' Butter nut (Noix de beurre ), seul nom donné à cet arbre dans les Etals de Ne\N- York et de la Virginie. TVliite %\?alnut (Noyer blanc), déno- mination très usité dans les Etats de Pen- J. olivseformis. . Pacane nut h^. J. aniara Bitter nuthickery sylvanie , et de Maryland. 0/7/7i^/{^(Noyer àrbuile),nom le plus en usage dans les Etats du New-Hamp- l^shire, de Connecticut et de Vermont. Pacane nut ( Noyer pacane ou Paca- nier), nom conféré à cet arbre dans la Vliaute Louisiane, par les François-llli- ' jnois et de la Louisiane, et adopté par les Américains^ Bitter nut hickery (Noyer amer ) , seul nom en usage dans les Etats de New- York^ du New-Jersey. TVhîte ///cAe/j ( Hickery blanc), dé- nomination la plus générale dans toute la Pensylvanie. Noyer amer ^ par les François-Cana- diens et des Illinois. 20 TABLEAU INDICATIF, Noms botaniques Noms vulgaires employés dans les diverses parties et américains. des Etats-Unis. J. aquatica i T'Vater hiiber nut , nom donné par TFaber bit ter w/^jmoi à cette espèce qui n'en a aucun hickery (dans les Etats méridionaux où elle croît. r Mocker nut hickery ( Noix moqueu- se ), connu plus généralement sous ce nom dans les Etats de New-York et de New- Jersey. ' ) W^liite heart hickery , secondaire- J. tomentosa, M.ocker nut hick^ . X squamosa . . . . Shell hark hickery. J. laciniosa. . Thick shell bark ment usité dans ces deux Etats. Coimnon hickery , en Pensylvanie , dans le Maryland et plus au sud. Noyer dur,^dx les François-Illinois. Shell bark hickery ( Noyer écail- leux ), nom le plus en usage dans tous les Etats-Unis. Shag bark hickery , dénomination se- condaire au nord de la rivière de Con- necticut. Kiskythomas , par les Hollandois du New-Jersey. Noyer tendre , par les François des Illinois. Thick shell bark hickery (Noyer é- cailleux à coque épaisse), nom donné là cette espèce dans les Etats de l'ouest où elle est le plus souvent confondue hickery. avec le yrai Shell bark hickery (Noyer (écailleux). Glocester nut hickery (H^ojer de Glo- cester en Virginie), connue sous ce TABLEAU INDICATIF. 21 Nom» botaniques Noms vulgaires employés dans le» diverse» parties cl américains. des Etals-Uni», iseul nom (laas cette partie de la Vir- ginie. Sprlngfieldhickery (Tlickery de Spri ng field), autre dénomination donnée à cet arbre dans cet endroit, peu éloigné de Philadelphie. SPig nut hickery ( Noix à cochon ), dé- nomination la plus générale dans tous les Etats-Unis. X i^ .vi^u .vL^.^y^.j. . X Hog nut hickery (Noix à cochon), /plus usitée dans quelques cantons de \\di Pensylvanie. ( Nutjneg hickery nut (Hickery mus- J.myristicaformis. jcade), nom donné par moi à cette es- Nutmeg hick. nut, jpèce , qui n'en a aucun dans les Etats (.du midi. ifVhîte oak ( Chêne blanc ) , dénomi- nation générale et unique dans tous les États Unis. Chêne blanc , par les François-Cana- diens. IMossy cup oak, nom donné par moi à cette espèce, qui se trouve dans le Gennessée , ( Etat de New - York ) et près Albany. ^ ( Over cup white oak CChêne frisé à cros Q. macrocarpa. . .1 •,. -,r . -'iii r\ 7-7 Ioy<5» dins les «liycrbt» parties des Ltals-Ucis. ' jRed oak (Chêne lou^e) , dans la partie basse des Etats méridionaux. ' Black oak (Cliêne noir), seule de'no- imlnaiion dans tous les Etats du milieu , 'de l'ouest et du midi. IQuercitroîi oak^ nom du commerce; CJtcne noir , par les Erancois-lllinois. / Scarletr oak ( Chêne écarlale ) , nom idonnc par moi à cette espèce, qui^ dans I tous les Etals du milieu, porte le nom du iChêne rouge, red oak^ étant confondue [avec une autre espèce, à laquelle nous réservons cette dénomination. Grey oak (Chêne gris), seul nonidon- Iné à cette espèce dans les Etats de ISe^v• Hampshire , et de Vermont , ainsi que Idans le District du Maine, la Nouvellc- \ Brunswick et la Nouvelle-Ecosse. PiTie aok ( Chêne à e'pingle ) , nom 1 donne' à cette espèce dans les Etals de [New-York et du New- Jersey. Swamp Spanish oak ( Chêne d'Espa- l^ne, des marais), dans les Etats de Pcn- fsylvanie et de Maryland. Red oak (Chêne rouge) , connu sous i cette seule de'nomination dans tous les Etats du nord et du milieu. ( Canoë hirch (Bouleau à canot), 'l Paper hirch (Bouleau à papier), " l Dénominations également usitées dans 4 26 TABLEAU INDICATIF. Noms botaniques et américains. Betula papyracea. Canoë hircli. . Betula populifolia . JVhite hirch. . Betula rubra JRed hirck Betula lenia . Black hirch. Noms vulgaires employés dans les diverses parties de.s litals-Unis. les Etats de New-Hampsliire , Vermont, lie District de Maine , Ja Nouvelie-Ecos- jse , et plus au nord. JVhite èzrcA (Bouleau blanc), e'gale- j ment employée dans les mêmes contrées. Bouleau à canot , par les Français- Canadiens. JVhite hirch (Bouleau blanc) ,de'no- Iminalion générale dans les Etals du nord 'et du milieu. Olclfield hirch (Bouleau des terreins secs ou des cbamps abandonnes). Red hirch (Bouleau rouge ) , dans l'Etat du New- Jersey et dans quelques can- tons de la Pcnsylvanie. Broom hirch ( Bouleau à balais ,) nom [secondaire dans la Pcnsylvanie. Birch (Bouleau j, dans les Etats plus au sud. Black hirch (Bouleau noir), de'nomi- nation la plus en usage dans les Etats du Inord et du milieu. Cherry hirch (Bouleau merisier), [nom secondaire dans quelques cantons [des états du nord. Sweet hirch ( Bouleau odorant ) , dans Iles Etats du milieu. Moutain mahoganj {Acajou de mon- Itagne), dans une partie de la Virginie. Cherrj hirch (Bouleau mei^isier ) , par les Français du Canada. T A 11 L i; A U I > 1) l (J A l' I F. 27 INuiiis Lolaiiiijue.s et américains. Betula lutca . . Yellow birch. Castanca vesca Chesnut. . . . Casianea pumila Chincapin . . . Fa;; us sjlvesiris IVliite heccli . Koms vtilgaiie» employé» dans le» diverse» partie» des Elals-Uois. Yellow birch (Bouleau jaune), nom donne à celte espèce dans les Etais de Vcrmont et de Ncw-Hampshire , ainsi |que dans le District du Maine et la pro- vince de la Nouvelle-Brunswick. Chesnut ( Châtaignier ) , seul nom dans toutes les parties des Etals-Unis où croît cet arbre. Chincapin^ seule dénomination dans les Etats du milieu , du sud et de l'ouest. Beech (Hêtre), dans les Etats du mi- |lieu et de l'ouest. TVhite beech ( Hêtre Liane), dans le» lEtats les plus septentrionaux et le District de Maine. F. fcrruginea. • . •( ^erf ^eecA (Hêtre rouge ) ^ dans les Red beech (Etats du nord et le District de Maine. Cliamœrops palme-/- Cabale tree (Ç\\.o\x. palmiste), dans la ^o 'v partie maritime des États méridionaux. Cabage l,ree ....(. , American Holly ( Houx d'Améri- Tl 1 • ' uex opaca y que), dans toutes les parties des Etats- Amerlccui /^o/Zj .|unis où il croît. iPersimons , seule de'nominalion dans tous les États-Unis où cet arbre se trouve. Plaqueminier, par les Français de la Haute et Basse-Louisiane. Acer eriocarpum . JKhite maple . . Tyhite maple (Erable blanc), seule I de'nominalion sur les bords de l'Ohio et des rivières qui viennent s'y rendre. Soft maple (E. tendre), dans les Etats !i8 TABLEAU INDICATIF. Noms botaniques et américains. Acer eriocarpum. White ma pie, . Noms vulgaires emploies dans les diverses parties des Elats-Unis. > Atlantiques, où cette espèce est souvent [confondue avec le vrai Érable rouge. S/r wager maple, en Angleterre, oii cet arbre a e'te' introduit. Red flowering maple ( Erable à fleurs rouges ) , Swamp maple (Erable des swamps), Soft maple (Erable tendre), Dénomination en usage dans tous les Etats Atlantiques. Celle de redjlowering 772«yf?/e( Erable à fleurs rouges j, l'est davantage en Yir- ble len- York Acer rubrum. . . Red flowering ... , \ginie , et celle de soft maple ( Erabb Idre ) , dans le bas de l'Etat de New- A. saccharlnum . Sugar maple. . . jet du New-Jersey. Maple tree (a.ihre d'Erable), dans la [Pensjlvanie , la Virginie et l'Etat de [rOhio, à l'ouest des monts Alle'ghanys. Erable plaine y par les Français du Canada, Sugar maple (Erable à sucre), de'no- mination ge'nërale, mais qui ne prévaut [cependant que dans les Etats du milieu a l'est des monis Allcghanys ; sous ce iméme nom, on comprend souvent cn- /core dans le Gënessée, l'espèce suivante. Rock maple ( Erable des lochers), nom iqui prévaut dans tous les Etats situés au 'nord de la rivière Hudson , ainsi que dans le District de Maine , la Nouvelle- Brunswick et la Nouvelle-Ecosse. ï A H L i; A U I > D I C A T I F. 2(J Noms liotyniqiK» iSoms vulg.iiies eriiplovcs dans le» fliTer«es parties et iiriiciicaliis. îles KtaU-Uiiii. illard maple (Erable dur) , sccondai- xxv.<.. ^^^ rement en usage dans ces mêmes Etais. Si/gar maple • • •) Erable sucre y par les Français du ' Canada. Sii^ar trce ( Arbre à sucre), de'nomi- nation générale sur les bords de l'Ohio et des rivières qui viennent s'y rendre , A. nigrum joù souvent encore, l'on de'slgne sous le Black siigar tree. \n\énie nom, l'espèce pre'cédcnte. Black sugar tree ( Arbre noir à sucre), nom secondaire mais qui doit cire prè- fe're'. Box elder ^ seule de'nominaiion dans les Etats de l'Ouest, où cet arbre est le Iplus abondant et le plus connu. A. nes^undo . . . .] Ash leaved maple (Erable à feuilles Box elder ]de frêne), nom qui lui est donne quel- quefois dans les Etals Atlantiques. Erable à giguiè?^e , par les Français des Illinois. Moose woo<:Z(Bois d'Elan), de'nomina- iion générale et unique dans tous les . . lEtals du nord, ainsi qu'à la Nouvelle- A. striatum ) \ Brunswick et a la Nouvelle-Ecosse. Striped maple ( Erable jaspé ), par 'quelques personnes dans les Etals du milieu. Large tiipelo (Grand Tupelo), nom le ,y T 1 . . j plus général dans les Etats du sud. ?loy lia L ' j 1 Itee dans les campagnes. Laurier tulipier^ par les Français de la basse Louisiane. TABLEAU INDICATIF. 33 Noms botaniques Nom» vulg.iireg eriiployc'» {de Tennessee. Black ash (Frêne noir), dénomina- Fraxinus sambuci-jtion la plus générale dans les Etats du folia ^nord et du milieu. Black ash J fVater ash ^ nom secondaire dans (cette même partie des Etals-Unis. TABLEAU INDICATIF. 35 Noms Lolaiiiqucft Noms vuigujrc-s einjiloyës dans Ifs diverse» parlie* et américaius. des Etals-Unis. iCarolinlan ash ( Frêne de la Caroli- ne), nom donné par moi à celle espèce, qui n'en a aucun dans le midi des Etais- Unis. Gordonia lasyan-l Lohlollj hay ^ seule dc'nominalion ihus (dans la partie basse des Etats méridio- LobloUj baj. . . .(naux. G nubescens. .( Franllinia , nom donne à cei arbre Franklinia . . ,\par W. Bartram,en l'bonneur du doc- lieur Francklin. IDog wood (Bois de cbien% seul nom donné à cet arbre dans tous les Etats- Unis. Bois de Jlèche bâtard^ par les Fran- çais de la baute Louisiane. Rhododendron ma-. Swamp laurel (Laurier des swamps ximum 'q^ marais), sur les monls AUégbanys Swamp laurel. . . (^{i cet arbre est le plus abondant. f Mountain laurel ( Laurier de mon- tagne), dénomination la plus générale [sur la chaîne des monts AUégbanys. Kalmia latifolia. . . j Sheep laurel ( Laurier à mouton ) , Mountain laurelb''''^ secondaire dans les mêmes en- Idroits. Callicoe tree, dans quelques parties des Etats méridionaux, et notamment ^sur la rivière Savanab. ^ . . . i Vydd cherry { Cerisier sauvage ) , seul Gerasus virginiana. i , i i TTrij 1 (nom donné a cet arbre dans toutes les yyila cherry . . .| ^ . , .. ! parties des Etats-Unis ou il croit» 36 TABLEAU INDICATIF. Noms botaniques Konis vulgaires eriiplinés d.iiis les diverses parties et américains. Jes Et.ns-Unis. Cerasus caroliniana. f ^^^'^^' orange (Orange sauvage) , seul JFdd oran<^e . . \^^^ donne à cet arbre dans la partie 'maritime des Etats me'ridionaux. IRed cherry (Cerisier à fruit rouge) , de'nomination moins usite'e que celle de smalL cherry (petit cerisier), mais plus convenable. A * M 1 f /^^/7«w', seul nom donné dans les Etats Annona triloba . . ) , . . p y'u miheu et de Fouest, Çassimùiler) Ipar les Français de la liaule Louisiane. Gleditsia 5-acan-i ^one)-- /ocw^f (Fevier à miel), connu tnos. . . ^ . . . ..sous ce seul nom dans toutes les parties Honey locusL, . -des Etats-Unis où croit cet arbre. G, monosperma Sx^'amp locust(^Fevier des swamps ou marais), dans la partie maritime des Etats méridionaux. Swamps iocust . À Water locust ( Locust aquatique ) , nom secondaire dans cette même partie des Etats du midi. Lan rus sassafras. . -f ^Vz^^^TZ/'c^i-, seul nom donné à cet arbre Sassafras .... .[dans tous les Etats-Unis. . , ( Red hay (Laurier rouge), seul nom L. caroliniensis. . .) i » . ^ j i /donne a cet arbre dans la partie mari- ■^ I time des Etats du midi. iButton wood (Bois à bouton), con- nu généralement sous cette dénomina- tion dans tous les Etats-Unis, mais prin- cipalement en usage dans les Etats at- lantiques. TA 13 Li. AU INDICATIF. 3*] Nfims botaniqiips Koins viilj^aircs ('mploy^-* datii li-s aod (Bois blanc), nom le 'plus en usage dans le Gennessée. Bois /mine, par les Français Illinois. Calalpaùree (Arbre des Catawbaws, P)^gnoma catalpa, .jet par corruption Catalpa), dénomina- Lataipa tree. . . .hion générale dans tous les Etats méri- dionaux. Andromeda arbo-. Sorel tree (Arbre à l'oseille), nom ï'^^ 'donné à cet arbre sur les monts Allé- Sorel tree fghanys, et dans les Etats du milieu. Celtis occidenialis. t American netle tree ( Micocoulier Amer, nette tree. .(d'Amérique), dans tous les Etats-Unis. 38 TABLEAU liNDICATlF. Noms botaniques et aiuéi'icaius. Cellis crassifolia. Hack beriy tree. Mo rus rubra . Red mulbcry. Pavîa liitea . Buck eje. . Esculus ohioensis. Ohio buck eje . . Robinia pseudo-aca- cia Locust R. viscosa. . . . . . Rosefloweriug lo- cust. Noms vulgaires employés dans les diverses pavlies des Etats-Unis. f Hack berry tree, seul nom donné à cet arbre dans les Etats du Kentucky et de Tennessee. Hoop as h (Frêne à cercles), sur les bords de l'Ohio, en Pensylvanie et en Virginie. Black elder (Aune noir), dans cette même partie des Etats-Unis, mais moins en usage. \ Red mulherj ( Mûrier rouge ) , seul \nom donné à cet arbre dans tous les (Etats-Unis. Buck e)^e(OEil de daim), seul nom 'donné à cet arbre sur les monts Allégha- 'nys et dans les Etats de l'ouest. ' Ohio buck e^e (OEil de daim, de l'O- hio), nom donné par moi à cet arbre, qui fest confondu avec l'espèce précédente. Locust ( Robinier ou Acacia ) , déno- mination générale dans tous les Etals- lUnis. i^e/ZoîV /oci/^f( Acacia jaune), Red locust (Acacia rouge), Black locust ( Acacia noir ) , Noms donnés à cet arbre sur les bords [de la rivière Susquehannah, eu égard a la couleur de son bois. Roseflowering locusù (^Acacm à fleurs roses), nom donné par moi à cette es- ipèce qui n'en a pas dans le pays des Cbérokées, où elle croît. TABLtAU INDICATIF. 39 Noms botaniques et Hinéiicains. Virgilia lulea. . ydlow wood. Ulmus aniericana. White eliïi. . . . Noms iiilgiircs employés Jan>i les diverses parties des £luls-Uiii8. ' le//ow woofi( Bois jaune), nom (lon- .né à cel arbre, dans l'Elat de Tennessee. White elin (Orme Liane), dénomi- nation gc'ne'rale dans toutes les parties 'des Etats-Unis où croît cet arbre. Ulmus alata. Wahoo . . Ulmus rubra . Red elni. . . . C PVahoo, nom donne' à cette espèce Vdans la partie maritime des Etats du Imidi. Red elm ( Orme rouge ) , nom le plus ge'néralement en usage, dans toutes les [parties des Etats-Unis où se trouve cette lespèce. Sliperf elm, nom secondaire dans les \Etats de New- York et de New-Jersey. A'Ioose elm (Orme d'Elan), dans le [haut de l'Etat de New-York. Orme gras, par les Français des 11- Jinois. Planer tree, nom de la personne à Planera ulmifolia. .Ilaquelle cette espèce a e'të consacrée, Planer tree iet qui jusqu'à pre'sent n'en avoit pas encore reçu dans les Etats du midi. Populus tremuloï-/ American aspen {Tren\h\e à' kméxx- des /que), nom donne' à cet arbre dans les American aspen. .1 Etats du milieu et du nord. Populus grandiden-T American large aspen (grand Trem- *^*^ jble d'Amérique), nom donné par moi à American "i!/';^ i ^ /par ce nom, sur les borus la rivière cie Cotton tree \z. -, /ôavanah. I American hlack poplar ( Peuplier noir d'Ame'rlque ) , nom donne' par moi à celte espècede peuplier, qui, jusqu'ici n'a été connu sous aucune de'nominaiion particulière. Populus monilifera.( . ^^^ë^''^^^ P^P^"^ (Peuplier de Virgi- TV-. . . 7 /nie), nom donné en Europe à celte es- y irginian popLar.\ , ^' ^ Populus canadensis.C Cotton wood (Boisa coton), nom Colton wood . . .\*^omié à cet arbre sur les bords du Mis- Csissipi et de ses afïluens. T» , I / C«ro/m/««uow/flr (Peuplier de Caro- Populus angulata. .1 , , .-, j . jline ), nom donné à cet arbre en Europe, LaroLonian po- J ^ , , , . . . , J parce qu'd y a ete apporte primitive- (ment de cette partie des Etats-Unis. Populusbalsamifera. ^^^^^^^^ ^^^^^^ (Peuplier baumier), Balsam poplar . \^^^^^ ^^^^ ^^ ^^^^ en Canada. Populus candicans.j j^^^^,^ ;^^^^j halsam poplar (Bau- Heart Leavea oal-\ . , ^ .,, n sam poplar. . . J"^^*^»' ^ ^^^^^^^^ ^^ ^«^"0- Bass wood ( Tilleul ) , dénomination qui prévaut dans tous les Etals du nord et du milieu , et notamment dans le Gen- Tllia americana. Bass wood . , Inessee. Lime , non moins en usage. ^.,. „ ( ^^/uYd? //me (Tilleul blanc), cette es- Tdia alba J i j i r/-,i • c J , , . S pece , sur les bords de 1 Ohio , est conton- * (due par les liabitans avec ia précédente. TABLEAU INDICATIF. 4» Koms botaniques et américains. Tilia pubescens Dwonj lime tree Alnus serrulata . Common aider Alnus glauca . . Black aider . . Sallx nigra . . . Black willow . Salix ligustrina. Noms vulgaires employés dans le» diTerses partie» des Etats-Unis. iDwony lime free .( Tilleul à feuilles velues ) , ainsi designé dans les Etais méri- dionaux. ( Common aider ( Aulne commun ) , (dans tous les Etats-Unis. Black aider (Aulne noir) , nom donné a celte espèce dans l'Etat de Vermont. i Black -willow (Saule noir), dénomi- nation générale dans tous les Etats-Unis. Champlain willow ( Saule du lac I Champlain ) , nom donné par moi à li se trouve très-abon- ChamplainwillowY^^^'' ^^P^^^ ^"^ damment sur les bords de ce lac. Shining willow (Saule luisant), nom donné par moi à cette espèce qui n'en a 'aucun dans les Etats du milieu. Salix lucida. . . . Shining willow . I. 6 fc.^V-»^»'»'»»^/»'*.'*-».^'^ fc-«.'^V-»^».X-»/-VWW».-V-W-V^r-W-W^'W>.'«>'V'«,-VW^^,'«K>W^«^-VV LES PINS. JLiES Pins, arbres toujours verts et ordinairement d'une grande élévation, sont un des genres les plus intéressans à connoitre , à cause des grandes ressour- ces qu'ils offrent dans les arts, non-seulement pour leurs bois, mais encore pour les matières résineuses qu'ils fournissent. La différence la plus apparente entre les Pins et les Sapins consiste dans la dispo- sition de leur feuillage. Les feuilles des Pins , plus ou moins longues, selon les espèces, et comparables en quelque sorte à de petits bouts de gros fil , sont réunies par leur base au nombre de deux, trois ou cinq, dans la même gaine et au même point d'atta- che. Dans les Sapins au contraire , les feuilles n'ont que quelques lignes de longueur, et sont attachées une à une autour des branches, ou seulement à leurs côtés latéraux. Pour rendre plus facile la distinction des espèces de Pins et de Sapins qui sont plus nombreuses dans les Etats-Unis que dans l'Europe entière, j'ai pensé qu'il étoit à propos de ranger les premiers d'après le nombre de leurs feuilles, et suivant que leurs cônes sont ou ne sont pas épineux ; et les Sapins suivant les différentes dispositions de leurs feuilles. l-'*'^'V*<"*<^«'X«V-^^-»r^^,<^^-^^,-^^,^,^,.^^^ '«•%%>^ DISPOSITION MÉTHODIQUE DES PINS ET DES SAPINS DE L'AMÉRIQUE SEPTENTRIONALE. PINS. Monœcie Monadelphie ^ Lin. Fam. des Conifères y 3 ma. PINS A DEUX FEUILLES. CÔNES NON ÉPINECX. 1 Pinus rubra The Red {Norwaj) pine, 2 Pinus rupestris. . . The Grey pine. 3 Pinus mitis The Yel/ow pine. CÔNES ÉPINEUX. 4 Pinus inops The .Tersey pine, 6 Pinus pungens. . . . The Table mountain pine. PINS A TROIS FEUILLES. CÔNES NON ÉPINEUX OU A ÉPlNES PEU SENSIBLES. 6 Pinus australis. . . . The Long leaved pine. 7 Pinus serotina. . . . The Pond pine, CÔNES FORTEMENT EPINEUX. 8 Pinus rigida The Pitch pine. 9 Pinus taeda The Loblolly pine, PIN A CINQ FEUILLES. 10 Pinus strobus, . . . The White pine. SAPINS. FEUILLES TRES-COURTES ET DISPOSEES UNE A UNE AUTOUR DES TIGES. 1 1 Abies nigra The Black {double^ spruce. 1 2 Abies alba The IVhite {single) spruce. VEUILLES DISPOSÉES LATERALEMENT SUR LES CÔTES DES TIGES OU DES BRANCHES. i3 Abies canadensis. . The Hemlock spruce» i4 Abies balsamifera. . The Sylver fir. P/.J'. P J A'„:u,.'e „w JiiiiVi FINIT s Tluljra . PINUS RVBR^. THE RED FINE. ( Norway pine. ) Pi NUS rubra^ arhonnaxima; cortice rubente ; foliis hinis ^-^ -uncialihus y vagmis ferè unci'alibus ' strobilisovato- conicis , basi rotundatis , folio demidio - brevioribus , squamis inedio dilatatis , mermibus. P. resinosa; Ait. Hort. K" . Cet arbre est connupar tous les François du Canada sous le nom de Piîi rouge ^ nom que lui ont conservé les Angloisqui sont venus habiter cette colonie. Dans la partie la plus septentrionale des Etats - Unis , qui comprend le District de Maine, le New-Hampshire et l'Etat de Vermont, il est désigné sous celui de Norwajpine, Pin de Norwège, quoi qu'il en difFère totalement, puisque ce dernier est V A bies pice a , es- pèce de Sapin qui croît en Europe. Il seroit donc à désirer que le nom de Red pine. Pin rouge, prévalût dans les Etats-Unis, d autant plus qu'il est fondé sur un caractère particulier à cet arbre , comme nous le ferons remarquer dans la suite de cet article. Dans le voyage que mon père fit à la Baie d'Hud- son en 1792, pour essayer de déterminer en revenant du Nord au Sud l'apparition et la disparition succes- sive des arbres et des plantes de l'Amérique septen- trionale , il ne commença à trouver le Pinus rubra que près le Lac Saint-Jean en Canada, situé par le 480 de latitude, et vers le Sud il n'a pas été observé par moi, au-delà de Wilkesburry en Pensylvanie? latitude 4i° 3o'. Le Pijius rubra est même très-rare 46 PINUS RUBRA. dans toutes les contrées qui sont au midi de la riviè- re Hudson ; on le voit encore à la Nouvelle-Ecosse, où il reçoit , ainsi qu'au Canada , le nom de Pin rouge et quelquefois celui de Pin jaune. Makenzie, dans son voyage à l'Océan pacifique, fait aussi mention de cet arbre, comme se trouvant au-delà du Lac supérieur. Dans aucune des parties des Etats-Unis que je viens d'indiquer, je n'ai jamais vu le Pinus ruhra former de vastes forets , ni même entrer en grandes proportions dans leur ensemble , comme VAbies ni- gra^ VAbies Canadensis et le Pinus strohus ; mais il couvre seulement de petits cantons de quelques centaines d'arpens , où il est ordinairement seul ou quelquefois entremêlé avec ce dernier. Comme la plupart des autres espèces de ce genre , le Pinus rubra vient dans des terreins arides et sablonneux , et sa végétation n'en est pas moins magnifique , car il s'élève de 22 à 25 mètres (70 à 80 pieds j sur 5o à 60 centimètres (20 à 24 pouces j de diamètre; et ce qui rend surtout cet arbre remarquable , c'est la grosseur uniforme de sa tige dans les deux tiers de son élévation. Le nom de Pin rouge qu'il porte en Canada lui vient sans doute de la couleur de son écorce , qui est d'un rouge plus prononcé que dans aucune au- tre espèce de Pins des Etats - Unis ; cette couleur m'a paru être pour celle-ci, un caractère assez sail- lant pour lui donner le nom spécifique de rubra y de préférence à celui de resinosa^ employé d'abord par Alton , et adopté par Sir A. B. Lambert. Une PINUS RUBRA. 47 autre considération m'a encore induit à ce change- ment, c'est que beaucoup de personnes croiroient , ce qui seroit une erreur, que c'est de cet arbre qu'on extrait les matières résineuses qui sont employées en Amérique dans les constructions navales, et ex- portées pour le même objet. Les feuilles du Pinus rubra sont d'un vert sombre, longues de i3 à i4 centimètres ^ 5 à 6 pouces) , et réunies deux à deux ; elles sont rassemblées en pa- quets à l'extrémité des branches , comme dans le Pinus australis ou le Pinus niaritima , et non éparses sur les rameaux, comme dans le Pinus sjl- vestris ou le Pinus inops. Les fleurs femelles du Pinus ruhra sont bleuâtres dans les premiers mois de leur apparition , et ses cônes , qui sont dépour- vus d'épines , ont environ 3 centimètres (^ 2 pouces j de longueur; ils sont arrondis à leur base, se termi- nent promptement en pointe, et laissent échapper leur semence la même année. Les couches concentriques sont très-rapprochées dans le Pinus ruhra ^ et son bois travaillé présente un grain fin , serré et compacte ; il est même assez pesant , à cause de la matière résineuse dont il se trouve imprégné. Dans le Canada , la Nouvelle- Ecosse et le District de Maine , il est fort estimé pour sa grande force et l'avantage qu'il a d'être du- rable; aussi l'emploie -t- on souvent dans les cons- tructions navales, et particulièrement pour le pont des vaisseaux, parce qu'il peut fournir des planches de 12 à i3 mètres ( 4o pieds ) de longueur sans au- l^S P I NUS RUBRA. cun nœud. On en fait aussi les corps de pompes , qui durent long-temps lorsqu'on a soin d'ôter tout l'aubier. C'est de cette espèce de Pin qu'a été fait le grand mât du vaisseau de guerre le Saint-Laurent , de 5o canons, construit à Québec par les François ; cet exemple confirme l'observation déjà faite plus haut , que cet arbre parvient à une grande élévation. Du Canada , du District du Maine et des bords du lac Champlain , le Pinus rubra est exporté en Angleterre, sous la forme de madriers. Cependant j'ai appris que , dans ces derniers temps , fexporta- tion en étoit fort diminuée , parce qu'on l'a , dit- on , trouvé trop chargé d'aubier ; défaut qui ne me paroit pas fondé, car sur plusieurs tronçons de 32 centimètres [ipiedj de diamètre que j'ai examinés, il n'y avoit que 2 centimètres (i pouce J d'aubier. Le Pinus rubra est, dans sa jeunesse, d'une belle apparence, et sa végétation m'a toujours parue vi- goureuse. 11 n'y a aucun doute qu'il ne puisse très- bien réussir en France et dans tout le nord de l'Eu- rope ; et jepense que les bonnes qualités de son bois, propre aux constructions navales, ainsi que les ma- tières résineuses qu'il est susceptible de fournir, doi- vent engager à en propager la culture. Je suis donc loin départager à cet égard, l'opinion àeSir A. B. Lam- bert qui dit , dans sa description de cet arbre , qu'il ne peut donner des bois de bonne qualité. PLANCHE I-. Fig. 1 , feuille. Fig. 2 , graine. ■:t-^ P/.2. PINUSRxipestins '•«^■»>'^'V^>'V"»,V'*'VV^'V-%,-VW^-VV*-V^^*-V-^'W-VX.-V'»>-fc^.'V^-V-»^X.'W-v^/^-X.-WW-V-V>«<»/%'^^ PINUS RUPESTRIS. THE G RE Y PI NE. Pi NUS rupestris, arhor humilis; folîis binis y rigidis , un- cialibus ; strobilis cinereis ^ recurvis , insigniter incur- vatO'tortis , squamis inerinibus , ramulo adpressis. P, Banksiana ; A. B Lambert. Cette espèce fort rare dans le District du Maine et à la Nouvelle-Ecosse, y est connue sous le nom de scruh Pine^ Pin chëtif; et dans le Bas-Canada, sous celui de Grej pine ^ Pin gris. C'est de tous les Pins de l'Amérique septentrionale , celui qui se trouve le plus avant vers le nord. Je crois ne pou- voir mieux faire connoitre cette espèce , qu'en rap- portant un extrait des notes de mon père sur le Ca- nada : « Aux environs de la baie d'Hudson et des grands lacs Mistassins, dit-il , les arbres qui, quel- ques degrés plus au sud , forment la masse des fo- rets , sont sous cette latitude presque entièrement disparus, et par la sëvëritë des hivers , et par la stéri- litë du sol : toutes ces contrées sont entrecoupées de milliers de lacs , et couvertes d'énormes rochers en- tasses les uns sur les autres , qui sont le plus souvent tapissés de larges lichens de couleur noire ; ce qui ajoute encore à l'aspect sombre et lugubre de ces régions désertes et presque inhabitables. C'est, con- tinue mon père, en parlant àxxPinus riipestris^ dans les intervalles de ces rochers que l'on aperçoit çà et là quelques individus de cette espèce de Pins, qui I. 7 6o PINUS RUPESTRIS. fructifient à un mètre Ç 3 pieds) d'élévation, et qui, à ce peu de hauteur , portent avec eux toute l'em- preinte de la décrépitude. Cependant à i5o milles plus au sud, cet arbre offre déjà une végétation plus forte ; mais il ne s'élève presque jamais au-dessus de deux à trois mètres (^ 8 à lo pieds), et dans la Nouvelle- Ecosse , où il est également confiné au sommet des rochers , il parvient rarement à une plus grande élévation. Les feuilles du Pinus rupestris , réunies deux à deux dans la même gaîne , sont disséminées le long des rameaux, et non rassemblées en paquets à leur extrémité , comme dans l'espèce précédente. Leur longueur est d'environ deux centimètres (^ i pouce) ; elles sont sans gouttières à leur face interne et arron- dies extérieurement. Les cônes sont le plus souvent réunis deux à deux ; leur couleur cendrée ou grise paroît être l'origine du nom de Pin gris que nous avons dit que cet arbre porte en Canada; leur lon- gueur est d'environ cinq centimètres (^2 pouces ) , et leur pointe est toujours tournée dans la direction des branches, caractère- particulier à cette espèce. Mais ce qui surtout rend ces cônes remarquables , c'est la forme courbe qu'ils prennent naturellement, et qui les fait ressembler à de petites cornes de béliers ; ils sont extrêmement durs , dégarnis de pointes, et ne s'ouvrent qu'à la deuxième et à la troisième année , pour laisser échapper leurs graines. Dans les rhumes opiniâtres, les François - Cana- diens font bouillir ces cônes dans l'eau , et en font P I N U s 1\ U P E s T R I s. 5 1 une tisane , qui les guérit promptement. Si cette pro- priété dont on dit que jouissent également ceux de YAbies nigra, est avérée, elle renfermera, selon moi , tout ce qu'on peut espérer d'avantageux de cet arbre trop chétif, pour qu'on puisse tirer parti de son bois de quelque manière que ce soit; et cette même raison m'empêche de croire, comme le pense Sir A. B. Lambert , qu'on puisse jamais en extraire de la thérébentine ou du goudron pour le commerce , quelque résineux qu'il puisse être. PLANCHE II. F/g. i , feuille. Fi g. % , graine. PINUS MITIS. THE YELLOW PINE. PiNUS mitîs; arhor maxima,foliis, prcelongis, tenuoribus y canalîculatis ; strobilis parvis, sœpè solitariis , conoï- deo-ovatis , tessularum mucrone minutissimo. P. mitis, A. Mich. Flor. B. Ama. Cet arbre , disséminé sur une grande surface de pays dans l'Amérique septentrionale , y reçoit diffé- rentes dénominations , suivant les endroits où il se trouve : dans les Etats du milieu , oii il fort est abon- dant et très -employé , il est connu sous le nom de Yellow pine ^ Pin jaune; dans les Garolines et la Géorgie , sous celui de Spruce pine , Pin sapin ; mais plus communément sous celui de Short leaved pine y Pin à courtes feuilles. Quelques cantons des Etats de Massachussets et de Connecticut , sont les points les plus septentrionaux où cette espèce commence à se montrer ; mais elle est déjà très-multipliée dans le Bas-Jersey, et elle l'est en- core davantage dans cette partie du Maryland nommée Eastern-Shore ^ ainsi que dans toute la Basse-Vir- ginie , où sa présence est un signe certain de l'aridité du sol. J'ai encore retrouvé cet arbre sur la rive droite de la rivière Hudson , à peu de distance d'Albany ; près de Chambersburgh , dans la Pensyl- vanie; vers les sources de la rivière Delaware ; près de Mudlick en Rentucky ; sur les montagnes de Cum- berland , et aux environs de Rnoxville , dans Test /y .1 li,.ir.^/,>;' PINUS mitis PINUS MITIS. 53 Tennessee; près de Edgeiield Court-House; dans la Haute-Caroline du sud; enfin dans la Haute-Gc'orgie, sur la rivière Oconée. Dans tous ces lieux , il ne croit point seul, mais il entre dans la composition des forets en différentes proportions , qui varient sui- vant la nature du sol : moins il est bon, plus le Pi- nus mitis abonde; et s'il offre un certain degré de fertilité , on s en aperçoit aisément à l'aspect floris- sant des diverses espèces de chênes et de noyers avec lesquels le Pinus mitis est mêlé , en moindre quantité , mais qu'il surpasse toujours en grosseur et en élévation. On rencontre encore parfois cet arbre dans les Basses-Carolines , dans les Florides , et pro- bablement aussi à la Louisiane ; mais il est plus rare dans ces contrées, car on ne l'observe que dans les endroits où des bancs d'argile de couleur rouge, mê- lés de graviers, paroissent à fleur de terre, et percent de distance à autre la couche sablonneuse et légère qui couvre le sol de ces Etats, depuis les bords de la mer jusqu'à cent vingt milles dans l'intérieur. Cet arbre est d'une belle apparence lorsqu'il est arrivé à son entier développement ; il la doit à la dis- position de ses branches qui s'éloignent d'autant moins les unes des autres qu'elles sont plus élevées , et qui, se reployant latéralement sur elles-mêmes, finissent par présenter un sommet pyramidal très- régulier. Cette circonstance fait que la cime de cet arbre n'embrasse pas un espace aussi considérable que sembleroit l'annoncer sa hauteur et son diamètre , et c'est probablement de cette disposition, parfaitement 54 PINUS MITIS. régulière dans les grands individus de celte espèce, que lui est venu le nom de Spruce pine ^ Pin sapin. Dans le New- Jersey et sur le Eastern-Shone, la hauteur de cet arbre est de i8 à 20 mètres TSo à 60 pieds J, et son diamètre est le plus ordinairement de 2 à 3 décimètres (^i5 à iSpoucesJ , conservant cette dernière dimension dans les deux tiers de sa tige. Mais dans les Hautes-Carolines et la Virginie , on trouve des individus qui , sans être beaucoup plus élevés , ont le double de grosseur. J'en ai souvent mesuré qui avoient 19 à 20 décimètres ( 5 et 6 pieds j de circonférence. Les feuilles du Pinus rnitis sont longues de 12 a i5 centimètres (l^k S pouces j, fines, flexibles et creusées d'une gouttière à leur face externe 5 elles sont d'un vert sombre, et réunies deux à deux dans une seule gaine. Souvent encore elles sont au nom- bre de trois dans les pousses de l'année ; mais c'est un effet de la force de la végétation , qu'on n'observe jamais dans les vieilles branches. Cette espèce n'est donc pas un Pin à deux à trois feuilles, comme on l'a avancé, et c'est à tort qu'on lui a donné le nom de Pinus \fariahilis. Les cônes du Pinus mitis ont une forme ovale, et sont armés de pointes fines ; ils sont plus petits que ceux des autres espèces de Pins des Etats-Unis, car ils n'excèdent pas 2 à 3 centimètres ( i pouce et demi j de longueur , dans les vieux arbres. Ils lais- sent échapper leurs graines dans la même année. Dans le Pinus mitis les couches concentriques ou PI NUS MIT IS. 5j annuelles sont fort rapprochées les unes des autres • elles le sont six fois plus que dans les Pinus ri<[i(la ou le Pinus tœda. Il est aussi beaucoup moins chargé d'aubier, dont l'épaisseur n'exède pas cinq à six centi- mètres ( 2 pouces à 1 pouces et demi) dans les arbres qui ont 3o à 4© centimètres (i5 à i8 poucesj de dia- mètre , et il est encore moindre dans ceux qui ont une dimension plus grande. Le bois du Pinus miiis a le grain fin et il est médiocrement résineux, ce qui le rend assez compacte sans lui donner trop de pe- santeur. Une longue expérience a appris qu'il est d'une bonne qualité et très-durable. A New-York , Philadelphie , Baltimore , Washing- ton , ainsi que dans les petites villes de la partie ma- ritime des Etats du centre, notamment en Virginie , jusqu'à cent cinquante milles de la mer , les quatre- cinquièmes des maisons sont encore toutes bâties en bois; et c'est toujours avec des planches tirées de cette espèce de Pin que sont faits les planchers des rez-de-chaussées et des étages supérieurs , les marches des escaliers, les encadremens des portes et des boi- series, ainsi que les châssis des fenêtres, considérés alors comme plus solides et plus durables que s'ils étoient faits avec tout autre bois du pays. Dans les Hautes-Carolinesetle Holston, les maisons sont en- tièrement construites et mêmes couvertes avec le Pi- nus mitis^ car ni le Cupressus disticha^m le Cupr es- sus thuoides^ très-préférable pour la couverture, ne croissent pas dans ces contrées 5 mais dans quelque construction que ce soit, il est important de débar- 56 PIIS'US MITIS. rasser entièrement le Pinus mitis de son aubier , qui se pourrit très-promptement, attention qu'on n'a pas toujours , afin de gagner de la largeur sur les plan- ches, et surtout dans le voisinage des ports de mer, où il commence à devenir rare , par la grande con- sommation qui s'en fait journellement. Les constructions navales, particulièrement dans les ports de Philadelphie , de New-York et de Bal- timore , en consomment une très-grande quantité i le pont, les mâts de hunes, les heams et la menui- serie de la cabane , sont le plus souvent de ce bois, qui est reconnu pour être le plus durable , après celui du Pinus australis. Le Pinus mitis qui vient du bas Jersey et du Eastern-Shore est de meilleure qualité , et on le préfère toujours à celui qui descend du haut de la rivière Delaware, dont le bois n'est pas aussi compacte et aussi fort, en même-temps que le grain en est plus grossier 5 différence qui provient évide- demment de la nature du sol de ces derniers pays , qui est moins aride et moins mauvais. Le Pinus mitis débité en madriers ou en planches de 2 à 4 centimètres ( 1 à 2 I pouces) d'épaisseur, forme un article considérable d'exportation pour les colonies occidentales et l'Angleterre. Dans les prix courans de Liverpool , il est désigné sous le nom de New-York Pine ; dans ceux de la Jamaïque , sous celui de Yellow Pine ; et dans ces deux places , il est toujours vendu à un prix inférieur à celui du Pinus australis des Etats méridionaux, mais à un taux plus élevé que celui du Pinus strobus. PINUS MITIS. 57 Quoique cet arbre soit assez résineux pour donner de la thcrcbentine et du goudron , néanmoins on ne l'exploite pas sous ce rapport, ce qui entraîneroit un travail long et difficile, parce que , comme nous l'a- vons remarqué , le Pinus mitis est toujours mêlé avec les autres arbres dans les forets. Mais d'après les différens avantages que présente son bois , il est incontestablement, après le Pinus ruhra ^ l'es- pèce la plus intéressante à cultiver dans le milieu et le nord de l'Europe. Je ne puis donc partager l'opinion de Sir A. 13. Lambert , qui commence sa description latine par ces mots : Arhor medio- cris , etc. , et qui ajoute ensuite « que cet arbre ne s'élève qu'à vingt ou trente pieds, que son bois est spongieux et de peu de durée ; ce qui le rend im- propre à la bâtisse des maisons ». PLANCHE III. Fig. 1 , feuille. Fig. 2. ^ graine. I. 8 PINUS iNops THE JERSEY PIISE P I N u s inops ; arhor tnediocris , ramosa ; foUis binis , brevis ; strobilis oifato-acuminatis , solitariis , fuscis , mucronibus tessularum rigidis , deorsuin sub - incli- natis. Obs. Truncus et ramuli obscure et squalide Jiisci» P. inops j Linu. Cette espèce a reçu probablement son nom de ce qu'elle abonde dans la partie basse du New-Jersey, où le sol est maigre et sablonneux, et où elle se trouve souvent mêlée avec le Pinus mitis ; cepen- dant le Pinus inops n'est pas exclusivement confiné à la partie méridionale de cet Etat, car je l'ai retrouvé dans différentes parties du Maryland, de la Virginie et du Rentucky; dans la Pensylvanie, au-delà de Chambersburg; près de la rivière Juniata (^Crossing Juniata)^ et sur les Scruby ridges au-delà de Bedfort , éloigné d'environ 200 milles de Philadelphie. Dans cette partie de la Pensylvanie , cet arbre auquel on donne le nom de Scrub pine^ Pin chétif , reparoit par^ tout où le sol est schisteux et par conséquent assez Inaigre , ainsi que l'annonce la mauvaise apparence des Quercus coccinea , Quercus rubra, Quercus tinctoria^ Quercus alba et Quercus prinus monti- cola^ avec lesquels il est mêlé. Je ne l'ai pas rencontré vers le Nord, au-delà de la rivière Hudson, non plus que dans les Carolines et la Géorgie. gU: PIN us Inops /;? a erJeu P I N U s I N O P s. 5o Cet arbre s'élève quelquefois de 12 à 14 mètres (3o à 40 pieds), sur un diamètre de 3o à /|0 centi- mètres (12 à 1 5 pouces); mais il est rare d'en trou- ver de cette force, et il reste ordinairement au-dessous de ces dimensions. Son tronc , revêtu d'une écorcc ' noirâtre, diminue sensiblement de grosseur depuis sa base jusqu'à son sommet, et il est garni de bran- ches fort espacées dans la moitié de sa hauteur. Les feuilles du Pinus inops sont réunies deux à deux dans la même gaine ; elles sont d'un vert sombre , longues d'environ 2 à 3 centimètres (^ i à 2 pouces ), aplaties à leur face interne , roides et éparses le long des jeunes branches, qui sont très-flexibles et couvertes d'une écorce lisse, qui n'est point écailleuse comme dans les autres Pins. On observe encore que dans cette espèce, ainsi que dans celle précédemment décrite, le bois des jeunes pousses de l'année a une teinte violette ; caractère qui leur est particulier. Ses cônes, un peu plus grands que ceux du Pinus mitis^ ont environ 5 centimètres (2 pouces) de long et 2 centimètres (i pouce) de diamètre à leur base. Leur couleur est noirâtre ou d'un rouge brun. Ils sont armés de pointes fortes, longues, aiguës et re- courbées en arrière, et sont attachées par des pé- dicules épais et courts : le plus souvent ils sont pla- cés un à un sur les branches , la pointe dirigée vers la terre. Ils laissent échapper leur graines la même année de leur maturité. Ce qui vient d'être dit prouve suffisamment, que cette espèce de Pin a des dimensions trop petites , 6o PINUSINOPS. pour pouvoir être employé utilement, sans parler du désavantage attaché à son bois d'être surchargé d'au- bier; cependant le cœur est assez résineux pour que, dans les environs de Mudlick, dans l'Etat de Ren- tucky, on en retire une petite quantité de goudron, qui est consommée dans le pays. Je ne puis croire non plus, comme le pense SirA.B, Lambert, que ses branches 5 quoique flexibles, puissent servir à faire des cerceaux; car ils seroient chargés de nœuds et pourriroient en moins de six mois. C'est à mon avis, après le Piniis rupestris ^ la plus mauvaise es- pèce de Pins des Etats-Unis. PLANCHE IV. Fig. 1 , feuille. Fig. 2 , graine. /y,j. r JJl.:w:^;^ ,-, PINUS Pungens . PINUS PUNGENS, THE TABLE MOUNTAIN FINE. Pi NUS pungens; arhor 45 - 5o pedalis y folils hinis , hre- vïbus et crassis ; strobills turbinatls , prœmagnis ,Jiavis squamis echinatis , spinis luteis durissimis et basi la^ tloribus, P, pungens : A. B. Lambert , on the Fine. La montagne de la Table , l'une des plus élevées des Alléghanys, et située dans la Caroline septen- trionale , à 4o^ kilomètres (^loo lieues j de la mer , paroît avoir donné son nom à celte espèce de Pin qui couvre presque exclusivement son sommet , et qui est, au contraire , fort rare sur celles qui Favoi- sinent. Le Pinus pungens ne se trouve pas non plus dans les autres parties des Etats-Unis, comme mon père et moi, qui avons visité ces régions dans pres- que toutes les directions , avons eu occasion de nous en assurer. Le Pinus pungens est de tous les arbres de l'Amérique septentrionale le seul qui soit resserré dans des limites aussi étroites. Il est même probable qu'il sera le premier à disparoître de ces contrées , car toutes les montagnes où on le trouve sont très- accessibles et elles se peuplent rapidement, parce que l'air y est sain , le sol généralement de bonne qua- lité , et de plus , que les forets qui les couvrent sont fréquemment dévastées par des incendies. Le Pinus pungens s'élève de douze à quatorze 02 PINUSPUNGENS. mètres ( 4^ ^ ^^ pieds ) , sur un diamètre propor- tionné à cette hauteur. Ses bourgeons sont résineux , et ses feuilles , au nombre de deux dans la même gaîne, sont épaisses, roides et longues d'environ cinq à six centimètres (2 pouces et demi) ; ses cônes longs de huit centimètres Ç3 pouces), et larges à leur base de cinq centimètres Ç2 pouces), sont d'un jaune clair et ont une forme très-régulière. Ils sont sessiles , et souvent réunis au nombre de quatre.Chaque écaille est armée d'une forte pointe ligneuse , longue de quatre millimètres (2 lignes), élargie à sa base et qui se recourbe en avant. Cet arbre dont le tronc est très-rameux, et qui, comme on a vu , ne croît que dans une très - petite étendue de pays, et à une grande distance dans l'in- térieur des terres , ne sert à aucun usage particulier; seulement , les habitans des montagnes de la Caro- line du nord emploient pour mettre sur les plaies, la thérébentine qui en découle, soit accidentellement, soit par une incision faite au corps de l'arbre , et ils la préfèrent à celle que donnent tous les autres Pins. J'ai comparé cette thérébentine avec celle du Pinus rigida, et je ne leur ai trouvé aucune différence. Il paroît même assez surprenant que toutes les es- pèces de Pins, si différentes entre elles, donnent des produits résineux tellement analogues , qu'il est souvent très - difficile de les distinguer par fodeur et la saveur. Le Pinus pun gens ne paroit donc pas présenter au- cun objet particulier d'utilité, qui doive déterminer PINU5 PUNGENS. 63 à le cultiver en Europe, si ce n'est dans les jardins d'agrémens et de botanique. Sir A. \S. Lambert a donné à l'article du. Pinus tœda une figure exacte du cône de cet arbre 5 mais il a reconnu ensuite que ce cône appartenoit aune nou- velle espèce , à laquelle il a donné le nom spécifique de Pungens. Ce nom m'a paru convenable , et je l'ai adopté. PLANCHE V. F/g. 1 } feuille. Fig. 2 , graine. PINUS AU STRALIS. THE LONG LE A FED FINE. P I N u S australis ; arhor maxima ; foliis ternis , longissi- mis ; amentis masculis longo - cylindraceis , fusco- glaucis , di^ergentibus. Strohilis longissimè conoïdeis , tessularum tuberculo - tumido , mucrone minutissimo termiiiato. P, pal us tris , Linn. Cet arbre précieux reçoit différentes dénomina- tions, tant dans les pays où il croit, que dans ceux où il est exporté. Il est connu dans les premiers sous les noms de Long leavedpine^ pin à longues feuilles j de Yellow pine^ pin jaune ; de Pitch pine^ pin à gou- dron ; et de Brooni pine^ pin à balais. Dans les Etats du Nord, où il est importé par la voie du commerce, sous ceux de Southern pine ^ pin du Sud, et quel- quefois encore de Red pine , pin rouge ; enfin en Angleterre et dans les colonies occidentales, sous celui de Georgiapitchpine^^^'indi goudron de Géor- gie. Mais j'ai cru devoir lui conserver de préférence le nom de Long lea\>ed pine ^ pin à longues feuilles ; car, dans toute la partie de l'Amérique septentrio- nale située à l'est du Mississipi, on ne connoît aucun autre pin qui ait les feuilles aussi longues; et d'ail- leurs les noms de Yellow pine^ pin jaune, et de Pitch pine^ pin à goudron, qui lui sont peut-être plus universellement donnés , servent dans les Etats du milieu à désigner deux autres espèces très-dis- 6? i^ 3 /',//^^.v,V,A PIN us austialis PINUS AUSTRALIS. 6f> tinctes et qui sont très-répandues. J'ai pensé égale- ment que la dénomination spécifique à'amtralis. étoit préférable à celle àc palus tris , sous laquelle celte espèce est décrite par les botanistes; car cette dernière donne une idée absolument fausse de la nature du sol où croit cet arbre. C'est à peu de distance de Norfolk, dans la basse Virginie, où commencent les landes américaines, Fine Ban eus ^ que le Pinus australis commence aussi à se montrer, lorsqu'on va vers le midi ; car cette espèce est en quelque sorte inhérente à cette nature de terrain. On la retrouve ensuite sans in- terruption dans la partie basse des deux Carolines, de la Géorgie et des deux Florides, étendue de landes tellement vastes , qu'elles embrassent un es- pace de plus de looo kilomètres ( 260 lieues J du nord-est au sud-ouest, et de i5o à 200 kilomètres (^ 4^ à fjo lieues de largeur) à partir du bord de la mer, dans les deux Carolines et la Géorgie. J'ai re- connu trois points distans les uns des autres de 1 20 à i5o kilomètres ( 3o à 40 lieues], où le Pinus aus- tralis cesse de croître : le premier dans la Caroline septentrionale à huit milles de la rivière Nuse, sur la route de Louisburgh à Raleigh ; le second entre Chester et Winesburough dans la Caroline du Sud ^ et le troisième à douze milles nord d'Augusta dans la Géorgie. Lorsque cet arbre commence à se mon- trer vers la rivière Nuse , il se trouve réuni au PiniLS tœda et au Pinus jnitis^ et entremêlé de Quercus ferrugijiea et de Quercus catesbœi ; mais , immë- I- ^ 9 66 PINUS AUSTRALIS. diatement au-delà de Ralcigh , on le voit presque seul en possession du sol , et lorsqu'on le rencontre de nouveau avec ces mêmes espèces de pins, ce n'est jamais que sur les bords des marais fswamps^ , qui sont enclavés dans les landes. Ces dernières espèces, au surplus , sont à peine dans la proportion d'un à cent avec le Pinus australis ^ lequel, à cette excep- tion près, forme cette masse non interrompue de ibréts , qui couvre la vaste e'tendue de pays com- prise entre les points que je viens d'indiquer. Il y a néanmoins quelques cantons entre Fayetteville et Wilmington , dans la Caroline du Nord , où le Quercus cateshœi se trouve disséminé dans les lan- des, et c'est le seul arbre qui puisse , comme l'espèce que nous décrivons, s'accommoder d'un terrain aussi aride. La hauteur moyenne du Pinus australis est d'en - viron 20 à il\ mètres (^ 60 à 70 pieds j sur 40 centi- mètres (i5 à 18 pouces} de diamètre, et sa grosseur est uniforme dans les deux tiers de son élévation. Quelques individus parviennent à de plus grandes dimensions; mais cela tient aux localités, ainsi que j'aurai occasion de le faire remarquer dans la suite de cet article. Uécorce du Pinus australis est peu fendillée , et l'épiderme s'en détache en feuillets minces et transparens. Ses feuilles au nombre de trois dans la même gaine, longues d'environ 33 cen- timètres ( I pied), d'un beau vert, sont luisantes et réunies en paquets à l'extrémité des branches. Elles sont plus longues et beaucoup plus nombreuses PINUSAUSTRALIS. Gj dans les jeunes arbres; et c'est à cause de cela que les nègres les coupent souvent par le pied, et s'en servent comme de balais. Ses bourgeons sont trcs- gros, blancs, frisés et non résineux. Le Piniis australis fleurit au mois d'avril ; ses fleurs mâles présentent une masse de chatons diver- gens de couleur violette, et longs de près de 5 cen- timètres (^ i pouces J. A l'époque de leur dessication, ils laissent échapper une grande quantité de poleu ou de poussière jaunâtre, qui, emportée au loin par les vents, couvre momentanément la surface de la terre et des eaux. Ses cônes, armés de pointes fines, courtes et recourbées en arrière, sont très-volumi- neux, ayant 20 centimètres (^ -y à 8 pouces j de lar- geur sur 10 centimètres (^ 4 pouces ) de diamètre après qu'ils sont ouverts. Dans les années où cet arbre porte fruit, ils sont à maturité vers le i3 oc- tobre, et ils laissent échapper leurs graines dans le courant du même mois. L'amande, dun goût assez agréable, est enfermée dans une coque mince et de couleur blanche, tandis qu'elle est noire dans toutes les autres espèces de pins de l'Amérique septentrio- nale j elle est surmontée d'une aile membraneuse. Dans certaines années, les graines sont extrêmement abondantes, et elles sont avidemment recherchées par les dindons sauvages , les écureuils, et même par les cochons qui vivent presque toujours dans les bois. Lorsqu'au contraire ce ne sont pas des années à fruit, on parcourroit en vain des centaines de milles de forêts composées uniquement de cette espèce d'arbre, 68 PINUS AUSTRALIS. sans trouver un seul cône ; et c'est là probablement ce qui a fait dire aux François qui tentèrent de s'établir dans les Florides en iS6j « que les bois ëtoieut remplis de pins magnifiques, mais qui ne portoient point de fruit. » Le Piniis australis est peu charge d'aubier; sur plusieurs arbres de 4o centimètres (^ i5 pouces ) de diamètre , que j'ai mesurés à i mètre [^ 3 pieds ) de terre, je n'en ai trouvé que 6 centimètres ( i pouces et demi) sur i!\ centimètres ( lo pouces) de cœur; et c'est parce qu il jouit de cette propriété , qu'on en exploite une si grande quantité de cette grosseur , et c'est également par cette raison, que, dans le com- merce d'exportation qui s'en fait, on ne reçoit au- cune pièce qui n'ait au moins i!\ centimètres ( lo pouces) d'équarissage sans aubier. Lorsque cet arbre est parvenu à son entier développement, ses couches concentriques sont très-rapprochées, espacées éga- lement , et la matière résineuse y est assez abon- dante et répandue d'une manière plus uniforme que dans les autres espèces du même genre; c'est par cette raison que le bois du Pinus australis a plus de force, et qu'il est plus compacte et plus durable : il a d'ailleurs le grain fin et serré, et est susceptible de bien se polir. Ces divers avantages le font préférer dans les Etats-Unis à tous les autres pins, toutes les fois qu'on peut se le procurer. Cependant ces qua- lités éprouvent des modifications selon la nature du sot où il croît; ainsi dans les cantons qui avoisinent le bord de la mer, dont le leirain n'est qu'un sable PI NUS AUSTIIALIS. 69 qiiartzeux couvert d'une couche trcs-mince de terre végétale , ce pin est plus résineux que lorsque cette couche a douze centimètres (^ 5 à G pouces) d'épais- seur : de là vient qu'on désigne improprement les individus qui viennent dans le premier sol , sous le nom de Pitch pine ^ pin à goudron, et les autres sous celui de Yellow pine ^ pin jaune, comme si c'étoit deux espèces différentes. Ijg Pinus australis sert à un grand nombre d'usages dans les Carolines, la Géorgie et les deux Florides; les huit dixièmes des maisons en sont entièrement construites, à l'exception de la toiture qui est ordi- nairement faite en bardeaux de Cupressus disticha; mais dans les campagnes , à défaut de ce dernier bois, on s en sert aussi pour cet objet, et alors on est obligé de renouveler les bardeaux après quinze à dix-huit ans, laps de temps encore très-considé- rable dans un pays où les alternatives de la chaleur et de l'humidité sont extrêmes. On en fait aussi la clôture des champs cultivés; ce qui en consomme une quantité prodigieuse. Le Pinus australis est très-employé dans les cons- tructions navales, et c'est de toutes les espèces de pins la plus estimée pour ce genre de travail. Dans les Etats méridionaux, la quille, les beams ^ les bordages et les chevilles pour les fixer sur les membrures, ainsi que les mâts, sont tirés de cet arbre. On le préfère , parti- culièrement pour le pont, au vrai Pin jaune, Pinus mitis j et on en exporte, pour ce seul objet, une assez grande quantité à Philadelphie , à New-lork et 70 PI NU s AUSTRAL I s. dans d'autres ports de mer situés plus au nord. 11 y est aussi recherché pour faire les planchers des maisons. Le bois du Pinus australis contracte quelquefois une couleur rougeàtre , due à la nature du sol où il croit ; ce qui lui a fait donner dans les chantiers de constructions des Etats septentrignaux, le nom de Pin rouge. On y regarde le bois de cette qualité comme le meilleur, et beaucoup de constructeurs dans les Etats-Unis pensent même que les bordages des vais- seaux qui en sont faits, sont plus durables que ceux faits en chêne, et moins susceptibles d'être attaqués par les vers de mer. Dans la Floride orientale où j'ai voyagé , le Pinus australis m'a paru s'élever à une plus grande hauteur , et il couvre presque toute la surface du pays. C'est la seule espèce de Pin des Etats méri- dionaux, qui soit exportée eu AngleteiTe et aux colo- nies des Indes occidentales. Un grand nombre de petits bâtimens sont constamment employés à ce commerce , surtout de Wilmington dans la Caro- line du nord, et de Savanah en Géorgie. Les bois destinés pour les colonies occidentales, sont débités en planches et pièces de toute épaisseur, soit pour la bâtisse des maisons, soit pour la construction des vaisseaux. Ceux qu'on expédie pour l'Angleterre y arrivent sous la forme de madriers de 5 à lo mètres (^ i5 à 3o pieds j de long sur 3o à 6o centimètres ( 10 à 20 pouces j de diamètre : on leur donne dans le pays le nom de rajigijig timhers , et le prix varie de 8 à 10 dollars ( 4^ à 5o fr.j les loo pieds cubes. PINUS AUSTRALIS. 71 C'est à Liverpool que se rendent la plupart des na- vires qui en sont chargés. L'on dit que ces madriers sont employés à la construction des vaisseaux et servent aussi à celle des bassins dits Wet- Docks. On leur donne le nom de Geor^ia pilcli pine ^ pin à goudron de Géorgie, et cette qualité de bois de pin se vend toujours de vingt-cinq à trente pour cent plus cher que celle de toute les autres espèces qu'on im- porte des autres parties de l'Amérique septentrionale. D'après les usages variés auxquels on a vu que le bois du Pinus australis étoit appliqué, non-seule- ment dans les pays où il croit , mais encore aux colo- nies des Indes occidentales et en Europe, on peut juger combien la consommation doit en être consi- dérable. Cependant à ces causes de destruction , utile à la société, il vient de s'en réunir une autre infiniment désastreuse , et à laquelle il paroit im- possible de remédier. On a remarqué depuis l'an i8o4 que des cantons fort étendus, et couverts des plus beaux Pins, n'offrent plus que des arbres morts. J'avois déjà observé en 1802 le même phénomène sur le Pinus mitis dans l'Etat de Tennessee. Ce fléau, qui se fait sentir dans les belles forets de Pinus sjbestris [scothjîr) qui peuplent le nord de l'Europe , est produit par des essaims d'insectes , dont les uns se logent dans la maîtresse pousse ou la flèche, et les autres s'introduisent sous lécorce pénètrent dans le corps de l'arbre, et le font périr dans le cours de la même année. Les services qu'on retire du Pinus australis ne se 72 PINUS AUSTRALIS. bornent pas à son bois ; on en extrait la presque totaHté des substances résineuses qui servent à la construction des nombreux vaisseaux des États-Unis, et forment en outre une branche importante de com- merce avec les colonies des Indes occidentales et l'Angleterre. Sous ce rapport, il n'existe aucune autre espèce dans ce pays qui puisse y suppléer 5 car celles qui seroient susceptibles de le faire , sont ou dis- séminées dans les bois, ou situées dans des lieux peu accessibles^ ou , enfin, resserrées dans des cantons trop peu étendus ou trop éloignés , pour qu'on puisse en obtenir de grandes quantités ; et pour ne citer qu'un seul exemple , lors des premiers établis- semens dans les Etats septentrionaux , les terrains qui étoient couverts de Pinus rigida, furent presque épuisés au bout de vingt-cinq à trente ans, et depuis plus d'un demi-siècle le nombre des arbres de cette espèce y est tellement diminué , qu'on ne peut plus maintenant les exploiter sous le rapport des produits résineux. Malgré que les landes américaines, Pine Barrens y soient d'une étendue très-considérable , et qu'elles soient couvertes des plus beaux Pins, elles ne sont cependant pas toutes exploitées, soit par le défaut de communication avec les ports de mer, soit par l'éloignement des rivières qui les traversent, ou parce qu'on n'a pas encore ouvert de chemins pour y for- mer des établissemens agricoles, attendu l'extrême pauvreté du sol. On faisoit autrefois du goudron dans toute l'étendue des basses Carolines , de la basse PINUS AUSTRALIS. ^3 Géorgie et des Florides; car oa trouve partout des vestiges de tertres qui ont servi à la combustion des bois résineux; mais aujourd'hui cette branche d'in- dustrie est, pour ainsi dire, bornée à la partie infé- rieure de la Caroline septentrionale, où Ton fabrique la presque totalité du goudron et de la térébenthine qui s'exporte de Wilmington , tant pour les autres ports des Etats-Unis, que pour les colonies occiden- tales et la Grande-Uretagnc. Les produits résineux que fournit le Pinus austra- lis sont au nombre de six; savoir : la térébenthine , turpendne; la raclure ou le ratissage , scraping ; l'esprit de térébenthine , spirit of turpentine , la résine , rosin ; le goudron , tar ; et le bray , pitch. Les deux premiers sont introduits dans le commerce tels que la nature les donne , et les au- tres , sont le résultat de préparations pour lesquelles on emploie l'action du feu. Je vais entrer, relative- ment à ces difFérens produits, dans quelques détails qui y sont particulièrement relatifs. La térébenthine est la sève elle-même, obtenue par une incision pratiquée au corps de l'arbre. Gomme c'est à la mi-mars qu'elle commence à circuler , c'est aussi à cette époque que l'on en commence la ré- colte, qui est d'autant plus abondante que les cha- leurs deviennent plus fortes, de manière que les mois de juillet et d'août sont les plus productifs. Vers le mois d'octobre où la circulation commence à se ra- lentir, on cesse aussi la récolte , et l'on attend le re- tour du printemps pour en faire une nouvelle. Quoi- I. 10 ^4 PINUS AUSTRALIS. qu'on n*obtienne la térébenthine que pendant le printemps, l'été et une partie de l'automne, cepen- dant les travaux qu'occasionne son extraction , oc- cupent le reste de l'année. Ces travaux consistent à faire les boites , to box ^ à nettoyer la terre autour des arbres , to rake ; à en entailler, gendging j à raviver, to chip j à enlever la térébenthine , to dip ; enfin à ratisser , to scrape. La première opération , celle de faire les boîtes, a lieu dans les mois de jan- vier et de février \ on fait au bas de chaque arbre , à trois ou quatre pouces au-dessus de terre , et préfé- rablement du côté du midi, une entaille de la con- tenance d'environ i litre et demi ( i pinte et demie); on la fait, au reste , plus ou moins grande , selon la grosseur de l'arbre, et assez ordinairement elle oc- cupe le quart de son diamètre, et dans ceux qui ont plus de 2 mètres (^6 pieds) de circonférence, on pratique deux et quelquefois quatre boîtes opposées l'une à l'autre. C'est dans les mêmes mois et pendant le suivant, qu'on nettoie les arbres, c'est-à-dire qu'on enlève les feuilles et les herbes qui couvrent la sur- face du sol autour des pins. Ils se trouvent par ce moyen à l'abri du feu que les voyageurs, et surtout les rouliers, mettent inconsidérément dans les bois lorsqu'ils y couchent ; car la flamme manquant alors d'aliment, ne peut plus arriver jusqu'à eux, et sans ce travail indispensable, elle gagneroit les boîtes déjà imprégnées de térébenthine, et les détruiroit. Quand cet accident arrive , malgré les précautions qu'on a prises, on est forcé de les refaire du côté opposé. PINUS AUSTRALIS. 'J :i L'entaillement, gend^ing ou to notch , consiste à faire à chacun des deux côtés de la boite , et dans une direction oblique, une gouttière d'environ huit centimètres (trois pouces) de longueur; elle a pour objet de conduire dans la boite un surcroît de téré- benthine, et d'y diriger celle qui suinte des bords latéraux de la plaie qui occupe une plus grande sur- face que la boite elle-même. Dans l'intervalle de temps qui s'écoule depuis qu'on a commencé à entailler jusqu'à ce que ce tra- vail soit achevé , et qui est d'environ quinze joues, les premières boîtes sont pleines, et l'on commence à enlever la térébenthine. On se sert pour cela d'une spatule de bois, et l'ouvrier vide le seau qu'il porte avec lui dans un tonneau placé à proximité. Pour augmenter la récolte , on ravive une fois la semaine le bord supérieur de la plaie, en enlevant l'écorce et une portion de l'aubier, équivalente à quatre couches concentriques; car l'on a observé que plus on multiplie ces ravivemens, plusle produit de l'exsu- dation augmente. La térébenthine se récolte ainsi de trois semaines en'lrois semaines, espace de temps nécessaire pour que les boites soient remplies. Celle qu'on obtient de cette manière est la plus pure et la meilleure ; elle reçoit le nom de pure dipiîig. Les ravivemens successifs faits aux bords supérieurs de la plaie, forment dès la première année, une éten- due d'environ ii centimètres (i pied) au-dessus de la boite, et cette distance augmentant tous les ans, on est obligé de raviver plus fréquemment; car alors 7^ PIKUS AUSTRALIS. une plus grande quantité de térébenthine a le temps de se coaguler et de rester sur la surface de la plaie, avant d'arriver à sa destination. Les pluies continues pendant plusieurs jours, en humectant les bords de la plaie, en obstruent en partie les pores, ce qui oblige, dans ce cas, de les raviver plus fréquemment ; aussi remarque-t-on que la récolte est toujours moins abondante, lorsque les années sont pluvieuses et les étés moins chauds que de coutume. Le bord supérieur de la plaie est horizontal tant qu'il est à la portée de louvrier; mais lorsque celui-ci ne peut plus y atteindre que dif- ficilement, il a la forme d'un triangle à sommet ren- versé : c est ce qui arrive ordinairement la cinquième ou la sixième année , laps de temps après lequel on abandonne les arbres. La plaie se cicatrise sur les bords, mais l'éeorce ne recouvre jamais la partie dénudée , de manière à ce qu'elle puisse être retra- vaillée par la suite. On estime que deux cent cinquante boites pro- duisent à peu près un baril du poids de i55 kilo- grammes ( 320 liv. j que chaque baril doit avoir dans le commerce. Quelques habitans donnent à un nègre quatre mille ou quatre mille cinq cents arbres char- gés d'une boîte à soigner; d'autres seulement trois mille ; mais à la vérité cette dernière tache est con- sidérée comme facile à remplir. On considère en général que trois mille arbres rendent, année com- mune,soixante-quinze barils de térébenthine et vingt- cinq de ratissage, scroping-^ ce qui paroit indiquer piNUSAUSTRALis. nn qu'on vide les boîtes cinq à six fois dans le cours de la saison. Le baril de térébenthine, àïle pure cliping ^ se vendoit 3 dollars Ç i5 f'r. 75 c.) au mois de no- vembre 1807, à Wilmington dans la Caroline du nord, et celui de scraping vingt-cinq pour cent de moins. Le ratissage ou. scrapùi^^ est cette portion de térébenthine qui se durcit et se fige avant d'arriver à la boîte , et forme une couche épaisse qu'on en- lève dans le cours de fautomne , en y ajoutant le deriiier produit de la récolte de la térébenthine , pure diping. La térébenthine est exportée dans les Etats du Nord et en Angleterre. Cette exportation a été , en 1804 , de 77,827 barils Ç environ 240 mille quintaux). En temps de paix, il en vient même à Paris, où elle est connue sous le nom de téré- benthine de Boston y quoique le pays d'oii on la tire soit éloigné de cette ville de près de 1800 kilo- mètres ( 4oo lieues j. Dans tous les Etats - Unis on s'en sert pour faire le savon , dont la couleur est jaune et qui est de bonne qualité. L'Angleterre en consomme une très-grande quantité; car, d'après un exposé officiel des marchandises importées des Etats- Unis dans le cours de 1807, ^^^^ ^^ ^ ^^^^^ pour la somme de 465,828 piastres (2,445,597 francs). 11 en est arrivé dans le seul port de Liverpool, en i8o5 , 40,294 barils, et en 1807 , 18,924. Elle s'y vendoit au mois d'août 1 807 , 1 5 francs le quintal , et en 1 808 , après la mise de Fembargo sur les navires américains, 7^ PINUS AUSTRALIS. jusqu'à 4o fr. 5o cent. Je placerai ici une remarque que j'ai faite en lisant l'ouvrage d'Oddj sur les rela- tions commerciales du nord de l'Europe avec la Grande-Bretagne, c'est que la térébenthine n'est pas comprise dans les listes qu'il donne des marchan- dises exportées d'Archangel et de Stockholm , tandis que dans certaines années, il s'expédie de ces deux ports plus de 100,000 barils de goudron. On fabrique dans la Caroline du nord beaucoup d'esprit de térébenthine. On l'obtient en distillant la térébenthine dans de grands alembics de cuivre, qui ont le défaut d'être beaucoup trop resserrés à leur ouverture, ce qui doit ralentir l'opération. Il faut, dit-on, six barils de térébenthine pour avoir un baril d'esprit, contenant 1 12 litres (^122 pintesj. On l'expédie dans toutes les autres parties des Etats- Unis, et il en passe même dans les contrées de l'ouest par la voie de Philadelphie ; on en exporte aussi pour l'Angleterre , et il vient également en France , où quelques personnes le trouve préférable à celui qu'on fabrique dans les landes de Bordeaux , parce qu'il n'a pas une odeur aussi forte. En i8o4 il en a été exporté de la Caroline du Nord , 19,526 gallons, ou environ 80,000 pintes, mesure de Paris. La résine, rosin^ est le résidu de la distillation de la térébenthine; elle se vend environ un tiers de moins; 467^ barils ont été exportés dans le cours de l'an 1804. Tout le goudron qui se fabrique dans la partie méridionale des Etats-Unis se tire des bois morts du PINUSAUSTRALIS. jg Pinus australis ^ tournés à l'état résineux. Ce sont les débris des arbres qui tombent de vétusté, ou dont la chute est accélérée par le ieu mis annuel lenient dans les forets, et qui dans son passage brûle en partie le pied des Pins, et surtout de ceux qui ont été travaillés pour en extraire la térébenthine. Les sommets abandonnés des arbres abattus pour être débités en planches ou madriers, et qui forment environ un tiers de leur hauteur, fournissent encore beaucoup de bois mort pour la fabrication du gou- dron; et enfin, dans certaines années, la quantité en est encore augmentée par le verglas qui s'attache aux feuilles, et fait rompre par son poids de très- grosses branches '. C'est une chose digne de remarque que, dans les arbres résineux, les branches parviennent presque entièrement à ïétat de hois , et que l'organisation y paroisse beaucoup plus complète que dans le cœur même de l'arbre , tandis qu'on observe précisément le contraire dans les arbres à feuilles tombantes; mais il me suffit ici de faire connoitre fidèlement ce phénomène , et je laisse aux personnes qui s'occupent de physiologie végétsde le soin d'en donner l'explica- tion. Toutes les portions d'arbres et de branches hors d'état de végéter subissent promptement une altéra- tion particulière , l'aubier se pourrit, et le bois déjà imprégné de sucs résineux, s'en surcharge à un tel ' Voyez mon Voyage à l'ouest du Mont-AUéglianys , Paris , i8o3 , chez DeniUf rue du Pont-de-Lodi. 8o PIN us AUSTRALIS. degré, qu'il double de poids au bout d'un an. Les habitans prétendent même que la quantité de résine est encore beaucoup plus considérable après un in- tervalle de quatre à cinq ans. Cette augmentation de matière résineuse dans le bois mort est un fait certain , et dont il est facile de se convaincre, en comparant un morceau tiré d'un arbre qui vient d'être abattu , avec celui d'un autre tombé depuis long-temps. Lorsqu'on veut faire le gondron , on choisit dans les forets, pour y établir le bûcher ,Â:z7/, un canton oii ces bois morts sont abondans. On rassemble d'abord autour de l'endroit désigné tous les bois résineux ; on les dépouille de leur aubier , et on les coupe en morceaux d'un mètre (^ 2 à 3 pieds j de longueur, sur 8 centimètres ( 3 pouces) d'épaisseur, ou à-peu-près. Ce travail est assez long , et même assez difficile, à cause de la grande dureté des nœuds qui s'y trouvent. Après cette opération préliminaire, on dispose l'emplacement où les bois doivent être empilés ; pour cela , on élève un tertre de forme cir- culaire, et on l'entoure d'un fossé peu profond. Les terres qu'on retire de ce fossé sont rejetées dans l'intérieur du tertre , et servent à en rehausser les bords et à donner au sol une pente insensible jus- qu'au centre. Le diamètre du bûcher est propor- tionné à la quantité de bois qu'il doit recevoir. On lui donne environ 6 mètres ( 18 à 20 pieds j , pour obtenir à-peu-près 100 barils de goudron; dans le milieu est un trou qui communique par un conduit à une fosse destinée à recevoir sa matière résineuse , PINUSAUSTRALIS. 8l et qui est pratiquée dans le fossé même , dont le Ifi Ire est environné. Après que le sgl a été bien glaise et bien battu, on arrange les morceaux de bois les uns au-dessus des autres, dans la même direction que les rayons d'un cercle : ce qui leur donne une légère inclinaison vers le centre, suite nécessaire de la con- cavité du tertre. La pile achevée peut être comparée à un cône tron- qué aux deux tiers de sa hauteur, et ensuite renversé, pouvant avoir à sa base environ 6 mètres et demi ^ >.o pieds) de diamètre ; à sa partie supérieure ,809 mè- tres (25 à 3o pieds) ; et 3 à 4 mètres (10 à 12 pieds) d'élévation. Elle, est ensuite garnie en son entier de feuilles de Pin, recouvertes de terre, et le tout est maintenu sur les côtés au moyen d'une légère en- ceinte en bois. Cette enveloppe est nécessaire pour que le feu que l'on met dans la partie supérieure de la pile , et qui doit agir du haut en bas ,^ ne produise qu'une combustion lente et graduée ; car si la masse venoit à s'enflammer à la fois , l'opération seroit man- quée , et le travail préparatoire en partie perdu. Enfin cette dernière opération exige à-peu-près les mêmes soins qu'on apporte en Europe à la fabrication du charbon. Un bûcher, kill^ qui doit rendre de 100 à i3o barils de goudron, est huit à neuf jours à brûler. A mesure que le goudron se forme, et qu'il coule dans la fosse, on le vei^e dans des barils de 3o gallons, 93 litres (120 pintes) , qui sont aussi faits de Pinus australis, I. II Sa PI NUS AUSTRALIS. La bray pitch est le résultat de la combustion du goudron; mais seulement jusqu'à la réduction de la moitié de son volume, pour être de bonne qualité, La quantité de goudron et de bray importée en Angleterre des Etats-Unis dans Tannée 1807, est évaluée , dans l'exposé officiel que nous avons déjà cité, à 265,000 piastres, ou environ 1,391,250 fr. Le premier se vendoit au mois d'août de la même année à Liverpool , 2 1 schelings sterl. (^ 2 3 fr. 60 c. J ; et après qu'on y fut informé de la mise de l'embargo sur les navires américains, il s'éleva jusqu'à 4^ sclil. (^54 fr.) ; fait dont on peut tirer des inductions favo- rables aux Etats-Unis. A Wilmington, C. N., dans les temps ordinaires, le prix du baril varie de i dol- lar 7 schl. à 2 dollars, ^9 à 1 1 fr.j Depuis 1786 jusqu'en 1799, tout le goudron qui est arrivé en Angleterre , y a été expédié suivant les remarques d'Oddy , savoir : un tiers par la Suède, un tiers par la Russie, et l'autre tiers parles Etats-Unis : ce qui y est venu du Danemarck se réduit à peu de chose. Le goudron de Suède est le plus estimé dansle com- merce; après vient celui d'Archangel : quant à celui des Etats-Unis , il passe pour être inférieur aux deux autres. On attribue cette infériorité à ce qu'il est extrait de bois morts, au lieu que celui d'Europe est fabriqué avec les bois d'arbres récemment abattus. Je m'étendrai davantage sur cette différence à l'article du Pinus rigida^ où l'on verra qu'il paroît avoir été reconnu depuis long-temps que l'emploi du bois vert P I N U s A U S T K A L I S . 83 OU du bois mort, influe beaucoup sur la qualité du goudron. On reproche encore à celui des Etats-Unis de contenir souvent de la terre, ce quil faut sans doute attribuer au peu d'attention qu'on met à faire la fosse dans laquelle il coule à mesure quil se foniio dans le bûcher. Il égaleroit probablement en qualité celui du nord de l'Europe, s'il étoit fabriqué avec les mêmes soins et les mêmes procédés; cependant, à ces causes des différences qui tiennent au mode de fabrication , il faut en ajouter deux autres très- remarquables. La première, c'est que le goudron de Suède ou de Russie provient du Pinus syheslris ^ et celui des Etats-Unis du Pinus australis , deux arbres absolument distincts; la seconde, que l'un de ces deux arbres croît dans les régions de l'Europe les plus froides, tandis que l'autre, au contraire, est indigène à des pays très-chauds. J'ai déjà eu occa- sion de dire que, malgré la grande étendue de pays que couvre le Pinus australis ^ la fabrication du goudron et de la térébenthine étoit aujourd'hui restreinte à la Basse-Caroline du nord, et à une très- petite portion de la Virginie qui l'avoisine; mais d'après la grande consommation qui se fait de ces substances, tant dans les Etats-Unis que dans la Grande-Bretagne, je doute que quand même toutes les contrées qui en sont susceptibles, seroient ex- ploitées sous ce rapport, elles pussent fournir long- temps à la consommation ; car on prétend qu'un can- ton oii l'on a ramassé les bois morts pour l'extrac- tion du goudron, ne se trouve regarni d'une même 84 PINUS AUSTRALIS. quantité qu'au bout de dix à douze ans. Il paroît donc qu'il seroit très-avantageux d'extraire le gou- dron de bois vert où d'arbres écorcés à l'avance ; peut-être, en employant ce moyen, parviendroit- on à subvenir aux besoins du commerce ? On pourroit encore, dans ces mêmes contrées, tirer un grand avantage de l'écorcement des Pins d'un petit diamètre, cette opération, en les faisant passer dans le cours de quinze mois à un état rési- neux complet, les rendroit très-propres à faire des pieux, ainsi qu'à beaucoup d'autres usages pour lesquels il faut des bois très-forts et susceptibles de résister long-temps aux influences de l'air et de Ihumidité ; on devroit surtout tenter cet écorce- ment au mois d'avril ou au commencement de mai , lorsque la sève est en activité , en observant d'enle- ver le liber le plus exactement qu'il seroit possible. J'aurois bien désiré faire cet essai pendant mon der- nier séjour dans la Caroline du sud, mais la saison étoit trop avancée pour que je pusse l'entreprendre avec l'espoir d'obtenir un heureux résultat. Je terminerai la longue description du Piniis australis par le désir de le voir propager dans les Landes de Bordeaux. La température de cette partie de l'Empire et la nature du sol lui conviendroient très-bien ; il y réussiroit beaucoup mieux que dans les départemens qui sont plus septentrionaux, où il ne croitroit jamais que d'une manière imparfaite. Il seroit une ressource de plus pour la France ; car , outre ses produits résineux, son bois est le meilleur PINUS AUSTRAL I s, 85 de tous ceux que fournissent les autres espèces de Pins de l'Amérique septentrionale. Je l'ai comparé à celui du Pinus marilima (Pin de Bordeaux), et à celui du Pinus syheslris (Pin du Nord ou de Kiga), et je l'ai trouvé très-supérieur en qualité. Je ne doute pas non plus que les bois des Pinus mitis et du Pinus ruhra ne soient aussi très-préférables à ceux de ces deux espèces européennes, à en juger par les forts échantillons que j'ai rapportés. La figure du Pinus australis ^ dans l'ouvrage de Sir A. B. Lambert, représente bien les feuilles et les fruits; mais il est défectueux relativement aux (leurs mâles. Quant à la description qu'il donne de cet arbre , elle offre, de toute manière , une telle dispa- rité avec la mienne, que je crois devoir la transcrire ici textuellement et dans son entier , plutôt que d'entrer dans aucune discussion. La description la- tine commence ainsi : Pinus palustris. Arhor me- dioci^is , in paludosis. — The FTood is of a redis h white colour^ soft^ light and verj sparingly im- pregnated with rosin. It soon decaj and burn badfy it is so litle estimated that as long as any kind ofwood is to be had , not tho least use is niade ofit. « Le bois de cet arbre est de couleur rou- geâtre , tendre , léger et peu chargé de résine. Il pourrit promptement, et brûle mal. Il est si peu es- timé , qu'aussi long-temps qu'on pourra se procurer toute autre espèce de bois , il n'en sera pas fait le moindre usage.» PLANCHE VI. Fi'g' 1 f feuille. F/g, a j bourgeon. Fig, 5 , graine. PINUS SEROTINJ, THE POND FINE. Pin US serotina ; arhor , 4o-45 pedalis ; foliis ternis , prce- longis ; amentis masculis erecto incumbentibus ; strobi- lis ovatis ; tessularmn mucrone munutissimo. Obs. Strobïli anno tanlum sequenti dehiscunt. P. serotina A Mich. il. B. Am». Quoique le Pinus serotina se rencontre assez fré- quemment dans la partie maritime des Etats méri- dionaux , il est cependant comme perdu dans la grande masse des Pins à longues feuilles qui cou- vrent toutes ces contrées ; d'ailleurs , il n'est employé à aucun usage déterminé , et il a cet air de famille qui donne une apparence à -peu -près semblable à tous les Pins ; et c'est sans doute par ces motifs qu'il n'a reçu jusqu'à présent des habitans aucune déno- mination particulière. Le nom de Pojid pine. Pin des mares, que je lui donne, me paroît assez con- venable 3 car on le trouve principalement autour des mares Ponds remplies de Laiirus estivalis , Pondbushes ^diinû que dans les petits swamps ou ma- rais , dont le sol noir et même bourbeux est couvert de Gordonia lasianthus , Lsaurus cai^oliniensis Njssa aquatica y Magnolia glauca. Les feuilles du Pinus serotina , réunies trois à trois dans une seule gaîne , sont longues de i3 à i6 centimètres (^^ ai Q pouces j et même un peu plus grandes dans les jeunes individus. Ses chatons, longs PINUS Serotiiia. PINUS SEROTIJVA. 87 de II à 12 millimètres (6 à 8 lignes), sont droits et non recourbes, ni mêlés ensemble, comme dans le Pinus australis ou le Pinus mitis. Ses cônes , le plus souvent réunis deux à deux et opposés l'un à l'autre, ont environ 6 centimètres (^2 pouces et demi) de longueur, sur i/j- centimètres (5 pouces et demi) de circonférence, et sont assez semblables par leur configuration à un œuf de grosseur ordinaire. Leurs écailles, arrondies à l'extrémité supérieure , sont ar. mées d'une pointe très-courte et très -fine, qui se casse avec la plus grande facilité ; ce qui, dans quel- ques circonstances , pourroit faire croire qu'elles en sont entièrement dépourvues. Quoique les cônes du Pinus serulina ne soient que deux ans pour arriver à leur entière maturité^ cependant ils ne s'ouvrent et ne laissent échapper leurs graines que la troisième et même la quatrième année. Cet arbre s'élève ordinairement de 1 1 à 12 mètres (^35 à 4o pieds) , sur 40 à 5o centimètres [ i5 à 18 pouces) de diamètre; il est fort rare de trouver des individus qui aient de plus grandes dimensions. Il est surtout remarquable par ses branches fort espa- cées , et qui commencent toujours à partir au-des- sous de la moitié de sa hauteur; outre le désavan- tage que lui donne ce défaut, il a encore celui d'être surchargé d'aubier , au point qu'on en trouve tou- jours, même dans les plus gros arbres , une plus grande proportion que de cœur; et c'est à cause de cela qu'on n'en fait aucun usage dans le pays , et bo PINUS SEROTINA. . • qu'il ne mérite, point par conséquent d'attirer l'at- tention des personnes qui s'occupent de plantations utiles en Europe. Obs. Lorsque les marais où swamps, aux environs desquels croit le Pinus serotina^ sont peu éloignés des champs autrefois cultivés , mais abandonnés à cause de leur infertilité , on observe quelquefois qu'il s'y est multiplié avec le Pinus australis ; c'est ce qui m'a mis à même de m'assurer que la séche- resse du terrain n'apportoit point de différence dans la forme de cet arbre ^ ni dans celle de ses cônes , et que ceux-ci , dans ce cas , n'étoient point armés de pointes plus longues ni plus fortes que dans les individus qui croissent dans un sol humide. J'ai cru devoir ajouter cette observation, parce que cet arbre a été fréquemment confondu avec le Pinus ri^ida , avec lequel il a beaucoup d'analogie par sa forme. PLANCHE VIL Fig. 1 , feuille. Fig, 2 , graine. P/.8 /i,:v., ,/r/ . ( :,/,,. >c PINUS RIGIDA. THE PITCH PINE. Pin US rigida , arhor ramosa; cortïce scahro-rimosa , gf^fn- mïs resinosis ; foliis ternis ; amentis masculis ere.cio- incumhentibus ;strohilis sparsis vel aggregatis, squamia echiiiatis , spi'nis rigidis. P. rigida , Linn. Cette espèce est connue dans tous les Etats-Unis sous le nom de Pitch pine , Pin résineux , et quel- quefois aussi en Virginie sous celui de Black pine ^ Pin noir, mais jamais, sous la dénomination de Three leaved Virginian pine , Pin de Virginie à trois feuilles , que lui donne Sir A. B. Lambert, dans son ouvrage. A l'exception de la partie maritime des Etats mé- ridionaux et des contrées fertiles situées à l'ouest des monts Alléghanys, cet arbre se trouve dans tou- tes les parties des Etats-Unis , mais beaucoup plus abondamment dans la partie atlantique , où la na- ture du sol est très-variée et souvent de très mau- vaise qualité. Les environs de Brunsv^âck, dans le district de Maine, et ceux de Burlington sur le lac Champlain, dans l'Etat de Vermont, sont les points les plus sep- tentrionaux où je l'aie trouvé ; dans ces contrées, les endroits où il croît le plus ordinairement sont ceux dont le sol est uni et formé d'un sable quart- I. 12 go PINUSRIGIDA. zeux, friable et si peu substantiel que cet arbre , qui les couvre exclusivement , ne s'ëlève pas au-dessus de 4^5 mètres (12 a i5 pieds j; ses branches me- nues et chargées de petits cônes annoncent encore son épuisement. Les chaînons successifs qui composent les Allégha- nys et qui traversent la Pensylvanie et la Virginie, dans une étendue de plusieurs centaines de milles, en sont parfois couverts ; c'est ce que j'ai eu l'occa- sion de remarquer plusieurs fois, dans mon voyage de Philadelphie à Pittsburgh sur l'Ohio, et notamment en traversant les South mountains , sur le chaînon désigné sous le nom de Sadle Hill , à 3o milles de Bedfort. Sur ces montagnes, dont le sol est un peu moins mauvais , et qui est composé d'argile et de beaucoup de pierres , le Pinus rigida vient à 10 à 12 mètres ( 3o à 35 pieds J de hauteur, sur 3 à 4 décimètres ^ 12 à i5 pouces) de diamètre ; di- mensions beaucoup plus grandes que celles des diverses espèces de chênes avec lesquelles il se trouve. On le rencontre encore fréquemment dans la par- tie basse du New-Jersey, de la Pensylvanie et du Maryland, mais dans des sites tout opposés. Ainsi, dans tous les grands swamps ou marais remplis de Cupressus thujoides ^ qui sont constamment vaseux ou couverts d'eau , il se trouve des Pinus rigida qui surpassent les autres arbres en élévation et en grosseur : ils ont environ 20 à 25 mètres ^70 à 80 pieds J de hauteur, sur 6 à 7 décimètres (^ 20 à 28 P I N U s R I f i I D A . 91 pouces) de diamètre. Cet arl)re résiste aussi assez long-temps à l'action des eaux de la mer qui , dans les fortes marées, couvrent les prairies salées, au milieu desquelles il croit quelquefois, et où il est seul de son espèce. Les bourgeons du Piniis rigida sont toujours rési- neux , et ses feuilles, réunies au nombre de trois dans la même gaine, ont depuis 3 jusqu'à 18 centi- mètres ( I pouce et demi jusqu'à 7 pouces) de lon- gueur, selon qu'il croit dans des lieux très -secs ou très-humides. Ses chatons, disposés comme dans le Pinus serotina^ sont droits et longs d'environ 3 cen- timètres ( 1 pouce). Ses cônes varient également en grosseur, suivant les localités, depuis un peu moins de 3 centimètres (^ i pouces ), jusqu'à 5 centimètres ( 3 pouces et demi ) de longueur ; leur forme est py- ramidale, et chaque écaille est armée d'une pointe aigùe et longue d'environ 4 millimètres ( 2 lignes). Lorsque le Pinus rigida croit en grande masse, soit sur les montagnes, soit dans les marais, ses cônes sont disséminés et placés un à un sur les branches , et, comme je m'en suis assuré par des observations constantes, ils s'ouvrent pour laisser échapper leurs graines à l'automne de la même année qu'ils sont arrivés à maturité; mais lorsqu'au contraire, ces ar- bres sont isolés et exposés à être battus par les vents , ils sont rabougris , et les cônes sont ramassés au nombre de quatre à cinq, et même en plus grand nombre sur une seule branche. Alors ils restent plu- sieurs années sans s'ouvrir. Cette observation reh.- Q2 PINUS RIGIDA. tive à l'agglomération des cônes, s'applique aussi au Pinus inops et au Pinus pungens^ et fait reconnoître ces arbres au premier aspect. Le Pinus 7'igida a l'écorce épaisse , noirâtre , et profondément sillonée. Mais il se distingue sur- tout des autres espèces de Pins , en ce qu'il est très- rameux et garni de branches dans les deux tiers de sa hauteur; ce qui rend son bois très noueux. Il a de plus, l'inconvénient d'être tellement surchargé d'aubier , que les trois quarts de son diamètre en sont formés, ce qu'on observe même dans les plus forts individus : aussi , les couches concentriques sont-elles très-écartées. La qualité de son bois est en- core très-différente suivant les lieux oii il croît : sur les montagnes et dans les terreins secs et graveleux , il est très-résineux et par-là même compacte et pesant, ce qui lui a fait donner le nom de Pitch pine^ Pin à goudron ; dans les marais, au contraire, il est tendre, léger et encore plus chargé d'aubier ; alors il est dé- signé sous celui de Sap pine^Vin à aubier. Ces défauts essentiels le rendent inférieur au Pinus mitis-, mais comme cette dernière espèce devient tous les jours plus rare, à cause de la grande consommation qui s'en fait pour les constructions civiles et maritimes , on la remplace en partie à New- York, à Philadelphie et à Baltimore, par le Pinus rigida , dont on fabrique les caisses destinées à contenir diverses marchandises , telles que la chandelle, le savon, etc. Les ouvriers qui l'emploient pour ces usages secondaires se servent de la qualité dite Sap pine ^ Pin à aubier. PI NUS R I G I D A. 93 Dans quelques parties des monts Allcghanys où le Pinus rigida est très-abondant, les maisons en bois en sont entièrement construites, et lorsqu'elles ne sont pas peintes, on rcconnoît tout de suite à la quantité de nœuds dont les planches sont par- semées, qu'elles proviennent de cet arbre. On pré- tend cependant que pour le plancher inférieur, qu'on est dans l'habitude de laver toutes les semai- nes, elles sont préférables à celles du Pinus mit Is ^ le grain du bois étant plus ferme et plus résistant , à cause de la quantité de résine dont il est im- prégné. On s'en sert aussi pour les corps de pompes des navires, et il convient très-bien à cet usage, pour lequel on recherche préférablement les espèces de Pin qui ont très - peu de cceur sur un grand diamètre. Les boulangers de New -York, de Philadelphie et de Baltimore, ainsi que les briquetiers établis aux environs des villes , chauffent presqu'entièrement leurs fours avec le bois de cet arbre, ce qui en con- somme une prodigieuse quantité. Ils l'achètent à Philadelphie , 3 piastres (16 francs) la corde. C'est encore avec les morceaux les plus résineux que se fait le noir de fumée. Le Pinus i^igida paroit avoir été autrefois fort com- mun dans les Etats de Connecticut, de Massachus- setts et de New^-Hampshire , situés à l'est de la rivière Hudson; car, depuis le commencement du dix-sep- tième siècle jusqu'en 1776 , on s y est occupé, plus 94 PINUSRIGIDA. OU moins activement, de fabriquer du goudron. Cette fabrication y fut même encouragée vers l'an l'joS , à la suite de quelques différends survenus entre l'An- gleterre et la Suède qui fournissoit à cette première puissance ses approvisionnemens en ce genre : pri- vée momentanément de cette ressource , la Grande- Bretagne chercha à y suppléer par ses colonies du nord del'Aniérique; elle offrit une prime de i pound sterling (22 f. 5o c.) pour autant de huit barils faits à la manière ordinaire, c'est-à-dire , avec des bois rési- neux provenant d'arbres morts, et celle de 2 pounds 4 shellings sterling (49 f. 4o c), pour pareille quantité faite avec du bois vert. Gomme il paroît que ce der- nier procédé n'étoit point en usage, on le fit connoî- tre, et on publia qu'il consistoit à écorcer les arbres jusqu'à trois mètres ( 9 pieds ) au-dessus de terre , et à ne les abattre qu'au bout d'un an. La bonté de ce procédé a été confirmée depuis par les expérien- ces deBuffon, sur la conversion de l'aubier e?i bois , expériences dont on tireroit de grands avantages dans les Etats-Unis, si on en faisoit l'application aux arbres résineux. Soit que cet encouragement ait causé rapidement une grande destruction de cet arbre, soit qu'on doive l'attribuer encore à d'autres circonstan- ces que j'ignore; il est constant que depuis bien des années, on ne tire plus ni térébenthine ni goudron de cette partie des Etats-Unis , car tout ce qui s'en consomme à Boston et dans les ports de mer voi- sins y est importé de Wilmington , dans la Garoline du nord. PINUS KIOIDA. qS La petite quantité de goudron qui se fabrique sur les bords du lac Ghamplain , est employée pour les petits bàtimens qui y naviguent . ou est envoyée à Québec. Quelques pauvres habitans se livrent aussi à ce travail, dans la partie basse du New-Jersey qui avoisine la mer , et le peu de goudron qu'ils en re- tirent est transporté à Philadelphie où il est moins estimé que celui qui vient des Etats méridionaux. Quant à la quantité qu'on en consomme sur les bords de rOhio , pour la construction des sept ou huit vaisseaux de différente grandeur qu'on lance annuel- lement sur cette rivière, elle vient des monts Allé- glianys, et principalement des bords de Tarcreek, ( rivière à goudron J qui a son embouchure dans 1 Ohio à 20 milles de Pittsburgh , et ce goudron re- vient à un prix très-élevé. On ne fabrique pas non plus dans les contrées de l'ouest , d'essence de té- rébenthine ; tout ce qu'il en faut pour la peinture extérieure et intérieure des maisons y est transporté de Philadelphie et de Baltimore. Mes recherches ne m'ont rien appris de plus sur lePinus rigida , mais ce qu'on a lu , suffit pour prou- ver que plusieurs autres espèces de Pins lui sont préférables, telles que le Piniis ?nitis et le Piniis rubra^ qui peuvent venir dans les mêmes terreins, et avec lesquels il se rencontre quelquefois naturel- lement: ces espèces n'ont pas, du moins au même degré , les défauts de cet arbre ; car, ainsi que je l'ai déjà remarqué , lorsque ce dernier croit dans un sol sec et graveleux , il est branchu dans les deux tiers g6 • PINUSRIGIDA. de sa hauteur, et par conséquent les pièces qui en proviennent sont pleines de nœuds ; et s'il se trouve dans des endroits très - humides , il acquiert , à la vérité, de bien plus grandes dimensions, mais alors son bois ne vaut rien, pour tous les ouvrages qui exigent de la force et de la durée. PLANCHE VIII. Fig. i , feuille. Fig. 2 , graine. /' .f:jl^./fli,A: M PIN US Taîda^. 'V'VW W '*,-^/-^ ^ "^ X. -v^ -^^^-V*^^ ^-'W ^ -^ "»» ^''X/*» ^ PIN us TMDA. THE LOBLOLLY FINE. Pi NUS tœda, arhor maxima , supernè patula; foliîs ler- nis , prœlojigis ; amentis masculis divergent! bus. Stro- hilis 4 - um laliùus , tessul/s mucrone sursum rigide uncinato ; fructiferis sub-rhoînboideis. P. tseda , Lina. Cette espèce de Pin est connue , dans toute la partie basse des Etats méridionaux , sous le nom de Loblollj pinej et quelquefois sous celui de TVhite pine , aux environs de Richemond et de Peters- burgh en Virginie. C'est à peu de distance de Fre- derickburgh, dans ce même Etat, éloigné de 23o milles au sud de Philadelphie , que j'ai observé cet arbre pour la première fois, en me rendant dans les Etats du midi. Je ne crois pas qu'il se trouve beau- coup plus vers le nord, et certainement il n'existe point dans la Pensylvanie , ainsi que l'avance Sir A. B. Lambert, d'après Vanghenheim. Dans toute la basse Virginie, et dans cette portion de la Caroline du nord située au nord-est de la rivière Cap fear , ce qui comprend une étendue de près de 200 milles , le Pinus tœda croit dans tous les can- tons secs et sablonneux ; mais si le terrein est formé d'une argile rougeâtre mêlée de gravier, il est occupé par le Pinus mitis et par différentes espèces de Chê- nes. C'est une chose bien digne de remarque que la I- i3 98 PINUSTvEDA. régularité avec laquelle le Pinus tœda et le Plnus mitis sont soumis pour leur croissance à l'influence du sol ; car selon les variations qu'il éprouve , même dans l'intervalle de 4 à 5 milles , l'un ou l'autre de ces Pins paroît ou disparoît entièrement. Dans la même partie de la basse Virginie, cet ar- bre s'empare encore exclusivement des terres dont l'infertilité a fait abandonner la culture , de manière qu'en voyageante travers ces contrées, on rencontre fréquemment au milieu des forêts de Chênes et autres arbres à feuilles tombantes, des espaces de 35 à 70 hectares ( 100 à 200 arpens J couverts uniquement de jeunes Pinus tœda de la plus belle venue. Dans les Etats méridionaux, cette espèce de Pin, qui est la plus commune après le Pinus australis\, ne croit au contraire que dans les cantons qui avoi- sinent les rivières , ou qui sont traversés par les creeks ^ dont le sol est assez productif et susceptible de s'améliorer; tel est le terrein qui entoure la ville de Charleston, dans la Caroline du sud, à une dis- tance de 5 à 6 milles, qui est, en grande partie, couvert de Pinus tœda. On voit encore souvent cet arbre le long àesswamps étroits qui coupent en tous sens les landes, Pines harrens^ et qui sont remplies de Laurus caroliniensis , Magnolia glauca , Gor- donia lasyanthus ^ etc. Les feuilles du Pinus tœda sont fines , d'un vert clair et longues d'environ 16 centimètres (6 pouces); elles sont réunies trois à trois dans la même gaine , et quelquefois au nombre de quatre dans la mai- PINUS TJli.Dk, f)Q tresse pousse des jeunes individus les plus vigou- reux. Ce Pin fleurit en Caroline dans les premiers jours d'avril. Ses chatons ont près de 3 centimètres (un pouce 1 de longueur, et sont, comme ceux du Pi- nus australis recourbés en différens sens les uns sur les autres. Ses cônes, longs d'environ ii centimè- tres ( 4 pouces) armés de fortes pointes, présentent la forme d'une pyramide allongée, et, après leur ouverture, celle d'un rhombe plus ou moins parfait j ils laissent échapper leur graine la même année. Le Pinus tœda s'élève à plus de a 5 mètres ( 8o pieds) sur 8 à i o décimètres ^2 à 3 pieds) de diamètre , et sa cime est très-large. Ceux de ces arbres qui m'ont paru le plus élevés sur une moindre grosseur, crois- sent à peu de distance de Richemond , dans un terrein léger et assez aride. On auroit pu tirer de plusieurs individus que j'y ai observés , des cylindres très- réguliers de 3o à 4o centimètres (12 à i5 pouces) de diamètre sur 16 à 17 mètres ( 5o pieds) de lon- gueur, et sans aucune apparence de nœuds. lue Pinus serotina et le Pinus rigida sont, comme je l'ai remarqué y très-chargés d'aubier, mais le Pi- nus tœdamsi paru l'être encore davantage. J'ai tou- jours vu avec surprise que des arbres de 7 décimè- tres (3o pouces) de diamètre, à i mètre ( 3 pieds ) de terre , avoient 5 a6 décimètres ( 20 à ^4 pouces ) d'aubier, et je n'ai jamais trouvé dans des individus d'environ 3 décimètres (^un pied J de grosseur, et de 10 à II mètres (30 à 35 pieds) de haut, plus 100 piNus tj:da. de 3 centimètres ^ un pouce) de cœur ou de vrai bois : aussi les couches concentriques sont - elles extrêmement espacées dans ce Pin, et c'est ce qui explique la grande rapidité avec laquelle il croît , surtout dans les Etats méridionaux, oi^i j'ai le plus souvent fait cette observation. En Virginie oii il vient dans des terreins plus secs, et par conséquent moins rapidement, il n'a pas autant d'aubier, et son bois est d'une contexture plus compacte. Je m'en suis assuré en visitant les moulins à scie de la ville de Petersburgh , où l'on apporte beaucoup de tron- çons de cet arbre, pour y être débités sous diffé- rentes formes. Les trois quarts des maisons de cette ville, et presque toutes celles des campagnes voisines , sont entièrement construites en bois de Pinus tœda. On l'employé même pour les planchers du rez-de-chaus- sée à défaut du Pinus mitis qui seroit bien préfé- rable, s'il n'étoit pas si difficile de se le procurer, aussi sont-ils mal joints et pleins d'inégalités, car quoique les planches destinées à cet usage n'aient que 1 1 centimètres Ç /j. pouces ) de large et qu'elles soient bien clouées sur les solives, elles se retirent encore. Cet inconvénient qui provient du grand ëcartement des cercles annuels dont les intervalles sont remplis d'une substance très - spongieuse , est loin de se trouver dans \e Pinus aust rails -^ car ce dernier a plus de couches concentriques , dans 3 centimètres fun pouce) de largeur que le Pinus tœda dans 3 décimètres C I pied j. PINUS TiEDA. 10 r Dans les ports des Etats méridionaux, on se s^rt de ce Pin comme du Pinus ri^ida dans ceux du nord, pour faire les corps de pompe des vaisseaux , parce qu'on peut facilement, en les perforant, ôtcr tout le cœur à des arbres d'un grand [diamètre. A Charleston , dans la Caroline du sud , les quais sont remblayés avec des tronçons de cet arbre qu'on re- couvre de terre. Les boulangers chauffent aussi leurs fours avec son bois, et ils le paient un tiers de moins que celui du Pinus aust redis qui est plus résineux. Tous ces usages , comme on le voit, sont très-se- condaires , et c'est avec raison que dans ces contrées on regarde le Pinus tœcla comme un des moins utiles. D'ailleurs, il pourrit avec une grande rapidité , lors- c[u'il est exposé aux injures de l'air, et on lui repro- che encore de s'emparer très-promptement des ter- res abandonnées, et d'y croître si vite qu'il multiplie les travaux pour les soumettre de nouveau à la cul- ture. Mais si le Pinus tœda est peu estimé des Amé- ricains, il peut être très-utile dans le midi de l'Eu- rope, oîi tout arbre d'une belle venue et d'une crois- sance très-accélérée doit être considéré comme un bienfait de la nature. On pourroit s'en servir pour tous les ouvrages non apparens de menuiserie, pour les caisses d'emballage, etc. C'est à l'expérience à déci- der si dans les landes de Bordeaux , sa végétation ne seroit pas plus rapide que celle du Pinus niari- tinia. Si je désigne cette partie de la France, ce n'est pas que j'ignore que cet arbre supporte les froids 102 PINUS T^DA. qu'on éprouve aux environs de Paris , et même qu'il y fructifie 5 mais je doute qu'il puisse y prendre tout le développement qui lui est naturel. Le Pinus tœda fournit abondamment de la téré- benthine , mais elle est moins fluide que celle du Pinus australis. On en a fait l'observation en sou- mettant au même travail quelques-uns de ces Pins, qui se trouvent à proximité des cantons où l'on ex- ploite ce dernier pour en tirer les produits résineux. Comme le Pinus tœda a beaucoup plus d'aubier, et que c'est de cette partie de l'arbre que découle seulement la térébenthine , on pourroit lui faire des incisions plus profondes, et il seroit possible qu'on obtînt même une plus grande quantité de cette substance. La figure qu'en a donnée Sir A. B. Lambert est exacte , mais il est dans l'erreur lorsqu'il dit que cet arbre ne parvient qu'à une petite hauteur n Arbor humiliSy etc. » ; c'est, au contraire, suivant moi , de tous les Pins des Etats-Unis , celui qui , après le Pi- nus strohus arrive à la plus grande élévation. PLANCHE IX. Fig. 1 , feuille. Fig, a , graine. /l,:,:.;, ,M PIN US Su'ol)us PINUS STROBUS. THE mil TE PIJSE Pin US strohus , arhor excelsa ; corti'ce lœvi , cinereo œtate ;folus quinis , gracilibus , vagini's nullis ; amentis mas eu lis parvis , rufis ; strobilis lœvigatis , pendulîs ^ longo-cylendraceis. P. strobas. Linn. Cette espèce de pin , l'une de celles de l'Amé- rique septentrionale qui offre le plus d'intérêt, est connue, dans tous les Etats-Unis aiôsi qu'en Canada, sous le seul nom de FThite pine^ Pin blanc, à cause de la couleur de son bois qui est toujours très- blanc au moment où il vient d'être travaille : elle reçoit cependant encore quelquefois dans le New- Hampshire et dans le district de Maine, les> dénomi- nations secondaires de Pumpkin pine ^ Pin potiron; àiAple pine , Pin pomme, et de Sapling pine^ Pin baliveau, qui, comme nous le verrons, sont les ré- sultats de quelques propriétés particulières. Les feuilles du Piniis strobus , longues d'environ 1 1 centimètres ( 4 pouces) , sont toujours nombreuses et réunies au nombre de cinq ; elles sont fines, dé- liées, d'un vert légèrement bleuâtre : et cet arbre doit sans doute à ce feuillage léger et délicat la forme agréable et élégante qu'il offre assez constamment dans les jeunes individus. Les chatons qui portent les fleurs mâles , sont rassemblés au nombre de cinq ou six et courbés en différens sens les uns sur les I04 PINUSSTROBUS. autres : leur longueur est d'environ i centimètre (4 à 5 lignesj ; ils deviennent rougeâtres avant de tomber. Les cônes longs environ de lo à 12 centimètres (4 ^ 5 pouces) , sur environ 1 centimètres [ 10 lignesj de diamètre à leur portée moyenne , sont pédicules , pendans , un peu arqués et composés d'écaillés minces , lisses et arrondies à leur base. Ils s'ou- vrent vers le i^"". octobre , pour laisser tomber leurs graines , dont une partie est souvent retenue par la térébenthine qui suinte des écailles. Le Pinus strobus se trouve dans une vaste éten- due de pays, mais non pas par-tout avec une égale abondance; car un froid extrême, et surtout une trop forte chaleur finissent par le faire disparoitre entièrement. Vers le nord, c'est sur les bords de la rivière Mistassins, à environ l'jokilomètr. (^4oli^uesJ de son embouchure dans le lac S. Jean en Canada , par le 48° 5o' de latitude , que mon père observa le premier Pinus sti^obus , en revenant de la baie d'Hudson, après avoir traversé environ 44 myria- mètres T 100 lieues) de pays, sans en apercevoir au- cun. Mais en avançant 1 degrés au sud, il le trouva assez commun ; ce qui est dû sans doute , plutôt à la nature du sol , plus favorable à la végétation de cet arbre , qu'à la différence si peu sensible que cette petite distance doit apporter dans la tempé- rature. Il résulte encore des observations de mon père et des miennes, que c'est entre les 47® et 43° de latitude que cet arbre est le plus abomdamment répandu; car, dans les pays situés plus au midi. PIN us STR OBUS loj on ne le voit que dans les vallons ou sur le pen- chant des monts AUéghanys , jusqu'à leur termi- naison en Géorgie, et on cesse de le trouver dans les pays à l'est et à l'ouest de ces montagnes, à cause de la chaleur trop forte qui s'y fait sentir. On as- sure que le Plnus strobus est aussi très-multi- j^ïlié aux sources du Mississipi , ce qui est très-vrai- semblable , puisqu'elles sont situées sous la même latitude que les contrées où il parvient à son plus grand accroissement, comme dans le District de Maine, la partie supérieure de New- Hampshire l'Etat de Vermont et le haut du fleuve S. -Laurent. Dans ces diverses parties des États-Unis , je l'ai trou- vé dans les sites les plus opposés. 11 paroit , en effet s'accommoder de toute espèce de terrein, car il se fait remarquer par-tout où le sol n'est pas entière- ment formé d'un sable maigre et aride, ou conti- nuellement submergé. Cependant la partie la plus déclive des vallons , dont la terre est douce, friable et très-fertile , les bords des rivières où elle est composée d'un sable noir, profond et toujours frais les marais remplis de Thuia occidentalis , dont la surface est tapissée d'un lit épais de sphagmun et constamment humide, sont les sites où Ton ren- contre les individus qui atteignent le plus grand développement. Près de Noridgev\^ock , sur la rivière de Rennebeck , dans un de ces marais de Thuia où on ne peut avoir accès que dans le milieu de l'été, j'ai mesuré deux de ces arbres abattus pour faire des pirogues: l'un avoit 5o mètres ( i54 pieds 1 I. ,4 1 06 P I ]V U s s T R O B U s. de longueur sur i mètre 45 centimètres ( 54 pouces) de diamètre à i mètre (3 pieds) de terre, et l'autre 46 mètres (14^ pieds) sur i mètre i4 centimètres (44 pouces) à la même hauteur. Belknapp dans son Histoire du New-Hampshire , rapporte qu'on coupa près de la rivière Merimack , un Pinus strohus qui avoit 2 mètres 4B centimètres ( 7 pieds 8 pouces) de diamètre et moi-même j'ai vu près d'Hollow^ell , la souche d'un individu qui avoit un peu plus de 2 mètres (6 pieds). Ces arbres remarquables par leur grosseur extraordinaire , ëtoient probable- ment arrivés à la plus grande élévation où par- vient le Pinus strobus qui est d'environ 58 mè- tres ( 180 pieds). Des personnes dignes de foi m'ont assuré qu'elles en avoient fait abattre qui avoient à peu près cette hauteur, mais elles regardoient cette dimension comme extraordinaire , et ne se rencon- trant que bien rarement. Je suis donc porté à croire que c'est d'après des renseignemens inexacts que quelques auteurs ont avancé que le Pinus strohus s'élevoità plus de 84 mètres ( 260 pieds). Au reste cet antique et majestueux habitant des forêts de l'Amérique du nord n'en est pas moins le plus élevé comme le plus précieux des arbres qui les composent, et sa cime élancée dans les airs, les surpasse tous de beaucoup et le fait apercevoir à de grandes distances. Sa tige est sans branches jusqu'aux deux tiers et même aux trois quarts de sa hauteur, et les bran- ches sont véritablement très-courtes proportionnel- lement à la grosseur du tronc. Elles sont verticil- PINUS STROBUS. IO7 lées ou disposées par étage les unes au dessus des autres , et garnissent ainsi le reste du corps de l'ar- bre jusqu'à son sommet : alors les trois ou quatre derniers rameaux se relèvent et présentent un bou- quet qui semble comme détaché et dont on aper- çoit à peine le support. Lorsqu'au contraire le Pinus strohus se trouve disséminé dans les forêts d'Erables à sucre, de Hê- tres, ou parmi les Chênes de différentes espèces, comme sur les bords du lac Champlain , et qu'il croit dans une terre forte , substantielle et propre à la culture du froment, alors il présente une tête très- ramifiée qui embrasse beaucoup d'espace, et quoique dans ces sortes de terrein il parvienne à une moindre élévation , il n'en est pas moins encore le plus grand et le plus vigoureux des arbres au milieu desquels il se trouve. Dans le District de Maine et à la Nouvelle-Ecosse , j'ai rencontré fréquemment des terreins abandonnés à cause de leur stérilité, et j'ai toujours observé que le Pinus strohus étoit l'arbre du pays qui s'em- paroit le premier du sol, et qui, quoique jeune et souvent isolé, résistoit le mieux aux vents impétueux de l'Océan. Dans les jeunes individus qui n'ont pas plus de i3 mètres ( l\o pieds ), l'écorce du tronc , et surtout des jeunes branches, est lisse et même luisante ^ mais à mesure que les arbres vieillissent, elle se fendille , devient rugueuse et d'une couleur grise ^ elle ne tombe pas non plus par écailles, comme 108 PINUS STROBUS. dans les autres espèces de Pins. Le Pinus strobus en diffère aussi par son tronc qui ne conserve pas, comme ces derniers, un diamètre uniforme jusqu'à une grande hauteur; car il diminue au contraire très-sensiblement, à partir du pied jusqu'au sommet, quoique cela paroisse moins remarquable dans les vieux arbres. Il résulte de là beaucoup de perte lors- qu'on veut avoir des pièces d'une grande longueur et de même grosseur aux extrémités. Mais cet inconvé- nient est en quelque sorte compensé par l'avantage qu'il a d'être plus gros et d'avoir fort peu d'aubier ; car un Pinus strobiis de 3i centimètres [i pied) de diamètre à i mètre ^3 pieds) de terre, n'en a guère plus de 2,7 millimètres (i pouce) tandis qu'un Pinus miiis de la même grosseur , en auroit io,o (4 ou 5 ) , et un Pinus tœda 28,8 ( 10 ou 11). Cette propriété est assez importante, puisque dans toutes les cons- tructions , on doit dépouiller avec soin les plan- ches et les madriers de leur aubier qui est sujet à se pourrir très-promptement ou à être attaqué par les vers. Parmi les nombreuses espèces de Pins que pos- sède l'Amérique septentrionale,, il n'en est aucune dont le bois soit employé en aussi grande quantité et à des usages aussi variés : ce n'est pas cependant que le bois du Pinus strobus soit sans défauts , car il en a même d'assez essentiels, ôomme de n'avoir pas beaucoup de force , de tenir mal les clous , et d'être parfois sujet à se gonfler dans les temps hu- mides: mais ces défauts sont rachetés par une mul- PINUS STROB U§. 109 tilude de propriétés qui lui assurent la supériorité sur tous les autres bois du genre des Pins. Il est tendre, léger, peu chargé de nœuds et facile à tra- vailler; il résiste mieux qu'aucun autre aux injures du temps, et il ne se fend pas aussi facilement aux ardeurs du soleil ; il fournit des planches d'une belle largeur, et des pièces de charpente de la plus grande dimension ; enfin il est encore abondant et à bon marché. J'ai toujours observé que l'influence du sol étoit plus sensible dans les arbres résineux que dans ceux qui perdent leurs feuilles. Le Pinus strobus en par- ticulier, a des qualités très-différentes selon la na- ture du sol où il croit. Lorsqu'il se trouve dans des terrains formés d'un sable gras, profond et humide, il réunit au plus haut degré celles de ses propriétés qui le font le plus estimer, et notamment la légèreté, ainsi que la texture fine et délicate de son grain qui permet de le couper net en tous sens, sans qu'il s'é- raille ; et c'est probablement par cette raison qu'on lui donne dans ce cas le nom de Pumpkin pine^ Pin potiron. Mais, lorsqu'il croit dans des terreins secs et élevés, son bois est plus ferme et plus résineux , son grain est plus grossier, ses couches concentriques sont très-espacées, et alors on l'appelle Saplin^ pine , Pin baliveau. Dans tous les Etats du nord, qui renferment la très-grande partie de la population des Etats-Unis, les sept dixièmes des habitans vivent encore dans des maisons construites en bois, et les trois quarts de IIO P I NUS STROBUS. ces maisons, dont on peut évaluer le nombre à plus de 5oo mille , sont presqu'entièrement faites de PU nus strobuSy non-seulement dans les campagnes et les villages, mais, dans toutes les villes, à l'excep- tion de Boston , New- York et Philadelphie , qui ce- pendant ont encore les maisons de leurs faubourgs et un petit nombre d'autres bâties de cette manière. Dans les églises et autres grands édifices , les plus grosses pièces de charpente sont aussi tirées de ce même arbre. Les moulures qui décorent les portes extérieures des maisons , les corniches et les frises qui ornent l'intérieur des appartemens , les manteaux des che- minées qui sont travaillés en Amérique avec beau- coup de soin, sont encore faits de ce même bois, de même que les cadres des glaces et des tableaux, car il a l'avantage pour ces différens ouvrages de prendre bien la dorure. Les sculpteurs en bois qui s'occupent exclusivement de faire les figures destinées à orner l'avant des vaisseaux , n'emploient également que le bois du Pinus strobus ', mais, ils préfèrent pour ce genre de travail, la variété que sa qualité tendre et peu résineuse fait appeler trivialement Pumpkin pine^ Pin potiron. A Boston , et dans les autres villes des Etats du nord, l'intérieur des meubles d'acajou, les malles, le fond des chaises de Windsor de deuxième qualité , les seaux à puiser de l'eau , une grande partie des caisses destinées à emballer les marchandises, les cases et tablettes des magasins et boutiques sont faites PINUSSÏROBUS. III en planches de cet arbre, ainsi qu'une infinité d'au- tres ouvrages. Dans le District de Maine , on en fait aussi des barils pour le poisson salé, mais on y emploie de préférence la variété dite Sapling pine^ dont le bois a plus de force. Les magnifiques ponts en bois qui sont construits l'un à Philadelphie sur la Schuylkill , et l'autre à Trenton sur la Delaware ; ceux qui unissent Cam- bridge et Charleston à la ville de Boston , dont l'un a 974 niètres , [ 3,ooo pieds } de longueur , et l'autre 487 (i5oo), sont faits en bois de Pinus s tr obus y qu'on a préféré comme résistant le mieux aux alter- natives de la chaleur et de l'humidité. Il fournit encore exclusivement à la mâture des nombreuxvaisseauxqui se construisent dans les Etats du nord et du milieu , et il seroit bien difficile de le remplacer pour cet objet dans l'Amérique septen- trionale. On dit même qu'avant la guerre de l'indé- pendance, l'Angleterre faisoit venir des Etats-Unis les mâts nécessaires à sa marine militaire et marchan- de , et encore aujourd'hui, elle en tire de ce pays pour suppléer à ce qu'elle ne peut se procurer dans le nord de l'Europe. C'est du District de Maine , et notamment de la rivière de Rennebeck que sont venus en Angleterre les plus beaux échantillons. Le gouvernement anglois, peu de temps après l'établissement de ses colonies dans cette partie du monde, sentit tout l'avantage de posséder de belles mâtures, et toute l'importance de leur conservation ; 112 PINUS STROBUS. il rendit en 171 1 et en i 721 , les ordonnances très- sévères pour défendre, dans les propriétés royales, la coupe des arbres propres à la mâture. Cette défen- se s'étendoit aux vastes contrées qui sont bornées au midi par le New- Jersey et au nord par l'extrémité septentrionale de laNouvelle-Ecosse. J'ignore jusqu'à quel point on a tenu la main à leur exécution de- puis cette époque jusqu'à la révolution américaine ; mais ce que j'ai observé dans mes voyages, c'est que de Philadelphie jusqu'au delà de Boston, c'est-à- dire, dans une étendue d'environ 600 milles, on ne trouveroit plus un seul de ces arbres propre à mater un navire de 600 tonneaux. L'avantage le plus marqué qu'ont les mâts de Pinus stj^obus ont sur ceux de Riga, c'est d'être incompa- rablement plus légers, mais ils sont moins forts et ont , à ce que l'on dit , le défaut de s'échauffer et de pourrir plus vite à l'attache des vergues et dans l'entrepont. Voilà ce qui donne au Pinus sjhes- tris la supériorité sur le Pinus strobus, même dans l'opinion de la majorité des constructeurs améri- cains ; mais quelques-uns d'entr'eux, cependant, pensent que les mâts de celte dernière espèce seroient tout aussi durables, si on avoit soin de garantir exactement leur sommet de l'humidité : c'est dans cette vue que quelques personnes , pour ajouter à leur conservation , ont imaginé de les faire percer d'un trou de plusieurs pieds à leur partie supérieure, et de boucher ce trou hermétiquement après l'avoir rempli d'une certaine quantité d'huile, qui se trouve, PI NUS s TRO BUS. Il3 dit-on , absorbée au bout de quelques mois. On se sert encore en Angleterre du Pirius strohus pour faire ]es vergues et les mâts de baupré des vaisseaux de guerre. Cet arbre n'est pas assez résineux pour qu'on puisse en extraire de la térébenthine, et fabriquer du gou- dron avec son bois pour subvenir aux besoins du commerce. Ce travail, d'ailleurs, ne seroit pas facile , car il est rare qu'il couvre seul quelques centaines d'arpens, étant le plus souvent mêlé, en différentes proportions, parmi les arbres à feuilles tombantes. Pour compléter la description du Pinus strobus ^ je crois devoir indiquer avec plus de précision les diverses partie des Etats-Unis d'où Ton tire aujour- d'hui, non -seulement tout ce qui s'y consomme, mais encore ce qui est exporté tant en Europe qu'aux colonies des Indes occcidentales ; car cet arbre a cela de particulier, que la grande consommation qui s'en fait chaque année , oblige à aller faire les coupes dans des cantons tellement reculés, qu'ils ne seront pas habités avant vingt- cinq ou trente ans; ce qui n'a pas lieu à l'égard des autres espèces d'arbres du pays. Les hommes entreprenans qui se livrent à cette exploitation , surtout dans le District de Maine, sont la plupart de nouveaux émigrans {^setlers)^ qui ont quitté le New-Hampshire , entraînés les uns par Tin- constance de leur caractère, les autres par le désir de se procurer rapidement les moyens d'acquérir une centaine d'acres de terre , pour l'établissement de I. i5 Il4 PINUS STROBUS. leur famille '. Ces hommes se réunissent en petites bandes, se transportent en été au milieu de ces vastes solitudes, et les parcourent dans tous les sens pour reconnoitre les endroits les mieux garnis de Pinus strohus. Ils coupent ensuite les herbes qui croissent dans les environs , et les convertissent en foin pour la nourriture des bœufs qu'ils doivent ramener avec eux ; puis ils regagnent le pays où ils habitent. L'hiver arrivé , ils reviennent dans ces forets , s'éta- blissent dans des huttes couvertes en écorces de Bouleau à papier ou de Thuia occidentalis y et quoi- que la terre soit alors couverte de plus d'un mètre et demi ^4 ^ ^ pieds) de neige et que le froid soit si excessif que quelquefois le mercure se soutient pen- dant plusieurs semaines à i8 et 20 degrés au-dessous du point de congélation, ils se livrent, avec autant de courage que de persévérance, à l'abattage des ar- bres, les coupent par tronçons , lo^s , de 5 à 6 mé- trés (i4 ^ 18 pieds) de longueur, et au moyen de leurs bœufs , qu'ils emploient avec beaucoup d'a- dresse^ ils les amènent aux bords des rivières, et après les avoir estampés de leur marque, ils les rou- lent dans leur lit qu'ils en emplissent par milliers. Au printemps , les glaces venant à se briser, ces logs ou tronçons sont entraînés avec elles par le courant. C'est à^Wenslow, éloigné d'environ l^o lieues de la mer, que tous les tronçons qui arrivent par la ri- vière de Rennebeck, sont arrêtés par les bûcherons ' Les prix des terres dans les comtes de Kennebeck étoit , en 1807 j épo(jae à laquelle j'étois dans le pays , de 5 à 6 piastres l'acre. PIN us STROBUS. Il5 qui s'y sont rendus à lavancc. Ils trient au moyen de leur marque, ceux qui leur appartiennent , les mettent en radeaux et les vendent aux propriétaires des nombreux moulins à scie établis entre cette pe- tite ville et la mer, ou bien ils les (ont débiter à leur compte, en abandonnant la moitié ou même les trois quarts du produit, si la coupe de la saison a été abondante. Au mois d'août 1806, que j'étois à Wenslow, des milliers de ces logs ou tronçons couvroient encore la rivière. Je les examinai et je remarquai que le dia- mètre de la plus grande partie d'entr'eux étoit d'en- viron 40 à7|3 centimètres, ( i5 à 16 pouces J et que le reste que j'évaluai à un cinquantième à peu-près , pouvoit en avoir 5o (20). Le Fraxinus discolor et le Pinus ruhra étoient les seules espèces d'arbres qui se trouvassent entremêlés avec le Pinus strobiis , mais elles n'en formoient pas la centième partie. Si tous ces bois ne sont pas débités dans le courant de la même année , ils sont sujets à être attaqués par de gros vers qui les perforent dans tous les sens de trous de 5 millimètres ( 2 lignes) de diamètre; mais s'ils sont dépouillés de leur écorce , ils peuvent res- ter exposés aux injures de l'air pendant plus de trente ans sans s'altérer en aucune manière. Cette remarque s'applique encore à la souche de cet arbre, qui résiste aussi un laps de temps considérable aux alternatives de la chaleur et de l'humidité ; et il est même passé en proverbe dans ces contrées, que tel qui a abattu un Pinus strobus ne vit jamais assez pour le voir Il6 PINUSSTROBUS. tomber en pourriture; et, effectivement, j'ai vu au milieu de la petite ville d'Hollovs^ell située sur la rivière de Kennebeck , plusieurs souches encore intactes y quoique les arlrres d'oii elles provenoient eussent été abattus depuis plus de quarante ans. Après le District de Maine , qui, en réunissant ce qui vient à Boston du New-Hampshire par la ri- vière Merimack, fournit peut-être les trois quarts de tout le Pinus strobus exporté des États-Unis , les ri- ves du lac Champlain m'ont paru le plus abondam- ment peuplées de cette espèce et assez favorablement situées pour leur écoulement. Cet écoulement a lieu dans deux directions différentes : tout ce qui s'exploite à partir de Ticonderoga et au dessous, ce qui comprend les trois quarts de la largeur du lac Champlain, qui est d'environ i5o milles, est con- duit à Québec par la rivière Sorel et le fleuve S. Lau- rent. Cette distance est de 270 milles. Quant à ce qui s'en coupe dans la partie supérieure du lac , il vient à Skeenboroug, petite ville située à sa naissance et y est débité en planches. En hiver , ces planches sont portées sur des traîneaux à Albany, distant de '70 milles, et au printemps suivant elles sont char- gées , avec tout ce que la rivière du nord fournit, sur des sloops y bateaux de 80 à 100 tonneaux, qui les amènent à New- York, d'où elles sont encore exportées en grande partie aux colonies occidentales et même dans les Etats méridionaux. J'ai eu occasion de voir un extrait des registres de la douane du Eort S. Jean en Canada , et j'ai re- P I N U s s T R O B U s. II marqué que la quantité de cette espèce de bois qui est passée par la rivière Sorcl, depuis le i*''. mai 1807 jusqu'au 3o juillet suivant, pour se rendre à Québec y est portée ; savoir: pièces écarries, à 43,098 mètres ( 132,720 pieds) cubes; planches ordinaires .^1,9^6 mètres ( 160,000 pieds j ; planches d'environ 5 cen- timètres (^ 2 pouces) d'épaisseur, à 21, 558 mètres ( 67,000 pieds ) ; et , en outre , 20 mâts et 45'45 logs ou tronçons qui ont les mêmes dimensions que ceux qui sont débités dans le District de Maine. La partie supérieure de la Pensylvanic où la De- laware'et la Susquehanah prennent leur source, et qui est très -montagneuse et très -froide , quoique située entre les 4ï° et 4^° de latitude, a ses forets abondamment peuplées de ce Pin. 11 en descend au printemps une grande quantité qui fournit à la con- sommation de la partie intérieure du pays et qui en- tre dans la construction de la plupart des maisons tant dans les villes que dans les campagnes. On en débite aussi beaucoup en planches que l'on ex- porte de Philadelphie aux colonies occidentales. C'est également du haut de la Delaware que vien- nent à Philadelphie les mâts des vaisseaux de toute grandeur que l'on construit dans ce port. Au-delà des monts Alléghanys, c'est seulement aux sources de la rivière du même nom , éloignées de i5o à 180 milles de son embouchure dans l'Ohio, que s'exploite tout le Pinus sti^obus qui est envoyé à la Nouvelle-Orléans, dont la distance est de 2,900 milles = 399 myriamètres ( 900 lieues). Les trois Il8 PTNUS STROBUS. quarts des maisons de Pittsburgh , deWheeling, et de Washington en Rentucky, sont bâties en plan- ches de ce Pin qui ne se vend à Pittsburgh que 6 à 7 dollars ( 3o à 35 francs J les mille pieds cou- rans. Quoique le District de Maine fournisse , comme nous l'avons vu , la très-grande partie du Pinus strobus destiné à être exporté , et que beaucoup de navires s'en chargent directement de cette province pour l'extérieur, cependant c'est la ville de Boston qui est , principalement dans les Etats méridionaux , l'entrepôt général de cette branche de commerce. Les bois qui proviennent de cet arbre , s'y trouvent dans les chantiers sous les formes suivantes: i«. En pièces écarries de 4 ^ ^ mètres Ç ii k 15 pieds) de longueur sur différens diamètres; 2°. En scantling , pièces sciées carrément au des- sous de i6 centimètres ^6 pouces) d'épaisseur, des- tinées pour chevrons ou charpente légère ; 3°. En planches qui se distinguent en merchan- tahle hoards ^ planches marchandes ou ordinaires, et en clear hoards ^ planches de choix. Les pre- mières ont 2 centimètres ( trois quarts de pouce ) d'épaisseur, 3à5 mètres ( lo à i5 pieds) de longueur et 27 à 40 centimètres ( 10 à i5 pouces ) de largeur, et elles sont souvent parsemées de nœuds 5 on leur donne à New-York le nom à'Albanj boar^ds, plan- ches d'Albany , et leur prix est à peu près le même dans cette ville qu'à Boston , où il varie de 8 à 10 dollars (4o à 5o francs) les mille pieds cou- PINUSSTKOBUS. IIQ rans: les planches de choix, clear boards^ lirées des ■plus g^ros arbres y Pumpkin pine y ont la mcme lon- gueur et épaisseur que les premières, mais leur lar- geur est de ^7 , 6\ et 80 centimètres ( 20 , i^ et 3o pouces; elles doivent être sans aucun nœud, mais cependant on regarde comme telles celles qui n'en ont que deux qu'on puisse couvrir avec le pouce. Leur prix est de 20 à 26 dollars ( 100 à i25 francs) les mille pieds courans. Elles sont employées pour tous les ouvrages légers et délicats , et surtout pour les panneaux des portes et les boiseries des apparte- mens, ce qui leur a fait donner à Philadelphie le nom de panneaux de Pin blanc FThite pine panels -^ 40. En clap hoards espèce de planchettes longues de I mètre 33 centimètres (4 pieds), larges de 16 centimètres ( 6 pouces) et épaisses de 7 millimètres (3 lignes) d'un côté et plus minces de l'autre. On s'en sert encore dans les Etats du nord à revêtir ex- térieurement les maisons: on les place, pour cela, horizontalement les unes au-dessus des autres, le bord mince en dessous; 50. En essentes ou bardeaux, shingles ^ qui ont ordinairement 48 centimètres, ( 18 pouces) de long sur 8 à 16 centimètres ( 3 à 6 pouces) de large, et à peu près 7 millimètres ( 3 lignes) à l'extrémité la plus épaisse. Elles sont sans aucuns nœuds et doi- vent être faites seulement avec le cœur de l'arbre, ces bardeaux sont mis en paquets carrés et rangés de manière que le bout le plus mince est en dedans: le tout est maintenu au moyen de deux tringles en 120 PINUS STROBUS. bois placées transversalement, l'une dessus et l'autre dessous , et qui sont attachés avec deux harts. Les paquets de bardeaux sont quelquefois de 5oo , mais le plus souvent de iSo. Dans ce dernier cas, pour que le nombre s'y trouve à très-peu de chose près, ils doivent avoir 58 centimètres ( 22 pouces) de large et on doit compter à chaque coin 25 bardeaux. Le prix à Hollowell , au mois de juillet 1807, étoit de 3 dollars le millier. Deux hommes peuvent en faire 16 à 1800 par jour. Toutes les maisons de la ville de Boston, ainsi que celles des autres villes et des campagnes dans les Etats à l'est de la rivière Hudson , sont couvertes avec ces essentes qui durent seulement douze à quinze ans. On en exporte encore une grande quantité dans toutes les Antilles. Dans les colonies françoises on leur donne le nom d'essentes blanches. On peut juger par ces détails combien la consom- mation du bois du Pinus strobus est considérable dans les Etats-Unis; mais elle l'est aussi beaucoup en Europe et aux colonies occidentales. D'après un exposé des importations , des productions des Etats-Unis présenté au parlement de la Grande-Bre- tagne , la masse totale des bois arrivés de ce pays en Angleterre dans le courant de 1807 est estimée à i,3o2,g8o piastres ou 6,840,660 francs. Or, je crois que le bois du Pinus strobus peut bien entrer pour un cinquième dans cette masse. Il se vendoit en 1808 à Liverpool , 2 sh. 7 d. sterl., environ 3 francs le pied cube ; iesplanks^ planches de 5 centimètres PI NU s STKOBliS. l'JI (2 pouces) d'épaisseur sur environ 33 centimètres ( I pied j de large, cinq sols, et les planches ordi- naires , six sols. Dans un autre exposé, également officiel , sur l'importation des denrées des Etats- Unis dans les colonies angloises des Indes occiden- tales , pendant les années 1804, i8of> et 180G , la masse totale desboisy est portée à i i5,o68,ooo pieds; ce qui donne environ 38,35G,ooo pieds pour cha- cune de ces trois années; et en évaluant à un tiers de cette dernière quantité celle qui est fournie par le Piinis strohus ^ elle seroit de 12,785,000 pieds, composée principalement de planches, descantlin^s et de bardeaux. Dans ces diverses évaluations, qui ne sont que très-approximatives, ne sont pas compris les bois de cette même espèce de Pin , qui passent directement en Angleterre de la Nouvelle-Brunswick , province limitrophe de celle du District de Maine , ni celui qui est envoyé des Etats-Unis, dans toutes les co- lonies occidentales qui ne dépendent pas de la Grande-Bretagne , oii il s'en fait également un très- grand emploi. Maison n a eu seulement en vue, en entrant dans ces détails, que de donner ici une idée de la grande consommation du bois de Pinus stro- hiis , ces développemens ayant paru faire naturelle- ment partie de l'histoire de cet arbre ; on a voulu aussi montrer combien sa disparition , peut - être presque totale dans un siècle , des contrées où il s'ex- ploite aujourd'hui en si grande quantité, pèsera sen- siblement sur le nord des Etats-Unis. I- 16 122 PINUS STROBUS. Les qualités précieuses du Pinus strohus et les nombreux usages auxquels on l'emploie, doivent en- gager sans doute à le propager en Europe. Il vient bien dans le centre de la France, mais je ne crois cependant pas que le climat de cette partie de l'Em- pne lui soit parfaitement convenable ; je pense au contraire, que c'est sur les bords du Rhin, dans les vallées des Alpes et des Pyrénées et les pays froids et humides de l'Allemagne, de la Pologne et de la Russie, que sa réussite sera la plus assurée; car sa végétation m'a déjà paru plus belle et plus prompte dans la Relgique que dans les environs de Paris. Ce sera donc lorsqu'on renouvellera dans ces contrées les forets de Pinus sylvestris et à'Epicia , qu'on de- vra y introduire le Pinus strohus , et qu'on pourra décider, d'après les observations qu'on sera à même de faire par la suite , si cet arbre si utile en Amé- rique , est susceptible d'être naturalisé avec succès dans les forets européennes. PLANCHE X. Fîg. 1 , feuille. Fig. a , graine. /.V.,„v,- ,/-/ ABIES Nigra. ABIES NIGRA. THE BLACK [DOUBLE) S P RU CE. Abies nigra , arbor maxima ; foliis undique c'irca ramos erectis , brevioribus , sub /\-gon/s. Strobilis ovatis , pen~ dulis , rigicUs ; squmnis sub undulatis , apice crenula- tis aut divisis. Cet arbre , qui appartient aux régions les plus lïoides de l'Amérique septentrionale, est nommé en Canada Epinette noire et Epinette à la bière ; Double spruce ^ Sapin double, dans le District de Maine et les Etats du New-Hampshire et de Ver- mont; et Black spruce ^ Sapin noir, à la Nouvelle- Ecosse : mais ces deux dernières dénominations sont connues des habitans de ces différens pays : seule- ment chacune d'elles est d'un usage plus général dans ceux que j'ai particulièrement indiqués. J'ai cru ce- pendant devoir préférer le nom de Black spruce , Sapin noir , qui m'a paru rappeler un caractère plus frappant et qui , d'ailleurs , se trouve en opposi- tion marquée avec celui de l'espèce suivante connue dans le pays sous le nom de White spruce , Sapin blanc : on désigne encore quelquefois \ Abies ni- gra sous le nom de Red spruce ^ Sapin rouge, par suite de l'influence que certaines localités exer- cent sur la qualité de son bois. Jusqu'à présent on a même regardé cette variété comme une espèce dis- 1^4 ABIES NIGEA. tincte , ce qui n'est pas fondé ainsi que je le prou- verai dans la suite de cet article. Les contrées oiiV^bies nigra est le plus abondant, sont renfermées entre les 44® et 53^ de latitude sep- tentrionale et les55oet 75° de longitude occidentale, ce qui comprend le Bas-Canada, Terre-Neuve, la Nou- velle-Brunswick et la Nouvelle -Ecosse qui appar- tiennent à la Grande-Bretagne; le District de Maine, l'Etat de Vermont et la partie supérieure du New- Hampshire , dépendant des Etats-Unis. Ce Sapin est tellement multiplié dans ce? différentes contrées, que souvent il forme un tiers de la masse non-inter- rompue des forets qui les couvrent encore ; mais, sous une latitude plus méridionale , on ne le voit guère que sur le sommet des monts Alléghanys qui offrent des sites froids et humides, et notamment dans un marais d'une grande étendue, peu éloignée de Wilkesburry dans la Pensylvanie, ainsi que sur la Montagne Noire , dans la Caroline du nord , une des plus hautes des Etats méridionaux, et quia proba- blement reçu son nom de l'aspect sombre qu'elle a dans l'éloignement et qu'elle doit à la couleur fon- cée du feuillage de YAbies nigi^a : on le rencontre encore quelquefois aux environs de New-York et de Philadelphie dans les jw^tt?/?^ ou marais de Cupres- sus thujoïdes y mais dans ces terreins qui sont cons- tamment bourbeux, et quelquefois submergés une partie de l'année, cet arbre vient mal et ne s'élève qu'à une très-petite hauteur. Les feuilles de VAbies nigra sont d'un vert som- ABI f:,S NI G RA. 123 bre et triste , longues d'environ 9 millinnètres C 4 lignes), roides, très-nombreuses et très-rapprochees les unes des autres, et attachées isolément sur toute la surface des branches. C'est aux extrémités des ra- meaux les plus élevés que viennent les fleurs , aux- quelles succèdent de petits cônes ovales, rougeà- tres , et dont la pointe est tournée vers la terre j leur longueur varie depuis 18 millimètres ( 8 lignes) jus- qu'à un peu plus de 5 centimètres ( 1 pouces ). Ces cônes sont composés d'écaillés minces , légèrement crénelées à leur base , et dont quelques-unes sont souvent fendues jusqu'à moitié , dans les arbres les plus vigoureux , dont les fruits sont aussi les plus gros ; ils ne sont en maturité qu'à la fin de l'au- tomne; alors ils s'ouvrent pour laisser échapper leurs graines qui sont petites , légères , et que les vents emportent au loin , au moyen d'une aile dont elles sont surmontées. Les parties de l'Amérique septentrionale que j'ai indiquées comme celles où ce Sapin abonde le plus, sont fréquemment entrecoupées de collines plus ou moins élevées. C'est dans les vallons formés par ces collines dont le sol est humide, noir, profond et couvert d'un lit très épais de mousse, que se trou- vent les plus belles forets à'Abies nigra où les ar- bres sont tellement rapprochés qu'il n'y a entr'eux qu'une distance de 1 5 , 1 2 décimètres et même i met. (5, 4 et 3 pieds, j Cependant, ce peu d'intervalle ne nuit point à leur croissance, car ils y parviennent à leur plus grand développement, qui est de 25 à 3o mètres 120 ABIES NIGRA. ( 70 à 80 pieds ) sur 4^7 4^ ^t 54 centimètres ( i ^ , 18 et 20 pouces j de diamètre. Leur sommet présente une pyramide très-régulière, qui donne à cet arbre une fort belle apparence lorsqu'il se trouve isolé. Cette forme agréable est due principalement à l'ar- rangement symétrique des ses branches qui s'éten- dent horizontalement et ne sont pas inclinées vers la terre , comme dans VAbies picea d'Europe qui est le véritable Norwajpine^ Pin de Norw^ège des Anglois, dont l'aspect est beaucoup plus triste , pour ne pas dire très-lugubre. Le tronc de VAbies ni^ra^ recouvert d'une écorce unie et non crevassée profondément comme celle des Pins , est encore remarquable par la perpendi- cularité de son ascension^ et par la régularité avec laquelle il diminue de grosseur depuis le pied jus- qu'au sommet qui est terminé par la pousse de l'année, dont la longueur est de 3o à 4o centimètres (12 à i5 pouces). On trouve encore cet arbre dans ces mêmes pays , sur le penchant des monta- gnes, dont le sol très-pierreux et peu humide, n'est recouvert que d'un léger lit de mousse; mais ces ter- reins étant moins favorables à sa végétation , sa crois- sance n'y est pas aussi belle, et il n'acquiert pas la même élévation. C'est ce qu'on observe également dans d'autres cantons désignés sous le nom de poor hlack lands , crû d'essence noire des terreins maigres. Les individus qui viennent dans ces sortes de terreins ont les feuilles plus courtes , plus épaisses, et d'un vert encore plus obscur. Leurs cônes sont aussi de ABIESNIGIIA. 12- moitië moins gros, mais en tout semblables aux autres pour la l'orme , et ils s'ouvrent à la même épo- que pour laisser échapper leurs graines. ,La plupart du temps, et j'aurai plusieurs fois l'oc- casion d'en faire l'observation , les habitans des campagnes et les ouvriers en bois ne remarquent dans les arbres forestiers que quelques apparences qui les frappent, telles surtout que les qualités in- trinsèques de leur bois, sa couleur et celle de l'é- corce, et, comme d'ailleurs ils ne connoissent pas les caractèresbotaniquesquidift'érencientles espèces, ils donnent souvent aux mêmes arbres différens noms, tirés des qualités qui sont à leur portée et qui peu- vent varier suivant le terrein où ils croissent, sans s'embarrasser aucunement si ce sont des espèces dis- tinctes ou de simples variétés. C'est donc aux diffé- rences assez notables qui existent dans VAbies nigra suivant le sol oii on le trouve , qu'il faut attribuer la distinction que les habitans en ont faite en Sapin noir et en Sapin rouge : Black and Redspruce. C'est aussi d'après la grosseur véritablement remarquable des cônes delà dernière variété qui ont été envoyés en Angleterre, ainsi que sur des renseignemens in- exacts qui lui ont été fournis, que Sir K. B. Lambert s'est décidé , non pas, il est vrai, sans quelques dou- tes, à la décrire et à la figurer sous le nom àAbies ruhra. Il la présente encore comme inférieure , à tous égards , à l'autre variété , à laquelle il conserve le nom à^Ahies nigra^ tandis qu'au contraire, d'a- près ce que j'ai observé dans le pays même , c'est 128 ALBIES NIGRA. dans celle nommée Sapin rouge que se trouvent réunies au plus haut degré, toutes les qualités qui font rechercher cette espèce de Sapin pour certains usages déterminés. M. Lambert eût été probable- ment confirmé dans son opinion que le Sapin rouge étoit une espèce distincte du Sapin noir, si on lui eût présenté des échantillons tirés du cœur de ces deux variétés ; car , dans le Sapin noir, le bois est très-blanc, tandis qu'il a réellement une teinte rou- geâtre dans le Sapin rouge : cette différence de cou- leur dans le bois qui a lieu . quelquefois dans les arbres d'une même espèce, ne peut provenir, je le répète, que de la différence des terreins dans lesquels ils croissent, car on ne doit pas douter non plus que le sol n'ait une influence marquée sur les qualités du bois. La force, l'élasticité et la légèreté, sont les qualités importantes que possède XAbies nigra^ et, d'après ce qu'a écrit Josselyn dans son histoire de la Nou- velle-Angleterre, publiée à Londres en 1672, ces qualités le faisoient regarder dès-lors comme « four- nissant les meilleurs mâts de hune et les meilleures vergues qui fussent au monde ». Quoique ces pro- priétés soient communes aux deux variétés , cepen- dant, d'après le rapport des habitans , elles sont , comme nous l'avons dit, principalement rassemblées dans le Sapin rouge qui a encore l'avantage de four- nir des pièces d'une bien plus grande dimension ; car, le Sapin noir croissant dans un sol inférieur en qualité, ne parvient qu'aune moindre élévation, ABIES NIGRA. I2Q et son bois est moins souple et beaucoup plus sujet à être tors. Dans les chantiers de constructions navales de tous les ports des Etats-Unis, les vergues sont presque toujours faites en Abies ni^ra qui sont importes du District de Maine. On en exporte aussi pour le même objet une grande quantité aux colonies occidentales et à Liverpool , tant de cette même partie des Etats-Unis que de la Nouvelle-Brunswick et de la Nouvelle-Ecosse. Oddy, dans son ouvrage intitulé : On European Commerce , dit qu'on le préfère en Angleterre au Pin de Norwège [Ahies picea) , parce qu'il est doué de plus de force; mais, comme il ne peut donner des pièces d'une aussi forte dimension , on ne peut l'em- ployer, comme ce dernier , pour en faire les vergues des vaisseaux de guerre , pour lesquels on se sert souvent encore du Pinus strohus. Dans le District de Maine , et même quelquefois à Boston, où le chêne devient très-rare, on fait très- fréquemment en Abies nigra jhes genoux [knees] , pièces de bois destinées principalement à soutenir le pont des navires. Ces morceaux, lorsqu'ils sont en chêne, sont ordinairement formés de deux branches unies à leur base; mais ceux faits de cet arbre sont tadlés aux dépens d'une portion de la base du tronc et d'une des plus grosses racines. Ce sapin est après le chêne et le mélèze , qui est aussi assez rare dans ces contrées , l'espèce de bois la plus propre à cet usage , à cause de sa force et de sa durée. I. i- l3o ABIES NIGRA. Dans le District de Maine et même à Boston, VAhies Tîigi^a est fréquemment employé pour solives, dans la bâtisse des maisons , et on le préfère aujour- d'hui pour cet objet à YAbies canadensis qu'on regardoit autrefois comme meilleur. Quelques per- sonnes s'en servent encore pour faire les planchers , parce que son grain est plus ferme , et qu'il résiste mieux au frottement et à la pression des meubles , dont les pieds endommagent ceux faits en Pi- nus sU^ohus , surtout dans les appartemens où il n'y a pas de tapis. Cependant, il a pour cet usage particulier ,rinconvénient que ses planches sont su- jettes à se fendre dans leur milieu , et qu'elles pré- sentent alors des gerçures désagréables. Dans toutes ces contrées, et notamment dans le District de Maine et la Nouvelle-Brunswick, on dé- bite beaucoup d'y^Z>£e^ nigra en planches d'une belle largeur qui se vendent 25 pour cent meilleur mar- ché que celles de Pinus strobus. Je ne doute pas qu'il ne fournisse long-temps et abondamment aux besoins du commerce ; car , il est dans mon opinion cent fois plus commun que l'arbre précité. Ces planches s'ex- portent dans les colonies occidentales et en Angle- terre. 11 en vient, m'a-t-on dit, une bonne partie à Birmingham et à Manchester , et l'on s'en sert dans ces deux villes célèbres par leurs manufactures, pour faire les caisses d'emballage. On en fait , dans la Nouvelle - Ecosse, des barils employés à mettre le poisson salé , et pour cela , on choisit de préférence la variété dite Sapin rouge , dont le bois est plus A 1} r i: s ^ I G II A . i j j facile à travailler et se fend de droit fil, ce qui est évidemment dû à l'influence du sol. UAbies niara n'est pas assez résineux pour qu'on puisse en obtenir de la térébenthine en quantité suffisante j)Our !(• commerce ; aussi , ne cherche-t-on pas à en extraire sous ce point de vue. Son bois paroit contenir beau- coup d'air, car il pétille au feu pour le moins au- tant que celui du châtaignier. C'est avec les jeunes branches de YAhies nigra et préférablement avec celle de la variété dite Black spruce ^ Sapinetle noire, qu'on fabrique la bière connue sous le nom de bière de spruce, spruce béer. On les fait bouillir dans l'eau , et l'on ajoute ensuite une certaine quantité démêlasse ou de sucre d'éra- ble ,on laisse fermenter le tout, et on obtient ainsi cette liqueur salutaire et très -utile dans les voyages de long cours , pour prévenir le scorbut. L'essence de spruce, épaissie jusqu'à la consistance d'extrait, est également le résultat de réva2:)oration de l'eau dans laquelle on a fait bouillir long-temps des som- mités des jeunes branches de cet arbre. Comme je n'ai pas été témoin de cette dernière opération , je ne me permettrai pas d'entrer dans de plus longs détails; mais j'ai vu bien des fois, fabriquer la bière dans les campagnes, tant à Halifax que dans le District de Maine, et je puis assurer qu'elle n'est pas faite avec VAbies alba^ comme l'avance Sir A. B. Lambert. S'il a été bien reconnu en x^ngleterre que le bois de cet arbre est préférable à celui à^YJbies picea û sera utile, sans doute de le propager dans l'ancien ;i32 ABIES NIGRA. continent; mais, je pense qu'il ne réussira complè- tement que dans les contrées les plus froides et les plus humides du nord de l'Europe , et encore dans quelques parties des Alpes , des Pyrénées et des montagnes d'Ecosse PLANCHE XL Tig. 1 , feuille. Fig. 2 , graine. P/./2. /S.:.:.„ ./../'. ABIES ALba. lr//f^ Y^('n^/!eJ lJ// ^/*r/^v ABIES ALBA. THE WHITE {SINGLE) SPRUCE. Abies all^a, arhor /^S-So pedalis , foliis subglaiicis unclî- que circa ramos erccbis , tetra^oni.^ , subpungentibus . Stiobilis oblongo-cyli?iclraceis,penclulis , Iaxis y squamia margine integerrimîs. Cette espèce de sapiri, originaire des mêmes pays que la précédente , est nommée en Canada Epinette blanche ; à la Nouvelle-Ecosse TVhite spriice^ Sapin blanc; et Single spruce ^ Sapin simple, à la ]Nou- velle Brunswick et dans le District de Maine ; ce- pendant ces deux dénominations , comme celles données à V Abies nigra , sont généralement connues dans toutes ces contrées, et sont seulement plus usitées l'une que l'autre, suivant les différentes pro- vinces , c'est pourquoi j'ai pu choisir celle de FVhite spruce^ Sapin blanc, que j'ai regardée comme pré- férable. Il paroît que cet arbre ne commence, en venant du nord au midi , que quelques degrés plus au sud que \ Abies nigra , car mon père , suivant ses notes , ne l'a observé pour la première fois que vers le lac S. Jean en Canada , situé entre les 43° et 44° de la- titude. Il est beaucoup moins commun que V Abies nigra dans le District de Maine , du moins dans les cantons que j'ai parcourus. La remarque en est facile l34 ABIES ALBA. à faire, surtout en observant les jeunes individus qui sont isoles ; car , quoique les feuilles de ces denx sa- pins soient également implantées autour des bran- ches, elles présentent des caractères différens qui les font distinguer au premier aspect. Dans VAbies alha^ elles sont proportionnellement moins nombreuses, plus longues, plus écartées de la tige , et elles sont terminées par une pointe plus aigùe ; mais la diffé- rence la plus remarquable , quoique celle que je viens d'indiquer le soit sensiblement, c'est leur couleur d'un vert pâle et comme bleuâtre , qui lui a fait sans doute donner le nom de Sapin blanc , comme celui de Sapin noir a été donné à celle précédem- ment décrite, à cause de la couleur sombre de son feuillage. Les cônes de VAbies «/Z><2 sont aussi bien différens, car ils ont la forme d'un ovale très-allongé et leur largeur est de près de 5 centimètres ( i pouces) sur i6 à 18 millimètres T 6 à 8 lignesj de diamètre à leur partie moyenne. Cependant ces dimensions va- rient suivant que l'arbre est plus ou moins vigoureux mais la forme ne change jamais. Les écailles sont minces, et leurs bords ne sont point échancrés, ni même ondulés comme dans VAbies Jiigra. Ils en dif- fèrent encore en ce qu'ils sont en maturité un mois plutôt et que les graines sont un peu plus petites. UAbies alba croit à peu près dans les mêmes sites que VAbies Jiigra , mais il s'élève moins; car, quoi- , que sa tige soit plus effdée, sa hauteur excède rare- ment 16 mètres (^ 5o pieds) sur 3o à 40 centimètres AB I ES A LB A. l3j ( 12 à i6 pouces) de diamètre , à 97 centimètres ( 3 pieds ) de terre. Son sommet, comme celui de VAbies ni^ra^ a la forme d'une pyramide très-r(*gulière mais il est moins garni de branches , et par conséquent ne parojt pas aussi touffu. La couleur de son écorce n'est pas non plus aussi rembrunie, et cette différence est en- core plus sensible , lorsqu'on compare les jeunes branches des deux espèces. Le bois de VAbies alha est employé aux mêmes usages que celui de ÏAhies nigra^ mais il lui est in- férieur en qualité. Il pétille davantage au feu. L'ex- périence a appris cependant, que les fibres de ses racines sont douées de beaucoup de flexiblité et de force, lorsqu'on les a fait macérer dans l'eau. On les prive, par cette opération, de la pellicule qui les enveloppe, et l'on s'en sert en Canada pour cou- dre ensemble les morceaux d'écorce de bouleau dont on construit des canots. Les coutures sont ensuite recouvertes ou frottées avec la résine qui découle de cet arbre, et à laquelle on donne improprement le nom de gomme. Sir A. B. Lambert dit que son écorce est employée pour tanner les cuirs. Il est possible que cela ait lieu à Terre-Neuve ou dans le Bas-Canada, où je n'ai pas voyagé, quoique j'aie quelques raisons d'en dou- ter ; mais ce que je puis assurer, c'est qu'on ne s'en sert pas pour cet usage dans tout le District de Maine et dans les provinces de la Nouvelle-Brunswick et de la Nouvelle-Ecosse. Je puis également affirmer, et l36 ABIES ALBA. je l'ai déjà dit dans l'article précédent, que ce n'est pas avec les rameaux de celte espèce que se fabrique la bière de spruce , puisqu'au contraire , on évite soigneusement de s'en servir, parce que lorsque ses feuilles sont froissées elles répandent une odeur forte et désagréable qui se communique , dit-on , à la liqueur. Cet arbre , beaucoup plus répandu en France que l'espèce précédente, est élégant dans sa jeunesse, et le joli effet qu'il produit le fait très - rechercher en Europe pour l'embellissement des parcs et des jardins , où son feuillage contraste agréablement avec celui des autres espèces dont la teinte est plus foncée. Les pépiniéristes en France et en Allemagne, à qui il convient de multiplier les variétés, distinguent VAbies alha en Sapinette blanche ou argentée et en Sapinette bleue. PLANCHE XII. Fig. 1 , feuille, Fig. 2 , graine. P/jX IL-nn, JU.u:!.- „'.-! ABIES Canaiensis. A-BIES CANADENSIS. THE HEMLOCK SPRUCE. Abies canadensîs , arhor jnaxima , ramîs gracilibus , ramiiUs novellis m>illosissimis ; foUis soUtariis , planis , subditichis ; strobilis terminallbus ^ minimis , cylindra" ceO'Ovatis , despicientibus. Cet arbre est connu, dans tous les Etats-Unis, sous le seul nom {\! Hemlock spruce , et des Fran- çois du Canada , sous celui de Pérusse. Cette espèce de Sapin , dont l'analogue ne se trouve pas dans l'ancien continent , est une de celles qui appartiennent aux régions les plus froides du Nouveau-Monde, car elle commence à croître aux environs de la baie d'Hudson , latitude Si»; mais vers le lac Saint- Jean, et près de Québec, elle remplit déjà les forets. Dans la Nouvelle-Ecosse, la Nouvelle-Brunsv^ick, le Dis- trict de Maine , l'Etat de Vermont et la partie su- périeure du New-Hampshire , où je l'ai observée, elle forme quelquefois à elle seule les trois quarts de l'essence noire ou résineuse qu'elle compose avec V Abies ni^ra , Black spruce. En avançant plus au midi, cet arbre devient moins commun, et dans les Etats du milieu et du sud , il se trouve confiné aux Monts- Alléghanys , ainsi qu'aux chaînons qui en dépendent , et encore ne le trouve-t-on toujours que sur les bords des torrens et aux expositions les plus fraîches et aux endroits les plus obscurs. I. i8 l38 ABIES CANADENSIS. Dans les diverses contrées que je viens d'indiquer au nord et à l'est de l'Etat de Massachusetts , qui embrassent , sans y comprendre le Canada , une éten- due de plus de 1,100 kilom. (^25o lieues) en lon- gueur , sur près de 35o ( 80 lieues j en largeur , l'essence noire ou résineuse occupe constamment la partie la plus déclive des collines, et elle cons- titue presque la moitié des vastes forets qui couvrent d'une manière non-interrompue tous ces pays. On peut donc juger, d'après cela, combien YHemlock spruce est abondant dans le nord des Etats-Unis. Les situations très-liumides ne sont cependant pas celles qui paroissent le mieux convenir à sa végé- tation, car j'ai constamment observé que, lorsqu'il se trouve mêlé avec VAbies Jiigray Black spruce ^ il est moins abondant à proportion que le sol est plus humide. J'ai encore vu souvent cet arbre croître parmi les Hêtres et les Erables à sucre, dans un sol très-favorable à la culture du froment, et y acquérir un grand développement. L'Hemlock spruce , toujours plus élevé et plus gros que VAbies nigj^a^ Black spruce ^ atteint environ 23 à 25 mètres (^70 à 80 pieds) de haut, sur 2 à 3 mètres ( 6 à 9 pieds ) de circonférence , conservant le même diamètre dans les deux tiers de sa hauteur ; cependant, si on peut juger assez exactement de la croissance des arbres et de leur longévité , par le nombre des couches concentriques et leurs rappro- chemens, celui-ci doit être bien des années, peut- être même deux siècles, pour acquérir dépareilles ABIES CANADENSIS. I '^Q dimensions, car ces couches sont très-nombreuses et très-rapprochées. Les feuilles de THemlock spruce sont longues de i/f à i8 millimètres Ç6 k H lignes j , aplaties, très- nombreuses, disposées irrégulièrement sur deux ra ngs, et velues à l'époque de leur développement. Ses cônes, un peu plus longs que les feuilles, sont do forme ovale, pendans et situés à l'extrémité des ra- meaux. Lorsque cet arbre croit dans un terrain qui lui est favorable, il présente dans sa jeunesse, et jusqu'à ce qu'il ait atteint 8 à lo mètres C 25 à 3o pieds J de hauteur, une forme élégante et agréable qu'il doit à la disposition symétrique de ses bran- ches et à son feuillage bien fourni : il peut alors être considéré comme un arbre d'ornement et em- ployé avec avantage dans les jardins paysagistes. Lorsqu'au contraire il est arrivé à son entier déve- loppement, ses grosses branches, le plus souvent cas- sées à un mètre et demi Ç l[. k 5 pieds ) de leur nais- sance, et desséchées à leurs extrémités, sont comme autant de chicots qui se laissent apercevoir au de- hors , et ne sont plus garnies que de petits rameaux. Dans cet état qui le fait reconnoitre au premier abord, il a un aspect peu agréable, et quoique sou- vent dans toute sa force , il offre l'image de la décré- pitude. Ce défaut particulier est attribué à ce que les branches secondaires, toujours placées horizontale-' ment et garnies d'un feuillage touffu et serré retien- nent la neige , et s'en surchargent à un tel point, qu'elles finissent par céder au poids et se briser 3 l4o ABIES CANADENSîS. accident qui n'a pas lieu dans les jeunes individus, à cause de leur flexibilité'. Les bois sont encore rem- plis d'Hemlock spruce morts, soit qu'ils aient été pi- qués d'une espèce d'insecte qui s'attache de préfé- rence au genre des Pins, soit par d'autres causes que j'ignore. Cette multitude d'arbres morts et couverts de mousse , qui, dit-on , restent dans cet état vingt à trente ans sans tomber, contribuent beaucoup à déparer les forêts de cette partie des Etats-Unis , et à leur donner une apparence triste et lugubre. \J Henilock spruce offre une singularité que je n'ai remarquée dans aucun autre arbre de l'Amérique sep- tentrionale; c'est de ne s'élever quelquefois qu'à 60 et 80 centimètres ( 24 à 3o pouces ) de hauteur. Dans cet état, il affecte une forme pyramidale ou à peu près, et ses rameaux touffus et serrés ont une ten- dance plutôt à s'abaisser et à s'appliquer contre la surface de la terre qu'à s'élever. Cette disposition naturelle et assez remarquable peut le rendre propre à faire des charmilles ou à décorer les jardins à l'ins- tar de l'if, ayant l'avantage de croître plus rapide- ment, d'avoir une verdure plus gaie, et de souffrir également le ciseau. C'est à peu de distance de York, Court-House, entre Portland et Portsmouth, dans un endroit découvert, où est le sec et pierreux, que j'ai fait cette remarque. Malheureusement les c|ualités du bois de l'Hem- lock spruce ne répondent pas à son abondance, car de tous les grands arbres résineux de l'Amérique septentrionale, c'est, sous ce rapport, celui qui est le ABIES CANADENSIS. i4l moins appréciable ; heureusement ce désavantage qui feroit regretter de le voir occuper, d'une ma- nière si étendue , la place d'arbres réellement utiles, est compensé par une propriété bien précieuse pour les pays où il croit, c'est que son écorce peut servir au tannage des cuirs, propriété dont je parlerai dans la suite de cet article. On estime en général le bois qui se fend de droit fil , ce qui est dû à la direction verticale des fibres ligneuses; dans V Hemlockspriice ^ au contraire, ces fibres se dirigent d'une manière tellement obli- que, que dans un individu de 3o à 4o centimètres ( i2à 1 5 pouces) de diamètre, les mêmes reparois- sent à I î à 2 mètres [^kG pieds ) de haut. Outre ce défaut, qui est assez essentiel et qui s'oppose à ce qu'on puisse le fendre aisément pour servir à la clô- ture des champs , les vieux arbres en ont un autre ; cest qu'ils sont fréquemment ébranlés y shaky ^ c'est- à-dire qu'ils ont d'espace en espace les couches con- centriques désunies , ce qui ôte à ce bois beaucoup de sa force. Ce défaut de l'Hemlock spruce est attribué de ce qu'étant beaucoup plus élevé que les autres arbres avec lesquels il croit, sa cime , large et touffue, donne plus de prise aux vents dont il est tourmenté. On a encore reconnu que son bois ne peut être em- ployé à l'extérieur , dans la construction des édifices , attendu qu'il pourrit promptement exposé aux im- tempéries des saisons ; inconvéniens très-graves dans un pays oii presque toutes les maisons sont en bois. Cependant, comme le Pinus strohus , TVhite pine , l42 ABIES CANADENSIS. devient tous les jours plus rare et plus cher, on lui substitue , le plus qu'on peut , VHemlock spruce qui n*a sur ce dernier que deux avantages d'être très- commun et de tenir mieux les clous ; son grain , quoique grossier, est aussi plus ferme, et résiste da- vantage à l'impression des corps étrangers ; ainsi, dans le District de Maine, on en fait fréquemment les aires de granges, en le débitant en planches d'environ 5 centimètres (2 pouces) d'épaisseur; mais ce à quoi il est le plus employé, et ce qui en consomme une assez grande quantité dans les Etats du nord, cest parce qu'il sert à former la première enveloppe des maisons en bois, qu'on recouvre ensuite en clap- haards^ petites planchettes de Pinus strobus , TVhite pine. Lorsqu'on veut économiser, on en fait encore la charpente de l'intérieur des édifices , parce qu'il a été reconnu que le bois de XHemlock spruce^ à l'abri de l'humidité , est aussi durable que celui de tout autre sorte. Toutes les lattes, pour le plâtrage des appartemens, sont encore faits de ce bois, et on en fait même passer en Angleterre pour cet usage. Dans le District de Maine on en fait assez généra- lement les pieux destinés à la clôture des champs : employé de cette manière, il dure environ quinze ans, et à cet égard, il est préférable au Chêne gris , Q. am- higua^ et au Chêne rouge, Q.ruhra. Cet arbre est très-peu résineux , car je n'ai jamais trouvé qu'une très- petite quantité de térébenthine aux endroits où d'assez grands lambeaux d'écorce avoient été en- levés depuis assez long-temps. ABIES CANADENSIS. l4^ L'ëcorce de Xllemlock spruce possède, comme je l'ai annoncé, une propriété bien précieuse pour les Etats du Nord, ainsi que pour le Bas-Canada, la Nouvelle-I^runswick et la Nouvelle-Ecosse. C'est de remplacer dans le tannage des cuirs celle de Chêne qui est très-rare dans toutes les contrées où j'ai dit que cet arbre étoit si abondant. On lève cette écorce au mois de juin , et avant de la passer au moulin, on ôte avec une plane la moitié de son épiderme. \)\\ District de Maine elle est exportée à Boston, à New- Providence, et dans les autres parties des Etats septen- trionaux qui sont le plus habités, et où elle est presque exclusivement employée danslestanneries.il en vient aussi à New-York du haut de la rivière Hudson , et quelquefois on en importe à Baltimore. Sa couleur qui est d'un rouge assez foncé, se communique au cuir que l'on prépare avec elle. Plusieurs tanneurs que j'ai consultés , et qui sont dans l'usage de se servir de l'écorce de l'Hemlock spruce et de celle de Chêne , pensent que cette dernière est préférable, mais qu'en les mêlant ensemble , on fait de meilleur cuir que si elles sont employées séparément. De la Nouvelle- Ecosse et du nord des Etats-Unis on a exporté pen- dant quelque temps de l'écorce d'Hemlock spruce en Angleterre j mais ce commerce a cessé faute de demandes. On dit que les Indiens s'en servent pour teindre en rouge leurs paniers légers , faits en Erable rouge. On possède dans beaucoup de jardins en France , en Allemagne et eu Angleterre des Henilock spruce l44 ABIES CANADENSIS. qui donnent des graines ; mais généralement en France il vient assez mal, parce qu'il est presque toujours placé dans des situations trop découvertes et trop sèches. D'après la description de cet arbre , on voit que son bois ne possède aucune des qualités qui puis- sent déterminer à le propager dans les forêts Euro- péennes , et que si son écorce est précieuse dans le nord de l'Amérique , pour le tannage des cuirs , elle est inférieure à celle de Chêne. La figure que Sir A. B. Lambert à donnée est très-bonne; mais dans la description de quelques lignes qui y est jointe, cet auteur est dans l'erreur à certains égards, et il est sur-tout assez remarquable qu'il n'ait point parlé de la propriété dont jouit son écorce. PLANCHE XIII. Fig. 1 , cdne. Fig. 2 , graine. P/.y4 Ile:.:: .M ABIES Balsanufera . or (L^r/Zm ^->/ t/^//' mètres (^ i5o pieds ) de hauteur, sur à peu près 2 mètres ( 6 pieds j de diamètre. Dans les Pins , la substance résineuse est ex- traite au moyen d'une incision faite au corps de l'arbre , d'où elle transsude à travers les pores de l'écorce et les canaux séveux de l'aubier. Dans l/jS ABIES BAL SA MI FER A. VAbies balsamifera , et dans YAhies taxifolia cette substance est naturellement déposée dans des vé- sicules ou de petites poches , répandues sur le tronc et les principales branches , et c est en cre- vant ces tumeurs, qui font assez saillies pour être aperçues , qu'on recueille ce qui en découle , au moyen d'un entonnoir adapté à une bouteille. La quantité de térébenthine , ainsi obtenue annuel- lement de VAbies balsamifera , en Canada , dans le District de Maine et les pays adjacens , se ré- duit à quelques centaines de bouteilles qu'on ex- porte en Angleterre et dans le reste des Etats-Unis où elle est vendue sous le nom de baume de Gilead , quoique bien des personnes n'ignorent point que le véritable baume de Gilead soit le produit de VAmjris ^ileadensis^ arbre très-différent, et qui est originaire d'Asie ; mais d'après quelques ressemblances qu'on aura peut-être cru trouver dans l'odeur et la saveur de ces deux substances, on aura donné à la térében- thine de VAbies balsamifera le nom de ce baume. La térébenthine de cet arbre , traîchement extraite , est d'une couleur verdâtre , fluide et très transpa- rente; sa saveur est acre et pénétrante; donnée in- considérément, elle produit des ardeurs d'urines; appliquée sur l^es plaies, elle excite de l'inflamma- tion et occasionne beaucoup de souffrances. Cette substance a été surtout préconisée en Angleterre , où quelques médecins en recommande l'usage dans certains périodes de la phthisie pulmonaire, et alors on la préfère à la térébenthine de VAbies taxifolia , ABIES BALSAMIFERA. 1 4<) qui se récolte à peu près de la même manière en Suisse, et dans quelques cantons de l'Allemagne. Le Baumier de Gilead , cultivé depuis long-temps en Europe, doit être réservé pour l'embellissement des parcs et des jardins d'agrémens, où sa forme ré- gulière et son feuillage très-agréable lui assignent une des premières places parmi les arbres verts. PLANCHE XIV. Fig. 1 , cône. Fig» a , graine* LES NOYERS. jTarmi le grand nombre d'arbres differens qui composent les vastes forets de l'Amérique septen- trionale à l'est du Mississipi , les Noyers sont , après les Chênes , un des genres d'arbre dont les espèces sont le plus variées. Sous ce seul rapport, le sol des Etats-Unis est plus favorisé que l'Europe entière oii il n'en existe aucune qui lui soit indigène ; car l'on sait généralement que celle qu'on y cultive avec tant d'avantage pour les besoins de la société, est originaire d'Asie, et notamment des bords de la mer Caspienne, où mon père la trouva en abon- dance dans un voyage qu'il fit en Perse, en 1782. J'ai reconnu dans les Etats - Unis dix espèces de JVoyers , il est même assez probable qu'on en décou- vrira quelques autres dans la Louisiane. C'est donc .aux personnes qui voyageront dans ces contrées pour en étudier les productions naturelles, à diriger leur attention vers cette classe de végétaux fort intéres- sante à connoitre , parce que leur bois réunit des propriétés très - utiles dans les arts, et qu'il peut s'y trouver des espèces susceptibles de s'améliorer très-promptement , à l'aide de la greffe et d'une cul- ture soignée, telle que celle du Pacanier. A l'appui de cette considération, je citerai ce que mon père m'a souvent dit, que les noix sauvages du Noyer dAsie Jugla7is régia, étoient pi us petites, plus dures, iBl NOYERS. et d'une qualité inférieure à celles de l'espèce amé- ricaine que je viens de nommer. C'est donc aux membres des différentes sociétés d'agriculture des États-Unis, à multiplier les observations et les expé- riences, et à suivre en cela l'exemple de nos ancêtres, à qui nous sommes redevables de cette grande variété de fruits, aussi salutaires qu'agréables à la vue. Les Noyers de l'Amérique septentrionale m'ont paru offrir entr'eux des caractères assez distincts, pour que je croye devoir les partager en deux sections. Ces caractères naissent principalement de la différence des chatons qui portent les fleurs mâles, ainsi que de leur végétation plus ou moins rapide. La première section sera composée des Noyers à chatons simples (PL I.); et elle comprend seulement deux espèces, le Ju^lans nigj^a et le Jugla?îs cathartica, La deuxième renfermera les Noyers à chatons ramifiés ( PI. IV. ) ; et elle sera composée de huit espèces , savoir : les Juglans olivcefoj^mis; J. amara; J, aquatica; J. to- mentosa-^ J. squamosa^ J, laciniosa, J.porcina el J. mjristicœformis . Les trois premières espèces de cette deuxième section , se rapprochent un peu de ceux de la première , par leurs bourgeons qui sont à nu et ne sontpas recouverts d'écaillés. C'est encore à cause de cela que je les ai placées immédiatement après, et que j'ai mis à leur tête le J.olivœformis^ qui par ses nombreuses folioles, a le plus de res- semblance avec le J. nigra et le J. cathartica^ qui ont aussi leurs bourgeons nus. Dans tous les États-Unis , on donne aux Noyers de NOYERS. 1.j3 la deuxième section le nom général d'Hickery ' , et cela est fondé principalement sur certaines pro- priétés de leur bois, qui quoique modifiées suivant les espèces^ s'y trouvent réunies à un plus haut degré que dans tout autre arbre, soit d'Amérique, soit d'Europe. Ces espèces ont encore beaucoup de ressemblance, tant par leur port que par leurs feuilles, dont les folioles dans toutes, diffèrent par le nombre et par la grandeur. A ces causes de con- fusions se réunit celle qui est produite par les fruits, dont les formes varient à l'extrême dans les mêmes espèces; tellement que lorsqu'on les voit séparé- ment, on croiroit qu'elles appartiennent à des espè- ces étrangères. Ce n'est donc pas entièrement d'après des différences aussi notables , qu'on doit en éta- blir la distinction. Il faut surtout encore qu'elle soit fondée sur l'examen des jeunes pousses de l'année précédente, des bourgeons et des chatons; car ce n'est que par une observation constante, faite pendant tout le cours d'un été dans les forets de ces contrées, que je suis parvenu à distinguer aisément ce qui n'étoit que de simples variétés, d'avec de véritables espèces. M. Delile , de l'Institut d'E- gypte, alors dans les États-Unis, a pris une part active aux recherches que j'ai faites à cette occasion, étant journellement avec moi dans les bois; et nos observations ont eu, je crois, pour résultats, ce qu'oiv doit attendre de beaucoup de persévérance. ' Mot dont je n'ai pn connoitre la signification , et qni est probable- ment d'origine indienne. l54 NOYERS. D'après ces différentes considérations , fondées principalement sur le grand rapport qu'ont entr'eux les bois des diverses espèces de noyers Hickery; j'ai pensé qu'il étoit plus convenable dans la des- cription particulière de chacun d'eux, de ne faire mention que sommairement de leur propriétés res- pectives, et d'en parler d'une manière plus étendue , collectivement et comparativement dans un article séparé qui terminera leur histoire. DISPOSITION' MÉTHODIQUE DES NOYERS DE L'AMÉRIQUE SEPTENTRIONALE. Monœcie Polyandrie y Lin. Fam. des Térébenthacées ^ Jn««. 1/' SECTION. CHATONS SIMPLES. (Pl.I, f.g.3.) Végétation très-rapide. 1 Juglans nigra Black walnut. 2 Juglans cathartica. . . Butter nut. II'. SECTION. CHATONS COMPOSÉS CD ATTACHES TROIS A TBOIS AD MEME PEDICULE. (PI. VII, fis. 3.) Végétation très - lente, 3 Juglans olivseformis. . Pacane nut^ hîckery; 4 Juglans amara. . . . Bitter nut , hickerj. 5 Juglans aquatica. . . . Water bitter nut, hickery. 6 Juglans tomentosa. . . Mocker nut , hickerj. 7 Juglans squamosa. . . Shell Bark, hickery. 8 Juglans laciniosa. . . . Thick shell bark , hickery. 9 Juglans porcina. . . . Pig nut ^hickery, lo i\x^B.nsm.jYisiicddîoTTa\s.Nutmeg hickery nut. P/J- r J £e€iûuéi (/<■/ JUCtLANS mgra JUGLANS NIGHA. THE BLACK IVALNUT. 3 V GhkTHS JblioUs quindenisy subcordatis , supernè angus- Latis , serratis : fructu globoso , punctato scabriusculo : riuce corîugata. i Cet arbre est connu des Américains dans toutes les parties des États-Unis où il croît, ainsi que des François de la Haute et Basse-Louisiane, sous le seul nom de Noyer noir, Black FTalnut, Les envi- rons de Goshen, État de New-Jersey, situés par le 4^0 5o' de latitude, sont à l'est des Monts-Allé- ghanys, le point le plus rapproché vers le nord où il commence à paroitre, tandis qu'à l'ouest de ces mon- tagnes il existe déjà en abondance dans cette por- tion du Génessée , État de New-York, qui se trouve comprise entre les 77° et 79° de longitude, et qui est d'environ deux degrés plus avancée vers le nord. Cette observation, ainsi que j'aurai occasion de le faire remarquer , s'applique à plusieurs autres végé- taux, dont l'apparition est soumise à l'influence de la température, laquelle devient plus douce à mesure qu'on s'avance vers l'ouest. Le noyer noir est déjà très-commun dans les forêts qui avoisinent Phila- delphie , et si l'on en excepte ensuite toutes les par- ties basses des Etats méridionaux, dont le sol est trop sablonneux ou trop humide comme celui des marécages , on retrouve cet arbre jusqu'au Mis- sissipi , ce qui embrasse une étendue de près de l58 JUGLANS NIGRA. deux cent soixante-treize myriamètres( 700 lieues j. On remarque encore qu'à Test des monts Allëgha- nys , dans la Virginie , les Hautes-Carolines et la Haute - Géorgie , il est principalement confiné aux vallons, au milieu desquels circulent les rivières et les creeks^ et dont le sol est meuble et profond; tandis qua l'ouest de ces mêmes montagnes, dans les Etats du Rentucky, duGénessée et de l'Oliio, où les terres sont presque partout d'une très-grande fertilité, il croit en plein bois, entremêlé avec le Gjnmocladus dioica^ le Gleditsia triacanthos , le Moriis rubra^ le Robinia pseudo-acacia ^ lejuglaiis squaniosa ^V Acer nigrum^XeCeltis crassifolia et VUlmusrid)ra. Tous arbres qui sont considérés comme signes indicatifs des meilleures terres. C'est aussi dans ces contrées que cet arbre provient à son plus grand développement. J'ai vu souvent sur les rives de l'Ohio et dans les iles qui sont au milieu de cette belle rivière, des indi- vidus qui avoient environ un mètre (3 à 4 pieds) de diamètre, sur 20 à 22 mètres (60 à 70 pieds) d'élé- vation , et il n'est pas rare d'en rencontrer qui ont 2 mètres (6 à 7 pieds) d'épaisseur. Cette force de végétation indique suffisamment que le Juglans ni- gra est un des plus grands arbres de l'Amérique septentrionale. Lorsqu'il est isolé ses brandies s'é- tendent horizontalement à une grande distance , ce qui fait que son sommet embrasse alors beaucoup d'espace, et lui donne une apparence magnifique. Les feuilles du Noyer noir, sont composées de sept ou huit paires de folioles presque opposées les JU GLANS NI GRA. IjQ unes aux autres, et attachées par de courts pétioles sur un pétiole commun. Elles sont longues de 5 à 8 centimètres (2 à 3 pouces), de forme lancéolato-acu- minées, légèrement pubescentes et dentées sur leurs bords. Les fleurs mâles sont disposées en chatons pendans et cylindriques, dont les pédicules sont simples et non ramifiés comme les Noyers Hic- kerys. Koj.pl. l-Jig' 3. Aux fleurs femelles succèdent des fruits parfaitement ronds, très-odorants, à sur- face légèrement inégale, et qui viennent toujours à fextrémité des branches. Dans les arbres jeunes et vigoureux, ils ont quelquefois 18 à 21 centimètres ( 7 à 8 pouces ) de circonférence. Le brou fort épais , ne se partage pas non plus naturellement en j)lusieurs parties comme dans les Noyers Hickerys; mais il s'amollit, finit par pourir et laisser échapper la noix. Celles-ci sont très-dures, un peu déprimées latéralement et comme plissées ou sillonnées à leur surface. L'amande , partagée par des cloisons ligneu- ses, est douce et d'une saveur agréable, quoique inférieure à celle du Juglans regia ou Noyer or- dinaire. On apporte ces noix aux marchés de New^- York, de Philadelphie et de Baltimore, où on les achète pour être servies sur la table. La grosseur des fruits du Noyer noir varie beau- coup , eu égard à^ la vigueur de l'arbre qui les pro- duit, et par rapport au sol où il croît, ainsi qu'à la température du climat où il se trouve. Sur les bords de rOhio, et dans le Rentucky, ses fruits revêtus de leur brou, mesurent 18 à 21 centimètres ( 7 à.8 I. 21 l6o JUGLANS NIGRA. pouces J de circonférence , et les noix ont une gros- seur proportionnée. Dans le Gënessée au contraire où il fait un froid extrême, ainsi que dans les champs épuisés par la culture, où ces arbres ont été mé- nagés lors des premiers défrichemens , elles ont moitié moins de cette dimension. On observe encore quelques petites variations dans la forme du fruit , et dans la manière dont est sillonnée la coquille; mais je ne puis considérer ces différences que comme accidentelles. Il est vrai qu'il n'est pas de genre d'arbres en Amérique , dont les fruits de chaque espèce offrent des formes aussi variées ; cir- constances qui doivent nécessairement avoir induit en erreur les personnes qui n'ont observé que le petit nombre d'individus qui se. trouvent dans les jardins en Europe, et qui les ont décrits comme des espèces distinctes. Le tronc du noyer Noir est revêtu d'une écorce épaisse , noirâtre et fortement crevassée dans les vieux arbres. Lorsqu'il est fraîchement débité, son aubier est très-blanc, tandis que le cœur est violet; mais bientôt après avoir été exposé à l'air, cette couleur prend plus d'intensité et devient presque noire , d'où est venu probablement à cet arbre le nom de Noyer noir. Les qualités qui font surtout apprécier son bois, sont : de résister long-temps à la pouriture quoique exposé aux alternatives de la chaleur et de l'humidité , pourvu néanmoins , qu'il soit privé de son aubier qui s'altère très - prompte- ment; d'avoir beaucoup de force et de tenir bien JU GLANS NIGRA. l6l les clous; de n'être plus sujet, lorsqu'il est bien sec, à se tourmenter ni à se fendre; enfin d'avoir le grain assez ferme et assez fin pour recevoir un beau poli. Toutes ces propriétés le font employer de pré- férence à beaucoup d'ouvrages où il convient très- bien. Outre ces divers avantages, il a encore celui de n'être point attaqué par les vers. A l'est des monts Alléghanys , on fait peu d'usage du Noyer noir dans la construction des maisons en bois; mais dans quel- ques parties des Etats du Rentucky, de l'Ohio, et notamment sur la rivière Wabash, il est fréquem- ment débité en essentes de 48 centimètres (i 8 pouces j de longueur, sur loà i6 centimètres (4 ^ ^ pouces) de largeur pour les couvrir, et quelquefois encore on s'en sert pour la charpente. Mais c'est dans lebé- nisterie surtout qu'on emploie généralement le bois de cet arbre dans le pays où il abonde. On en fabrique des meubles qui sont souvent très-beaux , par les accidents qui se rencontrent principalement dans les morceaux tirés de l'endroit où le tronc se partage en plusieurs branches. Cependant comme il prend en assez peu de temps une couleur très rem- brunie, beaucoup de personnes donnent la préfé- rence aux meubles fabriqués avec le bois du Cerisier de Virginie. On fait aussi avec le bois du Noyer noir ^ les montures de fusil des troupes , comme étant plus fort et plus résistant que celui de lAcer rubriim. Celui-ci quia plus d'éclat et de légèreté , est employé- de préférence pour les fusils de chasse. On s'en sert fréquemment encore en Virginie, pour faire les pieux 162 JU GLATS'S NI GRA. des entourages, parce qu'il résiste bien à la pouri- ture, et qu'il peut rester vingt à vingt-cinq ans en terre sans s'altérer. Quelques personnes m'ont assuré en avoir vu faire de bons moyeux , ce qui dénote- roit encore sa force et sa durée. Tous les cercueils à Philadelphie sont aussi faits en planches de Noyer noir. Le bois de cet arbre est encore employé comme excellent dans les constructions maritimes; mais il ne doit être mis en œuvre que lorsqu'il est bien sec; alors on assure qu'il est plus durable que le Chêne blanc. Breckel dans son histoire de la Caroline du INord, avance qu'il n'a pas l'inconvénient comme ce dernier , d'être attaqué par les vers de mer dans les pays chauds; avantage bien précieux, si cela est vrai , et qui demande de nouveau à être confirmé. Dans les chantiers de constructions navales à Phi- ladelphie , je l'ai vu fréquemment employer pour genoux et varangues; mais à Wheeling, à Marieta, ainsi qu'à Louisville, petites villes situées sur les bords de l'Ohio, il constitue une grande partie de la charpente des vaisseaux qu'on y construit. Sur la rivière Wabash, on en a fait des canots et des piro- gues qui sont très-estimés, à cause de leur solidité et de leur durée. Quelques-unes de ces pirogues , faites d'un seul tronc d'arbre, ont plus de i3 mètres (40 pieds) de longeur, sur i mètre environ (^2 à 3j de largeur. Le Noyer noir est donc un arbre précieux, et c'est avec raison que beaucoup d'habitans ne le JUGLANS NIGRA. l63 coupent pas^ lorsqu'il s'en rencontre dans les nou- veaux defrichemens qu'ils entreprennent. Le Noyer noir débité en planches, plancks ^ de 5 centimètres (2 pouces) d'épaisseur, est exporté en Angleterre; mais la quantité est peu considérable. Ces sortes de planches se vendent à Philadelphie à rai- son de quatre cents ^ environ 20 centimes le pied. Le brou qui enveloppe la noix, donne ujie cou- leur fort analogue à celui que fournit notre Noyer d'Europe. On s'en sert dans les campagnes pour teindre les étoffes de laine. Cet arbre a été depuis long-temps introduit en France et en Angleterre , dans les jardins des ama- teurs de cultures étrangères. Il réussit très-bien et donne abondamment des fruits. Quoiqu'il diffère beaucoup du Noyer d'Europe, néanmoins de toutes les espèces de l'Amérique septentrionale, c'est celle qui a le plus de ressemblance avec lui. Si nous comparons donc ces deux espèces sous les différens degrés d'uti- lité que l'une et fautre présentent aux arts et au commerce, nous trouverons que le bois du Noyer noir est plus compact, plus pesant, qu'il est doué de beaucoup plus de force , et qu'il est susceptible de prendre un plus beau poli; enfin , qu'il nest pas sujet à être attaqué par les vers; propriétés, qui comme nous l'avons vu précédemment, le rendent propre non-seulement aux mêmes usages que celui que nous possédons, mais encore aux grandes cons- tructions. Je pense également que par ces mêmes considérations , cet arbre conviendroit parfaitement l64 JUGLANS NIGRA. pour succéder à l'Orme sur les grandes routes; car il paroît actuellement bien prouvé , que pour obtenir des succès certains dans la culture des arbres ou des plantes herbacées sur le même terrain, il est né- cessaire d'y planter alternativement des espèces d'un genre différent. Cependant si on considère le Noyer noir sous le rapport de ses fruits , on trouvera que les avantages qu'il présenste ont très-balancés , car ses noix quoique assez grosses, sont très-inférieures à celles de -nos espèces les plus médiocres. On a planté en même temps et dans le même ter- rain des noix de l'une et de l'autre espèce , et l'on a observé que celles du Noyer noir donnent des sujets qui poussent plus vigoureusement, et qui s'élè- vent à une plus grande hauteur dans le même espace de temps ; alors il seroit peut-être profitable de greffer à 2 à 3 mètres (8 ou 10 pieds) de hauteur, notre Noyer d'Europe sur celui d'Amérique, et si on adoptoit cet usage, on jouiroit de tous les avantages que présentent ces deux espèces , sous le rapport de la qualité du bois et de la bonté des fruits. PLANCHE I. Feuille moitiée grandeur naturelle. Fig. 1 , noix recoitverte de son brou. Fig. 2 , noix séparée de son brou. Fig. 3 , Jleurs mâles sur un chaton simple et non ra» mifiét l'JRedoR^ M. JUGLANS cathaj-licci. -x,-^ V*»"V -v "fc ^» "*- '^ -^ '*«^'^ '*''*»'^ **''^'*' "^ JUGLANS CAT HAUT ICA. THE BUTTER N U T. JuGLANS cathariica, foUolis suOi/ulndenis , lanceolatis, basi rotimdato-ohtusis , suhtus tomentosis , leuiter ser- ratis. Fructu oblongo-ovato , apice mammoso , viscido , longé pedunculato. Nuce oblonga acuminata , insi- gniter inscupltè-scabrosa. Cette espèce est connue dans l'Amérique septen- trionale , sous différentes dénominations. Dans les Etats de New-Hampshire, de Massachussett et de Vermont, elle porte le nom de Oïlnut^ Noyer à l'huile. Dans la Pensylvanie, le Maryland et sur les bords de rOhio, elle est plus connue sous celui de White Walnut^ Noyer blanc; tandis que dans les Etats de New-York , de New-Jersey et de la Virginie , ainsi que dans la partie montagneuse des Hautes- Carolines, on l'appelle Butter nut^ Noix de beurre. Parmi ces diverses dénominations, j'ai cru devoir préférer cette dernière, parce que d'une part, elle n'est pas entièrement étrangère aux autres parties des Etats-Unis que je viens de désigner, et que de l'autre, dans les environs delà ville de New-York, son bois y est employé à des usages plus variés. J'ai pensé également que le nom spécifique latin de cathartica^ qui lui a été donné il y a déjà fort long-temps par le docteur Cutler de l'Etat de Massachussett, devoit être définitivement substitué à celui de Cinerea , sous lequel cette espèce a été jusqu'à présent dis- l66 JUGLANS CATHARTICA. tinguëe par les botanistes. Cette distinction avoit été tirée de la couleur des branches secondaires qui sont revêtues d'une écorce lisse et cendrée, mais elle ne rappelle réellement qu'un caractère peu im- portant, tandis que le premier exprime une des qua- lités les plus intéressantes de cet arbre. On trouve encore le Juglans cathartica dans le Haut et Bas-Canada, dans le district de Maine, sur les bords du lac Erié, dans les Etats du Rentucky et du Ténessée, ainsi que sur les bords du Missouri; mais je ne l'ai pas rencontré dans la partie basse des deux Carolines, de la Géorgie et de la Floride orientale, oii la nature du sol et la chaleur exces- sive qu'on éprouve en été, sont peu favorables à sa végétation , qui est au contraire remarquable dans les pays les plus froids ; car dans l'Etat de Vermont , par exemple , où les hivers sont si rigoureux, qu'on y va en traineau quatre mois de l'année , cet arbre acquiert 2 à 3 mètres ^8 à 10 piedsj de circonférence, cependant je ne l'ai vu nulle part croître plus abon- damment que dans les bas-fonds qui bordent l'Ohio, entre Wheeling et Marietta ; mais il m'a paru que répaisseur des forets qui les couvrent, et où le so- leil ne pénètre que difficilement, s'opposoit à son entier développement; car je n'y ai point observé d'individus d'une aussi forte dimension que dans le New-Jersey, sur les bords élevés et très-escarpés de la rivière Hudson , presque opposés à la ville de New-York. Dans cet endroit les bois sont peu garnis , et la surface du terrain qui est d'une nature froide JUGLANS CATIIARTICA. l6' é et peu productive, est parsemée de gros rochers: c'est dans leurs interstices qu'ont pris naissance les plus gros Ju^lans calhartica que j'aie vus. J'en ai mesuré qui à i mètre (^3 piedsj de terre, avoient3 à 4 mètres ( loà 12 pieds) de circonférence, sur environ 16 mètres (^5o pieds) d'élévation, et dont quelques racines tout en conservant le même diamètre , s'éten- doient en serpentant à fleur de terre jusqu'à plus de i3 mètres (4o pieds). Le tronc de cet arbre se rami- fie promptement , et ses branches qui s'étendent à une grande distance, m'ont semblé affecter une direc- tion plus horizontale que dans les autres arbres , ce qui en faisant paroitre son sommet très-vaste et plus touffu, lui donne un aspect assez remarquable pour le faire d'abord reconnoitre de loin. Les bourgeons du Ju^lans cathartica comme ceux du J. nigra ne sont pas revêtus d'écaillés , mais sont à découverts, et ses feuilles se développent de très-bonne heure au printemps , environ quinze jours avant celles des Jitgla?2s Hickerys '. Chaque feuille est composée de sept ou huit paires de folioles sessiles , et terminées par une impaire pétiolée. Ces folioles longues de 5 à 8 cen- timètres (2 à 3 pouces), sont de forme oblongue, dentées sur leurs bords et légèrement velues. Les fleurs mâles sont supportées sur des chatons gros, ' Cette végétation très - hâtive s'observe également dans plusieurs autres arbres, qui, comme celui-ci, existent dans des régions tiè^- septentrionales , et qui continuent à se trouver jusques sous des lati- tudes assez méridionales. !• 2 2 l68 JUGLANS CATHARTICA. cylindriques, longs de 8 à lo centimètres [ 1\.3l 5 pouces j, à pédoncules simples, et sont attachées sur les pousses de l'année précédente. Les fleurs femelles qui au contraire prennent naissance sur celles de l'année, sont terminales, et l'ovaire est surmonté de deux stigmates de couleur rose. Les fruits suspendus ordinairement un à un, sont sou- tenus par des pédicules minces, flexibles, et longs d'environ 8 centimètres ( 3 pouces); leur forme est celle d'un ovale oblong sans suture apparente ; ils ont souvent 6 centimètres ( 2 pouces et demi) de longueur sur i3 (5 pouces) de circonférence , et sont très-visqueux, ce qui est dû à de petites utricules d'une grande transparence qui couvrent leur surface et qui sont faciles à apercevoir à la loupe. Les noix sont très-dures ; dégagées de leur brou leur forme est oblongue; elles sont obtuses à leur base, termi- nées à leur sommet par une pointe très-aiguë , sont sil- lonnées profondément et d'une manière très-irréguliè- re : elles sont à maturité aux environs de Nevs^-York, vers le i5 septembre, quinze jours avant celles des autres espèces de Noyers. Dans certaines années elles sont si abondantes , qu'un homme peut en ramasser plusieurs minots par jour. L'amande est épaisse, très- huileuse, et rancit promptement; aussi en voit-on rarement dans les marchés de New-York et de Phi- ladelphie; c'est aussi probablement à cause de cette propriété, qu'on lui a donné les noms de noix de beurre et de noix à fhuile, vraisemblablement parce que les Indiens qui habitoient ces contrées, piloient JUGLANS CA.THARTICA. 169 ces noix, et séparant par rchuliition la substance grasse qui surnageoit, ils s'en servoicnt, dit-on, pour mêler à leurs aliments. Les fruits du Noyer calliartique , lorsqu'ils n'ont encore atteint que la moitié de leur grosseur ordi- naire , sont souvent employés pour faire des corni- chons ; pour cela on les plonge d'abord dans l'eau bouillante , et après les en avoir retirés et bien es- suyés, pour les /débarrasser entièrement de l'espèce de duvet dont ils sont couverts , on les met confire dans le vinaigre. Le Ju^lans nigra et le Ju^lans cathartica ont , dans les premières années de leur jeunesse , assez de ressemblance , tant par leur feuillage que par la rapidité avec laquelle ils croissent; mais arrivés à leur entier développement , ils ont chacun un port qui leur est propre, et qui les fait reconnoitre au premier aspect; et si on vient à examiner leur bois, surtout lorsqu'il est bien sec , on y trouve des diffé- rences très-notables. Le premier est pesant, fort, et d'une couleur très - rembrunie ; taudis que celui dont il est question, est très-léger, a peu de force, et d'une couleur rougeâtre ; mais ils jouissent tous deux également du précieux avantage de résister long -temps à la pouriture , et de n'être pas atta- qués par les vers. C'est à cause de son défaut de force , et parce qu'il donne rarement des pièces d'une grande longueur, que le Ju^lans cathartica n'est point apporté dans les villes pour la construction des maisons , quoiqu'on s'en serve quelquefois pour lyO JUGLANS CATHARTICA. cet usage dans les campagnes. Je l'ai assez souvent vu employé dans quelques cantons de l'État de New- Jersey, pour en faire les sols des maisons et des écuries, qui sont construites en bois, et qui reposent immédiatement sur la terre ; et c'est aussi parce qu'il résiste bien aux alternatives de la chaleur et de l'humidité, qu'on en fait de bons pieux et de bonnes barres pour clore les champs, et que, dans beaucoup de fermes, on le préfère pour en faire les auges où l'on donne à manger aux bestiaux, et que l'on place au dehors. Les pelles à remuer le grain et les sébiles faites de ce bois, sont aussi préférées à cause de leur légèreté , et parce qu'elles ne sont pas aussi sujettes à se fendre que celles en Acer ruhruin ^ ce qui fait qu'elles se vendent un peu plus cher. Aux environs de New-York, j'ai remarqué que dans la construc- tion des petits canots faits d'un seul ou de deux troncs d'arbres, il étoit employé pour courbes des- tinées à leur donner plus de solidité oii à les unir ensemble; mais on se sert d'un bois plus fort, lors- que ces canots sont d'une assez grande dimension. A Pittsbourgh sur les bords de l'Ohio, \e Juglans caihartica est quelquefois débité en planches , dont on fait de petits esquifs. Ceux qui descendent la rivière, les achettent de préférence à cause de leur légèreté. A Windsor dans l'État de Vermont, on s'en sert pour faire des panneaux de carrosse et de cabrio- let; ceux qui l'emploient le trouvent fort bon pour cet usage, parce qu'outre sa légèreté, il n'est pas sujet à se fendre, et que de plus, il prend très-bien la cou- JUOLANS C AT H ART ICA. I7I leur. En effet, j'ai remarqué que ces pores sont beau- coup plus ouverts que ceux du Tulipier et du Tilleul. La propriété médicale de l'écorce de cet arbre a été constatée depuis long-leinj)s dans les États-Lnis, par plusieurs médecins distingués, entr'autrespar le docteur Cutler. L'extrait aqueux de l'écorce, ou même sa décoction adoucie avec du miel , a été bien re- connupour un des meilleurs cathartiques que possède la matière médicale, parce que sa qualité purgative est toujours assurée , et que dans les constitutions les plus délicates, elle opère toujours sans causer ni dou- leur ni irritation. Enfin l'expérience a appris que, dans bien des cas, elle avoitproduitd'excellents effets dans la dyssenterie , etc. C'est ordinairementsous forme de pilules, et à la dose di^un demi gros jusqu'à un gros , qu'il se donne aux grandes personnes. Cependant son usage n'est assez général que dans les campagnes , où beaucoup de fermiers en font tous les ans au prin- temps une petite provision pour les besoins de leur famille et ceux de leurs voisins. Ils l'obtiennent en fai- sant bouillir dans l'eau l'écorce toute entière , jusqu'à ce que la liqueur se réduise par l'évaporation en une substance épaisse, très-visqueuse et de couleur pres- que noir. Ce procédé est vicieux, etl'ondevroit préa- lablement enlever l'épiderme ou la partie morte de l'écorce qui recouvre le tissu cellulaire , et qui est fort épaisse ; car vers la fin de l'opération, parl'ébullition long' temps continuée, elle s'est imprégnée des quatre cinquièmes du liquide , déjà chargé de la partie extractive. 17^ JUGLANS CATHARTICA. J'ai VU encore cette écorce employée avec succès , comme moyen révulsif dans les ophtalmies inflam- matoires, et même dans les maux de dents, par l'ap- plication à la nuque d'un petit morceau , qu'on a auparavant fait tremper dans l'eau tiède. On s'en sert aussi quelquefois dans les campagnes, pour tein- dre la laine d'un brun foncé; mais celle du Jii^lans nigra est très-préférable. J'ai enfin remarqué qu'au moment oii , dans un arbre vivant , l'on met à nu le tissu cellulaire de l'écorce, il étoit d'une grande blancheur, mais que dans 'l'espace d'une minute , il passoit à une belle couleur citron , qui peu à près , se changeoit en une couleur brune foncée. Quoique le Juglans cathartica^ comme on voit, possède quelques propriétés utiles , je ne pense pas cependant qu'il soit d'un assez grand intérêt, pour engager à le cultiver dans l'ancien continent comme une espèce forestière qui seroit profitable , soit dans les arts, soit même comme bois à brûler. Il devra donc seulement trouver sa place dans les parcs et jardins d'agrémens. PLANCHE II. Feuille moitiée grandeur naturelle, Fig, 1 , noix recouverte de son brou, Fig. 3 , 7ioix séparée de son brou. PL3 HfJteJmui Pùtjrf JlTCrLANS oliva? formis. I"?''S<,^cfJc 4 /// (jJ^Ci cAeri/ JUGLANS OLIVMFORMIS, TUE FACAJSENUT, H I C K E li Y. JuGLANS olivceformis ;folioli's siihtriclenis .falcatis , serra- tis. Friictu oblongo , proininulo-quadriangulato ; nuce oUuœformi , lœvL Cette espèce qui se trouve dans la Haute-Loui- siane , est nommée par les François des Illinois, et à la Nouvelle -Orléans, Pacanier , et ses fruits INoix Pacanes. Nom qui a été adopté par les habitans des États-Unis, qui par suite l'appellent Pacane mit. Les bords des rivières du Missouri, des Illinois, de S.-François et des Arkansas, sont les endroits où cet arbre se trouve le plus abondamment. Il est encore fort commun sur la rivière Wabasli, ainsi que sur les rives de l'Oliio, mais seulement jusqu'à 200 milles de son embouchure , dans le Mississipi; passé cette distance, il devient plus rare, et on ne le rencontre plus au-delà de Louisville. Mon père qui a parcouru toutes ces contrées , a appris des François qui y résident, et qui sont dans l'usage de remonter le fleuve jusqu'à sa source pour aller à la traite des fourrures, qu'on ne le voit plus au-delà de la rivière grande Mackakité , dont l'embouchure est située par le 42° 5o' de latitude. Cet arbre affecte de croître principalement dans les lieux frais et qui sont même très-humides ; on cite entr'autres un marais Çswamp) de plus de 800 174 JUGLANS OLIViEFORMIS. ■ arpents, qui est exclusivement couvert de Pacaniers. Ce marais qui est connu des François des Illinois, sous le nom de la Pacanière, est situé sur la rive droite de l'Ohio, vis-à-vis l'emboucliure de la rivière de Gumberland. Le Pacanier est un fort bel arbre dont la tige est bien filëe , et qui, lorsqu'il se trouve en corps de foret, parvient à 20 et 24 mètres [60 et 72 pieds J d'élévation. Son bois dont le grain est grossier, est comme celui des autres Noyers Hickery, pesant et compacte; il est également doué de beaucoup de force et d'élasticité, propriétés qui cependant ne sont pas chez lui réunies à un aussi haut degré , que dans quelques-unes des espèces que je décrirai ci-après. De même que les Ju^lans nigra et Juglans cathartica , ainsi que dans les deux espèces suivantes, les bour- geons sont à nu , et ne sont point recouverts d'écaillés. Ses feuilles longues de 3o à 45 centimètres ( i pied à 18 poucesj , sont supportées sur des pétioles un peu anguleux et légèrement velus au printemps. Chaque feuille est composée de six à sept paires de folioles, qui sontsessiles et terminées par une impaire pétiolée, ordinairement plus petite que les deux qui la précè- dent immédiatement. Ces folioles longues de 5 à 8 centimètres ^ 2 à 3 pouces J , dans les arbres arrivés à leur entier développement, etde8ài3(^3à5j dans les jeunes individus qui poussent avec vigueur, sont de forme ovale-acuminées, sensiblement dentées, et assez remarquables par leur bord supérieur qui présente une forme demi-circulaire très-prononcée, JUGLANS OLIV^FORMIS. in^ tandis que rinféricur est comparativement très-peu arrondi. On observe encore que la nervure princi- pale, au lieu d'être dans la partie moyenne, est plus bas, ce qui fait que la portion supérieure est de moitié plus large. Les noix, ordinairement très-abondantes, sont revêtues d'un brou épais de 2 à 4 "dllimètres (i à 2 lignes] , et garnies de quatre angles légèrement sail- lans, qui correspondent à ses divisions naturelles. Ces noix qui varient de longueur depuis 3 jusqu'à 4 cen- timètres (i pouce et demij, sont pointues à leurs extrémités : leur forme est cylindrique, leur couleur jaunâtre, et elles sont souvent marquées de lignes noirâtres, même purpurines, au moment où elles viennent d'être débarassées de leur enveloppe. La coquille lisse, mince, quoique assez résistante pour n'être pas cassée avec les doigts, renferme une amande bien fournie, et assez facile à avoir, parce quelle n'est pas partagée par des cloisons fortes et ligneuses. Ces noix, d'un très-bon goût, font l'objet d'un petit commerce , entre la Haute et Basse Louisiane. De la Nouvelle-Orléans , elles sont réexportées aux Indes Occidentales, et souvent encore dans les grandes villes des États-Unis. Non-seulement elles sont très-préférables à toutes celles qu'on a trouvées jusqu'à présent dans l'Amérique septentrionale, mais je crois même qu'elles ont une saveur plus délicate, que celles que nous possédons en Europe. De plus, on trouve souvent des variétés de Pacaniers , qui quoique sauvages, donnent des noix dont l'amande I. 23 in6 JUGLAINS O L I V iEF O R M I S. est beaucoup plus grosse que celle de nos Noyers qui n'ont pas été cultivés. Je pense donc que , sous le rapport du fruit, cet arbre mérite de fixer l'attention des Européens ; et qu'au moyen d'une culture soi- gnée, on parviendra à en obtenir de très-beaux, sur- tout si l'on considère que notre Noyer dans l'état sau- vage, ne donne que des noix très-inférieures à celles du Pacanier. Il est vrai cependant que cette heu- reuse perspective est balancée par la lenteur avec laquelle croit cet arbre , dont nous possédons plu- sieurs individus en France , qui ne portent point encore de fruit, quoiqu'ils soient plantés depuis plus de trente ans. Mais s'il est vrai que cet arbre puisse être greffé sur le Noyer noir ou sur le Noyer ordinaire , alors sa végétation sera incomparable- ment plus rapide , et rien ne s'opposera à ce qu'on s'applique à le propager en Europe. PLANCHE III. Feuille moitié grandeur naturelle. Fig. 1 f fruit couvert de son brou. Fig. 2 , fruit séparé du brou. ri.4 /fJl,:/.mA' ,/{-/ JUGLAT^S amma. / Cll^Lfc ■ JUGLANS AMARA. BITTER JSUT, HlCKERY. JuGLANS aniara , arbor maxima , folloUs 7 — 9"'*, frla- bris , conspicuè serratis , impari breviter petiolato. Fructu siibrotundo-ovoïdeo , supernë suturis prominulis ; nuce lœvi , subglobosà , mucronatà : putamine fragili , nucleo amaro. Cette espèce est généralement connue dans l'Ltat de New-Jersey, sous le nom de Bitter nut ^ Noyer amer ; tandis que dans la Pensylvan ie, et notam- ment dans le Comté de Lancaster, elle est désignée par celui de TVhite Hickery^ Hickery blanc, et quel- quefois encore de S^amp Hickery^ Hickery des ma- rais. Mais plus au sud elle est confondue avec \eju- glans por^cina y enûn les François des Illinois, comme les habitans de New- Jersey , lui donnent le nom de JVojer amer. Cette dernière dénomination sous la- quelle je la décris, ma paru devoir être préférable- ment conservée ; car elle indique une des propriétés particulières du fruit de cet arbre. Les environs de Windsor dans l'État de Vermont,. latitude 43° 3o', sont, je pense, irès-rapprochés du point le plus septentrional, où le Noyer amer com- mence à croître, en venant du nord au midi; car on ne le rencontre pas dans le district de Maine , où il existe cependant beaucoup de situations sur les bords des rivières très-analogues à celles où il est fort commun , à quelques degrés plus au sud. Cet l'jS JUGLAIVS AMARA. arbre parvient aune très-grande élévation, dans les Lois de Bergen's Woods, à six milles de Nevs^-York, et dans les bas- fonds qui bordent l'Ohio. J'ai mesuré plusieurs individus qui avoient de 3 à 4 niètres ( 10 à 12 pieds j de circonférence, sur environ 23 à 26 mètres (70 a 80 pieds j de hauteur; mais il ne parvient il est vrai à de pareilles dimensions , que dans les endroits où le sol est d'une excellente qua- lité, et maintenu constamment à l'état de fraîcheur, souvent même d'humidité , par les débordemens des creeks et des rivières ; et c'est probablement parce qu'on a remarqué qu'il affectoit de croître dans de pareilles situations, qu'il est désigné quelquefois comme il a été dit , par le nom de Hickeiy des ma- rais. C'est de tous les Noyers Hickerys, celui chez lequel la végétation est la plus tardive , car j'ai constamment observé que ses feuilles se développent environ quinze jours plus tard. Dans les individus bien venant et en état de porter fruit, elles ont de 32 à 4o centimètres ( 12 à i5 pouces) de longueur, sur une largeur à -peu -près d'égale dimension, qui varient ainsi que dans tous les autres arbres, eu égard à la nature , du sol, ou encore selon qu'elles croissent sur les branches inférieures ou sur les plus élevées.Chaque feuille est composée de trois ou quatre paires de folioles, terminées par une impaire moins grande que les deux qui la précèdent immédiate- ment. Ces folioles, longues d'environ 16 centimètres (6 pouces) sur 27 à 3o millimètres (12 à i5 lignes) de largeur, sont sessiles, ovales-acuminées et très- J U GLANS AMARA.. I 79 sensiblement dentées en scie; elles sont lisses et d'un vert assez obscur. Lorsque cet arbre a perdu ses feuilles, il est encore facile à reconnoitre à ses bour- geons qui ont une belle couleur jaune, et qui sont à nu, sans être couverts ou enveloppés d'écaillés. Dans la Pensylvanic et le New-Jersey, le Noyer amer est en fleurs vers le aS de mai. Les chatons qui portent les fleurs mâles , longs de 5 à 8 centi- mètres [ 2 à 3 pouces j, et disposés trois à trois sur le même pédicule , sont pendans et flexibles , tou- jours réunis seulement deux à deux. Ils sont atta- chés à la naissance de la pousse de l'année, tandis que les fleurs femelles peu apparentes, sont au con- traire placées à leur partie supérieure. Les fruits toujours assez abondans, sont en ma- turité vers le i^^. octobre. D'un seul arbre on pour- roit souvent en récolter plusieurs minots. Le brou qui couvre la noix est mince, charnu, et surmonté dans sa moitié supérieure de quatre appendices en forme d'ailes. Il ne devient pas ligneux comme dans les autres Noyers Hickerys; mais il s'amollit, et finit par tomber en pourriture. Dans cette espèce, la forme des noix est plus constante et plus régu- lière. Elles sont plus larges que longues , ayant environ 22 millimètres (10 lignes) de largeur sur i3 à 1 5 (^ 6 à 7 1. } de hauteur. La coque qui est blanche, lisse , et assez mince pour être cassée avec les doigts, renferme une amande très-remarquable par les si- nuosités profondes qui la pénètrent de toutes parts, et qui sont le résultat de la plicature de l'amande l8o JUGLA.NS AMAEA. sur elle-même ; elle est si âpre et si amère, que les écureuils et les autres animaux sauvages, ne recher- chent les noix de cet arbre, que lorsqu'ils n'en trouvent plus d'aucune autre espèce. Dans quelques parties de la Pensylvanie où cet arbre se trouve assez multiplié, on a retiré de ses noix une huile bonne a brûler, et susceptible d'être employée à d'autres usages secondaires; mais de ces essais qui ont réussi à quelques fermiers, on ne doit pas en conclure qu'on puisse, sous ce rapport, tirer de cet arbre des produits capables de devenir une bran- che d'industrie; car ni le INoyer amer , ni les autres espèces de l'Amérique septentrionale , ne couvrent jamais des cantons assez étendus, pour en fournir les moyens. Il y auroit à cet égard beaucoup plus d'avan- tage à multiplier le Noyer d'Europe, dont la culture est encore totalement négligée dans tous les Etats- Unis, et qui certainement réussi roit au-delà de toute espérance dans les Etats du milieu , et surtout dans ceux qui sont situés au-delà des Alléghanys. La texture de l'écorce du Noyer amer, la couleur de l'aubier et du cœur, sont les mêmes que dans les autres Noyers Hickerys, et son bois possède, quoi- que dans un degré inférieur, ces propriétés qui les font distinguer- si évidemment des autres arbres; propriétés qui sont la pesanteur, la force, la ténacité et l'élasticité. On s'en sert à Lancaster comme bois de chauffage ; mais sous ce rapport, il n'y est point consi- déré , comme supérieur en qualité au Chêne blanc, et il n'est point vendu à un taux plus élevé. JUGLANS AMAKA. l8l Le Noyer amer existe en France dans plusieurs jardins , et même y donne des fruits ; cependant comme on ne peut rien espérer de la qualité de son fruit, qui paroît vouloir un sol très -fertile pour arriver à un grand développement ; enfin , que son hois est reconnu en Amérique , pour être un peu inférieur à celui que fournissent les espèces sui- vantes, je ne crois pas qu'il doive trouver place dans les forets d'Europe. PLANCHE IV. Feuille de grandeur naturelle. Fie. 1 ) Jioix revêtues de leur brou. l'ig. -• ^ noix séparée de son brou. JUGLANS AqUATICA, WATER BITTE R NU T HICKERY. JuGLANS aquatîca foUolis 9 — 1 1 "", lanceolato - acumina- tis , sub-serrads , sessilibus ; impari hreviter petîolato» Fructibus pedunculatis , nuce sub-depressa , parva , rubiginosa , tenera. Cette espèce qui appartient à la partie basse des des Etats méridionaux , n'y est connue sous aucune dénomination particulière, car elle a été confondue jusqu'à présent par les habitans avec le Juglans por- cina^ quoiqu'elle en diffère à beaucoup d'égards. Le nom d'Hickery des liiaraiis ^ PV^ater lïickeiy y que je lui ai donné , m'a paru assez convenable , parce que j'ai toujours trouvé cet arbre dans les marécages, et très- souvent dans les fossés qui entourent les champs à riz, oii il croit avec \Acer ruhruni^ le Njssa aquci- tica^ le Cupressus disticha et le Populus angulosa. Le Juglans aquatica s'élève de i3 à 16 mètres (^ 4^ à 5(0 pieds J , et son port est en tout semblable à celui des autres Noyers Hickerys, dont il fait partie. Ses feuilles longues de 21 à 24 centimètres [8 à 9 pouces), sont d'une belle couleur verte , seulement composées de quatre à cinq paires de folioles, sessiles et terminées par une impaire pétiolée. Ces folioles légèrement dentées sur leurs bords, longues et étroi- tes, ont environ 10 à i3 centimètres ( [\'k b pouces j de longueur, sur 18 à 20 millimètres (8 à 9 lignes^ -^v^r ^ei ^ JFGLAKS aquatica At^m t K-m^ ' JU GLAN s AQUATICA. l83 à leur partie moyenne, assez semblable d'ailleurs à des feuilles de Pécher. Les noix couvertes d'un brou peu épais et lëgère- ment inégales 5 sont petites, anguleuses, et un peu déprimées latéralement; elles sont rougeâtres et in'îs- tendres. L'amande en est fort amère, et présente comme dans celles du Ju^lans amara , des sinuosités profondes qui la pénètrent de toutes parts. Ces fruits, comme on le pense bien, ne sont pas mangeables. Le bois an Ju^lans aquatica^ quoique participant des propriétés de tous les autres Noyers Hickerys, leur est cependant inférieur sous tous les rapports , attendu qu'il vient dans des lieux très-aquatiques. Cet arbre dont j'ai rapporté des noix en France, pousse vigoureusement, et supporte bien les froids de nos hivers ; cependant je ne crois pas qu'il mérite de trouver place dans nos forets européennes , ni même d'être ménagé dans les défrichemens en Amé- rique. La partie méridionale des Etats-Unis possède d'ailleurs beaucoup d'espèces plus utiles , comme bois de constructions ; car celui-ci , comme ceux de tous les Noyers Hickerys, ne convient en aucune manière à cet usage. PLANCHE V. Rameau avec des feuilles de grandeur naturelle. Fig. 1 , Jioix recouvertes de leur brou. Fig. 2 . noix séparée du brou. I. 2'^. JUGLANS TOMENTOSA, MOCKER NUT HICKERY. JuGLANs tomentosa foliolîs 7 — 9'»% lœviter serratis ySuh- tus conspicuè 2>///osis, ùnpari sub - petîolaio ; anientis compositis y lon^issiniîs ^JiUforniibus , eximiè tomen- tosh, f rue tu globoso Del obîongOy nuce quadrangulà y -crassà durissùnaque. Bans la partie de l'État de New- Jersey qui a voi- sine la rivière Hiidson, ainsi qu'à Nevs^-York et dans les environs de cette ville , cette espèce de Noyer est connue sous le nom de Mocker mit, Noyer à noix moqueuse , et quelquefois encore de FFhite heart Uickery, Hickery à cœur blanc; tandis qu'à Phila- delphie, à Baltimore et dans la Virginie, celui de Comnion Hickerj , Hickery ordinaire , est le seul en usage. Les François des Illinois lui donnent le nom de Noyer dur. J'ai cru devoir conserver la première de ces dénominations, parce qu'elle exprime un des cai actères du fruit de cet arbre, qui n'est véritable- ment pas plus abondant dans la Pensylvanie , et plus au midi , que les autres Noyers Hickerys, comme pa- roitroit l'indiquer le nom qu'il y porte. Vers le nord je n'ai pas observé le Jiiglans tomentosa , au-delà de Portsmoulh dans l'État de Massachussett , quoi- qu'il soit déjà a^sez commun aux environs de Boston et de New-Providence , situés seulement à 100 milles ])lns au sud; enfin il est peut-être plus abondant que j)ai tout ailleurs dans les forets qui existent encore J'I.U SettAolel. tJlIGLANS tomeniosa J U G L A N s T O "Vl i: N T () s A . I 85 dans la partie allanlique des Etats du milieu, ainsi que dans celles qui couvrent les Hantes-Carolincs et la Haute - Géorgie; mais dans ces mêmes États, il est proportionnellement beaucoup plus rare vers la mer, à cause de la stérilité du sol, qui est géné- ralement aride et sablonneux, et par suite peu favo- rable à sa végétation. J'ai cependant remarqué que c'est le seul des llickerys dont on trouve toujours des rejetons dans les Pinières , Pine harrens ; ces reje- tons brûlés tous les ans, ne s'élèvent jamais qu'à 1 mètre (^3 ou 4 pieds j. J'ai fait la même obser- vation en traversant les grandes prairies naturelles, Bi^ harrens , du Kentucky et du Ténessée ; car le Ju^lans tomentosa et le Quercus Jerruginea ^ sont les seules espèces d'arbre qui s'y trouvent dissémi- nées, et qui résistent aux incendies qui presque à chaque printemps, embrasent ces prairies. C'est pro- bablement à cause de cela , qu'en partie arrêtés dans leur végétation , ils ne parviennent l'un et l'autre qu'à 2 ou 3 centimètres (8 ou 10 pieds) d'é- lévation. Comme la plupart des autres Noyers du pays, 011 trouve de préférence celui-ci dans des terreins de bonne qualité, et principalement sur les coteaux à pente douce qui entourent les marais, où il se trouve mêlé avec des Liepidambars, des Tulipiers, des Éra- bles à sucre, des Noyers à noix araères , des Noyers, noirs, etc. Dans de pareilles situations, il atteint son plus grand développement, qui est ordinairement d environ 20 mètres (60 pieds), sur 5a à 60 eenti- l86 JUGLANS TOMENTOSA. mètres ( iSk 20 pouces) de diamètre. Je me ressou- viens cependant d'avoir vu des individus d'une plus grande dimension , près de Lexington en Rentucky ; mais cela tient à l'extrême fertilité de ces contrées , et cet accroissement n'est pas ordinaire , tant pour cet arbre que pour beaucoup d'autres, en deçà des Monts-Alléghanys. Le Juglans tomentosa est néan- moins de tous les Noyers Hickerys, celui qui paroît être le plus susceptible de croître dans des terreins de médiocre qualité ; car , quoiqu il soit d'un^ mau- vaise apparence, et en quelque sorte rabougri, il (hit partie des forets dégradées et appauvries, qui occupent les terreins maigres et graveleux de la plus grande partie de la Basse -Virginie. Dans celte espèce, les bourgeons sont gros, courts, d'un gris blanc et très-durs, ce qui suffit en hiver pour la faire reconnoître , et c'est même à cette épo- que de l'année où les feuilles sont tombées, le seul caractère auquel on puisse alors s'attacher dans les individus qui sont au-dessus de 2 à 3 mètres (8 à 10 pieds) de haut. Dans les premiers jours de mai, les bourgeons grossissent beaucoup , les écailles exté- rieures tombent et les internes persistent; enfin celles-ci se séparent et laissent apercevoir les jeunes feuilles qui grandissent si rapidement, que je les ai vu acquérir 5o centimètres (20 pouces) en dix huit jours : chacune d'elle est composée de quatre paires de folioles sessiles et terminées par une impaire. Ces folioles longues de 16 à 22 centimètres (6 à 8 pouces ) de forme ovale - acuminée , légèrement JU CLANS TO MENT OSA, 187 dentées dans leur contour, sont odorantes, assez épaisses, très -velues inférieurement, ainsi que le pétiole commun auquel elles sont fixées. Dès les premiers froids, les feuilles de cette espèce d Hickery deviennent d'un beau jaune , et tombent peu de temps après. Les fleurs mâles, disposées sur des cha- tons longs de i6 à 20 centimètres (6 à 8 pouces), velus, flexibles et pendans, sont réunis trois à trois sur un pédicule commun, et attachés aux aiselles des premières feuilles des pousses de Tannée, aux extrémités desquelles sont situées les fleurs femelles, qui sont peu apparentes et d'un rose pâle. Les fruits du Juglans tomentosa, sont à maturité vers le 1 5 novembre, ils sont odorans, sessiles ou très- rarement pédoncules; le plus souvent réunis deux à deux. Sous le rapport de la forme et de la grosseur, ils oftrent des différences très-remarquables: dans quel- ques arbres, ces fruits sont parfaitement rands avec des sutures rentrantes; chez d'autres, ils sont très- allongés avec des sutures sortantes ou anguleuses, les uns ont plus de 6 centimètres (2 poucesj de longueur sur 24 à 3o millimètres [12310 lignes j de dia- mètre, d'autres ont moins de moitié de cette gros- seur. Le brou qui conserve toujours beaucoup d'épaisseur, devient dur et ligneux vers l'automne. A cette époque, il s'ouvre inégalement, et seulement dans les deux tiers de sa longueur , pour laisser échapper la noix. La coquille fort épaisse, légère- ment striée , et d'une extrême dureté , renferme une amande douce, mais petite et difficile à extraire l88 JUGLANS TOME NT OSA. à cause des cloisons très-forles qui la partagent; et c'est probablement pour cela qu'on a donné à cette espèce le nom de Noyer à Noix moqueuse. Les noix varient non -seulement dans la configuration et dans le volume, mais encore dans le poids, etcelaàuntel point, qu'on croiroit qu'elles appartiennent à des arbres d'espèces différentes; car quelques-unes de ces noix, sont presque rondes et si petites, qu'elles ne pèsent pas tout-à-fait un gros, tandis que d'autres sont très-allongées, à angles saillans, et si volumi- neuses, qu'elles en pèsent plus de quatre. Lorsque ces dernières sont débarrassées de leur brou , il est quelquefois possible de les confondre avec celles des Juglans laciniosa^ et les premières avec quelques- unes des variétés appartiennent au Juglans porcina. Parmi ces différentes variétés, j'ai fait figurer de grandeur naturelle, celle qui est la plus commune. La grande dureté de ces noix, et la difficulté d'en extraire l'amande, qui d'ailleurs est peu fournie, sont cause qu'on n'en apporte que rarement aux mar- chés. Le tronc du Juglans tomentosa^ dans les vieux arbres , est revêtu d'une écorce profondément crevassée, point écailleuse, très - épaisse , et très- consistante. Son bois de la même couleur et de la même texture que les autres No3^ers Hickcrys , jouit des mêmes propriétés qui rendent les arbres de cette classe si remarquables. Celui-ci est surtout préférable comme com])ustib]e. Pour cet usage on choisit les arbres qui ont de 16 à 20 centimètres JUGLANS ÏOMENÏOSA. I 89 (6 à 8 pouces) de diamètre, parce que lorsqu'ils ont atteint cette grosseur, leur bois donne plus de cha- leur, et comme le cœur qui est de couleur rou- geâtre n'est pas encore développe, on donne alors fréquemment à celte espèce le nom de TVliitc heurt lllckerj ^ llickery à cœur blanc. Dans les campagnes on se sert quelquefois de son écorce pour en ojj- tenir une couleur verdiitre , mais l'usage qu'on en fait est très-limité. De tous les Noyers II ickerys, c'est celui dont la végétation est la plus lente, ce dont je me suis assuré par les semis que j'ai fait des noix de ses diverses espèces, ainsi que par la longueur comparative de leurs pousses annuelles. J'ai cru aussi remarquer que son bois étoit le plus susceptible d'être attaqué par les insectes , et notamment par le callidiimi jle- xuosimi , dont la larve le ronge intérieurement. Ces différentes considérations, sont, je pense , des motifs assez puissans, pour engager les personnes qui vou- dront former de grandes plantations, à donner la préférence à quelques autres espèces que je me pro- pose d'indiquer. PLANCHE VI. Feuille du tiers de la grandeur naturelle. Fig. 1 , noijc revêtue de son brou. Fig, '1 , noix séparée du. brou. F/g. 5 , callidiiiai flexuosuin. JUGLANS SqUAMOSA. SHELL B^RK HICKERY. JuGLANS squamosa ^ foliolis quînis inajoribiis ^ longe pe- tiolatis , ovato-acuminatis , serratis , subtus villosi's , impari sessili : amentis moscuh's compositis , glabris Jîliformibusque : fructu globoso , depresso , majore ; nuce compressa , albâ. La disposition assez singulière qu'offre l'écorce de cette espèce de Noyer, lui a fait donner les noms de Shell bark Hickerj^ de Scaly hark^ de Shag hark Hickery ^ Hickery à ëcorce écailleuse. Parmi ks différentes dénominations , dont la signification est à-peu-près la même, j'ai conservé la première, comme plus généralement en usage dans les États du milieu et du sud. Les descendans des Hollan- dois, qui habitent cette partie du New-Jersey qui avoisine la ville de New- York, lui donnent encore fréquemment le nom de Kiskythomas nut^ et les François des Illinois, Noyer tendre. Les environs de Portland , dans l'Etat de New- Hampshire, sont un des points les plus avancés vers le nord où j'ai trouvé le Juglans squamosa-, mais sa végétation m'a paru y être restreinte par la rigueur des froids qu'on éprouve déjà sous cette latitude ; car il est peu élevé, et les fruits n'y acquièrent qu'une grosseur médiocre. Je ne l'ai pas trouvé dans les forets du district de Maine , non plus que dans celles /■,■...,■„ ,/,■/' J l G L AN s s ijuam i) s a finir, ^.fc 7. JUGLANS SQUAMOSA. IQI de l'Etat de Vermont, situées un peu plus avant vers le nord. Cet arbre est au contraire fort commun sur les bords du lac Érië, près de la Nouvelle-Genève dans le Génesséejle long de la rivière desMohawks; près de Goshen, dans le nouveau Jersey, enfin sur les rives de la Susquehannah et de la Schuylkill, dans la Pensylvanie. Il l'est comparativement beaucoup moins dans le Maryland , la Basse-Virginie, ainsi que dans les États méridionaux. Dans la Caroline du sud, un des endroits les plus rapprochés de Charsleston où je Tai observé , se trouve dans la paroisse de Goose Creek, à 24 milles de cette ville; on le rencontre encore dans les États de l'ouest; mais il y est moins répandu que l'espèce suivante , avec laquelle il a beaucoup de ressemblance, ce qui fait que les habitans les confondent et leur donnent le même nom. A l'est des Monts-AUéghanys, le Juglans squamosa croit exclusivement autour des swamps ou marais, ainsi que dans les endroits très- frais, qui sont souvent exposés à être submergés pen- dant plusieurs semaines de suite. Dans de pareilles situations, il se trouve le plus ordinairement mêlé avec le Quercus discolor , l'Acer rubrum , le Liqui- damhar styracijlua , le Njssa et le Plat anus occi- dentalis. C'est de tous les Noyers Hickerys, celui qui parvient à une plus grande élévation sur un plus petit diamètre , car il acquiert quelquefois 20 à 25 mètres (80 à go pieds) de hauteur, sur moins de 65 centimètres (2 pieds) d'épaisseur. Son tronc dépourvu de branches dans les trois quarts de sa hauteur, est ï» 23 192 JUGLANS SQUAMOSA. d'une grosseur régulière et presque uniforme jusqu'à la naissance de ses premières branches, ce qui en fait un arbre magnifique ; mais ce qui lui donne surtout une apparence singulière et le fait recon- noître tout de suite à une grande distaYice, c'est l'aspect que présente son tronc , dont l'écorce f épi- derme) se divise naturellement en un grand nombre de bandes étroites et longues de 3o à 96 centimètres (1 à 3 pieds), qui sont recourbées en arrière, et ne sont plus adhérentes que par leur partie moyenne. Ainsi hérissé du haut en bas de pointes saillantes, le Juglans squamosa est bien propre à attirer l'at- tention de l'homme le plus indifférent. Cette exfo- liation de l'épiderme qui s'opère d'une manière si remarquable , n'a lieu que dans les arbres qui ont acquis plus de 25 centimètres (10 pouces) de diamètre , quoiqu'elle s'annonce long-temps aupa- ravant par de longues gerçures. Ce caractère qui est très-suflisant pour le faire reconnoitre lorsqu'il est privé de ses feuilles ep hiver, n'existe pas encore dans les sept ou huit premières années de sa crois- sance 5 aussi pourroit-il alors être confondu facile- ment avec les Juglans tomentosa et Juglans por- cina , si on n'avoit pas recours à l'examen des bourgeons. Dans ces deux dernières espèces , et assez généralement dans tous les autres arbres , ils sont formés d'écaillés, étroitement appliquées les unes sur les autres, tandis que dans l'espèce dont il est ici question , les deux écailles plus extérieures îie les embrassent qu'à moitié, et laissent dans la JUGLANSSQUAMOSA. IqS partie supérieure un intervalle très-marqué. Je me plais même à considérer cette disposition particu- lière de ces deux écailles, propre à cette espèce et à la suivante, comme le principe de l'exfoliation de son épiderme. Au printemps, dès que l'action de la sève commence à se manifester, ces deux écailles tombent, les plus internes grandissent con- sidérablement, et se chargent d'un duvet soyeux et mordoré; enfin après un intervalle d'environ quinze jours, les bourgeons qui ont déjà acquis près de 6 centimètres (^2 pouces) de longueur, crèvent, et laissent apercevoir les jeunes feuilles, dont le déve- loppement est souvent si rapide, que dans le cou- rant du premier mois , elles ont acquis toute leur grandeur, qui est quelquefois de plus de 60 centi- mètres Ç 20 pouces) dans les arbres encore jeunes, et dont la végétation est très -vigoureuse. Dans cette espèce, chacune des feuilles est composée de deux paires de folioles , plus une impaire pétiolée : ces folioles sont lisses et d'un vert agréable en dessus, et finement veloutées en dessous; elles sont dentées dans leur contour. Les inférieures sont proportio- nellement beaucoup moins grandes que les deux suivantes, qui le sont presqu'autant que l'impaire Celle - ci a souvent 3o centimètres Ç 1 pied ) de longueur, sur 10 centimètres (4 pouces) de largeur. Comme dans l'espèce précédente, les fleurs mâles qui paroissent du i5 au 20 mai dans l'État de jNe^v- York, sont disposées sur des chatons longs de i3 à 16 centimètres Ç5 aG pouces), glabres, flexibles '94 JUGLANS SQUAMOSA. et pendans ; ces chatons sont réunis trois à trois , et sont supportés par un pétiole commun , qui est attaché aux aisselles des premières pousses de l'année. Les fleurs femelles verdâtres et peu apparentes, sont au contraire situées à leurs extrémités. Les fruits du Juglans squamosa^ sont en maturité vers le i^'. octo- bre; dans certaines années, ils sont si abondans, qu'un seul arbre en donne cinq à six minots. Sui- vant la nature du sol et de l'exposition , ils varient pour la grosseur, qui est assez généralement de i5> centimètres ( 5 pouces et demi) de circonférence; pour la forme elle est toujours la même. Ils sont arrondis, et présentent quatre sutures rentrantes, opposées les unes aux autres, qui indiquent le point où la division du brou doit se faire; car il se par- tage en quatre segmens égaux, qui se séparent entiè- ment les uns des autres au moment de la complète maturité. Cette division totale du brou doit même être considérée avec son épaisseur très-remarquable , et qui est hors de toute proportion avec la noix, comme un caractère particulier aux Noyers à écorce écailleuse. Les noix du Jiiglans squamosa^ sont petites, blanches, comprimées latéralement, et pré- sentent quatre angles marqués, qui correspondent aux quatre divisions du brou. De tous les Noyers de l'Amérique septentrionale que nous connoissons, c'est celui dont les noix, après celles du Pacanier, renferment l'amande la plus douce et la plus fournie; la coquille qui la contient est assez mince, quoiqu'elle soit encore suffisamment JUGLANS SQUAMOSA. IQJ épaisse pour qu'on soit obligé de casser ces noix avant de les servir sur la table ; car elles sont trop dures pour pouvoir être brisées en les pressant l'une contre l'autre dans la main , comme cela se fait ordinaire- ment à l'égard des noix d'Europe, qui, bien certai- nement, leur sont très-préférables. Les noix du Ju- glans squamosa, sont cependant encore assez recher- chées, car elles forment un petit article de commerce, qui se trouve porté dans les listes des exportations des produits du sol des Etats-Unis. Cette exporta- tion qui ne s'élève pas annuellement à plus de quatre à cinq cents minots, a lieu principalement de New^- York et de quelques petits ports duConnecticut, d'où ces noix sont envoyées dans les Etats méridionaux, et dans les colonies des Indes occidentales , quelque- fois même il envient à Liverpool : dans ces difFérens endroits, elles sont connues sOus le nom ^Hickery niits , noix d'Hickery. Ces noix qui se vendent au marché de New-York, environ lo francs (2 dollars ) le minot, sont ou ramassées dans les bois, ou provien- nent des arbres, qui lors des premiers défrichemens, ont été conservés au milieu des champs cultivés. C'est principalement dans les environs de Goshen , Etat de New- Jersey, et dans plusieurs fermes situées sur les bords de la rivière Hudson, 3o milles au delà d'Albany, que j'ai remarqué qu'on a eu cette sage précaution. Les Indiens qui habitent sur les boids des lacs Érié et Michigan, recueillent ces noix pour l'hiver; ils en pilent une partie dans des mortiers de bois, ^gS JUGLANS SQUAM OSA. et font bouillir cette pâte dont ils retirent une ma- tière huileuse qui surnage, et qu'ils mêlent avec leurs alimens. Avant de parler des propriétés du Noyer écailleux, sous le rapport de son bois, je ne puis m'empêcher de faire mention d'une fort belle variété de ces noix, produites par quelques arbres qui existent dans une ferme, situées au Seacocus, près de Snake Hill, dans le New-Jersey. Elles ont presque le double de grosseur de celles que j'ai vues partout ailleurs; la coquille est également blanche et comme bosselée au lieu d'être anguleuse. Un siècle de culture n'amè- neroit peut-être pas les autres au point de perfection où se trouvent déjà celles-ci, qui elles-mêmes étant greffées, augmenteront encore beaucoup de volume. Le bois de Jiiglans squamosa j, possède toutes les propriétés particulières aux Noyers Hickerys, qui sont la pesanteur , la force, l'élasticité et la ténacité ; comme eux il a le même défaut, celui de pourrir très- promptement et d'être attaqué par les vers. Cepen- dantcomme cette espèce s'élève à une grande hauteur, sur un diamètre très-uniforme, on s'en est quel- quefois servi à New- York et à Philadelphie , pour faire la quille des vaisseaux, mais il est rare qu'on l'employé actuellement à cet usage, les plus grands arbres ayant été abattus dans les environs des ports de mer. On a aussi reconnu que le bois de cette espèce se fendoit plus facilement, et qu'il avoit un plus grand degré de souplesse : c'est pour cela que dans quelques cantons de la Pensylvanie , on en JUGLANS SQUAMOSÀ. ig'J fait (les paniers et surtout des manches de fouets de carrosses, fort estimés à cause de leur grande élasti- cité. On en fait même passer un certain nombre de paquets ou de bottes en Angleterre. Cest encore a cause de cette même propriété , et parce qu'il a le grain un peu plus fin, que les tourneurs qui dans les campagnes des environs de INew-York et de Philadelphie, préparent les pièces destinées à com- poser les chaises, dites de Windsor, lesquelles sont toutes en bois, se servent par préférence de celui de cette espèce , pour en faire les baguettes qui en forment le dos. J'ai eu plusieurs fois occasion de remarquer, que parmi les différentes sortes de bois Hickerys , apportées en hiver à New- York pour com- bustible, celui de cette espèce dominoit, non qu'elle soit la plus estimée sous ce rapport, mais parce qu'elle paroit être plus commune sur les bords ou dans le voisinage de la rivière du Nord. Telles sont les usages auxquels le bois du Juglans squamosa^ m'a paru le plus spécialement adapté. Par ce qui a été dit précédemment, on a vu que cet arbre s'élevoit à une très-grande hauteur , et qu'il étoit d'une superbe venue. Je crois donc qu'il doit être introduit dans les forets européennes , et qu'on devra le placer de préférence dans les endroits frais, analogues à ceux oli on le trouve le plus souvent dans l'Amérique septentrionale. Sa réussite sera certaine dans le nord de l'Europe; car il peut sup- porter les froids les plus rigoureux. Je ne connois en France que deux individus de 198 JUGLANS SQUAMOSA. cette espèce de Noyer qui portent des fruits, l'un se trouve à Denainvillier , près Pethivier, dans les possessions de la famille de M. Duhamel du Mon- ceau, et l'autre à S. Germain-en-Laye, dans l'ancien jardin de M. le maréchal de Noailles; mais l'admi- nistration forestière en a dans ses pépinières plus de douze milles plants, qui sont provenus des envois faits pendant mon dernier voyage dans l'Amérique septentrionale. On peut donc regarder dorénavant, la multiplication de cet arbre utile et très * beau , comme assurée dans nos forets. PLANCHE VIII. Feuille composée de cinq folioles. Fig. i , noix revêtue de son brou. Fig. 2 , portion du brou , qui montre sa grande épaisseur. Fig. 5 , noix séparée du brou. Fig. 4 , chaton composé ou divisé en trois .parties , caractère commun d tous les Noyers Hickerys. K têi* 'Ai ài.» F/. 8. JUGLANS lacmiosa. 'sM^cÀy t^-n^r.// /"^a^r t::yL/cÀ€ O Y E K s. :i'2l d'un pouce de diamètre, on en couperoit une partie pour faire des cercles, et le surplus donneroit du bois de chauffage, ou serviroit aux divers usages aux- quels le bois de ces sortes de Noyers est le plus propre. On a dû voir par ce qui a été dit précédemment, que si le bois de tous les Noyers Ilickerys a des défauts essentiels, il a aussi des propriétés fort remarquables qui les compensent, et qui le font rechercher dans les arts. Je pense donc que ces arbres méritent fat- tention des Européens , surtout comme pouvant fournir un excellent combustible ; et quoique leur croissance soit très-lente dans les premières années, il conviendroit néanmoins de les faire entrer dans la composition de nos forets ; mais je doute qu'on puisse jamais y parvenir, si on enterre dans les bois les noix elles-mêmes , car cet arbre même très-jeune, ne souffre que difficilement la transplantation, l'expé- rience ayant appris que quoique dans les quatre premières années, les jeunes brins aient à peine acquis 6 millimètres (3 lignes) de diamètre, sur 34 centimètres (18 pouces) de hauteur, si on cherche à les déraciner, on trouve qu'ils ont déjà des pivots de I mètre (3 pieds) de longueur, sans le moindre chevelu; c'est ce qui fait que de plus cent mille jeunes plants, qui sont provenus d'une grande quan- tité de noix que j'ai envoyées en France pendant mes différens voyages en Amérique, on ne voit presque nulle part de ces Noyers, parce que tous ces plants périssent ou languissent lorsqu'on les transplante 2 22 RÉSUME SUR LES NOYERS. des pépinières dans des endroits plus espacés, d'où ils doivent une seconde fois être enlevés pour être mis en place. Le Noyer noir et le Noyer cathartique, au contraire, dont la végétation est très-accélérée, qui ne pivotent que très-peu , et dont les racines se garnissent abondamment de chevelu, reprennent facilement à la transplantation , même lorsqu'ils ont atteint 2 à 3 mètres (6 à 9 pieds) de hauteur. Je terminerai ce résumé des propriétés des Noyers Hic- kerys, par recommander plus particulièrement l'in- troduction dans les forets européennes du Ju^lans squamosa et du Juglans porcina , et c'est parmi toutes les espèces que j'ai fait connoitre, celles qui, sous le rapport de leur bois, réunissent à mon avis au plus haut degré tous les avantages. Je crois également que le Juglans olivceformis ^ mérite l'attention des amateurs de cultures utiles, non pas à cause de son bois, mais parce que ses noix sont fort bonnes, qu'elles sont plus délicates que celles d'Europe, et qu'elles peuvent doubler de gros- seur, surtout si on parvient à les greffer avec succès sur le Noyer noir ou le Noyer commun ; tentative qui devroit aussi être faite dans les Etats-Unis. *'V*'»(^'VAC*^^^<'^ TABLE. Intbodcction Tableau indicatif des espèces d'arbres qui seronl décrites. Disposition méthodique des Pins et Sapins JPinus rubra . Pinus rupestris. Pinus mitis. . Pinus inops. . Pinus pungens. Pinus australis. Pinus serotina. Pinus rigida . Pinus (céda. . Pinus strobus. Abies nigra. . Abies alba. . yibies canadensis. Pin rouge Red ( Norway ) pine. Pin gris Grey pine Pin jaune YelloiV pine. , . . Pin du N. Jprsey. . . . Jersey pine. . . . Pin delà Montagne delaTablc. Table mountain pine. Pin à longues feuilles . . . Long leaved pine . Pin des marais Pond pine .... Pin à goudron Pitch pine .... Pin à l'encens Loblolly pine . - . Pin de Weymouth, . . , JVhite pine. . . Sapinette noire. . . , • Black (double) spruce Sapinette blanche. . . . While fsinglej spruce Uemlock spruce ..... Hemlock spruce. . , ^bies balsamffera . Sapin banmier yàmerican Silver fir. Introduction à l'histoire des Noyers de l'Amérique septentrionale. Disposition méthodique Jugions nigra. . . Noyer noir Black ivalnut . . . Juglans cathartica. Noyer cathartique . , . . Butler nut . . . Juglans olivceformis. Noyer pacanc ..... Pacane nut, hickery. Juglans amara. . . Noyer amer. ..... Bitternutj hickery . Juglans aquadca. , Noyer amer aquatique. . . fVater bitter nut , hi Noyer à noix moquense . . Mocker nut , hickery Noyer écailleux Shell Bark , hickery, Noyer lacinié Thick shell bark , hick Noyer à porc Pig nut , hickery . Juglans tomentosa Juglans squamosa Juglans laciniosa. Juglans porcina . Juglans myristicce- Sormis. .... Noyer à noix grises . . . Nutmeg hickery nut. Résumé des propriétés et l'emploi dans les arts des bois des Noyers Hickerys ckery ery page I i5 44 4^ 49 5a 58 6i 65 86 89 96 io3 124 i33 145 i5i i55 .57 i65 '7Î ï77 182 184 190 206 21 1 ai3