h (J '9^: A^f»4vr.^'^^;f^ .^ /,4 mmm HISTOIRE DES MALADIES DE S. DOMINGUE, TOME PREMIER. Cet Ouvrage fe trouve A BORDEAUX^ Chez les Frères La Bottier e, A B R E S T ^ Chez D E R R I E N* A C A E N, Chez G. Leroy, Imprimeur. A ORLEANS, Chez M A s s o T. A MARSEILLE, Chez M o s s Y. A MONTP E LLIBR^ Chez R I G A u D. A NANTES, Chez la veuve Vatar 6l Fils. A ROUEN, Chez Abraham Lucas. IPHI c .•/# f4' f^^': 4: HISTOIRE DES MALADIES DE S. DOMINGUE, Par M. POUPPÉ DESPORTES, Médecin du Roi, & Correfpondant de rAcadémi£ Royale des Sciences de Paris, , TOME PREMIER.' A PARIS, Chci Lv jAY, Libraire, rue S. Jacques, au-defTus ©®^îii«nn 'AFERTISSEMENT. : T 'H rs T o îR E des-Maladies de .-1-iSaint Domingue a été peu e*. connue jufqu'ici, & cette matière p étoit encore abfolument neuve, ^ lorfque M. Defportes partit pour^ TAmérique , envoyé par le Roi " dans l'Ifle de Saint Domingue en 1752. A fon arrivée au Cap Fran- çois, où il fixa fon féjour, quoi- qu'il y eût déjà deux Médecins, il commença fes obfervations qu'il a continuées jufqu'à fa mort pen- dant l'efpace de quatorze ans. Elles forment rOuvrage que nous préfentons au Public. On y a joint lin Traite; des Plantes ufuelles de Tome I. ^ a AVERTISSEMENT. rAmérique , avec une Pharmaco- pée ou Recueil de formules de tous les Médicamens fimples du Pays, avec la manière dont on a cru, fuivant les occafions, devoir les affocier à ceux d'Europe ; en- fin un Catalogue de toutes les Plantes que l'Auteur a découver- tes à Saint Domingue, ou qui lui ont paru mai décrites par le Père Plumier , avec leurs noms Fraur çoîs , Karaïbes & Latins. Nous avons encore de M. Def- portes des Mémoires ou Differta- tions fur les principales Planta- tions & Manufa£tures du Pays, le fucre , le café , le cacao , l'indigo, le coton , &c. Nous tâcherons de iie rien laifTer à défirer fur ces articles dans THiftoire naturelle pe Saint Domingue^ que nous efi >^.4BM AVERTISSEMENT. 3 pérons auffi donner. Le but vérita- ble de la Botanique ne fe borne pas à vouloir ramaffer des Plantes, ôc à décrire fcrupuleufement jufqu'à la dernière iibre d'unq feuilIe/Le Botanifte doit être attentif aulli à obferver ce qui peut contribuer' à la perfedion des Arts , & ne point négliger les moindres cir- conftances qui peuvent y concou- rir. Ce font là les intentions du Miniftre jaloux du progrès des Sciences. Les vues fages & phi- lofophiques de M. Defportes fe font remarquer dans tous fes Ou- vrages. On nous permettra d'en faire connoître plus particulière- ment l'Auteur, en rapportant Us traits de/a vie que nous avons pu recueillir. Jean -Baptllle- René Pouppé A i^ 4 AVERTISSEMENT: Defportes naquit à Vitré en Bre^ tagne le 28 Septembre 1704, de René Pbuppé Defportes , Doûeur en ?VÎédecine, ôc de Jeanne Arot de Laîidavran, fille de Jean Arot^ Receveur alternatif des Fouages '&'Taiiles de Vitré ôc de Fougè- res. Sa famille , originaire de la Flèche en Anjou , & établie à Evron au Bas-Maine depuis plus d'un fiécle , a toujours joui de la eonfidération due à Fancienneté & au rnérite. Elle avoit déjà pro« duit quatre Doâeurs en. Méde- cine. M. Defportes fut le cinquié- iTiedefon nom. Lui-même rend compte dans une de fes lettres à M. FAbbé fon frer^, avec qui il a toujours entretenu unejcorref- pondance des plus intime , de la foeoa dont il commença fes étu- AVERTISSEMENT, f des en Médecine. Nous nous fe- rions unfcrupule defupprimerces petits détails. Nous, le laifferons parler. Outre que Ton retrouvée dans leurs lettres les hommes tels qu'ils ont pu être , ce qu'il dit ne fauroit qu'être utile à tous ceux qui fe deflinent à la même Fro- feffion. =3 Je commençai à Paris ^ dit-i! ^ o^ mon cours de Médecine à l'âge ^ d'environ vingt ans. La pretiiiere K> année je lus^ j'écrivis ôc j'étu^ M diai des chofes que, je l'ayoue^ » je ne comprenois guères. J'affif- w tai à des cours publics , dont ja as ne tirai d'autre utilité que celle ç de me familiarifer avec quelques termes qui me paroiffoient bar- bares. L'hiver fuivant , je pris f, les mefures convenables pour Aiij 1 ^6 AVERTISSEMENT, 90 ébaucher FAnatomie. Je n'our y> blierai jamais les bontés qu'eu- yy rent pour moi les célèbres MM. » Duverney & Wincellow ^ qui » faifoient alors les cours publics, » ôc qui voulurent bien m*accor- so der quelques inftruûions parti- M culieres. Je joignis toujours à co^ c» exercices ceux des Ecoles, & M je commençai infenfiblement à 53 en goûter les leçons, 33 fee cours des Plantes qui fe 55 fait Tété au Jardin du Roi, fuc » pour moi une amorce d'autant yy plus flatteufe , que prévenu ea » faveur des fpécifîques , je me w perfuadois que la connoiffance » des Plantes & de leurs proprié^ S5 tés, me conduiroit à la fcience de w guérir toutes les maladies. J'y » fus tout de bons je ni'y livrai de ^.^m AVERTISSEMENT, f »> façon qu'au fécond cours je fa- » vois pour ainfi dire par cœur » tout le Jardin du Roi; je me •» moquois même de quelques 90 camarades qui vantoîenc Tutili- » té de fuivre les Médecins dans 90 lesHôpitauXr Jem'dcarcoisamiî 90 de la véritable route pour deve- 90 nir en quelque forte Médecin. 90 Les inflrudioiis d'habiles Prati- 90 ciens auprès des Malades écanc 93 les meilleures leçons que puifl^e 90 recevoir un jeune Etudiant. Les 93 difcours des Ecoles, fondés le 93 plus fouvent fur des fyftêmes 90 plus éblouiffans que vrais , gâ- 90 tent fouvent auffi plutôt Tef- 0» prit qu'ils ne le perfectionnent* 00 En fe prévenant pour un fyftê- ?o me qu'on époufe , on prend le A iv s ÂP^ERTÎSSEMENT. ^ parti de vouloir alTujettir la na- 3=> ture au fyftême. ^ Je franchis enfin le pas. Je ^ m'attachai à l'Hôtel - Dieu & à ^ la Charité. Quelque rebutant ^ que m'en parût le commence^ ^? ment y quelque grandes que ^ fulTent les difficultés que j'é- »3 prouvai d'abord pour fonder & » connoître îçs diverfes méthodes » que les Médecins employent , 33 je m'opiniâtrai dans la vue que » fi je ne pouvois rien découvrir^ »je parviendrois du moins à me »3 faire au vifage des Malades dans K» les différentes fituations de leurs M maladies. Cette étude ne me fut w pomt inutile; car je parvins ea 33 effet au point d'acquérir ce coup w d'oeil qui détermine un Méde- AVERTISSEMENT. 9 •a cin, ce certain y^ ne fais quoi ^ qu'on apperçoit dans la phyfio- >3 nomie, qu'on fent fans pouvoi* >3 l'exprimer , & en quoi je fais » confifter, pour ainfi parier, la » coup de maître, y^ Pour réufTir dans les vues que »» je m'étois propofées , je me bor- » nai aux maladies qui me paroif- ^ foient les plus confidérabies , ^ marquant le numéro des lit€ , & ^ faifant ma vifite avant & après ^ celle des Médecins. J ecrivois ^5 rhiftoire de chaque maladie, qui » fôuvent nétoit pas longue; oa =» me dirpenfera d'en donner la » raifon. J'affiitois en même temps >3 tous les matins aux opérations »> & aux panfemens. Je lifois l'a- »:> près midi les meilleurs livres de ^ pratique que Boerhaave indique iio AVERTISSEMENT. y> dans fa Méthode d'étudier la Mé- ï» decine. Mais fi j'étois guréri de •p mes premières préventions pour » les fpécifiques , les Plantes* n é- ^ toient pas tellement effacées de w ma mémoire, que tous les étés w fa Botanique 6c la Chimie ne me » rappellaffent au Jardin du Roi ; » car refprît d'obfervation aij lit » des Malades m'avoit fait con- M noître que les remèdes les plus ^ fimples ^ étoient toujours les » meilleurs» Après fix ans d'études & d'affi-" duités à Paris, M. Defportes alla à Rheims fe faire recevoir Do£leur; Il y fit & foutint une thèfe qui mon- îre également les talens de fon eC» prît & la bonté de fon cœur. Elle avoît pour fujet , An vita éC mors mtchanicèfiant. Il la dédia à MM, >-<^HI ArEKTISSEMENT. ii de Juffieu;, donc fpn penchant & fo a goût pour les Plantes lui avoienc concilié Feftime 6c l'amitié. Les talens de M. Defportes le firent bientôt connoître. Son^oût & fon application lui procurèrent promptemenc des connoiffances que d'autres n'acquièrent que dif- ficilement 6c à Taide du temps. Il n'avoit que vingt-huit ans iorfqu'il fut choifi pour remplir les fonc- tions de Médecin du Roi dans rifle de Saint Domingue. A cette qualité il réunit enfuite celle de Correfpondant de l'Académie Royale des Sciences. Ce dernier ti- tre qui lui écoit du fi légitimement^^ lui avoit été accordé en 1738 ; 6c le commerce qu'il entretint après la mort de M. du Fay avec M. Ber- înard de Juffieu^ le lui fie confir nier en 17^5, A ¥J 12 AVERTISSEMENT/ On peu t ciire que M. Defportes i à un goût comme inné pour fa Profeffionj réuniffoit tout ce qui pouvoit former un Médecin ôc un Académicien. Anatoniifte , & me- îi:ie dans î'occafion 5 habile Chi- rurgien;, Botanifte & Chymifte^ il pouvoit en tous genres donner des preuves de favoir, Obfervateur exa£t & eonftant, la nature eût avec peine, ce femble, échappé à fts obfervations» Parmi les fervices réels qu'il a pu rendre à l'humanité , c'eft à lui que l'on doit en quelque farte îe rétabliffement de l'Hôpital du Cap. Il n'y avait pas plus de vingt lits dans THôpital de cette Capi- tale de la Colonie ; on en aug-*, îîienca le nombre jufqu'à cent j & il fut diciTé un règlement; par le- "ArERTISSEMENT. i? quel tout Chirurgien avant d'exer- cer aux Ifles , ferviroit rHôpital pendant un an, non-feulement pour s'inftruire des maladies du Pays 3 mais auffi pour aider aux panfemens , & féconder le zèle des Frères de laCharité* Nous ne pouvons taire un trak particulier de fa vie qui honore à la fois l'Homme & le Médecin. Il eft arrivé que pendant les fréquen- tes allées & venues de nos Efca- dres 5 de cinq à fix Religieux , à .peine en reftoit-il un feul en ét^t de faire le fervice ordinaire. Alors M. Defportes prenoit lui-même le tablier, & deven.oit Hofpitalier & Médecin. Il mourut au quar- tier Morin , Ifle & Côte Saint Domingue, chez M. de Lacombe^ MaJQr des Suiffes, le i$ Février 14 DIVERTISSEMENT. 1 74S y âgé de quarante-trois ans ÔC cinq mois. L'unique ambition qui rempliffoit fon ame, étoit celle d'être utile aux hommes , & de ré-- pondre au choix qu'avoit fait de lui le fage Miniftre (a) qui gouver- noit \qs Colonies, & à la confiance dont il Tavoit honoré : paffion no- ble qui caraaérife le vrai citoyen. Non nobis fed Reipublic^ nati fumus; c'eft la devife cju'il avoic adoptée. L'efîime que Ton con-- ferve encore dans nos Colonies î¥)ur fa mémoire, fait un éloge d'autant plus Batteur qu'il eftplus fincere. {a) M. le Comte de Maurepas ^ Miniilre de la Marine , & Secrétaire d'Etac. On fait quei avantage , quel bonheur il y a d'être gouverne par un Miniftre que la diUance d^s lieux n'en:- ^^z\iç. point de connoître ce '^ui fe pafTe & ce qui convient, « HISTOIRE DES MALADIES Situation de Saint Domingue , & defcrip^ don générale de la partie du Nord: mœurs des Habitans : caufes & indicct-, lions de leurs maladies. *IsLE de Saint Domingiie ,. fituée entre les trois cens trois & trois cens dix degrés de longitude, ôc entre lesdix-huit & vingt degrés de latitude , ell coupée dans toute fa longueur par une chaîne ■■ ï6 Hiflo'ire des Maladies de montagnes , où l'on trouve différentes efpéces de minéraux. De ces montagnes defcendent quantité de rivières ou ruif- feaux qui forment , dans les pluies abon- dantes , des torrens qui entraînent des terres & des fubftances de différente na- ture, qu'ils répandent fur toutes les Eile- res. On nomme Eftcres à l'Amérique , les rivages qui font de niveau avec la Mer bafle > & qu'elle couvre dans le reflux. Les deux tiers de Saint Domingue font Efteres 5 c'eft-à-dire des falines très- boueufes & marécageufes , remplies de Mangles ou ïambes de chien. Le mélange de ces terres & autres diverfes fubftran^ ces abreuvées par mtervailes d'une eau, partie douce , partie falée , fur-tout dans les trous des Crabes, qui fixent leur de- meure dans ces endroits , & dont le nombre qH fi confidér^ble , que dans l'ef- pace d'un pied -cube, on en pourroit compter plus de cinquante plus ou moins grands , fuivant la groifeur de cet amphi- bie : le mélange^ dis -je, de ces fub£- l de Saint Domingue, IJ tances eR comme le foyer & laNmatiere des exbalaifons qui corrompent l'air , & dont l'odeur bitumineufe fait affez con- noître la mauvaife qualité. La grande quantité de Maringuolns & de Moufii" ques , infeaes plus petits que les pre- miers , &: dont la piqûre brûlante lailTe une cuiiïon confidérable , efl auffi une incommodité prefque continuelle dans les habitations voifmes des Eûeres. Ces infeûes n'éclofent que dans las eaux qui font corrompues 5 ou qui commencent à fe CQBfompre. L'humidité excelTive, un air chaud Se brûlant , les exhalaifons putrides de tou- tes fortes de fubftances , nous font alTez fentir quel caradere de pourriture cette atmofphere doit imprimer aux corps or- ganiques des animaux. La multiplication des infeaes efl un figne prefque univer- fel de la conftitution putride dp l'air ; & la plupart des maladies peflilentielles qui régnent dans les étés les plus chauds de l'Europe , font de même annoncées 'î8 Hipire des Maladies par une multitude confidérable ê^e coi animaux. Les corps organifés ne font pas les Juls affeaés de cette difpofmon nuifible de 1 air. Les cadavres fe pourriffent beau- coup plus vîte qu'en Europe; les chairs à^s animaux fe con/ervent bien moins long-temps. Les métaux même nous marquent cette qualité nuifible ôc deL truaive de Fair ; car j'ai oblervé à Saint Domingue ce que Bontiifs avoit Obfervé â Java ; (^uod chalybs ac fenum , tùm œs quoque, ac ex hïs confecla infîrumenU , m- bïgïnem citms au œmgmem contrahant ^ etiam fiuîjjïmâ anni tempe ftate. Air in America adco efficax rodendo , Ut metallaferl omnia con fumât ; ut de aère Bermudenfi Britannï tefiantur, Boerhaav^ Chem. tom, i . de a'dre, M. Gcofroy a obfervé dans Ton Traité de la Matière médicale , que tous les ilics du corps humain tendoient par eux- mêmes à l'alkalefcence , & prenoient très-aifément ce caraûere. Le lait ôc ^âe Saint Domingm. \^ ïe cliyîe contiennent des acides qu'il ell aifé de dévelppper. M. Colbatch, Médecin Anglois , a dé- montré , par la comparaifon dij^lang des gens fains avec celui des fébricitans, qu'il y a beaucoup plus çl'alkali dans le fang de ceux-ci. On en doit de même démontrer davantage dans les corps qui tendent le plus à la pourriture , puifque le fel alkali volatil efl le produit propre de la putré- faction. Si l'expérience démontre toutes ces vérités en Europe , combien plus doi- vent-elles être vraies à Saint Domingue, dans la conilitution de l'air qui eft la plus putréfiante de toutes les conftitiuions ; dans un air chargé des vapeurs ou exhalai- fons putrides des Elleres, qui en font une fource inépuifable ? Combien les corps des hommes , épuifés par TexcefTive tranfpiration , ôc en même temps ouverts par l'humidhé qui les environne , ne doi- vent'il^ pas pomper de ces vapeurs pu- trides , puifque M. Keïl a démontré que ko Hijîo'ire dcÉ Maladies les corps abforboient d'autaiif plus de l'humidité de ratmofpherc , que leur épiiifement eft plus grand ? 11 eût été prefque impoiTibie d'habiter fous la Zone torride, à caufe des cha- leurs exceffives , fi la- fageffe du Créa- teur n'avoit remédié a cet obflack. Dans l'efpace de vingt - quatre heures , deux vents oppofés fe fuccedent régulièrement l'un à l'autre , & rafraîchiiTent Tair. L'un s'appelle Brife , & règne ordinairement depuis neuf à dix heures du matin jiif- qu'à neuf à dix heures du foir. Le vent de terre lui fuccede. Ces deux vents font foiivent interrompus en hiver par les vents du nord qui font très -plu- vieux , & en été par le vent du fud qui efl orageux. . On ne peut guères diflinguer que ces deux faifons à Saint Domingue, & qWqs ne différent abfolument entr'elles quepar ces deux efpéces de vents; les jours ce- pendant étant plus courts de deux heures dans le folflice d'hiver , contribxient à ^.^SÊk dt Saint Domlngue] %t modérer la grande chalçnr. Les habitans faits auclimat regardent le vent du nord comme mal - fain ; celui du fud efl très- pernicieux aux nouveaux venuSa On voit donc que fi le vent du nord perd à Saint Domingue quelques-unes des qualités que lui reconnoiffent les Médecins de l'Europe, (puifqu'il eil plu- vieux &: humide ) au moins celui du fud conferve-^-il toutes fes mauvaifes qualités. La plaine du Cap , oii j'ai fait mes ob* fervations, s'étendant de l'eft à l'ouefl,' & la brife venant régulièrement du nord- cfl ou du nord-nord-ed 5 eft iituée de feçcnji qu'elle doit recevoir , au moins dans l,e5 trois quarts de fon étendue , l'influence des mauvaifes exhalaifons qui s'élèvent continuellement des Efteres. On remarque que ceux qui habitent le long des montagnes , ou dans les monta- gnes , jeuilTent eux & leurs Nègres d'une fanté plus parfaite. Une chaîne de peti- tes montagnes couvre les plus belles plai- nes de Saint Jac^ms , du Çotuy & de la I I 2.2. Hijîoire des Maladies Bcque , que polTécknt les Efpagnols. Uaîf qu'ils refpirent , mais encore plus la fo- briété avec laquelle ils vivent , peuvent contribuer à leur procurer cette heureufe vieilleffe à laquelle le plus grand nom- bre parvient cctfnmunément , tandis que de cent François à peine en trouve-t-on lin de foixante ans» On doit encore ajouter que les Efpa- gnols ne quittent pas , comme les Fran- çois , un air doux & tempér-é , & qu'ainfi la chaleur doit faire fur eux une impref- £on d'autant moindre , qu'elle leur eft moins infolite. De plus , le caraftere lent & pareffeux des Efpagnols femble Teur interdite toutes les paillons qui dépen- dent de l'ambition 5 & dont nos malheu- reux François font 11 affedés. On doit diftinguer en deux claffes les François qui font à Saint Domingue. La première clafTe comprend les naturels du Pays, ou Créols : les Etrangers font la féconde. Les Créols, pour l'ordinaire, font d'un tempégment délicat; pituiteux- ^Hl de Saint Domlngue» 25 mélancolique , ou pituiteux-biiieux. Les Européens étant nés dans la Zone tem- pérée , ont une conftitution plus forte. Ceux-ci ^ font plus fujets aux maladies dans l'été ; ceux-là dans Thiv^, On a coutume de jetter l'épouvante dans les efprits furies maladies qui arri- vent aux liles. En efet, outre la qualité de l'air , qui eil telle que \qs Anciens nous la décrivent, & félon \qs principes phy- fiques , la plus propre à engendrer & â entretenir la putréfadion , la différence des alimens plus groffiers & moins fuc- culens que ceux d'Europe, doit former un chyle & un fang épais , enduire les inteilins de matières gluantes, en raîen-: tir les fécrétions, 6c enfin occafionner des engorgemens & desobftruaionsdans les vifceres où la circulation eil -naturel- lement augmentée , & la qualité altérée par le travail & les débauches. Suivant l'Hippocrate Latin , il fau- droit , pour fe bien porter, s'abilenir des femmes pendant l'été: Fmus mqu^ «^4 Nifloire des Maladies œjlatc , neque autumno utïlïs e(l ; œjiate m totiwi ^fi fieripouft y ahflimndnm. Quel- que faliitaire que puiffe être ce confeil , je doute qu'Hippocrate lui-rnême fe fît écouter aux Ifles , où règne un été per- pétuel , & où tout anime les paffions. Mais de toutes les caufes qui peuvent altérer lafa^nté , on n'en peut pas comp- ter qui concourent plus généralement à Saint Domingue avec l'intempérie de l'air 5-que les paffions de l'ame. Quoique ces paffions foient ^lus ou moins vives dans lei difFérens tempéramens , ce font proprement les mélancoliques dans lef- Guels nous en obfervons àts efFets plus dangereux & plus rebelles aux fecours de- notre art. Les bilieux peuvent pren- dre les chofes plus à cœur que les mé- lancoliques, & faire éclater à l'extérieur plus de paiTion ; mais auffi les paffions ceffent bien plus vite chez eux, & la diffipation procurée par les objets ex- térieurs 5 empêche ordinairement les fuites fâcheufes que le chagrin produit chez de Saint Domingue» 2,ç chez ceux qui en ont long -temps le cœur pénétré. On peut dire en général de toutes les pafîîons qu'on obferve chez les mélancoliques , ce que Boerhaave dit de la colère , ira memof. De plus , fi nous confidérons que de toutes les affedions de l'efprit qui re- gnent dans notre Colonie , les plus ordi- naires fe réduifent à l'inquiétude & au chagrin , nous ferons contraints d'a- vouer que ce font ordinairement ces pafTions qui , par leur adion infenfible far les principaux organes du corps , tour- nent la conftitution en mélancolique ^ qui eft plutôt une dégénérefcence acci- dentelle qu un tempérament naturel Il efl aifé au rede de démontrer quel- les peuvent être les fources de chagrin & d'inquiétude des gens qui débarquent de l'Europe pour habiter nos Colonies. Pour l'ordinaire on ne parle en Europe de l'Amérique que comme d'un pays où la fortune femble prodiguer fes faveurs. Les tréfors dont cette partie du monde' Toms /, ^ ^S ITifiGirc des Maladies eft dépofitaire , font un appas fi fédin- fant , qu'il femble faire méprifer tous les dangers. Le défir de s'enrichir, qui fait partir , & qui devient alors le moteur de toutes les avions , étouffe en quelque forte tout autre fentiment. De-là une in- différence extrême , non-feulement pour les fciences, &: pour tant de merveilles de la nature, qui fe préfentant tous les jours dans nos Colonies , ont été fi long- temps ignorées & négligées , mais même pour tout ce qui ne paroît pas devoir con- tribuer à ce qu'on appelle fortune. Pour réuffir , il n'y a que deux états à choifir , le commerce ou l'art de faire valoir fes ha- bitations. Dans ces états , les foins qu'il faut fe donner , les viciffitudes auxquelles on eu expofé , la crainte &: le chagrin , dé- rangent &: altèrent en peu de temps la conf- titution naturelle , de façon que , quelque .Tobufte qu'elle foit, elle fuccombe bientôt. C'eft ce qu'on a eu lieu de vérifier en deux circonilances qui ont porté de fu- neftes coups à la vie des Négocians ôc de Saint Domlnguc, 2,7 des habitans , favoir dans la guerre décla- rée à rEfpagne par l'Angleterre en 1734 , & dans celle de la France contre l'Angle- terre au Printemps 1743. La première donna à la Colonie la plus belle appa- rence de fortune qu'elle puiffe jamais' efpérer. Les Négocians avoient \qs ports ouverts pour tranfporter aux Efpagnoîs leurs befoins ; les habitans virent leur fucre augmenter du double de fa valeur par l'interruption du commerce des Co- lonies Angloifes. On fe livra en confé- quence à des entreprifes très-confidéra- bles qui n'eurent pas tout l'heureux fuc- cès dont on s'étoit flatté. Beaucoup de gens eurent des maladies de langueur qui fe terminèrent par l'hydropifie , la diar- rhée ou la phtifie. La guerre qui furvint en 1744 changea l'état de la Colonie en rendant le malheur plus général. Le dérangem.ent de la fortune de tous Iqs habitans fut une fuite néceffaire de l'in- terruption du commerce. La valeur des denrées d'Europe augmenta confidéra- B ij i8 ITiftoîre des Maladies blement ; celles du pays diminuèrent à proportion , êc chacun fut obligé de négliger fes affaires pour prendre les armes. Les mauvaifes conftitutions des faifons concoururent avec les fatigues & le chagrin à produire un grand nombre de maladies, qui firent périr plus d'ha- bitans dans l'efpace de trois à quatre ans , que je n'en avois vu périr les dix pre- mières années de mon féjour à S. Domin- gue : ce qu'on verra dans l'Hiftoire des Maladies. L'explication d'ailleurs qu'on peut donner de leurs caufes & des moyens d'en entreprendre la cure, ne peut fervir qu'autant qu'on y joint un continuel exer- cice de la pratique. Elle feule peut faire découvrir les différentes modifications, ies métamorphofes qui arrivent dans^ les mladies, &fouvent dans la même maladie , fmvant les variations du temps, & fuivant les paffions qui agi- tent l'efprit &le cœur de l'homme. C'eft fur quoi on ne peut guères donner de préceptes , parce que ce font de ces lu- dt Saint Dominant. 29 ïhîêres qui ne s'acquièrent que par l'ha- bitude de voir les malades , & que par une continuelle attention à examiner , à obferver les degrés & les proportions des différentes révolutions auxquelles le corps humain , foit en fanté , foit en ma- ladie , femblable au baromètre , eft con- tinuellement, expofé. }^on enim poft ra- tïomm inventa efl Mediclna ; fed pofi Mè- dlcinam quœjita eji ratio, Hecqua (a). (a) La forme que j'ai donnée à mon Ouvrage , comme la feule qui convienne^à une Hiftoire des Conftitutions épidémiqass, a^nécelTiré des redi- tes , parce qu'il cft im.poffible que plusieurs conf- titutions fe trouvant conformes ou prefque fem- blables, on ne répète pas fouventla même cho- fe. Ces répétitions au furplus ont leur utilité , n'eufTent-elles que celle de faire connoître les difficultés qu'on a de développer les véritables caufes des maladies ^ & de fe former une bonne méthode pour les combattre ; comme auiïl de faire connoître combien il efl: important de com- mencer de bonne heure à exammer & à méditer , parce que, quelque longue que puiffe être la vie ^ elle eil encore trop courte pour acquérir tou- B iij 50 milolr& des Maladies tes les connoifTances qui font néceffaires à un Médecin pour être parfait : ars longa , vita bre-- vis. En s'accoutumant dès la jeunefTeàla médi- tation, on a l'avantage de profiter d'un temps que le plus grand nombre perd à de frivoles arau- femens incompatibles avec les réflexions que demande une profeflion aulîi difficile ; eji enîm ers muta ù' cogitabunda. On a la fatisfadion de cueillir, dès le commencement de|*automne des fruits que les autres n'ont jamais celle de voir mûrs. Une joie intérieure encourage & dé- termine à continuer les récherches, & à perfec- tionner des découvertes que l'activité d'une trop grande jeuaefTe avoit empêché d'approfondir 6ç laifTé imparfaites. rnr -ir -,r de Saint Domingue, 31 HISTOIRE DES CONSTITUTIONS ÉPIDÉMIQUES. Conjlitutlon de r Hiver ly^^* J' A R R I V A I à Saint Domingue îe 2 2 Odobre 1732. On faifoit au Cap, Ville capitale de la Colonie-Françoife , des prières publiques pour demander la cefTation des pluies qui avoient été abon- dantes pendant tout le cours de l'année , fur-tout pendant les mois de Septembre & 0£lobre. On me dit que les années 1730 &: 1731 avoient été pareillement pluvieu- {qSj & qu'elles avoient été précédées de plufieurs années fort féches. Dans la dépendance du Cap , les vents du nord , qui ne s'y font ordinairement fentir qu'au mois de Novem.bre , ôc qui Biv 32. Hijîolre des Maladies finiffent au mois d'Avril , commencèrent dès le mois d'Oâ:obre. Ces vents font toujours accompagnés d'un temps nébu- leux ôc pluvieux ; ils n'ont coutume de du- rer que quatre ou cinq jours , & ils inon- dent cette Contrée deux ou trois fois le mois. Ils ont été plus fréquens cette année. Pendant cette faifon ^ c'eft-à-dire de- puis le mois de Novembre 1732 juf* qu'au mois de Mai 1 73 3 , on ne vit qu'un même genre de maladies diverfifiées par difFérens fymptômes , mais dont la caufe me parut la même ; des fièvres intermit- tentes iïmpîes 5 qui dégénéroient très- fouvent en continues, on plutôt, félon Morton , en continentes, qui par leur redoublement indiquent l'affinité qu'elles ont avec les intermittentes. On obfervoit très-fréquemment les double-tierces bi- lieufes,qui font particulières à ce cli- mat , & dont nous donnerons ci-après la defcription. Quoique les fluxions de poitrine foient plus rares à Saint Domingue qu'en Fran- de Saint Domingue, 35 ce ^ caildum peciori amicum ^frîgîdum ini* mïcum , j'en ai peu obfervé dans cette conftitution parmi les blancs ; elles ont été communes parmi les nègres. Plus ex- pofés aux injures de Tair , plus abattus par les fatigues du travail , accoutumés à le baigner encore tout couverts de fueiir , ou à dormir au ferein ou fur la terre , ils doivent naturellement y être plus fujets que les blancs. Au refte ces fluxions de poitrine étoient toutes bilieufes. Je leur ai quelquefois fait prendre Pé- métique dès le commencement ; je dis quelquefois , parce que la grande ardeur & la dureté du pouls , qui accompagnent prefque toutes les maladies de ce pays , font une contre-indication qu'il feroit té- méraire de tranfgreiler. Quand j'ai cru qu'il convenoit de donner Témétique , je J'ai toujours fait prendre délayé dans une grande quantité d'eau de caffe. La manne & l'huile m'ont paru les remèdes les plus convenables ; mais la boifTon que je pref- cris dans cette maladie , quoique très- B V 54 Hijloirc dis Maladies fimpîe , eft de tous les remèdes le plus efficace pour exciter l'expeftoration , & préparer le malade à la purgation. Voici quelle eft la tifane que j'emploie plus or- dinairement. Je fais bouillir dans une pinte d'eau ime demi-poignée d'épinars du pays , amaranihus altïjjimus longl-folius ^fpicis h riridi alhicamibus ; une pincée de bour- geons d'avocatier , pcrfia Clufiu En ôtant la liqueur de defîus le feu , on y met une cuillerée de miel commun , & après l'a- voir paffée , on y ajoute une chopine d'huile. On fait prendre au malade un verre de cette tifane de deux en deux heures. Après l'avoir fait purger & faî- gner fuffifamment , je viens à bout de chaffer la fièvre avec un opiate fait avec î'écorce de citronnier , les yeux d'écre- viffes & une fuffifante quantité de miel* J*ai trouvé à Saint Domingue un anr cien préjugé , dont bien du monde a été la viôime. On y regardoit la faignée dans le rhume comme meurtrkre , & faute de de Saint Domingue. 3 y ce fecours, il dégénéroittrès-fouvent en fluxion de poitrine & en fuppuration. J'ai été quelquefois appelle pour des malades qui étoient tombés dans ce dernier acci- dent 5 & il a fallu faire à plufieurs l'em- pyème. Comme les nègres font plus fjjets aux vers que les blancs , ils ont auiïï coutu- me d'en donner des marques dans leurs fluxions de poitrine. Il eft important d'y faire attention ; &: quoique la plupart du temps on n'en ait que des lignes douteux , j'ai toujours eu foin de mêler des vermi- fuges avec les purgatifs & les tifanes. J'ai mis depuis quelque temps en ufage une tifane , qui eft tout enfemble pe£l:orale , & le plus excellent vermifuge qu^on puiiTe employer à Saint Domingue. Prenez écorce de gommier rouge ou blanc , de fucrier de montagne , coupés par petits morceaux ^ du capillaire ou franc-bann , des fommités de gombo , de la canne de fucre bien mûre, coupée par morceaux , ôc des fommités de pois B vj ^6 Hijîoiu des Maladies d'angole, de chacun une bonne poignée; graine de petit mil, une pincée; faites- les bouillir dans deux pintes d'eau jufqu'à la diminution d'un quart. Quand on aura paiTé la liqueur , on ajoutera une chopine d'huile. On en fait boire un bon verre de deux en deux heures. La colique bilieufe 5c celle de Poitou font très-communes aux Ifles de l'Amé- rique ; apud infulas Carïhum , dit Syden- ham 5 notijjîma efi colica Pïcionum, Ces maladies différent très-peu entr'elles, & elles demandent à peu près les mêmes remèdes. Je fais toujours faigner le ma- lade avant de lui donner l'émétique, & je ne le lui fais prendre qu'après l'avoir difpofé par les bains , les huiles & les la- vemens. Si les douleurs continuent , j'ai recours aux eaux de cafîe, à l'opium & au baume de fucrier , qui a un bon effet dans ces maladies , & que j'eflime autant que le baume du Pérou fi recom- snandé par Sydenham. Quoique le choiera • morbus foit un de Saint Domîngue, 37 fymptôme plus particulier aux maladies de l'été qu'à celles de l'hiver, j'ai néan- moins trouvé quelques malades attaqués de ce fâcheux accident. La violence de ce fymptôme obligeoit d'y apporter un prompt remède. La défaillance , la peti- teffe du pouls , & les extrémités foibles, donnoient lieu d'appréhender que le ma- lade ne fuccombât ; c'eil pourquoi il étoit à propos de répéter les faignées prefque coup fur coup. Alors les liqueurs dé- voyées reprenoient leur cours ordinai- re, &; la fièvre qui furvenoit n'annon- çoit rien de fâcheux. Outre les faignées & les lavemens fréquens, je confeillois au malade de boire fou vent de l'eau de poulet , & de la décodion de chicorée fauvage. Je ne me fer vois d'opium qu'à l'extrémité , & je tâchois toujours aupara- vant de paffer un léger minoratif. Dans la jnaladie de Siam , le cholera-morbus étant l'effet d'une diflblution conlidérable , il étoit un figne pour cefTer les faignées. La djfTenterie , encore plus rare que le 5 8 Hlfloire des Maladies eholera-morbus dans la conftitution d'hi- ver, & plus commune dans celle de l'été , eft furvenue dans Tune & Tautre de ces faifons durant cette conftitution. Pour y remédier , j'ai ordonné les lavemens émolliens , faits avec une déco£^ion de tri- pe & du plantain. Dans ces bouillons j'ai mis les bourgeons de monbin, de grand- couiin 5 triumfetta friiciu cchinato raccmofo ^ PL J'ai purgé le malade avec le tamarin, les mirobolans , & la manne , dans le petit lait; quelquefois j'y ai ajouté le fyrop de chicorée compofé de rhubarbe. Si le mal continue , on a recours au laudanum, au cachou &: au fuccin , incorporés dans le baume defucrier. On prendra pour tifane du bois-marie , calophyllum feu calaha, folio citrïfplmdinte^àw bois de chandelle , faururus tigno duro odoratiffimo , des fom- mités d'Apiaba ou herbe quarrée , me- tiffa quadrangulari caute alnjjzmd , du maïs boucanné , c'eft-à-dire brûlé comme du café, de chacun une bonne pincée , qu'on fera bouillir dans deux pintes d'e^u juf- de Saint Domlngue, 3^ qu'à la diminution d'un quart. Quand le malade commence à fe mieux porter, il ufe de gombo préparé de la manière que je marque dans mon Traité des Plantes itfuelles. Il arrive quelquefois que , quel- que foin qu'on apporte pour réfoudre Tin- flammation qui arrive dans quelques-uns des vifceres du bas- ventre ^ elle fe termine par fuppuration. Quand l'abcès fe forme dans la partie convexe du foie , on gué- rit , par le moyen de l'opération , plus vite & avec plus de fuccès qu'en France. Il paroît en général par ce que nous difons ici , que Sydenham ne s'eil pas trompé , quand il nous a dit que toutes les maladies qui arrivent , pendant une eonftitution , ne différent guères que dans les accidens & dans la différence des par- ties que cette maladie attaque. De plus longues differtations fur les caufes & la cure des maladies , m'ont paru inutiles 5 parce que les écoles , les bons livres & les biôpitaux fourniffent des moyens fufiifans pour s'en inilruire. m I ^0 Hifmn des Maladies Conjlitution de PÉté I/^J. LA faifon pîuvieufe a été fuivie d'une très-féche & très-aride. Le vent de fiid a commencé à fe faire fentir dès le mois d'Avril ; & depuis ce mois juf- qu'à celui de Novembre , il n'y a pas eu de femaine où il ne foit arrivé trois ou quatre fois des orages conîidérables. Dans le mois de Mai, on a vu des maladies d'un genre différent , & dont la caufe m'a paru tout- à-fait oppofée à celle des ma- ladies de l'hiver. Le mal de Siam a mis une infinité d'hommes au tombeau en très-peu de temps ; mais je n'ai vu qu'une femme qui en ait été attaquée. La violence de la maladie a été telle , qu'elle a pour ainfi dire aflbupi toutes les autres, & régné feule. C'eft le carac- tère de toutes les maladies contagieufes & peililentielles ; Sydenham , & avant de Saint Domingue, 41 lui Diemerbroek , l'avoient remarqué de la pelle. Auffi pour fe faire une idée de cette violence , qui d'ailleurs ne chan- geoit rien à la nature des iymptômes , & à la théorie que nous avons établie , il fufîit de faire attention à l'hiftoire que je rapporte ici. H I s T O I R E. Je fus appelle un jour en confultation pour un jeune homnre de trente ans. Jô le trouvai en robe de chambre fur fon lit , & il étoit fort tranquille. Je fentis en l'approchant une odeur cadavereufe ; Je lui demandai s'il venoit de la felle ; il me dit que non , mais qu'il avoit un petit dévoiement , & qu'il rendoit un peu de fang. Ce fymptôme étoit accompagné d'une jauniiTe univerfelle , d'une dou- leur à la partie inférieure du ventre, d'un pouls très-foible & du hoquet. Toute ma confultation fut de lui faire adminiftrer les facremens , & trois heures après il mourut très-tranquîUement. On 42 Hifloire des Maladies me dit qu'il s etoit promené la veille dans la rue. Ejî prudèutis hominis cum qui fer- yari non poufi , non attingerc , ne videatur occidijje quem fors ipfius interemit. Cels, Conjiitutions de t Hiver IJ^^y se de L'Eté se de r River ijj^. JE réunis trois conftitutions dans lef- quelles j'ai obfervé le même cara61ere de maladie. Tout le monde avoit été concerné par la maladie de Siam. On fe flattoit qu'une faifon différente , & dont le commencement paroiiToit heureux , purifîeroit l'air , & diffiperoit la conta- .Çion. On a joui pendant quelque temps d'une bonace trompeufe , & pendant les mois de Novembre & de Décembre il y a eu peu de maladies. Conflitution de P Hiver //JJ. Les vents de nord commencèrent au mois de Novembre, ôc ils ne parurent de Saint Domîngue, 45 que quatre à cinq fois jufqu'aii mois d'Avril. La pluie , qui pour l'ordinaire les accompagne , ne duroit que trois ou quatre jours ; l'hiver par conféquent a été plus (qc qu'humide. Ce changement donna lieu de prëfumer que la contagion, bien loin d'être diilipée , conîinueroit, & pourroit même augmenter Tété fuivant^ In Jîccitatibus f&bus acutœfium & Ji quidem annus pro majoriparu talïs fmrit , quakm fuît conflituùomm > ut plurimîim ttiam taUs morhos expeclarc oportet. Hip, Jph, y, Scci, III. Suivant cet aphorifoie , on ne fut pas trompé. Les maladies qui avoient ceffé l'hiver, reparurent l'été , & cauferentde nouveaux ravages. On vit donc peu de malades les premiers mois de l'hiver 5 & ceux qui furent attaqués avoient dans le commencement les fympîômes qui femblent propres à cette faifon ; mais ces fymptômes fe changeoient bientôt en d'autres plus dangereux & plus funef- tes. Un homme paroilToit attaqué d'une fièvre double-tierce ou continue ordi« 5^4 Hifioiu des Maladies naire , qui ne portoit avec elle aucun mauvais caraftere ; vers le dixième ou le onzième jour de la maladie , il arrivoit un changement fubit ; le malade tomboit dans une langueur coniidérable ; la jau- niffe furvenoit accompagnée pour l'or- dinaire d'un pouls fîafque , d'une douleur de ventre, très-fouvent d'hémorragie & de pourpre. J'ai eu recours aux mêmes remèdes , dont je m'étois fervi Tété pré- cédent ; j'ai pris le parti de faire faigner copieufement dès le commencement de la maladie ; & comme on étoit obligé d'avoir égard à la conftitution d'hiver qui paroifîbit la première, & dont les fymptômes dénotoient une plénitude de matière dans les premières voies, qui fe mêlant avec les liqueurs , contribuoit à augmenter la putréfadion ou diflblution du fang, j'employoîs promptement les purgatifs, & j'y joignois mêmeréméti- que , pourvu que l'ardeur & la féche- re£e du tempérament n'y miflent point d'obflacles ; & c'eil à quoi on ne fauroit di Saint Domingue. 45 trop prendre garde dans les Pays chauds ; trois à quatre verres d'émulfion aiguifée avec une dofe ordinaire d'émétique , quelquefois répétés deux ou trois jours, quelquefois entremêlés d'eau de caffe amere , rempliffoient cette indication. Après avoir donné ces remèdes , j'exa- minoisles mouvemensde la nature , laif- fant le malade au feul ufage des lave- mens , tifanes & bouillons émolliens, & légèrement fudorifiques. Lorfque les lignes de difTolution paroiiToient , une lé- gère teinture de kinkina , dans laquelle je faifois mettre le nitre purifié , la pou- dre à vers & celle de vipères , dans la confeaion d'hyacinthe ^finiflbient la cure de la maladie. H I s T O I R E» Un jéfuite , Allemand de nation, âgé d'environ trente-cinq ans , d'un tempé- rament très-robufte , fut attaqué d'une fièvre double-tierce. Le 5 les accès étant devenus plus violens, je fus le yoir. On j^6 Hifioirc des Maladies Tavolt faigné deux fois du bras , & une fois du pied : on l'avoit aufîi purgé avec les eaux de cafTe. Je trouvai le malade dans un redoublement conlidérable , l'ef- prit égaré , & le pouls très-concentré. Le 7 le redoublement vint de meilleure heure , la langue commença à être feche, & le malade fut agité de mouvemens • convulfiîs ; il ne fentoit d'ailleurs aucune douleur; je le fis faigner du bras. Le 8 ks mêmes accidens continuèrent & augmen- tèrent de façon qu'on le crut agonifant. La langue étoit comme rôtie . les lèvres très-gercées , & les yeux à demi-ouverts. Je le fis faigner du pied , & je lui pref- crivis pour boiffon le petit lait fait avec la crème de tartre , l'eau de poulet , dans laquelle on faifoit cuire de la lai- tue , de la chicorée fauvage , & un concombre avec fes graines pilées. J'em- ployai fréquemment les lavemens émoi- liens , & les potions huiieufes &: vermi- fuges. Le foir je réitérai la faignée du pied. Le p j'ordonnai l'eau de cafie ai- de Saint Domîngue, 4-7 gulfée , avec le fel d'epfom ; le malade ne commença à évacuer qu'après-midi. Tous les Tymptômes étant revenus y je le fis faigner vers les dix heures du foir, J'apperçus que le malade avoit beaucoup de taches pourprées. Je continuai l'uia- ge de l'eau de caffe , qui opéra mieux que le jour précédent. Les 11,12,13, 3 4 &: I 5 , le malade fut toujours dans le même état; mais l'aridité desla langue , fa noirceur , l'inconflance du pouls , tantôt foible , tantôt fort , la continuation des mouvemens convulfifs , l'égarement d'ef- prit, étoient des lignes d'une mort pro- chaine. Pendant tout ce temps , je con^ tinuai l'ufage de l'eau de caffe , & des boiflbns marquées ci-deiTus. La puanteur & la mauvaife qualité des matières que rendoit le m.alade, m'obligeoient à fui-' vre cette indication. Le 1 6 on commença à avoir quelqii'efpérance de guérifon. La langue parut humide ^ les yeux un peu ferelns , &: les urines moins char- gées. Le foir le redoublement étant re- ^8 Hijîoïre des Maladies venu avec les fymptômes ordinaires , le pouls étant fort èc fréquent , je fis faigner le malade du pied , & le lendemain je lui fis prendre trois à quatre verres d'eau de caffe amere. Le i8 nous eûmes lieu d'efpérer une heureufe convalefcence. Le redoublement n'avoit point été con- fidérable , la langue étoit nettoyée , les yeux étoient beaux , & les urines na- turelles. Je lui confeillai d'ufer encore quelque temps de la tifane amere émul- fionnée. Trois ou quatre jours après que j'eus ceffé de le voir, j'appris avec furprife qu'il fe plaignoit d'une vive douleur à la maléole de la jambe où il avoit été le plus faigné , &: que la fiè- vre étoit revenue avec des mouvemens convulfifs. Un trombus , qui avoit pro- curé une légère inflammation à la jam- be gauche , avoit obligé de faire à la ïambe droite les faignées qui étoient devenues nécelTaires depuis cet acci- dent; mais il n'y avoit pas d'apparence que cette douleur provînt de la piqûre d'aucune de Saint Domingue, ^a d'aucune faignée. Le malade étant con- valefcent , je Favois vu fe remuer & fe lever fans fe plaindre de rien. Je con- jeaurai plutôt que ie fang m'ayant paru dilTous dans les dernières faignées , il pcuvoit y avoir dans cqUq partie une difpofition gangreneufe. Ne pouvant al- ler voir le malade, le fieur Lapuyade, Chirurgien , y fut; & après avoir exa« miné cet accident , il me rapporta qu'il avoit trouvé un gonflement confîdérable dans toute la jambe , mais fur-tout à la partie inférieure ; qu'il avoit fenii le ca- nal de la faphene tendu jufqu'au haut de la cuiffe comme une corde, ce qui pro- venoitde ce que îefangétoit arrêté dans ce vailTeau; qu'ayant lieu de croire qu'il avoit abcédé dans la partie inférieure, iî avoit fait une incifion jufques vers le milieu de la jambe ; qu'il en éîoit forti beaucoup de pus; qu'il avoit recom- mandé qu'on entretînt blen__la fuppura- tion , & qu'on appliquât des cataplafmes émoiliens jufqu'au bout delà cuiife.Sur Tome /, Q ^O Hifioire des MaladUs ce rapport, je crus qu'on pourroit fau- ver le malade ; mais nous fîimes trom- pés. On nous marqua que la fièvre ôc les convulfions perfiftoient. Je fus avec le fieur Lapuyade; je trouvai la plaie pan- fée à fec Si ne fuppurant plus , quoi- qu'elle fût encore vermeille , & la jambe & la cuiffe enveloppées de compreffes treépées dans l'eau-de-vie camphrée, ukus autcm Jivc antd fari comigmt ,fivi in morbofiat , difcerc oporut ; fi mm mo- riturus fit homo , anU morum hvidum & ficcum mt , autpallidum & fucum. H,pp. prognofi. Le Chirurgien qui avoit fom dumalade,avoit jugé à propos de ûn- vreune méthode toute oppofee a celle nue lui avoit confeillée fon confrère. La ialoufie- règne dans tous les Pays comme dans toutes les profeffions. Le malade en fut la viaime; il étoit dans un état ou i\ n'y avoit plus de remède ; il mourut trois ou quatre jours après , avec les fympto- nrns du fpafme. Cette obfervatlon eftun. peu longue ; mais les accidens qui en font de Saint Domingue, ^ i \ç fujet 5 méritenî Vaiicnûon des plus ha- biles Praticiens. Con[îitution de l'Eté ly^^. Au mois d'Avril on crut être exempt de ia contagion qui avoit régné l'année précédente. Ce mois , comme celui de Mai, fut très-iec^ôc pendant ce temps on vit peu de malades. Les premiers jours de Juin le temps changea , & les vents de fud cauîerent de grands orages , & durèrent fept à huit jours. Cette viciiFi- tude a fufii pour caufer de nouvelles maladies. Pendant les mois de Juin , Juillet & Août, il y a eu bien des malades à la Ville du Cap , mais il y en a eu très- peu dans la plaine. La Ville du Cap efl fituée au bas d'une montagne qui la couvre du côté du nord & de l'ouefl ; cette Ville regarde la mer à l'eil, & elle efl: bornée au fud par des marais d'une demi- lieue de long , qui fe remplirent dans le flux de la mer. Durant le folilice d'été les marées ne font ^1 Hiflolre des Maladies pas il hautes dans l'Amérique méridionale que durant celui d'hiver ; l'eau n'étant pas alors fi abondante, ni par conféquent dans un fi grand m.ouvenient , doit s'y cor- rompre plus promptement. S'il arrive que Tété foit plus {ec que de coutume , cette eau , l'égoùt de la Ville , &; le tombeau des crabes Ôc des autres infedes de la mer , exhale une plus grande quantité de cor- pufcules infeaés , capables d'engendrer la corruption où ils fe répandent. Si les pluies font abondantes,les terres étant alors inon- dées , les mauvais principes font comme noyés & entraînés par le cours des eaux. Suivant ces remarques , il efl facile de comprendre pourquoi laVille du Cap doit être plus mal-faine en été qu'en hiver ; pourquoi un été trop fec doit être d'un funefte augure pour fes habitans. On doit donc attribuer à la grande féchereffe de l'été les maladies qui ont régné à la Ville du Cap pendant cette faifon ; telles étoienî les fièvres intermittentes & les fièvres double^tierces , qui dégénéroient de Saint Domingiic, e| pour Tordinaire en continues. Les mala- des fe pîaignoient de violentes douleurs de tQiQ , & elles étoient fi opiniâtres , qu'il étoit impofîîble de les calmer : \qs faignées du pied , de la gorge , les remè- des rafraîchiflans , les topiques , les pur- gatifs 5 les véficatoires & l'opium , ne procuroient aucun foulagement au ma- ladeo Oii l'art efl inutile, la nature fe plaît quelquefois à opérer des prodiges falutaires. Le plus grand nombre gué- rifîbit par une innombrable quantité de doux qui fortoient à la tèio, Si à l'exté- rieur du corps , c'étoit un figne cer- tain d'une parfaite guérifon. Ceux qui avoient le ventre libre , étoient plus promptement guéris ; le mal étoit plus opiniâtre dans les malades qui étoient d'un tempérament fec, que dans ceux qui étoient replets. /. Histoire, M. de Lorre , Maître Chirurgien au Cap , d'un tempérament maigre & C iij Ç4 Wftolrc des Maladies robufle , eut une fièvre continue , avec nn violent mal de itiQ. La fièvre dura quinze jours. Lorfqu'eile commença à fe calmer, il fortit par toute la tête une fi grande quantité de petits doux, qu'à peine auroit-on pu placer entr'eux la tête d'une épingle. Tous fuppurerent, ôc ii fut parfaitement guéri. //. H I s T O IRE. Un homme de trente ans fut attaqué d'une fièvre tierce dont les accès étoient confidérables. Quand j'arrivai, le mala- de étolt mort ; le Chirurgien me dit qu'il ' n*avoit paru aucuns fymptômes fâcheux, qu'il lui avoit fait deux faignées du bras 6i une du pied , qu'il l'avoît purgé deux fois avec deux médecines fort douces, 6c mis enfuite à l'ufage du kinkina. Je le fis ouvrir ; nous trouvâmes tout le foie gangrené. Tandis que les anciens habitans du ^ Cap étoient affligés par ce genre de ma- ' ladie /les nouveaux avoient un fort en- de Saint Domlrigue, 55 core bien plus trifle. Le mal de Siam reparut , & fît périr pins de la moitié des marins. A quoi attribuer le prompt effet d'une corruption qui en vingt-quatre heures précipitoit au tombeau ceux qui en éîoient attaqués ? Mais quelque générale qu'ait été cette contagion, les Matelots en ont été, pour aind dire , les feules viâiimes. Exténués, accablés de fatigues , dépourvus de tout fecours , abandonnés entre les mains d'un jeune Chirurgien peu appliqué & fans expérience , la plupart font morts man- que de fecours. Les maladies ayant celTé au Cap vers la ^n d'Août , elles fe répandirent dans la plaine. L'inflamm.ation des inteftins , le cholera-morbus , la colique de Poicouj la dyfurie , & la paiïïon hyilérique , fu- rent les maladies les plus communes. In Jiccitatibus ankrindes, urinez (lillicidia ^ & dyfint crics, Hipp* Aph, \G^ S cet AIL C jv 5 6 Hifiolre des Maladies lîl. H I s T O IRE, Un homme de trente-cinq ans ayant une fièvre aiguë avec vomiffement & dé voiement , m'envoya chercher. Il avoit déjà été faigné , & on kû avoit donné une légère eau de caïïe. Je le trouvai très-froid , prefquefans pouls, les yeux égarés. Je lui ordonnai le thé, l'eau de poulet , & de prendre le foir un grain d'opium dans un demi'gros de thériaque. Les accîdens continuèrent ; le lendemain on réitéra les mêmes remèdes , & je ns augmenter la dcfe d'opium. Le 5 plu- fieurs des accidens étant calmés , & le, foir le pouls étant fort & très-fréquent , le malade fut faigné du pied, & je lui fis prendre le lendemain quelques verres d'eau de cafTe qui firent cefler la fièvre. Quoique les Pays chauds foient plus favorables à la délicatefîe des femmes que les Pays froids , & que la vie tran- quille qu'elles y mènent, contribue beau. coup à les entretenir dans une fanté plu$ de Saint Domîngue» sij parfaite que les hommes ; elles fontnéan- moins fujettes à reiîentir les impreiïions d'un climat qui demande un tempéra- ment plus fort , & différent de celui des Européens. Les femmes vieiîlifTent à S. Domingue bien plutôt qu'en France. Leurs évacua- tions périodiques fîniiTent à un âge moins avancé que dans les Pays froids; & dans cette révolution elles elTuient de dange- reufes maladies, La molleffe du tempérament des femmes, qui fait qu'elles ont une moins abondante tranfpiration qne hs hom« mes 5 eil' reconnue par plufieurs Médecins pour la caafe générale des menflrues. La tranfpiration étant plus abondante dans les Pays chauds , il efl donc naturel que les femmes Yoient moins réglées, & que leurs règles ceffent de meilleure heure. Le défaut de férofité contribuant à ren=- dre les fibres de la matrice moins flexi-- blés, la cefTation des menfîrues doit j être très - préjudiciable à la fanté. Uo 5 8 H'ijloln des Maladies fang dépourvu d'une fuffifante quantité de limphe, doit être moins fluide; ôcû ce fang, qui a coutume de trouver une iffue par la matrice , y trouve trop de réfiftance , il s'y engorge , &: produit de fâcheux Tymptômes. Ces accidens ont du être plus fréquens à la fin de l'année 1734. îe temps ayant toujours été très- fec. Aufîi eft-ce l'année où nous avens plus vu de femmes malades; & prefque toutes fe rencontroient dans le cas^ de la celfation de leurs règles , qui auroient pu couper pied à la maladie , fi elles avaient eu foin d'en prévenir les fuites par les remèdes convenables. H I s T O I R E, Une femme d'environ quarante ans,. d'un tempérament robufte & fanguin ,êut une fièvre double-tierce , accompagnée dans les accès ou de délire ou d'une efpece; d'afroupiiTement^d^ailleurselleétoitpref- que fans pouls & froide. En la levant, elle s'évaaouiiToit, Bc reûoitprès d'ui^ de Saint Domîngue. < 9 quart d'heure en cet état. Sqs fréquens bâillemens me firent juger qu'il y avoit de la vapeur : elle avoit été faignée du pied y & on lui avoit fait prendre quel- ques verres d'eau de cafTe aiguifée avec le fel d'epfom. Je fis faire un opiat avec le kinkina , i'aloës, la mirrbe , le fafran de mars apéritif, le fel d'abfynthe &: la teinture de cafloreum. On en donnoit un gros de fix en fix heures à la malade. Dès le lendemain la fièvre & les acci- dens ceiTerent. La tifane dont je me kts ordinaire- ment pour les femmes hyftériques , ell une eau minérale artificielle , faite avec une poignée de vieux doux bien rouil- les , & un gros de fel ammoniac qu'on fait infufer pendant vingt-quatre heures dans deux à trois pintes d'eau. Je fais quelquefois bouillir dans cette eau des racines d'herbes à bled , d'afperges, d'herbes à chiques ; pittonia ramo (ijjimct vihurni foliisyfiore albo ; de pois-puant , cajjia fœtïàa y folïis fmnœ y non ercaa ; des C vj ^O Hifioire des Maladies fommités d'avocatier, perfea Cluf. &de liane à calçon , paffî-flora feu grana^ dilla, Conjluutlon de Œ'iver ly;^^.. Le premier nord commença vers la fin d'Odobre : depuis le 1 5 de Janvier jurqu'aii mois d'Avril , k temps fut plus- froid que de coutume, & prefqu'aufli froid qu'il l'eft ordinairement à Paris au commencement d'Avril. Pendant les mois d'06:obre , Novembre & Décem- bre 5 j'ai remarqué dans le peu de m.ala- dies qu^il y a eu , la même conflitution que l'hiver précédent , avec cette diffé- rence 9 que les fièvres & les autres fymp- îômes n'étoient pas généralement fi vio^ lens. Les mois de Janvier , Février & Mars 1735, ont été, non - feulement très-fereins , mais même plus froids qu'ils n'ont coutume d'être. Les vents d'eil , nord-eft & nord ,. ont toujours régné fans pluie pendant ce long efpace de temps : aufli en a-t-on refîenti.debons ei^ets. Il de Saint Domîngm, Si tïy^L prefque pas eu de maladies. On n'a vu que quelques rhumes & quelques flu- xions qui n'avoient aucuns fympîômes fâcheux. On efpéroit qu'une faifon û avantageufe contribueroit beaucoup à changer la conflituîion qui avoit paru dominer depuis près de deux ans , &C que l'air purifié de fes mauvaifes qua- lités, fer oit déformais falutaire aux ha» bitaris & aux étrangers. Conjtuudon de TEtè iy^3. Les mois de Mars , Avril & Mai , n'ont €té ni trop fecs ni trop pluvieux. L'al- ternative qui a régné pendant cette fai- fon a été très-avantageufe pour la fan- té ; on doit attribuer plutôt aux eftets d'un mauvais régime qu'au caradere d'une conftitution mal-faifante , les ma- ladies qu'on a vues pendant cette fai* fon. L'ophtalmie, ou l'inflammation des yeux 5 a été la feule qui ait paru dépendre du vice de l'air. Si aqiàlonius & jim plu^ ^lîs fmrit autumnus , fccis, temperamênth I 6i Hiftolrc des Maladies trunt ophtalmiœ, Hlpp, Aph. 14 , Seci, ÎIL Quoique Fophtatmie foit commune dans les quatre parties du monde , elle a de- particulier dans les climats de la Zone torride , qu'elle fait de grands pro- grès en très-peu de temps; & pour peu qu'on difFere d'y remédier , on eu bien- tôt la vîdime de fa négligence. Le fang engorgé dans les vaiffeauxde la conjonc- tive & des autres membranes de l'œil , fur-tout de la choroïde & du ligament ciliaire , déchire les petits vaiiTeaux par fa qualité acre ôc corrclive , & occa- iionne àts taies , abcès & glaucomes, pour l'ordinaire incurables. Il arrive mê- mQ très fouyent que cette acrimonie , qui efl comme naturelle dans les habitans des Pays maritimes & marécageux , parti- cipe de la contagion vérolique. Ceux aux- quels on s'étoit trop prefîe d'arrêter le cours d'une chaude-piffe , & dans qui , par le retour du fiux vénérien , on ne ve- noit pas à bout d'en extirper les racines > ont paru être les plus fujeîs à l'ophtalmie* de Saint Domlnme, L H I s T O I R E, 63 Un jeune homme d'un tempérament ÎQC , étant attaqué d'une ophtalmie , fut faigné deux ou trois fois inutilement. On employa fans fuccès les purgatifs hydra- gogues , les coUires , les véficatoires & le féton. Il s'ell formé une taie 5 & les liqueurs fe font épailîîes , de façon qu'il ne paroît aujourd'hui ni prunelle 5 ni cornée îranfparente. IL Histoire, Une femme de quarante ans ayant été faignée dans la même maladie huit à neuf fois 5 tant du bras que du pied & de la gorge , & ayant ufé de bouillons , tifa- nés & purgatifs anti-fcorbutiques , a été •parfaitement guérie. II L Ri s t o I r e. Un Jeune homme fort débauché qui avoit la même maladie ^ ufoit 3 fans md é4 Hijloire des Maladies eiFet, des mêmes remèdes. Je fonpçonnaî qu'il avoit eu une chaude-piffe qui avoit été mal guérie; il me l'avoua. Je le mis à lufage des bains , des lavemens & des boiiibns émollientes. La chaude-pifîe re- parut auffi-tôt ; & à mefure que l'ëcou- lement augmentoit l'ophtalmie paroifToit fe diïïiper. Cette maladie efl [vulgaire- ment appellée Fluxion. On emploie in- diitéremment ce terme pour marquer toutes les maladies extérieures défignées par les noms de Rliumatifmes êc de Ca- tarrhes. On y eft fort fujetdans les Ifles , fur-tout depuis Novembre jufqu'en Fé- vrier. La grande fraîcheur des nuits , le peu de foin qu'on a de s'en, garantir, & la coutume de fe promener ou de voyager dans le temps qu'il tombe une grande abondance.de ferein, concourent à rendre ces maladies fort communes. Bontius a fait les mêmes remarques dans fes excellentes Obfervations ds NLedh- clnâ Indorum, , Juin j Juillet 3, Août , Septembre 6c Oc- de Saint Domingue, 6 1 tobre, ont été aulTi tempérés que les mois précédens : il y a eu très- peu d'o- rages. Pendant les deux autres mois de l'année il y en a eu de très-vioiens. Les fièvres tierces & double-tierces ont été les feules maladies qui ayent régné du- rant cette faifon. Elles ont eu de parti- culier que \qs malades étoient fort long- temps à fe rétablir. Conflitution de, I^ Hiver iy;^J^, Vers la fin d'O^obre on eut un nord qui dura près de trois femaines , & c'efl le feul qu'on ait eu jufqu'en Février. Les mois de Novembre, Décembre &: Jan- vier, fe font écoulés fans qu'il foit tombé de pluie, & la chaleur a été prefqu'aiiffi vive que dans la canicule. Les orages ont continué comme dans le folftice d'été ^ ce qu'on n'avoit jamais vu. Qu'il me foit permis de rappeller au Leaeur les caufes principales que nous avons rapportées ci-devant , ^ la def- cription que nous ayons faite de la fitua- 66 Hifioire des Maladies tion de la Ville du Cap Ô^ de fes envi- rons ; cette attention eft d'autant plus néceffaire , qu'à ï\x lieues de la Ville , du côté de l'efl , on jouifloit d'une fanté parfaite , pendant que le Cap & tous fes environs étoient infeclésde maladies. Le territoire du Fort. Dauphin n'a été plus fain, que parce qu'étant fablonneux &. plus élevé , il a dû être à couvert des mauvaifes exhalaifons que produit la dif- pofition d'un terrein marécageux. En général , cette année a été plus aride que les précédentes. Pour peu qu'il tombe de pluie dans le cours d'une telle année 5 cette petite quantité ne doit fervir qu'à augmenter la corruption. La mabdie de Siam a donc régné avec fureur pendant les mois de Novembre , Décembre & Janvier ; elle a même été accompagnée de fymptômes plus vio- îensque les années précédentes. Comme les hiftoires rapportées dans le traité par- ticulier que j'ai fait fur cette maladie , dépendent 5 îpour la plupart ^ de cette de Saint Domingiie, 67 conflltution , j'y renvoie le Ledleur. Pendant le cours de c^itQ falfon , les maladies ont été aufli fâcheufes pour les femmes que pour les hommes , fur- tout pour celles qui étoient grofîes ; pUifieurs ont eu de faniTes couches ,011 des accouchemens très-kborieux. Elles étoient , pour Tordinaire , attaquées de fièvres double-tierces , qui devenoient continues, fi on le laiiToit furprendre par une fauiïe apparence d'intermifTion. Vers îe neuf ou le onze de la maladie ^ il teibrmoit une inflammation au foie ou. aux inteflins , d'autant plus incurable qu'elle s'étoit formée lentement. Si la malade étoit grolTe , on devoit appré- hender une fauffe couche , d'autant plus commune, que dans les Pays chauds tou- tes les parties fe relâchent plus facile- ment que dans les climats tempérés. H I s T O I R E. Une femme d'un tempérament très- replet 6c bilieux ^ eut j dans fon fixiéme 6 s Hijloire des Maladies mois de grofTeiîe , une fièvre doubîei tierce qui au troifiéme accès devint continue. Au commencement de chaque redoublement elle avoit des vomiffemens qui duroient quatre à cinq heures. Je la fis faigner les huit premiers jours cinq fois du bras. Je lui fis ufer pour boifTon d'une eau de calTe aiguifée de fel d'epfom. Le délire étant furvenu , je la fis faigner deux fois du pied, La fièvre ne fe calma qu'au bout de dix-fept jours ; elle devint alors double-tierce. La malade guérît parfaitement, & accoucha au terme de neuf mois d'Orne fille qui parut n'avoir reçu aucune imprefiion de l'état où s'é' toit trouvée la mère. Conjlitution de tEti ly^C L'été de 173^ a été tout- à- fait diffé- rent des précédens. L'air a prefque tou- jours été ferein pendant cette faifon ; & à l'exception des pluies & de deux à trois orages qui font arrivés pendant Juin , depuis Avril jufqu'en Octobre on \ de. Saint Dom'ingue, ^g n'a pas entendu dix fois le tonnerre. La malignité ne m'a pas paru auffi générale. Les fièvres continues ou continentes , dont nous avons déjà fait mention , ont été les maladies les plus communes, &c il n'y a eu que très-peu de malades atta- qués de fièvres peililentielles. J'ai attribué en partie les maladies précédentes au rétabliflement de la Ville du Cap. Les deux tiers de la Ville ayant été confumés par un incendie à la fia ie 1733 , îes habitans ont dans l'efpace ie deux ans rétabli les maifons. Les terres p'on a remuées pour faire ces édifices , l'humidité des murailles nouvellement induites de chaux , ont du remplir la ^ille de vapeurs. Quelque pernicieufes qu'elles aient pu être , elles n'ont ce- pendant pas été au/Ti funeiîes oue celles les fréquens orages. Confiltuùon de V Hiver ly^ C, Après un calme & une féchereife de [uatre mois y le premier nord parut yo' B'iftoire des Maladies vers la mi-Odobre , & dura deux à trois jours. Un mois après , il en vint un autre qui dura peu de temps , & qui fut fuivi d'un temps très-iec. Ce temps perfifta jufques vers la fin de Janvier , où la fai- fon changea de façon , que nous eûmes , pendant près de_quinze jours de fuite, des pluies qui furent accompagnées , au commencement de Février ,• d'orages affez violens , ce qui eft fort extraordi- naire dans ce mois. Depuis Novembre jufqu'en Janvier , l'air fut très'frais. Les fluxions ou catar- rhes furent alors très-commams , &: les enfans fujets à des maladies vermineufes & à des fièvres continues. Les femmes eurent des accouchemens très-laborieux , & accompagnés de fuites très-fâcheufes. Plufieurs , vers la fin de l'année , furent attaquées de fièvres pourprées , prefque femblables à celles qu'on voit alTez fou- vent en France. Les habîtans des pays chauds font encore plus fujets aux catarrhes que ceux de Saint Domîngue. n j des tempérés. L'alternative du chaud & du froid arrêtant ordinairement trop fii- bitement la tranfpiration , doit occafion- ner des engorgemens dans les parties ex- térieures. Les oreilles , les yeux & les dents font pour l'ordinaire le fiége de ces reflux. Je fais fouvent appliquer \q% véficatoires derrière les oreilles , & fur l'os occipital; j'en ai toujours obfervé de bons effets. Les enfans furent attaqués en plus grand nombre durant cette faifon. Au relie les maladies des enfans font du même ca- radlere que celles qu'ils ont en Europe : je n'y ai remarqué d'autre différence que la difficulté de les purger. Il faut très^ fouvent avoir recours à l'émétique. La manne , la rhubarbe & la poudre corna- chine même, ne produifent pour l'ordi- naire aucun effet. Nous avons obfervé beaucoup d'ac- couchemens laborieux &: de fuites de couches fàcheufes. Les fymptômes de ces 72 Hljîo'in des Maladies accidens malheureux paroîtront par le détail de l'hilloire fuivante. H I s T O I R E, Une Dame ayant accouché fort hen- reufement , elle perdit connoiiTance fix heures après la couche , la langue devint épaiffe , les vuidanges fe fupprimerent , le ventre fe gonfla ÔC devint douloureux. Elle étoit depuis quatre heures dans cet état, lorfque je fus appelle. Je la fis fur ie champ faigner du pied. Les convul- fions fe mirent de la partie ; la matrice devint d'une dureté confidérable. Trois heures après je fis faire une féconde fai- gnée du pied très-copieufe , 3c appliquer fur le ventre des fom.entations eu cata- plafmes avec l'abfynîe fauvage , le pois- puant &c la verveine -puante qu'on ût bouillir dans parties égales d'eau & de vin blanc. On les renouvelloit de trois en trois heures , & on donnoit à chaque fois un lavement de la décoction des mêmes herbes. Je n'ai jamais tant eu lieu de de Saint Domingm. y, àe défefpérer d'un malade que de cette femme-là. Outre ces accidens , elleavok la rate très-gonflée depuis pkifieurs an- nées , un vifage très-boufE & plombé , des jambes très -enflées, tous fignes avant- coureurs d'hydropifie ou de diarrhée. La malade paflk la nuit dans un état d'agonie. le la trouvai le matin un peu moins agi- tée, la langue bégayante, le ventre tou- jours gonflé , tendu & douloureux. Je la fis encore faigner du pied, & lui fis tirer au moins quinze onces de fang. Quatre heures après cette faignée,Ies vuidanges commencèrent à paroître, & augmen- terent peu à peu , de manière que dans vingt -quatre heures tous les fâcheux fympîônies ceflcretu. Au bout de huit jours nous purgeâmes la malade avec dedouxhydragogucs, & on les lui réi- téra fept à huit fois. Cette Dame étant menacée depuis trois à quatre a.s d'hydropîfie , en étoit en quelque façon garantie par les accou- chemens , dans lefqtiels elle rendcit uns Tome I, T-j 47J. Hifioirc des Maladies prodlgleufe quantité d^eaii. Dans ceîuî. ci elle n'en rendit prefque point, & ce fiit fur ce fondement que je pofai la mé- thode dont je m€ fuis fervi avec fliccès dans cette maladie. Les fièvres peftilentielles qui ont re. gné vers la fin de l'année, ont paru d'a- bord un peu différentes de celles des conflitutions précédentes. Quelques ma^ lades ont eu à la vérité des fymptômes femblables à ceux de la maladie de Siam ; mais dans le plus grand nombre , le pré- lude ne fe trouvant pas fi violent , ih tomboient dans des accidens un peu moins confidérables, mais pour la plu^ part auffi funefles par leurs fuites. Nous avons remarqué que dès que la fièvre ceffoit , il paroifToit beaucoup de pourpre ; que le plus grand nombre des malades étoit attaqué de vives douleur^ de tête dès le commencement , & qu'a- vant ou après la mort ils rendoient beau, coup de fang par le nez. Pendant la vio- Jence de la fièvre, ils fe plaignoienî mÊÊÊÉÊÊÊÊÊÊÊ di Saint Domingue, y^ beaucoup de cette partie ; & lorfque la fièvre fe calmoit , la douleur ceffoit ; mais^ eu égard à la douleur qui avoit précédé, on pouvoit augurer une hé- morragie par le nez ou les oreilles. La maladie a fait fentir dans quelques per- fonnes des efFets de malignité vers les parties inférieures. On peut attribuer ce changement à la grande féchereffe qui a régné pendant le cours de cette année. L'air fec con- tribuant beaucoup à refferrer toutes les parties du corps , le ventre a dû être moins fufceptible de relâchement , &c le venin contagieux par conféquent plus difpofé à s'élever & à fe fixer vers les par- ties fupérieures. C'efl à la même raifon que j'attribue la moindre quantité de diar- rhée. En effet, depuis près de deux ans nous n'en avons vu qu'un très-petit nom- bre ; mais à fou défaut l'hydropilie a pris la place. Aqullonlœ conjîitudones cor- pora compïn^iint & rohujîa efficiunt , aU vos Jicçant ; aufirlniQ vero corpora dif- «5 H'ifioîrcdes Maladies folvunt 5 & alvos humeSant, Aph, ly , ScU^ II L L Histoire. Un jeune homme de dix-huit ans i d'un tempérament vif & Tanguin , fut attaqué d'une fièvre violente , accompa- gnée de douleur de tête & de reins ; on îe faigna deux fois du bras , & quatre fois d^ti pied très-copieufement ; le trois la fièvre fe calma , & il parut un com- mencement de jauniffe. On lui U ufer pour boiffon d\me légère eau de caffe , qui lui fit évacuer beaucoup de matières bilieu- fes. A la fin du 5 de la maladie , les ma- tières parurent noires. Le 6 il lui furvint une hémorragie confidérable par le nez, qui dura fept à huit heures ; il mourut le foir. IL H I s r o I R E. Une femme de trente ans fut attaquée d'une fièvre continue , qui ne fut précé- dée ni de froid , ni de vomifTement. Elle fe plaignoit feulement de la tête &: des reins. Je la fis faigner du pied , &: réiti- ^â& Saint Iboininguù ^ ttt îa même faignée dans le jour. Je lui prefcrivis de fréquens lavemens & des boiflbns fort légères. Le 3 il furvint des envies de vomir; le pourpre parut 3 & la fièvre continua jufqu'au 4. Le pouls d'ailleurs étoit foible & fréquent. J'em- ployai la poudre de vipère dans les bouil- lons , la confe£tion alkermès, le fel d'ab- iinthe , & la poudre à vers ; je fis mettre du fafran dans la tifane. Le 4 la malade fe plaignit d'une grande opprefiion , ce qui me détermina à îa faire fa igné r du bras* Le 7 elle urina le fang , &: le bas-ventre devint douloureux. Je lui fis appliquer fur le ventre àts catapiafnTes flilîs avec les plantes hyflériqucs ; le 8 les règles parurent , & elle fut guérie. Nous avons vu pendant cette faifod peu de malades parmi les habitans de îa plaine. La férénité de l'air en a dû être la caufe. En q,'R^\ , nous avons toujours obfervé que les faifons pluvieufes étoient fatales aux anciens du Pays ^ fur-tout quand les pluies étoient de longue durée^ D iij 78 Hljîôln des Maladies Il a fuccédé aux pluies de Février mi vent des plus violens , qui a continué pendant près de quinze jours» Conftïtuùon de VEte n2>7* La faifonfrorde , qui dura jufqu'au 15 de Mars, fut fuivie d'un temps chaud Ô£ orageux , qui continua jufqu'à la fin d'A- vril. Le tonnerre ne fut pas cependant fréquent , fur-tout les derniers quinze jours d'Avril. Depuis le commencement de Mai jufqu'à la fin de Juin , le temps fut toujours pluvieux , le vent tantôt au nord , tantôt au fud. Cette vicifîitude efl extraordinaire dans cette faifon» Les mois de Juillet , d'Août & de Septembre , fu- rent très-chauds. On eut peu de pluie & d'orages pendant cette faifon. Les fluxions ou rhumes , les coliques de différentes efpeces, furent les maladies qui régnèrent pendant Mars & Avril. Le changement fubit qui arriva à la mi- Mars, occafionna dans plufieurs fujets une ré- volution ou fonte fubite , qui fiit accom-s ÉMÉMUÉ % Saint Domînguel, i§ j^agnée de fymptômes très -fâcheux ; tel fut le catarre fufFoquant. D'ailleurs les fymptômes les plus communs furent de violens rhumes de poitrine , des diar- rhées , des furdités , de vives douleurs de tête , des ophtalmies , & des coli- ques. Les coliques de cette année furent plus aiguës & plus opiniâtres que celles des années précédentes ; j'en ai remarqué cette année une efpece différente de toutes celles que j'ai ohfervées , & dont je ne crois pas qu'aiicun Auteur ait par- lé. Je l'appelle colique vérollque , parce qu'elle attaque ceux , ou qui ont une go- norrhée , & dont la diminution de l'écou- lement fait foupçonner que îe reflux du virus affede les inteftins , ou qui de- puis peu de temps en ayant été maltrai- tés 5 ont le malheur d'en reffentir les fâ- cheufes fuites par les douleurs les plus aiguës. Quoique cette efpece de colique paroifle avoir les mêmes fymptômes que la colique de Poitou , ôc qu'elle de- D iv So H'ijîoin dis Maladies mande le même traitement, elle a àé particulier qu'ils font plus violens , qu'ils durent plus long-temps, & qu'il faut; pour en extirper les racines, un plus long ufage de purgatifs & de fomniferes. Il ne convient au furplus d'avoir recours aux narcotiques dans cette efpecc de colique ^ qu'après avoir réitéré les pur- gatifs pendant plufîeurs jours , afin d'é/- virer un plus long féjour du virus dans les vifceres du bas-ventre» /. Histoire. Une femm^ de cinquante ans , d'un tempérament replet , robude , fanguin, pituiteux , & fujêtte aux vapeurs , tomba tout'à-coup dans un accès de fièvre qui ne fut caraQérifée que par un frifîbn îrès-long, auquel fuccéda une très-lé-^ gère chaleur , &: un pouîs fort peu éle- vé : la malade fut toujours très-affoupie. Il furvint une légère moiteur; on profita de l'intermifîion pour faire deux faignées du piedj qui ne parurent être abondati* de Saint Do mlngue» g^ tes que par rapport au trop d'embon- point de la malade ; & elle £t ufage d'une tifane royale, dont on aiguifa le premier verre d'une demi-dofe d'éméti-: que. Ces remèdes foent peu d'effet. Après huit heures de calme, on vit re- commencer les premiers accidens , qui augmentèrent au point que la refpira- tion devint très-gênée, le vifage œdé- mateux, les extrémités froides; & i| Survint une falivation û abondante , que la malade mourut comme fuffoquée. Les véficatoires , les potions volatiles , les îavemens irritans , le kermès minéral ^ & l'émétique , ne produifirent aucun effet. Dès le commencement de la maladfe ^ îe vifage étoit bouffi & d'un pâle clair ^ le pouls concentré & très-petit. Ces deux fignes fuffifent pour faire diffinguer cqUq^ Bialadie de lapoplexie fanguine, ou du fommeil léthargique procuré par une inflammation du cerveau ; le vifage^' dans ces maladies jetant toujours rouge .,, 82 Hifidre des Maladies les vaiffeaivx de la conjon£live enflam^- més, le pouls élevé &: très -fort. On au- roit effayé de faire la faignée de la tem- porale ou de la jugulaire ; mais dès le commencement du fécond jour il pa- rut des fignes d'une agonie certainei IL Histoire. Un homme d*un tempérament ro* bulle & fec , étoit attaqué depuis plu- fieurs mois à\mQ gonorrhée, pour la guérlfon de laquelle on avoit employé tous les fecours de la Médecine ; l'écou- lement néanmoins perfîiloit d'une coit- leur tantôt blanche, tantôt jaune ou ver^ te. 11 furvint une colique , dont les dou-- kiirs étoient fort aiguës : après plus de quinze jours d'ufage des remèdes appli- qués inutilement , & la plupart mal-à- propos , le malade fe ât tranfporter au Cap. La gonorrhéecouloit alors très-peu. Je fis baig'ner le malade foir & matin pendant trois jours ; il prit de fréquens lavemens avec la caffe bouillie dans de 2c Saint Domingue, ^3 Peau de mer. Après cette préparation , îlufa pour boiffon pendant quatre jours, d'une tifane royale , compofée avec k féné , la cafTe , le Tel d'epfom , la chico- rée fauvage & le creflbn dans une pin^ d'eau. Cette tifane le faifoit aller huit à dix fois. J'y fis ajouter dans chaque verre douze grains de poudre çornachine. Le foir du cinquième jour il prit deux grains d'opium , qu'on redoubla deux heures après , par rapport au peu d'effet des premiers. Cette dofe calma les douleurs , fans d'ailleurs procurer le fommeil. Les douleurs étant revenues, on retourna à l'ufage des purgatifs, auquel fuccédoit alternativement celui de l'opium^ afin de procurer da foulagement pendant la nuit. Après huit à dix jours de cette al- ternative , on s'en tint à celui de l'opium y qu'on ^i continuer quatre à cinq jours ^ & qu'on accompagna de la tifane fudo- rifique. On termina la cure de cette ma- kdie par le lait coupé, qu'on fît pren- dre pendant plufieurs femaines au mu-« D vj. g4 Hijioire des Maladleé iade , qui eut le honheivr d'être parfaite^ ment guéri de la colique & de la gQr norrhée. Depuis Avril jufqu'à la fin de Juin , que cefTerent les pluies , il y eut très - peu de maladies, Uabondance des pluies , qui tombèrent enfuite pendant deux mois> contribua à rafraîchir l'air ^^ à laver les terres , de manière qu'on eut lieu d'en bien augurer pour la fanté des habitans dans la faifon fuivante. En effet , non- feulement l'été, mais même toute l'année a été une des plus faines qu'on ait encore Tues à Saint Domingue. Les habitans de la plaine ont été malades en plus grand nombre que ceux du Cap, ce qui arrive ordinairement après les faifons pluvieu- fes ; mais leurs maladies avoient le ca- radere d'une fimple fièvre putride , fans aucune apparence de malignité. Le caraûere des maladies de cette conflitution a eu departiculier qu'il étoit très-facile de relâcher le ventre des ma- lades 5 & même fi facile :, qu'il falloit une de Saint Domingue, f ^: circonfpe^iion extraordinaire , lorfqu'on jugeoit à propos de purger un mabde, fur-tout ceux , ou qui avoient le ventre naturellement très-libre , ou qui étoient d'un tempérament replet. Quoiqu'on doive apporter cette attention dans tous les temps , on doit fur-tout l'avoir pen- dant la faifon de la canicule, fur-tout Ibrfque cette faifon a été précédée d'ura temps très-pîiivieux , comme il eil arrivé cet été; car je n'ai jamais été plus em- barraffé dans l'ufage des purgatifs que pendant cet efpace de temps. Il étoit étonnant de voir qu'une once , & mê- me une demi-once de manne , fuffifoit pour l'ordinaire , & faifoit aller douze ou quinze fois les malades. Il falloit mê- me quelquefois en arrêter l'effet par une potion cordiale , ce.qui arrivoit fréquem- ment aux tempéramens replets , à l'égard defquels on ne fauroit trop prendre de précaution , par rapport à la grande dif- pofuion qu'ils ont dans les climats chauds à ce qu'on appellç/o/z/ê d'hummrs, Auffi s 6 îlifloire des Malaiks ïie pent-on trop recommander dans Ce Pays Tufage des purgatifs en lavage, c'efl-à-dire en dofes réitérées : par ce îTîoyen on ed maître de purgerun ma- lade fiiivânt fes forces. C'efl à la grande facilité qu'on"a eite cet été de relâcher ks fibres des^ intef- tins, qu'on doit attribuer l'heureux fuc- eès de la Médecine dans la cure du vtidX de Siam. Quoique cette maladie ait été Eioins commune cqHq année que les précédentes, elle a toujours confervé fon titre de maladie endémique. Elle a eontinué d'attaquer les nouveaux venus , dont plufieurs nous ont fourni dès ob- fervations Intéreffantes inférées dans la defcription de cette maladie. J'ai obfervé qu'après de longues & abondantes pluies, les fièvres tierces , double-tierces & continues , ou plutôt continentes, éîoient les maladies les plus communes, dont la caufe étant un re- lâchement ou ramoliiffement des folides ^ des fluides 5 n'occafionnoit quedefisn- ^dt Saint Domingue. S7 pîea engorgemens. J'ai aiiiîl remarqué qu'il y avoit alors moins de maladies eontagieiifes , &; que le contraire arri- voit lorfqir'iî tomboit ài^s pluies en pe- tite quantité^ & qu'elles étoient précé- dées épuîs Avril jufqu'à la fin de Juin ^îî eft tombé de petites pluies deux ou trois fois par fem.aine , fans orage. Juillet & Août ont été très-fecs , &: tes brifes ont été très-fortes pendant ces mois. Depuis le 30 Aoùtjufqu'au 15 Septembre ^ on a eu deux petits nordsv Hiver /73 d'efclaves , on devoit plutôt l'attribuer au peu de foin qu'on en avoit , qu'à la 96 îïifîoire des MaladUi malignité de la maladie & à la violenté des fymptômes. H I s T O I R E. Je flis appelfé îa nuit pour une femme très - replette , grofîe de quatre mois y qu'on avoit faignée deux fois du bras , & qui étoit dansie cinquième jour de la riia- ladie ; j'obfervai une petite vérole con- fluente , dont les puftules avoient peine à fortir. La gorge étoit fi enflammée ou furchargée du levain variolique , qu'elle ne pouvoit refpirer. Je fis appliquer un fort emplâtre véficatoire à la nuque du cou y pour détourner la matière morbifi- que 5 Se lui donner jour. Les emplâtres tirèrent abondamment, les fymptômes diminuèrent; & la petite vérole étant bien fortie , la malade n'eut befoin que de gargarifmes &c de tifane. Lorfque l'éruption des pufiuîes eft abondante aux jambes des Nègres , on doit y faire beaucoup d'attention , parce jqu'ayanr la peau des pieds fort dure $c ^dc Saint Domînguél çî' fcâf tïïagîneufe , il fe fait entre cuir & chair une fuppuration où les vers ont coutume de s'engendrer. Les enfans, comme c*^eil: îa coutume,' furent les plus infedés de cette maladie ; mais elle n'étoit dangereufe que quand îa fîcvre vermineufe paroiffoit l'accom- pagner. Je me fuis toujours fervi avec fuccès dans cette occafion de kermès mi- néral grain à grain , mêlé dans de l'huile d'amandes douces, ôc de la poudre à vers en bol ou dans la tifane. Plufîeurs ont été attaqués de maux de gorge avec fièvre , ce qui donnoit lieu de craindre la petite vérole , fans qu'elle furvînt. La violence du mal m'a fouvenî obligé de recourir aux véficatoires. J'ai toujours obfervé un bon effet de ce re- mède dans les maladies où t'engorge- ment des vaiïïeaux lymphatiques paroif- foit avoir plus de part que celui des vaiffeaux fanguins. Lorfque je m'apper- çois que îa fuppuration n'eft pas aflez abondante j, JQ la fais entretenir avec l'on-? Çt mjloire des MaladUi giient bafilicon , auquel je fais joindre cïé la poudre de cantharides. On eut un nord en Décembre depuis îe 1 1 j ufqu'au 1 8 . Il revint le 2 5 , & dura trois jours. Le temps flit enfuite fec & frais jufqu'au i 5 de Mars , otile vent de nord reparut , & fit pleuvoir pendant iXQis jours. Confîitutïon de VEté jy2>9* Le temps fut ferein & fec pendant Avril , Mai , Juin ^ Juillet ; il rfy eut que fix à fept orsgês dans la plâinê. Us furent plus fréqucns vêr^ ks montagnes» îl n'y en eut point jufqu'à la fiti de Sep- tembre. La mortalité des beiliaux a été grande pendant cette confliîution ; ce qu'on peut attribuer à la grande féchereiTe Si à la grande quantité de chenilles que le peu de pluie faifoit naître. Les nègres des habitations présides montagnes , ont été fort fujets aux fièvres continues vermi- neufes j aux fluxions de poitrine 3 aux de Saint Domingue, ç | inflammations du foie & des înteftins. Depuis k premier Août jufqu'en Odo- bre, il n'y a prefque point eu de mak- des. Confiitutïon de t Hiver f ^jc/. Le vent du nord a prefque toujours continué. Depuis 1732 on n'a voit point eu de faifon {1 pluvieufe ni auiîi ora- geufe. Elle a été d'autant plus mau- vaife , qu'elle a fuccédé à un été très-fec & très-aride ; d'où s'en eft fuivi une conûitution d'un caraûere différent àçs précédentes. • La Ville du Cap a été la première qui aîtifcflenti les effets d'un tel changement. Les fièvres double-tierces , & quelques maladies de Siam , ont paru pendant Oc- tobre. La douleur de tête , l'affoupiffement & le flux de ventre , ont été les fymptô- mes les plus communs dans les fièvres double - tierces. Les parotides ont été très- fréquentes , fur- tout dans la mala- i 94 Hlfio^re âcs Makdus die de Slam. Je n'ai point vu de fai. fon cil cette maladie fe foit davantage terminée par abcès , fiir-tout aux jam- bes &: aux glandes parotides ; leur maturité étoit fi prompte, qu'il falloit les ouvrir au bout de deux ou trois jours. La plupart des parotides fe diffipoienl: par le flux de ventre. J'ai obfervé dans quelques fujets des retours alternatifs de parotides & de flux de ventre ; c'eft-à-dire que le dernier fe calmant , la parotide reparoiffoit. L'ouverture de ces paroti- des étoit infruaueufe. La furdité les pré- cédoit, & en étoit- un figne pronoftic. On ne doit regarder ces dépôts co#me critiques que lorfque la fièvre cefTe ou fe calme. On peut alors efpérer. Il con- vient même d'en prévemr la fuppuration par l'ouverture , de crainte que cette ma- tière d'une qualité peflilentielle , ne crou- pifl'ant trop , ne produife une trop gran- de putréfadion , &: une métaflafe fuivie de fymptômes fouvent plus mauvais que de Saint Domlngue, p^ ceiîx qui ont précédé : mais fi après la nailTance d'une parotide, la fièvre per- fide , l'opération eft inutile ; il n'y a que l'ufage des purgatifs qui convienne. En effet, les parotides fuppurent rarement dans ce cas , & elles ont coutume de (q terminer par réfolution. On tâche de la procurer par les cataplafmes émolliens & réfolutifs , & par le flux de ventre. h&s bilieux m'ont paru plus fujets à cette crife que les autres tempérament. On a d'ailleurs affez bien réuffi , peni dant cette faifon , dans la cure de la nialadie de Siam ^ des fièvres double- tierces. Les habitans de la Plaine ont eu le fort de ceux de la Ville; mais les ma. kdies n'ont été dangereufes qu'à ceux dont le tempérament étoit inféré de quelque vice fcorbutique ou vérolique. Quoique la diarrhée ait été très<:ommu- ne, plufieurs fujets dont le tempérament €toit naturellement refTerré, ont été at- taqués d'efquinancie , de tumeurs & de ç6 Bifloin des Maladies parotides fcorbutiques ou véroliqueSç auxquelles fut\enoit une gangrené fi prompte &: fi confidérable , ^u'on ne pouvoit reuiîir à en arrêter le cours. Le vent de nord a prefque toujours ^ régné pendant cette faifbn , & on n'a vu ;aucun mois fe paffer fans orages, Conflïtution de CEti 1^40-. Depuis le 20 Mars jufqu'à la fin d'A- vril , la température a beaucoup varié ; il a fait très-chaud vqts la fin du mois , mais le ciel a été fort ferein. On a eu pendant Juin fept à huit violens ora- ges. Juillet & Août ont été fecs, peu orageux, parce que les brifes ont été fortes. Outre les maladies d'hiver qui ont X continué pendant cette conftitution , & qui ont été plus mauvaifes, eu égard à îa chaleur & au temps qui a été moins pluvieux, la petite vé-^ole a été très- conuîiune , fur-tout pendant Mai & Juin. Plufieurs de Saint Domlnguei q^ Plufieurs Nègres ont été attaqués ea Avril d'efquinancies & de fluxions da poitrine. Les fyniptôraes de la maladiî de Siamétoient très-conformes pendant le mois de Juin à ceux qui avoient paru durant l'été 1733. Les faignées fe rou- vroient, & la gangrené furvenant aux extrémités , étoit le dernier fig„e d'une Diort prochaine. Conftimion de l'Hlyer lyAo, On eut un nord très-confidérabîe le 12 Septembre; il dura quatre à cinq jours, & les pluies tombèrent pendant trois. Un pareil nord revint le 20 d'Oc- tobre & les pluies durèrent fix jours. Elles furent f,>ivies jufqu'au ij de No- vembre, d'un temps calme & fans brife. Les pluies d'orages ne loœberent que vers les montagnes. Le temps fut enfuite frais, & lesbrifes fortes. Le 20 on eut un nord; le vent perfifta à venir, tan- tôt de cette partie, tantôt de l'efl, jus- qu'au mois de Mars : ce qui procura d^ Tome 1, £ g§ MifioiK des Maladus temps en temps des pluies qui duroîent deux ou trois jours ,6c un temps tres- f-ais , qui fut cependant interrompu en Janvier durant dix à douze jours par ^ temps mou, humide & orageux. Lesbrifes ordinaires reparurent a la fan de Février , & continuèrent pendant Mars. , , , ■J'obfervai dans les fièvres doub.e- i-erces un caraftere particulier. La plu- part commençoient par fièvres commues, & n'avoient les fignes de double-tier- ces que vers le 8 , le lo & le i2v Ceux oui avoient le flux de ventre fuoient peu; quelques-uns avoient des taches pourprées & des hémorragies. Ces der- r.iers fymptômes indiquoient une com- pi;cation de double-tierce ôc defievre inal.iene. Le flux de ventre, qui quel- auefois affoibliflbit trop le malade , obh- geoit d'avoir recours aux cordiaux, ô£ le les mêler avec les purgatifs. Le km- Hna de Saint Domingue, qui eft moins .mer que celui du Pérou , m'a paru de Saint Domîngue, ocj mieux réuffir clans cette conflitution que dans aucune autre, fur- tout dans les fiè- vres qui traînoient trop en longueur. Cette conflitution a ététrès-mauvaife pour les fcorbutiques & les véroles; beaucoup ont fini par la diarrhée ; quel- ques-uns par lapulmonie Se par l'hydro» pifie. Un grand nombre de ces pauvres qu'on appelle Frères de la Cofle , anciens dans le Pays, & infedés de {çiorhv.i ou de vérole, a péri par la diarrhée, mais fur -tout par \qs ulcères aux jambes , auxquels ces pauvres font très- fujets 5 étant obligés de marcher . nuds pieds. Ces ulcères devinrent pendant cette conflitution comme Fégoût de tout le venin , U d'une fi mauvaife qualité , que dans Fefpace de douze ou quinze jours les chairs fetrouvoient livides ba- veufes , fongueufes , & fi corrompues , que les os fe dépouilloient même de leur périofle , & fe carioient promptement. Si on coupoit la jambe de ces malades , ils pé- rlffoient plutôt , parce que la diarrhée qui E ij ICO Hijloire des Maladies furvenoit ne donnoit pas le temps à la fuppuration de s'établir. Cette confiitution fiit fort dangereufe pour les fejnmes groffes &: en couche* Piufieurs furent attaquées de fièvres dou- ble-tierces accompagnées & fuivies de fâuffes- couches , ou de fuppreflion de YuidangeSc /. Histoire. Une femme en couche , d'un tempé- rament, replet & pituiteux , fut attaquée , deux jours après fa couche , d'une fièvre double-tierce fans vomifTement , oc ce- pendant accompagnée d'un fi violent mal de tête , que pour le calmer , le Chirur- gien lui appliqua fur les tempes m em- plâtre de bétoine garni de trois à quatre arains d'opium. Huit à dix heures après , fa malade tomba dans un fommeil lé- thargique y & la fièvre augmentant , les vuidanges fe fupprimerent. J'attribuai ces fymptômes à l'effet d'un remède ap- pliqué très-mal-à-propos. Ayant faitôter de Saint Domlngue, i^% fës emplâtres , j'eus recours aux bouli- Ions laxatifs, aux lavemens Sccataplaf- mQs émolliens. Le ventre , qui étoit au- paravant très-refTerré , fe lâcha , & les vuidanges reparurent iorfque la iîevre commença à s'appaifer , ce qui a cou- timie d'arriver à la plupart des femmes en couche , & Iorfque les règles ac- compagnent cette maladie. C'efl pour- quoi il ne convient point de précipiter la faignée du pied, ^ on ne doit la faire que quand les régies ouïes vuidan. ges ne reviennent point à la fin de l'accès, ou que revenant elles ne font pas aiTez abondantes ; ce que les fymptômes qui furviennent ou augmentent font con- noître. Souvent il fuffit de féconder la nature par les remèdes émolliens & lé- gèrement apéritifs. Ils procurent une éva- cuation d'autant plus favorable, qu'é- tant favorifée parla nature, elle efl beau- coup plus efficace & plus falutaire. Ainfi on ne doit fe déterminer à la faignée du pied que dans le cas où Tobilacle paroîc E iij 102. Hijloirê des Maladies trop difficile à furmonter , & où nu ccni« mencement de douleur dans la matrice annonce une difpofition inflammatoire. //. Hl s T O I R E. Une jeune femme d'un tempérament îrès-bilieux &: délicat , fut attaquée , fur la fin de fa groff^ife , d une fièvre que les deux premiers accès firent juger tierce. On la faigna deux fois du bras; Elle accoucha le 4 fort heureufement. Elle eut pendant la nuit un léger reflen* îiment de fièvre qui fe diffipa le matin vers les onze heures. Un friffon fuivs de concentration, d^ pouls j ds foibleiTe & de violens vomiiTemens , déclara un grand accès, qui fut d'autant plus con« fidérable, que le cholera-morbus fut de la partie , & que les premiers fymptô- nies perfiilerent jufqu'au foir , où les grandes foiblefTes obligèrent d'avoir re- cours à un peu d'élixir de Garus dans du thé. Il ne parut que des fueurs froides & peu abondantes. Pendant cet afiaut, les 2i Saint Domingue: îbj Viûdanges diminuèrent fans qu'il parût d'interruption. Le pouls fe développa pendant la nuit; la chaleur revint fans ardeur. On calma l'altération de la ma- lade par une légère limonade : elle n'eut qu'une légère m.oiteur ; elle pafîa la jour» née du 6 fort tranquillement ^ & les vui- danges furent abondantes. Le foir le pe- tit accès commença par de la cllaleur 5 & fut plus fort que le précédent. Il n'y eut le matin qu'une légère remiPiion indiquée par une foible moiteur. Vers les onze heures le grand accès fut précédé ôc ac- compagné de tous les fymptômes du cinquième : ils furent même plus vio- lens , de façon qu'on jugea la malade à l'extrémité : on eut recours aux mêmes remèdes & aux épithêmes. Les déjec- tions m'ayant paru extrêmement abon- dantes, très-bilieufes & fétides, je pris le parti de hafarder une once de manne & vingt-quatre grains de fel végétal qui firent aller fept à huit fois , fuivant les vues que je m'étois propofées. Les vui- E iv ÎC4 EiÇioin dis Maladies danges continuèrent & parurent fuiS- famment abondantes pendant cette opé- ration. La fièvre revint à l'ordinaire , & elle parut plus confidc-rable ; il n'y eut qu^ane remilTion très-foible. Le grand accès fe joignit ou commença à ie con- fondre avec le petit, de façon qu'il ne fut point accompagné de fâcheux fymp- îômes. Le pouls fut toujours développé ; la malade fut feulement plus agitée après- midi ^fe plaignant beaucoup de l'eflo- mac & d'une grande altération. Il n'y eut ni concentration ni foibleife : elle fut plufieurs fois à la felle , & rendit des matières très-bilieufes ôi ïévA^s. Les vuidanges ne furentpôint interrompues : cet accès perfifta une grande partie de la nuit, & fe termina par une fimple moiteur^ où la malade ne mouilla qu'une chemife. Je fis réitérer le matin le même remède , qui eut un bon effet. Le 1 1 il ne parut que le petit accès , qui fe pro- longea de façon qu^il n'y eut aucune crace du grand , & qui ayant continué di Saint Domîngue» io% vingt-quatre heures, fe termina par ^me légère fueur. Le 13 l'accès fut moindre ; & le 17 il n'en parut aucun veflige. ^ On jugera par ce traitement comment il convient de k comporter dans pareille circonflance ; de quelle conféquence il eft de ne rien précipiter & de fuivre les mouvemens & efforts que fait la nature , afin de les féconder dans la juile propor. tion qu'elle paroit indiquer. ^ En cas de fuppreffion, je ne me ferois déterminé à la faîgnée du pied qu'après l'application àQs cataplafmes & l'ufaçie des bains. S'ils n'euiTent pas fait un bcn effet, j'euffe eu alors recours à ce re- mède, que la qualité des fymptômes qui précédoient & accompagnoknt les grands accès , rendoit fort dangereux. Vers la fin de Janvier & pendant Fé^ vrier,lescatarres, Jes fluxions de poi- trine, les douleurs d'oreilles, les mi- graines, &: différens rhumatiimes , fu- rent les maladies régnantes. Les cnï'àns y forent plus fujets , ceux fur-tout dont E V log Hlftolre des Maladies les dents commencoient à percer , ce qui leur donnolt des accès de fièvre affez vio- lens, mais qui n'étoient pas dangereux chez ceux qui avoienî le ventre libre. Conftltution de P Eté 1741 • Le mois de Mars a été très-fec , tan- tôt chaud , tantôt froid „ fuivant que les brifes étoient foibles ou fortes. Le 6 d'Avril , les vents fe fixèrent au nord , & y perfifterent dix à douze jours. Il tomba cependant peu de pluie , qui fut encore moindre à la plaine, parce que les vents du fud commencèrent à domi- ner vers le î 5 de ce mois par quelques orages foibles; il leur fuccédade fortes trifes , qui continuèrent le refte de ce jnois. En Mai les brifes fe calmèrent', & le temps fut très-orageux & très- chaud. Pendant cette conflitution, la plupart de ceux qui étoient attaqués de mauvais ukeres, de diarrhée, périrent par des abcès au foie ou à la poitrine. 3'attnbuat la caufe d'un reflux auffi particulier à la d& Saint Do min gtie, j^j' révolution fubite de la chaleur, qui , ra- nimant & rétabliffant tout-à~c'oup la îranfpirarion , occafionna un retour trop fubit du centre à la circonférence , le- quel reflux ne pouvant y parvenir par rapport à la trop grande foibîeiTe , fe fîxoit fur quelque vifcere. Par la même raifon, des rhumes dégénérèrent en pulmonie chez quelques perfonnes. les enfans ont été fort fujeîs aux con- Vulfions & aux fièvres vermineufes. La petite vérole a été commune, mais moins que l'année précédente. Pendan^lemois de Mai , les fièvres double -tierces avec fîux de ventre & vomiffement, la àydtn^ rerie & le îénefme, fur-tout parmi les Ma- îelots, les inflammations au foie & aux înteflins , furentles maladies \qs plus fré^ quentes; elles le devinrent encore da- vantage vers le commencement de Juin , où le temps M fec&chaud pendant plu- fieurs jours. Il parsoi dans cette faifon une efpéce de fluxion à qui on donna le nom de E vj 1^0 8' Hiflo'm des Maladies' mal de mouton ^tw égard à la conformité qu'elle fe mble avoir avec la tumeur dont ces animaux ont coutume d'être atta- qués à la gorge. Peu de perfonnes en fîirent exemptes. Lagorgedevenoit con*^ fidérablement enflée , fans fièvre , fans tenfion. Le mal avoit rarement d'autre fuite ; les cataplafmes réfolutifs & quel- ques purgations fuffifoient pour le dif- fiper.a» ffî ST O I RE. Le deuxième jour de Juin , plufieurs perfonnes furent empoiforinées par une efpece de petite fardine , qu'on appelle ziix lÛQS cajeux» Ceux qui ne mangè- rent point des. entrailles en furent moins incommodés. On ouvrit un homme mort de ce poifon; on lui trouva le foie ex^ îrêrr f ment dur, un fan g très-coagulé, fur-îout dans les oreillettes du cœur. On ©bferva^ dans un chat, l'eflomac ganr grend 6c corrodé par placards , le py- iQra oc rinteftin duodénum extrêm*e^ di Saint Dommgiit', rc^ ment gangrenés, (Se piuiieurs marques pareilles dans les autres inteilins. Les em- poifonnés furent tous attaqués de pefan- îeur d'eilomac , de voniifTement, de tran- chées accompagnées de froid aux extré- mités > & de la perte du pouls. Dans ceux où les premiers fymptômes furent moins violens , il y eut une grande chaleur dans^ les entrailles, une grande inquiétude-,. une refpiration gênée. On remarqua ces fymptômes dans le Matelot qu'on ou- vrit à l'Hôpital , qui ayant mangé beau- coup d'autres alimens, eut les accidens qu'on vient de rapporter , & dans l'eflo- mac duquel on ne trouva point de cpr- rofion, parce que leppifon ne put agir immédiatement fur \^s membranes de Cfi vifcere , mais feulement dans le fang. On attribua cet événement aux Manu-' nïlkrs. Mais comme cet arbre efl aujour-- d!hui très-rare, je penfe qu'on doit plu^ tôt l'attribuer à la grande quantité de fruits & de fleurs de plufieurs autres ar^: bres vénéneux, qui entraînés par les 'Il Fïô Hlftoin des Maladies pluies abondantes , fe dépofent fur îe^^ hauts fonds, qui font communs aux en- virons dès embouchures des rivières. En' effet à Saint Domingue , les mois de Mars & d'Avril font de tous les mois ceux oiî la plus grande partie des arbres & arbriiTeaux jette leurs iTùits; n'y eût-ii que ceux du bois rouge &: des bois lai-- teux qui font en grand nombre , ils fuf- fifent pour produire cet accident. Le temps fut calme & chaud les quinze premiers jours de Juin. Le refle du mois il y eut des brifes fortes 5r qui ne furent interrompues que par deux ou trois ora- ges. Pendant les mois de Juillet & d'Août, les orages furent plus fréquens, fur-tout- vers les montagnes; car il n'y en eut au Gap que vers le 1 1 de Juillet , & deux -? Gu trois par femaine jtifqu'à la fin d'Août. Les m.aladies d^ Siam furent principale- ment mauvaifes à la fin de Juin ôc au commencement de Juillet, eu égard à la féchereife qui parut un peu dominer pen- dant le mois de Juin. Plufieurs périrent de Saint Domingue] tvt^ dès îe trois ou quatrième jour de îa ma- ladie. La dyfîemerie & le cholera-mor- bus furent communs. Le mal de gorge 5. dont j'ai déjà parlé, perfiila & devint plus dangereux 5 parce qu'il attaquoit dans plulieurs les parties internes , les amyg- dales & latrachée-artere. Les petites vé- roles furent fréquentes. Les fièvres dou- ble-tierces bilieufes &: lymphatiques, la maladie deSiara, furent les maladies do- minantes, fur-tout parmi les nouveaux' venus , & celles qui firent pendant cette Gonflitution le plus de ravage. Les malades , de quelque maladie qu'ils fufTent attaqués ^ foutenoient peu la faignée. Dès la féconde ou la troifiéme^ le pouls fe concentroit & devenoiî flaf- que 5 fur-tout dans la maladie de Siam , & les fièvres double- tierces lymphatiques. Dans celle-ci les accès étoient fuivis de fueurs, confidérables & fi abondantes^ qu'il falloit avoir irecours aux cordiaux. Tous les gens replets fuccomberent à la maladie de Siamice. cjui eil ordinaire à .ji|l! Tïl Hïfioirc des Maladies Saint Domlngue , oii de tels tempér^ qu'il fut très-difficile de leur relâcher le ve^itre. C'étoit l'efFet de là grande féchereffe qu'on éprouva pendant prefque tout le cours de cette année ^ &: qui mit les habitans dans une trifte fituation , tant par la mortalité des Nègres U des belliaux , que par le peu ; de revenu qu'ils firent. . Conflitution de V Hiver iy43"» Depuis le 1 5 de Novembre jufqu'au " mois de Décembre , les vents furent tantôt au nord, tantôt à l'eft. Il tomba peu de pluies, &: le temps fiit conftam- ^ ment froid. Pendant Décembre les brifes furent foibles , ce qui procura un temps mou 5 qui vers Noël devint couvert, ac-fut pluvieux pendant fept à huit jours : les orages s'y joignirent. On eut le même temps durant le mois de Janvier. Il y eut ^etsic 6;ôtJe ^Q des orages mêlés de de Saint Dom'ingue, i ? i nords : les pluies furent d'abord peu abon- dantes. Février & la moitié de Mars furent fecs , & les brifes furent fortes : il leur fuccéda un nord pluvieux qui dura dix à douze jours. Le kc &c les brifes ' revinrent, & perfnlerent jufqu'au 20 > d'Avril. Il y eut plufieurs morts fubites au > commencement de cette confîitution. La ^ maladie de Siam fut rare. Les fièvres ^ double-tierces furent plus communes en Décembre. Une grande quantité dé Nè- gres furent attaqués de fluxions de poi- trine catarreufes & bilieufes. Les ma- - Wes fe pîaignoient de violens maux de tête. Le rhume fut comme épidémique dans toutes les maladies : il précédoit oii furvenoit , ce qui étoit un fignê affez fur ' pour les caradérifer de lymphatiques. En e^Qt les double-tierces furent pref=. - que toutes de ce caradere , & le fang : contenoit-.plus de férofités que de cou-» - tume , quoiqu'une faifon extraordinaire» - mmt féçheôc chaude eût précédé cette- î p Hlfloin des Maladies conilitiition. L'alternative des vents àe nord , d'eil 6c de fiid , qui femblerent s'entrecouper , &: qui produifirent une grande variation pendant le mois de Décembre , m*en parut l'unique & prin- cipale caufe. Cette alternative déran- geant l'ordre de l'infenlible tranfpiration, en occafionnoit continuellement des re- flux , qui à la fin formèrent dans les vaif- feaux lymphatiques des engorgemens qui fe communiquèrent aux languins. Ce caraaere perfifla dans les maladies juf- qu'à la fin de Janvier , où les corps plus humeaés furent plus faciles à relâcher. Pendant les mois de Février , de Mars & d'Avril , il n'y eut prefque point de maladies, fi ce n'efi quelques légères flu- xions. Il veut peu d'ulcères mauvais pendant cet hiver, & on vit peu de diarrhées , d'hydropifies U de pulmo- nies. Il parut pendant le cours de Janvier & de Février une comète dont la che- velure étoit longue de plus de fept à huit de Saint Domingue. 133 pieds. Au mois de Mars la France dé- clara la guerre à l'Angleterre. Conjîitutlon de VEtè iy44» Le temps devint orageux dès la fin d'Avril , & il y eut beaucoup d'ora- ges en Mai dans la dépendance du Fort Dauphin : ils furent moins fréquens dans celle du Cap. Le mois de Juin fut moins orageux : Juillet & Août le furent beaucoup : Septembre fut iQc\ les brifes furent fortes : les orages revinrent en Oaobre. Ce quM y eut d'avantageux dans une telle viciffitude de temps, c'eft que les Brifes furent toujours contantes & pref- que toujours fortes ; auffi les pluies furent- elles plus abondantes vers les niontagnes. Les ophtalmies , les fluxions & les fièvres double-tierces furent les maladies de la faifon : il n y en eut au Cap que pendant le cours d'Août. Les maladies de Siam furent prefque toutes mortelles tant au Cap qu'au Fort Dauphin. î54 Hijîbln des Maladhs La Ville du Fort-Dauphin ell fituée ckns rendrcit le plus favorable de l'Ifle , tîânt par rapport à l'éloignement des montagnes que par la beauté de fôn port. Un canal d'une demi-lieue de long fur environ deux cens toifes de large , con- duit les eaux de la grande mer dans une baie ovale de trois lieues de longueur fur une de largeur dans les deux tiers de fon étendue. Au centre & vis-à-vis du canal , autrement dit Goulet , avance une langue de terre fort étroite , qui fe termine en une plate - forme prefque ronde , d'environ cent toifes de large , fur laquelle on a bâti un Fort. Les Na- vires du premier rang peuvent entrer & mouiller dans ce Port, Un tel avan- tage femble promettre à cette Ville de devenir la Capitale de Saint Domingue. Placée au milieu de l'Iûe &:-d'une plaine qui a plus de qj^iarante lieues de lon- gueur , fur trois , quatre & cinq de lar- geur , elle efl à portée de recevoir & de fournir tout ce qui peut contribuer à d'c Saint Domlfiguev 1 3 f Mre fleurir le commerce , & donne la commodité de communiquer tant pa^ mer que par terre les ordres des fupé- rieurs dans les deux extrémités de VIÛqô Les marécages remplis de manglcs qui environnent un tiers de la Ville , font le feul défavantage qui s'y trouve ^ & auquel il eil facile de remédier par des levées , & en y rapportant des terres ; ce qu'on a entrepris & exécuté depuis cinq à fix ans au Cap , & ce qui a contri- bué à rendre cette Ville beaucoup plus faine 5 quoiqu'il n'y ait encore qu'un tiers de l'ouvrage fait. Il faut efpérer que les Commandans qui en connoiffent Fimportanee pour la fanté deshabitans, s'attacheront à faire continuer & fînir un ouvrrgeaufîi utile. Confiitution ds. C Hiver 1^44» Les orages continuèrent avec violence dans la dépendance du Fort -Dauphin pendant 0£lobre & Novembre. Il fur- ^vint depuis le 15 jufqu'au zoOftobre^ ii'i* Î36 Hlftoirc diS Maladies & di^piiis le 27 jiirqu'aii 15 Novembre , un nord qui donna une grande quantité de pluies. Quoique les vents fufTent très- inconftans , ils furent plus permanens au nord ou à l'ouefl , & prefque toujours chauds. Le temps fut mou & pefant. On eut à peu près la même faifon au Cap: le temps n'y fut orageux que quand le nord parut; il n'y eut point de brifes pendant tout cet efpace de temps. Il y eut dans le quartier du Fort- Dauphin un plus grand nombre de ma- lades que dans celui du Cap. Depuis le commencement jufqu'àla fin de Novem- bre 5 les maladies de Siam & les double- tierces lymphatiques furent très - com- munes. Ces maladies furent moins dan« gereufes vers la fin de Novembre , par rapport à la grande difpofition qu'on trouvoit , dans les malades , au relâche- ment. Il ne parut point de crifes par char- bon ou par dépôt. Quelques-uns furent attaqués de ténsfme ; & s'ils le négli- geoient , il dégénéroit en inflammation du ventre. % Saint Domlngue: 137 Le temps fut moins pluvieux pendant Décembre : le vent d'eft régna beau- coup , & les brifes furent fortes. Le 1 5 il y eut un nord qui dura trois jours avec abondance de pluie; il finit par un orage. Sept à huit jours après cela , les orages revinrent ; & fur la fin du mois le temps fut nébuleux & pefant. Il y eut beaucoup de malades parmi | les habitans : plulieurs femmes grolTes \ & en couche furent attaquées de fièvres ' \ double-tierces : quelques - unes périrent ou accouchèrent d'enfans morts. Les diarrhées furent communes. Les brifes furent très-fortes en Jan- vier : il y eut un nord plus venteux que ■pluvieux 5 qui commença vers le 1 5 , & dura jufqu'au 25. Le temps fut en- fuite tempéré , & les brifes aiTez égales jufqu'au commencement de Février. Le temps varia beaucoup pendant ce mois. Les vents étoient tantôt à l'eil: , tantôt au fud ou à roueil:. Cette variation oc- cafxonna un temps alternativement frais 13 s HiJÎGirc des Maladies & orageux. Le mois de Mars fe com« porta à peu près de la même façon. Ce- pendant les vents étant plus conflamment à i'oueft 5 le temps fut plus orageux que frais, tes brifes furent affez égales dans le commencement ; mais il leur fuccéda un calme qui procura vers le 1 2 quel- ques légères pluies de nord mêlées d'ora- ges. Le temps dura ïcc & chaud jufqu'au ao de Mars , où les brifes devinrent con- fîdérablement fortes , ôc perfiilerent ]\\{^ qu'au 28 , où il furvint des orages vio- kns qui continuèrent trois jours. Les rhumes furent communs pendant cette conftitution. Il n'y eut d*ailleurs de malades que pendant Février. Les nou- veaux venus furent attaqués de la mala- die de Siam, & on vit quelques double- tierces lymphatiques. Il falloit , ainiique |e Fai obfervé dans plufieurs endroits de ces Mémoires , fe comporter pour les faignées, félon l'alternative du temps; c'eft-à-dire que dans le frais elles étoiènt autant avantageufes que dangereufes dans d& Saint Dominmt, î>9 Te temps mou. On ne doit point s'écar- ter de cette méthode dans les climats de la zone torride : d'elle dépend tout le fiiccès qu'on peut efpérer. Les douleurs de tête étoient ordinaires , 6^ la faignée de la gorge étok beaucoup plus utile que celle àw pied. Quelques perionnes reffentirent àts avant - coureurs d'apoplexie, comme étourdifTement, grande pefanteur, & mê- me perte de connoifîance. Une ou deux copieufes faignées guériiToient tous ces fymptômes. Les ulcères fcorbutiques & véroliques furent moins communs que \^s hivers précédens , & ils furent plus faciles à guérir. Quelques fièvres fe ter- minèrent par abcès au foie. Conjîkutlon de VEtè iy^5. Les quinze premiers jours d'Avril fu- rent ferains , & les brifes égaies. Vers le 1 5 les vents changèrent; ôi s'étant fixés au nord &: à l'ouefl, ils procurèrent des pluies d'autant plus abondantes , que les Î40 Hlftoin des Maladies orages s'y joignirent. Ce temps perfiila pendant un mois , & les inondations fu- rent fi grandes & fi continuelles , que fi,iT le rapport des anciens du Pays, il ne s'en étoit point vu de pareilles. Cette ré- volution fe termina par des orages qui furent vioiens & fréquens jufqu'au 20 de juin. On eut alors un intervalle dei 8 à 20 jours , pendant îefquels on n'entendit que cinq à fix fois le tonnerre vers les mon* tagnes , & les brifes furent afiez égales : mais elles devinrent violentes vers le 1 5 Juillet , & perfillerent jufqifau 20 d'Août. Une Efcadre de fix navires de' guerre ayant mouillé au commencement de Mai dans la rade du Cap François , mit à terre environ trois cens malades , dont aucun ne fut attaqué de la maladie de Siam. Les rhumes , les pleuréfies ou péripneu- inonies, les fièvres caîarreufes , & quel- ques bilieufes, furent les plus commu- nes , & eurent des dénouemens d'autant plus heureux , que le ventre étoit plus libre. Cette Efcadre partit à la fin de de Saint Domingue, 141 Mai , & vint rernouiiier à la mi- Août. Pendant Juin & Juillet les beftiaux fu- rent attaqués d'une contagion particuliè- re 5 qu'on n'avoit point encore obfervé» On leur trouvoit des vers en quantité au fondement * ou dans les narines , mais fur-tout dans les plaies qui pouvoient leur arriver par accident. Il s'en formoit promptement au nombril des veaux & des poulains , & à la nature des mères» Le remède qu'on employoit étoit l'infu- iion de tabac dans l'urine ou l'eau de chaux mêlée avec le taffia. Les fièvres double-tierces furent les ma- ladies les plus communes cet été , & les deux tiers des habitans, tant de la Plaine que du Cap , en furent attaqués. Ces fiè- vres participoient plus du caradere des lymphatiques que de c/ilui des bilieufes* Peu de malades étoient fujets au vomifle-^ ment , au violent mal de tête & au chole- ra-morbus. Dans prefque tous on remar- quoit un grand accablement , d'abondan- tes lueurs, un vifage peu enflammé ^ %4'^ M/îoire des Maladies même pâle, le pouls grand & très-dif- pofé à la flaccidité. Ces maladies firent plus de ravage au Cap qu'à la Plaine , parce que le temps y fut toujours fec de- puis la mi-Juin jufqu a la mi- Août , & que les pluies d'orage ne pàffoient pas la moitié de la Plaine. On y obferva auiïi une plus grande quantité de fièvres double-tierces lymphatiques ducaraftere de celles qui font les plus longues , les plus rebelles , dont les accès ou redou- blemens ., s'uniffant enfemble , fe termi- nent par une fièvre continue , accom- pagnée de fommeil léthargique, de mou- vemens convulfifs^ de parotides, &:c. Je n'ai obfervé ce dernier fymptôme que dans quelques malades à l'Hôpital. Ces maladies ne furent dangereufes que pour ceux qui avoient des fujets de cha- grin, ce qui étoit fort commun par rap- port au dérangement que la révolution •de la guerre occalionna dans les affaires, Cefl: pourquoi il en périt plus à la Ville ^ proportion gardée, qu'à l'Hôpital. de Saint Domlngm'^ î^^l Les fréquentes & abondantes faignées ilirent nuifibles ; la faignée du pied, adminiftrée trop promptement, faiioit tomber ou en léthargie , ou dans un ac- cablement qui empêchoit ou retardoit l'efFet falutaire qu'on devoit efpérer à^s abondantes fueurs qui avoient coutume déterminer les accès ou les grands re- doublemens* Il faiioit proportionner les faignées à la violence des premiers accès. La ma- ladie dans le plus grand nombre ne Corn- niençoit que par de petits accès fans frif- fon , & qui en augmentant infenfiblement fe joignoient; ce qui arrivoit dans les uns au fept ou au neuf, dans les autres au onze ou au treize : la maladie dans les derniers ne fe terminoit que vers le quinze ou le dix-huit. Les minoratifs , les laxatifs , auxquels il convenoit de joindre les vermifuges , parce que les vers étoient affez com- muns, flirent les remèdes les plus con- venables. L'émétique en lavage fut ad* î44 Hijloire dùS Maladies minlflré ?vec fiiccès dans l'Hôpital à pîu- fieurs Matelots & Soldats , dont le tem- pérament efl plus robufte que celui des habitans. 11 falioit l'éviter à l'égard de tous ceux qui paroiiToient d'une com- plexion délicate & facile à émouvoir ^ mais il convenoit d'entremêler fouvent Tufage de quelque cordial léger pour ceux dans qui on appercevoit ou un trop grand relâchement , ou un trop grand accablement , afin de donner à la nature les forces néceiïaires pour entretenir & augmenter les fueurs critiques. Aucunes parotides ne fe lerminoient par fuppuration ; ou elles s'endurciffoient malgré les cataplafmes émoliiens ; ou elles fe réfolvoient ; d'où il réfultoit une prolongation de fièvres très-opiniâtres^ qu'on ne venoit à bout de déraciner que par i'ufage réitéré des laxatifs , des tifa* nés apéritives & fébrifliges. Les tumeurs fquireufes que j'ai fait ouvrir , ont donné une matière plâtreufe ou crétacée ; il n'é* loit pas pofTible d^y: établir la fuppuration. Je I 154 Htfloire- des Maladies foit des animaux , foit des Nègres , corv*- îinuerent pendant cet hlver^ H I s T 01 R E. Un homme de trente ans , d'un tem-- pérament fec & mélancolique , fanguin 9 ayant une poitrine délicate , fut attaqué^ d'une fièvre par friflbn , dont le premier' accès for violent , & fuivi d'une légère îueur, qui procura une intermiiTion de' douze heures, dans laquelle on fît deux* faignées du bras. On donna de fréquens' lavemens. La fièvre reprhr par chaleur, continua- par^redoiiblemens 5 dont quel- ques-uns étoient précédés de friflbnne- mens, St terminés par une légère fueur de courte diirée , à laquellefuccédoit une' fécherefié ou une aridité fuivie d'aug- mentation à€ fièvre. J'arrivai le jour" qu'on -jugeoit être le feptiéme. Je' ne' pus^ avoir un rapport exaâ: des varia- tions des^ accès ; tout ce- que je pus fa- Y^ir fut qu'on Tayoit faigné deux fois' de Saint DomingUè\ ï 1 5 Hù bras , & une fois du pied ; qu'on Fa voit purgé deux fois avec la cafle , la manne 5 les follicules &Ie fel d'epfom , dans le temps où la fièvre avoit paru avoir plus de remiffion ; enfin que la nuit précédente avoit été fort mauvaife. Je trouvai le malade à huit heures du matin dans un redoublement qui ne me parut pas violent, & qui fe termina par une légère fueur^oii il mouilla une chernife • cette fueur fut fuivie d'un autre redoublement qui dura toute la nuit , & pendant lequel il fut fort agité, fort altéré & très-brûlant. Le matin la remiiîion fut de courte du- rée ; & vers les fix heures k malade fut pris d'un frifTonnement accompagné de concentration très-grande dans le pouls , de pefanteur d'eilomae 6^ d'envie de vomir, de foiblelTe^ ou lypoîhymie ^ & d'une peau féche & aride. Après deux ^ heures d'iuie pareille fitnatidn , le pouls fe ranima 5 la chalair devint pltis vive, êc^ augmenta de façon que le malade fut en délire. Ce redoublement perfifta jufqu à G - vj 1 5 6 Hïflo ire des Maladies quatre heures du ibir , & la foupleffe du poub fembloit devoir faire efpérer quelque crife favorable ;nîais il ne parut point de fueur ; & vers les fix heures le pouls reprenant un état de dureté & de refferrement , qui me fit conjeaurer le commencement d'un redoublement, je pris le parti de faire mettre le malade dans un bain fait avec la décodion d'her- bes émolUentes. Comme il parut le bien foutenir, je l'ylaiffai demi-heure, &:le fis bien envelopper quand il en fut fortî. Il fuccéda a cette opération une moheur quï^ fut fuivie d'une fueur dans laquelle le malade mouilla cinq à fixchemifes. Je lui fis prendre le matin trois onces de manne dans le petit lait en deux prifes, qui le firent. aller trois à quatre fois. A midi le refferrement , la féchereffe & Ta- îidité de la peau annoncèrent un redou- blement qui fe termina par une légère moiteur , à laquelle fuccéda un autre redoublement qui. dura jufqu'au matm. II fut fuivi vers les fept heures d'un frift î57 de Saint Domingue,' fonnement & d'une corxcentration de pouls qui annoncèrent le grand redouble- ment ; mais n'ayant pas apperçu des fymptômes aulîi violens que dans le pré- cédent, j'en augurai bien dès-lors. En effet, malgré l'agitation , les inquiétudes & la vive chaleur qui tourmentoient le malade, ce redoublement fe termina dès midi par une fiieur qui fut copieufe , & je purgeai le malade dans la nuit avec la cafTe, la manae & le fel d'eplbm , ce qui le fît aller cinq à fix fois. La fièvre revint à midi , fe calma le foir , redoubla auffi- îôt;maisce r^edoublement ne fut point fuivi d'un troifiéme , & f e termina par une fueur qui fut peu abondante, mais longue y 6c qui fut fufHfante pour ailurer une prompte guérifon. Le malade , dont je viens de décrire îa maladie , n'eil pas le feui , comme on l'a déjà pu voir , qui ait éprouvé l'effet fa- lutaire du bain. Je n'héfite pas à l'em- ployer dans les fièvres ou j'appréhende 15 s Hljîoire des MaladUs la concentration , comme il eil ordinaire dans îa maladie de Siam ^ dans les doi> ble- tierces , avec eholera-morbus> ou fans cholera-morbus, dont lafueur qui doit terminer le grand accès , eft inter»- ceptée y ou me paroît trop foible , & ne pas répondre à ht force du redouble- ments Conjîitutlon de tEtliy^G» Pendant Avril , Mai & Juin , \t^ venti pérfiflerent au nord & à l'oueft. Ils fu- rent toujours iifoibles, qu'on peut dirô qu'il y eut un calme continuel. Les pluies furent fréquentes & prefqué 'toujours orageufes pendant Avril & Mai; elles furent beaucoup mêlées de nord pendant Avril , & de fud pendant Mai. Elles furertt prefque continues les quinze prerniers purs d'Avril , ôc fe terminèrent enfuitè par des orages coniidérables tous le^ jours ou tous les deux jours vers lès îroi'à ou quatre- heures du foin II n'y eut d*in* de, SVint Domingue, ' i e^ r îerniptlon qu'à la fin d'Avril pendanf^ fept à huit jours. Le temps' fut moins ora- - geux pendant Juin; il n'y eut qu'un ou ^= deux orages très - foibles par femaine. - Cette conftitution procura des^ chaleurs ^' exce/Tives pendant Mai & Juin. La diarrhée fut la maladie qui £t le ' plus de ravage pendant Avril, fur-tout' parmi les anciens. A la fo d'Avril les ma-- îadies aiguës attaquèrent les équipages^ des navires delà rade, fur-tout ceux des vaiffeanx du Roi. La maladie de Siam- fnt la plus'commune. Pendant Avril & le- commencement de Mai , hs double-tier- " ces biiieufes furent plus fréquentes que- les lymphatiques ; Se vers la Un do Mai ' Se le commencemenrde Juin , les demie- ' res le furent plus que les premières. Elles - parurent la plupart compliquées , c'efl>> à-dire accompagnées de quelques fymp^'^ tomes - pedilentiels. Il y eut quelques, malades affligés de flux dyfTentérique ; - ces maladies confirmèrent , pendant A vrlî ^ a^iMai, le jugement que j'ai porté fur l6o Élfioire des Maladies leur termlnailbn dans lesfaifons pluvieiî- ïes, \\ n'en fut pas ainfi à la fin de Mai <; ^ où les pluies commencèrent à être moins ' fréquentes. Les malades étoient extrê- mement accablés , ëi a voient une li grande difpoiition au relâchement , qu'a- près deux ou trois faignées , le pouls de- venoitflafque, petit, ondulent ou fré- millant, ligne d'un afFaiiTement qu'on ne pouvoit diiTiper. Il failoit être éga- lement circonfpeû dans l'ufage des pur- gatifs. Un quart de dofe d'émétique en lavage y ^ une once ou deux de manne , fuffifoient pour exciter fix à fept vomifTemens ,& procurer le flux de ven- tre. Dans la plupart la flaccidité du pouls indiquoit une fi grande difpofition à une fonte ou colliquation , qu'on étoit obligé de remettre à la nature le foin de la guérifon , & de ne s'attacher qu'à la fou- tenir ou à la fortifier pair les cordiaux.' Lés faignées du pied non- feulement fu- rent inutiles , mais dangereufes. Lorfque la violence du mal de tête perfiiloit > la de Saint Dommgue» léi laîgnée de îa gorge convenoit. On vit dans cette conilituîion , fur-tout pendant Juin , toutes les efpeces de fymptômes qui peuvent accompagner îa maladie de Siam , & les ditferentes métamorphofes qu'elle peut fubir. Le faignement de nez fut très-commun , & les dépôts externes fort rares. Les fa ignées de plufieurs ma- îades fe rouvrirent. Parmi les trois vaiffeauxde Roi , M- tinés pour convoyer les navires mar- chands, il yen eut un appelle leJafon, commandé par M. de Conteneuil , qui avoit quatre c^ns hommes , dont il n'y eut que trois ou quatre attaqués de la maladie de Siam. Deux choies m'ont paru contribuer à la fanté de l'équipage de ce navire. La première , qu'il faifoit beaucoup d'eau , & en fi grande quan- tité, qu'on eût été obligé de le caréner, fi on n'eût pas découvert la voie d'eau vers le milieu du navire, & qu'il fuffi- foit de le mettre un peu à la bande pour Ktancher. La féconde, que ce Capitaines, ; ii^ll 1^1 Hipoire des Malafui vieux Marin , qui avoit beaucoup pratT» que ces Mers, oii il s etoit fait connoî* tre par fes combats ôcfes entreprifes, avoit pour maxime de mettre en ufage tout ce qui pouvoit diiïiper & réjouir fon équipage. Cette obfervation confir- me les principes auxquels nous avonS cru devoir attribuer la première caufe de cette fatale maladie , favoir qu'elle dépend des mauvaifes exhalaifons , & de là difpofition oii les paiSons contribuent à mettre le tempéramer^t pour en rece*» voir les imprefiions. Quoique la qualité de l'eau qu'on tire du fond d'un navire par la pompe 5 ne paroiffe pas une caùfe fulEfante pour produire àcs maladies i, elledoiî le devenir , & y contribuer beau- coup, quand la conftitution de la faifoii concourt à augmenter les exhalaifons qui rempliffent l'air de mauvais principes, de levains diffolvans & corrofifs. Cette conilitution eft depuis treize ans celle qui m'a paru la plus conforme avec les conteutions des étés des années 1733 6ê 1736* de Saint Dom'ingue, iSt la fëchereiFe & la chaleur furent gran- des pendant les mois de Juillet & d'Août;, on n'eut prefque point de brifes pendant Juillet & une partie d'Août. Il y en eut de très-fortes depuis^Ia mi- Août jufqu'à la fin , ce qui contribua à augmenter la féchereffe. Dans l'efpace de ce temps, on n'eut à la plaine que cinq à fix ora- ges; il yen eut davantage vers hs mon- tagnes. îl y eut peu de malades pendant cette: faifon; mais ceux qui furent attaqués de fièvres, eurent des accès violens, qui étoient accompagnés de douleurs de tête aiguës, fuivies de délire ou de fom- meil léthargique. Dans la plupart ks yeux- étoient vifs & étincelans. Tous dvoient le ventre refferré. Cesfymptô- mes furent communs chez les malades • que M. de Coniîans , commandant de l'Efcadre du Roi, mit à l'Hôpital dans la relâche qu'il fît au Cap. Les convaief^ cens , fur-tout les mélancoliques, furent beaucoup affligés de doux. Non-feule« 164 liiftolredes Maladies ment les malades fapportoient les fai- gnées, mais ii falloit les réitérer fré- queiHîTient , fans cependant les faire abon-' dantés ; après trois oiï quatre faignées du bras , prefcrire celles du pied , en- fuite celle de la gorge y &C faire beaucoup boire d'eau de caiTe , du petit lait.,^ des-boitïllons émoUiens & de la limo- rrade. Je ne vis d'autre apparence de mata-' die de Siam que dans huit à dix malades qui eurent deux à trois jours de fuite des fièvres continues , qui cédèrent à la même méthode. Il parut dans cette conf-^ titution quelques abcès au foie. On vit beaucoup de rhumes vers la fin d'Août. Le temps s'eft comporté différemment pendant Septembre &0£lobre. Les ora- ges ont été plus fréquens. II y en a eu deux à trois par femaine depuis la un d'Août jufqu'au 20 d'Octobre , &le ton- nerre efl tombé plufieurs fois dans cha- que Paroiffe. Ces orages ont été cepen- dant plus confidérables dans les environs de Saint Domingue, ri S^ an Cap que dans la dépendance du Fort- Dauphin , parce que les vents dominant toujours au nord & à l'oueft , joignoient .celui du fud qui venoit des montagnes; ce qui faifoit varier la brife qui étoit rarement forte ; d'où il réfultoit de temps en temps une alternative de temps chaud ô* mou & de fraîcheur. Les fluxions & les rhumes furent les maladies les plus communes, & les fièvres double- tier- xes furent moins ardentes, Conjlitutlon dû CHivcr ly^C* Depuis le 20 O^obre jufqu'au 15 de Novembre , on eut des pluies prefque continuelles 5 d'autant plus abondantes, qu'elles provenoient de l'union , comme on dit dans le Pays , du nord & du fud. Cependant les orages dominèrent vers I^ fin d'Oûobre, & le nord prit le defTus en Novembre , ce qui occafîonna des débordemens confidérables. Il fuccéda peu à peu à ces pluies orageufes un temps «aime & ferein j mais chaud Se mou. En I i66 Hljloin des Mdlaâus Décembre on eut après ces pluies la même difpofition de temps qu'en No- vembre. Un'y eut pendant le cours de Janvier que de foibles brifes. Les vents continuèrent à tenir à l'oueft & au nord- Depiii^s le lo jufqu'au 15, le temps fut orageux : il faiToit tous les jours des éclairs , & on entendit deux à trois 4>is îe tonnerre , qui fut accompagné de pluies qui tombèrent par intervalles & en petite quantité. Ce temps fut fuivi d une férénité & d'une fraîcheur plus confidérable & plus confiante qu'aupa- ravant. La maladie de Siam fut d'autant plus commune à la fin d Qé^obre , & le$ quinze premiers jours de Novemb^^e , que la rade du Cap fe trouva garnie d'un .grand nombre de navires, qui étoient à Saint Domingue depuis la fin de Juin* Cette maladie fut plus mauvaife dans le xommencement de la conftitution que dans le cours de Novembre. On obferva qu'elle fut accompagnée de tous Jes fymp^ tomes qui lui font propres , c'çfl-à-dire de Saint Domingue, j.^y àc jaunifle, d'évacuations par haut Ôc par bas de matières noires , & d'ouver- tures de faignées , de douleurs ou dipôt^; fur quelques extrémités , & de parotides ; mais. fur- tout d'hémorragies confidéra- blés parle fondement & parle nez. La première étoit mortelle; la féconde ordi- nairement falutaire : cette dernière n'ar- rivoiî qu'à ceux qui avoient r^ffenti de yiolens maux de tête , ce qui déterminoit a faigner de la gorge ceux qui s'en pîal- gnoient beaucoup. Cette maladie, ainfi que nous l'avons toujours remarqué , fut fatale aux tempéramens replets, & à ceux dont le viûge étoit d'un rouge vif ou tirant furie pourpre, aux mélanco- liques, dont le teint étoit d'un pâleîivi- de , ou d'un rouge pourpre. Il falloit être fort circonfpea à l'égard de ces tempé- ramens dans Tadminiilration des faignées & des purgatifs : car pour peu qu'on excédât dans l'un ou dans l'autre, il en téfultoit un afFaiffement générai qui étoit indicfué par Taçcablement du malade^ 47^§ 'îîifioirc des Maladies rïa petltefïe , la concentration ou îa flac»^ cidité du pouls: c'eil pourquoi il conve- îioit de ne leur faire que de petites *f ai?» gnées, de ne les réitérer que fulvant-k qualité du pouls ^ & fur-tout celle de la refpiration , qui eil fujette dans ces têm- péramens à devenir tout d'un coup em- barraltée , courte 'âc fréquente, ce qui efl:^ tm figne mortel. Il m'eft arrivé que,- trompé par l'apparence d'un tempérament j-obufte 5 par un vifage rouge , & des yeux enflammerez chargés, je me fuis. déterminé à tenter une ou deux faignées copieufes , dont l'effet étoit une opprei^ £on & une concentration qu'il étoit rare .de pouvoir diiîlper ni par les bains , ni par les fudorifiques. La qualité du pouls doit fervir. de guide en pareille occafion. Dès qu'oit l'apperçoit tendre à la flaccidité ou à une: concentration accompagnée de mouve^ înent qu'on appelle /reW/Zû/z/, en latin fmnûcàns puîfus y il faut tout fuipendre. Ainfi dans plusde trois cens «jaiades^iïe: j'ai de Saint Domingiu, xSg j'ai traités pendant celte conftitution, il . y en avoit que je faifois faigner trois ou quatre fois dans vingt - quatre heures , d autres une ou deux fois feulement. A quelques-uns je faifois tirer dans la pre- mière ou les deux premières faignées, une Jivre & demie , & même deux livres de fang : à d'autres feulement fix ou huit onces. La force &Ia plénitude du pouls décidoient du nombre des faignées & de la quantité de fang qu'on devoit tirer : je dis la force & la plénitude; caril eft ordinaire de trouver dans les malades des pouls qui paroiffent grands , mais fans force ou -dureté , c'eft-à-dire qu'ils font mous. Une teUe qualité annonce nnedifpofition pro- chaine à la flaccidité ou à l'afFaiiTement. En général les malades dans cette confti- tution foutenoient peu la faignée, fur- tout ceux qui furent attaqués pendant le mois de Novembre, ce qui provenoit de l'humidité , qui en relâchant les corps, ies rendoit mous & flafques ; ainfi deux, trois ou quatre faignées fuffifoient } Tome I, ji I lyo Hifioirc des Maladies & fur cent maladies je ne crois pas qu'il s'en folt trouvé dix à l'égard defquels faie pafTé outre. On les purgeoit avec la même précaution. Je nefaifois prendre l'émétique qu'à un quart de dofe ou à un tiers , difîbus dansim demi-verre d'eau; & je leur donnois enfuite tous lesjours , ou de deux en deux jours , de la manne à la dofe d'une once , qu'on réitéroit de fix en im heures fuivant fon effet. Les malades ufoient poux boiifon de la tifane qu'ils fouhaitoient, parce que le vomif- fement ou les envies de vomir qui font prefque continuels dans le cours de cette maladie , obligent de laifTer à leur choix la boiffon qu'ils croient pouvoir mieux retenir. Je leur confeillois feulement , par préférence , l'infufion d'of^ille , la décoaion fimple de chiendent , & une légère limonade. Rien ne m'a paru mieux convenir pour calmerle vomiffement 6c Je hoquet , qu'un julep fait àr^c^e fuc de citron, les ye»x d'ccr^viff02^v& le fel i'abfynthe, . ,>^:o^' ^ de Saint ^omn^ut. 17, J'aî eu quelquefois recours à l'opium, à la dofe d'un grain & d'un demi-grain, fur- tout qyand le hoquet perfiftoit plufieurs JQUrs ; mais quelques cuillerées de bouil- lie données 4e temps ^ en temps au mala- de, m',ontparu !e remède le plus efficace pour calmer ce rxm.ptôme. L'impoffibili- te, ou pour mieux dire la difficulté d'em- ployer les bains dans l'Hôpital du Cap , m'a empêché d'adminiftrer ce remède auffi fouv ent que je l'euffe fouhaité , & qii'il .eût été néceffaire. J'y fuppléois par les cataplafmes à l'égard de ceux en qui on appercevoit de la difpofition à quel- ques dépôts. H 1 s r O I B. E. X>an5 le nombre des malades qui eu- ?ent:d^ fâcheux/ymptômes , un Matelot eO;.«Bt.fiK.ce,%,ejiiçflt_plufieurs qui me- ttent d!,êtire rapportés. On l'avoit feigne JWé fei,le:ibis , U il n'avoit point été purgé. •IJjgquyoit. être dans le cinq ou %§'?}? içifïjïJeJ^fl^die; fon pouls Hij- I ,-,' Hljloïn des Maladiei étoit comme naturel, mais flafque-,f7?irie/2/2^5 , fur- tout celles qii^ônavoit négligées dans les premiers jours, & àPégard defquelles on rtWoit pas eu la précaution d'employer les faignées & les remèdes émolliens , . délayans & laxatifs. C'eft pourquoi il périt plus de malades en Janvier qu'en Décembre. L'aridité de la langue ôc les vives douleurs de tête furent les fymp- tômes les plus communs, & ils fuffi-* foient feuls pour faire connoître le carac- tère & le progrès de la maladie. La grande quantité dé malades ayant mis la difette dans les rem.edes les plus îiéceffaires , comme la caffe , la manne, &c. je trouvai le moyen d'y fuppléer par les fuivans. Je fis faire des apozêmes laxatifs avec le mida'mlir'bdtard , \?ichi- de Saint Domingue, jj^ corie faiivagc ^ les épinars , & le gros fîrop. On les rendoit purgatifs avec le {énéonhdlam- purgative du Pays, qu'on fâifoit bouillir enfemble. Les potions cordiales iimples fe faifoient avec la can- nelle , lesdoux de girofle , la mufcadê & le fucre 5 bouillis dans parties égales d*eau & de vin : je les rendois compo- fées avec la poudre de vipère & le kermès minéral. Les bols fébrifuges fim* pies fe préparoient avec les écorces d'o- ranger & de citronnier piilvérifées : les bois coTupofés fe faifoient avec lé fel am- moniac & la limaille de fer bien" fine ; joints aux médicâmens {)récédens. Les îifanes aflringentes fe faifoienr a vecià racine depourpier , rherbe^ppelléè/r/érf de ponU\ quï eft iiné éfpecê deg^-û^g;^; î'écorce de bois blanc ^ & le maciiefèt piléi " L'ipécacimna du Pays fuppîéoit à celbi du Bréfil. La tifane de café fe doànoit aux ' cachediques. On panfoities ulcérés^ aveè '^■ îe fuc de karatas , quand les chairs étoienV"* maxfvaifes', ôc- enfuite avec un onguent H V ' ij$ Htfîolrc des Maladies compofé de parties égales de fuc de liane à minguet , de fuc d'orange , de tafia , & le double àegrosfirop. Voilà , à l'exeep- tion de la faignée & de l'émétique en lavage , quels furent les remèdes dont je me fervis pendant tout le cours de cette conftitution , où je puis alTurer avoir traité plus de mille malades. Le fuccès que j'eus furpafTa mon attente , & jne confirma dans l'idée que j'ai toujours eue 5 que les remèdes fimples & les plus naturels font à préférer. Les fièvres double-tierces lymphati- ques furent rares en Oaobre , Novem- bre 6l Décembre , & le peu qu'il y en eut fut d'une efpece bénigne; ce quiprove- lîoitdela grande humidité qui contribue à empêcher la vifcofité de la lymphe. AufTi cette caufe ne fubfiftant plus en Janvier , elles devinrent plus communes, plus mau- vaifes , la plupart comphquées , c'efl-à- dire qu'elles fe terminoient par quelques dépôts gangreneux. Il périt, pendant le cours de cette de Saint Domingue, lyo conftitution , beaucoup de diarrhétiques ; & la plupart despulmoniques qui a voient réfifté plus long temps que de coutume , fuccomberent à la fécherefTe 6c à la fraî- cheur de Janvier. Les vers continuèrent à affliger les animaux & les hommes qui avoient des bleffures : ils furent égale- ment communs dans les maladies inter- nes. On vit peu de fluxions de poitrine ; il y eut quelques rhumes qui furent conlidérables ait commencement de Dé- cembre & de Janvier. J'obfervai aufli dans le même temps quelques mala- des attaqués de coliques de Poitou , au- trement rhumatifmes d'entrailles. Les ul- cères des jambes furent plus communs que les hivers précédens ; & quoique plufieurs parufTent d'une mauvaife qua- lité , cependant il périt peu de malades. Depuis quatorze ans que j'exerce la Médecine à Saint Domingue , je n'ai point remarqué de conflitution fi mal- faiae & fi var iante que celle-ci , fi ce ii'efl celle du commencement de Thiver H vj m So ; Hljloirc des Maladifs ' de 173 1 ; mais comme c'étoit 1a pre»' miere année de mon féjour à Saint Domingue , je n'ai pu, comme dans celle-ci , faire les mêmes obfervations 9 & en conftater lecaraftere, comme j'ai été à portée de le faire dans un hôpital, où 11 a paffé dans l'efpace de quatre à cinq mois plus .de mille malades. J'y ai ob- fervé dans quatre mois quatre révolu.-- tions ;. la première à la fin d'0£lobre aux premières -pluies , où la maladie de Siam fut mauvaife; la féconde en Novembre ^ où la même maladie fut très-commune^ 3«ais moins, dangereufe ; la troifiéme en Décembre /où les fevres double-tierces prirent la place ^ & devinrent à la fin du mois prefque générales V & d'un carac- tère aiTez doux; la quatrième en Jan- vier > où GQS maladies furent pluiarden» îes> approchant des lypiriennes , & oii leà lymphatiques furent aufli communes que.îes-bilièufes. E efl facile de recon-' mid& dans ces variations les eâets des cbâigei^eîis du temps j qui fembleat êtr^ N» •%. •-•«*-- dt Saint Domlngiiel \ §î' la- feule caufe de ces diiîerentes révôlii- tiens dans les maladies. Lé vent qui a toujours dominé a p'anr le plus fouvent tenir à l'oueft , ou au nord-oueiï ^, ou au nord; de façon <|ue Tes briles étant foi- bles , il en réfuîtoit un temps chaud êc mou , propre à former & entretenir des orages. Ceft pourquoi les années ou. règne xmo, telle difpofitîonjfonf toujours orageufes , pluvieufes & mâl-faines. Le 19 Novembre de cette année mou- rut à Léogatie^ M. Charles Bruniêr dé Larnage , Gouverneur & Lieutenant- Général des Ifles fous le Vent, îl pofTé- doit toutes les qualités de l'efprit & du cœur qui peuvent rendre un homme par- fait , & propre à gouverner. * Pendant Jaiivier , Février & Mars ' on eut prefque de quinze en quinze jourâ une alternative de chaiîd &' de frais ^ d'orage &' de nord , qui produifant de^ effets contraires, contribua non-feule- ment à prolonger la même conflitution épidêmiquç ^ mais encore à là rendre plus iSl Hïftoiu des Maladies mauvaîfe. Le temps orageux parut do- miner; & comme les vents de- nord eu de nord-ouefl s'y joignoientjilen réful- toit des pluies [abondantes qui duroient cinq à fix jours. Aux pluies fuccédoit un temps frais & ferein, chaud par in- tervalles, mais dont la chaleur diminuoit infenfiblement , & fe terminoit par des éclairs &: quelques coups de tonnerre qui annonçoient la pluie. Ces révolutions furent plus confidérables à la fin de Jan- vier & à la fin de Mars , qu'à la mi- Fé- vrier & au commencement de Mars, Elles eurent de particulier que les vents de nord furent plus forts & durèrent plus long-temps que dans les autres, fur-tout dans la révolution qui arriva à Téquinoxe de Mars , où après fept à huit jours d'un temps très-orageux, on eut un nord très- pluvieux qui dura huit à dix jours , qui fut accompagné de vents très-violens, ÔC fuivi d'un temps mêlé de nord & d'o- rages , qui dura jufqu'au i ^ d'Avril. Le même caraûere de maladie qui de Saint Domlngue, 185 avoit parupendant Décembre & Janvier, perfifla. Je variois ma pratique fuivant le ckangement du temps; c'eil-à-dire, je iaignois plus dans Je frais que dans l'hu- mide; je m'attachois plus à délayer & à ram.oUir dans le premier que dans le fé- cond. On vit dans chaque révolution , lorfque le temps devenoit doux & ora- geux , quelques maladies de Siam , & peu en réchappèrent , fice n'eftles trois premières femaines de Mars où le temps fut très -calme, & plus conftamment chaud & humide. Les enfans , plus fuf- ceptibles des imprefîions que peuvent faire des changemens aufîi fubits & auiE fréquens que ceux qui ont paru cet hi- ver , y fuccomberent autîî en plus grand nombre que les adultes. Quoique les vers fuffent un fymptôme commun à tous, il convenoit d'y faire moins d'at- tention qu'au caractère de leur fièvre î^ui étoit ou double- tierce bilieufe, ou lym- phatique , & prefque toujours compofée de l'un & de l'autre genre. Il n'y a point i ï§4 ^ Niftoirc des Matadm encore eu de conftitution où ces âeit^ caraûeres de fièvre ajent paru plus mê- îés 5 plus -unis que dans celle de cette faîfon ; ce qui prov^noit fans doute des effets oppofés que le changement fubit occafionnoit dans les cOrps y dont l'un étôit de rendre la lymphe glutlneufe , ôé Fautrede produire le gonflement des fo- lides , & l'expanfion ou raréfaction des autres humeurs. Il convenoit dene point négliger les faignées , fur-tout à ceux qui a voient le venii^ conilipé. Il en a péri pîufieurs paur n'avon* pas eu recours à ce remède. Les catarres > les fluxions, fur-tout "celles de poitrine , furent com- munes parmi lès Nègres. On vit plufieurs Blancs & Nègres , dans les révolution^ de Février > attaqués d'apoplexie , d'ef- qirînancie & de fpafme.^ Les pulmoniques qui avoient fout^nu^plus long-tenfips que dans les années pr-écédentes, ne purent téfiflei-. Il en fut de même des diarrhé- îiques & des hydropkîuês à la fin de Fé^ ymt &>au eoiîimeaçemetu de Mars j ks " de Saint Domlngue, l'S^ fièvres parurent plus du cara6l:ere des lymphatiques que de celui des bilieufes. Il en fut autrement depiiis le lo ou le 1 5 juf- qu'à la fm du mois, tes lymphatiques prirent enfuite le delTus. C'eft ainli que le caraâ:ere de ces maladies paroît ab- folunient dépendre de celui du temps. Hifioin£un& apopUxk^- Un Nègre fut pris d'ëtourdiffemens , qui furent accompagnés de vomiffe- ment : on le crut ivre : cependant le mal augmenta au point qu'il perdit là connoiffance , & qu'il eut pendant la nuit des agitations & des contrarions vio- lentes. Le matin on ne put douter du ca- raftere de la maladie , qui me parut d'au- tant plus dangereufe que les extrémités étoient froides, & que le pouls étoit concentré &: frémillant. Je fis mettre le malade dans un bain tiède , oii je le fis faigner du bras ; on lui tira environ trois livres de fang. ïl refla trois heures dans le bain» Six heures après ^ n'appercevanî î86 Hijloire des Maladies point de changement , je réitérai les mê- mes opérations , à l'exception qu'il fut faigné de la gorge , &: qu'on lui tira un peu moins de fang : la quantité pouvoit aller à deux livres. Je lui fis enfuite ap- pliquer , avec le cautère aâuel , un feton à la nuque du cou. Dès le foir le ma- lade commença à parler , & il fut le ma- tin en état de prendre une médecine hy- dragogue. Une tifane fudorifique termina la guérifon. J'ai employé avec un pareil fuccès la même méthode pour les efquinancies; & de quatre que j'ai traités , il n'y a eu qu'un malade à qui une amygdale tomba en fuppuration ; j'en attribuai la caufe au retardement de la faignée , qui ne fut faite que le fécond & peut-être le troifiéme jour de la maladie. de Saint Domingue» 187 O BS ERVATIONS Sur les différentes Conflitutions des années depuis iy2>^jufciiCen ly^y* TJ^ N réfléchiflant fur le carâftere des •*—' conilitutions épidémiques que j'ai décrites depuis le mois d'Odobre 1732 fufqu'aii mois de Mars 1747, je trouve dans celles des années 1732 & 1733 tant de conformité avec celles des années ?7455 174^ ^ ^747 i qu'on auroit fujet de conjeé^iîrer comme un ordre périodi- que dans les révolutions du temps. L'époque du premier ordre périodi- que > fi on peut ajouter foi au rapport ies habitans qui en ont été témoins , fe- roit Fannée 1730; & celle du fécond ['année 1745 : ce qui conflitueroit une période de quatorze à quinze ans, pen- dant le cours de laquelle il paroit comme deux conflitutions diamétralement op- li.^'i. ï-SS Hifioire des Maladies pofées & partagées par une tempérée , la première très-pluvieufe , &: la dernière feche. L'une & rautreparoifTent perfif- ter trois à quatre années , peut-être cinq ; ce qui réduitoit la mitoy^enRê aw même efpace de temps. Pour donner à cette conje£^ure la cer- titude qti^orf défif^roit , il ne feroit quei^ tion quÊ d'obferver , fuivant les Pays , avec attention^ les différentes conftîtu- tions des années. Là cônnoiffance d'uiî ordre périodique dans les conftitutions feroit d^itant plus- utile -, qu'on auroit un fur moyen de prévenir les bons ÔC îes mauvais effets qui en doivent réful- ter , tant pour la fant€ que pour l'agri- culture. J'ai fouvent regretté de n'avoir pu parvenir à mé procurer un bon baro-» mètre Ôc un bon thermomètre : mes ob-i fervations enauroient pu devenir plus in^ téreffantes. L'année 1744, qui a précédé la pre- mière année de la révolution pluvieufe , a été moins aride que les quatre à cinq précédentes* "4^ Saint Domlngue» %^^ : Le temps m'a paru fe comporter corn- ,jne fi la nature fe^fùt difpofée pour la révolution qui devoit arriver l'année fuivante. Les années 1 730 ,31 ^ 3 1 93 3^ Sem- blent avoir été, par progreiîion , plus pluvieufes ; la dernière cependant moins que la troifiéme. Il en a^été à peu près de même des quatre à cinq piremieres années de la féconde révolution. L'année 1744 , par rapport à la dif- férence que j'y ai remarquée avec le^ précédentes , ne femble être que com- me rannonce (d'une nouvelle révolu- tion. L'année 1745 a été extrêmement plu-» vieufe; 1746 l'a été un peu moins que 1745. Arriveroit-ii dans les révolutions du temps , comme dans celles du corps humain, un ordre alternatif d'accès plus forts & moins forts ? Les conftitutions épidémîques paroif- fent avoir leurs temps ou périodes comme les maladies , c'efl-à-dire qu'elles ont ÎÇO Hljloîrc des Maladies leur commencement , leur progrès, leur état & leur déclinaifon. L'examen des conflitutions futures dé- cidera de ce que je ne continue de pro- pofer que comme une conje6ture , t^ui , quoique téméraire , peut donner Ireu a des obfervations dont la certitude contrî-^ bueroit à la confervation de bien des hommes. i6 2îio"i de Saint Dominvue, 191 DESCRIPTION PARTICULIERE DES FIEVRES DE S. DOMîNGUE. Maladie de Siam. T A maladie de Siam doit être regar- -*-' dée comme une fièvre putride , ma- Kgne & peftilentielle. On a ignoré pendant long-temps les funefles efFetsde cette maladie dans les Ifles; la i-égularité avec laquelle elle fe reproduit , femble devoir la faire re- garder comme une de ces maladies dont il faut chercher là caufe dans la confli- iiiîion de l'air. Le premier événement qui l'ait fait re. marquer , a été la relâche , à la Martini- que, d'une nombreufe efcadre qui venoit j^% Hifioîre des Malddm .deSiam, &: dont l'équipage , pendant fon féjour dans cette Colonie , fut afflige ■ d'une fièvre maligne ou peftilentielle., qui fk périr .un grand nombre de Ma-, ;telots. Cette maladie attaque très-rarement les Créoles ou les Sauvages habitans d& Me. Les Européens deïlinés à vivre fous un climat plus tempéré, en font, pour ainfi dire, les feules viaimes. La chaleur extraordinaire de la Colonie pro^ duit fur leurs corps des changemens dont font exempts les corps formés fous ces climats , & pour lefquels cette ardeur de l'été eft fuivant l'ordre de la nature. Si , félon la remarque de Sydenham , & fuivant l'expérience journalière , le moin- dre changement d'air eft capable de pro- duire des fièvres qui naturalifent , pour ainfi dire , le corps dans un Pays , quel changement n'avons-nous pas à attendre de cette différence extraordinaire de cli- mat ,.qui doit produire des humeurs d'une denfué & d'une qualité fi différente > de Saint Domingue. j^-t H faut dans cette maladie dîilira„er deux temps principaux : le premier efî celui de la fièvre : le fécond eft celui de la métaftafede la maladie , dans laquelle ou le malade guérit, ou la nature ayant tait de vains efforts, fuccombe à la force os la maladie. Signes diagnopques. Dans le premier, le ma! fe déclare que!- quefois par unfriffon, mais plus fou. vent par une grande laffitude. La fièvre qui furvient, eft accompagnée de vives douleurs de tête & de reins, & d'un- pefanteur dans la région épigaflrique avec vomiffement ou envie de vomir! Le vomiffement eft plus ordinaire quand la ma.adie commence par le friffon La fièvre dure trois ou quatre jours fans don- ner de relâche au malade ; rarement con- tmue-t-elle jufqu'au cinquième. Pendant ce temps-là les malades font fort acca- bles ; ils ont le pouls élevé & fort fur- tout dans ceux dont le friffon a précédé Tome I, T :m 104 Hifioire des Maladies la fièvre. La peau eft féche & us , fib'dh atrafiirfum vd deorjum prodkrit y lahah, Aph, 22 , fiB, iv, Quibufcumquc ex morbis aciitis aut ex diuturnis .... bilis atra 5 yd fanguis ni^cr prodierït , poftridiï rnoriuntur. Aph, zt ^ ftct. iv. On doit- conûdérer dans la cure de 1 %q6 Hîftoire des Maladies' cette maladie trois temps., le temps &^ la fièvre, le temps du calme qui lui fuc- £^de , ô: le temps de la terminaifon. Tous ceux qui guériffent du mal de Siam 5 ne le tirent des bras de la mort que lorfque la nature leur procure un flux de ventre abondant, un dépôt confidé- rable fur quelque partie externe, ou par une évacuation abondante d'urines noi* res; mais cette dernière crife eft bien rare. Toutes les indicationsdoivent donc tendre à féconder ia nature , pour pouf^ fer & chaffer la ^matière morbifique par quelqu'une de ces crifes. La plus commune & ia plus falutaire eft le flux de ventre. On doit donc l'a- voir particulièrement en vue. Les pre- mières voies doivent avoir un droit par- ticulier fur la crife qui termine une ma- ladie de pourriture. H eil rare que la fe- Hience de la pourriture n'y prenne fon ©rigme» Auffi obfervons-nous dansTouverture des cadavres morts de la maladie de de Saint. Domlriguel 207^ Slam , que îa gangrené ne fe trouve ja- mais en plus grande quantité ailleurs que dans les inteftins , quoique la ibupleiïe ^ la flaccidité de ces parties ne puiiTens nous mettre en droit d'accufer aucun: engorgement inflammatoire, ■ Il faut donc ne prendre que îès indi- cations générales, s'attacher à dimimier la plénitude & le trop grand engorge-- ment, délayer & ramollir, fe conduire en un mot de façon, que n'afFoibliflant pas trop la nature y. on ne la mette pas^ hors d'état de foutenir raffàifTement ou; î'accablement qui fiiccede à la fièvre; & qu'on lui laiiTe aîTez de force pour travailler elle-même à i'expulfion de k-; matière morbifique. Dans ctttQ vue nous proportionne- rons les faignées à la difpofition qu'on î^ncontre dans les malades. Nous les vui-^ derons dans les commeneemens par des lavemens purgatifs, enfuite émolliens':. on leur appliquera de bouine heure des •fomentations ^ cataplafmes émolliens m 2oS Hifioire des Maladies fur toute rétendue du ventre , & od aura foin de le leur entretenir ehaud. lî faut les exhorter à boire fouvent, & choi- fir dans les boifTons délayantes celles qiû flattent le plus leur goût , parée que le vomiiTement ou l'envie de vomir met un grand obftacle au défir de boire ; Se même les malades qui ont ce fymptôme font peu altérés , quoiqu'ils- paroiffent avoir beaucoup de chaleur. On trouvera dans le Recueil des remèdes qui termine FHidoire des Maladies ,les formules des lavemens , catapîafmes , bouillons &: ti- fanes qui conviennent. Je fais un grand cas du petit lait clair fait avec la crème, ^e tartre , & altéré par le creffon qu'on y fait infufer , ou d'une légère décoc- tion de tamarin légèrement édulcorée, & à leur défaut , d'une foible limonade avec l'orange fauvage , & une croûte de pain rôtie pour en ôter la crudité. Il con- vient d'entremêler cette boiffon de quet ques taffes d'infufion de thé & d'anis înêiés enfemble ,. ôc encore mieux de de Saint Dominme, 209 creflbn , li le malade n'y répugne point. Pour peu que la fièvre paroifle fe cal- mer , il ne convient dIus de faisfner , & je me détermine à Ja pnrgaîion , que j'ad- niiniflre fuivant les différentes cfrconf- tances où j'apperçois les malades; car s'ils paroifTent avoir de la difpofition à avoir le ventre libre , je mets feulement dans le petit lait du fe! d'epfom ou de faignette , ou feuî , ou avec quelques grains de poudre cornacbine que j'ajoute dans la féconde ou troifiéme prile^fi?!- vant ïè(ï^ que vi^wt avoir la première» J'emploie plus ordinairement rém^éti- que en lavage, parce qu'outre que cette façon de purger ne répugne point au malade , elle féconde d'autant mieux Tin- dication , qu'on fe propofe de décharc^er , s'il fe peut , avant le développement à^s mauvais principes, les premières voies de la matière morbifique qui les fur- charge. Quelque prenante que paroiiTe l'mdication de la pourriture , je n'ai re- cours aux acides un peu forts dans les I i!i!:'(>i %ïQ Hijloîre des Maladies boiffons , comme jus d'ofeille, dé ci- - tron 5 & erprit de vitriol , que lorfqu'il faut abfolument prendre le parti de cal- mer le vomlffement ou Thémorragie , parce qu'ils refferrent le ventre , & font contraires à la crife la plus générale Ô5 la plus ordinaire. Ils font après tout or- dinairement infru£Vueux, ^ je préfère une légère infufioti de canêlle dans k thé , qui réuffit beaucoup mieux. Lorfque le malade efl au fécond terme de la maladie , c'eil-à-dire que la fièvre a totalement baillé , il faut agir fuivant les différentes circonllances où il peut fe trouver. Les malades paroiffent ordi- nairement tranquilles, & feulement abat- tus pendant vingt-quatre heures , quel- quefois deux jours, c'eft-à-dire jufqu'aii cinquième , oii il commence à paroître des fignes de diffolution.On entretient le malade pendant ce temps dans Tufage des boiffons 5c des lavemens qui convien- nent , ou pour augmenter la liberté du -centre, fi elle neil pas fuitifante^, ou de. Saint Domingne, lit pour îa procurer. On ajoute dans ieur tifane quelques racines apéritives , d^af- perges, de chiendent, d'ofeille , & le fel de nître. Si ihî vomifiement trop con- fidérable fatigue le malade , ce qui efi: nn mauvais iigne, (car quand on l'aob- fervé dans la fièvre , il ceffe ordinaire- ment pendant ce temps ) on tentera quel- ques acides, le jus d'ananas, de citron, i'eau des Carmes, les épirhêmes fur Fef- tomac, & on redoublera Tufage desla- vemens , à moins qu'une foibiefTe trop grande n'oblige de les fufpendre. Il ne convient pas encore dans ce temps d^ la mamdie de faire prendre des purga- tifs un peu forts ; on courroit rifque de faire tomber le malade dans un afFaiiTe- ment ou dans des foiblefles auxquelles i! pourroit fuccomber. îl convient feule- ment, il on lui trouve ailez de force , d'aiguifer ks bouillons ou tifanes de quel* que fel laxatif, ou ày faire fondre un peu de manne , fi le malade peut en fup- porter lodeur & le goût ^ Ce dernier :]i;ii 2,12 HiJÎQlre des Maladies laxatif efî à préférer à tous les autres | il m'a paru le mieux réuilir. Quand par le changement des fymp- tômes on découvre que le développe- ment des mauvais principes eft fait , & que le fang en efl infsdté , on y appli- que les remèdes qui paroiiTent convenir pour les combattre. Il n'y en a point pour le vomifTement noir &c le flux de ventre noir : néanmoins pour celui-ci , fur-tout quand la fuppreïïion d'urine n'eft point de la partie , car c'eil alors un figce mortel, on donne au malade, fuivant k degré de force ou de foiblefTe qu'il a , de légers cordiaux , comme con- fedion d'alkermès , poudre de vipère , infufion d'eau de canelle ; on y joint quelquefois des purgatifs , afin de ba- layer les mauvaifes matières, qui en s'ar- rêtant ne peuvent qu'avancer la corrup- tion. Dans les évacuations trop abon- dantes qui jettent le malade dans une trop grande foiblefîe , j'ai recours avec fuccès à l'opium , à un tiers , à un quart de Saint Domînguéi 215 de grain réitéré ; il procure un peu de fommeil, qui réparant les forces, met k malade en état de foutenir l'efFet des . purgatifs qu'on efl obligé de réitérer. Dans les vomiffem.ens continuels qui perfiilent après la cefTation de la fièvre, e'efl-à-dire dans le commencement du troifiéme temps de îa maladie , j'ai eu un bon fuccès du bain dans lequel on laiffe & on remet le malade fuivant ks forces. L'hiftoire neuvième en efl une preuve. Mais fi le vomiffement eft noir, ce remède n'edpîus de faifon , ainfi qu'il paroît dans le malade de l'hiiîoire dixié^ me. Les remèdes y deviennent inutiles. AufTi-tôt qu'un malade fe plaint de quelque douleur à quelque extrémité , il faut fur le champ y appliquer des fo- mentations ou cataplafmes adouciffans, ëmoUiens & maturatifs , & envelopper tbute la partie, afin d'attirer fur cette 'partie le plus de matières marbifiques qu'il fera poffibîe , & y procurer un dé- pôt qu'on ouvrira dès qu'il paroitra quel^. ^14 Bifioin des Maladies £ le nitre , ks bouillons ou apozémes de laitue , de pourpier , & la chicorée blanche. Les urines devinrent abondan*- tes , mais peu chargées; la jauniffe au- d'un tempérament vif, bilieux &: mélanGbîique , fut attao.ué par des frif- fons , douleurs de tèlQ & de reins , d'une fièvre confidérable , qui fut les cinq pre- miers jours double-tierce. L'accès du 5. dura fans relâche avec grand afToupiffe- ment ; fur la fin le vomiiTement furvint ?- & le hos petit & ferré, quelquefois mou& flafque ;le ven- 'tre eft toujours gonflé, les hypocondres ■élevés , quelquefois douloureux, & i] y a un refferrement & une conftipation «énéraleduventrequifemblenfcaraae- rifer ces maladies. La tête eft touiours prife,mais difltéremment ; dans les uns il V a affoupiffement, dans les autres un délire , tnais qui n'eft pas bien VIO, ient. de Saint Domingue. 2. a, Cesfymptômesfe divifentindifFérem- ment; car on peut compter deuxefpeces différentes de ces fièvres. L'une eu une fièvre que nous appelions doubîe-tieixe biheufe, & l'autre double-tierce Ivm- phatique ou pitukeufe. Dans la première erpece les hypocondres font peu gon- ftes &pl„s douloureux, la langue char- gée d une humeur plus /aune &plus ari- de,Iepoulsaffez petit, mais ferré; le dehre s'y joint plus ordinairement , & les accès fuivent mieux l'ordre auouel >ls k font affujettis dès le commence- ment Cette efpece attaque princioaie- ment dans les faifons les plus chaudes, les gens qui ont les humeurs acres & U tempérament plus bilieux. Les fièvres lymphatiques au contra.Ve ont quelque chofe de moins violent & de moms tumultueux, mais elles ont auffi plus d obflmation & plus de difficulté à guenr. Leventreeftplusgonflé.quoiqueplus' fouple, les hypocondres fonr moins dou- Lii H 244 Hif^re des MaladUs ioureux, le pouls eft flafque & moni i'urine moins rouge , mais plus crue , point de délire , mais un abattement con- fidérable. Les accès ne fuivent pas à beau- coup près la même régularité que dans la fièvre double-tierce biiieufe. Le petit prend fouvent le caraaere du grand, le grand au contraire celui du petit. Dan$ la première les .accès font plus forts, piais ils font auffi plus courts. Dans celle- ci la longueur des accès eft remarquable, ;is empiètent conftdérablement l'un fur l'autre , & c'eft une des marques aux- ouelles j'ai plus fouvent & mieux re- connu le caratlere des fièvres double, tierces lymphatiques. _ ' La terminaifon la plus ordinaire de ces fièvres, c'eft le dévoiement. Quand il furvient annoncé par les fignes qui doi- vent nous faire conclure une diminution de la maladie , il eft heureux 5 cependant une terminaifon funefte en particuber aux fièvres double-tierces lymphatiques , ^ qu'on ne eonnoît point dans les fièvres 'de. Saint Domingue, 24 J Bîîieufes , c'efl un flux cbyienx qui fur- vient quand îe malade efl aux abois , & qui finit & la conflipation & îa vie. Dans les fièvres biîieufes au contraire, lî l'on voit un devoiement bilieux 5 c'efl ordinairement pour le bien du malade , & il eil précédé de fignes heureux qu'on île volt pas dans les fièvres lymphati- ques. L'engorgement des vifceres du bas^ ventre &des glandes du méfentere, ed aflez démontré par tous ces fymptômes. Dans Tune & l'autre efpece de ces fiè- vres , toute la force eil opprimée à la fois par ces arrêts univerfels de liqueurs; niais il paroit que dans Teipece bilieufe les vifceres en font le fiége principal ; êi dans l'efpece de fièvre lymphatique , ce font les parties glanduîeufes. L'ouverture du cadavre m'a démontré ctiiQ conjec- ture; car dans la première efpece nous avons trouvé , comme Baglivi , le foie , Teflomac , le m.éi'entere engorgés ; mais dans la féconde efpece , les glandes L II] .2-46 H'ifloire des Maladies étoient prifes en particulier , & princi- palement toutes les parties qui avoifi- nent le pancréas. Cette partie elle-mê- me étoiî dans les uns enflammée, & fquir- reufe dans les autres, mais dans tous \q^ fujets généralement affedée ; ce qui n'eft pas d'une utilité médiocre pour faire en- tendre aux Médecins d'où vient ce gon- flement fouple, cette conftipation rebelle qui caraftdrife notre efpece^ ÔC enfin le flux chyîeux qui la termine. :. Baglivi a remarqué d'après Fontanus ; que ces fièvres font rares dans les Pays froids, & que les Pays auxquels ap- partiennent ces hémitriîées, font les Pays chauds. Fréquentes funt in jEthiopid& in Italid, C'qû de ces efpeces de fièvres defquelles Hippocrate àitiFehes exhy-^ pochondr'iorUm dolore malignes. Pour le traitement ^ la nature des par* îies engorgées & de Tengorgement mê- me 5 nous doit démontrer combien Ba- glivi a raifon de nous recommander de nous armer de patience; car nous nç "de Saint Domingue. 147 ^cuvons pas compter fur les jours cri- tiques ; & l'inflexibilité du ventre nous démontre affezque nous n'avons guères à attendre de l'art qu'une mitigation des fymptômes , & des habiles Médecins qu'une attention exafte à fuivre les voies de la nature , quitend affez généralement à fe débarraffer pair les évacuations du bas-ventre. /. Histoire^ VnQ Dame âgée de quarante-neuf ans J qui depuis plus d'un an n*avoit plus fes règles , d'un tempérament robufte , mé- lancolique-bilieux , après cinq à fîx purs •d'indîfpofition pour laquelle elle fe fit faigner au bras , fut attaquée le 23 Dé- cembre 1746 d'une petite fièvre qui fut fuivie d'un redoublement accompagné d'envie de vomir. Elle fut faignée le 1^ au matin ; elle pafTa la journée fans fiè- vre ; une légère chaleur accompagnée* d'inquiétudes & de douleurs de tête , an- nonça vers les neuf heures du foir le pe-- L iv 24^ ^ ^ifiOire- des Maladies tit accès , qui continua iiifqu'à huit heu- res du matin, où le friffon & le vomif- fement déclarèrent le grand. Cesfymp- îômes accompagnés d'une grande agita- tion & de beaucoup d'inquiétudes , fu- rent confidérables jufqu'après midi, fai>s que d'ailleurs la malade rendit , ni par haut ni par bas , aucune matière bilieufe: tout parut fe réduire à de vains efforts. La fièvre fe calma dans l'après-midi fans aucune apparence de crife , ô^ en fe cal- mant, fît tomber la malade dans un ac- cablement & une foibieiTe confidérables ayant les traits du vifage fort changés; & n'ayant point effuyé de maladie de- puis plus de huit ans, il devoityavoir de grands engorgemens qui pouvoient la faire périr le 5 ou le 7. Après avoir ré- fléchi fur les moyens que je pourrois employer pour prévenir ce fâcheux évé- nement, je penfai qu'il ne pouvoit y en avoir ac- compagnées de douleurs de îête , 6c fui- vies d'une grande chaleur, d'altération: & de beaucoup d'inquiétudes pendant la nuit. Ce petit accès avoit avancé de trois^ heures r le grand avança à proportion.^ Le friflbn;, la concentration , le vomif- fement & les agitations furent eonfidé-- fables ; la malade tomboit de temps en? temps en foibiefie. Ces fymptômes fe calmèrent après-midi , & le calme fur fuivi d'une moiteur qui fe termina en une petite fueur qui fit mouiller une che- mife. La malade fut deux ou trois fois à k felle 5 & pafla la nuit affez tranquiile- înent. Ayant appris le matin qu'elle avoit L. y 1^0 Hijloin des Maladies évacué deux ou trois fols pendant la^ nuit j &: que les matières étoient bilieu- fes, je me déterminai à la purger avec une tiiane royaîe ; elle en- prit deux ver- res qui la firent aller quinze à dix-huit fois. Il n'y eut que les cinq à fix pre- mières felles bilieufes; les autres étoient de la couleur ô£ de la nature des boif- fons qu^elIe avoit priiés r ce que j'ai oh- fervé dans prefque tous les malades, ôc à mon égard dans les fréquentes mala- dies-que j'ai effuyées à Saint Domingue ; ce qui me fait croire qu'en fait d'évacua- î-îons du ventre procurées par les purga- tifs y il n'y a que les premiieres felles d'u- tiles , & que les autres , dès qu'elles ne font pas teintes d'humeurs excrémen- tielles 5 bien loin d'être avantageufes , doivent être nuifibles , parce qu'elles ne peuvent que produire un plus grand defiéchement dans les folides ôc les li- quides. Le 29 du mois , qui étoit le fut de la maladie, le petit accès avança de trois keur es ^, ôc s'annonça par- un léger de Saint Homlngue, lyi friflbn , qui fut bientôt fuivi de chaleur, d'inquiétudes & de maux de tête plus eonfidérables que dans les précëdens; je m'attendis à un afTaut bien violent , quand le grand lui fuccéderoit^ : il avança pa- reillement de trois heures ; l'accable- ment , les éclipfes du pouls, la perte de eonnoiffance , & les foibleffes fréquen- tes, donnèrent lieu de s'allarmer,&je me trouvai dans ces circonftances où il? faut remédier au mal le plus preffant. Je' £s prendre à la malade quelques cuille-- 3'ées d'une potion faite avec la caneîle, les= doux de girofle & le fucre , bouillis en parties égales d'eau & de vin, Après' deux heures de combat entre la vie 6ê- la mort, la nature l'emporta; le ventre fe déboucha , & les évacuations furent fi fréquentes & fi abondantes pendant cinq ou fix heures, qu'on étoit conti- nuellement occupé à changer la malade. Les matières qu'elle rendbit étoient fé- tides & jaunes. On lui fit prendre deux à- trois fois , pendant les effets de cette L. vj. 2, 5 i Hijloîre des Maladies crife , une cuillerée de la potion. La fiieuf fe joignit à cette évacuation , &: la ma- lade mouilla deux chemifes. Elle conti- nua d'évaciier pendant la nuit , & le len- demain elle parut tranquille ; deux go- belets de petit lait fuiiirent pour entre- tenir les évacuatior-S. Cependant le huit de la maladie , le petit accès avança de trois heures , & fe déclara par un frif- fon plus fort &: plus long qu'il n'avoit fait , & par des envias de vomir que la malade n'avoit point encore eues; ce qui me fit juger que le grand , qui lui fuccéderoit, continueroit en façon de redoublement , c'eft-à-dire fans être ac- compagné des fymptômes ordinaires i l'avance des acc^ efl un figne certain de l'augmentation 5 ou du moins de l'état de la maladie. Ce petit accès fut très- yioleat ,, & la malade fut toute la nuit dansuae grande altération ôc une chaleur ardente ; elle fut très-agitée. Il n'y eut de fîgne de grand accès qu'un relTerrement ou une légère concentration du pouls > ôc dt Saint Domlngue, 25^ une froideur qui dura demi-heure ou trois quarts d'heure. D'ailleurs , à l'exception de raccablement & des foibleffes > il pa- rut, pour la force, de la même nature que le petit. Cet accablement 6c ces foi- blefles augmentèrent quand la crife ap- procha; mais ces fignes ne furent pas fi efficaces qu'au feptiérae jour : une éva- cuation, pareille à la pi-écédents la difîî- pa. Cette évacuation continua pendant la nuit, & on la prolongea le lendemain par deux gobelets de petit lait , ainfi qu'on Favoit pratiqué à la fin de l'autre crife. La malade eut une faeur plus forte & plus longue. Le 10 le petit accès n'avança point : il prit feulement h peu près à la même heure que le huitième jour, ^ il' commença par un léger friffon &: quel- ques envies de vomir ril pamt confidé- rable à la malade , mais je ir'en eus point d'inquiétude. Auffi le matin , bien loin de trouver de la £evre à la malade , je la. vis au contraire dans une moiteur qui perfévéra tout le jour. Le 12. il n'y eut i 1^4 Hiflolre des Maladies qu'un accès de fept à huit heures , quî revint de trois en trois jours pendant Fefpace de huit à dix jours, & qui obli- gea d'avoir recours à quelques purga- tions , le petit lait dont la malade con- tinuoit de faire ulage , ne faifant plu^ d'efFet. Les fymptômes que j'obrervai le troî- fiéme jour dans la maladie que je viens de décrire, me déterminèrent à admi- niflrer les remèdes qui pouvoient tendre au relâchement, tout indiquant & mar- quant une plénitude & un engorgement fi eonlidérables , qu'on avoit tout lieu d'ap- préhender au cinquième, ou tout au plus tard au feptiéme, une fiifFocation : ce qu'il efl ordinaire d'obferver dans ces climats à l'égard de ceux qui périffent le cinquième ou feptiéme jour des fièvres double-tierces, & auxquels i'émétique m'a paru n'avoir d'autre effet que d'au- gmenter la concentration, qui ne dé- tachant par les fecouiTes qu'il procure que les matières des premières voies p^ ' it Saint D 0771177 giiel s-jj- fans rîen ôter des ernbafras qui font dans le centre des vifeeres, il ne peut que les augmenter par la preiTion qu'il leur occafionne ; preflion d'autant plus fetale, qu'elle fortifie le reiTort des fibres,, bien loin de concourir au relâchement. H convient donc mieux d'avoir re- cours aux bains, aux îavemens & aux faignées, qui font les feuls remèdes dont on puifle efpérer quelque fuccès. On doit y avoir recours lorfque les deux accès fe joignent dès les premiers jours, &: dans lefquels le grand ne fe termine pas par une crife, ou dont la crife ne paroît pas proportionnelle à la violence de l'accès , parce que l'union ou la con* tiguité de ces deux accès , dès le com- mencement de la maladie , eil un figne certain de turgefcence ou de plénitude abondante ^ & que la privation de crife femble annoncer une concentration qui provient de l'état d'oppreiFxOn oii fe trouve la nature. j n )'li ':!•' 2,56 Hijîôln des Maladks I L H I s t o I R É. Une jeune Dame de vingt-trois à vingt-quatre ans , d'un tempérament re- plet, fanguin- bilieux , ayant le eou court 5 oc à.\mQ famiUe fujette à l'apo- plexie , eut une pefanteur , des ©ngour- diffemens confidérables , fuivis de mal de tête"& de fièvre, qui fe calmèrent au bout de huit à dix heures par une lé- gère moiteur. Elle ne reffentit enfuite que la pefanteur;. elle fut tranquille juf^ qu'au lendemain au foir , oii elle fentit un grand mal & un gonflement au cou qui i'empêchoit de tourner la tête ; la langue devint épaifle & bégayante avec difficulté d'avaler. Elle fe fit ^ire une copieufe faignée an bras ; elle eut toute la nuit un violent mal de tête. Le trois, le mal de tête diminua le matin , & elle fut fans fièvre; mais il revint à ^di ac- compagné d'un grand engourdifTement. Le Chirurgien la faigna du pied le foir. B ■""■"■■■■■»■- de Saint Domwme, ^57 ce qui calma tout y dc lui procura une nuit tranquille. Je fus appelle le quatre. Je trouvai la malade dans un frifTonne- ment qui duroit depuis deux heures , avec des envies de vomir , &i le vifage fort rouge. Je la fis faigner du bras dans le fort de l'accès. J'aurois fouhaité que le Chirurgien en eût fait une ou deux pa- reilles au lieu de celle du pied ; mais je n'ai encore pu parvenir à corriger les Chirurgiens du Pays à ce fujet , ni à leur faire comprendre mes raifons. Ils atta- quent toujours le fymptôme le plus ap- parent , fans faire attention à la caufe. La fièvre 6c le mal de tètQ furent con- fidérables, & fe terminèrent par une fueur peu abondante ; j'ordonnai dans le déclin deux lavemens très -purgatifs 5 parce qu'elle garda le premier plus de deux heures, Se qu'elle le rendit fans excrémens. Le fécond eut plus d'effet. Elle pafTa ime nuit affez tranquille; le quatrième au matin elle eut le pouls fiévreux 6c de la chaleur qui fe difïi- à^ 158 Hifloin des Maladie» perent vers midi ; je la purgeai avec la caffe , le (éné Se le fel d'epfom : elle fut neuf à dix fois à la felle. La nuit fut inquiétée: inquiétante. Le matin, vers les huit heures , le friflbn étoit confidé- rable , accompagné de grands vomifle- mens , 6c fuivi d'une fièvre très -arden- te, &c d'une (i vive douleur de tête, que la mabde jettoit les hauts cris. Le vomiiTement dura quatre à cinq heures , èc ia fièvre perfifla jufqu'à minuit ; la malade n'ûrinoit point , & fe plaignoit d'une douleur au bas- ventre , pour la- quelle je lui appliquai un cataplafme. La fueur fut peu abondante , & le pouls refe toujours fiévreux ; ce qui me fit beau- coup appréhender pour le fept. On lut donna deux lavemens émolliens ; elle garda le premier quatre heures, le fé- cond deux heures, & les rendit à peiî près comme elle les avoit pris. Le ma- tin la malade mouilla une chemife. Je îa purgeai comme auparavant , &c la m.é- deeine eut le même effet. A cinq heures- ■imBii,(ifc..^„^..w de Saint Domingue, i ^a diifoîr,ily eut un frilTon conficlérable auquel je ne m'atîendois pas , & ce frif- fon régla dans la fuite les temps de la maladie. Le vomiffement fe mit de la partie ; il ne dura pas , & il fut fuivi d'une fièvre accompagnée de douleur à la tête. Une fueur peu abondante qui parut trois ou quatre heures après , cal- ma cette douleur; elle fut accompagnée de trois petites fe lies de matières un pea bilieufes. Cette fueur fut interrompue vers minuit par un redoublement qui di- mimia à fix heures du matin par unefim- pie moiteur, à laquelle vers les neuf heures fuccéda un grand redoublement qui fut précédé de naufées & de vomif- fement qui durèrent peu. La jnalade fut peu ahérée , & fe plaignit moins de la tête ; mais elle fut dans de grandes in- quiétudes. 11 parut vers midi une moi- teur qui fut fuivie de fueurs affez abon- dantes ; le ventre fe lâcha trois à quatre fois en petite quantité. Ces crifes con- tinuèrent pendant la nuit : elle mouilla - n il 'ii Il , I ■ ,^y 260 Hijloin des Maladies fix à.fept chemifes , & urina quatre I cinq fois , ce qui n'étoit point encore arrivé. Elle dormit à différentes reprifes tranquillement. Le huit, efpérant beait- eoup de i'événement dont j'avois été té- moin , &; de la diipofition que îa ma- lade avoit d'aller à la felle , je lui fis prendre-une once de manne, demi-gros de follicules de féné , & lifn gros de fol d'epfom. Elle la vomit demi-heure après. Je réitérai la même dofe, qu'elle garda, ■ & qui la fit aller quatre à cinq fois à la felle jufqu'à midi , oii parurent les avant- coureurs à\\n frillbn qui devint confl- dérable, & qui fut accompagné d'une grande altération , d'une concentration de pouls j| de foiblefTe , 6c de trois à quatre violens vomiiTemens. Cet état dura trois heures ^& fut fuivi d'une fiè- vre & d'une chaleur très- ardente , fans cependant qu'il y eût douleur de tête^ La malade fut dans cet état jufques vers minuit , où il parut une foible remif- fion, à laquelle fuccéda un redouble» is ■■■ww^r.^. de Saïni Domlngue. 261 ïîîent qui relâcha un peu vers les cinq heures du matin parunefoible moiteur, & qui reprit jufqu'à dix heures. Le peu d'urines qu'elle rendit étolt comme de ia forte bière , & Ton pouls fut toute la nuit flafque &: prefque ondulant. A dix heures le grand redoublement fe déclara par une augmentation de chaleur, ua pouls plus plein , u^ grand accablement, une grande tenfion de ventre, & une légère douleur de tête , fans vomiûe- ment ni altération. Ces fymptômes du- rèrent jufqu'à midi , où la malade tomba dans une grande défaillance & une perte de connoiflance,qui m'obligèrent d'avoir recours à une potion compofée d'un gros de confe£lion d'alkermès, deux grains de kermès minéral , & quatre grains de poudre de vipère , dont je ne lui fis prendre que la moitié , par rapport à la vive chaleur qui furvint. Vers deux heu- res après - midi parut une moiteur qui fut toujours en augmentant jufqu'à cinq Jieures , oii la malade niouilla unç che^^ iffiBi Il ^ %6i HiJÎGlre des Maladies Hiife. La connoiflance ne revint que vers les huit à neuf heures , & la fueur perfifta jufqu'à une heure après minuit. Le ventre fe relâcha , la malade ren- dit un peu de matières biiieufes , & urina plus abondamment que de coutume. Elle fut trois fois dans la nuit à la felle , ren- dant les mêmes matières. Depuis mrdi jufqu'à fix heures le pouls fut extrême- ment petit , concentré, frémillant com- me celui d'une agonifante ; mais la ref- piration étant prefque toujours naturel- le 5 fut le feul figne qui me donna tou- jours lieu d*efpérer. La langue , quoique humide 5 étoit un peu noire vers le mi- lieu. Après une crife abondante de fueurs, le calme fuccéda , & la malade ayant eu deux à trois heures d'un fommeil afTez tranquille , je lui fis prendre à quatre heures du matin une once de manne & dix-huit grains de poudre cornachine dans du petit îait , qu'elle vomit en par- tie. Je réitérai la même prife à fix heures; Elle fut à la felle plufieurs fois en petite dt Saint Domlngiie, 1(^9 quantité. Les matières étoient liées, très-fétides , & d'un jaune de fafran. Elle prit une troifiéme dofe à neuf heures; fa boiflbn étoit du thé &: delà décoc- tion de chiendent ; elle prenoit des bouil- lons de chicorée fauvage , d'épinars & de pourpier , avec un peu de beurre frais ; car elle vomifToit ceux de viande. Le dix, j'attendois avec inquiétude le retour de la fièvre ; pour peu qu elle eû$ avancé, j'eufT^ défeîpéré; mais elle re- tarda d'environ une heure; & lesavant-!» coureurs étant moindres , j'eus au con- traire lieu de bien augurer. En effet les accès furent beaucoup moins confidéra- blés , & fe terminèrent par une fueur aufïï abondante que la précédente; les urines furent abondantes & d'une couleur na- turelle avec un fédiment louable ; le re- doublement qui devoit être le plus fort, fut uniforme aux autres , & fe confondit avec le fécond. La langue devint plus chargée , & cette croûte noire qui étoit dans le milieu , augmenta beaucoup ; ce -2.64 Hlfloire des Maladies qui provenoit fans doute de ce que la matière étant délayée, & commençant à s'évacuer, foarniffoit une plus grande abondance a exhalalfons. La malade fut deux à trois fols à la felle : & aux deux dernières , les matières me parurent en très-petite quamité ; elles tenoient de la qualité du bouillon. Comme cette Dame étoit d'un tempérament très-conflipé , U qu'elle n'avoit point été malade de- puis huit à neuf ans , je n'en fus point furpris ; il fallait du temps pour le ré- tabliffement des incruftations que la qua- lité du tempérament & la longue fanté avoient produites. Sur ce fondement , je pronoiliquai que ia maladie feroit encore un peu longue, ce qui arriva ; car la fièvre conferva pendant fept à huit jours ie m.ême ordre , avec cette différence , que le premier accès retarda toujours, à la vérité lentement ; car le dix-neuf i! ne retardoit que de trois heures , U fe continuciî de façon , que ne paroiffant plus de marque d'aiitre redoublement , U fe de Saint Domîngue, 26^? fe termînoitpardesfiieurs extrêmement copieufes qui fatiguoient beaucoup la malade. La langue fe chargea de plus en plus, & devint noire; ce qui étoit un - figne d'une grande plénitude. Je fis cef- fer rufage des bouillons maigres 6c du petit lait, craignant que la qualité buti- reufe de l'un, & la qualité acide de l'au. tre , ne milTent obilacie à la guérifon , augmentant l'humeur bilieufe , & la coa- gulant. Je continuai de deux en deux jours, ou de trois en trois jours , les purgatifs, &je m.is la malade à l'ufage d'une tifane apéritive , faite avec le chiendent, les racines de chicorée fau- vage , d'ofeille , les doux rouilles & le nitre, & d'un opiate fait avec le quin- quma, la petite centaurée, l'iris de Flo- rence, & le fel d^abfynthe. Il fallut quit- ter l'opiate trois ou quatre jours. Bien loin d'avoir un bon effet, la fièvre per- fifta , & parut plus forte que de coutu- me. Il fallut revenir au bout de cinq à fix femaines à une tifane royale fort Tojne /. ^g u •J %66 Hlftoin des Maladies compofée. Je la prefcrlvis avec une poî- gnée de chicorée fauvage , fix gros de féné , demi- livre de caffe , trois onces de manne , & une once de fel d'epfom pour trois prifes. On ajouta , dans la première , 30 grains de poudre cornachine. Lama- Jade fut des deux premières prifes fi co- pieufement à la felle, rendant des matières de toutes couleurs , qu'elle ne prit point la troifiéme. Dès-lors la langue fe nettoya parfaitement ; la fièvre fut beaucoup moindre. On réitéra la même médecine, & la malade fe rétablit parfaitement; à l'exception qu'elle eut quelques petits- retours de fièvre dans la convalefcence qui fe diffiperent par quelques prifes de manne ôi de fébrifuges. Elle ne perdit de fon embonpoint qu'après l'effet des dernières médecines , & elle fut long- temps à revenir au point où elle étoit avant la maladie. Je ne me fuis comporté avec tant de ménagement dans cette maladie , que parce que j'avois à faire , comme je Tai oimngue. 2^7 déjà dit , à un tempérament extrême- ment replet, à l'égard duquel on doit tout cramdre, de teis tempéramens pé- riffant prefque tous à Saint Domingue par l'afFaiffement auquel ils font fuiets qiiand on les évacue trop vîte & 'trop abondamment , foit par les faignées . foit par les purgatifs. IIJ- H i s r o I R E. Une Dame de quarante ans , d'un tempérament fec & très-mélancolique agitée depuis plufieurs aanées de gran' des inquiétudes, & qui n'a voit ei. de- pms quatre ans d'autres maladies que des migrâmes, fut attaquée d'une fièvre dont les premiers accès parurent foibles Le mal de tête détermina le Chirurgien* après une faignée du bras , de lui en faire' une du pied II la purgea le jour du grand accès. La fièvre vint cinq à f.x heures après, & fut accompagnée d'une altéra- lion confîdérable , & d'une chaleur plus Vive qu'à l'ordinaire. Je fus appelle ce Mil 25 s Bljîolrc des Maladies jour-là pour voir la malade, que je trou* val fort agitée ôc fort inquiète. L'accès dura quinze à vingt heures, &: fe ter- mina par une foible fueur. La fièvre re^ prit raprès-midi par un léger friffon , dura à peu près le même temps que l'au. trç, & fe termina de U même façon* Comme la malade fe plaignoit de con. tinuelles envies de vomir , je lui fis pren- dre une dofe d'émétique en deux pri^ fes^ le remède fit peu d'effet, Je voulus tenter le furlendemain une purgation avec la manne , le fel d'epfom , l'agaric ; ^lle la vomit. 3'eus recours à la poudrç çornaçhine, qui n'opéra point. Les rè- gles parurent l'accès fuivant ; elles furent très-foibles , & difparurent totalement dans l'autre accès. Comme je m'étois ttrouvé abfent pendant cette révolution , oh ne fit rien à la malade ; ce que je défapprouvai d'autant plus que je fus obligé d'attendre la fin des deux accès qui s'étoient fort approchés , pour la lai- gner du pied, h n'ofols le faire pend^ni d& Saint DoTfîlngue* iê§ le cours de la fîevre , eu égard à Tacca** blement & aux foiblefTes qui prenoient fréquemment à la malade, & parce qu'elle n'avoit que de foibles marques de cri-- {es. Cette faignée ne rappella point les règles ; il n'en réfuîta d'autre changement dans la fièvre que l'union plus intime des accès. îl ne fut plus quéftion dès- lors que d'un feul accès qui prenoit pat un frifTonnement qui duroit cinq à fix heures; il fe terminoit par une limple moiteur. J'appréhendois d'autant plus 5 que la peîiteiTe du pouls &c une dou- leur iixe & profonde à la partie fupé- rieure de la région ombilicale , donnoit lieu de foupçonner une concei-itration , un dépôt dans le pancréas. La malade fut toujours conftamment û conflipée, qu'elle rendoit les lavemens comme elle les avoit pris. Elle pouvoit être dans le quinze ou feize de la maladie ; j'avois commencé de la voir le cinq ou lefix. 11 me parut que la fièvre tint pen- dant les douze premiers jours lecaradere M iij li vJ 2-70 Hifioire des Maladies d'une Rqvîq quotidienne affez uniforme, Tun & l'autre accès prenant à peu près à îa même heure & avec les mêmes fymptô- mes, avec cette feule différence, que dans l'un le friflbn, les envies de vomir , l'ai, îération & la douleur de tête étoient un peu plus forts. Cet accès cependant avança peu à peu, mais fi foiblement, qu'obfervant le petit augmenter 5c fe prolonger fans une diminution fenfible du grand , j'augurois mal. Il n*y eut qu'a- près la faignée du pied que la diminu- tion fut plus fenfible. Malgré cette favo- rable révolution , la privation de crife , la douleur iîxe du ventre qui étoit tou- jours accompagnée d'une confîipation opiniâtre , étoient de trop mauvais fignes pour efpérer une iifue favorable. Je pris le parti , pour prévenir \qs mauvaifes fui- tes qui pouvoient arriver , de mettre la malade à l'ufage des bains , Aqs apozê- mes faits avec la laitue , les épinars, le médecinier-bâtard. Après quatre à cinq jours d'ufagede ces remèdes, je tentai de Saint Domingue, lyi îa manne feule dans le petit lait avec la crème de tartre , quatre onces dans deux prifes. Le remède opéra cinq à fix fois , & fit rendre des matières très-fétides. Je réitérai le même remède deux jours de fuite. Chaque jour la iîevre retardoit d'environ une heure , Si finiffoit trois ou quatre heures plutôt , fans autre crife que la moiteur. Mais l'abondance des xirines, qui furent très-copieufes, depuis l'ufage des bains 6c des autres remèdes, y fuppléerent. Un opiate avec le quin- quina 5 l'iris de Florence , le fafran de Mars apéritif, & le fel armoniac , diffipa totalement la fièvre, dont le cours avoit duré vingt -quatre à vingt- cinq jours. Cefl la feule que je me rappelle avoir vu fi opiniâtre , & fe terminer auiîi favo- rablement , fans aucune évacuation cri- tique confidérable , par les fueurs & les felles. On eût dû dès le commencement avoir recours aux bains, &C faire trois à qua- tre faignées du bras, réfervant celle du M iy 17 2. Hiplre des Maladies pied pour le temps oii la malade efpé- roit ks règles , & ne tenter les purga- tifs qu'après être parvenu à relâcher les fbhdes. C'efl à quoi on ne fauroit trop s'attacher à l'égard des malades qui font îrès-conftipés j ce qui eft toujours ordi- naire aux mélancoliques, qui font, de tous les tempéramens , ceiîx dont les par- ties font plus roides & plus compares. La faignée du pied , trop précipitée par le Chirurgien , me lia tellement les mains, que l'état de foiblefTe où étoit la mala- de, m'empêcha de la faire réitérer, la réfervant d'ailleurs pour le temps des règles , au cas qu'elle eût été néceffaire, & comme je l'euffe fait faire , fi je me- tois trouvé à la fin de l'accès où elles avoient paru foiblement. I K Histoire. Un homme de 35 ans , Flamand de nation, d'un tempérament très -re- plet, ayant une voix argentine & une refpiration courte, fut attaqué , par laf- !!!■ "i^l de Saint Domîngue', 273 fitiide & pefanteur , accompagnée de chaleur , d'une petite fièvre avec envie de vomir. Les trois premiers jours on n'apperçut ni intervalle ni remifîion , &: le malade ne fe plaignoit que de chaleur. Il fut faigné deux fois dans trois jours , & le quatrième , n'appercevant plus de fièvre , je lui fis prendre deux grains d'é- înétique en deux prifes, qui le firent vo- mir deux à trois fois afiez copieufement , & aller fept à huit fois à la felîe , 011 il rendit des matières féreufes & un peu jaunes. Le cinq il eut un léger friflbn avec envie de vomir, & fuivi d'une fiè- vre un peu plus forte qu'à l'ordinaire , & accompagnée d'agitation , fans d'ail- leurs reffentir de douleur, fi ce n'eil qu'en touflant il fe plaignoit un peu de la tête. Cet accès dura fix heures , & fut fuivi d'une fueur très-abondante. Le fixiéme le malade paroifiant fans fièvre , & allant à la felle facilement fans aucun figne de flux de ventre , prit deux onces de manne qui le firent aller fept à huit M y 2.74 Hijloire des Maladies fois fans tranchée. Vers les cinq heures du foir , furvint une petite fièvre avec in- q\nétude & agitation. Le malade ne fe plaignoit d'ailleurs de rien;ll urinoltbien, mais les urines étoient crues. Lui ayant trouvé le matin la même fièvre , & ayant appris que pendant la nuit l'inquiétude avoitperfiflé, & qu'il avoit eu un peu de délire , je pris le parti d'ordonner une faignée du bras. Je me déterminai à cette faignée , parce qu'il avoit été deux àtrois fois à la felle vers la pointe du jour , & qu'il me parut de conféquence de pré- venir le grand accès. J'afîiftai à cette faignée , que je ^s faire de neuf à dix onces. Le pouls du malade changea peu. Le contraire étoit arrivé le foir du jour précédent ; car ayant été piqué , il tomba en foibleffe , & on ne put avoir de fang; ce qui avoit obligé de remettre la par- tie au lendemain. Le fang de la première palette devint verd , & celui des autres d'un rouge très-vermeil fans prefque de férofxtés , & le fang qui tomba îiir 4a de Saint Dom'ingue, ijtt remette , la teignit d un rouge pâle. Trois ou quatre heures après la faignée, le grand redoublement vint fans envie de vomir, mais avec friffon &: grande inquiétude ; Us extrémités devinrent un peu froides, ie pouls très-petit, & la refpiration très -courte. Deux heures après , parut une fueur affez abondante & froide ; mais le pouls fut toujours très- mauvais 5 devint frémillant, & le ma- lade mourut en parlant, après avoir bu im verre de tifane. Je fis réflexion fur l'événement qui avoit fuivi la faignée, & je me repro- chai d'avoir pris ce parti , ou du moins de l'avoir fait faire trop copieufe. F, Histoire, Un Négociant du Cap , d'un tempé- rament fanguin-bilieux , foible de la poi- trine , ayant reçu une très- mauvaife nouvelle, fut attaqué par grande lafîî- tude, pefanteur, engourdifTement & vives douleurs de tête, d'une fîevre qui M vj 27^ Sljlo'irc des Maladies fut continue. Les trois à quatre premiers Jours on le faigna une fois du bras & deux fois du pied très copieufement. La fièvre fe calma par une légère fueur , & il y eut un aiTez long intervalle , dans le- quel on le purgea avec l'eau de caffe ai- guifée de fel d'epfom. Dans l'accès du cinq, il eut un affoupiffement ; on le purgea le fix; le fept il fut en léthargie pendant tout l'accès, qui fe termina par fueur. On réitéra l'eau de caiTe. Voilà tout ce que j'en pus favoir. Le neuf on m'appella ; car il n'eJfl pas à la portée de nos Chirurgiens de faire attention à la nature des crifes, à celle des accès & des redoublemens. Comment y feroient- ils attention? puifque par la manière dont on débute dans cette maladie , le même Chirurgien fait la même faute que dans la précédente ; & quand je la lui repréfentai , il n'eut d'autre raifon à in'apporter que le mal de ièlQ, Ce qu'il y a de fâcheux pour un Médecin dans une pareille circonflance , c'eft qu'il ne de Saint Domlngne* %jj peut réparer de telles fautes, & qu'on lui impute les fâcheux évériemens qui en réfultent. Je trouvai le malade dans un affoupiffement , dont on le faifoit cepen- dant fortir en le fecouant. Ses jqwX étoient , dans cet aflbupiffement , prefque toujours ouverts , vifs & clairs. Il re- muoit continuellement les lèvres comme s'il eût voulu parler , ou qu'il rêvât. Sa langue étoit naturelle & humide. Il avoit une légère moiteur : fon pouls étoit très- fréquent & très-variant , parce qu'il étoit beaucoup convulfif , d'ailleurs aflez fou- pîe. Il urinoit beaucoup y mais une urine claire , & ne fe plaignoit de rien. Il al* loit facilement à la felle, pour peu qu'on lui donnât des lavemens ; mais il les ren- doit comme il les prenoit , & il fut vingt- quatre heures dans cet état^ ayant de petits redoublemens qui étoient marqués par une féchereffe , & fuivis d'une pe- tite moiteur : ils duroient trois ou quatre heures, & fe fuccédoient hs uns aux autres. Au bout de ces 24 heures 3; ^7^ Hlfiolre des Maladies le malade revint à lui , & me reconnut ; il parut raffuré; iln'avoit mouillé qu'une feule chemife, ce qui me parut de mau- vais augure , parce que la crife n'étant point proportionnée aux accidens que j'avois remarqués , faifoit connoître une concentration générale; & ce qui y met- toit le comble , c'efl qu'il parloit & fe levoit fans fe plaindre d'aucune dou- leur , & qu'en parlant il retomboit dans des rêveries. Il fut cinq à fix heures dans cet état. Je le fis faigner de la gorge ; on îie tira qu'une bonne palette , parce que le fang me parut diffous. On lur appli- qua les véfîcatoires à la nuque du cou & aux jambes. Il retomba dans les mê- mes accidens du jour précédent , & ils fe terminèrent de la même façon. Les véfîcatoires furent fi long-temps à opé- rer, qu'on ne les leva que le lendemain. Ils tirèrent peu. Cet effet ne fit qu'au- gmenter le mauvais pronoflic que j'en avois tiré. On lui donna quelques ver- res d'eau, de çafTe nitrée, qu'il rendit de, Saint Domlngue, 279 fans changement de couleur. Dans Ta- près-midi les accidens reparurent moin- dres ; le malade eut plus de connoiffan- ce , moins de convulfions , plus de moi- teur. Je lui a vois fait faire pour boifîbn une légère teinture de café. Il eut une nuit moins agitée & plus tranquille que de coutume. Je continuai l'eau de caffe ; il la rendit , ainfi que les bouillons , fans prefque d'altération , & les vélicatoires ne fuppuroient prefque point. Le malade cependant parut encore mieux, quoi- qu'il^ût toujours le pouls convulfif. Il fe crut fi bien le lendemain , qu'il fe fit faire la barbe , & qu'il ordonna d'aller chercher fa chaife pour aller à la plaine. Le foir je le laifTai affez tranquille ; mais je trouvai le lendemain un grand chan- gement ; il étoit fans connoiflance , dans une grande chaleur, des mouvemens convulfifs qui s'étendoient par fecoufles jufqu'aux épaules , &: un ris fardonique continuel. On me dit qu'il avoit été toute la nuit fort agité. Tous ces fymptômes iSo Hifloire des Maladies augmentèrent jurqu'à ce qu'il mouruf. Après la mort , il rendit beaucoup de ma- tières purulentes par les oreilles, le nez & la bouche. FL Histoire. Un Chirurgien , âgé de trente ans , d'un tempérament aflez fort , fans être replet , bilieux-fanguin , fut attaqué d'une iievre double-tierce , dans laquelle il fe fît faigner les premiers jours deux fois du bras , & purger une fois. Je le trouvai le cinq fort agité, ayant le pouls très- ferré & un peu concentré, les extrémi- tés froides , fe plaignant d'un grand mal de tête. Il vomiffoit & alloit beaucoup à la felle , jufqu'à ce que la moiteur fuc- cédât, & qu'il furvînt une fueur, qui d'ailleurs ne parut pas côpieufe. Lelixié- me, tout étant calme, je confeillai au malade une purgation , avec une once de manne , & deux gros de fel d'epfom , qu'il réitéreroit trois heures après , fuivant l'effet qu'elle auroit. Le feptiéme jour, le de Saint Domingue, iSî malade me dit avoir été purgé douce- ment ; mais qu'il appréhendoit d'autant plus le retour de la fièvre ^ qu'il fentoit un grand mal de tête. Son pouls, quoique ferré & fort, étoit un peu concentré. Je lui confeillai une faignée du pied , qu'il auroit foin de proportionnera fes forces. Elle fut petite ; mais deux à trois heures après, les fymptômes ordinaires étant furvcnus , le malade tomba fans connoif- fance , dans une agitation violente y les yeux égarés, fans pouîs, fans chaleur, & fut dans ctt état deux.joursfans qu'on f\\t le fouîager. On me dit qu'il s'étoit purgé violemment le jour précédent avec la manne , la rhubarbe , & plus d'une once de fel d'epfom. FIL H I s T O I R E. Un autre Chirurgien de 26 ans, d'ua tempérament fec-mélancohque & trèsr refferré , crut dès fon premier accès, être attaqué du mal de SiamJl fefit lui-même déuxfaignées copieufes,dont l'une s'étant if aSl Hijîolre des Maladies déliée, lui fit perdre beaucoup de fang. Le lendemain il fe purgea avec une dofe ordinaire d'émétique dans une feule prF- fe. Il ïut violemment purgé par haut Ô5 par bas. La fièvre parut en conféquence n'avoir aucune règle; car les redouble- mens qui étoient les moindres , devin- rent les plus forts ; il ne leur fuccédoit point de fueur^&on n'appercevoit qu'une légère moiteur ; ce qui joint à un grand feu & à un grand mal de tête , obligea d'en venir à des faignées du pied & de îa gorge , dans lefquelles le malade n'é- pargna pas le fang, étant dans le fyflême qu'on ne peut guérir que par les fai- gnées. Pendant le cours de la maladie , quî dura dix à douze jours, on n'eut au- cun figne d'évacuation critique. Les dé- jeâ:ions furent toujours féreufes , & le malade périt fans avoir prefque d'a- gonie ; de façon qu'il mourut plus de foibleffe que de la violence des fymp. tomes. âc Saint Domingue. 283 VI I L Histoire, Un autre Chirurgien , plus fage que les précëdens 5 étant attaqué d'une iîevre double*tierce bilieufe , ne iit rien les pre- miers jours , parce qu'il avoit de grands vomiffemens & de grandes évacuations dans les grands accès. Le cinq , ils furent à un point, qu'il parut avoir les acci- dens du choiera- morbu s , & qu'on étoit obligé de lui donner des cordiaux. Après ces accidens, fiuvencit une fueur abon- dante 5 à la frn de laquelle une demi-once de manne fondue dans du thé, étoit le feul remède qu'on employât pour l'é- vacuer. Il fut le feptiéme jour dans 1^ même état que le cinquième. Il prit ΀S mêmes remèdes qui eurent le même ef- fet ; & le grand accès du neuf fe con- fondant avec le petit, fe paffa fans vo« miiTement & fans flux de ventre. i84 Hifiolre des Malddiei OBSERVATIONS Sur les Fièvres doubU-tlcrceSi l ï 'Irrégularité qui fe trouve dans le •*-^ Cours des fièvres double - tierces ^ ftî'a engagé à en examiner les variétés qui peuvent s y rencontrer. Il y a des fièvres qui 5 comme je Taî dit , commencent par être continues ; el- les font telles deux, trois & quatre jours, fans aucune marque de remiiTion.La fiè- vre fe termine par une foible crife , & f eparoît par un accès qui finit ou fans crife 5 ou par une légère fueur. Le retour de cet accès femble manifeiler une fiè- vre quotidienne. D'autres fe déclarent par de foibles accès qui viennent tous les jours, & qui , comme dans la première efpéce, fembîent ne fixer un ordre pé- riodique que le quatrième ou cinquième de Saint Domingue* %^t |our. Cet ordre périodique donne égale- ment qu'aux premières, une apparence de quotidienne Je dis apparence , parce quo dès les premiers périodes on découvre de l'irrégularité dans les accès. Celui du quatre , par exemple , efl toujours plus long & moins fort ; il commence par une moindre concentration , & fe ter- mine , ou fans crife , ou par une légère moiteur. Sans crife dans la première efpece , avec plus on moins de moiteur dans la féconde. L'accès du cinquième jour s'annonce par une concentration qui devient forte , ou qui efl fuivie d'un frifîbnnement un peu long ; il eft plus violent & moins long que l'accès du jour précédent ; il finit par une crife plus ap^ parente. Cet accès prend rarement dès les premiers jours à la même heure , que le précédent , auquel il répond. Il avance ordinairement d'une ou de deux heures ; & plus il avance , plutôt il fe réunit avec le premier , qui , de fon côté , femble fe prolonger , pour en favorifer l'union, On tS6 H'ijtoire des Maladies remarque que \qs accès , en s'appro- chant , changent de foi-me , c'eft-à-dire que le moindre devient plus fort , & fe revêt des fympîômes du grand ; ce qui arrive toujours dans le période , où ils s'unifTent , de façon que celui qui les pre- miers jours étoit le moindre , prend , ou par une concentration , ou par un frif- fon qui paroît en raifon réciproque , de la force dont Tun ou l'autre étoit les pre- miers jours au grand accès. Cette révo- lution annonce une iffue favorable pour la terminaifon de la maladie; c'efl un ligne certain de l'union (i intime des deux accès, qu'il eft difficile d*appercevoir aucune apparence de redoublement > c'eft {îgne que les forces de l'un & de l'autre réunies , vont fur mon ter les obs- tacles qui empêchent la liberté de la cir- culation; ce qui ne manque pas ordi- nairement d arriver , & ce qui s'exécute par des évacuations plus ou moins abon- dantes de la matière morbifique , tant par les fueurs que par les felles. Si au I de Saint Domlngue, i2y contraire les accès paroiiTent fe foutenir dans ie même ordre , û le petit augmen- tant , le grand , bien loin de fe déranger, prend à la même heure & avec les mê- mes fymptômes, on doit craindre ; &c fi le petit en fe prolongeant le joint, fans que l'autre ait fait aucune avance , on doit alors mal augurer. La fièvre fe ren- dra en peu continue; & quelques fâ« cheux fymptômes , comme fentiment douloureux dans le ventre , fommeil lé- thargique , violens mouvemens convul- fifs , annoncent une mort prochaine. Il efl rare, dans les fièvres lymphati- ques, que le petit accès avance ; ce qui ar- rive au contraire dans les fièvres bilieu- {es. En fe prolongeant pour fe joindre au grand , il paroît fe partager en deux ou trois redoublemens défignés par de légè- res moiteurs , qui les précédent. Plus ces redoublemens paroifTent longs & forts , plus on doit juger la maladie violente &C longue , & que la crife qui la terminera fera confidérable. Cette difpofition ell 28 s Hijloire des Maladies propre aux fièvres qui ont été continues avant de prendre la forme dé quotidien^ nés. Ainûdu temps qu^elles ont été tel- les dans ieur principe , on peut juger de la grandeur des engorgemens , & de la vio- lence de la maladie , & par conféquent fe fervir de cet indice pour prendre de bonne heure les indications qui peuvent conve- nir, &* pour diminuer une partie de la îurgefcence d une trop grande plénitude. Le retardement du petit accès, qui efl devenu le plus confidérable dans l'é- tat complet de la maladie , quelque foi- ble qu'il foit , eft une preuve du dé- clin de la maladie. Sa terminaifon plus prompte & conftatée par d'abondantes lueurs, le confirme toujours. Si au con- traire il reprenoit à la même heure & avec les mêmes fymptômes , on doit s'at- tendre à une crife aufîi forte que la pré- cédente. Pour la favorifer & la foutenir, il convient de faire prendre d'avance jquelque remède convenable. Il n'en efl pas ainfx des double - tierces bilieufes ; dès- lors de Saint Dom'mgui. jga dès-lors que le premier accès n'avance plus , quoiqu'il prenne à la même heure que celui qui a précédé la grande crife , on peut alors compter fur un déclin cer- tain. L'irrégularité des accès des fièvres lymphatiques ne permet guères de les ftxer a aucun genre de fièvres dont les Praticiens ont défigné le caraÛere & les efpeces. Cependant comme celui qu'ai. les manifeftent dans l'état de la maladie et plus conforme au caraftere des dou- ble-t.erces, je penfe qu'on doit les y rapporter. ^' Le délire ou le fommeil léthargique qmfurvient dans la fièvre lymphatique doit être attribué à l'engorgement des glandes & réfervoirs lymphatiques d« cerveau, qui efl de tous les vifceres ce- u, oh la fécrétion de la lymphe & de la ferofité eft la plus abondante, & c'eft aulîî pour en procurer le dégorgement qu'on met beaucoup en ufage les véfi- Tome 1, 2^ 290 Hîjîo'ire des Maladies catoires qu'on applique à la nuque du cou & entre les deux épaules. Peu réchappent du fommeil léthargi- que qui accompagne les accès des dou- ble-tierces bilieufes , parce qu'il furvient prefque toujours dans les premiers ac- ces ; au lieu que dans les lymphatiques , il ne paroît ordinairement qu'après le feptiéme jour. S'il ar ri voit dans celle- ci , comme dans l'autre , dès le commen- cement, il eil également un fymptôme mortel. On trouve dans ceux qui meurent du fommeil léthargique des double-tierces bilieufes , la fubilance cendrée du cer- veau de couleur rougeâtre , oc quelque portion de la médullaire de la même cou- leur : dans les lymphatiques, les ventricu- les du cerveau font fort engagés de lym- phe ou de férofité , fans que la fubftance paroiffe d'ailleurs changée de couleur, à moins qu'il n'y ait eu complication. de Saint Domingue, 2.91 II. Explication de et qiion entend par Conflltutïon épidémique. On enterid par Conilitution épidémî- que,ime certaine dirpofition ou qualité dans l'air, que la différence des vents 7 communique communément , & qui par Ton aaionfur les corps, y fait des im- preffions particulières qui conftituent un tel caraaere de maladie; lequel car-adere de maladie a coutume de perfiiler, pen- dant que l'air conferve l'empreinte de la même qualité, ou pour mieux dire, des mêmes principes. Qu'il y ait uncertaitt prmcipe de vie infenfiblement répandu dans l'air, c'efl ce que nous démontra l'expérience commune. Rien , pour ainfî dire , ne fubfifte fans air; mais toute fort© d'air ne fuffit pas. L'air, quand il eft dé- pouillé de certaines qualités , ceffe par cela feul d'être propre à l'entretien de la vie comme à celui de la flamme, ce qiû Nij 2,92.' Hifloln des Maladies arrive , quoiqu'il retienne fon éîailicitë ;. ce qui prouve , pour le dire en paiTant, qu'il n'agit pas fimplement comme l'an- tagonifte des mufcles intercoftaux. Ce fluide élaftique donne & conferve aux vaiffeaux le ton qui leur convient. Il fa- vorife les fécrétions, &: (es ofcillations entretiennent le mouvement dans cha- que partie , tenant leurs fibres , leurs tuyaux , leurs fluides dans un mouvement toujours varié par le chaud , le froid , l'humidité & la féehereffe ; toujours en aâion 5 il opère fans difcontinuer ; il pé- nètre Se met pour ainfi dire en jeu tout le fyllême animal, produifant une grande variété d'effets , & même des effets op- pofés; il rafraîchit & échauffe tout en* femble, dilate & contrade, coagule & réfout. Compofé des parties volatiles qu'exhalent tous les corps, de ^petites particules fort ferrées les unes contre les aiitres , qui s'attirent, fe repouffent , s'é- feranlent mutuellement, il femble être la e^Vife dç toute cette variété de météores. dé Saint Do min gué, ±Cft de tempêtes , de fecoiiffes de la terre Ôs du ciel. Le petit monde n'en eft pas moins afFedé que le grand. L'air renfermé dans les vifceres, les vaifTeaiix, les mem.branes du corps humain , par (es fels , fes foiifres ^ &G. engendre des maladies de différen- tes natures. G'eil ce caradere partlcnlier de mala- dies qui fait connoître celui de la confti- tution ; de forte que lorfqu'on fait atten- tion à une certaine uniformité qui arrive pendant le cours de plufieurs années dans hs mêmes faifons , on parvient par la comparaifon des conirituîions précéden- tes, à juger non-feulement du principe ôc de Torigine des m.aladies dont une Con. trée efi: affligée ^ mais même à en faire un juile pronofîic; fi ce n'eft dans ces ré- volutions étonnantes où les faifons pa- roiiTant bouleverfées elles-mêmes , toute la nature femble fe reffentir du défordre général. Nii[ i^4 Hifioire des Maladies III. Sur les Tempêramens en général. Il n'y a perfbnne qui n'ait un tempé- rament dominant. Le tempérament varie à l'infini. On fait que les corps font com- pofés d'élémens. Il y a dans tous les corps humains des humeurs fubordonnées à ces premiers élémens , dont elles dérivent , & dont le mélange fait la diverfité des tempéramens. On réduit ces humeurs à quatre for- tes ; le fang , la pituite , la bile & la mé- IçncoUque. Mille caufes étrangères peu- vent changer la difpofition des humeurs. Les alimens, l'air, &;c. contribuent infi- niment à la nature des corps & des tem- péramens. Du mélange diverfement combiné des élémens ou premiers principes , dépen- dent donc , & la qualité & la différence de tous les corps en général , & des tempé- ramens en particulier. Les divers tem- de Saint Domingue» 295 péramens des hommes naiflent des diffé- rentes manières dont fe trouvent combi- nés les divers élémens nécefTaires à For- ganifaîion de leur machine. De-là peut- être ce je ne fais quoi , que les Cartéfiens appelleront , s'ils veulent , tendance de principes , & les Newtoniens attraciion ou affinité^ & que nous nommons j(y/7z- pathie &C antipathie^ qui peut dépendre d'influences ou émanations de corpufcu- les plus ou moins homogènes , par con- féquent plus ou moins fufceptibles d'u- nion entr'eux ou d'éloignement. Phéno- mène au refle qu'on ne peut concevoir & qu'on voudroit tâcher de faire dépen- dre de toute autre caufe que de la conflit tution naturelle. Mais quoique la diverfîté des tempé- ramens puiffe aller, pour ainli dire , à Tin- fini , & qu'ils varient non-feulement fui- vant le climat, les lieux & les faifons, mais encore fuivant le fexe , Tâge & le genre de vie , de forte que leur diiîem- blance femble être en quelque façon ré- Niv ^9^ Hipolre des Maladies ciproque à celle dts vifages : cependant on les limite communément à quatre genres; favoir le tempérament chaud ou fanguin , le tempérament humide ou pi- tuiteux, le tempérament {qc ou bilieux , le tempérament froid ou mélancolique; & fuivant les fignes caraftériftiques qui paroiffent dominer dans les uns plutôt que dans ks autres , on peut \qs fubdivi- fer en efpeces , & même pouffer lafub- ciivifion jufqu'à trois; par exemple bilieux- fanguin , mélancolique-fanguin , pitui- teux-fanguin , 6cc. ou fanguin-bilieux- mélancolique , fanguin-pituiteux-bilieux, mélancolique-bilicux-fanguin , &:c. Tous les tempéramens doivent fe rap- porter à ces didinaions générales, & on ne doit avoir égard à la force & à la ré- gularité des folides qu'autant qu'ils con- tribuent à rendre les tempéramens plus forts ou plus foibles, fans d'ailleurs rien changer à leur qualité effentielle & fpé- cifîque. C'efl la règle qui m'a paru tou- jours la plus fûre dans la pratique , ôc dt Saint Domlngue, 297 Fexpérience journalière en confirme tel- lement la vérité , que malgré la pafîiori des fyftêmies, on eil encore obligé de s 7 conformer. Qu'on difpute , qu'on cherche à démontrer dans les écoles la nature & la qualité du fang , qu'on en réduife l'analyfe aux parties globuleufes d'une fubftance homogène & à la férofi- té ; le Praticien en reviendra toujours à reconnoître dans le fang un liquide com- pofé de différentes fubflances qu'il réduira aux humeurs des anciens , & dont l'une dominante décidera ducara£lere du tem- pérament, & contribuera à celui de la maladie. Les loix de la nature font tou- jours les mêmes, & les découvertes ana- îomiques qu'on a pu faire jufqu'ici ne nous donnent peut-être d'autre avantage que de pouvoir joindre à l'expérience la folidité du raifonnement. Cum radone ac- quïriiur Medlcina, L'humeur dominante, admife par hs anciens pour la caufe des tempéramens, a donné matière à bien des recherches N V l.c)B Hijlo'in des Maladies pour en découvrir le fiége , l'origine & la nature. On fait en quelque forte au- jourd'hui à quoi s'en tenir dir ce point à regard du tempérament fanguin qui fup- pofe une proportion dans toutes les fé- crétions; d'oiiréfulîe cet équilibre conve- nable pour former & faire le plus heu- reux tempérament; du bilieux qui pro- vient d'une trop abondante fécrétion de bile , dont le mélange dans le chyle & dans le fang établit le tempérament ; du pituiteux qu'on doit attribuer à une trop grande quantité de férofité qui noie en quelque façon les autres principes, & ramollit les fibres. Il n'y a que l'humeur mélancolique dont on n*a pu , pour ainfi dire, encore découvrir l'origine &: la qualité , & qu'on admet cependant , parce qu'on ne peut révoquer en doute fes ef- fets. On pourroit même dire qu'on eft à ce fujet peut-être moins avancé que les Anciens , qui , quoique moins inftruits dans l'Anatomie , en mettoient le fiége dans la rate , U ce fondés fur une certaine de Saint Domingue, 299 analogie qu'ils croyoient appercevoir de cette humeur avec la fubflance & la cou- Jeur de ce vifcere. En effet, malgré la prévention oii l'on peut être encore de n'admettre d'autre fonaion à la rate que d'épaiffir le fang, eu égard à fon tiffu partie vafculaire, partie cellulaire , ne peut-on pas dire que parle méchanifme de ks fondions, elle donne non-feulement une confiftance au fang , mais même à la bile , & fuivant le plus ou moins de fondions , un mode ou une qualité qui conflitue l'humeur mé- lancolique ? Il faut examiner d'abord laflrudure de ce vifcere; enfuite nous analyferons l'humeur bilieufe, à la çom- pofition & à la formation de laquelle il efl confiant que le fang de la rate contribue beaucoup. Anatomk de. Winfcelow. » La rate efl une maffe bleuâtre tirant » fur le ronge , dune figure ovale un ♦>peu alloDgée , longue environ de fept Nvi 300 Hlftolrc des Maladies » ou huit travers de doigt, 6c large de » quatre ou cinq , un peu mollaffe , pla- » céedans l'hypocondre gauche, entre la » groffe extrémité de l'eilomac & les » fauiTes côtes voifines fous le bord^voifin » du diaphragme oc fur le rein gauche, »> & attachée à ces parties par plulieurs » ligamens lâches qui la font prêter aux » différentes exteniions Se puliions des » unes &c des autres. » La fubilance de la rate eft dans M l'homme prefque toute vafculaire , » c'efl-à-dire compofée de toutes fortes » de vaifTeaux ramiiiés. Dans le bœuf, » c'eil un tiflu réticulaire qui y domine , » & dans le mouton elle eu vifiblement » celkilaire. Dans l'un & l'autre, il n'y a >> point de ramifications de veines. On » n'y voit que deslinuofités entr 'ouvertes >> par-tout , & difpofées en manière de ^> rameaux, excepté un petit bout du » tronc veineux qui efl percé de tous » côtés dans l'extrémité de la rate. » On entrevoit des grains glanduleux de Saint Domlngue» 30Î »> dans la rate de Thomme , comme dans » les rates àts animaux. On trouve , dans » toute fon étendue,des ramifications vei« » neufes très-nombreufes. On y voit, par- » tout entre ces ramifications , comme un » épanchement univerfel de fang extra- » vafé &L imbibé ou arrêté dans une » efpéce de tiffu cotoneux ,-tranfparent » & d'une finefTe extrême , que l'orî » trouve épanoui par-tout le volume de » la rate. » Le tiffu cotoneux ayant entouré » toutes les ramifications , fe termine » enfin en cellules prefque impercepti- » blés, qui communiquent enfemble ; de » forte qu'en faifant im petit trou dans » l'enveloppe membraneufe de la rate, » en y foufFiant par un tuyau , on gonfle ^> dans le même inllant tout le volume » de ce vifcere. » L'artère fplénique coule le long de »> la face inférieure du pancréas , & va » en ferpentant vers la rate. La veine > » dont la capacité ell plus grande , fait r 302 Hijloin des Maladies » peu d'inflexion dans ce trajet. » Les nerfs de la rate font en grand » nombre. » Les artères , les veines & les nerfs » étant entrés dans la rate , fe divifent » &c fubdirifent en un grand nombre de » ramifications , & s'y accompagnent » par-tout Jufqu'aux dernières extrémités » de leurs divilions. Les extrémités ca- » pillaires de toutes ces ramifications » vafculaires , tant artérielles que veineu- » fes , aboutiffent en petites cellules co- » toneufes , dont il eil parlé ci-defTus. » Ces cellules communiquent toutes en- » femble , de forte qu'en quelqu'endroit » qu'on perce la tunique de la rate , on f* en gonfle toute la maiîe entière en fouf- » fiant. Dans le bœuf & le mouton , on » ne trouve point de ramifications vei- » neufes. La veine étant- entrée dans la » grofTe extrémité de la rate , fait d'abord » environ un pouce ou demi-pouce de » chemin ; après quoi , au lieu d'une f> veine ordinaire , on ne trouve iqu'un i de Saint Domingue, 303 î » canal percé de tons côtés. Le commen- » cernent de ce canal eil encore garni de » quelque refte de tuniques d'une veine ; » mais la forme du canal entier s'elFace » peu à peu , de forte qu'on ne trouve » après cela que des filions creufés » dans le tifîii réticulaire de la rate du » bœuf. » L'artère fplénique s'y ramifie , ^ » moyennant une gaine particulière , de ^ » même que les nerfs à-peu-près comme » dans l'homme. Les extrémités de ces *> ramifications capillaires paroiffent flot- » ter dans les cellules , & remplir de » fang le tiflu cotoneux de ces cellules. ^ J'ai obfervé au bout de plulieurs ex- l 3;> trémités artérielles , de petits grains » arrangés à-peu-près comme ceux d'une » grappe de raifin. J'ai vu fortir de cha- » çun de ces grains deux petits tuyaux , » Tun court & ouvert , l'autre long &: » plus menu , lequel alloit fe perdre dans n les parois de la rate. » Je conjeâure que le petit tuyau 304 Hlftoin des Maladies » long 5 dont je n'ai pas pu trouver PeX- » trémité, pourroit être l'origine d'un >f vaiffeau lymphatique , d'autant plus » que cette efpece de vaiffeau fe trouve » fi vifiblement &: en fi grand nombre » dans la rate du bœuf. Les petits grains »fe découvrent facilement, &: fe dé- » montrent de même dans une rate de >> bœuf cuite & développée, au moyen » d'une manipulation particulière. Dans » une rate fraîche , ils font beaucoup plus » gros que dans une rate cuite ; mais ils » y ont moins de fermeté , & s'afFaifTent »> quand on les blefle. On découvre de »> pareils grains dans la rate de l'hom- » me , mais extrêmement petits , de forte » qu'ils ne font vifibles que par le mi- » crofcope. . . . » La rate , l'épiploon , les appendices ^ épiploïques , les couches adipeufes du >> méfentere , celles des gros inteftins , » même le pancréas & toute la fuite » glanduleufeducanal-inteflinal , paroif- ^> fent contribuer à la formation de la ^!iim de Saint Domingue, '^^S » bile , mais chacun d'une manière dif- » férente. » II paroît 1°. que le fang veineux qui » revient de toutes les glandes inteilina- » \qs & du pancréas , eft dépouillé d'une » grande partie de fa férofité^ i^. que » celui de la rate a fubi une certaine al- » tération,par le retardement méchani- » que de fon cours , & a acquis un dé- » veloppement particulier, par l'avion du » grand nombre de nerfs que le plexus » fplénique y envoie; 3''. que celui enfin >>qui revient des épiploons, des appen- » dices , des couches , & des autres col- » ledions adipeufes , eil chargé d'huile. i> Ces trois. fortes de fang veineux fe » rencontrent dans le tronc de la veine- » porte venîrale5& s'y confondent enfem- » ble en allant fe répandre dans le fmus » ou tronc tranfverfal de la veine-porte » hépatique. Ils fe mêlent plus intime- » ment dans ce fmus comme dans une » efpece de lac , & y deviennent une » mafîe de fang uniforme , qui n'étant 3o6 Hijîoîre des Maladies » poufTé dans les branches de la velne- » porte hépatique que par le fang qui fur- » vient de la veine- porte , & par le bat- » tement collatéral des ramifications de » l'artère hépatique , y coule très-lente- » ment. Méchanique néceffaire pour la » fécrétion de la bile , qui eil une humeur »favoneufe, graffe , huileufe , alkali- »ne, acre, amere , lixivielle & déter- » iive ». Suivant Texpofition anatomique de la rate que nous avons copiée du Livre de M. Winfcelow , il paroît que la plus grande partie groiîiere & rerreftre de la bile provient du fang veineux qui revient de tous les inteflins ; du pancréas , parce qu'il eft le plus dépouillé deferofité ; que l'huileufe efl fournie par le fang qui re- vient des épiplocns & autres parties graii> feufes. Il reile donc à examiner & à dé- couvrir la fource de l'aikaline. Elle pa- roît indiquée dans le même expofé par l'altération que le favant Anatomifte que nous avons cité, penfe lui-même devoir I de Saint Domîngue» 307 réfiilter du méchanifme de la circulation dans la rate. Il femble de fait que la nature n'a dif- pofé & arrangé toutes les parties de la rate , que pour qu'elle fût comme un filtre , & comme un récipient par lequel & dans lequel un fel alkali pût fe filtrer -facilement , fe dépofer, fe figer & fe corporifier. Une artère qui ferpente , des ramifications multipliées à l'infini, & qui fe terminent par des ouvertures plus lar- ges que n'ont coutume d'être celles des vaiffeaux fécrétoires , enfin un nombre confidérabie de cellules , ce méchanifme ne doit-il pas diminuer confidérablement le mouvement du fang, & faciliter au fang les moyens de dépofer les fels qu'il contient ? Le fuc nerveux efî porté en grande abondance dans ce vifcere; i^. pour dé- gager le principe falin des autres parties hétérogènes , & faciliter à tous les pe- tits molécules les moyens de s'amalga- mer & s-'incorporifier d'une manière à joS Hifloire des Maladies prendre une nature alkaline , à la forma- tion de laquelle le mouvement rapide de la circulation eût mis obfîacle dans les autres vifceres ; i^'. pour fuppléer au dé- faut du mouvement du liquide fanguin , qui , dépourvu de ce fecours , eût pu en CroupifTant fe corrompre. De -là fans doute la première & principale caufe du gonflement de la rate , fi commun dans les Pays chauds, où une trop grande tranfpiration, ajoutons un ufage peut-être trop fréquent & trop immodéré des fem- mes , diiîipent une grande abondance d'efprits animaux. Ce principe alkali , dont la {lru6^ure de la rate produit la formation , eft con- duit par la veine fplénique dans le réfer- voir commun ^ où mêlé avec le fang des autres vifceres , il concourt à lui donner la qualité requife pour former la bile. Mais s'il arrive que par une difpofition naturelle , la rate produife une quantité de principe qui foit furabondant, il en réfultera une qualité particulière qui de Saint Domingue, 5 ç^ci COnftitiTera le tempérament mëlancoli- que-bilieux, lorfque h partie huileure dominera avec lui, apurement mélan- colique , ioi:ique ce fera la partie terref- îre , & , fuivant le plus ou le moins , des tempéramens plus ou moins atrabilaires. La rate , reconnue comme la fource d'un principe alkali , devient un vifcere encore plus digne des oblervations de la Méde- cine. Mais comme les humeurs qui fe filtrent dans différentes parties du corps humain femblent fe confondre de façon qu'elles fe manifeftent fous la forme de bile oii de pituite , on pourroit n'admettre que deux genres de tempérament; de forte que le fanguin deviendroit un mode du pituiteux 5 ainfi que h mélancolique îe ferojt du bilieux. Le fang ne peut former un genra de tempérament proprement dit ^ parce qu'il femble de fa nature être un tout qui réfulte des parties effentielles , tant des autres humeurs que des alimens. Il m 3 I O Hljîo'ire des Maladies parvient à cet état de perfeQion qu'a- près avoir fubi plufieurs dépurations, qui toutes aboutiflent à le décharger du furabondant des parties lulfureufes , ter- reftres , falineufes & aqueufes , dont une portion eft deftinée à la formation du chyle. Les premières & dernières étant dans tous les corps beaucoup plus abon- dantes que les autres , elles doivent par conféquent dominer dans le mélange qui s'en fait avecle chyle 6c avec le fang qui en réfulte. Ce qui fuffit , ce femble, pour faire concevoir que la qualité dominante dans le tempérament doit être la bilieufe & la pituiteufe. Toutes ces dépurations font l'effet des fondions de difFérens vifceres , dont les uns font deflinés à filtrer plus particu^ lierement les fubftances huileufes, les autres les terreflres , & enfin plufieurs les falineufes ;raqueufe fert de véhicule à toutes , cependant plus aux falineufes qu'aux autres , par rapport à fa qualité difiblvante. Une partie de ces jnatieres , de Saint Domingue, 311 c'eft-à-dire les plus grofTieres, font inu- tiles, & comme telles fortent du corps par difFérens émonûoires , pendant que la portion la plus fine ell réfervée à plu- fieurs ufages. Le principal eilla formation du chyle. Ces différentes fubflances font à fon égard la fondion de difFérens levains qui pénètrent & atténuent ïqs matières digé- rées pour en féparer & développer les parties effentielles avec lefquelles elles s'uniffent fuivant l'afîinité , l'analogie qu'elles ont entr'elles ; de manière que fi la fubftance fulfureufe eft dominante , il y aura un plus grand nombre de principes de cette nature unis & entraînés pour être incorporés aux globules fanguins. Il en fera de même des autres fubflances qui en lieront plus ou moins , fuivant le degré d'abondance oii elles pourront être. Telle efl la fource de la différence des tempéramens , dont la première caufe ne peut provenir que d'une difpofition, na- tureHe dans certains vifceres, à filtrer une 3 ,1 1 Hljîolre des Maladies grande abondance de fubftance d'une na- ture & d'une efpece particulière & ana- logue. Si tous les vifceres fe trouvoient conftruits de façon à fournir dans une jufte proportion toutes ces différentes fubflances, il en réfulteroit cet équili- bre , cette harmonie qui eft requife pour le tempérament parfait qu'on appelle égal; mais comme il ne s'en eft point encore trouvé , on a défigné celui qui paroît en approcher le plus par le nom de tempérament fanguin. Cependant nous obfervons certain tempérament dont la conilitution femble privilégiée , & comme à l'abri des im- preilions que l'intempérie de l'air & les paiïions peuvent faire fur les autres. Or ce tempérament paroiflant principale- ment oppofé au mélancolique , dont le principe nous a paru devoir être un al- kali , il n'y a , pour ainfi dire , qu'un acide qui puiffe être le principe de celui-ci. jL'acide feul ayant la qualité & la pro- priété. dt Saint Domingaet 3 l * priété de congeler les liquides , & d'affer- mir les folides , il n'y a que iui qui puiffe donner la conMance aux humeurs, & le reffort aux fîbres , convenables pour procurer cette rigueur & cqi air de fanté que nous admirons dans certains tempëramens , autant communs dans les Peuples du nord, qu'ils font rares dans ceux du midi. On ne peut attribuer ce précieux avan- tage,qui \qs dédommage bien des rigueurs d'un hiver long & violent , qu'aux ^Œets de l'acide nitreux , dont on convient que i'air de cqs climats efl imprégné. Ce prin- cipe qu'ils refpirent, & qui s'iniinue con- tmuellement par hs pores, doit fuffire non-feulement pour décider , dèslespre- miers inilans de la conception , la qua- Iitédu tempérament, mais auffi pour combattre & empêcher ks effets àes mauvais alimens & boiffons dont ils peu- vent ufer. " Mais ce qui contribue à leur donner une çonfbtution avantageufe, devient dani i 314 ffîftoire des Maladies eux la caufe d'une révolution mortelle J lorfqu'ils fe tranfportent dans les régions du midi. Il femble que la vive chaleur qui règne fous la zone torride faiTe à leur ' égard le même effet que peut faire une étincelle de feu dans la poudre à canon , dont on fait que Tacide nitreux eft le principe dominant. Ils fubiffent une rare- fadion^une expanfion fuivie d'explofions d'autant plus violentes & plus fatales, que leur tempérament eft fanguin , c'eft- à-dire fort & vigoureux. De-là vient que les Peuples du Nord {a) , que la paf- fion des richeffes a déterminé à fuivre l'exemple des Portugais & des Efpa* gnols , pour partager avec eux les tréfors qui fe trouvent dans les climats chauds, y réfiftent beaucoup moins que ces der- niers ; & que Ton a toujours obfervé . que plus les contrées d'oîi ils fortoient étoient voifmes du pôle , moins pou- ^ (a) Abrégé des Relations de tous les Voyà ges taî^tmié en i745 > T. Ht de Saint Domlngue, ^ i e voient-ils foutenir les effets de celles du midi ; au lieu que le contraire arrive à ceux qui paiTent du midi au feptentrion. Outre les genres de feî acide & de feî alkali, il y en a un autre qu'on nomme fel falé, qui peut concourir auffi-bien qtre les autres dans la formation du tem- pérament. Tous ces genres fe divifant ea efpeces, dont Talkali fans contredit four- nit la clafTe la plus nombreufe , fouvent plufieurs de ces efpeces peuvent fe ren- contrer dans le même tempérament , & fuivant leurs degrés, lui donner un carac. tere qu'il eft important de développer, parce qu'il influe toujours dans les pre- mières caufes des maladies , fur-tout des clironiques & de celles qu'on appelle orî- ginelles. Quelque habile Médecin qu'onj fbit, on s y méprend fouvent, & on tombe dans des erreurs d'autant plus pré- judiciables., que les remèdes qu'on pref- crit font contraires , & accélèrent h mort. Il convient à un Médecin prudent, qui Oïl l'.i ^l§ Hipom des Maladies fe voit appelle un peu trop tard > de ne rien hafarder U de ne preiçrire que des remèdes doux auxquels on ne puifîe imputer la caufe de la mort du malade : ee à quoi le Public eft toujours difpofé, CONCLUSION. Dans toutes les maladies dont je viens de faire la defcription, on ne voit que des effets d'engorgemens bilieux ou pitui- teux 5 d obilrudions dans les vifceres , ou glandes deftinées à la fécrétion de la bile ou de la lymphe , autrement dite pituite. Les caufes des maladies peuvent donc , comme celles des tempéramens , fe ré^ duire à deux genres , & en s'y rédui- fant, avoir pour principe la qualité du tempéramem, c'eft-à-dire dépendre du dérangement de la fonaion dommante qui conftitue fon caraôere. Mais comme les tempéramens bilieui^ & pkuiteux fe divifent en plufieurs efc peees, dont deux femblentêtre desmo^ àçs çffçntielç , favoir le mélancolique 5§ âc Saint Domingue, 5 1 y îe fangnin , de même les deux genres aux- quels nous rapportons les maladies , pa- roiiTent fe diverfifîer par autant d'efpeces. La connoiffance des principes qui conf- tituent la qualité difFérencielle du tempé- rament , fait par conféquent connoître celle de la maladie , & doit fervir de guide dans le traitement. C'eil pourquoi nous avons fait notre principale étude d'en développer la nature & les qualités ; & pour y parvenir , nous croyons n'a- voir point trouvé de meilleur moyen qu'un continuel exercice de traiter àQ^ malades , & d'ouvrir des cadavres. En eiFet, on ne peut voir un grand nombre de malades attaqués du même genre de maladie , qu'on ne foit porté à chercher la caufe des différentes modifi- cations qu'on apperçoiî. Les comparai- fons que ces différences obligent de faire, conduifent à connoître la qualité domi- nante qui influe, à découvrir qu'elle dépend de celle qui conftiîue le tempe- rament ,& qui par cette raifon étant pré- O lij ' M .^,1 3 iS JTifioin des Maladie pondérante, doit être la première canfe de l'engorgement; d'où il eft facile d'in- férer qu'un tel vifcere eft le fiége de la maladie , puifque fa fonûion eft de filtrer l'humeur qui forme le tempérament. C'efl ce que l'ouverture des cadavres confirme ou re£Lifie. Tel eft le chemin que j'ai pris pour parvenir à connoître les maladies qui régnent à S. Domingue. Je le crois d'au- tant plus fur , qu'il m'a conduit à décou- vrir le fiége & les caufes des différentes fièvres qui affligent les Colons; mais fur- tout de cette fatale maladie qu'on appelle mal de Siam, dufcorbut des Pays chauds, des diarrhées , de l'hydropifie , des abcès au foie & au pancréas. C'efi en fuivant avec perfévérance cette route, que j'ai connu que le foie , la rate ôi le pancréas, éîoient les principaux acleurs de toutes \^% fcènes tragiques qui caradérifent ces , différentes maladies , & qu'elles étoient tellement dépendantes de la qualité du tempérament , que hs bilieux 6c les mé- dt Saint Domînguel, 319 îandolîques en étoient à Saint Domingue les principales vi£limes , parce que la nature du climat leur eft plus €ontrair« qu'aux pituiteux & aux fanguins. Il a fallu , pour réuffir dans ces décou- vertes , & l'aveu en eft trop utile aux jeunes Médecins pour le difîimuler ; il a fallu , dis-je , commencer par me dé- pouiller de toutes préventions , fur-tout des préjugés que les écoles fyftématiques îniluent dans Tefprit des Etudians. Les premiers malades fuffirent pour m'en faire connoître le danger, & me perfua-< der qu'ayant à combattre des maladies différentes de celles de l'Europe, je de- vois m'attacher à étudier la nature du climat, qui en étoit la première caufe: ce que je ne pou vois exécuter que par mon exaditude à décrire les variations des faifons & du temps. Dans cette vue, je commençai un Journal d'obferva- tions ,tant des changemens que je remar- quois dans les faifons & le temps , que des maladies qui me paroiffoient en dé* O iv 3 20 mjloire des Maladies pendre. Je joignis à cette étude les ob- iervations que j 'a vois foin de recueillir, ioitparconverration,foit par lettres des anciens xMédecins , Chirurgiens , & même des Habitans. On penfe fans doute que ma pratique dut être, les premières années , un peu chancelante. Andpius hœremus , inquit Sjdenhamus, qua via infiflendum m œgris fubveniamus , ac proinde ingenti adhihitâ catiidâ, intentifquc omnibus animi nervis ^ vix ac ne vix quidem cfficere pojfumus ne unus aut alur eorum qui fe primi nofir(S. cum £ommiforintvitâpcriclitetur ^ donec invejH^ gatojugiter tandtmque perfpccîo morbi gg. nio ad eumdem perdomandum recio ped^ O intrepido denuh procedamus. J'avouerai même que , malgré toute mon attentioi> & mon application , je ne ferois peut être . pas encore plus avancé , fi je n'étois par- venu à procurer au Cap l'étabiiffemenf d'un Hôpital de la Marine, dont le pre- mier règlement fut de m'aftreindre à y i^ifiter les nialadesi obligation que je de Saint DomingUe, 321 m'impofai malgré le grand éloignemeut où il eft de la Ville , par le motif d'avoir ime école où je piifle éclaircir mes dou- tes 5 & voir d'un coup d'œil toutes les métamorphofes qui arrivent dans chaque genre de maladie. En effet , lliôpital de cette Capitale de la Colonie étant devenu Tafile des diiFérens Peuples qui commercent à S. Domingue, m'a fourni toute la facilité que je pouvois défirer pour conncît're non-feulement les maladies en général ^ mais auffi celles qui font propres à cha- que nation , ou pour mieux dire , \qs fymptômes qui peuvent leur être parti- culiers , & dediverfifieren conféquence la méthode générale & particulière que je m'étois formée de les traiter, De-là la connoifTance que j'ai acquife de chan- ger de méthode générale fuivant le chan- gement du temps , de faigner plus dans les temps fecs que dans les pluvieux , de faigner plus copieufement & moins fré- quemment dans le commencement d'un Ov 3 1 î H'ijloin des Maladies , &c, temps pluvieux qui fuccéde à un fec , & de préférer la faignée de la gorge à celle du pied , fur-tout dans les faifons opi- niâtrement féches , ôc de ne prefcrire cette dernière que dans la vue de procu- rer une évacuation critique , de purger plus promptenient dans les temps humi- des que dans les fecs , & de préférer Té- iTîétique en lavage & la manne à tout autre purgatif. De-là enfin les remarques particulières que j'ai faites fur la façon de modifier les remèdes généraux fui- vant la qualité du tempérament, qui, comme je l'ai dit,femble dépendre de celle du climat oii il a été formé , & de prefcrire les remèdes particuliers que l'expérience m'a fait connoître le mieux convenir. Fin du Toms> pnmuu 32S 1 1 I iiit TABLE DES MATIERES Contenues en ce Volume,, x\ c I D E S 5 (les) quand les employer ^ page 209. Accouchemens , 70 , 1 20. Ananas, (Jus d') 211. Apoplexie, 81 , 139 & 185. Arrivée de l'Auteur au Cap François, 3 1 1 — de fix Navires de guerre, 140, B B AGLivi, fur les fièvres : ce qu'il en dit après Fontanus , 241 & 246. Bains, (les) Leur utilité ,125,127,156, 157, 213, 219, 225, 229, 2483 255 & 271. Baume de Sucrier, 36 & 38. Beftiaux , (Maladies & mortalité des) 92, ii5, 121 , 141 6c 146, Bontius y 64. 324 , Table Bouillie, (la) remède efficace pour cal- mer le hoquet , 171 &: 236. VJ» ANELLE y ( infufion de)2ÏO,2I2 & Canicule. Précaution à avoir à l'égard des purgatifs dans la canicule, 85. Catarres. Les Habitans àcs Pays chauds y font plus fujets que ceux des tempè- res 70. Cayeux 5 (efpece de petite Sardine). Pkifieur perfonnes empoifonnées pour en avoir mangé , 108. Chagrin , ( fuite & effets du ) 142. Charbon , ou Antrax charbonneux , 214 & 223, CoUque de Poitou , 36 & 179. ' — vérolique , 79. Comète, ( apparition d'une ) enJanvi^îf & Février 1744, 132. Coqueluches , 146, Crifes falutaires , 53 > 197 a 198^3 201 & 206. • — non falutaires , 199. D D ESCRîPTiON de Saint Domingue^ de fa fiîuation , principalement de la DES Matières. ji^ partie du nord , & des mœurs de fes Habitans. Caufes & indications de leurs maladies, 15 &:fuiv, — du Cap François ,51. — ;- du Fort-Dauphin , 134. Diemerbroek. Ce qu'il dit & penfe fut les maladies contagieufes, 41. Dyirenterie5 37. XL AU de Caffe, 59, 149, 238, 27Ç & 279. Eau minérale artificielle , 59. Elixir deGarus, 102. Emétique , 143 , 209 ôc 254. Enchylofe, 227. Epidémie. Ce qu'on entend par Confli4 tut ion épidémique , 291. Efcadre commandée par M. Dubois de la Motte. Son arrivée au Cap le 8 Décembre 1746, 173. Efquinancie , 95 & 186. Exhalaifons, i6i&C 174, 1^ EMMES (les) vieiliiffent à Saint D()W mingue plutôt qu'en France, 57. Fièvres de Saint Domingue ,230, 241, 243 6c fuiv. ï 3i6 Table Fièvre pourprée , 70 , 77 , 194 & 2.34. Fluxion , 64. Flux chyleux ,245. Fonte d'humeurs , 85 & 160* Frères ( les ) de la Code , 99 & 1 27. VJANGRENE, 48, 200, 207 , 214 ô^ Gorge , (mal de) appelle Mal de mou- ton, 108, lïi &CÏ11» H IriÉMORRAGIE, 167, 2iOO , 101 & 218. Hippocrate , ( Aphorifmes d') 105 , 246. Hiftoire d'une faufle pleuréfie , 117. Hôpital ( établiffement d'un) de la Ma- rine au Cap , 1 2 & 3 20. Hoquet, (ceiTation du) figne d'efpé* rance, 236. J ASON,(le) Vaiffeau de Roi commandé par M. de Conteneuil , préfervé de contagion, 161. DES Matières. 517 Jannifle, 153, 172,194, loi & 2.17, Inondations, 140, 145 & 1^5. Ipécacuana de Saint Domingue , 1 77 & Julep , pour calmer le hoquet & le vo- miffement, 170. i^ AIT, (petit) 208,2.09, iï4>i52j &253. Lapuyade, (le fieur) habile Chirur- gien , 49. Larnage , ( M. Charles Brunier de ) Gou- verneur &c Lieutenant-Général des If-* les fous le venî. Sa mort 6c fon éloge ^ 181. Laudanum, 221. Leilenduere , ( M. de ) vient remouiller avec fa Flotte au Cap le 17 Août 1745 ' M7- Leucophlegmatie ,153. Limonade, (bon effet d'une légère) 103 , 149 , 170 ôc 208. M lALADiE de Siam, 191 & fiiiy. Manne, (la) 211, 212 & 214. |i8 T a" b le Marées (les) ne font pas f? baiiféS daîî? rAmérique durant le iojilice d'été que durant celui d'hiver ,5 1, N i\ EGRES, plus fujets aux fluxions de poitrine &i aux vers que les Blancs J Nord (vent de) pluvieux, 31 , 114,1 165 & 182. O V/bserv AXIONS fur les différentes conftitutîons des années , 1 80 &: 1 87* Onguent fait avec les plantes du Pays^ 177. Opiaîe, 34. Opium , 5(5, 83 , 171 , 212 & 235;. Orage confidérable le 7 Janvier 1746, 150. Ouverture de cadavres, 201 ôcfuîv» i AROTiDEs, 93 , 94, 144 & 201 Petite Vérole, 89. Pourpre après la mort, 203. DES MaTIERES. 3^ .Quinquina ou Kinklna de Saint Do' mingue, 45 ? 90 , 165 6c 271. R \eflux d'humeurs fur les teflicuîes^ 1 1 1, -eiâche au Cap de l'Efcadre du Roi; commandée par M. de Conflans,été 1746, 163. .emedes (les) manquent. Comment M, Defportes y fupplée, 176. établifTement de la Ville du Cap , 69, •humes, 131 ,153, 164, 165 6c 170, 5AiGNÉE.(ia) Ce qu'il convient d'ob-^ ferver à fon égard, 167, 168, 215 & 275. palme, 151 & 184. ydenham. Ce qu'il dit fur les confti* tutions, 39, 192 6c 230. l A MARIN, lôS. 'euipéramens, (les) Obfervations (un i 330 Table des Matières. les tempéramens en général , 294 Sc fuiv. Thé, 5(5, 208, 222, 226, 263 & 283. Tifane pour exciter rexpeàoration , & pour préparer les malades à la purga- tion, 34. < — de Café, 177 & 279. — royale, 265. — vermifuge, 35. Tonnerre, 164, 166 & 18:?. Tremblemens de terre , 1 13 & 1 50. Tumeurs, 144 & 227. V ERS. A quoi attribuer ceux dont les animaux furent infeftés en Juin & en Juillet 1745 , 141 , 146, 1 53 & 179. Vélicatoires ,71,91, 240 & 278. Vipères , ( poudre de) 212, 240 & 26 1 ; Yomiffement , 208 , 212, 2i3,2i9& 242. y Il EUX ( Inflammation des) ou OphtaH mie, 61 6262» Fin de la TahUp M I y. 7