vel (} £ te Ar SN RRUNE QUE, (s QE es LUEUR SRE 6 | D 1% HS EE OI KE MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE DES NS CONEIN CES, INSCRIPTIONS ET BELLES LETTRES DE TOULOUSE. HMOP NS ENST EMONONN. "D: SUR re 4 s D TI ll EEE SES LE be ARR ONU ENOrU SE; Chez D. DESCLASSA N, Maître-ès-Arts, In primeur de l’Académie Royale des Sciences, près la Place Royale. Et fe trouve a Paris, chez CRAPART, place St. Michel, à l'entrée de la rue d’Enfer, « pa —— k M. DACMC: D PENSAIS Ne fa LAN k L ps “4 pe til ce se + À ŒS L à 4 1 AS AUDIT L ÿ N le # EE 1 [:- Doll ; . p À LE Me 1 qu (ei (4 > Hair | Me “ober ge Lu Ji je AURONT | Au | ME (M + i Pt A 4 4 eu see ee ee eee ee ae eee ee eee OU, réntrianastienenaeseettsesenennenmet ‘à TA B.ILE PÉOUNR DE CES TN OT RUE Hr: TOIRE de l’Académie. Page r Lettre de M. le Baron de Breteuil à M. l Abbé de Rey. p.38 Changemens furvenus dans la Lifle des Académiciens. P. 9 HISTOIRE DES OUVRAGES DE L'ACADEMIE. D. 13 PHYSIQUE. Sur un tremblement de Terre € Jur des effets finouliers de la Foudre. P- 15 Defériprion d'un Hato. P-+ 19 Objfervations fur trois Aurores boréales. p- 20 Trombe de terre , Aurore boréale. P. 24 ANATOMIE. Sur un Enfant trouvé dans la trompe droite de la matrice. P+ 27 Sur l'opération de la Boutonniere. P. 29 Sur un Anevrifme fingulier. P- 31 Sur un Epi de Gramen tormentofum fpicatum introduit dans le corps humain. p.733 Obférvations fur une Bouche bridée | avec carie aux maxillaires. P- 34 Extrait des Reoïffres des Délibérations de L Académie Jar un raccourciffement de bras , occafionné par un coup de Jeu. p. 38 Sur une réunion apparente des deux fexes dans le même Jüjee. P- 39 iv IT ANR LE. MÉDECINE. Sur la petite Vérole naturelle. P. 43 Sur une Crife frnguliere. P. 44 Sur une efpece de Maladie de poitrine. P. 45 Sur un Vomiflement noir épidémique. P. 47 Sur un Bubonocele , d’où font fortis des vers de plufieurs pouces. p. 48 Sur la Rape. p. 5° Sur une Maladie finguliere , occafionnée par un excès d'étude. p."$2 Chüte fubite de cheveux. p. 56 Sur une Paralyfie , occafionnée par une violente affeélion de l'ame. P- 57 Eleétricité Médicale. P- 59 LITTÉRATURE. Ex plication d'un Bas-relief antique , repréfentant Efculape € Hygée guériffant des malades. p. 63 Sur Les Infériptions crouvées à Soleure. p. 67 Sur les Veuves Rajapoutes. P: 71 ÉO'G'EIS: Éloges des Académiciens morts depuis l'origine de l Aca- démie en 1729. P- 79 M. de Caumels. p. 80 M. de Palmas. p. 81 M. le Comte de Fumel. P. 83 M. le Chancelier d'Agueffeau. p. 84 M. de Crillon. ibid. M. Soubeiran de Scopon. p. 86 M. le Préfident de Palarin. p. 87 M. de Rabaudy. p. 88 AUDE FE: v M. d'Ouvrier. M. de Cruffol. M. le Comte de Miran. M. de Maniban. M. de Saint-Amand. M. le Préfident de Nupces. Du R. P. Raynal. D, Pont. M. de Paraza. M. de Bouquet. M. le Marquis de Chalver. M. Sage. M. l'Abbé de Raymond. M. l'Abbé de Catellan. Eloge de M. de Saint-Laurens. Eloge de M. Du Mas. Eloge de M. Garipuy pere. P- 134 Leemlie pe) eo ge due Pace 2 De dc ns bi O (e mo) bi bp ei À TA HE à Ph 5 TABLE POUR LES MÉMOIRES. M ÉMOIRE fur la Jauge des Tonneaux de la Ville de Touloufe. Page : Conjeëlures fur quelques fragmens d'Inferiptions Romaines , découvertes à Touloufè vers la fin de l'année 1782, par M. de MONTÉGUT. P. 14 Deféription de la Baroe aux pattes rouges , par M. de LA PEIROUSE. p. 36 Mémoire concernant les dépenfes d'eau des grands référvorrs par des orifices confidérables , accompagné de diverfes expériences propres à indiquer la caufe & la mefure du déchet que ces dépenfes éprouvent , les réfervoirs étant vi TAB: LE conflamment entretenus pleins ; par M. L'ESPINASSE ; Correfpondant. - 39 Expériences fur la hauteur du mercure dans le Thermo- metre , faites fur le Pic de midi de Bareges , par M. de La PEIROUSE. DUAE Mémoire fur les Etoiles doubles & le mouvement des fixes, par M. DARQUIER. P- 79 Mémoire fur un Tombeau , qui étoit dans l'ancienne Eglife e LA de la Daurade , € für une Epitaphe gravée fur un marbre attaché au mur de cette EÉolife | par M. de MONTÉGUT. p. 100 Mémoire fur la jonétion 6 la féparation des Rivieres , par M. L'ESPINASSE , Correfpondant. P- 115 Mémoire fur la nature du Volfram , 6 celle d'un nouveau métal qui entre dans fa compofition , par MM. D'ELHUYAR freres , Correfpondans. P- 141 Réflexions fur les Etoiles nouvelles 6 périodiques , par M. DARQUIFR. P- 169 Mémoire fur deux Roues de char antique , qui font dans le cabinet de l’Académie , par M. l'Abbé MAGI. p. 179 Mémoire fur un coup de Tonnerre près de la Ville de Caftres , avec des réflexions fur les lois de l'Eleétricité , € fur les Conduëleurs Electriques ou Paratonnerres | par M. GARIPUF fils. p. 138 Mémoire [ur les Cérémonies , les Temples €: les Afcétiques Indiens , appelés Pandarons , par M. de CAYROL, ancien Capitaine d’Artillerie. P+ 197 Obférvations Affronomiques des années 1781 , 1782, 6 partie de 1783 , par M. DARQUIER. eur Fin de la Table du fecond Volume. CORRECTIONS ET ADDITIONS. DANS “LeEPTS TOTRE, Pa 22, ligne 20 , Casfiopée, /ifez Cafiopée. Page 24, lione 27, ambrafler, lifez embrafler, Page 35, ligne ur, après le mot Infcriptions , il faut ajouter la note fuivante. « Depuis l’impreflion de ce » Mémoire , on a découvert un autre fragment , » qui, adapté au précédent , forme les mots qui » fuivent, » HicrAcET ‘ BONAE ME MORIAE Ev GENIVS vVix IT ANNIS XV RÉQUIE..:.: RS Ph lame ete Page 63, ligne 25 , procurer , life procuré. Pas: 73, ligne 29, foutenus » liféz foutenues. D'AIN SU ILE SAME MOrR'E S, Page 113, ligne 2, après le mot St. Jean » ajoutez la note fuivante : «On voit dans l’ancien cimetiere des » Chevaliers, qui eft derriere St. Jean, un Tombeau » de pierre fans infcription, fur lequel eft oravé l'é- » cuflon des Comtes de Touloufe : on peut préfumer » qu'il renfermoit le corps de Raymond VI.» Page 187, ligne 2, de l’effieu, liféz du moyeu ; ligne 27, pam , /{/ex pan-coupé ; ligne 37, repaire , /ifex répère. Pas. 108 , line 12, impofnta , lifex impofant. Idem , ligne , hymenes, lifex hymnes. Page 206, à la note, ligne 22, Page 207, ligne 9 € 20, Raflia, /ifez Vafia. Page 209, à la note, ligne 3, Chelinghan, /ifez Cheringan, ORDRE DES PLANCHES. ASIONS : LA UhRAERLAINE 7 Re: H1sT OMR E La Planche de Dianorbé, à la page 39. MÉMOIRES. La I. Planche , page 44. La II. Planche, page 56. La III. Planche , page 104. La IV. Planche, page 123. La V. Planche , page 180. HISTOIRE _—_—— DST ON ELE SRE OO L'RE DE L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, INSCRIPTIONS ET BELLES LETTRES DAE ET OUI LGOLU:SLE: Fo as a D: PUIS la publication du premier volume des Mémoires de l’Académie , la perte qu’elle a faite de MM. Garipuy , pere & fils, a donné lieu à un événe- ment qui, tout heureux qu'il eft pour cette Compagnie, na point afloibli fes regrets. Ils laifloient un fuperbe Obfervatoire & des Inftrumens d’Aftronomie , d’un choix & d’un prix peu communs. Tant qu’ils vécurent, ils en partagerent la jouiflance avec leurs Confreres. Il étoit à craindre que cet édifice & ces effets précieux ne fuffent détruits ou difperfés , lorfque les Etats de la Pro- Tome IT. 2 CES TOUTRIE vince , à qui l'Académie avoit déjà de fi grandes obliga- tions, voulurent lui donner un témoignage de leur amour pour les Sciences. Perfuadés que les récompenfes qui attirent en foule les Savans & les Artiftes dans la Capi- tale , anéantiroient les Sciences & les Arts dans les Provinces , s'ils n’y étoient foutenus par des encoura- gemens multipliés, ils prirent en confidération le projet d'acquérir la maïfon , l'Obfervatoire & les Inftrumens de MM. Garipuy, pour en aflurer le libre ufage à l'Académie. Cet événement lui fut annoncé par une lettre que M. l’Archevèque de Touloufe , qui préfidoit alors les Etats , adrefla au Secrétaire de l’Académie , remplie de ces expreflions vives & touchantes , que fuggere à un cœur généreux , la fatisfaétion qu'il éprouve en venant de faire le bien. L'Académie ne trouva pas de moyen plus propre de témoigner la fenfibilité dont elle étoit pénétrée , que de faire écrire par fon Secrétaire à M. l’Archevêque de Narbonne & à M. l’Archevêque de Touloufe, pour leur faire connoître fon extrême défir de mériter par fes travaux , la continuation des encouragemens & des fecours que la Province vouloit bien lui accorder ; & en même-temps , comme il importoit à l’Académie de s'attacher par les liens les plus étroits, ceux des Mem- bres des Etats de la Province , avec lefquels elle auroit néceflairement des rapports , elle crut qu'il feroit à pro- pos de nommer à deux places d’Aflocié honoraire, l'Evêque Préfident de la Commiffion des Travaux Pu- blics du haut Languedoc , & le Baron des Etats, Membre de cette Commiflion , & de donner une place d'Affocié libre au Syndic Général du Département ; DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 3 mais comme le nombre des Académiciens , limité à foixante-un , mettoit l’Académie dans la néceflité d'attendre la vacance de ces trois places , elle y nomma {ous le bon plaifir Sa Majefté , & chargea {on Secrétaire d'écrire au Miniftre , pour le prier de mettre fous les yeux du Roi > & “e lui faire agréer l'arrangement qu’elle avoit pris. Les motifs de la Compagnie étoient trop louables, & fa délibération trop fage , pour ne pas obtenir le fuccès qu’elle défiroit. M. le Baron de Breteuil {e fit un plaifir d'annoncer à la Compagnie que le Roi avoit autorifé la nomination @ n) L'Académie , pour s'acquitter envers tous fes bien- fai@teurs , en général & en particulier , délibéra , 1°. Qu'il feroit fait une députation de quatre de fes Membres à M. l'Archevêque de Touloufe, pour lui offrir de nouveaux témoignages de reconnoiflance de la délibération des Etats du 28 Décembre 1782 , con- cernant le projet de faire jouir l’Académie de la maifon, AE & Inftrumens de feu M. Garipuy. °,. Que les mêmes Députés préfenteroient à M. eee un extrait des regiftres , fcellé du fceau de l'Académie, & collationné par le Secrétaire, con- tenant la dira qu'elle prit le 23 Janvier 1783 ; au fujet de la nomination aux deux places d'Affocié honoraire & à celle d’Affocié libre ; les copies de /4 lettre écrite par le Secrétaire au Miniftre le 29 du même mois, & de la réponfe de M. le Baron de Breteuil ; la mou pour l'enregiftrement de cette derniere , & la délibération concernant la députation, avec priere à M. l'Archevêque de faire dépofer cet extrait dans les (1) Voyez la lettre de M. le Baron de Breteuil à la fuite de cette Hiftoire. 4 FT: SANTE OMNIRNE Archives de la Province à Montpellier , comme un monument de la reconnoiflance de l’Académie. M. de Puymaurin , Syndic Général de la Province, & Aflocié hbre de l'Académie , fut chargé en parti- culier, de prier M. l’Archevèque de permettre que l'Académie fit copier fon portrait, pour le placer dans la falle de fes aflemblées. L’Adminiftration Municipale, excitée par l'utilité des vues & des travaux de l’Académie , faifit, de fon côté, toutes les occafions de concourir à fes eflorts, lorfqu'ils tendent fur-tout à l'avantage des Citoyens. Tant de bienfaifance femble avoir donné un nouveau degré d’aétivité au zele des Académiciens , dont les travaux fe multiplient journellement. Des cours publics de Botanique font ouverts dans le jardin de l'Académie, qui , par les foins de celui de fes Membres à qui elle en a confié la direétion (1), s'enrichit tous les jours, & devient , par le grand nombre de plantes rares de tous les pays, un des plus intérefans de l'Europe. Les vœux que la Compagnie faifoit pour un Cabinet de Phyfique expérimentable & pour un Laboratoire de Chymie, ont frappé l'Adminiftration de la Province ; & fi le premier de ces objets n’a point été accordé a l'Académie même , elle a porté l’attention jufques à (1) M. le Baron de La Peyroufe, qui non-feulement entretient la correfpon- dance la plus étendue, mais qui dans fes fréquens voyages aux Pyrénées & ailleurs , fait tous les jours des découvertes dans les trois regnes. Parmi les Savans avec lefquels il correfpond , il faut diftinguer M. FouLqurEr de la Baftide, In- rendant de la Guadaloupe , Aflocié ordinaire de l'Académie, connu par fon goût, par fes talens & par fon amour pour les Sciences. 11 a envoyé à l'Académie un grand nombre de graines & de plantes rares & précieufes des diverfes latitudes de l'Amérique ; & M. PAbbé PourreT, Correfpondant de l'Académie, qui a également beaucoup contribué à l’accroiffément du jardin, par plufeurs envois de graines & de plantes qu’il a recueillies fur les Pyrénées en différens voyages ; i en a donné une relation à l’Académie , qui paroïtra dans les volumes fuivans. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. $ choifir un des membres de la Compagnie (1), pour lui confier le cabinet de phyfique dont elle a fait pré- fent au College Royal, & pour le charger de donner des lecons publiques d’une fcience prefqu’inconnue à Touloufe, ou qui dumoins n’y étoit cultivée que par quelques Savans , dont les expériences étoient concen- trées dans leurs cabinets. Quant à la Chymie , fi népligée dans les Provinces, où elle ne trouve ni ces fecours ni aucun de ces grands objets d’émulation, que l’enthoufafme & la mode, au- tant que l’amour des Sciences , lui prodiguent dans la Capitale, elle commence d’être cultivée avec avantage au fein de l'Académie même. Ce n’eft pas que depuis fa fondation elle n'ait eu des Chymiftes d'un mérite diftingué ; mais cette Science a fait, dans ces derniers temps , des progrès fi étendus, des découvertes fi pré- cieufes , que les Savans renommés qui ont ouvert la mine & commence les premieres fouilles , feroient au- jourd’hui bien étonnés de fon abondance & de fa ri- chefle. Tandis que les Etats, à qui la follicitude pater- nelle de M. l'Archevêque de Touloufe ne cefle d’expo- {er nos befoins , s'occupent des moyens d'étendre dans cette Ville les connoïflances chymiques, la Compagnie recherche , avec le plus grand foin , les fujets qui peu- vent concourir à fes vues ; elle vient de s’en attacher deux fur lefquels elle fonde les plus grandes efpérances ; l'un, en qualité d'Aflocié étranger , eft M. de Morveau, fi connu par fon zele pour les Sciences ; & l’autre, en qualité d’Aflocié ordinaire , eft M. de Puymaurin le fils, ———————————_——— (1) Le nombre & l'afliduité des perfonnes de l’un & de l’autre fexe » qui ont füivi le premier cours de M. l'Abbé Martin, juftifient les défirs de l'Académie, & atteftent l'utilité de cet établiflèment, 6 ÉT I STOUTIRLE w’elle avoit d’ailleurs tant de raifons de défirer, & qui, dans l'age des plaifirs, joint à beaucoup de connoiflances & à la plus grande ardeur pour l'étude de la Chymie, les qualités qui annoncent les fuccès. L'Académie avoit fait encore une acquifiion dont elle fe glorifoit. M. Morand, de l'Académie Royale des Sciences de Paris , qui avoit eu occafion d’aflifter à nos féances , qui y avoit lu des Mémoires très-inté- reflans, & qui nous avoit flattés de l’efpérance de le revoir & de l'entendre cette année même , dans un voyage qu'il devoit faire en Languedoc , avoit défiré une place d'Affocié étranger : la Compagnie avoit faifi, avec empreflement , l’occafion de le nommer ; fes lettres d’'Académicien n’étoient pas encore expédiées , qu’elle apprit fa mort. Si quelque chofe peut la confoler de cette perte, c’eft le remplacement de M. Morand, par M. de Morveau, de l’Académie de Dijon. Une perte non moins confidérable qu’elle a efluyée , eft la retraite de M. l'Abbé de Rey , fon Secrétaire perpétuel. Il remplifloit avec diftinétion , depuis plu- fieurs années, cette place importante. Aux talens & aux connoiflances indifpenfables à l'organe d’une Com- pagnie qui réunit tant de Sciences, dont chacune a une langue , une marche , des moyens qui lui font propres, M. l'Abbé de Rey joint cette aménité de caraétere qu’on retrouve dans fes écrits ; cet efprit conciliant , fi né- ceffaire dans un Corps, où la différence des opinions naît du zele même de chaque Membre pour la recher- che de la vérité , où l'amour propre, fi délicat & fi fen- fible, eft fouventaux prifes avec la critique , qui, malgré tous fes ménagemens , eft prefque toujours humiliante, même pour ceux qui favent la mettre à profit. M. l'Abbé DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 7 de Rey , qu'éloignoient depuis quelque temps, malgré lui , de nos aflemblées , les devoirs de la Magiftrature , devenus plus preflans & plus nombreux , par la con- fance dont fa Compagnie l’honore, donna fa démiffion dès le commencement de cette année , & demanda de pañler dans la clafle des Affociés libres. C’eft à regret, & à la derniere extrémité , que l’Académie a cédé à fes prieres. Elle a choifi, pour le remplacer, M. Caftilhon Affocié ordinaire dans la claffe de Littérature. L'Académie regarde comme un encouragement à de nouveaux efforts, les lettres obligeantes qu’elle a reçues de divers Savans au fujet du premier volume de {es Mémoires ; elle défire qu’ils faflent au fecond le même accueil. Contribuer avec eux au progrès des lumieres , être utile aux hommes, mériter plutôt qu’obtenir les fuffrages du Public, tels font les vœux qu’elle forme & les motifs qui l’animent. 8 TS T'ON TOR E REG EE EN RENE EPP EE EENEENIEEEENPENENER LETTRE de M. le Baron de Breteuil à M. l Abbé de Rey , Secrétaire de l’Académie. A Verfailles, le 23 Janvier 1784. : H ’oN m'a repréfenté , Monfieur , la Lettre que vous avez écrite à M. Amelot le 29 Janvier de l’année der- niere , pour obtenir l’autorifation d’une délibération , prife par l’Académie le 23 du même mois. Je viens de mettre cette Délibération fous les yeux du Roi, & je vousannonceavec plaifir que Sa Majefté en a également approuvé les difpofitions & le motif. Quoique les deux nouvelles places d'Honoraire, auxquelles l'Académie a nommé l’Évêque qui préfidera la Commiflion des Tra- vaux Publics du haut Languedoc, & le Baron qui fera de cette même Commiflion , & celle d'Aflocié libre, à laquelle elle a nommé le Syndic Général du Départe- ment , excédent le nombre fixé par fes Conftitutions , Sa Majefté a bien voulu l’autorifer à y déroger pour cette fois. Jai l'honneur d’être très-parfaitement, Monfieur , votre très-humble & très-obeiffant ferviteur , Signé , le Baron DE BRETEUIL. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. ‘9 ESRI EE SEAT D) a ———— —— CEA NP IGHENMUE NS SURVENUS dans la Lifle des Académiciens, depuis le commencement de 1782 ,& l’'impreffion du premier volume des Mémoires de l’Académie. 5 HONORAIRES. M. l'Evêque , Préfident de la Commiffion des Tra- vaux Publics du haut Languedoc. M. le Baron des Etats, Membre de la même Commiflion. A SSOICT ES BR ES: M. Marcorelle , Correfpondant de l'Académie Royale des Sciences de Paris, à la place de feu M. le Marquis de Beauteville. M. Gardeil, Profefleur de Médecine en l'Univerfité, & de Mathématique au College Royal, Correfpondant de PAcadémie Royale des Sciences de Paris, à la place de feu M. Garipuy le pere. M. le Syndic Général de la Province , du Département de Touloufe. M. l'Abbé de Rey, Confeiller au Parlement , ancien _ Secrétaire , à la place de M. de Puymaurin. ASSOCIÉS ORDINAIRES. Pour 14 MÉCHANIQUE. EDR NE IE PME AVE PRET SP LENS VE CRU MES PRES VS AE TEE M. Gounon, Secrétaire du Roi honoraire , à la place de M. Marcorelle , qui a pafñlé dans la claffe des Aflociés libres. Tome IT. B 10 HNI.S TO TRE M. de Puymaurin fils , à la place de feu M. de Saget lainé , Direfteur des Travaux de la Province. Po R\1I AB 07 ANT QUE. M. Mañars de Cazelles , Doëteur en Médecine de l'Uni- verfité de Montpellier , de l'Académie des Sciences & Belles Lettres de Befiers , de la Société Royale de Médecine de Paris, & ci-devant Correfpondant de l'Académie , à la place de feu M. Maynard. M. Viguerie, Chirurgien Major de l'Hôtel-Dieu , à la place de M. Gardeil , qui a pañlé à la clafle des Aflociés libres. POUR LES INSCRIPTIONS ET BELLES LETTRES. Le R. P. Hyacinthe Sermet, Ex-Provincial des Carmes Déchauflés , & Prédicateur ordinaire du Roi , a la place de M. le Marquis d'Orbeflan , des Académies des Jeux Floraux & des Arts, & de celles de Cor- tonne & de Pau , qui a pañlé à la clafle des Aflocies libres. M. l'Abbé Magi , Doëteur en Théolooie , de l’Académie des Jeux Floraux, à la place de feu M. Reboutier. M. Caftilhon , de l’Académie des Jeux Floraux , Bi- bliothécaire du College Royal , à la place de feu M. Du Mas. SECRÉTATRELPERPÉTUEL. M. Caftilhon , à la place de M. l'Abbé de Rey , qui a donné fa démiflion du Secrétariat, & qui a pañle dans la clafle des Affociés libres. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. xx ASSOCIÉS ÉTRANGERS. M. de Morveau, ancien Avocat Général du Parlement de Bourgogne, de l’Académie des Sciences de Dijon, & de celle de Stokholm, à la place de feu M. Morand reçu le 29 Juillet 1784, & mort dans le mois d’Août fuivant. AUD'J'O ENT: Pour 14 MÉCHANIQUE. M. Marcorelle , neveu. Ge —— 2: CORRESPONDANS MORTS. M. Pumphry , Dofteur en Médecine, à Corck en Irlande. M. de Rayrac, Chanoine Régulier de Chancelade, Curé de St. Maclou d'Orléans, Cenfeur Royal. M. Seguier , de Académie des Infcriptions & Belles Lettres de Paris, Correfpondant de celle des Sciences, & Secrétaire perpétuel de celle de Nimes. M. Goulard , Démonftrateur Royal d’Anatomie , 4 Montpellier. NOUVEAUX CORRESPONDANS. M. ie Comte de la Ceppede, Colonel au Cercle de Weftphalie , des Académies & Sociétés Royales de Dijon, Lyon, Nantes, Stokholm, Hefle-Ham- bourg , Munich, à Paris. M. le Commandeur Deodat de Dolomieu, à Malthe. M. Pagez, ancien Capitaine des Vaiffeaux du Roi, à Paris. 12 ENT ST Def M. l'Abbé Pourret , à Brienne. M. Simoilowits, Affefleur du Collese de Sa Majefté Impériale de toutes les Ruflies , Doéteur en Médecine, Chirurgien Major du Sénat de Mofcou, & Membre de la Commiflion contre la Pefte, à Mofcou. M. l'Abbé Genty , Dofteur Agrégé en l’Univerfité de Paris , Membre & Vice-Secrétaire perpétuel de la Société Royale d'Agriculture d'Orléans, & Profefleur de Philofophie au College Royal de la même Ville, a Orléans. M. Chauffier , de l'Académie de Dijon, à Dijon. M. Jean-Jofeph d'Elhuyar, Direéteur Général des Fon- deries du nouveau Royaume de Grenade , de la Société Royale Bafque-Efpagnole , & Santafe. M. Faufte Firmin d’Elhuyar, Profefleur de Minéralogie & de Métalluroie , Membre de la Société Royale Bafque-Efpagnole , à Weroara. M. l'Abbé Darbas , Prètre Hebdomadier de l'Eglife de Rieux , à Rieux. M. Clément, Profefleur de Mathématique , 4 Rochefort. M. l'Abbé Ricard , à Paris. M. le Marquis de Manara , à Parme. M. Cerati, à Parme. M. Chaptal , Profeffeur de Chymie des Etats de Lan- uedoc , des Sociétés Royales des Sciences de Mont- pellier & de Médecine de Paris, de la Société Pa- triotique de Milan, de l’Académie Royale de Turin, à Bordeaux. Dom Carriere , Bénédiétin, des Académies de Montau- ban & de Bordeaux. ELES L'OLRE DES OUVRAGES L'ACADÉMIE. à HAL i Us MES ik P | d' et ts WE Mi re VTT . ù 4. ( | PT * ir LE Le À vé: hi: j La | AU AITUERE 16 | AY Mi 'R N 4 (ai ju 16 nl Sie He 4 Ti, ÉOATA £ ai tt 14 AA TU) La: ch Fe chat | Au LT cd IAA, it (ri \ Lt sn ait L, ul 1h + LL ] à Ni li $ IL} L u | À 2 | UE 4) (hi il 1 Ji a Î | x # (au? | à | Net | ini Ni ÿ; ù ; L} 4r ni il | | ( t TAN LA TRUE \LOT L'REE : | EAN M à] H h A | 1} À te | nl l di LUN 15 PS D'OQUE. SUR un tremblement de Terre , & fur des effets finguliers de la Foudre. C E qu’on va lire fur ces phénomenes eft extrait de trois Lettres écrites de Tarbe, les 21, 28 Juin & 15 Juillet 1750, à M. Darquier, par M. Lavant, Corref- pondant de l’Académie , témoin des événemens qu’il raconte. Quoique depuis l’époque où ces Lettres ont été écri- tes , les tremblemens de terre qui ont boulever{é difié- rentes contrées, aient donné lieu à de favantes recher- ches, les conjeftures de M. Lavant fur ces redoutables phénomenes n’en paroïtront pas moins précieufes. Tarbe & fes environs font fouvent expofés aux tremblemens de terre ; mais ce fléau frappe plus fré- quemment Lourde , Bagnieres , & autres lieux fitués au pied des Pyrénées. Les commotions qui les ébran- lerent en 1660, durerent plus de quinze jours , & les effets en furent terribles. Celles de 1750 furent moins funeftes , mais aufñ eflrayantes. La journée du 24 Mai avoit été fort ora- geufe ; après une pluie qui tomba vers les quatre heures du foir , le temps devint froid ; la nuit fut très-noire jufqu'a dix heures quelques minutes , où lon reflentit à Tarbe une forte fecoufle qui dura une minute. Demi- heure après il y en eut encore une qui ne dura pas plus de deux fecondes ; on en reflentit une troifieme plus 16 Fi: Ti Q ER E forte & plus longue à onze heures un quart ; il y en eut plufieurs autres pendant la nuit, que M. Lavant , furpris par le fommeil , ne put obferver. Mais au pied des montagnes ces fecouffes furent plus confidérables, fur-tout à Juncolas, village de la vallée de Caftelloubon, à Lourde & autres lieux circonvoifins. Lourde eft, comme Bagnieres, fituée au pied des Pyrénées , à fon d'ane gorge. Juncolas eft à une lieue au fud-eft de Lourde. Il n *ÿ a dans cette derniere ni eau minérale, ni mine connue. Dans toute la vallée on he trouve qu'une feule mine de plomb & une fon- taine d’eau chaude. Les habitans de Lourde & de Juncolas pañerent la nuit du 24 en plein champ, dans les plus cruelles alar- mes ; ils éprouverent plus de vingt fecouffes. Depuis cette époque jufqu’au +7 Juin, il ne fe pafla pas un jour qu’on n’en reffentit quelqu’une dans tout ce quartier, & quelquefois trois , quatre & cinq dans la même Journée. Les fecouffles qui fuccéderent à celles du 24 Mai, furent moins longues & moins fortes , jufqu’a celles qu’on efluya le 15 Juin entre midi & une heure, & le 16 à 7 heures & demie du matin ; la terreur qui avoit diminué , redoubla. * Du 24 au 17 Juin, le temps avoit été variable & froid pour la faifon. S’étant mis au beau le 17, & étant devenu chaud , les fecoufles ceflerent. Le 23 s'étant remis a la pluie, une fecoufle auffi forte, mais moins longue que celle du 24 Mai, fe ft ntes a Lourde, à Juncolas & dans leurs environs : elle fut fuivie de quelques autres pendant le refte de la nuit , & redou- blerent les nuits fuivantes. Dans celle du 2$ au 26, de 120 ou 130 maiions qui formoient le village de Jun- colas , DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 17 colas , il n'en refta que 22, & deux feulement après les fecoufles du 26 au 27. Pendant ces nuits défaftreufes, les habitans de Lourde coucherent, les uns fous des tentes ou dans des rez de chauffée, les portes ouvertes; les autres en plein champ. Le côté de la Ville qui regarde le nord , fut fort mal- traité ; les cheminées furent renverfées; ; quelques guérites ct jetées dans la riviere ; trois Fo croulerent la premiere nuit ; le château , une partie des écuries, les voûtes de l'Eglife & du magafin à poudre, & les monumens les plus folides , foufirirent des dommages confidérables. M. de Lavant obferva que dans ces derniers tremble- mens , les premieres fecoufles venoient de bas en haut, que les autres étoient horizontales, & que celles-ci ren- verfoient ce que celles-là avoient ébranlé. En vain le retour du beau temps & de la chaleur faioit-1l efpérer la fin de ce fléau ; on le reflentit encore à Lourde & dans les environs , depuis le 27 Juin : mais les fecoufles furent plus rares &d'ioins vives M. Lavant ne rapporte que les faits dont il s’eft afluré : il raconte que les fontaines d’eau chaude & celles d’eau froide furent troublées que les premieres dépoferent beaucoup plus qu’à He , de cette écume qu’elles charrient & de cette matiere vifqueufe qu’on remarque dans le baflin des fontaines de Bagnieres. Un grand bruit qui fe fit entendre dans la montagne à Lourde & dans les environs , reflemblant à des coups de canon répétés plufieurs fois & en même- temps , pré- cédoit de quelques inftans les fecoufles ; ce qui fit con- jeêturer à M. Lavant que la caufe de ce bruit étoit éloignée , que l’intervalle du bruit étoit en raïfon de la Tome IT. C 18 Hits TouRmRE diftance de la caufe, & que s'il précédoit les fecoufles de deux fecondes à Tarbe , il ne les précédoit pas d’une à Lourde : mais provenoit-il de la même caufe que le tremblement, ouen avoit-ilune particuliere? M. Lavant, fans rien décider , trouve pourtant quelque vraifem- blance dans cette derniere opinion. Le bruit ne fe faifoit entendre que dans les montagnes ; & fa caufe , quelle welle fût, fe développoit d'abord ; & devenue plus puiflante , elle occafionnoit la fecouffe. Peut-être, ajoute M. Lavant, ce bruit, qui fe répandoit dans les lieux pleniers & découverts , étoit-il en partie l'effet de la fituation & de la configuration des montagnes ; mais il ne penfe pas que ces fecoufles , fenties à de fi grandes diftances , fuflent produites par une feule impreflion, ni que le fiege de cette caufe réfidät en tel & tel lieu. Il croit que la fecoufle du 24 Mai ; fentie à Mont- pellier , ne pouvoit avoir été produite que par une trai- ée de matieres qui s’étoient fucceflivement embrafées jufqu’à cette diftance. La raïfon & l'expérience l’avoient convaincu que cet effet pouvoit être produit autant par le reflort de l'air que par des matieres combuftibles, & ue ces deux caufes étoient répandues dans tous les lieux où le tremblement de terre s’étoit fait reflentir ; parce ue s’il ny avoit eu qu'une feule & unique impulfon, il eût fallu , en fuppofant le fiege de cette caufe dans les montagnes , qu’elles euflent été bouleverfées , pour ue la fecoufle fe fût communiquée fi loin. À ces obfervations, M. Lavant ajoute un fait qui peut fervir de preuve au magnétifme de la foudre , ou à l'identité des fluides éleétrique & magnétique. Le 18 O&obre 1749, la foudre tomba fur le presby- tere de Montant. Elle parcourut lé cabinet du Curé DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. r9 qui s’amufoit de l’art de l'horlogerie. Elle fouilla fur-tout une boîte remplie d'outils d'Horloger, tous d’acier , fans en fondre aucun. Elle fit quelques dégats dans le ne À mit un violon & quelques inftrumens fragiles en mille pieces, ne brüla rien, & quoique fort chargée de fumée, elle ne laïfla que des taches noires fur des papiers & des livres ; mais la premiere fois que le Curé voulut fe {ervir de {es outils, 1l fut fort étonné de les trouver tous aimantés , quoiqu'il n’y eût chez lui aucune pierre d’ai- mant. M. Lavant envoya à l’Académie une meche de vrille & une lime. Ces outils étoient réellement aimantés. DESCRIPTION d'un Halo. Le 17 Mai 1780 , à 6 heures 1 quart, parut une portion de couronne dont le foleil occupoit le centre. MM. Vidal & Garipuy fils, qui fe promenoient cha- cun de fon côté , tournerent leurs yeux vers ce mé- téore ; ils fe communiquerent enfuite leurs obferva- tions. Il en réfulte que cette couronne étoit éloignée du foleil d'environ trente degrés vers le nord ; que l'arc apparent avoit environ vingt- cinq degrés, & qu'il paroïffoit fufpendu , fon extrémité inférieure étant à peu-près à la hauteur du foleil ; qu’il avoit les couleurs d’un fecond arc-en-ciel très-foible , dont on ne diftin- guoit bien que le rouge & le ] faune : qu'une colonne de lumiere blanchâtre s’éleva per péndichlrement au- deffus du foleil qui lui fervoit de bafe, d’une largeur apparente , égale au diametre de cet aftre , peu fenfible d’abord , augmentant enfuite de lumiere à mefure que le foleil baïfloit ; qu’elle devint rougeätre quand il fe 20 HrISTOMTRE coucha ; que fa hauteur étoit d'environ 22 degrés & demi ; que les nuages bas, fort éloignés , mais moins que la colonne, auxquels elle répondoit , la coupoient dans les endroits où ils la rencontroient ; qu’elle fuivit le foleil au-defous de l'horizon , & qu’elle diminua à mefure qu'il defcendit. MM. Garipuy , pere & fils, monterent à leur Obfer- vatoire, & la fuivirent jufques à 8 heures 11 minutes; elle difparut comme un aftre qui fe couche dans un vertical, dont l'amplitude boréale eft de 36 degrés so minutes , égale à celle qu’avoit alors le foleil, qui étoit à 7 degrés ÿÿ minutes au-deflous de l'horizon. Le ther- mometre étoit à 15 degrés, & le vent au nord-oueft, fenfible feulement par {a fraicheur. Le ciel fut enfuite très-ferein pendant quatre ou cinq jours, comme il arrive très-fouvent après les Halo , quoique plus fréquens dans le nord, & en hiver. OBSERVATIONS fur trois Aurores Boréales. Les deux premiers de ces météores furent obfervés à Narbonne, par M. de Marcorelle, le 29 Février 1780. L'un étoit de l’efpece des aurores boréales, qu’on appelle refplandiffantes, & parut au nord-nord-oueft, vers la fin du Crépufcule ; fon extrémité boréale étoit environ 15 degrés au-deflus de l'horizon , d’où elle s'élevoit vers le fud à bien près de 2 degrés au-delà de la Polaire. Sa partie orientale touchoit au quarré de la grande Ourfe, & du côté de l’oueft, eile finifloit aux premieres étoiles des Cornes du Taureau. A 8 heures 43 minutes , elle parut dans fa plus grande effervefcence. Cinq jets bril- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, 32r lans de lumiere, fe dirigeant vers le fud, partoient , comme d’un foyer commun, d’un point placé à 2 deprés au-deflous de la Poe lue divergence refpeétive étoit marquée par des angles très-aious , & leur mafle totale pouvoit être comprife fous un angle de 30 degrés. Cette aurore fe rapprocha fort du nord, & diféarut : à peu-près à 9 heures 40 minutes. La feconde aurore boréale, de l'efpece de celles qu'on nomme tranquilles, feparée ae premiere par un efpace aflez confidérable , parut un quart d’heure plus tard ; elle étoit au nord-eft, & fembloit être bien avant Ne l'horizon : de forte qu’on ne la voyoit que dans une efpece de lointain. Son élévation étoit d'environ 20 ou 25 degrés, & fon étendue de l’eft au nord de 30 degrés. Elle étoit mafquée horizontalement par une trainée de nuages obfcurs qui en déroboient la plus grande partie à l'œil de l'Obfervateur. Elle difparut à ro heures 15 minutes. Ces phénomenes avoient été précédés par des vents de nord-eft & de nord, qui n’avoient ceflé de fouffler pendant 16 jours avec plus grande impetuoñité ; le premier, depuis le 12 jufqu'au 22, & le fecond, depuis cette époque jufqu’au 28. Dans cet intervalle, “il étoit tombé de la neige , & le froid s’étoit vivement fait fentir. Le mercure étoit defcendu plufeurs fois dans le thermometre de Réaumur , à 2 degrés au-deflous de la glace , & 1l s’éleva dans le barametre à 28 pouces 7 lignes. Le même Académicien & M. Darquier firent part à l'Académie des obfervations qu'ils avoient faites chacun en particulier , lun à Narbonne , l’autre à Touloufe , d’une autre aurore boréale, beaucoup plus confidérable, r 22 HISTOIRE qui parut la même année , la nuit du 28 au 29 Juillet. Elle étoit du plus grand caraëtere, d’une très-vafte am- plitude , que M. Darquier eftima de 125 degrés eft & oueft , & d’un foyer très-lumineux. Elle commença le 28, un quart-d’heure après le crépufcule du foir , & ne finit d'éclairer que le lendemain 29, peu de temps avant le crépufcule du matin. M. de Marcorelle eftima l'arc qu’elle décrivit à l'horizon, depuis le nord-oueft jufques au-delà du nord-eft, de 110 degrés. Comme elle par- courut fucceflivement cet arc, cet Académicien la divifa en trois parties. Ce météore offrit le fpeétacle le plus impofant & le plus varié : M. de Marcorelle en fait un détail intéreflant. Les obfervations de M. Darquier s'accordent avec celles de M. de Marcorelle : il ne fit point de divifion comme ce dernier ; mais il diftingua difiérens rayons, dont un très-éclatant à 10 heures 20 minutes, pañlant entre Arêture & la grande Ourfe , s'élevoit jufqu'au Zénith, dans le temps qu'un rayon plus foible & moins large s’élevoit jufqu’à Cafliopée à lorient. A cette époque , M. Darquier lifoit très-diftinte- ment , à la clarté du météore , du caraëtere petit cicero. La projeîtion de l'ombre des cheminées étoit très- fenfible , & l’on diftinguoit très-bien la chevre qui venoit alors de fe lever. À 10 heures 3$ minutes ,-la clarté étoit fi vive, qu'on pouvoit lire aifément à la lueur de fes rayons. M. Darquier ne néglige dans fes obfervations , aucun des accidens de ce phénomene que M. Marcorelle fuit auffi dans fes moindres changemens. Il réfulte des obfervations & des réflexions de M. Marcorelle, 1°. que les rayons de cette aurore, très- brillans & très-multipliés, ne s’enflammant pas de bas en L' DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 23 haut, par jets précipités, il faut la regarder comme une augre rayonnante tranquille. ,. Que fon amplitude étoit très-confidérable. °. Qu'elle étoit de la plus grande élévation. s D'une extrême variété dans fa forme. °. Que l’extrêmité des fegmens obfcurs & lumineux re attention, 6°. Ainfi que la rupture, fur-tout à l’oueft , de fa lumiere , qui a formé les ns nuages Rue 7 Que fa clarté ayant perfévéré d’un crépulcule à ne il n’y a point eu de nuit. o, Que la divifion marquée de l'aurore en trois par- a à Un yenon éclairées & éteintes du nord-oueft au nord-eft, paroit aflujettie à la marche correfpondante & progreflive du foleil vers les mêmes points. 9°. Que les nuages qui couronnoient l'horizon, & qu'on voit très- fréquemment accompagner les A OT boréales , pourroient être l’eflet de la chüte de la partie la plus grofliere des vapeurs & des exhalaïfons qui re- luifent dans l’athmofphere. 10°. Que la chaleur ayant été extrême le 28 Juillet, le thermometre de Réaumur ayants été ce jour-là, à 2 heu- res après midi, a Narbonne, au 31°. depré au-deffus de la congélation, , ne nait avoir contribué à élever fupérieurement les exhalaifons , à les éle@rifer & a les rendre phofphoriques ; raifon pour laquelle pen- dant les ardeurs de la canicule, le ciel eft à l’oueft inf- niment plus rouge » après le ee du foleil , que dans les autres temps E l’année. L’a@tion d’un vent fec, vio- lent & long-temps foutenu , peut produire le même eflet , en provoquant & animant fans cefle le choc des parties groflieres de l’athmofphere , & en les forçant a 24 LT'I STORE s'élever vers une région fupérieure. Telle fut l'aurore boréale du 29 Février : elle parut le premier jour de calme , qui fuccéda à des vents furieux & de nord pen- dant feize jours confécutifs. : 11°. Enfin, que le foleil étant plus perpendiculaire à l'horizon , quand il vient d'entrer dans le figne du Lion, que lorfqu'il fe trouve dans le figne des Poiflons, la matiere qui opere la réfraétion des rayons folaires dans l’athmofphere , doit être alors dans un plus grand | degré d’élévation; qu’ainfi l'aurore boréale du 28 Juillet avoit un fous-foyer de réfraëtion plus élevé dans lath- mofphere , que l'aurore du 29 Février , & que confe- quemment encore, toutes chofes d’ailleurs égales , elle peut avoir été vifble du nord au fud, fous une bien plus grande latitude. TROMBE de Terre , Aurore Boréale. P, RMI divers phénomenes dont M. le Prefident d'Orbeffan fit part à l'Académie, dans la lettre qu'il écrivit le 13 Mai 1780 , il y en a deux qui méritent une attention particuliere ; l’un eft une trombe de terre, & l’autre une aurore boréale. La premiere exerça fa fureur fur une fuperbe falle de maronniers d'Inde , plantée au fond du jardin de M. le Préfident d'Orbeffan depuis plus de 6o ans, & dont les arbres étoient d’une grofleur fi confidérable , que deux hommes pouvoient à peine les ambrafler, a quatre pieds au-deflus du fol. Le 19 Avril 177$ , vers deux heures après midi, on vit du côté de l’oueft ,un nuage qui paroïfloit chargé de DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 26 de pluie. Tout-à-coup le ciel s’obfcurcit; 1l s’'éleva une tempête accompagnée de fiMlemens & d’un bruit affreux. La poufliere étoit fi épaifle qu’on ne diftinguoit plus les objets. La tempête dura huit minutes, & le ciel reprit toute fa férénité. Alors on vit la falle des ma- ronmers prefque renverfée , les arbres avoient perdu plus de quatre pieds de leur à plomb, fans que le terrain où 1ls étoient plantés füt foulevé; deux de ces arbres avoient eu leur cime brifée ; un troifieme, de même grofleur , avoit été enlevé de fes racines en forme de cône , & paroïfloit avoir été tordu , fans que le fol en eût été ébranlé, mais les racines qui y étoient adhé- rentes , laifloient voir une cavité dans ce qui reftoit du tronc à demi pied fur terre. Cette cavité avoit trois pieds de profondeur. L'arbre ainfi arraché , fut jeté à quelque diftance , & brifa une ftatue, dont quelques légers fragmens , ainfi que la cime de l'arbre, furent retrouvés le lendemain à près d’un demi-quart de lieue de diftance , fur des côteaux qui bordent la plaine. Les champs femés de blé, & bordés de quelques haies , étoient couverts de branchages | quoique ces haies, aflez élevées, n’euflent rien fouffert de l’eflet du tourbillon. Cette trombe fe fit fentir à plus d’une lieue de l’oueft à left, le fud & le nord furent épargnés; elle fe termina à la rive gauche de ’Arats, à üne grande lieue d'Orbeffan, fans doute parce que le pays y eft découvert : la lar- seur du terrain parcouru par le tourbillon , eft d’en- viron 300 toifes; il n’avoit été dépouillé que de quel- ques foibles arbrifleaux.: M. le Préfident d'Orbefan n'attribue le défaftre de la falle des maronniers qu’à la force de leur réfiftance. Cet ouragan ne fut accompagné ni fuivi d'aucune pluie. Tome IT, D 26 EST O0 FRE L’aurore boréale que le même Académicien obferva, eft du 8 Mars 1780, à huit jours de diftance de celles que M. de Marcorelle obferva à Narbonne : « Entre » le nord-oueft & l’oueft, dit M. le Préfident d'Orbeflan, » nous vimes un arc radieux , d’où fortoient plufieurs » faifceaux de lumiere , qui s’élevant aflez haut, s'éten- » dirent avec célérité vers plufieurs parties du ciel, » depuis l'horizon jufqu'au zenith. Lorfqu'ils furent » réunis, le ciel parut couvert d'un voile de pourpre, » autravers duquel on appercevoit diftinétement quel- » ques étoiles : cette aurore dura près de quatre heures » un quart, ayant commencé à fix heures quinze mi- » nutes, & n'ayant fini qu'à 10 heures vingt-fept mi- » nutes : alors ce beau fpeftacle difparut. » M. le Préfident d'Orbeffan termine ce détail par une réflexion fur la différence de nos payfans, qui n’eurent aucun effroi de ce phénomene , avec prefque tous les habitans de Naples qu'il avoit vus dans la plus grande confternation, à l’afpeét d’une aurore boréale , fuyant dans les Eglifes, qu’on avoit eu foin de laifler ouvertes, pouffant des cris & faifant des prieres à Dieu, pour qu'il détournât d'eux les fléaux que ce météore leur préfageoit. Lu DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 27 AG UNDAAR TP OMENE ST .;E. SUR un Enfant de quatre mois & demi , trouvé dans la trompe droite de la matrice. Carre intérefante obfervation eft de M. Fronton, Chirurgien & Accoucheur , qui la communiqua à l'Académie. Une femme de cette Ville, âgée de 28 ans , bien confituce , ayant eu fix enfans nt elle étoit accouchée a cet , fe trouva grofle pour la Rt fois : fa groffefle fut fâcheufe par une perte qu'elle éprouva, par une douleur aigue au côté droit de la région de la matrice, par des vertiges , des éblouiffemens, & par un teen général. La plupart de ces fymptomes ayant augmenté après deux mois de groffeite , & la fievre étant furvenue , on eut recours a la faignée & aux purgatifs, qui foula- gerent pour un temps la malade. Un accident arrivé par fon imprudence , augmenta le danger de fa fituation. Elle voulut partager un très- gros pain avec un couteau à deux manches, en appuyant ce pain contre fon eftomac & fon ventre. Cu preflion lui occafionna une échim ofe très-confiderable , depuis la partie fapérieure de la région épigaftrique , jufqu' au bas de la région ombilicale , accompagnée d'une dou- leur aiguë , tant dans le coté déjà afle@té que dans tout En ventre. Les remedes 2 appropriés réfolurent l échy- mofe ; mais les douleurs continuerent, plus ou moins fortes , jufqu’a fa mort, arrivée quatre jours après. 28 ÊTES TOLBRE Le matin du jour qu’elle mourut, fes douleurs s’étant talenties , elle déjeüna & fortit; mais ayant eu une foiblefle , elle rentra chez elle; & plufeurs foiblefles s'étant fuccédées , elle expira peu d'heures après. Il y en avoit vingt-quatre qu'elle étoit morte , lorf- qu'on procéda a l’ouverture du cadavre. L’incifion cru- ciale ayant été faite à l'abdomen , il fortit environ quatre pintes de fang. On foupçonna la rupture de quelque vaifleau , occafionnée par la preflion que cette femme avoit foufferte en coupant le pain dont ona parlé. Après avoir pompé ce fang , on apperçut une poche formée par la trompe droite de la matrice. Cette poche con- tenoit l'enfant, & étoit enduite d’un fang caille qui y étoit intimément collé ; on l’efluya , & 1l fut aifé de connoître que l’épanchement du fang venoit de la rupture de cette poche ; car on apperçut le corion & l’amnios qui contenoient les eaux où nageoit l'enfant. Ces eaux s'épancherent par l'ouverture qu’on fit de ces membra- nes , & on l'en retira. Il étoit de la grandeur des fœtus de quatre mois. Il parut que la matrice , tant intérieurement qu’exté- rieurement , même dans fa fubftance, n’avoit plus la couleur qui lui eft naturelle dans l’état de grofleffe ; fa fituation même étoit changée ; elle fe portoit du côté gauche , par la preflion de la trompe droite qui con- tenoit l'enfant. Il fut impoñible de démêler l'ouverture qui fait la communication de la trompe avec l’uterus. Le morceau frangé étoit d’ailleurs effacé par la diften- tion de la trompe. Il n'eft pas douteux que la fituation finguliere de cet enfant , indépendamment de l'accident de l’echymofe, occafionnée pat l’imprudence de la mere, devoit né- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 29 ceflairement entrainer fa mort, avant que ce fœtus ne fût parvenu au terme ordinaire. SUR l'opération de la Boutonniere. M. du Rozier , Chirurgien Major de l'Hôpital de la ville d'Ax, ancien Aide-Major des Armées du Roi, ayant fait heureufement l'opération de la taille à un jeune homme de 18 ans accablé de maux , dont le moindre étoit la plus grande mifere , déjà taillé à l’âge de 7, à qui on avoit extrait une pierre de la groffeur & de la figure d’une tête de coq, fut appelé 1$ mois après par ce malade , qui fouflroit d’horribles douleurs de colique néphrétique. M. du Rozier appaifa ces dou- leurs ; mais peu de temps après , il fallut en venir à une troifieme opération. M. du Rozier, perfuadé que les cruels fecours de la Lithotomie ne procurent qu’un foulagement momentané aux perfonnes qui portent en naïfant une difpofition oraveleufe dans les humeurs , & qu'ils ne détruifent pas le principe du mal, fe détermina à faire à fon ma- lade l'opération de la boutonniere. Après avoir extrait la pierre , il conduifit dans la veflie une canule qu'il avoit fait applatir fur les côtés, dont le bord extérieur étoit évafé, & auquel il avoit fait faire deux ouvertures pour y pañler deux rubans, afin de l’aflujettir au ban- dage. Il la fixa avec des plumafleaux , des comprefles, & contint le tout avec le bandage ordinaire , qui ne génoit point l'écoulement des urines. Tous les cinq ou fix jours , il retiroit la canule pour la nettoyer. £a fuppuration s'établit , les urines ne coulerent plus que 30 HISTOIRE par la canule , & dans foixante jours , la boutonniere fut formée. M. du Rozier trouva enfuite le moyen de recevoir les urines à mefure qu’elles fortoient de la veflie par la boutonniere. Un an après, nouvelle attaque de douleur néphréti- que; deux mois s'étant encore écoulés, le malade fentit au bord de la boutonniere un corps étranger qu'il toucha du doigt. M. du Rozier l'ayant mis dans la fituation d’un homme qui va fubir l’opération de la taille, dilata avec fes doigts les levres de la boutonniere , & fentit une pierre. Au moyen d’un cure oreille recourbe qu’il infinua par la partie fupérieure de l'ouverture , il parvint à faire fortir doucement cette pierre, qu'il trouva de la groffeur d’une feve de marais, & le malade en rendit de lui-même une feconde de la groffeur d’un pois. Depuis ce temps, le gravier parvenu dans la veflie après les attaques de douleur néphrétique , ou eft entrainé par les urines, ou lorfqu’il eft trop gros, on l'extrait par la boutonniere. Si la tifane dont ufe le malade pour poufler le gravier au- dehors, ne fuffit pas, il a recours aux bains domeftiques, & le moindre eflort fait fortir le gravier. Depuis douze ans, ce graveleux a rendu par la même iffue une grande quantité de pierres. Au furplus , de l’état de marafme où il étoit quand M. du Rozier len- treprit , il a pafé à l’état le plus fain , & a acquis une force & un embonpoint qui font envier fon fort aux autres graveleux. M. du Rozier croit qu'il eft bien des cas où la boutonniere délivreroit pour toujours de l'horreur des fecondes tailles. es DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, 3t SUR un Anévrifme fingulier. M. Carriere, Chirurgien habile, & l’un des premiers Fondateurs de TAradénie , lui communiqua , le 15 Juillet 1732 , l’obfervation fuivante. Un Ofiicier de la maifon de M. l'Evêque de Comin- ges , âgé d'environ 35 ans , fut faigné du bras droit, & l’on n’arrêta le fin qu'avec beaucoup de peine. Deux ou trois jours après, ayant fait du même bras un exer- cice violent , il reflentit une douleur très-aigue à l’en- droit de la faignée : le bras & l’avant-bras devinrent fort enflés ; il y parut une échymofe tres- -confidérable. Le Chirurgien qui l'avoit faigné, mit en ufage tous les remedes convenables ; léchymofe & la grande enflure cfparurent en peu de jours. On s'apperçut enfuite d’une petite tumeur dure , accompagnée d'un battement fenfble qui croifloit d’un Jour à l’autre. Trois mois apres cet accident, le malade vint à Touloufe , & confulta M. Carriere, qui, après avoir examiné le bras , crut appercevoir un anévrifme du volume d’une groffe pomme de reinette. Cet ané- vrifme étoit dur , rond, life & uni , accompagné d’un fréquent battement. re peau qui le couvroit avoit fa couleur naturelle ; la tumeur ne difparoïffoit pas, quoi- qu'on la comprimät. L'opération fut jugée néceflaire , & M. Carriere y préfida en préfence de deux autres Chirurgiens. Il avoue qu’elle lui donna de la peine , parce que la tumeur, par fon trop grand relief, cachoit le tronc de l’artere qu'il devoit lier, & l” empêchoit de la découvrir. Après avoir lié & ouvert l'artere , il fut étrangement 32 ELT AT OUTRE furpris de voir une mafle charnue, au lieu d’un fan fluide qu’on trouve dans les anévrifmes ordinaires. Cette mafle étoit de la nature de ces concrétions qu’on nomme improprement polypeufes ; elle occupoit la poche qui s’étoit faite dans l’artere, & formoit cette grande tu- meur dont on a parlé. Après avoir fait l’extraétion de ce corps , 1l crut n'avoir plus rien à faire, parce que l’artere ne fournifloit plus ; cependant, un inftant après, 1l vit jaillir le fang en abandance de la poche qu'il avoit ouverte. Il crut d’abord n'avoir pas aflez ferré la ligature ; mais ayant examiné la chofe de plus près, 1l s’apperçut que le fans jaillifloit d’une autre artere qui venoit par-deflous le tronc , pour s'ouvrir dans cette poche formée par la dilatation de fes tuniques. Il ne put pas découvrir cette artere pour en faire la ligature, parce qu’elle étoit fort cachée par les muf- cles ; ce qui le détermina à appliquer un petit bouton de vitriol fur fon embouchure , & pour plus grande fu- reté , il mit une petite comprefle fous l’artere, & une autre deflus : il remplit le refte de la plaie de bourdon- nets de charpie brute & de plumaffeaux ; il ajouta par- deffus un cérat, des compreffes & le bandage dont on fe fert ordinairement, & le malade s’en retourna à Co- minges, le vingtieme Jour après l'opération, fans qu'il lui fût furvenu d'autre accident, qu’une légere hémor- ragie , quatre Ou cinq jours après l'opération , qui fut arrêtée par la fimple application du colcotar & du ban- dage. | CH SUR DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 33 SUR un Épi de Gramen tormentofum fpicatum, introduit dans le corps humain. M. Meynard , Doëteur en Médecine , rapporte le fait fuivant. M. de Clayrac , Curé de Monpeiroux , au Diocefe de Lodeve , ayant mis par mégarde fur fa langue un épi de gramen tormentofum fpicatum | & fait quelque mou vement , l’épi gagna le gofier, & lui occafionna, en defcendant , une {uflocation , dont on ne le fit revenir qu'à force de l’agiter. Il n’éprouva d'autre accident, pendant trois jours , qu’une toux incommode & un pi- cottement a la gorge. En vain, pour accélérer la defcente de l’épi , qu'il foupçonnoit s'être arrêté à l’œfophage , avaloit-il des cérifes & des croûtes de pain fans les mâcher, l’épireftoit, en apparence , au même endroit. Le quatrieme jour 1l fut éveillé fubitement par une douleur aiguë qu'il reflentoit au côté droit. La fievre furvint. Il fut faigné plufeurs fois & traité en pleuré- tique ; mais ayant révélé la caufe de fon mal qu'il avoit cachée jufqu’alors , on effaya plufieurs méthodes. La toux , la fievre, le crachement purulent , au lieu de diminuer , augmenterent encore. Le 18°. jour , la douleur lui parut plus extérieure; une tumeur douloureufe fe manifefta au même côté, entre la derniere des vraies & la premiere des faufles côtes, On y appliqua des réfolutifs ; la tumeur groffit. On eut recours aux émolliens , enfin aux fuppuratifs. Le feptieme jour de ce traitement, la tumeur perça ; il en fortit quantité de pus. Dans le panfement , on apperçut un corps ré- Tome IT, | 34 HISTOIRE fiftant ; on le faifit, & l’on retira l’épi avalé depuis trois femaines. Il étoit entier, & avoit feulement un peu jauni dans le corps du malade ; fa plaie fe confolida , & il ne reflentit plus aucune douleur ; mais il lui refta fa toux & fon crachement de pus. Le poumon avoit été afle@e ; il falloit calmer l'irritation ; on y réuflit au moyen des bouillons adouciflans & rafraichiflans , du lait de vache, coupé avec la feconde eau de chaux, & enfin du lait d’änefle ; infenfiblement la toux s’appaifa, & les crachemens diminuerent. Les fymptômes difpa- rurent , & à la fin de l’année , le malade ayant repris fon embonpoint, il ne lui refta que la cicatrice de l’ou- verture que l’épi s’éroit faite. OBSERVATIONS für une Bouche bridée avec carie aux maxillaires. Ox avoit lu depuis peu à l’Académie , des obfervations fur les mâchoires fupérieure & inférieure d’un Efpagnol, qui fe trouvoient réunies par de fi fortes brides , qu’aucun remede n’avoit pu les relâcher, & qu'il fallut enfin fe réfoudre à les couper avec le biftouri, pour délivrer le malade de fon affreufe fituation. Le 13 Avril 1780 , M. Gardeil rendit compte à la Compagnie d’une autre bouche bridée , qui mettoit le malade dans un état encore plus fàcheux , .& que guérit la nature feule , très-peu aidée par l'art. Le nommé Varlé , Allemand , âgé d'environ trente ans, fe trouvant à Touloufe pour fon commerce de pendules de bois , fe préfenta, le $ Août 1779 , à M. Rufcat, Chirurgien-Dentifte de cette Ville. Varlé reve- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 3s noit de Bayonne, d’où il étoit forti fi gorgé de reme- des mercuriels , que fes mâchoires étoient bridées , au point que les dents de l’inférieure fe croifoient fous celles de la fupérieufe : il ne fe foutenoit qu’au moyen d'alimens liquides , introduits dans la bouche , par le vuide qu'avoient laiflé deux dents molaires tombées de la mâchoire fupérieure , & qui laifloient voir desulce- res qui avoient ronpé l'intérieur; on en diftinguoit fur- tout un trés-confidérable au fond du gofier. Le défaut de foin & d'attention à nettoyer ces ulceres , & l’im- pofhbilité où le malade étoit d'ouvrir la bouche, avoient donné lieu à des finus fiftuleux à droite & à gauche, avec de fortes brides en certains endroits, de la gan- grene en d’autres , & une carie profonde & étendue aux os maxillaires. Le malade , d’une maigreur extrême, d’une pâleur livide , le vifage have & défait, n’articuloit qu'avec peine quelques mots rares & prefque inintelli- gibles, pour répondre aux queftions les plus eflentielles : l'odeur infeéte & cadavéreufe qu’exhaloit fa refpiration, ne permettoit à perfonne de l’approcher. M. Rufcat , inftruit que ce ravage avoit été fait dans l'efpace de trois mois, & que deux Chirurgiens , à qui Varlé s’étoit préfenté, défefpérant de le ouérir, le Jui préfenté , P e le guérir, le L avoient renvoyé , examina cette bouche comme il put ; il y trouva de gros morceaux de l'os maxillaire inférieur qui chanceloient ; il ofa tirer un bon augure de cette {éparation des parties cariées , opérée par la nature; mais il ne voulut tenter de les extraire qu’en préfence d’un Médecin, & il appela M. Carriere. Îl commença le lendemain 6 Août ; il fentit branler fous la tenette une portion de la mâchoire inférieure 4 dont le balancement fe terminoit d’un bout à la dent 36 ET FST DURE canine , fans pouvoir déterminer jufques où 1l abou- ufloit de l’autre ; il l’attira doucement : mais quelle fut fa furprife , en voyant fuivre un gros fragment, que M. Gardeil préfenta a la Compagnie , auquel tenoient fix dents, trois groffes molaires , les deux petites & la canine! Ce fragment vint fans [ae » & prefq ue fans hémorra- gie. M: Rufcat remit au lendemain la fuite de l’extraêtion. Ï! tira une portion d’os de la mächoire inférieure encore plus gros que celui de la veille, & que M. Gardeil préfenta aufli à l'Académie ; il contenoit fept dents, les trois grofles molaires , les deux petites , la canine , & une petite incifive. Il ne refta que la bafe de la mà- choire inférieure, avec trois incifives qui fe conferverent en bon état. On voyoit, par ces deux morceaux , que la carie avoit détruit la partie fupérieure de l’os maxillaire inférieur jufqu’au-deffous du finus. M. Rufcat enleva le même jour un morceau de la mâchoire fupérieure du côté droit avec fes trois dents ; il détacha encore une dent de la machoire fupérieure du côté gauche , avec un morceau de los qui y étoit attaché & que la carie avoit féparé du refte. M. Gardeil mit ces deux pieces fur le Bureau. Après l'extraétion de ces os, M. Rufcat fit le panfe- ment , au moyen des inje&tions & des lotions antipu- trides & exfoliatives. Il appliqua légerement des bande- lettes imbibées des mêmes remedes. De concert avec M. Carriere , il prefcrivit l'ufage d’une forte décoëtion de kina, & ‘continua la même méthode jufques à par- faite guérifon. Le quatorzieme jour il détacha trois pe- tites efquilles très-peu confidérables , & cette énorme laie de la bouche fut confolidée & entierement cica- trifée le 30 Août. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 37 Alors M. Rufcat confeilla au malade de forcer les brides , qui paroïfloient déjà un peu relâchées par l'ufage des remedes & par l’irritation qu’ils avoient caufée. Varlé pouvoit pañler les doigts à travers les inter- valles qu'avoit laifle l’extraétion des os. Il parvint à placer des corps durs , mais minces , entre les trois dents qui reftoient à la mächoire inférieure & les dents de la mâchoire fupérieure ; il s’en fervoit en guife de levier. Il déchira fi complettement , petit à petit, toutes les brides, qu'il réuflit à ouvrir la bouche aufli libre- ment qu'avant que les brides ne fuflent formées. Le 8 Septembre , 1l ouvroit comme tout le monde, & il a continué depuis ; 1l put y introduire toute forte d’alimens , & 1l parla à peu-près comme avant fa ma- ladie : 1l avoit feulement plus de difficulté à mâcher. Après fa guérifon , il partit pour l’'Efpagne , où il alla continuer fon commerce de pendules. M. Gardeil ne craignit pas d’aflurer que cette maladie étoit une de celles où il s’eft fait la déperdition de fubftance des os maxillaires la plus confidérable ; on auroit eu de la peine à le croire , s’il n’avoit apporté les pieces juftificatives. Il en conclut en faveur des grandes reflources de la nature, & des avantages qu’on peut en attendre dans des cas qui paroiflent défefpérés, lorfqu’un homme de l’art fait la connoïtre & l'aider. 33 HTSTOrRE EXTRAIT des Regifires des Délibérations de l'Académie Royale des Sciences , Infcriptions & Belles Lerrres de Touloufe. Du Jeudi 21 Juin 1781. M. Brun a préfenté à l'Académie le nommé Miquel Diarnobé , âgé de 44 ans , natif de Pampelune , dans la Navarre Efpagnole. Cet homme , fervant en qualité de Canonnier dans le Vaifleau le St. François-Xavier, reçut vers la fin de Mars 1780 , au fiege de Gibraltar , une mitraille dans l'articulation du bras gauche avec l'avant - bras, Dans cette même aflaire, il fut fait prifonnier par les Anglais, & porté à l'Hôpital du Fort. Le délabrement qu'avoit occafionné ce coup de feu, étoit fi confidérable , que de cinq Chirurgiens conful- tans, quatre opinerent plufieurs fois pour l'amputation. Le cinquieme, dont M. Brun a témoigné des regrets de ne pas favoir ie nom , encouragé par l'aëtion des doigts, qu'il voyoit fubfifter, parvint à empêcher l’o- pération : on traita en conféquence le bleflé, en fivant les indications qui fe préfentoient. Ce traitement duroit déjà depuis onze mois, lorfque, par un échange , ce prifonnier encore malade , fut tranfporté à l'Hôpital de St. Roch, où, après cinq mois de panfemens, il obtint une parfaite guérifon. M. Brun ayant rencontré par hafard , dans les rues de Touloufe, cet Efpagnol qui alloit à Rome en péleri- nage , fut fi étonné de la difproportion frappante que préfentent ces deux bras au premier coup d'œil, qu'après Hits 1 à4 MAR ARTS Or MODO" À os : ” un ige de 1 ALE Eu (LE “lan in 1e Gran de RME Là er ro d 4 DUC fear y re V4 Na 218 fus ra ie bé ALORS, CITE RTE e 4 A ! k 4 Lt EST TAN LA at st 44 Le a Rust. Pag. 39 - DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 39 un léger examen, & quelques renfeignemens pris à la hâte fur cette difformité, 1l l'a jugée digne de l'attention de l’Académie. On a vu, en effet, en comparant le bras fain avec celui qui a été meurtri, que ce dernier ayant perdu la moitié inférieure de l’humerus, & la moitié fupérieure des os de l’avant-bras, n’a que 15 pouces de longueur depuis épaule jufqu’à l'extrémité des doigts, en y com- prenant un intervalle de 15 lignes qui fépare les os qui ont refté , tandis que celui qui n’a rien fouffert, en a 28. Cet homme ne laiffe pas de fe fervir librement du poignet, avec lequel il fouleve un poids de 40 livres ; mais 1] ne peut porter fa main à la tête que par fecoufles, a la faveur d’une forte contraétion des mufcles qui re- couvrent l'épaule : lorfque la partie inférieure de fon bras a été ainf tranfportée, fes doigts agiflent à volonté. L'Académie ayant vu cette efpece de phénomene avec intérêt , a paru défirer en même-temps de voir cette obfervation dans un plus grand détail , & fous un point de vue relatif aux progrès de l'Art : en confc- quence, elle a chargé M. le Secrétaire de faire deffiner ce bras. Woyez la planche D ES EE PR NE LUTTE 27 ie Fe te SUR une réunion apparente des deux Sexes dans le méme fiyer. M + Mafars, perfuadé qu'il n’exifte pas dans la nature des êtres qui, réuniffant les deux fexes, ont la faculté de fe reproduire, fe contenta de faire à l’Académie le portrait le plus fidelle & le plus détaillé de la perfonne qui fait le fujet d'un Mémoire qu'il lut le 4 Décembre 1783. 40 Frs THOURE Cette perfonne eft âgée de 22 ans, forte en appa- rence , mais d’une confttution délicate. Sa taille eft de cinq pieds deux pouces ; les hanches hautes , les genoux gros , la poitrine un peu applatie , fans aucune faillie du larinx à la partie antérieure du col, nulle proëmi- nence de gorge, maigre , effilée , brune, la voix & les traits féminins , & allez intérefans ; beau teint, mais trop monte en couleurs ; yeux, fourcils, cheveux noirs, la levre fupérieure couverte d'un duvet afez touflu , mais fans poil au menton; la démarche lefte , les mufcles des mains & des avant-bras aufli vigoureulement pro- noncés que ceux des hommes , dont elle recherche fe commerce avec autant d’ardeur qu’elle a d’indifférence pour celui des femmes. Tels font les premiers traits qui la caraftérifent. Les parties de la génération ont quelque chofe de plus AU équivoque. Une efpece de Phallus femble tirer fon origine de la partie inférieure des os pubis ; 1l a deux pouces de lon- gueur , & deux pouces fept lignes de circonférence à fa partie moyenne ; au taét il paroïît compofé de deux cylindres adofés , ainfi que les corps caverneux , mais dans les interftices defquels on ne trouve point le canal membraneux , qui dans l’homme conftitue l’uretre. A l'extrémité de ce cylindre , fe montre à moitié un gland life, bien conforme , proportionné au refte du Phallus , entouré d’un prépuce large , qui s’allonge , fe retire , dont le gland peut être couvert, & qui fe plifle au-deflous de fa couronne , quand on le découvre en- tierement. Il n’eft point percé à l'extrémité ; mais on obferve à la place de l'orifice une fofle ou dépreflion très-fenfble , qui DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 41 qui s'étend tout le long de la partie antérieure du gland & finit au frein que M. Mafars trouva plus large & plus épais qu 1 ne l’eft dans l’état ordinaire. Sur les côtés du Phailus s’élevent deux corps ovoides, l’un à droite, l’autre à gauche, de confiftance moyenne , du volume des tefticules , ayant comme eux leurs épydi- dimes. Ces corps font exempts de douleur quand on les prefle : ils font fufpendus par une attache ronde, de la grofleur du cordon fpermatique , & renfermés éurs dans une enveloppe particuliere , reflemblante au fcro- tum des hommes , mais féparée l’une de l’autre. Du point de divifion des deux fcrotum , & de la commiflure fupérieure d’une fente fubjacente , dont 1l {era bientôt parle , pend le Phallus ; les poches, dans lefquelles font contenus les tefticules , le dépañlent un peu, fur-tout la poche du tefticule droit, qui eft un peu plus gros que l’autre , & qui defcend un peu plus bas. Ce Phallus, s’il faut en croire le fujet, n’eft fufcepti- ble d'aucun gonflement , d'aucune aétion , d’aucune fen- fibilité , & fous ces rapports il diflere encore du vrai penis , dont il emprunte l'extérieur , & du clitoris qu'il repréfenteroit très-bien, s'ilavoit fes qualités, & sil étoit moins long & moins gros. Lorfqu’on releve le Phallus & les fcrotum , on apper- çoitune fente plate, inacceflible à tous les regards, dans l'état libre des parties fuperpolées : elle a un pouce de longueur ; elle va du pubis vers l'anus; elle fe termine au périné, par un repli de la peau , tel que celui qui conftitue la fourchette dans la femme. Cette fente n’a ni grandes ailes ni nymphes ; ; elle pre- cede un conduit très-étroit, qui paroït trés-court , où M. Mafars n’a trouvé aucun veftige d'hymen, ni de Tome IT, 42 FCNSUE CNRC caroncules myrtiformes. Il y enfonça fon doigt ; mais a mefure qu'il avançoit , 1l fentoit qu’au lieu de cette fubftance fouple , pongieue, dont eft compofe le vagin de la femme , ce conduit étoit tapifle d’une membrane aflez ferme, hériflée d’une infinité de petites glandes très- -rapprochées les unes des autres. Le doigt n'y fut pas introduit au-delà d'un pouce & demi, qu’un commen- cement de douleur qu'il excitoit , & la réfiftance d’un corps folide , glanduleux , qui fembloit en former le fonds , l'empêcherent d'aller plus avant , & de toucher luterus, fi pourtant il yen a, & s'il n’eft pas remplacé par ce corps. Il fut impofible de reconnoitre le méat des urines. Le fujet dit qu’elles fortoient de la partie intérieure, moyenne , fupérieure du conduit en queftion. II dit en- core que par ce même conduit, 1l éprouvoit réguliere- ment un écoulement de mois plus ou moins abondant, précédé & accompagné quelquefois de douleurs aux lombes , de coliques SECHE qu ’enfuite il fe portoit bien ; qu'il avoit vécu pandant cinq ansavec un homme ; qu'il n’eft pas rare qu'il en voie quand le caprice lui en amene ; qu'il trouve dans leurs embraflemens des plaifirs relatifs à fes goûts ; qu'il peut les fatisfaire fans qu'il lui en coûte des fouffrances, à moins qu'il ne fe livre à des fatyres trop difproportionnés. On auroit de la peine à le croire, après ce qu’on a vu de la petitefle du paflage & de fon peu de profondeur , fi les faits ne devoient pas l'emporter fur les raifonnemens. M. Mafars termine fa defcription par quelques ré- flexions , dans lefquelles 1l balance les raifons qui peu- vent décider pour un fexe ou pour l’autre , mais fans prendre aucun parti. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 43 Mi DE CeL:N.E. SUR la petite Vérole naturelle. Cr: ST une vérité qu'il y a des maladies qui , en contribuant à la dépuration des humeurs, peuvent guérir d'autres maladies ; mais pour connoître l'étendue & les bornes de cette propofition générale , il faut examiner les cas particuliers. En 1769 , M. Pouderous commu- niqua à l’Académie quelques obfervations utiles à ce fujet. Un enfant, de l’âge de dix ans , des environs de Villemur , eut la petite vérole en 1742. Depuis l’âge de fix ans, cet enfant avoit eu les glandes du col en- goroces : elles pañloient de l’état d’inflammation à celui de la fuppuration , qui étoit purement lymphatique ; mais d’une nature fi âcre, que l’humeur ou le pus qui en découloit , enflammoit & ulcéroit les parties voifi- nes. Ces glandes cefloient de temps en temps de fluer , s'engorgoient de nouveau & s’ulceroient : elles {e cica- triferent parfaitement après la fuppuration de la petite vérole , & difparurent pour toujours. Deux freres , fils d’un Négociant de cette Ville, fe trouverent aufhi guéris, en 1754, de tumeurs fcrophu- leufes , après la fuppuration de la petite vérole. La fille d'un Charron de Rabaftens en Albigeois , âgée d'environ dix ans, étoit , depuis l’âge de fept, tourmentée de dartres rongeantes & encroûtées aux deux épaules. Ayant été attaquée , au mois de Mai 1745; d'une petite vérole confluente , qui donna lieu à une 44 HISTOIRE abondante fuppuration , elle fut entierement délivrée de fes dartres. Il feroit à défirer que M. Pouderous n’eût pas borné fes obfervations fur les maladies curatives , fi l'on peut s'exprimer ainfi , à la petite vérole. SUR une Crife finguliere. | fuivante eft de M. Averos, Doëteur en Médecine, réfidant à la Salanque en Rouf- fillon , qui l'envoya à l’Académie. Dans l'épidémie des fievres malignes & peftilentielles qui afigerent la Salanque , depuis le mois de Mai 1756 jufqu'au mois de Juin 1758 , une fille de 19 ans fut attaquée de la maladie commune avec les fymptômes ordinaires. Bientôt à l'abattement général , au mal de tête, à un pouls obfcur , languiflant & inégal , fuccé- derent une chaleur brûlante dans tout le corps , fur-tout aux extrémités , & un pouls fréquent & convulfif, accompagné de tremouflemens aux tendons du poignet. La langue chargée fur les bords & éréfipelateufe au milieu , devint gerfée, très-noire & parfemée d’aphtes. Après de cruelles infomnies , la malade tomba dans une phrénéfie qui dura trois jours. M. Averos eut recours aux faignées du bras & du pied , aux émetiques , aux purgatifs , aux potions rafraichiflantes , calmantes , & même narcotiques , &c. Enfin le vingt-unieme jour , au lieu de la fueur cri- tique, que l’état du pouls fembloit annoncer , 1l s’apper- cut, avec étonnement , que les mains & les pieds, de- venus douloureux , s'étoient confidérablement tuméfiés, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 43 & que de l’épiderme de ces parties , il fuintoit , à travers les tégumens , une efpece de rofée d’une nature âcre & cauftique , qui, mife fur fa langue, y faifoit une im- preflion de feu , & y excitoit même des empoules. Quatre ou cinq jours après , toute la peau des mains fe détacha, en forme de gands, jufqu’au poignet , & le lendemain il en arriva autant à celle des pieds. De ces parties dépouillées de leurs tégumens , il dé- coula une grande quantité de {érofités ou d’humeurs lymphatiques fi âcres, qu’elles rongeoient les linges. Cet écoulement merveilleux fut bientôt fuivi d’une par- faite guérifon. SUR une efpece de Maladie de Poitrine. Ux jeune homme , âgé de 18 ans, malade depuis trois mois , eut recours, en 1759 , à M. Averos, Correfpondant de l’Académie. Il refpiroit & toufloit avec peine ; 1l étoit exténué ; ce qui faifoit penfer à des perfonnes de l’art, qu'il avoit quelqu’ulcere au poumon. I fe plaignoit d’un poids qu'il rapportoit intérieurement à la région épigaftrique ; il reffentoit une douleur très- vive en forme de ceinture le long des faufles côtes, tant du côté droit que du côté gauche , depuis l’épine du dos jufqu’au cartilage xiphoiïde. Cette douleur étoit infupportable lorfqu'il étoit aflis , & diminuoit confidé- rablement quand il étoit couché. La région épigaftrique & les hypocondres étoient extrêmement gonflés. Le pouls étoit fréquent , & battoit avec aflez de force & d’ésalité. M. Averos avoue que d’abord il fut très-embarrafé 46 TU SATAOMARLE fur le diagnoftic de cette maladie ; mais qu’enfin , la foif infatiable dont le malade étoit tourmente , l’enflure des extrémités & les urines briquetées , le tirerent de fa perplexité : il penfa que le malade qu’on avoit cru pul- monique , étoit attaqué d’une hydropifie de Sn Interrogé fur les commencemens de fa maladie, jeune homme répondit qu'il croyoit qu’elle éroit la LE d’un effort qu'il avoit fait en fe courbant : il ajouta que quelque temps après , 1l avoit reflenti comme un corps étranger qui lui pefoit dans le ventre (ce font festermes ); que É refpiration devint enfuite gênée ; que ces phéno- menes avoient augmenté avec le temps, & fur-tout le poids auquel avoit fuccédé la douleur qui le ceignoit & qui le tourmentoit cruellement , lorfqu'il fe tenoit débout ; qu’elle étoit moins ape quand il étoit aflis, & prefqu’ infenfible quand il étoit couché. M. Averas ordonna quelques remedes > qui n ’empêécherent point que le malade ne mourût quelques j jours après. A l'ouverture du cadavre, on ne trouva point d’eau épanchée dans la cavité de la poitrine. Le poumon, le médiaftin , le péricarde , étoient dans leur état naturel. M. Averos promena fa main dans la cavité du thorax, pour y chercher la caufe de la maladie. Il trouva une tumeur aflez élevée, occupant toute la partie tendineufe du diaphragme AT enfoncé dans l'abdomen. L’ayant ouverte avec le fcalpel , il en découla une grande quan- tité d’eau un peu jaunatre & d’une odeur infupportable. M. Averos examina attentivement la nature de cette tumeur, & il vit qu’elle étoit formée par une ferofité , qui s’étoit amaflée entre le diaphragme & la plevre qui le tapiffe ; alors il vit évidemment , & s’aflura par {es yeux & par fes mains , que le malade étoit mort d’une DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 47 hydropifie de poitrine enkiftée , qu'aucun Médecin n'avoit m1 obfervée ni décrite. SUR un Vomif}ement noir épidémique. H YPOCRATE parle dans fes ouvrages d’une maladie qu'il appelle vomiflement noir : elle eft aflez rare en Europe ; mais très-fréquente en Amérique , fur-tout à la Havane , où elle fait périr beaucoup de monde. Elle avoit régné à Cadix en 1740 ; elle y reparut au mois de Juin 1764. L’abattement des forces avec un mal-aife dans tout le corps ; un dégoût pour les alimens & pour la boiflon ; un poids confidérable à l’eftomac avec de fréquentes envies de vomir; le ventre conftipé ; les urines peu abondantes & fétides ; le pouls petit, fréquent & concentré : telles étoient les annonces du vomiffement noir , qui paroïfloit régulierement le fecond jour de la maladie : on trouvoit, a l’ouverture de ceux qui avoient le malheur de fuccomber , l’eftomac & les inteftins gangrenés. M. Perié , Médecin de Cadix , & Correfpondant de l'Académie , ayant cru appercevoir la caufe de cette épidémie dans l’infe@tion de l'air, occafionnée par des chaleurs exceflives, à la fuite d’un hiver pluvieux s effaya le premier d’empl loyer le vinaigre : il donna à fes malades une once de vinaigre diftillé , fur une livre de petit lait auf diftillé , à la dofe d’un verre, d'heure en heure. Le bouillon de poulet, quelques plantes nitreufes & un peu de vinaigre furent le remede des riches. Celui des Pauvres étoit un verre de vinaigre bouilli dans trois pintes d’eau, & du bouillon avec du mouton, les plantes A8 HI ST OURE nitreufes & le vinaigre. Cette méthode eut le fuccès le plus heureux. On ne fera pas furpris que le vinaigre ait produit de fi grands eflets dans une maladie où domi- noit la putridite , & où il y avoit une exaltation de bile bien marquée. SUR un Bubonocele , d’où font fortis des vers de 2 plufieurs pouces. LE fait que nous allons rapporter a été obfervé par M. Sabatier ; 1l n’eft pas fans exemple , mais 1l eft tres- rare. Simone Fors, âgée de 34 ans, mere de onze enfans, portoit , dans fi droite , un bubonocele , de la groffeur d'une feve ordinaire , occafionné par une forte compreflion au côté droit du LE ventre. Cette tumeur, qui depuis huit ans ne groflifloit & ne la faifoit (ufr que lorfque le vent d’eft fouffoitavec violence ou qu’elle avoit fait des travaux forces , ne l’empêéchoit pas de cultiver fon champ. Un excès de colere , auquel elle fe livra le 12 Juillet 1749 , lui fit fentir une douleur très- vive dans la tumeur , qui groffit beaucoup & s’enflamma. La douleur & la rougeur céderent à deux faignées & a des applications émollientes qu’ordonna M. Sabatier ; ; mais le 3 Août, il fe fit, au centre de la tumeur , une petite ouverture de la grofleur d'un fi, qui rendit une férofité gluante & jaunätre en petite quantité ; mais qui ne fut qu'un fuintement imperceptible , quand la tumeur flétrie fut redevenue à fon premier volume. Le 11, fur le foir , la tumeur fe gonfla de nouveau, redevint rouge & prefque livide ; la douleur devint fi vive, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 49 vive , qu'elle arracha des cris continuels à la malade ; elle éprouvoit des déchiremens comme de coups de poignard dans les anneaux : elle étoit quelquefois agitée dans diflérentes parties, de mouvemens convulfifs fuivis de défaillances ; le pouls étoit ferré, petit, inépal , avec refroidiffement dans tout le corps, fans qu’aucun remede püt produire le moindre calme. Le 13, à cinq heures du matin, les fymptômes redoublerent , de petites gouttes d’une RENTE verdâtre coulerent de l’ouverture ee l'on vit tout de fuite un ver fufiforme , long de A pouces, ayant la tête d’un brun noirâtre & fort pointu, fortir en double ; 1l rampoit & s’entortilloit avec force. M. Sabatier Pexamina, & le trouva femblable à ceux que rendent les enfans ; F avoit deux lignes de diametre dans fa plus grande grofleur, diminuant jufqu’aux extrémités, qui fe terminoient en pointe. Il vécut environ fix res Dès qu'il fut forti, les douleurs ceflerent , la tumeur pälit & diminua ; l'ouverture fe reflerra & donna peu de férofité. La malade affoiblie garda le lit le refte du jour & la nuit fuivante ; mais le lendemain au point du jour , les douleurs recommencerent , la tumeur s’enfla & rougit. À onze heures du matin, la malade cr onvARe un fourmillement douloureux dans laine , voulut y re- garder ; ; elle apperçut la tête d’un re ver, redreflée perpendiculairement {ur la tumeur d'environ un pouce, il en avoit neuf quand il fut forti ; il étoit gros à pro- ortion , & refflembloit parfaitement au premier. Alors l'ouverture fe refferra , il n’en découla prefque plus rien. La malade fe leva le lendemain, la tumeur diminua & revint à fon premier volume : on appliqua des topiques vermifuges ; & la malade ayant pris les eaux de Balaruc, ne rendit plus de vers; mais on trouva Tome IT. G de) HRSTOIRE trois fois de fuite à l’'emplâtre qu'on avoit appliqué fur la tumeur , une efpece de fil long de trois lignes , d’une fubftance Foaienes dure, cylindrique, moulée comme par une filiere, qui Ë réduifit en poudre lorfqu’on la toucha ; ; mais rien de liquide ne fortit de l'ouverture , pas même quand avec l’emplâtre on arracha cette efpece de fil. La tumeur diminua Juiques au volume d’une feve ordinaire. La peau reprit fon état naturel. SUR la Rage. : 19 E 24 Mars 1772, un loup enragé mordit grievement quatre perfonnes près du moulin de St. Meu; un Meünier, un Maréchal, une fille nommée Catherine , & un jeune Berger, âge de 14 à 15 ans; le premier mourut de la rage vingt jours après. Le Maréchal , effrayé de cette mort, alla confulter M. Mafars ; 1l crachoit déjà une {alive écumeufe ; il avoit le fourcil hérifle , l'œil hagard, & fentoit dans l’eftomac un poids & un embarras très- incommodes. Ses jambes & fes bras étoient dans un mouvement continuel ; fon pouls étoit fréquent , dur & plein. La bleflure qu'il avoit reçue à la cuifle à travers la culotte ,avec eflufion de fang , quoique prefque guerie, étoit encore rouge & gonflée. M. Mafars lui ordonna de fe faire faigner, de prendre un bain & un lavement , avec la décottion de courge, de frotter fa plaie & 13 environs avec l’onguent mer- curiel camphré, de prendre, en fe couchant , une émul- fion narcotique camphrée, précédée d’un bol fait avec le mercure , le mufc, la poudre tempérante de ftah], la poudre de gulette & le firop de limon, & le lende- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, «rx main un bouillon antifpafmodique rafraichiflant, A peine eut-il exécuté cette ordonnance , dont il s’étoit bien trouvé , qu'il revint chez M. Mafars avec Catherine & le jeune Berger : celui-ci avoit été mordu aux deux bras & à la tête, & le loup lui avoit déchiré la joue jufqu'au menton , qu'il avoit, pour ainfi dire , haché avec les dents : cependant il étoit riant & gai, & fes plaies étoient prefque gucries : Catherine étoit accablée de triftefle ; fon pouls étoit lent & plein; la bleflure à la cuiffe n’étoit pas confidérable, quoique faite à nud, Celle du bras étoit encore profonde & douloureufe, & ne fournifloit qu'une efpece de matiere ichoreufe, M. Mafars ordonna à ces deux derniers une faignée , & à tous les trois des fri@tions foir & matin, avec la pommade mercurielle camphrée fur les plaies & tout à lentour, des juleps , des émulfions narcOtiques , rafrai- chiflantes & camphrées pour l'heure du fommeil, pré- cédées d’un bol mercuriel antifpafmodique , des lave- mens froids , des bains, du petit lait nitré, des bouillons faits avec la chair d'agneau ou de chevreau, les cuifles de grenouilles , la racine de pivoine mâle , les fleurs du Gallium jaune , le mouron & quelques feuilles d’oran- ges. Il défendit en même-temps le vin, les nourritures falées & épicées, & l'ufage de la viande ; il leur con- feilla celui des fruits & des végétaux rafraichiflans, & les exhorta à chercher tout ce qui pourroit les diftraire & les amufer. Quand ils fe plaignoient de mal-aife 1 d'inquiétude , de fueurs, detremouflement dansles chairs, de piquures brülantes à la gorge & à l’eftomac , on re- médioit à ces fymptômes , en augmentant la dofe de Tonguent mercuriel & des narcotiques , en les faifant refter plus long-temps dans le bain, & en leur faifant s2 ET HS 'ioudRuE prendre deux ou trois lavemens froids dans les vingts quatre heures. Ce traitement continué pendant un mois, fauva le Maréchal & Catherine feulement. On eut foin de di- minuer la dofe des narcotiques , à mefure que leur cure prenoit de la confiftance & que leur fommeil devenoit plus tranquille. Pour le jeune Berger , rien ne put em- pêcher le développement du venin ; il mourut dans un accès de rage , le trente-troifieme jour de fa bleflure. SUR une Maladie finguliere , occafionnée par un excès d'étude. é ‘ AA E fils de M. Pouderous, qui depuis environ treize ans, confacroit au moins douze heures par jour à l’étude du Droit , fans autre relâche que les heures de fes repas, fe plaignit , au commencement de 1781, d'une vive douleur à la partie antérieure & poftérieure de la tête, accompagnée de fréquentes envies de vomir, fans em- barras dans l’eftomac , fans mauvais goût à la bouche & fans fievre. Avec le fecours de l’eau tiede, 1l vomit quantité de matieres glaireufes , infipides , femblables à des blancs d'œuf ; il s'endormit après ce vomiflement, & fe trouva le lendemain matin , à fon réveil , fans douleur à la tête qui cependant refta pefante. Il fe re- mit à l'étude , & y éprouva plus de fatigue qu'avant cet accident. Le 21 Mars, fon mal de tête revint, & dura vingt- quatre heures après le vomiflement , qui avoit été éga- lement provoqué par l'eau tiede ; le fommeil devint plus difficile : des chaleurs fe firent quelquefois reflentir, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 83 principalement dans les entrailles ; elles céderent à un léger purgatif. M. Pouderous fe remit à l'étude, & y éprouva plus de difficulté que jamais. Le 20 Avril, même accident , avec vomiflement de matieres bilieufes , qui fe foutint près de trois jours , & douleurs de tête avec élancemens , qui céderent à une faignée du pied, aux pédiluves, aux bains, aux bouillons antifpafmodiques. Le 30 Avril, M. Pouderous fils fut très-furpris de voir les objets doubles ; les images étoient à côté l’une de l’autre , l’une paroïflant plus petite. Cette duplicité d'objets n’avoit lieu, que lorfqu'ils étoient à une certaine diftance & qu'il les regardoit en face : il les voyoit fim- ples à quelque diftance qu'ils fuflent , quand il les repar- doit par côté , ou de bas en haut. Dans la fuite, il vit les objets fimples à la diftance où il les voyoit aupa- ravant doubles , & il les vit doubles à celle où il les voyoit fimples auparavant , mais toujours en les regar- dant en face. Sa vue étoit confufe , lorfqw'il regardoit de deux yeux, & cette confufion fe faifoit plus fentir immédiatement après le repas : elle diminua par l’éva- cuation d’une matiere épaifle & blanche , que le malade moucha à certaine époque. Ses yeux étoient un peu fixes, & il y fentoit une légere douleur , lorfqu'il mou- voit les globes, & fur-tout lorfqu’il les comprimoit avec la main. Les maux de tête revinrent à plufieurs reprifes pen- dant le cours de la maladie. Ils furent calmés comme par enchantement , tantôt en prenant un peu de café, tantôt en mangeant fa foupe. Les remedes dont on a combattu cette maladie , font les bains , l’ufage interne des rafraïichiffans , des hume£tans & des antifpafmodi- 54 HISTONRE ques , la ceflation abfolue du travail & l'exercice du cheval. La vue de M. Pouderous fut rétablie dans le mois de Juin ; la pefanteur de tête fut entierement diflipée par un débordement de bile , furvenu à la fin de Juiller, & depuis il a joui d’une fanté parfaite. M. Pouderous pere , ayant lu à l'Académie, l'hiftoire de cette maladie ; cette Compagnie , frappée des parti- cularités concernant les afle&tions de la vue de M. fon fils, voulut en conftater l’état d’une maniere pofitive. Elle nomma des Commiflaires, qui firent , en préfence de M. Morand, de l’Académie des Sciences de Paris, les expériences fuivantes , que M. Garipuy rapporta à la ance du 17 Mai, de la maniere qui fuit. 1°. On reconnut que M. Pouderous fils eft myope, en ce qu'il voit mieux les objets éloignés avec un verre concave. 2°, Il voit les objets diftinétement avec l’œil gauche, un peu confufément avec les deux yeux, & moins bien avec l'œil droit feul. 3°. Iivoitl’objetfimple, lorfqu'il ne le regarde qu'avec un œil, quel qu'il foit. 4°. S'il fait ufage des deux yeux en même-temps, tous les objets qui font devant lui, lui paroiflent dou- bles , à quelque diftance qu'ils foient. 5°. Pour connoître l'angle de leur écart, on a fait les expériences fuivantes , en faifant varier la diftance de l’objet à l'œil, & en mefurant la quantité du déplace- ment. D'abord on a préfenté à M. Pouderous fils une feuille de papier large de 6 pouces 6 lignes : ila vu deux feuilles qui fe touchoient à la diftance de 29 pouces ; l'écart DE L'ACADÉMIÉ DE TOULOUSE se étoit donc de 6 pouces 6 lignes , qui, à cette diftance, foutend un tel de 12 degrés $7 minutes. La même feuille , dont la longueur étoit de 8 pouces 6 lignes , préfentée en travers, les deux i images fe tou- choient à 31 pouce 6 lignes, & l'angle de l'écart étoit de 15 degrés 40 minutes. Onluia enfuite préfenté deux bâtons à plomb, cha- cun d'une toife ; ils étoient éloignés de lui de 33 pieds. D'abord il en à vu quatre ; mais lorfque les bâtons ont été écartés entre eux de 9 pieds 6 pouces, il n’en a vu que trois, parce que les deux i images moyennes ont été fuperpotées la droite appartenant à l'œil droit, & la gauche à l’ocil gauche; l’angle de l'écart étoit hs de 16 degrés 44 minutes à un “éloignement de 74 pieds. Il a fallu écarter les bâtons de 23 pieds 6 pouces , pour que deux images fe confondiflent : l'angle étoit de 19 degrés 25 minutes. An à l'éloignement de 162 pieds, l'écart, quia réduit at images à trois, a été de 55 pieds 3 pouces ; ce qui donnoit un angle de 19 degrés 12 minutes. IE après ces faits » l'angle a augmenté avec la diftance, jufqu’a ce qu’elle a été de 74 pieds ; il y a enfuite une légere diminution de 74 pieds à 162. “Une partie de ces différences peut être rejetée fur la difculté de bien fair@ces expériences y d'autant qu'elles fatiguoient M. Pouderous ; ce qu’on vouloit éviter. Cependant , l'augmentation graduelle jufqu’à la dif- tance de 74 pieds, peut faire augurer que la diminution eft due en partie au plus grand effort qu'il eft obligé de faire , pour voir un objet éloigné. GEXOnIa remarque qu'un objet élevé au-deflus de l'horizon de 40 degrés ou plus, paroît fimple , foit que 56 RS TO IME la diftance foit grande ou petite. On a placé au-devant de M. Pouderous, à la diftance de trois pieds, un bâton fort haut ; il a paru fous la forme d’un Y renverfé , dont les deux jambes montoient jufqu’à la hauteur de 7 pieds au-deflus du fol , & de 2 pieds & demi feulement au-deffus des yeux de M. Pouderous. © 7°. Les objets qui ne font pas en face , mais beaucoup par côté , ne paroiflent point doubles. CHUTE fubite des Cheveux. € E phénomene, arrivé le 17 Juin 1781 , regarde un Laboureur de la Paroiïfe de Fanjeaux , Diocefe de Mi- repoix ; nous le rapportons tel qu’il fut adreflé à M. de Puymaurin , & tel qu'il eft décrit par MM. Lavalette & Moreau, Chirurgiens , & certifié par M. Calages, Juge Royal & Châtelain. Nous ne changerons rien à leurs expreflions. « Jacques Ponfole fortit à trois heures du matin, pour » aller chercher de l'orge verd pour fes bœufs ; 1l n’eut » pas fait quatre pas au grand air, qu'il fe fentit faifi » d’un grand froid, qui donna dans la tète & dans les » autres parties du corps ; ce qui ne le dérangea pas de » fa befogne : il n’éprouva d’autfè incommodité qu'un » peu de mal à la tête & un peu de laflitude dans tous » fes membres , qui ne le priverent pas, les jours fui- » vans, de vaquer à fon travail ordinaire. Ce qu'il y a » de furprenant , c’eft que dans le cours de la femaine » il perdit tous fes cheveux. Le poil des fourails, des » paupieres , de la barbe, & généralement de tout fon » corps, tomberent dans le même efpace de temps ; & » quoiqu'il DE L'ACADÉMIE DE TOUEOUSE. &7 » quoiqu'il y ait cinq mois & demi de cette époque, » il ne paroït pas qu 11 doive en revenir un feul. Cet » homme, âge d'environ quarante ans, avoit beaucoup » de cheveux , & étoit fort vélu. Il eft à à remarquer que > c’étoit le même jour, & à peu- près à la même heure, » où le brouillard emporta la récolte de toute cette » contrée ; ce que nous Chirurgiens , Jurés de la ville » de Fanjeaux, avons vérifié par nous-mêmes , & que » nous certifions véritable. A Fanjeaux, le 1 Déccube # 1781. Æ. Moreau, Lavalette, Chiruroiens Jurés , » fionés. » À la fuite eft la légalifation du Juge, fignée Calages , & par mandement, Mercier, Green SUR une Paralyfie , occafionnée par une violente affection de l'ame. Ur; jeune homme de 17 ans » paralyfé depuis deux mois de la ceinture en bas , privé dans toutes fes extré- mités inférieures de fentiment & de mouvement ; mais ayant confervé fon appetit & digérant bien , eut une attaque qui, pendant trente-fix heures , lui Ôta toute connoifflance , éprouvant des convulfions extraordinai- res , qui le jetterent dans le plus grand afloibliffement, Deux purgations ranimerent fes forces dans les parties non paralyfées ; ; les autres refterent dans le même état. Elles confervoient leur chaleur naturelle. Dix à douze jours s’étoient paflés depuis cet accident, lorfque M. Pouderous fut confulté. Le prudent Médecin, pour ne rien faire au hafard , interrogea le pere du jeune homme fur fon cara@tere, fa conduite, fur la caufe & les commencemens de fa maladie. Le pere lui raconta Tome IT, H 58 FH TS OLRE que fon fils ayant eu une vive difpute avec le Vicaire de fa Paroifle , celui-ci, qui fe croyoit offen{e , exigea des réparations : on eut toutes les peines du ne a y déterminer le jeune homme , qui y confentit enfin. Il fe rend le Dimanche fuivant à la Sacriftie , où le Vicaire fe difpoloit à dire la Mefle ; on le reçoit avec dédain ; on rejette fes excufes , prétendant que l'offenfe ayant été publique, la réparation doit l'être aufli. Le jeune homme confus & piqué fe retire : le Vicaire porte {es plaintes au pere , qui , partageant fon reflentiment, exige que le Dimanche fuivant, fon fils , avant A Grand'Meffe , demande pardon au Vicaire devant le monde aflemblé ; & comme :il éprouve quelque ré- fiftance , il appuye fon ordre des plus fortes menaces. Son fils promet d'obéir. Le jour fatal arrive ; le jeune homme trop fenfible , part en murmurant; mais à peine a-t-il fait la moitié de chemin de la Pone à l'Eglife, qu’il tombe perclus de la moitié inférieure de fon Corps. On le porte dans fon lit, où il refte deux mois livré au Chirurgien du Village. Tel eft le récit que le pere du malade fait en pleurant à M. Pouderous. Celui-ci prefcrivit des friétions , des embrocations fur les parties paralyfées , des bouillons apéritifs & céphaliques , les véficatoires & les eaux de Balaruc ; mais ces remedes furent inutiles : 1l furvint un Pere fur ces parties ; 1l parut un afcite qui, ayant dégénéré en hydropifie générale , enleva le malade en- viron deux mois & demi après l'accident qui avoit en- gagc le pere a confulter M. Pouderous. Il termine fon Mémoire par des réflexions très-fages, fur l'égard que les Médecins doivent avoir aux effets de lation de l'ame fur l'économie animale. Il les exhorte DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 59 à éloigner de leurs malades tout ce qui peut les affeter trop vivement , foit en bien , foit en mal : il paroît très-perfuadé que, lors de la derniere épidémie qui affipea Touloufe & une partie de la Province , la crainte D fit autant de ravages que la maladie ÉÉm: ÉLECTRICITÉ MÉDICALE. M . Mafars de Cazeles a communiqué à l’Académie trois Mémoires, ou plutôt trois Recueils d’obfervations, fur les eflets qu” “il a obtenus de l’éleftricité appliquée aux maladies , tantôt feule , tantôt combinée avec les re- medes qu ‘emploie la Médecine , felon qu'il y a été dé- terminé par les circonftances. Cora il connoifloit les obftacles qu ’oppofent aux nouvelles découvertes, & l'ignorance qui rejette fans examen , tout ce qu’elle ne connoit pas, & le favoir même , qui par prudence ve devoir fe méfier de toute nouveauté, pour peu qu’ell s’écarte des principes reçus & GORGE par une lobe expérience , M. Mafars voulut , pour témoins de fes traitemens , les favans & les 1 ignorans , les curieux & les incrédules , les partifans de l’éleétricité médicale & fes Antagoniftes, ceux qui , fubjugués par les préjugés & par l'habitude, fe refhfent à l'évidente > ÊT ceux qui, moins Philofophes encore, fuppofent toujours des caufes étrangeres aux faits qu ls ne peuvent nier. HSM moncsiout Mecuets detNe Mafars offrent cent neuf maladies ; 1l fait, de chacune en particulier, l’hiftoire détaillée , afin qu’on puife déterminer quelles font celles qui réfiftent où qui cedent à cet agent. Il en réfulte que fur cent neuf malades, il y en a eu fept Go HrTsTouRE pour lefquels l'életricité a été fans eflet , trente-neuf qu'elle a guéris , & foixante-fix qu elle a confidérable- ment foulagés. Onze ont été traités fous les yeux des Commiflaires de l'Académie, Les maladies guéries ou foulagées font des perse invétérées & rhumatifmales , plufieurs paralyfies com- plettes , imparfaites, ayant différentes caufes, des hémi- pélagies , fcrophules , tumeurs fcrophuleufes & autres, des atrophies, des dartres , des furdités , des impuiflan- ces ou défauts de virilité , fuites d’épuifement & de dé- bauche, des engelures, des engourdiflemens, des cram- pes: des œdéniaties , cecités d’un œil, ophtalmies, gouttes ferenes des deux yeux , vue double , cephala- gies, rachitis, gonflemens ; De ae » incontinence d'urine , &c. On peut juger de la gravité de ces mala- dies par les fuivantes , que M. Mafars a guéries. La premiere eft une hémipélagie du côté gauche, avec douleurs périodiques , irrégulieres , infupportables à l'épaule , au bras , à la jambe paralyfés, & dont le malade fut délivré après vingt féances éleétriques d’un quart d'heure chacune. La feconde , une atrophie du poignet & de la totalité de la main, femme après la répercuflion d’une efpece de tumeur phlegmateufe fur ces parties, à la fuite d’une maladie vénérienne , à raifon de laquelle on avoit fait prendre au malade mille trente dragées de keyfer. La troifieme eft une paralyfie de toute la partie gau- che du vifage, avec perte involontaire de falive , par la commiflure gauche des levres , & de partie des liqui- des , lorfque le malade buvoit. L'engorgement , dans tout ce côté de la bouche , des alimens broyés, l'obli- geoit de les poufler avec Le doigt, pour les diriger vers DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 6x le pharinx; il lui étoit impofñlible de fermer l’œil gauche, qui fembloit prêt à quitter l'orbite , &c. Dans le nombre des malades , auxquels, après le trai- tement , 1l n’eft refté que des incommodités fupporta- bles , fans avoir été radicalement guéris , eft un fcro- phuleux , entre deux ou trois , foumis à l’éleétricité, qui, chargé dés l'enfance de tumeurs fcrophuleufes, la plupart abfcédées , dont l’une à l’angle droit de la mâchoire in- férieure fuppuroit depuis trois ans, & l’autre , qui en- touroit circulairement le poignet , préfentoit plufieurs points de fuppuration ; il fe plaignoit en outre, lorfqu'il commença de fe faire életrifer, de croûtes épaifles dans l'intérieur du nez, qui tomboient & fe reproduifoient fans fin, avec eflufion de matieres, tantôt fanguino- lentes , & tantôt purulentes ; de lippitudes , d’écoule- ment fréquent de larmes puriformes de l'œil gauche, de tremblement de bras pour peu qu’il les élevât , de douleurs fourdes dans les lombes, les genoux ; & d’une fi grande foibleffe dans toutes ces parties, fpécialement dans tout le côté gauche, qu’il ne pouvoit marcher , ni fe tenir debout que pendant quelques inftans. Il fut éleétrife pendant deux mois ; dès les premieres féances , il acquit la faculté de marcher & de fe tenir debout les heures entieres fans fe faire violence ; bientôt il abandonna fon lit pendant le jour. Un mois après, il fut en état de faire à pied des courfes d’une lieue & demi. Déja le volume des tumeurs du col étoit fi di- minué , qu'à peine paroïfloient-elles au ta@ ; celles qui fuppuroient étoient cicatrifées , fur-tout celledu poignet, qui s’étoit applatie , au point que l'œil en diftinguoit à peine la trace fur la partie latérale extérieure de l’avant- bras avec le carpe ; déjà l’ozene étoit entierement guéri; 62 Frs TouRE l'œil n’étoit ni rouge ni larmoyant, ni chaflieux » lorfque le malade abandonna brufquement le remede , qui lui eût fans doute procuré la guérifon la plus complete. Cepen- dant , on n'a pas oui-dire qu'aucun de fes maux ait reparu. Les fept malades qui n’ont éprouvé aucun effet de l'éleétricité , ne devoient certainement pas efpérer plus de fecours de méthodes ufitées ; on peut en juger par le malade attaqué d’un tremblement femi-paralytique gé- géral , & d’un afloiblifiement , tant des forces du corps que des opérations de l'ame caufés par un épuifement , effet de l’onanifme & de la débauche. Si ces obfervations réunies , avec celles qui ont été faites dans la Capitale ; ne font pas aflez nombreufes pour détruire tout pyrrhonifme fur l’éleétricité médicale, elles le font plus qu'il ne faut, pour mériter , de la part du Médecin philofophe & impartial , une attention par- ticuliere. Il eft vrai que tous les malades que M. Mafars a foumis à l’éleétricité n’ont pas été radicalement guéris ; = mais dans l’état où ils étoient , lorfqu’ils ont réclamé fon fecours, ne leur reftant, dit-il, pour réparer une fanté détruite , que les débris d'une Te rréparable , le feul foulagement eft un avantage , qu'ils n’auroient point obtenu des reflources ordinaires de la Médecine. Le prétexte de la crainte des rechûtes a fourni des armes aux Antagoniftes de l’éle&tricité ; mais, répond M. Mafars , lese époques des révolutions falutaires , qui remontent les unes à trois, les autres à quatre, les autres a cinq années, font ne de tout ce que cette terreur, vraie ou fcinte » à pu faire imaginer de plus fpécieux. On lui a objeëté deux rechûtes ; mais il prouve qu’elles {ont l'effet de l’imprudence des malades ; l’un eft une DE L'ACADÈMIE DE TOULOUSE. 63 apopleëtique , qui, avant fa parfaite guérifon , ceffa de s'offrir à l'éle@ricité. Un an après , elle eut une attaque d’apoplexie ; encore eft-1l à remarquer que le côté éle&trifé fut épargné ; l’autre, que fa paralyfie privoit de fes fa- cuités viriles , ne ls eut pas plutôt recouvrées , qu'il cefla de fe faire éleétrifer pour les reperdre encore. Mais quand même ces rechûtes n’auroient pas été provoquées , faudroit-il en conclure contre l'efficacité d’un remede , qui » fur cent neuf malades, les guérit ou les foulagea tous, à l’exception de fept, & fur le compte duquel on ne Dent pas mettre les deux feules rechütes qu’on lui oppofe ? Quel eft, dit M. Mafars, le remede connu, dont on puifle dire qu’il a terminé près des deux cinquiemes de maladies » Par des cures que nul effort de l’art ni de la nature n’a pu opérer, & procurer aux autres des foulagemens , qui ne different des guérifons complettes que par de légeres nuances ? LITTÉRATURE. EXPLICATION d’un bas-relief antique, repréfentant Efculape & Hygée guériffant des Malades. {c y a peu de Villes dans les Gaules aufli riches en antiquités que Narbonne : c’eft la patrie de M. Viguier d'Efagnol, Correfpondant de l'Académie, qui, parmi divers Mémoires qu'il a adreflés à cette Compagnie; ; s’eft fort étendu ,. dans pee de ce bas-relief, tout ce qui appartient à l’hiftoire & au culte d’ ae Ce fuperbe monument eft un vœu fait à ce Dieu : G4 HISTOIRE on le voit à Narbonne dans le Palais des anciens Vi- comtes, au-deflus d’une porte, à laquelle il fert d’attique. I! eft de marbre blanc, de 3 pieds 10 pouces & demi de largeur , fur 1 pied 8 pouces de hauteur. Perfonne n’avoit encore eflayé d'expliquer cette antiquité , peut- être unique , en ce qu'elle retrace tout ce que les Auteurs anciens & modernes rapportent d'Efculape. La Differ- tation de M. d’Eftagnol a trois parties : la premiere comprend l’hiftoire de l’origine, de la vie & du culte de cette Divinité ; la feconde eft l'explication du bas- relief ; la RARE embrafle une fuite de monumens, qui atteftent la vénération que la Médecine a infpirée aux hommes dans diflérens temps, & les honneurs qu'ils ont rendus aux Médecins. Une infcription qu'on voit à Riez en Provence, rapportée par Grutter , fait préfumer à a M. Viguier que le culte d'Efculape fut porté dans les Gaules par les Phocéens après la fondation de Marfeille , & non par les Romains, après la conquête. Le peuple de Narbonne lui érigea un Temple, aux murs duquel, fuivant l’ufage que nous avons pris des Anciens , on attachoit des tableaux ou des fculptures repréfentant les guérifons opérées par le Dieu : c’eft ce que M. d'Eftagnol prouve par des monumens trouvés à Narbonne même ; & tel eft le bas-relief qui fait le fujet de fa Differtation. II le divife en deux grouppes ou tableaux. Dans l’un & dans l’autre, la fcene eft dans un bois. Et en eflet, il y avoit toujours un bois facré auprès des Temples d'Efculape. On y portoit les malades : le Dieu ou le Prêtre qui le repréfentoit , leur prefcrivoit fes re- medes. M. d’Eftagnol traduit plufieurs formules derecettes, prifes de différentes infcriptions rapportées par Grutter. Dans DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 6G$ Dans le premier tableau, le Dieu, ou peut-être le Prêtre qui le repréfente , eft dans l'attitude d’un homme qui répond ; il eft à préfumer qu'il rend un oracle, ou qu'il prefcrit des remedes. À droite & à gauche, des Prètres lui préfentent une offrande ; mais le temps a dé- truit ce qu'ils offrent. Des corbeaux perchés fur de vieux chênes, dont le bois eft compote , défignent fans doute que l’objet de la Médecine eft de conferver la vie & d’en prolonger le cours. Le Dieu , ou fon Prêtre, tient à la main un caducée. Cet attribut lui eft commun avec Mercure ; celui-ci s’en fervoit pour évoquer les ombres desenfers, celui-là pour empêcher les hommes d'y defcendre, & pour les rappeler des bords de la tombe. Un gros ferpent entoure , en rampant, le tronc d’un des plus gros chênes. Qui ne fait qu'Efculape fut adoré fous la forme du ferpent, fymbole de la Prudence ? Il eft repréfenté fans barbe , & avec le Sagum , conformé- ment au Coftume Gaulois; fingularité dont M. d'Efta- gnol donne l'explication la plus naturelle. Deux rou- leaux font aux pieds du Dieu. Clément d'Alexandrie parle d’un Efculape Egyptien , fils de Menés, qui écrivit fur la Médecine , & qui dépofa fes livres entre les mains des Prètres. Ils furent regardés comme facrés. Ces rou- leaux font ces mêmes livres qu’on trouve fouvent {ur les monumens confacrés à Efculape , & fur les Médailles: Plus loin eft un autre grouppe de trois figures. C'eft une femme à qui un Prêtre préfente un enfant malade qui s'appuie fur un bâton. Tel eft le fecond tableau. M. d'Eftagnol préfume que cette femme eft Hygée, Déefle de la Santé, fille d'Efculape & de Minerve. Elle impofe fa main droite fur la tête du malade , & touche fes yeux Tome IT, I 66 ET Sir ONrèRtE de la gauche. Mais comment une Déefle partage-t-elle avec Éfculape les fon&tions de l’art de guérir , & pour- quoi les Prêtrefles d'Hygée font-elles confondues dans le même Temple avec les Prêtres d'Efculape ? M. d'Ef tagnol répond à cette queftion, que les femmes étoient admifes au culte d’un grand nombre de Dieux, dont elles deflervoient les Temples ; ; qu’elles FE être fpécialement confacrées au fervice de ceux d’Efculape, non-feulement à caufe des foins qu ’elles ont-donné dans tous les temps aux malades , mais parce que plufieurs ont acquis une grande célébrité dans la pratique de la Médecine. Telle fut Agnodice dont parle Hygin. Cette jeune Athénienne, après avoir quelque temps fréquenté l’école d’ Hiérophyle , fous l’habit d'homme, fe rendit très-favante dans l’art des accouchemens : elle gagna la confiance de toutes les femmes d’Athenes. Les cures étonnantes qu’elle fit , toujours fous le même dé- guifement , exciterent la jaloufie des Médecins : ils ré- {olurent fa perte. Sa beauté , fon afliduité auprès de fes malades , les éloges que les Aibéeenbee prodiguoient à {es nent paturent , à l’envie, des moyens allez puiflans pour PRET Ils Lace devant l’Aréopage , de n'exercer fon art que pour féduire les femmes & mieux tromper les maris. Le filence d'Agnodice , réfolue de ne fe défendre qu’a la derniere extrémité, fa timidité , fa pudeur naturelle , encourageoient la calomnie ; mais lorfque fes ennemis le croyoient triomphans , Agnodice ne fit que révéler à fes Juges, le fecret de fon fexe : PAréosage lui permit de continuer l'exercice de fon art, & la Loi qui, chez les Athéniens, l'interdifoit aux En s , fut abrogée pour toujours. La défenfe ne {ubffla que pour celles qui n'étoient pas de condition libre, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 67 Cette partie de la diflertation de M. Viguier d’Efta- gnol , eft terminée par une nomenclature alphabétique des lieux , où Efculape a été principalement t adore. Cette table & LL fuite des monumens de la vénération des Peuples pour la Médecine , font remplies de recherches précieufes. SUR des Infériptions trouvées à Soleure. M. Barthes , Correfpondant de l’Académie , lui en- voya , en 1763, la copie de plufieurs infcriptions dé- couvertes fous fes yeux , dans les fondemens de l’an- cienne Eglife de Soleure, lors de la démolition. Ce Sa- vant parvint à raflembler les débris épars & mutilés de ces monumens , & 1l en donne l'explication , qu'il fait précèder de quelques obfervations préliminaires fur le lieu où ils ont été. trouvés. La ville de Soleure , qui a donné fon nom à un des cantons: de la Suifle , étoit enclavée dans les Gaules du temps d’Augufte. On la reconnoït pour la plus ancienne du pays Helvetique ; l’on trouve dans fes environs des veftiges d’un camp Romain, & les reftes d’un très-beau chemin que Céfar y fit conftruire malgré les obftacies qu ’oppoloit a fon projet la nature du fol. Cette Ville pourroit feule fournir la matiere d’une hiftoire inté- reflante , par la part qu’elle a eu à toutes les révolutions que les Gaules & l'Allemagne ont éprouvé depuis les premiers fiecles. Le plus intéreffant de ces monumens , indiqué fous le n°. 1, eft un tombeau , fur le devant duquel eft gra- vée cette infcription : D. M. £ FL. SEVERIANÆ, 68 EE. ST OR IE M. Barthès rapporte à ce fujet un fait hiftorique, confiné dans les archives de Soleure & dans un ma- nufcrit du fixieme fiecle, confervé par le Chapitre. On Y lit qu'en l’année 1519 On trouva renfermées dans ce tombeau les reliques de St. Urs & St. Vi&tor , Patrons de la Ville, qui fouffrirent le martyre l'an 288 de J. C., fous le reone de Maximien & de Dioclétien. Ce mo- nument étoit recouvert d’une pierre qui n’étoit ni de la même qualité; ni de la même coupe, aflujettie par deux bandes de fer. Les os de chaque Martyr étoient amon- célés féparément. Dans la tête de St. Urs on trouva une lame d'argent , avec cette infcription gravée au cifeau. Conditur hoc Scs tumulo Thebaidos Urfus. A côté de la tête de St. Viétor étoit un parchemin manu{crit, qui fut réduit en cendres aufli-tôt qu’on vou- lut le toucher. Le tombeau étoit très-propre, & ne con- tenoit point de pouflere. M. Barthès préfume que ces Corps Saints furent ca- chés dans ce monument vers l'an 450 , temps auquel les troupes d'Attila dévaftoient les environs de Soleure. On n’imagina point d'afile plus afluré pour les Reliques, contre la fureur des Goths & des Huns , qu’une tombe fimple & paienne. On peut encore préiumer que la Reine Berthe , femme de Raoul [ , Duc de Bourgogne, ayant découvert ce monument relpe@able, fonda , l'an 932, l'Eglife de Soleure, qu’elle dédia à ces Saints Mar- tyrs. °N ayant point es déplacer leurs os, elle fe contenta de faire couvrir & fceller le farcophage, qu elle plaça fous le Maïître- Autel. Cette Eglife ayant été dé- molie en 1519, On retira les Reliques du tombeau qui les contenoit ; & ce monument, également précieux DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 69 aux yeux des Savans & des Fidelles , de la piété & des yeux profanes » avoit refté confondu jufqu'à ce Jour parmi les matériaux employés en 1519 a la reconf- truttion de l'Eglie ; ; la viile de Soleure eft en partie re- devable de cette découverte à M. Barthès, qui a acquis des droits à fa reconnoiflance. Le n°. 2 repréfente une pyramide fur laquelle eft gravée une infcription , que M. Barthès lit ainfi : Dis Manibus Sexti IVNIÏI MAIORINI FILIL EIVS CVRAVERVNT. Vers la pointe de la pyramide on voit un figne vf. que M. Barthès croit repréfenter un faifceau de liéteurs ; À] reflembleroit plutôt à une croix , & annonceroit une famille chrétienne , fi les mots Diis Manibus ne prouvoient que l’infcription remonte aux temps du paganifme. Le n°. 3 eft un Autel, dont la partie fupérieure eft mutilée. M. Barthès y lit, Dis Manibus , qu’il a fuppléés Dec DecrMi. Decivs DECIMANVS FRATER. Le n°. 4 préfente la bafe d’un obélifque , fur laquelle M. Due lit, Düs Manibus SEVERI CVRAVERVNT FRATRES EIVS. Le n°, $ offre un Autel , fur lequel on lit Dis Manibus Ë$ MEMORINÆ SEVERIANVS PATER. Fieri Curavit. M. Barthés conje&ture que cette fille de Severianus s appe- loit Severiana , & pouvoit être fœur de Flavia Severiana, dont il eft fait mention dans l’infcription, n°. r. [l fonde fon opinion fur ce que les tombeaux de ces deux femmes fe trouvent dans le même lieu , fur la reflemblance des noms, & fur ce que la famille des Séveres étoit nom- breufe & répandue dans ces contrées. Le n°. 6 eft compofé de trois morceaux qui étoient épars dans les fondemens , & qu’on parvint à raflem- 70. HISTOIRE bler. E’infcription eft du plus beau caraétere. M. Barthès. la lit ainfi : Düs Manibus Liberi CATICI CORBVLON!IS Seviri Auguftalis Liberius PRIMVS ET SECundus CALVS FILI1 EIVS PONENDVM CVRAVERVNT. On voit fur ce monument trois cœurs , qui défignent le pere & les enfans. M. Barthès obferve qu'il y a eu un Conful du nom de Calus , & que Liberius Corbulon pouvoit bien être. defcendant du fameux Corbulon ; avec d'autant plus de raifon , que pour être Sèvir, 1l falloir être de la famille des Auguftes. L’Autel , repréfenté fous le n°. 7, fervoit de bafe à une ftatue. On voit fur le haut deux trous qui dé- fignent la place qu’occupoient les pieds de l'Idole. L'inf- cription peut être lue ainfi : GEXNio VBlorum. IN HONOREM DOMVS DIVIN® ARAM CVM SIGNO SVECCONius DEMECENVS DE SVO POSVIT IMPERatore Domino Noftro ANTOnino , ET SACERDOTE Confulibus. L'époque fixée par ce Confulat fe rapporte, fuivant Baronius , à l’année 219. L'infcription, n°. 8, paroït avoir de grands rapports avec celle qui eft défignée fous le n°. 9. Cette derniere eft gravée fur une table de pierre , qui vraifemblable- ment étoit placée au frontifpice d'un Temple. On y lt: | IN HONORem DOMus DIVINÆ APOLLINI AUGufo Titus CRaflus DAMVSIVS TEMPLVM DE SVO DONODEDIT. Il paroït réfulter de ces deux monumens que Damu- fius avoit fait bâtir à fes dépens un Temple à Apollon; qu'on y voyoit une ftatue de ce Dieu donnée par Demecenus ; qu’A pollon étoit appelé le génie proteéteur DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 71 des Ubiens, & que ces mots DOMVS DIVINæ , qui fe trouvent fur pluñieurs monumens, défignent un Temple des Dieux , & non une maifon de l'Empereur | comme certains Auteurs l’ont prétendu. Le n°. 9 eft un fragment d’infcription du plus beau cara@tere , que M. Barthès croit devoir lire ainf: Viro Ilufri MARcello de republica benè merito Titus VERinus ET Titus ARMENtarius DE SVO DeDicarunt. M. Barthès obferve que ce monument a été élevé à un homme vivant, parce qu'on n’y trouve point ces mots, po/uerunt , ou autres expreflions équivalentes, qui cara@terifent des infcriptions {épulcrales. La beauté des caracteres l'engage à la rapporter au regne d’Augufte, & il préfume qu’elle a pu avoir pour objet Marcellus, Edile , & beau fils de l'Empereur. L'infcription marquée au n°. 10 eft en partie effacée par le temps. On y lit : Tito cCRAssIO Aviro Filio ANnorum XXXV. M: Barthès termine fon Mémoire par la defcription d’une monnoie d'argent d’Eudes, Roide France, frappée à Touloufe , trouvée dans les mêmes fondemens. Cette monnoie n’eft point rare, & fe rencentre dans la plu- part des cabinets. SUR les Veuves Rajapoutes. M. De Cayrol a fouvent entretenu l’Académie de la leéture intéreffante de fes Mémoires fur les Indiens, & principalement fur la Religion des Brames. Il y entre dans des détails que n’ont pas été à portée de connoïtre, comme lui, les Ecrivains qui ont parlé de l’Indoftan. . 72 É NS TO DRE Témoin oculaire des faits qu'il raconte pendant un féjour de plufeurs années dans l'ndoftan , aidé par les circonftances , & favorifé par l'adminiftration , il a pénétré dans l’enceinte des Temples , il a vécu avec diftinétion au milieu de différentes Caftes. Frappé de la nouveauté des objets qui l'environnoient , obligé de renoncer aux idées que des Hiftoriens mal inftruics lui avoient données 2 il apprit la langue des Brames , gagna leur confiance , fe fit expliquer leurs y fteres , médita leurs te , voulut connoîïtre jufqu’aux moindres particularités de leur culte, porta l'œil le plus attentif fur leurs Pagodes , fur leur Philofophie , fur leurs difiérentes Sektes, & débrouilla l'hiftoire des différens Peuples de l'Inde. Dans un Mémoire que M. de Cayrol lut en 1777, à l’occafion d’une Veuve , qui, ayant rompu fes liens, réclama la proteétion dal Pavillon français ; il s'étend fur les moyens qu'emploient les Brames , pour entre- tenir la fuperftition , qui , dans quelques parties de l'Inde , dévoue les veuves à l’infamie ou aux flammes ; il remonte à l’origine de cette coutume atroce , née chez les Rajapoutes, tribu nombreufe & guerriere, dont il trace l’hiftoire abrégée , d’après des Mémoires que les Brames même lui ont fournis. Sous le regne de Boncilerao Parteflingue , les Raja- poutes partageoient avec les Brames la vénération des Peuples & la confiance des Souverains, qui regardoient cette tribu comme la plus intrépide Lacs les combats, & qui finirent par l’opprimer. Les Rajapoutes (Étant le joug du defpotifme , fecondés des Marates , {e révol- terent , & furent vainqueurs. Ramrou leur Chef, s'empara du FR , de Bengale & de Lahor. Ambitieux, Re de DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 73 de conquêtes , ils porterent leurs armes jufques au Can- dehar. Leur République , dont la puiflance , en temps de guerre , étoit entre les mains des Chefs, gouverne À en temps de paix, par les vieillards , ne dura qu'un demi-fiecle. Gefferam fut leur premier Roi : apres la mort de fes enfans , des divifons inteftines obligerent une troupe de Rajapoutes de fe réfugier dans l’intérieur du pays des Carnates , où ils fonderent une Ville appe- lée Rajapour. Ils jouirent d’une longue paix : une po- pulation nombreufe étoit la fuite de leur application au Commerce & à l'Agriculture , lorfqu’on s’apperçut que le nombre des hommes dneoie confidérablement , tandis que celui des femmes étoit toujours le Fée On voulut connoitre la caufe de ce phénomene , & lon découvrit que les femmes , pour fe délivrer de la tyrannie & des mauvais traitemens , exercés par les Ra- japoutes contre leurs époufes , les faifoient périr par le poifon. On fait que 170 Dames Romaines furent con- damnées au fupplice pour le même crime ; les Raja- poutes; par une loi barbare , qui confondoit l’innocent & le coupable , déclarerent infame & criminelle envers le ciel toute femme qui furvivroit à fon époux. Dés qu'il eft mort , on enferme la Veuve Rajapoute dans une chambre ni Ru ; toute communication avec fes parens & fes amis lui eft interdite. Un Brame s’en empare : 1l ranime le courage & échaufle l'imagination de l'infortunée , par les plus féduifantes peintures des délices qu’elle va goûter dans une autre vie. Ces infi- nuations & ces images , foutenus par une nourriture légere, procurent à Ë vi£time les fonges les plus agréa- bles , prélude des voluptés qui l’attendent. Au bout de huit jours, la veuve, entierement livrée à {es illufñons, Tome IL. K 74 Er "SUT OL RVE brave la mort & les tourmens , & marche avec intré- pidité vers le bûcher , placé dans un foffé de dix pieds quarrés , profond de fix, & formé de bois de tech & de menguyer. Une traînée de matieres combuftibles eft prolongée fur l’un des côtés, jufques au bûcher auquel elle communique. À peine le feu a-t-il pris dans cette partie, que la veuve qui s’eft purifiée dans l’eau cou- rante , diftribue du bethel à fes amis & aux afliftans ; -elle fait trois fois le tour du bûcher fur lequel eft le corps de fon époux : à chaque tour , elle Ôte quelqu'un de fes bijoux qu’elle diftribue à fes camarades : enfin, elle s'élance fur le bûcher déjà enflammé ; on jette a l'inftant, fur la veuve , du manteque , des parfums & des eaux odoriférantes. Pendant que le feu dévore les deux corps , les Brames chantent les louanges de cette viétime de l'amour conjugal. Les cendres , ramaffées dans une urne de pierre, font dépofées dans le même endroit où elle s’eft immolée, & fouvent on y éleve un Oratoire , que les Brames ont foin de rendre célebre par quelque miracle. - M. de Cayrol prouve que ce reglement particulier aux Rajapoutes , n’a jamais été autorifé au-delà du Gange , ni par la Religion ni par les Lois ; & qu’en-deçà, aucune relation moderne ne parle de cette efpece de fuicide. Toute idée de deftruétion eft condamnée par le Wedam, que M. de Cayrol a lu dans l'original avec la plus grande attention. Les anciens Philofophes Indiens parlent avec mépris des infenfés qui fe donnent la mort. Les époufes des fages Pandarons fe remarient fans infamie; les Rajas, dont ja jaloufie va jufqu’a punir de mort les fignes & les regards équivoques de leurs époufes , n’ont jamais exigé le déteftable honneur du bûcher. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 7s M. de Cayrol ne difconvient pas qu’il n’y ait eu dans tous les temps des fuicides chez les Indiens, qui, ayant en horreur l’eflufion du fang, ont préféré de finir leurs jours par le feu ; mais les Voyageurs & les Hiftoriens, même anciens , tel que Quinte-Curfe (1) , ont exagéré, lorfqu’ils ont dit que les vieillards ou les malades gymno- fophiftes , & que les veuves indiennes terminoient , tous par le bûcher , une vie que la douleur , le chagrin ou l'ennui leur rendoient infupportable. Il réfulte de ce Mémoire qu'il exifte dans l’Indoftan une Cafte fans Souverain & fans afile , dans laquelle les veuves ne peuvent furvivre à leurs époux fans en- courir l’infamie ; que dans d’autres Tribus , on voit des veuves, efclaves de la vanité & de la fuperftition, périr dans les flammes , & qu’enfin il arrive quelquefois que des femmes veuves expirent dans le même fupplice, viétimes de l’amour conjugal. (1) Quinte-Curfe , liv. 8, is Fa LEA | POP ur né. A h Hal | i ; 0 — ; ve ji En Lo Air Fo a | UM PA "MIA : 4 Aa € à Mer 0 fx E hi F À D'OICTE el | H Lac à Dé SA y A7 { Q 4 ÿ : Ai A mu ho DR ULRUR da Mes ri 1 à A A ne HE Map Ares Eu HE U in DT i de (y ei né ira 10 TE ELOGES. JL 11 4 È ds . QE 1: : | LA A "j su 1) ri1à dd AMEN TAENES : À ni D'OR ” ne ART LE { DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 79 ÉF°0: GrEUS DES Académiciens morts depuis l'origine de l’Académie | en 1729. EL: CADÉMIE avoit annoncé dans fon premier volume (1), qu’elle ne feroit imprimer que les Éloges de ceux des Académiciens à qui elle auroit décerné cet honneur ; cependant elle a réfléchi qu'il y auroit une efpece d’ingratitude à dérober cet hommage à la mé- moire des Fondateurs de cette Compagnie. En confe- quence, elle a délibéré que le Secrétaire raflembleroit tous les éloges qui ont été lus jufqu’à préfent, & qu'il en feroit des Précis hiftoriques , dans lefquels il rappor- teroit les traits les plus intéreflans. On trouvera ici une partie de ces Précis ou Notices, qui feront continués dans les volumes fuivans. On a employé , autant qu'il a été poflible , le texte même des éloges ; on n’a fouvent fait que les abréger , en regretant d’être obligé d'en mutiler plufeurs, qui feroient honneur aux Fontenelle & aux Dalembert. On s’eft aflujetti à l’ordre chronologique de la mort des Académiciens : on eût défiré de pouvoir fuivre l’ordre des réceptions , qui auroit préfenté une fuite inté- reflante de l'Hiftoire de l'Académie depuis fon origine ; mais malheureufement tous les éloges lus dans le temps, n’ont pas été remis , parce que , même après l'érection de là Société en Académie Royale, cette partie ne re- (1) Hift. de l'Acad, pag. 19, 80 Horn. S1T. GIMRUE gardant pas fpécialement le Secrétaire , lorfque la mort enlevoit un Académicien , celui qui avoit été lié plus particulieremèntav ec lui, ou qui pouvoit mieux apprécier fon mérite, fe chargeoit de le louer. On trouvera au bas des pages, le nom de l’Auteur de chaque éloge dont on donne le Précis. On indique , par des guillemets , les morceaux auxquels on n'a rien change. M. de Ca. : RAYMOND DE CAUMELS (1) naquit à Touloufe le Le 28 O&obre 1687, d'une ancienne famille , établie dans. cette Ville depuis plus de trois fiecles , avec tous les agrémens de l'efprit & du Corps : aimable, vif, enjoué, fait pour la fociété , il préféra l'étude aux plaifirs. En prenant le parti de la Magiftrature , il pouvoit afpirer a des places élevées ; il choifit la profefhion d'Avocat, uniquement pour fe dévouer à la défenfe de ces plai- deurs que leur indigence force d'abandonner leurs droits. a leurs oppreffeurs. Il ne voulut jamais d’autres cliens, & il en eut beaucoup. Ainfi , par fon rase & fes lumieres, il s’éleva au-deflus de fes ancêtres. Parmi ceux-ci, un Pierre de Caumels, Avocat Général au Parlement de Touloufe , eut l’eftime de Henri IV, qui , dans plufieurs lettres , lui en donna les témoigna- ges les plus honorables , & qui le fit Confeiller d'Etat. Maleré tant de faveurs, Caumels eut le courage de donner des conclufions oppofées aux vues du Roi , fon Bienfaiéteur , dans une circonftance où elles paroifloient contraires au bonheur des Peuples. Henri, qui jugeoit les cœurs , & qui connoifloit fa droiture , lui écrivit , de fa propre main, la lettre la plus remplie de bonte. (1) L'éloge de M. de Caumels fut lu à la féance publique du 25 Août 1747, par M, l'Abbé de Sapte , Secrétaire perpétuel Lorfque DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. Sr Lorfque la Société des Sciences fe forma , Raymond de Caumels obtint une place d'Affocié TUE 1lÈn y lut point d'ouvrages ; ; les recherches jui bufoidhe ravi un temps confacré à protéger l'infortune : mais par fon afliduité , par fa critique , par les jugemens les plus fans , & par de grandes connoïflances dans les Scien- ces & dans les Lettres , 1l fut très-utile à la Société naiflante. Le travail forcé , auquel il fe livra lorfqu'il fut nommé l’un des Direëteurs de l'Hôpital Général , épuifa fes forces. Il mourut le 3 O&tobre 1746. ALEXANDRE DE SIMON DE PALMAS, Ingénieur du Roi , Chevalier de St. Louis, naquit à Marfeille le 1 Septembre 1684, d’une famille ancienne, originaire de Normandie. Sa figure noble & belle , fa gravité ftoique , lui firent donner , par fes jeunes camarades , le furnom d’Adonis Philofophe. H fut deftiné à la Mérine par Robert de Simon , fon oncle, Capitaine des Vaifleaux du Roi, qui jouifloit de l’eflime & de l'amitié du cé- lebre Duquefne : il fit quelques campagnes en qualité d'Enfeigne : l’état de dépériflement où étoit alors notre Marine. , le goût que Tournefort, dontilétoit connu, lui avoit donne pour la Botanique , & les exhortations de M. de Soiemi fon frere , le déterminerent, en 1706, à quitter le fervice de mer pour celui de terre. Il obtint une compagnie dans le Régiment de Conti, dont M. de Solemi étoit Lieutenant-Colonel. Il partagea fes loi- firs entre la Géométrie & la Botanique qui eut toujours la préférence : cependant fes connoiflances dans les Mathématiques le firent entrer dans le Génie en r71r. En moins de trois ans, 1l fe trouva à plus de vingt fi fieges. A celui de Barcelo il obtint les éloges du Maréchal Tome Il. É M. de Pate mas, 82 ET TS TOME de Berwic; à celui de Palma , dans l’Ifle de Majorque, l'eftime & l'amitié du Chevalier , depuis Maréchal d’Asfeld. A la paix, le Roi lui donna , pour récom- penfe , la place d’Ingénieur en chef du canal royal de Languedoc ; place que ce Prince , qui en connoifloit toute l'importance , n’avoit jamais confiée qu'aux Inge- nieurs les plus expérimentés. L’honneur de ce choix, les plantes de tous les genres, qui croiflent en abon- dance fur les bords du canal, & aux environs du baflin de St. Ferréol, dans la montagne noire , l’attacherent pour toujours à fon nouveau pofte. Il s’acquit une grande réputation parmi les Botaniftes. Il entreprit un Botanicum Canalenfe , dans lequel il fe propofa de reë&ti- fier la méthode de Tournefort ; mais la guerre de 1719 interrompit fon travail ; il repañla en Efpagne , & fut employé, par M. de Bonac , aux Sieges de Fontarabie, de St. Sebaftien & de Caftel-Léon ; & lorfqu’a la paix il voulut reprendre fon ouvrage , 1l ne retrouva plus fes papiers. La place de Botanifte, qu'ilobtint dans la Société des Sciences, en 1730 , l'engagea à recommencer. Il mit de l’ordre dans le jardin de la Société , l’enrichit de plantes rares & étrangeres, & donna d’excellens pré- ceptes pour l'étude de la Botanique. Rappelé par la guerre en Îtalie , il commanda la feconde Brigade des Ingénieurs aux Sieges de Demont & de Cony. Le plan géométral du Comté de Nice, & quelques autres ope- tations , lui mériterent l’eftime du Prince de Conti & la confiance du Maréchal de Belleifle , qui le chargea du Siege de Valencienne. Accablé de fatigues, 1l tomba malade , fut tranfporté à Grace , où 1l mourut le 22 O&obre 1747 ; il conferva jufqu’a la mort l’eftime & DE L'ACADÉMIE DE T'OULOUSF. 83 l'antitié de tous fes Généraux ; « preuve évidente de » fon mérite, dit l'Auteur de fon éloge (1); car fi le » mérite ne gagne de tous les cœurs , dés grandes ames » ne peuvent fe plaire où le mérite n’eft pas. » Il avoit lu plufeurs Mémoires dans les féances de la Société : fa mort imprévue l’empêcha de mettre la derniere main à fon Botanicum Canalenfe , qu'il avoit emporté en Italie , & dont on n’a trouvé à Touloufe que quelques fraomens. Louis DE FUMEL , Chevalier, Comte de Fumel, M.teComre de l'Académie des jeté Floraux & de celle de Peinture , * de Fuel né à Touloufe en 1683, d’une famille alliée dès le treizieme fiecle aux LOUE d'Armagnac , de Lautrec & de Cominges, « fit fes études, dit l’Auteur de fon » éloge (2) > en homme qui dthroit eu tout à attendre » de Es mérite littéraire, & rien de fa naiflance. » Il entra dans les Moufquetaires , fe trouva à toutes les aétions de la guerre de 1700, & fur-tout à la trop fameufe bataille de Malplaquet. Retiré du Service en 1710 , il fe livra à fes premiers goûts pour les Lettres & pour les Arts. Il les cultiva , il attira auprès de lui ceux qui les cultivoient. « On a de lui des defleins qui » prouvent fon goût pour la Peinture , & des plans » qui atteftent fon talent pour l’Architeëture. » Il défira d’être de la Société des Sciences, & contribua à fon éreétion en Académie Royale : il fut très-aflidu. On cite avec éloge les difcours qu'il prononça , dans les féances publiques qu'il préfida. « Son air noble & ma- » jeftueux , fa phyfionomie réguliere , où fe peignoient (G) Lule 25 Août 1748, par M. l'Abbé de Sapte, (2) Lu le 25 Août 1751, par M. de Puymaurin, 84 HI STONMME » la nobleffe, la candeur & la fincérité , » ajoutoient à fes expreflions, cette énergie que donne le fentiment de la chofe qu’on exprime. Tout Ecrivain , Orateur ou Poëte , eùt voulu l'avoir pour Leéteur. « C’eft un ta- » lent qui fuppofe bien des connoiflances. » Il mourut le 10 Décembre 1749 , également regreté de tous les Ordres des Citoyens. MeChn HENRI-FRANÇOIS D'AGUESSEAU, Chevalier, gufeau Chancelier de France , Seigneur de Frefnes , Comman- deur des Ordres du Roi, né à Limoges le 27 Novem- bre 1668. Son nom feul fufit a fon éloge (1). Le Roi, lors de l’éreétion de la Société en Académie Royale, fe réferva la nomination des Aflociés honoraires , & mit à leur tête M. le Chancelier d'Aguefleau, Ce Mo- narque ne pouvoit pas donner à la Compagnie, une preuve plus éclatante de fa proteétion. Mets Le Roi comprit dans la même lifte des Affociés honoraires , JEAN-LOUIS BERTONS DE CRILILON, Archevéque de Touloufe, depuis Archevèque de Nar- bonne , né à Avignon en 1683 , Prélat dont les vertus héréditaires dans fon illuftre famille , rendront fa mé- moire toujours chere aux Touloufains. Îls fe fouviennent encore des reflources ingénieufes que fa charité lui fuggéroit pour prévenir ou pour terminer les affaires les plus épineufes. Nommé au Siege de Narbonne, il quitta Touloufe avec regret, & ne partit qu'avec le projet de revenir tous les ans pafler quelques jours dans cette Ville. Son fuccefleur étonné des tranfports des Touloufains , la premiere fois que M. de Crillon y re- (1) Lu dans l’affemblée publique du 25 Août 1752, par M. Raynal, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 8 vint, lui demanda de quel charme il s’étoit fervi pour gagner ainfi tous les cœurs ? Je Les aimois , répondit naïvement le Prélat. « Etant Evêque de St. Pons, il » fut député vers le Roï par les Etats de Languedoc, » pour folliciter des fecours contre la pefte qui mena- » çoit cette Province. Son éloquence naturelle , fon » caraétere infinuant & fouple, & le zele qu'il mit » dans fes démarches, engagerent le Régent à lui faire » propofer, par le Miniftre des affaires étrangeres , » l'ambaflade d'Efpagne ; commiffion que les circonf- » tances rendoient trés-importante. Le Miniftre com- » battit en vain le refus du Prélat , par les inftances les » plus preffantes ; M. de Crillon préféra de revenir à » St. Pons , calmer les alarmes de fon Diocefe, ou » partager fes calamités. » Il fut fait Cordon Bleu en 1742. Le Roi, par une faveur fans exemple, & malgre les réclamations du Chancelier de l'Ordre , voulut qu’il fût reçu le même jour que M. le Dauphin. A l'aflem- biée générale du Clergé , dont il fut l'organe en 1740, & en 1745 ; à la tête de la Province, par-tout jufte, affable , conciliant & rempli de modération , « il obtint » l'amour du Peuple, l'eftime de la Nobleffe, la véné- » ration du Clergé & la confiance du Roi. » S'il eût eu autant de force de génie que de bienfaifance , des vues aufli étendues que fa charité étoit ardente ; fi à ces qualités refpeftables 1l eût joint cette a@ivité de caratere & d’efprit, qui, en formant le projet du bien, en voit toute l'étendue , regarde les obftacles comme des inconvéniens néceflaires qu’elle a prévus , qu’elle a déjà trouvé les moyens de furmonter , & dont elle triomphe, lorfque la prudence ordinaire ne fait encore que les appercevoir, quels n’auroient pas été les re- 86 Er ST f0NAR IE grets des Touloufains à la mort de Crillon , arrivée la {oixante-huitieme année de fon âge (1) ? M. de Sco. JEAN SOUBEIRAN DE SCOPON , de l’Académie des nice Jeux Floraux , né à Touloufe le 18 Janvier 1699 , fut deftine a la profeflion d'Avocat par fes parens ; 1l obtint des fuccès brillans au Barreau qu'il quitta pour aller dans la Capitale , fe livrer à fon goût pour les Lettres: quelques ] Jugemens fur des ouvrages eftimés lui acqui- rent la réputation d'homme de goût : les jeunes Ecri- vains le confulterent ; 1l fut recherché des étrangers dans un voyage qu'il fit en Hollande & en Angleterre. Le célebre Saurin fit les plus grands efforts pour le retenir a la Haie. De retour à Touloufe en 1726 , fon pere exigea qu'il reprit fa premiere profeflion ; il obéit , obtint encore des fuccès , & repartit pour Paris : il s’y maria , revint dans fa Péiol où il partagea fon temps & fes travaux entre Mae trie des Jeux Floraux & la Société des Sciences. Les Recueils de la premiere font remplis de fes ouvrages. Îl partagea , avec Clémence Izaure , la gloire de fa Fondation. Izaure n’avoit pro- poté fes prix qu'aux Poëtes ; & lorfque les anciens Jeux Floraux furent érigés en Académie , on établit un prix d’éloquence de 250 livres. M. de Scopon offrit à cette Compagnie de le porter à 450. « Rien n'égale, dit » l'Auteur de fon éloge (2), la joie qu'il eut, lorfqu' on » lui annonça que fon offre avoit été acceptée. » Lorfqu’il eut perdu fes parens , 1l repartit pour Paris avec fa famille , où 1l mourut fubitement le 22 Février 1751 ; il étoit généreux , bienfaifant , févere dans fes (1) L’éloge de M. de Crillon fut lu par M. le Préfident d'Orbeffan le 24 Août 1751. (2) M. de Saint-Amand le lut le 25 Août 1753. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 87 mœurs. Parmi fes talens , 1l ne faut point oublie} celui de la déclamation, qu'il portoit au plus haut degré. Le célebre Baron fe plaifoit fouvent à l’entendre. Les ouvrages qui reftent de lui, font, une diflertation fous le titre de Réflexions , à l’occafion du Brutus de Voltaire & de fon Difcours fur la Tragédie , dans la- quelle M. de Scopon défend l'opinion de Lamotte , concernant les Tragédies en profe : elle fut réimprimée en 1738, à la fuite de fes Obfervations Critiques fur les remarques de l'Abbé d'Olivet, qu'il combat avec avantage. Levtre au fujet de l'Hifloire de Mad. de Luz. Examen des Confeffions du Comte de *** par : Duclos ; en 1742. Cette Critique eft vive, remplie de finefle, de fel, de goût , de décence & de gaieté ; elle eut deux éditions dans la même année. Carailere de la véritable Grandeur , en 1746 ; ouvrage rempli de Philofophie. Confidération fur les Moœurs de ce fiecle en 1749, dans lefquelles 1l fe trouve quelquefois en oppoftion avec Duclos , dans un ouvrage fous le même titre. Trop d’auftérité dans les principes, un peu de féche- refle dans le ftyle , nuifirent à l'ouvrage de M. de Scopon , qui fe difpofoit à en donner une édition pref- qu'entierement refondue , lorfque la mort le furprit. JEAN-JOSEPH DE PALARIN , Préfident à Mortier du Parlement de Touloufe, né dans cette Ville le 12 Avril 1714, s'emprefla de demander une place d'Affocie libre dans la Société des Sciences, lorfqu’elle commença à fe former. Îl fut compris , dans la Lifte de 1746 , au rang des Affociés ordinaires de la clafle de Littérature ; mais à la premiere place vacante d’Aflocié libre, il reprit M. de Pa- larin. 88 HISTOIRE fon rang , < non pour éviter , dit l’Auteur de fon » éloge (1) , un travail dontil étoit capable , mais pour » ne pas manquer aux fonétions de la Magiftrature. » Ii étoit né avec routes les qualités de l’homme aimable ; il faifoit les délices des Sociétés par fa gaieté , par la douceur de fon caraëtere , & par une certaine tournure d'efprit originale , qui donnoit aux chofes les plus communes , un air de finefle & de naïveté. Il favoit fi ‘bien diriger les traits de la raillerie , que ceux qui en étoient l’objet, en rioient les premiers. Il n'offen{a jamais perfonne , excepté peut-être fon Profefleur de Rhéto- rique , qui, l'ayant chargé d'un des principau# rôles d'une Tragédie , & craignant que fes vers ne fuflent pris pour de la profe , exerçoit fon éleve à faire fentuir fur-tout la mefure & la rime. Le jeune Palarin, inftruit par la nature, fit, à fon maitre , des repréfentations inu- tiles fur le véritable goût de la déclamation ; il fallut céder , & prendre aux répétitions le mauvais ton de l'Auteur , qui lui prodigua les éloges & les carefles. Mais lors de fa repréfentation , le jeune Aëteur fe livre à fon heureux naturel , enleve les applaudiflemens des Speétateurs , & finit par déconcerter l’Auteur , dont le dépit égaya la fcene. Il mourut le 27 Septembre 1751. LM de ROIERRIEDE RABAUDY, ancien Viguier de Touloufe, audy. : FN : $ de l'Académie des Jeux Floraux, naquit dans cette Ville le 9 Mars 1702. « Il fe montra dès lenfance tel qu'on » le vit dans le cours de fa vie ; né avec le talent des » affaires, avec un difcernement juite & des vues de » Citoyen, il étoit le Conciliateur & le Magiftrat de » fes Condifciples. » La mort de fon pere le rappela de (1) M. le Préfident d'Orbe@an le lut le 25 Août 1754. : Paris. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 89 Paris, où il venoit de faire fon cours de Droit. Il revint de la Capitale avec des mœurs & un goût perfeétionne : il fut pourvu de la charge de Viguier , qui depuis long- temps étoit dans fa famille ; « ie ne négligea aucun des » détails de fa profeflion , & n'en paroïfloit prefque » point occupé. Ces jours , ces inftans, qui fuient » comme un éclair pour la plupart des hommes , fon » économie les fixoit en quelque forte, & les multiplioit » ir les divers ufages qu’elle en Évoi faire. Pour fes » cliens & les fuppôts de la Juftice, point de Magiftrat » plus applique à à fes fonétions ; pour les Compagnies » dont 1l étoit membre, point d’Acadèmicien plus afidu » à leurs exercices , n1 plus ardent pour leurs progrès ;, » pour la vie civile, point d'homme qui en connût » mieux les obligations; il fut eftimé, chéri, confidéré. » El avoit une mere qu’il aimoit & qu “il relpe@toir, & ces fentimens ne fervoient qu’à le rendre ‘plus malheureux dans fon domeftique. Un mariage heureux le dédomma- gea ; mais la fuppreflion de fa Charge l’obligea de fe ren- dre a la fuite dela Cour, pour folliciterun rembourfement. I n’y préfentoit que des titres & des raifons :.on lui donna des paroles vagues & des difcours obligeans ; on lui pro- pofa des arrangemens qui ne pouvoient pas lui convenir. Après huit mois de démarches inutiles, il repartit ; ma enfin , lorfqu'il y fongeoit le moins , il apprit que le Roi, en lui accordant une fomme aflez confidérable pour la finance de fa Charge , lui donnoit encore une penfion de 1200 livres fur le Tréfor Royal, & qu’on lui deftinoit des récompenfes d’un autre genre, & des marques de diftinétion peu ordinaires. Ï ne vivoit plus que pour fa famille , pour les Lettres & pour fes amis. Il fecondoit, il facilitoit les recherches Tome IT, M M. d'Ou- vrier. 90 HTSTOIRE de ceux qui s’adrefloient à lui dans leurs travaux litté- raires ; confeils , livres, manufcrits , il fe faifoit un plaifir de les leur livrer. L’Auteur de fon éloge (1) convient , avec reconnoiflance , des grands fecours que M. de Rabaudy lui a fournis. « L'Académie n’oubliera » jamais fon attachement pour elle , ni les fervices » qu'il lui rendit, quand 1l fallut travailler aux Statuts » & aux Reglemens de la Compagnie ; en forte qu’elle » ne fauroit ouvrir fes Archives , ni confulter fes Lois, fans fe rappeler le nom de ceudigne Académicien. » Il mourut le 29 Janvier 1754. Il a laiflé un fils qui a hérité de fes vertus & de fes talens. JEAN-BAPTISTE D'OUVRIER , de l’Académie des Jeux Floraux , d'une ancienne famille d'Auvergne , na- quit à Touloufe le 27 Septembre 1682. Son goût pour les Lettres, né avec lui, l’introduifit à l'Académie des Jeux Floraux en#712 : il y occupa fouvent les féances particulieres , de la lecture de fes obfervations fur la Langue françaife. Il formoit des vœux pour l'éta- bliflement d'une Société favante , lorfqu'il apprit que quelques Citoyens s’occupoient à réalifer fa chimere, M. d'Ouvrier s'unit à eux , « & plus d’une fois, » dans leurs affemblées publiques , il fit admirer fa » facilité, & la juftefle de fon efprit dans la difcuflion » & le développement des principes de chaque fcience : » il contribua , par fes foins & par fon crédit, à l'éta- » bliffement de l’Académie , qui, par reconnoiflance, » confacra fon nom avec celui de fes Fondateurs. » II mourut le 13 Juin 1755 (2). ÿ —————————— (x) M. Lefranc de Pompignan , qui le lut le 25 Août 1754. (2) L'éloge de M. d'Ouvrier fut lu par M. Raynal le 25 Août 1756. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 97 FRANÇOIS DE CRUSSOL D’USsEz , Archevêque de M. de Cu Touloufe , né le 24 Janvier 1702 au Châtéavide Vale pa près de Clermont'en Rouergue , fut envoyé jeune à Touloufe pour y faire fes études. En 1727, il fut appelé par fa famille dans la Capitale , où la régularité de fes mœurs lui valut, en 1780 , l'Abbaye de Charroux. Quatre ans après , 1l fut nommé à l’Evêché de Blois. Comme l'élévation ne fert qu'à mieux faire connoître les hommes, l'Epifcopat le fit paroître encore plus aflable & plus compatiflant. Des réformes qu'il crut néceflaires, lui fufciterent des embarras ; il en vint à bout , en em- ployant à propos la douceur & la fermeté. Il entreprit de faire conftruire à fes dépens un vafte Séminaire ; le Roi vint à fon fecours , & lui donna l’Abbaye de St. Germain d'Auxerre : 1l dota cet établiffement des fonds de fes épargnes. Il recherchoit dans fon Diocefe quels étoient les Gentilshommes les plus pauvres , & fe char- geoit de l'éducation de leurs enfans. Dans un temps de difette , ayant acheté de fes deniers pour 20000 livres de grains en Auvergne, 1l eut à lutter contre deux Intendans qui Vouloient les retenir ; 1] défendit avec tant de zele la caufe des pauvres , qu'il hs de tous les deux. Il fut nommé en 1753 à l’Archevêché de Tou- loufe. Son Diocefe fut dans la défolation ; les regrets du Prélat ne furent pas moins vifs; car on s'attache autant par le bien qu’on fait, que par celui qu’on recoit. Il parut aux Etats de Languedoc avant de venir à Tou- loufe ; dans la difcuflion des affaires , le talent lui tint lieu d'expérience. Il trouva dans cette Ville fes premieres connoïflances , fes premiers amis & une parenté formée de la Nobleffe la plus illuftre. Il s’annonça par des bien- faits. Après un féjour d’un an , il tomba malade ; le M. le Comte de Mirau. 92 HTSTOTRE repos , les remedes , rien ne put le rétablir : preflé par fa famille & par le confeil des Médecins , il alla chercher des fecours dans la Capitale, où il mourut huit mois après d’un épanchement de fang dans la poitrine le 30 Août 1758. Il parut rarement à l’Académie. Il y avoit été reçu en qualité d’Aflocié honoraire (1). JEAN-JACQUES DE VERDUSAN, Comte DE MIRAN, de l’Académie des Jeux Floraux , né au Château de Herrebouc en Bigorre en 1693 , d’une famille tres- ancienne , entra jeune aux Moufquetaires ; fes alliances avec les Rohan, les Larochefoucault , les Noailles & les Roquelaure , le firent admettre dans la meilleure Compagnie , où il fe fit aimer par les graces de fon efprit , par fa gaieté , fon imagination brillante & fé- conde , & par l’a-propos, qui ne lui manquoit jamais. Rappelé par la mort de fon pere, 1l fe fixa à Touloufe ; il y fit long-temps le charme des Sociétés, par fes plai- fanteries ingénieufes , par fa maniere agréable de conter, & par le fel qu'il répandoit dans fes difcours. Il fe fixa par un mariage heureufement aflorti ; l’homme frivole difparut ; 1l fut bon mari, bon pere de famille. Il étoit de l'Académie des Jeux Floraux , & défira d’entrer dans celle des Sciences : il ne fut déplacé dans l’une ni dans l'autre. Il aflifta régulierement aux feances de la der- niere. Il y travailla peu ; mais fes avis étoient écoutés avec plaifir : il avoit une éloquence naturelle à laquelle rien ne réfiftoit ; 1l en donna une preuve éclatante, lorfqu'au Parlement, il plaida lui-même une caufe qui lui étoit propre , & qu'il gagna. Il enleva les fuffrages des Avocats & des Juges. Il fe retira à la campagne , & s’y (1) Son éloge fut lu par le P. Raynal le 25 Août 1758. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 93 livra à l'éducation de fes enfans. Comme il avoit cultivé les Lettres de bonne heure , qu’il s’étoit toujours nourri de la leéture des meilleurs Auteurs de l’antiquité , & qu'a ces connoiffances il joignoit celle du monde, il les inftruifoit en les amufant ; 1l mourut au milieu de ces occupations refpeétables le 7 Août 1760 (1). JosEPH-GASPARD DE MANIBAN, premier Préfident M: de Me du Parlement de Touloufe , de l'Acadéinie des Jeux Floraux , né à Touloufe le 2 Juillet 1686 , d’une fa- mille très-ancienne de l’Armagnac , fut élevé par Gui de Maniban fon pere , Préfident à Mortier. Il fut deftiné a la Magiftrature , « & heureufement , dit l’Auteur de » fon éloge (2) , fes difpofitions fe trouverent d’accord » avec les arrangemens de la fortune & de la naïflance.» A la mort de fon pere , il fe trouva maître d’un patri- moine très-confidérable. Il époufa Mademoifelle de La- moignon , qu'il alla demander lui-même à fa famille. « C'eft dans la Capitale qu'il faifit cette urbanité , cet » art des convenances que perfonne ne poflédoit mieux » que lui. A la noblefle des manieres, il joignoit l’amé- » nité d’un caraétere infinuant & ferme , l’enjouement, » une imagination vive & fertile en réparties heureu- » fes, une raillerie fine, naturelle , délicate , pleine d’un fel piquant , mais fans âcreté. » Il avoit étérecu, en 1714, à la Charge de Préfident à Mortier : M. le Régent le nomma à celle de premier Préfident. Il l’a remplie pendant quarante-un an , avec un zele & une dignité qui ne fe font jamais démentis. Tout étoit facriñé à l'intérêt public. « La dette du Citoyen étoit une dette ÿ (1) Lu par M. le Préfident d’Orbeflan le 25 Août 1761, (2) M. l'Abbé de Rey, qui le lut lé 25 Août 1763. 04 Hz STONURE » privilégiée qu'il payoit tous le jours, & dont il n'a » Jamais cru être quitte envers la Patrie. Dans une année » défaftreufe , où une maladie épidémique couvroit la » Ville de deuil, où la difette faifoit craindre un mal » plus affreux , il foulagea la mifere par fes largefles £ » & diflipa la terreur par fa fermeté. Il s’étoit acquis » fur le public une efpece de culte qui fe rapportoit plus » au Citoyen qu ’au Magiftrat. Jaloux des droits du » Corps dont il étoit le chef, 1l ne craignit jamais de » Ss’expofer pour foutenir fa gloire ; ; il y maintint la paix » & l'harmonie. Il aima, il protégea les Lettres ; les » Sciences ne lui étoient point étrangeres : 1l les regar- » doit comme une des principales fources de la gloire » & de la profpérité des Empires. Un double lien l’atta- » choit à l’Académie , l'amour du bien public & fon » propre goût. Il accueillit , il favorifa le projet des » refpeétables Citoyens qui en jeterent les fondemens. » Plus d’une fois fa générofité fournit des reflources à » cette Compagnie , & elle ne pourra jamais remonter à fon origine, EU fe rappeler fa bienfaifance. » Ses longs travaux le conduifirent à un épuifement de forces ; il s’éteignit le 30 Août 1762. Me Saint CHARLES- CLÉMENT- MARTIN DE SAINT-AMAND, Band né à Chaumont en Bafigny le 19 Mai 1702, de parens nobles , joignoit aux vertus qu'il avoit puifées dans fa famille , la franchife & la candeur qui caraftérifent les Champenois. Il fe diftingua dans fon cours de Droit à Befançon. De retour dans fa Province , 1l fut chargé de V infpeétion du grand chemin de Chaumont à Langres À fait par des Corvéables , dont il adoucifloit la mifere. Débarraflé de ce travail , 1l fe livra aux Lettres. « La » fortune, qu'il ne cherchoit pas, vint fubitement Le Ÿ DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 9s » prendre par la main ; elle avoit amené à Chaumont » un de fes plus célebres favoris. Il connut M. de Saint- » Amand, l’aima & voulut qu'il fût riche ; il lui pro- » cura la recette générale du tabac à Touloufe ; emploi » qui, n'ayant rien d’aflujettiflant, qui, ne procurant » l’aifance qu'à la faveur d'une contribution libre, » s’accommode avec cette noble fierté de caraëtere » qu'infpirent les Lettres. M. de Saint-Amand eut bien- » tôt acquis à Touloufe l'amitié de tous ceux qui le » connurent. Plein de tendrefle & d’enthoufiafme pour » fa nouvelle Patrie , il exaltoit fans cefle la beauté, » les agrémens , la fertilité , les produétions , la falu- » brité de l'air, l'efprit & la vivacité des habitans de » cette Ville favante, & l’une des plus anciennes de » l’Europe. Il ne voulut plus en fortir ; on lui offrit des » établiffemens plus confidérables dans la Capitale & » ailleurs. Ces offres ne le tenterent jamais. » Il fut reçu, en 1744, dans la Société des Sciences. Lors de l’éreétion de la Société en Académie , il fut nommé , par. les Lettres Patentes, Tréforier perpétuel ; fon ancien goût pour les Médailles & les Antiques fe réveilla. Il forma , en peu de temps , un cabinet digne de l’attention des curieux ; 1l n’étoit jamais fi content que lorfqu’il examinoit fes Antiques dans la retraite, ou qu'il travailloit aux différens Mémoires qu'il venoit lire à l’Académie. Au milieu de fes jouiffances , au fein de fes amis , la fortune qui jufqu’alors l’avoit fi bien traité , lui fit éprouver fes revers. Il efluya une ban- queroute cruelle par un excès de confiance ; «il fupporta » fa difprace avec courage , & fe mit en devoir de la » répareravec tout l’ordre & toute l'économie poflibles.» Son cabinet n’en foufirit pas ; il eut même, comme 96 HISTOIRE Antiquaire, l'aventure la plus heureufe. Une urne , con- tenant environ quatre mille médailles d'argent , avoit été trouvée par un particulier aux environs de Toulaufe. L’Inventeur , après en avoir vendu un grand nombre: (peut-être les plus précieufes ) aux Orfevres de Tou- loufe & à ceux des Villes voifines, en vendit trente mille au Direéteur de la Monnoie , qui en avertit M. de Saint-Amand , en les lui envoyant par facs de mille chacun. Ne trouvant d’abord que des Alexandre Sévere , des Gordien Pie, des Gallien , M. de Saint-Amand les rejeta dans leurs facs, & alloit les renvoyer aux four- neaux de la Monnoie , lorfque M. de Romecour fon frere, homme favant , mais aufli phlegmatique que fon frere étoit vif, fe mit à parcourir ces médailles ; « comme il étoit tard , il les emporta dans fon appar- » tement. Vers le milieu de la nuit, M. de Saint-Amand » eft éveillé par fon frere, qui , une bougie à la main ;: » lui préfente une loupe & une médaille ; l'Antiquaire » regarde , voit une belle tête d'Impératrice , & lit » autour, en caraéteres bien confervés , Sabinia Tran- » quillina Aug. M. de Romecour fe retire , revient un » moment après , préfente une autre médaille à fon » frere, qui lit : Cornelia Supera Caii. I reparoit bientôt » avec deux Pacatiens , à revers diflérens. » On n’en connoifloit que deux, l'un au cabinet du Roi, l’autre qui appartenoit au Pere Chamillard , Jéfuite ; « & ce » font ces deux Pacatiens fi rares, différens par leurs » revers , qui fe préfentent à la fois d'eux-mêmes à M. » de Saint-Amand. » Les recherches continuées pendant trois femaines , donnerent, finon de ces médailles capi- tales, plufieurs de moindre prix, & des revers très-rares. Le DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 07 Le prix qu'y mit le Direfteur de la Monnoie, furpafloit a peine la valeur intrinfeque. C'eft dans ce même remps qu'il acquit les deux roues de char antique , qui font le fujet du Mémoire de M. PAbbe Magi , imprimé dans ce volume. M. de Saint-Amand avoit réparé fes pertes, lorfqu’une feconde banqueroute, plus odieufe & plus accablante que la premiere , vint mettre fa conftance à bout. Ses Supé- rieurs, qui connoïfloient fa probité , lui conferverent {on emploi » & lui accorderent de longs termes ; mais le coup avoit porté jufqu’au cœur ; 1l perdit fa gaieté ; fa fanté fe dérangea ; il fut attaqué d’une cine ligne , qui l’enleva le 10 Février 1763. Les pauvres le pleurerent , le public le regreta, fes amis furent incon- folables. Trois d’entr'eux lui firent ériger , à frais communs , un monument dans l’Eglife de la Dalbade. Il avoit eu le projet de laiffer fon cabinet à l’Académie ; mais le revers qu'il venoit d’efluyer, ne lui ayant pas permis d'en difpofer, cette Compagnie en fit l'acqui- fition (1). GUILLAUME DE NupPces , Préfident à Mortier du maeNupces. Parlement de Touloufe naquit das cette Ville en 1700, d’une famille qui remonte à la création du Parlement. On trouve un Nupces parmi les Sénateurs qui compo- foient cette Compagnie en 1460. Son éducation fut perfeétionnée à Paris par les plus habiles Maîtres. Il tenoit de la nature les talens les plus aimables. « Si dans » le relàchement de nos mœurs , eft-il dit dans fon » éloge (2), il ne put atteindre à la modeftie & à la pal M. Lefranc de Pompignan lut l'éloge de M. de Saint-Amand le 10 Avril 1669 (2) Lu le 25 Août 1764, par M. l'Abbé de Rey. Tome IT. N 98 H Y ST OURE » gravité de fes peres, on a du moins retrouvé en lui » leur droiture & leur équité. Efprit fier & libre dans » le commerce de la vie , il dépouilloit fon caraëtere » en prenant celui de Juge, & ne trouvoit alors plus » de fureté que dans l’aflerviflement à fes devoirs. » II conferva l'amour des Lettres au milieu du tourbillon du monde & des plaifirs. Dans la force des pañlions, à l'âge de 28 ans , lorfque l'Académie prit naïflance , 1l fut des premiers à goûter & a prefler l’établiflement de la Société des Sciences : il aflifta à fa premiere féance en 1729 , & partagea avec fes Confreres cet efprit de zele & de ferveur qui diftingue les inftitutions nouvelles. Dix jours après, il fut nommé Préfident de la Société, & loriqu’elle fut érigée en Académie Royale, il fut mis dans la clafle des Aflociés libres : 1l fut très-exaët aux aflemblées , & contribua aux fucces de la Compagnie, par fes critiques & par fes éloges encourageans. « Il » étoit d'une humeur vive & même un peu cauftique, » cenfurant librement ce qui lui déplaifoit, & il n’en » étoit pas moins recherché, parce que la bonté de fon » cœur lui faifoit tout pardonner. Il étoit vrai, ennemi » de l'adulation , aflable , populaire , toujours prêt à » aider le pauvre qui imploroit fon fecours; il réfervoit » toute fa fierté à ces tyrans fubalternes , jaloux d’é- » tendre de vaines prérogatives , & de voir groflir la » troupe de leurs flatteurs ; il fe faifoit contre eux le » vengeur de la liberté commune. Il mourut le 14 » Juin 1763. » LeR P. JEAN REYNAL, Supérieur Général de la Congrégation Reñil de la Doûrine Chrétienne , d’une famille obicure , naquit en 1702 à Gramont dans le Rouergue : fes talens naturels fuppléerent à une éducation foignée. Dès DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 99 e de 16 ans , il entra dans la Congrégation des Do&trinaires de Villefranche, où 1l avoit fait {es études. Il fut envoyé au College de l'Efquille à a Touloufe, pour y enfeigner la Grammaire , qu'il étudia dans de bons Auteurs de l'antiquité. Un Poème Latin fur l’aimant, attira fur le jeune Poète l'attention de fes Supérieurs & des Gens de Lettres. À l’âge de 2$ ans, il fut choifi pour profefler la Rhétorique dans le même College. « Dès ce moment, obferve l’Auteur de fon éloge (1); » on le vit toujours prêt a fe montrer au grand j jour, » à fe mefurer avec fes rivaux, & à prendre le public » pour arbitre de fes combats. Soit qu'il fallüt ouvrir » l’année académique par un difcours d’appareil qui püt » jeter de l’éclat fur les études publiques , {oit qu'un » événement intéreflant l’invität à fervir d'interprete » aux fentimens de la nation‘, on accouroit en foule » aux charmes de fon éloquence. » Il ne fut pas aufli heureux dans fes eflais de Poëfie Françaife, Il obtint trois prix de Difcours à l’Académie des Jeux Floraux : le Poème que cette Académie couronna en 1729 , ne vaut aucun de ces Difcours. Après avoir profeflé neuf ans la Rhétorique , 1l paffa à une chaire de Philofophie, qu l occupa pendant quatorze ans avec la même diftinc- tion. Dès fon premier cours, « l’Académie qui le jugea aufli propre aux Sciences qu aux Lettres, {e l'attacha, » & fes regiftres font remplis de fes Ouvrages Philofo- » phiques , où brillent l’ordre & la clarté. On resrette » qu'il ait été trop féverement attaché à un fy ftême » abandonné aujourd'hui des Colleges même. » Des bancs de l’école , il pafla au Reétorat du College, & ÿ (1) M. PAbbé de Rey ; qui le lut le 27 Maï 1765. D. Pont. 100 ELEST ONE il parut aufi verfe dans l’Adminiftration que dans les Sciences & les Lettres. Sa Congrégation l’appela au Gouvernement général. Le P. Reynal combattit long- temps; 1l étoit fortattaché au College de l'Efquiile & à la Ville; mais il fallut céder. La Congrégation commençoit à reflentir les eflets de fon choix, lorfque la mort enleva le P. Reynal dans la foixante-unieme année de fon âge, quatorze mois après fon éleétion au Généralat, JEAN-JOSEPH PONT, né à Carcaflonne en 1715 , de riches Négocians, renonça à leur fortune pour fe livrer aux Sciences , aux Lettres & à la Piéré. Dès l’âge de 17 ans , il fit profeflion de la vie religieufe dans la Congrégation de St. Maur. Paflionné pour les Auteurs anciens, il crut avec raifon qu'il falloit les étudier dans leur langue propre. L'étude des Langues favantes devint pour lui une paflion. Il cultivoit les Lettres dans la retraite , lorfaw’un « de nos plus célebres Littérateurs » entreprit de faire pafler dans notre Langue, les beautés » de la Poéfie facrée. Il choifit D. Pont pour lui appla- » nir les difficultés de la Langue Hébraïque. Ce premier » fuccès le fit bientôt connoître , & l’Académie , qui » défiroit de ranimer dans cette Ville le goût des Lan- » gues favantes, l'invita à venir en donner des leçons » publiques. On fait avec quel zele & quelle capacité » 1l remplit, pendant douze ans, les pénibles fonétions » de fa Chaire : fon école fut très - fréquentée. » … fuccès engageant l'Académie à fe l’attacher dès la miere année , elle le nomma à une place d'Aflbcié ordinaire dans la clafle de Littérature. Pour remplir fes engagement, il entreprit un travail trés-utile fur Euripide & fur Lucien. « De dix-neuf Tragédies qui nous reftent » d'Euripide, il y en a onze dont il a fait de favantes DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. rot analyfes à la maniere du P. Brumoy. On trouve dans » les Ouvrages de D. Pont bien des réflexions qui » avoient échappé à fon devancier ; l’un & l’autre ont traduit les plus beaux endroits de leur Auteur , mais dans un goût fort difiérent. D. Pont eft moins élé- » gant, mais plus littéral. » Quant à Lucien, s’il n’a pas rendu fon enjouement & fes graces , ce qui paroït impoflible , il eft certain qu'il a rendu le fens de fon original avec plus d’exa@i- tude que d’Ablancourt ne l’avoit fait. Il remporta deux prix de Difcours à l'Académie des Jeux Floraux, dans lefquels il fe montre plus Philofophe qu'Orateur. Il s’étoit retiré dans la {olitude du cloitre quelque temps avant fa mort, arrivée dans fa quarante-neuvieme année (r). ANDRE JOUGLA DE PARAZA, Confeiller au Parle- M.deParazs: ment de Touloufe, né à Beziers le 12 Novembre 1702, d’une famille ancienne dans la Magiftrature, refta jeune entre les mains d’une mere tendre , éclairée & picufe, & fit des progrès rapides dans l'étude & dans la vertu. Quoiqu'il n’eût que vingt ans lorfque fa mere l’'amena à Paris, les plaifirs de la Capitale ne l’engagerent jamais à la perdre un feul jour de vue. De retour dans fa patrie, il fut reçu Confeiller au Parlement. « Il fentit que la » {cience du Droit privé pouvoit faire de prands Juges; » mais que celle du Droit public conflituoit le véritable » Sénateur. ;, Il devint l’organe du Parlement à l’âge de 29 ans. Il fut député quatre fois à la Cour par cette augufte Compagnie, qui le chargea des affaires les plus épineufes & les plus délicates. « Lorfque dans des temps » Orageux , les Lois furent forcées au filence, M. de ÿ va (x) L'éloge de D. Pont fut lu le 25 Août 1767 , par M. l'Abbé de Rey. 102 HISTOIRE »» Paraza montra qu’un courage & une fermeté iné- » branlables, ne font pas incompatibles avec la modé- » tation & la douceur. M. le Prince de Conti , qu'il » avoit eu l'honneur de complimenter à fon paflage à » Touloufe en 1730, au nom de l’Académie des Jeux » Floraux, aimoit fa converfation, & faifoit cas de fon » €lprit. Les d'Agueffeau, les Joly de Fleury, les Ma- » Chault, les Malesherbes furent fes amis particuliers. »#1l avoit demandé une place à l'Académie des Sciences, » n'étant âgé que de 27 ans : fes fréquens voyages & »» fes longues abfences l'empêcherent d'en fuvre les » exercices avec ce zele dont il remplifloit fes autres » devoirs; mais il faut lui tenir compte d’avoir procuré » à la France les Œuvres du Chancelier d’Agueffeau , » quil mit en ordre.-Il écrivoit très-bien en Latin & » en Français. Une Lettre Latine qu’il adreffa à M. de » Rabaudy, étant tombée par hafard entre les mains de » M. de Malesherbes, ce grand Magiftrat voulut con- noître l’Auteur de ce petit chef-d'œuvre d'élégance, » & ne cefla depuis de l’eftimer. La Langue Greque » n’étoit point entrée dans fon éducation ; mais le défir »» de l’enfeigner à fes enfans, lengagea de l’apprendre » dans un âge avancé. Une mort cruelle & prématurée » lui enleva laine. » Le fecond , Confeiller au Parle- ment , a hérité de fon favoir & de fes vertus. M. de Paraza eut des contradiétions à efluyer : fa fenfbilité fut mife aux plus cruelles épreuves; fa fanté s’affoibli, mais il demeura ferme au milieu d’une famille éplorée, qui recueillit fes derniers foupirs à Paris, dans la foixante- feptieme année de fon âge (1). (1) Prononcé par M, l'Abbé de Rey le 15 Août 1771, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSF. +03 CHARLES-GERAUD DE BOUSQUET , Confeiller au M. de Bouf. Parlement , né à Touloufe le 30 Août 1694 , après avoir fuivi quelque temps le Barreau, fut reçu Confeiller a l’âge de 23 ans. « Science, droiture , fermeté, amour » de fon état, noble fimplicité de mœurs, 1l avoit tout » ce qui conftitue un Magiftrat. Lorfqu'il fut appelé à » la Tournelle, 1l n’en foutint le trifte miniftere, qu’en » penfant que l'indulgence étoit cruauté envers pa- » trie. Cette douceur de caraftere ne nuifoit en rien à fa fermeté. ,, Un jour que les prifonniers révoltés » étoient prêts à brifer leurs chaines , il ne fit que fe » préfenter, & tout rentra dans le devoir. ,, Une figure noble & une taille avantageufe relevoient fes autres qualités : 1l leur avoit aflocié la culture des Lettres ; PAcadémie le compte parmi ceux qu’elle regarde comme fes Fondateurs. Son goût le porta au genre de l'Hiftoire ; il occupa plufieurs de nos féances de la leêture de divers Mémoires , pour fervir à la continuation des Annales de Touloufe depuis 1610, où Lafaille a fini. On a de lui une fuite de Piero fur les anciens murs de Touloufe & fur le Château Narbonnois, & une defcrip- tion très-détaillée de l’entrée de Louis XIIT dans cette Ville le 29 Novembre 1621. ,, Comme tous les beaux » Arts, eft-1l dit dans fon éloge (1 )» furent mis à » Contribution pour rendre cette entrée plus magnifi- » que elle peut donner une idée jufte de l’état où ils » étoient parmi nous à cette époque. ,, M. de Boufquet mourut âgé de foixante-neuf ans. Quoiqu' il eût perdu la vue quelque temps avant fa mort, il n’en étoit pas moins aflidu aux féances de l’Académie. (1) Prononcé par M. l'Abbé de Rey le 25 Août 1769, 04 : ENT ST OUTRE M.lcMar- HENRI-AUGUSTE DE CHALVET-ROCHEMONTEIX , de KE Sénéchal de Touloufe , naquit à Paris le 17 Janvier 1705. Les Chalvet, originaires d'Auvergne , tenoient, dès le treizieme fecles un rang diftingué dans cette Pos. vince. En 130$, ré donnerent des Comtes au Cha- pitre de Brioude , qui exige des preuves aufli étendues que celui de Lyon. Ils paroifient parmi la Nobleffe la plus qualifiée , dans les guerres qui agiterent les regnes de Charles VII & de Louis XI, & “depuis ils fe font toujours fignalés dans la Robe & dans l’Epée. Cette famille s'établit en Languedoc , fous le regne de Fran- çois L. Henri-Augufte n’avoit que treize ans , lorfqu'il entra dans le Régiment de la Couronne , en 1730 :1l fuccéda à {on frere ainé dans la Charge FT Sénéchal. Le Cardinal de Fleury , qui défiroit cette Charge pour fon neveu , touché des fervices des ancêtres de M. de Chalvet , du fuffrage général du Régiment de la Cou- ronne & du vœu de fes Concitoyens , fe défifta. M. de Chalvet époufa , en 1734, Elifabeth Jougla de Paraza. L'amour le plus tendre les unifloit, quand la guerre qui venoit de fe déclarer les fépara. Il fit, fous les Maré- chaux de Berwic & d’Asfelt, les campagnes de 1734, 1735 & 1736. Il fe trouva au terrible Siege de Phi- lisbourg , & s’y diftingua. Pendant cette guerre , les Etats de Languedoc formerent le projet de lever à leurs dépens un Régiment , fous le nom de Septimanie , & M. de Chalvet fut défigné pour en être le Chef ; mais la paix qui fuivit, fufpendit ce projet ; & le calme ,-qui fembloit devoir durer long-temps , le détermina à quitter le fervice. Il revint aider fa Patrie de fes confeils , après lavoir fervie par fa valeur. La Charge de Sénéchal donne l'entrée & le droit de fuflrage dans les Aflemblées Municipales. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 10$ Municipales. Il s’en rendoit le maitre par fa douceur , & par la maniere adroite & infinuante avec laquelle 1l tempéroit la vivacité des uns , excitoit la lenteur des autres , concilioit les efprits ; & de tant d’ opinions di- verfes , ne formoit que l'avis le plus avantageux à la chofe publique. « Les Académies des Sciences & des Arts, » dont le Confeil de Ville a doté l’une & fondé l’autre, doivent en partie à M. de Chalvet, les fecours ge- néreux & abondans qu’elles ont reçu de ce Confeil ; mais ce n’eft pas le feul endroit par lequel 1l mérita leur reconnoiffance ; il les éclaira l’une & l’autre de fes lumieres, & les anima par fon exemple : affidu à leurs sMimblies , initié à leurs travaux , fes avis étoient toujours mêlés de vues utiles & d’obferva- tions intéreflantes. Les difcours qu'il prononça dans les féances publiques étoient toujours remplis de pré- ceptes, de maximes & de réflexions fages. » On fe fouvient encore de celui dans lequel 1l développa, dans la féance de Pâques 1764, les principes & les avan- taces de l'Agriculture. LH ôtel que l’Académie occupe étoit uni à la Charge de Sénéchal; M. de Chalvet confentit à la défunion , fe contenta du rembourfement des répara- tions qu il y avoit faites, & rendit même à l’Aca- démie une partie ‘de la fomme à titre de don. Juf- qu'aux murs qui nous entourent , dit l’Auteur de fon éloge (1), tout eft pour M. de Ghalens dans cette Compagnie , un fujet d'éloge. Vrai Citoyen , 1l dé- fendoit avec un zele refpeétueux , mais ardent , les privileges de fa Patrie, lorfque des arcanes é épi- neufes les mettoient en danger. L’eftime que le Mi- es (1) M. de Puymaurin , qui le prononça le 25 Août 1772. Tome II. M, Sage. 106 HISTOIRE » niftre chargé de cette Province, ne pouvoit lui re- » fufer, & l'amitié qu'il lui avoit vouée, afluroient tou- » jours le fuccès de fes repréfentations. » Il mourut le 17 Mars 1772. L'éloge (1) D'ANTOINE SAGE, Chymifte-Apothi- caire, né à Touloufe le 2 Avril 1691 , a un rapport intime avec l'Hiftoire de l'Académie; les Sciences étoient cultivées dans cette Ville , mais les travaux des Savans étoient ifolés ; leurs fuccès périfloient avec eux , fans aucune utilité pour les progrès des connoiflances. Leur domaine eft fi vafte, & la vie eft fi courte, que fi celui qui entre dans la carriere étoit obligé de la recommen- cer, parce qu'il ne pourroit pas partir du point où s'eft arrêté celui qui l'a précédé, 1l feroit impofhble de parvenir à une découverte. Il falloit donc des dépôts où les enfans puflent retrouver & fuivre le fil des recher- ches de leurs peres. C’eft fans doute ce qui fit imaginer les Sociétés favantes. Tel fut , ou dumoins tel on doit fuppofer avoir été le motif de M. Sage, lorfqu'il forma le projet d’un établiflement , dont perfonne , avant lui, n’avoit eu l’idée à Touloufe. Fils d’un habile Apothi- caire , il avoit appris prefqu’en naïflant les élémens de la Chymie. Son pere vouloit qu'il füt Médecin. Il avoit tous les talens néceflaires à cette profeflion qu'il exerça dans la fuite, fans titre, mais avec fuccès : Sage vou- loit être Chymifte ; il alla d'abord à Bordeaux , & en- fuite à Paris. Il s’attacha au célebre Geofroi , & le fuivit pendant plufieurs années, ne fe bornant pas à l'écouter, mais faifant, de moitié avec lui, les expériences, les préparations & les analyfes. Formé dans la Pratique & dans la Théorie , il revint à Touloufe , brülant du défir (1) Prononcé par M. l'Abbé de Rey le 25 Août 1775. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 107 de répandre les lumieres parmi fes Concitoyens. Il forma un laboratoire qu'il fournit des inftrumens les plus né- ceflaires. Il ouvrit des Cours publics de Chymie , en- feignant fur-tout la meilleure maniere de préparer les médicamens. Dans la belle faifon , il partoit avec un Frere Chartreux, fon ami, Chymifte comme lui, par- couroit les campagnes , gravifloit les rochers les plus efcarpés des Pyrennées , & revenoit chargé de curio- fités naturelles, & de plantes rares & falutaires qu'il cultivoit lui-même. “ La conformité des goûts & des » Caratteres l’eut bientôt lié avec deux hommes d’un » mérite fupérieur. M. Carriere , excellent Chirurgien » & Anatomifte, & M. Gouazé , Médecin habile, d'un » génie hardi , dédaignant la routine & cherchant à » Ctendre les limites de l’art de ouérir. , Ce Triumvirat fit part à quelques Citoyens de fon projet d’établiffe- ment ; 1ls en favoriferent l'exécution dès le premier Jan- vier 1729 ; la Société naïflante commença à tenir des affemblées régulieres, & M. Sage donna des leçons de fon art fous les yeux de fes Confreres. Dans un premier Mémoire , il expofa l'origine , les progrès & les prin- cipales opérations de la Chymie ; il releva dans un fecond , les avantages que la Médecine peut tirer des remedes chymiques ; dans un troifieme, il enfeigne à graduer le feu , à décompofer les mixtes, & des prin- cipes généraux il defcend aux détails particuliers. Quel- quefois fes Mémoires avoient pour objet la Botanique ; mais 1l revenoit toujours à la Chymie. Il n'y a pas fait des découvertes nouvelles ; mais il a ouvert la carriere , & mis fes fuccefleurs à portée d'aller plus loin. Son zèle & la confiance méritée que le public avoit dans fes reme- des , furent la bafe d’une fortune honnête qu'il parta- * M.l'Abbé de Raymond, 198 Hirs T OIRE geoit avec les pauvres. Il mourut le 22 Septembre 1772. François DE RAYMOND DE TOLOsANI, né à Tou- loufe le 18 Avril 1704, d'une famille très-ancienne , {e déroboit dans fa jeunefle aux amufemens de fon âge, pour aller dans les campagnes chercher & cueillir des plantes, dont il étudioit les propriétés ; l’Hiftoire natu- relle le conduifit à la Phyfique expérimentale, & celle-ci lui fit fentir la néceflité de la Géométrie. Il y fit des progrès rapides ; & c’eft à titre de Géometre qu'il fut recu dans la Société des Sciences lors de fon établifle- ment : il ne regardoit cependant cette Science que comme linftrument de la Phyfique ; aufli ne voulut-1l jamais s’enfoncer dans les profondeurs de l'analyfe : 1l lut à P'Académie différens Mémoires fur des recherches utiles, un, entr'autres, fur le defféchement du bois à l'air, & fur fon inbibition dans l'eau. Sujets que M. de Buflon a trai- M. lAbbéde Catcllan. tés enfuite avec plus d'érendue. M. Abbé de Raymond expofoit fes découvertes avec juftefle , ordre & clarté. Il fut nommé à un Canonicat de St. Sernin , & dès ce moment il renonça au monde & à l'Académie ; mais il ne cefla pas d’être bon ami, bon Citoyen & bon parent: & ;] mourut viétime de fa fenfbilité. Les difgraces de » la Magiftrature , qui frapperent fur tout ce qu'il avoit » de plus cher, laccablerent d'une douleur fi vive & » fi profonde , que fa fanté en fut altérée , & qu'il finit » Les jours le 8 Avril 1774. ,, Son efprit l'eût porté à la raillerie , fi fon cœur , réprimant fes faillies, ne l'eût convertie en une plaifanterie fine & délicate , qui le rendoit plus cher à fes amis, en le rendant plus aimable. FRANÇOIS-AMABLE DE CATELLAN , né à Touloufe au mois d'Août 1698, d’une famille ancienne & féconde en hommes de mérite , quitta fes études à l’âge de douze DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. xo9 ans pour entrer au Service ; mais bientôt, renonçant au Service pour embrafler l'Etat Eccléfiaftique , il reprit fes études, fut pourvu d’un Canonicat, & alla cultiver les fciences & acquérir les vertus Eccléfiaftiques au Séminaire de St. Magloire à Paris ; il en revint a l’âge de 23 ans, pour fe mettre en poffeflion de ‘a grande Chantrerie de la Cathédrale , qu'un de fes grands oncles lui avoit réfignée. Cette dignité k qui donne la police d’un chœur fort nombreux , le mit fouvent aux prifes avec des Confreres qu'il aimoit, & dont il étoit aimé ; mais , dépofitaire des droits dt fa place ere croÿoit obligé de les conferver. Bientôt après, le Chapitre, qui avoit appris à fes dépens combien il connoifloitles Lois, & combien il étoit propre aux affaires, le chargea de Ja défenfe de fes prétentions , & il eut un entier fuccès. On découvrit en lui des qualités & des connoiïffances qu’il avoit cachées avec foin ; une vañfte érudition, du talent & du goût, & fur-tout une efpece de pañlion pour l'étude de la nature : la Société des Sciences le rechercha , & fe l’attacha en qualité de Botanifte. Le jardin des plantes lui fut confié, & les avantages que le public en retira , tournerent fes regards vers la Société naïflante , qui le nomma fon Trélorier ; il mourut le 9 Oë&tobre 1776 ; il légua à l'Académie une petite colleétion de curiofités naturelles. Ayant augmenté fon patrimoine par fon efprit d'ordre & d'économie , il donnoit aux pauvres fes revenus Ecclefialtiques ; ; plus de vingt ans avant fa mort , s'étant dépouille d’un Prieuré confidérable , il difoit qu’on l’avoit foulagé d’un grand fardeau (1). (1) L’éloge de M. Abbé de Catellan fut prononcé le 25 Août 1777, par M* l'Abbé de Rey. 110 FAT 'S TOME ar ÉLOGE HISTORIQUE DE M. DE SAINT-LAURENS, Confaller au Parlement. Par M. DE PUYMAURIN. Lu ee | EAN-FRANÇOIS DE SAINT-LAURENS naquit en cette He Ville, l’ainé de quatre freres , le 16 Août 1690, d’An- toine Fe Saint-Laurens , Confeiller au Parlement , & de Marie Chalvet. Son aïeul paternel étoit Tréforier de France de la Généralité de Montauban , & fa famille jouifloit depuis long-temps de la Noblefle ; Marie Chalvet fa mere étoit de la maifon de Chalvet, maifon illuftre & an- cienne , tant dans l’Epée que dans la Robe , qui a pro- duit plufieurs célebres perfonnages , entre autres (1) Matthieu de Chalvet, Préfident du Parlement , l’un des plus grands Mapgiftrats de fon fiecle. Antoine (2) de Saint-Laurens étoit à-la-fois Homme de Lettres & Magiftrat attaché à fes devoirs ; 5 maloré la {écherefle des matieres de Jurifprudence , qui faifoient fa principale occupation, il conferva jufqu’a la fin de fes jours un goût vif & délicat pour la poéfie & l’éloquence; il aimoit tendrement fes enfans ; 1l voulut leur donner (1) Matthieu de Chalvet donna de grandes preuves de zele & de fidélité pendant les troubles & les défordres de la Ligue , il mourut Confeiller d'Etat en 1607. (2) Antoine de Saint-Laurens étoit de l’Académie des Jeux Floraux , il mou- rut Doyen de cette Compagnie : il a laiffé un recueil d’Arrêts. DE L’'ACADÉMIE DE TOULOUSE. xrr lui-même ces premieres impreflions qui reglent fouvent pour tout le refte de la vie, l’efprit & le cœur; l’appli- cation à l'étude, & les progrès rapides de Jean-François le rendirent bientôt l’objet le plus cher des foins pater- nels. La tendrefle d’un pere ne connoït plus de bornes lorfqu’elle fe croit unie à la juftice ; il fe forma dès- lors,entre M. de Saint-Laurens & fes trois freres , une forte de rivalité qui alloit quelquefois plus loin que la fimple émulation , & qui a duré long-temps. À l’âge de quinze ans, M. de Saint-Laurens foutint, avec le plus grand éclat, au Collese de l’Efquile , des thefes pénérales de Philofophie. Cet exercice embrafle le champ le plus vafte des connoïiflances humaines ; il attaque l’efprit de tant de côtés à-la-fois, qu’il démêle prefque toujours cette inclination dominante , dont la fource eft dans le talent que la nature donne pour une Science de préférence aux autres ; 1l en refta à M. de Saint-Laurens un goûttrès-vif pour la Métaphyfique. Cette Science eft la feule où lefprit ne fait ufage que de fes propres forces, & ne doit fes fuccès qu'à lui- même ; dans toute autre , il emprunte le fecours des objets fenfibles , & partage en quelque forte avec eux fes découvertes ; dans la Métaphyfique , au contraire, toute alliance avec les féns eft féverement profcrite comme trompeufe & infidelle ; la treve même y pafle our dangereufe. Le vrai d'imagination , plaifir fi pur & fi délicieux pour, les efprits juftes , eft l'unique but des vœux & des eflorts du Métaphyficien. Il s’'éleve pour y atteindre ; 1l plane au-deflus des opinions hu- maines ; & du point de vue où il fe place , elles ne lui . paroïflent plus qu’un amas confus d'erreurs & de pré- jugés , fans cefle agité par l'intérêt & par les paflions. 112 HISTOIRE Une Science fi relevée & fi fublime eft fans doute bien attrayante ; mais qu'elle exige de facrifices & qu'elle préfente : de difficultés, dans un âge fur-tout où l’on eft communément fi difipé, où l’on fuit la réflexion & la retraite comme un ridicule ! M. de Saint-Laurens n’avoit que feize ans, lorfque le Livre de la Connoiflance de foi-même, du Pere François Lamy , Bénédiétin > imprimé depuis quelques années, lui tomba , pour Le premiere fois , entre les mains. Il le lut avec la plus orande atten- tion ; & cette leéture ayant fait naître des doutes, 1l les propofa avec tant de force & de fagacité , que le Pere Lamy fe crut obligé de répondre ; M. de Saint- Laurens répliqua, & cette guerre favante, que l’âge & les études des concurrens fembloient oh rendre fi inégale & fi forte, fe foutint pendant quelque temps. M. de Saint-Laurens cefla le premier ce combat ; maïs fans rien céder du terrain fur lequel il avoit combattu. Une étude plus étroitement liée avec l’état qu'il devoit embrafler un jour, réclamoit fon temps & {es forces ; il finifloit fon Droit ; il falloit foutenir l'A@e de Licence’; & la réputation qu'il s’étoit déja faite dans les Belles Lettres & dans les Sciences abftraites , ne lui permettoit point de médiocrité dans le genre d'étude , qui étoit le premier de fes devoirs ; 1l prit donc la Licence; & la façon brillante dont il la foutint , donna un nouvel éclat à fa réputation. Devenu plus libre pour le choix de fes études , & fon génie fe déployant avec la force de l’âge, il embrafa à-la-fois prefque toutes les Sciences, la Jurifprudence, la Métaphyfique, l'Etude de la Nature, la Poëfie , l'Eloquence , l’'Hiftoire. Il ne paroïit guere pofiible de mener de front tant d’études diverfes ; mais le génie fupplée au défaut du temps , & quelquefois il eft DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 113 eft propre a tous les genres , à peu-près comme ces miroirs ardens qui confument toutes les matieres , de quelque nature qu’elles foient , aufli-tôt qu’elles fe prés fentent au foyer. M. de Saint-Laurens fuivit ces diverfes études pen- dant cinq ans , lifant douze heures par jour. C’eft ainfi qu 1l acquit cette érudition prodipieute , qui a toujours étonné les perfonnes qui étoient à portée de le voir & de l'entendre. Mais l’érudition toute feule n’eft que de lor brut & en mafle, qui, tout précieux qu'il eft, n'entre point dans la circulation juiqu'e a ce qu'il ait reçu une forme extérieure. C’eft du goût que l’érudition re- çoit la fienne , s’il eft permis de parler ainfi; il la regle, il la dirige , 1l la contient, & 1l lui donne le mérite de l’a-propos , fans lequel elle n’eft qu’un étalage vain & inutile, que l'excès & l'abus du favoir. Le goût ne s’acquiert point dans le cabinet ; il eft le fruit du commerce du monde & de l'habitude de vivre dans ces Sociétés choifies , qui raffemblent le favoir , l’efprit & le fentiment, où l'autorité des anciens & l'opinion des modernes , les regles & lufage , le raifonnement & l’obfervation , fe balancent & fe com- binent , pour donner à la Littérature cette élégance & ce coloris féduifant, fans lefquels elle ne peut {e flatter d'intérefler & de plaire! Ces Sociétés ne peuvent, en général , fe former & fe foutenir que dans les Capitales des Empires ; en France ce n’eft qu'a Paris , parce que tous les grands talens viennent s'y rendre comme une forte de tribut que les Provinces lui paient. M. de Saint-Laurens avoit trop à cœur d'ajouter aux connoiflances qu'il avoit acquifes, tout ce qui pouvoit les étendre & les embellir, Tome IL, 15e 114 HLT ST OMR E pour ne pas fouhaiter ardemment d’aller pafler quelque temps dans cette Ville fameufe. M. fon pere , malgré toute fa tendrefle , céda a fes inftances. M. de Saint-Laurens partit pour Paris âge à peu-pres de vingt ans ; en arrivant dans cette Ville immenfe , : où les Arts, les Speftacles, la richefle & le luxe , pre- fentent à tout inftant , à un étranger , des objets nou- veaux , fon premier empreflement fut d'aller voir le Pere Lamy, qui, dès qu’il eut entendu prononcer fon nom , lui demanda des nouvelles de M. fon pere. Ce favant Religieux , aux coups qu’on lui portoit dans ces combats littéraires , dont nous avons rendu compte, avoit toujours cru avoir à faire à un Guerrier comme lui, blanchi fous le harnois. Il eut toutes les peines du monde à fe perfuader que ce jeune homme étoit ce même Adverfaire qui avoit foutenu contre lui , une guerre fi vive & fi difficile. Une converfation fur la même matiere ne lui permit plus d'en douter, & dès ce mo- ment il {e forma, entre eux , une liaifon qui ne cefla qu’à la mort du pere Lamy (1). Dans ce temps-la, M. de Fontenelle & M. de La- mothe , liés d’une étroite amitié, exerçoient une forte d’empire fur la Littérature françaife. Leurs talens , leurs connoïflances prefque univerfelles , un ftyle pur , dé- licat & ingénieux , l’art avec lequel le premier favoit traiter toute forte de matieres , les paradoxes littéraires du fecond , & l’adrefle qu'il mettoit à les défendre , & les liaifons de ces deux hommes célebres , avec tout ce qu'il y avoit de plus grand dans le Royaume , leur avoient donné cette confidération perfonnelle , qui eft (x) Le Pere François Lamy , Bénédi&tin, mourut à Paris le 11 Avril 17114 DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. trs _Ja feule autorité que les Lettres reconnoiflent. Par-tout où ils portoient leurs pas, on fe raflembloit autour d'eux ; on s’emprefloit de favoir d'avance le lieu où ils devoient fe rendre , & on s’avertifloit pour s’y trouver; des mœurs douces , un accès facile , une converfation infinuante, qui inftruifoit fans affe€ter la leçon & le pré- cepte , & dans laquelle on croyoit entendre le langage du cœur , qu’on reprettoit de ne pas trouver toujours dans leurs écrits , attachoit les Auditeurs , & les enchaïi- noit des liens de la perfuafñion & de l’éloquence ; liens fi puiflans , que les anciens , pour en exprimer la force, les repréfentoient fortant de la bouche d’'Hercule. M. de Saint-Laurens devint bientôt un des plus zélés Difciples de ces deux Philofophes ; car ils méritoient aufl ce nom , fi on le donne à l'égalité de l'ame , à la modé- ration du cœur, & a l'étude des hommes & de la nature. Mais fon admiration pour eux ne fut point aveugle, il refta toujours le maître de fa façon de penfer, & 1 ofa quelquefois relever par des critiques juftes & mo- dérées les défauts qu'il apperçut dans leurs Ouvrages. C'étoit alors la mode de s'occuper très-férieufement d’une forte de problèmes , dont l’objet paroifloit être de régler le cœur, mais qui ne fervoient tout au plus qu’à exercer l’efprit; on les propofoit dans les fociètes , ou bien par la voie des Journaux. Une galanterie raf- née, qu'on fembloit vouloir foumettre à l’analyfe & au calcul, étoit la matiere de ces problèmes; l'amour eft de tous les fentimens moraux le plus indépendant des regles & de la théorie, & je ne vois que la difficulté feule de l'y ramener, qui puifle être un attrait pour ceux qui lentreprennent. La plupart des Ecrivains payerent 116 FE SE ORNE le tribut à la mode. L’Auteur des Mondes, & le Tra= duéteur de l'Iliade, n'en furent point exempts. M. de Saint-Laurens fut entrainé par la foule. Il traita quelques- unes de ces queftions inutiles qui faifoient l'intérêt & l’'amufement du jour ; les Ouvrages qu'il fit à cette oc- cafion, font prefque tous reftés manufcrits; j'en ai lu plu- fieurs ; ; Je n'ai garde de faire l'apologie de genre , mais je ne puis m'empêcher de convenir que fous l’appa- rence du badinage & le ton de quelqu'un qui s’égaie & fe joue, ces petits écrits recelent une métaphyfique quelquefois profonde, & une connoïflance fine & dé- licate du cœur humain. M. de Saint-Laurens fe édit à ces amufemens dans les momens de loifir que lui laifloient des occupations d’un ordre bien fupérieur. Sa famille le deftinoit à la Robe; cet état, où l’on fe doit tout entier aux autres, exige prefque toujours le facrifice de fes goûts & de {es “plaifirs : ; & s’il tolere un délaflement que le travail rend néceflaire, il ne fouffre point de partage avec des devoirs différens. L'exemple contribue autant que l'étude à former le Maviftrat. La gravité de fes mœurs eft l'appui de la confiance des peuples en fa juftice; & c’eft l'exemple qui dirige les mœurs. Paris, malgré la difipation & le tumulte qui y re- gnent, a confervé dans la Magiftrature , avec les for- mes & les maximes antiques, les mœurs graves & f{e- veres de nos peres. Tous les Citoyens reconnoiflent aujourd’hui l'importance de ces maximes & de ces for- mes, mais 1l y en a peu qui fentent que les mœurs font également importantes. Les mœurs des Magiftrats font pourtant la bafe fur laquelle ces maximes & ces formes DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, r17 tepofent , & aufli-tôt que les mœurs s’afloibliront , les maximes & les formes s’écrouleront avec elles. M. de Saint-Laurens étoit trop éclairé pour ne pas appercevoir cette vérité, à laquelle la dignité & l’hon- neur de la Magiftrature font attachés. Il pénétra à travers tous les obftacles, qu'un jeune Etranger, fans autre re- commandation que fon mérite, doit s'attendre à ren- contrer dans une Société où fe rendoient plufieurs cé- lebres Magiftrats ; il étudia leurs mœurs , & fe forma fur ce modele. Aufli , quand il revint quelque temps après dans fa patrie, une charge fut la feule chofe qui parut lui manquer pour être Magiftrat. Il ne tarda point d'en être revêtu. il fut reçu Confeiller au Parlement en 1713. Il fut reçu en 1724 à l'Académie des Jeux Floraux, a la place de M. fon pere ; les droits de la nature ne font point un titre pour les honneurs littéraires ; ie mé- rite feul décida les fuffrages. Le nouvel Académicien fut pendant quelques années aflidu à tous les exercices. Des motifs fur lefquels je dois obferver le filence qu’il gardoit lui-même, l’éloi- gnerent , fans l’en féparer , d'un Corps qu'il ne cefla jamais d'aimer. M. de Saint-Laurens fe livra pour lors tout entier aux fonétions de fa Charge. Son cabinet & le palais, l'étude & l’exercice de fes devoirs parta- gerent fon temps ; il fe fit bientôt une réputation diftin- guée par la juftefle, la précifion & la clarté qu’il favoit mettre dans les rapports des affaires dont il étoit charoc. C'eft ainfi qué les Eettres font vraiment utiles à un Ma- giftrat lorfqu’elles lui fervent à faire valoir la juftice. Après avoir fervi aux Enquêtes, M. de Saint-Laurens monta en Tournelle à fon tour ; ce fut une épreuve x18 HISTOIRE bien délicate pour un cœur aufli fenfible que le fien , de; prononcer la peine de mort ; ces malheureux , que le crime amene fous le glaive de la Juftice , lui fembloient être de triftes viétimes des inftitutions humaines ; des hommes à qui d'autres hommes Otoient une vie, dont ceux qui la perdoient n’avoient pas eux-mêmes le droit de fe priver. Mais fa maxime ordinaire , qu'il ne faut pas être plus fage que la Loi, fufpendoit un atten- driffement qui devient une foibleffe dès qu'il s’oppofe à la juftice ; le droit de vie & de mort eft le point d'appui de l'autorité dont le Magiitrat eft dépofitaire: cette au- torité vient de Dieu; ainfi, lorfque le Magiftrat, au nom du Prince, punit de mort, c’eft le pouvoir de Dieu même qu'il exerce fur les hommes. La fanté de M. de Saint-Laurens avoit toujours été extrêmement délicate ; l'étude , les veilles, l'application au travail, la dérangerent & laffoiblirent. Les infirmi- tés s’accrurent, les attaques de goutte devinrent fré- uentes, il fut forcé de renoncer à toute occupation confidérable ; & dans les dernieres années de fa vie , 1} ne fortit prefque plus de chez lui : c'eft alors que cette Compagnie , dont il étoit un des Fondateurs, fut pri- vée de fa préfence & des fruits qu'elle en retiroit. Les amis de M. de Saint-Laurens s’empreflerent d’a- doucir fa retraite ; ils formerent infenfiblement autour de lui, comme une Société Littéraire de tous les genres , qui tenoit chaque jour fes {éances, où l’on s’entretenoit de toutes fortes de matieres, où l’on vivoit dans une gaieté décente , fous les lois de l’émulation & de l'amitié. Tous les regards fe tournerent vers cette So- ciété qui décoroit la demeure du Sage, & confoloit fes vieux jours; on tint à honneur d'y être admis. Ce fut DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 119 un titre pour être adopté dans nos Corps Littéraires ; & J'avouerois, fi je ne craignois point d’en afloiblir l’'é- loge, que j'ai plus d’une fois fouhaité d’y être introduit. Enfin, les forces céderent à l'opiniätreté des douleurs ; une goutte remontée termina une vie que la Religion & la Foi avoient toujours éclairée. M. de Saint-Laurens n’a point été marié , fes biens, fes talens & fon goût pour les lettres, ont paflé à M. de Mourlens fon neveu, Confeiller au Parlement. Il étoit d’une figure intéreflante , les yeux vifs & pleins de feu. Une fociété douce ,un commerce sûr, des mœurs fimples , une humeur vive , mais modérée, formoient fon caraétere. I s’exprimoit avec facilité ; il donnoit à tout ce qu'il difoit une tournure agréable & délicate ; fa vivacité naturelle ne l’emporta jamais au-dela des bornes de l'honnêteté; rien qui püt blefer l'honneur ou la délica- tefle ne lui échappoit , & les reproches même, lorfqu’il étoit forcé d'en faire, ne frappoient qu'avec ou & avec finefle. M. de Saint-Laurens avoit une érudition prodigieufe; c’étoit le fruit d’une leîture immenfe , qui s’étoit fou- tenue depuis la plus tendre jeunefle ; il Motte livres, & il aimoit encore plus a les lire. Ces deux goûts, qui paroïflent faits l’un pour l’autre , ne fe trouvent pas toujours enfemble ; FR étoit extrèmement courte ; la pefanteur des in-folio ne lüi permettant point de les approcher aflez pres de fes yeux , il en achetoit ordi- nairement deux exemplaires , l’un fervoit à former fa colleétion , & il arrachoit les feuillets de l’autre pour les lire plus commodément. 120 HISTOIRE Il a laiflé très-peu d'. vrages. Il difoit qu'on ne doit écrire pour le public que lorfqu’on fait aflez pour foi, & jamais il ne s’eft cru arrivé à ce point. M. de Saint-Laurens avoit l'ame grande , le cœur noble & généreux ; il refufa , lorfqu'il étoit de fervice aux Enquêtes, fa portion de la bourfe , que la Chambre dont il étoit membre avoit délibéré de lui conferver pendant une longue maladie. La Chambre ayant infifte , il demanda qu'il lui fût permis d'employer cette fomme à une pendule , dont il fit enfuite préfent à la Chambre. Dans une difcuflion d'intérêt avec fes freres, 1l leur envoya dix mille francs pour les aider à la foutenir. Un trait de cara@tere fi noble & fi rare , terminera fon éloge. ÉLOGE DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. xt ke O1 GRE DE M. Du MAS, de l’Académie des Jeux Floraux, Profeffèur d'Eloquence au College Royal de T'ouloufe. PAR le R. P. SERMET, Carme Déchauf}é , Prédicateur ordinaire du Roi. Pare DU MAS naquit à Ioudun le 20 Janvier 1738. Tout annonça , dès fa naiflance , que le Ciel lavoit deftiné à la fonftion noble & fublime de former des hommes. Point de titres par conféquent autour de fon berceau, point d’honneurs, point de richefles. Avec des vertus , 1] n’y trouva que quelques foibles débris d'une honnête aifance ; & c’eft là fans doute tout ce qu'il devoit y trouver. Quel eft l'homme, en effet, qui ait aflez de force & de courage pour s’élancer du fein des grandeurs ou de l’opulence, dans le fentier pénible & rebutant de l'éducation publique ? Dans le lieu de fa naïflance réfidoit un de fes oncles, que fes vertus & fes talens avoient élevé à la Cure de St. Paterne. Cet Eccléfiaftique refpe@table , féduit fans doute par les fentimens de la nature, crut entrevoir dans le jeune Du Mas, l’homme que le Ciel avoit choïfi pour lui fuccèder dans fes fonétions paftorales. Plein de cette idée , 1l le tranfporte dans fon Presbytere , pour s'y occuper tout entier du foin de fon éducation. Son zele fut bientôt récompenfé par les progrès rapides de fon Tome IT, 122 HISTOIRE Eleve. Il n’avoit encore que 13 ans, & déja il avoit fini fon cours d'Humanités. C'étoit la le but de la carriere que les jeunes gens parcouroient alors à Iffoudun ; de la ils fe rendoient à Bourges pour y faire leur Rhétorique. On fit fuivre cette {marche au jeune Du Mas ; mais fon Mentor étoit trop éclairé pour le croire capable de s’élancer tout de fuite dans le vafte champ des fciences abftraites. S'il n’eût voulu en faire qu'un fimple titulaire, qu'un héritier paifible & tranquille de fes revenus ecclefiaftiques , peut-être, calculant alors fes degrés de capacité fur fes années d'étude , fe feroit-il applaudi de fon ouvrage, & l’eût-il regardé comme parfait & confommé ; mais il avoit des vues plus grandes & plus nobles fur fon Eleve , il le deftinoit aux fonétions fublimes du miniftere Evangélique. Dès-lors il étoit naturel qu'il ne regardàt les études de Province que comme une foible prepara- tion à celles de la Capitale. C’eft dans ce creufet qu'il veut qu'on épure fes talens, & qu'on apprécie fes fucces. Il l'envoie donc au College du Pleflis, difputer une de ces places que des Mécenes généreux ont confacrées à l'éducation de cette clafle de jeune gens , que le ciel a tout-à-la-fois enrichis de talens & dénués des biens de la fortune. Les eflorts de notre jeune Athlete font couronnés ; il éclipfe tous fes rivaux, & cette premiere viétoire fut le préfage de celles qu'il devoit remporter toutes les fois qu’il entreroit en lice avec eux. La fupériorité de fes talens étoit bien propre fans doute à lui mériter la bienveillance de fes Maïtres ; mais il la dut encore plus a la régularité de fa conduite, à la pureté de fes mœurs, à la douceur de fon caraétere, & à fon application continuelle à l'étude. Bientôt 1ls le DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 123 Jugetent digne de partager leurs travaux , & ils ne tahdéronE pas à fe l'aflocier en qualité de Maitre de quartier. C'’eft dans l’obfcurité de cette place; c’eft en furveillant une foule d’enfans , trop fatigués fouvent des leçons & de la gravité d’un Profeffeur , pour refpefter | comme ils le déneoicnt , une autorité Hbalernet c’eft au milieu des diftraétions que caufent prefqu'à chaque inftant leurs faillies & leurs débats minutieux ; c’eft la, dis- “Je , que pour augmenter la mafle de fes hhoifinées , 1l s’entre- tenoit paifblement avec les plus fublimes Ecrivains de Rome & d’Athenes, qu'il les comparoït les uns aux autres , qu'il analyfoit leurs idées, leurs exprefions ; que , fe répliant fur lui-même, il fe pénétroit de leurs maximes , & qu'il fe transformoit en quelque forte en eux-mêmes. C’eft là que, parcourant l’Hiftoire des Na- tions , 1l cherchoit à connoître les hommes, retrouvant quelquefois, & prefque toujours dans les querelles pué- riles de fes Difciples , l’image des guerres fanglantes qui ont ébranlé les Empires , & jugeant par l’explofion de nos paflions , encore foibles & timides, des fecoufles terribles qu’elles doivent donner à la terre, lorfque l’ha- bitude & l’indépendance les ont fortifiées. C’eft enfin là qu'il préparoit une reflource à fa Patrie déjà décidée à {upprimer une Société qu’elle avoit idolatrée, & qu’elle avoit cru jufqu'à ce moment lennellémene nécefaire à la Religion & aux Lettres. Quoique jeune encore, 1l futun des premiers qui fixa les yeux du Miniftere. La traduétion qu'il venoit de faire des Colloques d’Erafme , & plus encore celle qu'il pré- paroit des Economiques de Xénophon, & qu'il avoit déja bien avancée , méritoient cette diftinétion. 124 HVUr ST OLIS Ces deux Ouvrages n’annoncçoient-ils pas en effet un mérite capable de donner à fes Difciples, non-feule- ment une parfaite connoïflance des langues favantes , mais encore le goût de la fagefle & de la vertu? Il pañla d’abord au College de Metz, pour y régenter la troifieme, & bientôt à celui de la Fleche , où 1l difputa & obtint la Chaire de Rhétorique. Pendant qu'il profefloit à Metz, Mie, Huflenot, dont le pere avoit éte l'aigle du barreau, & dont le frere a de nos jours commandé dans l’Ifle de la Grenade , après avoir partagé avec M. le Comte d’Eftaing la gloire de fa conquête ; Mie, Huflenot, dis-je , avoit fait fur lui cette douce impreflion que produit la vertu. Le défir de former le lien qui devoit les unir, & les obftacles que fembloit vouloir y oppofer lAdminiftration du College de la Fleche, avoient déja dégoûté M. Dumas du poite qu'il y remplifloit ; l'offre qu’on lui fit bientôt après , de la place de Principal au College d'Iffoudun, acheva de le décider. Il vole vers fa patrie, trop heu- reux de pouvoir lui être utile, & d’y vivre fans con- trainte avec une époufe digne de lui. : Il étoit trop jaloux de la gloire du College qu’on ve- noit de lui confier, pour ne pas travailler a le faire confirmer par des Lettres Patentes. Il n’y avoit pas en- core réufli , lorfqu'il vint à vaquer une place d’Agrégé à PUniverfité de Paris. Il vole au concours, & bientôt tous les fuffrages fe réuniflent fur fa tête. Ce fuccès, en accroiflant fa gloire , troubla fon repos & fon bonheur ; mais ce ne fut que pour quelques inftans. L’agrégature lui impofoit le devoir de réfider à Paris, & il ne pou- voit en être difpenfe qu’autant que le College d'Ifloudun feroit patenté. Il fe voyoit donc dans la cruelle alterna- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. tr tive de renoncer à fa patrie , ou aux droits que lui donnoit fa nouvelle place ; mais le Miniftre eut bientôt tranché la difficulté. La lettre flatteufe qu’il écrivit à ee fujet au Reéteur de l’'Univerfité de Paris (1) eft une preuve non-équivoque que la réputation de M. Du Mas n'étoit pas reflerrée dans les bornes étroites d’une pro- vince. Son nom parvint à Monfieur l’Archevèque de Touloufe , & cet Illuftre Prélat, toujours occupé de l’ac- croiflement des Sciences & de la gloire de fa Métropole, (1) Copie de La Lettre de M. le Comre de St. Florentin à M. Du Mas. A Compiegne le 18 Août 1767. J'ai, Monfeur, rendu compte au Roi de Ja lettre que vous m’avez écrite le 7 Juillet dernier, Sa Majefté a trouvé votre demande fondée , & je viens en con- féquence, & conformément à fes intentions, d'écrire à M. le Reëteur., la lettre dont je vous envoie la copie. On ne peut vousêtre, Monfieur, plus parfaitement dévoué. Signé SAINT FLORENTIN. Copie de Le Lettre de M. le Comte de Sr. Florentin à M. le Receur de L'Univerfité de Paris. À Compiegne le 18 Août 1767. Le fieur Du Mas a quitté , Monfieur , au mois de Septembre 1766 , le College de la Fleche, où il remplifloit avec diftin@ion depuis deux ans, la Chaire de Rhétorique, pour aller à IMoudun fa patrie, où il occupe , depuis cette époque, la place de Principal du College de cette Ville ; il s’eft préfenté de nouveau au concours qui s’eft tenu au mois d'Avril dernier , & a été admis à une place d'Agrégé , mais aux termes des Lettres Patentes du 10 Août 1766, comme le College d’ifloudun n’eft pas eficore confirmé par des Lettres Patentes , il ne pourroit occuper la place de Principal de ce College , & garder celle d’Agrégé qui exigeroit fa réfidence à Paris ; cependant, Sa Majcfté défirant conferver à l'Univerfité un Sujet aufh diftingué que le fieur Du Mas, & fe propofant de confirmer le College d’Iffoudun, elle me charge de vous marquer qu’en atten- dant qu’elle fafle connoître fes volontés à ce fujet , fon intention eft que le College d'Iffoudun foit regardé comme autorifé par fes Lettres Patentes, & qu’en conféquence le fieur Du Mas continue de remplir la place de Principal à Ifloudun , & conferve en même-temps l’éligibilité aux Chaires de l’Univerfité, en fe conformant au furplus des difpofitions des Lettres Patentes du 10 Août 1766, Vous aurez foin de faire connoûre les volontés de Sa Majefté aux Juges du concours, à leur premiere affemblée, & de faire infcrire la lettre que je vous écris fur le regiftre des délibérations du concours, Vous counoificz les fentimens avec lefquels je vous fuis, Monfieur , &c. 126 HISTOIRE réfolut d'y attirer M. Du Mas. Flatté d'un fuffrage auffi glorieux , il fit le facrifice de fa patrie, & vint occuper ici la Chaire de Rhétorique. Pendant quinze ans tous nos Concitoyens ont été les témoins de fes travaux & de fes fuccès : il n’en eft pas un qui ne convienne qu'il avoit réufli à nous confoler de la perte des Cleric, des Vaniere , des Lombard , des Latour (1 ), & qu'il avoit par conféquent mérité de remplacer ces grands hom- mes ; que feroit-ce fi nous interrogions tous ceux qui ont eu le bonheur d’être formés par {es mains? Qu'ils parlent , & qu’ils nous difent tout ce qu'il fit pour orner leur efprit & leur cœur, leur donner le goût des Scien- ces & des Lettres, leur infpirer l'amour de la vertu , les pénétrer de refpe& pour la Religion , leur faire connoïtre les diflérens devoirs dé la fociété , leur en faciliter la pratique , en un mot , pour en faire des Hommes, des Savans , des Citoyens , des Chrétiens. Un Mercénaire compte fcrupuleufement les inftans qu'il doit a fa place, & faifit avec empreflement le plus léger prétexte pour lui en dérober quelqu'un ; plus ac- (1) Le P. Cleric, Jéfuite, eft connu par fon Poème des anciens Solitaires de l'Orient, & par plufeurs autres Ouvrages couronnés par l’Académie des Jeux Floraux, & imprimés dans fes Recueils. Le célebre P. Vaniere , Auteur du PrædiumæRuflicum , d'un volume #n-12 d'Opufcules Poétiques, d'un Diétionnaire Poétique, & d’un autre grand Dic- tionnaire Latin & Français, Ouvrage auquel il n’avoit pas mis la derniere main, mais qui eût été plus complet & plus étendu qu'aucun des Diétionnaires que nous ayons pour ces deux Langues. A Le P. Lombard avoir été reçu Maître des Jeux Floraux après avoir remporté douze prix, c’eft-à-dire, autant que les Statuts de l’Académie permettent d'en remporter : il fut chargé par fon Corps de la continuation du grand Di&tionnaire du P, Vaniere. 11 avoit fait une hiftoire du Parlement de Touloufe en 3 vol. z1-4°., dont la cataftrophe de la Société nous a privés. On ignore ce que font devenus ces manulcrits. s Le P. Latour, Auteur d’un volume de Cantiques Spirituels, fut peut-être de tous les Inftituteurs le plus propre à fan@ifier la jeunefle qu'il chérifloit ten. drement , & dont il étoit chéri de même. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. +127 cupé de fes befoins que de fes devoirs , 1l néglige ceux- ci de crainte de manquer à ceux-là. L'homme de génie au contraire, le véritable Homme de Lettres n’eft oc- cupé que de fa gloire & de celle de fes Eleves. Voilà fa fortune , l'objet de fon ambition, le terme de fes défirs. Tel fut M. Du Mas. Le temps de exercices claffiques ne fufhfoit pas à fon zele. Il entraïnoit fouvent fes Di£ ciples dans fa maïfon , s’enfermoit avec eux dans fon cabinet , y recommencçoit fes lecons, leur livroit tous fes Le L je veux dire fes livres, leur apprenoit à les connoître , a les extraire, à fe LA approprier, en un mot, à devenir ce qu'il sidi lui-même. Il vouloit, lorf- qu'il les expofoit aux yeux du Public , qu'ils paruflent plutôt fes Rivaux que fes Difciples. Il fuit, pour s’en convaincre, de parcourir les différens programmes des exercices qu’il a fait foutenir fur la Poëéfie Lyrique , fur l'Eloquence du Barreau , que fais-je? Quelle idée ces eflais ne nous offrent-ils pas de la Rhétorique qu’il étoit fur le point de donner au Public! C’étoit la fon ouvrage de prédileétion, celui qu'il avoit travaillé avec le plus de foin , & fur lequel il paroïfloit vouloir fonder l’édi- fice de fa gloire. Heureufement qu'il n’eft pas defcendu avec lui dans la tombe. Nos efpérances ne feront point trompées. Nous avons lieu de croire qu’il fortira bientôt de la prefle , & que M. Du Mas fe furvivant à lui-même, inftruira encore après fa mort, non-feulement les Dif- ciples, mais les Maitres. L'intérêt des uns lui parut toujours inféparable des autres ; & de là ce vafte plan d'éducation qu'il avoit projetée , mais que nous défefpérons de voir exécuter , à moins qu'un homme de la même trempe , doue de la même facon de voir & de fentir, & aufhi zélé que 128 H1STOTRE « lui pour le bien public, n’eût le courage de recueillis & de mettre en ordre les matériaux épars qu'il defti- noit à ce grand Ouvrage. Il avoit comparé les avanta- es & les inconvéniens de l'éducation privée avec ceux de Péducation publique. Forcé pour l'intérêt de la mul- titude , de fe décider en faveur de celle-ci, il vouloit indiquer les vrais moyens de la perfe@tionner , & per- fonne fans doute n’étoit plus propre à y réuflir. Que ne puis-je , pour vous en convaincre, vous rendre compte de toutes fes idées ? Mais un Ouvrage à faire , à peine definé, à peine même apperçu , n’eft gueres fufceptible d’analyfe. Autant M. Du Mas étoit fidelle à fes devoirs de Profeffeur , autant 1l fut jaloux de remplir ceux de PAcadémie. Ce titre ne fut point pour lui une vaine décoration. Loin d’éteindre ou même d’afloiblir fon amour pour le travail, il ne fervit qu’a le ranimer; non- content de remplir fcrupuleufement fa tâche, 1l étoit tQujours prêt à fuppléer ceux de fes Confreres, que des affaires domeftiques ou le fervice du public éloignoient de nos féances. Que des foins ne fe donna-t-il pas pour limpreflion de nos Mémoires ! La revifion des épreu- ves, ou plutôt tous les détails typographiques rouloient fur lui feul, On auroit dit que c’étoit là fon unique affaire. Cependant outre les devoirs de fa clafle, il avoit à correfpondre avec les Académies de Nimes , de Chà- lons-fur-Marne & de Hefle-Caflel, avec la Société Royale Patriotique de Suede, parce qu’elle s’étoit aflo- ciée à celle de Hefle-Hambourg , à laquelle il avoit honneur d’appartenir. Celle-ci l’'avoit même chargé de former un Comité à Touloufe & aux environs; & lui avoit envoyé à ce fujet un diplème de Secrétaire perpétuel. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. r29 perpétuel. Joignons à tout cela les diflérens Ouvra- ges qu'il avoit entrepris, tous difparates > tous étran2 gers les uns aux autres, dont un feul auroit fufä pour abforber un génie moins vafte que le fien, & dont il eft à défirer qu'une main habile fafle la Colle&tion pour en enrichir le Public. Que d’études , que de con- noiflances ne fuppofent-ils pas ! On peut en juger par le fragment de fa Difiertation fur Vénus , imprimée dans nos Mémoires. Nous ofons croire qu’elle eût réufü, ou dumoins balancé les fufirages de l’Académie Royale des Infcriptions & Belles-Lettres de Paris, s’il l’eût en- voyée au concours. Îl en eût été fans doute de même de fon Mémoire fur Minerve , fi un Journalifte étran- ger & peu exaët ne l’eût égaré fur le véritable fens du iujet. M. Du Mas raflembloit des matériaux pour écrire l'Hiftoire des Etats de la Province ; il avoit même daigné ï ARE Er AE À 2 m'aflocier à ce travail. L’ Académie de Nimes conferve, dans fes archives, fa Differtation intéreffante fur l’Efprit philofophique ; enfin, nous connoïflons fon Mémoire fur les Vers Léonins, par la leéture qu’il en a faite à l'Académie ; & ce dernier ouvrage , qui eft tout-à-la- fois une Hiftoire amufante & une Critique ingénieufe, nous a fait comprendre à quelles recherches pénibles il étoit capable de fe livrer ; & en eflet, ne falloit-il pas un homme aufi laborieux , auffi intrépide que lui, pour s’enfoncer & fouiller ainfi dans les fiecles de barbarie & d'ignorance , reflufciter tous les chefs-d'œuvres de mau- vais goût qu'ils avoient produits, & remonter à l’origine de ce préjugé ridicule , qui divinifoit en quelque forte l'abus du genie, & failoit confifter la fupériorité des talens dans l’art extravagant de fe former des entraves ? Tome 11. R 130 HISTOIRE Quel contrafte frappant les Poëfies de M. Du Mas ne forment-elle pas avec celles de ces Poëtes ridicules? Ce n’eft pas, comme chez eux, telle lettre de l’alphaber, telle figure triangulaire , ovale ou quarrée , la ftruéture d’un Aigle, d’un Chérubin ou d'un. Autel , qui reglent la marche des penfées ; c’eft le feu facré dont il eft pé- nétre. Ce n’eft point une Mufe profane , une Divinité chimérique , c’eft l'Efprit Saint qui l'anime , qui l’en- flamme & qui l'élève au-deflus de lui-même. Emule du fublime Roufleau , du tendre Racine , du Roi Prophete, je l’entends tantôt célébrer, avec un faint enthoufiafme, la grandeur de l’Étre fuprème , la magnificence de fes ouvrages, les prodiges de fa toute-puiflance , & les redoutables effets de fa colere vengerefle : tantôt conf- terné , ananti au pied du trône de l'Éternel , déplorer les miferes qu'il partage avec l’efpece humaine , gémir fur fes écarts, & par fes larmes & par fes fanglots , s’efforcer d’arrèter & d’éteindre la foudre qu'il entend gronder fur fa tête. Toujours je le vois pailer rapide- ment du fublime au pathétique , & de cette onétion douce & tendre , qui eft le langage du repentir & de l'efpérance , à ces élans impétueux , qui font l’'expreflion d’un cœur éclairé par la foi, & embrafé d'amour. Il ne sétoit propoé d’abord que de réunir, d'éclair- cir & de compléter les Pfeaumes de Buchanam , des Commire , des Du Cerceau , des Magnet & de MM. de Sainte-Marthe. Sa modeftie ne lui permettoit pas de foupconner qu'en ne voulant que les imiter & fe rappro- cher d'eux , il les laifleroit loin derriere lui : encore moins ofoit-il fe promettre que les foixante-quinze pre- miers qu'il mettoit au jour, en fairoient défirer au Pu- blic la fuite qu'il avoit projetée, ainfi que les Cantiques DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, 131 de l’ancien & du nouveau Teftament. Reliquas , dit-il humblement dans fa Préface, cum utriufque teflamenti Canticis utinam fperes Nous ne fommes pas furpris de ce langage , nous qui converfant tous les jours avec lui, fûmes plus à portée de le connoître ; nous , qui étions encore plus frappés de la fimplicité de fon ame que de la vivacité de fon efprit , de la fupériorité de fes vertus que de celle de fes talens. Combien 1l étoit modefte dans fes avis ! Tou- jours exat, mais toujours précis, adoptant prefque toujours les idées & les obfervations des autres , & ne cherchant jamais à en impofer & à fe faire valoir. Un trait fufit pour le caraétérifer, & faire bien connoître tout-à-la-fois fa modeftie & fa véracité. Dans le Précis de la Vie d’'Érafme , qu’il a mife à la tête de la Tradu&tion de fes Colloques, 1l avoit ofé dire que rien n’étoit plus épuré que le latin de cet Ecrivain: il a fouligné ces mots dans l'exemplaire qu'il s’'étoit ré- fervé, & au-deflous j'ai lu ceux-ci écrits de fa propre main : Voyér fur cette propofition la Critique fort jufle que J'ai effuyée de la part de M. Freron. Un homme auf propre à diriger la marche du génie & les opérations du goût , devoit néceffairement re les yeux de l’Académie des Jeux Floraux. Depuis long- temps elle nous énvioit le bonheur que nous avions de le pofléder : elle n’attendoit qu’une occafion pour laffo- cier à fes travaux ; elle faifit avec ardeur celle que lui fournit la mort de M. l'Abbé de Neuvillé, & toute la Ville applaudit à ce choix. Le difcours que prononça M. Du Mas, le jour de fa réception, roula princ:pa- lement fur les qualités que doit avoir un homme de Lettres , & fur-tout un Académicien. Sans ie voulair, 132 HESTOLRE il fe peignit lui-même. Hélas ! nous ignorions alors qu'il, prononcçoit fon Oraifon funebre , & que c’etoit pour la premiere & la derniere fois que fa voix fe faifoit entendre dans le Sanftuaire de l’'Eloquence. Quelle eût été notre confternation , fi le Modérateur de cette Académie eût alors entr'ouvert le livre de nos deftinées ! Encore qua- rante jours, auroit-il pu nous dire, & nous verrons régner fous ces portiques le deuil & latriftefle, & l'éclat de cette augufte cérémonie ne fervira qu'à accroitre nos regrets. C'étoit à ce terme fatal que la mort attendoit M. Du Mas. Ah ! C’eft moins fur lui que fur fa famille, fur fes amis, fur fes éleves , fur tous les Savans qu'ont porté fes coups. Il fembloit qu'il la fentit approcher. Depuis quelque temps il fe plaifoit à fréquenter ma retraite. Je croyois d'abord que c’étoit pour diriger mes pas chancelans dans la carriere des Sciences ; mais je m'apperçus bientôt que c'étoit au contraire pour que 'éclairafle les fiens dans les fentiers de la piété. Il aimoit à parler avec moi , des deux illuftres Confreres (a); que la mort venoit de nous enlever , & dont J'avois eu tout-à-la-fois la douleur & la confolation de recueillir les derniers foupirs. IL vouloit que je lui rendifle un compte exaét des fentimens qui les animoient dans cet inftant fi terrible pour le méchant , mais fi doux pour l’homme de bien. Il envioit leur bonheur. Je veux , me difoit-il quelquefois , avec cette candeur & cette ingé- nuité qui cara@térifoient fon ame, Je veux que vous me convertiffiex. Eh ! qu'avois-je donc à faire avec un homme tout occupé du bonheur de fon époufe , de l'éducation de fes enfans , de celle de fes Difciples , de l'étude de EDEN ARE 2 UE PORTES PERTE LE ETES TNT, EME (1) M, le Marquis de Beauteville, & M. de Garipuy pere. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 133 la vérité, de la gloire des Lettres , de l’accroiflement des Séiénées 9 & fur-tout de l’idée de l'éternité ? Il la vit s'ouvrir à fes yeux , non en froid Stoïcien , mais en Chrétien. Il n’attendit pas une impulfion étrangere pour remplir fes derniers devoirs de Religion. Il fe hâta de me prévenir. Il craignoit peut-être que F amitié n’affoi- blit mon zele. Ah ! les difpofitions de fon ame étoient bien propres à le ranimer. Son langage , fes fentimens, toute fa conduite, prouverent jufqu’a fon dernier int, qu'avant de dure nos Pfeaumes , 1l les avoit long- temps médités, & qu'il s’étoit intimement pénétré de lefprit du Roi Prophete. Cette Académie trouvera peut-être des hommes dont les talens égaleront le furpafleront même ceux de M. Du Mas ; mais j'ai peine à croire qu’elle en trouve jamais qui puiflent nous confoler de fa perte. 134 HISTOIRE ÉLOGE DE M. GAR1IPU/Y Pere. Par M DARQUIER. Lule 2$ Aoûe F RANÇOIs-PHILIPPE-ANTOINE GARIPUY , Direfteur ho des Travaux Publics de la Province , naquit à Touloufe le 16 Avril 1711, de Jean-François Garipuy & de De- moifelle Catherine Laqueille. Après avoir fini fes études de Collese & d'Univerfité, M. Garipuy fuivit pendant quelque temps le Barreau, par déférence pour fon pere , qui défiroit qu’il embraflät cet état. 1] auroit vraifemblablement rempli cette carriere avec honneur; mais un penchant fecret , que l’occafion n'avoit pas encore développé, ne tarda pas d’être un obftacle aux vues de fa famille. La nature l'avoit formé pour les hautes fpéculations des Mathématiques ; 1l dut au hafard la premiere impulfion qui l’entraina dans cette route difficile , où il devoit marcher à pas de oéant, fe faire un nom diftingué , contribuer à l'éclat & à la cé- Iébrite de cette Compagnie , & ‘obtenir la confiance la plus entiere & la plus honorable de l’'Adminiftration de cette Province. Le fieur Chevalier, Ingénieur , étoit logé chez un Apothicaire nommé Carbonel , dont la boutique étoit le rendez-vous de ces hommes défœuvrés, qu’on appelle communément des Nouvelliftes ; de ces gens que tout paroit intéreffer , mais que rien n’afle&te , qui font avides des moindres événemens , non pour réfléchir ou pour DÉ L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. x3s s'inftruire , mais comme les tonneaux des Danaïdes , pour répandre à proportion qu’ils s'empliffent ; le défir de fe diftraire amenoit auffi dans cette Calote , car c’eft anfi qu'on nommoit cette Société frivole & légere, des Plaideurs & de jeunes Avocats. M. Garipuy y fit connoiflance avec cet Ingénieur ; étant monté dans fa chambre un jour qu'il n’y étoit pas, il apperçut un livre fur la table, le Traité de la Grandeur , par le Pere Lamy ; il parcourt les premieres pages , avec cette curiofité in- quiete qui s’accroit d’un inftant à l’autre , lorfqu’elle eft l'effet du talent; & crainte d’être interrompu , il fort & emporte le livre. C’étoit le vol de Prométhée. Rentré chez lui, il continue avidement fa le&ure , dit adieu pour toujours à Cujas & Barthole , & fe confacre tout entier à la Science dont il vient d’entrevoir l'importance & l'étendue. C'eft ainfi qu'un coup d'œil jeté par hafard chez un Libraire fur le Traité de l'Homme par Defcartes, enleva Malebranche , l'un des plus grands Métaphy- ficiens du fiecle dernier , aux contentions de l'Ecole, & nous valut le livre fublime de la recherche de la vérité. Quoique ce Traité de la Grandeur foit en fon genre un livre excellent , il eft plutôt fait pour donner une idée nette de l’objet des Mathématiques que pour rendre Géometre. Le calcul plus rapide & plus expéditif fait arriver bien plus promptement à la vérité , mais fans trop favoir comment ; de maniere que l’on eft plutôt averti qu'une chofe eft vraie, qu’on n’en eft convaincu. Ce n’eft que dans la Géométrie & dans la Synthefe feules qu'on trouve cette conviétion coaétive , fur laquelle la contradiétion n’a point de prife. M. Garipuy fentit bientôt qu'il avoit befoin d'autres 136 HISTOIRE fecours pour aller plus loin. Il confulta le Pere Durranc, Profefleur de Mathématique au College des Jéfuites, & fur-tout M. Bourruft , Médecin, qui poflédoit très- Miel la Géométrie RP , & qui étoit admirateur zélé de la méthode des anciens. Celui-ci lui indiqua les éle- mens d'Euclidé de Barrou, ouvrage excellent , que notre jeune Géometre ne quitta qu'après lavoir parfaitement entendu. La liaifon qu'il avoit AE avec le Pere Durranc & M. Bourruft , lui donnerent l'entrée à la Société des Sciences. Îl y fut recu le 16 Mai 1731. Ses premiers travaux annoncerent fa prédile&tion pour l'Aftronomie ; & dès le 11 Décembre , il lut, dans une féance dial de la Société , un Métiaue fur les Parallaxes & les Réfraëtions. Il y porta auf le calcul de l'Eclipfe de Lune , qui devoit avoir lieu le premier Décembre 1732 Cette maniere de prévoir & de tracer l'avenir, qui, pour un Aftronome formé , n’eft ‘qu ’un fujet d'ennui , caufe au moment de Dee nent à celui qui en fait le premier eflai , une forte de Éhbos & d'orgueil intérieur , qui ne peuvent être fentis & bien appréciés que par ceux qui fe font trouvés dans le même cas. Le domaine des Mathématiques eft très-étendu , & une fois fa provifion de Géométrie faite, ce font commu- nément les circonftances qui décident de la partie que l'on cultivera de préférence. M. Clapiés, Direfteur des travaux de la Province, & Membre de la Société des Sciences de Montpellier , étoit bon Aftronome ; il avoit beaucoup obfervé, & il avoit plufieurs fois calculé des éphémérides pour cette même ville. Les affaires de fa Direétion l’appeloient fouvent DE L'ACADÉMIÉ DE TOULOUSE. 137 fouvent à T'ouloufe. Il eut occafion de connoïtre le jeune Garipuy ; ; il vit avec plaifir que le goût vif & ardent qu 1] avoit pour laftronomie , étoit foutenu d’une géo- métrie pouflée déjà très-loin. Il l’exhorta à fuivre cette carriere, & à y Joindre la géométrie pratique , Comme un moyen plus sûr d’unir l’aifance & la fortune avec les connoiflances & les talens. Il lui laiffa même entre- voir qu’en fuivant cette route, 1] pourroit un jour lui fuccéder dans fa place. J’ajouterai que l’amitié qu’il con- çut des-lors pour lui ne s’eft pas démentie un inftant jufques à a fa mort. M. Clapiés fut préfent fans doute à la feconde Obfervation de l'Eclipfe de Lune du 3 Mai 1734, que M. Garipuy fit au jardin de M. de FAT CR Grefier des Etats. M. Garipuy avoit formé aufli une autre liaifon bien intéreflante avec M. Duffourc , qui fut admis dans la Société des Sciences le 3 Mars 1735, & qui vraifem- blablement auroit été un jour fon Édule, fi le zele de la Religion ne l’eût engagé dans une autre carriere qui réclame l’homme tout entier , parce qu'on ne peut y obtenir de vrais fuccès pour nu pour les autres, qu'autant que le cœur y feconde les efforts de l’efprit. M. Duflourc embrafla l’état Eccléfiaftique, fut nommé a une Cure dans le Vivarais, fe confacra aux Mifions, & mourut jeune, en fuivant avec ardeur fes travaux apoñtoliques. Etprit lumineux , tête excellente & vrai- ment géométrique. Les fuites de cette liaifon ne pouvoient que tourner à linftruétion de l’un & de l’autre. Ils eurent le courage de fuivre enfeinble la lefture des neuf Livres des Sec- tions Coniques de la Hire. Très-peu de Géometres ont tenté cette entreprife ; M. d’Alembert convient , en Tome IL. 5 138 HI S-T:OFL RE parlant de cet Ouvrage, « que les démonftrations en » font très-longues , & pleines d'une fynthefe difficile » & embarraflee. » C'eft à-peu-près à cette époque que nos deux amis, aidés de M. Gleizes, firent faire un quart de cercle de bois de deux pieds & demi de rayon, muni d’un limbe de carton, qu'ils diviferent eux-mêmes, & avec lequel ils réuflirent à fixer la hauteur du pole; ils firent cette obfervation à la tour du rempart dans le mois de Fé- _vrier de l’année 1736. Je ne fuivrai pas plus loin M. Garipuy dans fa carriere aftronomique ; il l’a tracée lui- même dans un écrit imprimé à la tête du premier volume de nos Mémoires. On y verra les travaux qui nous ont été communs, à partir de la fin de 1748 , ou je com- mençai d’obferver; j'ajouterai feulement qu’il étoit ex- cellent & très-exa@ Obfervateur, fur-tout très-fertile en reflources dans un art où ce befoin fe répete fouvent; il connoifloit d’ailleurs & fe fervoit fupérieurement des inftrumens. Notre Académicien fit un voyage à Paris en 1740. Il étoit déjà très-avancé dans le calcul différentiel & intégral, qu'il manioit avec beaucoup d’adrefle & de facilité, & il avoit acquis une connoiflance profonde des principes d'optique , & des théories aftronomiques ; il fe lia particulierement dans ce voyage avec MM. Clairault, Maupertuis , Caflini, Bouguer & le Monier; celui-ci le fit nommer par l’Académie des Sciences, fon Correfpondant, le 12 Mars 1740. C'eft alors que je fis une connoiflance plus intime avec lui. Tous les Membres de cette célebre Compagnie fai- foient le plus grand cas de M. Garipuy. La plupart m'ont dit fouvent depuis, que fans les devoirs mului- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 139 phés de fes places, ils ne doutoient pas qu'il n’eût tenu par fes Ouvrages un des premiers rangs parmi les grands Géometres du fiecle. C’eft dommage qu'il nait rien publié , qu’on n’ait même rien trouvé dans fes papiers de relatif à cet objet. M. Clapiés étant mort en Janvier 1741, la direétion des travaux publics de la Province, dont il jouifloit feul , fut partagée entre MM. Carney , Pitot & Garipuy. La Sénéchaultée de Touloufe fut donnée à ce dernier. Jufques à cette époque , aflidu à nos affemblées, exa à remplir fa tâche académique, fuivant les Obferva- tions Aftronomiques » autant que pouvoit le lui per- mettre le petit nombre d’inftrumens qu’il avoit, nous n'avons eu à le confidérer que comme NA Rn. Déformais ce ne fera gueres que le Direfteur des tra- vaux dont j'aurai à vous entretenir. Obligé à des voya- ges , a des abfences, à des vérifications , nous en Jouimes peu ; l’aftronomie fut forcément abandonnée ; il ne la reprit qu'un moment en 1750 , où nous fimes enfemble , avec le quart de cercle que l'Académie venoit d'acquérir de la fucceflion de M. l'Abbé de Ribaute, les Obfervations correfpondantes à celles que M. PAbbé de Lacaille étoit allé faire au Cap de bonne Efpérance, M. Carney étant mort le 22 Novembre 1752, M. Garipuy pañla à la Sénéchauflée de Cons Il fut obligé de prendre une maifon à Narbonne, des y tranfporter avec fa famille, ce qui fufpendit pour quel- ques années fes travaux aflronomiques : fes inftrumens , ainfi que ceux de l'Académie , refterent oïfifs jufques en époque à laquelle il finit fa maifon , qu'il avoit commencé à rebatir en 1772; c’eft alors que fon fils, dont nous regretons aufli la perte, fut nommé , {ur la 140 HY'E ST ONME démiflion de fon pere, à fa place de Direéteur des tra- vaux. Cet événement ramena M. Garipuy dans fa patrie, & le rendit à l'Académie. Ses abfences fe bornerent depuis aux voyages annuels à Montpellier , dans le temps des Etats, & à quelques vérifications occafion- nées par la nouvelle commiflion de Direfteur des ou- vrages de la Garonne , dont il avoit été chargé le 2 Mars 1776. C'eft au loifir dont il a joui à cette époque , que la Ville doit ce magnifique & fuperbe Obfervatoire, qu'il fit élever dans fa maïfon, qu'il munit de nombreux inftrumens, au choix defquels avoit préfidé le favoir & le goût; que les étrangers s’'emprefloient d'aller vifiter comme un monument digne de leur curiofité , & qu’en- fin la fagefle & la générofité des Etats ont mis à l'abri de la faulx du temps, en l’acquérant de fes héritiers pour le conferver à l'Académie. Des étangs dont M. Garipuy avoit fait 'acquifition , & qu'il vouloit deflécher , l’engagerent à faire avec fon fils un voyage en Hollande : c’eft chez un Peuple perpétuellement occupé , non-feulement à fe défendre des eaux, mais encore à leur ravir fans cefle du terrain pour l’urilifer, que l’art de deflécher les marais doit être le mieux connu. Car le befoin eft toujours la mefure des progrès de l’induftrie. Parmi les connoiflancesutilesqu'ilrapporta de ce voya- ge ,nous compterons la Vis d'Archimede, qu’il a fait con- noître le premier à Touloufe, ou dumoins dont il renou- vela l'ufage; car M. Abeille s’en étoit fervi lors de la conf- truétion de la Digue du Bazacle. Cette machine hydrau- lique, connue par le nom du fameux Géometre Grec , fon Inventeur , eft aufli fimple qu’elle eft utile, pour DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. rar cpuifer l'eau à de médiocres profondeurs ; mais ce qui doit paroître bien étonnant, c’eft qu'après 2000 ans de la date de fon invention , fa théorie foit encore à peine foupçonnée. Le celebre M. Euler , dans un Mé- moire qu'il a publié fur ce fujet , dans le cinquieme volume des nouveaux Commentaires de l’Académie de St. Pétersbourg , en marque ainfi fa furprife : « Quoique » la Vis d’Archimede , dit-il, foit très-connue , que » fon ufage foit très-fréquent, nous fommes cependant » forcés d’avouer que fa théorie eft encore fort cachée , » & qu'on n’a qu'une notion fort vague, tant de la » maniere dont elle procure lafcenfion de l’eau, que » de l’évaluation des forces néceflaires pour produire » cet eflet, » Notre Académicien en avoit porté un modele, & d’après fa direétion , les fieurs Touroude & Caftets en firent plufieurs qui ont été de la plus grande utilité lors de la conftru@tion du Canal de St: Pierre. L'économie des bras & du temps qu’elles procurerent en cette oc- cafion , eft un bienfait dont on lui fut redevable. Les ouvrages que M. Garipuy a fait exécuter dans la Province comme Direfteur des travaux , n’apparte- nant pas direftement à l'Académie , on en réferve pour une autre occafion le détail & l’énumération telle qu’elle a été donnée par M. Ducros fon neveu & fon Eleve. Je ne manquerai pas de faire remarquer qu’on peut regar- der en quelque forte M. Garipuy comme un des Fon- dateurs de notre Société, qui ne datoit que de dix ans, lorfqu'il y fut admis; qu'il feconda avec la plus vive ardeur les efforts généreux de fes Confreres, pour ob- tenir les Lettres Patentes qui l'érigerent en Académie, 142 HT SG OMR & qu'il fut toujours tres-jaloux de fa gloire & du mai: tien de fes privileges. M. Garipuy parloit avec beaucoup de précifion & de clarté. Sa converfation étoit intéreffante & folide, Mais accoutumé à cette reétitude géométrique qui ne permet pas le plus léger facrifice des vérités qu’elle préfente, il y tenoit peut- être trop dans les affaires de la vie civile , dans les fimples difcuflions de la fociété, où l’art de ramener l’apinion contraire confifte bien plus à perfuader qu'à convaincre. Cette fermeté n’était ce- pendant jamais qu'une fuite de fa bonne foi. Il avoit appris l'Anglois pour pouvoir lire le Traité des Fluxions de Maclaurin, & l'Optique de Smith , qui n'avoient pas été traduits à cette époque. Le premier de ces Ouvrages , Vraiment original , n'étoit qu'à la portée d’un petit nombre de Comes Il avoit été compofé par fon Auteur, pour juftifier la méthode des Fluxions de Newton ,' & la démontrer à la maniere rigoureufe des anciens: M. Garipuy le lut , létudia ; l'entendit , & cette le@ture ne lui laifla plus rien à acquérir de la Géométrie fublime des modernes. C’eft dans le fecond , moins difficile à fuivre , qu'il fe rendit familiers les principes d'Optique qu'il avoit finguliere- ment préfens , & qu’il appliqua enfuite avec la plus grande facilité à la théorie des lunettes achromatiques. M. Garipuy étoit férieux » grave & appliqué. Toute difipation , tout SLEnenE même qui ne s’accordoit as avec ce caraétere , lui étoit ablolument étranger, Î n'alloit jamais au Speftacle ; il ne jouoit à aucun jeu de cartes , & ne féquentoir gueres ce qu'on appelle le monde, où les prévenances que l’on reçoit ne font DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. +43 prefque jamais qu’en raifon du goût que l’on a pour cet amufement. Les échecs étoient le feul ; jeu, fi c'en eft un, qu'il fe permit. L'application qu'il exige , les com- ou varices & profondes qu'il préfente, & l'attrait piquant de ne devoir qu’à foi le fuccès qu’on y obtient, le lui fufoient regarder comme une forte d'occupation. Îl n’y étoit cependant pas très-fort. C’eft que , felon un des plus grands Philofophes de ce fiecle , que j'ai déjà cité, « les combinaifons des échecs » quoiqu “elles puiflent » être déterminées par le calcul, n’ont, dans la pra- » tique , aucune liaifon avec les sniobi aan géomé- » triques. » La probité la plus exa@te , le défintérefflement le plus fevere , formoient le fonds AAA NOSRTNE LR VE Garipuy. Chargé par les devoirs de fa place, de déterminer, d’éva- luer 1 facrifices que la chofe publique exige de la propriété privée , en faveur des ouvrages dont l'utilité eft générale , nul de ces moyens qui influent fi fré- quemment fur le commun des hommes , la follicitation, le crédit , l'intérêt | pas même l'amitié, n’agiterent ja- mais la balance qu *l tenoit entre l’Adminiftration & le Particulier. Modele des Direfteurs des Travaux Publics, par fon zele , fes connoiffances , fon génie, fes talens, il le fut 2er par la pureté de fes vues, la netteté de fes devis , la franchife & la loyauté de fes rapports. Il eut l'art fi difficile de concilier prefque toujours , fans récla- mation & fans murmure , & le dédommagement des Propriétaires , & le bénéfice des Entrepreneurs , avec le ménagement des fonds publics. Le temps dont M. Garipuy pouvoit difpofer, malgré les plus grandes occupations , (il en refte toujours à 144 HT s Tour WE ceux qui, comme lui, ont fu de bonne heure fe ga- rantir des pafons , & s’abftenir des amufemens inutiles ) il l'employoit à lire les Géometres anciens & modernes; &c à cet égard , fon érudition étoit prodigieufe ; 1l la déployoit fans oftentation, dans l’occafion feulement, & dans fes converfations particulieres avec fes amis. Depuis la démifion volontaire qu'il avoit faite de fa place de Direéteur des Travaux de la Sénéchauflée de Carcaflonne , en faveur de fon fils , il étoit devenu plus {édentaire , plus aflidu à P'Académie , & à fuivre des obfervations aftronomiques. Les voyages le fatiguoient; il avoit une incommodité qui fe renouveloit toutes les fois qu'il alloit en voiture; 1l paroïfloit néanmoins jouir d’une bonne fanté , à laquelle fa fobriére & fa maniere de vivre très-réglée ne contribuoient pas peu. Il aflifta à notre féance du 21 Mars 1782 , qui précédoit immé- diatement nos vacances de Pâques ; nous étions bien loin de prévoir que nous aurions le malheur de le perdre avant le 11 Avril, jour où nous devions nous raflem- bler. La Suette, épidémie funefte, qui efraya jufqu’aux Médecins, & en égara quelques-uns , que l'on força d’être cruelle, mais qui n’auroit pas même été une ma- ladie , fi on n'eut point fongé a la foigner , commençoit à étendre fes ravages. M. Garipuy en fut atteint un des premiers, le jeudi 28 Mars ; & malgré les foins conftans d'un Médecin habile , dont le zele étoit encore animé par l'amitié , il fuccomba le 2 Avril, feconde fête de Pâques, après avoir demandé & recu avec la plus grande édification les derniers fecours de la Religion; il en avoit toujours refpeété les grandes vérités. Cette tête forte, fi févere & fi rigoureufe dans l'examen des motifs de crédibilité DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 148 crédibilité ordinaires, avoit toujours diftingué les objets que l’Auteur de la nature a abandonnés a notre difcufion, de ceux dont il s’eft réfervé le myftere, & qu'il a finie plement propofés à notre foi. Il a laiflé de fon mariage avec Dame Therefe de Boé, deux filles & un fils. Les deux filles font entrées dans cette Société libre de Vierges Chrétiennes , qui fe con- facrent volontairement à l'éducation des jeunes perfonnes de leur fexe , & dont l’Inftitut fimple & modefte n’eft défigné que par le nom de famille de celle d’entre elles qu’elles jugent à propos de choïfir, & qui ne connoiffent d’autres liens que ceux dont la religion & la vertu atta- chent les uns aux autres, des cœurs émus d’un défir commun de faire le bien. Le fils, notre Confrere, nous a été enlevé, par la même maladie, cinquante jours après la mort de fon pere , lorfque nous nous livrions à la douce efpérance qu’il en répareroit la perte par fon mé- rite & fes talens ; ce nouveau malheur a mis le comble à notre affiétion & à nos regrets. M. Garipuy , qui a fait le fujet de cet éloge , étoit auffi de l'Académie des Arts de cette Ville, & de la Société Royale des Sciences de Montpellier. Il avoit été Capitoul en 176$ , député aux Etats de 1768, & compris cette même année dans la députation de la préfentation du cahier à la Cour. Ïl avoit refufe, lors de fon voyage en Hollande , des propoñitions très-avantageufes pour pañler au fervice d’une Puiflance étrangere. Du moment qu’il a été employé dans les Travaux de la Province, jufqu’à fa mort, 1l n’a pas ceflé un inftant de jouir de l’eftime & de la confiance des Chefs qui ont Tome IT. T 146 HT ST (0 r RE) ee. dirigé fon Adminiftration. M. Dillon fur-tout, Arche- vêque de Narbonne aëtuel , lui a accordé l'intimité la plus honorable & la plus flatteufe ; cette diftin@tion de la part d’un Prélat , dont le génie, les lumieres , l'amour du bien , & le difcernement des hommes , font avoués par la reconnoiflance & le fuffrage unanime des Habi- tans de cette Province , fait bien mieux l’éloge de M. Garipuy , que tout ce que mes foibles expreflions en ont pu dire. 4 MÉMOIRES TIRÉS DES REGISTRES DE L'ACADEÉMIE, Gun ay 4 A Lis 08 CR ÉNTL CE) AL | 17 np Min nee l l # Pr jé PAT Mrs L La … ; lé dd M l TA o "ra ce) vs PE Ê ep ah. RTL nf # MER EN: Es. n DONNE LA ar Er dl at NE ol L 'L ©: PA . MAL ! ve Fr nm. | ar No TH a pres DE L’ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, INSCRIPTIONS ET BELLES LETTRES | DB OU BOUT 0 E. MÉMOIRE SUR LA JAUGE DES TONNEAUX DIEM ANRT ER DIE Te ONU OUULSLE: €: #, Msn LES CAPITOULS avoient cru Lufe s Sep- devoir adopter l’année derniere, à la place de l’ancienne "ie 1754 Jauge des Tonneaux, une nouvelle Jauge qui leur avoit été préfentée, comme plus exaëte & plus commode ; mais cette. nouvelle mefure ayant depuis excité les Tome IT, 2 ME M'O t'RES réclamations de quelques Jaugeurs , & notamment du Sr. Dechamps, qui a prétendu qu'elle étoit préjudiciable aux Vendeurs , ces Magiftrats ont prié l'Académie de les fixer fur la préférence de l’une ou de l’autre de ces deux Jauges. Cette Compagnie s’eft empreflée derépondre à cette invitation intéreflante, & a nommé Commiffaires pour procéder à cetexamen, MM. Garipuy , Puymaurin, Darquier, le Pere F ontenilles & l'Abbé de Sapte, qui, après avoir fini leurs opérations , ont remis le rapport fuivant. La mefure des liquides à Touloufe, eft le péga. Nous n'avons trouvé à l'Hôtel de Ville qu'une matrice pour déterminer la grandeur de cette mefure. Elle eft de laiton, & ne contient que le demi-péga ; fa forme eft à peu-près celle d’un cône tronqué , dont la bafe fait le fond. Elle porte l’ empreinte des Armes de la Ville; il y a apparence qu’elle a été faite en l’année 1574, parce que cette date y eft gravée en gros caraëteres. On y lit auffi une feconde date écrite en caraéteres beaucoup plus menus, & poñté- rieure à la premiere : c’eft celle de l’année 1608. I ya à côté un écuflon, autour duquel eft écrit, matrice; mais les deux premieres lettres de ce mot font Éites. ‘auf bien qu’une partie de l’écuflon. Notre premier foin a été de connoître exa@tement la valeur de cette mefure. Le peu de régularité de fa forme nous a empêchés de profiter de la méthode la plus direéte , qui étoit de prendre les dimenfions de ce folide pour en connoître la capacité. Au défaut de cette méthode , nous en avons employé deux autres qui nous ont donné fenfiblement le même réfultat. Nous avons fait faire un vafe de fer blanc, le plus exaétement cylindrique qu'il a été pofible , & d’une DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 3 capacité parfaitement égale à celle de la matrice; ce que nous avons vérifié plufieurs fois avec beaucoup de foin. Nous avons pris les dimenfions de notre nouvelle mefure fur une échelle divifée en pouces & en centiemes de pouce du pied de Roi, par le fieur Eanglois. Le diametre intérieur de ce cylindre s’eft trouvé de 3. 71 pouces, & fa hauteur de 7. 38$ pouces; ce qui donne 107. 68 pouces cylindriques pour la grandeur du demi-péga, & 203. 36 pouces pour le péga, qui valent 159.7 pouces cubes auf du pied de Roi. Quelques précautions que nous euflions prifes en prenant ces mefures , nous avons été bien aife d’avoir une autre preuve de leur exaétitude. Nous avons employé .le poids ; à cet eflet , nous avons fait pefer en notre préfence, par le fieur Laporte, Affineur Juré de la Ville, le demi-péga plein d’eau : le poids de cette eau, déduétion faite de celui du vafe, a été de trois livres trois onces quatre gros, douze grains, poids de marc, en prenant le milieu entre deux opérations qui ne done que de douze grains. Or le poids d’un pied cube d’eau eft de foixante-neuf livres douze onces, poids de marc, en prenant un moyen entre toutes les de qui ont été données par divers Membres de l’Académie des Sciences de Paris : donc , fuivant le rapport du poids d’eau contenue dans notre vafe, avec celui du pied cube d’eau, le demi-péga contient 79. 77 pouces cubes pied de 2100 & le péga 159. $ pouces cubes ; & le milieu entre ces deux déterminations , dont la difiérence eft bien peu de chofe, fixe le péga : 159. 6 pouces cubes, ou à 203. 2 pouces cylindriques du pied de Roi. La détermination que nous venons de donner au péga, met cette mefure, à l'avenir, hors de danger de toute 4 MÉMOIRES akération , quand même on viendroit à perdre ou à falfifier toutes les mefures aétuelles de cette efpece. La longueur du pied de Roi étant déterminée d’une maniere invariable par celle du pendule à fecondes , il fera toujours facile de faire un vafe , dont la capacité foit égale à celle du péga que nous venons de fixer ; mais pour rendre ce moyen encore plus aifé aux Habitans de cette Ville, qui fe fervent de la canne & du pan, au lieu de la toife & du pied , nous avons deter- miné aufli la grandeur du péga en pouces de notre canne. Nous avions befoin pour cela de connoitre le rapport de la canne à la toile ; nous y fommes parvenus , en comparant l’étalon de la toife qui appartient à l’Aca- démie, & qui a été fait exaétement fur celui du Châtelet de Paris, avec ceux de la canne qui font à l'Hôtel de Ville. Nous avons trouvé deux étalons de la canne : le premier, qui contient cette mefure en entier, eft fcellé au pilier du grand Confiftoire; le fecond, qui ne contient que la demi-canne, eft attaché au tableau qui eft dans le cabinet de la Chambre Syndicale. La canne du Confiftoire excede d’un cinquieme de ligne , pied de Roi, le double de la demi-canne qui eft fur le tableau: différence aflez légere, mais que nous n'avons pas cru devoir négliger ; & comme la mefure qui eft dans le grand Confiftoire, eft plus grande, qu’elle paroït plus ancienne; qu'elle eft bien confervée, & qu’elle eft plus connue que les autres, nous l’avons choifie pour terme de comparaifon avec la toife. Il en réfulte que la canne de Touloufe contient cinq pieds fix pouces quatre lignes & un cinquieme de ligne de la toife ; ainfi la canne eft à la toife , exaétement comme 1327 eft à 1440 , à DÉ L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. s$ peu-près comme 47 eft à $1 ; ou ce qui approche un peu moins, comme 12 eft à 13. La canne étant divifée en 64 pouces, & la toife en 2 , le pouce de la canne eft à celui de la toife dans le rapport, compolé de 72.à 64, & de 1327 à 1440; c’eft-à-dire , que le pouce de la canne eft à celui de la toife , comme 1327 eft a 1280 , à peu-près comme 113 eft à 109 ; ou ce qui approche un peu moins, comme 28 eft à 27. Le pouce de la canne eft divifé en huit lignes, & celui de la toife en douze ; ainfi la ligne de la canne eft à celle de la toife , comme 3971 eft à 2560 , à peu-près comme 197 eft à 127 ; ou ce qui approche un peu moins, comme 31 eft à 20, ou enfin comme 14 eft à 9. IL fuit du rapport que nous venons d'établir entre le pouce de la canne & celui de la toife, que le demi-pépa contient 182. 4 pouces cylindriques, & 143. 3 pouces cubes de notre canne; ce qui fixe le péga de la maniere la plus commode pour les Habitans de cette Ville. Lorfque nous eûmes déterminé la capacité du péga , nous vérifiämes une Jauge de bois qui a fervi de modele à la matrice de fer qui fut faite l’année derniere ; & nous n'avons point fait ufage de cette matrice de fer, parce que l’on n’y a point fuivi exaëtement les divifions du modele. Ce modele, ainfi que les anciennes Jauges de cette Ville, a deux échelles pythométriques, dont la premiere fert à mefurer la longueur , & la feconde les diametres des Tonneaux. Les premieres parties de ces deux échelles marquent, l'une le diametre, & l’autre Ja hauteur du cylindre , qui contient exa@tement un péga; l'échelle des longueurs eft divifée en parties égales; celle 6 MÉMOIRES des diametres eft divifée en parties décroiflantes, & les nombres qui font fur les divifions de celle-ci, expriment la furface des cercles dont elle mefure les diametres. Nous mefurämes avec foin la premiere partie de chacune de ces deux échelles ; celle des diametres a 7. 85 pouces du pied de Roi, & celle des longueurs 3. 303 pouces. Le produit du quarré du premier de ces nombres, par le fecond, donne 203. ÿ pouces cylindri- ques pour la valeur du péga, ce qui n’excede que de de pouce cylindrique ; ce à quoi nous avons fixé cette mefure , & s'accorde aflez à la fuppofition que le péga {oit en nombres ronds, ou 160 pouces cubes du pied de Roi , ou 144 pouces cubes de la canne de Touloufe : ce qu’on peut bien admettre dans la pratique, fans aucune erreur fenfible. Nous avons vérifié aufli les autres divifions de la même Jauge , & nous avons trouvé qu’elles ont été faites exaËtement dans les principes fuivant lefquels ces échelles ont été conftruites. Ilne fuffit pas d’avoir juftifié par nos mefures la Jauge dont on fe plaignoit , 1l falloit encore reconnoitre fi dans la maniere d'en faire ufage, il ne fe glifloit point quelque faute qui donnût fujet à des plaintes légitimes, quoiqu’on eût attribué mal-à-propos à une faufle divifion l'erreur qu’elle produifoit. Pour cela , nous appelâmes le fieur Dechamps, l’un des Jaugeurs Jurés de cette Ville, qui avoit porté les premieres plaintes fur la nouvelle Jauge. Nous lui fimes jauger devant nous trois Tonneaux diflérens avec cette Jauge , & avec une Jauge plus ancienne , faite d’après les mefures rapportées dans l'arithmétique de Capdeville , & dont la plupart des Jaugeurs fe fervoient avant le reglement ordonné l’année DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 7 derniere. La premiere partie de l'échelle des diametres fur cette derniere Jauge , eft de 8. 30 pouces pied de Roi, & la premiere partie de l'échelle des longueurs eft de 2. 88 pouces ; ce qui ne donne que 198 pouces cylindriques du pied de Roi pour la valeur du péga , - 2 pouces de moins que ce que nous avons fixé ci-deflus d’après des mefures très-exaétes. Le fieur Dechamps jaugea chacun des trois Fe te avec ces deux Jauges. Sa pratique, femblable à celle de tous fes Confreres, eft de prendre le diamerre du Tonneau au bondon, & celui des bouts ; d'ajouter les nombres qui répondent à ces deux diametres ; d’en prendre la moitié pour la valeur du cercle qui exprime la groffeur moyenne du Tonneau , & de multiplier cette furface moyenne par la longueur du Tonneau. Cette pratique feroit exaéte, fi la courbure des douves étoit celle d’une parabole, & fi on pouvoit mefurer le diamétre du bout aufli exaftement que celui du bondon; mais on ne mefure ce diametre qu’en dehors du fond du Tonneau, au lieu qu'il faudroit le prendre en dedans, où il eft toujours plus grand. D'ailleurs , la courbure des douves tient un milieu entre celle de l’ellipfe & celle de la parabole , fur-tout dès que les Tonneaux ont beaucoup de bouge, & par-là ils contiennent plus que s'ils étoient des paraboloïdes tronqués. Ces deux confidérations font voir que la pratique des Jaugeurs de cette Ville doit diminuer la capacité des Tonneaux, & fur-tout de ceux qui ont beaucoup de bouge; ce > qui s'accorde avec nos expériences. Nous remplimes d’eau l'un des Tonneaux , en la mefurant avec beaucoup de foin. Notre mefure contenoit exaétement fix pégas, & fon goulot étoit fort étroit ; 8 | MÉMOIRES en forte que , la rempliflant un peu plus ou un peu moins, on ne pouvoit pas commettre une erreur fenfible. Nous ajoutâmes aufli à chaque mefure la petite quantité d’eau qu'il falloit pour la mouiller, & qui y reftoit en vuidant le furplus. Ce premier Tonneau contint 110. 4 pégas. Nous le pesâmes ; celui de l’eau , déduétion faite de la futaille, fut de 710 liv. 11 onces poids de marc; & ce poids divifé par celui du péga, qui eft de 6 Liv. 7 onces : de gros , le quintal donna pour la contenance du Tonneau 110. 4 pégas, exaétement la même chofe que ce que nous avons trouvé «par la mefure. La nouvelle Jauge , fuivant la pratique ordinaire, ne donnoit à ce Tonneau que 106. 2 pégas , & celle de Capdeville , 109. 9 pégas. L'eau du fecond Tonneau pefa 699 livres 9 onces,; ainfi il contenoit 108.6 pégas. Par la nouvelle Jauge, on ne trouve que 105. 4 pégas, & par l’ancienne, 108. 2 : pégas. L'eau du troifieme Tonneau pefa 477 liv. 13 onces; ainfiilcontenoit 73.6 pégas. La nouvelle Jauge ne donna que 72. 7 pégas, & l’ancienne donna 74. 8 pépas. e premier Tonneau eft celui qui a le plus de bouge; le diametre du bondon eft à celui du fond dans le rapport de 6 à $. Ceux du fecond Tonneau font prefque dans le même rapport, & ceux du troifieme ne font entre eux que comme 9 eft à 8. Ces faits juftifient la premiere des réflexions que nous avons faite ci-devant , & ils font voir qu’en fe fervant d’une Jauge exaétement divifée , on doit toujours trouver quelque chofe de moins par la pratique ordinaire de nos Jaugeurs, parce qu’en mefurant le diametre du bout du Tonneau par dehors, on prend une mefure trop courte. Il DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 9 Il nous reftoit à vérifier fi toute l'erreur du jaugeage venoit uniquement de la faufle mefure du diametre des bouts, & fi la figure du Tonneau n’y contribuoit pas aufli. Pour éclaircir ce doute, nous avons fait défoncer lestrois Tonneaux, pour prendre en dedans les dimenfions vraies des bouts. Avec ces diametres, la nouvelle Jauge a donné pour le premier Tonneau 108. 1 pégas; pour le fecond, 106. 6 pégas , & pour le troifieme, 74: 3 pégas ; & l'ancienne Jauge a donné pour le premier, I11. 4 pégas; pour le fecond, 109. $ pégas, & pour le troifieme , 76. 3 pégas : d’où il fuit, 1°. que dès que les Tonneaux ont un bouge un peu confidérable , tels que le premier & le fecond , leur renflement ou leur capacité eft plus grande que celle d’un paraboloïde , avec les mêmes diametres. 2°, Que lorfque le bouge eft petit, comme celui du troifieme Tonneau, la courbure des douves eft {enfible- ment celle d’une parabole , & même un peu moindre. 3°. Que fi on mefure exaétement les diametres des Tonneaux, la Jauge de Capdeville leur donne une trop grande capacité , même à ceux qui ont beaucoup de bouge, quoiqu’on emploie Ja méthode des Jaugeurs, qui en diminue la contenance; ce qui vient de ce que, dans les divifions de cette Jauge, on a fuppofé le péga trop petit, ainfi que nous l'avons vu ci-devant. Nous venons de faire voir les défauts de la pratique ordinaire des Jaugeurs : nôus avions montré c1-devant ceux de leur ancienne Jauge, & l’exaétitude de la nou- velle ; 1l nous refte à donner l’ufage de cette nouvelle Jauge , pour mefurerexaétement toute forte de Tonneaux. Le peu de connoiffances que les Jaugeurs ont de la Géométrie, & de la néceflité qu'il y a d’ailleurs de leur Tome IT. 2 10 MÉMOIRES donner une méthode courte pour une pratique qui doit être fi fouvent répétée, nous oblige de nous écarter un peu ici de la rigueur géométrique, qui exigeroit que l’on vérifiät pour chaque Tonneau le genre de la courbure de fes douves. Nous fuppoferons qu’elle tient le milieu entre l’ellipfe & la parabole ; ce qui réfulte des mefures que nous avons prifes fur le premier & fur le fecond Tonneau , & ne peut pas caufer une erreur confidérable fur ceux de la troifieme efpece , qui font d’ailleurs les moins en ufage. Si les Tonneaux étoient paraboloïdes , il faudroit, pour avoir leur grofleur moyenne, ajouter le cercle du bondon à celui des bouts, & prendre la moitie de la fomme, fuivant la pratique des Jaugeurs, qui ne donne pas aflez, comme nous venons de le voir. Si au contraire les Tonneaux*étoient elliploïdes, 1l faudroit ajouter le double du cercle du bondon à celui des bouts, & prendre le tiers de la fomme , ce qui donneroit trop. Nous prendrons un milieu entre ces deux figures extrêmes ; & pour cela , nous ajouterons le triple du cercle du bondon au double du cercle des bouts, & nous prendrons le cinquieme de la fomme pour la groffeur moyenne du Tonneau, qu'il ne s’agit plus que de multiplier par fa longueur, pour en connoitre la capacité. On trouve par cette pratique 109. 7 pégas pour le premier Tonneau, 108. 7 pégas pour le fecond , & 74. 4 pègas pour le troifieme ; ce qui ne diflere de leur vraie contenance que de - de péga par défaut pour le premier Tonneau, de : par excès pour le fecond, & de -: aufli par excès pour le troifieme. Ces différences, qui font les plus grandes dans le premier & dans le troifieme Tonneaux, dont la forme eft moins en ufage, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. xx s'y trouvent en fens contraire, & il n’y en a prefque pas dans le fecond, qui eft de la forme la plus commune; d’où il faut conclure qu’on ne fauroit attendre plus d’exaétitude d'une methode générale, & à la portée des Jaugeurs. Nous ajouterons ici un exemple , foit pour rendre plus fenfble la méthode que nous propofons, foit pour faire voir la maniere la plus aifée d’en faire le calcul. Opération detaillee. P Diametre au bondon ti" urs 750. Diametre au premier bout. . 90. 180. Diametre au econd bout... 89. 178. 178. np —— Opération réduite. | CAS 750. Foo Mr 80, (90 ETS. IIOS8.OUIII. nn Honneur en ed t00 —— | "999. RCE =: ; Contenance . 110. ou 109. 89. er) 12 MÉMOIRES On voit par l'exemple ci-deflus, la maniere de rendre le calcul plus facile , en réduifant la divifion par cinq, a la feule fuppreflion d'un chiffre. Pour cela , il faut, 1°. écrire le nombre qui répond au diametre du bondon, & le multiplier par 6 ; 2°. écrire le diametre qui répond à chacun des bouts, & le doubler ; 3°. ajouter ces trois nombres, en négligeant le dernier chiffre, ce qui donnera la grofleur moyenne du Tonneau ; 4°. écrire fa longueur fous la groffeur moyenne , & faire la multiplication ; 5°. retrancher deux chifires du produit, les autres mar- queront le nombre de pégas que le Tonneau contient. Lorfque nous eumes befoin de déterminer le rapport de la canne à la toife , nous nous rendimes à l'Hôtel de Ville pour y vérifier les étalons de ces mefures. Nous avons rapporté ci-deflus ce qui concerne la canne. Il nous refte à dire que l’étalon de la toife qui eft dans le cabinet de la Chambre Syndicale, eft plus long d'environ cinq lignes que celui de l'Académie, qui a été fait avec beaucoup de foin fur l’étalon du Châtelet de Paris, & fur l’exattitude duquel on ne peut avoir de doute. Le défaut confidérable que nous avions trouvé dans l'étalon de la toife , nous engagea à vérifier ceux des autres mefures que nous étions à portée de voir ; & l'intérêt que le Public a à leur exa@titude, nous détermine à communiquer les défauts que nous y avons reconnus. La perche qui eff fcellée au pilier du grand Confiftoire, a de longueur 14 pans 7 pouces + de a canne attachée au même pilier ; au lieu que cet étalon ne devroit avoir que 14 pans. Cette plus grande longueur doit être cor- rigée , pour prévenir les erreurs qu elle peut caufer dans l'arpentage , & qui montent à environ dix perches quarrées fur chaque arpent. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 13 L’étalon du diametre de la pagelle , qui eft dans le cabinet de la Chambre Syndicale , a , à quatre pans trois pouces quatre lignes deux tiers , & le diametre de la demi-pagelle a trois pans un pouce. Ces mefures ne s'accordent pas entre elles ; la demi - pagelle eft plus petite que la moitié de la pagelle d'environ dix pouces quarrés. Mais ces mefures ont un défaut bien confidé- rable ; la pagelle même eft trop courte , relativement à l'Ordonnance du 1°. Août 1719. Suivant cette Ordon- nance , la pagelle doit contenir quatre pans en quarré ; cts » {eize pans quarrés ; ainfi, pour avoir un cerceau de la contenance de 5 pagelle , fon diametre doit être de 4 pans 4 pouces % de ligne, & le cerceau de la demi-pagelle doit avoir de bee 3 pans 1 pouce 4 lignes +, & de circonférence 10 pans 1 ligne :. Ces mefures font exaétes autant que la nature de la chofe le permet, 14 MÉMOIRES C0 NI EC T'UR ES SuR quelques fragmens d’Infcriprions Romaines découverts à Touloufe vers la fin de l’année 1782. Par M. DE MONTÉGUT. Lu de 23 Ï, E défir de feconder les vues patriotiques de lAca- Janvier 1785 Jémie, m'a porté, depuis quelques années, à recueillir avec foin tout ce qui peut fervir à faire connoître l’ancien état de cette Capitale des Teétofages fous l'Empire des Romains. Je lui ai déjà fait part de plufieurs monumens intéreflans qui ont été découverts dans cet efpace voifin des Récollets , qui portoit le nom de Fererra , & que j'ai prouvé avoir fervi de cimetiere , notamment fous le regne des premiers Empereurs. On y a trouvé depuis quelques fragmens d’Infcriptions Romaines , & un far- cophage de pierre, taillé groflierement, & fans aucune gravure ; un autre fragment d'Infcription a été trouvé dans une vigne à Vieille-Touloufe. J'ai examiné avec attention ces différens monumens, qui, par leur état de délabrement, ne peuvent être facilement expliqués, & fur lefquels je hafarderai quelques obfervations. Quand on ne peut {e flatter de parvenir à la découverte exaéte de la vérité, il faut fe borner à chercher le vraifemblable. Des conjeêtures plaufibles doivent , ce femble , être accueillies , & fubffter jufqu'a ce qu’elles aient été détruites par des preuves folides, ou par des conjeétures plus raifonnables. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. rs La premiere des Infcriptions trouvées au Fauxbourg des Récollets (1), confifte en un fragment de marbre blanc , qui forme à peu- près le tiers de la totalité. Les caracteres qu'on y voit font grands , bien tracés , & paroïflent € être du haut Empire. On voit à l'angle gauche de la pierre une cavité de forme ronde , au fond de laquelle eft un trou quarré qui traverfe d’outre en outre; ce qui annonce que le marbre a été attaché à quelque mur avec de gros clous. On y lit: FE VOLT QUAESTOR. AD ulVIR. SIBI ET Il paroït qu’on peut expliquer ainfi cette Infcription, relativement aux caraëteres qui exiftent, & en fuppléant ceux qui ont été détruits par le temps. Fulvius Volteius | Queæftor ad frumentum emundum Triumvir, fébi & fais pofrerifque eorurn. Si par PAPAS j ’avois eu le bonheur de rencontrer la vraie ex plication de ce monument, il nous apprendroit, tout mutilé qu'il eft, qu'il y avoit à Touloufe un Quefteur Romain , appelé Fulvius Voltéius ; que cet Officier , dont , au rapport des Hiftoriens , la dignité ne cédoit qu'a le de Préteur , étoit en même-temps un des Commiflaires prépolés par le Sénat pour l'achat des grains deftinés à la nourriture du peuple, &c qui étoient payés des demiers publics. Les mêmes Hiftoriens nous difent que le Quefteur, chargé de la recette des revenus de l'Etat, l’étoit auffi du recouvrement des grains. Comme QG) Elle cft dans le cabinet de M. le Chevalier Rivals. 16 MÉMOIRES ce dernier objet étoit d’un détail très-étendu , 1l avoit deux Adjoints qui avoient le titre de Duumvirs pour l'achat des grains ; Duumvir ad frumentum emundum. On trouve cette qualité ainfi énoncée dans plufieurs Inferiptions rapportées par Gruther. Ces Duumvirs font repréfentés fur une médaille de la famille Calpurnia ; elle porte, d’un côté, la tête de Saturne , avec les noms Pifo & Cepio ; le revers repréfente ces deux Officiers aflis fur la chaife curule , avec ces mots, À D. FRU mentum EM undum , qui défignent leur fonétion. Dion nous apprend que les Duumvirs, prépofés pour l'achat & la difiribution des grains , avoient été établis par Augufte, & que pour parvenir à cet emploi, il falloit qu'ils euffent exercé la Préture cinq années auparavant : Juffitque ut fingulis annis duo viri qui ante quinguennium Preturam pi ei [jen frumento difribuendo unoquoque anno conflituerentur. Nous trouvons dans Vaillant que le Quefteur préfidoit à la diftribution des grains que les Duumvirs avoient achetés des deniers publics. Cétoit le Sénat qui les envoyoit dans les difiérentes Provinces de l’Empire. C’eft fans doute à raifon de cette aflociation du Quefteur avec les Duumvirs, que, dans Pinfeription que je rap- porte, le Quefteur Volréius prend la qualité de Triumvir pour l'achat des grains. Les Quefteurs étoient nommés par le Sénat, & envoyés dans les Provinces avec le Préteur; ils avoient, comme lui , les Liteurs & les FH Si le Préir étoit abfent , le Quefteur exerçoit toutes fes fonétions, & à fa mort il le fuppléoit, jufqu’a à l’arrivée de fon fuccefleur. L’exiftence d’un Quefteur à Touloufe, eft une des plus fortes preuves que l’on peut donner que cette Ville étoit la DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 17 la Capitale d’une Colonte, ou d’une Province Romaine, & en cette qualité, le lieu de la réfidence de fes Magiftrats. Quelqu'un de ces Pyrrhoniens, qui s’étudient moins à chercher la vérité , qu'à embarrafler les voies qui paroïflent pouvoir y conduire , & qui s’obftinent à refufer à Touloufe la gloire d’avoir été Colonie fous les Romains, prétendra peut-être que le Quefteur Voltéius étoit un étranger que le hafard avoit conduit dans cette Ville, où il mourut ; mais l’Infcription que je rapporte fait foi que cet Officier y étoit domicilié avec fa famille, & qu'il y acquit un tombeau pour lui & pour fa poltérité, Jibi € Juis. Une Infcription rapportée par Gruther , conftate l’exiftence d’une famille Voltéia établie à Touloufe. Ce Compilateur ne dit point où cette Infcription a été trouvée ; mais puifqu’elle a été confacrée à la mémoire d'un Touloufain, & qu’elle étoit placée fur fon tombeau, on peut préfumer que c’eft dans cette Ville qu’elle a été découverte. Elle eft conçue en ces termes : DIIS MANIBVS C.FABRICII. C.L. VOL. PROXIMI TOLOSENSIS C.FABRICIVS VICARIVS PATRONO.BENE MERENTI. FECIT IN FRONTE, P. VII. IN AGRO,. P. VIL Tome IL. C Page 930. 18 MÉMOIRES Cette Infcription eft dédiée aux manes de Caïus Fabricius, Touloufain, proche parent de Caïus Lucius Voltéius , par Caïus Fabricius fon affranchi , & fon Vicaire ou Intendant , en mémoire des bienfaits qu'il avoit reçus de fon Patron. Le tombeau avoit fept pieds de largeur , tant du chef que du côté des champs. En fuppofant que cette pierre ait été trouvée au cimetiere près St. Roch , à Touloufe , le tombeau de Fabricius ‘devoit être placé attenant le mur qui lui fervoit de clôture , le côté de la tête regardant la Ville, & celui des pieds la campagne. C’eft ainfi qu’étoit fitué un far- cophage qui a été découvert depuis peu au même lieu, que j'ai vu dans fon entier , & qui a été brifé par ja mal-adrefle des Ouvriers. Il avoit la forme de nos bieres; fa longueur étoit de fix pieds , fa largeur de trois, du côté de la tête, & de deux pieds à l’extrémite inférieure; fa hauteur de vingt pouces. Sa matiere eft une pierre blanche & molle, facile à brifer. Il étoit recouvert d’une pierre taillée en dos-d’âne , fans aucune Infcription , & contenoit un fquelette entier, parfaitement confervé. Les Ouvriersm’ontrapporté qu'au même lieu onavoit trouvé un marbre blanc de deux pieds en quarré, avec des lettres gravées ; que le Maitre qui les emploie , l'emporta chez lui avec d’autres pierres pareilles , & les fit fervir au fondement d’une muraille qu'il faifoit bâtir. C’eft ainfi que, par une malheureufe fatalité, nous avons èté privés de ces monumens précieux que le temps avoit épargnés, & qu'on ne retrouvera peut - être qu'après plufieurs fiecles , lorfque l’on rebätira le mur fous lequel ils ont été enterrés. Il devoit y avoir , attenant ce tombeau , un édifice confidérable & richement décoré, ainfi qu'on peut s’en DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 19 convaincre par des reftes de murailles que l’on y trouve, qui paroïflent de ftruéture Romaine , & par quelques morceaux de marbres précieux de toutes couleurs que J'y ai ramañlés. À en juger par leur forme quarrée ou triangulaire , & par leur peu d’épaifleur , ils doivent avoir fervi de pavé. On en a trouvé plufieurs charretées de même efpece, qui ont été jettés dans le chemin pour le rendre praticable. Un heureux hafard a cependant fauvé de la deftru@&ion quelques monumens intéreflans, dont je me propofe de faire part a l’Académie. Je me borne en ce moment à rapporter une [nfcription fépulcrale trouvée au même lieu , & qui fournit une nouvelle preuve que Touloufe étoit habitée par un Quefteur Romain ; elle eft ainfi conçue : DIIS. MAN. C. LVTATIVS TOL.QÆST. SIBI ET SVIS La famille Lutatia, d’origine Plébéienne, eft connue par l’'Hiftoire & par les médailles. Les marbres capitolins font mention de Caïus Lutatius, dont le pere & l’aïeul portoient aufli le nom de Caïus. Tite-Live parle du même Caïus, qui, étant Proconful Li. #:: lan $r2 de Rome , remporta une viétoire navale fur les Carthaginois. Patin rapporte une médaille d'argent Famil. Rom. frappée à l’occafion de cette viétoire... Eutrope fait le Liv.,p.77, détail d'une viétoire remportée par Caïus Lutatius ,** Conful , la vingt-troifieme année de la premiere guerre punique. Il fe mit enfuite à la tête d'une flotte de 20 MÉMOIRES 300 vaifleaux ; celle des Africains étoit de 400 voiles, Lutatius combattit vaillement, malgré une bleflure qu'il avoit reçue dans le combat précédent. Les Romains prirent aux Carthaginois 73 vaifleaux , en coulerent à fond 123 , & n’en perdirent que 12 ; ils tuerent aux ennemis 13000 hommes, firent 32000 prifonniers, & un butin immenfe. Cette défaite força les vaincus à demander la paix. On trouve dans Tite-Live un autre Caïus Lutatius, qui fut envoyé à Alexandrie pour renouveller l'alliance avec Ptolémée, l'an $80 de Rome. Il eft évident que lInfcription que l’on vient de découvrir appartenoit à un Quefteur de cette famille, qui réfidoit à Touloufe, & qui y fut enterré. Je crois pouvoir en fixer l'epoque au dernier fiecle de la République. Le dernier grand homme de ce nom , dont l’'Hiftoire fait mention , eft Quintus Lutatius Catulus , qui fut contemporain de minore as Pompée & de Céfar, & qui fut moins puiffant qu'eux, Emr.m.+ dit Crevier, parce qu'il étoit plus vertueux. L'Empereur Galba fe faifoit honneur de compter ce Héros au nombre de fes Ancêtres; il étoit aieul maternel de Memmia Achaïca , mere de Galba. Ptolémée parle de la Colonie de Touloufe ; Céfar dit qu’elle fut réduite en Province ; Pline la met au nombre des Villes Latines. Les Infcriptions que J'ai . rapportées ctablifent le rang qu’elle occupoit parmi ces Villes, puifqu’elles prouvent qu’elle étoit le lieu de la réfidence du Quefteur Romain. Pour donner une idée plus exaëéte de l’état de cette Ville célebre fous la domination des Romains, je crois néceffaire de remonter au premier temps de leur éta- bliffement dans les Gaules. Narbonne fut la premiere DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 2t Colonie qu'ils fonderent dans les pays qui compofent aujourd’hui le Languedoc. Quelques autres Villes, telles! L que Touloufe, Nimes, Beziers, jouirent dans 4 fuite du même honneur. Ces Colonies étoient compofées ou de Citoyens Romains qui venoient s’y fixer, attirés par le commerce & par la beauté du climat, ou de Vétérans des Légions, dont on récompenfoit les fervices, en leur donnant des terres conquifes. Les uns & les autres confervoient toujours leur ancien droit de Bourgeoifie Romaine , & leurs privileges furent bientôt rendus communs aux habitans du pays, avec lefquels ils étoient en quelque forte naturalifés. Ces Colons, dans la vue de confacrer leur attachement pour leur premiere patrie, s’emprefferent de conftruire dans les Provinces les mêmes édifices publics que l’on voyoit à Rome , tels qu’un Capitole, un Amphithéatre , un Cirque, des Termes, des Cours de Juftice , des Marchés, comme on peut en juger par ceux qui nous reftent de Narbonne , de Nimes & de Touloufe. Chaque Colonie fe gouvernoit par elle - même , & fuivant les Lois qui lui étoient propres. Il y avoit un Confeil compofé du Sénat & du Peuple, qui avoit l'autorité légiflative & le pouvoir de créer les Magiftrats. Les Sénateurs portoient le nom de Décurions; ils avoient droit de fufirage dans les éleétions: c’étoit parmi eux que l’on choififloit les Duumvirs, qui gouvernoient la Colonie à l’'inftar des Confuls de Rome, & fous l'autorité du Proconful envoyé par la République. Il y avoit aufh des IV, Virs, des VI. Virs Auguftales, des Pontifes, des Augures, de Flamines, des PERS des Ediles, des Quefteurs, des Cou Le Pouf ou le Préteur Romain préfidoit aux Affemblées appelées Conventus ; il les convoquoit , pour chaque Canton, Hifoire du angu. to. [4 D. 49 & uive 22 MÉMOIRES dans la Ville la plus confidérable. On y décidoit les différends des particuliers : les principaux du pays y afliftoient comme Juges, ou comme Avocats. Les Sen- tences de ces Tribunaux étoient fans appel. La partie Am. Mar- de la Province Narbonnoife, qui eft en-deçà du Rhône, «uRétoit partagée en trois Cantons , où l'on tenoit ces Tobf Ë Affemblées ou Conventus : c’étoient ceux de Narbonne, ñ de Touloufe & de Nimes. Tous ces faits font conitatés “par les Hiftoriens Latins , par les Ecrivains modernes & par les anciens Monumens. Fo.1,p.309. Plinenous apprend que de fon temps, les Touloufains, 14.1.3,h4 appelés Zolofaces , Tolofant , ou Tolofenfes | jouifloient du Droit Latin, & que leur Gouvernement étoit libre. : Touloufe, Capitale des Teétofages, fut mife au nombre des Villes alliées de la République , & les Romains y Neuf Gtablirent dans la fuite une Colonie, qui devint riche wasum. & puiflante (1). Dion. Frag. On lit dans les Fragmens de Dion, recueillis par M. Ba fe Valois , qu'en l'an 647 de Rome, Caflius Longinus ayant été défait par les Tigurins , les débris de l'armée Romaine fe renfermerent dans les principales Villes de la Province Narbonnoife. Touloufe étoit alors dans l'alliance de la République , & avoit confervé fon ancienne liberté , quoique fituée dans l'étendue de la Province Romaine ; elle avoit reçu les Soldats Romains autant pour fa propre défenfe , que pour celle de .la Province dont elle étoit frontiere. Les Cimbres & les Tigurins firent leurs eflorts pour gagner les Touloufains, & les engager à s'unir à eux pour éloigner un ennemi — (1) Suétone, vie de Galba, dit que ce Prince, avant d'être Empereur, avoit été Gouverneur d'Aquitaine ; qu’il avoit obligé en cette qualité les Fouloufains, & contratté amitié avec cux. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 23 puiffant, qui, tôt ou tard, les afferviroit ; ils les mena- cerent de leur faire fubir le même fort que les Romains venoient d’éprouver , & de leur faire payer chérement l'alliance qu'ils avoient contra@tée avec la République, s'ils perfiftoient à la favorifer. Les Touloufains, féduits ou intimidés , arrêterent tous les Romains qui FE trou- voient dans leur Ville. Quelques citoyens qui n’avoient point eu part à cette trahifon, firent offrir fecrettement a Cépion , Gouverneur de la Province , d'introduire pendant la nuit fes troupes dans Touloufe, & de l'aider a délivrer les prifonniers. Ce projet fut efleëtué ; Cépion s’empara de la Ville fans coup ferir , & foit pour fe venger de l’outrage fait aux Romains, foit pour fatisfaire {on avidité, 1l la livra au pillage. C’eft dans cette occafion qu'il s’'empara des tréfors confacrèés aux Dieux, dont la poffeffion lui devint fi funefte. Rien ne prouve mieux la liberté dont Touloufe jouifloit avant d’avoir reçu dans fon fein une Colonie Romaine, qu’un fait rapporté par Céfar dans fes Com- cigir. de mentaires, Où il dit qu'il fe fervit utilement des troupes Fe, Ga. 1 que cette Ville lui fournit pour la conquête des Gaules ; & que Craflus , qui faifoit la guerre aux Aquitains , Hifoire du demanda des troupes auxiliaires aux villes de Nine ne ANG & de Touloufe , qui lui donnerent leurs plus braves citoyens. C’eft en reconnoïffance des fervices rendus à l'Empire par les Touloufains , que Rome établit chez eux une Colonie. Une Infcriptionrapportée par Gruther, annonce Gruther, que Touloufe formoit une République particuliere , & 37:77 qu’elle étoit le lieu de la réfidence d'une Légion. On ÿ diftingue, parmi fes habitans, les naturels du pays & les Colons : Ci es & Incole. Peromne n'ignore que le mot Calep.&e. 24 MÉMOIRES incola défigne celui qui a établi fa demeure dans une Ville étrangere. Le mot lab: Tolofant , qui eft fans doute tronqué ou mal rendu, paroït défigner le Fauxbourg où la Colonie Romaine étoit établie | & qui devoit être au lieu où ef fitué le village de Vieille-Touloufe, ainfi que je létablirai dans la fuite de ce Mémoire (x). Ces deux clafles de Touloufains fe réunirent pour témoigner à M. Clodius , leur concitoyen , leur recon- noifflance, à raifon des fervices qu’il avoit rendus à leur République , en exerçant fucceflivement les fonétions de Duumvir, de Flamine & de Tribun de la quatrieme Légion Flavienne, Cette infcription eft ainfi conçue : M. CLODIO M. F. GAL. FLACCO II VIRO. BIS. FLA MINLTRIBVNO. MILITVM. LEG. Inl FLAVIAE. VIRO. PRES TANTISSIMO. CIVI OPTIMO.OB.PLVRIMA ERGA.REM.P.SVAM MERIT A. CIVES. LABI. TOLOSANI. ETINCOLAE Des témoignages auf authentiques que ceux que Je viens de raflembler , n’ont pu impofer filence aux détraëteurs de la gloire de Touloufe. . (1) Touloufe, Métropole de la Narbonnoife premiere ; fes Fauxbourgs alloient jufqu’à Gaffelafe, ( st. Alban ) Ceftanet, Monrabe, Pech-David, Lalande. CareZ, Un DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 28 Un Ecrivain anonyme répandit l’année derniere dans le public un Ouvrage, ayant pour titre: Remarques d'un Raffe fur la Colonie & le Capitole de Touloufe. Dans cet Ouvrage critique , l'Auteur combat tous les diflérens {yftèmes qui ont paru fur l’état de Touloufe fous les Romains, fans en adopter aucun. Il ne veut la regarder ni comme Province, ni comme Colonie Romaine, ni comme Métropole , ni comme Ville libre , ni comme Ville conquile. Il ne nous apprend point fi cette Ville étoit, à cette époque, Capitale des Gaulois Teétofages, Colonie Grecque, alliée de Marfeille, & en cette qualité honorée par Rome du titre de Sœur, ou Ville tributaire des Romains, & du nombre de allés qui avoient fubi le joug de l'efclavage. Après avoir tourné en ridicule {es Temples, fes Bains, fon Amphithéatre , fon Capitole, il ajoute que quand tous ces monumens exifteroient , & feroient dignes de la magnificence Romaine , 1ls ne prouveroient rien pour la gloire de cette Ville, parce qu'on n’y reconnoitroit que les traces de la Rrvaude Si elle jouifloit de certains privileges , elle les acheta bien cher, & on n’a pas raifon d’être flatté d’une faveur qu'on a payée ; fi Rome y envoyoit un Quefteur, c’étoit uniquement pour y exiger le tribut : nouvelle preuve de fon humiliation. On a beau vanter l'avantage qu’avoient les Villes de Province d’avoir des Ediles , des Quefteurs, des Décurions , un Capitole , ce fera toujours , dit l'Auteur, la marque du collier du chien de la Fable. Quelque ingénieufes que foient les réflexions de lAnonyme, je ne faurois les adopter. Perfonne n’ignore avec quel mépris les Romains traitoient les peuples Vaincus , qu’ ils qualifioient de barbares & d’efclaves. Les Rois même leurs tributaires , recevoient les Lois Tome IT, D 26 MÉMOIRES d’un Préteut ou d’un Proconful. On les voyoit à Rome confondus dans la foule, profternés aux pieds du Sénat, & regardes comme Re au-deflous d’un fimple Citoyen Romain. Quand on voit une Ville puiflante par fon étendue, par fes richefles, par fa population, régie par les Lois Romaines, gouvernée par des Magiftrats pareils à ceux de la Capitale de l'Empire, habitée par des Quefteurs, des Duumvirs , des Sénateurs ; des Chevaliers ; quand on ne peut douter qu’elle n’ait été décorée d’un Amphi- théatre, d’un Capitole, de Bains publics, qu’elle offre des Temples & des Infcriptions confacrés aux Dieux de l’Empire & à la gloire des Empereurs, on doit penfer que cette Ville eft devenue l’alliée, & non l’efclave des Romains , & qu’elle a adopté volontairement leurs Lois, leurs Mœurs , leur Gouvernement. J'aime à voir dans les Teftofages, nos Ancètres, des ennemis redoutables à ce peuple conquérant > qui ont traité avec lui d’égal à égal , qui n’ont pas rougi de devenir citoyens de Rome, & Fe s'identifier en quelque forte avec les Maïtres du Monde. Je fuis flatté de voir cette orgueilleufe Cité donner à Touloufe les titres de Savante & de Palladienne , & envoyer dans fes Ecoles célebres les enfans des Empe- reurs, pour y recevoir une éducation plus brillante que celle qu ‘elle auroit pu leur donner. Un Cenfeuri ignorant, ou prévenu, tel que l’on n’en voit que trop de nos jours, fe rira de mon enthoufiafme; il me reprochera de donner créance à des fables, & de vouloir confacrer de vieilles erreurs. Je lui répondrai qu'il y a tout au moins de limprudence à donner ce nom à des traditions anciennes & refpe@ubles, appuyées fur l’'Hiftoire & les Monumens DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 27 publics ; que quand ces faits feroient douteux , & ces témoignages équivoques , je fafirai toujours avec empreffement tout ce qui pourra rétracer des époques glorieufes à à ma Patrie ; je lui dirai : Laïflez - moi des préjugés qui me flattent , & pour lefquels vous n'avez aucun dédommagement à à m'offrir. Mais je fuis bien éloigné de vouloir mettre au rang des fables & des erreurs , tout ce qui a été publié fur la gloire & l'indépendance de nos Ancêtres. Les preuves que j'en airapportées fufiroient feules pour me démentir. Je viens d’en découvrir de nouvelles dans une Infcription trouvée, il y a peu de ; Jours, dans une vigne a Vieille- Touloufe , & qui m'a été communiquée par M. le Chevalier Rivals. Sur le marbre , dont il ne fubfifte qu'une partie , on lit les caraéteres fuivans : Q. ATILIVS. M. F. SACERD. DIV XIT. AN Je croirois pouvoir l'expliquer ainfi : Quintus Atilius Marci filius Sacerdos divi Augufti ; VIXIL ANNOS.... Cette Infcription défigne la fépulture de Quintus Atilius , Prêtre , qui fut fans doute inhumé auprès du Temple qu'il deflervoit , & ne fut point porté au cimetiere public. Ces mots, Sacerdos Divi, paroïfient {e rapporter à Aupgufte. L’épithete Divus étoit donnée aux Princes ou aux Héros, à qui on accordoit, après leur mort, les honneurs de la confécration. Auoufte fut le remice à qui la flatterie éleva des Temples de fon vivant, Il en avoit un à Rome , dont Antonia fut la 28 MÉMOIRES Prêtreffle , ainfi qu’on le voit fur les médailles de cette Princeffe , où elle porte ce titre : Sacerdos divi Augufti. Plufieurs peuples des Gaules s’étant révoltés contre les Romains, qui les avoient fubjugués, Augulte fut en perfonne dans ces Provinces , qu il fit rentrer dans le devoir , & 1l y laifla Drufus, qui acheva de les pacifier. Soixante de ces peuples fe réunirent pour faire batir à Lyon un Temple fuperbe à l'honneur d’Aupuite, dont les veftiges fubfiftent encore, & dont l’Autel eft repré- fente {ur fes médailles. Sabot en donne la defcription, & dit qu'on y plaça foixante Statues , repréfentant les différens peuples qui avoient Re" ce monument. Dans l'énumération qu'il en a fait ; il ne nomme pas les Touloufains , parce qu ils n’étoient point compris dans le nombre des révoltés & des vaincus. Touloufe, alliée & fœur de Rome, voulut à fon tour fignaler fon attachement pour la perfonne de l'Empereur ; elle lui éleva un Temple à un de fes Fauxbouros , aujourd hui Vieille-Touloufe : c’étoit fans doute le quartier occupé par les Romains , s’il faut en juger par les monumens qu fe trouvent fréquemment a Vieille-Touloufe, & en defcendant le côteau de Pech-David , jufqu’a l'Eglife £ S. Roch, par la proximité du Château Narbonnois, qui étoit la place d'armes des Romains , & le féjour de LT leur Commandant , & par le cimetiere Romain qui fe Guirau, an trouvoit placé entre ce Château & le côteau de Pech- Nemaus An- David. doque ; p. 9 & 10. Hare Plufieurs Ecrivains refpeétables nous apprennent que p-704.Gruth pi 231; 323.0ES principales Villes de la Gaule Narbonnoife éleverent Lea oO 7 nn fon ES Temples à à Aupgufte avant fa mort, vers la onzieme mifeel de année de l’Ere Chrétienne ; fa fête y étoit célébrée dans spi. less-mois de Janvier & de Septembre, Ces Temples DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 29 étoient deflervis par un College de Prêtres, qui portoient le nom de Sextumviri Auguftales. L’Auteur de l'Hiftoire du Languedoc donne le détail de leurs fonétions. D’après les anciens Hiftoriens , le peuple les nommoit ou pour toute la vie, ou pour cinq années feulement , dans les Affemblées annuelles que les Proconfuls convoquoient dans la Métropole, & qu’on appeloit Conventus juridicr. Ils préfidoient aux fpeëtacles qu'on donnoit pendant l'Affemblée Provinciale , fous leur autorité & leur direttion ; ils avoient pour Chef un Prètre pris dans le nombre des Flamines. Cet établiffement fubffta jufqu’au regne de Conftantin, qui, avec les facrifices des Païens, abolit le nom & les fonétions des Flamines ou Sévirs Auguftales , & de leurs Colleges. Touloufe étant la {econde Ville de la Province Narbonnoife , renfermoit un de ces Colleces , ainfi qu’on peut en juger par une Infcription rapportée dans le Tome I de PHiftoire du Languedoc ; elle eft ainfi conçue : Q. FVLLONIO TOLOSANO Inn AVGVST. CÆCILIA.LF TERTVLIANI VXOR. Cette Infcription paroît confirmer l'explication que j'ai donnée à celle trouvée à Touloufe, & qui a pour objet Quintus Atilus , que je préfume avoir été du nombre des Prêtres d’Auguite. Une troifieme Infcription trouvée auprès des Récol- lets, à l'ancien terroir de Feretra , ne feroit pas moins 30 MÉMOIRES intéreffante que celles dont je viens de faire mention, fi on eût pu la découvrir en fon entier. Ce qui en refte confifte en deux fragmens, qui ne forment pas le tiers de la totalité, & qui font au pouvoir de M. le Chevalier Rivals ; en les réuniflant, on y lit ces mots : DIVO FRA IMP CAESAR NIN En fuppléant le grand nombre de lettres qui manquent, je la rétablirois ainfi : Divo Cæfari Valeriano fratri Imperator Cæfar Publius Licinius Saloninus Auguflus. Je vais, MESSIEURS , vous faire part de mes conjeêtures à cet égard; fi elles vous paroïflent fondées, il en réfultera que Salonin IT, fils de l'Empereur Gallien, vint à Touloufe, & y dédia ce monument à la mémoire de Salonin [°'. fon frere, tue par Pofthume , & bientôt après fa confécration. Cette Infcription , ainfi reftituée, fourniroit une preuve démonftrative de ce que j'ai avancé dans ma Diflertation imprimée fur l’exiftence des trois Salonin. Il eft évident , d’après le peu qui nous refte de cette Infcription , qu’elle a été faite par un Empereur , ou un Prince de la famille Impériale, qui portoit les titres de Céfar & d’Augufte , IMP. CAESAR ; que ce Prince a dédié ce monument à un de fes freres qui étoit mort, & que Rome avoit placé au rang des Dieux , DIVO... FRATRI,; enfin, que le Prince, auteur de l’Infcription, avoit un nom qui fe terminoit en NINVS, ainfi qu'on DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 31 peut en juger par les lettres NIN. Il refte à chercher quel a pu être le Prince dont le nom avoit une pareille terminaifon , qui a été dans les Gaules, &r qui a furvécu à un de fes un , auquel on a D , après fa mort, les honneurs de la confécration. Les lettres NIN, qui compolent une pattie du nom, ne pourroient s'appliquer qu'à Antonin Pie , à Marc- Aurele, à Commode , à Caracalla , à Elagabale , qui Joignirent à leur nom celui d’Antonin ; à trois Tyrans du nom de Saturnin , ou aux trois Salonin , fils de Gallien. Il n’eft pas poflible de trouver dans l'Hiftoire Romaine d’autres Princes , au nom defquels les lettres NIN puiffent s'adapter. Antonin, Marc-Aurele & Commode, n’eurent point de frere ; ainfi le monument qui nous occupe ne peut leur être attribué. On pourroit m'objefter qu'Antonin eut un frere , puifque HAdrien avoit d’abord adopté Ælius , & qu'après la mort de ce Céfar, il adopta Antonin, qui lui fuccéda à l'Empire ; mais peut-on raifonnablement regarder comme freres deux Princes de familles difie- rentes, parce qu'ils ont été fucceflivement adoptés par un Empereur qui n’étoit pas leur parent ? Peut-on préfumer qu’'Antonin, parvenu à l'Empire, ait confacré un monument à Ælius , comme à fon frere adoptif, tandis qu'Ælius avoit été retranché de la famille des Céfars, avant qu'Antonin y eût été admis ? Comment ce monument auroit-1l été placé à Touloufe, où on ne dit point qu'Antonin ait jamais pale ? On me dira peut - être encore que Commode eut plufieurs freres, & qu’il a pu leur dédier des Infcriptions. Annius Verus eff le feul qui a vécu jufqu’a l’âge de fept 32 MÉMOIRES ans, & qui reçut le titre de Céfar ; il mourut en l’année 170 , fept ans avant que fon frere Commode eût été déclaré Augufte , & dix ans avant fon élévation à l'Empire. Il eft hors de toute vraifemblance que ce Prince barbare, dont le nom feul rappelle l’idée de tous les crimes, qui fit périr fa femme, fa fœur, fon neveu, {on beau-frere, qui fut violemment foupçonné d’avoir avancé les jours de fon pere , eüt penfe à donner ce témoignage de tendrefle fraternelle à la mémoire d'un enfant mort depuis long-temps, & dont l’exiftence avoit fait une bien légere fenfation dans l'Empire. Il faut encore obferver qu'Annius Verus & Commode n’ayant point voyagé dans les Gaules , on ne fauroit préfumer que cet Empereur ait dédié à fon frere , à Touloufe , une Infcription , dont on ne voit ni l'utilité, ni le motif. Caracalla \après avoir aflafliné fon frere Geta dans les bras de leur mere Julie, crut effacer l’horreur que ce crime avoit infpiré contre lui aux Romains, en le faifant mettre au rang des Dieux. On connoît un mot de lui à ce fujet, qui peint bien fon impiété & l'atrocité de fon ame. Sit divus , dum non fit vivus. Mais cette apothcofe fut une vaine cérémonie qui n'eut aucune fuite. Je ne connois aucun monument de la confécration de Geta ; comment Caracalla auroit-il pu dédier une Infcription à fon frere dans les Gaules & à Touloufe, où il ne vint jamais ? Elagabale n’eut point de frere. Ïl a exifté trois Tyrans du nom de Saturnin. Le premier leva l’étendard de la révolte contre Gallien dans une Province de l'Orient ; il ne refte de lui aucun monument. Le fecond fe révolta en Egvpte fous Probus, & prit le pourpre à Alexandrie. Le troifieme fit éclater fa rebellion DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 33 tebellion dans les Gaules fous le regne de Conftantin, & périt peu de jours après; on ne connoïît ni fa famille, ni les événemens de fa vie. Il eft donc évident qu'aucun de ces trois Tyrans n’a pu être l’auteur de l’Infcription qui nous occupe , & il eft plus que probable qu’elle ne peut convenir à aucun des Princes qui ont porté le nom d’Antonin. I refte à examiner fi on ne peut pas conjeêturer , avec vraifemblance, qu’elle a été dédiée par Salonin I, fils de Gallien, à la mémoire de fon frere aîné. Jai établi dans mon Mémoire fur la famille de Valérien , que l'Empereur Gallien eut trois fils, qui porterent tous le nom de Salonin. L’aîné fut créé Céfar par fon grand-pere Valérien en 253, & envoyé dans les Gaules en 256 , pour y fervir fous Pofthume. Ce Général s'étant révolté contre Gallien , pourfuivit le jeune Salonin , qui s’étoit échappé de fon camp , & l’obligea de fe renfermer dans Cologne. Après un long fiege , les habitans de cette Ville livrerent le malheureux Prince au Tyran , qui le fit maflacrer avec Silvain fon Gouverneur , au commen- cement de l’année 260. Gallien fit mettre fon fils au rang des Dieux , & fit frapper les médailles qui nous apprennent fa confécration , (DIVO CAESARI VALERIANO ). Il conféra de fuite le titre d’Auguite à Salonin IL. Il eft à préfumer qu’il le mena à fa fuite, lorfqu’il vint dans les Gaules en 262 pour foumettre le rebelle Pofthume. Il y fit la guerre en perfonne jufqu’en 264; une de fes armées étoit commandée par Auréolus. C'eft fans doute dans le cours de ces campagnes que Salonin fe trouvant à Touloufe , l’une des principales Villes des Gaules, y dédia cette Infcription à la mémoire Tome IT. 34 MÉMOIRES d’un frere cher aux Touloufains , qui n’avoient point fléchi fous le joug du Tyran. Si l'explication que je donne aux fragmens de ce monument paroit un peu conjeéturale, j’ofe dire qu’elle n'eft point fans vraifemblance , & c’eft peut-être la plus raifonnable de toutes celles qu’on pourroit hafarder fur cette matiere. Je l'ai propofce d'autant plus volontiers, qu’elle fe concilie avec mes obfervations fur l’exiftence & les époques de la vie des enfans de Gallien. Je fuis cependant prêt à l’abandonner , fi l’on m'en fait voir la faufleté | & que l’on propofe une explication plus fatisfaifante. Il me refte à donner une notice de trois autres fragmens d’Infcriptions trouvés au même lieu que les précédens. Ils n’offrent rien d'intéreflant pour l’'Hiftoire de cette Ville ; mais ils méritent d’être confervés, comme étant des reftes précieux de l’antiquité. Le premier contient les caraéteres fuivans : IX VIT EBRVA RIAS 11 paroît que c’eft une Infcription fépulcrale qui énonce feulement le jour & le mois du décès de celui pour qui elle a été faite ; en reftituant les lettres qui manquent, on pourroit la lire ainfi: XIX OCCVBVIT KAL. FEBR V ARIAS. Le mot ANTE eft fous-entendu. Le 19 avant les Calendes de Février, chez les Romains, répondoit au 14 de Janvier. Le fecond fragment contient lInfcription fuivante : DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 3e HIC IACET ONAE ME ORIAE EV NIVS VIX ANNIS XV VIF: Elle défignoit le tombeau d’un Jeune homme appelé Eugene , mort à l’âge de quinze ans; elle doit avoir été faite dans les derniers temps de l'Empire, à en juger par la forme des caraëteres, & par ces mots HIC IACET, qu'on ne trouve point dans les anciennes [nfcriptions. Le troifieme fragment ne contient que ces lettres : VMANVS vo Il feroit inutile d’en chercher l'explication ; la beauté des caraéteres prouve feulement qu’elle eft de plufieurs fiecles antérieure à la précédente ; on peut dire qu’elle a été faite par un des Soldats Vétérans de ja dixieme Légion, appelés Decumani , qui formerent la Colonie de Narbonne vers lan 636 de Rome : c’eft ce qui fit donner à cette Ville le nom de /Varbone Decumanorum. L'Hiftorien du Languedoc rapporte deux Infcriptions qui font à Narbonne, & qui ont été confacrées par des Décumans, 36 MÉMOIRES DESIRE D'E'S CRIPIT'E ON DE LA BARGE AUX PATTES ROUGES. Par M. DE LAPEIROUSE. . Lu le Li E qui pourroit faire trouver grace aux yeux du Février 1783. niUts Eur SE. commun des Lefteurs , pour l’aridité des defcriptions des êtres vivans, plus feches encore dans l'Hiftoire des Oifeaux , par cela même qu'elles font & doivent être plus minutieufes , feroit fans contredit les détails agréa- bles & variés de leurs mœurs & de leurs habitudes ; mais tant de difficultés arrêtent la vigilance de l'Obferva- teur , qu'on ne peut pas efpérer que cette partie de l'Hiftoire Naturelle , d’ailleurs purement curieufe, foit, même dans plufieurs fiecles , portée à un certain degré de perfe&tion. C'eft toujours contribuer à cet Ouvrage immenfe, que de faire connoître un Oifeau, qui paroït ne l'avoir pas été jufqu’à ce jour , puifqu’il n’en eft fait aucune mention dans les Auteurs. Voila ce qui m'a engagé à faire la defcription de celui-ci , quoique je n’aie abfolument rien à dire de fes mœurs. J'ai vu deux individus de cette efpece qui m'ont fervi de modele ; ils étoient femelles , & furent pris aux environs de Saint-Béat en Cominges, dans une prairie aquatique , voifine de la riviere de Garonne : ce fut le 15 Janvier 1779 ; & cette époque même eft aflez furprenante , parce que le peu de Barges qu'on voit dans les hautes montagnes , & même dans les environs de Touloufe , ne paflent communément que dans le mois d'Avril. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 37 Il ne m'a pas été difficile de rapporter cet Oifeau à la famille à laquelle il appartient ; la forme de fon corps, les proportions de fes jambes , la longueur de fon bec & fa tournure particuliere aux Barges , plus fenfible encore dans cette efpece , que dans les autres , m ’ont indiqué , au premier coup-d’ocil, le nom générique que je devois lui donner. La couleur des jambes m’a fourni celui de l’efpece. Cette Barge pefoit quatre onces & demi ; elle a de longueur un pied un pouce fix lignes depuis le bout du bec , jufqu’à l’extrêmité de la queue, & quinze pouces jufqu’au bout des ongles. L’ envergure eft d’un pied huit pouces ; la queue dépañle les ailes de fix lignes. Le bec a deux pouces trois lignes de longueur ; il eft arqué du deflus en deflous, & recourbé en fens contraire vers la pointe , qui eft fort émouflée. Il eft noir ; la mandibule inférieure eft d’un beau rouge de re depuis fa naiffance juiques vers fa moitié ; les narines font longues & profondément creulées. Le deflus de la tête, du cou, les plumes fcapulaires & le croupion , font Fe gris cendre , qui fe fonce à mefure qu'il s'éloigne de la tête. Une zone blanchätre, aflez étroite, part 26 bec, & pale fur les yeux en Lune de fourcil ; Li gorge , le ventre, les flancs , les cuifles, les couvertures ARC roures de la queuc & des ailes, font d’un blanc de neige ; la poitrine a une lépere teinte de gris. L’aile eft compofée de vingt-cinq pennes ; elles font brunes du côté extérieur, & blanchâtres du côté intérieur. Cette couleur re à mefure que les plumes font plus proche du corps, & eft piquetée de taches brunes. La premiere penne a fa tige blanche. Les petites cou- vertures inférieures font tachées de brun; les fupérieures 38 MÉMOIRES {ont d'un brun clair. Les moyennes font bordées de blanc ; les longues ont des taches blanches fur les côtés, qui découpent le brun en forme de dent. Les couvertures fupérieures de la queue, & même, un peu, les flancs, font rayés tranfverfalement de blanc & de cendré. La queue a douze pennes d'un cendré rouflâtre , découpé en fcie fur les côtés par une teinte blanche ; les deux du milieu font les plus longues, d'une feule teinte cendrée , & arrondies par le bout. Les jambes étoient d’un rouge de cinabre très-vif, teintes d’orangé dans tous les plis , les articulations & derriere le tibia , dans toute fa longueur ; les ongles noirs, celui du doigt du milieu ayant intérieurement cet appendice tronqué, incifé & creufé en deflous, que j'ai obfervé dans toutes les Barges. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 39 EE MÉMOIRE CoNcERNANT les Dépenfes d'Eau des grands Réfervoirs par des orifices conf dérables , accompagné de diberfés expériences propres à indiquer la caufe €: la mefure du déchet que ces dépenfes éprouvent , les Réfervoirs étant conflamment entretenus pleins. Par M. L’EsPINASSE, Correfpondant. Dr Auteurs recommandables nous ont donné Lu le 14 des regles de pratique pour mefurer la dépenfe d’eau 7%: d’un réfervoir entretenu conftamment plein , lorfque la hauteur & l’orifice en font connus ; ils les ont fondées fur des expériences très-délicates, qu'ils ont variées avec beaucoup d'intelligence. Tantôt ils ont obfervé, fous la même hauteur d’eau dans le réfervoir , le rapport des dépenfes par des ouvertures inégales, mais femblables ; tantôt , fous diverfes hauteurs d’eau , 1ls ont obfervé le rapport des dépenfes par le même orifice , ou par des orifices € égaux ; enfuite, après avoir combiné les divers réfultats qu'ils avoient Cent , & les avoir modifiés par diverfes confidérations prifes dans la théorie & dans l'oblervation , ils en ont déduit des regles , qu ‘ils ont jugé applicables à tous les cas, & par-là propres à fervir de guide dans la Pratique de l'hydraulique. Ces regles, qui n’ont pour fondement, au grand regret des Praticiens, que des expériences faites en petit, fervent, il eft vrai, à déterminer avec une précifion fuffifante les dépenfes des réfervoirs , lorfque leur hauteur , l'aire & 40 MÉMOIRES la figure de leurs orifices diflerent peu de celles des ouvertures foumifes à l'expérience ; mais fi de ces trois élémens , lun , ou deux des trois , ou tous les trois enfemble , varient confidérablement , ne fera-t-1l pas poflble que telle circonftance , qui, en petit , navoit que foiblement afleêté l'écoulement, l'affeétera, en grand, d’une maniere fenfible, ou bien que telle autre circonf- tance , dont l’eflet, en petit, étoit notable , ne le fera pas dans l'expérience en grand ? Jetons un coup -d’oil rapide fur quelques exemples , dont certains ont déja été confidérés dans plufieurs écrits, & fur lefquels 1l ne fera pas indifférent d'infifter dans celui-ci. 1°. La réfiftance de l'air eft un léger obftacle à l’é- coulement, quelle que foit l'ouverture, lorfque la hauteur de l'eau dans le réfervoir eft médiocre , & que par-là la vitefle de l’eau, qui fe vuide, eft médiocre elle-même; mais cette hauteur venant à augmenter, tandis que rien ne change du côté de ouverture, la réfiftance augmente évidemment dans le même rapport. Tout le monde fait, en eflet , que les réfiftances dans ces deux cas font proportionnelles aux quarrés des vitefles , & que les quarrés des vitefles fuivent le rapport des hauteurs , puifque les vitefles font toujours repréfentées par leurs racines. 2°, Le frottement eft une caufe de retard peu fenfible, lorfque la hauteur n’eft pas confidérable. Il n'en eft pas de même lorfque , cette hauteur venant à augmenter , ( l'ouverture reftant la même , Je veux dire , tant que rien ne change ni dans fes dimenfions, ni dans fa figure, ni dans l'épaiffeur des parois qui la forment }) la vitefle recoit un accroiflement relatif à l'augmentation de hauteur : car foit que le frottement fuive le rapport fimple DE L'ACADÉMIE DE T'OULOUSE. 47 fimple des vitefles , comme le prétendent certains Auteurs , foit que , felon d’autres , 1l fuive le rapport de leurs quarrés, on devra toujours le regarder comme un obftacle plus ou moins puiflant , a mefure que la hauteur de l’eau fera plus ou moins grande. Quant aux variations que l’eflet du frottement peut éprouver du côte des orifices, les premiers principes de la géométrie enfeignent que js rapports des circuits de deux figures femblables, varient moins que ceux de leurs aires; d’où 1l fuit que eue qui eff la plus petite, a fon circuit plus en prife, proportion gardée, à cette forte d’obftacle, & que par conféquent la plus grande doit moins Er la viteffe du fluide auquel elle donne paflage, la hauteur reftant la même. 3°. L’obliquité dans fa direétion des particules d’eau qui enfilent un orifice , laquelle donne lieu à la contra&tion de la veine fluide qui s’écoule , ne peut pas être la même {ous diverfes hauteurs. L'effet de cette contraftion doit donc varier , & par une fuite néceflaire, rendre variable elle-même la dépenfe de lorifice. Sur quoi il fe préfente à faire une obfervation eflen- tielle , qui a échappé jufqu'ici aux Auteurs qui fe font occupés de cette importante matiere. 1° obliquité, fous laquelle on voit {ortir l’eau de l’ori- fice d’un réfervoir > peut être rapportée a deux caufes oppofées : c’eft ou à la trop petite, ou à la trop g grande fuperficie de l'orifice , la hauteur & l'amplitude 4e re- fervoir étant les Are En effet, confidérons comment fe fait l'écoulement , au premier inftant où l’on ouvre un orifice. Comme ce moment peut être indivifble , 1l n’eft pas douteux que l’eau , qui fe préfentoit d’abord perpendiculairement au plan de lorifice , & qui lui Tome IL, A2 MÉMOIRES correfpondoit avant qu’on ne l'ouvrit, ne foit déplacée par les particules des côtés, que leur mouvement oblique y porte; & comme ce nombre de particules eft refpeéti- vement beaucoup plus grand, lorique l’orifice eft beau- coup plus petit , à caufe de fon plus grand circuit , 11 fuit qu'elles doivent par leur concours avoir plus de force pour reflerrer la veine , & lui faire éprouver la contraétion. Il n’en feroit pas de même, fi l’orifice avoit une certaine furface proportionnée à l'amplitude & à la hauteur du réfervoir. Dans ce cas-ci, les particules d’eau , qui répondroient à l’orifice, y trouvant un libre paflage , à raïfon de fon étendue , pourroient céder fans obftacle à la preflion-de la colonne dont elles feroient chargées ; & par la tenacité qui leur eft propre , elles entraineroient les particules contiguës qui feroient au même niveau, & qui, à leur tour, feroient remplacées par leurs voifines. Ces remplacemens fe feroient ainfi de proche en proche , par des portions de la même tranche horizontale , qui , à caufe de leur plus grande vitefle , ne fauroient être déplacées par les particules latérales : au contraire, la direétion de celles-ci fe plieroit néceflairement au parallélifme des autres ; mais fi l'aire de cet orifice étoit trop grande refpeftivement à l’am- plitude & à la hauteur du réfervoir , on voit clairement que l’eau , qui répondroit à lorifice , pouvant ne pas {uffire à en nourrir l'ouverture avec la rapidité due à la colonne fupérieure, il faudroit, dans ce cas, que celle qui fe vuideroit , füt conftamment remplacée par des particules qui viendroient de tous côtés, & fe préfen- teroient à l’orifice fous des dire&tions obliques , d’où naïtroit inévitablement la contrattion. 4°, Les entonnoirs , qui fe forment au- deflus d’un DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 43 orifice ouvert , font regardés comme infenfibles par plufieurs Obfervateurs , lorfque la hauteur de l'eau au- deflus de lorifice eft confidérable , à moins que les eaux , à la furface du réfervoir, ne foient déjà animées de quelque mouvement antérieur ; mais fi l’on y fait attention, on verra que, comme, dans les cas les plus importans de la pratique, il s’agit 1 connoitre la dépenfe des grands orifices, qui ont pour tête d’eau, des rivieres, des canaux ou de lacs, l’on ne peut pas fappofer que dans ces cas 1l n’exifte aucun mouvement antérieur à Ja furface des eaux , & que par-là lentonnoir ne doive pas y avoir lieu. Plufieurs caufes peuvent produire ce mouvement, où concurremment , Ou féparement. En effet, l’ bin de ces res d’orifices fuppofe prefque toujours deux corps de maçonnerie ou de char- pente , l’un de droite , l’autre de gauche , lefquels, en avançant dans l’intérieur du lit de la riviere , du canal ou de tout autre grand réfervoir, fervent d’ épaulemens à l’enfemble de l'orifice. Quelle qu’en foit la pofition, lorfqu’on vient à l’ouvrir, toute autre caufe de mouve- ment fuppofée anéantie , l’on ne peut manquer d’en exciter un à la furface des eaux les plus calmes. Ce mouvement, en fe combinant avec les déviations que lui font éprouver l’irrégularité des bords, fon choc fur les maçonneries , fur la charpente ou autres obftacles qui fe trouvent fur fa premiere direétion , doit bientôt produire des tournoiemens , & par-la des entonnoirs. Si c’eft une riviere qui fournifle à l'écoulement , il eft clair que fes eaux étant courantes, & ayant par-là un mouvement particulier à la furface , elles fe prêtent encore plus à ce tournoiement dont je viens de parler. Quant aux eaux ftagnantes, 1l fuflit d’obferver que, fi 44 MÉMOIRES bien que foit étanchée une grande ouverture deftinée à les vuider , il eft impofñlible qu’elle le foit aflez pour qu’elle n’ait point des perdans dans fon pourtour , ou dans les affemblages des pieces dont fa fermeture eft formée. Or, cette caufe fubfiftant conftamment , doit imprimer aux eaux de la furface un mouvement à peu- près équivalent à celui dont les eaux courantes font agitées. Îl doit donc , dans les cas ordinaires , s'établir toujours au-deflus des orifices un ou plufieurs entonnoirs, qui , en donnant un libre pañlage à l'air , apportent une altération fenfible à leur produit. Ce principe d’altération a été reconnu de plufieurs Auteurs, comme je l'ai déjà dit; mais mal-à-propos ont-ils jugé qu’il n’avoit pas lieu lorfque l’orifice eft vertical. Si l'on n’admettoit pas l'exiftence de ces entonnoirs, que les réflexions ci-deflus font envifager comme un efet néceflaire, & fur laquelle des expériences répétées plufieurs fois & en divers lieux ne laiflent aucun doute , il feroit impoflible d'expliquer dans les grandes évacuations d’eau qui fe font au moyen de grands orifices , une fingularité qui eft frappante, & qui m'a paru mériter d’être connue. La figure 1°°. pl. 1°. la rendra fenfible. Soit À B CD l'orifice reétangulaire & vertical d’une grande piece d’eau. Lorfqu'on a ouvert entierement l'orifice , l'expérience fait voir que la coupe verticale & en travers de la veine fluide qui s'écoule , au lieu d’être à l'endroit où elle commence à fe dégager de l'orifice , d’une figure égale ou même femblable à ce reftangle , eft réduite à la figure MhikNCD , par la formation de la gorge évuidée hik, & par la fuppreflion des triangles AMh, KNB. Cette réduétion de figure m'a toujours paru être la même fous des hauteurs entre CG oupe er. ri LeLEn par RPM A C Son Empellement ouperf pue 5 a Plan de me 2 CDE dei. gr Empcllene onvcrlvuc pars sa a face fah Llm, Fi £g- 4 77 Coupe Fer. icale 7 la Ger: ji dEcut milieus, dans le sens de Geoulem | a oupe} £ La retenue de Villedubert étant baffle , ainfi que dans l'expérience précédente, de 1 pied 4 pouces 6 lignes, les deux empelemens de l’'Evêque l'ont remplie dans lefpace de 23°, la hauteur de l’eau, au-deflus du centre de gravité de ces ouvertures, étant de 6 pieds 3 pouces 3 lignes. PR ENS EL TA INE PP E CITY Ce réfultat eft le même que dans l'expérience deuxieme, 2 ARS MM th RM 20686250. 0. RIVE SCD AD EA TN AT D. RME: La vitefle relative à 6 pieds 3 pouces 3 lignes, feroit Ce nel io TA PRE Ne NEA «1 19. 39.par? La furface des deux empelemens, qui eft de 12.5.3.7.4, multiplie par 19. 39 , donneroit pour dé- - penfe pendant une feconde, ci . 24124 GAS, | Dans une minute, ci . . .. . .. 1447472. 7. 100, nÉvcpendantis3" ei. JUL, : 34308166! Ici la dépenfe naturelle eft à l'eff&tive :: 16 : 8. 82. s4 MÉMOIRES EXPÉRIENCE QUATRIEME, Servant à vérifier le réfultat de la feconde , ainft que la cinquieme fervira à a vérifier le réfultat de la troifieme. La retenue de Villedubert étant bafle de 1 pied 4 pouces 6 lignes , l'empelement, côté droit, de la porte de défenfe de l Evêque, l’a remplie dans l efpace de 42', là hauteur de l’eau au-deflus du centre de gravité de cet empelement étant de $ pieds 10 pouces 4 lignes. RÉVSIU TL TLAUTOIE CE EEE C TIME Ce réfultat eft le même que dans les deux expériences précédentes), Gi: eidie soins L00025 PE) 0. RÉENS VII Ti A Te NE ANT RMIEAL. La vitefle due à $" 10. 4. feroit de . 18775 par” Cette vitefle , multipliée par la furface de l’empelement, qui eft de GP 1. 10. 7 , donneroit pour dépenfe par fe- conde , Élu cie nitele in ln EMAr RES RC re e 100. Et dans 42' ou2529 11 Hein 298323.02. ——_— Ici la dépenfe naturelle eft à l’efleftive :: 16 : 9. 84. EXPÉRIENCE CINQUIEME. La retenue de Villedubert étant pareillement bafle de 1 pied 4 pouces 6 lignes , les deux empelemens des la porte de défenfe de l’eclufe de l'Evêque, entierement ouverts , l'ont remplie dans l’efpace de 23° 39 *; hauteur de l’eau , au-deflus du centre de gravité de ces empelemens , étant de 5% 10. 8. G. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 5$ RAÉNS'C'E, TANT EUHNEVENCNTAT EF. Ce réfultat eft le même que dans les trois expériences précédentes , & par conféquent de . . 183625" 9.0. RON SUD RSAËTIENEAPTITORDEUT: La viteffe due à $. 10. 8.6, feroit (Ole EUROS CN PEN RE 1880 px® La furface des deux empelemens ; P Ë qui eft de 12% 5: 3. 7- 4, multi- pliée par cette vitefle, donneroit pour leur dépenfe par feconde, ci 23390" $.8.10.8. —— 100, Et pendant 23° 30", ou 1410", ci 32980o$"74 Ici la dépenfe naturelle eft à l’effeétive :: 16: 8. 90. EXPÉRIENCE SIXIEME. L’empelement, côté droit, de la porte feconde, en defcendant de l’éclufe de Lalande , étant tout-à-fait ouvert, & l’eau étant à 13 7. 10.6. au-deflus du centre de gravité de l'ouverture , les eaux fe font élevées dans la retenue d'Herminis, qui eft la retenue immédiatement inférieure , d’un pied cinq pouces dix lignes dans l’efpace der? ; REA SN TTL NT ARTE EVE EN CNLPIRE: Le quarré des diverfes parties de la retenue , à la hauteur moyenne , en y Joignant celui du baffin inférieur de Tude® étotde 4 4 «4 5014304, CG, La hauteur obfervée, ci... ..... D. SO. Le cube ou volume total étoit, ci . . . 86407. ç0. ARE EAN RARE DCR 56 MÉMOIRES R'ES'U L'T'ÆFON AIO RENE La viteffe relative à 137. 10.6, feroit HER 2e à: cuis ec slee 28" 62px" La furface de l’empelement, qui eft de 6. 9. 9. 9. 6 , multiphiée par cette vitefle, donneroit pour la dépenfe par feconde 5 "ER. 4 ar ilinelaiare 4200192228 100, Et dans 12° ou 720 ef 1.08 208 140494. 39- a ——— — Ici la dépenfe naturelle eft à l’effe@tive :: 16 : 9. 84. EXPÉRIENCE SEPTIEME. IVota. Pour entendre cette expérience-ci , on peut jeter les yeux fur la figure 1°. de la planche 2. L’empelement, côté gauche, de la porte feconde de l'éclufe de Trebes, placée en L, étant tout-à-fait ouvert, tandis que fon centre de gravité étoit à 12 pieds 1 pouce au-deflous du niveau des eaux du baflin fupérieur, dans 3" ,il a élevé de trois pieds cinq pouces les eaux des deux baffins inférieurs entre L & O , qui déjà étoient de niveau elles-mêmes, & qui étoient retenues dans ces baflins par la porte baffle en O , dont les empelemens étoient fermés. Je dois obferver que ce qui faifoit que l’eau étoit de niveau dans les deux bafins inférieurs au commencement de l'expérience feptieme , & des deux furvantes , c’eft que pour avoir fur la porte en O une charge, qui lobligeoit à bien fermer , & par-là faire en forte de retenir toutes les eaux , que je vuiderois pendant la durée de l'écoulement qui faifoit l’objet de mon obfervation , j'avois DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 57 j'avois fait élever l’eau dans le baflin le plus bas, à une certaine hauteur fupérieure à l’épéron en P. RNÉISOCR ENT A TE FFE lCIT INF. La furface des deux baflins étoit, ci, . . $193"0o. 4. a hauteur obiervée, ci . . : . . . . . . 3520. Le cube ou volume total étoit , ci . . . 1774283. RBÉDSOU LADE ANT ENT A LOIR ,E. LE La vitefle relative à 12 pieds 1 pouce, feroit par feconde AE M AE A ES PEN 26P 92. La furface de l’empelement, qui eft de 5" 8. 3. 10. 4, multipliée par cette vitefle , donneroit pour dépenfe de cet empelement par feconde, ci . . 15326. 10.2. 1. ee 100, Et pendant 3° ou 180”, de . .. . . 27588. 32. Ici la dépenfe naturelle eft à l'efletive :: 16: 10. 29. EXPÉRIENCE HUITIEME. Ayant fait élever la vanne de dix pouces feulement au même empelement, c’eft-à-dire, n'ayant ouvert qu’à la hauteur de neuf pouces & demi (1), le trou de l’em- pelement au-deflus de fon feuil, & le centre de gravité de l'ouverture ainfi réduite , étant à 12 pieds 8 pouces x ligne au-deflus du niveau du baflin fupérieur , dans a | (1) Cette hauteur de 10 pouces fe réduit à 9 pouces +, parce que l’entre-toife maitrefle bafle, qui fert de feuil, eft relevée de 3 pouces vers ke bec de l’épéron; ce qui fait que la partie de cette entre-toife , correfpondante à l'ouverture de lempelement , cft elle-même relevée d’un pouce , & par conféquent de demi. pouce dans fon milieu, Tome IL, H $5 MÉMOIRES l'efpace de $" , l’eau , qui étoit d’abord de niveau dans les deux baflins inférieurs , s’y eft élevée à la hauteur de 3 pieds 7 pouces. RE SU EL T'AMVWENT FE CPE. Le quarré des deux baflins inférieurs étoit, comme ci- detus , de TR RE RE RS NT TO SRE É3 hauteur 6bfervées. (68. litat ueuche 31741 Le cube ou volume total, ci . . . . . . 18608.33. RÉ STNLITUANTINN A FERRIENE La vitefle relative à 12 pieds 8 pouces 1 ligne, feroit : House par feconde de . .. .. ..... 27% 56. La furface de l'ouverture, qui n’étoit _alors que de 3" 2.0.9.6, multipliée par cette vitefle, donneroit pour la dépenfe par feconde , 1... . . 8742 $.9.10. 100, Et dans $" ou 300",c1 . . . .. .. 26227. 4$. Ici le produit naturel eft à l'efletif : : 16: rt. 35e EXPÉRIENCE NEUVIEME. Ayant fait élever la vanne de ÿ pouces feulement, c’eft-à-dire, ayant mis à découvert le trou de l’empele- ment, de maniere que la hauteur de l’ouverture n’étoit dans fon milieu ,que de quatre pouces & demi au-deflus du feuil, & fon centre de gravité étant à 12 pieds 10 pouces 7 lignes au-deffous du niveau du baflin fupérieur, l’eau, qui étoit de niveau dans les deux baflins inférieurs, s’y eft élevée de r pied 11 pouces 4 lignes dans l’efpace de cinq minutes. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. ç9 RÉETS ONE EN ANTO RS RPENE"C TI T. Le quarré des deux baflins étoit , comme ci- deflus, de este ie CU aU TUE MO HOSTOPL : 0.4. La hauteur obfervée, ci)... 4... I. II.4 LE Volumertotal étoit,, 1: .'. 1009760. ROËNS DILIT ATEN AT U'R HE La viteffe relative à 12 pieds 10 pouces 7 lignes , eût crc parieconde Cine 2770: La furface de Pere , qui étoit réduite à n’être que de 16.0. 4.6, étant multipliée par cette viteile , donneroit pour la dépenfe par feconde 4174 2.0.0. 100. Ebdanstlongookiensit)Le# ras 22.170. Ici la dépenfe naturelle eft à l'effeétive :: 16 : 12. 90. IVota. Dans ces deux dernieres expériences, la gerbe d’eau n’étoit pas aufli écornée aux angles que dans les autres, où l’empelement étoit entierement ouvert. ÉPDOIPENR TE: N'CPEUS”", Sur la dépenfe du Moulin de Trebes par fes courfters. Pour faire entendre tout ce qui fe rapporte à ces expériences, 1l convient de mettre en avant les obfer- vations fuivantes , qui s’éclairciront au moyen de la planche 2. Ce moulin prend fes eaux dans la retenue de Trebes en À, par deux courfiers, & les verfe par un biefL,E, dans lequel coulant parallelement à léclufe de même Go MÉMOIRES nom , elles vont fe décharger dans la retenue inférieure fous les bas joyers de cette éclufe , vers F. Voyez la figure 1°°., planche 2. La direftion des courfiers bcd, eft coudée dans leur coupe longitudinale | comme l’on voit dans la froure 2 de la même planche. D'abord, du côté de la venue des eaux, c’eft un prifme reétangulaire & horizontal, qui 3 pieds 6 pouces de longueur. La coupe verticale & . travers de ce prifme , eit un reétangle, qui a 3 pieds de hauteur, & 2 pieds 3 pouces de bafe ; apres quoi ils fe terminent par un tronc de pyramide oblique , dont la grande bafe eft le reétanple dont nous venons de parler; & la petite, qui en eft l’orifice de fortie, eft un autre petit reétangle, dont la hauteur eft de fept pouces, & fa largeur de cinq. La longueur de l'axe de la partie inclinée , eft de neuf pieds, quoique la hauteur perpen- dculate du tronc ne foit que de huit. Le côté inférieur & horizontal de l’orifice eft à 9 pieds 3 pouces 6 lignes au-deflous du niveau des eaux du canal. Le centre de gravité de cette ouverture eft donc à 9 pieds feulement au-deffous du même niveau. Afin de mefurer la dépenfe de ces courfiers , ou enfemble , ou féparément , j'avois fat barrer par un batardeau tranfverfal, GH, figure 1"°., le bief de fuite du moulin, vis-à-vis le RATES du bafin le plus bas de l'éclufe, & ; je forçois par-là les eaux du bief à fe rendre dans ce ‘baffin, par une Hoi que j'avois pratiquée fur le couronnement de fes maconneries. L’éclufe ayant 24 pieds 7 pouces 6 Jignes de chûte, & la fortie des courfiers du moulin n'étant qu’à 9 pieds 3 pouces 6 lignes au-deflous du niveau de la retenue base , le 'bief avoit une pente aflez confidérable , pour que je n’eufle DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 6x pas à craindre d’engorger orifice des courfiers, en faifant regonfler les eaux au moyen du batardeau. De plus, pour avoir un récipient plus grand que le baflin, qui recevoit immédiatement les eaux du moulin, & pouvoir par - là donner plus d'étendue à mes expé- riences , la porte bafle en O & fes empelemens étant bien fermés , Je faifois ouvrir la porte troifieme en P ; par ce moyen, les eaux parvenues, dans le baffin le plus bas, à être au niveau de l’éperon de cette porte-ci , fe répandoient dans les deux baflins inférieurs de O en L. D'ailleurs, je chargeois par-là la porte bafle, de maniere qu’elle fermoit plus exaëétement. J'avois aufli fait fermer la porte feconde en L , & deux raifons m'y avoient déterminé. La premiere , c'eft que , pour compenfer à peu-pres les petites pertes inévitables , qui devoient fe faire à la porte bafle , foit aux pourtours & aux joints des empelemens , foit aux feuillures rondes , foit enfin entre les poteaux délardés, pendant la durée des expé- riences , 1l convenoit qu'il y eût, au-devant de la feconde porte L, une certaine hauteur d’eau, qui, par les pertes particulieres de cette porte , verfàt dans les baflins inférieurs une quantité d’eau approchante de celle qui s’échapperoit par la porte bafle. La feconde, c’eft qu'il falloit retenir dans le baffin fupérieur , les eaux qui pafloient par-deflus l’entre-toife de la porte de défenfe, & qui, fi elles fuflent parvenues dans les baffins infé- rieurs , ne pouvoient manquer d’altérer les réfultats. Les chofes ainfi difpofées, aufli-tôt que l'eau fournie par les courfiers du moulin, s’étoit aflez élevée dans le bain, où elle tomboit, pour être fupérieure au niveau de léperon de la porte immédiatement fupérieure , je prenois la hauteur de l’entre-toife de la porte bafle G2 MÉMOIRES au-deflus des eaux du baffin. En même-temps, je notois l'heure qu’il étoit ; & comme il falloit un certain temps avant le commencement de l'expérience, Pour que l'eau, tombant dans le baflin le plus bas, fe mit au niveau du baflin contiou, l’on voit que écoulemehe des courfiers devoit être bien établi au moment où l'expérience commençoit. Lorfque l l’eau étoit parvenue dans les deux baflins , à une certaine hauteur , je notois encore la hauteur de la même entre-toife au-deflus des eaux du baflin | & en même-temps l’heure qu'il étoit dans ce moment-là ; ce qui me donnoit le temps de l'écoulement & la hauteur dont les eaux s’étoientélevées pendant fa durée. EXPÉRIENCE PREMIERE. Les deux courfiers du moulin étant ouverts, l’eau des deux baflins inférieurs s’eft élevée d’un pied onze pouces dans l’efpace de 15°. RES T'EPRANT ELRE CITE La furface des deux baflins, dont il s’agit, étoit, comme nous avons déja vu dans les 7°., 8°, & 9°. expériences fur-lestempelemensinde 2104 JS 0 STD NOM La hauteur obfervée, ci... . . . .. ET er Le cube ou volume total, ci . . . . . . 9953. 3.0. R'EÉYS YO LT AT NY ACT UNRIENT: La furface des deux orifices eft de . . . -75 depied quarré, La viteffe relative à la hauteur de 9", (rot pat .(ECONdeR EEE ele 22 ete 122429 162610 La dépenfe par feconde CHE CR FEtdans 15 0900, 0-2: Le: + IOID3 Ier Ici la dépenfe naturelle eft à l'effeftive :: 16:17 5. GG. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. Gz EXPÉRIENCE DEUXIEME, Sur Les deux courfrers. Les difpofitions reftant les mêmes, & les deux courfiers ? , ’ ! ! étant ouverts , l'eau s’eft élevée dans les deux baflins inférieurs de 2° 6. 9. dans l’efpace de 20’. RÉSEET ATUE FF\ENC TT F La furface des deux baffins étoit | comme ci - deflus À de nr de dd dot Moro gthqeis, La hauteur obfervée, ci... ...... 2569. Le cube ou volume total, ci ...... 13307 2. 9. ne es | ROEISITNL TA TON ANTITRRIE L I eft évident que, tout le refte étant le même dans cette expérience-c1 & dans la précédente, les réfultats théo- riques doivent être proportionnels aux temps , & par conféquent font entre eux ::20:1 $ ; d’où il fuit qu’en fe bornant à ajouter au produit théorique précédent fon tiers , on a le produit théorique ou'naturel qui répond à cette expérience-ci, & eft de .. ... 13550. 82. Ici la dépenfe naturelle eft à l'efleêtive :: 16: 15. 7o. EXPÉRIENCE TROISIEME, Sur un Jeul courfier. Un feul courfier étant ouvert, & l’autre exa@ement fermé & étanché , l’eau des deux baflins s’eft élevée de 7 pouces 9 lignes dans l’efpace de 10”, 64 MÉMOIRES RESIULTAT:EFFECTUIF. La furface des deux bains eft , comme ci- deflus , MR arbre te uote MARS 2 AR ROSES La hauteur obfervée, ci . . . . . . . .. 6: 41 9, — Le cube ou volume total : . . . . . . «+ 3353. 9.11. D ————— R'ENSITOL IT AAÎT ENVAC TA CR R ENT: Pour éviter la longueur du calcul , il fuffit d’envifager que , dans cette expérience- ci , la dépenfe naturelle doit être le quart de la dépenfe naturelle dans l’expérience précédente, & par conféquent de . . . . . 3387.70. Icile produit naturel eft au produiteffe@tif : 161 83. TABLE, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. Œ AT BL AIMUE ; RENFERMANT les diverfes dépenfes relatives aux Expériences ci-defjus. 65 Hauteurs PLUeules Rapports conftantesde ; FE [des dépen- N°. d - | Duré s RARE ; ives ! | Exoé Peau au-def- Er Aires des Dépenfes | Dépenfes ae fes natu- | | He fus du centre lemens, | Orifices. naturelles. | effectives. | PACE lrelles aux | ‘Îde gravité : TN dépe des orifices. chDESe |effeltives. EXPÉRIENCES fur les empelemens des Eclufes. pi he t I 4. 2, 0.6|1.32.30| $.9 3e 547 | 506648. 17| 378508.00| 1136.62 | 16:11,95 2 6. 12. 8.0|0.40. o| 6.1.10. 7.0|292751. 66] 183625.75| 1275.17 |16:10.03 3 G. 3. 3010.23. ol12.5. 3. 7:41 332918. 661 18362$5.75| 2217.70 | 16: 8. 82 || 4 $.10, 4.010,42. O| 6.110, 7.0 198323. 02 183625.75|1214.45|16: 9.84 | | $ 5.10. 8.6]0.23.30|12.5. 3. 7.4| 329805. 74] 183625. 75 | 2170. 51116: 8.90 | | G 13e 710.6|0.112. 0] 6.9. 9. 9.6|140494. 39] 86407. 50| 2000, 17|16: 9.84 | | 7 Y200 TattOs ON Os Sal Ole de 3e TO: 4 27588, 32 17742.83| 1642.85 |16:10.129 | 8 12. 8. 1.0]0. 5. o| 3.2. o. 9.6| 26227.45| 18608. 33| 1033.79 | 16 ce) 9 12.10, 7.0.0, $. O| 1.6. ©. 4.6] 12$522.70| 10097. so] 560.97|16:12.90 | EXPÉRIENCES fur les courfiers du 4 Moulin de Trebes. Tome IT. pi ' pi | 9. 0.0.0 |0. 15 0 Le o. 0.0! 1016312 0953.25| 184.31|16:15.66 | TUE 9. 0 0.010.120. o| 45 o. o.o 13550.82| 13307.08 184. 82 16:1$ 70 | | 3 9. 0. o.oloc.10. o Tr © 0,0 3387.70 335375 93.15 116 NEA EE — = 5 66 MÉMOIRES RTE EL EXTO'NS Sur les Expériences ci-deffus , & fur les confequences qu’on en peut déduire. 1°. Il eft aife de voir, dans la Table précédente, qu'une grande ouverture dépenfe plus d’eau, à proportion, fous une petite hauteur de réfervoir, que fous une plus grande. Par exemple, dans les premiere & deuxieme expériences, où les ouvertures font très-peu différentes, la dépenfe efle@ive de la premiere étant exprimée par #1. 95 , la dépenfe effeétive de la feconde n’eft que 10. 03. Cette obfervation devient plus fenfble , fi lon compare les réfultats efle&tifs des premiere & feptieme expériences, où les furfaces des orifices approchent plus de l'égalité, mais où la hauteur, dans la derniere, eft prefque triple de la hauteur dans la premiere : car le produit effe@tif étant dans celle-ci 11. 9$ , comme nous l'avons déjà dit, il n’eft dans la feptieme que 10. 29- 2°, Les deuxieme & troifieme expériences prouvent que deux grandes ouvertures voifines l’une de l’autre, qui vuident de l'eau en même - temps , fe font des fouftrations réciproques, & qu'il n’eft pas vrai que, fi ces ouvertures font égales, elles dépenfent enfemble le double de l’eau que chacune d'elles fourmiroit en parti- culier : car, dans la troifieme , les deux empelemens vuidant à la fois, la dépenfe efle&tive n’eft que 8. 82, tandis que, dans la feconde, où 1l n’y a qu’un empelement ouvert , elle eft exprimée par 10. 03. Cependant la hauteur de l’eau , dans les deux circonftances , eft à peu-près la même. Cette obfervation fe trouve appuyé par les réfultats des quatrieme & cinquieme expériences DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 67 fur les mêmes empelemens, puifque, dans la cinquieme, où ces deux empelemens vuident à la fois, la dépenfe efle&tive eft exprimée par 8. 90; c’eft-à-dire, à peu-près par le même nombre, qui repréfente la dépenfe efle&@ive dans la troifieme expérience, correfpondante à celle-ci, tandis que, dans la quatrieme , où il n’y a qu’un empe- lement ouvert, la dépenfe effe@ive eft exprimée par 9.84. La même obfervation eft confirmée par la comparaifon des premiere, deuxieme & troifieme expériences fur les courfiers du moulin: car, dans les premiere & deuxieme, où les deux courfiers font ouverts à la fois, les dépenfes efle&tives font dans la premiere 15. 66, & dans la deuxieme 15.70, tandis que, dans la troifieme , où il n’y a qu'un courfier ouvert , la dépenfe efle@ive eft 15.83. Au refte, les centres des ouvertures des cour- fiers , fur lefquels ces trois expériences ont été faites, font diftans entre eux de 9 pieds , & les centres des empelemens , fur lefquels les deuxieme, troifieme, qua- trieme & cinquieme expériences du haut de la Table ont été faites , l’'étoient d'environ 13 pieds. Quant à l'amplitude du canal, qui, dangles deux cas, étoit le réfervoir commun qui fournifloit à la dépenfe, on peut s’en faire une jufte idée , en jetant les yeux fur la figure 1°°. planche 2, Yétendue du canal devant la porte de défenfe de lEvèque & celle de Trebes, étant à peu-près la même , ainfi que la profondeur de l’eau au-deffous du {euil des ouvertures, laquelle profondeur étoit d'environ 1 pied 6 pouces fur la longueur de 40 toifes. 3°. Lorfque l’eau coule par des tuyaux additionnels beaucoup plus larges à l'entrée qu’à la fortie | comme dans les courfiers dont je viens de parler, la dépenfe cflcétive diflere peu de la dépenfe naturelle : car , en 63 MÉMOIRES moyennant les réfultats de la premiere & deuxieme experiences , la dépenfe efle@tive fe trouve être à la dépenfe naturelle dans le rapport de 15. 68 : 16. Sur quoi Je remarquerai que vraïfemblablement la dépenfe efle@tive dans ce cas-ci eüt été encore plus grande » fi les courfiers, au lieu qu'ils étoient de pierre, euflent été de bois life , & bien corroye. 4°. Il s’en faut bien qu’il en foit de même dans les dépenfes des empelemens , quoique leurs ouvertures {oient des tuyaux prifmatiques de la longueur d'environ 20 pouces. On voit dans les réfultats de la Table, que les dépenfes effeétives font tres-éloignées des dépenfes naturelles , & que , pour rapprocher les premieres de celles-ci , il faut beaucoup diminuer l'aire des ouver- tures. Par exemple, en comparant les feptieme & hui- tieme expériences, on voit que le produit effeëtif, qui, dans la premiere, n'étoit que 10. 29 , l'empelement étant entierement ouvert, devient 11. 35, lorfque l'aire de l’orifice n’eft qu’un peu plus de la moitié de ce qu’elle étoit d’abord, la charge d'eau reftant la même, & que ce produit devient 1 2.#0 dans la neuvieme expérience, lorfque l'aire de l’orifice eft réduite à n'être qu’à peu-près le Die de ce qu’elle étoit dans la feptieme. °, Quoique nous ayons déjà remarqué qu'un grand ori vs donne refpe£tivement plus d’eau fous une petite charge que fous une grande , cependant une légere augmentation dans l'aire de l'ouverture peut faire que, fous la plus grande charge , la dépenfe effe&tive foit refpe&tivement la même que fous la plus petite. Par exemple, dans les quatrieme & fixieme expériences l’on peut obferver que, quoique dans celle-ci l’ouverture ne {oit plus grande que dans la premiere que d'environ ;: , DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 6) & que la charge d’eau dans la fixieme foit relative à une hauteur , qui eft deux fois & demi celle de la quatrième , cependant la dépenfe effeQive eft exprimée dans les deux cas par 9. 84. 6°. Les réfultats des expériences fur les courfiers du moulin , qui fe terminent par des petits orifices , font conformes à ceux de M. Poleni , & relatifs aux favantes obfervations de M. l'Abbé Bofut , qu'on trouve dans les articles 395 & 396 de fon Hydrodinamique, Tomell; mais 1l s’en faut de beaucoup qu'il y ait la même con- formité entre ceux que cet Auteur-ci a trouvés dans celles de fes propres expériences , où les tuyaux addi- tionnels étoient ou cylindriques , ou prifmatiques , & ceux que lon voit dans mes expériences fur les empe- lemens , où les ouvertures font ménagées , comme Je l'ai fait remarquer , dans des conduits pareillement p'ifmatiques : car, dans ce cas, fes dépenfes naturelles étant exprimées par 16 , {es dépenfes effe@ives le font par 13 , tandis que les dépenfes effe@tives , que j'ai obtenues, font entre 9. 84 & 11.95. Ce n'a été qu'en diminuant beaucoup l'ouverture de l'empelement, comme dans l'expérience neuvieme, que je fuis parvenu à avoir une dépenfe effeétive exprimée par 12. 90 , nombre très-voifin de 13 ; d’où 1l eft aifé de conclure que les formules admifes jufqu’aujourd’hui pour l'évaluation des dépenes des orifices, ne font applicables qu'aux cas où ces orifices font petits. Je démontrerai dans une autre occafon qu'elles ne font pas plus admiflibles , lorfque les hauteurs de l’eau , au-deflus des petits orifices , excedent les limites ordinaires. On ne fauroit donc trop multiplier les expériences de ce genre dans diverfes cir- conftances , parce qu'en attendant qu'il ait réfulté de 70 MÉMOIRES leur variété un concours de principes propres à fervir de bafe à des formules générales, leurs réfultats particu- liers ferviront de guide dans les divers mefurages qui pourront fe préfenter à faire dans des circonftances analogues. J'ajouterai à ce fujet que le plan des ouvertures, que j'ai mis en expérience , étant oblique au courant, leur dépenfe doit , ce femble , être moindre que s’il É pré- fentoit perpendiculairement au fil des eaux. Dans les empelemens placés comme fur KN, KR, le courant mis en mouvement fait AL es ei , comme l'on voit, avec le plan de ces ouvertures , un angle qui eft égal à celui que KN , KR , lignes du battement de léperon , forment avec: les ; joues TNS,URX de l'éclufe, & qui, dans ce cas-ci, étoit dEdbiron ND ÉD 4 quant aux orifices des courfiers du moulin de be ji le fil des eaux faifoit, avec le plan de ces orifices, un angle d'environ 45°. On ne fauroit douter que , fi le plan de ces ouvertures , fur-tout des empelemens, étoit perpendiculaire au fil du courant , les réfultats des dépenfes ne fuflent plus grands. Cette obfervation con- firme encore la néceflité de varier de pareilles expé- riences dans des circonftances qui foient tout-à-fait différentes. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 7x CR er EXPÉRIENCES SUR LA HAUTEUR DU MÉRCURE DANS LE THERMOMETRE, Faites für le Pic de Midi de Barepes. SE TE PU LOG ET NES CR LEA 2 Par M. DE LAPEIROUSE. S I les Phyficiens ont reçu avec applaudiffement cette in te ; D'ffertation profonde & bien vue, qui nous a donné un Y#ier 1783. apperçu général fur l’état des Pyrénées , ces fuperbes montagnes, fi dignes de l’étude du Naturalifte , & fi peu connues encore , ils n’ont pu voir , fans une forte d’étonnement , le réfultat des obfervations du Thermo- metre fur le pic de Midi & le pic de Lerey , près de Bareges, faites ou rapportées par M. d’Arcet(1). En effer, on eft fi accoutumé à voir la liqueur monter dans le Thermometre lorfqu'il fait chaud, & à la voir defcendre par le froid , que ces phénomenes journaliers avoient , pour ainfi dire , ufurpé l'autorité d’une Loi générale. Il a dû paroître très-fingulier de voir qu'il a pu arriver, que plus on s’élevoit dans l’atmofphere, plus le Mercure montoit dans le Thermometre, quoique fur les hauteurs, où ces expériences ont été faites , 1l y fafle, même en été, un froid défagréable € piquant. La croyance due à des expériences faites ou rapportées par M. d’Arcet , leur donnoit le plus grand poids ; cependant nombre de Savans confervoient encore quel- (1) Pag. 112 & fuivantes, à Ja fuite de Ja Différtation fur la dégradation des Pyrénées. ——— 72 MÉMOIRES ques doutes, & ils défiroient que ces expériences fuflent répétées. Ce fut pour fatisfaire leurs défirs , que l'Aca- démie , par fa Délibération , chargea ceux de fes Cor- refpondans qui habitoient les Pyrénées , de faire des expériences fur diverfes montagnes, pour conftater l’ele- vation ou l’abaiffement du Mercure dans le Thermometre dans les hautes réoions. Elle leur fournit des inftrumens faits avec foin fous les yeux de feu M. Garipuy. M. Vergnies de Bouifchere , Doëteur en Médecine, Correfpondant de l’Académie, réfidant alors à Ax dans le Comté de Foix , eft celui qui s’eft le plus occupé de ces obfervations , qu'il étoit à portée de faire ; il les a répétées fur Le Port de Pailleres , fur la montagne de Merens, & fur diverfes autres des environs d’Ax. M. l'Abbé Martin , Profefleur de Phyfique expéri- mentale au College Royal, un de nos Confreres, ayant fait quelque féjour à Wébre dans le Comté de Foix, voulut aufli voir par lui-même quels phénomenes lui préfenteroit le Thermometre fur les pics les plus élevés. Il fit fes obfervations fur la montagne de Bellié, non loin d'Ax. Les réfultats des expériences de ces deux Phyficiens furent les mêmes. Plus ils s’élevoient vers le fommet des montagnes, & plus le Mercure s’abaifloit dans le Thermometre. Le voyage que nous avons fait aux Pyrénées durant l'été dernier, M. le Commandeur Déodat de Dolomieu & moi, uniquement pour y faire des recherches & des obfervations {ur l'Hiftoire Naturelle de ces montagnes, nous ayant conduit à Bareges, il entroit dans notre plan de parcourir le pic de Midi, & de gravir fur fon fommet efcarpé. Je ne laïflai point échapper une aufh belle occafion. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 3 occafion. Je voulus voir fi le Thermometre m’offiroit les mêmes phénomenes qu’il avoit montrés à M. Guiot fur cette même montagne. Je réuflis à me procurer le même guide qui l’avoit accompagné ; avec ce fecours, & ayant à la main l’obfervation de M. Guiot, rapportée par M. d’Arcet, il me fut facile de me placer aux mêmes ftations qu'indique M. Guiot. Nous partimes de Bareges le Dimanche s du mois d'Août, Meflieurs de Puymaurin , le Commandeur de Dolomieu , Dubernard le fils, le Baron de Tarabel & moi. M. Darquier s'étant chargé de faire , durant notre courfe , des obfervations correfpondantes, refta à Barepes. Nos deux Thermometres étoient au Mercure, bien purges d'air, & aflez bien gradués. Ils étoient , depuis quelque temps , en obfervation comparative. Dans le réfultat , J'ai réduit une différence d’un tiers de degré , qui fe trouvoit entre fon Thermometre & le mien , qui étoit plus haut. Il eft inutile d’avertir que nous fimes à chaque ftation une paufe aflez longue, pour donner le temps au Mercure de fe fixer dans le tube. Je dirai feulement que j'eus toujours l'attention de tourner le tube du côté du Nord. Lorfque je l'ai expoft aux rayons du foleil , ce qui ne m'eft arrivé que fur le fommet , j'aurai foin d’en avertir. Le Thermometre dont fe fervit M. Darquier étoit à l'air libre, à peu-près à l’expofition du Nord-Ouelt & à l'ombre. L'on verra d’un coup-d'œil, & l’on pourra comparer très-commodément dans la Table fuivante, l’obfervation de M. Guiot & la mienne. Celle de M. Darquier rendra encore plus fenfible la marche qu’a tenu la liqueur dans les diflérens points d'élévation que nous avons fucceffi- Vement parcourus, Tome IT, K 74 MÉMOIRES Obfervations Obfervat. faites à Bareges |du Ther- A ar M.Darquier | mometre , Nous partimes de Bareges Burant notre |faites le 9 à G heures du matin ; le Ciel courfe. ne étoit ferein, & le foleiltrès-vif. sue = Midi , pa On voyoit quelques nuages M. Guiot, élevés venant du Sud-Oueft. Au moment du départ, le Thermometre à l'ombre mar- quoit +} MER Lorfque nous fûmes fur les fommités des premieres mon- tagnes, il s'éleva un vent du Sud-Ouelt, aflez frais. Arrivés à 8 heures : au bord du grand Lac , le Thermometre place en obfervation donna . . . . Deg. Fra&. | Heures. Degrés. | Deg. Fra&. 13: 7: 9 h 8: 15: ES tee Aprèsle déjeüné étantmon- s tés au plateau de la Hourquete 9- 15 des cing Ours, à 9 heures 40 minutes , nous eümes . « + +13. ; ie A 1o heures & demi, au bord du petit Lac , 1l étoit encore entierement couvert À de neige. Le froid étoit vif ; 10! IS nous obfervames . . . . . .[13. = 16. : Arrivés au fommet du pic à 11 heures , le Thermome- " tre expofé au foleil , nous EE YA etmes: 4 414 EME SAUESS 29. 3 Tourné enfuite vers le Nord, comme dans toutes les autres ftations , il defcendit à.[10. | 23. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 76 Deg. Fra@, | Heures. Degrés, Il fut ainfi ftationnaire juf- qu'a midi, moment de notre départ du fommet. Pendant tout le temps que nous y ref- tâmes , le foleil y fut très- brillant; le côté du Nord étoit couvert de nuages bas, qui partoient avec rapidité du Sud-Oueft. Le vent étoit vio- lent ; le froid étoit vif & pi- quant, quoique nous fuflions couchés fur les roches ébou- lées du fommet, à l'afpe& du midi : car nous ne pümes abfolument y réfifter étant debout. À midi & un quart au petit Lac en defcendant, à la même ftation que nous avions prife lorfque nous étions montés, attention que nous eûmes auffi Midi, I £ dans les autres ftations . . .[14 : À midi 45 minutes, au pla- teau de la Aourquete des cinq Oran AN NO hear 44, à h À une heure & un quart, I, 172 au bord du grand Lac. . . .|16. Durant quelques obferva- tions de lithologie & de bo- tanique que nous fimes aux alentours du grand Lac , des nuages épais gagnerent tous| | | 76 MÉMOIRES les pics ; & s’abaiflant peu a Deg, Fra. Heures. Degrés, | Deg. Fra&. peu, nous en fümes enfin en- veloppés. Ils étoient fi épais, que nos guides furent très- embarraffes pour retrouver le ; . A 3 heures chemin. À 2 heures, en par Rp tant , le Thermometre étoit al 14. [ont aufii en- loppé Ba- Ces brouillards ont aug- Ua menté d’épaifleur pendant n notre route , & ils font de- 321$ venus très-humides. De retour à Bareges à 4 heures : , par une bruine très-épaifle , nous avons ob- fervé le Thermometre à . .|14 : On s'apperçoit aifément , par la comparaifon de ces deux expériences, que les réfultats en font diamétralement oppofés. Dans celle de M. Guiot, le Mercure s’eft élevé dans le Thermometre en raïfon de l'augmentation du froid que l'Obfervateur éprouvoit, & de la hauteur du lieu de l’'obfervation. Dans la mienne, c’eft le contraire. Si on la compare à celle que M. Darquier faifoit dans le même temps à Bareges, on verra que je n'ai jamais obfervé le Mercure qu'a deux degrés au - deflous de l'élévation à laquelle 11 étoit dans ce même moment à Bareges, & cela dans toutes nos ftations , à la réferve toutefois de celle du fommet du pic ; & c’eft ici que fe trouve la différence la plus effentielle, & le vrai réfultat de l'expérience, puifque dans l’obfervation de M. Guiot le Mercure monta ( le tube expofe au foleil ) à 29 deg.+, & que.je ne l'ai vu qu'à 15 degrés. A l'ombre d'un parafol, M. Guiot l’obferva à 23 degrés, & moi à 10, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 77 le tube tourné vers le Nord. Dans cette même direftion, à peu-près , M. Darquier avoit fon Thermometre à Bareges , dans ce moment , à 17 degrés ; c’elt-a- qe qu’à Bareges le Mercure étoit plus élevé de 7 deores, qu'il ne l’étoit au même inftant fur ie fommet du | 7 ; tandis que, fuivant l’obfervation de M. Guiot, il l'eût été au contraire de 6 degrés de plus fur le lommet du pic, qu'a Bareges. Or, comme nos obfervations ont été faites avec toutes les précautions néceflaires pour fe procurer un concours de circonftances, le plus égal qui füt en notre pouvoir, avec celles de M. Guiot ; ; qu'elles ont été faites dans les mêmes lieux, aux mêmes ftations, avec le même ouide, prefque aux mêmes heures » à peu- près par le même vent, & prefque dans la même faifon , le réfultat que j'en ai obtenu étant conforme à ss que J'avois eu ci-devant de femblables expériences faites fur des pics très-élevés, dans d’autres parties des Pyrénées , & à ceux qu'avoient eu auf M. Abbé Martin & M. Vergnies de Bouifchere , il paroïit que l’on peut aflurer que l'afcenfion & l’abaiflement de la liqueur dans le Ther- mometre, fuit l'impulfion des mêmes lois fur les fommets les plus élevés, que dans nos plaines. Les obfervations contraires faites par M. Guiot fur le-pic de Midi, & fur le pic de Lerey par M. d’Arcet, doivent être regardées comme des phénomenes rares , qui proviennent d une caufe particuliere & accidentelle , qui aura échappé à la fagacité de ces Obfervateurs ; & je fuis d'autant plus fondé à le penfer ainfi, que M. d’Arcet ayant fait lui- même un travail très-fuivi fur le Barometre & le Ther- mometre , ‘fur le même pic de Midi , {es obfervations du Thermometre font conformes à peu-près aux nôtres. 738 M'E MONTRES Que faut-1l donc penfer de la contradiétion qui fe trouve entre ces deux expériences, que certainement on ne peut révoquer en doute, & auxquelles foi entiere doit être ajoutée ? Je répondrai, avec M. Achard(1), « qu'il » me able qu’on peut en conclure que les obfervations » météorologiques n'auront l'utilité qu’on peut en atten- » dre , que loriqu’on Joindra à à l’obfervation des inftru- » mens qui indiquent la pefanteur , la température & » l'humidité de l'air , celle d’une machine propre à » marquer l’état éleétrique de l’atmofphere , parce que » fi l'életricité n’eft pas la caufe unique d’un grand » nombre de météores, elle doit dumoins toujours con- » courir à leur on : donc en négligeant de » l'obferver avec le même foin que le Barometre & le » Thermometre , on perd le fruit de toutes les autres » obfervations météorologiques les plus exaétes. » (x) Nouveaux Mémoires de l'Académie de Berlin, année 1780, Mémoire fur limperfeétion de la Météorologie , &c, par M. Achard, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 79 ME M. :O:. L'URLE Sur Les Étoiles doubles & Le mouvement des fixes. PAr M DARQUIER. L£roque de linvention des lunettes fut, pour les LuirAñem Aftronomes, un commencement de nouvelles FEU à Ps “Hu ces ; un onde nouveau fe manifefta pour eux ; le 1783: nombre des corps celeftes s’accrut ; les quatre Satellites de Jupiter, les cinq de Saturne, fon anneau, furent une nouvelle acquifition pour notre fyftême folaire ; & l'inventeur des lunettes , ou dumoins Galillée , qui fut le premier les employer utilement, fut pour le (Gisks ce que plus d’un fiecle auparavant Criftophe Colomb avoit été pour le nouveau Monde. Depuis cet inftant , les Aftronomes & les Artiftes concoururent à l’envi pour 1 reculer les limites de l’optique. L'on dut à leurs efforts réunis les fameux objettifs de Campani & d'Huyguens , de 100 & 125 pieds ; le télefcope Grégcorien, le Neuvtonien, & dans ces derniers temps les lunettes achromatiques à triple objettif de Dollond , qui, fous une longueur de 3 pieds & demi, dune la commodité au grand effet. Elles avoient fait _prefque abandonner les télefcopes à réflexion , quoique très-aifés à employer , parce qu'ils font d’une clarté bien moindre ; mais ils reparoïflent aujourd'hui avec bien de l'avantage. M. Guillaume Herfchell , Hanovrien de naiffance, Mufñcien de profeffion , établi à Bath en Angleterre, 80 MÉMOIRES où il eft Organifte, pouflé par la force naturelle de fon génie, qui l’entrainoit vers l'aftronomie, eft parvenu à conftruire lui-même un télefcope de 7 pieds & demi, & ÿ pouces d'ouverture, qu'il peut faire groflir jufqu’à fix mille fois. C’eft avec cet inftrument qu'il a découvert la huitieme planete que l'on voit depuis trois ans , & dont j'ai publié 64 Obfervations dans le fecond volume de mon Journal aftronomique. Cette découverte eft la plus importante qui ait été faite en aftronomie depuis qu'on a connoiflance des autres planctes. Encouragé par ce premier fuccès , 1l a conftruit un fecond télefcope de 12 pieds , qui Fa conduit à une nouvelle découverte , qui n’a pas encore été publiée, mais dont j'ai été inftruit par une lettre d’un Membre de l'Académie des Sciences de Paris , dans le mois de Septembre dernier. Voici ce qu'il m'écrivit à ce fujet. « Je ne fais fi je vous ai fait part que M. Magellan a » écrit de Londres que M. Herfchell, avec fon fameux » télefcope, avoit découvert que l'étoile & du Bouvier » étoit double ; c'eft-à-dire , qu'avec un très- fort » grofliflement , on voyoit une fort petite étoile très- » près d'&, & d’une autre couleur. Nous n'avons pu » l’appercevoir diftinétement avec l'équipage ordinaire » de l’excellente lunette du Préfident S.....; mais y en » ayant appliqué une autre , qui faifoit grofir environ » quatre cents fois , nous avons vu cette petite étoile » bien féparée d’é. Elle paroït un peu plus bleue qu'elle; » mais on ne diftingue pas évidemment la diflérence » des couleurs entre cette étoile & &, que M. Herfchell » annonce être jaunâtre , autant que je me rappelle. » Vous jouiflez d’un Ciel plus pur que nous, & avec » votre fort grofliffement, vous pourrez peut-être voir » diftinétement DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 8r » diftinétement la féparation de ces deux étoiles , & » leurs différentes couleurs. Cela feroit aflez curieux. » Je reçus cette lettre le 13 Septembre 1782, & le foir même je proftai du temps ferein Fa obferver l'étoile en queftion. J'employai d'abord le plus foible équipage de ma lunette achromatique , de 42 pouces. À la pre- miere vue, je diftinguai, d’une maniere non équivoque, que Eole étoit compofee de deux parties très- inégales. Je me fervis enfuite du plus grand grofliffement , & la féparation paroïfloit très-bien ; mais à l'égard de Ja différence des couleurs, J'avoue qu’il m'a été difficile de me fatisfaire à cet égard ; elle ne m'a pas paru aflez marquée pour affeoir un jugement certain. La différence d’intenfité de la lumiere, néceffairement plus forte dans la grande étoile, que dans la petite, peut produire une illufion optique qui fera conclure une difiérence dans la couleur. Il faudroit au furplus, pour démentir le rapport de M. Herfchell dans cette partie de l’obfervation , en avoir de bien conftatées, & faites avec des inftrumens de la force du fien. Il y a plus : c’eft, je crois, que fon télefcope , qui eft à réflexion, doit mieux dépouillér les grandes étoiles de leurs Énullse lumieres , que les lunettes à réfra£tion de même force. J'ai vu avec mon télefcope à réflexion de 18 pouces, de M. Schort, la féparation des deux parties de cette étoile, prefqu’ suffi bien qu'avec ma lunette achromatique de 42 pouces , garnie de fon foible équipage , & qui eft cependant d'un eflet bien fupérieur à a celui du telefcope. Je ne ferois donc Pas étonne que M. Herfchell eût vu, avec la derniere évi- dence, ce que nous aurions ie que foupconner. On peut done regarder comme aflez vérifié ce phénomene, qui rentre dans la clafle des étoiles doubles. Le nombre Tome IT, : Lie 82 MÉMOIRES de celles-ci eft aflez confidérable , quoique les Aftro- nomes , qui ont donné des Catalogues d'étoiles , n’en aient fait aucune mention depuis Hyparque , jufqu’à Flamfteed. Celui-ci eft le premier qui en ait parlé ; encore n'y a-t-il dans fon immenfe Catalogue que la feule étoile de la quatrieme grandeur , placée dans la bouche du Dragon, qu’il ait notée comme double. M. de la Caille, dans fon Catalogue boréal & auftral , n’a notées doubles que à de la cinquieme grandeur de l’'Hydre, & une autre de la fixieme dans le grand Chien. Il eft cependant certain que cet Aftronome & fes Prédécefleurs ont reconnu , comme doubles , bien d’autres étoiles, telle, par exemple , que > de la Vierge. Il y a apparence qu'ils n’ont pas regardé cette circonftance comme eflentielle ; cependant comme un des objets principaux des Cata- logues eft de fixer l’état du Ciel à une certaine époque, & de mettre à portée les Affronomes de vérifier les changemens qui peuvent y furvenir , il auroit été à défirer qu'ils euflent noté celles qui leur auroient paru doubles. M. Bode, Aftronome Allemand, de l’Académie de Berlin, vient de publier un Atlas célefte d’un aflez grand format , fort bien gravé & très-complet ; il y a joint un Catalogue de 45 étoiles doubles ; on peut les divifer en trois clafles: 1°. celles qui, quoique tres-près, peuvent être cependant obfervées lune après l’autre, & dont l'afcenfion droite & la déclinaifon font fenfiblement diflérentes ; 2°. celles qui font trop près pour être dans le cas des précédentes , quoique fenfiblement féparées ; 3°.enfin quelques-unes qui paroïflent compofces de deux demi-étoiles fans féparation, foit que ces deux moitiés foient égales ou inégales. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 83 L'étoile € du Bouvier eft, par l’obfervation finguliere & précieufe de M. Herfchell, dans ce dernier cas. Mais les chofes ont-elles toujours été ainfi à l’égärd de cette étoile, ou bien cette duplicité eft-elle de fraîche date? C'eft ce qu'il eft très - difficile de décider. Nous ne pouvons attendre , pour nous éclairer fur cet objet , aucun fecours des Aftronomes qui nous ont précédé, dumoins de ceux qui font venus depuis la découverte du télefcope : car pour les autres, 1l leur étoit impoflible d appercevoir rien de pareil. Les premiers n’ayant noté que très-peu d'étoiles doubles, & ne paroïflant pas avoir eu pour objet même Aceelloire de les faire connoitre , leur filence fur la forme de l'étoile & du Bouvier, qui eft de la troïfieme grandeur , & qu'ils ont obfervée très-fouverit, puifqu'elle eft dans tous les Catalogues connus ; leur filence, dis-je, n'apprend rien ; mais il feroit très-poñlible que le hafard m'eût fourni le moyen de donner quelque lumiere fur cet objet, que Je n'évalue cependant que fa jufte valeur. L'apparition de la Comete de 1779 , que J'obfervai, me donna occafon de faire un fupplément de Catalogue d'étoiles pour 4 ou $ conftellations ; celle du Bouvier étoit du nombre, & j'obfervai trois fois, cette année-là, l'étoile & dont il eft queftion. Je n'ai aucune idée de lavoir vue alors telle que je l'ai apperçue à préfent avec la même lunette dont je me fervois en 1779; mais jufques-là je rentrerois dans la clafle des autres Aftro- nomes , & mon:filence en 1779 ne feroit pas plus concluant. Mais voici qui y ajoute quelque force : c’eft que dans ce Catalogue inféré dans le fecond volume de mes Obfervations , je trouve que jy ai notée comme double l'étoile n°, 2, de la fixieme grandeur du Bérénice, 84 MÉMOIRES Or, cela me fait penfer que fi j'eufle vu € du Bouvier double , je l’aurois notée aufli comme d’une bien plus grande conféquence. IL faut convenir, & je ne le difli- mule pas , que ce-n’eft qu'une preuve négative bien foible , que la duplicité de l'étoile € foit de nouvelle date; cependant elle paroït aflez forte pour devoir m'engager, ainfi que les autres Aftronomes qui l'ont vue dans cette occafion, a l’'examineravec attention, quand elle paroitra dans quelques mois vers l'Orient. Si l’on s’appercevoitque la féparation fût plus apparente, les foupçons que c’eft un phénomene nouveau » pourroient prendre quelque couleur de certitude ; mais il faudra vraifemblablement bien des années pour lui donner toute fa force. Le phénomene de la féparation d’une étoile déja obfervée comme unique en deux parties bien diftinétes, feroit de la plus grande importance. Occupé de quelques idées nouvelles fur la pofition des fixes , & fur leur mouvement, Je n’ai négligé aucune recherche pour bien conftater un fait qui jetteroit le plus grand jour fur le fyflême général du monde. J'ai trouve dans le premier Livre de l’Aftronomie, d’un Auteur célebre, un paflage qui m'avoit donné de grandes efpérances pour trouver enfin ce que J'avois cherché avec tant de foin. Il y rapporte qu’on a écrit que M. Dominique Caffini avoit vu quel quefois la premiere étoile d’Aries double, ainfi que la précédente , de la tête des Gemeaux , & partagée en deux parties diftantes l’une de l’autre d’un intervalle égal à la fomme de leurs diametres ; que la même chofe avoit eu lieu dans les Pléiades & dans l'épée d'Orion , où l’on en avoit vu quelquefois de triples & quadruples. Il cite pour fes garans Wolff & régori, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. B8s Cette expreflion de quelquefois ne m’avoit prefque pas laiflé de doute fur la réalité du phénomene, fur-tout l’obfervation en étant attribuée au célebre Dominique Caffini. Mon plus grand empreflement a été de recourir aux fources: J'ai trouvé effeétivement la même aflertion dans Wolf; mais il ajoute ces mots: Reférente Gregori. J'ai donc eu recours à ce dernier , & voici le pañage que j'ai trouvé, pag. 257 & 258 de la feconde édition de fon Affronomie Phyfique , imprimée à Geneve en 1726. Je crois devoir le rapporter en entier. Tranféo nunc alias in fixis mutationes ope telefcopii obférvatas , quales fünt que à Dominico Caffini noviter (1) deteilæ perhibentur ; quod nempè quædam ut Arietis prima É precedens ; caput Geminorum aliquando in binas æquales intervallo diametri utriufvis diflantes divifæ appareant ; guædam aliæ , ut Pleiadum aliquæ , Ë medio in gladio Orionis , quandoque triplæ aut etiam quadruplæ videantur , phenomena enim hæc præterquam quod nudis oculis ( de guibus folis nos hic agimus ) non cernantur aliundè originem ducere videntur, 6 alio proindè loco traëlanda veniunt. Il eft impoflible, je pente, de trouver, pour le fait dont il s’agit, un pañlage plus pofitif, une aflertion plus précife. Grégori doute fi peu du phénomene, qu’il ajoute a l’expofition , que ce n’eft pas là le lieu d'examiner quelle en eff la caufe ; mais j’avoue que plus je défirois que l’obfervation füt conftatée, plus je devenois difficile pour les preuves, & il me reftoit à la vérifier dans Caffini lui-même. Comme les découvertes & les obfervations de cet Aftronome celebre n’ont jamais été publiées en corps d'ouvrage , je n'ai pas été peu embarrafié de (1) La premiere édition étoit de 1702. 86 MÉMOIRES trouver les traces de cette obfervation ; mais enfin, en lifant l'Hiftoire qu'il a donnée de fa découverte de la lumiere zodiacale (1), J'ai vu évidemment que Grégori s’étoit trompé, & qu’en plaçant à contre-fens a/iquandô & quandoque , 11 avoit mduit à erreur MM. Wolf & de Lalande. M. Caflini rend compte , dans cet Ouvrage , des obfervations qu’il fit pendant plufieurs années de cette lumiere, & dont la premiere, qui eft du 18 Mars 1683, fut Hire dans le Journal des Savans , du mois fuivant. Il indique , dans chaque obfervation, Le conitellations qui couvroient cette lumiere ; & comme celles du Belier, du Taureau, des Gemeaux, &c. fe trouvoient fouvent comprifes dans fon étendue , il difoit : « La » lumiere rafoit ou couvroit la premiere étoile d’Aries, » la précédente de la tête des Gemeaux. » Et fes obfer- vations étant pouflées jufqu'en 1687 , & la lumiere zodiacale couvrant dans certaines Éte de l’année ces mêmes conftellations , 1l a dù répéter fouvent la même phrafe , ainfi qu’il l'a réellement fait pag. 27, 28, 33, 43, 49, 50, &tc. C'eft à la page 33 qu'il dit, à propos de la Comete qui parut à la fin de 1664, & qu'il obferva le 15 Février 166$ : & L’attention avec laquelle nous » furvions la Comete, nous fit appercevoir que la pre- » miere étoile d’ Fr TAL vue par la lunette, eft compofée » de deux étoiles, comme celle qui eft dans la tête du » précédent des Gemeaux , felon l’obfervation que J'en » fis quelque temps après. Je vis aufli a cette occafion a — — (1) Imprimée au Louvre vers la fin du fiecle deraier , dans un Recueil in-fol. de différens voyages entrepris par divers Membres de l'Académie, par ordre de Louis XIV. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 87 » la Nébuleufe de la ceinture d’Andromede:, que l'on » n'avoit pas apperçue depuis long-temps. » Que l’on rapproche maintenant ce paflage de celui de Grégori, & que l’on y trouve, fi l’on peut, l’aliquando , le quandoque videantur , le mutationes noviter deteéle de cet Auteur. Dominique Caflini ne dit pas un mot de cela ; c’eft en obfervant quelquefois l'étoile d'Aries qu’il sel apperçu qu’elle étoit double , & non pas qu'il l'a vue quelquefois double en l’obfervant : car cela fuppo- {eroit évidemment qu il Pauroit vue quelquefois fimple. Ce qu'il ajoute au fujet de la Nébuleufe d’ Andromede, eft bien remarquable : car on pourroit prefque à juie titre en conclure qu’elle auroit difparu pendant quel que temps , ce qui cependant n’eft certainement pas vrai. L'on voit qu'il ne parle que de fes obfervations | & non de celles des autres. Je n’ai trouvé nulle autre part des veftiges de ce que Grégori dit des étoiles d'Orion; concluons donc qu’on n’avoit rien vu, ou dumoins rien publié fur cette divifion d'étoiles avant M. Herfchell, qui, felon ce que jai appris depuis peu, a obfervé avec {on incomparable télefcope , dans plus de 200 étoiles, ce phénomene obfervé d’abord dans le feul € du Bouvier. A l'égard de la premiere étoile d’Aries citée, elle ne doit avoir éprouvé aucune variation fenfible depuis l'obfer- vation de M. Caffini, c’eft-à-dire, depuis environ cent vingt ans : car fi on vouloit ia la pofition de cette étoile double , telle qu’elle paroït actuellement , avec une lunette de 7 ou 8 pieds, on employeroit exaétement les mêmes termes que lu. Fidelle au projet que j'avois formé d’obferver & du Bouvier une feconde fois à lorient , je l'ai examinée, dans le mois de Mars dernier , ivee la même lunette ; 88 MÉMOIRES mais j'avoue qu’elle ne m'a pas paru auf évidemment double que dans le mois de Novembre. Pour me fatisfaire davantage fur cet objet, j’employai une lunette de 12 pieds à obje&tif double de Dollond, excellente, & dont l’Académie a maintenant l’ufage, & qui appartenoit à M. Garipuy ; elle fait un plus grand eflet que la mienne: auffi a-t-elle augmenté chez moi , ainfi que chez mon coufin , le foupçon que cette étoile eft double ; mais j'avoue cependant que cela na pas été jufqu’a la con- viétion. La Luifante de la Couronne, qui en eft très-pres, nous donna prefque la même apparence. Je dis prefque, parce que nous y trouvions exa£tement quelque diffe- rence. Au refte, comme j'ai appris depuis, ainfi que je l'ai déja dit, que M. Herfchell avoit annoncé qu'il venoit de faire la même remarque fur plus de 200 étoiles , peut-être que la Luifante de la Couronne eft du nombre. L'excellence & la grande perfeétion de fon inftrument, qu’on ne peut révoquer en doute, d'après tout ce qu'on en publie , lui donne un grand avantage fur les autres Obfervateurs ; & la découverte de la huitieme planete que nous lui devons , eft un grand préjugé en faveur de la fupériorité de ce télefcope. Il l’auroit vrafembla- blement confondue avec les étoiles fixes , s’il n’avoit ot ; DE dr s été frappé au premier afpe&t de la différence de lumiere que préfentent les corps lumineux par eux - mêmes , comme les étoiles, ou ceux qui bnilient d’une lumiere réfléchie , comme les planetes. La {cience de la connoiffance du Ciel, quoique cultivée depuis quelques milliers de fiecles, eft encore peuavancée. On pourroit trouver la caufe de la lenteur de nos progrès à cet égard, dans la multitude d'objets qu'embraffe l'Af- tronome , & fur-tout dans la vafte étendue du firmament, M. DE L'ACADÈMIE DE TOULOUSE. 89 M. de Maupertuis vouloit que l’on départit à chaque Aftronome une certaine zone du Ciel pour fon domaine, avec défenfes d'en pañler les limites , & de porter fes regards ailleurs, fous aucun prétexte. Il divifoit le Ciel en Empires , Royaumes , Souverainetés , &c. afin que les Aftronomes puflent vaquer , pour ainfi dire , plus aifément & plus exattement au foin de leurs Etats , en diminuant leur befogne. L'idée étoit belle , grande ; mais impofhble & chimérique. Bientôt l'ambition auroit dévoré le cœur des Aftronomes | comme elle dévore celui des Grands de la terre; l’efprit de conquête auroit prévalu ; chacun auroit empiété fur fon voifin, & le Ciel , qui eft le féjour de la paix , feroit devenu le théatre de la guerre. En abandonnant du projet de M. Maupertuis, ce qu'il y a de trop gênant, je le bornerois, à prefcrire à quelques-uns un certain travail particulier, en laïffant à tous un libre champ dans l’efpace. J'exhorte donc les jeunes & laborieux Aftronomes , & pourvus de lunettes convenables , à s'occuper du Catalogue des étoiles doubles , triples , fingulieres dans leur forme, leur couleur, &c.; en un mot, de faire fur ces aftres ce qu'on a fait fur les Nébuleufes, & fur-tout de bien fixer leur grandeur. Je fais l'extrême difficulté qu'il y a de remplir ce dernier objet ; nous n'avons d’autres mefures communes pour cela , qu'un jugement fort incertain , variable & particulier à chaque individu. Il n'y a pas deux étoiles égales parmi toutes celles que lon met dans la premiere clafle ; Sirius , la Chevre Antarès, Canobus, Aldebaran , &c. different en éclat, en couleur , en diametre apparent , même en fcintilla- tions ; effet uniquement dû à la conftitution de l’atmof- phere, puifqu’il n’exifte pas dans les endroits où elle eft Tome IZ, M 90 MÉMOIRES la plus pure , tels que le Caire & Malthe, &c. ; mais fi cette détermination eft rigoureufement impoñible, il faut dumoins tâcher, par un examen attentif & répété, d'en diminuer l'incertitude. On doit principalement s'attacher à bien connoître la force des lunettes qu’on emploie, pour être mieux entendu, foit par fes Contemporains, foit par Ja poftérité , dans le compte qu'on doit rendre de fes obfervations. Du {era par-là mieux à portée, tôt ou tard, de connoitre les changemens infenfiblement furvenus. L'idée de linvariabilité & de l'incorruptibilité des Cieux , ne tient peut-être qu'aux limites reflerrées de notre vue. La variation & la diflolution des formes ne feroient-elles l'apanage que de notre chétive planete ? Ona apperçu depuis long-temps, dans les plus groffes étoiles , un petit mouvement particulier qui avoit fait varier leur latitude ; elle n’eft plus la mème que du temps d'Hypparque , quoique, par la théorie, elle dût être invariable : c’eft principalement dans Arbres que ce mouvement, quoique très-lent, a paru le plus prompt. Si l'on n’a découvert rien de pareil dans les petites étoiles, c'eft qu'on ne les a point aflez obfervées , & que d’ail- leurs leur diftance du foleil, que leur petitefle doit faire fuppofer infiniment grande , doit faire paroître leur mouvement particulier infiniment lent. La maniere irré- guliere dont elles font difperfées dans l'univers , doit nous montrer , comme une vérité inconteftable , qu'il y en a néceffairement une infinité d’autres fituées dans le même rayon viluel qui arrive à nous, & qu’ainfi les plus grofles ou les plus voifines nous Htben les plus petites ou les plus éloignées. Je ne fais aucune difficulté de conclure , & j'en fuis convaincu , qu'il y a dans ce moment, relativement à nous, une quantité innombrable DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 91 d’éclipfesa@tuelles de fixes, dont l'immerfion a commencé peut-être avant l’origine de notre monde , & dont l’é- merfion eft réfervée à la poftérité. D’après ces fuppofi- tions , qui ne pourroient révolter que les efprits trop étroits, pour concevoir l’immenfité de l’Etre Éternel & de fes œuvres, on peut penfer que M. Herfchell a obfervé le commencement de Pimmerfion d’autres petites étoiles éclipfées par les grofles dans & du Bouvier, & dans les 200 étoiles qu'il a reconnu depuis être dans le même cas. Les fameufes Lois de l’immortel Kepler , déduites des Obfervations de Thyco, & qui ont donné naïffance à la fublime Théorie Neuvtonienne , ou dumoins qui démontrent évidemment qu’elle eft un fait, nous forcent de conclure aufli , par analogie , que ce qui fe pañle dans notre fyftême folaire , fe pafle de même dans les autres ; que les étoiles fixes étant des foleils pareils au nôtre , elles forment chacune un fyftème particulier , dont elles font la planete principale & régiflante , où tout eft rigoureufement égal à ce que nous voyons dans le nôtre. Il fuit de là que leur tendance vers les corps céleftes, renfermés dans leur fphere d’aétivité, eft réci- proque; que tout y eft mis & balancé fuivant la loi de la raifon inverfe du quarré des diftances. Enfin , une derniere conclufion à laquelle on ne fauroit fe refufer, c'eft que cette quantité infinie de fyftêmes divers avec les grofles planetes qu’ils renferment fans doute , font foumis, & obéiffent à la même loi; qu’ils font entraînés eux-mêmes dans les trajeétoires particulieres qui leur font deftinées autour d’un centre commun, unique, immobile ; en un mot, d’un point où réfide toute la force qui régit l’univerfalité des fyftêmes, que j'appellerai volontiers le pivot du monde des mondes, 02 MÉMOIRES Un Obfervateur, placé par-tout ailleurs que dans ce centre, doit voir tous les fyftèmes particuliers, à l’ex- ception de celui auquel il appartient , alternativement dire&ts, rétrogrades , ftationnaires ; & c'eit ici le vrai principe de ces éclipfes, de ces occultations, immerfions, émerfions d'étoiles dont j'ai parlé plus haut ; de ces étoiles doubles, triples , &c. A l'égard de ces difpari- tions périodiques, de ces apparitions fubites d'étoiles , dont l'Hiftoire de l’Aftronomie nous offre tant d’exem- ples , pourquoi n’en chercheroit-on pas la caufe dans la combinaifon feule du mouvement de la planete princi- pale, & des fecondaires de chaque fyftême ? Y auroitil quelque abfurdité à penfer que dans certaines circonf- tances , les dernieres peuvent nous dérober la vue de la premiere ? L'inconcevable durée des périodes , des révolutions de ces fyftêmes particuliers, qui efraie prefque l'imagi- nation, ne nous a pas permis de nous appercevoir encore d’une différence fenfible dans leur pofition refpeétive ; nous appartenons à un monde trop nouveau pour cela. Ce n’eft plus le problème des trois corps qu'il faudroit réfoudre , pour déterminer leurs trajeétoires ; ce feroit celui d’une infinité de corps. La géométrie des hommes ne fauroit aller jufques - là ; c’eft le fecret de l’Etre Suprème , qui, en les tirant du néant par un feul aéte de fa volonté, leur a imprimé le mouvement, à la con- fervation duquel eft attachée la durée finie de l'univers. Quoique l'intervalle qui s’eft écoulé depuis Hypparque jufqu’à nous, foit bien court , relativement à la lenteur du mouvement particulier des étoiles , cependant la comparaifon de fon Catalogue avec les nôtres, femble indiquer quelques anomalies indépendantes de leur mou- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 93 vement en longitude. M. Mayer eftun des premiers qui les ait conftatées. ï eft vrai que V imperfeétion des inftrumens des Anciens, peut-être même celle des nôtres, qui n’ont pas encore acquis toute la précifion dont ils font fufcep- tibles | nous empêchent de démêler les quantités dont il eft ici queftion. Mais devons-nous pour cela renoncer à ces recherches, & abandonner à la poftérité l'avantage de jouir feule de la connoifflance du mouvement particulier des fyftèmes & de leur déplacement relatif? Je ne le penfe pas ainfi. Nous avons dans l’obfervation des Nébuleufes , & fur-tout dans la Belle d'Orion , de quoi conftater ce déplacement. Découverte en 16$6 par M. Huyouens, il en deflina la figure , & la pofition des étoiles qu’elle renferme ; elle a dans ce deflein à peu- près la forme d’un chevron irrégulier à branches inégales ; le fommet de Pangle qu’elles forment , eft dirigé à l'occident ; un grouppe de quatre étoiles brillantes , quoique petites, eft placé dans la partie nébuleufe, près de ce fommet ; trois autres étoiles font fituées en ligne droite , à égale diftance à peu-près les unes des autres , dans la branche auftrale dont elles occupent le milieu. Soixante-quinze ans après, C’eft-ä-dire, en 1731, M. de Mairan en deffina, d’après fes Dénaron une figure, qui differe de celle de M. Huyguens, quant à la pofition des étoiles. Elle fut de nouveau obfervée en 1758 , par M. le Gentil , d’abord avec un télefcope Grégorien de fix pieds, & enfuite avec des lunettes de huit. & dix-huit pieds. Ce qu'il y a de fingulier dans cette obfervation, c’eft qu avec ces dernieres, la Nébu- leufe lui a paru être , à peu de chofe près , telle que 04 MÉMOIRES M. Huyguens l’avoit deflinée ; & avec le télefcope de fix pieds , les trois étoiles paroifloient en ligne droite hors de l’efpace nébuleux , faifant , avec cette même branche , un angle de 40°. Il y a impofhbilité de concilier ces différences, qui certainement ont dépendu de quelque illufion optique. Je ne n’y arrêterai donc pas pour pañler à la derniere obfervation qu’en a fait M. Meflier en 1773 , & dont il a donné une figure dans une addition à fon Mémoire {ur les Nébuleufes, inféré dans les Mémoires de l'Aca- démie des Sciences de 1771. Le grouppe des quatre étoiles eft en entier dans la Nébuleufe au-deflus de l'angle des deux branches du che- vron, mais plus près que dans la figure de M. Huyguens. Les trois autres étoiles font fur {a limite auftrale ; de maniere que les deux plus occidentales étant dans la partie nébuleufe, l’orientale eft en dehors. Cette figure eft fi différente de celles de MM. Huyguens & Mairan, qu'il eft inconteftablement prouvé qu'il y a un déplace- ment relatif de la Nébuleufe & des étoiles, plus confi- dérable dans l’efpace de cinquante-deux ans écoulés depuis Fobfervation de M. de Mairan à M. Meffier , qu'il ne l'avoit été dans foixante-quinze depuis M. Huyguens à M. de Marran. Enfin , j'ai moi-même obfervé plufieurs fois , dans le mois de Mars dernier , cette même Nébuleufe au couchant, avec ma lunette achromatique de 42 pouces, qui eft de même force que celle de M. Meffer. Je lai aufli obfervée , le 26 du même mois, avec la lunette de Dollond de douze pieds, à obje@tif double , dont l'Académie a l'ufage, & qui eft excellente. J'ai deffiné la figure de cette Nébuleufe d’après ces obfervations, & DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. os j'en ai fait vérifier l’exaêtitude , l'œil à la lunette, par M. l'Abbé de Rey , M. Darquier mon coufin, & le fieur Caftets, Artifte fort intelligent. Cette figure difiere affez vifiblement de celle de M. Meflier , en ce que le grouppe des 4 étoiles s’eft fort rapproché du fommet de l'angle, & que les trois autres font prefque totalement hors de la Nébuleufe , à l'exception de la plus occiden- tale , qui eft encore dns 1 ne m’étendrai pas fur une figure de cette Nébuleufe gravée dans le Journal de Phyfique de M. Rozier , du mois de Janvier de cette année , d’après l’obfervation faite en 1779 par M. Lefevre , Profefleur de Phyfique à Lyon ; elle s'éloigne fi Condé blornent des autres & de la mienne , que j’en foupçonne l’exaétitude. Au refte, en conférant toutes les figures qu'on en a defliné, il Énble que l’on pourroit préfumer que l'apparence de la Nébuleufe peut varier un peu , felon qu’on l’obferve au levant , au méridien ou au couchant ; & je penfe qu'il eft eflentiel de noter cette ce Les étoiles fixes & les nébuleufes font fi finguliere- iment différentes à la vue, qu'il eft bien difficile de former quelque conjeéture be fur la nature de ces der- mieres. Cette connoiffance feroit plus curieufe qu’utile pour l’Aftronome. Il lui fufit de pouvoir les confidérer comme des points de comparaifon propres à indiquer la réalité du déplacement particulier des fixes ; c'eft un nouveau champ ouvert aux Oblervateurs. Le Catalogue des Nébuleufes de l’hémifphere boréal de M. Meier, & celui de l’auftral de M. l'Abhe de la Calle, offrent se facilités qu'on n’avoit pas avant eux. Un Obfervateur qui s’occuperoit uniquement à évaluer exa£tement leurs diftances des étoiles qui les avoifinent , ainfi que la 96 MÉMOIRES configuration relative de celles qui y font placées, & qui en tiendroit une note exaéte , trouveroit dans les découvertes qui en réfulteroient, le fruit de fes travaux. F infifte d'autant plus volontiers fur cet objet, qu'ayant répété, il y a peu de jours, fur la finguliere Nébuleufe que je découvris dans la conftellation de la Lyre, en Février 1779, les obfervations que je fis pour lors, il a réfulté de leur comparaifon que depuis cette époque, la Nébuleufe s’étoit éloignée de # de la Lyre, dans l’ordre des fignes, en afcenfion droite, de 43”, & en déclinaifon, de 47”. Remarquons que fa figure ronde &bien nettes » permet d’en obferver le centre avec aflez d’exaétitude. Cependant je ne diffimulerai pas qu'une partie de ces différences peut être attribuée a l'erreur inévitable des obfervations ; mais elles font aflez fortes pour faire naître le foupçon bien fondé du déplacement relatif de la Nébuleufe & de l'étoile. Ce ne fera guere que dans quelques années que ce foupçon pourra être infirmé , ou fe changer en certitude. J’ajouterai que l'ayant obfervée à préfent dans les mêmes circonftances , avec le même inftrument, & le concours des mêmes perfonnes qu'en 1779, nous avons tous jugé féparément que fa lumiere & fon diametre avoient augmenté ; mais je crains l’illu- fion. Je fuis fobre fur l’aflertion des faits qui ne font pas encore à leur point de maturité ; le mouvement des divers fyftêmes eft dans ce cas, & je finirai en difant , avec Séneque le Philofophe : Wenier rempus quo pofteri noftri tam aperta nos neciffé mirabuntur. ADDITION au Mémoire ci-deffus. On a dû voir dans ce Mémoire , que d’après les comparaifons que j'avois faites de difiérentes obferva- tions DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 07 tions de la Nébuleufe d'Orion, & de celle que j’avois découverte en 1779, dans la Lyre , J'avois pu former un foupçon aflez fondé du mouvement particulier de ces Nébuleufes. Celle de la tête du Verfeau fait élever le même foupçon. En réduifant mes obfervations de 1781 » j'ai trouvé dans mes Journaux neuf obfervations que j'avois faites de cette belle Nébuleufe depuis le 17 Décembre 1787, jufqu’ au 22 du même mois, en la comparant à différentes étoiles de cette bien & d’Antinous. Par neuf obfervations à jours différens , dont les plus el oignées entre elles ne le font pas d'un quart de minute , J'ai fixé {on afcenfion droite à 32°. 32 . 54, & fa déclinaifon auftrale à 1°. 37°. 40”. Comme M. Maraldy avoit obfervé cette Nébul leufe, qu’il découvrit le 11 Septembre 1746, & M. Mefer le 11 Septembre 1760, j'ai été curieux de comparer nos trois obfervations, pour voir quel avoit été fon mouve- _ment, en He droite, dans leur intervalle. Il s’étoit écoulé quatorze ans de la premiere à la feconde, 21 ans + 102 jours de celle- ci à la mienne , & 35 ans + 102 Jours de celle-ci à la premiere. Par le leu fa variation annuelle , en afcenfion droite , doit être de 46". 6, & par conféquent , en 14 ans, il a dû être denlisusunushiuat M tsar sb HO 5246. Le 11 Septembre 1746 , obfervation CNE Marly RE. 200 0" 320000 IT, C. Audit jour 1760, par M. Mefier, . 320. 17. o. Différence . . .. ME AT CR Tome IT. N 03 MÉMOIRES Donc par cette comparaifon , la Nébuleufe parottroit avoir eu un mouvement rétrograde, en afcenfion droite, de 62". en quatorze ans. (1) Mouvement calculé en vingt-un ans 102 jours, de 1760 daSTUCL at MAIN Re t til 16301 Obfervation de1760, 2200132017. M0; | 220%:3320 8 Obfervation de 1781 . ... . .. . . 320. 32. 54. Mouvement rétrograde de . . . . .. 2017: Mouvement calculé en trente-cinq ans rod jouEs neue Ne sourate 2 TION ET Obfervanon. de 174624210820 087 20; | 2200.94-00 7. Obfervation de 17811: 4 : :.". 0 320:32..54. (2) Différence rétrograde . . . .. 130 7e Ces différences en quatorze, en vingt-un & trente- cinq ans , ne font point proportionnelles ; mais ce qu'il y a de fingulier , c’eft que , quelque comparaifon que l'on en fafle , elle donne toujours un mouvement rétrograde. Or cela feul doit fuffire pour engager les Aftronomes à obferver cette Nébuleufe avec le plus grand foin & la plus grande exaétitude , l'obfervation (x) Cette différence de 62”. peut fe réduire à 20”, fi M. Maraldy a comparé , comme il y-a apparence, la Nébuleufe avec « du Verfeau, pris dans les Tables de M. Caflini, où cette étoile cft trop avancée de 42", & fa variation annuelle trop forte d’une feconde. (2) Cette différence de 1'.36".7 fe réduit à 56”. 7, fi on a égard à la correétion de la note précédente ; & alors on aura 20”. 36". 5 , 56". 7 pour les wrols différences des trois comparaifons plus proportionnelles, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. o9 en étant très-fufceptible, la Nébuleufe offrant un centre très-diftin&. MM. Maraldy & Meffier n'ayant point donné le détail de leur obfervation, on ignore s'ils l'ont corrigée, ainfi que j'ai fait la mienne, par l’aberration & la nutation ; s'ils ne l'ont point fait , comme je le foupçonne , les mouvemens particuliers de rétrogradation feroient plus confidérables. 100 MÉMOIRES M ÉMOIRE Sur un Tombeau qui étoit dans l'ancienne Eolife de la L . LA Daurade , & fur une Epitaphe gravée fur un marbre attaché au mur de cette Églife. Par M. DE MONTÉGUT. Lu le 6 LHisrome des Comtes de Touloufe, fi intéreffante Juillet 7% Dour cette Ville ; & fi digne d’embellir les Annales de l'Univers, eft une de celles qui a été le plus négligée, & fur laquelle on a été fouvent forcé de fe livrer aux conje@ures. L’ignorance qui a régné dans toute l'Europe jufqu’au onzieme fiecle, la négligence des Auteurs con- temporains à conferver la mémoire des événemens de ces temps reculés , le petit nombre de monumens qui nous reftent de la grandeur des anciens Souverains de cette Province, tout femble avoir concouru à répandre fur cette partie de notre Hiftoire , des nuages qu'il eft peut-être impofhble de difiper. Guillaume de Puylau- rens, Nicolas Bertrand, Guidon, Noguier & plufeurs autres Ecrivains, qui ont parlé des Comtes de Touloute, ont donné carriere à leur imagination , & fubftitué des fables au récit exaët des faits qu'ils ignoroient. Les con- traditions & les différences effentielles qui fe trouvent entre les opinions de ces Ecrivains , prouvent qu'ils étoient tous également éloignés de la vérité. Catel a été le premier qui a tenté avec fuccès de débrouiller ce cahos. Cet Auteur favant & laborieux a réuni, fous un feul point de vue, les traits de l'Hiftoire de nos Comtes, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. rot ui fe trouvoient répandus dans diflérens Auteurs. Il a fouillé dans toutes les archives ; il a raflemblé des ma- nufcrits inconnus jufqu'à lui; & après un long & pénible travail , il eft parvenu à donner une notice exafte & fuivie des Comtes de Touloufe , prouvée par des a@tes authentiques, & au-deflus de tout foupcon. Cafeneuve, Marca & Lafaille ont répandu un nouveau jour fur cette Hiftoire , qui a été portée prefque à fa perfe&tion par les Auteurs de l’'Hiftoire de Languedoc. Le Public a Pobligation à M. Raynal, Membre de cette Académie, de l'avoir mife fous fes yeux dans une forme plus abrégée & plus exafte. Un des points de cette Hiftoire , fur lefquels les Auteurs ne s'accordent point , eft l’époque de la mort de Guillaume IV , quatorzieme Comte de Touloufe, & la connoiffance du lieu où il fut inhumé. Catel n’en fait aucune mention ; 1l dit feulement que ce Comte vivoit encore vers l'an 1090 , & il cite une Bulle du Pape Urbain IT, qui lui accorde, ainfi qu’à {es fuccef- feurs , la permiflion d’avoir un cimetiere dans l'Eglife de la Daurade. On trouve à la fin de l’'Hiftoire de Catel, un extrait des regiftres de l'Hôtel de Ville, dans lequel il eft dit, « qu'il y a un Comte enterré au cimetiere de » la Daurade, vers la rive de Garonne.» Lafaille, aprèsavoir également cité la Bulle d'Urbain If, fixe le temps de la mort de Guillaume [V à l'année 1090, & il ajoute : « Apres ce qui a été dit du cimetiere de » la Daurade , il y a apparence que Guillaume y fut » enterré. On y voit encore aujourd’hui un Tombeau » avec les armes des Comtes de Touloufe : c’eft peut-être » le Tombeau de ce Comte ; mais on n’oferoit l’aflurer, » parce qu'il n’y a aucune infcription. » 102 MÉMOIRES Chabanel , dans fon Livre des Antiquités de la Dau- rade , l'a conjeéturé de même d’après les bienfaits que Guillaume accorda à cette Eglife , donnée par Ifarn , Evêque de Touloufe , à Hugues, Abbe de Cluny , en 1077 , de l'avis € confeil de fon Seioneur Guillaume , Comte de Tolofe, & d’après la Bulle du Pape Urbain IT, qui permet à ce Comte de {e faire inhumer , lui & fes fuccefleurs, dans le cimetiere de la Daurade. Les Hiftoriens de Languedoc ont donné la véritable date de cette Bulle ; elle eft de l’année 1093. Ils citent à ce fujet un accord pañlé la même année entre les Chanoines de Saint Etienne & de Saint Sermin , par la médiation des Evêques de Touloufe, de Carcaflonne & d'Agen (1). « Ces Prélats, par leur Jugement, maintin- » rent les Chanoines de Saint Sernin dans l’ufage où 1ls » étoient d’enterrer dans le cimetiere de leur Eglife , » l'Evêque , {e Comte, & tous les Nobles de la Ville ; ufage fondé fans doute fur la piété des peuples envers » le faint Fondateur de l'Eglife de Touloule. » Le paflage que je viens de rapporter, prouve que la permiffion que donna le Pape au Comte Guillaume , de {e faire inhumer , avec toute fa poftérité, dans le cime- tiere de la Daurade, eft néceflairement poftérieure à cet accord , & que ce Comte vivoit encore en 1093. On en trouve une nouvelle preuve dans une reftitu- tion faite la même année au Monaftere de Soreze, des dimes de l'Eglife de Saint Sernin de Druilhe. Cet afte, rapporté dans les preuves de l'Hiftoire de Languedoc(2), eft daté de l’année 1093, Guillaume étant Comte de Tou- loufe. On ne trouve plus aucun monument qui prouve D ———————————————————— (x) Hifloire de Fanguedoc , Tom. 11, L. 15, pag. 280. (2) L'om. 2, pag- 332. ÿ DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 102 que Guillaume ait vécu au-delà de cette année. Les Hüftoriens de Languedoc rapportent une Charte pe Raymond de Saint- Gilles fon frere & fon fuccefleur ; date du 20 Juillet 1094. On peut donc fixer l Re de fa mort au commencement de 1094 , ou à la fin de 1093. Les mêmes Hiftoriens préfument , fur la foi d’un ancien Auteur , cité par le P. Labbe (1), que Guillaume IV mourut à Jérufalem , où 1l étoit allé en pélerinage avec Berenger , Comte Fe Barcelone , fon frere utérin, qui y mourut en 1093. « Il paroït en effet » certain, ajoutent-ils » que Guillaume mourut hors de » one > Car on n'y trouve aucun veftige de fon » Tombeau. » C’eft fans doute d’après une autorité aufli refpeétable, que M. Raynal affirme (2), « que Guillaume IV, » débarrafle du gouvernement de fes Etats, qu'il mec ! ! \ , » cédés à fon frere Raymond en 1088, s’adonna tout » entier à la dévotion, & fit un pélerinage à Jérufalem, » où il mourut vers l'an 1094. » Quelque porté que je fufle à adopter le fentiment de M. Raynal, j'avois toujours regardé ce fat hiftorique comme n'étant pas fuffifamment éclairci. Catel & Lafaille n’ont donné que des conjeëtures, qui menent à croire que Guillaume IV eft mort à Touloufe |, & y a été inhumé. Les Hiftoriens de Languedoc, que M. Raynal afuivis, n ’oppofent à à ces conJet res que le témoignage e d'un HUE inconnu , dont ils ne rapportent point le pañfage, & ils ne font : aucune dificulté d’aflurer que ce Comte ne mourut point à Touloufe, puifque lon n'y trouve point fon Tombeau. Cette preuve négative ne (1) Gaufrid. Voffienfis. Tom. 11 , novæ biblioth. Labbæi, (2) Hiftoire de la ville de Touloufe, L. z, p. 49. Voy. pl. Ire. NE 104 MÉMOIRES m'avoit point fatisfait. La découverte d’un Tombeau placé dans l'Eghfe de la Daurade , & qui, depuis fa démolition , a été tranfporté dans le cloitre , paroit propre à éclairair ce fait hiftorique. D’apres l'examen que j'en ai fait, je penfe qu'il y a de fortes raifons pour croire que c’eft le Tombeau de Guillaume IV , mort à Touloufe vers la fin de l’année 1093, & inhumé dans le cimetiere de la Daurade , en conféquence de la per- miflion qui lui avoit été accordée par Urbain IT dans le cours de la même année. Ce Tombeau étoit adoffé au mur extérieur de l'Eglife, & placé au-deflus d’une porte latérale, fous les orgues, du côte de la place de la Daurade. Il étoit pofe fur quatre colonnes ; en démoliffant le mur , on a détruit ces colonnes, ainfi que la pierre qui couvroit le Tombeau. On n’a confervé que le cercueil, qui a été placé dans le cloitre tenant à l’Eglife. Ce cercueil eft de forme quarrée, d’une feule pierre blanchâtre & molle; 1l a fix pieds de longueur , fur trois de largeur , & environ quatre de profondeur ; le devant eft orné d’une fculpture aflez groffiere. On y voit dans le milieu un écuflon de forme ronde, orné d’une bordure en petits feuillages, Le milieu de l’écuffon eft occupé par un agneau a 5 de gauche à droite , dont la tête eft environnée d’un cercle ; derriere le corps de l’agneau , on voit une longue croix pâtée. Le champ eft femé d'étoiles ; à droite & à gauche on voit deux écus de forme triangulaire ; ils font remplis chacun d’un château crenelé à deux tours ; au bas pa- roiflent des faces ondées. Ces écus font furmontés d’un couronnement de feuillages ; tout le fond de la pierre eft couvert d'une vigne fauvage ; le haut du cercueil eft orné d’une bordure en petites feuilles. Du reîte, on ne Fi \N c \ < aspire IFCSa opvs SCYPTURE AR RRIS\ RVIUS os rEMSET RITUELS vE M RER HIC \EVMELLVS,\ LL pp Un ee or A1C NEUVE TS \\ lconpvs SvB (LAPIDE fpi ITVS IN REGÇVIE 2 VER IUMACVLATE \ À ( Her \ETATE\ Vi TAE A Li, De | \ [e CAN CISQ raies \ Tite ANGELICIS VIRCI \\ | \ - \ # € € 4; VS R SACER VReANQ?S RoMANVS PAPA SECVHD \\ S Le sr LME TERIVM PREGPIT oc coMtTVM \ INSVRER VT Dipics IVBET ILLO \ \ LSAcRe MANDATO | cIVIBVS INDE + D | à > RS TT Var LP | , TNT PES | # | fe D # TT à À +{ à LC, | URL EPL" a. 1 N | Lt 29 gr AT ROUTE" SAT é Car k nt r AE ES À d \nalE An W " LA PL STAR dy ques? Fe aug A RE 1!) 1 ee SL PT lise Qt Cr | mis AL eV DRE es MAR j ns bess C'AEUt el pe REA re fs " Daren eue vw. +4 &:4\ £ l'E pi} lu 4 49h MS DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 10$ ne trouve fur cette pierre aucune infcription qui annonce le nom de celui pour qui ce cercueil a été fait, ni la date de fa mort. Ce Tombeau n’étoit certainement pas inconnu aux Hifloriens du Languedoc, non plus que la defcription qu’en donne Lafaille , qui préfume qu'il contenoit le corps de Guillaume [V , ni l'extrait des regiftres de l'Hôtel de Ville * , imprime à la fuite de l'Hiftoire de + second Catel, à l’article de Guillaume IV, où il eft dit « qui ivre blanc. » y a un Comte enterré au cimetiere de la Daurade , vers » la rive de Garonne. » Quand ces favans Bénédiétins ont rejeté une opinion aufli vrafemblable , ils fe font peut-être fondés fur ce que l’établiflement des armoiries étant fixé, par la plupart des Auteurs , au temps des Croifades, en 1096, il fe trouve poftérieur au décès de Guillaume IV, & conféquemment, qu’on n’a pu graver fur fon Tombeau des armoiries qui n’exiftoient pas. On pourroit ajouter que les armes des Comtes de Touloufe, fuccefleurs de Guillaume , étoient différentes de celles qu'on voit fur cette pierre , & qu’elles portoient une croix vuidée, cléchée & pommetée, fans tours & fans agneau. Je répondrai que , quoique l’ufage des armoiries ait commencé au temps des Croifades, il en exiftoit long- temps avant cette époque. On n'ignore point que les Princes , les Evêques , les Seigneurs , les Villes , les Communautés Religieufes, avoient chacun leur fceau, dont ils fcelloient les Ordonnances , les Chartes, & tous les A&tes auxquels on vouloit donner quelque au- thenticité. La France avoit pour armes , dès le temps de Clovis, un écu chargé de fleurs de lys fans nombre, qui furent réduites à trois par Charles VI. L’Angleterre Tome IT. O 106 MÉMOIRES portoit des léopards, l'Allemagne un aigle , l'Efpagne un lion, &c. Dans les premiers fiecles de la Moranchies les Re. dans les tournois , portoient des armes ornées de devifes & d’emblèmes , qui fervoient à les faire reconnoitre. Les armoiries , dont l’origine fe perd dans l’antiquité la plus reculée , étoient ordinairement chargées de la figure de quelque animal. Les médailles des diflérens peuples en font foi; celles de Lyon, frappées du temps de Marc-Antoine, portent un lion; celles de Nimes, fous Augufte , avoient , comme jour hui, un crocodile enchainé à un palmier ; Rome un aigle ; Rhodes une rofe ; Touloufe avoit un belier. Le nom de la rue de la Porterie , Porta Arietis, confirme cette tradition conftante ; & j'ai lu dans un ancien Auteur (1 1)» qu'en creufant près de la-Place Royale, on a trouve les reftes de cette porte , fur laquelle fe voyoit encore la figure du belier dont on lui avoit donné le nom (2). On pourroit m’objeéter que ; parmi les Tombeaux des Comtes de Touloufe antérieurs à Guillaume IV, & qui font renfermés dans une Chapelle attenant D: des portes de l'Eglife de Saint Sernin, 1l y en a trois qui font fupportés par des colonnes , dont les chapiteaux font ornés de la croix vuidée , cléchée & pommetée , telle que la portoit Raymond 4 Saint-Gilles, & qu'elle exifte aujourd’hui, & que cette même croix étoit peinte fur les murs dela même Chapelle , fuivant le deflein qu’en a donné l'Hiftorien du Languedoc. Si cette croix formoit les armes des Comtes antérieurs à GuillaumelV, elle a dù former les fiennes ; & le Tombeau qui Re une croix pâtée toute différente , ne fauroit être Îe fien. (1) M. S. de Dupuy. (2) Annales de Fouloufe , par Durofoy, tom. 1 , p.430. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 107 Je répondrai, avec l'Hiftorien du Languedoc (1), qu'il eft évident que les croix pommetées qu'on voyoit aux murs de cette Chapelle , & qui ornent les chapiteaux des colonnes qui fupportent les Tombeaux , y ont été placées long - temps après la mort de ceux qui y font dépofes, & après le décès de Guillaume IV. Ses deux fils y furent inhumés vers l'an 1090 ; plufieurs années après on y transféra les autres trois Tombesucs C:: Quant à l’origine des armoiries, 1l eft impoffble d'en fixer exaétement l’époque ; mais 1l eft certain qu’elle eft antérieure au décès de Guillaume IV , quoique Pufage n'en foit devenu commun, & que l'art héraldique n'ait été connu que lors des premieres Croifades. Moreri & le P. Ménétrier (2) rapportent un fceau de Robert le Frifon, Comte de Flandre, attaché à un afte de 1272 qui repréfente d’un côté un Cavalier, de l’autre un écu chargé d’un lion. Les armoiries de la Nobleffe doivent leur origine aux tournois, qui ont commencé en Alle- magne dl ldemenfecle , & dont l’ufage pafla aufli-tôt en France. Henri Spelman dit que la Noblefle d'Angleterre a des armoiries depuis le regne de Guil- laume le Conquérant dans le onzieme fiecle. L’Hiftorien du Languedoc attefte (3) que Raymond de Saint-Gilles portoit la croix de Touloufe en plein dans fes armes, quelques années avant qu'il fe croisät pour l'expédition de la Terre Sainte : c’eft ce qui paroït par fon fceau pendant à la Charte qu'il donna en 1088 en faveur de l'Abbaye St. André d’Avionon, inférée dans les Preuves. I! eft donc certain que ls Gomes de Touloufe avoient COÉRomzr pr7es (2) Tom. 1, p. 341. (3) Tom. 5, p. G87. 108 MÉMOIRES des armoiries avant le déces de Guillaume IV, & qu’on a pu les graver fur fon Tombeau. La différence qui fe trouve entre les deux croix ne prouve rien ; celle qui formoit l’armorial de Touloufe , étoit originairement pâtée. Raymond de St. Gilles y ajouta les douze points; mais il n’en changea pas la forme. On peut s'en con- vaincre par fon fceau gravé dans l'Hiftoire du Langue- doc (1), par celui d’Alphonfe & par fes monnoies qui y font auffi gravées : donc la forme de la croix patée qui eft fur notre Tombeau, n’eft pas exclufive des armes des Comtes ou de la ville de Touloufe. Les tours & l'agneau ne formoient point partie de l'écuflon des armes de Raymond de Saint-Gilles & de {es fuccefleurs ; mais elles ont, dans tous les temps, fait partie des armes de la Ville & du Comté. L’Hiftorien du Languedoc a donné le deflein d’un fceau des Capi- touls de l’année 1242 (2), où l’on voit l'agneau & les deux châteaux. Il eft vrai que l'agneau a la tête tournée différemment que dans les armes aétuelles de la Ville; ce qui prouve que fon armorial a éprouvé divers chan- gemens, quoiqu'il foit toujours au fond effentiellement le même. Le champ étoit femé d'étoiles avant Guil- laume IV. On les fupprima depuis , comme on a fup- primé l’auréole qui étroit autour de la tête de l'agneau, dont on a changé la difpofition, ainfi que la forme de la croix. Touloufe , en élevant un Tombeau à Guil- laume IV en 1093, a pu y faire graver les armes de la Ville & du Comté, dans lefquelles celles de fa famille fe trouvoient compriles. Les deux châteaux que l’on voit aux deux côtés de (1) Tom. 5, p. 687. (2) Tom. 5, pl vint, ibid, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 109 l'agneau , dans les armes de Touloufe , & qui, fur le cercueil, fe trouvent dans des écuflons féparss, repré- {entent les deux forterefles qui étoient bâties aux extré- mités de la Ville, aux lieux où font préfentement les moulins du Bazacle & du Château, & qui dominoient la Garonne. On voit la figure de ces châteaux fur les anciens poids de cette Ville de l’année M. CCC.XXXIX. Lorfque le Chriftianifme fut établi à Touloufe , on ajouta une croix à fes armes. Cette croix, qui fe voit {ur le Tombeau de Guillaume IV , étoit patée, pareille à celles qui fe trouvent fur les monnoies d’ argent frappées à Touloufe fous le regne de Louis le Débonnaire. Raymond de Saint-Gilles lui fubftitua une croix ornée de douze points qu'il avoit pris pour fes armes. On trouve une autre différence entre l'écuflon gravé fur le cercueil & les armoiries de Raymond de Saint-Gilles ; le premier porte un agneau fur un champ femé d'étoiles; les fecondes portent {eulement une croix vuidée, dede & pommetée fur un champ de gueules , telle que l'ont portée depuis Guillaume IV, les Comtes de Touloufe. Cette croix forme aujourd’ ce les armes de la Province de Languedoc. Guillaume avoit confervé les anciennes armes de la Ville & Comté de Touloufe. Raymond ON te frere les changea quelques années avant fon voyage à Languedoc , la Terre Sainte ; ainfi l'on peut dire avec raïfon que la Sr croix de Hoon , telle qu’elle eft aujourd’hui , doit fon origine au temps des Croifades ; mais que cette Ville avoit des armoiries avant cette époque , & que ce font celles qui font gravées fur le cercueil dont La donné la defcription. Mon opinion {e trouve en cela conforme à celle de Lafaille, & aux reciftres de l'Hôtel de Ville. 110 MÉMOIRES Je crois avoir donné les plus fortes préfomptions que ce cercueil appartient à un Comte de Touloufe. Ce Comte ne fauroit être un des prédéceffeurs de Guillaume IV, puifque jufqu’à lui le lieu de la fépulture des Comtes étoit dans l’Eglife de Saint Sernin , où l’on voit encore les Tombeaux de Pons Il, de Guillaume IT, d’un autre Seigneur de cette Maifon, dont on ignore le nom, & que l’on a cru être Raymond Bertrand, frere de Guil- laume IV ; enfin celui de deux enfans de Guillaume IV, morts en bas âge, & avant l’année 1093. A cette époque, il transféra la fépulture des Comtes à la Daurade , en vertu de la Bulle d'Urbain IL. I y a tout lieu de croire que fe fentant près de fa mort » puifqu’ il ne pafla pas la fin de cette année, il follicita auprès du Pape la permifhion d’être inhumé dans cette Eglife qu'il avoit embellie , & pour laquelle il avoit une affe&tion particuliere. Les Hiftoriens de Languedoc affurent que depuis la Bulle d’Urbain, « les fuccefleurs de Guillaume, » & tous ceux de fa famille qui moururent à Touloufe, » établirent leur fépulture dans le cimetiere de la Dau- » rade. » J'obferverai d’abord qu’on n’a trouvé à la Daurade d’autres veftiges de la fépulture des Comtes , que le Tombeau qui fait l’objet de ce Mémoire, & l'épitaphe d'un fils d'Alphonfe Jourdain , mort en as âge , qui eft gravée fur un marbre blanc. Elle eft rapportée par Catel, qui attefte qu’elle étoit autrefois adoflée au mur de l'Eglife. Je l'ai vue depuis dans une des Chapelles du cloitre ; la pierre a été fendue vers le milieu , par le peu de foin qu’on a pris de conferver ce monument en le détachant du lieu où il étoit placé. L’infcription, tele que je l'ai copiée figurativement , eft écrite en DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. xtrr cara@teres moitié Gothiques, moitié Romains. L’orto- graphe fe reflent de la barbarie du fiecle ; elle eft en vers élégiaques , rimés fuivant le goût du temps , & conçue en ces termes : Afpice, Leëlor, opus [cripturæ marmoris hujus. Offender titulus quem ceoit hic tumulus. Tldfunft natus Comitis jacet hic tumulatus. Corpus fub lapide , fpiritus in requie. Parvulus œtate , vitæ puer immaculatæ , Junoitur Angelicis , Viroginetfque choris. Wir facer Urbanus Romanus Papa fecundus. Effè cimeterium præcipic hoc Comitum. Tnfiper ut didici juber illos hic fepeliri , Sacro mandato civibus inde dato (x). Alphonfe Jourdain, dont il eft fait mention dans cette épitaphe , étoit fils .de Raymond de Saint-Gilles, & frere cadet de Bertrand, à qui il fuccéda dans le Comté de Touloufe. Il eut de fon époufe Faydide d'Ufez , Raymond V., Alphonfe, Faydide, & un fils dont on ignore le nom , pour qui fut faite l’épitaphe dont nous parlons. Il eut encore un fils appelé Muce, qui mourut en 1203, & qui fut enterré à Nimes. Les Hiftoriens (1) Le&eur, l'écriture gravée fur ce marbre t'apprendra quel eft celui qui eft renfermé dans ce Tombeau. Ici eft enfeveli un fils du Comte Alphonfe ; fon corps gît fous cette pierre, & fon ame eft dans le repos. Cet enfant , d’un âge tendre, & d’une vie pure & fans tache, eft maintenant avec les Cieux des Anges & des Vierges. Le faint Pape de Rome, Urbain II, a voulu que ce ft ici le cimetiere des Comtes. J'ai appris qu'il l’avoit ordonné ainfi par un Décret facré adrefié aux Touloufains. 112 MÉMOIRES de Languedoc rapportent fon épitaphe ; mais on ne fait fur quel fondement ils croient qu'il n'étoit point fils légitime. On ne trouve rien dans l’épitaphe qui favorife cette opinion : c'eft ce même Muce que M. Raynal a mis au rang des enfans naturels d’Alphonfe, fous le nom de Pons, mort en 1203. J'obferverai, en fecond lieu, qu'aucun des Comtes, fuccefleurs de Guillaume IV , n’a été inhumé dans le cimetiere de la Daurade, ni dans la ville de Touloufe, & qu’ainfi le monument qui nous occupe ne fauroit leur convenir. Raymond IV , furnommé de Saint-Gilles , frere de Guillaume IV , mourut en l’année 110$ , au Château Pélerin en Syrie , & y fut inhumé. Bertrand , fils de Raymond , mourut l'an 1112 à Tripoli, & fut inhumé dans cette Ville. Guillaume, Comte de Poitiers, ufurpateur du Comté de Touloufe , dont il fut chaflé par Alphonfe, mourut en 1126 , & fut enterré à Poitiers. Alphonfe Jourdain , frere de Bertrand , mourut de oifon à Céfarée en Paleftine l’an 1148. Raymond V , fils d’Alphonfe , mourut à Nîmes l'an 1194, & y fut enterré dans le cloitre de la Ca- thédrale. Raymond VI, fon fils, mourut à Touloufe en 1222. L’excommunication qui avoit été fulminée contre lui, empêcha que fon corps ne fût inhumé. Les Chevaliers de Saint Jean, auxquels il s’étoit donné, le tranfporte- rent dans leur Maïfon , & le mirent dans un cercueil de bois , où il exiftoit encore du temps de Bertrandi & de Guillaume de Puylaurens, qui atteftent l'avoir vu. Depuis, le cercueil a été détruit, & les offemens difper- {és ; DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 113 {és ; il ne refte que la tête, que l’on conferve encore dans la Sacriftie de l’'Eglife de Saint Jean. Raymond VIT, fils du précédent, mourut en 1249 à Milhau en Rouergue, & fon corps fut tranfporté au Monaftere de Fontevrault, où il fut inhumé auprès de Jeanne d'Angleterre fa mere , d'Henri , Roi d'Anpgle- terre, fon grand-pere , & de Richard , Roi d’Angle- terre , fon oncle , ainfi qu'il l’avoit ordonné par fon teftament. Alphonfe, frere de St. Louis, dernier Comte de Touloufe , du chef de Jeanne fa femme , fille de Raymond VIT, mourut de la pefte en Tofcane l'an 1271, ainfi que la Comtefle fon époufe. Ils ne laiflerent point de poftérité , & en eux fut éteinte la race des Comtes de Touloufe, dont les Etats furent réunis à la Couronne en vertu du Traité de Paris. Le corps d’Alphonfe fut porté à Saint-Denis, & celui de Jeanne au Monaftere de Grociac, qu’elle avoit fondé , dans le Diocefe de Melun. Il eft prouvé par le témoignage des anciens Hifto- riens, & par la Bulle d’'Urbain IT, que la fépulture des Comtes de Touloufe fut transférée à la Daurade en 1093 ; fous le regne de Guillaume IV. Les mêmes Hiftoriens nous apprennent qu'il y a un Comte enterré dans le cimetiere de cette Eolife. Il eft également prouvé qu'aucun des prédécefleurs ni des fuccefleurs de Guil- laume IV n’a été inhumé dans ce cimetiere ; il paroit raifonnable d'en conclure que le Tombeau qu'on y a découvert , & fur lequel font gravées les armes de Touloufe , renfermoit le corps de ce Comte. Des motifs de crédibilité fans nombre fe réuniflent pour donner du poids à ma conjefture. La Littérature a’auroit prefque point d'Ouvrages à produire , {ur-tout Tome IL, P 114 MÉMOIRES en matiere de monumens antiques, fi elle ne pouvoit donner que des chofes démontrées ; & ie Public feroit privé de plufieurs Differtations , qui , en accumulant les probabilités, ont fouvent mené à la découverte de la vérité. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, t1$ a —©—————— rm À BERET FRDRE SE EAN EN EE ERREUR D ET SUNSET SEE MÉMOIRE SUR la jonction & la féparation des Rivieres. PAR M. LESPINASSE, Corre/pondanr. C EST une queftion également curieufe & 1 importante Lu le 31 que de déterminer , après que deux Rivieres fe ner 785 umes pour couler dans un feul lit, ou qu’une Riviere s’eft divifée pour couler dans deux lits difiérens , quel eft le rapport de la hauteur du courant commun à celle des courans particuliers. Il n’eft pas néceflaire de faire remarquer que lorfqu’on connoît la largeur du lit & la portée des Rivieres , on parvient, avec la même facilité, à connoître leur vitefle par leur hauteur , & leur hauteur par leur vitefle , & que la détermination de l’une amene la détermination de l’autre. Parmi les Auteurs qui fe font occupés de cette quef- tion , les uns , pour la réfoudre , ont eu recours aux formules de la Méchanique , touchant la compofition du mouvement des corps durs , fans les modifier en aucune maniere ; d’autres ont mieux aimé la traiter par voie d'expérience. J'ai cru qu'il convenoit d'examiner ces deux moyens, tels qu'ils ont été empl oyés jufqu’au- jourd' hui, & de difcuter les principes fur lefquels ils étoient 2 appuyés. 116 MÉMOIRES On trouve dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de 1738, des Remarques de M. Pitot fur la jonétion des Rivieres. Cet Auteur avance que , pour avoir la vitefle commune réfultante de deux Rivieres unies, il faut divifer la fomme des quantités de mouve- ment des eaux dans les Rivieres féparées, par la fomme de leurs quantités d’eau, & que pour avoir l’expreflion algébrique de cette vitefle commune , fi l’on nomme m, n les quantités d’eau de ces deux Rivieres, & V ,u les vitefles de leurs courans particuliers, la formule fera cent mn * Il eft évident que cette regle fuppofe que la quantité de mouvement du courant commun, doit être égale à la fomme des quantités de mouvement des deux Rivie- res. Or on concevra aifément qu’elle eft plus grande, fi l’on fait attention que quoique la mafle d’eau de la Riviere commune foit égale aux deux mafles d’eau par- ticulieres, cependant, comme dans l’expreflion de cette mafle , la vitefle, qui en eft un élément , augmente aval du confluent, la mafle fe combine avec une plus grande vitefle pour produire la quantité de mouvement. Ceft donc une quantité plus grande que mV+nu, qu'il faut divifer par m+n, pour avoir la vitefle commune. En efñlet , le lit commun doit néceffairement être moindre que la fomme des deux lits des Rivieres fim- ples : car la furface contre laquelle l’eau frotte dans le lit commun , eft moindre que la fomme des furfaces contre lefqueiles l’eau frotte dans les deux lits particu- liers ; d’où fuit que la vitefle des eaux dans le lit com- mun doit être plus grande que leur vitefle dans chacune des Rivieres , ce qui d’ailleurs eft parfaitement con- forme à l’expérience. Cependant en partant de la for- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 117 mule ci-deflus, toutes les fois qu’une Riviere en rece- vroit une autre , où les eaux auroient la même viteffe, VnoV= nxV A 2 on voit que la formule devenant -5+; pe , la vitefle commune feroit exa€tement V , ou bien égale a la vitefle d’une des Rivieres confluentes. La fource de l'erreur de M. Pitot eft qu'il étoit per- fuadé , ‘comme il le dit formellement à la Remarc que onzieme du même Mémoire, que la vitelle des Rivieres dépend uniquement de la pente du terrain fur lequel elles coulent. Cet Académicien ser e donc pour rien le furcroit de hauteur que l’afluence d’une Riviere dans une autre, doit néceffairement caufer dans les eaux de celle-ci. Il eft cependant certain que ce furcroit de hauteur dans le récipient doit en augmenter la vitefle, puifque le poids de l’eau fupérieure peut accélérer la rapidité de l’eau inférieure , jufqu’à ce que celle-ci ait acquis, par l’eflet de ce poids, une vitefle égale à celle qui lui feroit due relativement à la hauteur de l’origine de la Riviere. M. + pe Boflut a propoifé dans fon Hydrodynami- que , tom. 2 , art. 712 , de connoitre de combien on fera (PEN Fe niveau d’une Riviere en en dérivant une certaine quantité d’eau. Or la folution de cette queftion ne fauroit manquer de donner celle de la queftion : in- verfe , qui feroit de connoïtre de combien on feroit hauffer le niveau d’une Riviere en y jetant une certaine quantité d’eau. On voit dans cet article que l’Auteur part de Ja double fuppofition, qu’a la furface la viteffe du courant foit comme infenfible |, & que faifant abftraétion des obftacles, la vitefle de chaque point foit due à la hau- teur qui lui répond fur toute la profondeur. Dans ce 118 MÉMOIRES eas , la formule qu'il indique donne une maniere aifée de déterminer la hauteur à laquelle les eaux de la Ri- viere doivent fe réduire après la dérivation, ainfi que la hauteur & la largeur du Canal de dérivation : mais cette formule conduit-elle à la folution du problème, comme il le prétend, en faifant ufage de ce qu’il a dit plus haut à l'article 68r du même Ouvrage , lorfque tous les filets de l’eau de la Riviere qu’on a à faigner ; ont leur vitefle particuliere, modifiée d’ailleurs par di- verfes circonitances ? C'eft ce qu'il eft d'autant plus important d'examiner , que c’eft ce dernier cas qui fe réfente ordinairement dans la pratique , & qui eft le plus difficile à traiter. Remontons donc à cet art. 68r, & voyons en quoi il confifte. M. l'Abbé Boflut fuppofe dans cet article qu'il s’agifle de conftruire un pont fur une Riviere , & qu'il faille connoître le changement qui arrivera dans la profon- deur de fa fe&tion , lorfqu’on en diminuera la laroeur par l'établiffement du pont. « Si on ne vouloit pas admettre , dit-il, l’hypothefe » que les vitefles des différens points de l’eau font pro- » portionnelles aux racines des hauteurs qui leur répon- » dent ; mais qu'en conféquence du frottement , on » fupposät que la hauteur due à la vitefle moyenne de » l'eau, lorfqu’elle pafle par le pertuis ACDB, fr. [°° ,» ( ACDB a été fuppofe , à l’article précédent , être la fe&tion de la Riviere avant l’établiffement du pont, & EF GH la fe&tion de la même Riviere après l’établiffe- ment du pont, } « eft la droite donnée OS , & que la » hauteur due à la vitefle moyenne de l’eau, lorfqu’elle » pale par le pertuis EFGH, eft la droite IT , le Va DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. ‘119 » problème ne feroit pas plus difficile à réfoudre : car » en faifant, » » » » » » » » >» » » » Figure premiere. ARE PP = 20 COR TC SPORE CEE EE D HO RE 'e jui Hole bn NES © à RU TE LL. il eft clair que les quantités d’eau écoulées dans le même temps par les deux pertuis ACDB, EFGH, étant les mêmes, on auroit l'équation be V'H= bc V/H' ; & comme la loi fuivant laquelle les points S, T font placés fur les hauteurs KO, KT, eft cenfée donnée, on auroit une feconde équation. Ces deux équations ferviroient à déterminer les deux inconnues H° & b'. » Par exemple , lorfque les points S, T font femblable- ment placés fur les droites KO, KI,ona H:H'::b:b', & par conféquent b' =, & fubftituant cette valeur de b' dans l'équation bcÿ/-4=b'c V/H' , on trouvera bcaV’H=bcupH, & H:H'::ÿc1:}c, donc ab bia ci» Si l’on connoifloit réellement comment SO, IT font placées fur les droites KO , KT, il feroit aïfé , par la méthode de l’Auteur, d’en inférer la valeur de EF, & par conféquent on auroit le furcroit de hauteur 1O, provenant du rétréciffement de la Riviere; mais lexem- ple que prend l’Auteur, & où 1l fappofe que les lignes SO, IT foient proportionnelles à KO , KT, c’eft-à- dire, que les viteffes moyennes {oient comme les racines de ces dernieres lignes, étant contraire à Fexpérience, on ne voit pas à quelle autre loi on pourra avoir 120 MÉMOIRES recours pour établir la proportion , qui d’abord avoit fervi à trouver une expreflion de b', au moyen de laquelle on l’éliminoit de la premiere équation. En effet, fi dans les eaux courantes les vitefles étoient proportionnelles aux racines des hauteurs, la vitefle au fond feroit toujours plus grande qu'au milieu, Cependant on fait que la plus grande vitefle eft quelquefois au milieu , quelquefois au-deflus du milieu; qu’elle n’a pas de place conftante , & que cette place eft déterminée par diverfes circonftances. On ne trouve pas des regles plus fures fur cette matiere dans la Théorie des Auteurs Italiens , qui s’en font eflentiellement occupés. Je me borneraï à rapporter celle qui a été établie par le Pere Grandi. Cet Auteur avance que lorfqu'une Riviere fe jette dans une autre, le furcroit de vitefle occafionné dans le récipient, eft à la vitefle de l’affluent, comme le finus du complément de l’angle que font les deux Rivieres, eft au finus total. Or on voit que lorfque cetanpgle eft très-aigu , le finus du complément devenant prefque égal au finus total , il faudroit que le furcroït de vitefle du récipient différât très-peu de la viteffe de l’affluent, & que par conféquent la vitefle , dans le lit commun , füt prefque égale à la fomme des vitefles des deux Rivieres avant leur jonc- tion; d’où il fuivroit encore que dans le même cas la fe&tion du lit commun devroit être prefque égale à la fe&tion du récipient, ce qui y exclurroit toute augmen- tation de hauteur. Une très-srande difficulté qu’on peut oppofer encore à cette regle, c'eft, ce me femble, qu'elle eft indepen- dante de la quantité d’eau que l’affluent apporte dans le rétipient. On ne fauroit cependant douter que la plus ou DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. x2r ou moins grande quantité d’eau qui fe jette dans une Riviere, n’y augmente communément plus ou moins la rapidité du courant, tout le refte étant égal. Comment fuppofer, en effet, qu'un petit filet d’eau & un grand volume , qui tous deux animés de la même vitefle, déboucheroient féparément dans une Riviere, en accé- lerroient également la rapidité ? Cela ne ho avoir lieu , au moins conftamment. Si les Théories de la Méchanique ont été infuffifantes juiqu’à préfent pour l’établiffement des principes cer- tains fur cette partie de l’hydraulique , il s’en faut bien qu ’on trouve de meilleures reflources dans les expé- riences connues qui ont eu le même objet. De tous les appareils : imaginés & exécutés pour cette forte d’expé- riences, ceux qui ont fait le plus de gran font ceux dont on s’eft fervi à Leyde en 1755, & à Ferrare en 1762. La premiere confiftoit dans un canal artificiel de 1200 pieds de longueur, & de 6 ou 7 pouces de lar- geur , & qui avoit une pente totale d'un pied, diftribuée umiformément fur toute fa longueur. M. Genneté, Phy- ficien de Florence, Auteur de cette Machine, y Érloit couler de l’eau au moyen d’un vafe d’une certaine hau- teur , qui, entretenu plein & perce d’un orifice, y four- niffoit conftamment la même quantité d’eau ; puis ayant mefuré la portée du courant, il y ntooit fuccefi- vement deux affluens , dont chacun y ajoutoit une portée d’eau égale à la moitié de celle du récipient, & il obfervoit que les quantités d’eau qui couloient fuc- ceffivement dans le récipient , étant comme I. 1 2, la hauteur, dans ces trois cas , y reftoit fenfiblement la même , & qu'ainfi pour lors les vitefles augmentoient Tome IL. Q 122 MÉMOIRES comme les quantités d’eau. La hauteur ne lui paroïfoit s’accroitre que de -; , lorfque la portée des eaux du récipient étoit devenue trois fois plus grande qu’elle n'étoit d'abord. Le fecond étoit pareillement un canal artificiel où l'on faifoit couler de l’eau. Sa longueur étoit de 199 pieds , fa largeur de 7 pouces. Il avoit d’ailleurs une pente uniforme. On y introduifoit fucceflivement , à angle aigu, des affluens de la même largeur & à peu-près de la même portée. Lorfqu'on y laïfloit entrer le pre- mier, l'augmentation de hauteur étoit prefque de moitié. En y introduifant un fecond affluent égal au premier, on voyoit la hauteur de l’eau du récipient augmenter à peu-près des deux tiers; de forte que les hauteurs de l'eau dans le récipient, croifloient proportionnellement à fes portées. Où l’on voit que dans l'expérience faite à Ferrare, les hauteurs de l’eau dans le récipient fuivoient le rap- port des quantités d’eau , & que dans celle de Leyde c'étoient les vitefles qui croifloient dans ce rapport, ce qui donnoit des réfultats tout-à-fait oppolés. Cette contrariété m'a paru tres-embarraflante pour les perfonnes qui cherchent à fixer leurs idées fur cette queftion, & fur-tout pour celles qui, à raifon de leur état, ont befoin de principes sûrs, qui, en les empêchant de flotter dans l'incertitude, fervent de bafe à leur con- duite dans les travaux hydrauliques. Comment, en effet, ne pas voir avec peine que fi l'on a à jeter les eaux d’une Riviere dans une autre de même portée, & qu’on veuille combiner d'avance ce qui réfultera de cette jon&ion , il faudra , fuivant l'expérience de Ferrare , s'attendre à un accroiflement de hauteur dans le réci- us comprenant le couts dunc paihe de la cAvière dcAude, dc «lle de Feasquel ct Ou Canal de Languedoc RE PLIV 1288. Tozses Caitc comprenant le cours dune pu Canal de Languedoc. DE L'ACADÉMIÉ DE TOULOUSE. 123 pient, qui en double la profondeur primitive , & que, fuivant expérience es à Leyde, Pr edbeton de la Riviere affluente ne puifle produire d’autre effet fur le récipient que d'y augmenter la vitefle du courant fans augmenter fa hauteur ? C’eft pourquoi J'ai cru devoir traiter cette queftion par de nouvelles expériences. Ma pofition m'en a fourni des moyens fimples & ailes, dont je vais rendre compte. Pour me faire entendre Plus aifément ,en rapportant mes quatre premieres expériences , Je m'aiderai de la petite carte ci-Jointe. On y voit que la Riviere de Frefquel AB, entre avec toutes fes eaux dans le Canal de Languedoc » à peu-près fous un angle de 7$° vis-à- à-vis d fon embouchure ; & vers le point E eft un épanchoir de fond à cinq grands pertuis , qu’on tient fermés lorfqu’on veut retenir dans le ea les eaux de la Riviere, & qu’on ouvre lorfqu'on ne veut pas qu’elles reftent, comme lorfqu’elles font troubles, & F eft une éclufe en amont , appelée de Frefquel , dbnomVd la Riviere, d’où lon peut faire couler de l’eau, qui ) après avoir parcouru feule la partie de Canal FI, vient fe mêler avec celle de la Riviere , & coule AveE elle fur la longueur d'environ 250 toifes , de O en M , dans un lit droit & uniforme. Lorfquil ne fe fait aucune dépenfe d’eau à cette éclufe, & _que les pertuis de l’é- panchoir en E font fermés, “il n y a que les eaux de la Riviere qui coulent dans la portion du Canal O M. EXPÉRIENCE PREMIERE. Les eaux de la Riviere coulant feules dans la portion du Canal OM, & ayant leur débouché libre vers la partie d’aval du Canal ; parcouroient 3 pieds par feconde. 124 MÉMOIRES La fe@tion de leur lit avoit 31 pieds de largeur à la bafe , & 41 pieds à la fuperfcie. Sa hauteur étoit de 2 pieds 4 pouces. Lorfqu’après avoir lâché les eaux à l'éclufe F par les deux empellemens , ( c'eft ainfi qu’on appelle les gui- chets pratiqués dans chaque ventail de porte pour faire pafler de l’eau dans le baffin de l'éclufe ou dans la partie inférieure du Canal, } ces eaux s’étoient mélées avec celles de la Riviere , elles parcouroient enfemble, dans la même partie OM , 4 pieds 6 pouces par feconde. La {e&tion du courant commun, mefurée au même en- droit, avoit 35 pieds de largeur à la bafe, 42 pieds à la fuperficie , & fa hauteur étoit de 2 pieds 7 pouces 9 lignes. RÉSULTAT DE LA PREMIERE EXPÉRIENCE. Dans le premier cas, d'après les données , il couloit dans le Canal O M 252 pieds cubes d’eau par feconde. Dans le fecond cas , l’eau étant élevée devant la porte de l’éclufe de Frefquel de 3 pieds 9 pouces 5. 6 au-deffus du centre de gravité des empellemens , & l'aire des deux ouvertures étant de 11 pieds 6.9. 11 quarrés, la dépenfe des deux empellemens eût été théoriquement de 174 pieds 22 cubes par feconde , & en employant la correftion qu’exige la contraëtion de la veine, elle étoit de 124 pieds 47 cubes feulement. La portée de l’affluent étoit donc à celle du récipient comme: SIC RIM CU CR Er AGG"d/2. 02 Et le furcroît de hauteur à la fe&ion étoit à fa profondeur primitive comme. 1.00 à 7. 46. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 128 EX PILE RIT EINIC'EN DIE UNXII E M E. La même Riviere de Frefquel , dont il s’agifloit dans l'expérience précédente, ayant, lorfqu’elle n’eft pas re- tenue dans le Canal , fon débouché dans la Riviere d'Aude vers le point P, fous l’angle de 33°, ainfi qu’on le voit fur la même carte , j'ai fait les obfervations fuivantes. 1°. Les eaux de la Riviere de Frefquel étant retenues .dans le Canal , celles de la Riviere d’Aude couloient feules , aval de l'embouchure de la premiere, dans un lit aflez uniforme & droit , fous une feétion qui avoit 151 pieds 10 pouces de largeur réduite , & 2 pieds 8 pouces 2 lignes de hauteur. Leur vitefle étoit de z pieds 11 pouces par feconde. 2°. Après avoir fait ouvrir entierement les cinq per- tuis de l’épanchoir en E , la hauteur de la feëtion eft parvenue à être de 3 pieds 9 lignes, & s’eft foutenue à ce point , de maniere que l’accroiflement de hauteur a été de 4 pouces 7 lignes. La largeur de la feétion étoit alors de 153 pieds 4 pouces ; la vitefle du courant commun de 4 pieds 6 pouces par feconde. INota. Les cinq pertuis en E avoient enfemble la largeur de 13 pieds 11 pouces 10 lignes. Leur hauteur étoit de 6 pieds 11 pouces 11 lignes, & la hauteur de l’eau au-deflus du feuil de l’épanchoir de 7 pieds ÿ pouces 9 lignes. RÉSULTAT DE LA DEUXIEME EXPÉRIENCE, Dans le premier cas , la quantité d’eau qui pafloit par la fe&tion mefurée dans l'Aude, étoit de 1187 pieds © pouces 14 lignes cubes par feconde. 126 M É M O I 'RÆŒ'S Dans le fecond cas , elle étoit de 2114 pieds cubes dans le même intervalle de temps. Où l’on voit que la quantité d’eau de la Riviere de Frefquel ou du Canal devoit être de 927 pieds cubes par feconde , ce qui s'accorde aflez bien avec la portée qu'on peut déduire de la note ci-deflus : car, d’après les données , la portée théorique feroit de 153#1 pieds 8 lignes cubes par feconde , & en la corrigeant à raifon de la contration de la veine feulement , elle fe trou- veroit réduite à 1079 pieds 3. 11. 5. Or dans ce cas-ci cette correétion doit être infuffifante , puifque les pertuis qui concourent à donner cette portée, ne font diftans entre eux que d’un pied, ce qui ne peut manquer d’af- foiblir la dépenfe particuliere de chacun de ces pertuis. En eflet , en faifant ufage , pour cette correétion , du rapport trouvé par M. l'Abbé Boflut pour réduire dans certains cas la dépenfe théorique à la dépenfe efle&tive:, qui eft celui de 8a5, la dépenfe réelle des cinq pertuis ne fe trouveroit être que de 944 pieds 4. 11. 6; dépenfe très-approchante de celle que donne la différence des portées de l'Aude dans les deux cas ci-deflus. La portée de l’affluent étoit donc à celle du récipient, en négligeant les fraftions, comme . 1.00 à.1.28. Et le furcroit de hauteur à la profon- deur primitive, comme . . + + + 1.00 à 7.OL. EXPÉRIENCE TROISIEME Dans une autre circonftance, j'ai fait les obfervations fuivantes. | ro. Les eaux de l'Aude couloient feules dans une artie de fon lit , qui eft droite, à peu-près uniforme & diftante de l'embouchure du Frefquel d'environ 2000 DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 127 toifes. La feétion du lit de la Riviere étoit de 111 pieds 3 pouces de largeur, & de 3 pieds 6 pouces de hauteur réduite. La vitefle étoit de 3 pieds 9 pouces 2 lignes par feconde. 2°. Lorfqu’après avoir ouvert les pertuis de l’épan- choir en E, les eaux du Frefquel couloient avec celles de l'Aude , la vitefle fe trouvoit être de 4 pieds par feconde. La fe@tion avoit 1 12 pieds 6 pouces de largeur, & 3 pieds 10 pouces de hauteur ; l’accroiflement de RE étoit donc de 4 pouces. 3°. Pour connoitre la portée du Frefquel en feul , j'avois retenu fes eaux dans le Canal, en fermant l’é épan- choir en E & l’éclufe d’aval ; au même inftant j'avois fait mefurer combien 1l manquoit d’eau fous l’éclufe d'amont & au-deflus de celle d’aval, pour que la rete- nue ( c’eft ainfi qu'on nomme toute partie du Canal comprife entre deux corps d’éclufe ) füt à fon niveau ordinaire. La premiere de ces mefures étoit de 3 pieds G pouces , & la feconde de 7 pieds 2 pouces, ce qui donnoit pour hauteur moyenne du vuide à remplir, s pieds 4 pouces. La longueur totale de la retenue eft de 11748 pieds, & fa largeur réduite de 42 pieds. Or ce vuide fut rempli dans l eipace de 2 heures $o minutes; mais cette partie du Canal ne put fe remplir fans que la partie de la Riviere de Frefquel, comprife entre le point À & la chauflée du moulin, immédiatement fupérieure, ne fe remplit aufli. Or le ohne d’eau néceffaire pour remplir cette partie de Riviere, étoit de 1180800 pieds cubes , ce qui, joint au VEbne de la retenue , faifoit celui de 381235 2. 128 MÉMOIRES RÉSULTAT DE LA TROISIEME EXPÉRIENCE.) En faifant le calcul du premier article, on voit que le volume d’eau de la Riviere d’Aude feule étoit de 146$ pieds 6 pouces 9 lignes par feconde. Le calcul du fecond article donne , pour la portée du courant commun, 1832 pieds 9 pouces 9 lignes dans le même intervalle de temps ; d’où 1l s’enfuivroit, en fouftrayant le premier du fecond, qu'on auroit pour la portée du Frefquel 367 pieds 3 pouces", ce quis’accorde aflez bien avec le calcul du troifieme article, qui donne pour cette portée 373 pieds 9 pouces 1 ligne. La portée moyenne entre ces deux eft de 370 pieds 6 pouces par feconde. La portée de l’affluenr étoit donc à celle du réci- pient , en négligeant les fraétions , dans le rapport deu Lroit f AMEL ES 108 ON RO AIT Et l'augmentation de hauteur de la fe&ion à fa profondeur primitive , comme. À ue on dl crie liet HNRINTION HE ES EXPÉRIENCE QUATRIEME. Les eaux du Frefquel fortant du Canal par l’épanchoir en E, & coulant avec celles de l'Aude , J'obfervai ce qui fuit. 1°. Le courant compofé couloit , à l'endroit dont j'ai parlé dans l'expérience précédente, fous une feétion qui avoit 113 pieds de largeur. Sa hauteur étoit de 3 pieds 7 lignes , & fa vitefle de 4 pieds 3 pouces par feconde. 2°. Lorfqu’on eut fermé l’épanchoir , les eaux étant d’abord bafles dans le Canal, fuivant les melures prifes aux DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 129 aux deux bouts de la retenue , de $ pieds 6 pouces 6 lignes, parvinrent à leur niveau dans l’efpace de 4 heures 1$ minutes. °. Au moment où les eaux de Frefquel , retenues dans le Canal , achevoient de remplir la retenue , la fe&tion de l'Aude n’avoit plus, au même endroit, que 112 pieds de large & 3 pieds 6 pouces 8 lignes de hauteur, & par conféquent cette hauteur avoit diminué de 3 pouces 11 lignes. : RÉSULTAT DE LA QUATRIEME EXPÉRIENCE. Le calcul du premier article donne, pour la portée du courant compofé, 1864 pieds 3 pouces 7 lignes par feconde. Le calcul du fecond donne, pour la portée du Fref- quel, 255 pieds 10 pouces 8 lignes par feconde. Et en déduifant le fecond du premier, la portée de l'Aude feule fe trouvoit n'être que de 1608 pieds 4 pouces 11 lignes pendant le même intervalle de temps. La portée de l’afluent étoit donc à celle du récipient, en négligeant les fraétions, comme . 1.00 6.30. Et l’accroiflement de profondeur à la profondeur primitive , comme . 1.00 à 10. 80. EXPÉRIENCE CINQUIENME. 1°. La Riviere d’Aude couloit feule , près du village de Trebes , fous une fe&tion moyenne qui avoit 178 pieds de largeur, & 4 pieds 8 pouces 4 lignes de hau- teur , tandis que fa vitefle moyenne étoit de 1 pied 8 pouces par feconde. 2°. J'y ai introduit, à 100 toifes en amont des fec- tions mefurées , les eaux de la Riviere d'Orbiel ; ( ces Tome IT, KR 130 MÉMOIRES eaux fervent communément à entretenir la navigation du Canal dans cette partie, & je les en avois détournées pour les jeter dans l'Aude, afin qu’elles ferviflent à mon expérience ). Elles étoient fournies par deux pertuis , dont chacun avoit 2 pieds 7 pouces 3 lignes de large, & 3 pieds 2 pouces de hauteur, leur élévation au-deflus du centre de gravité de ces pertuis fe foutenant conf- tamment à 3 pieds ÿ pouces. 3°. Lorfque le courant commun étoit bien établi , la hauteur de la fe&tion de l’Aude étoit de 4 pieds 9 pouces 4 lignes. La hauteur de cette Riviere avoit donc augmenté d'un pouce. RÉSULTAT DE LA CINQUIEME EXPÉRIENCE. D'après le premier article , la portée de la Riviere d'Aude coulant feule, étoit par feconde de 1392 pieds 8 pouces 2 lignes. D’après les données du fecond article, la portée de l'Orbiel feroit théoriquement de 236 pieds 1 ligne par {econde. En corrigeant cette dépenfe par la réduétion de 8 à ÿ, dont nous avons parlé , elle n’étoit que de 147 pieds 6 pouces. La portée de l’affluent étoit donc à celle du réci- pient , en négligeant les fraétions , dans le rapport de. Ce ME PE MESSE Et l'augmentation de profondeur étoit à la profondeur primitive, com- de: à ie PER ON NI RE Aulas EXPÉRIENCE SIXIEME. Cette expérience-ci & celle qui fuit immédiatement, ont été faites au réfervoir de Saint-Ferriol , qui eft le DE L'ACADÈMIE DÈ TOULOUSE. +31 magañfin d’eau du Canal de Languedoc, où l’on tient en réferve une grande quantité d’eau pour les befoins extraordinaires du Canal. Les eaux fortent , en partie, de ceréfervoir, par trois robinets qu’on ouvre à volonté. L'ouverture de chacun de ces robinets eft ovale; elle a 8 pouces 6 lignes de hauteur, & 6 pouces 6 lignes de largeur. Les tuyaux qui portent l’eau à chaque robinet ont 20 pieds de longueur ; ils font pareïllement ovales, & ont 9 pouces de hauteur fur 7 de largeur. Le centre du tuyau du milieu n’eft éloigné de celui de fes voifins, que de r pied 9 pouces. Les robinets , lorfqw’ils font ouverts, verfent leurs eaux dans un Canal uniforme , dont la bafe a 2 pieds 11 pouces 8 lignes de largeur , & dont les joues à plomb font en pierre de taille, ainfi que la bafe qui réunit les eaux des trois robinets, & les porte dans l’ancien lit d’un ruiffleau qui traverfoit, avant létabliflement du réfervoir , le vallon où ce réfervoir eft placé. Cela pole , j'ai obfervé ce qui fuit. 1°, Un robinet étant ouvert fous la charge de 70 pieds 11 pouces , ( les eaux du réfervoir Ubiene Dalles de 13 pieds 1 pouce au-deflous de fon niveau ordinaire ) les eaux s’éleverent à 5 1 pouces de hauteur à l’extrémité du Canal de fuite. 2°, Deux robinets voifins étant ouverts à la fois fous la même charge, les eaux s’éleverent , au même endroit, à la hauteur de 14 pouces. RÉSULTAT DE LA SIXIEME EXPÉRIENCE. Suivant ce que nous avons dit , l’affluent étoit au récipient, à peu-près comme . . . I.o0oà1.00. Je dis à peu-près , parce que , vu la petite diftance 132 MÉMOIRES des deux robinets voifins, ils doivent fe dérober réci- proquement de l’eau néceflaire à leur dépente. Et l'augmentation de hauteur étoit à la hauteur pri- tuhives comme: ane Ne ie Ut LOG A BAG EXPÉRIENCE S'EPATNI EMVE Les deux robinets de la fixieme expérience reftant ouverts , & les eaux fe foutenant dans le Canal de fuite à Ja hauteur de 14 pouces, j'ai fait ouvrir le troifieme robinet ; alors les eaux fe font élevées, au même endroit, a la hauteur de 22 pouces. RÉSULTAT DE LA SEPTIEME EXPÉRIENCE. Dans ce cas-ci, l’affluent étoit au récipient, à peu- prés comme: 4 MU NN NE RTS CO AleNRE: Et l'augmentation de hauteur étoit à cette hauteur. COMME F- AUS e NL COR MIT EXPÉRIENCE HUITIEME. Les eaux qui nourriflent le Canal dans fa partie fu- périeure, étant fournies par la Riviere de Sor, au moyen d'une rigole de dérivation qui les porte au point de partage, & cette rigole recevant, fous un angle de 95°, les eaux du réfervoir , lorfqu’on trouve à propos de les y faire couler, j'ai DELLE ce qui fuit. 1°. Les eaux du Sor coulant feules dans la rigole , j'en mefurai une fe&ion & la vitefle aval du confluent ; je trouvai que la hauteur étoit de 1 pied 3 pouces, & la vitefle de o pieds 58 par feconde. Comme la rigole a uniformément 18 pieds à la bafe , & que fes joues font taludées d’un fur un, la largeur eur de la fe&tion étoit pour lors de 19 pieds 3 pouces, l'ire de la feétion DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 132 de 24 pieds 06 , & la quantité d'eau de 13 pieds 95 par feconde. 2°. Les eaux du Sor coulant avec celles du réfervoir de Saint-Ferriol | & leur courant commun étant bien établi aval de leur confluent, je mefurai la feétion des eaux au même endroit où je l’avois mefurée avant; elle avoit 3 pieds 3 lignes & 3 pieds 62 de vitefle par feconde. Sa largeur réduite étant, d’après ce que nous avons dit, de 21 pieds o. 3, la feftion étoit de 63 pieds G pouces ou 63 pieds $o, & la quantité d’eau qui y pañloit, de 132 pieds 13. RÉSULTAT DE LA HUITIEME EXPÉRIENCE. L’afluent étoit , au récipient , dans le rapport dotation El HO Hit GOrdVOee Et l'augmentation de profondeur du récipient à la profondeur primitive , \ COMME NS Le UT OO Ode EXPÉRIENCE NEUVIEME. Près du village de Trebes il y a un moulin à blé fur le Canal, qui eft à deux meules. Les chüûtes de l’eau y font chacune de 9 pieds , & les orifices des courfiers, par où elle fe vuide , qui font éloignés entre eux de 9 pieds , ont 7 pouces de hauteur fur $s pouces de largeur. Je commençai d’abord par faire ouvrir un feul cour- fier. L’écoulement étant bien établi, je trouvai , par des mefures prifes dans le biez de fuite , que l’eau y pañloit fous une fe@ion qui avoit 4 pieds 10 pouces 6 lignes de largeur, & 6 pouces de hauteur. Puis ce courfier reftant toujours ouvert, je fis ouvrir 134 MÉMOIRES le fecond , & en mefurant de nouveau la feftion du biez , au même endroit , je la trouvai de $ pieds de largeur & de 9 pouces 3 lignes de hauteur. RÉSULTAT DE LA NEUVIEME EXPÉRIENCE. Dans ce cas, l’affluent étant à peu-pres égal au réci- pient, leur rapport étoit celui de . . 1.00à 1.00. Et l'augmentation de hauteur étoit à la profondeur primitive, comme . , 1.00 à 1.84. E'UAUB VERRE Renfermant les divers réfulrats des Expériences ci-defJis. Numéros| Surcroits | Surcroîts de Kapports des Rapports de l'aug- des Expe- | de largeur | hauteur aux |affluens aux réci- |menration de pro- riences. faux fec-|feétions. piens. fondeur à la pro- tions. fondeur primitive. pi pi 1. 3.0: 0.|0. 3: ‘9.1 x. 00: 2. 02.| Fr. 00 :! 7. 46. 2. : Mtére lo 7. e00!: me28/o0tt 7307. . 1. 3. O.|0. 4. oO. 1.00 : 3.95$.|1.00 : 10. 50. "Te: 6. 0.10: 5.7 "o.|T. 00 : 9. 46.1 r. 00166. 33. 3 | 4. |#0:0./0:13 n&r..00::,65/30.| r: cor 0: 89: $ 6.! ,|0: 0.10.fotuto: 001200: |rao0-M37166: 7. "lo 001 MAO |T: 00: 2% or OO MT. 57. 1 dr. dl mis 0 li 0oo sr. looks k DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. x3$ Remarques fur ces Expériences & fur la Table qui eft à la fuite. On peut voir que dans tous les cas où une Riviere en a reçu une autre, la hauteur du récipient a toujours augmenté ; mais que cette augmentation n’a aucun rapport fixe avec les affluens. Par exemple , dans la premiere, l'afluent eft au récipient , à peu-près comme rs eftà 2, tandis que l'augmentation de hauteur n'eft à la hauteur primitive que comme 1 à 7 : à peu-près; dans la feconde, l’afluent eft au récipient, comme 1.00 ar: 297 tandes que l’accroiffement de hauteur n'eft à cette Puteur que comme I. O0 à 7. OI. En comparant, fur la Table, les réfultats des troifieme & quatrieme expériences, le rapport de l’augmentation de profondeur à la profondeur primitive, font à peu- près égaux, quoique dans la quatrieme le rapport de l’affluent au récipient ne foit qu’a peu-près la moitié de ce rapport dans la troifieme. On voit à la Table que le rapport de lafflue ent au récipient étant égal , dans la cinquieme Sp ; À celui de 1. oo à 9. 46 , le rapport de l'augmentation de profondeur à aile profondeur primitive ,n ef . celui de 1. 00 à $6. 33. Or ce rapport-ci eft bien él oigné de tous ceux que la même colonne renferme ; mais je dois faire obferver que la Riviere d'Orbiel , qui étoit l'afluent , avoit fes eaux fort troubles lorlque ; je les introduifis dans l'Aude ; que ces eaux n’étoient encore nullement mélées avec celles de l'Aude ; que par là elles étoient plus libres de conferver ce qui leur reftoit de leur grande rapidité, au moment où elles entrerent 126 MÉMOIRES dans ce récipient, & que d’ailleurs cette rapidité étoit favorifée par une plus grande preffion que les eaux fupérieures exerçoient fur les inférieures , à raifon du limon dont elles étoient chargées. De cette plus grande vitefle devoit inévitablement réfulter un moindre re- hauflement dans le récipient , & c’eft ce qui rendoit le rapport obfervé beaucoup plus petit. On remarque dans les deux articles de la fixieme expérience , que fi l’on nomme u la vitefle des eaux dans le premier cas , V leur vitefle dans le fecond , puilque la largeur du petit Canal eft la même, les quan- tités d’eau feront comme u x 11 à V x 14; mais comme l'on fait que V x 14 doit être à peu-prés deux fois plus grand queux 11,onaura l équation XuxEE= V4, ouz2u— 14M: d’où l’on tireu: V :: 14: 22, ou bien,u,:,V::;7 11: ouencore us Visas: De plus , en combinant le premier article de cette même expérience avec la feptieme , on voit que les quantités d’eau qui s’écouloient dans les deux cas, étotent entre elles dans le rapport de 11 u à 22 V ; & comme 22 V eft à peu-près trois fois plus grand que 11 u,on aura l’équation 33 u= 22 V, ce qui donneu: V::22: 33,00 benne: Ver 2cb6oneneore u. Meter ee Maintenant , en combinant le fecond articie de la fixieme expérience avec la feptieme , on voit que les quantités d’eau fournies , dans les deux circonftances , peuvent être exprimées par 14u, 22 V ; & comme 14 u eft à peu-près les ? de 22 V, on a l'équation 3 x 22 V = 14u, ou bien 44 V = 42 u, ce qui donne la proportion u: V::22:21::1.00 : 0.95. Où l’on voit, 1°. que lorfqu’un récipient reçoit un afluent de même portée que lui, fa vitefle s’accroit, pourvu DE L'ACADÈMIE DE TOULOUSE. 137 pourvu que fa largeur n’augmente pas dans le rapport de o. $7 a 1. 00 , tandis que l’accroiflement de hauteur de la fetion n’eft à cette hauteur, fuivant la table, que dans le rapport de 1. 00 à 3. 66 ; 2°. que fi le récipient reçoit un affluent , dont la portée foit double de la fienne , l’accroiflement de vitefle , dans le récipient , n’eft à celle qu'il avoit d’abord , que comme o. $o à 1. 00, & que cependant l'augmentation de hauteur de la feétion eft à cette hauteur dans le rapport de’ r. 00 à 1. 00, ou égale à cette hauteur ; 3° ques fi le réci- pient reçoit un affluent, dont la portée ne foit que la moitié de la fienne , la vite primitive diminue , & que ce dont elle eft Anne eft à la vitefle que le ré- cipient avoit d'abord, dans le rapport de o. 04 à 1. 00, tandis que l” accroiffement de hauteur ef à cette hauteur, comme o. ÿ7 à I. O0. On peut conclure de ces Dh fécyatons , que lorfque les eaux d’une Riviere éprouvent une crue , leur viteile doit augmenter jufqu'à ce qu'elles fe foient élevées À une certaine hauteur, pañlé laquelle , la vitefle , au lieu d'augmenter, diminue, & que par conféquent ‘alors la hauteur , qui d'abord avoit peu augmenté , reçoit une augmentation fenfible , ce qui vient fans doute de ce que la réfiflance des obftacles & les frottemens aug- mentent en plus grande raifon que la vitefle ; mais ce point où la vitefle commence à être plus retardée par cette refiftance, qu’elle n’eft accélérée, & où par con- féquent elle peut diminuer, eft un point que la théorie ne fauroit afhigner, & qu’on ne parviendra pas non plus vraifemblablementa déterminer par l'expérience, à caufe de la difficulté d’eftimer cette réfiftance , dont tant de circonftances peuvent faire varier l'étendue & l'influence, Tome IL. S 138 MÉMOIRES Cette conclufion fe trouve confirmée par l’obferva- tion de M. de Buffon fur les inondations des Rivieres. » » »” Y » Lorfqu'une Riviere groflit , dit ce célebre Ecrivain dans fon Hiftoire Naturelle, la vitefle de l’eau aug- mente toujours de plus en plus , Jufqu’à ce que le fleuve commence à déborder. Dans cet inftant , la vitefle de l’eau diminue, ce qui fait que le déborde- ment une fois commenté , 1l s'enfuit toujours une inondation qui dure plufieurs } Jours : car quand même il arriveroit une moindre quantité d'eau après le dé- bordement, qu’il n’en arrivoit auparavant, l’inonda- tion ne laifferoit pas de fe faire, parce qu’elle dépend beaucoup plus de la mince: de la vitefle de l’eau, que de la quantité de l’eau qui arrive: Si cela n’étoit pas ainfi , on verroit fouvent les Fleuves déborder pour une heure ou deux, & rentrer enfuite dans leur lit, ce qui n'arrive jamais. L'inondation dure au con- traire toujours pendant quelques jours , foit que la pluie cefle , ou qu'il arrive une moindre quantité d’eau, parce que le débordement a diminué la vitefle, & que par conféquent la même quantité d’eau n'étant plus emportée dans le même temps qu'elle l'étoit auparavant , c’eft comme sil en arrivoit une plus grande quantité.» Mais comment, me demandera-t-on, dans le Canal uniforme dont il s'agit dans mes obfer- vations précédentes , la vitefle pourra-t-elle éprouver une diminution par une plus grande affluence d’eau, tant qu’elle ne débordera pas? C’eft que les bords gar- dant toujours la même diftance refpettive qu’ils avoient d'abord , & ne pouvant pas céder à l’impreflion du courant qui fait effort pour {e répandre latéralement, ce courant réagit fur lui-même ; d’où naïflent des bouillon- DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 139 nemens & une fluétuation qui doivent néceflairement en retarder la vitefle. Il n’en étoit pas de même iorfque la quantité d’eau étant moindre & plus proportionnée à la largeur du Canal, elle y trouvoit un paflape libre, & où elle n’éprouvoit aucun engorgement , & par là ardoit une vitefle refpettivement plus grande. Il nous refteroit à concilier avec les réfultats de mes obfervations, où l’on voit conftamment une augmen- tation de hauteur à chaque furcroit d'aflluent, les pré- tendus exemples du contraire dont on a fait tant de bruit, Mais fans examiner tous ces exemples, que la diftance des temps & des lieux'ne permet pas de difcuter en particulier, contentons-nous d’envifager celui qu’on cite de la dérivation du Tibre faite par l’ordre de l'Empereur Nerva. On prétend que le Canal que ce Prince fit creufer pour évacuer les eaux furabondantes du Tibre, dans le temps de fes plus grandes crues, ne fervit point du tout à empêcher fes inondations, & on cite en témoignage de ce fait , les Lettres de Pline. Il eft vrai que cet Auteur, écrivant à Macrinus , (voyez fa Lettre 17, Liv. 8, Traduétion de M. de Sacy ) lui parloit en ces termes : « On ne voit ici qu'orages, » qu'inondations. Le Tibre eft forti de fon lit , & s’é- » levant au-deflus de fes rives , 1l s’eft répandu fort » loin; quoique le Canal , que la /age prévoyance de » l'Empereur a fait faire , en ait reçu une partie, il » remplit les vallées , il coule par les campagnes; par- » tout où 1l trouve des plaines, 1l ne laifle rien à décou- » vert... Puis une pluie continuelle & des tourbillons » qui fembloient lancés des nues , n’ont fait gueres » moins de ravages que le Fleuve en auroit pu faire. » [left clair que Pline, en parlant de cette inondation 140 MÉMOIRES du Tibre , la défigne comme une inondation extraordi- naire, & dont il ne connoïfloit pas d'exemple. On ne doit donc pas conclure de linfuffifance du Canal, dans cette circonftance , pour empêcher entierement les dé- faftres du Fleuve, qu’il ne les diminuât point en partie, & que, fans fon fecours, ils n’euffent pas été plus grands. D'ailleurs , cet Ecrivain qualifie de /age, la prévoyance qu'avoit eu l'Empereur de faire creufer le Canal : il convenoit donc que cet ouvrage pouvoit être d'une efficacité, que mal-à-propos on prétend qu'il a nice. . DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 1:41 MÉMOIRE SUR la nature du Volfram, & celle d’un nouveau métal qui entre dans fa compofition. Par MM. D'ELHUYAR freres, Corre/pondans. GPUR HR MILE R. IL E Volfram eft une des fubftances fingulieres du regne minéral, fur la compofition de laquelle les Miné- ralogiftes ont été fort partagés jufqu’è à préfent. Henckel dit (1) que c’eft une mine d’étain arfenicale & ferrugi- neufe. Cronftedt (2) & Vallerius (3) l'ont regardée comme une manganefe mêlée d'étain & de fer. Jufti (4) aflure qu’il contient du fer, de l’arfenic , un peu d’étain & une terre non métallique , auxquels Piumer ajoute encore du foufre & de la terre calcaire (3). Scopoli (6) dit que c’eft une mine d’étain qui donne 25 livres par quintal. M. Sage (7) penfe que c’eft une combinaïfon du fer avec le balaite ; ; d’autres Auteurs lui donnent encore d’autres principes difiérens. Mais celui qui a examiné avec le plus d'attention ce minéral , c’eft Lehmann (8). Il rapporte une infinité d'expériences À (1) Kies-Hiftorie , cap. 9. (2) Forfok til. Mineralogie eller Mineral Rikets Upftallning, $, 117, (3) Syftema Mineralogicum , tom. 1 , pag. 345. (4) Grundriss des Mineral-Reichs, pag. 58. (5) Naturgefchichte des Mineral-Reïchs , tom. 1, pag. 448. (6) Enleitung zur Kenntniss und Gebrauch der Foflilien , pag. 104. (7) Elémens de Minéralogie Docimaftique, vol. 1, pag. 209. C8) Phyficalifch-Chymifche Schriften, pag. 2754 Lu le 24 ars 1784 142 MÉMOIRES defquelles il conclut qu'il eft compofé d’une terre vi- trefcible , combinée avec beaucoup de fer, & une petite portion d’étain. Les expériences {uivantes feront voir, que ce que cet Auteur regardoit comme terre vitrefci- ble , a des propriétés fort différentes de celles qui de- vroient la caraétérifer comme telle ; & que le produit ferrugineux contient encore une autre matiere, qu'il ne connut point. Ce minéral, que les Allemands ont appelé Wo/fiam ou Wolfarth , nom qui a été traduit en latin par celui de Spuma-Lupi , n'a été trouvé jufqu’à préfent que dans les mines d’étain : car, quoique plufieurs Auteurs veuil- lent le fuppofer plus commun , c’eft une erreur qui provient de ce qu'ils confondent quelques mines de fer fpéculaires, avec le véritable Volfram , comme on peut le voir par leurs defcriptions & par les échantillons que l'on trouve fouvent fous ce nom dans les Cabinets. Quelques - uns lui ont donné aufli le nom de Zupus Jovis, par rapport aux mauvais effets qu'il produit dans les fontes des mines d’étain , dont il eft difhicile de le féparer par les lavages, à caufe de fa pefanteur, qui eft tres-confidérable. GR E Le Volfram eft dun noir brunâtre. On le trouve en mafles, ou difperfé & cryftallifé en prifmes hexaedres , comprimés, terminés par des pyramides tétraedres, dont les angles font tronqués. Intérieurement , il eft brillant, & d’un éclat qui approche du métallique. Sa caflure eft feuilletée , & les feuillets font plats , quoiqu'un peu confus : dans quelques endroits , elle eft plutôt inégale que feuilletée, & rarement ftriée. Lorfque la caflure eft DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. +43 feuilletée, on y obferve des parties féparées , teftacées. Ses fragmens font anguleux indéterminés , avec des bords peu aigus. Il eft toujours opaque. En le raclant, il donne une poudre d’un brun rougeûtre obfcur. Il eft mol , & extraordinairement pefant; fa pefanteur fpécifi- que eft 6, 835 (1). Le Volfram que nous avons employé dans nos ex- périences, avoit ces caraéteres : 1l provenoit des mines d’étain de Zinnwalde dans les frontieres de la Saxe & de la Boheme. CAE D 1°. Le Volfram ne fe fond pas par lui - même au chalumeau ; fes angles s’arrondiffent feulement , mais l'intérieur conferve fa ftruêture & fa couleur. 2°, Avec le fel microcofmique, il fe fond avec effer- vefcence, & forme un verre d’un rouge d’hyacinte dans la flamme extérieure, qui devient beaucoup plus obfcur dans l’intérieure. 3°. Avec le borax, il fait auffi effervefcence , & il forme un verre d’un jaune verdâtre dans la flamme in- terne , & rougeûtre dans l’externe. (1) Cette deftription eft faite fuivant la méthode que M. Werner , Profefleur de l’inftitut Métallurgique de Freyberg, a donnée dans fon Traité des caracleres externes des Foffiles ; méthode dont il fait ufage dans les excellentes defcriptions ajoutées à la nouvelle traduétion qu'il fait de la Minéralogie de Cronfted en Allemand , dont il a déjà paru une partie. Il feroir à fouhaiter que tous les Minéralogiftes vouluflent adopter le langage que cet Auteur propofe. On ne verroit pas alors cette multitude de noms donnés à une même chofe ; & des chofes fort différentes confondues fous la même dénomination. On pourroit mieux juger des analyfes des Chymiftes. On éviteroit des conteftations ; on fauroit à quoi s’en tenir fur les defcriptions : au lieu que dans prefque toutes celles qu’on a données jufqu’à préfent, il faut deviner, pour favoir de quoi on y parle, & l’on fe trompe encore fouvent. En un mot, la Minéralogie, au lieu d'un langage vague , en auroit un aufli déterminé que la Botanique & la Zoologie. 144 MÉMOIRES 4°. Ayant expofé une portion de Volfram dans uf creufet à un feu fort, pendant une heure, il fe bourfou- fla , & devint fpongieux & brun ; il prit une fémi- vitrification » & étoit après cela attirable à l’aimant. s°. Mélé à parties égales avec le nitre, & jeté dans un creufet rougi au feu, il fe fait une détonnation, ou pour mieux dire , le mélange bout avec une flamme bleue aux bords, & il s’éleve des vapeurs nitreufes. En jetant enfuite ce mélange dans l’eau , 1l sy diflout en partie ; 1l fe forme un précipité blanc, en jetant quel- ques gouttes d'un acide dans cette Sletons & IV. 1°, Ayant mis au feu , dans un creufet , deux gros de Volfram réduit en poudre, avec quatre gros d’alkali végétal , le mélange fe fondit aflez facilement ; mais l'ayant HA enfuite fur une plaque de cuivre, il refta dans le creufet un réfidu noir , qui , après avoir été édulcoré, pefoit 37 grains. 2 Nauss jetèmes enfuite ce qui étoit tombé fur la plaque, dans l’eau qui avoit fervi a édulcorer le réfidu précédent; & ayant filtré la liqueur, 1l refta fur le filtre une poudre d’une couleur plus claire que celle du réfidu précédent , & qui, après avoir été bien lavée, pefoit 9 grains. 3°. Le réfidu noir qui étoit refté dans le creufet, étoit attirable à l’aimant, & donnoit au chalumeau, avec le {el microcofmique ; un verre d’un jaune verdätre dans la flamme intérieure , & dans l’extérieure , un globule qui, au moment du refroidiffement , étoit d’un rouge cramoïfi, & devenoit enfuite d’un jaune rougeûtre. Ce phénomene DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 14 phénomene nous fit reconnoître dans cette matiere un mélange de fer & de manganefe (1). Pour féparer de ce réfidu la partie de Volfram qui auroit pu refter fans être décompofée , nous le délayämes dans l’eau ; mais voyant qu'il s’y foutenoit facilement fans former immé- diatement de dépôt, nous conclûmes qu’il ne devoit en refter que très-peu , ou point du tout , qui ne füt dé- compolé. 4°. L'autre réfidu qui étoit refté fur le filtre , étoit aufli attirable à Paimant ; mais le verre qu’il formoit avec le fel microcofmique, nous fit juger qu’il contenoit beaucoup moins de manganefe que le précédent. 5°. Nous jetimes enfuite de l'acide nitreux fur la diflolution qui avoit paîlé claire par le filtre; & fur le champ il fe fit un précipité blanc abondant, qui, après avoir été éduicoré , confervoit un goût, fucré d’abord, & enfuite piquant & amer; & produifoit une impreflion défagréable à la gorge : il fe diflolvoit dans l’eau , & rougifloit alors le papier bleu de tournefol. Nous ne pümes pas déterminer avec exaétitude la quantité de ce (2) Ce phénomene eft très-utile pour découvrir la manganefe mélée avec le fer, dans tel état que ce dernier fe trouve. Il eft conftant que la flamme externe du chalumeau calcine en général les métaux, & que l’interne leur donne une portion de phlogiftique. 11 y a très-peu de différence dans les effets que produi. fent ces deux flammes fur le fer : car, dans les deux, il donne au fel microcof. mique une couleur verte, plus ou moins foncée , fuivant la quantité qu'on em- ploie. Mais la mangancfe, traitée avec ce même fel, lui donne , dans la flamme externe, une couleur rouge cramoifi, qui s’évanouit entierement dans l’interne, Cela étant , il eft facile d'expliquer le changement du rouge cramoifñ au jaune rougeâtre, dans le mélange de ces deux matieres. La manganefe calcinée , dans la flamme externe , préfente la couleur rouge qui lui eft propre dans cer état ; mais en refroidiflant, elle Ôte au fer une portion du phlogiftique qui lui refte : & elle perd avec lui fa couleur ; & le fer privé de cette partie, donne au fel microcofmique une couleur jaune de miel. Si dans le mélange il y a plus de manganefe que de fer, comme il arrive dans le cas aétuel, la premiere ne trou- vant pas tout le phlogiftique nécefaire , donne au jaune du fer une nuance de rouge , & de là réfulte le jaune rougeûtre, Tome IT. T 146 MÉMOIRES précipité, parce que nous obfervames qu #11 fe diflolvoit aflez dans les eaux de lotion. Nous examinerons dans la fuite fa nature. $. V. 1°. Ayant Ares ces réfultats par la voie feche , nous pafsämes à à l'examen de cette matiere par la voie humide ; & pour cela , nous mimes dans un matras cent grains de Volfram en poudre » fur lequel nous jetèmes une fufifante quantité d'acide marin pour le couvrir de l’épaifleur d’un doigt ; nous plaçames ce matras dans un bain de fable , & l'ayant fait bouillir pendant une heure , nous obfervämes que la poudre devenoit jaune. Cette particularité j jointe aux propriétés acides, que nous avions reconnues dans le précipité blanc [ $. IV, n. 5. ], nous firent foupçonner que la matiere dont provenoit cette couleur , pourroit bien être celle que M. Scheele a dernierement trouvée dans la Tungflene ou pierre pefante (x). 2°. Notre foupçon devint plus vraifemblable , lorf- qu'ayant décanté la liqueur , après l'avoir laïflée repofer, & ayant édulcoré le réfidu avec de l’eau diftillée, jetant enfuite de l’alkali volatil deflus, la couleur jaune difpa- rut à l’inftant, & la liqueur refta claire. Nous décantà- mes alors de nouveau la liqueur , & après avoir édulcoré le réfidu avec de l’eau diftillée ,nous le fimes bouilliravec du nouvel acide, qui préfenta les mêmes phénomenes que le premier. Il en fut de même de l’alkali volatil, avec lequel nous répétâmes l’opération antérieure. Nous con- tinuâmes de cette façon , en changeant d’acide & d’alkali (1) Journal de Phyfique , Février 1783. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. +147 alternativement , jufqu'à ce qu'il ne refta qu’un peu de poudre blanche, qui ne voulut point fe diffoudre , ni dans l’un ni ds l’autre, & dont le poids étoit de deux grains. 3°. Ce petit réfidu étoit en partie du quartz , & fembloit en partie de la chaux d’étain, par la couleur laiteufe que montroit le verre formé par cette matiere, & le fel microcofmique en refroidiffant. Cependant nous ne pouvons pas aflurer que ce füt véritablement de ja chaux d’étain , parce que fa petite quantité ne permit pas de faire les eflais néceflaires pour le confirmer. 4°. Nous mêlâmes après cela les diflolutions acides avec leurs eaux de lotion correfpondantes , & nous les fimes évaporer jufqu’à réduire le tout à environ quatre onces. Nous fimes de même avec les diffolutions alka- lines, & leurs eaux de lotion; mais elles ne furent point évaporées. s°. Ayant fait deux autres diffolutions de ce minéral, l'une par l'acide vitriolique, & l'autre par l'acide nitreuxs 1l prit une couleur bleue avec le premier, & jaune avec le fecond, ce qui acheva de nous confirmer dans notre foupçon. Mais comme ces diflolutions fe faifoient beaucoup plus lentement , que celle par l'acide marin, nous les abandonnâmes, pour fuivre, avec cette derniere, nos recherches. 6°. Nous primes enfuite la huitieme partie de fa diffolution acide [ n. 4. ], & ayant cflayée avec l’al- kali Pruffien , elle donna un précipité bleu très-abon- dant. Mais connoïffant que dans cette diflolution il devoit y avoir de la manganefe, & fachant d’ailleurs, qu'elle fe précipite conjointement avec le fer , nous eümes recours à un autre moyen pour féparer ces deux 143 MÉMOIRES fubftances (1). Pour cet effet, nous jetimes fur la diffolu- tion reftante une once d’acide vitriolique, & nous fimes évaporer la liqueur, jufqu’à ce que le mélange ne ren- voyoit plus d’odeur d'acide marin. Comme la liqueur avoit beaucoup diminué par cette opération , car elle fut réduite prefque à fec , nous l'etendimes avec quatre onces d’eau difullée ; & après avoir faturé l'excès d’a- cide, avec l'alkali végétal; jufqu'à ce que la liqueur commençoit à fe troubler , nous la plaçames fur un bain de fable , & nous la fimes bouillir pendant un quart d'heure. À mefure que la liqueur s’échaufloit , il {e forma un précipité très-abondant , & l’ayant filtrée, elle pafla claire & fans couleur. Ce qui refta fur le filtre pefoit 12 grains , & étoit attirable à l’aimant. Après l'avoir calciné , le verre que le réfidu formoit avec le {el microcofmique , ne donnoit aucun indice de man- ganefe. st | | | 7°. Ayant examiné après cela la diffolution claire, au moyen de quelques gouttes d’alkali Pruffien , elle donna un précipité brunätre fans le moindre atome de bleu ; elle fut précipitée pour lors entierement avec (x) L’illuftre Bergmann propofe deux méthodes pour faire cette féparation. La premiere confifte à faire évaporer à fec, la diffolution de ces deux fubftances dans l'acide nitreux, calciner le réfidu , & jeter enfuite deffus de l'acide nitreux avec un morceau de fucre ; pour lors l'acide diflout aifément la manganefe , & très-dificilement le fer. La feconde fe réduit à précipiter ces deux métaux en- femble avec l’alkali Pruffien; d'où il réfulte que la manganefe, combinée avec la partie colorante du bleu de Prufle , forme un compofé foluble dans l’eau , & alors on peut la féparer du fer par les lavages. Mais ces deux méthodes ont leurs inconvéniens. Dans la premiere , l’acide nitreux diffout toujours un peu de fer, & par conféquent elle n’eft pas entierement exaéte ; & dans la feconde , quoiqu'on puifle déterminer aifément la quantité de fer, comme la manganefe s'en va dans les eaux de lotion avec le fel neutre qui s’eft formé dans la précipi- tation, il n’eft poflible d'en déterminer la quantité qu'avec beaucoup de travail. C’eft pourquoi la méthode que nous avons employée nous a paru plus courte, & plus fure. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 149 Pakali végétal aéré, ce qui fut fait en trois temps, en fafant bouillir à chaque fois un peu la liqueur. Les deux premiers précipités eflayés au chalumeau , donne- rent, avec le fel microcofmique, des verres d’un rouge cramoïf , comme la manganefe la plus pure, dans a flamme externe ; & dans Poe , la couleur difparut entierement. Le re donna aufli un femblable ver- re, mais qui, en refroidiflant , reftoit laiteux dans les dE flammes ; ce qui Enbibie annoncer une portion, quoiqu "infiniment petite, de terre calcaire , ou de chaux d’étain dans cette matiere. Nous fommes cependant plus portés à croire que ce fut la premiere » parce que la chaux d’étain n’auroit pas attendu à fe précipiter la der- niere. Quant à la terre calcaire, nous ne pouvons pas non plus aflurer fon origine ; peut-être provenoit-elle des eaux que nous avions employées , quoique nous euflions mis tout le foin poflible à leur diftillation. Les trois précipités réunis pefoient 24 grains & :, & par la calcination , ils fe réduifirent à 19 + de chaux noire. Mais fi nous ajoutons à ce poids, le correfpondant à a la huitieme partie que nous avions précipité féparément avec l’alkali Prufien, le total de la manganefe, en état de chaux noire, AE 22 grains ; & celui de fers 1 3: ri Nous jetimes enfuite de l’acide nitreux fur la moitié de la diffolution alkaline fn. 4. ], & il fe forma fur le champ un précipité blanc bone Après avoir décanté la liqueur , nous jetèmes de l’eau diftillée fur le précipité pour lédulcorer ; mais nous étant apperçus qu'il s'y diflolvoit en Partie, & voulant en déterminer exattement la quantité, nous verfâmes fur lui la liqueur qui avoit été décantée , pour ramafler ce qui fe feroit L 150 MÉMOIRES diflout, & nous la fimes évaporer jufqu’à ficcité. Nous mimes enfuite le réfidu dans une petite capfule de terre, que nous plaçcimes fous la moufle d’un fourneau de coupelle ; par ce moyen, le nitre ammoniacal fe vola- tilifa, & il refta une matiere jaune de couleur de foufre, qui pefoit 28 grains. Comme cette quantité provenoit de la moitié de la diffolution , il réfultoit que les 100 grains de Volfram en contenoient 56 de cette matiere; mais ayant obfervé que le fond de la capfule reftoit jaune , nous la cafsâmes ; & nous vimes qu’elle l’avoit pénétrée de l’épaiffeur d’une ligne. Nous répétâmes donc cette expérience, en nous fervant d’un fond de matras ; & nous nous aflurimes ainfi, que le Volfram contient 6$ pour 100 de cette matiere. & VL De ces mêmes effais répétés différentes fois , tant par la voie feche que par la voie humide , il réfulte, que le Volfram eft compofé de manganefe , de fer & d'une matiere jaune , dont nous examinerons bientôt les propriétés. Quant au quartz & au peu d’étain que nous avons foupconné dans le réfidu infoluble , nous croyons devoir les regarder, plutôt comme des parties hétérogenes qu’effentielles à la compoñition du Volfram : car il ne feroit pas étonnant que ce minéral , prove- nant d’une mine d’étain, dans laquelle la gangue ordi- nare eft du quartz , contint quelques atomes de ces deux fubftances , fi finement difperfées , qu'ils fuffent imperceptibles à nos fens. La proportion de ces prin- cipes , par la voie humide eft , dans cent grains de Volfram ; DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. sx Manganefe en état de chaux noire . 22 grains. Shauxideten ae le Miele 83 2 La matiere jaune . . ANEUIE CS 6S Réfidu quarzeux & d’é ut Sa AL TE 1 102 + Quoique le produit en fer & en manganefe femble être plus grand par cette voie, que celui que nous avons retiré par la voie feche ; quoique l’acide marin volatilife toujours un peu de fer , 1l faut obferver, que le creufet ne put point être lavé aflez exatement, qu'il n’en reftat un peu attaché à fes parois. En outre , le fer & la manganefe obtenus par la voie feche , approchent plus de l'état métallique, que ceux qu’on retire par la voie humide, qui font plus calcinés. De là provient aufhi que la re des produits ef ici plus grande, que celle des 100 grains de Volfram dont ils proviennent. La matiere jaune contribuera peut-être aufhi à cette différence; car nous ne favons pas, fi elle fe trouve précifément dans ce même état. Pour compléter cette analyfe, il faudroit recompofer de nouveau le Volfram , en réuniflant fes principes dans les proportions dans lefquelles nous les avons trouvés ; mais nous n'avons pas pu parvenir à faire cette réunion. Nous n'avons point trouvé, & nous ne voyons pas même de moyens, pour le faire par la voie humide : la difficile fufion de ces trois matieres eft un obftacle, que nous n’avons pas pu vaincre, pour parvenir à notre but par la voie feche. L'examen que nous avons fait de cette matiere jaune, du précipité blanc produit par l’acide nitreux dans la 192 MÉMOIRES diffolution alkaline fixe [ $. IV, n. $. ], & de celui qu’occafionna le mème acide dans la dfolution alkaline volatile [ $. V, n. 8. ], a achevé de nous convaincre que ces sous font entierement femblables à ceux, que M. Scheele obtint dans fon analyfe de la tungftene ou pierre pefante (x). Pour plus de fureté, nous les avons comparés avec ceux que nous avions retirés , par la même méthode d’une pierre pefante , provenant des mi- nes d’étain de Schlackenwalde en Boheme (2), & nous les avons trouvés être la même chofe. Nous ne diflimu- lerons cependant pas, que nos expériences nous ont fait voir, que ce que MM: Scheele & Bergmann ont regardé comme un fel fimple acide , eft un fel très-compofe , qui varie fuivant les procédés que l’on emploie pour le former ; comme on le verra par les expériences fui- vantes, faites avec la matiere jaune. SV LL Pour faire cet examen avec la facilité & la précifion requifes , nous nous propofàmes de ramafler d’abord une bonne quantité de eette matiere; & pour cela nous fondimes fix onces de Volfram , avec autant d’alkali végétal. Ce mélange fut enfuite diflout dans de l’eau diftillée, & la liqueur filtrée fut évaporée jufqu'à ficcité. Il refta pour lors un fel blanc , fur lequel, après l'avoir broyé , nous jetâmes de Pate nitreux » qui, par l'ébullition au bain de fable , le rendit jaune. Nous décantämes enfuite la liqueur , & nous jetiämes du (1) Journal de Phyfique, Février 1783. (2) Cette pierre a été généralement regardée ju qu’à à préfent comme une mine d'étain blanche : cent grains en ont donné 68 de matiere jaune , & 30 de chaux, ou terre calcaire pure. nouvel DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 153 nouvel acide fur le réfidu, avec lequel il fut foumis de nouveau à l’ébullition ; & cela fut répété encore une troifieme fois, pour le dépouiller entierement de fon alkal. Le réfidu fut , enfuite, calciné fous la moufle du fourneau de coupelle , d’où il fortit très-jaune & ur. : SE Li 1°. Cette matiere eft entierement infipide, & fa pefan- teur fpécifique eft 6, 12 (1). (1) Voici la méthode que nous avons employé pour déterminer la pefanteur fpécifique de cette matiere & celle de plufeurs autres, dont nous parlerons dans la fuite. 1°. On met un petit flacon de cryftal dans un des plats d’une balance ordinaire, qui foit bien fenfible ; & dans l’autre , de la limaille de fer ; OÙ un autre corps quelconque , pour lui faire équilibre. L'on introduit enfuite dans le flacon, une portion arbitraire de la matiere dont on veut connoître la pefanteur fpécifique , réduite en petits morceaux, ou en poudre ; & l’on tient compte de fon poids. 2°. On remplit, après cela , le flacon , d’eau diftillée ; en laiflant dedans , la matiere que l’on examine, & on le pefe de nouveau dans cet état, Souftrayant alors de ce poids, celui de la matiere feche ; ce qui refte, eft le poids de l'eau. 3°. Cela fait, on vuide le flacon, on le lave bien , on le remplit de nouveau avec de l’eau diflillée feule , & on le pefe. kn fouftrayant du poids de l'eau de cette troifieme opération, celui de l'eau de la feconde ; ce qui refte eft le poids de la portion d’eau , qui , dans la troifieme opération , occupoit le même efpace que la matiere feche dans la feconde , & par conféquent d'un volume épal à celui de celle-ci. En comparant donc ce refte avec le poids de la matiere qu’on examine , on aura un réfultat qui fera la pefanteur fpécifique cherchée. Cette méthode donne en général plus de pefanteur fpécifique aux corps, que Ja balance hydroftatique ; parce que, réduits en petits morceaux , le nombre de leurs pores diminue confidérablement. C'eft ainfi que le Volfram , qui , par la balance hydroftatique , donne 6, 835 , comme il a été dit dans fa deféription , donne , par cette autre méthode, 6, 931, en le réduifant en morceaux de la groffeur d’une lentille. Avec les matieres réduites en poudre fine , les réfultats ne font ni aufli exaëts , ni auffi confans: les unes donnent plus, que lorfqw’elles font en petits morceaux, & d’autres en donnent moins. Cette différence provient de ce que, dans celles qui donnent un réfultat moindre , il eft difficile , pour fi fort qu’on temue le flacon, que l’eau rempliffe bien tous les interftices , que laïffent entre eux les grains de la poudre. C’eft pour cela que le Volftam, réduir en poudre, donne un réfulta: moindre encore, que par la balance hydroftatique, Quant à celles qui donnent plus de pefanteur, ce font feulement celles qui font très-poreufes lorfqu’elles font en maffes, & celles qui ont quelque afinité avec Veau , qui pour lors remplit bien tous les interftices, Tome I]. V 154 MÉMOIRES 2°, Effayée au chalumeau , elle conferve fa couleur jeune dans la flamme externe, même fur un charbon ; dans l’interne, elle devient noire, & fe bourfoufle ; mais elle ne fe fond point. 3°. Avec le fel microcofmique, elle fait effervefcence; & forme, dans la flamme interne, un verre tranfparent, d'un bleu plus ou moins obfcur, fuivant la proportion du mélange , mais fans aucune teinte de rouge : dans la flamme externe , fa couleur difparoït entierement , mais il la reprend dans l’interne. Si l’on répete plufeurs fois cette alternative , ou qu'on maintienne ce verre pendant long-temps dans l’une des deux flammes , fur un charbon; il perd tellement fa couleur, qu’il eft im- pofible de la lui rendre. Cet effet dépend de l'alkali des cendres, qui décolore le verre en fe combinant avec lui : comme il arrive lorfque l’on ajoute une portion d’alkali, ou de nitre, à un globule du même verre nouvellement forme, & dontiacouleûr foit foncée : car, fur le champ, ils le FOHOÈUE limpide. 4°. Avec le borax , elle fait aufli effervefcence , & forme un verre d’un jaune brunâtre & tranfparent, qui conferve cette couleur dans les deux flammes. °, Avec l’alkali minéral, elle fait aufli effervefcence, & fe fond, mais fans préfenter aucun phénomene par- ticulier. $&. IX. 1°. Cette matiere ne fe difout pas dans l’eau; mais en la triturant avec elle, elle forme une émulfon, qui traverfe les filtres fans s’éclaircir ; & fe conferve long- temps fans former de dépôt. On obferve feulement , lorfqu’elle eft trop chargée , qu'au bout de quelques LA DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 115$ jours il fe forme , vers le fond du vale , une efpece de nuage plus denfe, que dans le refte du flacon ;-& au bout de trois mois la liqueur eft encore un peu lee 2°. Les acides vitriolique , nitreux & marin , n’ont aucune aétion fur elle ; elle ne s’y délaie pas , mème par la trituration. L’acide acéteux lui donne une couleur bleue , mais il ne la diflout point. 3°. Elle fe diflout entierement dans l’alkali végétal, tant par la voie feche, que par la voie humide ; mais le rélultat eft toujours avec excès d’alkali. Si, fur cette diflolution , on Jette quelques gouttes d'acide nitreux ; il fe fait à l’inftant un précipité blanc , qui fe rediflout en remuant la liqueur. La mème chofe arrive en jetant de nouvel acide, & cela continue tant que la diffolution conferve un excès d’alkali : elle acquiert aufli à pro- portion plus d’amertume. Si l’on jette plus d'acide qu il n'en faut pour faturer l’exces d’alkali, le précipité qui fe forme ne fe rediflout plus , quoique l’on remue la liqueur ; fi on la filtre dans cet état, 1l refte fur le filtre un fel blanc, qui, après avoir été édulcoré, conferve un goût fucré d’abord , & enfuite piquant & amer; il produit une fenfation défagréable à la gorge. Ce fel fe diflout dans l’eau , & rougit alors le papier bleu de tournefol. Ce fei eft abfolument le même , que le précipité blanc occafionné par l'acide nitreux, dans la diflolution alka- line du Volfram [ $. IV, n. 5. ]. Il eft aufi entierement femblable à celui que M. Scheele obtint dans l’analyfe de la Tungflene [ $.T, lett. f ], & qu'il a regardé comme un acide particulier. Nous avouons aufli qu'il contient un acide particulier ; mais nous allons faire voir, qu'il eft combiné avec une portion d’alkali & de l'acide préci- < 156 MÉMOIRES pitant, & que c’eft feulement en état de combinaifon qu'il a préfente, jufqu’à préfent, des propriétés acides. 2% Les propriétés de ce fel varient aflez , fuivant les circonftances quiaccompagnent la précipitation, comme on pourra le voir par ce qui fuit. 1°. Ce fel fe fond, par lui feul, au chalumeau ; & avec les fondans, il préfente les mêmes phénomenes , que la matiere Jaune. 2°, Mis à calciner, 1l renvoie une odeur d'acide ni- treux, & devient jaune ; mais après le refroidiflement, il eft blanc , infipide & infoluble ; & 1l fe fond encore au chalumeau. 3°. Les acides vitriolique & nitreux , jetés fur ce fel, lui donnent une couleur jaune & le décompofent ; on trouve dans la liqueur filtrée un fel neutre , à bafe d’alkali végétal, relatif à l'acide qu'on y a employé. Si au lieu de jeter cet acide fur ce fel , on le jette fur fa diffolution , il ne fe fait point de précipité , pas même en faifant bouillir la liqueur , fi l'acide y eft en petite uantité ; mais fa diflolution perd à mefure fon goût {ucré , & acquiert plus d’amertume. Si l'on jette l’acide en abondance , & fi l’on fait bouillir la liqueur , 1l fe forme un précipité jaune , entierement femblable à la matiere jaune employée pour former ce fel. 4°. L'acide acéteux diffout entierement ce fel par le moyen de l'ébullition: laïflant enfuite refroidir la diflo- lution, il fe dépofe, dans les parois du vafe,une matiere blanche , tenace comme la cire , qui , étant lavée & pétrie avec les doigts , forme une mafle glutineufe , DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 1s7 femblable à la partie glutineufe du froment » laquelle produit fur la langue une imprefhion ee très- douce. La laiflant à l'air, elle prend une couleur brune obfcure , perd fa tenacité, & acquiert un goût amer. Cette fubftance fe diflout He l'eau , & lui donne un goût fucré au commencement , & ne amer. Elle rougit la teinture de tournefol, & a toutes les propriétés du fel précédent ; excepté qu’elle devient bleue avec l'acide vitriolique , & qu’elle précipite le vitriol de cuivre. Nous ne pouvons pas aflurer cependant fi ce fel contient un peu d'acide nitreux ; mais ce qu'il de sûr, c’eft que nous avons on un fel Robe en nous fervant de l’acide acéteux, au lieu du nitreux, dans la précipitation de la diflolution de la matiere jaune dans l’alkali fixe. Voici notre procédé. En évaporant, à ficcité, cette diffolution alkaline, & jetant de l’acide acéteux fur le réfidu, il fe diflout, en grande partie , au moyen de l’ébullition. En décantant enfuite à l’inftant la liqueur , & la laiffant refroidir , 1l fe forme de petits cryftaux en barbes de plume , qui, après avoir été édulcorés , ont d’abord un goût Fa \ quoique moins fort que me du fel précédent, & enfuite amer. Leur diffolution rougit le Papier bleu , & l’efprit de vin y occafionne un précipité ; mais la liqueur refte émulfive. La portion qui refte fans fe diffoudre, eft auffi de la même nature. Ces mêmes cryftaux mis en digeftion dans de nouvel acide acéteux , s’y diflolvent , & lui donnent une couleur bleue ; mais en laiflant refroidir la liqueur, elle perd cette couleur, & il fe dépole, fur les parois du vafe,une matiere glutineufe, femblable, par fes propriétés , à celle dont nous avons déjà parle. Si, au lieu de laïffer refroidir la liqueur , on la fait DL 153 MÉMOIRES plus long-temps , la couleur bleue difparoït , & 1l ne fe précipite rien, pas même en refroidiflant. Si l'on continue l’ébullition, pour la concentrer jufqu’à ficcité , & que l’on jette deffus de l’efprit de vin, pour {éparer le fel acéteux alkalin , qui pourroit s'être forme , il refte une poudre blanche , qui , après avoir été édulcorée avec du nouvel efprit de vin, a un goût très-amer, eft très-foluble dans l’eau, & fa diflolution ne rougit point le papier bleu, ni ne change en bleu celui préparé avec le vinaigre. Ce dernier fel préfente au chalumeau les mêmes phénomenes , que le fel acéteux précédent ; 1! devient bleu avec l'acide vitriolique : avec le vitriol de cuivre , il donne un précipité blanc ; enfin , dans tout le refte , il ne fe diftingue point d'eux. Tous ces {els deviennent d’abord bleus par la calcination , enfuite jaunes ; mais en refroidiffant , ils reftent tous blancs. Ces différens fels, compofés tous des mêmes principes, favoir, de la matiere jaune, d’alkali végétal & d'acide acéteux, ne diflerent, que par la proportion de ces mêmes principes , où par leur état de combinaïfon plus où moins intime; d’où réfulte la diverfité de leurs faveurs, & la petite différence dans les autres propriétés. Ces parties conftituantes ont été reconnues de la ma- niere fuivante. Ayant jeté fur les diffolutions, tant du précipité blanc produit par l'acide nitreux [ $. IX, n. 3. ], que de ces fels acéteux, une portion d’eau de chaux ; elles forme- rent des précipités, qui n’étoient tous que de la ungflene régénérée ; & nous trouvâmes dans les diffolutions fl- trées, des fels neutres à bafe d’alkali végétal, relatifs aux acides avec lefquels la précipitation avoit été faite dans chacune; ce qui prouve que ces deux principes entroient DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. +59 dans la compofition des fels, ou précipités en queftion. s°. Les diflolutions vitrioliques de fer, de cuivre & de zinc, celles d’alun, & du muriate de mercure , & lalkali Pruffien, n’occafionnent aucun précipité dans la diflolution du fel , formé par le concours de l'acide nitreux [ $. IX, n. 3. ]; mais le nitre calcaire, & les fels acéteux de LR & de plomb, donnent He pré- cipités blancs. Dalkalé Pruflien ne précipite pas non plus les fels acéteux [ $. X , n. 4.] Ces expériences prouvent fuffifamment , que ce fel n’eft point un acide fimple , mais un fel compofé de la matiere jaune, d’alkali végétal & d’acide nitreux. La combinaifon de cette même matiere , avec l’alkali vo- latil, achevera d’éclaircir ce point, en faifant voir, que l'acide, que M. Scheele a obtenu de la décompofition Tue ogftene , par la voie humide , eft aufli un fel compofe. SUXNE 1°. Cette matiere jaune fe diflout aufli, entierement, dans l’alkali volatil ; mais le réfultat eft toujours avec excès d’alkali. 2°. Ayant mis à évaporer cette diflolution, dans un bain de fable , il s’en forma de petits cryftaux figurés en aiguilles, d’un goût piquant & amer. Ils produifoient une fenfation défagréable à la gorge; ils fe diflolvoient dans l’eau, & rougifloient alors le papier bleu. Ayant répèté cette opération, avec différentes portions de ces mêmes cryftaux, diflouts dans l’eau diftillée ; larflant les uns plus long-temps au feu que les autres, AOÛ obtin- mes des diflolutions, avec d’autant plus d’excès d'acide, qu’elles avoient fouffert plus long-temps le feu; & pen- 160 MÉMOIRES dant cette opération , elles renvoyoient toutes des vapeurs d’alkali volatil. Si lon continue trop long-temps cette opération, ou que l'on y donne un peu trop de feu , ce fel fe décompole ; & il fe dépofe une matiere bleue, infoluble & infipide (1). Ces cryftaux perdirent tout leur alkali par la calci- nation; & le réfidu étoit une poudre jaune, entierement femblable à celle, qui avoit été employée pour leur for- mation. En faifant cette opération dans une cornue, le réfidu eft d’un bleu foncé, & ne devient jaune que par la calcination à l'air libre. La diflolution de ces cryftaux eft précipitée par les fels vitrioliques de fer, de cuivre & de zinc; par l’alun, le nitre calcaire, le muriate de mercure , & les fels acéteux de cuivre & de plomb. L’acide vitriolique décompofe ce fel, & donne un pré- cipité bleu. L’acide nitreux & l’acide.marin en font de même ; mais le précipité eft jaune. L’eau de chaux régé- nere la Zungftene, & l’alkali Prufien n’occafionne aucun précipité. 3°. Ayant jeté de l'acide nitreux , fur une autre por- tion de la diffolution, avec excès d’alkali ; il fe forma un précipité blanc, qui, après avoir été édulcoré, con- fervoit un goût fucré d’abord , & enfuite piquant & amer : il fe diflolvoit dans l’eau , & rougifloit alors le papier bleu. Ce précipité eft femblable à celui que nous avions obtenu dans l’analyfe du Volfram[ 4. V, n.8.], ainfi qu’à celui dont parle M. Scheele, $. IT, lett. c & d, de fon Mémoire, déjà cité. (1) Nous penfons , au commencement, que les précipités, produits par les acides, dans les diflolutions alkalines de cette matiere jaune , n'étoient , comme celui. ci, que des fels avec excès d'acide; compoñés feulement d’alkali, & de cette matiere : mais les expériences que nous avons déjà rapportées , & celles qui vont fuivre , nous firent changer d'idée, Ce DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 161 Ce fel differe de celui tiré de la diffolution par l’alkali fixe,[ $. IX, n. 3. ] par les propriétés fuivantes : ro. fa diflolution fe décompofe en la faifant bouillir : elle devient émulfive & de couleur bleue ; 1l s’en préci- pite une poudre bleue, qui n’a point de propriètes fali- nes , & qui fe comporte en tout comme la matiere jaune, dont elle ne diflere que par un peu de phlogifti- que, qu elle a enlevé à l’alkali volatil. 2°. Par la calci- nation , ce {el devient d’abord bleu & enfuite ; FRA & conferve cette couleur après le refroidifflement : réfidu n’eft point fufble, par lui-même, au A A LAN 3°. Avec l'acide vitriolique , il donne un précipité bleu. 4°. L’alkali fixe en dégage de Palkali volatil. $°. La liqueur filtrée , après la régénération de la Tunoflene , par l’eau de ue contient du nitre calcaire. 6°. Enfin cette combinaifon "ft beaucoup plus foible , que celle de l’alkali fixe. Cela prouve aflez que ce fel Det qu'un fel triple, compoié de la matiere jaune, d’alkal volatil, & d'acide nitreux précipitant ; par rs on ne Lui le regarder comime un fel fimple. Nous efpérons de pourfuivre l'examen de ces différens fel ls, pour en déterminer les propriétés , avec plus de pré- cifion. Nous devons cependant rendre juftice à MM. Schecle & Bergmann. La uno flene , dont ils ont tiré ces pro- duits , eft un minéral fort rare & peu connu ; & nous favons pofitivement, qu'ils en ont eu très-peu , pour faire leurs expériences. Îls n’auroient pas manqué , fans cela, de l’examiner avec cette exaftitude & certe faga- cité qui les cara@térife | & qu’on admire dans leurs Ouvrages. Continuons maintenant l'examen de notre matiere jaune. Tome IL. X 162 MÉMOIRES SYTAIUNE 1°. Cette matiere devient bleue en la laïflant dans un endroit éclairé ; beaucoup plus promptement encore en l’expofant au foleil, & le bleu en eft plus foncé, dans ce dernier cas. 2°, Ayant tenu à un feu fort, pendant une heure & demie, cent grains de cette matiere, dans un creufet d'argile bien bouché, il en réfulta une mafle fpongieufe d’un noir bleuâtre, dont la furface étoit cryftallifee , en aiguilles fines, comme la mine d’antimoine en plumes. Elle étoit aflez dure; & en la broyant, elle fe réduifit en une poudre d’un bleu foncé. Il ne nous fut pas poffible de favoir avec exa@titude , quelle fut fa diminution ; parce qu'une partie s’étoit introduite dans la mafle du creufet. Sa pefanteur fpécifique étoit $ , 7 en petits morceaux, & 9, $$ en poudre (1). Ayant trituré cette poudre avec de l’eau , elle s’y délaya , & forma une émulfon , qui traverfoit les filtres fans s'éclaircir. Elle devint jaune par la calcinatiom , avec 5 d’augmenta- tion dans fon poids. 3°. Cent autres grains de la même matiere furent mêlés avec cent grains de foufre, & mis à un feu fort, dans un creufet d’argille , pendant un quart-d'heure. Il en réfulta une mafle, d’un bleu obfcur & friable, dont l'intérieur préfentoit une cryftallifation en aiguilles fines, comme les précédentes , mais tranfparentes & de la couleur du lapis lazuli : elle pefoit 42 grains. En ayant mis une partie fur des charbons ardens, nous ne fentimes point d’odeur de foufre. (1) Voilà un exemple de la pefanteur fpécifique, plus grande en poudre qu'en males, parce que certe matiere et très-fpongicule dans ce dernier état. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 163 4°. Ayant mis cent autres grains dans un creufet brafqué & bien bouché, à un feu fort, dans lequel il refta pendant une heure & demie; nous trouvämes, en caflant le creufet , après l'avoir Ep ee (x 1), un bouton qui fe ne en poudre entre les doipts. Sa couleur étoit grife ; en l’examinant à la loupe , on y voyoit un afñlemblage de globules métalliques , parmi leiquels il ÿ en avoit quelques-uns de la groffeur d’une tête d’épingle , dont la caflure étoit métallique & de couleur d'acier. Il pefoit 6o grains, & par conféquent il avoit diminué de 40. Sa pefanteur fpécifique étoit 17, 6. En ayant mis une partie à calciner , 1l devint jaune , avec d'augmentation dans fon poids. Deux autres portions furent miles en digeftion , l’une avec l'acide vitriolique, & l’autre avec l'acide marin ; mais elles ne fubirent d'autre altération, que celle de diminuer de -— de leur poids : car examinant enfuite les deux portions avec une loupe , on y diftinguoit encore les grains avec leur afpeft métallique. Les deux liqueurs acides , eflayées avec l’alkali Pruffien , donnerent des précipités bleus ; ce qui nous fit voir que la petite diminution provenoit d’une portion de fer, que le bou- ton avoit fans doute reçu de la poufliere de charbon, dans lequel il avoit été enveloppé. L’acide nitreux, & l'eau régale fe chargerent aufli de Ia partie ferrugineufe des deux autres portions ; mais outre cela, ils les chan- gerent en une poudre ; is , entierement femblab le à celle qui avoit été employée pour cette opération. (x) La premiere fois que nous fimes cette expérience, ayant caflé le creufét, avant qu'il für entierement froid , le bouton s’enflamma aufli-tôr qu'il eut le conta@ de l'air, & fa couleur grife devint , dans un inftant , jaune. 164 MÉMOIRES g S'1XU PE 1°. Ayant mis 100 grains de limaille d’or, avec $0 grains de la matiere jaune, dans un creufet brafqué, à un feu fort, pendant ? d'heure, nous obtinmes un culot jaune , qu'on pouvoit réduire en morceaux entre les doigts , & dont l'intérieur préfentoit des grains d'or féparés, & d’autres qui avoient une couleur grife ; ce qui nous fit connoître qu’il n’y avoit pas eu une fufion parfaite; mais cela nous prouvoit en même-temps , que cette matiere rendoit l’or plus réfra6taire , puifque la chaleur qu'il avoit fouflerte , étoit beaucoup plus que fuffifante pour le fondre. Ce culot pefoit 139 grains, par conféquent il y eut une diminution de 11 grains. A yant coupellé ce culot avec du plomb, l'or refta pur dans ja coupelle ; mais cette opération fe fit avec aflez de difficulté. 2°. Ayant fait un mélange de platine, & de la matiere jaune, dans les mêmes proportions que le précédent, & l'ayant expofé, avec les mêmes circonftances, à un feu fort , pendant © d'heure ; nous obtinmes un bouton friable, dans lequel on diftinguoit les grains de platine, plus blancs qu’à l'ordinaire , & quelques autres fenfible- ment changés , quant à leur figure. Ce bouton pefoit 140 grains, & par conféquent il y eut une diminution de 10 grains. Il prit, par la calcination , une couleur jaune , avec très-peu d'augmentation dans fon poids. L'ayant lavé enfuite, pour féparer la matiere jaune, 1l refta 118 grains de platine, d’une couleur noire, laquelle {e conferva fans altération fenfible , ni dans le poids, ni dans la couleur , après l'avoir calciné de nouveau DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. r6$ à un feu très-fort. Il faut obferver que, dans les lava- ges, on s’occupa moins de ramafler toute la platine , que de la bien dépouiller de la matiere jaune ; qu’ainfi les eaux de lotion emporterent encore une partie de la poudre noire la plus fine; & par conféquent l’augmen- tation que conferva la platine, apres les lavages, & les calcinations , doit être évaluée au-delà des 18 grains qu’elle indiquoit par fon poids. Ayant mêlé cette matiere avec les autres métaux, dans les mêmes proportions qu'avec les précédens , & les ayant traités de même, nous obtinmes les réfultats fuivans. 3°. Avec l'argent, elle forma un culot blanc grisûtre, un peu fpongieux , qui s’étendoit aflez bien fous le marteau ; mais en continuant de le frapper, il fe fendoit, & fe divifoit en morceaux. Ce culot pefoit 142 grains, & c’eft l’alliage le plus parfait que nous ayons obtenu, après celui du fer. 4°. Avec le cuivre, elle donna un culot d’un rouge de cuivre, tirant fur le gris, fpongieux, & aflez duétile. Il pefoit 133 grains. s°. Avec le fer de fonte blanche , elle forma un culot parfait, dont la caflure étoit compa&te, & d'un blanc grisâtre. Il étoit dur, aigre, & peloit 137 grains. G°. Avec le plomb, un culot d'un gris obfcur, avec très - peu d'éclat ; fpongieux , très-duétile , & qui fe divifoit en lames en le frappant avec le marteau. Il pefoit 127 grains. | Ali NON 7°. Le culot formé avec l’étain, étoit d'un gris plus clair, que le précédent, très-fpongieux, & un peu duétile, Il pefoit 138 grains. 8°. Celui de l’antimoine étoit gris, éclatant, un peu 166 MÉMOIRES fpongieux , aigre ; il cafloit facilement. Il pefoit 108 rains. °. Celui du bifmuth préfentoit une caflure » qui, regardée dans une certaine direétion , étoit ogrife, & d'un éclat métallique ; ; en changeant de dire&tion , elle fembloit terreufe, & fans aucun.éclat; mais on y Aer. guoit, dans les ou cas , une es de pores, épars dans toute la mafle. Il pefoit 63 grains. 10°, Celui du zinc étoit d’un noir grisätre & d’un afpeét terreux , très-fpongieux & fragile. Il peloit 42 grains. 11°. Avec la manganefe ordinaire , elle donna un bouton d'un pris bleuatre , & d’un afpeët terreux ; ; fon intérieur , examiné avec une loupe , reflembloit à une {corie de: fer impure. Il pefoit 107 grains. lue de Gù L Ces expériences confirment le foupçon de l'illuftre Bergmann , qui , de la pefanteur fpécifique de cette matiere , & de la propriété qu’elle a de colorer le fel microcofmique & le borax, en conclut qu’elle doit être de nature métallique (1). Le changement de fa couleur, à mefure qu'elle fe charge de phlogiftique ; la diminu- tion de fon poids abfolu , & l'augmentation de fa pe- fanteur fpécifique dans même proportion ; Fafpe& métallique qu “elle prend, lorfqu'elle fe charge d'une fufi- fante quantité de ce principe; les propriétés qu’elle pré- fente alors, & les différens alliages qu’elle forme avec les métaux, font des preuves inconteftables de fa nature métallique. La matiere jaune doit donc être regardée (1) Jownal de Phyfque , Février 1783: DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 167 comme une véritable chaux métallique , & le bouton qu’on obtient, en expofant cette chaux à un feu fort avec la poufliere AS érebon , comme un véritable métal. Mais outre ces deux états, cette fubftance peut, comme larfenic , prendre celui (acide : caf quoique nous n'ayons pas pu l'obtenir jufqu’à préfent » exempte de toute combinaifon avec des propriétés vraiment acides, les combinaifons qu’elle forme avec les alkalis, & fur- tout celle avec l’alkali volatil, qui préfente des propriétés acides non équivoques , job fufifantes , pour aflurer qu’elle peut aufli prendre cet état ; peut-être, en multi- pliant les expériences, l’on découvrira bientôt le moyen de l'obtenir en acide pur, comme on a fait avec l'acide arfenical. Ce métal préfente donc des propriétés qui le diftin- guent de tous ceux que nous connoiïflons | jufqu’à à pes {avoir , 1°. fa pefanteur fpécifique , qui eft 7 E 20: A verres qu'il forme avec les ad 30 fa infufñbilité , qui eft plus grande que celle du magnéfi ; 4°: a PA liens jaune de la chaux, qu'il donne par la calcination, & que nous n'avons pas pu fondre ; s°. les alliages qu *l forme avec les autres métaux , qui font diférens del ceus que forment ceux-ci entre eux; 6°. fon indiflolubilité, au moins direfte, dans les neue Vitrio- lique , marin & nitreux , & dns l’eau régale , & fa converfion en chaux par ces deux derniers ; 7°. la faci- lité avec laquelle fa chaux fe combine avec les alkalis ; les fels qui en réfultent ; 8°. l’émulfion que forme, avec l’eau, cette chaux, même lorfqu’elle eft combinée avec une certaine portion de phlogiftique ; 9°. lindiffolub lité de cette même chaux dans les acides tes , nitreux , marin & acéteux , & la couleur bleue qu'elle 168 MÉMOIRES prend avec ce dernier. Toutes ces différences font aflez remarquables > pour que nous puifhons regarder cette matiere , comme un métal Jui g oeneris , diftinét de tous ceux que nous connoïfions juiqu’à prélent. Nous donnerons à ce nouveau métal le nom de V olfran ,enle prenant de la matiere dont nous l'avons retiré; & nous reparderons celle-ci comme une mine, dans laquelle ce métal eft combiné avec le fer & la manganefe, comme nous l'avons déjà prouvé. Ce nom lui correfpond mieux que celui de Tungfle ou Tungflene, qu’on pourroit aufh lui donner; parce que le Voliram eft un minéral plus anciennement connu que la 7ungffene, & fur-tout plus généralement parmi les Minéralogiftes, D'ailleurs le terme de olfram eft reçu dans toutes les Langues , même dans le Suédois. Nous changeons fa terminaifon ”m en »z , pour rendre plus propres aux dénominations ufuelles, celles des fels formés avec cette fubftance , en les nommant /é/s volfraniques. On pourroit lui FA en Latin, le nom de Volfranium. Où Halte jufqu’a préfent aucun ufage du Volfram: nous ne VOyOns pas même encore celui auquel pourroit être employé le nouveau métal qu'il contient ; nous ne devons pas conclure de là, que ce foit un être abfo- lument inutile. Nous voyons à chaque inftant appliquer aux Arts & à la Médecine ; des fubftances , dont on ne fe doutoit pas qu'on püt faire quelque ufage. La Chymie , en examinant les propriétés des corps , en découvre tous les jours de nouvelles , & multiplie leur application. Nous avons donc lieu d’attendre que cette fcience, en nous dévoilant les propriétés de ce nouvel être, nous fera connoître des moyens pour en retirer quelque utilité. RÉFLEXIONS DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 169 RÉFLEXIONS SUR les Étoiles nouvelles & périodiques. Par M DARQUIER. D) ANS le Mémoire que je lus l’année derniere , à LualAfem. pareil jour , fur les étoiles doubles & les nébuleufes Er es j'établis le mouvement aëtuel de tranflation dans l’efpace ‘7%. de tous les corps qu’il renferme , comme une confé- quence immédiate & direëte du principe général de la gravitation , confidéré comme un fait attefté par tout ce qui eft foumis à nos obfervations. Cette conféquence n’eft elle-même qu’un principe fécond duquel dépendent tous les phénomenes céleftes. Chaque corps parcourant, avec fon fyftême particulier, autour du centre général du monde, l'orbite qui lui a été afignée, dirige, fait, acheve, recommence fa révo- lution fans interruption, fans obftacle, & fur-tout uni- formément ; toutes les inégalités que nous pouvons ou pourrions y obferver, ne feroient dues qu’à notre pofi- tion hors de ce centre général. C’eft une vérité reconnue par tous les Aftronomes modernes (7). On n'aura pas de peine à imaginer quelle infinie variété doit réfulter pour nous de cette pofition excen- trique dans les afpeËts & les configurations relatives de toute cette multitude de corps en mouvement. Le quarré des temps des révolutions étant comme le cube des diftances, l’immenfe étendue de cette fphere d’aûtivité (1) M. Lambert, Lettres cofmologiques, Tome IT. Y 170 MÉMOIRES doit rendre les mouvemens infiniment lents; ainfi pou- vant , relativement à cette derniere confidération, nous fuppofer comme touchant prefque à l'époque du pre- mier départ des corps céleftes répandus dans l'univers, ils doivent avoir fait bien peu de chemin ; les obfer- vations doivent nous avoir bien peu éclairés fur cet objet , & nous ne pouvons gueres nous accrocher qu’à des induétions délicates pour parvenir à la connoiflance du fyftêème général. Je n’avois confidéré , dans mon premier Mémoire , que la pofition des fixes dans leur orbe concentrique au centre commun ; j’avois conclu que vu leur quantité innombrable , il y avoit une probabilité équivalente à la certitude , qu'il en exiftoit une grande partie fituce dans le prolongement du même rayon vifuel, les unes derriere les autres, & que leur mouvement devoit à la longue les féparer, de maniere à nous en offrir deux ou plufieurs, là où on n’en auroit obfervé qu'une. Cette affertion prouvée à priori , left aufli à poffe- riori , par la comparaïfon des Catalogues des Anciens avec ceux des Modernes : elle a appris à M. Mayer qu’il y avoit eu un déplacement réel de plufieurs fixes ; mais ce qui a mis le dernier fceau à cette preuve , ce {ont les dernieres obfervations de M. Herfchell. Plufieurs centaines d'étoiles , obfervées plus ou moins doubles avec fon nouveau télefcope, c’eft-à-dire, mordant plus ou moins les unes fur les autres, vérifient cette pofition fucceffive d'étoiles , & fes occultations lumineufes que j'avois tirées de l'induétion. J’avois aufli confirmé les mêmes chofes par des obfervations que j'avois fautes avec la lunette achromatique de dix pieds , à objeëtif double, de Dollond , ayant appartenu à M. Garipuy. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 17t Elles avoient été faites dans fon obfervatoire acquis par la Province , qui en a confié la garde & lufage à l'Académie. Il eft aifé de fe convaincre que ce qui a lieu entre les planetes ou autres corps céleftes opaques, répandus dans l’efpace, doit auffi avoir lieu entre les fixes. Cette feule confidération fournit une caufe bien fimple & bien naturelle des apparitions & difparitions plus ou moins promptes de quelques étoiles. Ce ne font, relativement à nous , que de véritables éclip{es de différente durée, totales , partielles , &cc. On pourroit douter que le nombre des corps non lumineux répandus dans l'univers, füt aflez confidérable pour pouvoir produire cet effet d’une maniere fenfble ; mais d’abord l’analogie, ce guide fi sûr dans les fciences naturelles, nous apprend qu'il doit être plus grand que celui des corps lumineux. Chaque fixe eft un foleil comme le nôtre, qui doit avoir comme lui, dans fa fphere d’aétivité, des corps opaques, tels que des planetes, des fatellites, des come- tes ; qu'il doit échauñer , éclairer , diriger , fans quoi ce feroit des caufes fans motifs. Notre fyftême ne paroiflant jufqu’a préfent contenir que huit planetes , dix fatellites & une centaine de cometes, ne préfente, ce femble, que bien peu de corps pour occuper un efpace aufli immenfe. En argumentant de notre foleil aux autres, l’univers refteroit à peu-près vuide , & répondroit peu à l’idée qu'on doit fe faire de fon Auteur ; mais M. Lambert, dans fes Lettres cof- mologiques, nous a fait voir qu’en accumulant plufieurs millions , on n’épuiferoit pas le nombre des cometes que peut & doit renfermer notre fyftème folaire. Que 172 MÉMOIRES l’on fe raflure contre leur choc mutuel ; malgré ce qu’en ont dit quelques Cofmologues, peut-être trop tranchans, chaque corps célefte a fon orbite marquée , fa route libre , fa période réglée : leurs atmofpheres font même immifcibles ; leurs anomalies abfolues ne font dues qu’à la forme de leurs orbites , & les relatives qu’à notre pofition excentrique. Nul défordre , nulle confufon à craindre. Les orbites des cometes font elliptiques , paraboli- ques ou hyperboliques. Je ne m’occuperai pas des deux dernieres , quoique je fois loin d’en croire l’exiftence aëtuelle impofñlible. Je me fais une aflez grande idée de l'univers pour donner à la marche des corps qui par- courent leurs branches, une marge telle qu'ils n’en atteindront pas les Affymplotes avant la deftruétion de toutes chofes. Je m’arrête donc aux elliptiques de notre fyftême ; leur foyer commun eft dans le foleil, & leur périhélie en eft plus ou moins éloigné, felon l'étendue des orbites ; les uns tombent dans l’orbe de Mercure, les autres dans celui de Vénus, dela Terre, de Mars, &c. M. Lambert a fait voir qu’en ne confidérant qu’un feul plan , paflant par le foleil , on pourroit y fuppofer les périhélies, & conféquemment les orbites répandues en augmentant en nombre comme le quarré des diftances au foleil, & que leur inclinaifon avec l’écliptique pour- roit aflefter toute forte d’angles fans fe nuire & fans interfe{tion réciproque. En argumentant d’après la fameufe comete de 1680, qui étoit foixante fois plus près du foleil que l'orbe de Mercure , & en fuivant toujours la loi du quarré des diftances , il a démontré qu'on pouvoit, fans choquer les vraifemblances , porter à cinq ou fix millions le DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 173 nombre des cometes comprifes dans l’orbe de Saturne. Que fera-ce fi on fait le même calcul pour l’orbe de la huitieme planete découverte par M. Herfchell , qui eft trois fois plus éloignée du foleil que Saturne ? Qu’on réfléchifle encore que celle-ci eft au moins plus de cin- quante mille fois plus près du foleil que de l'étoile la plus voifine, & l’on verra quel nombre prodisieux de ceometes pourroientexifter dans notre fyftême folaire fans forcer les fuppofñitions. Ce n’eft encore ici qu'une preuve à priori de la caufe à l’eflet ; elle ne peut être fatisfaifante & concluante qu’en remontant de l'effet à la caufe : c’eft en partant des obfervations qu'on peut y parvenir. En examinant les 69 cometes inférées & calculées dans le premier volume des Tables de l’Académie de Berlin , imprimées en 1776 , on trouve qu'il y en a feize dont le périhélie eft renferme dans l’orbe de Mer- cure , & ÿ1 dans celui de Vénus. Ces nombres font, à très-peu-près, comme un à trois. De ces deux orbites, lune eft triple de l’autre ; elles font donc comme le nombre de ces cometes. Or , ces deux orbites étant prefque circulaires | font comme les quarrés de leurs diametres ou des diftances périhélies ; on peut donc dire, avec quelque fondement , que le nombre de co- metes y croît comme le quarré de ces diftances. Ï1 ne faut pas fe dillimuler que ce calcul n’eft qu'un à peu-près ; que les nombres n’en font pas aflez exa@ts pour fervir de bafe à une regle démontrée : mais com- bien de cometes n’échappe-t-il pas à nos regards ? Quelle foule d’obffacles ne s’oppofe pas à leur vifibilité ? Il eft tout fimple que les apparitions de celles dont le périhélie eft placé dans l’intérieur de l’orbe de Mer- cure & dans celui de Vénus, foient plus fréquentes que 174 MÉMOIRES celles dont le périhélie eft au-delà de l’orbe de la terre; la lumiere de celles-ci eft plus foible , leur queue plus courte , leur vifbilité d’une moindre durée ; leur gran- denstiminue. bien vite, & elles difparoiflent dans bien peu de temps. Comme leur diftance périhélie eft fort confidérable , elle annonce une orbite fort allongée ; d’où il fuit que leurs apparitions font moins fréquentes. L’efpace qu’elles circonfcrivent autour du foleil étant d'autant plus étendu > que la diftance aphélie eft plus grande, 1l s'enfuit qu’on pourra, fans inconvénient, y fuppofer ces orbites très-multipliées en même -temps fans fe nuire, & chacune des cometes qui les parcourent plus long-temps au- -delà de la fphere de vifbilité. Si à cela nous ajoutons toutes les autres caufes qui peuvent nous dérober ces cometes, on fera étonné d’en trouver quelqu’une de cette efpece dans les catalogues. Les nuages, la longueur des jours, la pofition des or- bites fous l'horizon pendant la nuit, la fphere de vifi- bilité bornée à la diftance de Mars, &c. tout cela, je le répete, milite contre l’apparition de ces aftres, mais non pas contre leur exiftence. Une nouvelle preuve de leur grand nombre , c’eft que depuis environ Go ans que quelques Aftronomes fe font confacrés à cette recherche , nous avons les élémens d’une centaine de cometes , prefque toutes obfervées dans l’hémifphere boréal, & que dans ce grand nombre, il n’y en a pas au-delà de quatre ou cinq qu'on puile foupçonner avoir paru deux fois; encore n’y at] que celle de 1682, revenue en 1758, fur l'identité de laquelle on ne puiffe pas former de doute , quoiqu il ne fût cependant pas impoflible que deux cometes réel- lement différentes paruflent avoir les mêmes élémens, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 175 dès que nous ne pouvons les déduire que d’un petit nombre d’obfervations faites dans une très-petite partie de leur orbite , & dès-lors infufhifantes pour conclure la révolution périodique. Ne ferions-nous pas trop modernes pour avoir pu obferver une comete à fa fe- conde apparition ? Il femble qu’on pourroit s’aider du principe des caufes finales pour multiplier le nombre des corps céleftes. Des efpaces infiniment étendus dans chaque fyftème folaire, fans corps circulans pour les remplir , paroiflent con- trarier les principes de la perfeétion du monde ; mais fans y avoir recours, il femble que le mouvement réel de toutes les fixes autour d’un centre commun, prouve aflez bien l’exiftence d’une infinité de corps opaques ou non lumineux par eux-mêmes , roulant dans. chaque {yftême folaire , & dont la majeure partie ne fauroit frapper nos yeux, mais dont la preuve doit fe manifefter par les phénomenes. Nous pouvons, de plus , foupçonner que chaque {yftême folaire doit être d'autant plus ou moins fourni de corps de cette efpece, qu'il fe trouvera à une plus orande ou moindre diftance du centre général, & cela vraifemblablement toujours dans le rapport du quarre des diftances. Nous ignorons complétement la pofition de ce centre , & combien nous en fommes éloignés ; mais il réfulte de cette confidération que la variété dans les phénomenes , qui doit être nulle , obfervée de ce point , fe multiplie étrangement pour ceux qui en font les plus éloignés. J'ai dit que la préfence de tous ces corps ne pouvoit fe manifefter que par les phénomenes. Un des princi- paux , & le feul que j'envifage ici, eit l'apparition, la 176 MÉMOIRES difparition des étoiles , leur illumination & leur dimi- nution de clarté graduelle. Les Hiftoriens ont fait mention de plufeurs étoiles nouvelles qui ont paru & difparu en divers temps; mais, meilleurs Hiftoriens qu’Aftronomes , on peut tout au moins les taxer d’exagération , lorfqu'ils ont comparé la clarté de quelques-unes à une partie de la lumiere de la lune. Ce n’eft qu’en 1572 que les Aftronomes s’en font occupés à l’occafion de celle qui parut pour la premiere fois dans la conftellation de Caffiopée , que Thico obferva , & qui difparut en 1574. Kepler en obferva une autre dans le Serpentaire en 1604. La changeante de la Baleine augmente, diminue graduelle- ment, jufqu’à difparoïtre tout-a-fait. La période de fa lumiere a été fixée à 344 jours. Une des plus fingulieres eft Aool, la tête de Médufe, de la feconde grandeur, dans laquelle M. Godriche , Aftronome Anglais , a remarqué , dans le mois de Mai de l’année derniere , une période de diminution & recouvrement de lumiere de 62 heures ; lers de fon moindre éclat , elle eft à peu-près de la quatrième grandeur. Les Anglais n’ont pas tout-à-fait l'honneur de cette découverte : Montanari & Maraldi en avoient averti en 1694. Toutes ces étoiles font de vraies fixes, de vrais fo- leils, qui éclairent les cometes & les planetes de leurs fyftêmes particuliers. Celles-ci, trop éloignées de nous pour être apperçues, peuvent & doivent fouvent être interpofées entre ces fixes & nous, nous les cacher en tout ou en partie, & caufer, par leur révolution, des alternatives de lumiere, qui ne font véritablement que des éclipfes totales ou partielles. Nous n'avons pas befoin de fortir de notre fyftème pour DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 177 pour trouver la caufe de ces apparences ; les cometes qui nous appartiennent peuvent y fuffre. J'ai à cet épard une obfervation qui m'eft particuliere. Le 18 Février 1779, en obfervant la comete qui parut cette année-là, je vis très- diftinétement l’émerfion d’une petite étoile que la comete avoit occultée. Comme celle-ci étoit affez voifine de fon périhélie, fon mouvement étoit prompt, & l’occultation n’a pas dû être d’une durée bien longue. Les Obfervateurs des autres fyftèmes en oppofition avec la comete & cette étoile, l’auront vu paroître & difpa- roître , fans Sifabliblemens en foupçonner la caufe. Lorfque les cometes vont ou reviennent de leurs aphélies , & que leur orbite eft fort allongée , elles paroïffent s'approcher ou s'éloigner prefqu’en ligne droite d’un mouvement très-lent. Si quelque étoile fe trouve dans leur alignement , elle nous fera cachée pendant à peu- pres la demi-période , qui , dans quel- ques-unes, pourroit bien être de quelque Glliat d'années. Ces cles reviendront vifibles lorfque la comete pañlera dans l’autre partie de fon orbite. Qu’of n’imagine pas que le tranfport de la terre dans le demi-grand orbe, puifle apporter quelque changement dans cette appa- rence ; le diametre eft trop petit , relativement à la longueur de rayon reéteur des cometes. A l'égard des étoiles qui font dans le cas de la tête de Médufe , une grofle planete qui en fera proche, dont conféquemment la révolution feroit très-prompte, & dont le plan de l'orbite ne feroit qu'un petit angle avec l’'échiptique , fufiroit pour y produire cet effet. Tous les phénomenes de cette efpece ne feront que des cas particuliers, réfultans du même principe & paralleles aux occultations des étoiles par la lune. Tome IT. Z 178 MÉMOIRES Je n'ai pas prétendu ici bâtir un fyftême; je n’ai fait que préfenter quelques réflexions fur des faits avérés. Un mouvement général de toutes les parties de l'univers autour d’un centre unique, n’eft uniforme & invariable que vu de ce point. Pour toute autre pofition , les afpeëts & les configurations varient; il n’y a point de change- ment abfolu dans l’œuvre de l’'Etre fuprèême; les vicifli- tudes & les bouleverfemens font purement relatifs. Placé, s’il eft permis de le dire, dans ce centre, 1l em- brafle l’enfemble dont il connoit feul le méchanifme. Mon but n'ayant point été de détruire, mais d’édifier, je ne dirai rien des étoiles en partie lumineufes & en partie obfcures de Rüiccioli , n1 des meules de moulin de Maupertuis. DE L'ACADÈMIE DE TOULOUSE. 179 MÉMOIRE SUR deux Roues de Char antique qui font dans le Cabinet de l’Académie. PAR M. l'Abbé Mac 1. [I L n’y a pas de monumens plus rares que les roues des chars des Anciens, fi ce n’eft les chars même. On n'en connoît qu'une au Vatican, & une autre à Berlin dans le Cabinet du Roi de Prufle. Le Cabinet de l’A- cadémie eft peut-être le feul qui en réunifle deux. Avant d'en donner la defcription, je vais en tracer l’hiftoire. Un Payfan du village de Fa, Diocefe d’Aleth, près des bains de Rennes, en labourant un champ de M. de Cayrol, Membre de l'Académie, fentit fa charrue arré- tée par un corps qui oppofoit une forte réfiftance. Après avoir un peu creufe , 1l trouva deux roues de bronze, l’une entiere & l’autre un peu altérée. Ce Laboureur les porta chez un Marchand de bois d’'Efpéraza , village voifin de Fa, & les lui vendit pour un écu. Ces roues , portées fucceflivement à Limoux & à Carcaflonne, furent préfentées à divers Fondeurs, qui, n’en connoiflant pas heureufement le métal , à caufe de la forte patine qui les recouvroit, refuferent de les acheter. Le fort de prefque tous les monumens de ce genre, eft de tomber en des mains qui ne les eftiment que ce qu'ils pefent. À peine ces reftes précieux ont-ils revu le Lu le 3 Juim 1784. 180 MÉMOIRES jour, qu'ils font deftinés au creufet, & c’eft fans doute ce qui les a rendus fi rares. Le propriétaire de ces roues , fatigué de les offrir inutilement , les relégua dans un magafin , où elles “refterent pendant cinq ou fix ans. M. l’Abbé"Bertrand, connu par fon goût pour les Lettres, conduit par hafard à Efpéraza , entendit parler de ces roues : 1] demanda à les voir ; il en connut le prix, & de retour à Touloufe, il en parla à M. de Saint-Amand notre Confrere, qui, en tout événement, fit propofer au Marchand de bois de les lui vendre. Celui-ci fe crut trop heureux de s’en défaire pour la fomme à laquelle 1l les avoit offertes aux Fondeurs : ainfi moyennant vingt écus , M. de Saint- Amand obtint ce monument, dont la valeur intrinfeque étoit même fupérieure à cette fomme , & chacun fe félicita de fon marché. M. de Saint- Amand fit placer ces roues dans fon cabinet, & les fit graver : les planches furent répandues dans l'Europe. Une de ces gravures parvint à Benoit XIV. Sa Sainteté fouhaita de les acquérir. On fit des propo- fitions à M. de Saint-Amand, qui répondit que dans le deffein où il étoit de laïfler à fa mort, fon cabinet à PAcadémie , 1l ne fe regardoit que comme dépoñitaire des monumens qu’il renfermoit. M. de Saint-Amand mourut quelques années après ; les revers qu’il avoit efluyés n'ayant pu permettre que fes intentions fuffent remplies, relativement au don du cabinet , l'Académie l’acheta. :* Ces roues, dont on trouve ici le deffein tel que M. de Saint-Amand lavoit fait graver , [ voyez planche V ] diflerent entre elles de peu de chofe, quant aux dimen- fions. Leur diametre eft de vingt pouces: elles ont cinq utre Mau Anti GP. : | e/Voue entiere vu le fa ce GR APPLE LIL E rofil À £ 7 F2 TE CT 3 74 Æ c utre À 777 Ututiles NN Chelles do r2 POUES EL De CDS CES CERN CORRE Ce moe co TAN IDAENIDEIT/N ENT PTIT DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 181t Ta.) -iacune , comme celles du trige de la famille Manliu. Ces rayons naïflent du milieu de l’effieu , & fortent chacun d’un ove entouré de plufieurs filets très-bien faits. Le moyeu , qui dépañle autant d’un côté que d’autre , a quatorze pouces & demi dans tuate fa longueur , & eft orné d’autres filets grands & petits, comme les ouvrages faits au tour. L'ouverture par où doit pañler l’eflieu, a deux pouces neuf lignes à chaque bout. Cette cavité, renflée dans le milieu fous les rais, laïfle un vuide dans cette partie entre le moyeu & l’eflieu. Ce vuide communiquant avec celui des rayons, qui font creux , fervoit à rafraichir l'air pendant la rotation. Les jantes de bronze , qui n’en forment qu'une , puifque le tout eft d’une piece faite d’un feul jet, oft trois pouces de hauteur & un pouce une ligne d’épaif- feur. Dans cette épaifleur eft une rainure Ce dans toute fa circonférence , qui devoit recevoir les jantes de bois. Cette rainure a neuf lignes d'ouverture & deux pouces trois lignes de profondeur : elle fe rermine en angle aigu , émouflé par un pam arrondi de deux ou trois lignes. Les trous des boulons rivés qui aflujettifloient les jantes de bois , font placés à Fan {ept lignes du bord ; il ÿ en a un correfpondant à chaque rais, & un autre au milieu. Tous les Ouvriers qui ont vu ces roues, conviennent que , comparées aux produétions de nos Arts dans ce genre , elles font un chef-d'œuvre. Je ne fais fi c’eft pour en augmenter ou pour en diminuer le prix , que quelques Antiquaires étrangers ont prétendu que ces roues n’avoient Jamais nv à faire rouler un char , mais feulement à la décoration d'un arc de triomphe. Ils donnoient pour raïfon leur 18z MÉMOIRES petitefle, & pour exemple , des roues femblables, qui, dit-on, avoient été employées dans la Germanie à la décoration d’un arc de triomphe, érigé en l'honneur de Pertinax. Qu:nd cette opinion feroit fondée , ces roues n’en feroient ni moins antiques , ni moins précieufes ; elles auroient de plus le mérite d’avoir été un monument du pays même ; mais fi on les avoit examinées de près s on auroit été forcé de convenir qu’elles ont été faites pour fervir, & qu’en eflet, elles ont beaucoup fervi à faire rouler un char. Il fuffit de jeter les yeux fur la forme des chars antiques; car quoiqu'il ne nous en refte aucun en nature , nous pouvons nous en rapporter à leurs repréfentations , & les médailles font des titres qu'on peut confulter en toute fureté. Or à juger des roues des chars qui y font repréfentés, par le nombre des rais, & par les proportions qu'elles ont avec les chevaux , on verra qu'il y en a de plus petites encore que celles-ci ; les roues des biges , des triges & des quadriges des familles Claudia, Fulvia, Lu- cilia, Antonia, Vibia, Servilia, &c.n’ont que quatre rais, & ne vont que jufqu'aux jarrets pliés des chevaux ; elles devoient donc être plus bafles que celles de l’Académie. Les Grecs, de qui les Romains ont appris les Arts, & dont ils ont copié les chefs-d’œuvre, en avoient de plus petites encore. Dans deux bas-reliefs antiques qu’on voit à Rome , l’un repréfentant Achille combattant contre Memnon (1), l'autre , Heëtor attaché au char de ce Héros (2) , les roues des deux chars font fort au-deflous du jarret des chevaux. (x) Voy. defcription de la ville de Rome, par Planches , tom. 1. (2) Ibid. tom. 3. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 183 Une autre preuve que les roues des Anciens ne pouvoient pas être grandes , c’eft qu'ils les faifoient fouvent d’un feul morceau d’ais ou de madrier, & les Latins appeloient celles- là tympana. On voit fur plu- fieurs monumens des charriots avec des roues pleines (x ) Virgile ne les confond point avec celles qui avoient des rails : Hinc radios trivere rotis , hinc tympana plauftris (2). Il ne faut pas juger des chemins & des voitures des Romains par les nôtres ; leurs chars ne courant que fur une arene unie, ou ne roulant que fur des voies pavées comme nos ÉlRe. n'avoient befoin que de très-petites roues. Les rhenfes ou chars facrés , fur lefquels on portoit les images des Dieux , le carpentum , qui fervoit aux funérailles ou à l’apothéofe des Empereurs , devoient être les plus eleves. Cependant les roues de ces chars, les plus grandes fans doute , à en juger par le nombre des rais, qui alloit jufqu’a huis ainfi qu'on le voit aux chars ele ne , DR Rubria, Nævia, & à celui de Tibere , & à fix, ne au rnb d'Agrippne & au char de triomphe de Germanicus ; ces roues, dis-je , ne vont que jufqu'a a demi-cuifle des chevaux , ce qui feroit ; juger que l'élévation des chars de cérémonie des Romains, n’eétoit point proportionnée aux roues. Dans l'apothéofe de Claude , -on voit une grande thenfe , & au triomphe de Titus, un grand char fur de fort petites roues. Les roues de l’Académie ont tout le creux du moyeu (x) La Colonne Antonine. (2) Virg. Georg. L. 2, v. 444 134 MÉMOIRES ouvert : la rainure eft évuidée exaétement & profon- dément dans toute la circonférence, pour recevoir les jantes de bois dont on la garnifloit , foit afin de con- {erver le métal, foit pour ne pas gâter les chemins, foit pour diminuer le bruit des voitures dans les Villes. Les boulons qui les aflujettifloient s’y voientencore rivés(1). Si ces roues n'avoient été faites que pour la décoration, on les auroit moulées fans rainures, fans trous de bou- lons & fans ouverture qui traversät le moyeu : car à quoi bon percer des roues qui ne devoient pas fervir ? . Les différens noms des voitures des Anciens font croire qu’elles avoient auffi différentes formes adaptées aux différens ouvrages auxquels on les appliquoit (TR I] y en avoit à quatre roues (3). On peut croire que les chars en forme de coquille n'étoient plus élevés fur le devant que par les roues plus petites qu'on mettoit fur le derriere. Si l’on garniflüit de bois celles de l'Aca- démie , elles pourroient être de la hauteur de nos petites roues de carrofle. M. l'Abbé Barthelemi , en les exa- minant , affura qu'il y avoit des biges chez les Romains, dont les roues n’étoient pas plus hautes, & que celles du Vatican & du Roi de Prufle avoient la même di- menfion. Ces roues font donc aflez grandes pour avoir {ervi à des chars antiques , puifqu’elles ont Îles propor- tions néceflaires à cette deftination, & que même elles ne font pas des plus petites. Il eft aifé de fe convaincre, en fecond lieu, par les TS —— (2) Le temps & la rouille empêchent de bien juger du frottement de l’effieu, Bx peut-être fe fervoit-on d’emboîtures. (2) Ces noms étoient cerruca ; rheda , thenfa, carpentum , plauffrum , cifium » petorium OU petoritum ; farracum , epitidium ; coyinum , arci/ma ; arcera ; RC. , (3) Pesorium où petortfume ‘ .TOues DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSr. 18e roues même, qu’elles ont fervi : tout y porte l'empreinte du travail. Tous les boulons de celle qui eft entiere, font fauflés , les uns plus , les autres moins. Il y en a un qui eft creufé dans le milieu ; quelques autres font devenus courbes : ils n'ont pu prendre cette forme que par le tiraillement des jantes de bois, ou par les efforts du roulage. Si elles n’avoient fervi qu'à la décoration d’un arc de triomphe , On auroit trouvé les boulons tels qu’ils étoient lorfqu’on les plaça : ils n’auroient efluyé d’autre altération que celle de la rouille, tandis que les trous fe font élargis par le mouvement , & font devenus ovales & anguleux , au lieu de ronds qu'ils étoient. On y apperçoit des bavures du métal que les bou- lons ont pouflées en dehors, ce qui n’a pu fe faire que par la répercuflion des boulons contre les parois du trou. J'ajouterai qu’a la feconde roue, qui paroït plus ufée, on trouve d’autres trous de différentes formes & grandeurs entre les boulons. Il eft vraifemblable que ces trous ont été faits par des clous chaflés dans le bois pour raffer- mir des morceaux cafés de la jante. Des perfonnes qui virent ces roues, lorfqu’on les porta chez M. de Saint- Amand, m'ont affuré avoir vu des refles de ces jantes d'un bois noir. Quoique les deux roues aient les mêmes formes, & à peu-près les mêmes dimenfons , elles ne paroiffent pas forties du même creux. Le moyeu de lune eft plus gros que celui de l’autre. Il y a un filet en forme d’an- neau au bout de l’un des rais de la feconde, qui ne fe trouve point à la premiere. Si cet anneau n’a pas été mis pour fervir de marque ou de repaire à Ouvrier, je ne préfume pas qu’on l'y ait mis pour ornement , Tome II. A a 186 MÉMOIRES parce qu'’alors il auroit fallu en mettre à tous les autres rais, On remarque, dans le milieu du moyeu, un maftic noir & très-dur. Les Anciens grañfloient-ils leurs roues ? Dans ce cas, ce maftic auroit été formé par le cambouis. D'ailleurs , celle qui a été caflée & refloudée en dernier lieu , a plus d'épaifleur : {on métal eft plus fier, & ne paroït pas du même titre ; elle a dû pefer davantage lorfqu’elle étoit dans fon entier. Il fe préfente ici une autre queftion. Ces roues ont- elles appartenu au mème char ? D’un côté , elles ont été trouvées dans le même endroit ; elles font pareilles, & ont les mêmes dimenfions. De l’autre , l’une eft plus ufée, & paroït avoir plus de fervice ; le metal n’eft pas du même titre dans les deux roues ; leur reflemblance & leur différence n’ont rien de frappant à l'œil. Ce qui rend cette queftion plus difhicile à décider , c’eft que les roues de nos voitures ont l'entrée du moyeu, & les rayons difpofes de maniere à pouvoir diftinguer É droite & la gauche. Il n’en eft pas de même des roues anti- ques, du moins de celles que poflede l'Académie. Les rayons font à plomb ; le moyeu eft également prolongé de _chaque côté, & n'a pas plus d'ouverture à un bout qu’à l’autre. En un mot, il n’y a point d’entrée déter- mince pour l’eflieu. Cette méthode eft-elle plus commode & plus folide que la nôtre ? Je crois que cette difiérence vient de celle qu'il y avoit entre la voie des Anciens & la voie de nos chemins. La roue qui avoit été fracaflée , & qui, comme je lai déja dit, eft plus ufée, a plus de lardons un autre bronze, foudés ou appliqués, ou coulés fur la piece. Ils paroiflent y avoir été mis pour des réparations que le travail avoit néceflitces. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 187 Je navois pas à prouver que ces roues fuflent d’une haute antiquité : perfonne n’a formé le moindre doute a cet égard. J'avois à détruire l'opinion de ceux qui prétendent qu’elles n’avoient été faites que pour la dé- coration d’un arc de triomphe, & ; Je n'ai pas un grand mérite à avoir démontré le contraire : un peu de criti- que & une légere connoiffance de l'antiquité , n’ont fufh pour parvenir à la vérité fur cet objet. Au furplus, ces roues doivent être regardées comme un monument unique, puifqu’elles forment un tout, dont le Souverain Pontife & le Roi de Pruffe n’ont chacun qu’une partie. 183 MÉMOIRES HITS — MÉMOIRE SUR un coup de Tonnerre arrivé près la ville de Caflres , avec des Réflexions fur les Lois de l'Éledtricité, & fur les Conduëteurs Electriques ou Paratonnerres. Par M. GaArtPuY Fils. Ra de E 12 Avril de l’année derniere, MM. d'Aufac , blée publique du 11 Avril 1782. de Gautran & de Lavallongue partirent de Caftres à cheval pour aller fe promener du côté de Lautrec, au nord-nord-oueft de la Ville. Un orage aflez violent qui couvrit les environs fur une grande étendue, les furprit à deux lieues de Caftres, & à demi-lieue de Lautrec. Ils étoient près d’un pont appelé de Poulobre, lorfqu'il tomboit de très-grofles gouttes de pluie éloignées les unes des autres, comme on le voit communément au commencement des orages. Ces Meffieurs alloient de front & au grand trot. M. d’Auflac, âgé de 46 ans, étoit le plus grand ; il étoit au milieu du chemin, & fe tenoit fort droit fur fon cheval. M. de Gautran, âgé de 26 ans, convalefcent & attaqué d’obftruétions, étoit à fa gauche ; 1l fe tenoit fort courbé fur l’encolure du cheval. M. de Lavallongue, fexagénaire, étoit le plus petit de la troupe. A peine eurent-ils paflé le pont , que la fondre les frappa tous les trois dans le même inftant , & les ren- verfa avec leurs chevaux. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 189 M. de Lavallongue tombé fur le dos , d’ailleurs le moins maltraité des trois, fut bientôt remis de fon étour- diflement par la fraicheur de la pluie abondante qui tomboit fur fon vifage. Il ne tarda pas à voir fes deux camarades terraflés le vifage contre terre. S’étant dégagé de fon cheval, qui out bientôt après, il s ’approcha de M. d Aulac, qu’il trouva mort, ainfi que fon cheval. M. de Eten ne donnoit aucun figne de vie ; mais après qu'il l’eut fortement fecoué , 1l A de GE éva- nouiflement!, & ce ne fut qu après des fecours tardifs, à caufe de l'éloignement des métairies , qu on put le retirer de deflous fon cheval , qui avoit été tué fur la place. Voila les faits que j'ai appris de M. de Lavallonoue, le moins maltraité du tonnerre , & qui m'a paru plus afleété des foins emprefles des Payfans dont ils furent fecourus, que de la foudre qu'il ne craint point, maloré cette terrible aventure ; cependant il fentoit encore des engourdiflemens dans les cuifles & dans les jambes, le huitieme jour après. Il ajoute qu’à linftant où 11 fut frappé du tonnerre , il entendit un bruit épouvantable, & fe fentit enveloppé d’un tourbillon grisätre qui le prefloit de toute part, comme sil avoit été pris dans un épervier. Voici maintenant les circonftances particulieres dont je me fuis aflure, & dont j'ai vu la plus grande partie. Comme :1l étoit intéreflant de connoitre le lieu de l'événement , je m'y rendis dès que j'en fus inftruit ; ce fut le fixieme jour après l'accident. Lorfqu’on a pañfé le pont de Poulobre , en allant vers Lautrec, le chemin qui traverfe un petit “vallon, monte infenfblément fur environ quatre cents toifes de longueur. L'endroit frappé 190 MÉMOIRES de la foudre , éloigné du pont de 19 toiles, eft élevé de 4 pieds fur les champs de la gauche, & de 12 pieds fur ceux de la droite ; le chemin, qui eft fort bombé, eft uni comme une allée de jardin. Jai vu dans cet endroit du poil des chevaux qui étoit encore attaché au gravier; je n'ai reconnu aucune trace de la foudre; rien ne m'a paru ni vitrifié, mi réduit en chaux : il eft vrai qu'il avoit beaucoup plu depuis ce fâcheux évé- nement. J'ai amené fur les lieux les Payfans qui arrive- rent les premiers pour fecourir les Foudroyés ; ainfi 1l n'y a aucun doute fur le lieu de cette fcene tragique. Je n'ai pu voir les trois chevaux qui avoient été mis dans des fofles : on n’a vu fur eux aucune trace de la foudre ; mais cela ne prouve pas qu'il n’y en ait point eu , parce que ( ainfi que je vais le rapporter ) J'ai découvert aux felles , des traces qu'on n’avoit pas apperçues. ) M. d’Auflac a eu le crâne mutilé à trois doigts fur l'oreille gauche , un peu en avant. Il eft forti de l’ou- verture, du fang caillé, lorfqu’on a relevé le cadavre, & fes oreilles faignoient. Les deux côtés du cou, depuis l'oreille, en pañlant fous la mâchoire, jufqu’à la pomme d'Adam , ont été brülés ; le col de la chemife a été déchiré ; le bas ventre & tous les poils ont été brûlés. Il portoit une épée d’argent , que J'ai examinée avec attention ; la pointe a été fondue dans fa furface, fur un demi-pouce de longueur ; le bout du fourreau en fer a été également fondu dans fa furface, & percé d’un trou oblong , dans lequel on pañleroit la lame d’un canif plat & large ; la lame de l'épée a été fondue aufli au tranchant du deflus, à un pied de la poignée, fur trois lignes de longueur , & une ligne & demie de hauteur ; DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 191 le fourreau a été percé vis-a-vis la partie fondue , fans avoir été brülé : le trou a une ligne de diametre. II a aufli deux petites parties fondues à la coquille, l’une deflus & l’autre deflous ; le quartier & l’arçon gauche du devant de la felle, d’un cuir vieux & fec, ont été percés à l’extrêmité inférieure de l’arçon, d’un petit trou comme celui d’une groffe épingle. Aucune partie des fers de la felle ne m’a paru marquée de la foudre. M. de Gautran a eu le gras de la jambe droite brûlé à fon contaët avec le cheval , fur une furface à peu- près égale à celle d’une piece de douze fols ; le deflus de la cuifle a été brülé fur prefque toute fa longueur ; la culotte de laine noire a été percée de deux trous ; les reins ont été brûlés fur une traînée étroite , en re- montant jufques entre les deux épaules, où la brûlure cefle, & où l’habit & le manteau de laine ont ét£ percés d’un trou femblable à celui d’une balle de fufil. M. de Gautran portoit un gros couteau de chafle d'argent, à la mode, le manche en ivoire; une petite chaîne d’ar- gent qui pendoit du pommeau à la garde , a été fondue auprès de la garde , & en a été détachée par la fufion; le pommeau de la garde en deflus a été fondu fur une furface de trois lignes en quarré, dans toute l’épaiffeur de l'argent qui étoit fort mince ; le tranchant inférieur de la lame , ainfi que le bout du fourreau en argent, ont été fondus, vis-a-vis l’un de l’autre, fur une ligne & demie en quarré, à la jonftion du fourreau avec le bout ; le fourreau a été percé entre les deux fufons, fans avoir été brülé ; le couteau de chafle étoit foutenu par des courroies de peau attachées à un grand crochet d'acier, prenant fur la ceinture de la culotte : ce crochet a été un peu fondu à l’aplomb de la garde du couteau 192 MÉMOIRES de chafle ; le quartier de la felle a été percé comme d'un coup d'épée , & la boucle de l’étriviere , auprès du trou de la felle, a été un peu fondue. O:B3S,E Re ANT TO NAS: Les expériences des plus habiles Phyficiens démon- trent que les phénomenes de la foudre & ceux de l’e- le&tricité ont une grande analogie. Si on examine main- tenant les détails du fait que nous venons de rapporter, on en découvrira de nouvelles preuves. En fuivant exaétement les traces du tonnerre fur nos Foudroyés, on voit alternativement des trainées de feu fur les corps életriques , ou fur ceux qui tiennent le milieu entre les corps éleétriques & les corps non élec- triques : tels font les habits de laine fecs & les cuirs des felles qui ont été déchirés ou percés. Ces trainées de feu ceflent aux points de contaëét avec les corps non éle@riques. L'épée & le couteau de chafle ont été fondus à ces points, qui ont fervi aux écoulemens éleétriques entre les Cavaliers & les chevaux. Les felles d’un cuir fec & vieux ont arrêté une partie de l'éleêtricité, qui s’eft divifée en plufeurs étincelles , foit à caufe de la réfiftance qu'oppofent les corps élec- triques, foit parce que la mafle des corps non éleétri- ques n'étoit pas fuflifante pour donner un libre cours au grand volume de léleftricité. Les bizarreries apparentes des effets de la foudre , font les lois de la chofe même, & dépendent des diffé- rentes vertus éleétriques des corps qui en font atteints, ainfi que de leur mafle. On peut aflurer qu'un Conduc- teur éle@trique qui n’auroit pas une mafle proportionnée au DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 192 au coup dort il feroit frappé , bien loin de garantir , pourroit être nuifible, parce qu’il détermineroit lexplo- fion du tonnerre dans le lieu qu’on voudroit préferver, & où elle feroit des ravages en fe détachant du Con- duéteur. Un habile Phyficien du nouveau Monde dit : « Il eft dangereux de fe mettre à l'abri fous un arbre : » pendant le tonnerre ; cette retraite a été fanefte à » plufieurs, tant hommes que bêtes. » On Peut confi- dérer cependant un arbre comme un conduéteur hériflé de pointes, parce que le bois verd conduit parfaitement l'éle&tricité. Le danger que l’on court fous un arbre pendant le tonnerre, vient donc de ce que le conduc- teur eft imparfait ; ainfi de pareils inftrumens ne doivent être mis en œuvre que par des gens habiles qui puiflent connoître les expériences en grand , & la prodigieufe élafticité du fluide éle&trique. Lorfqu'une mafle quelconque , formée de plufieurs corps éleétriques & non éle@triques, aura été cleétrifée , fi on approche de cette mafle un autre corps non élec- trique , l'explofon arrivera fur les points qui feront les plus près du corps qu’on lui préfentera , ou bien dans les points qui, quoique plus éloignés, feront plus propres à laïfler couler le fluide éleétrique. Je fuppole, par exemple, qu'on approche une boule de métal d’un conduéteur éleétrifé, l’étincelle fe mani- feftera aux points du conduéteur & de la boule qui font les plus rapprochés ; mais fi l’un & l’autre font hériflés de pointes de verre, de cire, du cuir fec, &c., l'étin- celle ne fe mamifeftera pas fur ces éminences, quoique plus rapprochées entre elles que le métal, mais feule- ment des parties du métal qui feront les plus voifines. Il pourra y avoir cependant , relativement à la pureté Tome IT. Bb 194 MÉMOIRES des corps qui feront interpofés fur le métal , des cra- quemens & de petites aigrettes de feu qui annoncent des! émanations éleétriques ; ; mais l'écoulement le plus fort ou l'explofion s’élancera du métal. On pourroit conclure de ces obfervations, qu'il feroit poflible de déterminer quelle fera la route que le feu éleétrique devra parcourir dans une maïfon frappée de la foudre, après avoir analyfé préalablement avec foin les corps & les fubftances qui la compofent. L'élévation du chemin où ces Meflieurs ont été frappés , paroit avoir contribué un peu à l’explofion du tonnerre dans cette partie. Tous les animaux étant de la clafle des corps non éleftriques , il eft probable que les trois Cavaliers ont pu provoquer le coup plutôt dans cette partie du chemin que dans une autre. Enfin nous remarquerons que M. d’Auflac , le plus grand de la troupe , droit fur fon cheval , & placé au milieu du chemin très-bombé , a été frappé fur la tête & tue ; que M. de Gautran, moins élevé que M. d’Auflac, & courbe fur l’encolure de fon cheval , a été bleffé entre les deux épaules; que M. de Lavallonoue, qui n’a eu qu'une très-forte commotion, étoit le plus petit de la troupe, c’eft-à-dire , que chacun d’eux a éte frappé en raifon He fa oise diftance du nuage éleétrique. On ne doit pas négliger d'obferver aufli , à l'égard de ce dernier, qu'il ne portoit ni épée, ni couteau de chafle qui pût établir la communication de fon corps avec celui de fon cheval ; en forte qu'il étoit, pour ainfi dire, ifolé fur la felle : ar il eft probable que ce défaut de communication a contribué pour beaucoup a le fouftraire à un plus grand danger ; ; ce qui paroït prouvé d’ailleurs, puifqu'il n’a reçu qu’une commotion, tandis que fon Fee a été tué fous lui. DE L'ACADÉMIE DE TOÙULOUSE. r9$ On peut fe garantir de la foudre en plate campagne de deux manieres , en fe couvrant de corps éleAriques qui puiflent 1 intercepter le coup dont on feroit frappé, ou bien en portant à côté de foi un conduéteur de métal capable de rétablir Fan entre la terre & les nuages. Îl feroit plus sûr d'employer les deux moyens à la fois ; par exemple , un parafol de taffetas, dont le manche feroit d’un bois fec & verni, du Rat duquel pendroit une chaine de fer ou de cuivre qui traïneroit a terre, préfenteroit les deux avantages réunis, & feroit préférable. Pour ce qui concerne la fufion des lames de l'épée & du couteau de chafle dans le fourreau , fans que le fourreau , quoique percé , ait la moindre apparence de brûlure , nous ne connoiffons que le feu € leétrique ca- pable de produire un effet aufli extraordinaire. Plufieurs Phyficiens qui ont douté du fut, ne fe font pas occupés de cet objet; d’autres ont voulu l'expliquer, en fuppo- fent que la fufion eft imparfaite. [Il ne paroït pas qu'aucun d’eux ait examiné le fait avec foin. Nous avons cru pour cette raifon devoir préfenter à l’Académie le couteau de chafle que portoit M. de Gautran : elle a reconnu que les parties de la jame frappée par la foudre, ne préfentoient point de coches , comme on les feroit d’un coup de marteau, mais qu'il y a eu {ur les bords des gouttes de métal formant des éminen- ces , ce qui prouve une fufion complete ; ; elle a été convaincue aufli que le fourreau n’a point été brülé. Nous nous abftenons de toute réflexion à cet égard ; il nous fufñit d’avoir conftaté un fait eflentiel. « 10 plus » important pour nous, » ( dit un Savant de Philadel- phie , aufhi bon Phyficien que bon Politique }) « n’eft 196 MÉMOIRES » pas de favoir de quelle maniere la nature exécute fes » Lois; il nous fuffit de connoitre les Lois elles-mêmes. » C'eft un avantage réel de favoir qu'une porcelaine » abandonnée en l'air fans être foutenue , tombera & » fe brifera immanquablement ; mais de favoir comment » elle tombe, & pourquoi elle fe brife , c'eft une matiere » de pure fpéculation. Ces connoïffances font agréables, » à la vérité ; mais fans elles nous pouvons garantir » notre porcelaine. » Occupons-nous donc à raffembler beaucoup de faits : nous ferons plus utiles à la Société & aux Sciences. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. +97 mm | MÉMOIRE SUR les Cérémonies, les Temples & les Afcétiques Indiens | appelés Pandarons. PEAR M: Der Ca Ro Le ancien Capitaine d’Artillerie. L EXPOSITION du fyftême de Maididaflein, Lute4Mars Philofophe Indien, dont les talens & les connoifflances ‘7%* m'ont été fi utiles, formera en partie le plan de ce Mémoire. Les Inventeurs des cérémonies religieufes , « prétend ce Sage, étoient convaincus que la religion » fimple , nue & détachée de tout culte, ne captive » pas le commun des hommes. Ce n’eft, dit-il, que » {ur les fens que l’efprit fe regle & fe modele, parce » que c’eft par eux que l’homme craint, défire & jouit. » Le Lépiflateur n’auroit fait que bien peu de profélites, » sil avoit connu le caraëtere de la Nation à laquelle » 1] donnoit des Lois. » Le Polithéifme , ajoute-t-il, femble être la religion » la plus propre au caraëtere de l’Indien ; né fenfible , » curieux, nonchalant & timide, 1l voit fes Dieux avec » extafe; il accompagne les chars de triomphe avec un » raviflement inconcevable ; il s’attendrit fur les dou- » leurs qu'éprouvent les pénitens , malheureufes vi&i- » mes de la plus extravagante fuperftition. Enfin l’In- » dien voit, fur la figure extatique des Pandarons, cette » douce fatisfa@tion , avant-coureur des délices que » goûtent les élus dans le ciel. Tout ce que méprife le 198 MÉMOIRES Philofophe , & tout ce qui avilit la raifon, eft le principal mobile de l'admiration & de l’enthoufiafme » de ces hommes qui n’exercent jamais leurs facultés intelleétuelles. » Il faut convemir, avec Maididaflein , que les Léoifla- teurs de ces contrées furent fe prêter habilement au ca- raétere national , en inventant un culte qui pt les affervir au dogme , fans employer le raifonnement, la force & la contrainte. L'Indien , fous des Gouvernemens arbitraires , dont 1l éprouve les injuftices fans en par- tager la puiffance , périroit d’ennui , fi par l'appareil im- pofnta des fêtes, le Brame n’avoit foin d’ébranier fon ame & d’agiter fon organifation. Frappé de la magni- ficence & de la fombre majefté des Temples , l’œil du Polithéifte Indien eft réjoui par la marche bruyante & gaie des procefions. À des objets aufli riants fuccedent des hymenes où le cœur exprime fa fenfibilité, & le genie fes élans fulphureux. Toute la nature eft animée & déifiée dans ces chants d’allegreite. La Poe, qui, dans l'Inde, ne s'éloigne pas des pañlions vertueufes qui la firent naître, a peuplé de Dieux, laterre , les eaux & le firmament. C’eft à l’enthoufiafme des Poetes, dit Maididaffein , qu’on doit les générations , les affilia- tions divines & les génies malfaifans. « Parabarabaftou » (felon les Auteurs infpirés ) engendra Parafati , qui » fignifie Puiflance : ces Mitholociftes en ont fait une » Déefle , de laquelle ils prétendent que Vichnou (1), % ÿ ÿ (1) Les Auteurs des Lettres édifiantes font mention d’un Vichnou-Yefoudow, qu'ils traduifent tout uniment par Yefou. Cet ouvrage, rempli de pieux men fonges , jadis très-refpeltés , arrange fi artiftement la naiffance , la vie , la mort de ce Yefou, qu'on fe croit tranfporté à Bethléem & à Jerufalem. J'avoue qu'ayant les matériaux à pied-d'œuvre , je mai pu batir un édifice auffi à l'Euro- péenne, que l’Auteur de cetre fi@tion ; & voilà comme , avec du papier , wre elume & de l'encre , on inftruu l'Univers, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 1099 » Brama (1) & Routra font iflus. Ces Dieux ne figni- » fient autre chofe que l’eau , la terre & le feu. Deux » autres Divinités , dont le nom de la premiere eft » Maïifloura ou Maiïfphorein, & celui de la feconde, » Sada-Chiavein , l'air & la matiere fubtile des Euro- » péens, ou bien le vuide, dont quelques favans Indiens » font un élément. Les Poètes donnent à Brama le pou- » voir de produre , à Vichnou celui de conferver, & » à Routra celui de détruire. » Ces trois Dieux, avec leurs femmes , leurs fœurs & leurs enfans , implorés fous différens noms, propres aux lieux où 1ls font adorés , font les principales Divinités de l'Indoftan. Cette contrée révere encore les fleuves, & refpetle certains animaux , parmi lefquels chaque Pagode diftingue la vache & les finges qui font nourris dans fon enceinte. Les urines de la vache facrée font un remede fpécifique contre toutes les fievres ; maladie jadis érigée en Déefle chez les Romains. De tous ces objets de latrie, le plus intéreffant pour les favans, & lemoinsconnuen Europe, eftle Linghuam(2). (x) Dieu ayant déterminé de créer le monde, ne voulut pas agir immédiate- ment ; mais il créa trois êtres parfaits. Le premier fut Brama , qui veut dire pénétrant ; le fecond, Befchen, exiftant en toutes chofes ; le troifieme, Mehandou, Grand Seigneur. Par le moyen de Brama, il créa le monde. Par le moyen de Befchen, il le conferva. 11 le détruira par le moyen de Mehandou. Bernier, Page 139. (2) Le Linghuam eft une pierre qui reffemble, par la forme & la couleur, à celle qui eft décrite par Hérodien, vie d'Héliogabale. « Baflien, dit cet Auteur, » avoit environ quatorze ans, & Alexian dix, ( celui-ci fut appelé Alexandre » févere ) quand ils furent faits tous deux Prêtres du Soleil, appelé Héliopa- » bale en langue phénicienne ; aftre que les Phéniciens réverent beaucoup, à » l'honneur duquel ils ont édifié un fort grand & fpacieux Temple, fuperbe- » ment enrichi de beaucoup d’or, d'argent & de pierres précieufes : & fi » non-feulement les Habitans du lieu le réverent , mais les Gouverneurs des » Provinces voifines, & enfemble les Rois & Princes étrangers, à l’envi l'un » de l’autre , lui envoient tous les ans de magnifiques préfens. D'efficie, il n'y » en a point faite à la mode Romaine ni Grecque, Ce n’eft qu'une picrre ronde 200 MÉMOIRES Peu d’Auteurs ont cherché les raifons qui ont déterminé les Indiens à rendre un hommage religieux aux Lin- huams , connus chez les anciens fous le nom de Phallum. A l’afpeët de la monftrueufe repréfentation du Dieu qu’on adoroit à Lampfaque , les Voyageurs ont rouoi, les Miflionnaires ont anathématifé , & pas un homme n’a recherché l’origine d’un culte qui retrace les fêtes que Rome célébroit le 26 Août (1) ; les cérémo- nies des grands myfteres , pratiquées à Athenes, & celles dont à Memphis (2) on honoroit la Déefle [fs , & à Thebes (3) le Dieu Bacchus. À ces anciens ado- » par le bas, qui vient peu à peu en pointe, de la forme prefque d’une pyra- » mide, noire au poflible , puifqu'ils difent être tombée du ciel ». Les Syriens ayant perdu fans doute l'idée de la repréfentation primitive de cette pierre , ajouterent foi à la relation fabuleufe que les Prêtres leur donnerent fur ces objets de latrie. (1) Les Dames les plus chaftes & les mieux famées faifoient tous les ans le 26 Août, une proceffion folemnelle depuis la Ville jufques au Temple de Venus, à laquelle elles préfentoient un Phallum, c’eft-à-dire, l'efigie du membre viril, lequel elles mettoient entre les mains de l’Idole. Cette fête avoit été modelée fur celle des grands myfteres d'Yachus des Athéniens, à laquelle ce que je vais rapporter avoit donné naiffance. Yachus, fils de Cerés, & frere de Proferpine & de Typhon, fut tué en trahifon par ce dernier , & fon corps démembré en diverfes parties, qui furent recueillies par les foins & la piété de fa mere, qui ne put cependant retrouver le membre viril ; elle voulut, en réparation de fa perte, qu'il fût plus honoré que tous les autres membres , qu'il für révéré dans les myfteres & les cérémonies. (2) « Typhon étant la nuit à la chaffe , au clair de la lune, rencontra le corps » d'Ofiris, & l'ayant reconnu , le déchira & le coupa en quarante parues qu'il » jerta çà & là; & dit-on plus, qu'ifis trouva toutes les autres parties, excepté » le membre naturel, parce qu'il fut incontinent jeté dans la riviere ; que les » poiffons le Lepidothe , le Phagre & l’Oxirinchus ( le Brochet ), le mangerent ; » & pour raifon de quoi, Ifis les abomina par-deflus les autres poiflons ; mais » au lieu du naturel, celle en fit contrefaire un, qui s'appelle Phallus; & le » confacra tellement, que les Egyptiens en célebrent la fête ». Plutar. Ifs. (3) « La proceflion des Bacchanales , dit le même Auteur ; qui fe fair en » notre pays , (il éroit de Cheronée, près de Thebes ) fe faifoir anciennement? » fort fimplement & joyeufement. On y portoit une cruche de vin, un cep de » vigne, & puis quelqu'un y traînoit un bouc ; un autre y portoit une corbeille » pleine de figues ; puis, après tout, on y portoit un Phallus , qui eft la reffem= » blance de la nature d’un homme ». Plur, Traité de l'Avarice, & convoitife » d’avoir ». rateurs DE L’'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 2017 rateurs du Phallum » on peut joindre les Perfes & les Affyriens (x 1), qui érigerent des Autels à l’Agent immé- diat de la génération. “Toutes ces Nations avoient fans doute une tradition vraie ou fabuleufe , qui juftifioit leur refpeë&t pour un culte qui paroït de nos jours auf ridicule qu’obfcene. Voyons la Mythologie Indienne fur cet article (2). (1) Ptoloméce parlant des Syriens & des Perfes, dit que chez eux on adore les membres que la nature deftine à la génération. On les adore, dit-il, à caufe des afpeëts de Venus , de Saturne & du Soleil, favorables à la réproduction des cfpeces. Apud Sylden. « On montre aux yeux du Peuple, dit Boulanger , les repréfentations du » membre viril ». C’étoit, felon les apparences , un emblème de la génération des chofes , qui rappeloit aux hommes la reconnoïflance qu’ils devoient aux Dieux pour la fécondité. Cer emblème eft Ie même que celui des œufs, qui , en Egypte, étoient le fÿmbole du monde & de l’auteur de la nature qui produit tout en lui-même. On en portoit dans les orgies & dans les myfteres d’kricine. On peut encore confulrer fur Let article Diodore de Sicile , liv. 1 ; Macrobe Satur. liv. 7, chap. 18. Theodor. Therap. liv. 1 , & Tertul. Cet Auteur dit : Vrile membrum totum efi myflertum , {e&. 11, chap. 32. (2) Voici une autre origine du Linghuam, extraite de PEfour-Vedam. Brama & Vichnou , accompagnés d’un nombreux cortege de Brames , furent autrefois fur la montagne Keïlaflan , rendre à Chib ( Chiavein ) une vifite. Ils le trouverent jouiflant de fa femme. Leur arrivée ne l’empécha pas de continuer. Il les vit, mais fans rien dire, & fans leur faire la moindre politefe. L’ivreffe de fa pañlion l'avoir mis hors de lui-même. A cette vue, quelques-uns de ceux qui compofoient cette illuftre affemblée, entr’autres Vichnou, ne firent qu’en rire & eurent honte pour Jui... Chib, peu de temps après , étant revenu à lui, demanda à fes Gardes quels étoient ceux qui étoient venus chez lui. C’eft Brama & Vichnou, lui dirent-ils, accompagnés d’une nombreufe troupe de Pénitens. Ces paroles furent comme un coup de foudre, qui pénétra jufques au cœur de Chib & de Dourga ( Déefe très-adorce dans le Bengale , & inconnue dans les Pro- vinces du Sud des Carnattes ) ; ils en moururent l’un & Pautre, dans la même pofture où ils avoient été jufques alors. Chib a voulu que cette a@ion, qui avoit fair fa honte , für célébrée. Voici comme il s’en exprima lui-même : « La honte » ma fair mourir, mais elle m'a donné cette autre figure ». Cette nouvelle figure eft le Linghuam. Le Phallum ou le Linghuam ne reçoit, dans l'Inde, les refpe@s & tes homma- ges des hommes qu’à la faveur d’une fable , dont l'amour a fourni le fond, Chez les Egyptiens, les Grecs & les Romains, il n’a été admis, au nombre des objets de vénération , qu’en mémoire d’une a@ion cruelle & barbare, rant le climat & Ja différence des culres ont d'influence {ur l'imagination la moins exaltée , quoique la plus déréglée. Offrir aux Dieux du ris ou des fruits, ou maflacrer au pied des Autels, des animaux utiles & domeftiques, font deux a@es religieux qui font fur nos fens des impreflions bien différentes. La reconnoifance , la joie & l'amour , Tome II. Ce 202 MÉMOIRES Vichnou étant defcendu fur la terre, emprunta la fioure de Ravena , fameux Brigand , qui, après avoir ravagé l'empire des Carnattes , s’étoit dérobé par une prompte fuite aux pourfuites de l’armée du Souverain de ces contrées. Vichnou, fous la figure de ce Dévañta- teur, sintroduifit chez fa femme : 1l joua auprès d’elle un rôle aufli important, mais plus fcandaleux que celui de Jupiter auprès de lépoufe d’Amphitrion. Le Dieu Indien lenleva , & vécut pendant deux ans avec elle. Lafé des plaifirs terreftres, Vichnou , réfolu de quitter fa Maitrefle, parut devant elle avec tout l'éclat de la Divinité ; il portoit la lune fur fa tête. Ce Dieu ayant difparu , la femme de Ravena , ou felon d'autres My- thologiftes qui lui refufent l'honneur de cette aven- ture , celle de Devora ou celle de Schiavein , à qui ils la donnent indiftin£tement , fonda , en mémoire des plaifirs ineflables que Vichnou lui avoit prodigués , une Communauté de filles des plus illuftres Caftes. Leur virginité dévouée à Vichnou , ef l'unique vœu qui les attache à l’Autel de ce Dieu ; & c’eft fur cet Autel qu’eft repréfenté le type du bonheur de la Fondatrice , & le {ymbole de celui qu’elles efperent. entrainent lés Indiens dans leurs Pagodes ; Pambition , la terreur & la cruauté, profternerent les autres Nations aux pieds de leurs Idoles, & enfanglanterent les mains de leurs Prêtres, Tous les Auteurs ne font pas d’accord fur la figure du Linghuam. « On fair, » dit un Ecrivain moderne , que le Lingam eft la figure des parties naturelles de » l'homme réunies à celles de la femme ». Je n’en ai pas vu de certe efpece, ni de la forme de celui dont parle Porphyre. Il prétend que Bardafane avoit vu chez les anciens Indiens une flatue de dix coudées de haut , qui repréfentoit l'homme &x la femme , de maniere qu’un côté du vifage , un bras, une main, un pied, appartenoeint à l'homme, & les autres membres à la femme. Onle repréfentoit encore dans les Pagodes fous la figure d'un homme , avec trois yeux & feize mains; Lettr. ediff. Tom. XVI, pag. 129, 130. Abrah. Roi, dit que certe figure qu’on porte dans les proceflions, & dont la vue plaît beau- coup plus aux Indiens, eft le Livghuam, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 203 Les Brames Philofophes ne fe prêtent pas au ridicule d’une telle révélation. Ils foutiennent que les filles font obligées de vénérer le Phallum , comme un objet con- facré à recevoir l'hommage qu’elles font au Dieu , de leur virginité. D'ailleurs le Peuple eft perfuadé que fi une fiancée, n'ayant pas vécu chaftement, touchoit cette pierre , emblême de la génération , Dieu la puni- roit de quelque affreufe maladie. Cette idée eft fi forte- ment imprimée dans l’efprit de tous les nouveaux ma- riés , que ceux-ci, le lendemain de leurs nôces , font couvrir le Linghuam de la pagne , dépofitaire des preu- ves qui conftatent une virginité violemment enlevée. Plufieurs relations atteftent fauflement que les Brames ont devancé les nouveaux mariés dans les bonnes gra- ces de leurs époufes ; & par une contradiétion mani- fefte , elles ajoutent que les filles font déflorées par les Linghuams. Ces ouvrages, quoique très-accrédités , ne fauroient nuire ni aux Brames ni à la vérité. Les Prêtres Indiens , fiers des privileges de leurs Caftes , & jaloux des refpeëts des Peuples, font très-indifiérens pour des plaifirs, dont ils peuvent, dans l’intérieur de leurs mai- fons , goûter les douceurs fans crime , fans crainte & fans remords. Quant à la défloration par le Linghuam, elle eft impoflble phyfiquement. Il fuit d’avoir vu ces repréfentations monftrueufes , pour s'en convaincre. Ainfi, ni les Phallums, niles Brames, ne forcent ja- mais les Vierges à dénouer leur ceinture. Nous allons fuivre ces Prètres dans la célébration des deux princi- pales fêtes annuelles. La premiere fe célebre le 2 Jan- Vier , jour où commence l'année indienne. Dés que le Soleil a fini la moitié de fon cours, les 204 MÉMOIRES chars de triomphe (1), & les éléphans , charges des Divinités , fortent de la Ville, au bruit des tamtams, des triangles & des hautbois. Ces joueurs d’inftrumens font précédés des Bayaders. Cette proceflion ayant tra- verfe la Ville, fait {tation dans la plaine. C’eft dans ce lieu que tous les jeunes gens , montés fur de beaux chevaux , courent après un lievre qu’un des afliftans ne doit lächer que dans un moment convenu. La courfe de cet animal , dirigée vers le levant ou vers le cou- chant , pronoftique une bonne ou mauvaife année. Les cavaliers volent foudain aux troufles du fugitif. Celui qui lui porte le coup mortel , reçoit , pour prix de fon adrefle , l’aflurance d’une bonne année. Cette fête , appe- lée Pongol , célébrée avec la plus grande folemnité, eft une preuve que la crainte & la curiofité font les plus incurables maladies de l’homme , moins à plaindre des maux phyfiques qu'il éprouve que des chimeres qu'il fe crée. C'eft pour calmer le délire de leur imagination , queles Indiens célebrent , en Novembre, une fête appe- lée la Purification. On apperçoit dans une vafte plaine, un brafier ar- dent (2), placé entre deux mares d’une eau bourbeufe : cette eau humeéte une terre glaife , argilleufe. Le Péni- tent, après avoir défendu fes pieds par un maftic ar- (1) Les Romains avoient des chariots facrés, appelés TAenfæ ; ils étoient attelés de quatre chevaux de front, ou d’un pareil nombre d’éléphans , comme on le voit dans les medailles d’Augufte , de Perronius Turpilianus , &c. (2) Le feu a été regardé comme un Dieu par plufieurs Peuples. Les Grecs & les Romains l’adoroient fous le nom de Vulcain & de Vefta. Cet élément fut la principale Divinité des anciens habitans de Cis, ville de Médie, dans laquelle on voyoit le fameux Temple bâti en fon honneur par Zoroaître, s’il en faut croire les anciens Auteurs. Les Parfis injurieufement appelés Guebres, qui de tout temps ont adopté la doëûtrine de ce Légiflateur, portent, gravé fur une médaille attachée à leur bras, un brafier étincellant avec des figures hyérogliphi- ques, Les Indiens appellent le feu, l'œil de la Divinité & le grand pacificateur, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 20$ gilleux , marche fur le feu , & s'arrête fur des charbons ardens. Le peu de temps qu’il emploie à braver ce terri- ble élément ; eft trop court, pour que la chaleur puifle pénétrer. Les chars de triomphe, qui font le plus bel ornement des principales fêtes indiennes , méritent une attention particuliere. Ces chars portent tantôt fur quatre roues & tantôt fur fix. Leur mafle formant une pyramide qua- drangulaire, s'éleve près de vingt pieds au-deflus de l’en- tablement : le char eft divifé en trois étages par une char- pente en treillis. La Divinité, environnée de danfeufes & de joueurs d’inftrumens , eft logée dans une niche, pratiquée dans le troifieme. Des hommes & des femmes {culptés fur ces chars avec aflez d’expreflion , y cho- quent la vue par leurs poftures lafcives (1). Les Dieux même ont été déshonorés par le cifeau du Sculpteur. L’imagination la plus ardente, & l'impulfion du tempé- rament le plus emporté, ont pu feules defliner tant d’affreufes nudités & de fi horribles infamies. Les Indiens prétendent qu'un mauvais génie a conduit la main du Sculpteur. Ce génie n’a pas moins abufé du pinceau qui a tracé les figures qu ‘on voit dans les Temples. Mais tous ces objets, ajoutent les Brames, en infpirant le (1) Les Egyptiens, les Grecs & les Romains, offroient, aux regards du Peuple, des objets auffi infames & auffi monftrueux , gravés dans les Temples. Herodote, Paufanias, Varron & Diodore de Sicile , en font mention. « Ces repréfentarions » (à ce que prétend Boulanger ) étoient, fuivant les apparences , des abus de » quelque ufage primitif, fondé fur quelque principe innocent ou utile dans fon » origine ». Il ne faut pas fuppofer les hommes gratuitement criminels. Il faut refpeéter l'antique nudité de ces figures, comme on vénéroit à Sparte , celle des filles, lorfqu’elles s’exerçoient à des amufemens gymnaftiques. Le Savant n'eft pas plus fcandalifé du langage naïf d’Amiot & de l'expreflion énergique & nue de Montagne, que le Théologien des douzieme & treizieme chapitres d'Ezéchiel. En outre , les Brames regardent les figures obfcenes comme des hyérogliphes, qui cachent des vérités apocaleptiques , dont la connoiflance n’eft pas réfervèe à Ja génération préfente. 206 MÉMOIRES dégoût & l'horreur, fervent admirablement à la réforme des mœurs. Les chars de triomphe, dont le nombre n'eft jamais au-deflus de quatre , n’honorent pas toutes les prome- nades religieufes (1), qu’on dit avoir été fouvent en- fanglantées par la mort de quelques pénitens écrafés fous leurs roues. Quoique très-attentif à obferver l’ordre & la pompe des cérémonies, je n'ai pas été témoin de cette cruelle fuperftition. Mais j'ai appris les raifons qui ont engagé les Brames à donner à des danfeurs les pre- miers rôles dans le fervice divin. C’eft d’après les inf- truétions des Prêtres, & l'opinion des Bayaders , que j'en vais donner une idée. C’eft dans la Mythologie qu’il faut chercher l’inftitu- tion des Bayaders des Pagodes , appelées par les Indiens (1) Voici les fêtes célébrées dans la Pagode de Verdacheloum. On promene, en Janvier , autour de l'enceinte de cette Pagode , des chars fur lefquels font Verdacheloum-Sami, ou Sadachavein, Periamenequé, Poullear & Soubramini.. Dans le mois d'Avril, on fête Sadachavein pendant dix jours. En Mai, on célebre la fête appelée Outrami. Dans Juin, on huile l'intérieur de la Pagode, qu’on nettoie le plus propre- ment qu’il eft poflible , pour y recevoir la vifite du Dieu. Dans le même mois, om célebre la fêre de Periamenequé ; on atrele un feul char. La fête de réjouiffance , dans laquelle on remercie Sadachavein de la récolte du ris , eft célébrée dans le mois d'Août. Les Brames s’étant purifiés, diftribuent du ris aux Chatrias , aux Raflias. Dans la cérémonie de la fête de Septembre , on éleve un pendal dans la Pagode, avec un Autel fur lequel la Divinité tutélaire du pays ef placée. Hlle y refte dix jours , au bout defquels on l'enfourche fur un cheval proprement harnaché. Le Dieu couvert d'une chirolle, fait en dehors , le tour de lenceinte. 11 part un lievre , qui pañie au-devant du cheval. Le Brame , en croupe derriere le Dieu, détend Parc dont le Sami eft armé, & tire fur l'animal. Dans O&obre , la Divinité eft habillée de neuf & huilée, Tous les Indiens fuivent fon exemple. Cette fête théophanique, appelée Tebalouli, n'eft qu'un avertiflement de l'approche de l'hiver. La fête de Novembre eft à Verdacheloum , comme par-tout ailleurs. Le Sami, nommé Manié-Vaïfler, eft promené pendant Décembre, dans l’inté- rieur de la Pagode. Cette cérémonie dure dix jours. Dans tour le courant de ce mois , on lit exatement le Vedam , dont la le@ure eft fuivie de celle de la fon- dation de la Pagode, Le dernier jour , l'Idole eft promenée hors l'enceinte dx Temple. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 207 Coile Toebria, ainfi nommées pour les diftinguer de celles qui font au fervice des Aldées ou des Caftes. Dans les premierstemps, (dit la Mythologie Indienne) Vichnou, Brama & d’autres Samis , danfoient devant le grand Dieu ; celui-ci ofdonna qu’à la place de ces Divinités baladines , on fubftituât des filles qu'on nourriroit avec du ris cuit , qu’on diftribueroit trois fois la journée ; en conféquence , on choifit de jeunes filles dans les Caftes Chatria & Raflia, auxquelles on donne un maître à danfer. Cet homme, content de fes éleves, les mene dans la Pagode , & les préfente au Brame, chargé du fervice du Temple. Quand ce Prêtre les a agréées , 1l les oblige à prendre un bain & à couronner leur tête des plus belles fleurs. Purifiées & élégamment vêtues , les danfeufes fe préfen- tent devant le Dieu tutélaire , qu’elles régalent d’un échantillon de leur talent, & dès-lors elles font admifes au rang des Prètreffes. Ces Bayaders n’aviliflent pas le facré cara@tere dont elles font revêtues , en prodi- guant leurs faveurs aux Caftes Raflia & Chatria. Ces fa- veurs fouvent douloureufes, quoique cherement payées, déshonoreroient la Cafte Brame. Ces Prêtres chafle- roient de la Pagode leurs Confreres convaincus d'un libertinage réprouvé par l’Inftitut. Le fort des Bayaders feroit égal à celui du Brame delinquant , fi ces danfeufes aflouviffoient les feux des Choutras , des Mogols & des Européens. Au fujet des autres Bayaders , voyez la note (1). Celles-la ne font ni fous la tutelle immédiate (1) 1! exifte dans l’Indoftan deux autres efpeces de danfeufes ; les premieres appelées Bayaders d’Aldée , & les fecondes Bayaders de Cafte. Les Courtifannes d'Aldce font fous la proteétion du Couroual. Cet Officier de Police eft obligé de leur faire toucher la paie que le Prince on le Fermier leur donne. Voici quelle eft leur éducation. Des Matrones qui, dans leur jeunefle, ont exercé le 208 MÉMOIRES des Dieux , ni nourries dans les Temples. Ces édifices ; dont le Voyageur Européen ne peut pas voir l’inté- rieur, dans des lieux où l’Indien n’eft foumis qu’au Gou- vernement de fes anciens Maïitres, étonnent l’œ1l obfer- vateur par leur grandeur & par leur archite6ture. La defcription de la Pagode de Strirengham doit fufhre au Leéteur , pour affeoir fon jugement fur cette matiere. Ce Temple (1) eft environné de fept enceintes métier de Bayader , achetent des jeunes filles qu’elles élevent au chant & à la danfe , & qui, après la mort de leurs Patrones, hérirent de leurs bijoux , & dans un âge avancé les remplacent dans toutes leurs fonétions. Le noviciat de ces courtifannes eft affez fingulier. La Matrone , après Paéhat de la jeune fille, fait annoncer la nouvelle acquifition qu’elle a faite. Le plus offrant ne peut poñléder fa conquête , qu’au préalable la jeune Bayader n'ait été promenée dans un palanquin ou fur un cheval. Après fa tournée, elle eft conduite dans une falle où elle trouve un Cathari paré de fleurs, près duquel elle fe place. Le Cathari ka fuir dans fon lit, où il eft bientôt remplacé par l'amant. Ces danfeufes afliftent à toutes les cérémonies extérieures , faites à l'honneur du Dieu tutélaire. Les Bayaders des Caftes , font achetées par les Chefs des Tribus qui ont foin de leur nourriture & de teur entretien , & qui leur paient des maîtres à danfer. Ces filles font employées dans les fêtes celébrées par les Corps des Métiers, (1) Voici la defcription de ce Temple, par l’Auteur de lHiftoire Philofophi- que du Commerce des deux Indes. « Pour prix de leurs fervices, les Français fe » firent céder un territoire immenfe. A la tête de leurs acquiftions , du côté du » midi, étoit l’Ifle de Cheringham , formée par deux branches du Caveri. Cette » Ifle longue & fertile eft célebre dans l'Inde, par la grande Pagode qui lui » donne fon nom, & qui eft fortifiée comme tous les édifices deftinés au culre » public. Le Temple eft formé par fept enclos quarrés , renfermés les uns dans » les autres, dont les murs ont trente-cinq pieds de hauteur & quatre d’épaiffeur. » Ces enclos font à trois cents cinquante pieds de diftance les uns des autres, & » chacun a quatre portes chargées de figures emblématiques , avec une haute » tour au-deffus. Le mur intérieur a quatre lieues de circuit. Les Chapelles font » renfermées dans cette derniere clôture. Hs doivent le concours que la vénéra- » tion leur attire, à l'opinion généralement établie qu’on y conferve les images » de Brama, de Vichnou & de Sieb ». Cette defcriprion eft très-fautive. On doit s’en tenir à celle que j'ai donnée. Commandant d’Artillerie & Officier du Génie , employé pendant quatorze mois dans cette Pagode , j'aieu, fur cer article, des connoiffances qu'aucun Officier , ni avant ni après moi, n’a eu ni le temps ni Poccafon d’acquérir. Les murs de fa plus vafte enceinte n’ont que feize pieds de hauteur ; les autres s’élevent jufqu'à trente-deux pieds : tous ces enclos forment des quarrés longs. La diftance du plus grand à celui qui Pavoifine, eft dans fa longueur prife de l’eft à l’oueft de trente toifes , & cinquante du nord au fud. ‘lous ces enclos fe rapprochent à mefure qu’ils avoilinent le fanétuaire. Donner au mur intérieur quatre lieues de quarrées ; DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 209 quarrées ; les mufs de la plus vafte, protégés par des tours de gazon, ont 750 toifes de longueur fur $5o de largeur. Au milieu de chacune eft une porte furmontée d'une pyramide quadrangulaire. Deux portes de la pre- miere enceinte ne font pas encore finies , & une autre de la feconde fut renverfée par un baril de poudre. Les autres enceintes, dont les diftances des unes aux autres deviennent moindres à mefure qu'elles fe rapprochent des lieux facrés, font paralleles à la nr , ainfi que leurs portes. Ces portes font prefque toutes cl argées d’une maçonnerie pyramidale, contenant depuis trois juiqu’e a fept é étages. Ces ouvrages font ornés dans l’exté- rieur , de figures repréfentant des Dieux , des hommes & 1 finges , autour defquels on a delire de fleurs en différentes couleurs. Apres qu'on a franchi la porte de la fixieme enceinte , on voit, à droite & à gauche, une quantité prodigieufe de colonnes, qui foutiennent un plancher, formé par des pierres de fix à fept pieds de longueur fur trois ou quatre de largeur CC {UT Un pied & demi d’épaifleur. & côté de ce périptere eft un circuit, eft une erreur fi groffiere , que j'ai de la peine à me perfuader qu'un homme qui n’auroit fait qu’aborder à Pondicheri, püt , à fon retour, propager une telle faufleré. L’ifle de Chelingham n’a que fix lieues françaifes de circon- férence , & fa plus grande largeur n’excede pas trois mille toifes. Le canon de Tiroufcherapali , place fituée à trois cents pas loin du bord du Caveri, porte fon boulet au-delà de la Pagode, dont les murs du nord ne font éloignés du Colram que de cent toiles. 11 n’eft point douteux qu’une coulevrine de douze ne portât à toute volée au-delà du Colram. « Les Tamoults aflurent , dit M. le Gentil, que la grandeur & la hauteur des » Pagodes dépendent du rang dela Divinité qu'on y révere ».L’Inde, divifée en plufieurs feétes, n’a pas encore établi, parmi les Dieux du premier rang , un ordre hyérarchique. Dans la côte de Coromandel, Brama, Vichnou, Routra, Chiavein , Moundou , Goundou &x Sadachavein, & difputent la priorité, Ils font tous égaux dans les Pagodes, dont ils font les Divinités tutélaires. M. le Gentil appelle Pagodes, ces édifices dont le Samis n’eft invoqué que dans des événemens heureux ou malheureux. Ce demi-Dieu, logé dans des Oratoires, n’a point de Brame attaché à fon fervice. Tome 11. D d 210 MÉMOIRES étang où les Indiens vont fe purifien A l'extrémité de cette immenfe pifcine , s'offre un édifice , devant lequel eft un bœuf fculpté en pierre (1) , accroupi fur un enta- blement de quatre pieds de hauteur. Ce bâtiment , com- pofé de deux nefs & d’une chapelle , féjour de la Di- vinité tutélaire , eft précifément ce qu’on doit appeler Pagode. Dans la nef, qui eft plus près du fanétuaire , font placés les Brames, les Bayaders & les Joueurs d'inftrumens. Les Chatrias & les Vafñlias rempliflent l’autre batiment. Le grand Pontife , placé aux pieds de la Divinité, eft renfermé avec elle dans une autre Chapelle, qui n’a que douze pieds quarrés , & dont l'extérieur de la voûte eft couvert de lames d’or. On voit dans les campagnes des ftatues coloffales , dédiées ou à Crifchna ou à Evora , & des chapelles qui renferment chacune leur Dieu , dont le ventre eft d’un volume énorme. Ce Dieu reçoit plufieurs dénominations adaptées aux fonétions dont il eft chargé. Les dernieres Caftes de l’Inde l'appellentgBaouth ; nom que je n'ai jamais entendu prononcer par aucun Brame, n1 par aucun Pandaron. On réclame la proteëtion de ces Dieux forains dans le temps de fécherefle , pour en obtenir la (1) On apperçoit devant les portes de quelques Pagodes, des bœufs accroupis qui ont leur tête tournée du côté du Temple. Le bœuf eft l'animal le plus révéré dans l'Inde. Il étoit très-refpeëté des anciens Grecs & Romains. Le crime de tucr un bœuf éroit chez eux, aufñli capital que celui de priver un Citoyen de Ja vie. Les Athéniens , fous le regne d'Ereéthée , ayant été contraints d’en immoler un, le Viétimaire qui l’aflomma, s'enfuit hors des confins de l’Attique, & la hache dont l'animal fut frappé , fut appelée en jugement comme homicide. « Les grands » chemins, dit Deflandes , les portes des principales Pagodes, font ornés de » bœufs de pierre qu'on a travaillés avec beaucoup d'induftrie. Le Peuple y » court en foule, & croit honorer le Dieu Ram, qu'il regarde comme fon » Fondateur ». Deflandes fe trompe. Le bœuf neft regardé que comme le fymbole de l'Agriculture, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. >2rt pluie. On porte à cet effet un vafe rempli d’eau , qu’on: verfe en cadence fur la tête du Sami. Pendant cette cé- rémonie, les Bayaders d’Aldée chantent un hymne, dont voici la tradu@tion littérale. « Dieu puiflant , nous » arrofons ton corps de l'élément nourricier du ris, » élément auquel le foleil fait la guerre : daigne au » vrir, d'un nuage bienfaifant , cet aftre qui brüle nos » moiflons , & donne à chacune de nos plantes utiles , » une aufli grande quantité d’eau que celle dont nous » arrofons ta tête. » Les Divinités auxquelles les Indiens ont accordé leur confiance , ne font pas aflez nombreufes , pour que cha- que Dieu n'ait qu'un feul emploi à remplir & un feul diftriét à gouverner ; ainfi le Sami, qui a la clef des réfervoirs céleftes È difpofe aufli des rayons du foleil, pourvu que le même Dieu change de nom & prenne celui de Soubramini , fous lequel il a le pouvoir de dé- livrer les poflédés : il acquiert encore une nouvelle autorité , qui devient bien plus refpettabl e fous la dé- bastion de Poulchar. Alors il préfide à “ses, , dont il a lui-même éprouvé les douceurs , ayant époufé Lachemi, la Déefle de la Beauté. Ce Sami , tranquille poffeffeur des hommages des Habitans de la campagne y dont 1l ne partage les honneurs qu'avec Chiavein & la Déeffe Peri-amenaiquen, qui fignifie grande Dame, ne paroïît dans les Villes que fous le nom de Poulchar, où fa petite ftatue figure dans les maifons. Ce n’eft pas à la gloire des Dieux du fecond ordre qu’on a élevé d’immenfes Pagodes : on n’ambitionne pas même leur prote@tion dans les longs pélerinages qu'on entreprend. Les nombreufes troupes de Voya- geurs qui couvrent les plaines de l'Indoftan , n’adreffent leurs vœux qu'aux Divinités du premier ordre. 212 MÉMOIRES Ces Pélerins (1) rempliflent les Chaudrerie ou Cara- vanferai qui environnent le Temple de Vichnou à Ja- ouernat, ville du Bengale, & celui de Dévora , furnom de Brama, dans les montagnes de Tiroupatti, Sercor de Chandergori : ils implorent la proteétion de Routra , adoré dans Ram-Surene , ville du Maduré. Ces dévots fe précipitent en foule dans les Pagodes de Vichnou , proteéteur de Strirengham. Les pélerinages furent la premiere pañlion qui agita l'homme religieux. Le Polythéifme divifoit à peine les enfans de la terre, que chaque horde , chaque peuplade & chaque bourg ou nome , vanta la puiflance de fes Dieux. Les hommes, dont les demandes n’avoient pas été accueillies par la Divinité locale , tâcherent de fe concilier les bonnes graces des Dieux étrangers. [ls firent des vœux, promirent des offrandes , voyagerent pour les accomplir , & pour enrichir des Prêtres qui ne fe négligerent pas. Ceux-ci firent valoir la puiflance des Samis, dont ils étoient les Miniftres : beaucoup de ces Pélerins rejoignirent leurs foyers , ruinés & fouvent accablés de maux plus cruels que ceux dont la guérifon avoit été l’objet de leurs voyages. Dégoûtés de leurs courfes , ils renforcerent leur piété d’une mélan- colie fombre & atrabilaire ; alors 1ls imaginerent de féchir les Dieux par le fang des vi@times ; la fuperftition d'un côté , l'hypocrifie de l’autre, aiguiferent le fer qui le verfa. RENE SR RES ER COR RE RCE ER ER ES (1) Dès qu'un Indien fe prépare pour quelque pélerinage , il fait, pendant huit jours, lit à part avec fa femme ; après quoi il demande au Chef de Cafe la permiflion de porter la toque jaune & le langouti ( efpece de chiffon qui fert à cacher ce que la pudeur défend de montrer ) de la même couleur. On paie la permiflion, qui rarement eft refufée. Le Pélerin, la tête couverte, le corps nud, fe joint à la bande dévote des Pélerins déjà dévoués à la Pagode, qui fait l'objet de leur voyage. On voit des Indiens qui, par curiofité , vifitent des Temples ; ceux-ci ne fuivent aucune regle, DE L’'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 213 Le Fanatifme toujours égal à lui-même, mais diffé- rent dans fes eflets , fouffle le défefpoir & la douleur dans les cœurs des Indiens qu’il tyrannie. Frappé d’une vaine & {ombre terreur, l’Indien s’inflige des tourmens dont la variété & la cruauté paroiflent au-deflus des forces humaines ; ici un pénitent s’enterre jufqu’au cou dans une fofle où il n’entre qu'avec peine ; il y périt fouvent après avoir éprouvé les plus affreufes douleurs. Un autre fanatique eft aflis fur des chaifes hériflées de pointes de fer. On apperçoit près d’un Temple un en- thoufiafte , qui , ayant tenu pendant quelques années fon bras levé, ne peut plus le ramener vers fon Corps. Un autre paroît, dont les ongles percent la paume de la main fermée depuis long-temps. En voyageant fur les grands chemins , on entend les cris & les fanolots des malheureux, qui, couverts d’un fable brûlant, im- plorent la miféricorde des pañans, & bravent follement les roues , les chevaux & les tigres. Le Dieu Evora eft invoqué par des pénitens qui reftent fufpendus une ou deux minutes à un croc enfoncé dans les chairs de l'épaule. Le Dieu Routra force les Pélerins de Ram- Surene à s'appliquer des fers brûlans fur la plante des pieds. Plufieurs Pandarons s’'impofent un filence éternel. Ces Afcétiques, dont aucun Auteur n’a parlé, méritent une attention particuliere. J'ai prouvé, dans un Mémoire fur les Brames , que ces Prêtres doivent leur inftitution à Cafminaram , qui vivoit fous la premiere dynaftie des Empereurs des Carnattes. Les Savans Indiens , très-ignorans dans les calculs chronologiques , cedent aifément à de fimples conjeétures : en conféquence, ils prétendent que T'aflin- gue-Rajaram , premier proteéteur de l’Inftituteur des 214 MÉMOIRES Brames, vivoit après Alexandre ; que tous les Gymno- fophiftes qui vivoient avant & quelque temps après ce Conquérant, étoient des Pandarons , & que les éloges que les Grecs & les Romains avoient prodigués aux Sages de leur Nation , étoient adreflés à ces derniers, dont l'infütut fe perd dans la nuit des fiecles. J'avoue que j'ai cru entrevoir dans les Pandarons les mêmes vertus , les mêmes qualités de ces Philofophes que l’an- tiquité la plus reculée a prônés avec autant de juftice que de vérité (1). On remarque dans les Pandarons la même application pour l'étude, la même fobriété dans les repas que dans les anciens Gymnofophiftes. Ces Afcéti- ques méprifent la vie; ils habitent les montagnes, logent dans les cavernes , bravent l’intempérie des climats & les befoins les plus urgens. Le Pandaron a de la Divinité les idées les plus fublimes , & de la vertu les fentimens les plus vrais. Etre bienfaifant , il fe rapproche de fes femblables , leur communique le fruit de fes études ; il les dirige & les rend meilleurs. Le fordide intérêt n’avilit jamais leurs inftruétions. L'homme avide qui vendit la doëtrine , deshonora la fcience & profana fon fan&tuaire. (1) Quinte-Curce donne une idée des Pandarons dans un pañlage du huitieme Livre : Unum agrefle Ë horridum genus eff, quod fapientes vocant , &c. Les Auteurs de l'Encyclopédie ont confondu les Pandarons avec les Brames, quoique ce qu'ils en difent ne foit exaëét ni pour les uns, ni pour les autres. Aucune fete n’a eu des rapports plus frappans avec les Pandarons , que les Lhérapeutes, fi Philon ne les flatte pas dans fon Livre de la Vie contemplative : cet Aureur ra-. conte qu'il y avoit un Peuple répandu dans prefque routes les parties du monde connu, fur-tout dans l'Egypte , aux environs d'Alexandrie, & nommé Théra. peutes ; que ces gens-là renonçoïent à leurs amis & parens , à leurs biens & à Jeur patrie ; qu’ils fe débarrafloient de toutes les affaires temporelles, & qu'ils fe retiroient dans les folitudes , où ils avoient chacun leur habitation particuliere , nommée Semnée ou Monaftere. Il ajoute que les Thérapeutes s’y livroient entie. rement aux exercices de la priere & de la contemplation ; qu'ils fe regardoient comme étant continuellement en préfence de Dieu ;..... qu’ils ne mangeoient gwaprès le coucher du foleil, & qu’il y en avoit beaucoup qui ne mangeoïient qu’une fois en trois jours, ou même en fix jours de temps, Encycl, art, T'hérapeutes, DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 21s L'innocence de la vie du Pandaron répond de la pureté de fa morale. Ce Sage a déja pratiqué avec ferveur, ce qu'il annonce avec zele. Plutarque parle fans doute de ces Philofophes , lorfque cet Ecrivain fi vertueux , : fenfe , fi judicieux , dit « qu’en ces quartiers-là 1l » aufli quelques gens qui font profeflion d’une re » auftere & nue ; hommes facrés & vivant à leurs Lois, » vaquant alla contemplation de Dieu, & fe nourriflant » à moins de frais que Diogene , & n'ayant pas befoin » de biffac. » Je n’ai fait l'éloge que de ceux des Pandarons qui, par choix, embraffent cet état 5 & non de ces jeunes gens que les parens agregent à la vie afcétique. Ces derniers n’ont pas de demeure fixe ; ; ils doivent confer- ver la couleur jaune pour leur ceinture & pour leur langouti. Leur toque eft compofée du poil de différentes bêtes. Ces Pandarons font vœu de ‘chafteté & de pau- vreté : 1ls s'impofent à leur gré le genre de pénitence dans lequel ils doivent pañler leur vie; mais le Pandaron qui choifit lui-même cet état, vit fous le ; joug de l’hy- men, & porte des cheveux, dont l’unique foin confifte à les barbouiller de fiente de vache & de poudre de bois de fandal. Si la chevelure eft longue, 1l en couronne & cou- vre fa tête, en tâchant d’imiter la figure d’une toque(x). Il en ef parmi eux qui , frappés du dogme de la préexiftence du péché, s'impofent des pénitences très- rigides. Jai vu à Courtaloum un partifan de ce fyftême, qui , depuis vingt- cinq ans , n'avoit che de place que pour fatisfare à fes befoins naturels. Cet homme, LA (1) Les Brames fe foumettent quelquefois à la regle des Pandarons : ils re- connoiffent alors un Chef particulier, qui, pour le fpirituel, eft foumis au Grand Brame, Ces Pandarons Brames deffervent les Pagodes avec les Chatrias & les Rafias, qui ont embraflé la même regle, 216 MÉMOIRES d’une figure intéreffante & d’une politefle admirable , ne mangeoit par jour qu'une banane, & ne buvoit qu'un quart de feptier de lait ; 1l étoit per age de $o ans. Ces Pandarons rigoriftes & fataliftes, font plus rares que ceux qui pañlent leur vie à del a connoître la nature & la propriété des végétaux. Ceux - ci font appelés à la Cour des Princes Indiens & Mosols. Ces Souverains les emploient en qualité de Médecins. Les Européens confondent fouvent ces Pandarons avec les Faquirs, Anachoretes Mufulmans. Ces Doëteurs, prefque tous de la feéte d'Al , font divifés en quatre clafles, dont la plus réverée porte le nom de Pyr-Jedda, & la plus fainte , celui de Santon. Le Santon s'efforce de furpañler les Polythéiftes dans tous les exercices de pénitence ; mais ces derniers , plus folitaires , plus fe- queftrés , MOINS exigeans & moins impofteurs , n'ont ni leur audace, ni leur orgueil , ni leur intolérance. En eflet, ces Miniftres Mufulmans , fiers de profefler une religion née dans le fein des armes, propagée par des viétoires , & énorgueillie d’être la feule en Afie qui adore & reconnoiît l’unité de Dieu, exigent des peuples une vénération extrême. Ils fe olifent dans les Palais des Grands , qu’ils rançonnent avec autant d’infolence que de rapacité. Quelquefois fous l’habit de Faquirs & fous les livrées de la mendicité, font cachés des Chefs, qui , ayant efluyé des revers, attendent de leurs intri- gues & des circonftances, l’inftant heureux qui doit les replacer à la tête des armées. L’hypocrifie, la vanité & l'ambition des dévots Mufulmans, font aufli contraires aux vues de la nature & au vrai culte que Dieu exige des hommes , que la foiblefle , la crédulité & lextra- vagance des pénitens Indiens. OBSERVATIONS DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 217 OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES Des années 1781, 1782, & partie de 1783. Par M. DARQUIER.  Y A NT annoncé dans le fecond Volume de mon Journal Aftronomique , que je n’imprimerois plus mes Obfervations en corps d'Ouvrage; mais qu’elles feroient inférées dans nos Volumes à mefure qu’ils paroitroient, j'ai mis en ordre celles que J'ai faites depuis le premier Janvier 1781, époque de la fin de mon Journal ; de maniere qu'il n’y aura pas d'interruption : je les ai réduites dans la même forme que les premieres. Elles confiftent en 116 lieux de la lune ou des planetes ; cinq oppoñitions , favoir , deux de Jupiter | deux de Saturne & une de Mars, outre les éclipfes de lune des occultations d'étoiles, des immerfions ou émerfions des fatellites de Jupiter, & 22 obfervations de la planete d'Herfchell. Tome IF. E e 218 MÉMOIRES Suite des Obfervations Aftronomiques de 1781. Le 30 Janvier 1781. h u LL 01617+ Soleil dE, 4 09,1 Re P 43310 175624 3830 4 TI ‘457 V 4:16 50 ((@ ONE OLIS 62 33 D es M 43042 19 D Jp 4127 À 1835 1124$6- 6S EM Le 31 Janvier. PU 29 317 33 137 L 514 VPN tenC 29 18 $2 111759 B 5444 M $ue: .,8 11124810 29 22,A1V-0r0 FEZI Z 8S in Le 3 Mars. 016$3> Soleil L P 6:19 2 ç 752$ 4$ 1772498) V 6 219 $C 754257 2614 1 B . M 61424 MD 22342 B- 8 I111$47 A VEN E : x 111313: Regulus. 1120$9+> € Le 7 Mars. P 1014 8 É0r5 201222100708 1 07 V 958 6 : 13833 o 2112038 B 15 M 10 911 ANxA429 48! ç 4 4 B24: 105620: A Fi. 123 105742, Regulus. LILAGESE 1? DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, 219 Le 8 Mars. fi f [ZA or$çs7 Le Soleil. TI 458: UE 0] LA [1 e f " + Br anuE TR 2 022 270 OÙ: Vio$s2o Ée 1534849 155033 B EE M 11 6 7 $ 00047 44a10 B4 4 Le 9 Mars. 01643+ Le Soleil. 858 9+ 6% , P'x2 16 44 16810 58 344010 S 63 Verre (026: $C 1682754 31259 B us Miz 038 S SAT AA | 355) MP ie Le 10 Mars. o1$31+ Le Soleil 854165: 8% Eu P 13 042 182 56 ç 42) 1:16, 4 16% Nér24617 252 3 1823919 1$754B 9° Mizss33 6 N39 12 25123 B1: + 02 Le 11 Mars. 823; 65 Re P 135230 Ç 1965335 495946 S 645 V3972ç60012 19636652 $2149 A on M 134724 CON 7 AE ONE PET GE Le 16 Mars, o14 $= Soleil. ua P 182721 27040 20 71.55 38 S 1:76: V181331: > 2702228 274422 À Le M 18 21 44 9 01946 41628 À + o11 + 03 1781 220 MÉMOIRES Le 31 Mars. h F "” O 9.54; Soleil. OT Le F 86 20 84 $4 12 Vo 6r 56 PC 8$ 11 34 M $ 159 $ 2 2$4331 Le 2 Mai. © 140 Soleil. P 73927 Ssr548257 V 73746 CC ? 154 56 34 M 73446 SR 27 11 431; » Bouvier. Le 4 Mai. P 92048 181 $8 48 Vrto soi ke re 3 182 1451 M 91532 6 priprx 102624; «af 10 $6$$ » Bouvier. Le 7 Mar. 113948 «© P 115811: 22419 3 Verx 562641 3 224 36 26 M 115238 AIT 2SNQ RP 1225 16 ZEN VO TS V122329 + Jupiter. M121941 7 231148 16/6.491S 102 272850 B pe 4 S 6 B+ ox — 056 20 V6 US NE 152911B 5% 443 34 B+o « — O01Z 414710S 5%; 2 TT D, 06023 40 14 2 BE cz $437 LceR 12284) 1947 B-0;7 DE L'ACADÈMIE DE TOULOUSE. 221 Le 10 Mar. h L [2 al ns3 Soleil LT 29,190 «© OUT PI PRET PT Pex2%E2, 128: : 2304329 60 $6 29 Viz1018 Cup. $ NAN AL), Mr2/46/22 T2 ALAN NOIRE, «2 Le 11 Mau. 10$12$ Aréture. I11242$5+ « © PRr2 070 2303$20 60$411 Vyi2:$ 54% Jupiter. 1720167 A MUR TES 7 224020 ob ee Le 12 Ma. 1120 36 a © 1146$6- 8 P:12" 23:27 2302735 60 62 ç2 NAT, (1#9% Cr 3 17 LONGUE D rs Mi15733 7 223348 1 922 B-.; OPPOSITION DE JUPITER Du 12 Mai 1781. Erreur moyenne des tables en lon- DÉDUIT. + EAU +13 0 — 340 Ennlitiendes 2 (JUAN, L'ANE : — 10158" Lieu du Soleil le 11 Mai a 12h 1° 55. EMMMTomionte"t A. Je 60 1 amine! Ter ET 2 RENAN of 2 MÉMOIRES Mouvement journalier . . Idem ge Jupiter dans le même in- SEVRES +00: CORIRER 222 Mouvement relatif . Lieu de la Terre le 11 Mai 1781 . Idem de Jupiter corrigé Diftance à l'oppoñition le 11 à 12" 155: ; D'où l’on a l'heure de l’oppoñition TM à Touloufe le 12 à . à Et à Paris à . s Le lieu de l'oppoñition à Avec une latitude géocentrique bo- téale dents utile Le 24 Mai. P:22/94 ED 7. 60204 V235$121 © Vénus. ; M234747 S 2 22064 Le 25 Mai. o 3 $> Soleil Par 620 228 48 $6 Vir 311 + Jupiter. ; M 10 59 46 17 20 $6 33 1196407 7m 114344; Ë Plg359 ‘x ( 49 $8 © V23 548 $ Mercure. M23 220 1 22 430 1° 9 26” 23 18 16 201700 B,,,, O 22 45 À 4 o11 602913 16 $$ 13 À I AAONDE — ] 7 26 23 58 ALL 208Bax 1 SR Ee DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. Le 26 Mai. h Ji "” 0 3137; Soleil OR} in Pr rs? S 228 41 39 Vio$84o + Jupiter. M 10 s$ 24 è 7 204910 1122463 7 pos ob 2312 $7;: SE 5302 V2 0997 dMacuse. M0 627 \ 1 24 O24 Le 27 Mai. P PARIS re RATUSNLS Moblaczens € 12192424 M 24222 3 28 859 104835 ea P 10 5734 è 228 342$ Miro.$4, 7 À Jupiter. Mio5soss $ 7 204218 Le 28 Mai. 10 44 41 (Fe s Pro! sait Cr 22812709 V 1049 37 Ci M 10 46 32 TVLO TS 7 P'23/21724 56 00 36 V231745 $ Mercure. M 23 144$ 1 28 6$ç0o 222 # 60 17 24 16 $3 24 À LTD — 341 = 0590 25 45 22 174950 B,, ; © 59 44 À _ 030 15 44 16 16 57 34 18 058 S 253629 B 60 2$ 57 16 5156 À nt aNoND NE) 27 602413 LOVSONT PATES 1} EG F5 24 27 38 LP: ve M 0 39 S'en 224 MÉMOIRES a! Le 29 Mai. 0 339+ Soleil 0 tr MERE UE ER Ps 8655 + 150 853 263215 S 1647 Moss PC 1502$40 1713 7 B 119 M 53015 4 262846 448218 B— 5: 104045: 8 Priostaee 228 19 $7 602219 Vioa4s $ >» Jupiter. 16484 A... Mio42 7 7 202757 1 717B-0s;; 11 8$$i «Serpent. Le 30 Mar. PA6 271259 \ 1634525 323140 S 16: a ue 164 \a4$r tr 9 Men 205975 M 62232 è $ 10$644 4 947 Be 4 Le 31 Mai. PATATE O ‘ 1766722 39122355 ee V Ai 1771340 44359B ÿŸ7 M 9 16 S° $s 253421 :41480B= 5 ME te AT EN sy P 104000 : 228 613 6019 1 V1io35s58 Crus 164500 À, 4 Mio3318 7 201425 1 6$9B-0;:: 10 $1 57; ? Serpent. 1T IEEE 11, 6 6 NUE Le return. PUS 226 190 $17 461348 ue V 8 020 de ! 19021,27- : 22 10/05 M 75748 'f02207 2 450 B&ns fe DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 225 Mro2232 M 1020 18 TOI 7 AT Pro!22 32 V'roN17 56 M 1015 $4 P 10404171 V1036 4 M 1034 2 10 13 13 10 $9 14 10492 P 121442 V 12104 M12 8 4 Tome IT. Saturne. N Le 2 Juin, 203281 r 203 44 49 6 2518 53 Le 3 Juin. 217,27 3 217 441II 7 10 20 42 22746 3 Jupiter. FETES Le À Juin. 227.39 48 Jupiter. 7 1948 27 23212 $5$ 232 30 27 7 252043 25547 2 è 8 164$ 41 o F LA : 531012 S ,638 9 412 À 5956 5938368 8 12910 À 5956 G.3426-À io 60 142$ 16140124 AN& UC BEA 60 13 2 16 39 DA CE TN SNB 9 6$10 95 D 20 S6kqupA 0 5743 5472 1$446À 5 L 1 5 6447 1 2TAROR2) À LE 13532 B- 036 Ff 170 226 MÉMOIRES OPPOSITION DE SATURNE Par l'obfervation du 4 Juin. Erreur en longitude fouftraétive . — o 11'00 Idem en latitude eur. —— o 36 Lieu du Soleil à midi TM: d Pen IGNG. :. 60e NU RRE ESS F6 US 0 UITS Tdern LE:7 Ne MEN En REG T7 Mouvement journalier . . . . Sr Être Pen de SAtREnE SN MIE UM ANNE 4 42 Mouvement relatif 73,440 20% TU #60 ————— — Lieu de la Terre le 6 à midi . . 8 16 oo 18 Idem de Saturne corrigé . . . 8 16 34 35 Diftance a l’oppofition le 6 à midi. 34 TZ Heure de A MNeS le 6GTMaà is Paris NA UNE 13} 16" 16 Lieu de l'oppoñtion CRETE LUS ETS 9 Latitude géocentrique boréale . . 1 30127 Le 17 Juin. V10204$ Emerfion du fecond Satellite de Jupiter. Le 30 Juin. h 1 LL L o01020+ Soleil Pit ar 02 108 758 20 113% V o3340 € Ven 232346 B_,; M 03652 3 163543 058 9B+4., Sd Z4r Rd Sd Eat mur & DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, 227 Suite du 30 Juin. h 1 “ o ! 17] Q ‘ 1 14937: 12420 O 2224 3 13817 Mere} 211114B, I 41 29 4124430) 102628 B4+ cc 739411) ÿ 1227045738 2 72918.» € 2123031 132629 À 5917 1B2SS S , NC OCR MORE TE PRE 105853 «+ Ophiucus. OU Le 1%. Juiller, O 4$ 24 è 10938 4 201917 03453 + Vénus. 23) TONZ Barr 03816 $. ME NON CREER A I 50 49 :@ Ç 12$ $2 6 22 $0 $6 14018 S Mercure. 2044121B 04 1 43 42 ! AUS TA RL ET TUBAS ES; 82842: 225 535$ 5945 56 818 7: Jupiter. TOUTE 53 AI 821 34 ( 7117489 08 d'ADN 8 32 3? 2262815 631824 S 5° 82134; € ; 2264520 19 753 À 59 825 A 17193048 az A 105458: «Ophiucus. DIR Le 2 Juiller. 01043? Soleil À 9 2747 S 241 25 12 67 200.8, ;,.: 9 16 $9 (( S 2414244 2340 BA hs 9 20 38 ê 8 41444 241 $4 À - 015 938 8 Antares. PAS 102641 « Hercule, 1781 228 o111$: o fo so PÉ?55S O 43 42 AR 3 Phi228 307 Vi121710 Nrr2rez = < P 125048 V 123927 M 124340 kr 11 43 44 11334 11 58 44 P 124041 V 1229 3 M 1233 34 O11$2}+ P o$60oo; V o44 8 M o48 53 LFERE P2%0 35 V 121839 M 1223 28 : Vénus. Vénus. Le $ Juiller. 5 RAS ERA 289 41 289 23 à 9 121429 295 16 30 . Mars. 9 2227 39 Le 7 Juillet. 294 42 41 < Mars. 3 9 215$ 44 Le 9 Juiller. 3 120 O0 $9 PIC T0 294 810 { Mars. 3 9 2123 37 114 46 28" MÉMOIRES 20 56 43 223035 B4cs Le 72 + 027 70 36 59 27 4 AGE S3247ÂÀ +414 70 48 29 2718021, À se EE + 028 + 048 DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, 229 Le 11 Juillet, MASON o1214 Soleil CNT CES Pr22024: 2933221 V' 128,160 Mars. 3 Mir2 7289 9 20$913 Le 12 Juller. 1124135 ce TI 006 T Pri2r1037: 293 14 4 V12 2417 Mars. Mr24754 9 2033 22 OPPOSITION DE Le 12 Juillet 1787. Erreur des tables en longitude . Idem en latitude . TRUE RS Lieu du Soleil le 11 Juillet à 12h 13 9 TM à Touloufe Idem le 12 à 12 7° 54" Mouvement journalier du O Idem de Mars. Mouvement relatif . Lieu de la Terre le 11 Idem de Mars. Diftance à loppofition le 11 711026 27 IAA robe $ 5033 A+ os 711$20 27 42 2$ À 4 028 5 5246 À + r15 MARS + 0° 29° y © 54 3° 19° 52 30 3 20 49 31 Sn 16 19 L4ES1120 PIC LL S CE 230 MÉMOIRES 1781 Heure de l’oppofirion T M à Tou- — loue HEle= Mars abs bia 547 Etats 4906: MEME Ex 6,56? 2 Lieu de l’oppoñition. . . 2109 Fa" 37. 00 Avec une latitude péocentrique ouiitalé de} "111 4 RNMARL EE" S? 52% 00 Le 14 Juillet 1781. h o 1240 Soleil. 111622 cg + Sr ef CONTI e AE A 29237 $ 712600 LE ars. pif Mirs7az $ 9 195920 $S7IGAX ci Le 27 Juiller. PS E6K9 2081227 555469 S 163 Vs 240 n0ic 208 2849 11 47 49 À Pe MS 5202 ZU0 3842106 EL e ? + Serpent double. 1038 Oo À Antinous. POMPES 288 $3 54 72 S40 V 104$ 58: Mars. 283254 A, M1062 o S 9 163743 6 DE NN Le 28 Juillet. 013 8 Soleil P 10 5400 288 39 $2 72 654 V10405$1 Cs 3 2834 8 A M 10 46 s1 11 446 z: Antinous. + 02 9 162519 6 929 AY 5e DE L'ACADÉMIE DÉ TOULOUSE, 23r Le 30 Juiller. 013 45 Soleil. Se à P 8184 2 CA ATNACINUAT SAR VRAIS UE 40 180 2515950 25 5949 À 5e M 81137 8 rifor4 2 #2189) A: + or Le 3 Août. P 12 s 4659 3123535 6657 1 S 638 V115316 > C 312$213 2247 9À 5614 Mi158s7 S 10 9 r11 45$640A. 1 + 22 123523: 6 Verfeau. Le 4 Août. 124620 4 Capricorne. 1510 Pr2 662 320220216227 LE 9 ice V2 4224150 ; AAGL7 21029 020À 55.43 M 12 48 58 10 721014742612 À pré + I Le 79 Aoûe: 012167 Soleil PAS ME S 1I0lN21 4627118 Le, 72 Nh4 sit) < 0$$ 8 21221 À 5416 M 14 5640 FE 2086 710 22321 Le 8 Août. 00412 70 Soleil. 10$$$2 > Antinous. 11 142 «Capricorne. Pis426ç2> 1174 40 7400180 7 V'r53062 002 1142653, 33213 DB 5417 M 1535 23 OME2 9 10 LARMES A LP 4 st 17 1781 53 55 aa: té 9 49 «9 B 554 4321 0: C7 2 Br ris + 15 Ces SE z0 $$ 07 À #57 5343 2 26 14 À o13 +o:t 722018it 154 273634 À 574 417 28A = 56 12 FUME. ON CU Nés 26 $023 À 5531 232 MÉMOIRES Le 23 Août. Rs o 8$2+ Soleil An LE P'E 1247 203 3221 Vi eës7. à C 20349 0 MES 27 6 2$39 4 Le 25 Août. o 820 Soleil PE SET 231 56 33 V 5 856 &C 232 13 47 M 51032 7029112 3% 11 831+ FVerfeau. Le 26 Août. o 8 1: Soleil. Pérez 247 2 9 VOUS 322 247 19 47 M 6 652 8 93439 11 433 6 Verfeau. Le 27 Août. o 742+ Soleil P,:7 Tr 262 36 22 V°'744 "4e GC 262 $4 9 M7, Mia 8 234145 Le 29 Aout. où za, Soleil 2; 9 4° S 293 27 138 V 85946 °C 293 4435 M Ho CE oui 8 34 105238; & Verfeau. 11 7302 4 Capricorne. 1217 $2i Fomauht. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. Le 31 Août. NT o 620 Soleil. M 80 P 1049417 321 1640 l'A CPEES: (@ 3213250 M 10 43 37 TOR 20 27 Le 21 Septembre. Prat mar ê 226 13 36 MMS zou ic 226 Dr 2 Mi, trs S TAROT UTC Le 29 Septembre. MASON S |" Soleil. TOI 22 a Verfeau. P 10 16 44 Ç 3413920 VMhozogms € 3 341 $4 36 M 10 10 36 11 84950 Le 22 Oobre. HI 129 Soleil P 45418 ? 283 17 14 NT she 20" G 283 3S 15 M 44710 ( 9 1200 48 85424; «Pégafe. Le 26 Ofélobre. PuS:6 69: 337 5831 Vaspsareeic 338 13 $4 M 8 94 II 40 $023 828 7: + Verfeau. 83037: Fomauht. 83857 «Pégafe. Tome LI7, 233 HT 2009 7 À 55 34 A4iar A. 28 635348 S 19 42 28 À He D Ce TC RS f62723% 1 1356 11 48 28 s44r 34932 A2 = G 7247260, 281 3281À He $ OA NArE 43 + L HOBLR ANT De 133336 À fi 4 S59À- 46 1781 234 MÉMOIRES Le 27 Octobre. h LA LL 82419 «4 Verfeau. 82648: Fomauht. 835 8 -Pégafe. 84413 +? Verfeau. ARIE 0 Paie P#58222) 249 8/18 s2 3816 16": Do) 7. SEC 3493321 8 420 À 5435 M4 8.5 Le Fr 7 ANR INR 17119 A0 + ot Le 30 Oélobre. P 10 56 28 214614 29708 Ed Var Stan C 225 EU 6 49 03156 Bus M 10 48 52 0.234332 O 957 ALES 1120 7 + des Poiflons. TUE 11241$; «AÂriés. Le 31 Oéobre. E 11372139 2285 8285 7er lire V114$46 &C 331336 142343 B 5 $ HE CU r' PISTES O0 .0 67 270B UE is Le 1°, Novembre. 11$1432 Soleil 924 3 > Pégafe. 111232 « Poiflons. 111640 « Âriés. P 122245:) AS ETC 2410018016 V1230$412) AS \1p0ÿ1941x60.B Le hate 1 M8 1528 DE 37 Le À Novembre. Paso: 851846 1597415 DAS V145844 © 8500 59 275731B 5 M 14 42 34 2253512 434 4B% 1 DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 235 Le 20 Novembre. h g (1 8 76 38 1h « Flèche. Fu9674) 2 S A V 9 935 + Comete. S 300 310 172923 B M 65540 S è Le 27 Novembre. Pire 9 ç MN Mar Comete SHAI021E28),82%6$:8 M 65647 ê Le G Décembre. P 73752 - V 7,32 21: > Comete. 2022640 ,2,6206-B M 724 9 Le 7 Décembre. 73731 V/72226%° Comete 202 301 4. 22520 B M 72335 Le 9 Décembre. P: 648 z V 64037 Comts 3 3034821 04930 B M 63344 Le 28 Décembre. o1914+ Soleil j P 104450; 744232 164$46 S UE Vio2s1o2s € 7459 7 265028 B 5:15 M 1027 $4 21626 1, dau Be te ns 19 1781 à 236 MÉMOIRES Le 30 Décembre. h u “ 12 846 € Gemeaux. 12 16 4$ d Le: MON UT UMR : Pr2% 825: 104 $049 154912 S 1727 'CEEAT Æ 3 1043327 274611 B 5, M 1220 52 202 6207 À 5 ARGUS Le 6 Mai 1732. Ce foir à 10 heures & demie , il a paru une belle aurore boréale ; à 1 1 heures elle étoit très-brillante, & quelqu'un qui ne s'occupe pas d’aftronomie , qui n’en connoiït pas même les termes , a lu , avec la plus grande facilité, le frontifpice des éphémérides de M. de Lalande. L’aurore étoit de l'efpece des rayonnantes, mais tranquille , fes jets paroiïflant peu à peu fur le fond du Ciel , fans paroïtre être lancés. Le fegment obfcur étoit confondu avec les nuages qui bordoient l'horizon; le centre de la plus vive clarté devioit à l’oueft d’environ 20° ; l'amplitude ou la corde de l'arc lumineux, étoit de près de 100° : elle étoit vers fa fin à minuit. Un fort vent d’oueft, accompagné d'une pluie abondante, régnoit depuis quelques jours. Le 27 Mai. Viosz1is Immerfon du premier Satellite. Le 13 Juin. 1159 17 Soleil. P 12 4654 263 4642 663051 Viz 545 ç Jupiter. 3 225721À ,.: M12 527 8 241622 02$19 B_ 4 Per 2228 26811 3 6$ 53 32 V 122320 diet 2219 S9 À Li Mi223%:2 }) 8:28 1927, 1072248: 123647+ d> DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 237 Le 14 Juin. h 1, [24 11$91$; Soleil DIET AS TN 10 1248000 V1034 1 Immerfon du troifieme Satellite. BHO 2; 263 38 30 66 3029 VTT #3 Cie. $ 22$659AÀ,,, M 1200 5$$ 8 24 848 02316 13 RME T PM2rO T2 268 6 6 655337 Vizi8 sr € Sarume. 2220 4 M 1218 42 22 d > 2 OPPOSTFTONMDE NUPITER II $ 8 281427 1: ATH 6; Du 14 Juin 1782. Erreur des tables en longitude . NAT Jdemien latitudes ce: 0ui8t 4, 2 MEN 20 Lieu du Soleil le 14 Juin à 12h © 55 TM à Touloufe . . . . 2230 53 59 L Idem le 15 à 11" 56° 32". . . 2 24 si S Mouvement journalier . . . . S7 Idem de Jupiter obfervé. . . . 732 Mouvement relate. 5 4. . EH 4.38 ” LieutderlarTerre le ri, .! .\ . . $ 29055050 Idem de Jupiter corrigé. . . . 8 24 8 34 Diftance à l’oppoñition . . . . © 14 35 1782 1782 238 MÉMOIRES D'où l’ontire l'heure de l’oppofition Je 14 Juin TM à Touloufe . . . Le lieu de l’oppofñition à Latitude géocentrique BW ss Le 35 Juin. h P un Ç 3 140 39 44 V 346 22 € 140 56 $ M 34628 201 AIR 101$ 2 em 102ç11 .* Ophiucus. 103844 Antares. 111957} »Ophiucus. 11 30 40 € Pir$s54 ? 263 29 49 Vir5627 Ç Jupiter. M 1:56 32 8 24 00 44 PAANS STE 268 128 Vi21431 © Saturne. M 12 14 36 3 8 281021 Le 16 Juin. 101II 4 em 1026 12 g 103417 Antares. 112641 COphiucus. Ph SZ 268202 Viriçregs $ Jupiter. 3 Mir$2 3 8 235321 P-r2 94012 S 267 56 42 Vizio 3 > Saturne. Mina tome À (828 556 17h26" 55" 8° 24 6 52 0 24 39 14 00 20 S Re 19 42 23 B dr Aï1Ç$3 B+ :3 1Z 66 3000 226 GO ANLE SE 02324 B-::3 655333 222000 À _,..s 17178 04e 6630 3 Ne EE D: DER 0212128 B- 118 65 53 33 222000 1° 71 A 0 DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE, Le 17 Juin. ACTA RON F7, SPRONEERE 10/22 E25 © 1030177: Antares. 112223 €Ophiucus. P. 1146 $x 7. Mix 470$ Tupiter. Mir4734 S 8 23 45 46 DT 422) 267 $200 655355 Mirz as € au 8 M 12. 6 6 28 LYS 239 263 13 26 6630 12 22 $642 À — 710 O 22 32 BB, 49 22 20 22 10 $7 1 GA AUS OPPOSITIONLDELSATURNE Du 18 Juin 1782. Erreur des tables en pre Idem en latitude . Lieu du Soleil le 17 Juin à er 6 6" TM à Touloufe LA Taem le-z9 à 11° 57 54". Mouvement dans l'intervalle . Lieu de Saturne corrigé le 17 Juin à la même heure . .. 828 1 351 Idem le 19 8 27 52 44) Mouvement relatif . Lieu de la Terre le We, Juin à L pare de l’obfervation . Idem de Jupiter corrigé Diftance a loppofition . ni 0e 7 2° 26° 45 53 2 28:40 »2 1782 1782 240 MÉMOIRES D'où l’on a l’heure de l’oppofition le 18 Juin TM à Touloufe . . . 17h 07" 46" En . # 27° 56 9 Avec une latitude péocentrique B. ENG 47 Le 19 Juin. nr Y15 oooo 8 Soleil 10 14 16 cm 102220 Antares. 11144$ COphiucus. LETTRES Pr123747:) 262 5638 662912 V113758 , Jupiter. 3 22 $$ 42 ARE M 113354 \ 8 2330412 .02246B-;:6 P.rn<647e ? Ç 267 4224 6$ 532$ V 1156 58 : > Saturne. 2 DOTE NA ler 1'60BE cz Le 15 Septembre. 1148653: Soleil. Prob re ç 18129 58 434 V o32z0 + Mercure. 02044 Loi M o1718 \ 6.548242 PRE Ar Le 16 Septembre. 114837 Soleil. P 01323 182 55 38 43 5953 NTo2asr2e Mereure SOA M o2929 VS L 7 MER IS ARE Le 1°: Oétobre. J'ai apperçu à 7" ; , une aurore boréale rayonnante au nord-oueft , fous la grande Ourfe ; elle occupoit tout l'efpace nn ÈS DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 2417 Suite du 1°. Oobre. l'efpace compris entre la Chevre à lorient, & Ar@ture à l'occident. À 7h :, elle étoit médiocrement lumineufe fans rayons. A 7h, elle augmente de lumiere, mais refte toujours tranquille & fans mouvement. Le centre de la plus grande clarté étoit à l’oueft à 45° du nord. À 8" 20 , elle eft très-brillante , & les objets fe voyant très-diftinétement. À o", elle diminue, & a fini à 9h ?. Le 19 Oétobre. h ! LL 113743: Soleil PR UT LT PRES 22 264 38 18 66 $3 24 V 40040 Jupiter. 3 22 VON ONA TE M 24539 8729 4390 © 4rABaa4 Le 11 Janvier 1783. o 7$o: Soleil. P 64759 ? 331720 273447 1 55 Mn6'aoù 2e C 323255 F6 38 55 B' 5450 M + an PU 642 25 ll SSUrIBL 101740 «Orion. RE 114921: gpetit Chien. Le 9 Février. P 6:12 8 Siodnlzo AGIR ARC APAC 531656 234327 B 57 Maésr2tr7 2064242004 24%221B12 ïe 1e : — 18 CHASSE Alcyone, Les nuages ont empêché d’obferver OMNSTOE Sirius. loccultation des Pléiades, Tome IT, HR 1782 1783 242 MÉMOIRES Le 10 Février. h LL LLA 61046 Alcyone. 6122$ . Atlas. P 7 D u6 cé dira 17 27 AU 1449 Vu6e7 Sec 662549 263844 B 57 M 7 148 2 85847 453,3 B— 1 Le 17 Mars. Prra6?e 167 4 6 3716 2 nue V 1118 18 Le 3 1671940 63844B 7% M 112643 HAN EO T6 Us DE 114338 ‘à la patte du Lion. mue Le «8 Mars. OBsERVATION de l'éclipfe de Lune avec la lunette de 42 pouces achromatique. TV. 737 40 ’éclipfe commence. 73815 Elle eft certainement commencée. 7 39 5° Grimaldus à l'ombre. 74110 dleft dans l'ombre. 7 49 20 Gaffendus à l'ombre. 75150 Ariftarcus à l'ombre. 75220 Keplerus à l'ombre. 7 840 Copernic à l'ombre. S 120 Idem dans l'ombre. 8 4oo Thyco à l'ombre. 8! s'4otmcA moitié. 8 615 Tout-à-fait dans l'ombre. 811 $ Plato à l'ombre. 8121$ En entier dans l'ombre. DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 243 Suite du 18 Mars. 1753 Ve = = ‘ “1 h 8184$ Manilius à l'ombre. 83035 L'ombre à mare imbrium. 8 3240 À mare crilium. 83825 Immerfon totale. 102020 Commencement de l’émerfon. 102220 Emerlion de Grimaldy. 102350 Hors de l'ombre. 103010 Gañlendus la rafe. 1022, $ Ariftarcus , idem. 103425 Keplerus rafe l'ombre, 10412$ Copernic hors de l'ombre. 104310 L'ombre à Thyco. 10 49 20 Idem à Plato. 10$03$ Dehors. 10$94$ Manilius à l'ombre. 112030 Fin de l’éclipfe. Le temps a été trés-favorable pour l’obfervation, & l’obfcurité a été bien marquée. Pendant le milieu de l'écipfe , la courbure de l'ombre étoit irréguliere | & tranchoit aflez bien fur la partie éclairée: On vit, lors de la plus grande obfcurité , cinq ou fix petites étoiles que la Lune avoit occulté. LA même éclipfé obfervée par M. François Darguier , / / e7i V avec un télefcope à réfleition de 18 pouces , de Short. 738314 Commencement. 74120 Grimaldus dans l'ombre, 74910 Gaflendus rafe l'ombre. 75020 Idem dans l'ombre. 75820 Copernic rafe l'ombre. 244 MÉMOIRES Suite du 18 Mars. Lu LL h 8 410 Thyco rafe l'ombre. 1020 o L'émerfion commence. 10223 Emerfion de Grimaldy. 103030. Îdem de Gafñlendus. 103500 Îdem de Kepler. 104310 Idem de Thyco. LA pofition de la fenêtre où il obférvoit, ne lui a pas permis . d’obferver d'autre phafe. OATAZ Soleil. 74229 Procyon. 113944+ * à la patte du Lyon. 1$ 41 Ph20222; 179 NAN AA NTS A SNA Vi2 549 6 1793825 o o1$À 6 M12135$ $ 294018 010 oO À—053 — 015$ Le 19 Mars. o 725% Soleil P 125929 A Mimi dei V1265214 CD 1921014 649 4 À 5835 Mo 67 RO MT ON Lt TE Le 16 Mai. 1153 42 Soleil V 1128 6 Immerfon de 7 m derriere € Pos | 8 è 13648 ç0 692026 I 5,6 Niro 3 2363034 243343 À 5! M 12 855 7 2946 18 43242 À 018 Vi1243 $ Emerfionderm he 4 DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 24$ h LA “1 11 $2 14 g >> É 120$ Vire Ur ra € Satume M 12 5 26 9 12114$ 0 Fo [} [LA o ! “ 28 2656 665210 22317 A0... OAI = 37 OPPOSITION DE SATURNE Du 1°. Juillet 17383. Erreur des ru en ee Idem en latitude . Lieu du Soleil le 30 Juin à hEAs s' 26" TM à Toul 3 Idem le 12 même heure Mouvement de Saturne dans le même intervalle Mouvement relatif . Lieu de la Terre le 30 Idem de Saturne . Diftance à l’oppofition . D'où l’on a l’heure de l’oppofition le 30 Juin TM à Touloufe En . Avec une ide, péocentrique 1783 246 MÉMOIRES 1783 Le 31 Juiller. Ta dé 455 Emerfion du quatrieme Satellite de Jupiter. Le'2 Aoxt. 91733 Emerfon du premier Satellite. | Le 9 Août. ; 11115$ Immerfon du premier Satellite. Le 15 Aoûr. 10 4246 Emerfon du fecond Satellite. Le 16 Aott. ‘13 919 Emerfion du premier Satellite. Le 9 Septembre. 75437 Emerfion du fecond Satellite. Le 9 Novembre. TE Immerfion d’Alcyone derriere la Lune. 856 Emerfon de la même. Le 29 Novembre. 92813; Occultationtrès-exa@e de : du Capricorne. Le G Décembre. P 102027 494949 20 53 551 ii Vio2ss8 € so 615$ 231614B 551 M 10 17 36 1 2346 9 44117 B-04 — 018 103$4$ Alcyone. 10737 2440, Atlas: DE L'ACADÉMIE DE TOULOUSE. 247 OBSERVATIONS de la Planete l'Herfchell, feconde fuite. 128200:M. AD. D:3BANWEongit, .\ Latit: Septembre. h , s ART SAN97 55.27 LU o 4 LU LL u [LL 23 30160 SPELSES, O7 49 2 MAN 0 116 029 20/10 SI 7ALONIONC E7 2$ 29 113$ 97 $852 233347 371844 o 17 56 O&obre. 12 470082 66023 3426 93 7 29 1908 ç0 12 1043198401. 2933152137123 (6 O TOUS 16NMO 1 980329 23240 3722 5810 1922 180102209802 5002334106 3 71210! 0 18 22 TJ TONI ONNZ 27) 23 24III 27 2000 O0 20 30 935 975436 233$ 7 371438 018 52 Décembre. TNA A2 AT N23118 40013 6) 8 3 Moro SUN oo 27,28 4103 616 8.0 19,48 FOMNONTNOGNE2 60 22129042 [311$ AE 291 0 19002 20 RON 200224006096 2450 jOMYIT3 1783 Janvier. 4 7 2 942456 2341656 34 233 01739 TOMNNÉNANO 47 (5022 45/2103 42328 02144 20. $56 944257 234342 34189 0 19 56 22000 490048 22 43525) 34,14 40) 0 19 26 15 $36 941532 2343652 33 535$ ©1918 Ka $ 32 941612 2344 7 335330 O193$ Vrlle 2 9 6 9350 $ 234346 333036 ©1834 3 9 2 93$13$ 234354 33319$9 © 18 34 4 858 935235 234353 333256 0184$ Fin du fecond Volume. Lu, À ’ Le L: e 01.