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HISTOIRE

NATURELLE

DES MINÉRAUX.

Par M, le Comte de B Vffon, Intendant du Jardin & du Cabinet du Roi, de V Académie Fraîîçoife , de celle des Sciettces , b'c.

Tome Troifième.

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TABLE DES ARTICLES

Contenus dans ce Volume.

MJ E l'Argent Page i

Du Cuivre 50

De l'Étain 123

Du Plomb 164.

Du AIercure 211

De l'Antimoine 271

Du B ISMUTH z%^

Du Zinc 295

De la Platine 316

Du Cobalt 359'

Du Nickel 377

De la Mangan èse 385

De l'Arsenic 393

Des Cimens de nature 413

Des Cristallisations 425

Des Stalactites vitreuses 435

Des Stalactites cnflaUlfces du Quarti-aiftal de Roche , 440

Améthyste 4^7

Cristaux-topazes 47^

Chrysolite 475

Aigu E-MARiNE 47^

Des Stalactites criflallifécs du Feld-fpath. 480

Saphir d'Eau 4^3

Feld-Spath de Russie ou Pierre de Labrado R 4^5

ΠIL DE Ch AT. . 487

(El L DE Poisson 489

Œil de Loup 491

aventu ri n e 492

Opale 493

Pierres éri s ées \ 500

Des Stalactites crïflallïfêes du Sclwd, . . 502

Emeraude 503

R I dot 523

Saphir du Brésil 525

Œil de Chat noir ou noirâtre 526

BÉRYL 528

Topaze èr Rubis du Brésil 530

Topaze de Saxe 536

G RE N AT r3o

HyAC INTHE 5 53

tou r malin e 559

Pierres de Croix 567

Des Stalactites vitreuses non cri flallï fées. 569

A G AT ES 577

Cornaline 585

Sardo IN E 588

Frase 589

Onyx ^ 591

Calcédoine 595

Pje RRE Hydrophane , Oculus mundi . 598

PÉTRO-SILEX. 605

Arrangement méthodique des Minéraux.. 609

HISTOIRE

HISTOIRE

NATURELLE

DES MINÉRAUX.

DE L A R G E N T.

IN ous avons dit que dans la nature primitive , i'Argent & l'Or n'ont fait généralement qu'une mafle commune, toujours compofce de l'un & l'autre de ces métaux, qui même ne font jamais complètement féparés , mais feulement atténués , divifés parles agens extérieurs, & réduits en atomes fi petits,, que l'or s'eft trouvé d'un côté , & a laifTc de l'autre la plus grande partie de l'argent ; mais malgré cette féparation d'autant plus natu- relle qu'elle efl plus mécanique, nulle part on n'a trouvé de l'or exempt d'argent, ni d'argent qui ne contînt un peu d*or. Pour la Nature , ces deux métaux font du même Minéraux , Tome IIL A

2 Histoire Natup elle

ordre, &l elle les a cloués de plufieurs attributs communs; car quoique leur denfiié foit très-différente (û) , leurs autres propriétés eflentielles font les mêmes ; ils font également inaltérables , & prefque indeflrucflibles , l'un & l'autre peuvent fubir i'a6tion de tous les élémens fans en être altérés ; tous deux fe fondent &. fe fubliment à peu-près au même degré de feu (b) ; ils n'y perdent

(û) « Un pied cube d'argent pèfe 720 livres ; un pied cube d'or, 5j 1 348 livres. Le premier ne perd dans l'eau qu'un onzième de fon poids, & l'autre entre un dix-neuvième & un vingtième ». Diélionnaire de Chimie , articles de l'Or Ù" de l'Argent. J'obferverai que ces propor- tions ne font pas exades, car en fuppofant que l'or perde un dix- neuvième & demi de fon poids , & que l'argent ne peiàe qu'un onzième, fi le pied cube d'or pèfe i 348 livres , le pied cube d'argent doit pefer 'jCo livres feize trentièmes. M. Bomare , dans fon Didion- naire d'Hifloire Naturelle , dit que le pouce cube d'argent pèfe 6 onces 5 gros 26 grains, ce qui ne feroit qu'un peii plus de 7 i 8 livres le pied cube, tandis que dans fa Minéralogie, tome II , page 2 j 0 , il dit que le pied cube d'argent pèfe i 1 523 onces , ce qui fait 720 iivres 3 onces pour le pied cube. Les eflimations données par M. Briffbn font plus jufles ; le pied cube d'or à 24 karats , fondu & non battu pèfe, félon lui , 1 348 livres i once 41 grains, & le pied cube d'or à 24 karats , fondu & battu pèfe 1355 livres 5 onces 60 grains; le pied cube d'argent à 12 deniers, fondu & non battu, pèfe 733 iivres 3 onces i gros 52 grains, & le pied cube du même argent à J2 deniers, c'eft-à-dire, aufll pur qu'il eft pofllble , pèfe, lorfqu'il €ft forgé ou battu ,735 livres 1 i onces 7 gros 43 grains.

(b) Nota. On eft alTuré de cette fublimation de l'or & de l'argent, non-feulement par mes expériences au miroir ardent, mais auITj par Ja quantité que l'on en recueille dans les fuies des fourneaux d'affinage des Monnoies.

DES Minéraux, 3

guère plus l'un que l'autre (c) ; ils réfiftent à toute fa violence, fans fe convertir en chaux (d); tous deux ont aulTi plus de du(flilité que tous les autres métaux ; (èu- iement l'argent plus foible en denfité & moins compa6le que l'or , ne peut prendre autant d'extenfion fe) ; &. de

(c) Kunckel ayant tenu de i'or & de l'argent pendant quelques femaines en fufion , afl'ure que i'or n'avoit rien perdu de Ton poids ; mais il avoue que l'argent avoit perdu quelques grains. Il a mal-à- propos oublié de dire fur quelle quantité.

(d) L'argent tenu au foyer d'un miroir ardent , couvre comme l'or d'une pellicule vitreufe ; mais M. Macquer qui a fait cette expé- rience , avoue qu'on n'efl pas encore afluré fi cette vitrification pro- vient des métaux, ou de la poufTière de l'air. Diâionnaire de Chimie » article Argent,

(e ) « Un fil d'argent d'un dixième de pouce de diamètre , ne fou- tient, avant de rompre, qu'un poids de 270 livres, au lieu qu'un « pareil fil d'or foutient 500 livres. . . On peut réduire un grain « d'argent en une lame de trois aunes, c'efl-à-dire de 126 pouces « de longueur fur 2 pouces de largeur , ce qui fait une étendue de « 2 5 2 pouces carrés , & dès-lors avec une once d'argent , c'eft-à- « dire 576 grains, on pourroit couvrir un efpace de 504 pieds <c carrés , Expériences de Mujfchenbroek. » Nota. Il y a certainement ici une faute d'impreflion qui tombe fur les mots deux pouces de larcreur, ce fil d'argent n'avoit en effet que 2 lignes & non pas 2 pouces, & par conféquent 26 pouces carrés d'étendue, au lieu de 126; d'après quoi l'on voit que 576 grains ou i once d'argent, ne peuvent en effet s'étendre que fur 104 & non pas fur 504 pieds carrés, <Sc c'eft encore beaucoup plus que la denfité de ce métal ne paroît l'indiquer , puifqu'une once d'or ne s'étend que fur 106 pieds carrés; dès-lors, en prenant ces deux faits pour vrais , la dudilité de l'argent eft prefque aulTi grande que celle de

A ij

4 Histoire Naturelle

même, quoiqu'il ne foit pas fufceptible d'une véritable rouille par Jes imprefTions de i'air & de l'eau, il oppofe moins de réfiflance à l'adion des acides, & n'exige pas , comme l'or , la réunion de deux puilfances aétives pour entrer en difTolution ; le foie de foufre le noircit & le rend aigre & cafTant ; l'argent peut donc être attaqué dans le fein de la terre plus fortement, & bien plus fréquemment que l'or , & c'eft par cette raifon que l'on trouve affez communément de l'argent minéraiifé (f), tandis qu'il eft extrêmement rare de trouver l'or dans cet état d'altération ou de minéralifation.

L'argent, quoiqu'un peu plus fufible que l'or, eft

l'or, quoique fa denfité & fa ténacité foient beaucoup moindres. IJ y a auiïî toute apparence qu'Alphonfe Barba fe trompe beaucoup en difant que l'or eft cinq fois plus dudile que l'argent; il aflure qu'une once d'argent s'étend en un fil de 2400 aunes de longueur; que cette longueur peut être couverte par 6 grains & demi d'or , & qu'on peut dilater l'or au point qu'une once de ce métal cou- vrira plus de dix arpens de terre. (Métallurgie d'Alphovfe Barba, tome I , page 1 0 2 J.

(f) te On rencontre de l'argent natif en rameaux , entrelafics & >■> comprimés , quelquefois à la fuperficie des gangues fpathiques & » quartzeufes ; on en trouve de crifîallifé en cubes, il y en a en » pointes ou filets qui provient de la décompofition des mines » d'argent rouges ou vitreuies , & quelquefois des mines d'argent » grifes , &c. Il eft aflez ordinaire de trouver fous cet argent en 35 filets des portions plus ou moins fenfibles de lamine fulfureufe, à la décompofition de laquelle il doit fon origine ». Lettres de M. Demejle à Al. Bernard , tome II , page ^j" o.

DES Minéraux. 5

cependant un peu plus dur & plus fonore (g) ; le blanc éclatant de fa furface fe ternit, <Sc même fe noircit, dès qu'elle efl expofée aux vapeurs des matières inflammables, telles que celles du foufre , du charbon , & à la fumée des fubftances animales ; fi même il fubit long - temps i'impreflion de ces vapeurs fulfureufès, il fe minéralife, & devient femblable à la mine que Ton connoît fous le nom ^argent vitré.

Les trois propriétés communes à Tor & à Targent qu'on a toujours regardés comme les feuls métaux parfaits , font la dudilité , la fixité au feu & Tinaltéra- bilité à l'air & dans Teau. Par toutes les autres qualités l'argent diffère de l'or , & peut foufîrir des changemens & des altérations auxquels ce premier métal n'eft pas fujet. On trouve, à la vérité, de l'argent qui, comme Tor, n'efl point minéralife, mais c'eft proportionnellement en bien moindre quantité: car dans iès mines primor- diales, l'argent, toujours allié d'un peu d'or, eft très- fbuvent mélangé d'autres matières métalliques, & parti- culièrement de plomb &. de cuivre ; on regarde même comme des mines d'argent, routes celles de plomb ou de cuivre qui contiennent une certaine quantité de ce métal (h); & dans les mines fècondaires produites

(gj Cramer, cité pour ce fait dans le Didionnaire de Chimie; article de /'Argent.

(h) La plupart des mines d'argent de Hongrie , ne font que des, mines de cuivre tenant argent, dont ]es plus riches ont donné i j

6 Histoire Natu relle

par la fliilation èi. le dépôt des eaux, l'argent fe trouve fou\'ent attaqué par les Tels de la terre, & fe prcfente dans l'état de minéralifation fous différentes formes : on peut voir par les liiles des Nomenclateurs en minéralogie, &. particulièrement par celle que donne Vallérius , combien ces formes font variées , puifqu'il en compte dix fortes principales, & quarante - neuf

ou 20 marcs d'argent par quintal <5c beaucoup plus de cuivre ; « 011 » fe'pare ces métaux, dit M. de Morveau , par les procédés fui vans. »Dans un four conftruit exprès pour fe rendre maître du degré » de feu , on arrange l'un à côté de l'autre les tourteaux de cuivre noir » tenant argent, auxquels on a mêlé environ un quart de plomb, fuivant « la quantité d'argent que tient la mafîè de cuivre ; on met alors le » feu dans le four, on place des charbons jufque fur les tourteaux ; ces pièces s'affaiflent, le plomb qui fe fond plus aifément que le » cuivre & qui a plus d'affinité avec l'argent, s'en charge & s'écoule M à travers les pores du cuivre , tandis qu'il eft encore folide ; le plomb » & l'argent fe réuniffent dans la partie inférieure des plaques de fer ; » on raffemble tout le plomb riche en argent, au moyen d'un fécond ïi feu un peu plus fort l'on fait rejfuer la mafle de cuivre ; il eft M aifé après cela de paffer cet argent à la coupelle , de refondre le cuivre » en lingots , & par-là la mine fe trouve épurée de tout ce qu'elle » contenoit fans aucune perte.

« Lorfque le plomb contient de l'argent, on coupelle en grand » le plomb provenant de la première fonte , & on le convertit en M litarge fur un foyer fait de cendres lefFivées ; on lui donne un fécond j> affinage dans de vraies coupelles , & les débris de ces vaifTeaux , » ainfi que des fourneaux , & même litarge qui ne feroit pas reçue M dans le commerce , font remis au fourneau pour en revivifier le plomb î>. Élémens de Chimie, par M. de Morveau, tome I, pages 2^0

D E s M J N É R AU X, 7

variétés dans ces dix fortes ; je dois cependant obfèrver qu'ici comme dans tout autre travail des Nomen- clateurs, il y a toujours beaucoup plus de noms que de chofes.

Dans la plupart des mines fecondaires, l'argent fe préfente en forme de minerai pyriteux , c'eft-à-dire , mêlé & pénétré des principes du foufre, ou bien altéré par le foie de foufre , &. quelquefois par l'arfenic (i).

L'acide nitreux difîbut l'argent plus puiiTamment qu'aucun autre ; l'acide vitriolique le précipite de cette diflblution, & forme avec lui de très-petits criftaux qu'on pourroit appeler du vitriol d'argent: l'acide marin qui le diffout auffi , en fait des criftaux plus gros dont la maffe réunie par la fufion fe nomme argent corné ^ parce qu'il efl à demi-tranfparcnt comme de la corne.

La Nature a produit en quelques endroits de l'argent

(i ) « La mine d'argent rouge eft minéralifée par l'arfenic & le foufre ; elle eft d'un rouge plus ou moins vif, tantôt tranfparente « comme un rubis , tantôt opaque & plus ou moins obfcure ; elle « eft criftallifée de plufieurs manières , la plus ordinaire efl en prifmes « hexaèdres , terminés par des pyramides obtufes ». Lettres de AI. Demejle y tome II , page -^/j. Nota. J'obferverai que c'efi: à cette mine qu'il faut rapporter la féconde variété que M. Demefle a rap- portée à la mine d'argent vitreux, puifqu'il dit lui-même, que ce n'efl qu'une modification de la mine d'argent rouge , & que cette mine vitreufe contient encore un peu d'arfenic; qu'elle s'égraine fous le couteau , loin de s'y couper. Voye-^ idem, page ^^ (i.

8 Histoire Natu relle

fous cette forme , on en trouve en Hongrie , en Bolième & en Saxe , il y a des mines qui offrent à la fois l'argent natif, l'argent rouge, l'argent vitré à. l'argent corné (k): lorfque cette dernière mine n'efl point altérée, elle eft demi - tranfparente & d'un gris - jaunâtre ; mais fi elle a été attaquée par des vapeurs fulfureufes ou par le foie de foufre , elle devient opaque & d'une couleur brune; l'argent minéralifé par l'acide marin, fe coupe prefque aufTi facilement que de la cire; dans cet état il efl très-fufible, une partie fe volatilife à un certain degré de feu, ainfi que Targent corné fait artificiellement, & l'autre partie qui ne s'efl point volatilifée fe revivifie très-promptement (IJ.

Le foufre difTout l'argent par la fufion & le réduit en une maffe de couleur grife , 6l cette maffe reffemble

(k) Les mines riches de Saint " André njherg ^ font comporees d'argent natif ou vierge , de mine d'argent rouge , & de mine d'argent vitré : on vend fur le pied de la taxe ou évaluation , ce qu'on trouve d'argent vierge & fans mélange ; ou bien on le fait imbiber dans le plomb d'un affinage. Comme ces fortes de mines riches fe trouvent aufli fort fouvent mêlées avec des mines ordinaires , & qu'un quintal de ce mélange contient jufqu'à cinquante marcs d'argent , on fe contente de piler ces fortes de mines à (qc ^ &. on les fond enfuite crues ou fans les griller. ..... A JoachimJIal en Bohème,

on trouve de temps en temps parmi les mines, des lamines d'argent rouge, & de l'argent vierge. Traité de la fonte des mines de Schlutter, traduit par M. Hellot, tome II , in-^' pages 2j^ & 2 () 6 .

(IJ Lettres de M. Demefle , tome II, page 4^2,

beaucoup

D E s M I N L n AU X, e>

beaucoup à la mine d'argent vitré, qui, comme celle de l'argent corné, efl moins dure que ce métal, & peut fe couper au couteau (l). L'or ne fubit aucun de ces changemens; on ne doit donc pas être étonné qu'on le trouve fi rarement fous une forme minéralifée, & qu'au contraire dans toutes les mines de féconde formation , les eaux & les fëls de la terre ont exercé leur aétion, l'argent fe préfente dans diiîérens états de minéralifation & fous des formes plus ou moins altérées ; il doit même être fouvent mêlé de plufieurs matières étrangères métalliques ou terreufes , tandis que dans fon état primordial il n'eft allié qu'avec l'or, ou mêlé de cuivre & de plomb ; ces trois métaux font ceux avec lefquels l'argent paroît avoir le plus d'affinité ; ce font du moins ceux avec lefquels il fe trouve plus fouvent uni dans fbn état déminerai (m) ; il efl bien plus rare de trouver

(l) Élëmens de Chimie , par M. de Morveau, tome I , page 2l^^<,

(m) m. La mine d'argent grife ou blanche, n'efl:, dit M. Demefle, qu'une mine de cuivre tenant argent ». Cette aflertion efl trop gé- nérale , puifque dans le nombre des mines d'argent grifes , il y a peut-être plus 'de mines de ploinb que de cuivre tenant argent. « Il y a de ces mines grifes & blanches, continue- t- il, qui font d'un* gris - clair & brillant , répandues en petites maflfes lamelleules, «c rarement bien diAindes dans les gangues quartzeufes , fouvent u mêlées de pyrites aurifères; dans les mines de Hongrie, on en tire •« 2,0 à 2. j marcs d'argent par quintài «. Lettra de M, Demejle, tome II , -page ^42.

Minéraux, Tome II L B

lo Histoire Naturelle

i'argent uni avec le mercure, quoiqu'il ait aufTi avec ce fluide métallique une affinité très-marquée.

Suivant M. Geller, qui a fait un grand travail fur l'alliage des métaux &. des demi-métaux, celui de l'or avec l'argent n'augmente que très - peu en pefanteur fpécitique ; il n'y a donc que peu ou point de péné- tration entre ces deux métaux fondus enfèmble ; mais dans l'alliage de l'argent avec le cuivre, qu'on peut faire de même en toute proportion , le compofé de ces deux métaux devient fpéciiiquement plus pefant, tandis que l'alliage du cuivre avec l'or l'efl fenfiblement moins; ainfi dans l'alliage de l'argent & du cuivre, le volume diminue & la maffe fe rcfTerre, au lieu que le volume augmente par l'extenlion de la maffe dans celui de l'or & du cuivre. Au relie , le mélange du cuivre rend également l'argent & l'or plus fonores & plus durs , fans diminuer tle beaucoup leur duétilité ; on prétend même qu'il peut la leur conferver lorfqu'on ne le mêle qu'en petite quantité , & qu'il défend ces métaux contre les vapeurs du charb.on qui, félon nos Chimifles, en attaquent & diminuent la qualité dudlile; cependant, comme nous l'avons déjà remarqué à l'article de. l'or, on ne s'aperçoit guère de cette diminution de dudilité caufée par la vapeur du charbon; car il efl d'ufage dans les monnoies, lorfque \es creufcts de fer, qui contiennent jufqu'à 2^00 marcs d'argent, font prefque pleins de la matière en fofion , il eft, dis-je, d'ufage

DES Minéraux. h

d'enlever les couvercles de ces creufets pour achever de les remplir de charbon, & d'entretenir la chaleur par de nouveau charbon dont le métal efl: toujours recouvert, fans que l'on remarque aucune diminution de dudilité dans les lames qui rcfultent de cette fonte ('îij ,

L'argent allié avec le plomb ainfi qu'avec l'étain, devient fpécifiquement plus pefant ; mais l'étain enlève à l'argent comme à l'or, fa du6lilité : le plomb entraîne l'argent dans la fufion & le fépare du cuivre ; il a donc plus d'affinité avec l'argent qu'avec le cuivre. M. Geller, & la plupart des Chimifles, après lui, ont dit que le fer s'allioit aulfi très-bien à l'argent : ce fait m'ayant paru douteux , j'ai prié M. de Morveau de le vérifier ; il s'efl affuré par l'expérience qu'il ne fe fait aucune union intime, aucun alliage entre le fer & l'argent, & j'ai vu moi-même, en voulant faire de l'acier damaffé, que ces deux métaux ne peuvent contrarier aucune union.

On fait que tous les métaux imparfaits peuvent ie calciner & fe convertir en une forte de chaux, en \c^ tenant long-temps en fufion, & les agitant de manière que toutes leurs parties fondues préfentent fucceffi- Vement à l'air ; on fait de plus , que tous augmentent de volume & de poids en prenant cet état de chaux.

Nous avons dit <5l répété (o) , que cette augmentation

^ . .^ I

(ïï) Obfervdiion communiquée par M. Tillet , en Avril i y 8 1 ,

(o) Voyez ie Dilcours qui fert d'imrodudioa à l'Hifloire des Miiierauxi

Bij

12 HiSTOi RE Nature LLE

de quantité provenoit uniquement des particules d'air fixées par ie feu, &: réunies à la fubftance du métal qu'elles ne font que mafquer, pui/qu'on peut toujours iuf rendre fon premier ^t en préfentant à cet air fixé quelques matières inflammables avec lefquelles il ait plus d'affinité qu'avec le métal; dans ia combuflion cette matière inflammable dégage l'air fixé , l'enlève , & lailTe par conféquent le métal (bus fa première forme. Tous ies métaux imparfaits & les demi -métaux peuvent ainfi fe convertir en chaux ; mais l'or & l'argent /ont tou- jours refufés à cette efpèce de converfion , parce qu'apparemment ils ont moins d'affinité que les autres avec l'air, & que malgré la fufion qui tient leurs parties divifées , ces mêmes parties ont néanmoins entr'elies encore trop d'adhérence pour que l'air puiffie les féparer & s'y incorporer : & cette réliftancc de l'or & de j'argent à toute aélion de l'air, donne le moyen de purifier ces deux métaux par la feule force du feu, car il ne faut pour les dépouiller de toute autre matière, qu'en agiter la fonte, afin de préfenter à fa furface toutes ks parties des autres matières qui y font contenues, & qui bientôt par leur calcination ou leur combufiion , îaifferont l'or ou Targent feuls en fiifion & fous leur forme métallique. Cette manière de' purifier l'or & i'argent étoit anciennement en ufage , mais on a trouvé une façon plus expéditive en employant le plomb qui, dans la fonte de ces métaux, détruit, ou plutôt fépare

DES Minéraux. ij

& réduit en fcories toutes les autres matières métal- liques (p), dont ils peuvent être mêlés; &: le plomb iui-même fe fcorifiant avec les autres métaux dont il s'cft faifi, il les fépare de Tor & de Targent, les entraîne, ou plutôt les emporte &. s'élève avec eux à la furface de la fonte ils fe calcinent, & fe fcorihent tous en- femble par le contad de l'air, à mefure qu'on remue la matière en fufion, &. qu'on en découvre fucceffive' ment la furface qui ne fe fcorifieroit ni ne fe calcineroit, fi elle n'étoit inceffamment expofée à i'aélion de l'air libre ; il faut donc enlever ou faire écouler ces fcories à mefure qu'elles forment , ce qui fait aifément , parce qu'elles furnagent & furmontent toujours l'or & l'argent en ^{low. cependant on a encore trouvé une manière plus facile de fe débarraffer de ces fcories , en fe fervant de vaiffeaux plats &. évafés qu'on appelle coupelles, &. qui étant faits d'une matière sèclie , poreufè & réfiflante au feu, abforbe dans fes pores les fcories, tant du plomb que des autres minéraux métalliques à mefure qu'elles fe forment , en forte que les coupelles ne retiennent &. ne confervent dans leur capacité exté- rieure, que le métal d'or ou d'argent, qui, par la forte attraction de leurs parties conflituantes , fe forme &

(p) Nota, II n'y a que le ïtx qui , coiiune nous Wyons dit à l'article de l'or, ne fe fcpare pas en entier par le moyen du plomb, il faut, fuivant M. Poerner, y ajouter du bifmuth pour achever de icorifier le fer.

14 Histoire Naturelle

. préfente toujours en une maiïe globuleufè appelée hûuton de fin ; il faut une plus forte clialeur pour tenir ce métal fin en flifion que lorfqu'il étoit encore mêlé de plomb ; car le bouton de fin confolide prefque fabitement au moment que l'or ou l'argent qu'il con- tient, font entièrement puritiés ; on le voit donc tout- à -coup briller de l'éclat métallique, & ce coup de lumière s'appelle coriifcatlon dans l'art de TAfîineur dont nous abrégeons ici les procédés , comme ne tenant pas dire6tement à notre objet.

On a regarde comme argent natif tout celui qu'on trouve dans le fein de la terre fous forme de métal; mais dans ce fens il faut en diflinguer de deux fortes, comme nous l'avons fait pour l'or; la première forte d'argent natif, efl celle qui provient de la ilifion par le feu primitif, & qui fe trouve quelquefois en grands morceaux (q) , mais bien plus fbuvent en filets

(q) « II y a dans le Cabinet du "Roi de Danemarck , deux très- » grands morceaux de mine d'argent, tous deux dans une j?i erre V blanche , plus dure que le w^/Z'/v ( c'efl-à-dire dans du quartz). Le plus grand de ces jnorceaux a cinq jjieds fix pouces de longueur, >»& le fécond quatre pieds, tous deux en forme de folives ; on » eflime qu'il y a trois quarts d'argent , fur un quart de pierre, & le premier morceau pcfe 560 livres m. Journal étranger, mois de juin 17^8.— On aflure que dans le Hartz, on a trouvé un morceau d'argent fi confidérable , qu'étant battu on en fit une table autour de laquelle pouvoient fe tenir vingt- quatre perfonnes. Dïdïomairc 4'Hipïre Naturelle , par Al. de Bomare, article Argent.

DES Minéraux, ij

ou en petites maiïes feuilletées & ramifices clans le quartz Si. autres matières vitreufes ; la féconde forte d'argent natif, eft en grains, en paillettes ou en poudre, c'eft-à-dire, en débris qui proviennent de ces mines primordiales, & qui ont été détachés par les agens extérieurs , ôi entraînés au loin par le mouvement des eaux : ce font ces mêmes débris raflemblés , qui, dans certains lieux, ont formé des mines fecondaires d'argent , fouvent il a changé de forme en fe minéralifant.

L'argent de première formation efl ordinairement incruflé dans le quartz ; fouvent il efl accompagné d'autres métaux &. de matières étrangères en quantité fi confidérable , que les premières fontes , même avec le fecours du plomb, ne fuffifent pas pour le purifier.

Après les mines d'argent natif, les plus riches font celles d'argent corné & d'argent vitré ; ces mines font brunes , noirâtres ou grifes , elles font flexibles , & même celle d'argent corné efl extenfible fous le mar- teau, à peu-pres comme le plomb; les mines d'argent rouge au contraire , ne font pas extenfibles , mais cafTantes ; ces dernières mines font comme leè pre- mières , fort riches en métal.

Nous allons fuivre le même ordre que dans l'article de l'or, pour l'indication des lieux fe trouvent les principales mines d'où l'on tire l'argent. En France on connoifToit affezi anciennement celles des montagnes des

i6 H I STO IRE Naturelle

Vofges ouvertes dès le dixième fiècle (r) , & d'autres dans pluiieurs provinces, comme en Languedoc (f),

en

^r) ce Dès le dixième fiède , il y avoit plus de trente puits de mines » ouverts dans les montagnes des Vofges , depuis les fources de la Mo- 3> Telle jufqu'à celles de ia Sarre; on en tiroit de l'argent <Sc du cuivre : » on a renouvelé avec fuccès , en différentes époques , plufieurs de » ces anciennes mines; loin d'être épuilées^ elles paroifîent encore 5j très-riches. On peut croire que dans toute cette chaîne de mon- » tagnes , tous les rochers renferment également dans leur fein ces » riches minéraux , puifque ces rochers font généralement de la même nature & la plus analogue aux produdions métalliques. Mais pour- quoi offrir aux hommes les vaines «Se cruelles riche/îès que recèle » la terre; les vrais tréfors font fous nos pas; tel qui fauroit ajouter » un grain à chaque épi qui jaunit dans nos champs , feroit à l'œil du Sage un plus beau préfent au monde , que celui qui découvrit le Potofi ». Hïjioire de Lorraine , far JVI. l'Abbé Bexon^ page 64, La mine de Saint- Pierre qui n'eil pas éloignée de Giromagny , prcfente de grands travaux; le minéral ell d'argent mêlé d'un peu de cuivre. . . . Vis-à-vis la mine de Sainte-Barbe , dans la montagne du Balon, il y a un filon de mine d'argent. . . . On connoît auffi deux filons de mine d'argent dans la vallée de Saint -Amarin , celui de Vercholti & celui de Saint- Antoine. Exploitation des mines , par M, de Genfanne : Mémoires des Savons étrangers, tome IV, pages 14.1 «y fuivantes.

(f) Dans le douzième ficelé les mines d'argent du Languedoc étoieiit travaillées très-utilement par les Seigneurs des terres elles fe trou- voient ; toutes ces mines , ainfi que plufieurs autres qui font aban- données , ne font néanmoins pas entièrement épuifées , d'autant plus que les Anciens n'ayant pas l'ufage de la poudre, ne pouvoient pas faire éclater les rochers durs ; ils ne pouvoient que les calciner à force de bois qu'ils arrangeoicm dans ces fouteriains, & auquel ils

meiioiem

\D E s M I A' L R A U X. \j

en Gévaiidan & en Rouergue (t) , dans le Maine & dans

». .^ "

mettoient le feu; & lorfque fe rocher trop dur, ne le brifoit pas après

cette calcination, ils abandonnoient le filon Il paroît aufii par

les Annales de l'abbaye de Villeniagne, &. par d'anciens titres des feig- neurs de Beaucaire, qu'à la fin du quatorzième fiècle, les mines- de France ctoient encore aufîi. riches qu'aucune de l'Europe. Afcmoires de l' Académie des Sciences , année i jj S , fciges i ^ ^ & fiiivdntes, «Sur les montagnes noires en Lancaiedoc , ii y a, dit Coelinr Arcon (en i 66j ), une mine d'argent , à laquelle le feigneur de « Cannelle fit travailler jufqu'à ce qu'elle fût inondée. Il y en a une ce aune à Lanet , dont lept quintaux de minerai donnoient un quintal oc de cuivre & (juatre marcs d'argent; mais au bout de cin"j ans on <c Tabandonna à caufe de la mauvaise odeur. Il y a d'autres filons «5 dans la même montagne; il y a aufli une mine à Davefan, dont te on tiroit par quintal de matières , dix onces d'argent & un peu de « plomb. ... On a fait autrefois de grands tra\aux dans le })ays de « Corbières, pour cultiver des minerais de cuivre, de plomb &: " d'antimoine. . . . On y a trouvé quelques rognons mctalliques de ce fix à fept quintaux chacun, qui donnoient dix onces d'argent par « quintal, avec un peu de plomb & de cuivre w. Barba; yVléiallurgic , tome II, pages 26 S & 2y6.

(l) On voit par les regillres de l'Hàtel-de-vilIe de Ville-franche en Rouergue , qu'il y a eu anciennement des mines d'argent ouvertes aux environs , auxquelles on a travaillé juique dans le leizicme fiècle. Defcrtpt'ion de la France, par Piganiol ; Paris, i y i S , tome IV, page 20 S. Strabon , qui vivoit du temps d'Augufte, dit que les Romains tiroient de l'ar^jent du Gcvaudan & du Rouertrue , & qu'ils creufcrent âu(îx dans les Pyrénées, pour en tirer ce métal aind que l'or. Il ajoute que le pays fitué entre les Pyrénées & les Alpes, avoit fourni beaucoup de ce dernier méial , & que l'or devint plus commun à Rome ajirès la conquête des Gaules. . . . Célar, dans Tes Commentaires, dit que les mines avoieiu été travaillées même avant

Alménmx j Tome II L C

i8 Histoire Naturelle

l'Angoumois (^u) ; ^ nouvellement on en a trouvé en' Dauphinc , qui ont prcfenté d'abord d'affez grandes- richeffcs. M. de Genfànne en a reconnu quelques autres dans le Languedoc (x) ; mais le produit de la plupart

la conquête, ôc il falloit qu'il y eiJt en effet beaucoup" d'or dans les Gaules, vu la quaniitc que Ce(ar eu fit pafier en Italie, & qui y fut vendu à bas prix; ( i 500 petits Teflerces le marc, ce qui ne revient, ielon Budt'e, qu'à 62 livres 10 fous de notre monnuit). Alémoircs de l' Académie des Sciences, année ijj6, p-iges j ^ ^ d/ fuivantes.

(u) Il falloit qu'il y eut autrefois des mines d'or (Se d'argent dans le Maine , puifque l'article LXX de la coutume du Maine , porte que la fortune d'or, trouvée en mine appartient au Roi, & la for- tune d'afgent, pareillement trouvée en mine, au Comte Vicomte de Beaumont, & Baron. Idem, page lyS. Oji a découvert à Montmeroil proche Aiigoulême , une mine d'argent , mais on ne fa pas exploitée. Voyage hijîor'ique de l'Europe ; Pans, j 6 () ^ ^ tome 1, page 8 S.

(x) Au-deffous du château deTournel, on nous a fait voir aupics du moulin qui efl fur le bord de la rivière, un très - beau filon de mine de plomb & argent. Cette mine qui n'a point été touchée mériteroit d'être exploitée, parce que la veine fe fuit très-bien; on y remarque fur la tête qui paroît au jour , de la pyrite mêlée avec de la mine de plomb, lur toute fa longueur, ce qui en carac^érife

l:i bonté Il y a auprès du village de Mataval , un filon de

mine de plomb & argent .... A une demi -lieue de Bahours, on trouve au fond d'uu vallon , une mine de plomb qui rend depuis lept jufqu'à neuf onces d'argent par quintal de minerai ; le filon traverfe le ruifleau & fe prolonge des deux côtés dans l'intérieur, & le long des montagnes oppofées. HiJIoire Naturelle du Languedoc , par M. de Genfmne ^ tome II, pages :i2 , 240 & 24S . . . . Au- deffous de la paroifle de Saint-André, diocèfe d'Uzcs, au lieu appelé

D E s I N É R A U X, 19

de CCS mines ne payeroit pas la dcpenfe de leur travail, & dans un pays comme la France , l'on peut employer les hommes à des travaux vraiment utiles , on feroit un bien réel en défendant ceux de la fouille des mines d'or & d'argent , qui ne peuvent produire qu'une ricliefTe fi6tive & toujours décroiflante.

En Efpagne , la mine de Gnadalcanal dans la Sierra Moraia ou montagne Noire, efl l'une des plus fameufes; elle a été travaillée dès le temps des Romains (y) , enfuite abandonnée, puis reprife & abandonnée de nouveau , & enfin encore attaquée dans ces derniers temps : on affure qu'autrefois elle a fourni de très- gnndes richeffes , & qu'elle n'eft pas à beaucoup près cpuifée; cependant les dernières tentatives n'ont point

Y Ejhade , il y a un très -bon filon de mine d'argent grife. Hïjlo'irc Naturelle du Languedoc, par AL de Genfanne , tome I, page 16 j. < Il y a dans la montagne appelée les Cacarnes , diocci'e de Pons, une mine de plomb & argent fort riche; mais le minerai n'y efl ' })as abondant ; il y a une autre mine femblable , mais moins riche Cil argent, au lieu appelé Brïoun, le tout dans le territoire de Rioufet. Idem, tome II, page 2 0 j) . En remontant de Colombières vers Donts, on trouve près de ce dernier endroit de iiès-bonnes mines de plomb & argent. Idem, tome II, page 21 j. Aux Corteilles , diocèfe de Narbonne, il y a un très - beau filon de mine d'argent, ijièk'e de blende. Idem, tome II, page 1S8.

(y) Pline dit que l'argent le plus pur fe tiroit de l'Efpagne , & que l'on y exploitoit des mines d'or qui avoient été ouvertes par A.nnibal, & néanmoins n'étoient pas encore à beaucoup près épuifces. t'mc XXX, chapitre xxvil.

20 Histoire Natu relle

eu de fuccès, & peut-être fera-t-on forcé cfe renoncer

aux cfpcrances que Jonnoit Ton ancienne & grande

célébrité, ^c Les fommcts des montagnes autour de

" Guadalcanal , dit M. Bowles , font tous arrondis, ôl

» par-tout à peu- près de ia même hauteur; les pierres

» en font fort dures, & reffcmblent au grès de Turquie

» ( Cûs Turcica) li y a deux liions du levant au

" couchant, qui fe rendent à la grande veine dont la

» direction elt du nord au fiid ; on peut la fuivre de

>^ l'œil dans un efpace de plus de deux cents pas à la

» fuperficie ; a une lieue & demie au couchant de

'^ Guadalcanal, il y a une autre mine dans un roc élevé;

3' la veine efl renverfée , c'cil-à -dire , qu'elle eft plus

riche à la fiipcrficie qu'au fond ; tWt peut avoir feize

^> pieds d'épaiifeur, & elle eft, comme les précédentes,

>> compofée de quartz & de fpath. A deux lieues au

5> levant de la même ville, il y a une autre mine dont

31 la veine eft élevée de deux ])ieds hors de terre , &

>> qui n'a que deux pieds d'épaifteur. Au refte, ces mines,

?i qui fe préfentent avec de fi belles apparences , font

" ordinairement trompeufès; elles donnent d'abord de

î> l'argent ; mais en defcendant plus bas on ne trouve

plus que du plomb. » Ce Naturalifte parle auffi d'une

mine d'argent fans plomb, fituée au midi & à quelques

lieues de diftance de Zalamea. Il y a une mine d'argent

dans la montagne qui eft au nord de Lografo (i) , &

(tJ Bïjloirc Naturelle d'Efpagne, par M. Bowles, pages 6 ^ &

DES Minéraux, 21

piufieurs autres dans les Pyrénées , qui ont été travaillées par les Anciens, & qui maintenant font ahandonnées ^a^ ; il y en a auiïi dans ic^ Alpes & en piufieurs endroits de la SuifTe. M." Scheuchzer, Cappeler &i Guettard en ont fait mention (l^) , & ce font fans dout^ ces

fuïv. Cet Auteur parle aufTi de quelques autres miaes dumcnie canton, l'on trouve de l'argent vierge, de l'argent vitré, (Sec.

(d) L'avarice a cté fouvent trompce par le fuccès des exploitations faites par les Phéniciens, les Carthaginois &.les Romains. Les premiers, au rapport de Diodore de Sicile , trouvèrent tant d'or & d'argent dans les Pyrénées , qu'ils en mirent aux ancres de leurs vai/leaux ; on tiroit en trois jours un talent eubo'K|ue en argent, ce cjui montoit à huit cents ducats ; enflammés par ce récit , des j^articuliers ont tenté des recherches dans la partie feptentrionaie des Pyrénées ; ils femblent avoir ignoré que le côté méridional a toujours été regardé comme le ])Ius riche en métaux. Tite-Live parle de l'orbe de l'argent que les mines de i/i/^rf 'fournifloient aux Romains; les monts qui s'alongent vers le nord jufqu'à Pampelune , font fameux, fuivant Alphonfe Barba, par la quantité d'argent qu'on en a tirée; ils s'étendent aufli vers l'Ebre , dont la richefle ell vantée par Ariftote & par Claudien:/n Jheriâ narrant combujiis aliquando a pafor'ibus Jilvis, calenteque ex ïgnibus terra , manifejtatum argentum dejluxi[je. Ciimque pojlmodiim terrœ motus fupervenijfent , eruptis hintibus magnam copitvn (ircrenti Jîmul coUeâam, Arifîot. de Mirab. aufcult. L'Hidoire ne cite point les mines que les Anciens ont exploitées du côté de France, ce qui prouve qu'elles leur ont paru moins utiles que les mines d'Efpagne ; aulTi avons -nous remarqué que les entreprifes tentées dans cette }>artie ont iMefque toujours été ruineufes. EJfais fur la minéralogie des Pyrénées , in-^.' page 2^^.

(b) M. Scheuchzer dit qu'il y a une mine d'nrgent à Jchanneherg, à BaranvaU M. Capptler dit que le cuivre mêlé à l'argent le

22 H 1 STO IRE Naturelle

hautes iiu)iU3gnes des P3 renées & des Alpes , qui renferment les mines primordiales d'or (5c d'argent, dont: on trouve les débris en paillettes dans les eaux qui en découlent ; toutes les mines de féconde forma- tion font dans les lieux inférieurs au pied de ces montagnes, & dans les collines formées originaire- ment par le mouvement & le dépôt des eaux du vieil Océan.

Les mines d'argent qui nous font les mieux connues en Europe , font celles de l'Allemagne ; il y en a piufieurs que l'on exploite depuis très-long-temps, dL l'on en découvre affez fréquemment de nouvell(*^s. ?vl. de Jufli , fivant Minéralogifle, dit en avoir trouvé fix en 175 I, dont deux font fort riches, & font fituées fur les frontières de la Styrie ('cj. Selon lui, ces mines

jiiomre de toutes parts dans le mont Sj/in au - de (Tu s de Zill'ts. yilémoires de AI. Cuettanl dans ceux de i Académie des Sciences iinnce 17^2, page S -3- On a découvert en creufant le baffin

de Kriembach, qu'une pierre bleuâtre lenfennoit de l'argent

Il y a aufli de l'argent dans le canton d Underwald Les

environs de Bex & du lac Léman ^ renferment des veines d'argent. Jdiw , pages j'j'j» & ^^6.

(c)^^ La plus riche refîemble à une pierre brune tirant furie rouge, ?5 & l'autre relTemble à une pierre blanche, & fe trouve près d'An-

V naberg, cette pierre blanche ne paroît être qu'une pierre calcaire; j> l'eau agit fur elle, après avoir été calcinée, comme fur une pierre

V à chaux, & elle ne contient ni foufre, ni arfenic ni aucun métal: ^> l'on n'y aperçoit que l'argent fous une forme métallique au moyen

Ù £ s AI I N É R A U X. 2

font mt-Ices de fubftances calcaires en grande quaiuitc, êi. cependant il ailure qu'elles ne perdent rien de leur poids lorfcju'elles font grillées par le feu, & qu'il ne s'en élève pas la moindre fumée ou vapeur pendant la calcination ; ces afiertions font difficiles à concilier; car il ell certain que toute fubftance calcaire perd beaucoup de fon poids lorfqu'elle ell calcinée, âc que par cou- féquent cette mine d'Awjûltr^, dont parle M. de Juili, doit perdre en poids à proportion de ce qu'elle contient de fdbftancc calcaire. Ce fa\ant Minéralogifle, affure qu'il exiile un très-grand nombre de mines d'argent mincralifc par l'alka'i , mais cette opinion doit être interprétée, car l'alkaii feul ne pourroit opérer cet effet; tandis que je foie de foufre , c'c(t-à-dirc, les principes du foufre réunis à l'alkaii peuvent le produire ; & comme M. de Julli ne parle pas du foie de foufre, mais de l'alkaii fimple , fès expériences ne me paroiffent pas concluantes ; car falkali minéral feul n'a aucune aétion fur l'argent en maffe: & nous pouvons très-bien entendre la formation de la mine blanche de Schemnitz par l'intermède du foie

d'une loupe. . . . Dès le commencement elle rendoit une, deux & trois livres d'argent par quintal; à peine les Ouvriers eurent-ils <:< creufé à une brafle c\ demie de profondeur, c[ue la mine rendoit ce jufqu'à vingt-quatre marcs par quintal. . .. On y rencontre même ic des morceaux de mines d'argent blancfies & rouges , & il le trouve c< aulîî de l'argent maiht ». Nouvelles vérités h l'avantage de la Phyfique^ jjar Al. de Jujfi ; Jvurnal étranger, Odobre iyj4>

24- H/STO/RE Naturelle

de foufre : la Nature ne parok donc pas avoir faît cette oj)cratioii de la manière dont le prétend M. de Jufii (d) ; car quoiqu'il n'ait point reconnu de foufre

dans

(d) Cette mine efl: extrcnienieiit riche; car fa mine commune contient ordinairement trois, quatre, julqu'à fix marcs -d'argent pnr quintal ; la bonne en rend julqu'à vingt marcs , & l'on en lire encore davantage de quekjues morceaux ; on a même trouve à cette mine à' Annaberg , des malTes d'argent natif, du jK-)ids de plufieurs livres .... M. de Jufti prétend que tout ce c[ui n'efl: pas d'argent natif dans cette mine, a cté mineralife par un fel alkalin, <5c voici fes preuves.

Les plus riches morceaux de la mine font toujours ceux qui , tirant fur le blanc, font mous & cafîàns, qui paroident compofe's par-tout de parties homogènes, «Se dans lefquels, ni la fmij^le vue ni le fecours du microfcope , ne font apercevoir aucune particule d'argent fenfible. Il faut donc que l'argent y foit mèlc intimement avec une fubllance qui le prive de fa forme métallique , & comme il n'y a dans cette mine ni foufre ni arfenic , mes expériences dcmontreront que ce ne peut être que l'alkali minerai.

Dans les parties de la mine qui font moins riches , la dureté de la matière efl: à peu -près égale à celle du marbre commun, &.

l'on y voit des parcelles d'argent dans leur forme de métal

Et ce qui démontre c{ue cette mine riche & molle a été vcritable- nient produite par l'union de l'alkali avec l'argent, c'efl qu'on obtient un vrai _/ô/V de fovfrc , Idrjqu'à une partie de la mine en quellion, on ajoute la moitié de foufre, & que l'on fait fondre ces deux Tnaiicres dans un vailleau fermé ....

Depuis que j'ai été convaincu par la mine d' Annaberg , qu'il y a dans la Narure des mines véritar;Iement alkalines , j'en ai encore découvert dans d'autres endroits : à Schemniti en Hongrie , on 4 trouvé depuis long - ter.qis que les mines riches qu'on y exploite,

ctojeat

DES Minéraux. 25

clans cette mine, le foie de foufrc qui eft, pour ainfi dire, répandu par-tout, doit y exiger comme il exifle non - feulement dans les matières terreufes, mais dans les fubdances calcaires, & autres matières qui accom- pagnent les mines de féconde formation.

En Bohème , les principales mines d'argent font celles de Saint-Joachïm ; les filons en font affez minces, & la matière en efl très-dure, mais elle eft abondante en métal; les mines de Kut tenbcrg ïowi mêlées d'argent & de cuivre , elles ne font pas fi riches que celles de Saint- Joachim ('e). On peut voir dans les Ouvrages

» ■^■.- I. ■■-■■■—■ I ■■—■,1 I iiiB^...! I I III ^^^^— —a

ctoient accompagnces d'une fubftance minérale, nioJle , blanche, & de la nature de la craie. Cette fubftance qui, à eau fe de la fubtilité de Tes parties & du peu de folidité de fa inafle, blanchit les mains comme de la craie, a été pendant très-longtemps jetce comme une matière inutile ; on s'eft enfin avifé de l'edayer , & on a trouvé, par les cfTais ordinaires qu'elle contenoit, dix marcs d'argent par quintal .... Et fi l'on y veut faire attention on trouvera peut-être fréquemment cette mine alkaiine dans le voifinage des carrières de marbre & de pierre à chaux

Toute la montagne fe trouve la mine d' Annaherg^ n'eft com- pofce que d'une pierre à chaux ou d'une efpèce de marbre commun, & l'on m'a envoyé de Siléfie , une efpèce de marbre qui venoit de la montagne appelée le Zotembcrg, ôc dont j'ai tiré par l'analyfe ,

deux onces & demie d'argent par quintal M. L/ieman m'a

afluré avoir vu un marbre qui contenoit jufqu'à trois onces & demie d'argent par quintal. Nouvelles vérités a l'avantage de la Phyfique , par M. de Jujli; Journal étranger, mois de Mai i 7/ 6 , pages y i & fiiiv.

(e) Grifelius , dans les Éphémérides d'Allemagne depuis l'annco 1670 à I 68 6.

Minéraux , Tome IIL D

z6 Histoire Naturelle

des Mincraiogi/les Allemands, la dcfcription des mines <Je plufieiirs autres provinces, & notamment de celles de Tranfilvanie, de la Hefle & de Hongrie; celles de Schemnitz (f), contiennent depuis deux jufqu'à cinq gros d'argent, & depuis cinq jufqu'à fèpt deniers d*or par marc, non compris une once & un gros de cuivre qu'on peut en tirer auiïi (g).

Mais il n'y a peut-être pas une mine en Europe, l'on ait fait d'auffi grands travaux que dans celle de SallLerg en Suède, fi la defcription qu'en donne Rcgnard n'eft point exagérée ; il l'a décrit comme une ville fouterraine , dans laquelle il y a des maifons , des écuries êL de vafles emplacemens (hj . ^ - . I , . . ■■ . . ,

(fj Par les Mémoires de M. Ferber, fur les mines de Hongrie, il paroît que la mine de Schemnitz eft fort riche ; que celle de Kremnitz a fourni, depuis 1749 jufqu'en 1759, en or & en argent, ïa valeur de 42,498,009 florins, c'eft-à-dire , plus de 84 millions de notre monnoie ; & que depuis 1^48 , celle de Fclfobania fournit par an environ 100 marcs d'or, 3000 marcs d'argent, 3000 quin- taux de plomb, & i joo quintaux de htharge , fans compter les mines de cuivre & autres. Alémoires imprimés à Berlin en lyS 0, in- 8 .* Extraits dans le Journal de phyfiquey Août iy8 1 , page i C i.

(g) Traité de la fonte des Mines de Schlutter, tome II, page s o^f.

(h) Regnard ajoute à la defcription des excavations de ia mine, ïa manière dont on l'exploite. « On fait, dit -il, fécher les pierres ï» qu'on tire de la mine fur un fourneau qui brûle lentement , & » qui fépare l'antimoine , l'arfenic & le foufre d'arec la pierre , le » plomb & l'argent reftent enfemble. Cette première opéradon welt fuivie d'une féconde, ^ ces pierres féchccs, foAt jetées dans

DES Minéraux. 27

rc En Pologne, dit iM. Guettard, les forets de Leib'ni font riches en veines de métaux , indiquées par les " travaux qu'on y a faits anciennement; il y a au pied de '^ ces montagnes , une mine d'argent découverte du temps ^' de Charles XII (i) . »

Le Danemarck, la Norwège (k) & prefque toutes

des trous elles font pilées & réduites en boue, par le moyen ul des gros marteaux que l'eau fait agir ; cette boue efl: délayée dans « une eau qui coule incelTamment fur une planche mife en glacis , •« & qui emportant le plus grolfier, lai/le l'argent & le plomb dans k le fond fur une toile. La troificme opération fépare l'argent d'avec « le plomb qui fond en écume , & la quatrième fert enfin à le per- «<

feétionner, & à le mettre en état de fouffrir le marteau On «

me fit, dit l'Auteur, prcfent d'un morceau d'amiante, dont on oc avoir trouvé plufieurs dans cette mine, m dEuvrcs de Regnard; Paris, JJ-^2 , tome /, pages 2. o^ & fuiv.

(i) Mémoires de l'Académie des Sciences de Paris, année iy6 2, page s i^.

(k) En Norwège, il y a plufieurs mines d'argent il fe trouve quelquefois des morceaux de ce métal qui font d'une grandeur extraordinaire: on en conferve \n\ dans le Cabinet du roi de Danemarck, du poids de onze cents vingt marcs. On tire des pièces entières d'argent pur des mines de Kongfberg. La profondeur perpendiculaire d'une de ces mines, eft de cent trente toiles; cti mines font fans fuite , & néanmoins il n'y a peut-êire que celles du Potofi qui rendent davantage. Hijloire Naturelle de Norwège , par Pontoppidan ; Journal étranger, mois d'Août ij^^- M. Jars vient de donner une defcription plus détaillée de ces mines de Kongfberg; elles ont été découvertes par des filets d'argent qui fe manifefioient au jour. . .. On évalue le produit annuel de toutes les mines de ce département ,332 ou 3 3 millQ marcs d'argent Tous le*

iS Hl SrO IRE NATU RELLE

les contrées du nord, ont auiïi des mines d'argent dont quelques-unes font fort riches, & nous avons au Cabinet de Sa Majeflé, de très-beaux morceaux de mine d'argent,

rochers de cette partie de la Norwcge font très-compacts , 6c fi durs qu'on eÙ. oblige' d'employer fe feu pour les, abattre .... Les veines principales les })Ius riches , font prelque toutes dans des rochers ferrugineux , £< ces inines s'appauvrident toutes à melure que l'on delcend, en forte qu'il ell très-rare de trouver du minerai d'argent, lorfqu'on eft defcendu jul'qu'au niveau de la rivière qui coule dans la vallée au-delTous de ces rochers. Les veines minérales renfermées dans les filons principaux font fort étroites ; il ert: rare qu'elles aient au-deiïùs d un pied d'épaiffeur, elles n'ont même trcs-fouvent qu'un pouce ou quelques lignes; ces veines ne produilent généralement point d argent minéralilé , fi l'on en excepte quelques morceaux de mines d'argent vitreufes que le hafard fait rencontrer quelquefois, encore moins de la mine d'argent rouge, mais toujours de l'argent viero-e ou natif, exnèmement varié dans (es, configurations; elles font remplies de différentes matières pierreufes , qui (ervent comme de matrice à ce métal , & forment un compofé de fpath calcaire , d'un autre fufible couleur d'amcthyde, d'un fpath verdàtre, & d'un autre encore d'un blanc tranfparent , reffembiant affez à une félénite , & fou vent recouvert de cuir foOlle ou de montagne , qui tous font unis à de l'argent vierge, & en contiennent eux-mêmes; ce métal fe trouve encore dans un rocher de couleur grife , qui pourroit être regardé comme le toit & ie mur defdits filons; on le rencontre aufîi , mais plus rarement avec du mica.

Dans tout ce mélange on n'aperçoit aucune partie de quartz , mais

bien dans les filons principaux l'on trouve même de la pyrite

riche en argent , dans laquelle ce métal fe maniferte quelquefois , «5c

l'on voit des criOallifations de fpath & de quartz .... Ces filons

ontiennent auffi de la blende.

D E s AI I N É R A U X. ic^

que le roi de Danemarck, a(5luellement régnant, a en la bonté de nous envoyer. Il s'en trouve aufTi aux îles de

Féroë & en Ifîande f/J.

, —— ■■

L'argent eft toujours maiïjf dans Je rocher & prefque pur, c'efl-

à-dire avec peu de mélange Plufieurs fois on eu a détaché

des morceaux qui pelbient depuis 20 juiqu'à 80 marcs. Dans la principale mine de Cottes h i If in der riQth , fituée fur le filon de la montagne moyenne , . . . On trouva il y a prcs de fept ans , à cent trente -cinq toiles au - deflbus de la fuiface de la terre, un feul

morceau d'argent vierge prefque pur , qui peloit 4 1 9 marcs

Cependant la forme la plus commune l'on trouve ce métal, ell celle d'un fil plus ou moins gros , prenant toutes fortes de courbes &. fio-ures , quelques-uns ont un pied & plus de longueur; d'autres ont la fineflè des cheveux , feuls ou réunis enl'emble en grande quantité par un feul point d'où ils partent , mais ordinairement mêlés à du fpath eu du rocher; d'autres encore forment difiérentes branches de ramifications de diverfes grofleurs, dont la blancheur & le brillant annoncent toute la pureié du métal lorfqu'il efl ratfuié.

On en trouve auffi en feuilles ou lames; c'eft communément à travers ou entre les lits d'un rocher gris fchifleux , de manière que dans un de ces morceaux qui pourroit avoir quatre pouces d'épaifleur, on rencontre quelquefois une , deux & même trois couches , pénétrées de cet arcrent qui , quand on les fépare , préfentent à chaque furface des feuilles irès-blanches & trcs-minccs.

Il efl de ces veines enfin , l'argent efl tellement divifé dans ie fpath &; le rocher, quoique vierge, qu'on a bien de la peine à Je reconnoître; dans d'autres on ne le dillingue point du tout; il en efl; de même du quatrième filon. Ai. Jars , Mcmoircs des Savans Étrangers j tome IX , pages 4// c^ Juiv.

(l) Selon Horrebow, les Iflandois ont trouvé dans leurs montagnes, du métal qui étant fondu , s'eft trouvé être du bon argent. H'ifloirc générale des Voyages, tome XVI U, page s (>'

30 Histoire Naturelle

Dans les parties feptentrionales de J'Afie, les mines d'argent ne font peut-être pas plus rares ni moins riches que dans celles du nord de l'Europe: on a nouvellement public à PcterlLourg , un Tableau des mines de Sibérie, par lequel il paroît qu'en cinquante-huit années on a tiré, d'une feule mine d'argent, douze cents feize mille livres de ce métal , qui tenoit environ une quatre - vingtième partie d'or. Il y a aufTi une autre mine dont l'exploitation n'a commencé qu'en ly^fS, & qui depuis cette époque ju/qu'en 1-7-71,3 donné qiiatre cents mille livres d'argent, dont on a tiré douze mille fèpt cents livres d'or (m). Al." Gmclin tSc Muller font mention dans leurs Voyages, des mines d'argent qu'ils ont vues à Argiinsk, à quelque dillance de la rivière Ar^um ; ils di/cnt qu'elles /but dans une terre molle une petite profondeur, que la plupart . trouvent fituées dans des plaines environnées de montagnes (n) , &. qu'on rencontre ordinairement au- deffus du minerai d'argent, m\t efpèce de chaux de plomb, compofée de plus de plomb que d'argent.

ïi y a au/Ti plufieurs mines d'argent à la Chine, fur-tout dans les provinces de Junnan & de Sechuen (0) , on en trouve de même à la Cochinchine (p), «Se

(m) Journal de Politique & de Littérature. FcnUr lyvâ, article Paris.

(n) Hiacire générale des Voyages, tome XVI JI , page 2ij,

(0) Idem, tome VI, page ^8^.

(n) Suivant Mendez Pinto, il y a aux eiivirons de Quanjû^ar^

D E s M I N É R A V X. 31

celles du Japon paroiffent être les plus aborxJantes cfc toutes ((j) . On connok aufii quelques mines d'argent dans l'intérieur du continent de i'Afie. Chardin dit qu'il n'y a pas beaucoup de vraies mines d'argent en Pcr/è , mais beaucoup de mines de plomb qui contiennent de l'argent ; il ajoute que celle de Renan ^ à quatre lieues d'Ifpahan, &. celles de Kirman <Sc de Mazanderan, n'ont été négligées qu'à caufe de la dilëtte du bois qui , dans toute la Perfe, rend trop di/J^endieux le travail des mines (r) ,

Nous ne connoifTons guère les mines d'argent de l'Afrique, les Voyageurs qui fe font fort étendus fur les mines d'or de cette partie du monde, paroiffent avoir négligé de faire mention de celles d'argent ; ils nous difent feulement qu'on en trouve au cap Vert (f),

dans l'anfe de la Cochinchine , ées mines d'argent dont o\\ tire une fort graride quantité de ce nietaJ. Hijloire générale des Voyages , tome JX , page ^ S ^.

(q) Oi\ ne connoît guère d'autres mines d'argent dans toute I'Afie que celles du Japon, dont Jes relations vantent l'abondance. Cependant Mindez Pinto , dit qu'il y en a de ïon abondantes fur îes bords du lac de Chiamuy, d'où o\\ le tranfporte dans d'autres provinces de J'Afie. Jdem , tome X, page ^2 S. 'Là province de Bungo au Japon, a des mines d'argent; Kattami, lieu fitué au nord de cet Empire, en a de plus riches encore. L'argent du Japon pafîe pour le meilleur du monde, autrefois on i'échangeoit à U Chine, poids pour poids contre de l'or. Idem , page éj^s

(rj Voyage de Chardin. Tome II, page 22.

(f) On alTure que d^is \ï\q Saint- Anîom , au cap Vert; W ^ ^

^2 Histoire Natu relle

au Congo {tj, au Bambuk (uj , & jufque Jans le pays des Hottemots (x) .

Mais c'eft en Amérique nous trouverons un trcs-

grand nombre de mines d'argent, plus étendues, plus

abondantes , & travaillées plus en grand qu'en aucune

autre partie du monde. La plus fameufe de toutes, efl

celle de Potofi au Pérou: « Le minerai, dit M. Bowles,

en eft noir, & formé dans la même forte de pierre que

,, celle de Freiberg en Saxe ; ce Naturalise ajoute que la

3) mine appelée Roficle, dans le Pérou , efl de la même

nature que celle de RotligitUeti - eri & de AnJrcûJherg

dans le Hartz, & de Sainte -Marie -aux -mines dans les

Vo/ges (y) ».

Les mines de Potofi flirent découvertes en 1545, & l'on n'a pas cefTé d'y travailler depuis ce temps, quoiqu'il y ait quantité d'autres mines dans cette même contrée

une mine d'argent , mais qui n'eft pas encore exploitée. Hijlolrg générale des Voyages , tome II , page ^i S.

(i) On trouve des mines d'argent dans la province de Bamba , au Congo, qui s'ctendent jufque vers Angole. Idem , tome IV, page 6 1 y.

(u) II y a des mines d'argent dans le Bambuk en Afrique. Idna, tome II , page iT^^. . . . II y a aufli des mines d'argent dans les terres A' Angoykayango en Afrique. Idem ^ tome IV, page ^8 S .

(x) On a auffi découvert au commencement de ce /Iccfe, une mine d'argent dans les colonies Hoilandoifes, au pays des Hottentots ; mais on n'en a pas continué l'exploitation. Kolbe , dans VHijioïu générale des Voyages , tome V, page //J»

(y) Hiftoire Naturelle d'Efpagne, page 2

du

DES Minéraux, 33

du Pérou. Frézier afTure que de Ton temps, les mines d'argent les plus riches ctoient celles (ÏOriero , à quatre- vingts lieues A'Arica ^ & il dit qu'en i y 1 2 on en découvrit une auprès de Cufco, qui d'abord a donné près de vingt pour cent de métal , mais qui a depuis beaucoup diminué aind que celle de Potofi (zj- ^^ temps d'Acofla, c'efl - à -dire, au commencement de i'autre fiècle, cette mine de Potofi, étoit fans comparai/on la plus riche de toutes celles du Pérou ; elle efl fituée prefque au fommet des montagnes dans la province de Charcas, &. il y fait très-froid en toute faifon. Le foi de la montagne efl fèc & ftérile, elle efl; en forme de cône , &. furpafle en hauteur toutes les montagnes voifnies ; éXc peut avoir une lieue de circonférence à la bafe, <&.fon fommet eft arrondi & convexe. Sa hauteur, au-deffus des autres montagnes qui lui fervent de bafe, efl: d'environ un quart de lieue. Au-deffous de cette plus haute montagne, il y en a une plus petite l'on trouvoit de l'argent en morceaux épars ; mais dans la première, la mine efl dans une pierre extrêmement dure ; on a creufé de deux cents jladcs, ou hauteur d'homme dans cette montagne, fans qu'on ait été incommodé des eaux; mais ces mines ctoient bien plus riches dans les parties fupérieures, & elles fe font appauvries au lieu de s'ennoblir en defcendant (a) . Parmi les autres

^— ■» ■■■■ 1^»^— ^— ^ ■■■■_■■■ Il -■—■.,■ I I B^^B^

(■^) Hiftoire géncrale des Voyages, tome XIII, page ^8^,

(a) Ce roc de Potofi, comieiii quatre veines principales; la v'iche ,

ATméraux , Tome III. E

34 Hi STO IRE Naturelle

mines d'argent du Pérou , celle de Turco , dans le corrégiment de Cavanga, eft très -remarquable, parce que le métal forme un ti/Tu avec la pierre très-apparent à l'oeil ; d'autres mines d'argent dans cette même con- trée, ne font ni dans la pierre ni dans les montagnes; mais dans le fable il fuffit de faire une fouille pour trouver des morceaux de ce métal , fans autre mélange qu'un peu de fable qui s'y cft attaché (h) .

Frézier, Voyageur très-intelligent, a donné une affez bonne defcription de la manière dont on procède au Pérou, pour exploiter ces mines & en extraire ie métal. On commence par concaïïer le minerai, c'eft-à-dire, les pierres qui contiennent le métal ; on les broie enfliite dans un moulin fait exprès: on crible cette poudre, & l'on remet fous la meule les gros grains de minerai

le centcno, celle d'étain & celle de Alend'ietû. Ces veines font en la partie orientale de la montagne , & on nen trouve point en la partie occidentale, elles courent nord & fud. . . . Elles ont à l'en- droit le plus large fix pieds, & au plus étroit une palme: ces veines ont des rameaux qui s'étendent de côté & d'autre. . . . Toutes ces mines font aujourd'hui (en 1589) fort profondes, à quatre-vingts ,

cent, ou deux cents fiades, ou hauteur d'homme On a

reconnu par expérience, que plus haut eft fituée la veine à la

fuperficie de la terre, plus elle eft riche & de meilleur aloi

On tire le minerai à coups de marteaux , parce qu'il eft dur à peu- près comme le caillou. Hijloire Naturelle des Indes, par Acojîa. Paris j j 6 0 0 , page 1 3 j & fuiv.

(b) Hidoire générale des Voyages, tome XIII , page ^00.

DES Minéraux. ^ r

qui refteiu fur le crible, 6l lor/que le minerai trouve mêlé de certains minéraux trop durs qui rempéchent de fe pulvérilèr, on le fait calciner pour le piler de nouveau; on le moud avec de Teau, &. on recueille dans un ré/èrvoir cette boue liquide qu'on laiiïe fécher, & pendant qu'elle efl encore molle on en fait des caxons^ c'eft-à-dire, de grandes tables d'un pied d'épaiffeur, & de vingt-cinq quintaux de pefanteur ; on jette fur chacune deux cents livres de marin qu'on laiffe s'incorporer pendant deux ou trois jours avec la terre; enfuite on l'arrofe de mercure qu'on fait tomber par petites gouttes ; il en faut une quantité d'autant plus grande que le minerai efl plus riche, dix, quinze & quelquefois vingt livres pour chaque table. Ce mercure ramafle toutes les particules de l'argent. On pétrit chaque table huit fois par jour, pour que le mercure les pénètre en entier , & afin d'échauffer le mélange ; car un peu de chaleur efl néceffaire pour que le mercure fàififîe de l'argent , & c'efl ce qui fait qu'on efl quelquefois obligé d'ajouter de la chaux pour augmenter la chaleur de cette mixtion ; mais il ne faut ufer de ce fecours qu'avec grande précaïuion; car fi la chaux produit trop de chaleur, le mercure fe volatili/e, & emporte avec jui une partie de l'argent. Dans les montagnes froides, comme à Lipès & à Potofi , on efl quelquefois obligé de pétrir le minerai pendant deux mois de fuite , au Jieu qu'il ne faut que huit ou dix jours dans les contrées

Ei;

36 Histoire N aturelle

pius tempérées : on el1: même forcé de fervir Je fourneaux pour échaufîèr le mélange & preffer l'amal- game du mercure, dans ces contrées le froid efl trop gronJ ou trop conilaiit.

Pour rcconnoître fi le mercure a fait tout fbn efîèt, on prend une petite portion de la grande table ou caxon, on la délaie & lave dans un baffin de bois, la couleur du mercure qui refle au fond indique fbn efiet; s'il efl noirâtre on juge que le mélange efl trop chaud, & on ajoute du fel au caxon pour le refroidir ; mais fi le mercure c(l blanchâtre ou blanc, on peut préfumer que l'amalgame efl fait en entier, alors on tranfJ3orte la matière du caxon dans des lavoirs tombe une eau courante; on la lave jufqu'à ce qu'il ne rcfle que le métal fur le fond des lavoirs qui font garnis de cuir- Cet amalgame d'argent & de mercure, que l'on nomme pel/d , doit être mis dans des chauffes de laine pour laiffer égoutter le mercure ; on ferre ces chauffes , & on les preffe même avec des pièces de bois pour l'en faire fortir autant qu'il efl poffible , après quoi , comme il refle encore beaucoup de mercure mêlé à l'argent , on verfe cet amalgame dans un moule de bois en forme de pyramide tronquée à huit pans, & dont le fond efl une plaque de cuivre percée de plufieurs petits trous. On foule & preffe cette matière pella , dans ces moules pour en faire des maffes qu'on appelle pignes. On lève eniuite le moule, «Sl l'on met la pign€ avec bafe de

DES Minéraux. 37

cuivre fur un grand vafe de terre rempli d'eau, &. fous un chapiteau de même terre, fur lequel on fait un feu de charbon, qui fait fortir en vapeurs le mercure contenu dans la pigne ; cette vapeur tombe dans l'eau & y reprend la forme de mercure coulant : après cela la pigne n'eft plus qu'une maffe poreufe , friable & corn- pofëe de grains d'argent contigus, qu'on porte à la monnoie pour la fondre (cj.

Frézier ajoute à cette defcription dont je viens de donner l'extrait, quelques autres faits intéreffans fur la différence des mines ou minerais d'argent; celui qui ell blanc & gris, mêlé de taches rouffes ou bleuâtres, eft le plus commun dans les minières de Lipès; on y diftingue à l'œil hmple, des grains d'argent quelquefois difpofés dans la pierre en forme de petites palmes. Mais il y a d'autres minerais l'argent ne paroît point, entr'autres un minerai noir dans lequel on n'aperçoit l'argent qu'en raclant ou entamant fa furface ; ce minerai qui a fi peu d'apparence, & qui fouvent efl mêlé de plomb, ne laifle pas d'être fouvent plus riche, & coûte moins à travailler que le minerai blanc ; car comme il contient du plomb qui enlève à la fonte toutes les impuretés, l'on n'elt pas obligé d'en faire l'amalgame avec le mercure: c'étoit de ces minières d'argent noir que les anciens Péruviens tiroient leur argent. Il y a

(c) Frézier, HUloire générale des Voyages, tome XII J, page jp.

38 Histoire Naturel le

d'autres minerais d'argent de couleurs diiTércntes , un qui eft noir, mais devient rouge en ie mouillant ou le graitant avec du fer; il eft riche, &l l'argent qu'on en tire eil d'un haut aloi. Un autre brille comme du talc, mais il donne peu de métal; un autre qui n'en contient guère plus eft d'un rouge-jaunâtre : on le tire aifément de fa mine en petits morceaux friables & mous ; il y a aufti du minerai vert qui n'eft guère plus dur, & qui paroît être mêlé de cuivre ; enfin on trouve de l'argent pur en plufieurs endroits ; mais ce n'eft que dans la feule mine de Cotamito, aftcz voifine de celle de Potofi, l'on voit des fils d'argent pur, entortillés comme ceux du galon brtilé.

Il en eft donc de l'argent comme de Tor & du fer; leurs mines primordiales font toutes dans le roc vitreux, &L ces métaux y font incorporés en plus ou moins grande quantité, dès le temps de leur première fùfion ou fublimation par le feu primitif; & les mines fecon- daires, qui fe trouvent dans les matières calcaires ou fchifteufes , tirent évidemment leur origine des pre- mières. Ces mines de féconde & de troifième formation, qu'on a quelquefois vu s'augmenter fènfiblement par l'addiiion du minerai charié par les eaux, ont fait croire que les métaux fe produifoient de nouveau dans le fein de la terre ; tandis que ce n'eft au contraire que de leur décompofition <Si. de la réunion de leurs détri- mens, que toutes ces mines nouvelles ont pu &: peuvent

DES Minéraux. 39

encore être folpiées ; & fans nous éloigner de nos mines d'argent du Pérou, il s'en trouve de cette efpèce au pied des montagnes &: dans les excavations des mines même abandonnées depuis long-temps ^JJ .

(d) Dans la montagne du Potofi , l'on a tant creufe en diiïcrens endroits, que plufieurs mines fe ibnt abîmées, «& ont oiTeveli les Indiens qui travailloient , avec leurs outils & étançons. Dans la fuite des temps on efl venu refouiller les mêmes mines, & l'on a trouvé dans le bois, dans les crânes & autres os humains, des filets dtùvgewi qui les pénètrent. C'eft encore un fait indubitable qu'on a trouvé beau- coup d'argent dans les mines de Lipcs , d'où on en avoit tiré long- temps auparavant. Je fais qu'on répond à cela qu'au trefqi^ elles étoient fi riches qu'on négligeoit les petites quantités ; mais je doute que lorfqu'il n'en coûte guère plus de travail on perde volontiers ce que l'on tient. Si à ces faits nous ajoutojîs ce que nous avons dit des lavoirs d^ Adacoll Sx. de la montagne de Saint- Jofeph fe forme le cuivre, on ne doutera plus que l'argent «Se les autres métaux ne fe forment tous \cs jours dans certains lieux. . . , Les anciens Philo- fophes & quelques modernes , ont attribué au foleil la formation des métaux , mais outre qu'il efl; inconcevable que fa chaleur puilîe pénétrer jufqu'à des profondeurs infinies , on peut fe dé/abufer de cette opinion, en failant attention à un fait inconteflable que voici:

Il y a environ trente ans que h foudre tomba fur la montagne d'IIimani , qui ell au-defius de la Pa7^e , nmr ement C/wçuiiigo , ville du Pérou, à quatre-vingts lieues d'Arica; elle en abattit un morceau, dont les éclats qu'on trouva dans la ville & aux environs, étoient pleins d'or ; néanmoins celte montagne , de temps immémorial , a toujours ctc couverte de neige; donc la chaleur du foleil qui n'a pas allez de force j)Our fondre la neige , n'a [)as avoir celle de former de for qui étoit delTous , &. qu'elle a couvert l'dns interruption.... D'ailleurs la j)lupart des mines du Pérou & du

40 Histoire Naturelle

Les mines d'argent du Mexique ne fcmt guère moins fameufcs que celles du Pérou. M. Bowles dit que dans celle appelée VûUadora, le minerai le plus riciie donnoit cinquante ^i^•res d'argent par quintal, le moyen vingt- cinq livres, & le plus pauvre huit livres, &. que fouvent on irouvoit dans cette mine des morceaux d'argent vierge (e). On eflime même que tout l'argent qui fe tire du canton de Sainte- Pécaqiie, eft plus fin que celui du Pérou (f): fuivant Gemelli Carreri la mine de Sauta- Crux avoit en 1697, plus de fept cents pieds de pro- fondeur; celle de Navaro plus de {\\ cents, & l'on peut compter, 4it-il, plus de mille ouvertures de mines (g) ,

Chily, font couvertes de neige pendant huit mois de l'année. Fré^ier, Voyage à la mer du fud ; Paris, 1732, page 146 à^ fuiv.

(e) Hiftoire Naturelle d'Efpagne, pages 2^ & 24.

(f) Hiftoire géncrale des Voyages, tome XI, page ^ 8 p.

(g) C'efl: une obfervation importante & qui n'avoit pas échappé au génie de Pline: « Qu'on ne trouve guère un filon feul & ifolé; 3j mais que lorfqu'on en a découvert x\x\ on efl: prefque fiir à^ew rencontrer plufieurs autres aux environs ». Ub'icumque vna inventa verra ejl , non procul invenitur alla ( Lib. XXX, cap. xxvil ). « La fublimation ou la chute des vapeurs métalliques, une fois déter- 5> minée vers les grands fommets vitreux, dut remplir à la fois les 55 différentes fentes perpendiculaires ouvertes dès-lors dans ces mafles primitives ; & c'efl dans un fens relatif à cette production ou prc- 55 cipitation fimultanée, que le même Naturalise interprète le nom latin originairement grec , des métaux ( U'na?.\a. quafi /xtr'a»^uy ) ; » comme pour défigner des matières ramaffées <Sc rafiemblées aux 55 mêmes lieux , ou des fubflances produites en même temps & difpofees enfemble x». JVote communiquée par AI. iabbc Bexon,

dans

Ù E s AI J N É R A U X. 41

dans un efpace de fix lieues autour de Santa-Crux (h). Celles de la Trinité ont été fouillées jufqu'à huit cents pieds de profondeur; les gens du pays affurèrent à ce Voyageur , qu'en dix ou onze années , depuis 1 6?>n jufqu'en 1697, ^" ^^ ^^^^^ ^•''^ quarante millions de marcs d'argent. Il cite auffi la mine de Saint-AIatihieii , qui n'efl qu'à peu de diflance de la Trinité, & qui n'ayant été ouverte qu'en 1689, étoit fouillée à quatre cents pieds en 1697; '^ ^'^ 4"^ ^^^ pierres métalliques en font de la plus grande dureté , qu'il faut d'abord les perarJer & les bri/èr à coups de marteau ; que l'on diflingue & fépare les morceaux qu'on peut faire fondre tout de fuite , de ceux qu'on doit auparavant amalgamer avec ie mercure. On broie ces pierres métalliques , propres à la fonte, dans un mortier de (er , & après avoir féparé par des lavages , la poudre de pierre autant

(h) En Amérique, îes mines d'argent fe trouvent commune'ment dans les montagnes & rochers très-hauts & dëferts .... Il y a des mines de deux fortes différentes , les unes qu'ils appellent égarées , & les autres Jîxes & arrêtées. Les égarées lont des morceaux de métal qui fe trouvent amafles en quelques endroits , lefquels étant tirés & enlevés, il ne s'en trouve pas davantage; mais les veines fixes font celles qui, en profondeur & longueur, ont une fuite con- tinue en façon de grandes branches & rameaux , & quand on en a trouvé de cette elpèce , on en trouve ordinairement plufieurs autres au même lieu.... Les Américains favoient fondre l'argent; mais ils n'ont jamais employé le mercure pour le féparer du minerai. mjlûire Naturelle des Indes , par AcoJIa; Paris, 160 0 y page /J/.

Minéraux, Tome JIL F

42 HisTOinE Naturelle

qu'il eftpoffible, on mcle le minerai avec une certaine quantité de plomb, & on ies fait fondre enfemble, on enlève ks fcories avec un croc de fer , tandis que par le bas on laifTe couler l'argent en lingots que Ton porte dans un autre fourneau , pour le refondre &. achever d'en féparer le plomb. Chaque lingot d'argent eft d'en- viron quatre-vingts ou cent marcs , & s'ils ne fe trouvent pas au titre prefcrit, on les fait refondre une féconde fois avec le plomb pour les affiner. On fait auffi l'effai de la quantité d'or que chaque lingot d'argent peut con- tenir, & on l'indique par une marque particulière; s'il s'y trouve plus de quarante grains d'or par marc d'argent, on en fait le départ. Et pour les autres parties du minerai que l'on veut traiter par l'amalgame, après les avoir réduites en poudre très-fine , on y mêle le mercure & l'on procède, comme nous l'avons dit, en parlant du traitement des mines de Potofi ; le mercure qu'on y emploie vient d'Efpagne ou du Pérou, il en faut un quintal pour féparer mille marcs d'argent. Tout le pro- duit des mines du Mexique & de la nouvelle E/pagne, doit être porté à Mexico , & l'on affure qu'à la fin du dernier fièclc, ce produit étoit de deux millions de marcs par an , fans compter ce qui palfoit par des voies

indireéles fi).

_ . , _ __ , , . ^

(i) Hiftoire générale des Voyages, tome XI , pages j 3 0 & fu'iv»

Les cantons de Tlafco âc de Maltepeque , à l'oueft du Mexique,

font aufll fort célèbres par Uurs mines d'argent; CuaPiimango , du

DES Minéraux, 4}

H y a aufil plufieurs mines d'argent au Chili , fur- tout dans le voifinagc de Co<^mmho (kj , & au Brefif, à quelque diflance dans les terres voifmes de la baie de tous les Saints (l); Ton en trouve encore dans plu- fieurs autres endroits du continent de l'Amérique & même dans les Illes : les anciens Voyageurs citent en

côte du nord, ne l'eft pas moins par les Tiennes, avec onze autres dans ce même canton; & dans fa province de Guaxaga , il y en a un aufîi grand nombre. Les mines de Guanaxat'i & de Talpuyaga font deux autres mines célèbres, la première eft à vingt- huit lieues de Valladolid au nord, & l'autre à vingt -quatre lieues de Mexico. Une montagne fort haute & inacceffible aux voitures, 6c même aux bêies de charge , qui eft placée dans la province de Guadalajara, vers les Zacaùqucs, renferme quantité de mines d'argent & de cuivre mêlées de plomb. La province de Xalifco, conquife en 1554., efl: une des plus riches de la nouvelle Efpagne, par Tes mines d'argent, autour defquelles il s'efl: formé des habitations nom- breufes, avec des fonderies, des moulins, &c .... Celle de Calnacana contient aufll des mines d'argent. Les Zacaùques ou Zacuîecas, font un grand nombre de petits cantons qui forment, fous ce nom commun, la plus riche province de la nouvelle Efpagne ; on y compte douze ou quinze mines d'argent , dont neuf ou dix font fort célèbres , fur-tout celle del Frefnillo qui paro/t inépuifable. La province de la nouvelle Bifcaie, contient les mines à'Eude , de Saint- Jean & de Sainte-Barbe, qui font d'une grande abondance, & voifmes de plu- fieurs mines de plomb. Les montagnes qui féparent le Honduras de la province de Nicaragua, ont fourni beaucoup d'or & d'argent aux Efpagnols. La province de Colla Ricca, fournit aufll de l'or & de l'argent. Hijioire générale des Voyages , tome XII, pages (j^S & fuiv^

(k) Idem, tome XIII , page 412,

(l) Voyages de M. de Gemies ; Paris ^ i^^S,page i^j.

Fij

4.4- Histoire Naturelle

particulier celle de Saint-Domingue f?nj , mais la culture & le produit du fucre & des autres denrées de confoni- mation que l'on tire de cette île font des tréfors bien plus réels que ceux de fes mines.

Après avoir ci-devant expofé les principales propriétés de l'argent, & avoir enfuite parcouru les différentes contrées ce métal fe trouve en plus grande quantité , il ne nous refte plus qu'à faire mention des principaux faits, <& des obfèrvations particulières que les Phyficiens & les Clîimifles ont recueillis en travaillant l'argent & en le foumettant à un nombre infini d'épreuves ; je commencerai par un fait que j'ai reconnu le premier. On étoit dans Topinion que ni l'or ni l'argent mis au feu & même tenu en fufion , ne perdoient rien de leur fubilance ; cependant il efl certain que tous deux fe réduifent en vapeurs & fe fubliment au feu du fbleil à un degré de chaleur même affez foible. Je l'ai obfervé, lorf^ qu'en 1747 j'ai fait ufage du miroir que j'avois inventé pour brûler à de grandes diftances |^;7y'; j'expofài à 40, ^o &. jufqu'à 60 pieds de diflance, des plaques &. des affiettes d'argent, je les ai vues fumer long- temps avant de fe fondre, & cette fumée étoit affez épaiffe pour faire une ombre très-fenfible qui marquoit fur le terrein. On s'eft depuis pleinement convaincu que cette fumée .^ _ ■■

(m) Hifloire générale des Voyages , tome XII, page 218. (nj Yoyei les Mémoires de l'Académie des Sciences , année 174?'

DES Minéraux. 4-

étoit vraiment une vapeur mcialiique , elle s'attachoit aux corps qu'on lui prélëntoit & en argentoit la iurface , & puifque cette fublimaiion fe fait à une chaleur médiocre par le feu du foleil, il y a toute raifon de croire qu'elle fe fait aufli & en bien plus grande quantité par la forte chaleur du feu de nos fourneaux , lorique non-fèulement on y fond ce métal , mais qu'on le tient en fufion pendant un mois, comme l'a fait Kunckel : j'ai déjà dit que je doutois beaucoup de Texadlitude de ïon expé- rience , 6l je fuis perfuadé que Targent perd par le feu une quantité fenfible de fa iubflance, & qu'il en perd d'autant plus que le feu eil plus violent ôi appliqué plus long-temps.

L'argent offre dans fès diffolutions différens phéno- mènes dont il eft bon de faire ici mention ; lor/qu'il efl diflbus par l'acide nitreux, on obfèrve que fi l'argent efl à peu-près pur, la couleur de cette difîblution, qui d'abord efl un peu verdâtre, devient enfuite très-blanche, & que quand il efl mêlé d'une petite quantité de cuivre elle efl conflamment verte.

Les diffolutions des métaux font en général plus corrofives que l'acide même dans lequel ils ont été difTous , mais celle de l'argent par l'acide nitreux , i'efl au plus haut degré , car elle produit des criflaux fi caufliques, qu'on a donné à leur maffe réunie par la fufion, le nom de Phrre infernale. Pour obtenir ces triftaux, il faut que l'argent &. l'acide nitreux aient

4.6 Histoire Naturelle

été employés purs ; ces criftaux fe forment Jans h diffolution par le feiil refroidifTement ; ils nont que peu de coiififlaiice, & font blancs & aplatis en forme de paillettes; ils fe fondent très-aifément au feu & long- temps avant d'y rougir; & c'eft cette mafTe fondue & de couleur noirâtre qui eft la pierre infernale.

Il y a plufieurs moyens de retirer l'argent de û diffolution dans l'acide nitreux : la feule adlion du feu, long-temps continuée, fuffit pour enlever cet acide; on peut auffi précipiter le métal par les autres acides, vitrio- lique ou marin, par les alkalis & par les métaux qui, comme le cuivre, ont plus d'affinité que l'argent avec facide nitreux.

L'argent, tant qu'il efl dans l'état de métal, n*a point d'affinité avec l'acide marin; mais dès qu'il efl diffous, il fe combine aifément, & même fortement avec cet acide ; car la mine d'argent cornée paroît être formée par l'adion de l'acide marin (o) ; cette mine fe fond très-aifément, & même fe volatilife à un feu violent (p).

(o) ÉIcmens de Chimie, par M. de Morveau, tome I, page 1 1 ^>

(p) « On retire de la Lune-cornée, l'argent bien plus pur que celui y> de la coupelle ; mais l'opération efl laborieufe , & préfente un » phénomène intéreflant. L'argent qui , comme l'on Tait , eft une >■> fubllance très-fixe, y acquiert une telle volatilité qu'il eft capable » de s'élever comme le mercure , de percer les couvercles des V* creufets , &c . . . . Il faut aulîl qu'il éprouve dans cet état , une » Torte d'âtiraâioa de iranfmiflioa au travers des pores de^ vaiflTçavix

DES Minéraux. 47

L'acide viiriolique attaque l'argent en maiïe au moyen de la chaleur ; il le difTout même complètement , & en faifànt diftiller cette diffolution, l'acide pafTe dans le réci- pient, & forme un fel qu'on peut appeler vitriol d'argent.

Les acides animaux &. végétaux, comme Tacide des fourmis ou celui du vinaigre, n'attaquent point l'argent dans fon état de métal , mais ils difToIvent très-bien fes jnécipités (q) ,

Les alkalis n'ont aucune adionfur l'argent, ni même fur fes précipités ; mais lorfqu'ils font imis aux principes du foufre , comme dans le foie de fbufre , ils agiffent puifTamment fur la fubflance de ce métal qu'ils noir- ci/fent & rendent aigre & caffant.

Le foufre qui facilite la Rifion de l'argent, doit par conféquent en altérer la flibftance ; cependant il ne l'attaque pas comme celle du fer & du cuivre qu'il transforme en pyrite ; l'argent fondu avec le fbufre peut en être féparé dans un inftant, par l'addition du nitre qui, après la détonation, lai/Te l'argent fans perte fèn- fible ni diminution de poids. Le nitre réduit au con- traire le fer & le cuivre en chaux, parce qu'il a une a6lion dired:e fur ces métaux &. qu'il n'en a point fur J 'argent.

les plus compares , puifque l'on trouve une quantité de grenailles « d'argent difleminées jufque dans la tourte qui fupportoit le creufet ». ÉUmens de Chimie , par M. de Morveau , tome /, page 220, (q) Idem, tomt JJ, page 1 y, & tome JJJ, page 1 ^,

^.S Histoire Naturelle

La farface de l'argent ne fe convertit point en rouille par i'impreflion des ciémens humides; mais elle efl fujette à fe ternir, fe noircir &l fe colorer; on peut même lui donner l'apparence & la couleur de l'or en l'expofànt à certaines fumigations , dont on a eu raifon de profcrire i'ufage pour éviter la fraude.

On emploie utilement l'argent battu en feuilles minces pour en couvrir les autres métaux, tels que le cuivre & le fer: il fuffit pour cela de bien nettoyer la furface de ces métaux &l de les faire chauffer ; les feuiiles d'argent qu'on y applique s'y attachent 6c y adhèrent fortement. Mais comme les métaux ne s'uniffent qu'aux métatLx , & qu'ils n'adhèrent à aucune autre fubflance ; il faut, lorf- qu'on veut argenter le bois ou toute autre matière qui n'eft pas métallique , fe fèrvir d'une colle faite de gomme ou d'huile, dont on enduit le bois par plufieurs couches qu'on laiffe fécher avant d'appliquer la feuille d'argent fur la dernière ; l'argent n'eft en effet que collé fur l'enduit du bois , & ne lui eft uni que par cet intermède dont on peut toujours le féparer fans le fecours de la fiifion , & en faifant feulement brûler la colle à laquelle il étoit attaché.

Quoique le mercure s'attache promptement & affez fortement à la furface de l'argent, il n'en pénètre pas la maffe à l'intérieur; il faut le triturer avec ce métal pour en faire l'amalgame.

11 nous refte encore à dire un mot du fameux arbre

de

i>ES Minéraux. 49

cle Diane, dont les Charlatans ont fi fort abufé, en faifant croire qu'ils avoient le fecret de donner à l'or & à l'argeni la faculté de croître & de végéter comme les plantes; néanmoins cet arbre métallique n'eft qu'un aiïemblage ou accumulation des crifîaux produits par le travail de l'acide nitreux fur l'amalgame du mercure & de l'argent'; ces crifîaux groupent fucceffivement les uns fur les autres, &. s'accumulant par fuperpofition , ils repréfentem groffièremeut la figure extérieure d'une végétation (^rj.

{"rj Pour former l'arbre de Diane, on fait difToudre enfemble ou ft-parément , quatre gros d'argent & deux gros de mercure, dans l'eau forte précipitée, on étend cette diiïoiution par cinq onces d'eau diftillée , on verfe le mélange dans une petite cucurbite de verre , dans laquelle on a mis auparavant fix gros d'amalgame d'argent, en confiftance de beurre , & on place le vaifieau dans un endroit tranquille , à l'abri de toute commotion ; au bout de quelques heures , il s'élève de la mafle d'amalgame, un buifTon métallique avec de belles ramifications. Elémens de Chimie, par M. de Ahrveau, tome III, pngfs 4^4 & 4SJ'

Mhicraus t Tome IIL

50 Histoire Naturelle

DU CUIVRE.

UE la même manière & Jans ie même temps que les roches primordiales de fer fe font réduites en rouille par l'imprefîion des élémens humides , les mafles du cuivre primitif fe font décompofées en vert - de - gris , qui efl la rouille de ce métal, & qui, comme celle du fer , a été iranfportée par les eaux , <Sc difféminée fur la terre ou accumulée en quelques endroits , elle a formé des mines qui fe font de même dépofées par alluvion , Si. ont enfuite produit les minerais cuivreux de féconde &. de troifième formation ; mais le cuivre natif ou de première origine a été formé comme l'or & l'argent dans les fentes perpendiculaires des montagnes quart- zeufes, 6l il fe trouve, foit en morceaux de métal malTif, foit en veines ou fiions mélangés d'autres métaux. li a été liquéfié ou fuhlimé par le feu, & il ne faut pas confondre ce cuivre natif de première formation avec le cuivre en flalaélites , en grapes ou filets, que nos Chimifles ont également appelés aiirres natifs (a) , parce qu'ils fe trouvent purs dans le fein de la terre ; ces der- niers cuivres font au contraire de troifième & peut-être de quatrième formation; la plupart proviennent d'ime cémentation naturelle qui s'efl faite par l'intermède du

(a) Lettres de M. Demefte au dodeur Bernard, tome II, paoc

DES Minéraux, 51

fer auquel le cuivre dccompofc s'efl attaché après avoir été clifTous par les fels de la terre. Ce cuivre rétabli dans fou état de métal par la cémentation, auiîi-bien que le cuivre primitif qui fubfifle encore en ma (Tes métalliques , s'efl offert le premier à la recherche des hommes : <& comme ce métal efl moins difficile à fondre que le fer , il a été employé long-temps auparavant pour fabriquer les armes & les inflrumens d'agriculture. Nos premiers pères ont donc ufé , confommé les premiers cuivres de l'ancienne nature; c'efl, ce me femble, par cette raifon, que nous ne trouvons prefque plus de ce cuivre primitif dans notre Europe non plus qu'en Ahe, il a été confommé par i'ufage qu'en ont fait les habitans de ces deux parties du monde très-anciennement peu- plées & policées , au lieu qu'en Afrique, & fur-tout dans le continent de l'Amérique, les hommes font plus nouveaux & n'ont jamais été bien civilifés , on trouve encore aujourd'hui des blocs énormes de cuivre en maffe qui n'a hefoin que d'une première fufion pour donner un métal pur, tandis que tout le cuivre miné- ralifé & qui fe préfente fous la forme de pyrites, demande de grands travaux, plufieurs feux de grillage, & même plufieurs fontes avant qu'on puiffe le réduire en bon métal ; cependant ce cuivre minéralifé eft prefque le feul que l'on trouve aujourd'hui en Europe ; le cuivre primitif a été épuifé, & s'il en refle encore, ce n'cfl que dans l'intérieur des montagnes oii nous

G i;

52 Histoire Naturelle

n'avons pu fouiller, tandis qu'en Amérique il fc préfente à nu, non -feulement fur les montagnes, mais jufque dans les plaines & les lacs , comme on le verra dans l'énumération que nous ferons des mines de ce métal , & de leur état aduel dans les différentes parties du monde.

Le cuivre primitif étoit donc du métal prefque pur, incrufté comme i'or & l'argent dans les fentes du quartz, ou mêlé comme le fer primitif dans les mafles vi- treufcs ; & ce métal a été dépofé par fufion ou par iubli- mation dans les fentes perpendiculaires du Globe dès le temps de fa confolidation ; l'aélion de ce premier feu en a fondu & fliblimé la matière, &. l'a incorporée dans les rochers vitreux; tous les autres états dans lefquels fe préfènte le cuivre, font poftérieurs k ce premier état, &. les minerais mêlés de pyrites , n'ont été produits , comme les pyrites elles-mêmes, que par l'intermède des élémens humides : le cuivre primitif attaqué par l'eau, par les acides, les fels, & même par les huiles des végé- taux dccompofés , a change de forme; il a été altéré, minéralifé, détérioré, & il a fu])i un û grand nombre de transformations qu'à peine pourrons- nous le fuivre dans toutes lès dégradations &. décompofitions.

La première & la plus fimple de toutes les décom- pofitions du cuivre eft converfion en vert-de-gris ou verdet ; l'humidité de l'air ou le plus léger acide, fuilifem pour produire cette rouiik verte; ainfi dès les

D E s M I N É R A U X, 53

premiers temps , après ia chute des eaux , toutes les furfaces des blocs du cuivre primitif ou des roches vitreufès dans le/quelles il étoit incorporé & fondu, auront plus ou moins fubi cette altération ; la rouille verte aura coulé avec les eaux, & fe fera difTéminée fur la terre ou dépofée dans les fentes &l cavités nous trouvons le cuivre fous cette forme de verdet. L'eau , en s'infiltrant dans les mines de cuivre, en détache des parties métalliques , elle les divife en particules fi ténues que fbuvent elles font invifibles , & qu'on ne les peut reconnoître qu'au mauvais goût &l aux effets encore plus mauvais de ces eaux cuivreufès, qui toutes décou- lent des endroits giffent les mines de ce métal , & communément elles font d'autant plus chargées de parties métalliques qu'elles en font plus voifmes : ce cuivre diïïbus par les fels de la terre &. des eaux , pénètre les matières qu'il rencontre ; il fe réunit au fer par cémenta- tion , il fe combine avec tous les fels acides &l alkalins ; & fe mêlant auffi avec les autres fubflances métalliques , il fe préfente fous mille formes différentes , dont nous ne pourrons indiquer que les variétés les plus confiantes.

Dans fes mines primordiales , le cuivre eft donc fous fa forme propre de métal natif, conune l'or & l'argent vierge; néanmoins il n'eft jamais auffi pur dans fon état de nature qu'il le devient après avoir été rafHné par notre art; dans cet état primitif il contient ordinairement une petite quantité de ces deux premiers métaux ; ils

54- Histoire N atu re lle

paroifTcnt tous 'trois avoir été fondus enfèmble ou fublimés prefque en même temps dans les fentes de la roche du Globe ; mais de plus, le cuivre a été incor- poré <& mêlé, comme le fer primitif, avec la matière vitreufe : or, l'on fait que le cuivre exige plus de feu que l'or & Targent pour entrer en fufion, & que le fer en exige encore plus que le cuivre; ainfi ce métal tient entre les trois autres le milieu dans Tordre de la lufion primitive, puifqu'il fe préfente d'abord comme l'or & l'argent, fous la forme de métal fondu, & encore comme le fer, /bus la forme d'une pierre métallique. Ces pierres cuivreufès font communément teintes ou tachées de vert ou de bleu, la feule humidité de l'air ou de la terre donne aux par- ticules cuivreufès cette couleur verdâtre , & la plus petite quantité d'aikali volatil la change en bleu ; ainfi cqs maffes cuivreufès qui font teintes ou tachées de vert ou de bleu> ont déjà été attaquées par les élémens humides ou par les vapeurs alkalines.

Les mines de cuivre tenant argent, font bien plus communes que celles qui contiennent de l'or ; & comme le cuivre efl plus léger que l'argent, on a obfervé que dans les mines mêlées de ces deux métaux , la quantité d'argent augmente à mefure que l'on defcend ; en forte que le fond du filon donne plus d'argent que de cui\Te, & quelquefois même ne donne que de f argent (b) ,

(h) Le cuivre le forme près de l'or & de l'argent, dans des pierres mincrales de difFc'rentes couleurs , quoique toujours marqut'es de

DES Minéraux. 55

tandis que dans fa partie fupérieure ii n'avoit ofîert que du cuivre.

En général , les mines primordiales de cuivre font afTez fouvent voifmes de celles d'or & d'argent, & toutes font fituées dans les montagnes vitreufes produites par le feu primitif; mais les mines cuivreufès de féconde formation & qui proviennent du détriment des premières, giffent dans les' montagnes fchiiîeufes , formées comme les autres montagnes à couches , par le mouvement &. le dépôt des eaux. Ces mines fecondaires ne font pas auffi riches que les premières : elles font toujours mé- langées de pyrites & d'une grande quantité d'autres matières hétérogènes (c ).

bleu & de vert. En fuivant les veines de cuivre pur , on rencontre quelquefois de riches échantillons d'or très - fin ; jnais il ell plus ordinaire de trouver de l'argent: quand on aperçoit quelqu'échan- tilfon d'argent fur Ja luperficie des veines de cuivre, le fond a coutume d'être riche en argent. ... La luperficie de la mine d'OJIologué au pays de Lipes , étoit de cuivre pur; mais à mefure qu'on creufoit elle fe transformoit en argent , julqu'à devenir argent pur, AJctal- lurgie d' Alphovfe Barba , tome I , page i oy.

(c) Dans \qs montagnes à couches, le cuivre e/l ordinairement dans un compofé d'ardoife gris , noir ou bleuâtre , dans lequel il y a fouvent des pyrites cuivreufès, du vert-de-gris, ou du bleu de cuivre

parfenié très - finement Les ardoifes cuivreufès , qu'on trouve

communément dans les montagnes à couches, lont puiflantes depuis quelques pouces jufqu'à un pied <Sc demi , & rarement j)Ius ; elles font aufll très-pauvres en métal , ne donnent que deux ou trois livres de cuivre par quintal ; mais ce cuivre efl: très-bon. Injlruâicn fur ks îninesj par AI. Delius , tome I , pages Sy & S S,

56 Histoire Naturelle

Les mines Je troifième formation gifTent, comme les feconJes, dans les montagnes à couches, &l fe trou- vent non-feulement dans les fchifles , ardoifès & argiles , mais auiïi dans les matières calcaires ; elles proviennent du détriment des mines de première & de féconde for- mation, réduites en poudre ou diflbutes &l incorporées avec de nouvelles matières. Les Minéralogiftes leur ont donné autant de noms qu'elles leur ont préfenté de dif- férences. La chryfocolle ou vert de montagne, qui n'efl que du vert-de-gris très-atténué , la chryibcolle bleue qui ne diffère de la verte' que par la couleur que les alkalis volatils ont fait changer en bleu ; on l'appelle au/fi ûliir , lorfqu'il efl bien intenfè , & il perd cette belle couleur quand il efl expofé à l'air, & reprend peu à peu fa couleur verte , à mefure que l'alkali volatil s'en dégage ; il reparoît alors , comme dans fon pre- mier état, fous la forme de chryfocolle verte, ou fous celle de malachite : il forme auffi des criftaux verts & bleus fuivant les circonflances , & l'on prétend même qu'il en produit quelquefois d'auffi rouges & d'auffi tranf^ parens, que ceux de la mine d'argent rouge: nosChimifles récens en donnent pour exemple, les criftaux rou^^es qu'on a trouvés dans les cavités d'un morceau de métal enfoui depuis plufieurs fiècles dans le fein de la terre; ce morceau eft une partie de la jambe d'un cheval de bronze, trouvée à Lyon en 1771; mon favant ami, M. de Morveau, m'a écrit qu'en examinant au microfcope

les

D E s AI I N É R A U X. 57

les cavités de ce morceau, il y a vu non - feulement des criftaux d'uu rouge de rubis, mais aufTi d'autres criflaux d'un beau vert d'cmeraudc & tran/j^arens dont on n'a pas parié , & il me demande qu'cfl-ce qui a pu produire ces criftaux (dj f M. Demefte dit à ce Tujet, que l'azur & le vert du cuivre, ainfi que la malachite & les criftaux rouges qui trouvent dans ce bloc de métal , ancienne- ment enfoui , font autant de produits des différentes modifications que le cuivre, en état métallique, a fubies dans le fein de la terre (e) ; mais cet habile Chimifte me paroît fe tromper, en attribuant au cuivre feul f origine de ces petits cr'ijhmx qui font , dit-il , trcs-cclatans, & d'une vùiic rouge de cuivre tranfparente , comme la plus belle mine d'argent rouge : car ce morceau de métal n'étoit pas de cuivre pur, mais de bronze, comme il le dit lui-mcme,

(d) Lettres de M. de Morveau à M. de Buffon. Dijon , le 2 8 Août lySi.

(e) « Rien n'efl plus propre , dit-il , à démontrer le paflâge du cuivre natif aux mines fecondaires , que la jambe d'un cheval « antique de bronze, trouvée dans une fouille faite à Lyon en i 771 : « cette jambe qui avoit été dorée , offroit non-leulement de la mala- ce chite & de ra7ur de cuivre; mais on y remarquoit aufli plufieurs « cavités dont l'intérieur étoit tapifle de petits criftaux très-éciatans , «c de mine rouge de cuivre, tranfparente comine la plus belle mine te

d'argent rouge On peut donc avancer que l'azur & le vert «

de cuivre, ainfi que les criftaux rouges qui s'y rencontrent, font « autant de produits des différentes modifications que le cuivre en «: ctat métallique , a fubies dans le fein de la terre ». Lettres dt M. Demejle , &c. tome II, pages j/7 à" ^j8.

ATinéraux, Tome IIL H

5? Histoire Naturelle

c'efl-à-dire de cuivre mclé d'étain, & dès-iors ces criflaux row^ts peuvent être regardés comme des criflaux pro- duits par l'arfenic, qui refle toujours en plus ou moins grande quantité dans ce métal. Le cuivre feu! n'a jamais produit que du vert qui devient bleu quand ii éprouve i'adion de l'alicali volatil.

M. Demede dit encore « que l'azur de cuivre ou les

» fleurs de cuivre bleues, reffemblent aux criilaux d'azur

» artificiels ; que leur paflage à la couleur verte , lorfqu'elles

r> fc dccompofent , ell le même , &. qu'elles ne dilf èrent

qu'en ce que ces derniers l'ont folubles dans l'eau. »

Mais je dois obferver que néanmoins cette différence eft

telle qu'on ne peut plus admettre la même compofition ,

& quil ne refle ici qu'une reffemblance de couleur. Or,

le vitriol bleu pré/ènte ia même analogie , &. cependant

on ne doit pas le confondre avec le bleu d'azur. M.

Demede ajoute, avec toute raifon ce que l'alkali volatil

» efl plus commun qu'on ne croit à la furface & dans

^> l'intérieur de la terre qu'on trouve ces cri/laux

» d'azur dans les cavités des mines de cuivre déeompofées, » à. que quelquefois ces petits crirtaux font très-éclatans » & de l'azur le plus vif; que cet azur de cuivre prend » le nom de à/eu de înonmgne lorfqu'il efl mélangé à des » matières terreufes qui en affoiblilfent la couleur, & qu'enfin » le bleu de montagne , comme l'azur, font également fuf^ ceptibles de fe décompofer en paffant lentement à l'état ^> de malachite .... que la malachite, le vert de cuivre ou

»j

DES Minéraux. ^9

fleurs de cuivre vertes, rcfulteiu fouvent de l'altération « fpoîitanée de l'azur de cuivre, mais que ce vert efl aufTi « produit par la dccompofition du cuivre natif (Si: des mines « de cuivre , à la furface dc/queiles on le rencontre en " malachites ou mafles plus ou moins confidcrables <Sl ma- « melonnées, & que ce font de vraies (laiadites de cuivre, « comme l'iiématite en eft une de fer (f); » tout ceci efl; très-vrai, & c'efl même de cette manière que les malachites font ordinairement produites ; la fimple dé- compofition du cuivre en rouille verie, entraînée par la filtration des eaux, forme des flalaélites vertes, &. cette combinaifon efl bien plus fimple que celle de l'al- tération de l'azur (Se de fa réduclion en fialadites vertes ou malachites : il en efl: de même du vert de montagne ; il efl produit plus communément par la hmple décom- pofition du cuivre en rouille verte: ai l'habile Chimifle que je viens de citer me paroît fe tromper encore en prononçant exclufivement, « que le vert de montagne efl toujours un produit de la décompofition du bleu de « montagne ou de celle du vitriol de quwxg (g) . » H me femble au contraire que~ c'efl le bleu de montagne qui iui-méme efl produit par l'altération du vert qui fe change en bleu; car la Nature a les mêmes moyens que TArt, &i peut par conféquent faire, comme nous, du vert avec du bleu, Ôa changer le bleu en vert fans

(f) Lçtires de M. Demefle , &c. tome II, pages ^ S j) & fuh, (a) Id€in, tome II, page ^70,

H i/

6o Histoire Naturelle

qu*il foit néceffaire Je recourir au cuivre natif pour produire ces effets.

Quoique le cuivre foit de tous les métaux celui qui approche le plus de l'or & de l'argent par fès attributs généraux, il en diiîère par pludeurs propriétés efTen- tielles ; fa nature n'efi: pas aufîi parfaite , fubflance eft moins pure, fa denlité &. fa duétilité moins grandes; & ce qui démontre le plus l'imperfection de fon effencc, c'cfl q-.i'il ne réfiffe pas à l'impreffion des élémens hu- mides; l'air, l'eau, les huiles & les acides l'altèrent & le convertifTent en verdet ; cette efpèce de rouille pé- nètre, comme celle du fer, dans l'intérieur du métal, & avec le temps en détruit la cohérence & la texture.

Le cuivre de première formation étant dans un état métallique, & ayant été fublimé ou fondu par le feu primitif, fe refond aifément à nos feux; mais le cuivre minéralifé, qui efl de féconde formation, demande plus de travail que toute autre minerai pour être réduit en métal; il efl donc à préfumer que comme le cuivre a été empto) é plus anciennement que le fer , ce n'efl que de ce premier cuivre de nature dont les Égyptiens, les Grecs & les Romains ont fait ufage pour leurs inff rumens & leurs armes (7/;, & qu'ils n'ont pas tenté de fondre les

(h) Les Anciens fe fervoient beaucoup plus de cuivre que de fer; Jes babitans du Pérou & du Mexique, empfoyoient le cuivre à tous les ufages auxquels nous employons le fer. Métallurgu d'Alphonfe Barba , tome I , page i q6.

DES Minéraux, 6i

minerais cuivreux qui demandent encore plus d'art ôl de travail que les mines de fer; ils favoient donner au cuivre un grand degré de dureté, ioit par la trempe, foit par Je mélange de l'étain ou de quelqu'autre minéral , (5c ils rendoient leurs inilrumens & leurs armes de cuivre propres à tous les ufàges auxquels nous employons ceux de fer. Ils allioient aufii le cuivre avec les autres mé- taux, & fur-tout avec l'or ôl l'argent. Le fameux airain de Corinthe, fi fort eflimé des Grecs fij, ctoit un mé- lange de cuivre , d'argent & d'or , dont ils ne nous ont pas indiqué les proportions, mais qui fai/bit un alliage plus beau que l'or par la couleur , plus fonore , plus élaflique, & en même temps aufTi peu fufceptibie de rouille & d'altération : ce que nous appelons airain ou bronze aujourd'hui , n'eft qu'un mélange de cuivre & d'étain , auxquels on joint fouvent quelques parties de zinc & d'antimoine.

Si on mêle le cuivre avec le zinc, fa couleur rouge devient jaune , ôl l'on donne à cet alliage le nom de anrrâ jaune ou laiton; il efl un peu plus denfe que le cuivre pur (k) , mais c'eft lorfque ni l'un ni l'autre n'ont été

(ï) yEr'i corinthio pretium ante argentum , ac pcnc etiam ante auruirip Plin. lib. XXXIV, ch. i.

(k) Selon M. Brilîbn , le pied cube de cuivre rouge fondu Se non forge', ne pèfe que 545 livres 2, onces 4 gros 35 grains, tandis qu'un pied cube de ce même cuivre rouge païïe à h filière ,. pèfe 6i\ livres 7 onces 7 gros 26 grains. Cette grande diâerence

dz Histoire Natu relle

comprimés ou battus , car il devient moins denfe que k cuivre rouge après la compre/Tion; le cuivre jaune efl auffi moins fujet à verdir, & fuivant les différentes dofes du mélange, cet alliage efl plus ou moins blanc, jaunâtre , jaune ou rouge ; c eft d'après ces différentes couleurs qu'il prend les noms àç. fimilor , àç, peïnchebcc & de métal de Prince ; mais aucun ne reflemble plus à l'or pur par le brillant &l la couleur que ie laiton bien poli, & fait avec la mine de zinc ou pierre calaminaire, comme nous l'indiquerons dans la fuite.

Le cuivre s'unit très-bien à l'or, &. cependant en diminue la dcnfité au-delà de la proportion du mélange, ce qui prouve qu'au lieu d'une pénétration intime , il n'y a dans cet alliage qu'une cxtenfion ou augmentation de volume par une fmiple addition de parties interpo/écs , iefquelles, en écartant un peu les molécules de l'or, & fe logeant dans les intervalles , augmentent la dureté <ft rélalliciié de ce métal qui, dans fon état de pureté, a plus de molieffe que de r^ffort.

L'or, l'argent &. le cuivre fe trouvent fouvent alliés

demoiiire que de tous les métaux , fe cuivre eft celui qui fe com- prime le plus; & la compreffioii par la filière, efl plus grande que celle de la percufllon par le marteau. M. Geller dit que la denfité de l'alliage, à parties égales de cuivre & de zinc, eft à celle du cuivre pur comme 878 font à 874. Chimie mitallurgique , tome I, page 26 y Mais M. BrifTon a reconnu que ie pied cuhe 4e cuivre jaune fundu & noa for^é, pèfç 5Ç7 livres.

DES Minéraux, 63

par la Nature dans les mines primordiales, & ce n*efl que par plufieurs opérations réitérées & difpendieufès, que l'on parvient à les fcparer ; il faut donc, avant d'en- ueprendre ce travail, s'afTurer que la quantité de ces deux métaux, contenue dans le cuivre, efl aiïez confi- dérable, <Sl plus qu'équivalente aux frais de leur féparation, il ne faut pas même s'en rapporter à des effais faits en petit, ils donnent toujours un produit plus fort, & fe font proportionnellement à moindres frais que les travaux en grand.

On trouve rarement le cuivre aîlié avec l'étain dan& le féin de la terre, quoique leurs mines foient fouvent très-voifmes , & même fuperpofées, c'eft-à-dire, l'étain au-defilis du cuivre ; cependant ces deux métaux ne laiffent pas d'avoir entr'eux une affinité bien marquée; le petit art de i'étamage efl fondé fur cette affinité ; l'étain adhère fortement & fans intermède au cuivre, pourvu que la fiirface en foit affez nette pour être touchée dans tous les points par l'étain fondu; il ne faut pour cela que le petit degré de chaleur néceffaire pour dilater les pores du cuivre & fondre l'étain, qui dès- lors s'attache à la furface du cuivre qu'on enduit de réfme pour prévenir la calcination de l'étain.

Lorfqu'on fond le cuivre & qu'on y mêle de l'étain, l'alliage qui en réfùite, démontre encore mieux l'affinité de ces deux métaux , car il y a pénétration dans leur mélange; la denfité de cet alliage, connu fous les noms

64 Histoire Nature lle

à' airain ou de ùroni<;, efl plus grande que celle du cuivre & de i'ctain pris enfemble, au lieu que la denfité des alliages du cuivre avec l'or & l'argent efl moindre , ce qui prouve une union bien plus intime entre le cuivre & l'étain qu'avec ces deux autres métaux , puifque le volume augmente dans ces derniers mélanges , undis qu'il diminue dans le premier; au refle, l'airain eft d'autant plus dur, plus aigre & plus fonore que Ja quantité d'étain efl plus grande, &. il ne faut qu'une partie d'ctain fur trois de cuivre pour en faire di/paroître la couleur, & même pour le défendre à jamais de rouille ou vert-de-gris , parce que l'étain efl, après Tor & l'argent, le métal ie moins fufceptible d'altération par les éiémens humides; & quand par la fucce/fion d'un temps très -long, W fe forme fur Tairain ou bronze, une efpèce de rouille ver- dâtre, c'eft, à la vérité, du vert-de-gris, mais qui s'étani formé très-lentement, & fe trouvant mêle d'une portion d'étain, produit cet enduit que Ton appelle paiine^ fur les flatues <Sc les médailles antiques fij.

Le cuivre & ie fer ont enièmble une afHnité bien marquée, & cette affinité efl i\ grande 6l fi générale qu'elle fe montre non - feulement dans les produélions de la Nature, mais aufîi par les produits de l'art. Dans le nombre infini de mines de fer qui fe trouvent à la furface

-

(l) Cet enduit o\i patine ^e^ ordinairement verdatre, «Se quelquefois bieuâtre, & il acquiert avec le temps une fi grande dureté qu'il rcfjfte au burin. Lettres de M. Demcfe , tome II, page ^7^.

OU

DES Minéraux, 65

ou dans l'intérieur de la terre, il y en a beaucoup qui font mêlées d'une certaine quantité de cuivre, & ce mélange a corrompu l'un & l'autre métal ; car d'une part on ne peut tirer que de très-mauvais fer de ces mines chargées de cuivre, ôl d'autre part il faut que la quantité de ce métal foit grande dans ces mines de fer, pour pouvoir en extraire le cuivre avec profit. Ces métaux qui femblent être 'amis , voifms, & même unis dans le fein de la terre , deviennent ennemis dès qu'on les mêle enfemble par le moyen du feu; une feule once de cuivre jetée dans le foyer d'une forge, fuffit pour corrompre un quintal de fer.

Le cuivre que l'on tire des eaux qui en font chargées, & qu'on connoît fous le nom de cuivre de cémentation , efl du cuivre précipité par le fer ; autant il fe difTout de fer dans cette opération, aiuant il adhère de cuivre au fer qui n'ell pas encore diffous , & cela par fmiple attraction de contact: c'eft en plongeant des lames de fer dans les eaux chargées de parties cuivreufès , qu'on obtient ce cuivre de cémentation, & l'on recueille par c^ moyen facile une grande quantité de ce métal en peu de temps (m). La Nature fait quelquefois une

(m) A Saint-Bel , l'eau qui iraverfe \ti mines de cuivre fe fature en quelque forte de vitriol de cuivre naturel , il luffit de jeter dans Jes baflîns , on reçoit cette eau, une quantité de vieilles ferrailles; on y trouve peu de jours après, un cuivre rouge pur; c'eft ce qu'on appelle cuivre de cémentation, Elémens de Chimie , par AI. ds /^orveaii , tome II , page ^ i .

MiticrauXj Tome IIL I

dd Histoire Naturelle

opération afTez fcmblable ; il faut pour cela que le cuivre diflbus rencontre des particules ou des petites mafles ferrugineufes, qui foient dans l'état métallique ou pre/que métallique, &. qui par confcquent aient fubi la violente adion du feu ; car cette union n'a pas lieu lorfque les mines de fer ont été produites par l'intermède de Teau, & converties en rouille, en grains, &c, ce n'eft donc que dans de certaines circonflances qu'il fe forme du cuivre par cémentation dans l'intérieur de la terre; par exemple, il s'opère quelque cliofè de femblable dans la production de certaines malachites , &. dans quelques autres mines de féconde & de troifième formation, Je vitriol cuivreux a été précipité par le fer , qui a plus que toute autre métal , la propriété de féparer &. de pré- cipiter le cuivre de toutes fes diffolutions.

L'affinité du cuivre avec le fer , efl encore démontrée par la facilité que ces deux métaux ont de fe fbuder enfemble ; il faut feidement en les tenant au feu , les empêdier de fe calciner & de brûler, ce que l'on prévient en les couvrant de borax ou de quelques autres matières fufibles , qui les défende de l'action du Àe\x animé par l'air : car ces deux métaux fouffrent toujours beaucoup de déchet &. d'altération par le feu libre , lorfqu'ils ne font pas parfaitement recouverts &. défendus du contaél de l'air.

Il n'y a point d'affinité apparente entre le mercure & le cuivre ; puifqu'il faut réduire le cuivre en poudre

D E s M I N É R A U X. dy

& les triturer enfembie fortement & long-temps, pour que le mercure s'attache à cette poudre cuivreufe ; ce- pendant il y a moyen de les unir d'une manière plus apparente & plus intime ; il iaut pour cela plonger du cuivre en lames dans le mercure difFout par l'acide nitreux ; ces lames de cuivre attirent le mercure difTout, & deviennent au/Ti blanches, à leur furface , que les autres métaux amalgamés de mercure.

Quoique le cuivre puifTe s'allier avec toutes les ma- tières métalliques, & quoiqu'on le mêle en petite quantité dans les monnoies d'or & d'argent pour leur donner de la couleur ik. de la dureté, on ne fait néanmoins des ouvrages en grand volume qu'avec deux de ces alliages ; le premier avec l'étain pour les ftatues , les cloches , les canons ; le fécond avec la calamine ou mine de zinc pour les chaudières & autres uftenfiles de ménage: ces deux alliages , l'airain & le laiton , font même devenus auffi communs & peut-être plus néceflaires que le cuivre pur , puifque dans tous deux la qualité nuifible de métal, dont l'ulage eft très -dangereux, trouve corrigée; car de tous les métaux que l'homme peut employer pour fbn fervice, le cuivre efl celui qui produit les plus foneflcs effets.

L'alliage du cuivre & du zinc n'efl pas aigre & caffant comme celui du cuivre 6l de l'étain ; le laiton conferve de la dudilité , il réfifte plus long-temps que le cuivre pur, à l'aétion de l'air humide & des acides qui produifent

68 Histoire Naturelle

le vert -de -gris, & il prend l'étamage aufTi facilement. Pour faire du beau & bon laiton, il faut trois quarts de cuivre & un quart de zinc, mais tous deux doivent être de la plus grande pureté. L'alliage à cette dofe eft d'un jaune brillant, & quoiqu'en général tous les alliages foient plus ou moins aigres , & qu'en particulier le zinc n*ait auctme ductilité, le laiton néanmoins, s'il efl faic dans cette proportion, efl aufTi dudile que le cuivre même; mais comme le zinc tiré de fa mine par la fufion, n'efl prefque jamais pur, & que pour peu qu'il foit mêlé de fer ou d'autres parties hétérogènes, il rend le laiton aigre & cafTant ; on fe fert plus ordinairement & plus avantageufement de la calamine qui efl une des mines du zinc ; on la réduit en poudre , on en fait un cément en la mêlant avec égale quantité de poudre de charbon humeétée d'un peu d'eau ; on recouvre de ce cémenî les lames de cuivre , & l'on met le tout dans une caiffe ou creufèt que l'on fait rougir à un feu gradué, jufqu'à ce que les lames de cuivre foient fondues. On laifTe cnfuite refroidir le tout & l'on trouve le cuivre change en laiton & augmenté d'un quart de fon poids fi l'on a employé un quart de calamine fiir trois quarts de cuivre, & ce laiton fait par cémentation a tout autant de dudilité à froid que le cuivre même : mais comme le dit très - bien M. Alacquer fnj, \\ n'a pas la même

(n) Dii^iowwire Chimiç, à l'anicle du Cuivre Jaune,

D E s Af I N É R A U X. 6^

malléabilité à chaud qu'à froid, parce que le zinc fe fondant plus vîte que le cuivre , Talliagc alors n'efl plus qu'une e/pèce d'amalgame qui efl trop mou pour fouiîfrir la percu/fion du marteau. Au refte, il paroît par le procédé &. par le produit de cette forte de cémentation , que le zinc contenu dans la calamine eft réduit en vapeurs par le feu , & qu'il efl par conféquent dans plus grande pureté lor/qu'il entre dans le cuivre ; on peut en donner la preuve en faifànt fondre à feu ouvert le laiton , car alors tout le zinc s'exhale luccefTivement en vapeurs ou en tiammes , 8l emporte même avec lui une petite quantité de cuivre.

Si l'on fond le cuivre en le mêlant avec l'ar/ènic, on en fait une efpèce de métal blanc qui diffère du cuivre jaime ou laiton , autant par la qualité que par la couleur, car il eft aufli aigre que l'autre eft duétile; &. fi l'on mcle à différentes dofes le cuivre, le zinc & J'arfenic, l'on obtient des alliages de toutes \cs teintes du jaune au blanc & de tous les degrés de duélilité du liant au caffant.

Le cuivre en fufion forme , avec le fbufre , une efpèce de matte noirâtre, aigre & caffante, affez femblabie à celle qu'on obtient par la première fonte des mines pyriteufës de ce métal : en le pulvcrifànt & le détrem- pant avec un peu d'eau, on obtient de même par fon mélange avec le foufre auffi pulvérifé , une maffe folide affez femblabie à la matte fondue.

Un fil de cuivre d'un dixième de pouce de diamètre^

70 Histoire Naturelle

peut foutenir un poids d'environ trois cents livres avant de (c rompre; & comme denfité n'efl tout au plus que de fix cents vingt-une livre & demie par pied cube, on voit que fa ténacité efl proportionnellement beaucoup plus grande que fa denfité. La couleur du cuivre pur efl d'un rouge-orangé , & cette couleur quoique fauffe , eft plus éclatante que le beau jaune de l'or pur. Il a plus d'odeur qu'aucun autre métal, on ne peut lefentir fans que l'odorat en foit défagréablement affeété , on ne peut le toucher fans s'infeder les doigts , &. cette mauvaifè odeur qu il répand & communique en le maniant & le frottant, efl; plus permanente & plus difficile à corriger que la plupart des autres odeurs. Sa faveur plus que répugnante au goût, annonce fes qualités funefles ; c'efl dans le règne minéral le poifbn de nature le plus dangereux après Tarfenic.

Le cuivre efl; beaucoup plus dur & par conféquent beaucoup plus élaflique &. plus fonore que l'or, duquel néanmoins il approche plus que les autres métaux im- parfaits, par fa couleur (& même par fa dudilité, car il efl: prefque auffi dudile que l'argent : on le bat en feuilles auffi minces & on le tire en filets très-déliés.

Après le fer, le cuivre efl; le métal le plus difficile à fondre ; expofé au grand feu il devient d'abord cha- toyant & rougit long-temps avant d'entrer en fiifion ; il faut ime chaleur violente &l le faire rougir à blanc pour qu'il fe liquéfie, à. lorfqu'il eft bien fondu il bout 6c

DES Minéraux, j\

diminue de poids s'il efl expofc à l'air, car furlace fe bride & fe calcine dès qu'elle n'eft pas recouverte , & qu'on néglige de faire à ce métal un bain de matières vitreufes , & même avec cette précaution il diminue de maffe & fouffre du déchet à chaque fois qu'on le fait rougir au feu : la fumée qu'il répand efl en partie métal- lique , & rend verdâtre ou bleue la flamme des charbons , & toutes les mat/ères qui contiennent du cuivre donnent à la flamme ces mêmes couleurs vertes ou bleues : néan- moins fa fubflance efl affez fixe , car il réfifle plus long- temps que le fer, le plomb & l'étain à la violence du feu avant de fe calciner ; lorfqu'il efl expofé à l'air libre (Se qu'il n'efl pas recouvert, il fe forme d'abord à furface de petites écailles qui furnagent la maffe en fulion ; ce cuivre à demi -brûlé, a déjà perdu fa duc- tilité & fbn brillant métallique, & fe calcinant cnfuite de plus en plus il fe change en une chaux noirâtre qui , comme les chaux du plomb &. des autres métaux , augmente très-confidérablement en volume &. en poids par la quantité de i'air qui fe fixe en fe réuniffant à leur fubflance. Cette chaux efl bien plus difficile à fondre que le cuivre en métal , & lor/qu'elie fubit l'adion d'un feu violent , elle fe vitrifie & produit un émail d'un brun chatoyant qui donne au verre blanc une très-belle couleur verte; mais fi l'on veut fondre cette chaux de cuivre feule en la pouffant à un feu encore plus violent, elle fe brûle en partie & laiffe un réfidu qui n'efl qu'une

72 Histoire Naturelle

erpèce de fcorie vitrcufe &l noirâtre, dont on ne peut enfùite retirer qu'une très-petite quantité de métal.

En laiffant reiroidir très - lentement & dans un feu o-radué le cuivre fondu , on peut le faire criflallifer en crillaux proéminens à fa furface & qui pénètrent dans fou intérieur; il en efl: de même de l'or, de l'argent &. de tous les autres métaux & minéraux métalliques ; ainfi la criftallifation peut s'opérer également par le moyen du feu comme par celui de l'eau ; &. dans toute ma- tière liquide ou liquéfiée il ne faut que de i'e/pace , du repos & du temps pour qu'il fe forme des cridallifations par l'attradion mutuelle des parties homogènes <Sc fnnilaires.

Quoique tous les acides puiffent diffoudre le cuivre, il faut néanmoins que l'acide marin & fur-tout l'acide vitriolique foient aidés de la chaleur, fans quoi la dif- folution feroit excefTivement longue, l'acide nitreux le diffout au contraire très-promptement, même à froid ; cet acide a plus d'affinité avec le cuivre qu'avec l'argent, car l'on dégage parfaitement l'argent de fa diffolution, & on le précipite en entier & fous fa forme métallique par l'intermède du cuivre. Comme cette diffolution du cuivre par l'eau-forte, fe fait avec grand mouvement & forte elîèrvefcence , elle ne produit point de crifîaux, mais feulement im fel déliquefcent , au lieu que les dif^ folutions du cuivre par l'acide vitriolique ou par l'acide marin faifant lentement & fans cbullition, donnent de

gros

TiES Minéraux. 73

gros criflaux d'un beau bleu qu'on appelle viir'iol de Chypre ou vïinol bleu j ou des criflaux en petites aiguilles d'un beau vert.

Tous les acides végétaux attaquent auffi le cuivre; c'efl avec l'acide du marc des raifnis qu'on fait le vert- de-gris dont fe fervent les peintres ; le cuivre avec l'acide du vinaigrq, donne des criflaux que les Chimifles ont nommés cr'iflaux de Vénus. Les huiles, le fuif (Si. les graiffes attaquent auffi ce métal , car elles produifent du vert-de- gris à la furface des vaifleaux & des uflenfdes avec lefquels on les coule ou les verfe. En général , on peut dire que le cuivre efl; de tous les métaux celui qui fe laifTe en- tamer , ronger, dilfoudre le plus facilement par un grand nombre de fubflances ; car indépendamment des acides , des acerbes , des fels , des bitumes , des huiles & des graiffes, le foie de foutre l'attaque & i'alkali volatil peut même le diffoudre ; c'eft à cette difTolution du cuivre par I'alkali volatd qu'on doit attribuer l'origine des malachites de féconde formation. Les premières malachites, c'cfl-à-dire , celles de première formation, ne font, comme nous l'avons dit, que des flala6lites du cuivre diffous en rouille verte ; mais les fécondes peuvent provenir des diffolutions du cuivre par I'alkali volatil, lorfqu'elles ont perdu leur couleur bleue <Sl repris la couleur verte, ce qui arrive dès que I'alkali volatil s'eil diffipé. « Lorfque I'alkali volatil , dit M. Macquer, a diffous le cuivre jufqu'à faturation, ref}3èce de fel << Mmcraux, Tome IIL K

74- Histoire Naturelle

métallique qui rtfulte Je cette combinaifon , forme des criftaux d'un bleu-1'oncé & des plus beaux ; mais par l'expofitioii à l'air, l'alkali fe fepare &l fe difTipe peu-à- peu ; la couleur bleue des crifîaux , dans icfquels il ne refle prefque que du cuivre, fe change en un très-beau vert, & le compofc relTemble beaucoup à la malachite; il efl très - po/î'ibie que le cuivre contenu dans cette pierre ait précédemment été difTous par l'alkali \olatil, & réduit par cette matière faline dans l'état de mala- chite ( o ) . ^^

Au rcfle, les huiles, les graifTes & les bitumes n'at- taquent le cuivre que par les acides qu'ils contiennent; «Si. de tous les alkalis, l'alkali volatil eft celui qui agit le plus puiffamment fur ce métal; ainh l'on peut afîurer qu'en général tous les fèls de la terre & des eaux, foit acides, foit alkalins, attaquent le cuivre & le diffolvent avec plus ou moins de promptitude ou d'énergie.

Il eft aifé de retirer le cuivre de tous les acides qui le tiennent en diffolution , en les faifant fimplement éva- porer au feu ; on peut auffi le féparer de ces acides en employant les alkalis fixes ou volatils, & même les fubflances calcaires ; les précipités feront des poudres vertes, mais elles feront bleues fi les alkalis font cauftiques comme ils le font en effet dans les matières calcaires lorfqu'elles ont été calcinées. Il ne faudra qu'ajouter à

(o) Didionnaire de Chimie , article Cuhre.

DES Minéraux, y^

ce précipité ou chaux de cuivre , comme à toute autre chaux métallique, une petite quantité de matière inflam- mable pour la réduire en métal : & fi l'on fait fondre cette chaux de cuivre avec du verre blanc, on obtient des émaux d'un très-beau vert; mais on doit obferver qu'en général les précipités qui fe font par les alkalis ou par les matières calcaires, ne fe préfentent pas /bus leur forme métallique , & qu'il n'y a que les précipités par un autre métal, les réfidus après l'évaporation des acides foient en effet fous cette forme, c'eft-à-dire, en état de métal, tandis que les autres précipités font tous dans l'état de chaux.

On connoît la violente adion du foufre fur le fer, & quoique fa puiffance ne fbit pas auffi grande fur le cuivre , il ne laiffe pas de l'exercer avec beaucoup de force fpj; on peut donc féparer ce métal de tous les autres métaux , par l'intermède du foufre qui a plus d'affinité avec le cuivre qu'avec l'or, l'argent, l'étaiii & le plomb, & lorfqu'il eft mêlé avec le fer, le foufre peut encore les féparer, parce qu'ayant plus d'affinité avec le fer qu'avec le cuivre, il s'empare du premier & abandonne le dernier. Le foufre agit ici comme ennemi; car en accélérant la fufion de ces deux métaux,

(p) Les lames de cuivre Ilratitiees avec le loufie , forment une efpèce de marte aigre , cafTante , de couleur de fer ... . Cette ope'- ration réuflit également par la voie humide, en employant le cuivre en limaille, & en détrempant le mélange avec un peu d'eau. ElémcnS de Chimie , par Ai, de Morve au , tome II , page j j».

Kij

76 Histoire Naturelle

il ies dénature en même temps , ou plutôt il les ramène par force à leur état de minéralifation, & cl -ange ces met. ux e^i mnérais ; car le cuivre & le fer fondus avec le foufre, ne font plus que des pyrites fcmblables aux minerais pyriteux , dont on tire ces métaux dans leurs m'-nes de féconde formation.

Les filons le cuivre trouve dans l'état de métal, font les feules mines de première formation. Dans les mines fecondaires, le cuivre fe préfente fous la forme de minerai pyriteux, & dans celles de troi^ ficme formation, il a palfé de cet état minéral ou pyriteux, à l'état de rouille verte, dans lequel il a fubi de nouvelles altérations , & mille comi^inaifons diverfes par le conta6l & Taélion des autres fubflances falines ou métalliques. Il n'y a que les mines de cuivre primitif, que Ton puiffe fondre fans les avoir fait- griller auparavant ; toutes celles de féconde formation , c'eff -à-dire, toutes celles qui font dans un état pyriteux demandent à être grillées plufieurs fois; & fouvent encore. après plufieurs feux de grillage, elles ne donnent qu'une matte cuivreufe mêlée de foufre, qu'il faut refondre de nouveau, pour avoir enfin du cuivre noir dont on ne peut tirer le cuivre rouge en bon métal, qu'en faifant paffer & fondre ce cuivre noir au feu violent & libre des charbons enflammés , il achève de fe fépa- rer du foufre, du fer & des autres matières hétérogènes qu il contenoit encore dans cet état de cuivre noir.

Ces mines de cuivre de féconde formation peuvent

DES Minéraux. yy

fe réduire à deux ou trois fortes; la première eft la pyrite cuivreule , qu'on appelle aufTi improprement marcajfite , qui contient une grande quantité de foufre & de fer, & dont il efl très - difficile de tirer le peu de cuivre qu'elle renferme (q) ; la féconde efl la mine jaune de cuivre, qui efl aulfi une pyrite cuivreufe, mais moins chargée de foufre & de fer que la première; la troifième eft la mine de cuivre grife, qui contient de l'arfenic avec du foufre , &. fotivent un peu d'argent : cette mine grifè paroît blanchâtre , claire & brillante lorfque la quantité d'argent efl un peu confidérable , & fi elle ne contient point du tout d'argent, ce n'cft qu'une pyrite plutôt arfenicale que cuivreufe (r) .

(q) La inarcafîjte ou pyrite cuivreufe, efl: très-pauvre en métal de cuivre; mais elie contient beaucoup de fer, de foufre, &. quelquefois même un peu d'arfenic. . . . elie eft fi dure qu'elle donne des étincelles avec le briquet. Lettres de M. Demejle , tome II, page ^6 y.

(r) Ces différentes mines de cuivre grifes , éprouvent dans le fein de la terre , divers degrés d'altération , à proportion que leurs miné- ralifateurs fe volatilifent , elles paflent alors par divers états fuccefllfs de dfccompofition , auxquels on a donné les noms de m'im^s de cuivre vitreufe hépat'ique , violette ou apurée , de mine de cuivre vitreufe couleur de poix, d'azur & de vert de cuivre, de malachite, ôc enfin de bleu Ù" de vert de montagne. . . . Les couleurs rougeâtre, pourpre, violette, azurée , le chatoyement de l'efpèce de glacé qu'on obferve à la fur- face de la mine de cuivre hépatique, violette ou azurée, font dues à la di^îxpation plus ou moins confidérable des fubflances arfénicales & fulfureufes. ... Si la décompofuion efl plus avancée, les couleurs vives font remplacées par une teinte d'un brun - rougeâtre foncé. Lettres de AL Demejle, tome 11^ pages ^^4 àr j^j»

78 Histoire N atv relle

Pour donner une idée nette des travaux qu'exigent

ces minerais de cuivre avant qu'on ne puifle les réduire

en bon métal, nous ne pouvons mieux faire que de

rapporter ici par extrait les obfervations de feu M. Jars,

qui s'ell: donné la peine de fuivre toutes les manipulationé

& préparations de ces mines , depuis leur extraélion

jufqu'à leur converfion en métal rafiné. « Les minéraux

» de Saint-Bel & de Cheflcy dans le Lyonnois , font,

j> dit-il, des pyrites cuivreufes, auxquelles on donne deux,

trois ou quatre grillages avant de les fondre dans un

fourneau à manclie , elles produifènt des mattes qui

doivent être grillées neuf à dix fois avant que de donner

par la fonte leur cuivre noir : ces mattes font des maffes

régulines, contenant du cuivre, du fer, du zinc, une

très-petite quantité d'argent & des parties terreufès , le

5> tout réuni par une grande abondance de foufre.

» Le grand nombre de grillages que l'on donne à ces

» mattes avant d'obtenir le cuivre noir, a pour but de faire

» brûler & volatilifer le foufre , & de défunir les parties

» terreftres d'avec les métalliques ; on fait enfuite fondre

» cette matte en la Gratifiant à travers les cbarbons, & les

» particules de cuivre fe réunifTent entr'elles par la fonte,

& vont par leur pefanteur fpécifique occuper la partie

inférieure du baffm delliné à les recevoir.

Mais lorfqu'on ne donne que très-peu de grillage à >> ces mattes , il arrive que les métaux qui ont moins ?> d'affinité avec le foufre, qu'il n'en a lui-même avec les

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DES Minéraux. 79

autres qui compofent la mafTe rcguline, ie précipitent ies premiers ; on peut donc conclure que Targent doit fe précipiter le premier, enfuitc le cuivre, & que le foufre refle uni au fer. Mais l'argent de ces mattes paroît être en trop petite quantité pour fe précipiter fèul ; d'ailleurs il eft impofTible de failir dans les travaux en grand, le point précis du rôtiflage qui fcroit nccelTaire

pour rendre la féparation exacfte & il ne ih fait

aucune précipitation, fur -tout par la voie sèche, fans que le corps précipité n'entraîne avec lui du précipitant & de ceux auxquels il étoit uni (^/J . »

Ces mines de Saint-Bel & de ChelTey, ne contiennent guère qu'une once d'argent par quintal de cuivre , quantité trop petite pour qu'on puiiïe en faire la fépa- ration avec quelque profit. Leur minerai efl: une pyrite cuivreufe mêlée néanmoins de beaucoup de fer. Le mi- nerai de celles de Chelley contient moins de fer & beaucoup de zinc, cependant on les traite toutes deux à peu-près de la même manière. On donne à ces pyrites , comme le dit M. Jars , deux,, trois & ju/qu'à quatre feux de grillage avant de les fondre. Les mattes qui pro- viemient de la première fonte , doivent encore être grillées neuf ou dix fois avant de donner, par la fufion, ieur cuivre noir : en général , le traitement des mines de

ffj Mémoires de l'Académie des Sciences, année J /y o, pciges

So- Histoire Naturelle

cuivre cft d'autant plus difficile & plus long, qu'elles contiennent moins de cuivre & plus de pyrites , c'eft- à-dire, de foufre & de fer, & les procédés de ce trai-. renient doivent varier fuivant la qualité ou la quantité des dilïcrens métaux &. minéraux contenus dans ces mines. Nous en donnerons quelques exemples dans lYnumé- ration que nous allons faire des principales mines de cuivre de l'Europe & des autres parties du Monde.

En France, celles de Saint-Bel & de Cheiïey, dont nous venons de parler , font en pleine &. grande exploi- tation, cependant on n'en tire pas la vingtième partie du cuivre qui fe confomme dans le royaume. On exploite auiïi quelques mines de cuivre dans nos provinces voi- fmes des Pyrénées & particulièrement à Baygory dans la baffe Navarre (t) . Les travaux de ces mines font dirigés par un habile Minéralogifle, M. Hettlinger, que j'ai déjà eu occafion de citer, & qui a bien voulu m'envoyer

pour

(t) Dans la bafTe Navarre, à Baygori , on découvrit en 174^, cinq cents trente - trois ])ieds de fiions , fuivis par trois galeries <3c par trois puits; ces filons avoient un, deux & trois pieds de largeur. Le minerai , tant pur que celui qu'il faut piler &' laver , y ell enve- loppé dans une gangue blanche, du genre des quartz vitrifiabies; & il efl. à remarquer que la plupart des mines de cuivre de cette contrée, font mêlées de fer dans leur minerai, & que celle de Baygori , eft la feule qui n'en contienne pas.

Ce minéral de Baygori , efl jaune quand on le tire d'un endroit fec du filon , <Sc pour peu qu'il y ait d'humidité , il prend toutes fortes de belles couleurs. . . . Mais ces couleurs s'effacent en moins

de

DES Minéraux. 8i

pour le Cabinet du Roi, quelques échantillons des minéraux qui s'y trouvent, & entr'autres de la mine de fer en écailles qui eft très - fingulière , & qui fe forme dans les cavités d'im filon mêlé de cuivre & de fer (u),

11 y a aufîl de riches mines de cuivre & d'argent à Gîromagny ÔL au Puy dans la haute Aliace ; on en a tiré en une année fèize cents marcs d'argent & vingt-quatre milliers de cuivre : on trouve auiïi d'autres mines de cuivre à Stehnbach , à Saint - Nicolas dans le Val de Lehenhal , & à AJlenbach (x) .

En Lorraine, la mine de la Croix donne du cuivre, du plomb & de l'argent ; il y a aulTi une mine de cuivre à Fraife , &. d'autres aux villages de Sainte-Croix & de Z/Z/J^ qui tiennent de l'argent; d'autres à la montagne

de deux ans à l'air, & dirparoiflent même pour peu qu'on chauffe le minerai. . . .

En 1752, on de'couvrit dans la même montagne, un filon de minéral gris, prefque maffif, contenant cuivre & argent; on en a vu un morceau qui pefoit vingt-fej;t livres fans aucune gangue, qui, par l'effai qu'en fit M. Hellot , donna dix-fept livres de cuivre &

trois marcs deux onces trois gros d'argent par qumtal fi(fcif

Hellot, Mémoires de l'Académie des Sciences, année ^75^» P^i^^

(u) Lettres de M. Hetilinger à M. de Buffon. Baygori , le i ^ Juin 1774*

(x) Traite' de la fonte des mines de Schlutter, tome I , pages

II à" 12.

Mittéraupc , Tome IIL L

82 Histoire Naturelle

du Tillot j au Val-de-licvre , à Vaudrevangcs , ÔL enfin plufieurs autres à Saime - Mûrie-mix-inmcs (y).

En Franche-comté, à Plûncher-lès-mhws ^ il y a aufiî des mines de cuivre, & auprès de Cliatedu-Lajjihcn W s'en trouve quatre veines placées l'une fur l'autre, & l'on prétend que cette mine a rendu depuis 'vingt jufqu'à cinquante pour cent de cuivre (i) .

On a au/Ti reconnu plufieurs mines de cuivre dans le \J\mo{\VL (,i) , en Dauphiné , en Provence, dans le Vi^•arais , le Gévaudan & les Cevcnnes (b) ; en Auvergne

^^ Traité de la fonte des mines de Schlutter, tome I , pages i & j?.

(-J Idem, page /j-.

(a) Dans le bas Limofni , au comté d'Ayen, il y a plufieurs filons de cuivre en verdet & en terre verte , qui donnent, l'un dix-fept & l'autre vingt-deux livres de métal par quintal. Une autre mine que j'ai découverte eft jilus abondante que les précédentes ; le cuivre y eft combiné avec le plomb, & donne vingt-trois livres de cuivre par quintal. Quoique ces mines foient médiocrement riches , elles peuvent être exploitées avec profit; elles ne font que des fuors, procédant de la décoir.pofition des mines primitives, & infiltrées dans des mafTes de gros fable quartzeux , qui ont été entraînées des montagnes du haut IJmofin. Lettres de M, le chevalier Grignon ; Paris, 2^ Juillet lySi.

(h) En Dauphiné, il y a une mine de cuivre dans Ja montagne de la Coche , au revers de la vallée du Grefivaudan , du côté de L oif an , dovïx l'exploitation eft abandonnée, à caufe de la difficulté: des chemins .... If y a une autre mine de cuivre fur la montagne des Hyercs, à cinq lieues du bourg d'Oiian, elle eft mCltt: d'ocrc

DES I N É R A U X. 83

près de Saint - Amancl ; en Touraine à l'abbaye de Noyers ; en Normandie près de Briquebec , dans le Cottentin , &. à Carrolet dans le diocèfe d'A- vranciies fc).

En Languedoc ((JJ, M. de Gcnlanne a reconnu

•■ Il ■- ■■■■■■ ■■ ■m^sM^^ I _^^*^ !■■ ^ ^^^^^B ^^tm^^ I Hia^nB.M_i_B^i^a^^

de quartz & de pyrite fiilfureufe ; le filon a treize pouces de large .... Dans la même province, il y a une autre mine de cuivre au-deniis des lacs de BelUdonne . ... Se des lacs de BranJe .... Une autre aux Acles , au-delTus de Plawpïnes dans le Briançonnois; cette dernière mine ell: un mélange de cuivre & de fer, difious par un acide ful- fureux que l'air a développé, el'e a rendu cinquante pour cent de beau cuivre rofette .... Une autre au-deflus des bains du Moneftier de Briançon , qui a donné quinze livres un quart de cuivre pour cent. . . . Celle d'Hue^^ en haut Dauphiné , efl: fulfureufè & ferru-

gineufe , <5c donne treize livres de cuivre par quintal 11 y a

encore beaucoup d'autres mines de cuivre dans la même province ....

En Provence, au territoire d'Yères, il y a une mine de cuivre tenant argent & un peu d'or .... Une autre au territoire de la Roque : & dans celui de Sifleron, il fe trouve aufîl du cuivre, ainfi qu'auprès de la ville de Digne

Dans le Vivarais , il y a des pyrites cuivreuses au vallon de

Pourchajje , à deux lieues de Joyeufe à Allier en Gévaudan ,

à lept quarts de lieue de Bayard , il y a des pyrites blanches arfe- nicales qui contiennent du cuivre

A Lodève près des Cevennes, il y a une mine de cuivre tenant argent.... une autre à la Roquette aux Cevennes, à quatre lieues & demie d'Andufe. De la fonte des mines, par Schlutter, traduit par AI. Hellot , tome I , pages i 6 & fuiv.

(c) Idem, pûges 6 o , 6^ & CS.

(d) En revenant du Puits - Saint- Pons vers Riots & Oulargueg (dioccle de Pons ); nous avons ijouvé au lieu de Cafiltac , une mine

L ij

8^ H ISTO I RE NATU RELLE

plufieurs mines de cuivre qu'il a très-bien obfcrvées &

de cuivre fort confidcrable; on y a ù\i quelque travail Le

minéral y efl répandu par petits blocs difperfés dans toute la niafle de la veine qui a plulieurs toiles de largeur , & qui paroît au jour fur l'étendue d'un bon quart de lieue de longueur; le minerai y efl très-drlenical , & cojuient depuis vingt-deux julqu'à vingt- cinq livres de cuivre au quintal .... Le inincral efl de la nature des mines de cuivre griies, vulgaiiement appelées Ja/erts,

Il y a une autre veine de cuivre au lieu appelé Lasfonts , paroifîe de Mas de l'Eglile.... peu éloignée de celle de Cafîlllac. Hijhire JVaîurelle du Languedoc, par M, de Genfanne , tome II , page 21 ^.

A une lieue de la ville de Marvejols en Gévaudan , dans le terri- toire de Saint- Léger-de- Poire , on trouve plufieurs Tources d'eau cuivreufe, propre à donner du cuivre par cémentation; elles coulent dans un vallon à demi-quart de lieue de Saint-Léger. Les habitans de ce canton ont l'imprudence de boire de ces eaux pour fe purger, idem, tome II , page 2^0.

A la montagne de Fraifînei ( diocèfe d'Uzès ), il y a deux filons de mine de cuivre.,.. Le minéral ell jaune, mêlé de mine hépa- tique; il ell de bonne qualité & pallablement riche en argent, idem , tome I , page 16^..,, A la montagne de la Garde, il y a une veine confidérable de mine de cuivre bitumineufe, connue en Allemagne, fous le nom de Pcch-erti: cette efpéce de mine efl fort elHmée par la quantité du cuivre qu'elle donne; parce qu'outre fa grande dudilité, il a une très-belle couleur d'or, ibidem, page i 6 j.

Il y a deux fiions de mine de cuivre à la montagne du Fort, idem, page i 6 6 . -^ Une autre à la montagne de Dévèle; deux autres filons qui p.; ent fous Vilietort, & deux autres qui traverlent la rivière immédiatement au - defTus du pont, idem, ibidem. Au- defTus de Saint- André de Cap-feze , il y a de fort bonnes mines de cuivre, idem, page i6y.^ Au -defTus du village de Galuzières , dans le dioccfe d'Alais, en montant diredement au-defllis du château,'

DES Minéraux. 8;

décrites ; il a fait de femblales recherches en Alface (e).

il y a un filon confidcrable de mine de cuivre & argent, qui a plus de quatre toifes d'epaiffeur, & qui s'étend de i'ouefl: à l'eft fur une longueur de près d'une demi - lieue. On aperçoit dans ce filon , plufieurs efpèces de mine de cuivre ; il y en a de la jaune , de la grife , de bleu d'azur , de la malachite , de Thépatique & autres , H'tjîoire Naturelle du Languedoc , par Aï. de Cenfanne , tome II ,

page 22^ Aux environs de Saint - Sauveur , au lieu appelé

Low - camp - des - Hùns , il y a un gros filon de cuivre & argent, dont la gangue ou matrice a près de cinq toifes de largeur , idem , page 2^0. Dans le diocèfe de Narbonne, il y a des mines de cuivre & argent, aux lieux appelés la Cunale & Peyre - couverte , & celles de JaJht-d'Empo'ix font fort riches en argent: il y a un autre filon d'argent & cuivre à Peyfegut, idem , page i S y, Dans toutes ces montagnes , on trouve en général beaucoup de cuivre en azur. idem , ïh'id. Vers Buifle , il y a plufieurs filons de très-bonne mine de cuivre qu'on avoit ouverte il y a une quarantaine d'années, & qu'on a abandonnée en même temps que celte de Meifibux .... Le minéral de ce canton renferme beaucoup de cette efpèce de mine que les Allemands appellent Pech-ert:^^ & que nous pouvons nommer mine de cuivre bitum'meufe ; elle reflemble en efl^et au jayet, Se palTe pour donner le plus beau cuivre connu. On y trouve auffi de la mire de cuivre pyriteufe jaune, & également de la mine de cuivre azur, idem , pages i p 2 & i $ s ' ^^ avoit fait il y a quelques années , plufieurs ouvertures fur une mine de cuivre au lieu de Thines ( diocèfe du Vivarais ) ; mais outre qu'elle eîl très-pauvre , c'efl que le défaut de bois n'en permettoit pas l'exploitation, idem, tome III, pages I 8 2 à" 18 ^. Au bas du village de Saint-Michel, on voit un filon de mine de cuivre, idem ^ page i $7» En delcendant des montagnes vers Ecouflains, on trouve près de ce dernier endroit,, d'alîez belles veines de cuivre^ idem ^ page 2(tj,

(e) Dans la montagne, du côté de Giromagny, eft la mine de Saint- Daniel f qui a plus de deux cents pieds de profondeur. Le

86 Histoire Naturelle

Et M. le Monnicr, premier Médecin ordinaire du Roi, a obfcrvé celles du Roufîillon (fj & celle de

minerai domine en cuivre , il rend un peu de plomb ôi d'argent ; ce filon de Saint-Daniel eft traverfé par un autre, les Anciens ont fait des tra\ oux. Le minerai efi: la plupart de mine d'argent .... En remontant vers le Ib met de la montagne àe Saint - Antoine , il y a un filon de mine jaune de cuivre & de malachites ....

Toutes les montagnes, qui féparent Plancher-les-mines en Franche- comte , de Giromagny, font entrelaflees d'un nombre prodigieux de différens filons qui les traverfent en tous fens : toutes ces mines donnent du cuivre , du plomb & de l'argent ....

A droite du village d'Orùey e(ï Saint- Jofeph , l'on tire de très- belles mines de cuivre de toutes elpèces ; une entr'autres efl d'un pourpre vif, tigré de jaune, & d'une inaùère blanche qu'on prendroit pour du fpath , & qui eH cependant de la pure mine de cuivre. Le filon efi: accompagne quelquefois d'une efpèce de quartz feuilleté blanc très - réfradaire , & qui , quoique pefant , ne tient poitit de métal.

On trouve du cuivre dans plufieurs autres endroits des environs d'Orbey, comme à Slorkenfon , à la montagne de Steingraben ; celui-ci çfl: enferme dans un roc d'une efpèce de quartz vert aulTi dur que de l'acier; la mine efl: partie bleu de montagne, quelque peu de mine de cuivre jaune, & la plus grande partie de mine de cuivre bitumineule. Le fommet du filon efl une mine ferrugineufe brûlée, toute femblable au mâchefer; & l'on voit aiïez fouvent , pendant la nuit, fortir de grofles flammes de cet endroit: ce filon efl tra- verfé par un autre filon de mine de cuivre malachite & jaune, & quelquefois d'une belle couleur de rofe & de lilas; elle contient quel- quefois un peu d'or. Sur l'exploitation des mines , par M. de Genfanne , A'Icwoires des Savons Étrangers , tome IV, pages 1 41 & fuiv,

(f) Les montagnes dont la plaine du Roufilllon eft environne'e, fyr-tout celles c^ui tiennent à la chaîne de^ Pyrénées, font garnies

DES Minéraux. 87

Corail, dans ia partie des Pyrénées, fiiuécs entre la France & l'Efpagne (^) .

pour la plupart , de mines dans leur intérieur. Il y a quelques mines de fer; mais les plus communes font celles de cuivre, & on ea exploite quelques-unes avec lucccs .... Il y a une autre veine de cuivre fort riche au pied de la montagne d'Albert, tout proche du village de Soredde .... Cette veine fi abondante étoit accompagnée de feuillets de cuivre rouge très-dudile, &. formé tel parla Nature; on les trouvoit répandues parmi le gravier , ou plaquées entre des pierres, & même ie cuivre efl: ramifié dans d'autres en forme de dendrites .... M. le Monnier a obfervé qis la mine drée du puits Sainte - Barbe , étoit mêlée avec une pyrite jaune - pâle qui paroîc fulfureufe & arfenicale. Celle du puits Saint-Louis, qui efl voifine du premier , quoiqu'un peu moins pefante que celle du puits Sainte' Barbe, paroît meilleure & inoins embarraffée de pyrites arfénicales, & elle ell engagée dans une efpèce de quartz qui la rend trcs-aifée à fondre ; enfin celle du Corail femble être la meilleure de toutes , elle eft de même intimement unie à du quartz fort dur. Obfervatioa d'Hijioire Naturelle , par Aï. le Aïonnler ; Paris, i7S9> P^^es ^ 0 p Ù' Juiv.

(g) Les mines de cuivre de Catalogne , ne font qu'à une lieue de Corail .... Celle qui donne du cuivre plus eilimé que celui de Corail, fe trouve fituée précifément dans la colline de Bernadelle^ fous la montagne qui fépare la France d'avec l'Efpagne, entre la ville d'Autez & celle de Campredon. Il y a dans cette mine d'an- ciens & grands travaux , & l'on voit dans les galeries & dans les chambres auxquelles elles aboutifi'ent , des taches bleues & vertes , & même des incruflations de vert-de-gris, & aufîj des filets de cuivre qui forment un réfeau de différentes couleurs, rouges, violettes, <5:c, & ce réfeau métallique s'obferve dans toute l'étendue des galeries; « je ni'attendois , dit M. le Monnier , à voir quelques filoiis cuivreux;; mais il paroû qu'il n'eu a jamais exillé d'autres dan^ cette mine, ««

88 Histoire Natu pelle

Depuis la découverte de l'Amérique, les mines de cuivre, comme celles d'or &. d'argent, ont été négligées en Efpagne <54. en France , parce que Ton tire ces métaux du nouveau monde à moindres frais, 6l qu'en général, les mines les plus riches de l'Europe & les plus aifées à extraire, ont été fouillées, & peut-être épuifées par les Anciens ; on n'y trouve plus de cuivre en métal ou de première formation, & on a négligé les minières des pyrites cuivreufès ou de féconde for- mation, par la difficulté de les fondre, & à caufe des grands frais que leur traitement exige. Celles des envi- rons de Molina dont parle M. Bowle (h), & qui

paroi ffent

que ce refeau métallique que j'ai vu prefque par-tout Toute

» cette mine , qui eft d'une étendue très-confidérable, eft dans une » pierre dure qu'il faut faire éclater à la poudre ; & il y a dans quelques » cavités de cette pierre , du cuivre vert & foyeux , & dans quelques 5> autres , il y avoit une poudre grumelée d'un très- beau bleu d'outre- mer >♦. Ohfervation d'HiJIoire Naturelle , par M. le Adonnier; Paris, 1739, P^gfs 20 p & fuîv.

(h) « A quelques lieues de Molina, il y a une montagne appelée » îa Platilla; on voit au fommet des roches blanches qui font de

y* pierre à chaux , mêlées de taches bleues & vertes Dans les

» galeries de la mine de cuivre , on voit que toutes les pierres font » fendillées & laiflênt découler de l'eau chargée de matière cuivreufe , » & les fentes font remplies de minéral de cuivre bleu , vert & jaune , y mêlé de terre blanche calcaire. Ce minerai formé par ftillation efl: toujours compofé de lames très-minces & parallèlement appliquées » les unes contre les autres ... La matière calcaire s'y trouve toujours » mêlée avec le minéral de cuivre de quelque couleur qu'il foit. . . .

Il

D E s AI I N É R A U X. 89

paroifTent être de troifième formation , font également négligées; cependant, indépendamment de ces mines de Molina en Arragon, il y a d'autres mines de cuivre à fix lieues de Madrid, & d'autres dans la montagne de Guadeloupe , dans lerquelles on fait aujourd'hui quelques travaux; celles-ci, dit M. Bowles, font dans une ardoife jafpec de bleu & de vert (ï) .

En Angleterre , dans la province de Cornouailles ,

II fe forme fouvent en petits criftaux dans les cavités du minéral ce même, & ces crillaux font verts, bleus ou blancs. ... Le minéral « commence par être fluide & diflous , ou au moins en état de mu- <c cilage qui a coulé très-lentement , & que les eaux pluviales diflolvent <c de nouveau & entraînent dans les fentes ou cavités elles tombent <c goutte à goutte & forment la (laladlite. . . . Lamine bleue ne fe mêle « point avec le relie, & elles font d'une nature très-diftinde ; car je « trouvai que le bleu de cette mine contient un peu d'arfenic , d'argent ce & de cuivre, &. le produit de fa fonte efl une forte de métal de ce cloche. La mine verte ne contient pas le moindre atome d'arfenic, «c & le cuivre fe minéralife avec la terre blanche fufdite , fans qu'il y ce ait la moindre partie de fer. Cette luine de la Platilla étant une mine ce de chariage ou d'alluvion , elle ne peut être bien profonde, m Hijîoirc

Naturelle d'Efpagne , par M. Bowks , page i ^i à" fuiv Nota. Je

dois obferver que cette mine décrite par M. Bowles, efl non-feule- ment d'alluvion , comme il le dit , & comme le démontre le mélange du cuivre avec la matière calcaire, mais qu'elle eft encore de flillation, c'ell-à-dire, d'un temps pollérieur à celui des alluvions , puifqu'elle fe forme encore aujourd'hui par le fuintement de ces matières dans les fentes des pierres quartzeufes fe trouve ce minéral cuivreux qui fe réunit aufîi en ftal^dites dans les cavités de la roche.

(i) Hiftoire Naturelle d'Efpagne , /;^^^j 28 & 6 y.

ATméraux, Tome II I. M

90 Histoire Natu relle

fameufè par fès mines d'ctain, on trouve des mines Je Cuivre en filons, dont quelques-uns Ibnt trcs-voifins des filons d'ctain, & quelquefois même font mêlés de ces deux métaux ; comme la plupart de ces mines font dans un état pyriteux , elles font de féconde formation , quelques-unes néanmoins font exemptes de pyrites, & paroifTent tenir de près à celles de première formation; M. Jars les a décrites avec fon exa6litude ordinaire (k).

(k) Les filons de cuivre de la province de Coi'noudilies font dans une efpcce de fchifte nomme k'illas , dont la couleur eft difîcrcnte du- fchifte qui contient le filon d'étain; avec Tétain ce killas efl brun ^ noir & bleuâtre , mais avec les mine'raux de cuivre il eft plutôt gri- fàtre, blanchâtre & rougeâtre. Il efl très-commun de rencontrer des filons qui produil'ent du minéral de cuivre & de celui d'étain en même temps, mais il y en a toujours un qui domine.

Les matières qui accompagnent & annoncent les minéraux de cuivre & qui eu contienrjent Ibuvent elles-mêmes, confiflent proche la furface de la terre, en une efpèce de minéral de fer décompolé en partie ou fubllance ocreufe, mêlée de quartz ou d'un rocher bleuâtre; mais dans la profondeur, ces matières font un compote de quartz , de mica blanc fur une pierre en roche d'un bleu-clair; afTez fouvent de Ja pyrite , tantôt blanche , tantôt jaune, quelquefois le tout efl parfemé avec des taches de minéral de cuivre. Obfervations fur les in'ines, par M. Jars ; Mémoires de l'Acoiiémie des Sciences^ année i y y o , page j 40. Au-defTus de la ville de Redruts , on exploite une mine de cuivre très- abondante. ... fon filon efl peu éloigné de celui de fa mine d'étain de Peduandrea; il lui efl parallèle. ... La largeur commune du filon peut être de quatre à cinq pieds; il efl compofe d'un beau minera jaune ou pyrite cuivreufe, point de blende, afièz fouvent du quartz & de la pyrite^ fur-tout de la blanche qui eft arfenicale. . . quelque- fois du criflaf de roche qu'on nomme diamant de Cornouailles ... Ou

DES AI I N É R A V X. 91

En Italie, dans leVicentin, «on fabrique annuelle- ment , dit M. Ferher , beaucoup de cuivre , de foufre ^* & de vitriol. La lefTive vitriolique eft très - riche en « cuivre, que Ton en tire par cémentation & en y mettant « des lames de fer fl) ». Ces mines font, comme l'on voit, de dernière formation. On trouve au/Ti de pareilles mines de cuivre en SuifTe , dans le pays des Grifons &: dans le canton de Berne, à fix lieues de Romam- Moutier (m).

En Allemagne, dit Schliitter, on compte douze

trouve quelquefois du cuivre natif dans la partie fupcrieure du filon & dans les endroits il n'efl: pas riche. ... Le filon efl renfermé dans le rocher fchifteux nommé killas . ... Le côté du mur du fiJon elt tendre, fouvent il efl: compofe d'une matière jaune & poreufe , fouvent aufli d'une efpèce d'argile. . . . Le filon efl très -riche & abondant dans la plus grande profondeur qui efl: de foixante & quel- ques toifes. . A cinq milles de Redruth , on exploite encore plufieurs filons qui font de ia même nature «Se dans une roche de même efpèce.. H y a entr'autres dans ce pays une mine de cuivre vitrée extrêmement riche, mais très-peu abondante. . . . On trouve dans tout ce terrein une très-grande quantité de puits jufqu'à Sainte-Agnès, particu- lièrement près de la mer les filons de cuivre ne font qu'en petit nombre , en comparaifon des fiions d'étain qui y font beaucoup plus nombreux, tandis que c'étoit le contraire du côté de Redruth. Obfervations fur les mines , par Al. Jars , dans Us Aiémoïres de C Académie des Sciences, /innée 1770 > page J40.

(l) Lettres fur la Minéralogie, par M. Ferber , /jj^/ri ^7^" ^8. (m) Mémoires de M. Guettard, dans ceux de l'Académie des Sciences, année 17J2 , page $2^,

M ij

92 Hjstoire Naturelle

fortes Je mines de cuivre (iij , dont cependant aucune

(n) Ces douze fortes de mines de cuivre font i ." le cuivre natif ou jnine de cuivre fous forme métallique; il efl rare & reflemble à celui qui a été rafiné.

2.° Le cuivre azur ou mine de cuivre vitrée, elle tient de farfenic & un peu de fer.

3.° La mine de cuivre jaune, qui efl une efpèce de pyrite com- pofée de foufre , de beaucoup de fer & de peu de cuivre.

4.° La mine de cuivre fauve, qui tient du foufre, de l'arfenic , de l'argent & du cuivre en plus grande quantité cjue la fuivante.

5.° Autre mine de cuivre différente de la précédente.

La mine de cuivre bleue, d'Outre- mer ^wZ/ra marina), qui n'efl autre chofe que du cuivre diflbus par les acides, & précipitée & pénétrée parTaîkali volatil. Comme elle ne tient ni foufre ni arfenic, elle n'a pas befoin, à la rigueur, d'être calcinée, non plus que U mine de cuivre verte, appelée malachite ; au petit effai on ne les rôtit pas, pour la fonte en grand on les rôtit fort peu. 7.° La mine de cuivre verte , nommée malachite.

8.° La mine de cuivre en fable , qui efl compofée de cuivre & d'arfenic , mêlé de fable.

Cf° La mine d'argent, blanche ( ou grife ) tenant plus de cuivre que d'argent; mais les mines portent ordinairement le nom du métal, qui, étant vendu, produit une plus grande fomme d'argent que l'autre , quoiqu'en plus grande quantité.

10." La mine de cuivre en ardoife ou écailles cuivreufes; elle donne peu de cuivre aux effais , aufli-bien que la précédente.

1 1 . Prefque routes les pyrites un peu colorées , parce qu'il n'y en a prefque point qui ne contienne une ou deux livres de cuivre par quintal.

12. Le vitriol bleu-verdâtre natif, fe met au rang des mines de cuivre , parce que ce métal y fert en partie de bafe à l'acide qufi s'eft criftallifé avec lui & avec un peu de fer. Traité de la fonte des mines de Schlutlcr, tome J , pages i (^ 9 ir i^i^

DES Mll^ÉRAUX, 93

n'eft aiifli riche en métal que les mines de plomb , (l'ctain & de fer de ces mêmes contrées. Comme Ja plupart de ces mines de cuivre contiennent beaucoup de pyrites , il faut les griller avec foin , fans cela le cuivre ne fe réduit point, & l'on n'obtient que de la matte. Le grillage eft ordinairement de fept à huit heures , & il eft à propos de laifTer refroidir cette mine grillée, de la broyer & griller de nouveau trois ou quatre fois de fuite en la broyant à chaque fois ; ces feux interrompus la défoufrent beaucoup mieux qu'un feu continué. Les mines riches, telles que celles d'azur & celles que les ouvriers appellent mines pourries ou évejitées , n'ont pas befoin d'être grillées autant de fois ni fi long - temps ; cependant toutes les mines de cuivre, pauvres ou riches, doivent fubir le grillage , car après cette opération elles donnent un produit plus prompt & plus certain ; &. fouvent encore le métal pur eft difficile à extraire de la plupart de ces mines grillées. En général, les pratiques pour le traitement des mines doivent être relatives à leur quahté plus ou moins riche , & à leur nature plus ou moins fufible. La plupart font fj pyriteufes qu'elles ne rendent que très - difficilement leur métal après un très-grand nombre de feux. Les plus rebelles de toutes font les mines qui , comme celles de RammellLerg & du haut Hartz ( o ) ^ font non^

1. ■■ . - ■—— I .1 I . I I. »

(q) Les miues de cuivre de Rammelfberg & celles du haut Harti,,

94- Histoire Naturelle

feulement mêlées de pyrites, mais de beaucoup de mines de fer; il s'cll paffé bien du temps avant qu'on ait trouvé les moyens de tirer le cuivre de ces mines pyriteufes &. ferrugineufcs.

Les Anciens, comme nous l'avons dit, n*ont d'abord employé que le cuivre de première formation, qui fe réduit en métal dès la première fonte, & enfuite ils ont fait ufage du cuivre de dernière formation qu'on procure aifément par la cémentation; mais les mines de cuivre en pyrites , qui font prefque les feules qui nous refient, n'ont été travaillées av€c fuccès que dans ces derniers temps, c'ell-à-dire, beaucoup plus tard que les mines de fer , qui , quoique difficiles à réduire en métal, le font cependant beaucoup moins que ces mines pyriteufes de cuivre.

Dans le bas Hartz, les mines de cuivre contiennent du plomb & beaucoup de pyrites ; il leur faut trois feux de grillage, & autant à la matte qui en provient; on fond enfuite cette matte qui , malgré les trois feux qu'elle a fubis ne fe convertit pas toute entière en métal ; car dans la fonte il fe trouve encore de la matte

ne font que des pyrites cuivreufes , & il n'eft pas étonnant qu'on ait ignoré i\ long - temps l'art d'en tirer le cuivre : il y a peu de mines auxquelles il faille donner un aufîi grand nombre de feux pour les griller , & qui dans la fonte foient aufll chaudes & auffi rougeâtres. Schlutter, Traité de k fonte des fnineSj &c. tome II ^ pûge ^26.

DES Minéraux, * 95

qu'on eft obligé de féparer du métal & de faire griller de nouveau pour la refondre ( p)-

Dans le haut Hartz, la plupart des mines de cuivre font auiïi pyriteufes , &. il faut de même les griller d'autant plus fort & plus de fois qu'elles le font davan- tage. Aux environs de Clauflhal, il y en a de bonnes, de médiocres & de mauvaifes ; ces dernières ne font pour ainfi dire que des pyrites ; on mcle ces mines enfemble pour les faire griller une première fois à un feu qui dure trois ou quatre femaines ; après quoi on leur donne un fécond feu de grillage avant de les fondre , & l'on n'obtient encore que de la matte crue , qu'on foumet à cinq ou fix feux fuccefTifs de grillage , félon que cette matte eft plus ou moins fulfiireufe. On fond de nouveau cette matte grillée , & enfin on parvient à obtenir du cuivre noir en alfez petite quantité , car cent quintaux de cette matte grillée ne donnent que huit à dix quintaux de cuivre noir , &. quarante ou cinquante quintaux de matière moyenne entre ia matte brute & le cuivre noir; on fait griller de nouveau cinq ou fix fois cette mûtte moyenne avant de la jeter au fourneau de fufion; elle rend à-peu-près la moitié de fon poids en cuivre noir, & entre un^tiers & un quart de matière qu'on appelle matte firnple , que l'on

(■p) Traité de la foate àzs mines de Schlutter, tomt II, pages

96 ^Histoire Naturelle

fait encore griller de nouveau fept à huit fois avant de la fondre, & cette matte fimple, ne fe convertit qu'alors en cuivre noir (q).

Les mines de cuivre qui font plus riches & moins pyriteufes , rendent dès la première fonte leur cuivre noir, mêlé d'une matte qu'on n'efl obligé de griller qu'une feule fois, pour obtenir également le cuivre noir pur ; les mines feuilletées ou en ardoifes, du comté de Mansfeld , quoique très-peu pyriteufes en apparence, ne donnent fouvent que de la matte à la première fonte, &. ne produifent à la féconde qu'une livre ou deux de cuivre noir par quintal. Celles de R'ie^elfdorf ^ qui font également en ardoife , ne donnent que deux à trois livres de cuivre par quintal; mais comme il fuffit de les griller une feule fois pour en obtenir le cuivre noir , on ne lailTe pas de trouver du bénéiice à les fondre , quoiqu'elles rendent fi peu, parce qu'une feule fonte fuffit auffi pour réduire le cuivre noir en bon métal f^r) ,

On trouve dans la mine de A^eydenhek, du cuivre en métal mclé avec des pyrites cuivreufes noires & vertes ; cette mine paroît donc être de première formation, feulement une partie du cuivre primitif a été décom-

pofée dans la mine même, par l'aélion des élémens

I » » , -.___—____ .

(q) Traite de la fonte des mines de Schlutter, tome II , page 2 0^, (r) Idem, ibidem , ^^^f ^(f/.

humides,

DES Minéraux. 97

humides ; mais malgré cette altération , ces minerais font peu dénaturés, &. ils peuvent fe fondre feuls: on mcle les minerais noir & vert avec le cuivre natif, & ce mélange rend fon métal dès la première fonte, &: même affez pur, pour qu'on ne fbit pas obligé de le raffiner CfJ.

En Hongrie, il trouve des mines de cuivre de toutes les nuances & qualités ; celle de Horngromid e(l d'une grande étendue, tWç, efl en larges filons &. fi riche qu'elle donne quelquefois jufqu'à cinquante & fbixante livres de cuivre par quintal ; elle eft compofée de deux fortes de minerais, l'un jaune , qui ne contient que du cuivre ; l'autre noir , qui contient du cuivre & de l'argent ; ces mines, quoique fi riches, font néanmoins très-pyriteufès , & il faut leur faire fubir douze ou quatorze fois l'adtion du feu avant de les réduire en métal. On tire avec beaucoup moins de frais le cuivre des eaux cuivreufes qui découlent de cette mine au moyen des lames de fer qu'on y plonge , & auxquelles il s'unit par cémentation. En général , c'ell dans les montagnes de fchifte ou d'ardoifè que trouvent, en Hongrie, les plus nobles veines de cuivre (t).

<c II y a en Pologne, dit M. Cuettard, fur les confins

(f) Traité de la fonte des mines de Schlutter, tome II, page ^j? /. { t) Delius , fur l'art des mines. Traduéîion françoife , tome J , page S

Minéraux, Toinc JIL N

98 Histoire Naturelle

de la Hongrie & du comté de Speis , une mine de

cuivre tenant or & argent Cette mine cfl d'un

jaune doré avec des taches couleur de gorge de pigeon , & elle efl mêlée de quartz; il y en a uiire autre dans

les terres du Starofle de Bulkow J'en ai vu un

morceau qui étoit un quartz gris-clair, parfemé de points cuivreux ou de pyrites cuivreufes d'un jaune doré (u)^^.

En Suède, les mines de cuivre font non-feulement très - nombreufes , mais auïïi très - abondantes & très- riches ; la plus fameufè efl celle du cap Ferherg : on en prendroit d'abord le minerai pour une pyrite cuivreufè, & cependant il n'efl que peu fulfureux, &. il efl mclé d'une pierre vitreule & fufible ; il rend fon cuivre dès la pre- mière fonte ; il y a plufieurs autres mines qui ne font pas fi pures & qui néanmoins peuvent fondre après avoir été grillées une feule fois; il n'efl pas même nécelfaire d'y ajouter d'autres matières pour en faciliter la fufion, il ne faut que quelques fcories vitreufès pour leur faire un bain & les empêcher de fe calciner à la fonte (x).

En Danemarck & en Norwège , félon Pontop- pidan , il y a des mines de cuivre de toute efpèce ; celle de Rorûas efl la plus renommée ; trois fourneaux qui y font établis ont rendu, en onze années, quarante

(u) Mémoires de l'Académie des Sciences, année 17^2, page (x) Traité de la fonte des mines de Schlutter, tome II, page 4p^,

(C

<c

DES Minéraux. 99

mille neuf cents quarante-quairc quintaux de cuivre (^yj. M*. Jars dit « que cette mine de Romas ou de Relatif, ell une mine immenfc de pyrites cuivreufès, fi près de ia lùrface de la terre, que Ton a pu facilement y pratiquer des ouvertures affez grandes pour y faire entrer " & fbrtir des voitures qui en tranfportent au-dehors les '' minerais , & que cette mine produit annuellement douze '* mille quintaux &. plus de cuivre (i^ ».

On trouve aulFi des indices de mine de cuivre en Lapponie, à foixante lieues de Torneâ, & en Groenland ; l'on a vu du vert-de-gris & des paillettes cuivreufes dans des pierres , ce qui démontre affez qu'il s'y trouve auffi des mines de ce métal faj.

En Ilîande, il y a de même des mines de cuivre, les unes à fëpt milles de dillance de la ville de Wiclow; d'autres dans ia montagne de Crone-Bawn , qui font en exploitation, & dont les foffes ont depuis 40, 50 & ju/qu'à 60 toifes de profondeur (b). Le Réiateur obfèrve : « Que les Ouvriers ayant laiffc une pelle de fer dans une de ces mines de cuivre, il coule

(y) Journal étranger, mojj- ^'.^oiir tJSS'

(l) Mémoires des Savans étrangers, (orne IX, page 4S ^'

(a) Hiftoire générale des Voyages, tome XIX , page ^ o.

(b) Le premier minéral qu'on y trouve en cieufant, efl: une pierre ferrugineufe; au-deflous on découvre une mine de plomb qui femble être mêlée avec de l'argile, mais qui donne beaucoup de plomb & peu d'argent, & plus bas une riche mine pierreufe & brillante qui

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sitas

WBL\OTHtCA

100 Histoire Naturelle

» de l'eau , cette pelle fe trouva quelque temps après - toute incruftée de cuivre , & que c'eft d'après ce "fait, que les habitans ont pris l'idce de tirer ainfi >> le cuivre de ces eaux , en y plongeant des barres de » fer ; il ajoute que non-feulement le cuivre incrufte le » fer, mais que cette eau cuivreufe le pénètre & femble '> le convertir en cuivre , que le tout tombe en poudre » au fond du réfervoir l'on contient cette eau cuivreufe; » que les barres de fer contra6lent d'abord une efpèce de » rouille qui, par degrés, confomme entièrement le fer; » que le cuivre qui efl dans ïem étant ainfi continuelle- » ment attiré 6l fixé par le fer , il fe précipite au fond « en forme de fédiment, qu'il faut pour cela du fer doux, '> & que l'acier n'efl pas propre à cet effet ; qu'enfin ce fédiment cuivreux eft en poudre rougeâtre ». Nous obferverons que c'efl non - feulement dans ces mines d'illande, mais dans pKifiewrs autres, comme dans celles de Suède, du Hartz, &c. que l'on trouve de temps en temps , ÔL en certains endroits abandonnés depuis long- temps, des fers incruflés de cuivre, & des bois dans lefquels ce métal s' eft infmué en forme de végétation,.

Wl I I I < I II

rend foixante-quinze onces d'argent par tonne de mine, & en outre une grande quantité de plomb îe plus fin : après avoir percé quelques toifès plus bas on arrive à la veine de cuivre qui efl très -riche, & qu'on peut fuivre jufqu'à une certaine profondeur. Journal étranger, mois de Décembre jyj^, pages Jiy, pjques & compris pag& 1 2 (r>

DES Minéraux. ioi

qui pénètre entre les fibres du bois & en remplit les intervalles (cj; mais ce n'efl point une pénétration intime du cuivre dans Je fer, comme le dit le Relateur, & encore moins une converfion de ce métal en cuivre.

Après cette énumération des mines de cuivre de l^Europe, il nous refle à faire mention de celles des autres parties du monde; & en commençant par TAfie, il s'en trouve d'abord dans les îles de l'Archipel ; celle de Chalcuïs, aujourd'hui C/mlcéj avoit même tiré fon nom du cuivre qui s'y trouvoit. L'île à'Eubée en fourniiïbit aufTi (d ) ; mais la plus riche de toutes en cuivre, eft celle de Chypre; les Anciens l'ont célébrée fous le nom ^(Erofa, & ils en tiroient une grande quantité de cuivre & de zinc (e) .

Dans le continent de i'Afie, on a reconnu & tra- vaillé des mines de cuivre : en Per/è (f)^ « le cuivre, dit Chardin, fe tire, principalement à Sary, dans les

(c) Bibliothèque raifonnée, tome XLIII , page y o,

(d) Les premiers ouvrages d'airain avoient , fuivant ia tradition des Grecs, été travaillés en CEubée, dans la ville de Chakis f qui en avoit tiré fon nom. Solin , chap. XI,

(e) Defcription de l'Archipel, par Dapper, pages ^2^0" 445'

(f) W y a des mines de cuivre aux environs de la ville de Cacfiem. en Perfe , l'on fait commerce de ce métal. Voyage de Struys , tome I, page 2yy. A quelques lieues de la ville de Tauris , on trouve une mine de cuivre qui rapporte beaucoup au Roi. Voyage de Cerne m Carrer i, tome II , page 4j,

102 Histoire Natu relle

» montagnes de Miiiemkrm; il y en a aulfi à Badriam & vers Cajhïn; tous ces cuivres Ibnt aigres, & pour les adoucir, les Perfans les allient avec du cuivre de Suède & du Japon, en en mettant une partie fur vingt

du leur (^) '->'

M." Gmelin & Muller ont reconnu & obfervé plu- fieurs mines de cuivre en Sibérie ; ils ont remarqué que toutes ces mines, ainfi que celles des autres métaux, font prefque à la (urface de la terre. Les plus riches en cuivre font dans les plus hautes montagnes près de la rive occidentale du Jénifca; on y voit le cuivre à la furface de la terre , en mines rougeâtres ou vertes , qui toutes produifent quarante-huit à cinquante livres de cuivre par quintal (h). Ces mines iituées au haut des montagnes, font fans doute de première formation, la mine verte a feulement été un peu altérée par les élé- mens humides. De toutes les autres mines de cuivre, dont ces Voyageurs font mention, la moins riche eft celle de Ptchtama-Gora, qui cependant donne douze pour cent de bon cuivre; il y a cinq de ces mines en exploitation, & Ton voit dans plufieurs autres endroits de cette même contrée, les veftiges d'anciens travaux, qui démontrent que toutes ces montagnes contiennent

de bonnes mines (i). Celles des autres parties de la

f

(g) Voyage de Chardin, tome II , page 2^.

(h) HiRoire générale des Voyages, terne XVIII , page ^ je,

(i) Idem, ibid.

DES Minéraux, J03

Sibérie font plus pauvres; la plupart ne donnent que deux, trois ou quatre livres de cuivre par quintal (k) : on trouve fur la croupe & au pied de plufieurs mon- tagnes, différentes mines de cuivre de féconde & de troifième formation ; il y en a dans les environs de Cazan , qui ont formé des flalaélites cuivreufes , & des malachites très-belles & aifées à polir; on peut même dire que c'efl dans cette contrée du nord de l'Afie, que les malachites fe trouvent le plus communément, quoi- qu'il y en ait auffi en quelques endroits de l'Europe, & particulièrement en Saxe , dans plufjcurs mines de cuivre de troifième formation ; ces concrétions cui- vreufes ou malachites , fe préfentent fous différentes formes; il y en a de fibreufes ou formées en rayons, comme fi elles étoient criftallifées , & par - elles reffemblent à la zéolite ; il y en a d'autres qui paroiffent formées par couches fucceffives ; mais qui ne diffèrent des premières que par leur apparence extérieure. Nous en donnerons des notions plus précifes lorfque nous traiterons des flalaélites métalliques.

Les mines de Souxon en Sibérie font fort confidé-

(k) A cinquante-deux verHes de Catherinbourg fe trouve la mine de Polewai qui n'eft pas dirpofee par couches, mais par chambres ^ & qui ne donne qu'environ trois livres de cuivre par quintal. Hijl. générale des Voyages , tome XVIII , page i o iJ*. Celles de W^erchoturic ne rendent que deux pour cent, le minerai eft une pyrite de cuivre Diêlee de veines irrégulières de quartz noirâtre. Idem, page ^(j o.

104 Histoire Naturelle

râbles , & s'étendent à plus de trente lieues ; elles font fituées dans des collines qui ont environ cent toifes de hauteur, & paroifTent en (iiivre la pente; toutes ne donnent guère que quatre livres de cuivre par quintal; ces mines de Souxon, font de troifièmc & dernière formation ; car on les trouve dans ie fable , & même dans des bois fofTiles qui font tachés de bleu & de vert , & dans l'intérieur defquels la mine de cuivre a formé des criftaux (l). Il en eft de même des mines de cuivre des monts Riphces; on ne les exploite qu'au pied des montagnes , le minerai de cuivre fe trouve avec des matières calcaires, & fuit, comme celles de Souxon, la pente des montagnes jufqu'à la rivière (m).

Au Kamtfchatka, de temps immémorial les habitans étoient auiïl fauvages que ceux de l'Amérique fepten- trionale, il fe trouve encore du cuivre natif en maffes & en débris (n) , & une des îles voifmes de celle de Bering) ce métal fe trouve en morceaux fur le rivage, en a pris ie nom d'ik de Cuivre (o). La

(l) Hifloire générale des Voyages , tome XIX, page 4y^>

(m) Idem, ihid. page 4jy-

(n) « Dans quelques endroits du Kamtfchatka, on trouve dans fe fable une fi grande quantité de petits morceaux de cuivre natif, qu'on pourroit en charger des charretes entières, jj Le fieur Schercr, cité dans le Journal de Phyfique y Juillet i yS i , pages 41 & fuiv»

(0) Alednoi-ojlroff o\x l'île de cuivre qui fe voit de l'île de Bering, *fl ainfi appelée à caufe des gros morceaux de cuivre natif qu'on

trouve

DES Minéraux, 105

La Chine eft peut - ctre encore plus riche que la Sibérie en bonnes mines de cuivre, c'efl fur-tout Jans la province iïYun-naii qu'il s'en trouve en pius grande quantité ; & il paroît que quoiqu'on ait très-ancienne- ment fouillé ces mines , elles ne font pas épuifées , car on en tire encore une immenfe quantité de métal. Les Chinois diflinguent trois e/pèces de cuivre qu'ils pré- tendent fè trouver naturellement dans leurs différentes mines, i. le cuivre rouge ou cuivre commun, &. qui eft du cuivre de première formation ou de cémentation ; 2. le cuivre blanc qu'ils affurent avoir toute fa blancheur au fortir de la mine, & qu'on a peine à diftinguer de l'argent lorfqu'il eft employé. Ce cuivre blanc eft aigre, & n'eft vrai/èmblablement qu'un mélange de cuivre & d'arfenic ; 3. le tombac qui ne paroît être au premier coup-d'œil qu'une fimple mme de cuivre , mais qui eft m«iée d'une aflez grande quantité d'or (p) : il fe trouve une de ces mines de tombac fort abondante dans la

trouve fur la grève. . . . fur-tout à la pointe oueft de la bande mé- ridionale. Maleviskoi en recueillit, entre les roches & la mer, fur une grève d'environ douze verges , idem , ibïd.

(p) L'aurïchalcum de Pline, paroît être une efpèce de tombac, qu'il défigne comme un cuivre naturel , d'une qualité particulière & plus excellente que le cuivre commun , mais dont les veines étoient déjà depuis long-temps épuifées : In Cypro prima œr'is inventio ; mox vilitas , reperto in aliis terris prœjtantiore , maxime aurichalco , quod prœ- cipuum bonitatem admirationemque dià obiinuit ; vec repcritur longo jarn îempore eff'œtâ tellure. Lib. XXXIV, cap. II.

Minéraux , Tome III. O

io6 Histoire Naturelle

province de Hn-quang. On fait de très-beaux ouvrages avec ce tombac, & en général, on ne confomme nulle part plus de cuivre qu'à la Chine, pour les canons, les cloches, les inflrumens , les monnoics, &c. (q) ; cepen- dant le cuivre eft encore plus commun au Japon qu'à ia Chine; les mines les plus riches, & qui donnent le métal le plus tin & le plus dudile , font dans la province de Kïjnok & de Snrunga (r) , &. cette dernière doit être regardée comme une mine de tombac , car elle tient une bonne quantité d'or. Les Japonois tirent de leurs mines, une fi grande quantité de cuivre que les Européens & particulièrement les Hollandois, en achetteni pour le tran/porter & en faire commerce (fj; mais autant le cuivre rouge efl commun dans ces îles du Japon, autant le cuivre jaune ou laiton y efl rare, parce qu'on n'y trouve point de mine de zinc, & qu'on efl obligé de tirer du Tunquin ou d'encore plus loin, la calamine ou le zinc néceffaire à cet alliage (r).

Enfin, pour achever l'énumération des principales mines de cuivre de l'Afie, nous indiqutrons celles de l'île Formofe, qui font fi abondantes, au rapport des Voya- geurs, qu'une feule de ces mines pourroit fùffire à tous

(q) Hifloire générale des Voyages, tome V, page 484. (r) Idem , tome X , page 6 ^ ^.

(f) Hifloire Naturelle du Japon, par Koeinpfer, tome I , page p^, (tj Idem , ibid.

DES Minéraux. 107

les befoins & ufages de ces Infulaires ; la plus riche cil celle de Peorko; le minerai eft du cuivre rouge (uj , &. paroît être de première formation.

Nous ne {(dxons que citer celles de MacafTar dans les îles Célèbes (x) ; celles de l'île de Timor (y) ^ & enfin celles de Bornéo dont quelques-unes font mêlées d'or & donnent du tombac , comme celles de la province de Siiran^a au Japon, &. de Hu-quang à la Chine (i) .

En Afrique , il y a beaucoup de cuivre , & même du cuivre primitif Marmol parle d'une mine riche , qui étoit il y a près de deux fiècles , en pleine exploitation dans la province de Sus au royaume de Maroc, & il dit qu'on en tiroit beaucoup de cuivre & de laiton qu'on tranfportoit en Europe: il fait aufTi mention des mines du mont Atlas dans la province de Zahara,

(u) Defcription de l'ije Formofe; Amjlerdam , i y o j , page i^S.

(x) Hifloire générale des Voyages , tome X, page >f / 8.

(y) Idem , tome A'/, pûge -2j 2.

(tJ Idem, tome V , page 48^; & tome IX, page j" 07. « Le tombac, dit Ovington, efl: ion recherche aux Indes orientales; oï\ « croit que c'efl: un mélange naturel d'or, d'argent & de cuivre, <c qui eft de bon aloi dans de certains endroits, comme à Bornéo, ce & de beaucoup plus bas aloi dans d'autres , comme à Siam. » Voyage de Jean Ovington, tome II, page 21 ^. Le tombac de Siam & de Bornéo, ne nous laifle pas douter qu'il n'y ait dans ces contrées plufieurs autres mines de cuivre , dont les Voyageurs ont néglige de faire mention.

O ij

io8 Histoire Naturelle

l'on fabriquoit des vafes de cuivre & de laiton (aj. Ces mines de la Barbarie & du royaume de Maroc, four- niflent encore aujourd'hui une très-grande quantité de ce métal que les Africains ne fe donnent pas la peine de raffiner, =& qu'ils nous vendent en cuivre brut. Les montagnes des îles du cap Vert contiennent aufli des mines de cuivre ; car il en découle plufieurs fources dont les eaux font chargées d'une grande quantité de parties cuivreufès qu'il efl; aifé de fixer & de recueillir par la cémentation (b). Dans la province de Bambuck, fi abondante en or, on trouve auffi beaucoup de cuivre, & particulièrement dans les montagnes de Radfch'inkadbar qui font d'une prodigieufe hauteur (c). Il y a auffi des mines de cuivre dans plufieurs endroits du Congo & à Benguela; l'une des plus riches de ces contrées eft celle de la baie des Vaches dont le cuivre efl très-fin (d) ;

(a) L'Afrique de Marmol; Paris, i66yytome II , page S ^ ; & tome III t page S.

(b) II y a ^Qs mines de cuivre dans les îles du cap Vert , & parti- culièrement dans l'île Saint- Jean , le Voyageur Roberts a remarqué des eaux cuivreufès , dans lefquelles il fuffifoit de tenir la lame d'un couteau pendant une minute ou deux, pour que cette lame fût iii- cruftée de cuivre d'une belle couleur jaune. ... Il remarqua plufieurs fontaines dont \t^ eaux produifoient le même effet, qui étoit toujours plus marqué à mefure qu'on s'approchoit de la fource. Hijlo'ire gé- Tiérale des Voyages, tome II , page S 9 9-

(c) Hifloire générale des Voyages, tome II , page i^^; & tomt IV, page ^S S,

(d) Idem , tome IV, page ^S^ ; & tome V, page S(.

DES Minéraux, 109

on trouve de même des mines de ce métal en Guince, au pays des Infijejfe (e) , & enfin dans les terres des Hoitentois. Koibe fait mention d'une mine de cuivre qui n'eft qu'à une lieue de diftance du Cap , dans une très-haute montagne, dont il dit que le minéral efl pur & très - abondant (f). Cette mine fuuée dans une li haute montagne, eft fans doute de première formation comme celles de Bambuk , & comme la plupart des autres mines de cuivre de l'Afrique ; car quoique les Maures, les Nègres, & fur-tout les Abyiïins, aient eu de temps immémorial des inftrumens de ce métal (g) , leur art ne s'étend guère qu'à fondre le cuivre natif ou celui de troifième formation, & ils n'ont pas tenté de tirer ce métal des mines pyriteufes de féconde formation, qui exigent de grands travaux pour être réduites en métal.

Mais c'efl fur - tout dans ie continent du nouveau monde, & particulièrement dans les contrées, de tout temps inhabitées, que trouvent en grand nombre les mines de cuivre de première formation ; nous avons déjà cité quelques lieux de l'Amérique feptentrionale ,

(e) Hifloire générale ^q'î> Voyages, tome IV > page ^4-4'

^f) Idem, tome V, page i 8 C.

(g) II y a des mines de cuivre très-abondantes dans im lieu nommé Soudi , qui n'eft pas loin à!Alï[fina. Les forgerons nègres fe rendent à Soudi vers le mois de feptembre & s'occupent à ie fondre jufqu'au mois de mai. Idem, tome IV, page ^ ^ 2,

;io Histoire Naturelle

ou l'on a rencontre de gros blocs de cuivre natif <Sc prefque pur, on en trouvera beaucoup plus à mefure que les bommes peupleront ces déferts; car depuis que ies Espagnols fe font babitués au Pérou & au Cbily, on en a tiré une imnienfe quantité de cuivre; par - tout on a commencé par les mines de première formation qui font les plus aifées à fondre. Frézier, témoin judi- cieux, rapporte « que dans une montagne qui efl à

douze lieues de Pampas du Paraguay Si à cent lieues de la Conception, l'on a découvert des mines de cuivre fi fmgulieres qu'on en a vu des blocs ou pépites de plus de cent quintaux ; que ce cuivre efl fi pur que d'un feul morceau de quarante quintaux, on en a fait fix canons de campagne de bx livres de balle cbacun pendant qu'il étoit à la Conception; qu'au refte, il y a

dans cette même montagne du cuivre pur & du cuivre imparfait , & en pierres mêlées de cuivre (h) ».

C'eft aux environs de Coquhnbo que les mines de cuivre font en plus grand nombre, & elles font en même temps {\ abondantes qu'une feule, quoique tra- vaillée depuis long - temps , fournit encore aujourd'hui tout le cuivre qui fe confomme à la côte du Ghily &. du Pérou. Il y a aulTi plufieurs autres mines de cuivre à Carabaya & dans le corrégiment de Copiago (ï) ; ces

(h) Voyage à la mer du Sud; Paris, 1 7S 2 , pages j6 & jj* (i) Hifloire générale des Voyages, tome XIII, pages ^12.

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DES Af I N É R A V X. r i [

mines de cuivre du Pérou font prefque toujours mélaes d'argent, en forte que fouvent on leur donne le nom de mhies d'argent, Sl ïon a obfervé qu'en général, toutes les mines d'argent du Pérou font mêlées de cuivre, &. que toutes celles de cuivre le font d'argent CâJ; mais ces mines de cuivre du Pérou font en affez petit nombre, & beaucoup moins riches que celles du Chily ; car M. Bowles les compare à celles qu'on travaille aduelle- ment en Efpagne ("/). Dans le Mexique, au canton de Kol'tma, il fe trouve des mines de deux fortes de cuivre, l'une fi molle &. fi ducftile que les habitans en font de très -beaux vafes, l'autre fi dure qu'ils l'emploient au lieu de fer pour les inftrumens d'agriculture (m): enlin l'on trouve des mines de cui\'re à Saint-Domingue (n) , ÔL du cuivre en métal & de première formation au Canada fo) &. dans les parties plus Septentrionales de

fkj Barba métallurgie, iome 1 , pages i o y & i o S.

(l) La mine de cuivre de Carabaya , dans le Pérou, contient le même quartz ^ la même marcaOlte & la même matrice d'améthille que la nouvelle mine de cuivre que l'on travaille à Colmcnaoviejo , à fix lieues de Madrid. Celle de cuivre verte de Moquagna^ dans le Pérou, efl prefque la même que celle de Molina d'Arragon. Hijïoire Naturelle d' Efpagne , par M. Bowles , page 2 S .

(m) Hifloire générale des Voyages, tome XII , page 6 ^S.

(n) Idem, ibid. page 218.

(0) Sur les bords du lac Erié au Canada , on a vu des blocs de cuivre ruuge tout régulilé & qu'on a employé fans aucune prépa- ration : on foupço.me que cette mine ell dans le lac même. AI. Cuetlard; Mémoires de l' Académie des Sciences, année i yj 2, p. 216.

112 Histoire N atu r elle

l'Amérique, comme chez les Michillimakinac (p) , & aux environs de la rivière DdiWoKe, à la baie d'Hud/bn f^); il y a d'autres mines de cuivre de féconde formation, aux Illinois (rj & aux Sioux (fj; & quoique les Voya- geurs ne difent pas qu'il fe trouve en Amérique, des mines de tombac comme en Afie & en Afrique, cepen- dant les habitans de l'Amérique méridionale ont des anneaux , des bracelets & d'autres ornemens d'une

(p) II y a du cuivre prefque pur & en grande quantité' aux environs d'un grand lac, au pays des Alichillimakinac , & même dans les petites îles de ce lac ; on a travaille' de ce cuivre à la miffion du faut Sainte- Alarie. Hijloire de la nouvelle France , par Charlevoîx , tome III , p. 2 S i .

(q) Aux environs de la rivière Danoife , à la haie d'Hudfon , il y a une mine de cuivre rouge, fi abondante & fi pure, que fans le pafler par la forge, les Sauvages ne font que le frapper entre deux pierres, tel qu'ils le recueillent dans la mine, & lui font prendre la forme qu'ils veulent lui donner. Voyage de Robert Lade. Traduâion; Paris , I 744 , tome II , page ^16.

(r) Il y a auffi une mine de cuivre au pays des Illinois, qui efl jointe à une mine de plomb, à lames carrées; la parde cuivreufe eft en verdet, & le total eft mêlé d'une terre jaunâtre qui paroît ferrugineufe. M. Guettard; Mémoires de V Académie des Sciences, année 1 y ^ 2 , page 216.

(f) Charlevoix rapporte que le Sueur avoit découvert une mine de cuivre très -abondante dans une montagne près d'une rivière au pays de Sioux, dans l'Amérique feptentrionale , & qu'il en avoit fait tirer en vingt-deux jours trente livres pelant ; il ajoute que la terre de cène mine eft verte & furmontée d'une croûte noire & aufll dure que le roc. Hijloire àr Defcription de la nouvelle France ; Paris, 1744, tome II , page 41 ^.

matière

T^ E s Minéraux. r i 5

matière métallique qu'ils nomment caracoli , & que les

.Voyageurs ont regarde comme un mélange de cuivre,

d'argent & d'or produit par la Nature ; il efl vrai

que ce caracoli ne fe rouille ni ne fe ternit jamais;

mais il cft aigre , grenu <Sc cafTant ; on efl obligé de

le mêler avec de Tor pour le rendre plus doux & plus

iraitable; il efl donc entré de l'arfenic ou de l'étain

dans cet alliage; & fi le caraco/i neR pas de la platine,

ce ne peut être que du tombac altéré par quelque

minéral , d'autant que le Relateur ajoute : « Que les

Européens ont voulu imiter ce métal en mêlant fix parties «

d'argent , trois de cuivre & une d'or ; mais que cet «

alliage n'approche pas encore de la beauté du caracoli «

des Indiens, qui paroît comme de l'argent fur -doré «

légèrement avec quelque chofe d'éclatant, comme s'il «<

étoit un^ peu enflammé frj ». Cette couleur rouge &

brillante n'eft point du tout celle de la platine, & c'efl

ce qui me fait préfumer que ce caracoli des Américains»

cil une forte de tombac , un mélange d'or , d'argent &

de cuivre, dont la couleur s'cfl peut-être exaltée par

i'arfenic.

Les régioiis d'où l'on tire aétuellement la plus

grande quantité de cuivre font le Chily, le Mexique

6l le Canada en Amérique ; le royaume de Maroc &

ies autres provinces de Barbarie en Afrique; le Japon »■ '%

(t) Nouveau Voyage aux îles de l'Amérique j Paris, iyz2f tome II , page 2 i .

Aiiuéraux j Tome IIL P

114 Histoire Natv relle

èi la Chine en Afie , &. la Suède en Europe: par-tout on doit employer pour extraire ce métal, des moyens différens, fuivant la.différence des mines ; celles du cuivre primitif ou de première formation par le feu, ou celtes de dècompofition par l'eau, &qui toutes font dans l'ctat métallique, n'ont befoin que d'être fondues une (èulefois popr être réduites en très-fjon métal ; elles donnent par conféquent un grand produit à peu de frais: après les mines primordiales qui coijtcnt le moins à traiter, on doit donc s'attacher à celles le cuivre fe trouve très-atténué , très-divifé, & néanmoins il confcrve fon état métallique ; telles font les eaux chargées de parties cuivreufes qui dccouient de la plupart de ces mines. Le cuivre charié par l'eau y efl difTous par i'acide vitriolique, &. cet^ acide s'attachant au fer qu'on plonge dans cette eau, & le détruifant peu-à-peu, quitte en même temps le curvre & le lai(fe à la place du fer: on peut donc facilement tirer le cuivre de ces eaux qui en font chargées en y plongeant des lames de fer, fur lefquelles il s'attache en atomes métalliques, qui forment bientôt des incruflaîions maffives. Ce cuivre de cémentation donne dès la première fonte , un métal ' aufTl pur que celui du cuivre primitif: ainfi l'on peut affurcr que de toutes les mines de cuivre , celles de première & celles de dernière formation , font les plus aifées à traiter & aux moindres frais.

Lorfqu'ii fe trouve dans le courant de ces eaux

D E s M I N É R A U X. 115

cuivreufês des matières ferrugineufes aimantées ou atti- rables à l'aimant, & qui par confcquent font dans i'état métallique ou prefque métallique, il fe forme à la furface de ces maffes ferrugineufes une couche plus ou moins épaifïè de cuivre; cette cémentation faite par la Nature, donne un produit femblable à CNelui de la cémentation artilicielle; c'eft du cuivre prefque pur, & que nos Minéralogiftes ont aufTi appelé cuivre naiif (u) , quoique ce nom ne doive s'appliquer qu'au cuivre de première formation produit par le feu primitif Au refte, comme il n'exifte dans le fein de la terre que très-peu de fer en état métallique, ce cuivre, produit par cette cémentation naturelle, n'eft. auiïi qu'en petite quantité, & ne doit pas être compté au nombre des mines de ce métal.

Après la recherche des mines primitives de cuivre &. des eaux cuivreufês qui méritent préférence, par la facilité d'en tirer le métal , on doit s'attacher aux mines de troifième formation, dans lefquelles le cuivre décom- pofé par les élémens humides, eft plus ou moins féparé des parties pyriteufes, c'eft-à-dire, du foufre & du fer dont il eft furchargé dans tous fcs minerais de féconde formation. Les mines de cuivre vitreufes & foyeufcs,

(u) Lorfque ces eaux qui tiennent du vitriol bleu en diflolution, rencontrent des molécules ferrugiiieufes ( fans doute dans iVtat métal- lique ou très- voifines de cet état), il en réfulte une efpèce de cémentation naturelle qui donne naillance à du cuivre uat'if. Lettres de AI. Demejle au Doéleur Bernard, tome 11, page ^6 S.

Pij.

ii6 Histoire Naturelle

celles d'azur & de malachite , celles de bleu & de vert de montagne , &:c. font toutes de cette troifième forma- lion ; elles ont perdu la forme pyriteufe , & en même temps une partie du foufre & du fer qui efl la bafe de toute pyrite; la Nature a fait ici, par la voie humide & à l'aide du temps, cette féparatton que nous ne faifons que par le moyen du feu ; & comme la plupart de ces mines de troifième formation ne contiennent qu'en petite quantité des parties pyriteufes, c'e(t-à-dire, des principes du foufre, elles ne demandent auffi qu'un ou deux feux de grillage , & fe réduifent enfuite en métal dès la pre- mière fonte.

Enfin, les plus rebelles de toutes les mines de cuivre^ îes plus difficiles à extraire, les plus difJDendieufes à traiter, font les mines de féconde formation, dans lefquelles le minerai efl toujours dans un état plus ou moins pyriteux; toutes contiennent une certaine quantité de fer , & plus elles en contiennent plus elles font réfraétaires (xj ; & malheureufement ces mines font dans notre climat les plus communes, les plus étendues &. fouvent les feules

(x) Nota. Toutes les mines de cuivre fulfureufes ou arfenicafes contiennent toujours plus ou moins de fer. . . . L'arfenic ne refte Ci opiniâtrement uni au cuivre que parce qu'il ell joint avec lefer. . . . II faut donc , pour avoir du bon cuivre „féparer, autant qu'il eft pofllble, toutes les parties du fer qui peuvent s'y trouver, & c'eft par Je jnoyen du fafFre qu'on peut faire cette féparation. Voyc^ Delins , cité dans k Journal de Phyfique ; JuilUi jySQfpages ^s à^ f^iV'

DES Minéraux. 117

qui fe prcfentent à nos recherches : il faut, comme nous l'avons dit , plufieurs torréfactions avant de les jeter au fourneau de fufion , &l fouveni encore plufieurs autres feux pour en griller les mattes avant que par la fonte elles fe réduifent en cuivre noir, qu'il faut encore traiter au feu pour achever d'en faire du cuivre rouge. Dans ces travaux , il fe fait une immenfe confommation de matières combuflibles ; les foins multiplies, les dépenfes exceffives ont fouvent fait abandonner ces mines ; ce n'efl que dans les endroits les combuflibles, bois ou charbon de terre abondent, ou bien dans ceux le mmérai de cuivre efl mêlé d'or ou d'argent, qu'on peut exploiter ces mines pyriteufes avec profit ; & comme* l'on cherche, avecraifbn, tous les moyens qui peuvent diminuer la dépen/è, on a tenté de réunir les pratiques de la cémentation ôl de la lefTive à celle de la torréfadion (jyj.

(y) Quand on veut avoir le cuivre des mines fans les fondre ^ il faut les griller &. les porter toutes rouges, ou au moins très-chaudes, dans une cuve l'on aura mis un peu d'eau auparavant, pour em- pêcher qu'elles ne s'allument , ce qui arrive quand elles lont fulfu- reules. . . . Comme la mine s'y met prefque rouge, l'eau s'échauffe & elle détache mieux la partie cuivreufe difloute par l'acide du loufre , ce qu'elle fait en moins de deux jours fi la mine a e'té bien grillée, car celle qui ne l'a point été n'abandonne pas fon cuivre. Pour avoir encore ce qui peut être refté de cuivre dans la mine , après cette première opé- ration , on la grille une féconde fois & même on lui <Jonne deux feux, parce qu'étant humide & prefque réduite en boue , un premier feu la

ii8 Histoire Natu re l le

Nous ne donnerons point ici le détail des opérations

grille mal; lorfqu'elle eft bien grillce , on la remet dans la cuve fur la première ieffive ; quand on veut l'avoir j)lus forte ou plus chargée de cuivj» , on l'y laifle quarante-huit heures.

On peut emj)loyei cette leflive à deux ufages ; i ' en l'évaporant en faire du vitriol bleu; 2." à en précipiter le cuivre. . . . Quand la leflive s'efl: chargée de cuivre, on la letire de delTus Ton marc, A on la fait chauffer dans une chaudière de plomb. On a dans une cuve plufieurs barres de fer arrangées verticalement , & toutes féparées les un s des autres. ... on y verle enluite la lelîive toute chaude, <5c on couvre !a cuve pour en conferver la chaleur, car plus long-temj)S elle refte chaude, plutôt le cuivre s'y précipite; & s'il y a allez de fer ddus la cuve , tout le cuivre peut s'y précipiter dès la première fois, fans quoi il faudroit chauffer de nouveau la leflive; car quoique le cuivre fe précipite auffi dans la lelîive froide, la précipiiatioii en ell beaucoup plus lente . . .

Pour connoître fi tout le cuivre a été précipité, on trempe dans la leflive une lame de fer polie & qui ne foit point graffe, & on l'y tient quelque temps ; fi cette lame fe couvre d'un enduit rouge, c'ert: une preuve qu'il y a encore du cuivre dans M leflive; fi elle n'y change pas de cou eur tout le cuivre efl précipité.

Lorfque tout le cuivre s'efl précipité , on fait couler la leflive dans des baquets, en débouchant les trous qui font à diflfe'rentes hauteurs le long d'un des côtés de la cuve, afin de ne pas déranger les barres de fer; il faut prendre garde aufll , lorfqu'on a débouché les trous d'en-bas , que l'eau n'entraîne avec elle le limon cuivreux. Cette leflive coulée & reçue dans les baquets , peut être employée à faire la cou- peiofe verte, puifqu'elle contient du fer diffous.

Tant que les barres de fèr ne font pas entièrement rongées , elles peuvent toujours fervir à précipiter , & il n'eft pas nécefl"aire de les forùr louvent de h cuve pour les nettoyer : ainfl l'on peut verfer de

"^(^

D E s' M I N É R A U X, 119

du raffinage de ce métal (ij , ce feroit trop s*éloigner de notre objet, & nous nous contenterons feulement d'obferver que le déchet au raffinage efl d'autant

la nouvelle leflîve chaude jufqu'à ce qu'elles foient prefque dc'truites; après quoi on les retire , on les racle & l'on met la matière cuivreufe qui en tombe dans de l'eau claire. On pourroit mettre d'abord ces barres de fer dans la chaudière de plomb l'on fait bouillir la lefljve cuivreule , la précipitation fe feroit encore plus vite.

La matière cuivreufe qui vient de cette précipitation , contient beaucoup de fer qu'on peut en ièparer en partie par le lavage; mais comme le cuivre elT: réduit en un limon fort fin, il faut bien prendre garde que l'eau ne l'emporte avec elle. Lorfqu'on a rallèmblé allez de ce limon pour en faire une fonte , on le grille fi l'on veut, quoique cela ne foit pas nc-ceflaire , mais comme il faut le sécher exadement avant de le fondre , on le met fur une aire couverte de charbon qu'on allume pour qu'il rougiflé : on répète cette manœuvre deux fois, parce qu'ainli grillé il fe fond plus ailément.

Ce cuivre ainfi précipité , eft la même chofe que le cément de Hongrie , & on le fond avec addition de fcories qui ne rendent point de mattes , «Se mieux encore avec des fcories de refonte de litharge ; alors on ne retire de la fonte que du cuivre noir & point" de matte.

Cette manière de retirer le cuivre de fes mines , fe fait avec des frais peu confidérables , mais elle n'en fépare jamais tout le cuivre, & le minéral qui reftff , en contient encore allez pour mériter d'être fondu. Traité de la fonte des mines de Schlutter , traduit par He Ilot , tome II , pages ^ 0 2 & fuiv.

(jj Le déchet au raffinage du cuivre noir de Saint- Bel, efl de huit à neuf pour cent. Mémoires de Ad. Jars. Le déchet des cuivres bruts de Barbarie & de Mogador, n'eft que de cinq ou fjx pour cent. Aie moire s de AI. Limare.

120 Histoire Naturelle

moindre (d) , que la quantité qu'on raffine à la fois eft plus grande, &: cela par une raifon générale &. très- fimple, c'eft qu'un grand volume offrant à proportion moins de furiace qu'un petit , l'adiion deflrudlive de

(a) Un raffinage de cinquante quintaux de cuivre noir , rend ordinairement quarante-cinq à quarante-fix quintaux de cuivre rofette, ce qui fait un dcchet de huit neuf pour cent, niais ce déchet n'eft qu'apparent , puifque par des eiïàis réitérés , on a reconnu que Ton déchet réel n'étoit que de quatre &: demi pour cent, parce qu'il refle toujours beaucoup de cuivre dans les crafles ; on fait que dans quelques fourneaux que ce foit , \qs fcories provenant du raffinage , font toujours riches en cuivre : il efl prouvé que le cuivre fait environ un pour cent moins de déchet dans le fourneau à manche que fur les petits foyers , &. on peut attribuer cette différence à ce que l'on perfec- tionne dans une feule opération , une quantité de cuivre qui en exige au moins vingt fur le petit foyer; on fait que l'on ne peut raffiner du cuivre fans qu'il n'y en ait toujours un peu qui fe fcorifie avec les matières qui lui font étrangères; plus le volume e(l grand,

plus la quantité qui fe fcorifie efl petite à proportion Il eft

prouvé que la dépenfe du grand fourneau efl moindre de deux tiers de celle qu'exige en charbon le raffinage fur les j^etits foyers. .. . Le fourneau de Chefey dans le Lyonnois , à raffiner le cuivre, a plus de chaleur que n'en ont ceux d'Allemagne. . . Celui de Gruen- thaï en Saxe, conlomme quatre cents trente-huit pieds cubes de bois de corde, & environ vingt-quatre pieds de cl^^rbon pour raffiner quarante quintaux de cuivre noir ; à Tayoba en Hongrie, on con- fomme deux cents vingt pieds cubes de bois de corde pour raffiner cinquante quintaux de cuivre noir, auxquels on ajoute trois ou quatre quintaux de plomb qui fe fcorifie en pure perte : on fait encore que dix livres de plomb fcorifient environ une livre de cuivre. M. Jars, Miin. de l'Académie des Sciences, année 1 76 ^ > pages 6 02 & 6 o^-

l'air

D E s M I N É R A U X. 121

l*air &. du feu qui porte immédiatement flir îa furfacc du métal, emporte, calcine ou brûle moins de parties de la mafTe en grand qu'en petit volume: au rede, nous n'avons point encore en France d'afTez grands fourneaux de fonderies pour raffiner le cuivre avec profit ; les Anglois ont non-feulement établi plufieurs de ces four- neaux fb), mais ils ont en même temps conflruit des machines pour laminer le cuivre afin d'en revêtir leurs navires. Au moyen de ces grands fourneaux de raffinage, ils tirent bon parti des cuivres bruts qu'ils achettent au Chily, au Mexique, en Barbarie & à Mogador; ils en font un commerce très - avantageux , car c'efl d'An- gleterre que nous tirons nous-mêmes la plus grande partie des cuivres dont on fe fert en France 6l dans nos Colonies ; nous éviterons donc cette perte , nous gagnerons même beaucoup fi l'on continue de protéger

(b) On raffine aujourd'hui le cuivre dans de grands fourneaux de réverbère, à l'aide du vent d'un foufliet qu'une roue hydraulique fait mouvoir; on n'y emploie (jue du charbon de terre naturel. Chaque raffinage eft de quatre vingts quintaux, & dure quinze à feize heures. On fait ordinairement trois raffinages de fuite dans le même ïourne2iu , par feniaine; on le laiffe refroid r , & on le réjiare pour la feinaine fuivante. Quand les opérations font confidcrables , il f.ut avoir trois de ces fourneaux , dont un eft toujours en réparation lorfque les autres font en feu. En fe bornant à mille quintaux de fabrication par mois, il fuffit d'un de ces fourneaux à réverbère. A4é moire fur r établi Ifement d'une fonderie ù" d'un laminoir de cuivre , communiqué à Ai. de^ Buffon , par Af. de Limare.

Minéraux , Tome ÎIL Q

122 Histoire N atu relle

J'étabJj/Tement que M. Je Limare fcj, l'un de nos plus habiles Mctallurgiiles vient d'entreprendre fous les auf]3ices du Gouvernement.

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fc) Les ordres du Aiini/îre pour doubler /es Vai/Tcaux en cuivre, dit M. de Limare , font prendre le parti d'établir des fourneaux de fonderie & des laminoirs à Nantes , l'on feroit amener de Cadix les cuivres bruts du Chili & de toute rAméj"ique , ainfi que ceux de JMogador & de la Barbarie; on pourroit même tirer ceu:^ du Levant qui viennent à Marfeille ; car Nantes efl le port du royaume qui- expédie & qui reçoit le plus de Navires de Cadix, de la Ruflle & de l'Amérique feptentrionale ; il e(l aufîi le plus à portée des mines de charbon de terre & des débouchés d'Orléans &. de Paris, ainfi que des arl'enaux de Rochefort, de l'Orient &. de Breft.

La confommation du cuivre ne peut qu'accroître avec le temps , par la quantité de nitricres qu'on établit dans le royaume , par le doublage des Navires que l'on commence à faire en cuivre , &c. par ies expéditions que l'on pourra faire pour l'Inde, de planches de cuivre coulé ; par la fourniture des arfenaux d'Elpagne pour le doublement de leurs Vailîèaux , en payement de laquelle on pren- droit des cuivres bruts du Mexique, dont le Roi d'Efpagne s'efl réfervé la polTeflion, & qui ne perdent que fix à fept pour cent dans l'opération du raffinage ....

l^es cuivres bruts de Barbarie ne coûteront pas davantage , foit qu'on les tire diredeiiient de Mogador & de Larrache , par les Navires hoUandois, foit que l'on prenne la voie de Cadix par les Vaifleaux même de Nantes, qui font fouvent le cabotage, en attendant leur chargement en retour pour France, D'ailleurs ces, cuivres de Barbarie ne donnent que cinq à fix pour cent de déchet au raffinage.

On pourra auffi fe procurer des cuivres bruts de la Ruflle, de la Hongrie, & fur-tout de l'Amérique feptentrionale, qui a fourni jufqu à fte jour la majeure partie des raffineries Ang\o\(es. Alémoïrc (ommuniqué par AI. de Limare à M. de Bufon, en T^ovmbre lySo,

DES Minéraux. 123

DE T A I N.

v>E métal, le plus léger de tous fi^J, n'efl pas à beaucoup près aulTi répandu que les cinq autres ; il paroît affe(5ter des lieux particuliers, &l dans lefquels il trouve en grande quantité ; il ell au/Ti très-rarement mêlé avec l'argent, & ne trouve point avec l'or; nulle part il ne fe préfcnte fous forme métallique (1>J , &. quoiqu'il y ait d'alTez grandes variétés dans Tes mines, elles font toutes plus ou moins mêlées d'arfenic. On en connoît deux fortes principales ; la mine en pierre

(a) Le pied cube d'étaia pur de Cornouailles fondu & non battu , pèle, fuivant M. BrifTon, jio livres 6 onces 2 gros 68 grains, & lorlque ce même e'tain ell battu ou ccroui , fe pied cube pèle 5 i o livres i 5 onces 2 gros 45 grains; ce qui démontre que ce métai n'eft que peu Tufceptibie de comjuelîlon. L'ctain de Melac ou de Alalaca, fondu & non battu, pèle le pied cube 510 livres 1 i onces

6 gros 6 1 grains ; & lorfqu'il eft battu ou écroui , il pcfe 5 i i livres

7 onces 2 gros 1 7 grains ; ainfi cet ctain de Maiaca peut fe com- primer un peu plus que i'étain de Cornouailles. La pefanteur fpé- cifique de I'étain fin &. de I'étain commun, eft beaucoup plus grande, jiarce que ces étains font plus ou moins aliits de cuivre & de plomb.

(h) Quelques auteurs ont écrit qu'on avoit trouvé des morceaux d'étain natif dans les mines d'étain de Bohème & de Saxe , mais cela ell très-douteux ; & I'étain que l'on voit dans les Cabinets , fous le nom d\'tûin natif, qui a une figure de ftaladite non cylin- drique, mais ondulée ou bouillonnée & argentine, & qu'on prétend qui fe trouve dans la prefqu'île de Maiaca, nous paroît formé par le fea des volcans. Bomare; Alinéralog'te , tome JJ , article de /'Etain.

X2j^ Histoire Naturelle

vitrcufc ou roche quartzcufe , clans laquelle l'crain cfl difTéminc, comme le fer l'cfl clans Tes mines primordiales; & la mine crifialliféc qui eft ordinairement plus riche que la première.

Les criflaux de ces mines d'c-tain font très-apparcns, très-diftinds , <Sc ont quelquefois plus d'un pouce de longueur. Dans chaque minière, & fouvent dans la même , ils font de couleurs diilfcrentcs ; il y en a de noirs , de hlancs , de jaunes , & de rouges comme le grenat ; les criflaux noirs font les plus communs &. les plus riches en métal : il paroît que le foie de foufre, qui noircit la furface de l'étain, a eu part à la mlné- ralifation de ces mines en criflaux noirs ; quelques-unes de ces mines donnent foixante - iïw , & ju/qu'à quatre- vingts livres d'étain par quintal (c) . Les criflaux blancs pèfènt plus qu'aucun des autres, & cependant ils ne rendent que trente ou quarante livres de métal par cent; dans les mines de Saxe, les criflaux rouges & les jaunes font plus rares que les noirs & les bJancs; toutes ces mines en criflaux réduifènt aifément en étain , par la hmple addition de quelques matières inflammables , ce qui démontre que ce ne font que des chaux, c'efl-à-dire du métal calciné, & qui s'efl tnÇmit criflallifé par l'intermède de i'eau.

Dans la féconde forte de mines d'étain, c'efl-à-d;»re.

(c) Traité de la fonte des mines de Sclilutier, terne I,page.2i j.

DES Minéraux. 125

dans celles qui font en pierre ou roche, le meta!, ou plutôt la chaux de l'étain, eft li intimement incorporée avec la pierre, que ces mines font très - dures & très- difficiles à fondre. La plupart des mines de Cornouailles en Angleterre, celles de Bohème & quelques-unes de ia Saxe , font de cette nature ; elles fe trouvent quelque- fois mêlées de mines en crillaux ; mais d'ordinaire ces mines en pierre font feules & fe trouvent en liions , en couches, en rognons , en grenailles; fbuvent le roc qui les renferme eft fi dur qu'on ne peut le faire éclater qu'en le petardant avec la poudre, & qu'on eft quel- quefois ohligc de le calciner auparavant pour l'attendrir, en faifant un grand feu pendant plufieurs jours dans l'excavation de la mine ; enfuite loriqu'on en a tiré les blocs, on eft obligé de les faire griller avant de les broyer, fous le bocard la mine fe lave en même temps qu'elle fe réduit en poudre ; & il faut encore faire griller cette poudre métallique avant qu'on ne puifte la réduire en métal.

Si la mine d'ctain , ce qui eft aftez rare , fe trouve mêlée d'argent, on ne peut féparer ces deux métaux qu'en faifant vitrifier l'étain (éJ) ; fi elle eft mêlée de

(d) De tous les moyens que l'on indique pour féparer l'argent de l'ttain , le meilleur & le plus fimple ell d'employer le ter. M. Grofle a trouvé ce moyen en eflayant une (oiie de plomb, pour voir s'il pouvoit être employé aux Coupelles; car un s'étoit aperçu qu'il étoit allié d'étain. Il jeta defîus de la limaille de fer & donna un bon

120 Histoire Naturelle

minerai de cuivre, la miiic cl'étain, plus pc/ànte que celle de cuivre, s'en fépare par le lavage; mais lorA qu'elle cfl mêlée avec la mine de fer, on n'a pas trouve d'autre moyen de fcparer ces deux métaux qu'en les broyant à fec , & en tirant enfuite le fer au moyen de l'aimant.

Après que le minerai d'étain a été grillé & lavé , on le porte au fourneau de iiifion qu'on a eu foin de bien chauffer auparavant; on le remplit en parties égales de charbon & de mine bumeélée ; on donne le feu pendant dix ou douze heures, après quoi l'on perce le

feu. . . . En peu de temps le plair.b Ce couvrit d'une nappe formce par l'étain &. le fer ; alors il efl boa d'ajouter un peu de fel aikali fixe pour faciliter la fe'paration de ces fcories d'avec le rtgule. Cette pratique peut être ejnployée à féparer l'étain de l'argent; mais avant d'y ajouter le fer, il faut y mettre le plomb, fans quoi la fonte fe feroit difficilement & même imparfaitement, parce que l'étain fe calcineroit fans fe féparer de l'argent. II n'y a point de meilleur moyen de remédier aux coupelles dont le plomb fe héri/îè ou végette à J'occafion de l'étain.

Mais fi on avoit de l'or & de l'argent allies d'étain , il fau droit calciner vivement ces métaux dans un creufet afin de vitrifier l'étain, & enfuite pour enlever ce verre d'étain, ou même pour perfedionner fa vitrification , il Tuffiroit de jeter dans le creufet un peu de verre de plomb. Af. Grojfe , cité par M. Hellot dans le Traité de la fonte des mines de Schlutter , tome I , page 226. Nota. Ce procédé pour la calcination de l'étain ne peut fe faire dans un creufet que très- lentement & par une manœuvre pénible , au lieu que cette opération fe fait facilement, prompteinent & compUtemem fur un teft à rôtir. Note communiquée par M. de Morveau.

D E s AI I N É R A U X, ] 27

creufet du fourneau pour laifTer couler l'ctain qu'on reçoit clans des lingotières; on recueille aufTi les fcories pour les refondre & en retirer le métal qu'elles ont retenu, & qu'on ne peut obtenir en entier que par plufieurs fudons. En Saxe, l'on fond ordinairement dix -huit ou vingt quintaux de mines en vingt -quatre heures, mais il efl très-néceilaire de faire h'icn griller & calciner le minerai avant de le porter au fourneau de fufion , afui d'en faire fubiimer , autant qu'il efl pofTible , l'arfenic qui s'y trouve fi intimement mêlé qu'on n'a pu trouver encore les moyens de l'enlever en entier & de le féparer parfaitement de i'étain ; & comme les mines de ce métal font toutes plus ou moins ar/ènicales , il faut non-fèulement les griller, les broyer & les laver une première fois ; mais réitérer ces mêmes opérations, deux, trois & quatre fois, félon que le minerai efl plus ou moins chargé d'arfenic, qui dans l'état de nature, paroît faire partie conflituante de ces mines ; ainfi I'étain <& l'arfenic , dès les premiers temps de la formation des mines par l'aclion du feu primitif, ont été incorporés enfcmble ; & comme il ne faut qu'un très - médiocre degré de chaleur pour tenir J'étain en fudon, il aura été entièrement calciné par la violente chaleur du feu primitif, & c'eft par cette raifon qu'on ne le trotive nulle part dans le fein de la terre fous forme métallique ; & comme il a plus d'affinité avec l'arfenic qu'avec toute autre matière, leurs parties

128 Histoire Naturelle

calcinées & leurs vapeurs fublimces , fe feront mutuelle- ment faifics, & ont forme les mines primordiales dans lefquclies l'ctain n'efl mêlé qu'avec Tar/ènic fèul ; celles qui contiennent des parties pyriteufes font de féconde formation, & ne (ont établies qu'après les premières; elles doivent , comme toutes les mines pyriteufes , leur formation & leur polition à l'action & au mouvement des eaux : les premières mines d'ctain trouvent par celte raifon en filons dans les montagnes quartzeufes produites par le feu , & les fécondes dans les montagnes à couches formées par le dépôt des eaux.

Lorfque l'on jette la mine d'étain au fourneau de fufion, il faut tâcher de la faire fondre le plus vite qu'il efl poffible , pour empêclier la calcination du métal fej qu'on doit auffi avoir foin de couvrir de poudre

(e) Les Anglois font rôtir trois fois la mine d't'tain , & la lavent jufcju'à ce qu'il n'y paroiffe plus rien de terreux ; enfuite ils la chauffent une quatrième fois jufqu'à la faire bien rougir. Ils la pèfent pour favoir ce qu'elle a perdu au lavage îk à la calcination : à une partie de cette mine, ainfi préparée , ils joignent trois parties dejlux noir; ils mettent ce mélange dans un creufet & le couvrent de fel commun. Ils fondent à un feu vif & prompt , & n'y lailTent le creufet que le temps nécef- faire pour faire fondre i'étain; tant parce qu'il fe brûle aifément, que parce que les feis en fufion le rongent & en dérobent.

Quelquefois ils fubflituent au flux noir la même quantité de charbon de terre en poudre ; ils le mêlent & conduifent la fonte comme par le flux noir. Traité de la fonte des mines de Schlutter , traduit par M^ JJeliot , tome J , page 221.

de

DES Minéraux.^ 129

de charbon au moment qu'il eft réduit en fonte ; car à peine eft-ii en fufion que la furface change en chaux grife, qui devient blanche en continuant le feu. Cette chaux, dans le premier état, s'appelle cendre d'éui'm, & dans le fécond on la nomme potée. Lorfque cette der- nière chaux ou potée d'étain a été bien calcinée , elle efl aufii réfraélaire au feu que les os calcinés ; on ne peut la fondre feule qu'à un feu long & très - violent* elle s'y convertit en un verre laiteux femblable par la couleur à la calcédoine, & lorfqu'on la mêle avec du verre , elle entre à la vérité , dans l'émail qui réfulte de cette fufion, mais fans être vitrifiée (f); c'eft avec cette potée d'étain , mêlée de matières vitrifiables, que l'on fait l'émail le plus blanc de nos belles faïences.

Lorfque les mines d'étain contiennent beaucoup d'arfenic , & qu'on ell obligé de les griller & calciner à plufieurs reprifes , on recueille l'arfenic en faifant palTer la fumée de cette mine en calcination , par des cheminées fort inclinées. Les parties arfenicales

(f) Si on mêle la potée d'étain , au moyen de la fufion , avec du verre blanc tranfparent, bien-tôt il devient opaque, & paiïe à l'état d'émail par l'interpofition des molécules de cette chaux invitrifiable, même par l'intermède du verre de plomb; aulîi empêche -t- elle la coupellation en nageant à la furface du plomb fondu ; & lorfqu'on veut coupeller quelque matière métallique qui contient de i'étain, il faut par une calcination préliminaire en extraire ce dernier métal. Lettre de M. Demejfe a M. Bernard, tome II , page 40 S,

AïuiérauXj Tome IIL R

130 Histoire Natu relle

s'attachent aux parois de ces cheminées, dont il efl enfuite aifé de les détacher en les raclant.

On peut imiter artificiellement ces mines d'étain fg), en mêlant avec ce métal de l'arienic calciné, & même .ce minerai ne manque jamais d'opérer la calcination de j'étain, & de fe mêler intimement avec chaux lorf- qu'on le traite au feu avec ce métal (h) , ce qui nous prouve que c'eft de cette manière que la Nature a produit ces mines d'étain , & que c'eft à la calcination de ces deux fubftances , par le feu primitif, qu'eft due leur origine ; les parties métalliques de l'étain fe feront réunies avec l'arfenic, 6l de la décompofition de ces mines par les élémens humides, ont rélulté les mines de féconde formation , qui toutes font mêlées de pyrites décompofées & d'arfénic; ainfi , dans toutes ces mines, l'étain n'eft ni dans fon état de métal , ni même miné- ralifc par les principes du foufre ; il eft toujours dans fon état primitif de chaux , & il eft fimplement uni avec

(g) M. Monnet fait entrer du fer en quantité dans la conipofition de la mine artificielle d'étain. On pourroit donc croire, avec quelque fondement, qu'il en efl: de l'étain comme du cuivre, & que l'arfenic ne leur adhère fi fortement que par le fer que les mines de ces deux métaux contiennent.

(h) Une demi -once de rognures de feuilles d'étain, acquit par cette calcination, dans une cucurbite de verre, vingt -fix grains d'augmentation de poids, quoique la chaleur eût été afiez modérée, pour que l'arienic fe fublimât iàns faire entrer le métal en tufiont Elémens de Chimie , jjar Al, de Aloryeau , tome II , page Jjo,

DES Minéraux, 131

l'arfenic. Dans les mines de féconde formation, la chaux d'ctain efl; non-fculcment mclée d'ar/enic , mais encore de fer & de quelques autres matières métalliques, telles que le cuivre, le zinc & le cobalt.

La Nature n'ayant produit Téiain qu'en chaux , <Sc point du tout fous forme métallique, c'efl unique- ment à nos recherches & à notre art que nous devons la connoiflance & la jouiffance de ce métal utile ; il eft d'un très-beau blanc, quoique moins brillant que l'argent; il a peu de dureté, il eft même, après le plomb, le plus mou des métaux ; on efl obligé de mêler un peu de cuivre avec l'étain , pour lui donner la fermeté qu'exigent les ouvrages qu'on en veut faire ; par ce mélange , il devient d'autant plus dur qu'on augmente davantage la proportion du cuivre ; & lorfqu'on mêle avec ce dernier métal une certaine quantité d'étain, i'alliage qui en réfulte , auquel on donne le nom (ïû'irci'm ou de bronze, efl beaucoup plus dur, plus élaflique & plus fonore que le cuivre même.

Quoique tendre & mou lorfqu'il efl: pur, l'étain ne laiffe pas de confèrver un peu d'aigreur, car il efl moins duélile que les métaux plus durs, & il fait entendre lorfqu'on le plie, un petit cri ou craquement qui n'eft produit que par le frottement entre fes parties confli- tuantes, &. qui fèmble annoncer leur défunion; cependant on a quelque peine à le rompre , &. on peut le réduire en feuilles affez minces , quoique la ténacité ou la

R ij

132 Histoire Naturelle

cohérence de fcs parues ne foit pas grande ; car un fil d'ctain d'un dixième de pouce de diamètre, fe rompt fous moins de cinquante livres de poids; denfité, quoique moindre que celle des cinq autres métaux, efl cependant proportionnellement plus grande que ténacité ; car un pied cube d'étain pèfe ^10 ou ^ i i livres. Au refte Ja pefanteur fpécifique de l'étain qui efl dans le com- merce , varie fuivant les différens endroits on le fabrique ; celui qui nous vient d'Angleterre efl plus pefant que celui d'Allemagne & de Suède.

L'étain rend par le frottement une odeur dé/à- gréable; mis fur la langue faveur efl déplaifànte: ces deux qualités peuvent provenir de i'arfènic dont il efl très-rare qu'il foit entièrement purgé ; l'on s'en aperçoit bien par la vapeur que ce métal répand en entrant en fufion; c'efl une odeur à peu - près femblable à celle de l'ail, qui, comme l'on fait, caradérife l'odeur des vapeurs arfenicales.

L'étain réfjfle plus que les autres métaux imparfaits à l'aélion des élémens humides ; il ne fe convertit point en rouille comme le fer, le cuivre <Sl le plomb, & quoique fa fùrface fe teruiffe à l'air, l'intérieur demeure intad, & fa fuperiicie fe ternit d'autant moins qu'il efl plus épuré; mais il n'y a point d'étain pur dans le commerce, celui qui nous vient d'Angleterre efl tou- jours méic d'un peu de cuivre , & celui que l'on appelle éiain fit ne laiffe pas d'ctre mclé de plomb.

D E s M 1 N È R A V X. 13^

Quoique l'étain foit le plus léger des métaux , fa mine, clans laquelle il efl toujours en état de chaux, eft fpéciiiquement plus pefante qu'aucune de celles des autres métaux minéraiifcs , &. il paroît que cette grande pefanteur provient de fon intimité d'union avec l'arfenic; car en traitant ces mines, on a obfervé que les plus pefantes font celles qui contiennent en efiet une plus grande quantité de ce minéral. Les minerais d'étain, foit en pierre, foit en criflaux, foit en poudre ou fablon, font donc toujours mêlés d'arfènic , mais fou vent ils contiennent aujiïi du fer; ils font de différentes cou- leurs, les plus communs font les noirs <Sc les blancs; mais lorfqu'on les broie , leurs couleurs s'exaltent & ils deviennent plus ou moins rouges par cette comminu- tion. Au refle, les fables ou poudres métalliques qu'on trouve fouvent dans les mines d'étain n'en font que des détrimens, & quelquefois ces détrimens font fi fort altérés qu'ils ont perdu toute confiflance, &. prefque toutes les propriétés métalliques. Les Mineurs ont appelé immdick, cette pou/fjère qu'ils rejettent comme trop appauvrie , & dont en effet on ne peut tirer , avec beaucoup de travail, qu'ime très-petite quantité d'étain, îa fubflance de ce mundick n'eft pour la plus grande partie que de l'arfenic décompofé (i) .

(i) On diftingue aifément le mundick des autres mines par fa couleur brillante, jnais cependant brune & iale, & dont elle teijit les doigts .... Les mineurs afîurent qu'ils ne trouvent que peu ou

1^4 Histoire Naturelle

Comme l'ctain ne fe trouve qu'en quelques contrées particulières, & que fes mines en général, font aiïcz difficiles à extraire & à traiter, on peut croire avec fondement , que ce métal n'a été connu & employé que long-temps après l'or, l'argent & le cuivre, qui fe font préfentés dès les premiers temps fous leur forme métallique; on peut dire la même chofe du plomb & du fer ; ces métaux n'ont vraifemblablement été em- ployés que les derniers ; néanmoins la connoiffance & l'ufage des fix métaux, date de plus de trois mille cinq cents ans ; ils font tous nommés dans les Livres facrés ; les armes d'Achilles , faites par Vulcain, étoient de cuivre allié d'étain (k) ; les Hébreux &. les anciens

point d'étain dans les endroits ils rencontrent du mundick .... Et il efl: fur que fi on laifle du mundick parmi l'étain qu'on veut fondre, il le rend épais & moins ducTiile. . . . Les mineurs regardent cette fubftance, mundick, comme un poifon , & croient que c'eft une efpèce d'arfenic. ... II en fort en effet une puanteur très-dan- gereufe lorfqu'on le brûle pour le féparer de l'étain. Aferret , Collec- tion académique , partie éirangcre , tome II , pages ^8 o & fuïv

On diftingue aiféinent ce mundick du minerai d'étain, car le mundick s'attache aux doigts & les falit ; cette matière, fi elle refte avec l'étain, le gâte , lui ôte fun éclat & le rend cafTant. Le feu diflipe le mundick & l'odeur en eft pernicieufe, M. Hellot ayant examiné cette matière, l'a trouvée prefque en tout femblable à une mine bitumineufe d'arfenic, qui fut envoyée de Sainte-Marie-aux-Mines. Minéralogie de AI. de Bomare , tome II , pages i i i & fuiv.

(k) Homère nous dit aufli que les Héros de Troie, couvroient de plaques d'étain la tète des chevaux attelés à Içur char de bataille;

D E s AI I N É R AU X, 13 y

Grecs ont Jonc employé ce dernier métal (!), &. comme les grandes Indes leur étoient inconnues , (Se qu'ils n'avoient commerce avec les Nations étrangères que par les Phéniciens {rftj , il eft à préfumer qu'ils tiroient cet étain d'Angleterre , ou qu'il y a\oit dans ce temps , des mines de ce métal en exploitation dans i'Afie mineure, lefquelles depuis ont été abandonnées (nj, Aéluellement on ne connoît en Europe, ou plutôt on ne travaille les mines d'étain qu'en Angleterre & en quelques provinces de l'Allemagne ; ces mines font très- abondantes & comme accumulées les unes auprès des autres dans ces contrées : ce n'efl pas qu'il n'y en ait

mais il ne paroît pas qu'au temps du fiége de Troie , les Grecs fe ferviflent de vafes d'étain fur leur table; car Homère fi iidèle à re- préfenter toutes les coutumes, ne dit rien à ce fujet , tandis qu'il fait plus d'une fois mention des chaudrons d'airain dans lefquels les Capitaines & les Soldats faifoient cuire leur viande.

(l) Les anciens Romains fe fervoient de miroirs d'étain que Von fabriquoit à Brindes , & il y a toute apparence que cet étain étoit mêlé de bifmuth. Spécula ex Jlanno laudatijfima Brundufii temperabantur, donec argenu'is uli cœpere & ancïllœ. Plin. lib. XXXIV, cap. xvil.

(m) Le prophète Ezéchiel, en s'adreflant à la ville de Tyr, lui dit, les Cathaginois trafiquoient avec vous, ils vous apportoient toutes fortes de richelfes, & rempliflbient vos marchés d'argent, de plomb & d'étain. Chap. XXVII ^ v. 12.

(n) Nota. Woodward prétend, peut-être pour l'honneur de fa nation , que les anciens Bretons faifoient commerce avec les Phéni- ciens , & leur fourniObient de l'étain dès la plus haute antiquité; mais ce favant Naturalise ne cite pas les garans de ce fait.

136 Histoire Natu relie

ailleurs , mais elles font {\ pauvres en comparai/bn Je celles de Cornouailles en Angleterre, & de celles de Bohême & de Saxe , qu'on les a négligées ou tout-à- fait oubliées.

En France, on a reconnu des mines d'étafn dans la province de Bretagne, & comme ç\\t n'efl pas fort éloignée de Cornouailles , il paroît qu'on pourroit y chercher ces mines avec efpérance de fuccès ; on en a auffi trouvé des indices eu Anjou , au Gévaudan & dans Je comté de Foix (o). On en a reconnu en Suiffe (p) ; mais aucune de ces mines de France & de Saifle, n'ont été fuivies ni travaillées. En Suède, on a découvert ai exploité deux mines d'étain qui fe font trouvées aflez riches en métal (q); mais ies plus riches de toute

l'Europe,

».i ■—■■■■■■. > » - .1. ■-- ■■ .1 III - - , ,

(0) Dans le Gévaudan, i[ y a dans la paroiffe de Veuren , félon Al.de yl'IurvUle, une mine d'étain qu'on pourroit traiter avec fuccès... Suivant yMalus, il y a de l'étain dans les montagnes de la vallée d'UJlon au comté de Foix. ... Et en Anjou, fuivant P/gûnioI, il y a dans la paroifle de Courcelles des mines d'argent , de plomb <5c d'étain. Traité de la fonte des mines de Schlutter , tome I , pages 2^, ^i à' é ],

(p) La moniagne Aubr'ig , dans le canton de Schwit^ en Sui/Te, renferme de l'étain qui eft mêlé de pierres lenticulaires & de peignes. M. Guettard; Mémoires de l'Académie des Sciences, année 17J2, page SS°'

(q) On a découvert dans la province de Danmora une mine d'étain mêlée de fer, dont M. Richman a donné fa defcription ; elle cft plus dure & moins pefante que les mines d'étain de Saxe & moins abondante en étain, M. Brandt ea ajoute une autre découverte auprès

de

DES Minéraux, 137

l'Europe, font celles des provinces de Cornouaiiles (r)

de Wejlaufors dans la \f erflmanie , elle a encore moins d'etaiu , moins de pefanteur Tpécifique & plus de fer. Bibliothcque raifonnée , tome XLI , page 2y.

(r) Les mines de Cornouaiiles font de couleurs différentes ; il y en a de fix fortes, de la pâle, de la grile, de la blanche, de la brune, de la rouge & de la noire : cette dernière efl la plus riche & la meil- leure , & cependant les plus riches de toutes ne donnent que cinquante pour cent; on trouve dans [q fparr , qui fait fouvent la gangue de cette mine, des criftaux aflez durs pour couper le verre, lefquels font quelquefois d'un rouge-iranfparent , & ont l'éclat du rubis. Sur ce fparr on trouve aufli une autre forte de fubflance femblable à une pierre blanche , tendre , que les mineurs appellent kelum , qui laifle une ccunie blanche lorfqu'on la lave dans l'eau en fortant de la mine: il femble que ce foit la même matière que le fparr, & qu'elle n'en diffère que par le degré de pétrification criftailine. . , . & à l'égard des criflaux d'étain , on peut afîurer qu'ils font toujours mêlés d'ar- fenic , dont ils répandent l'odeur & même des particules ftrineufes par ime fiiiiple calcination fur une pèle à feu. , . . Les criflaux blancs font ceux qui font le plus mêlés d'arfenic , ils font les plus réfrac- taires au feu, & ce font les plus rares. Il y a d'autres criflaux d'étain d'un jaune d'or qui font aufîî afîez rares , autre part que dans la Hefle. D'autres criflaux qui font d'une couleur rouge tirant communé- ment fur celle du fpath rofe ou du petit rubis; ils font pour l'ordinaire Vin peu tranfparens ; il y a aufTl des criflaux d'étain tranfparent de couleur violette ; ils produifent abondamment dans la fonte ; on en trouve en Hongrie, dont la figure efl prelque cubique, & accom- pagnée quelquefois de pyrites fulfureufes ; il y a aufli des criflaux bruns qui ont fouvent une figure fort bizarre , leur couleur efl afl^ez femblable à celé des grenats bruts ordinaires; il y en a aufîi de verts qui ne pèfent pas autant que les bruns , & qui cependant rendent beaucoup à la fonte; ils forment des elpèçes de quilles à. huit paiiç,

Minéraux , Tome II L S

138 Histoire Naturelle

& Je Dévon en Angleterre, & néanmoins ces mines paroiffent ctre de féconde ou de troifième formation (f) ;

d'un brun-noirâtre en-dehors, fort durs & d'un vert chatoyant mte'- rieurement comme le fpath vitreux & écailieux. Minéralogie de Bomare , tome II, pages i j i & fuivanîes.

(f) L'étain ed fi abondant dans le pays de Cornouailles , qu'il eft répandu prefque par-tout, & que même les filons de cuivre les plus abondans contiennent de l'étain dans leur partie fupérieure, c'eft-à-dire, proche la furface de la terre; ce métal y efl même afîez abondant pour mériter l'extracfiion. D'autres fois le minéral de cuivre & celui d'étain fe trouvent dans le même filon , quoique féparément , ce qui ne continue pas ordinairement dans la profondeur.

Prefque joignant la ville de Redrath , on exploite une mine d'étain très-confidérable , nommée peduandrea. Cette mine fut d'abord com- mencée comme mine de cuivre ; on y a extrait une très - grande quantité de minéral; on y^travailloit alors deux fiions parallèles qui fe touchoient prefque l'un l'autre, de forte qu'ils n'en formoient qu'un feul , l'un produifoit du minéral jaune de cuivre ou pyrite cuivreufe , & l'autre du minéral d'étain. Le premier étoit joignant ie toit, «5c le fécond joignant le mur ou rocher inférieur; mais en allant dans la profondeur le minéral de cuivre a ce.ï^é ^ de forte qu'il ne refte plus que le filon d'étain qui eft fort abondant : cette mine a de cinquante à foixante toiles de profondeur.

A Godûlphin-bûll fe trouve la mine d'étain fa plus e'tendue qu'il y aït dans le pays de Cornouailles La diredion des filons eft tou- jours de l'elt à l'oueft comme dans toutes les mines de ce pays, & fon inclinaifon au nord-eft d'environ 70 degrés. Cette mine a, dit-on , quatre-vingt-dix toifes de profondeur perpendiculaire. . . On coinpte cinq filons parallèles fur cinquante à foixante toifes d'étendue , mais qui ne (ont point exploités également. ... il n'y a que le principal qu'on exploite en totalité.

DES Minéraux. 139

car on y a trouvé des débris de végétaux, &. même des arbres entiers (t) ; elles font en couches ou veines très-voifines, & d'une longue étendue, toutes dans la même direélion de l'eft à l'oued ( u) , comme font auffi toutes les veines de charbon de terre & autres matières anciennement entraînées & dcpofées par le

Ces filons font renfermés dans un granit à gros grains, très-dur, mais il n'en eft pas ici comme en Saxe & en Bohème ; l'etain ne fe trouve jamais réuni & confondu dans cette pierre , mais dans une efpèce de rociie bleuâtre qui paroît être la matrice ge'nérale du plus grand nombre des mines d'etain de Cornouaiiies. On rencontre communément le long du filon, joignant le mur, ce qu'on nomme le guide ; c'cfl un quartz mêlé quelquefois de mica, lequel le rend peu folide. Le filon confille lai-même en un quartz fort dur, qui n'eft; pas toujours parfaitement blanc , mais qui a un œil bleuâtre ; il efl; réuni à la roche bleue dans laquelle fe trouve le minéral d'étain , mais prefque toujours en petits grains criftaliifes comme des grenats. On y trouve aufli quelquefois du quartz criflallifé en hexogone ; il y a des endroits du filon qui font très-riches, mais fort tendres: ce minéral eft pari'emé de beaucoup de mica & de petits grains de minéral d'étain, comme de grenats; ce filon a 2 , 3 , 4, 5 pieds de large, plus ou moins. Obfervations fur les mines , par Ai. Jars ; Aïémoires de r Académie des Sciences , année lyyo.

(t) Voyages hiltoriques de l'Europe; Paris, i (f p ^ , tome IV, page 104.

(u) Les veines d'étain de Cornouaiiies ont une- dire<^ion très- étendue , puifqu'on rencontre plulleurs mines d'étain dans les îles de Seilly, qui font fituées dans les mêmes diredion & latitude que la province de Cornouaiiies. Ai. Jars; Alemoircs de l'Académie des Sciences, année lyyo, page j"/^.

s \]

140 Histoire Naturelle

mouvement des mers; & ces veines d'étaiii courent pour la plupart à la furface du terrein, & ne defcendent guère qu'à quarante ou cinquante toifts de profondeur; elles gifTent dans des montagnes à couciies de médiocre hauteur, & leurs débris entraînés par les eaux pkniales, fe retrouvent dans les vallons en fi grande quantité, qu'il y a fouvent plus de profit à les ramaffer qu'à fouiller les mines dont ils proviennent (x). Ces veines très-longues en étendue, n'ont que peu de largeur; il y en a qui n'ont que quelques pouces, & les plus larges n'ont que fix ou fèpt pieds (y) ; elles font dans un roc

(x) Dans les environs de la ville de Saint- Aujf le , province de Cornouaiiles , on a travaillé anciennement beaucoup de mines d'étain ; mais il y en a peu en exploitation aujourd'hui, on fe contente de prendre les terreins qui font dans le fond des vallons, «Si de les laver pour en retirer les morceaux de minerai d'étain cjui y lont répandus & dont les angles font arrondis comme ayant été roulés , & proba- blement détachés des filons d'étain des montagnes voifines; ces miné- raux d'étain font répandus dans les vallons lur de grandes étendues ; ils peuvent provenir auflj des détrimens ou déblais des mines ancien- nement exploitées , & qui auront été entraînées & dépofées par \qs

eaux des pluies Il y a toujours des filons fur les éminences

voifines , dont le minerai efl de la même nature que celui que l'on trouve répandu dans les vallons. . . . Il eft fi commun dans les mines d'étain que le m.inéral fe préfente jufqu'à la fijrface de la terre ; il y en a qui fijnt en pierre très-dure , mais il y en a auffi près de Saint- Auftle qui eft en roche très-tendre. AI. Jars ; Aîémoires de l'Aca^ dtmie des Sciences , année lyyo, pages j^o cf fuiv.

(y) Merret qui a écrit en 1678 , dit que \^s pierres du pays de Cornouaiiles, d'où l'on tire l'étain, fe trouvent quelquefois à un ou

DES Minéraux, 14,1

dur, clans lequel on trouve quelquefois des criflaux blancs & tranfparens, qu'on nomme improprement d'ianums de CornouaiJles. M. Jars & M. le baron de Dietrich, qui ont obfervé la plupart de ces mines , ont reconnu qu'elles étoient quelquefois mêlées de minerais de cuivre (i) ^ ôi que fouvent les mines de cuivre font voifines de celles d'ctain f^ij; & on a remarqué de plus, que, comme

deux pieds au-deflous de la furface de la terre, le plus fouvent difpofées en veines entre deux murs de rocher, couleur de rouille > qui ne paroiiTent avoir que très-peu d'aflinitc avec i'ctain. Les veines ont depuis quatre jufqu'à dix - huit pouces environ de largeur , & elles font le plus fouvent dirigées de l'eft à l'oueft. . . . Les folTes ont quarante, cinquante & quelquefois (o^xante brafles de profondeur. CoUeâion acûdémique , partie étrangère , tome II , pages ^S o ù' fui -

(1^) M. le baron de Dietrich qui a féjourné pendant plufieurs mois en Cornouailles, dit (jue la Nature elle-même a mclc enfemble îe cuivre & i'étain .... qu'il n'y a guère que les mines d'èiain roulc'es par les torrens , & celles qui fe trouvent dans le quartz granuleux qui renferme du fchori , qui ne foient pas mêlées avec de la mine de cuivre. Journal de Phyfique , mal lyS o, page ^82.

(a) Aux environs de la ville de Alaraijon , on exploite plufieurs fiions de minéral de cuivre & de celui d'étain, à peu-près de la nature & dans la même roche fchirteufe , nommée killas , que ceux des environs de la ville de Redenth. ... II y a aufîi des minéraux d'étain dans le granit , entr'autre dans le rocher qui compofe fe Alont Saint- Michel , qui n'eft féparé de Marazion que par un petit bras de mer : on aperçoit dans ce rocher une fort grande quantité de filons d'un fort bon minéral d'étain ....

On eflime le produit en étain de cette province à la valeur de cent quatre-vingt-dix à deux cents mille livres fterling chaque année ,

/

ii

142 Histoire Naturelle

toutes les mines d'ctain contiennent de J'ar/enic , les vapeurs qui s'élèvent de leurs fofTes font très-nuifibles, Si quelquefois mortelles [6J.

De temps immémorial, les Anglois ont fu tirer grand parti de leurs mines d'étain; ils favent les traiter pour le plus grand profit, ils ne font pas de commerce, ni peut-être d'ufage de i'étain pur ; ils le mêlent toujours avec ime petite quantité de plomb ou de cuivre. « Lorfque la mine d'ctain, dit M. Geoffroy, a reçu j> toutes les préparations qui doivent la diipofèr à être fondue , on procède à cette dernière opération dans

» un fourneau à manche on refond cet étain, qui

» efl en gâteaux , pour le couler dans des moules de 55 pierre quarrés ôl obiongs , <5c ce(i ce qu'on appelle

i'>fnuînons Ces fàumons font plus ou moins fins,

fuivant les endroits Ton en coupe pour faire des épreuves; le defiTus ou la crème du faumon efl très-douce & fi pliante qu'on ne peut la travailler feule ; on efl 3> obligé d'y mêler du cuivre dont elle peut porter jufqu'à

& qu'il fe vend du minerai de cuivre pour cent quarante mille livres fleriing. Oùfervationsjur les mines , pur Af. Jars; Mémoires de l'Aca- démie des Sciences , année i yy 0 , pages j^.o Ù" fuivantes.

(h) Lorfque la mine efl: riche , on trouve la veine à dix brades de profondeur, & au-defibus on trouve une cavité vide ou fente de quelques pouces d'ouverture ; il fort de ces fouterrains des vapeurs nuifibles & même mortelles. ColleOion académique , partie étrangère, tome II , pages ^S 0 & fuiyanles.

5>

»

DES Minéraux. 14.^

trois livres fur cent , &. quelquefois jufqu'à cinq livres. « Le milieu du faumon efl plus dur , &. ne peut porter ** que deux livres de cuivre, & le fond efl fi aigre qu'il « y faut joindre du plomb pour le travailler. L'étain ne « fort point d'Angleterre dans fa pureté naturelle ou tel « qu'il a coulé dans le fourneau; il y a des défcnfes très- « rigoureufes de 'le tranfportcr dans les pays étrangers , « avant qu'il ait reçu l'alliage porté par la loi (^c) ».

Quelques-uns de nos habiles Chimiftes, &. particu- {ièrement M.'^ Bayen & Clwrlard , ont fait un grand nombre d'expériences fur les différens étains qui font dans le commerce; ils ont reconnu que l'étain d'An- gleterre en gros faumons, ainfi qu'en petits^ lingots , mis dans une retorte, ou dans un vailTeau clos pour fubir l'adion du feu, laifTe échapper une petite quantité de matière blanche qui s'attache au col de la retorte, & qui ne fi point du tout arfenicak , ils ont trouvé que cet étain n'efl pas allié de cuivre pur, mais de laiton; car ils en ont tiré non - feulement un fel à bafè de cuivre, mais un nitre à bafè de zinc : cette dernière remarque de M." Bayen & Charlard, s'accorde très - bien avec l'obfèrvation de M. Jars, qui dit, qu'outre le plomb & le cuivre, les Ouvriers mêlent quelquefois du zinc avec i'étain, & qu'ils préfèrent la limaille du laiton,,

•^i— ^— ^M^— ^^i»^— ^— ^i^— I II - PI- »! W I ■■ I ■■ ■!■ I— ^^——

(c) Recherches chimiques fur l'etain, par M/' Bayen & Cbarlard,. jpages c) ^ & I 0 Q ,

144- Histoire Naturelle

qu'il n'en faut qu'une demi-livre fur trois cenrs pefant d'étain, pour ic dégraifler, c'e(t-à-dire , pour le rendre facile à planer (d) ; mais je ne puis me perfuadcr que celte poudre blanche , que l'ctain iaiffe échapper , ne foit point du tout arfenicalc, puifqu'elle s'efl fublimée , & que ce n'eft point une fimple chaux ; &. quand mcme ce ne feroit qu'une chaux d'étain , elle conticndroit toujours de l'arfenic ; d'ailleurs, en traitant cet étain d'Ano-Ieterre avec l'eau régale, ou feulement avec l'acide marin, ces habiles Chimifles ont trouvé qu'il contenoit une petite quantité d'arfcnic ; ceci paroît donc infirmer leur première affertion fur cette iiiûticre blanche qui s ai- tache an col de la rctortc, ir qu'Us dijcut n are nullement arÇenicale. Quoi qu'il en foit, on leur a obligation, d'avoir recherché quelle pouvoit être la quantité d'arfenic contenue dans l'étain dont nous faifons ufage ; ils fe font alTurcs qu'il n'y en a tout au plus qu'un grain fur une once, ^ l'on peut en fuivant leurs procédés (e) ,

connoître

(d) Alemoires de M. Jars; Acadcmie des Sciences, année lyyo,

(e) Le vrai moyen de bien connoître la portion de l'arfenic mêlé à l'eiain, efl: de faire difi'oudre ce dernier métal dans l'acide marin très-pur; s'il ne relie rien lorfque la difloluiion eft faite, l'étain efl ians arfenic ; s'il refte un peu de poudre noire , il faut la féparer avec loin, la laver, la faire fécher &: en jeter fur des charbons ardens pour reconnoître fi elle ed arfenica'e ou non: L'efl-elle! qu'on i'expofe à un degré de feu capable d'opérer la fublimation de l'arfenic; fi çlle s'exhale en entier, elle eft de pur régule d'arfenic; s'il refte

DES Minéraux. 14^

connoître au julle la quantité d'arfenic que tout étain contient.

Les mines d*étain de Saxe, de Mifnie, de Bohème & de Hongrie , giiïent , comme celles d'Angleterre , dans les montagnes à couches, & à une médiocre pro- fondeur ; elles ne font ni auffi riches ni aufTi étendues que celles de Cornouailles ; i'étain qu'on en tire efl néanmoins au/fi bon, & même les Allemands prétendent qu'il efl meilleur pour l'étamage ; on peut douter que cette prétention foit fondée , &. le peu de commerce qui fe fait de cet étain d'Allemagne, prouve affez qu'if n'eft pas fupérieur à celui d'Angleterre.

Les cantons fe trouvent les meilleures mines de Saxe , font les montagnes de Majlerherg vers Boles-fchau ; les veines font à vingt-quatre toifes de profondeur dans des rochers d'ardoifè, elles n'ont qu'une toife en lar- geur. Une de ces mines d'étain efl couchée fur une mine très - riche de cuivre , que l'on en fépare en la cafTant ; une autre à Breyienhrun vers la ville de Geor- genjiatt , qui efl fort riche en étain, efl néanmoins mêlée

un peu de poudre dans le teft qu'on enij)Ioie à l'opération , qu'on la pèfe s'il efl pofllbie , ou qu'on l'évalue, & on faura ce qu'une quantité donnée d'étain quelconque contient réellement d'arfenic fous forme réguiine. . . . On dit fous forme réguline , parce qu'en effet la chaux d'arfenic ne peut fe combiner avec l'étain , tandis qu'au contraire fon régule s'y unit avec la plus grande facilité. Recherches fur l'étmn, par M." Bayen ù' Char lard, pages 1 1 8 éf fuîv.

Aline raux. Tome III. T

14-6 Histoire Natu relle

d'une grande quantité de fer, que I*on en tire au moyen de i'aimant après l'avoir réduite en poudre: ie canton de FiirJIcmberg efl entouré de mines d'étain, & dans le centre de cette même contrée, il y a des mines d'ar- gent (fj. Les mines d'étain à' Eibenjiûk, s'éitnàtïïi dans une longueur de quelques lieues, & fouillent à d\\ toifes de profondeur; elles font mêlées de fer, & on y a quelquefois trouvé des paillettes d'or. Toute la montagne de Goyer eft remplie de mines d'étain; mais Je roc qui les renferme efl fi dur, qu'on eft obligé de ie faire calciner par le feu avant A'cxi tirer les blocs. On trouve auffi des mines d'étain à Schiéeberg; enfin à Anerjherg, la plus haute montagne de toute la Saxe, il y en a une à vingt - huit toifes de profondeur flir trois toifes de largeur , dans un rocher d'ardoifè ; cette mine a produit en 174.1, cinq cents quintaux d'étain (g).

En Bohème, à trois quarts de lieue de Plareîi ^ if fe trouve une mine d'étain voifine d'une mine de fer, qui toutes deux font dans un banc de grès à gros grains (h) ; & comme le minerai d'étain efl mêlé de parties ferrugineufes , on le fait griller après l'avoir broyé pour en féparer le fer au moyen de l'aimant;

(f) Traité de la fonte des mines de Sciilutter, traduit jpar M. Hdlot , tome II , page j 8 j ,

(g) Idem , ibid, page ^88,

(h) Voyages métallurgiques de M. Jars , page jr.

DES Minéraux. 14.7

il fe troi'.ve auiïi des mines d'étain dans le diflriél A* FJli'hdgen & dans celui de Saline t ; une autre à Sclilac- Kenwald, qui s'enfonce afTez profondément (i) , Enfin, il y a aulîi quelques veines d'ctain dans Jes mines de Hongrie (k) ; on aflfure de même qu'il s*en trouve en Pologne; mais nous n*avons aucune notice afTez cir- conftanciée de ces mines pour pouvoir en parler.

L' Afie efl peut-être plus riche que l'Europe en étain ;

il s*en trouve en abondance à la Chine (l) , au

■' ' 1 . .

(ï) Ephémérides d'Allemagne, année i6S6,

(k) On trouve des mines d'étain dans plufieurs contrées de l'Europe, en Saxe, en Mifnie , comme à Stolberg, Goyer, Anne- berg, Altemberg , Freiberg , dans la montagne de Saint-André de la forêt noire. En Bohème, dans les mines de Groupe près de Toplitz, dans celles d'Aberdam, deSchoufeld, &c. Dans la Hongrie, aux mines de Schonmitz & du comté de LyptoW. M. Geoffroi ; Mémoires de l'Académie des Sciences, année ij^8, page i o^. L'une des plus fameufes de toutes les mines d'Allemagne, efl celle à'Attemberg; on n'en trouve point de femblables dans toute l'hiftoire des mines... elle fournit de la mine d'étain , depuis la fuperficie jufqu'à cent cin- quante toifes de profondeur perpendiculaire. Ces fortes de filons en mafles n'ont que rarement une direction réglée , mais ils ont leurs bornes qui quelquefois eft une pierre sèche , quelquefois un roc que les mineurs appellent le féparateur. Traité de la fonte des mines dt Schlutter , tome II , pages ^ S j ù" fuivantes,

(l) On tiroit autrefois à la Chine beaucoup d'étain aux environs

de la ville àHU-fi, . . . L'étain eft fi commun dans cet empire , que

le prix en eft fort modique. Hijhire générale des Voyages , tome VI,

page 4<?4.— On voit à Dehiy aux Indes, un certain métal appelé

utunac, qui approche de l'étais , mais qui efl beaucoup plus beau <Sc

Tij

V

148 Histoire Naturelle

Japon (m) & à Siam ^?i) ; il y en a aufTi à MacafTar (oj , à Malaca (p), Banca, &c. cependant les Afiatiques ne font pas de ce métal autant d'ufàge que les Européens ; ils ne s'en fervent guère que pour étamer le cuivre (^) ,

plus fin, & fouvent on le prend pour de l'argent; ce métal s'apporte de la Chine. Thévenoî , Voyage au Levant ; Paris ^ 1 66^, tome III , page ijS.

(m) La province de Bungo au Japon, produit de i'etain fi blanc & fi fin , qu'il n'eft guère inférieur à l'argent , mais les Japonois i\\n. font prefque aucun ufage. Hifloire générale des Voyages , tome X, page e^j.

(n) Les Siamois travaillent depuis très-long temps à^s mines d'étain & de plomb fort abondantes. . . . Leur étain fe débite dans toutes ies Indes. Il eft mou & mal purifié & tel qu'on le voit dans des boîtes à thé qui viennent des régions orientales; & pour le rendre plus dur & plus blanc, ils y mêlent de la calamine, efpèce de pierre minérale qui fe réduit facilement en poudre, & qui étant {oixdxxe. avec le cuivre fert à le rendre jaune ; mais elle rend l'un & l'autre de ces deux métaux plus caiïant & plus aigre. Idem, tome IX, page s oy.

(0) Quelques provinces de MacafTar, dans l'île Célèbes, ont des mines d'étain. Idem, tome X , page ^j 8.

(p) On trouve de l'étain dans quelques endroits des Indes orien- tales , comme au royaume de Quidday, entre Tanafieri & le détroit de Malaca. M. Geoffroi ; Mémoires de l'Académie des Sciences , année ' 73 ^ > PW I 03- Les Hollandois apportent des Indes orientales des efpèces d'étain qui paflent pour étain fin ; celui de Alalac ou Malaca <Sc celui de Banca, qui n'eft pas aufii parfait que celui de Malaca qu'on emploie de préférence pour les teintures en écarlate & pour étamer les g'aces. Idem , page i j i.

(q) Il n'y a guère de mit>es d'argent en Afie, fi ce n'efi au Japon;

DES Minéraux. 149

ou faire de Tairain en alliant ces deux métaux enfemble ; mais ils font commerce de Tétain avec nous, & cet étain qui nous vient des Indes, efl plus fin que celui que nous tirons de l'Angleterre, parce qu'il efl moins allié; car l'on a obfervé que dans leur état de pureté, ces étains d'Angleterre &. des Indes , font également fouples Si difficiles à rompre : cette flexibilité tenace donne un moyen facile de reconnoître fi Tétain eft purgé d'arfènic ; car dès qu'il contient une certaine quantité de cette mauvaife matière, il fe rompt facilement.

Ainfi rétain, comme tous les métaux, efl un dans la Nature, & les étains qui nous viennent de difîcrens pays , ne diffèrent entr'eux que par le plus ou moins de pureté ; ils feroient abfolument les mêmes s'ils étoient dépouillés de toute matière étrangère ; mais comme ce métal, lorfqu'il efl pur, ne peut être employé que pour i'étamage , & qu'il efl trop mou pour pouvoir le planer & le travailler en lames; on efl obligé de l'allier avec d'autres matières métalliques pour lui donner de la fer- meté, & c'efl par cette raifon que dans le commerce il n'y a point d'éiain pur frj.

mais on a , dit Tavernier , découvert à Dabgore , à Sangore , à Bor- dalon & à Bâta des mines très - abondantes d'étain, ce quâ Jl fait beaucoup de tort aux Anglois, parce qu'on n'a plus befoin de leur étain en A fie ; au refle , ce métal ne fert en ce pays-là qu'à étamer les pots , marmites & autres uftenfiles de cuivre. Voyage de Tavernkr; Rouen , i y i ^ , tome JV, page (/ i .

(r) Nous croyons donc pouvoir conclure que les étains de Banca,

ICO Histoire Naturelle

Nous n'avons que peu ou point de connoiflfances des mines d'étain qui peuvent fe trouver en Afrique; les Voyageurs ont feulement remarqué quelques ouvrages d'étain chez les peuples de la côte de Natal (f) , & il e(l dit , dans les Lettres édifiantes, qu'au royaume de Qjieba, il y a de Tétain aufli blanc que celui d'Angleterre, mais qu'il n'en a pas la folidité, & qu'on en fabrique des pièces de monnoie, qui pèfent une livre & ne valent que fept fous (t) ; cet étain qui n'a pas la folidité de celui d'Angleterre, efl fans doute de i'étain dans fon état de pureté.

En Amérique, les Mexicains ont autrefois tiré de

de Malaca & d'Angleterre, doux, lorfqu'ils fortent du magafin d'un honnête marchand, font purs ou privés de tout alliage naturel ou artificiel , qu'ils font parfaitement égaux entr'eux , c'eft-à-dire , qu'ils font l'un à l'égard de l'autre, comme de l'or à vingt-quatre karats ou de l'argent à douze deniers tires d'une mine d'Europe , feroient à de l'or ou de l'argent aux mêmes titres des mines de l'Amérique méridionale.

Cependant ces étains fi purs ne peuvent être d'aucune utilité dans nos ménages ; leur mollefle , leur flexibilité y met un obftacle infur- montable ; il faut donc que l'art leur donne uwe certaine roideur , un certain degré de folidité qui les rendent propres à conferver toutes les formes que la nccefllté ou \t% circonftances obligent le potier à donner à ce métal; or pour parvenir à ce but, on a eu recours à difFérens alliages. Recherches fur l' étain , par MI' Baycn ^ Charlard , page p j.

(f) Hiftoire générale des Voyages , tome I , page 2j,

(t) Lettres édifiantes, XJ.' Recueil, page i6j.

DES Minéraux. 151

l'étain des mines de leur pays (^nj; on en a trouvé au Chily dans le Corrégiment de Copiago (x). Au Pérou, les Incas en ont fait exploiter cinq mines dans le diftri£t de Charcas. « Il s'eft trouvé quelquefois, dit Alphonfè Barba, des minerais d'argent dans les mines d'étain, &tou- < jours quantité de minerais de cuivre : il ajoute qu'une des < quatre principales veines de la mine de Potoji s'appelle < étû'in, à caufe de la quantité de ce métal qu'on trouve < fur la fuperficie de la veine , laquelle peu-à-peu devient < tout argent (y) ». On voit encore par cet exemple que i'étain , comme le plus léger des métaux , les a prefque toujours furmontés dans la fufion ou calcination par le feu primitif, & que les mines primordiales de ce métal fervent pour ainfi dire de toit ou de couvert aux mines des autres métaux plus pefàns.

L'étain s'allie par la f-ifion avec toutes les matières métalliques, il gâte l'argent &. l'or fur -tout, en leur ôtant leur dudlilité , & ce n'eft qu'en le calcinant qu'on peut le féparer de ces deux métaux; il diminue auiïi la duélilité du cuivre, & rend ces trois métaux aigres, fonores & caffans ; il donne au plomb de l'aigreur & de la fermeté, il s'unit très -bien au fer chauffé à un degré de chaleur médiocre ; & lorfqu'on le mêle par la ^ .

(u) Hifloire générale des Voyages, tome XII , page 6jo^

(x) Idem, tome XIII , page 414-

(y) Métallurgie d'AIphonfe Barba, tome I, page 114,

152 Histoire Natu relle

fufion avec le fer, il ne le rend pas fenfiblement plus aigre. Les métaux les plus ductiles font ceux dont Tétain détruit le plus facilement la ténacité ; A ne faut qu'une très - petite dofè d'étain pour altérer l'or & l'argent , tandis qu'il faut le mêler en affez grande quantité avec le cuivre & le plomb , pour les rendre aigres & caffans ; en fondant l'étain à partie égale avec le plomb , l'alliage efl ce que les Plombiers appellent de la foudiire, & ils l'emploient en effet, pour fouder leurs ouvrages en plomb : au refte , cet alliage mi-parti de plomb &. d'étain ne laifTe pas d'avoir un peu de ductilité.

L'étain mêlé par la fufion avec le bi/muth qui fond encore plus aifément que ce métal, en devient plus folide , plus blanc & plus brillant, & c'efl proba- blement cet alliage de bifmuth & d'étain que l'on connoît aux Indes fous le nom de tmunac.

Le régule d'antimoine donne à l'étain beaucoup de dureté, & le rend en même temps très-caffant; il n'en faut qu'une partie fur trois cents d'étain pour lui donner de la rigidité, &. l'on ne peut employer ce mélange que pour faire des cuillers, fourchettes, & autres ouvrages qui ne vont point fur le feu.

L'alliage de l'étain avec le zinc , eft d'une pefanteur fpécilique, moindre que la fomme du poids des deux; tandis que l'alliage du zinc avec tous les autres métaux, efl au contraire d'une pefanteur /pccifique, plus grande que celle des deux matières prifes enfemble,

L'étain

D E s Ai I N É R A U X, 153

L*éiain s'unit avec l'arfenic & avec le cobalt, il devient par ces mélanges plus dur , plus fonore & plus cafTant ; M." Bayen &. Charlard afïïirent qu'il ne faut qu'une deux cent cinquante - fixième partie d'arfenic , fondue avec l'étain, pour le rendre aigre & hors d'état d'être employé par les Ouvriers (^): fi Von mêle une partie d'arfenic fur cinq d'étain pur, l'alliage efl fi fragile qu'on ne peut l'employer à aucun ufage , & une partie far quinze, forme un alliage qui préfente de grandes facettes aflez femblables à celles du bifmuth, &. qui efl plus friable que le zinc, & moins flifible que l'étain.

Ainfi l'étain peut s'allier avec tous les métaux & Jes demi-métaux, &l l'ordre de fès affinités efl le fer, le cuivre, l'argent & l'or; &. quoiqu'il fe mêle très-bien par la fufion avec le plomb , il a moins d'affinité avec ce métal qu'avec les quatre autres.

L'étain n'a auffi que peu d'affinité avec le mercure, cependant ils adhèrent enfemble dans l'étamage des glaces , le mercure refte interpofé entre la feuille d'étain & le verre; il donne aux glaces la puiffance de réfléchir la lumière avec autant de force que le métal le mieux poli : cependant il n'adhère au verre que par fimple conta(5l, & Ion union avec la feuille d'étain efl affez fuperacielle ; ce n'efl point un amalgame auffi parfait que celui de l'or ou de l'argent , &. les boules de

(■^) Recherches chimiques fur l'étain, page ^S, Miner AUX , Toiiie II L U

154 Histoire Naturelle

mercure (a) auxquelles on attribue la propriété de purifier i'eau, font moins un alliage ou un amalgame, qu'un mélinge iimple & peu intime d'étain & de mercure.

L'ctain s'unit au foufre par la fufion, & le compofé qui réfulte de cette mixtion , efl plus difficile à fondre que l'étain ou le foufre pris féparcment.

Tous les acides agiffcnt fiir Tctain, & quelques-uns le diffolvent avec la plus grande énergie ; on peut même dire qu'il eft non - feulement diflbus , mais calciné par l'acide nitreux, & cet exemple, comme nombre d'autres, démontre affez que les acides n'agiffent que par le feu qu'ils contiennent (b) , Le feu de l'acide nitreux exerce

(a) Trois parties de mercure ajoutées à douze parties d'étain de Malac , fondues dans une marmite de fer , & coulées dans des moules fphériques , forment les boules de mercure , auxquelles on attribue la vertu de purifier J'eau , à. de faire périr les infedcs qu'elle contient ; elles acquièrent, en fe refroidiflant, aflez de folidité pour être tranf- portées : lorfqu'on veut s'en fervir, on les met dans un nouet que l'on fufpend dans l'eau , & on la fait bouillir un infiant. Élémeus de Chimie , par Al. de Morve au y tome III , pages 2 ^6 & ^^a.

(h) Nota. Je ne dois pas diOlmuler que la raifon des Chinnfles efl ici bien différente de la mienne ; ils difent que c'eft en prenant le phlogiftique de l'étain que l'acide nitreux le calcine , & ih pré- tendent le prouver , parce que dans cette opération l'acide prend les mêmes propriétés que lui donne le charbon , & que l'éiain qui a pafTé dans l'acide nitreux , quoique non dilTous , ne fe lailTe pl^is difioudre, & que par conféquent en fuppofant dans cette opération que l'étain fût calciné par le feu de l'acide, il devroit brûler de nouveau, <5c que cependant if efl de fait que fa chaux d'étain &

D E s I N É R A U X, I 5 5

fon adion avec tant de violence fur l'étain qu*ii le fait paffer , fans fufion , de ion état de métal à celui d'une chaux tout aufîi l)lanche & tout auiïi peu flifible que la potée ^ ou chaux produite par l'aélion d'un feu violent; & quoique cet acide f.mble dévorer ce métal, il le rend néanmoins avec autant de facilité qu'il s'en cft faid ; il l'abandonne en s'élevant en vapeurs, & il conferve fi peu d'adhéîion avec cette chaux métallic^uc» qu'on ne peut pas en former un fel. Le nitre projeté fur l'étain en fufion s'enflamme avec lui , &. hâte calcination, comme il hâte auffi celle des autres métaux qui peuvent fe calciner ou brûler.

L'acide vitrioiique au contraire , ne diflbut l'érain que lentement &. /ans effervefcence ; il faut même qu'il (bit aide d'un peu de chaleur pour que la dilfolution commence, &. pendant qu'elle s'opère, il fe forme du foufre qui s'élève en vapeurs blanches, 6l qui quelque- fois fumage la liqueur comme de l'huile, &. fe précipite par le refroidiffement. Cette diflblution de l'étain par l'acide vitrioiique, donne un fel compofé de criftaux en petites aiguilles entrelaffées.

l'acide nitreux n'ont pli!s aucune a(îlion l'un fur l'autre. Cette raifon des Chimirtes efl: tirée de leur ryllème fur le phlogiflique qu'ils mettent enjeu par -tout, & lors même qu'il Ji'en eft nul befoin. L'étain contient Çnns doute du feu & de l'air fixe, comme tous les autres métaux; mais ici le feu contenu dans l'acide nitreux fumt , comme tout autre feu étranger, pour produire la calcination de métal fans rien emprunter de fon phlogiftique.

u ij

156 Histoire N atu re lle

L'acide marin exige plus de chaleur que Tacicîc vitriolique pour difToudre l'étaiii ; il faut que ce premier acide foit fumant; les vapeurs qui s'élèvent pendant cette diifolution affez lente, ont une odeur arfenicale; la liqueur de cette diffolution eft iàns couleur, & limpide comme de l'eau, elle fe cliange prefque toute entière en criftaux par le refroidiiïement. « L'ctain, dit M. de Morveau , a une plus grande affinité avec l'acide marin que plufieurs autres fubflances métalliques , &: même que l'argent, le mercure & l'antimoine, puifqu'il décom- pofe leurs fels. L'étain, mêlé avec le fùblimé corrofif, dégage le mercure, même fans le fecours de la chaleur, &. l'on tire de ce mélange à la diftillation, un efpric de it\ très -fumant, connu fous le nom de liqueiit de Libav'ms (c) ». Aurefte, les crillaux qui fe forment dans la diffolution de l'étain par l'acide marin, fe réfolvent en liqueur par la plus médiocre chaleur, & même par celle de la température de l'air en été.

L'eau régale n'a pas befoin d'être aidée de la chaleur pour attaquer l'étain , elle le diffout même en grande quantité ; une eau régale , faite de deux parties d'acide ifttreux & d'une partie d'acide marin, difîbut très-bien moitié de fon poids d'étain en grenailles (d) , même à

(c) Elémens de Chimie, par M. de Morveau, tome II , pages 2^8 & ^S 9'

(d) Idein, page S73- " Cette diiïblution , ajoute ce favant Chi- » niifte , fournit quelquefois des criftaiiU en aiguilles par une ^vapo- ration trcs-Iente ».

DES Minéraux. 1^7

froid; en délayant cette difToIution dans une grande quantité d'eau , l'étain fe fépare de i'acide fous la forme d'une chaux bianche ; Sl lorfqu'on méie cette difToIution avec une difToIution d*or , faite de même par l'eau régale, & qu'on les délaie dans une grande quantité d'eau, il fe forme un précipité couleur de pourpre, connu fous le nom de pourpre de Caffius, & précieux par i'ufage qu'on en fait pour les émaux; Tétain a donc non - feulement la puifTance d'altérer l'or dans fon état de métal, mais même d'en faire une ef]:)èce de chaux dans difToIution, ce qu'aucun autre agent de la Nature, ni même l'Art, ne peuvent faire. C'eft auiïi avec cette difToIution d'étain dans l'eau régale , que Ton donne aux étoffes de laine la couleur vive & éclatante de l'écarlate , fans cela le cramoifi & le pourpre de la cochenille & de la gomme laque, ne pourroient s'exalter en couleur de feu.

Les acides végétaux agiffent aufTi fur l'étain, on peut même le diffoudre avec le vinaigre diflillé ; la crème de tartre l'attaque plus foiblement; l'alkali fixe en corrode la furface à Taide d'un peu de chaleur ; mais , félon M. de Morveau, il réfifle confiamment à l'aétion de l'alkali volatil (e).

(e) L'étain nous a paru conflarnment réfifter à l'adion de l'alkali volatil cauftique , malgré que quelques Chimiftes aient avance' que dans la dccompofition du vitriol ammoniacal par l'étain , l'alkali volatil

158 Histoire Natv relle

Conficlérant maintenant les rapports de l'ctain avec les autres métaux, nous verrons qu'il a tant d'affinité avec ie fer &. le cuivre, qu'il s'unit & s'incorpore avec eux, fans qu'ils foient fondus ni même rougis à blanc; ils retiendront Tétain fondu dès que leurs pores feront ouverts par la chaleur, & qu'ils commenceront à rougir; l'étain enduira leur fiirface, y adhérera, & même il la pénétrera & s'unira à leur fubftance plus intimement que par un fimple conta6l; mais il faut pour cela que leur fuperiicie foit nette & pure, c'efl-à-dire, nettoyée de toute craiïe ou matière étrangère; car en générai les métaux ne contradlenr d'union qu'enir'eux &. jamais avec les autres fubflances; il faut de même que l'étain qu'on veut appliquer à la furface du fer ou du cuivre, foit purgé de toute matière hétérogène, & qu'il ne fbit que fondu & point du tout calciné ; &. comme le degré de chaleur qu'on donne au fer & au cuivre pour recevoir l'étamage , ne laifferoit pas de calciner les parties de l'étain au moment de leur contaél, on enduit ces métaux avec de la poix réfme ou de la graiffe qui revivifie les parties calcinées , & confèrve à l'étain fondu, fon état de métal affez de temps pour qu'on puiffe l'étendre fur toute la furface que l'on veut étamer.

entraîne un peu de ce métal qui s'en fépare à Ja longue , ou qui eft précipité par un acide. Éiémens dt Chimie, par M. de A/oryeau , tome III, page s!.^6.

DES Minéraux, 159

Au rcfte, cei art de l'étamage, quoiqu'auffi imiver- fellement répandu qu'anciennement ufité (fj , & qu'on n'a imagine que pour parer aux effets funefles du cuivre, devroit néanmoins être profcrit , ou du moins fournis à un règlement de police, fi l'on avoit plus de foin de la famé des hommes ; car les Ouvriers mêlent ordinairement un tiers de plomb dans l'ctain pour faire leur étamage fur le cuivre, que les graiffes, les beurres, ies huiles &. les fels changent en vert-de - cfris : or, le plomb produit des effets à la vérité plus lents , mais tout auffi funeftes que le cuivre ; on ne fait donc que fubitituer un mai au mal qu'on vouloit éviter , & que même on n'évite pas en entier ; car ie vert-de-gris perce en peu de temps le mince enduit de l'étamage , & l'on feroit épouvanté fi l'on pouvoit compter le nombre des viélimes du cuivre dans nos laboratoires & nos cuifnies. Au/îi le fer efl-il bien préférable pour ces ufages domeftiques, c'eft ie feul de tous les métaux imparfaits qui n'ait aucune qualité funefle ; mais iJ noircit Jes viandes & tous \çs autres mets ; ii lui faut donc un étamage d'étain pur , & l'on pourroit, comme nous l'avons dit, s'affurer par l'eau régale (g}, s'il eft exempt d'arfenic, &

(fJ Pline en parle ; Stannum illitum œneis vafis fapores gratiores facït , & çompejlït ccrugïnïs virus. HiH. Nat. lib. XX XIV, cap. XVI.

fg/ Les érains que l'on aj^pelle purs, font encore mélanges d'arfenic; à peine font-iio touches par l'eau re'gale qu'ils fe terniilent,

i6o Histoire Naturelle

n'employer à l'étamage du fer que de i'étain épuré &

éprouvé.

On fe (èrt de réfine, de graiffe, & plus efficacement encore de Tel ammoniac, pour empêcher la calci- nation de l'étain au moment de fon contad avec le fer. En plongeant une lame de fer polie dans Tétain fondu, elle couvrira d'un enduit de ce métal; & l'on a obfervé qu'en mettant de Tétain dans du fer fondu, ils forment enfemble des petits globules qui décrépitent avec explofion.

Au refle, lorfqu'on poufîe l'étain, ou plutôt la chaux d'étain à un feu violent, elle s'allume & produit une flamme aiïez vive après avoir fumé ; on a recueilli cette fiimée métallique qui fe conden/è en poudre blanche. M. Geoffroy qui a fait ces ob/èrvations , remarque aufîi que dans la chaux blanche ou potée d'étain, il fe forme quelquefois des parties rouges ; ce dernier fait me paroît indiquer qu'avec un certain degré de feu , on viendroit à bout de faire une chaux rouge d'étain, puifque ce

deviennent noirs , & fe convertiflent en une poudre de la même couleur , dont il eft: aifé de retirer tout l'arfenic en la lavant une ou deux fois avec un peu d'eau diflillce , qui , diflolvant le fel formé par la calcination de l'étain avec l'acide régalifé , laiflera au fond du vafe environ deux grains d'une poudre noire qui efl du véritable arfenic. ,. L'arfenic , en quelque petite proportion qu'il foit mêlé avec l'étain , n'y en eût-il que TiTïv ^^ nianifefte encore lorfqu'on expofe ce mé- lange dans l'eau régale. Recherches Chimiques fur l'étain , par At^* Bayen & Charlard , pages ^8 àf fuiv,

n'eft

DES M I N É R A U A'. I 6 I

n'cfl qu'avec un certain degré de feu bien détermine, & ni trop fort ni trop foible, qu'on donne à la chaux de plomb, le beau rouge du minium.

Nous ne pouvons mieux finir cet article de Tétain, qu'en rapportant les bonnes obfervations que M." Bayen & Cliarlard ont faites fur les différens étains qui font dans le commerce C/i) ; ils en diflinguent trois fortes.

(h) Nous diviferons , difent-ils , tout IVtaia qui le trouve dans (e commerce intérieur du royaume.

1." En étain pur ou fans aucun mélange artificiel, tel enfin qu'il fort des fonderies; 2.° en t'tain allié dans \e^ fonderies m.ème avec d'autres métaux à des titres prefcrits par l'ul'age ou par les ioix dn pays; 3." en étain ouvragé par les Potiers c|ui font tenus de fe conformer dans tout ce qu'ils font concernant leur art , à des rè- glemens anciennement établis, & aujourd'hui trop peu fuivis.

L'étain pur ou fans mélange artificiel pourroit nous venir d'An- gleterre, II, à ce qu'on allure", l'exportation nen étoit pas prohibée parles Ioix du pays. Au défaut de celui d'Angleterre, il nous en ell apporté en allez grande quantité des Indes .... On nomme ce dernier éia'in de Banca & de Aialaca , ou fimplement de Malac ; celui-ci nous arrive en petits lingots pefant une livre, & qui , à caufe de leur forme , ont été appelés petits chapeaux ou écrho'ires.

L'étain qui le vend fous le nom de Banca , fe fait diftinguer du précédent , & par la forme de fes lingots qui font oblongs , & par leur poids qui efk de quarante - cinq à cinquante livres, & même au-defius: du refle, ces lingots de Banca & de Malaca n'ont point l'éclat ordinaire à l'étain , ils font recouverts d'une forte de rouille grife ou craffe , d'autant plus épailië qu'ils ont féjourné plus long- temps dans le fond des Vaifleaux, dont ils faifoient vraiiemblable- ment le lefl ....

Mincriiux , Tome III. X

i62 Histoire N atv relle

1.° l'ctaiii tel qu'il fort des fonderies, & fans mélange artiticiel ; 2.° i'étain allié dans les fonderies, fiiivaiu l'ufage ou la loi des dilîerens pays (ij; 3. l'étaia ouvragé par les Potiers (kj . Ces habiles Chimifles ont

II nous eft arrivé de i'étain pur d'Angleterre en petits morceaux ou échantillons pefant chacun entre quatie ik cinq onces; leur alped: annonce qu'ils ont été détachés d'une grofle niafie à l'aide du ciléau & du marteau. . . . Les côtés par ils ont été coupés ont conferve l'éclat métallique , tandis que le côté ou la fuperricie externe eft niamelonée & couverte d'une pellicule dorée , qui offre aHez fré- quemment les différentes couleurs de la gorge de pigeon ....

Nous avons trouvé chez un marchand de I'étain pur, qu'il nous affura venir d'Angleterre, & qui en effet ne différoit en rien pour Ja qualité de celui dont nous vejions de parler, cependant il avoil la forme de petits chapeaux qui pefoient chacun deux livres .... Mais nous favons que les marchands font dans l'habitude de réduire ies gros lingots en petits, pour fe faciliter le détail de I'étain... . Tels (ont les étains qui paffent dans le commerce pour être les plus purs, ou ce qui eft la même chofe, pour n'avoir reçu artificiellement aucun alliage. Recherches Chimiques fur I'étain, par M!' Bayen & Charlard, pages 22 & fuivantes.

(i) La féconde claffe de I'étain que nous examinons , comprend celui que nous tirons en très-grande quantité de l'Angleterre, d'où on nous l'envoie en lingots, d'environ trois cents hvres; nous les appelons gros faumons. Cet étain eft d'un grand ufage parmi nous, & il le débite aux differens ouvriers en petites baguettes triangu- laires de neuf à dix lignes de pourtour, & d'environ un pied &

demi de long II n'eft pas pur, «5c félon M. Geoffroy, il a

reçu en Angleterre même l'alliage prefcrit par la loi du pays. Recherches fur I'étain , &c. pacre 2y.

(k) A l'égard de la troifième claflè , elle renferme, comme nous

DES Minéraux. 163

reconnu par des comparaifons exades & 'multipliées, que les étains de Malaca & de Banca, ainfi que celui qu'ils ont reçu d'Angleterre, en petits cchantiilons de quatre à cinq onces, & auiïî celui qui fe yead à Paris, fous le nom iïéiain doux , ont tous le plus grand & le même éclat ; qu'ils réfiftent également <& long-temps , aux impre/Tions de l'air fans ternir ; qu'ils font les uns & les autres fi du6liles ou extenfibles, qu'on peut aifëment les réduire fous le marteau, en feuilles au/Ti minces que le plus fin papier, fans y faire de gerçure; qu'on en peut plier une verge d'une ligne de diamètre, quatre-vingts fois à angle droit fans la rompre ; que le cri de ces étains doux, eft différent de celui des étains aigres , & qu'enfin ces étains doux de quelques pays qu'ils viennent, font tous de la même denfité ou pefàn- leur fpécifique (l) .

l'avons dit, tous les étains ouvragés, & vendus par les Potiers d'étain , fous toutes fortes de formes. Le premier en rang , eft celui qu'ils vendent fous la marque d'étain fin ; le fécond , fous celle d'étain commun , & le troificme fous le nom de claire étoffe ou fimplement de claires. Idem , page 28,

(l) Recherches fur l'ctaîn, par M/' Bayeii & Charlard, y^^^iri 2^ & ^ Q'

Xi;

164 HisTO IRE Naturelle

D U P L 0 Ad B.

JLE PJomb , quoique le plus clenfe (a) des métaux après l'or, cft le moins noble de tous; il efl mou /ans du6liiité, & il a plus de poids que de valeur; fes qualités font nuifiblcs & fes émanations iuneftes; comme ce métal fc calcine aifément & qu'il efl prefque auffi fufiblc que J'ctain, ils n'ont tous deux pu fupporter rad;ion du feu primitif fans fe convertir en cbaux; auffi le plomb ne fe trouve pas plus que l'étain dans l'état de métal ; leurs mines primordiales font toutes en nature de cbaux ou dans un état pyriteux; elles ont fuivi le même ordre, fubi les mêmes effets dans leur formation; <& la différence la plus effcntielle de leurs minerais , c'efl q^ue celui du plomb efl exempt d'arfenic , tandis que celui de fétain en efl toujours mêlé, ce qui femble indiquer q^wt la formation des mines d'étain efl poflérieure à celle des mines de plomb.

La galène de plomb efl une vraie pyrite , qui peut le décompofer à l'air comme les autres pyrites , & dans laquelle efl incorporée la cbaux du plomb primitif, qu'il faut revivifier par notre art pour la réduire en

(o) Selon M. Briflon, le pied cube de plomb fondu, ccroui ou non écroui , pcfe également 794 livres 1 o onces 4 gros 44 grains; ainfi ce métal n'eft fufceptibie d'aucune comprefîlon, d'aucun écrouiflement par la percufljon.

DES Minéraux. 165

métal ; on peut même imiter artificiellement cette pyrite ou galène en fondant du foulVe avec le plomb ; ie mélange s'enfïamme fur le feu, & laifTe après la com- buflion une litharge en écailles, qui ne fond qu'après avoir rougi, & fe réunit par la fufion en une malTe noirâtre, difpofée en lames minces &. à facettes, fem- blables à celles de la galène naturelle ; le foie de foufre convertit aufii la cbaux de plomb en galène ; ainfi l'on ne peut guère douter que les galènes en général n'aient originairement été des chaux de plomb, auxquelles l'ac- tion des principes du foufre aura dopjié cette forme de minéraliiation.

Cette galène ou ce minerai de plomb affeél:e une figure exahèdre prefque cubique ; fa couleur efi à-peu-près la même que celle du plomb terni par l'air; feulement elle eft un peu plus foncée &. plus luifante ; fa pefanteur approche auffi de celle de ce métal ; mais la galène en diffère, en ce qu'elle efl cafTante & feuilletée aiïez irré- gulièrement ; cWc ne fe préfente que rarement en petites mafles ifolées (h) ^ mais pre/que toujours en groupes de cubes appliqués affez régulièrement les uns contre les autres ; ces pyrites cubiques de plomb varient pour la grandeur ; il y en a de fi petites dans certaines mines j

(b) M. de Grignon m'a dit avoir obfervé dans le Limofin , une niine de plomb, qui eft en criftaux 0(f\acdres , ilotes ou groupés par une ou deux faces; cette mine gît dans du fable quartzeux Ic'gcrement aglutinc.

i66 Histoire N aturelle

qu'on ne les aperçoit qu'à la loupe, & dans d'autres on en voit qui ont plus d'un demi - pouce en toutes dimenfions ; il y a de ces mines dont les filons font fi minces qu'on a peine à les apercevoir & à les fuivre, tandis qu'il s'en trouve d'autres qui ont plufieurs pieds d'épai/Teur , & c'efl dans les cavités de ces larges filons que la galène eil en groupes plus uniformes & en cubes plus réguliers; le quartz e(t ordinairement mêlé avec ces galènes de première formation ; c'efl leur gangue naturelle, parce que la fub/laiice du plomb en état de chaux a primitivement été dépofée dans les fentes du quartz, l'acide efl enfuite venu la faifir h, la mincralifer. Souvent cette fubftance du plomb s'eft trouvée mêlée avec d'autres minerais métalliques; car les galènes contiennent communément du fer ik. une petite quantité d'argent (c) , & dans leurs groupes on voit fbuvcnt des petites maffes interpofées qui font pure- ment pyriteufes, & ne contiennent point de plomb.

Comme ce métal ie convertit en chaux, non-feulement par le feu , mais au/Ti par les élémens humides , on trouve quelquefois dans le fein de la terre des mines en cérufè, qui n'efl; qu'une chaux de plomb produite par Wcià^ de l'humidité; ces mines en cérufe ne font point pyriteuiès

(c) On ne connoît gucte que la mine de Wïllach en Carinthie , qui ne contienne point d'argent; & on a remarqué qu'aHez ordi- nairement plus les grains de la galène l'ont petits , & plus le minerai

ell riche en argent.

DES Minéraux, i 67

comme la galène ; prefque toujours on les trouve mêlées de plufieurs autres matières métalliques qui ont été clécompo- Tces en même temps , & qui toutes fcmt de troffième for- mation. Car avant cette déccmpolition du plomb en ccrufe, on peut compter plufieurs degrés & nuances par lejfquels la galène paflè de fou premier état à des formes iuc- ceflives; d'abord elle devient chatoyante a iùrfàce, & à mefurc qu'elle avance dans fz décompofition, cWc perd de Ton brillant, & prend des couleurs rougeûtres & verdâtres. Nous parlerons dans la fuite de ces diffé- rentes efpèces de mines, qui toutes font d'un temps bien pofléricur à celui de la formation de la galène , qu'on doit regarder comme la mère de toutes les autres mines de plomb.

La manière de traiter ces mines en galène, quoique aflez fmipk, n'eft peut-être pas encore affez connue. On commence par concafîèr le minerai, on le grille enfiiite en ne lui donnant d'abord que peu de feu; on l'étend fur l'aire d'un fourneau qu'on chauffe graduel- lement; on remue la matière de temps en temps, & d'autant plus fouvent qu'elle eft en plus grande quantité. S'il y en a 20 quintaux, il faut un feu gradué de cinq ou fix heures; on jette de la poudre de charbon fur le minerai afin d'opérer la combufîion des parties fui- fureufes qu'il contient; ce charbon, en s 'enflammant , emporte auffi l'air fixe de la chaux métallique; elle fe réduit dès-iors en métal coulant à mtfiire qu'on remue

i68 Histoire N atu relle

le minerai & qu'on augmente le feu, on a foin Je recueillir le métal clans un bafTin l'on doit le couvrir auiïi de poudre de cliarbon pour prcierver furface de toute calcination: on emploie ordinairement quinze heures pour tirer tout le plomb contenu dans vingt quintaux de mine, & cela fe fait à trois reprifes diffé- rentes ; le métal provenant de la première coulée qui fc fait au bout de neuf heures de feu , fe met à part lorfque la mine de plomb contient de l'argent ; car alors le métal qu'on recueille à cette première coulée, en contient plus que celui des coulées fubféquentes. La féconde coulée fe fait après trois autres heures de feu , elle efl moins riche en argent que la première ; enfin la troifième «Se dernière, qui efl au/Fi la plus pauvre en argent, fe fait encore trois heures après; & cette manière d'extraire le métal à plufieurs reprifes, efl très-avanta- geufe dans les travaux en grand , parce que Ton concentre pour ainli dire, par cette pratique, tout l'argent dans la première coulée , fur - tout lorfque la mine n'en contient qu'une petite quantité ; ainfi on n'efl pas obfigé de rechercher l'argent dans la maffe entière du plomb, mais feulement dans la portion de cette maiïe qui efl fondue la première (à).

Nous avons en France plufieurs mines de plomb,

(d) Obfervatioiis métallurgiques de M. Jars; Mémoires de f Aca- démie des Sciences, année i yyo , page J i J'

dont

D E s Al I N É R A U X, 169

dont quelques-unes font fort abondantes & en pleine exploitation: celles de la Croix en Lorraine, donnent du plomb, de l'argent & du cuivre. Celle de Hargenthen dans la Lorraine - allemande , efl remarquable en ce qu'elle fe trouve mêlée avec du charbon de terre (e): cette circonftance démontre afTez que c'efl une mine de féconde formation. Au Val-Saint e- Marie , la mine a les couleurs de l'iris , & eft en grains affez gros ; celles de Sainte - Marie - aux - Mines &. celles de Stenbach en Al/àce, contiennent de l'argent ; celles du village à' Au- xelles n'en tiennent que peu, & eniin les mines de cTa/zz/ - 'Nicolas & à^AJlenbach , font de plomb & de cuivre (fj.

Dans la Franche-comté, on a reconnu un filon de plomb à Teruan, à trois lieues de Château -Lambert; d'autres à Frêne, à Plancher-lès-Mines , àBody, &c.

En Dauphiné, on exploite une mine de plomb dans la montagne de Vie?me; on en a abandonné une autre au village de la Pierre, diocèfè de Gap,- parce que les filons font devenus trop petits ; il s'en trouve une à deux lieues du bourg (ÏOifans, qui a donné cin- quante-neuf livres de plomb & quinze deniers d'argent par quintal (g).

(e) Traité de la fonte des mines de Scl:ilutter, tome I, page S.

(f) Idem, pages 11 & j 2*

(g) Idem, tome I , pages i ^ & fuivantes.

ATinéraiix f Tome III, Y

\jo Histoire Naturelle

En Provence, on en connoît trois ou quatre ^/i), & plufieurs dans le Vivarais (i) , le Languedoc (k), Je Rouiïillon (IJ & le comté de Foix (mj , le pays de Comminges (n). On trouve au/Ti pluiicurs mines de

(h) En Provence , il y a des mines de plomb au territoire de Ramatuelle , dans celui de la Roque; à Beaujeu , au territoire de la Nolle ; dans celui de Luc, diocèfe de Frtjus, 6iC. Tralié Je la foute des ÂJines Je Sihluiier, tome I, jniç^e 21,

(ij Dans le Vivarais, fix inine^ de ploinl) tenant argent, près de

Tournon Autres mines de plomb à BayarJ , diocèfe d'Uzès;

dans le njtme territoire de Ba.)ard, il y a d'autres mines de j)lumb à HanciJne & à Saint-Loup, . . d'autres à une lieue de Nancé , paroiiîe de Bahours , tenant plomb & ar^^ent. iJem, pcigei 2 2 if 2^,

(k/ En Languedoc, il y a des mines de plomb à Pierre Cervife, à Auriiic , à Cofcalely qui donnent du cuivie, du plomb & de l'an- timoine. ... 11 y en a d'autres daiis ia juonia^ne jioire près la Aallc'e de Corbicres. IJem , page 2 6 .

(l) Dans le Rouflillon , il y a une mine de plomb entre les territoires de Prat'cs £•. ceux de Alanere & Serra Lortga. . . . Autres mines de plomb à rognons dan.s le territoire de Torigna ; cç% mines foiii en partie dans les vignes , & on tes découvre aprcs des pliJies d'orage ; les Paylans en vendent le minerai aux Potiers. ... La niême province renferme encore d'autres mines femblables. Liem , pnge j j .

(m) Dans Je comte de Foix , mines de plomb tenant argent à

\ Afpie Autre mine de plomb dans la montagne de AiontrovjlanJ,...

Autre au village de Pejcbe près Chîiteau-Verdun Autre dans

les environs d' Arques , qui elt en feuillets fort ferrés & très-pefaus. JJem , page 4 1 .

(n) )J)M-\i le comté de Comminges, il y a ime belle mine de plomb près JenJs, dans la valke de Loron Uiie autre dans la

D E s AI I N É R A U X. 171

plomb dans le Bigorre fo), le Béarn (^f) &. la baffe Navarre fi/^.

Ces provinces ne font pas les feules en France, dans lefquelles on ait découvert & travaille des mines de plomb , il s'en trouve au/fi , & même de très-

vallée à! Arboujî , tenant argent Une autre tenant anfll argent,

dans la vallée de Luchon , . . . . & d'autres dans la ville de L}ge , &. dans la montagne Souquette ; cette dernière tient argent &

or La montagne de Geveiran efl: pleine de mines de plomb

& de mines d'argent , que les Romains ont travaillées autrefois

Il y a encore plulieurs auires mines de plomb dans le même Comté. Traité de la fonte des Mines de Schlutter, tome I , p^^^s ^^ Ù' ftiivantes.

(0) Dans le Bigorre , il y a une mine de cuivre verte à Gaver'in...»

Une autre à Confrette , au-delîus de Barrage Dans la montagne

de Cajlillan proche Peyre-Fite , il y a des mines de plomb <ju'on ne peut travailler que trois ou quatre mois de l'année , à caule des neiges...,

Autres mines de plomb à Stnix , dans la vallée d' Àuiun A Por-

chyite fie dans plufieurs autres lieux du Bigorre. Idem , pages ^6 & 4j.

(p) Dans le Béarn, il y a une mine de plomb fur la montagne de Hahal , à cinq lieues de Larmes , qui ell: en exploitation, bi. qui

rend cinquante pour cent Et une autre mine de plomb dans la

montagne de Alonheins. Idem , pages j 0 ^ j 2,

(q) Dans la baiïè Navarre, la montagne à' Agella , qui borne la

vallée d'Aure, renferme plufieurs mmes de plomb tenant argent

Celle Avadec contient audi une mine de j)lomb tenant argent

Dans les Pyrénées , il y a de même des mines de plomb dans la

montagne de Belonca Dans celle de Ludens de Porlufon,

de Vtiran, &. plufieurs autres endroits. Idem, pages j^f, yj, // ^ fuiv.

172 Histoire Natu relle

bonnes dans le Lyonnois (r), le Beauj.oIois (f), le Rouergue (rj, le Limofjn (uj, l'Auvergne {xj , le Bourbonnois (y) , l'Anjou (i) , la province de Nor-

/rj Dans le Lyonnois, il y a des mines de plomb près Sûint- Aldri'in de la Plaine . . . . D 'autres près de Tarrare , dont \es échan- tillons n'ont donné que huit livres de plomb & trente grains d'argent par quintal. Idem, p^ge S ' '

(f) Dans le Beaujolois , il y a des mines de plomb près du Rhône,

dans un lieu nommé Guyon D'autres à Confens en Fores, à

Saint-Julien- Afolïn- Alolette . &c. il y en a encore plufieurs autres dans cette province. Traité de la fonte des Alines de Scldutter , tome I , page ^2.

(t) Idem , page 0 .

(u) Dans le Limofin, il y a une mine de j)lomb à Fargens , à

une demi-lieue de Tralage Une autre dans la paroifle de Vicq,

éieclion de Limoges, & à Saint - Hilaire une autre mine de plomb tenant étain ; il y a encore d'autres mines de plomb qu'on foupçonne

tenir de l'éiain. Idem , page j^ Les meilleures mines de plomb

du Limofin font celles de Glanges , Alercœur & I(foudun ; cette dernière donne foixante - cinq à foixante - dix livres de plomb par quintal de minerai; mais ce filon eft très -mince. Note communiquée par AI. de Grignon , en Oéîobre lySi,

(x) En Auvergne, il y a une mine de plomb à Comhres , à deux lieues de Pontgibaud ; elle ne rend que cinq livres de plomb par quintal , mais cent livres de ce plomb donnent deux marcs & une

once d'argent; elle cfl: abandonnée Il y a d'autres mines de

plomb à Chades , entre Riom & Pontgibaud , & d'autres dans i'éledion de Riom. Traité de la fonte des Mines, par Schlutter, tome I, pages 60 & 61.

(y) Dans le Bourbonnois , il y a des mines de plojnb dans l'enclos

des Chartreux de Moulins , & dans le village d'Unes. Idem , page 62.

(l) En An/ou, félon Pigaaiiol, il y a des mines de plomb dans

DES Minéraux. 173

mandie (^dj &. ia Bretagne (èj^ celles de Poînpéan & de Poidawen font exploitées avec fuccès ; on peut même dire que celle de Pompéan eft la plus riche qui foit en France, & peut-être en Europe: nous en avons au Cabinet du Roi, un trcs-gro^Ét très-pefant morceau, qui m'a été donné par feu M. le chevalier d'Arcy, de l'Académie des Sciences.

M. de Genfanne, l'un de nos plus habiles Minéra- logiftes, a fait de bonnes obfervations fur la plupart de ces mines; il dit que dans le Gévaudan , on en trouve en une infinité d'endroits , que celle à' Alern, qui eft à grofles mailles , efl; connue dans le pays fous le nom de vernis ^ parce que les habitans la vendent aux Potiers pour verniffer leurs terreries; il ajoute que les veines de cette mine font pour la plupart horizontales , &. difperfées fans fuite dans une pierre calcaire fort dure (c) . On trouve auffi de cette mine à vernis en

paro'ijfe de Cor celle Une autre à ATontrevaux ; cette dernière

a été travaillée & enfuite abandonnée. Idem , page 6 j^,

(a) En Normandie , il y a une mine de plomb à Picrreville , auprès de Falaife. Idem, page 68.

(b) En Bretagne , il y a une mine de plomb à Pompéan; en 1733 & 1734» le minerai donnoit jufqu'à foixante-dix-fept livres pour cent de plomb , & ce plomb rendoit trois onces au plus d'argent par

(juintal Il y a encore d'autres mines de plomb à Borîen y Serw

gnat-, Poulûwen , Ploué , Loquefré , le Prieuré, la FeuUlée , Ploué- Normïnais y Carnot , Plucquets .Trebïran, Paul & Melcarchais. Traité àJe la fonte des Mines de Schlutter , tome I, page yo.

(c) Hiftoire Naturelle du Languedoc, tome III , page 22 j>

174 Histoire N atu r e lle

grofles lames auprès de Combene , paroifTe à' Iffa- e'UiK (d) . Le dodeur Aflruc avoit parlé pluficurs années auparavant, d'une femblable mine près Aç,Durford, dans le diocèfe d'Alais , qu'on employoit auffi pour verniirer ies poteries (e) .^\. deGenfanne a ob/èrvé dans les mines de plomb de P/^/vv-/.^^^ ^ diocèfe d'Uzès, que l'un des filons donne quelquefois de l'argent pur en filigranes, & qu'en générai, ces mines rendent quarante livres de plomb , & deux ou trois onces d'argent par quintal ; mais il dit que le minerai eft de très-difficile fufion , parce qu'il eft intimement iXi^Xè avec de la pierre cornée.

Dans la montagne de Mat-imèert, il y a deux gros filons de mines de plomb riche en argent; ces fiions, qui ont aujourd'hui trois à quatre toifes d'cpaiffeur d'un très - beau fpath piqueté de minéral , traverfent deux montagnes, & paroilfent fur plus d'une lieue de longueur; il y a des endroits leur gangue s'élève au - deffus du terrein de cinq à fix toifes de hauteur (fj. Cet habile Minéralogille cite encore un grand nombre d'autres mines de plomb dans le Languedoc , dont plufieurs contiennent un peu d'argent , & dont le minéral paroît prefque par-tout à la furface de la terre. « Près des bains de la Malon , diocèfe de Béfiers , on n ramaffe , dit - il , prefque à la furface du terrein , des

(d) Hiitoiie Naturd/ç du Languedoc, tome III, page ^jS.

(e) Bibliothèque raifonnée, Juillet, Août & Septembre 1759.

(f) Hiftuire Naturelle du Languedoc, par M. de Genfanne, tome II, p^gcs i 6 ^ & I 6 ^1

DES Minéraux. 175

morceaux de mine de plomb difperfcs & enveloppés « dans un ocre jaunâtre ; il règne tout le long de ce vallon, « une quantité de veines de plomb, d'argent &. de cuivre ; « ces veines font la plupart recouvertes par une cfj)èce de « minéral ferrugineux d'un rouge de cinabre , & tout- « à-fait fèmblable à de la mine de mercure fgj ».

Dans le Vivarais, M. de Genfanne indique les mines de plomb de Y Are^entière ; celles des montagnes voifincs de la rivière de la Douce; celles de Suhit - Laiircni- les-hams, du vallon de yî%)r^j^ & plufieurs autres qui méritent également d'être remarquées (h) ; il en a auni

^rr^ Hidoire Nature''e du Languedoc, par M. de Cenlanne, tome 11 , pages J 6 ^ c>" i 6 ^.

(h) La petite ville de rArgenticre en Vivarais, tire Ton nom

des mines de ploiub & argent qu'on y exploitoit autrefois

]1 n'y a point de veines réglées ;' le minerai .s'y trouve difperfc dans un grès très-dur , ou efpèce de granit , qui forme la niafie des mon- tagnes qui environnent l'Argentière. Ce minerai efl à grains fins, iemblables aux grains d'acier; il rend au - delà de foixante livres de plomb, 6c depuis quatre jufqu'à cinq onces d'argent auquirual.. . , 11 n'y a que la crête de ces montagnes qui ait tté attaquée, 6: il i.'tw faut bien que le minerai y loit épuifè Il y a fur ces mon- ta unes , depuis }^ûls jufqu'à la rivière de la Douce, dans la j^aroifle de Serre-mejames , quantité d'indices de mines de plomb; jiiais un phénomène bien fmgulier, c'eft qu'on trouve fur la furfacc de ce terrein des morceaux de mines de plomb plâtreux, lemblables à de la pierre à chaux ^ qui renferment des grains de jjlomb naturel,

dont quelques-uns pèlent jufqu'à demi-once La matière dure

& terreufe qui renferme ces grains, rend elle-même jufqu'au - delà de quatre-vingts pour cent de ])lomb

176 Histoire Naturelle

reconnu quelques autres dans différens endroits de la province du Vélay (i) . En

En defcendant de ces hautes montagnes dans le vallon de Sû'int^ Laurent-lcs-baïns , nous avons remarque quelques veines de mines de ploinb. II y en a une fur-tout confiderabie au bas de ce village, fur fa furface de laquelle on Remarque plufieurs filets de Ipaih d'une très-belle couleur d'améthyfte

Il y a peu de cantons dans le Languedoc, il y ait autant de minéraux que le long du vallon de Alayres , fur-tout aux montagnes qui font au midi de cette vallée. Ga commence à apercevoir les veines de ces minéraux auprès de la Narce , village fitué fur la mon- tagne du côté de la Chajfade. II y a auprès des Artch une

montagne qui nous a paru toute compofée de mines de plomb &: argent. On en trouve des veines confidérables au pied du village de Mayres.

En montant du Chayla , au bas du château delà Chaife, oï\ trouve près du chemin un très - beau filon de mine de plomb. II y en a plufieurs de même nature près le village de Saint- /Michel.

La montagne qui s'étend depuis Beaulieu à Ethlfes , jufqu'au-delà de Vincieux , eft traverfée par un grand nombre de filons de mine de plomb , dont une grande partie ell exploitée par M. de Plumefeïn ,

qui en a la conceffion de Sa Majeflc Le filon d'Eî/i}fes a

environ deux pieds de largeur , & efl entre - mêlé d'une terre

noire Le filon de BrouJJîrî eft magnifique. ... II y a des

endroits le minéral pur a près de quatre pieds de largeur. . . . Comme ce minéral ne tient prefque pas d'argent , on en fépar^ le plus pur pour les Potiers du diocèfe , fous le nom de vernis. Le furplus , qui fe trouve mêlé de blende ou de roche , eft porté à la fonderie de Saint - Julien, l'on en extrait le plomb. ... II y a un autre filon de mine de plomb à Baley, paroifi'e de Talancieux , qui n'eft pas riche. Hijloire Naturelle du Languedoc par M. de Gen- Jannc ^ tome III , pages lyS & fuiv.

(i) On trouve dans le canton ( de la paroijfe de Brignon en

Vtlay )

DES Minéraux. 177

Ea Franche - comté , à Plancher - les - Mines dans la grande moniague , les mines font de plomb & d'argent; elles font ouvertes de temps immémorial , & on y a fait des travaux immenfès : on voit à Baitdy près de Chute au- Lambert, un filon qui règne tout le long d'une petite plaine fur le fbmmet de la montagne. Cette veine de plomb efl fous une roche de granit, d'environ trois toiiès d'épaiffeur, & qui reffemble à une voûte en pierres sèches qu on auroit faite exprès , elle s*étend fur toute la longueur de la plaine en forme de crête (k) . Nous obferverons fur cela que cette roche

^_^_. _ Il - I 11 ri

Vélay ) , une très-belle mine de plomb , dont la veine efl trcs-bieii carade'rifee. . . . Nous avons trouve dans les bois voifins de Verftllac, un très-beau fîlon de mine de plomb. . . . Du côté d'Icenjaux, nous avons reconnu en difFérens endroits , des marques très-caradérifëes

de mine de plomb Vers Saint- Alaurice- de - Lignan &. de

Prun'ùres , nous avons trouvé quantité de marques de mine de plomb

parmi les rocliers de granits On voit auprès de Aionijlrol ,

plufieurs anciens travaux fur à^i mines de plomb; celle qu'on appelle la Bqt'u eft des plus confidérables. Les gens du pays nous ont afTuré qu'il y a beaucoup de minéral dans le fond des travaux qui ne font qu'à vingt-cinq toifes de profondeur; mais qu'on avoit été obligé de les abandonner , à caufe de la quantité d'eau qui s'y trou- voit. ... A peu de diftance de cet endroit eft la mine de Nant, dont on vend le minéral aux Potiers : la veine ne donne que par rognons.... II y a encore plufieurs autres mines <5c indices de mines de plomb dans ce diocèfe. Traité de la fonte des mines de SchuUter, pages 2^6, 2^^, 2jf.^, 2j^6 & 24J.

(k) Hiftoire Naturelle du Languedoc, par M. de Cenfanne^ tome II, pages i p & fuiv.

Minéraux, Tome IIL Z

178 Histoire Naturelle

ne doit pas être de granit primitif, mais feulement d'un eranit formé par alluvion , ou peut-être même d'un grès à gros grains , que ies Obfèrvateurs confondent fouvent avec le vrai granit.

Et ce qui confirme ma pré/bmption, c'efl que ies mines ne fe trouvent jamais dans les montagnes de granit primitif, mais toujours dans les fchifles ou dans ies pierres calcaires qui leur font adoffées. M. Jas- kevifch dit, en parlant des mines de plomb qui font à quelque diflance de Fribourg en Brifgau , que ces mines fe trouvent des deux côtés de la montagne de granit , oc qu'il n'y en a aucune trace dans le granit même (IJ.

En Efpagne, M. Bowles a obfervé plufieurs mines cle plomb dont quelques-unes ont donné un très-grand produit, & jufqu'à quatre-vingts livres par quintal ^m) .

(l) A quelque diflance de Fribourg en Brifgau, il y a plufieurs mines qui avoient été abandonnées , mais que l'on exploite de nou- veau La montagne de Grenfem, fe trouve plufieurs de ces

mines de plomb , eft adofiée à une montagne de granit. , . . Toutes les pierres qu'on y trouve font de vrai granit giilatre , à fort petits grains, avec des points de fchorl noir, reflemblant beaucoup au granitello d'Italie. Du côté oppofé de cette montagne, eft une autre mine de plomb dont le minerai efl une galène ; fa gangue ell de fpath calcaire. La montagne gianitique fe trouve donc entre les montagnes calcaires qui renferment les mines. Voyages de Ai.Jaskevïfch, dans le fuppUment au Journal de Phyfi^ue du mois d'Oâobre i y S 2.

(m) II y a une mine de plomb à deux lieues d'Orellana, fur le chemin de Zalùnica: cette nùne eii dans une petite cminence. . , ,

DES Minéraux. 179

En Angleterre, celle de Alendlp eft une galène en maire , iàns gangue & prefqiie pure (n) ; il y a aulH de très - riches mines de ce mctal dans la province de Darby (o) , ainfi que dans les montagnes des comtés

La veine coupe direclement la pierre d'ardoife , elle efi: dans fe

quartz, HiJIoire Naturelle d' Efpagne , par Ai. Bowlcs, page ^y.

Ddas h province de Jaen en Efpagne, aucune inine ne fe trouve

dans la pierre calcaire, <Sc il y en a une de plomb près de Limarcs,

dans du granit gris ordinaire. La veine a dans certains endroits foixante

pieJs de large, «?c dans d'autres pas plus d'un. Les falbandes qui

enveloppent la veine font d'argile ; mais ces falbandes font fouvent

à découvert & le mêlent avec le granit. . . . De ces falbandes qui

accompagnent les mines en gcncral , l'une foutient le filon par-

deifous & l'autre le couvre par-defTus , &: c'efl la plus grofle. . ..

Cette mine de plomb efl ordinairement en veines, mais on y trouve

aufîi des rognons. ... on en a trouve un fi abondant, que pendant

quatre ou cinq ans, il fournit une quantité prodigieufe de plomb

dans un efpace de foixante pieds de large, autant de long, & fur

autant de profondeur. . . . C'efl; une véritable galène à gros grains,

qui donne pour l'ordinaire foixante à quatre-vingts livres de plomb

par quintal. ... & comme ce plomb ne contient que trois ou quatre

onces d'argent par quintal, il ne vaut pas la peine d'être coupelle.

JJem , pages 417 & fuïv.

(n) La mine de ATcndlp , dans le comté de Sommerfet, ert en quelcjues endroits en filons perpendiculaires, tantôt plus étroits, tantôt plus larges; cette mine ne foriiie qu'une mafle, & elle contient du plomb pur , excepté à la furface , elle eft mêlée d'une terre rouge. Ai. Guetlard; Alémoires de l' Acadénàe des Sciences, année 17^2, pages ^21 & fuiv.

(0) On trouve en Derbyshire, des veines de plomb très-confi- dcrabies, daiis une pierre à chaux coqujllèie, à laquelle on donne un

Zij

i8o Hi STO IRE Naturelle

de Cardignan &. de Cumberland (pj , &. l'on en connoît encore d'auiïi pures que celles de Mendip, dans quelques endroits de i'ÉcofTe (q).

M. Guettard a reconnu des indices de mines de plomb en SuifTe (r) ^ & il a ob/èrvé de bonnes mines de

Très-beàu poli , & dont on fait piufieurs ouvrages Toutes lei

mines de cette province font très -riches en argent, & font dans des montagnes récentes dont les pierres contiennent des corps marins .... Cependant en Derbyshire, comme ailleurs, la pierre à chaux eft pofée fur le fchifle .... Malgré cette exception , il n'en eft pas moins vrai que les montagnes de nouvelle formation ren- ferment raï^mem de vrais ûlom de mine. Le ter es fur la Minéralogie, par M. Ferber; note, pages ^6 & fuiv,

(p) On fait qu'en géne'ral, toutes les montagnes du comté de Cardignan en Angleterre, font remplies de mines de plomb qui contiennent de l'argent. . . Dam les montagnes de Cumberland, il y a du cuivre , de l'or & de l'argent , à. du plomb noir. M. Guettard; Aiémoires de l'Académie des Sciences, année ly^^j page s^ S'

(cj) Il y a trois fortes de mines de plomb en ILco^e; la première nommée lum-lead, efl prefque de plomb pur ; la féconde /mlling- lead onfmethon, efl la mine triée; la troifième la mine pauvre. On ne fond pas la première ni la Çecoaàe; oa les vend aux Potiers de terre pour vernir leurs poteries. Jr^i// ^^ hfonîides mines de Schlutter, tome II , page 32^.

(r) Les Alpes du canton de Schwitz renferment des mines de plomb. Mémoires de V Académie des Sciences, année 17^2, page s 3 9. Scheuchzer dit qu'il y a une mine de plomb au-deiïus de Zillis en Barenwald; une autre de plomb & de cuivre à Anneber^r, Jdem, P^S^ 333' La vallée de Ferrera, les environs de Schams , de Davos & de Difentis fourniffent du plomb. Idem, ibidem. Dans ies environs du CrimfeUa SuiOh, il y a des veines de plomb. Idem, page 336.

DES Minéraux. i8i

ce méial en Pologne; elles font, dit-il, abondantes & riches en argent ("fj. Il dit aujfi que la mine (ïOlkufiow, diocèfe de Cracovie, eft fans matière étrangère.

11 y a dans la Carinthie, des mines de plomb qui font en pleine exploitation ; elles gifTent dans des montagnes calcaires , &. l*on en tire par année vin^t

(f) Il y a à Olkufifir , dans le domaine de i'cvêque de Cracovie, une mine de plomb fans matière étrangère , qui eft écaiileufe. Ses

cpontes ou falbandes font d'une terre calcaire Une autre mine

de plomb trouvée dans les Karpacs , eft à petites écailles, & contient beaucoup d'argent gris ; une troifième eft à petites écailles avec des veines d'une terre jaune d'ocre ; une quatrième eft auffi écaiileufe , pure & en mafle, compofée d'efpèce de grains mal liés, de forte qu'on diroit que cette mine a paflc par le feu ; ces deux dernières fe trouvent

aufll dans les Karpacs Les mines ù'Olkuf^ en Pologne, ont

été travaillées dès le quatorzième fiècle ; on y voit plufieurs puits , dont quelques-uns defcendent jufqu'à quatre-vingts braïïes de pro- fondeur. Leur fituation eft au pied d'une petite montagne, qui s'élève en pente douce. Le minerai de ces mines eft la galène couleur de plomb; elle eft fans mélange de cailloux ni de fable, ni

d'aucune autre fubftance Le minerai eft répandu dans une

terre jaunâtre , mêlée d'une pierre femblable à la calamine , & à de la pierre à chaux dans quelques endroits ; cette terre contient aufli des fragmens d'une pierre ferrugineufe , qui a été très- utile pour la fonte

du minerai A la profondeur de cinq ou fix braffes, on trouve

d'abord une efpèce de pierre à chaux , & dès la dixième brafîe on rencontre la veine du minéral , qui , dans quelques endroits , n'a que deux ou trois pouces, & dans d'autres jufqu'à une demi-braiïe

d'épaifteur On tire de ce plomb on/e marcs & demi d'argent ^

fur (bixante - dix quintaux de plomb. AI. Cuettard; Mémoires dr V Académie des Sciences, année i yC 2 , pogcs ^ j (f , ^21 Ù' fuht^

/

\%z Histoire is atu u e l le

mille quintaux de plomb (t) . Les mines Je plomb que l'on trouve dans le Palacinat en Allemagne , fous la forme d'une pierre cri/lallifce, font exemptes de même de toute matière étrangère; ce font des mines en chaux qui, comme cçWç^ de plomb blanche, ne contiennent en effet que du plomb , de l'air & de l'eau, fans mélange d'aucune autre matière métallique (ii) .

On voit par cette éniuncration qu'il trouve un gr-ûnd nombre de mines de plomi) dans prefque toutes les provinces de l'Europe; les plus remarquables, ou plutôt les mieux connues, font celles qui contiennent une quantité confidérable d'argent ; il y en a de toute efpèce en Allemagne (x) , de même qu'en Suède, <Sc jufqu'en Norwège.

(t) On trouve dans les mines de Bleyberg en Carinthie, plufieurs fortes de minerais. i.° Le •çXoxnhdige ou plomb compade prefque malléable, couleur de vrai plomb minéralifé avec le foufre & l'arfenic; 2." la galène de plomb criftallifée en cubes ou en odaédres; 3.° la craie parfeme'e de petits points de galène de plomb qui forment de jolies dendriies; 4.° le plomb fpatheux, couleur de jaune-clair, jufqu'à l'oranger blanc, couleur de plomb tran (parent, couleur de vert- pâle. . . .&c. Voyage de M. Jaskevlfch , dans le fupplément au journal de Phyfique du mois d'Oâobre de l'année i yS 2,

(u) Dans le haut Palatinat à Fregung , il y a une mine de plomb qui n'eft mêlée d'aucun autre métal, & parconféquent excellente pour l'ufage de la coupelle ; elle eft en partie fous la forme d'une pierre criftalline ; le refte n'efl; pas fi riche en plomb & paroit plus farineux. Colle dion académique, partie étrangère , tome II, page jt.

(x) La mine d? plomb & d'argent de Ramniei/berg, e/l 6ii pa«ie

DES Minéraux» i8<»

On ne peut guère douter qu'il n'y ait tout autant de mines de plomb en Afie qu'en Europe; mais nous ne pouvons indiquer que le petit nombre de celles qui ont été remarquées par les Voyageurs, & il en eft àt même de celles de l'Afrique <Sc de l'Amérique. En Arabie, félon Nieburh, il y a tant de mines de plomb

très-pure, &: en partie mêlée de pyrites cuivreufes & de foufre; <5c dans le milieu de ces pyrites on trouve quelques veines de mines de plomb brillantes. ... Le produit de cette mine efl: en argent, depuis un gros jufqu'à ime once , & en plomb depuis fix jufqu'à quarante livres par quintal. On ne peut réduire cette mine en moindre volume par le bocard & le lavage , parce que fa gangue eft trop dure & trop pefaiite ; mais elle a l'avantage d'être affez pure; ainft on peut la regarder comme une mine triée ; à caufe de fa dureté , on attend qu'elle ait

reçu trois grillages avant de l'efîayer Les mines qui fe tirent

des minières de Hal^bruche , ne contiennent par quintal que depuis une demi- once jufqu'à deux onces & demie d'argent; mais elles rendent depuis vingt-huit jufqu'à foixante-cinq livres de plomb par quintal; ainfi comme elles font tendres, on les grille feules, & ou ne leur donne que deux feux pour les ajouter enfuite aux autres dans la fonte ....

On trouve à Foelgehaiigen , de la mine de plomb à gros brillans, dont le quintal rend depuis foixante-dix jufqu'à quatre-vingts livres de plomb, & depuis fix gros jufqu'à une once & demie d'argent; on y trouve audî de la mine de plomb à petits brillans , contenant un peu plus d'argent & moins de plomb: on trie les meilleurs morceaux de ces mines , & on pile & lave le refte ; mais le tout doit être grillé ....

Dans le haut Hartz , le produit des mines pilées varie beaucoup ; il y en a dont le quintal ne tient qu'une demi -once d'argent, d'autres qui en contiennent jufqu'à un marc .... Celles ô.'Andrcdjltrg

184 Histoire Naturelle

dans VOmûTï, &. elles font fi riches qu'on en exporte beaucoup ^y. A Siani, les Voyageurs difent qu'on travaille depuis long-temps des mines de plomb & d'étain Ci), En Perfe, dit Tavernier, on n'avoit ni plomb ni étain que celui qui arrivoit des pays étrangers ; mais ou a découvert une mine de plomb auprès de la ville éiYerde (n) . M. PeyfTonnei a vu une mine de plomb dans l'île de Crète, dont il a tiré neuf onces de plomb fur une livre & une très-petite quantité d'argent ; il dit qu'en creufant un peu plus profondément , on découvre quelquefois des veines d'un minerai de couleur gri/è, taillé à facettes brillantes, mêlé de fbufre &. d'un peu d'arfenic, &. qu'il a tiré d'une livre de ce minerai, fept

font plus riches, parce qu'on y trouve de l'argent vierge & de la minera argent i rubra, dont les grillages fournirent beaucoup d'argent; enfin , il y en a d'autres qui , fans argent vierge ni même d'argent rouge , fournirent encore plus d'argent ....

Les mines qu'on tire dans le comté de Stolberg, à Strelibero-, font de plomb & d'argent,- mêle'es d'un peu de pyrites & de mine de cuivre. II fe trouve aufll dans les mêmes filons , de la mine de fer jaune «5c blanche qu'on ne peut en féparer entièrement , ni en pilant ni en lavant le minéral ; ainfi on la trie le mieux qu'il eft pofTible, en la pilant grofîièrement «& la faifant paffer par un crible. lyaité de la fonte des mines de Schlutter , tome II, pages 162,1 S 2, 18S, I pS & 32S,

(y) Defcription de l'Arabie, page 1 2j.

(l) Hirtoire générale des Voyages, tome XVIII, page j 07.

(a) Idem , tome X, page 6; 6.

onces

DES Minéraux. 185

onces de plomb & une dragme d'argent (b^. En Sibérie, il le trouve auili nombre de mines de plomb, dont quelques-unes font fort riclies en argent (c) .

Nous avons peu de connoifTances des mines de plomb de l'Afrique; feulement le do6teur Shaw fait mention de celles de Barbarie , dont quelques - unes , dit - il , donnent quatre-vingts livres de métal par quintal (d).

Dans l'Amérique feptentrionale, on trouve de bonnes

(h) Hifloire de Crête manufcrite, par M. Peyflonel.

(c) A quelque diflance à! Argunsk en Sibérie , & à quelques verftes de l'ancienne mine à'Ildïkim, on a de'couvert un nouveau filon d'un beau minéral luifant , très- foncé, mêlé d'un peu de gravier qui contient deux onces d'argent, & plus de cinquante livres de plomb par quintal. Il y a encore d'autres minerais dont on tire trois onces d'argent & foixante - quatorze livres de plomb , & l'argent qu'il donne contient de l'or. Hijloire générale des Voyages, tome XVIII , page 20p.

(d) Les mines de plomb de Jibùel - ris -fajf près d'Hamman-leef; celles de Wamarb-réefe , & celles de Benibootateb , font toutes fort riches, & l'on en pourroit certainement tirer de grands trélors fi elles

ctoient mieux travaillées On tire aifément par le feu 80 livres

de métal d'un feul quintal de mine Il y en a aufTi dans les terres

d'Alger, & fur-tout dans une haute montagne appelée Van-naff-réefe , dont le fommet eft couvert de neige. Après de grandes pluies , les torrens qui découlent de cette montagne charrient des grains & pailles de ce minéral , lefquels s'arrêtent fur ces bords, brillent comme l'argent à la lueur du foleil. Voyages de Sha\^r, tome I, pages 49

Minéraux , Tome IIL A a

i86 Histoire Naturelle

mines Je plomb aux Illinois (e), au Canada (f), en Virginie (g); il y en a aulTi beaucoup au Mexique (h), & quelques-unes au Pérou, (i) .

Toutes les mines de plomb en galène, affedent une

(e} Dans le pays des Illinois, il y a des mines de plomb dont on peut tirer foixante - feize on quatre - vingts livres de plomb par quintal..... Ce plomb contient un peu d'argent. AI. Gucttard , Mémoires de l'Académie des Sciences , année ij^i, page 210,

(f) 11 y ^ ut^e mine de plomb à la baie Saint- Paul , à vingt -cinq

lieues de Québec qui efl dans une grande montagne. . . . Les filons

de cette mine de Saint Paul font places perpendiculairement dans le rocher. .... Les pierres que l'on trouve à la furface ou à peu de profondeur, ne font qu'environnées de métal à la furface , & à mefure que l'on defcend les pierres en font plus pénétrées. Les veines font de différentes largeurs, & font peu éloignées les unes des autres. Idem, pages 2J0 Ù' fuivantes.

(g) La Virginie a des mines de plomb auxquelles on a travaillé, & qui font aujourd'hui abandonnées. Hifoire générale des Voyages , tome XIV , page ^ 6 S .

(h) Le canton d'Y:^(juiqui/paj a vingt-deux lieues de Mexico, abonde en mines de plomb La province de Guaxaca renferme la mon- tagne 1f{_-qui-tepcque , il fe trouve quantité de veines de plo 11b ; celle de Guadaiajara renferme dans ^^^ montagnes beaucoup de mines d'argent & de cuivre mêlées de plomb. Il s'en trouve aufli de

plomb & d'argent dans fa province de la nouvelle Bifcaie Et

autrefois on en tiroit aufTi beaucoup de la province de Chiapa. Idem , tome XII y page 648,

(i) Le Corrégiment de Guanta , dans le diocèfe de Guamanga au Pérou , a des mines de plomb. Idem , page 64 8,

DES Minéraux, 187

figure exahèclre en lames ccailleufes ou en grains anguleux» ik. c'eft en etfèt fous cette forme que la Nature a établi ies mines primordiûL's de ce métal ; toutes celles qui prc/entcnt fous d'autres formes, ne proviennent que de la décompodtion de ces premières mines dont les détrimens, faifis par les Tels de la terre, & mélangés d'autres minéraux , ont formé les mines fecondaires de cérufe , de plomb blanc (k) , de plomb vert, de plomb rouge , &c. qui font bien connues des Natura- liftcs ; mais M. de Gen/ànne fait mention d'une mine fingulicre qui renferme des grains de plomb tout-à- fait pur; voici l'extrait de ce qu'il dit à ce fujet: « Entre Pradel & Vameau , il y a une mine de plomb dans des couches d'une pierre calcaire fauve, & fouvent «

(k) La mine de plomb blanche qui fe trouve dans celle de Poii- laouen en Bretagne , efl: en afiez gros criflaux, de forme prifmatique, irrégulièrement Itrics dans leur longueur, d'un blanc de nacre tranf- parent, qui donnent au quintal quatre-vingts livres de plomb tenant

un peu d'argent Cetie mine de plomb blanche, quoiqu'en dife

Vallerius , ell parfaitement foluoie par tous les acides Elle ne

contient point d'arlenic , quoique Vallerius l'ait afiuré, ni d'acide

marin , comme le prétend M. Sage Les mines de plomb

fpathiques font des mines de plomb de féconde formation , que l'on rencontre difperfées fans ordre & fans fuite dans les environs & tou- jours allez près des galènes ou mines de plonib fultureufes. La pofi- tion iXts mines ff)athiques, leur criltallifadon diflintfle plus ou moins, \qs fontaifcment reconnoître pour l'ouvrage des eaux fouterraines chargées de la partie métallique des galènes dcconipofées. AUmoire de M. Laborie, dans ceux des Savûtis étrangers , tome IX, pages ^42 & fuiv.

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188 Histoire Naturelle

'^ ronge ; le iilon n'a qu'un pouce & demi ou deux pouces « d'ëpaiïTcur , & s'étend prefque tout le long de la foret des châtaigniers : c'eft en général une vraie mine de plomb blanche & terreufe ; mais ce qu'il y a de fmgulier, >> c'eft que cette fubflance terreu/è renferme dans fon 5^ intérieur , de véritables grains de plomb tout faits , ce >> qui étoit inconnu jufqu'ici ; cette terre minérale qui " renferme ces grains, rend jufqu'au-delà de quatre-vingt- " dix livres de plomb par quintal , & les grains de plomb qu'elle renferme font très-purs & très-doux; ils n'afîèétent point une configuration régulière , il y en a de toutes fortes de figures ; on en voit qui forment de petites >> veines au travers du minéral en forme de filigrane, & ^' qui reffemblent aux taches des dendrites. On trouve » du minéral femblable, & qui contient encore plus de " plomb natif, près du village de Fayet, Si. de même près >^ de Villeneuve-de-Berg , & encore dans la montagne >> qui efl à droite du chemin qui conduit à Aubénas, à »' une petite lieue de Villeneuve-de-Berg; les quatre « endroits de ces montagnes l'on trouve ce minéral, » font à plus de trois lieues de difîance les uns des " autres fur un même alignement, «&. la ligne entière a >> plus de huit lieues de longueur. Les plus gros grains de >> plomb pur , font comme des marrons , ou de la groffeur » d'une petite noix ; il y en a d'aplatis , d'autres plus >> épais & tout bifcornus ; la plupart font de la groffeur >> d'un petit pois, <St il y en a qui font prefque imper-

DES Minéraux, 189

cepiibles. La terre métallique qui les renferme, eft de ia même couleur que la litharge réduite en poufTière impalpable; cette terre fe coupe au couteau, mais il faut le marteau pour la caffer ; elle renferme aufli des véritables fcories de plomb, &. quelquefois une matière femblable à de la litharge ; cependant ce minéral ne provient point d'anciennes fonderies, d'ailleurs, il efl répandu dans une très-grande étendue de terrein ; on en trouve fur un ei^jace de plus d'un quart de lieue, fans rencontrer de fcories dans le voifmage , l'on n'a pas mémoire qu'il y ait jamais eu de fonderies (IJ -\ Ces derniers mots, femblent indiquer que M. de

(l) Nota. M. de Virly, Préfident à la Chambre des Comptes de Dijon, a eu la bonté de m'apporter un morceau de cette mine mêlée de plomb tout pur, qu'il a trouvé à l'Argentière enVivarais, fur l'une des deux montagnes entre lefquelles cette ville efl fituée; il en a rapporté des morceaux gros comme le poing, & communément il y en a de la grofleur d'un œuf; les uns ont l'apparence d'une terre métallique; ils reflemblent au mafficot, & font un peu tranfparens; d'autres plus légers font en état de verre , & renferment des globules de métal , plus ou moins gros , qui fe laiflent entamer au couteau , & font réellement du plomb. Il y a beaucoup de mines de plomb en galène aux environs de l'Argentière ; elles ont été exploitées dans Je temps des Croifades comme mines d'argent ; c'efl; même , à ce que l'on dit , ce qui a donné le nom à la ville ; il n'y a point de vefliges d'anciens volcans dans ces deux montagnes , & ces matières de plomb, qui ont évidemment éprouvé l'aélion du feu , font peut-être les refles d'anciennes exploitations , ou ie produit de la fufion des mines de galène par l'incendie des forêts qui couvroienc ces montagnes.

190 Histoire Naturelle

Gcnfaniie foupçoiine avec raifon , que le feu a eu part à la formation de cette mine finguliere; s'il n'y a pas eu de fonderies dans ces lieux, il y a eu des forets, <5c très-probablement des incendies, ou bien on doit fup- pofer quelqu'ancien volcan dont le feu aura calciné la plus grande partie de la mine, & l'aura réduite en chaux blanche, en fcories, en litharge, dans leiquelies cer- taines parties feront reviviiices en métal, au moyen des matières intiamniables qui fer voient d 'al i mens à l'incendie; cette mine eft donc de dernière formation; comme elle gît en grande partie fous la pierre calcaire, elle n'a pas été produite par le feu primitif, qui d'ailleurs J'auroit entièrement réduite en chaux, &. n'y auroit pas laiffé du métal; ce n'efl: donc qu'une mine ordinaire, qui a feulement été dénaturée accidentellement par le feu fouterrain d'un ancien volcan, ou par de grands incendies à la farface du terrein.

Et non-feulement le feu a pu former ces mines de plomb en chaux blanche; mais l'eau peut auHi les produire : la cérufè que nous voyons fe former à l'air fur les plombs qui y font expofcs , efl une vraie chaux de ce métal , qui étant entraînée , tranfportée & dépofée en certains endroits de l'intérieur de la terre par la filiation des eaux, s'accumule en mafles ou en veines, fous une forme plus ou moins concrète. La mine de plomb blanche n'eft qu'une cérufè criftallifée, éga- lement produite par l'eau; il ny a de différence qu'en

DES Minéraux, 191

ce que la cérufë naturelle eft plus mcice de parties terreufes ; ces mines de cérufe , les plus nouvelles de toutes, fe forment tous les jours comme celles du fer en rouille , par ks détrimens de ces métaux.

Les mines de plomb vitreufès & criflallifées , qui proviennent de la dccompofition des galènes, prennent différentes couleurs par le conta6l ou l'union des diffé- rentes fubflances métalliques qu'elles rencontrent; le fer leur donne une couleur rouge, 6c félon M. Monnet, il les colore auffi quelquefois en vert: cet Obfèrvateur dit avoir remarqué dans les mines de plomb de la Croix en Lorraine fffi) ^ un grand nombre de criflaux de plomb vert dans les cavités de- la gangue de cette mine , qui n'eft qu'une mine de fer grifâii e ; d'oii il conclut que les criflaux verts de plomb , ^ peuvent être formés de la décompofition de la galène par le fer. La galène elle-même peut fe régénérer dans les mines de plomb qui font en état de cérufe ou de chaux blanche ; on peut le démontrer, tant par la forme lifluleufe de ces galènes qu'on appelle plomb twir, que par plufieurs morceaux de mines dans lefquelles la bafe des crif- taux efl encore de plomb blanc , feulement un peu rougeâire, &. dont la partie fupérieure efl convertie en galène.

En général, les mines de plomb tiennent prc/quc

(m) Obfervations fur une mine de plomb, par M. Monnet.

J92 Histoire Natu relle

toutes une petite quantité d'argent; elles font au/Ti très- fouvent mêlées de fer & d'antimoine (n) , & quelquefois de cuivre (o) ; mais l'on n'a qu'un fèul exemple de mine de plomb tenant du zinc (p) ; & de même que l'on trouve de l'argent dans prefque toutes les mines de plomb, on trouve aufîi du plomb dans la plupart des mines d'argent; mais dans les filons de ces mines, le plomb, comme plus pefant, defcend au-de/Tous de l'argent , &. il arrive prefque toujours , que les veines les plus riches en argent changent en plomb à mefure qu'elles s'étendent en profondeur (q) ,

Pour connoître la quantité du métal qu'une mine de plomb peut contenir, il faut la griller en ne lui donnant d'abord que peu de feu; la bien laver enfuite, & l'effayer avec le flux noir, & quelquefois y ajouter de la limaille de fer (r) , pour abforber le foufre que le grillage n'auroit

pas

(n) II y a du plomb qui , dans la mine , efl: mêitî avec de l'an- timoine , & qui en con^^ïst encore après la fonte. Mémoires de l'Académie des Sciences , année ij] ^ , page s i ^.

(o) II fe trouve des mines de plomb cuivreufes, & le plomb qu'on en retire, conferve toujours quelques imprefljons du cuivre. Idem , ibidem.

(p) Il y après de Goflar, une mine de plomb qui contient une aflTez grande quantité de zinc .... mais on croit communément que c'en; la feule mine en Europe qui en contienne. Idem, ibidem,

(q) Delius, fur l'art des mines, tome I, page y^. (r) On met fi'x quintaux de flux noir fur un quintal de mine; on

mêle

î) E s Minéraux. ïpj

pas tout enlève (f); mais quoique par ces moyens on obtienne la quantité de plomb afTez jufle, i'eiïai par

mêle le tout pour être inis dans un creufet que l'on place au feu: on conduit la fonte comme celle d'un eflai de mine de cuivre, excepté que celui de la mine de plomb eft fini beaucoup pius tôt; on peut faire aufîi ces efîàis avec quatre quintaux de flux noir fur ua quintal de mine, & même avec deux ou trois quintaux de ce fluXg pourvu que la mine foit bien défoufrée.

Si les mines de plomb contiennent beaucoup d'antimoine , on ajoute , à i'eflai d'un quintal de ces mines , vingt-cinq ou cinquante pour cent de limaiKe de fer , plus ou moins , félon que la mine eft

chargée d'antimoine Si on eflaie les mines lavées > ou celles

qu'on nomme vulgairement pures , parce qu'elles n'ont point, ou très-peu, de gangues, fans les faire rôtir, il faut y ajouter vingt-cinq pour cent de limaille de fer: le plomb s'en détache plus aifément; mais l'elîâi eft fouvent incertain , parce que le fer donne à l'elîaî une couleur noire : quant aux mines rôties , il ne faut pas y ajouter de fer. Traité de la fonte des Mines de Sclilutter, tome I, pages 207^ Ù- JZ08.

(f) Les mines de plomb exigent la torréfa(ftion à caufe%u foufre qu'elles contiennent; on ajoute de la limaille de fer dans i'efîai poiu: les en dépouiller plus fûrement: quand la mine tient de l'argent, ce qui arrive fréquemment, on appelle plomb-d'ceuvre le produit de la première fonte qui fe fait à travers les charbons ou au feu réverbère , fur de la brafque. Ou retire de l'argent du plomb-d'ceuvra par une efpèce de coupellation en grand , c'eft-à-dire , en conver- tlHânt le plomb en litharge, fur un foyer fait de cendres le/Hvées; on lui donne un fécond affinage dans de vraies coupelles; & les débris de ces vailîeaux, ainfi que ceux des fourneaux, & même la litharge qui ne feroit pas reçue dans le commerce, font remis au fourneau pour revivifier le plomb. Élémens de Chimie , par M> dc /hfcrveau , tome I, page 2.^1,

Minéraux, Tome UL B b

394 Histoire Natup elle

la voie humide eft encore plus fidèle: voici le procède Je M- Bergman (r) ; on puivérife la galène , on la fait digérer dans l'acide nitroux ou dans i'acide marin , iufqu'à ce que tout le plomb foit dilTous, & alors le foufre minéral fe précipite ; on s'afTurc que ce foufre efl pur en le faifànt diffoudre dans i'alkali cauflique, on précipite le plomb par l'alkali criitallifé , & cent trente-deux parties de précipité indiquent cent parties de plomb : fi le plomb tient argent , on le fépare du précipité par l'alkali volatil , & s'il y a de l'antimoine, on le calcine par l'acide nitreux concentre; fi h galène lient du fer, on précipite le plomb &. l'argent qui peuvent y être unis, ainfi que la quantité de fer qui fe trouve dans l'acide, en mettant ime lame de fer dans la diflb- lution ; celle que la lame de fer a produite indique cxadement la quantité de ce métal contenue dans la galène.*

Le plomb extrait de famine par la fonte, demande encore des foins tant qu'il eft en métal coulant; car (i on le laifTe expofé à l'adion de l'air , fa furface fe couvre d'une poudre grife, dont la quantité augmente à mefure que le feu continue , en forte que tout le métal fe convertit en chaux, & acquiert par cette conver- fion, une augmentation de volume très-confidérable fu):

(t) Opufciiles , tome II, d'ijfcrtation 2^.

(u) Nota. M. Demefle dit que cette aug.mentation de volume ou de pefamçur / eft comme de 113 à 100.

DES Minéraux. ipj

cette chaux grife, expofce de nouveau à l'adion du feu, y prend bientôt, en ia remuant avec une fpatule de 1er, une alTcz belle couleur jaune, & dans cet état on lui donne ie nom de mafficot ; & fi l'on continue de ia remuer en la tenant toujours expofce à l'air, à un certain degré de feu, elle prend une belle couleur rouge , & dans cet état on lui donne le nom de luiuhini; je dis à un certain degré de feu; car un feu plus fort ou plus foible, ne changeroit pas le mafficot en minium; & ce feu confiant & ncceifaire, pour lui donner une belle couleur rouge, efl de cent vingt degrés (x) ; car fi l'on donne à ce même minium une chaleur plus grande ou moindre, il perd également fon beau rouge, redevient jaune , <& ne reprend cette couleur rouge qu'au feu de cent vingt degrés de chaleur. C'efl à M. Geofii-oy qu'eft due cette intéreffante obfervation , & c'efl à M. Jars (y) que nous devons la connoiflance des

^x) Divifioii du thermomètre de Rcaumur.

(y) II y a deux fabriques de minium dans le comte' de Derby, Tune auprès de Chejlerfield , & l'autre aux environs de ia ville de Wiskfa^orih, Le fourneau pour cette opération, eft un réverbère à deux chauffes, renfermées fous une ieule & même voûte. . . . On

y fait ufdge de charbon de terre On emploie communément

quinze quintaux ou dix lingots de plomb dans une opération. . ..

On commence j^ar mettre en-dedans, & devant l'embouchure du fourneau , le grollier de la matière jaune qui a relié au fond de la balfine dans le lavage , ce qui empêche le plomb de couler au- <iehors du fourneau. On introduit le plomb dans le fourneau, &. dè^

Bb ij

196 Histoire Naturelle

pratiques ufitées en Angleterre, pour faire le minium en grande quantité, & par conféquent à moindre frais qu'on ne le fait ordinairement.

Les Anglois ne fe fervent que de charbon de terre pour faire le minium, & ils prétendent même qu'on ne réuffiroit pas avec le charbon de bois ; cependant, dit M. Jars, il n'y auroit d'autre inconvénient que celui

qu'il eft fondu on l'agiie continuellement ; à mefure qu'il fe réduit en chaux on fe tire de côte', & on continue jufqu'à ce que le tout foit converti en poudre , ce qui arrive ordinairement au bout de quatre ou cinq heures. S'il refte encore quelques morceaux de plomb, on les conferve pour une autre opération. On donne une chaleur vive pendant tout fe temps de cette converfion , cependant elle ne donne qu'un rouge de cerife très-foncé ; car les deux ouvertures des chauffes & l'embouchure du fourneau font toujours ouvertes afin que Je contad de l'air accélère la calcination. . . .

If faut pfus que \^s quatre ou cinq heures qui convertiflent le plomb en chaux, pour qu'il foit réduit en poudre jaune; ainfi on le laiffe encore près de vingt-quatre heures dans le fourneau ; mais on ne fe remue pas fouvent dès qu'il efl une fois en poudre , feu- îemejit autant qu'il le faut pour empêcher qu'il ne fe ineiie en grumeaux , ou ne fe fonde en maffe. Quand on juge la chaux de plomb affez calcinée , on la tire hors du fourneau avec un rable de fer , & on fa fait tomber fur un pavé uni , on fait couler de l'eau fraîche par-deffus pour divifer la chaux qui peut être grumelée , & îa rendre affez friable pour paffer au moulin , ôc on continue jufqu'à ce qu'elle foit imbibée & bien refroidie; cette matière étant encore chaude refTemble beaucoup à fa litharge, & for/qu'elle efl froide, elle efl d'une couleur jaune-fale. Cette matière jaune efl mife dans un moulin pour y être broyée en y verfant de l'eau , & à mefure qu'elle fe broyé ^\i^ tombe dans une cuve placée pour la recevoir

x^ E s Minéraux. 197

Ses éclats de ce charbon qui pourroient revivifier quelques parties de la chaux de plomb, ce qu'il cfl très - aifé d'éviter. Je ne penfe pas , avec M. Jars , que ce foit-Ià le feul inconvénient. Le charbon de bois ne donne pas une chaleur aufli forte ni auïïi confiante ont le charbon de terre, & d'ailleurs l'acide fulfureux qui

au bas du moulin ; mais comme cette matière n'eft pas également broye'e , on la pafTe dans un tonneau plein d'eau pour y être lave'e à l'aide d'une badine de cuivre qu'on remplit à moitié de chaux de plomb, & qu'on agite de manière que la matière broyée la plus fine fe mêle à toute l'eau du tonneau & fe précipite au fond , tandis que celle qui n'eft pas divifée fufîfifamment refte dans la bafllne, & fert pour être placée , comme on l'a déjà dit , devant l'embouchure intérieure du fourneau pour être calcinée de nouveau avec le plomb. . . On continue de procéder de la même manière pour le moulin & pour le lavage , jufqu'à ce que toute fa matière jaune provenue de la première calcination ait été entièrement paiïce. Lorfque le lavao-e eft fait , on laifle précipiter au fond du tonneau la matière qui eft fulpendue dans l'eau par fa grande divifion , enfuite on \erÇe l'eau pour retirer le précipité auquel on donne la couleur rouge par l'opération fuivante. On introduit cette matière précipitée ou chaux de plomb dans le milieu du fourneau , on en forme un feul tas que l'on aplatit , & fur cet aplatiffement on fait des raies ou filions , & on ne remue la matière que pour l'empêcher de s'agiutiner ; & c'eft par cette dernière opération qu'on lui donne la couleur rouge. II faut trente-fix ou quarante-huit heures de feu avec du charbon de terre , comme dans la première calcination , «5c on retire eiîfuitc la matière toute chaude; elle paroîi alors d'un rouge très- foncé; mais elle prend, en fe refroidifl"ant , le beau rouge du minium. Ai. Jars, Mémoires de l'Académie des Sciences, année lyyo ,, pages ^ 8 ù' fuivante s.

198 Histoire Naturelle

s'en exhale, &la fumée du bitume qu'il contient, peuvent contribuer à donner à la chaux de plomb , la belle couleur rouge.

Toutes ces chaux de plomb, blanches, grifes, jaunes & rouges , font non - feulement très - aifces à vitrifier , mais même elles déterminent promptement & puiffam- mcnt la vitrification de plufieurs autres matières; feules, elles ne donnent que de la litharge ou du verre jaune très - peu folidc ; mais fondues avec le quartz , elles forment un verre irès-folide, alTcz tranf|xirent, <Sl d'une belle couleur jaune.

Confidérant maintenant les propriétés particulières du plomb dans fon état de métal, nous verrons qu'il efl le moins dur «^ le moins élaflique de tous les métaux, que quoiqu'il fbit très-mou, il efl auffi le moins duéliîe; qu'il ell encore ie moins tenace, pui/qu'un fil d'un dixième de pouce de diamètre, ne peut foutenir un poids de 30 livres fans fe rompre; mais il efl, après l'or , le plus pefant ; car je ne mets pas le mercure ni la platine au nombre des vrais métaux ; fon poids fpé- cifique cft à celui de l'eau diflillée comme 113^23 font à 10000, &. le pied cube de plomb pur, pèfe •794 livres 10 onces 4 gros 4.4. grains (i). Son odeur efl moins forte que celle du cuivre, cependant eWt fait fentir défagréablcment lorfqu'on le frotte ; il efl

(l) Voyez la Titbie des pelaateurs fpeciiîques, par J\l. BrifToii.

DES Minéraux. 19c

d'un aflcz beau blanc quand il vient cl'éiio fondu, ou îorfqu'on l'entame & le coupe ; mais rimprc/Tiou de i'air ternit en peu de temps fa furface qui fe décompofè en une rouille légère de couleur obicure & bleuâtre; cette rouille efl afFez adhérente au métal, elle ne s'en détache pas auiïi facilement que le vert-de gris fe détache du cuivre, c'eft une e/pèce de chaux qui fe revivifie aufîi aifément que les autres chaux de plomb ; c'eft une cérufe commencée ; cette décompofition par les élémens humides , fe fait plus promptement lorfque ce métal efl expofé à de fréquentes alternatives de féchcreffe & d'humidité.

Le plomb, comme Ton fait , fe fond très-facilement, & lorsqu'on le laiffe refroidir lentement, il forme des criflaux qu'on peut rendre très-apparens par un procédé qu'indique M. l'abbé Mongez ; c'efl en formant une géode dans un creufet, dont le fond efl environné de charbon, & qu'on perce dès que la furface du métai fondu a pris de la confiflance : on obtient de cette manière, des criflaux bien formés en pyramides trièdres ifblées, &. de trois à quatre lignes de longueur. Je me fuis fervi du même moyen pour criflallifcr la fonte de fer.

Le plomb expofé à l'air dans fon état de fufion, fc combine avec cet élément , qui non-feulement s'attache à fa furface, mais fe fixe dans fa fubflance, la convertit en chaux , & en augmente le volume & le poids C^J,-

(a) Silon M. Chardenon, un quinul de plomb donne jufqu'à

20O Histoire Naturelle

cet air fixé dans le métal eft la feule caufe de con-' verfion en chaux , le phlogiflique ne fait rien ici , & il eil étonnant que nos Chimiftes s'obfîinent à vouloir expliquer par l'abfence & la préfence de ce phlogiflique, les phénomènes de la calcination &. de la revivification des métaux ; tandis qu'on peut démontrer que le chan- gement du métal en chaux , & fon augmentation de volume ou pefanteur abfolue, ne viennent que de Tair qui y ell entré, puifqu'on en retire cet air en même quantité, & que rien n'eft plus fnnplc <&. plus aifé à concevoir que la rédudion de cette chaux en métal, puifqu'on peut également démontrer que l'air ayant plus d'affinité avec les matières inflammables qu'avec le métal, il l'abandonne dès qu'on lui préfente quelqu'une de ces matières, & laifTe par conféquent le métal dans l'état il l'avoit trouvé. La rédudlion de la chaux des métaux n'efl donc au vrai qu'une forte de précipitation^ auffi aifée à entendre, auffi facile à démontrer que toute jiutre.

Nous observerons en particulier , que le plomb <Sc î'étain font les deux métaux avec lefquels l'air fe fixe & fe combine le plus promptement dans leur état de fufion, mais que I'étain le retient bien plus puiflamment; «^— ^^— »— »— »— ^

cent dix livres de chaux ; & de tous les me'taux , fe plomb & Tctain font ceux qui acquièrent (e plus de pefanteur dans la calcination,, Almoïres de l'Académie de Dijon , tome I, pages ^ o^ O" fuiv,

la

DES Minéraux, 201

îa chaux de plomb fe réduit beaucoup plus aifément en métal que celle de i'étain par l'addition des matières inHammables ; ainfi l'affinité de l'air s'exerce d'une manière plus iniime avec I'étain qu'avec le plomb.

Si nous comparons encore ces deux métaux par d'autres propriétés , nous trouverons que le plomb approche de i'étam, non-feulement par la facilité qu'il a de fe calciner, mais encore par la fufibilité, la mollelfe, la couleur, & qu'il n'en diffère qu'en ce que, comme nous venons de le dire , la chaux du plomb efl plus aifé- ment réductible , & quoique ces deux chaux foient d'abord de la même couleur grifè, la chaux d'étain, par une plus forte calcination , devient blanche & refte blanche , tandis que celle de plomb devient jaune , puis rouge par une calcination continuée ; de plus, celle de i'étain ne fe vitrifie que très -difficilement, au lieu que celle du plomb change en im vrai verre tran/parent & pefant, & qui devient au feu fi fluide & li aélif, qu'il perce les creufets les plus compaéts ; ce verre de plomb dans lequel l'air fixe de fa chaux s'eft incorporé, peut encore fe réduire facilement en métal coulant , il fuflic de le broyer & de le refondre en y ajoutant une matière inflammable , avec laquelle l'air ayant plus d'affinité qu'avec le plomb, fe dégagera en faififl^ant cette matière inflammable qui l'emporte, & il laiffera par conféquent le plomb dans fon premier état de métal coulant. Le piomb peut s'allier avec tous les métaux, à Minéraux, Tome IIL Ce

202 Histoire Naturelle

Texception du fer avec lequel il ne paroît pas qu'il puiffe coutrader d'union intime (b) ; cependant on peut les réunir de très-près en failànt auparavant fondre le fer. M. de Morveau a dans iow Cabinet, un culot formé d'acier fondu & de plomb , dans lequel à la vérité , ces deux métaux ne font pas alliés , mais am- plement adhérens de fi près , que la ligne de féparatiou n'efl prefque pas fenfible.

La chaux de cuivre & celle du plomb mélangées , s'incorporent & vitriiient toutes deux ensemble; le plomb entraîne le cuivre dans fa vitrification, & il rejette le fer fur les bords de la coupelle ; c'eft par cette propriété particulière qu'il purge l'or & l'argent de toiite matière métallique étrangère; perfonne n'a mieux décrit tout ce qui pafTe dans les coupellations que notre favant Académicien, M. Sage, dans fes Mémoires fur les Ejfd'is.

On a obfervé que le plomb &. l'étain mêlés enfèmble,

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(b ) « Ce métal s'unit aflez facilement avec tous les métaux , 30 excepté Je fer avec lequel il refuie opiniâtrement tout alliage ; fou •y> affinité avec l'argent & fon antipathie avec le fer eft fi grande , 3) que fi l'on fait fondre dans du plomb de l'argent allié avec un T> peu de fer , le plomb s'empare auili-tôi de l'argent, mais rejette y* le fer qui vient nager à fa furface ». Diâionnaire Je Chimie , par AI. Alûcquer ; article plomb. Nota. J'obferverai qu'il efl douteux que le fer s'allie réellement avec l'argent , il ne s'unit avec ce métal que comme l'acier s'unit^ avec le plomb par une forte adhefiorij^ mais fans mélange intime.

DES Minéraux. 203

fe calcinent plus promptement & plus profonJémeat que l'un ou l'autre ne fe calcine feul ; c'eft de cette chaux, mi partie d'étain &: de plomb , que fe fait l'émail blanc des faïences communes; &. c'eft avec le verre de plomb feul qu'on vernit les poteries de terre encore plus communes.

Le plomb femble approcher de l'argent par quelques propriétés ; non - feulement il lui eft prcique toujours uni dans fes mines; mais lors même qu'il eft pur 6c dans fon état de métal , il préfente les mêmes phéno- mènes dans fës diiTolutions par les acides; il forme, comme l'argent, avec l'acide nitreux, un fel plus cauf- tique que les fels des autres métaux.

Le plomb a auffi de l'affinité avec le mercure ; ils s*amalgament facilement, Sl ils forment enfemble des criilaux; cet amalgame de plomb a la propriété fmgu- iière , de décrépiter très-vivement fur le feu.

L'ordre des affinités du plomb avec les autres métaux, fiiivant M, Geller, cfl l'argent, l'or, l'étain , le cuivre; cette grande affinité de l'argent & du plomb que l'Art nous démontre , eft bien indiquée par la Nature ; car l'on trouve l'argent uni au plomb dans toutes les mines de première comme de dernière formation ; ce font les poudres des mines primitives de l'argent, qui fe font unies & mêlées avec la chaux de plomb, & ont formé les galènes ou premiers minerais de ce métal ; mais les affinités du plomb avec l'or,

C c ij

204 Histoire Natu relle

l'ctain (5c le cuivre, que l'Art nous a fait reconnoître, ne fe manifeftent que par de légers indices dans le fcin de la terre; ce n'efl point avec ces métaux que le plomb s'y combine; mais c'eft avec les Tels, & fur -tout avec les acides qu'il prend des formes différentes : la galène qu'on doit regarder comme le plomb de première for- mation , n'ell qu'une efpèce de pyrite compo/ée de chaux de plomb, & de l'acide uni à la fùbflance du feu ùxe. L'air & les fels de la terre ont enfuite dccom- pofé ces galènes comme ils dccompo/ènt toutes les autres pyrites , & c'eft de leurs détrimens que fe font formées toutes les mines de féconde & de troiHème formation; cette marche de la Nature efl uniforme; le feu primitif a fondu, fublimé ou calciné les métaux, après quoi les élémens humides, les fels & lur-tout les acides, les ont attaqués, corrodés, diffous , & s'in- corporant avec eux, par une union intime, leur ont donné les nouvelles formes fous leiquelles ils fe pré- fentent.

Tous les acides minéraux ou végétaux , peuvent entamer ou difToudre le plomb; les huiles & les graiffes agiffent aufTi fur ce métal en raifon des acides qu'elles contiennent ; elles l'attaquent fur - tout dans fon état de chaux , & di (Toi vent la cérule , le minium & la iitharge à l'aide d'une médiocre chaleur.

L'acide vitriolique doit être concentré & aidé de la chaleur pour difToudre le plomb réduit en poudre

DES ÂllNÉRAV X, 205

métallique ou en cliaux , & cette cii/Tolutron produit un Tel qu'on appelle vuriol de plomb. On a remarqué que le minium réfifle plus que les autres chaux de plomb à cet acide, qu'il ne fe dilfout qu'en partie, c5c qu'il perd feulement fa belle couleur rouge, & devient d'im brun preique noir (c). Les fels neutres qui con- tiennent de l'acide vitriolique , agiffent aufTi fur les chaux de plomb ; ils les précipitent de leur diiïblution dans l'acide nitreux, ik. forment avec elles, un vitriol de plomb.

L'acide nitreux, loin d'être concentré comme le vitriolique, doit au contraire être affoibli pour bien diiToudre le plomb ; & la difloîution , après Tévapo- ration, donne des criftaux qui, comme tous les autres fels produits par ce même métal , ont plutôt une faveur fucrce que faline : au refte , cet acide diffout égale- ment le plomb dans fon état de métal &. dans ion état de chaux, c'efl - à - dire , les céruies, le maificot , le minium & même les mines de plomb blanches, vertes & rouges, &.C.

L'acide marin ne diffout le plomb qu'à l'aide d'une forte chaleur , cette dilfolution donne un fel dont les criflaux font brillans &l en petites aiguilles ; cet acide, ainfi que les fels qui en contiennent , précipitent le plomb de fa chffolution dans l'acide nitreux, & forme

(c) Élt^mens de Chimie, par M. de Morveau, towe II , page j?^.

loG Histoire Naturelle

un ftl Dictallique auquel les Chimifles ont donne le nom (le plo?ub corné , comme ils ont auiFi nommé argent corné ou lune cornet, les criilaux de la di/Tolution de l'argent par le même acide marin.

Le foufre s'unit aifcment avec le plomb par la fufion, & lorfqu'on laifle ce mélange expoié à Taétion du feu libre, il fe brûle en partie, & le rcfte qui eft calciné, forme une efpèce de pyrite ou mine de plomb , fem- biable à la galène (d) .

Les acides végétaux , & en particulier celui du vinaigre , attaquent & diffolvent le plomb ; c'efl en l'expofant à la vapeur du vinaigre qu'on le convertit en chaux blanche, & c'efl de cette manière que l'on fait la cérufe qui eft dans le commerce: cette chaux ou cérufe fe difTout parfaitement dans le vinaigre concentré; elle y produit même une grande quantité de crifîaux dont la faveur efl fucrée (e) , on a fouvent abufé de

(d) « Le plomb fondu avec le foufre s'enflamme feul ; il refle » une poudre noire ccaiileufe, que l'on appelle yi^/owZ' hrùlé; cette » matière n'entre en fufion qu'après avoir rougi; elle produit une » maffe noire , aigre , difpore'e à facettes ; c(^?i une galène ou mine » de plomb artificielle «. Elêmens de Chimie, par AI. de Morveau j tome II, page j^.

(e) « L'acide aceteux en vapeurs, agit fur le plomb & le réduit » en chaux ; fi l'on afTujettit dans un chapiteau de verre des lames a> de plomb minces , que l'on adapte ce chapiteau à une cucurbite évatée , dans laquelle on aura mis du vinaigre, & qu'après avoir lutté un récipient, qïi le diilille au baiix de fable pendant dix ou

DES Minéraux. 207

cette propriété de la cérufe & des autres chaux ou Tels de plomb , pour adoucir le vin au détriment de la famé de ceux qui le boivent. Au refle, l'on ne doit pas regarder la cérufe comme une chaux de plomb parfaite, mais comme une matière dans laquelle le plomb n'eft qu'à demi diffout ou calciné par l'acide aérien, & refte encore plutôt dans l'état métallique que dans l'état falin; en forte qu'elle n'eft pas folubie dans l'eau comme les féls.

Le plomb fe diffout aufli dans l'acide du tartre, à l'aide de la chaleur & d'une longue digeflion ; fi l'on fait évaporer cette diffolution, elle prend une confif- tance vifqueufe , & donne un fel criftallifé en lames quarrées (f): enfin, les acerbes ne laiffent pas d'avoir auffi quelqu'aétion fur le plomb, car la noix de galle

douze heures, les lames fe couvrent d'une matière blanche que l'on « appelle blanc de plomb , & qui , broyce avec un tiers ou environ « de craie, forme la cérufe.... Pour achever de le faturer , on met «c !e blanc de plomb dans un matras , on verfe dcOus douze à quinze «< fois autant de vinaigre diftillé; le mélange prend une faveur fucrce, « la fubftance métallique entre en diffolution , il s'excite beaucoup «< de chaleur ; on phce le matras fur un bain de fable , & on laiffe « le tout en digeltion pendant un jour. Après avoir de'canté la « liqueur, on la fait évaporer jufqu'à pellicule, on la place dans un « iieu frais , il s'y forme de petits cridaux groupés en aiguilles , «< on les redifiout dims le vinaigre , & on traite de même cette <c dilfolution pour avoir le lucre de Saturne w. Élémens de Chimie, par M. de ykloneau , tome III ^ pa^e 2 S,

(f) Idem, ibid. page 82

2o8 Histoire Naturelle

le précipite de fa didblution dans l'acide nitreiix, & la furface de la liqueur fe couvre en même temps d'une peilicule à reflets rouges & verts.

Les alkalis fixes &• volatils, non plus que les terres abforbantcs, ne font pas des effets bien fenijbles fur le plomb dans quelqu'état qu'il foit; néanmoins ils ont avec ce métal , une affinité bien marquée dans certaines circonflances, par exemple ils le précipitent de fa diffo- li'.tion dans l'acide marin, fous la forme d'une poudre blanche qui fe ternit bientôt à l'air comme le métal même (g).

En comparant les mines primordiales des fix métaux, nous voyons que l'or feul trouve prefque toujours en état de métal dans le fcin de la terre, que quoiqu'il n'y foit jamais pur , mais allié de plus ou moins d'argent ou de cuivre, il ne pré/ènte que rarement fous une forme minéralifée, & qu'il recouvre cSc défend l'argent de toute

(g) L'alkali cauflique n'a prefque point d'acftion fur le plomb , mais il diffout, pendant i'éljuHition , une quantiic très-fenfible de minium qui nea efl pas feparé par le filtre, qui fe dcpofe avec temps dans le fîacon , fous forme d'une poudre blanche , & qui eft précipitée fur le champ par l'eau forte. E-.émens de C L'unie , par AI. de Alorveau , lome III , page a S,

L'alkali volatil cauQique digéré fur la limaille de plomb , prend dans les premiers jours une couleur légèrement ambrée, qui difparoît enfuiie entièrement; une partie du métal eft; réduite à l'état de chaux, une autre partie efl: tenue en diflblution au point de pafîer par le filtre , elle eft précipitée par l'acide nitreux. I4cm , ibid. page 2^6.

altération ;

DES Minéraux. 209

altération; on afTurc cependant que l'or efl vraiment minéralifé dans la mine de Naghiac (^/ij , & dans quelques pyrites nouvellement trouvées en Dauphiné ; mais ce métal ne doit néanmoins fubir aucun changement , aucune altération , que par des combinai/bns qui ne peuvent fe trouver que très-rarement dans la Nature; & nous verrons en traitant de la platine, que l'or, qui fait le fonds de fa fùbftance, y efl encore plus altéré, & prefque dénaturé; ces deux exemples font les feuls qu'on puiffe donner d'un changement d'état dans l'or, & Ton ne doit pas les regarder comme des opérations ordinaires de la Nature, mais comme des accidens fi rares, qu'ils n'ôtent rien à la vérité du fait général, que l'or fe préfente par-tout dans l'état de métal , <5c feulement plus ou moins divifé &. non minéralifé.

L'argent fe trouve affez fbuvent, comme Tor, dans l'état de métal pur ; mais il efl encore plus fouvent mêlé avec le plomb ou minéralifé, c'cfl-à-dire, altéré par les fels de la terre; le cuivre réfifîc beaucoup moins à l'imprefTion des élémens humides , & quoiqu'il fe trouve quelquefois en état de métal, il fe préfente ordi- nairement fous des formes minéralifées & variées, pour

f/ij Nota. M. Bergmann , à qui M. Tungberg a envoyé un morceau de cette mine de Naghiac , s'efl: afTuré qu'il contenoit du quartz hhnc y une pierre crénaire blancludre , fe coupant au couteau, faifant effervefcence avec les acides , & de la manganaife. La formatiou de cette mine ne doit donc être regardée que coinnie accidentelle.

Minéraux, Tome II L D d

210 Histoire Naturelle

ainfi dire, à l'infini: ces trois métaux, l'or, l'argent & le cuivre, font ies feuls qui aient pris dès les premiers temps , & confèrvé plus ou moins ju/qu'à ce jour , leur état métallique; le fer, le plomb & l'étain ne fe trouvent nulle part , & même n'ont jamais été dans cet état métallique ; le feu primitif les a iondus ou calcinés ; le fer par fa fufion s'ell mêlé à la roche vitreufè, & le plomb & l'étain, après leur calcination, ont été faifis par l'acide ôl réduits en minerais pyriteux, ainli que les cuivres qui n'ont pas confèrvé leur état de métal : tous ces métaux ont fouvent été mêlés les uns avec les aiures, & dans les mines primordiales comme dans les mines fécondai res , on ies trouve quelquefois tous réunis enfemble.

Ty E s M I N É n AU X. 211

DU MERCURE.

IviEN ne reffembie plus à i'étain ou au plomb, Jaus leur écat de funoii, que le Mercure dans Ton état naturel; au/Fi Ta-t-on re/rardé comme un mctal fluide auauei on a cherche, mais vainement, les moyens de donner de la foliditc ; on a feulement trouve que le froid extrême pouvoit le coaguler, fans lui donner une folidité confiante, ni même aufn permanente, à beaucoup près, que celle de l'eau glacée; & par ce rapport unique & (ingulier, ie mercure femble fe rapprocher de la nature de l'eau , autant qu'il approche du métal par d'autres pro- priétés , &L notamment par dcnfité , la plus grande de toutes après celle de l'or f^a) ; mais il diffère de tout métal, & même de tout minéral métallique , en ce qu'il n'a nulle ténacité , nulle dureté , nulle folidité, nulle fixité, & il fe rcippoche encore de l'eau par fa volatilité , puifque , comme elle , il fe volatilife <5c s'évapore à une médiocre chaleur. Ce liquide minéral eft-il donc un métal! ou n'efl-il pas une eau qui reffemble aux métaux parce qu'elle eft chargée des parties les plus denfes de la terre, avec lefquelles elle

(d) La pefanteiir Tpécifique de l'or à 24 karars efl de if>2j8r , ^ celle du plomb de 115523. La pelanteur ipécifique du mercure coulant eft de 1356!^! , & celle du cinabre d'Almaden efl Ue 102185. yoyc\ les Tables de Ai. Brijfon,

Dd ij

212 Histoire Naturelle

s'efl plus intimement unie que dans aucune autre matière l On fait qu'en général, toute fluidité provient de la chaleur, & qu'en particulier le feu agit fur les métaux comme l'eau fur les fels, puifqu'il les liquéfie, & qu'il les tiendroit en une fluidité confiante s'il étoit tou- jours au même degré de violente chaleur, tandis que les fels ne demandent que celui de la température aduelle pour demeurer liquides ; tous les fels fe liquéfiant dans l'eau comme les métaux dans le feu, la fluidité du mercure tient, ce me femble, plus au premier élément qu'au dernier ; car le mercure ne fe folidifie qu'en glaçant comme l'eau; il lui faut même un bien plus grand degré de froid, parce qu'il eft beaucoup plus denfe ; le feu efl ici en quantité prefque infiniment petite, au lieu que ce même élément ne peut agir fur les métaux, comme liquéfiant, comme diflblvant, que quand il leur efl appliqué en quantité infiniment grande, en comparaifon de ce qu'il en faut au mercure pour demeurer liquide.

De plus, le mercure fe réduit en vapeurs par fefîèt de la chaleur, à peu-près comme l'eau, & ces deux vapeurs font également incoercibles, même par les réfif tances les plus fortes ; toutes deux font éclater ou fendre les vaifTeaux les plus folides avec explofion; enfin, le mercure mouille les métaux, comme l'eau mouille les fels ou les terres, à proportion des fèls qu'elles con- tiennent; le mercure ne peut-il donc pas être confidérc

I

DES Minéraux» 21^

comme une eau denfe & pefante, qui ne tient aux métaux que par ce rapport de denfité l &: cette eau plus denfè que tous les liquides connus, n'a-t-elle pas fe former, après la chute des autres eaux Sl des matières également volatiles reléguées dans ratmofphere, pendant J'incandefcence du Globe î les parties métalliques , terreflres, aqueufes & falines , alors fublimées ou réduites en vapeurs , fe feront combinées , & tandis que les matières fixes du Globe fe vitrifioient ou fe dépofoient fous la forme de métal ou de chaux métallique, tandis que l'eau encore pénétrée de feu produifoit les acides & les fels , les vapeurs de ces fubftances métalliques , combinées avec celles de l'eau & des principes acides, n'ont-elles pas pu former cette fubflance du mercure prefque auffi volatile que l'eau, <& denfe comme le métal! Cette fubftance liquide qui fe glace comme l'eau, & qui n'en diffère effentiellement que par fa denfité, n'a-t-elle pas du fe trouver dans l'ordre des combi- naifons de la Nature, qui a produit non-feulement des métaux & des demi-métaux , mais auffi des terres métal- liques & falines, telles que l'arfenic! Or, pour compléter h fuite de fes opérations n'a -i- elle pas dCi produire au/fi des eaux métalliques telles que le mercure! L'échelle de la Nature, dans fes productions métalliques, com- mence par l'or qui efl le métal le plus inaltérable, Sl par conféquent le plus parfait; enfiiite l'argent, qui étant fujet à quelques altérations, efl moins parfait que l'or;

214 Histoire Natv relle

après quoi le cuivre , l'ctain &: le plomb , qui font fuf- ccptibles non - feulement d'altération, mais de décom- pofition , font des métaux imparfaits en comparai/bn des deux premiers; enfin, le fer fait la nuance entre les métaux imparfaits & les demi -métaux; car le fer & le zinc ne préfentcnt aucun caradère effentiel , qui doive réellement les faire placer dans deux claffes difiéreiites; la duélilité du fer efl une propriété que l'Art lui donne, il fe brûle comme le zinc ; il lui faut feulement un feu plus fort, &c. on pourroit donc également prendre le fer pour le premier des démi-métaux, ou le zinc pour le dernier des métaux; & cette échelle fe continue par l'antimoine, le brfmutli, & linit par les terres métal- liques & par le mercure, qui n'eft qu'une fubflance métallique liquide.

On fe familiariièra avec l'idée de cette poÏÏlbilité, en pefant les confidérations que nous venons de préfenter, & en fe rappelant que l'eau, dans fon effence, doit être regardée comme un fel infipide & Huide, que la giace qui n'efl que ce même M rendu folide, le devient d'autant plus, que le froid efl plus grand; que l'eau, dans fon état de liquidité, peut acquérir de la denfité à mefure qu'elle dilfout les fcls ; que l'eau purgée d'air efl incompreffible, & dcs-lors Compofée de parties très- folides & très-dures ; que par conféquent elle deviendroit très-denfe, fi ces mêmes parties s'uniffoient de plus prèj; & quoique nous ne connoilfions pas au jude le

DES Minéraux. 215

moyen que la Nature a employé pour faire ce rappro- chement des parties dans le mercure, nous en voyons néanmoins aiïez pour être fondés à préfumer que ce minéral fluide, ed; plutôt une eau métallique qu'im vrai métal; de la même manière que l'aiTcnic auquel on donne le nom de dcnn-inctal , n'efl qu'une terre plutôt fâline que métallique, & non pas un vrai demi-méial.

On pourra me reprocher que j'abufe ici des termes, en difant que le mercure mouille les métaux , puifqu'il ne mouille pas les autres matières ; au lieu que l'eau <5c les autres liquides mouillent toutes les fubilances qu'on leur offre, & que par conféquent ils ont feuls la faculté de mouiller; mais en faifant attention à la grande denfité du mercure, & à la forte attraction qui unit cntr'elles fes parties confîituantcs, on fèntira aiféraent qu'une eau, dont les parties s'attireroient aufli fort que celles du mercure , ne mouilleroit pas plus que le mercure dont les parties ne peuvent fe dé/linir que par la chaleur, ou par une puiffance plus forte que celle de leur attraétioii réciproque, & que dès-lors ces mêmes parties ne peuvent mouiller que l'or, l'argent &. les autres fubilances qui les attirent plus puiffamment qu'elles ne s'attirent entr'elles; on fèntira de même que fi l'eau paroît mouiller indiffé- remment toutes les matières , c'eil que fès parties inté- grantes n'ayant qu'une foible adhérence entr'elles, tout contad fufiit pour les féparer, & plus l'attradion étrangère furpaffera i'attradion réciproque &. mutuelle de ces

2i6 N/sTOJRE Naturelle

parties conflituantes de l'eau, plus les matières étrangères, l'attireront puiflamment Ôl ih mouilleront profondement. Le mercure, par fa très -grande fluidité, mouilleroit & pcncireroit tous les corps folides de la Nature, fi la force d'attradion qui s'exerce entre fes parties en pro- portion de leur denfité, ne les tenoit pour ainfi dire en malfe, «Se ne les empcchoit par conféquent de fe fcparcr & de répandre en molécules affez petites, pour pouvoir entrer dans les pores des fubflances folides; la feule différence entre le mercure <Sc l'eau , dans l'action de mouiller, ne vient donc que du plus ou moins de cohérence dans l'agrégation de leurs parties confti- tuantes, tk ne confide qu'en ce que celles de l'eau fe féparent les unes des autres bien plus facilement que celles du mercure.

Ainfi ce minéral fluide comme l'eau , fe glaçant comme elle par le froid , fe rcduifant comme elle en vapeurs par le chaud, mouillant les métaux comme elle mouille les fels & les terres, pénétrant mcmc la fuhf- tance des huiles & des graiffes , & entrant avec elles dans le corps des animaux, comme l'eau entre dans les végétaux, a de plus avec elle, un rapport qui fuppofe quelque chofe de commun dans leur effence ; c'eft de répandre comme l'eau, une vapeur qu'on peut regarder comme humide; c'ell par cette vapeur que le mercure blanchit & pénètre Tor fans le toucher, comme l'hu- midité de l'eau répandue dans l'air pénètre les fels ; tout

concourt

DES Minéraux, 217

concourt donc , ce me femble , à prouver que le mercure n'eft point un vrai métal , ni même un demi - métal ; mais une eau chargée des parties les plus denfes de la terre ; comme les demi - métaux ne font que des terres chargées, de même, d'autres parties denfès & pefantes qui les rapprochent de la nature des métaux.

Après avoir expofé les rapports que le mercure peut avoir avec l'eau, nous devons auffi préfenter ceux qu'il a réellement avec les métaux; il en a la dcnfué, l'opacité, le brillant métallique, il peut de même être dilFous par les acides, précipité par les alkalis; comme eux, il ne contra6le aucune union avec les matières terreufes , & comme eux encore , il en contraéle avec les autres métaux ; & fi l'on veut qu'il foit métal , on pourroit même le regarder comme un troifième métal parfait , puifqu'il eft prefque aufîi inaltérable que l'or & l'argent, par les imprelïions des élémens humides. Ces propriétés relatives & communes le rapprochent donc encore plus de la nature du métal qu'elles ne l'éloignent de celle de l'eau, & je ne puis blâmer les Alchimiftes , qui , voyant toutes ces propriétés dans un liquide , l'ont regardé comme l'eau des métaux , &i particulièrement comme la bafe de l'or & de l'argent dont il approche par fa denfué, & auxquels il s'unit avec un empreflement qui tient du magnctifme, & encore parce qu'il n'a, comme l'or & l'argent, ni odeur ni faveur : enfin , on n'ell pas encore bien alTuré que Minéraux , Tome IIL E e

2i8 Histoire Natu-relle

ce liquide fi dcnfe n'entre pas comme principe clans la compofition des métaux , & qu'on ne puiffe le retirer d'aucun minerai métallique. Recherchons donc, fans préjugé, quelle peut être l'efTence de ce minéral am- phibie, qui participe de la nature du métal c^ de celle de l'eau ; raflemhlons les principaux faits que la Nature nous préfente, & ceux que l'Art nous a fait découvrir fur fes différentes propriétés avant de nous arrêter à notre opinion.

Mais ces faits paroiffcnt d'abord innombrables ; aucime matière n'a été plus effayée, plus maniée, plus com- binée ; les Alchimilles fur-tout , perfuadés que le mercure ou la terre mercurielle étoit la bafc des métaux , & voyant qu'il avoit la plus grantle affinité avec l'or <Sc l'argent, ont fait des travaux immenfès pour tâcher de ie lixer, de le convertir, de l'extraire ; ils l'ont cherché non-fèulemcnt dans les mxtaux & minéraux , mais dans toutes les fubflanccs & jufque dans les plantes ; ils ont voulu ennoblir, par fon moyen, les métaux imparfaits, & quoiqu'ils aient prefque toujours manqué le but de Jeurs recherches , ils n'ont pas laiffé de faire pkifieurs découvertes intéreffantes. Leur objet principal n'étoit pas abfolument chimérique, mais peut-être moralement impoffible à atteindre; car rien ne s'oppofe à l'idée de ia traniinutation ou de l'ennoblifTement des métaux, que ie peu de puifîance de notre Art, en comparaifbn des forces de ia Nature, & puifqu'eiie peut con,veriir les

DES Minéraux. 219

élcmens , n'a-t-elle pas pu , ne pourroit-clle pas encore iranfmuer les fubflaiices métalliques! Les Cliimifles ont cru, pour l'honneur du nom, devoir rejeter toutes les idées des Alchimiftes ; ils ont inénie Aî^A^vffiz d'étudier & de fuivre leurs procédés; ils ont cependant adopté leur langue, leurs caradères, & même quelques-unes des obfcurités de leurs principes; le phlogiflique, fi ce n'eft pas le feu iixe animé par l'air; le minéralifateur, fi ce n'efl pas encore le feu contenu dans les pyrites & dans les acides , me paroiiTent auffi précaires que la terre mercurielle <5c l'eau des métaux; nous croyons devoir rejeter également tout ce qui n'exifle pas comme tout ce qui ne s^entend pas, c'eft-à-dire, tout ce dont on ne peut avoir une idée nette ; nous tâcherons donc , en faifant l'hifloire du mercure, d'en écarter les fables autant que les chimères.

Confidérant d'abord le mercure tel que la Nature nous l'offre, nous voyons qu'il ne fe trouve que dans les couches de la terre formées par le dépôt des eaux; qu'il n'occupe pas comme les métaux, les fentes per- pendiculaires de la roche du globe, qu'il ne gh pas dans le quartz, & n'en eil même jamais accompagne, qu'il n'ed point mêlé dans les minerais des autres métaux; que mine à laquelle on donne le nom de c'inahre , n'efl point un vrai minerai, mais lui compofé, par fnnple juxtapofition , de foufre &. de mercure réunis, qui ne fe trouve que dans les montagnes à couches,

E e ij

220 Histoire Nature lle

Si jamais dans les montagnes primitives ; que par confé- qiient la formation de ces mines de mercure, eft pofîérieure à celle des mines primordiales des métaux, puifqu'elle fiippofè le foufre déjà formé par la décompoiition des pyrites; nous verrons de plus que ce n'eft que très- rarement que le mercure fc préfènte dans un état coulant, & que quoiqu'il ait moins d'affinité que la plupart des métaux avec le foufre, il ne s'cfl néanmoins incorporé qu'avec les pierres ou les terres qui en font furchargées; que jamais il ne leur cil aîTcz intimement uni pour n'en pas être aifémcnt féparé, qu'il n'efl même entré dans ces terres fulfurcufes que par une forte d'imbibition, comme l'eau entre dans les autres terres , ôl qu'il a dii les pénétrer toiucs les fois qu'il s'efl trouvé réduit en vapeurs ; qu'enfin il ne trouve qu'en quelques endroits particuliers , le foufre s'efl lui - mcme trouvé en grande quantité, & réduit en foie de foufre par des alkalis ou des terres calcaires, qui lui ont donné l'affinité nécefTaire à fon imion avec le mercure: il ne fe trouve en effet, en quantité fenfible, que dans ces feuls endroits; par-tout ailleurs, il n'eft que difféminé en particules û tenues qu'on ne peut les raffemblcr, ni même les apercevoir que dans quelques circonflances particulières. Tout cela peut fe démontrer en comparant attentivement les obfèrvations & les faits, <Sc nous allons en donner les preuves dans le même ordre que nous venons de préfènter ces affertions.

DES I N E R A U X, 22 i

Des trois grandes mines de mercure, & dont chacune fufFiroit feule aux befoins de tout l'Univers, deux font tn Europe & une en Amérique ; toutes trois pré- fcntcnt fous la forme folide de cinabre: la première de ces mines efl celle d'Idria dans la Carniole (b) ; elle efl dans une ardoife noire furmontée de rochers cal- caires : la féconde efl celle ^ Almaden en Efpagne (c) ,

(h ) Idria eil une petite ville fituee dans la Carniole , dans un vallon très-profond, lur les deux bords de la rivière d'Idria dont elle porte le nom ; elle efl entourée de hautes montagnes de pierres calcaires , qui porte fur un fcbiflc ou ardoife noire, dans les couches duquel font les travaux des fameufes mines de mercure ; l'èpaifleur de ce fchifte pénètre de mercure & de cinabre eft d'environ vingt tûiies d'Idria , &. fa largeur ou étendue ert de deux jufqu'à trois cents toifes ; cette riche couche d ardoife varie , foit en s'inclinant , foit en fe replaçant horizontalement , fouvent même à contre-fens. La profondeur des principaux puits eft de cent onze toifes. Voye^ la Defcripïïon des mines d'Idria, par AI. Ferber ^ publiée en i 7J4'

(c) Almaden eft un bourg de la province de la Manche , qui eft environné du côté du midi de plufieurs montagnes dépendantes de la Sierra Alorcna ou montagne noire. Ce bourg eft fitué au fommet d'une montagne , fur le penchant & au pied de laquelle , du côté du midi , il y a cinq ouvertures différentes qui conduifent par des chemins fouterrains aux endroits d'où fe tire le cinabre. On ne voit point au-dehors de cette mine ni de ces terres qui caradé- rifent par quelque couleur extraordinaire le minéral que l'on trouve dans fon fein , ni de ces décombremens qui rendent ordinairement leur entrée difficile, ou qui exhalent quelqu'odeur fenfible.... On lire li mine en gros quartiers maffifs , 6: ce font des forçats qui font condamnés à ce travail, & qui font emprifonnés dans une enceinte qui environne l'un des puits de la mine. . . . Les veines

212. Histoire Natu relle

dont les veines font dans des bancs de grès (ilj : la troifième eft celle de Guanca-vdica , petite ville à foixante

qui paroifleat au fond de l'endroit les mineurs travaillent, font de trois fortes, La plus commune eft de pure roche de couleur grifâtreà l'extérieur, & mêlée dans fon intérieur de nuances rouges, blanches & criftallines. Cette première veine en contient une féconde dont la couleur approche de celle du minium.

La troifième efl d'une fubRance compare, très-pefante , dure & grenue comme celle du grès, & d'un rouge mat de brique, parfemée d'une infinité de petits brillans argentins.

Parmi ces trois fortes de veines qui font les feules utiles , fe trouvent différentes autres pierres de couleur grifâtre & ardoifée , & deux fortes de terre graffe & ondueufe , blanche & grife que l'on rejette. Extrait du Mémoire de M. de Ju(fieu , dans ceux de l'Académie des Sciences , année i yi p , pages ^ ^ q & fuivantes.

(d) La ville d'AImaden compofée de plus de trois cents maifons,

avec l'églife , font bâties fur le cinabre La mine efl dans uno

montagne dont le (ommçx eft une roche nue fur laquelle on aperçoit quelques petites taclies de cinabre, . . . Dans le refte de la montagne on trouve quelques petites veines d'ardoife avec des veijies de fer, îefquelles à la fuperficie fuivent la direclion de la colline.... Deux veines traverfent la colline en longueur ; elles ont depuis deux à quatorze pieds de large. En certains endroits il en fort des rameaux qui prennent une diredion différente.... La pierre de cts veines eft la même que celle du refte de la colline qui eft du grès femblable à celui de Fontainebleau ; elle fert de matrice au cinabre qui efl plus ou moins abondant , félon que le grain efl: plus ou moins fin ; quelques-uns des morceaux de la même veine renferment jufqu'à 4ix onces de vif-argent par livre , & d'autres n'en contiennent que trois. . . .

La hauteur de cette colline d'AImaden eft d'environ cent vingt

DES Minéraux, 223

Jiciies de Pifco au Pérou ^e) . Les veines du cinabre y

pieds.... les enorna:^||iriorceaux de rochers de grès qui compofent l'in- térieur de la monràgne, font divifés par des fentes verticales. . . . Deux veines de ces rochers plus ou moins pourvus de cinabre, coupent la colline prefque verticalement, lefquelies, comme nous l'avons dit, ont depuis trois jufqu'à quatorze pieds de largeur ; ces deux veines fe réunifTent en s'cloigiiant jufqu'à cent pieds , & c'efl de-là qu'on a tiré la plus riche & la plus grande quantité du minéral. Hiftoire Naturelle d'Efpagne, par M. Bowles, pages ^jufqu'à 2 p.

(e) Guanca - velica efl: une petite ville d'environ cent familles, éloignée de Pifco de foixante lieues; elle efl: fameufe par une mine de vif-argent, qui feule fournit tous les moulins d'or & d'argent du Pérou. . . . Lorfqu'on en a tiré une quantité fuffifante , le Roi fait fermer la mine.

La terre qui contient le vif- argent efl d'un rouge blanchâtre comme de la brique mal cuite ; on la concalîe & on la met dans un fourneau de terre dont le chapiteau efl une voûte en cul-de- four , un peu fphéroïde ; on l'éiend fur une grille de fer recouverte de terre , fous laquelle on entretient un petit feu avec de l'herbe Iclio qui efl plus proj)re «à cela que toute autre matière combuflible , & c'efl pourquoi il efl défendu d^ la couper à vingt lieues à la ronde ; la chaleur de ce feu volatilii'e le vif-argent en fumée , & au moyen d'un réfrigèrent on le fait tomber dans l'eau. Fre^ier , vtyage à la mer du fud , pages 16^ & 16 ^,... Ces mines de Guanca- velica font abondantes & en graivd nombre ; mais , fur toutes ces mines , celle qu'on appelle àH Amador de Cabrera, autrement des Saints, efl belle & remarquable ; c'efl une roche de pierre très-dure , toute femée de vif-argent , & de telle grandeur cju'elle s'étend à plus de quatre-vingt vares de longueur^ &l quarante en largeur, en laquelle mine on a fait plufieurs puits & fofles de loixante-dix flades de profondeur. ... La feule mine de Cabrera efl fi riche en mercure , qu'on en a eflimé la valeur à plus de cinq cents mille ducats. C'eft

224- Histoire Naturelle

font ou clans une argile durcie &l blanchâtre, ou cfans de la pierre dure. Ainfi ces trois mines de mercure giflent également dans des ardoifes ou des grès, c'eft- à-dire, dans des collines ou montagnes à couches, formées par le dépôt des eaux, &. toutes trois font fl abondantes en cinabre qu'il fèmble que tout le mercure du Globe y foit acciunulé ('f); car les petites mines de ce minéral que l'on a découvertes en quelques autres endroits , ne peuvent leur être comparées ni pour l'étendue ni pour la quantité de la matière , & nous n'en ferons ici mention que pour démontrer qu'elles trouvent toutes dans des couches dépofées par les eaux de la mer, & jamais dans les montagnes de quartz ou des rochers vitreux, qui ont été formés par le feu primitif En France, on reconnut en 1739, à deux lieues

de cette mine de Guanca-veJica dont on porte le mercure, tant au Mexique qu'au Potozi, pour tirer l'argent des matières qu'on appeloit raclures & qu'on rejetoit auparavant comme ne valant pas la peine d'être traitées par la fonte. Acojla , Hijlolre naturelle & morale des Indes , pages i ^ 0 & fuïvantes.

(f) La Nature a prodigué les mines de mercure en fi grande quantité à Idrla, qu'elles pourroient non-feuiement fuffire à la confom- mation de notre partie du monde , mais encore en pourvoir toute l'Amérique 'ii on le vouloir , & fi on ne diminuoit pas l'extradion de fa mine , pour foutenir ie mercure à un certain prix. Lettres fur

la Minéralogie , par AL Ferber , page i^ On tire tous les ans

de la mine d'Almaden cinq ou fix mille quintaux de vif-aro-ent pour le Mexique. Hijloire naturelle d'Efpagne , pur M. Eowles , pages / àt fui vaut es,

de

DESAIlNÉRAUX. 21^

de Bourbonne-les-bains , deux efpèccs de terre qui ren- dirent une trois centième partie de leur poids en mercure , elles gifToient à quinze ou feize pieds de profondeur fur une couche de terre glaife (^gj. A cinq lieues de Bordeaux près de Langon, il y a une fontaine au fond de laquelle on trouve affez fouvent du mercure cou- lant (/i); en Normandie, au village de la Chapelle, éie6lion de Saint-Lo, il y a eu quelques travaux com- mencés pour exploiter une mine de mercure, mais le produit n'étoit pas équivalent à la dépenfe, & cette mine a été abandonnée (ij: enfin dans quelques endroits du Languedoc , particulièrement à Montpellier , on a vu du mercure dans l'argile à de petites profondeurs , & même à la furface de la terre fie),

^ llill i --■■-■Il ■!■■ ^^^ I Pi -^i^^— ^■^— ^■^^■^M

fgj Traite de la fonte des mines de Schlutter, tome I , page 7.

(h) Lettres de M. l'abbé Belley à M. Hellot. Traité de la fonte des mines de Schlutter , tome l , page j i .

(i ) Traite' de la fonte é^'^ mines , &c. tome I , page 6 S .

/k) La colline fur laquelle efl bâtie la ville de Montpellier, renferme du .mercure coulant auffi-bien que les terres des environs ; il fe trouve dans une terre argileufe jaunâtre & quelquefois grife. HiJIoire naturelle du Languedoc , par M. de Genfanne , tome I , page ^/^. Depuis le Mas-de-l' Églife jufqu'à Oulargues & même jufqu'à Colombieres ^ on trouve une grande quantité d'indices de mir.es de mercure, & on aflure qu'on en voit couler quelquefois d'alFez grofiL'S gouttes fur la furface de la terre. La qualité du terroir, au pied de ces montagnes, confille en roches ardoifées blanchâtres; elles font entre-mêlées de quelques bancs de granit fort talqueuXt Idem, tome If, page 214.

Minéruax, Tome IIL Ff

•"

226 Histoire N aturelle

En Allemagne , il fe trouve quelques mines de mer- cure dans les terres du Palatinat & du duché de Deux- Ponts (l) ; & en Hongrie, les mines de cinabre, ainfi que celles d'Almadcn en E/pagne, font fbuvent accom- pagnées de mine de fer en rouille, & quelquefois le fer, le mercure & le foufre y font tellement mêlés qu'ils ne font qu'un même corps (m^.

Cette mine d'Almadcn efl fi riche qu'elle a fait négliger toutes les autres mines de mercure en Efpagne; cependant on en a reconnu quelques-unes près d'Ali- cante & de Valence (?i) ; on a aulFi exploité une mine

(l) Lettres fur la Minéralogie, par M. Ferber , /?<7^^ 12.

(m) Hiftoiie naturelle d' Efpagne , par M. Bowies , page / iufqu'a 2().

(n) A deux lieues de la ville d'Alicante en une montagne

de pierre calcaire en fouillant du côté du vallon , on trouva une

veine de cinabre ; mais quand je vis celte veine difparoître à cent pieds de profondeur , je fis fufpendre l'excavaucn.

Dans cette ouverture de la roche , on trouva treize onces de fable de belle couleur rouge , qui par i'effai rendit plus d'une once de vif-argent par livre. Ce fable, par fa dureté & fa figure angulaire,

reflembloit tout-à-fait à celui de la iner A la fuperficie de cette

montagne , & près d'un banc de plâtre couleur de chair , il y avoit des coquilles de nier, de l'ambre minéral & une veine comme

un fil , de cinabre Je fis creufer au pied d'une montagne près

de la ville de Saint Philippe en Valence , & à la profondeur de vingt -deux pieds, il fe trouve une terre très -dure, blanche & calcaire , dans laquelle on aperçoit plufieurs gouttes de vif- argent fluide; & ayant fait laver cette terre, il en fortit vingt-cinq livres

(

DES AI J N É R A V À\ 22y

de ce minéral en Italie , à fix milles de la Valle imperhui près de Feltnno , mais cette mine efl a6tuellement abandonnée (o) ; on voit de même des indices de mines de mercure en quelques endroits de la Pologne (p) .

En Afie, les Voyageurs ne font mention de mines de mercure qu'à la Chine (q) ôl aux Philippines ('rjj ÔL ils ne di/cnt pas qu'il y en ait ime feule en Afrique ; mais en Amérique, outre la grande & riche mine de Guanca-velica du Pérou, on en connoît quelques antres;

de mercure vierge. . . . Un peu au-delTus de l'endroit fe trouve le mercure , il y a des pétrifications & du plâtre. La ville de Valence efl traverfée par une bande de craie fans pétrifications , qui , à deux

pieds de fa fuperficie , efl: remplie de gouttes de vif- argent

HiJIoire naturelle d'Efpagne , par AI. Bowks , pages ^ 4 Ù" fuivantes.

(0) Lettres fur la Minéralogie, par M. Ferber , page 48.

(p) Nota. Rzaczynski dit , d'après Belius , que la partie des monts Karpacs qui regarde la Pologne , renferme du cinabre & peut-être des paillettes d'or.... & il dit , d'après Bruckmann , que le comté de Spia renferme aufli du cinabre. Ai. Guettard , Mémoires de V Académie des Sciences , année lyCzy page ^18.

( q) Le Tchachd efl: probablement le cinabre ; le meilleur vient de la province de Houquang ; il efl plein de mercure, & l'on afllire que d'une livre de cinabre on en tire une demi-livre de mercure coulant, . . . Lorfqu'on laifle ce cinabre à l'air il ne perd rien de (a couleur & il fe vend fort cher. Le Père d' Entrecolles , Lettres édifiantes, 22! recueil , page ^j8.

(r) L'île de Panamao aux Philippines efl prefque contiguë à

celle de Leyte elle efl montagneufe, arroféede plufieurs ruifleaux,

& pleine de mines de foufre & de vif- argent. Gemelli Carîeri , Voyage autour du monde; Pc.ris , i j i c) , tome V , p(^^^ i 1 p.

Ff i)

228 Histoire Naturelle

on en a même exploité une près d'Azoque, dans la province de Quito (f). Les Péruviens travailloient depuis long -temps aux mines de cinabre, fans favoir ce que c'ctoit que le mercure; ils n'en connoifToient que la mine dont ils faifoient du vermillon pour fe peindre le corps ou faire des images; ils avoient fait beaucoup de travaux à Guanca-velica dans cette feule vue (tj, & ce ne fut qu'en 1564., que les Efpagnols commencèrent à travailler le cinabre pour en tirer le mercure (u) . On voit par le témoignage de Pline, que Jes Romains faifoient aulfi grand cas du vermillon , & qu'ils tiroient d'Efpagne, chaque année, environ dix mille livres de cinabre tel qu'il fort de la mine , & qu'ils le prcparoient enfuite à Rome. Théophrafle, qui vivoit quatre cents ans avant Pline, fait mention du cinabre d'Efpagne ; ces traits hiftoriques femblent prouver que les mines d'Idria, bien plus voifmes de Rome que celles d'Efpagne , n'ttoient pas encore connues ; & de fait, l'Efpagne étoit policée & commerçante, tandis que k Germanie étoit encore inculte.

On voit par cette énumération des mines de mer- cure , des différentes parties du monde , que toutes giffent dans les couches de la terre remuée & dépofée par

(f) Hijîoire générale des Voyages, tome XIII , page ^^8. (t) Hiftoire naturelle des Indes, par Acofta , /^/z^^ /jo. (u) Hiftoire philofophique & politique des deux Indes, tome III , page 2Sj*

DES Minéraux. 229

îes eaux , &. qu'aucune ne fe trouve dans les montagnes produites par ie feu primitif, ni dans les fentes du quartz: on voit de même qu'on ne trouve point le cinaJjre mêlé avec les mines des autres métaux (x) , à l'excep- tion de celles de fer en rouille, qui, comme Ton fait, font de dernière formation. L'établifTcmcnt des mines primordiales d'or, d'argent & de cuivre dans la roche quartzeufe, efl donc bien antérieur à celui des mines de mercure, & dès-lors n'en doit-on pas conclure que ces métaux fondus ou fublimés par le feu primitif, n'ont pu faifir ni s'affimiler une matière qui , par fa volatilité, étoit alors comme l'eau, reléguée dans ratmof]:)hère î que dès-lors, il n'eft pas poffible que ces métaux con- tiennent un feul atome de cette matière volatile , A. que par conféquent on doit renoncer à l'idée d'en tirer le mercure ou le principe mercuriel qui ne peut s'y trouver! Cette idée du mercure, principe exiflant dans J'or & l'argent, étoit fondée fur la grande affinité & l'attraélion très-forte, qui s'exerce entre le mercure & ces métaux; mais on doit confidérer que toute attraction , toute pé- nétration qui fe fait entre un folide & un liquide, eA généralement proportionnelle à la denfité des deux matières, &. que celle du mercure étant très-grande & iès molécules infiniment petites, il peut aifémcnt pénétrer

(x) On obferve que dans les mines de cinabre d'Almaden, il ïi^y a aucun autre métal. Mitnoires de l'Académie des Sue nus ,

230 Histoire Natu relle

les pores de ces métaux, & les humeder comme l'eau humecte la terre.

Mais fuivons mes afTertions : j'ai dit que le cinabre n'étoit point un vrai minéral, mais un imiple compofé de mercure faifi par le foie de foufre, & cela me paroît démontré par la compofition du cinabre artificiel fait par la voie humide ; il ne faut que le comparer avec la mine de mercure pour être convaincu de leur identité de fubflance. Le cinabre naturel en maffe eft d'un rouge très-foncé; il eft compofé d'aiguilles luifantes appliquées longitudinalement les unes fur les autres, ce qui feul fuffit pour démontrer la préfènce réelle du foufre : on en fait en Hollande du tout pareil & en grande quantité ; nous en ignorons la manipulation , mais nos Chimiftes l'ont à peu-prcs devinée : ils font du cinabre artificiel par le moyen du feu , en mclant du mercure au (bufre fondu fyj , & ils en font auiïi par la voie humide, en

(y) On fait du cinabre artificiel feniblable en tout au cinabre naturel. . . . Pour cela on mêle quatre parties de mercure coulant avec une partie de ibufre qu'on a fait fondre dans un pot de terre non vernifTe' ; on agite ce mélange qui s'unit très-facilement à l'aide de la chaleur ; le mercure uni au foufre , devient noirâtre. ... La force d'affinité s'exerce avec tant de puiffance entre ces deux matières, qu'il en réfulte une coinbinaifon.. . . On laifTe ce mélange brûler pendant une minute , après quoi on retire la matière , on la pulvé- rilè dans un mortier de marbre , & par cette trituration elle fe réduit en une poudre violette. . . . On fait fublimer cette poudre en la mettant dans un matras à un feu de fable qu'on augmente graduelle-

DES Minéraux, 231

combinant le mercure avec le foie de foufre fij; ce dernier procédé paroît être celui de la Nature; le foie de foufre n'étant que le foufre lui-même combiné avec les matières alkalincs, c'efl-à-dire avec toutes les matières terreflres , à l'exception de celles qui ont été produites par le feu primitif, on peut concevoir aifément que dans les lieux le foie de foufre & le mercure feront trouvés enfcmble, comme dans les argiles, les grès; les pierres calcaires, les terres limonneufes & autres

ment jufqu'à ce que le fond du matras foit bien rouge. Le fublimé qu'on obtient par cette opération efl: en mafle aiguillée , de couleur rouge-brun , comme i'ed le cinabre naturel lorfqu'il ri'eft pas pul-

vériré Par ce procédé donné par M. Baume, on obtient, à

la vérité du cinabre , mais qui n'eft pas fi beau que celui c{ue l'on fait en Hollande il y a des manufacflures en grand de cinabre artificiel , mais dont les procédés ne font pas connus au jufte. Diâiomiaire de Chimie , par AI. Alacquer , article Cinabre.

(l) On peut aufli faire du cinabre artificiel par la voie humide, en ajipliquant , foit au mercure feul , foit aux difTolutiofis de mercure par les acides, mais fur -tout par l'acide nitreux , les différentes

efpèces de foie de foufre & l'on doit remarquer que ce cinabre

fait par la voie humide, a une couleur rouge vif de feu, infiniment plus éclatante que celle du cinabre qu'on obtient par la fublimation.... mais cette différence ne vient que de ce que le cinabre fublimé eft en mafle plus compacte que l'autre , ce qui lui donne une couleur rouge fi foncée qu'il paroit rembruni ; mais en le broyant fur un porphyre en poudre très-fine, il prend un rouge vif éclatant. .. . Celui qu'on obtient par la voie humide n'étant point en malTe comme le premier, mais en poudre fine, paroît donc plus rouge par cette feule raifon. Idem, ibidem.

1-^z Histoire Natu re lle

matières formées par le dépôt des eaux, la combinai/on du merciu-e , du foufre & de i'aikali fe fera faite , & le cinabre aura ctc produit. Ce n'efl pas que la Nature n'ait pu former auiïi dans certaines circonflances du cinabre par le feu des volcans; mais en comparant les deux procédés par lefquels nous avons fu T imiter dans cette produdion du cinabre , on voit que celui de la fublimation par le feu, exige un bien plus grand nombre de combinaifons que celui de la fimpîe union du foie de foufre au mercure, par la voie humide.

Le mercure n'a par lui-même aucune affinité avec les matières terreufes , & l'union qu'il contracte avec elles par le moyen du foie de foufre, quoique pcrn:ia- nente, n'efl point intime; car on le retire aifément des maHes les plus dures de cinabre en les expofant au feu (il). Ce n'efl donc que par des accidcns particuliers, & notamment par l'adion des feux fouterrains que le

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^a) Il eft aifé de recomioître fi une pierre coniient du mercure ; il fuffit de la faire chauffer & de la mettre toute rouge fous une cloche de verre , car alors la fuinée qu'elle exhalera fe convertit ea petites gouttelettes de mercure coulant.

J'ai obfervé , dit M. de JufFieu , dans les endroits même de la veine la plus riche, que l'on n'y ttouve point de mercure coulant, & que s'il en paroît quelquefois , ce n'eft qu'un effet de la violence des coups que les mineurs donnent fur le cinabre qui efl en roche dure , ou plus encore de la chaleur de la poudre dont on le fert pour pétarder ces mines. Afi-moires de i Acadimie des Sciences , cnnéc lyi ^ , pog^s S^o ù' fuiyantes.

mercure

DES Minéraux. 233

mercure peut fe féparer de fa mine, & c'eil par cetic rai(on qu'on le trouve fi rarement dans Ton état coulant. Il n'eft donc entré dans les matières terreufes que par imbibition comme toute autre liquide, & Û s'y eft uni au moyen de la combinaifon de leurs alkalis avec le foufre; ôi cette imbibition ou humedation paroît bien démontrée, puifqu'il fuffit de faire chauffer le cinabre pour le delTécher (âj, c'eft- à -dire, pour enlever le mercure, qui dès-lors s'exhale en vapeurs, comme l'eau s'exhale par le deflechement des terres humeélées.

Le mercure a beaucoup moins d'affinité que la plupart des métaux avec le foufre, & il ne s'unit ordi- nairement avec lui que par l'intermède des terres alka- lines ; c'eft par cette raifon qu'on ne le trouve dans aucune mine pyriteufe ni dans les minerais d'aucun métal, non plus que dans le quartz & autres matières vitreufes produites par le feu primitif ; car les alkalis ni le foufre, n'exiftoient pas encore dans le temps de la formation des matières vitreufes ; & quoique les pyrites , étant d'une formation poflérieure, contiennent déjà les principes du foufre , c'eil-à-dire , i'acide & la fubftance du feu, ce foufre n'étoit ni développé ni formé, & ne

^ifj Nota. Ceci ^ CKadement vrai pour tout cinabre qui contient une bafe terxeule capable de retenir le foufie; cependant on doit excepter le cinabre qui ne feroit uniquement compofe que de foufre & de lîiercwre , car il fe fubiimeroit plutôt que de fe décompofer ; mais ce cinabre fans bafe terreufe ne fe trouve guère dans la Nuture.

Minérm.x, Tome III. G g

234 H 1 ST O IRE N ATU RELLE

pouvoit par conféquent fe réunir à l'alkali, qui lui-même n'a été produit qu'après la formation des pyrites , ou tout au plus tôt en même temps.

Enfin, quoiqu'on ait vu par l'énumération que nous avons faite de toutes les mines connues, que le mercure ne fe trouve en grande quantité que dans quelques endroits particuliers , le fbufre tout formé s'efl trouvé réuni aux terres alkalines, il n'en faut cependant pas con- clure que ces /euls endroits contiennent toute la quantité de mercure ex i fiante ; on peut, & même on doit croire au contraire qu'il y en a beaucouj) à la furface & d? )s les premières couches de la terre ; mais que ce minerai fluide étant par fa nature iulceptible d'une divilioit prefque infinie, il s'efl diffcminé en molécules fi ténues qu'cilt s échappent à nos yeux , & même à toutes les re- cherches de notre Art, à moins que par haiard, comme dans les exemples que nous avons cités, ces molécules ne fe trouvent en afiez grand nombre pour pouvoir jes recueillir ou les réunir par la fublimation. Quelques Auteurs ont avancé qu'on a tiré du mercure coulant, des racines d'une certaine plante femblable au doronic (c) ;

(c) «Selon M. Manfredi , il vient dans la vallce de Lancy » qui ell fituée dans les mont.tgnes de Tunis , une plante feniLiub/e 33 au doronic; on trouve auprès de Tes racines du mercure coulant 3> en petits globules ; Ton fuc exprimé à l'air dans une belle nuit fournit autant de mercure qu'il s'ell difTipé de fuc ». Coiledion aciiilém'tquc , partie étrangère, tome II, page p^.

DES Minéraux. 2.7, y

qu'à la Chine on en tiroit du pourpier fauvage (JJ ; je ne veux pas garantir ces faits ; mais il ne me paroît pas impolFible que le mercure difleminé en molécules très - petites , foit pompé avec la fève par les plantes , puifque nous favons qu'elles pompent les particules du fer contenu dans la terre végétale.

En faifant fuoir au cinabre l'adion du feu dans des vaifTeaux clos, il fe fublimera fans changer de nature, c'ell-à-dire, fans fe décompofer ; mais en Texpofant au même degré de feu dans des vaifTeaux ouverts , le foufre du cinabre fe brûle, le mercure fe volatilife & fe perd dans les airs; on efl donc obligé pour le retenir, de le fiiblimer en vaifTeaux clos, & afin de le féparer du foufre qui ic fublime en même temps, on mêle avec le cinabre réduit en ])oudre , de la limaille de fer fej ;

( d) Le P. cI'Eutrecoiles rapporte qu'à fa Chine on tire du mercure de certaines plantes , &; fur-tout du pourpier fauvage , que même ce mercure ell plus pur que celui qu'on tire des mines , & qu'on les diftingue à la Chimie par deux differens noms. Lettres édifiantes , 22! recueil, page 4^J'

(e) Si on met le cinabre fur le feu dans des vaifleaux clos, il fe fublime en entier , fans changer de nature. Si on l'expofe au contraire à l'air libre & fur le même f<;u, c'eft-à-dire dans des vaiffeaux ouverts , il fe dccompofe , parce que le foufre fe Inùle , & alors le mercure le dégage réduit en vapeurs ; mais comme il s'en produit beaucoup par cette manière , on a trouvé moyen de le féparer du foufre en vaifleaux clos, en otîrant au foufre quelqu'iniermède qui ait avec lui plus d'affinité qu'il n'en a avec le mercure... . comme i'dlkali fixe, la chaux, &c. & même les métaux & demi -métaux,

Gg ij

2^6 Histoire Naturelle

ce métal ayant beaucoup plus d'affinité que le mercure avec le foufre , s'en empare à mcfure que le feu le dégage , & par cet intermède , le mercure s'élève feul en vapeurs qu'il efl aifc de recueillir en petites gouttes coïilantes, dans un récipient à demi plein d'eau. Lorf- qu'on ne veut que s'afTurer fi une terre contient du

fur-tout le fer, le cuivre, l'etain , le plomb, l'argent, le bifmuth &. le régule d'antimoine , qui tous ont plus d'affinité avec le foufre que tÏQn a le mercure , & de toutes ces fubflances , c'elt le fer qui eft la plus commode & la plus ufitée pour la décompofiiion du cinabre en petit ; on prend deux parties de cinabre &. une partie de limaille de fer non rouillée ; on les mêle bien enfemble ; on met ce mélange dans une cornue qu'on place dans un fourneau à feu nu, ou dans une caplule , au biiin de fable , arrangée de inaiiière qu'on puifTe donner un feu aflez fort; on ajoute à la cornue un récipient qui contient de l'eau , & on procède à Ja diflillation. Le mercure dégngé du foufre par l'intermède du fer , s'élève en vapeurs qui paOènt dans le récipient, <Sc s'y condenfent , pour la plus grande partie, au fond de l'eau en mercure coulant. Il y a aufli une portioa du mercure qui relie très-divifée & qui s'arrête à la furface de l'eau, à caufe de la finefle de fes parties , fous la forme d'une poudre noirâtre, qu'il faut rama^Ter exactement pour la mcler avec le mercure en mafle , avec lequel. elle s'incorpore facilement. Ce mercure,

qu'on paffe enfuite à travers un linge ferré , efl très-pur Ou

trouve dans la cornue le foufre du cinabre uni avec le fer, ou l'âlkali , ou telle autre matière qu'on aura employée pour le féparer du mercure. ...

Trois livres de cinabre , fuivant M. Baume , donnent deux livres deux onces de mercure ; la limaille de fer abforbe douze onces & demie de foufre , & il y a perte d'une once & demie. Didionnairt de Chimie , j^ûr AI. Macper , article Cinabre.

DES Minéraux. 237

mercure ou n'en contient pas , il fufTit de mcler de la poudre de cette terre, avec de la limaille de fer fur une brique, que l'on couvre d'un \'are <\<i verre, & de mettre du feu fous cette brique ; fi la terre contient du mercure, on le verra s'élever en vapeurs oui fe condenferont au haut du vafe en petites gouttes de mercure coulant.

Après avoir confidéré le mercure dans mine , oii il fait partie du folide de la mafTe, il faut maintenant l'examiner dans fon état fluide ; il a le brillant mctailique peut-être plus qu'aucun autre métal, la même couleur, ou plutôt le même blanc que l'argent ; fa denfité eft entre celte du plomb & celle de l'or; il ne perd qu'un quatorzième de fon poids dans une eau dont le pied ciibe eft fuppofé pefcr foixante - douze livres, & par conféquent le pied cube de mercure pèfe mille huit livres. Les clémens humides ne font fur le mercure aucune impreffion fenfible; fa furface même ne ternit il l'air que par la pouffière qui la couvre, &. qu'il eft îiifé d'en fcparer par un fimple & léger frottement ; il parort fe cJiarger de même de l'humidité répandue *lans l'air ; mais en l'efliiyant furûce reprend ion premier brillant.

On a donné le nom de inercuu vierge à celui qui <>ft le plus pur &L le plus coidant & qui fe trouve quei- »quefois dans le fein de la terre , après s'être écoulé de ia mine par la feule commotion , ou par un fimplc

238 Histoire M aturelle

mouvement d'agitatioii, fans le fecours du feu; celui que l'on obtient par la fublimation eft moins pur ; <Sc l'on pourra reconnoître fa grande pureté à un efîèt très- remarquable; c'ell qu'en le fecouant dans un tuyau de verre , ion frottement produit alors une lumière fenfible , &femblable à l'éciair èledriqtie; l'cledricité efl en effet la caufe de cette aj^parence lumineufè.

Le mercure répandu fur la furface polie de toute ma- tière avec laquelle il n'a point d'affinité, forme, comme tous les autres liquides, des petites gouttes globuleufes par la feule force de l'attraélion mutuelle de fes parties ; les gouttes du mercure fe forment non-feulement avec plus de promptitude, mais en plus petites maffes , parce qu'étant douze ou quinze fois plus dcnfe que les autres liquides, fa force d'attraélion ell bien plus grande &. produit des effets plus apparens.

11 ne parojt pas qu'une chaleur modérée, quoique très - long - temps appliquée , change rien à l'état du mercure coulant (f); mais lorfqu'on lui donne un degré de chaleur beaucoup plus fort que celui de l'eau bouil- lante, l'attradion réciproque de fcs parties n'efl plus

(f) Boërhaave a fournis dix-huit onces de mercure à cinq cents diftillations de fuite , & n'y a remarqué , après cette longue épreuve , aucun changement fenfible , finon qu'il lui a paru plus fluide , que fa pefanteur fpécifjque étoit un peu augmentée & qu'il lui eft rede quelcjues grain^ de matière fixe. Diâionnaire de Chimie , par AI. Maçquer , anlcU Mercure.

D E s AI I N É R A U X. 239

affez forte pour les tenir réunies; elles fcparent ^ fe volatilifeni, fans néanmoins changer d'effence ni même s'altérer, elles font /èulement divifées & lancées par la force de la chaleur; on peut les recueillir en arrêtant cet effet par la condenlaiion , ôl elles repré/èntent alors fous la même forme , & telles qu'elles étoicm auparavant.

Quoique la furface du mercure fe charge des pouJf^ fières de l'air, & même des vapeurs de l'eau, qui flottent dans l'atmofphère , il n'a aucune affinité avec l'eau, &. il n'en prend avec l'air que par le feu de calcination: l'air s'attache alors à fa furface & Ce fixe entre fes pores, fans s'unir bien intimement avec lui, Si. même fans fe corrompre ni s'altérer ; ce qui fcmhle prouver qu'il n'y a que peu ou poiiit de feu fixe dans le mercure, & qu'il ne peut en recevoir à cauie de l'humidité qui fait partie de fa fubitance, & même l'on ne peut y attacher l'air qu'au moyen d'un feu allez fort & foutenu pendant pluheurs mois; le mercure, par cette très - longue digefîion dans des vaifTeaux qui ne font pas exaétement clos , prend peu - à - peu la forme d'une efpèce de chaux ^g), qui néanmoins eft différente

/o) Par la digefîion ù un degré de chaleur très-fort & foutenu pendant plufieujs mois , dans un vailTeau qui n'eft pas exadement clos, le mercure éprouve une altération plus fenfible; fa furface fe change peu-à-peu en une poudre rougeâtre, terreufe , qui n'a plus aucun brillant métallique , & qui nage toujours à la furface du refte

24.0 Histoire Naturelle

des chaux métalliques ; car quoiqu'elle en ait l'appa- rence , ce n'cd cependant que du mercure chargé d'air pur, &: elle diffère des autres chaux métalliques, en ce qu'elle Te revivilie d'elle-même, <Sc fàiis addition d'au- cune matière inflammable ou autre qui ait plus d'affinité avec l'air qu'il n'en a avec le mercure ; il fuffit de mettre cette prétendue chaux dans \\\\ vailTcau bien clos, & de la chauffei" à un feu violent, pour qu'en fe volatilifant le mercure abandonne l'air avec lequel il n'étoit uni que par la force d'une longue contrainte, &. fans intimité, puifque l'air qu'on en retire efl pur, & n'a contracté aucune des qualités du mercure ; que

du mercure fans s'y incorporer; on peut convertir aiiifi en entier en poudre rouge , une quantité donnée de mercure , il ne faut que le temps & les vaifTeaux convenables. On appelle cette .pré- paration du mercure, précipité /j^rT^' , 6c on ne peut obtenir cette poudre rouge ou précipité per fe qu'en faifant fubir au mercure la plus forte chaleur qu'il puifle fupporter fans fe réduire en vapeurs. Ce précipité paroît krç une vraie chaux de mercure. . . . d'autant qu'il ne s'ell fait que par le concours de l'oir, il ne pèfe pas autant que le mercure puifqu'il nage à fa furface ; mais ion volume ou pefanteur abfolue efl augmentée d'environ .... on en peut déo-ao-er i'air auquel eU due cette augmentation de poids, & faire la réduction de ce précipité ou de cette chaux fans addition dans des vaiffeaux clos , dans lefquels le mercure le revivifie ; l'air qui fe dégao-e de cette chaux de mercure, ell très-pur ( ce qui efl bien diflcrent de l'air qui fe dégage des autres chaux métallicjues , qui efl très-corrompu ) , & il n'y a point de perte de mercure dans cette rédudiou. Didiomaïre 4e Chimie , par AI, Alacquer , ariick Mcicure.

d'ailleurs

DES Minéraux, 241

d'ailleurs en pcfant cette chaux, on voit qu'elle rend par fa rcdu6tion la même quantité, c'efl-à-dire, autant d'air qu'elle en avoit fàiii ; mais lorfqu'on réduit les autres chaux métalliques, c'efl l'ai; que l'on emporte en lui offrant des matières inflammables , au lieu que dans celles-ci c'eft le mercure qui eft emporté ô>l féparé de i'air par /èule volatilité (fi).

(h) Ayant communique cet article à mon favantami M. de Morveau, aux lumières duquel j'ai la plus grande confiance , je dois avouer qu'il ne s'eft pas trouvé de mon avis ; voici ce qu'il m'écrit à ce fujet. « II paroît que la chaux de mercure efl une vraie chaux métal- lique , dans le fens des Chimiftes, Stalhiens , c'eft-à-dire à laquelle « il manque le feu fixe ou phlogiftique ; en voici trois preuves diredes « entre bien d'autres ; i ° l'acide vitriolique devient lulfureux avec <c le mercure; il n'acquiert cette propriété qu'en prenant du phlo- ce giflique ; il ne peut en prendre que il y en a ; le mercure «« contient donc du phlogiflique. Le précipité per fe de même avec ce l'acide vitriolique ne le rend pas fulfureux ; il efl: donc privé ce de ce principe inflammable. " «

2." L'acide nitreux forme de l'air nitreux avec toutes les matières <c qui peuvent lui fournir du phlogiflique ; cela arrive avec le mer- ce cure, non avec le précipité per fe ; l'un tient donc ce principe, & « l'autre en efl privé. ce

3.° Les métaux imparfaits traités au feu en vaifleaux clos avec ce la chaux du mercure , fe calcinent pendant qu'il fe détruit ; ainfi ce l'un reçoit ce que l'autre perd. Avant roj)ération, le métal imparfait ce pouvoit fournir au nitre le phlogiflique néceflaire à fa déflagration ; ce il ne le peut plus après l'opération ; n'efl-il pas évident qu'il en « a été privé pendant cette opération »! Je conviens avec M. de Morveau de tous ces faits , & je conviendrai aulîi de la conféquence qu'il en

Minéraux, Tome IIL H h

2^2 Histoire Naturelle

Cette union de l'air avec le mercure n eft donc que fuDeriicielle , ôl quoique celle du foufre avec le mer- cure dans le cinabre, ne /bit pas bien intime, cependant elle efl beaucoup plus forte & plus profonde ; car en mettant le cinabre en vaifTeaux clos comme la chaux de mercure, le cinabre ne fe dccompofe pas, il fe fublime fans changer de nature, & fans que le mercure fe fcpare, au lieu que par le même procédé, chaux fe décompofe & le mercure quitte l'air.

Le foie de foufre paroît être la matière avec laquelle le mercure a le plus de tendance à s'unir , puifque dans le fein de la terre le mercure ne fe prcfente que fous la forme de cinabre ; le ibufre feul, & fans mélange de matières alkalincs, n'agit pas auHi puiffamment iiir le mercure; il s'y mole à peu - près comme les graiffes lorfqu'on les triture enfemble , & ce mélange le mercure difparoît, n'efl qu'une poudre pefante & noire à laquelle

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tire , pourvu qu'on ne la rende pas générale. Je fuis bien éloigné de nier que le mercure ne contienne pas du feu fixe & de l'air fixe, puifque toutes les matières métalliques ou terreules en con- tieni'ient; mais je perfifte à penfer qu'une explication l'on n'emploie qu'un de ces deux élémens , efi: plus fimple que toutes les autres l'on a recours à deux ; & c'eft le cas de la chaux du mercure , dont la formation & la rédudion s'expliquent très-clairement par J'union & la féparation de l'air, fans qu'il foit néceHaire de recourir au phlogiftique ; & nous croyons avoir très-fuffifamment démontré que l'accefllon ou la réceffion de l'air fixé fuffiroit pleinement pour opérer & expliquer tous les phénomènes de la formation & de la réduction des chaux métalliques.

DES Minéraux, 243

les Chimirtes ont donné le nom é^éthiops minéral (i) ; mais malgré ce changement de couleur, & malgré l'apparence d'une union afFez intime entre le mercure &. le fbufre dans ce mélange , il efl encore vrai qu(î ce n'ell qu'une union de contaél & très -ftiperficielie; car il efl; aifé ^t\\ retirer fans perte, &. prccifément la même quantité de mercure fans la moindre altération; &. comme nous avons vu qu'il en efl; de même iorfqu'ou. revivifie le mercure du cinabre, il paroît démontré

(i) L'éthiops minéral efl une combinaifon de mercure avec une aflez grande quantité de foufre ; il efl noir..,. Il fe fait ou par la fufion ou par la fimple trituration.... On fait fondre du foufre dans un vaifTeau de terre non vernifîé ; aufll-tôt qu'il efl fondu on y mêle une égale quantité de mercure , en retirant le vaifTeau de defTus le feu. On agite le mélange jufqu'à ce qu'il foit refroidi &: figé ; il refle après cela une malle noire & friable qu'on broie &: qu'on tamife , & c'efl: l'éthiops.

Et lorfqu'on veut faire de l'éthiops fans feu, on triture le mercure avec le foufre dans un monier de verre ou de marbre , en mettant deux parties de mercure fur trois parties de fleurs de foufre, & on triture jufqu'à ce que le mercure ne foit plus vifible. ... L'union du mercure &. du foufre dans l'éthiops n'efl pas fi forte que dans le cinabre ; il ne faut pas croire pour cela qu'elle foit nulle , & qu'il n'y ait dans l'éthiops qu'un fimple mélange ou interpofition des parties des deux fubflances ; il y a adhérence & combinaifon réelle, La preuve en efl qu'on ne peut les féparer que par des inter- mèdes qui font les mêmes que ceux qu'on emploie pour féparer le mercure du cinabre , & cet éthiops peut aifément devenir , étant traité par les procédés chimiques , du véritable cinabre artificiel, Dïdïmnaïre de Chimie , par M. Macquer , article Ethiops,

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244- Histoire Natu relle

que le foufre qui altère la plupart des mciaux ne cauie aucun changement intérieur dans la fubdancc du mercure.

Au refle , lorfque le mercure , par le moyen du feu & par l'addition de l'air , prend la forme d'une chaux ou d'une terre en poudre, cette poudre efl d'abord noire , & devient enfuite d'un beau rouge en continuant le feu ; elle ofire même quelquefois des petits crifîaux tranfparens & d'un rouge de rubis.

Comme la denfitc du mercure eft très - grande , & qu'en même temps fes parties conftituantes font prefque infiniment petites , il peut s'appliquer mieux qu'aucun autre liquide aux furfaces de tous les corps polis. La force de fon union par fmipie contad; avec une glace de miroir, a été mefurée par im de nos plus favans PhyTiciens (kj , &l se^ trouvée beaucoup plus forte

(k) Si l'on met, dit M. de Morveau , en équilibre une balance portant à l'un de fes bras un morceau de glace taillé en rond , de deux pouces & demi de diamètre , fufpendu dans une pofition horizontale , par un crochet maRiqué fur la furface fupérieure , & que l'on ïàH'e enfuite defcendre cette glace fur la furface du mercure placé au-dellbus , à très-peu de diftance , il faudra ajouter dans le bafîjn oppofé jufqu'à neuf gros dix-huit graàus , pour détacher la glace du mercure & vaincre l'adhéfion réfultante du contacl.

Le poids & la comprefijon de ratmofphère n'entrent pour riea dans ce phénomène, car l'appareil étant mis fur le récipient dénué d'air, de la machine pneumatique, le mercure adherra encore à la glace, avec ime force égale, & cette adhcfion fouiiendra de

DES Minéraux. 245

qu'on ne pourroit l'imaginer ; cette expérience prouve encore, comme je l'ai dit, à l'article de i'étain, qu'il y a entre la feuille d'étain & la glace , une couche de mercure pur, vif &. fans mélange d'aucune partie d'étain, & que cette couche de mercure coulant n'eft adhérente à la glace que par iimplc contact.

Le mercure ne s'unit donc pas plus avec le ^'erre qu'avec aucune autre matière tcrreufc; mais il s'amalgame avec la plupart des fiibflances métalliques : cette union par amalgame , efl une humeclation qui fe fait fouvent à froid & fans produire de chaleur ni d'effervefcence, comme cela arrive dans les diffolutions ; c'efl une opé- ration moyenne entre l'alliage & la diiïolution ; car la première fuppofe que les deux matières fbient liquéfiées par le feu, &. la féconde ne fe fait que par la fufiou ou la calcination du métal par le feu contenu dans le diffolvant, ce qui produit toujours de la chaleur; mais dans les amalgames, il n'y a qu'humeéîation & point de fufion ni de diffolution: & même im de nos plus iiabiles Chimifles (/J, a obfervé que non- feulement les amal- games font fans produire de chaleur, mais qu'au contraire ils produifent un froid fenlîhle qu'on peut mefùrer en y plongeant un thermomètre.

même les neuf gros dont on aura chargé précédemment l'autre bras de la balance. Élémens de Chimie , par Aï. de Aloryeau , tome I , pages /4 & //,

(l) M. de Machi.

246 Histoire Naturelle

On objecflera peut - être qu'il fe produit du froid pendant l'union de l'alkali minéral avec l'acide nitreux, du fci ammoniac avec l'eau, de la neige avec l'eau, & que toutes ces unions font bien de vraies diffolutions; mais cela même prouve qu'il ne ])roduit du froid que quand la difToiution commence par l'humeélation ; car la vraie caufe de ce froid cfl l'évaporation de la chaleur de l'eau , ou des liqueurs en général qui ne peuvent mouiller fans s'évaporer en partie.

L'or s'amalgame avec le mercure par le fimple conta6l, il le reçoit à fa furface , le retient dans fes pores , & ne peut en être féparé que par le moyen du feu. Le mercure colore en entier les molécules de l'or, leur couleur jaune di/paroît, l'amalgame eft d'im gris tirant fur le brun fi le mercure efl fàturé. Tous ces effets proviennent de rattra6lion de l'or qui efl plus forte que celle des parties du mercure emr'clles , & qui par conféquent les fépare les unes des autres, & les divifè affez pour qu'elles puiffent entrer dans les pores & humeder la fubflance de l'or ; car en jetant une pièce de ce métal dans du mercure , il en pénétrera toute la maffe avec le temps, & perdra précifémem en quantité ce que l'or aura gagné, c'eft-à-dire, ce qu'il aura faifi par l'amalgame. L'or efl donc de tous les métaux celui qui a la plus grande affinité avec le mer- cure, &. on a employé très - utilement, le moyen de l'amalgame pour feparer ce métal précieux de toutes

DES Minéraux, i^j

les matières étrangères avec lerqiielles il fe trouve mêle dans fes mines: au refle, pour amalgamer prompiement l'or ou d'autres métaux, il faut les réduire en feuilles minces ou en poudre, & les mêler avec le mercure par la trituration.

L'argent s'unit au/fi avec le mercure par le fnnpie conta6t , mais il ne le retient pas aufTi puiffammcnt que l'or, leur imion eft moins intime; & comme la couleur de l'argent eO; à peu-près la même que celle du mer- cure , fa furface devient feulement plus brillante lorf- qu'elle en efl; humectée ; c'eft ce beau blanc brillant qui a fait donner au mercure le nom de v'if-argcnt.

Cette grande affinité du mercure avec l'or & l'argent, fembleroit indiquer qu'il doit trouver dans le fein de la terre des amalgames naturels de ces métatix, cepen- dant depuis qu'on recherche & recueille des minéraux , à peine a-t-on un exemple d'or natif amalgamé , & l'on ne connoît en argent que quelques morceaux tirés des mines d'Allemagne, qui contiennent une quantité aflez confidérable de mercure pour être regardés comme de vrais amalgames (m) ; il eft aifé de concevoir que cette

(m) M. Sage fait mention d'un morceau d'or natif de Hongrie, d'un jaune griiâtre, fragile, & dans lequel l'analyfe lui a fait trouver «ne petite quantité de mercure , avec lequel on peut croire que cet or avoit été naturellement amalgamé. Ce morceau ne contenant que très-peu de mercure , doit être certainement rangé parmi les HÙnes d'or ; mais les amalgames natifs d'argent de Sahlberg & du

248 Histoire Naturelle

rareté des amalgames naturels vient de la rareté même du mercure dans (o\\ état coulant , & ce n'cfl pour ainfi dire qu'entre nos mains qu'il eft dans cet état, au lieu que dans celles de ]a Nature, ii eit en mafTe fblide de cinabre , & dans des endroits particuliers très-diffé- rens, très-éloigncs de ceux fe trouvent l'or & l'argent primitifs, puifque ce n'elt que dans les fentes A\x quartz & dans les miontagnes produites par ie feu que giffent ces métaux de première formation; tandis que c'eft dans les couches formées par le dépôt des eaux que trouve le mercure.

L'or & l'argent font les feules matières qui s'amal- gament à froid avec le mercure; il ne peut pénétrer les autres fubflances métalliques, qu'au moyen de leur fufion par le feu , il s'amalgame auiïi très - bien par ce même moyen avec l'or & l'argent; l'ordre de la facilité de ces amalgames eft l'or, l'argent, l'étain, le plomb, le bilmuth, le zinc & Tarfenic ; mais il refufe de s'unir & de s'amalgamer avec le fer, ainfi qu'avec les régules d'antimoine &l de cobalt. Dans ces amalgames qui ne fe font que par la fufion, il faut chaufter le mercure jufqu'au degré il commence à s'élever en vapeurs, & en même temps faire rougir au feu, la poudre des métaux qu'on veut amalgamer pour la triturer avec le

Palatinat , contiennent fouvent plus de mercure que d'argent ; ils devroient donc être rapportés parmi les mines de mercure. Lettres ^e M. Demejle , tome II, page 10^.

mercure

DES I iW É R A U X. 249

mercure chaud. Les métaux qui , comme l'étain &. le plomb , fe fondent avant de rougir , s'amalgament plus aifcmcnt & plus promptement que les autres; car ils fe mêlent avec le mercure qu'on projette dans leur foute, & il ne faut que la remuer légèrement pour que le mercure s'attache à toutes leurs parties métalliques. Quant à l'or, l'argent ôl le cuivre, ce n'efl qu'avec leurs poudres rougies au feu que l'on peut amalgamer le mercure; car li l'on en verfoit fur ces métaux fondus, leur chaleur trop forte, dans cet état de fufion, non- feulement le fuhlimeroit en vapeurs , mais produiroit des explofions dangereufcs.

Autant l'amalgame de l'or & de l'argent fe fait aifc- ment , foit à chaud, foit à froid, autant l'amalgame du cuivre efl difficile & lent; la manière la plus fûre & fa moins longue de taire cet amalgame, efl de tremper des lames de cuivre dans la diffolution du mercure par l'acide nitreux; le mercure diffous s'attache au cuivre & en blanchit les lames. Cette union du mercure Si. du cuivre ne fe fait donc que par le moyen de l'acide, comme celle du mercure & du foufre fc fait par le moyen de l'alkali.

On peut verfer du mercure dans du plomb fondu , fans qu'il y ait explofion , parce que la chaleur qui lient le plomb en fufion, efl fort au-deffous de celle qui efl néceffaire pour y tenir l'or &. l'argent ; auffi l'amalgame fe fait très - aifément avec le plomb

ATuicrmiX , Tome III. I i

2^0 Histoire Naturelle

fondu fnj; il en cfl Je mcme de l'ctain ; mais il peut aufTi fe faire à froid avec ces deux métaux, en les rédui/ànt en poudre & les triturant long-temps avec le mercure, c'efl avec cet amalgame de plomb qu'on lutte

(^nj I ." Partie égale de mercure & de plomb forment une mafîe blanche folide , dont une partie du mercure fe fcj^are par une exudation occafionnée par la feule chaleur de i'atmo/phere , en glo- bules infiniment petits.

2..° Deux parties de plomb & une de mercure forment une mafîe blarche , dure , cafîante , à petits grains comme ceux de l'acier , dont le mercure ne s'échapjie pas ; ces deux lubrtances forment alors une combinaifon durable.

3." Trois parties de plomb & une de mercure forment une mafle plus dudile que le plomb & l'ctain ; on en peut faire des vafes , & on la liie aifément à la filière.

4." Ce dernier mélange ell d'une fufibilité extraordinaire; mais fi on l'expofe d'abord à un grand feu , il éclate avec explofion ; fi au contraire on le liquéfie à une douce chaleur , on peut enfuite le châufi^tr au rouge ; mais il bout continuellement avec un bruifl'e- ment comme la graille.

5.° Si l'on continue à le tenir en fufion, le mercure fe difllpe fucceflivement & totalement en vapeurs.

6.' La craiïè qui fe forme à la furface du plomb combiné avec le mercure, expoice feule dans un Vdiffeau rouge de feu, décrépite comme le fei marin.

7.° Cet amalgame de mercure & de plomb fe combine avec l'or, l'argent, le cuivre rofetre , ie laiton, le régule d'a^itimoine , le zinc & le bifmuth ; il les aigrit tous , excepté l'étain avec lequel il produit un affez beau métal mixte , blanc & dudile. A^oie couunu- jiiquée par M. de Crignon , en Odobre J7S2.

D E s M I N É R A U X, 251

les bocaux ou vafes de verre, dans lefqueis on con- ferve les animaux dans i'efprit-de-vin.

L'amalgame avec l'étain, efl d'un très-grand <Sc très- agréable uiage pour l'ctamage des glaces; a-infi des (ix métaux il y en a quatre, l'or, l'argent, le plomb (Se Tctain, avec lefqueis le mercure s'amalgame naturelle- ment, foit à cbaud, foit à froid; il ne fe joint au cuivre que par intermède, enfin il reliife abfolument de s'unir au fer; &. nous allons trouver les mêmes diliérences dans les demi - métaux.

Le bifmutb & le mercure s'uniiTent à froid en les triturant enfcmbie ; ils s'amalgament encore mieux lorfque le bifinuth efl en fufion, & ils forment des crillaux noirs affez réguliers, & qui ont peu d'adhérence entr'eiix; mais cette criftallifation du bifmuth n'efl pas un effet qui lui foit propre & particulier; car l'on efl également parvenu à obtenir par le mercure, une criflallifatipn de tous les métaux avec le/quels il peut s'unir Co).

Lorfqu'on mêle le mercure avec le zinc en Rifion, il fe fait un bruit de grcjîllemeut , femblable à celui de l'huile bouillante dans laquelle on trempe un corps froid; cet amalgame prend d'abord une forte de folidité , <Sc redevient iluide par la fimple trituration ; le même effet arrive lorfqu'on verfe du mercure dans de l'huile bouil- lante, il y prend même une folidiié plus durable que

(oj Voyez là-defius les expériezices de M. Sage.

252 HISTOIRE N ATU RELLE

dans le ziac fondu. Néanmoins cette union du zinc & du mercure paroît être un véritable amalgame ; car l'un de nos plus favans Cliimiftes, M. Sage, a reconnu qu'il fe criflallife comme les autres amalgames, & d'ailleurs, ■Je mercure femble diiïbudre à froid quelque portion du zinc: cependant celte union du zinc & du mercure paroît être incomplète; car il faut agiter le bain qui e/1 toujours gluant & pâteux.

On ne peut pas dire non plus qu'il fe faffc un amal- game dired & fans intermède, entre le mercure & le régule d'arfenic lors même qu'il efl en fiifion; enfin le mercure ne peut s'amalgamer d'aucune manière avec l'antimoine & le cobalt : ainfi de tous les demi- métaux, le bifmutb ell le feul avec lequel le mercure s'amalgame naturellement ; & qui fait fi cette réfiflance à s'unir avec ces fubflances métalliques , & la facilité de s'amalgamer avec d'autres , & particulièrement avec l'or & l'argent, ne provient pas de quelques qualités communes dans leur tilTu, qui leur permet de s'hume6ter de cette eau métallique , laquelle a tant de rapport avec eux par fa denfité \

Quoi qu'il en foit, on voit par ces différentes com- binaifons du mercure avec les matières métalliques , qu'il n'a réellement d'affinité bien fenfible qu'avec l'or &l l'argent, & que ce n'ell pour ainfi dire que par force, & par des affinités préparées par le feu, qu'il fe joint aux autres métaux, & que même il s'unit plus facilement

DES Minéraux. 253

& plus intimement avec les fubflances animales & végé- tales , qu'avec toutes les matières minérales , à l'exception (le l'or ck. de l'argent.

Au refte, ce n'eft point un amalgame, mais un onguent

que forme le mercure mêlé par la trituration avec les

huiles végétales & les graifTes animales ; elles agiffent

fur le mercure comme le loie de foufre , elles le

divifent en particules prefque infiniment petites , & par

cette divifion extrême , cette matière il denfe pénètre

tous les pores des corps organifés , fùr-tout ceux elle

fe trouve aidée de la chaleur , connue dans le corps

des animaux fur lequel elle produit des effets /àlutaires

ou funellcs , félon qu'elle eft adminiftrée. Cette union

des grai/fes avec le mercure, paroît même être plus

intime que celle de l'amalgame qui fait à froid avec

l'or &. l'argent (^p) j parce que deux fluides qui ont

enfèmble quelqu'affinité , mêleront toujours plus

aifément qu'un folide avec un fluide , quand même il

y auroit entr'eux une plus forte attraélion ; ainfi les

graiiïes agiffent peut - être plus puiffamment que ces

métaux fur la fubflance du mercure , parce qu'en

(p ) Il ne faut pas regarder le mercure comme fimpleraent didribué & entre- mêlé avec les parties de la graifle dans l'onguent mercuriel ; îl eft très-certain au contraire qu'il y a adhérence &. combinaifon , même très -intime, au moins d'une portion du mercure avec ia graifTe, ... car lorfcju'il eft fait depuis du temps, on ne peut plus, en le fondant , retirer tout le mercure qu'on y avoit mis. Didionnairc de Chimie , par M. Mac que r , artick Mercure.

2)4 Histoire N aturelle

rancifTant elles raififTent l'acide aérien, qui doit agir fur le mercure; & la preuve en eft qu'on peut le retirer fans aucune perte de tous les amalgames, au lieu qu'en fondant la graiffe on ne le retire pas en entier, fur-tout fi l'onguent a cié gardé afTez long-temps pour que la graiiTe ait exercé toute fon aélion fur le mercure ((j) ,

Confidcrant maintenant les effets des difTolvans fur Je mercure, nous verrons que les acides ne le dilTolvent

(q) Quoique le mercure foit fufceptible de fe diviier lorfqu'on le triture avec une huile grafl'e , il ne paroît pas qu'il y ait rcelie- ment djlîolution.. .. Le mercure fe combine plus facilement avec îes grailTes animales qui \\z font néanmoins qu'une efpcce d'huile l'acide eft plus abondant, & qui inanifeftent d'ailleurs les mêmes affinités que les autres fubflances huifeufes. On ne doit j)as ne'an- moins attribuer l'adion de ces graifles fur le mercure, à l'acide nholphorique qu'elles contiennent.

C'eft en combinant la graiiïe avec le mercure , que l'on forme b pommade mercurielle,. . . Dans cet onguent, les parties de mercure ne paroifient pas fnnpiement diflribuées ou enire-mêlces avec les parties de la graiffe ; on efl: fondé à penfer au contraire qu'il y a adhérence & union, même trcs-intime, car cette graille de l'onguent luercuriel fe rancit très-promptement , comme il arrive à toutes les matières huileufes qui entrent dans quelque combinaifon, . ..

Lorfque l'onguent mercuriel eft vieux , fi on le frotte entre deux papiers gris , la graifle s'imbibe dans le papier f & l'on ne voit point de globules de mercure; il n'en eft pas dfe même lorfque cet onguent ell récent, on y découvre trcs-aifément une grande quantité de parties métalliques. Toutes ces obfervations prouvent qu'il y a liue vraie combinaifon, une union intime dans ce mélange, lorfqu'il eft vieux. Elémens de Chimie, par M. de Alorveau , tome III t pa^es ^ S <f çT Juivanies,

DES Minéraux, 255

pas également comme ils clifToIvent les métaux, puiique ie plus puiiîant de tous, l'acide vitriolique, ne l'attaque qu'au moyen d'une forte chaleur (r) ; il en ed à peu- près de même de l'acide marin ; pour qu'il s'imiffe intimement avec le mercure, il faut que l'un & l'autre foient réduits en vapeurs , & de leur ccmbinaifon réiùlte un fèl d'tme qualité très-funefte, qu'on ^ nommé fo/>/imé corrofîf; dans cet état forcé, le mercure ne lailîe pas de conferver une ii grande attraction avec lui -même, qu'il peut fe furcharger des trois quarts de fon poids de mcrcme nouveau (f); &. c'eft en chargeant ainfi le

(r) L'acide vitriolique dans fon état ordinaire , n'agit point ou n'agit que trcs-foiblement & trcs-iual iur le mercure en niaile. Ces deux fubitances ne peuvent le combiner enlcinbJe à moins que i'acide ne loit dans le plus grand degrc de concentration, & fécondé

par la chaleur la plus forte Lorlque cet acide ell bien concentre,

il réduit le mercure en une nulle faline de couleur blanche, appelée y'itr'iol de mercure.

Si on expofe à l'adion du feu la combinaifon de l'acide vitriolique avec ie mercure , la plus grande partie de cet acide s'en détache; mais une chofe fort remarquable , c'efl que le mercure traité ainil par l'acide vitriolique loutient une plus grande chaleur & paroît par conféquent un peu plus fixe que c^uand il ell pur. Cette fixité ert; une fuite de fon état de chaux. Didionnaire de Chimie , par' AI. Alacqucr , article Mercure.

ff) L'acide marin en liqueur n'agit point fenfiblement fur fe-^ mercure en maffe , même iorlcju'il el\ aidé de la chaleur de i'ébul— iition ; mais lorfque cet acide très-concentré, elt réduit en vapeurs 7- &. qu'il rencontre le mercure réduit audi en vapeurs , alors ils s'unifient d'une manière très-intime. Il en rélulte un fel marin mer- curiel crirtallifé en aiguilles aplaties , & q^ii'on a nommé fublimi

2)6 Histoire Naturelle

fublimé corrofif de nouveau mercure, qu'on en diminue la qualité corrofive, & qu'on en fait une préparation faiutaire, qu'on appelle mercure doux, qui contient en effet fi peu de Tel marin qu'il n'efl pas diffolubie dans l'eau; on peut donc dire que le mercure oppo/è une grande réiiftance à l'aétion de l'acide vitriolique & de Tacide marin ; mais l'acide nitreux le diiïbut avec autant de promptitude que d'énergie: lorfque cet acide cii pur, il a la puiflance de le diifoudre fans le fecours de la chaleur; cette diflblution. produit un {ç\ blanc qui peut fe criftal- iifer, & qui efl corrofif comme celui de la diffolution d'argent par cet acide (tj. Dans cette diffolution, le

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corrofif , parce que l'on ne l'obtient que par Ja fubliination. . . . L'affinité de l'acide marin avec le mercure eft fi grande , qu'il fe furcharge , en quelque forte , d'une quantité confidérable de cette matière métallique. ... Le fublimé corrofif peut abforber & fe charger peu à peu , par la trituration , des trois quarts de {on poids , de nouveau mercure. Diélionnaire de Chimie, par AI. Alacquer , article Mercure.

( t ) L'acide" nitreux diOout très-bien le mercure ; dix onces de bon acide fuffifent pour achever (a dilTolution de huit onces de ce métal ; il l'attaque même à froid , 6c produit effervefcence &

chaleur La" diffolution fe colore d'abord en bleu , par l'union

du principe inflammable ; il s'y forme par le refroidiffemeni , un fel neutre , non delicjuefcent , difpofé en aiguilles ; c'efl; le nitre mercuriel. ... M. Bauiné remarque que la diffolution de nitre mercuriel , refroidie fur le bain de fable , donnoit àes aiguilles perpendiculaires , & que refroidie loin du feu , elfe donnoit des aiguilles horizontales. Elémens de Chimie , par M. de Morceau , tome II f pages ty^ ir fuiy.

mercure

DES Minéraux, 257

mercure eft en partie calciné ; car après la formation des criflaux, il fe précipite en poudre d'un jaime-citrin qu'on peut regarder comme une chaux de mercure. Au refte, l'acide nitreuxqui diffout fi puiffamment le mercure coulant, n'attaque point le cinabre , parce que le mercure y efl défendu par le fbufre qui l'enveloppe, & fur lequel cet acide n'a point d'aélion. Cette ditiérence entre le mercure & le foufre, femble indiquer qu'autant le fbufre contient de feu fixe^ autant le mercure en eft privé, &. cela confirme l'idée que l'efTencc du mercure tient plus à l'élément de l'eau qu'à celui du feu.

Des acides végétaux, celui du tartre efl le fèul qui agiffe fenfiblement fur le mercure; le vinaigre ne l'attaque pas dans fon état coulant, & ne s'unit qu'avec fa chaux; mais en triturant long-temps la crème de tartre avec le mercure coulant, on vient à bout de les unir en y ajoutant néanmoins un peu d'eau; on pourroit donc dire qu'aucim acide végétal n'agit direélement , & fans intermède fur le mercure. Il en efl de même des acides qu'on peut tirer des animaux , ils ne diffolvent ni n'at- taquent le mercure , à moins qu'ils ne foient mêlés d'huile ou de graiffe , en forte qu'à tout confidérer, il n'y a que l'acide aérien qui agit à la longue par l'in- termède des graiffes fur le mercure, &: l'acide nitrcux qui le diffolve d'une manière direde & fans intermède: car les alkalis fixes ou volatils n'ont aucime aélion fur le mercure coulant, <5c ne peuvent fe combiner avec ATmérmix j Tome III. K.k

258 Histoire Naturelle

lui que quand ils le failifTent en vapeurs ou en ciiffoîu- lions; ils le précipitent alors fous la forme d'une poudre ou chaux; mais que Von peut toujours revivifier fans addition de matière charhonneufe ou iniiammabie ; on produit cet effet par les feuls rayons du iokil, au foyer d'un verre ardent.

Une preuve particulière de l'impuiffance des acides végétaux ou animaux pour dilToudre le mercure, c'ell que l'acide des fourmis, au lieu de dilfoudrc cliaux Ja revivifie, il ne faut pour cela que les tenir enlcmble en digeflion fii) >

Le mercure n'étant par lui-même ni acide ni alkalin, ni falin , ne me paroît pas devoir être mis au nombre des dilfolvans, quoiqu'il s'attache à la furface 6c pénètre les pores de l'or, de l'argent & de l'étain ; ces trois métaux font les feules matières auxquelles il s'unit dans fon état coulant, & c'efl moins une diffolution qu'une humeétation; ce n'eO: que par addition aux furfaccs, &. par juxtapofuion, & non par pénétration intime & dé- compolition de la fubflance de ces métaux qu'il fe combine avec eux.

Non-feulement tous les alkalis ainfi que les terres abforbantes , précipitent le mercure de fes diiïblutions & ie font tomber en poudre noire ou grife, qui prend avec le temps une couleur rouge , mais certaines (ubf-

r

(u) EIcmens de Chimie, par M. de Morveau, torm II , j:oge j y

DES Minéraux. 259

tances mctailiques le prccipitent cgalemcnt; le cuivre, i'ctaiii <Si. l'antimoine ne dccompofent pas ces difToIutions ; & ces précipités, tous reviviiiés, offrent également du mercure coulant.

On détruit en quelque forte la fluidité du mercure en l'amalgamant avec les métaux ou en l'uniflant avec les graiiïes, on peut même lui donner une demi-folidité en le jetant dans l'huile bouillante, il y prend aflez de conlîftancc pour qu'on puifTe le manier, l'étendre, & en faire des anneaux & d'autres petits ouvrages ; le mercure rcfle dans cet état de folidité, ôl ne reprend fi fluidité qu'à l'aide d'une chaleur aflfez forte.

Il y a donc deux circonflances bien éloignées Tune de l'autre, dans Icfquellcs néanmoins le mercure prend également de la folidité, & ne reprend de la fluidité que par l'acceflion de la chaleur ; la première efl: celle du très - grand froid qui ne lui donne qu'une folidité prcfque momentanée , ôl que le moindre degré de diminution de ce froid, c'efl- à- dire, la plus petite augmentation de chaleur liquéfie; la féconde au contraire n'efl; produite que par une très - grande chaleur , puif- qu'il prend cette folidité dans l'huile bouillante ou dans le zinc en fufion, & qu'il ne peut enfuite fe liquéfier que par une chaleur encore plus grande; quelle conféquence dire6le peut -on tirer de la comparaifon de ces deux mêmes effets dans des%lrconftances fi oppofées, finon que le mercure participant de la nature de l'eau (Sl de

Kk ij

26o HisToïkE Naturelle

celle (lu métal, il fe gèle, comme l'eau par le froid, d'une part; & de l'autre, fe confoJide, comme fait un métal en fufion par la température aduelle, en ne reprenant fa fluidité, comme tout autre métal, que par une forte chaleur î néanmoins cette conféquence n'efl peut - être pas la vraie, & il fe peut que cette fblidité qu'acquiert le mercure dans l'huile bouillante & dans le zinc fondu, provienne du changement brufque d'état que la forte chaleur occafionnc dans fès parties intégrantes , & peut- être auffi de la comhinaifon réelle des parties de l'huile ou du zinc qui en font un amalgame folide.

Quoi qu'il en foit, on ne connoît aucun autre moyen de fixer le mercure; les Alchimifles ont fait de vains & immenfes travaux pour atteindre ce but; l'homme ne peut tranfmuer \çs fubflances, ni d'un liquide de nature en faire un folide par l'art ; il n'appartient qu'à la Nature de changer les eifences fxj, & de convenir les élémens , & encore faut - il qu'elle foit aidée de i'éternité du temps, qui, réunie à fes hautes puiffances,

(x) Nota. Je ne puis donner une entière confiance en ce qui cfl: rapporté dans les Récréations cliimiques , par M. Parmentier , tome I , poges ^^ p & fu'iv. c'eft néanmoins ce que nous avons de plus authentique fur la tranfuiutation des métaux; on y donne lin procédé pour convertir le mercure en or , réfifiant à toute épreuve , & ce , par le moyen de l'acide du t^irtre ; ce procédé , qui efl de Confîantin , a été répéta par Mayer <5c vérifié par Al. Parmentier,, qui a foin d'avancer qu'il n'efl pas fait pour enrichir.

DES Ai I N il n AU X, 261

amené toutes les combinaifbns pofTibles , & toutes les formes dont la matière peut devenir ftifceptible.

H en efl à pcu-])rès de même des grandes recherches <Sl des longs travaux que l'on a faits pour tirer le mercure des métaux ; nous avons vu qu'il ne peut pas exifler dans les mines primordiales formées par le feu primitif; dès-lors il feroit abfurde de s'obftiner à le rechercher dans l'or, l'argent & le cuivre primitifs , puifqu'ils ont été pro- duits &L fondus par ce feu; il fembleroit plus raifonnable d'effayer de le trouver dans les matières dont la for- mation efl contemporaine ou peu antérieure à la ficnne; mais l'idée de ce projet s'évanouit encore lorfqu'on voit que le mercure ne fe trouve dans aucune mine métallique , même de féconde formation , & que le feul fer décompofé & réduit en rouille, l'accompagne quel- quefois dans fa mine , oii étant toujours uni au foufre &. à l'alkali , ce n'eft, & ne peut même être que dans les terres graffes &. chargées des principes du foufre par ia décompofition des pyrites , qu'on pourra fe permettre de le chercher avec quelque efpérance de fuccès.

Cependant plufieurs Artilles , qui même ne font pas Alchimiftes , prétendent avoir tiré du mercure de quelques fubftances métalliques, car nous ne parlerons pas Au. préiendu mercure At% prétendus Phïlofophes , qu'ils difent être plus pefant, moins volatil, plus pénétrant, plus adhérent aux métaux que le mercure ordinaire , & qui leur fert de bafe commune fluide ou foljdc ;

i()2 Histoire N aturelle

ce mercure philofophique n'eft qu'un être d'opinion, un être dont l'cxiflence n'eft fondée que fur l'idée affez fpécicufe , que le fonds Ac tous les métaux eft une matière commune , une terre que Bêcher a nommée terre vicrciirielle , &. que les autres Alchimiftes ont regardée comme la bafc des métaux. Or il me paroît qu'en retranchant l'excès de ces idées , &. les exami- nant fans préjugés , elles font aiiiïi fondées que celles de quelques autres aduellement adoptées dans la Chimie; ces êtres d'opinion dont on fait des principes , portent également flir l'obfcrvation de plufieurs qualités com- munes qu'on voudroit expliquer par un même agent doué d'une propriété générale ; or comme les métaux ont évidemment plufieurs qualités communes , il n'ell pas déraifonnable de chercher quelle peut être la fub- fiance aélive ou pafîive , qui , fe trouvant également dans tous les mciaux , fèrt de bafe générale à leurs propriétés communes ; on peut même donner un nom à cet être idéal pour pouvoir en parler & s'étendre fiir fes propriétés fuppofées ; c'e(l-là tout ce qu'on doit fe permettre , le refte ell un excès , une fource d'erreurs , dont la plus grande ell de regarder ces êtres d'opinion comme réellement exiftans, & de les donner pour des fubilances matérielles , tandis qu'ils ne repré- ièntent que par abftraélion des qualités communes de ces fubflances.

Nous avons préfenté dans le premier volume de nos

DES Minéraux. 263

Supplémcns , la grande divifion des matières qui com- pofeiit le globe de la texre; la première clafFe contient la matière vitreufè fondue par le feu ; la féconde , ks matières calcaires formées par les eaux ; la troifième , la terre végétale provenant du détriment des végétaux &. des animaux ; or il ne paroit pas que les métaux fbient cxprefTément compris dans ces trois dalles ; car ils n'ont pas été réduits en verre parle feu primitif; ils tirent encore moins leur origine des fubflances calcaires ou de la terre végétale. On doit donc les confidérer comme faifànt une clafle à part , & certainement ils font compofés d'ime matière plus denfe que celle de toutes les autres fubflances : or quelle ell cette matière il denfe î efl-ce une terre folide , comme leur dureté l'indique î eft-cc un liquide pefànt, comme leur aflinité avec le mercure femble auffi l'indiquer l efl-ce un compofé de folide & de liquide tel que la prétendue terre mcrcurielle l ou plutôt n'efl-ce pas une matière fcmblable aux autres matières vitreufes , &. qui nen diffère effentiellement que par fa denfité & fa volatilité l car on peut auffi la réduire en verre. D'ailleurs les métaux, dans leur état de nature primitive, font mêlés ëi. incorporés dans les matières vitreuiès ; ils ont fculs la propriété de donner au verre des couleurs fixes que le feu même ne peut changer ; il me paroît donc que les parties les plus denfcs de la matière tcrreflre étant douées, relativement à leur volume, d'ime plus forte

264 Histoire Naturelle

attraction réciproque , elles le font , par ceue raifon , fëparces des autres, & réunies entr'eiies fous un plus petit volume ; la fubilance des métaux prife en général ne préfente donc qu'un fèul but à nos recherches , qui feroit de trouver , s'il efî polîjble, les moyens d'augmen- ter la denfîté de la matière vitreufè, au point d'en faire un métal, ou feulement d'augmenter celle des métaux qu'on appelle imparfaits , autant qu'il fèroit néceflaire pour leur donner la penfànteur de l'or ; ce but eft peut-être placé au-delà des limites de la puiffance de notre art, mais au moins il n'ell pas abfolument chimérique , puifque nous avons déjà reconnu une augmentation confidérable de pe- fanteur fpécifique dans plulieurs alliages métalliques.

Le Chimifte Juncker a prétendu tranfmuer le cuivre en argent (yj , & il a recueilli les procédés par lefquels

(y) Voici Ton procédé ; 011 fait couler en mafîe au feu de fable , quatre parties de feuilles de cuivre, quatre parties de fublimé corroGf, ÔL deux parties de fel ammoniac ; on pulvcrife ce compofé , & on le lave dans le vinaigre jufqu'à ce que le nouveau vinaigre ne verdille plus ; on fond alors ce qui relie avec une partie d'argent , & on coupelle avec le plomb ; fuivant Juncker, le cuivre fe trouve converti en argent. M. Weber , Chimifte Allemand, vient de répéter jufqu'à deux fois ce procédé , fur i'affurance que deux perfonnes lui avoient donnée cju'il leur avoit rculTi ; il avoue qu'il n'a retrouvé que l'argent ajouré à la fufion , & il remarque , avec toute raifon , que c'efl: opérer affez heureufement & avec toute exaditude , lorf- qu'une portion du métal fin ne paffe pas par la cheminée avec l'efpérance de la tranfmutation. Alagafin phyjico- chimique de M. Wder, îorne I , page 121.

on

D E s M l N É p. AV X, 265

on a voulu tirer du mercure des métaux; je fuis perfuadé qu'il n'en exifle dans aucun métal de première forma- tion, non plus que dans aucune mine primordiale, pui/que ces métaux & le mercure n'ont pu être produits enfemble. M. Groffe, de l'Académie des Sciences, s'eft trompé fur le plomb dont il a dit avoir tiré du mercure; car Ton procédé a été plufieurs fois répété, & toujours fans fuccès, par les plus habiles Chimifles; mais quoique le mercure n'exifte pas dans les métaux produits par le feu primitif, non plus que dans leurs mines primordiales , il peut fe trouver dans les mines métalliques de dernière formation , foit qu'elles aient été produites par le dépôt &. la flillation des eaux, ou par le moyen du feu & par la fliblimation dans les terreins volcanifés.

Plufieurs Auteurs célèbres, & entr'autres Bêcher & Lancelot, ont écrit qu'ils avoient tiré du mercure de l'antimoine ; quelques - uns même ont avancé que ce demi -métal n'étoit que du mercure fixé par une vapeur arfenicale. M. de Souhey, ci-devant Médecin-confultant du Roi, a bien voulu me communiquer un procédé, par lequel il afTure aufTi avoir tiré du mercure de l'antimoine (i). D'autres Chimifles difent avoir augmenté

^-^^^^-^^-^-^^-^-^ ' - ' .■■■Il I » M^^»^^^

(■^) « Le mercure, dit M. de Souhey, eft un mixte aqueux & terreux, dans lequel il entre une portion du principe inflammable ou lui- « fureux , & qui efl chargé jufqu'à l'excès de la troifième terre de ce Bêcher ; voilà , dit-il , la meilleure définition qu'on puifTe donner « du mercure. II m'a paru Ç\ avide du principe conftituant les métaux «

Minéraux , Tome III. Ll

266 Histoire Naturelle

la quantité du mercure en traitant le fîiblimé corrofif

5> & les demi- métaux , que je fuis parvenu à précipiter ceux-ci avec y> le mercure ordinaire Tous une forme de chaux rcdudible , fans x> addition , avec fe fecours de l'eau & avec celui du feu ; j'ai ainfî 35 calcine' tous les me'taux, même les plus parfaits , d'une manière aufli irrédudible avec du mercure tiré des demi-métaux. 33 L'affinité du mercure eft grande avec les métaux & les demi- 33 métaux , qu'on pourroit , pour ainlî dire , afTurer que le mercure 33 eft au règne minéral ce que l'eau eft aux deux autres règnes. 33 Pour prouver cette afiertion , j'ai fait des eflais fur les demi- 33 métaux , & j'expoiè feulement ici le procédé fait fur le régule 73 d'antimoine; en fondant une partie de ce rcgufe avec deux paities 33 d'argent ( qui fert ici d'intermède, & qu'on fépare, l'opération finie, ) 33 on réduira cette matière en poudre qu'on amalgamera avec cinq 33 ou fix parties de mercure ; on triturera le mélange avec de l'eau 33 de fontaine , pendant douze à quinze heures , julqu'à ce qu'elle 33 en forte blanche; l'amalgame lera long-temps brun, & par les 33 lotions réitérées, l'eau entraînera peu-à-peu avec elle le régule 35 fous une forme de chaux noire entièrement fufible ; celte chaux 33 recueillie avec foin, léchée & mile au feu dans une cornue, on 33 en (épare le mercure qui s'y étoit mêlé; en. décantant l'eau qui 3J a fervi à nettoyer l'amalgame , on ne trouvera que les deux tiers 33 du poids du régule qui avoit été fondu & enfuite amalgamé avec 33 le mercure ; on fépare auflx par la fublimation celui qui étoit refté 33 avec l'argent ; alors , fi l'opération a été bien faite , l'argent fera 33 dégagé de tout alliage , & très-blanc ; le mercure aura augmente 33 fenfiblement de poids , en tenant compte de celui qui étoit mêlé 33 avec la chaux du régule qu'on fuppofe avoir été fépare par la 3) diftillation. On peut conclure que le mercure s'eft aj)proprié le 33 tiers du poids qui manque fur la totalité du régule , & que ce 33 tiers s'eft réduit en mercure , ne pouvant plus s'en féparer ; les 33 deux tiers reftans , quittent l'état de chaux fi on les rétablit par 33 les procédés ordinaires avec le flux noir ou autre fondant , &

DES Minéraux, 2^7

avec le cinabre d'antimoine (a) ; d'autres par des pré- parations plus combinées , prétendent avoir converti

quelques portions d'argent en mercure ^l)) ; d'autres

'

ï'expérience peut être répétée jufqu'à ce que le régule d'auti- <c moine foit en entier réduit en mercure. <e

Si l'on fdit évaporer jufqu'à ficcité l'eau qui a fervi aux lotions, « après l'avoir laiflé dépofer, il reliera une terre grifàtre ayant un ce goût falin, &. rougiO'ant un peu au feu ; cette terre appartenoit au « mercure qui l'a dcpofée dans l'eau qui la tenoit en diflolution. « Le mercure, dans l'opération ci-deflus, fait la fondion du <c feu , & produit les mêmes effets ; il a fait difparoître du régule ce d'antimoine fon afped; brillant , il lui a fait perdre une partie dj ce fon poids en le calcinant d'une manière irrédu(5lible , fans addition , <c avec le fecours de l'eau & de la trituration , auflî complètement ce que pourroit le faire le feu j>.

Nota. On peut remarquer dans cet expofé de M. de Souhey, que fon idée fur l'eiïence du mercure qu'il regarde comme une eau métallique , s'accorde avec les miennes ; mais j'obferverai qu'il n'efl pas étonnant que les métaux traités avec le mercure fe calcinent même par la funpie trituration ; on fait que le métal fixe retient un peu de mercure au feu de diflilîation , on fait aufli que le mercure emporte à la diftijladon un peu des métaux fixes ; ainfi , tant qu'on n'aura pas purifié le mercure que l'on croit avoir augmenté par le mercure d'antimoine , ce fait ne fera pas démontré.

(a) Voici un exemple ou deux de mercurification , tirés de Vallerius Cf. Teichmeyer. Si l'on diftille du cinabre d'antimoine fait par le fublimé corrofif, on retirera toujours des dillillations après !a revivification du mercure, plus de mercure qu'il n'y en avoit dans le fublimé corrofif. Didionna'ire de Chimie , par M. Aiacquer , crticle Mercure.

( b) Si l'on pre'psre un fublimé corrofif avec l'efprit de fel <S{

Ll i;

268 Histoire Natvrelle

ennn aflurent en avoir tire de la limaille clc fer, ainfi que de la chaux, du cuivre, <Sc même de l'argent & du plomb à l'aide de l'acide marin fcj.

C'efl par l'acide marin, & même par les fèls qui en contiennent, que le mercure eft précipité plus abon- damment de Tes difTolutions, 6c ces précipités ne font point en poudre sèche, mais en mucilage ou gelée blanche , qui a quelque confiflance ; c'eil une forte de fel mercuriel , qui néanmoins n'efl; guère foluble dans l'eau. Les autres précipites du mercure par l'alkali à.

\e mercure coulant, A qu'on fubliiiie plufieurs fois de la chaux ou de }a limai-lie d'argent avec ce lublinic , une partie de l'argent fe changera en mercure. Dtâionnaire de Chimie , par AI. Alacquer, article Mercure.

(c) La limaille de fer bien fine expofée pendant ww an à l'air libre, enluite bien triture'e dans un mortier.... remife après ce(a encore pendant un an à l'air, & enfin foumiie à une dillillation dans une cornue , fournit une matière dure qui s'attache au col du vaifTeau , & avec cette matière un peu de mercure.

Si l'on prend de la cendre ou chaux de cuivre , qu'on la niefe avec du Tel ammoniac , qu'on expofe ce mélange pendant un certain temps à l'air, & qu'on le mette en dillillaiion avec du favon, on obtiendra du mercure.

On pre'tend aufTi tirer du mercure du plomb & de l'argent corn(?, en le mêlant avec parties égales d'efprit de fel bien concentre , en les laiffant en digeftion pendant trois ou quatre femaines , & /àiurant cnfufte ce mélange avec de l'alkali volatil , & le remettant en digef- tion pendant trois ou quatre femaines ; au bout de ce temps il faut y joindre égale quantité de flux noir & de favon de Venife, &. mettre le tout en diflillanon dans une cornue de verre , il paflera du mercure dajis le récipient. Jàm , ibidem.

DESJ\IINÉRAUX, 269

par les terres abforbantcs, font en poudre de couleurs différentes; tous ces précipités détonnent avec le foufre: & M. Bayen a reconnu qu'ils retiennent tous quelques portions de l'acide diflblvant, & des fubfîances qui ont fèrvi à la précipitation.

On connoît en Médecine les grands effets du mer- cure mêlé avec les graiffes dans lefquelles néanmoins on le croiroit éteint; il fuffit de fe frotter la peau de cette pommade mercurielle, pour que ce fiuide (1 pefant foit faifi par intuiïurception & entraîné dans toutes les p arties intérieures du corps qu'il pénètre intimement , & fur lefquelles il exerce une adlion violente, qui fe porte particulièrement aux glandes, & fe manifcflc par la faii- vation ; le mercure dans cet état de pommade ou d'union avec la grailfe, a donc une très-grande affinité avec les fubflances vivantes , & fon action paroit ceffer avec la vie ; elle dépend d'ime part de la chaleur & du mouvement des fluides du corps, & d'autre part de l'extrême divifion de fès parties, qui, quoique très-pe- fantes en elles-mêmes, peuvent, dans cet état de petiteffe extrême, nager avec le fàng, & même y furnager, comme il furnagc les acides dans diffolution en formant une pellicule au - deffus de la liqueur diffolvante. Je ne vois donc pas qu'il foit néceffaire de fuppofer au mer- cure un état falin pour rendre raifon de fes effets dans les corps animés , pui/quc fôn extrême divifion Çu^cit pour les produire , fans addition d'aucune autre matière

270 Histoire Naturelle

étrangère, que celle de la graifle qui en a divifé les parties , & leur a communiqué Ton affinité avec les fubflances animales; car le mercure en mafle coulante, & même en cinabre, appliqué fur le corps ou pris intérieurement , ne produit aucun effet fenfible , & ne devient nuifible que quand il efl réduit en vapeurs par ie feu , ou divifé en particules infiniment petites par les fubfiances qui , comme \ts graiffes , peuvent rompre les liens de l'attradtion réciproque de fes parties.

D E s Af I N É R AU X. 27 1

D

DE L'ANTIMOINE.

E même que le mercure eft plutôt une eau métaU iique qu'un métal, l'antimoine & les autres fubftances auxquelles on a donné le nom de demi-métaux ne fonc dans la réalité que des terres métalliques & non pas des métaux. L'antimoine , dans fa mine , efl uni aux principes du foufre & les contient en grande quantité, comme le mercure dans fa mine efl de même abondam- ment mêlé avec le foufre &. l'alkali; il a donc pu fe former , comme le cinabre , par l'intermède du foie de foufre dans les terres calcaires & limoneufes qui con- tiennent de l'alkali , & en général il me paroît que le foie de foufre a fou vent aidé plus qu'aucun autre agent, à la minéralifation de tous les métaux ; de plus , l'anti- moine & le cinabre, quoique fi difîcrens en apparence, ont néanmoins plufieurs rapports enfemble & une grande tendance à s'unir. L'efprit de {t\ 2l autant d'affinité avec le mercure qu'avec le régule d'antimoine. D'ailleurs, quoique le cinabre diffère beaucoup de l'antimoine crud par la denfité (a) ; ils relfemblent par la quantité de foufre qu'ils contiennent ; & celte quantité de foufre efl même

(a) La pelameur Ipécitîque de l'antimoine crud eft de 40643 , ^ celle du régule d'antimoine eft de 67021 ; & de même la pelanteur fpccilique du cinabre elt 102185, & celle du mercure coulant eft de 135681.

272 Histoire N atu relle

pius grande dans {'antimoine, relativement à fbn régule, que dans ie cinabre , relativement au mercure coulant. L'antimoine crud contient ordinairement plus d'un tiers de parties fulfureufes fur moins de deux tiers de parties qu'on appelle tnétalliques ^ quoiqu'elles ne fe réduifent point en métal, mais en un fnnpie régule auquel on ne peut donner ni la duélilité ni la fixité qui font deux propriétés efTentielles aux métaux ; la plupart des mines d'antimoine, ainfi que celles de cinabre, fe trouvent donc également dans les montagnes à couches , mais quelques- unes giffent aufli comme les galènes de plomb dans les fentes du quartz en état pyriteux , ce qui leur efl commun avec plufieurs minerais formés fecondairement par l'adion des principes minéral ifateurs ; auffi les gangues qui accom- pagnent le minerai de l'antimoine font-elles de diverfè nature , félon la pofition de la mine dans des couches de matières différentes; ce font ou des pierres vitreufes & {c\\\iit\x{ks(b) ou des terres argileufes, calcaires, &c. & il eft toujours aifé d'en féparer la mine d'antimoine par une première fîifion , parce qu'il ne lui faut pas un grand feu pour la fondre, & qu'en la mettant dans des vaifîeaux percés de petits trous, elle coule avec fon foufre & tombe dans d'autres vafes, en laiffant dans les premiers toute la pierre ou la terre dont elle étoit mêlée. Cet antimoine de

(hj Les mines d'antimoine d'Erbias , dans le Limofin , font dans àes mafles de pierres fchifl.eures & vitreliibles. Noie communiquer par M, de Gùgnon , en Odobrc ij8z.

première

DES Minéraux. 273

première fiifion , & qui contient encore Ton foufre , s'appelle annmoine criui ^ 6l il efl déjà bien différent de ce qu'il étoit dans fa mine il ib préfente fans aucune forme régulière ni flruélure diftinde, & fouvent en maffes informes , qu'on reconnoît néanmoins pour des matières minérales à leur tiffu ferré, à leur grain fin comme celui de l'acier, &. au poli qu'on peut leur donner ou qu'elles ont naturellement ; mais qui s'éloignent en même temps de i'effence métallique, en ce qu'elles font caf- fantes comme le verre , & même beaucoup plus friables. Le minerai d'antimoine ie préfènte auffi en petites maffes compofées de lames minces comme celles de la galène de plomb , mais prefque toujours difpofées d'une manière affez confufè. Toutes ces mines d'anti- moine fe fondent fàiis fe décompofcr, c'eft-à-dire, fans fe féparer des principes minérali/àteiirs avec icfquels ce minéral efl uni, & dans cet état qii'on obtient aifément par la liquation , l'antimoine a déjà pris ime forme plus régulière ôl des car^6lères plus décidés ; il efl alors d'un gris -bleuâtre &. brillant, & (on tiffu efl compofe de longues aiguilles fines très-diiHncles , quoique pofées les unes fur les autres encore affez irrégulièrement,

Lorfqu'on a obtenu par la fonte cet antimoine crud, ce n'efl encore, pour ainfi dire, qu'un minerai d'anti- moine qu'il faut enfuite féparer de fon foufre; pour cela on le réduit en poudre qu'on met dans un vaiffeau de terre évafé ; on le chaullc par degrés en ie remuant ATinénmx j Tome III. Mm

274 Histoire Natu relle

continuellement ; le foufre s'évapore peu-à-peu , & l'on ne cefle le feu que quand il ne s'élève plus de vapeurs fulfareufes. Dans cette calcination, comme dans toutes ies autres , l'air s'attache à la furface des parties du minéral qui , par celte addition de l'air , augmente de volume ^& prend la forme (\\mt chaux gri/è ; pour obtenir l'antimoine en régule , il faut débarraiïer cette chaux de l'air qu'elle a fàifi en lui préfentant quelque matière inflammable avec laquelle l'air ayant plus d'affi- nité , laifTe l'antimoine dans fon premier état 6l même plus pur 6l plus parfait qu'il ne l'étoit avant la calci- nation ; mais fi l'on continue le feu fur la chaux d'an- timoine , fans y mêler des fubflances inflammables , on n'obtient , au lieu de régule , qu'ime matière compade & cafTante, d'im jaune-rougeatre plus ou moins foncé , quelquefois tranfparente & quelquefois opaque & noire fi la calcination n'a été faite qu'à demi ; les Chimifles ont donné le nom de foie d mitïmo'mc à cette matière opaque , & celui de verre d'antimoine à la première qui eft tranfparente : on fait ordinairement pafl^er l'antimoine crud par l'un de ces trois états de chaux, de foie ou de verre pour avoir fon régule ; mais on peut auffi tirer ce régule immédiatement de l'antimoine crud (c) ; en le

{ c) V. Ce régule fe tire également de l'antimoine crud, par une forte de précipitation par la voie fèche ; on le mêle pour ceU j> avec des matières qui ont plus d'affinité avec le foufre ; le mélange

DES AI I N É R A U .r. 2y<y

réJuifant en poudre , & le fàifaiit fondre en vaifTcaux clos avec addition de quelques matières , qui ont plus d'afHnité avec le foufre qu'avec l'antimoine , en forte qu'après cette rédu6lion , ce n'cft plus de l'antimoine crud mêlé de foufre, mais de l'antimoine épuré, per- fectionné par les mêmes moyens que l'on perfedionne Je ter pour le convertir en acier (^0/ ce régule d'an- timoine reffemble à un métal par fon opacité, dureté, fa denfité; mais il n'a ni dudilité, ni ténacité, ni fixité, & n'en peut même acquérir par aucun moyen ; il eft cafTant, prefque friable, & compofé de facettes d'un blanc brillant , quoiqu'un peu brun. Ce régule eft un produit de notre art, qui ne doit fe trouver dans la

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étant diflous par le feu , h fluidité met en jeu ces affinités , & le ce Técfule , plus pefant que les fcories fulfureules , forme au fond « du creufet, un beau culot cri liai 1 ifc , que les Alchimiltes ont pris ce pour l'étoile des Mages ». E/ûnens de Chimie , par Al. de Morveau , tome I , page 2-;^. Ce nom même de régule , ou petit Roi , a été donné par eux à ce culot métallique de l'antimoine, qui fembloit, au gré de leur efpérance,, annoncer l'arrivée du grand Roi , c'eft- à-dire de l'or.

fdj Cette comparaifoii efl d'autant plus ]i\(\e , que quand on convertit par la cémentation le fer en acier , il s'élève à la (urface du fer un grand nombre de petites bourfouflures qui ne font rempîies que de l'air fixe qu'il contenoit, & dont le fcu fixe prend la place; car la pefanteur qui feroit diminuée par cette perte , fi rien ne la compenibit, eft au contraire augmentée, ce qui ne peut provenir que de l'addition du feu fixe qui s'incorpore dans la lubiUnce de ce fer converti en acier.

Mm ij

zj(i Histoire Naturelle

Nature que par accident (e) , ôl dans le voifmage des feux fouterrains ; c'efl un état forcé différent de celui de rantimoine naturel , âc on peut lui rendre ce premier état en lui rendant le foufre dont on Ta dépouillé; car il fuffii de fondre ce régule avec du foufre pour en faire un antimoine artificiel , que les Chimiiles ont appelé drui- iiîo'me rcjfufcitc^ parce qu'il reffemble à l'antimoine crud, & qu'il efl compofé dans fon intérieur , des mêmes matières également difpofées en aiguilles.

Le régule d'antimoine difière encore des métaux par la manière dont il réfifle aux acides ; ils le calcinent plutôt qu'ils ne le diffolvent , & ils n'agiflent fur ce régule que par des affinités combinées; il diffère encore des métaux par fa grande volatilité; car fi on l'expofc au feu libre, il fe calcine à la vérité comme les métaux, en fe chargeant d'air fixe ; mais il perd en mcme temps une partie de fa fubflance qui s'exhale en fumée , que l'on peut condeiifer & recueillir en aiguilles brillantes , aux- quelles on a donné le nom de fleurs argenihies d'aniimohie. Néanmoins ce régule paroît participer de la nature des métaux par la propriété qu'il a de pouvoir s'allier avec eux; il augmente la denfité du cuivre & du plomb, &

diminue celle de l'ctain & du fer, il rend l'étain plus

>■ . ^— —_ _____^__^____________

(e ) On a découvert depuis peu en Auvergne du foufre doré •naùf d'antimoine , qui eft un coinpofc de régule & de foufre , mais moins intimement uni , ce qui n'étoit auparavant connu que comme une préparation cliimique. Èlémens de Chimie , par M. de Morveau, tome I , pages 122 & 12^.

DES Minéraux, 277

caflant & plus dur; il augmente aufîi la fermeté du plomb; & c'eft de cet alliage de régule d'antimoine Si de plomb, dont on fe fert pour faire les caraéleres d'im- primerie ("/); mêlé avec le cuivre & Tétain, il en rend le fbn plus agréable à Torcille 6l plus argentin; mêlé avec le zinc, il le rend fpécifiquement plus pefânt ; & de toutes les matières métalliques le b'iùnmh, & peut-être ie mercure, font les feuls avec lefquels le régule d'anti- moine ne peut s'allier ou s'amalgamer,

Confidérant maintenant ce minéral tel qu'il exifle dans ie fein de la terre , nous obferverons qu'il fe pré- fente dans des états difFérens , relatifs aux différens temps de la formation de fcs mines & aux ditférentes matières dont elles font mélangées. La première & la plus an- cienne formation de ce minéral date du même temps que celle du plomb ou de l'étain , c'efl-à-dire , du temps de la calcination de ces métaux par le feu pri- mitif & de la production des pyrites après la chute des eaux ; auffi les mines primordiales d'antimoine font en filons Si en minerais comme celles de plomb ; mais on en trouve qui font mélangées de matières ferrugineufes & qui paroiffcnt être d'une formation poflérieure. Le minerai d'antimoine , comme les galènes du plomb , ell eompofé de lames minces plus longues ou plus courtes ,

('fj Le régule d'aïui.'noine entre dans la compoùùon des caraâïèra d'Imprimerie, à la dol'e d'un huitième, pour corriger la mollellè du plomb. Jdetn , page 2^ ^,

278 Histoire Naturelle

plus étroites ou pius larges, convergentes ou divergentes, mais toutes lifTes & brillantes d'un beau blanc d'argent; quelquefois ces premières mines d'antimoine contiennent, comme celles du plomb , une quantité confidérable d'argent , &. de la décompofition de cette mine d'an- timoine , tenant argent , ii s'efl forme des mines par la flillation des eaux, qui ne font dès-lors que de troi- fième formation : ces mines qu'on appelle mine^ en -plumes , à caufe de leur légèreté , pourroient avoir été fublimées par l'adion de quelque feu fouterrain ; elles font compofées de petits lilets folides & élafliques , quoique très-déliés & affez courts , dont la couleur efl ordinairement d'un bleu -noirâtre, & fouvent variés de nuances vives ou plutôt de reflets de couleurs irifées, commue cela fe voit fur toutes les fubflances demi- tranfparentes &. très-minces ; telle eft cette belle mine d'antimoine de Feljobuîiia ^ fi recbercliée par les ama- teurs pour les cabinets d'Hiftoire Naturelle. 11 y a au/fi de ces mines dont les filets font tous d'une belle couleur rouge , & qui , félon M. Bergman , contiennent de i'arfenic (g) ; toutes ces mines fecondaires d'antimoine, grifès, rouges ou variées font de dernière formation, & proviennent de la décompofition des premières.

Nous avons en France quelques bonnes mines d'an- timoine , mais nous n'en tirons pas tout le parti qu'il

(g) Opufcules chimiques, tome II, dijfnlation 21»

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DES M 1 N È R AV X, 279

feroit aifé d'en tirer , puifque nous faifons venir Je l'étranger la plupart des préparations utiles de ce minéral. Al. le Monnicr , premier Médecin ordinaire du Roi , a particulièrement obfervé les mines d'antimoine de la haute Auvergne : t' Celle de Mercœur , à deux lieues de Brioude, étoit , dit -il, en pleine exploitation en 1-739 , & l'on fentoit de loin, i 'odeur du foufre qui s'exhale des fours dans lefquels on fait fondre la mine d'antimoine. La mine s'annonce par des veines plombées « qu'on aperçoit fur des hancs de rochers qui courent « à fleur de terre Cette mine de Mercœur fournit une très -grande quantité d'antimoine; mais il y a encore une autre mine beaucoup plus riche au Puy de la Page , « qui n'eft qu'à une lieue de Mercœur ; elle efl extrême- oc ment pure, & rend fouvent foixante-quinze pour cent; « les aiguilles font toutes formées dans les filons de cette « mine, & l'antimoine qu'on en tire efl auiïi beau que «

le plus bel antimoine de Hongrie Un des plus «

petits filons , mais des plus riches de la mine de Mer- « cœur, &. qui n'a que deux pouces de large, efl uni du « côté du nord à un rocher franc , qui efl une gangue très-dure parfemée de veines de marcafhte ; & du côté du midi , il efl contigu à une pierre affez tendre <5c graveleufe .... Après cette pierre fuivent différens lits « d'une terre fàvonneufe, légère, capable de s'effeuilleter « a l'air, & dont la couleur efl d'un jaune-citron; cette « terre mife fur une pèle à feu , exhale une forte odeur «

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28o Histoire Naturelle

de foufre, mais elle ne s'embrafe pas ». M. le Monnier a bien voulu nous envoyer, pour ie Cabinet du Roi, un morceau tire de ce filon, & dans lequel on peut voir ces (ïi^ïèr exiles matières. 11 rapporte dans ce même Mémoire, les procèdes fort (impies, qu'on met en pra- tique pour fondre la mine d'antimoine en grand (hj , & finit par obicrver qu'indépendamment de ces deux mines de la page & de Mercœur, il y en a plufieurs auires dans cette même province, qui pour la plupart font négligées (i) . M.""' Hellot & Guettard font mention de celles de Langeac , de Cha/Tignol , de Pradot, de

/h) La manière de fondre la mine d'antimoine eft fort f/mple ; on met la mine dans des pots de terre dont le premier n'ed point percé (Se dont les autres font troués dans le fond ; on fuperpofe ceux-ci fur le premier, «Se oji les remplit de mine d'antimoine caflee par petits morceaux ; ces pots font arrangés dans un four que l'on chauffe avec des fagots; on fait un feu modéré pendant les premières heures, & on. l'augmente jufcju'à le faire de la dernière violence; pendant cette opération, qui dure environ vingt-quatre heures, il fort du fourneau une fumée très-épaifle qui répand fort loin aux environs, une odeur de foufre qui cepejidant ïieiï pas nuifibJe , car aucun des habitans ne fe plaint d'en avoir été incommodé ; après l'opé- ration , on trouve de l'antimoine fondu dans le pot inférieur , & les fcories reftent au-delTus. Quand la mine efl bien pure, comme celle de la Fage , le pot inférieur doit fe trouver plein d'antimoine ; maiî celle de Mercœur n'en produit ordinairement que les deux tiers. Ob fer valions d' Hijlo'ire Naturelle , par M. le Monnier; Paris , 1 7^ g , page 202 jufqu 'a 2 0 j .

(i) Idem , page 20^.

Monte! ,

D E s M I N É R AU X. 281

Moniel, de Brioiulc (k)^ à. de quelques autres en- droits f/J. Il y a au/n des mines d'antimoine en Lorraine, en Alfàcc f^^jj, en Poitou, en Bretagne, en Angou- mois f'îij &. en Languedoc foj; enfin, M. de Genfanne a obfcrvc dans le Vivarais, un gros lilon de mine d'antimoine mclc dans une veine de charbon déterre fp);

f/;J Mémoires de l'Académie des Sciences, ûnnée lyjP'

(l) En Auvcrgae , dit M. Hellot , il y a une bonne mine d'anilinoiiie à Pégu.... une autre auprès de Langeac &. de Brioude.... une autre, dont le minéral efl fulfureux, au village de Prados ,

paroifle (}i Aly une autre au village de Afonte/ ,- vnùme paroifle

d'Aly.... une autre dans la paroiile de Mercœur , qui donnoit de l'antimoine pareil à celui de Hongrie, &: dans la paroifle de Lubillac..., ces deux liions font épuilés ; mais on tire encore de l'antimoine dans la pa^oidë d'Aly, à deux lieues de Mercœur. Traité de la fonte des inities de Schlutter , tome I , page 62.

Iw) En Lorraine, au Vdl-dc- Li'cvre , il y a une mine d'anti- moine. Idem, page p Auprès de Giromagny en Alfjce , il y en

a \\v\Q. autre qui efl mêlce de plomb. Idem, page 11.

(v) On trouve en Angoumois une mine d'antimoine tenant argent ù A'ïûucl près Aiontbrun. Idçni , page y () .

(0) Dans le comte d'Aiais en Languedoc, il fe trouve à Alalhois

luie mine d'antimoine. Idem , page 2 () En de(cend?.nt des Portes

vers Cerjfoiix , au diocèfe d'Uzès , on exploite une mine d'anti- moine. Il y a trois filons de ce minéral, à la vérité peu riches, mais le minéral cil: très-bon. On en a fondu en notre préfence , & l'antimoine qui en eft proveau nous a paru aulll beau que celui de Hongrie, Hijloire Naturelle du Languedçc , par M. de Genfanne , tome I , page i y^,

(p) En monlant .dn Foufn V'crs les Fonds , on trouve dans un

Mincraux , Tome III, Nn

282 Histoire Nature lle

ce qui prouve aufTi-bien que la plupart des exemples préccclens, que ce minéral fe trouve prcfque toujours dans les couches de la terre remuée &l ilè}^oiéQ par les eaux.

L'antimoine ne paroît pas afteéter des lieux particu- liers comme l'étain &. le mercure; il s'en trouve dans toutes les parties du monde ; en Europe , celui de Hongrie eft le plus fameux & le plus recherché.

On en trouve aufîi dans plufieurs endroits de l'Alle- magne ; & l'on prétend avoir vu de l'antimoine natif en Italie, dans le canton de Sainte-Flore proche Mana, ce qui ne peut provenir que de l'effet de quelques feux fou- terrains qui auroient liquélié la mine de ce demi-métal.

ravin limitrophe de la pareille Saint-Julien, un gros filoji d'anti- moine mêlé de charbon de terre. Ces deux folliles y font intime- ment mêle's; phénomène bien fingulier dans la minéralogie; cependant tous les indices extérieurs annoncent du charbon de terre , & il eft à préfumer que dans la profondeur l'antimoine difparoîtra , & que le charbon de terre deviendra pur. Il peut même arriver que dans la profondeur il y aura deux veines contiguës , l'une d'antimoine & l'autre de charbon ; on ne peut former fur tout cela que des conjedures.... Il y a des morceaux l'antimoine prédomine, dans d'autres , c'efl: le charbon qui efl plus abondant , & en calTant ce dernier, on le trouve tout pénétré de petites aiguilles d'antimoine.... Cette veine d'antimoine efl un filon très-bien réglé , & qui a fon alignement bien fuivi; il a une pente telle que celle que les charbons de terre afFe<flent ordinairement vers leurs têtes ; il fe trouve entre des rochers fembLbles & de la même nature que ceux qui accom- pagnent pour l'ordinaire ce dernier fofTîle. Hijfoire Naturelle du Languedoc, par Ai. de Genfanne , tome III, pages 202 & 20^.

DES Minéraux, 283

En Afie , les Voyageurs font mention de l'antimoine de Perfe (q) & de celui de Siam fr) . En Afrique, il s'en trouve, au rapport de Léon-l' Africain, au pied du Mont- Atlas (f). Enfin AJphonfë Barba dit , qu'au Pérou les mines d'antimoine font en grand nombre [t) , & quelques Voyageurs en ont remarque à Saint Domingue & en Virginie (uj.

On fait grand ufage en Médecine des préparations de l'antimoine, quoiqu'on l'ait d'abord regardé comme poifbn plutôt que comme remède. Ce minéral pris dans fa mine & tel que la Nature le produit , n'a que peu

(q) En Perfe , il y a vers la Carainanie , une mine d'antimoine fingulière , en ce qu'après l'avoir fait fondre elle donne du plomb fin. Voyage de Chardin , ù'c. Amjlerdam , i yi i , tome II , page 2^,

(r) On a découvert à Siam une mine d'antimoine. Hijloire générale des J^oyages , tome IX, page ^oj,

(f) L'antimoine fe trouve dans des mines de plomb fur les parties inférieures du Mont-Atlas, aux confins du royaume de Fez. Joann'is Leonis Àfrïcanî , tom. II , pag. yyi'

(t) L'antimoine ou jlibium efl: un minéral fort refTemblant au fancha ou plomb minéral. Il efl: poreux , luifant & friable. II y en a de jaune -rougeâtre , & d'autre tirant fur le blanc , d'un grain auffi menu que l'acier.... On trouve ordinairement dans tout le Pérou l'antimoine mêlé avec les minerais d'argent , particulièrement avec ceux appelés négrllles. On le trouve aufîi feul en beaucoup d'endroits; il fait beaucoup de tort au minerai ainfi que le bitume & le foufre. Barba , Alétallurgie , tome I , pages ^ 6 & foiv.

(u) Hifloire générale des Voyages , ?o//?f XIX , page ^oS.

Nn ij

284 Histoire Natu relle

ou point de propriétés aélives; elles ne font pas même développées après fa fonte en antimoine crud , parce au'il e/t encore cnveioppé de ion /oufre ; mais dès qu'il en efl dégagé par la calcination ou la vitrilication , les qualités fe manifeflent ; la chaux, le ioie & le verre d'antimoine font tous de puilfans cmétiques ; la chaux eft même un violent purgatif, & le régule fe laiffe attaquer par tous les fels & par les huiles; l'alkali dilfout l'antimoine crud , tant par la voie feche que par la voie humide , & le kermès minéral tire de cette diffo- lution : toutes les fubftances falines ou huileufes dé- veloppent dans l'antimoine les vertus émétiques , ce qui fèmble indiquer que ce régule n'eft pas un demi- métal pur , 6l qu'il ell combiné avec une matière faline qui lui donne cette propriété aélive , d'où l'on peut auffi inférer que le foie de foufre a fouvent eu part à fa minéralifation.

DES Minéraux. 285

DU BISMUTH ou ETAIN DE GLACE.

X^ANS le rcgne minerai, rien ne fe reffembie plus que le régule d'antimoine & le biiinuth par la flru(5iure de leur (iibflance ; ils font intérieurement compofés de lames minces d'une texture & d'une ligure femblablcs » & appliquées de même les unes contre les autres ; néan- moins le régule d'antimoine n'efl qu'un produit de l'art, & le bifmuth eft une produélion de la Nature ; tous deux , lorfqu'on les fond avec le foufre , perdent leur flniélurc en lames minces & prennent la forme d'aiguilles appliquées les unes fur les autres; mais il cft vrai que le cinabre du mercure & la plupart des autres fubilances dans Icfquelles le fôufre fc combine , prennent éga- lement cette forme aiguillée , parce que c'eft la forme propre du foufre qui fe criftallife toujours en aiguilles.

Le bifmuth fe trouve prefque toujours pur dans le fein de la terre , il n'efl pas d'un blanc auffi éclatant que le blanc du régule d'antimoine ; il efl un peu j:.u- nâtre , & il prend une teinte rougeâtre & des nuances jrifées par l'impreffion de l'air.

Ce demi-métal ell plus pefànt que le cuivre , le fer &: l'étain (aj , Sl , malgré fa grande denfité , le bifmuth

fa/ La pefanreur Ipecifique du bifmuth natif efl de C)C2C2 ; celle du régule de bifiiuuh de ^-8227, tandis que Ja pefameuif

2^6 Histoire Naturelle

eft fans ductilité ; il a même moins de ténacité que le plomb , ou plutôt il n'en a point du tout , car \\ e/l très-calTant & prefque auiïi friable qu'une matière qui ne feroit pas métallique.

De tous les métaux & demi-métaux, le bifmudi eft le plus fufible; il lui faut moins de chaleur qu'à l'étain, & il communique de la fulibilité à tous les métaux avec Icfquels on veut l'unir par la fufion ; l'alliage Je plus fudble que l'on connoiiïe, efl, fuivant Ai. Darcet, de huit parties de bi/inuth, cinq de plomb & trois d'étain (b) , & l'on a obfervé que ce mélange fe fondoit dans l'eau bouil- lante, & même à quelques degrés de chaleur au-de/Tous.

Expofé à Tadion du feu , le bifmuth fe volatilife en partie , & donne des fleurs comme le zinc , & la por- tion qui ne fe volatilife pas fe calcine à peu-près comme le plomb ; cette chaux de bifmuth prife intérieurement , produit les mêmes mauvais effets que celle du plomb , elle fe réduit au/fi de même en litharge & en verre , enfin on peut fe fervir de ce demi-métal comme du plomb, pour purifier l'or & l'argent; \\\\\ de nos plus habiles Chimifles affure même: « Qu'il efl préférable au plomb,

fpécifique du cuivre pafTé à la filière, c'eft-à-dire, du cuivre le plus comprimé, n'efl: que de 88785. Voye-^ la Table de M. Brijjon.

(b ) La fufibilite de cet alliage efl; telle que le compofé qui en réfulte fe tond & devient coulant comme du mercure, non-feulement dans l'eau bouillante , mais même au bain-marie. Diél'tonnaire de Chimie , par M. Macquer , article Alliage.

DES Minéraux. 287

parce qu'il atténue mieux les mctaux imparfaits , & « accélère la vitrilication des terres & des chaux » (cj. Cependant il rapporte dans le même article une opinion contraire : « Le bifmuth , dit-il , peut fervir comme le plomb, à la purilication de l'or & de l'argent, parce l'opération de la coupelle, quoique îiwins bien que le *< plomb, fuivant M. Pemer ». Je ne Tais fi cette dernière afTertion elt fondée ; l'analogie femble nous indiquer que le bifimuh doit purifier l'or & l'argent mieux, (Se non pas moins bim que le plomb ; car le bifmuth atténue plus que le plomb les autres métaux , non - feulement dans la purification de l'or &. de l'argent par la fonte, mais même dans les amalgames avec le mercure , puiP qu'il divife & atténue l'étain, & fur-tout le plomb, au point de le rendre, comme lui-même, auHi Huide que le mercure , en forte qu'ils paffent enfemble en entier, à travers la toile la plus ferrée ou la peau de chamois, &. que le mercure ainfi amalgamé , a be/bin d'être converti en cinabre, & enfui te revivifié pour reprendre première pureté. Le bifmutli avec le mercure forment donc enfemble un amalgame coulant, & c'eft ainfi que les Droguifles de mauvaife foi, falfifient le mercure qui ne paroît pas moins coulant, quoique mêlé d'une affez grande quantité de bifmiuh.

L'impreffion de l'air fe marque affez prompiemem

(ç) Didionnaire de Chimie , par M. Macquer , article Bifmuth.

288 Histoire Nature lle

fur le bifinuth par les couleurs irifces qu'elle produit à (urface ; & bientôt fuccè dent à ces couleurs de petites eiiiorefcences qui annoncent la décompofiùon de fa fubflance ; ces eltiorefceîîces (ont une forte de rouille ou de céru/ê aiïez femblable à celle du plomb ; cette ccrufe ell feulement moins blanche &l prefque toujours jaunâtre ; c'efl par ces efllorefcenccs en rouille ou ccrufe que s'aîriionceut les minière» de bifmuth ; fair a produit cette décompofition à la fuperlicie du terrein qui les recèle , mais dans i'mtérieur le bifmuth n'a communément fubi que peu ou ]K)int d'altération ; on le trouve juir ou feulement recouvert de cette céru/è , & ce n'ell que dans cet état de rouille qu'il efl miné- ralifc , & néanmoins dans fa mine , comme dans fa rouille , il n'efl prefque jamais altéré en entier fJ) , car on y voit toujours des points & des parties très-fenfibles de bifmuth pur & tel que la ?^Jamrc le produit.

Or cette fubflance, la plus fulible de toutes les matières métalliques <Sc en même temps {\ volatile, & qui trouve dans fon état de nature en fijbfîance pure , n'a pu être produite comme le mercure que très-long-temps après ies métaux <Sc autres minéraux plus fixes «Si. bien plus difficiles à fondre ; la formation à\\ bifmuth cfl donc

(d) Quoiqu'on n'ait pas trouvé en Allemagne de billnuih uni au foutre, il efl cependant certain , dit M. Bergman , cju'il y en a dans quelques montagnes de Sucdc <!^ particulièrement à Hiddarliywari çn Mv^eriîmaniQ,

ù peu-prèi

DES Minéraux. 289

à-peu près contemporaine à celle du zinc , de l'antimoine & du mercure ; les matières métalliques plus ou moins volatiles les unes que les autres, & toutes reléguées dans r atmosphère par la violence de ia chaleur, n'ont pu tomber que fucce/fivement Sl peu de temps avant la chute des eaux. Le bifmuth en particulier n'eft tombé que long - temps après les autres & peu de temps avant le mercure , aufTi tous deux ne trouvent pas dans les montagnes vitreufès ni dans les matières produites par le feu primitif, mais feulement dans les couches de la terre formées par le dépôt des eaux.

Si l'on tient le bifinuth en fufion à i'air libre & qu'on le lailfe refroidir très -lentement , il offre à fa (iirface de beaux criftaux cubiques & qui pénètrent à l'intérieur; fi , au lieu de le laiffer refroidir en repos, on le remue en foutenant ie feu , il convertit bientôt en une chaux grife qui devient enfuite jaune & même un peu rouge par la continuité d'un feu modéré , & en augmentant le feu au point de faire fondre cette chaux , elle fe convertit en un vert jaune - rougeàtre qui devient brun lorfqu'on le fond avec du verre blanc , Sl ce verre de bifmuth , fans être auffi aélif , lorfqu'il efl fondu, que le verre de plomb, ne lailfe pas d'attaquer les creufèts.

Ce demi -métal s'allie avec tous les métaux; mais il ne s'unit que très-difficilement par la fufion avec les autres demi-métaux & terres métalliques ; l'antimoine Al'méraiLX , Tome IIL O o

290 Histoire Natu re lle

<&. le zinc , ie cobalt & rarfenic fe refurent tous à cette union : il a en particulier fi peu d'affinité avec le zinc que quand on les fond enfemhle ils ne peuvent mêler; le bifinuth , comme plus pefant, defcend au fond du creufet, &. le zinc refle au-defTus & le recouvre. Si on mêle le bifmuth en égale quantité avec Tor fondu, il le rend très-aigre & lui donne fa couleur blanche. Il ne rend pas l'argent fi caiïant que Tor , quoiqu'il lui donne auiïï de l'aigreur fans changer fa couleur ; il diminue le rouge du cuivre ; il perd lui-même couleur blanche avec le plomb, 6c ils forment enfèmble un alliage qui eft d'un gris-fombre ; le bifmuth mêlé en petite quantité avec i'étain lui donne plus de brillant & de dureté ; enfin il peut s'imir au fer par un feu violent.

Le foufre s'imit auiïî avec le bifmuth par la fufjon , & leur compofé fe préfente comme le cinabre & l'an- timoine crud en aiguilles criflallifées.

L'acide vitriolique ne difTout le bifmuth qu'à l'aide d'une forte chaleur , <Sc c'eft par cette réfiflance à l'aétion des acides qu'il fe conferve dans le fein de la terre fans altération , car l'acide marin ne l'attaque pas plus que le vitriolique ; il faut qu'il /bit fumant , & encore il ne l'entame que foiblement & lentement ; l'acide nitreux feul peut le diffoudre à froid , cette diffolution qui fe fait avec chaleur & efîèrvefcence eft traniparente & blanche quand le bifmuth eft pur; mais

DES Minéraux, 291

elle fc colore Je vert s'il efl mclé de nickel , <Sc elle devient rouge de rofe & cramoifie s'il eft mélangé de cobalt ; toutes ces diffolutions donnent un fèl en petits criflaux au moment qu'on les laifTe refroidir.

C'efl en ])récipitant le bifinuth de fcs diffolutions, qu'on l'obtient en poudre blanche, douce & luiiànte , & c'efl avec cette poudre qu'on fait le fard qui s'applique fur la peau. Il faut laver plufieurs lois cette poudre pour qu'il n'y refle point d'acide, & la mettre enfuite dans un flacon bien bouché ; car l'air la noircit en affez peu de temps, & les vapeurs du charbon ou les mauvaifès odeurs des égouts, des latrines, &c. changent prefque fubitement ce beau blanc de perle en gris-obfcur, en forte qu'il efl fbuvent arrive aux femmes qui fc fervent de ce fard de devenir tout -à- coup aufîi noires qu'elles vouloient paroître blanches.

Les acides végétaux du vinaigre ou du tartre , non plus que les acerbes , tels que la noix de galle , ne diifolvent pas le bifmuth, même avec le fecours de la chaleur , à moins qu'elle ne foit pouffée jufqu'à produire l'ébullition ; les alkalis ne l'attaquent auffi que quand on les fait bouillir , en forte que dans le fein de la terre ce demi-métal paroît être à l'abri de toute injure &. par conféquent de toute minéralifàtion , à moins qu'il ne rencontre de l'acide nitreux qui feui a la puifîance de l'entamer ; & comme les fcls nitreux ne fe trouvent que très -rarement dans les mine-s , il n'efl pas étonnant

Oo ij

292 Histoire N atu relle

que \t bifmuth qui ne peut être attaqué que par cet acide du nitre ou par l'adion de l'air ne Te trouve que fi rarement minéralifé dans le fein de la terre.

Je ne fuis point informé des lieux ce demi-métal peut fe trouver en France ; tous les morceaux que j'ai eu occadon de voir venoient de Saxe , de BoJième & de Suède ; il s'en trouve auiïi à Saint-Domingue (e) , & vraifemblablement dans plufieurs autres parties du monde : mais peu de Voyageurs ont fait mention de ce demi-métal , parce qu'il n'ed pas d'un ufàge néceffaire & commun; cependant nous l'employons non-feulement pour faire du blanc de fard , mais auffi pour rendre l'étain plus dur & plus brillant; on s'en fert encore pour polir le verre (f) & même pour l'étamer (g) , Si c'efl

{ej Hiftoire gcncrale des voyages, tome XII, page 21 S,

(f) Tranfadions philofophiques , iV." S9^ > I^ovembre IJ26.

(g) Je me fuis afTuré , m'écrit M. de Morveau , que le bifinuth fert encore à iVtamage des petits verres non polis qui viennent d'Allemagne, en forme de petits miroirs de poche, ou du moins qu'il entre pour beaucoup dans la compofition de cet e'tamage dont on fait un fecret , car l'ayant recueilli fur plufieurs de ces miroirs , & pouffé à la fufion , j'ai obtenu un grain métallique qui a donné la chaux jaune du bifniuih ; ce procédé feroit fort utile pour étamer les verres courbes , peut-être même pour réparer les taches des glaces que l'on nomme rouUlées. A la feule infpedion des miroirs d'Allemagne, on juge aiftment que cette compofition s'applique d'une manière bien différente de l'ctamage ordinaire , car iJ e/l bien plus épais & d'une épaifleur très-inégale ; on y remarque des gouttes, comme fi on eût pafTc un fer à fouder pour étendre &

DES Minéraux. 293

de cet ufage qu'il a reçu le nom A'étnm de glace.

Les expériences que l'on a faites fur fes propriétés relatives à la Médecine , n'ont découvert que des qua- lités nuifibles , & chaux pri/e intérieurement produit des effets femblables à ceux des chaux de plomb, & auffi dangereux ; on en abufè de même pour adoucir Jes vins trop acides & défagréables au goût.

Quelques Minéralogifles ont écrit que la mine de bifmuth pouvoit fervir comme celle du cobalt, à faire Je verre bleu d'azur: Elle laiife, difent-iis (h) , fuinter

faire couler le bifiiiuth à !a fuiface du verre ; ce qu'il y a de certain , c'efl: que l'adhérence eft bien plus forte que celle de nos feuilles d'étain.

Il me femble que le bifmuth entre auiïl dans l'amalgame dont on fe fert pour étamer la furface intérieure des globes. Note commu- niquée par Ad. de Aiorveau.

(h) La mine de bifmuth fert aufîi à faire le bleu d'azur ; à feu ouvert & doux , elle laifie aifémeni fuinter une fubftance femi- métdllique que l'on nomme bijmuth ou étain de glace, & elle laifie wïXQ pierre ou une terre grile & fixe.

Il faut féparer , autant qu'il ert pofllble , cette mine, fi elle eft pure , du cobalt véritable , pour en rafl^mbler le bifmuth ; mais le mélange de ces deux matières minérales eft ordinairement intime dans la mine , que cette féparation eft prefque impofijble ; c'ell pourquoi l'on trouve fouvent , dans les pots à vitrifier, une fubltance réguiine qui s'eft j>récipitée ordinairement d'une couleur blanchâtre tirant fur le rouge. Cette fubftance n'eft prefque jamais \\n véritable bifmuth , & tel qu'on le retire de fa mine par la fonte; mais elle eft toujours mêlte avec une matière étrangère qui eft la

294 Histoire Natu relle

» aifcment une fubflaiice femi-mctalliqae, que l'on nomme » bipnuth ou cuiin de glace, 6c enfuite elle laiife une terre o-rife & fixe, qui par vitrification donne le bleu d'azur ». Mais cela ne prouve pas que le bifmuth fourniffe ce bleu; car dans mine il efl très-/buvenr mclé de cobalt, & ce bleu provient fans doute de cette dernière matière: la terre gr'ife à' fixe n'efî pas une terre de bi/inuth; mais la terre du cobalt qui étoit mêlé dans cette mine, & auquel même le bifinuth n'ctoit pas intimement lié , parce qu'il s*en fépare à la première fonte & à un feu très-modéré; &. nous verrons qu'il n'y a aucune affinité entre le cobalt & le bifinuth, car quoiqu'ils fe trouvent très-fouvent mêlés enfemble dans leurs mines, chacun y conferve fa nature, & au lieu d'être intimement uni, le bifinuth n'efl qu'interpofc dans les mines de cobalt, comme dans prefque toutes les autres il fe trouve, parce qu'il conferve toujours fon état de pureté native.

terre fixe du cobalt. Ainfi on la pulvérife de nouveau pour fa joindre à d'autres mélanges de mine , de fable & de fel aikali , qu'on met dans les pots pour les vitrifier. Traité de la fonte des mines de Schlutter , tome I , page 248.

DES Minéraux. 295

L

DU Z I N C (a).

E Zinc ne fe trouve pas comme le bifmuth, dans un état natif de mJnéral pur, ni même comme l'ami- moine, dans une feule efpcce de mine ; car on le tire également de la calamine ou pierre calaminaire & de la blende , qui font deux matières différentes par leur compofuion & leur formation, & qui n'ont de com- mun que de renfermer du zinc: la calamine préfènce en veines continues comme les autres minéraux ; la blende fe trouve au contraire , difperfte &. en maffes féparées dans prefque toutes les mines métalliques : la calamine efl principalement compofée de ziac & de fer fh); la blende contient ordinairement d'autres mi- néraux avec le zinc (c). La calamine efl d'une couleur

(a) Paracelfe efl le premier qui ait employé le nom de zinc. Agricola le nomme contre -feyn ; on l'a appelé Jlannum indicum , parce qu'il a été apporté des Indes en afTez grande quantité dans le fiècle dernier ; les auteurs Arabes n'en font aucune mention , quoique l'art de tirer Je zinc de mine exifte depuis long -temps aux Indes orientales. Voye-^ la D'ijfer talion de M. Bergman fur le yjnc.

(b) M. Bergman a fournis à l'analyfe I "^'amine de Hongrie, & xl a trouvé qu'elle tenoit au quintal quatre-vingt-quatre livres de chaux de zinc, trois livres de chaux de fer, douze de filex & une d'argile , fur quoi j'obferverai que la matière de l'argile & celle du fdex ne font qu'une feule & même fubflance , puifque le filex fe réduit en argile en fe décompofant par les élémens humides.

(c) M. Bergman a trouvé que la blende noire de Danemora

zf)6 Histoire Naturelle

jaune ou rougeâtre , & aflez aifce à cliftingucr des autres minéraux ; ia biende au contraire , tire Ton nom de Ton apparence trompeufe & de fa forme équivoque (dj : il y a des blendes qui reflemblent à la galène de plomb (e); d'autres qui ont l'apparence de la corne,

&

tenoit au quintal quarante-cinq livres de zinc, neuf de fer, fix de plomb, une de régule d'arfenic , vingt- neuf de foufre , quatre de liiex <Sc fix d'eau.

(d) Ce mot blende fignifîe dans le langage des Mineurs Allemands une fubftance trompeufe , parce qu'il y en a qui relfemble à la galène de plomb. Didionnaire d' Hijîoire Naturelle , par AI.de Bomare , article Blende ( blind , éblouir , tromper les yeux).

(e ) On a donné à la mine de /aie b/anchâtre le nom de fûujfc galcne ; mais quoique le tiilu de cette dernière foit à peu - près feuilleté comme celui de la galène; ie^ feuillets qui la compofent font cependant moins diftinds & moins éclatans que ceux de ia mine de plomb fulfureufe ; fa pefanieur fpécifique efl: d'ailleurs beaucoup moins confidérable ; au refle il eft aifé de diflinguer la blende d'avec la galène , car fi Ton gratte avec un couteau le morceau dont l'apparence eft équivoque , il s'en dégagera , fi c'eft une blende, une odeur de foie de foufre des mieux caradérifées.... jM. de Born nous a fait connoître une blende tranl'parente , d'un vert -jaunâtre qui fe trouve à Ratieborzis en Bohème. J'en ai vu des échantillons qui avoient la tranfparence & la couleur de h topafe & de la cryfolite. Enfin , quoique le tifl'u de la blende foit prefque toujours lamelleux ou feuilleté , il s'en rencontre quelquefois des morceaux qui , par leur tiffu fibreux ou ilrié , imitent alfez bien la mine d'antimoine grife ; on les en diflingue facilement à leur couleur d'un gris-fombre & à l'odeur de foie de foufre qu'on en dégage par le frottement. . . . Cette dernière Ibrie de blende

efl

DES AllNÉRAUX, 297

&: que îes Mineurs Allemands appellent hom - hlcndc ; d'autres qui font noires & luifàntes comme la poix, auxquels ils donnent le nom de jntch-blcîide , & d'autres encore qui font de différentes couleurs grifes, jaunes, brunes, rougeâtres, quelquefois criflallifëes , & même tranff)arentes , mais plus fouvent opaques &. fans figure régulière. Les blendes noires, grifes & jaunâtres font mêlées d'arfenic , les rougeâtres doivent celte couleur au fer; celles qui font transparentes &. criflallifées , font chargées de foufre &. d'arfenic ; enfin toutes contiennent une plus ou moins grande quantité de zinc.

Non -feulement ce demi -métal fe trouve dans la pierre calaminaire & dans les blendes, mais il exifle auffi en affez grande quantité dans plufieurs mines de fer concrètes ou en grains, & de dernière formation; ce qui prouve que le zinc efl difféminé prefque partout en molécules infenfibles , qui fe font réunies avec la fer, dans la pierre calaminaire & dans les mines fecon- daires de ce métal , & qui fe font au/fi mêlées dans les blendes avec d'autres minéraux & avec des matières pyriteufes; ce demi-métal ne peut donc être que d'une formation poftérieure à celle des métaux, & même poflérieure à leur décompofition, puifque c'efl prefque

efl commune dans les mines de Pompe'an ; elle a moins d'e'clat que la manganèfe , & ne tache point les doigts comme cette fubftance. Lettre du Doâeur Dcmejîe , tome II , pages i jC , l S 0 & j 8 1 ,

Minéraux , Tome IIL P p

i^S Histoire Naturelle

toujours avec le fer décompofé qu'on le trouve réuni. D'ailleurs comme il efl très-volatil, il n'a pu fe former qu'après les métaux & minéraux plus fixes , dans Je même temps à peu -près que l'antimoine, le mercure &. l'arfenic, ils étoient tous relégués dans ratmofphère, avec les eaux <5c les autres fubftances volatiles pendant i'incandcfcence du Globe, & ils n'en font defcendus qu'avec ces mêmes fubflances ; auiïî le zinc ne trouve dans aucune mine primordiale des métaux, mais feule- ment dans les mines fécondai res produites par la décom- pofuion des premières.

Pour tirer le zinc de la calamine ou des blendes, il fuffit de les expofer au feu de calcination, ce demi* métal fe fublime en vapeurs, qui par leur condenfation forment de petits flocons blancs & légers, auxquels on a donné le nom dejleurs de imc.

Dans la calamine ou pierre calaminaire , Je zinc eil fous la forme de chaux; en faifant griller cette pierre, elle perd près d'un tiers de fon poids ; elle s'effleurii à l'air , & fe préfente ordinairement en malfes irrégu- lières , quelquefois criftallifées , elle efl prefque toujours accompagnée ou voifine des terres alumineufes ; mais quoique la fubflance du zinc foit difféminée par-tout, ce n'efl qu'en quelques endroits qu'on trouve de Ja pierre calaminaire. Nous citerons tout-à-l'heure les mines les plus fameufes de ce minéral en Europe, &. nous favons d'ailleurs que Je toutenagufj qu'où nous apporte

DES Minéraux, 299

des Indes orientales , eft un zinc mémo plus pur que celui d'Allemagne; ainfi l'on ne peut douter qu'il n'y ait des mines de pierres calaminaires dans plufieurs endroits des régions orientales, puifque ce n'eft que de cette pierre qu'on peut tirer du zinc d'une grande pureté. ^**'

La minière la plus fameufe de pierre calaminaire, eft celle de Calmjherg près d'Aix-la-Chapelle, elle cfl mêlée avec une mine de fer en ocre ; il y en a une autre qui efl mêlée de mine de plomb au-deflbus de Namur. On prétend que le mot de Calamine, efl le nom d'un territoire d'aflez grande étendue , près des confins du duché de Limbourg, qui efl plein de ce minéral : « Tout le terrein , dit Lémery , à plus de vingt lieues à la ronde , efl fi rempli de pierres cala- et minaires , que les grofTes pierres dont on fert pour « paver étant expofées au foleil , laifTent voir une grande c< quantité de parcelles métalliques & brillantes ». M. de Genfanne en a reconnu une minière de plus de quatre toifes de largeur, au-defTous du château de Montalet, diocèfe d'Uzès: on y trouve des pierres calaminaires ferrugineufes , commue à Aix-la-Chapelle, & d'autres mêlées de mine de plomb , comme à Namur , & l'on y voit auffi des terres alumineufes ; on en trouve encore dans le Berri près de Bourges, & dans l'Anjou & le territoire de Saumur, qui font également mêlées de parties ferrugineufes.

Pp i;

3oa Histoire N atu r e lle

En Angleterre on exploite quelques mines de pierre calam inaire clans le comté de 5ummeriet; la pierre de cette mine eft rougeatre à /a iurface, & d'un jaune- verdâtre à l'intérieur; elle eft très - pelante , quoique trouée & comme cellulaire ; elle e/t au/Ti très-dure & donne des étincelles ior/qu'on la choque contre 1 acier; elle eft foluble dans les acides : celle du comté de Nottingham en diffère, en ce qu'elle n'eft pas folubie, & qu'elle ne fait point feu contre Tacier, quoiqu'elle foit compaéte, opaque &. cellulaire comme celle de Sommer/ët ; cWe en diffère encore par la couleur qui eft ordinairement blanche , & quelquefois d'un vert - clair criftallifé. Ces ditîérences indiquent affez que la cala- mine en général , eft une pierre compofée de différens minéraux, & que nature varie fuivant la quantité ou k qualité des matières qui en conftituent la fubftance: îe zinc eft la feule matière qui /bit commune à toutes Jes efpèces de calamine ; celle qui en contient le plus eft ordinairement jaune; mais on peut fe fervir de toutes pour jaunir le cuivre rouge; c'eft pour cet ufage qu'on ies recherche & qu'on les travaille , plutôt que pour en faire du zinc qui ne s'emploie que rarement pur, & qui même n'eft pas auifi propre à faire du cuivre jaune que la pierre calaminaire : d'ailleurs , on ne peut en tirer le zinc que dans des vaiffeaux clos, parce que non- feulement il eft très - volatil , mais encore, parce qu'il s'enfîamme à l'air libre; & c'eft par la cémentation du

DES Minéraux, 301

cuivre rouge avec la calamine , que la vapeur cJu zinc , contenu dans cette pierre , entre dans le cuivre , lui donne la couleur jaune , & le convertit en laiton.

La calamine eft fouvent parfemce de petites veines ou filets de mine de plomb , die fe trouve même fréquemment mêlée dans les mines de ce meral , comme dans celles de fer, de dernière formation; & lorfqu'elle y eft très - abondante , comme dans la mine de Ram- mellberg près de Golîar, on en tire le zinc en même temps que le plomb, en faifànt placer dans le fourneau de fufion, un vaifTeau prefque clos à l'endroit l'ardeur du feu n'efl pas alTez forte pour entiammcr le zinc , & on le reçoit en fubflance coulante; mais quelque précaution que l'on prenne en le travaillant, même dans des vaifleaux bien clos , le zinc n'acquiert jamais une pureté entière , ni même telle qu'il doit l'avoir pour faire d'auffi bon laiton qu'on en fait avec la pierre calaminaire, dont la vapeur fournit les parties les plus pures du zinc ; &. le laiton fait avec cette pierre efl du6lile, au lieu que celui qu'on fait avec le zinc eft toujours aigre & caflant.

Il en eft de même de la blende ; elle donne comme la calamine par k cémentation , du plus beau 6l du meilleur laiton qu'on ne peut en obtenir par le mé- lange immédiat du zinc avec le cuivre ; toutes deux même n'ont guère d'aiure ufage , & ne font rechercbées Sl travaillées que pour faire du cuivre jaune; mais.

302 Histoire Naturelle

comme je l'ai déjà dit, ce ne font pas les deux feules niaiières qui contiennent du zinc; car il eft très-géné- ralement répandu, & en afTez grande quantité dans plufieurs mines de fer; on le trouve au/fi quelquefois fous la forme d'un fel ou vitriol blanc , & dans la blende, il efl: toujours combiné avec le fer & le foufre.

Il forme a/Tez fouvent dans \t% grands fourneaux des concrétions qui ont paru à nos Chimiftes (f)^

(f) « II y a des blendes artificielles qui imitent parfaitement les blendes naturelles dans leur tifTu , leur couleur & leur phofpho- 3> relcence. . . . J'en ai vu un morceau d'un noir luifant & feuilleté » provenant des fonderies de Saint- Bel. . . . \3\\ autre morceau venant du même iieu , donnoit , outre l'odeur du foie de foufre , »» des étincelles lorfqu'on le grattoit avec un couteau , & n'en donnoit » point avec la plume. ... & un troifième morceau venant des fon- »> deries de Saxe, & qui eft de couleur jaunâtre , étoit fi phofphorique « qu'en le frottant de la plume on en tiroit des étincelles comme j> de la blende rouge de Schasffenberg ». Lettre du Doâeur Danefe , tome II, pages I y p Ù" 180. Nota. Je dois oblerver qu'on trouvoit en effet de ces blendes artificielles dans les laitiers des fonderies, mais que jufqu'ici Ton ne favoit pas les produire à volonté, & que même on ne pouvoit expliquer comment elles s'étoient formées ; on penfoit au contraire que l'art ne pouvoit imiter la Nature dans la combinaifon du zinc avec le foufre. M. de Morveau eft le premier qui ait donné cette année 1780, »n procédé pour faire à volonté l'union direâe du zinc & du {owixe \ il fuffit pour cela de priver ce demi-metal de fa volatilité en le calcinant , & de le fondre enfuite avec le foufre ; il en réfufte une vraie pyrite de zinc qui a, comme toutes les autres pyrites, une forte de brillant métallique»

DES Minéraux. 303

tomes femblabies aux blendes naturelles. Cependant il y a toute raifon de croire que les moyens de leur formation font bien diffcrens ; ces ])lendes artificielles , produites par l'adion du feu de nos fourneaux, doivent difïërer de celles qui fe trouvent dans le fein de la terre , à moins qu'on ne fuppofe que celles - ci ont été formées par le feu des volcans, & cependant il y a toute raifon de penfer que la plupart au moins n'ont été produites que par l'intermède de l'eau (gj , & que le foie de foufre, c'eft-à-dire, l'alkali mêlé aux prin- cipes du foufre, a grande part à leur formation.

Comme le zinc eft non-feulement très-volatil, mais fort inflammable, il fe brûle dans les fourneaux l'on fond les mines de fer, de plomb, &:c. qui en font mêlées ; cette fumée du zinc à demi-brûlé, fe condenfè fous une forme concrète, contre les parois des fourneaux & cheminées des fonderies &. affineries; dans cet état on lui donne le nom de cadin'ie des foiirnemix; c'eil une concrétion de fleurs de zinc, qui s'accumulent fouvent au point de former un enduit épais contre les parois de ces cheminées; la fubflance de cet enduit efl dure, elle jette des étincelles lorfqu'on la frotte rapidement ou qu'on la choque contre l'acier; les parties de cette

fg)}A. Bergman croit , comme moi, que les blendes naturelles ont été formées par l'eau , & il fe fonde fur ce qu'elles contiennent réellement de l'eau ; il dit aufîi qu'on peut les imiter en unilî'ant par la fufion le zinc , le fer & le foufre.

304 Histoire Naturelle

cacimie qui Te font le plus élevées , & qui font attachées au iiaut de la cJicminée, font les plus pures & les meilleures pour faire du laiton (h) , parce que la cadmie qui s'efl: fublimée & élevée fi haut, y eft moins mclée de fer, de plomb, ou de tout autre minéral moins volatil que le zinc ; au refte on peut aifémcnt la recueillir, elle fe lève par écailles dures , &. il ne faut que la pul- vérifèr pour la mêler & la faire fondre avec le cuivre rouge, & c'eft peut-être la manière la moins coûteufe de faire du laiton.

Le zinc, tel qu'on l'obtient par la fufion, efl d'un blanc un peu bleuâtre & affez brillant; mais quoiqu'il fe terniffe à l'air moins vite que le plomb , il prend cependant en affez peu de temps , une couleur terne I

/h) On connoifloit très-bien , dès le temps de Pline , la cadmie des fourneaux & on avoit déjà remarqué qu'elle étoit de qualité A de bonté différentes , fuivant qu'elle fe trouvoit fublimée plus haut ou plus bas dans les cheminées des fonderies : EJl îpfe lapis ex quo fit ces , cadmia vocatur. . . . Hic rurfus in fornacibus exijlit , aliamque nominisfui originemrecipit : ft autem egejlâ fammis alque fatu tenuijftmâ parte materiœ , & cameris lateribufve fornacum pro quantitate levitatis applicatâ. TenuiJJima ejl in ipfo fornacum ore qua fammœ eluâantur , appellata capnitis , exujla ù" nimiâ levitate Jimi/is favilla : interîor optima , cameris dependens , Ù' ab eo argumenta botrytis cognominata ; tertia ejl in lateribus fornacum , quœ propter gravitalem ad caméras pervenire non potuit ; hcec dicitur placitis .... fuunt & ex duo alia gênera; onychitis , extra pêne cœrulea , intus onyckiiis macuUs fimilis ; ojlracitis , tota nigra , & cceterarum fordidijjîma . . . Omnis autem cadmia in cupri fornacibus optima. Plhi. lib. XXXI V, cap. x.

DES Minéraux. 30;

& d'un jaune- vcrdàtrc, & les nuances différentes de couleur dépendent beaucoup de Ton degré de pureté; car en le traitant par les procédés ordinaires, il con- ferve toujours quelques petites parties des niatières avec lefquelles il étoit mêlé dans h mine ; ce n'eft que très- récemment qu'on a trouvé le moyen de le rendre plus pur. Pour obtenir le zinc dans fa plus grande pureté , il faut précipiter par le zinc mcme ion vitriol blanc, ce vitriol décompofé endiite par l'alkali , donne une cliaux qu'il fuffit de réduire pour avoir un zinc pur & ians aucun mélange.

La fubflance du zinc efi: dure & n'eft point caftante , on ne peut la réduire en poudre qu'en la faifant fondre & la mettant en grenailles ; auftl acquiert-elle quelque ducliiité par l'addition des matières inflammables en la fondant en vaifteaux clos : fa dcnftté eft un peu plus grande que celle du régule d'antimoine, & un peu moindre que celle de l'étain^/^. Indépendamment de ce rapport aftl^z prochain de denfité , le zinc en a plufieurs autres avec J'étain ; il rend lorfqu'on le plie, un petit cri comme l'étain (kj , il rcfifte

(i) La pefameur Iptcifiqiie du régule de zinc ell de 71^08 ; celle du régule d'antimoine de 67021 , & celle de l'étain pur de Cornouaille de 72914; la pefanteur fpécifique de la blende n'eft que de 41665 ; il y a donc à peu-près la méine proportion dans les denfités relatives de la blende avec le zinc , de l'antimoine crud avec le régule d'antimoine , & du cinabre avec le mercure coulant.

fk) Le zinc , lorfqu'on le rompt , a le même cri que l'étain ; lorlqu'on le mêle avec du plomb , cei alliage a encore le même Aihicraux , Tome III. Qq

3o6 Histoire Natu relle

Je même aux imprcfTions des élcmcns humides , &. ne fe convertit point en rouille ; quelques Minéralogiftes l'ont même regardé comme une efpèce d'étain (ij , 6l il efl vrai qu'il a plufieurs propriétés communes avec ce métal; car on peut étamer le fer & le cuivre avec le zinc comme avec l'étain ; & l'un de nos Chimifles a pré- tendu que cet étamage avec le zinc {"^/jj^ qui efl moins fufible que l'étain, &l par conféquent plus durable, ed en même temps moins dangereux que l'éiamage ordi- naire, dans lequel les Chaudronniers mêlent toujours du plomb : on connoît les qualités limefles du plomb , on fait aufTi que l'étain contient toujours une petite quantité

cri ; les Potiers d'etain emploient le zinc dans leurs ouvrages & pour leurs foudures. H'foire de l'Académie des Sciences, année ly^i,

(l) Schlutter , dit Al. Hellot , regarderoit volontiers le zinc comme une efpèce d'étain , s'il étoit plus malle'able , & il foupçonne que venant d'une mine auiïi fulfureufe que celle de Rammelberg. ... il conferve encore une partie de ce ioufre ; cette idée , leion Schlutter , efl d'autant plus vraifemblable que par le foufre on peut rendre aigre le meilleur étain. . . . On fait aufîi que le zinc & l'étain peuvent également rendre jaune le cuivre rouge ; il cite pour exemple le métal fingulier qu'Alonzo Barba a décrit dans Ton Traité des mines & des métaux. Traité de la fonte des mines , i/c, tome II , foge -2/7; mais le fentimem de Schlutter iur le zinc ne nous parojt pas aflez fondé , car le zinc ne peut différer de ïéiàia par ie foufre minéraliiateur , puifqu'il n'en contient pas.

(m) M. Malouin, de l'Académie des Sciences, & Médecin de ia Faculté de Paris.

D E s M I N É R A U X. 5 07

tl'arfenic, &. il faut convenir que le zinc en contient aiiffi ; car iorfqu'on le fait fufer fur les charbons ardens, il répand une odeur arfenicaie qu'il faut éviter de refpircr; &. tout confidéré , l'étamage avec du bon ctain doit être préféré à celui qu'on feroit avec le zinc fn) , que le vinaigre diffout & attaque même à froid.

Si ces rapports femblent rapprocher le zinc de l'étain, il s'en éloigne par pluficurs propriétés; il cfl beaucoup moins fufible; il faut qu'il fbit chauifé prefque au rouge avant qu'il puifle entrer en lufion; dans cet état de fonte, furface fe calcine ians augmenter ie feu , & fe convertit en chaux grife , qui diffère de celle de l'étain en ce qu'elle efl bien plus aifément rédu<5tib!c , & que quand on les pouffe à un feu violent, celle de l'étain ne fait que blanchir davantage , (ii enfin fe convertit en verre , au lieu que celle du zinc s'en- flamme d'elle - même & fans addition de matière com- buflible. On peut même dire qu'aucime autre matière, aucune fubibnce végétale ou animale , qui cependant fèmblent être les vraies matières combuflib'es, ne donnent une flamme auffi vive que le zinc; cette flamme efl fans .fumée & dans une parfaite incandefcence ; elle efl accompagnée d'une fi grande quantité de lumière blanche,

(n) Cet etamage avec le zinc a e'tc approuvé par la Faculté de Médecine de Paris , mais condamné par l'Académie des Sciences & par la Société royale de Médecine; & il a auffi été démontre nuilLb'c, par les expériences faites à l'Académie de Dijon, en i77P»

Qqij

3o8 Histoire Naturelle

que les yeux peuvent à peine en fupporter l'éclat cblouif^ /ànt : c'elt au mélange de la limaille de fer avec du zinc, que font dûs les plus beaux effets de nos feux d'artifice.

Et non-feulement le zinc eft par lui-mcme très-com- buflible, mais il eft encore phofphorique ; fa chaux paroît lumincufe en la triturant, & fcs Heurs recueillies au moment qu'elles s'élèvent, & placées dans un lieu obfcur , jettent de la lumière pendant un petit temps foj.

Au rcfle, le zinc n'efl pas le fcul des minéraux qui s'enflamment loriqu'on les fait rougir ; l'arfenic , le cuivre & même l'antimoine, éprouvent le même efîct; le fer jette aufii de la flamme lorfque l'incandefcence eft pouffée jufqu'au blanc , & il ne faut pas attribuer avec quelques-uns de nos Chimifles (p) j, cette flamme

(o) M. de LafTone , procédant un jour à la déflagration d'une afTez grande quantité de zinc , en recueilloit les fleurs & les niettoit à mefure dans un large vaifleau ; il fut furpris de les voir encore lumineufes quekiues minutes après, & remuant enluite ces fleurs avec une fpatule , ayant obfcurci davantage le laboratoire , il vit qu'elles étoient entièrement pénétrées de cette lumière jjholpho- rique & difîufe , qui peu-à-peu s'affoiblit , s'éteignit, après avoir fubfiflé plus d'une heure. On peut voir dans fon Mémoire tous les rapports qu'il indique entre le zinc & le j^hofphore. Alémoires de l'Acûdémie des Sciences , année 1J-/2, pages ^80 & fu'iv.

(p) «c C'eft à la préfence du zinc contenu dans le fer qu'il faut y* attribuer la plupart des phénomènes que préfente ce fer impur & » mélangé , lequel fe détruit en partie par la combuflion , puifque » le déchet du fer en gueufe eft ordinairement d'un tiers. . . . C'elt

DES Minéraux. 3 09

au zinc qu'il contient, ni croire , comme ils le diient, que c'ell le zinc qui rend la fonte de fer aigre 6k. cafTante ; car il y a beaucoup de mines de fer qui ne contiennent point de zinc, &l dont néanmoins le fer donne une Hamme auffi vive que les autres fers qui en contiennent; je m'en fuis aiïliré par plufieurs effais, Si d'ailleurs, on peut toujours reconnoître par la fimple obfèrvation, fi la mine que l'on traite contient du zinc, puifqu'alors ce demi-métal en fe fublimant, forme de la cadmie au - delîus du fourneau & dans les cheminées des affineries ; toutes les fois donc que cette fublimation n'aura pas lieu, on peut être afTuré que le fer ne con- tient point de zinc, du moins en quantité fenfible, & néanmoins le fer en gueufe n'en eft pas moins aigre & caifant , & cette aigreur, comme nous l'avons dit, vient des matières vitreufes avec lefquelles la fubflance du fer eft mêlée , & ce verre ih manifefle bien évidem- ment par les laitiers & les fcories qui s'en féparent, tant au fourneau de fufion qu'à l'ailinerie ; enfin cette fonte de fer qui ne contient point de zinc , ne laiiïe pas de jeter de la flamme lorfqu'elle eft chaufïee à blanc , & dès - lors ce n'eft point au zinc qu'on doit

moins le fer cj le le zinc contenu dans la fonte, qui fe brûle , « fe dtiruit & fe volatilife , en foite que la perte du mctal dans « toutes tes circonllances , e(ï d'autant plus confidérable que le fer « s'y trouve joint à une plus grande quantité de zinc ». Lettres de AI. Demcjk , tome II , page i6j.

310 Histoire Naturelle

attribwer cette flamme, mais au fer même, (^ui efl en effet combuflible lorfqu'il éprouve la violente adlion Ju feu.

.La chaux du zinc, chauffée prefque ju/qu'au rouge, s'enflamme tout-à-coup & avec une forte d'explofion , & en même temps les parties les plus fixes font, comme nous l'avons dit, emportées en fleurs ou flocons blancs; leur augmentation de volume n'eft pas proportionnelle à leur légèreté apparente, car il n'y a, dit -on ^^j) , qu'un dixième de différence entre la pefanteur fpécifique du zinc & celle de fès fleurs ; mais lorfqu'on la calcine très -lentement, & qu'on l'empêche de fe fublimcr en {'agitant continuellement avec une fpatule de fer, l'aug- mentation du volume de cette chaux efl de près d'un fixième (r): au refle, comme la ciiaux du zinc efl très- volatile, on ne peut la vitrifier feule; mais en y ajoutant du verre blanc, réduit en poudre & à\x falhi , on la convertit en un verre couleur à' aigue-mûrme.

Plufieurs Chimifles ont écrit que comme le foufre ne peut contraéter aucune union avec le zinc , il pouvoit fervir de moyen pour le purifier; mais ce moyen ne peut être employé généralement pour féparer du zinc

(q) En féduifant le zinc en fleurs , le poids des fleurs furpa/Tè d'un dixième celui de (a nia{îê de zinc avant d'être re'duit en fleurs. Alitnoircs de l'Académie dis Sciences, année jyyz , page ^So.

(r) Eléiuens de Chimie, par M. de Morveau, tome I , page 2^y^

DES Minéraux. 311

tous les métaux, puifque le foufre s'unit au zinc par r intermède du fer.

Le zinc en fufion, & fous fa forme propre, s'allie avec tous les métaux & minéraux métalliques , à l'excep- tion du bifmuth & du nickel (f). Quoiqu'il fe trouve très-fouvent uni avec la mine de fer, il ne s'allie que très - difficilement par la fufion avec ce métal ; il rend tous les métaux aigres & cafTans, il augmente la denfité du cuivre & du plomb,. mais il diminue celle de i'étain, du fer &. du régule d'antimoine; l'arfenic 6c le zinc, traités enfemble au feu de fublimation , forment une mafle noire, qui préfente dans fa caffure une apparence plutôt vitreufe que métallique (tj ; il s'amalgame très- bien avec le mercure (u): << Si l'on verfe, dit M. de Morveau, le zinc fondu fur le mercure, il fe fait un bruit pareil à celui que fait l'immerfion fubite d'un corps froid dans de l'huile bouillante; l'amalgame paroît d'abord folide, mais il redevient fluide parla trituration; la criflallifation de cet amalgame laiffe apercevoir fes élémens même, à la partie fupérieure qui n'eft pas en contadl avec le mercure, ce qui efl différent des autres

(f) Elémens de Chimie , par M. de Morveau , rt^wf /, page 2 6 ^,

(t) Idem , tome II , page s^y.

(u) L'amalgame compofé de quatre parties de mercure fur une de zinc eft bien plus propre à produire l'élecflricité que l'amalgame de mercure & d'étain» Journal de Phy.Jique , mois de JSovembre jyS 0 , page ^y2.

»

312 Histoire N atu re lle

amalgames .... une once de zinc retient deux onces de mercure (x) ». J'obferverai que cette foliditc que prend d'abord cet amalgame ne dépend pas de !a nature du zinc , puifque le mercure feui , vcrfc dans i'iîuile bouillante, prend une fblidité même plus durable que celle de cet amalgame de zinc.

Les affinités du zinc avec les métaux, font, félon M. Geiler, dans l'ordre fuivant; le cuivre, le fer, l'ar- gent , l'or, l'étain & le plomb.

Autant la chaux de plomb cïi îdiCWc à réduire, autant la chaux ou les Heurs de zinc font de difficile réduélion, de-ià vient que la cérufe ou blanc de plomb devient noire ])ar la feule vapeur des matières putrides , tandis que la chaux de zinc conferve fa blancheur; c'cil d'après cette propriété éprou\'ée par la vapeur du foie de foufre , que M. de Morveau a propofë le blanc de zinc comme préférable dans la peinture, au blanc de plomb; les expériences comparées ont été faites cette année 178 i, dans la féance publique de l'Académie de Dijon; elles démontrent qu'il fiiffit d'ajouter à la chaux du zinc , un peu de terre d'alun & de craie, pour lui donner du corps & en faire une bonne couleur blanche, bien plus fixe & bien moins altérable à l'air, que la cérufe ou blanc de plomb, qu'on emploie ordinairement dans la peinture à l'huile.

(x) EIcmens de Chimie , par M, de Morveau , tome III , pages 44^ à- 44^,

Le

D E s M IN É R A U X. 313

Le zinc eft attaqué par tous les acides , & même la plupart le difîblvent afTez facilement; l'acide vitriolique n'a pas befoin d'être aide pour cela par la chaleur, Sl le zincparoît avoir plus d'affinité qu'aucune autre fubf^ tance métallique avec cet acide; il faut feulement pour que la diffolution s'opère promptement, lui préfenter le zinc en petites grenailles ou en lames minces , & mêler l'acide avec un peu d'eau , afin que le fël qui forme n'arrête pas la difTolution par le dépôt qui s'en fait à la furface. Cette diflblution laifTe après l'évapo- ration, des criflaux blancs; ce vitriol de zinc eli connu fous le nom de couperofe blaiiche, comme ceux de cuivre & de fer, fous les noms de coupera ft bleue &. de couperofe verte. Et l'on doit ob/erver que les fleurs de zinc, quoi- qu'en état de chaux, offrent les mêmes phénomènes avec cet acide que le zinc même, ce qui ne s'accorde point avec la théorie de nos Chimifles, qui veulent qu'en général les chaux métalliques ne puifTent ê^re attaquées par les acides. Ce vitriol de zinc ou vitriol blanc, fc trouve dans le fein de la terre (y) , rarement en criflaux réguliers, mais plutôt en (lalaélites , & quel- quefois en filets blancs; il fe couvre d'une efilorefcence bleuâtre s'il contient du cuivre.

(y) On n'a point encore trouvé, dit M. Bergman, d'autres fels de zinc, dans le fein de la terre, que celui qui vient de l'acide vitriolique ; & le vitriol natif de zinc eft rarement pur , mais mêlé au cuivre ou au fer, & fouvent à tous deux. Dijfertation fur le -Jne,

Minéraux , Tome III . R r

3:14 Histoire Naturelle

L'acide nitreux difTout le zinc avec autant de rapidité crue de puiiïance , car il peut en difToudre promptement une quantité égale à la moitié de Ton poids; la di/To- jution faturée n'eft pas limpide comme l'eau , mais un peu obfcure comme de l'huile, & fi le zinc efî; mêlé de quelques parties de fer, ce métal s'en fépare en précipitant , ce qui fournit un autre moyen que celui du fbufre pour purifier le zinc L'on doit encore ob/èrver que la chaux & les fleurs de zinc, diffolvent dans cet acide &l dans l'acide vitriolique, & que par conféquent cela fait une grande exception à la prétendue règle, que les acides ne doivent pas difToudre les chaux ou terres métalliques.

L'acide marin diiïbut aufiî le zinc très - facilement, moins pleinement que l'acide nitreux , car il ne peut en prendre que la huitième partie de fon poids; il ne fe forme pas de criftaux après i'évaporation de cette diflbiution, mais feulement un fel en gelée blanche <St irès-déliquefcent , dont la qualité eft fort corrofive.

Le zinc, & même les fleurs de zinc, fe diffolvent auffi dans l'acide du vinaigre, & il en réfulte des crif taux ; il en eft de même de l'acide du tartre ; ainfi tous les acides minéraux ou végétaux, <Sc jufqu'aux acerbes, tels que la noix de gale, agiffent fur le zinc: les alkalis, & fur - tout i'alkali volatil le dinx)lvent au/fi, & cette dernière diffoluiion donne, après I'évaporation, un fel blanc & brillant, qui attire l'humidité de l'air & tombe en déliquefcen-ce.

DES Minéraux, 315

Voilà le précis de ce que nous favons fur le zinc : on voit qu'étant très - volatil , il doit être difleminé par-tout; qu'étant fufccptible d'altération & de diiïblu- lion par tous les acides & par les alkalis, il peut fe trouver en état de chaux oii de précipité dans le fein de la terre ; d'ailleurs, les matières qui le contiennent en plus grande quantité , telles que la pierre calaminaire & les blendes , font compofées des détrimens du fer ôl d'autres minéraux ; l'on ne peut donc pas douter que ce demi-métal ne foit d'une formation bien poftérieure à celle des métaux.

Rr \]

3i6 Histoire Naturelle

DE LA PLATINE.

Il n'y a pas un demi-fiècle qu'on connoît la Platine en Europe, & jamais on n'en a trouvé clans aucune région de l'ancien continent; deux petits endroits dans ie. nouveau Monde , l'un dans les mines d'or de San- tûfé, à la nouvelle Grenade; l'autre dans celle de Clwco, province du Pérou, font jufqu'ici les feuls lieux d'où l'on ait tiré cette matière métallique, que nous ne connoif- fons qu'en grenailles mêlées de fablon magnétique , de paillettes d'or, & Ibuvent de petits criftaux de quartz, de topaze, de rubis, & quelquefois de petites gouttes de mercure; j'ai vu & examiné de très-près, cinq ou fix fortes de platine que je m'étois procurée par diverfes perfonnes & en diiférens temps ; toutes ces fortes étoient mêlées de fablon magnétique & de paillettes d'or; dans quelques-unes il y avoit des petits criflaux de quartz, de topaze , cScc. en plus ou moins grande quantité ; mais je n'ai vu de petites gouttes de mercure que dans i'une de ces fortes de platine (a) ; il fe pourroit donc que cet état de grenaille, fous lequel nous connoifTons la platine, ne fût point Ion état naturel, & l'on pourroit

(a) M. Lewis & M. le Comte de Milly ont tous deux reconnu des globules de mercure dans la platine qu'ils ont examinée. M. Bergman dit de même qu'il n'a point traité de platine dans laquelle il n'en ait trouvé. Opujcules , tome II , page i 8 ^.

DES Minéraux, 317

croire qu'elle a été concaflce dans les moulins l'on broie les minerais d'or & d'argent, & que les goutte- lettes de mercure qui s'y trouvent quelquefois, ne viennent que de l'amalgame qu'on emploie au traite- ment de ces mines ; nous ne fommes donc pas certains que cette forme de grenaille foit fa forme native^ d'autant; qu'il paroît, par le témoignage de quelques Voyageurs, qu'ils indiquent la platine comme une pierre métal- lique très-dure, intraitable, dont néanmoins les naturels du pays avoient, avant les Efpagnols , fait des haches &. autres iniirumens tranchans (ù) j ce qui fuppofe né- ceflairement qu'ils la trouvoient en grandes maffes, ou qu'ils avoient l'art de la londre fans doute avec l'addi- tion de quelqu'aiitre métal; car par elle-même la platine eft encore moins fuhble que la mine de fer qu'ils n'avoient pas pu fondre. Les Efpagnols ont auffi fait

(b) Dans le Gouvernement du Marannon, les habitans afTuroient que dans le canton des mines d'or , ils tiroient (ouvent d'un lieu nomnië Picari , une autre forte de métal pbs dur que i'or , mais blanc, dont ils avoient fait anciennement des haches & des couteaux, & que ces outils s'cmouflant facilement , ils avoient ceflé d'en faire.

Hijiolre générale des voyages , tome- X IV , page 20 M. Ulloa,

dans fon Voyage imprime' à Madrid en 1748 , dit expreffément, qu'au Pt rou , dans le Bailliage de Choeo , il fe trouve des mines d'or que l'on a été obligé d'abandonner à caufe de la platine dont le minerai eft entre-mêlé ; que cette platine eft une pierre ( Pïedra ) , {\ dure qu'on ne peut la brifer fur l'enclume , ni la calciner , ni par conféquent en tirer le minerai qu'elle renferme , fans un travail infini.

3i8 Histoire Naturelle

clifférens petits ouvrages avec la platine alliée avec d'autres métaux; perfonne en Europe ne la connoît donc dans fon état de nature , & j'ai attendu vainement pendant nombre d'années , quelques morceaux de platine eu maffe , que j'avois demandé à tous mes Correfpondans en Amé|*ique. M. Bowles , auquel le gouvernement d'Elpagne, paroît avoir donné- confiance au fujet de ce minéral, n'en a pas abufé; car tout ce qu'il en diç ne nous apprend que ce que nous fàvions déjà.

Nous ne favons donc rien, ou du moins rien, au jufle de ce que l'Hilloire Naturelle pourroit nous ap- prendre au fujet de la platine , fmon qu'elle fe trouve en deux endroits de l'Amérique méridionale, dans des mines d'or, & jufqu'ici nulle part ailleurs; ce feul fait, quoique dénué de toutes fes circonftances, fuffit, à mon avis, pour démontrer que la platine eft une matière accidentelle plutôt que naturelle ; car toute fubflance produite par les voies ordinaires de la Nature , cA géné- ralement répandue au moins dans les climats qui jouifTent de la même température; les animaux, les végétaux, les minéraux font enraiement foumis à cette rède uni- verfelle; cette feule confidération auroit fufpendre l'empreflement des Chimifles, qui, fur le fimple examen de cette grenaille, peut-être artificielle & certainement îiccidentelle, n'ont pas héfité d'en faire un nouveau métal , & de placer cette matière uou\e\\c non-(eu\ement ail rang des anciens métaux, mais de la vanter comme un

DES Minéraux. 319

troifième métal auiïi parfait que l'or & l'argent, fans faire réflexion que les métaux trouvent répandus dans toutes les parties du Globe; que la platine, fi c'étoit un métal, feroit répandue de même, que dès-lors on ne clevoit la regarder que comme une production acciden- telle , entièrement dépendante des circonflances locales des deux endroits cWe fe trouve.

Cette confidération , quoique majeure, n'eft pas la feule qui me faffe nier que la platine ibit un vrai métal. J'ai démontré par des obfcrvations exades (cj j qu'elle eft toujours attirable à l'aimant; la Chimie a fait de vains efforts pour en féparer le fer , dont fa fubflance cfl intimement pénétrée ; la platine n'efl donc pas un métal fnnple & parfait, comme l'or & l'argent, puif- qu'elle efl toujours alliée de fer. De plus , tous les métaux , & fur-tout ceux qu'on appelle parfaits, font tjès-duéliles ; tous les alliages au contraire font aigres; or la platine efl pltis aigre que la plupart des alliages, & même après plufieurs fontes & diffolutions , elle n'acquiert jamais autant de duélilité que le zinc ou le bifmuth, qui cependant ne font que des demi-métaux, tous plus aigres que les métaux.

Mais cet alliage le fer nous efl démontré par J'aélion de l'aimant , étant d'une denfité approchante de

(c) Voyez dans le premier volume in - 4.° des Supplcmens^ jpage j 0 j , k Mémoire qui a pour titre ; Obferyaiions fur la Platinf*

-^20 Histoire Natu relle

celle de l'or; j'ai cru être fondé à préfumer que la platine n'ell qu'un mélange accidentel de ces deux métaux très - intimement unis : les eflais qu'on a fait depuis ce temps pour tiklier de féparer le fer de la platine & de détruire fon magnétifme ne m'ont pas fait changer d'opinion ; la platine la plus pure , celle entr'autres qui a été fi bien travaillée par M. le baron de Sickengen ((tJ) , & qui ne donne aucun figne de magnétifme, devient néanmoins attirable à l'aimant, dès qu'elle efl comminuée & réduite en très-petites parties; la préfence du fer ed donc confiante dans ce minéral, & la préfence d'une matière aufTi denfe que l'or y efl également & évidemment auffi confiante; & quelle peut être cette matière denfe fi ce n'efl pas de l'or! Il efl vrai que jufqu'ici l'on n'a pu tirer de la platine , par aucun moyen, l'or, ni même le fer qu'elle contient,

(d) La platnie , même la plus épurée, contient toujours du ïer. M. ie Comte de Milly, par une lettre date'e du 18 Novembre «781, me marque «qu'ayant oublie' pendant trois à quatre ans, un morceau y> de platine purifiée par M. le Baron de Sikengen , & qu'il avoil 39 laiflce dans de l'eau -forte la plus plus pure, pendant tout ce 55 temps , il s'y étoit rouillé , & que l'ayant retiré , il avoit étendu la » liqueur qui reftoit dans le vafe, dans un peu d'eau diftillce & <]u'y » ayant ajouté de l'alkali phlogiftiqué , il avoit obtenu fur h champ 33 un précipité très-aUondant , ce qui prouve indubitablement que la » platine la plus pure & que M. de Sikengen afTure être dépouillée de tout fer , en contient encore , 6c que par ^conféquent le fer entre dans fa compofition »,

&

DES Minéraux. 321

& que pour qu*il y eût fur TtAence de ce minéral dcmonflration complète, il faudroit en avoir tiré & féparc le fer ôl For , comme on fépare ces métaux après les avoir allies; mais ne devons-nous pas confidérer, & ne i'ai-je pas dit, que le fer n'étant point ici dans Ton état ordinaire, Sl ne s'étant imi à l'or qu'après avoir perdu pre/que toutes fes propriétés, à l'exception de fa denfité Si. de fon magnctifme, il pourroit que l'or s'y trouvât de même dénué de fa duélilité , & qu'il n'eût confervé, comme le fer, que fa feule denfité , & dès-lors ces deux métaux qui compofent la platine, font tous deux dans un état inacceffible à notre art, qui ne peut agir fur eux , ni même nous les faire reconnoître en nous les préfentant dans leur état ordinaire ! Et n'efl-ce pas par cette raifon que nous ne pouvons tirer ni le fer ni l'or de la platine, ni par conféquent féparer ces métaux , quoiqu'elle foit compofée de tous deux î Le fer en effet n'y efl pas dans fon état ordinaire, mais tel qu'on le voit dans le fablon ferrugineux qui accom- pagne toujours la platine ; ce fablon , quoique très- magnétique , efl infufible , inattaquable à la rouille , infoiuble dans les acides; il a perdu toutes les pro- priétés par lefquelles nous pouvions l'attaquer, il ne lui eft refté que denfité &. fon magnétifme , pro- priétés par lefquelles nous ne pouvons néanmoins le méconnoître. Pourquoi l'or que nous ne pouvons de même tirer de la platine, mais que nous y reconnoilfons Mnétûux, Tome IIL S f

3 22 Histoire Naturelle

auffi évidemment par fa denfité , n'auroit-il pas éprouvé comme le fer , un changement qui lui auroit ôté ductilité & fa flifibilité î l'un efl po/Tible comme l'autre, & ces productions d'accidens, quoique rares, ne peuvent- elles pas fe trouver dans la Nature! Le fer en état de parfaite duéliiité , eu prcfque infufible , & ce pourroit être cette propriété du fer qui rend l'or dans la platine très- refracl:aire; nous pouvons auffi légitimement fiip- pofer que le feu violent d'un volcan, ayant converti une mine de fer en mâchefer & en fablon ferrugineux magnétique, &. teJ qu'il fe trouve avec la platiïie, ce feu aura en même temps, & par le même excès de force, détruit dans l'or toute duéliliié! Car cette qualité n'eft pas eflentielle , ni même inhérente à ce métal, puifque la plus petite quantité d'éiain ou d'arfcnic fa lui enlève ; <& d'ailleurs , fait-on ce que pourroit pro- duire fur ce métal , un feu plus violent qu'aucun de nos feux connus! Pouvons -nous dire fi dans ce feu de volcan, qui n'a laiffé au fer que fon magnétifme & à l'or fa denfué , il n'y aura pas eu des fumées arfeni- cales qui auront blanchi l'or & lui auront ôté toute fa dudilité , & fi cet alliage du fer & de l'or , imbus de îa vapeur d'arfenic , ne s'ell pas fait par un feu fupé- rieur à celui de notre art! Devons-nous donc être furpris de ne pouvoir rompre leur union; & doit-on faire un métal nouveau, propre & particulier, une fubflance fimple, d'une matière qui efl évidemment mixte, d'un

D E s M I N É R AU X. 323

compofé formé par accident en deux feuls lieux de la terre, d'un compofc qui préfente à la fois, la denfité de l'or & le magiictifme du fer, d'une fubftance en un mot qui a tous les cara6lères d'un alliage, & aucun de ceux d'un métal pur!

Mais comme les alliages faits par la Nature, font encore du refTort de l'Hifloire Naturelle, nous croyons devoir, comme nous l'avons fait pour les métaux, donner ici les principales propriétés de la platine : quoique très - denfe elle eft très - peu duélile , prefque infufiblc fans addition, fi fixe au feu qu'elle n'y perd rien ou prefque rien de fon poids, inaltérable & réfiflante à l'adlion des élémens humides, indiflbluble comme i'or, dans tous les acides fnnples (e) , Sl fe laiffant

('ej Nota. M. Tillet, l'un de nos plus fa vans Académiciens, & très-exacH: Obfervateur, a reconnu que, quoique la platine foit indifloluble en elle-même par les acides Innples , elle le dillout néan- moins par l'dcide nitreux pur, lorfqu'elle efi: alliée avec de l'argent ai. de l'or. Voici la note qu'il a bien voulu me communiquer à ce fujet : J'ai annoncé dans les Mémoires de l'Académie des Sciences, année «c / ;^/p , que la platine, foit brute, foit rendue dudile par les procédés «< connus, eft dilfuluble dans l'acide nitreux pur, lorfqu'elle efl alliée <c avec une certaine quantité d'or & d'argent. Afin que cet alliage foit <t complet, il faut le faire par le moyen de la coupelle, & en em- oc ployant une quantité convenable de plomb. On traite alors , par te la voie du départ , le bouton compofé des trois métaux , comme ce un mélange fnnple d'or &. d'argent; la diflolution de l'argent & «c de la platine efl complète, la liqueur efl tranfparente, & il ne refte ce que l'or au fond du matras, foit dans un état de divifion fi on ace

Sf ij

324 Histoire Naturelle

diffoudre comme lui, par la double puiffance des acides nitreux & marins réunis.

» mis beaucoup d'argent, Toit en forme de cornet bien conlervé x) fi on n'a mis que trois ou quatre parties d'argent égales à celle » de l'or. Il tiï vrai que fi on emploie trop de platine dans cette » opération, J'or mêlé avec elle ia défend un peu des attaques de » l'acide nitreux , & il en conlervé quelques parties. Il faut un » mélange parfait des trois métaux pour que l'opération réufllfle j> complètement : s'il fe trouve quelques parues dans l'alliage n il n'y ait pas affez d'argent pour que la diOolution ait lieu , la platine réfifte, comme J'or, à l'acide , & relie avec lui dans le pré- cipité ; mais fi on ne met dans l'alliage c[u'un douzième de platine , 3> ou encore mieux, un vingt-quatrième de l'or qu'on emploie, alors on parvient à diffoudre le total de la platine , &. for mis en expé- » rience ne conferve exad:ement que Ion poids. Il n'en eft pas ainfi » d'un alliage dans lequel il n'entre que de l'argent «Se de la platine: » la difloluiion n'en eft proprement une que pour l'argent ; la » liqueur refte trouble Se noirâtre, malgré une longue & forte ébulli- » tien; il fe fait un précipité noir & abondant au fond du inatras, qui n'efl que de la platine réduite en poudre & fubdivifce en une 35 infinité de particules , comme elle i'étoit dans l'argent avant qu'il 33 fut dilfous. Cependant fi on laifle repofer la liqueur pendant «quelques jours, elle s'éclaircit & devient d'une couleur brune, » qu'elle doit lans doute à quelques parties de la platine qu'elle a diffoutes , ou qu'elle tient en fufpenfion. Il paroît donc que dans 3) cette opération , c'ed à la préfence feule de l'or qu'eft due la » dilfolution réelle & aflez prompte de la j^latine par l'acide nitreux 33 pur ; que l'argent ne contribue qu'indiredement à cette dilfolu- » tion; qu'il la facilite à la vérité, mais que fans l'or, il ne fert qu'à 33 procurer une divifion mécanique de la platine , «?i encore cette divifion n'a-t-elle lieu que parce que l'argent dilfout lui-même, ne peut ] lus conferver la platine fubdivifce avec laquelle il faifoit corps 33.

39

30

DES M J N É R AU X, 325

L'or mêlé avec ie plomb le rend aigre, la platine protluit le mcme effet ; mais on a prétendu qu'elle ne fe fcparoit pas en entier du plomb comme l'or, dans la coupelle, au plus grand feu de nos fourneaux, dès- iors le plomb adhère plus fortement à la platine que i'or dont ii fe fcpare en entier, ou prefque en entier (f); on peut même reconnoître par l'augmentation de fon poids, la quantité de plomb qu'elle a faifi & qu'elle retient fi puifTamment, que l'opération de la coupelle ne peut l'en féparer; cette quantité, félon M. Schœffer, efl de deux ou trois pour cent; cet habile Chimifle, qui le premier a travaillé la platine, dit avec raifon, qu'au miroir ardent, c'eft-à-dire, à un feu fupérieur à celui de nos fourneaux, on vient à bout (ïtw féparer tout le plomb &i de la rendre pure ; elle ne diffère donc ici de l'or qu'en ce qu'étant plus difficile à fondre, elle fe coupelle auffi plus difficilement.

En mêlant partie égale de platine &. de cuivre, on les fond prefque auffi facilement que le cuivre feul , & cet alliage ell à peu -près auffi fuhble que celui de l'or & du cuivre; elle fe fond un peu moins facilement avec l'argent, il en faut trois parties fur une de platine,

/f) « L'or le plus pur ne fe fépare jamais parfaitement du plomb dans la coupelle ; fi vous faites pafier un gros d'or fin à la «c coupelle dans une quantité quelconque de plomb , le bouton « d'or, quelque brillant qu'il foit , pefera toujours un peu plus « d'un gros ». Remarque communiquée par M. TilUt.

326 Histoire Naturelle

6l l'alliage qui refaite de cette fonte, efl aigre Se dur; ou peut en retirer l'argent par l'acide nitreux , & avoir ainfi la platine faus mélange , mais néanmoins avec quelque perte: elle peut de même fe [ondre avec les autres métaux; & ce qui eu très - remarquable , c'cH que le mélange d'ime très - petite quantité d'ar/ènic, comme d'une vingtième ou d'une vingt-quatrième partie, fuffit pour la faire fondre prefque auffi aifément que nous fondons le cuivre ; il n'eil: pas même n-^ceflaire d'ajouter des fondans à l'arfenic, comme loriqu'on le fond avec le fer ou le cuivre, il fuffit feul pour opérer très-promptement la fuGon de la platine , qui cependant n'en devient que plus aigre & plus caiïànîe : eniin lorf- qu'on la mcîe avec l'or, il n'y a pas moyen de les féparer fans intermède, parce que la platine ik l'or font également fixes au feu, &i ceci prouve encore que la nature de la platine tient de très -près à celle de l'or: ils fe fondent enfemble affez ailèment; leur union efl toujours intime 6w confiante, <Scde même qu'on remarque des furfaces dorées dans la platine qui nous vient en grenailles, on voit auffi des filets ou petites veines d'or dans la platine fondue ; quelques Chimifles prétendent înême que l'or efl un diffolvant de la platine, parce qu'en effet, fi l'on ajoute de l'or à l'eau régale, la diffolution de la platine fait beaucoup plus promj)te- jiient & plus complètement, & ceci, joint à ce que nous îîvoiis dit de fa diffolution par l'acide nitreux, efl encore

DES Minéraux. 327

une preuve & un effet de la grande affinité de la platine avec i*or; on a trouvé néanmoins le moyen de féparer i'or de la platine, en mêlant cet alliage avec l'argent (gj, &

{g) « Lorfqu'on a mêlé de l'or avec de la platine , il y a un moyen fur de les féparer , celui du départ , en ajoutant au mélange <c trois fois autant d'argent ou environ qu'il y a d'or: l'acide nitieux « diflout l'argent & la platine , & l'or tout entier en efl feparé ; «c on verfe enfuite de l'acide marin fur la lic{ueur chargée de l'argent «c & de la platine , fur le champ on a un précipité de l'argent « feul; & comme on a formé par-là une eau régale, la platine «< n'en eft que mieux maintenue dans la liqueur qui fumage l'argent «< précipité. Pour obtenir enfuite la platine , on fait évaporer fur « un bdin de fable la licjueur qui la contient , & on traite le réfidu « par le flux noir , en y ajoutant de la chaux de cuivre propre à u ralîembler ces particules de platine ; on lamine après cela le bouton « de cuivre qu'on a retiré de l'opération , di. on le fait difioudre à « froid dans de l'efprit de nitre affoibli ; la platine fe précipite au « fond du matras , & après un recuit , elle s'annonce avec les carac- « tcres métalliques , mais avec un déchet de moitié ou environ , fur c^ la quantité de platine qu'on a employée. Voilà le procédé que « j'ai fuivi (k par lequel on voit que je n'ai rien pu perdre par « un défaut de foins ; après des opérations réitérées on parvient à « réduire la platine à peu de grains , & enfin à la perdre totalement, ce Ces expériences annoncent que la platine fe décompofe & n'eA « pas un métal fimple ; la matière noire & ferrugineule fe montre <c à chaque opération , & fe trouve mêlée avec celle qui a confervé « l'état jnétallique ; cette matière noirâtre qui n'a pu reprendre lès « caradères métalliques , eft fort légère <3c ne fe précipite qu'avec «f peine ; on ne croiroit jamais qu'elle eût appartenu à un métal « aufll pefant que la platine ; quatre ou cinq grains de cette « matière décompofée ont le volume d'une noifeite 3?. N«tc de M. Tillet,

?28 Histoire Naturelle

ce moyen eft aflez fur pour qu'on ne doive plus craindre de voir le titre de l'or altéré par le mélange de la platine.

L'or eft précipité de fa diiïblution par le vitriol de fer, & la platine ne l'efl pas; ceci fournit un moyen de féparer Tor de la platine s'il s'y trouvoit artificielle- ment allié, mais cet intermède ne peut rien fur leur alliage naturel. Le mercure qui s'amalgame fi puiiïamment avec l'or, ne s'unit point avec la platine; ceci fournit un fécond moyen de reconnoître l'or falfiiié par le mélange de la platine ; il ne faut que réduire l'alliage en poudre, & la préfenter au mercure qui s'emparera de toutes les particules d'or, ôl ne s'attachera point à celles de la platine.

Ces différences entre l'or & la platine, font peu confidérables en comparaifbn des rapports de nature que ces deux fubftances ont Tune avec l'autre; la platine ne s'eft trouvée que dans des mines d'or, & feulement dans deux endroits particuliers, & quoique tirée de la même mine, fa fubftance n'efl pas toujours la même; car en eflTayant fous le marteau plufieurs grains de platine, telle qu'on nous l'envoie, j'ai reconnu que quelques- uns de ces grains s'étendoient affez facilement , tandis que d'autres fe brifoient fous une percuffion égale ; cela feul fuffiroit pour faire voir que ce n'efl point un métal natif & d'une nature univoque, mais un mélange équivoque, qui fe trouve plus ou moins aigre, fclon la quantité &. la qualité des matières alliées.

Quoique

DES AI I N É R A U X. 329

Quoique la platine foit blanche à peu-près comme l'argent , fa clifToIution efl jaune , & même plus jaune que celle de l'or ; cette couleur augmente encore à mefure que la clifToluiion fe fature, & devient à la fois tout-à-fait rouge; cette dernière couleur ne provient-elle pas du fer toujours uni à la platine (hj f En faifant évaporer lentement cette difTolution, on obtient un fei criftallifé, femblable au fel d'or; la diffolution noircit de même la peau, &: laifTe aulfi précipiter la platine, comme l'or, par l'éther & par les autres huiles cthérées; enfin fon fel reprend, comme celui de l'or, fon état métallique , fans addition ni fecours.

Le produit de la diffolution de la platine paroît différer de l'or di(fous, en ce que le précipité de platine, fait par l'alkali volatil , ne devient pas fulminant comme l'or ; mais auffi peut-être que fi l'on joignoit une petite quantité de fer à la diffolution d'or , le précipité ne

(h) La platine ie difi'out dans l'eau rtgale , qui doit être compofée de parties égales dacide nitreux & d'acide marin. II en faut environ leize parties pour une partie de platine , & il faut qu'elle foit aidée de la chaleur. ..... La diflolution prend une couleur Jaune

qui pafle au rouge -brun- foncé ; il refte au fond du vaifleau des matières étrangères qui étoient mêlées à la platine , & particulière- ment du fable magnétique. La diffolution de la platine fournit par le refroidiflement , de petits criflaux opaques de couleur jaune & d'une faveur acre ; ces criftaux fe fondent imparfaitement au feu , i'acide fe diffipe, & il refle une chaux grife-obfcure. Elémens de Chimie , par Al, de Alorveau , tome II, pages 266 & 26

Minéraux, Tome IIL Tt

330 Histoire Naturelle

feroit pas fulminant ; je préfume de même qiie c'cfl par une caufe femblable que le précipité de la platine par i'étain, ne fe colore pas de pourpre comme celui Je Tor; & dans le vrai, ces différences font fi légères en comparaifbn des grands & vrais rapports que la platine a conflamment avec l'or , qu'elles ne fuiii/ènt pas à beaucoup près pour faire un métal à part & indépendant, d'une matière qui n'efl très - vraifembla- Liement qu'altérée par le mélange du fer &. de quelques vapeurs arfenicales ; car, quoique notre art ne puifFe rendre à ces deux métaux altérés leur première efTence, il ne faut pas conclure de fon impuiffance à rimpo/Ti- bilité; ce feroit prétendre que la Nature n'a pu faire ce que nous ne pouvons défaire, &. nous devrions plutôt nous attacher à l'imiter qu'à la contredire.

Aucun acide fimple, ni même le fublimé corrofif ni le foufre n'agiffent pas plus fur la platine que fur i'or, mais le foie de foufre les diffout également; toutes les fiibflances métalliques la précipitent comme l'or, & fon précipité conferve de mcme fa couleur & fon brillant métallique; elle s'allie comme l'or avec tous les métaux (5l les demi -métaux.

La différence la plus fenfible qu'il y ait entre les propriétés fecondaires de l'or & de la platine, c*efl la facilité avec laquelle il s'amalgame avec le mercure, & la réfiftance que la platine oppofè à cette imion ; il me femble que c'eft par le fer & par Tarfenic, dont la

DES Minéraux. 351

platine efl intimement pénétrée, que Tor aura perdu Ton attradion avec le mercure qui, comme l'on fait, ne peut s'amalgamer avec le fer, & encore moins avec i'arfenic ; je fuis donc perfuadc qu'on pourra toujours donner la raifon de toutes ces diiférences en convenant avec moi, que la piatine efl un or dénaturé par le mélange intime du fer & d'une vapeur d'arfenic.

La platine mêlée en parties égales avec l'or, exige un feu violent pour fe fondre; l'alliage eft blanchâtre, dur, aigre & caflant; néanmoins en le faifant recuire, il s'étend un peu fous le marteau; û on met quatre parties d'or fur une de platine , il ne faut pas un fi grand degré de feu pour les fondre, l'alliage conferve à peu-près la couleur de l'or, &. Ton a obfervé qu'en général , l'argent blanchit l'or beaucoup plus que la platine; cet alliage de quatre parties d'or fur une de platine, peut s'étendre en lames minces fous le marteau.

Pour fondre la platine & l'argent mêlés en parties égales, il faut un feu très -violent, & cet alliage efl moins brillant & plus dur que l'argent pur, il n'a que peu 'de dudilité , fa fubflance efl grenue , les grains en font affez gros, & paroiffent mai liés; & lors même que l'on met fept ou huit parties d'argent fur une de platine, le grain de l'alliage efl toujours gro/fier; on peut par ce mélange faire criflallifer très - aifément l'argent en fufion (ij , ce qui démontre le peu d'affinité

f - - "

(iJ *t Les crinallifaiions confiantes de l'argent il eft entré der

Tt i;

332 Histoire Naturelle

de ce métal avec la platine, puifqu'il ne contrarie avec «lie qu'une union imparfaite.

Il n'en eft pas de même du mélange de la platine avec le cuivre, c'ell de tous les métaux celui avec lequel elle fe fond le plus facilement; mêlés à parties égales, l'alliage en efl dur & caffant ; mais fi l'on ne met qu'une huitième ou une neuvième partie de platine, l'alliage efl d'une plus belle couleur que celle du cuivre; il eil: au/Ti plus dur, & peut recevoir un plus beau poli, il réfifle beaucoup mieux à l'imprefTion des élémens humides, il ne donne que peu ou point de vert-de- gris, &L il efl afTez du(5lile pour être travaillé à peu-près comme le cuivre ordinaire. On pourroit donc en alliant ie cuivre & la platine dans cette proportion , efTayer d'en faire des vafes de cuifmes, qui pourroient fe pafTcr d'étamage, & qui n'auroient aucune des mauvaifcs qualités du cuivre, de l'étain &l du plomb.

La platine , mêlée avec quatre ou cinq fois autant de fonte de fer, donne un alliage plus dur que cette

» la platine , feml^Ient indiquer réellement le peu d'affinité qu'il y » a entre ces deux métaux , il paroît que l'argent tend à fe féparer •>■> de ia platine. On a infailliblement des criflallifations d'argent bien 35 prononcées , en fondant huit parties d'argent pur avec une partie » de platine & en les paflant à la coupelle. J'ai remis pour Je » Cabinet du Roi des boutons de deux gros ainiî criftalijfés à » leur furface ; la loupe la moins forte d'un microfcope fait dilîinguer nettement les petites pyrajiiides de l'argent ». Remarque ((^mmuniquée far M, Tillet.

DES Minéraux. 533

fonte, & encore moins fujet à la rouille, il prend un beau poli ; mais il efl trop aigre pour pouvoir être mis en Œuvre comme l'alliage du cuivre. M. Lewio, au- quel on doit ces obfervations, dit auiïi que la platine fond avec i'ctain en toutes proportions, depuis parties égales jufqu'à vingt -quatre parties d'étain fur -une de platine , & que ces alliages font d'autant plus durs & plus aigres, qtie la platine efl en plus grande quantité, en forte qu'il ne paroît pas qu'on puiife les travailler: il en efl de même des alliages avec le plomb, qui mcme exigent un feu plus violent que ceux avec l'étain. Cet Iiabile Chimifte a encore obfervé que le plomb & i'argent ont tant de peine à s'unir avec la platine, qu'il tombe toujours une bonne partie de la platine au fond du crcufet, dans fa fufion avec ces deux métaux, qui de tous ont par conféquent le moins d'affinité avec ce minéral.

Le biilnutlî, comme Je plomb, ne s'allie qu'impar- faitement avec la platine, &l l'alliage qui en rcfulte efl caffant au point d'être friable: mais de la même manière que dans les métaux , le cuivre efl celui avec lequel la platine s'unit le plus facilement , il fe trouve que des demi-métaux, c'efl le zinc avec lequel elle s'unit auffi le plus parfaitement; cet alliage de la platine & du zinc ne change point de couleur, &l reffemble au zinc pur; il efl fetdement plus ou moins bleuâtre, félon la pro- portion plus ou moins grande de la platine dans le

334 Histoire Naturelle

mélange; il ne fe ternit point à l'air, mais il efl plus aigre que le zinc qui, comme l'on fait, s'étend fous ie marteau: ainfi cet alliage de la platine & du zinc, quoique facile, n'offre encore aucun objet d'utilité ; mais fi l'on mêle quatre parties de laiton ou cuivre jaune avec une partie de platine , l'union paroît s'en faire d'une manière intime , la fubftance de l'alliage efl compade & fort dure, le grain en efl très -fin & très -ferré, & il prend un poli vif qui ne fe ternit point à l'air ; fans être bien duélile, cet alliage peut néanmoins s'étendre aflez fous le marteau, pour pouvoir s'en fervir à faire des miroirs de télefcope , & d'autres petits ouvrages dont le poli doit réfifler aux impreflions de l'air.

J'ai cru pouvoir avancer il y a quelques années (k^, &L je crois pouvoir foutenir encore aujourd'hui , que Ja platine n'ell point un métal pur, mais feulement un alliage d'or &l de fer, produit accidentellement & par des circonllances locales; comme tous nos Chimifics, d'après M." SchœfFer & Lewis , avoient fur cela pris Jeur parti , qu'ils en avoient parlé comme d'un nouveau métal parfait, ils ont cherché des raifons contre mon opinion, & ces raifons m'ont paru fe réduire à une feule obje6lion que je lâcherai de ne pas laiffer fans réponfe : « Si la platine , dit un de nos plus habiles » Chimiftes (l), étoit un alliage d'or & de fer , d\t

(k) Supplémens, tome I, ïn-^' pages 301 Ù" fuiv. (l) M. Macquer.

DES Minéraux, 335

devroit reprendre les propriétés de l'or à proportion qu'on détruiroit, & qu'on lui enieveroit une pius grande quantité de fon fer, & il arrive précifément le contraire; loin d'acquérir la couleur jaune, elle n'en devient que plus blanche , & les propriétés par lefquelles elle difîere de l'or n'en font que plus marquées ». Il efl très-vrai que fi l'on niéle de l'or avec du fer dans leur état ordinaire , on pourra toujours les féparer en quelque dofe qu'ils foient alliés, & qu'à mefure qu'on détruira & enlèvera le fer, l'alliage reprendra la couleur de l'or, & que ce dernier métal reprendra lui-même toutes fes propriétés dès que le fer en fera féparé; mais n'ai -je pas dit <Sl répété que le fer, qui fe trouve fi intimement uni à la platine, n'eft pas du fer dans fon état ordinaire de métal , qu'il efl au contraire , comme le fàblon ferrugineux, qui fe trouve mclé avec la platine, prcfque entièrement dépouillé de fès propriétés métalliques, puif qu'il eft prcfque infufible , qu'il réfifîe à la rouille, aux acides , & qu'il ne lui refle que la propriété d'être attirable à l'aimant: dès-lors l'objedion tombe, pui/que le feu ne peut rien fur cette forte de fer ; tous les ingrédiens , toutes les combinaifbns chimiques , ne peuvent ni l'altérer ni le changer, ni lui ôter qualité magnétique , ni même le féparer en entier de la platine avec laquelle il refle conflamment & intimement uni ; & quoique la platine conferve fa blancheur &. ne prenne point la coideur de l'or, après toutes les épreuves qu'on

336 Histoire Naturelle

lui a fait fubir, cela n*eii prouve que mieux que i'art ne peut altérer fa nature; fubftance efl; blanche & doit l'être en efîèt en la fuppofant, comme je le fais, compofce d'or dénaturé par l'arfenic, qui lui donne cette couleur blanche, & qui, quoique très-voiati! , peut néanmoins y être très - fixement uni , &: même plus intimement qu'il ne l'efl dans le cuivre dont on fait qu'il efl; très-difficile de le fcparer.

Plus j'ai combiné les obfervations générales & les faits particuliers fur la nature de la platine , pljus e me fuis perfuadé que ce n'efl qu'un mélange accidentel d'or imbu de vapeurs ar/ènicales , & d'un fer brûlé autant qu'il efl poffible, auquel le feu a par conféquent enlevé toutes fes propriétés métalliques, à l'exception de fon magnétifme ; je crois même que les Phyficiens , qui réfléchiront fans préjugé , fiir tous les faits que je viens d'expofer, feront de mon avis, & que les Chimifles ne s'obftineront pas à regarder comme un métal pur & parfait, une matière qui efl évidemment alliée avec d'autres fubflances métalliques. Cependant voyons encore de plus près les raifons fur lefquelles ils voudroient fonder leur opinion.

En recherchant les différences de l'or & de la platine jufque dans leur décompofition , on a obfervé, i.°que la dilToIution de la platine dans l'eau régale ne teint pas la peau, les os, les marbres & pierres calcaires en couleur pourpre, comme le fait la diffolution de Tor,

& que

DES Minéraux, 337

& que la platine ne fe précipite pas en pouJre couleur de pourpre, comme l'or précipite par l'étain; mais ceci doit-il nous furprendrc, puifque la platine eft blanclie (îx. que l'or c(t jaune' 2. L'e/prit-de-vin & les autres huiles efTentielles , ainfi que le vitriol de fer, précipitent l'or & ne précipitent pas la platine ; mais \\ me /èmble que cela doit arriver , puifque la platine eft mêlée de fer avec lequel le vitriol martial & les huiles efTentielles ont plus d'affinité qu'avec l'eau régale , & qu'en ayant moins avec l'or elles le laifTent dégager de difTo- lution. 3. Le précipité de la platine par l'alkali volatil, ne devient pas fulminant comme celui de for, cela ne doit pas encore nous étonner; car cette précipitation pro- duite par l'alkali, e(l plus qu'imparfaite, attendu que la diffolution refle toujours colorée & chargée de platine, qui dans le vrai, ed; plutôt calcinée que diffoute dans l'eau régale: elle ne peut donc pas, comme l'or diffous & précipité, faidr l'air que fournit l'alkali volatil, ni par conféquent devenir fulminante. 4. La platine traitée à la coupelle, foit par le plomb, le bifmuth ou l'anti- moine , ne fait point {'éclair comme l'or , & femble retenir une portion de ces matières, mais cela ne doit-il pas néceffaircment arriver, puifque fa fufion n'eft pas parfaite , &l qu'un mélange avec une matière déjà mé- langée, ne peut produire une fubftance pure, telle que celle de l'or quand il fait l'éclair ! ainfi toutes ces différences, loin de prouver que la platine efl un métal Aline rail X , Tcmc UL Lu

338 Histoire N aturelle

fimple & difFctent de l'or , fembiciit démontrer au contraire , que c'eft un or dénaturé par l'alliage intime d'une matière ferrugineufe également dénaturée; &. fi notre art ne peut rendre à ces métaux leur première forme , il ne faut pas en conclure que la fubflance de la platine ne fbit pas compofée d'or &l de fer, pui/que la préfence du fer y efl démontrée par l'aimant, & celle de l'or par la balance.

Avant que la platine fut connue en Europe , les Efpagnols, & même les Américains, l'avoient fondue en la mêlant avec des métaux, & particulièrement avec le cuivre & l'arfenic; ils en avoient lait différens petits puvrages qu'ils donnoient à plus bas prix que de pareils ouvrages en argent ; mais avec quelque métal qu'on puifle allier la platine , elle en détruit ou du moins diminue toujours la dudilité; elle les rend tous aigres (Se caflans, ce qui fembie prouver qu'elle contient une petite quantité d'arfenic, dont on fait qu'il ne faut qu'un grain pour produire cet efiet fur une -maffe confidé- rable de métal: d'ailleurs, il paroît que dans ces alliages de la platine avec les métaux , la combinaifon des fubflances ne fe fait pas d'une manière intime, c'ell plutôt une agrégation qu'une union parfaite , &. cela feul fuflit pour produire l'aigreur de ces alliages.

M. de Morveau , auffi favant Pbyficien qu'habile Chimifte, dit avec raifon, que la denfité de la platine (m)

(wj belon M. Briflbn , h platine en grenaille ne pèfe que

DES Minéraux. 39

n'eft pas confiante, qu'elle varie même fuivant les diffé- rens procédés qu'on emploie pour la fondre , quoiqu'elle n'y prenne certainement aucun alliage (n) ; ce fait m ' démontre t-il pas deux chofesî la première, que la denfité efl: ici d'autant moindre que la flifion efl plus impar- faite, & qu'elle feroit peut-être égale à celle de l'or fi l'on pouvoit réduire la platiue en fonte parfaite ; c'efl ce que nous avons tâché de faire en en faifant pafTer quelques livres à travers les charbons dans un fourneau d'afjiiration ^oj: h féconde , c'efl que cet

10^2 livres 2 onces le j^ied cube, tandis que la platine tojidiie âc écrouie pèfe 1423 livres 9 onces , ce qui furpalTe la denfité de l'or battu & e'croui, qui ne pc(e que 1355 livres 5 onces. Si cette détermination efl exade , on doit en inférer que la platine fondue eft fufceptible d'une plus grande coinprefîion que l'or.

fn) EIcmens de Chimie, tome I , page i i 0.

(0) ce II efl impofîlble de fondre la platine ou or blanc dans creufet, fans addition. Il re'fîfle à un feu aufîi vif, & mêine plus fort <t

que celui qui fond les meilleurs creuf'ets Il fondroit beaucoup ce

plus aife'ment fur les charbons , fans creufet ; mais on ne peut le ce traiter ainfi , c{uand on n'en a pas une livre , & j'ctois dans ce *< cas. Le phlogirtique des charbons ne contribue en aucune manière « à la fufion de ce métal ; mais leur chaleur animée par le foufïïet « de forge efl beaucoup plus forte qu(? celle du creufet ». Defcription de l'or blanc , &c. par AI. Schœffer , Journal étranger , moh de Novembre ly^J- J'ai penfé fur cela comme M. ScliœfTer , & j'ai Cru que je viendrois à bout de fondre parfaitement la platine en la faifant pafTer à travers les charbons ardens, 5c en affez grande quantité pour pouvoir la recueillir en fonte; M. de Morveau a bien voulu conduire cette opération en ma préfence; pour cela nous avons

Uu ij

340 Histoire Naturelle

alliage de fer <Sc d'or, produit parmi accident de nature, n'efl pas, comme les métaux, d'ime denfité confiante,

fait coiiflruire , au mois d'Août dernier 17S1 , wne efpcce de haut fourneau de treize pieds huit ])ouces de hauteur loiale divifc'e en cjuatre parties égales, favoir ; ia partie inférieure, de forme cylin- drique de vingt pouces de haut fur vingt pouces de diamètre, formée de trois dalles de pierre calcaire pofées fur une pierre de même nature , creufée légèrement en fond de chaudière , ce cylindre éioit ])ercé vers le bas de trois ouvertures difpolées aux fommets d'un triangle équilatéral infcrit ; chacune de ces ouvertures étoit de huit pouces de longueur fur dix de hauteur , «Se défendue à l'extérieur par des murs en brique , à la manière des gardes-tirans des fours à porcelaine.

La féconde partie du fourneau formée de dalles de même pierre , ^toit en cône de douze j^ouces de hauteur , ayant au bas vingt pouces de diamètre & neuf pouces au-delfus ; Jes dalles de CQi deux parties écoient entretenues par des cercles de fer.

La troifième partie formant un tuyau de neuf pouces de diamèire ^ de cinq pieds de Jong , ïni Low'iS.xuw.Q en briques.

Un tuyau de tôle de neuf pouces de diamètre & fix pieds de hauteur, placé fur le tuyau de briques, formoit la quatrième & dernière partie du fourneau ; on avoit pratiqué une porte vers le bas pour la commodité du chargement.

Ce fourneau ainfi conflruit, on mit le feu vers les quatre heures du foir , il tira d'abord aflez bien ; mais ayant éié chargé de charbon jufqu'aux deux tiers du tuyau de briques , le feu s'éteignit , & on eut affez de peine à le rallumer «5c à faire defcendre les charbons qui s'engorgeoient ; l'humidité eut fans doute au/Ti quelque part à cet effet; ce ne fui qu'à minuit que le tirage fe rétablit, on l'en- treunt jufqu'à huit heures du matin en chargeant de charbon à la hauteur de cinq pieds feulement, & bouchant alrernaiivement un des tifards pour augmenter l'adivité des deux autres.

DES Minéraux. 341

mais d'une denfitc variable, oc rccilciiKin clilîûcme fliivant les circoiilhnces, en forte que iclle platine cfl

Alors on jeta dans ce fourneau treize onces de jjlatiiie inélee avec quatre livres de verre de bouteille puiverilc <5c tamik' , & on continua de charger de cliarboii à la même hauteur de cinq pieds au-defius du fond.

Deux heures après o\\ ajouta même quantitd de platine & de verre pile.

On aperçut vers le midi quelques fcories à l'ouverture des lifards ; elles ctoient d'un verre groflîer , tenace, pâteux, & préfentoient à leur (urface des grains de platine non attaques; oa fit rejeter dans le fourneau toutes celles cjue l'on put tirer.

On efîàya de boucher à la fois deux tifards, & l'élévation de la flamme fit voir que le tirage en étoit réellement augmenté, mais \e% cendres qui s'atnonceloient au fond , arrêtant le tirage , on prit le parti de faire jouer un très-gros fouiîlet en introduifant la bufe dans un des tiiàids , les autres bouchés, & pour lors on enleva le tuyau de tôle qui devenoit inutile.

On reconnut vers les cinq heures du loir que les cendres étoient diminuées; les fcories mieux fondues contenoient une infinité de petits globules de platine; mais il ne fut pas poffible d'obtenir un laitier allez fluide pour permettre la réunion des petits culois métal- liques ; on arrêta le feu à minuit.

Le fourneau ayant été ouvert après deux jours de refroidilTemenr , on trouva fur le fond une mafle de fcories groflières , formées des cendres vitrifiées &. de quelques matières étrangères portées avec le charbon, la platine y étoit dilléminée en globules de difll'erentes grofièurs , quelques-uns du poids de vingt-cinq à trente grdins , tous très-attirables à l'aimant: on obfeiva dans quelques parties des fcories , une efpèce de criHallifation en rayons divergens, comme i'afberte ou l'hématite flriée, La chaleur avoit été fi violente que

34- Histoire Naturelle

plus ou moins pefante que telle autre, tandis que dans tout vrai métal, la denfké efl égale dans toutes les parties de fa fubilance.

dans tout le pourtour intérieur , la pierre du fourneau étoit complè- tement calcinée de trois pouces 5c demi d'e'paifleur & même entamée en quelques endroits par la vitrification.

Les fcories pulvérifées furent débarrafTées par un lavage en grande eau , de toutes les parties de chaux & même d'une portion de la terre. On mit toute la matière refiante dans un très-grand creufet de plomb noir avec une addition de fix livres d'alkali extemporané ; ce creufet fut placé devant les foufflets d'une chaufferie ; en moins de fix heures Je creu(èt fut percé du. côté du vent, & il fallut arrêter le feu parce que la matière qui en fortoit couloit au-devant des foufflets.

On reconnut le lendemain à l'ouverture du creufet que la maffe vitreufe qui avoir coulé & qui étoit encore attachée au creufet, tenoit une quantité de petits culots de platine du poids de foixante à quatre-vingts grains chacun , & qui étoient formés de globules refondus ; ces culots éioient de même rrès-magnéiiques, & plufieurs préfentoient à leur furface des élémens de crifiallifation. Le refte de la platine étoit à peine aglutiné.

On pulvérifa groflièrement toute la ma/fe, & en y promenant le barreau aimanté , on en relira près de onze onces de platine , tant en globules qu'en poufîitre métallique ; cette expérience fut faite aux forges de Bnflon , & en même temps nous répétâmes dans mon laboratoire de Mombard l'expérience de la platine malléable; on fit clifibudre un globule de platine dans l'eau régaie , on précipita la diifolution par le lél ammoniac , le précipité mis dans un creufet au feu d'une petite forge , tut promptement revivifié , quoique fans fufion complète. Il s'étendit très - bien Ibus le marteau , & les parcelles atténuées & divifées dans le mortier d'agatbe fe trouvèrent encore ienfxbles à l'aimant.

DES Minéraux. 3 4.3

M. de Morveau a reconnu, comme moi & avec moi, que la platine eft en elle-même magnétique, indépendamment du fablon ferrugineux dont elle eft extérieurement mêlée, & quelquefois environnée; comme cette ohfervation a été contredite , & que Sciiaiièr a prétendu qu'en faifànt feulement rougir Ja platine elle cefToit d'être attirable à l'aimant; que d'autres Chimjiles en grand nombre ont dit qu'après la fonte elle étoit abfolument infenrd:)le à l'aétion magnétique , nous ne pouvons nous difpenfer \Ie préfenter ici le rcfultat des expériences, & les faits relatifs à ces affertions.

M/^ Macquer & Baume affurent avoir reconnu : « Qu'en pouffant à un très-grand feu pendant cinquante heures la coupellation de la platine, elle avoit perdu de « fon poids , ce qui prouve que tout le plomb avoit paffé « à la coupelle avec quelque matière qu'il avoit enlevée, *^ d'autant que cette platine pa(fée à cette forte é])reuve ^^ de coupelle étoit devenue affez duélile pour s'étendre <' fous le marteau »^ fp) . Mais s'il étoit bien confiant que la platine perdît de fon poids à la coupellation, & qu'elle en perdit d'autant plus que le feu efl plus violent & plus long -temps continué; cette coupellation de cin* quante heures n'étoii encore qu'imparfaite, & n'a pas réduit la platine à fou état de pureté: On n'étoit pas encore parvenu , dit avec raifon M. de Morveau, à «

(p) Didionnaire de Chimie, art. Platine.

»

»

»

344 Histoire N atu relle

» achever ia coupeliatioii tic la platine lorfque nous avons fait voir qu'il étoic polTibie de la rendre complète au moyen d'un feu de la dernière violence, M. de Bufion a inlcré dans (es Supplémens^</y'^ le détail de ces expériences >) qui ont fourni un bouton de platine pure, & ab/blument » privée de plomb & de tout ce qu'il auroit pu /coriiier; » & il faut obferver que cette platine manifefta encore » un peu de fenfibilité à l'aclion du barreau aimante lorf- »• qu'elle fiit réduite en poudre, ce qui annonce que cette » propriété lui eft effentielle, puifqu'elle ne peut dépendre ici de l'alliage d'un fer étranger (r) », On ne doit

donc

(q) Supplément à l'Hidoire Naturelle , tome I , in-^' (r) Eléiiiens de Chimie, tome I, page 21p. « 1,1 n'efl pas pofllble, dit ailleurs AI. de Morveau , de luppofer que ia portion >5 de platine d'abord traitée par le nitre (Sc^nfuiiepar l'aciue vitriolique, » fut un fer étranger à la pladne eile-même , puilqu'il efl: tvident » qu'il auroit clé calciné h la première détonation , & que nous 3} avions eu ratteniion de ne loumettre à la léconde opciation que î> la platine qui avoit reçu !e brillant métallique; cette réflexion nous 5> a engagés à traiter une troifième fois ies cjnq cents grains reflins, » Se le rcfultat a été encore plus faiisfailànt. Le creufet ayant été «tenu plus long -temps au feu, la, platine étoit comme aglutinée »au-deirous de la matière faline, la lefllve étoit plus colorée & » comme verdâtre , & la poufiicre noire plus abondante ; l'acide 35 vitriolique , bouilli fur ce qui ctoit reQé fur le filtre, étoit fenfi- « blement plus chargé, & la platine en état de métal, rcduite à » trente-cinq grains , coinpris quelques écailles qui avoient l'appa- » rence de fer brûlé , & qui étoient beaucoup plus larges qu'aucun >7 des grains de platine. Une autre circonfîance bien digne de remarque , c'eft que dans ces trente-cinq grains on découvroit

uilément

DES Minéraux. 3^1.5

donc pas regarder la platine comme un métal pur, funpie & parlait, puifqu'en ia purifiant autant qu'il eft polFibie, elle contient toujours des parties de fer qui la rendent fenfible à l'aimant. M. de Morveau a fondu la platine , fans addition d'aucune matière métallique, par un fondant compofé de huit parties de verre pu!- vérifé, d'une partie de borax calciné, & d'une demi- partie de poufFière de charbon. Ce fondant vitreux <Sc falin, fond également les mines de fer & celles de tous ies autres métaux (f), & après cette iufion il n'entre ni ter ni aucun autre métal , la platine broyée dans un mortier d'agate étoit encore attirable à l'aimant. Ce même habile Chimifte eft le premier qui foit venu à bout d'allier la platine avec le fer forgé, au moyen du fondant que nous venons d'indiquer: cet alliage du fer forgé avec la platine, eft d'une extrême dureté, il reçoit

aileinent à la feule vue, nombre de paillettes de couleur d'or , c< tandis qu'auparavant nous n'en avions aperçu aucune , même « avec le fecours de la loupe «c

Nous avons fait digérer dans l'eau régale la pouffière noire qui c< avoit été féparée par les lavages ; elle a fourni une dilToIution u palTdblement chargée, qui avoit tous les caradères d'une diflolution ec de platine , qui a donné fur le champ un beau précipité jaune- «e pâle , par l'addition de la diflolution du fel ammoniac , ce qui « n'arrive pas à la diflolution de fer dans le même acide mixte ; la «c liqueur prufllenne faturée l'a colorée en vert, & la fécule bleue « a été plufieurs jours à fe raflembler m. Élémens de Chimie, fat M. de Aforveûu , tome II , pages i ^ } & Juiv*

(f) Idem, tome I , page 2.2J,

ATinêmiipçj Tome IIL X x

3^6 Histoire Naturelle

un très-beau poli qui ne fe ternit point à l'air , & ce feroit la matière la plus propre de toutes à faire des miroirs de télcfcope (t).

Je pourrois rapporter ici les autres expériences par Jefquelles M. de Morveau s'efl afTuré que le fer exifte toujours dans la platine la plus purifiée ; on les lira avec fatisfaélion dans Ion excellent Ouvrage (u) ; on y trou- vera entr'autres chofes utiles, l'indication d'un moyen Tur & facile de reconnoître fi l'or a été faldtié par le mélange de la platine; il luilit pour cela de faire difToudre dans l'eau régale, une portion de cet or fufpcél, & d'y jeter quelques gouttes d'une dilTolution de fel ammoniac, il n'y aura aucun précipité fi l'or e/l pur, & au contraire, il /e fera un précipité d'un beau jaune s'il efl mêlé de platine ; on doit feulement avoir atten- tion de ne pas étendre la dilfolution dans beaucoup d'eau (x) ; c'efl en traitant le précipité de la platine, par une diffolution concentrée de fel ammoniac, & en lui faifànt fubir un feu de la dernière violence, qu'on

(tj La pfatine eft de tous (es métaux le plus piopre à faire les miruirs des télelcopes , puilqu'elle refi/te, auflj-bien que l'or, aux vapeurs de l'air, qu'elle eft cojupade , fort cJenle , fans coukvr & plus dure que l'or , que le défaut de ces deux propriétés rend inutile pour cet ufage. Defcriptïon de l'or blanc , par M. Schœfftr ; Journal étranger, mois de Novembre iy^7.

(u) Voyez les Éiéinens de Chimie, tome II , pages /^ & fuïv,

(xj Idem, ihi^^m , pages 26$ ù" 31^*

DES Minéraux. 3 47

peut la rendre aflez dudile pour s'éteiiJre /bus le marteau, mais dans cet état de plus grande pureté, lorf- qu'on la réduit en poudre , elle efl encore attirable à l'aimant; la platine efl donc toujours mêlée de fer, & dès-lors on ne doit pas la regarder comme un métal fimple : cette vérité, déjà bien confiatée, fe confirmera encore par toutes les expériences qu'on voudra tenter pour s'en afTurer. M. Margrafi a précipité la platine par plufieurs fubflances métalliques; aucune de ces préci- pitations ne iui a donné la platine en état de métal, mais toujours fous la forme d'iuie poudre brune ; ce fait n'ert pas le moins important de tous les faits qui mettent ce minéral hors de la claffe des métaux fnnples.

M. Lewis affure que Tarfenic diffout aifément la platine; M. de Morveau , plus exaét dans fes expériences, a reconnu que cette diffolution n'étoit qu'imparfaite, & que l'arfénic corrodoit plutôt qu'il ne difTolvoit la platine , & de tous les eifais qu'il a faits fur ces deux minéraux, joints enfcmble, il conclut qu'il y a entr'eux une très-grande affinité, « ce qui ajoute, dit-il, aux faits qui établi fîcnt déjà tant de rapports entre la platine & le fer; » mais ce dernier fait ajoute auffi un degré de pro- babilité à mon idée, fur l'exiflence d'ime petite quantité ci'arfenic dans cette ful.flance compofée de fer & d'or.

A tous ces faits qui me fcmblent démontrer quô la platine n'ell point un métal pur & f mple , mais un

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34^ Histoire Natv relle

niclange de fer & d'or tous deux altérés , & dans lequel ces deux métaux font intimement unis , je dois ajouter une obfervation qui ne peut que les confirmer: il y a des mines de fer, tenant or du argent, qu'il efl impoffible même avec (e'ize parties de plomb, de réduire en fcories Huides ; elles font toujours pâteufes & filantes , ik par conféquent l'or & l'argent qu'elles contiennent, ne peuvent s'en féparer pour fe joindre au plomb. On trouve en une infinité d'endroits , des fables ferrvigineux tenant de l'or ; mais jufqu'à préfent on n'a pu , par ia fonte en grand, en féparer afTez d'or pour payer les frais; le fer qui fe refiTufcite retient l'or, ou bien l'or relie dans les fcories (y) ; cette union intime de l'or avec le fer dans ces fablons ferrugineux, qui, tous /ont très-magnétiques & femblables au fablon de la platine, indiquent que cette même union peut bien être encore plus forte dans la platine l'or a fouffert, par quelques vapeurs arfenicales , une altération qui l'a privé de

(y) Traité de la fonte des mines de Schlutter, tome I , pages i Sf if I 8 ^. Nota. On doit néanmoins obferver que le procédé indiqué par M. Hellot , d'après Schlutter, n'eft; peut-être pas Je meilieur qu'on puifTe employer pour tirer l'or & l'argent du fer. M. de Grignon ait qu'il faut fcorifier par le foufre , rafraîchir par le plomb & coupeler enluite ; il aflure que le fieur Vatrin a tiré l'or du fer avec quelque bénéfice , & qu'il en a traité dans un an quarante milliers qui venoient des forges de M. de h BJou;'e en Nivernois & Berry , d'une veine de mine de fer qui a cefTé de fournil de ce minéral aurifère.

DES Minéraux. 3^9

du6lilité : & cette union efl d'autant plus difficile à rompre, que ni l'un ni l'autre de ces métaux, n'exifle dans la platine en leur état de nature, puifque tous deux y font dénués de la plupart de leurs propriétés métalliques. « Toutes les expériences que j'ai faites fur la platine, m'écrit M. Tillet, me conduifent à croire qu'elle n'efl « point un métal fimple , que le fer y domine , mais « qu'elle ne cont'imt point dor >>. Quelque confiance que j'aie aux lumières de ce favant Académicien, je ne puis me perfuader que la partie denfe de la platine, ne foit pas effentiellement de l'or, mais de l'or altéré, & auquel notre art n'a pu jufqu'à prcfent rendre fa première forme : ne feroit-il pas plus qu'étonnant qu'il exiflât en deux feuls endroits du monde, une matière auffi pe/ànte que l'or , qui ne fèroit pas de l'or î &. que cette matière fi denfe qu'on voudroit fuppofer différente de l'or, ne trouvât néanmoins que dans des mines d'or ! je le répète, fi la platine trouvoit, comme les autres métaux, dans toutes les parties du monde, fi elle fe trouvoit en mines particulières, &. dans d'autres mines que celles d'or, je pourrois penfer alors avec M. Tillet, qu'elle ne contient point d'or, & qu'il exifle en effet une autre matière à peu-près auffi denfe que l'or dont elle feroic compofée avec un mélange de fer , & dans ce cas , on pourroit la regarder comme un feptième métal, fur-tout fi l'on pouvoit parvenir à en féparer le fer; mais jufqu'à ce jour, tout me femble démontrer ce que j'ai ofé

350 Histoire Naturelle

avancer le premier , que ce minéral n'efl point un métal fimple, mais feulement un alliage de fer & d'or. Il me paroît même qu'on peut prouver par un feul fait, que cette fiibftance denfè de la platine , n'ell pas une matière particulière cflentiellement différente de l'or; puifque le foufre ou fa vapeur agit fur tous les métaux, à l'exception de l'or, <Sc que n'agiffant point du tout fur la platine , on doit en conclure que la fubftauce àenfe de ce minéral , efl de même eflence que celle de l'or, ÔL l'on ne peut pas objecter que par la même raifon la platine ne contienne pas du fer , fur lequel l'on fait que le foufre agit avec grande énergie, parce qu'il faut toujours fe fouvenir que le fer contenu dans la platine, n'efl point dans fon état métallique, mais réduit en fablon magnétique, & que dans cet état le foufre ne l'attaque pas plus qu'il attaque l'or.

M. le baron de Sickengen, homme auffi recomman- dable par fes qualités perfonnelles & fes dignités que par lès grandes connoi/fances eji Chimie , a communiqué à l'Académie des Sciences en 1778, les obfervations & les expériences qu'il avoit faites fur la platine; & ;c fais ici volontiers l'éloge de fon travail, quoique je ne fois pas d'accord avec lui fur quelques points que ncu3 avons probablement vus d'une manière différente. Par exemple , il annonce par fon expérience 2 i , que le nitre en fufion n'altère pas la platine ; je ne puis m'empêcJier de lui faire obfcrvcj que ies expériences

tf E s M I N É R A U X. -^ Ç T

ides autres Chimiftes, 6c en pariiciilier celles de M. de Morveaii, prouvent le contraire, puilque Ja platine, ainfi traitée, fe iaiire attaquer par J'acide vitrioiique &l. par l'eau-forte (ij.

L'Expérience 22 de M. le baron de Sickenn-en, paroît contirmer le fbupçon que j'ai toujours eu que la platine ne nous arrive pas telle qu'elle fort de la mine mais feulement après avoir paffe fous la meule, & irès- probablement après avoir été foumi/ê à l'amairame; les globules de mercure que M. Schœffer & M. le comte de Milly ont remarqué dans celle qu'ils traitoient, viennent à l'appui de cette préfomption que je crois fondée.

J'obferverai au fujet de l'Expérience ^^ de M. le baron de Sickengen, qu'elle avoit été faite auparavant, & publiée dans une Lettre qui m'a été adreffce par M. de Morveau, & qui eft inférée dans le Journal de Phyfiqiie, rowe 11, pûge jj)^; ce que M. de Sickengen a fait de plus que M. de Morveau, c'elt qu'ayant opéré iix une plus grande quantité de platine, il a pu former un barreau d'un culot plus gros que celui que M. de Morveau n'a pu étendre qu'en une petite lame.

Je ne peux me di/J3enkr de remarquer au/fi que îe principe poié pour fèrvir de bafè aux conféquences de l'Expérience ^6, ne me paroît pas jufle ; car un alliage même fait ])ar notre art, peut avoir ou acqttérir des

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(\) Voyez les Eléinens de Chimie, par M. de Morveau,

352 Histoire Naturelle

propriétés dilférentes dans les fubflances alliées, & par coiilcquent la platine pourroit s'allier au mercure, fans qu'on pût en conclure qu'elle ne contient pas de fer, ÔL même cette Expérience 56, eft peut-être tout ce qu'il y a de plus fort pour prouver au moins rimpoifi^ biiiic de priver la platine de tout fer, pui/que cette platine revivifiée que Ton nous donne pour la plus pure, & qui éprouve une forte de décompofition par le mercure, produit une poudre noire martiale, attirable à l'aimant, & avec laquelle on peut faire le bleu de PrufTe : or pour conclure , comme le fait l'illufîre Auteur (Expérience Jj) ) , que l'analyfe n'a point de prife fur la platine, il auroit fallu répéter fur le produit de l'Expérience 59, les épreuves fur le produit de l'Expé- rience ^6, & démontrer qu'il ne donnoit plus ni poudre noire ni atomes magnétiques, ni bleu dePrufFe; fans cela le procédé qui fait l'amalgame à chaud , n'e/l plus qu'un procédé approprié qui ne décide rien.

J'obferve encore que l'Expérience 64., donne un réfultat qui eft plus d'accord avec mon opinion qu'avec celle de l'Auteur; car par l'addition du mercure, le fer, comme la platine, fe fépare en poudre noire, & cela feul fuffit pour infirmer les conféquenccs qu'on Voudroit tirer de cette expérience: enfin, fi nous rap- prochons les aveux de cet habile Chimifîe qui ne laiffe pas de convenir : « Que la platine ne peut jamais être » privée de tout fer Qu'il n'e/lpas prouvé qu'elle foie

homogène.

DES Minéraux. 353

homogène Qu'elle contient cinq treizièmes de fer "

qu'on peut retirer progrefTivement par des procédés " très-compliqués; qu^cnfin il faut avant de rien décider» " répéter fur la platine réduite toutes les expériences qu'il " a faites fur la platine brute ». Il nous paroit qu'il ne devoit pas prononcer contre fès propres précomptions , en afTurant, comme il le fait, que la platine n'efl pas un alliage, mais un métal fimple.

M. Bowles, dans fon Hifloire Naturelle de l'Efpagne, a inféré les expériences & les obfervations qu'il étoit plus à portée que pcrfonne de faire fur cette matière , puifque le Gouvernement lui avoit fait remettre une grande quantité de platine pour l'éprouver ; néanmoins il nous apprend peu de chofes, & il attaque mon opi- nion par de petites raifbns ; ^' en 1753, dit -il, le Miniftre me fit livrer une quantité fuiîifante de platine « avec ordre de fbumcttre cette matière à mes expériences « <& de donner mon avis fur le bon 6l le mauvais ufâge « qu'on pourroit en faire ; cette platine qu'on me remit « étoit accompagnée de la note fuivante : « ^^7ns FEvcché « ^e Popayan fiiffragaui de Lima ^ il y a beaucoup de mhus « â'or, & une enîr autres nommée choco ; dans une parue de « /// monragrie fe trouve en grande quantité une efpcce de fable « que ceux du pays appellent platine ou or blanc ; en exa- ^«• minant cette matière, je trouvai qu'elle étoit fort pefante »

& mclée de quelques grains d'or couleur de fuie »

Après avoir féparé les grains d'or, j'ai trouvé que la « Aline faux. Tome IIL Y y

354 Histoire Naturelle

y> platine étoit plus pcfante que l'or à 20 karats ; en ayant »î fait battre qtielques grains fous le marteau, je vis qu'ils » s'ctencloient de cinq ou fix fois leur diamètre, & qu'ils » refloient blancs comme l'argent ; mais les ayant envoyés

» à un Batteur-d'or , ils fe bri/erent fous les pilons Je

35 voulus fondre cette platine à un feu très-violent , mais » les grains ne firent que s'aglutiner. . . . J'efTayai de ia » diffoudre par les acides ; le vitriolique & le nitreux 3> ne l'attaquèrent point , mais l'acide marin parut Tenta- 3) mer , & ayant verfë une bonne dofe de fel ammoniac » fur cet acide , je vis toute la platine (e précipiter en une 3) matière couleur de brique ; enfin , après un grand nombre 35 d'expériences raifonnées , je fuis parvenu à faire avec la » platine, du véritable bleu de Prujfe. Ayant reconnu par 3* ces mêmes expériences, que la platine conrenoit un peu » de fer, & m'étant fouvenu que dans mes premières » opérations, les grains de platine expofcs à un feu violent, » avoient contracté entr'eux une adbérence très-fuper- 3) ficielle, puifqu'il ne falloit qu*un coup a/fez léger pour 3> les féparer , je conclus que cette adbérence étoit l'effet de la fufion d'une coucbe déliée de fer qui les recou- »> vroir, & que la fubfîance métallique intérieure n'y avoit aucune part & ne contenoit point de fer ». Nous ne croyons pas qu'il foit nécefi^aire de nous arrêter ici pour faire fentir le foible de ce raifoimem.ent , & le faux de Ja conféquence qu'en tire M. Bowles ; cependant ij infirte, & fe munifTam de l'autorité des Chimifles qui

DES Minéraux. 355

ont regardé la platine comme un nouveau mcial fimple & parfait,, il argumente aflez longuement contre moi: " Si la platine, dit -il, étoit un compofé d'or & de fer, comme le dit M. de Buffon, elle devroit conferver « toutes les propriétés qui réfultent de cette compoiition, « & cependant une foule d'expériences prouve le con- « traire ». Cet habile Naturalise n'a pas fait attention que j'ai dit expreflcment, que le fer & l'or de la platine n'étoient pas dans leur état ordinaire, comme dans un alliage artiiiciel , & s'il eût confidéré fans préjugé fes propres expériences, il eût reconnu que toutes prouvent la préfënce & l'union intime du fablon ferrugineux <Sc magnétique avec la platine , & qu'aucune ne peut dé- montrer le contraire. Au refte, comme les expériences de M. Bowles, font prefque toutes les mêmes que celles des autres Chimifles, &l que je les ai expofées &l difcutées ci-devant, je ne le fuivrai plus loin, que pour obferver que malgré fes objeélions contre mon opinion , il avoue néanmoins: « Que quoiqu'il foit perfuadé que la platine eft un métal fui gênais, &. non pas un fimpIc mélange d'or &. de fer, il n'ofe malgré cela prononcer affirma- tivement ni l'un ni l'autre, & que quoique la platine « ait des propriétés dilîcrentes de celles de tous les autres « métaux connus, il fait trop combien nous fommes éloignés de connoîire véritable nature ».

Au reile, AI. Bowles termine ce chapitre fur la platine , par quelques obfcrvations iatéreffantes : « La

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356 Histoire Naturelle

» platine, dit-il, que je dois au célèbre Don Antonio de » Ulloa, eft une matière qui fe rencontre dans des mines 5> qui contiennent de l'or; elle eft unie (i étroitement avec « ce métal qu'elle lui fert comme de matrice, & que ce n'efl: qu'avec beaucoup d'efforts , & à grands coups qu'on parvient à les feparer; en forte que fi la platine abonde à un certain point dans une mine, on eil forcé « de l'abandonner, parce que les frais & les travaux né- ceffaires pour faire la féparation des deux métaux, abforberoient le profit.

Les feules mines d'où l'on tire la platine font celles de la nouvelle Grenade , & en particulier celles de Choco 6l de Barbacoa font les plus riches. // (/? rewar- « qiiable que cène mature ne fe trouve dans aucmie auire » inhie , fait du Pérou , foît du Chïly , fou du Mexique. Au 55 refte , la platine fe trouve dans les fufditcs mines , iion- i^ feulement en înaffe , mais au/fi en grains féparés comme 5) des grains de fable. Enfin il faut être réfervé à tirer des conféquences trop générales des expériences qu'on auroit faites fur une pareille quantité de platine tirée â*iin feul » endroit de la mine^ expériences qui pourroient être démen- 5> ties par d'autres expériences faites fur celles d'un autre

endroit des mêmes mines remarquant , continue

M. Bowles , que la platine contenoit du fer , & que » le cobalt en contient auiïi , qu'on trouve beaucoup de » grains d'or de couleur de fliie mêlés avec la platine , 5) que cette e/pèce nouvelle de fable métallique efi unique

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DES Minéraux, 357

dans le monde , qu*elle fe trouve en abondance dans « une montagne aux environs d'une mine d'or, &. qu'il y t. a beaucoup de volcans dans ce pays; je me fuis per- « fuadé que la montagne renferme du cobalt , comme « celle de la vallée de Giflan, dans les pyrénées d'Arra- « gou, que le feu d'un volcan aura fait évaporer l'arfenic a & aura formé quelque chofe de femblable au régule de cobalt ; que ce régule fe fond & fe mêle avec i'or , quoiqu'il contienne du fer , & que le feu appliqué pen- « dant lui grand nombre de fiècles , privant la matière de «

fa Rifibiiité , aura formé ce fable métallique que les li

grains d'or de forme irrégulière & de couleur de fiiie, « font aufTi l'effet du feu d'un volcan lorfqu'il s'éteint ; que les grains de platine qui contrarient adliérence , à « caufe de la couche légère de fer étendue à leur furface, font le réfultat de la décompofition du fer dans le grand « nombre de fiècles qui fe font écoulés depuis que le « volcan s'eft éteint ; & que ceux qui n'ont point cette « couche ferrugineufè , n'ont pas eu aflez de temps depuis « l'extinélion du volcan pour l'acquérir. Cela parortra un « ibnge à plufieurs ; mais je fuis le grand argument de « M. de Buiibn (a) ». M. Bowles a raifon de dire qu'il fuit mon grand argument; cet argument confjfle en effet, en ce que la platine n'eft point, comme les métaux, un produit primitif de la Nature, mais une fuuple production accidentelle , qui ne fe trouve qu'en deux endroits

(dj Hiiloire Naturelle d'JElpagne , chapitre de la Platine.

358 Histoire Natu relle

dans le inonde entier ; que cet accident , comme je l'ai dit, a été produit par je feu des volcans, & feule- ment fur des mines d'or mêlées de ïv.x , tous deux dénatures par l'acflion continuée d'un feu très-violent; qu'à ce mélange de fer & d'or, il fe fera joint quelques vapeurs ar/ènicales , qui auront fait perdre à i'or fa dudilité , & que de ces combinaifons très - naturelles , & cependant accidentelles , aura réfiilté la formation de la platine. Ces dernières obfervations de Al. Bowles, loin d'iniirmer mon opinion , femblent au contraire ia confirmer pleinement; car elles indiquent dans la platine, non-feulement le mélange du fer, mais la préfcnce de l'arfenic ; elles annoncent que la platine d'un endroit n'efl pas de même qualité que ccWc d'un autre endroit; elles prouvent qu'elle fe trouve en maffe dans deux feules mines d'or, ou en grains & grenailles dans des montagnes toutes compofées du fablon ferrugineux, ÔL toujours près des mines d'or &. dans des contrées vol- canifées : la vérité de mon opinion me paroît donc plus démontrée que jamais, & je fuis convaincu que plus on fera de recherches fur l'Hiftoire Naturelle de h platine, &. d'expériences fur fa fubflance , plus on reconnoîtra qu'elle n'ell point un métal fimple ni d'une clfence pure, mais un alliage de fer & d'or dénaturés, tant par la violence & la continuité d'un feu volcanique, que par le mélange des vapeurs fulfureufes & arfcnicales, qui auront ôté à ces métaux la couleur & leur ductilité.

DES M 1 N É n A V X. 359

DU COBALT.

xJE tous les minéraux métalliques , le cohalt cfl peut- être celui dont la nature eft la plus mafquée, les carac- tères les plus ambigus &. l'efTcnce la moins pure ; les mines de cobalt, très -différentes entr'elles , n'offrent d'abord aucun caradlère commun , & ce n'efl qu'en ks travaillant au feu qu'on peut les reconnoître par un effet très-remarquable, unique & qui conffle à donner aux émaux une belle couleur bleue. Ce n'efl aulTi que pour obtenir ce beau bleu que l'on recherche le cobalt ; il n'a aucune autre propriété dont on puiffe faire un u/àge utile, fi ce n'efl peut-être en l'alliant avec d'autres minéraux métalliques (a) . Ses mines font affez rares & toujours chargées d'une grande quantité de matières étrangères ; la plupart contiennent plus d'arfenic que de cobalt , & dans toutes le fer efl fi intimement lié au cobalt , qu'on ne peut l'en féparer ; le bifmutli fe trouve auffi affez fbuvent interpofé dans la fubflance de ces mines ; on y a reconnu de l'or , de l'argent , <Iu cuivre , &. quelquefois toutes ces matières & d'autres

(a) M. Baume dit daiis fa Chimie expérimentale avoir fàit"*éntrer le collait dans un alliage pour des robinets de fontaine, que cet alliage pouvoir fe mouler paifaiieraeni & n'e'toit fujet à aucune «Ipèce de jouille.

360 Histoire Naturelle

encore s'y trouvent mêlées enfembie , fans compter les pyrites qui font aufii fouvent intimement unies à la fubflance du cobalt. Le nombre de ces variétés efl donc fi grand , non-feulement dans les différentes mines de cobalt , mais auffi dans une feule & même mine , que les nomenclateurs en Minéralogie ont cru devoir en faire plufieurs efpèces, & même en féparer abfo- îument un autre minéral qui n'étoit pas connu avant le travail des mines de cobalt ; ils ont donné le nom de fîkkel (b) à cette lubflance qui diffère en effet du cobalt , quoiqu'elle ne fe trouve qu'avec lui. Tous deux peuvent fe réduire en un régule dont les propriétés font affez différentes pour qu'on puiffe les regarder comme deux différentes fortes de minéraux métalliques.

Le régule de cobalt n'affcde guère de figure régu- lière (c) , & n*a pas de forme déterminée; ce régule efl très-pefant, d'une couleur grife affez brillante, d'un tiffu ferré , d'une fubftance compa(5le tSi. d'un grain fin ; furface prend en peu de temps par Timpreffion de

(h) Cronftedt a donné le nom de Nickel à cette fubflance, parce <|u'eile fe trouve dans les mines de Cobalt que les Aiiemands nomment Kupfer-nickel. M. Bergman obferve que quoiqu'on trouve fréquemment du Cobalt natif, il ell toujours uni au fer , à 1 arfenic & au nickel. Opufcules chimiques , tome II , dijfer talion 2^.

(c) M. l'abbé Mongez afiure néanmoins avoir obtenu un régule de cobalt en crilUux compoles de faifceaux réguliers. Journal de Phyjique , lyS i.

l'air

DES Minéraux. 361

l'air une teinte rofacce ou couleur de fleurs de pccher; il eft afTez dur & n'eft point du tout ducflile ; fa den- fité eft néanmoins plus grande que celle de l'étain , du fer & du cuivre ; elle eft à trcs-peu-près égale à la denfué de l'acier (d) . Ce régule du cohaft & celui du nickel font après le bifmuth les plus pefantes des matières auxquelles on a donne le nom de demi - métaux , & l'on auroit certainement mis le bifmuth , le cobalt &. le nickel au rang des métaux s'ils avoient eu de la du6lilité ; ce n'efl qu'à cau/è de très-grande denfué que l'on a placé le mercure avec les métaux , & parce qu'on a en même temps fuppofé que fluidité pouvoit être confidérée comme l'exircme de la du6lilité.

Les minières de cobalt s'annoncent par des efïïo- refcences à la fiirface du terrein ; ces efliorefcences font ordinairement rougeâtrcb & afTez fouvent di/pofées en étoiles ou en rayons divergens qui quelquefois fe croifent. Nous donnerons ici l'indication du petit nombre de ces mines que nos Obfèrvateurs ont reconnues en France & dans les Pyrénées aux confins de TEfpagne ; mais c'efl dans la Saxe & dans quelques autres provinces de l'Allemagne qu'on a commencé à travailler, & que l'on travaille encore avec fuccès & profit les mines de

(d) La pefanteur Tpécifique du régule de cobalt eft de 7R1 ip; celle du régule de nickel de 78070 ; & la pefanteur fpccifique de l'acier écroiii & trempé eft de 78180; celle du fer forgé n'efl que de 77880.

Aîinéraux f Tome III. Z z

362 Histoire Naturelle

cobalt ; & ce font les Mincralogifles allemands qui nous ont donné le plus de luniicres fur les propriétés de ce minéral <Sc fur la manière dont on doit le traiter.

Le premier &. le plus fur des indices extérieurs fe) qui peuvent annoncer une mine prochaine de cobalt , cft donc une efflorefcence minérale, couleur de rofc, de flruéture radiée à laquelle on a donné le nom de jlcurs de cobalt ; quelquefois cette matière n'cfl point en forme de Heurs rouges , mais en poudre & d'une couleur plus pâle ; mais le figne le j)lus certain & par lequel on pourra reconnoître le véritable cobalt tfl la terre bleue qui l'accompagne quelquefois , & au défaut de cet indice , ce fera la couleur bleue qu'il donne lorfqu'il eft réduit en verre ; car fi la mine qui paroît être de cobalt fe convertit en verre noir, ce ne fera que de la pyrite ; fi le verre eft d'une couleur roulfe , ce fera de la mine de cuivre ; au lieu que la mine de cobalt donnera toujours un verre bleu de faphir; c'cfl: probablement par cette reffemblance à la couleur du faphir qu'oi:^ a donné à ce verre bleu de cobalt le nom de fiphre ou fdffre. Au relie, on a auffi appelé faffn la chaux de cobalt qui e(l en poudre rougeâtre & qui ne provient que de la calcination de la mine de cobalt; le fafîre qui c(l dans le commerce efl toujours mclé de fable quartzeux qu'on ajoute en fraude pour en augmenter

(e) Tranfâdions philofophicjues , A^.' ^p^ , Novembre ijiS,

DES Minéraux. ^6^

la quantité , & ce faffre ou chaux rougeâtre Je cobalt doime auiFi par la fudoii le même bieu que le verre de cobalt , 6l c'cft à ce verre bleu de falire que Ton donne le nom de fmalt.

Pour obtenir ce verre avec belle couleur , on fait griller la mine de cobalt dans un fourneau la Hamme efl réverbérée fur la matière minérale réduite en poudre ou du moins concafTée ; ce fourneau doit être fur- monté de cheminées tortueufes dans lefquelles les vapeurs qui s'élèvent puiiïent être retenues en s'attachant à leurs parois ; ces vapeurs s'y condenfent en effet & s'y accu- mulent en grande quantité fous la forme d'une poudre blanchâtre que l'on détache en la raclant ; cette poudre eft de l'arfenic dont les mines de cobalt font toujours mêlées ; elles en fourniffent en fi grande quantité par la hmple torréfaétion , que tout Tar/enic blanc qui efl dans le commerce vient des fourneaux l'on grille des mines de cobalt ; & c'efl le premier produit qu'on en tire.

La matière calcinée qui refle dans le fourneau, après l'entière fublimation des vapeurs arfenicales , efl une chaux trop réfraélaire pour être fondue feule; ,. il faut y ajouter du fable vitrefcible , ou du quartz qu'on aura fait auparavant torréfier pour les pulvérifcr; fur une partie de chaux de cobalt, on met ordinairement detix ou trois parties de cette poudre vitreufe à laquelle on ajoute une partie de falin pour accéJérer la fufion ; ce

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364- Histoire Natu belle

mélange fe met dans de grands creufets places dans le fourneau, & pendant les d\x ou douze heures de feu qui font néceïïaires pour la vitrification , on remue fouvcnt la matière pour en rendre le mélange plus égal & plus intime; 6l lorfqu'elle efl entièrement & parfaitement fondue, on la prend toute ardente & liquide avec des cuillers de fer, & on la jette dans un cuvier plein d'eau, fe refroidiflant iùbitement elle n'acquiert pas autant de dureté qu'à l'air, &. devient plus aiiée à pulvcrifer; elle forme néanmoins des maffes folides qu'il faut broyer fous les pilons d'un bocard, & faire eniuite pafTer fous une meule pour la réduire enfin en poudre très-fine &l bien lavée , qui efl alors du plus beau bleu- d'azur , & toute préparée pour entrer dans les émaux.

Comme les mines de cobalt font fort mélangées & très-différentes les unes des autres, & que même l'on donne vulgairement le nom de cobalt à toute mine mêlée de matières nuidbles (f), & fur-tout d'arfenic ; on efl forcé de les effayer pour les reconnoître, & s'aifurer fi elles contiennent en effet le vrai cobalt qui

(f) La fangue allemande a même attaché au mot de Cobalt ou Cobolt l'idée d'un elprit fouterrain ; malfdilant & malifi qui fe piait à effrayer & à tourmenter les Mineurs ; & comme le minerai de cobalt , à raifon de l'arfenic qu'il contient , ronge les pieds & les mains des ouvriers qui le travaillent , on a aj)pelé en général Cobalto les mines dont l'arlenic fait la partie dominante. Alémoire fur le Cobalt , par Aï. Saur , dans ceux des Savans étrangers , tome I.

D E s M I N É R A V X. 365

donne au verre le beau bleu. II faut dans ces cfTais rendre les fcories fort Huides & très-neties , pour juger de l'imenfité de la couleur bleue que fournit la mine convertie d'abord en cliaux & enluite en verre; on doit donc commencer par la griller & calciner, pour la mettre dans Tétat de chaux ; il trouve à la vérité , quelques morceaux de minerai le cobalt efl aflez pur pour n'avoir pas bcfoin d'être grillé, & qui donnent leur bleu fans cette préparation; mais ces morceaux font très-rares, & communément Je minerai de cobalt fe trouve mêlé d'une plus ou moins grande quantité d'ar- fenic qu'il faut enlever par la fublimation. Cette opéra- tion, quoique irès-fimple, demande cependant quelques attentions; car il arrive affez fouvent que par un feu de grillage trop fort, le minerai de cobalt perd quelques nuances de fa belle couleur bleue ; & de même il arrive que ce jninérai ne peut acquérir cette couleur, s'il n'a pas été affez grillé pour l'exalter, & ce point précis efl difficile à faifir. Les unes de ces mines exigent beaucoup plus de temps & de feu que les autres, ce ne peut donc être que par des effais réitérés & faits avec foin, que l'on peut s'afTurer à peu-près de la manière dont on doit traiter en grand telle ou telle mine particulière (^g) ,

(g) On pèfe deux quintaux qu'on réduit en poudre grcfTière ; on les met dans un tejl a rôtir, fous la in(.uffle du fourneau; on leur donne le degré' de chaleur modéré dans le commencement, &. de demi-heure en demi- heure on retire le teft pour refroidir la

366 Histoire Natu relle

Dans quelques-unes on trouve une afTez forte quantité d'argent, & même d'or, pour mériter un travail parti- matière <5c la jiietire en poudre plus fine , ce que Von répète trois &. quatre tois , ou jufqu'à ce qu'elle ne rende plus aucune odeur d'aiienic.

Le caillou qu'il faut joindre à cette matière pour en achever l'efiai, doit être aufli calciné. On choifit le filex qui devient blanc par calcination , «Se qui ne prend point de couleur tannée. On peut lui fubftituer un quartz bien crillallin ou un Table bien lave , qu'il faut auffi calciner. On divife en deux parties égales le cobalt calciné ; à une de ces parties on joint deux quintaux de cailloux ou de lable , & lix quintaux de potafle. Après avoir mclt le tout enlenible , on le met dans un creulet d'efîài , qtie l'on place fur l'aire de la forge devant le foufflet ; aufTi-iôt que le charbon dont on a rempli le foyer formé avec des briques , eQ affaiOe , & que le creufet ell rouge , on peut commencer à foufHer , parce qu'on ne rifque rien par rapport au foulèvement du Hux. Dès qu'on a loufflc près d'une heure , on peur prendre . avec un fil de fer froid , un edai de la matière en fufion , ô*. fi l'on trouve que les fcories foient tenaces & qu'elles filent, l'eflai e(l achevé.... on le laiffe encore au feu pendant quelques minutes. Quand on a çafie le creufet, on prend ces fcories, on les broyé 5t on les lave avec foin pour voir la couleur qu'elles donnent.

Si elle ell trop intenfe , on refait un autre effai avec le fécond quintal de cobalt qu'on a rôti , & l'on y ajoute trois quintaux de cailloux ou de fable. Si la couleur des fcor es de ce fécond elTai efl encore trop foncée , on répète ces efTais jnfqu'à ce qu'on ait trouvé la jufte proportion du fable & la couleur qu'on veut avoir. C'eft par ce moyen qu'on juge de la bonté du cobalt; car s'il colore beaucouj) de fable ou de cailloux calcinés , il rend par conféquent beaucoup de couleur, & fon prix augmente. Schlutier ^ Traité de la Fonte des mines , tome I , pages z^j & 2^^,

DES Minéraux. 367

culier, par lequel on en extrait ces métaux. Il faut pour cela ne calciner d'abord la mine de cobalt qu'à un feu modéré; s'il étoit violent, l'arfenic qui s'en dégageroit brufqucment emporteroit avec lui une partie de l'argent <5c de l'or , lequel ne s'y trouve qu'allié avec l'argent (/ij . Mais ces mines de cobalt qui contiennent une affez grande quantité de cet argent mêlé d'or, pour mériter d'être ainfi travaillées, font très -rares en comparailbn de celles qui ne font mêlées que d'arfcnic, de fer &. de bifmutb, &. avant de faire des eiïais qui ne laiffent pas d'être coûteux , il faut tâcher de reconnoître les vraies mines de cobalt , & de les diilinguer de celles qui ne font que des minerais d'arfcnic, de fer, &.c. &. l'on ne peut s'en fier à cette connoifTance

(h) On met quatre quintaux de cobalt dans un vaifieau plat fojs la moufHe; on l'agite, fans dilcontinuer, pendant la caicinarion ; & quand il ne rend plus d'odeur d'arfcnic, on le"pèfe pour con- noître ce qu'il a perdu de Ton poids ; ce dcchet va ordinairement à' vingt-cinq ou vingt-fix pour cent; on fait korifier ce qui refle avec neuf quintaux de plomb gfenaillt" dont on connoît la richefle en argent ; &. lorfque les fcories font bien fluides , on verfe le tout dans le creux demi fphcrique d'une planche de cuivre rouge qu'on a frotte de craie. Les fcoiies *ant refroidies, on les détache avec le marteau du culot de plomb , que l'on met à la coupelle ; on connoît parle bouton d'argent qui refle iur la coupelle, & dont' on a fouflrait l'argent des neif quintaux de plomi) , fi ce col>alt mérite d'être traité p6ur tin. Il convient aufll de faire le dcpart de ce bouton de couj^elle, parce qu'ordinairement l'argent qu'on trouve dàiis le cobalt, recèle un peu d'or. Jdtm , page 2^ y.

368 H ISTOIRE N ATURELLE

cl'infpedion, il ne faut faire que des efTais en petit ("ij, fur lefquels néanmoins on ne peut pas abfblument compter; car clans la même mine de cobalt, certaines parties du minéral font fou vent très-ditîcrentes les unes des autres i & ne contiennent quelquefois qu'une fi

petite

fi) Pour éviter la dépenfe des eflais en grand, il faut prendre une portion du cobalt que l'on veut ellayer ; on le pulvérile en poudre très-fine ; eniuite on le met dans un creufet large d'ouver- ture que l'on met dans un founeau Il faut que le feu foit

aflez fort pour tenir lou/ours le creufet d'un rouge obfcur ; mais dès que la matière paroît rouge , on l'agite de deux minutes en deux minutes. . . . Entre chaque agitation on iouffle dans le milieu du creufet à petits coups ieïïés avec un foufflet à jnuin , cojïime on fouffle lur l'antimoine qu'on emploie à purifier l'or. . . , C'eft le moyen le plus prompt de chalîer fumée blanche arfenicale , fur-tout lorfqu'on n'a pas defiein d'eflayer dans la fuite ce cobalt pour le fin; car fans le foufflet, l'arfenic fèroit fort long-temps à s'évaporer. Quand il refte un peu de matière volatile dans le creufet , le cobalt qu'on y a mis, paroît s'éteindre, & devient obfcur; mais il faut continuer à l'agiter jufqu'à ce qu'il ne répande plus de fumée blanche ni d'odeur d'ail ; alors la calcination eft finie, . » . Une once de cobalt ainfi calciné fe trouve réduite à environ cinq gros

On met deux gros de ce cobalt calciné dans un petit matras; on y verfe une once d'eau-forte, & environ trois gros d'eau com- mune; on place le matras fur des cendres très-chaudes.... l'eau- forte fe chargera de la partie colorante , fi ce minéral en contient , & prendra en une heure ou deux de digèllion , une couleur cramoifi laie ; c'eft la couleur que lui donne toujours le cobalt propre à faire l'azur, fur-tout s'il Uent du bifinuth. S'il ne contient

pas

DES Minéraux, 3 69

petite quantité de cobalt qu'on ne peut sn faire ufàge (k) .

La fubftance du cobalt eil plus fixe au feu que celle des demi-métaux, même que celle du fer & des autres métaux imparfaits ; auffi vient-on à bout de les féparer du cobalt en les fublimant & en les volatilifant par des feux de grillages réitérés. La fixité de cette fubflance approche de la fixité de l'or & de l'argent ; car le

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pas de parties colorantes , elle reftera blanche ; s'il tient du cuivre , elle prendra une couleur verte. ...

Pour tirer la matière bleue du fmalt , pi^nez cent grains de ce cobalt calcine , deux cents grains de fable bien lavé , deux cents grains de Tel de fonde purifie , & vingt à vingt-cinq grains de borax calcine'. Après avoir bien mêlé ces matières dans un petit creufet d'efîai bien bouché , mettez ce creufet fur l'aire d'une

forge, ou encore mieux dans un petit fourneau de fonte quarré

Faites agir le foufflet pendant une bonne demi-heure. Il n'y aura aucune effervefcence fi le cobalt a été bien calciné; laifîez ce creufet un demi-quart d'heure dans le feu après la parfaite fufion , ians fouffler , pour donner le temps à la matière vitrifiée de fe rafleoir; retirez le creufet & le mettez refroidir à l'air ; cafTez-le quand if fera froid , vous trouverez toute la matière vitrifiée en un verre bleu - foncé fi ce cobalt a donné une couleur rouge à l'eau- forte , ou au moins une couleur de feuille-morte. Traité de la Fonte des mines de Schlutter , tome I , page 2^ S.

(k) Une manière courte d'éprouver fi une muie de cobalt fournira de beau bleu , c'eft de la fondre dans un creufet avec deux ou trois fois fon poids de borax qui deviendra d'un beau bleu fi le cobalt efl de bonne qualité. Voyej^ V Encyclopédie , article Cobalt.

MhiJrauSj Tome IIL A a a

370 Histoire Naturelle

régule Je cobalt n'entre pas dans les pores de h cou- pelle, en forte que fi l'on expofe à i'adion du feu fur une coupelle, un mélange de plomb & de cobalt, le plomb feul pénètre les pores de la coupelle en vitri- fiant , tandis que le cobalt réduit en fcories , refte fur la coupelle ou ell rejeté fur fes bords ; ces fcories de cobalt étant enfuite fondues avec des matières vitreuies, donnent le bleu qu'on nomme f^iffie^ &. lorfqu'on les mêle à parties égales avec i'alkali & le fable vitrekible, elles donnent l'émail bleu qu'on appelle y/m//'.

Le régule de cobalt peut s'allier avec la plupart l\çs fubilances métallt^ucs ; il s'imit intimement avec l'or & ie cuivre qu'il rend aigres & caffans ; on ne l'allie que difficilement avec l'argent (l ) , le plomb & même avec l'arfeiiic , quoique ce fél métallique fe trouve toujours mêlé par fa nature dans la mine de cobalt; il en efl de même du bifmuth qui fe refufé à toute union avec le régule de cobalt; &l quoiqu'on trouve fôuvent le bifmuth mêlé dans les mines de cobalt , il ne lui efl point uni d'une manière intime , mais (miplement interpofé dans

(IJ Si l'on fdit fondre enfeinble deux piirties de cobalt avec une partie d'argent , on trouve l'argent au bas & le cobalt au-defius , flmjilement attachés l'un à l'autre ; cependant l'argent devient plus caliant , il eft d'une couleur plus grife , & le cobalt eft d'une couleur plus blanche qu'auparavant. Le régule de cobalt ne peut donc point s'unir au plomb & à l'argent en toutes proportions , mais leuleinent en peute quantité. Chimie mélallurgique de CelUr , tome I , page j 8^»

I

DES Minéraux, 371

la mine de cobalt fans ia pciictrer; &: au contraire lorfque le cobalt eft une fois joint au ioufre par l'intermède des alkalis, Ton union avec le bifmuth eft fi intime, qu'on ne peut les /éparer que par les acides , tandis qu'en même temps le cobalt ne contrarie avec le (ôufre qu'une très- légère union, &. qu'on peut toujours les Icparer l'un de l'autre, par un bmple feu de torréfadlion qui enlève le foufre & le réduit en vapeurs.

Le mercure qui mouille i\ bien l'or & l'argent, ne peut s'attacher au cobalt ni s'y mêler par la trituration aidée même de la chaleur ; aind la fixité du régule de cobalt, qui eft prefque égale à celle de ces métaux, n'inllue point fur fon attraction mutuelle avec le mercure.

Tous les acides minéraux attaquent ou difTolvent le cobalt à l'aide de la chaleur, &l ils produifent enfemble différens Tels dont quelques-uns font en criftaux tranfpa- rens ; l'alkali volatil difTout auffi la chaux du cobalt, <Sc cette diiïblution eft d'un rouge - pourpre ; mais en général, les couleurs dans toutes les difTolutions du cobalt , varient non - feulement félon la différence des diffolvans , mais encore fuivant le plus ou le moins de pureté du cobalt, qui n'eft prefque jamais exempt de minéraux étrangers, & fur -tout de fer & d'arfenic, dont on fait qu'il ne faut qu'une très-petite portion pour altérer ou même changer abfolument la couleur de la diffolution.

En France, on a reconnu plufieurs indices de mines

A a a ij

37^ Histoire Naturelle

de cobalt, & on n'auroii pas du négliger ces minières; par exemple, les mines d'argent d'Almont en Dauphinc, contiennent beaucoup de mines de cobalt qu'on pourroit réparer de l'argent. M. de Grignon affure qu'on a jeté dans les décombres de ces mines , peut - être plus de cobalt qu'il n'en iaudroit pour fournir toute l'Europe de faffre. Le cobalt fe trouve mêlé de même avec la mine d'argent rouge à Sainte -Marie - aux -Mines en Lorraine (mj , <Sc il y en a aufTi dans une mine de cuivre azurée au village à'Ojfenback dans les Vofges (n) ; on n'a fait aucun ufàge de ces mines de cobalt. M. de Genfanne dit à ce fujet, que comme ce minéral devient rare, même en Allemagne, il fcroit avantageux pour nous de mettre en valeur une mine conlidérable , qui fe trouve entre la Aimera & Notre -Dame -de -Cor al en

(m) Les mines de Sa'wtt-Mar'ie'aux-Mines , ont donné il y a cjuelques années de la mine de cabalt en fi grande quantité qu'on avoit fait des dtpenfes nécefiaires pour en fabriquer le fmah ; mais cette miiie de cobalt s'efl; appauvrie à mefure que celle d'argent a paru , de manière qu'on n'en trouve pas aujourd'hui allez pour fabriquer cette couleur. Alémoire fur le Cobalt , par Ai. Saur , dans ceux des Savons étrangers , tome J.

(n) Auprès du village d'Oflenback dans \t% Vofges il y a une mine de cuivre azur; le filon contient peu de mine en cuivre, mais il rend beaucoup de plomb ; ce filon eft un quartz noir extrêmement dur, parlemé de mine couleur de lapis, avec quantité de cobalt. Sur l'exploitation des mines , par Ai. de Genfanne , Afémoircs des Savans étrangers, tome JV , pages i^i &' fuiv.

DES Minéraux, 373

Roiifiiilon (0); il y en a une autre très -abondante &l (Je bonne qualité, que les Efpagnols ont fait exploiter avec quelques fuccès , elle elt fituée dans la vallée de Gijîau (p). M. Bowles dit que cette mine n'a été découverte qu'au commencement de ce fiècle {qjt Si. qu'elle n'a encore été travaillée qu'à une petite pro- fondeur, qu'on en a tiré annuellement cinq à fix cents quintaux ^r); il ajoute qu'en examinant cette mine de Giftau, il a reconnu différens morceaux d'un cobalt qui avoit le grain plus fin Si. la couleur d'un gris- bleu plus clair que celui de Saxe; que la plupart de ces morceaux étoient contigus à une forte d'ardoife

foj Cette mine eft fituée auprès du rui/Teau qui defcend de la côte qui fait- face au village de la Minera. La veine a plu-s de deux toifes d'épaifîeur, & paroît au jour fur plus d'une lieue de longueur; cette mine efl de la même nature que celle de San-Giomen en Catalogne. Hijfoire Naturelle du Languedoc , par Ai. de Genfanne , tome II , page i 6 1 .

(p) L'Efpagnol qui eft propriétaire de celte mine a traité de ion produit avec des Ncgocians de Strafbourg , qui l'envoient aux fonderies de Wirteiuberg. ... 11 eft étonnant qu'aucun particulier des frontières du royaume n'ait penfé jufqu'à préfent à enlever aux ATlemands la main-d'œuvre de la préparation de l'azur. Traité de la fonte des mines de Schlutter , tome I , pages ^8 & ^p.

(q) Hiftoire Naturelle d'Elpagne, pages ^pS é^ fuiv.

(r) Il y a une mine dans ia vallée de Giftau aux Pyrénées efpagnoles , dont le cobalt s'eft vendu fortant de la terre jufqu'à quarante livres le quintal pour la fabrique d'azur du Wirtcmberg. Traité de la fonte des mir.:j de Schlutter, tome J , page 2^6.

374 Histoire Naturelle

dure & iuifante avec des taches de couleur de rofe sèche, <& qu'il n'y avoir point de taches iemblables fur les morceaux de cobalt (f^.

C'efl de la Saxe qu'on a jufqu'ici tiré la plus grande partie du faffre qui confomme en Europe, pour les émaux, la porcelaine, les faïences, & au/îi pour peindre à froid, & relever par l'empois la blancheur des toiles. La principale mine efl celle de Schnéeberg, tWe efl très-abondante & peu profonde; on affure que le produit annuel de cette mine efl fort conhdérable, il n'ert pas permis d'exporter le cobalt en nature, <5c c'efl après l'avoir réduit en iàffre, qu'on le vend à un prix d'autant plus haut qu'il y a moins de concurrence dans le commerce de cette forte de denrée , dont l'Allemagne a pour ainfi dire le privilège excluhf (rj.

Cependant il trouve des mines de cobalt en Angleterre, dans le comté de Sommerfet; en Suède, la mine de Tannabcrg tÇt d'un cobalt blanc qui, félon M. Demefle, rend par quintal trente - cinq livres de cobalt, deux li>'rcs de fer, cinquante-cinq livres d'ar- fenic, & huit livres de foufre (u) .

Nous fommes auiîl prefque aifurés que le cobalt fe

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([) Hiftoire Naturelle d'Efpagne, par M. ^ovf\^s , page ^ ^ p.

(t) On trouve beaucoup de cobalt en Mifnie , en Boheniç, dans la vallée de Joachim-Stal ; il y en a dans le duché de Wirtemberg, dans le Hartz & dans plufieurs endroits de l'Allemagne.

(u) Lettres de AI. DeJKeile , tome II, p.ige 1^4.

DES Minéraux. 37^

trouve en Afie , & fans cloute dans toutes les parties du monde , comme les autres matières produites par la Nature ; car le très-beau bleu des porcelaines du Japon & de la Chine, démontre que très - anciennement on y a connu &. travaillé ce minéral (xj.

Dans les morceaux de mine de cobalt que l'on raiïemble dans les cabinets, il s'en trouve de toutes couleurs & de tout mélange, &. l'on ne connoîi aucun cobalt pur dans fa mine; il efl fouvent mêlé de bi(muth, & toujours la mine contient du fer quelquefois mélangé de zinc, de cuivre, & même d'argent tenant or, & prefque toujours encore la mine eft combinée avec des pyrites & beaucoup d'arfènic. De toutes ces matières la plus difficile à féparer du cobalt eft celle du fer, leur union efl fi intime qu'on efl obligé de volatilifer le fer en le fàifam fublimer pluiieurs fois par le fel ammoniac qui l'enlève plus lacilement que le cobalt ; mais ce travail ne peut faire en grand.

On voit des morceaux de minerai dans iefquels le cobalt efl décompofé en une forte de cérufè ou de chaux : on trouve auffi quelquefois de l'argent pur en petits filets ou en poudre palpable dans la mine de

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(x) Quelques perfonnes prétendent que c'efl: par un mélange du lapis- la/uli que les Chinois donnent à leurs porcelaines la belle couleur bleue. M. de Boinare eft dans cette opinion. Voye:^ fa Alinéralog'ie , tome H , pages ^6 ù' Juiv. mais je ne la crois pas fondée , car le lapis en fe vitrifiant ne confer ve pas la couleur.

37^ Histoire Naturelle

cobalt ; mais le pfus fouvent ce métal n'y efl point apparent, & d'ailleurs n'y eft qu'en trop petite quantité pour qu'on puifTe l'extraire avec profit. On connok aufli une mine noire vitreufe de cobalt, dans laquelle ce minéral eft en cérufe ou en chaux , qui paroît être minéralifée par Taélion du foie de fbufre dans lequel le cobalt fe difTout aifément.

DU

DES Minéraux, 3 77

I

«

ce

DU NICKEL.

L fe trouve affez fbuvent dans les mines de cobalt un minéral qui ne refTeniLle à aucun autre & qui n'a été reconnu que dans ce dernier temps ; c'efl le nickdl. M. Demefle drt " que quand le cuivre & l'arfenic trouvent joints au fer dans la mine de cobalt , il en réfulte un minéral fnigulier qui dans fa fradure eft d'un « gris rougeâtre & qui a pour ainfi dire fon régule propre, « parce que dans ce régule le cobalt adhère tellement aux « fubflanccs itiétalliques étrangères dont il eft mêlé, qu'on « n'a pas héfué d'en faire fous le nom de' ;//V/r/ un demi- métal particulier (a) ». Mais cette définition du nickel n'eft point exaéte , car le cuivre n'entre pas comme partie effentielle dans fa compofition, & même il ne s'y trouve que très-rarement. M- Bergman efl de tous les Chimiftes celui qui a répandu le plus de lumières fur la nature de ce minéral qu'il a fournis à des épreuves aulTi variées que multipliées. Voici les principaux réfultats de fes recherches & de fes expériences.

Hicrne, dit>il, eft le premier qui ait parlé du kupfir- n'ickel , dans un Ouvrage fur les minéraux , publié en fuédois en 1694.

Henckel Ta regardé comme une efpèce de cobalt ou <i'arfenic mêlé de cuivre. ( Pyrhol. cli. vil & viii ).

(a) Lettres du dodeur DemeAe, tome JI , page i^ij.

Minéraux , Tome IIL B b b

37^ Histoire Naturelle

Cramer a auiïi placé le kupftr- nickel dans les mines de cuivre ( Docimafl. S- ^/^ ^ "f^^)» ^ néanmoins on «V// ti jiV;ii7is tiré un atome de cuivre. Je dois cepen- dant obferver que M. Bergman dit enfuite que le nickel efl quelquefois uni au cuivre.

Cronûedt efl: le premier qui en ait tiré un régule nouveau en 175 i. ( Aâes de Stocholm ) .

M. Sage le regarde comme du cobalt mclé de fer, d'arfenic &. de cuivre. (Mémoires de Chimie , iyy2) ,

M. Monnet penfè au/Ti que c'efl du cobalt impur. (Traité de la Dijfolmion des métaux ) ,

Le kupfer-nickel perd à la calcination près d'un tiers & quelquefois moitié de fon poids , par la diifipation de i'arfènic & du foufre ; ce minéral devient d'autant plus vert qu'il efl plus riche. Si on le pulvérife & qu'on le pouffe à la fufion dans un creulèt avec trois parties de fîux noir , on trouve fous les fcories noirâtres & quelquiîfois bleues , un culot métallique du poids du dixième, du cinquième, ou même près de moitié de la mine crue : ce régule n'efl pas pur , il tient encore un peu de foufre & une plus grande quantité d'arfenic , de cobalt, & encore plus de fer magnétique.

L'arfenic adhère tellement à ce régule, que M. Bergman l'ayant fucceffivement calciné & réduit cinq fois , il donnoit encore l'odeur d'ail à une fixième cal- cination quand on y ajoutoit de la pouffière de charbon pour favorifer l'évaporation de rarfenic.

DES Minéraux, 379

A chaque récludlion , il pafTe un peu de fer dans les fcories ; à ia fixième , le régule avoit une demi- duélilitc , & ctoit toujours fenfible à l'aimant.

Dans les différentes opérations faites par M. Bergman, pour parvenir à purifier le nickel, fbit par les cal- cinations , foit en le traitant avec le foufre , il a obtenu des régules dont la denfité varioit depuis 7,0828 , juA qu'à 8,87^ 1 fS). Ces régules étoient quelquefois très- caffans, quelquefois aflez dudiles pour qu'un grain d'une ligne de diamètre formât une plaque de trois lignes fiir l'enclume; ils étoient plus ou moins fufibles, ôi fouvent aufli réfra6taires que le fer forgé, & tous étoient non-fèu- lement attirables à l'aimant, mais même il a obfervé qu'im de ces régides attiroit toutes fortes de fer, & que fes parties s'attiroient réciproquement; ce même régule donne par l'alkali volatil, une diffolution de couleur bleue.

M. Bergman a aulfi effayé de purifier le nickel par le foie de foufre , qui a une plus grande affinité avec le cobalt qu'avec le nickel , &. il eft parvenu à féparer ainfi la plus grande partie de ce dernier ; le régule de nickel , obtenu après cette diffolution par le foie de foufre, ne conferve guère fon magnétifme ; mais on le lui rend en féparant les matières hétérogènes qui, dans cet état , couvrent le fer.

fùj Lapefanteur fpécifique du régule de nickel , fuirant M. Briflbn, cft de 78070 , ce qui eft un terme moyen entre les pefanteuxi fpédficjues 70828 & 88751 , données par M. Bergman.

Bbbij

380 Histoire Natu relle

Il a de même traité le nickel avec le nitre, le fel ammoniac, l*alkali volatil, & par la diiïblution dans i'acide nitreux, & la calcination par le nitre, il Ta privé de prefqiie tout fon cobalt; le fel ammoniac en a féparé un peu de fer ; mais le nickel retient toujours une certaine quantité de ce métal ; & M. Bergman avoue avoir épuifé tous les moyens de l'art, fans pouvoir Je féparer entièrement du fer.

Le régule de nickel contient quelquefois du bifmuth; mais on les fépare aifément en fai/ànt difToudre ce régule dans Tacide nitreux, & précipitant le biliiiuth par l'eau.

M. Bergman a encore obférvé que le nickel donne au verre la couleur d'hyacinthe, 6l il conclut de fès expériences ;

i.° Qu'il ell poffihle de féparer tout l'arfenic du nickel :

2.° Que quoiqu'il tienne quelquefois du cuivre, iJ efl également facile de le purifier de ce mélange; & que quoiqu'il donne la couleur bleue avec l'alkali volatil, cette propriété ne prouve pas plus l'identité du cuivre & du nickel, que la couleur jaune des difToliitions d'or & de fer dans l'eau régale, ne prouve l'identité de ces métaux:

3.° Que le cobalt n'efl pas plus effentiel au nickel, puifqu'on parvient à l'en féparer, & même que le cobalt précipite le nickel de fa diffolution par le foie de foufre:

DES Minéraux. 381

4. Qu'il n'eft pas pofîibie de le priver de tout Ton fer, (5l que plus on multiplie les opérations pour l'en dépouiller, plus il devient magnétique & difficile à fondre; ce qui le porte à penfèr qu'il n'efl, comme le cobalt & la mangancfe , qu'une modification particulière du fer: voici fes termes.

Solwn itaque jam ferriitn rejlat, ér fmiè varice eœdemqne non exigiii monienti raiiones fuadent niccolnm & cobaltum &" jîiagrifjiinn forfan non aliter ac divcrfijjîmas ferri mo- djficdàoncs ejfe confidcraiidas (c) . On voit par ce dernier partage, que ce grand Chimifte a trouvé par l'anaJy/è, ce que j'avois préfumé par les analogies, & qu'en effet le cobalt, le nickel & la manganèfe ne font pas des demi-métaux purs , mais des alliages de difïerens miné- raux mélangés , & fi intimement imis au fer qu'on ne peut les en féparer.

Le cobalt, le nickel & la manganèfe ne pouvant être dépouillés de leur fer, reffent donc tous trois attirables à l'aimant ; ainfi de la même manière qu'après les fix métaux, il pré/ènte une matière nouvellement découverte à laquelle on donne le nom de plaiine , & qui ne paroît être qu'un alliage d'or, ou d'une matière auffi pefante que l'or avec le fer dans l'état magnétique ; il fe trouve de même après les trois fubflances demi- métalliques, de l'antimoine , du bilinuth & du zinc, il

(c) Dij[frl. de niccolo. Oviifcul. tom. Il , pag. 160.

-82 Histoire Naturelle

fe trouve, dis- je, trois fubflances minérales, qui, comme la platine, font toujours attirables à J'aimant, & qui dès- lors doivent être confidérées comme des alliages naturels du fer avec d'autres minéraux ; & il me fèmble que par cette raifon, il ièroit à propos de féparer le cobalt f^). Je nickel & la manganèfe des demi - métaux fimples , comme la platine doit l'être des métaux purs ; puifque ces quatre minéraux ne font pas des [ùbiîances fimples, mais des compofcs ou alliages qui ne peuvent être mis au nombre des métaux ou des demi - métaux dont l'edence , comme celle de toute autre matière pure, confifte dans l'uniié de fubflance.

Le nickel peut s'unir avec tous les métaux & demi- métaux, cependant le régule non purifié ne s'allie point avec l'argent ; mais le régule pur s'unit à parties égales avec ce métal, & n'altère ni fa couleur ni fa dudilité. Le nickel s'unit aifément avec l'or, plus difficilement avec le cuivre , & le compofé qui réfulte de ces alliages eft moins duélile que ces métaux, parce qu'ils font devenus aigres par le fer, qui dans le nickel efl toujours attirable à l'aimant. Il s'allie facilement avec l'étain & lui donne aufli de l'aigreur ; il s'unit plus difficilement avec le plomb, & rend le zinc prefque fragile: le fer forgé

devient au contraire plus dudile lorfqu'on l'allie avec le

' '

(d) Al. Braiidt , Chimifte fuedois , efl ie premier qui ait placé le cobalt au rang des demi-métaux ; auparavant on ne le regardoit quq comme une terre muiéraie plus ou moins friable,

DES M I N È n A U X. 383

nickel; fi on le fond avec le foufre, il fe criflallife en aiguilles (e): enfin, le nickel ne s*anialganie pas plus que le cobalt &. le fer avec le mercure (fj, même par le fecours de la chaleur & de la trituration.

Au refle, le minerai du nickel diffère de celui du cobalt en ce qu'étant expofé à l'air, il fe couvre d'une efflorefcence verte , au lieu que celle du cobalt eft d'un rouge-ro/àcé. Le nickel fe diffout dans tous les acides minéraux & végétaux; toutes fes difTolutions font vertes, & il donne avec le vinaigre des criftaux d'im beau vert.

Le régule du nickel eft un peu jaunâtre à rcxtérieur, mais dans l'intérieur, fa fubftance cfl d'un beau blanc; elle ell compofée de lames minces comme celles du bifmuth, La diiïblution de ce régule par l'acide nitreux ou par l'acide marin , efl verte comme les criftaux de fon minerai , &. ces deux acides font les feuls qui puifTent <lifroudre ce régide; car l'acide vitrioliquc, non plus que les acides végétaux , n'ont aucune a(5lion fur lui.

Mais, comme nous l'avons dit, ce régule n'eft pas un minéral pur, il efl toujours mclé de fer, & comme fes efTlorefcences font vertes, & que les criftaux de diftbluiion confcrvenp- cette même couleur , on y a

(e ) M. Bergman , [fer tût. de niccolo, M. de Morvww, JÉIémens de Chimie, tome î , page 2^2,

{/) Idem , tom IJI , page ^^7,

384- Histoire Naturelle

fappofé du cuivre qu'on n'y a pas trouvé, tancfis que le fer paroît être une fubflance toujours inhérente dans compofition ; au refle , ce régule lor/qu'il eil pur , c'efl-à-dire, purgé de toute autre matière étrangère, réfifle au plus grand feu de calcination, & 'i\ prend feulement une couleur noire fans fe convertir en verre.

DE

DES Minéraux. 385

* . . . «

DE LA MANGANESE.

J_j A Mangancfe cft encore une matière minérale com- pofée, & qui, comme ie cobalt & le nickel, contient toujours du fer , mais qui de plus efl: mélangée avec une afr<^z grande quantité de terre calcaire, & fouvenc avec un peu de cuivre (ûJ ; c'efl de la réunion de ces fubftances que s'efl formée dans le fèin de la terre, la manganèfe, qui mérite, encore moins que le nickel & le cobalt , d'être mife au rang des demi-métaux ; car on ^ ' ~ "

(g) La manganèfe.... fe trouve en diverfes contrées d^; l'Alle- mao-ne , auffi-hien qu'en Angleterre, dans le Piémont ô<. en jilufieurs autres endroits, tantôt dans des montagnes calcaires, tantôt dans des mines de fer. On s'en fert pour rendre le verre tranfparent & net, ainfi que pour compofcr le vernis des Potiers , tant noir que rou- geâtre.

Par différentes expériences , M. Margraff a reconnu que la man- ganèfe du comté de Hohenjlàn près à^ Hcpa ^ contenoit ime terre calcaire & un i)eu de cuivre. ... Il tira aufîi d'une manganèfe du Piémont , au moyen de l'acide du vitriol , un fel rougeatre , qui ayant été dilîbus dans l'eau, dépofa fur une lame d'acier quelques particules de cuivre , quoiqu'en moindre quantité que la manganèfo de Hohenftein. « On retire, continue M. Margraff, également du cuivre, tant de la manganèfe d'Allemagne que de celle de Piémont, « en la mêlant avec parties égales de foufre pulvérifé , en calcinant ce ^ mélange pendant quelques heures, »à un feu doux que l'on augmente «f enfuite en le leOlvant & en le faifant criHallifer », Journal de Phyfiquei Mars 17S 0, pages 22 j & fuiv.

Mmmux, Tome JIL C c c

386 Histoire Naturelle

feroit forcé dès-lors Je recrarJer comme tels , tous les mélanges métalliques ou alliages naturels, quand même ils feroient comj3ofcs de trois, de quatre, ou d'un nombre encore pfus grand de matières difiérentcs, 6c il n'y auroit plus de ligne de fèparation entre les miné- raux métalliques fimples & les minéraux compofés ; j'entends par minéraux fuiiples ceux qui le font par nature, ou qu'on peut rendre tels par l'art: les fix métaux, les trois demi-métaux & le mercure, font des minéraux métalliques fmiples ; la platine, le cobalt, le nickel & la majlganèfe font des minéraux compofés, & fans doute "qu'en obfèrvant la Nature de plus près, on en trouvera d'autres peut-être encore plus mélangés, puifqu'il ne faut que le hafard des rencontres pour produire des mélanges &. des unions en tous genres.

La manganèfe étant en partie compofée de fer & de matière calcaire, fe trouve dans les mines de fer fpa- ihiques mêlées de fubftances calcaires , foit que ces mines fe préfentent en ftala6tites , en écailles, en mafles grenties ou en poudre; mais indépendamment de ces mines de fer fpathiques qui contiennent de la manganèfe, on la trouve dans des minières particulières elle fe pré- fente ordinairement en chaux noire , & quelquefois en morceaux folides , & même criflallifés; fouvent elle efl mêlée avec d'autres pierres : mais M. de la Peiroufè , qui a iàit de très-bonnes obfcrvations fur ce minéral, remarque avec raifon, que toutes les fois qu'on verra une pierre

DES Minéraux. 3 S/

légèrement teinte de violet, on peut prcfumcr avec fondcMient, qu'elle contient de la manganc/e; il ajoute qu'il n'y a peut-être pas de mines de fer fpathiques blanches, grifes ou jaunâtres, qui n'en contiennent plus ou moins. « J'en ai, dit-il, coiiftammcînt retiré de toutes celles qiie j'ai eiFayées, une portion plus ou moins" grande, iclon l'état de la mine; car plus les mines de * fer approchent de la couleur brune , moins il y a de manganèle , & celles qui font noires n'en contiennent ^^ point du tout fl) ».

(h) La chaux de mangaiicfe bien pure efl légère , pulvcruleme, douce au toucher , <Sc falit les doigts ; tantôt elle elt en petits pelotons loges dans les cavités des mines , tantôt elle efl en couches , tantôt en feuillets ; on la trouve aufîi en maffes , dans ce dernier cas elle efl: plus lolide de durcie , quoique pulvérulente. Elle varie pour

la couleur ; il y en a qui elt parfaitement noire quelquefois

elle efl brune , rarement rougeâtre. M. de la Peiroufe a reconnu pour vraie chaux de manganèle, une fubllance qui à l'œil a l'éclat de l'argent; elle fe trouve allez fre'quemment en petites malTes dans

les cavités des mines de fer Il compte onze variétés de

chaux de manganèfe Toutes ces chaux ont pour gangues

le fpath calcaire, les fchilles talqueux , les mines de fer de dilix'rentes fortes , & la manganèle même. La manganèfe folide diffère de celle qui efl en chaux, par fa pelante ur , par fa dureté , par fa denfiîé: elle a une plus grande poruon de phlogillique, & contient prefque tôt jours du fer; fon tiffu , foit feuilleté, foit en maffe, efl com- pade , ferré 6c amorphe ; <5c c'ell en quoi on la dillingue de la manganèfe criftallifée: elle falit les doigts, mais n'efl point friable jii pulvérulente, comme celle qui eR eii chaux. M. de la Peiroufe

Ceci;

38S Histoire Natu p elle

La manganèfe paroît fouvciit criflalliice dans mine, à peu - près comme la pierre calaminaire, & c'eft ce qui a lait croire à quelques Cliimiiies qu'eile contenoic du zinc (c) ; mais d'autres Ciiimiiles, & particulière- ment M. Bergman , ont démontré par i'analj/è qu'il n'entre point de zinc dans fa compolition; d'ailleurs, cette forme' des criflallifàtions de ia manganèfè varie beaucoup ; il y a des mines de manganèfe criilallifées en aiguilles, qui relîemblent par leur texture à cer- taines mines d'antimoine, & qui n'en difièrent à l'œij que par leur couleur grife plus foncée & moins brillante que ccWe de l'antimoine; ôi ce qu'il y a de remarquable & de fmgulier dans ia forme aiguillée de

en compte huit variétés .... qui ont pour gangues le fpath calcaire^ Ja pyrite lulfureufe, Jes mines de fer, &c.

La manganèle criftallile le plus communément en longues & fines aiguilles priiinatiques , brillantes & fragiles: elles font rallemblées en failceaux coniques dont on peut aifément diftinguer la figure dans })lufieurs échantillons , quoique ces faifceaux foient groupés. On ient bien que les différentes combinaifons que peuvent avoir entr'eux ces nombreux faifceaux, font varier à l'infini les divers morceaux

de manganèfe criflaliifée Il y en a qui eft comme fatinée j

une autre qui imite parfaitement l'hématite fibreufe d'autres qui

font ftriées, &c. M. de la Peiroufe compte treize variétés de ces man- ganèfes criflailifées dans les mines des Pyrénées ; elles ont pour gangues le fpath calcaire, le fpath gypfeux , l'argife martiale, le jafpe rougeâtre , les mines de fer , les hématites & la inanganèfe même. Journal de Phyfique , Janvier 1 y8 0 , pages 6 y & fu'ii.

(s) Lettres de M. Demeile, tome II , page 1 8j.

DES Minéraux. 389

îa manganèfe, c'cil qu'il femble que cette forme pro- vient (Je fa propre llibÛaiice & non pas Je celle du foufre ; car la manganèfe n'eft point du tout mélce d'ainimoine, & elle n'exhale aucune odeur fulfureufe fur les cliarbons ardens. Au refle, le plus grand nombre des manganefes ne font pas criihlli/ëes ; il s'en trouve beaucoup plus en maffes dures & informes que l'on a prifes long- temps, & avec quelque fondement, pour des mines de fer ("i/J: on doit auiïi rapporter à la manganèfe, ce que plufieurs autres ont écrit de cette fubflance fous les noms d7ié- m alites noires , mamelonées , veloutées, ire.

On trouve des mines fpatbiques de fer , & par confcquent de la manganèfe dans plub-eurs provinces de France, en Dauphinè , en Roulfillon ; d'autres à Baigory & dans le comté de Foix ; il y en a aufîi une mine très-abondante en Bourgogne près de la ville de Mâcon; cette mine efl même en pleine exploitation, & Ton en débite la manganèfe pour les verreries & ^ ' . . _ ._

(d) La manganèfe ell une mine de fer pauvre, aigre, qui n'a point de figure déterminée; tantôt elle eft en petits grains, & reflemble à l'aimant de l'Auvergne; tantôt elle eft grisâtre, écaiileufe, itiarqueiée, brillante & peu folide ; elle contient toujours un peu de fer; tantôt & plus communément, elle efl: flrite , Lrillante, foJide, Si reflemble à de l'antimoine par fon éclat, par fa couleur qui eft d'un gris- noirâtre , & par fa pefanteur : cependant elle efl plus tendre , plus friable , plus caflante , plus graveleufe dans fes fradures ; elle efl prefque toujours traverfée de veines ou de filons blancs «Ik quanzeux^ Minéralogie de Bomure , tome JJ , page jj^.

390 Histoire Natu relle

les faïenceries : on trouve dans cette mine plufreurs fortes de manganèfcs, favoir, Ja mangancfe en chaux noire, la mangancfe en mafTcs foiides (5c noires, 6l Ja mangane/è criflaJlifée en rayons divcrgens,

La mine de mangancfe ne fe réduit que difficilement en régule , parce qu'elle eft très - diliicile à Icmdre , & en même temps très - di/pofce à pafTer à i'èta: de verre fe) ; ce régule c(t au moins aufîi dur que le fer, fa flirface eft noirâtre , & dans l'intérieur W eft d'im blanc brillant qui bientôt ternit à l'air; fa caifure préfente des grains affez groffiers & irréguliers; en le pulvérifant il devient fenfiblement attirable à l'aimant; un premier degré de calcination le convertit en une chaux blanche qui fe noircit par .une plus forte cha- leur, & fon volume augmente d'un cinquième envi- ron ; fi l'on met ce régule dans un vaiffeau bien clos, il fe convertit par l'adion du feu en un verre jaune- obfcur, & le fer qu'il contient fe fépare en partie, & forme un petit bouton ou globule métallique.

Le régule de manganèfe fe diiïbut par les trois acides

fe) Pour obrenir ce régule il faut pulvérifer la mine,' en former une boule en la délayant avec de l'huile & de l'eau , la mettre dans un creufet, environnée de toutes parts de poufljcre de charbon, & i'expofer à un feu de la dernière violence ; encore ne la trouve-t-oïi pas réunie en un feul culot, mais en globules diOéminés qui vont quelquefois à trente centièmes du poids de la mine.

Le régule de mangancfe eft à l'eau diflillée dans ie rapport de i^S,jo à 1000. Bergman, Ojpufcuks , îQme II, dijfertai. i p.

DES Minéraux, 391

minéraux , & fcs difTolutions font blanches : la chaux noire de manganèfe fe diffout dans l'alkali fixe du tartre, & lui communique fur le champ une belle couleur bleue.

Ce régule refu/e de s'unir au foufre, & ne s'allie que très-difficilement avec le zinc, mais il fe m.éle avec tous les autres minéraux n^étalliques ; lorfqu'on l'allie dans une certaine proportion a\'ec le cuivre, il lui ôte fa couleur rouge fans lui faire perdre ductilité : au rcfle , ce régule contient toujours du fer, & il eft, comme celui du nickel, celui du cobalt, <& comme la platine , fi intimement uni avec ce métal qu'on ne peut jamais l'en féparer totalement. Ce font des alliages faits par la Nature, que l'art ne peut détruire, & dont la fubftance , quoique compofée ; efl auffi fixe que celle des métaux fimplcs.

La manganèfe efl d'un grand u/àge dans les manu- factures des glaces & des verres blancs; en la fondant avec le verre elle lui donne une couleur violette , dont l'intenfité efl toujours proportionnelle à quantité ; en forte que l'on peut diminuer cette couleur violette jufqu'à la rendre prefque inapercevablc ; & en même temps la manganèfe a la propriété de chafler les autres couleurs obfcures du verre , &. de le rendre plus blanc lorfqu'elle n'efl; employée qu'à la très - petite dofe convenable à cet effet. C'eft dans la fritte du verre qu'il faut mêler cette petite quantité de manganèfe; fa couleur violette.

392 HrsroinË Naturelle

en s'évanouifFant , fait dirparoitre les autres couleurs, ,S{. il y a toute apparence que cette couleur violette qu'on ne peut apercevoir lorfque la manganèfe efl en très-petite quantité, ne laiiïe pas d'exifler clans la fubf- tance du verre qu'elle a blanchi ; car M. Macquer dit avoir vu un morceau de verre très-blanc, qui u^avoit befoin que d'être chauffe jusqu'à un certain point, pour devenir d'un très-beau bleu-violet (fj.

Il faut également calciner toutes les manganèfes pour leur enlever les minéraux volatils qu'elles peuvent con- tenir; il faut les fondre fouvent à plufieurs reprifes avec du nitre purihé; car ce ie\ a la propriété de développer & d'exalter la couleur violette de la manganèfe ; après cette première préparation , il faut encore la faire refondre toujours avec un peu de nitre, en la mêlant avec la fritte du verre auquel on veut donner la belle couleur violette; il efl néanmoins très-difîicde d'obtenir cette couleur dans toute fa beauté, fi l'on n'a pas appris par l'expérience , la manière de conduire le feu de vitrification; car cette couleur violette fe change en brun, (Se même en noir, ou s'évanouit lorfqu'on n'attein; pas ou que l'on paffe le degré de feu convenable» (5c que l'ufage feul peut apprendre à faifir.

m I . .,...•. mm

(f) Didionnaire de Chimie, article Manganèfe. M. de la Peiroufe dit aulTi qu'on peut faire difparoître & reparoître à la flamme d'une bougie la belle couleur violette que la manganèfe donne au verr© de Borax. Journal Phyfigue , Août jy$9 , j^^g^S i;6 ^ fuiV'

DES M I N É R A U X. 39;

DE L'A R S E N 1 C.

X-/ANS l'ordre des minéraux, c'efl ici que finifTent les fubflances métalliques, <& que commencent les ma- tières falines ; la Nature nous préiènte d'abord deux métaux, l'or & l'argent, qu'on a nommés parfaits, parce que leurs fubflances font pures, ou toutes deux alliées l'une avec l'autre, & que toutes deux font également fixes, également inaltérables, indeftruélibles par Taétiou des élémens; enfuite elle nous offre quatre autres métaux, le cuivre, le fer, l'étain & le plomb, qu'on a eu raifon de regarder comme métaux imparfuits, parce que leur fubltance ne réfifle pas à l'aclion des élémens, qu'elle fe brûle par le feu, (Se qu'elle s*altère & même fe décompofe par l'imprcfîion des acides & de l'eau; après ces fix métaux, tous plus ou moins durs & folides, 011 trouve tout-à-coup une matière fluide, le mercure qui, par fa dendté &. par quelques autres qualités , paroît s'approcber de la nature des métaux parfaits, tandis que par volatilité & par fa liquidité il rapprocbe encore plus de la nature de l'eau: enfuite fe prcfeiitent trois matières métalliques, auxquelles on a donné le nom de demi-métaux j parce qu'à l'exception de la dudiliié ils reifemblent aux métaux imparfaits; ces demi-métaux font l'antimoine, le bifmuth & le zinc, auxquels on a voulu joindre le cobalt , le nickel & la manganèfe ; & de mcmc Minéraux , Tome lîL D d d

394 Histoire N aturelle

que dans les métaux , il y a des différences très-marquées entre les parfaits & les imparfaits, il fe trouve aufli des différences très-fenfibies entre les demi-métaux; ce nom, ou plutôt cette dénomination, convient affez à ceux qui, comme l'antimoine, le bifmuth & le zinc, ne font point mixtes ou peuvent être rendus purs par notre art; mais il me femble que ceux qui, comme le cobalt, k nickel & la manganèfe, ne font jamais purs, & font toujours mêlés de fer ou d'autres fubftances difîcrentes de la leur propre, ne doivent pas être mis au nombre des demi-métaux, fi l'on veut que l'ordre des déno- minations fuive celui des qualités réelles; car en appelant demi-métaux les matières qui ne font que d'une feule /iibftance, on doit impofer un autre nom à celles qui font mêlées de plufieurs fubfiances.

Dans cette fuite de métaux, demi-métaux & autres matières métalliques, on ne voit que les degrés fuccc/îifs que la Nature met dans toutes les claffes de /es pro- duétions; mais l'arfenic qui paroît être la dernière nuance de cette claffe des matières métalliques , forme en même temps un degré, une ligne de féparation qui remplit le grand intervalle entre les fîibftances métalliques &: les matières falines. Et de même qu'après les métaux, on trouve la platine qui n'efl point un métal pur, & qui par ion magnétifme confiant paroît être un alliage de 1er, &. d'une matière auffi pefante que l'or, on trouve aufîi après ies demi -métaux, le cobalt, le nickel &i h manganèfe

D E s M 1 N É R A V X, 395

qui, étant toujours attirables à l'aimant, font par con- icquent alliés de fer uni à leur propre fubihnce ; l'on doit donc en rigueur les féparer tous trois des demi- métaux , comme on doit de même féparer la platine des métaux , pui-fque ce ne font pas des fiibllances pures , mais mixtes & toutes afliécs de fer, quoiqu'elles donnent Jeur régule fans aucun mélange que celui des parties métalliques qu'elles recèlent ; & quoique l'arfenic donne de même fon régule , on doit encore le féparer de ces trois dernières matières , parce que fon effence efl autant faline que métallique.

En efïèt, l'arfenic qui, dans le fein de la terre, /e préfente en maffes pefaiites & dures comme les autres fiibflances métalliques, ofîre en même temps toutes les propriétés des matières falines; comme les fels, il fe diifout dans l'eau ; mclé comme les falins avec les matières terreufes, il en facilite la vitrification; il s'unit par le moyen du feu avec les autres fèls qui ne s'unilTent pas plus que lui avec les métaux ; comme les fels , il décrépite & fe volatilife au feu, & jette de même des étincelles dans l'obfcurité; il fufe aulfi comme les fels, & coule en liquide épais fans brillant métailique; il a donc toutes les propriétés des fels ; mais d'autre part fon régule a les propriétés des matières métalliques.

L'arfenic, dans fon état naturel, peut donc être confidéré comme un fel métallique; & comme ce fel, par fes qualités , diffère des acides & des alkalis , ii

Dddij

39^ Histoire Naturelle

me feniLle qu'on doit compter trois Tels fimples dans ia Nature, l'acide, i'aikaii & l'arfenic, qui repondent aux trois idées que nous nous fommes formées de leurs effets , & qu'on peut défigner par les dénominations fel acide ^ fel cnuft^que Si fcl corrofif; & il me paroît encore que ce dernier fel, i'ari^nic, a tout autant & peut-être plus d'influence que les deux autres fur \t% matières que la Nature travaille. L'examen que nous allons faire des autres propriétés de ce minéral métallique & falin, loin de faire tomber cette idée, la juftiliera pleinement, & même la confirmera dans toute fon étendue.

On ne doit donc pas regarder i'arfenic naturel, comme un métal ou demi-métal , quoiqu'on le trouve commu- nément dans les mines métalliques , puifqu'il n'y exifte qu'accidentellement & indépendamment des métaux ou demi-métaux avec lelquels il efl: mêlé : on ne doit pas regarder de même, comme une chaux purement m^ tallique , l'arfenic blanc qui fe fublimc dans la fonte de différens minéraux, puifqu'il n'a pas les propriétés de ces chaux , & qu'il en offre <ie contraires; car cet arfenic qui s'efl volatilifé, relie conflamment volatil, au iieu que les chaux des métaux & des demi-métaux, font toutes conflaannent fixes; de plus cette chaux, ou plutôt cette rieur d'arlenic, eft fbluble dans tous les acides, & mcme dans i'eau pure comme les fels , tandis qu'au- cune chaux métallique ne fe diffout dans l'eau, & n'eil

DES Minéraux, 397

même guère attaquée par les acides. Cet arfenic , comme les fels , fe diifout & fe criftallife au moyen de rébuilitioii en criftaux jaunes & tranfparens ; il répand lorfqu'on le cliaufiè, une très-forte odeur d'ail; mis fur la langue faveur efl très-acre, il y fait une corrofion, ÔL pris intérieurement, il donne la mort en corrodant i'eftomac <& les inteflins. Toutes les chaux métalliques, au contraire, font prefque fans odeur & fans faveur; cet ariènic' blanc n'ell donc pas une vraie chaux métal- lique, mais plutôt un fel particulier plus actif, plus acre &. plus corrofif que l'acide &. l'alkali : enhn cet arfenic efl toujours très-fufible, au lieu que les chaude rhétalliques font toutes plus difficiles à fondre que le métal même ; elles ne contractent «aucune union avec les matières terreufes , «Sl i'arfcnic, au contraire, s'y réunit au point de foutcnir avec elles le feu de la vitrification, il entre, comme les autres fels, dans la cornpofition des verres ; il leur donne une blancheur qui fe ternit bientôt à l'air, parce que l'humidité agit fur lui comme fiir les autres fels. Toutes les chaux métalliques donnent au verre de la couleur ; l'aricnic ne leur en donne aucune , &. reffemble encore par cet effet aux falins qu'on mcle avec le verre. Ces fèuls faits font , ce me femble , plus que fuffifans pour démontrer que cet arfenic blanc n'eft point une chaux métallique ni demi-méiallique, mais un vrai (c\ , dont la fubflance adive efl d'une nature parti- culière & différente de celle de l'acide & de l'alkali.

398 H I STOIRE NATU RELLE

Cet arfenic blanc qui s'élève par fiibiimation dans h fonte des mines , n'étoit guère connu des Anciens (u) , &. nous ne devons pas nous féliciter de cette décou- verte, car elle a lait plus de mal que de bien; on auroit même du profcrire la rechercbe, l'ufage & le commerce de cette matière funcfte, dont les lâches fcélérats n'ont que trop la facilite d'abufcr: n'accufons pas la Nature de nous avoir préparé des poifbns &i des moyens de deflruétion ; c'efl à nous-mêmes, c'efl à notre art ingénieux pour le mal qu'on doit la poudre à canon, le fiiblimé corrodf, l'arfenic blanc tout aulTi corrofif. Dans le fein de la terre , on trouve du fbufre & du falpétre, mais la Nature ne les avoit pas combines comme l'homme, pour en faire le plus grand, le plus puiiTant inilrument de la mort; elle n'a pas fublimé l'acide marin avec le mercure pour en faire un poifon; elle ne nous préfènte l'arfenic que dans wn état fes qualités funefles ne font pas développées; elle a rejeté, recelé ces combinaifons nuîfibles en même temps qu'elle ne ceffe de faire des rapprochemens utiles & des unions prolifiques; elle garantit, elle défend, elle conferve, elle renouvelle, & tend toujours beaucoup plus à la vie qu'à la mort.

(iij La feule indicatioa prcçife que l'on ait fur l'arlenic fe trouve dans un paflage d'Aviceane qui vivoit dans le onzième fiècle ; M. Bergman cite ce pafldge par lequel il paroit qu'on ne con- jiOiflbii pas aJo;-s rarfeaic bUiiç fublime.

DES Minéraux, 399

L^arfenic dans fbn état de nature n'efl donc pas un poifbn comme notre arfenic fadice ("S); il s'en trouve de plufieurs fortes ôl de différentes formes, &. de couleurs diverfès dans les mines métalliques. Il s'en trouve auiïi dans ies terreins volcanifés fous une forme différente de toutes les autres , ôl qui provient de fon union avec le foufre ; on a donné à cet arfenic le nom (S! orpiment lorfqu'il cfl jaune, & celui de r/^/^-^r quand il efl rouge: au refle, la plupart des mines d'arfenic noires & grifes, font des mines de cobalt mêlées d'arfenic; cependant M. Bergman affure qu'il trouve de i'arfcnic vierge en Bohème, en Hon- grie, en Saxe, <r>^c. i& que cet arfenic vierge contient tou- jours du fer (c). M. Monnet dit auffi qu'il s'en trouve en France, à Sainte-Marie -aux-mines , & que cet arfenic vierge efl une fubflance des plus pcfantes & des plus dures que nous connoifîions, qui ne fe brife que difficilement, & qui prcfcnte dans fa fraéture fraîche, un grain brillant femblable à celui de l'acier, qu'il prend le poli & le brillant métallique du fer, que fon éclat fe ternit bien \îte à l'air, qu'il fe dilTout dans les acides, c^c. (d) , Si

(b ) Hoffuian allure, d'apics plulieuis expériences, que l'orpiment & le réalgar naturels ne font pas des poifons comme l'arfenic jaune & l'arfenic rouge artificiels. DuTionnaire de Chimie , par AI. Alaccjuer , article Arfenic.

(c) Opufcules chimiques," tome II, pages zyS ù" 2 S jf.

(d) jM. Monnet ajoute que l'arfenic vierge, dans des vaifleaux fermés, fe fublime fans qu'il foit befoin d'y rien ajouter; que combine' iveç tous les autres mttaux ; il doiuie toujours un tégule.,,».

400 Histoire Naturelle

j'avois moins de contiance aux lumières de M. Monnet, je croirois, à cette defcription, que fou ar/^nic vierge n'eiî qu'une e/pcce de marcaffite ou pyrite ar/enicale; mais ne les ayant pas comparés je ne dois tout au plus que douter, d'autant que le fàvant M. de Morveau dit aulTi: ^^ Qu'on trouve de i'arfenic vierge en mafTe 5> informe, grenue, en écailles &. friable; de I'arfenic noir » mclé de bitume, de i'ar/ènic gris teftacé, de l'ar/ènic blanc criftallifc en gros cubes ^e); » mais toutes ces

formes

o- \Jnç propriété de I'arfenic vierge , dit-il , eft de s'enfla/nmer , (oit » qu'on le falTe toucher à des charbons ou à Ja flamme ; il brûle M paifiblement en répandant une épaifle fumée qui fe condenfe contre les corps froids en un fublimé blanc. ... & lorfque I'arfenic qui brûle efl entièrement confumé, il refte un peu de fcorie terreufe & ferrugineufe jj

Le lieu l'on trouve le plus d'arfenic vierge efl Sainte-Marie- aux-mines ; il eft afîez rare par-tout ailleurs ; dans les années «755 & 1760, il fe trouva à Sainte- Marie -aux - mines une fi grande quantité d'arfenic vierge , que pendant plufieurs jours on en tiroit des quintaux entiers. . . . Dans les autres mines, comme dans celles de Freyberg, de Saint-Andreafberg-au-Hartz 5t dans quelques-unes de Suède, on en a trouvé par intervalles quelques morceaux. . . . M. Monnet conclut par dire que I'arfenic efl: une fubftance par- ticulière , femi - métallique fi on veut l'envifager par fes propriétés métalliques , ou femi - faline fi on veut l'envifager par fes propriétés falines , qui entre comme partie contingente dans les mines, & qui eft indifîei-ente à l'intérieur des métaux. Journal de Phyfiquc , Septembre ' 773 ' P^g^^ ^ 9 ^ à' fiiiv.

(e) Elémens de Chimie, tome I , page / ^;-. « L'arfenic , dit M. Demefte , eA une fubflance for: commune dans les mines ;

elle

D E s M I N É R A U X. 40 i

formes pourroieiu ctre des clécompofitions d'arfcnic, ou des mélanîies avec du cobalt &l du fer: d'ailleurs, ia mine d'arltiiic en écailles ni même le régule d'ar- fenic, qui doit être encore plus pur &i plus denfe que l'arfenic vierge, ne font pas aufli pefans que le ruppofe M. Monnet ; car ia pefanteur fpécilique de la mine écailleufe d'arfenic n'cft que de ^-7249, & celle du régule d'arfenic de )7^^3 3, tandis que la pefanteur fpécifique du régule de cobalt efl de 78 i 1 9, & celle du régule de nickel de ySoyo; il efl donc certain que l'arfenic vierge n'efl pas à beaucoup près auiïi pefant que ces régules de cobalt & de nickel.

elle s'y montre tantôt à la lurface d'autres minéraux , elle s'eft « dcpolee, foit à l'état de régule, foit à l'état de chaux; tantôt elle te s'y trouve minéralifée , <5c tantôt elle exerce elle-même les fondions « de mineialifateur . ...» Outre le fer que contient la pyrite arléni- cale , elle renferme aulFi quelquefois du cobalt, du bilmuth , même

de l'arixent & de l'or Le régule d'arfenic natif elt ordinai-

rement noirâtre & terni par l'a<ftion de l'air , quoique dans fa fracture récente il foit brillant comme de l'acier. Tantôt il foi me des maflès écailleufes , folides, allez compares & fans figure déterminée; tantôt ce font des malles granuleules avec des protubérances , com- pofées de lames très-épailies , pofees en recouvrement les unes fur les autres, & dont les fragmens ont par conféquent une partie concave & une partie convexe. Il porte alors le nom d'ar/rnic icjfacé. Quand cet arfenic vierge elt pur & fans mélange , il n'efl point afl'ez dur pour faire feu avec le briquet, mais il eft quelquefois mêlé d'une petite quantité de fer ou de cobalt, & alors la dureté efl plus confidérable.

La grande facilité avec laquelle l'arfenic pafie à l'état de chaux ,

Minéraux, Tome 111. £ee

402 Histoire Naturelle

Quoi qu'il en foit, i'arfenic fe rencontre dans preique toutes les mines métalliques, & fur-tout dans les mines d'étain, c'eft même ce qui a fait donner à I'arfenic, comme au foufre, le nom de nméralifateiir : or fi l'on veut avoir ime idée nette de ce que fignifie le mot de miner ûl'ifation , on ne peut l'interpréter que par celui de j'altcration que certaines fubfîances a6tives produi/ent fur les minéraux métalliques; la pyrite, ou fi l'on veut Je foufre minéral, agit comme un fel par l'acide qu'il contient; le foie de foufre agit encore plus généralement par fon alkali , &: l'arlèriic qui cft un autre {q\ fouvent uni avec la matière du feu dans la pyrite, agit avec une

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& la grande volatilité de cette chaux nous indiquent aflez pourquoi Ton rencontre la chaux de ce demi-me'tal fous la forme d'une etHo- r^ic^act blanche à Ja furface & dans les C3i\\tés de certaines mines ; on ne peut même pas douter qu'elle ne puifle réfulter de la décoin- pofuion , foit de la mine d'argent rouge , foit des autres minéraux qui contiennent ce demi-métal. . . . Cette efflorelcence blanche efl une chdux d'arlenic proprement dite. . . .

Le verre natif d'arfenic eft d'un blanc jaunâtre, de même que ïe verre facftice de ce demi-métal ; mais le premier efl; moins iujet à s'ahérar à l'air que le dernier, par la raifon fans doute que la coinbinaifon des deux fubflances qui compolent le verre natif, y efl plus parfaite & plus intime qu'elle ne l'elt dans le verre d'arlenic que nous préparons.

Quoi qu'il en foit , le verre natif d'arfenic fe rencontre à la fuper- flcie de quelques mines de cobalt & fur quelques produits de volcans, il efl: quelquefois criflallifé en prifmes minces , triangulaires , ou en aiguilles blanches divergentes, &c. LtUres de M, Dmtjlt , tome ÎI , pa^es 12 1 & fuiv*

DES Minéraux. 403

double puifl'ance, & c'ell de i'aclioii de ces trois icls acides, alkaiis &. arfenicaux, que dépend l'altération ou mincralifation de toutes les fubflances métalliques, parce que tous les autres fels peuvent fe réduire à ceux-ci.

L'arfenic a fait impreiïion fur toutes les mines mé- talliques dans lefquelles il s'eft établi dès le temps de h première formation des Tels, après la chute des eaux & des autres matières volatiles; il femble avoir altéré les métaux à l'exception de l'or; il a produit avec le foufre pyriteux &. le foie de foiifre , les mines d'argent rouges, blanches (Si. vitreufès ; il efl entré dans la plupart des mines de cuivre ff) , & il adhère très -fortement à ce métal fg); il a produit la cridallifation des mines d'étain & de celles de plomb qui fe préfentent en criflaux blancs & verts ; enfin il fe trouve tmi au fer dans plu- fleurs pyrites, & particidièrement dans la pyrite blanche que les Allemands appellent mifpikel j qui n'ell qu'un compofé de mine de fer & d'une grande quantité

^, I I - Il I - - - - - '

(f) La preuve évidente que l'arfenic peut minéralifer le cuivre, c'eft qu'il le diflout à froid & par la voie humide , lorfqu'on le lui prcfente très-divifé comme en feuilles de livret. Elémens de Chimie ^ par Af. de Aforveau , tome H , page ^ 2j .

(cr) L'arfenic tient très-fortement avec le cuivre, & louvent if fe montre dans la matte ou cuivre noir après un grand nombre de fontes & de grillages pour tâcher de l'en féparer , ce qui dans les mines d'argent tenant cuivre en rend la fèparation très - difficile. Ai» Monnet, Journal de Phyfque , Septembre i773-

E e e ij

404. Histoire Naturelle

d'arfenic (h). Les mines d'antimoine, de bifmuth, de zinc, & fur - tout celles de cobalt contiennent au/Ti de l'arfenic; prcfque toutes les matières minérales en font imprégnées ; il y a même des terres qui font fènfiLie- ment arfenicales ; aucune matière n'eft donc plus uni- verfcllement répandue : la grande (Se confiante volatilité de l'arfenic , jointe à la fluidité qu'il acquiert en (e. difTohant dans l'eau, lui donnent la faculté de tranf- porter en vapeurs, &. de dépofèr par- tout, foit en liqueur, foit en maffes concrètes; il s'attache à toutes les fubflances qu'il peut pénétrer, & les corrompt prefque toutes par l'acide corrofif de fon fel.

L'arfenic efl: donc l'une des fiibflances les plus actives du règne minéral ; \ts matières métalliques &

-— ' -- . - . .-■ _ ^

(h) Le m'ifpickd ou pyrite blanche peut être confidérce comme

une mine de fer ark-nicale , ce métal y étant minéralifé par beaucoup

d'ari'enic & un peu de foufre ; mais i'arfenic étant aufîi une fubftance

métallique particulière, & fa quantité dans cette pyrite excédant de

beaucoup celle du {'ex , nous pouvons regarder le mlfpicM comme

une mine d'arfenic proprenient dite. On le rencontre en maffes ,

tantôt informes & tantôt crillallifées de diverfes manières. . . . On

trouve de fort beaux groupes de criftaux de mif])ickel à Muinig

en Saxe, Lettres de M. le Doâeur Demejfe , tome II , page 12 p.

Et on obferve même affez généralement que le inili)ickel en

mafies confufes efl compofé de petites lames rhomboïdales. Llem ,

page 1^0.— La mine d'arfenic grife (pyrite d'orpiment) diffère

peu de la précédente; elle contient une plus grande quantité de

Çonîte , ce qui fait qu'en la calcinant on en retire du réal^ar

Idem, ibidem.

D E s M I N É R A U X, ^o J

t^rreufes ou pierreufes ne font en elles-mêmes que des fubilances paiïives; les Tels feuls ont des qualités avives, & le fbufre doit être confidéré comme un M , puifqu'il contient de l'acide qui efl l'un des premiers principes falins. Sous ce point de vue , les puiffances actives fur les minéraux en général femblent être rcpréfentées par trois agens principaux, le foufre pyriteux, le foie de foufre c^ l'arfcnic , c'eft- à-dire , par les fels acides, alkaiins & arfénicaux ; & le foie de foufre qui contient l'alkali uni aux principes du foufre, agit par une double puiflance & altère non -feulement les fubflances métal- liques , mais aufîi les matières terreufès.

Mais quelle caufe peut produire cette puiffance des fels , quel élément peut les rendre aétifs ! fi ce n'efl celui du feu qui efl fixé dans ces fels ; car toute aélion qui dans la Nature ne tend qu'à rapprocher , à réunir les corps, dépend de la force générale de l'attradion , tandis que toute aélion contraire qui ne s'exerce que pour féparer, divifer & pénétrer les parties conflituantes des corps , provient de cet élément qui , par fa force expanfive, agit toujours en fens contraire de la puiffance attradive , & feu! peut féparer ce qu'elle a réuni , ré- foudre ce qu'elle a combiné, liquéfier ce qu'elle a rendu folide, volatilifer ce qu'elle tenoit fixe, rompre en ua mot tous \cs liens par lefqucis l'attradion univer/èlle tien- droit la Nature enchaînée & plus qu'engourdie, fi l'élé- ment de la chaleur &. du feu qui pénètre julque dans fès

4o6 Histoire Naturelle

entrailles n'y cmretcnoit le mouvement néceffaire à tout développement , toute produdion & toute génération.

Mais , pour ne parler ici que du règne minéral , le grand altérateur , le feul minérali/àteur primitif eft donc le feu ; le fbufre , le foie de foufre , l'ar/ènic & tous ies fels ne font que fes infîrumens ; toute minérali/àtioii n'eft qu'une altération par divifion , di/folution, volati- lifation , précipitation , &c. Ainfi les minéraux ont pu être altérés de toutes manières , tant par le mélange des matières pa/Tives dont ils font compofés que par ia combinaifon de ces puifTances animées par le feu , qui les ont plus ou moins travaillés , & quelquefois au point de les avoir prefque dénaturés.

Mais pourquoi, me dira-t-on, cette minéralifation qui, félon vous, n'efi: qu'une altération, (c porte-telle plus généralement fur les matières métalliques que fur les matières terreufcs \ De quelle caufe, en un mot, ferez-vous dépendre ce rapport fi marqué entre le miné- ralifateur & le métal ! Je répondrai que , comme le feu primitif a exercé toute fa puifTance fur les matières qu'il a vitrifiées, il les a dès-lors mifcs hors d'atteinte aux petites adions particulières que le feu peut exercer encore par le moyen des fels fur les matières qui ne fe font pas trouvées affez fixes pour fubir la vitrification ; que toutes ies fubflances métalliques, fans même en excepter celle de l'or, étant fufceptibles d'être fublimées par l'adion du feu , elles fe font Icparées de la malTç

DES Minéraux, 407

des matières fixes qui fe vitrilioient; que ces vapeurs métalliques reléguées dans i'atmofphère tant qu'a duré i'exceflive chaleur du globe, en font enfuite dcfcendues & ont rempli les fentes du quartz Ôi autres cavités de h roche viireufe , &. que par confcquent ces matières métalliques ayant évité par leur fuite Si. leur fubiimation ia plus grande aélion du feu, il n'eft pas étonnant qu'elles ne puiflent éprouver auctme altération par l'aélion fecon- daire de la petite portion particulière du feu contenue dans les fels ; tandis que les fubflances calcaires n'ayant été produites que les dernières , & n'ayant pas fubi l'action du feu primitif, font par cette raifbn, très- fufceptibles d'altération par l'aélion de nos feux , &. par ie foie de foufre dans lequel la fubllance du feu eft réunie avec l'alkali.

Mais c'efl affez nous arrêter fiir cet objet général de la minéralifation qui s'elt préfenté avec i'arfenic^ parce que ce fel acre &. corrofif, efl l'tm des plus puiflans minéralifateurs par l'aélion qu'il exerce fur les métaux ; non-feulement il les altère &. les mincrali/e dans le fein de ia terre , mais il en corrompt la fubflance ; il s'infmue & répand en poifon deflruéteur dans les minéraux comme dans les corps organifés; allié avec l'or ÔL l'argent en très - petite quantité , il leur enlève l'attribut e/fentiel à tout métal en leur ôtant toute duéîi- lité , toute malléabilité ; il produit le même effet fur le cuivre; il blanchit le fer plus que le cuivre, fans

4o8 Histoire Naturelle

cependant le rendre auffi caiïant; il donne de même beaucoup d'aigreur à i'ctain & au plomb, & A ne fait qu'augmenter celle de tous les demi -métaux; il en divife donc encore les pariics lorsqu'il n'a plus la puif- fance de les corroder ou détruire; quelqu'épreuve qu'on iui falle fubir, en qtielqu'ctat qu'on puifTe le réduire, l'arfenic ne perd jamais fes qualités pernicieu/ès; en régule, en ticurs, en chaux, en verre, '\\ efl toujours poifon; la vapeur ieule reçue daus les poumons, fuffit pour donner la mort, 6l l'on ne peut s'empêcher de gémir en voyant le nombre des vidimes immolées , quoique volontairement, dans les travaux des mines qui con- tiennent de l'arfenic; ces malheureux Mineurs périlfent prefque tous au bout de quelques années , & les plus vigoureux font bien-tôt languiiTans ; la vapeur, l'odeur feule de l'arfenic leur altère la poitrine (ij , & cependant ils ne prennent pas pour éviter ce mal toutes les pré- cautions néceffaires ; d'abord il s'élève afTez fouvent

(i ) C'eft à cette lubrtance dangereufe qu'efl dCie la phthifie , & ces exulcérations des poumons qui font périr à la fleur de l'âge les ouvriers qui travaillent aux mines.... Parmi eux un homme de trente cinc{ à quarante ans efl déjà dans la décrépitude , ce qu'on doit fur-tout attribuer aux mines qu'ils détachent avec le cileau & le maillet, &. qu'ils refpirent perpétuellement par la bouche & par le nez; il paroit ([ue fi dans ces mines on failoit ulage de la poudre à canon pour détacher le minerai , les jours de ces malheureux Ouvriers ne feroient point fi indignement [prodigués. Encyclopédie , article Orpiment.

DES Minéraux. 409

des vapeurs aiTenicales dans les fbuterrains des mines dès qu'on y fait du feu; & de plus, c'efl en laifànt au marteau des tranchées dans la roche du minéral pour le féparer & l'enlever en morceaux, qu'ils refpirent cette poullière arfenicale qui les tue comme poilbn , (Sl les incommode comme pou/Tière ; car nos Tailleurs de pierre de grès font très-fouvent malades du poumon, quoique cette pouffière de grès n'ait pas d'autres mau- vai/ès qualités que très-grande ténuité ; mais dans tous ies ufàges , dans toutes les circonftances l'appât du gain, commande , on voit avec plus de peine qtie de furprife , la lanté des liommes comptée pour rien , <5c leur vie pour peu de cliofè.

L'arfenic qui malheurcufement fe trotive fi fouvcnt & fi abondamment dans la plupart des mines métalliques, y eil prefque toujours en fèl cri Hall in ou en poudres blanches ; il ne fe trouve guère que dans les volcans agilTans ou éteints fous la forme d'orpiment ou de réaigar; on alFure néanmoins qu'il y en a dans les mines de Hongrie, à Kremnitz , à Newibl, &c. La fubUance de ces arlènics mclés de foufre , eft difpofée par lames minces ou feuillets, & par ce caradère on peut tou- jours diftinguer l'orpiment naturel de l'artificiel dont le tilfu eft plus confus. Le réaigar eft auffi difpofé par feuillets , & ne diffère de l'orpiment jaune que par fa couleur rouge ; il eft encore plus rare que l'orpiment ; & ces deux formes fous lefquelies préfente l'arfenic MirJruiix, Tome IIL Fff

410 Histoire N atv relle

ne font pas communes, parce qu'elles ne proviennent que de i'a6tion du feu , & l'orpiment & le rcalgar n'ont été formés que par celui des volcans ou par des incendies de forets ; au lieu que l'arfenic fe trouve en grande quantité fous d'autres formes dans prefque toutes \t$ mines , &. fur-tout dans celles de cobalt.

Pour recueillir l'arfenic & en éviter en même temps Jes vapeurs funefles, on confîruit des cheminées inclinées & longues de vingt à trente toifes au-de(fus des four- neaux où l'on travaille la mine de cobalt , &. l'on a obfervé que l'arfenic qui s'élève le plus haut efl aufïi le plus pur & le plus corrofif ; pour ramaffer fans danger cette poudre pernicieufe, il faut fe couvrir la bouche & le nez , &. ne refJ3irer l'air qu'à travers une toile ; & comme cette poudre arfenicale diffout dans les graiffes & les huiles auffi-bien que dans l'eau , & qu'une très -petite quantité fuffit pour caufèr les plus funefîes effets , la fabrication devroit en être défendue & le commerce profcrit.

Les Chimifles , malgré le danger , n'ont pas laifTé que de foumettre cette poudre arfenicale à un grand nombre d'épreuves pour la purifier & la convertir en criflaux; ils la mettent dans des vaiffeaux de fer exaéle- ment fermés elle fe fublime de nouveau fur le feu.

Les vapeurs s'attachent au haut du vaiffeau en criflaux blancs & tranfparens comme du verre , &. lorfqu'ils veulent faire de l'arfenic jaune ou rouge femblable au

DES Minéraux. 411

rcalgar & à l'orpiment, ils mclent cette poudre d'arfenic avec une certaine quantité de foufre pour les fublimer enfèmble ; la matière fublimce devient jaune comme l'orpiment, ou rouge comme le rcalgar, félon la plus ou moins grande quantité de foufre qu'on y aura mêlée. Enfm fi l'on fond de nouveau ce réalgar artificiel , il deviendra tranfparent & d'un rouge de rubis ; le réalgar naturel n'efl qu'à demi-tranfparent, fou vent même il efl: opaque & reflemble beaucoup au cinabre ; ces arfcnics jaunes & rouges font, comme l'on voit, d'ime formation bien poftérieure à celle des mines ar/ènicales, puifque le foufre eft entré dans leur compofition & qu'ils ont été fublimés enfèmble par les feux fouterrains. On affure qifà la Chine, l'orpiment & le réalgar fe trouvent en fi grandes maffes qu'on en a fait des vafes & des pagodes ; ce fait démontre i'exiHence préfénte ou paffée des volcans dans cette partie de l'Afie.

Pour réduire i'arfenic en régule, on en mêle la poudre blanche fublimée avec du favon noir & même avec de l'huile ; on fait fécher cette pâte humide à petit feu dans un matras , & on augmente le degré de feu jufqu'à rougir le fond de ce vaiffeau. M. Bergman donne la pefanteur f])écifique de ce régule dans le rapport de 8310 a 1000 , ce qui, à yz livres le pied cube d'eau, donne 598 livres 7^; pour le poids d'un pied cube de régule d'arfenic ; ainfi la denfité de ce régule ed un peu plus grande que celle du fer, & à peu-près égale

Fff i]

412 Histoire Naturelle

à la clcnCitc de l'acier. Ce régule d'arfenic a , comme nous l'avons dit , piufieurs j^roprictcs communes avec îes demi-mctaux ; il ne s'unit point aux terres ; il ne fe diffout point dans l'eau , il s'allie aux métaux fans leur ôter l'éclat métallique; & dans cet état de régule, l'arfenic eft plutôt un demi -métal qu'un fcl.

On a donné le nom de t'erre d'arfaiic, aux criflaux qui fe forment par la poudre fublimée en vaiffeaux clos; mais ces criflaux tranfparens ne font pas du verre , puif- qu'ils font folubles dans l'eau ; &. ce qui le démontre encore, c'efl que cette même poudre blanche d'arfenic prend cet état de prétendu verre par la voie humide & à la fimple chaleur de l'eau bouillante (k).

Lorfqu'on veiu purger les métaux de l'arfenic qu'ils contiennent, on commence par le volaiilifcr autant qu'il efl poffible ; mais comme il adhère quelquefois trcs- fortement au métal & fur-tout au cuivre, & que par le feu de fufion on ne l'en dégage pas en entier, on ne vient a bout de le féparer de la matte que par l'intermède du fer qui ayant plus d'affinité que le cuivre avec l'ar- fenic s'en faifit & en débarraffe le cuivre ; on doit faire la même opération & par le même moyen en rafinant l'argent qui fe tire des mines arfenicales.

(k) 11 faut pour cela mettre la diilolution de cette cliauv dans quinze parties d'eau bouillante, & laifler, enfuite refroidir cette diflb- lution ; on obtient alors de petits criftaux en fegmens d'odacdres, &c. c'eft un verre d'arfenic formé par un degré de chaleur bien peu confidérable. Le tires d^ AI. Dcmejk ^ terne II , page iiS,

D E s AI I N É R A U X. 4I 3

DES CI MENS DE NATURE.

vJN a VU par l'expcfc des articles préccclens , que toutes les matières folides du Globe terreilre, produites d'abord par le feu primitif, ou formées enfuite par l'in- termède de l'eau , peuvent être comprifes dans quatre clafTes générales.

La première contient les verres primitifs & les matières qui en font composées , telles que les porphyres , les granités & tous leurs détrimens, comme les grès, les argiles , fchifles , ardoifes , &c.

La féconde claffe efl celle des matières calcinables , & contient les craies, les marnes , les pierres calcaires, les albâtres , les marbres & les plâtres.

La troifième contient les métaux , les demi-métaux &L les alliages métalliques formés par la Nature, ainfi que les pyrites & tous le^ minerais pyriteux.

Et la quatrième eft celle des réfidus & détrimens de toutes les fubihnces végétales & animales, telles que ie terreau, la terre végétale, le limon, les bols, les tourbes , les charbons de terre, les bitumes, &c.

A ces quatre grandes clafTes des matières dont le Globe terreftre eft prefque entièrement compofé , nous devons en ajouter une cinquième, qui contiendra les fels du toutes les matières falines.

Enfin nous pouvons encore faire une fixième claffe

414- Histoire Naturelle

des fubftances produites ou travaillées par le feu des volcans, telles que les bafaltes, les laves, les pierres- ponces , les pouzzolanes , les foufres , &c.

Toutes les matières dures & folides doivent leur première confiftance à la force générale & réciproque d'une attradion mutuelle qui en a réuni les parties conflituantes ; mais ces matières pour la plupart, n'ont acquis leur entière dureté & leur pleine folidité, que par rinterpofition fuccelfive d'un ou de plufieurs cimcns que j'appelle c////^//j"^£' Nature, parce qu'ils font dificrens de nos cimens artificiels, tant par leur effence que par leurs effets. Prefque tous nos cimens ne font pas de la même nature que les matières qu'ils réuniffent ; la fubUance de la colle efl très-différente de celle du bois dont elle ne réunit que les fur faces ; il en efl; de même du maflic qui joint le verre aux autres matières contiguës; ces cimens artificiels ne pénètrent que peu ou point du tout dans l'intérieur des matières qu'ils uniffent, leur effet borne à une fimple adhéfion aux furfaces. Les cimens de nature font au contraire, ou de la même effence , ou d'une effence analogue aux matières qu'ils uniffent, ils pénètrent ces matières dans leur intérieur, & s'y trouvent toujours intimement unis; ils en aug- mentent la denfité en même temps qu'ils établiffent la continuité du volume: or, il me femble que les fix claffes fous lefquelles nous venons de comprendre toutes les matières terreflres, ont chacune leur ciment propre

DES Minéraux. 41J

& particulier, que la Nature emploie dans les opéra- tions qui font relatives aux différentes fubflances fur le/quelles elle opère.

Le premier de ces cimens de nature efl Je fuc criftaiiin qui tranfude & fort des grandes mafTes quart- zeufes , pures ou mêlées de fel d-f pat h , de fchorl, de jafpe & de mica ; il forme la fubflance de toutes les flaladites viireufes , opaques ou tranfparentes. Le fuc quartzeux , lorfqu'il efl pur, produit le criflal de roche, les nouveaux quartz , l'émail du grès , &c. Celui du (eld- fpath produit les pierres chatoyantes , & nous verrons que le fchorl, le mica & le jafpe ont aufTi leurs flalac- tites propres & particulières ; ces flaladites des cinq verres primitifs fe trouvent en plus ou moins grande quantité dans toutes les fubflances vitreufès de féconde ÔL de troifième formation.

Le fécond ciment, tout auffi naturel & peut-être plus abondant à proportion que le premier, efl le fuc fpath ique qui pénètre , confblide & réunit toutes les parties des fubflances calcaires. Ces deux cimens vitreux & calcaire font de la même efTence que les matières (lir lefquelles ils opèrent ; ils en tirent auffi chacun leur origine , foit par l'infiltration de l'eau , foit par l'éma- nation des vapeurs qui s'élèvent de l'intérieur des grandes malles vitreufès ou calcaires ; ces cimens ne font , en un mot, que les particules de ces mêmes matières atté- nuées Sl enlevées par les vapeurs qui s'élèvent du fein

4î6 Histoire Naturelle

(le la terre , ou bien détachées & entraînées par une lente flillation des eaux, & ces cimens s'infinuent dans tous les vides &l jufqae dans les pores des ma/Fes qu'ils reniplident.

Dans les cimens calcaires , je comprends le fuc gypfeux, plus foible & moins fblide que le fuc fpathique qui reflaufTi beaucoup moins que le ciment vitreux; mais ce fuc gypfeux ell fbuvent plus abondant dans ia pierre à pldtrc que le fpath ne i'eft dans les pierres calcaires.

Le troifième ciment de nature eil celui qui provient des matières métalliques , & c'eft peut-être le plus fort de tous. Celui que fournit le fer ell le plus univerfel- lement répandu, parce que la quantité du fer eft bien plus grande que celle de tous les autres minéraux métal- liques , (Se que le fer étant plus fiafceptible d'altération qu'aucun autre métal par l'humidité de l'air & par tous les fels de la terre , il ie décompofe très-aifément à. combine avec la plupart des autres matières dont il remplit les vides & réimit les parties conftituantes. On connoît la ténacité & la folidité du ciment fait artifi- ciellement avec ia limaille de fer; ce ciment néanmoins ne réunit que les i».u-faces , &l ne pénètre que peu ou point du tout dans l'intérieur des fubUances dont il n'établit que la contiguïté ; mais lorfque le ciment ferrugineux eft employé par la Nature , il augmente de beaucoup la denfité & la dureté des matières qu'il pénètre ou réunit. Or cette matière ferrugineufe cil entrée, foit enmafles^

foit

DES Minéraux. 417

loit en vapeurs, clans les jafpes, les porphyres, les gra- nités, les grenats, les crifîaiix colorés, & dans toutes les pierres vitreufes, fimplcs oucompofces, qui pré/entent des teintes de rouge, de jaune , de brun, &c. On recon- noît auin les indices de cette matière ftrrugineufè dans plufieurs pierres calcaires, & fur-tout dans les marbres, les albâtres & les plâtres colorés; ce ciment ferru^rineux. comme les deux autres premiers cimens, a pu être porté de deux façons diltérentes; la première par fublimation en vapeurs , & c'efl ainfi qu'il eft entré dans les jafpes , porphyres & autres matières primitives ; la féconde par l'innltration des eaux dans les matières de formation poflérieure , telles que les fchiftcs , les ardoifes , les marbres & les albâtres; l'eau aura détaché ces particules ferrugineufes des grandes roches de fer produites par le feu primitif dès le commencement de la confolidation du Globe; elle les aura réduites en rouille, & aura tranf- porté cette rouille ferrugineufe fur la furface entière du Globe; dès-lors cette chaux de fer fe fera mêlée avec les terres , les fables & toutes les autres matières qui ont été remuées & travaillées par les eaux. Nous avons ci-devant démontré que les premières mines de fer ont été formées par l'aétion du feu primitif, & que ce n'ell que des débris de ces premitres mines ou de leurs détrimens décompofés par l'intermède de l'eau , que les mines de fer de féconde & de troidème formation ont été produites.

Minéraux, Tome II L Cgg

4i8 Histoire Naturelle

On doit rcunir au ciment ferrugineux le riment pyriteux, qui fc trouve non-fculcmem clans les minerais métalliques, mais auffi clans la plupart des fchiftes & dans quelques pierres calcaires ; ce ciment pyriteux -augmente la dureté des matières qui ne font point expofces à l'humidité, & contribue au contraire à Jeur décompornion dès qu'elles font humeélées.

On peut auffi regarder le bitume comme un quatrième ciment de nature : il fe trouve dans toutes les terres végétales, ainfi que dans les argiles & les fcbifles mêlés de terre limoneufe; ces fchifles limoneux contiennent quelquefois une fi grande quantité de bitume qu'ils en font inflammables ; & comme toutes les huiles & graiiïes végétales ou animales fe convertiffent en bitumes par le mélange de l'acide , on ne doit pas être étonné que cette fubûance bitumineufe fe trouve dans les matières tranfportées & dépofées par les eaux , telles que les argiles, les ardoifes, les fchifles & même certaines pierres calcaires; il n'y a que ks fubflances vitreufes, produites par le feu primitif, dans lefquelles le bitume ne peut être mêlé, parce que la formation des matières brutes & vitreufes , a précédé la production des fubftances organifées & calcaires.

Une autre forte de ciment qu*on peut ajouter aux précédens , eft produit par l'aélion des fels ou par leur mélange avec les principes du foufre; ce ciment falin ÔL fulfureux exifle dans la plupart des matières

D E s AI I N É R A U X, 417

terreufes; on le rcconnoît à la mauvaifc odeur que ccs matières répandent lorfqu'on les entame ou les frotte , il y en a même comme la pierre de porc (a) , qui ont une très-forte odeur de foie de foufre, ôl d'autres qui, dès qu'on les frotte, répandent l'odeur du bitume (l^J.

(a) Ce n'eft qu'en Norwcge & en Suède , dit Pontoppidan , que l'on trouve la pierre du cochon, ainfi appelée, parce qu'elle gucrit une certaine maladie du cochon. Cette pierre , autrement nommée lap'is fœiidiis , rend une puanteur affieufe quand on la frotte ; elle eft brune , luifante & paroît être une efpcte de vitri- fication dans la compoiltion de laquelle il entie beaucoup de foufre. Journal étranger , mois de Septembre i 7// , page 21^, Nota. Nous ne pouvons nous difpenfer de relever ici la contradlcflion qui ell entre ces jnots , vitrif cation qui contient du foufre , puifque le foufre fe feroit dilfipé par la combuftion , long-temps avant que le feu fe fût porté au degré nécelTaire à la vitrification. La pierre de porc n'ert; point du tout une vitrification , mais une matière calcaire faturt'e du fuc pyriteux qui lui fait rendre fon odeur fétide de foie de loufre ; combinaifon formée , comme l'on fait , pr.r l'union de l'acide avec l'alkali , repréfenté ici par une terre abforbante ou calcaire.

(b) La pierre de taille de Méjaune , dit M. l'abbé de Sauvages, efl tendre , calcinable , d'un grain fin , & d'un blanc terne ; pour peu qu'on la frotte, elle fent le bitume; Mémoires de l'Académie des Sciences, année i 74^ , p^gt 7-2/. La {iierre puante du Canada, qui efl: noire & dont on fait des pierres à rafoir , fe dilfout avec vivacité , & refte enfuite fans jeter les moindres bulles , d'où il fembleroit qu'on pourroit' conclure qu'il entre dans fa compofition

des bitumes, des matières animales mêlées à des parties terreules

Peut-être l'odeur forte & puante de quelques autres pierres n'efl-el'e produite que par des parties de bitume très-ténues & difpofées dars leur maffe , au point que ces parties fe diflblvent entièrement dans les

Gggij

420 Histoire Naturelle

Enfin le fixième ciment de nature cfl encore moins fmiple que le cinquième, & fouvent aufTi il cfl de qualités trcs-diuérenics , félon les matières diverfe? iur leiquclles le feu des volcans a travaillé avec plus ou moins de force ou de continuité, & fuivanc que ces matières font trouvées plus ou moins pures ou mélangées de fubllances diiiérentes : ce ciment , dans les matières volcaniques , efl fouvent compofé des autres cimcns , & particulièrement du ciment ferrugineux ; car tous les ba/altes &: prcfque toutes les laves des volcans, con- tiennent une grande quantité de fer , puifqu'ellcs font attirables à l'aimant ; <S^ pludeurs matières volcanifées contiennent des foufrcs &. des fèls.

Dans les matières vitreufes \'Ci plus fmiples , telles que le quartz de ikiQo\\(\c formation & les grès , on ne trouve que le ciment crirtallin & vitreux; mais dans les matières vitreufes compofées , telles que les por- phyres , granités & cailloux , il eft fouvent réuni avec les cimens ferrugineux ou pyritcux : de même , dans les matières calcaires fimples &. blanches , il n'y a que le ciment fpathique ; mais di^ns celles qui font compofées &. colorées , & fur-tout dans les mar!,'res , on trouve ce ciment fpathique fouvent mêlé du cin.ent ferrugineux,

acides Les pierres bitumineufei de l'Auvergne le trouvent dans

des endroits qui forment une fuiie de ;iiouiicu es pofcs dans le même alij^nement; peut- être y a-t-il ailleurs de femblables pitrres. Alémoïre de Al. Guet tard , dans ceux de l'Ai.adéniie dts Sciences , année i y^ ^'

D E s M I N É R A U X, 42 I

&. quelquefois du bitumineux. Les deux premiers cimeiis , c'eft-à-dire , le vitreux & le fpathique , dès qu'ils font abondans , fe manifeflcnt par la crillalli- lation ; le bitimie même fe criilallifè lorfqu'il eft pur, & les cimeiis ferrugineux ou pyriteux prennent aafîi fort fouvent une forme régulière ; les cimens fulfureux &L falins fe criftallifent non - feulement par l'intermède de l'eau , mais auiïi par l'aélion du feu ; néanmoins ils paroident aflcz rarement fous cette forme criiJal- lifée dans les matières qu'ils pénètrent, &. en général tous ces cimens font ordinairement difperfés &i inti- mement mêlés dans la fubflance même des matières dont ils lient les parties ; fouvent on ne peut les recon- noître qu'à la couleur ou à l'odeur qu'ils donnent à ces mêmes matières.

Le iUc crifîailin paroît être ce qu'il y a de plus pur dans les matières vitreufes , comme le fuc fpathique eft auffi ce qu'il y a de plus pur dans les fùbftances calcaires; Je ciment ferrugineux pourroit bien être aulfi l'extrait du fer le plus décompofé par l'eau ou du fer fublimié par le feu; mais les cimens bitumineux, fulfureux & ialin ne peuvent guère être confidérés que comme des colles ou c^lutens , qui réuni (Tent par interpofition les parties de toute matière, iâns néanmoins en pénétrer la fubltance intime, au Jicu que les cimens crifiailin, ipathique & ierrugineu^x ont donné ladenfité, la dureté & les couleurs à toutes les matières dans lefquelles ils fe iont incorporés.

4-22 Histoire Naturelle

Le feu & i'cau pcuNcnt cgaiement réduire toutes les matières à l'homogénéité ; le feu en dévorant ce qu'elles ont d'impur , & l'eau en réparant ce qu'elles ont d'hé- térogène , & les divifànt jufqu'au dernier degré de ténuité. Tous les métaux, & le fer en particulier, fe cridalh/ent par le moyen du feu plus aifément que par l'intermède de l'eau ; mais pour ne parler ici que des criflallifaticns opérées par ce dernier élément, parce qu'elles ont plus de rapport que les autres avec les cimens de nature, nous devons obferver que les formes de criftallifatioii ne font ni générales ni confiantes , & qu'elles varient autant dans le genre calcaire que dans le genre vitreux ; chaque contrée , chaque colline & , pour ainfi dire , chaque banc de pierre , foit vitreufe ou calcaire offre des criftallifations de formes différentes: or cette variété de forme dans les extraits , tant de la matière vitreufe que de la matière calcaire , démontre que ces extraits ren- ferment quelques élémens différens entr'eux , qui font varier leur forme de criftallifation ; fans cela , tous les criflaux, foit vitreux, foit calcaires, auroient chacun une forme confiante & déterminée, &. ne différeroient (\\.\c par le voliune <Sc non par la figure. C'eft peut-être au mélange de quelque matière, telle que nos cimens de nature, qu'on doit attribuer toutes les variétés de figure qui fe trouvent dans les criflallifations; car une petite quantité de matière étrangère qui fe mêlera dans une (lalaétite au moment de fa formation , fuffit pour en

D E s AI I N É R A U X. 423

changer la couleur & en modifier la forme; dès - lors on ne doit pas être étonné de trou^'er prcfaue autant de différentes formes de criitallifation qu'il y a de pierres différentes.

La terre limoneu/è produit aufTi des criftallifations de formes différentes, 6l en affez grand nombre; nous verrons que les pierres précieufes, les fpaths pefàns & la plupart des pyrites, ne font que des (laladites de la terre végétale réduite en limon, & cette terre ed ordi- nairement mêlée de parties ferrugineufès qui donnent la couleur à ces matières.

Des différens nVplanges & des combinaifons variées de la matière métallique avec les extraits des fubflances vitreufes , calcaires & limoneufes , il réfulte non-feule- ment des formes différentes dans la criftailifation , mais des divcrfités de pefanteur fpécifique, de dureté, de couleur Si. de tranfparence dans la fubflance des ftalaélites de ces trois fortes de matières.

Il faut que la matière vitreufe, calcaire ou limoneufè foit réduite à fa plus grande ténuité pour qu'elle puiffe fe criflallifer ; il faut auffi que le métal foit à ce même point de ténuité, & même réduit en vapeurs, &. que le mélange en foit intime, pour donner la couleur aux fubftances criftallifées , fans en altérer la tranfparence ; car pour peu que la fubflance vitreufe , calcaire ou limoneufè foit impure & mêlée de parties grofîières, ou que le métal ne foit pas affez diffout, il en réfulte

424 Histoire Naturelle

des fla!aditcs opaques & des concrétions mixtes, qui participent de la qualité de chacune de ces matières. Nous avons démontré la formation des flalaélites opaques dans les pierres calcaires , (Se celle de la mine de fer en grains dans la terre limoneufe (c) ; on peut reconnoître le même procédé de la Nature pour la formation des concrétions vitreufes, opaques ou demi-tranfparentes, qui ne diffèrent du criflal de roche que comme les flalaélites calcaires opaques diffèrent du fpath tranfparent , & nous trouverons tous les degrés intermédiaires entre la pleine opacité & la parfaite tran/J3arence , dans tous les extraits &. dans tous les produits des décompofitions des ma- tières terrcftres, de quelque eflence que puiffent être les fùbftances dont ces criflallifations ou concrétions tirent leur origine, &. de quelque manière qu'elles aient été formées , foit par exudation ou par flillation.

(c) Voyez dans le premier volume de cette Miftoire des minéraux, l'arutle de K Albâlrc & celui de la Terre végétale.

DES

DES Minéraux. 425

nrr- VI Jga

DES CRISTALLISATIONS.

JLjORSQ.ue les matières vitreufes, calcaires & limo- neufes font réduites à riiomogcnéitc par leur clifTolutioii dans l'eau , les j)arties fimilaires fe rapprochent par leur afîmité , & forment un corps folide ordinairement tranfparent, lequel en folidifiant par le defféchement, reffemble plus ou moins au cridal; &. comme ces crif- tallifations prennent des formes anguieufès, & quelque- fois aiïez régulières , tous les Alinéralogiftes ont cru qu'il étoit néceffaire de défigner ces formes ditiérentcs par des dénominations géométriques & des mefures précifes , ils en ont même fait le caraéîère fpécifique de chacune de ces fubflances : nous croyons que pour juger de la juflefTe de ces dénominations, il efl nécef- faire de confidérer d'abord les folides les plus fniiples, alidi de former enfuite une idée claire de ceux dont }a figure efl plus compofée.

La manière la plus générale de concevoir la géné- ration de toutes les formes difîérentes des folides, efl de commencer par la figure plane la plus fimple, qui cft le triangle. En établiffant donc une bafe triangulaire équilatérale , &l trois triangles pareils fur les trois côtés de cette bafe, on formera un tétraèdre régulier dont les quatre faces triangulaires font égales ; & en alongear<j; ou raccourciffant les trois triangles qui portent fur les

Minéraux , Tome IIL H h h

426 Histoire Natu n e lle

trois côxs de cette bafe, on aura des tétraèdres aigus ou obtus, mais toujours à trois faces fcmblablcs lur une bafc ou quatrième £ce triangulaire cquilatcraie : (Se Ç\ l'on rend cette bafe triangulaire inégale par fes cotés, on aura tous- les tétraèdres pofllblc^, c'cfl-à-dire , tous les foiides à quatre faces , réguliers & irréguliers.

En joignant ce tétraèdre baie à bafe avec un autre tétraèdre femblable , on aura un hexaèdre à lîx faces irianguiaires, &l par conféquent tous les hexaèdres pof- fibles à pointe triangulaire coiiuiie les tétraèdres.

Maintenant b nous étabiilTons un quarré pour bafe, & que nous élevions lin* chaque lace un triangle, nous aurons un pentaèdre ou fbiide à cinq laces, en forme de pyramide , dont la baie elt quarrée & les quatre autres faces triangulaires: deux pentaèdres de cette e/pèce, joints l)afe à bafe , forment un octaèdre régulier.

Si la b?fe n'efl pas un quarré, mais un lozange, & qu'on élève de même des triangles fur les quatre côtés de cette baie en lozange, on aura auffi un pen- taèdre, mais dont Ls faces feront inclinées fur la bafe; & en joignant ! afe à lafè ces deux pentaèdres, l'on aura un o(5laèdre à faces triangulaires &i obliques rela- tivement à la bafe.

Si la bafe ell pentagone, &. qu'on élève des triangles fur chacun des côtés d<- cette bafe, il en réfultera une pyramide à cinq faces h lafè pentagone, ce qui fait un hexaèdre qui, joint bafe à bafe avec un pareil hexaèdre.

DES AI I N É R A U A\ 427

pmduit un décaèdre rt2:idier dont les dix faces font triangulaires , & ielon que ces triangles feront plus ou moins alongcs ou raccourcis, & félon au/Ti que h ba/è pentagone lera compofëe de côtés plus ou moins iné- gaux , les pentaèdres & décaèdres qui en réfulteront feront plus ou moins rcp^uliers.

Si i'on prend une bafè hexagone, & qu'on élève fur les côtés de cette bafc lix triangles, on formera un heptaèdre ou folide à fèpt faces, dont la bafe fera un hexagone, & les lix autres faces formeront une pyramide plus ou moins alongée ou accourcie , félon que les triangles feront plus ou moins aigus , & en joignant bafe à bafe ces deux heptaèdres, ils formeront un dodé- caèdre ou folide à douze faces triangulaires.

En fuivant ainfi toutes les figures polygones de fcpt , de huit, de neuf, ôlc. côtés, & en établiffant fur ces côtés de la bafe des triangles & les joignant enfuite bafe contre bafe , on aura des fblidcs dont le nombre des faces fera toujours double de celui des triangles élevés fur cette bafe , & par ce progrès on aura la fuite entière de tous les fblides poffibles qui fe terminent en pyramides funples ou doubles.

Maintenant, i\ nous élevons trois parallélogrammes fur les trois côtés de la bafe triangulaire, & que nous fuppofions une pareille face triangulaire au-deffus , nous aurons un folide pentaèdre compofé de trois faces redan- gulaires ôl de deux faces triangulaires.

H h h ij

428 Histoire Naturelle

Et Je même, fi /ùr les côtés d'une ba/è quarrce, nous établifiTons des quarrés au lieu de triang!cs , & que nous fuppofions ime bafe quarrée au-deiïiîs égale & /èmblablc à celle du defTous , l'on aura un cvht ou hexaèdre à fix faces quarrées &: égaies ; & fi la bafe efl en lozange, on aura un Iiexaèdre rhomboïdai dont Jes quatre faces font inclinées relativement à leurs bafes.

Et fi l'on joint plufieurs cubes enl'ëmble,& de même plufieurs hexaèdres rhomboïdaux par leurs bafes , on formera des hexaèdres plus ou moins alongés , dont les quatre faces latérales feront plus ou moins longues, & les faces fupérieures & inférieures toujours égales.

De même, fi l'on élève des quarrés fur une bafe pentagone , & qu'on les couvre d'un pareil pentagone , on aura un heptaèdre dont les cinq faces latérales feront quarrées , & les faces fupérieures & inférieures penta- gones. Et fi l'on alonge ou raccourcit les quarrés, l'heptaèdre qui en réfukera , fera toujours compofé de cinq faces rectangulaires plus ou moins hautes.

Sur une bafe bexagone, on fera de même un oélaèdre, c'eft-à-dire , un folide à huit faces , dont les faces fupé- rieures & inférieures feront hexagones, <St les fix faces latérales feront des quarrés ou des reétangles plus ou moins longs.

On peut continuer cette génération de folides par des quarrés pofés fur les côtés d'une bafe, d'un nombre

DES Al J IS' É R A U X. 429

quelconque de côtés , foit fur des polygones réguliers , foit fur des polygones irréguliers.

Et CCS deux générations de folides , tant par des triangles que par des qiiarrés poics fur des bafes d'une iigurc quelconque, donneront les formes de tous les folides polTibles, réguliers ou irréguliers, à l'exception de ceux dont la fuperficie n'efl pas com])ofée de facts planes 6c rediligncs, tels que les folides fpliériques , elliptiques , & autres dont la furface efl convexe eu concave, au lieu d'être anguleufe ou à faces planes.

Or pour compo/er tous ces /ôlidcs anguleux, de quelque ligure qu'ils puifTent être, il ne faut qu'une agré- gation de lames triangulaires, puifqu'a^ec dts triangles on peut faire le quarré , le pentagone, l'iiexagone &. toutes les ligures reélilignes poffiblcs , à. l'on doit fup- pofer que ces lames triangulaires, premiers éiémens du folide criflallifé, font très -petites cîs. prefque infiniment minces. Les expériences nous démontrent que fi l'on met iùr l'eau des lames minces en forme d'aiguilles ou de triangles alongés, elles s'attirent & fe joignent en iaifant l'une contre l'autre, des ofcillations jufqti'à ce qu'elles fixent <& demeurent en repos au point du centre de gravité, qui efl le même que le centre d'attraélion, en forte que le fécond triangle ne s'atta- chera pas à la bafé du premier , mais à un tiers de fa hauteur perpendiculaire, & ce point ccrrefpond à celui du centre de gravité, par conféquent tous \cs folides

4.-0 Histoire Natu relle

poiTibies peuvent être produits par la fimplc agrégation des lames triangulaires, dirigées par la feule force de leur attra6lion mutuelle & refpeétive dès qu'elles font mifés en liberté.

Comme ce mécanifme efl le même & s'exécute par Ja même loi entre toutes les matières homogènes qui fe trouvent en liberté dans un fluide, on ne doit pas être étonné de voir des matières très - dificrentcs fe criilallircr fous la même forme. On jugera de cette fimilitude de crillallifation dans des fubftances très-dilfé- rentes par la table ci-jointe {^J , qu'on pourroit fans

(a) Table de la for

I. Téiracdre régulier, & qui forme un folide qui n'a que quatre face y , toutes quatre triangulaires ^ équilnérales.

Spath calcaire.

Marcaffite.

Mine d'argent grife. X. Téiracdre ir régulier.

Spath calcaire.

MarcafTite.

Mine d'argent grife.

■y. Tétraèdre dont les bords font

tronques.

Marcafiite.

Mine d'argent grife.

4. Tétraèdre dont les bords font

de paît & d'autre en bifeau, Marcaflite.

me des Criflallifîuions.

Mine d'argent grife.

5 . Tétraèdre dont les bords & les angles font tronqués.

Marcafiite.

Mine d'argent grife.

6. Prifme dont la bafe tf en losange, ou f lu tut hcxaedre-rhom- boidal.

Spath calcaire. Fcld-fpath ou fpath étincelant. Spath fufible. Grès criftallifé. Marcafiite. Pyrite arfénicale. Galène.

7. Solide pyramidal à deux pointes , cowpofées de deux faces triangulaires ifocèles; ce qui forme

D E s M I N É R A U X, ^31

doute étendre encore plus loin , mais qui fuflit pour démontrer que la forme de eri(lai!ilàtion ne dépend pas de l'efTence de chaque matière , puifqu'on voit le fpath calcaire , par exemple , fe crillalli/er fous la même forme que la marcaffue, la mine d'argent grife , le ftld-/patli , le fpath fufible , le grès , la pyrite arfénicale , la galène,

di'iix pyramides à fix faces jointes bafe cl l'dfe. Crilul.

8. Prifme à fx faces reâangles et barlongues , tcrwiuces par deux pyramides <•■ fx fuis.

Grillai de roche.

Mine de plomb verte.

p. Prijme à neuf pans inégaux, terminés par deux pyramides à trois faces inégales.

Schorl. Tourmaline.

1 o. Prifme oânedre, h pans iné- gaux , terminés par deux pyra- mides hexaèdres tronquées. Topaze de Saxe.

1 I . Cube ou hexaèdre soulier.

Spath fiifible. Sel marin. MarcafTite cnhique. Galène ttiTulatre. Mine de fer cubique. Mine d'argent vitreufe. Mine li'irgcntcornéc.

12. CuLe , dont les atgles font un peu troncjués , ce qii fait un foiuic h quaior-^e fces . don; fx Octogones c'' l:it triangulaires.

Spath fufible.

Sel marin.

MaiLafllte.

Aline de fer.

G a h n e .

Blende.

Mine d'argent vitreufe.

I 3. Cale tronqué , dont les an- gles font tronqués jufqu'd la moitié de la jace , & qui a , comme le précèdent, qu at or r^e faces dort fx Jont quarrées à^ huit hexaoones ir ré- guliers dans lefquels il y a trois longues faces e!^ trois courtes.

Spath fufible violet.

Marcalfite.

Galène.

Mine de cobalt grifc.

14.. Cube , dont les angles font

totalement tronqués , ce qui fait un

folide à quaierr^e faces , dont fx

43^ Histoire Naturelle

6l qu'on voit même le crjilal de roche, dont la forme de criftailifation paroît être la moins commune & la plus confiante , fe criflallifcr néanmoins fous la même forme que la mine de plomb verte.

La figure des criflaux ou, fi Ton veut, la forme de

quarrées & huit triangulaires équi- latérales.

Spath fufible violet.

MarcaiTite.

Galène.

JVIine de cobalt grife,

I 5. Cube tronqué a vingt -fix faces, dontfix oélogenes , huit hexa- gones & dou-[e reéîangles.

Galène. I 6. Oâacdre régulier ou double tétraèdre , dont les huit côtés font égaux.

Diamant.

Rubis fpinelle.

MarcafTite.

Fer oif^aèdrc.

Cuivre odaèdre.

Galène odaédre.

Etain blanc.

Argent.

Or.

1 7. Oâaèdre à pyramides égales tronquées au fommst , & qui fait deux pyramides a quatre faces , jointes bafe à bafe d/ tronquées par leur fommet.

Topaze d'Orient. Spath fufible. Soufre natif- Mârcaintc. Galène tcfrulaire. Etain blanc.

I 8. Oâûcdre , dont les angles Ù" les bords font tronqués , huit hexagones , fix petits oâogones à" dou^e reéîangles.

Galène tefTufaire. I 9 . Oélaedre , dont les fix anglet folides font tronqués.

Spath fufible. Alun. Galène. 20. Dodécaèdre f dont les faces font en loi^anges.

Grenat. 1 1 . Pyramides doubles oda'tires réunies par les bafes tronquées à' terminées par quatre faces en la- langes.

Grenat. 22» Solide à trente fix faces. Grenat.

criflallifation ,

D E s AI I N É R A U X. 43 ^

criftallifation, n'indique donc ni la denfité, ni la dureté, ni la fudbiiité , ni l'iiomogénéité , ni par conféquenc aucune des propriétés efTentielIes de la fuhltance des corps, dès que cette forme appartient également à des matières très-diiTé rentes & qui n'ont rien autre cho/è de commun; aind c'efl gratuitement & fans réflexion qu'on a voulu faire de la forme de crirtallifation un caractère Ipécilique & diflinélif de chaque fubftance , puifque ce caradlère efl commun à plufieurs matières , & que même dans chaque fubflance particulière , cette forme n'cil pas confiante. Tout le travail des Criftalloi^raphes ne fervira qu'à démontrer qu'il n'y a que de la variété par -tout ils fuppofent de l'uniformité ; leurs obfervations mul- tipliées auroient du les en convaincre & les rappeler à cette métaphyfique fi fiinple qui nous démontre que dans la Nature il n'y a rien d'abfolu, rien de parfai- tement régulier. C'efl par abflradion que nous avons formé les figures géométriques & régulières , &. par conféquent nous ne devons pas les appliquer comme des propriétés réelles aux productions de la Nature dont reffcnce peut être la même fous mille formes diliérentes. Nous verrons dans la fuite qu'à l'exception des pierres précieufes qui font en très-petit nombre, toutes les autres matières tranfparentes ne font pas d'ime feule & même effence , que leur fubflance n'ell pas homogène , mais toujours compofée de couches alternatives de différente denfité , & que c'efl par le plus ou le moins de force Miîiérdiix , Toîne III. I i i

434 Histoire Naturelle

dans rattraclion de chacune de ces matières de difîc- rente denfité que s'opère la criftallifàtion en angles plus ou moins obliques , en ihne qu'à commencer par le criftal de roche , les améthillcs 6i les autres pierres vitreufes , jufqu'au fjiath appelé crijlûl iïljîande , & au gypfe , toutes ces flaladites tranfparentes , vitreufes , calcaires & gypfeufes font compofces de couches alter- natives de ditièrente denfitc ; ce qui dans toutes ces pierres produit le phénomène de la double réfraction , tandis que dans le diamant & les pierres précieufes , dont toutes les couches font d'une égale denfité, il n'y a qu'une fmij.ie réfradion.

DES Minéraux. 43 j

DES STALACTITES VITREUSES

V_>HAQ,UE matière peut fournir Ton extrait, foit en vapeurs, foit par exudation ou flilJation; cJiaaue mafle folide peut donc produire des incruflations fiir propre fubftance ou des flafaélites , qui d'abord font atiacliées à fa furface (Se peuvent enfuite s'en fcparer ; il doit par confcquent fe former autant de ftaladites différentes qu'il y a de /ubdances diver/ès; <&. comme nous avons divifc toutes les matières du Globe en quatre grandes ciaffes, nous fuivrons la même divifion pour les extraits de ces ma- tières, & nous prcfenterons d'abord les flaJacflites vitreu/t'S dont nous n'avons donné que de légères indications en traitant des verres primitifs &. des fubftances produites par leur décompobtion ; nous expoferons enfuite les {lala6lites calcaires qui font moins dures & moins nom- breufès que celles des matières vitreufès , & defquelles nous avons donné quelques notions en parlant de ralbùtrc. Nous offrirons en troilième ordre les ftaladlites de la terre limoneufè , dont les extraits nous paroi/fent tenir le premier rang dans la Nature , par leur dureté , ieur dendtc 6l leur homogénéité ; après quoi nous rappellerons en abrégé ce que nous avons dit au fujct des flaladites métalliques, lefquelles ne (ont pas de5 extraits du métal même, mais de fcs détrimens ou de fes minerais, & qui font toujours mélangées de parties

1 ii ij

43^ Histoire Naturelle

vitreufes, calcaires ou limoneufes : enfin nous jetterons un coup-d'œi] fur \qs produits des volcans & des ma- tières volcanilccs telles que les laves, lesbafàltes, &c.

Mais pour mettre de l'ordre dans les détails de ces Jivinons , & répandre plus de lumière fur cJiacun des objets qu'elles renferment, il faut confidérer de nouveau, & de plus près , les propriétés des matières fimples dont toutes les autres ne font que des mélanges ou des compofitions différemment combinées; par exemple, clans la claffe des matières vitreufes, les cinq verres primitifs font les fiibflances les plus fimples; &. comme chacun de ces verres peut fournir fon extrait, il faut d'abord les comparer par leurs propriétés efîentielles qui ne peuvent manquer de fe trouver dans leurs agrégats & même dans leurs extraits ; ces mêmes propriétés nous ferviront dès-lors à reconnoître la nature de ces extraits, & à les diftinguer les uns des autres.

La première des propriétés effentielles de toute matière eft fans contredit la denfité ; & fi nous en compa- rons les rapports, on verra qu'elle ne laiffe pas d'être fenfiblement différente dans chacun des cinq verres primitifs; car,

La pcfameur fpécifique du quartz eft d'environ 26J00, relativement au poids fuppofé loooo de l'eau diflillée :

La pefanteur fj^écrfique des jafpes de couleur uni- forme, efl d'environ zyooo :

DES M J N É R A U X. 437

Celle du mica blanc cft aufTi d'environ lyooo, <Sc celle du mica noir efl de 29000:

Celle du feld-fpath blanc qui efl un peu plus pefant que le rouge, efl de 26466:

Et enfin la pefanteur fpécilique du fchori eft ia \)\\.\s grande de toutes , car Je fcjjorl crifîalii/ë pèfe 2 3 ou 34000.

En comparant ces rapports , on voit que le quartz & le feld-fpath ont à peu -près la même denfiié , qu'en- fuite les jafpes & les micas font un peu plus denfes , & à peu -près dans la même proportion relativement aux deux premiers , & que le fchori qui efl le dernier des cinq verres primitifs efl le plus pefànt de tous. La différence efl même fi confidcrable , que le mélange d'une petite quantité de fchori avec les autres verres, peut produire une affez forte augmentation de poids , qui doit retrouver & ih retrouve en eftèt dans les extraits ou flaiadites des matières vitreufes , mêlées de ce cinquième verre de nature.

La féconde propriété effentielle à la matière fblide, eft ia dureté; elle efl à peu-près la même dans le quartz, le feld-fpath <^ Je fchori ; eWc eft un peu moindre dans le jafpe ÔL affez petite dans le mica, dont les parties n'ont que peu de cohéfion, & dont les concrétions ou les agrégats font pour la plupart affez tendres &l quelquefois friables.

La troifième propriété , qu'on peut regarder comme effentielle à la fiibflance de chacun des verres primitifs, efl la plus ou moins grande fuhbilité: ie fchori & le feld-

438 Histoire Naturelle

ipath font très-fufibles ; le mica & le ja/pe ne le font qu'aux feux les plus violens , &. le quartz elt le plus réfradaire de tous.

Enfin une quatrième propriété tout au/H e/TentielIe que les trois premières, eft l'homogèncité qui marque par la fmipie réfradlion dans les corps tranfparens ; le quartz & le feld-fpath font plus Hmples que le jaipe & le mica, & le moins fimple de tous e(l le fchorl.

Ces propriétés, & fur-tout la denfité plus ou moins grande, la fufibilité plus ou moins facile, & la fimple ou double réfraélion, doivent fe confèr\er en tout ou en partie dans les agrégats fimples & les extraits trauf- parens, & même fe retrouver dans les décompofitions de toute matière primitive: aufli ces mêmes propriétés, tirées de la nature même de chaque fubftance, nous fourni- ront des moyens qu'on n'a pas employés jufqu'ici, pour reconnoître l'effence de leurs extraits, en comparant ces extraits avec les matières primitives qui les ont produits.

Les extraits qui tranfudent des matières vitreufcs font plus ou moins purs , félon qu'elles font çWcs - mêmes plus fmiples & plus liomogcnes , & en général , ces extraits font plus purs que la matière dont ils pro- viennent, parce qu'ils ne font formés que de fa fubftance propre , dont ils nous préfentent l'efience ; le fpatli n'eft que de la pierre calcaire épurée ; le criftal de roche n'eft proprement & cfTcnticllcment que du quartz diffous par l'eau & criftallifé après fon évaporation; \ts fubftanccs pures produifent donc des extraits tout au/B

DES Minéraux, 4^9

purs; mais fouvcnt d'une matière qui paroît très impure, il lort un extrait en flaladites tranlparcmcs ôc pures; clans ce cas, il fc fait une fecrction des parties fiinilaircs <i'une feule forte de matière, qui fe raffcmbicnt &i prc- fcntent alors une fubftance qui paroit dilîèrcnte des matières impures dont elle fort; &l c'efl ce qui arrive dans les cailloux, les marbres, la terre limoncufe, 6c dans les matières volcaniques ; comme elles font elles- mêmes compofèes d'un grand nombre de fubflances diverfes &l mélangées , elles peuvent produire des lia- ]a6tites tres-diiicrentes , & qui proviennent de chaque fubftance diverfe contenue dans ces matières.

Ou peut donc diftinguer les extraits ou fîalaélites de toute matière par les rapports de denfitc, de fufibilitc, d'homogénéité, & l'on doit auffi comparer les degrés de dureté , de tranfparence ou d'opacité ; nous trou-» ■verons , entre les termes extrêmes de ces propriétés, les degrés & nuances intermédiaires que la Nature nous offre en tout & par-tout; car fes productions ne doivent jamais être regardées comme des ouvrages ifolés ; mais il faut les conddérer comme des fuites d'ouvrages dans lefquels on doit failir les opérations fuccefîives de fbn travail , en partant &. marciiant avec elle du plus hmple au plus compofé.

440 H ISTOIRE NaTU RELLE

STALACTITES

CRISTALLISÉES DU QUARTZ, CRISTAL DE ROCHE.

I iF, Crilial de roche paroît être l'extrait le plus fimple & la Haladite la plus tranfparente des matières vitreufcs; en le comparant avec le quartz , on reconnoît aifément qu'il eft de la même efTence ; tous deux ont la même denfité fa), & font à très-pcu-prcs de la même dureté; ils réijftent également à l'action du feu &l a. celle des acides; ils ont donc les mêmes propriétés efTcntielles , quoique leur formation foit très-difîérentc; car le quartz a tous les caradères du verre fondu par le feu, & le criftal préfente évidemment ceux d'une flaladite du même verre atténué par les vapeurs humides ou par l'adion de l'eau: fès molécules très-ténues, fe trouvant en liberté dans le liuide qui les a diffous , fe raffemblent par leur affinité à mefùre que l'humidité s'évapore; & comme elles font hmples & fmilaires, leurs agrégats prennent de la tranfparence & une figure déterminée.

(a) Le poids du c^iurtz trani'parent efl à celui de l'eau diftiKce comme z6^^6, & celui du crirtal de roche d'Europe comme 26548 font à 1 0000 ; on peut donc aflurer que leur denfité efl: la même. Voyez la Table des pefanteurs f/)€cijîçucs que M. Brid'on , lavant Phyficien, de l'Académie des Sciences, s'eft donné la peine de faire en pelant à la balance hydroftatique toutes les matières terreufes & métalliques.

La

i

DES Minéraux, 44.1

La forme de cridallifation dans cet extrait du quartz, paroît être non-feulement régulière , mais plus coniiante que dans la plupart des autres fubftances criflallifées; ces criûaux fe prcfentent en prifmes à fix faces parallélogrammes, furmontées aux deux extrémités par des pyramides à fix faces triangulaires. Le criflal de roche lorfqu'il fe forme en toute liberté, prend cette ligure prifmatique furmontée aux deux extrémités par des pyramides ; mais il faut pour cela que le fuc crif- tallin qui découle du quartz, trouve im lit horizontal qui permette au prifme de s'étendre dans ce même fens, & aux deux pyramides de fe former à l'ime & à l'autre extrémité (hj: lorfqu'au contraire le fuintement de i'extrait du quartz fait verticalement ou obliquement contre les voûtes & \es parois du quartz ou dans les fentes des rochers, le criflal alors attaché par fa bafe n'a de libre qu'une de fes extrémités, qui prend tou- jours la forme de pyramide; & comme cette féconde pofition cfl infiniment plus fréquente que la première, on ne trouve que rarement des criflaux à deux pointes , & très-communément des criftaux en pyramide fimple ou en prifmes furmontés de cette feule pyramide , parce que la première pyramide ou le prifme, toujours attachés

fb) On trouve de petits crirtaux à deux poijites dans quelques cailloux creux; ils ne (ont point attache's par leur bafe, comme les antres, à la furface intérieure du caillou, ils en lont icparés & on ïes entend même balotter dans cette cavité en fecouant le caillou.

M'mcrau^ç , Tome IIL K k k

44-2 Histoire N.iTU re ll e

au rocher, n'ont pas perirJs à fa féconde pyramiJc (fe fe former à cette extrémité qui ferc de ba/è au criftal.

On peut même dire que la forme primi:ive du criflal de roche , n'cd rcel!en:iciit compofL'e que des deux pyramides oppofées par leur bafè, à. que le prifhie à ilx faces qui les fcpare , efl plutôt accidentel qu'elTentiel à cette forme de crifîallifàtion; car il y a des criflaux qui ne font compofés que de deux pyramides oppofées & fans prifne intermédiaire ; en forte que le criflal n'eft alors qu'iui (oWdQ dodécaèdre; d'ailleurs, la hauteur des pyramides efl confiante, tandis que la longueur du prifiiie efl très-variaLle ; ce n'efl pas qu'il n'y ait auffi beaucoup de variété dans les faces des pyramides comme dans celles du prifme , & qu'elles ne ioient plus étroites ou plus larges, & plus ou moins inclinées, fuivant la dimcnfion tranfverfale de la bafe hexagone, qui paroit être la fiirface d'appui fijr laquelle fe forment les pointes pyramidales. Cette figuration irrégulière & déformée, cette inégalité entre l'étendue & l'inclinaifon refpedive des faces du criflal, ne doit erre attribuée qu'aux obflacles environnans , qui fouvent l'empêchent de fe former en toute liberté dans un efpace affez étendu & affez libre pour qu'il y prenne fa forme naturelle.

Les criilatix grands & petits font ordinairement tous figurés de même, & rien ne démontre mieux que leur forme effcntielle efl cçWe d'une ou deux pyramides à fîx faces ; que les aiguilles du criflal naiffant dans les

DES Minéraux, 44-3

cailloux creux , elles font d'abord fi petites qu'on ne }es aperçoit qu'à ia loupe, & dans cet état de primeur, elles n'offrent (\\\e leur pointe pyramidale, qui fe con- ferve en grandifTant toujours dans les mêmes proportions: néanmoins i'accroiffement de cette matière brute ne fait que par juxtapofition &. non par intuffufception , ou par nutrition comme dans les êtres organifés ; car ia première pyramide n'efl point un germe qui puifTe fe développer & s'étendre proportionnellement dans toutes fès dimenfîons extérieures <Sc intérieures par ia mitrition, c'eft feulement une bafe figurée fur laquelle s'appliquent de tous côtés les parties luiiiiaires, fans en pénétrer ni développer ia mafle ; & ces parties conftituantcs du criflal étant des lames prefque infiniment minces & de figure triangulaire, leur agrégat conferve cette même figure triangulaire dans ia portion pyramidale ; or quatre de ces lames triangulaires en s'unifîant par la tranche, forment un quarré , & fix formeront un iiexagone ; ainfi la portion prifinatique à il x laces de la bafë de criflal , cfl compofée de lames triangulaires comme ia partie pyramidale.

Quoique la fubflance du criflal paroiffe continue & affez femblable à celle du beau verre blanc, <^ quoi- qu'on ne puiffe diftinguer à l'œil la forme de fes parties conflituantes , il efl néanmoins certain que le criftal efl .compofé de petites lames qui font à ia vérité bien moins apparentes que dans d'autres pierres, mais qu!

Klvk ij

44-4- Histoire Naturelle

nous font également démontrées par le fil, c*efl-à-dire, par le fens dans lequel on doit attaquer les pierres pour ies tailler; or le fil (k le contre-fil ic reconnoifFent dans ie criftal de roche, non-feulement par la plus ou moins grande facilité de l'entamer, mais encore par la double réfraélion qui s'exerce condamment dans le iens du fil, & qui n'a pas lieu dans le fèns du contre-lil ; ce dernier fens efl; celui dans lequel les lames forment continuité 6l ne peuvent féparer, tandis que le pre- mier fens eiî celui dans lequel ces mêmes lames féparent le plus facilement; elles /ont donc réunies de fi prés dans le fens du contre-fil , qu'elles forment une fiibdance homogène & continue , tandis que dans le lens du fil elles laiffententr'elles un intervalle rempli d'une matière de denfité différente qui produit la leconde réfradion.

Et ce qui prouve que cet intervalle entre les lames n'ell: pas vide & qu'il efl rempli d'une fubflance un peu moins denfe que celle des lames , c'efl que les images produites par les deux réfraétions , ne diffèrent que peu par leur grandeur & leur intenfité de couleurs; la lon- gueur du fpeélre fblaire efl 19 dans la première réfrac- tion, & 18 dans la féconde; il en efl de même de la iargeur de l'image , & il en efl encore de même de i'intenfité des couleurs qui trouvent afîbiblies dans h même proportion ; quelque pure que nous paroiffe donc la fubflance du criflal , elle n'efl pas abfolument homogène ni d'égale denfité dans toutes lès parties. La

DES Af I N Ê R A U X, 445

lumière cliffcremment rcfradée fcmble le démontrer , d'autamqiie nous verrons, en traitant des fpaths calcaires, qu'ils ont non-leulement une double, mais une triple, quadruple , (îkc. réfradion , félon qu'ils font plus ou moins mélanges de fubftances de dendté dilTcrente.

Un autre fait par lequel on peut encore prouver que le criflal efl compolé de deux matières de diiTcrcnte denfité , c'efl que fes furiaces polies avec le plus grand foin ne lailTent pas de préienter des filions, c'eft-à-dire, des éminences & des profondeurs alternatives dans toute l'étendue de leur iuperficie ; or la partie creufè de ces lillons efl certainement compofce d'une matière moins dure que la partie haute , puifqu'elle a moins réfiffé au frottement (c) ; il y a donc dans le criflal de roche alternativement des couches contiguës de différente dureté , dont l'une a été moins ufée que l'autre par le même frottement, puiiqu'alternativement les unes de ces couches font plus élevées , & les autres plus baffes fur la même fijrface polie.

Mais de quelle nature efl cette matière moins denfè

■I »

/c M. l'abbé de Rochon a dcmoniré cette inégalité de dureté dans les tranches du criflal de roche , en mettant fur la lurfdce polie de ce crillal uvi. verre objetflif d'un long foyer. Si la lurface du criftal étoit parfaitement plane & (ans filions , les anneaux colores produits par ce moyen feroient réguliers , comme ils le font quand on met un objedif fur un autre verre plan Ôl poli, mais les anneaux coiorcs font toujours irréguliers lur le crillai le mieux poli , ce qui ne i)eut provenir que des inégalités de fa lurtace.

44-6 Histoire N atu relle

& moins dure des tranches alternatives du criftal! comme il n'efl guère pollible de la recueillir /"éparément, Vun de nos fàvans Académiciens, M. l'abbc de Rochon, m'a dit qu'ayant réduit du criftal de roche en poudre très- fine par le feul frottement d'un morceau de crillal comrç un autre morceau, cette poudre s'eft trouvée contenir une portion afTez conGdérable de fer attirable à l'aimant. Ce fait m'a paru iingulier, & demande au moins d'être confirmé & vérifié far p'ufieurs criftaux ; car il le pourroit que ceux qui fe forment dans les cailloux & autres matières le quartz ei\ mêlé avec des fubfiances ferrugineufes , ou même avec des matières vitreufès colorées par le fer, en continfTent une petite quantité; mais je doute que les crilîaux qui fortent du quartz pur, en foient mêlés ni même imprégnés, ou bien le quartz même contiendroit auffi wwq certaine quantité de fer, ce que j'ai bien de la peine à croire, quoique ia chofe ne foit pas impofiibie; puifque le fer a été formé prefque en même temps que les verres primitifs, & qu'il s'eft mêlé avec les jafjjes , les feld -fpaths, les fchorls , & même avec les quartz dont quelques-uns font colores de jaune ou de rougeâtre.

Quoi qu'il en /oit, la lumière qui pénètre tous les corps tranfparens , & en fort après avoir fubi des réfradions & des difpcrhons , cfl l'infîrument le plus délié , le fcalpcl le plus fin par lequel nous puiiïions fermer l'intérieur des fubfiances qui la reçoivent d

DES M I N É n A U X, 44.7

tranfiiuitent; & comme cet inftrument ne s'applique point aux matières opaques , nous pouvons mieux juger de la compofition intérieure des fubfîanccs tran/parentes que de la texture coniufe des matières opaques 011 tout eft mélangé , confondu fans apparence d'ordre ni de régularité, (bit dans la polition, ioit dans la figure des parties intégrantes qui font fbuvent différentes ou diffé- remment pofées , fans qu'on puiffe le reconnoître autrement que par leurs difTérens extraits lorfqu'ils prennent de la tranfparence , c'efl-à -dire , de l'ordre dans la pofition de leurs parties fmii'aires, & de i'ho- niogénéité par leur réunion fans mélange.

C'efl dans les cavités & les fentes de tous les quartz purs ou mélangés que le criftal forme , fbit par i'exudation de leur vapeur humide, foit par le fuinte- ment de l'eau qui les a pénétrés ; les granités, les quartz mixtes, les cailloux & toutes les matières vitreiifes de féconde formation, produifent des criflaux de couleurs différentes ; il y en a de rouges, de jaunes & de bleus auxquels on a donné les noms de ruhïs, de topaze & de fapinr, aulfi improprement que l'on applique le nom de diamant aux criftaux blancs qui fe trouvent à Alençon, à Briflol & dans d'autres lieux ces criflaux blancs ont été dépofés après avoir été roulés & entraînés par ies eaux. Les amétbyfîes violettes & pourprées qu'on met au nombre des pierres précieufes , ne font néan- moins que des criflaux leims de ces belles couleurs;

44-8 Histoire N aturelle

on trouve les premiers en Auvergne, en Bohème, &c, & les {^conds en Catalogne. Les topazes, dites ocàJen' tilles , & que l'on trouve en Bohème, en SuifTe & dans d'autres contrées de l'Europe, ne font de mcme que des criftaux jaunes: l'hyacinthe, dite de Compojlelle, e(è un criftal d'un jaune plus rougeatre. Les pierres aux- quelles on donne le nom di algues mannes occidentales, & qui trouvent en plufieurs endroits de l'Europe, & mcme en France, ne font de même que des criflaux teints d'un vert-bleuâtre ou d'un blcu-verdâtre: on ren- contre auffi des criftaux verts en Dauphiné, & d'autres bruns &: même noirs ; ces derniers font entièrement obfcurs : & toutes ces couleurs proviennent des parties métalliques dont ces criflaux font imprégnés , particu- lièrement de celles du fer contenu dans les granités & les quartz mixtes ou colorés , dont ces flalaclites quartzeufcs tirent leur origine.

De tous les criflaux blancs, celui de Madagafcar efl le plus beau & le plus également tranfparent dans toutes fes parties ; il eft un peu plus dur que nos criflaux d'Europe, dans lefqucls néanmoins on remarque auffi quelque différence pour la dureté ; mais nous ne connoilTons ce très -beau criflal de Madagafcar qu'en maffes arrondies & de plufieurs pouces de diamètre; celui qui nous eil venu du mcme pays, & qui efl en prifme à double pointe, n'efl pas aufîi beau & reffemblc plus à uos criflaux d'Europe, dans lefqucls la tranfparence

n'eft

DES Minéraux. .44.9

n'eft pas aufTi limpide, & qui fouvent font nuageux, & préfeiitein tous les degrés de la tranfparence plus ou moins nette dans les criflaux blancs, jufqu'à la pleine opacité dans les criflaux bruns & noirs.

Lorfque l'on compare les petites aiguilles naiffantes du criftal, qu'on aperçoit à peine dans les cailloux creux, avec les grofTes quilles qui fe forment dans les cavités des rochers quartzeux &. graniteux (d) , on ne peut s'empêcher d'admirer dans cette criftallifation la confiance & la régularité du travail de la Nature qui néanmoins n'agit ici qu'en opérant à la furface, c'efl-à-dire, dans deux dimenfions ; la plus grande quille ou aiguille de criflal eft de la même forme que la plus petite ; la réunion des lames prefque infiniment minces dont il eft compofé fe faifànt par la même loi , la forme demeure toujours la même, fi rien ne trouble l'arran- gement de leur agrégation. Cette médiode de travail efl même la feule que la Nature emploie pour augmenter ie volume des corps bruts, c'efl par juxtapofition, & en ajoutant pour ainfi dire, furfaces à furfaces , qu'elle place les lames très - minces dont eft compofée toute criftallifation, toute agrégation régulière; elle ne travaille donc que dans deux dimenfions, au lieu que dans le

fd) M. Bertrand rapporte dans Ton Didionnaire univerfel des foiïiles, qu'on a trouvé près de Vifbach dans le haut Valais, à neuf ou dix lieues de Sion, une quille de criftal, du poids de douze quintaux; elle avoit fept pieds de circonférence & deux pieds & demi de hauteur.

ATinéraiix , Tome III. L 1 1

450 HisTOinE Natvrëlle

développement des êtres organifés , elle agit dans les trois dimenfions à la fois , puiique le volume &. la mafTe augmentent tous deux, & confervent la même forme & les mêmes proportions, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. L'aiguille naiflante d'un criftal ne peut grandir & gro/Tir que par des additions fuperhcielles, & par la fupcrpofition de nouvelles lames minces femblabies à celles dont la première aiguille ell: composée , & qui s'arrangent dans le même ordre , en forte que cette petite aiguille rélkle dans la plus grolîe fans avoir pris Ja moindre extenlion, tandis que le germe d'un corps organifé s'étend en tout fens par la nutrition, & prend de l'augmentation dans toutes fés dimendons & dans fa maffe comme dans fon volume.

\\ efl certain que le criftal ne fe forme que par l'intermède de l'eau, & l'on peut en donner des preuves évidentes; il y a des criftaux qui contiennent de l'eau, d'autres renferment du mica, àa fcliorl, des particules métalliques, &c. d'ailleurs, le crifîal fe forme comme ie fpath calcaire & comme toutes les autres flaladites, il n'en diffère que par nature vitreufe & par fa figu- ration ; il préfente fouvent des apparences de mouffes & de végétations dont la plupart néanmoins ne font pas des fubflances réelles, mais de fimples fentes ou cavités vides de toute autre matière (e): fouvent on

(e) Voyez le Mémoire par M. Daubenton, de i'Acadcaue cies Sciences, en Avril \yZz.

DES Minéraux, 451

trouve des criflaux encroûtés, c'eft- à -dire, donc les furfaces font chargées de matières étrangères, & fur- tout de terre ferrugineufe ; mais l'intérieur de ces crif taux n'en eft point altéré, <5c il n'y a vraiment de criftal ferrugineux que celui qui eft coloré, & dans lequel il efl entré des vapeurs ou des molécules de fer lor/qu'il s'eft formé.

La groffeur du prifme ou canon de criftal efl afTcz égale dans toute fa longueur; les dimenfions font beau- coup moins confiantes dans les parties pyramidales, & l'on ne trouve que très-rarement des criflaux dont les faces triangulaires des pyramides foient égales ou pro- portionnelles entr'elles , & cette groffeur du prifme femble déj^endre des dimenfions de la bafe de la pyra^ mide , car la pointe fort du rocher la première , & la pyramide y efl attachée par fa bafe qui s'en éloigne enfuite à mefure que le prifme fe forme & pouffe Ja

pointe au dehors.

La denfité du criflal de roche n'efl pas, à beau- coup près, auffi grande que celle du diamant & des autres pierres précieufes. On peut voir dans la note ci-de(fous {f), les rapports de pefanteur des différens

(f) Pieds cubes.

t.i*res. Oncei. Grsi. Crains. 185. II. 2. 64.

i85. 10. 7. 2.1.

Criftal de roche de Madagafcar. > de roche du Brefil. . . .

Pffiinfr-jr, Pouces cubes. Onces. Cr. Grcitti

2(jî30. I. 5. 54. 26')z6. I. 5. 54.

J-llii

4)2 HiSTO ï P E N ATU R E L LE

criflaux que M. BrifTon a fournis à l'épreuve Je fa balance hyciroftatique ; cette pe/ànteur fpécifiq'ie n'eft pas fenfiblemenc augmentée dans les criflaux colorés. Cette table nous démontre au/Ti que les aniétiiyftes, ia topaze occidentale , la cbryfblite & l'aiguë marine ne font que des criftaux violets , jaunes & verdâtres. M. BrifTon donne en/iiite la pe/anteur re/pecflive des

Pieds cubes.

JLmei. Oncts. Cm. Craint.

185.

3'

1.

185. 7. 5. 0.1.

185. 12, 4. 53.

18;. II. o. 14.

1^8 j. 12, o. 18.

I 80. 1 I. o. ^^.

385. II. 7. x6.

185. 15. d. 52.

185. 5». 3. 47.

185. 3 . 1 . 16.

^85. 10. I. 2.

185. 3

18;. 13

Crirtal de roche d'Europe

de roche irifé

jaune ou topaze de Bo-

nciTic •••••••»• ••••

roux- brun ou topaze en- fumée

noir

' ou faphir d'eau. . . . violet ou améthyfte

violet-pourpré ou améthyfle de vigne 01 de Cariha- gène

blanc - violet ou améthyfte blanche

2. 2.6. I. 71. I

Quartz criftailifé, laiteux. . , gras.... fragile . , ,

Pefaitteur. Pouces cubes»

Onces. Cr. Crt'ms. 26548. I. J, JJ. 26497. I. 5. 53.

26541. I. j. 5j.

26534. I. 5. 54. 26536. I. 5. 55. 26513.1. 5. 28.

26570. r. 5. 56.

26513. I. 5. 54.

26^4.6. I. 5. 55.

26519. I. 5. 54,

2645 8. I. 5. 52.

26404. 1. 5. ^0.

D E s I N É R A U X. 453

différens quartz , & lews poids fpécifiqiies fc trouvent encore être les mêmes que ceux des criftaux de roche, en forte qu'on ne peut douter que leur fubilance ne foii de la même eflence.

Toutes les matières cridailifées font compofées de petites lames prelque intiniment minces , & qui réunifTent par la feule force de leur attradion réciproque dès qu'elles fe trouvent en liberté ; & ces lames fi minces dont on ne doit confidérer que la furface plane, peuvent avoir différentes figures dont le triangle efl la plus fimple. M. Bourguet avoit ohfcrvc avant nous CgJ ^ que les prifmes hexagones , ainfi que les pyramides trian- gulaires du criflal de roche, font également compofées de petites lames triangulaires qu'on peut apercevoir à la loupe à l'extrémité des pyramides, & qui, par leur réunion, forment les grands triangles pyramidaux, & même les hexagones pri/matiqucs du criftal ; car ces lames triangulaires ne joignent jamars que par la tranche (h) , &- fix de ces triangles, ainfi réunis, forment un KeMagone ; fi l'on obferve ces triangles au microf- cope , ils paroiffent évidemment composés d'autres triangks plus petits , & l'on ne peut douter que les parties élémentaires du criflal ne ibient des lames trian- gulaires fort petites , &. dont la fiirface plane efl

/gj Lettres philofophiqiies lur la formation des fels, &c. Amjlerdam, 172$.

(h) Voyez dans ce volume l'article de U CriJîaUifatiop,

4)4- Histoire Naturelle

néanmoins beaucoup plus étendue que celle Je la tranche qui efl infiniment mince.

Quelques Naturalises récens, & entr'autres Linnaîus & Tes Écoliers, ont avancé mai - à - propos , que les criflaux pierreux doivent leur figure aux fels; nous ne nous arrêterons pas à réfuter des opinions auffi peu fondées : cependant tous les Phyficiens inflruits , & notamment le favant Minéralogifte Cronfledt, avoient nié avec raifon, que les fels euffent aucune part à la formation non plus qu'à la figure de ces criilaux; \[ fufiit, dit -il, qu'il y ait des corps métalliques qui fe criftallifent par la fufion, pour démontrer que la forme des criflaux n'eft point dépendante des fels. Cela ell très-certain; les fels & les criftaux pierreux n'ont rien de commun que la faculté de criflalii/èr , faculté plus que commune, puifqu'elle appartient à toute ma- tière non - feulement faline, mais picrreufe, ou même métallique, dès que ces matières font amenées à l'état fluide, foit par l'eau, foit par le feu, parce que dans cet état de liquidité, les parties fnnilaircs peuvent ^'ap- procher &l fe réunir par la feule force de l'attradion, & former par leur agrégation des crifîaux dont la forme dépend de la figure primitive de leurs parties confli- tuantes, & de l'arrangement que prennent entr 'elles ces lames minces en vertu de leur affinité mutuelle <Sc réciproque.

Le criftal de roche fe trouve ^ croît en groffes

DES Minéraux, 4^^

quilles dans les cavités des rochers quartzeux & gra- niteux ; ces cavitc's s'annoncent quelquefois à l'extérieur par des éminences ou bourioufMurcs dont on reconnoît Je vide en frappant le rocher; l'on juge par le fon que l'iniérieur en elt creux.

11 le trouve en Dauphiné ( i ) , pluGeurs de ces

(tj Depuis long-temps, dit M. Guettard, VOifan ( en Dauphiné) cft ctltbre par les mines de cnilal ; les babitans ne celîent pas d'ea farte la recherche ou de continuer l'ouverture des criflalikeres dont l'exploitation elt commencée. . . . L'on a découvert plufieurs mines de ce foUîle; il y en a au lac de Brandc , à Maronne , à la Corde , \ G'irauje , à V Arment'iere , précifémeni au-delTus de la Romanche , à Frenay , à la Grave, à Cyentor près le Cbazelle , à Vuujanï ; le criftal y efl nuageux & peu clair; au Sautet , paroiHe du Mont-de-lau , à M'iip'in qui ert au-deflus de cet endroit. . . . Les hlons de criftallicre (e font voir afTez communément à des hauteurs trcs-élevées dans les montagnes , quelquefois même , comme à la Grave , ils louchent ou font à j)eu de dillance des glacières, ce qui en rend Tacccs tou- jours alTez difficile & quelquefois dangereux, ce c[ui fera toujours un obllacle réel à une exploitation régulière. Alémoire Jur la Aline' ralog'ie du Dauphiné , lome II , page ^y6 & jui\anies. De Brandes , <^i le même Naturalille , nous avons monte à la petite Herpia , il y a une criRallière abandonnée. Le criftal en ell beau; le rocher cft un Ichifte tendre & dur en quelques jtarties.

De la petite Herpia on monte à la grande Herpia en deux heures

par un chemin très - étroit & jour arrivera la giaiide ciif-

tallière , il faut monter par des rochers preiqL:e droits.... On y travaille l'hiver , & elle ell , dit-on , la mc'e de toutes les autres criftallières , il y a un filon très- confidciable de quartz, & le criltal elt di vile en poches qui patoiflcnt très étroites & qui s'elargiflent à fur &. à mefure qu'on avance ; les inctes dçi crilta,ux font aaachees

456 Histoire Naturelle

rochers creux dont les cavités /ont garnies de cri/laux; on donne à ces cavités le nom de criflallicres lorfqu^ellcs en contiennent une grande quantité. C'efl toujours près du fommet des montagnes quartzeufes & graniteu/ès que giflent ces grandes criflallicres ou mines de crif- tal ; plufieurs Naturaliftes , & entr'autres M." Altman & Cappeller, ont décrit celles des montagnes de la

aux quartz de chaque côté, de forte que les aiguilles font tournées les unes contre les autres , & cet entre-deux eil rempli d'une terre ocreufe il y a quelquefois des aiguilles de criftal détachées; on fait jouer la mine dans le quartz pour détacher le rocher par quartiers , & en fuite on fépare avec des marteaux les crillaux de ce quartz. Le rocher eft: d'un fchifte tendre qui fe décompofe facileinent. Mémoire fur la Aiinéralogie d' Auvergne , tome I , page ij à" fuivantes. Ce même favant Acadéjnicien ( M. Guettard ) a parcouru avec M. Faujas de Saint-Fond, les montagnes de l'Oifaa dans les Alpes, dont Içs mines font couvertes de glaces perma- nentes , &i ont examiné les mines de criftal des foffe s de la Garde, des Afas-fur-lcs-clos, de A^aronne , de Frenny, Ils ont auffi vifitc les travaux de la fameule mine de criftal de la grande Herp'ia , qu'on a été forcé d'abandonner malgré fa richefte , parce qu'on ne peut y aborder que pendant un mois & demi de l'année , & qu'il faut courir les plus grands rifques en y efcaladant par des rochers taillés à pic, qui ne préfentent que quelques faillies qui (xxfhient à peine pour placer la pointe du pied , & c'eft au-delTus d'un précipice de plus de cinq cents pieds de profondeur qu'on eft obligé de voyager de la forte ; mais on eft dédommagé des peines & des dangers en contemplant cette magnifique criftailière qui préfente à l'œil un rocher qui n'eft prefqu'une maffe du })lus beau criftal , 6; c'eft pour ceue raifon que les gens des environs l'ont nommée la grande aijlalliire. Journal de Phyfique , mois de Décembre J 77J , page j ly.

SuiiTç ;

DES Minéraux. 457

Suiffe (k) ; elles font fréquentes dans ie mont Grhnfcl , entre le canton de Berne &: le Valais, dans le mont Scûnt - Gothard & autres montagnes voi fuies ; & c'ell toujours dans les cavités du quartz ou dans les fentes des rochers quartzeux que fe forme le criflal , & jamais dans les cavités ou fentes des rochers calcaires. Le criflal produit auffi dans les pierres mixtes, comme

(k) Sur les cimes des plus hautes Alpes, on trouve dç.% mines de criilaux ; on iait que cette matière fe trouve dans les cavités de certaines veines métalliques , & que le quartz leur fert de matrice. Aux Alpes, les veines de quartz fortent au jour, & indiquent aux Mineurs il faut creul'er; cependant il faut fouvent beaucoup de temps & de travail pour trouver une cavité qui contienne des criftaux. Dans \q Cr'mfelberg , on découvrit en 1719 une mine ue criHaux plus riche que toutes celles qu'on avoit déjà découvertes. L'un des criQaux de cette mine pelbit huit cents livres; il s'en trouve plufieurs de cinq cents livres. Les criftaux de la Suifle font en général fort tranfparens. On en conlerve un de couleur noire dans la bibliothèque de Berne ; on en trouve rarement de couleur jaune ou brune ou rouge. M. Altman en a un ciiez lui dont la couleur approche de celle de l'améthyde. Defcripl'ion des montagnes de glaie de la Suijfe , par M. Aitman^ Journal étranger, Janvier //Jj". Les indices qui guident les Mineurs dans la recherche du criflal de roche, (ont des bandes ou zones blanches de plufieurs toifes d'étendue & de huit à dix pouces de largeur, qui enveloppent eu divers fens les blocs des rochers; ces zones, qu'ils nomment feurs de mine, font, dit M. Cappeller, formées par des concrétions brillantes & plus dures que la fubftance du roc. Les Mineurs examinent auffi avec foin s'ils ne découvrent pas au bord de ces bandes des fuintemens d'eau qui tranfudent par des efpèces de loupes qui excèdent la Airfdce du rocher; alors ils frappent à grands coups de mafle fur

Ali/iJraux , Tome IIL M m m

458 Histoire Naturelle

on le voit dans prefque tous les cailloux creux dont la fublbnce efl fouvent mclée de différentes matières vitreufes, métalliques, calcaires & limoneufes : mais il faut toujours que le quartz y foit contenu en plus ou moins grande quantité ; fans cela le criftal ne pourroit fe produire, puifque fa flibflance eft un vrai quartz, f^ns mélange apparent d'aucune autre m.atière, & que quand on y trouve des corps étrangers , ils n'y font

ces éminences , & par le Ton qui réfulte de fa commotion , ils jugent fi le rocher cil plein ou caverneux. Si ce fon ell creux , ils conçoivent de i'efpérance & mettent la main à l'œuvre. Ils commencent par fe frayer une route par la mine avec la poudre ; ils la dirigent en galerie comme les autres Mineurs , & ils ont grande attention que leur mine ne coupe pas tranfverfalement les bandes blanches, au moins dans leur plus grande largeur; ce travail eft pénible & fouvent de plufieut^ années , même incertains s'ils parviendront à la caverne qui récèle le criftal de roche. La longueur de l'exécution efl encore prolongée par les neiges qui ne laifîent à découvert les travaux que pendant environ trois mois de l'année. . . .

La minière la plus riche que l'on ait trouvée , fut celle que l'on découvrit en 1719 ; la quantité du criftal que l'on en tira, fut eftimée trente mille écus. Les quilles étoient d'un volume e'norme ; il y en avoit une qui pefoit huit cents livres, plufieurs de cinq cents, & beaucoup de cent livres. L'on voit encore deux de ces belles quilles dans la bibliothèque de Berne. Tous les criflaux de cette riche minière étoient de la plus grande régularité & de la plus belle eau. Il s'en trouva très-peu de tannées par ces taches que l'on appelle neiges. Dans le Valais , vers le canton de Berne , dans la vallée de Kletch , on a trouvé une belle mine de criftal. Voyei^ les Mémoires de AI. CappcUer , Aie de m a Lucerne.

DES Minéraux. 459

que renfermés, enveloppés par accident, & non intime- ment & réellement mêlés.

M. Achard, très-habile Chimifte, de 1* Académie de Berlin , ayant fait i'analyfe chimique du rubis & d'autres pierres précieufes , &. en ayant tiré de la terre alkalinc , a penfé que le criflai de roche en contenoit aufTi , 6l dans cette idée il a imaginé un appareil très-ingénieux pour former du criftal en faifant pafTer l'air fixe de la craie à travers du fable quartzeux & des diaphragmes d'argile cuite. M. le prince Galitzin qui aime les Sciences & les cultive avec grand fuccès , eut la bonté de m'en- voyer au mois de Septembre i777> un extrait de la Lettre que lui avoit écrite M. Achard , avec le dcfiln de fon appareil pour faire du cridal ; M. Magellan, favant Phyiicien , de la Société royale de Londres , me fit voir quelque temps après un petit morceau de criflai qu'il me dit avoir été produit par l'appareil de M. Achard, & enfuitc il préfènta ce même criftal à l'Académie des Sciences ; les Commiffaires de cette Compagnie firent exécuter l'appareil , & effayèrent de vérifier l'expérience de M. Achard ; j'engageai M. le duc de Chaulnes & d'autres habiles Phyficiens à prendre tout le temps & tous les foins néccffaires au fuccès de cette expé- rience , & néanmoins aucun n'a réuffi , & j'avoue que je n'en fus pas furpris , car d'après les procédés de M. Achard, il me paroît qu'on viendroit plutôt à bout de faire un rubis qu'un criftal de roche ; j'en dirai

Mm m ij

460 Hi STO I RE Naturel LE

les raifons lorfque je traiterai des pierres précieufes, dont la fiibilance , la formation & l'origine font , feJon moi , irès-diiferentes de celles du criftal de roche. En atten- dant, je ne puis qu'applaudir aux efforts de M. Achard, dont la théorie me paroît faine & peut s'appliquer à la criflallifation des pierres précieufes ; mais leur fiibftance diffère de celle des criftaux , tant par la denfité que par la dureté &: l'homogénéité ; & nous verrons que c'eft de la terre limoneufe ou végétale, & non de la matière vitreufe que le diamant ôl les vraies pierres précieufes tirent leur origine.

Tout criflai , foit en petites aiguilles dans les cailloux creux , foit en groffes & grandes quilles dans les cavités des rochers quartzeux, efl donc également un extrait, ime flalaélite du quartz. Les criftaux plus ou moins arrondis que l'on trouve dans le fable des rivières ou dans les mines de féconde formation , & auxquels on donne les noms impropres de diamans de Comouailles ou d'Almçon, ne font que des morceaux de crifîal àt roche, détachés des rochers & entraînés par le mouve- ment des eaux courantes, ils font de la même effence, de la même pefanteur fpécilique & de la même tranfpa- rence ; ils ont de même une double réfradion , & ne dif- fèrent du criflai des montagnes qu'en ce qu'ils ont été plus ou moins arrondis par les frottemens qu'ils ont fubis, H fe trouve une grande quantité de cqs criflaux arrondis dans les vallées des hautes montagnes & dans tous les

DES Minéraux. 461

torrens & les fleuves qui en découlent ; ils ne perdent ni n'acquièrent rien par leur long féjour dans l'eau , l'intérieur de leur mafle n'efl point altéré, leur furface eft feulement recouverte d'une enveloppe ferrugineufe ou terreufe, qui n'efl même pas fort adhérente, & lorique cette croûte efl: enlevée , les criflaux qu'elle recouvroit, préfentent le même poli & la même tranfparence que le crillal tiré de la roche il forme.

Parmi les criflaux même les plus purs & les plus folidcs, il s'en trouve qui contiennent de l'eau & des bulles d'air , preuve évidente qu'ils ont été formes par Je fuintement ou la filiation de l'eau. Tavernier dit avoir vu dans le cabinet du prince de Monaco, un morceau de criflal qui contenoit près d'un verre d'eau //J ; ce fait me paroît exagéré ou mal vu , car les pierres qui renferment une grande quantité d'eau , ne font pas de vrais criflaux , mais des efpcces de cailloux plus ou moins opaques. On connoît fous le nom à'enhyJres (m) ceux qui font à demi-tranfparens &. qui contiennent beaucoup d'eau ; on en trouve fouvent dans les matières rejetées par les volcans (n) ; mais j'ai vu plufieurs criflaux

r I

(l) Voyage en Turquie, &c. Rouen, 171 ^ , tome I , page ^ ^ 2,

(m) Cette pierre fut connue des anciens ^ fous fe même nom.

Pline en parle & la décrit bien en ces termes : Enhydros feniper

rotunduatis abfolutœ , in candore ejl levls , fed ad motum Jluduat intùs

in veluti in ovis litjuor. Lib. XXXVII , cap, xi.

(n) Les enhydres ou cailloux creux font, dit M. Faujas de Saint- fond , àQ% eipèces de pierres caverneufes ou géodes , pieines d'eaii-.

462 Histoire Naturelle

de roche bien tranfparens & régulièrement criflailifcs , dans lefquels on ^^^ercevoit aifément une goutte d'eau flirmontée d'une buile d'air qui la rendoit fènfibfe par fon mouvement en s'élevant toujours au-deffus de la goutte d'eau lorfqu'on changeoit la pofition verticale du morceau de criflal ; & non -feulement il fe trouve quelquefois des gouttes d'eau renfermées dans le criflal de roche, mais on en voit encore plus fouvent dans ies agates & autres pierres vitreufes qui n'ont qu'une demi - tran/parence. M. Fougeroux de Bondaroy , de i' Académie des Sciences, a trouve de l'eau en quantité très-fenfible dans plufieurs agates qu'il a fait cafler (0); il efl donc certain que les criftaux, les agates & autres flaladites quartzeufes , ont toutes été produites par l'in- termède de l'eau.

Comme les montagnes primitives du Globe ne font compofées que de quartz, de granit & d'autres matières vitreufes, on trouve par-tout dans l'intérieur &. au pied de ces montagnes, du criflal de roche, foit en petits morceaux roulés, /bit en pri/mes & en aiguilles attachées

Cette eau efl ordinairement limpide , fans goût , fans odeur & de la plus grande pureté. On trouve près de Vicence, fur une colline yolcanique , de petits cailloux creux , d'une efpcce de calcédoine ou d'opale, dans lefquels il y a quelquefois de Teau : ces enhydres peuvent fe monter en bagues , & comme ils font d'une fubftance tranfparente , on y voit très-diftindement l'eau qui s'y trouve ren- fermée. Recherches fur les volcans éteints ^ page 2.^ o , in- fol.

(0) Voyez les Mémoires de l'Académie des Sciences , annéf

DES Al I N È R A U X. 4.6J

aux rochers. Les hautes montagnes de l'Afie en font aulTi fournies que les Alpes d'Europe. Les Voyageurs parlent du criftal de la Chine (p) , dont on fait de beaux vafes &l des magots ; des crifhux de Siam (éj^ , de Camboie , des Moluques (r) , &. particulièrement de celui de Ceylan ils difeni qu'il efl fort commun (fj.

En Afrique, le pays de Congo tire fon nom du criftal qui s'y trouve en très -grande abondance ('ij ; il y en a aufti en quantité dans le pays de Galam /^uj ; mais l'ile de Madagafcar eft peut - être de toute la terre la contrée la plus riche en criftaux ("xj , il y en a de plus & de moins tranfparens ; le premier eft limpide

(p) Hiftoire générale des Voyages, tome VI, page 48 j. (q) Idem, tome IX, page ^oj.

(r) Hiftoire de la Conquête des Moluques, par Argenfola\ Amjlerdam, lyoS , tome II , page ^^.

(f) Hiftoire générale des Voyages, tome VIII, page ^4^»

■— Les Romains tiroient du criftal de l'Inde & en fàifoient grande

eftime , quoiqu'ils fuflent bien que les Alpes d'Italie en produifoient

de très-beau. Oriens, dit V\me ^ crijlallum mitîït, IndkœnuUa prefcrtur,.,.

fed laudaia in Europe Alpîum jugis , lïh. XXXVII, cap. II.

(t) Idem, tome IV , page 611,

(u) Idem, tome II, page 644.

(x) Il y a de fort beau criftal à Madagafcar , fur-tout dans fa province de Galemboul on le tire en pièces de fix pieds de Jong & quatre de large fur autant d'épaifteur. Les Nègres n'y tra- vaillent que le foir , apparemment parce qu'ils n'aiment pas à le voir embarquer fur nos navires, Hijloire générale des Voyages, tome VIII, jpage 629,

4<Î4 Histoire Naturelle

comme l'eau, &. fe préfeme, pour ainfi dire, en mafles dont nous avons vu des blocs arrondis, de près d'un pied de diamètre en tout fens ; cependant quoiqu'il foit plus net & plus diaphane que le criflal d'Europe, il efl; un peu moins denfe fyj, 6l fouvent il cfl plus mclé de fchorl & d'autres parties hétérogènes. Le fécond criflal de jMadagafcar refTemble à celui d'Europe. Al. l'abbé de Rochon a rapporte de cette île une groffe Si belle aiguille à deux pointes de ce criflal ; on peut la voir au Cabinet du Roi.

Dans le nouveau continent, le criflal de roche eft tout au/Ti commun que dans, l'ancien ; on en a trouvé à Saint-Domingue [iJ, en Virginie ^-/^^ au Mexique &. au Pérou ("ôj^ M. d'Ulloa dit en avoir vu des morceaux fort grands 6l très - nets : ce favant Natu- ralise marque même fa furprife de ce qu'on ne ie recherche pas, & que c'efl le hafard fcul qui en fait quelquefois trouver de groffes malfes fc). Enfin, il y a du crillal dans les pays les plus froids comme dans

fyj Dans la Table de M. BrifToii , la pefanteur fpécifique du criftal de Madagafcar efl: de Z0530 , & celle du ciiftal d'Euiope de 26548, relativement à l'eau fuppofee loooo. Ainfi le triftaJ d'Europe efl un peu plus denfe que celui de Madagalcar,

(':^J Hif^oire générale des Voyages, tome XII , pa^c 21 S,

(a) Idem , tome XIV ^ page jf.08.

(h) Idem , tome XII , page 6 ^S .

(c) Idem, tome XIV » page ^08,

les

•^1

D E s M I ^ È R AU X. ^6 y

les climats tempérés & chauds ; on a recueilli en Lap- ponie & au Canada , des criftaux roulés tout femblabici» à ceux de Briftol, Si Ton y a vu d'autres criftaux en aiguilles & en grofTes quilles f^J; ainfi dans tous les pays du monde il fe produit du criilal , foit dans les cavités des rochers quartzeux, foit dans les fentes per- pendiculaires qui les divi/ènt ; & celui qui fe préfente dans les cailloux creux & dans les pierres graniteufes , provient aufli du quartz qui fait partie de la fubflance de ces cailloux & pierres mixtes.

L'extrait le plus pur du quartz eft donc le criftal blanc , & quoique les criflaux colorés en tirent également leur origine , ils n'en ont pas tiré leurs couleurs ; elles leur font accidentelles , & ils les ont empruntées des terres métalliques qui étoient interpofées dans la maffe du quartz , ou qui fe font trouvées dans le lieu de la formation des criflaux ; mais cela n'empêche pas qu'on ne doive mettre au nombre des extraits ou ftaiactites du quartz tous ces criflaux colorés ; la quantité des molécules métalliques dont ils font imprégnés , & qui leur ont donné des couleurs , ne fait que peu ou point d'augmentation à leur maffe; car tous les criflaux, de quelque couleur qu'ils foient, ont à très -peu -près la même denfué que le criflal blanc. Et comme les

fd) Voyez la relation du Pcre Charlevoix, & les Mémoires de l'Acadcmie des Sciences, année j/j2 , pare ipy.

ATmérûux, Tome UL N n n

i^dG Histoire Naturelle

améthyfles , la topaze de Bohème, la chryfblite à. l'aiguë- rnarine ont la même denfité, la même dureté, la même tlouble réfradioii , & qu'elles hm également réfilîantes à i'adion du feu, on peut fans héfiter les regarder comme de vrais criftaux , & l'on ne doit pas les élever au rang des pierres prccieufes qui n'ont qu'une fimple réfraction , & dont la denfité , la dureté & l'origine font très-différentes de celles des criflaux vitreux.

DES Minéraux, 467

lUMB mgJTIg-^

A M É T H Y s T E.

X. OUTES les Amcthyrtes ne font que Jcs cri/laiix de roche teints de violet ou de pourpre, elles ont la même dcnfnéf^?J^ la même dureté, la même double réfradion . que le criflal , elles font auiïi également réfradaircs au feu. Les améthyflcs violettes font les plus communes, & dans ia plupart , cette couleur n'a pas la même intenfité par-tout, fouvent même une partie de la pierre e/t violette & le reile eft blanc ; il femble que dans la formation de ce criflaJ , la teinture métallique qui a coloré la pyramide, ait manqué pour teindre le prifme; au/Ti cette teinture s'affoiblit par nuance du violet au blanc dans le plus grand nombre de ces pierres ; on je voit évidemment en tranchant horizontalement une table de criftaux d'améthyfte , toutes les pointes font plus ou moins colorées , & les bafcs font fouvent toutes, blanches comme le criiial.

On fait que le violet & le pourpre font les couleurs intermédiaires entre le rouge & l'indigo ou bleu-foncé ; le crillal de roche n'a donc pu devenir améthyfte que quand le quartz qui l'a produit s'efl trouvé imprégné de particules de cette même couleur violette ou pourprée;

(a) La pefaïueur fpccifique de l'améthyde eft de 26535, celfe du criftal de roche d'Europe de 2,(55^8 , & celle du criftai de roch^ Madagafcar de ^.(î^jÇ)»

4-68 Histoire Naturelle

mais comme il n'y a aucun métal, ni même aucun minerai métallique qui produife cette couleur par la voie humide, & que la manganèfe ne la donne au verre que par le moyen du teu, il faut avoir recours au mélange du rouge & du bleu pour la compofition des améthyftes ; or ces deux couleurs du rouge & du bleu peuvent être fournies par le 1er feul ou par le fer mêlé de cuivre: ainfi les améthyfles ne doivent fe trouver que dans les quartz de féconde formation , & qui font voifins de ces mines métalliques en décompobtion.

On trouve en Auvergne , à quatre lieues au nord de Brioude, une minière d'améthyfles violettes, dont M- le Monnier, premier Médecin ordinaire du Ho'i, Si. l'un de nos favans Naturalises de l'Académie , a donné une bonne defcription f/'J.

- -

fbj Les bancs de cette carrière d'amc'thyfles ne font point hori- zontaux , ils font au contraire en tables vertica'es poftes fur leur champ, & la matière qui les fe'pare efl; le criftal d'ame'thyfte dont la dureté furpalTe de beaucoup celle de la pierre qui efl cependant une gangue afiez dure.

Chaque veine d'améthyfle a quatre travers de doigt dVpaifTeur, ôi s'étend aufîi loin que le rocher qu'elle accompagne dans une diredion de l'efl: à l'oueft. Cette veine criftallifée n'adhère pas également aux deux tables entre lefquelles elle fe trouve , elle eft intimement unie à l'une des deux, à peine eft-elle feulement contiguë a l'autre. La furface qui tient fortement au rocher eft compofée de libres réunies de chaque faifceau qui cotnpofe l'améthyfle , & ce fâifceau fe termine de l'autre côté à une pyramide à cinq ou fix faces fouvent inégales, hautes d'environ fix lignes, en forte que la

i

DES Minéraux. 469

On trouve de femblables améthyfles clans les mines de Sc/iemnhi en Hongrie (c) ; on en a rencontre en Sibérie (dj Si jufqu'au Kamtfcliatka ("ej; il s'en trouve auffi en pluficurs autres régions, & particulièrement en Efpagne (f); celles de Catalogne ont une couleur pourprée, & ce font les plus cflimées fgj; mais aucune de ces pierres n'a la dureté, la denfué ni l'éclat des pierres précieufes , &. totites les améthyftes perdent leur

furface de cette croûte criHalline qui regarde le rocher auquel elle efl le moins adhérente, ell: toujours héri(îte de pointes de diamant. Chaque pyramide eft revêtue d'une croûte d'un blanc fale , mais l'intérieur eft très-fouvent une améthyfle de la plus belle couleur; il s'en trouve de toutes les nuances, & 'fen ai vu qui ctoient au/îi blanches que le plus beau criflal de roche. Ces pierres font beaucoup plus parfaites & n'ont même de tranljjarence que vers les pointes. Le milieu & l'autre extrémité font prefque toujours glaceux , les paylans des environs en caflent les plus beaux morceaux qu'ils vendent aux Curieux. Obfervations d' Hijloire Naturelle y par M. le Aïonnier; Paris, i 7 S 9 •> P^^g^^ ^ o o ù' fuiv.

(c) ColJedion académique, partie é i range re , tome JI , page 2 j y,

(d) Voyage de Gmelin en Sibérie , &c.

(0) Journal de Phyfique, Juillet 178 i , page ^/.

(f) llifloire Naturelle d'Efpagne , par M. ViO^sX^s , page ^i 0.

(g) Pline, parlant de l'améthyfte, nous apprend en partant quelle éioit la véritable teinte de la pourpre ; « on s'efForçoit , dit-il , de lui donner la belle couleur de i'améthyfte de l'Inde , qui eft , te ajoute t-il , la première & la plus belle des pierres violettes. Son «e éclat doux & moelleux femble remplir &. raftafier tranquillement « la vue fans la frapper de rayons pétillans comme fait i'efcarboucle». Linc xxxYii , ^0,

470 Histoire Naturelle

couleur violette ou pourprée lorfqu'on les expofe à Ta^tion du feu: enfin elles préfentent tous les caradères & toutes les propriétés du criflal de roche ; Ton ne peut donc douter qu'elles ne foicnt de la même eficnce, & que leur fubdance, à la couleur près, ne fbit ahfolumeni la même.

Les Anciens ont compte cinq efpèces d'améthyflcs qu'ils diflinguoient par les différens tons ou degrés de couleurs ; mais cette diverfité ne confiftc qu'en une fuite de nuances qui rentrent les unes dans les autres, ce qui ne peut établir entre ces pierres une différence clfentielle. La diflinclion qu'en iont les Joailliers en orientales & occidentales, ne me paroit pas bien iowAîiç^y car aucune amétliyfte n'offre les caracStères des pierres précieufes orientales; favoir, la dureté, la denfité & la fimple réfra6lion. Ce n'efl pas qu'entre les vraies pierres précieufes il ne puiffe s'en trouver quelques - unes de couleur violette ou pourprée , & même quelques Ama- teurs fe flattent d'en pofféder, & leur donnent le nom ^ amcthyfte orientale. Ces pierres font au moins très- rares, &. nous ne les regarderons pas comme des amé- thyfles, mais comme des rubis, dont en effet quelques- uns feniblcnt ofirir des teintes d'un rouge mçlé dft pourpre.

DES Minéraux. 471

CRISTAUX-TOPAZES.

\JN a mal-à-propos donne ie nom de Topa-^cs à ces pierres qui fe trouvent en Bohème, en Auvergne & dans plufieurs autres provinces de l'Europe, & qui ne font que des criflaux de roche colores d'un jaune plus ou moins fonce , & fouvent enfumé : comme leur forme de criflallifation, leur dureté, leur denfité font les mêmes que celles du cridal , & qu'elles ont aufTi une douhle réfradion , il n'cfl pas douteux que ces fortes de topazes ne foient, ainfi que les améthylles, des crillaux colorés. Ces criflaux-topazes n'ont de rapport que par le nom & la couleur avec la vraie topaze , qui efl une pierre précieufe & rare qu'on ne trouve que dans les climats chauds des régions méridionales, au lieu que ces crif taux - topazes ont peu de prix , & fe trouvent au/Ti communément dans les contrées du nord que dans celles du midi (a) , & quoiqu'on doraie l'épithète

(a) Wolckmann, dit M. Pott, donne l'enumération des lieux de Sibérie qui fournifTent les topa2es ; tels font les montagnes des géans , ou Riefengehurge , auprès du grand lac ; le mont Kommers ou Gomberg , auprès de Schreiberfan ; ie mont Kinart , derrière le château & au-deflbus de Kinart près de Hernijforjl , à la colline nommée Zei/igenbugel, dans le voifinage de Schmiedeberg , & dans les rivières d'Yfer ôl de Zacken

M. Henckel dit qu'elle fe trouve aflez abondamment dans le

jfji Histoire Naturelle

d'occidentale à la topaze de Saxe & à celle du Brefd, comme elles font d'une pefanteur fpéciiique bien plus frrande que celle des criflaux colorés, & prefque égale à la deniitédu diamant; leur criftallifàtion étant d'ailleurs toute différente de celle des criflaux de roche, on doit les re- garder comme des pierres qui , quoiqu'inférieures à la topaze orientale, font néanmoins fupcrieures à nos criflaux-topazes, par toutes leurs propriétés effentielles.

Ces criflaux -topazes fe trouvent en Bohème (l>) , en Mifnie, en Auvergne , & fe rencontrent auffi dans prefque

Voigtiand , à la montagne nommée Schneckemberg , auprès de la colline de Tanne b erg , à deux milles d* Anerbach , elle fe lire d'entre une marne jaune & le criHal de roche , <Sc fe rencontre dans les fentes d'un rocher fi dur , qu'on peut fe fervir des mor- ceaux de ce rocher pour entamer & briler même la topaze. La couleur de cette topaze eft plus ou moins jaune , à peu- près tirant fur un petit vin pâle. Le côté d'en -bas qui efl attaché au rocher, eft pour l'ordinaire plus trouble & plus obfcur ; mais vers la pointe, la couleur devient plus nette & plus traniparente. Alémolres de V Académie de Berlin, année jy^j , pages jj.6 Ùf fuiv,

(h) ce La topaze de Bohème, dit M. Dutens, efl: en criflaux ■n ou canons alfez gros , mais d'un poli moins vif que la topaze a:) d'Orient ou du Bréfil ; fa couleur tire fur celle de l'hyacinthe & » quelquefois fur le brun.... Ce qu'on appelle /q;?J{^ enfumée ^ 35 n'efl qu'un criflal de roche teint de jaune ordinairement terne & ï> fonibre ; & ce qu'on nomme topaiç d'Allemagne efl: un fpath » vitreux ou fluor cubique , lequel accompagne fouvent \es, filons 33 de plomb, & que l'on croit être, ainfi que la topaze même, » coloré par ce métal « , pages ^ 4 & fuiv.

tous

DES Minéraux. 4.73

tous ies lieux du monde le criflal de roche efl voidii des mines de fer, l'on a fouvent obfervé que la partie par laquelle ils font attaches au rocher quart- zeux qui les produit, efl environnée d'une croûte fer- rugineufè plus ou moins jaune ; ainfi cette teinture l^rovient de la difToliuion du. fer & non de celle du plomb, comme le dit M. Dutens, puifque le plomb ne peut donner la couleur jaune aux matières vitreufes que lorfqu'elles font fondues par le feu : & l'on objederoit vainement que le fpatli fluor qui accompagne fouvent les filons des galènes de plomb, cil teint en jaune, comme les criflaux-topazes; car cela prouve feulement que ce fpath fluor a été coloré par le plomb lorfqu'il étoit en état de chaux ou de calcination par le feu primitif

La pefanteur fpécifique des criflaux-topazes , efl pré- cifément la même que celle du criflal de roche (c); ainfi la petite quantité de fer qui leur a donné de la couleur, n'a point augmenté fenhblemcnt leur denfité; ils ont auffi à peu-près le même degré de dureté , & ne prennent guère plus d'éclat que le criftal de roche; leur couleur jaune n'cd pas nette , elle efl fouvent mêlée de brun, & lorfqu'on les fait chauffer, ils perdent

fc) La pefanteur rpccifique de Ja topaze de Bohcine eft de ^6541 , & celle du criflal de roche d'Europe de 2654.8. Tables de M. Bripn.

Minéraux^ Tome IL Ooo

474 Histoire Naturelle

leur couleur & deviennent blancs comme le criflal. On ne peut donc pas douter que ces prétendues topazes ne foicnt de vrais criftaux de roche, colores de jaune par le fer en difTolution qui s'efl mêlé à l'extrait du îjuariz lorfque ces criftaux fe font formés.

DES Minéraux. 475

C H R Y S 0 L I T E.

J_jES pierres auxquelles on donne aujourd'hui le nom de Cliryfolkej ne font que des crijîaiix-topaies dont le jaune efl mêlé d'un peu de vert ; leur pefanteur ij)éci- fique efl à peu-près la même (a) j elles réljflent également à l'aélion du feu, & leur forme de criflallifàtion n'efl pas fort différente (b) , M. le dodeur Demefle a raifbn de dire qu'il y a très-peu de difîérence entre cette pierre chryfolite & la topaze de Bohème (c) ; elle n'en diffère en effet que par la nuance de vert qui teint foiblement ic jaune fans l'effacer (d) ; c'eft par le plus ou le moins

(a) La pefanteur fpécifique de la chryfolite du Brefil efl de 26923 , & celle du crilUl de roche de 26548. M. Briflon donne aufli 27821 pour pefanteur fpécifique d'une autre chryfolite, fans indiquer le lieu elle fe trouve ; mais cette difference-de denfiie' n'eft pas aflez confide'rable pour faire rejeter cette chryfolite du nombre des criftaux colorés.

(h) La forme de criflallifàtion de la chryfolite ordinaire n'eft pas , comme on le croiroit au premier coup-d'œil abfolument fem- blable à celle du criftal de roche; la pyramide eft: plus obtufe , & les arêtes du prifme hexagone font fouvent tronquées & forment un dodécaèdre. Son tifTu efl fenfiblement lameileux parallèlement à l'axe du prifme , «S: elle a plus d'éclat que le crillal de roche le plus pur. Ej[a'i de CriJIullographie , jiar M. de Rome de Lïjle , tome IJ , r^^fs 272 àr fuiv.

(c) Lettre de M. Demefle, tome I, prge 42p.

(d) Robert de Berquca déâiùt uès-bieu la chryfolite, en difant

O û o i j

47"^ Histoire Naturelle

de vert répandu dans le jaune qu'on peut diftinguer au premier coup-d'ceil la chryfblite du péridot, dans lequel au contraire la couleur verte domine au point d'eifacer le jaune prefque entièrement; mais nous verrons que le péridot diffère encore de notre chryfolite par des caraclères bien plus elfentiels que ceux de la couleur.

La chryfolite des Anciens étoit ia pierre précieu/è

que nous nommons aujourd'hui topave orientale, & à

laquelle le nom de cliryfolhe ou pierre d'or convcnoit

eu eiîèt beaucoup (e) : « La chryfolite dans fa beauté,

» dit Pline, fait pâlir l'or lui-même (f) ; aulfi a-t-on

» coutume de la monter en tranfparent & fans la doubler

j> d'une feuille brillante qui n'auroit rien à ajouter à fon

éclat. » L'Ethiopie & l'hide, c'ell-à-dire, en géwhdSy

l'Orient, fourniffoient ces pierres précieufes aux Romains,

& leur luxe encore plus fomptueux que le nôtre, leur

fai/bit rechercher toutes les pierres qui avoient de l'éclat;

ils diftinguoient dans les chryfolites plufieurs variétés;

ia chryféieâre à laquelle, dit Pline, il falloit la lumière

claire du matin pour briller dans tout fon éclat (^) ; la

leucocryfe , d'un jaune-blanc brillant (h) ; ia méléchryiè,

que couleur efl un vert iiaifTant tirant fur le jaune, ou ua vert- jaune brillant d'un luftre doré.

(e) Chrifos lithos.

(f) Livre XXXVII , n.' 42,

(g) IbUem , n." 4^. (h) Ibidem , n' ^4,

DES Minéraux. 4.7^

qui, fuivant la force du mot, avec un éclat doré, offre la teinte rougeâtre du miel (i) ; toutes ces belles pierres font , comme l'on voit , très-différentes de notre chry- folite moderne , qui n'ell qu'un criflal de roche coloré de jaune -verdâtre.

Les chryfolites que l'on a trouvées dans les terreins volcanifés font de la même nature que les chryfolites ordinaires ; on en rencontre affez fouvent dans les laves & dans certains bafaltes : elles prcfentent ordinairement en grains irréguliers ou en petits fragmens qui ont la couleur, la dureté & les autres caraétères de la véri- table chryfolite, nous en ferons la comparaifon lor/que nous parlerons des matières rejetées par les volcans.

(i) Livre XXXYII , 4j.

47? Histoire Naturelle

A I G U E-M A R I N E.

L

ES Aigues-marines ne font encore que des criflaux quartzeux teints de bleuâtre ou de verdàtre ; ces deux couleurs font toujours mêlées , & à différentes dofes dans ces pierres , en forte que le vert domine fur le bleu dans les unes, & le bleu fur le vert dans les autres; leur dcnfité (a) ôl leur dureté font les mêmes que celles des améthyftes, des criftaux - topazes t^ des chry/b- lites , qui toutes ne font guère plus dures que Je crillal de roclie ; elles réfiftent également à l'adion du feu. Ces trois caractères effentiels fuffifent pour qu*on fait bien fondé à mettre l'aiguë - marine au nombre des criftaux colorés.

La reffcmblancc de couleur a fait penfèr que le léo'I des Anciens étoit notre aiguë - marine ; mais ce béryl , auquel les Lapidaires donnent la dénomination (\'ai^ue - viar'uie orientale ^ eft une pierre dont la denfité cft égale à celle du diamant, &. dès -lors on ne peut la confondre avec notre aigue-marine ni la placer avec jes criflaux quartzeux.

On trouve les aigues-marines dans plufieurs contrées de l'Europe, & particulièrement en Allemagne; elles

f n) Criflal d'Europe, 26)48; aiguë jjiarijie , 2722^; chrylolite, 2.-j%%\ \ chryfolite du Erefil^ 26^23. VoycT^ la Table de Ai. Brijjon,

DES Minéraux. 479

n'ont ni la denfité , ni la dureté , ni l'éclat du béryl & des autres pierres qui ne fe trouvent que daus les climats méridionaux ; &. ce qui prou\ e encore que nos aiguës - marines ne font que des criflaux de roche teints , c'efl qu'elles le préfcntent quelquefois en niOrceaux afTez grands pour en faire des vafcs.

Au refte, il fe trouve entre l'aiguë - marine & le béryl la même différence en pefanteur fpéciiique (6J qu'entre les crillaux-topazes & la topaze du Bredl , ce qui feul fuftit pour démontrer que ce font deux pierres d'effence différente , & nous verrons que le béryl pro- vient du fchorl , tandis que l'aigue-marine efl un criflal quartzeux.

{bj La pefanteur fpécifique du béryl ou aiguë -marine orientale efl de 3^48^, & celle de i'aiguç-marine occidentale ii'ell que de

480 Histoire Natu relle

SFA LACTITES CRISTALLISÉES

DU FELD-SPATH.

I 1 E Fel J-fpath , dont la denfité & la dureté font à peu- près les mêmes que celles du quartz, en diflère néan- moins par des caraclères efTentiels, la fufibilité & la figuration en criftaux ; & cette criftalii/àtion primitive du feid-fpadî ayant été produite par le feu, a précédé celle de tous les criflaux quartzeux qui ne s'opère que par l'intermède de l'eau.

Je dis que la cridaliifation du feld-fpath a été produite par le feu primitif, & pour le démontrer, nous pourrions ra])pcler ici toutes les preuves fur le/quelles nous avons établi que les granités , dont le fcid-iJ3atIi fait toujours partie conflituante, appartiennent au temps de l'incan- deftcncc du Globe, piiifque ces mêmes granités, ainfi que les verres primitifs dont ils font compofés , ne portent aucune empreinte ni veflige de l'impreflion de l'eau , & que même ils ne contiennent pas l'air fixe qui fe tlcgage de toutes les fubftances poiicrieurement formées par l'intermède de l'eau , ccû-a-d'ire de toutes les matières calcaires ; on doit donc rapporter la criflal- iifation du feld-fpatb dans les granits à cette époque, le feu, & le feu feul, pénétroit & travailloit le Globe avant que les élémens de l'air & de l'eau volatilifés, & encore relégués loin de fa furface , n'euffent pu s'y établir.

11

DES Minéraux. ^8 i

Il en efl de même du fcliorl, dont la criflallifation primitive a été opérée par le mcme feu ; puifqu'en prenant les fchorls en général, il en exifle autant & plus en forme crifîailifée dans les granités, que dans les mafTes fecondaires qui en tirent leur origine.

On reconnoît aifément le feld-fpath & les matières qui en proviennent au jeu de la lumière qii'elles réflé- chifTent en chatoyant , & nous verrons que les extraits de ce verre primitif font en affez grand nombre, mai< ils ne fe préfentent nulle part en auffi gros volume que les criftaux quartzeux ; les extraits ou ftalaélitcs du feld- fpath font toujours en affez petits morceaux ifolés , parce qu'il ne trouve lui-même que très-rarement eu maffes tm peu confidérables.

Dans cette recherche fur l'origine &. la formation des pierres tran/jiarentes , je fais donc entrer les carac- tères de la denfité , dureté , homogénéité & fufibilité , que je regarde comme efîentiels & très-diflinélifs , fans rejeter celui de la forme de criflallifation, quoique plus équivoque; mais on ne doit regarder la couleur que comme luie apparence accidentelle qui n'influe point du tout fur l'effence de ces pierres, la quantité de la matière métallique qui les colore, étant prefque infini- ment petite, puifque les criiîaux teints de violet, de pourpre, de jaune, de vert, ou du mélange de ces couleurs , ne pèfent pas plus que le criflal blanc , & que les diamans couleur de rofë, ou jaunes ou verts,

Minéraux, Tome- III. Ppp

4S2 Histoire Naturelle

font aufTi de la même denfité que les diamans blancs.

Et comme nous ne traitons ici que des flaladites traniparentcs , & que nous venons de préfentcr celles du quartz , nous continuerons cette expofitlon par les flaladites du feld-fpath, & enfuite par celles du fciiorl: ces trois verres primitifs produifent des ftalaélites tranf- parentes ; les deux autres, fàvoir, le jafpe & le mica, ne donnent guère que des concrétions opaques, ou tout au plus à demi-tranfparentes , dont nous traiterons après celles du quartz, du feld-fpath & du fchorl.

DES Minéraux. 48 j

SA P H I R D'E A U.

L^ E Saphir d'eau eft une pierre tranfparente légèrement chatoyante, & teinte d'un bleu pâle, fa dcnfité approche de celles du fcld-fpath &. du cridal de roclie (û) ; il a fouvent des glaces & reflets blancs , &l fouvent aufTi la couleur bleue manque tout-à-coup ou s'affoiblit par nuances, comme la couleur violette fe perd <&: s'affoiblit dans l'améthyde ; il paroît feulement par la différence de la pefameur fpécihque qui fe trouve entre ces deux pierres (l>), que le faphir d'eau n'efl pas tout- à- fait auffi denfe que Taméthyfle & le criflal de roche, & qu'il feft plus que le feld-ipath en criflaux rougeâtres ; je fuis donc porté à croire qu'il efl de la même effence que le feld-fpath , ou du moins que les parties quartzeufes dont il eft compofé font mélangées de fcld-fpath : on pourra confirmer ou faire tomber cette conjeélure , en éprouvant au feu la fufibilité du faphir d'eau; car s'il

(a) La pefanteur fpccifique du faphir d'eau eft de 25813; celle du ciidal de roche eft de 26548; la pefameur fpécifique du feld-fpath blanc eft de 26466, & celle du feld-lpath rougeâtre eft de 24378, en forte que la jiefanteur fpccifique du faphir d'eau étant de 25813, elle fait le terme moyen entre celle de ces deux feld-fpaths , & c'eft ce qui me fait prcfuiner que la fubftance du faphir d'eau eft plutôt compofce de feld-fpath que de quartz.

fb) La pefanteur fpécifique du faphir d'eau eft de 2581 j, (5c celle de l'amcthyfte de 26535.

Ppp ij

484 Histoire Naturelle

réfifle moins que Je criflal de roche ou le quarrz à i'aclion d'un feu violent, on prononcera fans héfiter qu'il efl mclé de feld-fpath.

Au refle, on ne doit pas confondre ce faphir d'eau, qui n'efl qu'une pierre vitreufe foiblement colorée de bleu, avec le vrai faphir ou faphir d'orient, qui ne difîère pas moins de celui-ci par l'intenfite , la beauté & le brillant de fa couleur , que par fa denfité , dureté, & par tous les autres caractères de nature qui le mettent au rang des vraies pierres précieu/ès.

(

DES Minéraux. 485

FELD- SPA TH DE R USSIE.

v_>*ETTE fubdance vitreufe afTez récemment conmie, & jiifqu'ici Aénoirmiée pierre de Labrador (a) , parce que ies premiers échantillons en ont été ramaflcs fur cette terre fauvage du nord de l'Amérique, doit à plus jufte titre prendre fa dénomination de la RufTie, l'on vient de trouver, non loin de Pétcrfbourg, ce feld - fpath en grande quantité. L'augufte Impératrice des Ruifies a daigné elle - même me le faire favoir, & c'efi avec empreflement que je faiiis cette légère occafion de pré- fenter à cette grande Souveraine , l'hommage univerfel que ies Sciences doivent à fon génie qui les éclaire autant que fa faveur les protège; & l'hommage parti- culier que je mets à fès pieds pour les liautes bontés dont Elle m'honore.

Ce beau feld-fpath s'efl trouvé produit &: répandu dans des blocs de rocher que l'on a attaques pour paver la route de Péter ftourg à Péterholi ; la maffe de cette roche eft unexoncrétion vitreufe dans laquelle le fchori domine , & oii Ton voit le feid-fpath formé en petites tables obliquement inclinées, ou en rhombes criflallifés

(a) Feld - Ipath à couleurs changeantes , connu ibus le nom de pierre de Labrador, on le trouve en effet en morceaux roulés, quelquefois chargés de glands de mer fur les côtes de cette contrée feptentrionale de l'Amérique.

486 Histoire Naturelle

d'une manière plus ou moins didinde. On le rcconnoît au jeu de Tes couleurs chatoyantes, dont les reflets bleus & verts deviennent plus vifs (Se font très - agréables à l'œil, iorfque cette pierre efl taillée & polie: elle a plus de denfité que le feld-fpath blanc ou rouge (h) ; ce feld-rpath vert a donc pris ce furplus de denfité par ie mélange du fcborl, & probablement du fcliorl ^qxi qui efl le plus pefant de tous les fchorls (c) .

Au rede , cette belle pierre chatoyante qui ctoic très-rare , le deviendra moins d'après la découverte que i'on vient d'en faire en Ruffie, & peut-être efl -elle fa même que ce feld-fpath verdâtre dont parle Wallerius, & qu'il dit fe trouver dans les mines d'or de Hongrie & dans quelques endroits de la Suède.

(h ) La pefunteur fpécifique du fpath de Ruflîe ou pierre de Labrador, efl de 26925; celle du feld-fpath blanc , de 2437S'; (Se celle du feld-fpath en crirtaux rouges, de 2.64.66. Tables Je Ai, Brijfon.

{ c ) 'Ls. pefanteur fpécifique du fchori olivâtre ou vcrt, efl de ^ 4. 5 I p ; même Table.

DES Minéraux. 487

.. ... .....j j

ŒIL DE CHAT.

X-jES pierres auxquelles on a dcnué ce nom font toutes chatoyantes , &. varient non-feulement par \c jeu de la lumière <$i. par les couleurs, mais aufîi par le cleflin plus ou moins régulier des cercles ou anneaux qu'elles prcfentent. Les plus belles font celles qui ont des teintes d'un jaune vif ou mordoré avec des cercles bien diftinds ; elles font très-rares & fort eflimces des Orientaux (a); celles qui n'ont point de cercles & qui

•^- .. » ■■ ■-■"'■■■■ ■* I .. . -■■■■■ , , ., . _ ^

(a) Les pierres précieufes dont on fait le plus de cas dans l'ile de Ceylan , & parmi les Maures &. les Gentils , font hs yeux de chat: on ne les connoît prefc[ue point en Europe. J'en vis une de la groffeur d'un œuf de pigeon au bras du prince d'Ura lorfqu'il vint nous voir. Cette pierre étoit toute ronde, & faite comme une grofie balle d'arquebufe : ces pierres pèlent plus que les autres ; on ne les travaille jamais, & on fe contente de les laver. Il femble que la Nature ait pris plaifir de raniaiïer dans cette pierre , toutes les plus belles & les plus vives couleurs que la lumière puifle pro- duire , & que ces couleurs forment un combat entr'elles à qui l'emportera pour l'éclat & pour le brillant , fans que pas une ait l'avan- tage fur l'autre ; félon qu'on les regarde , & pour peu qu'on change de fituation & qu'on remue cette pierre, on voit briller une autre couleur , en forte que l'œil ne peut diftinguer de quelle manière fe fait ce changement: de-là vient qu'on appelle ces pierres ceil de chat; outre qu'elles ont des raies couchées l'une contre l'autre , ce qui fait diverfité de couleurs , comme véritablement on voit que tous les yeux de chat brillent & paroifîent de différentes couleurs fans qu'ils le retournent- ou qu'ils fe remuent. Ces raies ou fils qui font dans les yeux de chat ne font jamais en nombre pair; il y en a trois ;

488 Histoire Naturelle

font grifcs ou brunes , n'ont que peu d'éclat & de valeur, on trouve celles-ci en Egypte, en Arabie, &c. & les premières à Ceyian. Pline paroît défigner ie plus bel œil de chat, fous le nom de Icucoplualmos , « lequel, dit-il, avec la figure du globe blanc &: de la prunelle »^ noire d'un œil , brille d'ailleurs d'une lumière enflam- mée (h). » Et dans une autre notice cette même pierre cH également reconnoi (Table (c) , \\ nous a con- fervé quelques traces de la grande cflime qu'on en faifoit en Orient dès la plus haute antiquité : «< Les î> Affyriens lui donnoient, dit -il, le beau nom A' œil de Bcliis, & l'avoient confacrée à ce Dieu ».

Toutes ces pierres font chatoyantes , & ont à très- peu-près la même denfité que le feld-fjoath ^J) ^ auquel on doit par conféquent les rapporter par ces deux caradères ; mais il y a ime autre pierre, à laquelle on a donné le nom iVcc'i! Je char îioir ou îioh'âire, dont la denfité c(t bien plus grande, & que par cette raifon nous rapporterons au 'îq\\ox\.

cinq ou fept. HiJIoire de Ceylnn , par Jean Ribeyro , i y 0 i , page j?.

(b) Leiicophtalmos rutila allas, oculi fpeciem candïdam n'igramque co-itiiiet. Hiil. Nar. Lib. XXXVli , n." 61.

(c) Bell Qculus all'icans pupïllam cing'it n'igrdm , e medio aurco fuhvrc lafi-entem. , proptcr fpeciem , facratijftmo AJfyr'iorum Dco dicauiur. Lib. XXXVII , n." 45.

(d) La pefanteur fpecilicjue du feld-fpath blanc, efl de 26466;* celle de i'cx-ii de chat mordoré, efl: de 2.66^^ \ de l'ail de dut jaune, 25^7;; & de l'œil de cliat gris^ 2^675,

DES Minéraux. 489 (E I L DE POISSON.

IL me paroît que l'on doit encore regarder comme un produit du feld-fpath, la pierre chatoyante à laquelle on a donné le nom (ïœîl de poijjbn, parce qu'elle t'a à peu -près de la même pefanteur f|3ccifique que ce verre primitif ('dj.

Dans cette pierre œil Je poijjon, la lumière efl blanche & roule d'une manière uniforme , le reflet en eft d'un blanc éclatant & vif lorfqu'dle eft taillée en* forme arrondie, & polie avec foin; la plupart des pierres cha- toyantes, « dit très-bien M. Dem.efle, ne font que des feld-fpaths d'im tiffu extrêmement fin, que l'on taille « ^x^ goutte de fuifow en cabochon , pour donner à la pierre « tout le jeu dont elle efl fufceptible. » Cette pierre cei! de poijfon , quoiqu'aflez rare, n'efl pas d'un grand prix , parce qu'elle n'a que peu de dureté , & qu'elle efl fans couleur ; cWe paroît laiteufe &. bleuâtre lorf- qu'on la regarde obliquement; mais au reflet direél de la lumière , elle efl d'un blanc éclatant &. très - intenfè : à ce caraélère, & en fe fondant fur le fens étymo- logique , il me paroît que l'on pourroit prendre

(a) La pefanteur fpe'cifique de îa pierre œil de poijfon, eft de 2.5782, ce qui ed à peu-près le terme moyen entre fa pefanteur fpccifique z6^66 du feld-fpath blaiic, & -4378 pefanteur fpécifiqua du feld-lpatli rougeâtre.

ATincraiix, Tome IIL Q^^

490 H isTo IRE Naturelle

\ argywdnmas de Pline, pour notre œil de poifTon; car il n'eft aucune pierre qui joigne à un beau blanc d'argent plus d'éclat & de reflet, & qui par conféquent puilfe à plus jufle titre , quoique toujours improprement, recevoir le nom de diamant d'argent (b): Si. cela étant, la pierre galLùque du même Naturalifte, fcroit une variété de notre pierre œil de poifTon, pui/qu'li la rapporte lui-même à fon argyrodamas (c) . Au refte cette pierre, ceil de foijjon , eft ainfi nommée, parce qu'elle reffemble par fa couleur au criflallin de l'œil d*un pcriflbn.

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(b) Argyroilamas.

(c) Gûllaiiti ar^yrodamanti finùlïs ef, paulb fordid'ior; Lib. XXXV IL,.

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DES Minéraux. 49 i

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ŒIL DE LOUP.

1-j A pierre api)clce (EU de loup, cft Je même :in pro- duit (lu fckl-rpath ; clic efl chatoyante, & probablement mclce de parties micacées qui en augmentent le volume & diminuent h ma/Te ; cette pierre ccW de loup , moins Aiin^c que \^ fcld'fpaih (a) , paroît faire la nuance entre les feid-fpatlis & les opales qui font encore plus mélan- gées de parties micacées; car l'œil de loup n'étincelle pas par paillettes variées comme Taventurine ou l'opale, mais il luit d'une lumière pleine & /ombre ; Tes reflets verdâtres fèmblcnt fortir d'un fond rougeâtre, & on pourroit prendre cette pierre pour une variété colorée de la pierre œil de poiflbn, ou pour mie aventurine iàns accident, fans aventure de couleurs, fi fa denfjté n'étoit pas fort au-deffous de celle de ces pierres. Nous îa regarderons donc comme un des produits ou flalac- lites, mais des moins pures &: des plus mélangées, du £eld-fpadi. Sa teinte foncée <Sc obfcure ne laiffe à fes reflets que fort peu d'éclat, & cette pierre, quoiqu'affez rare, dont nous avons au Cabinet du Roi deux grands

échantillons, n'a que peu de valeur.

* ' ' -•

(a) La pefanreur Tpécifique de fa pierre cc'il de /oup . n'ed qu* 4? -^i5^7' tandis que celle de l'œil de poifloa ell de zjySz*

492 Histoire Natu relle

r-^— u*-.iin.^i.U3s:

a^.i ij r I iii m '■^-j»u.Ej Lia,

A VE N T U R I N E.

i_jE feid-fpath & toutes ies pierres tranfparentes qui Cil tirent leur origine, ont des reliets cliatoyans; mais il y a encore d'autres pierres qui réunifTent à la lumière flottante & varice du chatoyement, des couleurs fixes, vives &. intenfes , telles que nous les prcfentenc les aventurines & ies opales.

La pefantcur fpécifique des aventurines efl à très- peu-près la même que celle du feld-fpath (a): la plu- part de ces pierres, encore plus brillantes que chatoyantes, paroifTent être femées de petites paillettes rouges, jaunes & bleues , fur un fond de couleur plus ou moins rouge; les plus belles aventurines ne font néanmoins qu'à demi-tranfjDarentes; les autres font plus ou moins opaques, &. je ne les rapporte au feld-fpath qu'à cau/è de leurs reflets légèrement cliatoyans, &. de leur denfité qui efl à très -peu -près la mcme ; car ies unes & ies autres pourroient bien participer de la nature du mica, dont les paillettes brillantes contenues dans ces pierres , paroifTent être des parcelles colorées.

(a) Feld-fpath, 26466; avemurine demi-tranfparente, 26667, aventurine opaque, 16^26. Table de M. Brijfon,

DES Minéraux. 49 3

OPALE.

XJ E toutes les pierres chatoyantes l'Opale efl la plus Lelle; cependant elle n'a ni la dureté ni l'éclat des vraies pierres précieufès ; mais la lumière qui la pénètre , s'anime des plus agréables couleurs , & femble fe pro- mener en reflets onJoyans, & l'œil efl encore moins ébloui que flatte de l'effet fuave de Tes beautés. Pline s^'arrcte avec complaifance à les peindre: « c'eft, dit-il, le feu de f efcarboucle , le pourpre de l'améthyfte, le vert éclatant de l'émeraude, brillant enfemble, & tantôt réparés , tantôt unis par le plus admirable mélange (a) ». Ce n'eft pas tout encore : le bleu & f orangé viennent fous certains afpeéls fe joindre à ces couleurs , &. toutes prennent plus de fraîcheur du fond blanc 6i lui/ânt fur lequel elles jouent , &. dont elles ne femblent fortir que pour y rentrer & jouer de nouveau.

Ces reflets colorés font produits par \c brifement des rayons de lumière mille fois réfléchis, rompus & renvoyés de tous les petits plans des lames dont l'opale efl compofée ; ils font en même temps réfraélés au fortir de la pierre, fous des angles divers & relatifs à ia pofition des lames qui les renvoient, & ce qui prouve

fa) EJi in iis carhunculi î envi or ignis , ejl ametyfii fidgens purpura if fmaragdi virens mare , & cunéla pariier incredibili mixlurâ luc(ntia> Lib. XXXVII , cap. 6.

ce

494- Histoire Naturelle

que ces couleurs mobiles & fugitives, qui fuivent l'œif &. dépendent de l'angle qu'il fait avec la lumière , ne {ont que des iris ou fpedres colores , c'e/l qu'en cafïànc ia pierre elle n'offre plus dans fa fracture, ces mêmes couleurs dont le jeu varié tient à flruéture intérieure, & s'accroît par la forme arrondie qu'on lui donne à l'extérieur. L'opale ell donc une pierre irifée dans toutes lès parties; elle efl en même temps la plus légère des pierres chatoyantes, & de près d'un cinquième moins àeni^e que le feld-fpath , qui de tous les verres primitifs eft le moins pefant (h) ; elle n'a auffi que peu de du- reté (c) ; il faut donc que les petites lames dont l'opale eft compofée , foient peu adhérentes , & affez féparées les unes des autres, pour que fa denfité & fa dureté en foient diminuées dans cette proportion de plus d'un cinquième relativement aux autres matières vitreufès.

. Une opale d'un grand volume, dans toutes les parties de laquelle les couleurs brillent cSc jouent avec autant de feu que de variété (i^J , efl \mc production fi rare qu'elle n'a plus qu'un prix d'eiliiiie qu'on peut porter

(h) La pefanîcur fpc'cifique de l'opale eft de 21140, «Se celle du feld-lpath le plus Jcger de 2^.378. Table de AI. Brijjon.

(c) L'opaÎG eH: fi tendre que , pour la polir , on ne peut , fiijvant Boëcc , enipîoycr ni l'cineril ni la pote'e , & qu'on ne doit fe fervir que dii tripoii étendu fur une roue de bois.

(d) Les plus grandes , dit Pline , ne paffent pas la grofTeur d'une aveline, 7wc;s aveHanœ imignlludine. Lijj. xxxyii , çaj?.

DES Al J N É R A U X, 49 5

très-haut. Pline nous dit qu'Antoine profcrivit un Séna- teur auquel appartenoit une très-belle opale qu'il avoit refufé de lui céder; fur quoi le Naturalise Romain s'écrie avec une éloquente indignation : « De quoi s'étonner ici davantage , de la cupidité farouche du tyran qui « profcrit pour une bague , ou de l'inconcevable pafTion « de l'homme qui tient plus à fa bague qu'à fa vie (e)f »

On peut encore juger de l'eftime que faifoiem les j\nciens de i'opaie, par la fcrupuleufe attention avec la- quelle ils en ont remarqué les défauts, <Sc par le foin qu'ifs ont pris d'en caraélérifer les belles variétés (f). L'opale en offre beaucoup , non - feulement par les diiîcrences du jeu de la lumière, mais encore par le nombre des nuances &l la diverfité des couleurs qu'elle réfléchit (g):

(e) Sed mira Antonii ferilas alcjne luxurla proptef gemmam profcriben^ t'is j nec m'inor Non'ii contuwacia profcriptionem fuam amantis. Idem, ibidi

/ f) y'ii'ia opal'i , fi color in forem herbue , quœ vocatur heliotropium. exeot , aut crijîaUum mit grandinem: fi fal interveniat aut fcabritia ûut punâa ocuUs occurfantia , nullofque mugis Jndia fimilitudine indifcreta vitro adultérât. Experimentiim in foie tantiim ; faifts enitîi contra radios libratis , di(^ito ac pollice unus atque idem travjlucet colos infe confumptui. Yeri fidoor fiibind} variât & pliis hue illucque fpavgit , & fulgor lucis in di (fîtes funditur. Hanc gcmmam proptér eximiam gratiam pleriquc cvpellavêre pcedcrota. Sunt & qui privatum genus e'nis faciiitit , favge- Tionque ab Indis vocari dicunt. Traduntur nafci & in yEgypto Ù" in Arabid if vili(f'mi in Ponto. Item in Galatiâ ac Thafo if Cypro. Quippe opa/i gratiam habct , ftd moîltus niiet , raro ncn fcaler. Plin, lib. XXXVII , cap. G.

(cr) On conngat cj^iuuc fortes d'opales , la première trcs-parfaife

49^ Histoire Naturelle

il y a Jc5 opales à reflets foiblement colorés, ou fur un fond laiteux flottent à peine quelques légères nuances de bleu. Dans ces pierres nuageufes, laiteufes & prefque opaques, la pâte opaline femble s'épaiiïir & fe rapprocher de celle de la calcédoine: au contraire, cette même pâte s'éclaircit quelquefois de manière à n'offrir plus que l'apparence vitreufe & les teintes claires & lumineufes d'un feld - fj^ath chatoyant & coloré ; & ces nuances , comme l'a très-bien obfervé Boëce, fe trouvent fbuvent réunies & fondues dans un feul &. même morceau d'opale brute. Le même Auteur parle des opales noires comme

& qui imite naïvement l'iris par le moyen de ces couleurs-ci, le rouge , le vert , le bleu , le pourpre & fe jaune. La faconde qui au travers d'une certaine noirceur , envoyé un feu & un c'clat d'efcarboucle qu'on lait très-rare & très-précieufe. La troifième qui aufli au travers d'un jaune fait paroître diverfes couleurs , mais peu gaies & comme amollies. Et la quatrième forte, celle qu'on nomme fauffe opale , laquelle eft diaphane & femblable aux yeux de poillon. . . La couleur des plus belles opales eft un blanc de lait , parmi lequel il e'clate du rouge , du vert , du bleu , du jaune , du colombin & plufieurs autres couleurs diffcrentes qui dedans ce blanc furprennent agréablement la vue; d'où je conclurois facilement que c'eft de cette forte que Boëce dit en avoir vu une , de fa grofîêur d'une petite noix, dont il fait monter fa valeur à une grande fomme de Tfiaiers.

Elle croît dans les Indes ^ dans l'Arabie, l'Egypte & en Chypre. Et à i'égard de celles de Bohème , quoiqu'elles foient grandes , elles font néanmoins fi peu vives en couleurs , qu'elles ne font guère eftimées. MencUles des Indes , par Robert de Berquen , pages jf4

des

DES Minéraux. 497

^es plus rares & des plus fuperbes par l'éclat du feu qui jaillit de leur fond fombre (/i).

On trouve des opales en Hongrie (ij , en Mi/îiie (k) Si dans quelques îles de la Méditerranée ^/^. Les Anciens tiroient cette pierre de l'Orient, d'où il en vient encore aujourd'hui, Sl nos Lapidaires diilinguent les opales, aiiifi que plufjeurs autres pierres, en orientales & en ccc'uientalcSj mais cette diftinélion n'eft pas bien énoncée ; car ce n'efl que fur le plus ou le moins de beauté de ces pierres que portent les dénominations d'orientales & d'occidentales , & non fur le climat elles fc trouvent , puifque dans nos opales d'Europe il s'en ren^ contre de belles parmi les communes , de même qu'à Ceylan & dans les autres conirces de l'Inde, on trouve beaucoup d'opales communes parmi les plus belles; îiinfi cette diflinélion de dénominations, adoptée par les

^ . : ^

(h) Boëce de Boot dit avoir eu eu fk poirefllon \x\\2 très-petite opale noire , & en avoir vu une autre de la groffeur d'un gro» pois & qui rendoit un feu comparable à celui du plus beau grenat. ( Lap'id. & gemm. h'ifi. pag. 1^2). Nous avouons n'avoir pas vu & ne pas connoître cette elpèce d'opale, quoiqu'après un témoignage aufll pofjtif, on ne puiiîe pas , ce femble, douter de fon exiftence.

(ï) Voyage de Tavernier , tome IV , page 41. Boëce de Boot dit que de Coa temps « la feule mine que l'on en connût en tlongrie, effondra &. fut enfouie fous fes ruines ». Lap'id. à^ gemm. hijl. pag. / j?/#

(k) h. Freyberg.

(l) L'île de Tajjos appelée aujourd'hui Taffo , produit de fort belles opales , qui font une forte de pierre précieufe. Defcripiion 4.C i Archipel , par Dapper; Ainjlerdam, lyo], page 1^4.

Mmûrau'A, Tome UL R r r

498 Histoire Naturelle

Lapidaires, cfoit ctrc rejetce par les Naturaliftes , piiif- qu'on pourroit la croire fondée fur une différence tfTentielIe de climats, tandis qu'elle ne l'efl: que fur la différence accidentelle de l'éclat ou de la beauté.

Au refle, l'opaie cfl certainement une pierre vitreufc de féconde formation, & qui a été produite par l'inter- mède de l'eau: h gangue efl une terre jaunâtre qui ne fait point d'effervefcence avec les acides ; les opales renferment fbuvent des gouttes d'eau. M. Fougeroux de Bondaroy, l'un de nos favans Académiciens, a facriflé à fon infîruélion quelques opales , & les a fait caffer pour recueillir l'eau qu'elles renfermoient ; cette eau s'efi; trouvée pure & limpide comme dans les cailloux creux &. les enhydres ^m) . Il fe trouve quelquefois des

(m) Je me fuis troxivé à portée d'obferver ce fait dans^ des- opales Celles que j'ai obfervces' ont été tirées du mont

£erico dans le Vicentin , dont le terrein offre des traces de volcan dans plufieurs endroits. Je n'alTure cependant pas que ces opales doivent leur origine à des volcans ; beaucoup de ces pierres n'offrent point de- bulles mobiles, &. ce n'eft que. dans la quantité, lorfqu'on les a polies, que la bulle fe voit daiis quelques-unes.

Ces efpèces d'agates perdent avec le temps la bulle qui fixe jnaintenant notre attention; on pourroit croire que celles-là avoient quelques (emes ou qu'il s'y eft formé quelques creva/Tes qui donnant iffue à l'eau, empêchoieiit la bulle d'air de s'y mouvoir comme el/e le faifoit auparavant.

J'ai expofé ces opales l'on n'apercevoit plus le mouvement de la bulle, à une douce chaleur; je les ai laiffées dans de Feau que j'ai.ûix long-temps bouillir, j'ai fait chauffer une de ces opales

(■:

DES Minéraux. 499

opales dans les pouzzolanes & dans les terres jetées par les volcans. M. Ferber en a obfervc , comme M. de Bondaroy, dans les terreins volcanifcs du Vicentin (nj; t:es faits fuffifent pour nous démontrer que les opales font des pierres de féconde formation, à. leurs reiiets chatoyans nous indiquent que c'eft aux Halaélites du feld-fpath qu'on doit les rapporter.

Quoique plufieurs Auteurs aient regardé le girafol comme une forte d'opale , nous nous croyons fondés à le féparer, non-feulement de l'opale, mais même de toutes les autres pierres vitreufes; c'eft en effet une pierre précieufe dont la dureté & la denfué font prefque iloubles de celles de l'opale, & égales à celles des vraies

pierres précieufes (o),

. ' ..1.

A i'ai jetée dans Teau fans être parvenu à faire reparoître la bulle

J'ai caiïe une de ces opales qui avoit eu une buile &l qui l'avoit perdue , & j'ai obfervé qu'elle étoit creufe & qu'il y avoit dans J'inte'rieur une -jolie criflallifàtion , (nais point d'eau & aucun conduit ni fente par fefquels cette eau auroit pu s'échapper.

J'ai rompu une féconde opale je voyois aiféineut le rwouve- ment d'une bulle, & je me fuis aflliré qu'elle étoit prefque remplie d'une eau claire, limpide, & qui m'a paru infipide. Atémoïres de M> Fougeroux de Bondaroy, dans ceux de l'Académie des Sciences, finnée 1776, pagfs 628 Ù" fuiv»

(n) Lettres fur la Minéralogie, pages 24. & 2^.

(0) Voyez l'article de Cïrafol dani le volume fuivant de ©et(« ^illoire des minéraux.

500 Histoire Natu belle

PIERRES IRISÉES.

yVpRÈs ces pierres chatoyantes dont les couleurs font flottantes, & dans lefquelies ies reflets de lumière paroifTent uniformes, W s'en trouve plufieurs autres dont les cou- leurs variées ne dépendent ni de ia réflexion extérieure de la lumière, ni de fa réfraction dans Tintéricur de ces pierres , mais des couleurs irîjQes que produifent tous les corps lorfqu'ils font réduits en lames extrêmement minces : les pierres qui préfèntem ces couleurs font toutes défedueufes ; on peut en juger par le criftal de' roche inp qui n'efl qu'un criflal fêlé ; il en eft de même' du feid-fpath irifc ; les couleurs qu'ils offrent à l'œil,, ne viennent que du reiiet de la lumière fur ies lames minces de leurs parties conilituantes, lorfqu'ellcs ont été féparées les unes des autres par fa percufTion ou: par quelqu'autre caufe. Ces pierres irifées font éionnces, c'efl-à-dire, fêlées dans leur intérieur; elles n'ont que peu ou point de valeur , & on les diflingue aifément des vraies pierres chatoyantes par le foible éclat &. le peu d'intenfité des couleurs qu'elles renvoient à l'œil: le plus fouvent même la fêlure ou féparation des lames c(l fenfible à la tranche , &. vifibie jufque dans l'inté- rieur dki morceau. Au refle, il y a auffi du criflai irife feulement à furperficie, & cette iris fuperficiefle s*y produit par i'exfoliation des petites lames de fa furface.

DES Minéraux. 501

tîe même qu'on le voit dans notre verre fadlice long- temps expofé aux imprcffions de l'air.

Au relie, la pierre iris de Pline, qui femblerort devoir être fpécialement notre criflal irifé, n'efl pour- tant que le criftal dans lequel les Anciens avoient ol)(èrvé la réfradion de la lumière , la divifion des couleurs, en un mot, tous les effets du prifme /^J^ fans avoir fu en déduire la théorie.

^aj Nota. Seulement il eft fingulier que Pline, pour nous décrire cet effet , ait recours à un criftal de la mer rouge , tandis que !a première aiguille de criftal des Alpes pou voit également le lui offrir. Iris effoditur in quâdam wfulâ maris rubri qua dijlat a Bérénice vrbe fexaginta millia , c cetera fuâ parte crijlallus , iiaque quidam radicem crijlaUi ejf'e dixerunt. Vecaïur ex argumento iris. Nam fub teâo perçu [fa foie fpecies & colores arcûs cœlejlis in proximos parie tes ejaculatur g Jiibinde mutcns magna que varietate admirât ionem fui augens. Sexangulum ejfe , ut (rijfallum , cenfat.... Colores verb non nifi ex opaco reddunt g née ut ipfœ habeant , fcd ut repercuffu parietum elidant : cptimaque quot maxïmoi anus facit , fmillimofque cceleJJibus. Lib. xxxvji,n." 5 a.

502 Histoire N atv relle

STALACTITES CRISTALLISÉES

DU S C H O R L.

JLjE fchorl diftère du qyartz, ôl reflembie au feJd- /padi par fa fufibilité , & il furpaiïe de beaucoup eu denfitc les quatre autres verres primitifs; nous rappor- terons donc au fchorl les pierres tranfparentes qui ont ces mêmes propriétés; ainfi nous reconnoîtrons les produits du fchorl par leur deufité & par leur fufibilité, & nous verrons que toutes les matières vitreufes qui font fpé- citiquement pkis pefantes que le quartz, les jafpes, le mica & le ic\à - /path , proviennent du fchorl en tout ou en partie. C'ell fur ce fondement que je rapporte au fchorl pkuôt qu'au feld - /j^ath les émeraudes , les péridots, le faphir du Brefd, &c.

J'ai déjà dit que les couleurs dont les pierres tranf parentes font teintes, n'influent pas fenfiblement fur leur pefanteur fpécifique ; ainfi l'on auroit tort de prétendre que c'ell au mélange des matières métalliques qui fonc entrées dans la compofition des péridots , des émeraudes & du fapliir duBrefil, quon doit attribuer leur denfité plus grande que celle du criflal , & dès-lors nous fommes bien fondés à rapporter ce furplus de denfité au mélange du fchorl qui eft le plus pefant de tous les verres primitirs.

'"^M

DES Minéraux. 503

Les extraits ou flaladlites du fchorl font donc tou- jours reconnoiiïabics par leur dcnfitc ôi leur fufibilitc , ce qui les diflingue des autres criflaux vitreux avec Jefqueis ils ont néanmoins le *cara£lère commun de la double réfracflion.

L'i

É M E R A U D E.

ÉMERAUDE, qui par fon brillant éclat & fa couleur fuave, a toujours été regardée comme une pierre pré- eieufè, doit néanmoins être mifè au nombre des criftaux du quartz mêlé de fcborl , i . parce que fa dcnfitc efl moindre d'un tiers que celle des vraies pierres précieufes , & qu'en même temps elle efl un peu plus grande que celle du criflal de roche (û): 2. parce que fa dureté n'efl pas comparable à celle du rubis , de la topaze & du faphir d'Orient, puifque i'émeraude n'efl guère plus dure que le criflal : 3. parce que cette pierre mife au foyer du miroir ardent, fond &l convertit en une maffe vitreufe, ce qui prouve que fubflance quartzeufè efl mêlée de fcld - fpath ou de fchorl ('bj ^

(a) La pefameur fpécifique de rémeraude du Pc'rou , eft de ^yy) 5, & celle du criftal de roche de 26548. Table de M. Br'ijj'on.

(b) L'émeraude expofee au foyer lenticulaire s'y efl fondue & arrondie en trois minutes , elle efl: devenue d'un bleu terne avec quelques taches blanchâtres. Cette expérience a été faite avec Ia> lentille à refprit-de-vin de M. de Bernières. Voye\ la Ca^tU dcs> Ans, du 2 y Juin jyj^'-

504- Histoire Naturelle

qui l'ont rendue fufible ; mais la denfité du feld-/{3aih étant moindre que celle du criflal , & celle de l'éme* raude étant plus grande , on ne peut attribuer qu'au mé- lange du fchorl cette fufibilité de l'émeraude: 4.° parce que les énieraudes croiffent, comme tous les criftaux (c), dans les fentes des rochers vitreux (d): enfin parce que l'émeraude a, comme tous ces criitaux, une double réfracftion ; elle leur relTemble donc par les caradères eiïentiels de la dcnfité , de la dureté, de la double réfra6tion; & comme l'on doit ajouter à ces propriétés celle de la fufibilité , nous nous croyons h\cri fondes à féparer l'émeraude des vraies pierres précieufès, & à ia mettre au nombre des produits du quartz mêlé de (chorl.

Les émcraudes , commie les autres criflaux , font fort fujettes à être glaceufès ou nuageufes ; il efl rare d'en trouver d'un certain volume qui foient totalement exemptes de ces défauts; mais quand cette pierre efl parfaite, rien n'eft plus agréable que le jeu de fa lumière, comme rien n'efl plus gai que fa couleur plus amie de

m ^ ' *

(c) La odiigue de la iniiie d'of de MeTjjuUel au Mexique, efl un quartz dans lequel fe trouvent des crillaux d'emeraude, lelquels même coniiennent des grains d'or. Bowles , Hijhïre Naturelle à' Ejpagne.

(dj On trouve les e'jneraudes au ^ong des rochers elfes croi/îênt, & vienneut à peu - près comme le criibl. Voyagef de Robert Lade ; Paris, i/4'i» lome I, pa^f^s /o t^ j-/.

l'œil

DES Minéraux. joj

l'œil qu'aucune autre fe) . La vue fe repofe, fe clclafTc, fe récrée dans ce beau vert qui fcmble otirir la miniature des prairies au printemps: la lumière qu'elle lance en rayons aufii vifs que doux, femble, dit Pline, brillanter l'air qui l'environne , & teindre par Ton irradiation l'eau dans laquelle on la plonge (^f^: toujours belle, toujours éclatante, foit qu'elle pétille fous le foleil, foit qu'elle luife dans l'ombre ou qu'elle brille dans la nuit aux lumières qui ne lui font rien perdre des anrrémens de fa couleur dont le vert eft toujours pur fg) .

Auffi les Anciens, au rapport de Théophrafle ^/^^

( e ) Une belle émeraude fe monte fur noir comme les diamans blancs; elle tfl: la Çt\x\e pierre de couleur qui jouifle de cette préroga- tive, parce que le noir, bien loin d'altérer la couleur, la lend plus riche & plus veloute'e , au lieu que le contraire arrive avec toute autre pierre de couleur.

(f) C'efl: la remarque de Thcophrafle (lûp. & gemm. n' 44), fur quoi les Commentateurs font tombés dans une foule de doutes & de mëpriles , cherchant mal-à-propos comment l'émeraude pouvoit donner à l'eau une teinture verte , tandis que Théophrafle n'entend parler que du reflet de la lumière qu'elle y répand.

(g) NuUius coloris afpeÛus jucundior ejl ; nam herbas quoque virent es frondefque ûvidè fpeélamus: fmaragdos vero tanto libenliùs quoniam nihil

omnino viridius comparatum illis viret. Prœiereûfoli gemmarutn contuitu ocu- "los implent nccfatiant ; quin Ù" ab intentione aliâ obfcurata afpeâu jmaragdi

recreaîur acies Ita viridi lenitate la(fi[udinem mulcent. Prœlerea

longinquo amplificantur vifu infcientes cîrca fe repercujfum aéra; non foie Tnutati , non umbrâ, non lucernis , fewperque fenfm radiantes & \ifum. admittentes. Plin. lib. xxxvii, n." 16. (^h) Lapid. & gemm. n.° 44.

Minéraux, Tome IIL S^i

$q6 Histoire Naturelle

fe plaifoient- iJs à porter i'émeraude en bague, afin de s'égayer la vue par fon éclat Ôl fa couleur /iiave ; ils la tailloient, /bit en cabochon pour faire flotter la lumière, {bit en table pour la réfléchir comme un miroir , foit en creux régulier dans lequel, fiir un fond ami de l'œil, vcnoient fe peindre les objets en raccourci f/J. C'efl ainfi que l'on peut entendre ce que dit Pline d'un Empereur qui voyoit dans une émeraude les combats des gladiateurs: réfervant rémcraude à ces ufages, ajoute ie Naturalifle Romain, & refpeclant fes beautés natu- relles , on fèmbloit être convenu de ne point l'entamer par le burin (/:); cependant il reconnoît lui-même ailleurs, que les Grecs avoient quelquefois gravé fur cette pierre f/J, dont la dureté n'efl en effet qu'à peu-

f ij P/erùtntjue concavi ut vifum coHigant Quorum verb corpus

extenjum ejl , eâdcm quâ fpecula ratione fuperî imagines reddunt , Nero princeps gladiatorum pugnas fpedabat fmaragdo. Idem, ibidem.

(k) Quapropter décréta hominum iis parcitur fcalpi vetitis. Loco cit,

{/J Livre xxxvii, n* j». Il parle de deux émeraudes, fur cha- cune defqueli'es croit gravée Amymone, l'une àt% Danaïdes , & dans le même livre de ^ow Hiftoire Naturelle, n." ^, il rapporte la gra- vure des émeraudes à une époque qui repond en Grèce, au règne du dernier des Tarquins. Selon Clément Alexandrin , le fameux cachet de Polycrate étoit une cmeraude gravée par Théodore de Samos. ( B, Clem. Alex. Padag. Hb. IIL ) Lorlque Lucullus , ce Romain fi célèbre par fes richefles & par fon luxe, aborde à Alexandrie , Ptolomée occupé du foin de lui plaire , ne trouve rien de plus précieux à lui offrir qu'une émeraude fur laquelle éioit gravé le portrait du Monarque égyptien. Plut, in LuculL

\

D£s Minéraux. 507

près égale à ceiie des belles agates ou du criflal de roche.

Les Anciens attribuoient auffi quelques propriétés imaginaires à i'émeraude; ils croyoient que fa couleur gaie la rendoit propre à chaffer la triflcfTe, & faifoit difparoîire les pbantômcs mélancoliques, appelés mûuvûis efprits par le vulgaire. Ils donnoient de plus à l'éme- raude, toutes les prétendues A'crtus des autres pierres précieufes contre les poifons & différentes maladies : feduits par l'éclat de ces pierres brillantes, ils s'étoicnt plu à leur imaginer autant de vertus que de beauté ; mais au phyfique comme au moral , les qualités extérieures les plus brillantes ne ibnt pas toujours l'indice du mérite le plus réel ; les émxraudcs réduites en poudre & prifes mtcrieurement , ne peuvent agir autrement que comme des poudres vitreufès , aclion fans doute peu curative, & même peu falutairc : &. c'efl avec raifon que l'on a rejeté du nombre de nos remèdes d'ufage, cette poudre d'émcraude & les cinq fragmens précieux , autrefois fi fameux dans la Médecine galénique.

Je ne me fuis (i fort étendu fur les propriétés réelles & imaginaires de Témeraude, que pour mieux démontrer qu'elle étoit bien connue des Anciens, & je ne conçois pas comment on a pu de nos jours révoquer en doute l'exiftence de cette pierre dans l'ancien continent, & nier que l'antiquité en eût jamais eu connoi fiance ; c'efl cependant i'afiertion d'un Auteur récent (m) ^ qui prétend

(m) ' M. Diitens.

Sff ij

5o8 Histoire Naturelle

que les Anciens n'avoient pas connu l'émeraucle, fous prétexte que dans ie nombre des pierres, auxquelles ils ont donné ie nom de JmaragJus, plulieurs ne font pas des émeraudes ; mais il n'a pas penfé que ce mot fmarûgJuSj étoit une dénomination générique pour toutes ies pierres vertes , puifque Pline comprend fous ce nom, des pierres opaques qui femblent n'être que des prafès ou même des jafpes verts ; mais cela n'empêche pas que la véritable émeraude ne foit du nombre de ces fmarûgdes des Anciens : il efl même affez étonnant que cet Auteur, d'ailleurs très-eflimable & fort inflruit, n'ait pas reconnu la véritable émeraude aux traits vifs & brillans, &. aux caractères très - diflin6lifs fous lefquels Pline a fu la dépeindre. Et pourquoi chercher à atténuer la force des témoignages en ne les rapportant pas exadte- ment \ par exemple , l'Auteur cite Théophrafte comme ayant parlé d'une émeraude de quatre coudées de Ion* gueur, & d'un obélifque d'émeraude de quarante cou- dées ; mais il n'ajoute pas que le Naturalifte Grec, témoigne fur ces faits un doute très-marqué, ce qui prouve qu'il connoiffoit affez la véritable émeraude pour être bien perfuadé qu'on n'en avoit jamais vu de cette grandeur; en effet, Théophrafte dit en propres termes, que \ émeraude ejl rare & J^^ fe trouve jawais en grand volume (n) , « à moins, ajoute-t-il, qu'on ne croie

(n) tçi h cr»ri'ct, xa} -rà /iiyt-^oç ^ /Afya'^H. De lapid. pag. Sj,

DES Minéraux. ^09

aux Mémoires Egyptiens, qui parient d'émeraudes de « quatre &. de quarante coudées : » A'Iûis ce font cliofes, continue-t-il, qu'il faut laijjer fur leur bonne foi (o) ; & à l'égard de ia colonne tronquée ou du cippe d'éme- raude du temple d'Hercule à Tyr, dont Hérodote lait au/Ti mention , il dit que c'efl fans doute nnç. faufle émcraude (p). Nous conviendrons, avec M. Dutens , que des dix ou douze fortes de fmaragdes, dont Pline fait l'énumération, la plupart ne font en effet que de fauifes émeraudes ; mais il a voir comme nous , que Pline en diflingue trois comme fupérieures à toutes les aiures (q) . 11 efl donc évident que dans ce grand

(o ) Atque liœc quidevi ita ab ipfis referuntur. De lapid. pag. 87. (p) T^ifi forù pjeudofmaragdus fit. Ibidem.

( q ) La première eft l'émeraude nommée par les Anciens, pierre de Scythie , ôc qu'ils ont dit être ia plus belle de toutes. La féconde qui nous paroît être auffi une émeraude véritable ei\ Ja badrianne , à laquelle Pline attribue la même dureté & le même éclat qu'à Témeraude fcythique , mais qui , ajoute-t-il , efl: toujours fort petite. La troifième qu'il nomme émeraude de Copias , & qu'il dit être en morceaux aflez gros , mais qui ell moins parfaite , moins tranfj arenie & n'ayant pas le vif éclat des deux premières. Les neuf autres lories étoient celles de C'/^^^r^, d'Ethiopie y d'Herminie, de Perfe , de Médie , de V Atiique , de Lacédémone , de Cartfiage , &. celle d'Arabie, nommée Cholus.. La plupart de celles-ci , dilent les Anciens eux-mêmes , ne méritoient pas le nom d'énieraudes , & n'étoient, iuivant i'expreiîion de Théophralle , que de faufTes émeraudes, pfeudofmaragdi , n."' 45 &. 4^. On les trouvoit communéjnent dans les environs des mines de cuivre , circonftance qui peut nous les faire regarder comme des Jîuors verts, ou peut-être même des malachites.

jio Histoire Naturelle

nombre de pierres auxcjiielles les Anciens donnoient le nom générique de fmaragdcs , ils avoient néanmoins très-bien fu diftinguer & connoître l'cmeraiide véritable qu'ils cara(5tcrirent, à ne pas ^'y méprendre, par fa couleur, fa tranfparence & fon éclat (r) . L'on doit en efTct ia fcparcr &. la placer à une grande diftance de toutes les autres pierres vertes, telles que les prafcs, Jcs fluors verts, les malacbites, & les autres pierres vertes opaques de la claffe du jafpe, auxquelles les Anciens appliquoicnt improprement & génériquement le nom de fmaragdes^

Ce n'étoit donc pas d'émcraudc, mais de quelques- uns de ces faux &. grands fmarûgdes, qu'étoient faites les colonnes & les flatues prétendues d'émeraude dont parle l'Antiquité (^f), de même que les très - grands vafes ou morceaux d'émeraudes que fon montre encore aujourd'hui dans quelques endroits , tels que la grande jatte du tréfbr de Gcnes (t) , la pierre verte pe/ànt

(r) Voyez ThéophraQe , n' ^^; & Pline, lïv. XXXVII, uf i 6 .

(f) Telle étoit encore la rtatue de Minerve, faite d'c'meraiide , ouvrage fameux de Dipœnus & Scyllis. V. Jun. dt Piél. vet.

( î) M. de la Condaniine qui s'eft trouve à Gènes avec M." les princes Corfini, peiiis-neveux du Pape CJcnient XII , a eu par leur moyen occafion d'examiner attentivement ce vafe à la lueur d'un flambeau. La couleur lui en a paru d'un vert très-fbnce' ; il n'y aperçut pas la moindre trace de ces glaces, pailles, nuages & autres défauts de tranfparence fi communs dans les émeraudes & dans toutes les jMerres prc'cieufes un peu groflcs, même dans le criftal de roche, iu^is il 7 dirtingua très-bien plufieurs petits vides femblables à des

DES Minéraux. jh

vingt-neuf livres , donnée par Charlemagne , au couvent de Reichenau près Confiance (^uj, ne font que des primes ou des prafes , ou même des verres fadices : or comme ces émcraudes fuppofées ne prouvent rien aujourd'iiui contre l'exiflence de la véritable émeraude, ces mcmcs erreurs dans l'Antiquité ne prouvent pas davantage.

D'après tous ces faits, comment peut-on douter de l'exiflence de rémeraude en Italie, en Grèce & dans les autres parties de l'ancien continent avant la découverte

buHes d'ail-, de forme ronde ou oblongue, telles qu'il s'en trouve ' communément dans les criflaux ou verres fondus , foit bbncs , foit colorés

Le doute de M. de la Condamine fur ce vafe foi-di(ant d'cmeraude n'efl: pas nouveau. II eft , dit-il, clairement indique par les exprefîions qu'employoit Guillaume , Archevêque de Tyr , il y a quatre ficelés, en difant qu'j la pr'ife de Céfarée , ce vafe échut pour une grande fomme d'argent aux Génois ^uî le crurent d' émeraude & qui le montrent encore comme tel & comme miraculeux aux voyageurs. Au refte , continue l'auteur , il ne tient qu'à ceux à qui ces foupçons peuvent déplaire , de les détruire s'ils ne font pas fondés. Alémoires de l'Académie des Sciences , année i yyj , pages ^40 & fuiv.

(u) On me montra ( à l'abbaye de Reicheneau près de Confiance) une prétendue émeraude d'une prodigieufe grandeur ; elle a quatre côtés inégaux dont le plus petit n'a pas moins de neuf pouces & dont le j)lus long a près de deux pieds , fon épailTeur efl: d'un pouce, & fon poids de vingt-neuf livres. Le Supérieur du couvent J'eflime cinquante mille florins; mais ce prix fe réduiroit à bien peu, fi , comme je le préfume , cette émeraude n'étoit autre choie qu'un fpath fluor tranfparent d'un alTez beau vert. Lettres de AL Vdliani Cûxe , fur l'état de la Suijfe , page 21»

512 Histoire Naturelle

du nouveau! comment d'ailleurs fe prêter à la fup- pofition forcée que la Nature ait ré/èrvé exclufivement à l'Amérique cette produdtion qui peut fe trouver dans tous les lieux elle a formé des criflaux ! &. ne devons- nous pas être circonfpedls lorfqu'il s'agit d'admettre des faits extraordinaires & ifolés comme le feroit celui-ci î mais indépendamment de la multitude des témoignages anciens, qui prouvent que les émeraudes ctoient connues & communes dans l'ancien continent avant la décou- verte du nouveau , on fait par des obfervations récentes qu'il fe trouve aujourd'hui des émeraudes en Alle- magne (xj j, en Angleterre, en Italie: & il feroit bien étrange , quoiqu'en difent quelques Voyageurs , qu'il n'y en eût point en Afie. Tavernîer &l Chardin ont çcrit que les terres de l'Orient ne produifbient poinc d'émeraudes, &. néanmoins Chardin, relateur véridique, convient qu'avant la découverte du nouveau monde, les Perfans tiroient des émeraudes de l'Egypte , & que leurs anciens Poètes en ont fait mention (y) ; que de

fon

■^-^— , I . . I I , Il III -Il I I - I in ^ I

( X ) II eft parlé dans quelques Relations d'une taiïe d'émeraude de la grandeur d'une tafl'e ordinaire, qui efl: confervt'e à Vienne dans le Cabinet de l'Empereur , & que des morceaux qu'on 4 ménagés en creufaqt cette tafle, on en a fait une garniture complète pour l'Impératrice. Voye-^ la Relation hijlorïque du voyage en Allemagne; Lyon, I 6y6, pages ^ & i o.

(y) Sefi-couli-càn , Gouverneur d'Irivan , m'apprit que dans les Pûëtes perfans, les émeraudes de vieille roche font appelées émeraides

d'Egypte,

DES Minéral' x. 5 \ 3

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fou temps on connoifToit en Pcrfe, trois fortes de ce pierres; favoir, l'cmeraude d'Egypte qui eft la plus belle, cnfùite les émeraudes vieilles & les émeraudes nouvelles: il dit même avoir vu plufieurs de ces pierres, mais il n'en indique pas les différences, & il con- tente d'ajouter que quoiqu'elles foient Ôlwwq très-belle couleur & d'un poli s\î, il croit en avoir vu d'auïïî belles qui venoient des Indes occidentales; ceci prou- veroit ce que l'on doit prcllimer avec raifon, c'ell que i'émeraude trouve dans l'ancien continent auiTi-bicn que dans le nouveau, & qu'elle eft de même nature en tous lieux; mais comme l'on n'en connoît plus les mines en Egypte ni dans l'hide, & que néanmoins il y avoir beaucoup d'émeraudes en Orient avant la découverte du nouveau monde, ces Voyageurs ont imaginé que ces anciennes émeraudes avoient été apportées du Pérou aux Philippines , & de - aux Indes orientales & en Egypte. Selon Tavernier, les anciens Péruviens en fai- foient commerce (i,) avec les habitans des îles orientales

d'Egypte , & qu'on tient qu'il y en avoit une mine en Egypte , qui eft à piélent perdue. Voyage de Chardin, &£. Londres, i Ij S 6 , page 2 6 ^.

(l^) Pour ce qui eft enfin de I'émeraude , c'eft une erreur ancienne de bien des gens , de croire qu'elfe (e trouve originai- rement dans l'Orient , parce qu'avant la dccouvei-te de l'A- mérique l'on n'en pouvoit autrement juger; & même encore aujourd'hui, la plupart des Joailliers & Orfèvres, d'abord qu'ifs voient une cmcraude de couIe.ur haute tirant fur le noir , ont

Miner ans , Tome IIL T 1 1

514 Histoire Naturelle

de l'Afie; & Chardin, en adoptant cette opinion (û) ,

accoutuirié de dire que c'eft une cmeraude orientale ; je crois bien qu'avant que l'on eût découvert cette partie du monde que l'on appelle vulgairement les Indes occidentales, les émeraudes s'apportoient d'Afie en Europe , mais elles venoient des fources du royauuie du Pérou; car les Américains, avant que nous les eufljons connus, tralk[uoient dans les îles Philippines ils apporfoient de l'or & de l'argent , mais j)lus d'argent que d'or , vu qu'il y a plus de profit à l'un qu'à l'autre , à caufe de la quantité de mines d'or qui le trouvent dans l'Orient: aujourd'hui encore ce mcme iiégoce continue , & ceux du Pérou pafl'ent tous les ans aux Philippines i\ec deux ou trois vaifleaux ils ne portent que de l'argent <3c quelcjue peu d'émeraudes brutes , & même depuis quelques années ils cefl'ent d'y porter des émeraudes , les envoyant toutes en Europe par la mer du nord. L'an 1660 je les ai vu donner à vingt pour cent meilleur marché c[u'elles ne vaudraient en France. Ces Amé- ricains étant arrivés aux Philippines, ceux de Bengale, d'Aracan, de Pégu , de Goa & d'autres lieux y portent toutes fortes de toiles & quantité de pierres en œuvre, comme diamans, rubis, avec plufieurs ouvrages d'or , étoffes de foie & tapis de Perfe; mais il faut remarquer qu'ils ne peuvent rien vendre diredement à ceux du Pérou , mais à ceux qui réfident aux ManiUes , & ceux-ci les revendent aux Américains ; «Se même fi quelqu'un obtenoit la permiffion de retourner de Goa en Efpagne par la mer du fud , il feroit obligé de donner fon argent à quatre-vingts ou cent pour cent jufqu'aux Philippines, fans pouvoir rien acheter , & d'en faire de mêm.e des Philippines jufqu'à la nouvelle Efpagne, C'eft donc -là ce qui fe pratiquoit pour les émeraudes avant que les Indes occidentales fulTent décou- vertes ; car elles ne venoient en Europe que par cette longue voie & ce grand tour ; tout ce qui n'étoit pas beau demeuroit en ce pays-là, & tout ce qui étoit beau pafToit en Europe. Les fix Voyages de Tavernier , à'c. Rouen, lyj^ , tome IV , pages 42 & fuiv. (a) Les Perfans font luie dillinâion emre Iq^ émeraudes cojnmc

DES Minéraux, j i j

dit que les cmcraiidcs qui, de fou temps Te trouvoiciu aux Indes orientales, en Perfe & en Egypte, venoient probablement de ce commerce des Péruviens qui avoient travcrré ia mer du Çud long-temps avant que les E/j)a- gnols euflent fait la conquête de leur pays ; mais ctoit-il liécefTairc de recourir à une fuppofition au/Ti peu fondée pour expliquer pourquoi l'on a cru ne voir aux Indes orientales, en t^gyinc <5c en Per/c , que des, émcraudes des Indes occidentales ! La raifon en cil bien fnnple ; c'efl que les émeraudes font les mêmes par-tout, & que comme les anciens Péruviens en avoient ramaffé unç

nous faifons entre les rubis; ils appellent la plus belle émeraude d'Egypie , la (oiie fuivante éincraude vieille , &i la troificme forte émeraude nouvelle. Avant la découverte du nouveau iHonde , les émcraudes leur venoient d'Egypte, plus hautes en couleur, à ce qu'ils prctendcnt, ik plus dures que les cmeraudes d'occident. \h m'ont fciit voir plulieurs fois de ces cmeraudes qu'ils appellent :^enorûitd Afefri ou de JlTifrdino Tancien nom d'Egypte , & aufft "^enoroud afvaric d'afvan ville de la Thébaïde , nommée Sycne par les anciens Géogr,iphes ; mais quoiqu'elles me jiarulfent très-belles , d'un vert foncé ik d'un polt:nent fort vif, il me fembloic que j'en avois vu d'aufii belles des Indes occidentales. Pour ce qui eft do la dureté , je n'ai jamais eu le moyen de l'éprouver , <Sc comme il eft certain qu'on n'entend point parler depuis long-temps des mines d'émeraude en Egypte , il pourroit être que les xfmeraudes d'Egypte y étoicnt apportées ])ar le canal de la mer rouge, & venoieiu ou des Indes occidentales par \es Philippines, ou du royaume du Pégu ou de celui de Golconde fur la côte de Coromandel , d'où l'on tire journellement à^s émeraudes. Voyage de Chardin; AmJIerdam , f yi 1 i towe II , page 2y.

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5i6 Histoire N atv re lle

trcs-granJe qiian:itc, les E/pagnols en ont tant apporté aux Incies orientales, cîu*eHes ont fait difparoître Je nom ^ l'origine de celles qui s'y trouvoicnt auparavant, & que par leur entière & parfaite rcffemhlance, ces éme- raudcs de l'Afie, ont été & font encore aujourd'hui confondues avec les émeraudcs de l'Amérique.

Cette opinion que nous réfutons, paroît n'être que le produit d'une erreur de nomenclature ; les Natura- liftes récens ont donné avec les Joailliers, la dénomi- nation de pierres orientales à celles qui ont une belle tranfj^arence , &. qui en même temps font aftez dures pour recevoir un poli vif; & ils appellent ^/V/r^j occi- dentales (b) , celles qu'ils croient être du même genre, & qui ont moins d'éclat & de dureté. Et comme l'émeraude n'eft pas plus dure en Orient qu'en Occident, ils en ont conclu qu'il n'y avoit point d'émeraudes orientales, tandis qu'ils auroient du pcnfer que cette pierre étant par-tout la même, comme le criftal, l'amé- thyfte , &c. elle ne pouvoit pas être reconnue ni dénommée par la différence de fon éclat & de fa dureté.

(h) Boëce paroît être l'auteur de la diftinction des emeraudes en orientales & occidentales: il caraderife les premières par leur grand brillant, leur pureté & leur excès de dureté. II fe trompe quant à ce dernier point , & de Laét s'eft de même trompé d'après lui , car on ne trouve pas entre les emeraudes cette différence de dureté , & toutes n'ont à peu-près que la dureté du criftal de roche.

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DES Minéraux, 517

Les cmeraiides étoicnt feulement plus rares & plus chères avant la découverte de l'Amérique; mais leur valeur a diminué en même raifon que leur quantité s'efl augmentée. « Les lieux, dit Jofeph Acofta, l'on a trouvé beaucoup d'émeraudes , & l'on en trouvoit « encore de Ton temps en plus grande quantité, font au nouveau royaume de Grenade & au Pérou ; proche de Manta & de Porto-vieil , il y a un terrein qu'on ap])elle terres des émeraudes , mais on n'a point encore fait la conquête de cette terre. Les émeraudes naiffent des pierres en forme de criflaux .... j'en ai vu quelques- ce unes qui étoient moine blanches & moitié vertes, & d'autres tontes blanches . . . . En l'année ijSy, ajoute cet Hiflo- rien , l'on apporta des Indes occidentales en EfjDagiae, « deux canons d'émeraude, dont chacun pefoit pour le « moins quatre arobes (c). » Mais je foupçonne avec raifon que ce dernier fait efl exagéré ; car Garcilaffo dit que la plus groffe pierre de cette efJDèce, que les Péruviens adoroient comme la Déeffe-mère des éme- raudes, n'étoit que de la groffeur d'un œuf d'autruche, c'eft - à - dire , d'environ fix pouces fur fon grand diamètre (d) : &. cette pierre-mère des émeraudes n'étoit

(c) Hiftoire Naturelle des Indes, par Acofta; Paris , i6 oo , page j j 7 & fuiv,

/d) Hiftoire des Incas , tome I. Du temps des Rois Incas, 011 ne trouvoit dans le Pérou que des turquoifes , des émeraudes & du criftal fort net, mais que les Indiens ne favoient pas niettrs

5i8 Histoire Naturelle

peut - ctre el!e - même qu'une prime crcmerauJc qui, comm.e la prime cl'améth) fie , n'cft qu'une concrétion plus ou moins confufe de divers petits canons ou criflaux de ces pierres. Au refte, les primes d'émeraude foiu communément fort nuageufes, &. leur couleur n'eft pas d'un vert pur , mais mélangée de nuances jaunâtres : quelquefois néanmoins cette couleur verte efl auiTi franclîc dans quelques endroits de ces primes que dans l'émcraude même , & Boëcc remarque fort bien que dans

en œuvre. Les eineiaudes viennent dans les mojuagnes qu'on appelle A'innta , dépendantes de Puerto - V'iejo, II a été impoflible aux Efpagnois , quelque peine qu'ils fe foient données , de découvrir mine; ainfi l'on ne trouve prefque plus d'émeraudes dans cette province qui fourniflbit autrefois Jes plus belles Je cet empire. On. en a apporte cependant une fi grande quantité en Efpagne, qu'on ne les eftime plus. L'émeraude a befoin de fe mûrir comme le fruit; elle commence par être blanche, enfuite elle devient d'un vert- obfcur, & commence })ar fe rendre parfaite par un de fes angles qui fans doute regarde le foleii levant , & cette belle coulçm Ce répand enfuite par toute fon étendue. J'en ai vu autrefois dans Cufco d'auHî groOes que de petites noix , parfaitement rondes ôc percées dans le milieu ; les Indiens les préféroient aux turquoifes. Ils coano'iiCoïem les perles, mais ils n'en faifoient aucun ufage , car les Incas ayant vu la peine «5c le danger avec lefquels on les tiroit de la mer , en défendirent l'ufage , aimant mieux conferver leurs fujets qu'augmenter leurs richeflès. On en a pêche une fi grande quantité qu'elles font devenues conununes. Le P. Acofla dit qu'elles étoient autrefois fi recommandables qu'il n'étoit permis qu'aux "Roï^ & à leur famille d'en porter, mais qu'elles font aujourd'hui fi communes que les Nègres en ont des chaînes & des colliers. HiJIoirç fffs Incas ; Paris , 1 7^^ , tome II , pages 2S ^ à" fuiv.

DES Minéraux. 519

un morceau de prime nébuleux & fans éclat (e) , il fe trouve fouvent quelque partie brillante, qui étant enlevée & taillée , donne une vraie & belle émeraude.

II fèroit afTez naturel de pcnfer que la belle couleur verte de l'émeraude lui a été donnée par le cuivre ; cependant M. Demeftc dit (f): « Que cette pierre paroît devoir fa couleur verte au cobalt, parce qu'en fondant des émeraudes du Pérou avec deux parties de verre de borax, on obtient un émail bleu ». Si ce fait fe trouve confiant & général pour toutes les émeraudes, on lui fera redevable de Tavoir obfervé le premier, & dans ce cas on devroit chercher, & on pourroit trotiver des émeraudes dans le voifmage des mines de cobalt.

Cependant cet émail bleu que donne l'émeraude fondue avec le borax, ne provient pas de l'émeraude feule; car les émeraudes qu'on a expofées au miroir ardent ou au feu violent de nos fourneaux (g) , com- mencent par y perdre leur couleur verte; elles deviennent friables, & finirent par fe fondre fans addition d'aucun

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(e) II dit de prafe , mais il efl: clair que fa prafe eft la prime :

Prafius mater fmaragdï muliis putatur & non ïmnuritb , quod altqvandb

m repenatur et'iamfi non feniper ; vam qnœ partes viriJiores nhfgue

fûvedine & perfpicuœ in prafio reperiuntur , fmaragdi rite appellari pûjfunt , ut illi quorum jia\edo aurea ejl , chryfoprafii, Geimn. & fapid. hill. pag. 2,3.

(f) Lettres de M. Demefte , tome I , page 426,

(ë) '^oyez l'article des Pierres préçieufss dans l'Encyclopédie.

520 Histoire Naturelle

fondant , &. fans prendre une couieur bleue ; ainfi l'éma bleu, produit par la fufion de i'émeraude au moyen du borax, provient peut-être moins de cette pierre que du borax même qui, comme je l'ai dit, contient une bafè métallique: &l ce que cette fufibilité de Têmeraude nous indique de plus réel, c'cft que fa fubftance quartzeufe efl mêlée d'une certaine quantité de {c\\oy\, qui la rend plus fufible que celle du criflal de roche pur.

La pierre à laquelle on a donne le nom A'émerauJe duBrefd, prcfente beaucoup plus de rapport que I'éme- raude ordinaire avec les fchorls ; elle leur refTemblc par la forme , & fe rapproche de la tourmaline par Tes propriétés éle6triques ffi); elle efl plus pefànte <Sc d'uu vert plus obfcur que I'émeraude du Pérou ^ij ; couleur efl à peu-près la même que celle de notre verre à bou- teilles, fes criflaux font fortement flriés ou canelés dans leur longueur, & ils ont encore un autre rapport avec les criftaux du fchorl par la pyramide à trois faces qui les termine; ils croiffent, comme tous les autres criflaux, contre les parois & dans les fentes des rochers vitreux; on ne peut donc pas douter que cette émeraude du Brefd ne foit, comme les autres émeraudes, une ftalac- tite vitreufe , teinte d'une fubflance métallique , &. mêlée

(II) Voyez la Lettre de M. Demefte , tome 1 , page 42-/.

(i) La pefanteur fpécifîque de I'émeraude du Brefil eft de 31 ^j;, & ceiie de fetnerau^ie du Pérou n'eil que de 27755.

d'une

DES Minéraux, 521

d'une grande quantité de fchorl qui aura confidérabfe- ment augmente fa pefànteur; car la denfité du fcliorl vert efl plus grande que celle de cette émerautle {l:J; ainfi c*efl au mélange de ce fchorl vert qu'elle doit couleur, fbn poids & fa forme.

L'émeraude du Pérou , qui efl l'émcraude de tout pays , n'efl qu'un criftal teint &: mêlé d'une petite quantité de fchorl qui fuffit pour la rendre moins rcfractaire que le criflal de roche à nos feux; il faudroit eiïayer fi i'émeraude du Brefil, qui contient une plus grande quantité de fchorl, <Sl qui en a pris fon plus grand poids & emprunté fa figuration , ne fe fondroit pas encore plus facilement que I'émeraude commune.

Les émeraudes, ainfi que les améthifles violettes ou pourprées, les crillaux-topazes , \qs chryfolites dont \c jaune efl mêlé d'un peu de vert, les aiguës - marines verdâtres ou bleuâtres, le faphir d'eau légèrement teint de bleu, le feld-fpath de Ruffie, &: toutes les autres pierres tranfparentes que nous avons ci-devant indiquées, ne font donc que des criflaux vitreux , teints de ces diverfes couleurs par les vapeurs métalliques qui Ce font rencontrées dans le lieu de leur formation, & qui {c^ font mêlées avec le fuc vitreux qui fait le fond de leur effence; ce ne font que des criflaux colorés dont

(k) La pefànteur fpécifique du fchorl vert efl: de 34J25), & celle de I'émeraude du BrefiI de 315;;.

Minéraux, Tome IIL Uuu

522 Histoire Naturelle

la fiibflaiice, à l'exception de la couleur, efl la mcmc que celle du criflal de roche pur, ou de ce criflal mêlé de feld-fpath &. de fchorl. On ne doit donc pas mettre ks émeraudes au rang des pierres précieufcs , qui par la denfitc, la dureté & rhomojnjcnéité , font d'un ordre fupérieur, & dont nous prouverons que l'origine efl toute différente de ccWc des émeraudes & de toutes les autres pierres tranfî^arentes , vitreufes ou calcaires.

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DES Minéraux. 523

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Il en cfl du PériJot comme Je l'émeraucle du Brefil; il tire également fon origine du fchorl, & ia même différence de denfitc qui fe trouve entre l'cmeraude du Brefd & les autres cmeraudes , fe trouve auffi entre la chryfblite &. le péridot ; cependant on n'avoit jufqu'ici diflingué ces deux dernières pierres que par les nuances des couleurs jaunes & vertes dont elles font toujours teintes. Le jaune domine fur le vert dans les cîiryfolites , & le vert domine fur le jaune dans les pcridots , <Sc ces deux pierres ofil-ent toutes les nuances de couleurs entre les topazes, qui font toujours purement jaunes & ies émeraudes qui font purement vertes. Mais les chry- folites difîèrent des péridots par le cara6tère elTentiel de la denfité ; le pcridot pèfe fpécifiquement beaucoup plus (n) ; Si. il paroît par le rapport des peraïueurs refpedives, que la chryfblite, comme nous l'avonë dit, eft un extrait du quartz , un criftal coloré , & que les péridots, dont la pefanteur fpécifique eft bien plus

faj La pefanteur fpccifique de la chryfolite du BrefiI efl: de ^6()z^ , & celle de la chryfolite de l'ancien continent efl: de 2782 i ; ce qui ne s'éloigne pas beaucoup de fa pefanteur 26548 du criflal ôi. de celle de la topaze de Bohème, qui efl de 26541. Voyei la Table de M, Bnjjon.

U u u ij

524 Histoire Natu relle

grande ( l) ) , ne peuvent provenir que des fchorfs également denfes. On doit donc croire que les pcridots font des extraits du fchori , tandis que les chr^foiites font des criftaux du quartz.

Nous connoiiïbns deux fortes de péridots, l'un qu'on nomme ovicmal , & dont la denfité efl confidcrablement plus grande que celle du pérfdot occidental ; mais nous connoiiïons auffi des fchorls dont les denfitcs font dans le même rapport ; le fchori criflallifé correfpond au péridot occidental , & le fchori fpathiquc au péridot oriental , & même cette denfitc du pcridot oriental n'ell pas encore au/fi grande que celle du fchori vert (c) ; & ce qui confirme ici mon opinion, c'efl que les péri- dots fe criilallifent en prifmes ftriés comme la plupart des fchorls; j'ignore à la vérité, h ces pierres font fufibles comme les fchorls , mais je crois pouvoir le pré/limer, &. j'invite les Chimifles à nous l'apprendre.

M. l'abbé de Rochon qui a fait un grand nombre d'expériences fur la réfraélion des pierres tranfparentes, m'a afluré que le péridot donne une double réfraélion

beaucoup plus forte que celle du cridal de roche , &

-

(b) La pefanteur fpécifique du péridot occidental efl de 30^89 ,

& celle du fchori criAailifé eft de 30926. Voye^la Table de M. Brïjfon,

(c) La pefanteur fpécifique du péridot oriental efi de 33548 , celle du fchori fpathrque ert de 33852, & celle du fchori olivâtre ou vert ea de y^yx^. Ibidem.

DES Minéraux, 52 j

moindre que celle du criftal d'Iilande ; de plus , le péridot a, comme le cridal de roche, un fens dans lequel il n'y a point de double rélraclion : & pui/qu'il y a une différence encore plus grande dans les deux réfradions du pcridot que dans celles du criflal, on doit en conclure que fubflance eft compofée de couches alternatives d'une denfité plus différente qu'elle ne l'cH dans celles qui compofent le crifîal de roclie.

SAPHIR DU BRESIL.

Une autre pierre tranfparente qui, comme le péridot ÔL l'émeraude duBrefd, nous paroît provenir du fchorl, efl celle qu'on a nommée Saphir du Brefil ^ & qui ne diffère que par couleur bleue, de l'émeraude du même climat ; car leur dureté <3c leur denfité {owi à très-peu-près égales (a) , & on les rencontre dans les mêmes lieux. Ce fapliir du Brefd a plus de couleur & un peu plus d'éclat que notre faphir d'eau, & leur denfité refj)e6tive eft en même raifon que celle du, fclîorl au quartz: cç.'i^ deux faphirs font des extraits ou flaladlites de ces verres primitifs, & ne peuvent ni ne- doivent être comparés au vrai fàphir dont la denfité efl d'un quart plus grande, & dont l'origine efl aufî] très- différente.

(a) La pefanteur ipccifique du faphir du Brefil eft de 31307, & celle de l'émeraude du Brefil eft de 3 1 5 j ; . Tables de M, Brijfon,

J26 Histoire Natu relle ŒIL DE CHAT NOIR

OVi NOIRÂTRE,

]\ ous avons rapporte au feld-fpath l'œil de cliat gris, i'œil de cl\r.t jaune & l'œil de chat mordoré , parce que kur denfitc eft à très-peu-prcs la même que celle de ce verre primitif; mais la pierre à laquelle on a donné Je nom à' œil de chat noirâtre efl beaucoup plus dcnlé que les trois autres : fa pefanteur fpécifique approche de celle du fchorl violet duDauphiné (a).

Toutes les pierres vitreufès & tranfparemes dont les pefanteurs fpécifiques fe trouvent entre 2^ & 28 mille, font des ftaladites du quartz & du feld - fpaih dcÇç^nek les denrucs font auffi comprifes dans les mêmes limites; & toutes les pierres vitreufes & tranfparentes dont les pefanteurs fpécifiques font entre 30 & 35 miile, doivent rapporter aux fchorls defquels 'es denfités font aufli comprifes entre 30 &. 35 mille, relativement au poids çje l'eau fuppofce 10 mille (b).

Cette manière de juger de la nature des flalaélitcs

^a) La pefanteur fpécifique du fchorl violet de Dauphiné eft de 32956 ; celle 4e l'oeil -de -chat noirâtre, de j^jpj. Tables de M' Briffon.

/hj Les pefanteurs fp«cifiques des fchorls font: fchorl criftalfifc, 50926, fchorl violet du Dauphiné, 32956; fchorl fpathique | 2^852; fchorl vejî on olivâtre, 3452^. Jbi<;lfm%

DES Minéraux. 527

Criflallifées & de les clafTer par le rapport cfe leur denfité avec celle Jes matières primitives dont elles tirent Iclî origine, me paroît, farts comparaifon, la plus diflinde & la plus certaine de toutes les méthodes, & je m'ctonne que jufqu'ici elle n'ait pas été raifie par les Naturalifîes , car la denfitc eft le caradère le plus intime, & pour ainfi <lire, le plus fùbflantiel que puiffe ofirir la matière; c'efl celui qui tient de plus près à Ton eflence , & duquel dérivent le plus immédiatement la plupart de fes pro- priétés fecondaires. Ce caradère difiindif de la denfité ou pefanteur fj:)écifique cfl fi bien établi dans les métaux, qu'il fert à reconnoître les proportions de leur mélange jufque dans l'alliage le plus intime : or ce principe fi fur à l'égard des métaux, parce que nous avons rendu par notre art leur fubflance homogène, peut s'appliquer de même aux pierres criflallifées qui font les extraits les plus purs & les plus homogènes des matières pri- mitives produites par la Nature.

528 Histoire Naturelle

B É R I L.

I j A couleur du pcriclor efl un verc mclé de jaune, celle du bcril efl un vert mêlé de bleu, & la nature de ces deux pierres nous paroît être la même. Les Lapidaires ont donné au Bcril le nom (Y aiguë - vmr'me orientale, & cette pierre nous a été afTez bien màxq^ét par les Anciens: « Le béril , difent-ils, vient de l'Inde, & on le trouve rarement ailleurs : on le taille en hexaèdre & à plufîcurs faces, pour donner par la réflexion de la lumière plus de vivacité à fa couleur, & un plus grand jeu à fon éclat , qui fans cela eft foible.

On diflingue plufieurs fortes de bérils : les plus cflimés font ceux dont la couleur efl d'un vert de mer pur , enfuite ceux qu'on appelle chryfobcrils , qui font d'un vert un peu plus pâle avec une nuance de jaune- doré .... Les défauts ordinaires à ces pierres font les filets & les taches : la plupart ont auffi peu d'éclat ; les Indiens néanmoins en font grand cas à caufè de leur grandeur (a)» » Il n'efl pas rare en effet de trouver d'affez grandes pierres de cette efj)cce, & on les diftin- guera toujours de i'aigue-marine qui ne leur reffemble que par la couleur , & qui en diffère beaucoup , tant

(a) Pline, //>. XXXVII , chap. j.

par

DES Minéraux,

S^9

par la dureté que par la dendté (b). Le béril, comme le péridot , tire Ton origine des fchorls, Si l'aigue-marine proviem du quartz ; c'efl ce qui met cette grande diffé- rence entre leurs denfitcs , & quoique le béril ne foit pas d'une grande dureté, il eft cependant plus dur que l'aigue-marine, & il a par confcquent plus d'éclat & de jeu, fur-tout à ia lumière du jour; car ces deux pierres font fort peu d'effet aux lumières.

(h) Ija pefanteur fpécifique du béril ou aiguë - marine orientale eft de 3 54-89 j tandis que celle de l'aigue-raarjne occidentale n'eft que de 2722.9. Tables de M. Bnjfon.

Minéraux , Tome IIL

Xx

53

Histoire Natu rëlle

TOPAZE ET RUBIS DU BRESIL.

Il fe trouve au Brefii, des pierres tranfj^arentes d'un rouge-clair, <Sc d'autres d'un jaune très-foncé, auxquelles on a donné les noms de Ritùis &. Topaies, quoiqu'elles ne reflemblent que par la couleur aux rubis & topazes d'Orient, car leur nature & leur origine font toutes différentes : ces pierres du Brefd font des criflaux vitreux provenant du fchorl auquel ils reffemblent par leur forme de criflallifation (a): elles fe caffcnt tranfverfalement comme les autres fchorls, leur texture eft femblable, & l'on ne peut douter qu'elles ne tirent leur origine de ce verre primitif, ])uifqu'elles fe trouvent, comme les autres crillaux, implantés dans les rocbers vitreux. Ces topazes & rubis du Brefd diffèrent effentiellement des vraies topazes & des vrais rubis, non - feulement par ce caraélère extérieur de la forme, mais encore par toutes les propriétés effentielles , la denfité, la dureté, l'homo- généité & la fufd^ilité. La pefanteur Spécifique de ces pierres du Brefil (h), efl fort au-deffous de celle de

(a) La topaze du Brefil eft en prifmes ftries ou caneles à l'extérieur comme ceux de lemeraude du même pays, & ces prilmes font ordinairement furmonte's d'une pyramide à l'extrémité qui pointe en avant au foi tir du rocher auquel leur bafe efl adhérente; cette flrudure eft conllante , mais le nombre de leurs faces latérales varie prefque autant que celles des autres fchorls.

(b) La pefanteur fpécifique du rubis d'orient eft de 42838,

DES AI I N É R A U X. 531

ces pierres d'Orient: leur dureté, quoiqu'un peu plus grande que celle du criflai de roche , n'approche pas de celle de ces pierres prccieufes; ceJles-ci n'ont, comme je l'ai dit, qu'une Imiple Sl forte réfraction, au lieu que ces pierres du Bredl donnent une double & plus foible réfraélion ; enfin elles font fiifibles à un feu violent , tandis que le diamant & les vraies pierres précieufes font combuflibîes , Si. ne fe réduifcnt point en verre.

La couleur des topazes du Brefil efl d'un jaune- foncé mêlé d'un peu de rouge : ces topazes n'ont ni l'éclat , ni la belle couleur d'or de la vraie topaze orientale; elles en dilfèrent aufli beaucoup par toutes les propriétés efieniiellcs, & fe rapprochent en tout du péridot, à l'exception de la couleur, car elles n'ont pas la moindre nuance de vert; elles font exadement de la même pcfanteur fjoécifique que les pierres aux- quelles on a donné le nom de ri/I^is du Brefil (c) : aulTi la plupart de ces prétendus rubis ne font-ils que des topazes chauffées (d) ; il ne faut pour leur donner la

& celle du rubis du Biefil n'eft que de 35311- La pelanteur fpécifique de la topaze d'orient efl de 40106, & celle de la topaze du DrellI n'efl que de 35365. Tahks de M. Bnjfun.

(c) La pelanteur fpccii^que du rubis du Brefil efl de 3531 i, & celle de la topaze du Brefil ell de 35365. IJcm.

(d) On fait depuis long-temps que les pierres prccieufes orientales peuvent foulTrir une très-forte aâion du feu fans que leur couleur

X XX ij

53- Histoire Natv pelle

couleur du rubis-balais , que les expofer à un feu aflez fort pour les faire rougir par degrés; elles y deviennent couleur de rofe, <Sc même pourprées; mais il efl très- aifé de diflinguer les rubis naturels & fa6tices du Brefil des vrais rubis, tant par leur moindre poids que par leur fauffe coideur, leur double réfradion &. la foiblefTe de leur éclat.

Ce cbangement tie jaune en rouge efl une exaltation de couleur que le feu produit daiis prefque toutes les pierres teintes d'un jaime- foncé: nous avons dit, à l'article des marbres , qu'en les chauffant fortement

foit altérée , & qu'au contraire les occidentales y perdent en très- peu de temps la leur, <Sc deviennent femblables à du criftal fi elles font traniparentes , ou d'un blanc mat fj elles font opaques ; mais on ignoroit que la topaze du Brefil ne pouvoit être comprime dans aucun de ces deux genres dont nous venons de parler ; elle a la fîngulière propriété de quitter au feu la couleur jaune & d'y devenir d'une couleur de rôle feinblabJe à celui du rubis-balais , & d'autant plus vit que le jaune de la pierre étoit plus fale & plus foncé. Le procédé efl des plus fimples ; il ne s'agit que de placer la topaze dans un petit creufet rempli de cendres , & poufl'er le feu par degrés jufqu'à faire rougir le creufet , & après l'avoir entretenu quelque temps dans cet état , de le lai/fer s'éteindre ; quand le tout fera refroidi, on la trouvera convertie en un véritable rubis-balais; nous difons convertie , car il n'eft pas poffible d'apercevoir la moindre différence entre le rubis balais - naturel & ceux-ci. C'eft ce qui avoit porté plufieurs Joailliers qui favoient ce fecret , à en faire un myftère, & c'efl: à M. Dumelle, Orfèvre, qui l'a communiqué à M. Guettard, que l'Académie en doit la connoiffance. Hijloirc de l'Académie des Sciences, année ly^y , page ^ z.

DES AI I N É R A U X. 533

lorfqu'on les polit on fait changer toutes leurs taches jaunes en un rouge plus ou moins clair. La tonaze tlu Brefil offre ce même changement Ju jaime en rouge, ÔL M. de Fontanicu, l'un Je nos Académi- ciens , obferve qu'on connoit en Bohème, im verre fufible d'un jaune à peu-près fcmblable à celui de la topaze du Brehl, qui lorfqu'on le fait chauffer, prend une couleur rouge plus ou moins foncée , félon le degré de feu qu'on lui fait fubir fej. Au refle, la topaze du Brefd , foit qu'elle ait confcrvé fa couleur jaune naturelle , ou qu'elle foit devenue rouge par l'adion du feu , fe diflingue toujours aifément de la vraie topaze & du rubis-balais, par les caradères que nous venons d'indiquer: nous fommes donc bien fondes à les féparer des vraies pierres prccieufcs , & à les mettre au nombre des flalaélites du fchorl , d'autant que leur dcnfité les en rapproche plus que d'aucun autre verre pri- mitif (y).

Je préfume, avec l'un de nos plus favans Chimiftes, M. Sage , que le rubis fur lequel on a fait à Florence des expériences au miroir ardent, n'étoit qu'un rubis du Brefd, puifqu'il eft entré en Rifion , & s'eft ramolli au point de recevoir fur fa furface l'imprelfion d'un

fej Art d'imiter les pierres precieufes; Pans, jyyS , page 28 r (f) La pefanteur ipccifique du fchorl vert ou olivâtre ell de 34529, &. celle du rubis du BrefiI de 3 53 11»

534 Histoire Naturelle

cachet, & qu'en même temps fa fubftance fondue aJhc- roit aux parois du creufet : cette fufibiiité provient du fchorl qui conftitue l'effence de toutes ces pierres du Brefil (^) ; je dis de toutes ces pierres , parce qu'indé-

( g) C'efl auiïi le fentiment d'un de nos meilleurs obfervateurs ( M. Rome de Lide , dont l'Ouvrage vient de me tomber entre les mains). Les topazes brutes, dit - il , qui nous arrivent du Brefil, ne confervent ordinairement qu'une feule de leurs pyramides , l'autre extrémité efl ordinairement terminée par une furface plane rhomboïdale qui elT: l'endroit de la caiïure qui fe fait aifément & tranfverfalement. On y dillingue facilement le tifiu lamelieux de ces criflaux. La pofition de leurs lames eft perpendiculaire à l'axe du prifme «Se conféquemment dans une direction contraire aux flries de la furface qui font toujours parallèles à l'axe de ce même prifme. Souvent les deux pyramides manquent , mais c'eil toujours par des ruptures accidentelles. L'extérieur de ces criltaux préfente des cane- îures parallèles à l'axe.

La topaze, le rubis & le faphir du Brefil ont beaucoup de rapport avec les Ichorls & les tourmalines parleur contexture, leur canelure, & par la variation dans les plans du prifine & des pyramides , qui rend fouvent leur criflallifation indéterminée.

La topaze du Brefil a rarement Ja belle couleur joncjuille de la topaze d'orient , mais elle eft fouvent d'un jaune pâle & même entièrement blanche.

Celle dont la couleur irès-foncce tire fur i'hyacinte ed la plus propre à convertir par le feu en rubis du Brefil , mais il y a auffi des rubis du Brefil naturels , fouvent avec une légère teinte de jaune , cjue les Portugais appellent topazes rouges.

Les plus beaux lont d'un rouge clair ou de la teinte que \\n\ défigne par le nom de balais. Ceux qu'on fait en expofant au feu

DES Minéraux. 53^

pendammcnt des émeraudes , faphirs , rubis Si topazes dont nous venons de parler, il fe trouve encore au Brefil , des pierres blanches tranlparentes qui font de la même eiïence que les rouges, les jaunes, les bleues Si les vertes.

la topaze du BrefiI enfunice , font d'un rouge violet plus ou moin» fonce.

Quant aux faphirs du BrefiI , il s'en trouve depuis fe Lieu foncé de l'indigo jufqu'au blanc-bleuâtre.

Le tiiïii feuilleté de ces gemmes fait qu'on les taille aufll quel- quefois de manière à produire cette réfradion de la lumière qui caradérife les pierres chatoyantes. De-Ià le rubis chatoyant , le iàphir œil de chat &. les chatoyantes jaunes, vertes, brunes, &c. du Brefil & autres lieux. Crîjlallographie par M, Rome de Lijle y tome II y pages 2 ^ ^ & fuiv.

5^

Histoire Naturelle

TOPAZE DE SAXE.

i_jA Topaze de Saxe cfl encore, comme ceiie Ju Bref il , une pierre vitreufe que l'on doit rapporter au fchori , parce qu'elle ell d'une den(\tc beaucoup plus grande que la topaze de Bohème faj &l autres cridaux quartzeux avec lefquels il ne faut pas la confondre. La topaze de Saxe &l celle du Brefd font à très-peu-près de la même pefantcur fpécilique (b) ^ & ne diffèrent que par la teinte de leur couleur jaune, qui efl bien plus légère , plus nette & plus claire dans la topaze de Saxe ; mais dans toutes deux la denfité excède de plus d'un quart celle du criflal de roche & du criilal jaime ou topaze de Bohème ; ainfi par cette première pro- priété on doit les rapporter au fchori , qui des cinq verres primitifs cfl le plus denfe: d'ailleurs, la topaze de Saxe fe trouve , comme celle du Brefd , implantée dans les rochers vitreux (cj, & toutes deux font

(û) La pefanteur fpécifique de la topaze de Saxe eft de 35640, tandis que celle de la topaze de Bohème n'eft que de 2(^541.

(bj La pefanteur fpécifique de la topaze du Brefil eft de

(c) Le fameux rocher de SchneckenJIe'm d'où l'on tire les topazes de Saxe, eft fitué près de la vallée de Dannebers à deux milles d'Amerbach dans le Voigtland. Crijlallographie de M. Rome de Life, tome H , page 2 6 ^ .

fufibles ,

DES Ml N É R A U X. <^^j

fiifibles (J), comme les fchorls, à un feu violent.

Les topazes de Saxe (e), quoique d'une couleur moins foncée que celles du Brefii, ont néanmoins diffé- rentes teintes de jaune (f). Les plus belles font celles d'un jaune d'or pur, & qui reffemblent par cette apca- rence à la topaze orientale , mais elles en diffèrent beau- coup par la denfité & par la dureté (gj : d'ailleurs,

(dj La topaze de Saxe ne fe trouve guère avec fes deux pyramides , parce qu'elle efl fouvent implantc'e dans la roche quartzeule elle a pris nai.Tance. . . . On ne les trouve jamais abfolument libres 6c folitaires , elles font entourées à leur bafe & quelquefois même entièrement couvertes d'une argile ircs-fine, blanche ou couleur d'ocre , &. plus pâle en quelques endroits. Elles ont un tiflu feuilleté & fe rompent aifément. Le prifme en eft quelquefois comme articulé ou compofé de plufieurs pièces entées l'une fur l'autre , ainfi qu'il arrive à la chryfolite du Brefil. Crijlallograph'ie , de AI, Rome de Life, tome II, page z6j.

(e ) « La topaze de Saxe , dit M. Dutens , efl jaunâtre , très- tranfparente , dure &. d'un éclat fort vif; mile au feu elle y perd ce fa couleur «Se refle blanche & claire. . . . On trouve ces topazes « dans le quartz ou parmi les grès crirtallifés & quelquefois entourés ce d'un limon jaune». Page ^ ^.

(f) La topaze de Saxe varie beaucoup dià.i\s /es nuances. Celles dont la couleur jaune efh mêlée de vert , prennent le nom de chryfûlite de Saxe , il y en a même d'un bleu verdâire ou dont Ja couleur tire fur celle de l'aiguë - marine ; mais leur couleur efl communément jaunâtre & quelquefois d'un beau jaune d'or, mais celles-ci font rares ; il y en a aufll de blanches qui ont beaucoup d'éclat. Idem , page 26 S,

(g) La pelanteur fpécifique de la topaze orientale efl de J^oioC ^ tandis que celle de la topaze de Saxe n'efl que de 35640.

Minéraux, Tome IIL Yyy

53^ H ISrO I RE N ATU RE LLE

la lumière, en traverfant ces topazes de Saxe, fe clivi/c & foufire une double réfraélion , au lieu que cette réfradion ell fimple dans la vraie topaze, qui étant & plus dénie & plus dure , a aufTi beaucoup plus d'éclat que ces topazes de Saxe, dont le poli n'efl jamais aufli vif ni la réfraélion au/Ti forte que dans la topaze d'Orient.

La texture de la topaze de Saxe eft lamelleu/è, cette pierre eft compofée de lames très-minces & très-ferrées , fa forme de criftallifation efl différente de celle du crifbl de roche (hj , 6l fe rapproche de celle des fchorls ; ainfi tout nous démontre que cette pierre ne doit point être confondue avec la topaze de Bohème, & les autres criftaux quartzeux plus ou moins colorés de jaune.

Et comme la denfité de cette topaze de Saxe efl à très-peu-près la même que la denfité de la topaze du Brefd, on pourroit croire qu'en faifànt chaufîer avec précaution cette topaze de Saxe, elle prendroit, comme

la topaze du Brefil, une couleur rougeâtre de rubis balais ;

»<

f/ij Cette pierre fe trouve, entre autres endroits, dans le Voigtiand fur le Schneckenberg près de la colline de Tanmberg à deux milles ^ Averbach on ia voit en aflez grande abondance dans les crevaiïes d'un roc fort dur , & elle s'y trouve mêlée avec une efpèce de marne jaune & avec du criftal de montagne. Quant à fa texture

intérieure, elle efl compade, mais foliée Sa figure eft prifmatique

à quatre angles inégaux ; elfe eft dure & a beaucoup d'éclat. Margraff, Journal de P hyji que , fuppU ment au mois d'Août J782, fûges j 0 I ù" fuiv.

D E s M I N É R AU X. 5 3 (^

mais Texpérience a démenti cette préfomption ; la topaze de Saxe perd fa couleur au feu , & devient tout-à-fait blanche , ce qui vient fans doute de ce qu'elle n*efl teinte que d'un jaune très-léger en comparaifon du jaune foncé & rougeâtre de la topaze du Brefd.

GRENAT.

V^uoiQUE la pefanteur fpéeifique du Grenat excède celle du diamant , & foit à peu-près la même que celle du rubis & de la topaze d'Orient fa), on ne doit ce- pendant pas le mettre au rang de ces pierres précieufes ; s'il leur reffemble par la denfité, il en diffère par la dureté , par l'éclat & par d'autres propriétés encore plus eflemielles ; d'ailleurs l'origine, la formation & la com- pofuion des grenats font très-différentes de celles des vraies pierres précieufes ; la fubflance de celles - ci efl homogène &l pure, elles n'ont qu'une fimple réfradion, au lieu que la fubflance du grenat efl impure, com- pofée de parties métalliques &. vitreufes , dont le mélange manifefle par la double réfraélion & par une den- fité plus grande que celles des criftaux & même des diamans. Le grenat n'efl réellement qu'une pierre

(a) Pefanteur fpéeifique du grenat 41888, du grenat Syrien 40000, du rubis d'Orient 42838, de la topaze d'Orient 401 06. Voyei les Tables de M. Brijfon.

Yyy ij

54Û Histoire Nature lle

vitreiife mêlce de métal {h); c'efl du fchorl & du fer, Ta couleur rouge & fa fufibilité le dcmontrcnt; il faut à la^^vcrité un feu violent pour le fondre. M. Pott e(l le premier qui l'ait londu fans intermède & fans addition; il fe rcduii en un émail brun & noirâtre.

Le grenat a d'ailleurs beaucoup de propriétés com- munes avec les fclîorls de féconde formation ; il ref- fèmblc par fa compofition aux émeraudcs & faphirs du Brefd (cj j il efl, comme le fchorl, fufible fans addition; ie grenat & la plupart des fchorls de féconde formation font mêlés de fer, <5c tous Jes grenats en contiennent une plus grande quantité que les fchorls ; plufieurs même agiffent far l'aiguille aimantée : ce 1er contenu dans les grenats eft donc dans fon état métallique , comme le fable ferrugineux qui a confervé fon magnétifme, & i*on ne peut douter que leur grande pefanteur ne provienne & ne dépende de la quantité confidérable de

(b) Certains Chimiftes ont penfé que la couleur rouge du grenat venoit de l'or & de l'ctain , parce que l'on contrefait les rubis & les grenats au moyen d'un précipité d'or par l'étain ; mais on a démontré depuis, que les grenats ne contiennent que du {et Se point du tout d'or ni d'ctain. Voye-^ le Diûionna'ire de Chimie de AI. Alûcquer , nrticle Mines, page 6^0,

(c) La plupart à^i crillailifations du grenat femblent prouver que {qs molécules (oi\t rhomboïdales, de même qiie celles des fchorls & des pierres prccieufes du lîréfil. Lettres de AI, Demcjle , tome /,

DES Minéraux, 5^1

fer qui efl entre clans la compofition de leur fubftance. Les diitérentes nuances de leur couleur plus ou moins rouge, &. de leur opacité plus ou moins grande, en dépendent aufli ; car leur tranfparence efl d'autant plus grande qu'ils contiennent moins de fer , & que les particules de ce métal font plus atténuées ; le grenat Syrien, qui efl le plus tranfj^arent de tous, efl en même temps le moins pefant , & néanmoins la quantité de fer qu'il contient efl encore affez grande pour qu'il agiffe fur l'aiguille aimantée.

Les grenats ont tant de rapports avec les fclioris, qu'ils paroiffent avoir été produits enfèmWe & dans les mêmes lieux ; car on y trouve également des maffes de fchorl parfemées de grenats , & des maffes de grenat parfemées de fchorl fd): leur origine & leur formation paroiffent être contemporaines & analogues ; ils fe trouvent dans les fentes des rochers graniteux, fchifleux, micacés <Sc ferrugineux, en forte que le grenat pourroit être mis au nombre des vrais fchorls, s'il ne contenoit pas une plus grande quantité de fer qui augmente denfité de plus d'un (ixième; car la pefanteur fpccihque . du fchorl vert, le plus pefant de tous les fchorls, n'efl

(d) On voit entre Faiflriiz & Cornowitz, des morceaux défachés de fchorl vert fpathique , cjui renferment de grands grenats rouges; quelques-uns de ces morceaux de fchorl font écailleux &. d'un tiHli micacé. Lettres fur la Alinéralogie , par AL Ferber j à^c. traduites par M. le Baron de Diétriçh , pages p & i q.

542 Histoire Naturelle

que de 34529, tandis que celle du grenat Syrien, Je moins pefant & le plus pur des grenats, efl: de 40000. Les grenats les plus opaques contiennent jufqu'à vingt- cinq & trente livres de fer par quintal, & les plus tranfparens en contiennent huit ou dix , c'eft - à - dire , toujours plus que les fchorls les plus opaques &. les plus pcfans : cependant il y a des grenats qui ne font que très-peu ou point fenfibles à Taétion de J'aimant, ce qui prouve que le fer dont ils font mélanges, étoit réduit en rouille , & avoit perdu fon magnétifme lorf- qu'il efl entré dans leur compofition.

Ainfi le fer donne non-feulement la couleur, mais la pefanteur aux grenats ; on pourroit donc les regarder comme des ftaladites de ce métal , & nous ne Jes rapportons ici à celles du fchorl qu'à caufe des autres propriétés qui leur font communes , & des circonflances de leur formation qui femblent être les mêmes. La forme des grenats varie prefque autant que celle des fchorls de féconde formation ; leur fuhflance vitreufe efl tou- jours mêlée d'une certaine quantité de particules ferru- gineufes, & les uns &l les autres font attirables à l'aimant, iorfque ces particules de fer font dans leur état de magnétifme.

Les grenats, comme les fchorls de féconde forma- tion, fe préfentcnt quelquefois en affez gros groupes, mais plus fouvent en criflaux ifolés & logés dans les fentes &. cavités des rochers vitreux, dans les fchifles

DES Minéraux. ^^^

micacés & dans les autres concrétions du quartz, du feld-fpatli & du mica ; & comme ils font difféminés en grand nombre dans les premières couches de la terre, on les retrouve dans les laves cSl dans les déjedions volcaniques. La chaleur de la lave en fufion change leur couleur de rouge en blanc, mais n'eft pas affez forte pour les fondre, ils y confervent leur forme & perdent feulement avec leur couleur une grande partie de leur poids (c), ils font au/fi bien plus rcfradaircs au feu : la grande chaleur qu'ils éprouvent lorfqu'ils font faifis par la lave en fufion, fuffit pour brûler le fer qu'ils contenoient, &. réduire par conféquent leur denfité à celle des autres matières vitreufes; car on ne peut douter que le fond de la fubftance du greiiat ne foit vitreux, il étincelle fous le briquet, il réfifte aux acides, il a la caffure vitreufe, il eft auffi dur que le

(e) La pefanteur fpécifique du grenat volcanifé n'eft que de 2,4684; au lieu que celle du grenat ordinaire efl: de 41888. Voye^^ la Table de AI. Brijfon. Rien de plus commun que les grenats à vingt-quatre faces dans les laves & autres produits volca- niques de l'Italie. Tantôt ils s'y trouvent plus de'colorés par l'adion de l'acide marin & quelquefois comme à demi vitrifiés; tantôt ils font encore plus décompofés & à l'état d'argile blanche ou de terre non efFervelcente avec l'acide nitreux ; mais dans l'un ou l'autre cas , ils confervent leur forme granatique , & quoique les grenats femblent avoir fouffert un retrait ou une légère dépreOion qui rend i'arête des bords plus faillante , leur forme trapézoïdale , loin d'en être altérée , n'en devient que plus fenfible. Lettres du Doùkur Demejle au D odeur Bernard, tome J , pages ^^^ & fuiv.

544- Histoire N atu relle

criftal, & s'il n'étoit pas chargé de fer, il aiiroit toutes les qualités de nos verres primitifs.

Si le fer n'entroit qu'en vapeurs dans les grenats pour leur donner la couleur, leur pefanteur /])ccifique n'en feroit que trcs-pcu ou point augmentée; le fer y réfide donc en parties mafTives , & c'efl de ce mélange que provient leur grande denfué : en les expofànt à un feu violent & long-- temps foutenu, le fer fe brûle c^ fe diflipe, la couleur rouge difparoît, & lorfqu'on leur fait fubir une plus longue & plus violente adion du feu, ils îonàcnt Si ih convcrtifTent en une forte

d'émail //).

Quoique les Lapidaires diftinguent les grenats en orientaux & occidentaux, il n'en eft pas moins vrai que

/fj Ce n'efl: en effet qu'à un feu libre &. trcs-vioJent ou trcs- long-temps foutenu , que le grenat perd fa couleur , car on peut cmailler fur cette pierre fans qu'elle fe décolore & fans qu'elle perde foa poli ; &: je me fuis aiïuré qu'il falloit un feu xioïent pour diminuer la denfité du grenat & brûler le fer qu'il contient. J'ai prié M. de Fourcroy , l'un de nos plus habiles Chiniiftes , d'en ùire l'expérience. Il a expofé dans une coupelle pefant trois gros vingt-cinq grains, douze grains de grenat en poudre. Après trois heures d'un feu très-fort , pendant lequel on n'a aperçu ni vapeur , ni flamme, ni décrépitation , ni faùon fenfbles dans la matière, le grenat a commencé à fe ramollir 6c à fe ]>ourfouffîer légèrement. Le feu ayant été continué pendant huit heures en tout , le grenat n'a pas éprouvé une fufion plus forte , & il eH: refté conflamment dans l'état de ramollilfement déjà indiqué. L'appareil refroidi a préfenté une matière rougeâtre , aglutinée , adhérente à la coupelle.

dans

D E s M I N É R A U X. 5 4.5

dans tout pays iis font de même nature , & que cette diftinclion ne porte que fur la différence d'éclat & de dureté. Les grenats les plus purs & les plus tranf])arens , loriqu'ils font polis, font plus brillans ^^ plus durs, &L ont par conféquent plus d'éclat & de jeu que les autres, & ce font ceux que les Lapidaires appellent grenats oncntaux ; mais il s'en trouve de pareils dans les régions de l'Occident comme dans celles de l'Orient; les grenats de Bohème en particulier font même fouvent plus purs , plus tranfparens & moins déicclueux que ceux qu'on apporte des Indes orientales : il faut néan- moins en excepter le grenat dont le rouge eft teint de violet, qui nous vient de l'Orient, & fe trouve parti- culièrement à Surian, dans le royaume de Pégu, & auquel on a donné le nom de grenat Syrien (g) ; mais ces grenats les plus tranfparens (Se les plus purs, ne le font cependant pas plus que le criltal, & ils ont, de même que toutes les autres pierres vitreufes, une double réfraction.

Quoique dans tous les grenats le fond de la couleur foit rouge, il s'en trouve, comme l'on voit, d'un

(o-^ Il paroît que le mot fyrien vient de Sun an , ville capitale du royaume de Pcgu. Les Italiens ont donne à ces grenats, le noni de ruhïni rocca , <3c cette dénomination n'ell pas mal appliquée , parce que Jes grenats Te trouvent en eftet dans les roches vitreufes, tandis que les rubis tirent leur origine de la terre limoneuse , &: Te trouvent iloles dans les terres &. les Tables.

Mincraux , Tome UI, Zzz

54-<5 Histoire Naturelle

rouge - pourpré , d'autres font mêlés de jaune & ref- femblent aux hyacinthes; ils viennent aufîi des Indes orientales (h): ces grenats teints de violet ou de jaune font les plus eflimés, parce qu'ils font bien plus rares que les autres, dont le rouge plus clair ou plus foncé efl la feule couleur. Les grenats d'Efpagne /ont com- munément d'un rouge femblable à celui des pépins de la grenade bien murs, &. c'efl peut-être de cette ref- femblance de couleur qu'on a tiré le nom de grenat. Ceux de Bohème font d'un rouge plus intenfe (i) , &

(h) Le grenat fyrien efl: d'un rouge plus ou moins pourpre', ou charge de violet, & cette couleur n'efl: jamais claire. Il y eu a de prefque violets , mais ils font rares & n'ont guère cette couleur que lorfque la pierre a un certain volume.

Quoique le grenat fyrien foit afTez commun , on en rencontre difficilement de fort gros , purs & parfaits ; en géne'ral fa couleur en eft rarement franche & décidée; elle efl très-fouvent fourde & enfumée.

C'ell: le grenat fyrien, lorfqu'il efl vif & bien pourpré, que les fripons & les ignorans font quelquefois pafTer pour améihyfle orien- tale , ce qui fait croire à des gens peu infiruits^ que cette dernière n'efl: pas fi rare qu'on le dit. Note communiquée par M. Hoppé.

(i) Le grenat de Bohème ( appelé vermeil en France ) efl d'un rouge-ponceau foncé , mais pur & velouté. La grande inienfité de fa couleur ne permet pas de le tailler à facettes deffus & deflbus , comme les autres pierres , car il paroîtroii prefque noir ; mais on le cabochonne en deffus & on le chève en deffous ; cette opé- ration l'amincit aflez pour qu'on puiffe jouir de fa riche & iuperbe couleur , & lui domie un jeu grand & large qui enchante l'ceil d'un amateur.

DES Minéraux. 5^7

il y en a aiifTi de verdâtres (li), de bruns & de noi- râtres : ces derniers font les plus opaques & les plus pefans, parce qu'ils contiennent plus de 1er que les autres.

La pierre à laquelle les Anciens ont donné le nom de carbunculus, & que nous avons traduit par le mot ffciV'boucle , ell vraifemblablemcnt un grenat d'un beau rouge & d'une belle tranfparence ; car cette pierre brille d'un feu très - vif, lorfqu'on l'expofe aux rayons du foleil (l) ; elle conferve même affez de temps la

Un grenat de Bohème parfait, d'une certaine grandeur , e(l une chofe extraordinairement rare ; rien de plus commun en très-petit volume.

Les défauts ordinaires des grenats de Bohème , font d'être remplis de points noirs & de petites bulles d'air, comme une compofition, ces petites bulles d'air fe rencontrent encore dans d'autres grenats, Tur-iout dans ceux il entre du jaune.

Ce que l'on appelle grenat de Bohême en France , eft une pierre très-différente de celle dont on vient de parler ; elle eft plus claire & d'un rouge vinaigre ou fie de vin légèrement fjleuâtre & très- rarement agréable. Note communiquée par AL Happé.

(k) Le grenat varie par fa couleur; quelquefois il eft du plus beau rouge tirant fur le pourpre, c'ed le vrai grenat; d'autres fois il eft d'un rouge-jaunâtre & tire fur l'hyacinthe ; ceux de Bohème font d'un rouge très-foncé. On en trouve en Saxe & dans le Tyrol, qui font verdâtres , peu ou point tranfparens , fouvent même entière- ment opaques. Leur gangue ordinaire eft le quartz ou le feld fpath , & fur-tout le mica j'en ai vu d'une groffeur extraordinaire, d'un rouge foncé , qui étoient ainfi recouverts de mica. Idem,

(l) L'efcarboucle garamantine des Anciens eft le véritable grenat des

Zzz i;

54-8 Histoire Naturelle

lumière dont elle s'imbibe, pour briller enfuite clans l'obfcurité & luire encore pendant la nuit fmj . Cepen- dant le diamant & les autres pierres précieufes jouiffent plus ou moins de cette même propriété de conferver pendant quelque temps la lumière du- foleil , & même celle du jour c|ui les pénètre & s'y fixe pour quelques Jieures; mais comme !e mot latin carbuncubis , indique une fubfîance couleur de feu, on ne peut l'appliquer qu'au rubis ou au grenat, & les rubis étant plus rares <5i en plus petit volume que les grenats, nous nous croyons bien fondés à croire que i'efcarboucle des Anciens étoit un vrai grenat d'un grand volume, (Si. tel qu'ils ont décrit leur carbiiucidus.

La grandeur des grenats varie prcfque autant que celle des criflaux de roche, il y en a de fi petits qu'on ne peut les diflinguer qu'à la loupe , (Si d'autres ont

Alodernes. L'expérience fuit voir que cetre pierre a plus l'apparence d'un charbon ardent au foleil que Je rubis ou toute autre pierre prc- cieufe de couleur rouge. Voye^^ Hill fur Théophrcifie , page 6 i .

(m) Je ne fais cependant fi l'on doit accorder une entière confiance à ce que je vais rapporter ici. « Dans une des falies du palais du roi de M Ja Chine, il y a une infinité de pierreries fans prix: , & un ficge ou 33 trône précieux le roi s'afiled en niajeftc. 11 ell fait d'un beau » marbre dans lequel il y a tant d'efcarboucles & d'autres pieneries des 3:» plus rares, ouvragées <x enchaffees, que durant la plus obfcure nuit » elles éclairent autant la falle que s'il y avoit wn grand nombre de chandelles allumées. « Recueil des voyages qui ont fervi à l'étaù/ijjenient de la Compagnie des Indes; Anijkrdam , i jQz, îvnie III, page 4^Q.

DES Minéraux, 5^9

pluficurs pouces &l jufqu'à un pied de diamètre; ils ft trouvent également dans les fentes des rocliers vitreux, les petits en criflallifation régulière, ^ les plus gros en forme indéterminée ou bien en criftailifluion confiife: en général ils n'affeélcn: fJ3écialcmcnt aucune forme particulière ; les uns font rliomboïdaux ; d'autres lont odlaèdres , dodécaèdres ; d'autres ont quatorze , vin<'-t- quatre & trentc-fix faces (u): ainfi la forme de criftalli-

(n) Il y a des grenats teflulaires dodccacdres, dont les plans font des rhonibes.

II y en a d'autres 336 facettes, dont 24. hexagones alongc'es plus . petites que les \ 2 rhonibes.

II y a des grenats trapézoïdaux ou grenats teiTuIaires à 24. facette?, dont les plans font des trapczoïdes.

Al. Fauias de Saint-Fond fait mention de fix varicics de orenats.

La première d'un rouge couleur de feu , décaèdre, formée par un prifme court hexaèdre, terminé par des pyramides tricdres obtufes.

La féconde à douze facettes & à prifme alongc , qui efl: d'un très- beau rouge, légèrement jaunâtre; cette efpèce femble tenir le milieu entre le grenat & l'hyacinthe, «Se le rapprocher de celle que les Italiens nomment giacinto-guûrna/Iind , hyacinthe-grenat.

Deux autres de même forme, mais dont l'un a perdu fa couleur 6c efl blanc &. cryflallin.

Un autre à priime court hexagone, terminé par deux pyramides pentagones , dont les faces font la plu])art rhomboïdales ou à cinq côtés , ce qui forme un grenat à feize facettes. '

Un autre avec un pareil nombre de facettes , mais dont le prifme trèsalongc a huit tdces terminées à chaque bout par une pyramfde aiguë &. en pointe des quatre côtés. Recherches fur Us volcans éteints,' par AL Faujas de Saint- Fend.

5)0 Histoire Naturelle

fation ne peut fervir à les faire reconnoître & diflinguer des autres criflaux.

li y a des grenats fi tran/j^arens & d'une i\ belle couleur qu'on les prendroit pour des rubis ; mais fans être connoiffeur, on pourra toujours les diflinguer aifé- ment ; le grenat n'eft pas fi dur à beaucoup près , on peut l'entamer avec la lime, &l d'ailleurs il a, comme toutes les autres pierres vitreufes, une double réfraélion, tandis que le rubis & les vraies pierres précieufes dont la fubftance efl bomogène, n'ont qu'une feule réfraétion beaucoup plus forte que celle du grenat.

Et ce qui prouve encore que le grenat efl de la même nature que les autres pierres vitreufes , c'eft qu'il fe décompofè de même par l'adion des élcmens hiunides (oj .

On trouve des grenats dans prefque toutes les parties du monde. Nous connoiffons en Europe ceux de Bohème, de Siléfie, de Mifiiie, de Hongrie, de Stirie;

(o) M. Greifelius dit ( Ephéménde s (T Allemagne , année i6yo a I 6 S 6) qu'à un mille de la vallée de Saint- Joachim , fur X^^^ confins de la Bohème & de la Mifnie, font des montagnes de grenats: tout y ell plein de ces pierres , on en voit une grande quantité fur la furface de la terre , mais de nulle valleur , ayant été calcinées par la chaleur du foleil. Pour avoir des grenats de quelque prix , il faut fouiller la terre de ces montagnes , car il paroît qu'une certaine humidité efl néceflaire pour les conferver. On dit qu'un cent pefant de ces pierres contiennent quelques onces d'argent fin. Collcdion académique , Partie étranger e , tome IV, page i a i.

DES AI I N É R A U X. 551

il s*cn trouve aufTi dans le Tyrol , en Suifle, en Ef- pagne (pj^ en Italie & en France, fur-tout dans les terreins volcanifés fi^J: ceux de Bohème font les plus purs» les plus tranfJDarens &. les mieux colorés f?-J. Quelques

^pj Vers la moitié de ce chemin (de Motril à Almeria) il y a une grande- plaine qv»i s'en éloigne à trois lieues; elle eft fi remplie de grenats , que l'on en pourroit charger un vaifléau ; le lieu l'on en trouve le plus eft un ravin formé par les eaux & les orages au pied d'une colline balle qui eft: aufli remplie de ces pierres. Dans le lit de ce ruilTeau il y a beaucoup de pierres rondes avec du mica blanc ; elles font pleines de grenats en dedans ôc en dehors , &. l'on voit qu'ils viennent de la décompofition de la colline. Hijioire Naturelle d' Efpagne, p(ïr\ Ai. Bowles , page 12^.

(q) Il y a plufieurs années qu'on a de'couvert près de Salins, une veine de grenats. Sur r exploitation des mines , par Ai, de Genfanne ; Savans Étrangers, tome IV, page i^i. On trouve fur les bords d'un ruifleau nommé le Riouppenouliou près d'Expailly, à un quart de lieue du Puy, des grenats qui font dans les matières volcanifées . . , .

Il eft fmgulier que dans prefque tous les pays Ton a des mines de grenats, tels qu'à Swapawari en Lapponie , en Norwcge, fur les monts Krapachs en Hongrie, &c. on foit dans la perfuafion qu'ils ont prefque toujours avec eux des paillettes d'or ou d'argent; j'approuve fort la raifon que donne M. Lehmann de cette croyance « J'ai ima- giné, dit cet habile Chimifte, que ce qui a fait croire que les grenats ce contiennent une aflez grande quantité d'or , vient de la pierre « talqueufe & luifante qui leur fert de matrice. » Recherches fur Us Yolcans éteints , par M. Faujas de Saint- Fond , page i S^ & fuivante.

(r) Boëtius de Boot , donne aux grenats de Bohème la préférence fur tous les autres , même fur ceux de l'Orient , à caufe de leur pureté & de la vivacité de leur couleur qui, félon lui, réfifte au feu. Mais, fuivant M. Pott, les grenats en fe fondant au ièu perdent leur

55^ Histoire Natu relle

Voyageurs affarent en avoir trouve de très - beaux en Groenland &l dans la Lapponie { f) .

En Aiie, les provinces de Pégu, de Camboie, de Calicut , de Cananor , font abondantes en grenats ; il s'en trouve zi\(ï^i à Golconde & au Thibet (rj.

Les Anciens ont parlé des grenats d'Ethiopie, & l'on connoît aujourd'Iuu' ceux de Madagafcar; il doit s'en trouver dans plufieurs autres contrées de l'Afrique: au refte, ces grenats apportés de Madagafcar font de la même nature que ceux de Bohème.

Entin, quoique les Voyageurs ne fafTcnt pas mention

tranfparence ôi. leur couleur rouge. Le iiuine Boëtius dit qu'en Cohcme les gens de la campagne trouvent les grenats en morceaux gros comme des pois, répandus dans fa terie, fans ctre attaches à aucune matrice; ils font noirs à la furface , & l'on ne peut en recon- noître la couleur cpi'en les plaçant entre l'tx-il c'k la lumière. . . . I^es grenats de Silefie font ordinairement d'une qualité' très- médiocre. Encyclopédie , article Grenat.

(f) M. Crantz met le grenat de Groenland dans la clafle du quartz, parce qu'il fe trouve dans les lentes des rochers quartzeux, en morceaux de grandeur &: de formes inégales. Mais comme il efl: très-dur & d'un rouge tranlparent qui tire fur le violet , les lapidaires le rangent parmi les rubis. C'efl dommage qu'il foit fi fragile & qu'on n'en puiffe confèrver que de \i. grofîeur d'une fève cjuand on le met en oeuvre, H'ijfoire générak des Voyages, tome XIX, page 2^.

( t ) Le royaume de Golconde produit beaucoup de grenats. H'ijloîre générale des Voyages, tome IX, page y i y. Vers les montagnes du Thibet qui lont l'ancien Caucafe , dans les terres d'un Raja, au-delà du royaume de Cachemire , o\\ connoît trois montngnes dont l'une produit de:3 grenats. Idem, tome X, p^g^ ^ 2.y,

des

D E s M I M É R A U A\ 555

des grenats d'Amérique, on ne peut guère douter qu'il ny en ait dans plufieurs régions de ce vafte continent, comme il s'en trouve dans toutes les autres parties du monde.

H VA C I N T HE.

-tVrès le grenat fe préfente l'Hyacinthe qui approche de fa nature , & qu'on doit auffi regarder comme un produit du fchorl mêlé de fubflances métalliques. L'hyacinthe fe trouve dans les mêmes lieux que le grenat, elle donne de même une double refradion, ces deux pierres criflallifées fe rencontrent fouvent en- femble dans les mêmes mafTes de rochers (a): on doit donc la rapporter aux criflaux vitreux, & c'eft après le grenat la pierre vitreufe la plus denfe (b). Sa couleur

(a) Cette pierre hyacinthe aufli commune que le grenat ( que (buvent elle accompagne ), peut (ans doute , ainfi que celui-ci , (e rencontrer dans les deux Indes aulîi fréquemment qu'en Europe... Il y a des grenats qui ont la couleur de l'hyacinthe , & il y a des hyacinthes qui ont celle du grenat, mais ces deux pierres diffèrent beaucoup l'une de l'autre par la forme & la gravité fpécifique ... La dureté de l'hyacin- the l'emporte fur celle du grenat, mais trop peu ; 2.° la gravité fpéci- fique du grenat eft fupérieure à celle de l'hyacinthe. . . L'hyacinthe éft infufible au degré de feu qui met le grenat en fufion. Ejfaî de Crijlallographie y par M. Rome de Life, tome JJ , pages 28^ & fuivantes.

(h) La pefânteur fpécifique de l'hyacinthe eft de 3^873, & celle du grenat Syrien de 40000.

Minéraux, Tome II L Aaaa

554- Histoire Natu rellb

n'eft pas franche, elle efl d'un rouge pius ou moins mélc de jaune ; celles dont cette couleur orangce ap- proche le plus du rouge , font les pius rares &. les plus eftimées ; toutes perdent leur coidcur au feu, & y deviennent J3Janches, /ans néanmoins perdre leur iranf- parence, & elles exigent pour fe fondre un pius grand degré de feu que le grenat (c). On voit des hyacinthes

(c) Cetce pierre ell d'an rouge tirant lur le jaune, c'efl-à-dire , d'une couleur \)\us ou moins approchante de celle de l'orangé. Lorf- f]u'on expofe l'hyacinthe à l'adion d'un feu alTez violent, eile perd Çd couleur & conlei ve fa tranfparence , ce qui prouve que la lubflance qui la colore eft volatile: fi on laiiïe ces criftaux expofcs trop long-temps à l'adion du feu , ils s'y vitrifient fans intermède , au moins à leur furface : car ils adhèrent alors entr'eux & aux parois du creufer. La pierre qui porte le nom de jargcn , n'efl autre chofe que l'hyacinthe blanchie au feu pour imiter le diamant. Lettres du doâcur Dewejle , &c. tome I , page ^12. La couleur de cette pierre eft d'un rouge tirant fur le jaune , ce qui la rend plus ou moins tranfparcnte ; elle entre totalement en fufion au feu , elle efl: plus légère & plus tendre que le grenat, aulTi lalime a-t-elle facilement de la jirife fur elle. On a,

I,* L'hyacinthe d'un jaune rougeâtre , ou l'hyacinthe oriental: on fa trouve en Arabie , à Cananor , à Calecut & à Camboye ; la couleur de cette belle hyacinthe efl; d'un rouge foible d'écarlate ou de cornaline, ou de vermillon, tirant lur le rubis ou plutôt fur le grenat, au travers de laquelle on remarque ordinairement une kfgère nuance de violet- colombin ou d'améthyfte, elle eil très-refplendiflante, dure, & reçoit «n poli vif :

2.° L'hyacinthe d'un jaune de ^fran, ou l'hyacinthe occiàemûe-^ elle efl: moyennement dure , d'une couleur plus fafrance, plus orangée, & bien moms éclatante que la précédente ; elle reflèmble quelquefois

D E s M I M É n A U X, 5^5

en très - grande quanticc dans ies mafTes de roches vitrcufcs, & autres inaticrcs rejetées par le Véftive (J),

à la .^ur du louci ou à lu Heur d'hyacinthe , &. nous vient du Portugal ;

3.° L'hyacinthe d'un blanc jaunâtre : elle a beaucoup de reflein- blance avec l'agate ou avec le fuccin qui efî: d'un blanc- jaui-^âtre :

4,° L'hyacinthe couleur de miel ou hyacinthe niielice : autant la précédente relVemble au fuccin , autant celle-ci reffemble au miel, tant par fa couleur que par Ion éclat cjui efl: foible & terne : ces deu>: dernières fortes d'hyacinthe font peu dures, peu iranfp-rentes, mal nettes , pleines de graine ou de peiiies taches qui les font tailler à facettes pour en cacher les défauts; elles fe foutiennent bien moins de temi)s au feu que les orientales. Elles nous viennent de la Siléfie & de ia Bohème.

Ce qu'on appelle jdrgon d'Auvergne, font des petits criflaux à facettes & colores, bien des gens les regardent comme des primes d'hyacin- thes, ils font brillans 6; très-i edts. On les rencontre communément dans le Vivarais j)rès du Puy.

On nous apporte de CompodeHe en Ei pagne , fous le nom dliy^ cintJjes , des pierres ruuges-opaques , qui ont une figure déterminée & qui ne font c[ue des cryflaux. A'Unéralogie de Bomarc , tome /, pages z4^ à' fulvantcs.

(d) Il y a des hyacinthes blanches , foit en criflaux folitaires, foit en groupes: ces dernières viennent des bafes de la Somma en Italie. La roche qui fert de gangue aux hyacinthes de la Somma , a fouffert plus ou moins de l'action du feu , mais en général elle efl fort peu dénaturée. La couleur de ces hyacinthes tire plus ou moins lur le brun; les unes font dans des gangues argiltules micacées plus ou moins cuires ; les autres dans des malfes de grenats dodécaèdres à bords tronqués , d'autres font entre-mclés de fchorls prifmatiques , de fchorls dodécaèdres & même de fpath calcaire.

^ Aaaa i;

5 5^ Histoire Naturelle

ÔL ces pierres fe trouvent non-feuiement en Italie dans Jes terreins voicanifés, mais auifi en Allemagne, en Pologne, en Efpagne, en France, &. particulièrement dans le Vivarais ôl l'Auvergne ^e): il y en a de toutes les teintes, de rouge mêlé de jaune, ou de jaune mêlé de brun; il y en a même des blanches qu'on connoît fous le nom de jûrgon (f). II s'en trouve aulTi d'un

II y a au Vefuve des hyacinthes , les unes en groupe , les autres en criflaux folitaires; il y en a de brunes, de verdâtres , &c. leur couleur la plus ordinaire eft un jaune -foncé mêlé de rougeâire, mais qui tire fouvent fur le verdâtre ou le noirâtre.

(^i\ Jes trouve non -feulement au Vefuve , mais encore parmi certaines éruptions des anciens volcans éteints de l'Italie , & même d'autres contrées. . . .

Elles ne font point un produit du feu des volcans , comme M. Ferber le dit en plufieurs endroits de les Lettres fur l'Italie , en confondant ces hyacinthes, tantôt avec les i'chorls , tantôt avec l'émail ou verre de volcan fi connu fous le nom de pierre ohfidîenne ; mais elles faifoient partie des roches primitives du fécond ordre, qui fe font trouvées dans la fphère d'adivité du foyer volcanique.

Il fe trouve des hyacinthes blanches en croix par la réunion de quatre de leurs criilaux fimples parallèlement à leur longueur. ( On peut obferver que cette figuration eft encore un caradère commun à l'hya- cinthe & au fchori dont les criftaux fe trouvent fouvent croilés les uns fur les autres ). Cr'ijlcllo graphie par Ai. Rome de Lijle , tome H , pages 2S ^ & fuivantes.

( e ) Il fe trouve des hyacinthes d'un beau rouge de vermeil ou de grenat. M. Faujas de Saint- Fond les a trouvées dans un ruiifeau à un quart de lieue du Puy en Vélay, Jdem , page 2 S S.

(f) J'ai trouve parmi les grenats d'Expailly ( pays volcanique du

DES Minéraux, y^y

jaune affez rouge pour qu'on s'y trompe en les j)renant pour des grenats, mais la plupart font d'un jaune enflimc, 6l même brunes ou noirâtres : elles fe trou\ cnt quel- quefois en groupes, & fotivent en criflaux ifolés fgj; mais les unes & les atures ont été détachées du rocher elles ont pris naiffance comme les autres criflaux vitreux. M. Rome de Lille dit avec raifon : « Que l'on donne quelquefois le nom <S^ hyacinthe orinuale , à tt des rubis d'Orient de couleur orangée, ou à des jargons «» de Ceylan, dont la teinte jaune efl mêlée de rouge, de même qu'on donne auiïi quelquefois aux topazes orangées du Brefil, le nom A' hyacinthe occidentale oïl de Pornti^al ; mais l'hyacinthe vraie ou proprement dite, e(l une pierre qui diffère de toutes les précédentes, moins par couleur qui eft très- variable , que par

Vélay ) de véritables hyacinthes , d'un jaune tirant fur le rouge , criftallifées à prifines quadrilatères oblongs, terminés à l'un & à l'autre bout par une pyramide à quatre côtés. J'en polsède une qui a un pouce de lono^ueur fur fix lignes de diamètre, mais qui n'a point de pyramide. On appelle ces hyacinthes , jargons d'hyacinthes du Puy. Recherches fnf Us Volcans éteints, par M. faujas de Saint- Fond , page i Sj.

(g) Ces hyacinthes jaunâtres font afTez fouvent groupées dans les cavités des roches quartzeufes ou feld-fpaihiques qui ont été détachées des entrailles du volcan , fans avoir trop fouffert de l'acflion du feu. Cette adion a bien été aflez violente pour les altérer plus ou moins , mais non pour les dénaturer entièrement. Les angles des criflaux ont confervé leur tranchant , les faces leur poli , & le quartz ou feld-fpath fa blancheur & fa folidité. Lettres du doÛeur Demejle , tome I, page 41 S,

5)8 Histoire N atu r elle

fa forme, fa duretc <& fa gravité fpccifiqiie (IiJ ».

Et eu eftèt, quoiqu*il n'y ait à vrai dire qu'une feule & mcme eflcnce clans ]es pierres prccieufes, & que communément elles fbient teintes de rouge, de jaune ou de bleu, ce qui nous les fait diftingutr par Jes noms de ru lus , lopaics ir faplùrs , on ne peut guère douter qu'il ne fe trouve aufli dans les climats chauds des pierres de mcmc eflence , teintes de jaune mclc d'un peu de rouge , auxquelles on aura donné la déno- mination (ïhyûdnthcs orientales; d'autres teintes de violet, «Se même d'autres de vert, qu'on aura de même dénommées améîh'ijlcs & émeraiides orientales ; mais ces pierres pré- cieufes, de quelque couleur qu'elles foient, feront toujours très-aifées à diilinguer de toutes les autres par leur dureté, leur denfité, & fur-tout par l'iiomogénéité de leur fùbilance qui n'admet qu'une feule réfradion ; tandis que toutes les pierres vitreufes dont nous venons de faire rémunération, font moins dures, moins denfes, & en même temps fujettes à la double réfraélion.

^h) CriRallographie , par M. Rome de Lifle, tome II, page 282,

DES Minéraux.

5>9

TOURMALINE (a).

V^ETTE pierre ctoit peu connue a\ant la publication d'une Leitre que Ivi. le duc Je iN03a-Caraifà m'a fait i'iionneur de m'ccrire de Naples, ^^ qu'il a fait eniuite iiuprimcr à Paris en 175 9- H expcie dans cerie Lettre, les obiervations <5e les expériences qu il a faites iur deux de ces pierres qu'il avoit reçues de Ccylan: leur prin- cipale propriété eft de devenir éleclriqucs fans frottement (Si. par la limple chaleur (h) ; cette éledricité que le feu leur communique, fc manileilc par attraélicn fiir l'une des laces de cette pierre , &. par répulf'on fur la face oppoiée, comme clans les corps éleétriques par le frottement dont l'éleétricité s'exerce en plus ^ en moins, <Sc agit politivement & négativement fur différentes faces: mais cette faculté de devenir électrique fans frottement &L par la limple chaleur, qu'on a regardée comme une

(a) Tourmaline ou tire-ccndre; cette j^ierre ell ainfi dcnomince, parce qu'elle a la propriété d'attirer les cendres & autres corps légers , fans être frottée, mais feulement chaulTce ; fa forme eft la mcme que celle de certains fchorls, tels que les peridots & les t'meraudes du Brefil; elle ne diffère en effet des fchorls que par fon éledricité qui efl: plus forte & plus confiante que dans toutes les autres pierres de ce même genre.

fbj Pline parle ( liv. XXX vil, n.' 2 <) ) d'une pierre violette ou brune (jonia)y qui échauffée par le frottement entre les doigts, ou fimpîement chauffée aux rayons du foleil , acquiert la propriété d'attirçr les cocps légers. iN'elVce point la tourmaline:

560 Histoire Naturelle

propriété fmgulière & même unique, parce qu'elle n'a encore été diftindement obfervée que fur la tourma- l^e , doit fe trouver plus ou moins dans toutes les pierres qui ont la même origine; & d'ailleurs, la chaleur ne produit -elle pas un frottement extérieur & même intérieur dans les corps qu'elle pénètre , & réciproque- ment toute fridion produit de la chaleur? il n'y a donc rien de merveilleux ni de furprenant dans cette com- munication de réledricité par l'adion du feu.

Toutes les pierres transparentes font fufceptibles de devenir éledriques, elles perdent leur éledricité avec leur tranfparence , & la tourmaline elle - même fùbit le même changement, & perd au/fi fbn éledricité lor/qu'elle eft trop chauffée.

Comme la tourmaline eft de la même effence que les fchorls , je fuis perfuadé qu'en faifant chauffer divers fchorls, il s'en trouvera qui s'éledriferont par ce moyen; il faut un affez grand degré de chaleur pour que la tourmaline reçoive toute la force électrique qu'elle peut comporter, & l'on ne rifque rien en la tenant pour quelques inftans fur les charbons ardens ; mais lorfqu'on lui donne un feu trop violent , ^\\t le fond comme le fclîorl (c)j auquel d\c reffemble au/fi par fa forme de

criftallifation,

(c) M. Rittman a obfervé que la tourmaline fe fondoiten un verre blanchâtre , & qu'en y ajoutant du borax & du fpath fufible , elle fe fondoit entièrement , mais que les acides minéraux , même lés plus

forts ,

D E s I N É R A V X. 561

criflallifation , enfin elle efl de même clenfitc & d'une égale dureté ((ij; l'on ne peut guère douter, d'après tous ces caractères communs, qu'elle ne foit un produit de ce verre primitif. M. le docteur Dcmeftc le prcfu- moit avec raifôn , & je crois qu'il efl le premier qui ait range cette pierre parmi les fchorls fe).

Toutes les tourmalines font à demi - tranfparentes , les jaunes & les rougeâtres le font plus que les brunes &. les noires; toutes reçoivent im alfez beau poli: leur fubllance, leur caffure vitreufe, &. leur texture lamelleu/è comme celle du fchorl, achèvent de prouver qu'elles ,font de la nature de ce verre primitif

forts , ne fembloient pas l'attaquer ; & comme les mêmes phénomènes fe manifeftent dans la ze'olite & le balalte , il a conclu que la tourmaline en étoit une efpèce , «Se la vertu éledrique qu'il avoit remarquée à une efpèce de zéolite, couleur de ponceau , le fortifia dans ce fentiment.... Mais toutes ces recherches ne découvrent pas encore les vrais prin- cipes de la tourmaline. Journal de Phyfique , fupplêment au mois de Juillet lySz.

(d) La pefanteur fjîccifique de la tourmaline de Ceylan eft de 30541 , celle de la tourmaline du Brefil de 30S63 , & celle du fchorl crillallifé de 3092^).

(e) La tourmaline efl aufll rangée avec les fchorls; en s'échauffant elle s'éledrife d'un côté pofitivement , tandis que de l'autre côté elle s'éledriie négativement, comme l'a obier M. Franklin. Sa couleur efl rouge , jaunâtre ou d'un jaune-noirâtre aflez tranlparent , elle eft criftalliiée comme le fchorl de Madagaicar, en prifmes à neuf pans, fouvent llriés , terminés par deux pyramides trièdres obtufes placées en fens contraire. Lettres de M. Demejle , tome I, in-i 2 , page 2 (} 1 ^

Miucraux , Tome IIL B b b b

^6z Histoire Natu relle

UWc de Ceyian, d'où font venues les premières tourmalines, n'efl pas la feule région qui les produife: on en a trouvé au Brefd, & même en Europe, parti- culièrement dans le comté de Tyrol ; les tourmalines du Brefd font communément vertes ou bleuâtres. M. Gerhard leur ayant fait fubir différentes épreuves , a reconnii qu'elles réfifloieni , comme les autres tourmalines , à l'aétion de tous les acides , & qu'elles confèrvoient la vertu éleétrique après la calcination par le feu, en quoi, dit-il, cette pierre diffère des autres tourmalines qui perdent leur éledricité par l'aélion du feu (f^; mais je ne puis être de l'avis de cet habile Chimifle fur î'origine des tourmalines qu'il range avec les bafaltes, & qu'il regarde comme des produits volcaniques; cette idée n'efl fondée que fur quelques reffemblances acci- dentelles entre ces pierres & les bafaltes ; mais leur effence & leur formation font très-difierentes, &. toutes

(f) Les pierres gemmes , ainfi que la tourmaline , fe dninguent par la vertu eledrique qui leur eft propre , avec la différence pourtant que les premières ont hefoin de fridion pour exercer leur faculté attradive , au lieu que la féconde ne devient éledrique qu'après avoir cte' mife fur de la braife , & pofsède, outre la faculté attradive , aufîi la répulfive. Le balalte ell une pierre fufible noirâtre, non éledrique, qui écume beaucoup en fondant ; 6t puifque les laves o1it les mêmes principes que la tourmaline & le bafalte , on peut croire avec plulieurs Naturalises , que ces criftaux doivent leur origine à des volcans , du moins pour la plupart. Journal d( Phyfique , fuppUmcnt au mois de Juillet I jS 2.

DESAIlNÉRAUX. 563

les propriétés de ces pierres nous clcmontrent qu'elles -ptoviennent du fchorl, ou qu'elles font elles-mêmes des Ichorls.

11 paroît que M. Wilkes eft le premier qui ail découvert des tourmalines dans les montagnes du Tyrol. M. Muller nous en a donné peu de temps après une defcription particulière f^J: ces tourmalines du Tyrol ^~~™— ^~'— ^— ^^■™^"™"~^"»— »— ^-^— »— "— ^*— »— ^— »— ^— «»— ^——i ^»»»— ^

{^gj La montagne nommée Greïner , fituee vers l'extrémité de la vallée de Zillerthal a fon fommet le plus élevé couvert de neige en tout temps; c'efl fur cette montagne que M. Mulier dit avoir trouvé dans leur lieu natal le talc, le mica à grandes lames , l'arbefte , le fchorl, le fchorl blende , les grenats de fer & la tourmaline ; en defcendant il ramafîà une petite pierre qui avoit quelqu'éclat & qu'il prit d'abord pour un beau fchorl noir crilUlIifé & tranfparent ; il voulut chercher l'endroit d'où elle provenoit , & il rencontra bientôt dans les rochers de granit, des veines de talc fin & de Héatite, qui renfermoient la pierre qu'il avoit prife pour un fchorl noir; il fe procura une bonne quantité de cette pierre , qui ayant été foumife à l'acflion du feu <Sc parvenue à l'état d'incandefcence , commença à fe fondre à fa furface , en prenant une couleur blanchâtre ; un petit fragment de cette pierre mis enfuite fur de la cendre chaude, apprit à M. Muller qu'elle avoit une qualité éledrique, & enfin par différens effais , il découvrit que cette pierre étojt la vraie tourmaline.

Cette tourmaline eft brune , couleur de fumée , ou plutôt fa. tranfparence & fa couleur lui donnent , quant à ces deux qualités, quelque chofe d'approchant de la colofane; & de même que les tourmalines étrangères connues jufqu'ici, elle préfente par- tout de petites fêlures qui ne fe remarquent cependant que lorfqu'elle eft dégagée de fa matrice. Lettre fur la tourmaline du Tyrol, par AI. Muller; Journal de Phyfique , Mars jyS 0 , pages 182 ir fuiv.

Bbbb ij

564 H I ST OIRE NaTU RELLE

paroifTent être de vrais fchorls, tant par leur pefanteur fpécifique &. leur fufibiiité ('fi) , que par leur forme de criftalli/àtioli (i); elles acquièrent la vertu clecftrique fans frottement & par la fimple chaleur ( kj , elles

(h) La tourmaline du Tyrol , fondue à l'aide d'un chalumeau, bouillonne comme le borax, <Sc alors elle jette une très -belle lueur phofphorique ; elle fe fond très-promptement, & refroidie, elle a la forme d'une perle blanche & demi - iranlparente. Lettre fur la tour- maline du Tyrol, par AI, Afuller; Journal de Phyfique , Aîars j yS 0, pages I S 2 & fuiv.

(ï) La forme de notre tourmaline, dit M. Muller, eft en général prilmati({ue ; au moins n'ai - je encore trouvé que deux échantillons qui fulîeiit des pyramides parfaites : prcfque toujours les prifmes font

à neuf pans, &; ils ont douze faces, fi on compte leur bafe

Les côtés àQs criflaux de la tourmaline Çonx^ tantôt plus larges , taniôt plus étroits , & rarement deux côtés de la même largeur fe trouvent contigus : leurs pointes qui font émouflees & inégales, ont pour la plupart une très - forte adhérence à la matière jiierreufe dont ces criflaux lont environnés. Les côtés des pnlmes ont une fui face brillante .... Ces prifmes font longs de plus de trois pouces, & épais depuis deux julq'à cinq lignes ; la pierre ollaire qui leur (ert de matrice efl verdâtre ou tout-à fait blanche: ils y (ont incorporés les uns auprès des autres en tout fens .... Mais les plus épais & \es plus minces fe rencontrent rarement enfemble; ces, prifmes fe dégagent fans peine de leur matrice dans laquelle ils laifîènt leurs empreintes, qui font aufli brillantes que fi on les avoit ])olies . . . . Mais tous ces prilmes ont des fêlures c|ui empêchent qu'on puifî'e fe les procurer en entier, parce qu'ils fe cafîeni fouvent dans l'endroit de ces fêlures .... Les deux nouvelles furfaces de la pierre caffée prélentent d'une part une convexité, & de l'autre une concavité, comme le verre , lorfqu'on le brife. Idem , ib\dc7n.

(k) Pour peu qu'elle foit chauffée, elle manifeUe fa qualita

D E s M I N Ê R A V X, 5(^5

reffemblent en tout à la tourmaline de Ceylan, & diffèrent, félon M. Muller, de celle du Brefil; il dit: <c Qu'où doit rapporter à la claffe des zcolites les tourmalines ^ du Tyroi comme celle de Ceylan , & que la tourma- line du Brefil femble approcher du genre des fchorls, parce qu'étant mife en liifion à l'aide du chalumeau, cette tourmaline du Brefd ne produit pas les mêmes effets que celle du Tyrol , qui d'ailleurs eli de couleur enfumée comme la vraie tourmaline, au lieu que celle du Brefil n'ed pas de la même couleur 3). Mais le traduéteur de cette Lettre de M. Muller, ohfcrve avec raifon, qu'il y a des fchorls cletStriques qui ne jettent pas, comme la tourmaline, un éclat phofphorique lorf- qu'ils entrent en fufion ; il me paroît donc que ces différences indiquées par M. Muller, ne fuffifent pas pour féparer la tourmaline du Brefil des deux autres, & que toutes trois doivent être regardées comme des produits de différens fchorls qui peuvent varier, & varient en effet beaucoup par les couleurs, la denfité,

ciedrique ; cette vertu augmente jufqu'à ce qu'elfe ait acquis à peu-près le degré de chaleur de l'eau bouillante ; <S: à ce degré de clialeur i'atmofphère éledrique s'éteadoit des pôles de la pierre à la diftance d'environ un pouce. Notre tourmaline, fortement grillée fous la moufïïe , ne perd rien de fon poids : elfe conferve fa tranf- parence & fa qualité éledrique , quoiqu'on l'ait fait rougir à plufieurs reprifes , & que même on ait pouni- le feu au point de la faire fondre à la fuperficie. Lciirc fur la tourmaline du Tyrol, par AI. AlulUr; Journal de Phyftque , Mars 17S0 , pages j S2 cT fuiy.

566 Histoire Naturelle

la fufibilité , ainfi que par la forme de criflailifàiion.

Et ce qui démontre encore que ces tourmalines ont plus de rapport avec les fcliorls criflailifcs en prifmes qu'avec les zéolites , c'eft que M. Muller ne dit pas avoir trouvé des zéolites dans le lieu d'où il a tiré fes tourmalines, & que M. Jaskevifch y a trouvé du fchorl vert (l).

(l) A. quatre portes d'Infpruck, il y a une mine d'or dans un endroit nomme Zilkrthnl ; la gangue efl un fchifte dur, verdâtre , iraverfé par le quartz; on en retire fort peu d'or; mais cette mine eft très-fameufe par la produdion de la tourmaline décrite par M. Muller. La gangue de la tourmaline efl un fchifle verdâtre mêle avec beaucoup de mica. On a découvert dans la même mijie fe trouve la tourmaline, dw fchorl vert , du mica couleur de cuivre & de couleur verte & noire , en grandes lames , le fchilie talqueux avec des grenats, le vrai talc blanc en aflez gros morceaux. Supplément au, Journal de Phyfique d'Odobre ijSi^ pages ^i i ù" j; i 2.

DES Minéraux. 567

PIERRES DE CROIX.

V/ N obferve clans quelques - uns des faifctaux ou groupes criflaliifés des fcliorls , une dirpofiuon dans ieurs aiguilles à fe barrer & fe croifer les unes les autre en tout fens, en toute direction, & fous toutes fortes d'angles. Cette difpolition a fon plein efîèt dans la Pierre de croix , qui n'ell qu'un groupe forme de deux ou quatre colonnes de fchorl, oppofées & croifces les unes fur les autres ; mais ici , comme dans toute autre forme , la Nature n'efl point affervie à la régula- rité géométrique ; les axes des branches croifées de cette pierre de croix ne fe répondent prcfque jamais exa<5lement; fes angles font quelquefois droits, mais plus fotivent obliques ; il y a même plufieurs de ces pierres en lozange , en croix de Saint - André ; ainfi cette forme ou difpofition des colonnes , dont cette criflallifation du fchorl efl compofée, n'efl point un phénomène particulier, mais rentre dans le fait général de l'incidence oblique ou direde, des rayons du fchorl les uns fur les autres : les prifmes , dont les branches de la pierre de croix font formées, font quadrangulaires, rhomboïdaux , & fouvent deux de leurs bords font tron- qués. On trouve communément ces pierres dans le fchifte micacé (a) , ôl la plupart paroiffent incruflées de mica; (a) Lettres du dodeur Demefte , pa^es 2 /j? Ù' fuiv.

568 Histoire Naturelle

peut-être même ce mica efl-il entre dans leur compo- fition, & en a-t-ii dcterminc la forme; car cette pierre de croix eft certainement un fchori de formation fecondaire.

Mais il ne faut pas confondre ce fchori pierre de croix avec la ??îdcle , à laquelle on a donné quelquefois ce même nom , & que plufieurs Naturalises regardent comme un fchori, car nous croyons qu'elle appartient plutôt aux pctriiications des corps organifés.

STALACTITES

DES Minéraux. 569

STALACTITES VITREUSES

NON CRISTALLISEES.

J_jES cinq verres primitifs font les matières premières, clcic|ue!ies feules toutes les fubilauces vitreufes tirent leur origine, 64. de ces cinq verres Je nature il y en a trois, le quartz, le IlU - {j)at[i d^ le fcliorl , dont les extraits font tranfparens , & fe présentent en formes criflailifces ; les deux autres, /avoir, le mica &: le jafpe ne produisent que des concrétions plus ou moiiis opaques, ci. même lorfquc les extraits du quartz, du fel d/j^ath Si du fchorl le trouvent mêlés avec ceux du jafpe Si. du mica, ils perdent plus ou moins de leur tranfparence, & fouvent ils prennent une entière opacité. Le même effet arrive lorfque les extraits tranfparens de ces pre- miers verres fe trouvent mêlés de matières métalliques, qui par leur effence font opaques : les llaladiLes tranf- parentes du quartz, du feld-fpath & du fchorl, peuNent Jonc devenir plus ou moins obfcures , Si tout- à- fait onaques, fuivant la grande ou petite quantité de matières étrangères qui s y feront mêlées; Si comme ks com- J>inaifons de ces mélanges hétérogènes font en nombre inlini, nous ne pouvons faifir dans cette immenfe variété que les principales différences de leurs réfukats, & eu préfenter ici les degrés les plus apparens entre lefquels Minéraux , Tome III, C c c c

570 Histoire Natu re lle

on pourra fuppofcr toutes les nuances intermédiaires & fuccefTives.

En examinant les matières pierreu(es fous ce point de vue, nous remarquerons d'abord que leurs extraits peuvent fe produire de deux manières diiîérentes; la première , par une exu dation lente des parties atténuées au point de la difTohnion ; & la féconde, par une flillation abondante <Sc plus prompte de leurs parties moins atténuées & non difToutes; toutes fe rapprochent, fe réuniffent & prennent de la /bliditc à meiure que îeur humidité s'évapore; mais on doit encore obferver que toutes ces particules pierreufes peuvent fe dépofer dans des efpaces vides , ou dans des cavités remplies d'eau: fi i'cfpace efl vide, le ixxc pierreux n'y formera que des incruflations ou concrétions en couches hori- zontales ou inclinées, fuivant les plans fur lefquels il dépofe; mais lor/que ce me tombe dans des cavités remplies d'eau, les molécules qu'il tient en difTolu- tion peuvent fe foutenir & nager en liberté, elles forment alors des criflallifations qui, quoique de la même effence, Ibnt plus tranfparentes & plus pures que \es matières dont elles font extraites.

Toutes les pierres vitrcufes, que nous avons ci-devant indiquées, doivent être regardées comme des flala(5tites criftallifées du quartz, du feld-fpath & du fchorl purs, ou feulement mêlés les uns avec les autres, & fouvent teints de couleurs métalliques : ces fîaladites font toujours

DES Minéraux, 571

tranfparentes lorfque les fucs vitreux ont toute leur pureté ; mais pour peu qu'il y ait mélange de matière étrangère, elles perdent en même temps partie de leur tranfparence & partie de leur tendance à fe criflallifer , en forte que la Nature paffe par degrés infenfibles de la criflallifàtion diftindte à la concrétion confufe , ainfi que de la par- faite diaphanéité à la demi -tranfparence & à la pleine opacité : il y a donc une gradation marquée dans la fuccclTion de toutes ces nuances , & bien prononcée dans les termes extrêmes ; les ilalaélites tranfparentes font prcique toutes criftallifées, & au contraire la pliîpart des llaiaélites opaques n'ont aucune forme de criftalli- fuion , & l'on en trouve la raifon dans la loi générale de la crillallifation , combinée avec les effets particuliers des diiférens mélanges qui la font varier; car la forme de toute criflallifation efl le produit d'une attraélion régulière & uniforme entre des molécules homogènes & fimilaircs; & ce qui produit l'opacité dans les extraits des fucs pierreux , n'efl que le mélange de quelque fubflance hétérogène , & fpécialement de la matière métallique, non fnnplement étendue en teinture comme dans les pierres tranfparentes & colorées, mais incor- porée c^ mêlée en fubdance maifive avec la matière pierreufe : or la puifTance attractive de ces molécules métalliques, fuit une autre loi que celle fous laquelle les molécules pierreufès s'attirent & tendent à fe joindre; ii ne peut donc rélulter de ce mélange qu'ime attraclioii

C c c c ij

57- H ISTO 1 R E N ATU RELLE

confufe dont les tendances divcrfes fe font réciproque- ment obitaclc , & ne permettent pas aux molécules de prendre entr'elles aucune ordonnance régulière: & il en efl de même du mélange des autres matières minérales ou terreu(ès, trop hétérogènes pour que les rapports d'attraction puiflènt être les mêmes ou combiner enfemhle dans la même direciion uns fe croifer , & nuire à l'efFet général de la cridallifation & de la tranfparence.

Aiin que la criflallifation s'opère, il faut donc qu'il y .ait allez d'homogénéité entre les molécules pour qu'elles concourent à s'unir ibus une loi d'affinité corn- m.une , & en même temps on doit leur fup})ofcr aiïez de liberté pour, qu'obéiilant à cette loi, elles puifTent fe chercher, réunir oc fc difpofer entr'elles dans le rapport combiné de leur hgure propre avec leur puif- fance attractive ; or pour que les molécules aient cette pleine liberté, il leur faut non - feulement l'e/pace, le temps & le repos néceffaires , mais il leur faut encore ie fecours, ou plutôt le foutien d'un véhicule Piuide dans lequel elles puifTent fe mouvoir fans trop de rélK- tance, & exercer avec facilité leurs forces d'attradion réciproques: tous les liquides, & même l'air & le feu, comme fluides , peitvent fèrvir de foutien aux molé- cules de la matière atténuée au point de la diffolution. Le feu primitif fut le fluide dans lequel s'opéra la crif- lallifation du feld-fpath & du fcliorl'; la criflallifation des

DES Minéraux, 573

régules métalliques s*opère de même à nos feux, par le rapprochement libre des molécules du métal en fufion par le fiuide igné. De femblables etiets doivent pro- duire dans le fein des volcans ; mais ca criflalli/àtions, produites par le feu, font en trcs - petit nombre en comparai/on de celles qui font formées par l'intermcde de l'eau : c'efl; en efkt cet élément qui , dans l'état acltiel de la Nature, efl le grand inflrument & le véhi- cule propre de la plupart des criflallifations ; ce n'ell pas que l'air & les vapeurs aqueufes ne /oient auffi pour les fiibftances fufccptibles de fublimation, des véhicules également propres, & des liuides très -libres leur Griilallifàtion peut s'opérer avec toute facilité ; 6c il paroît cju'il fe fait réellement ainfi un grand nombre de cril- tallifations des minéraux renfermés & fublimés dans les cavités de la terre; mais l'eau en produit infiniment plus encore, & même l'on peut afTurer que cet élément feul, forme aélueilement prcfque toutes les criflalli/àtions des fubfîances picrreufes , vitreufes ou calcaires.

Mais une féconde circonftance effcntielle à laquelle il paroît qu'on n'a pas fait attention, c'ell qu'aucune criflaliifation ne peut fe faire que dans un bain fluide, toujours égal & conflamment tranquille , dans lequel les molécules diiToutcs nagent en liberté ; & pour que l'eau puiffe former ce bain,, il efl néceffaire qu'elle fbit con- tenue en allez grande quantité &. en repos, dans des cavités qui en fbiem entièrement ou prefque entièrement

574 Histoire Naturelle

remplies. Cette circonftance d'une quantité d'eau qui puiiTe faire un bain efl fi néccffaire à la cridaili/àtion , qu'il ne fèroit pas pofîible fans cela d'avoir une k[ée nette des effets généraux <Sc particuliers de cette opéra- tion de la Nature; car la criflalliiàtion, comme on Aient de le voir, dépend en général de l'accefTion pleinement libre des molécules les unes vers les autres , & de leur tranfport dans un équilibre affez parfait pour qu'elles puiffcnt s'ordonner fous la loi de leur puiffance atiraélive, ce qui ne peut s'opérer que dans un Huide abondant & tranquille: <Sc de même, il ne feroit pas poffible de rendre raifbn de certains effets particuliers de la criflal- lifation, tel par exemple, que le jet en tout fens des aiguilles dans un groupe de criftal de rocbe , fans fuppofèr un bain ou maffe d'eau, dans laquelle puiffe fe fornire ce jet de criflallifation en tout fens ; car fi l'eau tombe de la voûte, ou coule le long des parois d'une cavité vide, elle ne produira que des concrétions ou guhrs , néceffairement étendus & dirigés dans le /èul fens de l'écoulement de l'eau qui fe fait toujours de haut en bas ; ainfi cet effet particulier du jet des criftaux en tout fens, auffi-bien que l'efîet général &i combiné de la réunion des molécules qui forment la criflallifation, ne peuvent donc avoir lieu que dans un volume d'eau qui rempiiffe prcfque entièrement & pendant un long temps, la capacité du lieu fe produi/ent les criflaux. Les Anciens avoient remarqué avant nous , que les

DES Minéraux, 575

grandes mines de criflal ne fe trouvent que vers les liants foinmets des montagnes, près des neiges & des glaces, dont la fonte qui fe fait contintiellement en- deifous par la chaleur propre de la terre, entretient un perpétuel écoulement dans les fentes & les cavités des rochers; & on trouve même encore aujourd'hui en ouvrant ces cavités auxquelles on donne le nom de cr'ijliillicres , des relies de l'eau dans laquelle s'cfl opérée la criliallilation; ce travail n'a ceiTé que quand cette eau s'efl écoulée, & que les cavités font demeurées vides.

Les fpaths crillailifés dans les fentes & cavités des bancs calcaires, fe font formés de la même manière que les crifiaux dans les rochers vitreux : la figuration de ces fpaths enrhombes, leur polition en tout fens, ainfi que le mécanifme par lequel leurs lames fe font fuccef- livement appliquées les unes aux autres, n'exigent paî> moins la fluctuation libre des molécules calcaires dan^ im fluide qui leur permette de s'appliquer dans toui les fens, fuivant les loix de leur attraélion refpcélive; ainfi toute crillallifàtion , foit dans les matières vitreufès, foit dans les fubflances calcaires , fuppofe néceffairement im fluide ambiant & tranquille, dans lequel les molé- cules diffoutes foient foutenues & puiffent rapprocher en liberté.

Dans les lieux vides au contraire, les eaux flillantes tombent goutte :i goutte des parois & des voûtes, les fucs vitreux & calcaires ne forment ni criflaux ni fpaths

57^ Histoire Naturelle

réguliers, mais feulement des concrétions ou congela^ lions, Icfquelles n'offrent qu'une ébauche & des rudimens de criliallifation ; la forme de ces congélations efî en général arrondie , tubuléc , & ne prcjfènte ni faces planes, ni angles réguliers , parce que les particules dont elles font compoiccs, ne nageant pas librement dans le fluide qui les charrie , elles n'ont pu des-lors fe joindre uni- formément, & n'ont produit que des agrégats confus fous mi 11'.^ formes indéterminées.

Après cet expofé que j'ai cru néccifairc pour donner une idée nette de la manière dont s'opère la criftalli/à- tion, & iaire fèntir en même temps la diiîcreiice effentielle qui fe trouve entre la formation des concrétions & des criflallifations , nous concevrons aifément pourquoi la plupart des ilalaclites dont nous allons donner la defcrip- tion, ne font pas des crilialliiations, mais des concrétions demi-tranfparentes ou opaques , qui tirent également leur origine du quartz, du feld-fpadi à du fchorl.

AGATES,

DES Minéraux.

577

tm

AGATES.

Jtarmi les pierres demi - tranfparentes , les agates, les cornalines & les farcloines tiennent le premier rang; ce font, comme les criflaux, des ftaladites quartzeufes, mais dans lefquelles le fuc vitreux n'a pas été afTez pur, ou aflez libre pour criflallifer & prendre une entière tranfparence: la denfité de ces pierres fa)^ leur dureté, leur rcfiftance au feu & à ra6tion des acides, font à

{aj Pefanteur fpécifique du quartz.

2644.6.

du criflal de roche d'Europe.

2654.8.

de l'agate orientale. 26901.

. de l'agate iiue'e. . 26253.

de l'agate ponc^ue'e. 26070.

de l'agate tachée. . 2.6324.

de l'agate veme'e. . 2666y. —— de l'agate onix ... . 26375.

de l'agate herborifée. 25891.

de l'agate moufleufe. 25991.

-, de l'agate jafpée ... 263 5 6. de la cornaline. . . 261 37.

de la cornaline pâle. 26301.

de la cornaliiie pondluée ,

26120.

filmé fau;<. Tome UL

Pefanteur fpécifique de la corna- line veinée. ... 26234.

de la cornaline onix. 26227.

——de la cornaline herborifée.;

26133.

de la cornaline en flaladite.

25977.

de la fardoine.... 26025.

de la fardoine pâle. 26060.

de la fardoine poni^uée.)

2621 5.

——— de la fardoine veinée. 25951»

de la fardoine onix . 2 5949.

de la fardoine herborifée.;

25988.

—— de la fardoine noirâtre.;

26284,

Voyez la Tahk de M. Brijfoni

578 Histoire Natu relle

très -peu -près les mêmes que celles du quartz & du criftal de roche: la très-petite différence qui fe trouve en moins dans leur pefanteur fpécifique, relativement à celle du criflal , peut provenir de ce que leurs parties conftituantes n'étant pas aufTi pures, n'ont pu fe rap- procher d'aufli près ; mais le fond de leur fubflance efl de la même efTence que celle du quartz ; ces pierres en ont toutes les propriétés, & même la demi-tranf- parence, en forte qu'elles ne diffèrent des quartz de féconde formation que par les couleurs dont elles font imprégnées, & qui proviennent de la diffolution de quelque matière métallique qui s'efl mêlée avec le fuc quartzeux ; mais loin d'en augmenter la maffe par un mélange intime, cette matière étrangère ne fait qu'en étendre le volume en empêchant les parties quartzeufes de fe rapprocher autant qu'elles fe rapprochent dans les criflaux.

Les agates n'afïèétent pas autant que les cailloux la forme globuleufe ; elles fe trouvent ordinairement en petits lits horizontaux ou inclinés, toujours affez peu épais & diverfement colorés ; & l'on ne peut douter que ces lits ne fbient formés par la flillation des eaux; car on a obfervé dans plufieurs agates des gouttes d'eau très-fenfibles (bj ; d'ailleurs, elles ont les mêmes caractères

(b) A Conftantinople, M. i'AmbafTadeur me fit voir des manches de couteaux d'agate, dont l'un avoit dedans une eau qui jouoii, &

DES AI I N É R AV X. 579

que tous les autres fécJimens de la flillaiion des eaux; on donne le nom (ïonix à celles qui préfenieut diffé- rentes couleurs en couches ou zones bien diflindes : dans les autres, les couclies font moins apparentes, & les couleurs font plus brouillées, même dans chaque

qui femhloit à un ver noir qui fe feroit remué. Voyages de Atori' conys ; Lyon, j^^j, page ^ 2 (j , Première partie. Je conjedure , dit M. de Bondaroy, que dans les agates la furface extt'rieure s'ctant durcie la première , l'eau pétrifiante %'e'ii dépofée inté- rieurement; cette eau a prefque rempli la capacité de ces pierres, il eft reflé une bulle d'air qui a produit le même effet que dans les tubes qui fervent de niveau ; une preuve que cette bulle efl: de l'air qui nage dans l'eau, c'eft qu'en tournant la pierre, la bulle plus légère que l'eau, monte & gagne la partie la plus élevée de la pierre; fi vous la retournez, la bulle, du bas vous l'avez portée, remonte encore à la partie fupérieure de l'agate ; la bulle change un peu de forme dans les différens mouvemens qu'on lui fait éprouver ; enfin , ces pierres produifent le même eflTet que les niveaux d'eau à bulles d'air; & je crois que ceux qui ont parlé de ce fait dans les criftaux, ne l'ont pas expliqué de cette manière faute d'avoir été à portée

d'examiner des pierres il fe rencontroit J'ai vu le même

fait dans les morceaux d'ambre ; enfin, je l'ai obfervé dans une partie de glace ii s'éioit rencontré une bulle que l'on pouvoit faire mouvoir ....

Cette eau fe dépofe avec le temps, & forme des criftallifations dans l'intérieur des agates, dès-lors le phénomène difparoît , & je n'ai plus trouvé d'eau dans les pierres qui n'avoient plus de bulles. . . . Je crois devoir ajouter ici qu'au lieu de bulles d'air ou d'eau , je connois des agates qui, dans leur intérieur, renferment des grains de fable qui fe meuvent dans ces pierres. Voyei les Mémoires de V Académie des Sciences, année ijy^'T^è^^ éSyàrfuiv.

Dddd ij

580 Histoire Natu relle

couche, & il n'y a aucune agate, ce n'efl en petil volume, dont la couleur foit uniforme & la mcme clans toute Ton cpaifTeur, ce qui prouve que ia matière dont les agates font formées n'efl pas fimple, & que le quartz qui domine dans leur compofition , efl mêlé de parties terraifès ou métalliques qui s'oppofent à la criflallifàtion, ÔL donnent à ces pierres les diverfes couleurs & leâ teintes variées qu'elles nous préfentent à la furface & Jans l'intérieur de leur mafTe.

Lorfque le fuc vitreux qui forme les agates fe trouve en liberté dans un efpace vide, il tombe fur le fol oii s'attache aux parois de cette cavité, & y forme quel- quefois des maffes d'un aifez grand volume (c) ; il prend

(c) Du côté de Pinczovia & de Niefvetz en Lithuanie, on trouve quelques agates onix , des fardoines , des calcédoines , & une pierre qu'on pourroit peut-être regarder comme une aventurine. Le fond de cette pierre, dit M. Guettard , efl: blanc, gris, brun, rouge ou de quelqu'autre couleur, & parfemé d'une quantité de petites paillettes argentées ou dorées. J'ai vu de toutes ces pierres travaillées en taba- licres, pommes de canne, poignées de fabre, taflès, foucoupes, &c, en un mot on fait, dans les manufadlures du prince Radzivil, travailler ces pierres avec beaucoup de foin, & on leur donne un trts-beau poli ; il eft depuis peu lorti de cette manufadure , un c^tbaret à café dont le plateau eft d'un feul morceau d'une de ces pierres , & affez grand pour qu'on puifle y placer fix taiïes avec leurs foucoupes, la cafetière, & même unethéyère, qui font tous d'une pareille pierre; ce cabaret a été préfenté au roi de Pologne par le prince Radzivil, J^. Guettard , Mémoires de V Académie des Sciences, année 17^2^ page 2^^,

DES Minéraux. 581

les mêmes formes que premient toutes les autres con- crétions ou flala<flites ; mais lorfqu'il rencontre des corps figurés &. poreux , comme des os , des coquilles ou des morceaux de bois dont il peut pénétrer la fubfiance, ce fuc vitreux produit, comme le fuc calcaire, des pétrifications qui confervent & préfentent tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, la forme de l'os ("JJ, de la coquille &

du bois (^^/.

I - ... I ^

{dj J'ai vu dans un Cabinet à Livourne, dit M. de la Condamine, un fragment de mâchoire d'éléphant, pétrifié en agate, pefant près de vingt livres. J'ai parlé ailleurs d'une dent molaire ( on ne fait de quel animal ) du poids de deux ou trois livres , pareillement con- vertie en agate , trouvée au Tucuman , dans l'Amérique méridionale il n'y a point d'éléphans. Mémoires de l'Académie des Sciences, cnnée 17^7, jxigi 34^-

(e) Ce qui m'a le plus frappé à Vienne, dans le Cabinet de l'Em- pereur, dit M. Guettard, eft une cjuantité de morceaux de bois pétrifié , qui [font devenus plus 'ou moins agates , & qui varient par les couleurs; les uns font bruns, d'autres blanchâtres, gris, ou autre- ment colorés ; un de ces morceaux qui efl: agatifié dans le centre & par un bout, eft encore bois par l'autre bout; on prétend même qu'il s'enflamme dans cette partie, nous n'en fimes point l'expérience, elle fut propofée. Ces bois pétrifiés font ordinairement des rondins de plus d'un demi-pied ou d'un pied de diamètre; quantité d'autres ont plufieurs pieds de longueur , & font d'une grofleur confidérable^ ils prennent tous un poli beau & brillant. Idem, année 176^, ipage 2rj. Dans les terres du duc de Saxe - Cobourg , dit M. Schepflin , qui font fur les frontières de la Franconie & de la Saxe, à quelques lieues de la ville de Cobourg même , on a déterré depuis peu, à une petite profondeur, des arbres entiers pétrifiés, mais pétrifiés 4 un point de perfedion ; qu'en uavaillant on trouve que cela fait

582 Histoire Naturelle

Quoique les Lapidaires, <Sc d'après eux nos Naturali/îes, aient avancé qu'on doit diflinguer les agates en orientales & occidentales, il efl néanmoins très-certain qu'on trouve dans l'Occident, & notamment en Allemagne, d'auffi belles agates que celles qu'on dit venir de l'Orient, & de même, il efl très -fur qu'en Orient la plupart des agates font entièrement femblables à nos agates d'Europe: on peut même dire qu'on trouve de ces pierres dans toutes les parties du monde, & dans tous les terreins le quartz & le granit dominent, au nouveau continent comme dans l'ancien, &. dans les contrées du Nord comme dans celles du Midi ; ainfi la diflinétion d'orien- tale & d'occidentale ne porte pas fur la différence du climat , mais feulement fur celle de la netteté <&. de l'éclat

une pierre aufli belle & aufli dure que l'agate. Les princes de Saxe qui ont pafle ici m'en ont donné quelques morceaux , dont j'ai l'honneur de vous envoyer deux pour le Cabinet du Jardin royal: ils m'ont montré de belles tabatières , des couteaux de chafTe & des boîtes de toutes fortes de couleurs , faites de ces pétrifications : fi les morceaux ne font pas de conféquence , vous verrez pourtant par-là mon attention à fatisfaire à vos defirs. Lettres de Ai. Schepfiin à Aï. de Buffon ; Strajhourg , 2 y Septembre iy^6. On a trouvé, dit M. Neret fils, dans une montagne, qui eft auprès du village de Séry, en creufant à la fource d'une fontaine, une très-grande quantité de bois pétrifié qui étoit dans un fable argileux. Ces bois ne font point efFervefcence avec les acides; Oi\ y diltingue très-bien l'endroit qui a été recouvert par l'écorce, il efl toujours convexe, & confi- dérablement piqué de vers qui , après avoir fiUonné entre l'écorce & le bois, traverfent toute l'épaifleur du morceau, & y font agatifés. Journal de Phyfique ; Avril i y8 1 , page ^ 0 ^ .

DES Minéraux. 583

de certaines agates plus belles que les autres: néanmoins i'eflence de ces belles agates efl la même que cdk des agates communes ; car leur pefanteur fpéciiique & leur dureté font auffi à peu-près les mêmes ("fj.

L'agate, fuivant Théophrafte, prit Ton nom du fleuve Achates en Sicile, fiirent trouvées les premières agates; mais l'on ne tarda pas à en découvrir en diverfes autres contrées, & il paroît que les Anciens connurent les plus belles variétés de ces pierres, puifqu'ils les avoient toutes dénommées (g) , & que même dans ce nombre, il en efl quelques-unes qui femblent ne fe plus trouver aujourd'hui (h): quant aux prétendues agates odorantes, dont parlent ces mêmes Anciens (i) , ne

(f) Voyez ci-deflus la Table des pefameurs Ipccifiques des diverfes agates.

(g) Pha(facates , cerachates, fardachatcs , harnachâtes , Uucachaies r- dendrochates , corallochaies , à^c.

(h) Entr'auires celle qui, félon Pline, étoit parfemée de points d'or moins que ce ne foit i'aventurine ), comme le lapis ( Pline dit le faphir ; mais nous verrons ci-après que Ion faphir elt notre lapis), Ù" fe trouvait abondamment dans l'île de Crète. Celles de Lefios & de JVIefsene , ainfi que du Alont (Eta Ù" du Alont Parnajfe qui , par l'éclatante variété de leurs couleurs , fembloient le difputer à l'émail des Jleurs champêtres ; celle d'Arabie, qui, excepté fa dureté, avoit toute i' apparence de l'ivoire Ù' en offroit toute la blancheur. Pline, liv. xxxvii,

n." 54.

(i) Aromatites & Ipfa in Arabiâ traditur gigni , fed & in ^Egypto circa Pifas ubique lapidofa Ù" myrrhœ coloris & odoris , ob hoc Riginis fre- quentata. Plin. loc. cit, & auparavant il avoit dit, autachates , cùm uritur, wyrrham redolcns.

584 Histoire N aturelle

doit - on pas les regarder comme des bitumes con- crets, de la nature du jayet, auquel on a quelquefois donné, quoique très - improprement , le nom agate 7ioire ! ce n'efl pas néanmoins que ces fucs bitumineux ne puiflent s'être infjnués, comme fubflance étrangère, ou même être entrés, comme parties colorantes, dans la pâte vitreufe des agates lors de leur concrétion. M. Dutens afTure à ce fujet, que fi Y on racle dans Jei agates herborifées les linéamens qui en forment i'her- borifation, & qu'on en jette la poudre fur des charbons ardens, éXç, donne de la fumée avec une odeur bitu- mineufè. Et à l'égard de ces accidens ou jeux d'her- borifations, qui rendent quelquefois les agates fnigulières & précieufès, on peut voir ce que nous en dirons çi-après à l'article des cailloux.

CORNALINE.

DES Minéraux. 585

CORNALINE.

V^OMME les agates d'une feule couleur font plus rares que les autres, on a cru devoir leur donner des noms particuliers : on appelle Cornalines , celles qui font d'un rouge pur; fardoincs, celles dont la couleur ed; jaune ou d'un rouge mêlé de jaune ; yrafts , les agates vertes ; & calcédoines, les agates blanches ou d'un blanc-bleuâtre.

Quoique le nom de cornaline , que l'on écrivoit autre- fois carnéole , paroiffc défigner une pierre couleur de chair, & qu'en effet, il fe trouve beaucoup de ces agates couleur de chair ou rougeâtres , on reconnoît néanmoins la vraie cornaline à teinte A'mw rouge pur, ^ à la tranfparence qui ajoute à fon éclat ; les plus belles cornalines font celles dont la pâte eft la plus diaphane, & dont le rouge a le plus d'intenfitc: & de ce rouge inten/e jufqu'au rouge - clair & couleur de chair, on trouve toutes les nuances intermédiaires dans ces pierres.

La cornaline n'elt doiic qu'une beJJe agare plus ou moins rouge , & la matière métallique qui iui donne cette couleur n'augmente pas fa denlité , &. ne lui ôte pas /a tranfparence ; c'efl ce qui la diflingue des cailloux rouges -opaques, qui font en général de même effence que les agates, mais dont la fubiiance eft moins pure, & a reçu fa teinture par àt^ parties métalliques plus jrrolTières & moins atténuées : ce font les rouilles ou ATméraux, Tome lîL E e ee

586 Histoire Naturelle

chaux de fer, de cuivre, &c. plus ou moins difToutes qui donnent la couleur à ces pierres, & l'on trouve toutes les nuances de couleur , & même toutes les couleurs différentes dans les cailloux auffi-bien que dans les agates; il y a même plufieurs agates onix , dont les différens lits préfentent fuccefTivement de l'agate blanche ou noire, de la calcédoine, de la cornaline, &c. on recherche ces onix pour en faire des camées; les plus beaux font ceux dont les reliefs font de cornaline fur un fond blanc.

Il en eft des belles cornalines comme des belles agates; elles font auffi rares que les autres font communes : on trouve fouvent des ftala6lites de cornalines en mamelons accumulés & en affez grand volume ; mais ces cornalines font ordinairement impures, peu tranfparentes , & d'un rouge faux ou terne. On connoît auffi des agates qui font pQn(5tuées & comme femées de particules de cor- nal'ine , formant des petits mamelons rouges dans la fubftance de l'agate , & certaines cornalines font elles- mêmes femées de points d'un rouge plus vif que celui de leur pâte ; mais la nature de toutes ces pierres eft abfolument la même ; & l'on trouve des cornalines dans ia plupart des lieux d'où l'on tire les agates, foit en Afie (<^) , foit en Europe &. dans les autres parties du monde.

(a) Dans VYémen , fur le chemin entre Taœs & le Mont Sumara, ©n voit ia pierre akjk'jemani , qui eft d'un rouge-foncc , ou plutôt

DES Minéraux. 587

(Tun brun- clair, qu'on nomme quelquefois fimpleinent yV/w^w/' ou akjk , on la tire principalement de la montagne Hirran prés de la ville Damar. Les Arabes la font enchâfler, &. la portent au doigt ou au bras, au-deflus du coude, ou à la ceinture au-devant du corps, & on croit qu'elle arrête le fang quand on la met fur la plaie. . . . On trouve louvent des pierres fort reflemblantes à Vakjk ou à la cornaline, parmi celles de Camboye , qu'on nomme pierre de mockha, & dont on porte une grande quantité de Surate , tant à la Chine qu'en Europe. Defcr'ipîion de l'Arabie, par AI. Niebuhr, page 12^. Les plus belles cornalines font celles que l'on apporte des environs de Babylone ; enluite viennent celles de Sardaigne ; les dernières font celles du Rhin, de Bohème & de Siléfie; pour leur donner le plus grand brillant, on met defibus, en les montant, une feuille d'argent. Diélionnaire Rncydopédique de Chambcrs.

E e e e i j

5S3 Histoire Naturelle

S A R D 0 I N E.

L

A Sardoine ne diffère de la cornaline que par fa couleur qui n'eft pas (ï\m rouge pur, mais d'un rouge- orangé, & plus ou moins mêlé de jaune; néanmoins cette couleur orangée de la fardoine, quoique moins vive, efl plus fiiave, plus agréable à l'œil que ie rouge dur & fcc de la cornaline ; mais comme ces pierres font de la même effence, on paiïe par nuances de l'orangé le plus foible au rouge le plus intenfé, c'efî- à-dire," de la fardoine la moins jaune à la cornaline la plus rouge , &i l'on ne diflingue pas l'une de l'autre dans les teintes intermédiaires entre l'orangé & le rouge, car ces deux pierres ont la même tranfparence, & leur denfité, leur dureté & toutes leurs autres propriétés font les mêmes ; enfin , toutes deux ne font que de belles agates teintes par le fer en dilTolution.

La fardoine efl très-anciennement connue ; Mithri- date avoit, dit-on, ramaffé quatre mille échantillons de cette pierre, dont le nom, fuivant certains Auteurs, vient de celui de l'île de Sardaigne , il s'en trouvoit en affez grande quantité : il paroît que cette pierre étoit en grande eflime chez les Anciens (a) ; elle efl en effet

(a) Polycrate, tyran de Samos, croyoit expier fuffifamment le bonheur dont la fortune s'étoit plue conflamment à le combler , par le facrifice volontaire d'une fardoine qu'il jeta dans la mer, & qui

DES Minéraux, 589

plus rare que la cornaline , & fe trouve rarement en aiiffi grand \'oiume.

fut retrouvée dans les entrailles d'un poiflbn deiliné pour la table de ce tyran. Pline, livre xxxvil, chap, i.

FRASE.

V^ETTE pierre a été auffi célébrée par les Anciens; c'eft une agate verte ou verclâtre , fouvent tachée de blanc, de jaunâtre, de brun, & qui cfl quelquefois aufTi tranfparente que les belles agates dont elle ne diffère que par le nom: les Prafes ne font pas fort communes, cependant on en trouve non - feulement en Afic, mais en Europe, & particulièrement en Siléfie. M. Lehman a donne Thifloire & la defcription de cette prafe de Siléfie, ainfi que de la chryfoprafe du même pays, qui n'efl qu'une prafe dont la couleur verte eft mêlée de jaune faj. Ce favant Minéralogifle dit qu'on trouve les prafes & les chryfoprafes dans une terre argileufe verte, & fouvent mclée d'opales , de calcédoines & d'afbcfle ; <Sl comme elles font à très-peu-près de la même pefan- leur fpécifique f/>J^ & qu'elles ont Ja même dureté, Sl prennent le même poli que les agates, on doit les mettre

{aj Mémoires de l'Académie de Berlin, ûnna i /JJ' (b) La pefanteur fpécifique de l'agate o^entale eft de 250^1, & celle de la prafe eft de 2 5 8 o 5 .

590 Histoire Naturelle

au nombre des agates colorées ; la cornaline l'efl de rou'T-e, la fardoine de jaune-orange, & la prafe l'eft de vert. M. Dcmefte penfe que cette couleur verte de la prafe, provient du mélange du cobalt, parce que cette pierre étant fondue avec deux parties de borax elle produit un beau verre bleu (c) ; mais peut-être cette couleur bleue provient du borax qui , comme je l'ai dit (d) , contient des parties métalliques; on pourroit s'affurer du fait en fondant la prafe fans borax, car fi elle donnoit également un verre bleu , l'opinion de M. Demefle feroit pleinement confirmée ; mais il efl à croire que la prafe feroit, comme l'agate, très-réfrac- taire au feu, & qu'on ne pourroit la faire fondre fans addition, foit du borax ou d'un autre fondant, & dans ce cas, il faudroit employer un fondant purement falin qui ne contînt pas , comme le borax , des parties métalliques.

Au refle, quelques Naturalises ont donné le nom de -prafe à la prime d'émeraude qui n'efl point une agate, mais un criflal vert, défectueux, inégalement coloré , & dont certaines parties plus parfaites que les autres, font de véritables & belles émeraudes ; le nom de j^rafe a donc été mal appliqué à cette fubftance qui n'eft qu'une

(c) Lettres de M. Demefle, &c. tome I, pages 48^ & j^S ^ .

(d) Voyez l'article du Borax dans le fécond volume de cette hiftoire des Minéraux.

DES Minéraux. 591

émeraude imparfaite afTcz bien défignce par la dénomi- nation de prime ou matrice d'émeraude.

ONYX.

J_jE nom iVOnyx (a) , qu'on a donné de préférence aux agates dont les lits font de couleurs différentes , pourroit s'appliquer affez généralement atomes les pierres dont les couches fuperpofées font de diverfes fubflances ou de couleurs différentes. Théopliraffe a caradcrifc l'onyx, en difant qu'elle eft variée alternativement de blanc «Se de brun (b) ; mais il faut obferver que quel- quefois les Anciens ont donné improprement le nom d'^//>'X à l'albâtre, & c'efl faute de l'avoir remarqué que plufieurs iModernes fe font perdus dans leurs conjeétures au fujet de l'onyx des Anciens , ne pouvant concilier des caractères qui en efîét appartiennent à des fubflanccs très-différentes.

(a) Onyx en Grec, fignifie ongle; ik. l'imagination des Grecs n'étoit pas reflce en défaut fur cette dénomination pour lui former une origine élégante & mythologique. Un jour, difoient - ils , l'Amour trouvant Venus endormie, lui coupa les ongles avec le fer d'une de Ces flèches, & s'envola; les rognures tombèrent fur le fable du rivage de l'Inde; & comme tout ce qui provient d'un corps célefle ne peut pas périr , les Parques les ramafsèrent foigneufement , & les chan- gèrent en cette forte de pierre qu'on appelle onyx, Voyez Robert de Berquen. AlerveiHes des Indes, page (f i ,

(h) Lapid. & gemm, n." y y.

592 Histoire Naturelle

De quelque couleur que foieiit les couches ou zones dont font compofccs les onyx , pourvu que ces mêmes couches aient ime certaine régularité, la pierre n'en cfl pas moins de la cîafTe des onyx , à moins cependant qu'elles ne foient rouges ; car alors la pierre prend le nom de fardonyx o\\ fdni aine -onyx (c): ainii la di/po- fition des couleurs en couches ou zones fait le principal cara6lère des onyx, &: les diflingue des agates {jmp/es qui font bien de la même nature, & peuvent offrir les mêmes couleurs, mais confu/es, nuces ou difpofées par taches &. par veines irrégulières.

Il y a des jafpcs, des cailloux opaques, &. même des pierres à fuld, dans lefquels on voit des lits ou des veines de couleurs différentes , & qu'on peut mettre au jiombre des onyx : ordinairement les agates-onyx qui , de toutes les pierres onyx font les plus belles, n'ont néanmoins que peu de tranfparence , parce que les couches brunes, noires ou blanches & bleuâtres de ce§ agates font prefque opaques, & ne laiffent pas aperce- voir la tranfparence du fond de la pierre fur laquelle ces couches font fuperpofées parallèlement ou concen- triquement , & prefque toujours avec une cpaiffeur égale dans toute l'étendue de ces couches. II y a auffi des onyx que l'on appelle agates œillces, &. que les Anciens avoient diflinguées par des dénominations propres: ils

(c) Hill. page 12 2,

nommoient

D E s M I N É R A U X, 595

nommoicnt trwphtalmos & lycophtalmos (d) , celles qui préfeiitoieiu la forme de trois ou quatre petits yeux rouges, & clonnoient le nom A' homimodes (e) , k une agate qui préfentoit un cercle de couleur d'or au centre duquel étoit une tache verte.

Les Grecs f/J^ qui ont excellé dans tous les beaux Arts , avoient porté à un haut point de perfedlion la gravure en creux & en relief fur les pierres ; ils reclier- choient les belles agates onyx pour en faire des camées; il nous rcfte plufieurs de ces pierres gravées dont nos Connoilfeurs ne peuvent fe laffer d'admirer la beauté du travail, la correction du deflln, la netteté Si la iineife du trait dans le relief, qui fe détache fi parfaitement du fond de la pierre qu'on ie croiroit fait à part, & enfuite collé fur cette même pierre: ils choififfoient pour ces beaux camées les onyx blanches & rouges , ou de deux autres couleurs qui tranchoient fortement l'une fur l'autre. Il y a plufieurs agates qui n'ont que deux couches

('(IJ Plia. liù. XXXVII, n*' yi & J2.

(e) Idem , w.* 60.

(f) Plufieurs Artiftes Grecs s'immortalisèrent par îa gravure fur pierres fines. Pline nomme Apoiionide, Cronias , Diofcoride qui grava la tête d'AuguHe, laquelle fervit de fceau aux Celars ; mais le premier de ces Ariirtes, ajoute-t-il , fut Pyrgotèle ; & Alexandre, par le même Édit il dêfeiidoit à tout autre qu'à Appelle de le peindre, & à tout autre qu'à Lyfippe de modeler faftatue, n'accordoit qu'au feul Pyrgotèle l'honneur de graver fon effigie. Voyc^^ Pline , l'iv. XXXVII , n.' 4.

Aïinéraus , Tome ÎIL F ff f

594 Histoire Naturelle

ou lits de couleurs différentes ; mais on en connoit d'autres qui ont trois & même quatre lits bien dif- tinds (g) , du brun profond & noir, du blanc mat, du bleu-clair & du jaune - rougeâtre ; ces onyx de trois & quatre couleurs font plus rares , cSl font en plus petit volume que celles de deux couleurs qui fe trouvent commimément avec les autres agates: les Anciens tiroient de l'Egypte les plus belles onyx, & aujourd'hui \'oxi en trouve dans pîufieurs provinces de l'Orient, & par- ticulièrement en Arabie (h),

(g) Lycophtalmos quatuor efr coîorum ex rut'ilo ù' fanguïneo in mcdio vigrum candido c'iugitur ut luporum cculi , illis per omnia fimilis. Triophtalnios très hominis fimul oculos exprïmens. PJin. lib. XXXVii , n. 71 & 72. Horm'inodes ex argumenta viridïtatïs in candidâ gemma vel nigrâ & aliquando p/illidâ , ambiente circula aurei coloris appellatur. Idem, n.° 60.

(h) On trouve des onyx dans VYemen ; on voit beaucoup de ces pierres dans /es chemins, entre Tms & le mont Sumara: Aycfcha , Ja femme bien aimée de Mahomet, avoit un collier de ces pierres peu eflimées aujourd'hui. Defcriptim de l'Arabie , par Al, JSiebuhr . page I2J,

DES Minéraux. 595

l'jA.iiBJi-ii m^i.' 'rtai

CALCÉDOINE.

JLi A Calcédoine cfl encore une agate, mais moins belle que la cornaline, la fardoine & la prafe; elle efl au/Ti moins tranfparente , & fa couleur efl indécife, iaiteufè & bleuâtre; cette pierre eft donc fort au-de(fous, non-feu- Jement des cornalines Si. des fardoines, mais même des agates qui ne font point laiteufes , Sl dont la demi-tranf- parence eft nette; auffi donne-t-on le nom de calcéJoîne k toute agate dont la pâte efl nuageufe & blanchâtre.

Les calcédoines en petites maffes , grolTes comme des lentilles ou des pois , font très - communes & fe trouvent en immenfe quantité ; j'en ai vu par milliers dans des mines de fer en grains; elles y étoient elles- mêmes en petits grains arrondis , qui paroifToient avoir été ufés par le frottement dans leur tranfport par le mouvement des eaux ; ia plupart n'étoient donc que des débris de maffes plus grandes ; car on trouve com- munément les calcédoines en flaladites d'un affez grand volume , tantôt mamelonnées , & tantôt en lames apla- ties; elles forment fouvent la bafe des onix dans Icf- quelles on voit le lit de calcédoine fiarmonté d'un lit de cornaline ou de fardoine ; les calcédoines font auffi quelquefois ondées ou ponduées de rouge ou d'orangé, & ih rapprochent par-là des cornalines & des fardoines; pliais les onix les plus eflimées , Sl dont on fait les plus

Ffffi/

59^ Histoire Natv relle

beaux camées, font celles qui, fur un lit d'agate pure- ment blanche, portent un ou plufieurs lits de couleur rouge , orangée , bleue , brune ou noire , de couleurs en un mot , dont les couches différentes tranchent vivement & nettement i'épaiiïeur de la pierre ; ordi- nairement la calcédoine eft laiteufë, blanche ou bleuâtre dans toute fa fubftance. On en trouve de cette forte de très -gros & grands morceaux, qui paroilfent avoir fait partie de couches épaiffes Gaffez étendues: les plus beaux échantillons que nous en connoiiïions, ont été trouvés aux îles de Feroë, & Ton peut en voir un de fix à fept pouces d'épaiiïeur au Cabinet du Roi. On diftingue dans ce morceau , des couches d'un blanc auffi mat & auffi opaque que de l'émail blanc , & d'autres qui prennent une demi - tranfparence bleuâtre. Dans d'autres morceaux, cette pâte bleuâtre offre des reflets & un chatoyement qui iont reflembler ces calcédoines à des girafols (a) ^ Si les rapprochent de l'opale, laquelle femble participer en effet de la nature de la calcédoine, ainfi que nous l'avons dit à fon article.

^aj Cette eipèce de calcédoine bleuâtre & à reflets, paroîi défjgnée dans la notice fuivante : « On tire de la montagne de Tougas , des » agates de différentes efpèces , & quelques-unes d'extraordinairement j> belles , d'une couleur bleuâtre, afiez femblables au faphir: on en » tire auffi des cornalines & des jafpes. Cette montagne eft à l'extré- » mité feptentrionale de la grande province d'Osju au Japon , vis-à- vis du pays de Yeço w. H'ijhire Naturelle du Japon, par Kc£mpfer ; la Haye, i y 2 c) , tome I, page pj.

DES Minéraux. ^ç^-j

Au refte , les calcédoines mélangées de pâte d'agate commune , ou les agates mêlées de calcédoine , font beaucoup plus communes que les calcédoines pures; de même que les agates, fardoines & cornalines pures, font infiniment plus rares que les agates mêlées & brouillées de ces diverfes pâtes colorées ; car la fubf- tance vitreufe étant la même dans toutes les agates, & les parties métalliques ou terreufes colorantes , ayant pu s'y mélanger de mille & mille manières , il n'efl point étonnant que la Nature ait produit avec tant de variété les agates mêlées de diverfes couleurs, tandis que les agates d'une feule couleur pure fans mélange, & d'une belle tranfparence , font aflez rares & toujours en très- petit volume.

593 Histoire N aturelle

PC I -m- J.l-JT ■■■■. J-' l.

PIERRE HYDROPHANE.

V^ETTE pierre fc trouvant ordinairement autour de h calcédoine, doit être placée immédiatement après q\\q\ toutes deux font corps enfemble dans le même bloc, &. cependant différent l'une de l'autre par des caradtères effentiels: les Naturalifles modernes ont nommé cette pierre oculus miuidi , &. ils me paroifient s'être mépris lorfqu'ils l'ont mife au nombre des agates ou calcé- doines ; car cette pierre hydropliane n'a point de tranf^ parence, elle eit opaque <Sc moins dure que l'agate, & elle en diffère par la propriété particulière de devenir tranfparente , & même diaphane lorfqu'on la laiffe tremper pendant quelque temps dans l'eau; nous lui donnons par cette raifbn le nom de pierre hydropliane : cette propriété, qui fuppofe i'imbibition intime & prompte de l'eau dans la fubfîance de la pierre , prouve en même temps que cette fubftance efl d'une autre texture que celle des agates dont aucune ne s'imbibe d'eau; enlin, ce qui démontre plus évidemment combien la flruéture ou la compofition de cette pierre hydropliane diffère de celle des agates ou calcédoines, c'efl la grande diffé- rence qui fe trouve dans le rapport de leurs denfités (a) ,

(a) La pefanteur fpécifique de l'agate eft de 25901 , & celle de la pierre oculus mundi ou hydrophane, n'efl que de 22(jjc. Voye^ la Table de M. Brijon.

DES Minéraux. 599

celle de l'hydrophane n'efl que d'environ 23000, tandis que celle des agates & calcédoines eft de 26 à 27000; il eft vrai que la fub fiance de toutes deux efl quartzeufe, mais la texture de i'hydroph^ne eft poreufe comme une éponge, (Se celle des agates &i calcédoines efl folide & pleine ; on ne doit donc regarder cette pierre hydro- phane <Sc poreufe, que comme un agrégat de particules ou grains quartzeux qui ne fe touchent que par des points, & laifTcnt entr'eux des interflices continus qui font la fondion de tu)'aux capillaires, & attirent l'eau jufque dans l'intérieur &. au centre de la pierre ; car fa tranfparence s'étend & augmente à mefure qu'on la laifTe plus long-temps plongée dans l'eau, elle ne devient même entièrement diaphane qu'après un afTez long féjour, foit dans l'eau pure , foit dans toute autre liqueur ; car le vin, le vinaigre, i'efprit-de-vin , & même les acides minéraux, produifent fur cette pierre le même effet que l'eau ; ils la rendent tranfparente fans la diffoudre ni l'entamer, ils n'en dérangent pas la texture, & ne font qu'en remplir \es pores dont enfuite ils s'exhalent par le feul delféchement ; elle acquiert donc ou perd du poids à mefure que le liquide la pénétra ou l'abandonne en s'exhalant, & l'on a obfervé que les liquides, aidés de la chaleur , la pénètrent plutôt que les liquides

froids.

Cette pierre qui n'étoit pas connue des Anciens/ navoit pas encore de nom dans le fiècle dernier: ïï

6oo Histoire N atu relle

eft dit dans les Éphémérides d'Allemagne, année ify2, qu'un Lapidaire, qui avoir trois de ces pierres, fit prc* fent d'une au Confui de Marienbourg, & la lui donna comme une pierre précieufè qui n'avoit point de nom; Tune de ces pierres, ajoute le Relateur, étoit encore dans fa gangue de quartz ; celle qui fut donnée au Confui de Marienbourg , n'étoit que de la groffeur d'un pois & d'une couleur de cendre; elle étoit opaque, & lorfqu'elle fut plongée dans l'eau, elle commença au bout de ^\^ minutes , à paroître diaphane par les bords ; elle devint d'un jaune - d'ambre ; elle pafTa enfuite du jaune à la couleur d'améthyfte , au noir, au blanc, & enfin elle prit une couleur obfcure, nébuleufe & comme enfumée; tirée de l'eau elle revint à fon premier état d'opacité, après s'être colorée fucceiïivement, & dans un ordre inver(è des mêmes teintes qu'elle avoit prifes auparavant dans l'eau (b). Je dois remarquer qu'on n'a pas vu cette fucce/Tion de couleurs fur les pierres qui ont été obfèrvées depuis ; elles ne prennent qu'une couleur &. la confervent tant qu'elles font imbibées d'eau.

M. Gerhard, favant Académicien de Berlin, a fait beaucoup d'obfervations fur cette pierre hydrophane (c) , il dit avec raifon qu'elle forme l'écorce qui environne

(b) Colledion académique. Partie étrangère , tome III, page i 6j.

(c) Voyez les Mémoires de l'Académie de Berlin, année ijjj; &. le Journal de Phyficjue de M. l'abbé Rozier, Mars 177 S.

les

DES Minéraux, 6oi

les opales cSc les calcédoines cl'Iiîancle & de Fcroc, 6c qu'on Ja trouve également en Siiéfie elle conftitue l'ccorce brunâtre & jaunâtre de la cryfopmfe. D'après les expériences chimiques que M. Gerhard a faites fur cette pierre, W croit qu'elle eft compofée de deux tiers d'alun fur un tiers de terre vitrihable & de matière graiïe (d) ; mais ce favant Auteur ne nous dit pas quelle efl cette matière graiïe ; on peut lui demander fi c'eft de la graifle, de l'huile ou de l'eau-mère de fel ! & ces deux tiers d'alun font- ils de l'alun pur, ou feulement de la terre^ alumineufe ! quoi qu'il en foit , il nous apprend qu'il a fait la découverte d'une pierre en Silcfre , qui préfente les mêmes phénomènes que celle-ci: « Cette pierre, dit-il, efl foiblement tranfpa rente ; mais plongée « dans l'eau elle le devient complètement ; il lui faut feulement plus de temps pour acquérir toute tranf- « parcnce (e) ». De plus, par les recherches particulières

(d) Cette pierre efl compolc'e de deux tiers d'alun, d'un tiers terre vitrifiable «Se de matière grafle. L'efpèce brune de Siléfie contient aufîi du fer; ce n'ell donc ni quartz, ni caillou, mais une pierre grade de l'ordre de celles qui contiennent de la terre d'alun; d'où l'Auteur avoir conclu qu'il falloir en faire plutôt une efpcce qu'un genre , attendu qu'il pouvoit arriver qu'on découvrît dés pierres chatoyantes parmi les pierres grafles qui contiennent la magnéfie du fel marin. Jmrnal de Pliyjîijiie de Af. l'abbé Hoiier , Mars J 77S .

(e) ÎI y a cej)endînt une grande diffcrence entre ce morceau & /es autres qii'ort.avoii auparavant examinés; il faut à celui-ci plufieurs jours avant qu'il devienne tranfparent duns i'eau. M. Gerhard examinant

Minéraux, Tome ÎIL ^ ZZ^

6o2 Histoire Naturelle

que M. Gerhard a laites de ces pierres hydrophancs, il alTiire en avoir vu qui avoient jufqu'à deux pouces un quart de longueur fur un pouce un huitième de largeur^ & plus d'un pouce d'épaifFcur par un bout, & il dit qu'on les trouve dans la matière intercalée, entre les couches des calcédoines de l'ile de Feroë.

Il eft vrai que toutes ces pierres bydrophanes ne font pas également lufceptibles de prendre à volume égal le même degré de tranfparence , les m*es deviennent bien plus diaphanes, ou le deviennent en bien moins de temps que les autres; il y en a qui changent de couleur, & qui de grifes deviennent jaunes par l'imbi- bition de l'eau; mais nous avons vu plufieurs de ces pierres dont les unes étoient grifes, les autres rougeâtres, d'autres vcrdcitres, & qui ne changeoient pas fenhble- ment de couleur dans l'eau elles prenoient une afTez

cette difFérence , a trouvé qu'elle confifte uniquement dans une plus grande quantité de matière grafle ; car fi l'on fait bouillir cette nouvelle efpcce d'ocu/us mundi dans du vinaigre , & encore mieux dans la lefîive caullique, on s'apercevra qu'après cette opération, H faut beaucoup moins de temps pour qu'elle devienne tranfparente. Cette expérience donne lieu de préfumerque toutes les pierres grafles dans lefquelles la matière grafïè n'eft pas trop abondante, & qui ne font pas trop chargées de parties martiales , pourroient produire le même effet , d'autant j)lus qu'il efl vraifemblable que toutes les efpèces qui appartiennent à cette clafTe, doivent leur origine, fur tout à une terre glaife ou marneufe, dont le caractère principal efl de s'imbiber fortement des principes fluides. Journal de Phyfique de M. Vû^bi Rojier y Mars ijjS,

D E s M l N È R AU X. 60^

belle tranfparence. M. le dodcur Titiiis, favaiit Natara- lifte, & Direéleur du Cabinet d'Hifloire Naturelle à Drefde, m'a fait voir quelques-unes de ces pierres, & m'a confirme le fait avance par M. Gerhard, que \hydrophû7ie grife eft m\t matière qui fe trouve inter- calée entre les couches de la calcédoine; M. Daubenton, de l'Académie des Sciences, a vérifié ce fait en réduifant à une petite épaifieur quelques-unes des couches opaques grifes ou blanches , qui fe trouvent fouvent entre les couches des calcédoines ; il y a auffi toute apparence que cette même matière fert quelquefois d'enveloppe, & recouvre la couche extérieure des calcédoines; car on a vu des hydrophanes grifes , qui avoient trop d'épaifleur pour qu'on puifTe les regarder comme des couches de lames intercalées dans la petite mafie des calcédoines ; on peut auffi préfumer qu'en recherchant fur les cor- nalines, fardoines & agates colorées, les couches opaques qui les enveloppent ou les traverfent , on trouvera des hydrophanes de diverses couleurs, rougcitrcs, jaunâtres* verdâtres , fèmblables à celles que m'a montrées Ai. Ta'ius, & je penfe que cette matière qui fait la fubilance des hydrophanes, n'eft que la portion la plus groffière dii fuc vitreux qui forme les agates; comme les parties de cette matière ne font pas affcz atténuées , elles ne peuvent fe réunir d'afiez près pour prendre la demi-tranfparencc èL la dureté de l'agate ; elles forment une fubftance opaque, porcufe & friable, à peu-près comme le grès;

Ggggij

6o4 Histoire Naturelle

ce font en effet de petits grains quartzeux réunis plutôt que diffoub, qui laiffent entr'eux des vides continus & tortueux en tous fens, & dans lelquels la lumière s'éteint & ne peut paifer que quand ils font remplis d'eau; la tranfparence n'appartient donc pas a la pierre hvdrophane, & ne provient uniquement que de l'eau qui fait alors une partie majeure de fa maffc, & je luis perfuadc qu'en faifant la même épreuve fiir des grès amincis , on les rendroit hydrophanes par leur imbibiiion dans l'eau. Il n'eft donc pas ncceffaire de recourir avec j\i. Gerhard, à la fuppoluion d'une terre mêlée de matière graiïe pour rendre railbn de la traniparence que ces pierres acquièrent par leur immcrfion & leur fé/our dans l'eau ou dans tout autre Jiquide traniparent.

r^^^^

DES Minéraux. 605

PÉTRO-SILEX.

JLi E premier caraclère apparent du Péiro-filex efl une clen:ii-tranrparence gralFe , qu'on peut comparer à celle du miel ou de l'huile flgce ; il me femble que ce cara6lère n'éloigne pas le pétro - iilex du quartz gras ; mais confidcram toutes Tes autres propriétés, je crois qu'on peut le regarder comme un quartz de féconde formation mclc d'une certaine quantité de feld -fpath; car la dendté du pétro-lilex efl prefque exaélement la même que celle du quartz gras & du feld-ipath blanc (aj: fa dureté efl aufTi la même que celle de ces deux verres primitifs, & comme, félon M. d'Arcet , le pctro-filex efl fufiblc à un feu \iolent , cette propriété femLle indiquer que fa fubftance n'efl pas de quartz pur, & qu'elle efl mêlée d'une certaine quantité de ield-lpath qui , fans rien changer à fa denfité, lui donne cette

fufibilitc.

Le pétro-filex fe trouve en petits & gros blocs , & même en afTez grandes maffes dans les montagnes quaptzcufes & graniteufes : fa demi-tranfparence le dif- tingue des jafpes avec lefquels il fe rencontre quel- quefois, & auxquels il reffemble fouvent par les couleurs;

- I II, - - - , -

mm i ■" ' ' ■'

(a) La pefanteur fpecifique du quartz gras eft de 26458, celle du feld-lpath blanc dl de z6^66, ôi celle du pétro-filex blanc eft de ^6^27.

6o6 Histoire Natv relle

car il y a des pétro-filex, comme des jafpes, Je toutes teintes (b) ; elles font feulement moins intenfes <5c moins nettes dans le pctro-filex, & dm poli fans être gras , comme fa tranfparence , n'eft néanmoins pas aufïi vif que celui des beaux ja/pes.

Cette pierre e(l de féconde formation; elle fe trouve dans les fentes 6i cavités des rochers vitreux ; c'eft une concrétion du quartz mclé de feld-fpath , & comme ces

(b) Caillou de roch^ ; petro-jîlex; lapis corneus Germanorum, II eli compofé de parties aflcz groOlères , & ne reçoit pas un beau poli; jj eil demi-tranfparent à les extrémités & aux parties minces.

Jl y a du pétro-filex :

{ I ) Couleur de chair dans la mine de Caris à S^hlberg :

(2) Jaune-blanchâtre à Sahia:

(3) Blanc; à la mine de Chrifticnfl^erg, dans la nouvelle minç de cuivre.

(4.) Verdàtre ; à la Fofîe des Prêtres dans Hellefors.

On ne connoît point encore de caradère diftindif entre le pétro- fllex & le jafpe; mais un œil expert s'aperçoit bien que le pérro-fjlev, quand il eft cafTé, efi: un peu brillant & demi -tranfparent , au lieu que le jafpe reflemble à de la corne, qu'il ell juat & opaque, comme une argile defTcchée. Le pétro-filex ne le trouve aufîi qu'en morceaux & débris , tandis que le jalpe fait quelquefois les plus grofl'es & les plus fpacieufes montagnes. II fe trouve aufTl dans le voifinage de pierre à chaux , comme les filex dans \es lits de craie : arec Je temps on pourroit peut-être acquérir de plus amples & de plus fxades connoiflances. EQaï de Aiinéralog'ie traduit du Suédois ù" de l'Allemand de M. Wledman , par M. Dreax ; Paris, 17/1 , p^g^i p 2 & Juiv,

DES Minéraux. 607

deux verres primitifs font unis clans la fubflance des granités, le pétro-filex doit fe trouver communément dans les montagnes graniteufes , telles que les Vofges en Lorraine, & les montagnes de Suède, \Vallerius dit qu'il y en a de blancs , de gris , de bruns , de rougcâtres, de verdâtres & de noirâtres; d'autres qui font ondes alternativement de veines brunes & jaunes, ou griiès & noirâtres ; d'autres irrégulièrement tachés de ces différentes couleurs, &c.

DES Minéraux, 609

ARRANGEMENT DES MINÉRAUX

EN TABLE MÉTHODIQUE,

Rédigée d'après la connoiffancc de leurs propriétés

naturelles.

V^ETTE Table préfente les Minéraux, non-feulement avec leurs vrais caradères , qui font leurs propriétés naturelles, mais encore avec Tordre fucceffif de leur gcnéfïe ou filiation , félon qu'ils ont été produits par l'adron du feu , de l'air &l de l'eau fur l'élément de la terre.

Ces propriétés naturelles font:

1 . La dendté ou pefantcur fpéciiique de chaque fubdance qu'on peut toujours reconnoître avec précifion par la balance hydroftatique :

2. La dureté dont la connoiffancc n'eft pas aufli précife , parce que l'effet du choc ou du frottement ne peut fe mefurer auffi exaclement que celui de la pefanteur par la balance, mais qu'on peut néanmoins eflimer, & comparer par des effais afTez faciles:

3. L'homogénéité ou fmpiicité de fubflance dans chaque matière, qui fe reconnoît avec toute précifion dans les corps tranfjjarens , par la f mple ou double réfraction que la lumière foufïre en les traverfant , & que l'on peut connoître , quoique moins cxaétcment ,

Alinéraux, Tome JIL H h h h.

6 10 Histoire NyiTURE lle

clans les corps opaques, en les foumettant à Tadioii tles acides ou du feu:

^/^ La fudbilitc & la réfiflance plus ou moins grande des diiîë rentes matières à l'adion du feu avant de /e calciner, fe fondre ou vitritier:

y^ La combuftibilité ou dellru^tion des différentes fubilances par l'adion du feu libre, c'eft-à-dire , par Ja combinailon de l'air & du feu.

Ces cinq propriétés font les plus effentiellcs de toute matière, & leur connoiffance doit être la bafe de tout fyftème minéralogique & de tout arrangement métho- dique : auffi cette connoiffance , autant que j'ai pu l'acquérir, m'a fervi de guide dans la compofition de cet Ouvrage fur les Minéraux, dont le quatrième & dernier Volume efl aétuellement fous prefTe ; & c'efl d'après ces mêmes propriétés, qui conffituent la nature de chaque fubftance, que j'ai rédigé la Table fuivante:

(5ir

Mg-iJ-ii-u-i— ■i,»i.ijv«^^tiUj_i,jt^imji^t>'_i.'in.»-«.>.;u«TiXr^tUi^i»jit^n

».mn.imi. L-1..UUI— j^ja

TABLE MÉTHODIQUE

DES MINÉRAUX.

PREMIER ORDRE.

Maiïères vhreiifes. Première Classe.

MdîVcrcs viîreufes produites par le feu primitif.

I JUL.I riVI'IW"'" "'""■■' ■" "i.iiii", "7

MATIERES.

SORTES.

Subfiances vitreules

iiniples. r r\

* ' Quartz.

Feld-fpath. Verres primitifs ^ Schorl.

Jafpe. Mica.

VARIETES.

1

Roches de 2, , 3 & 4. lubllances vitreules.

Pierre Je Lapponic.

rouge.

'■■ SuLHances compofe'es.

Porphyre,

brun.

tous deux pondues de| blanc.

rou£re.

Granit < ?

ens.

a gros grains, à petits gra'ns.

Hhhh ij

6i2 Table

Deuxième Classe,

Matières vitreufes extraites des premières , & produites pat

l'intermède de l'eau.

PREMIERE DIVISION.

Produits du Quart^.

MATIERES.

Vitreufes produites

par l'intermède

de l'eau ,

demi - tranlparentes.

Quartz

de féconde foniuiion

Criflal de roche,

Tranfparentes / Amcthyfte

Criflal-topaze

Chryfûlithe.

Algue-marine.

VARIETES.

blanchâtre.

lougeatre.

gras.

feuilleté.

grenu.

blanc.

nuageux.

rougcâtre.

bleuâtre.

jaune.

vert.

l"Tun.

noir opaque.

irifc.

violette, pourprée.

d'un jaune plus ou moins foncé & enfumé.

d'un jaune mêlé de plus ou moins de vert.

d'un vert bleuâtre

ou

d'un bleu verdâtrc.

MÉTHODIQUE. 613

SECONDE DIVISION.

Produits du Feld-fpalh feul , & du Qvnvli mêlé de Fcld-fpath.

MATIERES.

SORTES.

VARIETES.

Tranfparentes j Saphir d'eau,

Pierre de RufTie

ou

de Labrador.

Demi-tranfparemes. . . 1 Q£il de chat,

Toutes chatoyantes. . . J QEil de poifTon

QEil de loup.

Opale .

Opaque

A vent urine.

1

plus ou moins bleuâtre & à demi-chatoyant.

chatoyante , avec reflets vcrdàtres &. bleuâtres.

gris.

jaune.

mordoré.

blanc intenfe. blanc-bleuâtre.

brun-rougeâtre. brun-verdâtre,

à fond blanc.

à fond bleuâtre, fond noir.

fans paillettes.

femée de paillettes bril lantes rouges, bleues (3c d'autres couleurs.

rouge plus ou moins femée de paillettes brillantes de 4ilférentcs couleurs.

6i4

Table

TROISIEME DIVISION.

Produits du Schorl fiul, & du Qudrii & Fdd-fpath mêlés de fchorl.

MATIERES.

Traiifparentcs,

VARIETES.

du Pérou.

^I,

vert pur plus ou moins cidir.

(iu Brcfil.

vert plus ou moins

foncé.

)Icu. blanc.

B, \ vert-blcnâtrc.

ervi \

) bleu-verUatre.

( plus ou moins denfe.

< vert plus ou moins mclc de jaune.

dEir de chat noir ou noiratie

Demi- tranfparentes Opaques

Rubis & Topazes diA P^"s ou moins rougcâtre. Brelil ) plus ou moins jaune- loncc

jaunc-dor'é. Topaze de Saxe / jaune-clair.

blanche.

rouge-violct^ Syrien.

rouge couleur de feu / Grenat ^ Efcarboude. I

rouge brun dcmi-tranfpa-j rcnt ou opaque.

Hyacinthe ^ jaune mêlée de plus ou

^ moins de rouge.

Tourmaline S «■'^"S'-'e.

f orangt-( ^ noirâtr(

Pierre de croix 5 ^''""^•

) noirâtre.

MÉTHODIQUE. 615

QUATRIÈME DIVISION.

StûlûLiites vïtreiifes non crijlallifées , produites par le mélange du Quart?^

& des autres verres primitifs.

Demi-tranfparentes. .

( blanche. ] laitcufe.

Agate < veinée.

j ponduée. V herborifée.

C rouge pur plus ou moins ^-. T. 1 intenfe.

<-OXi-l^\me < veinée.

f ponéluée.

C orangée. Sardoine < veinée.

/ herborifée,

Prafe vert plus ou moins foncé.

C blanchâtre. y-^ \ . y / bleuâtre.

^^^^^àoxnt <rougeâtre.

^ toujours laiteufe,

Tranfpareii tes imbibées f „. i t i ) m' ^-^^

,, ' > Pierre hydrophane. . .< bleuâtre.

<^eau ^ J ^ /rougeâtrc.

i blanc. 1-k r C 1 roui;eâtre.

Demi-tranfparentes \ Petro-filex (de toutes couleurs.

aux parties milices. J j veiné.

\ taché.

C compoTéc de lits on

Onyx \ couches de différentes

/ couleurs.

C veinés. Cailloux < œillés.

^_ , / herborifés.

Opaques { )

^ T- V^np'i's gros ou plus petits

Poudino'ues < -n

1 uuuHJj^uca \ cailloux.

r fanguin. Jaf])es de féconde for-1 héliotrope.

mation i ^*^';'''- ,

V. univerlel.

6i6

Table

CINQUIEME DIVISION.

Produits if ûçrréirais du Alica cf du Talc.

Ojîaques

&

Demi-tranlparentes,

C blanchâtre. i^de / verr.

{ olivâtre.

tachée de toutes couleurs, verte fans tache.

Serpentine / veinée.

librcufe. grenue, .

blanchâtre, verdâtre.

Pierre ollaire / fcmée de points talqueux.

veinée, feuilletée.

ipure. no'râtre-plonibée. melee de leurre, plombagine.

o- j I T S blanche,

r terre de lard {

) rougeâtre,

r> l'-r r 1 blanche.

Craie d Lipap-ne. . . . < .^

) griie.

r^.. ; ,1 T) ) blanche.

L-raie de Jinancon. . . {

f plus ou moins fine.

blanc.

Talc ) ^^^rdâtre.

jaunâtre, rougeâtre.

Suite

M É T U 0 D I (l U E. 6iy

Suite de la cinquième division.

Produits & agrégats du Mica & du Talc.

Amiante.

Demi-tran(parentes. .

Aftefte.

Cuir de montagne.

Opaques.

Liège de montagne

Minéraux, Tome III.

en filets plus ou moins longs , & plus ou moins

fins.

blanchâtre.

jaunâtre.

verdâtrc.

en epis.

en filets plus ou moins

courts, gris.

jaunâtre, blanchâtre.

plus ou moirts poreux &. léger.

blanc.

jaunâtre.

en lames plates ou fcuil lets fuperpofés.

jaunâtre.

blanchâtre.

en cornets ou feuillets contournés.

plus ou moins caverneux & léger.

lii

1 1

6i8 Table

Troisième Classe.

Détrimens des Matières vïîreiifes.

Compofees des détrimens des verre primitifs.

Porphyres de féconde formation

Granits de féconde formation

Opaques.

Grcs .

Argiles.

\

Schide & Ardoife. ,

vert taché de blanc, couleurs variées.

rougeâtre à gros grains ^ grandes lames ta!- queufes.

rougeâtre à petits grains, Granité lie.

pur.

mêlé de mica.

à grains plus ou moins fins

de fubftance plus ou

moins compa(5ie. blanc, jaunâtre, rougeâtre. brun.

grès poreux. grès à tiltrer.

blanche & pure.

bleuâtre.

verdâtre.

rougeâtre.

jaunâtre.

noirâtre.

grifâtre.

bleuâtre.

noirâtre.

pins ou moins dur, & en

grains plus ou moins

fins.

MÉTHODIQUE. 619

Quatrième Classe.

Concrétions vïîreufes & argilcufes formées par l'intermède de l'eau.

MATIERES.

Concréiions arorileufes

Grès mêlés d'argile

SORTES.

Ampdite.

Sme<^is

ou

Argile à foulon.

Pierre à rafoir

Ces ou Pierres à aiguifer.

VARIETES.

plus ou moins noire, à grain plus ou moins fin,

comporéc de couches al- ternatives de gris-blanc ou jaunâtre , & d'un gris brun.

plus ou moins dures.

blanches.

brunes,

bleuâtres.

jaunes.

rougeâtres.

grès de Turquie.

l i i i ij

620

T A B

DEUXIEME ORDRE.

Matières calcaires toutes produites pari intermède de Veau. Première Classe.

Matières calcaires prlmitires avec leurs Jétrimeiis & agrégats.

MATIERES.

SORTES.

Coquilles

Sub/laiîces calcaires primitives.

Madrépores.

Polypieds de toutes fortes. ,

1

Craie

Detrimens des matières calcaires primitives en grande marfes. j Pierres calcaires

VARIETES.

Les variétés de ces corps marins à ÇviD?i3.ï-\ct co- quilleufe font innom- brables.

\

plus ou moins blanche (S;] plus ou moins dure.

de première formation.

Pierres coqu'illeufes.

de féconde formation.

plus ou moins dures.

à grain plus ou moins fi«n

blanches ou teintes de dïiférentes couleurs.

MÉTHODIQUE, 6ll

Suite de ia Première Classe.

Matières calcaires primitives avec leurs rlétrimens & agre'gats.

VARIETES.

Marbres.

Détrimens des matières

calcaires primitives

en grandes mafles.

lAIMm

de première rorniatron. Marbres coquilleux.

Brèches.

I

Poudingues calcaires.

de Ççconà.Q ïormiiXïon.

blancs.

de toutes couleurs uni- formes ou variées.

veiné.

onde.

blanchâtre.

jaune.

irougeâtre.

mêlé de gris , de brun & de noir.

hcrborifé.

Plâtre.

6ii

Table Deuxième Classe.

Staldâites & concrétions calcaires.

MATIERES.

SORTES.

Produits des matières calcaires tranlparens, r

Spatii calcaire

Demi-tranfparens

Opaques mêlés de lublUnce olleufe

Perles.

Turquoifes

criflal d'inande. fpath blanc, jaune, rougeâtre.

blanches. Perles d'huître.

jaunâtres.

brunâtres. Perles de pa- telles i^ de moules.

de vieille roche.

de nouvelle roche.

d'un bleu plus ou moin pur (Se plus ou moins foncé.

verdâtres.

IiicruHaiions

&

pétrifications calcaires.

Tous les corps orga- nifés incruAcs ou pé- trifiés par la fijbftance calcaire.

Coquilles pétrifiées.

Madrépores & autres corj)s marins iiicruftés & pétrifiés.

Bois & végétaux in- cruftes & pétrifiés.

623

MÉTHODIQUE.

Troisième Classe.

Adtitières vitreiifes mêlées d'une petite quantité de fuhflances calcaires

MATIERES.

Plus vitreufes que calcaires. Opaques.

Demi- iranfparentes

Opaques.

Tianfparentes

SORTES.

VARIETES.

blanche. 2^^'û'"'^e rougeatrc

bleuâtre.

bleu.

Lapis lazuli / taché de blanc.

mêlé de veines pyriteufes

grife.

Pierre a rulil (

rougeâtre.

noirâtre.

C plus ou moins dure & Pierre meuiitre .....( ,

j plus ou moins trouée.

rouge ; faux rubis.

jaune ; fauïïe topaze Spath fluor

^ vert; faufTe émeraude

bleuj faux faphir.

02^

Table

TROISIEME ORDRE.

Matières provenant des débris if du détriment des Animaux if des Végétaux,

Première Classe.

Produits en grandes maffes de la terre végétale.

r Terre de jardin plus ou

Terreau < moins décompofée &

/ plus ou moins mélangée*

S Terreau décompofé, dont les parties font plus ou . ..,.^ moins atténuées

& des animaux , plus , r t- j i

ou moins mélangées/ Terre limoneufe ) ?'T r P'"!"

j I . \ 1 erie iimoneuie / font encore plus de

de parties heiero- J ^ compofées.

gènes opâfjues

Terre végétale entière ment décompofée

Bols </ ^''""

rouge

gris

vert

Tourbe ... \ '^^'''■^^" P'"s ou moins ) bitumineux.

Mëlaneëes de bitume. / l ^^^•^.•'e végétale plus ou

i I moins bitumineufe.

paques. \ Charbon de terre.. . .< P'"^ ou moins pyriteufe.

plus ou moins mélangée

•de matière calcaire ,

fchilleufe, &c

Seconde

MÉTHODIQUE, 625

Deuxième Classe.

Concrétions & produits de la Terre limoneufe.

Produites par la terre limoneufe ,L ^ t

phofphorefcentes \ ^P^^^ P^^^"^' &. combullibies.

Opaques & comburtibles.

Pyrite.

Liquides & concrètes;

tranfparentes ,

demi-tranfparentes,

opaques

& conibuftibles.

Pierre de Bologne.

Spath pefant odaèdre.

blanc.

cridallifé.

mat.

de couleurs différentes.

^cubique lifTe.

\ cubique flriée à la furface

Iglobuleufe ou elliptique. K Marcaffite.

Jplus ou moins dure.

Ê recevant le poli, <Sc non V efflorefcente.

Soufre minéral plus ou moins décompofé

naphte. pétrole, afphalte.

Bitumes ^ fuccin.

ambre gris.

poix de montagne,

jayet.

Minéraux, Tome IIL

Kkkk

(>zi Table

Suite de la Deuxième Classe.

Concrétions & produits de la Terre limoneiife.

MATIERES.

SORTES.

Produites

par la terre Jimoneufe ,

tranfparentes

& homogcnes.

Diamant.

V A

R 1

É T

E

s.

blanc.

odaèdre.

dodécaè

drc.

jaune.

couleur

de rofe.

vert.

Combuftibles

bleuâtre, noirâtre.

rouge de feu.

Vrai Rubis ^ rouge pourpre, >'W.

rouge clair,, balais. rouge orangé j vermeille.

^j. . rr- \ jaune vif.

Vraie Topaze. ...... ^

jaune d'or velouté.

bleu.

bleu-célede. Ibleu foible. Vrai Saphir ^ blanc.

bleu-foncé.

bleu mêlé de rouge, Gyrafol,

METHODIQUE.

6zj

QUATRIEME ORDRE.

Aiatîères falïnes. Première Classe.

Sels ftinples , Acî.Ie , Alkali & Arfcuic,

MATIERES,

SORTES.

Acide acrien.

VARIETES.

Produits f Acide & Sels

de r.cide aérien V ^itrioliques fur les maticres vitreufet. '

Produits

de l'acide aérien

fur les fubrtances

animales & végétales.

Alkali

Alun de roche. Alun de plume. Vitriol.

en maffcs.

en ftaladitcs.

vert. }'ltriol ferrugi- neux.

bleu. Vitriol cuivreux

blanc. Vitriolée ^inc Beurre fertile.

Natron.

Soude.

Allsali minéral.

Alkali fixe végétal.

D

Alkali volatil. Alkali cauftique. Alkali fluor.

Kkkk ij

628 Table

Suite Je la Première Classe.

Sels fimpJcs , AciJe , Alkali & Arfcnic.

MATIERES.

SORTES.

Autres produits

de l'acide aérien

liir les fu bilan ces

animales &. végétales .

Produits

de l'acide aérien

lur les matières

calcaiies & alkalines.

Acide des végétaux '& des animaux

Acide pholphorique.

Acide marin.

Nitre,

Produits de l'acide aérien

liir les matières

alkalines, animales,

végétales &. minérales.

Arfênic.

Sel mêlé de parties . p métalliques, .......) '^^^^^'

VARIETES.

Vinaigre.

Acide du tartre.

Acerbes.

Acide des fourmis , 6cc.

mclé d'alkali. Sel gemme. Sel marin.

Salpêtre de houfTage.

mclé de parties métalli- ques en Heurs blanches, criltallifé. mêlé de foufre. orpiment, réalgar.

Tinckal eu borax brut, d'une confiftance molle & rougeâtre.

d'une confiflance ferme, |

grifc ou verdâtre. Sel fedatif.

MÉTHODIQVE. 629

Deuxième Classe.

Sels fublimés par le feu.

Subftance du feu

faifie V Soufre

par l'acide vitriolique.

Produits fublimés

de l'acide maria

&. de l'alkali volatil.

Sel ammoniac

Compofées

de l'acide vitriolique

&. de la niaiiére

du feu libre.

Acide fulfureux volatil.

compofé de l'alkali volatil & de l'acide marin.

de l'alkali volatil <?c de l'acide vitriolique.

de l'alkali volatil & de l'acide nitreux.

630

Table Troisième Classa.

Sels compofés par l'intermède de l'eau.

MATIERES.

SORTES.

VARIETES.

C

de fo

lompofces r

une &. d alkali. \

Coinpofées de l'acide vitriolique ^ Sel de Clauber. (3c d'alkali minerai.

Compofées de l'acide vitriolique \ Sel d'Epfoin. <5t de la niagncTic.

METHODIQUE.

6>,l

CINQUIEME ORDRE.

Afatières métalliques. Première Classe.

Matières métalliques proiiitites par le feu primitif.

MATIERES.

Métalliques fimples

& dans leur état

de nature.

Métaux,

SORTES.

VARIETES.

Or primitif en état de métal . .

en filets, en lames, en grains- en malfes. en pépites, en végétations.

jaune.

rougeâtre.

blanchâtre.

criftallifé en odacdre par

le feu. toujours allié d'argent par

la nature.

en ramification, en feuilles, en grains. Argent primitif / toujours allié d'or cScquel-

en état de métal \ quefois d'autres fubltan-

ces métalliques, criftallifé en odaèdre par le feu.

Cuivre primitif en état de métal. . .

Ç en bloi l gros.

blocs plus ou moins

ans les roches

Plomb en état de chaux. J"^^'.^"g^,^3

l vitreufes.

Étain en état de chaux . 5 "^^'.^"g^/^n^ les roches

) vitreules.

Fer en ctat de fonte.

mélangé dans les roches

vitreufes. aimant, émeril. mâchefer, fablon magnétique.

632 Table.

Deuxième Classe.

Al ère s méîdUiques formées par l'intermède de l'eau.

MATIERES.

SORTES.

Concrétions & mines

des métaux dans leur état d'agrégationj * &. de minéraliration.

VARIETES.

Argent.

Métaux.

)

Cuivre.

en paillettes, pyrite aurifère.

en paillettes.

pyrites argentifères.

Mine d'argent vitrée, bru- ne, noirâtre ou grife.

Mine d'argent cornée , jaunâtre, à dcmi-tranf- parente & opaque.

Mine d'argent rouge.

Minerais pyriteux du cuivre ou pyrites cuivreufes.

Mine de cuivre vitreufe.

Mine de cuivre cornée. Mine de cuivre foyeufe. Malachite.

Mine cri/tallifée.

veloutée.

fibreufe. mamelonnée.

Pierre arménienne, azur, bleu de montagne vert de montagne.

Mine de cuivre antimo- niale.

Suite

MÉTHODIQUE, 6^

Suite (Je la D e u x i i m e Classe.

Afdtières métallitjues formées par l'intermède de l'eaa.

MATIERES.

SORTES.

Concrétions & mines /

des métaux dans leur état d'aerefratioi & de minérilifation.

VARIETES.

Plomb

Étain

Métaux

Fer,

galène.

Mine de piomb viîreufe & crillailifee.

blanche.

noire.

rouge.

verte.

jaune.

Mine d'étain en filons.

en couches.

en rognons.

en grenailles.

en criftaux.

noirs.

blancs.

jaunâtreSt

rouges.

Mine fpathique.

fpéculaire.

en grains.

en géode.

en ocre.

en rouille plus ou moins décompofée.

hématite.

Minéraux, Tome JIL

LUI

634 Table

Troisième Classe.

Afciùères femi-niétûîli(]ues ou dcnù-tnéîaux dans leur état de nature.

SORTES.

Eau métallique

Demi-métaux,

I

Mercure.

Antimoine.

Bifmuth

;

Zinc,

VARIETES.

\

en cinabre.

en état coulant.

en minerais blancs & gris.

Mine d'antimoine en aiguilles.

Mine d'antimoine en plume, fouvent niéiéc d'argent.

en état métallique, mêlé de cobalt, jaunâtre.

rougeatre.

en pierre calaminaire. en blende. noire.

grife.

jaunâtre.

rougeatre , &c.

crillailifée.

tranfparentc.

opaque.

en vitriol blanc

METHODIQUE. Quatrième Classe.

AlHages métalliques faits par la Nature,

'^35

MATIÈRES.

SORTES.

VARIÉTÉS,

f

en grenaille toujours mc-

Platine é

t

1 lée de fablon magné- tique , &. alliée de fer dans fa fubflancc.

' toujours plus ou moins

Cobalt <

(

mclé de fer par un * alliage intime.

Alliages métalliques j

.

' mêlé de fer &: de cobalt

tous mêles de fer .... ^

Nickel )

par un alliage intime, grenu.

^

. iamellcuî.

(

' grife.

\

1 noire.

Manganèfe <, .J

i

fcrillalliféc. L non criflallifée. r toujours mêlée de fer par an alliage intime,

<

EBia

LUI ij

6^,6 Table méthodique.

SIXIEME ET DERNIER ORDRE.

Produits volcaniques.

MATIERES.

SORTES.

VARIETES.

Laves.

Bafalte,

Matières fondues par le feu des Volcans.

Pierre de touche.

Pierre variolite.

Te

par le fe

rre cuire f

u des Volcans, (

.Tripoli.

Detrimens des matières voicaniques.

Pouzzolane.

plus ou moins compades, plus ou moins trouées, noires , brunes & rou-

ge aue s.

■plus ou moins mêlé de fer , ainfi que les laves & de différentes figures, depuis trois jufqu'a neuf faces dans fa longueur, articulé ou non dans Ton épaiffeur.

noirâtre.

grifâtre.

verdàtrc.

à grains plus ou moins

hns. noire, brune.

fe.

gri

à grains plus ou moins proéminens , & plus ou moins rougeâtres,

blanc.

jaunâtre,

noirâtre.

plus ou moins sécFi« &

rude au toucher.- grife. rouge, blanchâtre, ôcc.

■■

!

Fin du troifième Volume des Minéraux,

TABLE DES MATIERES

Contenues dans ce Volume.

XTLGATES. Le fond de leur fubf- tance efl de la même eflence que celle du qw^-m^page 578. Elles font produites par le fédiment de ia ftillaiion des eaux , 579. Agates en grand volume , leur formation, j8o. Variétés dans les couleurs & dans ia difpofition des lits dont font compolces les agates, ^7^ à" fu'iv. Elles fe trouvent dans toutes les parties du monde, & dans tous les terreins le quartz domine , 582. La pelanteur fpécifique des agates en général , ell un peu moindre que celle du criAal de roche, 577. Quelques agates contiennent de i'eau en quantité même aflez (en- fible , & que l'on peut recueillir en les calTant, 462 & 578. Agates œillées , 5 p 2. Agates herborifées, 5 84. Pétrifications d'os & de bois en agates , j 8 i . Les agates onyx font compofées de couches ou de lits de différentes touleurs, 592. Les plus belles

agates onyx fe trouvent en Orient j, & particulièrement en Arabie , 594.

AiGUE-MARiNE (!') efl: une ftalâdite du quartz, un criftal de roche teint d'un vert- bleuâtre ou d'un bleu-verdâtre, 448 & 478.

AlGUE-MARINE ORIENTALE. Voyei BÉRYL,

Airain efl; un alliage de cuivre & d'ctain , dans lequel il ne faut qu'une partie de ce dernier métal iur trois de cuivre, pour en faire difparoître la couleur, & même pour le défendre à jamais de fa rouille ou vert-de-gris , 64. L'airain de Corinthe étoit un alliage de cuivre, d'or & d'argent, dont les Anciens ne nous ont pas indiqué les proportions , 61 .

A L K A L I volatil efl plus commun qu'on ne croit à la furface 6c dans l'intérieur de la terre, 58.

Amalgame. Différences entre l'amalgame & l'alliage, 245.

Améthyste, Les amethyfl:es violettes & pourprées ne font que des criHâux de roche teints de ces

}J Ta

belles couleurs, 447 & 467.— Elles ont la même denfitc , la même duieLé, la même double réfradion que le ciiflal de roche, & font également rcfiadaires au feu , 467. Leur pointe ell toujours colo- rce, 6c fouvent la couleur manque dans leur bafe, ibïd. Amethyftes en Auvergne, en Hongrie, en Sibe'rie, à Kamtfchatka , 468 ù" fuiv. Ainethyltes pourprées en Catalogne, 4(^9. Antjmoine. Formation des mines primordiales d'antimoine, 277.— Formation des mines fecondaires, ibid. Mines d'antimoine en plu- mes & autres mines antimoniales de dernière formation, 27 S. Alines d'antimoine en France, en Allemagne, en Hongrie, en Italie, en Afie, en Afrique &; en Amé- rique, 279 àf Ju'iv, Antimoine crud, fa compofition & fa re'duc- tion en rcgule , 272 à^ fuiv. Foie & verre d'antimoine, 274. Différence du régule d'antimoine avec les me'taux, 276. Alliage du re'Lfule d'antimoine avec les mc-taux , ibïd. & fuiv. Argent. L'argent & l'or dans la nature primitive n'ont fait gcnéra- iement qu'une mafle commune, i. Propriétés communes à ces deux métaux ; 2, Pioprililés

BLE

différentes de ces deux métaux , 4. Mine d'argent vitrée, fa forma- tion , 5 . M ine d'argent cornée , 7 & t 5. Mine d'argent rouge, 1 J. Vitriol d'argent, 7. Autres minéralifations de l'argent, 9. Alliage de l'argent avec les autres métaux, lo & fuiv. Raifons pourquoi l'argent & l'or ne fe con- veriiOent point en chaux comme les métaux imparfaits, 12. Ar- gent natif de deux fortes, 14. Mines d'argent en France, 1 6 tf fuiv. En Ef])agne , 1 9 ci^ fui^. En Allemagne, 22. Eu Hongrie, 2 > & fuiv. En Suède, Danemarck , Norwège& Illande, 2.6 & fuiv. En Pologne, 27.— En Sibérie & dans plulleurs pro- vinces de i'Afie , 30 & fuiv. -^ En Afrique , 3 i c^ fuiv. En Amérique, & particulièrement au Pérou , à Potolî , 3 2 di^ fuiv. Manière d'exploiter les mines d'ar- gent au Pérou , &L d'en tirer le métal, 34.

Arsenic. Efl une matière qui forme une ligne de féparaiion qui remplit le grand intervalle entre les matières métalliques & \çs ma- tières falines , 3 94. Son effence efl autant faline que métallique , 395. Propriétés falines de l'ai^ feiiic^ ibid, Propriétésmétalliques

iD E s Ma

<3e fon reguïe, ïbid. La plupart des mines d'arfetiic, noires & grifes, font des mines de cobalt mêlées d'arfenic ; & l'arfeaic vierge efl: comme le cobalt, toujours mtlé de fer, 399. L'arfenic fe trouve dans prefque toutes les mines mé- talliques , & fur - tout dans celles de cobalt & d'étain *, 402. A (fiions de l'arfenic fur les mines de différens métaux, 403. Alliage de l'arfenic avec les ipctaux, 407, Manière dont on recueille l'ar- fenic par fublimation, 410. AvENTURiNE. Ses rapports avec le feld-fpath & le mica. Defcrip- tion de cette pierre , qui louvent cil plus opaque que iranfjiarente , 492.

B

B

É R Y L. Ses différences avec l'aiguë - marine à laquelle il rel- feinble par les couleurs, 328. Les Lapidaires lui ont donné le nom à' aiguë -marine orientale , ibiJ,, ^ Différentes fortes de béryls, leurs défauts. Le béryl tire fon origine du fchorl , au lieu que i'aigue-marine provient du quartz , ibid. & fulv. Bismuth. Se trouve prefque toujours pur dans le lein de la terre, ^8). Sa pefanteur eft

T J E R E S. ]};

plus grande que celle du cuivre, ibid. Il eft plus fufi ble qu'au- cune autre fubAance métallique , 2 3(î. Son alliage avec les mé- taux 6i demi-métaux , ibid. & 290.

Le bidnuth & le mercure forment enfemble un amalgame coulant, 2 S 7. Epoque de la première formation du bifmuth , 289, Poudre du précipité de bifmuth avec laquelle on fait le fard, 2f) I . Étaniage des glaces c^ verres au moyen du biimuth, 292.

Blende. Voyei Z i n c. Il fe forme allez fouvent dans les grands fourneaux , des concrétions fem- blables aux blendes naturelles. Koyei ibid.

C '

^ADMIE des fourneaux efl Une concrétion de fleurs de zinc , ({ui s'accumulent & s'attachent aux parois des cheminées des four- neaux où l'on fond les mines de fer qui contiennent du zinc, 303.

Manière de faire du laiton avec la cadmie des fourneaux , ibid. Ù'jilivi

Calamine. Voyei Zinc.

Calcédoine eO une agate d'un blanc bleuâtre & d'une tranfpa- rence laiteuiè, 55^5 & 595. Calcédoin.^s en pe it & en grand volume, )9 5 Ù' Juiy,

h T A

C A R A C O L I ^cj- Àmencûins , quelfe peut être cette matière métallique,

113.

Chrysocolle verte ou veri de montagne, n'efl: que du vert- de - gris très -atténué. -La chryfocolfe bleue ne diffère de la verte que par la couleur que les alkalis vola- tils ont fait changer, 56. 0\\ l'appelle aiur lorfque le bleu eft bien intente, & bleu de montagne lorfqu'il l'efl moins, ibid.

Chrysolite. Les pierres que l'on appelle aujourd'hui chryfolites, ne font que des criflaux dont le jaune efl mêlé d'un peu de vert , 475. Différence de la chryfo- îite & du péridot, 476. Chry- folites des volcans font de la même rature que les chryfolites ordi- naires , 477.

Chrysoprase, efl une prafe dont Ja couleur verte efl: mêlée d'un peu de jaune, 589.

C I M E N s. Différence des cimens naturels & de nos cimens artifi- ciels ,414. Le premier des ci- mens de nature, eft le lue vitreux DU criflâllin. Le fécond ell le fiic f])athiqueou calcaire, 41 5. Le troificme ell le ciment métal- lique & pyriteux , ibid. if fu'iv Le quatrième e(l le bitume, &c. 418,

BLE

Cinabre ell un compofé de mercure par le foie de foufre, 230. Produdion du cinabre , 23 i «y fu'iv. Le cinabre ne fe trouve point mêle avec les mines des autres métaux , à l'exception de celles de fer en rouille , qui font de dernière formation, 229.

Cobalt. De tous les minéraux métalliques , le cobalt efl; peut-être celui dont la nature ell la plus mafquée;^on ne peut le recon- noitre d'une manière fûre que par la couleur bleue qu'il donne aux émaux, 359. Les mines de cobalt font aflez rares, & toujours chargées de matières étrangères , ibid. Le cobalt efl toujours mêle de fer fi intimement, qu'on ne peut les féparer , ibid. Régule de co- balt , fes propriétés , 3 60 & ^ i . Indices des minières de cobalt, 3 6 1 Ù'fuiv. La fubftance du régule de cobalt efl plus fixe au feu que celle des demi- métaux , & même que celle du fer & des autres métaux imparfaits , 369. Alliage du ré- gule, de cobalt avec les métaux & demi - métaux, ^yo Ù" fuiv. Mines de cobalt en Europe, à la Chine, au Japon, &c. 372 Ù* fuiv.

Cornalines font des agates

d'un rouge pur & d'une belle

tranfparence ,

DES Ai 'A tranfparence , jSj.— If y en a auiïî de moins tranfparentcs , 5 S (5. Cristal de roche. Eli de la même elTence que le quartz. Sa for- mation , 44,0. Pourquoi l'on trouve'trcs ' rarement des cridaux à deux pointes , & très-commune'- ment des criftaux en pyramide fimple , ou en prifmes funnontcs de cette feule pyramide, 44.1. Criftaux de roche, grands & petits, font figures de même , 442. Criflal de roclie donne une doubfe réfraction dans le fens dnfl, qui n'a pas lieu dans le fens du contre-fl de fa fubftance, 444. Efl: com- pofé de deux matières de différente denfité, & dont l'une eft moins dure que l'autre, ibid. &. 445. Criftaux de roche de couleurs différentes, 447. Les parties élémentaires du criftal de roche , font des lames triangulaires fort petites , ôc dont lafurface plane eft néantnoins beaucoup plus étendue que celle de la tranche qui eft pref- que infiniment mince, 453 ù'fuiv. C'eft toujours près du fommet des montagnes quartzeufes <Sc gra- niteufes, que fe trouvent les gran- des criftallières ou mines decriflal, 45 5 ^fi^iv. Il fe trouve plufieurs criflaux qui contiennent de l'eau <Sc des bulles d'air , 46 r . Le criftal

Mincrmx , Tome UL

T I E R E s. >

fe trouve dans toutes les montagnes primitives quartzeufes & grani- teufes en Europe, en A fie & dans toutes les parties du monde, 462 à^ fuïv. Les criftaux colorés ne font pas plus denfes que les criftaux fans couleurs, 4<55 <5c 487. Cristallisation. Les formes de criftallifation , ne font ni générales ni confiantes, & elles varient au- tant dans le genre calcaire que dans le genre vitreux, 422. Mnnière dont fe produifent les crifiaflifa- tions, foit par le moyen du feu, foit par l'intermède de l'eau, 425 Ù' fuiv. Raifon pourquoi des matières très-différentes peuvetit fa criftallifer, & fe criftallifent en effet fous la même forme, 430. La forme de criftallifation n'indique ni la denfité , ni la dureté , ni la fufibilité , ni l'homogénéité , ni aucune des propriétés effentielles de la fubftance des corps , 433. Elle n'eft point un caradère ipé- cifique & diftindif de chaque fubftance , ibid. Dans la criftal- lifation la Nature n'opère que dans deux dimenfions , au lieu que dans le développement des êtres orga- nifés, elle agit dans les trois di- menfions à la fois, 449 &" fuiv. Circonftance efientielle à la crif- tallifation , 5 73-^ y^'^- ^ Jvl m m m

yj Ta

crinallrfation peut s'opeier égale- ment par le moyen du feu comme par celui de i'eau , 72. Cuivre. Le cuivre primitif a été formé comme l'or & l'argent dans les montagnes quartzeules, &l\[ le trouve, foi t en morceaux de métal malllf, foit en veines ou filons jnélancrés d'autres métaux, 50. Mines de cuivre de féconde for- mation , elles font plus rébelles que toutes les autres à i'adion du feu , \ \6. Elles exigent d'être grillées plufieurs fois avant de donner leur métal, yy. Mines de cuivre de troifième formation, 56. Cuivre de cémentation fait par la Nature, 66. Affinité du cuivre & du fer, 64 & 66. Alliages du cuivre avec les autres métaux, demi-métaux & avec l'ar- fenic, 6^. Propriétés du cuivre, fa denfité, fa ténacité, fa mauvaiie odeur , fes qualités funeftes , la dureté, fon élailicité, fa dudilité, fa réfiftance au feu , 70. Chaux & verre de cuivre ,71. Tous les fels de la terre & des eaux , foit acides , foit alkalins , attaquent le cuivre & le difiolvent avec plus ou moins de promptitude & d'énergie, 74. Enumeration des principales mines de cuivre de l'Europe , ôc des autres parties du monde, 80

BLE

& fuiv. Comme le cuivre efl moins difficile à fondre que le fer, il a été employé long-temps au- paravant, pour fabriquer les armes & \gs inftrumens d'Agriculture , 51. Kailon pourquoi l'on ne trouve prefque plus de cuivre primitif en Europe & en A fie; & pourquoi l'on en trouve encore en Atiique &. en Amérique, ibid. Converlion du cuivre en vert-de- gris ou verdet; comment elle s'eft opérée dès les premiers temps , 5 2, à^ Juiv. Eaux cuivreufes ,53. Comparaifon du cuivre avec l'or & l'argent , & leurs diliérences efîentielles , 60. Les minerais cuivreux de leconde forination , demandent encore plus de temps & d'art que les mines de fer pour être réduits en bon métal, ib'id. de 61.

Cuivre jaune ou laiton. Efl un mélange de cuivre ik de zinc, qui ne fe trouve pas dans la Nature, 61. Manière de faire du bon laiton, 68.

D

.U ISSOLUTIONS. Les difiolutions des métaux (ont en générai plus corrofives que l'acide même dans lequel ils ont été diflous, 45.

DES AI A

E

V

■L A u ( r ) dans Ton eiïence doit être regardée comme un fel infi- pide & fluide, & [a glace qui n'efl: que ce même fel rendu folide le devient d'autant plus que le froid efl; plus grand , 214.

Emeraude doit être niife au nombre des crillaux du quartz mêlé de fchorl , 503 ci^ fuïv. De'fàuts des emeraudes, 504. La véritable cjneraude étoit bien connue des Anciens, 5 07 & fuiv. Faufles emeraudes , 510. Lieux l'on a trouvé la plus grande quantité d'émeraudes en Amérique, j I 7. L'émeraude efl fufible , & fufibilité ainfi que fa pefanteur (pécifique, démontrent que fa fubf- tance quartzeufe efl mêlée d'une certaine quantité de fchorl , 5 20. Emeraude du Brefil , l'es diffé- rences d'avec la véritable emeraude du Pérou, 520. Rapports évi- dçns de cette emeraude du Breill avec les fchorls , ibid. Ses autres propriétés , ïbid. Les emeraudes étant des pierres vitreufes &. à double réfradion, ne doivent pas être mifes au rang des pierres précieufes, qui par leur àen^né y leur dureté & leur homogénéité, font d'un ordre fupérieur &

T I è R E s. vi)

d'une origine didl-rente , 522.

Enhydres; c'efl le nom qu'oii a donné à des agates ou cailloux minces & creux qui contiennent une aflez grande quantité d'eau, 461 .

E TA I N. Mines d'étain de première forjiiation, i 27. La mine d'étain efl plus pefante qu'aucune de celles des autres métaux minéralifés, & fa plus grande pefanteur provient de l'arfenic qui y efl mêlé , 135.— Etain, cofiime tous les autres mé- taux, ell un dans la Nature, 14^,

Mines d'étain en roche, 125.

Mines d'étain en criflaux ; gran- deur & couleurs 4p ces criflaux , 1 24. Produits de ces mines d'étain par fonte , ihid. Etain peut s'dllier avec tous les métaux & demi-métaux, 153. Grande affinité de l'étain avec le fer & le cuivre, 158. Étamage du fer préférable à celui du cuivre, i 5p.

L'étain enlève à l'argent comme à l'or , leur ducflilitc , 11, Eit après l'or & l'argent , le métal le moins fufceptible d'altération par les élémens humides , 64. Ses mines paroifîent affecter des lieux particuliers, 1:^5. Nulle part il ne fe préfente fous fa fonne métallique, ibïd. Mines d'étain font toujours plus ou moins mêlées

M m m m ij

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T A

d'aifenic, 123. . Cendre & potée d'étain, 129. On peut faire artificiellement des mines d'étain avec de l'ctain & de l'arfenic ,130.

L'ctain efl après Je plomb le plus mou des métaux , 131.— On mêle le cuivre avec i'étain pour lui donner plus de fermeté, ibiJ. Propriétés de l'ctain , fa denfité , (à. ténacité , &c. îbid. ù'

fulv II n'y a point d'étain pur dans le commerce , & il efl toujours mêlé de cuivre ou de plomb ,132.

Mines d'étain en Angleterre, en Allemagne, aux Indes, à Ma- laca , Banca , &c. fur les côtes orientales de l'Afrique & en Amé- rique , I 3 5 & fulv,

F

£LD-SPATH. Caradères par lefquels il diffère du quartz. La criftâllifation du feld - fpath a été produite par le feu primitif, & a par conféquent précédé toutes les crillallilations qui le font faites par l'intermède de l'eau ; preuve de cette allértion, 480 éfjuiv. Les extraits du feld-fpaih font en afléz grand nombre ; mais ils ne le pré- fentent nulle part en aufli gros volume que les criftaux quartzeux ; ils lont toujours en alfez petits morceaux ifolés , parce qu'il ne le

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trouve lui-même que très-rarement en mafles un peu confidérables , 481.

Feld-SPATH de Ruffie. Trouvé nouvellement près de Féterfbourg; fa delcription, fes couleurs «Se les propriétés, 485. Cette pierre chatoyante paroît être un feld- fpath mélangé de fchorl, 48 (j.

Fer. Il ne le fait aucune union intime, auciui alliacre entre le fer &. l'argent, 11. Comparaifoii du fer avec le zinc ,214.

Feu. Le feu agit fur les métaux, comme l'eau (ur les lels , 212. Le feu paroît être dans le mercure en quantité prefque infiniment petite , ibid.

Foie de foufre. A fouvent aidé , plus qu'aucun autre agent , à la minéralifation de tous les métaux, 2y i .

ALÊNE n'efl qu'une efpèce de pyrite compofée de chaux de plomb , &. de l'acide uni à la fub- flance du feu fixe, 204. Peut fe régénérer dans les mines de plomb qui font en état de cérufe ou de chaux blanche , 1 p i .

Grenat, (le) Quoiqu'aufll pelant que les pierres précieufes, ne doit pas être mis à leur rang, fa grande

DES 'Aï A

pefanteur ne provenant que du fer qu'il contient en parties inafTives ,

5 39 ^ 5+4- Différences du grenat & des pierres précieufes , ibid. Le grenat eft conipofc de fchori <3c de fer, il e(l fufible «Se donne une double rtfradion, ibid,

6 540. Ses reflemblances avec les fchorls de féconde formation , ibid. La plupart des grenats contiennent aflez de fer en état métallique pour agir fur l'aiguilîe aimantée, ibid. La forme des grenats varie prefque autant que celle des fchorls, 542 & 54p. On les trouve fouvent mêlés en- femble , J 4 i . Les grenats fe préfentent quelquefois en allez gros groupes , & plus fouvent en criflaux ifolés , J42. Grenats volcanilés ont perdu leur couleur & une grande partie de leur poids , J44. Les grenats de tout pays font de la même nature ; fouvent même ceux de Bohème font plus parfaits que ceux qu'on apporte des Indes orientales, 545. Gre- nat Syrien; le plus beau de tous les grenats vient de Surian dans le royaume de Pégu, ibid. Dif- férentes couleurs dans les grenats , 546 cf fuiv. L'eicarboucle ou carbunculus des Anciens , eft vrai- fembiabiement un grenat; )-^7 ^

1 tx

T I E Ti E S.

fuiv. Difîerences par lefquelles on peut diftinguer aifément les grenats des ruljis , 5 jo, Diffé- rens lieux l'on trouve (\ts grenats , tant dans l'ancien que dans le nouveau coniuieat , ibid, & fuiv.

H

H

Y A C I N T H E ( r ) ajiproche du grenat , &. on peut la regarder comme un produit du fchori mêlé de lubftances métalliques, 553.

Ses caradères communs avec le grenat : ces deux pierres fe ren- contrent fouvent enfemble, ibid,

L'hyacinthe elt après le grenat la pierie vitreufe la plus denfe , ibid. Différentes nuances dans la couleur orangée des hyacinthes, 5^4. Elles perdent leur couleur au feu, & y deviennent blanches fans perdre leur tranfparence, ibid,

Différens lieux l'on trouve des hyacinthes , j 5 (5.

Hydrophane ( Pierre ) , ocu/us mundi ; cette pierre ie trouve ordi- nairement autour de la calcédoine, ou intercalée entre ks couches , 598 &. 603. Leurs différences; cette pierre hydrophane eft opa- que , «Se ne prend de la tranfpa- rence que quand eWe eft itnbi- bée d'eau, ibid. Sa texture eft

X T A B

différente de celle de la calcédoine & des autres agates, 598. Elle devient traniparente , non - feule- ment dans l'eau, mais dans toutes les autres liqueurs, 599. Ces pierres ne prennent pas toutes à volume égal le même degré de tranfparence, 6oz. La tranfpa- rence n'appartient pas à la pierre hydrophane, &. ne provient uni- quement que de l'eau, qui fait une partie majeure de fa mafTe après l'imbibition, 604.

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JLaiton. Koyf^ Cuivre jaune, 6\. Efl: un peu plus denfe que le cuivre pur, mais c'eft lorfque ni l'un ni l'autre n'ont été com- primés ou battus , car il devient moins denfe que le cuivre rouge après la comprefTlon ; il efl: aufîl moins fujet à verdir, & fuivant les différentes dofes du mélange , cet alliage efl: plus ou moins blanc , jaunâtre , jaune ou rouge ; c'efl: d'après ces différentes couleurs qu'il prend les noms de Similor , de Pïnchebec & d^ métal de Prince, 61. & 62.

M

IVi ALACHITES. Comment elles font produites par la décompo-

L E fition du cuivre, jS & 59. Les belles malachites fe trouvent le plus communément dans les contrées du nord de i' A fie, 103. Différentes formes fous lef- quelles fe préfentent les mala- chites , ihid.

Manganèse efl un minéral compofé qui contient toujours du fer, & qui efl: mélangé de matière calcaire, 38 j. La manganè/e fe trouve principalement dans les mines de fer fpathiques , 386. Elle a auffi fes mines particulières, ibid. Indices de la manganèfe par la couleur violette des pierres calcaires ,386 if fuïv. Variétés de la manganèfe dans fes mines , 390. Régule de la manganèfe; les principales propriétés , ihid. Alliage du régule de la manganèfe avec les métaux & demi -métaux, 391, Le régule de manganèfe contient toujours du fer , & il efl: fi intimement uni avec ce métal qu'on ne peut jamais S'tn féparer totalement , ihid. Ufage de la manganèfe dans les Manufaélures des glaces & des verres blancs ; elle donne au verre une couleur violette , & fait difparoître les autres couleurs lorfqu'elles font foibles, ihid.

Massicot efl une chaux de

DES AI A T

plomb qui prend au feu la cou- leur jaune en la remuant avec une fpatule ,195.

Matière. Les propriétés eflen- tielles de toute matitre font la denfitc , la dureté , la plus ou moins grande fuj^bilité , i'homo- généïtc <5t la combuniLilité ; ce font en même temps les vrais caractères par lefquels on peut reconnoître la nature & l'oricrine de chaque fubftance différente , 43<5 & fuiv.

Mercure efl plutôt une eau métallique qu'un vrai métal, 2, i 5.

Raifon pourquoi le mercure ne mouille que les métaux , &. ne mouille pas les terres , ih'id. & fuiv.

Le froid extrême coagule le mercure fans lui donner une foli- dité confiante , ni même auffi per- manente que celle de l'eau glacée, 2. 1 I . Comparaiion ^s proprié- tés du mercure avec l'eau & avec les métaux , ïbïd. Le mercure mouille les métaux , comme l'eau mouille les fels ou les terres à pro- portion des fels qu'elles contien- nent, 212. Rapports du mer- cure avec l'eau, 214. & fuiv. Rapports du mercure avec \gs métaux , 2 1 7 diT' fuh. Le mer- cure ne fe trouve que dans les couches de la terre , formées par

I h R E S. X).

le dépôt des eaux ; il n'efl point mêlé dans les minerais des autres métaux, 219. Sa mine à laquelle on donne le nom de cinabre , n'ell point un vrai minerai, mais un compolc par llmple juxtapofîtion de loufre & de mercure réunis, ibid. La formation des mines de mercure efl poflérieure à celle des mines primordiales des métaux , 220. Le mercure fe préfenie très-rarement dans un état coulant, ibid. Le cinabre r;e fe trouve que dans quelques endroits particuliers le loutre s'efl trouvé en grande quantité , & réduit en foie de foufre par des alkalis ou des terres calcaires , qui lui ont donné l'afiî- nité nécefîaire à Ion union avec le mercure , ibid. Des trois grandes mines de mercure, & dont chacune lufïîroit aux befoins de tout l'Univers, deux font en Europe & une en Amérique, 221. Aline d'Idria dans la Carniole .... Mine d' Almadcn en Efpagne , ibid. Mine de Guanca Velica au Pérou , 222. Autres petites mines de mercure , tant en Europe

qu'en A fie, 225 & fuiv Raifon

pourquoi Von trouve fi rarement le mercure dans fon état coulant , ^23 2. Confidération du mercure dans Ion état de cinabre ; & dai-!>

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\<ôn c'tat fTui Je , 237, Principales propriétés du mercure , ïbiJ. Différence de la chaux de mercure & des autres chaux métalliques , 2.40 ù' yî"i'« Amalgame du mercure avec les métaux (?c demi- métaux , 246 & fuïv. II refufe de s'amalgamer avec le fer, l'an- timoine & le cobalt, 248. Le mercure ne forme pas un amalgame avec les graifl'es , 252. On retire Je mercure fans perte de tous les amalgames ; mais on ne peut le retirer en entier des graifles, 254.— Sublimé corrofif , ibid. Mercure doux, fa préparation, 255. Le mercure jeté dans l'huile bouil- lante prend une forte de folidité, 2J9. D'où peut provenir la folidité que le mercure prend dans le zinc fondu & dans l'huile bouil- lante , ibid. & fuiv. Le mercure philofophique n'eft qu'un être d'opinion, 262, Comment le mercure agit dans le corps des animaux, 16 i). Al É T A U X. Confidérations & re- flexions fur la nature des métaux , 2 63 <y fuiv. Ordre des matières métalliques, depuis l'or jufqu'à J'arfenic, 393* La rédudion de la chaux des métaux , n'efl: dans le vrai, qti'une forte de précijiitation , ^99' Comparaifon des mines

BLE

primordiales des fix métaux, 208 Ù' fuiv. Échelle de la Nature dans fes produdions métalliques , 213^ fuiv.

Minéralisation. Comment & par quels agens s'opère la minera- lifation des matières métalliques , 402 & fuiv.

Mines. Les mines primordiales du fer, de l'or, de l'argent, «Se même du cuivre , font toutes dans le roc vitreux , & ces métaux y font incorporés en plus ou moi/is grande quantité, dès le temps de leur première fufion ou fublima- tion par le feu primitif, 38. Les mines fecondaires qui fe trouvent dans les matières calcaires ou fchif- teufes , tirent évidemment leux origine des premières , ibid,

M I N I u M efl: une chaux de plomb, qui prend la couleur rouge à un certain degré de feu déterminé, qui eft de cent vingt degrés , & ne doit être ni plus fort ni j)lus foible, 195. Pratiques ufitées en An- gleterre , pour faire le minium eia grande quantité & à moindres frais, 196 Ù" fuiv,

M u N D I c K efl une poufîlère qui fe trouve dans les mines d'étain, & qui ne contient qu'une très- petite quantité de métal, & c'ert

plutôt

D £ s A

plutôt de l'arfenic decompofç que de l'ctàin, 1^3.

T I È R E S.

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A T U R E. Ses produdions ne doivent pas être regardées comme des ouvrages ifolcs ; mais il faut les confidcrer comme des fuites d'ouvrages dans lefquels on doit faifir les opérations fucceflives de travail , en partant & marchant avec elle du plus fimple au plus compofé, 439.

Nickel efl un minéral qui fe trouve dans les mines de cobalt, & qui n'efl connu que depuis peu d'années, 377. Le nickel con- tient toujours du fer, & l'on ne peut l'en féparer entièrement par aucun moyen , 380. II donne au verre la' couleur d'hyacinthe , ibïd. Le nickel , le cobalt & la inanganèfe ne font pas des demi- métaux purs, mais des alliages de différens minéraux mélangés , & fi intimement unis au fer qu'on ne peut les en féparer, 381. Alliage du nickel avec les métaux & demi- métaux, 381 d/fuiv. Le nickel ne s'amalgame point avec le mer- cure , 383. Différence entre le minerai du nickel & celui du cobalt, /^/V.

Minéraux, Tome II L

kJ c u LU s M u N D i, Voyfi Hydrophane.

(EiL DE Chat. Les pierres aux- quelles on a donné ce nom, font toutes chatoyantes; elles varient pour le deffin plus ou moins régu- lier des cercles ou anneaux qu'elles préfenteiit, 487. Variétés de ces pierres , ibid. Leurs pro- priétés chatoyantes , leurs rapports avec le feld-fpaih , 488.

<EiL DE Chat noir ou noirâtre. Ses différences avec les autres pierres auxquelles on donne ce même nom d' œil de chai, 526. II provient du fchori , ibid.

(ElL DE Loup. Pierre chatoyante provenant du feld-fpath , & mêlée de particules micacées; elle paroît faire la nuaiice entre lesfeld-fpaths de les opales , 49 i

(ElL DE Poisson. Pierre ainfi nommée , parce qu'elle refîeinble au criftallin de l'œil d'un poilfon, ^89. Elle ell chatoyante, & on doit la rapporter au feld-fpath, fa defcription & fes propriétés, ibid. & 490.

Onyx. Voyei Agate, Le nom à'ofiyx qu'on a donné de préfé- rence aux agates , dont les lits font de couleurs différentes, pourroit

N n 11 n

xlv T A

s'appliquer afTez généralement à toutes les pierres dont les couches fuperpofées font de diverfes fubf- tànces ou de couleurs différentes, 591.

Opale eft la plus belle de toutes les pierres chatoyantes; fa defcrip- tion , Ton chatoyement, fa texture, fon peu de denfité & fes autres propriétés, 493. L'opale eft dans la réalité , une pierre irilée dans toutes fes parties , elle efl: beaucoup plus légère que le feld- Ipath , & auflx beaucoup moins dure, 45)4. Différentes fortes d'opales, ib'id. & fu'iv. Opales noires, 49^- La gangue de i'opale ell une terre jaunâtre & vitreufe, qui ne fait point effer- vefcence sisec \gs acides, 498. Les opales renferment fou vent des gouttes d'eau , \hid.

Or. VoycT^ Argent, i, 2, 3 & 4.

Orpiment. Comment on dillingue l'orpiment & le rcalgar naturels de l'orpiment ôc du réalgar arti- ficiels , 409.

P

X ELLA & PiGNE d'ArGENT.

Voye?^ Argent, 36. P É R I D O T , tire fon origine du fchorl , 5 2. 3 . Différences du péridot & de la chryfolite , ïhid.

BLE

Deux fortes de pcridots , leurs difîérences & leur defcripiion , 524. Le péridot donne une double réfradion plus forte que celle du crillal de roche , & il a , comme ce criftal, un fens dans lequel il n'y a point de double réfradion , ib'id. ôc 5 2 j .

PÉTRO-SILEX. Son premier carac- tère apparent, eiï une demi-tranf- parence grafle qu'on peut comparar à celle de l'huile figée, 605. Il doit être regardé comme un quartz mêlé de feld-lpath.- Il eft fufible à un feu violent. II fe trouve en petits & gros blocs , & teint de différentes couleurs , ibid,

Pierre de croix. Cette pieire n'efl qu'un groupe formé de deux ou quatre colonnes de fchorl , oppofées & croifées les unes fur les autres , 5 6y. Variétés dans la forme de ces pierres , & leur defcription , ibid. Ce font des fchorls de formation fecondaire , 568.

Pierre deLabrador, Voyei Feld-spath de Russie.

ViET^TiE infernale. Voyei Dissolu- tion d'Argent, 45.

Pierres irifées. Commem pro- duifentles couleurs dans les pierres irifées, 500. Ce Lbnten général

D £ s Ma

des pierres fêlées & défedueufes , joo,

Pj ERRES précievfes. Leur fubdance diffère de celle des criHaux de roche, tant par la denfitc que par la dureté & l'homogéncité , c'ell: de la terre limoneufe ou végétale, & non de h matière vitreufe qu'elles tirent leur origine, 460.

Pierres travfparentes. Toutes les pierres tranlparentes Ibnt fufcep- tibles de devenir éledriques, elles perdent leur éledricité avec leur traniparence, jéo.

Platine. On n'en a jamais rencon- tré dans aucune région de l'ancien continent , & il n'y a que deux endroits en Amérique, l'on ait julqu'ici trouvé cette matière mé- tallique dans des mines d'or, 3 i 6. •— Elle efl: en grenaille , & mêlée de fablon ferrugineux & magné- tique, ibid. Il n'eft pas certain que cette forme de grenaille foit la forme native de la platine ,317. La platine eft encore plus ré- fraâiaire au feu que la mine de fer, ibid. La platine n'efl point un vrai métal fimple , mais un minéral dont la produdion eft accidentelle, 3 1 8 6c 5 I 9. La platine contient toujours du fer, car elle eft tou- jours attirable à l'aimant, 319. l^a platine eft toujours aigre, &

T I E R E XV

n'acquiert que très-peu de dudi- iité, ibid. C'eft un alliage d'or & de fer fait par la Nature, 320, Raifons pourquoi l'on ne peut tirer ni l'or ni le fer de la platine, 321. Principales propriétés de la platine , 323. Mélange de la platine avec les métaux , 3 2 5 di^ fuiv. Moyens de reconnoître l'or falfifié par le mélange de la platine, 3 27 ^ fuiv. La fubi- tance de la platine, quoique tirée de la même mine , n'eft pas tou- jours la iiième, 328. Pourquoi la platine ne s'amalgame pas, comme l'or, avec le mercure j 330. XJfages utiles qu'on pourroit faire de l'alliage de la platine & du laiton, 332 & 33 4- De tous les n)étaux , le plomb & l'ar- gent font ceux qui ont le moins d'affinité avec la platine , 333.— La platine n'eft qu'un mélange accidentel d'or imbu de vapeurs arfenicales, & de fer brûlé autant qu'il eft pofllble; preuves de cette aftertion , 334. & fuiv. Diffé- rences de la platine avec l'or, 336 (^ fuiv, La denfité de la platina n'eft pas conftante , mais varie félon les differens procédés qu'on emploie pour la fondre, 3}9- -^ XJfage de l'alliage de la platine avec le fer forgé, 345 Ù'Juiv,-^

N n n n ij

XVJ T A B

Obfefvations intereflaiites fur i'hif- toire naturelle de la platine, 355.

Plomb. Les mines primordiales de plomb font toutes en galènes de forme hexaèdre, & toutes les mines qui le prcièntent fous d'autres formes ne proviennent que de la

décompofition de ces galènes, 1 87. Mine de plomb blanche, n'efl: qu'une cèrufe ou chaux de plomb criftallifèe, & produite par l'inter- mède de Teau , i 90. Mines de plomb verte , mine de plomb rouge, ibid. Mine de plomb ijngulière, qui renferme des grains de plomb tout- à-fait pur, i 87 e^ fuiv. Mines de plomb tiennent prefque toutes une petite quantité d'argent , & prefque toutes les mines d'argent tiennent aufFi du plomb; mais dans les filons de ces mines le plomb , comme plus pe- fant , defcend au-de(Tous de l'ar- gent , & il arrive prefque toujours que les veines les plus riches en argent, fe changent en plomb à mefure qu'elles s'étendent en pro- fondeur , ibid. Toutes les chaux de plomb blanches, grifes, jaunes & rouges font non-feulement très- aifèes à vitrifier, mais même déter- minent promptement la vitrification de plufieurs autres matières, jpS. , Le plomb eft le moins dur &

L E le moins élaftique de tous les mé- taux , il efl: aufTi le moins duâile & le moins tenace, ibid. Coin- paraifon de la chaux de plojub avec celle d'étain , 200. Le plomb peut s'allier avec tous les métaux, à l'exception du fer, 202.

Mélange du foufre avec le plomb par la fufion, forme une elpèce de pyrite qui refîemble à la galène, 206. Le plomb ne fe trouve pas plus que l'étain dans l'état de métal, i 64. La galène de plomb efl une vraie pyrite, ibid.

Mines de plomb en galène, varient beaucoup par la largeur de leurs filons , 1 66. Le plomb Te convertit en chaux non-feulement j)ar le feu , mais aufll par les élé- mens humides, ibid. Les mines de plomb en cérufe font de troi- fième formation , 1 67. Décom- pofition naturelle de la galène, ihid. Mines de plomb en îrance : celle de Pompéan en Bretagne, eft la plus riche, 168. En Elpagne de autres provinces de l'Europe, 178 & fuiv. En Afi>e, I 83. En Afrique & en Amé- rique , ibid. & fui'j.

P R A s E. Efl une agate verte , fou- vent tachée de blanc , de jaunâtre , de brun, & qui efl quelquefois auHi tranfparente que les belles

DES Ma

sgates, 5 89.— Les prafes ne font pas fort communes , ibid. On en trouve néanmoins en Siléfie , & lorfque leur vert efl mêlé de jaune , on leur donne le nom de cryfoprafcSy 589. Quelques Na- turalifles ont donné Je nom de prafe à la prime d'émeraude , qui n'eft point une agate, mais un criftal vert défedueux, 590.

S

O AFFRE. Voye-^ Cobalt, 362 & 370.

Saphir à'eau. Ses propriétés natu. relies , Tes couleurs , fa double réfra^ion, &c. 48 3 & 4.84. Ses défauts. Il tire fon origine du feld-fpath & du quartz; preuves de cette aflertion , ibid.

Saphir du Brésil provient du ichorl; Tes rapports avec i'éme- raude du Brefil, & Tes différences d'avec le vrai faphir , 5 2 j .

SardoiNE efl une agate d'un rouge mêlé de jaune, ou pure- ment jaune , 585. Cette couleur orangée de la fardoine, eft plus fuave à l'œil que le rouge dur de ia cornaline , 588. Les fardoines font plus rares que les cornalines , & fe trouvent rarement en aufîi grand volume, 5 85>.

S C H O R L , eft le plus denfe des cinq verres primitifs, 437. La

T I è R E S. ay)}

criftdliifation des premiers fchorls a été produite par le feu primitif, comme celle du feldfpath, 487, Rapports du fcliorl avec le feld-fpath, j 02. Ses différences avec le quartz , ibid.

Sels. On peut compter trois fels fimples dans la Nature , l'acide , l'alkali & l'arfenic, qui répondent aux trois idées que nous nous fommes formées de leurs effets , & qu'on peut défigner par les dénominations de fel acide , fel cauftique & fel corrofif, 1^6.

Smath. Voyei Cobalt, ^6j & 370.

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1 o M B AC. Mines de tombac à la Chine, au Japon &. à file de Bornéo, font des mines de cuivre mêlées d'une certaine quantité d'or, 105^ Juiv. Topazes de Bohème ne font que des criflaux de roche colores de jaune, 448 «3c 471. Ces to- pazes auxquelles j'ai cru devoir donner la dénomination de crijîaux- topa^es , fe trouvent, comme le criftal de roche, dans les climats chauds , tempérés & froids , au lieu que les vraies topazes ne fe trouvent que dans les climats \q.%. plus chauds , 471. La denfiré de ces criftaux-topazes efl à très-

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peu-près égale à celle du criftal bfanc, ifs ont auflî le inênie degré de dureté, 473. Us perdent leur couleur, & deviennent blancs comme le criftal par l'adion du feu , iûiJ. <5c 474.

Topazes & Rubis du Brésil, Leur nature & ieur origine font toutes différentes de celle des rubis & topazes d'Orient, 550. Ce font des criftaux vitreux prove- nans du fchorl; preuve de cette aflertion, ii^id. La plupart des rubis du Brefil, ne font que des topazes chauffées du même pays, 532.

Topaze de Saxe eft, comme celle du BrefiI, une pierre vi- treufe que l'on doit rapporter au fchorl , leurs refîembfances & leurs différences, 536. La couleur jaune de la topaze de Saxe, efh toujours moins foncée que celle de h topaze du Brefif, 557. ^. Différences de dureté entre la topaze de Saxe & la vraie topaze , ibid. La topaze de Saxe perd couleur jaune au feu , & y devient tout- à -fait blanche, au lieu que la topaze du Brefil y prend une couleiir rougeâtre , 538 iùrfuiv.

Tourmaline. Sa principale propriété eft de devenir éledrique fans frottement, ôa par la fimple

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chaleur ; cette électricité que le feu lui communique , Ce manifefte par attradion, fur l'une des faces de cette pierre , & par répulfioii lur la face oppofée, J59. La tounnaline perd fon électricité lorfqu'elle eft trop chauffée , 5 60.

La tourmaline le fond comme ie fchorl, à un feu violent, iùiJ,

Ses autres rapports avec les ^chorls, $61. Différentes fortes de tourmalines, ibid. Tourma- lines de Ceylan , du Brefil, du Tyrol, Sic. leurs différences, 5 62.

TUTUNAC. Le métal qu'on appelle aux Lides orientales tutunac , eft probablement un alliage d'étain & de bifmuth ,152.

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ERMILLON. Les Romains faifoient grand cas du vermillon , &:tiroient tous les ans d'Efpagne, environ dix mille livres de cinabre , &L les anciens Péruviens em- ployoient auffi le cinabre pour faire du vermillon, & ne connoif^ foient pas le mercure avant l'arrivée des Efpagnols dans leurs pays, a82. Vert-degris ou Verdet, eft: une elpèce de rouille qui pénètre dans l'intérieur du cuivre , & avec le temps en détruit la cohérence, & la texture , 60.

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Vert de montagne. Comment il efl produit par la décompofuion du cuivre, 59. Voye^ Chryfe- cclle.

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J—i I N C. Ce demi - mctal fe tire également de la pierre calaminaire &. des blendes, 295. Compa- raifon de cette pierre calaminaire «Se des blendes , ïb'id. & fuiv. Le zinc exifte non-feulement dans la pierre calaminaire & les blendes, mais encore dans plufieurs raines de fer, 2C)7. La formation des mines de zinc efl; pûft^érieure à celle des autres mines métalliques, & même pofle'rieure à leur première dé- compofition , 297. Le zinc efl; très-volatil, il ne fe trouve dans au- cune mine primordiale des métaux, 2,^ 8 . Manière de tirer le zinc des blendes & de la pierre calaminaire, jyid, Lieux l'on trouve des minières de pierre calaminaire , 2.c)Cf à^ fuiv. Le zinc s'emploie rarement pur, & n'efl pas même fi propre à faire du cuivre jaune ou laiton , que la pierre calami- naire, 300. Manière dont fe

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fait le laiton ou cuivre jaune avec le cuivre rouge & la pierre cala- minaire , 301. Le zinc efl non- feulement très- volatil, mais très- inflammable , 303. Moyen d'ob- tenir le zinc dans fa plus grande pureté, 305. Propriétés natu- relles du zinc , fes conformités & fes diflcrences avec l'étain , iùiJ. d^ fuiv. Fleurs de zinc. Con- verfion de la chaux de zinc eu verre couleur d'aigue-marine, 3 10. Le zinc en fufion & fous fa forme propre , s'allie avec tous les métaux &. n>inéraux métallicjues, à l'exception du bifniuth &. du nickel, 311. Alliage du zinc avec les métaux, il les rend tous aigres &. caflans, jbid. Amalgame du zinc avec le mercure, efl diffé- rent des autres amalgames, iùiJ. La chaux du zinc efl très-diflScile à réduire , &. conlerve mieux fa blancheur que la cérufe ou chaux de plomb. Il paroît donc que le blanc de zinc feroit préférable au blanc de plomb dans la peinture, 312. Le vitriol de zinc efl blanc, & fe trouve afllez fouvent dans le fein de la terre , ^ ^ ^'

Fin âe la Table des Aintïeres du tro'ifihne Volume âa

Minéraux^

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