LÉ CASE DIESEL DCLMENTS CNT ÉEE ES A DLUUE Qi RE Ki LUS PA FE / BI OL RTL À à HISTOIRE m E ET MORALE Y ÎLes Des A prbi. sde = T'VRELL « NA nd aa nn à à | 6 PS Fa : HISTOIRE "% NATURELLE ET MORALE Au | DIE S à ILES ANTILLES DE L’'AMERIQUE. _… ÆEnrichie d'un grard'nombre de belles Figures en taille douce, des Places & des Raretez les plus confiderables, qui y font décrites. és. * Le Fl \ É À « Avec un Vocabulaire Caraïbe. NECONDE EDITION, Reveué Co augmentée de plufieurs Deferiptions | € de quelques en éclarciffemens | qu'on defiroit en la precedente, Ê ca “A ROT E.R D'A M, Ne Em LARNOQUTE. LE LR | 18 D DC LLw dir da DIRE d- sk 4 \ EPS : 4 ? # . 7 Ps ee É LE le De Û Le 4 F7 8 pe ‘q “& L ii A 1 1 “+ ÿ rad € | HARLULELS . éd SIL En AT NE 4 à D 7 dE A | N + q + sn LT Wu 76 U I VERNE UR. ON RER | L'ILE ‘DE TABAGO, Po le ls Hauts & Pa lan Se ignenrs les Eflats Generans D} … des Provinces Vies du Pairbas. nà 0 D LS #4 ÿ Le : Le Eu oc pe, “gr. à à F, * «= @ CE“ = : L z * AT ge Æ <° Bt ‘ à % ! 4 # ‘: à A mn q à À i $ mn | C4) Gañns 4. 5 24 PE Ge7 ‘4 A LR \ s 7 O N S I E 8 R $ > # h = L. re te K r % : « é È » à L API : , + : pe PA): à à |» w ET PR 2: mi Put ni La Mt EL RS ï æ + son Fan Ta nE k ag © { Ps # * H £ % 3 & : P. F4 Li 6 # 8 SE # f ms”. ? à . à Y, a À yat cf convié de rcvolt Hi {- dore Naturelle & Morale des Iles Antilles de l'An: crique , & d’en procurer une À dition nouvelle, qui fut: enrichie de :plufieurs Defcrip- tions, & de quelques figures & D | 13: echin : E P | 1T R E. | éclairéiffémens CU of tif enla precedente: ] ‘ay créu queje nepou- vüis échdroher yhc prèt lus species à TOUTES fu Ad dati ns, qu'en leür x Féifane ÿ Voir le jour àfa CR veur de vôtre No om, quieft-autant celebre dans cetre partie du. 4 ,nQu- veau Monde, lüntoe Livre traite, qu'il eft illuftre & de Don nE ES deut au milieu denous. Mais bien'gue je fois perfuadé/ quéc ce écacDNY YE a ge doive recevoir un ornement & un éclattoutpartioudief dedahléerté queje prens, & 4 quejeconfeffe hat. tement, qi la befoin die cet apuÿ, pour paroitre aus Dyéusd nhecle res éclairé, 8tiqui alfujetdiexami. 14 ner ie NE que par le pañlé, les EMISTRE. lespiecesdé-cérter oature qu’on luy ri oifaut neahtmoins que je ous avoué, Monsieur, que ce n'eft pointtant{on propre intereit, quim'oblige à Vous lofrir, que le defrquir diaite dé donnerau pu- blic quelques’ preuves ‘dela grande eftimequeie fais de voseminentes vertus, & fingulierement de votre pieté; & de cé zele que vous avez pour: d'avancement la gloire de Du, dans ne e Colonie, qui recueille avec ioyelesdous fruits … devôrre fage conduite, dépuis que à providence Vous y a: appellé. Il œft vray’ *Monsreuk,c que nayant pas Je bien d’eftre connu de vous, FT Eriee _ que d'abord po | : NOUS Vous ne foyez fu rpris dé non pro: ; cedé : mais f. vous: me permet: tez de le iuftifier ; ie vous diraysil vous plait, qu en vifitant durant mes voyages la plüpare des Iles de l'A merique, & trouvant celle de Tabago entierement deferte;) bien quelle me parut richement: pour» veué , de tous les avantages natue rels, quen eut pu.defirér pour re: ‘cevoir des hihi ie fouhaitois dés lors, que quelque perfonñe ‘d'autorité, prit Ja refolütion-de la faire cultiver comme clle le im 11 “toit: deforte; qu'ayant en fuite-en: _ tendu, que Mefsieurs Laïpfins y avoient fait porter à leurs ‘frais:& dans leurs propres vaifleaus , pla | fieurs fi éiner pour: éta- blir ane nouvelle Peuplade, 2: Gi Jx Commifston: &: les favorables aufpices des Hauts & Puiffans Séig- meursles Eftats Generaus des Pro- _viñces Unies du Pais bas, & qu’ils vous avoient prefenté : à leurs Hau- tes Puillances ; pour ‘ÿ comman- der én leur Nom: je benis Dieu de tout mon cœur de ce genereus delleinr, & dé l'excellent choix que È eur avoient fait de vôtre ne pour ef ‘ayoir. Ja: dis féction & dés cé fems-lx;;je con: _ ééusde grandes éfpérancus ‘qu'il : feroit aco iripagné d'un: heureu sf{uc: ebspat la end étion ‘du Seigneur, es bélle Terre étänc en dé Wic} b fi EPISTRE. fi bonnes mains, feroit bien toft, lune des plas floriflantes & des plus me detoutesles Antilles. Cer- Monsieur, ie puis dire maintenant avec Verité , que mon attente n’a point cfté vaine, &que mes defirs font à prefent parfaite- ment acomplis, puifque j'aprens avec une fatisfaétion non pareille, par le recit conftant & unanime de tous ceusqui en font retournez dé. puis peu, qu'outre la grande pru- dence, l'équité, & la moderation tres-exquifes, que vous aportez en : Fadminiftration de vôtre charge; en _ protegeant les gensde bien, repri- mant, les déreolez par Lou tél de la | jaflice, & veillant fur tout que Dieu Soit foit fervi, dans toute [étendue de vôtre Gouvernement : vous gar- bois un fi belordre dans vÔ- treMaïfon, & vous y recevez avec tant de courtoifie & de civilité tou- tes les Perfonnes. d'honneur qui vous vifitent, que vous confervez &avancez merveilleufement parmi _ œnouveau Monde, la gloire & la reputation de la Nasion Beloique. efais, MONSIEUR, quevôtre Mo- deflie, qui releve grandement le luftre. sa vos autres peifeétions, n'aprouvera point ces loüanges, bien qu ‘elles foyent fondées fur la verité: c’elt pourquoy je ne _m etendray point plus avant dans cette riche matiere, de peur de vous D 5 : Qu _ ofenfer, & afin aufsr que l'onné me puifle point imputer avecquelque couleur, d’avoir entrepris de faire : vôtre Eloge, : qui eft refervé une meilleure plame: “mais je VOUS prie: raytant feulement;quepoür confir: mer ce que cette Hhftoire pole par tout pour conflant:aflavoir;, queles Ïes Antilles ne font point fi-obfcu- res, qu elles n ayentle bonheur d’e: ftre éclairées de plufieurs honneftes Familles, & particulierement. de Chefs, qui fonttres.illuftres , pour leur pieté, leur valeur, leur fagefle, & méme pour leur grande cruditions il vous plaife, Monsieur, de éaiai frir que j'ajoûte encore ce mot: qu'ayant Ja connoïflance de toutes les E PIS TIRE. les. belles Cchotes , &: ‘pofledant: en égale perfeétiondes plusnobleslan. gucsde l'Europe: Bi mémé celles quifont des pluspriféesentre les do- étes, commeles excellentes Poëfies Latines que nousraÿons {dé vôtre faflon le. témoignent amplemeñt: Vousavez aufsi-couites les graces na- turelles &'aquifes, & tous lesatraits de l'efprit & du corps; qui font:Ca- pables de toucher les cœurs & de gagner les afeétions deb habitatis delle que vous gouvernez , &des étrangers qui y abordent : relle- ment, qu encore que cet agreable féjour ait toutes les beautés & tous les charmes qu’on fauroit defirer, pourlerendre acompli, il faut toute- Se z fois EPTSTIRE. fois avouer, que vous eftes fon plus precieus joyau, & que vous faites fes plus cheres délices. Voila, Mon: | SIEUR , le fentiment commun de tous ceus qui ont eu le bien de vous voir, & lesraifonnables motifs qui m'ont excité à graver vôtre Nom au frontifpice de cette Hiftoire des Îles Antilles, entre lefquelles celle où vouscommandez, eft la premie. reenordre, demémequevos{oins Font rendué l’une des plus confi: derables. Et c’eft aufsi de toutes ces neceflaires & evidentes premif. fes, queje tireray s’ilvous plait, la preuve tres- claire de la juftice de mon entreprife, de méme quec ft dur vôtre ETS bonté que je fon- _ de ; EPISTR E. i da efperance quejay, qu'en L (éel- Jant de votre aprobation , vous agrecrez, le petit prefent que: je vous fais de la Delcription de vétre Ile & du pais des Apalachites en parti- cuher, comme un témoignage du fervice que ie vous ay voué & du ; refpect tres-fincere queie vous por- te, & comme un gage inviolablé des prieres que ie prefente à Dieu pour la profperité & la bencdiction de vos orands employs, me difant à toujours. | MONSIEUR Fütre tres-humble & tres- obeiffant Serviteur,. DE ROCHEFORT. PRE tes par des per founes intereflees * qui par de certains STI PRES A ONE PET à - ge Motifs Gr pour de t ertäines confidérations-degsfent laverie 7 mous reprefentent, les chofes d'un autre air} C7 Jous ge autre couleur, qu'elles ne ont eneffet. Quelquefots an[% nous réncénifèns dés Edivdins, qui de fer froid ex deigetéde cœur, nous en font acroire, © prenent plaifir a smpalér à rl credali és, Besuns G'les autres ont P. affärance-de men tir) G'çroyent quisls lepeuvent faire mpunément ; parce qu'il Viennent de loin, comme dit le prover M 2 Par fo1s enfin nous fobie} Jujéts Rrécévois des piéces dééette native ) de a Wait de AIMENT roffiers 7 di n'ont ni eflude né gprit pour nous donner rien d'éxati-&r' d'affuré, € dans lesécrits dé- #4 ? a | ë : , up GA n6 oggva dt degersinés ni de fondsnen made qu en plufu urs fuets ils, 0 pris le blanc pour le no j 7 que fé H'bvoir à bich compos, où bib réteiai le} ES de à us lesraportent fe leur naïve! L ile : gu0y qu'au reÿle ALES fo f&Ëp fers (et trôm DE Mi Hitontraire, Cet un grand avantage, quand de tels Ouyragesfont eq 4 [ex par des Auteurs , ou l'on peut reconnoiflre toit en | ces trois conditions | d’eftre desintereffez, de ne point faire jeu de la verité, &r d'avoir de là mémarä&s dél'httelligence, pour facrer lus Klein a Ceus qui prendront la péne , de jetter les yeus fur l'Hifhoire que nous leur prefentons en ce Volume, y doivent efperer les “denéprenlières détescoñditibns que nous venons d'établir | ceÿ£ a dire enun mot, la fincerité : ven que c'eSt une loïiange, qW'il jemble qu'un chacun fe peut douner umocenment , 4 moins que “M: es (EE . Ja sïé PRE FACE je propre confcience le demente. Mais pour les qualitez de l'efhr it que nons avons reprefentées comme latroifième condition , nous n en faurions prendre ’eloge, fans faire un trait de vanite. : Nous ofons nous promettre que le titre d'Hiftoire Naturelle & Morale, que nous mettons fur le front de cet Ouvrage, ne Jemblera ni trop fafluens ni trop dalle, à ceus qui daigneront le confronter avec le corps de lapiece. Au moins ayons nous tafche de proportionner la grandeur de l'edif- ce, à la magnificence du portail. Ce n ‘est pas que nous nous vantions icy d'avoir compris dans ce Livre, tout ce que l'on … pourroitécrire fur le fajet des Antilles. Ontrouveroit affex de matiere pour en amplifier de beaucoup l'Hiftoire Naturelle, & même la Morale: Mais quoy qu'il en foi, 1l nous fe Elie que nous avons fatisfait en quelque forte, à ce que le frontifice du Livre fait efberer aus Lecleurs, & que fi chaque partie du Nouveau Monde | étoit examinée auf particulierement par les - Hioriens, | Lucien en feroit miens informé, qu'il n’a efle ju à ments 0 - Nous avons efte obligez à toucher en quelques pit , des jets déje traitez par d'illuftres Ecrivains, & connus d'une infinité de perfonnes : non certes en intention ou de grofsir nôtre Volume , ou de nous élever au dèfus de ces grands Auteurs : mais parce que Jaris cela nôtre Hitoire ent efie defetluenfe. Tontde même qu'une Carte de la France [eroit imparfaite, fi fon. Anteur y avoit obmis quelques places confiderables , Jous ombre., que d'autres Geographes. les auroient marquées en des Cartes particulieres | de chaque Province du Royaume. Et m'eantmoins | nous nous fommes retranchez en ces matieres, autant qu'il nous à êté poffible , comme en la Dofcription du Gocos de Ÿ Ananas U'de plufieurs antres chofsis ent c . Alexis nn. PERDEARFIANGA ES A l'exemple de Lery &° de l'Efcarbot , & d'autres Hifo- riens, 7° par le confeil &' les invitations de quelques-uns de nos rs: nous avons parfeme cet Ouvrage de paraleles , 5° d'épofitions enpruntées de divers Pais & de divers Peuples. Si quelcun trouve que c’eft interrompre le fil de Hitoire, alon- ger le parchemin | &' amufer le tapis : nous nous flatons dans la creance , qu'il y en aura d’autres | à qui ces petis enrichiffe- mens ne feront pas desagreables. Et s'ils ne les confiderent pas comme de traits apartenans au deffeineffenciel dutableau, 45 les pourront regarder avec quelque plaifir comme des bor- dures de fleurs ; de fruits, € d 0 “pour E ornements dk la piece. Pour ne pas fatiguer le cm en bi fafint faire du trop grandes traites tout d'une halène | &g' pour ne point l’affer fes Jeus par une trop longue € trop uniforme tiffure de periodes & de difcours , nous avons divife nôtre Hliloire en autant de Chapitres &5 d Articles , que nous avons eftime le pouvoir faire raifonablement , &° avec grace. Mais en quelques endrois , la contexture la liaifon de la matiere ne nous ayant pas laiffé [a liberté de faire des paufes | 7 de couper nôtre recit, comme nous l'euffions voulu ; cette contrainte nous férvira d'une _— iffinte Le difcours e$t l'image le sis Maïs le portrait repres fente la chofe mème. C'e$t pourquoy , nous nenous fommespoint contentez de fimples paroles dans cette Histoire... Nous y avons ajoûté un grandnombre de figures &7 de tailles douces, Jelon les fujets qui nous l'ont permis, pour en inprimer plus pnif= fanment Pidée dans les efbrits , par une demonftration fenfible: palpable. Et nons n'avons pas creu, que les celebres Auteurs qu ont excellenment reprefenté:une partie des mêmes chofes par PIE E FH A CO E le burin de leurs Graveurs | comme entr'antres Charles de l'Eclufe, &7 Tean de Laet, nous en duffent détourner : veu guepar ces aides nous facilitons l'intelligence des matieres, &° nous divertiffons nos Le£leurs, en même tems que nous embe- Uiffons 3° que nous enrichiffons nôtre HiSloire. Mais fi la mai du Graveur qui a tafché de fuivre le crayon du Peintre, n'a pas bien conduit tous fes traits ; nonobflant les Joins € les adreffes de ceus qui en ont formé les deffeins , il s’en faudra prendre feulement à [a foibleffe &r a Jon inadvertence, er non pas rejetter la fante fur les Directeurs de l'Ouvrage, qui wont rienoublié, de tont ce qu'ils ont creu pouvoir contribuer, à Ja perfethon. | Pour les manquemens de ce Livre , qui peuvent eflre venus de nous mêmes , fans que le Scribe ni l'Imprimeur y ayent rien contribué ; nous n’aurons point de bonte de les reconnoitre , &x nous nous garderons bien de les défendre , quand on nous les au- yamontrez, fachant allez qu'elle eft la foibleffe , tr de lame. moire &° du jugement de tous les hommes du monde. Seulement nous faplions ceus qui les auront remarque, de s'apliquer a ens mêmes ce dire fameus Homo fum, humani à me nihil alienum puto. C'e$t à dire de fe fouvenir qW'ils font fujets à Je méprendre, © à Je tromper comme toute autre perfonne. Qu'au lieu dong de reprendre féverement &r avec rigueur, ce qu'ils n'aprouve- ronc pas dans nôtre HiStoire , ils nous en avertiffent doucement &'en charité : &' nous y defererons autant que la raifon nous depourra perfaader. Ainfi bien Loin de nous en plaindre ) NOUS : Leurenaurons de l'obligation, &' le public en recevra de l'utili té, fi ce Livre ef} mis encore une autre fois en lumiere. | c 2 Nous eurent | _SREMACE . Nous citons fouvent avec honneur, plufi eurs perfonnes de: merite de toutes fortes de conditions &7 qualitez ; qui habitent dans les Colonies | que diverfes Nations de l'Europe ont formées aus Antilles. Nous avons e$timé que nous en devions ufer dela Jorte, pour antorizer par ce moyen nos Relations | © leur procurer plus d'eclat & plus de certitude. Nous avons auf produy ces illuftres & irreprochables témoins , pour desabuzer plufieurs quifont fimal informez de ces Iles, qu'ils Je: perfua- dent , qw’elles ne fervent pour La plapart , que de retraite aus banqueroutiers {7 aus gens de mauvaife vie. Le contrarre etant neantmoëns tres-aVere , affavoir y qu “elles font habitées par une imfinite d'honneîtes familles, quiy vivent Fu LC en la crainte de Dieu. Ce n'ef} pas pour obliger cette Province tres-renommée , en laquelle cette Hifloire aeflé mife fous lapreffe, que nous avons. toñjours employé le terme d'Hollandois , pour exprimer toute cette friaue Nation, qui releve de la Sowveraineté des Hants 7 Pas as Seigneurs les Etats Generaus des Pro- Vinces Vues des Païs-bas : mais feulement pour nous rendre intelligibles à nos François; ennous acommodant au flile come munement Yecess parmi eus | qui comprend fous ce mot; Lons: Les Fabitans des autres Provinces confederees.… D À ÆVER* D A VER TESSEMENT Labalione DSC.T.E.U.R. Touchant bete feconde Han Elfinie des Antilles. Ette Hiftoire, ayant efté imprimée en un Païs ou nô- tre langue eft étrangere, ce n’eft pasde merveille, qu'il s’ytrouve pluficursfautes. Et ilya plutôt fujet desé- tonner, qu'ilne s’y en rencontre pasd'avantage. Ilÿ a plu- fieurs & aigus, où il n’en faut pas, & fouvent il n‘ÿ en a point, où il en faut, felon la regle d’aujourduy. Nousdifons auffile mèmeé des Apoftrofes » & des ponétuations, On trouvera ris en quelques endrois , des lettres qui ne font pas neceffai- fuivant la prononciation & l'ortografe quiont cours; & en nd autres ilen faudroit ajoûter, pour eviter les incongrui= tez. Nous aurions fait une lifte detoutes ces fautes, que nous condamnons les premiers, fi nous. néuffions craint, qu’elle eut étonné par fa longueur. Pour ce qui eft de lelegance & des enrichiffémens du lan=- gage, comme cela n’eft pas de l'effence del’ Hiftoire; Les. efprits folides & raifonnables, rechercheront plus icy les chofes , que lesmots , &laverité quelesornemens. Nous confeflons neantmoins, que pour nous eftre arrétez un peu trop fcrupuleufement, aus propres termes de quelques me- moires., qui nous font venusdediverfes mains, nous. FOR quelquéfois employé des mots qui‘ne fonrplus de mile, même des faffons de parler, quine font.pas du bel ufage. op Leëteurs, les fuporteront s’illeur plait : puifque fi ces fautes font tort à la: pureté dela diétion, & à l’élegance du ftile, qui eft à prefent le mieus receu, elles.ne corrompent point le fens, & ne changent pas la fubftance des chofes, Nous demandons particulierement ce benin fuport, en fat veur des Additions, des éclairciffemens, & des amplifications que nous avons cfté obligez de faire à cette deuziéme Edition, C + rs CAvertiffement au Lelfeur. fans en avoir pü confererfelon nôtre defir, avec cetres-doûte & incomparable Amy & Allié, qui eut la bonté de polir, d'orner, & d'adoucir par fes pures & naives expreffions ,.les rudes maticres que nous lui communiquâmes pour en com- pofer cette Hiftoire, à peu prés en la même forme, qu'elle a paruenfapremiereimpreflion. Car nous avoüons que c’eft de cette excellente plume, que nous tenons la plus grand”- part, detout ce qu'il y a de plus net & de plus exaét dans cet Ouvrage, & particulierement tous ces riches paraleles, & toutes ces judiciéufes opofirions, dontilluy plût de parfemer, comme d'autant de belles fleurs , l'Hiftoire Morale de nos Ca- taïbes : de même que nous lui dévons le Vocabulaire dulan- gage de ce Peuple , qu'il obtint du P. Raymond qui étoit alors à Paris. De forte, quefi nous avions efté encore aflez heureus, poureftre éclairez de fes bellés lumieres ; fans dou- te, que cette piece pourroit eftre mife au rang des plus ache- Vées en fa forme, comme nous ofons avancer, qu'éllél’eft en la verité de fes maticres. Mais une étenduë d'environ deus censlieués de chemin quinous fepare , ayant interrompu dé- puis quelques années le dous commerce de lettres, que nous entretenions auparavant avec ce grand homme : le Lecteur debonnaire eft fuplié d’atribuer à cetteinfurmontable necef- fité, l'inegalité du ftile qui eft vifible en quelques endrois, & la privation de tous les autres precieus ornemens , dont cette Hifoire auroitefté enrichie , fans cet éloignement. Bien que tout cet univers foit unteatred'inconftance, cùil arrive joutnellement des reVolutions fi étranges & fi inpre- veués, qu'elles changent en peu de tems la face des chofes mêmes , qui fembloient eftre les plus afermies: il faut parti- culierement confeffer, que ces alterations & ces changemens font plus reconnoiffables & plus frequens dans ce nouveau Monde, duquel nous décrivons icy une partie ; qu’en aucun autre endroit dePancien , où nous habitons. Dépuis environ dixfet ans, que nous fonmes de retour du dernier des voyages que nous y avons faits chéminans en nôtre vocation, felon l’ordre que la providence nous avoit adreflé: nousaprenons que des Iles qui avoient alors des Colonies tres-floriffantes, fontà prefent prefquedefertes , & que d’autres qu'on tenoit nb | cn LES CE à “ - A 4 4 EE PS EE s A & à ei SHÉRS « % - F : . » 10 F > ï CAvertiffemeut au Leëtèur en ce tems-là comme abandonnées, font maintenant peu pléesà merveille. Que la plüpart des mêmes Ilesont changé de Seigneurs fonciers, bien qu’elles reconnoifient la même Souveraineté dont elles relevoient auparavant. Queles In= diens originaires du Pais, font tellement reduits à l’étroit, qu'ils n’ocupent plus que les Terres de 4 Dominique & de Saint Vincent , où l’on projette encore d’établir des Colo- nies, &de les obliger à les receVoir ou paramitie ou par for- ce. Tellement qu'on nousaflure, quefi nous étions main= fenant fur les lieus, nous aurions de la péne à reconnoitre les chofes, que nous y avons autréfois veuës de nos FRS yeus, & touchées de nos propres mains. Voila, ce qui concerne les changemens qui foot arrivez aus Antilles : : & pour ce quitouche ceus du Continent, les derniers memoires qui nous font venus du fein dela Mexi- _quenous informent, que la Colonie de la Palme, qui ocupoit _autréfois l’un & l’autre tivage dé la grande Riviere, qui eft connué dans la Floride fousle nom du Fleuve du Saint Efprit & quis’étendoit lors que nous y fûmesportez, dépuis la co- fte de la mer jufques à Ochile, c'eft a dire, plus dedix ou douze lieuës avant dans la terre, a efté contrainte dépuis peu d'abandonnertoute cette contrée-là, & de fe retirer au pied des montagnes;qui fontéloignées de plus de foixante lieués de Ja cofte de la mer, en tirant au dômaine dés €4palachites, tant afin de fe mettre à couvert des incurfons des Sauvages: de la Province de Tagoesfa qui les harceloïent fans ceffe ; que _ pour fe parer par même moyen, des frequentesinondations de la Riviere & destorrens, qui enlevoient fouvent tout le: provenu de leurschamps, lors qu'ils étoient à la veille de le recueillir. Nous avancons ces exemples, afin que ceus qui faifans le voyage de l’'Amerique, porteront avec eus nos Re- jations, ne trouvent point étrange d’y voir toutes ces re- volutions qui y font furvenuëés, & qui ne pouvoient cftre preveués d'aucun homme. Quelques-uns denos Amis, ayant veu entre nosmains, les excellentes Lettres, dont plufieurs Seigneurs & Chefs de di- "Verfes Colonies de l’Amerique, nous ont honorez en fuite de la premiere Edirionde cette Hiftoire : & ayans jugé qu’elles donne L 4 Coimri feet an Lecteur. donneroient un merveilleus poidsà nos Relations, & qu ‘el les leur ferviroient d'une aprobation autentique ’ {i nous leur donnions place à l'entrée de ce Volume, veu nonmé- ment, qu’elles leur fembloient écrites à deffein d’eftre pu- bliées. Nous avons eu beaucoup de péne à fuivre en ce point Ieursinclinations , à caufe que nous fommes perfuadez quela | grande generofite de ces Seigneurs, leur a diété des termes trop beaus, trop obligeans & trop avantageus en faveur de cet Ouvrage, & fi nous avons fléchi à leursfentimens, ce n’a, pas efté fans protcfter , comme nous le faifons encore, que ce n’eft point pour nôtre intereft particuiier, puifque fans nous atribuer aucune partie deceséloges, maisles renvoyant en= ticrement à la même civilité d’où ils ont pris leur origine, nous neles produifons icy, que pour les confiderations que ces Charitables amis nous ont allesuées: & pour juftifier amplement, ce que nous avons déja pofé comme tres-con- flant : queces Païs-là, ne font point fi barbares. que quel- ques-uns leseftiment: puis-qu'ils’y rencontre des perfonnes tres:illuftres, non feulement au fait des armes & en la fage conduite des peuples, mais encore en la connoiffance parfaite de tout ce qui eft en eftime parmi les plus grands & les plus folides efprits de nôtre Europe, ainfi que ces riches. pro duttions de ‘leurs plumes le témoignent, fans qu'il{oit befoin dcrecourir à d’autres preuves, RIT A9: 10e 61 db of Mn Qt. 20, RER Ù RE MC OR LES: De quelques Lettres choifies entre plufieurs au- ttes, qui ont efté ëtrires de l’Amerique en faveur de certe Hiftoire. Et premierement de celle que Monfeur Je Chevalier de Lonvilliers Poincy, Bailly & Grand Croix de fOrdre de Saint Jean de Jernfalem, Commandeur d'Oyfemont & de Coulours, Chef d’Efcadre des Vaif- feaus du Roy en Bretagne, Lieutenant & Gouverneut General pour fa Majefté aus Iles de l’Amerique nous écri- vit aprés qu’il en eut receu un Exemplaire, & en nous envoyant le Plan de fa Maifon, & le payfage de l'Ile de Saint Chriftofle, | | MONSIEUR | E n’ay point eflé furpris de la beauté > de l'excellence de vôtre _ Livre, quevous avez pris la pene de m'envoyer. Il ne peut rien fortir de vêtrebelefhrit, qui ne foit parfaitement achevés € il me Jemble que vous avez fi heureufement reuffi dans cet Ouvrage, que je m'afure que vôtre reputation én recevra un grand éclat. Vos re- marques font fi curieufes © f? veritables, € le difcours ff poli que vos amis n’y peuvent rien defirer d'avantaze. Pour moy, je meveus feulement rejoñir avec vous, d'un fi beau fucces, € vous vendre mille graces, de ce que vous vous effes fi avantageuft- ment fouvenu de moy. Ie vousenvoye enéchange le Plan de cer. 4e CHaifon que vous avez defiré. I'y ay joie celui du payfage de nôtre Ile, qui ne vous desagreira pas: © guoy que l'abfence de Monfieur CAuber de Midelbourg , wiye un peu mis en Peine par qui vous faire tenir ces petites curiofitez , j'ay creu que CHonfieur Kerke, marchand de Fieffingue feroit consu de vous, ©" qu'il s’'aquiteroit volontiers de cette commiffion dont je le char ge par le Capitaine LAntoine d'UArmoyfe. Ie voudroë eître af- fe hcureus , pour vous témoigner en une ocafion de plus d'impor= dance, ma gratitude de tant d'autres obligations que je vous a); Vous pouve? bien croire, Monfieur, queje le feray toû- 4 Mec AE Jours LETTRES. jours avec joye dans toutes celles qui s'ofrirent, G* que je fuis dé fout M0h Cœur. | MONSIEUR De Saint Chrifofe le 10 Vôtre tres-humble Decemb. 1658. * | Serviteur. Le Cusvazrier DE PoiNcry. Copie d'une autre Lettre que le même Seigneur nous adref- ‘ fa, en nous envoyant encore un autre Crayon de fa Maiïfon. | MONSIEUR ] * Ayreceu la lettre que vous avez pris la peine de m'écrire le fixié. | 2e du mois de Mars dernier, © je fuis bien aife que vous ayez agrée les Tableaus de ma Maifon G* de nôtre Ile. Votre Livre ei rempli deremarques tres-doctes , © ff curieufes qu'il nerecevra qu'un mediocre enbeliflement, en y goñtant le Plan d'une petite Caze a l'Tndienne. Le prens pourtant tant de plaïfir à fatisfaire #. ceque vous difirez, que je vous en envoye encore un autre Crayon. par cette voye, afin que vous ayez le moyen de choilir celui que vous: jugerez le plus propre à vôtre deffein. Ie ne fuis point du tout éton- né de l'aprobation que nôtre Nation, € même les ttrangers ont donnée à voffre Hiffoire : Car elle ef ft exatfe G fébien écrite, qu'on n'y peut rien goûter. Ie fuis témoin depuis plus de vintan- nées de la pläpart des belles chofes que vous remarquez, © on ne: _ fauroit trop avantageufement reconnoitreun travail fi loüable. Ie vous fouhaite toute forte de profberité, €* vous vonjure de croire; qu'en toutes ocafions je vous feray paroitre , que jefuis parfaites. InCHE, M O NSIT EUR De Saint Chriftofle Le 15. Vôtre tres-humble: Juillet 1659. Serviteur Le CHevazier ns Porncy. Copie LÉ, À FY TRE METTRES « " re p Lea & : rs Copie de la.lettre que Monfeur le Gouverneur dc la Co. ‘Jonie de la Palme , nous a envoyée au fujet de cetre F * Hifioire. MONSIEUR N°": Colonie doit beaucoup à vôtre doëte plume, Gr au zele LN guevous avez eu de la faire connoitre à l'autre Monde, où fans vos belles lumieres, l'on ne fauroit pas même fi elle fubfiffe en celai-cy : tellement que mous reconnoilfons par une tres-agreable experience, qu'en quelque part qu'on vous trouve; foit dans le feën de l'ile Hifpaniola, foit dans celle de la Toïtuë, foit dans la _ Floride, foit es France,ou dans vos riches Ecrits, vous efles par tout l'obliceant G le tout aimable. Il ny à aucun de nôtre Com- pagnie quin'ait cesfentimens , qui ne vous regarde comme un ami intime, quinefouhaite de vous revoir dans ces contrées, © de VOUS pouvoir ur jour témoigner la reconnoiffance que nous vous de- vons, à caufe de ce dous fouvenir quevous avez en de nous dans vôtre vraye incomparable Histoire des © Antilles. Nous avons fout fujet de donner ces eloges à cette excellente produtfion de v6- tre efprit , apres tant de Relations fabuleufes quiont palfé fous nos Jus, qui ont donné aus _Apalachites 7 aus autres Indiens qus peuplent ces Pais, une louteautre face qu'ils n'ont en éfet. Pour moy, j'2y du déplaifir de ce que lors que cette Colonie nai[- Jante eut lebien de vous pojleder, je ne püs joüir qu'un moment de voffre donce converfation. Vous fave?, Aonfieur, que la neceffité de nos affaires m'obliges de me rendre fur nos frontieres pour opofer nos forces à la defcente des Barbares , qui y avoient . paru, * quejepri congé de vous dans Pefberance de vous trou- Ver encore à la Palme à monretour, mais [ans doute, vous ne le Jauries pas Ji je ne le vous difois, que jamais aucun vent ne fut plus contraire à mes inclimaïions , que celui qui durant mon abfence Je rendit favorable à la continuation de voffre Voy- ge, puis gù en vous enlevant du milieu de nous, il ra- vit auf les delices de nos cœurs, @° nous priva d'une tres- Jenjible confolation, Dépuis ce tems-là, nous avons fouvent parlé | d 2 de LETTRES due, de vous, nous avons reconnu par vôtre digne Hiffoire, que l'a mitie que nous avons pour Vous ejt rECIPrOQUE, UCW que VOUS AVEZ bien conferve les Idées dela Palme, de Cofa, de Bemarin € des Provinces voifines, que vous nous donnez des enfeignes illnffres de ce precieus fouvenir. Certes, Monfieur, quand bien vous nous auriez laiffez dans ce profond Jilence, où nous fommes comme enfevelis dépuis tant d'annees, nous dirions neantmoins de vôtre Histoire , qw'elle eft judicieufe, fidele, € divertiffante, C qu’elle est richement embelie de tous les agréemens, que les efprats les plus délicats fauroient défirer, pour leur entiere [atis= faëtion. Pourfuive? , Monfieur à nous aimer, G'tenez s'il vous: plait pour a{furé que nous reputerons à grand bonheur d'aprendre: que nos leïires vous ayent eflefidelement aelivrées, que nous: ayons tobjours part envosafettions, de mêmequ'en vous hono- rans tres-parfaitement, nous faifons des prieres à Dieu pour vê- tre profberité, © pour l'heureus fuccés de vos loiables entrepri- Jés. C’est auffi à [a fainte protection, queje vous recommande er particulier, comme étant de tout mon cœur. à MONSIEUR De la Palme en l’Ameri. Vôtretres-humble & tress que Septentrionale obeiffant Serviteur.. le 14 Juin 1659. ; | De Var CROISSANT. Copie d’une Lettre que MonfieurEdouard Gracves, Doéteur en droit, & l’un des Chefs & Directeurs des Familles: étrangeres qui font parmi les A palachites, nous à egvoyée: fur le fujet de cette Hiftoire, avec la Relation fort ample de tout l’état de ce Pais-là, & jes crayons de la montagne d’Olaimy, de la Ville de Melilor, & dela Plantefenfitive: M,O,.N S'IE LR LA ND Zen que nous vivions dans l’une des plus reculées Colonies de: A DC Amerique Septentrionale, C que nous foyons prefque pri. vez detout commerce avec lereste des hommes, qui fort profef=. on £or8 / mn 1100 D HE A TRE ENS. fion de rechercher les belles chofes * de leur donner le prix qu'et les meritent : nous avons neantmoins effé affez heureus, que de recevoir un Exemplaire del'excellente Hiffowre Naturelle C7 Mora le des Iles Antilles, que vousavez donnéeau public. Et parce que vous avez eu labonté de vous fonvenir de nous, € de nous nom meravec honneur en plufieurs endroits de vôtre Livre, € même d'yinferer à deffeinunebelle Gjudicitufe digreffion, quine traite que de nous , je crois eftre obligé de. vous en rendre detres-afec- tuenfes aifions de graces, © de vous affurer comme je fais , que nons avons leu avec un contentement extraordinaire, cette Re- lation tres-fidele € tres-exaite, que vous ave? compofée de ce petit Etat, fur les memoires que fei Mr-Briffok vous avoit envoyez. Nous fouhaiteriois, Monlieur ; que ce doite Perfonnage, qui a dasffé parmi nous une {douce odeur de fes vertus, futencoreenvie pour s'aquiter de la proineffe qu'il vous avoit donnée, d'informer encore plus amplement l'Europe, de tout ce qu'ily à deplusrare Cr de plus confiderable dans ce Pais G* dans les Provinces voifines. Car comme il avoit une tres-exafle connoiffance de toutes ces choz Jés, © unegrace incomparable % s'en exprimer devive voix par écrit, il eut cfléfans doute auffi foigneus détenir [a parole avec honneur, qu'ilavoit efté facile obligeant à la donner. CHaïs afin que dans cette perte qui nous ef extremement [en(i- ble, vousne foyez. pas entierement fruffré de cette douce attente, del'efferance que vos en avez fait concevoir au public : nous vous prions Monfieur de recevoir le Cayer qui acompagne les pre fentes, où vous trouverez les Crayons de la celebre montagne d'O- aimy, de nôtre Villede Melilot , @ de la Plante feufitive, avec un recit veritable de nôtre petite Colonie , € detaut-ce dont nous avons creu vous devoir informer, pour effre ajoñté fi vous le jugez. convenable, à la deuxième Edition de vôtre Hiffoire. | Nous avons auffi effimé, Monficur, que vous ne trouveriez point mauvais,.que nous joigniffions anffiaces memoires que mous confions à vôtre prudence, le jugement que nous avons pris la l5- berté de faire de tout vôtre digne Ouvrage, @* la priere que nous: vous faifons de le recevoir, comine le fentiment general de tout ce qu'il y a d'honnêtes gens, dans cette partie du nouveau Monde: De vray, Monfieur, nous croirions commettre une haute injuflice fi ous en ufions autrement, Cr fi nous ne confeffions avec cettefran= on ne ï chafe. _ LERTIT NES. chife fincerité dons nous faifons profefion : que vous avez grandement obligé le public, en lui donnant une piece des plus _acomplies en cégenre d'écrire, qui ayent encore veu le jour , Cr que ‘nous ne doutons point qu’elle ne foit dans l'aprobation univerfelle _détous ceus qui aiment les Iles, € qu'en Juite, vous w'en rece= Viez une grande loïange. | te tte CHais agreez s'il vous plait, Monjieur, que nous prenions la liberté de vous dire, que d'abord nous nousfommes un penétonnez; de ce que vous ne vous étiez donnt autrement à connoitre dans L'exemplaire qui eSt parvenujufques à nous, que fous certaines ler- #res, qui n'ont jamais efé de mauvais augure. Nous n'avons garde de chercher quelques myfferes, qu'une inrenienfe fubrilité pour roit facilement trouver dans ces Caraïderes, ni depenetrer dans les raifons qui vous ont obligé d'en ufèr de l1 forte ; mais nous nows Jommes perfaadez que jt votre modeflie, par une indufirie fem blable zcelle de cet excellent Peintre de l'antiquité, à voulu en. Prunter ce voile: vous étiez auffi par un faccés tout pareil, fort bien reconnu à la délicatefe de vos traits, aus vives couleurs de vôtreffile, € parcette raviflante Symmetrie que vôtre pinceais « donnée à toutes les parties de'cet excellent Ouvrage. | Sans vous traiter aves des termes de flaterie, qui font bannis par 4 arréft irrevocable, G fans'aucune efperance derapel, de toutela gurifdiition de cette Republique : de qui ponvoit-onatendre des defcriptions friches & fonaives , detout ce qu'il y a de plus mer. veilleus dans ces Iles, oùles plus renommecs Nations de l Europe ont poule comme à l'envi des Colonies, que de celui qui les a foigneufément vifitées ? Et qui pouvoit nous en donner l'Hiffoire avec plus de perfeirion : qu'une perfonne exempte de toutes les par. tialitez € détous les prejuges ou interets , qui infeitent la pli= plart des Ecrivains du fiecle: dr qui s'eff étudiée de confiderer les Chofes dans leur propre forme, [ans que l'envie, lajaloufie, ou quel. ‘que autre pafion maligne ,'ayent tant foit peu alteré leur vraye gr naturelle beauté? + | Soit que vous parliez des miracles de lanature, on des mœurs des Barbares , ou de la police des habitans étrangers : vous le faites ‘avec tant de grace , d’exattitude , © de dexterité, que nous pouvons dire, que la curiofité la plus avide > la plus infatiable, s'en frenve fatisfaite, Mais, ce qui donne plus de poids à nôtre admira- ; 101 ; } N9 SMILE OT RTRRE er 1] BEN MEN alt \ peu ‘Eu : # Ur) : LETTRES. #ion,c'eff que vous avez tiré toutes ces raretez de vêtreriche fonds ayant lepremier penetré dans ces fecrets, G* tr'aÿte de ces matieres.. Bien que, le fujet que vous maniez fort Jouvent affezfierile. languiffant , voire même quelquéfois fanvage € obfcur, vous le poliffez par la donceur de vos expreffons ; vous l'éclairez de vos belles lumieres, vous le [tenez par la force de vos raifonnemens, vous l'animez par la vigueur de vos penfées , vous l’enrichiffez de tant d'agreables paraleles > de judicieufes opofitions, € vousle revetez de tant de precieus ornemens , qu'on y trouve par tout un dous aymant, € des chaines invilibles, qui lient les cœurs, € atirent les afefions de tous ceus qui le conjiderent. Ileff vray, que vôtre modeflie, dans la preface qualifie toutes ces beautés, ces graces, &> cesriches obftrvañions, des bordures de fleurs, de fruits, 7 d'oifeaus, quinefont point de l’effence mais de l'ornement du Tableau : Mais quant à nous, nous les priferons toù- jours comme une raviflante broderie, qui rehaulfe la valeur de la anaticre, ou fi vous nous permettez de nous exprimer encore plus ri. chement, comme autant de perles, de diamans, de rubis, © d'autres: pierres precieufes que vous yauezfemées., pour donner: à tout le corps de cette Hiffoire, tout l'éclat Gr toute la pompe , qu'on pour- roit defirer pour fonacompliffement. Voila, Monfieur,ce que nous avions à dire en gros de votre travail, Maïs, s'il nous est encore permis de leconfiderer en détail, trou- vez bon, Monfieur, quenous vous declariens franchement , que ous avons icy quelques-uns de vos ais quivous ontconnuaus Iles, quife perfuadent, que fans y penfer, vous. avez fait un grand £ort aus païs. que vous décrivez ,. parce que vous les repreftntez. ‘avec tant de naïuete dans leur beauté naturelle: qu'ils aprehendent, qu'uln'y ait deformais perfonne qui forme le deffein de villier ces lieus, pour léquels autrefois l'on ne craïgrois point d'entreprendre. defi longs € de fi perilleus. voyages, puifqu’on peut. à prefent Ji ai[e- ent contempler tout ce qu'ily a de plus beau G* de plus rare, [ans fortir du lieu de fademeure , G mémefans quiter le cabinet : Mais nous ne vous celerons.pas auffi, qu'il y en a d'autres, cr en beaucoup plus grand nombre, quivaifonnent tout autrement , € qui s’aten- dent que vôtre proccdéawra un. Juccés tout contraireau juzement des Premiers. D'autant qu'ils croyent que vous dépeignez ces cow- #rces f{belles © firaviflantes, que les. Iles fortunées qui fout tant VAR = ÉÉTTRHE vantées dans les fables , n'en étant que des idées fort croffieresie dé legers crayons l'on prendra volontiers la generenfe refolution de les aller voir, pourconferer les excellentes copies que vousleur avez miles en main, avec les Originaus, > ainfs contenter la cveuê, de ce que vous dites effre, commeil l'ejl en éfet, acom- pagré de tant de charmes reels, C7 de veritables delices. | _ Et de vrai, Monjieur, qui eff celui qui en lifant vos doffes écrits, n'auroit envie de voir ces belles plaines de quelaues Iles que vous reprefentez, couvertes detant dctrefors delamature: € - &econfiderer en prefence, la hauteur prodigieufe de ces montagnes, Quipour nous fervir de vos termes , font couronnées d'une infinite d'arbres precieus, re: étues d'une verdure éternelle? Qui ne Jeroit épris de la beauté de tant de profondes vallees & d'agreables collines, qui en divertifant ces aimables payfages, y forment des Perfbeitives fi divertifantes, que l'œil ne peut foufrir qw'avecre. gret, d'effre tant foit peu diverti de la contemplation de tous ces aimables objets ? Sur tout qui est-ce, quiaprés avoir leu ce que vons dites de ce magnifique Palas de CMonfieur lé Gouverneur Gense- ralde vôtre Nation, lequel vous décrivez d'une architeéture jf acomplie, arrofé detant de claires fontaines , ombragé de tant de Oois preciens @ de bnne odeur, afforti de tout ce que l'artifice © la nature ont de plusraviffant, G* même pourven de tanrde douceurs, qu'elles pourroient faire tarir les fources de l'amertu- me: ne foit en fuite tranfporté d'un ardent dejir de voir le gloriens a emblage de tant de raretez G° de tant de merveilles , qui lui loyent autréfois inconnuës ? < IL faudroit auffs effre privé de l'une des plus douces paffions, qui flatent ordinairement le cœur des hommes, Ji aprés avoirles vôtre Hiffoire l'on ne defiroit de voir, non plus dans les livres, ou dans les cabinets des curieus; mais au lieu même de leur origi- ne, tant defortes de bêtes à quatre pieds , de reptiles © d'infeites, particulierement ces incomparables Orfeaus que vous reprefen- tez dans leur pompe, couverts d'un plumage diver/ifié de tant de vives @inalterables couleurs, qu’elles femblent avoir épuifé tout ce qu'ily a de plus brillant & de plus lumineus dans la nature, pour faire ce fuperbe mélange ? L'on envoyebien à l’Europe quel- ques dépoüilles de ces legers habitans de Pair : maïs ontre qu'étans 4 morts , ils perdent beaucoup de leur luÿtre > de leur grace: vous | | les CE TTRÉES. Ses avez fi parfaitement bien d'écrits en vôtre Hifloire, que note nous perfusdons aifement , que ceus qui la lifent fouhaiteroient fort volontiers, d’avoir quelque participation de leur agilité, pour fetranborter dans ces aimmables contrées , afin de les y voir avec tout ce vif éclat, € tout ce riche émail dont ils font pare. Et fur tout pour y confiderer ce Diamant animé, ou cette Efforle volante ,-cet admirable Colbty , qui pour perpetuer farace, fait sn nid d'un fimerveilleus artifice, qu'ileit à craindre que l’_4ra- bie heureufe n'oublie deformais celui de fon Phænix , pour cele- brer celui-cy. | Pour nerien dire de ce petit Cucuyos, que vous revetez de tant de gloire G de lumiere, qu'il fait évanouir les plus épaiffes tenebres de la nuit : ces Monffres delamer © delaterre, ces LAmfibies qui font marcher devant eus la terreur & l'éposvan- sement, étans couverts de vos termes, onf ume certaine grace, qui amoindrit de beaucoup l'horreur qu'on avoit cenceuë de leurs corps écaillez ou heriffez de poil, G* de toutes les prodigienfes défenfes dont leurs gueules font armées. La mer même cette inexo- rable, qui nerefpeile aucune autres loix que celles quefon Crea. teur lui a impolèes, y nourrit tant de poiffons diferens, drecele dans [on vafte fein tant d'ambre , tant de perles , tant de coral, _Ctant d'autres riches produfions que vous décrivez , que defor- sai, l'on fe refoudra facilement à fe confier à fon inconftance, pour avoir quelque part à tous [es trefors. : Vous n'exaltez pas neantmoins ces heureufes contrées juf[qu'à un tel point, que vous n'en découvriez les défauts, € n'en declariez les incommoditez , mais au mêmetems que vous en don- - m€2 laconnoif[ance , vous fournif[ez par une charitable induffrie, des remedes qui font propres pour repouffer les éfets de leur mas dignité. Et il n'y a rien de tout ce qui peut choquer lerepos des Habitans de ce nouveau Monde, à quoy vous nepourvoiyez, ni venin auquel vous n'opofiez l'antidote, ni d'afligeant que vous ne foulagiez : de forte que les nouveaus venus en lifant vostcrits J trouvent non [eulesent le moyen de palfer leur vie avec douceur dans ces agreables retraites, @r les fecrets dereuffir dans teus les nobles G> profitables employs que vous leur propofez : mais envere des aydes dont 1l faut nfèr, © leregime de vivre qu'ils doivent garder, pour y conferver leur Janté toijours wigoureufe, tu ie € e$ LETTRES. des injures des faifons, les mauvaifes qualitez de quelques fruits. les outrages des reptiles G* des infeites ; tellement qu'en moins d'une heure, ils y aprenent plus de remedes aus maus qui les y peu vent acueillir, qu'une fâcheufe experience ne leur en auroit p# enfeigner, dans la revolution d'un frecle entier. . _ Vous avez.fi parfaitement confervé les idées du naturel, de la police, de toutes les diverfes faffons de faire des Nations que vous avez veuëés en tant de diférens endrois de PLAmez rique, qu'on ne fauroit rien defixer aus naïves defcriptions, que vous en avez faites. Les marximes mêmes les plus fauvas ges, © les coutumes les plus étranges, reçoivent un tel air de politeffe en pallans par vos mains, que les effrits les plus deli: cats, netreuventrien qui lesrebute, on quileur donne le moin dre dégoût en lifant vôtre HiStoire. Et pour les memoires qui vous ont effe fournis par ces nobles Voyageurs que vows citez fojeurs Avec eloge : vous lesavez fi bien arangez dans liur propre lieu € dans un ordre fi judicieus,qu'encore qu'ils forens precieus en leur matiere © en la forme qu'ils ontrecené de leurs propres Auteurs, vous les avez rendus tellement vôtres par ce beau jour, "par tot tes agréemens dont vous ls avez acompagnez , que ce feroit vous fairetort, fi l'onne les contoitentre vos propresrichel]es. Bien que vôtre Nation, fost l'une des plus illuffres CG des. plus gencreufes qui foyent an CMonde, G* qu'on doive apelez vôtre France, de même que l'ancienne terre de Canaan > le Puis de la vraye noblefe, la parfaite en beauté, la joye de toute la. terre, € qw'ellefoit celebrée par tout l'univers pour l'wildel'Euz rope, la mere des civilitez , @ lamaitrelfe des belles fiences, de la bonne grace, G* de tous les plus nobles exercices de la paix-d de la guerre, de la Cour © d# cabinet : vous ne neghigez pus neantmoins par un fourcilleus dédain, les autres Peuples, qui font dans fon ancienne alliance + mais vous loüez ce qui le merite parmitelle Nation qu'il fe rencontre, € vous avez Ji bien par: éagé vos Relations, que vous donnez à chacune ce qui-luiefl deu; Jens qu'on vous puille acufer avec juflice, de partialité on de. fakerie, + < A ;, D 0 + De peur, que-ces chaleurs prefque continnës qui reznent ans’ Antilles, nefuffent tant foit peu contraires au temperiment de vôs: Aeikeurs, yous leur avez fourhi par unefage prévoyance, D dirt ; YA HA le. ! ALAE AE RE #. ble rafraichifement au milieu de leur courfe , an moyen de la Re- lation fi curieufe G fibien circonflanciée, de ces triffes Habitans du Détroit de Davis, qui pallent les deus tiers de leur vie parmi des glaces & les neiges qui couvrent leurs cavernes : € lereffe, dans les eaus avec les poiffons , commeune efbece d'CÆmfibies en- tre les autres hommes. Nousnedoutons point, CMonfieur, que les Caraïbes que vous avez fi bien dépeints, dans leurs ménages € dans leurs diver- tifemens, dans tous leurs exercices de la paix © de laguerre, dans leur naif[ance G* dans leur mort : ne vous avoüent defirmais pour leur propre Hifforien, © qu'ils ne vous celebrent en leurs Carbets & en toutes leurs rejoiffances les plus folemnelles, pour avoir fait l'arbre de leur gencalogie, & pour leur avoir donné La connoiffance de leur vraye origine ; Cr fingulierement , pour les avoir produits à la.face de l’Europe tels qu'ils font en éfer, c'eftaffavoir, beaucoup mois barbares, qu'on ne les avoit creus julques-à prefent. Nous avons eu la curiofité, decommuniquer ce quevous en avez dit, à ceus qui reffent encore au milieu de nous; Cnous les avons entends confirmer de vive voix , tout se que fen CMonfieur Briffok, vous avoit mandé de leurs guer- res, de-leur religion , de leur langage, € de leurs mœurss tellement que toutes ces chofes [ont fi veritables au fonds, d* en tontes leurs circonffances, qu'on ne fauroit les rejeter, fans dementir tout un peuple, quipar une tradition conffante € una- aime, étant nourri dans cette créance, en fera toijours le ga- rant. | Ne À lu Maïs ce féroit peu, s’il n'y avoit que cette Nation, qui fe refent encoré de l'humeur fauvage, qui publiaÿf vos perfeilions, € qui vous témoignast fes reconnoiffances :- Il e$f aufft tres- Juffe, que nous qui vivons entre quelques refles de ces Peu- ples , © parmi d'autres, que nous tâchons de civiliser, tenions. & gloire finguliere de nous aquiter de ces devoirs : * que nos Fa- milles, quine compofent à prefent aucun vorps d'état feparé d'avec eus , © qui jufques- maintenant S'étoient contentées d'a voir leur temoin au ciel, ayant eflé produites au jour par votre. Histoire , confeffent qu'elles. font redevables à vôtre bonté, ae toute là lumiere dont elles jouifflent en l'Europe, € qu'elles vous en réiterent par ma. plume, leurs plus Aire / CETTE LET TER Lu affions de graces. Recevez-les s'il vous plait Monficur, € en continuant de nous honorer de vôtre bienvucillance, qui nous eff fi avantageufe: Croyez que nôtre Floride, répandra volontiers CG fans aucune referve tout ce qu'elle a de fleurs , pour orner la couronne qui eff deué à vôtre Histoire, © que nos plaines, nos lacs, nos forets, © nos plus hautes montagnes n'ont point d’ha- bitans , qui n'admirent vos écrits , * qui ne forment des vœus pour vôtre profperité. Ce Jont-la leurs fentimens communs, les particuliers de celui qui [era pour tofjours. MONSIEUR ‘De Melilot en la Floride Vôtre tres-huimble & tres= Ce 6 Jan. 1660. affcttioné Serviteur. EnpouaArD GRAEVES. HISTOI x ROM RÉ AND are 19: RTS AS Woo SAR RS MOMISTVOTRES | mArOR ELLE & M bas D'ES sbé ÊRES ANTILLES D E LAMERIQUE ML Tv beam RiE MIiER #4 Comprenant l'Hiftoire Naturelle. CHAPITRE PREMIER. De la fituation des LAntilles en general : de la Ti emperature. de FAirz De da nature du Païs; & des. Peuples | qui ÿ habitens. | Nrre le Continent de l'Amerique Meri- | | dionale, & la partie Orientale de l'Ile de Saint /2 Jean Porto-Rico, ily aplufeurs Iles, qui ont # ÿ la figure d’un arc, & qui font difpofées en telle à forte, qu'elles font une ligne oblique au travers #S del'Ocean. ” Elles Re den BE appellées, les Antilles del Ames rique. Que fi l'on demande la raifon de cenom là, il efl à Croire », qu ‘elles ontété ainfi nommées >. ParCc qu elles font Ÿ A = IR FC TZ = __ Etpour le sratifierencore d’avantagefa Majefté,luidonnæ sv le ceint militaire, & le fit CHEVALIER D'E L'A- COLADE, Commeil apert plus amplement par fes Let tres données à. Saint Germainen l’Aye:, au mois d’Aouf*, de: lan de grace mille fix cens foixante deus, léquelles font fignées. . de famainRoyale, & feellées du grand: feau en cireverte:, & : _ CA: Fe 1ap. 2 DES LES ANTILLES 39. en fuite verifiées & enregiftréesau Parlement de Paris, ouï &- Î à ce confentant le Procureur General de fa Majefté s fivand J'Arreft de verification , en date du vintcinquiéme May, mil- | Jefixcens foixante trois. D'autant que cette Ile, eft au rang des Zles Antilles , & du nombre de celles qu'on nommeaufliles Z/es Caraïbes, & qu’en cette qualité, e elle cftéomprife dans la conceflion que la Com- _ pagniedes Indes Occidentales a obtenuë des Hauts & Puiffans Seigneurs les Eftats Generaus des Provinces Unies, dés le | commencement qu'elle furerigée, M. M. Lampfins ont apuyé letabliffement qu'ils y ont fair, de l Otroy des Directeurs commis des chambres refpettives de cettemême Compagnie, _seprefentans l'Affemblée des dixneuf: ainfi i qu il paroit par J'Extrait de leurs refolutions, en date du cinquiéme du mois de May, de l’année mille fix cens cinquante cinq. L'une des conditions de cet Oétroy, portant expreffement, que celui qui feroit nommé pour commander à cette Colonie naiflante, féroitagreé & confirméen cette charge par les mê- mês Hauts & Puiffans Seigneurs les Eftats Generaus, M. M. Lampfins leur prefenterent Monfeur Hubert de Beveren : & Ieurs Hautes PuiMfances étant deuëment informées de la gene- _ rofité, de l’expcrience, de la fidelité, & de routesles autres belles qualitez dont ce Gentil-Bommeeftrichement pourveu, & qui le rendent tres-capable de cet employ, ie munirent de _Jeur ample Commiflion , le deuziéme du mois de Seprem- bre en la même année mille fixcenscinquantecinq: en vertu de laquelle, ileft entre en poffeflion de ce Gouvernement, au grand contentement de tous les Habitansde l'Ile, quionttout fujet de fe loüer de fatres-fage conduite, & detous les grands foins qu'il aporte pour procurer le bien & lagloire de leur Colonic ; & l'entretenir dans lerepos & la tranquilité dont elle jouit. Il faut avoüer, que cette [le meritoitbien d’avoir des Habi- tans : car outre ce que nousavons déja dit, de la bonté de l'air qu'on y refpire, de l’incomparable fertilite de fon ter- roir, dela beaute raviffante des arbres qui le revéètent, & du criftal coulant des rivieres & des fontaines qui l’arroufent, | os Din vivres qui ycroifflent, du miel & du fucre di y C z difti- Ds Nan : PARA PR SARL 1 At SARL OR Dr PA LPS ERA ji en MU PNT TE 20. Histoire Narunrier, Ebpa diftilent, des precieufes marchandifes qui s’y recueillent, de la pefche & de la chaffe qui y font abondantes, de la feureté & commodité de fes ports & defesrades, & detousiesautres, avantages qui la rendent recommendable : étant voifine du Continent de l'Amerique meridionale, elle eft tres-propre pour y entretenir un bon commerce avec les François, les An- glois, & les Efpagnols qui yont des Colonies, comme aufi avec les C4roñagues , les Calibis, les Caraibes, & plufeurs autres nations Indiennes, qui ont leurs Villages fie le bords de la grande Riviere d’Orinoque, & le long de la cofte de la mer. Pour aflurer ce commerce, & mettre cette place en état de ne point redouter les courfes des fauvages, ou les furprifes de quelque autre ennemi, M. M, Lampfins y ont fait bâtie .. trois Fortereffes, qui font à prefent en tres-bonne défenfe,. & fuffifanment pourveué de canons, & de toutes les autres mue.” nitions de guerre & provifions de bouche, qui font neceffai- res pour afermir le repos des habitans, contenir les broüil- lions dans le devoir, & donner de la terreur aus envieus de la gloire de cette Colonie. La plus confiderable de ces Forteref. fes, & où Monfieurle Gouverneur fait fa demeure ordinaire, eft connuéë fous le nom de Lamp/inbereue, pour la diftinguer des deus autres, qui font communement apelées de Beveren, & de Belleuiite. La premiere eft bâtie furune agreable colline, laquelle eft élevée de cinquante pieds ou environ, au defus du terrain que l'on nomme Lempfin-Baye, & où l’on à aufli jetté les fonde- mens d’une Ville, quiportele nom des Seigneurs del'Ile, & qui eft déja enrichie d'une belle & grande ruë, en laquelle on voit l'Eglife, plufieuts agreables maifons couvertes detuiles, & acompagnées de Magazins, fortamples & folidement ba tis, & de quelques autres ornemens publics & particuliers, qui font tous d’une belle monftre au dehors, & tres-commo= des au dedans. Cette Forterefñe confifte en quatre baftions, fur chacun déquels , ilyaunebaterie de plufieurs groffes pie= €es de canons, qui defendans la Ville & la Campagne voifine, peuvent foudroyer tous les vaiffeaus qui auroient l'affuran- ce dé moüiller àcette Baye, ou de porter des hommesà terre, fans én avoirobtenu la permiflion. Ces auAEE baftions enfer« ment Ehap.z Es ÎLES ANTILLES, ns € … ment dans leur enceinte le corps de garde, l'arfenal muni de toutesfortes de bonnes armes, la maifon de Monfieur le Gou= verneur, & les apartemens des Officiers & des foidats de la garnifon qui y eft entretenué. L'autre Fort qui eft appellé de Beveren, eft flanqué fus un rocher , lequel étant inacceflible de quelque côté qu’on le * vueille aborder, eft encore baigné de la mer & d’une riviere d’eau douce, quiluifontun large & profond foflé, en forme de demyelune. La fituation de cette place eff fi avantageufe, que felon le jugement de tous ceus qui s’entendent aus fortifi- cations, l’on pourroit avec peu de frais, la mettre en état d’ar- réter une puiflante armée: parce qu'outre qu’elle n’eft com- mandée d'aucune montagne ou eminence qui foit au voifina- :@, le roc fur lequelce Forteft bâti, ne peut eftre ni miné ni fapé, à caufe de fa dureté naturelle, & des eaus qui l'en- tourent. Joint que pour y entrer, il faut traverfer la riviere, & monter parun petit fentier pratiqué dans la mafñfe du rocher, & qui eft fi étroit, qu’il n y peut pañfer qu’un homme de front, tellement que les foldats quile gardent, n’ont pas beaucoup de peine à defendre cetteavenué, & d’en empefcherl'accés. I eft auffi pourveu de plufieurs groffes pieces d'artillerie de quinze à dixhuit livres debales, qui tiennent la rade & tout le Quartier voifin en feureté. Tout joignant cette Place, il ÿ a une langue deterre qui formeune prefqu'Ile, fur laquel- le on a deffein de bâtir encoreuneautre Ville, fous le nom de la Nouvelle Flefinque. Letroifiéme Fort, qu'on apelle de Belleviffe, ne confifte qu'en une redoute, qui eft conftruite entre deus Pointes, dont l’une eft nommée de Caron , & l’autre de Sable. L'ona edifié dépuis peu cette petite Fortereffe, à deffein d’empefcher les Indiens de faire quelques irruptions dans l'Ile par ces en- drois-là, Car bien-que M. M. Lampfins defirent que leurs. fujets entretiennent une bonneintelligence avec ces Barba- res, afin de les aprivoifer & de les atirer à la connoiffance de . Dieu, par toutes les voyes de douceur & de charité Chre- . ftienne, fieft-ce qu'ils ne veulent pas qu'ils defcendent à ter- re, fans en avoir demandé & obtenu la licence de Monfeur le Gouverneur, C 3 Pour LT NME ini: 3 ro in # EH 22 HISTOIRE NATURELLE, ét Pour ce qui eft de l’état prefenc de cette Colonie, les der- niers memoires qui en font venus nous aprenent, qu Aya déja environ douze cens Habitans, quis’ocupent tous à cul- tiver le Tabac ou le Gingembre, ou le Coton, ouf Indigo, ou cesprecieus Rofeaus dont onfaitle Sucre, & qu'ils ont déja fix beaus Moulins pour briferces Cannes & en exprimer le Suc. Il eft aufi conftant queles Navires qui en font re- tournez depuis peu, ont déchargé à Fleflingue dans les ma. gazins de M. M. Lamplins, une quantité bien notable de toutes ces fortes de marchandifes, qui étoient du crû & de la faflon de cette Ile : léquelles aufli au raport des experts ont ché jugées autant excellentes & aufli bien conditionées qu'aucunes autres de même efpece, qui jufqu’à prefent font venués de l'Amerique. + Il eft à croire, quelabonté & la fertilité du terroir decette Ile, contribué beaucoup aus loüables qualitez & à toute la perfedion de ces marchandifes: maisil en faut auffi donner la gloire & la loïüange, à la diligence & à la d’exterité des Habitans de cette Nouvelle Oüalcre, qui étans d'un naturel vigilant & laborieus au poffible, font auf fort foigneus de ne rien oublier de tout ce quieft capable de mettre dans l’efti- me leur aimable Colonie, & de lui aquerir & conferverun bon renom parmiles marchands. Quant au Gouvernement de cette He, la juftice & la police y font adminiftrées avec toute l’equité, la douceur & la mode- ration que l’on fauroit defirer, par un fage Confcil auquel Monficurle Gouverneur prefide. Ce Senatcft compofé d’un Bourguemaiftre de cinq Efchevins & des principaus Officiers dela milice, quiterminent promtement & fans beaucoup de remifes fuivant les bonnes loix, & les anciennes coûtumes des Provinces confederées, tous les diferens qui peuvent fure venirentre les Habitans. | Les Eglifes de l’une & de l'autre langue que le Seigneur y a recucillies, c’eft à dire tant la Fimatde que la Valonne, font aufli conduites parle miniftere des Pafteurs des Anciens & des Diacres, de même que celles des Provinces Unies aufquelles elles font aflociées, fous la dire&tion d’une même DAPEEE Eclefaftique, x l'Inf} EEE de leurs Synodes. : : | nfin | | 15 MES IE S) ANTILLES 3 Enfin, pour ce qui concerne la Police, l’on ne foufre point de pareffeus ni de bouches inutiles dans cette petite Republi- que, non plus qu’encelle des Abeilles: mais comme l’oyfi- veté qui eft laroüillure des corps & des efprits, en eflbannie par un Arreftirrevocable, aufli le dous & profitable employ de l'agriculture, & tous les loüables exercices qui fervent à l'entretien du commerce, y font receus & pratiquez avec hon-- neur, de même que parmi les plus gencreufes Nations , dont Vhiftoire eft parvenue jufques à nous. Û MUR, EC L EE; 'lE De l'Ile de la Grenade. " Ettelle, quiet fituée fur la hauteur de douze degrez,, & feize fcrupules au deça de la Ligne, commence pro- _prément le demy cercle des Antilles. On luy donne fétlieües de longueur, furunelargeur inégale, elle s'étend Nord & _ Sudenformede Croiffant. Les François si y font placez il y environ fix ans. ls eurent à leur arrivée beaucoup à dé- mefler avec le Caraibes, qui leur en contefterent quelques mois par la force des armes, lapaifible pofeflion. Mais enfin Monfieur du Parquet Gouverneur pour le Roy de l'Ile de la Martinique, qui avoit entrepris à fes frais cet établifiemenr,. les obligea, à luy laiffer laterre libre ,. par la confideration de: leurs propres Interefts,. fondez principalement fur le grand avantage qu'ils recevroient du voifinage des François, qui: _ les affifteroient en tous leurs befoins. … LaTerre, y eft tres-propre à produire toute forte de vi- vres du pais, des Cannes-de Sucre, du Gingembre & d’excel- lent Tabac. Ellejouyt d’un air bienfain. Elle eft pourveüe: _ de plufeurs fources d’eau douce, & de bons moüillages pous: les Navires. 1l y a aufliune infinité de beaus Arbres, dont les uns portent des fruits delicieus à manger ,. & les autres: font propres à bâtir des maifons, La pefche eft bonne en: toute lacofte, & les Habirans fe peuvent étendre tant pour Ja pefche , que pour la chaffe, en trois ou quatre petis Ilcts.. “qu'on. nommé les Grezadins, qui font au Nord-Eft de ectre: ‘&: terre Dr HISTOIRE NATURELLE, (Chap © terre. Monfieur le Comte, Capitaine de la Martinique, à cfte le premier Gouverneur de cette Ile. Monfieur de.là Vaumeniere, luy a fuccedé en cette charge. 1la fous fa conduite plus de trois cens hommes bien aguerris, qui pour la plupart ont déja demeuréen d’autres Iles, & qui s’enten- dent parfaitement à faire cultiver la terre, & à manier les armes, pour repouffer au befoin les cfforts des fauvages, & de tous ceus qui voudroient troubler le repos dont ils jouyflent, en cette aimable demeure, Monfieur le Comte de Seryllac, ayant entendu le recit avantageus qu’on faifoit à Paris & ailleurs, de la bonté & beauté de cette lle, là fait acheter dépuis peu de Monfieur du Parquet. Ce qui donne tout fujet d'efperer, que dans peu de tems cette Célonie, qui eft tombéeen defibonnes mains, fera confiderable pour le nombre de fes Habitans, & APE la quantité des Marchandifes qu’elle fournira. AR T:}C L.E IIL De l'Ile de Bekia. Ette Terre, eft diftante de la ligne de douze dégrez & + vint-cinq fcrupules. Elle à dix où douze lieües de cireuit, & elle feroit affes fertile, fielle étoit cultivée. Il y aunfort bon Havre pour les Navires, qui y peuvent eftre à l’abry de tous vens: mais à caufe qu’elle eft dépourveué d’eau douce, elle eft peu frequentée, fi ce n’eft de quelques Caraïbes de faint Vincent, qui y vont quelquefois faire la pefche, ou cultiver de petis jardins qu ils ont ça & là, are leur D PARA | ART LC LoBub EM De l'Ile de Saint Vincent. Ette Ile, eft la plus peuplée de toutes celles que pofe= , dent les Caraïbes: Elle eft fur la hauteur de feize de- grez au No.d dela Ligne. Ceux qui ont veu l'Ile de Ferro, qui 1 51 Hu TONÉNENE SN, + ; _ Chap.2 DES. Mrs ARTASLE Sir | 25 | qui: -eft l’une des Canaries, .difent que cellecy eft de même figure. : Elle pèut avoir huit lieuës de. Jong & fix de large, Laterreeft relevée de plufieurs hautes montagnes: au pied defquelles fe voyent des plaines, qui feroyent fort fertiles fi elles éroient cultivées, Les Caraïbes y ont quantité de. beaus Villages, ou ils viventdelicieufement , & dansun pro fond repos. Et bien qu'ils foient toûjours dans la méfiance des Etrangèrs , & qu'ils fetiennent fur leur garde quand il enarrive à leur rade, ils ne leurrefnfent pas neantmoins du paindupais, quieftia Caffave, de l'eau, des fruits, & d'au- . tres vivres qui croifient en leur terre, ‘s'ils en ont befoin: pourveu qu’en échange, ils leur donnent descouteaus, des ferpes, des coignées, 0 ou quelques autres ferremens, dont ils font état. A caufequecette place, entre toutes celles queles Caraïs bes poffédent aus Anulles, eft la plus voifine du continent, où habitent les Aroüagues leurs irreconciliables ennemis, ils. Ÿ aflignent ordinairement, le rendez-vous general de leurs troupes , lors qu'ils ont formé le deflein delesaraquer. C’eft auffidecette le ; que font fortis les plus vaillans hommes, qui à diverfes reprifes, ont faitdes defcenres & des ravages dans les Coloniesdes François à des Anglois, comme nous le nu | cnfonlieu. | | UARTICLE V: ol | Del ledel Brbaude d " rit | ip rrqlé que nos d'Brançois sppettens Ja Barboude &cles Ane À, slois Barbade; ft lituée entrele treiziéme & leauator- ziemé dégre ; au Wotd de l'Equatewr , à l'Orient de Sainte _ Aloufic& dé Saint Vincent. Les pb koi) qui yont mené des : l’an mil fix cens vint fét la Colonie qui l’habite encore à - prefent, luy donnent environ vint-cinqglièuëés detour. Elie eft d’une figure plus longue que large.’ Il n’y a qu'un feul ruiffeau éncette Ile, qui merite de porter le nomde Riviere: Maislaterre y étant préfque par tout platre &unie, elleaen à | ii endroits des Etangs, & des ue d'eau douce, qui RER STE ARTS PAU 26 Histotre NATURELLE, "te 3 qui fuppléent au defaut des fontaines & des rivieres. La: plu= part des maifons, ontauflhides Cifternes, & des puits , qui ne tariflent jamais. Du commencement qu'on cultiva cette terre, on tenoit qu'elle ne promettoit pas beaucoup: Mais l'experienceave- rifié lecontraire, & elle s’eft trouvée fi propreà produiredw Tabac, du Gingembre, du Cotton, & particulierément des Cannes de fucre, qu'apres l'Ile de Saint Chtiftofle, elle eft fa plus frequentée des Marchands, & la plus peuplée de tou- tesles Antilles. Des l'an mil fix cens quarantefix, onycon- toit environ vint mille Habitans, fans comprendre les Efcla- ves negres, que l'on tenoit monter à un nombre beaucoup plus 2 grand. Il ya plufieurs places encettelle, qui portent à bon droit Ic nom de Villes : parce-qu'on y voit plufieurs belles, lon- gucs & larges ruës, qui font bordées d'un grand nombre de beaus edifices, où les principaus Officiers & Habitans de cette celebre Colonietont leur demeure: Mais à confiderer toute cette Ile engros, on la prendroitpour une feule gran- de Ville, à caufe que les maifons ne fontpas fort éloignées des unes ses autres : Qu'il yen a aufli beaucoup de:bien bâties, à la faflon de celles d’ Angleterre : :que les boutiques & tes magazins y font fournis de toutes fortes de Marchan- difes: qu’on y tient des foires & des marchez : Et que toute l'ile, à limntation des grandes Villes ,‘eftdivifée en plufieurs. Parroiffes , qui ont chacune une belle Eglife, où les Pafteurs. qui y font en grand nombre, font le fervice Divin. 4 ousles plus confidérables Habitans de cette Ile, y font fer _mementétablis, &s’ytrouventfibien, qu'ilarriverarement qu'ils la-quittent,,. pour aller en-une autre. Cequin'eft pas étonnant , puifqu'clle Leur fournit en abondance tous lesmeil. leurs rafraichifflemens quipeuventeftre tranfportez de l'Euro- pe, &une infinité dedouceurs que ce nouveau Monde pro- duit. | Nous aprenons aufli, que cétte la s’efttellement ae erué, quenc pouvant plus contenir fans enprefflement le grand nombre de fes Habitans ;elle a efté obligée pour.fe mettre plus au SRE, de pouflér une nouvelle Peuplade dans le Continent de bass pes Icre ANTILLES 27... de l'Amerique Meridionale, laquelle s’acroift dejour à autre, à la décharge, & au plus grand avantage de celle-cy, dont elle releve. Cette Ile eft renommée par tout, à caufe de la grande abondance d’excellent fucre, qu’on en tire depuis plufeurs années. Left vray, qu'il n’eft pas fi blanc que celuy qui vient d’ailleurs, maisileft plus eftimé des Raffineurs, parce qu'il a le grain plus beau, & qu'il foiffonne davantage, quand on le purifie, | AR PI CIE TNT De l'Ile de Sainte Lucie, Es François appellent communément cette Ile Sainte CAloufie , elle eft fruée fur le treiziéme degré & quaran- te fcrupules audeça dela ligne. Elle n'eftoit par cy devant frequentée que par un pétit nombre d’Indiens, quis’y plai- foient à caufe de la pefche qui y eft abondante, Mais les François de la Martinique, font venus dépuis peuleurtenir compagnie. ]1 y a deushautes monragnesen cettelle, qui font extremément roides. Onles apperçoitdefortloin, & onlesnommeordinairement, les Prrons de Sainte CAloufie; Au pied de ces montagnes; il y a de belles & agrcables vallées, quifont couvertes de grands arbres, & arrofées de fontaines. On tient quel'airyefl bon, & que laterre y fera fertile, quand elle feraun peu plus découverte, qu’elle n'eft Mpabfcor. Monfieur de Roffelan, a étably cette Colonie Francoife, fous les ordres de Monfieur du Parquet, qui l'avoit choify pour y eftre fon Lieutenant: & étant decedé en l’exercice de cette charge de laquelle il s’aquittoit dignement, Mondfeur JeBreton Parifien a mis en fa place. 10 PR UE DO 0 à 28° Misrotre: Naruneree, 7 A LT l: CL E VLE. Lel'ile de le Marlirique: Es Indiens; appelloient cétte Île CMañaninas mais des Efpagnols luyont donné Ie nom.qu'elle porre à prefent. Elte et fur la hauteur de quatorze degrez & trente fcrupules. au deça delaligne. C'eft unebelle & grandeterre, quiaene” Viron feize licuës en longueur, fur une largeur inegale & quarante “n de circuit. C eft aujourduy l'une des plus cele- bres, & des plus peuplées des Iles Antilles. Les François, & les Indiens occupent cetteterre, & y ont vécu long tems enfemble en fort bonne inte lligence. Mon- fieur du Parquet, neveu de feu: Monfieur Delnambuc , qui. donna lélcommencement aus Colonies Francoifes qui. font répanduës énices Antilles, comme nous le dirons Cy apréss. en cfGounverneur pourleRoy, & ras quelques années hé en: a âquis RSeigneurie. ic C'eft la plus rompue dés Antilles C efeà à dive la: plus rem plie dé montagnes, qui font fort hautes, ét éntre coupées dé : rochers inaccefMibles. Ce qu'il y ade bonne terre, éft com. pofé en partie de Mornes, qui font des eminences prefque rondes, ainfinommées au pais: de côtaus qui font parfaite= ment beaus, (on les appelle Cofieres au langage des:Hes:3; Et de quelques plaines ou vaions, qui. font exttemÉment agreables. | Les montagnes, fonttout à fait inhabitables, & ft ; de repaire au beftes fauvages, aus ferpens, & aus couleue. res, quiy font en fort grand nombre. Ces montagnes font: couvertes de beaus bois , d’ontlesarbres, furpañfent de beau: coup & engrofleur, & en hauteur! lépñbrds de Frances. &. produifent des fruits, & des graines , d ont es a aus & les: oiféaus.fe repaiflent. LL Pour ce qui eft des Mornes & des cÔtaus., & plupart ob Babitables, & d’unbonterroir, mais fort penible à à-cultiver :- Caronen voir qui font fi hauts & fidroits, qu’à peine y peut #ntrafailler fans danger, oudumoins, fans eitre obligé à (e tenir Ç& A EN? D # 7 Ve 4 - À sn | Chapz Des lies, ANDILLEES, 29 tenir d’une main à quelque fouche de l'abac, ou à quelque - branched’atbre, afiu de travailler de l’autre. Le 1abac qui croift dans ces lieus élevez, eft toujours meilleur, & plus eftimé, que celuy qui croift es vallées, & en des fonds, quine font pas de fi prés favorilez de l’aimable prefence du Soleil. Car le Tabac qui fe cueille en ces en- | droits, eft toujours plein de taches : jaunâtres , comme s’il étoit brûlé, & n’eff ni debon coût, nidebonnegarde. Ces lieus étoufes font aufli fort mal-fains, ceu$ qui y travaillent, deviennent de mauvaife couleur, & lesnouveaus venus, qui ne {out pas acoûtumez à cetair, y gagnent plütot qu'ailleurs ke mal d'eftomac, qui eft fi commun en cesliles. | Comme il y a deus fortes de Nations differentes en cette terre, auffi eft elle partagée entre l’une & l’autre, c’ef à dire entre les indiens habitans naturels du païs, &les François, qui jétterent les fondemens de cette Colonie au moys de Juillet de l’an mil fix cens trente cinq, fous iafage conduite de Monfeur Defnambuc, qui les fit pañer de l'ile de Saint Chriftofie, les mit en la paifible poffeffionde cetteterre, & apres. les avoir munis de tout ce qui étoit neceflaire pour ur fubfiftence, & pour leur feureté, leur laiffa Monfeur du Pont, peur commander en quaité de fon Lieutenant. : Lapartiedellle, quicfthabitée par Les Indiens, efttoute coinprife en un quartier , qui fe nonume la Cabes-terre , fans autre diffinétion, | Pour ce qui eft du païs occupé par les François, & que Von nomme faffe-terres. il eft divifé en cinq: quartiers, qui font la Cafe du Pilote, la Cafe Capot, le Caxbet, le Fort Saint Pierre, & le Prefcheur. En chacun de ces quartiers il y aunc Eglife, ou du moins une Chapelle, un Corps de garde,. &une place d'Armes, autour de laquelle bn a bâty piutieurs. beaus & grands Magazins, pour ferrer les Marchandifes qui Miennent de dehors, & celles qui fe font dans l'ile. Le :quartier de la Cafe du Pilote ;.eft ainf appellé, à caufe d’un. Capitaine fauvage, qui y demcuroit autréfois, & quite noit à Sloire-deiporter ce nomide Pilote, que nos Francois luyavoient donné. 11 étoit grand amy de Monfieur du Par: quet, & c'étoir luy quil'avertifoit continuellement, de es D Er les = RAR ER SE OP AT RU DCE ET PS ATEN 4 PET MEN 30 HrstToire NATURELLE, Chap. "4 les deffeins, que ceus de fa Nation formoient alors con tre nous. Au quartier de la Cafe C'apot : ily aunc rott belle Savan- ne, (onappelle ainfi aus Jlesles prairies & les lieus de pâru- rage) laquelle eft bornée d'un cofté d’une riviere, nommée {a Riviere Capot, & de l’autre, de plufeursbelles habitarions. . Le quartier du Carbet, aretenu ce nom, des Caraibes, qui avoient autréfois en cette place l’un de leurs plus grands Villages, & une belle Caze qu'ils appelloient Le Carbet , nom, qui eft encore à prefent commun à tous les lieus, où ils font icurs aflemblécs. Monfieur le Gouverneur, a honoré un fort Jong tems c'et agreable quartier de fa demeure, laquelle il faifoit en une maïfon qui eft bâtic de briques, guéres loin de Ja rade, pres de la place d'armes, en unbeau vallon, quieft arrofé d’une affes groffe riviere, qui tombe des montagnes. Les Indiens quin’avoient pointencore veu de bâtiment de pa= reille figure, nide marierefifolide, le confideroient au com. mencement, avec un profond étonnement, & apres avoir cfayé avec La force de leurs épaules, s’ils le pourroient ébran. ler, iis étoient contrains d’avoüer, que fitouteslesmaifons étoient bâties de la forte, cette tempefte qu "On nomme. Ouragan, nclcs pourroit endommager. | A « Cette maifon, eft entourée de plufieurs beaus jardins, qui font bordez d'arbres fruitiers, & embellys de toutes les raré- eZ & curiofitez du pais. Monfieur le Gouverneur a quit- té cette demeure depuis environ deus ans, à caufe qu’il ne fe portoit pas bien en cequartieroù elleëft fituée, &ena fait prefent aus Jefuites, comme aufli de plufieurs belles habita- tions quien dépendent, & d’un grand nombre d’Efclaves né- gres, qui les cultivent. Le Fort Saint Pierre, eft le quartier où demeure prefente. ment Monfieurle Gouverneur: Il y a une Fort bonne bat- terie de pluficurs groffes pieces de Canon, pattie de fonte verte, & partie defer. Ce Fort commande fur toute la rade, A unjet de pierre du logement de Monfieurle Gouverneur, ‘eft la belle Maïfon des fefuites, f fituée fur le bord d'une agreable Riviere, que l’on appelle pour cette railon, la Rivire des Iefuites. Cerare cdifice, qui pourroit en un befoin fervir | de NL A _ Chap.z DES ÎLES ANTILLES, 31 de Citadelle, eft bâty folidement de pierres de taille & de bri- ques, d’une ftruûure qui contente l’œil, Les avenuës en font fort belles, & aus environs on voit de beausjardins, & & des vergers remplis de tout ce quelles Iles produifent de plus delicieus, & de plulieurs plantes, herbages , feurs & fruits qu'on yaapportez de France. Ily a méme un plan de Vignes, quiporte de bons raifins , cnafés grande abondance, pour en faire du vin. Le quartier du Prefcheur, contient un plat païs fort con- fiderable pour fon étendu ; & plufieurs hautes montagnes, à la pente déquelles on voit un grandnombre de belles habita- tions, qui font de bon rapport. | Entre la Cabes-terre & la Bafle-terre, y auncul-de-fac, où il fe trouve beaucoup de bois propre àmonterle Tabac. On y va prendre aufli des rofeaus, qui fervent à paliffader les Cafes, & du Mahor franc, dont l'écorce fert à plufieurs ufages de la ménagerie. La plupart des maifons de cette Ile, font de charpente, fortcommodes, & d’une montre agreable, Les plus confide- ‘tables font bâties fur ces eminences, que les Habirans appel- Jent Mornes. Cette fituationavantageufe , contribué beau. coup à à la fantéde ceus Qui y demeurent, cat ils y refpirent us air plus épuré que celuy des vallées, Et elle releve merveil- Jeufement la beauté detousces agreables edifices, leur four- aifant une perfpe@ive fort divertiffante.. La meilleure rade de cetteile, eftentrele Carbet, & le Fort Saint Pierre. Elle cft beaucoup plus affurée que celle des Ilesvoifines, étant à-demy entourée de montagnes afles hautes, pourla mettre à couvert des vens, & ytenir les vaif. fcaus enfeureté. Entre la: Cafe du Pilote, & ce fein qu’on nomme ofdinai- rement /e Cul-de- fac des Salines , ily a-un-rocher une demye ieuéavantenmer, que lonappellele Diamant, àcaufe de fa figure, qui fert derétraiteà uneinfinité d'Oifeaus, & entre autres aus Ramiers ,: qui y font leurs nids, L'accés eneftdif- ficile: maison ne laïiffe pas de le vifiter quelquesfois en paf “fant , pendant le remis queies petits des Ramicrs, font bonsà: ‘manger; | | #2 al LL 3 e “ û Er UE : « C4 17 RO RRLE AT PNR à - à 7 ’ ! | 32 __ Hisroirs NATURELLE, Chap. + : Le Crénage, ft fitué du même cofté que ce Diamants c'eft : unlien en forme de Cul-de-fac, ou de fein, où l’onimene les Navires pour les r’afiraichir, & pourles repareren les tout- nant fur le cofté, jufques à ce que laquille apparoifle à à de- couvert, La mer yeft toujours calme: maiscelieun'eft pas en bonair, & les matelots y font ordmairement pris defie- vies, quipouftant ne font pas fort dangereufes, puis qu'elles quittent le plus fouventen changeant delieu. | Outre les Torrens, qui au tems des pluyes coulentavec impetuofité parmy toutes les ravines de cette Ile, on y conte jufqu’à neuf ou dix rivieres confidcrables , qui ne tariffent jamais. Elles prenent leurs fources à la pente, ou au pied des plus hautes montagnes, d’où elles roulent leurs eaus entre les vallons, & apresavoirarrofé la terre, elles fe déchargent en la mer. Leur voifinage eft fouvent incommode & dange- reuz , à caufe que lors qu'elles fe debordent, elles deracinent les arbres, fappent les rochers , & defolent les champs & les jardins, entrainant bien fouvent dans les precipices, les mai- ons qui font enla plaine, & tout ce quis’oppote à cette ex- traordinaire rapidité de leurcours. C'’eft auilice qui a con: : vié la plupart des Habitans de cette Colonie, de‘choifir leurs demeures au fommet de ces petites montagnes, ou à la pente de ces eminences , d’ont leur Ile eft richément couronnée: car ellesles parentcontre ces inondations. Mais ce qui eft de plus confdetable en cetteterre, elt la multitude des Habitans qui la pofledent, & la cultivent, qu’on dit eftre à prefentde neuf ou dix mille perfonnes, fans y comprendre les Indiens, & les Efclaves négres, :qui font prefque en aufi grand nombre. La douceur du Gouverne- ment, & la fituation avanrageufe de cette Ile, contribuent beaucoup ? à l'entretien, & à | Tl'accroiffément de cettegrande affluance de Peuple. Cat préfque tous les Pilotes des Navires François & Hollandois quivoyagent en l Amerique, ajuftent le cours de leur navigation en’telle forte, qu'ils la puifient reconnoitre, & aborder avant toutes les autres, quine font pas fi bien fu leur route: & fi-toftqu'ils ont jetrél'ancreà Ja rade de cette terre, pour y prendre les refraichiflemens'qui leur font necelaires, ilsy fon. defcendreleurs pafagers, s'ils d. | ne 1: en 1e NAS SRE r Her. CORMPAIPE 5 ET. (re RUE Ie " Ÿ < “Chap.z DES ÎLES ANTILLES 35 ne font expreffément obligez de les conduire eñcore plusloin. JL eft même arrivé fouvent, que des familles enticres, qui étoient forties de France, en intention de pañer en d'autres Iles, qui font au delà de celle-cy, & qui ne luycedentenrien, nienbonté d'air, nien fertilirédeterroir, étans fatiguées & ennuyées de la mer, s y font arrêtées, pour ne point s’expo- fer de nouveau, à tantde dangers, de dégouts, & d’autres incommoditez , qui accompagnent infeparablement ) CES iongs & penibles voyages. Parmy cette grande multitude de peuple, qui icompofe cette Colonie, il ya plufieurs perfonnes de merite, & de condition quiapres avoir fignalé leur valeur, dans les armées de France, ont choify cette aimable retraitte, pour eftre le lieu de leur re- pos, apres leurs honorables fatigues. Monficur de Gourfolas, Lieutenant General de Monficur le Gouverneur, s’y eft rendu recommandabile entretous; fa fase conduite, fon affabilité, & fon humeur obligeante, luy ont aquis les affeétions de tousles Habirans de l'Ile, & les refpeéts de tous les étrangers qui y abordent. Monfieur le Comte, & Monfieur de L’Oubicre, y font confiderez entre les principaus Officiers. Morfieur du Coudré, y a exerce un fort longtems la charge de Juge Civit & Criminel, avec beaucoup d'approbation. Au commencement de la defcription de cette Ile, nous avons dit à deflein, que les François & les Indiens, yont vêcu long tems enfemble en bonne intelligence : Car nous apprenons des memoires, quinous ont efté cnvoyez depuis peu, touchant l’Etatde cetre Ile, qu'il y-a environ quatre ans, que les Caraïbes font en guerre ouverte avec les nôtres, que depuis ce tems-là, ces Barbares ont fait plufieurs ravages en nos quartiers; & que niles hautes montagnes, ni la profon- deur des precipices, ni l'horreur des vaftes & affrcufes foli- tudes, qu'onavoir tenuës jufques alors pour un mur impenc- trable, quifeparoit les terres des deus Nations, ne les ont p& : .Cene feroit pas même affez pour la perfetionde ce magni- fique Hoftel, qu'il eut tous ces. rares avantages de la natu- se & de l’art, que nousvenonsde décrire, fiaprés tout cela _ilétoit fitué enunlieu defert, aride, & infruucus, & qu'il _faluft mandier d’ailleurs que de la terre qui l’environne, les moyens necefaires pour fon entretenément. Aufli n’a-til point ce defaut, & la beauté s'ytrouve jointe avec l'ütilité,. par un merveilleusaffemblage. Car de fes feneftres, on voit dans labaffecourt,trois machines,ou moulins propres à brifer Jes Cannes de Sucre, qui apportent à leur maiftreun profit, _& un revenuafuré, & quivadu pair avec celuy des plus no _ bles & meilleures Seigneurices de France. Quantà la matiere: . pour entretenir Les moulins, aflavoir les Cannes de Sucre, .chle fe recuëille des chams qui font aus environs, & qui les. _ produifenrà merveille. Plus de trois cens Négres, qui appar-- tiennent à Monfieurle General, cultivent cesterres, & iont: | employez au fervice de ces Moulins, & à la fabrication de. . diverfes autres Marchandifes ,, que certe Ile produit heu- teufement , Comme nous Je dirons au fecond. Livréde cet-. te Hiftoite. G % contue Tout fe faiten cette Le & en fes dépendanecs, fans. CR A A 17 RS * 4 ù . JT ral % “ d ; RE Re MALTE (CE 4 HISTOIRE NATURELLE, Chap.4. confufion , & fans cmpréffement. Ce grand nombre d'Efcla- ves Négreseft{i bien policé, conduit & reglé, que-chacun fe rend à l'exercice & à l'employ quiluy eft afligné parle Maitre desouvrages, fans s'ingerer dans lesoffices & dans les occupa- tions des autres. Outre cette forte de gens qui fontnezà la fervitude, Mon- fieur le General a environ cent Domeftiques Francois de Nation, qui font gagez pourle fervice de fa maifon , dont la . plüpart font de divertes profeflions, & dedivers métiers ne- ceffaires enlafocicté Civile, furtous lefquels , l'intendant de Hamaifon, auneinfpeétion particuliere, Monfieur le General, a encoreles Gardes de fa EN qui l’'accompagnent lots qu'ileft neceflaire, fouslaconduite d’un Capitaine, plutôt pour reprefenter la Majefté du Roÿ, de qui il a l’honneur d’efire Lieutenant, que par aucun be- foin qu 1len air, eftantaimé, & chery de tous les Frauçois, & reveré des Etrangers. A l'exemple de Monfieur le General, plufieurs Nobles & honorables Familles, quifont venués de France, eftant atti- tées par la douceur de fon Gouvernement, fe fontferme- ment établies dans cette Ile, & y ont bâty de belles & agrea- bles maifons. Les plus remarquables font celles de Meflieurs de Poincy, de Tréval, & de Bencvent, qui fonttrois braves Gentils-hommes, Neveus, de Monfieur le General : le pre micr defquels, eft Gouverneur particulier de Saint Chriftofle, fous Monfieur fon Oncle, & les deus autres , font Capitaines de leurs quartiers. | Feü Monfieur Giraud, entre fes autres Maifons, en avoit auîM fait bâtir une presde l'Hoftel de Monfieur le General, & une autre à à Cayonne, qui font des plus accomplies, Ce perlonnage, qui étoit de grand merite, & qui par fa fage con- duite, s’étoiracquis l’amitie de tous les Habitans des Îles, portoit la qualité de Sergent de bataille de Saint Chriftofe, & autres Îles de deflous le: vent, c'efta-dire, des. Martin, de Saint Bartelemy & de Sainte Croix, x Le font au Couchant de S. Chriftofle. | Entre les maifons confiderables parmy nos François, on doit encore mettre celle ÿ Monficur Auber, quiacfté Gou- VCENEUE > Châp.4æ DES. PATES ANTIELES er ÿs verneur de la Gardeloupe. | Elle eft d’une belle ftrnétufe , de bois folide & en bon fonds, & de plus, elle a un bois de haute fütaye, quin'eft pas encore abbatu, & dela terre nette pour occuper cinquante Efclaves, qui travaillent au Sucre, & au Gingembre. Mais ce qui luy donne plus deluftre, eft qu’elle eft placée, au plus haut érage des Habitations du quartier de Ja montagne Plateau, & relevée fur uneeminence, d’oul’on découvre plufieurs belles demeures qui font au défous, & autant loin en mer, que là force de l'œil fe peut êtendre, Mosfieut de la Roziere à prefent Majordel’ile, Monfieur de Saint Amant, Monfieut de l’Efperance, Monfieur de la. Roche, qui font Capitaines, trous les Officiers en gencral, & tous 1és plus anciens Habitans, fontbienlogez. Les Anglois, ont aufli fait bâtir en leurs quartiers, plu- ficurs grands & beaus edifices, qui relevent merveilieufé- ment la beauté naturelle de cette lle. Les plus confiderables font ceus de Feü Monfieur #äernard, premier Gouverneur General de cette Nation : de Feü Monfieur Rich, qui fut fon Succefleur , de Monfieur Eret, qui exerce aujourduy cette charge avec grandeloüange, & de Monfieur le Colonel Gefrefon, qui font tous fi accomplis, qu'ils doivent à bon droit eftrenommez , entre les plus belles ,. & les plus commo- des maïfon des Antilics. Onconte auf, jufques à cinq belles Eglifes, que les An- gloisont faitbâtiren cette!le, La premiere , Qu’onrencon- tre en fortant du quattier des François, eft à la pointedes Pal- _miftes ; lafeconde pres de la grande rade, au deflous de l' Ho ftel de Monficur leur Gouverneur ; la troifiéme à la pointe de Sable, & les deus autres, au quartier de Cayonne. Les trois- premieres, font d’une agreable ftru&ure felon le pais, ornées. en dedans de belles chaires, & de fieges de menuifcrie, & de. bois precieus. Les Eccleliaftiques, y. font envoyez de même qu'en toutes lesautres Iles parles Evefqnes d’Argieterre, dé. quelsilstiennent leur ordiunation, & ils y cclebrent le Service Divin, au grand contentement detous ccus de icu#Naïion,. … & à l'édification finguliere des étrangers, felon la Liturgiede: _ lEglife Anglicane, avec toute la gravité, la modeftic & la. Heverence, quifontrequifes, à la Maifon de Dieu, & au culte rech > # à rs ï À Ë À ‘ui ut % La, 56 Histoire Nan UNE: | Chap fcligieus, que tous les ter font rm A de by teur dre, h ‘ AR CHAPITRE CINQUIÉM 1 Des Îles de deffous le vent. TL OuteslesIles, qui font au Couchant decelle déSaint Chriftofle, font ordinairement appellees, les Zles de deffous le vent : parce quele vent qui fouffle prefque toujours aus Antilles, eft un vent d'Orient , qui participe quelquéfois un peu du Nord, & quecen ‘ft que bien raré- ment un vent du Couchant, ou du Midy. On en conte en tout neufprincipales, defquelles nous traitterons en ce Cha- pitre, felon l’ordre à peu prez qu'elles tiennent en la Carte, 4 ARal 4 LE De l'Ile de Saint do M Ette Ile cft au N hé: Oueft de Saint Chriftofle, fée la hauteur dedix-fét degrez, & quarante minutes. Elle eft petite, & ne peut avoir entout, qu ‘environ cinglieuës de rour. Ce n’eft à proprement parler qu'une montagne, qui s’é- Jeve au milieu de l’Ocean, en forime de pain de Sucre : quieft la méme figure que reprefente le mont de Tabor, & le Pic de Tenerife : finon que ce dernier, eft incomparablément plus haut. | # Elle releve de la Souveraineté de Meflicurs les Etats Genc- raus des Provinces Unies, qui en ont concedé la Seigneurie, & la propricté fonciere, à Monfieur Van Rée, & à {es Affo- ciez Honorables Marchands de Fleflinguesen Zelande, qui y ont étably une Colonie, compofée d'environ feize cens hommes , quiy font proprément accommodez, fous le dous Gouvetflement de la Nation Hollandoife. Cette lle, eft la plus forte d’affiéte de toutes les Antilles: car il n'ya qu'une bonne defcente , qui peut eftre facilement | ” defendué, & où peu d’aomumnes pourroient arréter une armée cnticre. Y Chap.s - Des ILES ANTILLES 57 entiere. Outre cette fortification naturelle, on y abâtyun bonFort, qui commandefur la meilleure rade, & bicnavant en mer, par la portée de fon Canon. Les Habitans font tous commodémentlogez, & propré- ment meublez , à l’imitation deleurs compatriotes d’ Hollan« de. 11 n'ya plus que le haut de la montagne, qui foit couvert de bois : : tout le tour eft déffiché. Et l'on ne fauroit croire qu'âäpéne, la grande quantité de Tabac, qu'on enatiré autré- fois, & qu'on entire encore journellement. Bien-qué , le fommet de la montagne decette Ile, paroiffe fort pointu, il eft neantmoins creus, &acn fon centre un fonds aflez vafte, pour entreténir quantité de Sauvagine, qui fe plait dans cette profonderetraitte. Les Habitans, font foigneus de nourrir fur leurs terres, toutes fortes de volail- les, & même des Pourceaus, & des Lapins, qui y foiflonnent à merveille. 11 n’y a point de Fontaines en cette Ile; mais il ya prefen- _ tement fort peu de maifons, qui n'ayent une bonne Citerne, pour fuppléer à cemanquement. 11 y a aufhi des Magazins, li bien fournis de toutes les chofes, qui font neceflaires à la vic, & à l'entretien des Habitans, qu'ils en ont fouventañez, pouren faire part à Icurs voifins. Quant aus perfonnes qui compofent cette Colonie, ilya pluficurs familles honorables , qui y vivent Chrétienne. - ment & fans reproche, & qui n’ont jamais été fétries des crimes , que quelques- uns leur impofent. Ceus quiont vécu parmy ces gens-là , y ont remarqué un grand ordre, & beaucoup moins de déreglement, qu'en diverfesautres Iles. Il y a aufMiune belle Eglife, quieft gouvernée par un Pa- . fteur Hollandois. Monfieur deGraaf, qui eftà prefent Pa- fteur de l’Eglife de Trévers, en l’fle d'Oualcre, enacuautrée foislaconduite. 11 sprefchoit en un même Jour, &enuné . même chaire, en Francois, & en Flamand; pour edifier les Habitans de l’une & de l’autre langue, qui demeurent en cette Ile. Monfeur de Mey celebre Predicateur del Eglife de Midelbourg, quientreautreécrits, a donné au public un‘ . dote & curieus commentaire, fur les lieus les plus difficiles des on livres de Moyfe, oùil cft traittédes chofes naturelles, ‘: ; H fucccda RNA POTTER % TAN NAT £ 58 HrsTotrEe NATURELLE, Chap.s facceda à Monfieur de Graaf, & dépuis qu’il a té rappelé pour fervir en fon Païs, Meflicurs les. Direéteurs de cette Colonie, ont toujours efté fort foigneus de demander au. Synode de leur Province, de bons & de fideles ouvriers pour eftre employez , en cette pctite open de la vigne du. Scigneur. ARTE COLE: LAURE Del'Ile de Saint Bartelemy. Ile de: Saint Bartelemy, eft au ‘Nord-Eft de Saint CH& ftofle ,. fur le dixféttiéme degré. Elle a peu deterre pro-- pre cftre cultivée, bien qu'elle foit d'un affez grand circuit. Monfieurle Bailly de Poincy , Gouverneur Gencral des Fran- Çois, l’à fait habiter à fes dépens , il y a:environ quinze ans. L'on y trouve plufieuts beaus arbres fort eftimez, une in- finité d'oifeaus de diverfes cfpeces, _& de la pierre tres- -pro= pre à faire de la: chauz, qu’on y va querir des autres Iles, Elle eft de difficile accez pour les grands Navires; à cau fe qu'elle cft entourée de plufieurs rochers. Ceus qui. fe plaifent à la Solitude, n’en s’auroient defirer une plus. accomplie. à De l'Ile de Saba: Lie eft fituée au Nord-Oueft de Saint Euftache, far Lx hauteur du dixféttieme degré, & trente-cinqfcrupules.. On croiroit à la voir de loin, quece ne feroit qu'une roche: . Mais la: Coloniede Saint Euftache, quiy afait paffer des hom-- mes pourlacultiver, y atrouvéune agreable vallée, & affez: de bonne terre pour employer plufeurs familles , qui vi- vent contentes, en cette aimable-rctraitte. Il n'ya-point de: moüillage à:la coffe, que pour des chaloupes.. La: pefche y eft: abondante; Etles fains que Monfieur.le GouverneurdeSamnt Euftache, | PP : 4 pes IL ESA (À NETITLGE 8, 49 Euftache, a pris jufqu'à prefent de cette Peuplade, font que … Les refraichiffemens neceflaires n'y manquent point, oo LCI Eve HP De l'Ile de Saint CMEÉFËfis Ette Ïle, eft fur la hauteur de dixhuit dégrez & frire fcrupules. Elie a environ fét licuës delong, & quatre _ delarge. Il y a de belles Salines, qui avoient obligel’Efpas gnola y bâtir un Fort, oùil entretenoit une Gatnifon, pour s'en conferver la propricté. Mais il y a environ neuf ans, qu'il démolit le Fort & äbandonna l'ile, Ce qui ayant efté apperceu par Monfieur de Ruytér, qui commandoit l’un des grands Navires, que Meflieurs Lampfiusenvoyent d'ordinaire en l'Amerique, & qui poutlors coftoyoit cette Ile de Saint Martin , il fut à Saint Euftache lever des hommes, qu'il ÿ - amena pout l’habiter, & en prendre poffeflion, au nom dé Meflieurs les Eftats Generaus, des Provinces Unies. La nouvelle de la fortie des Efpagnols de cette terre, étant venu£é au même tems à la connoiflance de Monfieur le General des François, il equippa promtément un Navire, & y mit un nombre debraveshommes, pour relever le-droit & les pretenfions de nôtre Nation, qui avoit poffedé cette Ile avant l’ufurpation de l’Efpagnol. Dépuis les François, & les Hollandoiïs, ont partagé cetteterre à l'amiable, & ils y vivent enfemble, en fort bonne intelligence. Les Salines, font an quartier des Hollandoiïis: mais les François en ont l’ufage libre. Monfieur le General, établit pour fon Lieuténant en cette place Monfieur de la Tour. _ Era prefent, c’eft Monfieur de Saint Amant qui ÿ comman. de. Il a fous foyenviron trois cens hommes, quicultivent la terre, & fonttous les dévoirs poflibles, pour la mettre en réputation. Les Hollandois, y font en aufli grand nombre que les Francois. Melfieurs Lampfus, & Monfeur van Rée, font les principaus Seigneurs , & Direéteurs de cetre Colonie. Ils onten leur quartier de belles Habitations, de grands Ma: | Le OA gAZzINS, | is 6e HisToiIre NATURELEE, Chap.s gazins, & un nombre bien confiderable de Né égress qui leut font ferviteuts perpetuels..… | ne Il n’y a point d'eau douce en cette Ile, que celle, qui: a | tems des pluies eft recuëillie endes cirernes, qui y font affez: communes. il y a plufieurs Ilets à l'entour de cette terre, qui font tres-commodes, pour les menus divertifflemens des Habirans Il y a aufli des Etangs d'eau falée, qui s avancent bien avant entre les terres, où l’on pefche une infinité de bons poiflons, patticulierément des Tortuës.de mer. -On : trouve dans lesbois, des Porceaus fauvages ; des Ramiers, des. Tourtes, & des Perroquets fans nombre. On y voit plu- fieursatbres, qui difélent diverfes fortes degomme: maisle Tabac qui ycroift,érant plus eftimé que celuy des autres Iles: c’eft ce qui rend fon commerce plus confiderable.. | Les François & les Hollandois, ont leurs Eglifes. particu- lieres, es quartiers de leur lutifdidtion. Monfeur des.Camps,. qui a efté le premier Pafteurde l’Eglife Hollandoife , y fur:en- voyé encette qualité par le Synode des Eglifes Vallannes des. Provinces Unies, quia cette Colonie fous foninfpection fpi- rituelle,. & étant decedé en l'exercice. deceëte charge, les. premiers Vaifleaus qui doiventpartir pour ce païs-là, ÿ en doi. vent porter un autre, quiaefté choili pour fon fucceffeur, & qui y doit prefcherle Saint Euangile du Seigneur,en l'une & em: autre langue. À BR TT EE LE: NE De l'Ile de l'Anguille. Lle porte ce mom, à caufe defafigure: car c’eft une ter-- yrcfortlongue, & fortétroite, quis’étenden ferpentant: pres de l'Ile de Saint Martin, d’où on l’appercoità découvert:. ll ne s'ytrouveaucune montagne, laterre, y eftpar tout plat-- te & unie, À l'endroit-où-elle a plus detargeur, il ÿ aun-érang autour duquel, quelques familles Angloifes fe font placées dépuisfétouhuitans, &oûeltes caltivent du Tabae, qui cft: fort prifé de ceus qui fe comnoiffent à cette Marchandife: On: mer cette lle fur là hauteur de dixhuit M ra vint {cru pales. au A laligae. ART Li. EE UE San tal Rs "our $ DES ÎLES ANTILLES si D'ART LC Like Nb Des Iles de Sombréro d'Anegade, G° des Vierges. A premiere de ces trois Iles , eft fituée au milieu des: , Bancs, quibordent le Canal par ou pañlent les Navires, qui veulent retourner en Europe. Elleeft fur le dixhuitiéme degré, & trente fcrupules. Les Efpagnols, l’ont nommée Sombrero, à caufe qu clle à la figure d'un chapeau. Elle eft inhabitée. LAnegade,. qui eft fous. le même dégré que Sombrero , eft auffi deferte, & de dangereus abord. Les. Vierges grandes € petites, comprenent pluficurs. Iles qui font marquées en la carte fous ce nom. Onencontc en. tout douze ou treize. Elle s'étendent au Levant de l'Ile de Saint Jean de Porto-Rico;. fur la hauteur de dixhuit degrez: au. Nordde la ligne. Entre ces Iles. il yade fort. bonsmoüil- Jages, pour mettre en feureté pluficurs flottes. Les Efpagnols : les vifitent fouvent pour lapefche, quiy eftabondante, Il y a: auffi, uncinfinité de beaus Oifeaus de mer & deterre. Maisily a fi peu de bon terroir, qu apres l'avoir effayé, & vifité en tou. tcfon étendué, onatrouvé, qu'il ne meritoit pasd'avoirdes Habitans. : y ARE CE EF V1. De l'Ile. de. Sainte Croix. EL” dérnicre de toutes les Antilles, qui font au deffous. du Vent, eft celle, qui porte le beau nom de Sarnte Croix. Elle eft fur la hauteur de dixhuit dègrez & quel- ques-ferupulkes.. Les Caraïbes, quien furent chafez parles Efpagnols, lanommoient. C4y-ay; Elle étoit fort eftimée par- my.cus:: à caufe que c'était là premiere [le que cette-Nation avoit occupée aus Antilles, en venant du Nordchercherune. habitation commode , pour jetter les fondemens de leurs Calonies ,. comme nous. Îc: reprefenterons particuliere- Hi. 3: | ment. € PAM à 7 rate Fe W à * 63 1 esmoli d'# M g€ GR ut, ment au fecond Livre de cette Hiftoire , au Chapitre de tue Origine. Laterredecette Ile, sé avec beaucoup d’ ufure, tout ce qu’on y feme.. On’y voit de belles & fpacieules plaines de terre noire & facileàlabourer. Il y a auffi plufieurs arbres fort beaus, & precieus, qui font propres à la teinture, & à la ménuiferie. L'airy eftbon; maisleseaus n’y font pas beau coup faines, fi on les boit incontinent qu’elles ont éfté pui- fées. Pourleur Ë Ôter la mauvaife qualité qu’elles ont, on les Jaifle repofer quelque tems en des vaifleaus de terre , Ce qui les rend bonnes, & quidonne fujet de croire, qu’elles ne font mauvaifes, qu’à caufe de leur limon, comme celles du Nil. Cette Ile, eft maintenant en la poñieflion des Francois ; qui en ont relevé glorieufement le débris. Apres les divers changémens de Maitres, qui y étoient furvenus en peu d’an- nées, comme nous le dirons au Chapitre deuziéme du fecond Livre de cette Hiftoire. Monficur le General des Francois, qui la fait peupler à fes frais, luy a donné un nouveau lafires qui fait naître l'efperance d’une ample Colonie. Elle peut avoir neuf ou dix lieuës delong, & prefque à au tant, en fa plus grande largeur. Les montagnes n'y font point fi hautes, ni fi preffées les unes contreleS'äutres, que lonne puifle monter au deffus, & qu'iln’y refte beaucoup debônne terre, propre pour employer plufieurs milliers d'hommes, : : CHAPITRE SIXIEME Des Arbres qui croiffent en ces Iles, dont on peut man. ger le fruit. | | } Ntre les Arbres, qui fe trouvent en ces Iles, les uns É de bons fruits qui aident à la nourriture des Habitans , les autres font propres : à faire des bâtimens, ou bienils fervent à la ménuiferie , ouàlateinture, Ily en a auffi ; qui font employez avec heureus fuccés en la Medecine, & quelques. autres qui recréent feulement l’odorat par leut Ses } “Ghap-6 Des ILES ÂANTILEEES. 63 _fenteur agteable, ëc & la veüe par la beauté de _—. feüillage, qui ne flérrit jamais. Deceusqui portent des fruits bons à manger, & qui fe voyent en l’Europe, on n'yrencontre que les Oramgers, les Grenadiers, les Citroniers , & es Limoniers, dont la groffeur, & la bonté, furpañe celle ms mêmes efpéces qui croiflent ailleurs. AK FE C LEE. Des Orangers, Grenadiers, @ Citroniers: Uant aus Oranges, ilyena de deux fortes aus Antilles ;. elles font toutéfois de mêmefigure, & on neles peut difcerner que parlegoût. Lesunesfont douces, & les autres aigres, les unes & les autres extremément delicates ; les aigres aportent une grande commodité au ménage, car on s’en: fert au lieu de verjus & de vinaigre, mais les douces excel- lent en bonté. Il eft vray que quelques un nomment les: Oranges de la Chine, Les Reynes des Oranges, & de vrais mufcats fous la figure ‘& la couleur d’Oranges. Mais quel- que eftime que l’on faffe de l'agreable douceur de ces Chi- noifes , il y en a qui preferent le goût excellent & relevé de celles del Amerique. Les Grenadiers croiffent aufli. en perfeétion en toutes ces Tes , & y portent des fruits beaus à voir & agreables au gout. Ces Arbrifleaus fervent en plufeuts endroits de Palifade _ aus courts, & aus avenuës des maifons, & debordure aus jardins. _ Pons les Cirons, il y en a de trois efpéces differentes en: grofleur , que l’on ne nommepas ponrtant toûtes Citrons, - Ea premiere forte, qui eft la plus belle & la plus groffe, eft ap-. : pellée Zime. Elle n’eft guére bonne qu'à confire, n'ayant préf. que point de jus, mais étant confite ellceft excellente. La:fe- * conde efpéce eft le Lion, dela même groffeur que les Ci-- tons quinous font apportez d'Efpagne : mais il a peu de jus à proportion de fagroffeur. Le petit Citron qui fait latroizié- me cfpéec eftlemeilleur &le pluseftimé. Ina qu'une t po 64 HISTOIRE NATURELLE, Chap.é6 dre pellicule, & eft tout plein de fuc extremement aigre, qui donne bon goûtaus viandes, & fert à affaifoner pluféeurs ra- gouts. Ileft particulier à l’Amerique. Quelques curieus;ont aufli en leurs jardins des Citrons parfaitément dous, tanten leur écorce qu’en leur fuc, quine cedent ni en grofleur, nien faveur à ceus qui croifient en Portugal. Ils ont aufli des Fi- guicrs de la même efpece que ceus qui croiflent en la France & ailleurs, & qui ont cecy de particulier, que prefque toute l’année, ils font chargez de fruits qui meuriffenr à merveille, dans ces païs chauds. Les Angloisde l'Ile dela Ferwmude, en font une boiffon fort fâine-& exrremementagreable au goûr, quileur tient lieu de vin, laquelle cftant gardée, devient auffi forte que le vind’Efpasrie. | 1.2 (+ AS RTE: GE Eos R Du Goyavier. Our commencer par les Fruitiers, on faitetat du Goya- vier, qui approche de la forme d'un Laurier, horsmis. que fes feüilles font plus molles, d'un vert plus clair & qu’el- les fontcottonnées par deflous. L'écorce de cet Arbre eft fort deliée & unie. Il pouffe plufieuts rejettons de fa racine, qui font à la fin, fi on ne lesarrache, un bois épais fur toute la bonne terre voiline. Ses branches qui font affés toufuës , font chargecs deus fois l'an de petites fleurs blanches, qui font {ui- vies de plufieurs pommes vertes, qui deviennent jaunes & de bonne odeur, lors qu'elles font meures. Ce fruit, quife nom- me Goyave, eît orné au deflus d’un petit bouquet en forme de couronne, & au dedans, fa chair eft blanche ou rouge, remplie de petis pepins commeeft la Grenade, Ce qui fait que les Hollandois l'appellent Gresade douce. Il eft de Ja groffeur d’une pomme de Rénette, & il meurit enune nuit. : Saqualité eft, de referter le ventre cftant mangé vert : dont aufli plufeurs s’en fervent contre le flns de fans : Mais étant mangé meur, il a un cfferrout contraire. OT ARTL A Ru EC LE IT Du Papayer. TT EPapayer, eftun Arbre qui croift fans branches, de la A, hauteur de quinzeà vint pieds, gros à proportion, creus & fpongieus au dedans, d’où vient qu’on l’employe à con- duire par tout où l’on veut, les ruiffeaus des fontaines. Il y ena de deus fortes, l’une quife voit communément dans tou tesles Iles. Ses feüilles fontdivifées en trois pointes, à peu prés comme la feüille du Figuier, elles fontattachées a de lon- - gues queles, qui font grofles commelepouce, & creufes au dedans: Elles fortent de la cime del'Arbre, d'où e£fant re- . courbées,, elles couvrent plufieurs fruits ronds de la grofieur … d'unepoyre de Coin, qui croiffent à l’entout dutronc, au- . quel ils demeurent attachez. } ; AR UN AUELE 66 HisTOIRE NATURELLE, Chap.ée L'autre efpéce de Papaÿer : fe trohve/particulierement et YIle de Sainte Croix. Elle eft plus belle & plus chargée de: fuêilles que l’autre. Mais ce qui‘la fait eftimer d'avantage, c’eft fon fruit qui eft de la sroffeur d’un Melon, & de la figu= re d'une mammelle . d’ où vient que les Portugais l'ont pome mé CHMamao. Ces Arbres, ont cecy de particulier, qu ils donnent de nouveaus fruits chaque mois de l’année. Lafleurde l’une & de l’autre efpéce eft debonne odeur, & approchante de celle’ du fafmin. Mais on met entre les resales des Les le fruit de’ la derniere , à caufe que quand il eft arrivé à fa perfection, il a: une chair ferme, qui fe couppe par tranches comme Le Mélon, & qui eftd’un goût delicieus. Son Ecorce,eft d'un Jaune meflé de quelques lignes vertes, & au dedans il'eft remply d’une in finité de pctis grains ronds gluans & mollaffés, d'un goûr pic- quant, & quifentl'épice. Cefruit fortifie l eftomac, &'aide: à ladigeftion. Quelquesunsle mangent, comme ilyient de: L H'AjDIE ; 3 Mais de delicats. le preparent avec du Sucre, & és font Che | eut EEE ASriLrss. |: Le pére mr Pr fe: RE À "RE ï V ; 7 ; K { . is S PAP, A ‘er 4 Mans NN 7 \ // È KR L \ \ à MS 4 SS , r NI Hz © N AN { M4 #p \\ > KT \ #1 TZZ LE * font une forte de Marmelade, qui eft fort agreable la veué, & delicieufe au goût , lors notamment que la douceur natu- relle de ce fruit, efl relevée par quelques épiceries qu'ils y mettent. Oubienils le confiffenttout entier, ou coupé & frché par quartiers, en forme d’écorces de Citrons. . À. jm. À as GE à CL E | I V. Du CMomin , de des Cachimas. L Ex Homir, eft un nes qui croift de la groffeur d’un Pommier, & porteungrosfruit de même nom queluy. left vray que les infulaires l’appellent ordinairement Corafol, | à caufe que la graine de ceusquifevoyentparmy eus, à cfté | k 2 APpOt- e. ECC ER CPE gs Hisrorns NATURELLE, Chapén apportéede Corafol,qui eft une Ile tentie dépuisunlongtems | 1 par les Hollandois, quiyontun bon fort, & une ample Colo- nie, quis’eftétendué en plufieurs autres Iles voifines de celle: B. Ce fruitreffemble à un petit Cocombre, qui n’eft point meur. IL: a. vla peau tojonrs verte, & émaillée de pluies “es compartimens, en Rent TE si on ae cuëille ‘en fämatu-. rité il eft blanc au dedans comme dela Créme, & d’une dou= ceur relevée parune petite aigreut , quiluy donneune pointe fortagreable. Ce fruit, eft raffraichiffant au pofhible, & deli- - cieus au goût. Ii porte fa femence au milieu, qui eft delagrof- feur, & de lafigure d’une Féveextremementpolie, & de la: couleur d’une pierre de touche, fur laquelle onauroittout fraichéement éprouvé une piece d or; car cle paroit émaillée de Rpotres. veines d'orces. Nous haplé Des JLES A NPFPPLES LE] _ - Nous joignons les Cachimas avec le CMomin à Caufe que ces Arbres, portent aufli des fruits , qui ont le goût & la _ blancheur de la Creme, & que leur femence qui croift au milieu, eft prefque d’une mémefigure & folidité. Mais il y a deus fortes de Cachimas, l’une quieft fauvage & heriffée dépines, eft chargée d’un fruit de la groffeur d’une pomme mediocre ,.qui a la peau relevée par boffettes, & quidemeure tousjours verte & dure. Et quant à l’autre, qu’on appelle or- dinairement le Cachimas franc, c’eft un Arbre qui à l'écorce affez polie, & qui dans la faïfon, prefente un fruit beaucoup * plus gros que le premier, qui étant parvenu à fa maturité eft d'une couleur vermeille, & dont la fubftance qui eft cachée fous cette peau, eftblanche au poflible, & d’unetres-douce faveur. Ces Arbrescroiflentaflez hauts, & font couverts de’ feuilles aprochantes à cellesdesCharagniers. Ceus quiman- gent rarement de ces fruits, ontréemarqué, qu’ils ont la vertu: d’exciter l’apetit, & de purifier l’eflomacdeshumeurs gluan- tes , qui y étoyent atachées, ce quifait, qu'ils les ont en. de rs À R T J: se E | V. si — Du] nnipes },.E Zunipa: On Genipa, quicelt le même Atbre que les Bre- + (iliens nomment lanipaba;, & les Portugais Zeripapo, eroïft de la groffeux d’un Chataignier, fes rameaus fe recourbent pres de terre, &fontun ombrage agreable, fesfeuilles font ._ longues comme celles du Noyer. Il porte des fleurs pareil- lesà.celles du Narciffe, qui font de bonneodeur: Sonbois ef: _ folide, de couleur degrisde perle.. Les Habitans des Iles. couppent les troncs de-ces Arbres quandils font encore. Jeu- nes, pourfairedes afuts de fufils & de moufquets, parce que: ce bois étant mis facilement en:œuvre, peut efre poly en. … perfettion. Chaque mois il fe reveft de quelques feuilles nouvelles. Jl porte despommes quiétantmeures, femblent … eflre cuites-au-four , elles font de la groffeur d’une porame de “Rambour: En tombant de l’Arbre elles fontun bruit pareil 2e L 3; à ccluy 6 H IST oi RE N AT LE EL LE» | Chap 1 AN a à Le a my, n Fa LA Ps [ 2002 se LÀ Fo Ci Ye She 4 su (Re it NAS DER rte bee ot 6 eh LENS “SSSR eno Bat E re : S KR à \\ à celuy d'une arme à Lo Ge qui vient, de ce que certains vens ou ef prit, qui font contenus en de petites pellicules qui couvrent la femencé, étans excitez par la cheute, fe font ou- verture avec violence. D’ où il y a raifon de fe perfuader, que C'eft le même fruit, qu’en la nouvelle Efpagne les Indiens ap- pellent d’un nomfortbarbare, Quant la lazin. Si on mange de ces pommes de de funipa, fans ôter cette peti- te peau qui cft au dedans, elles referrent le ventre d’une étran- ge fafon. Ce fruit eft recherché des chaffeurs,à caufe qu'étant aigrelct il étanche lafoif, & fortifie le cœur de ceus quifont fatiguez duchemin, Son fac, teint en violet fott brun, encore qu'il foir clair comme eau de roches & quand on-en veut mettre jufques à deus fois fur la mérm8 place du corps que l'on veut teindre, la feconde rcinture gätoir noire. Les Indiens s’en fervent pour fe fortifierle corps, & le rendre plus fou- ple, avant que d'aller à laguetre. Ils croient auf, que cette couleur les rend plus terribles à leurs ennemis, Lateinture de ce fruit ne fe peur effacer avecle favon: mais au bout de, neuf ou dix Jours, elle d’ ifpatoit d'elle même. Au tems que ce. fruit tombe, les pourceaus qui en pt , ont lachair & la Ji, graiffe > 2, à L 4 HMS or LORS ni. ; à grille: ‘entierement violette, comme l'experience le témoig- né. : Ilen eftde même dela chair des perroquets ; & des au tres oifeaus, lors qu'ils s’en nourriflent. Aurefte, on peut faire ayec ces pommes unbreuvage aflés agreable, mais qui n'eft gueres en ufage, que parmy les Indiens, & les Chañeurs, qui n'ont point de demeure arrétée, 8 BP NET EL VI * Du Raifinier: Ée Raifinier que les Caraïbes nomment Oxlem ,. croift de moyenne hauteur & rampe prefque par terre au bord: dela mer: Mais dans une bonne terre il devient haut, com- me un des pue beaus Arbies des Éorer 1 ales feüilles r4 ron- Le: épaifes, tree de rouge &dé ve vert. Sous lécor- ct dutronc, apres qu'’ona enlevé unaubel blanc de Pépaif- eu dedeus pouces, on'trouve un boiïs violer, folide, & “fortpropre à faire d'excellens ouv rages de menuiferie. ]! pro-: 1 duiren fes brançhes des fruits, qu'on one quand ils font’ ‘ MEUTS;. POSE RAT DIM EE AP er fre PS à F = 4 RC AR RAR TIR CMS ST. ha AN PS. JAM, 4. 1 ÈS MN 1 7 RAP ANR SRE AN ME AE x Fa (ILES SEEN Me PR re 27 D |. Se Ÿ & SRE ME UT tra TUE “54 « APT Le 72 : HiIsTOIR Ë NATURELLE, Chap6 meurs, pour de gros Raifins violers: Mais au lieu depepins, | chaque grain a fous une tendrepellicule, & fous fort peu de. | fubflance aigrette, raffraichiffante , & d’aflez bongoût, um « n'oyau dur comme celuy des prunes. D ÔRLTN 3 +8, ART Lee MIO De lCAcaou. | L y a trois fortes d’ Arbres qui portent le nom D'CAcajons À mais il n'ya que celuy que nous décrivonsicy, qui porte du fruit.’ C’eft un Arbre de moyennehautear, qi panche fes branches jufques à terre. Ses fcüilles fontbelles & larges , àf=, lement, puis aprés elles deviennent incarnates, & decouleut. | de pourpre. Elles croiflent par bouquets & elles exhalent une fi douce odeur, qu'onn’a point depéneà difcernerl'Ar- » bre qui les porte. Ces fleursnetombentpoint jufques à ce « | | : qu'elles Mr | qu elles foient pouffées par une efpece de Chataigne faite en forme d’orciile, ou de rognon de lievre; Quand cette cha- _tâigne a pris fon AT a il fe forme au deffious une belie pomme longuette, quieft couronnée de cette crefte, qui de- vient en meuriffant d'une couleur d'Olive, pendant que la pars fe revelt d’une peau delicate, & vermeille au poffble. lle eft remplie au dedans, de certains filamens fpongieus, qui font imbus d’un fuc tout enfemble dous & aigre, qui defal- terc grandement, & quel'ontient eftxe tres-utile à la poitri= nc; & aus défaillances de cœur, étant temperé avec un peu de Sucre. Mais, s'il tombefur quelque 1 inge » ily imprime unetache roule, quidemeure jufques à ce que l’Aïbre fleu- rifle de nouveau. Les Indiens font unbruvage excellent de ce fruit, lequel étant gardé quelque jours, à la vertu d'enyvreraufli prom- tément que feroit le meilleur vin de France. La nois qui eft au deflus étant brulée, rendune huile cauftique, de laquelle on fe fert heureufement pour amollir, & mème pourextirper ces durétez quicroifflent aus pieds, & que l’on nomme Cors. Que s’y on la cafe, on trouve au dedans un pignon couvert d’une tendre pellicule, laquelle étant Ôrée, eft d’un tres-bon goût, & a la vertu déchauffer & de fortifier merveilleufement T l'éftéinac. Cet Arbre, ne porte datent qu'une fois l’an, d'où vient que les Brefiliens, content leur âge avec les nois qui croif- fent fur cette pomme, en refervantune pat chacun année, Jaquelle:ils confervent avec grand foin , dans ün petit pa- nier, quineft deftiné qu'acetufage. Si onfaitune incifion qu pied de cet Arbre, il jette une somme claire & transpa- rente, que plufieuts-ont pris pour celle qui vient d'Arabie. La femence de l’Arbre cf en la nois, qui produit aifément étant mifeen terre, \ X ART I- HiRES Jras: pie ta 1 7% (ES are nnk NaruneuLe, ‘Cp. | ARTICLE VIL 611514 Des Prunes D'Ieaque L Icaque » Cft une efpece de petit prunier, quicroiften for- me d’un buiffon ; les branches, font en touttems char- gées de petites feüilles Jonguettes , elles font deus fois l'an émaillées d’une infinité de belles fleurs blanches , ou vioïct= tes, qui font fuivies d’un petit fruit rond , dela groffeur d'u- ne reine de dags, à qui étant meurt devient blanc ou violet, CE CURE hernie dé même qu 'étoitfa qe Ce fruit eft fort dous, & téllement aime de certains Sauvages, qui demeurent pres du Golfe d'Hondures, qu’on les appelle Zcagues, à caufe de l’état qu'ils font de ces Prunes, quileur fervent de nourriture. Ceus: quiont voyagé parmy ces Peuples, ontremarqué, que lors. que ces fruits font en leur maturité , ils font fort foigneus: des’en conferver la proprieté;, & que pourempefcher leurs. voifins, qui n’en ont point en leur contrée, d'y venir faire. aucun dégaft, ils tiennent durant tout ce rems-Hàaus âyenués: « = de SX pes ILres ANTILLES. 7$ docteur terre, des Corps- -de-garde, compofez de l'elite de leurs meilleurs Soldats, qui les repouffent vivement avec la fléche & la mafluë, s'ils ont l’aflurance de fe prefenter. | F2 LE \ ARTICLE IX. Des Prunes de Monbair. E Monbain, eft un Arbre qui croift fort haut, & qui pro- duit aufli des Prunes longues & jaunes, quifont d’añez bonne odeur: Mais, le noyau étant plus gros que tout ce qu'elles ont de chair, elles ne font gueres eftimées, fi ce n’eft de quelquesuns, quiles meflent dans les bruvages du Oxicos & du Æ«by, pour leur donner un meilleurgoût. Les Pour- ceaus, qui vivent dans lesbois, font toujours gras, lors que ces fruits font en maturité, par ce qu’ilen tombe une grande quantité fous les Arbres, à étre qu'ils m'euriffent, qui font receüillis avidément de ces animaus. Cet Arbre, jette une gomme Jaune, qui rend une odeur encote plus penetrante que celle dufruit. Les branches étant mifesenlaterre, prenent aifément racine, ce qui fait, qu'on les employe ordinairement à fermer les parcs, où l’on nourti le bétail. ASE LCL Enix Du Courbary. 19 E Courbary, croift d'ordinaire plushaut, plustouffu, & plus gros, quele Monbais. 1] porte un fruit, dont la co- que cft fort dure à caler; & quia enviton quatre doigts de long, deusdelarge & un dépais. Dans la coque il a deusou trois noyaus, couverts d’une chair fort pâteufe, qui eft jaune comme du Safran, Le goût n’en cit pas mauvais: maison _n'en. peut faire d’excés, que l'eftomac n'en foit extremément chargé & que la gorgen’enfoitempefchée. Les Sauvages en cas de neceflité en font une forte de bruvage, qui n’eft pas desagreable étant bien preparé, c’eft à dire lors qu'il a hs è K 2 bien 76 Hisroirr£g N ATURELLE, ‘tn bien boïüillyavéc l’eau. Son boiseft folide, decouléurtitant fur le rouge. l’Arbre étant vicil rend de la gomme, quis’eni durcit au Soleil , , & qui demeure toujours claire, transparens te comme l’ambre jaune, & de bonneodeur. Quelques In- diens en forment des boutons de diverfe figure, dont ils font des Bracelets, des Colliers & des pendans d'oreille, quifont beaus, luifans, & de bonne fenteur. AR T'ICLEURE Da Figuier d'Inde. O N voiten la plüpart de ces Iles, un gros Aïbre, queles Européens ont nommé Figuir d'Inde, a caufe qu'ilporte un petit fruit fans noyau, qui a lafigure, &le goût appro- chant des figues de France. D'ailleursil nc reffemble de rien à nos Figuiers; car outre que la feüille eft dedifferente fi- gure, & beaucoup plus étroite, il croift en des lieus, fi deme- furément gros, qu ils’en rencontre qu'à peine plufieurshom- mes pourroient embraffér, parce que le tronc, qui le plus fou- vent n’eft pas uny en facirconference, pouffe à fes coftez, dé. puis laracine jufques à l’endroit oùles branches prenent leur | naiffance, certaines areftes, ou faillies, qui s’avancent jufques. à 4 Ou s-pieds aus environs, & qui forment par ce moyen de: profondes cannelures, enfoncéescomme des niches. Ces. faillies, quifont delamêème fübftance que le corps de l’Arbre font anfli envelopées , de la même écorce quile couvre, & elles font de l’épaificur de fét à huit pouces, à. proportion dè la groffeurdu tronc qu’ellesentourent. Leboisde cet Arbre, €ft au dedans blanc & mollaffe, & l’oncouppeordinairement dé ces longues pieces qu’il pouffe hors de fon-tronc, pout . faire des planches, des portes, & des tables, fanscrainte que l'Arbre: meute. Car il recouvre en peu de! tems , fi propre- ment de fon écorce, la bréche quia eftéfaite, qu'a peine peut onapoercevoir que l’onenait rien enlevé, Tous-cens qui ent demeuré en lIle de Ia Tortñe, quieft fituce au cofté fep. fentrional del’Ile Efpagnole, ont veu au chemin qui conduit: él 6 DE: ÉLESS ANTALLESS Fi 53 des - +508 de la montagne, au village que nos Éuncois ont nommé Milplantage, un deces Arbres, qui peut facilement tenr à couvert plus de deus cens hôfumes fous l'ombre de fes branches, qui font toujours chargées de plufieurs feüilles fi toufués, qu’on y trouve en voyageant, une fraicheur fort agreable, &.un couvert bien afluré contre la pluye. DARUR TLC LE : IL Du Cormier. L yaences Iles, une efpéce de Cormier, bien different du , Cormier que l’on voit en France. Car il éft d’une hauteur Éxeclive fort beau à voir, & ornéde belles feüilles, & de plu fieurs branches quiles accompa gnent. Il porteun fruitagrea- ble, rond commeune Cerife, qui eft de couleur; jaune, tachete. _de petites marques rouges , & qui tombe de foy même lors qu'il eftmeur. Il ale goût de la Corme, & c’eft ce qui eft cau- fe, qu'onluya ur même nom, eft or Een Oifeaus. | n wi MR Aa GuR à -XME. nm": ê dotaus ‘ Da. Palmisle Epineus. Outes ces Îles ont des Palmes, & quelques-unes en ont: jufques à quatre fortestoutesdifferentes. L'une fe nom- me Palmiffe Epinens. Cet Arbre porte juftement ce nom, car il eft tout Heriffé, ayantenfa tige, enfesbranches, & en fes- fcüilles de grandes épines-extremement aiguës, & fidange- _ reufes, que quand quelcunen eft pique il court rifaue d* ct eftre. long tems incommode, s’y l’on n’y apporte un promet remede. Celles qui entourent le tronc de PArbre, font plates, longues comme le doigt, de Ja figure d’'an Cure-dent, polies,. & d' une couleurtannéetirant fur jé noir. Les Neëores, avans. que de s’en approcher, mettent le feu à l’entour ‘du pied. de LAtbre, pour bralertoutes les Epines qui l'arment & luy fer-. Vent de defenfe.. Son fruit confifte.en un gros bouquet, qui. K_ 3: cf lon s La Z / | RE NSKÈUSS D 1 £ - > SN NW 1 She à 6 >\ | LE \ SW EU) N \ C4 (a TS IX (ll 1 S L) N sn AN \ WE 7 A n À NZ \ A : \ f, A 1120 NZ / } b \ L : V2 nn = SS eftcompofé de plufieursn nois diires dites & rondèi! qui refferrent des noyaus qui font bons : à manger. C'eft aufli de cette efpece de Palmes, que quelques Négrestirent du vin, par le moyen des incifions qu'ils font au deflous de fes bran- ches. Il y a apparence, que c’eft le même Arbre, que les Bre- #2 filiens nomment CAyré | + A RTE F'CE E ATV Du Palmisie Franc. à ” LS LA feconde efpece eft nommée palrifte Franc. C'eft un grand Arbre droit & d’une hauteur demefurée. Les raci- nes de cette efpece de Palmier, s’élevent hors de terre touts autour de latige, de la hauteur de deus ou trois pieds , & de lagroffeur d’un baril. Ces racines font petites à proportion de la hauteur de l’Arbre qu’elles foutiennent: mais eHés font entrelacées fi étroitement, & fi confufément les unes dans les: autres, qu'elles luy fervent d’un folide appuy. Cet Arbre a cecy =" Chapé pes ÎLES ANTILLES 5ÿ ‘cecy de particulier, qu'il eft ordinairement plus gros par le haut que par lebas. Quandileft encore jeune; il a l’écorce tendre, decouleur grisâtre, & marquée de pied en pied d’un cercle, qui donne à cognoiftre à peu prés, combien il ya s. _ d'années pris fa cons fiftence, il devient par tout fi folide & fiuny, qu'onn’y peut plus rienremarquer. Son fommet, eftorne de plufcurs belles branches canclées & polies, qui font accompagnées de part: & d'autre, d’une infinité de feüilles vertes, longues, étroites, & deliées, qui leur donnent une merveilleufe grace. Les: plus tendres de ces branches, qui ne font pas encore épa- novyes;s’élevent direétementau milieu de l’Arbre, pendant que les autres qui font courbées tout autour, luy compofent une riche & agreablecouronne. 13 Cet Arbre, fe décharge par chacun mois de queleunel de fes branches, & d’une écarce, quife détache de deffous., la-. quelle eft longue de quatre ou cinq pieds, large de deus ou: “environ, & de l’épaiffeur d’un cuir preparé. Les Habitans- mées Les, nomment cette écorce Tache, & ils l’'employent | ‘NS | pour: cut a TON = { 80 Os er rt WT. ui. die LE, : ces de. leurs Habitations , de mèine qu'ils fe ferventides feuile les, trefiées ; -&cordonnées:proprément à l'un descoftez des branches, pour faire cèlle de leurs maifons. Nous avons à defiein, rangé les Palmiftes à la fin des Ar: bresfruitiers quifetrouvent encesiles, à caufe qu'ils contri- buent tous, horsmis le Latanier, à la nourriture des hom- mes. Car fi le Palmifteépineus, lequelnousavonsdétcriten l'article precedent, fournit du vin, celuy-cy porte au fommet de fon tronc, & comme en fon cœur, une moëlle blanche, tres-tendre, & tres-fayoureufe qui ale soûtde Noifette,étant mangée cruë, & étantbouillie & aflaifonnée avec plufeurs feüilles deliées, & blanches au pofible , qui l'entourent, & Juy fervent comme de chemife, elle peut tenir un rang confi- derable, entreles plus delicieus mets des Antilles. Les Fran- çois, appellent cette fubftance moëlleufe, & lesfeuilles qui lenveloppent, Chou de Palmifle , parce qu'ils en mettent au potage, au lieu de chous, ou d’autres Herbes, em! a | pour la-couverture de leurs Guifines ,&.des autres petis of ARE Si l’on fend endeusle troncde cet Arbre, & qu’on enleve. comme il fe peut faire aifément, une certaine matiere fillaf- feufe & mollañfe qui eft au dedans, ce bois qui refte ainfi creufé, & qui eft épais d’un bon pouce, fournit debelles & longues soutieres, qui font de durée. Ons’en fertpourcou- vrir Ft ünce feule piece le faite des Cazes,'& pour condrire les-eaus partout où l'on veut. Les Tourneurs&les Menuy- fiers font auf. avec ce bois:,:qui eft préfque noir. & fe po= lit-aifément , plufieursbeaus & rares ouvrages, pce natue rellement marbrez. | Piine, fait des Arbres fi prodigieufemetit hauts, qu’ une fléche n’en peut atteindre le fommet quandelleefttirée; Et l'Auteur de l'Hiftoire generale des Indes’, parle d'un Arbre de telle hauteur, qu'on ne s’auroit jetter une pierre a plein bras par deflus. Mais encore que le Palmifte que nous de- crivons furpañfe de beaucoup tous les autres arbres des Antil- les, nous n’ofetions pas dire qu’il foit d’une hauteur fi deme- furée, puifque du pied de l'arbre, on remarque facilémentune belle panache, qui fortant du plus haut dutronc, efttoujours tournée au foleil levant; Elle fe renouvelle par chacune an=, née, L LRU OM RAS ñ 1} WE 4 .. Ps ” A x De \ Dhap.6 DES ÎLES ANTILLES as . née, & quandelleeft fortic de fon étuy, elle eft émaillée d’us . nc infinité de petites fleurs jaunes, en forme deboutons do- rez, qui venans à romber, font fuivis de plufieurs fruits ronds, . & dela groffeur d’un petit œuf de poule. Ils font attachez en un feul bouquet, & afin que ces fleurs & ces fruits, foient con- fervez contte les injures du tems, ils font couverts par deffus d’une écorce épaifle, dure & grisâtre par le dehors, & d'un _vermeil doré par le dedans, quiaboutit en pointe, Ce precieus ” _parafol, n'eftautte chofe que l'étuy, qui relerroit les fleurs, avant qu'elles fufflent épanouyes, & quis'étantentre-ouvert par deffous, s’élargit en une figure creufe au milieu, & pointué aus extremitez, pour mieus couvrir & les fleurs & le fruit. D'autant que cette efpece d’Arbres, n'a pointdépines, on: Jenomme Pa/mifle Franc, 1 yenaencore une autre fotte, qui ne croift pas fi haut que celle-cy, quiporteune petite graine ronde, que les Négres font foigneus de recuëillir, à caufe qu'elle fert à fairede beaus Chapelcts quifont maïbrez, & polis a merveille. ART ELUE XV Du Latanier. | L A troiziéme cfpece de Palme eftnommée Laranser. Cet À crbre éleve fatige affezhaut; mais ilne croift pas beau- coup engroficut. Au lieu de branches il n’a que des longues feuilles, qui etant épanouyes font rondes par lehaut, & pli- _ cécs par le bas, à la facon d’un Eventail, Elles font attachées _à de grandes queués, qui fortent deccrtainsfilamens, qui _ entourentlatefte du tronc , commeune groffe toile rouffe & fortclaire. Ces feuilles étant liées par pertis faiffeaus, fervent à couvrir les cazes, & la peau qu’on enleve de deflus les: … queués, eft propre à faire des cribles, des paniers, & plufieurs . autres petites curiolfitez, que Îcs Indiens tiennent entreleurs . meubles plus precieus. Ils font auflidu bois de cetarbre, & de celuy du Palmifte Franc, des arcs, des mauës, dontils fe fervent en leurs combats, aulieu dépées, des Zagayes, qui font de petites lances aigues , qu'ils d'ardent avec la main r L contre $$ (Hisrorns Naruneszr, Chap | À NW 4 | LE Hx LE 20 EU PR y LIT 22 \ TM ct \ j se | | | il contre leurs ennemis, & ils er » muniffent Ja pointe de leurs: fléches, qui font par ce moyen aufli penctrasies que s’yelles étoient d'acier. A RTE I C:L-E : YA Du Cocos. À quatriéme efpece de Palme, & la plus excellente de- . toutes , eftcelle qui porte le nom de Cocos, cé fameus. fruit dont les Hiftoriens difent tant demerveilles.. Maïs il faut remarquer, que les Cocos qui fe trouvent aus Indes Occi- .dentales, ne croiffent pas à beaucoup-prés fi hauts, que ceus: del Orient, Je tronc pour l'ordinaire n'excedant pas vint, ou: vint-cinq pieds en hauteur, étant au refte d’une grofleur biem ” proportionnée.. Il eft beaucoup plus chargé de branches & de feuilles, que le Palmifte Franc: Les Iles de la CMonaque: & de Roatam, qui fontau Golfe d'Hondures, font renomméés. pour abondance. de: ces. Arbres, L'Ile de Saint DR : S DES ÎLes ANTILLES 3 entreles Antilles, en eft auffiornee, & c'eft de là ‘qu'on en aapporté en celle de Saint Chriftofle. ; .… Le fruit, croift fur letronc même, au pied des branches. , 11 a la forme d'une nois : mais fans faire de comparaifon F2 / ti % - RÉ COURT e F h 1 P'ANAL | SL yum EN $ = 7 ND) I E- Ce Cacao, qui fe trouvoit aufMiaus Antilles, en l'an 1649, dans le Jardin d’un Habitant de l'Ile de Sainte Croix, eft à prefent connn en celle de Tabago, comme nous l'avons dit en fon lieu. C'eft un Arbre prefque femblable à l’Oranger, finon qu'il ne croift pas du toutfihaut, & qu'il a les feüilles un peu plus étendués. On le plante ordinairement en des licusombrageus, & même fous d’autres arbres, qui le puif- fent defendre de l’ardeur du Soleil, quiflétriroit fes feuilles: Son fruit qui eft de lagroffeur, & d’unefigure approchante * de celle d’un Gland, ou d’une moyenne Olive, fe forme _ danside grofles coffes longuettes, qui font rayées, & divi. g fé | re . , f {ces par lecoftez, commeil efticy reprefenté, - sa (CHAPITRE SÉTTIÈME. Des Arbres qui font propres à bâtir; on qui érvent à ä le mennyferie; on 4 la Tointre. .bres qui portent des fruits, qui contribuent à la nour- | rirure , ou au raffraichiffement des Habitans des An tilles : & en ce Chapitre, nousnous propofons detraitter des principaus, qu'on peut employer utilement, tant à bâtir des maifons, qu’à les orner, par le moyen desbeaus meubles de menuyferie, qu'on en peut faire; Puis apres,nous confidere- rons tous les autres Arbres de diverfes couleurs, ae font pro- pres à la Teinture. N Ous avons jufques icy reprefenté, plufieurs beaus Ar- A KR T:1:C LES De deus fortes d' Acajou. L ya fort peu d'Iles, ou l’on ne trouve de beaus Arbres,qui font trespropres à bâtir des maifons, & à faire divers ou- vrages deménuyferie. On fait particulierement état de l'U4= cajou , qui croilt d'une hauteur & d’une groffeur fi exceflive, que les Caraïibestirent fouvent d’unfeul tronc, cesgrandes Chaloupes, qu'ils appellent Pyraugiües, qui font capables de portercinquante hommes. I pouffe plufieurs branches, qui font fort toufuës, à caufe de la multitude de feüilles d’ont elles font chargées, l'ombrage de cet arbre eft fort agreable : Et méme quelques uns’tiennent, qu'il contribué à la fanté de ceus quife repofent deffous. Il y a deus fortes d’CAcajon, qui ne font différens qu’ "en la hauteur deleurtronc, & en la couleur deleurbois, Cceluy qui eft le plus eftimé, a le bois rouge, leger, de bonne fenreur, & fort facile à eftre mis en œuvre. Ona remarque par EXPE= rience, que le ver ne l’endommage point ; qu'il ne fe péurrit ; point dans l'eau; quand il a éte conpé en bonne Enne; Et | sa DES ÎLES: AN SERRES &7 que les coffres & les aumoires qui font faites de ces re , don. nent unebonneodeuraushabits, & qu'ils les contregardent de toutes les vermines, quis’engendrent, ou fe gliflent aifé- ment dans les coffres qui font faits d’une autre matiere. Ces proprictez font caufe que quelques-uns ont creü, que cet arbre étoit une efpece de Cedre. On en fait aufli de l'Efcente, pour couvrirles maifons. Les Capitaines de Navires, quitra- fiquént aus Antilles, apportent fouvent des planches de ce bois qui font fi longues & fi larges,qu’il n'en faut qu'une,pour faire une belle & grande table. L'autre forte d’CAcajou, eftde pareille figure quantaude- hors, que celuy que nous venons de décrire ; mais il ne croift pas du tout fi haut, & quand onalevé l'écorce & l'aubel, on trouve que le bois eftblanc. Ileftauffi fort facile à mettre en œuvre, quandileft fraichementcouppé; mais fi on le laiffe a: l'air, il fe durcitentelle forte, qu'onabien de la péne à s’en. fervir. Les Habitans des Iles, ne l’employent qu’à faute d'au- tre, à caufe qu'il eft fujetausvers, & qu'il fe pourriten peu: de tems. Sion fait des incifions au tronc de ces arbres, ils: jettent une grande abondance de gomme, quipourtroit avoir: quelque bonufage, fi on en avoit fait l’effay.. AR EE CG LE: -Ek EN EN ® Et Arbre, eft bien aufli gros & aufli haut que l’Acajou, & n’eft pasmoins prifé des Architeétes, & des Menuyfiers. Ses feuilles font polies, & affes longues. Il porteun fruit de: la groffeur d’une prune, qui etant venu enfa maturité, eft de: couleur jaune, & beau à voir, maisil eft tropamer pour” eftre recherché des hommes. Les Ramiers s’en engraiffent en une faifon del’année, & pendant ce tems là, leur chaireft demême goût , que le fruit qu'ils ont mangé. Il a l’écorce ce endrée & craboteufe, le bois pefant & ayfe à polir, & fclon les lieus où il croift .. fon cœur eft lOULE, Où jaunâtre, ot. ant furle violet. . onouvre l'écorce, ilen fort uneliqueur hircufe.. qui fe durcit en formede Gomme. | | 102 | ARTE 8 HESTOIRE NATURELLE, Chap. s À RE C'LNERARE Du Bois de Rofe. L faut avouer, quefi les Habitans des Antilles, avoient def | feinde s’y établir fermement, ils y pourroient: trouver, non. feuiement les chofes qui font necefaires à l'entretien de la vie, mais encorc les delices & 1es curiofitez , tant pour- AN à LR Fe A pret. TLES ANTTÉLES 11% ris abondamment par toutes éesbonnesqualitez, la | péné qu'ildônné, avant qu'on s'en puiffe fervir. Il y à éncoreunautre Atbre qui porte le même nom de Bois de fer, mais il n’eft pas comparable au precedent. Ilné _ portéque de petites feüilles, & quand il fleuritil ef chargé d'uncinfinité de Bouquets, qui s’élevent fur toutes fes rar ches, comimé autant de pannaches, quides parent fort avanta- geufement. Ileft d’une belle hauteur; & ilal’aubel jaune où _ blanc, felonles licus ou ilcroift. Tout le bois de cet arbre, horsmis le cœur qui eft fort petit, fort dur,& tirant fur le noir, ft fujetaus vers, ce quifait qu’on ne le met pas volontiers en œuvre, fi ce n'eft à faute d'autre. de RTE C L PR De plaficurs CArbres db le Bois eft propre à la Teinture. Ntre les Arbres qui croiffentaus Antilles , il y en a plue fieurs quiferventàla Teinture. Lesplus eftimez, & les plus connus, font, le Bois de Brefil, le Bois Jaune, l Ebéne VCr= te, & le Roucou. Le Bois de Brefil, eft ainfi nommé, à caufe que lé premier qui à cfte veü en Europe, avoit efté apportéde la Province du Brefil, ouil croift en plus grande abondance, qu'en aucun autre endroit de l’ Amerique. Cet arbre cftraréaus Antilles, & on n'entrouve qu'encelles, quifontle plus heriffées de rochers fecs & arides. Son tronc n’eft pasdroit comme ce- luy des autres arbres ; maisileft tortu, raboteus, & pléinde nœuds à peu prés comme l Epine blanche. Lors qu'il eft chargé de fleurs il exhaleunc doncefenteur, qui fortifiele Cerveau. Son bois eft recherché des Tourncurs ; mais fon principal ufage, eftenla Teinture. | PEllede Sainte Croix, eft renommce parimy toutes lés au trés, pour avoirune infinité d'Arbresrares &precicus. On k ait parriCulieré ément état d'un, qui s’éleve fort haut & dont le Jois qui eft parfaitement } jaune, fertà la Teinture. Lors que’ Anglois tenoient cette lie, . en Fe beauconp M en _ 92 Aster NATURELLE, Chap:7 " en. leur païs. On le nomme Bois laure, à caufe de facous . leur, ou bien de Fuflok , ainfi que nous bye ditenla de- | fcription del’Ile de 7: abago, en laquelle cet Arbre elt auffi fort ï commun. ; L'ébene Verte, et PA a employée à à faire pluficeurs. excellens ouvrages de Menuyferie , par ce qu'elle prend aifé- ment {a couleur, & cieluftre de lavraye Ebéne: mais fon meil. leur ufase eft en la Teinture, laquelle elle rend d’un beau vert naiflant, L'arbre qui porte ce bois, eft fort touffu, àcaufe que + fa facine pouffe une grande quantité de rejettons , quil’ empe- fchent de croiftre f haur & fi gros qu'il feroit , fi fa force .étoit. ramaffée en un feul tronc. Ses feuilles font polies, & d’un beau vert. Sous l'écorce, il a environ deus pouces d’aubel blanc, & le refte du bois de uesau cœur, eft d'un vert fi obfcur, qu'il approche du noir;, mais*quandon le polit, on découvre Cets- taines veines jaunes, qui le font paroiftre marbré. \A'RETCLE 0 Du Roucow.. "Eft le même Arbre que les Brafiliens nomment frvcu ILne croift pas plus haut qu'un petit Oranger. . Ses.feüil= les qui font pointuës par l'un des bouts, ont “la figure d'un, cœur. Il porte des fleurs blanches. meflées d’ Incatnat; Elles. font compofées de cinq feuilles,qui ont la forme d’une Etoile, & la largeur d'une Rofe. Elles croiflent par bouquets, aus. extremitez des branches, Ces fleurs font fuivies de petites fi-. liques, qui referrent plafieurs grains de la groffeur d'unpetit: pois, quiétans parvenus à maturité , font couverts d’un: ver. millonle plus vif, & le plus éclatant, qu'on s’auroitdefirer ; E Cette riche Teinture, quieft enfermée-en cetteécofe , eftfi, mollette, & fi gluante, qu’elle s'attache aus doigts, aufli-tôr. qu'on latouchc. | Pour avoir cette A couleur, on s’écouë dans un. Vaificau de terre les grains fus lefquels elle eftattachée, on: ver.e deffüs de lcau tiede, dans laquelle on les lave, jufques à ce qu’ils ayent quitté leur vermillon. ES puis quandon à laif-. À re DES. ILES ANTILLES. : 98 A repoier cette eau, on fait feicher à l'ombre le marc, où. Ja lie épaiffe qui fe trouve au fonds du vaifleau, & ou en forme des Tablettes, ou de petites boules, qui font fort efti. mées des Peintres, & des Teinturiers, lors qu’elles font pu- res, & fansaucun mélange, comme font cons Ass nous yes nons de décrire. > n\ ar = te j É uw We 7 \ Hf) rt ÿ HS 2 N & NX À S 4 Fa LA RS 7) D 12 Y, / \ PA L À É An IN "te Bois de cet nee fe brife Éiciléniente; il ft tres-propre pour entretenir lefeu, & s’il.eft entierément éteint & qu’on. en frotte. quelque tems deus pieces l’une contre l’autre, elles. jettent des.étincelles comme feroitunfuff,. qui allument. le Cotton, outoute autre matiere fufceptible de feu, quelon a.mife auprez pourles recevoir. Son:écorce ferra faire des cordes qui font de durée. Sa racine donne un bon goüraus viandes, & quand.on en met dans les fauces, elle leur comm nique A couleur, & l'odeur du Safran. £ 4 | Les Caraïbes, ont de ces Arbresentous leurs lardins, ils les. entretiennent foigncufement & les prifent beaucoup; à cau- | M 3. le. Lé RPC D AR : NS. te de, FL Ur Ve 14 MEL Be RU RU RE ONN DR RARE UE + UNE À He fr ÿ 64 HrSToire Nat wlrt, emo Een Ba tirent ce bean vérmillondontils fe rougifent lé Fr] corps. Ils s’en fervent auffià peindre, & à donner dû luftré k ans plus belles vaifiellés de leur petit ménage. | "4 “Onpourroit auffi mettre au rang dés Arbres qui fe pro. ptesà la Tcinture, la plûpart de ces quidifilent des gom- … mes: car ceus qui ont efté curieus d’en faire Péffay,' Ont ré marqué, qu'eftant meflées dans la Teinture, elles relevent les couleurs les plus fombres & les moins claires, paruncer- « tain éclar, & un fort beau luftre, qu’elies leur donnent. | / CHAPITRE HUITIÈME. Des Arbres qui font ntiles a la medecine : Et de quelques autres dont les Habitans des Antilles peuvent tirer de grand, s avantages. es Ieu ayant ordonné à tous les Peuples les bornes de leur habitation, n’a l’aiffé aucune contrée dépourveuë de moyens neceffaires, pour y fäire fubfifter commo- dément les hommes, qu’ilya placez; & pour étaler devant leurs yeus, Les richeffes infinies de fon adorable Providence, il a donné à la terrelavettude produire, non feulement les vi- vres qui font neceffaires pour Icur nourriture; mais encore divers antidotes , pourles mn muni£ contre lesinfrmitez, dont ils peuvent étre acuéillis, &'plufieurs’remedes fouvérains, pourlesendelivrer,: lorsqu'ils yfonttombez. Pour férien dire des autreélendroirs du monde; les Antillés, pofñedent fans contredititous ces farës avantages emindégréforteorifides | rable: Car icllesine fourniffenv pas: fimplémentà leurs Habi- tansuncagreable varictéde fruits, deracines, d'herbages, de legumes, de gibier, depoiffons, & d’autres delices pour cour vririeurs tables; mais ellesieurprefententeticore un grand nombre d’excellens remedes;:pour:les: Suetir” de lefirsmalas diesi C'eftce que-leLeéteurjndicieuspourra facilémestre. marquer En: ja fuitré de: COtte: Hiftoiré: Naturelle ; &! ME “1 € dû liere= ! Chap.$ Des ÎLES ANTILLES . os lierement en ce Chapitre, où nous décrirons les Arbres qui. font d’un grandufage enla Medecine. | EL CE: L'EUuUL. Du Caffier où Canificier, | PNEt Arbre croift de la groffeur, & prefque de la mêmef- gure qu'un Pefcher, fes feüilles font longuettes & étroie tes: Elles tombent une fois l’an pendant les fécherefles, & quand la faifon des pluyesretourne, il en poufle de nouvelles, ) LT K XN L. SN < NS ÈKRK ñ @ ARR SSS KE È NS NS GX ; NI ; LES : SN \ y, ] TR jh KI _ NY AN 1 SS Q Ê . Ÿ Î } | me 4 Re. pare ae pe = car PU ne = < PE Pere. | 2 ae de & $ SES f Elles font precedées de plufieurs beaus bouquets de fleurs Jaunes, auquelles fuccedent de longs tuyaus, ou de longues #liques, qui viennent de ia grofleur d'unpoulce, ouenviron, & font quelquefois d’ua pied & demy, ou dedeus ee de | ong, Li TA HrSTOTRE: x ATURFLLE, Chap. long: Elles éontiennent au dedans ; conime en autant ter ol tites cellules, cette drogue Medecinale fi connué des Apoti=. caires, que l’on appelle Czffe. Nos François nomment l’Ar- bre Cafier ou Camificier, &1ics Caraïbes Cal Mali. Tandis" que le fruit groflit & s’allonge, il eft toujours vert, mais quand il a pris fa confiftance, il dévienten meuriffant, brun, ou violet, & demeure ainfi fufpendu à fes branches, uand' ce fruit ft meur & fec, &que les Arbres qui te. portent font asitez de grands véns, on entend de fortloin le bruit; -qui- eft ec excité par la cobifiof de ces dures & longues: filiques, lesunes conrre les autres. Cela donne l' éfpouvante: aus Oïfeaus, quin’enofentapprocher; & pour les hommes qui ne favent pas la caufe de ce fon confus, s’ils ne voyent les Arbres mêmes émeus, & choquans leurs branches & leurs fruits, ils s’imaginent qu’ils ne font pas loin du bord de la mer, de laquellcils croyent entendre l'agitation : ou bien ils fe perfuadent, que c’eft le Chamaillis de plufieurs foldats, qui font aus mains. C'eft la remarque de tous çeus qui ont vifité le fein , ou comme on le nomme ordinairément le” Cul-de-fac, de lle de Saint Domingue, où l’on voit des plai- nesentieres, & de fort longue étendué, qui ne fonrcouver- tes d’aucuns autres Arbéts C’eft aufli de-là, felon toute ap- parence, qu’on a apporté la femence de ceus qui croiffent aus Antilles. Au refte ces bâtons de Cafe, qui viennent de l'Amerique, font plus pleins & plus pefants , que ceus qu’on apporte du Levant, & la drogue qui eft dedans , atous les mêmes effets. Les fleurs du Caflier étant confites en fucre , purgentbe- nignement, non feulement le ventre, mais aufli la veflie. Les. bâtons du Cafier lors qu’ils font confits verts, ont auffila même propriete. Mais la poulpe étant extraite du fruit meur, fait une opcration plus prompte, & beaucoup plus Joüable. Plufieurs des Habitans du Païs fe trouvent bien d'en ufer _chaque mois, un peu avant le repas : & ils ont remarqué, queccdous Medicament Icur conferve merveile | ienfcment leur bois ne conflitution. # jh po: vnbb 3% dog) M ARTE. \ Mile Chapes Ds. lans, ANTALLES TS y : () Ru Gil E, dis Des e N ois de CHedecine, * Es Nois de Medecine qui font fi communes en toutes ces _ les,croiffent fur.un petit Arbre, d’ont on fait le plus fou. vent les feparations des [ardins & des habitations. Si l'on n’empefche fa jufte croiffance, il monte à la’hauteut d'un fi- guiet ordinaire, duquel il a auffi lafigure, fon bois eft fort tendre & moëlleus ; il produit plufieurs branches. qui ram- pent confufément à l’entour dutronc. Elles font chargées de feüilles aflez longues, vertes & mollafles, qui font rondes par le bas, & fe terminent en trois pointes. "»? —=—— QE #r E : 5 ; | vs Ki + C E à n LG : Le * S on NEA ja ss $ A Le, ” “RE TA ” NT CN SR MSN à ä Æ ES ee _ épées Lebois & les feuilles de cet Arbre, diftilent un fuc laiteus, quitache lelinge: Mémeil n’y à pas de plaifir de s’enappro- Cher entems de pluie, parce que les gouttes d’eau quitom- bent de deflus fes feüilles, ont un tout pareil effet que le fuc. Li porte plufieurs fleurs jaunes compofées de cinq feüilles, NN qui #8 - us DIRE N 8 ë R E° dde, cha : qui ont la figure d'une étoile, quand elles font épanoüyes: Les » fleurs venant àtomber, quelques unes font fuivies de petites nois, qui font vertes au commencement, puis elles devien= nentjaunes, & enfin noires, & un peu-ouvertes lots qu’elles font meures; Chaque Nois, rcferre trois ou quatre Resa en autant de Hicée céllules ; qui ont l écorce noirâtre la groffeur & de la figure d’une Féve. L’écorce érant Eved. on trouve dans chacun, un pignon blanc, d’une fubftance huileufe, qui eft cnveloppé & my-party d’une deliée pelli-. cule 1 Cespignonsont un goût aflez agréable, quieft appro- chant de celiydes Noifettes : Maïs, s’y l'onn 'cbferve quel que regle enlesmangeant, ils excirentun étrange devoyément par haut & par bas , particulierement, s’y onavalle la petite. peau qui les enveloppe, & celle qui les fepare parlamoytie.. Pour temperer leur force, & pour en uferavec unheureus: fuccés, on les purge de ces peaus, &on les fait pañler legere- ment fur les charbons, puis étant battus, onen prent quatre: oucing, qu'on méfle dans un peu de vin, pour leur fervir de: vchicule & de correttif. Les rameaus de cet Aïrbreétant eouppés & mis en terre. prenent facilement racine. Les Portugais tirent de l'huile des pignons, qu: cft eftimée enla ménagerie, & ci BeUS auf avoir fon lieu en la MAMA, FR TTC LEVATIS Du Bois de Canelle. L Arbré, qui porte cette efpece de C anclle: Ste nm f come. mune en toutes les Iles, peut tenir place entre ceus qui: fervent à la Medecine, puifquefon écorce aromatique eft re- cherchée de tous ceus qui font travaillez d’affeétions froides, & employée pour déchargerl'eftomac, des humeurs gluantes. & piruireufes quil'opprefient. La bonne odeur, & la verdu. re perpetuel lle de ce bel Arbre, ont perfuadé à quelques uns: que c'étoit une forte de Laurier : Maïs ik croift beaucoup: pras haut, fontronc cr plus gros, fes branchesfont plus” éten— _ | s Songs: MRÉIL TE À 069 | érenduës,: &ifes feñilles, ‘qui ne font pas dutout fi longues, font de beaucoup plus douces, & d'un Vert plus gay. 504 écorce, quieft cachécfous une peau cendrée cft plus épaifie, Mr d'une couleur plus blanche, que la Canellequi vient du le- vant; Elle eft auffi d'un goût plus acre & plus Mmordicant,; Mais étant féchée à l’ombre, elle donne une faveur tresagrea- ble aus viandes. - Outretous ces Arbres precicus que nous venons de décri- re, leslles de Tabago, de la Barbade, & de Sainte Croix, font eftimées entre toutes les autres, paur avoir plufieurs bois que l'ufagea rendus recommendables en la Medecine. Car on trouve du Sandale ,: du Gayac, & même du Safafras, qui font affez connus , fans qu'il foit befoin d’en faire des de di pertes L no” ARTIÈLE 1%. AE, Du ne i » É QU ( Ÿ Ti y à Encore cuisse autres FE ones tue, communs sat toutes les Antilles, dont les Habitans peuvent:tirer de grandes commoditez. Le Cottonnier, que les Sauvages ap- pellent Harod où- Aketha ; doit tenit lepremier rang, COM me étant le plus utile. II croift de la hauteur d’ un Pefcher : Il a l'écorce brune, les-féüillès petites, divifées en trois. J1 porte unc fleur de la grandeur d'uneRofe, quieftfoutenué _ parle bas fustrois petites feuilles vertes, .& piquantes, ‘qui Penferrent. ni GÈtES fleur: eft compofée. de ginqrfeüilles, qui font d'un jaune doté, elles ont en leurfonds de petiteshigncg de. couleur de pourpre, Sun. bouton; jaune, quicit enrourg de..petis.filamens,de.même couleur. Les ficurs. font fuivies d'un fruit, | de figure ovale, qui eft de la groffeur d’ nnc petite mois ayec facoque.. Quandbil et, parvenu | fa maturité » ile tout noir par dehors, & il s entrouve en trois endroits, qui font xoir.la. blancheur du. Cotton, .qu il referre fous ceite rude.couverture, Où trouve, dans chaque fruit, fét PEHSE We, qui font la, fmence delArbre.. r er riee LES + 4 HS TR Lee ïoo HISTOIRE NATURELLE, Chap.s. -H:y 4 une autre efpéce de Cottonnier, quirampefur la” terre, comme la vigne deftituée d'appuis : ceftcelle-cy, qui produit le Cotton le plus fin & le plus eftimé. On fait de l’un & de l'autre destoiles, & plufieurs petites “often qui fonts es 5400 ufage en laménageric. bn COST, ARTICLE Du Savonnier. Y L y a deus fortes d’Arbtes, dont tes [nfulaires fe fervent. au lieu de Savon, l’una cette qualitéen fonfruit, quicroift par grappes, rond, jaunatre , & dela grofieur d'une petite pru= ne, quiaaufhun noyau noir & dur, quife peut polir. Onle nomme communément Pomme de. Savon. L'autre, acette vertu en fa racine, qui eft blanche & mollaffe, L'un & l'au- tre rend l’eau blanche & écumeufe, comme feroit le Savon. même; Mais fi on ufoit du premier trop fouvent, il brule. roit le linge. L'on appelle ces Arbres S'avonniers ; à _ de: fa propriete qu'ils ont deblanchir: À 8 VE ART CL RSS | Du Paretuvien.. je "Ef Arbre, ne fe plait qu'aus marécages, &auis trés de lime. ah feuille Verte, épailfe, &'afflez longue. Ses branches qui ferécourbent contfe terre, ne l'ont’ pas [ee tof touchée, qu ‘elles prennent des racines, & pouflent un autre Arbre, qui entrelañfe ordinairement fa tige & fes branchesfe présà prés, & à tant deréplis, avec toute qu'il peut join. dre ; que ces Arbres gagnent & occupent en pet détems; tout | Cequ'il trouvent de CRT terre, qui cft parce moyén:rene! due fi difficile à défricher; que l'onn’en peut attendre aucun profir. C’eftfons ces Arbres, que les Sangliers, & autres be . fes Sauvages tiennent leur fort. lis fervent aufli en quelques L? a | à Ji: US. i _ fieus de rempart aus s Habitañs déstiès: qui font iMiezcé que: perfonne ne les fürprendra de ce cofté là. Ils font encore tresutiles, en ce quen ayant point de Chefne encesiles: leur écorce eft propre à tannerlesceuirs. DO OGNTE ARTIGEE VE. hi Pire ai © D Calebaffier. rc ne faut pas oublierle Cakebafier. qui fournit plus gran- À de partie des petits meubles du ménage des Indiens, & des biansétransers ; qui font leur demeureences Iles. C'eft un Aïtbre, qui croift de la-hauteur, dela-grofleur, & de-la Horûé d’un gros Pommier. Ses Branches font ordinairément fortrouffuës. Ses feüilles qui-font longuettes , étroites, & rondes par le bout, font attachées par bouquets aus bran | CE : N 3. ches. PEL T Les DATE UT Ê hé deg : 5 es ; : LE AT NES te ; k ÿ Se 195 HesTounEe: NATURELLE, — = _— —— ches,-&en LUE endroits du tronc: nestitie fleurs 8e des fruits prefque tous les mois, del’année,; Les, fleurs font d'un gris mefléde vert, -& chargé, de petitestaches noires , -& quelquefois violettes. Elles font fuivies decertaines-poma mes, dont à peine en peut-on trouver deus, quifoient de pa- reille grofeur, & de même figure. Et:comme un potier, fait paroitre l'adreffe de fa main, en faifant fur une même roüe, & d'une même mañle dertètre « des vaiffeaus d’une for- me & d’une capacité differente: Ainf la natute montre iCy fon-induftrie merveilleufe, en tirant d’un feul. Arbre,, des fruits. diversenileur forme, &en leur groficur;. ‘CACOFE qu "is foient tous sstacheé à nRe même. hranenes 3: & produitsd' ‘une mémefnbfañtess 1-5 «1e 2! sb Po’ ip 4 1diA rt .Cés fruirsont-cecy Frs commun, qu'il sorit tous une écorce dr ligoeufe., d’une épaiffeut & d’une folidité requifepour : sen pOUYOIX fervir audieu de boutciiles, de-baflins;: deicou- «2959 : t A pes, w Chap.s pes ILES ANTILLES 103 pes, deplats, décuelles, & detouslesautres petis nes qui font necefaires au ménage. 1ls font remplis d’une cer taine poulpe, laquelle étant bien bien meure, devient violer. te, de blanche qu'elle étoit auparavant. 0. trouve parmy cette fubftance , certains petis grains plats, & durs qui font la femence de l’Arbre, Les Chaffeurs des Îles, fe fervent de ce. fruit pout étancher leur foif au befoin, & ils difent qu'ilaie oùt de vin cuit: mais qu'il referre un peu trop le ventre. Les Indiens polifent l'écorce, & lémaillent fi agreablement avec du Roucou, del’Indigo, & plufieurs autres belles cou- leurs, que les plus delicats ! peuvent manger & boire fans dé- goût, dans les vaiflelles qu’ils en forment Il y a auffi des Curieus, quine les eftiment pas indignes, detenir placeentre Les raretez de leurs cabinets. MERE L°'CE EF VIEIL Du CMabor. L y a deus res dArbres qu’on appelle C#ahor, affavoir le I: Mabot franc, & \e Mahot d'herbe. Le premier eft le plus re- cherché, parce qu'il eft plus fort. 11 ne devient pas fort grand, mais il produit plufieurs branches, qui rampentcontreterre, L'écorce en eft fort épaifle, & fort aifée à lever de deflus l’Ar- bre. On en fait de longues éguillettes, qui font plus fortes _ que les cordes de Teil, d’onton fe fert en plufieurs endroits. . On l'employe ordinairement à monter les rouleaus du Ta- bac, & à attacher plufieurs chofes, qui font neceffaires au me- nage. Pour ce quieftdu Mahot d'herbe, on s’en fert au défaut du premier; maisil pourrit facilement, & n’egale enrien l’au- trepourlaforce. Enfinil y a dans ces Iles plufieurs autres Arbres » Qui ne fe * Yoyent point en l’Europe, dont les uns recréent feulement _Javeue, telsque font, celuyqu'onappélle 44:ppo4, & plu fiéurs fortes de Bois Epineus : Et les autres contentent l’odo- rar par leur bonne fenteur: ou même ont des qualirez veni- meufes , comme /’C4rbre laiteus. Céluy dontia racine étant pose ,_& jettée dans les rivicres, enyusc les Poiflons : le: Mancez ICE Hrstor ne" A EUR BCE, | p.9 Mancenilier , lequel nous décrirons en fonlieu, & une ibfinitéi d’autres, qui ont tous ie bois blanc, mol& de nul ufage, & qui. n’ont cncore point de nom parmy nos François. | È & / ; CHAPITRE NEUVE Des Arbriffeaus du Pais ; qui portent des fruits, on qui pou Jent des racines, qui font propres a la nourriture des Habitans, . qui ; fervent 4 d’autres ufages. ; Ÿ en diverfes Contrées , a chacure defquelles il a donné quelque avantage & quelque commodité, qui ne fe trouve point aus autres, afin que dans cette agreable varicté, fa Providencefe puiffe tant plus diftinétément reconhoitre, & admirer. Mais, il faut avoüer, qu’en ladiftribution que cette Divine Sagefle a fait de fes biens, les Antilles ont eftéfortri-" chement partagées: Car pour nous arréter fixement à la mat ticre que nous traittons, non feulement le grands Arbres, que ? nous avons décrits aus Chapitres precédens, contribucntau . logément, à à la nourriture, au vétement, à la confervation de - la fanté, & à plufieurs autres dous accommodémens des hom- mes qui y habitent, mais il y croiftencore plufieurs Arbrif- feaus, qui poufent des racines, ou quiportent des fruits qui ferventaus mêmes ufages, commceil fe pourra remarquer par la lee ae ce Chapitre, D) leu ayant fait de la terre un feul Element , la feparée ARS EE GC LEehos Du CHanyoc. Es Habitansdes Iles , fe fervent au lieu de blé de la raci- ne d’un Atbriffeau , qui fe nomme Mamyoc, & que les TFoupinambous appellent Manÿot , & d'autres Aandioqué, de laquelle on fait un pain affez delicat, que l'on appelle Cafave. Cette racine cft fi feconde, qu'un arpentdeterre quien fera . planté, 45 Chap DES Izes ANTILLES 105 De. nourtira plus de perfonnes, que n'en pourtoient faire _ fix, qui feroient enfemencez du meilleurfroment. Ellejette ‘unbois tortu, de la hauteur de cinqà fix pieds, qui eft tres- | facile à à is &remply de Rens nœuds. Sa feüille eft étroi- ss à en. te& longuette. Au bout de neufmois, la racine CA en fa mas turité. On dit même qu’au Brefil , il AaT faut que trois ou quatre mois, pour croiftre groficou commela cuifle. Silaterre 0m point trop humide, la racine s’y peut conferver trois , fans fe corrompre: "fi bien qu'il ne faut point de grenier De ferrer, Caron latire de laterre, à mefurc qu'onuena _befoin. _ Pourfaire venir cette racine, il faut prendre de ce bois, & lecouper par bâtons, de la longueur d’ un pié ou environ. Puis faire des foffes dans le jardin avecunchouë, & fourret trois de ces bâtons en triangle dans {1 terre que l'onàtirée _deccsfofes, & dontona fait un petit monceau relevé. On net | (e) appclle ( Po d Fa vre Eee) tof. MisTorré NATURELLE, Chap. | appelle cela planter 3 la foffe. Mais il y a uné autre forte dé». planter le Manioc, que lon nomme planter au Piquet, qui eft plus pronte & plus ayfée, mais quine produit pas dé Manioc. fibeau, nifieftimé. Cela ne confifte, qu’à faire ün trou en. terre avec un piquet & à y planter tout droit lebois de Ma- nioc. Mais il faut prendre garde en le plantant, de ne pas: mettre les nœuds en bas, parce que les bâtons ne poufie-" roicnt point. Les Indiens n’y font point d'autre faffon : mais pour l'avoirenfaifon, ils obfervent le decours de la Lune, & que la terre foit un peu humeëée, ]y a plufeurs fortes de ces Arbrifleaus, qui ne font diffe- tens, qu’en la couleur de l'écorce de leur bois, & de leur ra= cine, Ceus quiont l'écorce, grife, oublanchec, ou verte,. font un pain de bon goût, & ils croiffent en peu de tems: mais les racines qu’ils produifent ne font pas de fi bonne gar- de, & elles ne foifonnent point tant, que celles du Manyoc: rouge ou violet, quicft le plus commun, le plus cftimé, & le plus profirable en la ménagerie. | Le fucde cette racine, eft froid comme celuylacigue, &s c eft un poifon fi puiffant, que les pauvres Indiens des grandes. Jes, étans perfécutez à feu & à fang par les Efpagnols, & Voulans eviter une mort plus cruelle, fe fervoient de ce venin, ! pour fe faire mourir eus mêmes. On voit encore aujourduy en l’Ile de Saint Domingue, un lieu nommé la Cavernedes. Indiens , où fe trouvent les offemens de plusde quatre cens. perfonnes, qui s'y donnerent la mortavec ce poifon, pour . échaper des mains des Efpagnols. Mais, au boutde vintqua treheures, que ce fuc fi venirheus pour toutes fortes d’ani- MAUS , cft tiré de fa racine , il perd fa qualité pi & en gcreufe. | | Â:-R TE. FC EE MR. > 21 'D# Ricinys , ou Palina sg re Né) L y à dansies Antilles , une infiaité de ces Arbriffeaus que | l'on nomme Palma Chriffi, ou _Ricinus. Et ils croiflent fis hauts, & fi gros en quelques lieus, æ on Les prendroit: pour. une! WaChap.o ‘pas ILES “ANTILLES. 07 ane efpece differente de ceus:que l’on Voiten Europe. Les Négresen amañent la graine & en expriment l'huile, de 1a- quelle ils fe fervent pour frotter leurs cheveus, & fe garentir de lavermine. Les qualités que luy donnent Galien & Dios- coride ,’ répondent bien à F'ufage qu'en tirent ces Barbares. La feüillede cet Arbriffeau eft aufli fouyeraine , pour lagueri- _ fon dequelques ulceres, parce qu'elle cit fortattraive. ARTE LC, LE. DH. Des Bananiers, & Figuiers EL Lente entoutes ces Iles deus fortes d’Arbriffeaus, ou plus tôt de gros Rofeaus fpongieusau dedans, qui viennent vo- lontiers enterre grafñle, pres des ruifleaus, ou dansies vallées, ed ‘ ELeRTe sis ii té Se K Es Le de NS KES mi font à l'abry des vens.. 400 les nomme ordinairement | Bananiers > OU-Planes & Figuiers., Où Pommiers de Paradis. Doi O2 Ces o8 HISTOIRE NATURELLE, Chap: 9 Ces deus efpeces d’Arbriffeaus ont cecy de commun.entre. eus, x. Qu'ils croiffent de parciile hauteur, affavoir de douze ou de quinze pieds hors de terre: 2. Que leurstiges quifont. vertes, luifantes, fpongieufes & remplyes.de: ‘beaucoup d' ‘eau, fortent d'un. gros oignon en forme d’une poire ,. qui eft muny “de plufieurs petites racines blanches; qui le lient avec laterre:- 3. Qu'ils pouffent proche leur pié desrejettons, qui. produi- fent des fruits au bout de l’an : 4. Que quand on a coupeune des tiges pour avoir le fruit, la plus avancée fuecede en la: place, & ainfilArbrifieau fe PErpCtué & fe multiplie ,. telle. ment, qu'il occupe avec lc temps, tout autant de bonneterre: qu'il en rencontre: 5. Que la fubftance dé l’un & de l’autre: eftmollaffe, qui fe font en eau, laquelle étantclaire an pof fible, a neantmoins la qualité deteindre lelinge, & les étoffes blanches en couleur brune. 6. Quelcursfruits font au fom- met de chaquetige, en formede sroffes grappes, ou degros bouquets. 7. Et que leurs feüilles, qui font grandes d'environ. une aulne & un quart, & larges de dixhuit pouces, peuvent fervir de nappes & de ferviettes, & étant.féches, tenirlieu de- matelas & de lits, pourcoucher mollement. Ces deus Arbriffeaus font encore femblables encecy,. que. de quelque fens que l'on coupe leurfruit, Lors qu'il eft en mas turité, la chair qui eft blanchecommenége, reprefente en: fon milieu la figure d'un Crucifix: cela paroit particulieres ment quand on le coupe par roüelles délicates. C’eft pour quoy les Efpagnols croiroient faire un crime, d’y mettre le. couteau, & fe fcandalifent fort, dele voir trancher autrement: qu'avecles dens, Maisle Bananier acecy de particulier: 1. Son fruiteft long. de douze à tréze pouces, un peurecourbé vers l’extremire, gros à peu prés comme lebras; au lieu que celuy du Figuier: cft de lamoitie plus petit, de lalongueur de fix pouces. 2. Le. Bananier ; ne produit enfon bouquet que vintcinq ou trente. -Bananes pour le plus, quine font point trop ferrées lesunes. aupres des autres: Maisle Figuier, a quelquefois jufques a: cent ou fix vint figues; qui font tellement unies & preffées. Jesunes contre lesauttres, qu'on ade la peine à'les en.détar- che 3. Les Bananesont. ds ferme &. folide, -propreà eftre: : DES. in ARR LLLA 109: ne cuite, oufouslacendre, ouau pot avec la viande, ou confite, & féchée au four, ou au Soleil, pour eftre gardée plus facilement. Mais la Figue, ayantune fubftance molla- ce, ne pent fervir à tous ces ufages. . Pour avoir ces fruits, on coupe pat le pieles peut , qui ne portent qu’une feule fois en leur vie, € on foutien avec une fourche la groffe grappe, de peur qu'elle nefefroiffe en tombant. Mais on n’y met pas volontiers la ferpe, que quand onappercoit, qu’il ya quelques uns des fruits de chaque bou- quet , quiont la peau jaune ; Car c'eftunfigne de maturité : & lors étant portez à la maifon, ceus qui étoient encore verts. meuriflent fucceflivement, & l’on a chaque jour du fruit nouveau. | | La Grappe, qui eft nommée Regime par nos François ,. eft ordinairement la charge d’un homme: & quelquesfois il la: faut mettre fur un levier ,. & la porter à deus furles épaules, comme la grappede raifin. ,; queles Efpions rapporterent de Jaterre de Canaan. Quelques uns, ont trouvé ce fruit fi beau & fi delicat, qu'ils fe font imaginez que cét celuy du Paradis _ terreftre, dont Dieu avoit defendu à Adam & à Eve deman- ger. Auf rilslenomment Frguier D'CAdam, où Pommier de: Paradis, La feüille de ces Rofeaus, fe trouvant dela gran deur que nousavons dit, étoit du moins bien propre, à cOU-- vrir la nudité de nos premiers parens. Et pource qui regarde la figure du Crucifix, que le fruit reprefente au dedans lors _qu'ileftcoupe, cela peut fournir une ample matiere de. pro- _fondes fpeculations., à cens qui fe plaifent à fpiritualifer Les _fccrets dela Nature. Jlyenaquidifent, que lafigure d'une Croix eft aufli mar- | quée dans la femence de l’herbe que l’on nomme Ryë, La pe- tite Getiane. on Cruciara, a les feüilles difpofées en forme de Croix furfatige: &ilfautavoüer, que la naturecomme en se s’eft pluë à reprefenrer de cettefortediverfes figu=. , dans les plantes & dans les fleurs. Ainfi ilyen a qui fe: hbortenr à la forme deschevens, d’autresà celle des veus, _desorcilles, du nez, du cœur, de lalangue des mains & de _ quelques autres parties du corps. Et œnfi ilyaencorediver- fsplantes fameufes, qui femblent reprefenter plufieurs au. & 0. 3: tres: = MO ES D Len (ta VER: La AR PNR ANR PR Le CA A LRROUS EN Er RSI Ro Ut à La x 5" À s f ù Ë (AE > 110 HISTOIRE NATURELLE, (Chap.9\ tres chofes, comme des Aigles, des Abeilles, des ferpens, des” pattes de chat, des creftes de coq, des oreilles d’Ours, des” bois de cerf, des fléches, & femblables ; dont par fois même, à caufe de cette reffemblance, ces plantes- là, portent le nom. Nous ne les fpecifions pasicy, parce que tous les Livres cn font pleins. F8 QU 2 ah NS LES Ge oi à Tv. Du Bois de Coral. Ï L ya encore en plufeurs Iles, un petit Arbriffleau, qui porte. une graine rouge comme du Coral. Elle croift par bouquets à l'extremité de fes branches, quien reçoiventun grand luftre. Mais ces petits grains, ont une petite marque noire à l'un des bouts, qui les” défigure, & leur fair perdreleur prix, felon J’advis de quelques uns. Les autres difent tout au contraire, que cette bigarrure de couleurs, ne les rend que plus agrea- bles. On s’en fert à faire des Braffelets. ART L'OUL EUTRE Du Iafinin © du Bois de Chandelle. Es Arbriffcaus, que nos François ont nomme Zafmin, & Bois de Chändelle doivent eftre mis entre ceus, qui font confiderables en ces Iles. Car le premier porte une petite. fleur blanche , qui parfume tout la circonference de fabonne odeur; &c "ef ce qui luya acquislenomqu'ilporte. Et quant à fautre, il exhalé une fi agréable & fi douce fenteur, lots qu'on brule fon bois fec, ileftauffif fufceptible defeu, &il rend une flamme fi claire, à caufe d’une certaine somme aro- matique d’ont il eft Imbu, que c’eftavecraifon qu'ileft re- cerché des Habitans pour l’ufage & l'entretien de leurs feus, & pourleur tenir lieu de chandelle , & de flambeau Le la nuit. Ps D exal KE : a NE AR 2 A MT À DES lues ANTILLES 113 CHA PITRE DIXIEME. Des Plantes ) Hkerbages, 7 Racines de la terre des Antilles. Pres avoir reprefenté dans les Chapitres precedens, _ les Arbres & les Arbriffeaus, dont la terre dès An- tilles-eft richément couverte : il nous faut mainte- pant entrer en la confideration, de plufieurs rares Plantes,. Herbes, & Racines dont elle eft aufli tres- abondamment pourveuë, AR DIE LE dd De trois-fortes de Pyman, de Plante, que nos François appellent Pyw4+# ou Poyure del’Amerique, eft la même que les naturels du païs nom- ment L4xi ou Carive. Elle croift touffuë, comme un petit. buiffon fans épines. Satige, eft couverte d une peau Cendrée,. elle porte plufieurs petis rameaus, qui font chargez d’une. multitude de feüilles longuettes, dentelées , & de couleur de: vertnaiflant. 11 y enadetrois fortes quine font en rien diffe- rentes, qu'en la figure de l’écoffe, ou du fruit qu’elles por-- tent. L’unene produit qu’un petitboutton rouge, longuet: comme un clou de Girofle, qui à au dedans une femence deliée, beaucoup plus chaude que les épices ,; qui viennent du Eevant, & préfquecauftique, qui communique facilement. Dre qualité picquante, à tout ce à quoy on l'employe. L'autre Efpéce , aune écoffe beaucoup plus grofle, & plus: D, qui devient patfaitement vermeille étant meure, &: f l’on s'en fert aus faulces, elle les jaunit comme feroit le: Qhefran. La Troiziéme, aencore une ecoffe plus g groffe ,qui eft affez. bare. rouge comme du plus vif Coral, & qui n’eft pas éga+ L° ; | lement: FAST AP PR PE AMD D GA PRE Be F : A OREE CN 112 HesTOIRE NATURELLÆ, ÆChap.10. lementunie. La graine qui n’eft point fiacre, ni fiépicée qu . celle des autres, eft fufpenduë au milieu. C’eft l’un des pluss Dbeausfruits, que l’on s’auroir voir, lors qu'ileft meur. On enaapportéde la graine en France & ailleurs, quieft venué k ee re mn Dee en perfe@tion. Mais le fruit ne vient pas du tout figros, qu'en l'Amerique Onfe fert decetteécofle, &de la graine quieft dedans, au lieu de poyure, parce que ce fruit donne un goût relevé, qui approche deceluy decetteépice. Leseffers neant- moins n’en font pas fi loüables, Car apres qu'il à un peu pi= qué la langue, & enflammé le palais pat fon actimonie, au lieu de fortifier, & déchauffer-la poitrine, ill'affoiblit, & y. caufe des froideurs,; Ou plutoft, felonle fentiment des Me decins, il ne l'échauffe que trop, & il l’affoiblit par fa vertu cauftique, n'y caufant de froideur que par accident, enfant. qu'il diffipe l'humide radical, qui eft le fiege de la chaleurs Cet pourquoy onremarque dans les Îles, que ceus qui s’en fer vent, # FN CM a HUY Et Chap.io pes ce ANVTLÈLE Lt “vent ordinairement en leur manger, font füujets à des n maus | d'eftomac, & à à contracter une couleur jaune. ARTICLE. IL Du Tabac. A plante de Tabac, ainf appellé à caufe de l'Ile de Tabago, Lc où felon l’opinionde quelquesuns, elle aefté premiere- ment découverté par les Efpagnols, eft aufli nommé Z60- tiane, du nomde Monfieur Aro Medecin, quilamitie pre- mier en ufage en l'Europe, & qui l'envoya de Portugalen France. On la qualifie encore Herbe à la Réyne, parce qu eftant _ apportée de l’ Amerique, elle fut prefentée à la Reine d’Efpa- gne, comme uneplanterare, & de merveilleufevertu. Les Efpagnols, luy donnent de plus le nom d' Herbe Sainte, pout les excellens effets que l’experienceleurena fait fentir, com- me temoigne Garcilaño | au 25 Chapit. du 2 Livre de fon _ commentaire Royal des Yncas du Perou. Enfinonl'appelle Petun , bien que Jean de Lery s’en mette fort en colere, fou- tenant que la plante qu'il a veuéauBrefil, & que les Taupi- nambous nomment Pefur, eff tout a fait differente de noftre Tabac. Les Caraïbes, le nomment en leur langue naturelle T Ouly. On ne connoiïfloit autréfois dans les Iles d’autres Plantes de Tabac, que celles queles Habitans nomment or- dinairement Tabac vert, & Tabac à la langue, à caufe de la fi- gure de fa feüille: Mais dépuis qu’on y à apporté de laterre ferme, de la femence de celles qu'on appelle Tabac de Veriné, & Tabac des CL A4mazones, on les a aufli divifées en ces qua- tre fortes. Les deus premisres font de plus grand rapport: Mais les deus autres font plus cfimées , à Caufe de leur bon- ne odeur. Toutes ces fortes des plantes de T. bac, croiflent aus Iles, de la hauteur d'un homme & d'avantage, lors qu'’onn 'empéche point leur croiffance, en coupant fe fommet de leurs tiges, Elles portent quantité de feüilles vertes longues, veluës par deffous, & que l’on diroit eftré huilées, lors qu'on les manie, "Celles qui croiffent au-bas de la plante, font plus larges & plus le LÉ lon- 154 Hilo ea D à UNE dE , longues, comme tirant plus denourriture de l'humeur de Fr i racine. Elles pouflentau fommet de petits rameaus, quipor- M 1 tent une fleur en forme de petite clochette, laquelle eft d’un: violetclair. Et quand cette fleur eft féche, il fe formeun petit. boutonen la place, dans lequel eft conténué la femence, qui cft de couleur brune & exrrémement deliée. | Quelquefois on trouve fous les feüilles, & fousles bran- ches de cette Plante, des nids de ces petis oifeaus quel’onap=. pelle Colbris, & que nous décrirons en leur lieu. AR: lrd.C LE EE 0 EN De l’Indigo, À matiere d’ont on fait cette Teinture violette qu’on: appelle Zrdigo, fetire d'une Plante, quine s’éleve hors de terre, qu’un peu = de. dois Tel & dura. Elle a k. feuille petite, d'un vert naïffant, qui tire fur le jaune quand | NN à. Te > — RE = Exnature de cette Plante eft telle, quefi quelcunarrache de fes feuilles, ou s’illes touche feulement, toute laPlante fe flétrit, & laiffe tomber fes autres feüilles contre terre, com- me fi on l’avoit foulée aus pieds. Et felon le nombre des- feuilles que l'on en à arrachées, elle demeure plus ou moins- de temps à fe redreffer. ue | 1! en croift une femblable- à Madagafcar que les habitans- appellent Haef-vel, c'efta dire Herbe ayant vie. Mais ce n’eft pas la même efpece, qui fe voit à Parisau jardin du Roy, Gar elle a la feuïlle beaucoup pluspetite, & qui n’eft nita- chetée nidentelée: Etqui plus eft,. elle ne produit point de fleurs. Outre que fes feüilles eftant touchées, fe reflerrent en: dedans par quelque forte de eontration, Au lieu que celle: que nous decrivons , laiffe tomber les fiennes à terre en dchors, | On: ONE: (62 PE. à 0% Se © PAROLE A VE ETES La ut a +: #7 Sal à + me fus Es HeSTOIRE N ATURERLLE, Chap. 1 Onvoit encore une autre efpece de Plante vive &fenfble, en plufieursautresIles. Elle croift quelquéfois de lahauteug d’un Arbrifleau. Elle ‘eft revetuë de beaucoup de petites branches qui:font chargées en tout tems d’une infinite de feüilles longuettes & étroites, qui font émaillées enla faifon des pluyes, de certaines menuës fleurs dorées, qui réfemblent à de petites étoiles. Mais ce qui fait que cette Plante eft efti- mée l’unedes plus rares & des plus mervcilleules du monde, eft qu’aufli-tôr qu'on là veut empoigner , elle retire fes feüik les, & Les recoquille fous fes petisrameaus, comme S'y elles | Énionr détries puis elle les épanouit de nouveau, quand on retire la main & qu’on s’en éloigne. | Iyenà, qui nomment cette Plante /’Herbe Chajfes parce qu’elle ne s’auroit fouffrir qu’on la touche, fans s’en offencer. Ceus quiont pañlé par l’Ifthme depuis Nombre de Dios juf- ques à Panama, racontent qu'il y a des bois entiers, d’un At- brenommé Sesfirif, auquel fi toft que l’on touche, les bran- ches & le feüilles s’élevent avec grand bruit, & font enfem- ble la figure d'un Globe. On voyoit a Paris, au jardin du Roy il y à quelques at nées, un Arbrifleau fenfitif, eftimé de grand prix. Mais. quelcun s’eftant avifé de lonn l'invention de le mettre au fonds d’un puits, pour le conferver contre le froid, & les risueurs de l’hyver, il y mourut miferablement, au grand IC orct des Curieus. À RE lool: EAN Val De plufieurs Jortes de Pot. À terre nee tout des pui tels que font les de feves, de plufieurs fortes: Les Sauvages Ans. _tillois les appellent en general Æfamconti. Pour les Pois, ils (ont prefque tous de mème éfpece que Ceus qui croifient en l'Europe, excepté ceus que l'on cueille für un petit Arbrifleau, qui eft de la hauteur du Geneft & a les feuilles petites, vertes, & étroites. M porte des Pois dans. «es ÉORER ou filiq'es, quifont attaches à fes branches. Ils font. F. | Chap.it DES ILES ANTILLES 129 ont verts & plus petis que les ordinaires , d'un goût relevé, & fi faciles à cuire, qu'ilne leur faut qu'un bouillon. On les nomme aus Îles, Pois d'CÆngole, parce que la femence, en _ eft venuë de ce païsla, comme il eft à croire. _ I yenäd'uneaurre forte, quel’onnomme Pois, mais qui ncantmoins ont la figure de Féves. Ilsfontaffespetis. Er de cette efpece il y en a de blans, denoirs, de rouges , Outannés, qui font tous excellens, & qui viennent à maturité en trois mois. "On les nomme à Saint Chriftofle Pois Anglois. ARS diG IL 2: Des Feves, @* Fafeoles. > Ntre les Feves CG: Fafeoles , il en croift aus Antilles de Plufieurs efpéces,qu'on ne voir point en France. Les plus communes font desblanches, à qui les premiers Habitans ont _ donnéun nom mal honnefte, à caufe deleur figure. Elles . produifent leur fruir, qui eft bon à manger, fix femaines aprés avoir efté plantées. Les autres font diverfifiées de plufcurs belles & differentes couleurs, comme celles que l’on nomme Féves de Rornc, cu de Lombardie. | Mais les plus confiderablcs pour leur rareté, fonteell.s qu'onnomme Févés defét ans, parce qu’une même tige, por te fét ans enticrs fans fe laïer, & s’étend fur des Arbres , fur les rochers & par tout on elle peut atteindre. Et ce qui eft mer- Vcilleus, ceft qu’en touttems il yadufruitenfleur, du fruit en, vert, & dufruiten maturité. De iorte qu’on y peut ade mire: bio | Le printems © l'CAutomne en un même rameas. “On dit la même chofe, d'un certain Arbre d’Egipte nommé Figuier de Faraon, où l'on voit toujours du fruit meur, du fruit preft àmeurir, & du fruit naiant, Les Orangers ont un emblable avantage, | CP ORPAETE | ARTI- & ” mnt 150 HtsToire NATURELLS, Chap.rr AR TOILE VIIL. Des Plantes c herbes qui peuvent avoir leur afa ge en le CMedecine 04 44 ménage. Uant aus plantes, qui peuvent avoir leurufage en la Me- decine. 1l y en a plufeurs en ces Iles, defquelles les pro- prietés ne font pas encore bien connuëés, & quelques autres qui fe trouvent aufli ailleurs. Telles que ‘font, la /colopandre, une efpece d'CAloes, & plufieurs fortes de Capilläires. yen a aufli quelques unes, dont ona déja fait l'experience, & qui font recognuës pour eftre dounées de grandes vertus, entre lefquelles les plus prifées font, le Zowc de fenteur, le Balifier Zers. & l'Herbe aus fléches. Le Jonc defenteur, eft tout femblable aus autres joncs qui croiflent aupres des étangs & des rivieres; mais il pouffe une racine ronde de la groffeur d'une noifette, qui rend une odeur fort douce comme celle de l'iris, & qui étant féchée à om- bre, & reduite en poudre, a une merveilleufe vertu pour aider les femmes qui font en travail d'enfant, fi on leur en donne une petite prife. Le Balifier, croift de differente sroffeur & hauteur felon les terroirs où il fe trouve, il fe plait particulierément dans: des lieus humides. Ses feuilles font fi grandes & fi larges, que les Caraïbes en couvrent au befoin, leurs petites cabanes. Elles font auflfi employées pour adoucir les inflammations des playes, & pour faire des bains à ceus qui ont des nerfs foulés, ou quelque autre debilité. Sa fleur, qui croift commeune pan- nache, quieftcompofée de plufieurs petites coupes jaunes ow rouges, eft fuivie de boutons, qui font remplis d'un grand nombre de grains gros comme des pois, quifontfi LE & # durs qu'on en peut faire des Chapelets. L'Herbe ausfléches, eft une efpece d'herbe trié, car pen- dant le jour fes fleurs font toujours fermées , & durant la nuit elles font epanotiyes, Ses feüilles qui font d’un beau vert, font longues de fix ou fet pouces, & larges de trois, Saracinc étant Fée “ ADS AÎLES A NBIDUES IT 13% piléc, a la vertu déteindre tout le venin des flêches enpoifon- nées, etant appliquée fut la playe, lc plus promtément qu'il cf potlible. La plüpart des Herbes potageres que nous avons en France, . croiflent aufli en ces Iles. 11 eft vray qu'il y en a quelques unes, comme font les Chous & les Oignons, quine portent _ point de graine. On n’en manque pas toutefois ass cela, Car quant aus Chous, lors qu’ils font en marurité, il s pro- duifent plufeurs rejettons, que l’on transplante, & quien . pouffent d’autres, qui deviennent auffi gros & aufli beaus, que s'ils venoient degraine. Et pour ce qui eft des Oignons, les . Navires y en apportent quantité, qui produifent beaucoup . de vert, dont on fe fert ordinairement dans le potage, & dans des pois. Il y a auffi beaucoup de Melons communs, dont la graine acte portée deces quartiers; Mais a caufe de la chaleur du païs, ils meuriffent là plus facilement, ont la chair plus ferme, * & de meilleur goût, & font d’une plus fovêue odeur. Et ce quieft l'excellence, ch quel'onena, en toutes les faifens de l'année, Chapirr AN REG LE ‘IX Des CMelons d'eau. L croift en ces païs là, une autre efpece de Melons, qui font communs en Italie; Mais qui font fans comparaifon meilleurs en Egypte, &aulevant. 1len croift aufli en quel- ques endroits de France, mais il ne valent tien. On les _ nomme CHelons d'eau, parce qu'ils font remplis d’une eau fucrée, qui entrelañe leur chair, qui eft pour l'ordinaire, | vermeille, & rouge comme du fang aus environs du cœur, . où font contenus les grains de leur femence, qui font auffi . de même couleur, & quelquesfois noirs. Leur écorce de- 4 . meure toujours verte & fans odeur, de forte que c’eft à la tige, plutoft qu’au fruit, qu'il faut difcerner leur maturité. La croiffent fouvent plus gros que la tefle, d’une forme ron- | KR à de 332 Hisroins NaTURBLLE, Chap.11 de où en Ovale On les mange fans fel, & bien que lon. en mange en quantité , is ne nuifent point à l’eftomac: Mais. en ces païs-là quifontchauds, ilsraffraichiffent beaucoup, & provoquent l’appetit. On y cultive encore ds CAfays, qu’on nomme autrement Blé d’Efpagne, ou de Turquie, detoutes fortes de 4%}, des Concombres, des Citrotilles, des Bettesraves & d’autres Fa & nes , qui font toutes extremement bonnes & favourenfes, { æ ART CLR Des Lys des CAntilles. sde 1 T parce qu'il y en à qui pourroient outre: cote au _mander des fleurs. Il yen croiïft aufli de tres-belles, SC de tres-bonne odeur, Entre autres ils’y voit une efpece: de” Lys Chap.is Des ÎLES: ANTILLES: |. 13% Lys blancs d'une merveilleufe fenteur: Car ils ontune odeur pareille à celle du Jafmin , mais fi penetrante, qu'il n’en faut qu'une fleur, pour parfumer une chambre. L’Oignon & la . feüille font femblables à celles des Lys de France, mais la fleur afes feüilles cparpillées & divifées par petis lambeaus , com me fi elles avoient efté découpées par plaifir, avec des cizeaus. Ilyaencored'autres Lys, qui font du tout point pareils à nos. “tal jaunes, ou orangers, { ARTICLE XE De Deus fortes de fleurs: aude Paffion. N voit aus Antilles une Plante tres-renommée pour la: beauté de fes feüilles,, la douce odeur de fes.fleurs, & la: bonté de fon fruit. Les Efpagnols l’appellent Grezadile, les Hollandois Rhanz Appel, & nos François l2 fleur de la Paf- fion, à caufe qu'elle porte cette rare fleur, en laquelle on re marque avec admiration, une partie des inftrumens de la paf. fion de nôtre Seigneur, qui y font reprefentez. Il eft Vraÿ que quelques curieus qui l'ont confiderée attentivement, avoüent, qu'ils y ont bien reconnu quelque reflemblance de la couronne dépines, des foüets, des clous, du marteau, & de la Colomne: maisils ajoûtentaufl, que la plüpart de ces cho-- fes y font figurées, à peu prés en la même façon, que les Vier- ges, les Lions, & les Oursle font par les Conftellations cele- ftes; tellement, que pour trouvertoutes ces enfeignes de la: _ pafiondans ces fleurs-là, ils difent apres Acofta au 27 Chapi- tre du Livre quatrieme de fon Hiftoire, qu’ileft befoin de quel- que pieté, qui en fafle croire une partie. I y en a de plufeursfortes, quiont toutes cecy de com- munñ: que s’ ‘y elles ne rencontrent quelque arbre pour Fém- . braffer, &fefoutenir, ellesrampent fur la terre, comme fait de lierre : que. leurs. fleurs s’epanoviflent apres le lever du . Soleil, & fe reférment avant qu'il fe couche ; & qu'elles. produifent un fruit delicat & raffraichiffant au poffble. Mais. . les feüilles, les fleurs, & les fruits de quelques-unes, fonr fi dif ferens en leur forme exterieure, qu'ilne fe faut pas s'étonner K 3. | de: Pi à . 1» HiSTOIRE NaATU TES Le RELLE:, LE ee L4 LA Pa qi AR she) dd 6 4 cp . # * k men. mæÆs: ILES, À NTALGERES, © rs5 de ce que les Auteurs qui ont traittédecette Plante, & qui enter, qu'il n’yenavoit qu'une feule efpece, ne fe font pas accordez, dans les defcriptions qu'ils nous en ont données. Les Habitans du Brefil en content jufques à fét fortes: mais aus Antilles, l’onn’en connoît quelesdeus, dont nous avons: icy fait mettre les figures. L'une a les Piles affez larges, qui font partagées encinqfleurons, dont celuy du milieu eft rond parie haut, & les quatre autres fe terminenten pointe. Sa fleur étant épanoüye, eft plus ample qu'unerofe. Elle eft enferrée prés du pied, dans trois petites feuilles vertes ; fon corps eftcompofé de plufieurs autres belles feüilles, dont les unes font d’un bléu celefte, quieft parfemé de petites pointes: rouges, quiont la figure d'une couronne, & les autres font | de couleur de pourpre. Toute cette belle fleur et entourée d’uneinfinité de menus filamens ondez, qui font comme les rayons de ce petit Soleil entreles fleurs : ils font émaillez de blanc, de rouge, de bléu , d’incarnat, & de plufieurs autres vives couleurs, qui leur donnent une merveilleufe grace. L'autre forte, aauffiles feüillesdivifées en cinqparties com- me la premiere: mais fa fleur, qui a la figure d’une petite coupe, bordée par le haut de ‘petits filets blancs: & rouges, _n’eft point fiétendué ; le dedans eft orné de feuilles blanches, qui fe terminent en pointe. Ces deus efpéces de fleur delæ Paffion, pouflent de leur cœur une petite Colomne ronde, quia fur fon chapiteau un bouton charge de trois grains, qui ont la forme de clous: cette colomne eft accompagnée de cingfilets blancs, qui fapportent de petites languettes jaunes, femblables a celles qu’on voit dans la couppe. des Lys ; & c’eft ce qu'ondit reprefenter les cinq playes de nôtre Seigneur. 79 … Ces fleurs, qui font d’une douce odeur, venant atomber,. | Je bouton qui eft fur la colomne fe groflit tellement , qu'il s’en forme un beau fruit ; June, poly, & de la groffeur d’ une ._ pommemediocre. Son écorce eft aufli épaiffe c que celle d’u-- ne Grenade, & elle eft remplie d’un fuc delicieus au goût, parmy lequel, ilya un grand: nombre de pepinsnoirs & durs: - au poflible. On ordonne ce fruit, commeun fouvérain raf- . fraichiffement, à ceus quiont la fievre, & l'experience afait éVnnoître, qu aunefinguliere vertu pour reveiller l'appetir,. FECICCR. se | ; ; nn 136 HisTOIiREe NATURELLE, Chap. 14 recreer les efprits vitaus, & reprimer les ardeurs de l’efto=" mac; Les Habitans du Brefl entretiennent foigneufe-. ment cette Plante, de laquelle ils fe fervent comme d'un” fingulier ornement pour couvrir les berceaus & les cabi-" nets de leurs jardins, car fes feüilles & fes fleurs leur four-. niflent un agreable ombrage; & ils compofent avec le. fruit un fyrop cordial, qui eft fort cftimé parmy eus, à caufe. qu'outre les proprietez que nous avons déja dires, ila encore + cette qualité bien remarquable, de nc laifferaucundégoùt, à. ceus qui ont accoutume d'en ufer. L’écorce dece fruit & fes fleurs étans confites, proaiene tous les mêmes cffets que le fuc. AURUT T°C'LUEL EIRE De l’Herbe de Mur. L ya auffi une Herbe, que l’on nomme Herbe de Mufe. Elle. porte fatigeaffeshaut, & elle croift touffué, commeun pctitbuiflon fans épines. Ses feuilles font affez longues &: rudes, fes fleurs font jaunes fort belles à voir , enforme de ca- lice oude clochette, quife forment apresen un boutonañez gros, qui devient étant meur, d’un blanc fatiné en dedans, & de couleur de mufc en dehors. La graine que ce bouton re. ferre, eft aufli de cette même couleur brune: Ellefent par- fairement le Mufc , quand cle eft nouvellement cueillie. Dontaufli elle eft nomméc Graine de Mufc, & elle conferve long tems cette odeur, pourveu qu ‘on Ab en lieu fec, & dansquelque vaiffeau, où elle ne s'évente pas, Ainf plufieurs autres Herbes, plufieurs Atbrifleaus, & même la plufpart de ces vimesou Léenes ,; qui rampent parmy lesbuiffons, & qui s'élevent furles Arbres qui croiffent dans les Antilles, portent des fleurs aufli belles & agreables à {a veuë, qu'elles font douces & fovéues à l'odorar. De forte. que bien fouvent en allant par la campagne, on à re en D. | Hieus; où l’airtenefttout patfumé. obhio a * + Pt Es ; : 1 "LT 9 11 CAS ê ’ LE é = nt — * di —— Chap.12 LD Lacs LA NTM SET 37 ; ia | CHAPITRE DOUZIEME. | pi De cinq fortes de Be$les à quatre pieds, qi’ 0% 4 trouvé en ces Îles. .Vant que les Efpagnols & les Portugais euffent dref- fé des Colonies en l’Amerique, on n'y voyoit ni Chevaus, ni Bœufs, ni Vaches, ni Moutons, ni Bre- bis, ni Chévres, ni Pourceaus, ni Chiens. Mais pour faciliter _ leurs navigations, & raffraichir leurs vaiffeaus dans le befoin, ils jetterent de tous ces animaus en divers lieus decenouveau Monde; oùilsont tellement multiplié, qu’a prefent ils y font plus communs, qu en aucun endroit de l’Europe. Outre ce Betail étranger , il a eu detout tenis dans les An: tilles quelques Beftes à quatre pieds, telles que font, l'Opaf- um, le'Zavarés, le Tatou, l'Agouty, & le Rat mufqueé, dont nous feronsles defcriptions en ce Chapitre, PT oI 6 LE»... Motos De L'Opafum. ’Opaflum, quieft le même animal que les Brefiliens nome By ment Carigueya, eft de la groffeur d’un Cochon de fix fé-” -maines. la le muféau pointu, la machoire d’enbas plus cour- te que celle dedeflus, commele pourceau : les orcilles, lon _gucs, larges & droites, & la quetie longue, pelée par le bout, AC recourbée. Il eft couvert fur le dos d'un poil noir entre- mélé degris, & fous le ventre & fous le col, ileft jaunâtre. H a des ongles extremement pointus, avec let quels f grimpe Îc- ocrement fur les arbres. Il fe nourrit d’oifeaus, & ilfaitla chaffe aus poules comme le Renard, mais au defaut de proye, ile nourrit de fruits. Cequieftde particulier en cet Animal, cf, que par une ingularité bien remarquable, il a une bourfe de fa peau méê- mercpliée fousleventre, dans Jaquelle il porte fes peris, jef- NS) | quels Der 135 HISTOIRE NATURELLE, . quels il lafche fur terre quand il veut, en defferrant cette. bourfe naturelle. Puis quand il veut pañier outre, il l'a r’ou- vre, &lespetis rentrentdedans, & il les porte ain par tout. . La femelle les allaitte fans les pofer à terre; car fes mams« melles font cachées dans cette bourfe, quieft en dedans cou- verte d’un poil beaucoup plus mollet, que celui qui paroit en dchors. La femelle produit ordinairement fix petis. Mais le mafle, qui a anfli un pareil fac naturel fous le ventre, les porte à fon tour, pour foulager la femelle, quoy qu'ilneles puiffe pas allaitter. Ces Animaus font communs dans la Virginie, & dans la Nouvelle Efpagne. La Baleine, n’ayant pas receu de. la nature lacommodité d’untelfac, à l’induftrie, à ce que die: Filoftrate , de cacher fes petis dans fa gueule. Et la Belette: aime tant fes petis, que crainant qu'on ne les luy dérobe, elle les prend aufli dans fa gueule , & les remnë de lieu cm autre. AR TEE TE IE. Du Iavaris: Ï L y a aufli en quelquesunes decesIles, comme a Tabagoi uncefpece de Pourceaus fauvages, qui fe voient pareille- ment au Brefil, & en Nicaragua. 1ls font préfque en tout fem- blables aus fangliers de nos forefts. Maisils ontpeude lard, les oreilles courtes, prefque point dequêue, & ils portent leur nombril fur ledos. On en voit de tout noirs, & d'autres. qui ont quelques tâches blanches. Leur grongnément, eft aufMi beaucoup plus effroyable, que celuy des Pourceaus do-=- mcftiques. Onlesnomme Zavaris. Cette venaifon eft d’afiez. bon goût : Mais elle eft difficile à prendre, à caufe que ce Sanglier ayant un event fur le dos, par lequel il refpire & ra- fraichit fes poulmons, il eft prefque infatigable à la courfe.. & s’il eft contraint de s’arréter, & qu'il foit pourfuivy des. Chiens, il eft armé de defenfes fi pointuës & fi trénchantes,. qu'ildéchire toutceusquiont aflurance delapprocher. ARTI+ tt LAN + 14 La à à £ FA UN NE" hi. 171 \ N \ MR. DES ÎLES ANTILLES 139 AUREDILC LE LIN Du Tatou. Es Tatous, qui fe trouvent au M à Tabazo, font armés d’une dure ééaille, de laquelle ils fe couvrent & fe-pa- rent comme d’une cuiraffe. Ilont la tefte d’un Cochon, le mufeau de même avec quoy ils foüillent la terre, Ils ont auf en chaque patte, cinq ongles fort pointus , dont ils fe fervent pour renverfer promtément la terre, & découvrir les raci- nes, dontils s’ engraiflent pendant la nuit, On tient que leur chair eft delicate à manger, & qu'ils ont un ee la queüe, qui guerit la furdités L onaexperimenté qu'il fou- lage le bourdonnement, & qu'il appaife la douleur d'oreille, Je laiffant dedans enveloppé dans du cotton. Il y enaquifont gros comme des Renards , mais ceus qui font à Tabago, foût beaucoup plus petis. Quand ces Animaus font pourfuivis, & quand ils prençnt _ leur repos, ce qu'ils font ordinairement durantle jour, ils fe mettent en forme deboule, & ils ramaffent fi bien leurs pieds, eur tefte, & leurs oreilles fous leurs écailles dures & folides, qu'il ny à aucune partie deleur corps, quine foità couvert fous cette curafñle naturelle, quieft à l'épreuve des armes des chafieurs & des dens des chiens, & s'ils font prés de quelque precipice , ils fe laiffent rouler du haut en bas, fans creinte de {€ faire mal. L'’Infcot recite qu'aus Indes Orientales, en la Riviere de Goa, fut pris un Monfire Marin, tout couver! d'écailles , dures àl’égaldufer; & quilors qu'on letouchoir, fe retiroit ainfi en une pelotte. AR FF LC LE ‘IV. De l CAgouty. TT, so), eft de couleur brune tirant fur le noir. Tale poil rude, clair, & une petite queüc fans poil. Ila deus de en la machoiré den haut, & autant en celle d’en-bas. Si2 ji 140 FH arb à ne NATURELLE. Chap.ral 11 tient fon manger en fes deus pattes de devant , comme l'Efcurieu. Iljette un cry comme S'il difoit diflin&ements Coïyé, On le pourfuit avec les chiens, parce que fa chair,” quoy qu’elle fente un peu le fauvagin, eft eftimée de plu- fieurs, autant que celle du Lapin. Quand il eftchañté, il fe ._ fauve die le creus des Arbres, d’où onle fait fortit avec h° fumée, apres qu'ilacrié étrangement. Si on le prend jeune, il s 'aprivoife aifément, & lors qu’on le met en colere, le poil. de deflus fon doss 'heriffé, & il frappe laterre de fes pattes de derriere, comme font les lapins, Ileft aufli de même groffeur. Mais fes oreilles font courtes & rends" & fes dens font tren- ‘chantes comme unrafoir. | | LR TE F'CE'ES Re Des Rats CMufqués.: Es Rats Mufqués , que nos François appellent Ps/oris, font le plus fouventleur retraitte dans les trousde la ter- ré, comme les Lapins, aufli ils font prefquedela-mème grof. fcur, mais pour la figure, ils n’ont rien de different de celle des gros Rats qu’on voit ailleurs, finon quela plufpart, ont ie poil du ventre blanc commeles Glirons, & celuy du refte du corps, noir outanné. Ils exhalentune odeur Mufquée, qui abbat le cœur, & parfume fi fort l'endroit de leur retraitte,. qu'il ef fort aifé de le difcerner. La Terre ferme de l’ Amerique, nourrit plufieurs Ka US quatre pieds, qui ne fe trouvent en aucune de ces Iles. CHA- L PT de af Chap. 12 qe ne PT TT \ 1 - Rae LA pbESs ÎLES ANTILLES, AT TS des Rats Mufques - Ne SN CS “ma Histoires NATURELLE, Chap, 198 CHAPITRE TREIZIEME, Des Reptiles qui Je voyent en ces Îles. Presavoir reprefenté au Chapitre precedent, lesBe- ftes à quatre pieds, quife font trouvées aus Antiles, “ “5 à [ors que les Colonies étrangeres s’ ; font établies : nous devons à prefenttraitter des Reptiles , qui y font aufli en. grande abondance: car ces animaus qui font naturellement ennemis du froid, fe multiplient merveilleufement dans ces pays chauds: Joint que les grandsbois, & les rochers de ces Iles, contribuent beaucoup : à leur production, car ilsleurs fervent de retraitte affurée. ART 1 C LÉ De plufieurs efbeces de Serpens € de Couleuvres. L y a fort peu de Beftes venimeufes dansles Antilles. Ileft v'ay qu’ilyabeaucoup de Serpers & de Couleuvres de dit- ferente couleur & figure. Il s’en voit de neuf a dix pieds de long, & de la groffeur du bras & de la cuifle. On y a même une fois tué une de ces Couleuvres, qui avoit dans fon ventre une Poule entiere avec la plume, & plus d'une douzaine d'œufs, ayant furpris la poule comme elle couvoit.-Il s’en eft trouvé uneautre, quiavoit engloutyun chat. D'où l’on peut aifément juger, ‘de la groffeur de ces Beftes. Mais quelques prodigieufes qu’eiles foient, elles n’ont aul- cun venin en la plüpart de ce Terres. Et même plufieurs ha- bitans, en ayans fur la couverture de leurs maifons, qui eft fait le plus fouvent des feüilles de Palme, ou de Cannes de Sucre ; ils neles en chaffent pas, à caufe qu’elles dénichent & _devorenttousles Rats. Mais il fauttout dire, elles font auf ja guerre aus Poulets. Onaencoreremarqué, que quelques unes ont l’adrefle de oarder une poule lors qu'elle couve,” fans Juy faire aucun mal pendant ce tems-là: Mais fi toit” | que. 4 + - r S À 2 F i 3 Va | : Fe k de a ir Ha Est | ‘ J ESA ANT 2370) RES pis pes ÎLES ANTILLES. 143 que les œufs font éclos, elles mangent les pStis pouffins, & du moins fuffoquentla poule, s’yelles ne font pas affez puif. fantes pour l’engloutir. .]l y ena d’autres qui font parfaitement belles & agreables à voir: car elles font entiereinent vertes, horsmis fous le ventre , qu’elles font d’un grisblanc. Elles font longues, d’u- ne aulne & demye, & qûclanefois de deus: Mais celles font fort deliées à proportion, n’eftant pour Le plus, que de la grof- feur du poulce. Elles ne vivent quedegrenoüilles, qu'elles épient prés des ruifleaus, oud’oifeaus, qu’elles guettent fur” les Arbres, & dans leurs nids, lors qu’elles y peuvent attein: dre. Ainfi cette efpece de Couleuvre eft noble par deffus les. autres: Car ellene vit que de péfche & dechañe. Quelques Habitans, qui font acoûtumez à voir toutes ces fortes de Couleuvres, les manientfans crainte, & les portent en leur fein. Ceus quiont voiagé en Alie & en Afrique, difent qu'ils: y ont trouvé quelque chofe de femblable. Car ils rappor= tent qu'en la grande Tartarie, il y a des montagnes, où fe nourriflént des Serpens d'une srofieur prodigieufe , mais- nullement venimeus, & tresbons à manger: Et qu’au Royau- me de Syr, ils ont veu de ces Beftes, fe jouer avec des enfans, qui leur donnoient un morceau depain. On ditaufli, que dans les Provinces des Antes, au Royaume du Perou, ilya. d'effroyables Coulcuvres, longues de vintcinq à trente pieds, | qui ne font mal à perfonnc. Quant aus Iles de la CHartinique ; & de Sainte t Aloufie, il n'en cft pas de même qu'aus autres Antilles; Carilyena: qui ne font point dangereufes, & d’autres qui le font beau-- Coup. Celles qui ne le font pas, font plus groffes, &: plus longues que les autres. C’eft pourquoy-ceus quineles. connoiflent pas, en ont plus depeur, que de celles qui font: véritablement à craindre, Neantmoins ciles ne font aucun mal: au contraire, dez qu'elles apercoivent une perfonne, €lles s’enfuyent avec diligence. Ce qui eft caufe qu’on les appelle Courereffes.. Elles ontaufñli des taches noires & blan- ches fur le dos , qui fervent à. les faire reconnoitre plus piment. | Les: | Nec x ”, FLE Er C++ MUR 144 HISTOIRE NATURELLE, Chapxn Les Couleuvres dangereufes, font de deus fortes. Les” unes font grifes fur le dos &-fort veloutées. Les autres font. toutes jaunes, ou roufles & cffroyables à voir , à caufe de cet te couleur, bien qu'elles ne foient pas plus dangercnfés &. peuteftre encore moins, que les premieres. Les unes & les“ autres ayment fort les or aufli bien que celles qui n'ont point de venin, Et lors qu ‘ y en a beaucoup en une cafe, c’eft merveille s’il nyaauffi des Coulcuvres. Elles font de dif. ferentegroffeur & longueur, & l’on tient que les plus courtes,” font celles qui font le plus à craindre. Elles ont latefte platre! & large, la gueule extremement fenduë, & armée de huit” dens, & qu elquefois dedix; dont les unes font crochuës coma me un croiffant, & tellement pointuës, qu'il eftimpofble. de s’imaginer rien de plus. Et commeelles font toutes creu- fes, c’eft par ce petit canal qu’elles font couler fubtilement! leur venin, quieft renferme dans de petites bourfes, aus deus coftés de leur gueule, à l'endroit precifement où répondent: les racines deleursdens. Elles ne mâchent jamais les alimenst dontelles fe nourriflent: mais les avalent toutentiers, apres les avoir preffez & aplatis, s'ils fonttrop gros. Quelques. uns difent, quefielles em ployoient leuts dens à les mâcher, elles. s ’empoifonnéroient clles mêmes, & que pour obvier à cela, elles couvrent leurs dens de leurs gencives, lors qu’elles pre nent leur nourtiture, . Ces Animaus font fi venimeus dans ces deus Îles, que. quand ils ont piqué, s’y l’on n’a recours promtément, à quel- que puiffant remede, la bleflure fe rend incurable, en moins de deusheures. Ils ont cecy de bon, qu'ils ne vous mordent. jamais, pourveu que vous ne les touchics pas, ni rienfur, quoy ils fe repofent. | s AR ET 'HiCrL EN He De Leÿars. Lya pluñeurs fortes de ZLezars dans ces Iles. Les plus, gros & ies plus confiderables , font ceus que quelques In diens ont nommé Zgwanas, les Brcfiliens Serembi , & nos Ca raibes R / ? PEN | DES hat À à MES | 145 raibes Ouäyamaca. Quand ils ont pris leur jufle confifience, ilsont. cnviron cinq pieds de longueur, à mefurer dépuis la teñte, jufques à l’extremité de la queüe, quieft bien aufli lon- UE que: Je refte du corps: Et pour leur groffeur elle peut cftre d'un pied en circonference. Sclon les divers terroirs ou ils.fe nourriflent, ils ont aufli la peau de differente couleur. Ét c'eft peuteftre pour ce fujet, que les Portugais les ontnom- _més Cameleons , &{e font perfuadez que s’en eftoitune cfpece. Enquelques lles, les femelles font couvertes d’un beau vert, qui-eft marqueté de blanc & de noir, & les mâles font gris: En d’autres ils font noirs, & les femelles font d’un gris de rayé de noir & de vert, ily a même des lieus, où les males & les femelles ont toutes les petites écailles de leur peau, f éclatantes, & fi chamarrées, qu’on diroit à les voir de loin, qu'ils foient couverts d' une riche toile d'or, ou d'argent. Ils ont fut le dos des épines en forme de crête, qu'ils dretfent & couchent quand ils veulent, & qui Vontroujours en amoin- driffant dépuis la tefte jufque au bout de la queüe. Ils font : portez fur quatre pieds, quiont chacun cinq griites, qui font munies d'ongles fort pointus. Ils font fort légers à à lacourfe. & ils grimpent des mieus fur les arbres. Mais, foit qu’ils aiment de confiderer leshommes, ou qu’ils foient d'un naru- rclftupide, & peu apprehenfif, quand ils fontapperçeus du chañfeur, ils attendent patienment le coup de fléche, ou de fufil fans branler. Et même , ils fouffrent qu’on leur mette an colun las coulant, qui eft attaché au bout dela perche, dont on fefertafles fouvent, pour les tirer de deffus les Arbres où ils repofoient. Quand ils font en colere, ils enflent un grand gofer, quileur pend fous le col & quiles rend epouvanta- bles, ils ont aufli la gueule fort fendué , lalangue épaifle, & quelques dents affez pointuës. Ils ne demordent pas aifé- ment, cequ'ils ont unc fois ferré : mais ils n’ont point dé Venin. Les Femelles, ont des œufs qui font dela groffeur de ceus des Ramiers, mais ils ont la coque molle. Elles les pofent affes profond dans le fable, qui eft au bord de lamer, &les. “aient couver au Soleil, d'oùeft venu que quelques Auteurs, les ont mis catte les animaus amfbies, ‘Les Sauvages ont 4 T À aprins 51 VON 146 HISTOIRE NATURELLE, Chap.18… aprins aus Europeensle moyen de prendre ces Lezards, & la hardicffe de les manger à leurexemple. Ils font tres-dificiles à tuer. De forte qu’à quelques uns, l’on a donné jufques à trois coups de fufñil, & emporté une partie des entrailles, fans qu'ils fuffent abatus. Cependant, en leur mettant un petit. boisdans lenez, ou une épingleentre les deus yeus, yaiant” là un petit trou, où l’épingle entreaifément, on les fait mou- riraufli-tôt, Les Caraibes, font fort adroits à les prendre avec un laqs coulant, qu'ils leur pañfent fubtilement fur le cou, ou bien les ajant attrapés à la courfe, ils les faififfent d’une main par la queüe, laquelle étant fort longue ; donneune belle prife: & avant qu'ils fe puiflent retourner pour les mordre, ils les prenent fur le chinon du col: Et puisils leur tournent. les pattes fur le dos, ilsleslient, & les confervent ainfi en vie” plus de quinze jours, fans leur donner à manger. Leur chair eft blanche , & en desendroitscouvertede graïffe. Ceus qui en ufent , latrouvent fort delicate, lors nommement qu’on à relcyé un certain goût fade qu'elle a naturellement, par de bonnes épices & quelque fauce piquante. On ne confeille: pas ncantmoins d'en manger fouvent, à caufe qu’elle défeche trop le corps, & lui fait perdre tout fon embon-point. Les œufs font fans glaire, & n’ont au dedans que du jaune, qui rend le potageaufli excellent, que nos œufs de poule. Outre ces gros Lezars, onen voiten ces Iles de quatre au= tres fortes qui font de beaucoup plus petis. Nos François les. nomment C4yolis, Roquets, Maboujats, & Gobe-mouches. SR LICLE, KE Des CAnoli, Es L4nolis, font fort communs en toutes les habitations. Ils font de la groffeur & de la longueur des Lezars qu’on: voiten France: Maïs ils ont la tefte plus longuette, Ja peau jaunatre &-fur le dos,ils ont des lignes rayées de blei., de vert & de gris, qui prenent depuis.le deffus de latefte, jufques-au bout delaqueüe. Ils font leur retraitte dans les trous de la tetes % c'eft de-là que pendant la nuit ils font un bruitbeau-" coup; ; 11 NA GA “Chips ps ÎLIS ANTILLES. 47 coup plus penetrant, & plus inportun que celuy des Cygales. Le jourils font en perpétuelle a&ion, & ils ne font que rodet aus environs des Cafes, pour chercher dequoy fenourir. ARTICLE IV. bu re Des Roquets. L Es Aou: font plus petis queles L4r0o/#. Ils ont la peau de couleur de feüille morte, qui eft marquée de petis points jaunes, ou noirâtres. Ils fade portez fur quatre pieds, dont ceus de devañt font affes hauts. Ils ont les yeus étince. Jans & vifs au poflible. Ils tiennent toujours la tefte élevée cnfair, &ils font fi difpos, qu'ils fautelent fans cefle, comme des oifeaus , lors qu'ils ne veulent pas fe fervir de leurs aifles. Leur queüe eft tellement retrouffée fur le dos, qu’elle fait comme un cercle & demy. Ils prenent plaifir à voir les hom- mes, & s'ils s’arrétent au lieu ou ils font, ils leur jettent à chaque fois des œillades. Quandils font un peu pourfuivis, ils ouvrent la gueule, & tirent = langue comme de petits pre de chañe. A RTE C L'E LT Des Mabonÿ as. L Es Afabonjas font de differente couleur. Ceus qui fe tien- nent dans les arbres pourris , & aus lieus marécageus, comme aufli dans les profondes & étroites vallées où le Soleil nepenetre pas, font noirs & hideus tout ce qui fe peut, & c’eft fans doute ce qui a donné occafion de les appeller du même nom, que les Sauvages ont impofé au Diable, Ils ne . font gros pour l’ordinaire ,. qu'un peu plus que le pouce, huilé fix ou fét de longuenre Ils ont tous la peau comme ile, 1 a 148 | H£STOIRE NaruRELLe, Chap.n AR TUT e "4 E AT Des Gobe-mouches. " Eus que nos François nomment Cl mali à caufe de. ‘leur exercice le plus ordinaire, & les Caraibes Oxleon… m4, font les plus petisde tous les Reptiles qui font en ces Iles. Hs ont la figure de ceus que les Latins nomment Sre/iones: Ilyenaqui femblent eftre couverts de brocatelde fin or. où d'argent , d’autres qui fontde vert doré ; & de diverfes autres raviffantes couleurs. Ils font fi familiers, qu'ilsentrent hardi- ment dans les chambres, où:ils ne font aucun mal: mais au. contraire les purgent de mouches, & de pareille vermine. Ce qu'ils font avec une telle d’exterité & agilité, que les ru fes des chaffeurs ne font pas à prifer, en comparaifondecel- les de cette petite Befte. Car elle fe tapit, & fe met comme en fentinelle fur quelque planche, fur la table, oufur quel- ques autres meubles, qui foyent plus élevés que le pavé; où elle efpere que quelque mouche fe viendra pofer. Etap- percevant fa proye, elle la fuit par tout de l'œil, & ne la quit- te point de veuë, faifant de fa tefte autant de differentes po. ftures, que la mouche change de places. L’ondiroit quelque. fois, qu’elle fe lance à demy corpsen/l’air. Et fe tenant fur fes. pieds de devant, halétant apres fon gibier, clle entr’ouve fa: petite gucule affez fenduë, comme fi déja ellele devoroit & l'engloutifloit par efperance. Au refte, bien que l'an menc du bruit enlachambre, & que l’on:s ‘approche d’ elle, elle. eftf attentiveà fachaffe, qu’elle n’abandonne point fon pofte; & ayant enfin trouvé fon avantage , elle s’elance f droit fur fa proye, qu'il arrive rarément qu’elle lui échappe: C’eft un divertiflement bien innocent, que de confiderer l'attention; que ces petites Beftes apportent, à chercher leur vie. : 16: De plus si font fi privées qu’elles montent fur tatable quand on mange ÿ & fi elles apperçoivent quelque mouche; elles la vont prendre jufques fur Les aflietes de ceus qui man-. gent, & même fur les mains & fur les habits. Elles font d'ail: Fun fipolies & finettes, qu'elles ne donnentpoint d’averfion: | ji | ni chambre, où il y avoit un tour de lit de taffetas changeant, hap, 13 DEsse ÎLES: ANTILLES: | 149 fi de dégoût, pour avoir palté fur quelqueviande. Pendant la nuit, elles tiennent leur partie en cette mufique que font les Anolis, & lesautres petis Lezars. Et pour fe perpetucr, elles font de petis œufs gros comme des pois, qu’elles cou- vrent d’un peu deterre, les laiffant couver au Soleil, Si toft qu'onlestué, ce qui cf fort aifé, à caufe de l'attention qu’el- les apportent à leur chaffe, elles perdent incontinenttoutleur Juftre: l'or & l’azur, & tout l'éclat de leur peu fe ternit , & devient pâle & livide. | , j . Siquelqu’un de ces petis Reptiles que : nous venons de dé- cxire , _devoit eftre tenu pour une cfpece de Cameleon, fe de- yroit "eftre ce derniers à caufe qu’il prend volontiers la cou- leur, de tout ce furquoy:il fait fa refidence plus ordinaire, Car ceus qu’on voit à l’entour des jeunes Palmes, font entie- rement verts comme les febillesde cet atbre. Ceus quicou- rent fur les orangers, font jaunes comme leur fruit; Etmême il s’eneft trouvé, qui pour avoir efté familiers dans une Lt produifi irent une-infinité depetis , quiavoienttoat le-corps émaillé de diverfes couleurs, toutes femblables à lornement du lieu où ilsavoient accés. : Onpourroit peuteftre attribuer: _ceteffer,. à la force de leur petite imagination : mais nous laif= fons cette f] rl aus curieus.. }. see LUE Ci ES Fe Te 2 Des Brochets de terre. FL y.a encore en plufièurs dé cesiles des Brachers dé terre; À quiontl’entiere figure la peau, & la hure denos Brochets de Riviere. . Mais au liew de nageoires, ilsont quatre pieds; qui font fi foibles; qu'ils fe trainent fur laterre-en rampant, & enfcrpentant commeles Couleuvres, ou pour demeurer en nôtre comparaifon , comme des Brochets , qui font hors de ‘Jeau, Les plus grands, ne péuventavoir que quinze pouces _delong, furune gtoffeur proportionée. Lenrpeau, eft cou verte. de. petites écailles, qui font extremément luifantes, m L T 3: & de: 150 Hisrornz NATURELLE, Chap. 15 & de couleur de gris argenté. Quelques curieus, enont de petis en leurs Cabinets, qu'onleura fait pes né des sale) mandres. Pendantla nuit, ils fontun bruit cHfroyable de deflous 1e | rochers , & du fonds des cavernes où ils fe tiennent. Lefon qu’ils rendent eft beaucoup plus fort, & plusdefagreable que celuy des Grenoüilles & des Crapaus , & ilfe change & fe diverfifie, fuivant la varieté deslieus, oùils font cachez. Ils” ne fe montrent préfque point, qu’à l’entrée de la nuit, & quand on en rencontre de jour, leur mouvément, qui et tel que nousavons dit, donne de la frayeur. ART LCL IE: VAE = Des Scorpions CG" d'une autre ass de dangerens pr L ya auffi des Scorpions, qui ont la même forme, que ceus qu’on voit en France: mais ils n'ont pas un venin fi dan- gcteus , ils font jaunes, gris, ou: bruns, con les différens terroirs où ils fe trouvent, En foüillant dans les lieus harécageus pour y faire des Puits, ou des refervoirs d’eau, ontrouve fouvent uneforte de Lezars hideus au poñlible. Ils font de la longueur de fix. pouces ou Environ. La peau de leur dos eft noire, & parfemée de petites écailles srifes, qui femblenteftre huilées, tantelles font luifantes. Ils ont le déffous du ventre écaillé commele dos: mais la peau qui le couvre, eft d’un jaune pâle. Leur tefte cft petite & pointué, Leur gueule qui eft affez fendueë, eftarmée de plufieurs dens, qui font extremément trenchan- tes. lis ont deus petis yeus, mais ils ne peuvent füpporter la lumiere du jour, car auffi-tôt qu’on les atirez delatérre, ils tachent incontinent de faire un trou avec leurs pattès, qui ont chacune cinq ongles durs & crochus, avec quoy ils fe font ouverture de même que les Taupes ,” pour penetrer par toùt où ils veulent. Ils font un grand ravage dans les jardins ; ron- geant les racines des Arbres & des Plantes. Leurmorfure, eft auffi autant venimeufe, que celle du Lt dangereus Serpent. Le H As! # : EN . » n Gros Lezart noume Tuanes F7 ee () on a rm CA À ARR ANA AAA A f AAA {| < ass hs Al ;. sil NE cs — TE = pe NP TERME DD) ] LNTES. " Aa à. sp, 077 LD) = x ; à in ! NS SS (Le men = y J / CE En D rPRSA CS LPs ris instant sons CL LL SSA À PSC APCE à à MTL VE , \ A SLT F ne” HT lé \ OK (} Re + ar K « a Le ci POPAR DT 7 KA RRKKKKKKKKKKKKKKKÇ ANR \ SE NN A uk 2. 2 £ A À NE | $ + \ \ À NN (a) NAN A F # “a | 5 oobe mouches mur =D LA à RhTSS 7 FÉES 152 : H EST-OULRE: N AT U R ELLE, Chap. 14 : CHAPITRE QUATORZIEME. Des Infeéles qui font communs aus Antilles. r On feulement les cieus, & les autres plus vaftes & plus relevez corps de la nature, racontent la gloire =. % du Dieu fort : mais mêmeles plus petites & les plus A ter de fes produtions, donnent aufli à connoitre l’ou- vrage de fes mains, & fourniflent à tous ceus qui les confide-. rent avec attention, une riche & abondante matiere, pour exalter la puiffance | , de fa Majcfté Souveraine. C’ et pour quoy nouscroyons, queceus qui fe plaifent à mediter les fe- crets de la nature, & de contempler les merveilles de Dieu, quiatiré de fes inépuifables trefors, tant de riches ornemens, de proprietez occulres, & de rares beautez, pour en revétir les moindres de fes creatures : auront pour agreable, que nous donnons ce Chapitre, à la confideration de quelques Infeétes, qui fe voyent communément aus Antilles, & qui fonttous revétus de quelques qualitez particulieres, comme d’autant de rayons de gloire, qui foutiennent & relevent avee éclat, leur foibleffe & leur bafeffe naturelle. À R T.l GEL EE Des Soldats, € des Limaçons. Ntre les Infeétes, qui font en abondance en ces pais chauds, ily a uncefpece d’Efcargots, ou de Limacçons, que les Francois appellent So/dats, parce qu'ils n'ont point de coquilles qui leur foyent propres & particulieres, & qu'ils. ne les forment pas de leur propre bave, comme le Limaçon: commun: mais, que fi toft qu’ils font produits de quelque matiere corrumpué, Ou autrement, ils ontcetinftinét, pour mettre la foibleffe de leur petit corps à couvert des injures de l'air, & de l'atteinte des autres Beftes, de chercher une mai- fon étrangere, & de s'emparer de tel coquillage qu'ilstrou- vent Ch pES Les ANTILLES. ET Dent leur eftre propre, dans lequel ils S’ajuftent & acCOMmMOo= -dent,:comme-les Soldats qui n'ont point de demeure arrétée: mais qui font toujours leur maïfon de celle d’autruy., felonla rencontre & la neceflité. ù On les voit plus ordinairement en des coques de Burçaus, qui font de gros Limaçons de mer, qu'ils rencontrent à la co- te, à laquelle ils font pouffez, quand Île poifflon qui en étoitle premier hofe, eft mort. Mais, on trouve aufli de ces petis Sol- dats., en toutes fortes d’autres coquillages, même en des: Co= ques de nois de Liénes, & onenaveus quelquesuns, qui s’é- toient fourrez dans des pieds de groffes Crabes mortes. 11 ont encore ccttcinduftrie, qu'a mefure qu'ils grofliffent, ils changent de coquille, felon la proportion de leur corps, & en prennent une plus ample, dans laquelle ils entrent quittant ia premiere. De forte qu'on en voit de differentes faffons & figu- res, felon la diverfité des coquillages qu'ils empruntent, I yà apparence que c'eft de ces Soltars que Pline parle fous le nom d'une-efpecc de petite E creviffe, à quiilattribue le mê- me. Ils ont toutle corps fort tendre, horsmis latefle & les pattes. Ils ont pour pied & pour défenfe, un gros mordanr, femblable au pied d'un gros Cancre, duquelils ferment l’en- trée de leur coquille, & parenrtout leur corps. 11 eft dentelé au dedans, & il ferre fi fort ce qu’il peut attraper, qu'il ne démord point, fans emporter la piece. Cétinfeéte, va plus vifte que le Limaçon commun, & ne falit point de fa bave, l'endroit où il pañfe. Quand onprend ce Soldat il s'en fafche, & fait du bruit. Pour luy faire rendre la maifon qu’ila prife, on en approchele feu : & auf tôt il fort de laplace. Sionläluy soi pour yrentrer , il s'y remet par le derriere. Quand il s’en rencon- _treplufieurs, qui veulent quitter en même rems eur vieille maifon, & s'emparer d’une nouvelle, qui leur agrée à tous: c’eft alors qu ilentrent en une grande conteftation, & qu'apres S’eftre opinâtrez au combat, & avoir joué de leurs mordans, les plus foibles fontenfin contrains de ceder au victorieus, qui fe faifit aufMfi tôt de la coquille, de laquelle il joüit en paix, comme d’une précicufe conquefte. | Drpeslaues. uns des habitans en mangent, comme on faiten V auci- ré. HisTorre NATURELLE, Chap.rg quelques endroits les Efcargots: Mais ils font plus propres. à la Medecine, qu’à la nourriture. Car étans Ôôtez delcur. Le & mis au Soleil, ils rendent une huyle, quieft fort profitable à la guerifon des goutes froides, & qui s'employe aufli heureufement, pour amollir les duretez, & les callus: du corps. è Il y a encore dus fortesde petis Limagons, qui font fort beaus. Les uns font plats comme les bonnets de Bafques, &c: de couleur brune. Les autres font pointus, & tournez en forme de vis de prefloir, ils font aufli rayez de petites ban des rouges ;. jaunes & violettes ;. qui les font cftimer des. Curicus. À R TIGE E IE Des Mouches. Lumineufes.. N voitences les, plufienrs efpecesdegroffes Æ7ouches: ? de differentes figures & couleurs. Mais il faut donner lc premicrlieu.. à celles que les François appellent Æ1owches: Lumineufes, que quelques Sauvages nomment Cueuyos, & les. Caraibes Coyouyou, d'un nom approchant. Cette Mouche n'eft point recommendable pour fa beauté, où pourfafisure,,. qui na rien d’extraordinaire: mais’feulement pour fa quali- té lumineufe. Elle eftde couleur brune, & dela groffeur d’un. Hanneton, Elle à deus ailes fortes & dures, fous lefquelles font deus ailerons fort deliez, qui ne paroiffent que quand , ÿ cuffent employé routes les régles de Ia perfpeétive , & les > adouciffemens de la peinture. Ledeflous du corps, étoit de », même couleur que la tefte, horsmis, qu'ils y avoit fix pieds >, noirs, repliez proprement contreleventré. Sionepanoüife >, foit les ailes, qui étoient dures & folides, on appercevoit :, deusaïlerons, quiétoient plus deliez que de la toile de foye, , & rouges comme écarlate. Je la vis en l'Ile de Sainte Croix, », entre les mains d’un Anglois & j'encouchai à l'heure même », la defcription fur mes tablettes. Je croiois au commencé- », ment qu’elle étoit artificielle, à caufe de cet incarnadin fi vif, », & de ce filct d'argent, mais l'ayant maniée ,je reconnus que , la nature étant fans doute enfes plus gayes humeurs, S’étoit. :,divertie à patet fi richement, cette petite Reine entre les n Infeêtes. * ‘AR ris $ TR ONBSS T4 281 À NITAILUESS NO - fée MR DT obC Lo EraciEV.2 Des CHMillepieds. Et Infeête eft ainfi nommé, à caufe de la multitude pref. ny queinnombrable de fes pieds, qui herifflent tout le def- fous de fon corps, & quiluy fervent pour ramper fur laterre, avec une vitcfle incroiable, lors notamment qu'il fe fent pourfuivy. Il a de longueur fix pouces, ou environ. Le deffus de fon corps eft tout couvert d'écailles tannées, qui font fort dures, & emboittées les unes dans les autres , com- me les tuiles d'un toit: mais ce qui eft de dangereus en cet animal, eft, qu’il a des mordans en fa tefte & en fa queüe, dont il pince fi vivément, & gliffeunfimauvais veninen la: partie qu'il ableffée; que l’efpace de vint-quatre heures, & quelquéfois plus long tems, on y reffent une douleur fort aiguë. | | de Ro D LE EVE Des CAraignées. : MN voit en plufieurs des Antilles, de grofes tu #raignees;. que quelques uns ont mifes au rang des Falanges à cau- fe de leur figure monftrueufe,.& de leur groffeurfi extraordi- naire, que quand leurs pattes font étendués, elles ont plus: de circonference, que la paume de la main n’ade largeur. Tout leur corps eft compofé de deus parties, dont l’une eft platte, & l’autre d’une figure ronde, quiaboutiten pointe, comme un œuf de pigeon. Elles onttoutes, un trou fur le des ; qui eftcomme leur nombril Leut gueule ne peut pas: facilémenteftre difcernée,. à caufe qu’elle eft préfque toute couverte fous un poil d’un grisblänc, qui eft quelquefois en _treméle de rouge. Elle eft armée de part & d'autre, dedens crochets fort pointus, qui font d’unematiere folide ; & d’un: _noirfi poly & fi luifant, que les Curieus les enchaffenten er, pour s’en. fervir. au lieu de Curédens, qui font-fort eftimez: | | dE. à à Ÿ pe Te Ps ES CSM y k Riou 160 HISTOIRE. NATURELLE, ché de tous ceus , quiconnoiflent Ja vertu qu'ils ont, de preferver de douleur, & de toute cerrustien, les parties quien font frottées. Quand ces Araignées font devenuës vieilles, elles on couvertes par tout d’un duvetnoirâtre, quieft auffi dous , &. auf preffé, quedu velours. Leur corps, eft fupporté par die pieds, qui font velus par les côtez, & heriflez en défous de petites pointes, qui leur fervent pour s'accrocher plus aifé- mentpar tout, où elles veulent grimper. Tousces piedsfor«" tent de la partie de devant : LS ont chacun quatre jointures,l & parle bout, ils font munis d'une corne noire & dure, qui eftdivifée en deus, commeune petite fourche. | Elles quittent tous les ans leur vieille peau , comme Icst ferpens , & les deus crochets qui leur fervent de dens & de defenfe; ceus-qui rencontrent ces precieufes dépoüil- les , y peuvent remarquer la figure entiere de leur corps; telle que nous l'avons fait dépeindre à la finde ce Chapitre. Leurs yeus fontfipetis, & fi enfoncez, qu'ils ne paroiffent que comme deus petis points. Elles fe nourriflent de mou- ches, & de femblables vermines, & on a-remarqué qu’en quelques endroits, elles filent des toiles qui font fi fortes, que les petis oifeaus qui s'y. embarraflent, ont bien de la péne de s'en développer. On ditle même des Araignées, qui fetrou=. Vent communémeut dans les Iles Vermudess qui font habi- tées par les Anglois ; il eft aufi fort probable, qu'elles font d'une même efpece, 18 AR T'I1:C L :E VE Du Tigre volant. | O N a donné à cet Infeéte, le nom de Tigre volant , à eaufe qu'il eft marqueté par tout fon corps,de taches de diver- fes Couleurs, de même quele Tigre. Il eft de lagroffeur d’un Cerfvolant. Sa tefte eft pointue, & embellie de deus gros Yeux, qui fontaufli verts, & aufli brillans qu’une Emerau- de. Sa gueule eft armée de deus crocs durs, & pointus au pofible, avec lefquels iltient fa proye, pendant qu’il en tire | le. : « / : k ] Lie . : : 2 4 , | ï (LL 4 “ À AUR ? Aa 7 gr pis é NH AU dE KË ape Ds: ILES: ANTILLES: |: #61 le fac. Tout fon corps eftrevétu d’une croute dure & bru- ne, quiluifertcomme de cuirafle. Ses ailes, qui fontaufi d’une matiere folide, couvrent quatre ailerons, qui font auf deliez que de la toile de foye. Il a fixpattes, quiont chacune trois jointures, & qui font heriflées de plufieuts petites poin- tes. Durant le jour, il s'occupe continuellement à la chaife d’autres Infeëtes, & pendant la auit, il fe perche fur les ar- bres, d'où il fait un bruit tout pareil aë Chant des Ci- gales. A RE T CE: Er VAT, 4 Des C Abeilles , € de quelques autres Infectes. Fr Es Abeilles , qu'on voit aus Antilles ne font pas debeau- | As differentes de celles, qui fe trouvent en l’Ameri- -que Meridionale : maisles unes & les autres, font plus peti- tes que celles de l’Europe. Il y enaqui font grifes, & d’au- tres, quifont brunes, ou bleuës: ces dernicres font plus de cire & de meilleur miel. Elles fe retirent toutes, dans les fen- tes des rochers, ou dans le creus des arbres. Leur cire eft mol- le, & d’une couleur finoire, qu'il n’y a aucunartifice, qui foit capable de la blanchir : maïs en recompenfe, leur miel eft beaucoup plusblanc, plus dous & plusclair, que celuy que nous avons en ces contrées, On les peut manier fans aucun danger , parce qu'elles font prefque toutes dépourveües d éguillons, On trouve encore dans ces Iles, pla eurs Cerfs volans , & uncinfinité de S'anterelles ; & de Papillons, qui font beaus à merveille. IL s’y voit aufli & furla terre, & en l’air divers Infeétes fortimportuns & dangereus , quitravaillentgrande- ment lès Habitans: mais, nous parlerons de ces incommodi- tez, & de quelques autres, dans les deus derniers Chapitres de ce premier Livre, rs | CHA- 527 PS jé : à | ss ï d: « 15 À PET é Le 2 À LT ml à w! ff han. 6x HISTOIRE NATIWRELLE, Chap. LE F Fa x d à Te Ÿ ci) o sr nait TE de °° æ 4 + Se : à : ns / 3 ! L L : k. ir à x ET î dass? ALET Pr de GA XS à NAR L « D e ‘ * 12 * “ 1 LE RS POLRELET PP Ac "P2 6: : GR *é # 4 L L à < FLY pe “IS . DE Es sh Frs A A NTIELES A 363 nn j CHAPITRE. QUINZIÈME. Des Of aus les ps confider ables des Ai. Oùtés les œuvres de Dieu fat: bites : ïl jesa a toutes faites avec fageffe , la terre cft pleine de fes 3 ju biens : mais il faut avoier, qu'entre toutes les Crea- turcs; qui n’ont rien au deflus dela vie fenfrive,; les Oifeaus publient plus hantement qu'aucunesautres, les inépui fables tichefles de fa bonté & de fa providence : Et qu'ils nous cons vient, pat la douce harmonie de leur chant ; par lPaétivité de féurvol, par les vives couleurs & par routé la pompe de ieut plumage, de loüer & glorifier cette Majefté Souveràine ; qui les ffavantageufement parez, & embellis de tant de rares per- fettions. C'éft auf “pour nous animer à ces facrez dévoirs, qu'aprés avoir traitté des Arbres, des Plantes, des Herbages; des Beftes à quatre pieds, des Reptiles & des Infectes, dont laterre des Antilles eft couverte, nous décrironsence Ch2- pitre tous les plus rares Oifeaus, qui peuplent l'air de ces aimablesContrées, & aébenrichiffent la verdure éternelle, de pere Arbres dont elles font couronnées. | ACRUT 1 CL Een Des Érerates) Es qu’on approche de ces Hés, pluficurs Oifeaus qui frequentent la met, viennent à la rencontre des Navires, comme s'ils éroient envoiez, pour:les recotinoître. Si tof que les nouveaus pañagers les appercoivent, ils fe perfadent qu'ils verront incontinent la térre: Mais ilnefe faut pas flatter de cette éfperance , Jufques à ce qu' on les voie venir pat troupes. Car ily énà unecfpèce, qui s'écarte fouvent en Pleine da | pe plus-de déus cens lieücs loin de terre." : . Nos François les nomment Fregates, hcaufé de la fermeté & delalegeretéde leur vol, Ces Oifeaus ont bien autant de À Xr'z chair": 164 À détridi x M rot nes .. til chair qu'un Canart,; mais ils ont les ailes beaucoup plus. grandes, auf ils fendent l air,avec unctelle vitefie & rapidité, qu'en peu de temps, onles a. perdu de veuë. Ils ont le plumage different : car les uns font entierement noirs: & les autres font tout gris, à la referve du ventre & dés ailes, qui font mé- lées de quelques plumes blanches. Ils font fort bons pef. cheurs, car quand:ils apperçoivent un poiflon à fleur d'eau, ils ne manquent pas comme en fe joüant, del’enlever, & d’en faire curée. Ils ont fur tout une adreffe merveilleufe, à fefai- {ir des poiffons volans; car fitoft qu'ils voyent, que cette de+ licate proye fait heriffer les eaus, & qu'elles’en.vaeftre con- trainte de prendre leflor, pour eviter les cruelles pourfüites de fes ennemis de mer. Ils fe placent fi bien du cofté où ils doivent faire leur faillie, que dez qu'ils fortent de l’eau, ils les reçoivent en leurbec,. ou enleur ferres : Ainfi cesinno- cens & infortunés poiflons, pour-eviter les dens d’un ennemy,. tombent fouvent entre les griffes d’un. autre, qui nc leur fait pas une meilleure compoñtion. 1h ! Les rochers qui font enmer, & les hérdé Iles snfiabat Lo fervent. de retraitte à pe, pe C’eft anffi en ceslieus de: ferts | oùils font leurs nids. . Leurchair n’eft point:tant pri- fée : ot on recüeille fort foigneufement leur graiffe; à.caufe qu'on a experimenté, qu'elle cit trespropres pout laguérifon ou du moins lefoulagement, de la Paralyle, & de toutes forts. tes. de gouttes froides. £ | ARS EM LNE Des Fauves.. : Es Oifeaus, quenosFrançois appellent Fzuves, à-caufé dela couleur deleunr dos , font blancs fous le ventre. Hs: font de la. grofieur d’une poule d’eau; maisils font ordinai+ rement fimaigres, qu’il nyaque leursplumes qui les faffe vas loir. Ils ont les pieds comme les: Cannes, & le bec. pointu, comme les beccaffes.. Ils vivent de petis Poiffons, de même que les Fregates., mais ils. font les plus flupides de trous les. Oifeaus de: mer & deterre, qui fontaus Antilles: car: foi: qu'ils: Chap:a$ Des ÎLES ANTILLES. | 165$ qu'ils fé laflent facilement de voler, ou qu'ils prenent les Na- vires pour des rochers flottans ; ai tôt qu’ils en apper- goivent quelcun, fur tout fi la nuit approche, ils viennent incontinent fe pofer deflus: Et ils font fi étourdis qu ils fe Pen prendre fans peine. Au RE OCR E GR E: Des LAigrettes de plufieurs autres Oifeaus de CMer € de Rivicre. N voit aufli prés de ces les, & quelquefois bien loin en: Mer,.des Oifcaus parfaitement blancs, qui ont le bec & les pieds rouges commedu Coral; Ils font un peu plus gros que Les Corneilles. Ontientque c ’eftune efpéce d'CAigrette, à caufe qu'ils ontune queüe qui eftcompofée de deus plumes longues & precieufes, qui les fait difcerner entre tous les au- tres Oifeaus, quifrequentent la Mer. Entre les Oifeaus de Rivieres & d’étangs : Il y a. des Pluviers, des Plongeons, des Poules d’eau , des Cannars , des Oyes Sauva- ges ;. uncefpecc de petites Causses, quifont blanches comme la neige partout le corps, & ont le bec & les pieds tout noirs,. & des Aigrettes, d'une blancheur du tout admirable, qui font de la groffeur d’un Pigeon, & qui ont le bec femblableà celuy de laBecañle, & vivent de poiffon ,. aimantiles fables & les ro- chers. Elles one particulierement recherchées, à caufede ce precieus bouquet, de plumes fines & deliées comme delafoye, dont. elles font parées, & qui leur donne une grace toute particuliere, Mais parce que tous ces Oiïfeaus de Mer & de Riviere, font communs ailleurs il n'eft pas befoin deles décrire. MR: T ER CLÉ. TV Du: Grand Goffer: EL ÿ: 4. encore un gros Oifeauentoutes cesiles , qui ne’vit punis poiffon:. ILeftde la groffeur d’une grofiè Canne, &c À & d'un: 366 HisTOoIre NATURELLE, Chap:i# d’un plumage cendré & hideusà voir. Ilale beclong & plats. la tefte groffe, les yeus petis & enfoncez, & un col affez. court, fousleqnel pend un Gofier, fi demefurement ample 8e vafte, qu’il peut contenir un grand feau d’eau. C'eft pour quoy nos gens l’appellent Grand Gojier. Ces Oifeaus, fe trou- vent ordinairement fur lesarbres, quifont au bordde la mer, où ils fe tiennent en embufcade pour épierleurproye. Carf toft qu'ils voient quelque poiflonà fleur d’eau, & à leuravan- tage, ils fe lancent deflus & l’enlevent. Hs font fi goulus, qu'ils _avallent d’aflez gros poiffons tout d’un coup, & puisils re- tournent à leur fentinelle. ils font aufli fi attentifs à leur pé- fche, que ne detournans point la vetüe de deffus la mer, d’oùils. attendent leur proye; on les peut facilement tirer de la terre, fans qu'ils fe donnent garde du coup. Ils font fongearts & melarcoliques, comme il convient à leur employ. Leurs yeus font fi vifs & fi percans, qu'ils déconvrent les Poiffons: bien loin en Mer, & plus d’une brafle de profomdeur : maïs ils attendent que le poifion foit préfque à flcur d’eau, pour fe: ruer deffus : leur chair n’eft pointbonne à manger. ACRUT . LG ‘E10 0e De Poules d’eau. Es Iles, qu'on nomme es Vierges, font recommenda- À blesentre toutes les Antilles, pour avoir une infinité de beaus & de rares Oifeaus de mer & deterte.. Car outre tous. ceus dont nous venons de parler, qui y font em abondance, on y voit une efpece de petites Poules d’eau, quiont unplu- mage raviflant. Elles ne font pas plus groffés qu'un pigeon: mais elles ont le bec plus long de beaucoup, de couleur jau= ne, & les cuiffes plus hautes, quide même que les pieds, font d'unrouscfort vif, Les plumes du dos & des ailes, & de la queüe, font d’un Incarnatluifant, entre-mélé de vert & de noir, qui fert comme de fons, pour relever ces éclatantes cou- leurs. Le deffous des ailes & du ventre, eft d’un jaune doré. Leur col & leur poitrine, font enrichis d’une agreable mé- ange, de tout autant de vives couleurs, qu'il y enàen tout, cu. PES Des! ILES) A NTELLES 167 leur corps: & leur tefte qui eft mennë, & en laquelle font €enchaffez deus petis yeus brillans, cftcouronnée d’unehuppe tifluë de plufñeurs petites plumes, qui font auf émaillées de diverfes belles couleurs. ARTICLE VI Des Flammans. w Esctangs, & leslieus marécageus, qui ne font pas fou. vent frequentez, nourriflent de beaus & grands Oifeaus, qui ont le corps dela groffeur des Oyes fauvages, & de la fi- gure de ceus , que les Hollandois nomment Lepelaer, à caufe de la forme de leur bec, qui eft recourbé en faflon d’une cücilliere. Carils ont lebectoutpareïl, lecolfortlong, & les jambes & les cuiffes fi hautes , que lerefte de leur corps eft clevé deterre de deusbons pieds ou environ. Mais ils diffe- rent cn couleur, d'autant qu'ils ont le plumage blanc quand: ils font jeunes ; puis apres à mefure qu'ils croiflent, il devient de couleur de Rofe, & enfin quand ils font âgez, il efttout incarnat. Il y a apparence que c’eft à caufe de cette couleur, que nos François les ont nommés Flammans. 11fe trouve de ces mêmes Oifeaus, prés de Montpélier, qui ont feulement le deflous des ailes & du corpsincarnat, & ledeflus noir. Ils’en. voit aufli aus Iles, quiontles ailes mélées de quelques plumes: blanches & noires. Dar On neles rencontre rarement qu’en troupe, & ils ont louye “& l’odorat fi fubtils ;. qu'ils éventent de loin. les chaffeurs,. & les armes à feu. Pour eviter aufli toutes furprifes, ils fe: pofent volontiers en des lieus découverts, & au milieu des- marécages, d'ou ils peuvent appercevoit de loin leursenne-- mis, &il yenatoujoursundelabande, qui faitle guet, pen- dant que les autres fouillent en l’eau , pour chercher leur nourriture : Et aufli toft qu'il entend le moindre bruit, ou qu'il appercçoit un homme, il prend leffor, &il jette un cri. aui fent de fignal aus autres pour le fuivre. Quand lés chai- feurs , quifrequentent l'Ile de S. Domingue, veulent abattre déces Oifeaus, qui yfont fort communs, ils fe mettent-au: A deflous- - ques à ce qu’ils foient arrivez en unlieu, d’oùils puiflent com 163 are GR N eus rl Chap. 19! deffous du vent, afin que l'odeur de la poudre ne leur foitf _ facilémentportée, puisils fe couvrent d’un cuir de Bœuf, & marchent fur leurs mains, pour contrefaire cette befte ; jufu : modemenrtirer leurcoup: & par cetterufe, ces Oïiféaus qui font acoutumez de voir des Bœufs fauvages, qui defcendent! des montagnes, pour venir aus abreuvoirs, font faits la proie deschaffeurs. Ils font gras & ont la chair affez delicate. On conferve leur peau, qui eft couverte d'un mol duvet, pour eftre employée aus mêmes ufages, quee sciics du Cygne % du Vautour. | A À. TI. CE Val Del'Hirondelle de l'Amerique: | : CU L y a quelques années , qu'il fut aporté deceslles, à un cu- H tieus de la Rochelle, un Oifeau de la groffeur d’une Hiron-: delle, &toutfemblable, excepté que “les deus grandes pla D ÉE— —> SS LÉ x d d SIT LP nc (D: D ; : D Æ 7 — NT PT RE = —— TR à 1 Es ET k ee 16) HE AMC 27 Le, 77 ou “à ) 4 Li | 3, mes de laqueuë, étoientun peu plus courtes, & que far Ke ) étoitcrochu, comme celuy d'un Perroquet , &fes pieds com=h me çeus d'une Canne, le tout parfaitement noir: fi ce n'eftr le ri d 1 } à ds ARC CT CNE PES. DE LT NE 1, BR eee dé. RE “4h DES. D A 1 mime 1 Fes 4 nd du ventre, qu'il'avoit blanccomme celuy des Hi- rondelles ; enfin il leur reffembloit f fort, horsmis cette per tire difference, que nous ne le fautions mieus nommet qu "Hirondelle d'U Amerique. Nous luy avons à deflein donné placcapres les Oifeaus de Mer & de Riviere, à caufe que la forme de fes pieds donne affez à connoiftre qu'il vit dans les caus. Et parce qu'il cftfirare, qu'aucun Auteur n’en a jamais parlé que nous fachions, nous en donnons icy la figure fide- lement tirée fur l'original, renvoyans celles des autres Ui. feaus plus remarquables, que nous avons déja décrits, ou qe nous pers: décrire, à la fin de ce np : ARTICLE du De PRE OH EAR deterre. cf * Utre tous ces Oifeaus de Mer, de Rivicres, & d’ étangs; j ontrouvcences Iles une tresgrande abondance de Per dris, de Tourtes , de Corneilles, & de Ramiers, quimenent un étrange bruit dans les bois. On y voit trois fortes de Poules, les unes font Poules communes; femblables à celles de ces quartiers ; les autres font de cellesque nous nommons ox les d'Inde : Etcellesdelatroifiémeforte, font une efpece de Faifans, que les François à limitation des E fpagnois, appellent Ponles Pintades, par ce qu'elles font comme peintes de cou- Jeurs blanches, & de petis points, qui font comme autant | d yeus, fur un fonds obicur. Il y a anffi plufieurs CHerles, Grives, Ortolans & Gros-becs, prélque tout femblables aus nôtres de même ncm. , Quant aus autres Qifeaus, qui font particuliers aus forefts des Antilles , il yen à de tant de fortes, & quifontfi riche- ment, & fi pompeufement couverts: qu'il faut avotüer.que s'ils cedent à ceus de l’Europe pour le chant: Ils les fur- paflent de beaucoup en beauté de plumage. Lesdefcriptions que nous allons faire, de Ans uns des plus confide- fables, confirmeront uRaRenr a vetité de cette propo- ‘fion, | ïs Ÿ Nous #70 HISTOIRE Pr re Chap.r Nous commencerons par les Perroquers ; qui felon-le tee differente groffeur font diftinguez en trois efpeces. Les plus grands font nommes C4rras, Camides où Camivés , les moin. sres Permogieets communs ; & les ee petis Perriques. 74 AR TI CILE0 ES Des fil Es «4rre font des Oifeaus beaus par excEtléréee del | kr srofleur d’un:Faifan : mais quant à la fisure du Corps, ils font femblables aus Perroquets. Ils ont tous fa tefte affés grof- fe, les veus vifs & aflures, le bec crochu, & une longue queuëé,, qui eft compofée de belles plumes, qui font dediverfescou= leurs, felon la difference des Iles, où. ils ont pris leur naïffance. On en voit quiont larefte, le deflusdu col, & le dos deblei celefte tabizé, le ventre & le deffous du col & des ailes, de jaune pâle, & la queué entierement rouge. Ilyena d’autres, qui ont préfque tout le corps de con fé de feu , horsmis qu'ils onten leurs ailes, quelques plumes. qui font. jaunes, azurées & rouges. Il's’en trouve encore qiontroutle plus mage meflé der rouge, deblanc, debleü, de vert & de noir, c’eft à dire de cinq belles & vives couleurs, qui font untrés- agreable émail. Ils volent ordinairement partronpes. On ju- gcroit à leur pofture qu'ils font fort hardis & refolus: car ils ne S'étonnent point du bruit des armes à feû, & fi les premier coup.ne les a bleffez, ils attendent fans bouger du lieu où ils font, une deuziéme charge : : maisilyena plufieurs, quiat- tribuent cette affurance, à leurftupidité naturelle, plutôt qu’ a leur courage. On lesapprivoife affez aifément : on leur ap+ prend auffiè à prononcer quelques paroles, mais ils'ont Pour la plüpart, la langue trop épaifle, pour fe pouvoir faire enten= dre, aufli bien que les Casides, & les plus petis Perroquéts. Ils font fi ennemis du froid, qu’on à biende la peine à leut faire ni lamer. 5 +: se L { LL. Chap. is D LE re s'AnTI 1 L Es! 172 rn R T 1 ns L E. Æ Des me UN in beaucoup té Canides qui font demême seof. feur que les preccdens, mais d’un plumage encore plus raviffant. Témoin celuy que Monfieur du Montel qui a fait plufieurs voyages enl’Amerique, & quiafoigneufément vi- fitétoutes les Iles, a veu en celle de Coraçao, & dontil nous donne cette exaûe relation. Il meritoit, ditil, de tenir 5 rang entre les plus beaus Oifeaus du monde. Je Le confidc- sraydefi prez, & le maniay fi fouvent étant. en ce lieu là, que 3 j'en ay encoreles idées toutes fraiches, Il avoit tout le plu- 5 mage fous le ventre, fous les ailes & fous le col de cou- 33 leur d’aurore tabizée :: Le deffus du dos, & de la moitié des ailes d'unbleü celefte, & vifau poffible: La queïie & » les grandes plumes des ailes, étoiententremélées d’unin- » Carnadin éclatant à merveilles, diverfifié d'un bleü comme 3 le deffus du dos, d’un vert naiffant, & d’un noir Juifant, qui | priéhauoir à faifoitparottre avec plus déclat, l'or & l’azur nde l’autre plumage. Mais ce qui étoit le plus beau , étoit fa ntelte, couverte d’un petit duvet decoulcurde Rofe, mar- ;, queté de vert, de jaune, & de bleïi mourant, qui s’étendoit 3 en ondes jufques: au dos. Ses paupieres étoient blanches, >, & la prunelle de fes yeux jaune & rouge, comme un rubis , dansunchatond'or. Ilavoit fur la celte, comme une toqueé ;, de plumes d’un rouge vermeil, étincelant comme un char- »,bon allumé, qui cftoit bordée de plufieurs autres plumes » plus petites, de couleur de gris de perle. # Ques ilétoit mervcilleus pour cette riche parure, il n’é- toit pas moins à prifer pour fadouceur; Carbien qu'ileût , lé beccrochu, & que les ongles, ou bte de fes pieds, d’ont » il fe fervoit cofnme de mains, tenant fon manger, & le por- ;, tant au bec , fuffent fi perçantes & fi fortes, qu'il eut püem- », porter la piece, de tout ce qu'il empoignoit: ncantmoin$ ,ilétoitfi privé,qu'ilj jotioit avec les petis enfans, fans les blef. 10, fer : Et quand on le prénoit, il refferroit G bien fes ongles, 2 #96 à FR LI ! L À Sgtt *" VERS Te À Je LA FETES 173 HisToirEe NATURELLE, Chap.1g, ,, que l’on n’en fentoit aucunement les pointes. Il l’échoit », Comme un petit chien, avec fa langue courte & épaifle, ceus >» Qui l’amadoüoient, & luy donnoient quelque friandife, j joig- ,,noit fatefteàleur joués, pour les baifer & carefler, & té y» Moignant par mille foupletes fa reconnoiffance, il fe laif= ,; foit mettre en telle pofture qu'on vouloit, & prenoit plailir » à fe divertir de la forte, & à faire pañler le tems à fes amis, 3» Maïs autant qu'il étoit dous &traittable, à ceus qui luy fais %» foient du bien; autant étoit il mauvais-& irreconciliable, 5, à ceus qui l’avoientoffenfé, &il les favoit fort bien difcers snerentre les autres, pour leur donner quelques atteintes 1, de fon bec & de fes ongles, s’il les trouvoit à fonavantage. 5, Aurefteil parloit Hollandois , Efpagnol, & Indien: Et %, en ce dernier langage il chantoit des airs commeun Indien ,, même. H contrefaifoit auffi toutes fortes dé volailles, & ,, d’autres animaus domeftiques. 1} nominoit:fes amis’ par >, nom & par furnom, accouroit à eus, & voloit fur eus; fitoft », qu'illes apperçevoit, notamment quand avoit faim. Que ,, S'ils avoient efté abfens, & qu'il ne les eut Veus de long y tems, il faifoit paroïtre lajoie qu’ilavoit deleut retour, pat ,; des cris déjouiflance. Quand il avoit bien folâtré & joué, ,, & que l’onétoit ennuyé de fes careffes , il fe retiroit au faîte ;, du couvert de la caze de fon nourriflier, qui étoirun Cava= ,, lerdelamèmelle: Et dela il parloit, chantoit, & faifoit » mille fingeties, fe mirant en fon plumage qu'il agençoit & ;»paroït, nettOyoit & polifloit avee fon bec. On n’avoit ;, point de peine à le nourrir. Car non feulement le pain ;, dont on ufe encette Île, mais tous les fruits & toutes les » racines qui y croiflent , luy étoientagreables. Et quandon: », luy en avoit donné plus qu’il n’en avoit befoin, il cachoit 5 {oigneufement le refte, fous les feüilles de la couverture de », la caze, & y avoit recours dans la neceflité : Enfin , je n’ay à jamais veu d’oifeau plus beau niplus aimable. IL étoit digne 3, d’étre prefenté au Roy, fi oneuft pü le pañer en France, C'ef-la, cequ'en rapporte ce noble & verirable Témoin, qui ajoûte, qu'il avoit été apporté des Antilles à Monfeur Ro- denborck, qui étoit alors Gouverneur du Fort, & de la Co- lonie Hollandoife, quief enl’Ile de Caracao. 32 lys AR T L 15 3 PES ALES] ANTILLES 373 Ale Du, LuBourhlye- Des Perroquets. N voit prefque par toutes les Antilles des Perroquets,que les Indiens habitans du païs appellent en leur langue Kouléhuecs, & qui vont par troupes comme les Etourneaus. Leschaffeurs les mettent au rang du gibier, & ne croient pas perdre leur poudre ni leur peine de les mettre bas. Car ils font aufli bons & aufli gras, que le meilleurpoulet : fur tout quandils font jeunes , & pendant le tems des graines, & des fruits de plufeurs Arbres, dontils fenourriffent. Ils font de differente groffeur & de different plumage, felon la difference des Iles. De forte que les anciens habitans favent reconnoître Jclieuouils fontnez , à leur taille & à leur plume. Il y en à d’une admirable forte, en l’une des Iles qu’on ap- pelle Wrerges. Ils ne font pas plus gros que l'Oifeau que les Hatins nomment Hwpupz, & ils ont prefque la même figure. Mais ils font d’un plumage chamarré d’une fi grande vatieté de couleurs, , qu'ils recréent merveilleufement la veuë, & ce qui cft le principal, ils apprenent parfaitement bien à parler, & contrefont tout ce qu'ils entendent, s. | in 1: © Je -E EE Des Perriques. Es plus petis Perroquets, ne font pas plus gros qu’un Merle, il s’en trouve même qui n’ont pas plusde corps qu'un Pafflereau. On les nomme Perriques. Elles font cou- vertes d'un plumage, quieft entierement vert, horsmis que _ fous le ventre & aus bords des ailes & dela queüe, il tire fur Je jaune. Elles apprenent aufli à parler & à filer. Maiselles: rctiennent toujours quelque peu du fauvagin. Ce qui fait qu'elles pincent bien fort, quand elles ne font pas en bonne humeur. Et fi elles peuvent avoir la liberté, elles gagnent des bois » oùclles meurent defaim. Car ayant cfté nourries Y 3 dc ni HusTorRE NATURELLE, Chap:19, de jeunefle en la cage, où elles trouvoient leur nourriture, préparée, ellesne favent pas choifir les Arbres, fur léquels il yades graines quileur font FRApRese à ARTICLE XIIL. L y à enquelqueslles, particulierement à la Gatdeloupes! un petit Oifeau que l'onnomme 7remblo, parce qu'iltrem= ble fans ceffe principalement des ailes qu'il entr’ouve. 11 ef dela groffeur d’unecaille, & fon plumage eft d’un gris un pets | plus obfcur, que celuy de É Alouétte. Du T ten A KT ECILE XI cé Du Pafèrean del ‘Amerique. "Es Iles de Tabago & de la Barboude, comme étant les plus Meridionales des Antilles, ont beaucoup de rares Oifeaus, qui ne fe voient pas-en celles, qui font plus au nord. If s’y enrencontreentre autresun, quin’eft pas plus gros qu'un Pañereau, & quiaun plumage raÿiffant: Car il a latefte, le col, & le dos, d’un rouge fi vif& fi éclatant, quelors qu onle tient ferré en la main, & qu'onne fait paroiftre que le col, ou le dos, on le prendroit même de fort prez, pour un char- bon allumé. Il a le deflous des ailes & du ventre d’un blëu: celefte, & les plumes des ailes & de la quete , d'un rouge ob- fcur, marqueté de petis points blancs, difpofez en égale dis ftance, qui ont la figure de la prunelle defon œil. Il a auf. lebec, & le ramage, d’un Pafléreau; & pour ce ne on me nomme à bon droit, Pafferean de l’ l'amerique, ‘ARTI % hap.is Des ÎLES ANTILLES | 173 7 ART IE L Er AV, De l'aigle D'Orinoque. L pañfe auf fouvent de la terre ferme, à ces mêmes Iles, Le forte de gros Oifeau, qui doit tenir le premier rang entre les Oifeaus de Proye, quifont aus Antilles. Les pre- iers habitans de Tabiso, le nommerent, LAigle D’ orirogue, à caufe qu'il eft de la sroffeur & de la figure d'une Aigle, & qu'on tient que c’et Oifeau, qui n’eft que pafager en cettelle, fe voit communement en cette partie de l’Âmerique Meri- dionale , qui eft arrofée de la grande Kivicre d' Orinoque, Tout fon plumage eft d’un gris clair, marqueté de taches noires, horsmis que les extremités de fes ailes & de fa queüe, font bordées dejaune. Jlales geus vifs & perçants. Lesaîles fort longues, le vol roide & promt, veu la pefanteur de fon corps. Ïis fe repaift d’autres Oifcaus , fur léquels il fond avec fürie, & apres les avoiratrerrez, il lés dechireen pieces , & les avale. I a neantmoïns tant de generofité, qu'il n'attaque jamais ceus, qui font foibles &'fans defenfe. "Mais feulement Ies Arras, es Perroquets, & tous les autres qui font armez comme lui, de becs forts & crochus, & de griffes pointuës. On à même remarqué , qu'il nc fé ruë point fur fon gibier, tandis qu’iléft à terre, ou qu ‘ileft pofé fur quelque branche: “ mais qu'ilattend qu'il ait pris l'eflor, pour le combattre en l'air, avec un parcilavantage. 700 DA PIS PE AN AE AN A 2 Da M L E CHansfeny, eft aufli une efpece de petite Aigle, quivit auffi de Proye, mais il n'a pas tant de cœur, que celle dont nousvenons de parler, caril ne fait la guerre qu’aus Ramiers, aus P'ourrés , aus poulets, & ausautres dsl Oifcaus, quiné Jui set reier, ! 3 196 Hisroire NATURELLE, Chap: 15, Il y a encorc dans ces Ilesune infinité d'autres Oifeaus des. toutes fortes d’éfpeces, & dont la plüpart n'ont point de noms. ÂA R TIC LE, CMOS Du Colibry. Our couronner dignément l’Hiftoire des Oifeaus denos Antilles, nous finirons par l’admirable Co/bry, admirable pour fa beauté, pour fa petiteffe, pour. fa bonne odeur, & pour fa faflon de vivre. Car étant le plus petit de tous les Oifeaus qui fe voient, il verifie glorieufement lé dire de Pline, que Natura nufquar magis quam in minimis tota eff. Il fe trouve de ces Oifeaus, donrle corps, eftfi petit, qu'ils ne font guéres plus gros qu’un Hanneton, Il y ena, qui ont le plamagefi beau , que le col les ailes & le dos reprefentent la diverfité de l'arc-en-ciel, queles Anciens ont appellé Zr#, & fille de l’ad= Mmiration. L'on en voiteneore, qui ont fous le colun rouge fi vif, quede loin, on croiroit que cefcroirunecfcarbouclé, Le ventre & le deffous des aîles.eft d’un jaune doté; les cuiffes d’ ur vert d’Emeraude; les pieds & ie bec noirs coinine ébes népolic; & les deus petis yeus, font deus diamans enchañez en une ovale de couleur d'acier bruny. ja tefte eft d'un vert naiffant qui lui donne tant d'éclat qu’elle paroit comme d’o- réc. Le mafle, eft enrichy d’une petite Hupe en forme d’ai- grette, qui eft compolée de toutes les differentes couleurs, quiemaillent ce petit corps, le miracle entre les Oifeaus, & l’une des plus rares productions de la nature. H abaifle & leve quandil lui-plair cette petite crefte de plumes, dont l Au- teur de la nature l'a fi richement couronné. Tout fon plu- mage eft aufli plus beau, & plus éclatant, que celuy de la femel le. … Queficet Oifeau eft merveilleus enfataille , &-en fon plus mage; iln’eft pas moins digne d’admiration «en l'aétivité dé. fon vol, qui eft fi vite & fi precipité, qu'à proportion, les plus gros Oifeau5, ne fendent point l'air avec tant de force, &:ne font pas unbruit fi refonnant , que celuy qu'excite cet aimax ble À LE ARLES + Chips BES ILES. ANTILLES | _1ÿ7 ble petit Colibry, par le battement de fes ailes; Carondiroit ‘que ce foit un petit tourbillon émeuen l’ air, & quififfic aus oreilles. Er parce qu'il fe plairà voler prés de ceus qui paf- fenr, il furprend quelquéfois fi inopinément, que bléndou vent il donne une fubite, & innocente frayeur, à ceus qui l'entendentplütoft qu'ils nele voient. _ Il ne vit:que derofée, laquelle il fucce far les fleurs des arbres avec falangue, qui eft beaucoup plus longue que le bec, & quieft creufe comme un petit chalumeau , de la grof- {eur d'une menué aiguille. On ne le voit que fort rarcrhont furterre, hi même perché fur les arbres: mais fufpendu en Yair aupresde l'arbre, où il prend fa nourriture. fe foutient ainf par un dous battement d'ailes, & enmême temsiltire larofée, qui fe conferve le plus long-tems , aufonddes fleurs à demy épanoüies. C'eft en cette pollure, qu'il y a du plaifir à le confiderer. Cat épanoviffant fa petite hupe, on diroit qu ’il ait fur la tefte, uné couronne de rubis & detoutesfortes de pierres precieufes. Et le Soleil rehauffant toutes les riches cnluminures de fon plumage, il jette un éclat fi brillant, qu’on le pourroit prendre, pour une rofe de pierrerie animée & vo- lanteen l'air. Aus licus où il y à plufeurs Cottonniers, on voit ordinairement quantité de Colibris. . Bien que fon plumage perde beaucoup de fa grace ue ileftmort, fieft cequ'ileft encorefibeau, quel’ona veu des Dames en porter par cutiofité pour pendans d'orcilles, Ce que plufeurs ont trouvé leur eftre mieus feant, que tous les autres. Ce merveilleus Oifeau , n’a pas feulement la couleur extra- -otdinairement agreable : mais il y en a d’une forte, qui apres avoir recrée la veué, rejouit encore & contente l'odorat par . {a fovêue odeur, qui eft auffi douce, que celle de l’ambre & du mufc les plus fins. … Ilbâtit le plus fouvent fon nid, fousunepetite branche de : quelque Oranger ou Cottonnier, & comme il eft propor- tioné à la petiteffe de fon corps, il le cache fi bien parmy les | füilles, & le met fi induftrieufement à l’abry des injures de Pair, qu'il eft préfque imperceptible. ILeft auf, fi bu archité®te, : mue pour n’eftre point expofé aus vens du levant & du Nord, | sie Z | an À A 178 HISTOIRE NATURELLE, Chap. 14h dr qui foufflent d'ordinaire en ces païs-la, ‘il le place au midy. Ale compofe au dehors de petis filets d'une Plante que lo à nomme Pre, & dont nos Indiens font leurs cordes. Ces» petis filamens, font deliez comme des cheveus, mais beau coup plus forts. 11 les lie & les entortille avec fon bec fi ferrément, à l’entour de la petite branchefourchuë, qu'ilà. choifie pour y perpetuer fonefpece: que cé nid étant ain parmy les feüilles, & fufpendu fous la branche, fe trouve comme nous avons dit & hors de la veuë, & hors de tout. peril. L’ayanr rendu folide & remparé au dehors par ces fila= mens, & par quelques brins décorces & de meñuës hetbes,, entrelacez les uns dans les autresavec un merveilleus artifi= ce, il le pare au dedans du plus fincotton, & d’un duverde petites plumes, plus molles que la foye laplus deliée. La fe= melle, ne fait communément que dens œufs: qui font en: ovale, & de la groffeur d’un pois, ou fi vous voulés d'une: 2. 1 »familieres., : On trouve par fois des nids de Colibry, fous » Is branches de quelquesunces de ces plantes de tabac, qu’on: » Aiffecrottreaufli haut qu'elles peuvent, pour en avoir la. »Confideray attentivement & le nid & l'oifeau. Er aprés: » Avoir admiré l’œuvre de Dienen. cette petite créature, jé: » dis étant tout ravy. à: la: veuë decenid, qui étoit de la grof= » feur d’une nois, ENL SUPREME K M $ Pzs ÎLES ANTILLES 179 nt | be la matiere ou la figure à Se falle écy confiderer ei: Rien ne fe doit accomparer ‘ati CA cette exquifé CArchiteëture PA Vne folide dureté # Sy mcfle avec la beauté és Par un fingulier artifice : 5, Car un bec fe tout l'inflrument il Qui donne à ce rare cdifice, ” _ Son plus precieus ornement. Au refte , ilfe voit de ces Oifcsbs prefque en toutes les An- tilles, mais felon ladiverfité des Iles ils different & de grof- feur & deplumage. Les plus beaus, & les plus petis de tous, fe trouventen l'Ile d Aruba, qui releve de la Colonie Holian- doife, quicftà Coracuo. On pourroit peuteftre defirer i icy ; que nous parlaffions du chant de cet Oifeau, & qu'aprésavoir ravy la veuëé, & fatisfait merveilleufement l’odorat , il contentaft encore l'ouie par l'harmonie de fon chant. Quelques uns difent qu'en effet il y en a d'une efpece, qui chante en quelque fai- fon del'année. Maisilyagrandeapparence, que ce qu’on appelle lechantdu Colibry, n’eftautre chofe, qu’un petit cry femblable à celuy de la Cygale, qui eft toujours d’un même ton. Maisquandilne chanteroit pas, il poffede fans cela , afez d’autres rares avantages de la nature, pour tenir rang entre les plus beaus , & les plus exceliens Oifeaus. Ceus qui ont demeuré au Brefil, nous rapportent con- ftanment, qu'il y a un petit Oiïfcau nommé Gorambuch, d’un blane luifant, qui n'a pas lé corps plus gros qu’un Frelon, & quine doit rienau Roflignol, pour le regard du Chant clair & ner. Peuteftreque c 'eft une cfpéce de Colibry, comme quelques uns le pofent. Mais toujours n’eft il pas comparable, nien beauté de plumage, ni en odeur, & autres raviflantes qualitez, à et que nous venons de décrire. &- “Aie La Ceus 180 HesTorrnEe (NATUREELE, Chap t4 Ceus l4 ont mieus rencontré, qui ont dit que ce chef d'œuvre denature,. eftune efpéce de ces petis Oifeaus que quelques Indiens appellent Guaraciaba, où Guacariga, c'eftà dire Rayon du Soleil, & Guaracigaba, c'eft à dire Cheves da Soleil. Les Efpagnols les nommeut Towinéios, pat ce ques quand on en met un avec fon nid dans un trébuchet à pefef l'or, 1e _pefe ordinairement , que deus de ces petis poids, que Îcs mêmes Efpagnols appellent , Tominos Ce A dire. vint-quatre grains. Quelques uns ont mis en avant, qu’une partie de ces ad- mirables Colibris , font premierement des Mouches, qui puis: aprés fe transforment en Oifeaus. D'autres ont écrit , queles: Antillois appelloient ces Oifeaus des Renez , parce qu'ils dors ment la moitie de l’année comme les L'oirs, & qu'ils fe reveils ent au Printems, renaiflant comme de nouveau, avec'cetté agreable faifon. Même il yenà quidifent, que lors que les: fleurs viennent à tomber, ils pouffent leur petit bec dans le. tronc des arbres, & y demeurent fichez immobiles &:comme morts durant fix mois, jufques à ce que la terre vienne à à efire couverte , d’un nouveau tapis de fléurs: Mais nous: n'avons garde de mefler rous ces contes, à la veritable Hiftoiré de nôtre Colibry, & nous ne les faifons que sache du asia en paîant. ON Nous fermerons ce Chapitre; parune ice Bitr; digne d'étreremarquée, &quinefe voit point ailleurs: fie n’ef peutcftre en la Guinée comme lInfcotle rapporte: C’eft le: merveilleusinftiné®, que Dieu a donné à tous lés petis Oifeaus. de l’Amerique, pour conferverleurefpece. Encequ'yayant parmy les bois une forte de grandes couleuvres vertes & mez nuës ; quirampent fur les Arbres, & qui pourroients’entor- tillant de branche en branche, allermanger les œufs des Oiz feaus, dont elles font fort avides: Pourempefcher ces larro+ nefes d'atteindre à leurs nids , tous les petis Oifeaus, quin’ont: pas le bec aflez fort, pour fe defendre contre leurs :énnemis,. font leurs nids au bout fourchu de certains filamens ,)quicome ‘me.le lierre croiflent à terre, s’élevent à la faveur des Arbres, &. s'étant pouflez jufqu'a leur fommet, ne pouvantaller plus outre, retombentenbas, quelquesfois deus outroisbrafles,: |] " ‘Ni {1 é Ps Ds: ILEss À NMILLES 1 18È au deffous d des branches. C’eft donc au boutde ces ligamens nommés Zieres par nos François, que les Oifeausatrachent fortement leurs nids, avecunetelle induftrie, que lors qu’on les rencontre dans les bois, comme il y ena gtand nombre, on ne peut aflez admirer, nila matiere, ni l’ouvrage de ces pe- tis edifices branlans. Pour ce qui eft des Perroquets, & des autres Oifeaus qui font plusforts, ils font leur nids dans les creus des arbres, ou fur les branches,comme ceus de par decà : Car ils penvent rechalfer avec le bec & les ongles, les Cou- leuvres qui leur font la guerre. Ontrouvéra en la page fuivante, ïes figures des Oifeaus Jes plus rares & les plus confiderables que nous venons de décrire : mais il faut confefler que leburin, nimême les. pinceaus les plus delicas , ne leur s’auroient don- ner lagrace, lestraits, ni toutes les vives couleurs, dontils font naturel- lement patrez. : Ea at ee, 24 =] CA + 4 se NS SN SS S LUS Anrvreu | I 483 il ‘ C9 Hi É CHAPITRE UD EU" À Des Poiffons nr Mn s! 7, Pr Rires des Alle. ) Y Ousne pretendons pas, de traitter Re des Poif- _ fonsdes Antilles, avec toute l’exaétitude, que cette _ample & feconde matiere le pourroit defirer: mais, puis qu’apres avoir confideré jufquesicy, toutes les plus pre- cieufes richeffes, dont Dieu a fortavantageufement pourvew les terres de ces heureufes contrées, l'ordre requiert, que nous parlions ? à prefent , des Drodutions de la Mer qui les en- toure, & des Rivieres qui les arrofent: nous nous ptopofons feulement de décrire briévement dans ce Chapitre, les plus excellens Poiflons, quis’y trouvent en abondance, & qui fer- vent à la nourriture de l’homme, afin que cette confideration nous porte à reconnoître,. que fatres-fage Providence a dé ployé fes merveilles fur les profondes eaus, avec autant déclat & de liberalité que fur lefec, & par confequent qu'il ef jufte: que les Cieus & la terre le loüent , la Mer & toutce qui fe re- mué en elle, BE I CL E. K . Des Poiffons volans. æ L yena, qui tiennent pour un contefaitaplailir , ce que: re dit des Poiffons volans , bien que les relations de plu- fieurs fameus voiageurs en faffent foy. Mais, quelque opinion qu'en puiffent avoir ceus quine veulent rien croire, que ce “qu'ils ont veu, c’eft une veritétres-conftante, qu’en navi- geant, dés qu'’onapafté les Canaries, jufques à à ce que l’on: approche des.Iles del’Amerique, on voit fortir fouvent dela: Mer, de groffes trouppes de Poiflons, qui volent la hauteur d’üne pique, & pres de cent pas loin ,. mais pas davantage : par ce que leurs ailes fe féchent aw Soleil. Ils font préfque: femblables aus Harans , mais ils ont la tefte plusronde, &ils ee [us larges fur le dos. Ils ont les ailes commeune Chau= ve-fou- U« Le & 184 HisToung NATURELLE, £ ve-fouris, quicommencent un peu au deflous delatefte, & s'étendent préfque jufques à la queüe. Il arrive fouvent, qu'ils donnent en volant contre les voiles des Navires, & qu'ils tombent mème en plein jour furletillac.. Ceus quien, ont faitcuire, & qui enont mangé les trouvent fort delicas \ 16 .:DES FU A 4 POLE S 7 78% Ce quiles oblige à à quitter la mer , qui eft leur életment le plus ordinaire, eft qu'ils font pourfuivisde plufieurs grands Poif- fons, quien fontcuréc. Et pour efquiver leur rencontre, ils prennentune fauffe route, faifant un bond enl'air, & chan- geant leur n’agcoiresen ailes, poureviterle danger, mais, ils trouvent des ennemis en l'air, rail bien que dans les eaus, Car #lya de certains Oifeaus marins, quine vivent que deproyc, lefquels-leur font aufli une cruelle guerre, & les prennent ‘en volant; comme nous l'avons déja dit au Se DE gedent. | « -JLne fera peuteftre pas So are stir àceus, alice | Hi- foire de ces Poiflons ailés du nouveau monde, de nous y voir ajoûter pour enrichifement , les paroles de ce grand Poëte, qui dans {on ddylé: Hpraique, nous témoigne 1 avec plai- fuila 2 lo veu smile is fous les dde barilives + Tombercomme des Cieux de vrais poilfons volans : Qui courus dans les flots par des monfîires avides, … Etmettant leunrefuge en leurs ailes timides … cAufein diupin vogueur plenvotent detons cotez,, Et jévanbient le tillac delleurs corps nganter À KR En 1 C L E LT, : Des ss Porroquet de der. tL ya au. ences s quartiers là des Poiffons; -Qui ont Peécaille comme la Carpe, mais de couleur verte comme la plume Len Perroquet: d'ou vientaufli que nos François les nom- ment Perroqueis de Mer. i H-ont les yeus beaus & fort étince- Jans, les prunelles claises comme du Criftal, qui font entou- rées d’un cercle argenté, qui eftenfermédansunautre, qui eftd’un vert d’émeraude comme les écailles de leur dos, car celles de deffous le ventre, font d’un vert jaunätre. Ils n’ont point de dents, mais, ils ont les machoirces d’ cnhaut & d’en- bas d’ unosfolide, quieft extremément fort, de même cou- leur que leur écailles, & divifé par petis compartimens beaus à voir, Ils vivent de Poiflons : à Coquille, & en cetayeccesdu- “ Aa Ies 286 H S6érlo'r Re NATURELLE, Chap:ré res machoires, qu’ils brifent commeentre deus meules, les Huitres les Moules, & les autres coquillages , afin de fe repai= tre de leur chair. LIs font excellens à manger, & figros, qu il s’en voit qui pefent plus de vint livres. A SR T'TUCCLUE 11E De la Doré, F À Dorade, que quelquesuns nomment rame de Mer , y. 15 eftencorc commune. Elle a ce nomde Dorade, parce que dans l’eau fatefte paroiït d’un vert doré, & tout le refte de” fon corps jaune comme or, & azuré comme le ciel ferain. Elle fe plait à fuivre les Navires, mais elle nage d'unetelle viteffe, qu'il faut efire bien adroit, pour la pouvoir atteindre avec la gaffe où foine, quifont des infiramens., avec lefquels les Matclots ont de coutume de prendre les gros Poiflons : auf ils'en voit peu, quiaitune plus grandedifpoftion natu= relle à fendre les flots que celuy-ci; car il a le devantde la tefte fait en pointe, le dos heriffé dépines quis’étendent juf= ques à la queüe quieft fourchuëé , deus nageoires au defaut de la tefte, & aurant fousle ventre, les écailles petites, & routle corps d’une figure plus large que groffe; Ce qui luy donne un merveilleus empire dansles eaus. Ils’entrouve, quiont environ cinq pieds de longueur. Plufieurs eftiment que leur chair qui eft un peu féche, eft aufi agreable au goût que celle de la Truitte où du Saulmon; pourveu que fon aridité foit corrigée, par quelque bonne fauce. Lors que les Portu- gais voient que ces Dorades fuivent leur Navire, ils fe meta tent furle beau pré, avec une ligne à laimain , au bour de la- quelle il y a feulement un morceau de linge blanc au haut de F hamecçon, fans autre Papas: # «8 S 1 L #8 A NTALEL # s.: ! FE A KR io 1 € L E. IV. ; De la Bonite: L yaunautre Poiffon, qui fuit ordmairement les Navires. Onle nomme Porte, Il eft gros & fort charnu, & de la lon- gueur de deus pieds ou environ. 5a peau patoit d'un vert fort obfcur, & blanche fous le ventre. Iln’a point d’écailles fice n’eft aus deus coftés, oùilenadeus rangs de fort petites, qui font couchées furune ligne jaunâtre, quis’étend de part & d'autre, à commencer depuis la tefte jufques à la queüe qui eft fourchuë. Il fe prend avecde gros hamecons, que l'on jette aus environs du Navire. Tout en avançanr che- min, & fans caller les voiles on fait cette pefche. Ce Poiffon eft goulu comme la Moruë, & fe prend avec toute forte d'a- morces, même avec les tripailles des Poiflons, quiontefté eventrez. Onle rencontre plus fouvent en pleinemer,qu’es coftes. 11 eft bon étant mangé frais; maisileftencore plus delicat, lors qu’ila deneeéi un peu “dans Été, & dans lé poivre, avant que de lefairecuire. Plufieurs tiennent, que ce Poiflon eft le même, que eeluy que nous appcllons Thon, & qui eft commun en toutes les coftes de ia Met Medi- prañées EE CE CAE ENT VS De l'Eguile Dre CHer. het , eftun Poiffon fans écailles, ee croift de la lon- gueut de quatre pieds ou environ. Ii a la tefte en poin- , longue d’un bonpicd, les yeus gros & lians qui font he de rougé. La peau de fon dos eft rayécde lignes de bleü & devert, & celle de deflous fon ventre, eft d’un blanc meflé de rouge. Il a huit Nagcoires, qui tirent fur le jaune, .& une queue fort pointué, qui a péuteftre donné l'occafion de Juy donner le nom qu'il porte, de même que la figure AA 2 nue 88 HusTorre NATURELLE, Chap: ' LR HR ; 1 * k Ne { Ë él È es | / DR ERNST 7 de TI 5 EN defatefte, a convié les Hollandois de l ppchers L dbac-Pypes c'eftadire Pipe ATabars. | hi k "A KR T »: CL FE h De plufieurs: autres Paillois F later: 5 y 1 des Rivieres. | Es Côtes de ces Ilesont auf des Carançues: des Mulets qui entrent quelquefois en l’eau douce, & fe pefchent dans les Rivieres , des Poiffons deroche quifa font rouges , & de diverfes autrescouleurs, & fe prennent aupres des Rochers:. Des N'egres ou diables de Mer ,, qui font de gros Poiflons qui ont l'écaille noire, mais quiont la chair blanche & bonne au poflible , & uneinfinité d’autres Poiflons, qui. font pour læ pluspart differens de ceus qui fe voient en “Europe, y & qu} n'ont encore point de noms parmy.nous.. Pour ce quieft des Rivieres ;. elles fourniffent une grande abondance de bons Poifons aus Habitans des Antilles, & s'il cft permis de comparer les petites chofes aus grandes, -elles. ne cedent point à proportionde leur etenduë en fecondité, à laMer. Ileft vray qu’elles ne produifent point de Brochets; de Carpes, ni de femblables Poiflons, qui font communs en ces quartiers-cy: maisilyena grande quantité d'autres, qui. ne font connus que des Indiens, & dont quelques uns ap- prochent de la figure des nôtres. pe + PATES Love die : Es | hap. 16 p Est ÎLES À NTELLE 189 À re | HE AU A Æ CU) UC WZ LE # D V UL 74 ÿ, y} Do md IS S SNS LL 0) # sis NE is & RER DÉcs Le A WU > 190 \ Ha . | : | CHAPITRE DIXSEPTIEME + Des Mon$lres Marins qui [e trouvent en ces quartiers. Eus qui ont decry l’Hiftoire des Poifons, ont mis au rang des Baileines, tous ceus qui font d’une groffeur ex- traordinaire, de même, qu'ils ont compris fous le Titre des Monîtres, tous ceus la qui ont une figufe hideufe, ou qui vivans de proye font des ravages dans leseaus, comme les Lions, les Ours, les Tigres, & les autres beftes farouches en font fur la terre. Nous devons parler dans ce Chapitre des uns & des autres, c’eft à dire de tous ceus qui font d’une grof-. feur prodigieufe, ou qui font effrovables pour leur forme hideufe à voir, & redoutablesà caufe de leurs défences. Et ainfi, nous defcendrons pour un peu de tems, danses abyfmes de cette grande & fpacieufe Mer, où comme dit le Saint Roy qui acompofé les Sacrez Cantiques d’Ifraël, il yades Repti- les fans nombre, de petites beftes avec des grandes, & apres y avoir contemplé les œuvres du Scigneur, nous en remonte-! rons incontinent, pour celebrer fa benignité & fes merveilles. cnversles fils des hommes. AR EL CHE UE De l'Efpadon. Ntre les Monfires Marins, on remarque particuliere- ment celuy que nos François nomment Æ/padon, à caufe qu'il a au bout de fa machoire d’enhaut une defenfe de la lar- _geur d’un grand Coutelas, qui a des dens dures & pointués. des deus coftés. 11 y a deces Poiffons, qui ont ces defenfes longues de cinq pieds, larges de fix pouces parlebas, & mu- nies de vintfet dens blanches & folides enchaquerans, & le corps grosà proportion. Jlsont tous la tefte plate x hideufes de la figure d'uncœur, ils ont prés des yeus deus fouspiraus, par où ils rejettent l’eau qu'ils ont avalléc. Ils n’ont point d' écails / Le ) “Le CE El æ \ 7 . " pes » “4 BEN ILES ‘AMMPEUES . ‘pt d'écailles, mais ils font couverts d’une peau grife fur le dos, _& blanche fous le ventre, qui eft raboteufe comme une lime. Js ont fét nageoires, deus à chaque cofté, deus autres fur le dos, & puis celle qui leur fert de quete. Quelques uns les appellent Poillons à Scie, où Empereurs, à caufe qu’ils font la guerre à la Baleine, & bien fouvent la bleflent à mort, pe Hs ke à LS AR TLC E EU TE Des CMarfoïiins. | ? | Es CHWorfouims, font des Pourceaus de Mer, quivonterr É: grandetroupe, & fe jorent fur la Mer, faifant des bonds, & fuivant tous une même route. Ils s’approchent volon- tiers aflez prés des Navires; Et ceus qui font adroits à les harponner, en accrochent fouvent. La chair en eft aflez noiri- tre. Les plus gros, n'ont qu'un pouce ou deus de lard. Ils ont le mufeau pointu, la quete fortlarge, la peau grisâtre, &un troufurlateftc, paroëils refpirent & jettent l'eau. Ils ron- flent préfque comme les Porceaus de terre. Ils ontle fang . chaud, & les Inreftins femblables à ceus du Pourceau, & font prefque de même goût: mais leur chair eft de difficile digeftion. 1l y auneautre efpece de AMarfoüins, qui ont le groin rond _& mouflu comme une boule. Et à caufe de la reffemblance de leur tefte avec le Froc des Moines. Quelques uns lesappel- lent, Teffes de Moine, & Moines de Mer. ARE TC LEE k Du Requiem. L E Requiem. eft une cfpece de Chien ou de Loup de Mer, le plus goulu de tous les Poifflons, & le plus avide de chair humaine. Il eft extremément à craindte ; quand onfe baigne. Ilne vit quedeproye, & il fuit fouvent les Navires, pour fe repaitre des immondices que l’on jette en Mer. Ces monfres paroifient de couleur jaune diet eau. llyena qui font +92 HisTetrre NATURELLE, Chap.” font d’une grandeur & d’une groffeur deméfurée , & quifones capables, de coupér tout net un homme en deus. Leur peau ci) rude, & l’on en fait des limes douces, propres à polir lebois. Ils ont latefte plate, & n’ont pasl'ouverture de leur gueule touts au devant de leur mufeau, maïs deffous. Ce qui fait, que pour prendre leurproye, il faut qu'ils fe retournent le ventre prefs que en haut. Ils ont les dentstrenchantes fort aiguës & fort" larges, quifont dentelées tout autour, comme les dents d’une fcie. Il y enatels, quienonttrois & quatre rangs en chaque machoire. Ces dents fontcachées dans lesgencives; maisils ne les font que trop paroitre quand ils veulent. Cescruéls Dogues Marins, font le plus fouvent efcortez de! deus ou trois petis Poiflons, & quelquéfois d'avantage qui le precedent avec une telle vitefle & un mouvementfi mefuré, qu'ils s’avancent & s’arreftent plus ou moins, felonqu'ils 1p- perçoivent que les Requiémss’avancent ous’arreftent. Quel- ques uns les nomment Rambos, & Pelgrimes. Mais nos Ma- telots les appellent les Pslotes du Requiem, par ee qu'il femble que ces petis Poiffonsle conduifent. Ils n’ont qu'un bon pied ouenvironde longueur, & ils font gros à proportion. Mais au refte, ils ont l’ écaille parfemée de tant de belles & wvivés cou- leurs, quel’ondiroit, qu'ils foient entourez de chaïnés de pet. les, de corail, d'émeraude, & d’autres Pictrenees 0e ne s’au- roit fe laffer de les confiderer en l'eau. C'eft ainfique la Baleine ne marché jamais, qu “alé n'ait devant elle un petit Poiffon, femblable au Goujon de Mer, qui s'appelle pour celala Guide. La Baleine le fuir, fe laiffant mener & tourner auf facilement, que le timon fait tourner le Navire, & en recompenfe aufhi, au lieu que toute autre chofe, quientre dans l’horrible Cäos de la gueule dece Mon-- ftre, cft incontinent D & englouty, cepetit Poiflon s’y retire cntoutefeureté, € y dort. Et pendant fon fommeil la Baleine ne bouge, mais aufiroft qu'il fort elle fe met à le fuivre fans cefle. Ët G de fortune elle & carte deluy ; elle va errant ça & la, fe froiffant fouvent contre les rochers, coms me un vaiffeau qui n’a point de souvernail. Ceque Plutar- que témoigne qu'il a veu en l lle d’ Anticyre. Il yaunc pa= reille focieté, entre le petit Oifeau Li on nommé le Roytele Ælepi7 .oesu ILES ANTILLES" roi &leCrododyle. Et cette Coquille qu’on appelle la Nacre, vitainfi aufli avec le Pinnothere, qui eft un petit animal de la forte d'un Cancre. C’eft ce que recite Michel de Montagne, aufecond Livre de fes Effais, Chapitre 12. Au refte la chair du Requiem n’eft point bonne , & l'on m'en mange qu'enneccflité. Ontienttoutéfois que quandils font jeunes , ils ne font pasmauvais, Les curieus, recücillent foigneufement la Cervelle qui fe trouve dans la tefte des vieus, & apres l’avoirfaits’écher, ilslaconfervent, & ils di- fnt qu'elle efttres-utile à ceus, qui font travaillez de la pier= re, ou de la gravelle. | Quelques Nations, appellent cé Monftre Tiburon & Tube. #on. Mais les François & es Portugais luy donnent ordinaire. ment ce nom de Requiem, c’elt à dire Repos , peuteftre parce quil à accoutumé de paroïître, lors queletems eft ferain & tranquille, comme font aufli les Tortués : ou plûtot, parce qu'ilenvoye promtément au repos, ceus qu'il peut attraper; qui eft l'opinion la plus communeentre nos gens, qui lappei- lent de ce nom. Son foye étant boüilly, rend une grande quantité d'huyle, quiefttres-propre pour entretenir les lam- pes, & fa peau, eft utile aus Menuyfers, pour polir leur buyrage, | | Ro MIE SEAE À DV: De la Remore. ï 0 Es Pilotes , dont nous avons parlé: les Regziems, AZ font bien fouvent accompagnez d’une autre forte de Petis Poiffons, que les Hollandois appellent S#yger, par ce qu'ils s’attachent fous fe ventre des Requiems, comme s’ils les vouloient fucçer. Nos François tiennent, que c’eftune efpece de Remore, & ilsieur ont donné ce nom, à caufe qu'ils # collent contre les Navires, commes'ils vouloient arrérer leur cours. 1ls croiflent environ de deus pieds de long, & d'une groffeur proportionée. Ils n’ont point d’écailles, mais ils font couverts par tout, d’une peau cendrée, qui eft gluante comme celles des Anguilies. {ls ontla Machoire | Bb de 194 HISTOIRE NATURELEE, Chap.17 de deffus, un peu plus courte que celle de deflous, au lieu dé dens, ilsontdepetiteseminences, qui font affez fortes pour brifer ce qu’ils veulent avaller. Leurs yeus font fortpetis, de couleur jaune. Ils ont des Nagcoires & des Empennures? comme les autres Poiflons de Mer, mais ce qu'ils ont de par= ticulier, eft, qu'ils ont la tefte relevée d’une certaine piece faite enovale, qui leurfert de couronne. Elleeftplatte, & rayée par deflus de plufieurs lignes, qui la rendent heriffléeg C'eftaufli par cetendroit, que ces Poiflons s’attachent fi fer= mementaus Navires & aus Requiems, qu'ilfaut fouvent les tuer, avant quede les pouvoir feparet. Onenmange, mais c’eft au defaut d’autres Poiffons, qui font plus delicas. À RUE. LC LE V. Du Lamantin. | + Ntre les Monfires Marins, qui font bons à manger, & que l’onreferve en provifion, commeon faiten Europe le Saumon & la Moruë, on fait fur tout état aus Ilesdu La mantin felon nos François, ou N'amantin & Manaty felonles Efpagnols. C’eft un Monftre, qui croift avec l'âge d'une grandeur fi étrange, qu’on ena veu qui avoient environ dix= huit pieds de long, & fét de groffeur au milieu du corps. Sa tefte a quelque reffemblance à celle d’une Vache, d’où vient que quelques uns l’appellent Vache de CHMer. Ilade petis yeus, & la peau épaife de couleur brune, ridée en queiques: endroits & parfemée de quelques petis poils. Eftant fiche, elle s’endurcitde telle forre, qu’elle peut fervir. de rondaché impencetrable aus fléches des Indiens. Aufli, quelques Sau- vages s’en fervent pour parer lestraits de leursennemis, lors qu'ils vontau combat. Il n’a point de Nageoires, mais en leur place, ila fous le ventre deus petis pieds, qui ont'chacun quatre doirs fort foibles , pour pouvoir fupporter lé fais d’un corps fi lourd & fi pefant : Et il n’eft pourveu d’aucuneautre defenfe. Ce Poiffon vit d’herbe, qui croift auprés des Ro ches, & fur lesbaffes qui ne font couvertes que d’une braffe: oucnviron, d'eau de Mer. Les femelles mettent leur fruit | hors, Ch: IDESUPLES ANTILLES, 195 D: à la faffon des Vaches, & ont deus tétines avec léquel- les elles allaitent leurs petis. Elles en font deus à chaque pot- tée, qui ne les abandonnent point, jufques à ce qu'ils n'ayent plus befoin del’ait, & qu'ils puifient brouter l'herbe comme leurs meres. Entre tous les Poiflons, il n’y en a aucun qui ait tant de bonne chair, que le Zamantin. Car il n’en faut fouvent que deus ou trois, pour faire la charge d'un grand Canor, & cette chair eft femblable à à celle d’un animal terreftre, courte, ver- meille , appetiflante, & entre-meflée de graifle, qui étant fon- duë nefe rancit jamais. Lors qu’elle a efté deus ou trois jours dansle fel, ellceft meilleure pour la fanté, que quand on mangetoutcfraiche. Ontrouve plus fouvent ces Poiffons, à l'embouchure des Rivieres d'eau douce, qu'en pleine Mer. Les curieus, font grand érat de certaines pierres qu’on trouve en leurtefte, à caufe qu’elles ont la vertu à ce qu ils difent, cftant reduites en poudre, de purger les reins de gravelle, & de brifer même la pierre qui y feroit formée. Mais, à cauft que ce remede eft violent, onneconfeille à perfonne æ cnufer, fans l'avis d'un fage & bien experimenté Medecin, AIR TIT-CIT E VE Des Baleines © autres CMonffres de Her. | Eus qui voyagenten ces Iles, appercoivent quelquefois fur leur route des Baleines qui jettent l’eau par leur évent de la hauteur d’une pique, & quine montrent pour l’ordinairé qu'un peu du dos, qui paroit comme une Roche horsde l’eau. Les Navires, font aufli par fois efcortez afflez long tems, par des Monftres qui font de la longucur, & de la grofitur d’une Chalouppe, & qui femblent prendre plaifir à fe mon- trer. LesMatclotsles nomment Æforhous où Sowffleurs, pat ce que detems en tems, ces prodigieus Poïffons mettent une Partie de leur tefte hors de l’eau, pour reprendre haleine, Et alors ils foufflent, & font écarter l’eau de devant leurs mu- feaus pointus. Quelques uns difent, que c'eftune efpece de ne Marfouins. « Bb 2 ART te rt, 9 , AE ï \ 2 = 196. Hisroire NATURELLE, 4 R TELE, MR Des Diables de CHMer, Us coftes de ces Les, il tombe nue fous la Varel des Pefcheurs un Monitre, que l'on met entre les efpeces. de Dalles de CMer, à caufe de fa figure hideufe. ]left long d'environ quatre pieds, & gros à proportion. IL porteune boffe fur le dos, couverte d’aiguillons pareils à. cens d'un Heriflon. Sa peau eft dure, incgale, & raboteufe com- me celle du Chien de Mer, & de couleur noire. Ila latefte platte, & relevée par deffus de plufieurs petites bofles ,. entre lefquelles on vait deus petis yeus fort noirs. Sa gueule qui eft demecfurément fenduë, eft armée de plufieurs dens extre= mément perçantes, dontilyen a deus qui font crochuës &! annelées , comme celles d’un fanglier. Il a quatre nageoires & une queüeaffez large, qui eft fourchuëé par lebout. Mais ce qui luy à fait donner le nom de Diable de Mer, eft, qu’au deflus des yeus, il a deus petites cornes noires affes pointuës, qui fe recoquillent fur fon dos comme celles des Beliers. Outre que ce Monftre eft laid au poflible , fa chair qui eft mollaffe & filafeufe , eft un vray poifon, carelle caufe des vo= miflemens étranges, & des defaillances, qui feroient fuivies de: la mort, s'yelles n’étoient prontement arrétées par une prife debon Teriac, ou de quelque autre contrepoifon. Ce dange= reus animal, n’eft recherché que des curieus, qui fant bien. aifes d’en avoir la d'épouille dans leurs cabinets. Ainfi ce Diable, qui n’a porté jamais d'utilité aus hommes RAAFARS fa vie, repaif au moins leurs yeus.aprés famort. 1 Il ya.encore une autre fortede Diablesde Mer, qui ne font pas moins hideus.que les precedents , encore qu ilfoient d’une autre figure. Les plus grands de cette cfpece n’ont qu'un pied: ou environ dépuis la tefte jufques à la queüe. Ils-ent prefque autant de largeur,mais quand ils veulent, ils s’enflent-d’une telle RUES qu’ils paroiffent ronds comme uneboule: Leur gueulé qui eff afiés fendué , eftarméede plufeurs petites dens extrés mément pointués, &c au lieu de langue ils n’ont qu'un Le. MN D.27 DES ÎLES ANTILLES. 197 _ ôs, qui eft dur au poffible. Leurs yeus font fort étincelans, & fi petis & enfoncez en la tefte, qu’on a peine de difcernerla prunelle. Ilsontentreles yeus une petite corne, quirebroufle enarriere, & au devant d’icelle un-filet un peu plus grand, qui eft terminé par un petit bouton. Outre leur queüe, quieft comme le bout d'une rame, ils ont deusempennures, l’une qui eft fur le dos, laquelle ils portent droite &relevée, & Jautre fousle ventre. 1ls ont aufi deus nageoires, qui ré- pondent dechaque cofté du milieu du ventre, & qui fontter- minées en forme de petites pattes, qui ont chacune huit doits, qui font munis d'ongles affez piquans. Leur peau eft rude & heriflée par tout, comme celle du Requiem, horsmis fous le ventre. Elle eft d’un rouge obfcur, & marquetée detaches noires, qui font comme desondes. Leurchair, n’eft point bonne à manger. On les peut écorcher aifément, & apres avoir remply la peau de cotton, ou de feüilles s’éches, on luy donne place entre les raretez des cabinets ; Mais elle perd: beaucoup de fon luftre, lors que le Poiflon eft mort, MRTICLE":VIIL De la Becune.. FF : Ntre les Monftres goulus & avides de chair humaine, qui fe trouvent aux coftes de ces Iles, /4 Becune eft l’un des plus redoutables. C’eftun Poiflon, quieftde la figure d’un Brocher, qui croift de fét à huid pieds en longueur, & d’une grofleur proportionée. Il vit de proye, & il fe lance de fürie, comme un chien carnafier, fur les hommes qu’il appercoit en. l'eau. Outre qu'il emporte la piece de tout ce qu'il peur at- traper, fes dents onttant de venin, que leur moindre morfu- te, devient mortelle, fi on n’a recours au mêmeinftant à quel- que puiflant semede, pour rabattre & divertir la force de ce poifon.. | Eb s ARTE 1 Niltbrnt Narunesse, Ch. 17 AR TT IÉGE E rx x De la Beccaffe de Mer. Lyaencoreune autre forte de Becunes que nos Étniaie ont. nommée Beccal]e de Mer, à caufe dela figure de fon bec,quis _eft prefque pareil à celuy d’une Beccaffe, excepté, que la partie. d’enhaut, eft plus longue de beaucoup, que celle d’enbas, &" que ce Poiffon,remuë l’une & l’autre machoire,avec une égale | facilité. Onenvoitdefi gros & defilongs, qu'en peut mefu- rer 4 bons pieds entre queuë & tefte, & 12 pouces en la lar-M geur de chaque cofté, qui répond aus ouïes. Satefte a préfque fa forme de celle d’un Pourceau, mais elle eft éclairée de deus* gros yeux, quifont extremément luyfans. 1] a la queuë divifée en deus , & des nageoiresaus coftes & au deffous du ventre, &. line empennure haute & relevée par degrez, comme une cré-. fte,qui commence au fommetde la tefte,& s'étend tout le long - dudos, jufques prés de la queué. Outre le bec long & folide | qui Le fait remarquer entretous les Poiffons , il a encore deus efpeces de cornes dures, noires, & longues d’un pied & de=. my,qui pps au deffous de fon gofier, & qui luy font par- ticulieres, il les peut cacher aifément dans une enfonçurce qui. eft fous fon ventre, & quileurfertdegaine JIln’a point dé- -cailles: mais il eft couvert d'une peau rude, quieft noirâtre furle dos, grife auscoftez, & blanche fous le ventre. On en peut manger fans peril, encore que fa chair ne foit pas fi deli- cate, que “cellede plufieurs autres Poiflons. * “A. KE ll CL EE 2 De l'Heriffon de Mer. 1 rien de Mer qui fe trouve aufli. en ces côtes, porte à. bon droit ce nom là. Il eft rond commeuneboule, &: tout revétu dépines fort piquantes, qui le rendent redoutable. D'autres le nomment Poiffon armé. Quand les pefcheurs en prennent, ils les font fécher pour les envoyer aus curieus, a | les pendent par rarére en leurs cabinets. 1 mn RE 2 4 PO ! ( r CRE. re ; > « vo ; RPM ETS COUPER Enr SL HART Te ni j ÿ 7 “ AA ni NCA CUBES C'IUNF A$ 2 ü À Ph 2 à : : + HE Ke ; td ; ke DES ÎLES ANTILLES Mu. ANA pe 2 LL LOODDDL : ee MUR Lg 72 AU y. Ch We 7 00) : UP Rs mn) A | 02/2200 Pr & : { LA X LI Là | FE PEPIE ERUS à # dtiries e) ouutidé , ptett C4 Haiti cjosisrtettthes Ter 771 . sthatasgnsss tint" pre AA \ 209 HisSToiIrRz NATURELLE, Chap.is CHAPITRE DIXHUITIÈME.. Defcription particaliere d'une Licorne de Mir, qui s PA 4 la rade de l'Ile de la Tortuë en l'an 1644. Avec unrecit. curieus | par forme de comparaifon & de digrefsion agrea- ble, tonchant plufieurs belles & rares cornes qu'on a appor- tees A peu du détroit de Davis ; C7 de la qualité de la ter re, &7 des meurs des Peuples qui y habitent. ni Ous ne pouvons mieus finir ce que nous avions à dire des Monftres marins, que par la defcription d’un Poiflon fi remarquable & fi merveilleus, qu’il merite bien d’avoir un Chapitre particulier. C'’eft la Licorne demer, « qui fe rencontre quelquefois en ces quartiers. Il s’en échoüa en l’an 1644 une prodigieufe au rivage del’Ile de la Tortué, voiline de l'Ile Hifpaniola, ou Saint Domingue. Monfeur du Montel, enayantune connoiffance exatte comme Témoin oculaire, nous en donne cette curieufe defcription. Cette »> Licorne, dit il, pourfuivoit une Carangue, qui eft un >, Poiflon mediocre, avec unetelle impetuofité , quenes’ap-. » percevant pas qu'elle avoit befoin de plus grande eau qu'’el- » le pour nager, elle fe trouva la moitie du corps à fec, fur. >, un grandbancdefable, d’où elle ne put regagner la grande eau, &'ou lés habitans de lle Pommes Elle avoit. » Environ dixhuit pieds de long, étant de la groffeur d’une , Barrique au fort du corps. Elle avoit fix grandes nageoi- , res, de la faffon du bout des rames de galere, dont deus FA étoient placées au defaut des ouyës, & les quatre autres à », Côté du ventreen égale diftance: elles éroient d’un rouge ,, Vermeil. Tout le deffus de fon COPS , étoit couvert de » grandes écailles de la largeur d’une piece de cinquante huit », ols , léquelles étoient d’un bleu , qui paroïfloit comme par- » femé de paillettes d'argent. Aupres du col fes: écailles », étoient plus ferrées, & de couleurbrune, ce qui luy faifoit Commeuncollier. Les écailles: fous le ventre étoient jau- »ness 4 ® - li: h # RS, dés / . » 2 { a Li AT OU MAP 18 DES :ÎLES. ANTILLES. 201 nes: la queué fourchuË: la tefte un peu plus grofe que celle d’un Chéval, & presque de Ja mémefigure; Elle étoit >, couverte d'une péaudure & brune: & comme la Licorne de terre, aune corne aufront, cette Licorre deiner, enavoit ,, auffi une parfaitement belle au devant delatefte, longue de 3; neuf pieds & demy. Elle étoitentierementdroite, & depuis ,, Iefrontou elle prenoit {a naiffance, elle alloit toujours en di- ,,Minuant jufques à l’autre bout, quiétoit fi pointu, qu'étant »» poufléc avec force, elle pouvoit perçer Iles matieres les 5» plus folides. Legros bout, quitenoit avec la tefte, avoit nieize pouces de circonference, & dés-là jufques aus deus drticts de-la longueur de cette mer veilleufe corne, iléroit en » forme d’une vis de prefloir, ou pour mieus dire, faffonné enondes, commeunecolomnetorfe, horsmis que les en- ;, fonçures alloient toujours en amoindriflant, jufques à ce Qu elles fuffent remplies & terminées par un agreable adou- » Ciflement, qui finifloit deus pouces au deffus du quatriéme » pied. Toute cette partie bañie étoit encrourée d’un cuir », cendré, qui étoit couvert par tout d'un petit poil mollet, », & court comme du velours de couleur de feuilles mortex , mais au defflous, elle étoit blanche comme yvoire. Quant à l'autre partie qui paroïfoit toute nuë, celle étoit naturel- » lement polie, d’un noir luifant, marqueté de quelques me- nus filet: blancs & jaunes, & d’uncfolidité telle, qu'à peine une bonne lime en pouvoit cle faire fortir quelque menuë > poudre. Elle n’avoit point d'oreilles elevées, mais deus 4, grandes ouïes comme les autres Poiflons. Ses yeus étoient »de la groffeur d'un œuf de poule. La prunelle, quiétoit d'un bleté celefle emaillé dejaune, étoit entourée d’un cer- » Cle vermeil, qui étoit fuivy d’unautre fort clair, & luyfant » comme criftal. Sa bouche étoit afiez fenduë & garnie de » Pluficursdens,dont celles dedevantétoient pointuës & tren- ; chantes au poflibie, & celfes de derriere tant de l’une que de l’autre machoire, larges & relevées par petites boffes. » Elle avoit une langue d’une longueur & épaifieur propor- mtionéc , Qui étoit couverte due peau rude & vermeille, n Au refte,cce Poifflon prodigieus avoit encore fur fatefte, une 3, cfpéce de couronne rehauffée par defius le refle du cuir, | Cc ac 202 HésTorrE (NATURELLE, Chap.18 », de deus pouces ou environ, ‘& faiteenovale, delaquelle, , les extremités aboutiffoient en pointe: Plus de trois cens. », perfonnes de cette Ile-là, mangerent de fa chair en abon- » dance, . & la trouverent extremement delicate. ! Elle étoit », entrelardée d’une graifle blanche, & étant cuite, elle fe » Ievoit par écailles, comme la moruë fraiche: maiselle avoit », un goût beaucoup plus favoureus. >) eus. qui avoient veu ce rare Poiflonen vie, & qui ta y) avoient rompu léchine à grans coupsdeleviers ; difoient >, Qu'il avoit fait de prodigieus efforts, pourlesperceravec fa s; COTE, laquelle il manioit & tournoit detotites parts avec ,unc dexterité & une vitefle incomparable, & que s’ileut », CU affes d’eau pour fe foutenir& pour nager tant foit peu, il es eut tousenfilez. Quand onl’euteventré, onreconnut » aifément qu'il fe nourrifloit de proye, car ontrouva en [es >, DOyaus, beaucoup décailles de Poiffons. : » Lesrares dépouilles de ce mervcilleus animal, & fitioul »fatefte, & la riche corne qui y étoit attachée, ont demeuré »» pres de deus ans fufpenduës au corps de garde del'fle, juf- » ques à ce que Monfieur le Vafleur qui en étoit Gouverz » nEUur, voulant gratificr Monfieur des Trancarts , Gentil= a) homme de Saintonge, sen étoit venu voir, iuy fit prefent », de cette corne: Mais quelque peu aprés m'étant embar- », Qué dans un vaiffeau de Flefhngye avec le Gentil: homme, » Quiavoit cette precieufe rareté enunelonguecaiïfle, nôtre ;, Vaifleau febrifa prés de l’Ile de la Fayale, quieft Fune des » Açores. De forte que nous fifmes perte de toutes nos har » des & detoutes nos Marchandifes, Et ce Gentil-homme res » Stetta fur tout fa caille, [ufques icy font les paroles de nôtre aimable Voyageur. | Ontrouve en la mer du Nord, unc autre efpece de Lire nes, qui font fouvent pouflées parles glaces, aus coftes d’Iflans de. Elle font d’une longueur & d'une groffeur fi prodigieus fe, que la plüpart des Auteurs quien ontefcri, les mettent au: rang des Balcines. Elles ne font point couvertes:décailles, comme celle dont nous venons de’donner la: defcriprions mais d’une peau noire & dure comme le Lamantin. : EMes n'ont que deus nageoires aus coftez.,' & une grande & large cnpen. 1484 DES: ue A NTALLE Sr | 263 enpennure furledos, laquelle étant plus étroire au milieu, fait comme une double crefte, qui s ’éleve en une forme tres-propre, pour fendre commodément les eaus. Elles ont trois trous en forme de foupiraus, à la naiflance de leur dos, par où elles vomiffent en haut toute l’eau fuperflué qu "elles ont avallée, de même que les Baleines. Leur tefte fe termine en pointe, & au cofté gauche de la machoire d’enhaut, elle eft munie d'une corne blanche par tout, comme la dent d’un jeune Elefant, qui s’avance quelquefois de la longueur de quinze à feize pieds hors delatefte. Cette corne eft torfe en quelques endrois, & rayée par tout de petites lignes de cou- Jeur de gris de Perle, léquelles ne font pas feulement en la fuperficie : mais qui penetrent au dedans de la mañfe, qui cit creufe jufques au tiers, & par tout aufii folide, qu’un os le plus dur. Quelques uns, veulent que cette prominence, foit plütoft une dent qu'une Corne, à caufe qu'elle ne fort pas du front comme celle dont nous venons de parler, ni du deffus de la tefte, comme celles des Faureaus & des Beliers; mais de la Mmachoire d’enhaut dans laquelle le bouteftenchañlé, comme font les dens en leurs propres caflettes. Ceus quifontdece fentiment ajoûtent, qu'il ne fe faut pas étonner fi ces Poif- fons n’ont qu'une de ces longuesdens, veu que la matiere la- quelle en pouvoit produire d’autres , s’eft entierément epui- fée pour former cellecy, qui cft d’une longueur & d’une grof- feur fi prodigieufe, qu’elle fufñroit bien pour en faire une centaine. | Or foit que cette pefante & merveilleufe défenfe d'ont ces monftrueus Poifons font armez, foit appellée dent ou “Corne : il eft conftant qu'ils s'en fervent, pour combattre “contre les Baleines, & pourbrifer les glaces du Nord, dans léquelles ils le trouvent bien fouvent cnveloppez ; d'où Vient qu'onen à veu quelquéfois, qui pour avoir fait de vio- lens efforts, pour fe démefler du milieu de ces montagnes glacées , avoyent non feulement emouffé la pointe de cette lance naturelle ; mais même l’avoyent brifée & fracaffée en deus. Nous avons fair mettre en une même plancheles fi- Bures deia Licorne laquelle s’échoüa en l'Ile de la Tortuëé, & Cc2z d'une 46 208 HisTorrs NATURELLE, Chap 18 d’une de celles du Nord, afin que l'on puifle plus facilement. difcerner la grande difference quieftentre ces deusefpeces. k: HITS LL VAT, 2e re Au même tems, que nous tirions de noftre cabinet cette Hiftoire pour ladonner au public, un Navire deFlifinoue commandé par Nicolas Tunes, dans lequel Monfieur Lamp= fius , les Sieurs Biens, Sandras, & d’autres Marchands dela même Ville étoientintereflez, étant heureufement rertoutné du d’étroit de Davis, enarapporté entre autres rarétez, plus fieurs excellentes dépoüilles de ces Licornes de la mer du Nord, dont nous venons deparler. Et d'autant que la rela= tion qu’on nous a envoyée touchant cevoiage, peut donner de grandes luimieres à la matiere que nous traittons , "nous croyons que le Leéteur curieus trouvera bon, que nous le fers vions decette nouveauté par forme dedigreflion, qui fera ace | | com | Chap. PU OODIEST ILES ANTÉHDDES. 205 | compagnée de la même fidelité, avec laquelle elle nous a eftécommuniquée. Le Capitaine de qui noustenons cerecit, étant party de ‘Zelande fur lafin du Printems de l’an 1656. en intention de découvrir quelque nouveau commerce es terres du Nord, atriva-fur la fin du mois de Juin dans le Détroit de Davis , d’où étant entré dans une riviere qui commence au foixante qua- - triéme dégré & dix minutes de la ligne en tirant vers le Nord, il fit voile jufques au feptante deuzieme, fous lequel laterre que nous allons décrire eft fituée. Dez que les Habitans du Païs qui étoient à la pefche eurent - apperceu le Navire, ilsle vinrent recognoitre avec leurs pe- tis efquifs, qui ne font faits que pour porter une feule pet- fonne, les premiers quis’étoient misen ce dévoir, enattire- rent tant d’autres aprez eux, qu'ils compolfcrent en peu de ‘tems unefcorte de foixante & dix de ces petis vaiffleaus ; qui n abandonnerent point ce Navire étranger , jufques à ce qu'il eut moüillé à la meilleure rade, ouils luy témoignerent par _ leurs acclamations, & par tous les fignes de bienvetullance, qu'on peut attendre d’une Nation fi peu civilizée , la joye ex- traordinaire qu'ils avoyent, de fon heureufe arrivée. Ces pe-- . tis vaifleaus font fiadmirables, foit qu'ils foyent confiderez en: leurmatiere, foit qu'on ait égard à la merveilleufe induftrie _ dont ils font fañlonnez, ou à la d’exterité incomparable avec laquelle ils font conduits, qu'ils meritent bien, de tenir le _ premier rang, dans les defcriptions que cette agreable digref- {ion nous fournira. 1ls font compofez de petis bois deliez, déquels la plupart _ font fendus en deus comme des cercles. Ces bois font atra: chez les unsavec lesautres, avec de fortes cordes qui font fai- tes de boyaus de Poiffons, quilestiennent enarreft, & leur . donnent lafigure qu’ils doivent avoir, pour cftre propres aus: _ ufagcs aufquels ils font deftinez. Ils font couverts en dehors . de peau de Chiens de mer, qui font fi proprément coufnés par enfemble, & fi foigneufement enduites de refine à l’endroit: h des coutures, que l’eau ne les peut aucunement penetrer. (Es Ces peris Bateaus, font ordinairement, delalonsueur de | quinze à fcize pieds, & ils peuvent avoir par le milieu oùils Qc: 2. eut NX BAM (NES L + near" 206 HISTOIRE NATUREMAUILE, Chapr ont plus de groffeur, environ cinq pieds de dite EceteeR à C'eft des cet cendres qu'ils vonten appetiffant, de forte que les extremitez aboutiflent en pointes, qui font munies d'os blanc, ou de dépouïilesdes Licornes dont nous venons à deparler., Le deflus eft tout plat & couvert de cuir de mème quelerefte, & le deflous a la forme du ventre d’un gros Poif« {on : de forte qu'ils font tres-propres à couleur fur les eaus. IIS n’ont qu’une feule ouverture, qui cftdircétement au milieu de tout l’edifice. Elle eft relevée tout à l’entour d’un bord de cofte de Baleine, & elleeft faite à proportion, & de lagrof- feur du corpsd’un homme, Quand les Sauvages quiontinven-\ té cette forte de petis vaiffeaus s’en veulent fervir foit pour aller à la pefche, ou pour fe divertir fur la mer, ils foutrent pag cette ouverture leurs jambes & leurs cuifles, & s’érans mis fur leur feant, ils lient fi ferrément la cafaque quiles couvrè, avec le bordde cetteouverture, qu'ils femblent eftre entez fur cet“ efquif, & ne faire qu’un corps avec luy. Voila pour ce qui concerne la figure & la matiere See ces petis vaifleaus. Confiderons à prefent, l’équipage des hom« mes qui les gouvernent. Quand ils ont deflein d'aller fur mer, ils fe couvrent par déflus leurs autres habits d’une Cafa=« que, laquelle n’eft deftinée à aucun autre ufage. Cét habits de mer eftcompofé de plufieurspeaus, denuées de leur poil,« qui font fi bien preparées & unies par enfemble, qu'on le” croiroiteftre fait d’une feule piece. 11 les couvre dépuis Iew fomimet de latefte, jufques au deffous du nombril. lleften-« duit par tout d’une gomme noirâtre, laquelle ne fe diffoutw point dans l’eau, & qui l'empefche de percer. Le Capuchon“. quicouvrelatefte, ferre fi bien fous le col, & fur lefront,« qu'il ne leur aie rien que la face à decouvert. Les mans ches font liées au poignet, & le bas de cette cafaque, eft an fi attaché au botd de l'ouverture du vaiffleau, avec tant de foin,“ & avec unetelleinduftrie, que le corps qui eftainf couvert,“ fe trouve toujours à fec au milicu des flots, qui ne peu vent moüiller auec tous leurs efforts, que le vifige & les mains. | Encore qu'ils n'ayent ni voiles, ni mailt, ni gouvernail, ni compas, niancre, niaucune des pieces de tout ce grand atw : rails , LA RE à MAIS DES. ILES, ANTILLES ‘ 207 tivail, qui eft requis pour rendre nos Navires capables d'aller fur mer. Il entreprenent neantmoins de longs voiages, avec ces petis vaifleaus, fur léquels ils femblenteftre coufus. Ils fe connoifient parfaitement bien aus étoiles, & ils n'ont befoin d'autre guide pendant Ja nuit. Les rames dont ils fefervent, ont une “largeur à à chaque bout en forme de palette, & afin. qu'elles puiflént coupper plus aifément lesflots, & qu'elles foyent de plus grande durée, ils les entichiffent d’un osblanc,. quicouvre les extremitez du bois, ils en garniffent aufli les bords des pallettes, & ils yattachent cet ornementavec des chevilles de corne, qui leur fervent au lieu de clous. Le milieu. de ces rames eft embelly d’os, ou de corne precieufe , de mé- me que les bouts, & c’eft par là qu'ils les tiennentafin qu'elles ne leur coulent des mains. Au refte, ils manient ces doubles rames avec tant de dexterité & de vitefle, que leurs petis vaif- feaus dévancent aifémentles Navires, qui ont deployé tous leurs voiles, & qui ont le vent & la marée favorables. Ils font fi affurez dans cet petis efquifs, & ils ontunefi grande adrefte à les conduire, qu'ils leur font faire mille caracoles, pour donner du divettiffement à ceus qui les regardent. Ils s'éfcriment aufli quelquéfois contre les ondes , avectant de force & d’agilité , qu'ils les font écumer comme fi elles étoient agitées d’une rudetempefte, & pour lors, on les pren- droit plütot pour des Monftres marins qui s’entrechoquent, que pour des hommes : Et même, pour montrer qu'ils nere- doutent pointles dangers, & qu'ils font en bonneintelligence avec cet element qui les nourrit & les carefle, ils font lemou- linet, fe plongeans & roulans en la mer, par trois fois confecu- rives, de forte qu'ils peuvent palfer pour de vrais Amfbies. - Quandilsontdeflein, de faire quelques voiages plus longs que les ordinaires, où quand ilsapprehendent, d'eftre jeitez bien avant en pleine mer par quelque tempefte, ils portent dans levuide de leur vaiffleau, une veffie pleine d’eau douce, pouf étancher leur foif, & du Poiflon feché au Soleil où à Ja gelée, pour s’en nourrirà faute de viandes fraiches, Mais, il arrive rarément qu'ils foyent reduirs à recourir à ces proVi: fions : Carils ont certaines fleches en forme de petites lances, qui font attachés fur Leurs Batcaus, & lefquelles ils s'avent fr! d'arder: 208 HISTOIRE NaTuneirs, Chp18 d'arder fi vivement fur les Poiflons qu’ils rencontrent, qu'il n'atrive présque jamais, qu’ foyent fans ces rafraichiffe mens. Ils n’ont point befoin de feu pour cuire leurs viandes par ce que fur lamer & furlaterre, ils font accoutumez de less manger toutes cruüés, ils portent auf certaines dens de oros Poiflons, oudes broches d’os fort pointuës, qui leur tien* nent lieu de couteaus, car ils s’en fervent pour eventrer & trancher les Poiflons qu'ils ont pris. Au refte il n'y peut point avoir de debats dans ces Vaifleaus , puis qu’un feulhom-" me en eft le Maitre, le Matclot, Le Pourvoyeur , & le Pilote, qui le peut arrérer quand bon luy femble, ou l abandonner au gré du vent & dela marée, lors qu'il veut prendte le re- pos qui luy eft neceffaire pour reparer fes forces. En ce cas, il, accroche [a rame à des courroyes de cuir de Cerf, qui font preparéez à cet ufage, & qui fontattachées par bandes-au deffus de ce Batteau: ou bienil la lie à une MU laquelle pend au devant de fa cafaque. Leurs femmes, n’ont point lufage de ces petis Elquifs, mais. afin qu’elles puiflent quelquéfois fe divertir fur la mer, leurs marys, qui ont beaucoupde douceur & d’amitie pour elles, les conduifent en d’autres vaiffeaus , qui font de la grandeur de nos Chaloupes, & capables de porter cinquante perfon= nes. Ils font faits de perches liées par enfemble, &ïls font couverts de peaus de Chiens aemer, comme ceus que nous venons de décrire. Ils peuvent eftre conduits à force de rames. quand letems eft calme: mais lors que le vent peur fervir, ils attachent au maft des voiles de cuir. Or afin que la defcription de ces rares vaiffeaus, & de ces hommes demet, foirmieux éclaircie & comme animée : : nous en avonsicy fait mettreune da laquelle a ététiréeau naturel fur l'original. 1 Pour parler maintenant delaterre, enlaquelle naiffent ces’ hommes, qui font fi entendus en la Navigation: les dégrez, fous léquels nous avons déja dit qu’elle eft fituée, témoignent affez, qu'elle eft d’une tres-froide conftitution. Il cft vray, que durant le mois de juin & de juillet, quicompofenr l été de cette contrée là, & qui font éclairez d’ unjour perpetucl, de mème que ceus de Decembre & deJanvier, n’y font Se | cuic A A 0 / feule nuit, l'air y eft chaud icrcabic & fercin : mais te tefte.de l'année, les jours qui s’allongent & s’accourciffent alternati- vement, font accompagnez de broüillards épais, de négess ou de pluyes glacées, qui font extrémement froides & in- portunes. Toute la Terre quieft prez de la mer eft féche, & héritée de plufieurs rochers pélez, qui font affreus au poffible, elle cft aufi inondée en beaucoup d'endroits, au tems que les néges fe fondent, de plufieurs effroyablestorrens , qui roulent leurs eaus troubles, dans le vaftc fein de ia mer. Mais lors qu'onatraverfé une petite lieuë de mauvais chemin, on ren- contre de belles campagnes, qui font tariflées durant l'Eté, d'une agreable verdure. On y voit aufli des montagnes, qui font couvertes de petis arbres, quirecreent merveilleufement la veuë, & qui nourriffentune grande multitude d’oifeaus & de Sauvagine. Et on pañe par des vallées, qui font arrofces de plufcurs claires & agrcables rivieres d’eau douce, quiont aflez de force, pour fe rendre jufques à la mer. » Le Capitaine qui commandoit ce Navire de FliMingue, ‘étant defcendu à terre ayecune partie de fes sens, & l'ayant he. Dd foigncu.- AD) MN AE NO NOR ENT. (0 ES fol Tes FRE) LOUP SENIOR RUN D T7 K SARA Se 2 WAY AE # Si HISTOIRE NATURELLE, Chap18n foigneufement vifitée, il y rencontra entre autres chofes dignes de remarque, une veine d’une certaine terre brune, _ parfeméede paillettes luifantes & argentées, de laquelle il fit remplir une barrique, pour en faire l'épreuve: mais apres avoir été mife au creufet, on a trouvé qu’elle n’étoit pro- , pre qu’à encroûtcr des Boettes, & quelques autres menus ouvrages de bois, aufquels elle donne un fort beau luftre.w Cet Indice laiffe neantmoins quelque efperance, qu'on pour- i roit trouver des Mines d'argent parmy cctteterre, {ion avoit. encore penetre plus, avant. Encore que ce Pais foit bien froid, on y voit Dinfeuretie:(il | & grands Oifeaus d’un plumage blanc & noir, & de diverfess autres couleurs, que les Habitans écorchent, pour en manger la chair, & pour fe couvrir de leurs dépoüilles. On ytrouve” auflides Cerfs, des Helans, des Ours, des Renards, des Lie-# vres, des Lapins, & une infinite d’autres Beftes à quatre pieds, qui ont prefque toutes le poil blanc ou grisätre, fort épais, . long , doux, & tres-propre à faire de bons chapeats, ou dc: belles & tres-riches fourrures. Quant aus Peuples qui habitent cette terre, Nos Voya- geurs y en ont veu. de deus fortes, qui vivent enfemble en: Bonne correfpondance & parfaite amitie. Les uns, font d’unes fort haute ftature, bienfaits decorps, decouleur ‘allez blan- che, & fort habiles à la courfe. Lesautres, fentdebeaucoup* plus petis, d'un tcint olivâtre, & affés bien propertionnez! en leurs membres, horsmis qu “ls ont les jambes courtes & grofies. Les premiers fe plaifent à la chafle, à laquelle ils fonts pottez par leur agilité & leurbelle difpolition naturelle, pen=" dant que ceus-cy s ‘occupent à lapefche. -Ils onttous les dens” extremément blanches & ferrées, les cheveusnoirs, les yeus,* vifs, & les traits du vifagefibienfaits, qu'onn y peut. remar= quer aucune notable difformite, Ils font aufli tous fi vigou-. reus, & d'une fi forte conflitution, qu'on en voit plulieurs qui ayans pafle la centiéme année de leur âge, font encore: fort alaigres & fort robuftes. # En leur converfation ordinaire, ils paroiffent d’üne hu meut gayc, hardie & courageufe. Js aiment les étrangers® so les vont vifirer, à. caufe qu'ils leurs portent desaiguillesss er : 4 Re Chap. 18 DES. Juss ANTILLES | à _ deshamecons, dés couteaus, des ferpes, descoignées, : tous les autres ferremens qui leur font propres, & dont font une fi grande eftime qu'ils les achetent au prix de en uts propreshabits, & detoutce qu'ils ont de plus precieus : mais ls font fi grands ennemis de toute nouveauté y En ce qui . concerne leurs vétemens & leur nourriture, qu'il fcroit bies difficile, de leur faire recevoir aucun changement, ni en l'un ni en l’autre. Encore qu'ils foyent l’une des plus pau wres, & des plus Barbares nations que le Soleil éclaire, ils fe croyent tres-heureus, & les mieus partagez du monde: Et ils ont fi bonne opinion de leur maniere de vivre, que les civilitez de tous les autres Peuples, pañlentaupres d'eux pour des aétions mal- fcantes ; fauvages , à nus au poflible, | Cette haute cflime laquelle ils ont conceuë de eue: con- dition, ne contribuë pas peu à cette fatisfaction, & à ce cor- tentement d'efprit qu’on lit fur leur vifage ; “hs qu'ils ne s’entretiennent pas dans la vanité de plufieurs deffeins, qui pourroient troubler leur tranquillité: Ils ne fcavent ce que _c’efl de tous ces foucisrongeans, & de ces chagrins inpor- _tuns, dont le defir déreglé des richeffes tourmente la plüpart des autres hommes. La ‘commodité des beaus & fomptueus bâtimens, la gloire du fiecle, les delices des feftins, lacon- noiffance des belles chofes, & tout CE QUE nous cféions la douceur. & le repos de la vie, n’ayant point encore penetré jufques à eus, ils ne font auf travaillez d'aucune penfée de les poffeder, qui pourroit interrompre le dous repos dont ils joüiffent: mais tous leurs deffeins font terminez à ac- querir fans beaucoup d’emprefiement, les chofes qui font Run neccffaires pour leur vétement, & pour leur nourriture, _ Leursexercices les plus ordinaires, font la pefche & la chaf- ‘ fe: & encore qu'ils n’ayent point d’ armes à feu, nide filets, l'ingenieufe neceffité, leur a fuggeré des autres induftries toutes particulieres, pout y pouvoir reuflir. Ils mangent tou- . tes les viandes dont ils fe nourriffent, fans les faire cuire, & - fans autre fauce, que celle que leur franc appetit leur fournit, is fe rient de ceus qui font cuire Le poiffon ou la venaifon, Dada 2 cat Lan LE HAS à RSS LT APE RES D, EE ARR ED ER UE RE A Me HISTOIRE Nar URELLE, chasi . car ils tiennent, que le feu confomme leur faveur narumelle &- tout ce qui les rend plus agreables à leur goût. | Encore qu'ils n’ayent point befoin de feu, pour cuire leur viandes, ils en louent neantmoïins grandement l'ufa- ge, & leurs cavernes n’en font jamais dépourveués durant l'hyver; tant pour éclairer & adoucir par fa lumiere, la noit-" ceur & l'effroy de cetre longue nuit, qui regneen leurcon trée; que pour temperer par fon aimable chaleur, la froi=\ dure quilestientafliesgez de toutes parts. Mais quand ils pren sent leur repos, ou qu'ils font contrains de fortir de leurs grottes, ils fe muniflent d'une certaine fourrure ; laquelle” par unexcellenttrait de la Divine Providence, a la vertu de les garantir parfaitement, contre toutes les injures du froid, quand ils feroyent couchez au milieu des néges. Les habits des hommes confiftent en une Chémife, un haut de chauffe, une Cafaque & des bottines. La Chemife ne bat que jufques au deffousdes reins. Elle a un Capuchon. quicouvre latefte & le col. Elle eft faite de veflies de gros: Poiflons, qui fontcouppées par bandes d’une égale largeur, & fort proprément coufuës par enfemble. Elle n'a point d'ouverture à la poitrine comme les nôtres; maisafin qu’elle ne fe déchire enlavétant, les bouts des manches, la tétiere, & le déffous, font bordez d'uncuir noir fort delié: felon la. figure laquellenous avons fait mettreen ce lieu. : core autres Habits, & même leurs bottines , font auffi de picves r’apportées comme leurs chemifes: maisils fontd’une matiere beaucoup plus forte, affavoir de peaus de Cerf, ou de Chiendemer, parfairement bien prepatées, & garnies de leur poil. Celuy du Sauvage duquel nous avons fait mettre icy le pourtrait tiré au naif fur l'original, étoit de peau de deus couleurs , les bandes étoyent couppées d’une même largeur, & difpolées en unfi bel ordre, qu'une bandeblanche., étoit. coufué entre deus brunes, par une agreable affemblage, Le poi: qui paroifloit en dehors, étoit aufli poly , & aufli dous que du velours, & il étoit fi bien couché, & les diverfes pieces. fe rapportoient G parfaitement les unes aus autres, qu’on eut jugé au dehors, que tout l'habit avoit efté taillé d'une feule peau. Pource quiconcerne maintenant la forme de. la cafaque. cafaque & de tout l’ornement exterieur du Sauvage qui en: étoit paré : le Graveurles a:reprefentez fi naifuément encette taille douce , que ceferoituntravail inutile, d’en vouloir faire une plus ample defcription. Ces Sauvages qui habitent ce détroit, ne fortent jamais encampagne, fans avoir fur l'épaule un carquois remply de fléches, & l'arc ou lalanceenlæmain. Quant aus fléches ils en ont de plufieurs fortes. Les unes font propres pour tuer les Lievres, les Renards, les Oifeaus, & toute forte de menu. Gibier: & lesautres ne fontdeftinées, que pour abbatre les: ICerfs, les Helans, les Ours, & les autres sroffes beftes, Cel-- les-là , n’ont qu'environ deus ou trois pieds delongueur, & au lieu de fer, elles ont la pointemunye d’un os delié, tren-- chant & fort aiou., quia l’un des côtez heriffé de trois ou qua= Ÿ | D z | tre: L WEBER 3 \ NT te | “à dr 33 x 0 TERRE ON \ : D Heu pa 5 g14 Hisvoirne NATURELLE, Chap.18 Ï s se es à ne... — Re TON 2 se EE Rd r, CAT ke ( FH = - x ; D 5 x : EN ) ENS RE EE — # p.18 DES. 1us ANTILLES: ZT $ crochets, qui font 0 ’on ne les peut arrachet du lieu elles ont percé, fans élargir la playe. Etcelles-cy, quiont moins quatre ou cinq pieds delongueur, font armées pat bout d’un os pointu, qui aaufli des crochets , Qui font faits comme les dens d’une Scie. Hs lancent ces dernieres avec la Main ; mais pour leur donner plus de force, & faire qu’elles attaignent de plus loin. Ils attachent à leur bras droits un bois long d’un pied & demy, qui a d’un côté une affez profonde couliffe , dans laquelle ils font pañfer le gros bout de cette Javeline, laquelle étant dardée, recoit par ce moyen une plus 5 impreffion, & fait un etfet beaucoup plus violent, Ils portentauffi quelquéfois à la main, une efpece de lance, qui eft d'un bois fort & pefant, lequel eft garny pat le petit bout, d’un os rond, dont la pointe aefté aiguiféc furune pier- re, ou bienils les munifflentde ces cornes, ou dens de Poiflons. que nous avons décrites. Ces lances ont fét où huit pieds d hauteur, & elles font enrichies par le grosbout, de deus ailcrons de bois, ou de coftes de Baleine, qui leur don- nent un peuplus degrace, qu'elles n ‘auroyent fans cet ot-. nément. _ Outre plufieurs fortes d’hamecons, dont ils fe fervent pour sq les menus Poiflons qui frequentent leurs co- fes, ils ont encore diverfes efpeces de Javelots, léquels ils me lanceravec une d'exterité non parcille, fur les gros & monttrueus Poiffons qu’ils vont chercheren pleine mer. Et afin queceus qu'ils ont blefflez avec cette forte de d’ards, ne f puiflent couler au fonds de l’eau & fruftrer leur attente, ils: lient au gros bout une courroye de cuir de Cerf, longue de Mint-cinq ou trente brafles, & ils attachent au bout de Cite Æourroye, ou de cetteligne de cuir, une veflicenflée , la-- quelle retournant toujours au déffus de l’eau, leur marque “endroit oùef le Poifon, lequel ils attirentà eus, ou bienils e conduifent aifément à terre, apres qu’il s’eft bien débatu: & qu’il aepuifé fes forces. . Lejeunes femmes porenr un habit, qui n'eft pas de beau-- Coup different de celuy des hommes: mais les vieilles, fe cou-- ent le plus fonvent, des depodilles de certains gros Oifeaus; jui ontle plumage blanc &: noir ,. & qui font fort communs: Se 216 _ HisTOoIres N de 8 su 00 Chapat en cette terre. Elles ont l'adreffe de les écorcher fi propre= ment, que la plume demeure attachée à la peau. Ces habit ne ons battent que jufqu’au gras de la jambe. Elles font ceintes d’une courroyede cuir, à laquelle au lieu de clefs , ellél attachent plufieurs offelets, qui font pointus comme des. poincons, & de même longueur que des aiguilles de tefte Elles ne portent nibracelets, ni colliers, ni pendans d'oreil- les: mais pour tout o‘nement, elles fe fontunejtaillade en: chaque ] JOuÉ, & celles rempliflent la cicatrice, d’une certaines couleurnoire, qui felon leur opinion, les fait paroitre beaus coup plus agreables. | Pendant que les hommes fe divertiffent à la chaffe, ou à la pefche, elles s'occupent à coudre des habits, & à faire des tentes, des paniers, & tous les petismeubles, qui font necef= faires au ménage. Elles prennentaufli un grand foin des pe= tis Enfans, & fielles font obligées de changer de demeure, où de fuivreleurs Marisen quelque voyage, elles les portent:ou les conduifentpartoutoüelles vont, & pour les defennuyer par le chemin, & les appaifer lors qu its crient, elles ont de pe= tis Tambours, qui font couverts de veflies de Poiflons, fur léquels elles savent faire de fi bons accords, que ceus des Tambours de Bafque, ne font pas plus dous, ni plus agreables. Elles les fonnent aufli , pour donner l’épouvante , & fairé prendre la fuiteaus Ours, & aus autres Beftes farrouches, qui viennent fouvent roder prés descavernes, oùces Sauvages fe retirent avec leurs familles durant l’hyver, our à l’entour des tentes fous léquelles ils logent pendant l’été. Nous avons fait mettre en ce lieu,le pourtrait d’une de ces femmes vetuë de plumes, duquelon pourra inferer la grace queles autres peu“ vent avoir. Encore que ces pauvres B Baibarés n'ayent pas beaucoup de police, ils ont ncanrmoins entre-eux des Royrelets & des Cas pitainces qui Îes gouvernent, & qui prefident à toutes leurs aflembiées, Ils élevent à ces dignitez ceus qui font lés mieus faits de corps, les meilleurs chafeurs & les rs vaillans. Hs font couverts de plus belles peaus, & de plus precicufes fourrures que leurs fujers, & pour marque de leur grandeurs ils portent une en cigne , en forme de r0ze de broderie, la= : ac ANRT OR Tee Et ESS YO EU MMAE NT AT 10 RAT EE ture À: DES ÎLES ANTILLES! 217 , P “ LL e CNE L L # 4 quelle cit coufuë au dora de leur cafaque, & lors qu'its marchent, ils font toujours efcortez de plufieurs jeunes hom- mes, qui font armez d’arcs & de fléches, & qui executent fide= lement tous leurs commandemens. … Il n’ont point l'induftrie de bâtir dés maïfons:; mais dus | ant l'été, ils demeurent à la campagne fous des tentes de cuir, | Iéquelles ils portentavec eus, pour les dreffer en tous les en Ee - droits ANS 2 BU Ha à à Pate à ARE AS A AUS 0 se dl A PR QE MU 00 PS PARA D M RP TP a1$ RPM - | ARE Chap. 18 droits où ils trouvent bon de camper : & end lhyvee. ils habitent dans des cavernes, qui font faites naturellement dans les montagnes, ou qu'ils y ont creufées par artifice. 1 Ils ne fement, ni ne recueillent aucuns grains de la terre, pour l'entretien dé leur vie. Ils n’ont pointaufli d'arbres, où de plantes quileur portent des fruits, qui foyent bons à man- ger, horsmis quelque peu de fraifes, & d'une efpece de Framboifes: mais ils ne fubfiftent, comme nous l'avonsdé;jæ infinué , que de leur chafle & delcur pefche. L'eautoute pu- re cft eur boiflon ordinaire, & pour leur plus dclicieufe re- gale , ils boivent le fang des chiens de mer, & celuy des Cerfs,, & des autres animaus de terre qu'ils ont abbatus, ou qu'ils ont fait tomber dans les pieges, qu'ils leur fçaventdreffer, avec un merveilleus artifice. L'Hyver, étantflong & fi rigoureusen cette contrée où ils habitent, ileft impollible qu ils ne fouffrent beaucoup de dizette durant cette trifte conftitution de l’année, notam- ment pendant cette affreufe nuit quiles enveloppe deus mois entiers ; mais outre qu'au befoin ils fupportent aifémene la faim, ils ont tant de prevoyance,. qu'ils font fécher en efté le furplus de leur pefche & de leurchaffe, & le mettent en réferve, avectoutelasraifle, & le fuif, qu'ils ont pû ramaf- fer, pour ia provifion de cette fâcheufe & ennuyeufe faifon. On dit même, qu'ils font ff adroits à faire la chaffe à la fa- veur de la Lunc, que durant les plus épaiffes tenebres qui les couvrent, ils font rarément dépourveus de viandes fraiches. Is n’ont pas la curiofité de voir d'autre païs que celuy dé lcur naïffance,; & s'il arrive que quelque rude tempeite, ow quelque autre rencontre, les ait poufféz en quelque terre étrangere, ils foûpirent perpetuellement apres leur chere . patrie, & ils ne fe donnent pointde repos, ju fques à ce qu'on les yait rétablis: que fi Fon refufe, ou qu'on differe trop à leur accorder cette grace, ils. effayent de s’y rendre au peril de leurvie, à la faveur de leurs petisvaiffeaus, dans léquels. ils s’expofent à tous les perils dela Mer, fans autre guide que celle des Etoiles, dont ils ont afez de connoiffance » Pour regler leur navigation fur leur cours. 7 er" 1 DES ÎLES ANTILLES. 7 219 “al: Le langage dont ils fe fervent, n’a rien de commun avec celuy de tous les autres peuples de la terre. Nous en avons un petit Vocabulaire : mais de peur de groflir un peu trop cette digreflion , nous le referverons patmy nos memoires , jufques à ce qu'un fecond voyage qu’on projet- te pour ce d’étroit, nous en ait donné de plus claires lu- micres. On n'a pas encore pü bienremarquer, qu'elle forre de re- ligion eft en ufage parmy ces pauvres Barbares: mais par ce qu'ils regardent “fouventle Soleil, & qu'ils Ie montrentavec admiration , en élevant leurs mains en haut, on ainferé “ne qu ils le cenoient pour leur Dicu. Le Navire qui nous a fourny cette Relation, retournade ce d'Etroit de Davis chargé de plufcurs bonnes Marchandiles, déquelles nous mettrons icy la Lifte, pour montrer que Je froid quiregne en cette contrée n'eft pasfi rigourcus , quil y ait gelé toute forte de commerce. - 1. Neufcens peaus de Chiens de mer, longues pour la plüpart de fet à huit pieds, marquetées, & ondées de noir, derous, de jaune, detanné, & de plufeurs autres couleurs, qui relcvoyent leur prix, par deffus celles qu’on voit commu- nement en Hollande. 2. Plufieurs riches peaus de Cerfs, d'Helans, d’Ours, deRenards, de Lievres, & de Lapins, dont la plus grand part étoit parfaitement blanche. 3. Un grand nombre de precicufes fourrures, de diver- fes Beftes à quatre pieds, qui font toutes particulieres à cette region, & qui n'ont encore point de nom parmy nous, _ 4. Plufeurs Pacquets decoftes de Baleine, d’une longueur extraordinaite. s. Des Habitscomplets des Habifans du pe dont iesuns étoient de peaus, & les autres de dépoüillesd’oifeaus, & de ia figure que nous les avons reprefentez. 6. Plufieurs de icurs Chemifes, faites de veflies de Poif- fons , fort proprement coufuës, de leurs boncts, ganis, & bottines, de leurs carquois, fléches, arcs, & autres armes dontils fervent, comme auf plaficurs de leurstentes, de Le 2 lcuz ANS PER 50 > ne 9 6 ii 189 OR TES ONE, FOR AS ECS RE 0 En DORE PURE 2 RTE ne EN Sen er il te Na ; , 7e à“ P + Mer vu re Chap. x! leurs facs, de leurs paniers & autres petis meubles ; dont { ufentren leur ménage. ) 7. Un grand nombre de ces petis vaiffeaus de mer, qui font faits pour porterun feul homme: Un grandBatteau long” de quarante cinq pieds, qui pouvoit porter cotmodement cinquante perfonnes. 28 8. Mais ce qui étoit de plus rare & de plus precieus } c’étoit une quantité bien confiderable de ces dens,. ou cor* nes de ces. Poiffons qu’on appelle Licornes de mer, qui font eftimées les plus grandes, les plus belles, & le mieux pro: portionnées, de toutes celles, qu'on avoit veuës RTE prefent. On enaenvoyé quelques unes à Paris, & en d'autres. en droits de l'Europe, qui y ont efté bien receuës : maïs il y & grande apparence qu'elles feront encore plus prifées, quand on aura laconnoiffance, des admirables vertus qu'elles ont en la Medecine. Car bien-que leur beauté, & leur rareté leur doivent faire tenir le premier rang entre les plus pre cieufes richefles des plus curieus cabinets: plufieurs celes bres Medecins & Apoticaires de Dannemark, & d’'Allemaige ne, quien ont fait les effays endiverfes rencontres, témoig= nent conflamment ,. qu’elles chaffent le venin, & qu'elles ont toutes les mêmes proprietez, qu’on attribué commune= ment à la Corne de la. Licorne deterre. En voila aflés, & peutcftre que trop au goût de tous uns, pour unefinie ple digreffion. k Mr 1 42. Je, SEVEN SRE 210 7 SNSEET ES bal : VU MA ER (0 | PO REVIENT SRE 08 HO + CHAPITRE DIXNEUVIEME. Des ur so vérts de croutes dures, au lien de pean &* _ décailles : de plafieurs rares Coquillages : © de quelques _ autres belles productions de la Mer , qui fe trou- Vent aus coÿtés des Antilles. Moins que d’avoir quelque participation de cette celefte Sapience , qui fut autréfois adreflée à Salo- mon, pour parler non feulement des Arbres dépuis le Ccdre qui eft au Liban, jufques à l’Hifope qui fort de la paroi: mais encore des Beftes, des Oifeaus, des Reptiles, & des Poiflons: Il cft impoffible de fonder les profons fecrers des caus, pour y conter toutes les excellentes creatures, qui fe jouent dans leur fein, & remarquer toutes lesvertus , & les proprietez occultes, dont elles font ennoblies. Car cet Ele- ment eft doùé d’ une fi merveillenfe fecondité, qu'il ne pro- duit pas feulemenrentouteabondance, des Poiffons de diffe- tentes efpeces , qui fervent à la nourriture de l’homme, & qui font pour'la plüpart d’une groffeur demefurée, & d'une figure monftrueufe, comme nous venons de le montrer dans les precieus Coquillages & d'autres Rarétez, qu'il faut confeffer, toutes ces riches beautez de fes inepuifables trefors, pour nombre de bonnes creatures, quine fe Voyent paintailleurs, Vient qu'on y trouve, comme nous-le verrons en ce Chapitre, dés Etoiles, des Cornets, des Trompettes, des Porçelaines, PU Dis LLES.ANTIDEES : 2. Chapitres precedens : mais encore, une figrande multitude de que la Divine Sageffe qui eft diverfe en LOes fortes , a tiré faire paroître la gloire de fa puiffance, au milieu desflots de: la Mer; & pour nous convier doucement à l’admirarion de fes bontez, & de fon adorable Providence, laquelle s'4baiffe jufque dans la profondeur des abifmes, pourles peuplerd'un & d’une infinité d’autres, qui portent les caracteres, & les. images des corps les plus confiderables qui ornent les cieus,. Ou qui volent parmy les airs, ou qui embelificnt laterre : d’où: hi: GC: 3: des: 222 HisTorrns NATURELLE, Chap des Arbres, des Pommes, des Chataignes, & toutes les ol 15 raviffantes curiofitez qui font prifécs parmy les hommess Or pour commencer par les Poiffons, qui font couverts de croutes dures à& folides au lieu décailles, ou de peau. JL y ena plulieurs efpeces en la Mer, & aus Rivieres des Antilless On fait particulierement état, des Howars, des CAraignées, & des Cancres. | AS ART LCD ENS Des Homars. Es Homars, font une efpece d’Ecreviffes de même figure que celles de nos Rivieres. Mais elles font fi groffes, qu'il n'en faut qu'une pour remplir un grand plat. Elles ont la. chair blanche & favoureufe, mais un peu dureà digerer, Les Infulaires les prennent pendant la nuit fur le fable, ou fur les bafies de la Mer, & à l’aide d’un flambeau ou de la clarté de la Lune, ilsies enfilentavec une petite fourche de fer. À RTE CD. De l'Araignée de Mer. _ *Araignée de Mer, efttenuë par quelques uns, pourune efpece de Cancres. Elle eft couverte de deus fort dures écailles, defquelles celle de deflus eft relevée, -& celle de def fous eft plus unie,& dentelée de pointes rudes. Elle a plufieurs jambes , & une queué forte, & longue quelquefois d’en- vironun pied. Quelques Sauvages les recherchent foigneu- fement, pour en armer leurs fléches. Quand ce Poiflon eft feché au Soleil, fon écaille devient luifante & comme dia- fane, encore qu ‘elle foit naturellement de couleur cendrée... ROMANE E AN ÉRAVESS 2 LOS PTREET « DES, DWEs ANTILLES. 223. MAUR 141. C LE: TIT Des Cancres. FM Es Cascres ordinaires des Antilles, font dela même for- Ameque ceus qu'on pefche es coftes de France, Il yena de differente groffeur, mais ceus qui font les plus rares, font ceus qui vivent de proyc. Ils font affez communsen la plûü- part des Iles, fur tout aus Vierges. Ils fe rienent fous les tronc des arbres du rivage de la mer: & à l'exemple de ces Grenoüilles qu'on appelle Pefhenfes, ils épient de leur fort les Huitres & les Moules, pour en faire curée, & ils s’y pre- nent par cette rufe merveilleufe. C’eft qu’ils ont reconnu que leurs mordans & leurs défenfes, n’ont pas aflez de foree pour rompre les coquillages qui couvrentces Poiflons deli- çats. De forte, qu’ayans aufli remarqué qu'ils ouvrent plu= fieurs fois le jour leurs écailles, pour prendre Je frais, ils en. épient foigneufément le tems ,. & s'étans garnis d’un petit caillou rond, qu'ils ont choifi dans le gravier, ils letiennent preft en l'une de leurs tenailles, & s’aprochans de l'Huitre, ou de la Moule, le laiffent tomber avec tant d’adreffe dans fa. coquille entr ouverte, que ne fe pouvant plus refermer, le Poiflon demeure la proye de ces fins chaffeurs. | \, Quant aus: Coguilles que l’on trouve en ceslles, dans les ances ou la mer les poufle, elles font engrand nombre, & de plufeurs fortes. Voicy les plus recherchées & les plus. confiderables. | ART TC LE LTY. Du Burçau. HU EP, quià a figure d’un Limacon, étant denué de A lapremiere croûte quilereveft en dehors, prefente uns Coquille argentée, & entrelacée de taches d’un noir luifanr, d'un vert gay, & d’une grifaille fi parfaite & fi luftrée, qu'aucun émailleur, n'en s’auroit aprocher avec tout fonartifice. Si toft LLC 224 HisToire NATURELLE, Chap.19, que le Poiffon, qui a l'honneur de loger fous ce precieus cou. | vert, en a quitté la poñiefion , on Voit d’abord une entrée. magnifique, encroutée de perles : & en füitte plufeuts riches! appartemens, ficlairs, fi polis, & émaillez par tout d'un ar gentfivif, qu’il nefe peut rien voir de plus beau, en matiere de Coquillage. ART LI :C L'É NON à Du Cafque. E Cafque, qui eft de differente groffeur, à proportion des Lu teftes de tant de Poiflons qui en font revètus, eft ainft nommé à caufe de fafigure. II ef doublé par dedans & fur les bords, qui font épais, plats, & dentelez, d’un fatin incar- nat, extremément luifant. Et par le dehors, il eft faflonné d’une agreable ruftique, relevée de plufieurs petites boffes, qui font entrelacéës de mille compartimens , fur léquels on voit ondoyerun pannache, c. divetfes rares couleurs. ï ARTICLE VI Du Lambt. E Lambis, a peut-eftre reçeu ce nom, à caufe que le Poif- fon quile fait mouvoir, a la figure d’une groffe langue, qui léche cette.humeur gluante, quis’atache fur les rochers que la mer baigne de fesflots. C’eft un des plus gros Coquil* lages qui fe voient. Il eft retrouffé par l’un de fes bords, comme pour faire mieus paroitre, la belle couleur pourprine qui l’enrichit au dedans. Mais, il faut avoüer que fa mañlé étant affez grofliere, & heriffée par deffus de plufeurs boffés rudes & pointuës, luy fermeroit la porte des cabinets, fi l’ar= tifice en luy enlevant fa premiere robe, ne découvroit la bisarrure & la politeffe de lécaille marquetée, qu’il porte fous cét habit de campagne. Le Poiffon, qui logefous les cavet= nes de cette pctite roche mouvante » cftfigros, qu ilen faut peu pour remplit un plat. Il peut être admis fur les “a PU à 4 Re 19 ne lus: ANPIORUEN ES ‘des délicats, pourveu qu'il foit bien cuit, & ençotce mieus oyuré, pour corriger fon indiseftion. Et pour profiter de fa dépoüille, étant calcinée & meflée avec du fable de riviere, onen compofe unciment, qui refifteà la pluie & à toutes les injures du tems. Ce Éee auf, S'entonnant comme un _Cofdechaffe, & s'entendant de fort loin, quelques Habitans des Iless’en fervent, pour apeller leurs gensausrepas. Erles Indiens de l Amerique Septentrionale,l’ayans reduit en chaus, & meflé avec une certaine terre minctale, qu'ils tirent je montagnes, en forment ces beaus pavez de leurs cabanes, dont nous parlerons en fon lieu. Ab -INC RS VIT Des Porcelaines. Es Porcelaines , doivent être rangées entre Les plus rares productions de l'Ocean : foit que l’on confidere cetre agreable politefic, dont elles font liffées & au dehors & au | dedans ; foit que l’on fafe réflexion , fur tant de differentes & de vives couleurs, dontelles font revetuës. Elles replient * eur bord dentelé, & le roulent en dedans, & bien qu'elles foient plus ou moins luftrées, elles font toutes d'une même figure ovale, entrebaillantes au milieu, & recoquillées pat | Je | bec. Maisils'en trouve, quifont fort differentes en grof- feur & en couleur. _ Les plus ordinaires, font d’un jaune doré, marqueté de pe- _tites taches blanches ou rouges, & l’ondiroit de loin que ce font des marques de perles, ou de grains. de coral. Onenvoit auffi debleuâtres, détoilées, de grisâtres, de cryftalines, & de couleur d'A gate, qui ont toutes un œil fort attrayant. Mais celles qui font les plus eftimées des curieus, font de _Coralinc incarnate au dehors, & argentées au dedans : ou bien elles font parées d’un beau bleü celefte au dedans, & d’un riche porfire au dehors, rayéez de petis filets d'orez. On prife aufli avec raifon , celles qui font par deffüs d’un vertlui: fantcomme émeraude, & emperlées dans l'interieur, au bord, &en leurs canelures. L'on met auffi dans cemêmerang, #4 | F£ les 226 MisTOirre NATURELLE, Chapug les qui font fur le dos d'un noir luifant comme j'ayer, & quant aurefte, émaillées d’un bleu mourant, entrelacé de petites veines de pourpre. Enfin, il y en à qui font chamarrées de tant tde vives cou- leurs, qu’il femble que larc-en-ciel, ait imprimé furces peti- tes creatures, un racourcydefes plus “taille beautez: Il y en aufli une infinité d’autres, qui font diverfifiées de tant de _.chifres & de grotefques, qu'il eft à croire que la nature étoit en faplus gaye humeur, quand elle s’eft mife à produireces merveilles, Maislemaleft, que la mer qui les poffede comme fes plus precieus joyaus, ne s'en deffaifit pas volontiers, & femble ne les donner qu'à contre cœur. Carfiles-vens-ne la mettoyent quelquefois en colére, & qu’en fecoüant fes entrailles, ils ne fouilloyent jufques au fonds de festréfors, pour les enlever. par force, elle jouiroit toute feule de cesrichefles & de ces beautez, fans nous en faire jamais depart. Les curieus pour enrehaufler le‘luftre, les placent ets leur rang, & leur prix, dans de differentes caflètes doublées de velours vert, ou de quelque autre riche étoffe. Et a limi- tation des Fleuriftes, qui qualifient leurs T'ulipes & leur Oëil2 lets, desnoms des Cefars & des plus illuftres Héros; ils leur: fontporterles titres des Empereuts & des is ARTICLE VIE Des: Corneis: de CMer.. é ._ N voit encore aus Antilles, de deus fortes de ces gros LZ Coquillages, quel'onappelle Corsers.de Mer, qui font tournez par le bout en forme de vis. Les uns font blancs comme de l’yvoire, & neccdentenrienà fon luftre. Les au- tresfont enrichis par dedans d’un gris de perle, extremement luifant, & par dehors de plufieurs belles & vives couleurs, aui fe Fo nent quelquefois enécailles, ou fe repandent em fotme d'ondes, quife pouflent & quiflottent les unes fur les autres, depuis le bord dela large ouverture de deffus, jaf= ques Aa pointe entortillée Où éMes meurent: Sil'on perce ces Cor- Chap.r9 , Des. ÎItEs ANTILLES 229 Cornets parle petit bout, on en faitune efpéced'inftrument de mufique, quirend unfon aigu & penetrant, & qui étant pouflé parles diverfes s'inuofités de ce Coquillage, fe fait en- tendre de loin, comme feroitceluy d’unclairon. Mais, ilyà du fécret,à compalfer le foufle qu'il faut, pourles faire jouér. . Lamer, auflibien que les Architeëtes , fe plait à produire des ouvrages de diverfe ordonnance, Quelquéfois elle en fait à la ruftique, qui font tout nuds, & ont fort peu d’ornemens ; Puis elle-en fait de compofez parun mélange des ordres, qui viennent au fecours les uns des autres, avec tant de mignardife & de delicateffe, qu’il n'ya rien de plusagreableà l'œil. Cela fe remarque en uneinfinité de Coquilles, qui fontdiverfifiées decent mille grotefques. On y peut remarquer des laqsen- trenoûez , des efpéces de fruitages, des faillies hors d'œuvre, des culs de lampe, des pointes de diamant, des goutes pendan- tes, deséguilles, des clochers, des pyramides, des colomnes, des fufées, des chapiteaus , des moulures & une infinité d’au- tres fantaifies , &\ d’autres morefques, qui donnent fujet d’en- tretien & d’admiration aus curieus. Comme en cffet, l’onne S'auroit jamais affés admirer par ces échantillons, la merveil- leufe diverfité, de tant de riches ouvrages , que les eaus refer- vent dans leurs profons cabinets. ARE TIC LE 101%: De la Nacre de perle. Æ Es Coquilles ne donnent pas feulement un divertifle-. A ment agreable, qui porte les hommes, par la confidera- tion de ces petis, mais admirables ouvrages de la nature, à benir celuy qui en eft l’Auteur: Mais apres avoir contenté les yeus, elles fourniflent aufli dequoy fatisfaire le goût, & dequoyaccroiftre les tréfors. Car les Hwitres & les CMoules lervent. aus délices destables : & ?’Ecaille Nacrée où la Nacre de perle, et groffe dela Perle, quienrichit les couronnes des Rois. Il eft vray que ces Perles ne fe trouvent qu’en femence aus Antilles, & que c’eft l'Ile dela Marguerite, & la cofte Me ridionale de l'Amerique, qui ont le bonheur de lesrecueillir ouiu ti ; T2. Entite %28 di out 'uokrausi Chap. 19 | entierement formées. : Mais fi les Antilles ne voyent poir . precieus germe fe durcit en groffes Perles , ces riches: Ce quilles, ne les laiffent pas pourtant fans quelque avantage, Car elles leur offrent pour nourriture le corps qu "elles: enferment, & les deus parties de leur écaille argentée fours niffent chacune une cuéillier, qui peut paroitre avec éclat fur la table. 11 eft malaifé de dire, fi la rofée qui tombe aus Antilles n’eft pas aflés feconde pour faire que les Méres Perles, y pros duifent leurs fruits en perfeétion : Ou fi apres avoir reçet cette femence des cieus, ellesauortent, & n'ont pas afés de. force naturelle pour la retenir: Mais fans rechercher de qu'elle part vient Le défaut , il eft affuré qu’elles ont une auft. forte inclination à fe delivrer de l'oprobre de lafterilité, que celles qu'on péfche aus coftes de la Marguerite, Car fi on fe. veut donner la curiofité d’épier leurs fecrettes amours, dé deffus les rochers au pied déquels elles fe plaifent, on aperz ceufa qu’au lever del’Aurore, elles s’elancent plufieurs fois fur la furface de l'eau, comme pour faire hommage au Soleil, levant : Puis tout à coup, on verra qu’elles ouvrent leur ein, & qu'elless ’épanoviflentfur ce lit moller , pour attendre les premiers rayons de cebel aftre. Que fi elles font affés heu= xeufes, pour recevoir quelques goutes de larofée, qu il fait diftiller des cieus à fon lever, elles: referment promtément leurs écailles nacrées, de peur que quelque goutc d'eau falée,. ne vienne à corrompte ce germecclefte. Et puis ellesfe re= plongent alégrement au fonds de leur couche. Un Auteur nommé Fragofus, eftime que les Perles s 4 gendrent dans la. chair de l'Huitre , comme la pierre d quelques animaus, d’une humeur crafle & vifqueufe, qui refte de l'aliment, Quelques Doëtes Medecins , qui font auffi dans le même fentiment, appuyentcetteopinion, fur ée que 1 à Cofta, Ecrivain fort croiable pofe pour conftant, affavoi que les Efclaves qui pefchent:les Perles, plongent par où jufques à douze braffes dans la mer , pour chércher Iés"'Hu tres , qui d’ordinaire-font artMtOiEs aus rochers: qu "118168 arrachent de-là, & reviennent fur l’eau en étant ou | d'oùils concluent que du moins-on ne peut pasdire ; que cés , | Huitres- Œhap:19 :DES ÎLES ANTILLES. Zae: Huitres-là , qui font attachées aus rochers, humënt la rofée, &que par R fe faffe la generation des Perles. « Mais fans entrer en conteftation avec ces Meffieurs, Pa fans rejeter abfolument leur opinion, laquelle à fes fonde- mens : On peut dire que le recit tres-veritable d’Acoftatou-: chanta peche des Perles, ne fait du tout rien, contre le feñ-: timent communement reçeu de leur generation : Car il fé: peut faire, que les meres Perles qui ont conçeu de la rofée, fe sentant chargées de ce precieus fruit, n’ayent plus d'incli- nation de fe faire voir fur la furface des eaus; & qu’étañt con temes du trelor qu'elles poffedent , elles’ s'attachent pour lors fixement aus rochers ,; d’où puis mi cles font arra-- chées avec violence. e AR TECELE X. De plufieurs autres fortes de Cequillages. Eus qui au milieu des Villes les plus frequentées, veu- lent contrefaire des deferts, des rochers, & des folitudes: ou qui dans lés plaines de leurs jardins; veulent élever des- montagnes dans lequelles ils creufent des grottes, qu'ils en- éroutent de toutes les plus curieufes dépoüilles de la mer,. &delaterre, trouveroÿent en la plûpart de ces Iles , dequoy gontenter leur inclination. Mais il feroitil à cräinidre que l'abondance & la diverfité:, “métant'en peine leur choiz, ne leur en causât du mépris, Car pourparler de quelques-unes, on y Voit une multitude innombrable de Trowmpes de mer, d Efcargots, & de petis Pigrois ; argentins, étoilez, fangains,. vérdâtres, rayez d'incarnat, mouchetez de mille fortes de: couleurs, qui les font éclater pafmy le fable ; comme autant dé pietres precieufes. Le Solcil rehaufie merveilleufement leur luftre. Etlors qu'aprés quelque rude tempefte, la mer a: cnrichy lafürface de ces rivages, ‘de tous ces petis brillans, . l'œil en demeure tellement éblouÿ que l’on eft obligé d’a2 Yoüer,que lanature fait reluire avec majefté fa puifflance, &- montre ce qu'elle fait faire , en revérant de tant de riches” crnemens,& de tant de belleslumieres, ces menuës creatures.. din Ef. 3: Nos: æ Ma HisToins. Na TUREL mé, | Chapsil Nos Infulaires, ramaflent quelquefois par divertiflemeri ces petis jouets de la mer, & en ayantpercé le bout, ils les en filent, pour en faire des bracelets & des cordons: Mais la plüpart des Indiens de l’ Amerique Septentrionale, les ont en! une bien plus haute eftime. Carils s’en fervent pour lewrt trafic & pout leur menu commerce, comme nous faifons” parmy nous , de l'or & de l'argentmonnoyé: &ceuxlà, qui en ont le plus grand nombre, font eftimez les plus riches.b Les Coquilles qui fervent à cette ufage, font de mediocre. groffeur, d’une folidité & d'un lufire extraordinaire. Et pour eftre de mife en certains endroits, elles doivent avoir” été marquées par dés Officiers deftinez à cela, qui y don- nent le prix & le cours, en y gravant de certains petis ca- -raëteres. A R:T-1 CE LEURS D'un Coquillage couvert de Notes de CMujique. "A L y a un Coquillage fort confiderable , que Monfieur du, Montel croit quel on peut trouver en quelcune des Antil- les, bien qu'il n’en ait veu qu’aGoraco. Il eft d’une figure un peu differente des Porcelaines, c’eft à dire un peu plus ramafñlé. On le nommé CWwfical, parce qu'il porte fur le dos, des lignes noirâtres pleines de notes, qui ont une efpece de! clé pour les mettre en chant, de foïte que l’on diroit qu'il ne manque que la lettre, à cette tablature naturelle. . Ce curieus Gentil-homme raporte, qu’ilen a veu quiavoient cinq lig- nes, uneclé & des notes, qui formoicnt un acord. parfait. Quelcun yavoit ajouté la lettre, que la nature avoit oubliée; & la faifoit chanter en forme de trio, dont Va étoit fort. agreable. | k Les beaus efprits, pourroient faire la deffus mille belles confiderations. Ilsdiroient entr'autres chofes, que. fi felon! l'opinion de Pythagore, les cieus ont leur harmonie, dont. les dous accords ne peuvent étre entendus à caufe du bruit que l’on fait fur la terre, que files airs retentiffent de la né lodie. DEs JL£ES ANTILLES 33T Jodie d' une ibfiniré d'oifeaus,qui y tienent leur partie, & que fi les hommes ont inventé une Mufique à leur mode, qui char- me les cœurs par les orcilles : auffi la mer, qui n’eft pas tou- jours agitée, a dans fonempire des Muficiens, qui chantent d'une faflon qui leur eft particuliere , lesloüanges du Souve-: rain. Les Poctes adjouteroïent, que ces Tablatures natu- réelles, font celles quelesSyrenes avoient en mains dans leurs plus melodieus concerts: & qu'étant aperçeües de quelque œil qui vint troubler leur pañfetems elles les laifférent tom- ber dans les eaus, qui dépuis les ont toujours foigneufement confervées. Mais laiffant ces conceptions, & leurs fembla- bles, à ceus à qui ellesapartienent , fuivons le fil de noftre Hiftoire. | ARE LC LE ZXTL Des: Pierres aus yeux: Ncore qu'on trouve de ces Pierres bien avant enlater- re, auflibien qu'au bord de lamer : neantmoins puifque Ja plus commune opinion les tient pour une produétion des. eaus,. nous leur donnerons placeen celieu. On en voit qui fo :t auf larges qu'un Lyard ; mais les plus petites font les plus eftimées. A les confiderer au Soleil, on croiroit que ce . feroit de ces perles qu'on nommé Baroques , qui auroyent efté couppées en deus, tagt elles font ciaires , transparentes, & polies. Ilÿyena quelques unes, quront de petites, Veines rouges ou violettes , qui leur donnent un fortagreable éclat, felon les divers afpeats qu'on les regarde. Elles portent tou- tes, la figure d'un Limaçon gravée fur le cofté qui:eft plat. Quand on les met fous la-paupiere , elles fe roulent autourde: la prunelle de l'œil, & l’on dit, qu’elles ont la vertu de la forti- ficr, de l’eclaircir, & de faire fortir promprémentles fétus, qui: y feroyent tombez. C’eft pourquoy on les aappellécs d’un. om, quimonftre leur proprieré, ÆARTI- ” piT4 %. FES TRES CE AE : DE Pi rÉ GA | LS APT fre ._ 8% H 4470 URE NATUR ELLES ape t ; | à A * E ry : r'ÈT 14 FE 5 20027 FIG OR 2#47 à RENTE ‘ PR ENS SET EI LEURS RES 344 ‘ , : Ne At Porceleine | TN { AU f D) : Ï MTS y Ê f W/. D ‘74 2008 : ; di: 4 CMP EN ENOS PAUSE à AS | , En AIRE 2) d DES ILES ANTILLES 233 D'OR OTE L' ES NTI, Des Pommes de mer. " Nrencontre en l'Ile de Saint Martin, des Pommes demer,. A7 heriflées d’aiguillons perçans, qui fortent d’une peau brunc: mais quand le Poiflon qui les roule eft mort, elles quittent toutes ces épines & toutes ces défences , qui leur font desormais inutiles :. & laiffant au, cette croûte cendrée qui: les envelopoit ;. elles font montre de la blancheur de leurs: coques, qui fontentre- lacées de tant de compartimens &de petites finuofitez, que l'aiguille du plus adroit brodeur, fe trouveroit bien empéfchée fi elle les vouloitimiter. Il f emble que ces Pommes , pourroienr mieus étre apellées , de petis Heriffons de mer, où des Chataignes demer: Car étant en vie elles font & de la figure, & de la couleur, d’un petit Heriflon,. qui fe forme en boule & qui s’arme de tous fes traits, pour fe rendre imprenable 2 à fon ennemy. , Oubien, elles font fem- blables 2 à ces groffes & rudes envelopes , armées dépines, qui: couvrent la nigne, quand lle de fur l’Arbre. A LT LCI ob E. XIV. Des Etoiles de CMer. A Confidererde prés, tontesles raretez qui fe trouvent en: £ À la mer, ondiroit que le Ciel ne veüille rien pofféder de beau, qu’il n’en imprime une refflemblance en lamer, com-- me en fon miroir. C'eft pourquoy, l’on y voit des Zfoiles. qui ont Cinq pointes , ou cinq rayons, tirant fur le jaune, Tout ce beau compofé, n’aqu'un bon pied de Diamétre: Son épaifleur eftd’un pouce, fa peau eft aflez dure, & rele- vée parde petitesbofes, quiluy donnent meilleure grace. Si ces Etoiles de mer cedent en grandeur & enlunnére à. celles des-Cieus,elles les furpañlent,en ce qu'elles fontanimées, & em &e que leur mouvement n’eft point forcé; & qu'ellesnefont point nées niattachées en uné place, Car le Poiflon, à quice: LE, : | Ge ne riche af FN PSS Lio ds ANR RU ds a tôtqu il prévoit quelque crage, de crainte d’ étre noue À A laterre, qui n’eft pas digne de poffeder les Aftres, il jette deus petites ancres de fon corps, avec léquelles il s'accroche fiM fermement contre les rochers, que toutes les ’agitations* we | ondesirritées, nelen peuvent détacher. Sa vie eftentreten par le moyen de la nourriture qu’il prend, par une petite OU. verture, qui luy fertdebouche, & quieft juftementaucentre: de fon corps. Les curieus, tirent ces Æfoiles deleur Ciel hu mide, & apres les avoir f echées au Soleil, ils-en parenrieurs) Cabinets, AR TE CD ET UN: Des Arbres de Mer. Es bancs des Rochers, qui fontcouverts d’eau, ne peu- vent foufrir la fterilité, & nonobftant la falure qui les baigne inceffamment, ils féforcent de produire parmy l’herbe qui les reveft, des Arbres qui font incontinent glacez d'un. Salpèêtre, qui les rend blancs au poflible. Quelques uns les prenent pour une efpecede Coral. OUnenarrache detoutes figures, & defibienfafñlonnés, que l'œilne fe peur lafer, d'en confiderer les srotefques. AnRs TP ICUICE XVI. Des Panuaches de Her | ir 4 | Lya auffides Pannaches, qui font par: maniére de dire coms | me les bordures de ce grand Jardin liquide, ‘qui n'a jamais befoin d'étre arrofé. Elles font tiflués fort delicatement , en forme d’un riche point- coupé. Et fclon-la qualité des! Ro: chers oùelles ont leur racine, elles fontrauffi de différerites couleurs. 11 feroit feulement à defrér ; qu’elles euflent un peu plusde folidité , sans be Je: Meur des lles, ‘en ces te mn 17 | sis 345446 Lu Pa! 44 1110 C 4 À RAS A RAR Se | o. ARR DES ANTILLES us DES ÎLES » PS E 9. 28 8 5 £ © @ Ce je ANNE RSA pre = AL Let QUE 2 2 LS > 2 "5 \ \\ EI \ MERE \ 236 HisToïre NaTurezLe, Chap. x Dre CHAPITRE VINTIEME. De D Aube gris 3 De fon Origine € des marques de celuy qui e$t bon, &7 fans mélange. * Ambre gris, fetrouve en plus grande abondance aus coftes de la Floride, qu’en aucunedes autres contrées de l’Amerique. C’eft pourquoy les Efpagnols y ont dreffe des forts, pour fe conferver la terre, & pour entretenir. avec les Indiens qui l’habitent , le commerce de cette riche marchandife, laquelle ils receüillent foigneufement, dépuis qu'on leur enaenfeigné le prix. Oncnaaufi ramañlé quel- quéfois, aprés de rudes tempeftes, furlesrades de Tabago, de. la Barboude, & de quelques autres de nos Antilles, comme nous le reconnoiflons par plufieurs memoires , que nous avons entre nos mains: Etc'eftce quinous faiccroire, que fans fortir des limites de l'Hiftoire Naturelle que nous trai= tons, nous pouvons parfumer tout ce Chapitre de la fouëue odeur de cette drogue Aromatique, qui eff fans contredit la plus rare, & la plus precieufe de toutes les produétions, que l’Oceanaitencore pouffé hors de fon vafte & inépuifable fein, pour enrichir ce nouveau monde. Les Maldivois appell ent l’Ambre-gris Pañalale. c’eft à dire C4#bre d'or, à caufe de favaleur. Les habitans de Fes & de Maroc & les Ethiopiens, le nomment du même nom que la Baleine. Ce qui fait croire probablement, qu'ils ont eftime qu’il venoit de la Baleine. Ileft tres-certain, que ni Hippocrate, ni Diofcoride, ni Galien, n’ont jamais oui par- ler de l'Ambre-gris, non plus que de la pierre de Béfoar, du Gayac, du Saffafras, de la Sarfepareille, de la Gomme-goutte, de la Rubarbe, du Mechoacan, & d’une infinite d’autres, chofes, L ‘ambre-oris eft donc une drogue, dont la connoifs fance eft tout à fait moderne, & d’ont onne fait pas l'o- rigine. Quelques uns , fe font imaginez que cet Ambre, inconnt à l’antiquite, eft an excremcent de baleines, D’ autres croyent f qu il 1] DES : Ê LES ANT RE 237 qu'il vient des Crocodiles , parce que leur chair eft parfu- née. Quelques autres fe perfuadent, que ce font des pieces d'lles, & des fragmens de rochers cachezenla mer, & eim- portez par la violence des flots, parce qu'il fe recueille: quel- quéfois des pieces de cet Ambre , qui péfent jufques à à cent livres, & de lalongueur de foixante paumes , & qu'au rapport de Linfcot, en l’an mil cinq cens cinquante cinq, il en fut trouvé un morceau vers le Cap Comorin, du poids detrente quintaus. 1l y en a qui eftiment que c ‘eft une efpéce d’écu- mede mer, qui s'amañe & s’epaiflit avec Ietems, par l'agi- tation des eaus de la mer: & qui fe durcit par la chaleur du Soleil. Mais, c’eft plus vrai-femblablement une forte de Bitame, qui s’engendre au fond de la mer: Et lots qu'elle vient à tftre agitée extraordinairement par quelque furieufe tem pete, ‘elle détache ceBitume de fonfein, & le porte fur fes rivages. Caren effet, c’eit ordinairément apresune grande tempefte, que l’on entrouvefur les bords. Filoftrate en la vie d’Apolliniusdit, que les Panteres qui font à l'entour du mont Caucale, aiment fort la bonne odeur de ce lieu R. Mais il eftcertain qu'entre autresbeftes, les Oifeausfemon- | trent extremément amoureus de cét Ambre, & qu'ilsies’en- tent de fortloin. C'eft pourquoy dés que l'orage eft cefé , il le faut chercher & l’enleverendiligence, autremement on le trouveroittout mangé, Et ce n’eft pas fa bonne odeur, mais famauvaife, qui attire ces Oifeaus. Car ce parfum fi precieus & fiadmirable, lors qu'ileftencorcfrais, &mol, & qu’ilne fait que fortir de la mer, fent tres-mauvais, & les animaus y courent en même fafñlon, qu'ils vontauscharognes : Car fon odeur eft à peu prés, comime de lard corrompu, & il eft à croi- re, que c’eft pour cette raifon, que l'on a étéfi long-teims à le Connoitre, &aäà s'en fcrvir. Les Anciens imgcoient de fa ver. tu, pat fa mauvaile odeur, plutôt capable de faire mal au cœur, que de le réjouir, ainfiils le rejettoient comme inutile, ou même nuifible. Joint, qu'il ne fe trouve pas fi frequem- ment, nien fi grande quantité vers la cofte de Gréce, nidans l'Europe: & que Ics navigations aus Indes étoicnt rares autréfois. 1 | GS 3 Les ; AT SN A À MN SE CAIN ait Chap: œ Les At ch nes'en montrent par moins catho Aus. Pais oùil fe recueille en quantité , ces animaus font le a +1 la cofte, &auflitoft qu'ilsen decouvrent , ils s'en faififlent & lavalent, Mais, apres l'avoir gardé quelque tems dans leut ventre, ils le rendent fans qu'il foit aucunement digeré : Seulement ily perd une partie de fa qualité, & de fa bonne odeur, : C’eft pourquoy cette forte d'Ambre, qu'on appelle Renardé, et moins prifée que l’autre, & nes ‘employe a œuéres qu'aus parfums. r ne fera pas malà propos de donneren paffant, le moyen de difcerner le vray Ambre-gris d'avec le faus , veu que tous. ceus qui en ont écrit, comme Garcias, Monard, Scaliger, Féts dinand Lopés, Clufus, & autres, n’en parlent que fort fucs cinétement, & ne nous en difent pas les Marques cflen- ciclles. 1i faut favoir premierement, que l'Ambrefe diftingue en general, en celuy de la mer du levant, & enceluy dela met du Ponant. Ceiuy qui fe prendà lacofte du Levant, & par< ticulierement à la cofte dela Barbarie, oùil fe trouve en gran de quantité & ; en grofles piéces, eft generalement noir, & ne féche jamais fi bien, qu'il fe puifle reduire en poudre. comme celuy du Ponant, quelque addition qu’on y faffe pouf le pulverifer.. 11 fe fond aufli plus facilement au feu, ileft de moins donccodeur, & de beaucoup moindre prix. On ap= porte peu de cét Ambre en ces quartiers, parce qu'il n’y eft pas eftimé ,, & qu'iln'eft sue bon pour la Medecine, ni D Les parfums. L’Ambre du Ponant, dont le meilleur eft celüy de nos coftes, eft ordinairément d’un gris cendré : comme fr l'on avoit meflé de lacendre parmy ‘de la cire: de faffon neañt= moins, que lacendre y parutdifiinétement, & ne fe confondit pas avec la cire. Le deflus ayant frayé fur le rivage, & ayant plus fenty l'air, eft ordinairementde couleurtannée, ou dt moins plus blanc que le dedans, dur & folide en faffon dé croûte, & par fois meflé de fables & de coquillages, Ce qui asrive, lors qu’étant mol comme du Bitume ou de la poix, les ordures. s’y atrachent facilement ; Et cela diminué fon prix, mais nc le rend pasmoinsbon. LT aa Pour. RUE DE MARNE Le CPGE SR Dr LE RAA side Sr RE 5 # ( api20 ,: Dariss Ju Est À NETIELE ss 0259 1 Pouf favoirficet Ambre, quieftde:la meilleure cfpéce eft bon, on régardera premierement la figure, qui doit tirer pour l'ordinaire a la rondeur, par ce que toutes lies chofes moyen- nement molles étant roulées par la mer, & pouflées fur le ri- vage, s'arrondiflent. Il doit eftre éncorc en quelque faflon poly, & de couleur brune , entre gris de more & tanrnié. Que sileft bien fec, il faut qu'il foit fort leger pour fa groffeur. Carparl, vous jugeres fi ce n’eft point une mixtion de Co- lofone, de Bitume, de Cire, de Poix, & de Réfine, toutes ces ni 246 HiSTOIRE NATURELLE, Chap.20 … Les Infülaires, qui vont en certain tems de l’annéeaus Iles du Cayemar, pour faire provifion de la chair des Tortués, quiy terriflent en nombre innombrable , difent, qu'elles y abordent de plus de cent lieuës loin, pour y pofer leurs œufs, à caufe de la facilité du rivage qui eftbas, & par tout couvert d'un fable moler, Le terriffage des Tortuës commence à l4 #- oo tm ; . a es # es L 2 fin du mois d'Avril, & il dure jufques à celuy de Septembre, & c'eft alors que l’on en peut prendre en abondance , Cequife faiten cette forte. : À l'entrée delanuit, on met des hommes terre, qui fe tenant fans faire de bruit furla rade, guettentles Tortuës lors qu'elles fortent de la mer pour venir poferleurs œufs dans le fable. Et quand ils appercçoivent qu’elles fontun peu éloig- nées du bord delamer, & qu'avec leurs pattes elles font aû fable un trou profond d’un pied & demy, & quelquefois d'avantage pour y pofer leurs œufs; pendant qu’elles font occupées à fe vuider dans cetrou, ces hommes qui lés épient les furprenant, les tournent furle dos: &eftant en cette po= i | _ flure, w D % A « Lu . >+8 # « j v4 . : À Ie Er, aff, j : £ ” A M EE . HSE 2Hapiir BES ILES ANTILLES. 247 flure, elles ne peuvent plus fe reroutner, & demeurent ainfi jufques au lendemain, qu’on les va querir dans les chaloupes pour les apportet au Navire. Lors qu'elles font ainfrenver- fées fur le dos, on les voit pleurer, & onleurt entend jeter desfoupirs. Tout lemonde fait, que le Cerf pleure, lors qu'il éft reduit aus aboïis. Er c’eft une chofe présque incroiable, de cris & des gemiflemens, que pouflent les Crocodiles du fleuve du Nil, & des larmes qu'ils répandent fe voians pris, . Les Matelotsdes Navires qui vont ences Iles dy Cayman, pour faire leur charge de Tortuës, en peuvent facilement tonrner chäqué foir, en moins detrois heures, quarante où amquante, dont la moindre pefe cent cinquante livres, &les ardinaires deus cens livres, & il y en atelle, qui a deus grands feaus d'œufs dans le ventre. Ces œufs font ronds, de la grof- feur d'une bâle de jeu de paume: fs ontde lxglaire & un moyeuf comme les œufs de poule, mais lacoque n’en eft pas ferme, mais mollaffe comme fi c’étoit du parchemin moüilié, On en fair des fricaflées, & des amelettes quifont aflés bon- nes ; mais elles font plus féches & plus arides, que celles qu'on fait avec des œufs de poule. Une feule Torrwë à tant de chair, qu'elle eft capable de nourrir foixante hommes par jout. Quand onles veut manger, on leur cerne l’écaille du ventre, que les Infulaires appellent le plaffron de defloss, qui léftuni à celuy de deffas par de certains cartilages, qui font ifés à couper. Tout le jour, les Matelots font occupés à mettre en pieces & à falerles Torres, qu’ils ént prifes la nuit, Eapluspart des Navires qui vont en ces Iles du Cayerman, apres avoir fair leur charge, c’eft à dire apresfix femaines ou deus mois de demeure, s’en retournent aus Antilles, oùils ven dent cette Tortuë falée, pout la:nourtitute du commun peu- ple & des Efclaves. ; Maisles Torwés qui peuvent échapper la prifé, aprés avoir pondu leurs œufs à deus outrois reprifes, s’en retournent au Bien d'où elles cftoient venuës. Les œufs qu’elles ont cons Verts de tefre fur le rivage de lamer, érans éclos an bout de: x femaines par l’ardeur du Soleil, & non par leur regard, Comme Pline & quelques anciens fe font imagiñez autrefois : auflrtôrque les petites Forruës ont briféla Coque, aniles te-- } | noit: _ FU Na 4 —< 248 _ Histoire NATURELLE, | Chap.2t, 1 a EE leur a donné naiflance , pour fe rendre droità la ni aupres de leursmeres, parun inftinét qu’elles ontreceu de la nature. La chair de cette efpéce de Tortuë, eft ns delicate que le meilleur veau, pourveu qu’elle foit fraiche , & qu’elle foit feulement gardée du jout au lendemain. Elle eft entremeflee de graiffe , quieft d'un jaune verdatrecftantcuite. Elle eft des facile digeftion, & fort faine; d’où vient, que quand il y a des malades, s'ils ne peuvent fe guerir aus autres Iles, onles. fait pafler aus Iles des du Cayeman, dansles Navires, quien. vontfairela provifion. Et le plus fouvent , ayans efté rafrai- chis & purgez par cette viande, ils retournent en bonne fanté, La graiffede cette fortede Tortwë, rend une huile qui eft jau- ne, & propre à frire ce que l’on veut, lors-qu'elle eft fraiche, Etant vielle, elle fert aus lampes. A, KR -T I.CGLE III. Des Tertuës qu'on appellé Caoñannes. À Tortuë qu'on nommé Croëanne, eft de mémefigure que la precedente , horsmis qu’elle a latefteun peu plus groffe ; Elle fe met en defenfe lors qu’on la veut approcher pour la tourner: mais fa chair étant noire, fillafeufe, & de mauvais goût, elle n’eft point eftimée qu’à faute d'autre: huile qu'on en tire n’eftaufli LPrOPISS que pout entretenif les lampes. | ARTICLE LV: Des Tortuës qu'on appellé Carets. Uant à la troifiéme efpéce de Tortuë demer, nos Fran= çcois la nomment Curet. Elledifferedes deus autres en grofieur, étant de beaucoup plus petite, & ence qu'elle ne pofe pas fes œufs danslefable; maisdansle gravier, qui ef meflé de pCtis caillous. La chair n'en cf peine agreable, mais | les “iii & he Ke 21 DES; ALES LÀ NTLLLESe |: 349 “es œufs fon plus delicats, que ceus des autres efpéces. Elle fc roit autant negligée que la Caoëanne; n’étoit que font écaille ge fait foigneufement rechercher. Elle eft compolfée € quinze fcüilles tant grandes que petites, dont dix font plates; quatre un peu recourbées; & celle qui couvre le col, eft faiteentriangle cavé, commeun petitbouclier. La. dépoñille d’ un Caret ordinaire, pefe trois ou quatre livres: Mais on en rencontre quelquefois, qui ont lécaille fi epaiffe, & les feüilles filongues, & fi larges, qu elles pefent toutesen- femble, environ fix ou fét livres. C'eft de cette écaille de Carer, qu'on fait à prefent tant de Ta peignes, tant de belles coupes, de riches boëttes, de Gañettes, de petis Buffets, & tant d’autres excellens ouvra- ges, qui font eftimez de grand prix. On.en enrichit auffi les meubles des chambres, les bordures des miroirs, & des ta- leaus, & pour leur plus noble ufage, on encouvre les petis livres de devotion, qu’on veut porter en la poche. Pour avoir cette precieufe écaille, il faut mettre un peu de feu dé- fous le plaftron dedeffüs, fur lequel les feuilles font attachées : car fi tôt qu'elles fentent.le.chaud, on les enleve fans peine, avec, Ja pointe. ducouteau., Quelques uns aflurent, que cette epéce de Tortuë eft tel lement visgoureufe, que fon écaillé lui érant Ôtée, ilenre- aift bien ! tôt une autre, s’y on la rémet inçontinent en la mer. L'abondance du, Caret, fe trouve en:la: Peninfule de ucatan, & en plufeurs perites Iles, qui.font dans le goife d'Hondures. Ce qui fait voir, que Le bon Pirard étoit mal informé, lors qu'au Chapitre deuxiéme, de fon traitté des animaus Sr des fruits des Indes Orientales, il a dit que cette forte de Tortuëé, ne fe voyoit qu'aus Maldives & aus Fihp- pines. | Ontient que l’huilede Caret, a la le de gucrirtou- tes fortesde gouttes, qui proviennent de caufes froides On Sen fert auf avec heureus fuccés, pour fortifierles nerfs ; & Hoi appaifer les douleurs des reins, & toutes les fluxions ides, ver rade RS nd #5S (Hisrorne Narunesse, Ch ARTICLE VE De la fallon qu’on sefhe les Tortuës , C* tous les autres À (1 | gros Poiffens ré CAntillese | 1 Es Tortuës demer, nefe prennent pas feulement furlé fable, en la maniere que nous avons décrite cy deffus® mais aufli par le moyen dun inftrument que l’on nommé Varre. C’eft une perche de la longueur d’unedemye piqués au bout de laquelle , On fiche un clou pointu par les.deu bouts, qui eft carré parle milieu, & de la groffeur du et doigt. On l’enfonce jufques à moytic dans lebout de la vare re, où il entre fans force. Quelques- -uns, font desentaillurés. di cofté qu'il fort, afin qu'il tienne plus fort, lots qu'on là lancé dans lécaille de la Tortuë. re Voicy commeles pefcheurs font , pour darder gette Varre. La nuit lors qu'il fait clair de Lune, & quela mer efl'tran® quille, le maitre pefcheur, qu'ils appellent Varreur, s'étant mis en un petitefquif, qu'ils nomment Cor, avec dens au= tres hommes, l’un qui eftà l’aviron, pour le temuet d’un & d'autre cofté avec tant de vitefle & de d'exterité, qu’ilavanc | autant & avec beaucoup moins de bruit, que s'ilétoit poufé à force de rames. Et l’autre eftaw milieu ducanot, ôù'il tient la Ligne, quieftattachéeau clou, en état de pouvoir aifé: ment & promptement filer, lors que le Varrèur aura. frappé la Tortué. dE | En cet equippage, ils vont fans faire aucün He , où il efperent d'en trouver: & quand le Varreur, quifetienr touf droit fur le devant du Canor en appercoitquelcune à la lueur de la mer, laquelle elle fait écumer en fortant par intervallesg, il montre du bout de fa Varre, qui doit fervir de compas à celuy qui gouverne le petit vaifleau, l'endroit où il faut qu'iflé tonduife |; & s’étant approché tout doucerñent de là Tortue, il luÿ lance avéc roideur, cette varre {ur le dos. "Le clou penetre l écaille, & perce bien avant dans la chair &1é boisrevient furl’eau. Auf tôt qu’elle fe fent bleffée elle! fe couleà fonds ayccleclou, quidemeurcengagéen.fon-écail- Due «aDNESt he ES A MALE; À St EC £t cree plus qu’elle fe remuéë &c s LeMbi plus'ellé senferre. Enfin aprés s’étre bien débatuë, fes forces luy man- quant, à caufe du fang qu elle a perdu, elle fe laiffe prendre aifément, & on la tirc fans ae à bord du Canot, ou à For D #iioq + On prend en cette même c forte le L'an & STE autres gros Poifons : maïs au lieu d'un clou, on met au bout de la varre un harpon, ou un javelot de fer, quieft fait en forine de celuy.d’une lancebien perçante. A cofté de ce fer, ilyaun trou, auqu:l eft paflée une corde, laquelle eft auf gntortillée à j entour de la perche, en telleforte, que quand le Varreur l’a lancée de toute fa force fur le Poiffon, la corde coule facilement, pour luy donner la liberté de fe démener dans l’eau : & apres qu ‘il a epuife toutes fes forces, & qu'il “ft reduit à l’extremité, s’y on ne le peut embarquer dans le Canot, onle tire facilement fur le borddelainer, où l’onle pivie par quarticts. Bois ARTICLE VL. ni: Des Thu de Terre, C* d'Ecan douce. y EsTortuës de Terre, fe trouvent en quelques Iles prés Lu Rivieres d’eau douce, quifontles moins fujettes aus débordemens ; ou dans les étangs & dans les marécages, qui font bien éloignés de la mer. Elles {ont couvertes de trous côtez, d’une dure & folidecroute, qui ne fe leve point par écailles, comme celles des Tortuës de mer, & qui eff fi épaif- #e par tout, qu'elle fert d'un fort fiafluré à F animal qui y fait “ademeure, que quand les rouës d’un chariot pañeroyent par deffus, elle nefetoit pasbrifée. Mais ce quicftde plus mer- vcilleus, eft, qu’il ne peut jamais eftre à l’étroir dans cetre mai- “fon mouvante: car elle s’élargit à mefure que le corps de MHonhofte, prend de nouveaus accroifflemens. Le couvertde deffus, eft en quelques unes de la longueur d’un Li & de- may. Icftd’unefigure ovale, creufé comme un bouclier, & enrichy par deffus de plufieurs rayes, qui font arrangées en prions parquets, qui paroifent un peu relevez, & qui for- Li 2 ment Ra AE C1 Ce ANR |, DATES | À “ie L * NOR FT Dors ! 2 ‘a , DE 1 % RENE 1 L SLA ÿ FA 1 Va, 0 ) AE AS $ OL ‘ ï y ? fs DR À FAN SA tt à 0 ! 4 gt & ' ne, : A ' RE D ANNE (re A4 252 HLSTOIRE N ATURELLIE, Cha ment plufeurs petis compartimens d’une parfaite ER : Tous ces entrelacemens font couchez fur un fond noir, qui. eft émaillé en plufieurs endroits, de blanc & de jaune. x . Cette efpece de Tortuë, a la tefte fort hideufe, car elle cft femblable à celle d'un ferpent. Elle n'a point ‘de dens: mais feulement des m'achoires!, qui: font d'un os affez fort, pour brifer ce qu'elle veut avaller, Elle eft fupportée de quatre pieds, qui font bien foibles, pourfoutenirla pefanteut de fon corps, aufi elle ne fe confie pasen leurlegereté, pouf fe fauver , & gagner quelque retraitte , lors qu’elle eft pour fuivye: mais fielle n’eft fur le bord des Rivieres ou des étangs, dans léquels elle fe puiffe precipiter ; elle ne recherche aucun autre abry, njaucunautre avantage, que le toict de fa propre maifon, fous lequel de même que l'Heriflon, & l’Armadille, elle retire promptément & feurément fa. tele, fes pieds & fa queut,auflitôt qu’elle craint le moindre danger! : La Femelle, pofe des œufs de la grofieur de ceux d’un pigeon: mais un plus longuets. Elle les cache dans le fable, & les confie au Soleil, pour les couver & les faire éclore. Bien que quelques-uns tiennent, que la chair de ces Tortuës de terre fait de dificile digeftion, .ceus quien ontgoûté, la rangent entre les viandes les plus exquifes, & les plus delica= tes de toute l’Amerique: Et les Medecins du-païs, confeillent à ceus, qui font menacez d'Hidropifie, d'en ufer fouvent, pout Jeur sn r Ils ont aufli reconnu par experience qu'ils enont faite, que leur fang étant féché & reduit en poudre, attire le venin des viperes, & des Scorpions, enl’appliquant fur la playe. ILeft auMi conftant, que la cendre de Jeurécaille meflée avec le blanc d’un œuf, guerit les crevaffes qui: furé viennent aux mammelles des-femmes quiallaitent ; .& que s’y on s’en poudre la.refte, elle empefche. les chevens de: tomber. Ltadl 1RES dt S ANTILLES. D +1 k oi Li | 4 CHAPITRE VINT- DEUSIÉME. is les defcriptions particulieres de plufieurs fortes de - Crabes, qu Je trouvent communément fur la terre des Antilles. " L fetrouve par toutes ces Iles, des Crabes ou Cumcres, qui font une efpéce d’Ecreviffes Amfibies, & fort bonnes à manger, au lieu que celles du Brefil font defagreables, parce qu’elles fentent la racine de Genévre. Aufi les Indiens nfulaires eftiment beaucoup lesleurs, €t en font leur mets Je plus ordinaire. Elles font toutesd’une figure ovale, ayant Ja queüe retrouflée fous le ventre. Leur corps, quieft tout _ couvert d’une coque aflez dure , eft fupporté fur plufieurs pieds, qui font tous. Heriflez de petites pointes, qui fervent à les faire grimper plus aifément, où elles ont envie d’attein- dre. Lesdeus de devant font fort gros : l'un notamment, eft plus gros que Fautre. Nos François, appellent ces deus pat- tes de devant, des CHMordans, parce qu’avecicelleselles pin- cent & ferrent vivément ce qu'elles attrapent. La partie de devant qui eftun peu plus large & plus relevée que l'autre, pouffe en dehors deus yeux, qui font folides, transparens & de differentecouleur. Leur guetle, eft armée de deus petites dens blanches , qui font difpofées dechaque cofté, en forme de tenaillés trenchantes, dont elles couppentles feuilles, les: fruits, & Les racines des arbres, qui leur fervent de nou. HIUrC. AR TH. G E E::f: Des Crabes qu on nommé T ourlourors. LL yen adetrois fortes, qui different en groffeur & en cou- | leur. Les plus petites, font celles quel’on appelle commu: nément Tourlourous. Elles ont la coque rouge marquée d’u- he aehe 1 noire ;. clles font affez agreables au goût: mais à oi Li. 3 se PRE ON RE TMS A 0 POP PM CENT È : A 25% HisToire NATURELLE, Chap22, caufe qu'il y a beaucoup à éplucher, & peu à prendre, & qu’on tient aufli, qu’elles provoquent la diffenterie, elles ne font, =. cherchées que dans la neceflité,. é A R FT OL CE PUR Des Crabes dre Es autres font toutesblanches, & fetiennent aus pieds” des arbres au bord'de la mer, en des trous qu'elles font” enterre, & ou elles fe retirent comme les Lapms en leurs” clapiers Flies font les plu: groffes de toutes, &1l s’en voit” telles, qui ont en l’une de leurs pattes, la groffeur d’un œuf. de* chair auflidel care, que celle des Ecrevilfes de riviere. Elles. fe montrent rarément de jour: mais pendant Ja nuit, elles” fortént en bandes de leurs tanieres, pour aller manger fous: les arbes, & c’eft aufli en ce rems là, qu’on leswa prendre à lalanterne ; ouausflambeaus, Elles feplaifent particulieres ment, fous les Paretuviers, & fous les autresarbres qui {ont aubord de lamer, & dans les éndroits les plus marécageus! Quand on foüille dans la terre, ou dans le fable pour les €hercher en leurs retraittes, on les trouve toujours à moitie corps dans l’eau, de même que la plüpart des autres anis maus Amfbies. | AO + 04 TE i à EL A RU CNE UE OT Des Crabes peintes. “. Ais celles de la troifiéme efpece, laquelle tient le mi- lieu entre les deus autres, dont nous venons de parler font les plus belles, les plus merveilleufes, & les plus prifées de toutes. Elles ont bien la même figure que les preceden= tes ; mais felonles diverfes Iles, & Les differens terroir où elles fe ‘nourrilent , ‘elles font peintes de rant de: SU leurs, qui font routes (bell cs & fivives ; qu'il n'ya rien plus divertiflant,;: que deés voir en plein jour roder fousies arbres, oùellescheichent leurnourritute, Lesunes, oïvwtout >) DR le RUE CRC LOL TR RE Cr Fa en “ " TO AE RENEE 7 CUS A à DES. ILES A NUE | 255 cotrs de couleur violette pannaché de blanc: Les autres, font d'un beau jaune, qui eft chamarré de plufeurs petites Lignes grisâtres & pourptines, qui commencent à la gueüle, & quis’éparpillent fur ledos. Il y en à même quelques unes, qui fur unfondtanné , font rayées de rouge, de jaune, & de vert , qui leur donneun coloris le plus riche & le mieus meflé, qu'on fe pourroit figurer. On diroitàlesvoirdeloin, que toutes ces agrcables couleurs, dontelles font naturellement émaillées , ne foient pas encores féches , tant elles font lui- fantes ; où qu on les ait tout fraichément chargées de vernis, pour leur donner plus de luftre. Ces Crabes peintes, ne font pas comme les blanches, qui n 'ofent pas fe montrer de } jour. Car on les rencontre fur tout le matin & lefoir, & aprés les pluyes fous les Arbres, oùelles fégaient par troupes. Elles fe laiffent auffi appprocher d’affez Pres ; mais, incontinent qu’on faitmine de les vouloir arré- ter avecune baguctte, car il feroit trop perileus d'y emploier les mains; elles font-leur retraitte, fans tourner le dos à ceus quiles poutfüivent , , &enfe reculant de cofté, elles montrent Jeurs dens, & prefentant leurs defenfes ouvertes, quifontces deus rénailles où mordans, qu'elles ont en leurs pieds, elles s’en parent tout le corps, & les font choquer detems entems Fune contre l’autre, pour donner de la:terreur à leurs enne: mis ; & en cette pofture, elles gaignent leur fort, qui eft ordi- hairement fous la racine, ou dans le creus de quelque arbre _ pourri, ou dansles fentes des rochers. _ CesCrabes, ont cet inftinét naturel. d’aller tous les ans environ le mois de May, en lafaifon des pluyes au bord dela: mer fe laver, & fécouër leurs œufs pour perpetuer leur éfpéce, Ce qu elles font en cette forte: Elles defcendent des montagnes en fi grandetroupe, que les chemins & lies bois. en font toutcouverts : Et elles ont cette addrefle merveil- leufe, de prendre leur route vers la partie de Pile, où il y à: des ances defable, & des décentes,. d’où clles peuvent com- modement aborder la met. 6 Les Habitans,en font alors fort incommodez, parce a es remplifient leurs jardins, & qu ’avecleurs motdans:, elles. proton les pois, & les jeunes plantes de Tabac. On diroit: | àv OI” « De ds 256 HiSTOURE: NATURELLE, Chap22l à voir} otdre qu "elles gardent en cette defcente,.que ce feroit À une armée qui marche en bataille. Elles ne rompent jamais, leurs rangs. Et quoy qu’elles rencontrenten chémin, mai fons, montagnes, rochers, ouautres obfiacles,glless’ éforcen | de monter deflus, afin d’allertoujours conftamment en lisa droite. Elles font ‘alte deus fois Le ; jout, pendantlaplusgran®# dechaleur, tantpourrepaitre, que pour fe repofer un peu sk Mais elles font plus de chemin de nuitquede jour, jufquesà à ce qu'enfin, elles foient arrivéesaubord delamer, : 1 nu Lors qu’elles font ce voyage, elles font grafles & bonnes! à manger, les males étans pleins de chair ,, & les femelles! remplies d'œufs. Aufli en ce tems-là, onen à provifion à fa porte. Erquelquéfois, elles entrent même dans les maifons, quand les paliffades ne font pas bien jointes, & qu’elles trous vent ouverture. Le bruit qu’elles font durant la nuit, eft plus grand que celuy des rats, & empefche de dormir. Quand: elles font au bord de la mer, aprés s’eftreun peu repofées, Va avoir confideré la mer, comme la nourrice de leurs petis, elles. s’a, prochent de fi prés, qu’elles puifient eftre:baignées à trois ou quatre reprifes ;. des petites ondes qui flottent far le fable: puis s'étant retirées es bois , ones plaines voifines pour fe delafier, les femelles: retournent une feconde foisà lamer, & s étant un peu lavées, elles ouvrent leurqueüe, laquelle eft ordinairement ferrée fous le ventre , .& elles fecoüent dans l’eau, les petis œufs qui y étoient atrachez. Puiss’étant encore l'avées, elles fe retirent avec lemémeordre,;-qu ‘elles étoient venués. Les plus fortes regagnent incontinent les montagnes, cha cune au quartier d'ou elle étoit partie, : & par le même che minoùelle avoit pañlé. Maiselles font-alors, c’eftà dire, à leur retour, pour la plüpart fi foibles , & fi maigres ; qu’elles, font contraintes, de s’arréter es premieres campagnes qu'el= les recontrent, pour fe refaire , & reprendre leur pres micre vigueür, avant que de grimper au fommet des mon tagnes. Quant aus œufs qu’elles ont ainfi confiez à la met, apr avoir cité repouffez fur le fable moilet, & échaufez quelqué ie parles rayons du Soleil, ils viennent cafin à $ si & dr :7 = é %, d 4 CPE NIET pote APE COR F2 ro LE C7 DS APS +: TONER M: vas fers A NTrrVOCES ! y x à produire de petites Crabes, qu'on voit par Miionsdela largeur d'un liard gagner is buiffons voilins, jufques à ce qu'étant fortes ,: elles puiffent fe rendte aus montagnes au- prés de leurs meres, | 3 al ei . Cequieftde plus confiderable en ces Ctabes , eftqu’une fois l'an, affavoir, aprés qu’elles font retournées du voiage de 4 , Ces fe cachent routesenterre, durant quelques fix fémaines: de forte qu'il n’en paroit aucune. Pendant ce tems-là, elles changent de peau, ou d'écaille, & fe renouvel- lent entierement. Elles pouffent alors de la terre fi propre- ment à l'entrée-de leurs tanieres, que l’on n’en appércoit pas l'ouverture. Cequ'elles font pour ne point prendre d'air. Car quand elles pofent ainfi leur vicille robe, tout leur corps eft comme à nud, n'étant couvert que d’une pellicule ten- dre, & delicate, laquelle s’épaiflit & fe durcit peu à peu en croute; fuivant là folidité de celle qu’elles ont quitrées. _ Monfieurdu Montel rapporte, qu’ila fait creuferà defcin en des lieus, où il y avoit apparence qu'il y en cut de cachées. Et enayant rencontré encffet, qu'il trouva qu’elles étoyent comme enveloppées dans des feüilles d'arbres, qui fans doure, leur fervoient de nourriture & de nid, durant cette retraite : mais elles étoient & languiffantes & fi incapables de fupporter Vair vif, qu’elles fembloient à demy mortes , quoy que d’ail- leurs elles fuflenr graffes,& rres-delicates à manger. Les Habi- ans des [les les nomment pour lors Crabes Bourfieres , & les eftiment beaucoup. Tout auprés d’elles, il voyoit leut vicille dépoüille, c’eft à dire, leur côque qui paroïfloit aufli entiere, que fi l’animal eut encore été dedans. Et ce qui eft merveil- leus, c’eft qu’à peine, quoy qu'i y employait de fort bons yeuS, pouvoit il reconnoître d'ouverture, où de fente, par où le corps de la befte fuft forty, & fe fut dégagé de cette pri- fon. Neantmoins, apres y avoir pris garde bien exactement, il remarquoit en ces dépoüilles, une petite feparation du cofté de là queuë, par où les Crabes s'étoient d'éve- loppées. | | La maniere plus ordinaire de les appréter, eft toute la même que celle des Ecrevifles en France: Mais ceus qui font des plus delicats, & qui veulent emploier le tems qui ef Kk requis | ed AD AS HE) Don a es SAME ES CE 22 F 1 VAN AT ANR 6 PRINT YOUR: :AREST LEUR dr: PES ‘ SRE NE RAC TT EAU : À. Y * L} Ft “ { Re } % 258 HESTOUREINATURELÉE, Chap. requis, pouties rendre de meilleur goût, prennent la pén apres les avoir fait boiullir, déplucher tout ce qu'il y à des, bondansles pattes, & de tirer une certaine fubftance liuileu# fe, quieftdanslecorps, laquelleonnomme Tama, & dé fricafler tout: cela avec les œufs des femelles, y mêlant un: bien peu de poyure du pais, & du fuc d’oranges. il faut avoüer que ceragoût., eft l’un des plus RES , quel'onferve aùs Antilles, | Aus Terres, oùil y à plufeurs Atbres de Mancenilles, 1el Crabes qui. repairent deffous, ou qui ufent de ce fruit, ont une qualité venimeufe, De forte que ceus qui en mangent, en font dangereufement malades, Mais aus autres endroits elles font fort faines , & tiennent lieu. de delices, comme les Ecrevifes en Europe. Ceus qui font foigneus de conferver leur fanté, les ouvrent auparavant. que d'en manger, : & file dedans du corps eft noir, ilstienunent qu'elles font fan e ee & n'ont. spas d'en fer. CHAPITRE VINT- TROISIÈME. Des Tonnerres ; des Tremblemens de terre : & des Tems peftes ti arrivent. Jouvent en ces Iles. fyOmeiln ‘y à guéres de vifage fi beau & fi agreaë ( ble, où l’onne puiffe remarquer quelque defaut, & qui *ne foit fujet à quelque tâche, & à quelque verruë: Ainfi les Antilles, poffedant d’ ailleurs toutes les beautez & tous les avantages que nous avons reprefentez, &:quiles rendent fi recommandables; ont aufli leurs imperfections; & quelquesmanquemens, qui ternifient cet éclat, & quidis hinuent ces agrémens & ce prix. Voicy quelquesunes, des principales incommodités qui s'y rencontrent , & les remes des; qu’on y peut apporter: nt DES ILES ANTILLES |, - 259. FAR E LS AN au EN è ne LES Real b:C LEE Des Tonnerres. sT premierement, au lieu que danstoute la er du Perou l'on n’entend jamaistonner ; icy les Tonnerres font fre- quens, & en quelquesendroits, ls fon fi épouvantables, que Je cœur le plus affuré tremble d'effroy, quand cette puiffante & magnifique voix du Ciel, fe fait entendre, avecun fon fi terrible. 7 D AMI CL.E x Des Tremblemens deterre. Es Tremblemens de terre, yproduifent aufli quelqué- fois de triftes efféts, & émeuvent les fondemens de la “terre , d'une fecouffe fi violente ; qu'on eft contraint de _chanceler, auslieus où l’on fe croiroit le plus affuré. Mais pat bonheur, cela arrive rarément, & en quelques endroits, |’ agi- tation n'eft pas figrande. HR TI CL .E I L D'une Tempelle que les. Infulaires appellent Ouragans. E qui eft le plus à craindre, eft une confpiration genc- % rale de tous les Vens, qui fait le tour du Compas, en l’e- Îpace de vint-quatre heures , & quelquefois én moins de tems. Elle arrive d'ordinaire es mois de Juillet, d'Aouft, ou de Septembre. Hors de-là, on ne la craint pas. Autréfois on ne l’éprouvoit que de fét en fét ans, & quelquéfois plus rarement : Mais dépuis quelques années, elle eftvenuëde “deus en deus ans : Et en une feule année, on en à fouffert deus : Même peu aprés que Monfieur Auber euft eftéenvoyé pour Commander à la Gardeloupe, il y eut troisde ces oragesen Pefpace d’ un an, K'k:2 Cetté 7 Cette emnpeles que Îles Liiaites ane Ouragar, eftf étrange, qu'elle brie & déracine les Arbres, dépoüille dt toute verdure ceus qu'elle n’enleve point, defole les foréts. entieres, détache les rochers du haut des montagnes, & les precipite dans les vallées, renverfe les cabanes, entraine e. ques à la mer les plantes qu'elles artfache de faterre, fait dégaftuniverfel, de tout ce qu’elle trouve à la Campagne: & en un mot laife une famine en tout le pais, qui gemit longè tems en fuite de ce défaftre ,. & qui à bien de la péne ârépares ces ruines, * Cet Ouragan, ne fait pas feulement fes ravages furla terres mais il émeut encore une telle tempeñte fur la-mer, qu ‘elle femble fe mêler & fe confondre avec l'Air & les Cieux. Ce: Tourbillon impetueus, brife & fracaffe les Navires qui fe: trouvent dans lescoftes, jettant les uns fur lerivage, & fais fant plonger les autres dans la mer. De forte que ceus qui échappent de ce naufrage, ont grand fujet de lotier Dieu. M Céus qui prenent garde aus Sfignes qui font les avant-cotts reurs de cette Tempelte ont remarqué, qu’un peu auparavant qu'elle arrive, la mer devient en uninftant tellement calme! & unie, qu'il ne paroit pas la moindre ride én/fa foperficieà que les Oifeaus parun infinét naturel; defcendent par troupes. des montagnes, oùils font leur retraitte plus ordinaire, pouf’ {retirée dans les plaines & dansles vallées, oùils fe rangen£ contre terre, pouf à eftre labri des injures de ce mauvais tems, qu'ils prevoient devoirbientôtfuivre: & quela pluye qui tombe un peu devant, eftamere & falée, comme l’eau de la mer. i 11 y a peu d'années, qu'il parut un aéré memorable de cette tempelte, en plufieurs Navires qui eftoient à la. rade de Saint Chriftofle, chargez de Tabac, & prefts à faire voiles Carils furent tous fracallez & fubmergez, & la marchandize fut entierement perduë. Dont il fenfuivit un étrange effet, C'’eft que la pluspart du poiflon de lacofte, fut empoifonné de cetabac: Ornrvoioit la mer toute couverte de ces: pauvre animaus, qui-renverfez & languiffans, flottoient ab gté de Peau, & venoient mourir fur Le rivage. RS 4 Lan “7 CE NT NL ' PERS | 4 ets 0 NT TS PRET CET D: ae el D. 04 de 4 Ce A ANUS M 3 z PPS (Des ILES ANTILLES sr » Etafin, que quelcun ne s'imagine pas que cés desaftres foyent tout à fait particuliers au nouveau Monde, nous ajouteronsicy, qu'il s’eft veu en ces contrées de France de fi épouvaniables Fempeftes, que l’on néles peut eftimer autre Hhole/quedes Oragans, + | . L'Anmil. cinq cens quatre-vins dix-neuf, il fe leva prés de Bordeaus un vent fi violent & fi impetueus, qu’il rompit & déracina la pluspart des grands arbres, quieftoient forts pour refiftet, principalement les Noyers, dont les branches font ordinairement fort étendués, & en transporta quelques uns, à plus de cinq cens pas du lieu où ils étoient. Mais les arbres les plus foibles, & qui plioient, furent laiffés. Une partie du palais de Poitiers, en fut fort endommagée en fa couverture. Le Clocher de Cangres prés de Saumur, en fut abbatu. Divers autres Clochers, & plufeurs maifons dela campagne, en fouffrirent beaucoup de mal. Quelques per- fonnes ;: fe trouvant à chevai au milieu deschamps, furent emportéez à plus de foixante pasloin. Ce vent courut dépuis: le voifinage de Bordeaus, jufques au Vendomois & au Per- he: renant de large environ fix ou fétlieuës, & on nc voyoit en tout cet efpace, que fracas d'arbres arrachez & ren verfez. | er | à | Et pour donner un exemple d’une efpèce d'Ouragan, qui fefoit particulierement montré fur la mer, nous atracherons icy l'extrait, quinous a eflé communiqué d’une lettre écrite de la Rochelle, par un honorable Marchand du lieu, à l’un de fes amys & correfpondansà Roïüen, en dattedu trentiéme Janvier, mil fix. cens quarante cinq. Voicy donc ce qu’elle porte. | Ÿ ï 3» Dépuis deus jours, nous fommes dans une afflition fen- 1 fible, au fujet de l'extraordinaire tourmente qui a commencé L,, la nuit de Samedÿ dernier vinthuitiéme decemois, & qui: » Continué.encore. Nous voyons de deflus noftre muraille, trente Ou trentécinq Navires échoüez & brifez à la cofte, 5» la plûpart Anglois, avec nombre de Marchandifes perduës: 1 Unde ces Navires, de deus cens Tonneaus, à efté porté: > jufques auprés d’un moulin à vent, qui eft douze picds plus #» haut que la hauteur ordinaire de la mer, Car l’Orage n’a: Le - k KK: 3 >> PAS _» grand, que celuy du naufrage on vaifeaus. Tout le fel quit fous leurs ruines, & fe fauvent cs cavernes & esfentes des Antilles plufieurs cdifices, quipeuvent foûtenir cette épreu- que les Efclaves Négres ont bâties, fur lemodele de celles 262 HISTOIRE NATURELLE, Ghap23} pas efté feulement en l'air: Mais cette Tempefte, de , ment émeu & enfié la mer, qu’elle à pafñfé bien-haut at ,, deflus de fes bornes ordinaires : fi bien quele dommage &* , le dégaft qu’elle à fait fur laterre, eft fans comparaifon kdl ;, eftoit fur les marais bas, a efté emporté , touslesbleds des »'TeLres bafics, des marais deféichez, ont efté inondez.. ,, Et dans l’Ilede Ré, la mer à paifé d'un cofté à l'autre à tra JAMBES LUE y a gafté D uce de vignes, & noyé force bétail," »» De memoire d homme, on n’avoit veu monter la mer fi. haut, & elle eftentrée en des endroits, pres d'un licué 4vant* Ne D terre. Sibien, que ceus qui ont efté à Saint Chri-« », ftofle, difent, que l'oüragan qui y eft aflés ordinaire, n’eft pas. ë plus épouvantable, qu'à étéceluy-cy, qu’ils ont appellé du. ,, même nom. Le vent etoit Nord-Ouëft. On eftime le dom" », Mage, tant à la mer qu'à laterre, plusde cinq cens milefcus. » On tient, qu'il s’eft perdu environ deus mille cens de fel,! » qui font la charge de deus cens Navires, detrois cens ton“ >, neaus la piece. Il s’eft aufli perdu des Navires Hollandois* devant Ré, à Bordeaus, & à Bayonne, qui eftoient riche » ment charsez D'où ilapparoit, qu'il fait fouvent en Eu rope des Tempeftes, qui font bien aufli violentes, que celles. qui font tant apprehendées aus Antilles. Quelquesuns, pour fe mettre à couvert de cette Bourraf- que , abandonnent icurs maifons, crainte d’eftre envelopez rochers, ou bien fe tapiflent contre terre, au milieu des chams, où ils effuyent tout cet Orage. Les autres, tâchent de gagner promptement, quelque maifon du voifinage, qui foit afiez folidementbätie , pour refifter à toutes les feconfes: de cette Tempefte. Carpar bonheur, il y a maintenant aus ve, Il y en a même, qui fererirent dans de pétitcs cabanes,, des Caraïbes, car on à reconnu par experience , que ces petites huttes defigureronde, quin'ont point d'autre ouve:= ture que la porte, & dont les cheurons touchent la terre» font ordinairement épargnées; pendant que les maifons les = | plus aa SE }.7 Me à PL VERTE £ # se ur, f à Mes comes Indes ANTILLES 463 plus élevées, font transportées d’uncplaceenuneautre, fi élles ne font entierement renverfces ; par l’impetueufe agita- tion des vens, qui excitent cette tempefte. . Mais il fautavoüer, que toutes ces precautions exterieu- res , ne font pas capables de delivrer plainement les efprits des hommes, des frayeurs mortelles quiles environnent, lors que Dieu tonne du Ciel, qu'il fait retentir fa voixterrible, qu’il lance les éclairs & les charbons allumez; que laterre en tremble, que les montagnes croulent, & que les fondemens du monde font découverts : car _ tAcens que fesbontés ne peuvent émouvoir Cette effroiable voix ne fait elle pas voir _ Vnelmagede fa puiffance* _ Gertes, quinyconnoiit [a haute CMaesté,, Qui l'entend fans frayeur, n'apas de laconffance F- CHais il à de l'impicté. il faut donc, que ceus qui defirent d’eftre fans apprchenfion:;. au milieu de ces defordres, & de ces émotions de la mer & de Pair, ayent recours à des retraittes plus affurées, & que pout. cet effet, ilsentrent dans le fantuaire de Dieu, qu'ils fe logent à l'ombre du toutpuifflant, & qu'ils prennent le Seigneur pour Jeurretraite & pour leur fortereffe. . Il faut qu'ils embraffent avec une foy vive, ce grand & precieus falut qu'il a deploié en fon fils bienaimé, qui nousadelivré de toutes nos frayeurs par le fang de fa Croix, qui a fait noftre paix, & qui feul peut ap= paifer les craintes & les orages de nos confciences, & donner Un vraircpos à nos ames,d'autantque Celuy, qui du treshaut implore l'affiffance Et dont l'efpoir plein de conffance. DUaittend jon fecours que de luy, Quelque peril qui le menace Se peut promettre fans audace- D'avoir en [a faveur wn immobile appuy. Il fautqu'ils confiderent pendant cettetempefte, que c’eft: Dieu qnitire les vens de fes trefors, & qu'ils ne foufllent que D PAL: 26% - se opt NT A DUR ES Chap | par fon-ordre : Que ces effroiables Tourbillons, ces Ton: nerresgrondans, ces noires obfcuritez, qui voilent la face der Ja terre, & toutes ces puiflantes agitations qui la fecouënt: ne font que des groflicres idées, de ce jour épouvantable du Seigneur, auquel les Cieux pafferont rapidement & eftant mis” en feu feront diffouts , & les elemens étans embraféz fe fon= dront, & la terre & les Œuvres set font en elle, feront brulées. +4) Ils doivent patticulierement recourir à Dieu de tout leur cœur, & le prier qu’en contemplation des merites infinis de fon Saint Fils Jefus, illuy plaife d’eftre appaifé envers fes {er viteurs, & qu'il daigne avoir pitiedefaterre. Ils fedoivent fouvenir, que fon courroux ne dure qu’un moment: mais que” fa bienvueillance duretouteunevie. Quele pleur loge chés nous au foir, & qu’au matin il y a voix déjouifflance. Enfin ils doivent eftre fermement perfuadez, que celuy qui aconté leurs cheveus, a auffi conté leurs jours; Qu'ilne les abans donnera point au befoin , mais qu'il les comimettra à la char ge de fes Anges de lumiere, pour les contregarder parmy ces’ affreufes tencbres , afin que nulle playe n'approche de leur tabernacle. Mais, pour avoirau befointoutes ces douces penfées, & pour eftre munys au jour de la calamité, d’une fi fainte con fiance. Il faut qu’en bién faifant , ils recommandent par cha- cun jour leurs ames au fouverain Createur de toutes chofes; Qu'ils s’étudient de cheminer en Sainteté & Juftice devant luy, durant toute leur vie; Qu'ils lavent leurs mains en innocence, & qu ils purifient leurs cœurs, pat la Foy en fes precieufes promefes ; étans affürez, qu'il tient les vens, & toutes les autres creatures en bride par fa puifiance, qu'il n’y en à aucune, qui fe puifle mouvoir fans fa perimiflion , qu’il fait fervir à fa gloire les Feus, les Tonnerres, les Tempeftes,, & les Tremblemens de terre, & qu'il Les diriseau bien & au falut de fes enfans. + Pe24 DES ÎLES ANTILLES 26ÿ “CHAPITRE VINT-QUATRIEME. De quelques autres incommodités du pais ; &7 des remedes qu'on y peut aporter. ; Utre les Tremblemens deterre, les Tonncrres, & les Ouragans, qui fecoüent & defolent fouvent la terre des Antilles, comme nous venons de le repre- enter : il y a encore quelques autres incommoditez , qui font bien inportunes, encore qu'elles nc foyent point tant à craindre que les precedentes, Nous leur avons, refervé ce dernier Chapitre du premier Livre de cette Hiftoire , où, pour témoigner la grande pañlion quenous avons d’eftre afféz heureus pour contribuer quelque chofe au foulagément, & à WJ'enriere fatisfation des aimables Colonies de ce nouveau “monde: nous propoferons les remedes, que l'experience des anciens Habitans, &le jugement de pluñeurs celcbres Mede- cins, onttrouvé eftre les plus propres, & les plus efficacieus, pour les munircontre leurs dangereus effets. À RTPLE L Des CHMoustiques , € des CMarinçoins. N Ous donnerons le premier lieu, à certains petis Mou- Ÿ cherons appellez CHowstiques , que l'on fent plurôt qu'on ne les voit, tant ils font petis; Mais dans la foibléffe de leur corps, ils ont un aiguillonfi piquant, & venimeus, que leur piquure caufe une demangéaifon tellement impor- “tune , qu'en s’écorchant quelquefoisla peau à force de fe grar- ter, lableflure dégenere en unulcere d’angereus, f l’on n’y aporte du remede. À | » Il s'en trouve d'une autre efpece, qui font plusgros, & qui font un bruit, pareil à celuy que font les Moucherons, qui en France fe trouvent proche les étangs, & les licus maré- Cageus, On les nommé CHWaringoins. ils produifent le même D L 1 cict ae His TOIRE N. ATUR E LIL'E, crue effet que les Moufliques, étant armez d’un petit trait, qui pe les habits, & même les litsbranlans, dans léauelson repof en Mais ils ont cecy de particulier , qu'ils ne lancent j jamais leur petit éguilion, qu'ilsn ayent auparavant declaré la guerre, & fonné lacharge avec leur petite trompette, quidonne fouvent plus de peur, que leur piquure ne fait de mal. Pour s’exempter de ces deus fortes de petites Befes, on a d coùtume de placer la Maifon,.en un lieu un peu hautélevé, de luy donner air de tous coftez, & de coupper tous les arbres qui empefchentle vent d'Orient , qui fouffle présqueordinaire* ment ences Iles, & qui chaffe au loin ces malins & importuns: ennemis. Ceusaufli quiontdeslogisbien fermez, & des lits biens clos, n’enfontpointtant incommodez. à Mais, fil’oneneft travaillé, on n’a qu'à faire fumer du Ta bac en fa chambre, ou de faire un feu, qui rende bcancoup de fumée ; car par ces moiens, on met en fuite ces petis perturbas teurs du repos des hommes. Que s’ils ont piqué, & qu'en de= lire de faire paffer bien-tôt la demangéaifon , & attirer tour le venin, qu'ils ont glifié : il faut feulement moüiller dipnaits de: Le vinaigre, ou de jus de petit Citron. 20 À RE FTSLE. IE Des Guefpes, € des Scorpiorss. Es Guefpes, G les Scorpions, eu communs en la plüpart des Antilles. Ces vermines font de même figure, & auf: dns , que celles des mêmes efpéces que l’on voire beaucoup d’endroits de l'Europe. Les piquures des Guefpes: font foulagées par le jus de la feüille de la Ruë, & entierement: gucries, par une fomentation du fouverain remede contre toutes fortes de venins, qui eft difpenfé fous le nom celebre: D'orvietan. Etcelles des Scorpions , trouvent leur remedeen la befte même, qu'il faut écrafer deflus, & à fon defaur, il faut: recourir à l’huile qu’on appelle de Scorpion , qui doit eftre commune par tout, Où : fe trouve deces infedtes. PRO ARE ET De MR ACC ge] ET y AU ASE Ÿ æ AE ï FES MDESs A NMILEES, Séy ART TAC LE RE 4) “a Des Arbres de Mancenille. N la plüpart de ces Iles, croiffent certains Arbres nom- més Afancenilliers ; beaus à voir, qui portent des feüilles Libres à à celles des Pommiers fauvases, & un fruit que Von appellé Afarcenille, tout pareil à une ‘Pomme d'Apis, cat ileft pannaché derouge, beau à merveille, & d’une odeur fi agreable , que l’on feroit incontinent invité à en gouter, fi l'on n’étoit averty de fa qualité dangereufe. Cat bien qu'il foit dous à la bouche, ileft fifunefte, quefil’onen man- ÿgcoit, il envoyeroit dormir, non pour vint-quatre heures, comme une certaine femence du Perou, & une Herbe de lorient, de laquelle Linfcot parle amplement ; mais pour n'en téVeiller jamais. Tellement que c’eft bien pis, que ces Amandes d’un fruit de la Mexique, qui fentent le: mufc, mais quiaprés eftre mangées, laiffent un goût de pourriture. Et bien pis encore, que ces belles pommes de Sodome, qui étantouvertes, neprefentent que de la fuye, & de la pouf ficre. Car s'y vous avez le déplailir d'y eftre trompé, du moins ce n'cft pas au danger de voltre vie. Mais ces Pom- mes venimeufes, fe peuvent comparer à à la noix Indienne, qui croift en Java . Elle reffemble à une noix de Galle, & d’abord qu’on la mange, elle à un goût d’Avelaine;s mais puis aprés, elle donne des angoiffes mortelles, & c’eft un poifon tres- dangereus. Il fe trouve auffi dans l'Afrique, un Arbre nommé Cv/coma, qui ef chargé de Pommes mortelles. L'Arbre des Maldives nommé C4#b04, porteunfruir, qui neft pas moins trompeur, & moins pernicieus. Et le “pers roir de TripolyenSyrie, produit certains gros Abricots, qui font fort beaus à l'œil, & fort favoureus au goût; Mais les qualitez en font fouvent mortelles, ou du moins, elles gaufent de longues & ficheufes maladies, à ceus qui en | «eus % croift des CWancenilles, fi lebord de la mer & des rivie- , & fi le fruit tombe en l’eau, les poifions qui en man- | LI 2 gcat, M + LS SO - j/ LA TRS 170. 7 RCE PONS A ee Va 4 Vent DE Res 42 OR E ambre A Re 2 BOURSE ALES TN 5 ? Ÿ à: # LRO Léa, SE 2 y HAE OI ON TEE 46 204 SCA A EL PAPE SA EAP PARU: PME \ LÉ À » 268 Hisrorrs NE t 00 52 8 24 sent, ne manquent jamais d'en moutir; & encore qu'il demeure long temsdans l’eau. il n'y pourrit point; mais il fe couvre d'un falpêtre, qui luy donne une croûte folide, comme sl étoit petrefié. Dansles Iles, où cet Arbre croift en abondance, les Couleuvres y font venimeufes; Par ce que quelques uns croient » qu ‘elles fucent quelquéfois de fon fruit. Les Crabes mêmes, . font leur repaire fous ces Arbres, en contraëtent une qualité dangereufe, comm nous l'avons dit en fon lieu: & plufieurs ont été malaè des pour en avoirmangé. D'où vient, qu'au tems que ces fruits eftans fort meurs tombentäterre, on conféille à rous ceus qui font foigneus de leur fanté, des pes de er des Crabes. Ni les Couleuvres, niles Crabes ne vivent pas abfoltil ment de Pommes de Mancenilles. Mais quand'ellies font! leur repaire fous cet Arbre, ellesentirentlinfeétion, & plus encore quand elles fucent le venin de fon fruit. 11 fe peut faire neantmoins, que ce qui ef mortel à quelques animaus, ne le foit pas àtous: Et même que ces Infeétes, qui mangent fouvent de ce poifon, le changentenleur nourriture, par là coûtume & la continuation: Comme l’on dit de Mitridate, Ainf ils peuvent infecter ceus qui enmangent, n'en reces vant quant à eus, aucun dommage. Sous l'écorce dutronc, & Fr branches de‘ces Arbres, A contenuë une certaine eau gluante, & blanche comme du lait, extremément maligne & dangereufe. Comme il y a plus fieurs Mancenilliers fur les chemins fi fans y prendre garde; vous froiffez en paffant quelcune de ces: branches , ce lait, où plûütoft cevenin, en-fort & reiaillit fur vous: s tombe füe voftre chemife .. il y fait unevilaine tache, qui paroit conime une brûlure, Sic'eft fur lachairnuë, & qu'onnelave prons tément l'endroit quiaefté touché, il s'y forme aufli tôt des enleuvres & des ampoules. Mais ce quicft le plus à crains dre, c’eftpour les. yeux: Car fi par malheur, une gouttede “cette eau cauftique & venimeufe tombe deflus, il s'y fera une horrible inflammation , & vous en perdez la-veüe neuf jours durant ; au bout déquel$ vous receyrés db foulagement. : 404 FAN 9 A pe. 2 PU V4 Des k Let PU ROUEN APS PRESS ie : LAS RL. ire MA RET gr “ae RÉ VESS Chap. DES ÎLES AN TILLES. | 269 DEA Le. ou la pluye, apres avoir demeuré quelque tems für les feüilles des Aferceniliers , produifent le même effet, & fi elles tombent fur la peau, elles l’écorchent, comme feroit de l’eau forte. Cequine vaut guerés mieus, que les gouttes de pluye de deflous la ligne , qui font tellement contagieufes, à ce qu'aflurent ceus qui les ontfenties, que s’y elles tombent fur les mains, furle vifage, ou fur quelque autre endroitdu corps, qui foit à découvert, il s’y éleve auffitôt des veflies & des ampoules avec douleur, & même fi l’on ne change _promptement d'habits, on voit bien toft fon corps tout cou- vert de puftules, fans parler des vers qui s Fosenaent dans les habits. . L'ombre de cet Arbre nuit aus hommes, & fi l’on repofe deffous, tout le corps enfle d'une étrange faflon. Pline & Plutarque font mention, d’un-Arbre d’Arcadie , auf danges reus.que celuy-cy : Et ceus qui ont voyagé aus Indes Orien- tales, rapportent, qu’ils’ y trouve une Herbe nommée Saposy, quidonne la mort à ceux qui couchent deffus. Mais ce qui. augmente les mauvaife squalités du ÆAfemcenilhier, et, que même la viande cuire au feu de fon bois, contraëte quelque chofe de malin, quibrule la bouche & le sofier. Les Sauvages Antillois, connoiffans fort bien lanatute de ces Aancenilles, font entrer & le l'ait del'arbre, & la rofée: quientombe, & le fuc.du fruit en la compofition du venin,. dontils ontaccoutumé démpoifonner leursfiéches, Pour gucriren peu deremsl’enflure & les Puftules, quife forment au corps, apres avoir dormy par mégarde à l'ombre de ces Arbres, ouapres qu'on aétéarrofé de la pluye » Où de. larofée quitombe de deflus leurs branches, & même de ce lait, qui eft fous leurs écorces, ilfaut recourir promtement à: une efpeced'Efcargots, dont nous avons parlé cy defius, fous. lenomde Soldats, &ilen faut tirer une certainecauclaïre,. qui eft contenué dans leur coquille, & l’appliquer.fur la partie offenfée ; ce remede., rabat incontinent le venin de cette brue- lante liqueur, & met la perfonne hors de danger. L'huile, qui eft ciréc fans feu de ce même efcargot, a aufl le mème: effet, ques’ileft arrivé à quelcun, de manger du fruit de ces: Arbres venimeus , il faudra qu’il ufe des mêmes rencdes p') | 4 LE & que 270 HISTOIRE NATURELLE, Chap que nous prefcrirons cy aprés, pour Chafler le venin des Ser. pens, & tous les autres poifons. | | ART L LE TV: Des Pous de bois. | 4 RE abe = ii | L y a aufi une efpece de fourmis, oude rérilaubt qu ontune petite tache noire fur la telle, & le refte du corps toutblanc. Ils S'engendrent de bois pourry, & c’eft pour ce fujet, que nos François les nomment Pous debois. ls ontle: corps plus molaffe , que nos Fourimis ordinaires, & neant moins leur dent ofacerée, qu'ils rongentlebois, & s’inf- nuent dans les coffres, qui font placez prés deterre: & en moins de deusjours, par ce qu'ils fe fuiventà lapifte, filon n'eft foigneus de lestuer, il y en entre fi grande quantité, qu'ils” percent mangent & détruifent, le linge, les habits, les papiers, & tout ce quieft dedans: lis mangent même & rongent telle= ment Jes maitréfles fourches , qui foutiennent les cabanes communes, qu'ils les font enfin tomberà terre, fi l’on n’y ap- porte du remede. | On empefche ces beftes là de s’engendrer, fi on ne laifle. point de bois à terre en batiffant la maïfon. Car ils s’engen- drent de bois corrompu & pourry : fi onbrülele bout de tous les bois qu’on plante en terre: fi incontinent que l’on en re“ marque quelques uns, on jette de l’eau chaude dans les trous, qu'ils peuventavoir faits : fon fufpend les coffres en l’airavec des cordes, comme on eft obligé de faire entdivers endroits de l'Inde Orientale, afin qu’ils ne touchent point laterre, & fion. a foin de nettoyer fonvent les chambres, & de ne rien laifer: contreterre. Onaencore remarqué, que pour leur couppet* chemin , il ne faut que frotter Le lieu paroù ils pañlent, de’ l'huile de cette efpece de Paima-Chrifti, dont les Négres fes frottent latefte, pour fe garentir de la vermine. L'huile des Lamantin, à auflile même effet, & fi l'on en verfe fur leur ci tadelle, qui eft une fourmilliere compofée deleurbaue, las -quelleils attachent autour des fourches, qui foutiennent les cafcs, ils l'aban lonnentincontinent. di ARTI- NE Le A ar pr: LéedliX, : w » Lt Ant Ÿ £ $ “ A ; F& 2 f » DES ÎLES ANTILLES 2TI ANT FCLE V. Des Ravets, Œ Es Ravers fontencore dangereus. Il y enà de deus for- Bytes. Les plus gros font environ comme des Hannetons, & de même couleur : les autres font plus petis de la moitié, Les uns-& les autres rodent principalement pendant la nuir, _& fe gliflent dans les coffres , s'ils ne font bien ferméz, s’alif- fent tout ce qu'ils trouvent, & font allés de dégaft; mais Ron pastant, nifipromtement, que les Pos deboi; On les appelle Ravets, par ce qu'ils rongent comme les Ratstoutce qu'ils peuventattraper. C’eft fans doute la même efpéce, que Jean de Lery nomme CA4ravers, felon le langage des Brefi- liens. Cette vermine, en veut particulierement aus livres & à leur couverture. Les pous de bois n’en font pas moins, lorsqu'ils y peuvent mettre la dent. Maïsils ont cela de bon, qu'ils refpeétent les lettres, & qu'’ilsfe contentent de ronger la marge des livres, & d'y faire des cizelures profondes, Car, foit que l'ancre ne foit pas à leut goût, ou pour quelques an tre caufe, ils ne mangentl’impreflion, qu’en une extreme fa- mine , & à faute de routeautrechofe, Nous pourrions faire voir deslivres qui portent leurlivrée, & les marques de leurs dens. Mais ils font frians de linge, par defflus toute autre chofe : Et quand ils peuvent entrer enuncoffre, ils prepa- rent en une nuit plus d'ouvrage, que les plus habiles couturie- res, n'en pourroient r'entraire el\ un mois. .. Quantaus Ravers, encore qu'ils ne foient pas fi habilesen befongne , ils népargnent rien , finon les étoffes de foye & de cotton. Celuy notanment, qui n’eft pas misen œuvre, n’eft pas felonleurappetit. Et fil’ontientles coffres fufpendus en air, & qu’onen entoure les cordes, qui les foutiennent : auf tôt qu'ils font parvenus à ce cotron, qui embarafe leurs pe His pieds, ils tâchent de s’en démefler, & ils prennentinconti- Rentune autre route. Ceus quientdes maifons de brique, ou’ dé pierre, ne craignent point les Pows de bois : mais avec tous leurs foins, ils ont bien de la peine de s’exempter des courfes.. et : & dur No Mt: SR UN Ont ta 0 SL ARR ide, Mad 272 HiSTOiRE NATURELLE, Chap | & du dégaft des Ravets. On a neantmoins reconnuparex perience, qu'ils font ennemis des bonnes odeurs, & qu'ils new fe fourrent pas volontiers dans les coffres, qui font faits dem Cedre, & de ces excellens bois de fenteur, qui font com muns en toutcsles Iles, Au Caire, on met les picds des Ca» binets dans des vaiffeaus pleins d’eau, pourempefcher 1e“ fourmis d’ ÿ monter. Ce fecret qui eft bienaifé, produiroit. fans doute le mêmeeffer aus Antilles, pour fe munir contrée les Pous de bois & les Ravets, dont nous venonsde parler, & même contre les fourmis, sai y {ont auffi extremément inportuns. AR TI1CLÉE-0VE 14 | | h Des Chiques. } E qu'il y a-de plus à craindre entoutes:ces Iles, font de” (: certains petis cirons, qui s’engendrent dans la poudre,” dans les cendres du foyer , & en d’autres immondices. On les! nomme ordinairement Chiques. Ils fe fourrent le plus fou=\ ventauspieds, & fous les ongles des orteils, maiss’yonles! laiffe pañler outre, & qu'onne les tire de bonne heure, ‘ils! gaignent toutes les autres parties du corps. Au commence ment, ilsnecaufent qu’ ‘une petite demangeaifon: Mais lors qu'ils ont percé la peau , ils excitent une ‘inflammation à à la partie, quieftinfeétée, & de petis qu’ils yétoient entrez, ils" déviennent en peu de tems de la groffeur d’un pois, & pros duifent une multitude de Lentes ,» Capables d’en engendrer” d’autres. Et en fuite, il fe fait fouvent des ulceresaus lieus,* d'oùonliesà tirez. | Les Sauvages, à ceque racontent ceus quiont éonverfé parmy eus, ontune certaine gomme, de laquelle ayant frotté! leurs pieds, particulierement fous les ongles , ils ne peuvent” cftre incommodez de cette Vermine. Mais, on confeille à* ceus qui n’ont pas la connoiffancé de cefecret, de fe faire regarder aux pieds, par ceus qui s’entendentà découvrir, &c! à tirer ces dangereufes petites bcft:s, incontinent que l'on® fent la moindre demangeaifon ; 5 à quoy les Indiens font fort” droits. … C'eft aufli unbon remede, d’arrofer fouvent la chambre d’eau falée; De n’aller point nuds picds; de porter des bas de Chamois: & de fe tenir nettement. Car, iln’yad'ordi- haire que ceus qui fe negligent, & qui fe tiennent falément, qui cn foyent fenfblement attaquez. Ces facheus Cirons, font les mêmes que les Brefiliens appellent Tos, & quelque autres Indiens Na. Ceus qui ont des Ulceres, qui leur font cauféz par les Chi- ques, lors qu'ils n'ont pas efté tirez ni affésàtems, ni añés adroitément, font nommez UWalingres au ftile du païs. Ces ulceres viennent aufli fouventefois, aprés quelque petite écorchure, qui femble d’abord n’eftre que fort peu de chofe. Mais aprés on cft toutétonné, que cela devient grand com- me le creus de la main; & alors vous avez beau y donner or- dre: Car il faut que l’ulcere prenne fon cours. Hyena même qui pour eftre plus petis, ne laiffent pas d'’eftre tres-di- ficiles à guerir. Ces ulceres font de deus fortes. L'une eft ronde , & l’autre inégale. L’ulcere rond eft beaucoup plus difficile à guérir que l’autre, par ce qu’ilades bords de chair motte qui viennent toutà l’entour, & qui empirent le mal. Car tant que cette chair morte & baveufe y eft, l'ulcere ne peut guérir. C’eftpourquoy, lors qu'on penfelaplaye, il faût toujours couper jufqu’au vif cette chair morte, ce qui fait de cruelles douleurs. | + Entre les remedes pour la guerifon de ces ulceres, on &fe de vert de gris, de l’eau forte, de l’effence de vitriol, & d'Alumbrulé, qui mangent la chair morte de la playe. On fe fert auffi pour le même effet, du jusdu peit Citron qui eft £xtraordinairément aigre. Et lorsque la playe eft fale, il la tend belle & nette. Il eft vray, qu'a caufe de la grande dou- leur que l’on fent, lors quel’on en frote la playe, ona plutôt LT | M im - FCCOUTS # ô 274 HISTOIRE NATURELLE, Chap. recouts à d’autres remedes : mais aufli l’on ne guetit pas fi tôt, On fait encore un onguent avec du Mielcommun, uf, peu de fort vinaigre, & de poudre de vert de gris, quieft fou- verain pour gucrir en peu de tems les ulceres. Et pour les pres venir, on confeille de ne point negliger lamoindreblefüre, ou égratinure, quifurvient en quelque partie du eorps que ce foit, FAT een aus pieds, ouaus- jambes , mais d’y aps pliquer quelque emplâtre, qui attire le feu, qui pourroiteftre en la playe, & au defaut de tout autre remede, d’ÿ mettre di moins des feuilles de Tabac. Et de fe fervir dejus de citron, & de vinaigre, pour faire pafler ladeémangeaifon , qui demeuré apres que les Mouftiques, ou les Maringoins ont Jane, plie tôt que d'y emploierles ongles. RPETE CGIME VIr Remedes coztre la morfure des Serpens venimeus, G* con © tre tous les autres poifons tant de la terie, que Î de la mer des CAntilles. Ous avons dit au Ghapite fixiéme de cette Hiftoire: qu il y avoit des Serpens, & des Couleuvres aus [les de Ja Martinique & de Sainte Aloufe, qui ont un dangereus venin, Mais nous avons à deffein refervé pour ce lieu, les re: medes qu'on peut heureufement emploier, pour en rabatre la force. Nous poferons donc premierement, qu'ils doivent eltre mis en ufage, & par dedans & par dehors. Par dedans _pourfoulager & fortifierlecœur, & difiper la qualité venie meufe quile pourroit gagner, on fe fert avec heureusfuccés de Thériaque, de Mitridat, de Confeétion d’Alkermes, de Baumec’Egypte, & du Perou, de Rhuë, de Scordeunt, dé Scorconnaire, de Viperine, d’Angelique . de Contrahierva, Mais fur tout, il faut avaleravec un peu d’eau de bourraché; ou de buglofe,. ou de quelque autre Hiqueur,.le poids d’uñ efcu, def poudre du foye & du cœur des Viperes. Engenerd il faut ufer de toutes les chofesqui:fortifient lecœur, & qu réjoüiffent & révcillent les Efprits. Par dehors, on peut ap pliquer tous-les remedes, qui ont la vertu & la faculté d’at: | tires h: DES! ÎLES. A NTALLES, 27$ rer & diffiper toute forte de venin: Comme font la Ven- toufe appliquée fur la playe féarifiée, les Cornets, & tous les medicamens chauds & attraëifs, tels que font le Galbanum, J'Ammoniac, la fomentation de vin cuit, avec la racine de Serpentaria, ou la feuille d’'Armoife , les Aux & les Oignons, Ja fiente de Pigeon, le fang de la Tortuëédeterre, féché & mis #2 poudre, & femblables. Jl n'eft riende plusafluré, que de lier au deffus de la mor- Le le plus prontement que : faire {e peut, la partie offencée : & de l’inciferaufli tôr, & même d'en emporter la piece; où “du moins apres l'avoir {carifiée, d’y appliquer le plutoft que Jon peut, le derriere plumé d’une Poule, ou d’un Pigeon pour enattirer levenin, & cette Poule, ou ce Pigcon eftant mort, ilenfaut reprendre unautre, tantquiln'yaitplusde Vepin à attirer. Jiferoit auffi à defirer, que tous les aus des Antilles, euñent l'ufagede cer excellent Antidote, qui a été éprouvé en tantdelieus, qui eft connu fous le nom fameus d'Orvie- tan, à quifc debiteà Paris au bout du Pont-neuf, au coin de La ruë d Auphine, à lenfeigne du Soleil, Car cetadmira- ble fecret, a entre plufieurs autres rares qualitez, la vertu de chañer le venin de toutes fortes de Serpens, & de rabat- tre la force des plus puiflans poifons. Voici la faflon dont céus quiontefté mordus de Serpens venimeus, s’en doivent fervir. D :llen faut. prendre la groffeur d’une féve, diffous dans du vin, Et aprés il faut faire des fcarificarions fur la moriure, _& tirer le fang parle moyen delaventoufe. Puis y appliquer un peu d Orviétan, & prendre garde, que le patient demeus re éveillé, au moins l’efpace de douzcheuies, Ce puiflant re-. mede, fé peur conferver en fa bonté plufieurs années, pour- veu qu'on ne le tienne pas enun lieu chand, où il fe puiffe “deffécher. Et s’il devient fec, il le faut remettre en faconfi- Mtance avec du miel rofat. c. en trouve aufli qui cf en poudre. Quantau regime éd vivre, qu'il faut tenir durant!’ ufage de ceremede; Ii Fautévirertous les alimens, qui, échaufent & paient le fang , Ou qui engendrent l'humeur mélancolique. | M m 2 Et 276 HisT otRE N ATIURELLE, Chap. 24 Ecil faut abftenir enticrement de la purgation & de faignée, de peur d'attirer le venin de dehors au dedans : fi ce n'eft que le mal eûr gagné les parties nobles: Auquel cas il faudroit purger afñés copieufément, & ufer debains, & de chofes capables d'ouvrir les pores, & de provoquer la fueur. 1! . Que fi on eftoit reduit à telleextremité, qu’on ne püûtres couvrer aucun des Antidotes que nous venons de décrite : En voicy encore un, qui eff fort commun & tresfacile à pradtis quer. Ilfaut que celuy qui a efté mordu d’un animal venimeus; mange promtément une écorce de Cirrontoutfrais; car elle a la vertu de munirle cœur contre le venin. S'il eft poffiblé i faut licr la partie offenfée le plus.ferré que l’on peur, au deffus delamorfure. I la faut en fuittefcanfier, & y appliquer fous vent de la falive d’un homme, qui foit à [eün, & fi on peut avoir labefte, qui a fait le mal, il luy faut couper latefte , & l& broyer, jufques à ce qu’elle foit reduite en forme d’onguenr, qu'il faut appliquer tout chaud fur la playe. C’eft le remedé ordinaire, dont fe fervent les Habitans naturels du Brefils pour fe garantir de la violence du venin de ce. dangereus & monftracus Serpent, qu'ils appellent en leur langue Boitini ninga, & que les Ef pagnols nomment Cafeavel, Les derniers memoires qui nous ont efté envoiez de la Martinique, portent que quelques Honorables Familles qui font venuës dépuis peu du Brefil avec leursferviteurs Nécres,, pour demeurer en cette Ile, ont donné aus Habitanslacons noiffance de plufieurs herbes & racines, qui croiffent aus An tilles auffi bien qu’au Brefil, & qui ont une vertu fouverainé pour éteindre la force du venin de toute forte de Serpens, & des fléches envenimées. ._ On fe peut fervir des mêmes remedes que Rens avons aë tits cy deffüs, pour fe premunir contrée ie venin de la Becu- né, & detous les autres poiffons dangereus, quife trouvent en la mer. Ils peuvent auf eftre em ployez avec heureusfues cés, pourempefcher les pernicieus effets du Suc de Manioc,. delarbe de Mancenille, & de la piqure des Guéfpes ,. des Scorpions, & de tauslesautres. 1e venimeus, pe DES ILES ANTILLES _ 279 MOULIN CE EUNIIE F / De lEcume de mer. * Eus qui pefchent ou qui fe baignent en la mer, font quel- quéfois accuëillis d'une certaine écume qui flotte au gré du vent, comme une petite veflie de couleur de pourpre, de diférentefigure, & agreable à voir : Maïs à quelque partie du corps qu'elle s'attache , elle y a en un inftant,unetres- fenlible douleur, quieftbrulanre, & piquante au poflible, Le remede le plus prompt qu’on peut apporter pour appaifer cette cuifante douleur, eff, d’oindre la partie offencécavecde Fhuile de noix d’Acaïou, mélée avec un peu de bonne eau de vie: car une chaleur en fait pañferune autre. MUR EF CEE EX. Des Rats qui font communs en ces Iles. Épuis qu'il frequente aus Antilles, unfi grand nombre de Navires, & qu'ilarriveaffez fouvent, que plufieurs s’'échouënt à la rade de ceslles, où ils pourrifient de vicil- leflc: es Rats, quiétoient autréfois inconnus aus Caraïbes, ont gagné laterre, & ils s’y font tellement multipliez, qu'en quelques endroits, ils font grand dommage aus Patates, aus: Pois, ausFéves, & particulierément au MaïsougrosBié,, qu'on nommé Blé de Turquie. Et n’étoit que les Couleuvres: - les dertruifent, & les vont chercher bien avant dans les trous ide la térre & des rochers où ils fefourrent, & mème dans les couverts-des maifons, qui font compofez de feuilles de Pal- . mes, ou de Canne de fucre, onauroit fans doute dela peine à conferver des vivres. Ileft vray, qu'à prefentilyades Chats en ces Iles, qui ne les épargnent pas. Onamêmedrefie des chiens à leur faire la guerre, & c’eft un plafir de voir comme Hs font fubtils à les éventer, & adroits à leur donner lachafle,. _ & à les tuer. Mm 3 Cette: 8. Hist.:N'ATURS DES:ÎLES ANTIL. Ghap.z4M Cetteincommodiré n’eft pas particuliere aus Antilles. Et c'eft bien pis auPerou, car Garcilaffo en fon Commentaires Royal nous témoigne, que ces vilains animaus y étans en. nombre préfqueinfiny, y font par fois de grands dégats, rava-w geant les lieus par où ils pañlent, defolant les champs , CR rongeant les fruits jnfques aus bourgeons, & à la racine des” AfDres. ti Les Habitans des Iles, fe fervent encore d’une invention qu'ilsnomment Balan, pour empefcher queles Rats ne man- gent leur caffaue, & leurs autres provifions. Ce Balan, eft, une éfpece declaye ronde, ou quarrée compofée de plufeurs Eârons, fur léquels il ont coutume d’arranger la caffaue, aprés” qu'ellcaefté féchée au Soleil. Elle eft attachée au haur de la cafe avec une liene ; où une corde, quitient Le Balan fufpendu enlair. Et afin que les Katsne fe puiflenr pas couler le long delacorde, & deicendre fur le Balan, ils font pañier la corde par une caleballe bien polie » qui demeure fut penduë au Mi lieu, deforte que les Kars érans parvenus jufques à cet en-« droit-là, netrouvans point de prie pour arrefter leurs pieds, & appiehendans ie mouvement de la Calebafle, ils n’ont pas laflurance de pañler outre. Saas ce petit fecret, les Haba auroient de la peine à conferver leurs vivres. Voila comme le fage Auteurdela Nature, a voulu parun admirable contrepoids, qui balance toutes les perfeétions de l'univers, que les Pais qui ont quelques avantages par deffus les autres, foient à l’oppolite fujects à des incommodités, qui ne fe rencontrent point ailleurs: Et comme fa Divine Provi=! dence, qui pourvoit puiflanment aus befoins de fes creatures, a: mis l’Antidote aupres du venin, le remede joignant le mal, & a même ouvert devant Ééoue les inépuifable trefors de la. grace, & delanature, pour le premunir contre les injures de L air, lesoutrages des faifous , la violence des poifons, & de tout ce que la terre à produit de plus dangcereus, dépuis qu cle. le à efté envenimée par le premier peché. Fin du premier Livre de l'Hifloire des Antilles. MISTOIRE NATURELLE Mo R A L. ILES ANTILLES | LAMERIQUE LIVRE SECOND. DOS a EAN T L'HISTOIRE MORALE. NATURELLE ET MORALE D'SE"S ILES ANTILLES AMERIQUE * LIVRE SECOND. Comprenant lHiftoire Morale. À CHAPITRE PREMIER | De l'Etabliffement des Habitans Etrançers dans les les » deSaint Chriflofle, de Nieves , de la Gardeloupe, de la Martinique, 7 autres iles Antilles. Rues avoir achevé, tout ce qui pouvoiteftrede 2 l’Hiftoire Naturelle des Antilles, il faut venirà NO jr Hiftoire, que nous appellons Morale, & trai- VA) A ter dorefenavant en toute la fuite de ce Livre, DÉS) VE des Habitans de ces Lles, dont nous avons déja fair quelque mention, felon qu’il ft venu à propos, en la defcription que nous avons donnée au Livre precedent, de Shacunc de ces Iles en particulier. Nous parlerons premic- * Nn sement à | - Lee Ji ds 4 Fe HU » Ag vépe À L \ 282 ._ Histoire MoRaALE, À rement des Etrangers, oudes Européens ; autant qu'il fera necefaire à nôrre deflèin. Et puisnous defcendrons, àuné ample & particuliere confideration des Indiens, Habitans nas ‘turels du Païs, dont lefujet peuconnu, demande une dedui ion de plus longue haleine, & une recherche plus exacte 8" plus curieu‘et - | À | Les Efpagnols, fe fondans fur la Donation du Pape Ales xandre fiziéme, & fur quelques autres raifons apparéntesy pretendent que le droit de navigeren l’Amerique, & d'y étas blir des Colonies, foir au Continent foitaus iles, leur appar= tient privativement à tous autres. Mais outre que la vanité de cette arrogante prefomption, fe découvre affez d’elle mës me, & que ce feroit interrompre le fil de nôtre Hifoire, que de nous arréter icyàunetelle controverfe, le Doéte & cu= rieus Bergeron, a fi exaétément traité cette queftion, &fi clairement montré l'abfurdité decettechimere, en fon Zraire té des Navigations, que ce feroit péne perduë-des ÿ érendre: davantage, & d’y vouloir apporter de nouveaus éclaircifles mens, Aufli tous les Rois & Princes Chrétiens, ont tou jours contefté au Roy d'Efpagne, ce pretendu droit qu'il s’at= tribuë. Et ils ne Font pas feulement combattu par paroles & par écrits: maisencore par les effets, ayant envoyé detems: en tems des flottes en l’Amerique, pout y faire des Peuplades, & fe mettre en pofléffion de plufieurs terres de ce nouveat Monde; où particulierement fe font fignalez les François, les: Anglois, & les Hollandois. - 10 Mais les plus renommées detonutes les Celontes que ces: trois Nations pofiedent en Amerique, & celles qui font les: plus frequentées des Marchands, comme étant les plusavans rageufes pour le commerce, ce font celles des Antilles. Les: François à& les Anglois , comme on le peut remarquer au pres mier Livre de cette Hifloire, y font les plus avancez ;, & onf _enpartage les plus grandes, les plusriches, & les plus peuplées detoutesces Iles. = He Heftauffi conftant, queces Nations en leur établiffement,, n'ont pas fuivy les cruelles & Barbares Maximes des Efpag= no's, & n’ont pas impitoyablement exterminé comme eus, les Peuples originaires du pais. Car fi elles les ont trouvez Fan | 0 " 4 Ce at \e! ad # Si PNA Te PAL EIT I TETNR L à 'oie CL Crédls Fr Y AN yEnEs È x ! Chap.t : Des: FES ANTILLES. 26e _ dans les terres qu’elles poffedent, ellesles y ont:confervez pour la plüpart, & ont contraété alliance avec eus. Ileft bien -vray, queles Caraibes ont dépuis un long tems de grands dif- fcrens avec les Anglois: mais l'origine de leurs querelles Wicnt de quelques fujets de mécontentement , qu'ils ont re ceus de quelques particuliers de cette Nation, qui en corps à defapprouvé leur procedé : & en touté rencontres, a té- moigné qu’elle defiroit, qu'ils fuflent traittez avec la même humanité, moderation, & douceur Chrétienne, d’ont les amples & floriffantes Colonies de la Virgine & de la Neuve Angleterre, quirelevent de fa Jurifdi@ion, ont ufé jufques à preient, à l'endroit des Habitans naturels de l’Amerique Sep- tentrionale, où clles font établies: avec léquels elles entrez tiennent unefifainte, & fi parfaite correfpondence, qu’elle eur a facilité lesmoyens, de lesinftruire avecun heureus fuc. Æés, es myfteres dela Religion Chrétienne, & de fonder un “grand nombre de belles Eglifes, au milieu de ces pauvres Peuples. : . Surtout, ileft tres-averé, que lors que les Francois fe font £tablis à la Martinique, à la Gardeloupe, & à'la Grenade, ils l'ont fait par l’agréement des Caciques, & des principaus d’entre les Caraïbes, qui ont défavové ceus des leurs, qui ont voulu aller au contraire; & qui ont employé leurs forces & ieurs bons avis pour reprimer leurs deffeins, & faircentrer les nôtres en la paifble poñieffion, dece qu'ils leur avoyent auparavant accordé, Ce quijuftifie , que nous ne fommes pas coupables des mêmes violences que les Efpagnols, &° que nôtre proccdé en l'établiffément de nos Colonics aus Mes, n’a pasefté femblable au leur. Ques’yon nous objette que nous les avons chaflez de Saint Chriftofle, & de la Gar- déloupe, & qu'encore à prefent, nous avons guerre avec ceus de la Martinique. Nous répondons, que lors que nous avons peuplé ces [les nous n’avions autre but,qued’edification & l’inftruétion de ces pauvres Barbares, & que fi contre nôtre Premicre intention, nous avons été oblisez d'ufer de feve- rité à l'endroit de quelques uns, & de les traitter comme en- nemis, ils ont attiré ce malheur fur eus, en violæat les pre- Micrs, les facrées loix de l’aliance qu'ils avoyentcontrattée L'ÉES | 1114 7 DIN A RS avec VIE UN) Le Ib). EPSy MM Miel à. UNS GA MP 1: DE fr 2 284 HISTOIRE MIORALES : Chap. avecnous, & en prenant des. confeils fanguinaires , ‘quieu fent étouffé nos Colonies dans leur berceau, s'ils n'euffeng, cfté découverts. L: Les Colonies Françoifes & Angloifes ont cu aie come mencement en même tems, c’eft à dire en l’an mil fix:cens vint-cinq. Monfieur DE SNAM guc, Gentil-homme Fran=. çois , del’Ancienne Maïfon de Vauderop, & Capitaine ens tretenu par fa Majefté en la mer du Ponant, & Monfieux W asrnazsr, Gentilk-homme Anglois (lequel nos Frane çoisnommoyent Monfieur Oüarnard, pour faciliter la pros nontiation du double W, que nôtre langueignore) ont cn un même jour pris poffeffion de l’Ile de Saint Chriftofle , au nom des Rois de France, & de la Grand’ Bretagne leurs Maîs tres, pour avoirun lieu de retraiteaflurée,. & une bonne ras de pour les Navires de l’une & de l’autre Nation, qui fre- quentoient en l’Amerique. Cette Ile, ayant tous les rares avantages que nous. avons amplement déduits-au Chapitre qui en contient la defcription, étoir fort vilitée des Efpag- nols,. qui y prenoient fouvent leurs rafraicmffemens, en al: lant & en retournant de leurs longs voyages. is y laifioient aufli quelquéfois leurs malades, qui éroienttraittez par les Indiens Caraïbes, avec léquels ils avoient fait la paix a cette condition. | Ces Meflieursdonc eonfiderant, ques’ilspoffedoient cette terre , ils incommoderoient l'Efpagnol leur ennemy come mun en l’Amerique, & qu'ils auroïent une bonne & feure demeure, pour jetter les fondemens des Colonies , qu'ils fe propofoient de dreffer en ces iles, ils s’enrendirent maitress & y laifflerent des hommes poutlagarder, Mais avant que d’en partir, craignant que les Indiens ne fomentaffent quels que fecrette intelligence avec les Efpagnols, ou qu'en leurs abfence, ils n ect ht la refolution, que certains Sorciets, qui font en. haute eftime parmy ce Peuple. leur avoient fait prendre dépuis peu , de mettre à mort tous les Etrangers, qui étoienten leurterre;. ils fe défirent en. une nuit de tous les plus faétieus de cette Nation; & peu aprés ils contraignirent tous les autres qui s’étoient Cantonnez & mis en. defenie, à fe retirer ailleurs, & à leur laifer la place libre. Aprés | DES ÎLES ANTILLES. 285 ; Aprés quoy, Monfieur Defnambuc s’en retourna en Fran- ce, & Monfieur Oüarnard en Angleterre , où leur conquefte, | V& tout leur proccdé furent agréez des Rois; & la permiffion | leur ayant été donnée d’y faire pañfer des homme: » ils. y re- tournerent en bonne compagnie, en qualité de Gouver- _neurs, & de Lieutenans pour les Roisde France, & de la Grand'Bretagne, leurs Maitres. Mais avant que Monlieur Defnambuc vint cultiver & pourfüuivre fa conquefte, il creut que pour avoir un puiffant _appuy en France, qui prit Intereft en la confervation de cette lle, fousla Si crancre du Roy, & pour aflurer & avancer ainf fes deffeins , il feroit bien, de dreffer une Compagnie de perfonnes d'autorité , quieuffent la direétion & la Seigneurie de cetrelle, & des autres qu'il pourroit conquerir & foù- _ mettre à l’obciffance du Roy : àacondition, que cette Com- pagnie eutfoin, & prit à cœur d'y faire paffer des hommes pour conferver la terre, & la cultiver : d'y envoyer des Ec- clefaftiques, & de pourvoir à leur entretenement: d'y faire . bâtirdes Forts pour la feureté des Habitans, & de les munir de Canons, de poudre, de boulets, de moufquets, de mefche & deballes : en un mot d'y entretenir un bon arfenai, pour. avoir toujours en main, déquoy faire tefte à l’ennemy. Cette Compagnie ou Socicté, fut établie au moysd’Oc- tobre de l'an mil fix cens vint- x, tant pour l'Ile de Saint Chriftofle, que pourles adjacentes, & fut approuvée par le: Roy: & dépuis ellé fut Da ee & favorifée de nouvelles conceflions, & de tres-beaus Privileses obrenus de faMajefté,, le huitiéme de Mars mil fix cens quarante deus pour toutes: les iles de l’Amerique , fituées dépuisle dixiéme , jufques au. trentiéme degré au deça del Équateur. | Monfieur Defnambuc, ayant ainfi mis ordre à fes affaires en: France, retourna à Saint Chriftofle avectrois cens hommes, que les Seigneurs de, la Compagnie nouvellement erigée: avoientlevez, pour jetter les fondemens de cette Colonie : il amena auffi plufieurs braves Volontaires, qui tenoient à. gloirede fuivre un fi celebre Avanturier, & de prendre part dans fes honorables fatigues, fous l’efperance, de recueillir: Phllen fon tems, le fruit de fes conqueftes, 1ls atriverent tous Nn 3 à-Saint: % fe fs/ à Saint Chriftoñle a au commencement du Printemis de l mr $ mil fix cens vint-fét: & bien qu'ils euffent beaucoup fouf- fert durant leur voyage, & qu'ils fuffent malades pour la plû= : part ou affoiblis, ils ne fe laifferent point abbarre à ces rudes” épreuves : maisfe fouvenans, que les belles entreprifes font toujours accompagnées de grandes difficultez , & que les rofes nefe cucillent que parmy les epines , ils commencerent" dés-lorsà mettre la main à l’œuvre, & ayans appris dans peu. de jours de ceus qu'ils avoient trouvé dansl’Hé, tout l’ordre" qu'il faut tenir pour défricher les bois, dreffer les habita- tions, cultiver laterre, planterles vivres & le Tabac, & pour” faire tous les dévoirs, qui font requis dans les nouveaus éta= blifflemens, ils feconderent les sencreus defieins de leur Ca- pitaine, qui les animoit puiffanment par fes paroles, & par fon bon exemple. | Les partages de l'Ile entre les deus Nations, avoient été projettez avant ce Voyage : mais ils furent conclus & arrétez, folennellement , le treiziéme du moisd e May en la mêmean- née, Car afin qu'’unchacun puttravailler avec aflurance fur fon propre fonds, & que les nôtres n’euffent rien à démefler avec les Anglois: Monfieur Oüarnard étant aufli retourné d'Angleterre , quelque tems avant Monfieur Defnambuc, Où il s’étoit aufli appuyé d'une Compagnie, qui prenoit la protection de fes entreprifes : ils diviferent entre eus toute la terre de l'Ile, & y poferent les limites, telles qu’elles fe voient encore aujourduy, à Condition toutefois, que la chaffe, & la pefche feroient par tout libres aus Habitans des deus Nations, & que les Salines , les bois de prix, qui font propres, Ylatcinture, ou à la menuyferie, lesrades, & les mines de- meurcroient aufli communes. lis convinrent encore de cer. tains articlés, qui furent agréez & arrérez de part & d’autres pour entretenir une bonne cofrefpondange, prevenir toutes" jaloufies, & éviter tous les fujers de difpures & de conrcfta= tions, qui peuvent aifément naiftre , entre des Peuples de dif= ferentes humeurs. Ils firent auf enfemble une ligue de fenfive, pour s'entre-fecourir aubefoin, & fe prefter mains forte, pour repoufñer l’ensemy commun , & quiconque voudroit troubler la paix & Le PE , dont ils cfperoient de” joüir PapeT DES LES ANTIILER 28? joüir par enfemble, en cette aimable terre, qui leur éroit échcuë en partage. Aprés ces chofes; les deus Gouverneurs tale cEnE à Venvy. à l’affermiflement & à l’ornement de leur Colonie, Mais il’ faut avoüer, que les Anglois eurent de trégrands avantages par deflus les François, pour faciliter & conduire à à chef leurs defieins. Car outre que cette Nation-là, qui eft nee au fein de la Mer, fupporte plus facilement que nous, les fatigues des voyages de long cours, & qu'elle s'entend mieux à faire de nouvelles Peuplades : La Compagnie qui fut eta blieà Londres, pour ladirection de celle de Saint Chriftofie, pourveut {i genereufement à ce qu’elle fut affiftée des fa naif- fance, d'hommes, & de vivres, qui étoient neceffaires pour leur fubfftence, jufques à ce que la terre leur en eut produit, & elle eut tant defoins, quedetems entemselle fut rafrai- chic de nouveau fecours, & de toutes les chofes dont elle pouvoit avoir befoin dans ces commencemens, qu’elle pro+ fperoit & s'avançoit à veué d'œil, pendant que a nôtre, qui étoit dépourveuë de toutes ces affiftances , ne faifoit que lan- guir, & même fe fut facilement ecouléc, fi l’affe&ion qu’elle avoit pour fon chef, & lahaute cftime qu'elle avoit conceué de fa valeur, ne l'euflent entretenuëé à fa devotion, & liée tres-étroitement à fon lervice. Pendant donc que nôtre Colonie fouffroit tontes ces fois blefles, & qu'elle ne fubfiftoit que par fon courage ; celledes Anglois profitant de fes forces, en pouflaune nouvelle dans J’Île de Niéves, qui n'eft feparée de Saint Chrifiofle, que par un petit bras de mer, comme nous l'avons dit en fon lieu. Mais fi ce petit nombreauquel nos gens étoient feduits, ne eur permetroit pas de faire de parcils progrez, Monfieur | Defnambuc, s’étudioit en recompenfe de les affermir, & de Les policer par plulieurs beaus Reglemens, dont nous couche- tons icy quelques uns des principaus articles, afin que la: memoire en foit precieufement confervée , pour Pinftru- étion dela pofterité. En premier lieu, par ce que par la paix & la concorde, les plus petites choles s’accroiflent, & que la divifion fair écou- ler,. & cvanouïr les plus grandes : Fe vouloit que tous les: Do Habi-- 288 . HisTOIRE MORALE Po Habitans de l’ Ile, quireconnoifloient fon autorité, confe vaffententre-eus une tres-parfaiteunion, laquelle il leur te commandoit en toutes occurrences, comme lacolomne de. leur petit Eftar, & le facré Canal d’où routes fortesde bene diétions du Ciel & de la Terre, decouleroient abondanment. fur eus. Et d'autant qu'ilcft impoflible , que dans laconvet+ fation mutuelle ilne furvienne beaucoup de chofes, qui Lee roient capables d’alterer fouvent cette aimable correfpon=) dance, s’il n’y étoit promptément pourveu: il defiroit que femblables differens fuflent au plütoft terminez avec dou< ceur, & même avant le coucher du Soleil, s’ilétoit pe fible. . 11 leur ordonnoit d’eftre Loyaus, ronds, & finceres dans toutes leurs affaires; d’eftre courtois & fecourables envers" leurs voifins, & de tenir auf religieufement la parole qu'ils avoient donnée, que s’yellceut efté redigée par ecrit, & re ceué par devant des Notaires. Afin que letravailtrop aflidu de leurs habitats | néteull fit oublier le métierde la guerre , ou que leurcourage ne fe ramollit dans le profond repos, & qu’au befoin ilsfceuflent. manier les armes & s’en fervir avec d’exterité , il vouloit qu'ils en fiffent fouvent les exercices, qu'ils s’y faflonnafñent felonles regles dela difcipline militaire, & bien qu'ils fiffent, tous profeflion de cultiver la terre, qu'ils euflent la grace & l'air genereus des Soldats, & qu'ilsen portaffent entoustems, les marques & leslivrées, ne fortant)} jamais de leur quartiers fans armes à feu, ou du moins fans avoit l'épée. Que s'il les formoit en cette forte , afin qu'aus occafions: ils fiflent paroitre leur valeur, & leur courage à l'endroit des ennemis; 11 les obligeoit d'ailleurs, d'eftredous &‘humains lesuns enyers lesautres; Et il ne pouvoitfouffrir, que les plus forte Voulaffent les plus foibles. C'eft pourquoy il fit cette belle ordonnance, laquelle eft encore en vigueur dans toutes ces Iles, avoir , que les maitres ne pourroient engas ger leurs ferviteurs que pour trois ans, durant léquéls ils _ feroyent tenus de les traitteravec toute moderation & dou- ceur, & de n’exiger d'eux qu’un fervice raifonnable, &e pro= portioné. à leurs forces, Me HA ni. per I DES: ÎLES ANTILLES. ‘289 Ses foins s’étendoient notamment, à l'endroit des nou- yeaus venus, & afinque dés leur arrivée, ilseuffent dequoy fe mettre à couvert des injures de l'air, & que leur travail ne fut point retardé à faute de logemens, ildefiroit, qu’auffitoft | que Ja place qu'ils avoient deftinée pour faire leur bâtiment étoit découverte, tout le Voilinage les aidaft à l'élever. Cet- te louable Inftitution fut fi bien receuë , & fi foigneufement | pratiquée , qu’il n’y avoit aucun des Habitans qui n’en recon- nutl'equite, & quine tint à bonheur dans ces occafions, d’ Y contribuer volontairément fes pénes & fes foins. Lesuns alloient couper les bois qui étoient neceflaires, les autres couroyent aus rofeaus, &'aus feuilles de palmes, pour faire les paliffades & le couvert, les meilleurs Architeëtes plan- toyent les fourches, élevoyent les chevrons, & attachoient Jlacouverture, & ils étoient tous dans un fi aimable emprefle- ment, que le petit edifice fe trouvoit logeable dans peu de jours, fans que le proprietaire eut befoin de femettreen au- Cun fraiz, qu'a pourvoir tant feulement, à ce que laboiffon ordinaire du pais, ne manquaft point durant cc travail, àces charitables ouvriers. Enfin il avoit en horreur les parefleus, qui vivent de la fueur & du travail d’ autruy, comme les Bourdons du miel des Abeilles; mais pour ramener en nos jours, une petite image du fiecle d’or, qui eft tant prifé des Anciens, il incitoit tous les Habitans à eftre mn se communicatifs des biens que Dieu leur avoit departy, & à à témoigner leur charité & leur Hofpitalité envers tous ceus qui les venoient vifiter, afin qu'a l’âvenir, on ne fut pas obligé d’établir parmy eus des Hofteleries, dei Cabarers & de “femblables lieus de dé- bauches, qui ferviroient de retraite aus oifeus & aus diflo- lus, & qui attireroient la defolation & l'entiere ruine de la Colonie. . Cependant que Monfieur Defnambuc, régloit fi fagement fa pœsite République, & qu’il l'entretenoit de l’efperance d’un prompt fecours; les Seigneurs de la Compagnie, imitans le naturçl de plufieurs de nôtre Nation, quivoudroient moif- fonner incontinentapresles fémailles, étoyent de leur part, dans unc continuelle attente de quelques Navires chargez | 1 00 ac RNTTEURS 2:90: HISTOIRE MORALE, . (Chap detout ce qu'il yade plustiche, & de plus precieus dans l merique, pour remplacer avec ufure, ce qu'ilsavoïent d boutié, pour faire le premier embarquement; & jufquesà ce que ceretour fut arrivé, ils ne penfoient à rien moins, qu'à fe mettre en de nouveaus fraiz. Monfieur le Gouverneur, ayantremarque que toutes les Lettres qu’il avoir envoyées à ces Meflieurs fur ce fujet, n’avoyent point obtenu de repons ces favorables, fe refolut avant que la Colonie fut reduite une plus grande extremité, deles aller trouver en perfonnes & d'entreprendre un fecond voyage,pour folliciter cefécourss duquel dépendoit la feureté de leurs premieres avances, & la. fubfiftence des François.en cette Ile. Cebondefein, que le zele qu’il avoit pour la gloire de nôtre Nation luy avoit infpiré, reuffit felon fon cœur; Car étant artivé à Paris, 4b fceut fi bien reprefenter l’importance & lanccefliré de ce (ee. couts à Meflieurs de la Compagnie, qu'ils luÿ accorderent trois cens hommes, & des vaifilcaus munis dé toutésles pros vifions neceMaires, pour les rendre à Saint Chriftofle. 44 Ccrenfort tant attendu de nôtre Colonie, luy artiva heus reufement au commencement du mois d’Aouft , de l’a mil fix éent vinr-neuf, & elle le regeut avec tant dé joye & de fatisfattion, qu'elle s’imaginoit d’eftre parvenue au coms ble de fes fouhaits, & que dez lors elle pouvoit furmonter aifément, tout ce qui Voudroit traverfer l’execution de fes: projets. Mais comme les profperitez: de cette vie font de goutte durée, à péne s’étoit elle égayée dèus mois en la pofs feffion de ce bonheur, qu’une puifante Flotte d Efpagné vint fondre fur elle, Dom Federic de Tolede qui la coms mandoit, avoit ordre exprés avant que de defcendre à la Has vanne, à Cartagene, & aus autres plus celcbres ports du féim de l’Ametique, de s'arréter à Säint Chtiftofle, & d'en chaflèr les François & les Anglois, qui s'y étoient établis dépuis peu d'années, 25 4 | Cette armée navale, qui étoit compofée de vint-quatté grands Navires de charge, & de quinze Fregates, fe faifit pour premier ae d’hoftilité de quelques Navires Angloïs qui étoyent à l'ancre prés de l'Île de Nieves, puis elle vint moliiller à la rade de Saint Chriftofle , à la portée nn : WA “4 É CA ‘ar Maps DES ILES ANTTÉLES. 291 de la Baffe-Terre, où Monfeut de Rofféy commandoit. Les forts des deus Colonies, n'étoyent pas éncore én état Pour foùtenir. un ficge, ils étoyent dépourveus de vivres, toutesles munitions de poudre & de bales » Qui fË trouvoyent dans l'Ile, ne pouvoient pas faire des grands éfféts, & quand les deus Nations éuflent uny toutes leurs forces, éllés n’euf- fent pas pu refiftér à une fi redoutable armée: miais leur cou- tagc fuppleoit à rous ces défauts; car afin que l’énnemy n'eut pas fujet de fe glorifier d’eftte venu à bour de fes deffcins, fans quelque oppofition, Monfcur Defnambuc , détacha du quartier de la Cabes-terre où il commencoit de fe fortifier, tous fes meilleurs foldats, pour aller au fécouts de celuy qui Étoitmenacé, & les Anglois, y firent pafler quatre de leurs meilleures Compagnies. | ; Auflitôtque ces troupes furent arrivées au rendez-vous, elles s’employerent d'un commun accord avec les Habitans du quartier, à fe retrancher le long de la cote, pour repou- fer vigoureufement l’ennemy & luy contefter la defcente, & fans doute, elles luy euffent bien donné de la péne, fi elle euf- fent efté bien commandées, & que cette premiere ardeur n'eut efté ralentie, par la frayeur qui faifit tellement le cœur de Monfieur de Roffey, qu'ill’eurt laiffé mettre picdäterré, & venir aus approches fans aucunerefiftance , fiun jeune Gen- ül-ñomme Neveü de Monfeur Defambuc, frere aifné de Monfeür du Parquet, quieft a prefént Seigneur & Gouver- ñeut de la Martinique, n’eut obtenu là liberté de pañer les tetranchemens, & de donner fur la premiere Compagnie des ennemis qui parut fur le fable. 11 fat foutenu de quelques Vo- loñtaires, qui voulurentavoir part à fa gloire, mais, illes devança tous de beaucoup encourage & en fefolution; car il attaqua avec tant de vigueur celuy quiconduifoit la trou- pe, quille tua & plufieurs autres des plus vaillans de fa Com- pagnie, quicurent l’affurance de vouloir éprouver fa valeur ; mais étant abandonné de cets qui l’avoient fuivy en cefte teflée, il fut tellement invefty dé la multitude, qui venoit fondre furluy, qu’enfinil fut abbatu & emporte dans l’un des Mavires des enñemys, où aprés tous les deVoirs qu'on fit pour leguerir de fesbleflures, il mourut au grand resret de l’un & 8 ‘ PE Tres | de “à ba: PA EN RUE D Li * ls À : { FR LAC * LE CE ÿ + « 292 HisTOiIRE MORALE: | de l’autte party, quiavoit été témoin de fa generofité, & qui, ne pouvoit fe lafler de luy donner tous les pis beaus éloges, que fa vertu avoit merités. % Durant ce choc, qui devoit eftre FE pci un peuplus Vie gourcufement des nôtres , le General de la Flotte; fit détacher enunmêmetems, de tous les Naviresde grandes Chaloupes! remplies de Soldats bien armez, quidefcendirenten fort bon ordre, & couvrirent la rade. C'eft ce qui redoublal'épous vantement de Monfieur de Roffey , qui de peur d’eftre op= primé de cette multitude, fut d'avis de cederà la force, & de faire une honorable retraite , avant que les nôtres diet ins veftis & envelopés de tous coftez. Cette refolutionprife tu+ multuairement , fût fort mal receué de tous ceus qui étoyent jalous de la gloire de noftre Nation, & qui euffent defiré que l’ennemy, eut acheté un peu plus cherémentle degaft de leug Colonie : mais les fuffrages que l’épouvantement fuggcroit en cette fatale conjonéure ayans prevalu, il fut arrêté qu'à Vinftant même, on prendroit le chemin dé la Cabes-terre, & que là onaviferoit plus amplement, à tout ce qui feroit jugé necefaire, pour le falut commun. L’Efpagnol, voyant que nos gens abandonnoyent: Lei Fort, & leur retranchemens, LE avoir fait beaucoüp de rC=. fiftance, crut que cette retraite n’étoit qu’une feinte, qui étoit menagée à deflein , de l’attirer dans quelque embufcade qu'on luy avoit dreflée dans lesbois. Ce foubcon, qui étoit appuyé fur quelques apparences, le retint de pourfuivre f& viétoire, & l'arréra au quartier dela Bafle-terre, jufques à ce qu'il eut apris au vray l’état de toute l'Ile, & qu'il eut pour veu, à tout ce qu’il trouveroit eftre le plusexpedient, pouf executer promptement & fidellement, tous les points de (4 commiffion. | Pendant que l’ennemy prenoit ainfi fes tarte pour con. duire à chef fes deffcins, fans fe mettreendanger : Monfieur Defnambuc furpris d'un fi fubit changement, & d’unfuccés: fi inefperé, tâchoit de r’aflurer les fiens, _& de les encourager: à porter conftamment cette. difsrace: (ee remontrant qu'el= je nétoit pas irremediable : que l'ennemy ne s ‘opiniatreroit “ pas à demeurer dans l'Ile, jufques ä.ce qu'il en eut entiere=. ment Chap. 1 ment chaflé les Habitans : qu’il avoit des affaires de plus 2 | $ : DÉS VDES AÆANTrELErS 203 grand poids, qui l'appelloyent ailleurs: qu’il ne s’ engage- roit pas facilement dans les forets, qui luy faudroit traverfer de neceflité, pour venir à fon Quartier: qu'ils pouvoyent s’y mettre en bonne defenfe, pour foutenir fes efforts, &luy faire marquer de fon fang cette invafion, s’il entreprenoit de pafleroutre, & qu'encecas, il y avoit même en chemin des endroits fi forts de nature , que peu d'hommes le pourroyent arrêter, & le contraindre de retourner fur fes brifées. Ces avis étoient tres-judicieus : mais la terreur avoit tellement préoccupé les efprits, & la confternation étoit fi generale, qu'ils ne furent point pefez felon leur merite, L’af- fäire étant donc mife en deliberation, la conclufion für, qu’on abandonneroit l'Ile, & que la Colonie fe transporteroit en quelque autre , qui ne donneroit point tant d’ombrages à l'Efpagnol, & qui feroit plus écartée de la route Sins de fa Flotte. Monfieur Defnambuc, qui prevoyoit que quelque couleur qu'on pût donner à cette refolution, elle feroit no- tée de quelque lâcheté, qui flétriroit l'opinion qu'on avoit juftement conceuë de la valeur des François, & étouferoit en un inftant ces grandes efperances, qu’on avoit euës de: leur Colonie, ne pütpoint eftre perfuadé d’ydonner fonap- probation. Neantmoins, encore qu'il fut d’un fentiment tout contraire, pour ne point abandonner dans cette trifte rencontre, ceus qu'il avoitamenezdefiloin, &avec quiil avoit pañlé tant demers, & efluyé tantde perils; ils’accom- moda à leurhumeur, & s’embarquaaveceus dans quelques: navires qui fe trouverent à la rade ; & ainfi pouréviter un- plus grand defordre , en fe furmontant foy même, il témoigna: qu'iloublioit g gencreufement , le peu d’eftime qu'ils faifoyent: de fes rémontrances. Les Quartiers des Anglois, étoientauflidans'un grand des= ordre, ils avoyent apris que l’ennemy étoit maitre de toute Ja Bañe-terre : . qu'il ruinoit la Fortrefe des François, apres en. avoirenlevé le Cänon: qu'il avoit déja brulé toutes les cafes, & fait le dégaft des habitations du quartier. Ils croioyent à châquemoment, qu’il venoir fondre fur eus avec toutes fes: forces, & dans cette apprehenfion les uns effaioyent de fe. tel Oo. 3: fau=- Dr RS, SE Re “ F7, 2 Ps, JF TT ANES » O2" : ; o BU POUR 40 ï 29% HISTOIRE MORALE,:. fauver par mer, ou de fe retirer furles montagnes, pendant, que les autres, qui étoyent un peu plus courageus, furent d' ad vis d'envoyer des Députez à Dom Federic, pour le. prier de vouloir entendre à quelque accommodément : mais pout. toute reponfe, ils receurent un commandement exprés detors tir promtement de l'Ile, ou qu'autrément ils feroyent traittezh avec toute la rigueur E dont les armes permettent d’ufer à l'endroit de ceus, quis’emparent contretout droit, du bien | qui ne leurapartient pas. . y Pour faciliter ce depart que Dom Federic leur ordonnoit, on leur rendit felon fesordresles Navires, que fa Flotte avaith pris devant l’Ile de Nieves, &il voulut qu'ils s’y embarquaf= fent fans aucun delay, & qu'en fa prefence ils fifient voiles vers l’Angletere. Et parce que ces vaifleaus ne pouvoient. pas contenir une fi grande multitude, il permit à :tous ceusi quin'y purent pas avoir place,de demeurer dans l'Ile, jufques à° ce qu'il fe prefentâtune occafon favorable, pour fuyvre leurs compagnons. Aprés cette expedition, Dom Federic fit le= ver l'ancre à fes Navires pour continuer leur Voyage: mais incontinent que les Anglois qui étoyent reftez eurent perdu de veué cette flotte, ils commencerent à fe rallier, & à former une conftante refolution, de relever courageufement Les rui- nes deleur Colonie. Pendant que ces chofes fe pafloyent à Saint Chiiftofle les” François qui en étoyent fortis au commencement de cette déroute, avoyent tant enduré furmer, à eaufe du manque= ment de vivres & des vens contraires, qu’ils avoyent été con= trains derélâcher aux Iles de Saint Martin & de Montferrat, aprés avoir vifité en paffant celle d’Antigoa. Ils euffent bien fouhaitté de fe pouvoir établir en quelcune de ces terres: mais elles ne leur fembloyent que des afreus déferts en com paraifon de celle qu'ils avoyent quittée, Sa douce idée res pañoit inccffämment devant leurs veus, ils là regrettoient & châque moment, & l’aimable fouvenir de cet agreable fejours où la Providence Divine les r’appelloit, par des voyes qui! _ leur étoient inconnuës, leurfit naiftre le defirdes informer. -de l’état auquel l'Efpagnol l’avoit l'aiffé , puis-qu'ils em étoyent fi voifins. Pour contenter cette joiable curiofité, ils AMEN £ ; Chap. 2. Kctour ; qué la Flotte ennemie s’étoit entierementretitée, & queles Anglois qui y étoient reflez , travailloyent courageu« fement à rebatir leurs cafes, à plante: des vivres & à reparer Jeurs defolations. Getteagreabic nouvelle, refufcita en un inftant toutes les eéfperances de nos François, & releva glorieufementle cou: rage des plus abbatus : ‘de forte. qu ‘il ne fallut pas employer beaucoup d'artifice , pourles animer au retour, & pourleur perfuader de fe rendre en toute diligence en cette delicieufe terre, qui pofledoit déja leurs cœurs & toutes leurs plus ten- dies séions. 2 Aufli-toft qu'ils ; furent arrivez, chacun reprit fon pofie & retourna fur fa place, en bonne intention de s ‘yaffermir, & d’en relever promtement le débris: Mais la famine qui les taloñnoit, eut fans doute interrompu le cours de tous ces beaus deffeins, & ils fuffent fuccombez fous le faiz des pe- fans travaus qu'il leur falloit entreprendre en un même tems, pour rebâtir leurs maifons, & planter des vivres, fi dans ces extremitez fi preflantes, Dieu ne leur eut fufcité le fecours de quelques Navires des Provinces Unies, qui les vinrent vi- fiter à labonneheure, & ayant reconnu leur trifte état, les afifterent genereufement de vivres, d'habits, & de toutes les. chofes qui leut étoient necefMaires dans ce grand abandonné- ment où ils fe trouvoient réduits : & même pour leur faire Ja faveurtouteentiere , ils fé contenterent de leur fimple pa- xole, pour affurance de toutes ces avances. Nosgens, s’eétans tirez doucement à l’ayde de ce fecours, hors du mauvais pas où ilsfe voioyent accrochez, dez l’en= tree de leur rétablifiement, travaillerent en fuite avec tant d'ardeur en leurs habitations, que Dieu beniffant l’œuvre de “Jeursmains, latérre leur produifit des vivres, & du Tabac en fi grande abondance, qu'ils contenterent avec honneur leurs €haritables Creanciers, & en peu de tems ils fe trouverent beaucoup micus accommodez, qu'ils n’éroient avant leur de- #oute. Maisil leur falloit encore des honimes pour appuyer Jeurs entreprifes , & entretenir le conmmerce, qui commen- “oitàsCrablir parmyeus. Pour remedier à ce ‘bcfoin, Mon- (2 fieus HES-DDES ANTISEES, 29$. ls y firent pañer l’un de leurs Navires, qui leur rapporta à fon 296 HiISTOIRE MORALE, Chap.t fieur Defnambuc, qui voyoit fa conftance couronnée d'un fi heureus fuccés, ne trouva point de plus feur, nide plus dous. expedient, que de permettre aus principaus Habitans de Ian Colonice d’alleren France, pourenlever, & les y amener à" leurs propres fraiz. Ce fage confeil ayant efté fuivy, l’Ile fe peupla en peu d années de plufieurs braves hommes, qui Ia mirent enreputation, É | | La Colonie Angloife, réparaaufli en peu de tems, toute les bréches que le ravage de l’Efpagnol luy avoit faites. Et" Ja Compagnie de Londres qui s’étoit chargée defa dire&ion,, ne fe laffant point de luy envoyer des hommes & des raffrais chiflemens, les deus quartiers qu'elle occupoit dans l’Ile de* Saint Chriftofle, fe trouverent fi étroits pour contenir une grande multitude , qu'outre l'Ile de Nieves qu'elle avoit peu- plée avant la déroute, elle eut affés de force pour poufer en moins de 4 ans des nouvelle Peuplades dans Celles de la Bar boude, de Montferrat, d'Antigoa, & de la Barbade, quis’y font merveilleufement: accrués, & fe font renduës fameufes par le trafic des riches Marchandifes qu’elles fourniffent, & par le nombre de leurs habitans, comme il fe peut voir, par les. defcriptions particulieres que nousavons données de ces Iles, au commencement du premier Livre de cette Hiftoire. Pource quieft des Colonies Hollandoifesaus Antilles, elles” ne content leur établifiement qu 'aprez celles des François éc: des Anglois, Etcen'’eft pas l'Etat quia fourny aus frais, mais des Compagnies patticulieres de Marchands, qui ont delire, pour faciliter le commerce qu'ils ont en toutes ies Iles, que les François & les Anglois occupent, d’avoir des places de retrait= te afurée pour raffraichir leur Navires. La plusancienne dé ces Colonies, qui relevent de la Souveraineté de Meffieurs’ les Etats etui des Provinces Unies, eft celle de Saint Eu- ftache. Elle fut établie environ le mémetems, que Monfeut . Oüarnard forma cellede Montferrat, c’eftà direen l'an 1632 Elle eft confiderable, pour eftreenune place tres-forte de na= ture; pour le nombre & la qualité de fes Habitans : pour l'as bondance du bon Tabac qu’elie a produit jufques à prefent : 8e pour plufeurs autres rares avantages, dont nous avons déja parlé, au Chapitre cinquiéme du Livre precedent. Mon= |, #08 DES ÎJLES AN THUU EE: 297 F2 Monfeut Defnambuc, n’avoit pas moins de Paffion nide generofité que les autres Nations pour étendre fa Colonic: mais n'ayant pas cfté fecouru comme il eût efté requis dans ces commencemens, & fes deffeins ayans cfté fouventéfois traverfez de plufeurs facheufes rencontres, ileut ce déplai- fr, devoir pluficurs belles Iles occupées par d’autres, avant Qu'il fut en état d’y prendre part, & de BRySr fa conquefte hors des limites de Saint Chriftofle. ll avoit dépuis un long tems jetté les yeus fur l'Ile de la Gardeloupe, comme étant June des plus belles & des plus grandes de routes les Antilles, fais au même inftant qu'il fe difpofoit pour y envoyer des hommes, il fut prevenu par Monfieur del’ Olive, l’us des princi- paus habitans de fa Colonie, qui pendant un voyage qu’il avoit fait en France pour fes affaires particulieres , s’affocia avec Monfieur du Pleflis, & quelques Marchands de Dieppe pour y établir une Colonie, ‘fous la commiflion des Scisneurs de la Compagnie des iles de l’'Amerique . CesdeusGentils-hommes, étans Due enr de Ja Gardeloupe avec égale autorité, y arriverent le vint- huitiéme de juin, mil fix cens trente cinq, avecune Compag- nie de cinq cens hommes, qui furent accüeillis dez leur arri- véc de la famine, & dediverfes maladies, quien enleverent pluf ieurs. On tient, quele premier de ces maus leur furvint, pour s'eftre placez d'abord en des endroits, où la terre étoit da plus ingrate.& la plus mal- propreau labourage, qui füt en toutel'lle; & pouravoir entrepris trop legerciment la guerre contre les Caraibes Originaires du lieu, qui leur eufienr pü fournir en toute abondance la plüpart des vivres, qui etoient neceffaires pour leur fubfiftence dans ces commencemens, jufques à ce que la terre leur en eût produit. rsTRaRee dies fuivirent les mauvaifes nourritures, que la faim les con- traignoit de prendre, à faute de ES oliquses - à quoy on peut auffi ajoufter, quelaterre n’etant pas encore défrichée, Pair yétoit facilement corrompu. … Monfeur duPleflis, voyant les malheurs qui dejouren jour fondoient fur cette nouvelle Colonie, & ayant tout fujet d'en apprehender encore de plus grartds à Pavenir, en Conceut un tel déplailr, qu'il mourut nue le fettiéme mois ! Pp apres * en T'Y Qt AN TL RTS PE SU 16 4 A NÉE DE ds à Z9$ HISTOIRE MORALE, (Chap. aprés fon arrivée. 11 fut regretté de tous les François, & même des Indiens , qui avoyent toûjours témoigne bea coup de déference à fes fentimens, & d'amour & de refpe& pour fa perfonne. Il étoit doüé d’une grande prudence, &e, d’une humeur fi affable & fi obligeante, qu'il attiroit les” cœurs de tous ceus qui traitoient avec luy. À Aprés le decés de Monfieur du Pleffis, Monfieur de lOlis ve s'empara de tout le Gouvernement, & comme il étoit au+ tant remuant, que fon Collegue avoit efté dous & moderés il defera tant'aus confeils violens de quelquesbroüillons, qui l’obfedoient continuellement ;” qu'il fit bientôt aprésentres prendre, cette guerre funefte contre les Caraïbes, qui penfa ruiner cette Colonic naiffante. Il eft vray, qu'il les preffæ d’abord fi vivement, qu’il les obligea de luy quitter l'entiere pofleffion dela Gardeloupe. Mais d'autant, que pour Venir bout de ce defcin qu’il avoit formé déz fon arrivée, il fe foüils Ja de pluficurs cruautez, que les Barbares n’euflent pas vous lu exercer à l'endroit de leurs plus grands ennemis, il flérrit tellement fa gloire & fa reputation, qu'il ny avoit que des: gens de fang, & des desefpérez, qui aprouvaflent fæ conduite. | 774 TRES | Les Caraïbes , que Monfieur de l’Olive avoit chaflez de cette le, ferctirerent en celle de la Dominique. Ceus dé la même Narion qui la poffedent les receurent fort volons tiers, & pour leur témoigner, qu'ils étoient fenfiblement touchez de leurdifgrace, ils leur prefenrerent de fe joindré avec eus, pour venger par les armes l’injure qui leuravoit cfté faite, certe offre étroit trop avantageufe, pour eftre refufées Leurs forces érant donc ainfi unies, ils firent plufieurs defcens tes à la Gardeloupe , & s'opiniâtrerent tellement à: harcez lerles nôtres , par les frequentes incurfions qu ils faifoient fue eus, qu'ils étoient contrains d'abandonner la culture du Ta bac, & même des vivres qui étoient necefaires pourleurfubs fiftence,. afin d’eftre toujours fous les armes, pourrépoufs fer les efforts, prevenir les rufes,. & éventer les deffeins de ces ennemis, qu'ils avoient attirés fur eus par leur ins prudence. g. DR. - Fr Cette hap. 1 DES ÎLES ANTILLES. 25ÿ . Cette cruelle guerre, qui dura environ quatre anné es, re- duifit cette Colonie en un fideplorabie étar, qu'elle éroit dé- Criéepartout, & à caufe qu’elle avoit fi fouvent les Caraïbes fur lebras, on la croyoit à la veille de fa ruine, mais comme clleétoit reduite à ces extremitez, Monfeur del’Olive per- dit la veuë, & Meflieurs de la Compagnie y envoycrent Monfieur Auber pour Gouverneur, qui remediaà tous ces desordres , appaifatous les troubles, & y apporta cette bonne paix, quiy attira puis aprés le commerce, & l'abondance de toutes chofes, comme nous le dirons au Chapitre troiziéme de cette Hiltoire Morale, ds de Incontinent que Monfieur Defnambuc eut fceu, que la Gardeloupe étoit habitée, il refolut, de ne pas differer davan- tage à fe placer dans quelcune des meilleures Iles, qui étoient encore à fonchoix, & de peur d’eftre encore une fois fup- planté y 1€ Voyant aflifté d’afez bon nombre de vaillans hon:- mes, & pourveu de toutes les munitions de guerre, & de bouche, quifont neceffaires encesentreprifes, ilaila luy mê. me prendre poñeflion de l'Ile dela Martinique, en laquelle il mit pour fon Læutenant Monficur du Pont, & pour pre- mer Capitaine, Monfieur de la Vallée, Puis mourant à Saint -Chriftofle , ildonna par fon teftament tous les biens, & tous les droits, qu'il avoit à la Martinique, laquelle il avoir fait peupler à fes fraiz, à Monfieur du Parquet fon Neveu, qui en cf encore à prefent Seigneur & Gouverneur, commenous J'avons déja dit. ok _ Ce Gentil-homme étoit vaillant, digne de commander, accoftable, familieràtous, & doûüé d’une srande adrefle à fe faire aimer & obcir tout enfemble. Les Anglois mêmes le refpettoient & le craignoient également. On recire de luy, que ces Anglois, ayans outrcpaité tant foit peu les limi- tes, Qui par un commun accord, avoyent efte pofées entre-les deus Nations, il alla avecbien peu de fes gens au quartier des Anglois, & parla au Gouverneur, qui l’atrendoit avec une groffe Compagnie de Soldats: Mais il compoïta avec tant de courage & de refolution, mit en avant de fibonnes rai- dons, & fit de fi puiantes menaces de venir à bout par la fur- ge, de ce qu'il ne pourroit obtenir par la douceur, que le Lo. Pp 2 Gou- 00 _Gouverneur HE a dre qu'il acradn € c Fr ‘rencontre, prouve combien il étoit jalous de conferver droits de fa Nation. Dépuis ces deus Gouverneurs far f toujours bons ae | if CHAPITRE DEUXIEME. De l Efiabl iffement des François dans les Iles de sel Bartelemy , de Saint Martm, & de 5 4 4 Sainte Croix. ñ memoire eft en benediction dans les Iles, Monfieur du Halde, qui étoit fon Lieutenant au Gouvernes ‘ment, fut fait Gouverneur en chefpar Meflieurs de la Com- pagnie des Antilles. Mais comme peu de tems apres il fe füt retiré en France, Monfeur le Cardinal de Richelieu, premiér a Miniftre d'Etat, duquel la prevoyance s 'étendoit aus-ieus les plus éloignez, jugea que c’éroit une chofedigne de fes foinss de prendre à cœur la confervation , & l’accroiffement de cet te Colonie en l’Amerique, & que de là, lagloire du nom François, & les armes viétorieufes de nôtre invincible Mo: narque, pourroient s'étendre par tout ce nouveau Monde, comme elles éclatoient magnifiquement en celuy-cy. Il de- fira pour cet effet que les Iles fuffent pourveuës d'un Gous verneur, qui pût feconder & executer fes genereus deffeins. Et aprés avoir cherché partout, un Seigneur capable de cet employ, & doùéde la conduite, dela fageñe , dela genero- firé, & del experience neceflaire à une fi Srande charge : En unmot, quicuttousles avantages de l’une & de l’autre No blefle, pour reprefenter dignement la Majefté du nom Fran- COIS en un pais fi éloigne , fon Eminence n’en trouva point qui eût toutes ces rares qualitez , en un plus haut degré, que MONSIEUR LE CHEVALIER DE EONVIE- LIERS POINCY, BAILLY ET GRAND CROIX DE LORDRE DE S. JEAN DE JERUSALEM:. | Com- | \ Prés le decés de Monfieur DéRRee PRE fa a FX 3 4 TV 2] Le LEON EE Nero VÉPIT PR * | ! È NEA AL Mpz ‘ DES ÎLES ANTILLES. 301 Commandeur d'Oyfemont, & de Coulours & chefd'Efca- “dre des Vaiffeaus de fa Majefté en Bretagne , Gentil-homme “de fort ancienne Maifon, qui porte le nomdePoiNcy, & dont J’aifné fait fa demeure en l’une de festerres, proche la Ville de Meaus. Monlieur le Cardinal, prefenta cet excellent Gentil- homme _ au Roy Louis treiziéme de glorieufe memoire, qui loüant & approuvant ce bon choix, l’inveftit de la charge de Gou- wverneur, & Lieutenant Gencral pour fa Majefté aus lles de F Amerique. Dequoy, lettres luy furent expediées au mois de Septembre, de l’an mil fix cens trente huit. Cette qualité, n’avoit pas efté donné à ceus qui l’avoient precedé. L'an milfix cens trentencuf, Monfieur le Bailly de Poin- Cy, étant party avec tout fon train de la rade de Dieppe vers 1e my-fanvier , arriva un mois aprés aus Antilles, & fut reçeu premicrement à la Martinique, par les Habitans en armes. Puis il alla à la Gardeloupe, & à Saint Chriftofle, recevant par tout le ferment de fidelite. Sur tout fa reception fut tres belle en l'Ile de Saint Chriftofle. Il fut falué à fon arrivée du Canon de nôtre Fort, & de celuy de tous les Navires, Tous les Habitans François étant fous les armes, le receurent ‘en qualité de General, avec un applaudiffement univerfel, comme deja auparavant ils avoient fait des feus dejoye, & rendu graces à Dieu , fur les premieres nouvelles qu’ils avoicnteuës, defanominationà cette charge, &il fut con- _ duit à l'Eglife accompagné de fes Gentils-hommes, & de fes gardes pour y chanter le Te Deum. Sitôt qu'il fut entré en poffefion, l'Ile prit une nouvelle face, & l’on vit en peu de tems un notable changement de bien en mieus. Ainfil ne répondit pas feulement aus gran- dés attentes que fa Majefté, & Monfieur le Cardinal avoient conceués de fon Gouvernement: mais il les furpaña de beau coup. D'abord il fit bâtir des. Eglifes en divers quartiers de Jile. Ilprit foin queles Preftres fuffent bien logez & entre: tenuz, afin qu'ils puflent vacquer à leurs charges fans divcr= tilement, Sa Juftice parut au belordre qu’il établit, pour la rendre bonne, briéve, &gratuire, parun Confeil compofé des plus fages & des plus entendus d’entre les Ofüciers de : | lp 3 ds l'Ile. % ui: ST L'LTSR IN GP de DM RS Ce Dre AT ENTER bé ice RON RG & 4 ALLO. A ta 2 2 Gt Volut Qui « : JARFONARONS Es. 0 NO TNT ET I RER LUS AS CR MU CR TER + à + LE è : à: 17/10 EPS “y ds l'He. deals corrigea tous les Ah » quiie. glie. fent facilement parmy des perfonnes recuëillies de divers en- ! LEE & cr . de LR Do humeurs. 54 oO 3 | un des affaires les plus PR 1e fit admirer caioMe D & de ceus qu’il gouvernoit ; & de fes Voifins. La Grandeur” de fon efprit , qui luy fit furmonter toutes les dificultez qu'il trouva en l’accompliffiement de fes deffeins, le renditredouta-i ble aus broüillons. Son Affabilité, fon facile accés, & lebon accüeil qu’il faifoit aus étrangers, artira le commerce & l’a bondance dans fon Ile. Sa Bonté & fa Liberalite, luyaquite à jufte titreles cœurs & les afe&ions des François. Enfin, {4 Generofité éprouvée en plufieurs rencontres, tant en France, aus emplois tres- honorables qu'il a eus dans lesarmées de fa Majefté, qu’en l'Amerique , dépuis qu’il ycommande, enla® confervation , où amplification & enlaconquefie detanr de places con Gderables , donna dés l'ors de laterreur à l’'Efpag= nol, qui jufques à prefent n’a ofé traverfer fes belles & glo- rieufesentreprifes, Monfieur le General, ayant établi dans l'Ile de S. Chti- fofle, toutiebon ordre qui étoit neceflaire pour entretenir. les Habitans en unebonne concorde, pour y attirer toutes fortes de biens & y faire fleurirletrafic: & l’ayantrenduë las plus belle & la plus illuftre de toutes les Antilles, comme nous l’avones reprefenté au Chapitre 4 du premier Livre de cette Hiftoire, étendit puis apres la Colonic Françoife” dans les Iles de Saint Bartelemy, de Saint Martin, & de Saintes Croix, déquelles nous avons fait la defcription en fon lieu, mais il nous refte encore quelques circonflances bien con- fiderables , touchant la conquefte de l'Ile de Sainte Croix, lé- quciles nous ajoûterons en cet endroit. Cette Ile; aeu pluficurs maitres en bien peu de tems, & durant plufieurs annees, les Anglois & les Hollandois Gui contefté enfemble à quielleferoit. Enfin, ils lavoient par“ tagécentrecus: Maisen l'an mil fix cens quaranteneuf, les Anglois ayans remaïqué, que les Hollandois étoient en petit nombre, les obligerent à leurlaifier toute la place. Toutefois” ils DES ÎLES ANTIPLE .__ $of ils ne jouyrent pas long tems de leur ufurparion. Car bien tôt aprés, les Efpagnols de l'Ile de Porto Rico y firent une defcente, brulerent lesmaifons, tuerent ceus qu’ils trouve- rent fous les armes, à& firent transporter les autres, avec leurs femmes, & leurbagace, cn l’Ile de la Barboude. Apres qu'ils eurent ainfi depeuplé cette Île, comme ils étoient fur le point de remonter dans leurs vaiffeaus, pour s'éentretourner en leurterre, vVoicy arriver un navire des Iles de Saint Euftache & de Saint Martin, qui étoit chargé d’'hom- mes, léquels ayant apris la déroute des Anglois, dans la reance que l’Efpagnol s’étoit déja retiré , venoient relever les droits, & les pretentions que la Nation Hollandoife avoit fur cette Île: mais la pattie érantinegale , veu que les Efpag- nols étoient dix contre un, ils furent contrains de compofer.. Le deffein des Efpasnols, qui leuravoient promis bon quar- tier, & qui Les ténoient prifonniers, étoit de les mener à Por- to-Rico à leur Gouverneur, qui felon l'humeur Efpagnole,. ne leur eut peut eftre pas fait un trop bon party. * Lors donc qu'ils meditoient leur retour avec ces prifon- niers, qui étoient venus d’eux mêmes fe jetter entre leurs mains : deus navires François chargez de Soldats, de vivres, & de toutes fortes de munitions de gucrre aborderent cn lile, étant envoyez de la part de Monfeur de Poincy leur General, pour chañer Efpagnolde cette: terre, & la conque- fer pour le Roy. Ce fecours, vint bien à propos pourla de- livrance des Hollandois : Car les Efpagnols ayant veu nos gens , qui defcendoient alégrement & en bon ordre, & qui d’abord, formerent fur terre un gros de vaillans hommes bien armez , & en difpolition de combattre, ils lâcherent inmcontinent leurs prifonniers, & aprés quelque pourparler,. es François leur firent commandement de vuider à l'inftant del’ile, & de r’entrer dansleurs vaifleaus, à faute dequoy, ils Mes chargeroient comme ennemis, tels qu'ils étoient, & ne “eut donneroient aucun quartier. À quoy ils _mieus obeir, que ee lavaleur desnôtres, & | fort des armes, quoyils fuffent en plus grand nombre, Monfieurle General, reconnoiffant felon fon exquife pru- dence, l'importance de cette Ile,. qui peut faciliter d'autres con- ÉLTONES": ONE ile Phri "HE A 4 #: * d'Or. PP TE SE TN EE LOTO TPE 4 x, DRE 0. 7k. L # < . s ? zh 1-4 D «5 OL E h; &- 304 _ HISTONIRE MoOn'a LE,0 2 conqueftes, encorc plus gloricufes, jugea qu’il falloit accom- 3 pagner de fi heureus commencemens , d’un grand foin pour conferver, & la munir d’un nombre confiderable de vaillans. hommes, & fur tout d’un chefgenereus & experimenté; pouté y commander en fon nom. Pour cet effet ,iy envoya Mon: fieur Auger Major de l’Ile de Saint Chriftofle, qui avoit exet=" cé cette charge avec grande approbation par plufieurs années,» & le revétit de la qualité de Gouverneur de cettelle Ilmou=* rut enl’exercice decette charge, au grand regret detous less habitans, aprés avoir mis l'Ile en bon ordre; redrefé fes rui=" nes, & donne les commencemens à un Fort, qu'il avoit lugs même defliné, pour la feureté des vaifleaus,quiviendroient cys aprés à la rade; & pour faire perdre aus Efpagnols, route en=k vie d' y defendre: à l'avenir, pour y faire des ravages. [La con queftede certe Ile fut faite, en la faflon que nous venons de di rcenl’an 1650. Si cette Colonie, doit fes commencemens À la gencrofté de. Monfieur le General, qui ne laiflé écouler aucune occafñon ca- pable d’amplifier la gloire & le nom dela Nation Françoife,el= le luy eftauffi redevable de fa confervation, & de fon accroiffe-. ment. Carilaeu foin d'y faire pañler deshomimes, & d'y en voyer des vivres, jufques à ce quela terrecneut produi, (4 tous les raffraichifemens neceflaires en de nouveaus établiffe” mens, & notamment les munitions de guerre qu'il faut en une: place, quicft fi voiline de l’ennemy, & qu’ila enlevéedevant: fes yeus, & fous fa main. Pour faciliter ce deffein, ila eu long tems en met un de fes navires commandé par le Capitaine. Mancel duquel la vertu, la fidelité, lecourage, & l’adrefle,ont efté éprouvées en plufieurs rencontres fignalées. 11 faifoitle voyage ordinaire de S. Chriftofe à Sainte Croix, pour ypot- ter tout ce qui pouvoit faire befoin, à cette nouvelle Colonie. Les Hollandois, avoient edifié furune agreabléeminence de cettelle, une belle Eglife bâtie en forme de Croix. Si les Efpagnols refpedtant cefigne facré, qui étoit fur le clocher, n'ont pas ruiné cet edifice: nos François doivent cette mais fon d'oraifon à la pieté & au zele d’une Compagniede Mars chands de la ville de Fleflingue , qui fit premierement. habiter cette Lle, fous la commiflionde Mellicurs les Etatssx "1016008 hap.2 DES. ra ANTILLES. 305 Aie Roy: àprefentrégnant, étant informé detoutela gloire que Monfieur de Poincy a aquis, & qu’ilacquiert journélle- ment à nôtre Nation, & combien fa prefence eft neceffaire en-l'Amerique, a confirmé. de nouveau ce Genereus Cheva- lier en la charge de fon Gouverneur & Lieutenant General en ces quartiers là, & la Reyne pendant fa Regence, a haute- ment loüé fes dignes actions, & fa fidelité au fervice du Roy. Enl’an:165s1 Monfieur le General, traitta fous le bon plai- kr. du Roy: avec la Compagnie dont nous avons parlé, & layant rembourfée de tous les frais qu’elle avoit faits pour l'établiffement de cette Colonie, a aquis de ces Mef- fieurs qui compolent cette Compagnie, la Seigneurie & pro- pricte fonciere des Iles de Saint Chriftoñle , de Saint Bartele- my, de Saint Martin, de Sainte Croix, & des adjacentes » & Ceia au nom & au profit de fon ordre de Malte, qui par ce moyen elt accreu de l’une des plus belles, des plus rich:s, & des plus honorabies Seigneuries dont il joüifle, fous la Souveraineté de fa Majefté Tres-Chrefienne. Er dépnis le Roy a faitdon abfolu detoutes ces iles, à l'Ordrede Malte, à la feule referve de la Souveraineté, & de l'hommage d’une Couronne d’or de redevance , à chaque mutation de Roy, de Ja valeur de milefcus, comime il paroit parles lettres paten- tes de {a Majeité, du mois de Mars 1653. oUIs PA RSLA GRACE DE: DTE U: KOY DEFRANCE ET DE NAVARRE: Atous ee & avenir Salut. L'ordre de Saint Jean de Jerufalem, reliftance aus entreprifes dés Mahometans, ennemis de la Foy, dont les viétoires frequentes qu'ila remportées fur eus , en tant de combats , font des marques certaines , efquels grand nombre de Chevaliers ont efpanché leur fang, & prodigué leur vie pour le falut commun, & les Hofpiraus, ont efté fi dignement & charitablement adminiftrez pariceluy, depuis fon inftitution, qu'il feroit utile qu’il eut fon fiege nonfeule- ment enl’Ile de Malte, mais aufli en d’autres & plufieurs en- droits, afin que ce fuflent autant de ftarions, fortercfles & remparts pour la Chrétienté, & d’azilles aus Fideles. Ces “25.1 FO à Cons S'eft monttré fi utile à l’Eglife par fes fervices & fa continuelle à FA HA ia he PUS Gr NA EP PRIE ds tu RS 4 CE RSS AO AE ENT à D PAC 1 GARE SA A ee RP LA ALU FAR LES «> : LES Joe: Ant de Me { é % bar pe | Histo Most! # BOT D Confiderations, & l'affection que les Rois nos predeceffe & nous. à leur exemple avons toujours portée audit Ordre, | nous ont fait favorablement entendre aux fupplications iqui. nous ont efté faites de la part de noîftre tres-cher Coufinle Grand Mailtre dudit Ordre de Saint [ean de ]erufalem, par no ftreamé & feal Confeiller en nos Confeils Chevalier & Bailly d'iceluy, & Ambaffadeur de noître dit Coufin le Grand Mais ftre prés noftre perfonne, le Sicut de Souvré: Quele Sieur Bailly de Poincy Grand Croix. dudit Ordre, aprés. plufieurst beaus employsen France, auroit efté envoyé par le feü Roy noftretres-honoré Seigneur & Pere, fon Gouverneur & Lieu“ tenant Generales lles "de Saint Criftophe, & autres Iles de! l’Amerique peu connuës pour lors, lefquelles dépuis fous f& conduite font habitées de grandnombre de François, en quoy! ledit Sieur Bailly de Poincyn’auroit rienefparené pour ymainæ tenir noftre authoriteé, l'éclat & ladignité dunom François Mefines auroit fait baftir plufieurs forts à fes defpens, & fe fe soit auf formé un revenu confiderable par: acquilitions qu'il. a faites dans lefditesIles, ayant employe pour cémiéffer, le re= venu de plufñeurs années de deus des plus belles Commandes ries dudit Ordre, defquelles il jouifoit en France , lefquels Domaines, par droit de peculapartienaent à fon Ordre, auquel d’abondant ledit Sicur Bailly de-Poincy, comme bon Reli= gieus en a donné routes les feuretez neceffaires. En forte que noftre-dit Coufin le Grand: Maiftre & ledit Ordre, s’én pets vent dire des à prefent le vray proprictaire, fans attendx Pa luyreviennentaprésle decés pardroit de dépoiulle,àquoyno* fire-dir Coufnie Grand Maiftre a defiré joindre la proprieré entiere defdires Iles de Saint Chriftophe , par l'acquilition: d'icelles, pour laquelle noftredit Coufin a envoyé fes ordres: & pouvoir audit Sieur de Souvré , afin de rraiteravec ceusde la: Compagnie defdires Iles fous noftre bon phaifir, & fous l'éfperance que nousaurions ledit traité agreable, & que nous! ÿjoindrions enoutre,. ce qui nous apartient efdiresHles, afin: de pouvoir par noftre-dir Confin & fon Ordre, y former uit établifiement pour.le fervice & ladefenfe de la Chreftientést & pour la conveïrfion des Sauvages à la: Religion Catholiques À ces cAUSES, & aprés avoir. fait voir ennoftre Conf£illest "9 Let- ARE PAS Lu AIR AT Er RS FRANS TRE CE À AU La MF AE à Ce AL À d A ELA TAN ir lues ANTELLER — beton del affembl ée dc laslite De san de r Arme rique, pour: lacefion, vente & alienationdetourcequ'ils pour- royent pretendreenicelles fous nôtrebon plaifir , aus cha ges & conditions portées parle-refulrat du 2 May 1651. Le traité fairypar ledit Sieur de Souvré avec ceus de ladite Compagnie, le 24 defdits mois & an, attachez fousilecontre-féel de noftre Chancellerie. De l’avis de noftre-dit Confeil, où eftoyent la R eyne noftre tres-honorée Dame & Mere, noftre tres-cher Exere. le Duc d'Anjou , plufieurs Princes, Ducs, Pairs & Officiers: de noftre Couronne, & autres srands & notables Perfonnages de nôtre Royaume; Nous defirans favorable- ment: traiter noftre Coufin le Grand Maiftre & fon Ordre, & tefmoignet à toutela Chrétiente l’eftime que nous en faifons, & que comme Fils aifné de l’Eglife, nous ne laiffonsefchager aucune occafion pour le bien & l'augmentation de la Religion Chrétienne, & par ce moyeninviter lesautres Princes Chré- tiens de faire le femblable , & decontribuer de leur.part ainf que aus faions, à la manutention & propagation de la Foy, de noltre grace beclales certaine fcience , plaine puiflance & authorité Royale, Avons loüé,agrée, ratifié, loñons, agreons, ratifions & confirmons par ces prefentes fignées de noftre main, la conceffion cy devant faite à ladite Compagnie des Iles de Amerique du mois de Mats 1642. Enfemble ledit Con- tra du 24 May 1651. Portant l'alienation vente & ceflion des droits de ladire Compagnie dansles jles de l'Amerique , à eus concedées, au profit de noftre-dir Coufin le Grand Mai- fre & dudit Ordre de Saint Jean de Jerufalem. Er adjouftant ausconceflions faites par cy devant, avons de nouveau donné & otroyé à noftre-dit Coulin & à fon Ordre, donnons & oétroyons par cesdites prefentes ladite Lie de Saint Chrifto- phe, &autresen gencral endependantes, conformementau- dit Contrat du 24 May avec toutes leurs confiftances, à la xeferve des Iescontenuëés & fpecifiées aus Contrats de Ven- «c des 4 Septembre 1649. & 27 Septembre 1650. Pourladite Je de Saint Chriftophe, &autres Îles del’ Amerique, en ge neral, à ! a referve cydeflus, eftre renuës par nofire-dit Coufn Q9 2 le D QU i $ a 0 La? I TLL 7e z | r 5 ï & 30$ run tn Mes EEE _ diredte, & utile proprieté incommutable. Enfemble les pla- Gens tenans noftre Cour de Parlement de Paris, Chambre ÆsS T -NOSTRE PL AISIR.:: Et afin: que:ce fit RAT CET és a Rs DE Se à RUE PÉTROLE ROC TRUE Lot FA # PNG à le Grand Maïiftre & fon Ordre en plain Domaine, Sci 1 ces & forts eftans en’icelles, droit de Patronage Laïque de tous benefices & dignités Ecclefaftiques , qui fontou pout* ront eftre cy apres fondées, & qui nous peutde prefenrow pourroit apartenir , avec tous droits Royaus, & pouvoir de remettre & commubér les peines, creer, inftituer, & deftituef Ofliciers & Miniftres de Juftice, & [urifdiétion tant volontais res que contentieufes, pour pafñler tous aétes, jugertoutes matieres tant civiles que criminelles en premiere:inftance, & par appel en dernier reffort,. & en touscas, le routà perpe- tuitéenplainfief, &amorty, & foustel titre, ‘& y faire tels établiffemens quebon luy femblera, à lafeule referve de là Souveraineté, qui confifte en l'hommage d’une Couronné d'or de redevance à chaque mutation dc Roy, de la: valeur de mil efcus, qui feraprefentée par l’Ambañfladeur dudit Or: dre vers cette Couronne, ou par tout autre Officier d'ices luy en fon abfence, àlacharge que noftredit Coufin le Grand Maiftre, & l'Ordre, ne pourront mettre lefdites Iles hors deleurmain, n’y y donner commandement à autres qu’aus Chevaliers des Langues Françoifes nos fujets ,. fans nous de faire fcavoir, & pris fur ce noftre confentement. Si dons 4 nons en mandement à nos. amez & feaus Confeillers les des nos Comptes, & autres nos Officiers qu'il apartiendra, que ces prefenresils faflent enregiftrer, & du contenuen icels les faire jouir noftre-dit Coufin le Grand Maiftre & ledit Ordre plainement, paifñblement & perpetuellement, fans fouffrir qu'il luy fon fait, mis ni donné aucun trouble ni empefchement au contraire. Et d'autant que des prefentes Fon peut avoir befoinen même tems en plufieurslieus. Nous voulons qu’aus Copies deuëément collationées, foy foit ade jouftée comme à l’Original des prefentess CAR TEE chofe conftance pour toujours , -Nous avons fait mette nofire Seel à ces prefentes , fauf en autres chofes. noftre droit, & l'autruy en toutes. Donné à Paris au. mois de | Mars: | DES do bé ANTILLES 309 Mars, J'an de grace 1653. Et de REn Regne le detre me. Signé sk GA, LOU IS : ar fur le Reply, parle Roy de Lomenie. + te k. Vifi Mot! #4 Etfcellce du grand cas de cire verte fur Lacs de foye: + Aprés que Monfeur Le General de POifey » eutafermy la Seigneurie de l'Ile de Saint Chriftofle entre les mains de fon Ordre de Malte , & procuré foigneufement la gloire & la profperité des Colonies Françoifes de l'Amerique, il deceda paifiblement à Saint Chriftofie, l’onziéme du mois d’Auril de Fan mil fix cens foixante, au grand regret de tous les Habi- tans des Iles, parmy léquels la memoire de fes eminentesver- tus fera toûjours precieufe & en finguliere venerations Le Roy, confiderant felon fon exquife fageñe, que la chärge qui étoit vacante pat le decés dece digne Seigneur, étoit de tres-grande importance, en a pourven Monfieur le Cheva- lier de Sales, quiporteenfes Titres. Charles deSales, Che- valier dé l'Ordre deS. Jean de Jerufalem, Adminiftrateurde la Seigneurie de Saint Chriftofle, & Chef de la Nation Fran: | soife eftably de fa Majefté pour fon Eminence de Malte. Monfieur du Parquet Gouverneur de la Martinique, à TL aquis de la méme Compagnie la Seigneurie des Iles de la Martinique, de la Grenade, & deSainte Aloufie. Mon- fieur d'Hoüel Gouverneur de la Gardeloupe, a fait la même chofe pour les Iles de la Gardeloupe de Marigalante, de la De. firade, & des Saintes, Ces deus dernieres ne font pas encore peuplées, Mais il a demandé par avance la Seigneurie de ces terrés, afin que d’autres ne s’en puiflent civilement em- parer. Car il faut favoir, que la Compagnie des iles de l’A- méerique, laquelle eft maintenant abolie, avoit obtenu du Roy, toutes les Antilles habitées, & à habiter par fucceffion de tems. De forte que ces Meflieurs, qui ont traitté avec æctte Compagnie, “ont fait mettre dans leur o&roy, des iles Au ils n’ont pas encore habitées ; mais qui font. en leur voi- "Qa. 3. | finage, RE A Lab t M ah E ms AL MERS 1 RUN 810 H L'ST O RE Mo à A? LES finage , & à Jeurbienfeance : : & incontinent qu'ils tte : d'hommes en leurs autres Iles silsen feront pañer en celles fi ce n’eftqueles Anglois, ou les Hollandois s’en emparaflent auparavant. Car c 'eft uncrégle gencrale, qu'une Terre qui. eft fans habitans, eft au premier ôccpanit: Et l'Oétroy du, Roy, ou dela Compagnie, ne fert, que pour parer ces Mc fieurs contre quelcun de nôtre Nation, qui pourroit courir fur leurs deffeins. Ainf toutes ces Iles que pe Francois tiennent aujourduÿf enl Amerique ; relevent entierement du Roy pour la Souve= raineté, & de Meflieursles Chevaliers de Malte , du Parquet, & d Hoüel, pour la Seigneurie, fans plus reconnoitre la Coms pagie, quiacedéenleur faveur tous fes droits, & toutes IR prétentions. ns. «Quant à la fuite des Gouverneurs Anglois de l'Ile La Saint Chriftofle. Moñfeut Oüarnard étant mortapres avoir gl9s ricufement établyfa Nationdans les Antilles, & avoir peuplé enparticulier l’Ilé de Saint Chriftofle, dedouzeàtreize mille Anglois : Monfieur Aiche,:qui étoit premier. € capitaine de l'Ile fur établyen cette charge, & celuy-cy: pareillement, étant decèdé ;: Monfieur, Evres Ph pourveu du Gouvernement, qui l'adminiftre encoteaujourduy, avecla capacité & l’approba= tion finguliere,que nous ayons déja reprefentée, en oPAFIAEE l'Île de Saint-Chriftofle. : : +) l» = 100 Au refte lors que les: dtisns étrangeres: atriverent en'ces Iles ;' celtes fe logerent au-commencement à peu prés comme jes Habi tansnaturels du-pais, fous de petis couverts, & dans: defimples huttes, & cabañnes, faites du bois même qu ilscous poient fur lelieu, en-défrichant la terre. ‘(On voit encore dans les Coloniesnaiffantes, plulieurs de ces foiblesedificess qui ne {ont foutenus que par quatre ou fix fourches, plantées enterre, & qui pour murailles ne font entourez & pallifa= dez que de rofeaus , & pour toit, t'ont que des feüilles de pal: més, de cannes de fucre , ou dequelqu'autre herbe... Mais entoutes les autres Iles où ces Nations font mieus établies on voit à prefent pluficurs beaus edifices de charpente, de picrre & de brique, qui font faitsen lamême forme, que ceus 1 de leur pais; excepté, que pour l'ordinaire ils n'ont qu'un t PO. étage, AZ LUCE ET " * _ » D + ul Vs APN ERNUTE R Me Me FALSE ent | M7) QUES: LENS An TEÆBER. FFE tage, ou. deus au plus, afin qu'ils puiffent plus facilement “elifter aus vens, qui foufflent quelquefois avec beaucoup d'impetuofité ences quartiers là. Nous avons aflez parlé de ces cdifices , dans l’occafon quis’eneft prefentée, lors que nous ayons décrit chacune des Antilles en particulier. . Mais nousajouterons fenlementicy ; quefur tout, les An- glois qui-habitent ces Iles, font pour la plûpart commode: ment logez, & proprement ajuftez en leur ménage, par ce qu'ils s’arrétent dans les Colonies, & les embellifient, com- me fi c'étoit le licu deleur naiffance. Ils font auffy préfque tousmariez, ce qui fait, qu'ilstravaillent mieus à s’accommo- der, que ceus qui menent une vie de garçon, comme font plus fieurs entre les François. . Nous avions d:flein pour la clôture de ce Chapitre, de coucher icy tout le proccdé que tint Monfeur Auber, pour faire la paix avec les Caraïbes : lors qu'il vint prendre pof= feflion du Gouvernement de la Gardeloupe : mais à caufe que le difcours en eft un peu long, & qu'il peut donner de: grandes lumieres , pour connoitre le naturel de ces Indiens, dont nous avons à traitter en ce deuzième Livre, nousavons éreu qu'il n'en falloitrien retrancher, & qu'il metitoit bien de: emplir un Chapitre tout particulier. ( / CHAPITRE TROISIÈME. De l'afermiffement de la Colonie Françoifé de la Gardeloupe, par la paix, qui fut faite avec les Caraibes de ls RE Dominique y en l'an 1 640. a M Es premiers d’entre les François qni occuperent l'Ile M _dciaGardeloupe, y aborderent en lan 163. par les 4 Ordres d’une Compagnie de Marchands dela ville de Dicppe qui fous l’autorité de la Compagnie Generale des Iles de l'Amerique établie à Paris , y envoycrent les Sieurs du Pieffis & de L'Olive, pour ycommander en leurnom. Mais le premier érantmortpeu demois aprés fon PR ê&c \ PP | ALL» TN Lite RIRE LS, M'ÉSUR HLLS 1e DE OL LÉ: + & Lx DEL ARS | Ne MENT EPA ASE RL eu FRET Ce ET NT 7 I PO NES DRM PE D PRE SN OT RE 5 PR AE de PA NS RAS Q RS dE ë k Y 1 A de CO # 4 * Et H1STOIRE MORALE, C 4 l'autre pat la perte de fa veuë, &c ‘pat fes maladies continuellés sh ctant rendu inhabile à gonverner une Colonic naiffante, come" me nous l’avons déja reprefenté dans les Chapitres te Monfeurde Poincy, pourveut dignement â'tout cé qui étoitn neceflaire pour l'entretien dés nôtres en cette Ile; laquelle auroitefté abandonnée, fans les grands foins qu'il prit, d’y'en- voyer des troupes auxiliaires fous la conduite de Monfieur de la Vernade, & de Monfieur de Saboïüiily, pour s'oppofer aus deffeins des Caraïbes, qui leur en conteftoieñt puiffans ment. la poffeffion; de forte, que fi cette Colonie ne doit p*3 fon premier établiffément à Monfieur le General de Poincy,h elle luy eff redevable au moins de fa confervation ; & de La fubliftence. Ilapprouva auffi & confirma aù nom du Roy, l4M nomination que la. Compagnie des iles avoit faite de Mon fieur Auber, pour eftre Gouverneur de cette Iles 127: 00 Ce nouveau Gouverneur, pretaferment defidelité câtre les mains de Monfeur le General le 2e d'Ofobte ! 16404 | Mais avant que de defcendre à Saint Chriftoflé, le navire qui l’avoit pañfé de France en Amerique, ayant moüille prés der | la Dominique, plufieurs Sauvages qui avoient reconnu de! loin lenavire, &; jugé parles fignes de bien-vueillance qu’on leur donnoit, qu’ils n’avoient point d’ennemis dans ce vai£” feau, prirent l’affurance d'y entrer. Par bonheur, ceus qui l’étoient venu feconnoitre; étoient les premiers Capitaines de l'Ile. Monfeur Auber (e refolut de profiter de cette oc- cafon, jugeant qu'elle étoit tres- favorable » Pourr ’entfer en, alhance avec ce peuple, qui avoit été éfarouché, & presque nticrement alienédes François, par les violences &les Ri- gucurs de Monfieur de l'Olive, lun de fes predéceffeurs en la charge, & parlamanvaife cofduite de ceus quicomman: doient le fecours que Monfieur le General avoit ENVOYÉ. à nosgens qui €toient en cette Île. ‘Et parce qu'il favoit, que ceus de cette Nation felaifient facilement gagner par carefies & par petis prefens, il n'oublia rien de tout ce 4 POUTos contribuer à l'avancement de fon deffein. 2 Il leur fit donc favoir qu'il venoit de France, & qu fi étoit envoié pour commander en l'Ile de la Gardeloupe : uit avoit apris avec regret, les diférens qu 7 avoient eus M. les ran= Cha D'iEise Ï LES nr 313 Miréois dépuis quelques années : Qu'il venoit avec intention de les terminer à lPamiable,; Et qu'il vouloit eftre leur bon Compere, & leurbon voifin , & vivreavec eus comme avoit faicfeü Monfeut du Béieurhon amy. Il faifoit entremé: ler cerentretien, de force verres d’eau de vie, qu’il leur faifoit prefenter. … Ces Sauvages, voyant une reception fifranche, & fi cor: diale; aprésavoir parlé entreeus en leur langage de guerre, qui n'eft entendu que des Anciens Chefs de leurs entreprifes, fe refolurent d'accepter l'ofre qui leur ctoit faite, & de re- noüer lancienne amitie, en renonçant à tout ce qui pourroit entretenir cette guerre fanglante, quiavoit rantinconmodé les deus partis. Mais avant que de rien promettre ils deman- derentà Monfieur Auber , fi Monficur de l’Olive, Monfieur Saboüity, & tous ceus quiavoient fuivy leurs violences, forti- xoient de l’'He. Ec luy leurayant refpondu, qu'il les y obli- geroit, ils dirent que cela étoit neceffaire, & qu'autrement ils {croient toujours fâchez contre les François, par ce que difoientils, /’olive d* Sabouly point bons pour Caraibes, Ce font leursmots. La deflus, Monfieur Auber les ayant afiurez que cela deineureroit arrefté , & que pour luy il leur feroit bon, s'ils vouloient aufh ceftre bons: ce qu’ils promirent , illeur' ft fairegrand’chere, & les r envoya avec des préiens, x bien fatisfaits. De larrade de la Dominique, Monfeur Aubcr alla à 1a Gardeloupe, pour y pofer fon Equipage; & de là à Saint Chriftofle, pour y rendre fes devoirsà Monfieur le General, qui futjoÿeus du bon chois que la Compagnie des Hes avoir fait de fa perfonne, & le confirma en fa charge au nom du Roy,aprés qu'ileut prére le ferment de fidehité. 11 partit bien tôt aprés de Saint Chriflofle, pour fe rendre enfon Gouvernement: où: Auf le jeune-garçon, de foi côté, :l'aps pelloit fon Pere. : 11 ne‘paroifloit point contraint dans fes had bits, lors qu'il fut habillé : & iln'eur pas beaucoup de peine à s’acoutumer à nôtre faffon de vivre. Le Capitaine Barof demandoit de fa part, en échange de fonfils jrun.des fils de, Mademoifele Auber ; quiavoit éte mariée en premieres No% ces à feu Monfieur du Pleffis, & qui l’étoit en: fecondes Monfieur Auber. Mais Monfieur Aubert ayant reprefenté à ce Capitaine, que le Jeune du Pleflis étoit d’une natute trop délicate pour pouvoir Juporter la faffon de vivre des Caraïd bes , .ille ftconfentir à acceprer en Ôôtage, au lieu deluy, lun de fes ferviteurs qui s’ofroit volontairement à le fuivre, Ce jcune homme qui étoit d'une forte complexion, démeuræ quelques moisavecces Sauvages, quilerraitoient avec bcau- coup de douceur. : Mais foir que le éhangement d'air, oué changement denourritures cûtaltereé {a a Mis difpoñition , il tomba malade quelque tems aprés. Ce:quele Capitaine Ba- ron ayant aperceu , & craignant que s’il mouroit entre leurs mains , il n’enreçeut du reproche; il Ieramenaà Monficur Auberavec grand foin ,.fans luy demanderune autresperfons ne en fxplace; dibintpqueponié Otagce ilne vouloitque la pas role de fon Comperc. :Ileft. vray qu'il folicita fon filsà rez tourner: maisilne putlyinduire, legarçon difant, qu’il fe trouvoit beaucoup. E mieus avec Monfieur Sn € qu ‘avec fon:Perc:! Sx:p iv 12688 Le, Capitaine Batôur, pue E laiffé à la Lien un fi precieus gage, prenoit fonvent occafion de viliter Monfieut Auber,; & par même moyen de voir fon fils : Erfefentant infiniment -rédévable à Monfieur Auber de tant de biens gu'ilrecevoit déluy, & fingulieremént de l'afcéionfrtendre qu'ilportoit à fon fils ; lequelilavoitenÔtage, ilcherchales occafions de luy en témbigner quelques reconnoifancé. 11 s’avifa donc, de luy déclarer que durant les guerres que ceus de fa Nation avoienteués contre les François commans 5:tH20b ! dez Chap.3 DES ÎLes Art ek 321 dez par Monfeur de l'Olive, il avoit fait fon ptifonnier de guérre un jeune homme François à quiilavoit donné la vie, par ce qu’il avoit été autrefois au fervice de Monfeur du Pleflisfon Compere: Et qu'il y avoit prés de trois ans qu'il letenoit dans une honnête liberté, bien qu'ayant été pris les armes en main, & dans la chaleur du combat, il eut pü le faire mourir, Mais qu'il n’avoit pas voulu ufer de rigueut, en con- fideration de l’ancienne amitié , qu'il avoit eué autrefois avec Monfieur du Pleffis , à la fuite duquel il fe fouvenoit d’avoir veu ce François. Monfieur Auber, ayant compafñlion de ce pauvre jeunchomme, pria le Capitaine Baron de leluy vou- loir ramener. Ce qu'il luy accorda volontiers : & peu de jours aprés il fatisfit à fa promeñle ; & celuy qui avoit été délivré par ce moyen, a demeuré dépuis à à la Gardeloupe, fort long-tems. … Ce gencreus Capitaine, ne fe contentant pas d'avoir ainf obligé Monfieur Auber, & relâché à fa confideration fon prifonnier, luy donna avis, qu’un autre Capitaine de la Do- minique avoit encore un François en fa maifon, aufli prifon- nier de guerre, & s’offrit de s'employer auprés de ce Capi- taine, pour le faire mettre en liberté. Ce qu'iléxecuta avec unc fidelité & une affection nonpareille , ramenant peu dé jours aptéscétautre prifonnicr, quifenommoit Zeaz Zardin. Ce jeune homme ayant beaucoup d’efprit, avoit gaigné les bonnes graces, non feulement du Capitaine dont il étoit le ptifonnier, mais detous les Caraïbes ; qui luy portoientau- tant d’afettion, que s'ileüt été de leur Nation même. Et ül avoit la mémoirefiheureufe, qu'il avoit apris leur langue en perfeétion, | | Monfieur Auber, ne pouvant foufrir que le Capitaine Ba- ron l’emportit brun en bons offices, & en témoignages d’a- fe@tion , outre les prefens qu'il luy Éfoidteus les jours, & l’a- mitié fincerc qu'il luy montroit en particulier, voulut auffi obliger toute fa Narion. Cefut lors que ce Capitaine devoit D en guerre, contre les Aroüagues quihabitentenl’ile de la Trinité, & que pour ce deffein, il eut fait un armement ex- trordinairc. Car ce brave Sauvage, étant venu dire adieu à Monficur Auber avant que de partir pour cette expedition. ; Sf Maon- x 32% HisToirEe Monmaze,: Monfieur Auber luy donna pour mettrédans festroupes.uñ. de fes ferviteurs doméftiques, quiétoit fon giboyeutr, nomm " Des Seriffiers , qui fouhaitoit depuis long-tems de fetrouver aus combats de ces Sauvages : Et il le pourveut de bonnes” armes à feu, & detoute la munition neceflairepours'en bien fervir. Le Capitaine Baron fut ravy de cette faveur, & l'ayant acceptée avéc joye, la fit fonner bien haut parmy €eus de fan Nation. Ce volontaire, fuivit de grand cœur ce Capitaine & s'étant embarqué il fut au combat contre les Aroüagues-dé Vlle de la Trinité, avecune puiflante armée de Sauvages de toutes lesiles Antilles ;. En cette rencontre ilfirtont cequ'on pouvoit atendre d’un vaillant Soldat : & commeil étoit tresz bon fufelier, il tua & bleffatant d’Aroïüagues, qui n’étoient: pas acoutumez à. s’'entirl’éfet des armes à feu, qu'enfin ils. l’âcherent le pied, & s’erant retirez dans lesmontagnes, Jaife. ferent le champ de bataille aus Caraïbes viétorieus. Dépuis,. Serifliers pañloit parmy ceus de cette Nation pour un grand Capitaine,. & ilsne pouvoient affés admirer la bonté de Mons fieur Auber, .qui s'étoit volontairement privé du fervice qu’il pouvoit atendre de ce jeune homme, pour le préter à leurs troupes. Nous avons d'origisal toutes ces patticularitez, -& Monfieur Auber luy même en eft garent. È 4 Pendant tout le tems que Monlieur Auberà gouverné llede la Gardeloupe, lapaixqu'ilavoit faite avec les Cara bes à éré inviolablement entrerenué de part & d’autte, at grand profit des deus Nations. Car les Sauvages par cet accord avoient moyen de traiter avec les François, decoïg- nées, de ferpes, de couteaus, & de plufieurs autres outils ès marchandifes qui leur étoient neceflaires: Et les François, secevoient d’eusen échange , des Porceaus, des Lézars, des Tortuësde Mer, & une infinité d’autres poiflons, & d’au- tres tafraichiflemens, qui leur aportoientun fingulier:avans tage. De forte, que les Caraïbes étoient comme les Pour- voyeurs des François, qui travailloient cependant en. leurs habitations avec afliduité & feureté, 9 15020fT 0 I SE : 0e. 4 : PELAR TS re » A: RAA! i A de TE TABLES 34 TO ER PT SEE" FRS æzs dat ES ANTILXL E 4 Le î Med de Î r» F f 1} Bostaq : MURS IE. NS IBUS 14 096 6" STONE HO EL SUN » à nm CCHAPITRE QUATRIÈME. à 14) Du vof & des Océfassits ds Eabétqné Ent DOM TA: C Premierement, de la culture RANde ee # Preparation du Tabac. Ntoutes les Antilles, j argent n'a pointde cours pour letrafic ordinaire, maïisil fe fait par échange des Mar- | chandifes quicroiffentau païs, contre celles qui vien: nent de l’Europe; foit qu’elles confiftent en habits & en lin- ge, foit en armesouenvivres, &enautrescommodités ne- ceflaires pour pañer la vie avec douceur. Er c’eftce qui fe “pratiquoit chez tous les peuples, avant l’ufage de la monnoye, & qui fe voit encore aujourd'huy en plufieurs Nations Sau- vages, & mefmes dans la Colchide, où chacun porteau mar- pe ce qu'il a de trop, pour avoir de ce qu’il n’a pas. Les Magazins qui fe voyent en ces Iles, font ordinaire- ment fournis de toute forte de Marchandifes qui font ame- nées deFrance, d'Angleterre, de Hollande, & de Zelande, au (M abondamment qu’en lieu du monde. Le prix dechaque “Marchandife, n’eft point laifé à la liberte des marchans qui tiennent les Magazins, mais il eftmis à chaqueforte, par Mef- ficurs les Gouverneurs, de l'avis de leur Confeil. Les mar- chandifes, que les habitans prefentent en échange en toutes ces Iles, fe reduifent à cinq efpeces principales, favoir au Ta- bac, au Sucre, au Gingembre, à l'Indigo, & au Cotton. _ Au commencement, tous les habitans érrangers des An- tilles s’adonnoient à la feule culture du Tabac, qui les fai- foit fubfifter honorablement, Mais depuis que la grande ‘abondance qu’on en a faiten a ravalle le prix, ils ont planté en plufieurs endroits des Cannes de Sucre, du Gingembre, & de l’Indigo : Er Dieu a tellement beny leurs defleins, que cet une merveille de voir avec quel fuccés, toutes ces mär- chandifes croiffent en la plû-part de ces Iles. Er dautant que | D qui les voient en l’Europe , ne favent pas là façon | Sf 2 né L, Le n'a VAR Mat le RS TEE > ., rh #, éc Lif AL Sénat dé a À + Le, 5 Mi Li L: 324 HisTOURE Mo k & En Ch que l’on appoite à les preparer, il fera à propos pour con tenter leur curiofité, de parlericy dechacune :. & nous 7 joins. drons un motdu manimentdu Cotton: : # 11 effvray , que ces matieres ont efté déja traittées par di. vers Auteurs. Mais outre.que.noftre Hiftoire feroit incom- pletre.&. defe&tueufe fi: nous les paflions fous filence, nous. pouvons dire icy premierement avec fincerité, que tout le difcours que nous: en allons faire n’eft.pas une copie, ou une ‘imitation de quelque autre, mais un veritable original , tiré au naturel avectoutile foin,.& toutelafidelité poflibie. De forte, que fi nous difonslesmèmes chofes, que d’autres ont dites ayant nous: l'on ne doit pas eftre marry pi voiricy la confirmation d'une verité qui vient de fi loin,. & dont on ne fauroit avoir trop d’aflurance. Et:fi cefont des chofes CO traires., ellés pourront fervir à faire voir la fauffeté de celles qui leur font oppolées : ou du moins elles prouveront qu'en tous lieus on ne. fuit: pas fi exaétement une même métode en la: preparation de ces marchandifes, qu'il ne s'y remarqué fouvent quelque peritchangement. Deplus,.nous efperons: aufli, que quelques. unsS trouveront peuteftre dans les defcrips: tions fuivantes, quelque exaétitude & quelque clarté, quiné leur déplaira pas, & que même ils y rencontreront quelque * chofe de nouveau, qui n’a pas encore efté remarqué ni pros duit par les auteurs. Apres tout, nous fupplions ceus qui croiront nericntrouver dans ce Chapitre, nidans le fuivant qu'ils ne fachent, & quipuiffleou lesinftruire, ou les divers: tir, de paffer outre, fans blâmer nôtre diligence, & nôtre peis ne, & de permettre que nous écrivions. cecy pour d’autres, qui pourront en recevoir de l’inftruétion, ou du divertifies ment. Pour: avoir de beau & bon Tabac, onprepare premieres menten faifon propre des couches en divers endroits des jars dins,. qui foient à. l’abry desvens. On jette deffus-la graine qui a-été recuëillie des tiges de l’année precedente ; ;- que l'on à. laiffé. croiftre & meurir pour fervir à cét ufage.! On mefle de la cendte avec la graine quand on la: feme, afim qu'elle ne tombe pas trop épais en de certains lieus. Quand: elle commence à lever, onla couvre foigneufement de feüils: Eur: 4 DES ÎLES ANTILLES. 335 es de Palmifte épineus, ou de branches d’Oranger ou de Ci- tronicr, pour Ja garantir des ardeurs du Soleil, du froid de la nuit, & du degaft que les volailles domeftiques & les Oifeaus y pourroient faire. We Pendant que la plante croift, & devienten état d’étretrans- plantée, on prepare la place neceffaire pour larecevoir. Si l'habitation eft nouvellement établie, il faut avoir long tems “auparavant abattu le bois, & brûlé les branches fur la terre & fur les fouches pour les faire mourir. Que s’il yenrefteen- core , il faut tirer aus lizieres tout ce qui n'a pas été brûlé, afin que la place foit libre. ileft vray, qu'il n’eft pas befoin de Jabourer la rerre ni de la renverfer & remuer profondement, mais il en faut feulement arracher toutes les méchantes her- bes, & la. nétoycr fi foigneufement qu'il n’yrefte nibois, ni | écorce, nifeüille ,.ni lemoindrebrin d'herbe. Pour céc effet one ferrde Houëcs larges & tranchantes, qui pélent & écor- chent la furface de laterre, & au befoin extirpent la racine des herbes, que l'on craint devoir pulluler denouveau. Aprés: qu'on a preparé la terre en cette forte, on la pat- tage & divife en. plufeurs fillons , éloignez de deus outrois. pieds l’un de l’autre en égale diftance. On fe fert pour cela des-grands cordeaus, qui {ont marquez-de deus en deus pieds, ou environ, avec une petite piece de drap de couleur, qui y eftcoufué. Et puis on fiche de petis bois pointus, . entousles lieus de la terre, où ces marques répendent:. Afin que quand. le tems de transplanter le jeune Tabac arrive, qui eft celuy auquel Dieu envoye une bonne pluye, on n'ait rien à faire qu à planter, fans. s’amufer à former les compartimens du jardin. | La plante de Tabac, eft en état d’étre levée de deffus fa. couche ,. quand celle à quatre ou cinq feuilles affez fortes -& épaifes, delalargeur de la paume de lamain. Caralors s'il arrive que ha-terre foit arrofée d’une agreable pluye, tous. ceus qui font foigneus d’avoir debeau Tabac en la premiere. faifon, ne craignent point de {fe mouiller, pourveu qu'ils en mettent beaucoup enterre. On voit tous lesbons ménagers: en un agreable emprefiement dans leurs jardins , les. uns: s’occupent à .choifir & à tirer la plante de deffus les couches. LL ETTR 3: &: La RAR ILE NS CVSOR CLOSE PET (0 ARR EU CR RAP M SRE “er “ont +1 dut LR TE RAY UE AE, à Le PPT be A DE en Rae de A ut Ré nn a EPS TIMES : è ; Pc OP PONS 1 PR * à x : - -& à l'arranger éndes paniers : les autres la porféntà ceusqui ‘Ja doivent planter en tous les lieus, qui ont été auparavant ‘marquez au cordeau, comme nous avons dit. ! + , 18h Ceus quiont la charge de planter, fontuntrou avec un “bois pointu ;" à chaque endroit marqué, où ilsmettént-la ra= cine du Tabac : puis ils ramaflent &: preflent tout autour la terre, entelle forte neantmoins que l'œilde la plante ne foit point couvert. Ils font ainfile long de chaque rangee. Puisils entecommencentuneautre. Aprés qu'ils ontfiny cérexers= cice, la premiere fois que les voifins fe rencontrent, leur En= tretien le plus ordinaire , eft de s'informer les uns des auttes, combienils ont mis de milliersde plantes enterre; & fur cela chacun fonde l’efperance de fa future recolte. hot: 00 La plante étant mife enterre; ce qui fe fait ordinairement, à diverfes reprifes, à caufe que la pluye ne vient pas aflezs abondammant pour le fairetoutà coup, ou bien parce que la terre n'eft pas préparée à même tems, ou qu'on n'a pasaflez” de plantes, on ne la laiffe pas à l'abandon. Ce n'eft encore que le commencement du travail & des foinsqu'il y faut ap= porter, Carilfautétre foigneus de la vifiter fouvent: & aufli toft qu’on a remarqué qu'elle a pris racine, il faut prendre garde que les vers, les chenilles, & autres méchans infeétes! qui fourmillent en ces pais-là, ne la rongent & ne l'empes fchent de croiftre. le ll fauten fuite, du moins de mois en mois, arracher les _mauvaifes herbes qui la pourroient étouffer, farclerdiligems ment toutc la terre, & porter les herbes qu’on aenlevées, à\ la liziere, oubien loin du jardin : car fi on les laifloit en la. place d’où elle ont été tirées, la moindre pluye leur feroit prendre de nouvelles racines , & elles fe releveroient bien- toit. L’herbe la plusimportune, & que l'on a le plus de peis ne à bannir des jardins, c’eft le Pourpier, quine croift en Frans ce que par les foins des fardiniers. On continué cét exercices jufques à ce que la plante du Tabacait couvert toute la terres voifine, & quefon ombre empefche toutes les autres herbes nuifibles de fe pouvoir élever. s #105):2408 Cela fair, on n’a pas encore derepos, parce qu'à mefure, que la plante fe haufie & s'elargit, il faut luy tetrancher les | oh feuilles 26 HISTOIRE MORALE, Chap APR, NE | DES Due E” ANTITREt 327 filles fuperflues , arracher celles qui font féches, pourries, ou viciées , & la rejettonner, comme on parle, c’eft à dire émonder les petis rejettons, qui l’empêchcroient de venir en petfe@tion, en tirant le fuc des plus grandesfeüilles. Enfin quand la Tige eft creué d’une hauteur convenable, il faut l'arréter en coupant le fommet de chaque plante, hormis de celles qu'on veut conferver pour en avoir la graine, Aprés toutes ces facons , la plante demeure quelques fémaines à meurir : pendant quoy elle donne quelque tréve au foinaffi- du qu’on en a prisjufques alors. Maïs fi l’on netravaille autour d’elle, il luy faut preparer Ja place propre pour la mettre à couvert quand elle fera meu- re. On doit prendre garde que la grange où elle doit être médiocrement féchée, foit biencouverte, & ferméedetous coftez; qu'elle foit fournie de plufieurs perches propres pour Ja pouvoir fufpendre, qu’onait bonne provifion decertaines écorccs deliées que lon tire d’unarbre appellé CIZ4hof, pour attacher chaque plante fur les perches ; & que la place pour tordre le Tabac quand il fera fec, foit en bon ordre. Pendant que l'on fait tous ces préparatifs, fi les feüilles du: _ Tabac quittent un peu de leur premiere verdure , qu’elles commencent à fe recourber Vers la terre plus qu’à l’ordi- naire, & que l’odeur en devienne un peu plus forte, c’eft figne que la plante eft en maturité. Et alots il faut en un beau jour, aprés que la rofée eft tombée de deflus, la couper à un pouce prés de terre, & la laifler fur la place jufques au foir, lare- tournant une fois ou deus, afin que le Soleil defféche une partie de fon humidité. Sur le foir on la porte a pleines brafe fées fous le couvert. On l’attache par le bas de la tige aus petches, en telle forte que les feuilles panchent contre bas. H ne faut pasaufli, qu'elles foient par trop preflées lesunes - contre les aùtres, de crainte qu’elles ne fe pourriflent, ou . qu'elles ne puiffent féchet faute d’air. Cette premiere coupe du Tabac étantachevée, on vifite . fouvent les plantes qui féchent , tandis que les autres que l'on. vaencore laiffées fur le pied meuriffent. Et lors qu’on apper- çoit qu'elles font en état d’être torfes, (nos g gens deslles di- ent torquées) c'eft a dire qu'elles ne font ni trop féches;, car « elles: ne cthieut EN SA PE RS ES PUS nee PE US 0 + D Nr OO RE DU RES DE DT UN PI FRAC AA one PRE. : De FU : d 3 : ' re EU te se 5e, j 3 28 HISTOIRE MorALE,e hap.#& elles ne pourroient fouffrir le maniment dela rouë: niaufit trop humides, car elles pourriroient en peu de tems: on les, détache des perches, on les arrange à un bout de lagrange, & en dépoüille chaque tige detoutesfes feüillesen cetteforte. # 7 On met premicrement à part les plus longues & les plus: __ Jargesfeüilles, & on arrache la groffécofte qui.eftau milieu de chacune : les habitans appellent cela Gjamber. Les peti= tes feuilles font mifes aufli decofté, pour être employées au” dedans de La corde du Tabac, & les grandes leur fervent de: couvertures & des robes. Ces feüilles ainfdifpolées, font arrangées fur des planches ou des tables, à cofté deceluy qui” les doir tordre, & faire la corde, telle qu'en la voitfur ks IQu= leaus que l’on envoye par deca. | Iyade l'indufrieà tordre le Tabac: &ceus qui le favent faire avec diligence & dexterité, font fort eftimez, & gagnent, beaucoup plus, que ceus qui travaiilent à la terre. 1L faut qu’ils ayent la main & le bras extrémement fouples & adroits, pour faire tourner le rouët avec la vitefle & la propor= tion neceffaire, pour rendre la filure de même grofileur par tout. C'eft aufli une adreffe particuliereen fait de Tabac, de fa voir bien difpofer, arranger , & monter , comme parlent les maitres, un rouleau fur les baftons , quidoivent tous être d’une certaine groffeur & longueur, pour éviter la trom- perie. Quand le Tabac eft ainfi monté, on le porte au Magazin, & onle couvre de feuilles de-Bananier ou d’autres, de peus qu'ilnes’évente , & afin qu’il prenne unebeile couleur. Ce luy qui a la coupe grañe, noiraftre, & luifante, & l’odeu agreable & forte, & quibrüle facilement étant mis à Frs eft eftimé le meilleur. Nous avons dit, que la plante de Tabacfe couppoit entre deusterres, & nes’arrachoit pas: Ce qui fe faità deflein, afin quelaracine puifle repoufler. Eteneffet elle produit une fe= conde plante, mais qui ne devient pas fi forte ni fi belle que la premiere Le Tabac que l’on en fait, n’eft pas auf fi pré cieus, nidefibonne garde. Onlenommé, Tabac de rejetton, ou de la feconde coupe, oulevée. Quelques uns tirent d'une même APR Eee NT UNE TAN pis |. Pe4 DES. 16% ARE EEK 329 Menie foùché, jufques au troifiéme rejetton, Et c'eft ce qui Mécredire le Tabac, qui vient de quelques Iles. * Puifque nous nous fommes tant étendus fur la manufadu- re du Tabac, il ne faut pas oublier ce qui fe pratique par quel- ques. Curieus, pour le rendre même plus excellent que celuy qu'on nommé de Verine, de bonne garde, & d'une odeur qui fortifie le cerveau. Aprés qu’on a mis à parties plantes de la premiere couppe, & pendant qu’elles féchent à la perche, on amafñle toutes les feüilles de rebut, les petitsrejettons, com- me aufli les filamens qu'on tire du milieu des feuilles, qui ont Été déja émondées, qu’on appelle communement pRahhls dé Tabac, Et aprés les avoir pilées enun mortier, on met tout cela dans un fac, que l’on porte fous la preffe pour en expri- merlefuc, lequel on fait puis aprés boüillir fur un feu médio- tre , jufques à à ce qu'il foit reduit en confiftance de fyrop. Puis aprés il faut mêler en cewe decotionun peu de Copal, qui eft une gomme aromatique, qui a la vertu de fortifier Le cerveau, laquelle coule d’un arbre de même nom, qui cft commun en la terre ferme de l Amerique, & aus iles du Golfe d’Hondures, * Aprés qu'on a verfé cette dibene enla compofñtion , il la faut bien remuer, afin que fa bonne odeut, & fesautres qua- litez, fe communiquent & ferepandent partout. Puis il la faut retirer dufeu, & quandelle ettrefroidie, la mettre dans ün vaifleau prés du Tordeur de Tabac: & il faut qu'à chaque poignée de feüilles qu'il met en œuvre, il moüille fa main dans cette liqueur, & qu'ill’effuye furlesfeüilles. Cét arti- fice, a un effetadmirable pour rendre le Tabac, & de bonne garde , & d’une vertu qui luy donne un pris extraordi- maire, Le Tabac SinE comparé: doit être tordu gros du moins comme le pouce, & mis en fuite en petis rouleaus de la pe- fantéur de dix livres au plus, puis envoyé en des Tonneaus ou en des Paniers faits à deficin, pour le mieus conferver. Quelques habitans des Iles ayans eflayé ce fecret, ont fait pafer leur Marchandife pour vray Tabacde. Verine, & l'ont debitée au même prix. % ) : Tt Ceus RS Ce AN Pa de ONE 4 GUN LL VAS ES FAR AR ACTE RE AN RS GS LG ET A d Je tie o" \ PO À \, 1 ù A RUN ES dE 1 330 HisToIrRE MORALE» C Ceus qui s’imaginent que le Tabac croift fans peine, que l’onentrouve, par maniere de dire, les rouleaus attachu aus arbres de l’Amerique, d'ou il ne faut que les fecouër po les ramañler en fuire lots qu’ils fonttombez: Ou quidu moi fe perfuadent, qu'ilne faut pas beaucoup de faflonnide peine pour les remettre enleur perfe&tion , feront defabufez,. s'ils jettent les yeus fur cette relation de laculture & de la préparass tion du Tabac. Et nous pouvons ajouter, que s'ils avoien£s veueus-mêmes, les pauvres fervireurs & les Efclaves qui tra8} vaillent à ce pénible ouvrage, expofez la plus grande partie” du jour aus ardeurs du Soleil, & occupez plus de la moitié de la: nuit, à le mettre en l’état auquel on l'envoye en l'Europe, fans? doute, ils eftimeroient davantage, & riendroient pour pres cieufe cette herbe, qui eft détrempée par lafueur detant de miferables creatures. | ia : til In’eft pas befoin d'ajoutexicy, ce que les Médecins écris vent des merveilleus.effers du Tabac, veu que celacft pros prement de leur fait, & qu'il fe trouve aflez amplement dans: leurs livres, Nous dirons feulement qu'il faut bien que fes vertus foient grandes, puis qu'il a fon cours par toutle Mon- de, & que prefque toutes les Narions de la Terre, tant.les: civilifées que les Barbares, luy ont fair une receptionfavoras ble, &enont confeillé l’ufage. Que fi quelques Prinecs l'on£ interdit enleurs Etats, de crainte que l'argent de leurs fujets,: qui leur eftrare & precieus, ne s'enailleen fumec, & nes’es coulc deleursmains, pour une chofe qui n’eft pas necefaire à l'entretien de la vie, il n’y a toutefois perfonne, qui,ne lu doive permettre au moins, de tenir place entre les Drogues: & les remedes de la. Medecine. | 4 Les delicats & lescurieus, parmy les Peuples qui habitent des contrées chaudes , le temperent avec de la Sauge, du Ro- marin, & desfenteurs qui luy donsentune odeur fort agreas ble : Et aprés lavoir reduiten poudre, ils l'attirent par leg parines.. Les Nations qui habitent despaisfroids, n'en ik terdifent pasl'nfage aus perfonnes de condition : & c'eft mê: 1e unc perfection, & une galantiereentre les Dames deces pais-là, de favoir tenir de bonne grace une pipe, letuyaude laquelle eft de coral ou d'ambre,, & latefte d'argent où d'or: 2 LUNA ES ST “ FPE Li Disk FO ARNO, 331 & de Jehdee lafiimée de cette herbe, fans faire aucune grima- ice, & là pouffer hors dela bouche à divers réptifes, qui font paroiftre autant de petites vapeurs, dont la couleur brune, rehauffé la blancheur de leur teint. La compolition que nous avons d’ecrite pour refñidre le Tabac de bonne odeur, fera bien receué ; fans doute, parmy ces perfonnes, quitrouvent tant d'agréement & de delicateffe en cette fumée. + Au he. on ne fauroit dire la quantité de Tabac qui fe tire tous les ans de la feule Ile de Saint Chriftofle : &c’et tüne chofemerveilleufe que de voir le nombre de Navires de. France, d'Angleterre, de Hollande, & particulierement de Zelande , qui y viennent entraicte, fans qu'aucun s’en retour- ne vuide. Aufli le commerce que cette derniere Province a toujours entretenu en cette Ile & aus Iles voilines, a fait de riches & puiffantes maifons à Middelbours & à FI re Etencoré à prefent le principal trafic de ces deus ville ou fontles plus confiderables de la Zelande, fe fait en ces Hide qui leur font ce que les Mines du Perou font à l’Efpagne, CHAPITRE CINQUIEME. De la maniere de faire le Sucre, &7 de preparer le Gine … gembre, l'Indiso &r le Cotton. foit à Saint Chriftofle, &aus autresiles, eneuttelle- ment ravalé lepris, qu'on n’y trouvoit plus fon con- te. Dieu mit au cœur de Monlieur de Poincy General des François . de tenter d’autres moyens, pour faciliter la fub- fiftance des Habitans, & pour entretenir le commerce. Er fa Prudence Iny ayant fuggeré, d'employer fes ferviteurs & fes Æfclaves à la culture des Cannes de Sucre, & du Gingembre, & de l'Indigo, ce deffein a cfté fuivy d’une tellebenedi@ion, que c’eft une merveille de voir, quels en ont cfté les heu- eus Mcces, | dé A * Prés que la grande abondance de Tabac que l’on fai- Ex o Mt d At AS MONET RON PO SPP PUR SE A AL ART ee EMI LATTES Add na _ CI Si la lue dd Cine ch Sucre à elté connai quité, du moins l'invention d’en faire le Sucreeft nouvel Les Anciens l'ont ignorée,. aufibien que le Sené, la Cat l’'Ambre-gris, le Mufc, la Civette, & le Benjoin. Ils n fervoient de ce precieus rofeau qu'en. bruvage & en Mec S cine, Et nous pouvons oppofer toutes ces chofes , avec beaucoup d'avantage, aufly bien que nos Horloges, nôtre Bouflole, & nôtre art denaviger , nos Lunettes d’ approche, nôtre Imprimerie ,. nôtre Artillerie, & plufieuts autresbelles inventions de ces derniers ficcles.,. à leur teinture du vraÿi Pourpre, à leur verre malleable, aus. fubtites. Machines.de. leur de & à quelques autres femblables. % Ayant es au livre precedent, la defcription de Ha Canne de Sucre, ilne nous refte qu'à reprefenter la maniere, “donf À on S'en fert pour faire le Sucre. 0 . En décrivant la magnifique maifon de Monfeurle Genef ral de Poincy, nous avonsdit que fa bañle cour eftenrichie den frois Machines ou Moulins propres à:brifer les Cannes de Sucre. La Fabrique de ces Moulins eft de bois plus folide, plus elegante, plus induftrieufe, micus ordonnée, & plus) commode, que celle des Moulins qu'on voit à Maderc & at Brefl. Il n ‘eft pas À craindre icy, comme en ces licus-là, ques le feu gagne les chaudieres boüillantes, & allume un deploss rable embrafement, qui caufe fouventla mort de ceus qui travaillent aus environs. Car on voit boüillir ces Chaudies res, fans appercevoir le feu, qui s'allume, s’attire, & s entres tient par le dehors, dans les fourneaus, qui fontfibien. Cia mentez, que ni la flamme , ni lafumée n'empefchcaucune ment ceus qui font occupez à ce travail, d’y.vaquer fans, crainte d'aucun peril, & fans en recevoir .d’incommao# dité. “il Outre cestrois Monlins que Monfisurle Generafà devanl __ fon. Logis de la grande montagne , il en a fait faire troisk Cayonne, qui eft un des quartiers tenus par noftre Natiol enlamêmelle: lPundéquels, .au lieu que tous les ares fol tournezpar desbœufs,. on par deschevau$, eft Conduit p la cheute d’un gros ruiffeau d’eau vive, qui étant-rama îé dans un grand refcrvoir , & de-là tombant dur une g gt 4 Ve faser de Aure TTL Hourrer L moulin d Rouleau de 7 machine Rouleau qu Visent js ca jé 17 | Ca petis Déye per ou We decoule ÉE0e Banvn 2 regott Luc EE Z nmples din ou & TE Lux vauveaus NS essieu du cgra L'Aralean gui fat ner toutes ler roues dela machine et Jerrent {a machine I. Les plancher ur lesquelles Les Tlegreu = osent les cannes de Jucre 7 JA Je Fe es Tegres que Trenet Moulin, et qu pouffent ler Cannes entre lrRouleaus, : À N fait Voullr lerie tusquer a ce quil Voit epz Z Le A] Chap DÉS ILES ANTLELES 333 de rouë à feaus, fait mouvoir toute la Machine. | À l'exemple de Monfieur le General, les principaus Of- libre & Habitans de l'Ilede S. Chriftofle, ont aufli fait edi- fier des Moulins à Sucre. De forte qu’en cettefeule Ile, on conte aujourd huy beaucoup plus grand nombre de ces Ma- chines, que les Portugais n’en ont bâty jufques à prefent à Madere. Les principaus aprés cenus de Monfieur le General, fe voyenc aus habitations de Meflieurs de Lonvilliers , de Freval, & de Benévent. Et apres ceuslà Monfieur Giraud En a trois en divers quartiers de l’Ile, ou il a de, belles & de grandes habitations, Monfieur dela Roficre, Monfieut Au- ber, Mefheurs |’ Efperance , de Beaupré, de la Éantarne Paris, & de ia Roche, quifonttous Capitaines dans la même Ile, en. ont parcillément fait baftir , comme aufiy Meflieurs ans homme, de Bonne Mere, de la Montagne, Belletefte, Guillou, qui font des principaus & des plus confiderables Es bitans, Les Anglois, en ontaufñfi plufeurs en leurs quartiers, qui font parfaitement bien faits. Quand ces Cannes de Sucre font meures, on les couppe entre deus terres, au deffus du premier nœud qui eft fans Suc, &aprés leur avoir êté le fommet ,. & les avoir purgées de cet . taines petites feüilles, longues & extremement deliées, qui. fesenvironnent, on en fait des faifieaus, que l’on porte au Moulin, pour y être preflez & ecralez, entre deus rouleaus. garnis de bandes d’acier, qui fe meuvent l'un fur l’autre, à mefure que.la Machine eft ébranlée, par l'impreffion qu elle reçoit d’une grande rouë, qui la fait tourner. Le Suc qui en découle, eft reçeu dans un grand bañin où: relerVoir, d’où il fe répandpar de longs canaus dans les vaif.. feaus, quifont deftinez pour lefaire boüillir. Dansles gran- des Sucreries il y a du moins fix chaudieres, dontil yenatrois fortgrandes, qui font de cuivre rouge, & de la largeur & pro- - fondeur de celles des Teinturiers, & qui fervent à purifier le. . Suc qu ondoit faire boüillir-à petit feu, en y meflant detems entems, d’une certaine leflive extremement forte, qui luy fait. poufier en haut toutes lesimmondices, qu’on enleve avec une grande écumoire de cuivre. Aprés que ce Suc'eft bien puri- | fié dans ces trois, chaudicres par oùil pale, alternativément, T t. 3, on: 7 Pat" 4 Fx PYEM ET LS Re OX PULL à UE PT LOT POS DURE SE COR AN BURAS EI Se d'a À CN. 9 PRIRENT ÿ He pe "Ain : i À CL 4 FRE RACE AU EPA Er POUR 2 AR Réal LE 1! | | | sé HisToirre MoraLe, | on le coule par un drap, & en fuitre onle.verfe daus trois, duttes chaudieres de metal, quifont fort épaifles! afflezamples. & profondes d’un:bon pied & demy; c’eft dans ces chaudies) res ou ce Snc recoit fa derniere cuifon, car on iuy donnealorsk üh feu plus vif, onicremué inceffamment; & quand'il éleve, fes bouitlons un peü trop haut, & qu’on craint qu'il ne, ré, pañde hors de céschaudicres, on rabaifle fa ferveur en jettant dédans tn peu d'huile d'olive, où debeurre, & à mefure qu'ils s'epaiMir, on le vérfe en I derniere de ces chaudieres ;: d’où! quand it cominenteae figer,il eft mis dans des formes de bois) oude terre, puisil ef potté en des galleries, obon le blanchit: avec une éfpere de terre grafle, detrempée avec de l'eaus qu'on étend déffus, puis on ouvrele petirtron, quieft an dés, fous de chaque forme; afin que tour ce quirefte d’irnmodices) dans fe fucre,coule dans un canal,quile porte dans'un yaïfleaù,! qui éft preparé à cet ufage. 4 22b100).ip. nollir La premiere écume qu’on enleve des grandes chaudieres,,! ne peut fervir qu'aubétail, mais l’autre cfh propre pour faire le bruvagedes ferviteurs & des Efclaves. LeSucqui efttiré dela Canne ne peut duterqu'unjour, &cfi danse rems-là m'eft cuit, ils'aisrir& féchangeen vinaigre. : "Il faut auf ap> porter un grand foin, à laver fouventle refervoir quiconferve le fuc qui eft exprimé; & lescanausparoüilpañle, car s'ils avoient contractéde l’aigreur, le fuc nefe pourroit reduire en, fucre. On gatéroit aufli tout l'ouvrage, fi dans les trois gran= des chaudieres qui doivent eftre arroiées de leflive, on y jet toit du beurre oudel’huile d'olive , oufi dansles trois petites où le fuc fe forme enfyrop & engrain, par la force du feu & par lagitation continuelle qui s'en fait avec une pallette; on verfoit tant foit peu deleflive. Sur tout il fautbien pren dre garde, de ne point laifler tomber de fuc de Citron dans les chaudieres: car celaempefcheroit abfolument lefucre de fe former. | 21917 | >) 1U50ÿM Plufieurs habitans qui n’éfit pas le moyen d’avoir tant de” chaudieres, & de ces grandes machines pour brifer leurs Cans nes, ontdes petis Moulins qui fonit fairscomme des prefoirs, aui font couduits par dens outrois hommes, ou par un {eu cheval, & avec une ou deus chaudieres, ils purifient le fue | - qu'ils RL der + D | il 14 ni . > 4 A À ob AL de A eE Char DIESA: À LES ANTILLES 335 Peer ontexprimé, lereduifenten conliftance de fyrop,.& en | sf de bon fucre, fans autre artifice. … Le plus grand fecret pour faire debon Sucre, confifte à le Br blanchir; Ceus qui ont la conduite des Sucreries de ‘Monfieurle General le favent en perfeétion, mais ils ne le communiquent pas volontiers, De ce que deffus ou recu&il: le quel eftavantase & le profit Hingulier qui revient aus habitans de cette Ile, par le moyende cette douce & pre-: cieufe marchandife : Et quel contentement reçoivent nos Francois, de voir croitie en leurterre, & fi grande abondan- ge & avec fi grande facilité , ce qu'ils n’avoient aupara- Yant que pat Les mains des étrangers, & à grand prix d’ar- pont. | Cette abondance de Sucre , leur a donné envie de confire une infinité d’excellens fruits ,.quicroiffent en cette Ile : teis que font lés Oranges, les Limons, les, Citrons,. &r autres: Maïsils reuffifent fur tout au Gingembre, dont nous parlerons incontinent, & enl’admirable confiture qu ils font du fruit de Ananas, & des fleurs d'Oranges & de Citrons. | Quant à la preparation du Gingembre, lorsque laracine eft mure, onlatire deterre: : Puis on la fait fécher en dgslieus fecs & aërez : la remuant fouvent de: peut qu'elte nefe çor- rompc. Les-uns fe contentent de l’expoferau Soleil pourla fécher : mais les autres jettent encore par. deffus.de la chaux vive, reduiteen poudre, pourattirer plus facilement l’huuni- dité. Cette racine, qui tient un rang confiderableparmyles éfpiccries , fe transporte par tout le monde ; maiselle SAQAE pauter ement recherchée aus païs froids. Nos Francois, la tirent par fois de terre avant qu’e élle foit meure, & la confiffent entiere avec tant d'artifice, qu’elle-de- Vient rouge & transparente comme un verre. Le Gingembre confit quel’on envoyedu Brefil, & du Levant, .eftordinaire- mentfec, pleindefilamens, & trop piquant poureftre mangé _avecplaifir. Mais celuy qu’on prepare à Saint Chriftofle, n'a point du tout defibres, & ileft fi bien confit, qu’il n'y demeu- re rien qui refifre fous la dent, quandonen veut ufer. .. la une proprieté finguliere pour fortifier la poitrine Hand cle eft affoiblie, par un amas d'humeurs froides, éclair (Fe MO qu TES PRO EC PR ANS ANNE INA à AR OU T4 ALT EE "LEE w DURS "< le LOT 22 us Me WT AREA Le PMTIEL FN MEL IM u 4 À S ' 336 HS rite Ma À a Le F éclaircila voix, -adoucir} haléne, rendre bonne: are Vifage, cuire les cruditez de l'eftomac ;. ay der di digefion rappeller l'apétit, & confumer les eaus & lapituite, qui rene dent lé cotps languiffant. Et même on tient, qu’il conferve} & fortifie mérvéilleufement: la memoire ; en diflipant les humeurs froides , ‘ou la pituire du cerveau. On reduirauffi cette racièé en pafte, de laquelle on compolfe une conferves | ou une Opiate qui a les mêmes effets. Venonsàlindigo. La plante étant coupée, eft mile en . petis faiffleaus ; ‘qu’on laifile pourrir dans des cuves de pierre ou! dé bois, pleines d’eauclaire, fur laquelle onverfedel'huile, qui felon fa nature, furnage & occupe toute la fuperficie, On Charge de pierre les Etans, afin qu'ils demeurent fous l’eau, & au bout de trois où quatre jours que l’eaua boüilly par la feule vertu de Ja plante, fans qu’on l'aitapprochée du feu, la. feüille étant pourrie, & diffoute parcette chaleur, naturelle quieften la tige; onremuéavec de gros & forts batons toute, la matiere qui eft dansles cuves. pour luy faire rendre toute fa fubftance, & apres qu’elle eft repofée, ontirede la cuvele bois de latige qui ne s’eft pas pourry. Puis onremué,encore! pat plufieurs fois, ce qui refte dans la cuve; & aprés qu'on la laiffé rafloir, of tire parun robinet l’eau claire qui furnage:i Et la lie, ou le marc qui demeure au fonds de:la cuve, eft mis fur des formes, où on le laiffe fécher au Soleil. Ce marc , eft la Teinture qui eft:rant cflimée, & qui porte le nom #7rdigo. 14 Quelquesuns, exprimenten des prefloirs ve faiffeaus. de la plante pourrie, pout luy faire rendre tout fon fuc: Mais par ce que ce font les feüilles de l'herbe ,: qui compofent cette marchandife, ceus qui la veulent rendre de plus grand prix, {c contentent d'avoir le marc qui demeure apreslacorruption de ces feüilles, & qui fe trouve apres l'agitation, au fonds de la cuve. Le lieu où l’on prepare cctte riche couleur de pours pre violette, s'appelle, /Zxdigoterie. Les François des Antilles, ont demeuréun fortlong tems avant qucde fairetrafic de cette marchandife, à caufe que la plante dont on la compofe, étant de foy-même de forte odeur , exhale une pape infuportable, quand elle efk pour- ra : Û É LUE LE 1 d: : pull « #, LTA 11 & SUN 2 | Ch: DES ÉLDES ANTITEES 337 pourrie: ‘Mais dépuis que le Tabac à efté à un prix fort bas, & qu’en quelques endroits, la terre ne s’eft plus trouvée pro- pre, pouren produire de beau comme cy devant, ils fe font adonnez à la culture de L Indiso, dontilstirent à prefent un grand profit. Enfin pour ce qui eft du Cotton, nos François ne s’occu- pent pas beaucoup 2 à l'amañler, encore qu'ils ayent plufieurs arbres qui le produifent auslizieres de leutshabitations. Ce qui toutéfois eft fort peu dechofe, au prisde ce que l’on dit d'un certain quartier, d'une Province dela Chine, Car Tri- gaut au Chapitre dixhuitièéme du Livre cinquiéme de fon Hifioire, rapporte qu il y croift tant de Cotton, que pour le mettre en œuvre, il s’y conte jufques à deus cens mille tif ferans. - Les Angloisde la Barboude , font grand trafic de cette mar- chandife, comme aufli ceus qui demeuroient cy devant en J’Fle de Sainte Croix. Il n’y a pas grand aftifice à mettre le Cottonenétat: carilne faut quetirer du bouton entr’ouvert cette matiere, qui fe poufle au dehors préfque d'elle même. Et par ce qu’elle eft meflée des grains de la femence de l’arz bre, quifonten forme de petites fêves, liées avecle Cotton, au milieu duquel ils ont pris naiffance, on a de petites ma- chines, qui font compofées avec tel artifice, qu’au mouve- ment d’une roué qui les fait jouër, le Cotton tout net tombe d’un côté, & la graine de l’autre, Aprés quoy, on entafle le Cotton en des facsavec violence, afin qu'iloccupe moins de place. - Ce font là les principales occupations, qui entretien- nent le commerce des Iles, & dont les Habitans font leur trafic ordinaire. Vy C H A- “ 338 phtnleic MokraALE, CHAPITRE SIXIÈME. ‘4 Des Emplois les plus bonorables des Habitans Etrangers | | _des Antilles : de leurs Efclaves, & de leur Gouvernement. Es Colonies érrangeres qui habitentles Antilles, ne font pas feulement compofées de gens errans & de bafle condition , comme quelques uns s’imaginenre, mais auf de plufieurs perfonnes Nobles, & de plufieurs fas milles honorables. De forte que les occupations que nous venons de décrire, ne font que pour les moins confiderables Habitans, & pour ceus qui ont beloin de gagner leur vie par le travail deleurs mains. Mais les autres, qui ont des home: mesà gages, quiconduifent leurs ferviteurs & leurs efclaves cntousces ouvrages ; ménent, quant à leurs perfonnes, uné vie fort douce & fort 2 agreable. Leurs emplois & leurs dj: vertiflemens, aprés les vifites qu’ils font profeflion de rendre, & derecevoiravec grande civilité, font la chaffe, la pefché, & autres honneftes exercices. Et à l'exemple de Monfieur le General, qui eft incomparable à recevoir avec courtoifie, & à traitter magnifiquement ceus qui le vifitent, foit des François, foit des Etrangers: tous ceus de nôtre Nation de fon Ile, qui lontde la condition que nous venons de reprefen- ter, tiennent à faveur qu'on les frequente , & qu'on accepte les témoignages de leur civilité, qu’ils rendent avectant de franchile, & d’un cœur fi ouvert, que l’on s’en trouve double: ment obligé. Ils font fplendides dans les feftins qu’ils fonrà leurs amis, où , avecle bœuf, le mouton, & le pourceau, les. Volailles, le gibier de toutesfortes, le poiffon, Ja patiffèrie, & les confitures excellentes, ne font non plus épargnées qu'aus meilleures tables de France. Tousles Officiers excellent no= tammentencescourtoifies. Etàleurimitation, les moindres. Habitans tiendroient avoir commis une incivilité, s'ils avoient congedié quelcunhorsde chez eus, de à luÿ avoir prefentéà boire, &amanger, | Le ‘ tChap.6 DES ÎLES ANTILLES. "539 MJeslles; & au défaut de toutes ces chofes , on y fait premiere- ment une efpéce de bruvage delicieus, avec cette douce li- queur qu'on exprime des Cannes de Sucre, laquelle étant gardée quelques jours, a autant de force que du vin d’Efpag- ne; on entire aufli de l'excellente eau de vie, qui eft fort approchante de celle qu ‘on apotte de France; Mais ceus qui en prenent avec excés, en font dangereufement malades, De plus, ils font plufeurs autres fortes de boiflons avec du fuc d’Oranges, des Figues, des Bananes, & des Ananas, qui font toutes fort delicieufes, & qui peuvent tenir lieu de vin. -Ils compofent aufñli de la Biere, avec de la CaMaue, _& des Racines de Patates, quieft prefque auffi agreable, nour- riflante & rafraichifflante, que celle qu'on leur amene d'Hol- lande. Quant aus emplois honotables & neceffaires tout enfem- ble pour la confervation des Habitans deslles, ils font tous profeflion de manier lesarmes, & les chefs de famille ne mat- chent guetes fans é épéc. Chaque quartier cft rangé fous cer- fains Chefs & Capitaines qui y commandent. Lis font tous bien armez, & fouvent on leur fait faire lareveuëé, & les exer- \cices de guerre, même dans la paix la plus profonde, fibien qu'entouttems ils font prets, au premier coup de tambour, pour ferendre au lieu defigné parleurs Capitaines. En l’Ile de Saint Chriftofle, outre douze Compagnies de gens de pied, il y a aufli des Compagnies de Cavalerie, comme nous en avons fait mention cy deflus. * Etpar ce que toutes les perfonnes de condition honorable, qui font enañlez grand nombre en ces Iles, ont des ferviteurs _& des Efclaves, qui travaillent à tous les ouvrages que nous avons fpecifiez, & qu’en France on ne fe fert point d’Efciaves, n’yayant entoute l’Europe que les Efpagnols & les Portugais, quicnaillent acheter au païs de leur naiffance, Angole ou Cap Vert, & Guinec : il fera bon que nous en difions icy quelque chofe. Mais premierement, nous parlerons des ferviteurs à loüage,& quine font que pour untemis. Les François, que l'on mene de Franceen Amerique pour fervir, fonc ordinairement des aétes oblicatoires à leurs Mai- AB: Viry 52 tres, V2 Le Vin, la Biere, & l'Eau de vie, manquent rarement dans Ne NCA Ce go Hésrette Mbnh et pu | tres, par devant des Notaires: Par lefquels aétes ils s’obli- gent de les fervirtrois ans, moyenant un nombre de livres de Tabac quileur font acordées pendant cetems-là. Acaufe de cès trois ans de fervice où ils font engagez, on les appelle” communément des Trezte-fix mois, au langage des Iles. Il yena qui s’imaginent, que pour nes eflre pas obligez par ecrit à leurs Maitres dés la France , ils en font moins engagez lors” qu'ils font rendus dansles iles. Mais ils fe trompent fort em celà. Car lors qu’ils fe produifent devant un Gouverneur, pour fe plaindre de ce qu’on les a embarquez par force, ous pour repréfenter qu'ils-ne fe font pas obligez parécrit, onles condamne à fervir trois ans, celuy quia payé leur pañages , où tel autre qu'il plaira à leur Maitre. Sile Maitre n’a promis: pour falaire à fon fervireur que l'ordinaire des Iles, il n’eft obligé à luy donner pendant tous ces trois ans, que trois cens livres de Tabac; Ce quin'eft pas grand chofe pours’entre- tenir de linge & d’habits. Car ce Maitre ne luyfournit chofe quelconque pour fon entretien, que la fimple nourriture Mais celuy qui dés la France promet de donner plus de trois cens livres de Tabac à celuy quientre à fon fervice, eftobligé à les luy fournir exaétement , luy en euft-ilpromismille. Cet pourquoy il eft avantageus à ces pauvres cngagez, denesen pas aller aus Iles, fansbien faire leur marche, avant que de s'embarquer. Quant aus Efclaves ou Serviteurs perpetuels dont on fe: fert dans les Antilles, ils font originaires d'Afrique ; & on les améne du Cap de Vert, du Royaume d’Angole, & d’autres: ports de mer qui font en la côte de cette partie du Monde. C'eft-là qu'onles achete, de même que l’on feroit des beftes de fervice. Les uns font contrains de fe vendre & defe reduire à une fervitude perpetuelle , cus & leurs enfans, pour éviter la faim, Car aus années de la fterilité , laquelle arrive affez fou-1 vent quand les fauterelles , qui comme des nuées inonden£ le pais, ont broute tout le fruit de la terre, la neceflité les preffe tellement, qu’il n’y a forte de iguete) où ils ne fe fou- mettent volontiers pourveu qu’ils ayent dequoy s’émpefcher dc mourir, En ces occafons lamentables, le Pere "0 enfans A Ve nc DES lLES ANTILLES 344 enfans pour du pain, & les enfans quittent Pere & Mere fans regret. | Lesautresfont vendus, ayans été faits prifonniers de guerre parquelque Royteler, car c'eft la coutume des Princes de ces quartiers-ià, de faire fouvent des courfes dans les Etats de leurs voifins , pour prendre des prifonniers, qu’ils vendent | aus Portugais & aus autres Nations, quivontfaire aveceus,. | cét étrange & barbare trafic. On leur donne en échange, du | fer qu'ils prifent âl'egal de l'or, du vin, de l'eau devie, ou quelques menuës hardes, Ils captivent auffi bien les femmes queles hommes, & les vendent pefle-mefle, à plushaut ouà moindre pris, felon qu'ils font jeunes ou vieus, robuftes ou foibles, bien ou mal proportionnez de leur corps. Ceus qui les aménent aus Iles, les revendent derechef quinze ou feize cens livres detabac, chaquetefte. | Si ces pauvres Efclaves tombent entre Îles mains d’un bon, “Maitre, qui ne les traitte pas avec trop grande rigueur, ils _préferent leur fervitude à leur premiere liberté: & s'ils font mariez, ils multiplient à à merveilles dansles paischauds.: Ils font tous noirs, & ceus qui ont le teint d’un noir plus Jui- fant, fonteftimezles plusbeaus. La pluspartont le nez un peu plat, & degrofles levres: ce qui paffe aufli pour beautéentre eus. On tient même qu’en leur pais, les fages femmesleur applatiffent ainfi le nez tout exprés à leur naiflance. Is ont tous les cheveus fi frifez, qu’à peine fe peuvent ils fervir de _pcignes: mais ils ufent de l'huile de cét arbriffeau que l’on: nomme Palma Christi, pour empefcher lavermine. Ils font forts & robuftes au pofhble, mais fi timides & fi peu adroits à manier les armes, qu'on les domte facilement, | . Leur naturel eft fufceptible de toutes impreflions; &.les premieres qui leur font données parimy les Chreftiens, aprés qu'ils ont renoncé à leurs fuperftitions & à leurs idolatries, ils _ les gardent conftamment. En quoy, ils font differens des Jn- diens de l’Amerique , qui font changeaus comme des Ca- meleons. Entre les François habitans des Antilles, il y a de es Négres qui jeûnent exaétement le Carefme ,- & tous.les: autres jours de jeûne qui ieur font ordonnez, nonobftant deurs travaus RARATSS & çcontinuels. ; ÿ NL 3 Us Ke 748 EU ra FA FO, AA ROMANS Lu Le | 342 … HÉS'TOTIRE MORAEE.S ‘Ch À Hs font ordinairement orgucilleus & faperbes : Etaulieu que les Indiens veulent être traittez avec douceur, & qui ils. | fe laiffent mourir de trifteffe, fion les rudoye tant foit: peu; ceus-cy au conrraire, doivent être rangez à leur devoir past les menaces & par Les coups. Car fi onfe familiarife un peur trop avec eus, incontinent ils en abufent, Mais, fi on les” châtie avec moderation quand ils ont failly, ils en devien« nent meilleurs, plus fouples, & plus obeiflans, & fe louënt de: leursmaitres. Siauflion ufe de rigueur exceflive en leur en“ droit, ils prennent la fuite, & fe fauvent dans les montagnes; où ils ménent, comme de pauvres beftes, une vie malheureus fe & fauvage, & on les appelle alors Négres CHarons , c'eft à! dire Sanvages : Oubienils s'étranglent par defefpoir. 1i faut donc garder en leur conduite un milieu , entre l’extreme fe! verité & la trop grande indulgence, fi on les veut conferver! en leur devoir, & entirerun bon fervice. 4 Ils s’aiment-paflionément entreeus, & bien qu'ils foyent. nez en paisdifferens, & quelquefois ennemis Icsuns des au- tres, ils s’entrefupportent & s’entr'aident aubeloin, comme s'ils étoyent tous freres, Et quand leurs maitres leur donnent la liberté de ferecréer, ils fe vifitentreciproquement, & paf= fent les nuits entieresen jeus , endanfes, & en autres pañe= tems & réjouiffances, & même en petis feftins, chacun d’eus épargnant ce qu’il peut, pour contribuër au repascommun. Ils fé plaifent à la mulique, & aus inftrumens qui peuvent rendre quelque fon agreable & faire une efpéce d'harmonie, . Jaquelle ils accompagnent de leurs vois. Autréfoisils avoient. à Saint Chriftofle un certain rendez-vous au milieu des bois, où ils s’'affembloient trous les Dimanchés, &tous les autres jours defefte, apréslefervice del'Eglife, pourdonñer quel-" que relafche à leurs corps. Ils pañloyent-là quelquefois le tefte du jour, & la nuit fuivante, en danfes, &enentretiens, aarcables, fans prejudice de F ouvrage ordinaire: de leurs mai tres. Mèmeonremarquoit, qu’aprésqu'ilss'étoyent divers tis de cette forte, ils travailloient de beaucoup meilleur cous rage, fans témoigner aucune l’affitude, & micus que s'ils euf- féntrepoié en leurs cabanes toutle long. de la nuit, Mais pat ceque, pour entr tenir CES rÉ ‘jouitfances publiques, NT oient 4 |] te et D. 6 DES is ANTILLES C7" ir fouvent les volailles & les fruits des voifi ins, & quel- quefois de leurs maitres, l’exquife fagefle de Moubens le Ge- neral, qui n'eftime pas les moindres chofes, indignes de fes foins, leurainterdit ces affemblées noturnes : & à prefent s'ils fe veulent divertir, ils le font feulement en leur voifina- ge, avec la permiflion de leurs maitres, qui leur accordent volontiers cette honnefte liberté. . Aurefte, celuy qui a une douzaine de ces dre] peut étreeftime ete. Car outre que ces gens-là cultivent & en- tretiennent tous les vivres nece His, pour la fubfftance de leurs maitres, & pour la leur: étant bien conduits ils font beaucoup de marchandife de Tabac, de Sucre, de Gingem- bre, & d’Indigo, quiapportent un ‘grand profit. Et leur fer- vice étant perpetucl, leurnombres’accroift de tems en tems, par les'enfans qui leut naifent; lefquels pour tout heritage fuccedenr à la fervitude & à la fujettion de leurs parens, Tous les Habitans étrangers, quiontleur demeure en ces Iles, fe gouvernent felon Les Lois & les coutumes deleurs pais. | Parmy les François de Saint Chaiftofle, la Juftice s’admi- niftre par un Confeil compofe des principaus Officiers de da Milice de l'ile, auquel Monfeur le General Préfide. Et bien qu'il yaitdes mailons propres & deftinées à cette ation, | comme cette Chambre du Confeil, que nous avons de- _crite en fonlieu, neantmoins ce Confeil s’affemble par fois, : felon que le tems & les affaires le peuvent requerir, & que Monfieur le General le trouve le plus à propos pour fa com- _modité; fous uncefséce de grand Figuier, quieftdelagrof-. feur du plus gros Orme, proche le Corps-de-garde de la Bafe fe-terre, & rout joignant la Rade, C'eften ce Confeil , que fans ufer de tant de formalitez que l'on a inventées pour RER les Procés immortels. tous les differens qui peuvent furvenir entre les Habirans, font vui- dez à l'amiable, & terminez le plus fouvent à la premicre feance, fans qu’il coûte rien aus parties, finon ce quecelle qui eft uncc avoir tort , doit payer, fuivant la coutu- me, au profit des pauvres , .& de l'entretien de l’Eglife, & Hpone la fatisfation de la partie qui eftoit intercfée, | Ge ! MANU ANA "AE rl 344 Hfsroire Morart, € C' A 2 Ce Confeil condamne aufi à mort en dernietireflort. a | Les Gouverneurs des autres Iles, rendent aufli la Juftice, | chacun en fon Gouvernement. De forte, qu’il ne faurpas fe perfuader qu'on vive en ces païs-là, fans ordre & fans régle, comme plufieurs fel’imaginent. Et c'eftune merveille, de ce qu'y ayant là des perfonnes ramaffées de tant de! divers pais, & quifont d'humeurs fi differentes, le defordrene s’y foit pas Slifé, & qu'on les puiffe contenir dans le devoir & la fujetion des Lois. 3 Voila pour ce qui regarde les Habitans an: des Antilles. CHAPITRE SETTIEME. De L'origine des Caraïbes, Habitans Naturels du Pai Ordre que nous nous fommes propofe, demande que nous parlions deformais, des indiens Habitans Natu= rels des Antilles. Et il n’eft paft befoin d’agiter icy cette” | grande & difficile queftion, conunent la race des hommes. s’eft répanduë en l’Amerique, & d'où elle eft venué en ce Nouveau Monde. De grands perfonnages ont traitré cette matiere avectant de fufffance, d’exaétirude, & de folidités que ce feroit une chofe ennuyeufe & fupèrfluëé d’en entre tenir prefentement les Leéteurs. Joint, que l'Hiftoire de l'O tigine de nos Sauvages Antillois, ne requiert pas que nous en prenions le commencement fi haut , ni fi loin. Les Anciens & naturels Habitans des Antilles, font ceus que l’onanommez Cesribales, CAntropofages, où Mangeurs d'hommes: & que la plüpart des Auteurs qui en ont écrit, appellent Caribes : Mais leur nom primtif & originaire, & quia plus degravité, eftceluy de Caraïbes, commeils le pro= noncent eus-mèmes, auffi bien que ceus de leur Nation, qui fé trouvent en la terre ferme de l’Amerique: foit au conti» nent Septentrional, foit au Meridional. Et par ce que Fe _auuL ve 2 _ Cha Fr? 14 AN PELLE. ie De Fappellation 14 plus commune , en la bouche de nos Francois Habitans de ces Iles, & qu'elle eft fuivie parles der. nicrs Ecrivains , nous” emwloyerons pres quel autre, cn la füitre de cette Hiftoire, : | SH. esin Quelques uns eftimerit que ce nom de Caraibes n 'eft pas haturel aus Sauvages Antillois; mais qu’il leur a été impofé par les Efpagnols, comme à plufieurs Sauvages du Continent Meridional qui le portent: de même que celuy de Galibé, où de Cadibites , à leurs alliez Habitans du même Continent; Ceus qui font de cette opinion, difent queles Efpagnols ont bien pü donner à ces Peuples ce nom de Caraïbes, veu qu'ils Ont parcouru tous les quartiers de l’Amerique Meridionale, & qu'ayant fait les premieres Cartes, ils ont marquéces Na- tions-là fous ce nom, qui leur eft ‘demeuré dépuis.: Pout preuve de cela, ils aléquent , que les Caraïbes ne fe nomment jamais ainfi entr’eus, finon lors qu'ils font yvres, & qu'ayant da telte pleinede vin, ils fautent & fe réjoüiflent, difant en leur Baragoin, C#oy bonne Caraïbe. Que hors de là, ils fe fer- vent feulément de ce mort lors qu’ils font parmy les Etran- gers, & que dansieur négoce, & leur communication avec eus , ils fe veulent donnerà connoitreà eus, fachantbien que ce nomleureft connu. Mais quentr'eus ils s'appellent tou- jours, aufli bien que font ceus deleur Nationde la Terre fer me, & les Calibités, Cafizago, quieft lenom des Hommes ; & Calliponar, qui cft celuy des Femmes. Erqu'ils fe no: mmenr encore Oxbao-bonon, c'eftà dire, Æabitans des Iles, on Infu- laires : de même qu'ils appellent ceus du Continent, Baloxé- bonor, c'eftàdire, Habitans deterre ferme. Avec tout écli neantmoins, il n'y a guere d’aparence que le nom de Caraïbe foit venu des Efpagnols, & quenos Infu laires nel’ayent porté que dépuis qu'ils ont été connus d’eus ; Premierement, parce qu'avant que les Efpagnols niles Port: gais euffent penctréau Brefil, ils’ytrouvoit de certains ho: mes plus fubtils & plus A queles autres, que lès Bree filiens nommoient Caraibes, ainfi que jcande Leryl à CINA Te qué dans fon Hiftoire. Secondementil eft conftant , qu'il y a des Sauvages qui portent le nom de Caraibes, en des quartiers " “shpiritalé de l'Amerique Meridionalc, eules Efpagnols XX n'ont #46 HISTOIRE MORALE, apr n’ont jamaïs eu de commerce. Car non Béiee ceus de la Nation de nos Infulaires, quihabitent le long de ces coftes de l’ Amerique Meridionale, & qui font vaifins des Colleg nies Hollandoifes de Czyenne & de Berbice;. mais ceus en« core qui demeurent bien ayant dans ce Continent Meridio= nal, au deflus du fault des plus.celebres rivieres, s ’apellent eus mêmes Caraïbes. De plus, nous verrons dans la fuitte de: ce Chapitre, qu'il yaau Continent Septentrional une Nation! puiflante,. compolée en grande partie de certaines Familles qui fe glorifient encore à prefent, d'eftre Caraibes, & d'en: avoir reçculenom,long-temsavant que l’Amerique ait été découverte, Aprés, quand mêine les Efpagnols auroient. voulu impofer cenomà routes ces Nations, comment pour toit on prouver qu'elles l'euflenr voulu accepter de la mais de gens inconnus & ennemis : Or il elt certain que non feus lement tout ces peuples, a cus-mêmes Caraibes, mais que de plus, ils fe glorifient & tirent avantage de ce nom comme Monfeur du Montel l’a ouï de leur bouche plus fieurs fois : fe plairoient ils à faire trofée d’un nom qu'ils autoient reçeu de leurs ennemis > Que fi, comme nous lé verronStantof, les anceftres de nos Sauvages Infulaires, ont reçeu des Apalachites lenomde Caraïbes, au lieu de celuy: de Cofachites qu’ils portoient auparavant, ilsle prirent de pers fonnes amies & confederées , & même comme un élose d'honneur ? Enfin, cen’eft pas feulement dans l'yvrefle, & dans la débauche, que nes indiens. Antillois. fe nominent Caraïbes, mais aufh, lors qu'ils font fobres & de fang froids Que s'ils fenommententr'eus Calinago, ils peuventbienavoit plufieurs noms diferens, fans que pour celail s'enfuive, que les Européens leur en ajent donné quelcun de ceuslà. Pouf. ce qui eft du nom d’Oxbuo-bonon, fafignification montreaflez, qu'il ne leur eft pas particulier, & qu ile peut apliquerà tous les: Infülaires gencralement : Et s'ils fe fervent plutôr. de nomde Caraibes, que d’unautrenom, en parlant aus Etrans cers, c’eft parce qu’ils favent en effet, que ce nom leureft plus: connû : Mais celæ n’emporte pas, qu’ils l’ayent reçeu des Efpagnols , il feroit fans doute plus probable de dire, queles: ré l'ayant apris d'eus, “Equroient en fuite communis qué ‘Ch DES ÎLES ANTILLES. 54 que aus autres Européens. Mais au fonds, il n'importe guére _cequel'onencroye: Er chacun en peut avoir quel fentiment Alluy plaira. . Nous ne faifons que propofer ce qui nous femble plus vray-femblable. | | a | 1 Quantàl'Origine des Caraïbes Infulaires, ceus qui en ont parlé jufques icy, onteu fi peu de lumiere pour fe conduire dans cette obfcure antiquité, qu’à vray dire ils n’y ont marché qu'âtâtons. Quelques uns s’imaginent qu’ils font venus des Juifs, fe fondantentre autres chofes, fur ce que les parentes des Caraïbes leur font naturellement aquifes pour femmes, & qu'une partie d’eus, ne mangent point de Pourceau, nide Tortuëé. Mais c’eft prendre la chofe infinimentloin, & fut de tropfoibles conjectures. ]ly en a, qui les font deriver du havre de Caribana, & qui prerendent qu'ils en font iflus. Mais cette opinion n’eft fondée que fur la feule rencontre des mots de Caribana & de Caribes , fans aucun autre fonde- ment, | _ D'autres difent parune fimpleconjeure, queces Sauva- es font Originaires des grandes Iles, & qu'il nya pas bien long tems qu'ils habitent les Antilles, n'étant que des refu- giez, desreftes, & des parcelles de debris, en un mot'des téchappez des horribles mafacres que firent les Efpasnols, lors qu’ils s'emparerent de Saint Domingue, Cube, jamai- que; & Porto-Rico.. Mais la verité de l'Hiftoire nous té moigne, que dés le commencement de la découverte de lAmerique, les Antilles étoient occupées & peuplées par les Caraibes. Etque d’abord, ils furent furpris & mal-traittez par les Efpagnols. Mais que puis aprés les Efpagnols étant Vivement repoufez, & reffentans beaucoup d'incomrmodi- tez de certe guerre, firent une cfpecé d'acord avec quelques uns d’entr'eus : comme nous le verrons plus particulierce ment au Chapitre de leur Guerres. Ajouftez à cela, que les Indiens de Corad@h qui font fans contredirde ces veritables téchapez, & qui ont encore parmy eusdés perfonnés vivan- fes ,'quidemeuroient au port, dir 4 prefent 4e l'Ile » Pache, en Flie Hifpaniola, quand les premiers Efpagnols y aborderent, n'ont aucun mot de la langue Caraïbe en la leur, ni aucune faflon de faire, d’où l’on puiffe recueillir qu’ils ayent jamais i #0! RL ANE) QU {à & ed LU à ° j F7 LES, RE L pr + MAPS ASP TNT ARTARC LORD LE AR CRE EURO À ARR SSL AL ALP ETS à Us HisTOIRE MoRaALE ‘Ch eu de communication avec les Caraïbes. Outre que ceus des grandes Iles, qui pouvoient prendre la fuite pourcviter la tyrannie des Efpagnols , avoient bien meilleur conte de feres tirer aus terres quiétoient au deflous d’eus, & où les vens res guliets les portoient, que de remonter contre le vent, &ainfi retarder leur fuite, s expofer à à mille perils delamer, & als . longer leur voyage de vint fois autant, Carc ’eft merveille quand des vaiffleaus. tels que font lesleurs, peuvent gagner contrele ventune lieuéenunjour. Et il arrive Ie plus fous vent à de bien grands vailleaus qui veulentremonter, qu ls reculent plus en trois heures qu'ils n’avoient avancé en fix jours. Nous favons de bons Pilotes, qui ont mis trois mois àremonterdu Cyl-de-Sac, de Saint Domingue, à Saint Chris ftofle; au lieu que pour defcendre de Saint Chriftofle à Saint Domingue, il ne faut d'ordinaire qné quatre ou Cinq jours. au plus. j | 7 Quant au fentiment que les Caraïbes eus mêmes ont de leur propre origine, ignarans les monumens-de l'antiquité, autant que peu curieus de l'avenir , ils croyent la plupatt eftre venus des Calibites ou Galibis, leuts alliez & grans amis , Habitans de l’Amerique Meridionale, & voilins des Aroïagues, ou Aloïagues . cncette contrée, ou encette Pros vince, qui fe nommé communément Guyane, ou: Cofle Saus vage. Et ceus qui adherent à cette opinion, fe fondent fur la conformitédelangage, de Religion, &demœæurs , qui fe trouve entre les Caraibes Infulaires & les Calibires : Bien qu’au refte, cette refflemblance puiffe venir en partie de l'als lance & de l’amitie particuliere qu'ils ont entr'eus, en partie du voifinage des Caraibes du Continent Meridional, &de ces Calibites, & en partie d’autres caufes que nous reprefens terons cy-aprés. Dh . Mais ces pauvres Sauvages Infulaires, nes ‘acébréctll pas _entr'eus, dans le recit particulier qu'ils Me. leur extra@tion, & de ta caufe qui les a portez dans les Iles, & ils ne peus vent dire le tems. Voicy ce que ceus de Saint Vincent, #4 quelques autres, enontrecité à Monfieurdu Montel, & qu'il nous a fait voir dans fes Memoires curieus. Tousles @a- taibes étoient autrefois aff lujetis aus Aroüagues &. obeif- foient {1 4) AA CAN A M MA CHAPELLE Le ts WE (Re 11 CARTON AC PRESS NN A RAIN # De Er LE < & FAT HE li \ ; u “ L ÿ F [| « £ Ch DES a Ye ANS OURS. 349 Mbient à à leur Prince. Mais une partie d’entr’eus ne pouvant plus fuporter ce joug-là, fe rebellerent, Et afin de pouvoir VAVrE EN repos, éloignez de leurs ennemis, ils fe retircrent aus Antilles, quiétoient alorsinhabitées , & aborderent pre- | mierement en l'Ile de Tabago, quieft l’une des plus proches ‘du Continent. Dépuis les autres Calibites fecouërent auf la domination des Arogagues, mais letrouvansaflez forts, où n’ayans pas la mêmeinclination que les précedens, ils demeu- rerent en leur pais : Etils s’y font toujours confervez jufqu’à prelent, qu'ils y vivent encore libres, mais ennemis des 4ro4a- -gues, ayant un Capitaine General de leur propre Nation, qui leur commande. Hs font aufli demeurez jufqu’à cette heu confederez & finguliers amys des Cara ibes, C’eft fur ce recit à même quel’onfonde, & par ei que l’on explique le nom de Curaïbes, comme s’il fignifioit _Rebelles, foit qu'il ait efté impofé à nos Antillois par les Aroñagues , foit que ces Peuples l'ayent pris ens mêmes, pour leur fervir d’une efpece de trofée, tirant gloire deleur noble foulevement, & de leur genereufe Rebellion, quiles a mis en paix & en liberté. Mais il ne fautautrechofe pour mor- trer que Caraïbe ne veut pasdire Rebelle, comme le pofe entr’ autres un certain Journal d'un Hollandois , finon qu'il y à plufieurs Colonies en divers endroits de la terre ferme de l'Amerique, foit au Septentrion, foit au Midy, que perfonne ne pretend, & ne peut pretendre, avoir jamais efté fous la puiflance des Arogagues, & qui cependant portent ce nom de Caraïbes, Que s’il y en ad'entr'eus qui fe foyent rebellez contre d’autres Souverains ,. s'étans dépuis reconciliez avec. eus, & vivant encore aujourduy au milieu d’eus, fous ce nomde Caraïbes, ainfi que nous le verrons plus particulicre- ment tantoft, il nyanulle apparence, qu ilexprime des Re- belles, puifque ce leur feroit une flétriffure . & une marque. d’infamie. * Mais, ceus qui ont converfé long-tems avec les Sauvages. - de la Dominique, raportent que ceus de cette Ile eftiment. queleurs Anceftres font fortis de la Terre ferme, d’entre les. Eahbites, pour faire la guerre à une Nation d CAroaques qui habitoir les Lies, laquelleils détruifirent entierement , la. | X x. 3 refcgz- 350 HisTOoinE MORALE, 4 referve de leurs femmes, qu'ilsprirent pour eus, ayant paf re moyen repeuplé les Iles. Cequifait, qu'encore aujourduy les femmes des Caraïbes Infülaires, ont un langage different de celuy des hommes en plafieurs chofes , & conforme en quelque chofes à celuy des Aroïagues du Continent. Celug qui étoit le Chef de cette entreprife, donnoit les Iles conqui=" fes à fes confidens. Et celuy qui avoit eu en fon partage la. Dominique, fe difoit Oubonton-timani, c'eft à dire Roy, à fe, faifoit porter fur les épaules de ceus que les Infulaires nom ment Labouyow, © eff à dire ferviteurs. | Il y a fi peu decertitude, & tant d'inconftance en toutes ces narrations , & en d’autres femblables que ces pauvres. ignorans peuvent faire fur ce fujer, que felon l'avis des plus” fages, il n’y a guére d’ aparence d’ y afloir aucun fondement, En effet, ces Sauvages eus mêmes, n’en parlent qu’a l’avantu-. re, & comme des gens qui reciteroient des fonges: tancils. ont été peu foigneus de la tradition de leur origine: Etils{e” contredifent & fe refutent les uns les autres, par la diferen-. ce de leurs recits. Nous verrons neantmoins à la fin de ce. Chapitre, ce qui pour fembler probablement, leur avoir donné ocafion à la plupart, de croire qu 35 font venus des. Calibites. | Dans tous ces divers fentimens, que nous avons raportez ou des Efcrits ou des difcours de pluficurs, il y a cecy de. Joüable, que ceusquiles mettent en avant, fuivent les con= noiffances qu'ilsont, & qu'ils font leurseflorts pouréclaircir & pour déveloper des veritez Anciennes & inconnues, Mais . comme la Relation que nous allons donner dej’ Otiginedes Caraïbes Infulaires, eft la plus ample la plus particuliere, la | plus curieufe, & la mieus circonftantiée, qui air paru jufqu’àt prefent, auf la renons nous pour la plus veritable, & la plus certaine, laiffant toutéfois à la liberté du Leéteur judicieus, 1 de faivre tel fentiment qu’il jugera le plus raifonable. Au refte, comme nous devons rendre à chacun la loüange qui luy apartient , lepublic fera redevable de ces particularirez & den ces lumicres, à l’obligeante communication que nous ena donnée Monfieur Bristok Gentilhomme Anglois, l'un des 4 plus curieus hommes du RS & quientre fes autres riches con=. MMp7 Des ILES ANTILLES. -s$x | connoiffances , parle en perfeétion la langue des Vireiniens | & des Floridiens; Ayant veu dans fes beaus voyages toutes lesIles, & une grande partie de l’ Amerique Septentrionale, | C’eft par ce moyen, qu'il a appris exactement fur le lieu même, | dont nous allons faire mention, & pardes perfonnes intelli- | gentes, & quiluy ont parlé avec certitude, l’Hiftoire fuivante | de l'Origine de nos Sauvages, dont il garentira toujours la | verité, lors qu’ilenfera befoin, | | Les Caraibes, font Originaires de | Amerique Septentrio- male, de la Terre que l'on appelle maintenant la Floride. Ils | font venus habiter les Iles, aprés eftre fortis du milieu des | LÆpalachites, entre léquels ils ont demeuré lonsg-tems. Etils y ont laïiffé de leurs gens, qui portent encore aujourduy le nom de Caraibes. Mais leur premicré origine eft des Cofz- chites, qui changerent feulement denom, & furent appeliez. Caraïves, enla terre des Apalachites, comme nous l’allons voit incontinent, Les CApalachites font une Nation puiffante & genereufe,. qui fubfilte encore à prefent en la même contrée de la Fiori- de. Ils habitent un beau & grand pais nomme C4palache, dont ils ont receu leur nom: & qui commence fur lahaue teur de trente-trois degrez & vint-cinq fcrupules, du Nord: de la Ligne Equinoëtiale , & s'étend jufqu’au trente-fepriéme. Ce Peuple, communique à la mer du grand: Golfe de la Mexi- que, oude la Neuve Efpagne, par le moyen d’une Riviere qui prenant fa fourcedes Montagnes CApalates, au pied dé- quelles ils habitent, aprésavoir arrofé plufeurs belles cam- pagnes , fevientenfin rendreenla Mer, pres des Iles de 74- cobago. Les Efpagnols ont nommée cette Riviere, Rio del. Spiritu Santo. Mais les Apalachites luy confervent fon an- tien nom d’'Hitanachi, qui fignifie en leur langue, Belle agreable. Du cofté du Levant, ils font feparez de toutes les autres Nations, par de hautes & longues montagnes, qui font couvertes de nége en leur fommet la plus g grande partie de l'année, ce quiles fepare de la Virginie. Des autres coftez: ils confinent avec plufieurs petis Peuples qi leur font tous: amis & confedcrez. " ñ A MATTER à 852 ts CR Mb Ra CRE Chap.z Ces Apalachites, fe glorifient d’avoir poufié des Cétonid | bien avant dans la Mexique. Et ils montrent encore à prés fentun grand chemin parterre, par lequel ils difentr queleurs! troupes pañlerent pour s’y rendre. Les Habitans du païs les nommerent à leurarrivée Tlarwici, quifignifie CHontazgnars's car ils eftoient plus robuftes & plus genereus qu'eus. Ils placerent en un quartier pareil à celuy de leur naiffance, fitué au pied des montagnes, -enuneterrefertile; Où ilsbâtirent une Ville de même forme & figure que celle dont ils cftoient {ortis, laquelle ils occupent encore aujourduy. Ils s’y font tellement unis par mariages, & par d’autres\ liens de paix, qu'ils ne font plus qu’un Peuple avec eus. Etonneles pour: roit difcerner . s'ils n’avoient retenu plulieurs mots de leur langue originaire, qui “ la feule difference que l'on y re= HSArque. i Aprés que les Apéléchites eurent fait cette peuplade, leg Cofachites qui demeuroient plus au Nord de lAmeriques en un païs merécageus & préfque fterile, & quiavoient vécu, jufques la en bonne intelligence avec eus, fachant qu'ils rs alors détiuez de leurs meilleurs & plus vaillans hom- mes, prirent l’occafon qui leur étoit favorable; pour entre” nat fur ces Apalachites leurs voifins, & les chañier de - leurs demeures, ou du moins partager avec eux la terre où ils habitoient , aprés qu’ils s’en feroient rendus maitres. Ce deffein, ayant été ménagé fort adroitemententre les Ghefs des Cofachites, ils le publierent puis aprés par tous leurs vil- lages, & le firentapprouver à tous les Chefs de familles, qui, au lieu deculriver & d’enfemencer laterre de 7:75, au com mencement du Printems, commeils avoient accouftume de faire chaque rie préparerent leursarcs, leursfléches, &. leurs maflués : & aprés avoir mis le feu en leurs villages, &e s'être munis du pen de provifons qu’ils avoient de refte de l'hyver paflé, ils fe mirent en campagne avec leurs femmes &, jeursenfans, & tout le petit bagage qu'ils avoient, dans la re: | folution de Door ou devaincre, puis qu'ils ne pouvoient. plus rebrouffer chemin, & retourner en un lieu qu'ils avoient détour Se déponilé detoutes fortes decommoditez. En poche sé RER OS LA 15 & « Fr L/ - ÿ L : * “ Chap 7 DES: TEES ANTILLES. 353 : Pal En - cét équipage, ils arriverent bien toft fur les frontieres me leurs voifins. Les Apalachites, qui ne penfoient à rien moins, qu'à avoir un ennemy fur les bras , éroient alorsoccu- .pez à planter leur Hays, & les racines qui fervent à leur | nourritüre ordinaire. Ceus qui demeurent auprés du grand | Lac, qu'ils nomment en leur langue Theomi, ayant apper- ceu célte puiflante armée qui venoit : onde fur sn fe retire rent incontinent aus montagnes voilines, & laificrent leurs villages, & leur beftail, à la difcretion de l’ennemy, Puis ils furentde là autravers de bois, porter lanouvelle de cette irruption, aus Villes qui font dans les vallées, entre les premie- res montagnes, où refidoit le Paracoufe, qui eft le Roy du pais, avec toutes les forces les plus confiderables de fon Etat. Sur certe nouvelle fi furprenante ; Ce Prince , pen- dant qu’il fe preparoit à aller à la rencontre de l'ennemy, fit gagner, par ceus qui fe trouverent le plu-toft prets à cette ex- pedition, les avenuës des montagnes, & mit des embufcades €n divers endroits des grandes forêts, qui fontentrelegrand: Lac & les montagnes, & parlefquelles ii faut pañler pour en- trer en une belle &,fpacicufe vallée, qui a plus de foixante lieuës de long, & environ dix de large ; où font les demeu- res des principaus du pais, & les villes les pius confiderables de l'Etat. _ Pendant queles Cofachites S UIbient au pillage dés mai. Br ils avoient trouvées prés du grand Lac, les Apalachi- tes eurent moyendefe preparer à les recevoir. Mais eus, au lieu de prendre les routes & les chemins ordinaires qui con duifoient au plat païs, qui eft entre les montagnes comme nous avons dit, aprés avoit laiflé les femmes & les ER prés du grand Lac, avec quelques trouppes qu'ils detache- rent de leur armée pour lesgarder, étant guidez par que lues Apalachites qu’ils avoient furpris péfchant au grand lac, furent au travers des bois, des montagnes, & des précipices, où les Chamois n’auroient pù marcher qu'a grand’peine, fe rendre tout au cœur & au centre du pais, en une Province appellée des CAmanites. Us furprirent fäns refiftance les premieres places, qu'ils trouverent gardées feulement pas fes femmes, par les enfans , & par quelques vicillards qui st Y y n'a RE à Etage DE de TORRENT LOAONPAN AE TE V7 AP Re + Lo Sr | PTE UE AU à : f u PS HisTOIRE MORALE, (Chapy, n’avoient pû fuivrele Roy, lequelavec fon peuple, étoitallé attendre l’Ennemy, aus defcentes ordinaires qui conduifent au pals. dur À a Les Cofachites, voyans que leur defein avoit fi bien reu£e fy, &qu’ilyavoit grande apparence qu'en peu de tems ils fe. rendroient maitres detoutlepais, puis que leur commences, ment avoit étéfiheureus, pouflerent incontinent leurs cons queftes plus outre; & ayant des villes de retraitte,oùilsavoient laifé de bons hommes en garnifon, ils furentau devant du Roy d’Apalache, enintentiondele combattre,. ou dumoins,, de l’obliger à leur laiffer la paifible jouiffance d'une partie dur pais. L’Apalachite, fut extrémement furpris quand il apprit que l’ennemy qu'il attendoit aus frontieres & aus avenuës: acouftumées du païs s’étoit déja emparé d’une Province qui: étoit au centre de fes Etats , & qu'il avoit laiffé garnifon: dans les villes & autres places confderables. Neantmoinsy comme il étoit magnanime & courageus, il voulut eflayer ff le fort des armes luy feroit aufli favorable, qu'il croyoit fa caufe bonne & jufte. 11 defcendit donc avec les fiens des montagnes où ils’étoit campé: & aprés avoir anime fes gens. au combat, ilattaqua brufquement l’âvant-garde des Cofa: — chites, qui étoit venu reconnoître fa contenance. Lors que: de part & d'autre ils eurent confumé toutes leurs fléches, ils: vinrent AUS: mains s. & ayant pris leurs maflués s> 1l de fit un grand carnage des deus armées, jufques à ce quêé la nuit les: ayant feparez , les Cofachites remarquerent qu'ils avoient perdu beaucoup des-leurs en cette rencontre, & trouverent qu'ils avoient à combattre un peuple plus vaillant, qu'ils ne s'étoient imaginé : & par confequent qu'ils feroient micus de traitter avec luy a l’amiable, que de hazaïder encor une fois leurs troupes enun païs étranger. 4 4 lis refolurent donc d'envoyer dés le marin des Ambaflas deursau Roy des Apalachites, pour luy prefenter des cons ditions de paix, & pouren casde refus (diflimulant la perte qu'ils avoient faite au dernier combat) luydeclarer la guers re, & lefommer defe tenir preft à l’inftant, pour recevoi Jéur attaque, qui feroitbien plus rude que celle qu'il ay it cxperimentée le.jour. precedent. que. leurs forces étoient ue dant | alors Chap. 7 DES TLES ANTILLES, 35% ‘alors toutésunies. Le Paraconffis d'Apalache ayant ouï ces “Ambaffadeurs , demanda la journée pour advifer fur leur “propofition de paix. Et enfüuite, leur ayant aufli demandé les articles & conventions fous lefquelles ils vouloient trait- ter avec luy, en cas qu'il inclinaft à une paix, ils luy dirent qu'ils avoient quitté leur terre en intention de fe placer, ou par amitié, ou pat force, en ce bon & gras pais qu'il pofñe- doit : Et que s’il agréoit le premier de ces moyens, ils de- mandoient de faire un même Peuple avec les Abpalachites, d'habiter en leurterre, & de la cultiver; & ain de remplir les: places vuides de céns d’entr'eus qui s ’étoient débandez de puis peu, n° aller au loin planter une nouvelle Co- Jonie. L’Apalachite, affembla fi Confeil fur ces propoltions ; & en ayant fait l'ouverture, il reprefenta que l’armée des Co- fachites leur empefchoit le fecours, qu'ils poutroient avoir des autres Provinces, quin'avoient pas été preftes pour venir aveceus à cette guerre. Que pat même moyen le pañlage des vivres leur ctoit entiérement fermé. Que l’ennemy étoit maitre dela Campagne; & que fans coup ferir, il étoit entré en l’une des meilleures Provinces de tout l'Etat, oùils’étoit faily des places de 11 plus grande importance. Et que bien qu'en la journée precedente , ileut remarqué la fidelité & La gencrofité incomparable des fiens, à attaquer & à combattre leursennemys, fur lefquels ils avoient remporte detres-no- tables avantages , toutéfois cét heureus fuccés avoit été acheté par la perte de fes plus vaillans Capitaines & de fes meilleurs Soldats; Par confequent, qu'il falloit avifer à con- ferver le refte du Roy aume, en épargnant ce qu'il y avoit «encore d'hommes d'élite. Et puifque les ennemis propo- foient d’abord des conditions de paix, ce feroit fagement fait d'y entendre, fi cela fe pouvoit faire fans préjudice de leur gloire, & dela grande renommée qu' ‘ils s’étoient aquife juf- Ques alors. Qu'’aurefte, laterre quiétoit deferteen plufeurs endroits, par la tranfmigration d'une partie de leurs habi- tans, étoit aflez grande & aflez fertile, pour les nourrit 8h | | 4e ET E Vy2 Fe Fou L'ORSAN NS Le + PINS 74 ALAN. À AUS) as S À 3 TN ap Ans r ons MoRaAL®, Tous les Chefs des Apalachites ayant oui la. propoñition | de leur Roy , & jugeant que ce n’etoit pas la timidité, quil’o= bligeoit à pancher du cofté d’un accommodement avec les Cofachites, ven que le jour précedent il s'étoit trouvé au plus fort de la meflée: mais que € ’eftoit le feul-defir qu'il avoit de ne les pas expofer témérairement, & de conferver fon’ peuple lequel étroit déja en proye à l’'ennemy, quioccupoit une, des plus floriffantes Provinces. Ayant aufli eu advis par quel=. ques coureurs, quis‘étoient rendus en l’armée du Roy par des voyes détournées, & qui venoient des Villes, où les Cofa- chites avoient leurs garnifons,. qu'ilstraittoient avec grande douceur & grand refpeét les femmes & les vieillards, qu'ils y avoient trouvez ; ils fousctivirent unanimement au fentis mens du Prince, & répondirent qu'il faloit enténdreàun bon. accord, & faire en forte que les conditions en fuffentles plus avantageufes , que la conjoin@ure préfente de leurs affaires le pouvoit permettre, Et aprés avoir confirmé cette refolu= tion par leur H4 ha, quieft la marque de l'applaudiffement & de la ratification qu'ils ont coutume de donner à leurs déli= berations, ilslafignifilerent aus Ambañadeurs des Cofachites, qui l’attendoient avecimpatience. Cette nouvelleeftant apportée au camp des Cofachites ; ils: la receurent avecque joye, comme eftant conforme. à la fin qu'ils s’eftoient propofée, en entreprenant la guerre, & en quittant leur pais. Ils deputerent donc fur le champ des prin- cipaus d’entr'eus, pour convenir avec les Apalachites, des moyens de cettepaix, &pouren pañer tousles articles, Ces: Deputez, eftant arrivez au lieu où le Prince d’Apalache les attendoit, avecles plus confiderables de fa Cour, aflis furum fiese plus. relevé que les autres, & couvert.de chien fourrure, ils furent receus courtoifement. Et ayant pris feance, le Roy leur fit prefenter à boire d’un certain bruvagenommé Cafe, dans une coupe dont felon la coûtume il goûta le premiers Tous ceus du Confeil en burent en fuite : Et puis on nr part & d’autre entraitté d'accord, àcesconditions. , » Que les Cofachites, Habireroient pefle-mefle dans les villes & les bourgs des Apalachires, Qu'ils feroient en toutes _chofes eftimez & tenus comme les Narurels du pais, Qu ‘ils. Jouy " LA NME a Mbep/7 © Des ÎLES ANTILLES Sy Jouyroient entierement des mefmes franchifes. Qu'ils fe- _roient fujets au Roy comme les autres. Qu'ils embraferoient ‘Ja Religion & les coûtumes du païs. Ou que s'ils aimoient mieus, les Apalachites leur quitteroient la belle & grande Province d’'CA4wana, pour la pofleder en propre & en parti- culier, fuivant lés limites qui y feroient pofées. àcondition Éouréfois qu’ ils reconnoitroient le Roy d’Apalache pour Sou- verain, & qu'àl'avenirils luy en feroient tous les ans les hom- | mages raifonnables. Cét accord fut ainfi arrefté reciproquement, & fuivy d’ac- clamations mutuelles. Et peu de tems aprés que les Dcputez des Cofachites eurent rendu conte de leur negotiation à leur Chef & à fon Confeil, & qu'ils eurent prefenté le chois qui : Icureftoit donné, ou de mefler leurs demeures avec les À pa: Jachites, ou de'pofleder eus feuls & en propre la’ Province où ils eftoient entrez, ils accepterent d’un communconfen- tement, la propricté de cette Province d Amara, de laquelle Je Royd'Apalache les mit luy mêmeen paifible poffeffion. Les femmes, les enfan$ & les vieillards, qui y étoient demeurez pendant que les hommes capables d’aller à la guerre, aVoient fuivy leur Prince, furent transportez dansles autres Provin: ces, où le Roy leur affigna une demeure arreftée, pour eus & pour tous les vaillans hommes de cette même Province, qui s'eftoient expofez pour repoufler l'ennemy, & pour conferver lEtat. Aprés quoy, les deuspartis pofetentles armes: Et les Cofachites furent querir leurs femmes, leurs enfans, leur bétail, leur bagage, & les Soldats qu'ils avoient laifez prés du grand Lac de Theomi :: Et fe réjouïrent tous enfemble dans les Villes de leur demeure, pour le beau Pais qu is avoient conquis , ainfi qu “is l'avoient auparavant projerté. Lés Apalachites, nommerent depuis ce tems-là C a- RAÏBES, ces nouveaus hoftes qui leur étoient arrivez in. opinement & contre leur'attente, pour reparer la bréche _ qui avoit efté faite, par la peuplade dé leurs gens en une autre _ Contrée del’Amerique. Ce mot de Caraïbes fignifte en leur: langue, des Gens ajoutés ,. Ou furvenus fabitement à l'Impro= œiffe, des Etrangers, où dès Hommes forts € vaillans ;. Comme: pour dire qu’ un Peuple genereus, qu'ils n ’attendoient pas, V:Y: 3: leur. NT LR US LUE Sn LIRE MAN: ETS LL CL 14 Vrai — : “nl ? ? 2 HN nd LCR EURE u* Cr LAN EN 1 MINS 3 è Rs SES 2 DROITE bia + F UE TEST pie 5 | | % y IV ETES | | 1 358. HisToirrE MoRaALE, -Chapw Jeur efloit furvenu, & leurayoitefté ajouté. Et ce nomde. meuraà ces nouveaus venus, au lieu de celuy de Cofachites, qui n’a efté confervé que par quelques foibles & chétives fa milles, quieftoient plus au Nord dela Floride, & qui aprés Ja fortie des vrais Cofachites, s’emparerent de leurs Terres & encore à prefent, veulent , paffer fous le nom de ceus qui les ont précedez en la pofleflion de ce païs. Pendant que d'autre: * cofté ces vrais Cofachites furent reconnus fous le nom den Caraïbes, enla Province d’Amana. Et c’eft aufli fous ce nom que dorefenavant nous parlerons d’eus, & des Colonies qu'ils ont faites depuis ce tems-là. {il Ces deus Nations s'étant ainf unies pour terminer leurs» “differens, & finir une cruelle guerre qui les euft pû ruiner. toutes deus, vécurent en fuite plufieurs années en bonne cor" refpondance l'une avec l’autre: Mais aprés que les Caraïbes” fe furent acrus én grand nombre en cette terre qu’ils avoients aquife par leurs armes, ils ne voulurent point embraffer la. Religion des Apalachites qui adoroient le Soleil, comme nous dirons cy aprés, ni fe trouver à leur Ceremonies , au. Temple qu'ils avoient en la Province de Bémarin, où étoit. la Cour, ni enfin rendre au Roy les hommages. qui lu eftoient deus,pour la Province qu'ilsavoient Occup ée,fuivant. leur promefñe & leur Traitté. Leoi Ce manquement de parole dela part des Caraïbes, & cét. aïe de felonnie , fut de fujet de plufeurs guerres fanglantes, qui furvinrent puis aprés entre ces deus Nations. Les Ca, gaibes , étoientinveftis de tous coftez de leursadverfaires, qui les reflerroientdetelle forte, qu’ils ne pouvoient aucunement, s'élargir. Et les Apalachites, avoient au cœur de leur Etat. un cruel & irreconciliable Ennemy, qui les tenoit perpetuelss Jemenñt en alarme, & les obligeoit à eftre toujours fous les, armes. Pendant quoy ces deus peuples, tantoft vaincus &c, tantoft viétorieus, felon que le fort de-la guerre. eft jour-. nalier &cafuel, menoientunetrifte vie : Et fouvent, pout n'avoir .pû cultiver laterre, ou pour awoif fait le dégaft dans les champs les uns des autres , un peu. avant la recolte, ils: eftoient reduits à une extréme famine, qui faifoit mourir. plus de gens entre eus que l'épée, Érrperieit “a su ARTS $ (1 LT CHERE INA 2h A OR EURE PCT M f à FE NOR VAENATE DAS ie AAA DSL : G * si ae gi A: & PR hap DES D hs A tra Eee. 359. | ls Ctatren plus d’un fiecle en ces conteftations & en cet- | 4 guerre. Pendant laquelle les Caraibes qui avoient pour Chef & pour Roy de leur Nation un de leurs plus vaillans | Capitaines qu ils nommoient Regazim,accrurent leur Etat d’u- | ne autre Province qui leur elloit voifine du cofté du Midy, _& qui s'appelle CHatique , laquelle perçant les montagnes | par une Ouverture, qui reçoit un torrent defcendant desr méê- mes montagnes , s'étend puis aprés au Couchant, jufqu’à la | Riviere qui prenant fa fource au grand Lac, aprés avoir for. mé plufieursiles, & arrofé plufieurs Provinces, fe varendre en fin dans l’'Ocean. C'’eft cette celebre Riviere que nos François ont appellée de ay, & que les Apalachites nom- ment Bafainim qui fignifie en leur langue, Riviere delicienfe, ou «hondante en poilfons. Les Caraïbes ayant ainfi étendu leurs limites, & écarté leurs ennemis, firent pour quelques années une efpece de tréve avecles Apalachites, qui eftant: fatiquez de tant de guerres, & mattez par la perte d’une Pro: vince confiderable, entendirent volontiers de leur part à cet-- te ceffation d'armes ,. & de tous aétes d’hoftilité. _ Mais ces Apalachites, qui féchoient de regret de voir leur Etat écorné d’une celebre Province, profitant de l’occafion fa- worable de cettetréve;tinrent plufñeurs fois des confeils fecrets- comment ils pourroient emporter de plus grands avantages fürles Caraïbes, qu'ils n’avoient fait jufques alors. Et aprés avoir reconnu par leurs triftes experiences, qu'ils n’avoient _ pas beaucoup avance leurs affaires en atraquant leurs enne- mis à decouvert & à main armée, iis fe refolurent de les fup=- | planter parfinefle, & à cet effet, ue chercher tous les moyens: _delesdiviferentreeus, & deles engäger infenfiblement en: une guerfe civile & inteftine. Ce confeil eftant reçeu & ap- plus importantes, leur en fournirent bien toftles expediens; . & leur en fuggererent les moyens, qui furent tels. arlase lervice tir) & qu'ils craignoient CEE un ki à | Efprie: 4 PET : FL: 4 ë 7 RESSRMET ŸE OR g, 2 TRES - prouvé generalement de tous: leurs Preftres, qui font parmy. eusen grande cftime, & qui ont vois enleurs Affemblées les Ils avoientremarqué, queces gens qui les eftoient venu “fürprendre en:leur propre Terre, eftoient fans Religion, & fans connoiffance d'aucune Divinité, à-laquelle ils rendiflent AL à 0), A io OT NE RE nt Ka cr NE AN AIPRRENN, M EU 1 360 HisTOIRE Mota Et Chap. Efpritmalin, qu’ils nommoient C#abouya, à caufe qu'il les” tourmentoit quelquefois : mais que cependant ils neluy fais. foient nul hommage. Et c'eft pourquoy dés les premieres ans nées de leur arrivée, pendant lefquelles ilsavoient vécu en bonne intelligence avec eus, ils les avoient voulu induire à reconnoitre à leur exemple le Soleil pour le Souverain Gous verneur du Monde, & à l’adorer comme Dieu. Ces exhors tations & ces enfeignemens avoient fait de fortesimpreflions, dans les efprits des principaus d’entre les Caraibes. De forte qu'ayant reçeu les premiers principes de cette K eligion, pen dant lés années que leur mutuëlle correfpondance eut lieu, caucoup quittoient la Province d’CA4#ana, en laquelle ils demeuroient ,, pour aller en celie de Béinarin, la Capitale des Apalachites, d’où ils montoient enla montagne, 4 Olai=, mt, fur laquelle les Apalachites font leurs offrandes {olens nelles. Etàleurimitation, ils avoient participé à ces Ceres monies & à ce Service. Ces Preftres, que les Apalachires noms ment Zaoias, quiveutdire, Æommes de Diem, \akoicnt que les femences de Religion ne s’étouffent pas fi facilement dans les cœurs des Hommes, & qu'encore que les lon- gues guerres qu'ils avoient euëés avec les Caraibes , en. cuffent empefché l'exercice, il leur feroit aifé de rallumer les étincelles de cette connoiflance , quieftoient cachées fous: Ja cendre. | | Latréve & ceffation de tous aëtes d’hoftilité, qui avoit efté arreftée entre les deus Nations, en prefentoit une occafon: favorable. C’eft-pourquoy les Preftres du Soleil s'aviferents avec l'agrément du Roy, de faire publier parmy les Caraïbes, qu'au commencement du mois de Mars , qu'ils nomment DNaarim en leur langue , ils feroient un fervice folennel à l'honneur du Soleil en la haute montagne, & que ce fervice. feroit fuivy de jeus, defeftins, & de prefens, quele Roy donnes roit liberalementaus affiftans. Cette Ceremonie n'eftoit pas nouvelle parmyles Apalachires; les Caraïbes ne pouvoient foupçonner aucune fraude sf au aucune crainte de fur prife. Car ils avoient cetre coûtume fort ancienne parmy eus, de faire des prieres extraordinaires au Soleil, au coms. mencement de ce mois de Mari, qui eft précifement les 1 | Chap.7 DES ÎLES ANTILLES. géi Mtéms qu’ils ont feméleur CW4ys. : Ils font ce Service, potir de- | mander au Soleil qu'il veuille faire germer, croiftre, & meu- | tir, cequ'ils ont confié à fesfoins. Etils pratiquentla même | chofe, à la fin de May; auquel temsils ont fait la premiere “moiflon, pour luy rendre graces des fruits qu’ils croyent ‘avoir receus de fa main. D'ailleurs, les Caraïbes favoient lque durant ces fetes les Apalachites pendoient au croc les arcs & lesfléches; que ce feroitun grand criine parmy eus de | porter des armes en leur Temple, & d'y émouvoit la moin- | dredifpute,; & qu’en ces jouts-là, les plus grands ennemis fe | ‘reconcilioient & dépofoient toute leur inimitié. Ils ne dou- “oient auf nullement, que la foy publique, & la promeñt fo- Mennellement faite, ne fuft inviolablement gardée. LM Danscetteaffurance, ils fe difpofent à pañer à Bémarin au “tems afligné: & pour contribuer de leur part à la réjouiffan- ce publique, ils fe parent le plus avantageufement qu'il leur eft poflible. Et bien que dés lors ils euffent coutume des’ ha- biller fortàlalegere, & de montrer leur corps prefque à nud, | toutefois, pour s’accomoder aus faffons de faire de leurs voifins qu'ils alloient vifiter,ilsmettent en œuvre toutes les fourrures, les peaus peintes, & les étoffes qu'ils avoient, pour fe faire des habits. Jlsn’oublient point auf de peindre d’un rouge écla- tant leur vifage, leurs mains, & toutes les nuditez qui pou- Voient paroitre: Er ils fe couronnent de leurs plus riches guirlandes, tifluëés de plumes differentes des plus beaus oifeaus du païs. Les femmes, voulant de leur cofté prendre part à cette folennité, font tout ce qu’elles peuvent pour fe rendre agrea- bles. Les châines de Coquillagede diverfes couleurs, les pen- dans d'orcilles, & les hauts bonets enrichis de pierres iuifan- tes & precieufes, que les torrens charrient avec eus des plus hautes montagnes, leur donnoient un lufire extraordinaire, En cét équipage les Caraibes, partie parcuriofité, partie par vanité de fe faire voir, & quelques-uns par un mouvement de Religion, entreprenent ce pelerinage: Et pour ne point donner d’ombrage à ceus quiles avoient fiamiablement con. Viez , ils quittentarcs, fléches , & mafluës, au dernier village de leur jurifdition, & entrent en la Province de Bémarin avec une fimple baguette , en chantant & enfautant, com- : Zz me ET ; eu 1 « DES ER PPT Los AN HisTOIRE Mar 2 ap. me ils font tous d’une humeur extrémemient gaye ser Le enjotüée. D'autre part les Apal achites les atendoient en oi de. votion: & fuivant l’ordre qu'ils en avoient reçeu de leu Roy, qui fe nommoit Teltlabin, larace duquel commatdi encore à prefent parmy ce peuple, ils receurent courtoifes ment tous ceus qui vinrent au Sacrifice, Dés l'entrée même des Caraïbes en leur Province, ils leur firent un accueil au {ft + cordial, que s'ils euflent efté leurs freres, & qu’il n’y euft ja mais eu dé different entre eus: Ils les regalerent & feftinerer t tout le long du chemin, & les efcorterent jufques à la Villé Royale qu’ils appellent encore maintenant CHellor; c’eft à dire la Ville du Confeil, parce que c’eft la demeure du Roy & de fa: Cour. Les Chefs des Caraibes, furent traittez fplendi* dement au Palais Royal, & ceus du communchés les Habis tans dela ville, quin épargnerent rien, de Ce qui pouvoit contribuër à la fatisfation & à la rejoüiflance \de eue hoftes. Le jour dedié au Sacrifice du Soleil, le Roydes Apalachie tes avec fa Cour, quieftoit notablement accreué par l’arrivée des Caraibes , & d’un grand nombre d'habitans des autres. Provinces, quieftoient venus à lafefte, monta de grand mas tin fur le femmet de lamontagne d’Olaïmi, quin'efteloignée. que d’une petite lieuëé de la ville. Ce Prince, felon la coutu- me du païs, eftoit porté dans une chaize fur les épaules de quatre grand hommes, cfcortez de quatre autres de méme hauteur, pour prendre la place quand les premiers feroient las. 11 eftoit précede de plufieurs joüeurs de flute & d'autres infirumens de mufique. En cette pompeilarriva au lieu des ftiné à ces affemblées. Et quand la Ceremonie fut achevée, il fit une plus grande largeffe d’habillemens & de fourrures qu'il n’avoit accouftume de faire en de parcilles rencontres, Sur tout, il eftendit fa liberalité à l'endroit des principaus d’entre les Caraïbes: & à fonimitation les plus aifez de fon peuple diftribuërent aufli des prefens à tous ceus de cette Nation, quiavoient honoré de leur prefence leur Sacrifice Ps De forte qu il n° y eutaucun des Garaihes :44 æ à “4 rent Chap. D'ESA MODES ANTILLES, +65 furent defcendus de la montagne, on Jes-accucillit encore, & on les traitta, avectoute forte de témoignages de bonne volonté, en toutes les Maifons des Apalachites, au miliew defquels “ils avoient à repañler , pour retourner en leur quar- tier. Enfin, pour les inciter à une feconde vifite, on leur pro- téfta de La part du Roy & de fes Officiers, qu'ils feroient tou- jours receus avec nne égale affe&ion, s'ils defiroient de fe trouver quatre fois l'an avec eus, aus mêmes Cerc- monies. 1 Les Caraïbes eftant de retour en leur Province, ne € pou voient aflez lonër la bonne reception qu'on leur avoit faite. Ceus quiavoient gardé le logis, eftans ravis de voirles riches prefens que leurs concitoyens avoient rapporté deleur voya- ge, prenoient dés-lors la refolution de faire le même peleri- nage , àlapremierefefte, Et lejour qui yeftoit deftiné eftant écheu ilyayoit un fi grand empteffement parmy eus à y aller, que fi leur Cacique n’y euft mis ordre, la Province eut efté dépourveuëéd'habitans, Les Apalachites continuërent auf Jeur accueil & leurs liberalitez : & il y avoit une émulation ‘entre eus, à qui rendroit plus de devoirsaus Caraïbes, Leurs Preftres, qui favoient à quoy devoit enfin aboutir toute cette qtufe, neleur fécommandoient rien tant que la continuation de ces bons offices , qu’ils difoient eftre fort agreables au Boleila1s 10: Trois années s’écouletent en ces vifites : au bout def- quelles les Apalachites qui s’eftoieut épuifez enliberalitez à lendtoit deleursvoifins, voyans qu'ils avoient puiflanment gagné leursaffe@ions, & que la plus part eftoient tellement zelez au Service du Soleil, que rien nefcroir capable de leur faire perdre à lavenit, les profonds fentimens qu'ils avoient conçeus de fa Divinité, fe refolurent , eftantincitez à cela paf leurs Preftres, à l'avis defquels le Roy& toutle Peuple dé- feroient beaucoup, de prendre l’occafion de la tréve qui cftoit-expirée, pour declarer de nouveau la guerre aus Ca- taibées ,: & leurinterdiré l’acces de leurs ceremonies, s'ils ne Vouloïènt faire comme eus, une ptofeflion ouverte de tenir le Soleil pour Dieu, & s’aquitter de la promeñe qu'ils leur ri autrefois faite dé” reconnoitre le Roy d’Apalache 27 Z2z 2 pouf A de 1 ee deg AS USA RO ER RE APE 2 NN LL DE S'ANCINPRE rt PA ONU s 6. : D He HAE RURENR NA Le MAUR ‘Ve 364 HISTOIRE MoraLer, : Chap pour leur Souverain, & de luy faire hommage de la F'oNES CE d’LArMmAMA, En laquelle ils habitoient, comme la ten de iuy. Les Caraïbes furent divifez fur cette propoñtion. ci 1 tous ceus qui étoient portez pour l’adoration du Soleil, fus _ rentd’avisde contenter les Apalachites, difant que quand üls« n'y feroient pas obligez par leur parole É ils y fervient tenus, pour né fe point priver du libre exercice de la Religion du Soleil, en affiftant aus facrifices, qu'ils ne pourroient à pres feñt abandonner qu’à grand regret. : Le Cacique, & la plu part des plus confiderables entre les Caraïbes, |difoient, laun contraire, qu'ils ne vouloient point flétrir leur reputation & la gloire de toutes les victoires precedentes, par une paix honteufe, qui fous pretexte de Religion, les rendroit fujets, des. Apalachites. Qu'ils étoient nez libres, & qu’en cette qualité, ils étoient fortis du pais de leur paiflance, & s’eftoient. pouffez en une meilleureterre par la valeur de leurstarmes Qu'il falloit défendre pour toujours cçetre precieufe libertés & la cimenterde leur propre fang, s'ilen-étoit befoin. Qu'ils! étoient lesmêmes, quiavoientautrefois contraint les. Apalas chites à leur quitter en proprieté la plus confiderable de leurs Provinces, qui étoit le centre & comme l'œil de leur Etat. Qu'ils n'avoient rien diminué de cette: generofité: Et que tant s’en faut, que cette Valeur fuft étcinte; qu'au contra, re ils avoient accru depuis peu leur jurifdidion d’une belle & grand étenduë de païs, qui les mettoit au large, & leur don= noit jour au.delà des montagnes , qui les relertoient aupara vant. Qu'ayant ainfi écarté tout. ce qui pouvoits ’oppofer à leurs defleins, ce leur feroit une lâchcté inupporrablés de quitter ,, furunfimple prétexte deReligion, & pour la feule curiofité de fe trouver à quelques facrifices., lapoffeffionde ce qu'ilsavoientaquis, avec tant de peine & tant de fang : En fin, ques’ils defiroient d’adorer le Soleil , illuifoit auf favo* rablement en leurs Provinces, qu’en celles des Apalachites: Qu'il-les regardoit tout les jours d’un œilaufli graeiéus, qu'aucun autre endroit du monde. . Et que s’il s'agifloitide lu y. confacrer une montagne & unegrotte, on:en pourroit tsouyer parmy. celles qui. feparoient leur Etat,,d'avec le ont stand: D'ATIUET I 14 _c VC Oo 12 Ma EU k | es ch 7 / DAS LEËS ANTHLIES. 365 grand Lac, d’auffi hautes & d’aufi PRSEERS à ces myftcress qu étoit celle d’Ulaimi. Ceus qui defendoient le Service de ŒIal, & qui 'foute- noient qu'il ne faloit pas S'engager en une nouvelle guerre, en refufant des conditions qui leur étoient aufli avantageu- …fes qu’aus Apalachites, repliquoient , que puis qu'ils avoient couté depuis quelques années la douceur de lapaix, & qu'ils avoientexperimenté en tant de rencontres labonté,lacandeur, & la generofite de leurs voifins , iln yavoit point d'apparen- ce de fe jetter en de nouveaus troubles, qu'il étoit fi facile d'eviter , & même fans perté de la reputation qu'ils s’étoient | Rs Que la reconnoiffance que les Apalachites deman- - doient pour la Province qu ils occupoient , pourroit être d’unctelle nature & de fi petite confequence, que leur hon- neur n’en feroit en rien diminué, nileur autorité blefñée. Que pour ce quitouchoit le Service & les facrifices du Soleil , ils n’avoient point de Preftres qui fuffentinftruirsen cette fcien- ce, & qui en feuflent les Ceremonies. Qu'il feroir à craindre, que s’ils vouloient entreprendre d'imiterles Zaotas des Apa- Jachites, ils n’attiraffent par les fautes qu'ils y feroient, l’in- dignation de la Divinité qu’ils voudroient fervir, au lieu de gagner fa faveur. Que même ilsavoient appris, qu'il nefe _trouvoit nulle montagne en tout le pais, dont ils avoient Connoiffance qui fuft regardée du Soleil d’un afpeët fi agrea- ble & fi dous., que celle d’'Olarmé : ni qui euft comme elle un Temple cavé dans le roc d'une façon fi merveilleufe, que tout l’artifice des hommes, ne pourroit jamais atteindre à cet te perfection ; & qu ’aufh, c'éroit un ouvrage des rayons de la: Divinite qui y étoit adorée. Que quand on trouveroit une montagne & une cayerne qui Mass decelle-là, ce qu'ils ctoyoientneantmoins être impollible, les oifeaus mcffagers. du Soleil n° y feroient pas leur ue Et que la fontaine Confacrée à fon honneur, laquelle produifoit des cffets ad- mirables & des guerifons inouies, ne s'y rencontreroit pas. Et par confequent qu'ils s' expofcroien tà-larifée des Apala- chites, qui auroient toujours fujer de fegloritier d'une inf nité de prérogatives de leur Femple & ‘de leur Service an- cien; di deflus.ce nouveau qu'ils prerendoient d'erablir. dort | LES Ge: re it ; ù és L DAC Rd et NEA. 7 5 PR CARE AP Qt LAS re Qu : D'hal, à HER RMS AU CE EAU UT ER 1,2, SVT RAT ANT DRE wi À. 03 Vite PS PE TRE EN PRE EAU ET TASER D 366 HirsToire MORALE, Chapy Ce party, concluoir de tour celà, qu’il falloit faire une bonne paix, & aflifter à l'avenir aus memes Ceremonies , qe 4 avoient frequentées pendant la tréve. à Mais ceus qui s’eftoient arrcftez à des fentimens contrai- res, ne peurent aucunement être fléchis par toutes ces confi-. derations, ni divertis de la refolution qu'ils avoient prife de. ne reconnoitre jamais Les Apalachites pour Souverains, & de ne pas perdre leut liberté, fous l’ombre d’une Religion & d'une adoration que leurs peres avoient ignorée, De forte. qu’enfin cette contrarieté d’avis donna lé commencement à deus fa@ions qui fe formerent parmy les Caraibes, comme les Preftres des Apalachites l'avoient préveu. Et parce qu'ilss étoient divifez en leur Confeil, ils ne peurent rendre nne refponfe aflurée & uniforme, fur les propofitions de guerre ou de paix qui leur ctoient faites. Mais chaque party fe for. tifiant de jour en jour, celuy qui concluoit en faveur de l'al- liance avec les Apalachites & de l’adoration du Soleil, S'AC= creuttellement, qu’il fe vid en état d’obliger l’autre à fe fou. mettre à fon opinion, ou bien à abandonner la Province. à Ce fcroit un recit trop ennuyeus , de vouloiricy d'écrire tous les maus que cette guerre civile apporta aus Caraibes, qui fe déchiroient les uns les autres, jufqu’à ce qu'enfin, aptés plufeurscombats, les Apalachites s'étant joints avec lé party qui leur étoit favorable, ils contraignirent l'autre, à. prendre la fuite & à vuider des Provinces d’C4mana & de CHarique , pour aller chercher au loin quelque domeures affurée, Les Caraïbes viétorieus, ayant ainfi chaflé par le cousS | des Apalachites ceus qui troubloient leur paix & leur re: pos, munirent puiffamment leursfrontiers, & poferent aus. avenués les plus vaillans & les plus genereus de leurs corps, pour ofter à jamais aus exilez toute efperance & toute pre= tention de retour. Puis ils contraéterent une tresferme al. lance avec les Apalachires , fe foumettant à leurs Lois, ems braffant leur Relision, & ne faifant plus qu’un Peuple avec eus. Ce qui dure encore à prefent: Mais non pas toutefois. en telle forte, que ces Caraibes ne retiennent leur ancien nom, comme nous l'avons déja remarqué au sorpentel \ DES ÎLES A NrTb LE 367 ment de ce Chapitre, & beaucoup de mots qui leur font |. communs avec ies Habitansdes Antilles: tels que font entre | une infinité d’autres les termes de Cabowres pour dire les me nués curiofitez qu'on referve par rarcté, de Bouttou, pour fignifier une mafluë de bois pefant, de Taumaly, pourexprimer unragouft: de Bararé, pour direun Amy familier. d’£routou, pour denoter un Ennemy. {ls nommentaufli un arc 4ouba, | des fléches 4fowani: un Etang Taonabo : lefprit Malin Æfbo#ya, | &l’ame de l’homme 4kemboué, qui font les propres termes | defquelles les Caraibes Infulaires fe fervent encore à pre- | fent, pour fignifier les mêmes chofes. r Quant aus Caraïbes déchaffez de leurterre, par ceus de leur propre Nation, & jettez hors des limites deleurancien- | ne demeure & de toutes leursconquétes, aprés avoir rôdé prés de la riviere qui prend fa fource au grand Lac, & avoir effayé en vain, de s’accommoder avec les Peuples qui habi- tent l’un & l’autré bord, ils refolurent de fe faire pañfage au travers de leur terre, ou par amitie ou par force, & de pouf- fer du moins, les reftes de leur condition malheureufe, en quelque pais defert, oùils puflent fe perpetuër, & releveren toute {eureté, les ruines de leur Etat. Dans cette refolution Hs pénetrent jufques au bord de la met, où ayant rencon- tré des Peuples qui prirent compaflion de leur mifere, ils hy- vernerent auprés d’eus, & pañerent en grande difetre cette trifte faifon de l’année. Et comme ils faifoyent des regrets continuëls, pour la perte qu'ils avoient faite d'un païs fi dous & fi fertile queleleur, & qu'ils voyoient qu'ils ne fe pour- _roient jamais habituër avecjoye, en celuÿ où leur malheur les avoit releguez, voicy arriver à lacofle, au commencc- ment du printems, deus petis vaifleaus qui venoient des Îles Lucayes, & qui avoient efté pouflez par les vens à la rade, où nos Caraïbes avoient pailé leur hyver. IL y avoit en ces deus vaifleaus, qu'ils nomment Ceos Où Péiraugues, environ treize ou quatorze habitans de Crgafeo, qui eft l’unedes iles Lucayes , lefquels ayant mis piedârerre, raconterent aus Ha- bitans naturels de cette cofle, comment ils avoient efte jet- _tez par latempefte entre leurs bras. Et ils dirententre autres | “co des merveilles des Iles ou ils demeutoienr, ajourant, to. | qu'il qu’il yenavoit encore plufieurs au à deffusd' eus, en tirant vers. orient & au midy, quiétoient defertes & inhabitées, & que l’on eftimoit meilleures, que celles-là même, dontils leur fais _foient un figrand recit. Que quant à eus, ils ne demandoient, aus habitans du païs qu’un peu d’eau & de vivres, pour pou=\ voir repañier dans leur Terre, dont ils tenoient n'être éloignez” que de quatre ou cinq journées pour le plus. Les Caraïbes, qui étoient en peine de chercher quelque nouvelle demeure, & qui s'ennuyoient beaucoup de n'avoir point de lieu feur & arrefté, quiles mift à couvert detantde maus qu'ils fouffroient en une vie errante & vgabondes ayans ouï dire tant debiendeces Iles, quel’onafluroit étre voifines des Lucayes, fe refolurent de profiter de loccafion de ces guides, qui leur avoint été fufcitez par un bonheur extraordinaire, de les fuivre lors qu'ils s’en retourneroient, & aprés qu’ils feroient arrivez en leurterre, de fe placer dans les autres Iles defertes, dont ils leur avoient oui faire un Loc fiavantageus. | Ils eftimoient que l'exécution de cetteentreprife mettroit finàtoutesleursmiferes. Mais ils y rencontroient un grand obftacle, qui d'abord leur fembloit infurmontable, affavoir le manquement de vaiffleaus pour paffet la mer, & les porter. où ils defiroient aller. Is fe propofoient bien pour reme= dier à ce defaut, de mettre à bas des arbres, & de creufer le tronc avec du feu, comme faifoient les autres Nations, &" celle-là même au milieu de laquelle ils vivoient. Mais cét expedient, demandoit un long-tems pour en venir à bouts" pendant quoy, ceus qu'ils efperoient avoir pour conduéteurs mediteroient fans doute leur retraite. Et par confequent ils” jugerent que le plus court feroit, de chercher des vaifleaus tout prefts. Pour ceteffet, ils fe difpoferent à enlever à la fa- veur de la nuit, tous ceus que les Nations des rades voifines, &e" du long desrivieres, qui fe venoient rendre à la mer, avoient de préparez en leurs ports, & en état de voguer. Le jour. donc étant arrivé du partement des Lucaïquots, qui leur de- _ voient fervir de guides, nos Caraibes, quis’étoient munis auparavant des provifions neceffaires, s ‘afflemblerent, le plus fecrettement qu'il leur fut poflible , le long des ne aes. Lrr À das Nabil) dir dé lag NES NSRSESR Ni SE TO DR Re 0 at te STE N | UP ON CT SAM LAISSES: Hapi7 pes ImES ANTITLEK. 365 “des havres, & s’érantemparez detôustes Casos ou vaiffeaus, “qu'ils rencontrerent, fe joingnirentaus Lucaiquois, avec lef- “quels, fans avoir pris congé de leurs hoftes, ils firent voile vers lesiles Lucayes. | | “Le vent ayant été favorable à ces fugitifs, ils arriverent _enpeudejours à Crgafeo, où ils furent reçeus fort humaine- ment parles habitans ; qui apres leur avoir fourny les refrai- chiffemens netefaires, les conduifirent jufques aus dernieres de leurs Iles, & de-là leur donnerent encore une efcorte, pourlesmener à la premiere des Iles defertes, dont ils leur _avoient parlé, laquelle ils nommerent C4y4y & qu’à prefent ‘on appelle Sasrte Croix. Ils cottoyerent en faifant ce chemin J'Ile de Boriquen, dite aujourd'huy Porto-Ricco, qui éroit ha- bitée par une Nation puiflante. Ce fut donc en cette Ile d'LAyay, que nos Caraïbes jétterent les premiers fondemens de leur Colonie, & où jouiffant d’un dous repos, quileurfit Bien-tôt oublier toutes leurs traverfes paflées, ils fe multiplie- rent tellement, que dans peu d'années ils furent contraians de s'étendre en toutes les autres iles Antilles. Et quelques fie- cles aprés, ayant occupé toutes les Iles habitables, ils fe pouf- ferent jufqu’au Continent de l’Amerique Meridionale, où ils ont encore aujourduy pluficurs grandes & nombreufes Colonies, dans lefquelles ils fe font rellement affermis, que bien que les Tuos, Sappayos , Paragotis, Aronäcas, Où Aroña- ques, qui demeurent en l’Ile de la Trinité & es Provinces de l'Orenoque , les ayent fouvent voulu chaffer de leurs demeures , & qu'ils leur ayent livré de fanglantes guer- res, ils y fubfftent en unétatfloriffant, & entretiennentune fi bonne correfpondance & une fi parfaite amitié avec nos Caraïbes Infulaires , que ceus-cy, vont une fois ou deus l’an- née à leur fécours, fe lisuant tous enfemble avec les Ca/s- bites leurs amis & confederez, pour faire la guerre aus tCAronagues leurs ennemis communs, & aus autres Nations qui leurfont contraires. : : : Hhengh él Awtefte ; nous voulons bien croire, que la plupart des Caraïbes Infulaires fe difent.defcendus des Calibites leurs Confederez. Car ces Caraïbes étans moins puiflans que Iés Calibites, lors qu'ils artiverentenla Terre ferme parmy | | ‘. Ada 17 TRS, # 91195 eus, & s'étant ‘dépit Mes avec eus par mariages à par i ine. terets communs, ils n’ont fait qu’un peuple, quis’eft mutuels. lement communiqué Le langage. & les coutumes particulies res, Ce qui fait, qu’uné grande partie des Caraïbes, oublieus. de leur Origine, fe font acroire qu'ils font defcendus des Ca libites. Et il eft à prefumer, que dépuis un tems immemo" rial, que leurs predeceffeurs font pañez du Nord dans les” Les, ils n’ont eu aucune connoiflance de leur terre natale, qui: les ayant comme vomis hors de fa bouche, & jettez hors: de fon fein, les traittant comme des rebelles, ne fut pas res grettée de ces pauvres fugitifs, jufques au pointd’en confers ver précicufement la memoire. Au contratreil eftcroyable,* que pour bannir de leur efprit, le fouvenir des maus qu'ils y avoient fouferts, 1ls cn cffaçoient les triftesidées, autant qu'il leur étoit poflible ,. -& qu'ils étôient bien aifes de fe glorifieg d’uneautre Origine. Il pourroit bien eftre auf, que lors quë. les Caraïbes entrerent dans les lies, en venant du Septens trion, elles n’étoient pas tellement defertes, qu inyeutça & là quelques familles, qui pouvoient y eftre pañlées de lle Hifpaniola ou de Porto-Rico:, lefquelles ils defirent à larefet ve des femmes, qui pouvoicent fervir à l'acroiflement de leut Colonie. Veunommement, qu'il y toute aparence decroire que ces Caraïbes étant exilez du milieudes Apalachites , 8 contrains par le fort des armes, de quitter la place au viéto=. _rieus, plufeurs de leurs femmes étoient demeurées parmy ces, Apalachites, & les autres de leur Nation, qui s'étoient unis avec eus. Etde là pourroit eftre venué, la difference un ie ge des hommes & des femmes Caraïbes. Mais, pour reprefenter plusparticulierementces Coboniti de Caraïbes au Continent Meridionai de l’Ametique, premies rement, les Memoires de ceus qui font entrez danslacclebre riviere de l'Orenoque, diftante de la Ligne vers le Nordy dé huit degrez & cinquante fcrupules, difent, que fort doi au dedans si païs, il yhabite des Caraïbes, qui peuventaifément y être pañlez de l'Ile de Tabago ; celle detoutes les Antilles. qui eft la plus proche decé Continent: DEL Les Relations des Hollandois nous apprennent: auffi, qu'à vançant plus ontre vers lE re di ontrouvycà fept degrez dé cette 4 A DES ILES ANTILLES. 3Yt p.7 ectte Ligne ; la grande & fameufe riviere d Effèquebe » au bord de duiciié font premierement les Arouägucs , & en fuite les Caraïbes, qui ont guerre continuelleavecéus, & “qui fe tiennent aus deflus des fauts de cette Riviere, qui tom- “be avec impetuofité des montagnes. Et de là ces Caraïbes . s'étendent jufques à la fource de la méme Riviere, & font cn grand nombre, tenant une vafte étenduë de pais. Les même Voyageurs nous recitent, qu ‘à {ix degrez de Ia Ligne, ontrouve la riviere de Sarzame où Suriname, dans la- quelle entre une autre riviere appellée Zlouteca, Iclong de laquelle il y a auf plufieurs villages de Caraïbes. Il y a de plus un grand Peuple de cette Nation, lequel ha- bite un pais qui penctre bien avauntenlaterreferme. & qui aboutit à la côte, fous le cinquiéme & le fixiéme degré au Nordde l’Equateur, s'étendant le long d’une beile & grande riviere, qu'on nommé CAWaroüyne, diflante feulement de dix- huit lieuëés de celle de Sarrame, laquelle depuis fa fource, tra- verfe plus de deus cens lieuës de païs: où font plufieurs villa- _ ges de Caraibes, qui élifent comme les Infulaires, les plus vaillans d’entre eus pour leurs Caciques, & qui font d’une frature un peu plus haute que ces Antillôis, ne differanr gue- res d'eus , finon que quelques uns couvrent d’un drapeau leurs parties naturelles, plutôt par parure que par pudeur, ou parhonte. Ceus donc qui ont voyagé en ces Contrées, difent que depuis l'embouchure de certerivierede CWaroïyne, la- quelle eft à cinq degrez & quarante cinq fcrupules de la Ligne vers le Nord, jufquesà fa fource, il y a vint journées de chemin: & que danstoure cette étendué, les Caraïbes ont leurs villages, pareils à ceus des Infulaires. - Nous recucillons encore des Voyages des mêmes Hollan- dois, que les habitans de ce Continent, parmy lefquels ferpen= te la rivicre de Cayenne, font Caraibes de Nation. Enfin, ces Caraibes, ont pû paflerau travers des terres de ces Contrés, jufqu’au Brefil. Car ceus qui y ont voyagé af- furent, que parmy les Provinces qui font le long des côtes de la Mer du Sud, il s’ytrouve des gens qui portent lenomde Caraïbes, & qu'étant d’un naturel plus hardy & plus entre- mit plus rufé & plus fubril, que les autres Indiens du A dd 2 : Brefii, & \ ee Fr à ALVER, 8772 TEEN 4 CPU N 4 LE 2 872 = HisTOrREe MoRALE; F Brefil, ils fontentelie eftime parmyeus, qu'ils lestiennent pour être douëéz d'un favoir plus relevé que les autres, D'où vient, qu'ils déferent beaucoup à leursavis, & les prient de préfider à toutes leurs feftes & réjouïffances , lefquelles ne celebrent gueres, qu iln”yait quelcundeces Caraïbes, qui, pour cét effet vontrôdanr çà & la par les villages, oùils font. receus de tous avec jOYE; feftins ,,& careñes ; comme Jean de Leryla remarqué. Que s’il étoit befoin de confirmer que ces Caraïbes, réf pandusen tant de lieus de la terre ferme del’ Amerique Meris dionale, font de la même Narion que les Infulaires; on pouri roit icy mettre enavant, ce qui nous cft conftamment rappor= té par les deus Colonies Hollandoifes qui fonten ces cofles; affavoir celle de Cayenne & celle de Berbice, l’une & l'autre’ voifinesdes Caraïbes du Continent, pour faire voir lerap- port & la. reffemblance qu’il y aen plufieurs chofes, de leu# naturel, de leurs mœurs, & deleurscoutumes, à celles deg! Indiens Antillois. que nous décrirons cy aprés. Mais il eft tems de finir ce Chapitre , quifans cela même, femblera peut: être trop long. Il a été impoflible de le divifer, à caufe de l'uniformité & de l’énchainure de la matiere.: Et.la nature du fujet que noustraittions, ne nous. à pas permis d'en abregce: le difcours. Nousferons- même obligezd' ajoûter encoreunmot, fat laqueftion que lacuriofité de quelcunle pourroit obliger de. faire, combien de tems il y a, que les Caraïbes font pañlez de: la Floride dans les Iles. Er c’eft dequoy l’on ne peut avoit: de connoiffance aflurée. Car ces Nations n'ont pour la pluss part, d’autres annales que leur memoire. Mais parce que: ces gens-là vivent pour. l'ordinaire, plus de fix-vints ans,. on ncdoit pas trouver étrange, files choles qui fe font pañées ; parmy eus, fe perpetuent jufques.à trois ou quatre genera* tions. Et pour confirmation dececy, on voit pluficurs homs. mes & plufieurs femmes entre ce peuple , qui racontent da, venuë des Efpagnols en l’ Amerique , comme fi elle étoïît d'hyer. De forre, que le fouvenir dela fortie des Caraibes hors de la Floride, & des guerres qu'ils y ont euës, étant enr corc. frais à prefent PARU les. Apalghites ). CCUS a les N? Les ALEs PANPIMES. 373. | toui difcourir, conjeéturent qu'il y peut avoit cinq à (x AP ans, oucnviron, queces chofeslà fontavenuës. Que filon demande pourquoyÿ s'étant accrus fi puiffamment dans “leslles, ils nefe font pas mis en devoir de repañler en a Flo- “ride, pour fe venger des Apalachites, & de ceus de leur Na- -rion qui les en avoient chaflez,; on peut répondre , ptemicre- ment. Que la difficulté dela navigation, qui eft fort aifée des Antilles en la Floride: mais fort. perill eufe de la Floride aux. Antilles, les vens étant ordinairement contraires, leur en a peut eftre fait perdre l'envie. Secondement ; Que les Iles ayantunair pluschaud, & uneterre auf bonne, _& apparem- ment plus propre à leur naturel, que celle de fa Floride ils ont Creu que ceus qui lesenavoientchafflez, leuravoient, fans à - penfer, procuré le plus grand bien qu'ils pouvoient defirer ; & leur avoient fait trouver, contre leur deflein > mA: repos. affuré dans leur exil. CHA PI T RE HUITI EME. | Digrefion contenant un Abrez e de l'Hiftoire Naturelle: &7 Morale du Pais . Apalachites, | Uifque nousavons tant parlé des CApalachites: au Cha-- itre precedent. & que plufieurs des anciens Caraïbes = dépuisleurs guerres, ne font qu’un Peuple, & qu’une: même Republique avec eus: il ne fera pas hors de propos, veu- quecettematiere eft rare & peu:connué, de dire quelque cho=- fe de l’étenduë & de la naturede leur pais. Des produë&tions de: là Terre, & des fingularitez qui's'y trouvent. Des mœurs des habitans , de leurménage, & deleursemploys. De leur: Police, & deleurs Guetres. Dela Religion qu’ilsavoient au-- trefois & de celle qu'ils profeflent aujourduy : Deleuts ma-- Jadies, & de leurs entérremens, commenous l'avons recueil li, des excellens & judicieusmemoires , quinous ont cftéen. voyez, premierementen Latin, par C#r, Briÿfok, puis aprés : en NOIrE- langue, pat CHr. Edouard de Graeves ,. Chefs & Di je A aa3 reéteurs- 25 : Œe HISTOIRE dope ‘Cha . reéteurs des familles étrangeres, qi font à Pres habir ù AU das SU TT A cd NEED parmyce Peuple. Re ARTICLE IL OR De l de cn de la nature de Païs des del M Etat des C4palachites, contient plufeurs petites Pro vinces, dont les unes font en cette belle & fpacieufe Vals« lée, qui fl bornéedes côtés du levant & dunord, par une chaine d’hautes montagnes, qui font connuës dans toutes les cartes, fous le nom 4’ CApalates : de celuy du midy, de la Province de Tagoñesfa, quief habitée par une nation cruelle. & barbare au pofhible, qui eft toüjours en guerre avec fes voi- fins : & du couchant , de la Riviere d’Hiranaché, que les“ | Efpagnols appellent, le Fleuve du Saint Efprit, & de quelques. petites montagnes, qui les feparent des Cofacites, & de plu. fieurs autres petites Seigneuries, qui font dans l’aliance, ou fous la protettion du Roy d’Apalache, | La plus confiderabie des Provinces qui fontenla vallée, fe nomme Berarir, celle qui la fuit s'appelle C4waewe , & la troifiéme Matique. 11 eft vrai que cette derniere, quicom- mence dansla vallée, s'étend encore entre les montagnes, & _ même jufqu’au midi di grand Lac: qui eft connu parmy eus fous le nom de Theori. “Les autres Provinces, font, Schama & Meraco, qui font fituées entteles montagnes d’ CApales, & CAÆchalaque ; qui eften partie dans les montagnes, & qui s'étend en fuire en des marais, quifont entretenus parles dés. bordemens du grand Lac, quiarrivent reglement deus fois, chaque année, | Le Pais des ea Lee Lea étant ainfi, divifé en: fix petites 4 Provinces, quiont chacune leurs Chefs particuliers, qu'ils. appellent Paracouffes, & qui reconnoiffent celuy 4° Apalache pour leur Souverain: il neluy manque que le voifinagede la! mer, ou quelque fleuve navigable, pour avoir tous les plus grandsavantages, qu’on (auroit fouhairér à à un état, afinde le rendre recommendable. Car il renferme des montagnes d'une. vafte étendué , & d'une hautonk prodigieute, qui font habis | ds: A | tées 2 4 NUE SAR DENT MT UE CR OS et La PME en ee Lo CN a UE AMAR DT RE TON EL VAE EN ane Re L : he de j RUE AGEN 0 re x Or if + a + Te ü pofible , quine vit prefque que de fauvagine, qui eft abon- te parmy ces folitudes. On y rencontre auf ‘des plaines (a valées,qui font peuplées d’une Nation moins rude & micus icée, quicultivelaterre, & fe nourrit de route forte d'ex- &ellens fruits, qu’elle produit en abondance, Et enfin l’on y | trouve un grand Lac, & plufieurs marécages, qui y font fre- | vent de leur pefche, & des grains, quele peude bonne terre | qui leur refte à culriver, leur peut fournir. | temperature, comme celuy de la plüpart des Iles que nous beautems, y changent alternativement la fee délatérre, & à ce que fa plus grande furie foit pañce. Le fommet des plushautes montagnes qui regardent le fep- tentrion , eft couvert de neiges prés de la moitie del’annéec, Carellesnefe fondent, que durant les plus grandes chaléurs. del’été: &c’eftauffiencetems-là, quelestorrens qui fc for- ment dans les ravines, faifant fortir les rivieres hors de leurs. Canaus,. inondent les plaines, & caufent de grands ravages danstoutes les campagnes: maïs, outre que ces débordemens. fontbien toft écoulez, ils laiffent par tout où ils paflent, un li-- mon, quiengraific laterre, & la rend fertile à merveille. Les trois Provinces qui font dansles Vallées, ont par tout une terre grafie un peu difcile à-labourer, mais d’un grand ra- port. Les Villages & les autres places plus confiderabl es, qui portent le nom de Villes, fontordinairement bâties fur dé pe- tites ÉmMINenCes , qui les garéntiffent dés inondations. Et le terroir quicft à la pente des montagnes, éft fäblonneus, & tresraifé à cultiver, à caufe qu'il eft prefque par tout arroufé déruiffeaus, & de petites rivieres quien defcendent, sic ji X: . DES ILES ANTAELES 375 s par tout où elles font acceflibles, d’un Peuple vaillant quentez d’un nombre affez confiderable de familles, qui y vis L'air deces Provinces, n’eft point d’une égale & conftante avons décrites: mais, le chaud & lefroid, lespluyes & le: yentretiennent une agreable diverfité de faifons. : Suf la fin dé | Féré, & au commencement de l'automne, les tonnerres y font fi frequens & fi terribles , que les habitans mourfoyent de frayeur, s'ilsn’étoyent faffonnez àlesentendre. Le vent du: nord , y eft auflitellement impetueus, que ceus quifont à la éampagne, font fouvent contrains de fe jetter parterre, jufques: HEIN \ “r6 HISTOIRE Mo der CS La Terre quin’eft point défrichée, eft revétuë d'une. ; _-nité d: beaus Arbres, qui recreent merveillen fees ae & produifent diversbons fruits, qui re à a nourriture & au rafraichiffement des habirans. L’ on y voit des Cedres , dés Cjprés, des Pins, des Chefnes, des S'affafras de toute (or re de Palmes, des Tapaikas , Qui font couverts d’une écorce, quil a la couleur & le gout aprochant de la Canclie, & un grand nombre d’autres, qui n'ont encore point de NOMS | parMys nous. Quant à ce qui eft des Arbres fruitiers, outre de Charapictil & les Noyers qui y croifilententre les autres arbres des forers:" les dernieres familles étrangeres qui font pañées à cette terre, & les Indiens. qui y fontaufli venus dépuis peu, du Golfe! d'Hondures, y ont plantéen tant d’endsoits des Cocos, des Figuiers, rie Bananiers, des Grenadiers, des Orangers, des Citronniers, des D onices & des Poiriers de differente efpes ce, & mêmedes Cerifiers, des Pruniers, des Pefchiers, des Abricotiers & toute forte de fruits à noyaus qui y ont telle ment multiplié, qu'a prefent ils y fontaufli communs qu'en: Ja Virginie, ou en quelque autre des Colonies de l' AQU Septentrionale. Les Arbrifleaus & les Plantes qui portent des feuilles ,: ow des fleurs de bonne odeur, commele Laurier, le fafmin, le Mytte, les Rofiers , Je Romarin & la Sauge, y croiflenten perfection : de mêmequeles Ocillets, les Tulipes, les Vio- liers, les Lys, & touteslesautres belles Flcurs quiémaillent les parterres. Les Fraifes, les Frambroifes, & les Bleuës, croiffent dans les bois fans eftre cultivées. Onytrouve même des Noifettes, des Grofeilles rouges & blanches, & une in- finité d’autres petis fruits, qui fontbons à manger. Le Froment, l'Orge, &le fégle, qu'on y a femé à diver= {es reprifes & en divers endroits, n’ont pouflé que del herbe de même qu'aus Antilles. Mais enrecompente, ilycroift. pat | tout, une fi grande abondance de ris & de toute forte de millet, de pois, de féves, & d'autres legumes, que les Habitans des Vallées & des Plaines, en recucillent añez pour leur nourri- tute, & pour cn fournir à leurs voilins qui demeurent. aus M Ofe state Ft % de FA ï ne PTE AN x mé & quileuraportenten échange, des peaus pre- be notiéenxs: dés racines, les melons , les cocom- s,déscitroüilles, & generalement toutes les produélions des jardins de l’Europe, y viennent aufli facilement, qu'en âucun endroit du monde, pourveu que l’on prene la peine de les cultiver, & d'avoir de bonne femence. - Entreles Beftes : à quatre pieds, qui fe voyent dans ces Pro- ces , lesplusordinaires, font, les, Cerfs, les Cheurevils, les Sangliers, les Daims, & les Chamoys. Il n'yapointde Lievres; maisles Lapins y font fort communs, & les Origi- naires fe fervent de leurs peaus, qui font parfaitement blan- ches, pour faire les paremens de leurs habits d’hyver. Ils les faivent aufli teindre en diverfes couleurs, afin de donner ‘plus de grace à leurs fourrures. {l n’y a aucun animal farrouche dans le plat pais, parce que les Indiens qui habitent aus mon- tagnes, etans parfaitement bons chafleurs, leur font incef= fanment la guerre, & les repouffent au loin dans les folitudes inhabitables : tellement que les troupeaus de brebis, de va- ches, .& de chevres, qu'on yaamenez, paiflent parmy les prezen touteaflurance, fans qu’il y ait perfonne qui les garde. Mais dans les grandes forets, & au fond des deferts plus éloig- nezdu commerce des hommes, ilyades Ours, des Tigres, des Leopards, une efpece de Lions plus craintifs, & moins _cruéls que ceus de l'Afrique, & plufieurs autres fortes de be- ftes farrouches, qui vivent de proye. On y rencontre auf plufieurs monftrueus & dangereus Reptiles. Quant aus Oifeaus, il ya prefque par tout des coqs-d’ inde, des poules pintades, qu’on peut à bon droit ngmimer les fai- fans du pais, des perdris, des ramiers ; des tourterelles , des joifeaus de proye, des aigles, des oyesfauvages, des cygnes, des cannes , des aigrettes, des pañlereaus blancs, des Tonat= vzulis, des Paracouffis, des Flotiens, que nous décrirons en Particle fuivant, & uneinfinité d’autres, qui ont un pluma- 2e merveilleus, & beaucoup different de celui des mêmes efpeces dont nousavons patléen traitant des Antilles. Les Perroquets n’y font point frequens, à caufe qu'ils ne peuvent Murs Bbb pas DES: ILES ANTOE LEE 37%. À: fes de Martes, de Ronasds: de Cham, de Cerfs, d'Ours, TES NE PR ES RS AR PO RE Us SE E 9 DE nt des PSC LUEX LÉGN)E vide à ges AR 378 HISTOIRE MoRALES pas fouffrir le froid. Maisles Indiens, qui demeurentausrc trées plus meridionales, y cn aportent affez, pour conte la curiofité deshabitans, quife divértiffent à “Les aprivoifer. à leur aprendre à parler, comme on le faitailleurs. : 6 ‘Les CApalachites, n’ont aucune connoiffance des Poiflons | dé la mer, à caufe qu'ilsfont éloignez de la cofte, dé fét où” taie jdn es poutle moins: maisils en pefchent une grande quantité dans les rivières & dans les Lacs, qui font fort nour=" riffans, d’unexcellent goût, &c d'une figure bien aprochante= de celle de nos carpes, denos perches, de nos barbeaus, & de nosbrochets, El$ y ptenent aufli des anguilles, des Ecre=t vifes, des Crabes, & même des Loutres, qui ont la peau parfaitement noire & luifante , & des Caftorcs, Ra qu ils font de ces bonets, & de belles & precieufes fourrurts, ARTICLE II. de. en). De plufieurs rares fl: ingularite? , qui fi tronvent dans: les - 54 Provinces des CApalaihites. | A Hiépäte des produéions de la terre & de eaus , 4 quil | L nous avons fpecifiées en!l’arricle precedent; fontcommus nes à toutes les Provinces des. Apalachites: mais les fingularis tés, que nous allons décrire en celui-cy, nefe rencontrent qu'en quelques endroits particuliers ; bien qu elles foyent connuëés parmi tous les habitans des autres , à caufe de la: grande communication qu ‘ils ont par cnfemble, comme étans. Hienbres d’un mêmeétar. La Province de Bemarin, eft fertile en une faces raci= nes fort excellentes, que les Originaires apeltent Oriaëly, Elles font pour la plüpart un peu plus grofles qu’unénoix, & d'une forme prefque ronde. La peau quiles couvre eft fort deliée, & d’une couleur vermeille, maïs la fubftance qu’elle envelope eft d’un gris blanc, partagé de veines violettes, Ces racines fontliées les unes ausautres, par certains petis filamens,, dé- quels elles tirent aufli leur nourriture. Etant cuites fous da: cendre, ou bouillies en l’eau, elles ont un goût agreable &e relevé, & une vertu fi puiffanteà fortifier la poitrine, qu'on: NET AA À CN AAA 4 Met AS fui N AE Gr DIN EE RER LS à; Fa FEU À MRC pts acine qui croift dans la même Province, qui a une vertu iparticuliere pour fortifier le corps aprés unlongtravail, Elle €ft compoféc de plufieurs nœuds, qui fontde la groffeur d'un “petit œuf de poule, Elle n’eft point propre à eltre mangée, mais etant formée enboulettes, & féchée à l'ombre, de même que ces chapelets, que l’on forme parmi-nous de la racine - d'Iris : ilss’en fervent à laver les mains & le vifage, aulieu de favonettes, & mêmeils s’en frotent tout le corps, quand ils fe baignent; dans lacreance qu'ilsont, qu'elleala PASS de délaffer les menbres, & de les rendre plus fouples & plus vigoureus. Ilsont auffi remarqué par l’ufage, que cesracines étantbien preparées, communiquent leur odeur aromatique à leursvétemens, & qu'elles empefchent toute fortede ver. mines de s'engendrer dans leurs fourrures, Ils les nomment Koymelak en leut langue, c’eft à dire, les Racines debonne odeur. | | Il croift parmy les su dela Province d’Armame, une Plante en forme de chardons à larges feüilles, quifont he- riffées d’un cofté de plufieurs épines. Les häbitans du païs l’a- pellent Hyaleitokt , d'un terme qui fignifié, la Plante bien utile. Elle pouffe untige, qui eft ordinairement chargé une fois l’an, de deus ou troisteftes, qui grofiffent comme celles des Artichaus, & qui font couronnées d’une fleur de couleur Yiolette, laquelle eft divifée en plufieurs petites feüilles lon- guettes & étroites, comme celles du Soucy. Cette fleur érant tombée, & la chaleut ayant meüry la tefle qu’elle convroir, ce gros bouton s'ouvre cn divers endroits, & fait voir par fes fentes, une efpece de Cotton extremement dous & delié dont ilef rempli. Cetté forte de cotron ou de duvet , a un luftre Éclatanr & vérmeil comine celuy des rofes fraifchément € Épas nouïes: mais ce qui releve fon Prix, c’eft qu'ilconferve certe Vive couleur bien qu'i foit expofé au Soleil, & quelesvents £n faflent leur joûet, Les étrangers, & même plufieurs des Bbb z origi- Pres ANTILLES | ‘479 Les Puis. ont Ut la connoiffance d’une autre # 330 HirsToirREe Mora: originaires à leurimitation, le recucillentlorsqu'le _ n’échaufent point les reins, comme ceus qui font faits de TO RS CARO DLL OR RE EM NE s RER | ee, L / + r ! à Me } re A LE» pour engarnir des matelats, des lits, & des couflins, qui f beaucoup prifez parmy eus à çaufe de leur molleffle, & qu'i plumes, ou de laine, oude cotton. \ ja ! SAR Dans les montagnes de la Province d’CA4chalague, qui cons fine à lafeigneurie des Cofacites, il y aune plante fenfitive, qui! cft l’incomparable entre toutes celles , qui meritent de porter cenom, Les habitans du pais l’apellent par excellence, das zuli, qui vaut autant à dire, que /4 fleur vivante. Elle na, point d'autre graine que fa racine, qui a la figure d’un gros oignon de lys, d'oùelle pouffe un buiflon fort toufu, com» poféde plufeurs feüilles longues & étroites, qui font fem blables à celles du glayeul, horsmis qu’elles font heriffées der tous côtés, de certaines.petites pointes extrement piquantes,! qui leur fervent de défenfe. Du milieu de cet amas de feüilles,s qui font d’un beau verd.d’émeraudes ,. qui recrée merveilleu= fement la veuë, il s’eleve un tuyaude la groffeur d'un pouce, qui durant le printems, jufques au commencement des plus” ardentes chaleurs de l’efté, eftchargé d’une feule fleur, agreas bleàlaveué, &debonnefenteur, laquelle étant épanouye,s eftunpeupluslarge, que lesplusgrandesPeonnes. Sesfeüil= les qui font de la couleur de pourpre, font parfemées de plus fieurs. points jaunes, qui paroifflent comme autant de petites. étoiles: & pourledernier trait de fa beauté, elle pouffe de, fon fein, une forme declochette , émaillée de tout autant de couleurs, qu’on en admire en l’arcen ciel : &au mulieu de cette coupe, on voit un petit fruit vermeil au poflible, de la aroffeur d’une cerife fans noyau, quieft fort délicat au gout, ce qui fait queles Oifeaus en font fortfriands. Mais ce qui ct de plus merveïilleus en cettebelle Fleur, & qui luy a aquis le nom qu’elle porte, c’eft, qu’elle fe tourne toüjours du cofté du Soleil, qu’elle fe ferme lorsqu'il fecouche, & s'épanouié quandilfeleve, & quepourun furcroift demerveïllé , elle ne peut fouffrir d'eftre touchée de la main, ni en fes feüilles,. nien fafleur,, & particulicrement en fon fruit, qui eft coms me le petit cœur de cerare compofe, que toutes fes feüilles, qui. font armées d’épines, comme. nous. l'avons reprefent 4 Li D | ne: L N : 55 ‘NES Han ANTILLES. | 381 ne fe recoquillent comme par de certains réforts fecrets & faturels, pourenveloperlamain, & fe mettre en état derc- pouflerlaviolence. Mais aprés ce foible & inutile éfort, qui eft bon qu'a enlacer de petis oifeaus, qui ont l’affurance de en aprocher, & non pas affez de force pourrompreces fi- lets, cette admirable fleur, fe flétrit en un inftant avec fes feuilles, fans reprendre jamais fa premiere vigueur. De for- tc, qu'un leger atouchement eft capable, de faire perdre en un moment, non feulement toute la grace & tout le luftre, mais encore la vie à ce petit miracle de lafnature. Mr. de Grac- ves, de qui nous tenons cette naifue defcription , demême quele crayon de cette plante incomparable, que nous avons fait tirer au racourcy, dansle Payfage de la ville de CAé/ilor, _& de la montagne d’Olimy, pout enrichir cette feconde edi- tionde nôtre Hiftoire , nousaflure, qu'on aefayé à plufieurs fois de cranfplanter fon oignon dans des jardins particuliers, & qu’on à même aporté du lieu ou ellecroift, autant de terre qu'il falloit pour l’entretenir: mais qu'après tous ces foins & toutes ces precautions, au lieu de poufler le tigeils’eft pourri. Ce qui fait croire, que cette merveiileufe Plante, quincfe: plaift qu’aus montagnes & dans les. lieus les plus éloignez du commerce des hommes , ne peut eftre élevée en unautre air, qu’enceluyoù elle a pris fanaiflance , ni arrachée de fon pro preterroir, fans qu’elle perde la vie. Les Provinces de Bemarin. & de CMeraco, font fertiles en certains Arbres que les Originaires nomment Labiza, c'eftà direun Zoyæs , a caufe fans doute qu'ils en tirentleurs colliers, . leurs bracelets, & la plüpart de leurs plus precieufes richeffes. Hs font de la groffeur & de la figure des Lauriers, excepté que leurs fetiilies c qui font dentelées par le bout, font d'un verd plus gay. Ils portent aufliau printems des fleurs fort aproctantes de celles des abricotiers, qui fes’echent & rombent fan8eftre fuivies d'aucun fruit: mais en recompenfe,.le tronc & les plus grofes branches de ces Arbres, fuent une efpece de Copab, ou de somme precieufe, debonneodeur, & d'unjaune pâle , à: aiquelle on peut donner telle figure quel on defire,. quand el- le eft nouvellement recueillie. ”Mais étant expolée au Soleil, qu. gardée queique tems en lieu fec ,elle fe durcit enitcile forte, | BLbb 3 qu’elle: SO À 7 À j \ ÿ M: F K: 4 £ de x NS CPE EM PRE OPA OU Let LA RU 7e CL. VASE NNUR AT TRC EE ET PE 3 Ea + st2 HirsTorrEe MoRALE, qu'elle ne fe peut difoudre niàla pluye, ni même dans! chaude. Pouravoir cette liqueur gluanre & épeñle, en. grande abondance , les Habitans de ces Provinces-là, foi printems des incifions & diversendroits du tronc, & des groffes branches de ces Arbres, puis detroisentrois jour ils vont recuëillirles goutes qu’ils y trouvent pendantes , def quelles ils forrnent des bracelets, des coliers , des pendanss d'oreilles, des boutons, des jettons , & même de perites boettes de divetfe figure & capacité, & des medailles far 16 quelles ils imprimen diverfes effigics, avant que cette riche matiere, quicft comme une efpece d'Ambre , fe durcit, Toutes ces curiofitez, font en grande eftime parmy ce pau vre Peuple, & y tiennent le même rang que l’or & l'argent entrés nous. JIss’en fervent auff, au lieu de monnoyc, pour sat tenir leurcommerce, comme nousle dirons en fonlieu, Mais, entretous les plus beaus Arbres, qui croiffent dañ ces contrées, ils font un état particulier, d’une cfpece de Ce= dres, de tres-agreable odeur, qui ne fe trouve Core LE ment, que dans une belle vallée, que les Originaires de la Province de CMatiques , ont nommée Ber/a ykaot, qui fignifié en leur langue, la Vallée des Cedres. Ces Arbres pouffent leur troncs fort droits, & fort hauts, avant qu'ils s ‘épandent “en branches. Leurboiseft fansnœuds, de couleur de citron, & fi folide, qu’on le peut polir, &en faire routes fortes de beaus ouvrages de menuiferie, qui ont un luftre éclarant com- me l'or BERE , &unefidounce &fiagrcable fenteur, qu 'cllea la vertu de fortifier le cerveau, & de parfumer tout ce qu'on referre dans les coffres , qui font faits de ce precieus bois, fans crainte qu’il s’y engendre aucune vermine. | La Province ae Bemarin, & cette Vallée dont nous nee de parler, font encorerres-renommées, pour les rares Oi- feauSiqui s’ytrouvent, dont les plus cor fiderables font les To- - natzulis, qui chat ent auf melodieufement que nos Rof- fignols. Ils font de ia eroffeur & préfque de la figuré des Chaf= rai NE : mais ils ont le ventre & lés ailes, d’un jaune dos , ledos, d’unbleu celefte, qui s'étend PURE à la queuë, La tefte, d’un plumage entreméflé, de toutes Îés couleur , dontle refte de leur corps eft revétn , & le bec & les fériés", à , de cou «TZ NP CDI TORONTO ES ITS PR NTS PU D'UN € OS LE Ù EMULE Es: BIOP] »FTR ; #7 ESS $e FLAPE NU à L DES ALES ÆANTELLRR 333 1 leur le &pvoire. Ces peuples croyent , comme nous le hirons tantoft, que ces Oifeaus, qui font fi pompeufement parez, font les meflagers du Soleil, & qu'ils font particulie- rément confacrez à chanter fes loüanges , aufli le nom qu'ils Huront donné, fignific en sens un Chantre, où Mu- Jicien de Ciel, . Aprés le Tomatzuli, que nous venons dedécrire, le plus rare & le plus merveilleüs detonsles Oifeaus, qui font enefti. me parmy ces Nations, eft celuy qu'ils nomment Paracouffe, leufement l'orcille, à caufe qu'illa fait conduire felonles re- gles d'une mufique naturelle, quin a point de mauvaisacords, Aleft timbré d’un pennache, d’où il fort encore une petite ai- änchaton d’or, émaillé de blanc. Sa tefte & fon col, font Je col, un petit cordon noir, qui luy donne une grace mer. de jaune & d'incarnat. Son dos, & les sroffes plumes de fes ailes & de f2 queuë, fontd’un jaune doté. partagé denoir, üntunetres-acomplie proportion. Ses jambes font orangees,. & la cornede fon bec, & l’extremité de fes ferres, oi COU- Oïfeau , montrent affez qu’il a quelque fentiment de gloire, & forte qu'ilfaut avouer, quec’eftavec taifan que les A palachi- es autres Oifeaus, qui fe voyent dans leurs Provinces. OH , & celuy qui eft dans lavallée de ykaon , ont auf: c’eft-à-dire, le Royfeler. 11 eft de lagrofieur de ces petis Per- toquets, que nos infulaires apellent Perriques : mais , il n’a pas lebec crochu, fon vol, eft aufli plus roide, & de plus Re portee ; & au lieu d’un ramage inportun, & d’un Mémeton, ilauné voix fort douce, qui contente merveil- &rerte, qui cf comme le plus riche fleuron, quitermine fa couronne. Ses yeus, font comme deus rubis enchafiez. En cntichis d’un duvet, de toutes les plus vives couleurs. de Ja mature, quireprefentent un changeant admirable. 11 a fous weilleufe. Son ventre & le défus. de fes-ailes, font diverfifiez: & de couleur defeu, parun mélange en forme d' écailles, qui leur brune, tirant furle violet. Le port, &le corfage de cet” Qu'il fait tenirfonrang, parmy les autres, pour fe voir revétu de tant de vives couleurs, & fi avantageufement paré. De tes, luyont deferé lacouronne, & letitre de Roy, entre tous: _ Le grand Lac, qui eft connu parmy eus, fous le nom de: plus 44 CN GOMRONEELECET AN FT LE “y a Zi ee À ST ee ON OPINION ES RANCE MEMEUCT, ACT PT RINE ANT L'ar 0 S grtathc l'r 4 du d hd 4 € PP M ALU D SE A ‘ « ARR AE US se U FL ASE Ne dau FT CT 384 HisToirRe Morazez;. (Ch plufieurs rares Oileaus, tels que fonties Flammans & les Aj- grettes, que nous avons deja decrits au premier Livre de cette Hiftoire. Mais celuy qui merite d’eftre particulierement co 1e fideré, entre ceus qui hantentles rivieres & les marais, eff. luy, queles Originaires du pais nomment Flotien , il eftde, la groffeur d’une Aigrette, & d’une forme toute pareille. Ses” ailes, fon dos, & les plumes de fa queué, font chamarrées comme par écailles, de gris, de blanc, & de noir, & bors dées d’un petit filet rouge. Sa tefte, eft couverte de petites plumes noires & luifantes, qui luy fontcommeunce toque ; & quant au refte de fon plumage, il eft parfaitement blanc. I prepare au printems fon nid dans les rofeaus, de mêmequeles. Poules d’eau. 11 le couvre par défus avec une finguliere in2 duftrie, ne laiffant qu’une petite ouverture du cofté du midy: par laquelle il peut entrer & fortir, Il le garnit par dedans d’uné fine moufle, & dediverfes petites plumes, qu’il va recueillié ça & là parmy les buiflions, oùila coûtume d’en trouver: & aprés avoir ainfi preparé & agence fon lit mollet, ily pofe fes œufs, & y écloft fes petis, pour perpetuer fon efpece. 1 Parmy les Cofacites, qui font les bons voilins & ailliez des Apalachites, il ya dans les plus hautes montagnes de leur Pro- vince , une Caverne merveilleufe, en laquelle les eaus ont faf fonné,toutesles grotefques & les raretez les plus exquifes, que la curiofité la plus dificile à contenter, s'auroit defirer pour fon divertiflement. L’on y admire particulierement uu certain ens droit, où les eaus tombant en partie für une pierre dute au pof- fible, & diftilant aufli goutes aprés goutes de differente grof- feur, dans un baflin qu’elles ont formé, font unemufique fi acomplie, qu’a peine y à-tilaucune harmonie , qui luy foit preferable. A0 i On trouve aufli parmy les montagnes. des Provinces de Schama, & de Meraco, du Criftal de roche , & quelques Pierresrouges, & éclatantes, qui ont un feu affez brillant, pour paffer pour une efpece de Rubis. Ilya aufli des minesde cuivre, mais elles ne font pas encore découvertes. Ce qui confirme cette opinion, eft, qu’on y rencontre du fable doré, quiaun fi grandluftre, qu’on le prendroit pout dutres-fin Of, quand les torrens qui le charrient des montagnes à la phineal aiflent g Mhap3. DES: ÎLES ANTILLES, PA Hhiflentfurle bord des rivieres parmyle fables mais, les Or. fevres l’ayant voulu mettre à l'épreuve, ils’eft prefque entie- tement evaporé au feu, & même ce peu quieft refté dans le “creufet, nepeutpañfer, que pour du plus fin Cuivre. Pourlaciôture, detouteslesrarerez & fingularirez quife trouvent parmy les Apalachites, il ne faut pas oublier de faire ladefCription , de la celebre Vallée de Serfaykaow, de laquelle nous avons déjadit quelque chofe. Car c'eft l’une des pius agréables, & des plus propres à recevoir des Habitans, quife trouvent non feulement en la Floride, mais encore entoute Ÿ Amerique Septentrionale, foit qu’on air égard à la fertilité defonterroir, aus claires fources qui l'arroufent, aus excel- lens arbres quila revétent fi magnifiquement, & fur tout aus Cedrestres-precieus, quiluy ont aquis le nom qu’elle porre, de Vallee des Cedres , quieft l’interpretation du terme, dont les Originaires fe fervent, pour la diftinguer d'avec lesautres : ou que l’on veüilleconfideret , la chañle & la pefche, qui s'y peuvent faite fort avantageufement, ou la facilité de la forti- fieravecpeu de frais, & la rendre du rang des places que l’on direftre inprenables. , or: Cette Vallee, eff fituée enun air forttemperé, entre les trente-quatre & trente-cinquiéme dégrez au deça delaligne, & prefque au centre des renommées montagnes d’C4palates, Qui l'entourans de tous coftez, ne luy laiflent qu’une petite ouverture, laquelle aprés plufeurs finuofitez fort étroites, fevient enfin rendre dans la Province de CAatiques, qui s’é- tendcomme nous l’avons deja dit, & dans la plaine & dansles mêmes montagnes, Elle eft couverte prefque par tout de beaus Arbres de Caffise, dont la plüpart des Floridiens font cebreuva- ge fexcelient & fi fain, quieft tant priféparmyeus, Ilyaaufli des Chefnes d’une grofleur & d’une hauteur extraordinaire, quiportent des glands fi dous, qu’ils font autant prifez que les Charaignes :, & un fi grand nombrede cette efpece de Cedres recicus dont nousavons parlé cy délus, qu’ils ont donné à ette valiée le beau nom qu’elle porte. Tousces beaus Ar- bres, y font rangez par les fages mains de la nature, en une iftance fi bien proportionée, qu'on diroit qu'ils yayent ellé antez à deffcin , d’aller par tout à cheval, & fans aucun em- efchement, | Ccc Cette 4 ar dr ARR ÿ TEA LE D'ACTE RAT" à Len SR UN De PURE EE D) LT PEN 186 HisToirre MoRALE, Chap Cette agreable Vallée, a environ neuf lieuës de: 16 à prendre du Nordau Sud, fur une largeur inegale. Car en quelques endroits, elles ‘étend jufques à trois lieuës, & aus plus étroits, elle en a du moins une & demye. Elle ef arrous fée par tout de plufieurs petis ruifleaus d'eau vive, qui de la pente des montagnes, où ils prenent leurs fources, fe viennent rendre dans une belle Riviere, qui commence au pied de la plus haute montagne du cofté du Nord , & aprés avoir fers penté cette Vallée en falongueur, vient enfin fe perdre dans un grand Lac, qu'elle forme au Sud, qui a environ deus lieués de tour. 51,5 Ce Lac, a CCCy de merveilieus, qu’ étantentouté de toutes parts, d’une chaine continuëde hautes & fourcilleufes mons tagnes, qui luy font par tout un ram part inpenetrable, ex2 cepré du feulcofté, par oùla Riviere s'y décharge: fon baffif paroit neantmoins en tout tems également rempli; bien que la Riviere qui le forme, foit fouvent demefurément enflée; & que lestorrens, qui roulent leurs eaus de toutes les mons tagnes voifines , s'y precipitent avec impetuofité, lors que les nciges fe fondent, & durant les grandes pluyes duprintems & de l’auromne. Cette égale confitution deseaus.de ce Lac, qui fe contiennent toûjoursdansleur lit, faitcroire avecrai fon, àtousceus quivoyent cette merveille, que dans lesras œines de ces hautes montagnes , quile bornent prefque de tous tes parts, ily a des abyfines k & des concavitezfi profondes & livaftes, qu’elles font capables d'engloutirtoutes-ces caus; qui fans déni aprés avoir traverfé ces conduits foufterrains; vont faircleur fortie, en quelque autre endroit de cenouvcau Monde, LaRivicre qui compofece Lac, faifant fon:cours depuis fource , & rencontrant en trois éndroirs differens, quelques petites eminences de terre armées de rochers, fe divife en deug branches, & fe reunit autant de fois en un même canal: & ain], sé forme en fon fein trois petites Iles, extremement belles, qui font auffi.enrichies de Cedres & d'autres! arbres, quileur confervent un ombrage perpetuel. Elle eft aufli abon= danre en Ecrevifles, & en pluñeurs fortes d’excellens Po fons. Le Lac en nourritaufliuneinfinité, quien une faifor 22 Cu AE Si Te ONE SRE TH £ he p.8 DES ÎLES ÀAN TILL E(. 387 de lannée montent jufques-à la fource de da Rivicre, puis tedefcendent dans le vafte fein d’où ils cftoyent f fortis, s’ilsne tombent dans lesnafles des Pefcheurs, qui leur dreffent pour dors despieges. On trouve auffi fur icrivagedu Lac, & en divers endroits du bord de la Riviere, des Loutres & des Ca- ftors, qui font fort cftimez non tant pour ieut chair, qu'a çaufe de leurs precieufes dépoüilles. On rencontre aufli parmy les montagnes, qui font une fi forte ceinture de murailles naturelles à cette Vallée, une æfpece de Chamois, ou de petites Chevres Sauvages, qui fe coulent quelquefois par les precipices & les fentes des rochers dans la plaine; maisaufli toft qu’elles aperçoivent des hom- mes , elles regaignent les montagnes avec une agilité incom- parable. Les Apalachites les nomment C4loueyas , elles ont da tefte fort petite, à proportion du refte du corps; le col droit & clevé, lesyeus gros & vifs, lepoilblanc & aflez long, pout pouvoir eftre filé. Leurs cornes font fort petites, & recour- bées fous les oreilles. Leurs pieds font partagez en quatre on- gles, dontilyenatrois fur le devant, & le quatrième , qui æft plus large & plus gros que les autres,tourneen arriere. Ces Chevres fontfilesgeresàlacourfc, & lors qu'elles font pour- duivies, elles s’élancent avec tant de roideur & de vitefe de rocher en rocher, qu’elles femblent plütoft voler que courir. “Ces animaus, ont auflh une fi grande chaleurnaturelle, que par tout où ils fe couchent, durant même les plus grandes froidures de l'hyver, laglace & la neige y font incontinent fonduës. C’eft aufli à cetindice, que les Chaffleurs recon- noiffentleurgifie, & qu'ils prenent occafion de leur y rendre des lacets. Leur chair, eft tres-bonne, courte & la plus de- licate de toutes les venaifons de la Floride : & leur peau étant bien preparée, refifte à la pluye, & ala proprieté, de même que celle du Zeldre , d’échaufer tellement ceus qui en font couverts, qu'ils peuvent paffer fur les olaces, & parmy les neiges, fans eftre incominodez de la rigueur du froid. Tous ceusaufli, quifont travaillez de Heat froides , ne faux royent defirer un plus dous & plusfouverain remede, pour en | foulagez. uen Vallée, n’eft pas feulement frequentée des Chañeurs hic. CEcz 1 de 388 de la Province de asiques À Frs y ont nié bâti des Villag mais même du Paracouffe d’'Apalache, qui y va tous lesai une ou deus fois, prendreleplaifir de lachate, parce qu'e le eft tres-abondanre en Cerfs, en Renards, en Sanglier & en une infinite d’autres heftes fauves , qui font reche chées par ces Peuples » Non tant pour leur venaifon, qu'a caufe des peaus & des precieufes fourrures qu'ils en tie. rent, & qui font eftimées entre. eus , pout de grandes, richeffes. il Aurefte, cette Vallée n'ayant qu ‘une entrée fort étroites qui foit connuë jufqu'à prefent, peut eftre facilement pres fervée des ravages, que les Barbares font fouventdans toutle, plat païs des terres Voifines, & au befoin, elle pourra fervie de retraite afluree, & de vafte & ample Citadelle aus Apalass chites, à l'encontre de tous ceus qui voudroyent troubler le repos dont ils jouiffent parmy ces agreables folirudes, où la providence les a fait naïftre. Nous aprenons aufli des ders niers memoires de M. de Graeves, qu'ils ont deffcin, d'y tranfporter les principales forces de leur Etat, la Maifon Royale, les Colleges, & tous les autres ornemens de leur Ville capitale, & d’y enbaftir une autre de plus grande éten=. duë que celle de CHMelilot , fayvant-le plan, qui.en a efté dreffé dépuis quelques années, par un Capitaine Irlandois,. quis’éntend parfaitementbien à l’architeéture, & aus.fortifi cations: & que dans l’efperance de venir à bout de ce genes reus projet , ils ont déja bâti un petit fort à J'embouchurg: de cette Vallée, pour s’en conferver la proprieté. | AR EE GLIE Ps Du Corps: des CApalachites, Gr de lèurs Vétemens: ; Es CApalachites font pour la plüpart de grande tatulil de couleur olivätre & bien proportionez de corps. Hs nan: tous aflezblancs; mais ils changent la couleur natw xelledeleurpeau, parle frequent ufage d'un certain onguent; qu'ils compofent avec de la graiffe d'Ours, & la racine d’une Herbe, qui a la vertu. de les. endurcir contre le chaud & le Le DÉS re SR tt AE de LE EE CERN PROS PU EE ER ME TT RL RE RME DD CE PAS È x L ‘ Li £ us [5 APS. DES LES ANTHELES, | 389: froid. Ils onrtous les cheveus noirs & longs, & ce leur eft comme un prodige, de voir quelques étrangers, qui les ont blonds, & naturellement bouclez & frifez, lsn "Ont point de barbe, & s'il leur en vient quelques poils, ils les arrachent avecun grand foin, & de même que les Caraïbes Infulaires, ils apliquent promtement à l'endroit quelque huile cauftique, qui a la vertu de refermer les pores, & debrüler les racines du. poil, afin qu’il ne puiffe plusrecroiftre. _ Les hommes & les femmes, ontune AE égale , d'en- retenir leurs cheveus dans une grande netteté, & de lestrefler fort proprement; toutéfois avec cettedifference, que les fem- mes les agencent fur le fommet de leurs teftes, en forme de guirlande, au lieu que les hommes, lestiennent d'ordinaire. liez & entortillez en deus floquets, qui pendent derriere leurs ofcilles : pour n’avoir rien quiempefche, de bander & de ti- rer leurs arcs : mais aus jours de parade & de rejouïffance, ils _enhaiffentfloter une partie fur leurs épaules, ec qui leur don- neune fort bonne grace. Les Habitans des montagnes, coupent entierement les che- veus du cofté droit, & laiffant croiftre les autres, ils les reco- quillent & les nant fur le haut de leurtefte, en forme de crefte , qui panche un peu fur l'oreille gauche. Ils n’ont auf pour la plüpart, aucun ufage de boncts ni dechauflure, & quant aus autres parties de leurs corps, ils les couvrent de dé- pouüilles de Tigres & de Leopards, ou de peaus de Cerfs-& de chevres fauvages, fort proprement coufuës en forme de cafa: ques, quileur batent jufques-aus genous, & qui ont des man+ ches qui ne pañfent point le coude. Ceus des autres Provinces, qui font fituées au pied des montagnes d’CA4palates,. alloyent autréfois nuds dépuis le nombril en haut, durant tout l’efté: & en hiver, ils portoient des manteaus de peaus, enrichis de fourrures, mais aujourduy, ils font en toute faifon honeftement couverts. Carpendantles chaleurs ils ont des habits fort legers,qui font faits de cotton ou delaine, queles femmes favent filer, pour en compofer en fuite fur des métiers ,. plufieurs fortes de petites étofes bigar- -rées de diverfes couleurs, qui font dedurée, & agreables à la veué.. Mais durant l'hiver, qui eft: fouvent allez rude:;. ils: | GE. cce 3. font: RO RER D A A D à à EC nt ON MTS LT ù SPA è NEO SO PAL ES £ " 1 RAS 390 Hisrora® Mon:th eng 4 fonttous habilez de diverfes peaus , qu'ils favent aprefter. um proprement , qué les plus experts peletiers de l'Europe. Us. laiffent à quelques unes, le poil ou la laine, -qui leur fervent" de fourrure, & ils pañfent les autres & les laiffent unies des deuscôtez, “afin d'y peindredes fleurs, ou quelquesfigures/ léquelles ils relevent avec des couleurs fi vives, &fi bienapli- à quées, qu’elies paroiffent de loin, commede la broderie bien à exquife. Ils ont aufli apris des étrangers qui font parmi-eus, . à tannetles peaus debœutfs & decerfs, pour en faire des fou- | Jiers & des botines. Leshommes mariez, portent des bonets de peau de Lou-. tres, parfaitement noires & luifantes, Ils les font aflez hauts,” & leur laifient un bord largede trois pouces où environ, qui aboutit en pointe par devant, & l’un des côtez eft enrichi | d'un bouquet de plumes d’aigrettes, ou dequelque autre oi-" feaus , qui font en eftime parmieus. Les Femmes, fe couvrent. auf Là tefte , avec des coeffes qui font bordées de quelque ri che fourrure grifeounoire, mais les jeunes hommes & les file. les, n’ont en tout tems aucun autre ofnement de tefte, que. leurs propres cheveus, cordelez & treflez cürieufement, com- me nous l'avons reprefenté cy defus. 4 Ceus du commun, .n’ont pour tout habilement, qu’une” Cafaque à courtes manches , fur un petite chemifetre de cha= mois, qui leur defcend jufques aus genous. Cette Cafaque quileur couvre le gras de la jambe, ef liée fur les reins avec une ceinture de cuir, quieftornée endivers endroits d’un ou* vrage, qui femble eftre fairà l'aiguille. Maisles Chefs de fa” mille portent encore par défus, une forte de manteau fans col: let, qui netombe par devant, que fur le nombril; bien que par derriere, il pende prefques jufques à terre. L'habit des femmes de là même condition, ceft fort aprochant de celuÿ des hommes, horsmis que leurs robes couvrent lacheville du picd, & que leur manteau, qui eftentierement fermé par des. vant , a deus ouvertures aus côtez , par où elles Pr | les bras. Le Paracoufle, les Gouverneurs des Provinces, les Cap taines: & generalement tous les Officiers, qui frequentent lacourde CAclilot, font habilez beaucoup plus richement 6 Ç d in DUT È PEU SE = | AU ne: k ; EM A : ”* LA haps pes ÎLES ANTILLES. 391 plus curieufement que le commun. Caraulieu que ceus-cy “onrcouverts fur la peau d’une chemifette de chamois, ceus- la, qui ont à prefent la connoiffance & l’ufage des toiles de cotton & de lin, fe fervent de chemifes fort amples, dont les bords des coliets & des manches, font brodez de foye de di- verfescouleurs: & quant à leurs robes, elles font cnjolivées encfté, deplufeurs liftons en forme depaffemens, & enhi- & qui paroiffent comme pardivers étages. Ils fe ceignent auñi d'une ceinture de foye, ou de quelque autre riche étofe : & lors qu'ils veulent paroiftre en leur plusgrande pompe, & avec leurs habits de ceremonie, ils fe chargent par défustout cela, de cette forte de long imanteau,dont nous avons déja parle: où s’ils ne veulent pointeftre tant embaraffez, ils fe parent feule- ment d’uneefpece de cafaque à larges manches, qui ef ou verte par devant, afindefaire voir leurs autres habits, & fur tout, une lame d'argent ou de fin cuivre, dela largeur de la -paume de la main, qu'ils portent fur leur poitrine, commeune marque de leur nobleffe, ou à vous voulez comme le collier: de leurordre. lis font auffi fort curieus d'avoir des Foques de grand prix, foit que Fon confidere les belles peaus & les riches fourrures dont elles font faites, ou qu'on ait égard aus plumes, & aus. riches cordons qui les embelifent. [ls n'ont pasencore l’ufage des bas déchauffe, nides gants : mais ils portent des botines. & des fouliers., qui leur tiennent le pied ferré, & quipeuvent pañler pourbienfaits, enun pais, oirles arts ne font encore: qu'en leur naiflance. Les Zaoÿas, qui font les Sacrificateurs do Soleil , & les: Médecins de ce peuple, font aufli difcernez par des vétemens, qui leur fonc particuliers: & bien que lamatiere & la forme, en foit ridicule & grotefque au poflible, ils croyent neant-- moins, qu'il n'ya rien qui foit plus feant à la gravité de jeur profefion, ni qui foit plus capablede leur arirer le refpect 6c l’âdmiration des autres ordres. Ces habits confiftent en une- longue robe , qui eft faite de peaus dediverfesbeftes fauvages, coupées par bandes de largeurinegale, dontles poils de diffe-. £entes.couleurs, reprefentent au dehots un afreus mélange: ver, de fortexquifes & rares fourrures, qui les enrichiffent, Ge: 1 CPAS MN D HAT DE en LA 8 FDA 7 se Ra FT : & Fe a LE 392 Hisr on D MORALE» Ce Pelifon , qui leur bat jufqu’au défous du gras de pi jai : be eft ferré par le milieu, avec une ceinture de cuir de cerf, à la- quelleilsattachent trois ou quatte efcarcelles, qui font ordi. nairement remplies de plufñeurs fortes d'herbes, aufquelles ils. atribuent de grandes vertus pour la guerifon de diverfes malas dies, aufquelles ils font fujets. Par défus cette robe, ils POI= tent au lieu demanteau , la dépoüille toute entiere, d’un Lion ou d’un Tigre,ou d’un Leopard, dont la tefte & les pates qui. font Léchès Icur pandent fur l'eftomac, & aus deus côtez. Ils ont les oreilles percées , &aulieu de pendans de quelques. pierres precieufes, ils y atachent certains petis oifeaus noirs, qui font endurcis à la fumée. Soit que ce foit par fuperfirion, Ou par coutume, ils ont en tout temsles picds nuds, mais leur. tefte eft couverte d’un bonet fort haut qui aboutit en pointe, & quicft compofé de peausavecleur poil marquetées de dife rentes couleurs, & les plus hideufes qu'ils peuvent tencon- trer. Enfin, leurs bras qui font nudsjufques au coude, font, marquez de plufieurs caraéteres, & autres figures qui leur, font faites au tems de leur promotion à à ces charges, par les, . Surintendens de leur religion, qui aprés les avoir defignées. fur la chair de leurs difciples, y font des piqures julques au fang , lequel ils étanchent à l'inftanten jettant fur la playe la, cendre d’une certaine écorce d’arbre, qui ase ae cicatrice | une couleur brune, qui ne s’éface jamais. Les femmes des Gouverneurs & des Officiers, font plus, richement parées que les autres de moindre condition. Leurs. robes montent par degrez & font enrichies de broderie à leur. mode, ou de riches fourrures fuyvant la faifon; de même que. celles des honimesde qualité. Mais au lieu de Cafaques, el-. les portent des mantelines, qui les couvrent iqu' aus genous,!. & qui ont des ouvertures auscôtez, par où elles pañlent les bras. Lors qu’elles font conviées de fe trouver en quelque, afflemblée folemnelle, où à quelque feftin, elles ajoûtent à leurcocffurc ordinaire, un voilede quelque legere étofe, qui 4 l flote fur leurs habits. Elles peignent aufii leurs j joués de: be | millon, & atachent à leurs oreilles des pendans de criftal, | de quelque autre matiercquiairde l'éclat, & pour le LE x de Jeurs ornemens, elles fe chargent le col, de chaines & de. coliers, 4 DES: ÎLES ANTILLES. 393 1 œoliers, d'ambre, ou de coral, ou de quelques pierres vertes -ou rouges qui ont duluftre, Car pour les perles, les éme- _ raudes & les diamans, que quelques uns ont mis entre les tre- _ fors de ce peuple, il "eff tres- conftant, qu'ils leur ont donné beaucoup plus de richeñes fur le papier, qu'ilsn'enont dans leurs cofres. Zn RE EE: Gb E: : Ve De l'Origine des CApalachites & de leur Langage. Es CApalachites , {e tiennent des plus anciens Peuples de 15 tout ce nouveau monde : & bien qu'ils ne fe vantent pas comme les Arcadiens d’eftre nez devant la Lune, & d’avoir efté produits immediatement de la terre, ils fe glorifient neantmoins, d’avoir pofledé dépuis plufeurs g generations, le pais qu'ils habitent. Mais d'autant qu'ils n’ont point d’autres Annales, quelatraditivequ'ilsontrecceué de leurs predecet- feurs, ilsne fauroient dire precifement, combien il y a de fie- "cles qu'ils font en cetteterre, nid'oùils yfont venus. De for- te, quetout ceque l'on peut recucillir de plus vray femblable de leursdifcours fur cefujet, c'eft, qu'ils y ont efté pouflez de cette partie de l’Afe, qui eft à prefent ocupee par une nation de Tartares, qui n’eft feparée del’ Amerique Septen- trionale, que par ce petit d’écroit que l’on apelle d’Awjan. Les plus éclairez dans la connoiflance de l’origine des Ha- bitans de ce nouveau monde, & les plus judicieus entre les Anglois dela Virginie & de la neuve Angleterre, confirment ce fentiment touchant la vraye fource de ces Peuples, & l’a- “pPuyent en premier lieu, fur ce que les Americains, ont le teint, tous lestraitsdu vifage, la pofture du corps, les che- veus, & CR niesemenE Les yeus entierement raportans à “ceus des plus rudes entre les Tartares , qui habitent les con- trées del’Afie, quel’ontient eftre les pluéveilines de l’Amc- rique, Ils fondent aufli leur opinion, fur ce que les Ameri- 2140 Les # / “ FA î ; tek : 1 : r* | RETaE Le ! 04 Li MM Fe C4 SANTE Sn A A UT" Q SARA € DES ALES A D TE HE 8 399 Lies vdi: lesfevés:,-leris, lesmays, les lentilles, & fem- blables legumes font les mets Tes plus ordinaires qui leur font frvis, &ilarrive raçement, qu'on leur prefente deus fortes deviandéen un même repas. Avantque les Etrangersenflenr penetré jufques- -à eus, ils nE-Mangeoyent aucync chaire d’ OL- feaus nide beftes à quatre pieds, &-bien qu'ils fifent la chañle, | ge n’étoit quépar divertiflement, & pour netoyer le pais d’ani- maus farrouches. Il y amêmeencore à prefent pluficurs ans ciennes familles parmy eus , qui ne fauroyent eftre induites à | manger du poiflon, ni d'aicune autre chofe, qui ait eu vie fen- fitive; tellement, que fans faire profeflion d’eftre des difciples. | de Pythagore, ils obfervent exaétement ce point de fa rigou reufe difcipline. “Bien-que la Vigne croifle naturellement en. leur teLte , & quelesraifi ins y viennent à maturité, ils ne, font.point de vin : mais l'eau pure ,-eftieur boiffonlaplusordinaire. Jls ne bail, fent aufliaucune de leurs demeures, qu’auscndrois oùil y a: des fources ;-qui ne tariflent jamais. Ileft Vray que dans leurs feftins, ils & fervent d'une forte de biere fort agreable & nourriffante , quieft faitede CHWays :. & qu'ils ont l'adreffe de compofer rs l'hydromel parfairement bon, lemiel qu'ils ti- rent desfentes des rochers & du creusdes vVieus arbres , leux en fourniffant la matiere entoute abondance : mais ni l’un ni autre de ces bruvages ; non plus que celuyde la Cafe, qui eft myfterieus-& medecinal , ne font poinrd'an ufage commun. parmy ce peuple, | Diverfes bonnes racines qui: croiflent dans leuts terres,. leurfervent enlaplace du pain. Ils font aufi des galettes af- fezdelicates avec du Hays, queles femmes reduifent en fa æine à forcedebras, en moulant ce grain entre deus pierres, dontlunecftplate & l’autre ronde & longue. Cequine peut eftre fansungrandtravail, & une longueur quilafieroit la pa- tiencede toutes autres perfonnes. Ceus d’entreeus qui ufent: à prefent de chair &-de poiflon , les font rôtir, à caufe qu’ils efiment, que l’eau leur ofteroit leur meilleure & plus agrea>- ble faveur. Ils ont, à ce qu’ils difent, Jufage du fel dépuis un tems k immemorial , mais au lieu qu ‘autréfois isn'enavoyentpoint . qu'avec. — & ". ANS EE, Ve 2 So NS DT ET 4 LR xt 1 e ISERE 10 : EUR" 2. : AT UT RUES 4 = À: 14 AURA 2 PRES y PE OA E HN 4 POSE M 1 # PR A): à il ESS Pa À Lt Se HISTOIRE M AA EU qu'avec beaucoup de pénes , & par l'entremife des autres peuples qui demeurent le long de la cofte de la mer, ils ont dépuis peu découvert une fontaine falée, au pied de l’une de” leurs montagnes, qui fera capable de leur en fournir de fort. blanc & detres- -puravec'une facilité nonpareille ) puis qu'il ne leur manque point de bois pour le cuire , ‘& qu'ilsont trous vé le fecret de lé mettre en peris pains, ainfi qu'ils l'ont dé} éprouvé avecun hcureus fees, | Lex ARTICLE vL bol Des mœurs des cApalhirs. “as NET 3 naiiito se L Es Apalachites ont une certaine fi mplicité naturelle, qui paroit en plufieuts réncontres’ ‘aüfquellesils font faifs d’étonnement, pour ne pouvoir point comprendre: lalvraie caufe, dece qui leur en fournit le fujet, De même que les au: tres nations barbares, qui n'ont pas encore l'ufage descaraétes res, ils étoyent autréfois extremement furpris lors qu'ils voioyentécrire, &furtout, quand ils remarquoyent par leur. proprecxpcrience, qu'a l’ayde de ces petites figures formées fur le papier , les Europcens qui vivent aveceus, donnoyent à connoifire à leurs amis abfens;, l’état deleursafaires, & leurs plus fecrettes penfées. Is admiroyent auffi les livres, les are mes à feu, les môntresfonantes, les quadrans,, les cartes de geograñe, les globes celeftes & terreftres ; les fpheres, & toutes les curiofirtez d’'émail, de miniature, & d'orfévrerie,. que les étrangers leur aportoyent: mais à prefent que toutes ces chofes leur font affez familieres , ils ceflent d'avoir de l'admiration pour elles, bien qu'ils les ayent en fi grande eftis, me, qu'ils n'épargnent point ce qu’ils ont de plus precieus pourenavoirla potfeflion, LG Ils ont une Aftrologie : à leur mode, parlaquelleils predie fent à peu prés, les pluyes, les féchobetens les orages, & les changemens dutems, auparavant qu'ilsarrivent: mais ils. ne peuvent fe perfuader que la mer & la terre ne faflent en: femble qu'un feul globe, qui eft ferme & fufpendu au milieu de la vaite étenduë de l'air ,-quil’envelope également detous côtez, n A Chap.3 DES ÎLES ANTILLES. 401 CÔôtez, n'ayant aucun autre foûtien, que la puiffante main du - Divin Ouvrier qüi l’a faiteà la loüange de fa gloire. Car au - contraire, ilscroyent , qu'encore que la fuperficiedelaterre _ foitraboreufe & relevéeen montagnes, elle eft plate par dé- fous, étant apuyée fur une baze ferme & immobile, qui leur eft inconnué. lis tiennent aufli, que les Cieus font d’une matiere folide & tranfparente, & que le Soleil la Lune & lies étoiles, font des corps celeftes, incorruptibles & animez, qui s’é- gayentinceflament & fans lelaffer,fur ces beaus lambris azurez d'où ils éclairent le monde. Ils ne peuvent voir de longues barbes, fans en témoignet un étonnement extraordinaire, parce qu'ils ne puvent com- . prendre, àcequ'ilsdifent, que des perfonnes douées de rai- fon , puiffent foufrir à leurs mentons & en leurs joués, ces “excremens fuperflus & cette charge inutile, qui fuyvant leur fentiment, ne peut eftre bienfeante, qu'aus cheures, & aus boucs. 1lss’émerveilloyent aufli au commencement de ce que les étrangers qui ont la veué foible , ou debilitée par la vieïl- leffe, ou par quelque accident, fe fervent de lunettes pour la Æoulager. Parce que parmy-eus, l'en voitcommunement des vieillards qui aprochent, où même qui ont pañlé ia centiéme annéede leurâge, fans qu’ils puiflent remarquer aucune foi. "blefle, oulemoindre racourcifflementdeleurveuëê. Le grand foin qu'ils ont d'éviter la fumée, & tout ce qui peut ofenfer les yeus, contribue beaucoup à la vigoureufé conflirution, & à laconfervationdecefens, car ceus quiont converfepar- Mmyeusontremarqué, qu'ils n’aprochent point du feu, fice n'eft dans des rencontres extraordinaires, fe fervant pour échaufer leurs chambres durant l'hyver, d’une forte de Poéles, qui font faits de terrecuite, & quilont fi biendifpoiez en cer- tains endrois de leurs demeures, quetoutes les placesen font échaufées, fans que ceus qui font dans les chambres aufquel- les ils repondent, foyent tant foit peu incommodez de la flamme ou de la fumée du feu, qui yeft mis & attizé par de- hors. Ils ont neantmoins , une fingulicre vencration pour Je feu, comme étant , felon leur ancienne créance, laviveimage du Polcil qu'ils adorent. D'où vient que s’ils introduifent quel. Ece ques TAPER TRS VENTE é % + 402 HISTOIRE MorALrE,. Chip ques étrangers dans leurs cuifines, ou à l’enbouchure. des fournaifes qui échaufent leurs Poéles, ils ne peuvent oufrir, qu'ils crachent ou qu’ils jettent quelque inmondice fur lebras zicr, d'autant qu'ils croyent que l’injure qu'on fait à l’image, réiaillit fur l'original, & que c’eft une irreverence & uneins gratitude infuportable, d'avoir fi peu de refpeét, & de recon- noiffance , pour un element fi pur, & fi neceflaire à l'entretien: de la vic. 4) Ils confervent foigneufement en leurs memoires, comme! en autant de fideles regiftres, les genereufes actions de leurs anceftres , & les plus memorables exploits de leurs Roilelets, pour en faire le recitaus jours de leurs rejouiffances publiques. Ils font particulierement une commemoration folennelle de l'un de leurs plus illuftres Paracouf[e, qu'ils nomment C#4yr2 dok , d'autant qu’ils tiennent que c’eft lui, qui étendit & afer= mit les limites de leur état, avec tant de gloire & d’heureus fuccés, que durant fon regne, les Sauvages n'ofoyent pas: feulement aprocher de leurs frontieres pour y faire le dégaft, ou y enlever des prifonniers, comme ils le faifoyent aupara: Vant. Ilsajoütent, que cc fut même Prince, quiles obligea: par la force de fes raifons, & par fon exemple, à former des communautez fixes & arrétées eri un lieu, & à munir leurs Villages de pieuz & d'hayes vives, pour refifter plus facile- ment aus ataques de leurs ennemis, & eviter leurs furprifes. Iis celebrent aufli dans leurs chanfons, l'un de leurs Z4o44s, quieft connu parmy eus, fous le nom de Karakairy , & quia merité cet honneur, pour avoir inftitué le fervice du Soleil, & leuravoirenfeigné la façon de cultiver la terre, de faire la: chañfe du Cerf, & de tendredes piegesaus beftes farrouches,. quidefoloyentautréfois leurs Provinces. d Ils ont affez de foin & de prevoyance, pour fe procurer les: chofes qui font abfolument necefläires pour leur nourriture, & pour leurs vétemens, comme aufli pour bâtir leurscabanes,, & fe mettre à couvert des injures de l'air: maisils n'amafñent point de provifons pour plufeurs années, & tant s’en faut. qu'ils fe travaillent en aucune façon pour amaffer des richeffes,, ou des delices , & des magnifiques maifons, qu'ils fe rientors dinairemententre-eus, des vaines follicitudes, & detous les | enprefs POMADS Des ILES ANTILLES ._ 40 k “enpreffemens des étrangers, qui recherchent fouvent avec “ardeur toutes ces chofes fuperflues. _ Es font prefquetous, d’un naturel obligeant & grandement able: , & parce qu'ils ne fe fouvienent point, d'avoir receu ‘aucun déplaifir des étrangers, dépuis que les premiers Efpag- _nols qui les vifiterent fous la conduite d’Hernando à Soto , ra- vagerent leur païs , & contraignirent leur Roy. d'abandonner fa ville capitale à leur difcretion, pour fe retirer au fommet des montagnes Voifines, ils ne favent à prefent qu’elles careffes u. À ju faire, à ceus des autres nations, qui les vont vifi- , & dans ces rencontres, ils ne fe laffent point, de leur ‘ns toutes fortes de bons ofices, & de témoignages d' a- mitie. D'autant, qu’ils n'ont pas encorelaconnoiffance d'une in- _finité de delicateffes , qui font en ufage parmy les peuples mieus civilifez, ils paroiffent affez fobres, dans leurs répas Ordinaires : mais au tems de leurs feftins folemnels, & de leurs réjouiffances publiques, ils fe licencient à plufieurs excés, qui témoignent affez, que toute la frugalité qu'ils obfervent au boire & au manger, dans leurs maifons particulicres, ne leur eft diétée que par l’inpuiflance en laquelle ils font, d’avoir commodement les vivres qui font requis pour continuer en de pareilles débauches, ou de ce qu'ils ne veulent pas acheter des ragouts, & desfriandizes, au detriment de ce profond repos dontilsjouiffenr, fans y cherchertant d'artifice. Ils font dociles & fufceptibles d'infliuétion, & de toute Toüable difcipline: ce qui paroir, en cequ'ily en a déja plu- fieuts de leur corps, quiontaprisen perfe&tion, & avec une merveilleufe facilité à lire & à efcrire, & quelques-uns des métiers qui font neccflaires à l'entretien de ja focieté civile. Mais ilsontcecy de mauvais, qu'ils font fort méfians & arrer tez à leurs. propres fentimens, promts à fe courroucet, & adonnez à tirer Vengeance partrahifon , de tous ceus dont ils Croyent avoir reccu quelque déplaifir. ]ly en a auf plufieurs parmi-eus, quiconfervent desinimities hereditaires dans leurs familles, qui éclatent fouventen des querellesouvertes, & en des bateries, qui ne peuvent eftre apaifées que par l'auto- rité abfoluë de leurs Chefs, au commandement defquels ils Éec 2 défe. FU ( 494 Hisroirs MORALE» 1p..8 déferent entierement, dans ces occurrences. Ils ajoûtentens core une trop legere creance à leurs fonges;, & ilsontentre eus, certaines vicilles réveufes, qui faifant ouverte profcf- fon de les interpreter, & de predire en fuite, les chofes qui Jeur doivent avenir, entretiennent ce pauvre peuple dans fes fuperftitions, & le repaiflent deces vanitez. ARTICLE VIE Des Ocupatiows ordinaires des LAÆpalachites. Es Apalachites, ont toûjours eus en horreur l’oifiveté comme la plus dangereufe pefte de leur petite R epublis que, la roüille de leurs efprits , & le fepulere des hommes vis vans: & le travailauquelils s’adonnent avec plaifir & affiduité,. fans toutefois , témoigner beaucoup d’enpreffement, leur pros duit ce grand avantage entre plufieurs autres , qu’au lieu que leurs voifins qui habitent joïgnant la cofte de la mer, font fou vent preffez de la famine, pour n'avoir pas enfemencé leurs terres en la faifon convenable, ou pour avoir confumé en feftins & en débauchesles fruits de la derniere moiflon;. ceus- cyau contraire s’adonnans au labourage, & menageans avec prudence & difcretion le provenu de leurs champs, ont toi- jour dequoy entretenir leurs familles avechonneur, & mème pour fubvenir à laneceflité de leurs Alliez , qui demeurentaus montagnes, Aprés le tems des femailles & des moifons , les. hommes s’employent à la chaffe, à la pefthe, à planter des arbres fruitiers, à défricher les places qui font propres à faire des jardins à bâtir leurs maifons, à repaterlesbrefches de leurs Villes, ou à coudre leurshabits, leurs foulicrs & leurs botis nes: de forte qu'il arrive rarement qu'on lestreuve fans em ploy. Mais, il n'y ariefà quoyils fe plaifent d'avantage, ni en quoyils reufffent mieus, qu'a preparer leurs arcs, leurs fléches, leurs maflüuës, leurs zagayes, leurs boucliers , _& toutes les autres armes ofenfives & défenfves, dont la ont acoütumé de fe fervir, tant pour la chaflé que contre leuxs _enne: ÿ: Chap. DES ÎLES ANTILLES. 405 ennemis. Car tous les hommes jeunes & vieus, tiennent à gloire de les favoir faire, d’en avoir à rechange pout en .acommoder leurs amis, de lesentretenir luifantes & polies, non tant pour en faire parade durantlapaix, que pour s’en ouvoir ferviravecd’exterite au tems de guerre, Ils favent aufli preparer, avec une adreffe bien confiderable Jes peaus de Cerfs, de Chamoys, & d’autresbétes, pour en faire des vétemens, des tapis, & des couvertures de lits, qui font tres-commodes & de durée. Ils fe divertiffent encore affez fouvent, à faire de toutes fortes de poterie, de corbeil- Les & de paniers : ou bien à arranger des plumes d'oifeausen forme de tapifierie, avec une induftrie merveilleufe, Les femmes aufli de leur part, aprés le foin de leurs ménages, & de ce quiconcerne la cuifine, s'ocupent inceffanment à filer du cotten, ou dela laine, ou dela pite, dont elles font pluficurs. fortes de petites étofes far des métiers, qui font tres-propres à faire des habits d'efté, pour l'acommodement de leurs ‘familles. Hs aiment pañlionement la mufique & tous les inftrumens. quirendent quelque harmonie, tellement qu’a péne trouve t-on aucun parmy eus ,. quinefache joüer du flageollet, ou d'une forte de flûtes de differente groffeur , qui font un: acord fort agreable. ls ont aufli la voix naturellement douce &.flexible, ce qui eft caufe, que plufieurs de leurs jeunes. sens s’étudient à contrefaire le chant & le gazoüil- lement des Oifeaus: en quoy, ils reufiffent pour la pläpart: fi heureufement, que comme des autres Orphées, ils ati- rent des bois auprés d’eus, ces innocentes creatures, qui: croyent d'entendre leurs femblabies. Ils adoucifilent aufi. avec le chant, tout le travail auquel ils s’adonnent felon: Jeur loüable coûtume, par forme de divertiffement, & pour eviter l'oifiveté .: plétoft que. pour le profit qu'ils en efpse rent. Ils font auf re ee amoureus de la danfe, Fr Jans & faifans mille poftures ,. par léquelles ils croyent fe décharger des mauvaifes humeurs que leurs corps ont amaflées , & fe conferver cette grande agilité qu'ils ont à la. courfe , & à grimper les montagnes quand ils font Lee 3: la: 406 HisTOIRE MoRALE, Chap. la chaffe; comme aufli pour acroifire par ce moyen: cetre merveilleufe foupleffe de tous leurs menbres, de laquelleils: font de grandtrofées , en la prefence des étrangers. Is cele- broyent autréfois des danfes folemnelles à la clôture de cha que moiflon: mais à prefent, ils n’ont point de tems regle” pour ces divertiflemens, quidependent abfolumentde l’incli- nation, & de l'humeur des Capitaines, & des Chefs de fa mille, qui les aflignent en la faifqn, & aus jours, qu'ils; jugent, les plus convenables. Depuis quarante cinq ans ou environ, qu ‘ils ont la froquérél tation ordinaire des étrangers, ils fe fonrbeaucoup perfetio-\ nez dans les metiers, dont ils n’avoyent atparavant que quel=« quelegereconnoifflance. Et même, ils én ont apris plufieurs. autres, qui leur font tres-utiles; d’où vient, qu’ils bâtiffent… à prefent un peu plus folidement & plus commodement, qu'ils” ne faifoyent par le pañlé. Is font aufli, beaucoup plus habiles. qu’ils nétoyent, à ranner les cuirs, & à pre; arer les peaus,. de Cerfs, de Chamoys, de Caftors, de Martes, & roures” lesautres, dontils font leurs plus riches fourrures. Ils com mencent même à faire des cofres, des bufers, des tables & d’autres ouvrages de menuiferié, & à travailler au { our, comme auffi à peindre des fleurs & des fruits ,- plus aprochans du naturel, qu'ils ne failoient, avant que les Europeens leur cuffent fait part deleursfecrers, & des outils qui font necef= faires, , pour reuflir en ces arts, avec facilité & avec luccés. ARTICLE VEPE je De la Police des Apalachites. VE Peuple, à l exemple des Arabes, & de la plüpart des Tartares, étroit autréfois errant parimi les forers & les vaftes folitudes, de cette partie de l Amerique, ou la divine providence les avoit pouffez; & aprés qu’ils avoyent confu=" mé les fruits des arbres, & les racines de laterre, qu’ils avoyent treuvées en un licu, ils en décampoient, pour courir àunaus tre. Deforte, qu'étansainfi vagabonds, & expofez en tout: tems aus injures de l'air, & à l'intempérie des faifons, ils Lits | mes) de | » PAPA OC ER « STE Chap. 8 PES ÎLES ANTILLES. 407 menoyent une vie forttrifte, & tout à faitennuyeufe, Mais ü y a environ cinq ou fix generations, à ce qu’ils racontent, qu'un de leurs Paracoufes, nommé CHayrdok , dont nous avons déjaparlé, leur perfuada des’arréter au païs qu'ils pof- fedent encore à prefent ; leur prefcrivant la police qu'ils y de- voyent garder, afin qu'ils ne fufflent plus flotansde place en place, comme font encore aujourduy les Houstamins & les Elamins, qui rodent fans ceffe par les Provinces de la Floride, pour y faire ie degaft par tout, oùils netrouvent point de re fiftance, ne traifnantaucun autre bagageavec eus, que leurs armes, & quelques chetives tentes faites de peaus ou d’eécor- ces d'arbres, fous léquelles ils fe mettent à couvert durant la nuit. Dépuis cetems-la, les Apalachites ont maintenu leur pe= tite Republique en bonneunion, fous la conduite d’un Chef & premier Capitaine, qui failoit autrefois fa demeure à Apa- lache, & maintenant à CHelilot, qui eft la capitale de leur état, En châque Province ilyaun Paracouffe , & en chaque Ville un Gouverneur, qui font établis par celuy d’Apalache,, duquel is relevent. Il y a aufli d’autres Officiers inferieurs, qui font nommez par les Chefs de familles, qui ont eu de tout tems, ledroit de lcsinftaleren ces charges. Enfin ikn’y a fi petit Village parmy eus, qui n'ait fon Capitaine, qui repre- fente ja puiffance fuperieure. Le procedé de leur juftice, eft fort court, parce qu ils n'ob- fervent aucunes des formalitez , qui font en ufage parmy nous,. en matiere de procés, niaucun des artifices, que la.chicane a inventez, pour les rendre immortels, Les CapitainesaîMitez: des Officiers qui compolfent leur confeil, rendent la juftice deus foisle mois, affavoir au premicrcroiffant, & au plein de la Lune, touchant tous les menusdiferens, qui furviennent entre lesamilles. Mais lors qu'il s'agit d'une afaire de grande importance, ils ont recours au Gouverneur de la Ville ou au Paraconffe de la Province, quila terminent en dernier réfort.. Ers'ilarrive, queles Paracouffes des Provinces, ou les Gou- Verneurs des. Villes, ayent des démelez par enfémbl e, ou avec leurs fujets, le Paracouffe d'Apalache, quirefide ordinaire= ‘ment à Hello , en prend connoïiffance en Lo de Souve=. rain. FLO AT RE LE | dei 14 ES pi Dai Tec CE æ 6e - HISTOIRE MORALE) Chaps rain, & les apointe par l'avis defon Senat, qui l'AC EH eS AE par tout, où il lui plait de fetranfporter. Iisdifent, qu'ils onttoüjours puni de mort, les traiftresh les Incendaires, les homicides, & les Sentinelles qu'ils treu vent endormies , foit de jour foir de nuit. Tous ceus qui font convaincus d’avoir commis quelcunde cescrimes, font liez à un arbre, & percez de fléches, ou affommez à coups! de mafluë. Mais quant aus larrons, ils ne leur donnent point d’autres chaitimens, que la honte & le reproche, qu'ils leu#n font deleurfaute, dans toutes les Compagnies, où ils ont l'aflurance de comparoiftre. Ce qui leur eft une punition fi. fenfible, quela plüpart de ceus quiont dérobé, pour éviter cette honte , feretirent dans les deferts, où ils menent une” vie fauvage, ou ils s’aflocient aus Huuffamins où avec les. Elamyns, pour Continuer inpunement dans leurs brigandas, ges, & ne vivre deformais que de proyc, à la faffonde ces“ barbares. M Ils font prefque MER petis commerces par échange ad marchandifes, &àce défaut, ou lors qu'ils font obligez de. donnerdu retour, ils fe fervent de même que leurs voifins, dé certains petis grains noirs ou blancs, qui leur tiennent lieu dé monoye d’or ou d'argent, ou de quelque autre metal : avec cettediference, qu'un feul de ces grains noirs, vaut autant que vint de ceus qui font blancs. Les Indiens qui ont leurs Villages auprés de lamer, fontcetteefpece de monoye, avec l’extremité de certains coquiliages qu'ils eftiment precieus , &! aprés les avoir percez, & leur avoir donné, la forme & le coin qu’ils doivent avoir, poureltre de mife,; ils en compos fentdes chaines, déquelles ils fe chargent quand ils veulent: paroifire avec plus de pompe, comme étans les principales. _æxichefles, & les plus grands trefors, dont ils ayent la cons noiffance. Cette legere monnoye a fon cours, nou feulement entre les Originaires de l'Amerique Septentrionale , maisens coreentreles Anglois, & les Hollandois, ur: ont établi celcbres Gpipaise | Les Apalachites » trafiquent auffi avec des grains de Cotill & de Criftal, & même avec cette efpece d’ainbre, dont nous avons déja parlé, & quelquefois avec des pierres vertes où | rOL- ns 2 0 g SRE, LÉ TI AA LULU R., CORDES 1. RU A A pie Mer ge "Chap.s DES: ] L E S ANTILLES 408 rouges, quelestorrens charrient des montagnes , aufquelles ils favent donner des figures diféréntes, qui rehauffent leur “éclat, & encheriffent car prix. Avant qu'ils euffent la con- _noiffance des étrangers, ils n'avoyent point l’ufage des aulnes, pides poids, ni des mefures : mais à prefent, ils reconnoif- fent parexperience, quetout celacftnéceflaire, pour facili- terle commerce, & poureviter les fraudes. Tous les biens inmeubles font communs parmy ce Peu- _ple: de forte qu'exccpté leurs maïfons, & les petis jardins qui _Îes accompagnent , ils n’ont aucuns champs » niptez, ni bois, ni autres hcritages, qui leur apartiennent en propre: mais , ils cultiventtoutesleursterres encommun, & au tems qu'il faut faire le labourage, ou les femailles, oules moifflons, les Capitaines & les autres Officiers, conduifent au travail tousceus de leurs Compagnies, à qui l'âge & la fanté don- nent aflez de vigueur , pour s’ocuper à tous ces laborieus exercices. Ils vont tous à ce travail commun , fans enpreflement, & d’un franc courage, comme à un divertiflement bien agrea- ble; & dansces rencontres, ils gardentleursrangs, & mar- chent en ordre de bataille , avec leuts troufles remplies de flé- ches, -& l’arcà la main: afin ques’ils étoyent aflaillis de leurs ennemis, comme il leur eft arrive affez fouvent, ils foyent trouvez en état de les repouñér vigoureufement. Durant ces employs qui regardent le public, les Chefs ont lefoinde les rafrâichit de tems en tems avec quelque bon bruvage, & leurs femmes ne manquent pas des leur apréter de viandes beaucoup méilleures, que celles dont iis fe nourriffent à l'ordinaire. Ils refervent tout le provenu de leurs champs en des greniers pu- blics, qui font bâtis au milieu de chaque Ville ou Viilage, &'au plein de la Lune, & à tous les renouveaus, ceusqui font commis pour en faire la diftribution,en donnent à chaque famille , autant qu’il en faut pour fon entretien, ayant égard u nombre plusg stand, ou-plus petit des perfonnes dont cl- ect compose. | Ris. hu RU Ace Fif ARTI- he Mel, # NACRE OR ONE L= « RS AT En 4 APRES AU LENSES aie Le be Ne TAN Se #s Hrsrorrs MoRALE, A R'ETC LE -EX00008 POUR | RO Des Guerres des CApalachites. Li … Es Apalachites, jouïiffententre eus d’ une profonde paix dépuis un fort long tems; maisau dehors, ils ont pout, ennemis irreconciliables, les Habitans de la Province de 74 goesta, que quelques-uns apellent Carlites , & les Elamyns: & Housfamyns, quifont ces peuples cruels & fauvages au pofs fible, dont nous avons déja parlé, qui n'ayans aucune de“ meure atrétée, courent d’un lieuà l’autre avec une vitefle in+ croiable, pour y faire les ravages, les maffacres, & tous les: defordres, aufauels ils font incitez par leur humeur barbate” & fanguinaire. Ces mauvais voilins, obligent les Apalachis res à fe tenir toûjours fur leurs gardes, & à pofer de jour & der nuit des fentinelles aus avenuës de Icurs terres, pourdécouæ vrir leurs defleins, prevenir leurs furprifes, & s'opofer aus” irruptions de ces nations, qui leur font également formidas bles. : 34 Leurs armes, font l'arc &laflefche, lamafluë, la: fronde} &uncefpecede zagaye, ou de grand javelot, qu'ils lancent avec la main, quand ils ont épuifé toutes les fléches de leur garquois. Ils fe muniffent aufli lorsqu'ils vont à la guerre ; de certains grand boucliers de figure ovale, qui font faits der joncs cordelez & poiflezavecun telartihice, que bien qu'ils: ne foyent couverts que d’un fimple cuir, & qu'ils foyen® grandement legers, ils font neantmoins impenetrables à tous* les dards de leurs ennemis, Ceus d’entre cé Peuple qui habi= tent aus montagnes, font particulierement renommez pou! leur adrefleàtirer de l'arc. Car l'exercice affidu de la chaffe dont ils font profeffion, les a rendus fi habiles à 1e manier,’ que le Paracouffe general, qui en atoûjours à fa fuite, n'a’ point de plus grand divertiffement ; que de les faire tirer au blanc, pour emporter quelque: prix, qu'ildonne à celuÿ qui l’ateint en moins de coups, ou qui abat avec plusrde dexterité, une couronne, ou unbouquect,. qu’ilfait atacher au plus haut d’un arbre. à | A Li Ils ne Combarent point pour étendre leurs limites, ou pour le butin, comme plufieurs antres peuples: car ils s’eftiment fi bien partagez en terres, & ils vivent fi conrens dans leur condition, qu'ils ne fouhaitent rien du tout, au delà de ce qu'ils poflédent. Mais commeils ne font animez à la guerre, que pour conferver la gloire que leurs predecefieurs leur ont Jaifée en heritage, ou pour repoufér la violence, & tirer vengeance des torts, qu'ils croyent leur avoir efté faits, fi Icurs voifins fe veulent emparer, de la moindre partie du pais qu'ils ocupent dépuis un tems immemorial, ils n'oublient rien pour réprimer promptement & courageufement les ufur- pations des uns, & la violence des autres; & pour fe main- tenir en la pailible pofieflion du païs où ils fontnez, & des places, qu'ils ont aquifes & confervées par leur valeur. Quand leurs troupes marchent contre l'ennemy, aucun d’eus n'oferoit quiter fon rang ou s’écarter de la Compagnie, fans la licence exprefle du Capitaine, fous péne d’eftredegra dé, ou percé de fléches. Ils gardent un profond filence en faifant leur route, parce qu’ils ne conduifent point de fem- mes ni d’enfans, commeles Elzmins & les Houflamins, qui les trainent par tout avec le refte deleurpetit bagage, Mais lors qu'ils ont reconnu leurs ennemis, ils lesinveftiffent & leur donnent l'affaut avec tant de furie , & des cris fi effroya- bles, qu’ils font capables de faire tomber lesarmes des mains, & de porter la terreur & l’épouvantement, aus cœurs des plus aflutez. pot | As onttant de generofité, qu'ils n’ont point voulu apren- dre le fecret d’empoifonner leurs fléches: & lors qu'ils ont gagné la viétoire, & qu'ils fe font rendus maitres du champ de baraille, ils n’exeércent aucune inhumanité fur les corps dé ceus qui font morts au combat, mais aprés s’eftre aflurés de tous leurs prifonniers de guerte, & leuravoircoupéla chez velure, ils la portent en triomfc au bout de leurs zagayes, & frtoft qu'ils font retournez de ces expeditions, ils l’atachent à la porte deleurs cabanes, commé un precicustrofée. - Hsufent encore dans ces rencontrés d’unetelle modéràtion, qu'encore qu'ils foyent dans la chaleur du combat, ils pardon: fent avec une gencrofité qui n’a rien de barbare, à tousceus EG. 2 qui k Le Sete AP PÉLEAT ES $ MG alt MONS 2 7e CAPES 6 MU Y À. A NT f | qui emandans quartier Mere Le: armes à à leurs ÿ nd les bêtes, qui purent gagncr cet'aziles# furent confer 412 contentent les mener à ee Villes ,où ils les entretienne dans une Hhoncfis liberté , avec te, de douceur & de loir danfes, en jeus & en d autres mére su: “dual ed ils Ca avec excés leur propre valeur, & les be. spi memorables de leurs predeceffeurs.. y 5} enttit 4 AR: EL La UE Ne De la Religion ancienne des CApalachites: Es Apalachites , adoroient le Soleil, de même que la plüpart des plus celebres peuples de l'Amérique, & avoient des Prétres ou Sacrificateurs, qu'ils nommoient Zaoagn qui étoient fort fuperiliciens, à lui faire rendre le fervice qu'ils avoient inventé à fon honneur. ]ls avoient auflde noble fentimens, pour cette pretendué divinite: car ils croioyent que fes rayons avoient la vertu de donner le:mouvementr& da vic,. à toutes les creatures qui en font douées: qu'ils remets | toient-en parfaite fanté, toute forte demalades, & rendoients fecondes les landes & les montagnes les plus ftcriless quelle monde ne fubfiftoit. que par les benignes influences de: Roy des aftres, & qu'ayant. une feule : fois, retardé de vi quatre heures fa courfe ordinaire, les eaus du grand L qu’ils apellent Theowi, s'étoient tellement débordées, qu' les avoient couvert les plus hautes montagnes quiles-en rent, à la referve du fommet de celle d'Olaimy, quifurp fervé decette inondation generale, à. caufe du Fempleq] étoit confacré à fa gloire; de forte, quetantles homme en vie pour repeuplerlaterre. A . Is, Apple encore, à ces. foibles idées, auiteas fo tres ; LES : pl ne me Roytelet. Fleur C7 Parakouffe Lu - Le C Le grande - Eghfe- FE. Za iqure de la ‘ Plante Sen fiine et B HUE PE PRE EN EE CENNEE 7° 6 Ph 270 OT RSR Lt ER SES 1118 FAST 1 nina no, s AE à a ( hap.s * D ES P'LE's A NTILLES. 413 qui avoicnt plongé le monde dans cette épouvantable confu- - fion; & que dépuis cetems-là , leurs predecefleurs, parun tres-jufte mouvement de reconnoiffance, fe fentirent obligez - de l’adorer & de l’avoüer pour leur Dieu. Ils tenoientauffi . pour conftant , que le Soleil s’étoit bâti lui-mêmele Temple, qui eft dans la montagne d'Olaimy; & que les Oifeaus qu’ils nomment Zomarzulà, quife plaifent parmi les bois de cette agreable retraite à étoyent fescourtifans, à les muficiens qui chantent fans ceffe fes loüanges. Le fervice que les Apalachites rendoïent au Soleil, étoit de le faluër à fon lever, & de chanter quelques Hymnes fon hor- neur,. Ils lui faifoient aufli le même hommage tous les foirs, lefupliant de retournerbien toft, pour les éclairer de fa lumiez re. Mais outre ce fervice journalier, que chacun iui pouvoit prefentet à la porte de fon logis, ilsen avoient encore d'autres: plus folennels, qui confifloient en des Sacrifices de loüanges & _ d’aétions de graces acompagnées de parfums, qu'ils avoient acoûtumé de luiofrir quatre fois l’an,furla montagne d’Olaimy, . avec une grande pope,& un concours general de tousles Habi- tans de leurs fix Provinces,& même de ceus des états voifins, qui: font dans leur aliiance, commenous le reprefenterons en fuite: Cette montagne d’Olaimy, ef fans contredit, l’unc des plus: belles & des plus raviffantes detoutes celles, qui font en ce nouveau Monde. Elle eft fituée en la Province de Bemmarin, & ellecommence à une petite lienië de la ville royale de tAfe/ilor,. fa figure eft parfaitement ronde , & d'une pente firoide,. que pour en faciliter l’accés, on acfté contraint dé tailler rout au: tour, un chemin aflez large, pour montertrois hommesde front , qui dure environ deus lieués & démye, en tournoyant: Continuellement, jufques à ce que l’on foit parvenu au defus. Ce chemin, quieft entretenu aus frais communs dé la Provin- ce, eftornéen divers endroits, & dans unediftance égale, de beaus repofoirs gagnez dans le roc,en forme de grandes niches;. pour lacommodire des voyageurs: & tout le circuit de la mon- tagne dépuis Le pied, jufqu’à deus cens pas du coupean, eft re- yétu de beausarbres de Cedres,de Pins, de Palmes; de Cyprés; . de Cafiine,& de plufieurs autres fortes, qui rendenr des rëtines &des drogues aromatiques, d’unetres-fouêue odeur. . fi Éff:3: | Les: € N'Ve PP OENR PT ALS 0 (Re ET) VENIR OS de TE lar PERL æ #14 | HAISTOIRE MorRALE, Chap. Le fommmet de cette incomparable montagne ; S'étend, en ‘une large plaine parfaitement unie, qui a environ une lieuë detour, & qui eft ombragéc en diversendrois , de petisbou quets Fe mêmes arbres qui font à la pente , bien qu'ils ne foyent pas d'une pareille hauteur, à caufe que les grands vens qui les agitent, lesempefchent de croiftre : Mais cequieft ex» pofé au plein jour,eft couvert par tout d'un richetapisd'herbes. affez courtes, qui font émaillées d’une infinité de petites fieurs, & d'une efpece de Thyim & de Mariolaine, qui-recreent tel dement la veuëé, & exhalent une fiagreable fenteur, que l'œit. & l'odorat, y rencontrent également leurs delices. Bien queccttemontagne, leve fa tefte beaucoup plus haut que les autres du voifinage aufquelles elle commande , & qu'elle {oit du rang de celles à qui Les Poëtes attribueroient. d'avoir de fecrettes intelligences avec la moyennce:region de, jair: elle a encore ces precieus avañtages , qu’elle eft rare mentcouvertedeneigesdurant l'hiver, & que pour étancher encfté la foif des Voyageurs, elle eft rafraichie d'un agreable étang, qui conferve en toute faifon fes eaus claires & enjotiées, dansun large baflin, qui s’eft trouvé direétementplacé, au milieu dece fleuriffantterrein, qui lui fert de couronne. Le lieu qui leur fervoit de Temple, eft une belle & fpa- cieufe Caverne, qui s’eft rencontrée naturellement taillée à l'orient de cette montagne. Son ouverturceft vafte, large, & bien proportionée comme l'entrée dequelque fuperbe palaiss & bien que l’artifice n'ait rien du tout contribué à fa per= fection, l’on diroit routéfois àla voir deloin, que quelque architeéte bienexpett, ait voulu déployer en cerare frontifpis ce, toutes les plusexquifesricheffesdefon art, & tousles. plus doùs agréemens, que fon induftrie luiapû fuggerer, pour le rendre acompli. Cebceau Portail, quele Soleilefclaire de fes! premiers rayons aufli-toft qu'il fe leve, eft pofé furuncbelle. & ample plateforme, qui femble n'avoir efté gagnée dans la! mafñe duroc, qu'adeffein de fervir d’ un aimable PAU o) ; à ce Temple magnifique. {21199 2 08 Lc dedans de certe Grotte. a oi eft fair. en ovale, d’une longueur de deus cens pieds ou environ, furune larss geurtres-convcnable, pourentrerenir la jufie proportion ds PTIT :. eV. 14p. 8 fa figure. La voute, qui paroit aufli n'avoir efté faflonnée DES ÎLES ANTILLES as dans le fommet de cette montagne, par aucunes autres mains \ que par celles de la nature, fe hauffe doucement dépuis le bas en forme de demi cercle, jufques-à Ja hauteur d'environ fix vints pieds, où elle fe termine. L'on voit tout au milieu dé cette voute, une aflez grande ouverture , laquelle perçant jufqu'au defüus du terrain de la même montagne, enpruntede à, tout le beau jour qui l'efclaire, Cette efpece de grande lanterne, eftentourée äu dehors, de groffes pierres qui font liées & enclavées les unes avec les autres avec beaucoup d’in- duftrie, en forme de bord revelé de trois pieds hors deterre, pour eviter les cheutes: & c’eft juftement au défous de ce vafte fouspirail , que répond l'autel de ce Temp, qui nc confifte qu'en une table de pierre fans artifice, foutenué d'un gtos pivor, qui l’éleveau defus du pavé. _ Tout l'interieur de cette fabrique naturelle, eft encroûté. d’une forte de falpétre, qu'on prendroit pour du coral blanc, qui s’eft durci dans la fuiredutems, & formé en plufieurs gro- tefques & figures differentes quile diverfifient, & luidonnent unmerveilleus éclat. Le pavé, qui eft auffi d’une feulepierre, fans fentes ni crevaffes, de même que lavoute & les parois; eft fi poliéc fi gliffant, que pour marcher defus fans peril, on éfteontraint de le couvrir de fable. Tout au fonds de ce Tem- pile, & à lopofite de l'entrée, on aperçoit un baflin, qui eft rempli en tout tems d’une eau tres-claire , qui y tombe d'une petite fourece, qui eft prefque inperceptible , de mé- me que l'on ne peut difterner qu'a grand péne les fentes & les fecrets conduits du rocher par où elle fe décharge. Enfin, Æ plus grand ornement de tout ce Templefi renommé parmi ce Peuple, confifte en la parfaite blanchcur, qui éclate de lun à l'autre bout, .& cnune Rae AE tn proportion de tou tes {cs parties. LesSacrifices, que les Apalachites avoyent acoûtumé dé faire au Soleil, ne confiftoyent point, en l'élevation d'une peau de cerf au defus d’un arbre, remplie des plus excellens fruits du pais, & couronnée de fleurs & d'herbes de bonne Odeur, comme il fe pratique parmi quelques autres nations- de la Floride, ni en l’éfufion du fang humain , ou en l'immoe- lation TR NAS DE | URLS Pin Je ‘: SN RL RUE, à | lation de quelques bêtes , comme ceus que les Mexicains ofroient à leur Idoles. Car ils croioient que ce grand luminais re, qu'ils reveroient comme leur Dieu, donnant Ja vie à tous tes ‘les creatures qui en jouïffent, n ‘agréeroit pas un culte, qui en priveroiït quelques-unes du plus precieus de fes dons. Mais au lieu de toutes ces chofes, ils luy.ofroyenttant feulement: de l’encens & d’autres parfums, qu’ils faifoyent bruler en chantant & exaltant fa gloire & fes perfetions, & des habits ou quelques autres prefens, qu’ils mettoyent entre les mains des Zaoïas, pout eftre donnez aus pauvres, sy añftoyentà ces ceremonies. … Ces Sacrifices de loüanges & de reconnoiffance, fe C1 broyent en la maniere que nous allons d'écrire. La veillede chaque feñte, les Sacrificateurs montoyent fur la montagne, où ils avoient auparavant fait dreffer destentes, ou quelques. pctites cabanes, pour s’y preparer à l’ation folemnelle qu'ils ._ ydevoient fairele lendemain, & le peuple qui y abordoit de toutes parts, s’y rendoit du moins avant le jour. Le défus de la montagne & le chemin qui yconduiloit, étoyent éclairez durant toute cette nuict-là , de plufieurs g grands feus qu’on al- lumoit en divers endrois, pour réjouir & guider furement ï J Eng à Hunt - LEE pe. si N°4 on Chap.s .. DESMILES ANTOLLES 425. censvint& un, à caufe des horribles maffacres que les Barba. : 4 _resOriginaires du pais , y faifoient pour lors, de tous les étran- gets qu'ils rencontroient, & elles s’étoient embarquées à def. _fcin de fe retirer à la neuve Angleterre: mais les vens leur ayans efté contraires, elles furent pouflées à la cofte de la Flo-. ride, où le manquement de vivres les obligea de defcendre, _& de s’arréter fur le bord de la riviere de Seloy, & c'eft de là _ qu'elles pañferent en la Province de CAatique & puis en celles d'CAmana & de Bemarir, fous la conduite d'une Compagnie . d’'Apalachites , qui étoient defcendus à la cofte de Ja mer, _pour yprendre leur provifiondefel, commeilsavoient acoû- tumé de le faire en ce tems-là. HS - C'eft dans ces belles Provinces, que ces Familles étrange- res fe font acruës & fortifiées, y ayant attiré dépuis quinze ou feize ans la plûpart des Indiens Habitans des Iles de Roaraw, dela Æonaque & d'Outila, qui font au Golfcd’Hondures, & un nombre affez confiderable de perfonnes de toutes fortes de quaiitez & de diferentes nations,qui vivoient aus Lucayes prés du détroit fi celebre de Bahama, & particulierement quelques favans & zclez Eclefañiques, quife font fervis d’une retraite fidouce & fi favorable, pour s’employer ferieufement & fans difiraétion à leur propre falut: &mpour cftcndreen fuite les Hi. mites du pur & ancien Chriftianifime, parmi ces pauvres Peu- ples, fi Dieu leur en donnoit lesmoyens. Nous aprenons auf, par les derniers memoires qui nous font venus de ces quartiers-la, que Dieu beniffantles loüables intentions des Chefs & Directeurs de ces Familles étrangeres qui fe font aflociées dans ce religieus deffein, & les incompa- rables foinsde leurs Predicateurs & Catechiftes , le Parakouffe d Apalache, s’eft fait inftruire par eus en la Religion Chré- tienne, qu'enfuiteilareceule Batéme, & qu’a fonexemple _plufieurs de fes Officiers, & des principaus Chefs des familles de Bemarin & d'LAmana, & fur toutde là Ville de Æehilot, ont aufli embraffé le Chriftianifme, avec beaucoup de connoif- fance & d'ardeur : qu’outre les Pafteurs ordinaires qui ont la | conduite des Eglifes formées, ils onr encore établi une fainte “Gompagnie d'Envoyez, ou de Mifionaires Euangeliques, qui comme leurs Coadiuteurs en l’œuvre de la predication de Hhh la RE 167 000 LE «2 44 TE 14 5 MAN 2 6, DNA RL ONE PL que — 2 t : $ TELE TERRE Ÿ m7 A ET 456 D sue à TU MoraAL A _ Ghaf la parole de Dieu, travaillent avec une affiduité & une fidelité 4 nonpareilles, à l’inftruction de ce Peuple, & à recueillir des Eglifes en divers endroisde ce nouveau Monde, fous l’apros bation & la direétion des Infpe&teurs & Pafteurs ordinaires, der. qui ils tiennentleur Vocation exterieure, à ce facré minifteres & leur envoy particulier en cetrebelle moiffon du Seigneur 2 Que pour reuflir en une fi fainte entreprife, ils ont prerniere* ment apris en perfection la langue la plus connuë des Floris\ diens ,, & qui a lé plus de cours parmi ces péuples ; & qu'en fuite, ils ont dreffé des Efcoles en tous les heus, où Dieu # affemblé des Fideles par leur predication, "afin queles-grands! & lepetis, y puiflent eftre informez des facrez mifteres de las Religion Chrétienne, & élevez en lavraye pieté parles. in- ftruétions familieres du Catcchifme ; au même tes nd "ot Jeur enfeigne à à lire & à écrite. 123 4% Ces mêmes memoires ajoutent , qu'éncore que % Parti kouffe d’Apalache ait receu le Barème, & qu’il témoigne avoit beaucoup d’afcétiôn pour lés. étrangers dont Dieu s'eft fervi poûr lui procurer cebonheur;. il eff neantmoins entré dépuis peu en quelque ombrage contre eus, & que dansl'aprehenst fion que quelques uns de fon Confeil lus ont fairconcevoir;! que s’il leur foufroit de s’éroiitre d'avantage, ils pourroient avec le tems s'emparer de tout le gouvernementde l’état, ils les apremierement difperfez en diverfes Villes & Villages de fes Provinces, afin qu'a l’avenir.,ils ne foient pas capables: de faire en aucun lieu un corpsaffez confiderable pourfomen ter quelque party: & qu’enfuiteilaordonné, quetousceus. qui fe trouvent 4: prefent dans fes pais, y pourront demeurer paifiblement, & y jouir detous les mêmes droits &avantas ges que fes fujets naturels, pourveu qu'ils n ‘entretiennent. at | cunciñtelligence au dehors, au prejudice de la tranquilité pu# blique : : mais que l'entrée en fera deformaisentierement fers mée, à tous les autres étrangèrs, qui auroient deffein pi S'y VE nir établir, | !11 | Ceus qui favent la nature de ce païs-là ; difentque és Apas- Jachires n'ont aucune jufte raifon de craindre, que les Euro pecns prenent jamais l'envie d’ufurper leurs Térres+: Carou-. tre equ ff Reid une afez: De armée pourexecuter une: parcille: Lot L “+ LORS RES \ FRE L7 h ; RSyt _ DES "TS Ms nAa © DEN GE. - 429 pareille entreprife,, &.que les familles qui s’y font arrétées de eur confentement, ne font au milieu de ce grand Peuple, “aucun corps. confiderable » qui puife fubüfer de foy mè- . mme :,ce pañs étant fireculé du reftedu monde, &.entierement _«dépourveud’or, d'argent , de. pierres precieufes , &:detou- “esles riches marchandifes,qui atirent & entretiennent le con. mercc , ileft conftant, qu'il ne fera jamais recherché, nien- wié avec beaucoup de pafion, des peuples de l’Europe, quine #pouflent des Colonies, que là où ilya cfperance de faire du profit par le moyen du trafic. Joint, que quandces Provin- des maladies aufquelles ils font fiers, | des remcdes dont ils fe fervens. ) Len que és Apalachites ncfe slonifieot pas d’ cfre AAA dus des anciennes Tribus d’Ifraël; ils ont néantmoinscee decommunavecelles, qu'ils ne prenent point de femmes hors deleursfamilles, & fi quelques-uns d’entre eus enufent autrement, ils s’expofent au mépris & au:rebut dettoute leur .parenté; &. outre, que de femblables:mariages font facile- ment difouts, les enfans quien naïiffent, fontincapables d’eftre . Capitaines ou Chefs: de familles , d'autant qu’ils font tenus parmi cus, awmême rang que.des bâtards. | Gel li:q À Hh h 2 Les VAE re Lg HISTOIRE MORALE : Lesjeunes hommes ne font pas beaucoup de ceremonies ni de recherches pour avoir des filles en mariage : parce que les parens de part & d'autre, ont fouvent conveuu detout cela par enfemble, lors que leurs enfans étoient encore fort jeunes: & les enfans font en ce poinr:fi refpeétueus envers. leurs parens, & deferent tellement à deparcilsacords, qu’il n'ya point d'exemple parmi eus, d'aucunsquiayent defavoué ce qu'ils ont traité en de pareilles rencontres. 1ls peuvent. époufer de leurs parentes, dans tous les degrez quifont au défous de leurs fœurs, Ils ont toüjours pris lailiberté d'a voir autant de femmes qu'ils en peuvent commodement en tretenir: maisiln’yaquelapremiere, quileura efté donnée. parleurs parens, qui foit reputée pour legitime , & dont-les enfans puiflent eftre avancez aus charges, & BrciRenE à tous # ceus qui naiflent des autres. Is donnent pour l'ordinaire à leurs enfans mâles, Jesnoms de leurs ennemis qu’ils ont furmonteé, oudcleurs Villages qu'ilsontbrülez, ou même de leurs prifonnicrs de guerre qui font morts à leur fervice., Quant à leurs filles, ils les nomment. de mêmes nomsque leurs meresou grand’meres ou ayeules qui font decedces, ayant toüjours égard , qu'il n'yenait aus cune dans leur famille qui foit encore en vie, qui porte le. même nom: & au defaut des noms de cette nature, ils en: forgent d'autres felon leur caprice, aufquels, fionles en doir croire, il ya beaucoup de mylteres cachez. Les femmes, élevent tous leurs enfans jufqu’à l'age de: douze ansouenviron, mais quand les garcons font parvenus. à ce terme , clles les confient entierement aus foins & à læ conduite de leurs maris, qui fe chargent dés-lors, de leur education, les condaifant avec eus à lachafe, à la pefches au- labourage, & à tousles autres exercices, dont ilstachent.de les rendre capables. Ils les fafonnent aufli à tirer de l'arc & à lancer la zagaye de bonne etacc, & àfe parer defeurs bot cliers contre les coups de fléches > & ils les menéntà laguere re, quand ils font parvenus en âge d'en PRE fuporter la. fatigue. 240 Ils ont tous beaucoup d'amitie ponr leurs enfans, mais. 1e ne leur en donnent Lure tant de PICUVES extericures qué | | plu DES ÎLES ANTILLES. es pu ieurs autres nations, qui font confifter l'amour qu'ils ont pour eus, en une infinité de carefles, & qui l'evaporent en mignardifes, dont les enfansabuzent le plusfouvent. Etbien que cette conduite des Apalachites, femble un peu trop pan- ‘cher du cofte de la feverité, l’on remarque | toutéfois par expe- tience, qu’elle n’abat point le courage à leurs enfans , & qu’elle n’éroufe en aucune faflon le feu & la vivacité qui eft re- ; pour entreprendre quelque chofe de genereus, : L’on ne voit aucun d’entre eus qui foit travaillé de la pierre, pudelagravelle , ni même des goutes: ce qu’on atribuë à la fobrieré qu’ils gardent au boire & au manger, & aus exerci- ces affez laborieus aufquels ils s’ocupent tous les jours de leur vie, comme aufli à l’ufage frequent de la Caffine, quieftune forte de bruvage fort eftiméparmieus, quieft compofé de la. feuille de cet Arbre de même nom, dont nous avons déja par- l enplufeursendroits. Car ils tiennent qu’ilalavertu, de faire rendre quantité de ferofitez parles conduits naturels, & de chañfer toutes les humeurs gluantes, quileur pourroient caufer des obftruétions. Mais ils font fort fujets, lors notan- ment qu'ils deviennent vieus, à degrandes douleurs detéfte, à des foibleffes d'eftomac, & à des demangeaifons, qui leur excitent des puftules par tout le corps, qui desenerent fous. venten des ulceres malins, qui deviennent incurables.. Ils n'ont point d’autres Medecins que leurs Z4æ4#, qui meflent beaucoup de fuperftitions parmi les remedes qu'ils prefcrivent à leurs malades. Ils fe fervéntau lieu delaneettes 1& de rafoirs, de certaines dens de poïiflons extremement aiguës.& trenchantes, d'ont ils font desincifions affez pro- fondes, fur les parties douloureufes de ceus qui fe mettent: “entre leurs mains, ls n’efluyent point le fang:, qui coule des. «playes qu'ils ont faites: mais aprésl’avoirfuce, ilsle rendent: promptement à terre. Les efcarcelles qu'ils portent atachées à leurs ecintures, font toûjours garnies de diverfes fortes de oraifles, & de plufieurs feüilles., d'herbes, lefquelles ils apii- quent en forme d’emplâtres, fat les parties. mal affe&tées de: leurs patiens. 11s provoquent auf des vomiffemens & des: fueurs, avec une poudre compofée de l'écorce d’üne forte d'ärbrifiea,, & d’une efpece de coquillagecalciné, quiont: Hhk: 3 la: bn d 430 Hisroire MORALE» Chap#. a vertu de produire ces éfets.: Mais ces remedes font fi vioe lens, que les Europeens qui onteus l’affurance d’én Php sn ont efté dangereufement malades. p:. Quand tous ces remedes ordinaires n avancent point la gue- vais des malades, les Zaouas leurs prefcrivent des bains ; des - fomentations, l’nfagedes eaus minerales qui font au pied-de la montagne d'Olaimy, & enfin, aprés avoir épuifé tous leurs fecrets, ils les font expofer au lever du Soleil, à la porte de leurs cabanes , dans la creance que les dous rayons de cet. Aftre, feront plus puiffans pour leur rendre la fanté, que toutes leurs autres ordonnances. C'eftpourquoy, dans ces occurrences ils conjurent cette pretendué divinité, deyous loir dépleyer fa vertu vivifiante en faveur de ceus qui lui dé=. couvrans leurs maus, n’attendent-leur guerifon, que de fes benignesinfluences. | s{!1 il Ces Medecins, qui fontaufi Bari tem du Soleil, COM= me nous l’avons reprefenté, font fort eftimez parmi les A pa=® lachites, car outre qu'ils acompagnent cette double profef. fion, degraviteé, de modeftie, & d’une abftinence de toute forte de delices, & même de l’ufage des creatures, quiont cuës la vie fenfitive : ils ne peuventpoint eftre promeus à çes charges, quiles obligent à mener une vie beaucoup plus reti- rée que celle du commun, qu'ils n’ayent fait l'aprentiffäge de toutes leurs fuperftitions au milieu des forets ,:.& des plus afreufes folitudes, fous la conduite des Chefs de leur Secte, qui durant trois ans entiers les exercent & les fafflonnent par plufieurs rudes épreuves, à tousles myfteres de Jeur profane difcipline. C’eftaufli durant ce tems-là, qu'ils ont àcequ'ils racontent, d'étranges vifons, & la communiçation fami liere de certains efprits folets, quileur aparoiffansen diverfes figures "fe joûent de la fimplicité de ces miferables. abufez, quiontl’adreffe & la vanité, defaire pafler leurs réveries, & Jesillufions deces Anges de tencbres qui les feduifent,, pour -des revelations divines, &. des en qi Isur _ en- voyées du Ciel. 7 228 Yu estiR lg" Et" serrol 19" 3100 1. & à : 4 , g r tr tx “a fra ù à 1 2 NAS x à 1 4 } * AT 0 f SLiis bi 20 £ ID RE ; BES ÎLES ANTILLES, #3T ARTICLE XIII. ‘De l'âge ordinaire des CApalachites ; de leur mort, € de leurs enterremens. Es Apalachites, font prefquet tous de fort longue vie; car il s’en voit communément qui pañlentles cent ans , & en- Core a prefent il s’entrouve plufieurs, qui ont atteint le cent éinquantiéme. Ce quinedoit point eftretenu pour une nou | veauté, où pour une merveille extraordinaire ; puifquenous lifons au Chapitre dixiéme du livre quatriéme de la De- _fcription des Indes Occidentales , du Sieur de Laët, que Mr. de Laudoniere vifitant la cofte de Ja Floride, y vid un: Roitelet, amy dece Saturiova, dont nous avons tant parlé dans les articles precedens, qui avoit plus de cent cinquante ans, & qui pouvoit conter de fes fils & petis fils, jufqu’à La Cinquiéme generation. Hs embaûment avec un artificé tout particulier , les corps de leurs parens & amis decedez : car aprés en avoirtiré tous les inteftins, léquels ils enfeveliffent au même lieu, où le refte du corps doit eftre mis à la fin de leur deüil, ilsles plon gent dans un baume precieus qu'ils refervent à cet ufage. Cette compofirion eft faite de plufieurs fortes de gommes aftringentes, & de quelques drogues aromatiques, qui ont Ja vertu de deffécher les corps, & les preferver de corruption : & il eft conftant, qu’'apres qu’ils ont demeurétrois mois ou Environ dans ce baume , ilsenpeuvent eftre tirez, fans qu’il ÿaparoïiffe aucune alteration, & fans crainte qu’ils fecorrom- pent à l'avenir. En fuite de cet embaumement, ils les revérent de leurs plus precieufes fourrures, & aprés les avoir enfermez dans des cofres de cedres, & confervez dans leurs maifons: Fefpace de douze lunes entieres, ilsles enterrent dans la fo: feft la plusvoïfine de leurs demeures , , au pied de quelque at bre, avecbcaucoup de pleurs & de lamentations. H n’y a pasgrande difference entre les enterremens du fims ‘ple peuple & ceus des Capitainés, ou des Chefs de famiile :. mais. ils obfervent quelque chofe de particulier aus funerailles- de de: ï 432 dat OM Mont & Bee ‘deleurs Parakouffes : Car aprés qu'ilsles ont cabaumez avec tous les foins poflibles, & qu'ilsles ont couvertsdeleurs plus beaus habits, & parez de leurs chaines & de leurs Colliers. de ceremonies, ils Les gardent trois années entieres dans des. Cofres debois precieus, au milieu de la chambre où ils font. decedez. Ce terme étant expiré, ils les portentavecbe:u- coup de pompe au tombeau, queles heritiers du defunt ont faiccreufer, à la pante de la montagne d'Olaimy, où depuis untems rep ils ont acoûtumé d’enfevelir leur Sou.… verains: & fi roft qu'ils ontpoféles corps dans la grote, ils. ferment l’ouverture avec degroffespierres, qu’ils couvrent” d’un grand amas de gazons de terre. £ Les Capitaines, "& tous les autres Officiers & Chefs de fa mille, qui ont aflifté à ces derniers devoirs, apresavoir jertd. beaucoup de cris & pleuré le défunt, attachent ausarbres vois fins leurs arcs & leurs carquois pleins de fléches, leurs mafuës & leurs boucliers. Et les plus proches parens du defunt,s | plantent auprés de la caverne où ilsontmislecorps, un Ce= dre, ou quelqueautre forte d'arbres precieus, qu ils y cntre- tiennent avec tous les foins qui font requis pour empefcher. qu'ilnemeure: & s’ilarrive qui foitrenverlé par les vens, ou qu'il vienne à fécher, ou à deperir par quelque autre accident : ils ne manquent jamais d’en fubftituer un autre en la place, pour perpetuer entant qu'ileft eneus, la memoire du defunt: par ce figne vifible, Pour ! témoigner leur deüil, & faire EP D la grande triftefle qu’ils ont conceué de la mort de leurs parens, ils cou= pent une partie des cheveus de leur tefte : mais lors que leu# Prince eft decedé, ilsles rafent entierement, & neles laiffent point recroiftre, jufques-à ce qu'ils ayent porté fon corps au fepulcre, enla facon que nous venonsde décrire. Pour veris fier que les Ceremonies que les Apalachites obfervenrà em= baumer les corps de leurs parens, & à lesconferver quelque tems dans des cofres, avant que leur rendre les derniers de= voirs, ne leur eft ninouvelle; ni particulier ; le Sieurde Laët au Chapitre troifiéme du livre quatrieme de fon Hiftoire déja citée, raporte que les Soldats qui acompagnoyent Pamphile N'ervers , en fes expeditions da nouveau monde , fous [a com= DES FÉES ANT LUS, 43 3 Bbtuttiion de l'Empereur Charles cinquiéme Royd'Ef pagne, qui lui avoit acordé ie gouvernement de toutes lesterres qu'il pourroit découvrir, dépuis la Riviere des Palmes, jufqu’aus derniers confins de la Floride, étansdéfcendus à la plus pro- chaine cofte du païs que nous décrivons , trouverent dansles cabanes que ces pauvres barbares avoyent abandonnées, in- continent qu'ils eurent aperceu ces étrangers, qui étoyent munis d'armes à feu & montez à l'avantage : quatre grands Cofres de bois precieus, ou il yavoi&#pour tout trefor, des corps morts couverts de peaus de beftes fauvages. * Ceque nous avons dit jufques-à prefent, des mariages de Apalachites, de leurs Médecins & de leurs Funerailles, ne doit eftre entendu,que de ceus qui font encore dans l’idolatrie. Car ceus que Dieu a honorez de fa precieufe connoiffance, & apellez de leurs anciennes tenebres, à la merveilleufe lumiere de fon Euangile de grace, ont leurs mariages reglez, dans les degrés permis parfaLoy, & fe tiennent atrétez indiffol lu- blement à unefeulefemme. Ils ne fe fervent point auffi dans leurs maladies, des remedes fuperfticieus des Zaoÿws, mais aprés l'invocation du nom du Sauveur, qui eft le vray Soleil de juftice qui comme dit Ecriture, porte la fanté dans fes ailes c'eft à dire en fesrayons, ils ufent de quelques fimples, que l'experience leur aenfeigné eftre tres-propres à la guerifon de leurs maladies, Ils confient auf àlaterre, les corps de leurs freres en toutc fimplicité gravité, & modeftie Chrétienne, dans l efperance de la bien-heureufe refurrection, felon la pratique de l’Eglife primitive; fuivansencela, & en routes autres chofes qui concernent le fervice divin, Fordre de leur Liturgie particutiere, laquelle eftentierement tirée de la parole de Dieu,& fort aprochante de celle de l’Eglife d'Angleterre. Voilà la Digreflion curieufe, dont la recherche de lorigi- ne des Caraïbes nous a fournile fuiet & lamatiere, Nous fou- haitons pour la clôture, que certe nouvelle Relation, quieft beaneoup plus ample & plus exaite, que celle que nous avions inferée en la premiere edition de certe Hiftoire agrée à ceus qui prendront la péne dela lire,& qu ‘ils ayentlabonté de füporter les defauts de nos expreflions qui fe font bien fouvent tfouvées contraintes, efl tâchant de rendre.fidelement & clai- 2 lii remet F « è 4 ke . PS \ ii {x FO 434 Hasr ot Mon 184 À rementen nôtre langue,le contenu aux memoires qui nous sont efté confiez de divers endroits, _& enlanguc differente, fur cet teriche matiere. Au refte , ces Meflieurs qui converfent encore à à prefent avec ce Peuple, ou qui demeurent dans le voifinage, nous ayans honorez de toutes ces excellentes & AA on remar= ques, que nous tenons deleur liberalité, commeilapert par leurs lettres, qui paroiflent au commencement de cet Ouvras= 9e , fcront toûjours lesgrreprochablés témoins , de la fidelité que nous nous fommes étudiez de garder, en les donnant au public, & les répondans de la verité de tout ce que nous avons: avancé aprés eus, en maniant ce digne fujet. # Il feroit à defirer qu'a l'exemple de ces genereus Habitans de la Floride, les autres Colonies del Amerique Septentrionale, nous informaflent aufh à leur tour, de ce qu’elles ont de plus confiderable dans les païs où elles font établies; car nous apres nons qu’en laneuve Angleterre, qui fans contredit, ef la plus peuplée, & la plus fleuriffante de toutes, il yauneinfinité de ras retez, quifonttres-dignes d'eftre communiquées à nôtre Eu- rope:qu il y a plufieurs belles & grandes places fort rcnômees, qui peuvent porter le nomde Villes : qu'il y a par tout de E co- les aufquelles les enfans des Indiens font nourris & élevez en: la vraye pieté, & enla connoiffance des lettres, avec ceus dé la Colonie: qu'il yamèême une Academie fort celebre en l’u- nede leurs villes, laquelle eft compoféeentre autres, de plus fieurs Docteurs & Profeffcurs en Theologie, qui enfeignent publiquement & gratuitement cette divine fcience, à tous ceus! qui ont un faint defir de confacrer leur vie & leurs études. a fervice des Eglifes que le Seigneur a recucillies dans cette par tie de nouveau Monde: & que leurs faints labeurs, y font en core à prefent acompagnez de tant d'heureus fuccés , & de û grandes benediétions du Ciel, que leur dernier Synode Natios _nal, étoit compofé de plus de cent Pafteurs, qui y comparurent au nom de leurs Troupeaus, & qui y rendirent des folemnelles aétions de graces au Seigneur, de ce que de jouren jour, ilou= vroit le cœur de ces pauvres barbares, au milieu déquels fa providenceles a appellez, pour entendre; à l’Euangile quide | is prefché, & en y cRopanse avoir pattà fon alliance degrace.. | Le Bu Y CHAPITRE NEUVIEME. Du Corps des Caraibes, € de leurs Ornemens. | à nousétions écaftez, & retourner de la Floride aus Antil- les, pour y confiderer aufli exa@ement qu il nous fera pof- fible dans toute la fuite de cette Hiftoire, le Corps & FEfprir, | les Mœurs, laReligion, les Coûtumes, & les autres parti- | cularitez des Sauvages Caraïbes ou Cannibales, dont nous | por déja deduit amplement l'origine. Et parce que ceus d'entre ce peuple, nutienibotent dans les mêmes Iles où les François & les autres Nations Euro- |péennes ont des Colonies, ou qui les frequentent fouvent, s’accommodent en plufieurs chofes à leurs fafons de faire, & que pour leur eftre plus agreables, ils quittent beaucoup de leurs viéilles coutumes , ceus qui veulent favoir les anciennes Imœuts des Caraibes, ne les doivent pas apprendre des Ca- | raïbes qui demeurent à la Martinique, ou qui frequentent le | plus nos Européens : mais de ceus de Saint Vincent, léquels | éntre tous les autres, ont eu jufqu'à prefent le moins de com- munication avec les Etrangers. Auflieft ce d’eus, qu’eft par- ticulierement tiré tout ce que nous dirons cy aprés des Caraï- bes: mais avant que d’entrer en cette matiere, nous ferons quelques remarques gencrales, pour prévenir l’étonnement que le Leëteur pourroit avoir, de la difference de plufieurs de nos Relations, à celles des autres, ou de bouche ou par écrit. - L Ileft srefque impoflible, que des Rélations de terres & de coutumes fi éloignées de nouss’accordenten touteschofes, Veu que même nous voyons que celles des païs voifins, n’ont pes toujours un parfait rapport entr'elles. MT: Dépuis que les Caraïbes ont frequenté avec les Na- tions étrangeres, ils ont beaucoup relafché de leurs ancien nes pratiques, & ont quitté plufeurs faflons defaire, quileur étoient auparavant inviolables,. De forte qu’ilfe trouve au= RE | Jii 2 lo out | [: Pape maintenant reprendre le grand chemin dont nous Mi, À: 436 Histo Mo LR jourduy en eusun notable changement, dece qu'ils étoiené. autréfois. Cequicftarrivé, & en partie de ce que nous Eu- ropéens les ont déniaifez, & en partie auf, car il le faut avouër à nôtre honte, dece qu'ils les ontcorrompus. Et fur ccfujet, Monfeur du Montel nous rapportéenfes meñoires, que deus bons vieillards Caraïbes, avecléquels ila converfé | familicrement, luy difoient fouvent enleurentretien. $ ;,; Nos gens font devenus prefque come vous, dépuié. nqu'ils vous ont veus: Et nous avons de la peine à nou$ »Yeconnoître nous-mêmes, tant nous fommes differens de >, Ce que nous étions autréfois. Aufi nôtre Nation eftimes », qu'à caufe de ce changement, les Ouragans font plusfre= » Quens qu'ils n'étoient par Cy-devant: & que CMaboyas », (c'eft à dire, Pefprit malin) nous a mis fous la puiffance des, >» Franços, des Anglois, & des Efpagnols, qui nous ont » chaffez de la plupart de nos merlleuresterres, 4 III. Ils peuvent avoir des faflons de faire differentes, fe Jon a diverlité des Iles, bien qu'ils foient un même Peuples comme nous de voyons dans la diverfité des coutumes d’un! même Royaume, felonles quartiers, & les Provinces, De forteque pat exemple, ceus quiontleplusconverféàla Do minique r’apportéront des opinions, des coùtumes, -& des ceremonies des Caraibes, Qui ferontrecirées diverfementpa# des perfonnes qui les auront frequentez ailleurs. Ærmeant- moins les uns & les autres fercnt une relation-fidele, IV. Comme dans le Continent de l’ Amerique, les Caraïs bes quihabitentbien avant dansla Terre, & qui voyentraré= ment les étrangers, retiennent beancoup plus leurs anciennes mœurs, & leurancienne faflonde vivre, queceus.quihabis tans prés des Colonies Hollandoifes de Cayenne & de Berbis. cé, ontuncomimerce ordinaire avec les Chrériens. ‘Auïfi ën* tre nos Caraibes Infulaires, ceus qui ont moins de communis cation avec les Européens , tels que font ceusde Saint Vin: cent, font plus exacts obfervateurs de leurs vieilles} ‘habitudes, que ne le font par exemple, ouceus de la Martinique, ou LUS de la Dominique, quinous hantentdavantage. | at@ V. C'eft pourquoy fi ceus qui ne les ‘ont Ycus: qu cn ces cer lieus, ou qui ont appris de leurs nouvelles par des perfon- a DES Les PERL LA 437 Dern qui ne les avoient pratiquez qu'en ces lieus là, trouvent dans la fuite de nôtre Hiftoire diverfes chofes quine . s'accordent pas bien avec celles dont ils ont la connoiflance, js ne s’en étonneront pas s’il leur plait, veu que la plûpart de nos memoires, ont efté faits fur les Caraibes de S. Vin- cent. | | VI. Enfinles Lecteurs feront avertis, que nous allons dé- crire pour la plupart les anciennes mœurs, & les anciennes Coutumes de ces Caraïbes, afin que perfonne ne trouve étrange fi dansée qu'ils pratiquent aujourduy, il ya quelque chofe qui ne s’y rapporte pas. Ces avertifflemens étant donnez, rien ne nous empefche de commencer ce que nous avons en- trepris, pour fatisfaireau titre de ceChapitre. | La plupart des Peuples que nous appellons Sauvages & Batbares, ont quelque chofe de hideus, & difforme, ou de defcétueus, foit en leur vifage foit au refle de leur corps : com- me les Hiftoriens nous le rapportent des Maldivois, des Habi- fans du Détroit de Magellan & de plulieurs autres qu’il n’eft pas befoin de nommer. Pers Maïs les Caraibes font sensbien-faits, & proportionez de _ ar corps, aflez agreables, la mine riante, de moyennetaille, larges d’épaules & dehanches , & prefque tousenaffez bon point, & plus robufles que les François. Ils ont le vifage rond & ample, & pour la plupartles jouës marquées de deus peti- tes foflettes dans le milieu. Leur boucheeft mediocrement fenduë, & leurs dents font parfaitement blanches & ferrées, 11 ft vray qu’is ont le teint naturellementolivatre, & que cetre couleur s’étend même fur le blanc deleursyeus, léquels ils ont noirs, un peu petis, aufli bien que les Chinois & les Taftares, mais fort penetrans. Ils ontauflilefront & Ice nez aplatis, mais par artifice, & non pas naturellement, Car leurs meres les leur preffent à leur naïiflance, & continuelle- ment pendant tout le tems qu’elles les allaitent, fimaginant qu'ilyacnceladelabeauté & de la perfeétion, car fans cela its autoicnt le nez bien formé, & le front élevée comme nous. His ontles pieds larges & épatez, parce qu'ils vonrnus-pieüs : ï ais au reftefendurcis, qu'ils font à toute épreuve, & daits les bois & fur les rochers, Éii3 Entre CN URUE SN RME à it. #4 # ETS RAAS + de: Las 433 Bit r ol MORALE, ap. Entre ceus du pais on ne voit ni borgne, ni aveugle, ni boiteus, nibofu, ni chauve, ou qui ait de nature aucune dif De Lery formité, comme onle rémoigneauffi des Brefiliens, des Flori- Cha diens, & de la plûpart des Peuples de l’Amerique. Au licu, que ceus quife font promenez dans le grand Caire, rappor= poyage tent que parmy les ruës on voit force borgnes, & force aveu- R so gles, cesinfirmitez étant fi frequentes, & fi populaires en ce païs- à que de dix hommes, ily en a toujours cinq ou fix qui, en font atteints. Mais s’il yen a quelques uns entre les Ca- raibes qui foient difformes , ou perclus de quelque menbre, cela leur ef furvenu dans a rencontres, & dansles combats qu’ils ont eus avec leurs ennemis, & ces difformitez ou ces flétriflures, étant autant de preuvesde leur valeur, font efti. mées parmy eus de bonne grace, & glorieufes: bien loin de les mettre en danger d’eftreafommez , ou jettez en une fon: driere par ieurs compatriotes, comme ces pauvres cnfans qui. parmy le Peuple de Guyana, & chez les Lacedemoniens dus tems, de Lycurgue, venoient du ventre de leurs meres im parfaits & difformes. Il fe voit même de belles filles & de belles femmes entreles Sauvageffes Caraïbes. Témoin Ma: damoifelle de Roffelan, femme de Monfieur le Gouverneur ‘de Sainte Aloufie. Trigaut Tousles Caraibes ont les cheveusnoirs, comme les Chi- ie OS , qui pour cela font par fois nommez, L Peuple aus che. La Chine, Veus noirs. Cescheveusdes Caraïbes, ne (Ee pas frifez com-. bv.r. me ceus des Mores, mais tout droits & fort longs comme. ‘#48 ceusdes Maldivois. Et leurs femmes donnentroutes à cette couleur noire, le premier rang de la beauté pour la cheves AT Jure Onditaufli, queles Indiennes du Perou, ont tant de bo.s. paflionpourles cheveusnoirs, que pout donner à leur che- cbap.13. Velure cette couleur, quand ie y manque; elles fe donnent des peines & des tourmens incroyables. Au contraire, en Efpagne plufieurs Dames pour fe teindreles cheveusde cou- leur d’or, les parfument de foufre, les trampent dans de l’eau. forte, & es expofent auSolcilen plein midy, durant les plus violentes chaleurs de la Canicule.. Et enltalie certe couleur _ decheveuseft aufli fort affc@ée; témoin ce queditun Poire, 7 au fujet des Courtifannes Romaines. bis | oque dt ne fl... 54 ALTO EC SNMP ET OT ARR. PORN" CE OR] DUR, UE 2 Vire AE Lt L'UEE Cr TIE LA ER, ARE AMAR A A NES ACT EL 10 « ah NE Ce î ÿ Fute: EN er FA è ' sh k £ j MÆMp9 DES ILES ANTILLES 439 . O1 0 que ces Guenuches coiffées L à Avec leur poil fauve par art, &c. | » Les Caraïbes font fortfoigneusde fepcigner, & eftiment cclaforthonnefte. Ils huilent leurs cheveus, & ont uncin- vention pour les faire croitre. Les femmes pcignent ordi- nairement leurs maris & leurs enfans. Hommes & femmes treflent leurscheveus par derriere, & Les font aboutir enune | : petite corne, qu'ilsfe mettentau milieudelatefte. Aus deus | coftez ils les laiffent en mouftaches, felon la liberté naturelle. | Les femmes divifent leurs cheveusenforte, qu'ils leurtom- _bent des deus coftezde latefte ;. Et les hommes feparent les leursen l’autre fens, c’eft à dire qu'ilsles tirent fur le devant & fur le derricre de la tefte. Ce quiles oblige à en couper de deflus le front, parce qu'autrement ils leur tomberoient fur les yeus. Ce qu'ils faifoient autrefois avec de certaines her bes tranchantes, avant-que d’avoir l’ufage de nos cizcaus. Outre ce qu’ils ont accoutumé d'en couper, lors qu'ils font en deüil. Au lieu qu’en Madagafcar les hommes ne coupent rien du tout leurs cheveus. Mais les femmes fe rafent entie- rement. Ce qui eft tout à fait contraire à la coutume des. Peuples, parmy léquels vivoit l’Apoftre Saint Paul. On n’apperçoir point du tout de barbe aus Caraibes, s’il leur en vientils l’arrachent, comme font les Breliiens, les Cumanois, & certains Peuples füjets de l'empire des Tarta- 927% res, qui portent toujours un fer à la main, dontils s'arra ge. chent tout les poils de barbe quileur croiffent de nouveau. re» Au refte, l’onne voitguere les Caraïbes en cette peine, & Fon croit qu'ils ont un fecret, pour empécher le poil de reve- nir, quand une fois il eft arraché ; Invention quieuftefté fort ‘€ommode aus anciens Romains. Car on tient qu'ils n'ont prefque point donné à leur barbe la permiflion de croitre, que dépuis le tems de l'Empereur Adrien, quile premier laif- fa croirre la fienne. Jufques là, il étoitfi honorable parmy “eus de ne porter point de barbe, que les efclaves n’euffent OfÉ faire rafer la leur: Et même cela. étoit defendu à toute perfonne accufée de crime, comme pour mettre fur cusune Marque d'infamie:, jufqu’a ce qu'ils euflent efte abfous, ainfi auelerapporte Aule-Gelle. Tout au contraire de ce qui fe é 105 pra RRQ EUR LUS 7 QE" En 15 PRÉSENTE RE NT Fe * n Rte Xe ne 440 _ HisTorns MonarE hap.o pratique fous la domination du Grand Seigneut, qui fait ra. fer la barbe parignominie. Ce qui arriva l'an 1652 au Con fui François d' Alexandrie, accufe d’avoir mal-verfé en {a char- ge, & de qui labarbe étoit naturellement fibien frifée, &' d’une couleur blonde fi belle, que quelques Turcs luy en voulurent donner une fomme d'argent bien confiderable,. pour la garder par rareté. Mais il aima mieusl’apporter en: France. | #41 Les Caraïbes s’etonnent de voir nos Européens nourrie leur barbe, & trouvent que c’eftune grande difformité d’en- avoir, comme c'eft en eus une belle perfection de n’en avoit” point. Mais ils ne font pasles feuls des Sanvages, qui foient fantafques en matiere de bienfcance & de beaute. Tourés* les Nations Barbares, & même quelques civilifées, ontf{ur cela des gouts & des (entimens particuliers. Par exemple, on est rap- porte par divers Histo- viens qu sl fe- rost trop long de céter. mêt pour beauté entreles Maldivois, d’avoir tout le corps. velu, ce qui feroit patmy nous la beauté d’un Ours, & non. pas celle d’ unhomme, Entre les Mexicains, d’avoir icfront” petit & pleindepoil. Entre les [aponnois, de n’avoir gucres de cheveus: ce qui les oblige à les arracher foigneufement, & à n’en laifler qu’un toupet au fommet de latefte. Entre les femmes Tartares, d’eftre fort camufes, Mais pour rele= Ver les attraits de leur nez, elles le frottent d’un onguent fortnoir. Entreles Guinois , d’avoir de grans ongles & le nez plat. C'eft pourquoy ils l’aplatiffent & l'enfoncent. avec le pouce à leursenfans, dés qu’ils viennentau monde, comme font aufi les Brefiliens. Entre ceus de la Province de Cafco au Perou, & quelques Indiens Orientaus, comme entre les. ‘Calecutiens & les Malabares , d’avoir les oreilles extreme ment grandes , & pendantes jufques fur les épaules. Auf “Quelques uns d’entr'eus, fe les font venir telles par’artifice, Entre les Ethiopiens, d’avoir de grofes lévres, & le teint noir & poly conne jayet. Entre les Négres de Mofambi: que, d'avoir les dens extremement pointués: & ilsufentde ‘la lime pour les rendretelles. Entreles Maldivois,deles avoir rouges, -& pour cet éfct, ils machent continuellement du Petel, Entre les Japonois & les Cumanois de les avoirnoi res : auff les noïrciflent ils exprés. Entre ces dernierss en- core, FANS RE 4 É ’ Chap. DEL ÎLES ANTILLES 44 core, d'avoir le vifage long, les jouës maigres, & lesjambes .groffes par excés : Et c'eft pour cela qu'ils preffent la tefte de leurs enfans entre deuscouflins à leur naiffance, & qu’auffi- bien que les Habitans dela Riviere d'Effequebe, ils fe tiennent les jambes étroitement liées par le haut, & àlacheville du pied , afin de lesfaire enfler. Entre quelques Peruviens, d’a- voir le vifage incifé & déchiqueté, commeà coups de lan- gcttes, & d'avoir latefte platte & contrefaite, large de front, & fort étroite dépuis le front, jufqu’au chignonducou. Et _c'eft pour fe la rendre de cette belle forme, qu ilstenoient la tefte de leurs enfans preflée entre deuspetisais, désie mo- ment de leur naiffance, jufqu’à l’aage de quatre ou cinq ans. Enfin entre quelques Orientaus, & quelques Africains, c’eft une grande perfection aus femmes, d’avoir des mammellesà renverfer par deffus l'épaule. Erentre les Chinoïifes, la prin- cipale beautéeft, d'avoir le pied exccflivement petit & orefle. Et c’eft pour cet cffet, que dés leur enfanceonleleur ferre fi étroitement, qu'elles en font tout eftropiées, & qu’ipeine fe peuvent.elles foûtenir. Il feroit bien mal-aifé de décrire une beauté, furles opinions differentes de tous ces Peuples. Retournons aus Caraibss. . ]ls vont nûs entierement, hommes & femmes, comme splufieurs autres Nations. Et fi quelcun d'eus vouloit cacher fes parties naturelles , ilferoit moquédetousles autres. Quel- que frequentation que les Chrétiens ayent euë avec eus, il leur a efté jufques à prefent impoñlible de leur perfuader de fe couvrir. Que fi quelquéfois en venant voir les Chrétiens, ‘ou traitter avec eus , ils fe couvrent pour leur complaire, prenant une chemife, des calleffons, un chapeau, & les ha- bits qu'ils leur ont donnez, aufli toft qu’ils font de retour chez eus, ils fe depoüillent, & mettent tous ces habits-là dans leurs Cabinets en parade. Pour échange de cette com- plaiflance des Caraibes, quelques uns de nos François, étant allez au milieu d’eus, n’ont fait point de difficulté de fe de- poüiller entierément à leur exemple. Cette nudite regne au long & au large fous la zone Totride comme chacun fait. Quand on reproche aus Brefiliens leur nudité, ils difent que nous venons aus au monde, & que c’eft folie de cacher 4: K KKk IG Vincess le Blane 3. par. chap, 16. Æ42Z His Be Mot AUS L2 Relation 1e Corps qui nous a cftédonné par lanature. Ceus du RÉ - ss Fe aumede Bennin en Afrique , fontloüables, de fe couvrir au: ** moinslors qu'ils fe marient, ou même plutoft, fileur Roy le veut premettre. Les femmes des Iles Lucayes, dévoyent, aufli participer à cette loïange, car elles avoyent accoutus mé de fe couvrir, lors qu’elles étoient en état d'être mariées, & folemnifoient cette ation avec beaucoup de réjouilfance.. Mais aujourd’huy certe coutume n’a plus delieu: car cette pauvre Nation a été entierément détruité par les Efpagnols, ou enlevée pour travailler aus mines, & il n’ya’plus en tous tes les Iles qui portent ce nom, aucuns habitans naturels, maïs: feulement quelque peu d’Anglois, quel'on y a transportez, de l'Ile de la Vermoude. . Vénons aus ornemens de nos. Sauvages. 1ls changent leur couleur naturelle, par une couleur rouge qu'ils appliquent furleur corps.Car demeurantauprés des Ris Er fs. vicres & des Fontaines, la premiere chofe qu’ils font tousles: a à matins, c’eft de s’aller lavertout lecorps. Etc’eftce qu: pras des an. tiquoient les anciens Allemans comme T'acite le témoigne, sens Al. Aufli-toft que les Caraibes font lavez ils retournent à I lemars maifon, & fe féchent auprés d’un petit feu. Etant féchez, leur femme, ou quelcun de leur domeftiques , prend une Calebaffe remplie d’une certaine peinture rouge, ‘qu'ils ap- pellent Roucou, du nom de l'arbre quilaproduit, & lequél: nous avons reprefenté en fou lieu. On leur frorte tout le corps, & même aufli Je vifagede cette couleur, quieft dé» meflée avec de l'huile. Pour appliquer cette peinture ils le fervent d'une éponge au lieu de pinceau, &ils nomment cet= tcaction-là, fe Roucoüer: Et pour paroitre plus salans, ils: fe font fouvent des cercles noirs à l’entour des yeus, avec du jus de pommes de Junipa. | à we Cette peinturerouge, leur fert d'ornement & de “à ture tout enfemble. Car outre la beauté qu’ils y trou ils difent que cela.les rend plus fouples & plus agiles. coms me de vray, lesanciens Atletesfe frottoient d'huile, pourile mêmeeffet. De plusils difent, qu’en fe Roucoüant ainfi, ils fe garentiflent du froid de la nuit & des pluyes, des piquûres des Moufquites & des Maringoins, & de l'ardeur du Soleil, À OR OT SU APRES ETF CEA" COPY SA CAS AE MA AN ra € , hap,9 -- DES ÎLES ANTILLES. 445 qui autrement leur cauferoit des éleuvres & des ulceres à ‘4 eau. Cette onétion cndurcit leur peau, mais aufli elle rend luifante, doucé, & polie, comme le favent tousceus … les ont veus & touchez. La plupart des Sauvages fe peignent & s'ajuftent ainfi le corps bizarrement, mais non pas dé méme couleur, ni de même façon. Car il y en a qui fe rougiffentlecorps, aufMfi £4led# bien que les Antillois Caraïbes, comme ceus du Cap de Lopes 5,5" Gonfalves: Mais les autres y employent d'autres couleurs, riersen commele noir, le blanc, la couleur de chataigne, le Zinzolin, f# {5 le bleu, lejaune, & femblables. Quelquesuns n’en mettent. qu'une: D'autres fepcignentde plufieurs enfemble, & y re- prefenrent diverfes figures. Quelques autres fans s’appli- quer de couleur, fe frottentavec de l'huile de palmes. Il y en à qui fe font huiler de baume, & faupoudrer tout le corps d une menuë poudre d'or. Et d'autres enfin s oignent ke corps d’une colle gluante, & foufflent fur cela du duvet de divers oifeaus : ou bien ils fe couvrent d’une pafte gommée, & odoriferante , & y collent des plus belles fleurs qui croiffent cnleurpais. Ilyaà choifir dans toutes ces modes, & ce feroit un plaifir, que de voir tous ces pantalons danfer enfemble. On y pourroit joindre, pour rendre la troupe plus complete, Fe ces Pelerins Turcs, qui pottent ordinairement de longues ze. robes, faites d’un million de pieces de toutes couleurs. Au refte , la mode de fe peindre le corps eft bien ancienne : Et entre autres monumens de cette antiquité, Pline & He- Phre rodien nous récitent que certains Peuples de la Grand Bre- a 24 taigne, nayant l’ufage d'aucun vétement , fe peignoient le Herod. corp de diverfes couleurs , & y reprefentoient même des ce ve figures d’animaus : d'oùils furent nommes Piéfes ou Peints, 1e 5% Mais entre tous les Sauvages qui fe peignent aujourd’huy le corps, Les Caraïbes ont l’avantage de fe parer d’une couleur, que les Anciens ont fort honorée fur toutes les autres. Car ondit que les Gots ufoient de Cinnabre pour fe rougirle vi- fage. Et les premiers Romains au rapport de Pline fe peig- noient le corps de CHirium le jour deleur Triomfe. 11 nous £/7- 5% apprend que Camille enufadelaforte. Et ilajoûte , que les jt jours de sels on enlumunoit ainfi le vifage de la ftatué de " NRhE' 2". leur 444 Hisrotre MoRALE, hap. 9 leur Jupiter : Et qu'autrefois les Ethiopiens faifoient fi grand” état de cette couleur vérmeillé, que lcugs principaus Scig=. neurs fe l’appliquoient fur tout lecorps, & que leurs Dieus. mêmes la portoient en leurs fimulacres. # Nos Caraibes, fe contentent pour l'ordinaire de cette” peinturerougc, qui leur fert de chemife, d’habit, de manteau” & de Juftaucorps. Mais en leurs jours folemnels & de ré’ Jouifiance , ils ajoutent à leurrougediverfes autres couleurs,” dont ils fe bigarrent le vifage & tout le corps. F. Mais ce n'eft pas de peinture feulement qu'ils ufent : pour: fe parer. Ils ornent le fommetdeleurtefte, d’un petitcha= peau tiffu de plumes d’oifeaus de differentes LE , oud’un bouquet de plumes d'aigretre, ou de quelque autre oifeau.» Ils portent aufli quelquefois une couronne de plumes, qui leur couvretoute latefte. Ainfi voit on parmyeus, force te ftes couronnees , bien qu’on n y VoyepointdeRois. Encore* _ les prendroit-on'plutoft pour des R ois à leur couronnes 'de* plumes, que l'on ne reconnoitroit pour Prince, le Seigneur* du Golfe d’Antongil, qui n’a pour fon fceptre & pour mar- que de fa dignité Royale, qu’une grande ferpe de ne qu'il portetoujoursavec luy. Les femmes Maldivoifes, fe fontà chaqueorcilleun doit zaine de trous, où elles atachent de petis clous dorez, & quel” quefois des perles & des pierres precieufes. Les Dames de- Madagafcar & duBrefil, fe font un grand trou à pafñler le pou= ce, au tendron de l'oreille, où elles fourrent des pendans diet bois & d'os. Erles Peruviens fous le regne des Rois Yncas, avoient acoutumé de fe faire aus oreilles un trou d'une gran deur incroyable, où ils attachoiïent des lacets longs d’un quart d'aune, qui foutenoient des pendans d’or, d’une largeur de mefurée. Mais nos Caraïbes, ne veulent qu’un petit trou à lEuropéenne, au moldel oreille ou ils mettent des arreftes! de certains poiflons fort polies, des pieces d’écaille de Caret, & dépuis que les Chrétiens font venus verseus, des ou d’or, d'argent, ou de leton, où ils attachent de beaus pendan d'oreilles, Ils font ravis d’en avoir de ceus que leur apportent nosgens, & favent fortbiendiftinguer, & cherir fur ous les autres, ceus qui font de prix, ils font particulierement état 2 sé DÉS LES. ANTILLES: as hap.9 LA ceus qui font de Cfiftal, d’'Ambre, de Coral, ou dequel-. . queautreriche matiere, pourveu que la boue, & tout l’en- richiffement foit d'or. Quelquefois on leurena voulu don- _ ner, quin'’étoyent que de cuivre doré, & leur faire accroire qu’ils étoient d’ or: mais ils les ont rejettez endifant, qu’on les vouloit tromper, & que ce n’étoit que de l’or de chau- diere. Etpourenfairel'épreuve, ils ont accontumé de mettre la piece en leur bouche. Bien au contraire de ceus de Ma- dagafcar, qui lors que les Hollandois qui yÿnavigerenten l'an _ mil cinq cens quatre-vints quinze, leur offrirent une cuillier d'argent, la mirent entreleurs dens, & fentant qu’elle étoit dure, la refuferent demandant une cueillier d’étain. Et l'on peut affez juger quel état ils faifoient de l’étain, puis qu'ils prefenterentune fille, en échange d’une cuillier de ce metal. Herodote nous recite, qu autrefois parmy les Ethiopiens, le cuivre étoit plus eftimé que l’or, dont l’ufage étoir vil à un tel point, que l’on y lioit les criminels avec des chaines. d'or. y faire pañler une efpece de petit poinçon, qui cft fait d’un os, ou d’une arrefte de poiflon. Ils ouvrent même l’entredeus: de leurs narines, pour yattacherunebague, un grain de cri- ftal, ou quelque femblablegentilefñle. Le col, & lesbras de: nos Caraïbes ont aufli leurs ornements ; Car ils y mettent. des Colliers & des Bracelets, d’ambre, de raffade, de coral, ou de quelque autre matiere qui ait du luftre: Les hommes. portent les bracelets au gros du bras proche l’épaule: Mais. les femmes en entourent leurs poignets, de même quecelles: de ces contrées. Ils parent encore leurs jambes de chaines. deraffade, au lieu de jarretieres. Ceus d’entr’eus qui n’ont poins de communication avec les Européens, portent ordi- nairement pendus à leurcol, des fiflets d'os deleursennemis.. & de grandes chaines qui font compofées de dens d’Agouty.. de Tigres, de Chats Sauvages, ou de petis Coquillages per “cez & liez par enfemble,. avec une cordelette de fin cotton,. teinte en rouge ou en violet. Et quand ils fe veulent mettre: fur leur bonne mine, ils ajoutent àtout celades Bonets, des: celets qu'ils lient fous les effailles,. des écharpes.. & des: KKkKk 3 CCin= Liv So, Les Caraïbes, fe percent aufli quelquefois les eures, pour: Le € g., 446 HISTOIRE MORALE, Ghepall ceintures de plumes, fort ‘induftrieufement rifués par un agreable affemblage, léquelles ils Jaiflent flotter fur leurs épaules , ou pendre dépuis le nombril, jufques, au milieu de leurs cuifles. : Mais les plus confiderables de tous leurs ornemens, font, de. cettaines grandes medailles de fin cuivre extremément, poly, fans aucune grauvre, quiont la figure d’ uncroiflant, & font. €enchaffées en quelque bois folide & precieus. Ils les nomment” Caracols en leur langue ; Elles font de differente grandeur, car ils en ontdefipetites, qu'ils les attachent à leurs oreilles … en forme de pendans, & d’autres quifontenviron de la lar- geur de la paume de la main, léquelles ils portent penduës aus col, d’ou elles battent fur leurpoitrine: Ilsont ces Caracolis en grande eftime, tant par ce que leur matiere, qui necon- tracte jamais de roüillure, eft éclatante comme l'or: qu’à“ caufe que c’eft le butin le plus rare & le plus prifé, qu'ilsrem-w portent de courfes qu'ils font tous les ans, dans les terres des Arouigues leurs ennemis: Et quec’eft livrée, oule col=« lier qui diftingue les Capitaines & leur enfans , d’entre les hommes ducommun. Ceus-là aufi qui ont de ces joyaus en fontuntelcas, qu' en mourant ils nelaiffent autre heritage à. leurs enfans, ouà leurs plusintimesamis: Et ilyenatel pars my eus,qui garde encore un Caracolis de fon Grand Pere, dons il ne fe pare qu’aus plus grandes rejouiffances. Les femmes, fe peignent tout le corps & s’ajuftent prefonil comme les hommes, horsmis queiques petites differences” que nous avons déj remarquées , & qu'elles ne mettent point de couronnes deflus leursteftes. Elles ont auñli cecy de“ particulier, qu’elles portent des demyebottines, qui neleu defcendent que jufques à la cheville du pied. Cette efpece de chauflure eft fort proprementtravaillée, & terminée par Je haut & par le bas d’une petite rotonde tiffuë de jonc & de cotton, quileur ferre le gras de lajambe, & le fait paroitra PRE rep | fe J DES LES ANTILLES 447 ct | if ; CH À PITRE- DIXIEME. Remarques fur la langue des Caraïbes. ” Ous avons deffein de donner à lafin de cette Hiftoire: pour la fatisfaction des curieus un affez ample Voca- bulaire du langage des Caraibes. C’eft pourquoy nous nous contenterons de faire en ce Chapitre les Remarques principales, qui en pourront faire connoître la grace, ladou- ceur & les proprietez. Les Caraïbes ontun Langage ancien & naturel, & qui: | becr ft tout particulier, comme chaque Nationale fie _ 2, Maisoutre cela, ils en ont forméunautre, . qui eftba-- tard & meflé de plufieurs mots étrangers, parle commérce ‘au’ils-ont eu avec les Européens. Surtoutils ontemprunté beaucoup de mots des Efpagnols, par ce que ce font les’ Bree _miers Chrétiens qu'ils ayent abordez. 3. lis fe ferventtoujoursentreus, de Leur Langage ancieR: . & naturel. 4. Maislorsqu’ils converfent, ou qu’ils négocientavec- que les Chrétiens, ils employent leur Langage corrompu. 5. Outre celails ontun fort plaifant baragoin, lors qu'is “veulententreprendre de parler en quelque Langue etrangere. Comme lors qu'ils difent, Cowpere Gouverneur ; employant .€c mofde Cowpere generalement envets tousceus, qui font: Jeurs amis où leurs alliez. Ainf ils diroient tout franchement, s’il s’en prefentoit occafion, Cowpere Roy: C’eft aufi un de: leurs complimensde dire ànos François, avecun vifage riant, Ab fi toy bon pour Caraïbe, moybon pour France : Et lors qu ils. veulent feloüerdenosgens, & rémoigner qu'ilsen font fort fatisfaits, CHouche bon France pour Caraibe: Ainf difent-ils ‘encore Maboya mouche fache contre Caraïbe, lors qu’il tonne ou qu'ils fait un Ouragan: Et, Co mouche, Lunes , pour: fignifier qu'ils font fort àgez. Is ont aufli fort fouvert ces pa-- roles en la bouche, lors qu'ils reconnoiffent que nos gens: Yeulent abufer de leur fimplicité,, Compere, toy trompe Caraïde: Er LA PRET M PO) À 4 * TS ME CE nt FE Y # AR AN ee Fan : 448 HISTOIRE Morale, Ch: Et on les entend dire fouvent lors qu'ils fonten belle bumeur, CHMoy bonne Caraïbe. é | 6. Aurefte,bien que les Caraïbes de toutes sie Iles:s: ’entens dent tous univéntollettent entr'eus, ce n’eft pas à dire pourtant, qu'il ne fe trouve en quelque une, quelquedialeéte different de celuy d'uneautre. | 7. Le P. n’eft suére en ufageenleur Langue: Mais hors de cela on n’y remarque aucun défaut delettres, comme en la Langue du Japon, duBrefil, & de Canada, qui fe trouve dans ladifette d’E. L. KR. Ouencelledu Pésaé » Qui manque de B. D. EF. G.I. Jota, & X.au rapport des Hiftoriens. 8. Leur Langage eft extrémement dous, & fe prononce prefque tout deslévres, quelque peu des dents, & prefque point du gofier. Car bien que les mots que nous endonnerons cy-aptés , femblent rudes fur le papier , ncantmoins lors “qu’ils les prononcent, ils y font deselifions de certaines lers tres, & y donnent un certain air qui rend leur difcours fort agreable. Ce qui oblige Monfieur du Montel à leur rendre 5 CE témoignage, je prenois dit-il, grand. plailir à lesé écouter, », lors que j'étois parmy eus, & je ne pouvois affez admirer » la grace, la fluidite, & la douceur de leur prononciation, », qu'ils accompagnent d'ordinaire d'un petit foûris, qui à » beaucoup d’agréement. 9. Ils ont la prononciation plus douce que les Caraïbes du Continent : Mais d'ailleurs ils ne different qu’en dia ‘Hecte. ; 10. D'un feul mot, felon qu'il ef diverfoute prononcé! ils fignifient plufieurs chofes differentes. Parexemple, le mot d' An han fignifie 1. Ou, 2 2.1e ne faypas, 3.Tien ou Pré" felon la prononciation qu’on luy donne. 11. Pournous, nous ne pouvons prononcer cette Langue avecque toute la grace, & toute ladouceur qui luy eft natu- relle; à moins que ede lavoir apprife dés le bas âge. 40 12. Ilss'écoutent patiemmentles uns les autres, & ne s’in- _terrompent point dans leurs difcours : Mais ils ont accoutu- mé de poufer un petitton de vois, au bout de trois ou quatre périodes de celuy qui parle, Re témoigner la AR qu'ils ont she l'oüir. 13. Qu L'Al NH 19 “AN He EAN # Ld Se nie, 14 hs facultez naturelles de l'efprit, ou pour la douceur de la prononciation, quinousdevroit augmenter ia facilité de pro- _noncer leur Langue, neantmoins ils aprénent plus facile- ment lanôtre, que nous n’aprenons laleur, commeil fe re- connoit par l'experience. 14. Nos François ont remarqué, qu'ils ont grande aver- fion pour la Langue Angloife, jufqu’à ne pouvoir foufitir qu'on la parle devant eus, par ce qu'ils leur font ennemis. ue s’il fe voit dans leur langage corrompu plufieurs mots tirez de l'Efpagnol, qui eftaufli leur ennemy, c’efl qu'ils les ont a pris, durant le tems qu'ils avoient communication avec cette Nation- là , & quelle ne les avoit pas encore mal- traitez. _15. Ilsfont fortfoigneus, dene point communiquer leur langue, de crainte que les fecrets de leurs guerres nefoient découverts. Ceus même d'entr'eus qui fe font faits Chré- tiens, ne veulent pasrevéler le fonds de cette Langue, dans la creance qu'ils ont, que cela re prejudicier : à leur Nation. _ + 16. Voicy quelques unes des propriétez les plus particu- licres à leur Langue. Et premierement, les hommes ont beaucoup d’expreflions qui leur font propres, que les fem- mes entendentbien, maisqu’elles neprononcent jamais: Et les femmes ont aufli des mots & des frafes, dontles hom- mesn'ufent point, à moins que de fe faire | moquer. Delà. Vient , qu'en une bonne partie de leur entretien, on diroit que les femmes ont un autre langage que les hommes comme on le pourra reconnoitre en notre Vocabulaire, par la difference des faflons de parler dont les hommes & les fem- mes fe fervent, pourexprimer unemêmechofe. Les Sauva- ges de la Dominique, difent que cela procede de ce que lors que les Caraïbes vinrent habiter leslles, elles étoient occu- pées parune Nation d'Arouâgues, qu'ils détruifirent entie- rement, à la referve des femmes qu’ils épouferent, pour peu- pler lepais. De forte que ces femmes-là ayant confervé leur. Langue, l'enfcignerent à leurs filles, & les acoutumerent à parler comme elles, Ge ut s'étant pratiqué jufques à prefent +. LI] par PS Chip.io DES ILES ANTILLES. For 13. Quelque avantage que nous ayons fureus, ou pour. LES " Lois 0, JOREUTRMSE à L PR NBE LOS © "T2, | el : 7 SALE à Li MS REA . ERRRRET ENS Le 459 HisTOIiRE Month parles Meres envers les filles, ce Langage eft ainfi en … different de celuy des hommes en plufieurs chofes. Mais les L garçons, bien qu’ils entendent le parler de leurs Meres & de . leurs fœurs, fuivent neantmoins leurs Peres & leurs freres, &. fe faflonnent à leur Langage, dés l’âge de cinqou fix ans. Pour confirmer ce que nous avons recité fur l’origine de cette difference de Langage, on allegue qu'il y a quelque conformi- té entre la langue des Arouägues de la Terre Ferme, & celle des femmes Caraibes. Mais il eft à remarquer que les Caraï- bes du Continent, hommes & femmes, parlent un même lans gage , Nayant point corrompu leurlangue naturclle, par des : mariages aVeC des femmes étrangeres. 17. Les vicillars, ont plufieurs termes qui leur font affe- “ez, & plufieurs faffons de parler particulieres, qui n’ont PHARE d’ufage en la bouche des jeunes gens, 18. Les Caraibes, ont aufliuncertain langage, dont ils fer fervent feulement entr'eus, lors qu’ils prenent des refolutions. de guerre. C'’eft un baracoin fort difficile. Les femmes & les filles n’ont aucune connoiflance. de ce langage myfterieus,. nimême les jeunes hommes, jufques à ce qu’ils ayent donné" des preuves de leurgenerolité, & du,zéle qu'ils ont, pour læ querelle commune de leur Nation contre leurs. ennemis," C'eft afin que leurs. defleins ne foient. pas déconvers. avant) le tems. 19. Pourfaire leurs cas, leurs perfonnes, eg mœufs, & “leurs genres , ils n’ont point de particules feparées commen nous: maisilsallongent leurs mots de quelques. fyllabes-ow de quelques lettres, au commencementouàlafin, & ils en changent quelques unes. - Ainfi difentils à l'imperatif, Bayom». baka, marche: mais à l'indicatif , Nayoubakayem, je marche! Et Le même Babinaka, danfe Nabinakayem, je danfe. Ce qui a du rapport, avec la faffon dont fe forment. les Vers bes Ebreus. à 20. Les noms indéfinis & abfolus, font: pewen ufage sil myeus; furtoutles nomsdes parties ducorps: mais is. fonte prefque. toujours reftreints à une premiere , à une feconde, ot& à une troifiéme perfonne, 21, Ja Brin, perfonne fe marque ordinairement. pa + u Chap. 4 DES ÎLES ANTILÉES 4$t . uné N. au commencement du mot: Aéchic, mâtefte. La _feconde par un B. Bichic, tatefte. Et latroifiéme] parunc D. Lichic, fa tefte, 22. Le genre neutre & abfolu eft exprimé par un T. Tichic, latefte: Mais celaeft peuenufage. 23. Ils ont des noms differens , pour parler aus perfonnes mêmes, & d’autres pour parler d’ellés. Aïnfi difent ils Baba, mon Pere: en parlant à luy:, Et Towmzan, en parlant de luy. Bibi ma Mere, en parlant à elle, & Zchanum, en parlant d’elle. Ce qui avec la difference du langage des hommes & des fem- mes, des jeunes & des vieus, de l'entretien ordinaire, & des , 1 nivilenie, ni méchanceté où ils ne fe portent. Pour nos Caraïbes, quandils voyenties Chrétienstriltes & . plein d’ennuy, ils ont acoutumé deleuren faire doucement la guerre en leur difant, Compere (car c’eft un mot qu'ils ont appris, & dont ils fe fervent ordinairement pour té- moigner léur bonne volonté, comme leurs femmes aufli appellent nos Européenes, Comeres, pour une marque d'amitié) tu es bien miferable d’ expofer ta perfonne à de fi » longs& defidangereus voyages, & de te laiffer ronger à tant de fourcis & de craintes. La paflion d’avoir des biens » te fait endurer toutes ces peines, & te donne tous ces fà- ;, Cheus foins: Ettu n'es pas moins en inquiétude pour les bien que tu as déja aquis, que pour ceus que tu recherches ÿ Encore. Tu appréhendes continuellement que quelcun ne n»te vole enton païs ou fur mer, ouquetes marchandifes ne fafent naufrage, & ne foient englouties dans leseaus, Ainfi # tu Vicillis en peu ds tems, tescheveusenblauchiffent, ton ÿ» front s’enride, mille incommoditez travaillent ton corps, #» millechagrinste minent lecour, & tu cours à grand’hafte vers le tombeau. Que n'es-tu content des biens que ron mpais te produit? Que ne méprifes tu les richefles comm nous? Et à cefujet, eftremarquablele difcours dea re Brefiliens à Vincent le Blanc, Ces richefes, difoient-ils, » QUE | vous autres Chrétiens pourfuivez à perte d'haleirie 2! Mmm , vous ME, sd 3-part. chap. 1$s 458 . HrstTotrnEe MonrALE,T Cha »vous mettent-elles plus avant en la grace-de vôtre Dieu, » Vous empêchent-elles de mourir ? Et s ‘emportent elles » AVEC que vous autombeau? Ils tenoient à peu pres le mêz Cha13. me difcours à Jean de Lery, commeille rapporte en fon His foire. 151 Les Caraïbes, favent auf fort bien & fort emfatiquement reprocher aus Européens, comme'une injuftice manifefte, » l'ufurpation de leur Terre natale. Tu m'as chaflé, ditce », pauvre peuple, de Saint Chriftofle, de Niéves, de Mont- ,ferrat, de Saint Martin, d’Antigoa, dela Gardeloupe, de », La Barboude, de Saint Euftache, &c. qui ne t apparter »»NOient pas, & où tu ne pouvois legitimement prétendre, », Et tu me menaces encore tous les jours de m'ofter ce peur >, de païs qui me refte, Que deviendra lemiferable Caraïbe? », Faudfat-il qu’il aille habiter la mer'avec les poiflons ? Ta , terreeft, fans doute, bien mauvaife, puis-que tu la quittes » pour venir prendre la mienne : ‘Ou tu as bien de la malice, à de venir ainfi de gaycté de cœur me tiger Cette plainte na pas un air trop Sanvagc. f4{5 10 Lycurgue ne permettoit pas à fes citoyens de voyager; craignant qu'ils ne prifent desmoœurs étrangeres: . Mais n0$ Sauvages auroicnt bien befoin de grand voyages, pour fe dés barbarifer, s’il eft permisdeparler ainfi. Et cependant ; ils ne font pas feulement exems de cette convoirife infariable, qui fait entreprendre de fi grans & fi perilleus voyages aus Chrétiens, & traverfer t:merairement tant de terres & tant de mers: mais ils n'ont même nulle curiofté de voir les aus trescontrées du monde, aimant leur païs plus quetousceus qu’on leur voudroit propofer. Et comme ils eftiment que nous ne devrions pas être plus curieus, ni moins amateurs du nôtre, ils s’étonnent fort de nosvoyages. En quoy, cers Esfon tes, ilsont l'honneur de reflembler à Socrate, à qui Plaron Cri. rendcetémoignage, qu'il étoit moins forty d’Athenes pouf voyager, que les boiteus & les aveugles: & qu'il ne defira jamais de voir d’autres villes, ni de vivre fous d'autres loixy N'étant pas en ce point, non plus queccs Caraïbes, déFoph _niondes Perfes, quidifent en commun proverbe, queceluy qui n’a point Voyagé par le monde, refemble à un Ours. ‘. ‘ te es Apt DES : ILES A nou, 458 Le Les: Antillois ne font pas feulement. fans aucun defr de voyager; ils ne veulent pas même fouffrir que l’on enmene . perfonnedes leurs en une terre étrangere, fi ce n’eftque l’on promette expreflement, de le ramener bien-toft, Mais s'il arrive par, malheur qu'il meure en chemin, il ne faut pas faire état de retourner jamais parmy eus; Car ils vous pren- nent enune haine mortelle, &iln ‘yapoint de reconciliation à cfperer. : Mais s'ils n’ont point de curiofité pour les chofes qui font re ils en ont beaucoup pour celles qui font proche d'eus; jufques là que fi on ouvre un coffre en leur prefence, il leur faut montrer tout ce quieft dedans, oubien ils fe tien- _droient desobligez. Que s'ils agréent quelque chofe de ce qu'ilsyvoyent, encore qu'ilne foit que de tres-petite valeur, ils donneront ce qu'ils ont de plus beau & de plus précieus _ pour l’avoir,afin de contenterainfi leur inclination. Pour le trafic, ileft vray que lorsqu'ils ont pañté l'envie de cedontils onttraitté, & qu'ils ont reçeu en échange, ils s’en dédiroient volontiers. Mais le fecret pour leur faire.tenir leur marché, eft de leur dire qu’un marchand doit eftre ferme en fa parole. Quand on les piqueainfi d'honneur, & qu'on : eur reproche qu'ils n’ont pas plus de conftance que des en- fans; ils ont honte de leur legereté. “Le larcineff tenu pour un:grand' crime parmy eus: En quoy Ebiaben ils fe montrent plus raifonnables que Lycur- gue, qui nourrifloit en ce vice les enfans de L'acedemone, commeenune occupation fort loüable, pourveu qu'on s’en aquitaft finement & avec fouplefe. Mais commeles Caraï- bes haiffent naturellement ce peché, aufh ne fe voit-il point au miliéu-d’eus:; cequicft affezrare chez les autres Sauvages: Carla plüpart font larrons ; Etde là vient que quelques unes | de leurs Îles en portent le nom. : Pourles Caraibes, commeils ne font point enclins de leur marite à dérober, isvivent fans défiance les uns des autres. Tellement que leurs maifoñs:& leur heritages font à l’aban- don } fans portes ni clôtures, comme les “Hiftoriens le ré- moignent des grans Tartares. Quefi on leur derobe la moindre :chofe, :comnmie :pouxroit être un petit couteau, @uL avec Plutar- queen la: vie de Lycur- £#e: Les Iles: des Lars 1018... Voyage: de Car- pie en Tartaries r. Hdi V 48 460 HisTOiRE MORALE, avec quoy ils font mille petis ouvrages de menuyferie, ils - eftiment tant ce quileur eftutile, que cette perte eft Dent deles faire pleurer huit jours, & de les faire lisuer avec leurs amis pour en tirer reparation, & pour fe venger fur la pers. fonne qu ’ilsfoupconneroïentde ce larçin. Eten effet, dans les Iles où ils ont leurs demeures prés des Chrétiens, ilsont fouvent tiré vengeance de ceus qui leuravoient , à ce qu'ils” difoient, pris quelques uns de leurs petismeubles.. Aufli en” ces lieus-là, lors qu’ils trouvent quelque chofe de manque en leur maifon , is difentauffi toft, 7x Chrétien eff vennicy. Et entreles oriefs & les plaintes qu ls font aus Gouverneurs de nôtre Nation, celle-cy eft tonjoursentefte, Compere Gous verneur, Tes Mate (ainfi nomment ils tous les habitans étrangers) ont pris en ma cafe un couteau, Où quelque autre me- nuë piece de parcille nature. Les Guinoiïs ne formeroient pas de telles plaintez. Car s'ils perdent quelque chofe , ilsefti-. ment qu'un de leurs parens trépañez s'en eft venu faifir, pe qu'ilenavoit affaire en l’autre monde, Touslesinterelts des Caraïbes font communs entr’eus. His vivent en grande union & s’entr'aiment beaucoup les uns les autrés : ne reffemblant pas aus Afiatiques de java, quine. parlent pas mèmes à leurs freres, fans leur Poignard : à la main, tant ils ont de défiance. Cette amour, que nos Sauvagesfe. portent naturellement l’un à l’autre fait. , que l’on ne voit due fort peu de querelles & d’inimitiez entr'eus. Mais s'ils ont été offenfez, ou d’un étranger ou de quelcun * deleur compatriotes, ils ne pardonnent jamais , & pouffent à toute extremiré leur vengeance. Ainfi lors que quelcun de ces abufeurs qu'ils nomment Boyes leur fait accroire que lan de ceus qu'ils eftiment forciers, eft auteur-du malquileureft arrivé, ils ne manquent pas de rafcherà le tuer s’ils peuvent, difant Taraliatina, il m'a enforcelé. Nebanebouïbatina, jem'en vengeray. Etcctte paflion furieufe &.desefperéede {even ger, cffcelle qui les pouffe;" comme nous avons déjxdit, 4 hanger même à béllésidens lachaï#de leuts ennemis, felon quenous en décrirons les particularitez en Jeur lieu. Cette animofité defordonnée, eft le vice régnant univerfellement «ét So do parmy eus. Et ilregne de même, pref. À que e Rétan : 11 DES ÎLES ANTILLES. 461 que fans exception, chez tous les Sauvages Ameticains. La vengeance des Canadiens eft quelquefois bien plaifante: car _elles les porte jufques à manger leurs pous parce qu ‘ils en ont été mordus. Siles Brefiliens fe heurtent à quelque pierre, ils la mordent à belles dens, comme pour s'en venger. Et ainf encore mordent ils les fléches , dontils fontatteints dans les combats. | Sans avoir receu les loix de Lyeurguc, les Caraïbes, par une fecrette loy de nature, portent un grand refpeët aus vieil- lards, & les écoutentparler avec attention, témoignant, & par | leur gefte, & parun petit fon de voix, qu'ils ont leurs dif- cours pour agreables: Etentoutes chofes, les jeunes defe- rent aus fentimens des Anciens, & fe reglent fur leurs volon- tez. Ondit qu'ilen cft de même au Brefil & en la Chine, Les jeunes hommes Antillois, nefrequentent point defil- les ni de femmes qu’ils ne foient mariez. Et l'on a remarqué, _que les hommes font d'ordinaire moins amoureus en ce païs- Jà, quelesfemmes, commeendivers autres lieus de la Zone Torride, Hommes & femmes Caraïbes font naturellement chaftes, qualité bien rare entre les Sauvages. Et quand nos gens les capliderent trop curieufement , & fe rient de leur nudité, ils ont accoutumé de leur dire, Compere, ilne faut nous regarder qu'entre les deus yeus. Vertu digne d'admiration en un peuple nud & barbare comme celuy-là. On raconte du Capitaine Baron, qu'entre les diverfes de: fcentes qu'ilafairaveclesfiens, à plufeurs reprifes, enl’Ile de Monferrat, tenuë par les Anglois, il fit une foisun grand dégât dans les habitations voifines delamer, qu'il en enleva un grand butin, & que parmy les prifonniers s’étant trouvé une belle Demoifelle, qui était femme de l’un des Officiers dcl’Ile, illafitconduire en l’une de fes maifons de la Domi- nique, Cette Demoifelle étant enccinte lors qu’elle fut en- levée, fut fervieavec grand foin en fes couches, par les fenr- mes des Sauvages de la même Île. Er bien qu aprés cela, clie demeurût encorc long tems parmy eus, ni le Capitaine Ba- ron, ni aucun autre d’entr'eus, ne la touchérent jamais. _Ce qui eft fans doute, une grande retenuëé pour de telles gens... ; Mmnr 3 ileft De Læy chap. Ile Œ 14: Linfsos © Se mede, ‘462 HisTOoirE ro À uit ‘het Il eft vray, qu’une partie d’eus ont degeneré de cettechas ftcté, & de plufeursautres vertusdeleurs ancefres, Maisik eft cértain auf, que les Européens par leur pernicieus exema ples, & par le mauvais traitement dontils ontufé envers eus; _Lés trompant vilainement, faufant lachemert en toute-rent contre la foy promife, pillant & bruflant impitoyablement leurs maifons & leurs villages, & violant indignement leurs femmes & leurs filles, leur ont appris, à la perpetuelle infa- mie du nom Chrétien, la diffimularion , lemenfonge, latras hifon, la perfidie, la luxure, & pluñieurs autres vices, qui leur éroientprefqueinconnus, avant qu'ilseuffent encommerce, avec eus, Au refte, ces Sauvages, tout Sauvages qu ils font, ont de | la civilité & de la courtoifie au delà de ce qu’on pourroitfimas giner endes Sauvages; Cen’cff pas fans doute, qu'il n’y ait. quelques Caraibes fort déraifonnables & fort abbrutis. Mais au moins pour la plupart, témoignent ils du jugement & de” la dociliré en beaucoup de rencontres, & ceus qui les ont pra: . tiquez un long tems, ont remarqué en plufieurs divers traits _d’honefteté & de reconnoiffance, d’amitie & de generofitéz \ Mais nous en parlerons plus particulierement aug@hapitre de là réception qu'ils font aus Fan , qui leur vont rendre vilite. sf Ils ont auffi la proprieté en fi grande recommandation (chofe bien extraordinaire encore entre les Sauvages) & ont fi grande horreut des ordures, quefi l'on en avoit faiten leurs : jardins où font plantez leur Manioc & leurs Patates, ils les abandonneroient aufli toft, & ne voudroient plus fe fervir des vivres qui y y féroient. Nous verrons plus amplement. leur propreté & fur cé fujet & fur quelques autres, aus es pitres deleurs Habitations & deleurs Repas: 4 , 6 1 “ Chap.12 DES ILES ANTILLES. 463 She CHAPITRE DOUZIEME. De la fimplicité naturelle des Caraïbes. dbitarion étant fille de l'ignorance , on ne doit pas trouver étrange, que les Caraibes, qui ont fi peu de lu- miere & de onindi face de toutes les belles chofes, que l'étude & l'experience ontrenduës familieres parmy les Nations civilifées, foyent faifis d’un profond étonnement à Ja rencontre de tout ce dontils ignorent la caufe, & qu'ils foyent nourris dans une fi grande fimplicité, qu’on la pren- droit en la plupart de ce pauvre peuple, pour une flupidité brutale. Cette fimplicité paroïft, entr'autres chofes, dans l’extréme peur qu'ils ont des armes à feu, lefquelles ils confiderent avec une extréme admiration. Surtout, ils s’étonnent des fuzils : car encorc pour les pieces d'artillerie & pour les moufquets, ils y voyent mettrele feu. Maïs quant ausfuzils , ilsne peu- vent concevoir, d'oùil ef pofhible qu'ils prennentfeu: &ils croyent que C'cft CAfaboys qui fait cét office, Ainfi nom- . ment ils l’'Efprit malin. Mais cette peur & cét étonnement leur font communs avec beaucoup d’autres Sauvages, qui n’ont rien trouvé de fi étrange en leur fenconrres avec les Européens, que ces armes qui jettent du feu, & quide fi loin percent & tuënt ceus qu’elles rencontrent en droite ligne. Cefut-là, avec le prodige de voir des hommes combattre à Cheval, la principale caufe qui fit que les Peruvicns tinrent _ les Efpagnols pour des Dieus, & qu'ils fe foumirent à eus, _avec peu derefiftence. Ondit queles Arabes même, qui cou- rent le long des rivages du Jordain, & qui femblent devoir être plus aguerris, font dans cette peur & dans cét éton nement. | Entre les marques de fimplicité des Caraïbes, en voicyen- core deus bien confiderables. Lors qu’il arrive une éclipfe de Lune, ils croyent que UWaboya lamange, & danfent toute dan uit, faifant fonner des calebafles où il: y a depetis caillous. | ES Ant 2 Et Gare dafo es for Corse mentaire Royal SU 3: chap. 8, Voyage ce des Hayes au Lez VAT, * AE " 1 > # AVEAT 464 Histoire MORALE, P., Et quand ils fentent quelque mauvaife odeur en unlieu, ils © ontaccoutumé de dire CHaboya Cayeu eu, c'eftà dire, le Dia-. bleeft icy. Caima Loary, allons nous en à caufe de lun ou fauvons nous crainte de luy. Etmêmeils donnent lenomde CHMaboya, ou de Diable, à de certaines plantes, à de certains champignons de mauvaife odeur, & à tout ce Si aff capables de leur donner de la frayeur. Il ya quelque tems, que la plus grande partie des Caraibes! fc perfuadoient que la poudre à Canon étoit la graine de, quelque herbe: Etil s'en eft trouvé,qui en ont demandé pour en femer en leurs jardins. Etmême quelques uns, quoy qu’on leur en ait pü dire, enont jetté enterre, dans la creance qu’el-" le produiroit aufli aifément que de la graine de Chous : ]ma-« gination, toutefois, moins grofliere que celles de ces brutaus de Guinée , qui, la premiere fois qu ils virent des. Européens, penfoient que les marchandifes qu’on leur apportoit, comme toiles, couteaus, & armes à feu, croifloient fur la terre ainf Preparées, de même que les fruits des Arbres, & qu’on n’a- Voit qu’à les cueillir. Cela n’eft pas, fans doute, à beaucoup - ptés fi pardonnable, que la fimplicité de nos Caraïbes. Et. l'on peut encorealleguer, pour excufer cette fimplicité, ou Gani-_ du moins pour la faire trouver plus fupportable, la ftupidité” daÿfe ls. deces Americains, lefquels au commencement dela décou-* . €hap, 16. : di A | Ve. verte du Nouveau Monde, s'imaginoient que les Cheval & le Cavalier étoient une même chofe, comme les Centaures aMontag- des Poëtes: Et de ces autres, qui aprés avoir été vaincus, ves. seen fé nant demander paix & pardon aus hommes, & leur apporter et de l’Or & des viandes, en allerent autant offrir aus chevaus,. avec une Harangue toute pareille 4 celle qu'ils faifoient aus hommes, prenant le hannifement de ces animaus pour un. langage de compofition & de tréve. Et pour faire la cloture. de ces exemples, nous ajoûrerons feulement la niaiferie de De Leæy ces mêmes Indiens de l’ Amerique, qui croyoiïent tout fran" pt chement, que les lettres miflives que-les Efpagnols s’ens Leffe l.9. VOyOÏent 1 uns aus autres, étoient des couriers & des efpions Ghap.19. parlans & voyans, & declarans lesaétionsles plus fecréres : Æt dans cette croyance, redoutans un jour l'œil & la langue de l'une de ceslettres, ils la cacherent fous unepierre, poux | *. Male r é ‘ LA Dh Lt re Sn : PRE RCE, | RE 7 ANRT ER UE NN PSE TE AT 2 da LE TE *# Chap. 12 wi ÿ TLES Anvers 26% 4 manger en liberté quelques melons de leurs maitres, Enfin . l'on n'aura pas ifujet de trouver fi étrange, que les Caraibes _ayent pris de la poudre à à Canon qui leur étroit inconnué, _ pour de lagraine à femer, puis Qu'il s’eft même trouvé des _gensen France, qui vivant éloignez des lieus où fe fait le fel, croyoient par unc imagination toute femblable, qu'il fe re- _ cueilloit dans les jardins. Il arriva auf il y a peu d'années, qu'une femme habitante de la Martinique, ayant envoyé plu _ fieurs livres de Caret, & de T abac à une marchande de Saint- Carer ef Malo, comme cette femme eut vendu fa marchandife, elle Ent en donna avis à fa correfpondante à à la Martinique, & IuYy le de manda qu'elle luy confcilloit de planter à l'avenir beaucoup Torre: de Caret en fon jardin, plutôt que du Tabac, parce que ce _ Caret étoit beaucoup plus cher en France, & qu'il nefe pour- rifloit pas dans le navire comme le Tabac. Mais voyons ce qui fe prefente encore à dire, fur la fi D ES naturelle des ._ Sauvages Antillois. . C’eftunechofe plaifante, queces pauvres gens font fi fim- _ ples,que bien qu’ils ayent chez eus force belles Satines, neant- moins ils n’oferoient s’en fervir dans leur ordinaire, cftimaus _le Sel extrémement contraire à la fanté & à la confervation de la vie. ‘Aufli ne leur atrive-til jamais d’en manger ni d’en affaifonner leur viandes. Et quand ils voyeñt nos gens ent ufer, ils leur difent, par une compafliondigne de compaflon, : Compere ; tu te fais mourir. Mais aulieude fel, ils pimentent | étrangement tous leurs mets. _ Ils ne mangent point non plus entr'eus, de Pourceau, qu'ils | | nomment Coicoin & Bonirôlon : nide Tortuë, qu’ils appelent _ Catallou , bien que ces animaus fe trouvent en grande abon- danceenleurpaïs. Et ilss'en abftiennent pour les plus niaifes _raifons dumonde., Car pour le Pourceau, ilsapprehendent d'en goûter, de peur que leurs yeus n’en deviennent petis . Comme ceus de cette befte. Or c'eft, à leur avis, la plus grande de toutes les diformitez, que d'avoir de petis veus, Et cependant, il nyena guéres d'entr eus, qui ne les ayent tels. Quant aus Tortués, la raifon n’en cft pas moins ridicule. H$ne s’en nourriffent point, difent-ils, de crainte ques’ilsen mangeoient, ils ne participaffent à la lourdife & à la flupidité de cet animal. Nnn Les 466 so el Miusts ". à Les peuples Sauvages font ainfi remplis d'imagiations. Paul. le HREUis tes & grotefques, en matiere de. repas: Pouf ExeMe jeune em ple, les Canadiens s’abftiennent de Moules par-une certaine fes Re fantaife : mais ils font fi beftes qu'ils ne fauroient: donner: tons de. a Lam. taifonde cetteabftinence. Ils ne jettent point aus chiensiles si osde Caftor, de peur que l’ame de cette beftene Païllerdire PF aus autres Caftors, & ne les faffe fuir du pais. On:-dit auf qu'ils ne mangent point la moëlle de l’épine du dos d'aucun Mapa animal , de peur d'avoir mal au dos. Les Brefiliens né man: - gent point d'œufs de poule , eftimant que € eft du poifon. Ils. _pemangent point non plus de Cannes, ni d'aucun a utreanimak qui marche lentement, n1 de poiffons quine nagent pas vifte, Tres de crainte d’aquerir lalentoutidd ces beftes-là. : Les Maldis. te des VOisne mangent point de Tortuëé, non plus quedesCaraibes,.. Ari. mais C’eft à caufe Le conformité qu'elles ont, à leur aviss, “ avecl'homme. LesCalecutiens, & quelquesautres Oriens… Orsenta- Taus, negouftent jamais de chair ds Buffle, de Vache, ni dé les c.2.. Taureau, parce qu'ilscroyent que les ames humaines, au for2. La. tit du corps, vont animer celuy decesbeftes. Enfin, certains. Gara. Peruviens de la Province de Paftu, me mangent abfolument D L8. d'aucune chair: Et fi on les preffe d’en gouter feulementy, #7 ils répondent qu'ils ne font pas des chiens. - Tous ces exemé ples font mis en avant, pour faire voir que l’apprehenfion des Caraibes demanger du Sel, du Pourceau & dela Tortuë, ne les doit pas faite eltimer les plus bourrus & les Lis Cxtras vagans de tous les Sauvages. À 4 “Outre des. marques que nous avons déja prenihire Fe Leu niaiferie & de leur fimplicité, antrouveencotecelle-cy. C’eft. qu'ils font fi grofliers, qu’ils ne favent pas conter un plus grand nombré que celuy des doigts de leurs mains, &c des” orteüils de leurs pieds, qu'ils montrent pour: fighifier ici ; nombre-là; le furplus leur étant un nombre in, nombrables ae De forte qu ils n’auroient guarde d’eftre propres deflre ban Indes Quicrs. Bien au contraire des Chinois, qui fontfifavansà Me conter, qu’en un moment ils fontdes contes, fans mr où 1630, NOUS ferions bien empe:fchez. ADS À Maisles Caraïbes, .ont le Privilege de n n'efite pas. Le fol Nation du nmemél a qui l’on. puiffe mé Re cette ee A RAD RE Chap:12 DEA UT ARTOCRARE. 46» ' D nihée Gaf elle s’efttrouvée auflichez les Peuples de Ma- . dagaftar & de Guinée , pour n’alléguer que ceus-là. Er mé- medestAnciens Hiftoriens nous difent, que certains Peuples fe favoient conter Hé LE à id , & d’autres jufques à quatre: 5 A : Lés Guinois ayant conté jufquà dix, avoient acoutumé de five une marque & puis dé récommencer. Certains Sauva- ges du Septentrion de l’Amétique, pour exprimer un grand nombre qu'il leur eft impoñlible de nommer, fe fervent d’u- ne demonftration bien facile, prenant leurs cheveus ou du fable à pleines mains ; Compäraifons, qui fe voyent en plu- _ fieurs endroits dans LÉ. Saintes Ecritures. Les Antillois, ont auffi leur invention pour fuppléer au defaut du conte: car _quandil leur faut aller à la guerre & fe trouver prefts au ren- dez-vous general, àjout nommé, ils prenent chacun l’un aprés} autre, un égal nombre de pois , en leur affemblée fo- lennelle ; comime trois ou quatre dfgaines, & quelque nom- bre au deffous de dix, s’ilen eftbefoin, os qu'ils ont refo- du d'avancer leur entreprife. 1ls verfent ces pois dans une petite Calebañle, & chaque matin ils en oftentun, & lejet- tent : lors qu'il n’y en refle plus, c'eftà dire que le tems ar- refté pout leur partementeft écheu, & qu'ilfe faut mettre en état de marcher le lendemain. Ou bien ils font chacun au- tant de nœuds en une petité corde, & en denouënt un chaque jour: Et quandils font venus au dernier, ils fetrouveut au rendez-Vous. Quelquefois aufli ils prenent de petis mor- ceaus de bois, fur léquelsils font autant de crans, qu'ils veu- _ lent employer de jours à leur preparation. Tous les jouts _ ils coupent une de ces marques: & lors qu'ils ont la derniere, ils fe vont rendre au lieu affigné. a _ ! Les Capitaines, les Boyez, les Vicillards, ont l’efprit plus fubtilquele commun, & par une longue experience jointe à _ Ja traditive de leurs anceftes, ils ont acquis une groflere connoïffance de plufieurs afres, d’où vient qu’ils content les mois par Lunes, & les années par Poufliniéres prenant garde à cette conftellation. Ainf quelques Peruvicns re- gloient leurs années fur les recoltes. Les Montagnars de Drama obfervent le nombre des nuits & des Hyvers écrits Nan 2 p Sotri= 468 Has 1 OURS MORALE, h vre des: Quest. Tufiale. Soriquois content par Soleils. Mais, bien que les plus join? 5 cieus parmy nos Caraibes, difcernent les mois & les années, & qu’ils remarquent les differentes faifons, ils n'ont neant- moins aucuns monumens d’ antiquité , & ne peuvent dire combien de temsilya, que les premiers deleur Narionyin=. rent du Continent habiter les Iles: Mais feulement ils. ont donne à entendre quénieus, nileursperes, ni leurs grands peres, nes’en fouvenoient point. Hs ne fauroient dire nom plus, ni quel âge ils ont, ni dépuis quand precifement, les” Efpagnols font arrivez en leur pais, ni beaucoup. d’autres * chofes femblables. Carils ne marquent rien de tout cela $ & ils ne font nul état de ces connoiffances. > et re ll si CHAPITRE TREZIÈME. De ce qu'on peut nommer Religion parmy les Caraïbes. w bare, qui n'ait quelque opinion & quelque croyance de læ Divinité, difoit autrefois le Prince de l'Eloquence Ro- maine. Etailleurs, la nature même a imprimé la connoiffance de la Divinité en l’Efprit de tous les hommes. Car auelle nation, ou qu'elle fotte d'hommes yatil, qui n'ait fans. l ds Voirappris d'aucun, un fentiment naturel de la Divinité : On admire fans doute, avec jufte raifon, ces belles lumierés, qui fortent de la bouche d’un homme envelopé dans les tene- bres du Paganifme. Mais il femble, qu'il eft aujourd'huybierm malailé de verifier les fameufes paroles de cet incomparable: Orateur. Car les pauvres Sauvages de l’ancien peuple des. LAntes au Perou, & des deus Provinces des Chirhuanes ou: Cheriganes ; Ceus de la plupart des païs de la Nouvelle” France, de lanouvelle mexique, dela nouvelle Hollande, dus Brefil, des nouveaus Païs-bas, de la Terre del Fuego, “de Arouäâgues , des Habitans du fleuvede Cayenne, deslesdes. Jarrons & quelques autres, n’ont à ce que rapportent les Hi. ftoriens, aucune efpece de Religion, & n'adorent aulig puifs fance fouveraine. | à Cut Ï L n’eft point de Nation fi Sauvage, -ni de Peuple fi Bat= | 2 EX s FT el p< PAU qi PES 1! Hi Car |A 2 È Î g ne. Ne RE À en, } IE Chap.13 DES ÎLES ANTILLES. 465 _ Ceus aufli qui ont converfé parmy les Caraïbes Infüulaires, - font contrains d’avoüer, qu'ils ont prefque étouffé par la vio- Jence de leurs brutales paflions, toute la connoiffance que la nature lèur donnoit dela Divinité, qu'ils ont rejettétoutes les adreffes & les lumieres qui les y conduifoient, & qu’en füuitte, par un jufte jugement de Dieu, ils font demeurez dans unenuitfiaffreufe, qu'onne voit parmyeus, niinvocation, ni Ceremonics, ni facrifices, ni enfin exercice ou affemblée . quelconque de devotion. Ils n’ont pas même denom pour exprimer la Divinité, bien loinde lafervir. Deforte, que quand on leur veut parler de Dieu, Hleurfautdire. Celuyÿ qui a crée le Monde, quiatout fait, qui donne la vie & la nourriture à toutes les creatures vivantes, où quelque chofe de femblable. Ainfi font ils aveuglez & abrutis à tel point, qu'ils ne reconnoiflent pas le Seigneur de la nature, en cet ad- mirable ouvrage de l'univers, où luy même a vouiu fe peindre de mille couleurs immortelles, & faire voircomme à l’œil fon adorable puiffance. Ainfi demeurent-ils fourds à la vois d’une infinité de creatures, qui leur ptêchent continuclle- ment un Createur. Ain ufent-ils tous les jours des biens de leur fouverain Maitre, fans penfés#qu'il en eft l’Auteur, & fans en rendre graces à fa bonté, qui les leur communique f liberalement. | Is difent que la Terre eft la bonne Mere, quileur donne toutes les chofes neccffaires à la vie. Mais leur efprit tout de terre,ne s’éleve pas jufques à ce Pere Tout-puiffant & Tout-mifericordieus, qui de fes propres mains à formé la Ter- re,& qui par une continuelle influence de fa Divinité, luy don: ne tous Îles jours ja vertu de porter leur nourriture. Que ff on leur parle de cette Effencè Divine, & qu'on les entretien: . ne des myfteres de la Foy, ils écoutent fort patienment tout le: difcours: Maisaprésqu’onà achevé, ils répondent comme par moquerie , Compere tu es fort eloquent , tu es mouche mani. gat, c'eft à dire fort adroit, je voudrois auflibien parler que toy. Mêmeils difent comme les Brefiliens, ques’ilsfe lai foicnt perfuader à deteis difcours, leurs voilins fe moque: soient d’eus. / | Quelcun d'entre les Caraïbes RÉ un jour de Di- Nan 3. m anche FINS API 470 Es TRS MORTE » manche, Monficur du Montel rapporte qu'il luy dit, celu | »quia faitle Ciel & la Terre fera fâché contre toy dece ni 5; tu travailles aujourd’huy : Car ii a ordonné ce jour Por :, fon fervice. Et moy luy répondit brufquement le Sauvage, je fuis fêché contre luy : Car tu disqu'ileft le Maitre du Mont de, & des faifons. (C’eft donc luy, qui n’a pas envoyé l4 pluye en fontems, &quiafait moutrit mon Maniec &:tnes Patates, par la grande fécherefle. Puisqu'ilm’a fi mal trairtés je veus travailler tous les Dimanches pour le fâcher. Voyez jufqu’où va la brutalitéde ces miferables. Ce difcours-là, fe De Lery rapportcà celuy de ces infenfez de Toupinambous, qui fur ce ch#.17 qu’on leur avoit dit que Dieu éroit l’ Auteur du tonnerre, art gumentoient qu iln'étoit pas bon, puis qu’il fe plaifoit a1es éponvanter delaforte. Retournonsaus Caraïbes. 8 -Ceus de cetté même Nation, qui habitentau Continent Micridional de Amerique, n’ont aucune Religion non plus que ces Infulaires. Quelques uns d'entr’eus refpedént bien de Soleil& la Lune, qu'ils eftimenteitre animez. Mais pour= tant ils neles adorent pas, ni ne leur offrent ni facrifient chos. fe qui foit. Il eft vray-femblable, qu’ils ont encore retenu Cette Veneration pour usgrands luminaires, qu'ils l’ont. dije retenué des Apalachites, avec léquels leurs predecef= feurs ont fejourné autréfois. Nos infulaires n’ont pas même confervécettetraditive, mais Voicy tout ce qu’on peut nom- met Religion parmy eus, & qui en porte quelque cb: Image. s 1is ontun fentiment naturel de quelqué Divinité, ou de quelque puiffance fuperieute & bienfaifante, qui relidé és! Cieus, ils difent, qu'ellc fe contente de joüyr en repos des douceurs de fa propre félicité, fans s’offenfer des mauvaifes” actions des hommes, & qu’elle eft douée d’une fi grandebon= té, qu’elle ne tire aucune vengeance de fes ennemis, d’où" vient, qu'ils neluy rendent nihonneurniadoration, & qu'ils interpretent ces trefors de Clemence qu'elle déployefilibes ralementenverseus, & cette longue patience, donr elle les fupporte, ou à ne impuiffance, ou à unc indifference qu en a, pour la conduite des hommes. 4 DL el AT, CRE OCR PE 3, ANS sites AN à ERP ES EM MALI, Pnee NE ST ER Le * Chap. 13 DES ÎLES ANTILLES 47) Ex: Ils croyent donc deus foftes d’ Efprits, lesuns bons, les au- tres mauvais. Ces bons Efprits font leurs Dieus. Ertils les - appellent cn general C4kamboie, qui eft le mot que difent _leshommes: Et Opoyem, qui cft celuy des femmes. Il eft vray que lemot d’'C4Kkamboié, Gignifie fimplementun Efprir, _ & dela vient qu’il fe dit auff de l'Efprit d’un homme. Mais tantya, qu'ils nel’appliquent point aus Efprits malins. Ces . bons Efprits qui font leurs Dieus, font plus particulierement Exprimez par les hommes fous le mot dlcheïri, & par les femmes , fous celuy de Chemÿn, quenous ne pouvonstour- ner que par celuy de Dieu, & Chemiignum, les Dieus. Et cha- _cun parlant de fon Dieuen particulier, dit Zchésrilon, quieft le mot des hommes, & ANechemérakou, qui eft celuy des femmes, . Mais les hommes & les femimes nomment le mau- vais Efprit, quieft leur Diable CAapoya, où Aaboya, comme difent tous les Francois. Mais les Caraibes prononcent iCY KB, à l’allemande, Hs croyent que ces bons Efprits, ouces Dieus, font er | Minc nombre, & dans cette pluralité, chacun s’imagine en avoit üh pour foy en particulier. 1ls difent donc que ces Dieus ont leur demeure au Ciel, maïs ils ne favent ce qu'ils yfont, & d’eus mêmes ils ne s’avifent point de les reconnoi- tre, comme les Createurs du monde, & des chofes quiy font. Maïs feulement quandonieurdit, que le Dieu que nous ado: rons a fait le Ciel & la Terre, & que c'eft luy qui fait a. duire à la térre nôtre nourriture, ils répondent, ouy, 1 _ Dieu a fait le Ciel & la terre de France, & y fait venir ton blé. Mais nos Dieus ont fair nôtre LE & font croitre nôtre Manioc. : Quelques-uns difent, qu ils appellent leurs faus Diéis des: Rioches; Mais c'eft un mot qui n’eft pas de leur langue, il vient de l’ Efpagnol. Nos François le difent aprésles Efpag- nols. Et fi les Caraibes s'en fervent ce n'eft pas entr’'eus.. sais feulement parmy les Etrangers. Detout ce que deflus. NH appett, que bien que ces Barbarcs ayent un féntiment na- turel de quelque Divinité, ou de quelque puiffance fuperieu- re, ileftmeflé de tant d’extravagances, & enveloppé de ff De tencbres, que l'on ne peut dire que ces pauvres k gens: 472 : Aer 5 Fi QE MORALE, | | gens ayent connoiflance de Dieu. En effet, les Disinheer qu'ils reconnoiflent, & auquelles ils rendent quelque hom- mage, font autant de Demons, quiles fedwifent, & quiles tiennent enchainez fous leur damnable fervitude. - Bienque quant à eus neantmoins , ils les diftinguent d'avec les Hip malins. / | Ils n’ont aucuns Temples ni Autels, qui foyent particulies rement dediez, à ces pretendués Divinitez qu ils reconnoif fent, ils ne font aufli aucun Sacrifice à leur honneur de cho- fe qui ait eu vie; Maisils leur font feulement des offrandes de Caflaue, & des primices de leurs fruits; Surtout, quand ils croyent avoir cfté gucris par eus de quelque maladie, ils fontunvin, ouun feftin à à leur honneut, & pour reconnoif- fance, ils leur offrent de la Caflaue & du Ouicou. Toutes cesoffrandes font nommées par eus C4wacri. Leurs maifons étant faites enovale, & le toit allant jufqu’àterte, ils met. ‘ tent à l’un de bouts de la cafe leurs offrandes, dans des vaif feaus, felon la nature de la chofe, fur un ou fur plufieurs C4. outous , ou petites tables tiffluës de jonc & de feüilles de La- tanier, Chacun dans fa cafe peut faire ces offrandes: à fon Dieu ;. mais quand c’eft pour l’evoquer, il fautun Boyé : Tous tes ces offrandes ne font accompagnées d'aucune adoration, ni d’aucunes prieres, & elles neconfiftent, qu’en la prefen- tation même des cesdons. Ils évoquent auffi leurs faus Dieus , lors qu'ils fouhaittent leur prefence. :Mais cela fe doit faire par lintervention de leurs Boyez, c'eftà direde leurs Prétres, ou pour mieus dire de leurs Magiciens, &ils font cela principalement en quatre: occafions. 1. Pour demander vengeance de quelcun quileur afait du mal, & attirer quelque punition fur luy. 2..Pour être gueris de quelquemaladie dontils font affligez , & poum. en favoir l’iflué. Et quandils ont efté gueris, ils font des Vins” comme on les appelle ausHes, € "eftà dire des affemblées de réjouiffance, & de débauchesen leur honneur, comme pourt reconnoifflance, Et leurs Magiciens, font auf parmy eus. l'office de Medecins : joignant enfemble la Diablerie & la: : Medecine, & ne faifant point de cure, nid’applicationdere=. mcdes, qui nefoitunaéte de faperftition. 3. lis les confüul. tent hap.13 DES ÎLES ANTILLES. 473 - rentencore fur l’evenement de leurs guerres. 4. Enfnils évo- … quént ces Efprits-là par leurs Boyez , pour obtenir d’eus, qu ‘ils chaffent le CAfaboya, ou l'Efprit malin. Mais jamais ils n’évoquent le LA£4boya luy même, comme quelques uns fe font imaginez. Ù Chaque Boyé, a fon Dieu particulier, ou plutoft fon Dia- ble familier , lequel il évoque par le chant de quelques paro- les, accompagné de la fumée de Tabac, qu'ils font bruler de- Vant ce Demon, comme un parfum quiluy eff fort agreable, & dont l’odeur eft capable de attirer. Quand les Boyez évoquent leur Demon familier, c'eft toujours pendant la nuit, & il faut bien prendre garde dene porter aucune lumiere, ni aucun feu dans la placeoÿils ex- ercent ces abominations , car ces Efprits de tenebres, onten horreur toute forte de clarté. Et lots que plufieurs Zoyez . Éévoquentenfemble leurs Dieus, commeils parlent, ces Dieus, ou plütôt ces Demons, s’injurient & querellent, s’attribuant l’un à l’autre la caufe des maus de quelcun, &ilfemble qu'ils fe battent. Ces Démons, fe nichent fouvent dans des os de mort, tirez dufepulcre, & envelopez de Cotton, & rendent par la dés oracles, dilant que c’éft l’ame du mort. “IIS s'en fervent pour cnforceler leurs ennemis, & pour cet effet les forciers en- velopent ces os, avec quelque chofe qui foir à leur ennemy. . Ces Diables, entrent aufli quelquéfois dans les corps des femmes, & parlent parelles. Quandle Boyé, ou le Magicien .a obligé par fes charmesle Diable qui luy eft familier, à com- paroitre, ildit, qu'il luy apparoit fous des formes differentes, & ceus qui font'aus environs du lieu, où il prattique fes darm- nables fuperfitions, difent, qu'ilrépond clairementaus de- mandés qu'onluy fait, qu'il prédit lifué d'une guerre ou d’une maladie, & qu'aprés que le Soye s’eft retiré , que le Diable remué les vaifieaus, & fait comme claquer des mâchoires, de forte, qu'il fémble qu ilmange & qu'ilboiveles prefens, qu'on lüÿ avoit preparez, léquels ils nomment C4racri ; Mais que le lendemain, ontrouve qu'il n ya pastouché, Ces viandes profanes, qui ont efté fouillées par ces malheureus Efprits font reputées fi faintes par ces Magiciens & parle Goo peu LA Re" 474 HISTOIRE M era vie Cha 1 peuple qu’ils ont abufé; qu'il n’y a que les vieillards, pre plus confiderables d’ entr eus, quiayent la liberte d’en goûter : & même ilsn’oferoient s’yingerer, fice n’eft qu'ils ayent une certaine netteté de corps, qu'ils difent eftre requife en Fons ceus, qui en veulentufer. Aufli tôt que ces pauvres Sauvages ont quelque mal ou | quelque douleur, ils croyent quece font les Dieus de quel cun de leurs ennemis,quiles leur ont envoyez: Et ont recours au Boyé, quiconfultant fon Demon, leur apprend que.c’eft le Dieu d’un tel, ou d'un telquileur acaufé cesmaus-là. Et de là viennent des hatnes & des vengeançesçcontreceus, dont les Dieus les ont ainfi traittez. : Outre leurs Boyez ou Magiciens, qui fois grandement refpeétez & honorez parmy eus; ils ont des Sorciers, au moins les croyent ilstels, qui àce qu'ils difent-envoyent fur | eusdes charmes, & des forts dangereus & funeftes, & ceus qu'ils eftimenttels, ils les tuent quand ilstes peuvent attra- per. C'eft bien fouvent un pretextepour fe défaire de loue ennemis. Les Caraïbes, font encore fujets à d’autres maus qu'ils die fent venir du CMaboya, & ils fe plaignent fouvent qu'ililes bat. Ileft vray, que quelques Perfonnes de merite qui ont. converfé quelque tems parmy ce pauvre Peuple, font per ‘fuadez qu'ils ne font nipourfuivis, ni battus effectivement parle Diable: & quetoutes les plaintes & les recis cpouvan- , tables qu’ils font fur ce fujet, font fondez fur ce qu'étans d’un naturel fort melancolique, & ayant pour la plupart la ratte: groffe & enflée, ils font fouvent des fonges affreus. & rerris bles, où ils s’imaginent quele Diable leur apparoit , &:qu'il les bat à outrance. Ce qui les fait reveiller enfurfaut, tous. effrayez. Etàleur réveil, ils difent que: Maboya les SALE ï En ayant l'imagination tellement bleflée, qu'ils en eu fentir ladouleur. 7. Maisilefttres-conftant , parle témoignage de plufi eurs aus tres perfonnesde condition, & d’unrare favoir, quiont fes journéaflez long tems en l'Ile de Saine Vincent, qui n’eftha: bitée que de Caraïbes, & quiont aufli veü ceus.de lamême Nation qui RAGRRARONS au Conihent de l’Amerique Meri- diona- | cp. 13 DÉS ILES ANTILLES. 475$ . dionale: que les Diables lesbattent effectivément, & qu'ils montrent fouvent fur leurs corps, les marques bien vifibles des coups qu'ils en ontreçeu, Nousapprenons aufli, par la relation de plufeurs des Habitans François de la Martini- que, qu’étans allez au quartier de ces Sauvages , qui demeu- rent dans la même Ile. Ils les ont fouvent trouvez faifant d’horribles plaintes, de ceque Maboyales venoit de mal trait- ter, & difans qu'il étoit Couche fäche contre Caraïbes , de forte qu'ils eftimoyent les Francois heureus, de ce que leur Ca boya ne les battoit point. Monfieur Du Montel , qui s’eft fouvent trouvé en leurs Afflembiées & qui A chniverfe fort familierement & un long tems avec ceus de cette Nation qui habitent l'Ile de Saint Vincent, & même avec ceus du Continent Meridionai, rend », Ce témoignage furcetriftefujet. Dans l'ignorance & dans à | Irrelision où vivent nos Caraïbes, ils connoiflent par ex +, périence, & craignent plus que la mort, l'Efprit malin, yqu'ilsnomment CAMaboya : car ce redoutable ennemy leur » apparoit fouvent en des formes tres-hydeufes. Sur tout » Cet impitoyable & fanguinaire bourreau, affimé de meur- tres dés l’origine du monde, outrage & bleffe cruellement » Ces miferables, lors qu'ils ne fe difpofent pas afflez pronte- » ment à laguerre. De forte, quequandon leur reproche la »» paflionfiardenté qui patoiten eus, pour l effufion du fang e humain , ils répondent, qu’ils font obligez à à s’y porter rats »gréqu'ilsenayent, & que Æfaboya les y contraint. Cespauvres gens, ne font pas les feuls que l’ennemy du Genre humäintraittecomme fes éfclaves. Diversautres Peu ples Barbares, portenttous les jours en leurs corps de fanglan: tes marques de fescruautez. Er l'on dit queles Brefiliens fre: tmiflent & fuënt d'horreur, dans le fouvenir de fes appari- tions, & meurent quelquéfois de la feule peurqu'ilsont, du Mauvais traittement-qu'il leur fait. Aufli fe trouvetil quel- ques unes de ces Nations, qui flattent ce vieus Dragon, & qui paradorations , par offrandes , & par Sacrifices ; tâchent d’a- doucir farage & d’appaifer fa “firéurs Comme entre autres, pour: fé point parler des Peuples de l'Otient , quelques Flo: tidiens, & les Canadiens. Car c’eft la raifon qu’ils donnent 2 O00 2 du NE AU Sd EU HT OU 476 Histoire MORALE, Chap. du fervice qu'ils luy réndent. Onafure, que les Juifsmême fe font portez à faire quelquéfois des offrandes à à ce Demon, poureltre delivrez de fes tentations & de.fes pieges. Et l'un de leurs Auteurs cite ce Proverbe comme ufité parmy CUS: | Elie Donnez un prefent à Samaël, au jour de l'expiatio®. 4 Mais, quelque crainte que les Caraibes puiflent avoir de leur Aaboya, & quelque rude traittement qu'ilsenreçoivent, ils ne Phonorent nid'offrandes, nide pricres, ni d’adoration, ni de facrifices. Tout le remede dont ils ufent contre fes. cruelles vexations, c’eft de former le mieus qu'ils peuvent de « petites images de bois, ou de quelque autre matiercfolhide, a limitation de la forme où ce efprit malin leur eft apparu. Ils pendenrt ces images à leur col, & difent, qu'ilsen éprouvent du fouligement : Et que Æfabaya les tourmente moins, quand. ils les portent. Quelquefois aufli, à limitation des Caraibes. du Continent, ils fe fervent pour l'appaifer, de l'entremife des. Boyez, qui confultenr leurs Dieus fur ce fujer, de même qu’en: ces rencontres, ceus du Continent ont recours à.leurs Sor= ciers, qui font en grande recommandation. parmy eus. ; Car bien que les Caraïbes deces quartiers-là, foyenttous:. generalement affez rufez , neantmoins, ils ont parmy cos. certains Efprits adroits, qui pour fs donner plus-d’autorité & de reputation parmy les autres: leur font accroire qu ils, ont des intelligences fecrettes avec les Efpritsmalins, qu’ils nomment Æaboyas, de même que nos Caraïbes Infulaires, dontils fonttourmentez, & qu'ils apprenentd’eus, les cho. fes les pluscachées. Ces gens, font eftimez parmy ces Peu- ples fans connoiffance de Dieu, comme des Oracles, & ils. les confultent en toutes chofes, & s’arrétent fuperftitieufe- ment à leurs réponfes: Ce qui entretient des inimities irre= conciliables parmy eus, & quieft caufe bienfouvent, de plu" fieurs meurtres. Car quand quelcuneft mort, fes parens & fes alliez ont de coutume de confulter le Sorcier pourquoy ik eft mort? Que file Sorcier répond, que celuy-cy. ou celuys là, en ef la caufe, ils n’auront jamais de repos, tant qu'ils ayent fait mourir celuy que le Piaës (ainfi nomment-ils le Sorcier. en leur langue) aura marqué. Les Caraïbes des. les, imie 4 bu LA ET _ Chap13 DES ÎLES ANTILLES. 477 . tent auffiencela, la coutume de leurs Confreres, comme nous l’avons deja reprefenté cy defflus. | Mais c’eft une chofe aflurée, & que tous ces Sages reconnoiffent rous les jours eus-mêmes par experience, que le Malin n'a pas le pouvoir de les maltraitter , en la Com- pagnic d’ aucun des Chrétiens. Aufli, dans Les Iles où les Chrétiens font meflez aveceus, ces malheureus étant perfe- cutez par ce maudit adverfaire, fe fauvent à toure bride dans les plus prochaines maifons des Chrétiens, où ils trouvent un azile & une retraitteaflurée, contre les violentes attaques de ce furieus agrefleur. C’eft auffi uneverité conftante , & dont l’ Eee à jour- naliere fait foy dans toute l'Amerique , que le Saint Sacre- ment du Batême étant conferé à ces Sauvages, le Diable ne les bat & ne les outrage plus tout le refte de leur vie. 11 fembleroit apréscela, que ces gens dévroient fouhaitter avec paffion d'embraffer le Chriftianifme, pourfe tirer une bonne fois des griffes de ce Lyonrugiffant. Etde vray, dans les momens qu'ils en fentent les cruelles pointes en leur chair, ils fe fouhaittent Chrétiens, & promettent de le de venir, Mais aufli-toft que la douleur eft pañlée, ils fe mo- quent de la Religion Chrétienne & de fon Batêéme. La mé- me brutalité fe trouve parmy le peuple du Brefil. De: £Lery. chap. 16, 473 H15s TOIRE MORALE, | . CHAPITRE QUATORZIEME. Continuation de ce qu'on peut appeller Relivion parmy ul Caraibes : de quelques unes de leurs ‘Tiaditions : € du Jentiment qu'ils ont de l'immorta- lité de l'ame. ment les Efprits de tenebres, épouvantent durant Ia nuit par dès fpeéttes hideus, & dés réprefentationis. cffroyables les miférables Caraïbes, & comment pour les en- tretenir dans leur erreur, & dansuneé crainte fervile de leur prétendu pouvoir , ils les chargent de coups s'ils n'acquief- cent prontémerit à leurs malignesfuggeftions, & qu'ils char: fhent léurs fens par desillufiôns, & dés imaginations étrani- ges, feignant d’avoir l’autotité de leur réveler les chofes fu- tures, deles guerir deleursmaladies, déles venger deleurs “ennemis, & de lés delivrérde tous lés perils où ils fe rencon-. trent. Apréscela fe fautilétonner, fi ces Barbares qui n’ont point fceu difcerñcf ni reconnoitre l'honneur que Dieu leur avoit fait, de fe reveler à eus en tant de belles creatures, qu'il a mifes devant leurs yeus pour les conduire à la lumiere de leurs enfeignemens, ontefté livrez en un fens reprouvé, s'ils font encore à prefent deftituez de toute intelligence pour ap- percevoir lé vray chemin de vie, & s'ils font demeurez fans efpcrance & fans Dieu aumonde. { Nous avons aufli reprefenté, que quelque effort qu'ils ayent fait, pour étoufer tous les fentimens de la Divine Jufi- ce, & de fon droit, enleurs confciences; ils n’ont neantmoins pü faire en forte, qu’il ne leur foit refté quelque étincelle de cetteconnoiffance, qui les reveille, & leur donne de tems en tems., de diverfes craintes &.apprehenfions d'une main van: gereffe de leurs crimes , mais au lieu d’elever les yeus au Ciel pour enimplorer le fecours, & fléchir par confiance & par amandement de vie, la Majefté Souveraine du vray “l qu'ils N Ous avons veu dans le Chapitre precedent, com-. PORC RE AL TE Mn Vo rt MAC RSR a EE ; RAR CA Done AC AE Pi Chap.t4 DES ILES ANTILLES 479 . qu'ilsontoffenfé, ils defcendent jufques au profond des en- . fers, pouren évoquer les Demons par les facrileges fuperfti- . tions de leur Magiciens, qui aprés leur avoir rendu ces fune- ftes offices , les engagent par ces infames liens, en la déplora- ble fervitude de ces cruelstyrans. Cesfureurs, transportent ces pauvres Batbares jufques-là, que pour avoir quelque faveur de ces ennemisde tout bidré, & apprivoifer ces tygres, ils leur rendent plufieursmenus fer- vices. Carils ne leur confacrent pas feulement les premices de leurs fruits : Mais ils leur dreffent aufliles plushonorables _ tables de leurs feftins ; ils les couvrent de leurs viandes les plus delicates, & de leurs bruvages les plusdelicieus, ils les confultent en leurs affaires de plus grandei importance » & fe gouvernent pat leurs funeftes avis, ils attendent en leurs maladies, la fentence de leur vie ou de leur mort de ces dete- fables oracles, qu'ils leur rendent par Fentremife de ces mar- moufets de Cotton, dans lefquels ils envelopent les os ver- _ moulus de quelque malheureus cadaure, qu'ils ont tiré de fon fepulcre ; Et pour détourner de deflus ets la pefanteur de leurs coups, & divertir leur rage, ils font fumer à leur hon- neur parle miniftere des Boyez des feüilles de Tabac; ils peis- nent auf quelquéfois leurs hydeufes figures, au lieu leplus confiderable de leurs petis vaifleaus qu'ils appellent Pyraugues, ou ils portent pandué à leurs cous , comme le collier de leur defordre, unepetire effigicrelevée en bofñe, qui reprefente quelcun de ces maudits Efprits, en laplushydeufe pofture, qu'il leur eft autréfois apparu , comme nous l’avons y touchéau Chapitre precedent. On tient auf, que c’eft dans le même deffein qu ls ont de fe rendre ces monftres favorables, qu'ils macerent fonvent leurs corps, par une infinité de fanglantes incilions, & de jufnes fuperfitieus , & qu'ils ont en finguliere veneratior® les Magiciens, qui font les infames miniltres de ces furies d'enfer, & les executeurs de leurs paflions enragées. Ces pauvres abufez n’ont neantmoins aucunes loix, qui detcrmi- nent precifement le tems, detoutes ces damnables Cercmo- nics, mais lemême Efprit malin qui les ypoufle, leur enfait na:ftre affez fouvent l'envie : ou par vie mauvais traittcineut é qu'il do ” Hrisrormmsé No À ALIEN Chap. 14 -qu'illeur fait, ou par la curiofité qu'ilsont, de favoir lévene- ment de quelque entreprife de guerre, ou le fuccés de quel- que maladie, ou enfin pour chercher les moyens de fe Men | de leursennemis. Mais, puis queceus qui ont demeuré pinfieurs: années au milieu de cetre nation, témoignent conftamment, qu'en leurs. plus grandes détreffes, ils ne les ont jamais veus adorer ouin= voquer aucunde ces Demons, nous fommes perfuadéz, que tous ces menus fervices que la crainte leur arrache, plutôt. que la reverence ou l'amour, ne peuvent point pañer pour un vray culte, ou pour des aëtes de Religion, & que nous donnerons le vray nom à toutes ces fingeries , fi nous les aps. pellons des fuperftitions, des enchantemens, des fortileges,: & des honteufes produ&ions d’une Magie autant noire, que le font ces Efprits tenebreus, queleurs Boyez confultent. Et nous tenons aufli, quele manger & le bruvage qu'ils prefene tent à ces faufles Divinitez, ne peuvent pas eftre proprement. appellez des Sacrifices, mais plutôt les paëtes exprez, dont les: Diables font convenus avec les as » pour: Le rendre prefens à leurdemande. ! De forte, qu'il ne faut pas trouver étrange, fi dans tous ces … foibles fentimens qu'ont la plupart des Caraïbes, detoutce quia quelque apparence de Religion, ils fe moquententt'eus detoutes les Ceremonies des Chrétiens, & s'ilstiennent pour fufpeéts ceus deleur Nation, qui témoignent quelque defir de fe faire batifer. Aufle plus feur pour ceus à qui Dicuau- xoit ouvert le cœur pour croire au Saint Euangile, {eroir, de fortir de leurtetre, & deleur parenté, & de fe retirer aus Îles; qui font feulemenr habitées de Chrétiens : Car encore, qu’ilsne foyent pas fi fuperftitieus. que le Peuple du Royau me de Calecut, qui témoigne de l'horreur à toucher feule= méntune perfonne de Loy contraire à la leur, comme s'ils en: étoient foüillez ;. ni fi rigoureus qu’au Royäume de Peous. où quand un homme embraffe le Chriftianifme, la femme’en. celebre les funerailles, comme s’il étoit mort, & luy dreffe un rombeau , oùelle fair fes lamentations, puis elle a la liberré de fe reimariér comme VEUVE : ncantmoins celuy d’entre* les Caraïbes, qui feferoit UE au Chrifiauifme, s mar: à nul- Chapi4 Des. ÎLES ANTILLES. 441 . à mille réproches & injures, s’il perfeveroit de faire fa de- _meureau milieu d'eus. … Lors qu’ilsvoyentles Affemblées & le Service des Chré- btiens, ils ont accoutumé de dire, que cela eft beau & divertif- fant, mais quece n’eft pas la mode de leur pais: fans témoig- ner d'ailleurs en leur prefence, ni haine ni averfon contre _ ces Geremonies, comme faifoyent les pauvres Sauvages qui vivoyent en l'Ile Hifpaniola, oude Saint Dontingue, & aus ]les Voifines, qui ne vouloyent pas fe trouver au ferŸice des Efpagnols, & encore moins embraffer leur Religion, à caufe, difoientils, qu’ils ne pouvoyent fe perfuader que des perfon: nes fi méchantes & fi cruelles, dont ils avoyent tant ex- perimenté la fureur & la Dares pufñlent avoir une bonne creance, Quelques Preftres & Religieus, qui ont autréfois efté en cepais-à, en ayant batizé quelques-uns un peu à la legere, avant que de les avoir bien inftruits en ce myftere , ont efté caufe que ce Sacrement n’a pas efté entelle reputation par- my ces Caraïbes, qu'il eut efté fans cela, Et parce queleurs Parreins, leur donnoient de beaus habits, & plufieurs menuës gentileffes au jour de leur Batéme, & qu'ils les #raittoyent _ {plendidement, huit jours aprés avoir reçeu ce Sacrement, _ilsle demandoyent de nouveau, afin d’avoir encore des pre- fens, & dequoy faire bonne chere. Il y a quelques années, qué quelqu’uns de ces Meffieurs {e chargerent d’un jeune Caraïbe leur Carecumene natifde la Dominique qui fe nommoit T4 CAaraboiy, Fils du Capi- taine que nos François nommoyent /e Baron, & les Indiens, Orachora Caramiana, à deffein de luy faite voir l’une des plus grandes & des plusmagnifiques Villes du monde, ilsluy fi- tent pañlerlamer, & aprés luy avoir montré toutes les fomp= tuolitez de cette cité incomparable, qui eft la Capitale du plus Floriffant Royaume de l’univers, il y fut batizé avec grande folemnité, à la veuë de plufieurs Grands Seigneurs, qui hono- rcrent ceite action de leur prefence, il fut nommé Louis. Et aprés quelquetems de fejour en ces quartiers-là , il futren- voyé en fon pais, étant chargé de beaucoup de prefens à la Verité, mais auffi peu Chrétien qu’il en étoit forty, parce Ppp qu'il 482 HisTOrrR’E M 0 ka C qu'il n’avoit pas bien compris les. Myfteres de la Relic Chrétienne. Et il n’eut pasfi toft mis le pied dans: con | | que fe moquant de tout ce qu'il avoit veu comme d’une far ce, & difanrque les Chrétiens ne fe repaifloient que de fos lies , il retourna en la Compagnie desautres: NT au {es habits, & fe fit roucouércommeauparavants : 1°! Pour preuve de l'inconftance & dela legereté des’ fu diens Caraïbes, en la Religion Chrétienne quand ils l'ont une fois embraffée, on raconte encore que du tems que Mon. fieur Auber eroit Gouverneur de l’ile dela Gardeloupe à il k étoitfouvent vifité d'un Sauvage dela Dominique; qui avoit demeuré un fortiong temsà Sevilleen Efpagne, oùil avoit reçeu le Batéme. Maisetant de retour en fon Ile, bien qu'il fic tant de figues de Croix qu'onen vouloir, & qu'il portat. un grand Chapeler pendu à foncol, il vivoicneantmoinsà la, Sauvage, alloit nud parmylesfiens, & n’avoitrien rerenüde ce qu'ilavoitveu, & de ce qu'onluy avoit enfeigné-à Sevilleÿ * hormis, qu'ils fe couvroit d’un vieil habit d’ Efpagnol pour fé rendre plus recommandable , lots qu'il rendoit vifite Monfieur le Gouverneur. 145": UE Ils ontune Tradition fort ancienne parmyeus, ‘qui mon tre que leurs Ayeuls ont eu quelquéconnoiffance d’une Puf fance Superieure, qui ptenoir foin de leurs perfonnes, & dont ils avoyent fenty le favorable fecours. Mais c’eftunelumie: re, que leurs brutaus enfans laiflentéteindre, & qui par leur ignorance ne fait fur eus, nulle réflexion. Ils difent donc; que leurs anceftres étoyent de pauvres Sauvages, vivant comme ne beftes au milieu des bois, fans maifons, &fanscou vert pourferetirer, & fe nourriffant des herbes & des fruits. que la terre leur produifoit d’elle même, fans eftre aucune ment cultivée. Comme ils étoyent en ce pitoyable état, uns vicillard d’entr'eus extrémement ennuyé de certe brutales faflon de vivre, fondoit enlarmes tres-ameres, & tout abba= tu de douleur, déploroit fa miferablecondition. Mais fur ce la, un homme blanc s’apparut à luy defcendant du Ciel, &e s'étant approché, il confola ce vieillard defoté en luy difant 3 Qu'il étoit venu pour fecourir luy & fes Comparriotes, & pour leur enfeigner le moyen de mener à l'avenir une vie plus! dues ai ES RAP 4 - Chipi4 DESAILES ANTILLES. 483 douce & plus raifonnable, Que fi queléun d’eus eut plutôt formé des plaintes, & pouflé vers le Ciel des gemiffemens, | ils euffent efté plus prontement foulagez. Que le rivage dé _ Ja mer étoit couvert de pierres aiguës &tranchantes, dontils pourroyent couper & tailler desarbres pour fe faire des mai- fons. Et que les Palmiers portoyent des feüilles, quiferoient fort propres à couvrir leurs toits, contre les injures de l'air. Que pour leur témoigner le foin particulier qu’il avoit d’eus, & le fingulier amour dont il favorifoit leur efpece, fur toutes celles des animaus, il leuravoit apporté une racine excellente, quileur férviroit à faire du pain, & que nulle befte n'oféroit toucher, quandelle feroit plantée ; ; Etqu'il vouloit que des- ormais, ce fut leur nourriture ordinaire. Les Caraïbes ajou- tent, que la deflus ce Charitable Inconnu, rompit entroisou quatre morceaus un bâton qu'ilavoit en main: & que les don- fantau pauvre Vicillard, il luy commanda deles mettreen terre, l’affurant que peu aprés y foüiffant, il ytrouveroitune püiffante racine, & que le bois qu ’elleauroit pouffé dchors, auroit la vertu de produire la même plante. Il luy enfeigrià ‘puis aprés comme on en devoit ufer, difant qu'il falloit raper cette racine avec une pierre rude & picotée , qui fe trouvoit au bord de la mer: exprimer foigneufement le jus de cette _rappuré, comme un poifon dangereus ; ; & durefte, à l'ayde du feu , en faire un pain qui leur feroit favoureus, & dontils vi- vroient avec plaifir. Le vieillard fit ce quiluy avoit cfté en- joint, & au bout deneuf Lunes ; (commeils difent) ayant là curiofité de favoir quel fuccés RSR cülarévelation, il fut vifiter les bâtons qu’ilavoîit plantez enterre, &il trouva que chacun d’eus avoit produit plufieurs belles & groffes racines, d’ont il fit entierement comme il luy avoit efté ordonné. Ceus delà Dominique qui font le conte, difént de plus, que fi le vieillard eut vifité ces bâtons au bout de trois jours ; au lieu de neuf Lunes, ilauroittrouvé les racines creuës de mê- me groffeur, & qu'’ellés auroient efté toujours produites en aufi peu de tems. Mais parce qu'il n'y foüilla qu’apres un fi long terme, le Manioc demeuré encore à prefent tout ce tems-là en terre, avant qu’il foit bon à faire la Caf- fauc. | Le Ppp 2z C'eft CARE 0 4 ' 2 € SN TO ONE ENTER di ie Es LT RRURR 484 HisTOiRE MoRaALE: Chap. 14° C'eft tout ce que porte la Tradition Caraïbe, & l’on pous voit bien la coucher icytouteentiere, veuquec ’eft lafeule quifeconteentre ce Peuple ignorant , qui ne fe met point en peine de favoir lenom, & la qualité de cer aimable & celefte Bienfaiteur, qui Jes a tant obligez, nide luy rendre aucune reconnoiffance, & aucun honneur. Les Payens étoient bien plus curieus d’honorer leur Cerés, dontils difoient tenir le Com- froment, &l’inventiond’enfairedupain. Et les Peruviens, RL, AUOYÿ qu'ils ne connuffent pas le grand Pachacamac, c’eftà die. A ‘re CM- ployent aufli de petis rofeaus entre-laffez, pour faire des palif- fades, quitiennent lieu de murailles à leurs logis. Sous cha- que couvert, ils font autant de feparations qu'ils veulent de chambres. Üne fimple natte fait chez eus l'office de nos portes, de nos verrous, & de nos ferrures. Leur plancher d'en haut eft le toit même, & celuy d’en bas n’eft que de terre battuë, . Maisils ont un tel foin de letenit propre, qu'ilsle balayent toutes les fois, qu’ils y apperçoivent la moindreor- dure. Cequin’ alien que dans leurs cafes particulieres: Car ordinairement leur Carbet, ou leur maifon publique, oùils font leurs réjouiffances, eft fort fale. De forte que fouvent Ja place eft pleine de Chiques. T1 rigaus dans fo Hijtosre de la Chine. chap. 44 Pline. L.16.c.35. . Outreun petit corps de logis où ils prenent leur repos, & où ils reçoivent leurs amis, chaque famille confiderable a Qgq. ._.. €nco“ - 499 HISTOoiRE MoraALE; & ils fe fervent de l’autre comme d’un magafin, oùils confer: vent leursarcs, leursfiéches, & leurs boutous, quifont des Mafluës de bois pefant & poly, dontils fe fervent en guerre Chap: is encore deus petis couverts. Dans l’un, ils font leur cuifine au lieu d'épée, lors qu'ils ontufétoutes leursfléches. 11s y. tiennent encorc leurs outis, leurs paniers , leurs lits de refers + ve, toutes les bagatelles, & tousles peris ornemens dont ils. fe fervent en leurs réjouïffances publiques & aus jours de pa-. rade. - Ils nomment toutes ces babiolesdes Caconnes. Pourtous meubles, nos Sauvages n'ont que des liéts bran- lans, qu'ils apppellent C4wscs, qui font de grandes couvert tures de cotton, fortinduftrieufement tifluës, qu’ils froncent. par les bouts, pour joindre enfemble les deus coins de la lar: geur. Puisils attachent ces. L4#wars par ces deus bouts fron. cez, aus principaus piliers de leur edifice, Ceus qui n’ont point de liét de cotton, fe fervent d'unautre li@&, que l'on appelle Cabane, Ce font plufieurs barons tiffus de lons & de travers, fur lefquels on met quantité de feüilles de Balifier, ou de Bananier. Cette Cabane eft fufpendué & fourenué par les quatre coins, avec de grofès cordes de Mahot. sont outre cela de petisfiéges, tout d’une piece, faits d’un bois de couleur rouge ou jaune, poly comme du marbre. Et l’on! voit aufli chéz-eus de petites tables, qui ont quatre piliers de’ bois, & qui font tilluës de feüilles de cette efpece de Palme: qui fe nomme Lafanier, Leur vaifelle, & leur batterie de cuifine efttoute deterre, comme celles des Maldivois: ou de certains fruits femblables ànoscourges, mais qui ont l'écorce plus épaiffe & plus dure; taillez & compofez de diverfes figures, & qui font polis 8e. peints aufli delicatement qu'il fe peut. Cela leur tient lieu” de plats, d’écuelles , de baflins, d’afliettes , de coupes, & de’ vaifleaus à boire. ls nomment Cofs ou Couÿs, toute cette Vaifs felle faite de fruits : Et c’erle même nom, queles Brefiliens donnent à la leur , faite de femblablematiere, Ils fe pes de leur vaifelle de terre, comme nous nous fervons de marmites & de nos chbudérone de France. Ils en ont entre. autres d’une faffon, qu'ils appellent Cerery. Onvoir derces? Canaris qui font fort grands, & d'autres qui font fort petiss Les Nous ne écrvene qu dires des sapohts | que l’on appctle CE v4- » Taumalis; Mais les grands font emploÿez à faire le bruvage, 04% «# . qu'ils nomment Owicou. Les Caraibes dela Martinique, ap- : | portent fort fouvent de ces petis Casarë au quartier des Fran- cois, qui leurdonnent en échange quelques Cacones, c'eftà dire quelques petiques babioles qui leur plaifent. Nos gefls font état de ces petis vaiffeaus, parce qu'ils ne fecaffent pas _ fi aifément que nos pots de rerre. Cette vaiffelle qué nous | venons de décrire, quelque chetive qu'elle foit, eft confer- _ vée & entretenué pareus , avec autant de curiofité & de pro- pretéique l’on puiffe defirer. | _esescaraïbes ont même un lieu, bride mtinao de: ftiné à leurs neceflitez naturelles , ‘où , lors qu’ils en ont be= fait avec des œufs ES des entsailles de cra- bes, € du py= Mer. foin, ils fe retirent, y portant un bafton pointu avec lequel . ils font un trou en terre, oùils mettent leur ordure, qu'ils couvrent deterre puis aprés. Defrte que jamais on ne voit de’ces vilenies parmyeus. Et quoy que le fujet n’en foit pas fortagreable,cettecoutume, neantmoins, merite d’eftre te- marquée, veu qu’elle fe rapporte formellement à l’ordon- nance que Dieu avoit faite au vint-troifiéme du Deutero- nome, pour l’arméc d’Ifraëél, qui eftantà la campagne, ne pouvoit pas ufer de la propreté & de la commodité ordinairé dans ces neceflitez. À cela ferapporte aufi la coutume des Turcs, quilors qu'ilsfe trouvent dans ce befoin, font une _ fofle avec une pêle pour cacher leurs excremens. Ce qui rend leur Camp extremément propre ; ‘quand ils fonc-à la guerre. Ün ancien Auteur nous dit que dans l'Inde Orien- tale, uncettain Oifcau nonimeé le Z4$/e, fait quelque chofe de femblable, en foüiffantfon ordure, & Ta couvrant en forte qu'elle ne paroiffe point, Ce qui fetoit mervcilleus , s’il tenoit autant dela verité, qu'il fent la fable. Les Tartares, à cequélondit, ne voudroient pas mème avoir fait de l’eau dans l’enclos de leurs logemens, renant céla pour un peché, Repañons vers nos Sauvages. On voit dans l'enceinte deleürs maifons, un grand nombre de Poulles communes, & de Poulles d’Indes, qu'ils nourrif- fent, nontant pour l'entretien de leurstables, que pour ré- galer leurs. amis Chrétiens qui les vont vifiter, ou pour Qqaq 2 à échan= Busbe- guise en es Am bafades. lu. 3. Ctefiæs, Carprn en for Voyage de Tar- tarte. 492 : HISTOIRE MORALE; Chap:15). . échanger contre des ferpes, des coignées, des houës Fo à an tres ferremens qui leur font neceffaires. : NS un 1ls ont encore aus environs de leurs logis shit Oran- 1 sers, Citroniers, Goyaviets, Figuiers, Bananiers, & autres arbres portans fruit: de ce petis Arbres qui portent le Py=. man, & les Arbriffleaus ou les Simples dontils ont:la connoif= fancs , pour s’en fetvir quand:ils-ont quelque incommodité, | Et c’eft de tout cela qu'ils font les bordures de leurs-jardins. ” Mais ces jardins fons remplis au dedans de Manioc, de Patas tes & de divers Légumes, comme de Pois de plufieurs cfpes ces, de Feves, de gros Milappelle C#ays de petit Milôpde quelques autres. Is y cultivent aufli des Melons , detouires fortes des Citroüilles excellentes, & une efpecc deiChoü8 qu'on appelle Chons Caraibes, qui font d’un goût: delicat: Mais ils ont foin particulierement dela culturede l’Ananas; qu'ils cheriffent par deffus tous les autres fruits. | 2. Breves, : Au refte, bien quilsn'ayent pointde villages ; nide mais Le fons mobiles, & ambulatoires, comme l’onditdes Bedovias, in pauvre peuple de l'Egypte, de certains Mores habitans au Midy de Tunisen Afrique, & des Nations dela grande, Tar+ tarie, neantmoins , ils changent affez fouvent de demeure, felon que les y porte leur caprice, Car aufli-tôt qu'une ha= - bitation leur déplaiftle moins du monde, ils démenagent: , 18C fe vont placer ailleurs. Er cela fe fait en moins de rien, & fans en demander la permiflion à leur Cacique;commeétoient obligez de faireà leur Roy:.les Aciens Peruviens ; en hs blables rencontres. … }1:3%i30408 Entre les fujets de ce pren à donne parmy. JE Antillois, fe trouve parfois la creance qu’ilsonr d'être plus: De Lery fainement placez ailleurs. Ce qui caufe bien fouvent un pa- _ #4p.19: reil remu- menagechez les Brefiliens. Parfois quelque faleté que l’on aura faite en leur logis, & quileur donnedel'hor- reur. Et parfois aufli la mort de quelcun dela maifon, qui leur faifant apprehender d'y mourir de même, les oblige à fe rctirerailleurs, comme fi la mort ne ies y pouvoit ni trouver nifaifiravec lamême facilité. Mais cette folle apprehenfion a bien plus la Vogue encorechez les Caraibes du: Continent, qui ne manquent ROÏE el en de pareilles occafions, de ie la cafe, L Ge cafe, & d'aller chercher un autre gifte. Cette plaifante fu- | perftition fe voit audi chez Les Indiens de l'Ile de Coraçao, bien que ces pauvres gens ayent reçeu le Saint Batème. Car Monfieur du Montelrapporte, qu'étant au grand village de ces Indiens nomme /’Cafcenfion, & ayant remarqué en deus outrois endroits, des maifons Les unes defertes, quoy quel- les fuffent en leur entier, & les autres abfolument ruinées , il demanda pourquoy ces maifons étoient ainfi abondonnées : 2 ÆEtle Cacique ou Capitaine, luy répondit, quer’étoit parce qu'il étoit mort quelques perfonnes en ces lieus-là, Lesan- ciens Peruviens fe mettoient même dans le tracas d’un tel démenagement, s'ilarrivoit que leur logis vint-à être frappé de la foudre. Caralors, ils l’avoient en fi grande abomina- tion, qu'ils en muroient aufli-tôtla porte avec des pierres & de la bouë, afin qu’il n'yentraft jamais perfonne. On dit qu’autrefois les hommes de la Province de Quito au Perou, n’avoient point de honte de s’aflüjettir à faire tout leménage, pendant que leurs femmes s’alloient promener: Er les anciens Egyptiens n’en faifoient pas moins ; fi nous en croyons Herodorc. Il faut bien dire que le métier de faire la cuifine étoit eftimé bien noble dans la vieille Grece. Carle bon homme Homere reprefente en fon Iliade, Achille faifant luy même un hachis, & mettant de la viande en broche, & tous fes Courtifans employez à la cuifine pour régaler les Ambañadeurs d'Agamemnon. Et pour le poiflon, ilatou- jourseu ce privilege, Comme il a encore aujourd’huy, que les perfonnes de qualité, ne dédaignent pas de le favoirap- prefter. Mais parmy les Caraïbes, les hommes tiennent tous ces bep. 15 DES ÎLES ANTILLES. 498 Garcs- Laffe,l.2, Chap. 1+ Livre 25 Livre 9- emplois & toutes ces occupations pour indignes d’eus. lis font d'ordinaire à lacampagne. Mais leurs femmes gardent foigneufementlamaifon, & ytravaillent. Ilsabbarent, à la erité, le bois de haute futaye, necefaire pour leurs loge- mens: Ils bâtiffent les maifons; Etils ont foin d'entretenir l'edifice de reparations necelfaires. Mais les femmes ont la charge detout ce qu'il fant pour la fubfiftance de la famille : Ils vont bien à la chaffe & à la pêfche, comme nous le dirons _ cyraprés. Mais ce font elles , qui vont querir la venaifon au Qqq 3 lieu Da. 1 494 HisToirt Mon css lieu où elle a été tuée, &le poiflon fur le bord de l’eau. En cc fontelles, qui ont la peine de chercherle Manioc, depre: parer la Caffaue, & le Ouicou, qui eft leur bruvage le plusor- dinaire, de faire la cuifine , Acnblemer les jardins & detenir la Hp nette & le ménage bien en ordre, fans conter le foin qu’elles ont de peigner & de rocouër leursmaris, & de filer le cotton pour l’ufage de la famille. Deforte qu'elles font en une occupation continuelle, & en un travail fans re- lâche, pendant que leurs mariscourentles chams & fe diver- tient : reflemblant plutôt ainf à des efclaves, qu à des com- pignes. Dans lesIles de Saint Vincent, & dela Dominique, ily a des Caraibes qui ont plufieurs Négres pour Efclaves ; à la façon des Efpagnols & de quelques autres Nations, Ils les ont en partie, pour les avoir enlevez de quelques cerres des Anglois : ou de quelques navires Efpagnols, qui fe font autre- fois échovez à leur coftes. Et ilslesnomment Zawons, C'ef à dire Efclaves. Aurefte, ils fe font fervir par eus, entoutes les chofes oùilsles employent avec autanr d’obciffance, de promirude, & de refpeë, que le pourroient “faire les ee. ples les plus civilifez. Quelcun pourroit peut- être demander icy, fur le fard ce ménage des Caraibes, fi commenous avons l’ufage des lampes, deschandelles, & des flambeaus, ils ne fe fervent point aufli de quelque lumiere & de quelque artifice durant Januit, pour fupléer, dansle befoin, au defaut de la lumiere du jour. Etde vray, ils ont apris des Chrétiens à fe fervit d'huyle de poiffon, & à mettredu Cotton dans des lampes, pour s’éclairer pendant les tenebres delanuit. Maisla plu- part n'ont point d’autres lumieres pour la nuit, qu’unbois fort fufceptible de feu , qu'ils confervent pour cét effet, & que lesnôtres, à caufe de celà, appellent bo de chandelle. En effet, il eft tout remply d’une gomme graffe; qui le fait brû- ler comme une chandelle: Et ceboisétant allumé , rendune fort douce odeur. Ainfi les Madagafcaroisufent la nuit, au Jieu de flambeaus & de chandelles, de certaines gommes qui prenent aifément feu, lefquelles ils mettent en des creufets de terre, obelles fontun _ beau & ue + fi le ds | es LL b ñ DANS RE KE , he : à 4 , Chapis DES ILES ANTILÉES 495 des Caraïbes vient à s’éteindre, Ils favent le fecret d’en exciter avec deusboisde Mahot, qu'ils frottent l’un contre l’autre : & par cette collifion ils prénent feu, & éclairent en peu de tems. C’eft ant qui les Brefiliens, au lieu de la pierre & du fuzil, dont'ils ignorent l’ufage, fe férvent de deus certaines efpeces de bois, dont l’un eft prefque aufli tendre que s’il étoit àdemy pourry, & l’autre, au contraire, extremément dur: Et par la friétion & l’agitation le feu s’y prend, & allu- me ce quel'onveut. Onvoità Paris le mème éffet, en frap- pant l’un contre l’autre certains bois d'Inde, qui fe trouvent dans les cabinets des curieus. Ceus qui ont voyagé vers l'embouchure de la Riviere des Amazones, raportent qu’ils y ont veu des Indiens tirer du feu avec deusbâtons, maïs d'une faffon differente de celle de nos Caraïbes. Car en ce quartier-là , ils ont aufli deus morceaus debois, l'unmol, qu’ils applatiflent en forme de planchette, _& l’autfe qui efttres-dur, en forme de bâton pointu par le bout, qu'ils piquent dans celuyquieft mol, lequel ils tien- nent arrefté contre terre fous leurs pieds. Etils tournent l’autreavec les deus mains, d'une fi grande vitefle, qu’enfinle feu prend à celuy de deflous & il s’enflamme. Ercommeil arrive fouvent qu’une perfonne fe laffe en cét exercice, une autre reprend prontement lebäron, & le tourne avec la mé- me vitefle, jufques à ce qu'ils ayent allumé lefeu. Au refte, bien que plufieurs eftiment que ces faflons d'allumer le feu font modernes , il s’en trouve neantmoins des marques dans l'antiquité, comme on le peut voir dans T heophrafte. | = CHA De Lery chap. 19+ Esvre. de L Hifi. des plan Less GLOs HE El CHR . » 496 Histoire MORALE, Cha. 16 | is CHAPITRE SEIZIÈME. Des Repas ordinaires des Caraïbes. | Pa ae À plupart des peuples Sauvages & ] Barbares, font gou- chap. 9. lus & fales en leurs repas. Les Brefiliens mangent & boivent & parexcés, & fort falemenñt, à toutes heu- Panlle tes, & felevent même la nuit pour cét somabio) Les Cana- Fa diens font gourmans jufqu’à crever, & nefepeuvent même a réfoudre à laifler perdre l'écüume du pot. Jamais on ne les Aravel. Voit laver, nileurs mains, nileurs viandes. Ils ne favent non Far plus ce que c’eft que de s’effuyer en mangeant, & ils n’ont point d’autres fervietes que leurs cheveus & le poil de leurs Yoyez chiens, ou la premiere chofe qu'ils rencontrent. -Les grands pres Tartares en font de même. Ils ne lavent jamais leurs écuel- ot les, ni leurs marmites qu'avecle potagemême, & commet- tent d’autres vilenies, qui feroient trop horribles à reciter. Babe. Les petis Tartares ne leur cedentguere enfaleté , & en gours sp mandife, humant leurboüillon avec le creus de la main, qui %,€5 leur fert de cuillier pour en prendre: Et mangeant la chair Berge- des chevaus morts , fans fe donner la peine dela faire cuire "autrement, qu’en la laiffant une heure ou deus, entre la felle rs & ledos de leurs chevaus. Ainf, pour fortir de ces vilains € Blanc RAS é car. exemples, les Guinois, ceus du Cap de bonne Efperance, & alafo. certains autres Sauvages, devorent la chair cruë & puante, avec poil & plumes, tripes & boyaus, comme pourroient faire des chiens. Mais il faut donner aus Caraïbes la loüange d’être fobres, & propres enleurs repas ordinaires, aufli bien que ceus du Continent, encore que quelques uns d’entr'eus ne meritent pas cét éloge, comme il n'y a point de regle fi gencrale qui n'ait fon exception. Monfieur du Montel, : dis ne & fidele témoin, rend ce témoignage de fobrieté & dat propreté à ceus qu'ils a Veus à Saint Vincent , & ailleurs: Mais ils ne font pas rous fi retenus ni fi propres. Et ceus quilesont veus, entr’autres, à la Domisiques ne leur don nent pas çette qualité. | Chpas DES ÎLES ANTILLES. 497 _ Cepeuple, mange fouvent enfemble en la maïifon publi- que, commenousle verrons plus particulierement Cy aprés, ou pour fe divertir & faire la débauche, ou même pour s’en- tretenir de la guerre & des affaires du commun, comme au- trefois les Lacedemoniens. Les femmes, comme en quel- ques autres païs des Barbares, ne mangent point que leurs maris n’ayent pris leur repas, & ils n'ont point d’heure re- glée pour cét exercice. Leur eftomac eft leur Horloge. Ils _ endurent fi patiemment la faim, que s'ils retournent de la pe- fche, ils auront la patience de faire roftir le poiflon à petit feu, fur un gril de bois de la hauteur de deus pieds ou environ, fous lequel ils allumentun feu fipetit, qu'il faut quelquefois une journée, pour cuire le poiflon comme ils ledefirent. Il y a de nos François quien ayant mangé de leur façon, l'ont trouvé de fort bongoût, &cuitenperfeétion. Ils obfervent generalement en toutes les viandes qu'ils preparent, de les faire ainfi cuire fort lentement & à petit feu. - Ils mangent d’ordinaire aflis fur de petis fieges; & chacun d’eus a fa petite table à part, qu'ils nomment CAfatoutou, comme Tacite témoigne qu'il fe pratiquoit chez Îles anciens Allemans, & comme l’ondit qu'il fe fait encore aujourd’huy . dans le Japon. Parfois aufli ils mangent a terre, accroupis far leurs genous, & en rond les uns auprés des autres, Pour _ nappes, ils n’ont point de linge comme nous, ni de peaus comme les Canadiens : nide nattes ou de taffetas comme les _ Maldivois, nide tapis commé les Turcs, & quelques autres peuples, mais de belles & amples feuilles de Bananier tou- tes fraiches, quifont tres-propres à fervir denapes, étant de la grandeur que nous les avons reprefentées. Ce font auf leufs ferviettes, & ils en mettent fur eus pour s’y efluyer. ls fe lavent toujours foigneufement les mains avant le re- pas. Et même dans leur cuifine, ils ne touchent jamais rien de _ceque l’on peut manger, qu’ils n’ayent.les mains nettes, En- fin, dans tous leurs repas ordinaires, il paroit avec la fobrieté, uné propreté, que l’on auroit peine à s’imaginer parmy des Sauvages. _- Nous avons déja dit cy-deffus , que leur pain ordi- naire eft une certaine galette affez délicate, qu'ils appel- Ms L Rex lent An L- vre des Meænrs des An- csn5 Ale lemans. Lenfcer. chap. 26: 4 eyage Breves. 493 Hi1STOIRE MoRaALE, lent Caffave, compofée de la racine du Manioc. Elle fe +. encette forte, que nous fommes obligez de d’ecrircicy, pour la perfection de nôtre Hiftoire, bien que d’autres l’ayent re- prefentéeavant nous. La racine, bien qu’elle foit quelquéfois de la groffeur de la cuiffle, s’arrache aifément horsde terre. On la racle d’abord avec un couteau, pour emporter une : petite peau durequilacouvre. & puis on la rape ou grage (felon la frafe du païs) avec une rape ou grage platte, de fer ou de cuivre, de bonne grandeur : & on preffe la farine qui s’en forme dans un fac detoile, ou dans de longues chauñles, ou poches, quel’onappelleausIles Cowleuvres,induftrieufe- * ment tifluës de jonc, ou de feüilles de Latanier, par la main des _ Caraïbes, pour en exprimer le Suc. Les Sauvages, avant. qu’on leur eut porté de ces rapes, fe fervoient au lieudecela, de certaines pierres dures & picotées, qui fe trouvent fur leurs rivages. Elles font femblables à nos pierres pon- ces. Quand l'humidité du Manioc eft bien tirée, on pafñle la farine par un tamis, & fans la d’erremper avec aucu- ne liqueur, on la jette fur une platine , qui n’eft quel- quefois que de terre, fous laquelle il y a du feu. Lors qu'elle eftcuite d’un cofté, on latournede l’autre. Et quand elle eftachevée de cuire, on l’expofe au Soleil, pour la faire durcir davantage, & afin qu’elle fe puifle mieux conferver,. On ne la fait pas pour lordinaire plus épaiñle, que d’un petit doit, & quelquefoismoins, felon la fantaifie des Habitans. Elle fe garde plufieursmois. Mais pour la trouver meilleure, il la faut manger fraiche d'un jour ou deus. Il y enaquine. la quitteroient pas pour nôtre pain ordinaire. Et c’eft une merveille, que d’uneracine fi dangereufe defanature, l'on fache tirer par artifice, une nourriture fi excellente. . Ainfides Mores, mettant fécher au Soleil de certains Abricots mors, tels qui croiffent dans leur terre, & les faifant puis aprés, boüillir au feu,avec d’autres ingrediens , Enfontun Provse dont onufe fans aucun danger, & avec plaifir. Surtont , la Cafave que font les Sauvages Antillois eftex- tremément delicate. Car ils ont tant de patience à faire c® qu'ils entreprenent, qu'ils y reüfliffent mieus que les Fran- çois, qui fe précipitent ordinairement en leurs ouyrages, & He " que ie DES ÎLes ANTILLES: |. 498 qui n'ont pas fi tôt commencé qu'ils voudroient avoir ache- _vé. Mais nos Caraïbestravaillenta loifir, & ne confiderent pas le tems qu'ilsmettent en leur occupations, pourveu que F ouvrage foit bien fait. Quefi quelques Européens, qui ont ufé de la Caffavè, fe plaignent que cette nourriture n'eft pas faine, qu'elle pâte | l'eflomac, qu'elle corromptlefang, qu'elle change la cou- leur, qu’elle débilite les nerfs, & qu’elle defféche le corps : il faut confiderer, que comme l’acoutumance eft une feconde nature, fibien que plufieurschofes, quoy quemauvaifes en elles mêmes, lors qu'on lesa acoutumées, ne nuifent point à la fanté, auf à l’oppofite, celles qui de leur nature font bon- nes & innocentes, voire les meilleures; fi on nelesa point acoutumées, font par fois préjudiciables & nuifibles. Et pour montrer cetre verire, c'elt que par cette faute d’acoutuman- ce, enla même forte que quelques uns de nos gens fe plais- nent de la Caffave, les Hiftoriens nous rapportent que les Brefiliens étant enfermez avec les Hollandois au Fort Sainte Marguerite, trouvoient étrange le pain & les viandes qu’on leur diftribuoit comme aus foldats, & dontil leur falloit vi- vre; & fc plaignoient qu’elles les rendroient malades, & les faifoient mourir. Et à ce propos, eft encore extremément remarquable, ce que nouslifons dans le Voyage de Monfieur des Hayes au Levant. C’eft que ce perfonnage ayant à fa ta- ble quelques petis Tartares, qui ne favoient ce que c’étoit que de pain, illeurenfit manger, dont ils penferent mourir deus heures aprés, que ce pain qu'ils avoient mangé com- mença à S’enfler, & à leur caufer de grandes douleurs. On fait auf, parmy les Antilloïs, une autre forte de pain avec du blé d’Efpagne, qu'on nomme Cfzys. Les Anglois qui habitent la Vermoude n’en ufent point d’antre, Quel- ques uns mangent aufli au lieu de pain, la racine appellée Patate, dont nous avons fait mention cy-devant. Pour ce qui eft des autres vivres dontufentles Caraïbes, leurs mets les plus communs, & dont fe fervent aufli les Caraïbes du Continent, font les Lezards, le Poiffon de tou- tes fortes, excepté la Tortuë; & les Legumes,; comme les Chous,les Pois, & les Féves. Mais Icur plus ordinaire man- pu! RE 2: get Moveañ en la Re- lation de le guerre faite au Brefilene sre les Hoëan- doss €$ €s Por TETE Voyagt de Frans £oss Cats- ches. so, HISTOIRE MORALE» Du. ger (bien au contrairedes Madagafcarois qui ont cettenout-. k. riture en horreur) eft de Crabes bien n’étoyées de leurs Co ques, & fricaflées avec leur propre graifle , & avec du jus de Citron & du Pyman, qu'ils aiment éperdument, & dontils rempliffent toutes leurs fauces. Neantmoins, quandils re- çoivent des François, ou d’aütres Européens, ils n’en font. pas G prodigues, & ils s’accommodent en celaà leur goût, par une complaifance & une difcretion qui n’eft pastrop Sau- vagc. Ils appellent le dedans de la Crabe Taumaly : Etc’eft de cela qu’ils font leur ragout le plus ordinaire avec de l’eau, de. la mouchache,ou fine farine de Manioc, & force Pyman, Pour. le deffert ils ufent de fruits comme nous. Et d’ordinaire ils fe contentent de Figues, de Bananes, on d’Ananas. Que s'ils mangent de la chair, & des chofesfalées, c’eft feulement par complaifance enversles Etrangers, pour n’être point impots tuns à ceus qui les reçoivent, & pourgratifier ceus qui les. vontvoir, Caralors, ilsappreftent la plupart des viandes fe- lon leur goût. Et c if : à cela qu'il faut ajufter ce que nous avons dits qu'ils nemangent jamais de Sel, de Pourceau, ni de T ortuë, nide Lamantin : lleft vray, qu ‘ilfe trouue parmy ce Fesble certains hom= més extrémement pateffleus & melancoliques qui menent une miferable vie; Carilsne fe nourriflent que de Burgaus,.. de Coquillages, de Crabes, de Soldats, & de femblables in- fetes, Ils ne mangent aufli jamais de potage, nide chair fi. ce n’eft de quelques Oifeaus qu'ilsboucanent, e’eft à dire» qu'ils font cuire fur la braife, avecleur plume, & fans les: éventrer, & pourtout ragoût , ils ne fe fervent que d’eau de. Manioc, quiperd faqualité venimeufc étant boüillie, define farine de Manioc & de force Piman. | ; 1ls affaifonnent quelquefois leurs viandes , d'un déteftable! affaifonnemenr , c’eft à dire de graiffe d’Arouâgues, leursen= nemis irreconciliables. Mais cela n’a pas de lieu dans leurs repas ordinaires : C’eft feulement en des jours folemnels de débauches, & de réjouïffance. _. Quantäleurboiflon. tout ainfi qu'en plufieurs endroits rs l'Amerique , les mêmes grains de Æfays qüi fervent à faire du pain, font employez à la compofition d’un bruvage quitient Lem: Chapi6é DES ILES ANTILLES sor lieu de vin: & que parmy nous, des mêmes grains de blé qui _compofent nôtre pain, nous faifons auffi de la biere ; de mê- me, en ces Iles, avec les racines des Patates & du Manioc, qui _ fervent de pain, oncompofe deusbruvages, qui font ordi- 4 naires dans le païs. Le premier & lepluscommun, quife fait de Patates boüillies avecde l’eau, s'appelle C#/4by. 1 raffrai- chit & defaltere merveilleufement, & il aaufli une vertu ape- _ ritive qui fait évacuér tout le fable & toutes les vifcofitez des parties bañles. D'où vient que l’on ne voit aucun de ceus qui s’en fervent ; fe plaindre dela gravelle. L'autre bruvage que on nomme Ovicow, (d’un nom approchant du Czouis des Brefiliens) fe fait avec la Caffave mème, boüillie pareillement dans de l’eau. On le coule au travers d’untamis que les Sau- Yages nomment Hbichet. Ce bruvage eft plus excellent que . le Maby & n’eftguere different dela biere, encouleur, & en | force. Les Indiens le rendent fort agreable, mais d’ailleurs d’une telle vertu, que fi l’on en prend beaucoup, il enyvre comme du vin. Ils le font de Caflave bien riffolée fur la pla- tine, puis mafchée par des femmes, & verfée dans des vaif- feaus pleins d’eau: où aprés avoit infufé & bouilly environ deus jours par fa propre vertu, fans feu, comme fait le vin nouveau, oncouleen fuite l’infufion par un tamis. Et le fuc qucl’onentire étant confervé deus autres jours, fe trouve dans fa perfeétion pour étrebu. Au refte, pour fairebouillir cette compofition, on met dans le vaiffeau deus outrois raci- nes de Patates, rapées bien menu. Et il eft vray que cette coutume que les Sauvages obfervent, de mafcher la CaMaive _avantquede la jetter danse vaiffeau, eft dégoutante au pof- {ible: Maisauf eft-ilconftant , que le bruvage qui eft com pofe de cette forte, eft incomparablement meilleur que celuy qui eft fait autrement. On faitaufli le Oufcou d’une autre fafon, fs racines de Patates. -C'eft qu'aprés que la Caffave eft tirée de deflus læ platine, onla met quelque part dans la cafe, & on.la couvre de feüilles de Manioc, & de quelques pierrespefantes, pour la faire échaufer. Ce qui fe fair durant trois ou quatre jours. . Aprés quoy onla met en plufieuts morceaus, que l’on étend: fur des feüilles de Bananier, & puis on les arrofe d'eau lege- Rte z rements, cd so2 _ HISTOIRE MORALE; | Chap. 16. | rement, & on les laiffeà découvert. Quand la Caffave à de- 4 meuré une nuit ainf, elle devient toute rouge : Et c’eft … alors qu’elle eft bonne à faire le Ovicow, & qu'elle fait boüil- . lir fon eau fans racines de Patates. On la nomme PA pourrie. Outre ces deusboiffons, qui font les plus ordinaires dans les Antilles, on y fait encore en divers endroits , 'plufieurs : vins delicieus. Les Négres, qui font efclaves en ces Iles, font des incifions aus Palmiftes épineus, d’où il diftille une certaine liqueur femblable à du vin blanc, laquelle ils re-. cucillent dans plufieurs petites Callebaffes qu'ils attachent aus ouvertures de cesarbres, qui en rendent chacun par jour deus … pintes, & quelquefois davantage. Les plusanciens Auteurs nousapprennent, que parmy les Orientaus le vin de Palmes étoit fort enufage, commeil y eft encore aujourd’huy : L’on s’en fert aufli en quelques endroits de RER comme en | CMonomotapa. | Deplus, onfaitaus Antilles, avec des Banenes: unautre bruvage qui fe trouve aufliailleurs, & que quelques uns ap= pellent Coufsem. Maïs parce que ce vin, quoy que tres-agrea- ble & plein de force, caufe de grandes ventofitez, iln ‘ef guéreenufage. - Enfin, ontire en ces Iles un excellent vindeces precieus rofeaus quidonnent le Sucre. Er c’eft le bruvage le plus efti- mé, qui fe fafñle aus Antilles. On 1: nomme Vis de Cannes : & il y a un fecret particulier pour le faire. 11 s’en fait plus à Saint Chriftofle qu'ailleurs, à caufe de la quantité de Cannes qui y font plantées. Le fuc a ces Rofeaus, s' exprime dans un moulin dreffé tout-exprés pour cétufage. Etpuis, on le pu-. rifie avec le féu , dans de grandes chandieres. Il fe peut con- ferver long- tems en fa bonté: Etil a une douceur & une certaine pointe, qui le feroient préfque pafler pour du vin d’Efpagne, On en faitaufli de l'eau devie, quelon appelle. Ean de viede Cannes, & qui fe garde micus que le vin de ces . mêmes Rofeaus. lln’y arien dans la matiere de ces repas ordinaires de nos: Antillois, qui puiffe fembler tenir du Sauvage, que peut être les Lezards, Mais cela ne vaut-il pas bien les Grenoüillés Se ji: ARS ! TRES + NS - es L “a Dan. re DES LES MANSELLES 503 | &les Efcargots, dont quelques uns mangent en ces quartiers ? _Etqui ne faitqu’en Efpagne il fe mange force Afnons ? Aprés tout, que l’on compare le vivre de nos Caraïbes avec celuy des Canadiens ; qui outre l’écume, dont nous avons ditqu'ils Er ré mangent , boivent d’ordinaire de vilaine & fale graiffe, & pre. 7784 ferent la chair de l’Ours à toute autre viande : Avec celuy des ee habitans de l'Ile de fort-aventure, l’unedes Canaries, qui vor es mangent du fuif en abondance : Avec celuy des Tartares, Sa des Perfes, des Chinois, des Huancas, Nation du Perou, & Fe des Négresd’Angole, quivivent communement de chair de Cheval, de Chameau, de Mulet,de Loup, de Renard, d’Afne, de Chien, & du fangdeces Animausenbruvage: Avec ce- luy des Indiens de l'Orient, qui trouvent la chair de Chauve- fouris aufli delicieufe que celle de la Perdrix: Avec celuy des Brefiliens qui fe nourriffent de Crapaus, de Rats, & devers: Ou enfin, avec celuy des Tapuyes, & de quelques autres. Barbares, qui mangent des cheveusd’écoupez fort menu, & meflez avec du miel Sauvage, & qui faupoudrent leurs vian- desde la cendre des corps brülez de leurs parens, & la païtrif- ent avecde la farine; Ce qui caufe de l'horreur feulement à le reprefenter: Que l’on faffe, dis-je, une comparaifon de tous ces infames ragouûts avec ceus de la Nation Caraïbe; Et lontrouvera, que dans fon manger ordinaire, elle n’a rien de barbare. 1lne faut pourtant pas diffimuler , que quelques uns de nos François raportent, qu'ils ont veu parfois les _ Caraïbesmanger des pous & des chiques qu'ils avoient pris, comme on le dit des Mexicains &:des Cumanois: Mais ils n’en font pas un ordinaire, & cela eft particulier à quelques- uns d’eus, joint qu'ils ne le font pas pour aucun goût qu'ils trouvent en ces vermines: tmais feulement pour fe venger & rendre la pareille, à ce qui leur à fait du mal. Aurefte, l’horreurqueles Caraibes avoient autrefois de manger du Pourceau, de la Tortuë, & du Lamantin, pour les plaifantes raifons que nous avons alleguées cy deffus, afloït jufqu'à telpoint, quefiquelcun des nôtres leur en avoir fait | manger, par furprife, & qu'ils vinfient puis aprés à le favoir, _ ilss’envengeoient affurement toft ou tard. Témoin ce qui ari- Va à une perfonne de marque d'entre nos François. Ce per- lonage 504 HiSTOrnE :MORALE, Chapi6 » fonage recevant vifire du Cacique, ou Capitaine des Sauv4= ges de l’Ile où il étoit, le traitta par raillerie de Lamantin de à guifé en faffon d’ des le Cacique, dans la défiance où il étoit de ce qui luy arriva, pria le Gentil-homme de ne le point + tromper, Et fur l’affarance qui luy en fut donnée, il ne fit point de difficulté de manger. Le difner étant achevé nôtre Gentil-homme découvrit la fourbe au Cacique & à fa com- . pagnie, pouravoir le plaifir de leurs difcours & de leursgri- maces, Mais ils eurent aflez de pouvoir fur eus-même, pour - diflimuler leur dépit. Et le Cacique fe coritenta de dire en riant, He bien Compere nous n'en mourrons pas. Quelque tems aprés, le Gentil- -homme luy fut rendre la vifite. Il le receut avec toute forte de civilité, & luy fit grand chere. Mais il avoit donné ordre à fesgens, de mettre danstoutes les fauf. fes de la graifle d’Arouäâgue, dont les principaus Indiens ont … toujours provifion chez eus. Aprés que cétinfame repas fut finy, le Cacique plein de joye, demandä au Gentil-homme & à fa troupe, s'ils fe trouvoient bien de fon traittement. Eus s’en joüantforr, & luy en faifant des remercimens, il leur apprit famalice, dont la plupart eurent tant de créves cœur, & tant de bondiffemens & de dévoyemens d’eftomae, qu'ils en furent grandement malades. Mais l’Indien femo- quant d’eus difoit, qu'il avoit fa revanche. Ceus qui ont frequenté dépuis peu les Caraïbes.de Ja Do- minique & dela Martinique, difent qu’à prefent , ils ne font pourla plupart aucune difficulté de manger du Lamantin , de la Tortuë , du Pourceau, & même de toutesles autres vian- des qui font enufage parmynous, & qu'ils fe rient de cette u fimplicité , quiles ‘obligeoit des’enabftenir, craintede parti ciper à la nature & aus qualitez deces Animaus. ” | Is ont aufli beaucoup relâché de cette grande feverité, dont ils ufoient à l'endroit de leurs femmes. Car elles ne vont plus que rarement querir la pefche de leur mary. Et quanduls _ k ontété à la pefche, le mary &.la femme mangent enfemble, | Elles vont auf plus fouvent au Catbet, pour participer au” _Feftin & à larcjouiffance publique, qu’elles ne faifoient avant gueleurs marys euflent eus la communication fanion des étrangers, Cp 17 DES [Les SNRIGRES 50$ CHAPITRE DIXSETTIÈME. Des Occupations & des Divert emens des Caraïbes. Lexandre le grand eftimoit que letravail eftoit une chofe vrayment royale. Et l’on voit encore ajout: d’huy dans le Serrail d’Andrinople des outils, dont Amurat fe fervoit pour faire des fléches, qu'il envoyoit à des _ principaus de f4 Porte. Les Peruviens meritent aufli fur ce fujet-là, beaucoup de louange. Car les Royÿs du Perou avoient fait des Loys & érably des Juges particuliers contre les Fai: z neans & les Vagabonds. Jufques- là, qu'il falloit queles enfans decinganss ’employafent à quelquetravail qui fuft confor- me à leur âge: Etils n’efpargnoient pas même les aveugles, lesboiteus, & lesmuëts. Les occupant à diverfes chofes, où l’on pouvoit travailler de la main. Mais il s’eft trouvé des Peuples fi lâches, que de tenir l’Oifiveté pour une chofe fort belle & fort honorable. Et les Hiftoriens des Indes Occi- dentales nous parlent de certains flupides & brutaus Indiens dela Nouvelle Efpagne & du Brefil, quironflent tout le long du jouren leurs cabanes, pendant que leurs femmes leur vont chercher des racines pour manger. . Nos Caraibes, ne reffemblent pas à ces Faineans. Caron les Voir travailler & prendre plailir à diverfes fortes d’exerci- ces... Les principaus & ceus qui leur font les plus ordinaires, font lachaffe & la pefche,: où ils employent une bonne partie de leuritems, mais particulierement à la pefche. Onneles voit guerces fortir de. leurs mafons fans arc & fans fléches, Etils.font admirablement adroirs à sen fervir, s’habituânrà cét exercice, comme les Turcs,-des er plusteudre ieuneñe. Ce qui fait qu'avecle tems, ils fe rendent fi habiles & fa rez àtirer de l'Arc, que de cent pas ils mettroient dansun . quart d'écu, fans jamais y manquer. Etmêmeens’enfuyant ils. favent tirer adroitement.fur leurs ennemis, foicnt autrefois. les Parihes. : 4 y-aVOit ENCOre plus de fujet d'admirer ces gauchers Benjamites qui frondoicnt à unche- veu, &n ÿ falloient point. He #7 SL Lors Up come. fai Plat. es lavse de ce Drin- ce. Voyage de des Hayes an Le- Vañt. Com mentasre Royal de Garcs- baffo, LS. cui. 9 L.6.10.3ç Herodoete lv. s. De Luact en [0% Hijtosre de l'A- mere Que Au LY- vre des Inges chap. 2 6% proyez far sous Jean de Lery * @hap. 12. Joféph Acofia lv. 3. c. 15. €9 Franc, Pirard, 1 part. chap. 2. 566 : HisTOtRE Moi ares Chap-r7 Lors que les Caraïbes fortent pour la chañfe ou pour Fee pefche, ilsne menent pas avec eus leurs femmes, ‘comme certains Brefiliens qui les fonttoujours matchert devant eus, tant ils font jalous: Mais quand ils ont pris quelque chofe, ils je laiffent fur le lieu , & les. femmes étoyent autréfois obli- . gées à l’allerchercher, & à l'apportérau logis, Comme nous. l'avons déja touché. ‘Oh dit que les Canadiens en font tout de même, | H n’y a point chez lés Antillois, non plus que parmy tous - les autres Indiens Occidentaus, de difineibs de qualité pout. la chafle : & l'exercice en eft auffi libre au ps pee d’en= tr'eus, qu’au plus stand. Comme en leurs repas particuliers, ilsne fe fervent d'au cune chair, s'ils n’ont des Etrangers à leurtable, aufli ne vont. ils pour l’ ordinaire qu'à la chañfe de Lezards.° Et s'ils. font quelque autre chafle, c'elt en des occafionS extraordinaires, « lors qu'ils veulenttraitrer qu'elques-uns de leurs amis d’entre hos Européens : où bien lors qu'ils les vont voir, & qu ils. veulent tirer d'eus quelque marchandife en échange, | ° Ils font merveilleufement fubtils , à pécher à l'himeçon & à tirer le poiffon avec la fléche. Et l'on ne fautoit affez adè mirerleur patience encér exércice. Car ils y demeureroient quelquefois un demy jourtout entier fans fe laffer. Er lors qu'aprés avoir guetté long-trems le poiffon , ils viennentenfin : à cnappercevoir quelque gros & puiffant, qui foit à leur gré. & bien à leur main, ils tirent deflus aveclafléche, de méme que les Brefiliens. Et commeils font excellemment bons /naè geurs, iis fe jettent à l’inftanteus-mêmes à corps perdu aprés lafléche, pour fe faifirdeleur proye. Maisoutrel’hamecon & la fléche avec quoy ils prennent le poiffon, ils favent auf heureufement plonger auprés des rochers, &'le tirer des cavernes où il eft caché: femblables en cela aus Floridiens, qui n’attendant pas quele poiffon vienne à fe montrer, le vont chercher jufqu’au fond del’eau, & l’yaffomment à coups de mafluë; Sibien qu’on les voit remonter tenant d’une maïitt la bette. . &del'autre la mañlüë, C'eft une chofe commune entre les Sauvages, ‘que d’eftre ainfi grands nageurs ;” “Etlon affüre nommément des Brefiliens, des Maldivois , dequels | ques y LR ; Re, : ; £ } ED : à NS 5 Chap.17 DES ÎLES ANTILLES %o ques Peruviens, & des habitans des Iles des DPPRS TRE jp pafñfer pour anfibies. qe Que files autres inventions pour la pefche viennent à - _ manquer à nos Caraibes, 1ilsont recours à un certain bois _ Iequel ils battent, l'ayant coupé en morceaus. Puis ils le jet- tent dans les érangs, ou dans les lieus où la mer eft coye. Et c'eft comme une momie fouverainé, avec quoyils prennent du poiffon tant qu'ils veulent. Mais ils ont cette prudence, de ne fe point fervir de cedernier artifice, que dans la neceñi- té, pour né pas faire untrop grand dégaft, “Aprés la chaffe & la “as s 1155s ‘adonnent à à plufieurs me- nus ouvrages, comme à faire des liéts decotton, fort bien tiflus, & qu'ilsnomment Cawmsacs. Les femmesfilent le cot- ton{ur le genou, & ne fe fervent pour l'ordinaire, ni de fufeau, nide quenoüille. Mais il y en a à la Martinique, qui en ont appris l’ufage de quelques Francçoifes. Elles je favent aufli parfaitement bien retordre : Mais dans quelques Iles les hommes font la tiffure du li. ‘Ils font outre cela, des pa- nicrs de joncs & d'herbes, de diverfes couleurs: desfiéges de bois poly, qui font tout d’unepiéce, de pctitestables, qu’ils appellent Afatoutou, tiflués de feüilles de Latanier, des tamis nommez Æibichets, des Catolis, qui font de Certaines hottes, plufieurs fortes de vafes, & de vaifleaus, propres à fervir à boire & à manger, qui font polis peints & enjolivez de miile grotefques & enluminures agreablesàlaveuëé. Is font auf quelques petis ornemens, comine les ceintures, les chap peaus& les couronnes de plumes, dontils fe parent les jours delcursfeftes & de leurs rejouiffance publiques. Et les fem mes font pour elles des demy-botines, ou des demy-chauffes decotton. Mais fur tout, ils s'appliquent avec foin à facon: ner & à polir leurs armes, c’eft à direleurs arcs , leurs Aéches, & leurs boutous ou mafluës, qui fe font de bois dur: & poly, & quiparie manche, font cutieufement ornez de bois x d'os de diverfes couleurs. is ne font pas moins fotditeus de travailler à leurs Pirawe pues. ou vaifleaus de mer, & à tout leur appareil de paix & de guerre. Ils les font d’un (eul grosatbre, qu'ils creufent, ra- - bottent, & PPRAeRE avec une dexterité nonparteille. Les ME STE z gtai- 508 _HisToirRE MORALE, ÆChap:ir. grandes Piraugues font par fois huvées, comme on parle, par Havés haut, tout à l'entour, fur tout au derriere, de quelques plan- AE *. Chesajoutées. Quelquesfois il ypeignent leur CHÆaboya, Par baufés. fois des Sauvages, ou des grorefques.. Ces chalouppes portent fouvent ufqu! à cinquante hommes, avec leurs mu- nitionsdeguetre. Avant qu'ils euffent communication avec les Chrétiens, qui leur ont fourny toutes fortes de coignées, & d autres outils de charpenterie & de menuyferie, ils avoient mille peines à venir à bout de faire leurs vaifleans. Carils. : ne Lery étoient obligez, comme les Virginiens & quelques autres PT5 Sauvages, à mettre le feu'aù pied des arbres, & à lesenviron=. ner de moufle moüillée un peu au deffüs du pied, pour cmpe- fcher le feu de monter: Et ainfi ils minoient l'arbre peu à} peu. Aprés, ils fe fervoient pourtailler le bois, decertaines pierres dures, aiguifées par le bour, avec lefquelles ilcou= poient & creufoient leurs Pirangues. Mais c'éroit avec une longueur de tems fi penible & fiennuyeufe, qu'ils reconnoif fentaujourd’huy l'obligation qu'ils nous ont, de les en avoir delivrez, & s’eftiment heureus de ia facilité qu’ils ont à pre. fent en leurs ouvrages, parle moyen deferremens dont ils. fontpourveus. Ainfiles Peruviens, tenoient pour un fi srand Gate bonheur ces outils que leur avoient apporté les Européens, pare que l’ufage des cifeaus s'étant introduit dansie Perou par le mentaire MOYEN ps Efpagnols, il yeut un Indiende qualité, qui n’en Royal, pouvant aflez louëér l'invention, difoit à l’un d'eus, que tél quand les Efpagnols n’auroient fait autre chofe que leur aps porter des rafoirs, des cifeaus , des peignes, & des miroirs, cela pouvoit fuffire pout les obliger à leur donner liberale- ment, tout ce qu'ils avoient d’or & d'argent. Les Caraïbes, s’employent aufli à faire des pots de terre de toutes fortes, qu'ils favent cuire en des fourneaus comme nos potiers. Er avec cette même terre, ils forment des pla- tines, fur léquelles ils font cuire la Cafave. | L'adrefe qu'ils ont à tous ces petis exercices que nous Ves | nons de décrire » témoigne affez qu'ils apptendroient aifé- ment plufieurs métiers de nos attifans, fionleur en donnoit la connoiffance. Ils fe plaifent fur tout à manier les outils des charpentiers & des menuyliers : Et fans avoir appris coms ut È a d #0 PER 4 AR | 2 à Chap.17 DES ILES ANTILLES 509 comme il s’en faut fervir, ils en favent faire plufieursouvra. _ ges, depuis que nos gens les en ont acommodez. De quoy _ donc vrayfemblablement ne feroientils point capables, s'ils étoientinftruits & exercez par debons maiftres, & qu ’ils fig fent leur aprentiffage fous eus. Comme ils aiment fort les divertiflemens & th tecteA= tion, auffi recherchent ilsavec pañlion tout ce qui peut les entretenirenbonnehumeur, & chaffer la melancolie. Pour céteffet, ils fe plaifent à nourrir & à apprivoifer grand noïn: bre de Perroquets & de petites Perriques, ou Arrats, auf- quels ils aprennent à parler. | Pourfedivertir, ils font auffi plufieurs inftrumens de Muñ- que, fionles peut appeller ainfi, furlefquels ils forment des accords. Comme entr'autres fur de certains Tambours faits d’unarbre creus , fur léquels ils étendent une peau d’un feul cofté , à la façon des Tambours de Bafque. On peut joindre à cét exemple une forme d'Orgues, qu'ils compofent avec des Callebañes, furléquellesils pofent une corde faite d’un fil de rofeau, que l’on nomme Prte. Et cette corde étant tou: chée rend un fon qui leur agrée fort. Le concert de beau: coup d’autres Sauvages, ne vaut pas nmieus que le leur, & .n’eft pas moins pitoyable .& moins difcordant à l'oreille des François. Ordinairement auffr, le matin à leur lever ils fe mettent à jouëér delaflute. Ils en ont dediverfes fortes, aufla _ bien polies que les nôtres : quelques unes faites des os de leurs ennemis. Et plufieursd’entr'eus, en favent jouér avec autant de grace que l’on pourroit s'imaginer pour des Sauva- ges, bien qu en celails n’approchent pas des François, Pen- dant qu'ils jouént ainfi de la flute, les femmes appreftent le déjeuner. Ils paffent encore le tems à chanter quelques aits, qui ont des refreins affez agreables. Et avec ces chanfons en la bou che, ils fe divertiflent quelquefois un demy jour, aflis fur de: petis fiéges, à voir rôtir leur poifon. Ils mettent auff des. pois ou de menus caillous, commeles Virginiens, en des ça- lebafes , par le milieu defquellesils font pañler un bafton, qui leur fert de manche. Er puis ils les font fonner en les re - muant. C’eft ainfi qu'en ces quartiers les femmes appaifent EE 2e} TE, SIL 3 & 516 HiuSTOTRE MoRALES & divertifflent les enfans avec des jouëts & des so D La plupart des chanfons des Caraïbes, quifont fortfrequens tes en leur bouche, font des railleries fanglantes deleursen+ nemis. Lesautresfont fur des oifeaus, ou fur des poiffons; ou fur des femmes, & le plus communement fur quelque bas | _ dinerie. Etilyena beaucoup qui n’ont ni rime ni raifon:: = Souvent auffi nos Sauvages Antillois, joingnentladanfeàx « leur Mufique : Mais cette danfe cft auffibelle & aufli bien ” reglée, que leur Mufiquea de douceur & de juftefe. On voit une bonne partie de peuples Barbaress’adonnerà cétexercice, avec une pafñon démefurée, comme pour exemple les Bres filiens, qui auraportde Jean de Lery, danfent jour & nuit, Etnousavonsdéjadit, qu'il yen abeaucoup, qui font même confifter en danfes, leurimaginaire felicité de l’autre vie. Mais les Caraibes, ufent particulierement de danfes dans leurs feftins Solennels, en leur Carbet où maifon publique. À Cesfcftins fe font avec cetordre. Quelques joursavanteetté réjouïffance publique, le Capitaine en avertit touvesiesmais \ fons ; afin que chacun ait à fe trouver au Carbet,aujouraffis- " né... Cependant , les femmes font une forte deboiffon de. Caffaue rôtie, & mieus preparée que cclicdontilsfe fervent « à l’ordinaire.: Et comme ils augmentent la dofe des ingrez diens de cette boiffon, elle a auffi plus de force , & ellereft ca pable d'enyvrer auffi facilement que le vin. Les‘hommes de leuf cofté vont à la pefche, où à la chañie des Lezards. Car'pour les autres viandes, nous avons déja dit qu'ilstn’en préparent point pour leur table, s'ils n'ont des étrangersà | traitter.. Aujour nommé, hommes & femmes fepeignentlé | corps de diverfes couleurs & dediverfes figures, & fe parent de leurs couronnes de plumes, de leurs plus belles chaines, 8 nu de leurs plusbeaus pendans d'oreilles, colliers, bracelets, & autresornemens. Lesplusgalans fe frotrent le corps d’une certaine somme, & fouffenr deffus du duvet de divers oi. feaus. Enfin, ils fe mettent tous fur leur bonne mine, & s’ef- forcent de paroitre le plus qu’ils peuvent en cette folennité.. Equippez de la forte, & femiransenleurs plumes, ïls vien- nent à l'affemblée. Les femmes y apportent le bruvage & les mets qu’ mes ont. a & font extremémént foig- _ neufes LA NRC AÉENE se % ÆChapi7 DES ILES ANTILLES. sit | neufés qu'il n'y manque rien, qui puiffe contribuer à la ré- jouiffance. Nos Caraibes employent tout-ce jour, & la meil- leure partie de là nuit à fairebonne chere, à danfer, à s’en- tretenir, & à rire. Et dans cette débauche, ils boivenr beau- coup plus qu’à l'ordinaire : c’elt à dire én un mot, qu'ils s’en- yvrent: Les femmes mêmele font pargalanterie, Lors qu'ils peuvent trouver du vin & de l’eau de vie, pour mefler dans cette fefte, ilsne s'y épargnent pas non plus, & s’en donnént au cœur joye. Si bien quece que nous avons dit de leur fo- brieté ordinaire, n’a point de Heu dans ces rencontres ,"non plus que lors qu'ils fe prep sarent à allerà la guerre, ‘ou qu” ils en retournent. Quoy qu'au fonds is n 'aillent pas jufqu'àl’ex- té des Brefiliens, quidans leur réjouiffance, boivent deus ou trois jours entiers fans celler, & dans leur ane fe PU MER en toutes fortes de vices. | + Leur yvrognerie & leurs débauchés fone fréquentes. Cat ils.en font. 1. Pour tenir leurs! confeils de guerre. ’2; Lors. qu’ils retournent de leursexpeditions, foit qu'ils y ayentreufli ou non. 3. Pourlanaiffance de leurs premiers enfans mañfles, 4. Quand on coupe les cheveus à leurs enfans. ‘5. Quand ils _ font en! âge d'aller à la guerre : 6. Pour abatre ‘un jardin fe- lon leur file, c'eft à dire, pour conper des bois, découvrir & défricher laterre, & la preparer pour un jardin : 7. Quand ils: frainent à la mer un Vaiffeau neuf. 8. Et quand ils ont été: guéris de quelque maladie. Ils nomment cés. Affmblées: Onicon, & dépuis qu'ils ont converfé-avec les Frânçois;! Vin. oMais à l’ oppofi iteaufli, tant leur humeur eft en cela HSte- & contraire à foy même, ils font de grands & de ridièules. jeufneurs. Et 1.ils jeufnent lors qu’ils entrent en adoleféence: 2. Quandon les fait Capitaines, 3, À la mort de leurs Peres,. éu-de leurs Meres. 4. A la mort du Mary, ou de la Femme. $. Lors qu'ils onttué un ArOuâgue : c aies Mu ee tourne à rap honneur. | CU r ‘ed SZ . | Hisrouns MonaLes Gas LUE qi fo 1 :CHAP ITRE DIXHUITIÈME, … … Du Traïttement que les Crabe font a ces qe. re LA sitore les vont Difiter. r pistes 29114010) a iuotiidids ER icy où nos Chaihes trionfent en matiere de € civie lité pour des Siuvages. Car ils reçoivent avec toute fortede Courtoifie & de temoignages d ‘affection. les ÉtrangerS qui abordent en leurs les, pour leur: y rendre vifite. : Ils ont des Sentinelles ‘furle Huiel de lamer, dansla sic part des Iles qu’ils poffedenttousfeuls. Ces Sentinelles font placées fur Les ontsEnes , oufurles eminences. qui décou= vrent loin enmer,. & elles font pofées entelle forte, qu’elles ont:la veuë lur les lieus oùil.y.a un bonmotüillage pour.les Navires, & une facile defcente pourles hommes. .Sitoft que ces gens apperçoivent un Naviré, ou une Chalouppe venir à eus, ilsendonnentavis à ceusdesleurs qui leur font les plus, proches. Et enmoinsde Hien , VOUS VOYEZ parètre plufieurs petis Canosou, vaifleans, dans. chacun defquels iln ‘yaau plus que trois hommes, qui font dé putez pour venir rcconnoitre “qui vous étes, &quivous crient deloin, que vous ayez à le declarer, /Carilsne fe ficnt pasau pavillon, parce quefouvent ils yont ététrompez:.& ils reconnoifent à la voix fi l'oneft Ærançois, Efpagnol, Anglois,, ou Hollandois. Sur touton dit, qu *ils. reconnoiflent les Anglois. Onaflüre eque les Bre- filiens: &.les Peruviens ont l'odorat ( fubtil, .qu'au fair ils difcernent un François, d’ avecun, Et fpagnol. | Quand les Caraïbes ne font pas bien.afurez qui le on ef, &. | | qu’ ondefcend.à eus les armes à la main, & en polture de: leur malfaire , ils fe mettent en défenfe, ra faififent des avenuë les plus étroites de leursterres, mettent desembülcades dans les bois, & fans qu'ils foient apperceus, fuivent de l'œil leurs ennemis, fe reculant parles voyes égarées, jufqu’à ce qu ils ayenttrouvé leuravantage, & qu'ils ayent uny toutes leurs. forces. Et alors , ils décochent une grefle de fiéches fur ces | ENnE- _ ji Nies DA DUT) PA A TA à ME Chap.i8 DES ÎLES ANTILLES ‘46 ænnemis: Puis ils lésenvironnent, viennent aus mains, & Jes afommentavec leurs mafluës, Ils fonten quelques unes desllesungros, quieft par fois de quinze cens hommes, & davantage, À ce.qu'’ilparoift; car on ne peut pas favoir afluré- ment leur nombre, veu qu'eus-mêmesne fachant pas conter, n’en ont pas la connoiffance. Que s’ils fe fentent prefez de leurs ennemis, ils fe cachent facilement, & fegliffent parmy les buiffons heriffez d’épines extremément piquantes, fe cou- ‘ant adroirement pas deflous : Ou bien ils grimpent des ro- chers inacceffibles à tous autres; Ou s'ils font voifins de la mer, ils fe jettent dedans, & plongent: puis vont fortir à cent, voire à deus cens pas loin du lieu où vous aviez la veuë. Et enfuitte, ils fe rallient enfemble aus rendez-vous quileur “font connus, & viennent de nouveau à la charge, lors qu’on y penfe le moins, & que l’on croit les avoir mis en dé- xoute. Mais quand ils reconnoiflent que ceus qui abordent font . dedeur amis, qui les viennent vifiter, comme fi cefont des _ Françoisou des Hollandois, aprésleuravoir crié qu’ils font les tres-bien venus, ils vont en partie à la nage au devaut d’eus , entrent dans leur vaifleau , & lors qu'il approche de terre, s'offrent à les porter à bord fur leurs épaules, pour té- moigner leur afeion dés l'entrée. Cependant, le Capitaine Jluymême, ou fon Lioutenant , vousattendfurle rivage. Et lors que vous mettez pied à terre, ils vous recoit au nom de _ toutel’Ile, & vous fait compliment fur vôtrearrivée. Vous étesamdi-toft conduits en bonne compagnie au Carbet, qui ef la maifon de Viile, où les habitans de l’Ile, chacun felon l'âge & felon le fexe de leurs nouveaus hofes, viennent faire la bien-venué. Le vieillard complimente & carefñe le vieil- lard : le jeune homme & la jeune fille, font le même envers leurs femblables; & dans le vifage de toute la troupe, on peut lire clairement, la fatisfaétion qu'ils ont de vous voir. Mais le premier difcours qu'ils Vous ti:nnent, en vous abordant, eft de vous demander vôtrenom, & puis, ilsvous difentle leur. Et pour témoignage de grande affection, & d’a- mitié inviolable, ils fe nomment eus-mêmes du nomde leurs -hoftes.. Mais ils veulent pour la perfeétion de la ceremonice; RU : | | DE Are que T4 LS STORE LOSC FLE. S14. H ISTOIRE MORAL E, © ap.18 que celuy qu'ils reçoivent fe qualifie auflide leur nom. Ainfi ils font un échange de noms; Er ils ont la memoirefiheu- reufe à retenir les noms de leurs amis & comperes, qu’au bout de dix ansils s’eñh fouviendront fans aucune équivoque, & recireront quelque circonftance de ce qui s’eft paffé de confiderable en leur derniere entreveué. Que fionleurafait prefent de quelque chofc, ils me manqueront pas de ler4- mentevoir, pour témoigner leur reconnotflance, Erlilacho- fe eftencore en être, ils lamontreront àceluy qui laleuravoit auparavantdonnée. Aprés rousces complimens de Sansa ce qu'ils vous ont faits d’abord, ils vous prefentent des lis fufpendus,, qui font fort nets & foït blancs, & qu'ils tiennenten referve pourde pareilles rencontres. Ils vous prient de vous y repofer, & en fuite ils Vousapportentdes fruits; & pendant que lesuns _pourvoyent au feftin, les autres fe tiennent auprés de vous, pour vous entretenir, obfervant toûjours le rapport de l’âge & du fexe, Cétaccueil, fera trouvé fans doute, bien plus raifonnable que celuy des Caraïbes du Continent Meridional, quireçoi- vent leurs hoftes d'une facon fortbizarre, &qui efl fembia= bleà celle que pratiquent les Canadiens. (Car le :Caciquede ces Caraibes conduit enla maïfon publique, fans parler au- Cunement , celuy qui les vient voir; puis, onluy prefente un fiege & du Tabac, & on le laiffe ainfi quelquetems fans luy dire mot, jufques à ce qu'il fe foit repofé, & même qu'ilait achevé de humer fon Tabac. Alors le Cacique approche & luy demande s’il eft venu ? L'autre répondant qu'ouy , il fe fied prés de luy, & l’entretient. Puis aprés ceus ducom-. mun viennent, luy demandant en la même forte, s'ileftvenu? Et luy ayant prefenté à manger, ils s ‘entretiennent auf foft agreablement. . Or il eft bien vray, que nos Caraïbes Infulai- tes pratiquent dans la reception de leurs hoftes, envers ceus de leur Nation qui font étrangers de leurs Iles, la même cho= fe que les Caraibes du continent: Mais quand ils recoivent des François, & d’autres Européens, quine favent pas garder lefilencefilong-tems, ils parlentàä eus, & les entretiennent d’abord, comme nous avons dit, s’acommodant à leur:hu- À meur,. Chap:18 DES ILES ANTILLES. 513 meut, & contrevenant, pour leur Tr. aus regles de leurs propres ceremonies. “Mais, le feftin qu’ils leur veulent faire eft deformais prepa- fé. Voyons donc commeils s'ygouvernent. Ils donnent à chacun fa petite table, & fes mets à part, commeles Chinois. Les uns apportent des Lezards rotis, les autres des Crabes fricaflées : quelques uns deslegumes: & d'autres des fruits: & ainfidurefte. Pendant le repas, ils vous entretiennent, & vous fervent avec un foin merveilleus. On ne leur fauroit faire plus de plaifir, quede bien boire & debien manger, & ils ne ceffent de vous en conjurer fort amiablement, dé vous verfcrà boire, & de prendre garde fi chaque table eft bien fournic. Ilnefaut rien laiffer dans le vaifileau en buvant, fi vous ne voulez les mécontenter. Que fi vous ne pouvez manger toute la Caffave qu’ils vous ont donnée, il faut pren- dre lcrefte fur vous, & l'emporter; autrement, vous les def- obligericz. Ainfi les Turcs, quandils fe trouvent austables déleurs amis, ont acoutumé deremplir leursmouchoirs, & quelquefois les manches de leurs robes, de morceaus de vian- de & de pain, qu'ils emportent chezeus. Erparmy lesgrands Farrares, quand un convié ne pcut achever toute la viande quiluya été prefentée , il faut qu'il donnele refte à fon valet, pour le Juy garder, ou bien qu'il emporte luy même en fon éfcarcelle, où il ferreauflfi lesos, quandil n’a pas eu le tems de les bien ronger , afin deles achever aprés, tout à fonaïfe. Mäis parmy les Chinois, quand lé convié s'en retourne chez Juüy, les fervireurs du conviant à avec Fa _ mets "4 font reftez fur la table. | - Aprés le repas, les Caraïbes vous ménent promener en leurs maifons particulicres, &' en leurs jardins, vous mon- trébt leurs armés, leuts curioftez ;& leurs babiolés | & vous font prefent de MASTER où de queldiies menus ouvrages de eur façon. | ue fi l’on à envie de æéthantet quélque tems avec eus, lé lc tiennent à faveur &'enfont ravis, & jamaisils ne ceflent ‘de vous faire bon vifage, nine diminuënt leur bon traite- “ment. Mais l'on fe veut retirer, ils témoignent de la trit tee de vôtre départ, & demandent fi vous avez été mal- Art 2 traittez, Trigaut LL 67e Pusbes QUEUS 3 lo. 4. poy4ge de Ka- bruiquss er Ts tarte. Au Li- re des Maeurs des An- sens Al- lemans.. 6 HISTOIRE MORALE, Chap.18 traittez, pour vous en allerfitoft. Avec cetrifte vifageils vous reconduifent en grande troupe jufque au bord de la mer, & même vous portent dans la chalouppe, fivous le vou- lez fouffrir. Etdanscétadieu, vous recevez encore de leut main des prefens de fruits, qu’ils vous preffent fort d'accep- ter, difant à ceus quiles veulent refufer, Compere, Ji tu n'en as pas befoin pour toy-même, tules donneras àates matelots, \s appellent ainti, tous les ferviteurs & domeftiques de ceus à qui ils parlent. Ce motde CHWatelor, eftcommun aufli entre les François habitans des Iles, pour figniñier un Affocié. Et lors que deus habitans ont acheté, ou defriché une habitation enfemble, on dit qu’ils fe font ezwatelotez. Ondit que les Brefiliens & les Canadiens, font aufli quelques prefens ende pareilles ren« contres. Et Tacitc nonsrapporte, queles anciens Allemans régaloient de leurs liberalitez les étrangers qui les alloient vis fiter: Maisqu'ils demandoient reciproquement aufli quelque chofedeleurpart: Encefte occafion, les Caraïbes fe mons rent plus genereus: Carils donnent fans rien demander, Mais ce feroitune inciviiité, d'aller voir ces bonnes gens & de recevoir leurs courtoifi es, fans leur faite aufli prefent de quelque chofe. C’eft pourquoy les étrangers qui ies vont voir, ont toûjours quelques grains de Raffade ou de Cryftal, quelques hameçons, éguilles, épingles , ou petis couteaus, & autres menuës bagatelles.' Érà la fin du repas ils mettent fur | Ja petitetable, fur laquelle ils ont mangé, quelques unes de fées devant eus contre terre, le mary qui eft derriere elles, faitencore civilité, en difant Esbétomt, Voila ton bruvage, Et l’autre répond à césideus complimens 74, c’eft à dire, Bien, owgrand mercy. La Caffave dépliée veut dire, Mange ton foul, & emporte le refte. À quoyils nemanquent: Quand ils ont biendifné fans eftre interrompus de perfonne, chacun les vient faluer l’un apres l’autre, en luy difant Halea-ribon, c'eft à dire fois le bien venu. Mais les femmes ne fe meflent pas beaucoup dans cette ceremonie., :: Pour: eu$ ; quand ils s’en veulent aller, ils vont dire adieu à tous en particulier : Ce qu'ils expriment: par le mot de Hwichan, en leur lan- gage, à | Lire NP at LL D sn # rs rc ok £ MorALE, CHAPITRE DIXNEUVIÈME. | De ce qe tient lieu de Police che les Carl. plufieurs fortés de Capitaines. 1. Capitaine de Carber, ou de Village, qu'ils nomment Tiosboutouli hauthe. : C'eft quand üun homo une famille nombreufé, & qu'il fe retire à lécart des autresavecelle, & bârirdes cafes pour la loger, | & un Carbet où elle s’aflemble quelquefois toute, pour fe - réjobir, ou bien pourtraitter des affaires qui touchent leur Communaité. 11 eftdoncà canfe de cela, nommé Capitaine | de Famille, où de maifons, 2, Capitainede Piraugue ;ic’eft a dire; ou céluy)à qui appartient le vaiffeau,,;ou eeluyiquiÿ commaride quand on va en guerre ; &, ils fonc nommez Tiouboutoñli Cankoz:3. Entre ceus qui-cormmandent chaque yaifleau emparticulicéh:ils ontencoréunAmiralouun Gene ral déMmer: quicommande toute la Flotte. -Hslernémment RNhalenéuEnfnr ils ontlegrand. Capitaine, qu’ils appellent Ouboutou, & awpluriet Osboutonntim. C'eft'le mêmeque les Æfpagnols nomment Excique; comme quelques autresiins dichs;r& qactquefois aufi nos Sauvagesparimitationssdlseft : toute fa: V6 dépuis qu’ cf éberiàxcettecharge: 1e Giéperal de leur armées, &soh:luiy fait toujouirs grandhonneur; Hcons voque les affemblées du Carbet, foit pour les re jouiflances publiques, foit pour les deliberations dela guerre. Et il mars che toujours accompagné de toute fa maifon, & d’autres gens qui luy veulent faire honneur. Ceus qui oentle plus de fuite, font les plus confiderez. Si quelcunne luy porte pasle refpcé qu'il luy doit, ila droit delcver la main fur Iuy pour lc frapper. Iln’yena quedeusau plus dansunelle, comme à la Dominique. Ordinairement ils font aufli les Amiraus quand la Flotte marche. Ou bien c'eft quelque jeunehoms me qui pretend à la charge; & quife veut fignaler en cette oççafion, [ y aen ch aque Île des Antilles habitées pat les Caraibes, On. { dt à ee. ri LES :ANTFELES. 18 On parvient à cette charge par eleétion. Et'on ne peut être éleu que l'onnaittué pluficurs Aronâgues, où pour le moins un Chef, Les fils ne fuccedent pas plutôt queles au- ttes à lachargedeleurs Peres, s'ils n’en font dignes. Quand Je Grand Capitaine parle, chacun faitfilence. Etquandil en- tre au Carbet, chacun feretire pourluy faire place. Ilaaufii toujours la premiere, & la meilleure part du feftin. Le Lieu- tenant de ce Capitaine fe nommeen Sauvage, Osboutow mali arict, c'eft à dire proprement la trace du Capitaine, ou ce qui paroitaprésluy. Aucun de ces Chefs ne com Pad atoutela Nation, & nad empire fur les autres Capitaines. Mais quand les Ca- gaibes vont à la guerre, ils choififfent detousdes Capitaines, un General d’ Armée, qui fait la premicre attaque : Et la Cam- pagne étant finie, il n’anulle autorité que dans fonile. 1l eft bien vray, que s’ila gencreufement réüiy dans fonentreprife, -ileft toujours fort confideré dans toutes les Iles, Mais au- trefois, avant que le commerce que les Caraibes ont avec les étrangers euft alteré la plusgrand’ part de leur ancienne po- lice, n yavoitbien du myftere, & bien des conditions, pour obtenir. ce degré d'honneur. l falloit premierement , que celuy qu’on élevoit à cette Dignité, euft fair plufieurs campagnes à la guerre, & qu’au feûdetoutel'ile dontil devoit être éleû Capitaine, iks’yfuft porté courageufement & vaillammant. Aprés cela, il luy étoit ncceflaire d’êcre fi agile & fi leger à la courfe, qu'il fur- montaften cét exercice tous les compctireurs qui s’y prefen- toientavecque luy. Entroifiémelieu, le prétendant au Ge- netalat de l'Ile , devoit emporter l’avantage à nager & à plonger, fur tous les autres afpirans. Pour la quatriéme con- dition, il falloit qu'il portaîft uñ fardeau d’unetelle pefanteur, que tous ceus qui briguoient avecque luy, n’en puflent fou- tenir le poids. Enfin, il étoit obligé à donner de grandes ro de fa conflance. Car on luy déchiquetoit cruelle ment les épaules & les mammelles avec une dent d’Agouty. -Même fes plus grands amis, luy faifoient de tres-vives & pro- fondes incifions en divers endroits du corps. Etle miferable _qui vouloit obtenir cette charge, devoit endurer tout cela, fans nt. : faire: -$20 AHis Tone : Mo 280 » faire parètre le moindre figne de refentiment & de de 4 Au contraire, il faloit qu ‘il montraft un vifage fatisfair & -riant, comme s’il eût été le plus content & le plus aifedu monde. On ne s’etonnera pas tant que ces Barbares fouf. friflent untraittement fi cruel, pour aquerirquelque dignité, lors qu’on fe repréfentera que les Turcs ne. fe montrent : quelquefois pas moins cruels envers eus-mémes, par une pure galanterie, & comme pour un fimple divertiffement. Temoin ce que Busbequius nous rapporte au quatriéme li- vre de fes Ambafades; Ce qui feroit trop lens poire cn cét endroit. Pour revenir aus Antillois, cette ancienne ceremonie qu'ils obfervoient en l’élcétion de leurs Chefs, femblera fans doute, comme elle l’eft en effet, étrange & Sauvage. Maisil fe trouve parmy d’autres Nations quelque chofe defembla= Vincent ble. Car au Royaume de Chili, on élit pour Souverain Ca- nl pitaine, celuy qui peut porter le plus long-tems un gros are. chap. 7. Dre furfes épaules. Au pais de Wiapaco, vers la grande Ris SE vicre des Amazones, pour être fait Capitaine , il faut endus quer, la, TT, fanscrier, fans faire la grimace ; ni branler, ncuffurieus coups de houffine de chaque Capitaine, à troisdiverfes fois, Mais ce n’eft pas tout. Il faut encore fouffrir d’être dans un li de cotron au deffus d’un feu de feüilles vertes, quinerend que de la fumée épaiffe, laquelle montant en haut incom- mode beaucoup , comme l'ont peut penfer, le miferablequi cft G sot que de s’y expofér. Etileft obligé à demeurer là, jufqu’à être évanouï & à demy-mort. C ‘eft avoir une met- Veilleufe envie d’être Capitaine. Autrefois même, parmy les Perfes, on demandoit à ceus qui vouloient être Mois dans la confrerie du Soleil, des preuves de leur conftance, en qua- De Lery ttevints fortes de courmens. LesBrefiliens, fans y faire tant. “haR. 14 de façon, élifent pour leur General, celuy quialepluspris, & le plus tué d’ennemis. Et à prelent aufli, en quelques unes des Antilles, les Caraïbes fe rient eus-mémes de leurs an- ciennes ceremonies, enl’éle&tiondeleur Capitaine. Etpar- çe qu'ils ont remarqué que leurs voifins tiennent pour ridi- cules ces façons de faire, ils fe contentent de choifir pour. Chef celuy qui s'étant porté vaillammant dans les guerres, con- æ” + a? ' Ÿ à % LR * ÿ # Pat F s > inf FOIS ne ! A | . EU + 2% 4 ee Chap. th. DES ÎLES ANTILLES $2t contre leursennemis, s'eft pr la reputation de brave & de courageus. Dés quele Cacique eft receu dans la charge, ilfe voit ex- trémement honoré detous. On ne paroïift devant luy qu'avec ungrandrefpe&. Et jamais perfonne ne parle, s’il ne l’inter- roge, ou ne le luy commande. Ques’ilarrive à quelcun denc pouvoirt tenir fa langue, on entend les autres luy crier à lheu- remême, Cala la Bocca , qu’ils ont apris de l’Efpagnol Mais ce n’eft pastout que de fe taire en la prefence de leur Chef. lis font tous fort attentifs à fon difcours, le regardent quand” ilparle, & pour témoigner, qu'ils approuvent ce qu ildit, ils ont acoutumé de faire un foûris, acompagné d’un certain Hun-bun, Ces marques d'honneur n’ont rien du tout de Sauvage, & qui ne foit receu prefque partout l'univers. Maïisles Mal- divois ont une façon d'honorer bien particuliere : Car com- me ils eftiment une attion de mépris de pañer derriere une perfonne, aufli pour luy témoigner une grande déference, ils prennent leur paflage devant fes yeus, & fe baiflant le corps, difent en paffant, Ne vows déplaife. Les yuncas, peu- ples de l'empire du Perou, pour témoignerle refpe& qu'ils portoient à leur Dieu, entroient dans fon Temple à recu- lons, & enfortoienttout de même; Tout aucontrairede ce que nous pratiquons dans nos vifires & dans nos civilitez ordinaires. Les Turcs, eftiment la main gauche la plus hono- rable parmy les gens deguerre: les Javans croyent qu’on ne fe peut foumettre & avilir davantage qu’en fe couvrant la tefte: Ce quineferaporte pas mal à ce que Saint Paul dit de l'homme qui faitotaifon, ou quiprofetife ayant ia tefte cou- verte. Les Japonois tiennent pour une grande incivilité, de recevoir étant debout céus que l’on veuthonorer. Ils s ’af- fayent, & déchauflent leut fouliers lors qu’ils veulent faire honneur à quelcun. Au Royaume de Gago en Afrique, tous . les fujets parlent à genous au Roy, ayant en leurs mains un _ vafe plein de fable, qu'ils fe jettent fur latefte, Les Négres du païs d’Angole fe couvrent aufli de terre, quand ils rencon- trent leur Prince, comme pour témoigner qu'ils ne font de- . Vant luy que poudre & cendre. Les Maronites du Mont Vvy | Liban proyex Pecard, Linfcots Garcs- | laffo, des Hayes, CS an- ALTER 1 Cer. 155 MS de SR dd 522 HISTOIRE MORALE, do Liban rencontrant en face leur Patriarche , fe profternent 3: fes pieds pour les baifer. Maisluyles ed aufli-tôt, leur prefente la main , laquelle ils faififfent à deus mains, & l'ayant baifée , la portent fur leur tefte. Mais ceus du détroit de Sunda ont une coutume tout à fait étrange. -C'eft que pour faire honneur à leurs Superieurs, ils leur prennent en main le pied gauche, & leur frortent doucement la jambe de- © puisle pied fau au sededt Etenfuite, ils leur frottent de même le vifage jufques par deflus la tefte. Jugez fi cette action-là feroit citimée fort refpettuëufe en ces quartiers. Tout cela montre que l'honneur mondain, qu’elqu ‘il puiffe être, hors la vertu, ne confifte au fonds, que dans l'opinion & dans la coutume, qui different, & quibien fouvent fe cho- quent, felon la diverfité & la contrarieté du caprice des Nations. Pour revenir au Cause de nos Caraïbes, fon office ef de prendre les refolutions pour le tems de la guerre, d’en or= donner les preparatifs,& d'y aller à la tefte de fes Compagnies. | C’eft aufiluy qui convoque les affembléesdefonlle, & qui : commande les réparations du Carbet, quicft la mai (on où: l’on s’affemble pour prendre les refolutions {ur toutes les af- | faires publiques. Enfin, c’eft luy quidans les occafons , ré- pond au nom detoutel’Ile, & qui prefcrir les jours de diver- tiflement & de rejouïiflance, dont nous avons déja parlé. LaJuftice, chez les. Caraïbes, n’eft point exercée par le: Capitaine, nipar aucun Magifirat: Maistout de mêmeque parmy les Toupisamboms, celuy qui fe tient offenfé entr'eus, … tire de fon adverfaire telle fatisfa@ion que bon luy femble, felon que la paflion le luy dite, & que fa force le luy per- met. Le public nes’intereffe point dansla recherche des cri mes. Que fi quelcun d’eus fouffre un tort ouunaffront, fans s’en venger, ileft m’eprifé detouslesautres, &tenu pourur lâche, & pourun homme fans honneur. Mais, comme nous … avons dit ailleurs , leurs divifions & leurs querelles, ont fort rares. Un Frere venge fon Frere & fa Sœur , un Mary faFemme, un Pere fesenfans, lesenfansleur Pere. Ainftuez, ils font bien: = ARMOR a" i RAR TES (18, Fe ï Led DES ÎLES ANTILLES. 523 | bien tuez, parceque ça été pour tirer raifon. Pour pre- _ venircela, fiun Sauvage de quelque Ile a tué un autre Sau- vage, crainte d'eftre tué en revanche pär les parens du mort, il fe fauve dans une autre Ile, & s’y habitué. Ceus qu'ils croyent Sorciers , ne la font pas longue parmy eus, quoy que bien fouvent, il y y ait plus d'imagination que de vcrité. _- Siles Caraïbes foubconnent quelcun de leur avoir dero- bé quelque chofe, ils tafchent de l'attraper, & deluy fairé des taïllades, ou de couteau ou de dent d’Agouty, fur les épaules, pour marque de fon crime & de leur vengeance. Ces dens d'Agouty, font en plufieuts occafions chez les Caraïbes, l'office denosrafoirs. Eten effet elle ne font gué- re moins tranchantes & moins affilées. Ainfi les anciens Pe- ruviens & les Canariens n'ayant pas encore l'inventiori de nos ferremens, fe fervoient de certaines pierres à feu, com- me de cifeaus, de lancettes, & de rafoirs. Le mary, ne fouffre point que fa femme viole impuné- ment la foy conjugale: mais il s’en fait luy-même la jufti- ce, comme nous le dirons plus particulierement au Chapi- . tre des Mariages. Mais ils ne favent ce que c’eft que de punir publiquement , & par forine de juftice. Er ils n’ont pas méme de mot en leur langue, pout fignifier Z4fice ou Jugement, Vvv 2 C H À» Platar=: queen lé vie de Salon. 524 HisTOIRE MORALE, Chap | CHAPITRE VINTIÈME. CS Des Guerres des Caraibes. Eft ordinairement A D les feftins publics. que les Caraibes prennent leurs refolutions de faire la guerre. : Ce qui n’eft pas particuliet à leur Nation: car les Brez « filiens & les Canadiens en font de même. Et afin qu’on ne penfe pas qu'il ne fe trouve rien de tel quechez lesSauvages, * Liver, Herodote & Strabon nous témoignent, qu’autrefois Les Per Glis. fes confultoient de leurs affaires les plus importantes dans. leurs banquets, & lors qu'ils avoient la tefte pleine de vin. Et non feulement les Perfes: mais plufieurs Nations Gré- PR questenoient leurs Conféils à table, fi nous en croyons Plu- « despropes tarque. Ce que font encore aujourd’huy les Chinois, au de table, rapport des Hiftoriens. x rs Mais pour venir au détail des Confeils de guerre de nos liure.7, Caraïbes, quand ils commencent à avoir le cerveau échauffé _deleur boiflon, une Vieilleentre dans leur affemblée avec une mine dolente &unmaintientrifte, & leslarmesaus yeus, : demandeaudience. Ce qui luy eftant facilemect accordé, à caufe du refpeët & de la reverence que l’on porte à fon âge: d’une vois plantive & entre coupée de foupirs, elle reprefen- te les dommages quetoute la Nation a receus des À rouâgues, leurs anciens & capitaus ennemis. Et aprés avoir faitunde- . nombrement des plus grandes cruautez, qu'ils ont autrefois exercées contre les Caraïbes, & des vaillans hommes qu'ils onttuez ou pris captifs dans les batailles, qui fe font données » entr'eus, elle defcend en particulier, à c’eus qui de fraiche. datte ont efté faits prifonniers , maflacrez, & mangez, dans … les dernieres rencontres; Et enfin, elleconclud, que ce fe=. toit à leur Nation une lâcheté honteufe & infupportable, s'ils ne prenoicnt la vengeance de tous ces maus, imitant la gene- rofité de leurs Predeceffeurs , braves Caraïbes, qui n’ontrien. eu en plus grande recommandation, que detirer raifon dein= jures qu’ils avoient receuës : Et qui aprés avoir fecoüé le joug: que Chap.2o DES ILES ANTILLES 525 que les Tyrans leur vouloient impofer pour aflervir leur an- cienneliberté, ont porté tdnt de fois leurs armes victorieu- fes dans les terres de leurs ennemis, qu'ils ont pourfuivis avec la fléche & le feu jufques. fur leurs plushautes montag- nes, les ayant contraints de fe retirer dans le creus le plus profond des Abymes, dans les ouvertures des rochers, & dans l’horreut des Forets les plus épaiffes : : avec tant d’heu- reus fuccés, que même à prefent Llsin ‘oferoient plus paroi- tre {ur les coftes de leurs Mers, & ne fauroient trouver de demeure fi écartée, où ils fe puiffent tenir à couvert contre les attaques des Caraïbes ; La frayeur & l’épouvantement les ayant faifis aprés de fi grandes victoires. Qu'il faut donc courageufement pour fuivre cette pointe, & ne fe point relâcher, que cette race ennemie ne foit tout à fait extet- minée. Aufli-toft que le difcours de la vicille eff finy , le Capitaine harangue fur le même fujet, pour émouvoir davantage les Efprits : : aprés quoy, on voit toute l’aflemblée applaudir una- nimement à fa propofition, & donnertoutes fortes de fignes. qu ils reconnoiffent la juftice de la caufe. Et dés ce moment, eftant animez par les paroles qu'ils viennent d'entendre, ils ne refpirent plus que le fang & le carnage. Le Capitaine, jugeant bien par l’applaudiffement de toute l’affemblée, & par fes geftes & facontenance, qu'elle conclud àla guerre, bien qu'elle ne le dife pas par fes paroles, ilen fait , à l'heure mê- me l'ordonnance, & limite le tems de l’entreprife par quel- ques-unes de leurs façons de conter, comme nous l'avons dé- crit dans le Chapitre de leur fimplicité naturelle. Il faut re _ matfquericy, qu’ils prennent ces refolutions fanglantesefiant yvres; & aprés que le Diable les a tourmentez pour les y porter, comme nous l'avons touché cy deflus. Dés le lendemain de cette affemblée, on ne voit & on n’en- tend en tous les quartiers de l’Ile, que les preparatifs à la guer- re. Les uns polifient leurs arcs : les autres mettent en état leurs mañlüuës: les autres préparent, aiguifent, & enveni- ment leurs fléches : lesautres, enfin, dreffent & agencent leurs Piraugues. Les femmes de leur cofté, travaillent à difpofer &” à amañler les vivres neccflaires pour l’armée. | | Vus |: Et 26 HisSTOIRE MORALE, Chhron Et au jour préfix chacun fe trouye fans manquer au bord dé Ja mer, avec tout fon équipage, pour l’embarquement. Ils fe fourniffent tous d’un bon arc, & d’un gros trouffeat defléches qui font faites d’un certain petit roféau poly, armé d’un fer par lebout, ou d’un os de quené de raye, dentelé & extremement piquant, C’eft aufli de cela que les fléchés des Brefiliens font armées. Maisles Caraïbes ajoütént'aus léurs, pour les rendre plus redoutables, un poifon fouveraiñnement mortel, compofé de jus de Mancenilles, & d’autrés venins, la moindre égratignure qu’elles font, eft une bleffure mortelle. , Il a cfté jufques cy impoflible, de tirer d'eus le fecret de cetté compofition. Ils portent aufli chacun cette épée de bois qu'ils nomment Bouton, ou pour mieus dire, cette maflue puiffante, quileurtientlieu d'épée, & dontils s’efcriment à merveilles. Ce font-là toutes leurs armes: carils ne fe cou- De Lay Vrent point de Rondaches, comme les Tzwpinambous; mais “hap. 14. Jeurs corps demeurent tout à nud. Aprés le foin deleurs armes, ils prennent celuy de leurs munitions de bouche, & portent enleurs vaifleaus, dela Caf- fave, du poiffon rofty, des fruits, & particulierementdes Ba. nanes, qui fe gardent long-tems, & de la farine de Manioc. Les Icaques dans leur guerre ne fe donnent pas cette peine. Et cequ'ils pratiquent en ce point, leur eft tout particulier, & meritequel’onenparle. Carils fe paflent de fi peu de cho- fe pour leur nourriture, & fe plaifent fi fort à vivre de cer- taines prunes, qui croiffent en abondance en leurs quartiers, & dont ils portent mêmele nom d’/cagues, que quand ils vont à la guerre, onne les voit jamais porter de provifion de bou= che avec eus. De Ley Nos Sauvages Antillois, anfh bien que ceus du Brefl, me- 4p: 14: nent à la guerre quelques femmesaveceus, pour faire leur cuifine & pour gardet leurs Piraugues ou vaiffeaus de mer, quand ils ont fait leur defcente. Ils attachent fermement à. ces Piraugues leurs armes & leurs munitions debouche. De: forte que fi le vaifleau vient à renverfer, ce qui arriveañlez fouvent, ils leremettentfurfonaffette, fans rien perdrede Chap.13. ce quieft dedans. Etdans ces rencontres, eftantfibonsna- ” geurs que nous les avons reprefentez, ils ne fe trouvent , | | point Paru l'OmWP29 DEL ILES ANTILLES +27 _ point en peine de leurs perfonnes; & ils fe font quelquefois moquez des Chreftiens, qui fe rencontrant prés d’eus en ces occafions, fe mettoient en devoir de les fecourir. C’ef ainfi que les Foupinambous fe rioient un jour de nos François, en üne femblable aventure, comme le recite Jean de Lery. Les Chez. voiles des vaifleaus des Caraïbes font de toile decotton, ou d’une efpece de natte riflué avec des feüilles de Palme. 1Is - favent admirablement bien ramer avec de certains petis avi- rons, qu’ils pouflent d’une vitefle nonpareille, Ilsmenent aufli quelques Canots, qui font leurs plus petis vaifieaus, pour accompagner leurs Piraugues, Leur coutume eft de marcher d’Île en Ile pour s’y raffrai- chir, &ils ont à cét effet desjardins, en celles à même qui font defertes & inhabitées. Ils defcendent auffi dans les Iles _de leur Nation, pour joindre à leurs troupes, en chemin fai- fant , tous ceus qui font en érat de lesaccompagner. Etainfi ils groffiffent leur armée, & avec cér équipage, ilsfe vont sendre fans bruit, fur les Frontieres. Lors qu'ils marchent ie long des coftes, & que le foir eft venu, ils mettent leur vaiffeau fut le fable, & font enune de- _ mye heure leur logement fous quelquearbre, avec des feüil- les de Balifier ou de Latanier, qu'ils attachent enfemble fur des gaules, ou fur des rofeaus , foutenus par quelques four- ches plantées en terre, & pour fervir de fondement à ce petit couvert, & pour fufpendreleurs Hits. Ils appellent ces loge- mens faits à la hafte, C4roupa. Le Lesgiflateur de Lacedemone avoit defendu, entre au- riurar. tres chofes, de faire fouvent la guerre contre mêmes enne- La de mis, de peur delesaguerrir. Mais les Caraïbes ne fuivent pas zyeu ces maximes, & n'apprehendent pas un pareil inconvenient, ge Car ils font toujours la guerre à la même Nation. Levran- ciens & irreconciliables ennemis , cefont les Aroacas, Aroïa- ques, Où CAronagues ; qui cft le nom qu'on leur donne lé plus communement dans les Iles, bien que quant aus Caraïbes, is les appellent €4/loñagues : léquels demeurent en cette par- tic de Amerique Meridionale, qui effconnuë dans les Cartes. fous le nom de Province de Guyana ou Guayana, guére loi des bords des rivieres, qui defcendent de cette Province pour us fe Avrsan ES Quin. te Care 1 afisn. lv. 9. M Garce- baffe LS. chap 11 à FE ORAN 528 HISTOIRE MORALE, Cho 1 fe rendre enla mer. Le fujet de l’inimitié immortelle de nos À Caraibes Infulaires contres ces Peuples, a efté déja touché au Chapitre de l’Origine des Caraïbes, aflavoir, que ces Arouägues ont cruellement perfecuté les Caraibes du Con- tinent leurs voiflins, Confreres de nos Infulaires, & de la même Nation qu’eus. Er qu'ils leur ont livré continuelle- ment des guertes fanglantes pour les exterminer, ou, tout au moins, pour les chafler de leurs demeures. Ce font donc ces . ÂArouâgues, que nos Antillois vont chercher en leur païs or- dinairement une fois ou deus par an, pourentirer toute la vengeance que leur fureur eft capable de leur diéter. Et il faut remarquer que de leur cofté, les Aroüagues ne vont jamais attaquer les Caraïbes Infulaires dansleursiles, dépuis qu'ils fe font retirez de celle de Tabago, qui étoit la plus voif= ne de leur Terre, mais qu'ils fe tiennent fur la fimple defen- five; Au lieu qu’ils font aflurez de voir. plus fouvent chez eus nos Sauvages, qu'ils n'auroient à fouhaiter, bien quede la der- niere des Antilles qui eft Sainte Croix, en côtoyant, comme ils ontcoutume defaire, toutes les autres Iles, dans léquel- les ils. ont des jardins ou des Colonies, jufquesausterres de Aroüagues, il y ait environ trois cens lieuës de chemin, La srande generofité du grand Alexandre le portoità di re, qu Lil ne falloit pas dérobber la viétoire: Mais Filippes d' une autre humeur que fon fils, eftimoit qu’iln'yavoit ja- _ mais dehonte à vaincre, de quelque faflon que ce puftefre. - Nos Caraibes, avec la plupart des Ameriquains, fc trouvent dansle même fentiment. Car ils font routes leurs guerres par : furprife, & netiennent pas à deshonneur de s’y fervir de la faveur des tencbres. Bien au contraire des Icaques , qui s'e- fiimeroient flétris en leur repuration, fi lors qu'ils arrivent dans lesterres de leurs ennemis, ilsneles envoyoient avertit de leur venuëé & fommer de fe mettre fousles armes pour les recevoir. Les Arraucains qui font voifins du gouvernement de Chili, Peuple belliqueus , & que l’'Efpagnol n’a pû domtet jufques icy, en ayant cfté mème fouvent vaincu , font encore biendavantage. Car quandils veulent combatre cétennemy, ils luy font denoncer la guerre par des Héraus & luy en- >) VOYENE dire, Nous rixrons trouver dans tant de Lunes: 5 La Ce 20 DES ÎLES ANTILLES. $29 | », Tientoy preft. Et ainfiles Yncas, Rois du Perou, n’entre- prenoient aucune guetre, qu'auparavant ils n’en avertiflent leurs ennemis , & ne la leur declaraffent par deus ou trois fois. Ce qui fera voir, en paflant, que Lefcarbot s’eft trompe dans fon Hiftoire de la Nouvelle France, lorsqu'ila dit quetous les Indiens Occidentaus univerféllement, font leurs guct- res par furprife. . Les Caraibes ont cette : imagination , que “lu guette qu ils commenceroient ouvertement ne leur rcüfliroit £ pas. Deforte qu’aprés avoir fait leur defcente chez les Aroüagues, s'ils font découverts, avant que de donner le premierchoc, ou qu’un chien, par maniere de dire, ait abbayé contr'eus, tenant cela pour mauvais augure, ils remontent tour froidement | dansleurs vaifleaus, & retournent en leurs Iles, remettant la partie à une autre fois. Mais s’ils ne font point appetéqus , ils donnent vivement fur leurs ennemis, & les vont chercheren leurs Cabanes, Que s’ilsne les peuvent pas aifément aborder, & qu'ilsles trouvent trop bienretranchez & fortifiez dans quelques maifons mu- nies de bonnes paliffades, d’où ils décochent leurs fléches avec avantage: ils ont acoutumé de les contraindre d’enfortir, en y jettant le feu avec leurs fléches, au bout déquelles ils atta- chent du cotton allumé. ‘Et ces fléches eftant pouffées fur lestoits, quinefontqued’herbes, ou de feüilles de Palme, les enflamment aufli-toft. Ainf les Aroüagues (ont obligez de fortir de leurstanieres, & de rendrecombat en pléne cam- pagne; ou bien de prendre la fuire, fileur courage ne leur permet pas de faire tefte aus ennemis. Quand nos Sauvages les ont de certe forte attirez au champ de bataille, ils tirent premicrement contr'eus toutes leurs fléches. Et aprés avoir épuifé leurs Carquois, ils ont recours au Boutou, & font d’étranges effets avec cette épé de bois, ou plutoft avec cette mañué: Ils ne font que fauteler encombattant, pour donner moins deloifir à l'ennemy de les mirer. Les armes à feu, particulierement les canons, qui font tant de bruit & tant d'effet, fur tout lors qu’ils font chargez de clous, de chai- nes, & d’autres ferrailles, leuront bbatu le courage, ne ï ilsont affaire avec nous, & leur font apprehender x approche k. : Àxx de 530 | rene “pape heu | pe de nos navires & de nos forts. : Mais:bien qu'ils ne prenëent mont La. PaSd'Opium, pour ofter lé fentiment, avant:que.d’ allerau Paluda- Combat, comme les Turcs & les Indiens Orientausde Cana- ra not : & qu’ils ne fe nourriflent pas de T'ygres ni de Lions, chap. 76. pour fe rendre plus courageus, commele Peuple du Royau: E Vin. me de Narfingue vers Malabar, toutefois quand ‘ils come . dd battent armes égales contre les Aroüagues ,:& qu'ils ont Lines COmumencé la bataille ; principalement s'ils font animez par Fe quelque heureus croi: ils font hardis comme desLions, & | rien n’eft capable de leur faire lâcher le pied: maisils veulent Vaincre ou mourir. Aänfi en failoient des Sauvages belli- | queus du pais de Carragence eftans attaquez parles Efpagnols. ps) Car ils fe precipitoient aucombar de telle furie,, hommes & Lure. femmes, qu’une de leurs filles, couchaplufeurs Éfpagnols fur la place avant que d’être tuée, Ondir aufliqueles Mexicains &-les Canadiens fe font plutoft tailler en pieces, que de le À laifler prendre aucombat. | Siles Antillois peuvent avoir en vie quelcun de ‘leurs. ennemis, ilslelient &] 'enménent captifen leurs Îles, Que fi. quelcun de leurs gens rombe mort ou ble danse champ de: bataille, ce leur feroitun reproche crernel & infupportable,, de le laiffer au pouvoir de l’ennemy. Et c'eft-pourquoy ils fe jettent de furie au milieu des:plus grands dangers, & tefte-baiflée percent d'un communcffort, toutcequileur faie reliftance, pour enlever les corps de leurscamarades, 1& des. ayant arrachez par force d’entre les mains desennemis, lés: porter enleurs vaifléaus. Aprés quelabatailleeftfinie, nos ie on retirent au: bord delamer, oudansquelquelle voifine. Et s'ilsont re- çcu quelque notable perte par la mort de quelques uns de- leurs Chefs, ou deleurs plus vaillansfoldats, ils fonttretentir: l'air d'hurlemens & de cris. épouvantables, avant que de re monter en leurs vaifleaus: Et meflant uncinfinité delarmes. au fang de leurs morts, ils les couchent piroyablement en. leurs Pirangues , & les accompagnent de leursregrets & de leurs foupirs jufques aus premieres deleursiterres. 1:99 Que s'ils ont eu la viétoire, ils ne s'amufentpas:à couper lesteftes de leurs ennemis tuez, à Rs potter en: trofée , 160 à Due 1 (HI ER A < E TA NSNRRTEE DE ; +#- Chap.20 DES ÎLES ANTILLES. Sat | depoüiller ces pauvres corps de leur peau, pour Ja faire férvix d’étendart à leurstriomfes, comme font les Canadiens : & comme le pratiquoient autrefois les Scythes, fur le témoig= _ nage d’Herodote, & même nos vieus Gaulois, fi nous en croyons Tite Live. Les Caraibes fe contentent de jetter des cris de joye fur les corps des Arouagues, & de faire éclat rer fur leurs rivages des tons d’ alégrefe comme pour inful- terà cette terre ennemie, avant que de ja quitter. Mais aprés qu'ils ont répandu fur ce païs étranger une partie de leurs chanfons triomfales, ils remontent en diligence dans leurs _ Vaifleaus, pour porter le refte dans le fein deleur patrie. Et ils enmenent bien garottez les pauvres Arouagues qu’ils ont pris en vie, pour en faire chez eus la curée, que le aol fuivant vareprefenter. Le but qu'ils ont en cette guerre, n’eft pas de ferendre maitres d’un nouveau paiïs, ou de fe charger des dépoüilles de _ leursennemis: Maisils ne fe propofent que la feule gloire de ‘les vaincre & d'en triomfer, & le plaifir d’aflouvir fureus la vengeance qu'ils refpirent, destorts qu'ils en ont receus. Nos Caraibes n’ont, aprés les Aroüagues, qu'ils nomi- ment fimplement Etouiton, c'eft à dire £zsemis, aucuns plus grands ennemis que les Anglois, qu'ils appe Hot Etohton _ N'oubi, c’eft à dire Ennemis contrefaits , açaufe qu'ils font vé- tus. Cette inimitié a pris fon origine de ce que les Anglois, fousie pavillon des autres Nations, ayant attiré plufieurs des Caraibes dans leurs vaifleaus, où au commencementils les avoient amadouëz & alléchez par mille careffes & petis pre- fens, & furtout avec de l’eau de vie, qu'iis ayment extreme- ment : lors qu'ils virent que leur vaiñieau éroit remply de ces | pauvres gens, qui ne penfoient à rien moins qu'à une pareil. le perfidie, ils levérent l'ancre, & porterent les Caraibes, hommes, femmes, & enfans, en leurs terres, où jufqu'à pre- fent ils les tiennent efclaves. On dit qu'à “ts des Efpagnols, ils ont fait ce lâche trait en plufieurs Iles: C’eft ce quieft caufe qu'ils haïffent à à mort les Anglois, & qu’ils ne _ peuvent feulement ouir parler leur langue, Jufques là même, - que fi un François fe fert de quelques termes Anglois en fon difcours, il atire fur foy leur inimitié. Aufli à leur tour, & : Xxx 2 par Liv. 4: UT PAICE 532 His TOIRE MORALE; pri à. 3 par droit de reprefailles, ils ont fait fouvent des defcentes dans les Iles de Montferrat, d' Antigoa, & en d'autres quifontoc: … cupées parles Anglois. Et aprés avoir brûlé quelques mais fons, & pillé quelques meubles, ils ont enlevé des hommes! des femmes, & des enfans, qu’ils ont conduit à la Dominique & à Saint Vincent. Mais on n'apprend point qu'ils en ayent mangé aucun. Ils refervent cette cruauté pour les Aroüa: gues. Et mêmeavant que les Caraibes fuffent en guerreavec les Habitans de la Martinique, quand les Parens ou amis des Anglois qui avoyent été enmenez prifonniers de guerre par ces Caraïbes, employoient l'interceffion & l’entremife des François, ils étoyentaifément élargis, & remis entreles mains des François, ,; quidonnoienten échange aus Caraïbes, quel- ques unes de ces bagatelles dont ils font cas; ouune coignéé & quelque femblable outil qui leur eft neceläiéet Onamé- me recou de leurs mains des Arotagues deftinez à être mañ- | sez, enleur prefentant aufh en échange quelquesunesdeces chofes. 1ls ont encore à à prefent en l'Ile de Saint Vincent, des garçons & des filles de la Nation Angloife, qui pout avoit été enlevezfort} jeunes, ont oublié tout à faitleurs parens, & ne voudroient pas même retourner avec eus, tant ils font façonnez à l'humeur des Caraibes, qui les traittent auflide : leur part fort doucement, comme s’ils étoient de leur Nation, Aujourd’huy, on ne les reconnoift qu’aus cheveus qui font blons, au lieu que les Caraïbes les ont tous univerfelle- ment noirs. - Quantaus Efpagnols, au commencement dela décovets te de l’ Amerique, les Caraïbes qui poffedoient toutes les Ans tilles furent rudement traittez par eus. Ils les perfecutoient avec le fer & le feu, & les pourfuivoient parmy les bois, com- me des beftes fauves, pour les emmener captifs travailler aus mines, Ce quicontraignit ce peuple, quieft vaillant & ge- nereus, à repouñler la violence, & à dreffer aufi des embü- ches à leurs ennemis; Et même à les affaillir à guerre ouver- te en leurs vaifleaus qui étoient à leurs rades, léquels ils pe doient fans crainte desarmesà feu, &autravers des épées & | des piques. Cequileur réü Mit à dites fois, fi avantageu- fement, qu'ils fe rendirent maitres de plufieurs Navires ri- | che- Chap:2o DES ILES ANTILLES. 533 chement chargez, faifant main-bafle par tout Kenlevant tout le butin, & puis brûlant ies vaifleans. 11 eft vray qu’ils pardon- noient aus efclaves Négres qu’ils y rencontroient, & qu'ils les conduyfoientà terre, pour les faire travailler en leurs ha- bitations. Et c’eft de là que font venus les Négres qu’ils ont à prefent en l'Ile de Saint Vincent, & en quelques autres. : Les Efpagnols ayant refenty ces pertes, & voyant qu'ils avoient à faire à forte partie, & que quand ils auroient ruiné cette Nation, il ne leur en reviendroitaucun avantage : con- fiderant aufli que les Iles qu’ils habitoient étoient neceffaires à leurs vaifleaus qui venoient d’unlong voyage, pour y pren- dre des raffraichiflemens, del’eau, du bois, & mêmedes vi- vres, au befoin, & pour y laiffer dans la neceflité les malades qui étoient en leur Flotte, ils ferefolurent de traitter plus humainement les Caraïbes: & aprés avoir donné la liberté à quelques uns de ceus qu’ils tenoient captifs, & les avoir ama- douëz & renvoyez en leurs terres avec ptefens, ils fe fervi- rent de leur entremife pour traitter une forme de paix avec ce Peuple, laquelle ayant été acceptée de quelques Lies, ils y jetterent les pourceaus qu'ilsavoient amenez de l’Euro- pc: & depuis, ils y laifloient en pañlant les malades qu’ils avoient cnleurs Navires, pour les reprendre au retour étant gucris. Mais les Caraïbes de Saint Vincent, & ceus qui de- meuroient à la Dominique, ne voulurent point confentir à cét accord, & ont confervé toujours jufqu’à prefent, Icur averfion contre les Efpagnols, & le defir de fe venger d’eus. . Aurefte, pour ce qui eft particulierement deleurs guerres défenfives, ils ont appris par la hantife & la frequentation des Chrétiens, & par les démeflez qu'ils ont eu avec eus en di- verfes rencontres, à tenir leurs rangs, à fe camper en des lieusavantageus, à fe Gabionner, & à fe fervir d’une forte retranchemens à leur imitation. Nos François le reconnu- rent & l’éprouverent ces dernieresannées, enla prife de l'Ile de la Grenade. Ils s'étoient imaginez, que les Caraibes ne feroient nulle refiftance: Maisils les trouverent en défenfe, pour leur empêcher la defcente, & leur contefter ia demeure en çette terre; Car outre qu'ils leurfirent effuyer la grefle i: Xxx 3 d'une 434 . US TOLRE MO R AE, | cie T d’une infinité de fiéches, & qu'ayant mis des baticades aus avenuës , ilss’oppoferent courageufement à leur débarquez ment, & les efcarmoucherent par pluficurs fois: quand ils virent que les nôtres, nonobftant leur reliftance ne faifoient point volte-face, mais qu'ils Les repoufloient vertementdans | les bois, ils fe rallierent fur une éminence laquelle ils avoient fortifiée. Et comme elle étoit elcarpée de tous côtez, hors: mis d'un feul quiavoit une fpacieufe avenue, ils avoient COL- pédes arbres, du tronc defquels ils avoient compofé de longs rouleaus, qui étant attachez & retenus fort legerement au plus haut de jamontagne, pouvoient être roulez le long de la pante, & poufiezavec force & violence contre les nôtres, s’ils euffent voulu aller à laffaut. Ils firent auf, à plufieurs _reprifes, des farties de ce fort-là fur nos gens, qui étoient oc cupez à en bañtir un, où ils puffent attendre enfeureté le fe- cours qui leur devoit être envoyé de la Martinique : Er ils les tinrent inveftis quelques jours; Pendant léquels ils avoient fait descreusen terre, où ils étoient à couvert du moufquet des Francois: Et de là, montrant feulement latefte , ils déco. choient des fléches contre ceus qui avoicnt l'affurance de fortir du retranchement. Ils poufferent même, à la faveur de la nuit, un pot remply de braife ardente, fur laquelle ils avoient jetté une poigné de grains de Pyman, en la Cabane que les François avoient drefféc des leur arrivée en l'Ile, afin deles étouffer, s’ils euflent pu, par la fumée dangereufe & la vapeur étourdiffante du Pyman, Mais leur rufe fut décou- Verte: Et quelque temsaprés, le fecours étant fur Venu aus - nôtres,les Caraïbes traitterentavec eus, & leur laiflerent la libre ofefion de cette terre. Cetaccord, ne fut pas univerfellement aprouvé des Chefs’ decette inconftante Nation. Ceusde l'Ile de 8. Vincent pro=. tefterent les premiers à l'encontre, & pour témoigner haue tement leurdefaveu, ils éclatérent quelque temsaprésenune rupture ouverte, qui donna le commencement à une nouvel! le ouerre, laquelle à à duré dépuis le tréziéme de Juillet , de l'année mille fix cens cinquante quatre qu'elle fut declarée, jufqu’a lentrée de l'an mille fix cens foixante & un, c'cft à dire fét ans ou environ. | Il PR AN EN PUR? à em L AE) ADP TS ’ Bis P'Chapizb pis TES ANTELLES 535 ._Ibeftvray que les Caraïbes, pour-donner quelque couleur de juftice aus maflacres aus embrazemens & à toutes les au- ._ tres violences qu'ils commirent en fuite dans l'Ile de Sainte Aloufie, & endivers quartiers de celle dela Martiniquealle- -guoiententre leurs autres prétextes, que pare Traité de paix qu'ilsavoyentfaitavec M: du Parquet, avant quede lui laif- fer la paifible jouiflance de la Grenade, ils’étoitobligé de leur donner en compenfation, la valeur de trois mille florins, qui leur feroient contez en marchandifes qui leur feroient les plus agreables, entre toutes celles qui ont couts dans Le païs : & quecette conditionn'ayant point ‘efté acomplie, ils avoyent eu droit d'en rechercher la fatisfaétion les armes à la main, & de fe venger eus mêmes de tant d’autres injures qu’ils preten- doient avoir receu des François de la Martinique. Cette longue guerre, qui fut accompagnée de divers fuc- cés’, ifelon. quéles armes font journalieres ; fut cafin térmi- née un peu aprés lamort de Mr: du Parquet, par la prudence _ & la valeur de Mr: deGourfolas, lequelil avoit fait recon- noiftre de fon vivant, pour fon Lieutenant General. Mr: de L'Aubiere, l’un des plus vaillans & des plus renommez Capi- taines de la mêmellede la Martinique, s’aquit auffi beaucoup degloire dans les grands & perilleusemploys oùil fut engagé, fuivant les ordres de Mr: de Gourfolas fon digne frere , pour prevenir les mauvais defleins de ces Barbares, teprimer leur coutfes, s'emparer de leurs retranchemens, & les obliger à quitter entierement cette belle terre , pour fe refugier aus: llesdesS. Vincent & dela Dominique,qui font les feules places qui leur reftent à à prefent de toutes les Antilles qu'ils ont au tréfois occupées, | Ontient, qu ily a encorc quelques familles de: Caraibes à à la Martinique: maisoutre qu'ils font leur demeure parmiles François, & qu'onneleur permet plus d'avoir des Villages. particuliers & d'y faire des affemblées ;. on les efclaire main. tenant defi prés, qu’ils ne peuvent entretenir aucune inteliie gence ni fomenter aucun parti avec ceus de leur Nation qui demeurentailleurs , fans eftre découverts. | L'un des principaus Officiers dela Martinique , nousacens voyé de fagrace, une fort ample, & tres-exacte Relation de: tout 536 Hirsrorre MoORALE, Chapir tout ce qui s’eft paffé de plus memorable durant cette guerre : mais parce que ce Chapitre eft déja affez eftendu, & que ce re= cit grofliroit nôtre ouvrage au delà de ce que nousavons pro= polé, nouslereferverons pourunautre Traité, auquelnous luy trouverons fa place;fi le Seigneur nous continué la vie: &. nous dirons feulement par avance, que jes Habitansde cette Ile celebre, font redevables de ce dous repos, & de cette profonde tranquilite dont ils jouïffent à prefent, à la fage conduite, & aucouragede Mr: de Gourfoias, & de Mr: de l’Aubiere fon frere: puifque Dieu s’eft fervi de leur zele & de leur generofté, pour domter les Sauvages & conferver à la France l'une des plus illuftres & des plus peupleés Colonies ‘au elle ait sens tout cenouveau Monde. | CHAPITRE VINT-ET- UNIÈME. Du Traitement que les Caraïbes font à leurs pris Jouniers | de Here: un Tableau qui donnera de l'horreur. Iln’y paroiftra que de l’inhumanité, de la barbarie & de la rage. On “verra des creatures raifonnables y dévorer cruellement leurs femblables, & fe remplir de.leur chair & deleur fang ; aprés: avoir dépoüillé la nature humaine, & revétu celle ‘des plus fanguinaires & des plus furieufes beftes. Chofe que les Payens même, au milieu de leurs tenebres, ont autréfois trou- véef | pieine d’execration, qu'ils ont feint quele Soleil s étoit retiré, pour ne point éclairer de tels repas. Lors que les Cannibales, ou C4wrropofages , c'eftà dire N Ous allons tremper nôtre plume dans le fang & faire CHMangeurs d'hommes: car c’eft icy proprement qu'il les faut appeller de cenom, quileureftcommun avec celuy de Ca= raibes : lors dis-je, qu’ils ramenent quelque prifonnier de guerred’entreles Aroüagues, il appartient de droit à celuy qui s’en ef faify dans le combat, ou qui l’a pris à la courfe. Defortequ'étant arrivé en fon Ile, ile garde en fa maifon, & afin <æ NCAA 2 + étés DÉES* DES ANTILLES. $37 dansun Amac, qu'il fufpend prefque au faifte de fa cafe, & aprés l’avoir fait jeufner quatre ou cinq Jours, ille produit en un jout de débauche folemnelle, pour fervir de viétime pu- blique, à la haine immortelle des fes Comparriotes contre cette Nation. _ S'il y a de leurs ennemismorts fur la place, ils Jes man- gent fur le lieu même. Ils ne deftinent qu'à l’efclavage les filles & les femmes prifes en guerre. Ils ne mangent point les enfans de leurs prifonnieres, moins encore les enfans qu'ils ont eus d’elles : mais ils les élevent avec leurs autres enfans. Ils ont goûté autrefois de toutes les Nations qui les frequentent, & difent que les Francois font les plusdelicats, & les Efpagnols les plus durs. Maintenant ils ne mangent plus de Chrétiens. ils s’abftiennent auffi de pinfieurs cruautez, qu’ils avoyent _acoutuméde faire, avant que detuerleursennemis : Car au. lieu qu’à prefent ils fe contentent de les aflommer d’un coup de mañluë, & en fuitte de les mettre en quartiers, & de les faire r0tir & de les dévorer : ils leur faifoyent autrefois fouffrir beaucoup de tourmens,avant que de leur donner le coup mor- tel. Voicy donc unepartie : des inhumanitez qu'ils exerçoient en ces funeftes rencontres, comme eus-même les ont racon- . tées à ceus qui ont eu la curiofité de s’en informer fur les licus, & qui les ont apprifes de leur bouche. Le prifonnier de guerre, qui avoit efté fi malheureus que de tomber entre leurs mains, & qui n'ignoroit pas qu'ilne fut deftiné à recevoir tout le plus cruel traitement, que la rage leur pourroit fuggerer, s’armoit deconftance, & pout témoigner la gencrofité du peuple Arotague, marchoit de luy même alaigrement au lieu du fuplice, fans fefaire lier ni traifner, & fe prefentoit avec un vifage riant & afluré au mi- lieu de l’affemblée, qu'ilfavoit ne repirer autte chofe que fa mort. _ Apeineavyoit il apperceu ces gens qui témoignoient tant de joye, voyant approcher celuy qui devoit eftre le mets de leur abominable feftin, que fans attendre leurs difcours, & leurs fanglantes moqueries , il les prevenoitences termes. Je fay 2 fort bien le deffein, pour lequel vousim'appellez en ce licu. Ni 4 " »]e Æffass de Montage me lv.r. C2 °32Le ie des rnies de nos Gaibes! ñ 7 point libaiéé comihé parmy les Maldivois, où l'onn’en péur avoit quetrois. ef à À base _ à la fois. Maïs comme ce nôimbre étbit. autrefois prop oGNÉ * _ tournoié ei à leuf coura é&aleur valeurs" ‘Ca EME Mois qu ls L sent &' qu'ils en Le obtenir. De forte quéthez’eis, tonéhc-pauiihes To dpabous, celliy qui à lé plus äcfem- LZZ 2 æ # ES 547 Hri?. de Lac. Relation des Hael- landes. De Laër en [or his. Pyrard. 1.part. chap. 27: Cenqne- fe des : Canaries par Be éenconrés Vintené le Blanc, I. parte chap. à. Livre 3 à Ha I. FAN | À puoireavéc unélôgé, de Hardiefe&'de gd 0 | metofité is" ‘pohvoÿent prétendre ‘& éfpérer: une foüvelle” de femme, anfféréore à prefént; ils eh ontaûütant qu'ils en "def. Hifhoir. de Lo- PEXs. at re y PTE À RE] ati | à ML IN NPARAAN ES MOOI FA HA 548 . HisToire Moxa LES Ésigits : mes eft eftiméle plus-vaillant & le plus confiderable de toute l'Ile, Et au lieu qu'en l'Ile Efpagnole, toures les femmescou: | choient dans une même chambre avec leur: mary y les Caraï. bes, commenous lavons déja touché, pour éviter toute forte 1 de querelles & de jaloufies; tiennent leurs femmes. dé même quefont les Furcs& les T'artares, en des demeures feparées. Même quelquefois ils les metrenten diverfes Iles : Ou:bien ils font cette feparation & cet éloignement de leurs femmes l'unede l’autre, afin qu'elles: fe puifflent plus commodement adonner à la culturede leursjardinages, quifontépars en: di- verslieus, Etc’eft pour celamême, que l'on afflure queles Caraibes du Continent pratiquent le femblable, leurs fem- mes ayant la loüange de nefe point laifler piquer à à lajaloufic. Nos Sauvages Infulaires, ont foin s’ils n'ont qu'une femme, denes'éloigner pas beaucoup d'elle, :& s'ils en ont plufieurs ils les vifitent les unes aprés les autres. Mais ils obfervent Pltar- que dans Les vues, ‘de Ly-. * ; curgue CS de Salon. Relatsor: des Hal. * landes. Lsnfcot, chap. 16. Vancent le Blanc, 1. part. tous, comme les Floridiens, dene En touchez ces qui _ font grofles.… ; On ne fauroit LufSEnesets s'étonner qrie Méta & So= lon, ces lumieresde la Grece, fe: foyent montrez fiaveugles, & fi peu honnêtes gens, que d'ouvrirlaporte à l’adultere:,.,& de trouver bon qu’ Fil entraf chez leurs Citoyens: : Car à péne . yatilauçune des Nations les plus'Barbares:& les plus Sauva- ges;quinaiten foy-même affezde lumiere: pour-y lire cette de , tracée de lamaindelanature: Que l’adultere eftuncris e, & qu'il doitêtreen horreur :, & quiaufli ne témoigne: so l’a.en deteftation , & ne le chatie feyvérement lors qu'il s'introduit chez ele. in punitionde l’adultere n eftque plaifante chez les Guinois. C'eft que la femme fi ellene ve être chaflée, paye pour: amende à fonrmary quelques onces. d'or, Mais il n'y a-pas dequoy tire chez. les Orientaus de .Barbates;; les puniffent. même de mort. Et les- Peguans {ont fi rigoureus çn ces rencontres. & ont tant d’'horreir: pass: ce: chap. 32. CHIMIE: QUE, chezeus les adulreres fontentetrez.vifs, hommes: SEE > 139194 19 210) ME no Caraibes ne, one pas icy des plus indulgenssiddes. moins. jo ma RO ne ee , RE Bengala,-& chez les Mexicains, qui coupent:-leinez&;les | oreilles. à. leurs femmes en pareils cas, Divers autres-Peuples. Élup2% Des ÎLES ANT ELLES. 549 moins jalous de leur honneur. Ils ne favoient point autre fois punir ce crime, par ce qu'il ne regnoit point entr'eus, avant leur communication avecles Chrétiens. Mais au- jourd’huy, fi le mary furprend fa femme s’abandonnant à quel- queautre homme, ou que: d’ailleursilenaitune connoiffance affurée, il s’en fait luy même lajuftice, & ne luy pardonne guéres, mais il la tuë , par fois d’un coup de Boutou , par fois en luy fendant le ventre du haut en bas, avecun ea , OU une dent d’Agouty , qui ne tranche guére moins fubti- lement. Cette exccution-là étant faite, le mary s’en va trouver j , fon Beau-pere, & luy dit tout froidement. J'ay tué ta fille nparce qu ellene m'avoit pas clé fidelle, Le Pere trouve » lation fi jufte, que bien l’oin d’en être fâché contre fon gendre, il l’en loué & luy en fait gré, Tu as bien fait luy ntépond-il : Elle le meritoit en Et même s’il luy refte encore des filles à marier, il luy en offre une déslors , & pro- met de la luy donnerà la premiere : occafion. Le Pere n’époufe pas fa fille, comme quelques uns ont. voulu dire. Ils onten horreur ce crime, & s'il y à eu pat- my eus des Peres inceftueus, ils ont efté contrains de s’ab- fenter, car s'ils avoient efté attrapez des autres, ils les au- roient ‘brulez vifs, ou bien ils les auroient déchirez en. mil le pieces. Ma ae Zzz 3. C HA>= ‘ste HisToirEe MORALE, CHAPITRE VINT- TROISIÈME, F De la Na iffänce es de l'Education 34 Enfans | des Caraibes. me plusbrutale que celle dontils fe fervent à la Naif- fance de leursenfans. Leurs femmes acouchent fans beaucoup de peine, & fielles fentent quelque difficulté, elles ont recours à la racine d'une efpeccdejont, de laquelle elles expriment Je Suc, & PPS elles font incontinent deli- vrées. Quelquefois dés le jour même de leur acouchemenr, elles fe vont laver avee leur enfant, à la plus prochaine Rivie- re ou fontaine, & fe remettent autravail otdinäire du mé. nage. Les Peruviennes, les Japônnoiïfes, & les Brefiliennes nn en font de même: Et il étoit ofdinaire aus Indiens de l'Ilé es Efpagnole, & même aus anciens Lacedemohiens, de laver de Laæ, ainfi léuts enfans dans l’eau froïde, pour leut éndurcit la peau Fra. incontinent aprés leut naiffänce. Les Maldivois lavent les leurs durant plufieurs jouts. Er l'on nous véut faire croire, que les Cimbres méttüienr aütrefois dans la neige Ces petites Creatures nouvellement nées, pour les acoutumer au froid & à la fatigue, &leur renforcer les menbres. Ils ne font point de feftin à la naiffance de leurs enfans, que pour le premier quileur vient; & ils n’ont point de tems prefix pour cette rejouiffance, cela dépend de leur caprice : mais quandils affemblent leurs amys pour fe refouir avec eus fur la naiffance de leur premier-né, ils tâchent de ne rien éparg- ner de ce qui peut contribuer au bon traitement & à la joye O N ne voit guére patmy ces pauvres Indiens, decoutu= Hero. Jes conviez; au lieu qu’autrefois les T hraces,accompagnoieñt M lv. s. : Fe ; "7 deleurs pleurs les cris de ceus qui venoient aumonde, fe re- mettant devantles yeus, toutesles miferes qu'il faut fouffrir M encette vie. toi | Maïs voicy la brutalité dé hôs Sauvages, dans leur réjouif- fance pour l’acroiffement de leur famille: C’eft qu'au même tems que la femme eft delivrée le marÿ fe met au lit, pour s'y plaine Chap.23 DES ILES ANTILL ES. $3 plaindre & y faire acouchée: coutume, qui bien que Sau- \ vage & ridicule , fe trouve neantmoins à ce que l’on dir, parmy les payfans d’une “certaine Province de France. Et ils appellent cela faire la couvade. Mais ce qui eft de fà- cheus pour le pauvre Caraïbe, qui s’eft mis au lit au lieu de l’acouchée, c’eft qu’on luy fait faire diéte dix ou douze jours defuite, neluy donnant rien par jour, qu’un petit mor- ceau de Caffave, & un peu d’eau, dans laquelle on a auf faic boüillir un peu de ce pain de racine. Aprés il mange un peu plus: mais il n’entame la Caffäve qui luy eft prefentée, que parle milieu durant quelques quarante jours, en laiffant les bords entiers qu’il pend à fa cafe, pour fervir au feflin qu’il fait ordinairement en fuite à tousfesamis. Et même il s’ab- ftient apréscela, quelquéfois dix mois, ouunanentier, de plufieurs viandes, comme de Lamantin, de Tortuë, de Pour- ceau, de Poules, de Poiffon, & de chofes delicates: Craig- nant par une pitoyable folie, que cela ne nuife à l'enfant. Mais ils ne font ce grand jeufne qu’à la naiffance de leur pre- mierenfant. Carà celle des autres, leurs jeufnes font beau- coup moinsaufteres, & beaucoup plus courts, n’étant d’or- dinaire que de quatre ou cinq jours au plus, x On trouve bien chez les Brefiliens, & les Japponois des maris affez infenfés pour faire ainfi l’'accouchée : mais ils ne font pas fi fors que de jeufner dans leur lit. Au contraire ils s’y font traiter delicatement & en abondance. On dit qu’au- trefois la même chofe s’eft veuë chez les Tibariens, voifins à la Cappadoce, & chez quelque autre peuple. Mais les Ha- bitans naturels de Madagafcar imitent ce jeufne des Caraïbes, lors qu'ils veulent faire circoncir leurs enfans. … Quelques uns de nos Caraïbes ont encore une autre folie : Et c'eft bien pis que tout le refte pour le pauvre pere à qui il eft néunenfant, car à la findujeufne, on luy fcarifie vive- ment les épaules avec unedent d’Agouty. Et il faut quece Alesan- dre d'A> lexan- dre. François Canches. miferable, non feulement fe laiffe ainfi accommoder, mais que même il le fouffre fans témoigner le moindre fentiment de douleur. Iis croyent que plus la patience du Pere aura paru grande dans ces épreuves, plus recommandable aufli fera la: vaillance du fils : Maisilne faut pas laifler tomberàterre ce le: url I. part De Le chap. Plutar. ke HisTotre MORALE, Chap23 le noble fans, dont l’effufion fait ainfi germer le courage. Auffi le recueillentils en diligence, pour en frotter le vifage de l’en= fant, eflimant que cela fert encore beaucoup à le rendre Des. dévéhs Et cela fe pratique même en quelques endroits en- vers les filles: carbien qu’elles n’ayent pas à fe trouver dans les combats, comme autrefois les Amazones, neantmoins, elle ne laiffent pas d'aller à la guerreavec leurs maris, pour leur apprefter à à manger, & pourg garder leurs vaiffeaus, tan dis qu’ils font aus mains avec l’ennemvy. Dés queles enfans font nez, les Meres leur applatiffent le front, & le preflent en telle forte, qu’il panche un peu enarric- re, car outre que cette forme eft l’un des principaus traits de la beauté qui eft eftimée parmy eus, ils difent qu’elle fert pour pouvoir mieus décocher leur ‘fléches au deffüs d'un arbre , en fe tenant au pied , à quoy ils font CXEECHIENC IE adroits, y êtans façonnez dés leut jeunefre. Ils n’'emmaillotent point leurs enfans : mais ils leur laif. fent la liberté de fe remuët à leur aife dans leurs petis Amacs Ou lits de Cotton, ou fur de petites couches de feuilles de Ba- nanier, qui font étenduës fur la terre, à un coin de leurs cafes: Et neantmoins leurs menbres n’en deviennent point contre faits; mais tout leur corps fe voit parfaitement bien formé, Ceus qui ont fejoutné chez les Maldivois, &chezles Tau- pinambous, en difent autant des enfans de ces Peuples-là, bien quejamaisonne les enferme, non plus que les petis Ca- raibes, dans des couches & des langes. Les Lacedemoniens gueenla en faifoient de même autrefois. VIE ae Lycur. £ #E: Ils ne donnent pas les noms aus enfans, auffi tôt aprésleur naiffance : mais ils laïiffent écouler douze ou quinze jours, & alors on appelle un homme & une femme, qui tiennent lieu de parrein & de marreine, & qui percent à l'enfant les oreil- les, la levre de défous, & l’entre-deus des narines & y pañlent un fil, afin que l’ouverture foit faite pour y attacher des pen- dans. Ils ontneantmoins la difcretion, de differcer cette cere- monie, fi les enfans font trop foibles pour fouffrir ces perçue res, jufques à ce qu'ils foyent plus robuftes. La plupart desnoms que les Caraïbes impofent à leursen+ fans, font pris de leurs devanciers, ou de divers Arbres qui a | sue L) LE Chap.23s DEs ÎLES ANTILLES 553 croiffentenleurs Iles; oubien de quelque rencontre qui fera furvenué au Pere pendant la groffeffe de fa femme, ou pen- dant fescouches. Ainfi à la Dominique une fille fut appellée * Quliem-bann, c’eft à dire feüille de Raïfinier, qui eft un arbre dont nous avons donné la defcription en fon lieu. Unautre de lamêmelle, ayant efté à Saint Chriftofle pendant que fa femme étoit enceinte, & y ayant veu Monfieur le General de nôtre Nation, il nomma l'enfant que fa femme eut à fon retour, Geseral; en memoire du bon traitement que ce Seig- neur luyavoit fait. Ontrouve quelque chofe de femblable chez Les autres a tions. Par exemple les Canadiens empruntent les noms de zefsr- poiflons & derivieres. Les Virginiens & les Brefiliens fe fer- #”° vent de ceus de la premiere chofet qui leur vient en la penfée, comme d’arc de fléches, d’animaus , d'arbres, de plantes. Les grands Seigneurs de Turquie ont acoutumé de donner aus Eunuques qui gardent leurs femmes, les noms des plus belles fleurs, afin que ces femmes les appellant, par ces noms, ilne forte rien de leur bouche qui ne foit honnefte , & agreable. Les Romains, comme il fe voit chez Plutarque, prenoient quelquefois leurs noms des Poiffons , quelquefois de leurs plaifits ruftiques : quelquefois des imperfcétions de leurs corps, & par fois de leurs belles actions à limitation des Grecs. Les Saintes Ecritures même, nous fourniflent des exemples de quantité de noms pris de diverfes rencontres, . comme entre autres des Benoni, des Fares, des Icabod, & au- tres femblables. Les noms que les Caraibes impofent à leurs enfans mâles un peu aprés leur naiffance, ne font pas pour toute leur vie. Car ils changent de nom quandils font en âge d’eftre receus au nombre de leurs foldats; Et quand ils fe font portez vail- lamment à la guerre, & qu’ils onttué un Chef des Arouäâgues, ils prenent fon nom pour marque d'honneur. Ce quia quel- que rapott, à ce que pratiquoient les Romains aprés leurs _ viétoires, prenant en effetles noms des Peuples qu’ilsavoient vaincus. Témoin Scipion l'Africain, & tant d’autres qu'il n’eft pas beloin d’alléguer. Ces Caraibes viétorieus, ont auffi dans leurs vins, ou dans leurs réjouiffances publiques , quel- Aaaa cun 554 HiIsTOIRE MORALE; Char | cun choify pour leur donner unnouveau nom, auquelils di fent aprés qu'ils ontbienbeu, Téficléey atec, c’eftà dire, Ze: veus eflre nommé, nomme moy. À quoy l’autre fatisfait aufli- tôt. Et en recompenfe il reçoit quelque prefent, ou d'un. couteau, où d’un grain de Criftal, ou de quelque autre me. nuës bagatelles qui font en eftimeparmy-eus. | Les femmes Caraïbesalaitent celles même leursenfans, & font tres-bonnes nourrices, & tres tendres Meres,ayant tous les foins imaginables de lesbien nourrir. Et même leurs foins s’étendent aus enfans de leurs voilines, quand elles font à la. ns guerre. Toutes les Peruviennes, & les Canadiennes, & pref=. md quetoutes les autres Indiennes de FOccidenr, font auf nout« Mn p. rices. Et dans les Indes Orientales, au Royaume de Tranfias LeBlanc ne, & aus Maldives, les femmesde quelque qualitéqu’elles. Fire foient, font obligées à donner la mammelle à leurs enfans, Au li Âinfi Tacite noustémoigne, que chaque Mere allaitoitelle vre des mème fes enfans, parmy les anciens Peuplesde l’Alemagne.. des an. Ondit qu’autrefois les Reynes mêmes du Perow ; iprenoient siens Al. bien la peine de nourtir leurs enfans. Etnounsavons.l'exems lemands. Le de quelques Reynesdé France, qui n’ont pas dédaigné cet. Bergeron - : k : EM Tor oflice maternel. Bien au contraire de ces femmes Canarien- Traite nes, qui faifoient ordinairement alaiterleursenfans par des- ae Chérie: Comme faifoient aufli quelques villageoifes de Efjais de. Guyenne, au tems de Michel de Montaigne. 1" 21 sur. Montag- Les Meres de nos petis Caraibes, ne leur donnent pas. ne liv.2. chap. 8. feulement lamammelle, mais aufli-tôt qu'ils ont prisun peu de force, elles mâchent les Patates, les Bananes,' & les autres. fruits qu'elles leur donnent. Encore qu'’elles:laiffent quel- “ quéfois leurs petis enfans fe rouler tous nudsifür laterre’, & que bien fouventils mangent de la:poufliere, & mille ordue « a res qu'ils portent à leur bouche , ils croifient neantmoins merveilleufement bien, & la plupart deviennent fi robu- fes, qu'onen à veu, quipouvoiens'à ee mois matcher on 2PPDY: On leur coupe les cheveus à l’âge de auteure deus ans: & pour cela on fait un feftin à toute la famille, Il ya quel-. ques Caraïbes qui different jufques à cet âge-là, defaireper- cer les oreilles, les levres, & léritrekdeas. desr narines de bus BE En leur ù À 5 | Gt pars, [DES ANTILLES. 556 leurs enfans: toutefois cela n’eft pas beaucoup enufage, fi cen'eft lors que la foibleffe de l'enfant n’a pas permis de le faire plutôt. Quandils font parvenus enun âge plus avancé, _Jes garçons mangent avec leurs Peres, &les filles avec leurs Meres. Ils appellent Peres, leurs bcaus- -peres, & tous ceus qui font dans la ligne collaterale, avec leurs vrais peres. Bien que les enfans des Caraïbes ne foient pointinftruits à rendre quelque reverenceà leurs parens, ni à leur temoig- ner par quelques geftes du corps le refpeët & l'honneur qu'lsieur doivent, Ilslesayment neantmoins tous naturel- lement, & fion leur a fait quelque injure, ils époufent incon- tinent leurs querelles, & tâchent par tous moyens d’entirer vengeance. Témoin celuy qui voyant qu'un de nos François dela Gardelounpe, avoit coupé les ? rabans de lAmac dans Le- quel étoit couché fon beau-pere, de forte qu’étant tombé à bris 248 terre il s’étoit demis une épaule, affembla en mème tems ie 5e18- quelques jeunes gens, quifirentune defcente dans l'ile de Marigualante > & y maflacrerent les François, quicommen- fefpandr saisns de s’y habituer. en l'air. - Mais le principal foin que témoignent les Caraïbes en l’e- duéation de leurs enfans : c’eft de les rendre extremement adroitsatirer de l’arc. Et pour les y faffonner de bonne heu- re; à péne s’avent-ils bien marcher, que leurs Peres & Meres ont cette coutume d’attacher icur déjunér à une branche d'arbre, d'où il faut que ces petis l’abbatent avec lafléches’ils ont envie de manger, Cariln'yapointde mifericorde, Et à mefure que ces enfans croiffent, on leurfufpend plus haut deur.portion.. Is coupent aufh par fois un Bananier, & le pofent en terre, comme enbutte, pour apprendre à Icurs «enfansdtireraufruit. Ce quifait qu'avec le tems, ils feren- dent parfaits en cet exercice. Les anciennes Hiftoires nous -fapportent,; que certains Peuples, approchant se de la cou- tume des, Cataibes, obligeoient leurs enfans à abbatre leut manger avec la fronde. | ss deftinent ordinairement tous leurs fils à porter les ar mes, & à fevenger de leurs ennemis à l’imitation de leurs -dévanciers. Mais avant qu ils foyent mis au rang de ceus : qui peuvent aller à la guerre, ils doivent eftre declarez fol- st: Aaaa 2 dats pu 556 _HisToirrEe MORALE, n dats en prefence de tous les parens & amis , qui font conviez . d'affifter à unefi folemnelle Ceremonie. Voicy donc l’ordre qu'ils obfervent en ces occafions. Le Pere quia auparavant convoqué l'aflemblée, fait feoir fon fils fur un petit fiege, qui cft pofé au milieu de la cafe, ou du Carbet ; & aprésluyavoir remontré en peu de paroles , tout le dévoir d'un genereus foldat Caraibe, & Iuy avoir fait promettre, qu'il ne fera ja- mais rien qui puifle flétrir la gloire de fespredeceffeurs, & qu'il vengera de toutes fes forces l'ancienne querelle de leur Nation. Il faifir par les pieds un certain oyfeau deproye, qu'ils appellent CWansfenis en leur langue, & qui a été preparé long- tems auparavant pour cflre employé à cetufagc, &ilendé- charge plufieurs coups fur fon fils, jufques à ce quel'oifean foitmort, & que fa tefte foit entierement écrafée. Aprés ce rude traitement, quirend le jeunchomme tout étourdy, il luy fcarifie tout le corps avec une dent d'Agouty, & pour gucrir les Cicarrices qu'il a faites , il trempe l'oifeau dans unc infufion de grains de Pyman, & il en frotte rudement toutes fes blefintes , Ce qui caufe au pauvre patient une dou- leur tres-aiguë , & tres-cuifante : mais il faut qu’il fouffre tout cela gayément, fans faire la moindre grimace, & (ans témoigner aucun fentiment de douleur. On luy fait manger en fuitte Îe cœur de cetoifeau. Et pour la clôture del ‘ation, on le couche dansun lit branlant, ouil doit demeurer étendu de fon long, jufques à ce que fes forces foyent prefque tou- tes épuifées à force de jeufner. Aprés cela, il eft reconnu de tous pour foldat, il fe peut trouver à toutes les affemblés du Carber, & fuivre les autres dans toutes les guerres, qu'ils entreprenent contre Icurs ennemis. Outre les exercices de laguerre, qui font communsà tous les jeunes Caraïbes, qui veulent vivre en quelque eftime par- my les Braves de leur Nation;. Leurs Peresles deftinent fou- vent étre Boyez, c’eft à dire Magiciens& Mecdecins. Ils les. envoyent pour cet effet à quelqu’ un des plus entendus en cette: detcftable profefion, c’eft à dire qui foit en grande reputa- tion de favoir evoquer les Efprits malins, de donner des forts. pour fe venger de fes ennemis, & de gucrir diverfes maladies. aufquelles ceus de cette Nation font fujets. Maisil faut quete June 1e 4 TA 1518 CNRS : à “Chap?s DES ÎLES ANTILLES ni, jeune homme qui eft prefenté au Boyé poureftreinftruit en fon art, y ait efté confacré dés fa plus tendre jeuneffe par l'abftinence de plufieurs fortes de viandes, par des jeunes ri- goureus & que pour commencer fon apprentifflage, onluy tire du fang detoutes les parties de fon corps avec une dent d'Agouty, de même qu'on le pratique envers ceus qui font receus foldats. | Les Caraïbes, apprennent aufli avec foin leurs enfans à pefcher , à nager, & à faire quelques ouvrages, comme des paniers, des boutous, des arcs, des fléches, des ceintures; des litsdecoton, & des Piraugues. Mais d’avoir nul foin de former & de cultiverleur efprit, & de leur apprendre ni hon- neur, nicivilité, ni vertu: c’eft ce que l’on ne doit pas at- tendre de ces pauvres Sauvages, qui n’ont point d’autre gui- de, ni d’autre lumierc : pour une telle education, queleur entendement aveugle & remply d’épaiffes tenebres, nid’au- tre regle dans toutes les actions de leur vie, que le dere- glement & le desordre pitoyable de leur Nature vicieufe & cOrrompue. Aaaa 3 C HA 558 _ HisToirne MoRaLe, (Chap > eUVSE CHAPITRE VINT-QUATRIÈME. De l'Age indie des Cifatbes , de leurs Maladies » des Remedes dont ils Je fervent pour récouvrer la ae “ de leur Mort, € de leurs funerailles. | Es Caraïbes eftant de leur nature d’untres-bon tem- perament , & paflant leur vie avec donceur & repos = d'efprit, fans chagrin & fans inquiétude; Jointaufi la fobricté ordinaire dort” ils ufent enla conduite de leur vie, ce n’eft pas de merveille s'ils font exemtsd’uneinfinité d’in- commodirez & de maladies, quitravaillent d’autres Nations, & s'ils arrivent beaucoup plus tard au tombeau, que la plus grande partie des autres Peuples. Le bon air dont ilsjoüif- fent, contribué éncore à leur fanté & à la longueur de leurs jours. On netrouve guére parmy-eus des ces âges abrégez Pr il fe voit fi grand nombre parmy-nous: mais s'ils ne meurent demort violente, ils meurent fort vieus prefquetous. Leur vicilleffe eft extrémement vigoureufe : & à quatre-vints dix ans les hommes engendrentencore. Ils’en voit grand nom- bre d’entr’eus, qui ont plus de cent ans, & quin'ont pasun poil Caps. blanc. Jean de Lery, digne d’eftre creu , nous aflure qu'il n'avoit apperceu prefque | point de cheveus blancs en la tefte De Lar des Taupinambous de pareilâge, D’autres Hiftoriens nous Far affürent, que les femmes de ces Sauvages-là, gardent leur fe- de V4 condité jufques à à quatre-vints ans. Etles Francois ont con- ir nu au pais de Canada un Sauvage L quiavoit encore les che- Boi lv.s. VeUS noirs, & meilleure veuë qu custous, bien qu'il fuft a chap, 10. l’âge de cent ans. La vie ordinaire de nos Caraïbes eft de cent cinquante ans, & quelquefois plus. Car bien qu'ils ne fachent pas con- ter leurs années, on nelaiffé pas d’enrecueillir le nombre par es marques qu'ils en donnent. Er entr'autres, ils avoient encore il y a peu detems au milieu d’ pu, des perfonnes Vi= vantes Æ Chap.24 DES ÎLES ANTILLES. $$9 vantes, qui fe fouvenoicent d'avoir veu les premiers Efpagnols _ quiavoient abordé en l’Amerique. D’où l’on conclud, qu'ils devoient eftre âgez de cent-foixante ans au moins, Et en ef- fer, ce font des gens qui peuvent pañler pour l’ombre d’un corps, & qui n’ont prefque plus que le cœur en vie, eftant couchez dans un lit, immobiles & décharnez comme des fquelettes. Ils ont, toutefois, encoredelafanté. Etilparoit bien queleurlangue, non plus que leur cœur, n’eft pas mor- te, & queleur raifon refpire encore. Car non feulement ils parlentavec facilité , mais lamemoire-ér le jugement accom- pagnent leurs paroles. rs AGEttE mort fi reculée qui fe voit chez les Caraibes, nedoit _pas fembler étrange, ni eftre prife pour un fantôme. Carpour laifler maintenant les grands âges des premisrs fiecles & ceus dont les Ctefias, les Herodotes & les Plines font mention, les Hiftoriens modernes. nous fourniffent aflez d'exemples pour confirmer cette verité,, Er entr'autres les Hollandois qui ont trafiqué aus Moluques nousaflurent , que la vie, en ce pais-là eft bornée d'ordinaire à centtrenteans. -Vincént lé Blanc dit qu’en Sumatra, en Java, &ausiles voifinés; elle va jufqu'à cent quarante, comme elle fait auffichezles Cana- diens. Et qu’au Royaume de Cafuby, elle atteint la cent cin- quantiéme année. François Pirard, & quelquesautres, nous témoignent que les Brefiliens ne vivent pas moins ; & qu'ils vont; jufqu’à cent-foixante ans, .& au delà même. Et dans la Floride & en[ucatan, ;ils’eft trouvé des hommes quipaf- Joient. cét âge-là. Eneffet, onreciteque les François, au voyagede Laudoniere en la Floride, en 1564. Virent-làun vicillard ,) qui fedifoitägé detrois censans, & Pere de cinq Gencrations. Er enfin au rapport de Mafée, un Bengalois en _ Orient l'an 1557. fe vantoit d'avoir trois cens trente-cinq ans. ‘Apréstout cela, la longueur de jours denos. Caraïbes ne fauroit pañler pour un prodige, niunechofeincroyable. “Afclépiade, au rapport de Plutarque, eftimoit.que gene. ralement les habitans des pais froids vivoient plus:que cuis des regions chaudes, parce, difoit-il, que le froid rerient au dedans là chaleur naturelle, & ferre les porespouriagatder, au lieu que cette chaleur fe diffipe factement dans.les élis mais. Livre 3. liv, 4 chap. 12. 7.2: ES 7.48. Relarson des Hol- landos. Te paré. chap. 24° Lefcarb. Vincent le Blane. le parte. chap. 34. I. part. chap. 26. Bergeron au Tras- té des Naviga- liens. Lefcar- boi, €7 de. Luaer. Bergeron: au TTAis te. des Tavisax. 1085, Ætv: it: Aal.rs.- des Op3- ni085 des: Fslsfofess chap. 30. 560 . HISTOIRE MORALE, Chap.24 mots ou les pores font élargis & ouverts par la chaleur du Soleil. Mais l'experience des Caraïbes, & de tant d’autres Peuples de la Zone torride qui vivent d'ordinaire un fi grand âge, pendant que nos Européens font veus communément mourirjeunes, eft contraire à ce raifonnement naturel. Lors qu'ilarrive, commeilnefepeutautrement, que nos - Caraibes font attaquez de quelque mal, ils ont la connoiffan- ce de quantité d’herbes, defruits, de racines, d’huyles & de gommes, par l'ayde déquelles ils retournent bien-toft en con- valefcence, fi le maln'eft pas incurable. Ils ont encore un fecret affuré pour guerir la morfure des Couleuvres, pour- veu qu’elles n’ayent point percé la veinc. Car alorsiln’y a point de remede. C'eft le jus d'une herbe qu'ils appliquenr fut la playe, & dans vint-quatre heures ils font infailiible. ment guetis. Le mauvais aliment de LGrabès & d’autres s Infeêtes, dontils fe nourriffent ordinairement, eft caufe qu'ils font prefque tous fujetsà une fâcheufe maladie qu'ils nomment Py4»s en leur langue, comme les François à la petite verole. -Quand : Ceus qui font entachez de cette fale maladie, mangent de la Toïrtuë franche, ou du Lamantin, ou du Caret , qui eft une autre efpece de Tortuë, ils font incontinent aprés tous bou. tonnez, parce que ces viandes font fortir ce mal en dehors. Ils ont auffi fouvent de grofies Apoftumes, desclous, & des charbons en divers endroits du corps. Pour guerirces maus qui proviennent la plupart de la mauvaife nourriture dont ils ufent; Ls ent une écorce d'arbre appellée Chipiou, amere comme fuye , laquelle ils font tremper dans de l'eau, & ayant rapé dans cette infufion le fonds d’un certain gros Coquilla: _ge qu'on nomme Lambys, ils avalent cette Medecine. Ils preflent auffi quelquefois , l'écorce fraichément levée de quelques arbres de CYby, ou d'autres Vimes qui rampent furlaterre, ou quis’acrochent aus arbres, & boivent le jus qu'ils enont exprimé: mais ils ne fe fervent pas volontiers de ce remede, que quand les arbres font en leur ca a: . defévei Outreces Medecines, avec cc léquelles ils purgent les mau- vaifes humeurs du dedans; ils appliquent encore au dehors CCt= Chap.24 DES ILES ANTILLES sé: certains onguents, & linimens, qui ont une vertu tres- particuliere pour nettoyer toutes les puftules qui reftent or- dinairement furle corps de ceus qui fonttravaillez des Pyans. Ils compofent ces remedes avec de la cendre de rofeaus bru- lez, laquelle ils démeflent avec de l’eau, qu'ils recucillent des feüilles de la tige du Za/fier. Ils ufent aufli pour le même deffein, du jus du fruit de Zunipa, & ilsappliquent furlesbou- ‘tons le marc de ce même fruit, à caute qu'il à la vertu d’at- tirer tout le pus des playes, & de refermer les levres des ulceres. Ils n'ont point l'ufage de la faignée par l’ouver- ture de la veine , mais ils dtbae de fcarifications fur la partie douloureufe, en l’égratinant avec une dent d’Agou- ty & la faifant quelque peu faigner. Et afin de diminuer étonnement que pourroit caufer ce que nous avons déja reprefenté ailleurs, de tant d’incifions que ces Barbares fe font pour divers fujets, & qui donneroient lieu de fe figurer en leurs perfonnes des corps toujours fanglans, & couverts . de playes, il faut favoir qu’ils ont aufli des fecrets & des re- medes infaillibles pour fe guerir prontement, & pour fermer leurs bleflures , & confolider fi nettement leurs playes, qu'à peine peut on remarquer fur leurs Corps; la moindre ci- catrice, Ils fe fervent aufli de bains artificiels, & provoquent les fueurs par une efpece de poële où ils enferment le patient, qui reçoit par ce remede fon entiere guerifon. Les Soriquois font aufli fuer leurs malades : mais quelquefois ils les hume- tent de leur haleine. Et pour la cure des playes, eus & les Flo- ridiens en fuccent le fang, comme les anciens Medecins le pratiquoient , quand quelcun avoit été mordu d’une befte ve nimeufe, faifans preparer pour ceia celuy qui en faifoit l'office, On dit auffi que nos Caraïbes, lors qu’ils ont été piqués d’un ferpent dangereus, fe font fuccer | a playe par leurs femmes, aprés qu elles ont prisun bruvage , qui a la vertu de rabatre la forceduvenin. Les Taupinambous fuccent même les parties malades, bien qu'iln’y air point de playe. Ce qui fe fait anffi auelqnefois en la Floride. Et les Turcs,lors qu'il leur furvient quelque déflu&tion, & quelque douleur, on à lat-fte ou fur geique: autre partie du corps, brulent la partie quifouffre. Bbbb Quel. Lefce- bot ’ (] de Lacr, De Lery chap. 20. Linfcor, chap. 1. Voy: de Villa months 62 HisTOIRE MORALE, ‘Chapzj Quelques uns des Peuples Barbarés, ont de bien plus étranges remedes dans leurs maladies, commeil fe peut voit chez les Hiftoriens. Ainfi ondit queles Indiens de Mechoa: cham & de Tabafco en la nouvelle Efpagne, pour fe guerir de la fievre, fe jettent tous nuds dans la riviere penfant y. noyer cette maladie. En quoy pour l’ordinaire ils reüfiffent fort mal. Une action à peu prés femblable s’eft veué chez les Caraibes. Car Monfeur du Monrel y trouva un jour un vieillard, qui fe l’avoit la tefte à une fontaine extremement froide. Etluy en ayant demandé lacaufe, lebon homme luy » répondit: Compere, c’elt pour me guérir : car je fuis ,, Mouche c'eft à dire beaucoup enrhumé, Le Gentil: homme ne fe put empefcher d’en rire : mais plutôt il en eutpitié, croyant qu'il y en avoit añez pour perdre lepauvre vicillard, Et cependant contre toutes les régles de nôtre Medecine, cét étrange remede Iuy fucceda heureufement, Car nôtre Gen- til-homme Le rencontra le lendemain, gaillard & difpos, & délivré tout à fait de fon rhume. Et le Sauvage ne manqua pas de s’en vanter, & de railler nôtre Francois, de fa vaine pitié du jour précedent. Les Caraïbes font extrémement jalous de leurs fecrets en la Medecine, fur toutleurs femmes qui font fort intellisenà tes en toutes cescures : & pour quoy que ce pufteftre, ils n'ont encore Voulu communiquer aus Chrétiens les remedes fouverains qu’ils ont contre la bieflure des fléches enpoifon- nées. Mais ils ne refufent pas de les vifiter & de les traiter _ quand ils ont befoin de leur fecours: au contraire ils s’y por . tent alégrement, &detres-franche voïionté. Ainfi un per: fonnage de qualité d’entre nos François ayant été mordu .… dangereufement par un ferpent, en a été heureufement sue Tr. ry par leur moyen: En quoy certes ils font bien diffcrens de land, €5 CES brutaus de Guinois & de Sumatrans, qui n’ont aucune * deVin- compaffion de leurs propres malades, les abondonnant com= re me de pauvres beftes. Mais l’ancien Peuple de la Province i. par. de Babylone, prenoit unintereft fi particulier dans toutes les. ur maladies, que les malades yétoient mis en place publique, ia, © chacun leur dévoit enfeigrer le remede, dont il avoit fait l'experience fur luy-même, Ceus quiont fait Me: à Chap.24 Des ÎLES ANTILLES, 563 Cambaya; difent, qu'il y amème un Hofpital pour traiter les Oifeaus malades. LL Quand les remedes ordinaires dont fe fervent nos Caraï- bes en leur neceflité, n’Ont'pas eu un tel fuccés qu'ils s’é- toyent promis, pour lors ils ont recours à leurs Boyez, c’eftà dire à leurs Magiciens, qui contrefont aufliles Medecins : & Voyage des Drac, 2. partee les ayant conviez de les venir vifiter, ils les confultent fur l’'e- venément deleurs maladies. Ces malheureus fuppots de l’E- fpritmalin, fe font aquis par leurs enchantemens, un telcre- dit parmy ces pauvres abufez, qu'ils font reputez comme les arbitres de la vie & de lamort, & tellement redoutez à caufe deleursfortileges, & de la vangeance qu’ils tirent de ceus qui les méprifent, qu’iln’y a aucun de ce miferable Peuple, qui netienne à gloire de rendre une deference & une obeïflance aveugle, à tous leurs avis. Pour ce qui eft des Ceremonies qu'ils »ofervent en ces ren- contres, nous les avons déja touchées en partie au Chapitre de leur Religion. Il faut avant toutes autres chofes, que la cafeen laquelle le Boyé doit entrer foit bien nettement pres parée: que la petite table qu'ils nomment Caeroutou, foit chargée de l’Arakri pour CHWaboya, c’eft à dire d’une offrande de Caflave & d'Ouycou pour l'Efprit malin: & même des prémices de leuts jardins, fi c’eft la faifon des fruits. Il faut aufli qu'il y ait à l’un des boutsde la cafe, autant de petis fie- ges, qu'il fe doit trouver de perfonnes à cette deteftable ation. Aprés ces preparatifs ,; le Boyé, qui ne fait jamais cette œuvre de tenebres que pendant la nuit, ayant fait foigneufe- ment éteindre tout le feu de la Cafe & des environs, entre dans cetteobfcurité, & ayant trouvé fa place à l’ayde de la foible lueur d’un bout de Tabac allumé qu'iltiencen fa main;il prononce d’abord quelques paroles Barbares: il frappe en fuit- te de fon pied gauche la terre à plufieurs reprifes, & ayant mis en fa bouche le bout de Tabac qu’il portoit en fa main, ilfouf- flecinq oufixfois en haut la fumée quien fort, puis froiffant entre fes main leboutde Tabac, ill eparpille en l'air. Etalors lc Diable qu'il aevoqué par ces fingeries , Ébranlant d’une fu- Moule ue le faifte dela Cafe, ou excitant quelque autre | | BbbDO:2, :. bruit Elian 3. €.3 8e “Zi. 4. * chap. 12. © Elsan, ha. sr. #64 __ HisTOorRE MORALE, (Chapzz bruit épouvantable , comparoitaufli-tôt, & répond diftin- &ement à toutes les demandes, qui luy font faites par Le Boyé. Sile Diable affüre, que la maladie deceluy pourlequelil eft confulté; n'’eft pas mortelle : pour lors le Boyé & le Fantôs me qui l'accompagne, s'approchent du malade pour l’af- furer qu'il fera bien-tôt guery : & pour l’entretenir dans cette efperance, ils touchent doucement les parties les plus douloureufes de fon corps, & les ayant un peu preffées , ils feignent d’en faire fortir des épines, desosbrifez, des éclats de bois & de pierre, quiéroyent, à ce qui difent ces malheu- reus Medecins, la caufe de fon mal. Is humeétent auffi quel- quefois de leur haleine la partie dcbile, & l'ayant fuccée à plufieurs reprifes , ils perfuadent au patient, qu’ils ont parce moyen attiré tout le venin qui étoit en fon corps, & qui le: tenoit en langueur :;En fin, pour la clorûte de rout cet abomi- nable myftere > ils frottent tout le corps du malade avec le fe du fruit de Zusipa, qui leteint d’unbran forcobfcur, qui ef comme la marque éc le feau de fa guerifon. | ) Celuy qui croit d'avoir été guery par un fi dammable : moyen, a coûtume de faire en reconnoiflance un grande fe- ftin , auquel le Boyétient le premier rang entre les conviez. Il ne doit pas aufli oublier ?C##akri pour le Diable, qui ne manque pas des’ytrouver. Mais fi le Boyé a recücilly de la communication qu’il a eu-avec fon Demon, que la maladie eft à la mort , ilfe contente de confoler le malade , en luy di. fant, quefon Dieu, ou pour mieus dire fon Diable familier, ayant pitie de luy, le veut enmeneren fa Compagnie, poux eftre delivré de toutes fes infirmités. Certains Peuples, ne pouvans. fupporter l'ennuy & les inc commeoditez d’une trop caduque vieilleffe; avoïent acoutumé de chaffer avecun verre de Ciguë, leurame qui croupiffoit trop long tems à leur gré, dans leur miferable corps. Et quel- ques autresau rapport de Pline, étant las de vivre, fe precipi- toient en la mer. Maisen d’autres païs, les enfans natten= doient pas que leurs Peres étant parvenus à un grand âge; fiflent cette execution. Car on dit que par une Loy publi- que, ils en étoient les parricides & les bourreaus. Ertle Soleil | éclaire Chap.24 DES ILES ANTILLES. 565 éclaire encore aujourd’huy dans quelques Provinces de Ja Floride, des maudites creatures, qui pat une efpece dereli- gion & de pieté, afflomment leurs Péres parvenus à la cadu- cité, commedes perfonnes inutiles en ce monde, & qui font à charge à à cus-mêmes. Mais quelque avancée que puiffe eftre la vieilleffe chez nos Caraïbes, les enfans ne s’ennuyent pas de voir leur Peres & leurs Meres en cetétat. Ileft vray, que quelques Caraï- bes ont autrefois avancé la mort de leursparens, & ont tué leurs Peres & leurs Meres, croyant faire une bonne œuvre, & leur rendre un office charitable, en les delivrant de beau- coup d’incommoditez & d’ennuis, que traine aprés foy la vicilleffe, Un vicus Capitaine que nos François nommoient le Pilote, fe glorifioit d'avoir rendu ce deteftable fervice, à . plufeurs de fes ancêtres. Maïs premierement , les Caraibes ne pratiquoient cette inhumanmité, qu’envers ceus quile defi- roient ainfñi, pour être dchivrez des miferes de cette vie: & ce n’étoit, que pour aquicfcer aus prieres inftantes de ceus. qui Soient las de vivre, qu ‘ils en ufoient de la forte. De plus, cette Barbarie n’a jamais été univerfellement receuë parmy eus: & lesplus fages l'ont à prefenten deteftation,, & entre- tiennent leurs Peres & leurs Meres jufques au dernier perio= dede leur vie, avec tous les foins, & tous les témoignages d'amitie , d'honneur & de refpe&, que l’on pourroit attendre d’une nation, qui n’a point d'autre lumiere pour fe conduire que celle d’une nature corrompuë. Ils fuportent patiemment leurs defauts & les chagrins de leur vicillefle : ne fe laffent point deles fervir, & le plus qu’illeureft poffible, fe tiennent prés d’eus pour lesdivertir, comme nos François l’ontveu en quelques unes de leurs Iles Ce quine merite pas une petite loüange, fil’on confidere que celafe faitchez des Barbares. Que fi quelques uns d’entr’eus n’honorent pas ainfileurs Pe- res & leurs Meres, ils ont degenere de. la vertu de leurs Ancètres. Mais quand aprés tous leurs foins & toutes leurs peines, ils viennent à perdre quelcun de leurs proches ou de leurs amis, ils font de grands cris & de grandes lamentations fur fa mort ; Bien au conrraire des anciens Traces, & des Habi- pe Bbbb 3 tans Herodor&. Lso.s CA Fslofirare en la vie: 4 Apclloe mins) l.Se. + À. F oyage de Drac, 2.partse. Æenofon en [4 Cyrope- ee, LS. Pline, sv. 7. Chap. 54. | 466 | HisToiIrRe MORALE, ‘Chap.24 tans des Iles fortunées, qui enfevelifloient leurs mortsavee joye, danfes & chanfons , comme des perfonnes délivrées des mifcres dela vie humaine. Aprés que les Caraïbes ont arro- {E le corps mort de leurs l’armes , ilslelavent, lerougiffenr, luy frottent la tefte d’huile, luy ‘peignent les cheveus, luy plient les jambes contre les: cuiffes , les coudes entre les ; jam- bes, &ilscourbent le vifage furles mains, deforte que tout le corps ef à peu prés en la même poflure, que l’enfant eft dans le ventre de fa Mere, & ils l’envelopent dans un li& neuf, attendant qu ‘ils le mettent enterre. Il s'efttrouvé des Nations qui donnoiïent les rivieres aus cotps motts, pour fepulture ordinaire, comme quelques Ethiopiens. D'autres les jettoient aus oifeaus & aus chiens, comme les Parthes, les Hircaniens & leurs femblables aufi honneftes sens que Diogene le Cynique. Quelques autres Peuples un peu moins infenfez, les couvroient d'un mon- ceau de pierres. On dit que quelques Africains les mettent en des vaiffeaus de terre: & que d’autres les logent dans du VÉTIE: FICHACIIté, qui tenoit le feu pour le principe de toutes chofes, vouloit qu'onbrulaftles corps, afin qu’ils retournaf- fent à leurorigine. Et cette coutume obfervéepar les Ro- mains durant plufieurs Siecles, fe pratique encore aujour- d’huy chezdivers Peuples del’Orient. Mais Cyrus difoit en mourant, qu'iln’yavoit rien de plusheureus, qued’eftreau- fein de la terre, la Mere communedetousleshumains. Les premiers Romains étoient de cette opinion: catilsenterroient leurs motts, Et c’eft aufli de tant de pratiques differentes fur ce fujer, celle que l’on trouve en ufage chez les Caraïbes. Ils ne font pas leurs foffes felon nôtre mode, mais femblables à celles dés Turcs, des Brefiliens, & des Canadiens ; c’eft à dire dela profondeur de quatre ou cinq pieds, ouenviron de figure ronde, dela forme d’untonneau: Et au bas ils mettent un petitfiege, fur lequel les parens & les amis du défunt af- _ féent le corps, le laifant en la même pofture qu'il luy ont donné incontinent aprés fa mort. Ils font ordinairement la foffe dans la cafe du defunt, où s'ils l’enterrent ailleurs, ils font toujours un petit couvert fur l'endroit où le corps doit repofer , & apres l'avoir dévalé dans cette 3 Ghap:2%4 DES ILES ANTILLES. 567 cette fofle, & l'avoir envelopé de fon Amac, ils font un grand feu à l’entour, & tous les plus anciens tant hommes que femmes s’acroupiflent fur leurs genous. Les hommes fe placent derriere les femmes, & detemsen temsils leur paf- fent la main fur les bras pour les inciter à pleurer. Puis en - chantant & pleurant ils difent tous d’une vois piteufe & la- ,, mentable. Hé pourquoyestu mort? Tu avoistant de bon ,» Manioc, de bonnes Patates, debonnes Bananes, de bons , Ananas. Tu étois aimé dans ta Famille, & l’on avoit tant de foin de ta perfonne. Hé pourquoy donc es tu mort? , Pourquoy es tu mort? Si c’eftun homme ils ajoutent. Tu , étoisfi vaillant & fi génereus, Tu as renverfé tant d’enne- »mis; tut’és fignalé en tant de combats : Tu nous as fait ,, manger tant d’'Arouâgues : Hélast qui nous defendra ,, maintenant contre les Arouägues ? He pourquoy donc es »tu mort? Pourquoyestu moïtt. Etils recommencent plu- fieurs fois la même chanfon. - Les Toupinambous font à peu prés les mêmes lamenta- \ tions fur les T'ombeaus deleursmorts. Ileftmort, difent ils, cebon chañeur, & excellent pefcheur, ce vaillant guer- trier, ce brave mangeur de prifonniers , ce grand affom- », meurt de Portugais, & de Margaiats, ce genereus defenfeur »denôûtre païs. Il eftmort. Et ils repetent fouvent le mê- me refrein. Les Guinois demandent aufi à leurs morts, ce qui lesaobligez à mourir, & leur frottent le vifage avec un bouchon de paille pour les réveiller. Et Busbequius, dans la Relation de fes Ambaffades en Turquie recite, que pañlant par un bourg de la Servie, nomme Yagodena, il entendit des femmes & des filles quilamentant auprés d’un mort, luy di- foient dans leurs chants funebres, comme s’ileut efté capa- ,, ble de les entendre. Qu'avons nous merité & qu’avons » nous manqué de faire pourton fervice, & pour ta confo- » lation? Quel fujetde mécontentement as tu jamais eu con- »trenous, qui tait obligé de nous quiter, & de nous laifler »ainfi miferabies & defolées? Ce qui fe rapporte en partie aus plaintes funebres de nos Caraïbes. Le Vacarme, &les Hurlemens des Toupinambous & des Virginiens en femblables occafons, dure ordinairement un mOi. De Lery chap. ÿ ; Relarsow des Hole landos. Livre 1: 568 HISTOIRE MORALE, Chap. 24 mois, Les Peuples d'Egipte, faifoient durer leurs larmes ann foixante & dix jours. Et quelques Floridiensemployent des queenla vieilles pour pleurer le mort fix moisentiers. Mais Lycur- vie de guc, avoitlimité le deuil à onze jours, & c’eft à peu prés le Hé tems que prenoient autrefois nos Caraibes, pour pleurer le. on defunt , avant que dele couvrir deterre. Car durant l'efpace de dix jours, ou environ, deus fois chaque jour les parens, & même les plus intimes amys venoient vifiter le mort à fa fofe. Etilsaportoient toujoursà boire & à manger à ce mort, luy »» difant à chaque fois. Hé pourquoy es tu mort ? Pourquoy ne Veus tu pas retourner en vie? Ne dis pas au moins »» que nous t'ayons refufe dequoy vivre. Car nous t'appor- tonsäboire, & à manger. Et aprés qu'ils Iuy avoient fair cette belle exhortation, comme s'il l'ent dû entendre, ils luy laifloient fur lebord de la foffe les viandes & le bruvage, juf- ques à l’autre vifite, qu’ils les pouffoient fur farefte, puis qu il ne daignoit pasavancer fa main pour en prendre, Fos Les Peruviens, les Brefiïiens, les Canadiens, les Mada- Le un gafcarois, les Canariens , les Tartates , les Chinois, accom- Paul le pagnent auffi de quelques mets, les tombeaus oùils enter- Lerae rent leurs proches. Et fans aller fi loin, ne fe faitil pas quel- Cauche, Que chofe de femblable parmy nous ? Car on fert durant 28) quelques jours, les effigies de nos Roys & de nos Princes nou. hezge VClement morts, & on leur prefente à boire & à manger, gero, Comme fi elles étoient vivantes: même jufqu’à faire devant ga elles, l'effay des viandes & du bruvage. gant. Les Caraibes de quelquesiles, pofentencoreà ptéae des viandes prés de la foffe du mort : maisils ne le laiffent pas un fi long tems qu'ils faifoient autrefois , fans le couvrir deterre, Caraprés quela chanfon funebre ef finie, & que les femmes ont épuiié toutes leurs larmes, l’un des amis du defunt luy “4ofa metuneplanchefurlatefte, & les autres pouffent peu à peu Hit | | ; PNé Jaterre avec les mains & rempliffent la fofe. On brule aprés de la Chre, Cela, tout ce qui apartenoit au mort. de Laers []stuënt auf quelquefois des Efclaves pour accompagner Garcslaf. > Fo les Manes de leurs morts, & lesallerferviren l’autre monde, Linféor Mais ces pauvres miferables, gagnent au pied quand leur. ru #4 maiftre meurt, & fe fauvent en quelque autre Ile, Oncon- ru | çoit xX = x b t Chap.24 DES ÎLES ANTILLES. _$69 coitune jufte horreur, au récit de ces inhumaines & Barba- res funcrailles, quifontarrofées du fang des Efclaves, & de diverfes autres perfonnes : & qui expofent en veuëé de pau Vres femmes égorgées, brulées,, & enterrées toutes vives, pour aller en l’autre monde tenir compagnie à leurs maris, _ comme il s'en trouve des exemples chez diverfes Nations. Mais nos Caraïbesfe contentent en ces rencontres, detuer les Efclaves du defunt, s’ils les peuventatraper. Il étoit defendu aus Lacedémoniens de rien enterrer avec les morts: maisle contraire s’eft pratiqué , & fe pratique en- core aujourd’huy chez diverfes Nations. Car fans parler de _ tant de chofes precieufes que l'on faifoit confumer avec les corps qui pañloient par le feu aprés leur mort, chez les an- pue, ciens Romains, Macedoniens, Allemands, & autres Peu- Arr, ples : Nous lifons en l’Hiftoire de Jofefe que le Roy Salo- Fée mon enferma de grandes richefles avec le corps de David fon carpir. Pere: Ainf les T artares mettent dans la tombe avecle mort, De£erp tout fon-or & fonargent. EtlesBrefiliens, les Virginiens, R°%7 les Canadiens & plufieurs autres Sauvages enterrent avec lavdois. les corps les habits, les hardes & tout l'équipage des de- 2e24 ES Le funts. nr Ar _ C'eft aufice que les Caraïbes pratiquoient en leurs fu- _ nerailles, avant qu'ils eufflént communiqué avec les Chré- tiens, Car 4 la dernicre vifite qu’ils venoient rendre au mort ; ils aportoient tous les meubles qui luy avoient fervy _ durantfavie, aflavoir, l'arc & les fléches, le Boutou, ou la Mafluëé, les Couronnes de plume, les pendans d’orcilles, les Colliers, les Bagues, les Braffelets, les paniers, les vaif- feaus, & les autres chofes qui étoïent à fon ufage, ils en- terroient letoutavecle mort, ou ils lebrüloient fur la foffe. Mais à prefent ils font devenus meilleurs ménagers: Car les parens du defunt, refervent tout cela pour leur ufage, oubienils en font prefentaus afliftans, qui les confervent en memoire du defunr. | 3 Apres que le corps eft couvert deterre, les plus proches parens fe coupent les cheveus, & jufnent rigoureufement, croyant que par là , ils en vivront & plus long tems & plus heureus. D'autres, quittentles Cafes & la place où ils ont Ceccc | Enterté PANER ANR ne Ÿ FAC “y s70 Hisr. Mon. pes Îres AnTiL. Chap.24 enterré quelcun de leurs parens, & vont demeurer ailleurs. Quand le corps eft à peu pres pourty, ils font encore une. affemblée, & aprés avoir vifité & foulé aus pieds le fepulcre en foûpirant, ils vontfaire la débauche, & noyer leur dous leur dans le Ouïcou. Ainfi la Ceremonie eftachevée, & l'or ne vient plustourmenter ce pauvre corps. AE Fin du fecond &* dernier Livre de PHlifloire » 11 | | des Antilles. | VÔCAs. LAS L La L Nu 4171 PA VOCABULAIRE ÆCARAÏBE. s7t . Avertiflement. TOus marquons par des accens aigus Îes Siabes longues, & fur léquelles il faut appuyer. Et nous mettons deus points fur plufieurslettres, pour faire connoitre que celle qui precede. appartient à la fyllabe d’° auparavant, & nefe doit point du toutJoindre en la prononcia- tionavecla fuivante. Comme lors qu'en Francois hous mettons déus points fur loÿange, [ur louér, & fur quelques mots femblables. 2. Lorsque le mot que nous couchons eftceluy des hommes, nous le défignons paruneH. Et lors _ que c'eft celuy des femmes, nous le diftinguons paruneF. 3. Enfin, comme les mots de cette Langue font difficiles à imprimer correctement, à cEus quin’en ont pas la connoiflance par eus mêmes, les Leéteurs {ont fuppliez d'attribuer à Pinprimeur les fautes qui peut eftre fe trouveront icy én quelques en- droits , comme 1l eft prefque impoñlible autre ment. Ccec s I. LES 472 I LES PARTIES. du. À Corps HUMAIN. Oncorps, Néfobou. | La graifle, Takellé. Ma peau, Nre. Cela fignifie en général tout ce qui fert _de couverture. Mesos, N4bo. Gela fignifie | itÉ un er2dron. Les Caraïbes ne diftinguent / point les veinesd'avec les nerfs; & ils les expriment par le mot de: ANillagra, qui fi ignifie , mes nerfs ou mes veines : comme ZLilagra fes nerfs oufes veines. pellent encore ainfi les ra- cines des arbres. Mon fans: H. 27554. F, ANi- | moinalos. Mon poil, mes cheveus, 2777: bouri. Matefte, Mcheucke. Mes yeus,. Nakou. Ma prunelle , Aékou-euke. C'eft à dire proprement, Le noyau de non œil. Ma paupiére; Nakou-ora. C'eft . àdire, La peau de mon œil. Mon: fourcil, Nichikouchi, Proprement, Piece d’æil. Mes cils, Nékou-iou. Propre- ment, / poil de l'œil, Mon front, Nérebé. Mon vifage, Nichiban.. VOCABULAIRE Ils ap- CARAIBE. Mon nez, ; Miche | Ma boiché SA | | Malévre, Nioumärou. Ma dent, Nari. Me dent RE EE 2 Nackeu: e. . [Mes gencives, Näri-aregrik. proprement, ce qui eff contre mes dents. | Mon oreille, Marikaë, : 1 mes temples, Xouboyoubou. |mes Jouës, Ntigne. malangue, Ninigné, dou | monmenton, Näriona. ma-mammelle;Àovréi. : 100 ma poittine, Nérokon.. 1, mon épaule, #éch£... mon bras, #arresre. Il fignife auffiune ae. mon coude, neugueumeuke.. mes mains, z0#caboz : .° mes doits, nôucabo-raür, coms me fi vous defiez,, des Pets, ou lesenfans de ma main. mon pouce, noucabo-iteignum. Proprement, ce qui eff op= pofe aus doits. : Le pouls, Lôucabo FRE À c'e à. dire proprement, ê ame de la main. mon ongle, #éwbara: 9: 4 mon eftomac, sasichirokou. | mon cœut, H. #ouünni. FE. | nanichi. Ce mot fisnifie aufli, #07 ame. 1 mon poulmon , Zo4rai. mon foye, #oubana: mes entrailles, sowlakaë, Cela: : figai-- VOCABULAIRE fignifieauM le ventre, mes reins, RARAGARÉ, mon cofté, zauba. La ratte, couérnata. La veflie, Zchikoulou akaë. mon nombril, #4r1oma. Les parties naturelles de lhô- me, H. Yaloukouli, F.Ne- buera. Les parties naturelles de la femme, Toulonkou. mondetricre, #4rioma-rokou. ma fcfle , néatra. macuifle, #ebouik: mon genou, nagagirik. mon jarret, #chaouñ-chaouï. ma jambe, ourna. | ma gréve, nourna-aboulougou. ma jointure à! PAINCOATEROMNE, c'eftädire,#re chofe ajoutée. Ce qu ‘ils appliquent auf à une piéce que l’on met fur unhabit. ma cheville du pied, #awmour- gouts. mon pied, nougouti. mon talon, souçouti-on4. mes orteils, #owgonti-raim. C'’eft à dire proprement, /es petis du pied, La plante de mon pied, z04- . gouti-rokou, proprement, le dedans du pied. . Comme ils ne difent prefque jamais les noms indéfinis, furtout des parties du corps; mais qu'ils les reftreignent à l’une des trois perfonnes, CaARAÏBE, 573 _ nous les avons. misicy à la premicre. Qui les voudra mettre aus autres, n'aura qu'à, changer la premiere lettre à chaque mot : com- me on le peut apprendre du Chapitre du Langage. IL PANENTDE. & RLLIANCE, M On parent H. Niou= moulikou.E.Nitoucke. Monmariage, Touelletels, Monmary, Niraiti. Mon Pere, En parlant àluy,, H.&E. Baba. En parlant de luy,H. Touméan FE. zonkouchili. mon grand Pere. H. Z:4m04- lou, F. nargouti. « 0 Mon Oncle paternel. Onl'a- pelle Pere, Béba, Etpour figaifier le vray & propre: Pere, quand on le veut di- ftinguer expreffément, on: fait quelquefois cette addi-- tion, Baba tinnaka. L' oncle maternel. H. 7%, Es Akatobou.. monfils, H, Z#4k0u, Imoulon. Tamoinri, Ê, Niräheu. mon petit fils,. Abah: Lors qu'iln‘y en aqu’un. Mais. lors qu’il y en a plufieurs.. N ibagnem. Cecc 3 Mon: 574 Mon fréréainé, H. Hembin, E. Niboukayem. Mon cadet, H. Onänüne, & Ibiri. C'eft à dire propre- ment, #4 moitié » léem. Mon beau-frere 16 mon VOCABULAIRE F.Namou- CarAÎBE. baché. {Ma Coufine, H. les C ef à dire, C#a femelle, oumx promifés parce que naturel. ment elles fontdeuës pour femmes à leurs coufins, Les femmes difent Tosëllou. Coufin de mére, H.zZh4|Les enfans des deus fréres, mout , E. Nikeliri. Le Coutn non matié à la Coufine, Tapataganuts. Mon N deu Tanantigané. Hibali moukou. Mon gendre C'eft à dire,gwz fait des petis enfans. Ma femme, H. Zezérery. Les femmes difent, Liens, {a femme. Ma Mére, en parlantàelle,H, | & FE. Bibi, c'eftaufli une ex- clamation. En parlant d'elle; H.Zchänwm. F. N'oukonchourote. Ma Belle-mére du fecond lit, Noukéuchourouteni. Ma Belle-mére dont j'ay époufé lafille, Zwemouts, Ma grand'mére, H.Z#mouti. ENacçuette, La tante maternelle s’apelle Mere, Bibi, Ja paternelle, N'ahenpouli. Mañlle, H.Arsamanti, EF. Ne raheu. Ma Sœur, Niou. L'ainée, B#bi-Ouänduün. La cadette, Tarmouleloux. Bru, bellefille, & Niéce, Ni- | Uncamarade, barré, - s'apellent fréres & fœurs : les enfans des deus fœurs, tout demême, IIL CONDITIONS & QUALITEZ, N homme, ouun mafle, H. Ouékelli : au plariel, Onékliem, F. Eyéri : au plu- tiel, Eyérium. Une fenriee , OU une femelle, - H.ouélle:au pluriel, F.O44em Inärou : au pluriel, Zrroy4m. Unenfant, Mankeili. Ungarçon, C#owléke, Unefille, Nrsmkeirou. Unpetitgarçon, Oxékelliraen, Proprement, Yx peïst mafle. Une petite fille, Oxéle raen, Proprement, Vre gd: fe= meélle. Un vieillard, Ox274k;: Un Pére de famille, Trowbome touls authe. Un veuf & une veuve, Hoi cha. Un | | VOCABULAIRE: Un amy, H. Zbaouänale, F. Ni- tignor. Un ennemy, H. Eroutou, F. CAkani. Unennemycontrefait, Erdw- townoubi. Ainfi nomment ils tous ceus de leurs enne- | mis qui font vétus: Sauvage , Caron. Les Ca- raibes ne donnent ce nom qu'aus animaus & aus fruits Sauvages. Habitant, #oros. Jnfulaire, ou Habitant d’une lle, Gibäv: bonon. Habit de la terre ferme, balouë-boov. Homme de Mer, balenaglé. C’eft ainfi qu'ils appellent les Chrétiens, parce qu'ils - viennent de filoin par mer en leur pais. Général d'armée navale, ou Amiral, Nhaléné. | Capitaine de vaiffleau, Tiow- _ boutouli canavuïi: Grand Capitaine, ou Géné- ral, Oxbonton, au pluriel, does ci Lieutenant , Toshoutoumal: arici. C'eft à dire propre- ment , Le trace du Capitaine, OU ce qui paroit aprés day, Soldat, ou guerrier, Netou- PE Sentinelle, Efpion, Ærikouti, Näbara. Mon prifonnier de guerre, CaARAÏBE, 873 Niouitouli, Nionémakalj. Celuy qui a la charge dere- cevoir les hôtes, Nionë- kaiti. Mon ferviteur à gage, tel que le Chrétiens en ont, Na- bouyou. Setviteur efclave, Tarmon. Un chafleur Elerouti. Gras, Tiboulél, Maigre, Toulééli, Grand, CHowchipéli. Gros, Ouboutonti. Pin: Niantr, Raeu. Chétif, Pikenine. Enlangage: bâtard. Haut, Zrôuti, Bas, Orabouts: Profond, Oxiliti, Anianlitis Large, Taboubéreti. Long, Mouchinagonts. Rond, Chérériti. Quarré, Patagouti, Beau, Bouïtouti. Laid, Azanti ichibou.. Mol, Nioulouts, Dur, Téleti. Sec, Ouärrou, Ouärroutt. Humide, Kouchakouik. Le chaud & le froid font exe- primez au titre 1x, Blanc, C4outi: Noir, Oxliti. Jaune, Honëreti. Rouge, Ponati: Ils ne favent nommer que ces: quatre couleurs-là, & ils y- 1 bars toutes lesautres, Lar=- 576 Larron, Yosalout:, Inceftueus, Kaækouyoukonätiti,. Âdultere, Onlimateti. Paillard, Huéreti, Querelleus , Oulibimekoali, Koanaïfi. Traitre, Nrrobouteits. Mauvais, Oulibati, N'ianinän- #1, re Bon, Zroponti. Sage, Kanichicots. Adroit, Manigar. Fol, FN ao, OÙ, Talouali ao. C’eft à dire proprement, Qui n'a point delumiere. Vaillant, Balinumpti. Poltron, Abaouati. Joyeus, Aoutrehoie liouani. Trifté, Zmonëémers. Yvre, Nirimainti. Riche, Katakobaïri. Pauvre, A1arakobaiti. Piquant, Chouchouti. Mort, X ekerali. IV. ACTIONS. & PassiO NS. Lfefie en luy » Moinçatteti I lone. Atten moy, Zacaba, Noubara. Efpere,atten, C4Wiré. Efpere enluy, Ewerichiraba. Efperance, Ementchira. Mon cfperance, Nemenichi- rach. VOCABULAIRE GARAÏSE. Ma crainte, Nironnoubouli. Ma joye, H, de F. Niouannt. Ma trifteffe, Nirikabonë. Il eft né, Emeïgnouüli. Soisle bien venu, Haleatibon. . J'ay faim, Lanieridlins | J'ay foif, “Nacrabatina Donne moy à manget, ou, donne moy du pain, H. Terebali imboman, F, Nou- boute im boman. | Donne moy à sud Natoni boman. Mange, à l'imperatif, Bail. Manger, à l'infinitif, ce qui cft peu en ufage, CAika. Jemange, Naikiem. Boy, K bébé Jebois, Nariem, Natakayer. Je fuis échauffé de boire, N4- charouätina. Vienicy, Hac-yeté. | Vat’en, bayouboukas. | Parle, CAriangaba. ÎJe parle, Navançayem. Taytoy, Maniba. Afliedstoy, Niourônba. Couchetoy parterre, Réoiga naba. Lévetoy, Arsndibe Tien toydebout, Raramaba: Regarde, te 6 Ecoute, Abanb ha) Flaite, Zr2michaba. Goutes-en, Adchabaë. Touche lc, Kourouäbaë. Marche, bayonbaka, | | En, 7 VocABULAIRE CarAîse, Haétéétouffé, Nrsrakouäli, Je marche, Nayoubékayem. Promenctoy, Babachiaka. Cours, Hehemba. Danfe, babénaka. Jedanfe, Nabinakayem. Saute, Choubakouäba. Je vay fauter, Choubakona miabou. Ry, béérraka. Jeris,oujeme réjouis, Ntos- _ érékoyem. Pleure, © 4yakouäba, Dors, écronka. _ Réveille toy, 4kakotouäba, Veille, C4romankaba. Travail, H. Touñtegmal. FE. Noumanikle. Repos, Nemervoni, Combat, Tibouikenoumali. Guerre, H. Nasnkoa, FE. Ni- huiloukouli. Paix, N'sémboulonli, Heft défait, Nioucllemaint. Il eft vaincu, Exépab. KRefpire, C4ouraba banichi. Cela veut dire proprement, Raffraichy ton cœur. Souffle, Phoubaë. Crache, Chouëba. Toufe, Hymba. Mouche toy, Naïnraba. Excrémenter, Houmoura. Lavetoy, Chibäba. | _Arrofe, Touba boubara. Vabaigner, A4k40 bouka. Je nage, Napouloukayem. Il nagebien, Kæpouloukatirs, la été noyé, Chalalaals, 577 Ouvre, Talaba. | Ferme, T'aba. Cherche, 4/oukaba. Trouve, Zb:kouäbaë. Vole, Hamamba. Tu tombes, bérikeroyen. Perds le, Aboulekonäbaë. Ven le, Kebeciketabaë. Achete, Amouliakaba. Il traitte ou trafique, baout- remets. | Vaàlachaffe, Efrekabouka. Ma chaffe, Nékeren. Il tire bien de l'arc, Kachien= ratiti boukatiti. Il tire bien de l'arquebufe, Katourafits. Va pefcher du poiffon, 7ikæ bouka authe. Je pefche, Nariatayem. Ma pefche, Natiakani. Il eftarrivé au port, Abourrie Raali. Je chante en l’Eglife , Nala- lakayem. Je chante une chanfon, N4- romankayem. Il eft amoureus d'elle , il la Carefe , Zchoatoatitao. Baife-moy, Chouba nioumou- lougou. | Je veus eftre nommé: nom- me moy, Yetiklée yatek. Il l'aime, Krirchinti loné, Ti= bouinati. H lehait, Terekati lone. Querelle, Lionëlébouli. Dddd Yvrog- j sr Yvrognerié, Linétimali. Frappe, fouëtte, Bazkoaba. Fouët, 4baïchagle. Bats-le, C4pparabaë. Egratigne, Kzomba. Tuë le, Chrouïtbaë. Il fe porte bien, C4rouattienli Ileft malade, Nanègaëts. IN annéteits. Maladie, LA4rek. € m'a deforcelé, Naraliatina. e me vengeray, Nibaréboui- batina. Vengeance, Nayourbanabouli. J1 l’a mordu, Kerrélialo. Heftbleffé, Nrhoukabouäli. I vit encore, H. No#loukerls, FE, Kakékeïls, La vie, Lakakechoni. Heftmort, H.Aouëéli, Nito- tamainäli, F. Hilaali. La mort, Lalouëne. Enterre le; ce qui ne fe dit pas feulement de l'homme, * mais en général de tout ce que l’on met en terre, cam- me d’une plante, Borambaë. Enterrement, Toramouli. & ŒRAFrE U N Village, Avrhe. Une maifon publique, Karbet. Une maifon, H; Towbara: Vocagwrairs :CARAÏBE./ Fi E..Tomhonokos : aise et Un appenty, un.couvett, ow unauvent, EU Un Jardin, CHaima : à RCE Mon jardin, H. Imainali, & Nichäli, Fofe à manioc; 7 td Alt Le toit , Toubana ora. Pro- prement , Couverture ve “maifon où decafe. Muraille ou pe Ko rara. Plancher. Ils n'en ont point. Planche, Zboutou Porte, Bénra. ; Fenétre, Toullepen ; propres ment, #7 rot. Li&, H. Awak & or ” Néon: Table, CHWatoutou. Siége, Halaheu. Cage, Tonoulou-banna. Vaifleau, Takaë, Cequis’ ap= pliqueàtout. Vaifelle de calabafle, Cour. Moitié de Coui qui fert de plat, Tauba. Ce mot ja ES proprement un cofé Taffe à boire, Réfta. : 10.7 Verre, flaçon, bouteille, bon= tella, de Y'Efpagnol. Gril de bois, que d’autres Sau+ vages appellent et g Toula. Pot defer, ou marmite, fowraë.. Pot de terre, 7. anmals akaë. j M Canary. | ges FAO ou ce qui tiéde quel- l # 4 fl 11 D: | VocañuLairs ChRaïee. quelquechofe, Takerakle. Chandelle, lampe, flambeau, Touli, c'eft du fandal qui rendune gomme, Mouchette, Tachackoutaglé. Hameçon, Keouë. Aiguilles, C4koscha, Epingle, C4lopholer. Coffre, 4rka. Hotte, Alaouäta, Catoli. -Tamis, pour pañler la farine du Manioc, & pour couler le Ouïcou, Hibichet. Fine farine de Manioc, Joue) chache, Viande, chair Téberir. Duroty, Artbelet, Achérouri. Une faufle, Taomali, ou Tau- Unbachis,Aarara. (mali Un feftin, ANéroni, Laupal, Eletoak, Du poifon, "H. Tiboukoulou, F. Tibaukoura. | Marchandife, Eberitina. Marchand, Baouäinemoukou. Piraugue, ou grand vaifleau de Sauvages , Canaouëk. PA vaifleau de Sauvages, * que nous appellons Canot, Coulialz. _N avire, Karabire. Cela vient | “fans doute de notre mot | | ‘François. Corde, 1bitarrow: # “Cable, Kaboya. ere ut un radt qui fût le baragoin & qu'ils 7 ont formé, an doute, dé- “V'puis qu'ils ont freqüenté CAT vb à Couteau, Couchique. Dix, Chonno“caboraim, | Vint ; 576 avecles étrangets, comme quelques uns des fuivans. “Ancte, Téchibani & Ankourow- Ne Cifeaus, Chérachi. Beaucoup, Mouche, Mot du langage corrompu. ( c'eft à dire,tows les doits de la main. Chonnoncabo raim. Chonnongonci raim, C'eft à dire,fows les doirs de la main. © tous les orteils des pieds: Ils ne favent pas conter plusavant. : ‘à | Voila tonli&, poiétya: Voila ton pit: En . bal. Voilatonbruvage, en batoni. Grand mercy, Tao, Ouy, L4rhan, Non, Oui. | j Demain, Æo#ka. 1 02 Bonjour, CHMabonë, : l'Adieu, Huichan. VI ORNEMENS. Abicleiré ‘ôu bagarlles cn gencral, Caconés." Couronné, 7: jémataboni. Bague, À bb ore. Collier, Exeka, Mon collier, Terekalr, Bracelet, Nournari. Dddd 2 Pense 580 Vocasvraire ,Caraïsr, Pendant d'oreille, Aarc- ; 3 VESTA kaëla. VII ANIMAUS: Ceinture , Zeconti , où Ni- de terre, d’eau, A Var var). ; Brodequin, Téchepoulou. ET DAIR, Peigne de France, bai na. | C'eft nôtre mot en Bara- Hien, CAnly. goin. Peignede rofeaus, bouléra. Mouchoir, N'ainraglés Miroir, nie — Epée, Echonbéré. Arquebufe, moufquet, Ra- .…kabonchou. Piftolet, Rakabouchou raeu. Proprement, petite arque- bufe, ou petit mou[quet. Canon, Kaloo. Pique, Halebarde, Rarscha, La pointe, Laboulougou. Le milieu, Lrana, Le bout, Tfona. Un arc, H. Ow/4aba, KE. Chima- 1. Ces deus mots figni- fient aufli un L4rbre. Lacorde de l'arc, Zb:tarrou. Des fléches, «4louäini, bou- leouà, Hippé. | Maflué d’armés, dont les Sauvages fe fervent dans leurs aide au. lieu: d'é-|, pée, bouttore, L H. Lichibau , KE. ! Chiens. oùêllé anly. Proprement , fémelle de chien. Pourceau, bouirokou. Ils le | nomment quelquefois auf 4 fi, Coincain. Guenon, ou bartbuë, Aouï. ta. Tortuë, Carallou : ragoin, Tortille. Gros lezard, Ondyæmaka, c’eft le même que d’autres In. diens appellent Zganas. | Petit lezard, ou Gobe mous. che, Oulleoums. Rat, Karattoni. | Chat, CHMechous. Soldat ouefcargot, Makeré Fourmis, Hague. Araignée, Koulaëlé. Serpent, Héhué. Couleuvre, Couloubéra. l'Efagnol. Scorpion, 4kourou. Poiflon, LA4wthe. Eten Bas gage corrompu, Pisher. Coquillage, Vignotage. Ils … difent le poiffon,&ilsajou- tent, Ora;, Gommequidie & en Ba De 17 roit, a coque ; OÙ la D. [4876 du poifon, Ain "] Qat. tabos. VOCABULAIRE tabou ora, c’eft ce que nous apellons communément un Lambü. Moufquite , ou efpece de moucheron, CL Æ46tera. Autre efpéce de mouche- rons , nommez communé- ment Æaringoins, & con- nus fous cenom-là, CAa/x Kalabala. Qui ont les pieds blancs. Mouche, Huëré-buëré, Mouche luifante, Cogouyou, cela fe rapporte au Cocuyos d'autres Indiens, Oïleau, Tézoulou. Cogq-d’Inde, Ouekelli pikaka. Poule d'Inde, oxëé/épikaka. Poule commune, Kayou. Ganne, Kararou. Oifon, Zriria. Perroquet, Kow/éhuec. Pigeon, Ouäkoukouëï, Tourte, Oxlleou. Perdrix, Onällami. Plume, Tosbanna, C’eft auf une feuille. Âile, oubras, Tarreuné: Bec, ou bouche, Trouma. Pied ou patte, Téwgouts. VII ARBRES & PLANTES: . À Rbre, Huëhuë. À Plante, Mrfntelz.. 'æ CARAÎBE. Fleur, ZWehuë. Fruit, ou graine, T##. Feüille, Zosbanna. C'efaufli unc plume. Branche, Touribouri. Epine , fcion, Huëhuë you. Proprement, /e poil de l'ar- bre, ou, Huéhué akou : com- me fivous dificz, Les yeus de l'arbre. | Une Foreft, t4rabox. Figues, Backôukou. Ilsnomment les Oranges & les Citrons comme nous, parce que ces fruits leur font venus de l’Europe. Caflier,ou Canificier, A1al;- mali. Cotton, CManôulo. Cottonier, Alonôulo# akecha. Raifinier, Oxliem. Raquette. fruit ainfi nommé par les François, Batta. $S&t Gros chardon, nommé Tor- che ou Cierge,, Akoulerou. Tabac, Toul. Melon, Bari. Pois ou fêve, CWansconti. Canne, ourofeau, en géné- ral, Aamboulou, Tikasket. Canne de Sucre, Kezsche. Jus de Cannes , ou. vin de Cannes, Kazichira. Sucre, Choncre. C'eft nôtre mot même, en Baragoin. Une herbe, K4/20.. Racine à manger, Toroe. Dddd 3% IX.CHo- $$2 IX::GHOSTFS'ELE- -mentairés & inanimées. E Ciel, & une Nucë, O4- békou. Nuage blanc, C4Wiron. Nuage noir, Ouällion. Brouillart, Kewerez. FEtoille, Oxxloukouma. Soleil, H. Huyeyou, E. Kächi. Lune, EL Nonum, ce quifis- nific auffilaterre, EF. Kéfi. Journée, Libuyeouli, Clarté & refplendeur, loukone. Lumiere, Laguenant. Nuit, C4r14bot. Ténébres, bourreli. Ileft jour, Haloukaals, 1] eff nuit, boureokaali. Air, N'aouñraglé. Vent, bebeité, il fignifie auffi l'air quelquefois. Feu, Oxättou. Cendre, balliffr. ‘Pluye, Koroboui. Grefle, glace, neige: Ilsne ies connoiffent pas. Hyver, leur eftinconnutout de même, Eté, Liromouli, Le froid, Lamoyenli. - Le chaud, Zowbacha. Le beau-tems, Zeromonmeél:. ils l'appellènt aufli du nom délEté. | Il faitbeau-tems, Hreowmeti, 1] fait mauvais-tés, Yeheuméti. Tonnerre, Onälou oxyoulou. Lal. VOCABULAIRE Caraïss, Le bruit du tonnerre À Tutr- guctennt. Tempefte, Touällou, bointara, Ourogan : qui eft le nom le plus commun. Arc-en-ciel, C4lamoulou, ou Touléuca;jcomme qui diroit, plume, ou pannache de Dieu. Une montagne, Oxébo. : Une vallée, Taralironne. Le montant, 7. agreguin. Une plaine, Léromonobou. Eau, riviére, To». | Etang, Taonaba, Source, fontaine, Taboulikari. Puits, Chzekari. Ruitedu: Tipouliri. Mer, H. Balanna,F. Balaonä. Terrè: H. Nonum. Cela figni- fic aù ff la Lune, EF, Monä, Excrément, Zrk4. | Sable, SévêR: | Chemin, Era. , Pierre, Tébos. : Rocher, Emétalr. Île; Oubao. Tobe ferme, ou gi balone. L Dubois, Hnéhbré, il fgnife aufli un L4rbre.. Du fer, Cräbou. De l'or & de l’argenit, bo#lata. DePairin, 7£a/apirou. Du letton, Kaouanam. Untrou, Toulleper, celafigni= fie aufli une ferétre. Une rade, 6eys, c’eft le mot de Laye un peu nus: ms . CHO- à VOCABULAIRE X, CHOSES SPIRI- ruelles, ou de Religion. Caraïps. $£3 celuy de Dies, & des Dieus. Mon bon efprit, ou, mon Dieu, H. zcheirikou, F. Né- chèmérakou. Ame eft exprimée pat le! Efprit malin,ou Diable. Hom- L même mot qui fignifiele cœur. Voyez au titre des parties du corps humain. Un Efprit, H. Ækambouë, F. Opoyemns. Ces noms font generaus. C'eft pourquoy| ils s’appliquent parfois à _ l'Efprit de l'homme. Mais ils font donnez en particu- lier aus bons efprits; au moins que les Caraibes efti- : ment tels, & qui leur tien- Bon efprit , nent lieu de Dieus. qu'ils tiennent pour une Divinité, & dont _ fon Dieu en particulier, eft chacun d’eus a le fien pour -auflinommé, Zcheiri, qui -eft le mot des hommes; & | Chemin, quieft celuy des que cesmots répondent à | femmes, & dont lepluriel et Chemignum. De forte mes & femmes l’appellenr, Maboyz, comme pronon- cent tous nos François : Mais les Caraïbes pronon- cent icy le B. un peu à l’Al- lemande , comme fi nous écrivions, Æ10poya. Ils donnent auflñi le nom de Maboya à de certains cham- pignons, & à de certaines plantes de mauvaife odeur. Le Diable ou l'efprit malin eft icy: Sauvons nous crain- tedeluy, 24boya Kayeu-enu: Kaërma loari. ]ls ont accou- umé de dire cela,lors qu'ils fentét une mauvaife odeur, Offrandes qu’ils font aus faus Dieus , ou aus Demons, CLAnaCTrI. Invocation, priere, ceremo- nie, adoration. Ils ne fa- vent ce que c'eft, FIN. T'A SE". DES CHAPITRES & DES. &RETIELES Du premier Livre de cette Hiftoire des Antilles. CHAPITRE PREMIER. D E la fituation des CAntilles en general: de la Tempe- rature de l'air; de la nature du pais € des Peuples qui } habitent. pag 1 CH'ATPIFRETTE De chacune des CAntilles en particulier. 1, pag Article premier, de l'Ile de Tabago. | 7 Article fecond, de l'Ile dela Grerade. 23 Article troifiéme, de l’Iiede Bekca. 24 Article quatriéme, de l’Ile de Saint Fincent. 1 A Article cinquiéme, del'Ile de /4 Barboude. 25 Articlefixiéme, de l’Ile de Sainte Lucie. | 27 Article fettiéme, de l’Ile de la CHWartinique. 28 CGHAPBLTR EMI Des Iles CAntilles qui s'étendent vers le Nord. pag.35 Article premier, de l’Ile de /« Dominique. 35 Article fecond, de l'Ile de A4arigalante. 37 Articletroifiéme, des Iles des Saintes @ des Oifeaus. 38 Article quatriéme, de l’Ile de /4 Defirade. 38 Article cinquiéme, de l’Ile de /4 Gardeloupe. 39 Article fixiéme, de l'Ile d'C4ntigoa. *. - Article fertiéme, de l'Ile de CHonr-ferrat. 42. Article huitiéme, del’Ile de /a Barbade, & de laRedonde. 43 Article neufiéme, de l'Ilede Nzeves. 44 jh CH A- 4 | * 4 D PE du : | ar \ Ft TABLE CH APT RE, LV | De lle de Saint Chriflofle en particulier. 7 _ pag.4s CHAPITRE V. | Des Iles de deffous le Frs nel se rire PRE Article premier de l'Ile de Saint Enfliche, pag. 56 Atticle fecond, de l’Ile de Saizé Bartelemy. 53 Article troifiéme, de l'Ile de Saba. 55 Article quatrième, de l'Ile de Saint CWartin. 59 Atticle cinquiéme, de l'Ile de l’Anguille. 60 Article fixiéme, des Iles de Sowbrere, d'Anegade Cr des Vier- | es. ) 6I Atticle fettiéme, de l’Ile de Sante Croix. | 61 CHABPRRESVMR Des CArbres qui Lt bei em ces Iles dont on peut manger le fruit. | | pag. 62 Article premier, Des Orangers, red ee. Citroniers. 63 Article fecond, De Goyavier. NT SONTÉE Articletroiliéme, Dx Papayer. | , 6s Article quatriét me, Du Momin. | 67 Article cinquiéme, D4 Zunipa. | 69 Article fixiéme, Da Raifinier. | 71 Article fettiéme, Del’CAcajon. PIRE r Article huitième, Des prunes d'Icaque. 51232074 Article neufiéme, Des Prunes de Monbain. 7S$ Article dixiéme, D# Courbary. 75 Article onziéme, Dx Figuier d’ Inde. | 76 Article douziéme, Du Cormier. | Ç SE Article treiziéme, D Palmiffe Epinews. | 77 Article quatotziéme, D4 Palmifie franc. 78 Article quinziéme, D# Lafanier. SRE Ârticle feiziéme, Ds Cocos. | iron of 822 Article dixfettième, D# Cacao, - | 1184 Ecce CHA» TASLE C H À P 1 T REX IL. Dés Arbres qui font propres 4 béir: : où ds férdit à la Men puyferie : on aa Teinture, pag 86 Atticlepremier, De deus fortes d'Acajote RAR RAS Article fecond, De l'Acomas. : : UE e 87 Articletroifiéme, Du bois de Rofe. Bb SA SRE Article quatriéme, Du bois d'inde. 89 Article cinquiéme , De plufieurs bois rouges qui font propres 2 à bätir, @ des bots de fer. Article fixiéme, Deplujieurs LArbres dont le bois 4 robe à F Teinture. 91 Article fettiéme, D# Roucou. se \; 92 CG H A P RER E.;: VIE Des CArbres qui font utiles à la Medecine, Et de quelques au tres dont les Habitans des Antilles peuvent tirer de grands AVANTAGES. | ; .. 94 Article premier, D Caffier ou Canificiex, | 12 Article fecond, Des Nors de Medecine. . 97 Article troifiéme, Ds boës de Canelle. | 096. Article quatriéme, D# Cottonnier. 99 Article cinquiéme, D Savonnier. sé Ut Hoi Article fixiéme, D# Paretuvier | ni119) st3t109 Article fettiéme, Du Calebaffier. Ar ‘1 HO Article huitiéme, Dx CHMahor. A sh - 103 CH À PAT RUE Er Des LArbrifféaus du pais qui portent des fruits, 0% qui ponffèns des racines qui font propres à la nourriture des Habitans , om quifervent à d'autres Chi | pag: 104 Article premier, D4 Aanioc. : | | 104 Article fecond, D Ricinus on Palima Chriffist + 04106 Article troifiéme, Des Bananiers @ Figuiers. ne. Arti- ñ HAE UE 1370 quatriéme, Du bois de Coral. 110 Article cinquiéme, Dx Lafinite & du bois de chandele FA CCOMA DEL ER D OR TN à Des Plantes, Her bages, G* Racines de daterres de Antilles. 331 . Article premier, De trois forte de Pyman. 111 Article fecond, D# Tabac, 113 Atticletroifiéme, Del’Indigo. PRET Article quatrième, Du Gingembre. L is ES Article cinquième, Des Patates. | 116 Article fixiéme, Del’ Ananas. | 115$ Article fettième, Des Cannes de Sucre. 10 122 GC HA PPT ROE:S ALL De quelques autres rares productions de la terre des L Antilles, G° de plufieurs fortes de legumes , G* de Fleurs qui y croif- ent. pag. 123 Article premier, Des Raquettes: Lu 124. Article fecond, Dx Cierge. 1824 Article troifiéme, De pluficurs forte de Lienes. 12$ Article quatriéme, Des Herbes toujours vives, 126 Article cinquiéme; Des plantes fenfibles. 126 Article fixiéme, De plafi eurs fortes de Pois: 128 Article fettième, Des Féves € Faféoles. 129 Article huitiéme, Des Plantes € Herbes qui peuvent avoir leur afageen la Medecine ou au menage. 1e à 130 Articleneufième, Des CHMelons d’ CAN) 13% Article dixiéme, Des Lys des CAntilles. 132 Article onzième, De deus fortes de Fleurs de la Hd 133 Article douzième, De l’Herbe de Mufe. 136 CH À PIT REXEL De cinq fortes de befles à quatre picds, qw'on a trouvé dans ces LS pag. 137 Article premier, De lopaffum. 137 Article fecond, D# Zavaris. 1139 FeCE Attie Far | Arricle troifiéme, Ds Taton. HOTTE Article quatriëme, DET'AGOMYS NN NME Article cnquié ns Des Raïs mUfqHez or ES 0 OS CG. FH AtP TE TOR IE TS AIPE \o Des: Reptiles qui fe voyent en ces [les pre. 142 Article premier, De Ales RE À Sopens & de Coms leuvres. 1600 314 À Articlefecond, Des Lezars, à “144 Article troifiéme, Des CAnolis. .. CHAR 311186 Article quatriéme, Des Roguets al, 155 10 DNS Article cinquiéme, Des CMabouies. 147 Article fixiéme, Des Goubes Manches, 1 °à 148. Article fettiéme, Des Brochets de terre... 14.9: Articlehuitièeme, Des HUE œ d'une auire effoce à dange- rens Reptiles. | M | EH APITR.E.:1XE Vis: k, Des Infeites qui font communs aus CÆntilles. pas. 152 Article premier, Des Soldats € des Limacons. (0 SIA article fecond, Des Aouches Lumineufes. | 15 sl article troifiéme, Des Falanges. D DER. article quatrième, Des CHillepieds. | 159. articlé cinquième, Des Araïgnées. Li 159: article fixième, Du Tigre volant, | ii 160 Mhcle fettième, Des Abeilles G* de guelquesaunes pts 161 ee eo GUEE A PE TRE ET a Ê Des Oiféaus les plus confiderables des Antilles: pag. 16% Article premier, Des Fregates. 163 article fecond, Des Fauves. À 164 article troifiëme, Des Aigreties © de Des eurs autres Oifeaus de Mer de Riviere. | 7 fi 4 ES aticle quatriéme, D# Grand Gofier. on. 10HOPE afticlecinquieme, Des Poules. d’eau. M | | R ; Attke # À 6 à E article fixième, Des Flammans. article fettiéme, De l’Hirondelle de l' Amerique. | article huitiéme, De plufieurs Oifeaus de Terre. article neufième, Des Arras. article dixiéme, Des Canides. atticle onzième, Des Perroquets. article douziéme, Des Perriques. article treiziéme, Du Tremblo. article quatorzième, Du Pa]ereau de l Amerique article quinzième, Del” Aigle d'Orinoque. article feizième, Dx CMansfeny. Article dislcemne, Du Colibry. di APAT ER K XVI. Des Poiffons de la Mer, Gr des Rivieres des Antilles. Article premier, Des Poiffons volans. article fecond, Des Perroquets de Mer, article troifieme, De /4 Dorade,. article quatrième, De la Bonite. article cinquième, De l’Aiguslle de Aer. 87 article fixiéme, De plufieurs autres poilfons de la Mer & A Rivieres. CHXAPI TiRuE XVI Des Monffres Marins qui fe trouvent en ces quartiers, article premier, De PEfhadon, article fecond, Des CHarfouïns, article troifiéme, Dx Requiem. article quatrième, De /4 Remore. - article cinquième, Dx Lamantin: article fixiéme, Des Baleines @ autres Monffres de Aer. article léttiérnes Des Diables de Cer. article huitieme, De /4 Becune. article neufiëme, De /a Becale de Mer. article dixième, De l'Heriflon de Mer. Ecec z 167 168 169 170 Nr An 173 173 174 174. 175$ 175 176 .183 183 185 186: A 18% pag, 190 199: 191 1 G;I 1 9-3. 194 195 1 96: 10:7 1c8& 198 CHA T A B L E. C HAE T.R ES ÉVITE Defcription particulicre d'une Licorne de Mer, qui s'échous à la rade de l'Ile de la Tortuë en l'an1644. Avec un recit curieus par forme de comparaifon &* de digreffion agreable, touchant plufieurs belles G: rares cornes , qu'on a apportées depuis peu du détroit de Davis : G° de la gualité de la Terre, © des CMœurs des Peuples, qui y habitent. ‘Pag. 200 CHAPITRE LATE Des Poiffons couverts de Croutes Dures, au lieu de Peau, dr d'écailles : de plufieurs rares Coquillages : G* de quelques autres belles produitions de la Mer, qui [e trouvent aus t2: coffes des LAntiles, xxv Lin pag. 224 article premier, Des Homars. 4% 222 article fecond, Del’ Araignée de mer. 222 article troifieme, Des Cancres. 223 article quatrième, Du Burçau. | | 223 article cinquième, Du Cafque. | 224. atticle fixiéme, Du Lambw. 224 article fettiéme, Des Porcelaines. | 225$ article huitième, Des Cormets de Mer. ue 226 article neufième, Des N'acres de Perles. 227 articledixiéme , De plufieurs autres fortes de Coquilla- ges. | 229 article onziéme, D'un Coquillage couveré de notes de mu- Jique. Rs 230 article douziéme, Des Pierres aus yeux. 231 article treiziéme, Des Pommes de Mer. Re 233 article quatorziéme, Des Etoiles de CMer. | 0 248 arti- bibi ? mr À FA D LE article quinziéme, Des C4rbres de Mer, Mt: articlefciziéme, Des Pannaches de Mer, 234 CHAPITRE ‘XX De l'LAmbre-gris : de fon Origine © des marques de celuy qui est bon fans mélange. > pag. 236 CHAPITRE XXI De quelques CAnimaus CAmfbies qui font communs en ces Iles. pag. 241 article premier, Ds Crocodile. 241 article fecond, Des Tortuës franches. A eds article troifiéme, Des Tortuës qu'on appelle Caoiannes. 248 article quatrième, Des Tortuës qu'on appelle Carets. 248 article cinquiéme, De la faffon qu'on peche les Tortuës, G* tous les autres gros Porf[ons des CAntilles. 2.50 article fixiéme, Des Tortués de terre @ d’eau douce. 2 5.1 CHARBLTRE ZXXIL Contenant les defcriptions particulieres de plufieurs fortes de Crabes qui fe trouvent communement fur la terre des An- tilles. pag. 253 article premier, Des Crabes qu’on nomme Tourlouron. 25 3 article fecond, Des Crabes blanches. 254 article troifiéme, Des Crabes peintes. 25 4; . 4 T A BD k&E CH A ERA RAIN Des Tonnerres : des Tremblemens de Terre; © des rormpebes qu qui arrivent fouvent en ces Iles, | pag. 258 article premier, Des Tonnerres. 2m article fecond, Des Trermblemens de Terre. | 259 : 4 articletroifiéme, D'wne Tempelle que les Infnlaires appellent Ouragan 259 CHAPITRE, XXI 4 De quelques autres incommoditéz du païs, © des remedes qu'on } peut apporter. Pag.265 article premier, Des Monffiques, € des Maringoins. 265 article fecond, Des Guefpes & des Scorpions. 266 article troifiéme, Des CArbres de CHancerille. 267 article quatriéme, Des Pous de bots. UPPER article cinquième, Des Ravets. 2x (TR articlefixiéme, Des Chiques. | | 272 article fettiéme, Remedes contre la morfure de Serpens veni- meus, © contre les autres poifons tant de laterrequedela mer 7e CAÆntilles. | 274 article huitiéme, De/’Ecume de mer. R 277 à article neufiéme, Des Rats qui font commun en ces Iles: 277 TABLE TABLE Des Chapitres du fecond Livre de cette PRE Hiftoire. Lost CHAPITRE PREMIER. ) E l’Etabliffément des Habitans Etrangers dans les Iles de DD Saint Chriftofle, deNiéves, de la Gardeloupe , de la Mar “ tinique, @ autres Iles CAntilles. | pag. 261 | CHAPITRE PIE De PEtabliffément des François dans les Iles de Saint Bartelemy, de Saint Martin, G* de Sainte Croix. ft 300 CHAPITRE II. © De l'afférmiffèment de la Colonie Françoife de la Gardeloupe, par — da paix qui fut faite avec les Caraïbes dela Dominique, en |. dan1640. | CAR CHAPITRE IV. Du Trafic G des occupations des Habitans Etrangers du païs: . Et premierement de la culture &* de la preparation du Tabac. 323 CHAPITRE V. De la maniere de faire le Sucre, de preparer le Gingembres «. d'Indigo & le Cotton. PU CUT on US | CÉHABTITRE VI ‘Des Emplois les plus bonorablés des Habitans Etrangers dés Am tilles : de leurs Efclaves, G de leur Gouvernement. 338 | C ELA PP OR CE UE De l'Origine des Caraïbes Habitans naturels du Païs. 344 Les tt TE, MED F£ff CHA: TTNRELA CHAPITRE VIIL. Digreffion contenant un Abregé de l'Histoire Naturelle G Morale d# Païs.des Apalachites. * pag. 373 Article premier, De l'étenduë dr de la nature du Païsdes Apala CREES.. UN 374 Article fecond , Deplufieursrares fingularitez., qui fe trouvent dans les Provinces des Apalachites. | 378 Article troifiéme , Du Corps des. Apalachites, G* de leurs Véte= MERS: is me À + 388 Article quatrième, Def Origine des. Apalachites@ de leur lan« __ gage. | à de. 393 Articlecinquiéme, Des Villes, €r des Villages: des Apalachites, de leurs maifans > de leurs meubles ms Sp ADR Article fixiéme , Des mœursdes Apalachites. PR ve Article fetriéme, Des Ocwpationsordinaires des Apalachites. 404. Article huitiéme, De la Police des Apalachites. 406: Article neufiéme, Des Guerres. des: Apalachites, 410 Article dixiéme, DelaReligion ancienne des Apalachites. 412% Articleonziéme, Cowrment les: Apalachites: ont ewconnoif[ance: de la Religion Chreffienne. UE | 419: Article douziéme, Des CMariages des LApalachites, de l'edus cation de leurs enfsns, G° des maladies ansquelles ils font fujets, © desremedes dont ils fe fervent. 427 Article treiziéme, De l'égedes. Apalachites, de leurmort, € de: 1 . dèurs. enterremens. or ASE. CHAPITRE IX. Du. Corps des. Caraïbes. (‘a de leurs Ornemens, 65. CHAPITRE X. | 4 Remarques: fur la langue des. Caraïbes: 447 | CHAPITRE XL. à ; Du Naturel des Caraïbes, Cr de leurs mœurs. 455 | v Tr zzzrÉ CHAPITRE XIE ‘De la fimplicité naturelle des Caraïbes, pag. 463 CHAELTRE. XIIE De ce qu'on peut nommer Religion parmy les Caraïbes. 468 | CHAPITRE XIV. Continuation de ce qu'on peut appeler Religion parmy les Caraï= _ bes : de quelques unes de leurs Traditions : © du fentimens qu'ils ont de l’immortalité de l'ame. 478 CHAPITRE XVY. + Des Habitations É* du CMénage des Caraïbes. 438 | CHAPITRE XVE Des Répas ordinaires des Caraïbes. | | 496: | CHAPITRE XVII. Des Occupations G* des Divertiffemens des Caraïbes. 505 CHAPITRE XVIIE Du Traittement que les Caraïbes font à ceus qui les vont vifr- se Ko R | $ ÿ1 z CHAPITRE XIX. De ce qui tient lieu de Police chez les Caraïbes; S1$ CGHÉAÉéFITRE XX. | Des Guerres des Caraïbes. $2 4 | DHAPFITEE "AXE Du Traittement que les. Caraïbes. font: à leurs prifonniers: de gere, 36 Tass [6 CHAPITRE XXL | Des CHariages des Caraïbes, Lu s KEINE 544 CHAPITRE XATIT dela Nailfance G- de l'Education des Enfans des Caraïbes. 550 | CHAPITRE XXIV. De L'Age ordinaire des Caraïbes, de leurs roaladies, des Remedés dont ils fe fervent pour recouvrer | La fanté, de leur mort, & de leurs ET nn Rens 558 / L” Fin dé de Table des’ Chapitres de cette NY Hiftoire. Re