r^ wm Digitized by the Internet Archive in 2011 http://www.archive.org/details/histoirenaturell004buff HISTOIRE NATURELLE DES OISEAUX. Tome Quatrième. A PARIS, 3E L'IMPRIMERIE ROYALE, M. D CC L XX IL ■ v* Chez Panckoucke, Libraire, à l'hôtel de Thou, rue des Poite- vins , quartier S, Andrédes-Arcs. TABLE De ce qui eft contenu dans ce Volume. Le Paon. : . ; Page i Le Paon blanc. , . . . 54 Le Paon panaché. . . .59 Le F ai fan. . . . . . . 60 Le F ai fan blanc. . . . .94 Le F ai fin varié. . . . . $6 Le Cocquard 3 ou le Faifan bâtard. 97 O féaux étrangers qui ont rap- port au Faifan. . . . .5^ I. Le Faifan doré ^ ou le Tri- cû'o*" huppé de la Chine. 101 Iï. Le Faifan noir & blanc de la Chine, . . , , ,107 j III. L Argus ou le Luen, . . 1 1 c IV. Le Napaul ou Fa fan cornu 1 1 ï V. Le Ka traça 114 O if eaux étrangers qui pa.ro if fent avoir rapport avec le Faon & avec le Faifan. I. Le Chinquîs* . . • .116 II. Le f Spicifère 118 IIÏ. L'Epéronnier* . . . .121 Les.FIoccos. . ,. . . „ .12,8 I. Le Hocco proprement dit, IbicL IL Le Pauxi ou le Pierre, . . I42, III. VRoa-^in 146 IV. L'Yacou. . . . . .149 V. Le MaraiL . . . . 153 VI. Le Caracara 156 VII. Le CkacamcL ■. . . .158 VIII. Le Parraca & l'Huit- lallotL 159 Les Perdrix , 162, La Perdrix grife. . s . s 69 La Perdrix grf -blanche. . . 189 La petite Perdrix grife. ... 192, La Perdrix de montagne. . . 195^ Les Perdrix rouges. La Bartavelle ou Perdrix grecque.... 1Ç)J La Perdrix rouge d'Europe. . . . .215 £# Perdrix rouge-blanche. . . . 222, Le Franco lin. . . . . .225' Le Bis^ergot. . . . . . 2,3 s Ze Gorge-nue & la Perdrix rouge d'Afrique. . . .232 O if eaux étrangers qui ont rap- port aux Perdrix. , , . .234 I. Z<2 Perdrix rouge de Barbarie IbïcL ÏI. La Perdrix de Roche ou dt la G ambra. . . . .235 ÎIÏ, La Perdrix perlée de la i , Cfo'/ze, * . 23,6* IV. La Perdrix de la nouvelle Angleterre 237 La Caille 239 Le Chrokiel ou grande Caille de "Pologne 279 La Caille blanche 280 La Caille des îles Malouines. . .281 La Fraife ou Caille de la Chine. 182 Le Turnix ou Caille de Mada- , ëafcar- • • • ■ • • l84 Ztf Réveil- matin ou Az Caille de Java. . , . . .285 Oifeaux étrangers qui paro if- Jim avoir du rapport avec les Perdrix & avec les • Cailles. I. Les Colins. . . . # .288 Iî. Le Zone colin 292 III. Le grand Colin, . . . .203 IV, Le Cacoiîn 294 V. le Coyolcos Ibid. VI. Le Colenicuz. . . . .29e VIL VOcocolin ou Perdrix de montagne, .... 199 Le Pigeon 301 Oifeaux étrangers qui ont rapport au Pigeon. . . . . 351 Le Ramier $6t Oifeaux étrangers qui ont rapport au Ramier. I. Le Pigeon ramier des Mo- luques. . . . . . . 372 II. Le Founingo. . » . ». -$74 III. te Ramiret. . . . . .376 IV. le Pigeon des îles N'in- combât. . . . , .577 V. Le-Crownvogel. . . . •379 Ztf Tourterelle .38a Oifeaux étrangers qui ont rapport a la Tourterelle* I. Z# Tourterelle du Canada. 393 II. Zf2 Tourterelle du Sénégal. 35)4 III. IV. V. VI. VII. VIII. Le Touroccol . . ; . $94 . La Tourtelette. . . -39^ Le Turvert 397 Tour tertl les de Portugal > de la Chine j des Indes & d'Amboine. . . .399 La Tourte 401 Le Cocot^ln 403 Par M. de Buffon, HISTOIRE 'HISTOIRE NATURELLE. * LE PAON (a). Planche I de ce volume. à i l'empire appartenoit à h beauté & non à la force , le paon feroit , fans * Voyt\ Us planches enluminées, n.° 43 le mâle • & 434lafemelïe. (a) Le Paon. En Grec, Ta«? • en Latin, Pavo ; en Efpagnol , Pavon ; en Italien , Pavone ; en Alle- mand , Pfau; en Anglois, Peacock ; en Suédois, Paofogd; enPoIonois, Paw. — Paon. Bélon, Hifi. Nat. des Oifeaux, page 233. — Pavo. Gefner. AvL pag. 656. — Pavo. Friich, planche cxvui, avec une figure coloriée du mâle. Oifeaux j Tome IV. A 2 Hifioire Naturelle contredit , le roi des orfeaux -, il n'en ePr point fur qui la Nature ait verfé Tes tréfors avec plus de profufion : la taille grande , le port impofant , îa dé- mai che fière, la figure noble, les pro- portions du corps élégantes & fveltes , tout ce qui annonce un être de dif- tin<5tion lui a été donné ; une aigrette mobile & légère , peinte des plus riches couleurs , orne fa tête & l'élève fans îa charger \ Ton incomparable plumage , femble réunir tout ce qui flatte nos yeux dans le coloris tendre 8c frais des plus belles fleurs -, tout ce qui les éblouit dans les reflets pétiilans des pierreries ; tout ce qui les étonne dans l'éclat majeftueux de Tare- en-ciel : non- feulement îa Nature a réuni fur le plumage du paon toutes les couleurs du ciel êc de îa terre pour en faire le chef- d œuvre de fa magnificence, elle les a encore mêlées , afïbrtres , nuan- cées, fondues de fon inimitable pinceau, & en a fait un tableau unique , où elles tirent de leurs mélanges, avec des nuances plus fombres , & de leurs prpofitions enti elles , un nouveau du Paon. 3 îuftre 8c des effets de lumières fi fu- biimes , que notre art ne peut ni les imiter ni les décrire. Tel parent à nos yeux le plumage du paon , lorfqu il fe promène païfibie & feui dans un beau jour de prin- temps *, mais fi fa femelle vient tout- à-coup à paroître, fi les feux de l'amour fe joignant aux fecretes influences de la laifon , le tirent de fon repos 3 lui infpirent une nouvelle ardeur êc de nouveaux defîrs-, alors toutes fes beautés fe multiplient , fes yeux s'animent & prennent de l'expreffion 5 fon aigrette s'agite fur fa tête , &: annonce l'émo- tion intérieure -, les longues plumes de £a queue déploient , en ie relevant , leurs richefT.s éblouiffantes , fa tête & fon cou fe renverfant noblement en arrière , fe defîinent avec grâce fur ce front radieux , où la lumière du foleil fe Joue en mille manières , fe perd & fe reproduit fans cède , Se femble prendre un nouvel éclat plus doux 8c plus moelleux , de nouvelles couleurs plus variées 6c plus harmo- nieufes ) chaque mouvement de i'oifeau Aij 4 Hlfcoire Naturelle produit des milliers de nuances nouvelles, des gerbes de reflets ondoy ans & fugitifs, fans ceflTe remplacés par d'autres reflets & d'autres nuances toujours diverfes, 8c toujours admirables. Le paon ne femble alors connoître fes avantages, que pour en faire hom- mage à fa compagne qui en eft privée, fans en être moins chérie , Se la viva- cité que l'ardeur de l'amour mêle à fon action , ne fait qu'ajouter de nouvelles grâces à fes mouvemens , qui font natu- rellement nobles, fiers & majeflueux, 8c qui, dans ces momens , font accompagnés d'un murmure énergique 8c fourd qui exprime le defir (b). Mais ces plumes brillantes , qui fur- pafTent en éclat les plus belles fleurs, fe fiétriflent auffi comme elles , & tombent chaque année (c) ; le paon , comme s'il fentoit la honte de fa perte , (b) Cum fîridore procurrens. Paiïadius, de Re Rustica , lib. I, cap. xxvni. ( c) Amittit pennas cum primis arborum frondlbus, recipit cum germine eammdem, Ariftote , Hijî. Anim. iib.VIjCap.ix. du Paon. 5 craint de fe faire voir dans cet état humiliant , & cherche les retraites les plus (ombres pour s'y cacher à tous les yeux , jufqu'à ce qu'un nouveau printemps , lui rendant fa parure accou- tumée., ie ramène fur la fcène pour y jouir des hommages dus à fa beauté *, car on prétend qu'il en jouit en elle: , qu'il eft fenfrble à l'admiration , que le vrai moyen de l'engager à étaler fes belles plumes , c'eft de lui donner des regards d'attention & des louanges *, & qu'au contraire , lorfqu'on paroît le regarder froidement & fans beaucoup d'intérêt , il replie tous fes tréfors & les cache à qui ne fait point les ad- mirer. Quoique le paon foit depuis long- temps comme naturalifé en Europe , cependant il n'en eft pas plus origi- naire -, ce font les Indes orientales , c'eft le climat qui produit ie faphir , le rubis , la topafe , qui doit être regardé comme fon pays natal -, c'eft de -la qu'il a paiTé dans la partie occi- dentale de l'Afie , où , félon le témoi- gnage pofîtif de Théophrafte , cité par A ni 6 Hijloire Naturelle Pline , il avoit été apporté d'ailleurs (d) ; au lieu qu'il ne pjuroît pas avoir paflé de la partie la plus orientale de l'Aiie , qui eft la Chine , dans les Indes : car ïes Voyrg:urs s'sccordenr à dire que , quoique les paons foient fort communs aux Indes orïe. a ?s , on ne voit à la Chine que cet x qu'on y tr^nfporte des autres pays ( e ) ; ce qui prouve au moins qu'ils font très - rares à la Chine. Eiien a(Ture que ce font les Bar- bares qui ont fait préfent à la Grèce de ce bel oifeau (f) * & ces Barbares ne peuvent guère être que les Indiens \ puifque c en: aux Indes qu'Alexandre , qui avoit parcouru l'Afie , & qui connoirToit bien la Grèce , en a vu (à) Quippe cum Theophraflus tradat invc&itias efjc in A fia etiam Columbas & Pavones. Plinii. Ilifl. Nuti lib. X, cap. xxix. (e) Navarrette, Defcript. de la Chine > page 40 — 42. (f) Ex Barbar is ad Grœcos exportants ejjè dicitur , fùmum autem diu rarus. Élien ? Hift. Anim. lib. V , cap. XXI. du Paon. y pour ïa première fois (g) : d'ailleurs il n'ed point de pays où ils foient plus généralement répandus , & ea auilï grande abondance que dans les Indes. Mandeilo (h) & Thévenot (i) en ont trouvé un grand nombre dans îa province de Guzaratte ; Tavernier > dans toutes les Indes \ mais particuliè- rement dans les territoires de Baroche , de Cambaya & de Broudra (k) ; Fran- çois Pyrard, aux environs de Calicut (l) ; les Hollandois , fur toute la cote de Malabar (m) ; Lintfcot, dans l'île de (g) Élien, Hijî. Anim. ïib, V, cap. xxi. (h) Mandefîo , Voyage des Indes , tome II , livre : , page 147. (i) Thévenot, Voyage au Levant, tome IF, page 18. (k) Voyage de Tavernier , tome III, livre 1 , pa&.s 57^58. (I) Voyages de François Pyrard, tome. I, page 426. Cm) Recueil des Voyages qui ont fervi à Vé- rabliffement de la Compagnie des Indes , tome IV, fage 16. A 17 8 Hijïoire Naturelle Ceyïan (n) ; l'Auteur du fécond Voyage de Siam , dans les forêts , fur les fron- tières de ce royaume , du coté de Camboge (o) > & aux environs de la rivière de Meinam (p); le Gentil, à Java-, Gemelli Carréri, dans les îles Calamianes (q) _, fituées entre les Phi- lippines & Bornéo -, fi on ajoute à cela que, dans prefque toutes ces con- trées , les paons vivent dans l'état de fauvage , qu'ils ne font nulle part , ni fi grands (r)j, m fi féconds (f)* on ne pourra s'empêcher de regarder les (n) J. Hugonis Lintfcot , Navigatio in Orienttm , page 39. foj Second Voyage de Siam , page 75. (f) Idem, page 248. ( q) Gemelïi Carréri , Voyage autour du Monde , tome V , page 270. (r) Sunt & Pavones in Indiâ maximâ omnium. Mian , de Naturâ Animal. lib. XVI , cap. II. (f) Petrus Martyr , de Rébus Oceani , dit que les paons pondent aux Indes de vingt a trente ceufs. du Paon. 9 Indes comme leur climat naturel (t) ; Se en effet , un il bel oifeau ne pou- voit guère manquer d'appartenir à ce pays iî riche , C\ abondant en choies précieufes , où fe trouvent la beauté , la richeife en -tout genre , ' For , les perles, les pierreries, & qui doit être regardé comme le climat du luxe de la Nature : cette opinion eft confirmée en quelque forte par le texte facré ; car nous voyons que lés paons font comptés parmi les choies précieufes que la ûotte de Salomon rapportok tous les trois aïs j & il -eft clair que c'eft ou des Indes , ou de la côte d'Afrique la plus voiiioe des Indes, que cette flotte , formée & équipée fur la mer rouge (u) _, & qui ne pou- voit s'éloigner des cotes , tiroit fes richeifes : or il y a de fortes raifons de croire que ce n'étoit point des cotes d'Afrique \ car jamais Voyageur n'a (t) Voye^ Seconde Relation des Hoîlandois ? gage 370. (u) Voyez ie troiiième Livre des Rois , chap, IX 5 f. 26. A v io Hijloire Naturelle dit avoir aperçu dans toute l'Afrique » ni même dans les îles adjacentes , des paons fauvages qui puiTenc être regardés comme propres & naturels à ces pays, fi ce n'eil dans l'île de Sainte - Hélène , où l'amiral Verhowen trouva des paons qu'on ne pouvoit prendre qu'en les tuant à coups de fufîi (x) ; mais on ne fe perfuadera pas apparemment que la flotte de Salomon , qui n'avoit point de boufToIe , fe rendît tous les trois ans à l'île de Sainte - Hélène , où d'ailleurs elle n'auroit trouvé ni or , ni argent , ni ivoire , ni prefqae rien de tout ce qu'elle cherchoit (y): de plus, il me paroît vrarfembiable que cette île , éloignée de plus de trois cens lieues du coni n nt , n'avoit pas même de paons d i tc-mps de Salomon -, mais qte ceux q y trouvèrent les Hollan- dais y avoient été lâchés par les Por- ( x) Recueil des Voyages qui ont fervi h Féta- bliilement ce la Compagnie des Indes , tome IF, Jiage. l6l. (y) Auvim , argenrn m , éêrrtes EUpJuuttotubï, 6* fmm &j>avos. Reg.lib.III, cap. x, f, 22, du Paon. r i tugais y à qui elle avoit appartenu , ou par d'autres , & qu'ils s'y étoient multipliés d'autant plus facilement , que l'île de Sainte-Hélène n'a, dit-on, ni bète veni- meufe , ni animal vorace. On ne peut guère douter que les paons , que Kolbe a vus au cap de Bonne- efpérance , & qu'il dit être par- faitement fembiables à ceux d'Europe , quoique la figure qu'il en donne s'en éloigne beaucoup (\) * n'euflent Ist même origine que ceux de Sainte- Hélène , & qu^ls n'y euflent été ap- portés par quelques - uns des vailTeaux Européens qui arrivent en foule fur cette cote. On peut dire la même chofe de ceux que les Voyageurs ont aperçus au royaume de Congo (a) _, avec des dindons, qui certainement n'étoient point dts oifeaux d'Afrique , & encore de (?) Koy^I'Hiftoire générale des Voyages, tomeV, flalKnr^XXlV. (a) Voyage du P. Vandenbroeck , dans le Recueil, des Voyages qui ontfervi àl'établijjement de la Compa- gnie des Indes, tome IV, page 321. À vj I 2 Hijîoire Naturelle ceux que Ton trouve fur les confins d'Angola , dans un bois environné de murs , où on les entretient pour le Roi du pays (b ) : cette conjecture eft fortifiée par le témoignage de Bof- man , qui dit, en termes formels, qu'il n'y a point de paons fur la cote -d'or, & que l'oifeau pris , par M. de Foquem- brog & par d'autres , pour un paon 9 eft un oifeau tout différent appelé kroon- vogel (c ). De plus, la dénomination de paon d'Afrique , donnée par la plupart des Voyageurs aux demoifelles de Numi- die ( ' d) _, eft encore une preuve directe que l'Afrique ne produit point de paons *, & ii l'on en a vu ancienne- ment en Lybie , comme le rapporte Eudathe , c'en étoit ians doute qui avoient pafTé , ou qu'on avoit portés dans cette contrée de l'Afrique , l'une (h) Relation de Pigafetta , pag. 92 & fuiv. (c) Voyage de Guinée , Lettre XF.e page 268. (d) Voye\ Labat, volumt III , page 141 ; & la Relation du Voyage de M. de Gènes , au détroit de Magel an , par le fieur Froger , page 41. du Paon. i 3 des plus voilînes de la Judée, où Salomon en avoit mis long - temps auparavant ;" mais il ne paroît pas qu'ils l'euiïent adoptée pour leur patrie , & qu'ils s'y fufïent beaucoup multipliés , puifqu'ii y avoit des loix très - févères contre ceux qui en avoient tué , ou feulement bielle quelques-uns ( e ). Il eft donc à préfumer que ce ri était point des cotes d'Afrique que la flotte de Salomon rapportoît les paons , des côtes d'Afrique, dis -je , où ils font fort rares , & où l'on n'en trouve point dans l'état de fauvage , mais bien des côtes d'Aiîe où ils abondent , où ils vivent prefque par-tout en liberté, où ils fub- fiftent & le multiplient fans le fecours de l'homme, où ils ont plus -de grolTeur , plus de fécondité que par-tout ailleurs , où ils font , en un mot , comme font tous les animaux dans leur climat naturel. Des Indes , ils auront facilement paiïe dans la partie occidentale de i'Afie -, aufîi voyons- nous, dans Diodore de Sicile , qu'il y en avoit beaucoup dans (e) Aïdrovande , de Avibus , tome II , page 5. 14 Hijlaire Naturelle la Babylonie : la Médie en nourrrflbrt aufïï 'de très-beaux, & en fi grande quantité, que cet oifeau en a eu le furnom d'avis Medïca ( f ). Philoftrate parle de ceux du Phafe , qui avorent une huppe bleue (g) j Se les Voyageurs en ont vu en Perfe (h). De l'Afie ils ont pafTé dans la Grèce > où ils furent d'abord fi rares , qu'à Athènes on les montra pendant trente ans , à chaque néoménie , comme un objet de curiohté , 8c qu'on accouroit en foule des villes voiiînes pour les voir ( ï). On ne trouve pas l'époque certaine de cette migration du paon de ÏAûç (f) Aïdrovande , Ornithologie , tome II, p. 12, (g) Ibidem, page 6. (h) Thévenot, Voyage du Levant, tome 11^ page 200. ( i ) Tanta fuit in urbibus Paionis prœrogativa ut Alhenh tàm à viris quàm à mulieribus ftaittîo pretîo Jpt&atus fucrit ; ubi fingulis noviluniis & vitos & mu- lieres admittentes ad hiqufmodi fpeftacuLum , ex cofecere quefînm non mediocrem , multique è Lacedemone ac Thcffahà vidtndi caufà eo conjluxmnt. lEXïàïi , JJifl, Juimal.iïb.V , cap. XX I. du Paon. i 5 dans la Grèce -, mais il y a preuve qu'il n'a commencé à paro.ître dans ce dernier pays , que depuis le temps d'Alexandre , Se que fa première dation au fortir de l'Aile , a été l'île de Samos. Les paons n'ont donc paru dans ïa Grèce que depuis Alexandre -, car ce conquérant n'en vit, pour la première fors , que dans les Indes, comme je l'ai déjà remarqué-, êc il fut tellement frappé de leur beauté , qu'il défendit de les tuer, fous des peines très-févères j mafs il y a toute apparence que , peu de remps après , Alexandre, & même avant la fin de fon règne , ils devinrent fort communs -, car nous voyons , dans le poète Antiphanes , contemporain de ce Prince , & qui lui a furvécu , qu'une feule paire de paon apportée en Grèce , s'y étoit multipliée à un tel point, qu'il y en avoit autant que de. cailles ( k ) : êc d'ailleurs Ariitote , qui ne furvéquit que deux ans à fon Eiève , parle en (k) Pavoimm tantummedo par umim aiduxiî quip- j>iam rarum tune ai'am P luuiQ pero flures funt %uam coturnices. i 6 Hijîoire Naturelle plufîeurs endroiçs des paons comme d'oi- feaux fort connus. En fécond lieu , que l'île de Samos ait été leur première dation à leur paf- fage d'Afie en Europe , -ceft ce qui eft probable par la pofition même de cette île, qui eft- très-voifine du con- tinent de TAfie j & de plus , cela . eft prouvé par un paftage formel de Me- nodotus ( l) ; quelques - uns même , forçant le fens de ce pafïage , & fe prévalant de certaines médailles Sa- miennes fort antiques , où étoit repré- fentée Junon , avec un paon à fes pieds ( m ) ■> ont prétendu que Samos étoit la patrie première du paon , le vrai lieu de fon origine , d'où il s'étoit répandu dans l'Orient comme dans (l) Sont ihï pavones Jujioni facri , pr'nni quidem in Samo editi ac edncati , indegue didutli ac in alias regiones devefti , veluti Galli è Perfide & quas Melagridas vacant ex JEolia (feu Mtolia). Vide Atheneum, iib. IV, cap. xxv. (m) On en voit encore aujourd'hui quelques- unes , & même des médaillons qui repréfentent ie temple de Samos avec Junon & fes paons. Voyage du Levant de M. de Tournefort, tome I, page 425. du Paon. i 7 l'Occident 5 mais il eft aifé de voir , en pefant les paroles de Menodotus , qu'il n'a voulu dire autre chofe , (mon qu'on avoit vu des paons à Samos > avant d'en avoir vu dans aucune autre contrée iituée hors du continent de l'Afîe , de même qu'on avoit vu dans l'Eolie ( ou l'Erhoîie ) , des méléagrides qui font bien connues pour être des oifeaux d'Afrique , avant d'en avoir en aucun autre lieu de la Grèce ( Velut quas meleagridas vocant ex JEtholiâ ) : d'ailleurs l'île de Samos offrort aux paons un climat qui leur convenoit , puif- qu'ils y fubiiftoient dans l'état de fau- vage (n) j & qu'Aulugeile regarde ceux de cett& île comme les plus beaux de tous (0). Ces raifons étoient plus que fuffi- fantes pour fervir de fondement à la dénomination d'oifeau de Samos , que (n) Pavonum grèges agrefles tranfmarini ejje dicuntur in infulis Sami in luco Junonis. Varro ? de Ru Rufticâ , lib. III , pag. VI. (0) Aulugelle, Nott. Ame*, lib. VII, cap. xvi. 1 8 Hijloire Naturelle quelques Auteurs ont donnée au paon ', mais on ne pourroit pas la lui appliquer aujourd'hui , puifque M. de Tournefort ne fait aucune mention du paon dans îa defeription de cette île , qu'il dit être pleine de perdrix, de bécafTes , de bécaiïines , de grives , de p:geons fauvages, de tourterelles * de bec figues, & d'une volaille excellente ( p) ; Se il n'y a pas d'apparence que M. de Tournefort ait voulu comprendre, fous îa dénomination générique de volaille, un oifeau auiîi conhdérabïe Se auiîi diftingué. Les paons , ayant paiTé de l'Afîe dans la Grèce , fe font enfuite avancés dans les parties méridionales de l'Eu- rope , & de proche en proche , en France , en Allemagne , en Suille , & jufques dans la Suède , où , à la (p) M. de Tournefort , Voyage du Levant , tome I , page 41 2. (q ) Nota. Les Suiffes font îa feule nation qui fe foit applhuée à détruire, dans ïeur pays, cette be'.ie efpèce d'oifeau , avec autant de foin , que toutes les autres en ont mis à la multiplier ; & cela en haine des Ducs d'Autriche , contre lefquels ils du Paon. i 9 vérité , ils ne fubfiflent qu'en petit nombre , à force de foins (r) 3 & non fans une altération confidérable de ïeur plumage , comme nous le verrons dans la fuite. Enfin les Européens qui , par re- tendue de leur commerce & de leur navigation , embraiTent le globe entier , les ont répandus d'abord iur les côtes d'Afrique , Se dans quelques iîes adja- centes j enfuit e dans le Mexique, & de-là dans le Pérou Se dans quelques- unes des Antilles ( f) _, comme Saint- Domingue Se la Jamaïque , où. l'on en voit beaucoup aujourd'hui (t)y 8c où , avant cela , il n'y en avoit pas un feui , par une fuite de la loi générale du climat , qui exclut du nouveau Monde tout animal terreftre , attaché s'étoîent révoltés, & dont PÉcu avoit une queue de paon pour cimier. (r) Linnaeus, Syft. Nat. edit. X, pag. 156. (f) Hiftoire des Incas, tome II, page 329. (t) Voyez V Hiftoire de Saint-Domingue , de Char, levoix , tome I, page 28 — 32 '} & la Synopfis Avium deRay?jPû£, 183. zo Hijloire Naturelle par fa nature aux pays chauds de l'an- cien continent , loi à laquelle les oifeaux pefans ne font pas moins afTujettis que les quadrupèdes : or Ton ne peut nier que les paons ne foient des oifeaux pefans , & les Anciens l'avoient fort bien remarqué ( ' u) _, il ne faut que Jeter un coup d'œii fur leur conformation extérieure , pour juger qu'ils ne peuvent pas voler bien haut ni bien long- temps \ la. grofleur du corps 5 la brièveté des ailes & la longueur embarraiïante de la queue , font autant d'obftacles qui les empêchent de fendre l'air avec lé- gèreté : d'ailleurs les climats fepten- trionaux ne conviennent point à leur nature , & ils n'y reftent jamais de leur plein gré ( x). Le coq - paon n'a guère moins d'ardeur pour fes femelles , ni guère moins d'acharnement à fe battre avec (u) Necfublimiter poffunt nec per longa fpatia volare. CoïumeIIe,ye Re Ruflicà , lib. VIII , cap. xi. (x) Habitat apui iwjlraîes rarius , prœfertim in aviariis magnatum non yen (ponte. Linnsus , Fauna Suecica, pag. 60. du Paon. 2 i îes autres mâles que le coq ordinaire (y) ; il en auroit même davantage s'il étoît vrai ce qu'on en dit , que lorfqu'il n a qu'une ou deux poules , il les tour- mente , les fatigue , les rend ftériles à force de les féconder , & trouble l'œuvre de la génération à force d'en répéter les a&es : dans ce cas , les œufs forcent de Yoviducius avant qu'ils aient eu le temps d'acquérir leur maturité (^) ; pour mettre à profit cette violence de tempérament, il faut donner au mâle cinq ou fîx femelles (a) ; au lieu que (y) ^qCoIumeiïe, de Re Ruflicâ, Ub. VIII, cap. xi. (x) Quinque gaiïinas defiderat , nom fi unam aut alteram fietam fiepius comprejferit, vixdum concepta in \alvo vitiat ova,nec ad partum finit perduci , quoniam ; immatura genitalihus lotis excédant. Columeïle , de Re [Rufticâ, loco citato. (a) Je donne ici l'opinion des Anciens ; car des iperfonnes intelligentes que j'ai confultées, & qui ; ont élevé des paons en Bourgogne , m'ont allure •d'après leur expérience, que les mâles ne fe bat- Itoient jamais, & qu'il ne Moit à chacun qu'une ou deux femelles au plus ; & peut- être cela n'ar» nyê-t-il qu'à caufe de la moindre chaleur du iclimar 22 Hijloire Naturelle le coq ordinaire , qui peut fufrïre à quinze ou vingt poules , s'il eft réduit à une feule, la féconde encore utilement , & la rend mère d'une multitude de petits poufîins. Les paones ont aufli îe tempéra- ment fort lafeif, & lorfqu'elies font privées de mâles , elles s excitent entre elles , & en fe frottant dans la pouf- iîère {car ce font oifeaux pulvérateurs), & fe procurant une fécondité impar- faite 3 elles pondent des œufs clairs & Tans germe , dont il ne réfulte rien de vivant } mais cela n'arrive guère qu'au printemps , lcrfque le retour d'une chaleur douce & vivifiante ré- veille la Nature 5 & ajoute un nouvel aiguillon au penchant qu'ont tous les êtres animés à fe reproduire;, & c'eft peut - être par cette rail on qu'on a donné à ces œufs îe nom de zéphy- riens (ova ^ephyria ) j, non qu'on fe foie perfuadé qu'un doux zéphyr fufrile pour imprégner les paones & tous les oifeaux femelles qui pondent fans lai coopération du mâle \ mais parce qu'elles ne pondent guère de ces œufs que du Paon. ■ 23 cïans îa nouvelle faifon , annoncée ordf- I nairement & même défignée par les zé- phyrs. Je croirois auiïi fort volontiers que la vue de leur mâle , piaffant autour d'elles , étalant fa belle queue , farfant ; la roue , & leur montrant toute l'ex- prefîion du de(îr , peut les animer encore davantage , & leur faire produire un plus grand nombre de ces œufs ; ftériles -, mais , ce que Je ne croirai ! jamais , c'eft que ce manège agréable , I ces careHes fuperficielles , & , fi j'ofe i ainfi parler , toutes ces courbettes de ; petit - maître , puiflent opérer une fé- condation véritable , tant qu'il ne s'y joindra pas une union plus intime & des approches plus efficaces -, & fi quelques perfonnes ont cru que des paones avoient été fécondées ainfi par les ! yeux, c'eft qu'apparemment ces paones î svorent été couvertes réellement, fans i| qu'on s'en fût aperçu (h). L'âge de la pleine fécondité pour (h) u L'on ne peut bonnement accorder ce que : Quelques pères de famille racontent, c'eft que les/* 24 Hijloire Naturelle ces oifeaux , eft à trois a^s , félon Ariftote (c) & Columelle (d)^ & même félon Pline (ejj qui, en répé- tant ce qu a dit Àriftote , y fait quelques changemens \ Varron fixe cet âge à deux ans (f) ; & des perfonnes , qui ont obfervé ces oifeaux , m'affurent que les femelles commencent déjà à pondre dans notre climat à un an , fans doute des œufs ftériles -, mais prefque tous s'accordent à dire que Tâge de trois ans eft celui où les maies ont pris leur entier accroiiTement , où » paons ne couvrent leurs femelles , ains qu'ils les » empliffent en faifant la roue devant elles, &c. » Bélon, Rature des Oifeaux, page 234. (c) Parit maxime à trimatu. Hijl. Animal. ïib. VI , cap. ix. (à) De Re Ruflicâ , lib. VIII , cap. xi,hos genus Avium cum trimatum explevit , opùme progenerat ; fi quidem tenerior celle des longues & belles plumes de leur queue , & par l'habitude qu'ils prennent auffitôt: de les déployer en le pavanant & fai- fant la roue (h) ■ le fuperflu de la nour- riture , n'ayant plus rien à produire dans l'individu, va s'employer à la reproduc- tion de l'efpèce. C'eft au printemps que ces oifeaux Ce recherchent & fe joignent (i) ; fî on veut les avancer,, on leur donnera le matin à jeun , tous les cinq jours, des fèves légè- rement grillées, félon le précepte de Coiumelie ( k). La femelle pond fes œufs peu de temps après qu elle a été fécondée \ elle ne pond pas tous les jours , mais feu- (g) Voyez le tome III de cette Hiftoire Na~ tureiie ? générale & particulière , page 465 & fu- yantes. (h) Colores incipit fundereintrimatu.Ylm.lib. X . cap. xx. (i) Ah idibus februariis an te menfem martium, Coiumelie, de Re Rufûcâ, iib. VIII, cap. xi. (k) Ibidem. Oifeaux 1 Tome IF« B 2(5 Hijtoire Naturelle îeineni: de trois ou quatre jours l'un : elle ne fait qu'une ponte par an , félon Arifrote (l)* & cette ponte eft de huit œufs la première année , &: de douze les années fuivantes : mais cela doit s'entendre des paones à qui on ïaifTe le foin de couver elles - mêmes leurs œufs & de mener leurs petits y au lieu que , li on leur enlève leurs œufs à mefure qu'elles pondent, pour les faire couver par des poules wfa gaitesfm)* elles feront trois pontes, (l) Semel tantum modo ova pant duodecim cuit jpaulo pauciora , me contimiatis dkbus fed binis ternifve interpojiîis. Jtîïfl. Animal. lib. VI, cap. UL,primi- jiaiœ otlona maxime edunt. Ibidem. (m) Nota, Ariftote dit qu'une poule ordinaire ne peut guère faire, éclorre que deux ceuls de paon; mais Columelle ïui en donnoit juf(m*a cinq, & outre cela quatre œufs de poule ordinaire , plus ou moins cependant, félon eue ia couveuie étoit plus ou moins grande : il recommandoit de retirer ces oeufs de poule ie dixième jour, & d'en fubfcituer un pareil nombre de même efpèce, récemment pondus, afin qu'ils viniient à éciorre en même temps que les œufs de paon, qui ont befoindedix jours d'incubation de plus : enfin il preferivoit de retourner ceux-ci tous les jours, fi la couve ufe n'avoit pu le faire à caufe de.IeurgvoflTeur; ce qu'il eft aile de reconnoître , fi l'on a eu la précaution du Paon. %y félon Columelîe (n); la première de cinq œufs , la féconds de quatre , & la troiiîème de deux ou trois -, il paroît quelles font moins fécondes dans ce pays-ci, où elles ne pondent guère que quatre ou cinq œufs par an ; 8c qu'au contraire, elles font beaucoup plus fécondes aux Indes , où , félon Pierre Martyr , elles en pondent- de vingt à trente , comme je l'ai remarqué plus haut : c'en: qu'en général îa tem- pérature du climat a beaucoup d'in- fluence fur tout ce qui a rapport à h génération, & c'eft îa clef de plufîeurs contradictions apparentes, qui fe trouvent entre ce que difent les Anciens, & ce qui fe paffe fous nos yeux. Dans mi pays plus chaud, les maies feront plus ardens, ils fe battront entreux, il leur faudra un plus grand nombre de fe- melles, & celles-ci pondront un plus de marquer ces œufs d'ua côté. Vbyei Coïumelle, de lie Rujtica, loco citato. ' (n) Femince Pavones quz non incubant, ter anm partusedunt; prunus efioartus quinze fëre ovorum fecundus quatuor tmius trium autduorum. Columeïï- ' A te Rufhcâ , lïo. V 1 1 1 , cap. x i * Bii 28 Hijioire Naturelle grand nombre d'œufs , au lieu que, dans un pays plus froid, elles feront moins fé- condes , & les mâles moins chauds & plus paifibles. Si on laiffe à ïa paone la liberté d'agir félon fon initinct, elle dépofera fes œufs dans un lieu fecret & retiré : fes œufs font blancs & tachetés comme ceux de dinde, & à peu près de la même grof- feur^ lorfque fa ponte efl: finie, eile fe met à couver. On prétend qu'elle eft fujette à pon- dre pendant la nuit , ou plutôt à iailïer échapper fes œufs de deffus le juchoïr où elle efl: perchée (o) ; c'eft pourquoi on recommande d'étendre de la paille au- deflbus pour empêcher qu'ils ne fe brifent. Pendant tout le temps de l'incuba- tion, la paone évite foigneufement le mâle 5 & tâche fur-tout de lui dérober fa marche lorfqu'elle retourne à fes (o) Pluribus flramentis exagerandum efl aviarium, quo tutius integri fœtus excipiantur, nam pannes cura ad noSturnam requiem nnerunt . . . perticîs injiflentcs eiiïwiwrQva. . . . ÇolsfflsJfc, libt Vlll,caf. x i. du Paon. 29 œufs; car dans cette efpèce, comme dans celle du coq & de bien d'autres (p) ., le mâle plus ardent Se moins fidèle au vœu de la Nature , eft plus occupé de fon plariir particulier que de la multiplica- tion de fon efpèce*, & s'il peut furprendre la couveufe fur les œufs, il les cafïe en s'approchant d'elle, & peut être y met-il de l'intention, & cherche-t-ii à fe dé- livrer d'un obftacle qui l'empêche de jouir : quelques - uns ont cru qu'il ne les caiîoit que par fon emprefifement à les couver lui-même (q) 3 ce feroit un motif bien différent. L'Hiftoire Natu- relle aura toujours beaucoup d'incerti- tudes -, il faudroit, pour les lui ôter, obferver tout par foi même -, mais qui peut tout pbferver ? La paone couve de vingt - fept à trente jours 3 plus ou moins, félon la température du climat 8c de la faifon (p) Quant oh caufam aves nomiulhz fylveflres pa- riunt , fugientes marem & incubant. Ariitoîe, Hifior. Animal. lib. V I , cap. I x. (q) Voyz\ Aldrovande, Avi. tome II , r>age 14* B irj 3 0 Hlftoire Naturelle (r): pendant ce temps, on a foin de lui mettre à portée une quantité fufri- Jante de nourriture , de peur qu'étant obligée d'aller fe repaître au loin, elle $e quittât Tes œufs trop long-temps, & ne les larda: refroidir *, il faut auffi pren- dre garde de la troubler dans fon nid, 3c de lui donner de l'ombrage s car, par une fuite de fon naturel inquiet & dé- fiant, u elle fe voit découverte , elle abandonnera fes œufs, & recommencera une nouvelle ponte , crui ne vaudra pas h première , à caufe de la proximité de l'hiver. On prétend que la paone ne fait jamais éclorre tous fes œufs à la fois*, mais que , dès qu'elle voit quelques pouffins écîos , elle quitte tout pour les conduire-, dans ce cas, il faudra prendre les œufs qui ne feront point encore ouverts, & les mettre éclorre fous une (r) Excluait diebus triginta aut paulo tardais. Ariftote, Hiftaria Animalium , lib. VI , cap. ix. — ■ Par tus excluditur ter nopetds aut tard ius triceJimo.Ylin. lib. X, cap, ii x. du Paon. 3 t autre couveufe ou dans un four a incu- bation ( f). Elien nous dit que la paone ne refle pas conftamment fur fes œufs, & qu'elle paiTe quelquefois deux jours fans y revenir, ce qui nuit à la réuilite de la couvée (t). Mais je foupçonne quelque méprife dans ce paffage d'ÉIien , qui aura appliqué à l'incubation ce qu'À- riftote & Pline ont dit de la ponte, laquelle en effet eu: interrompue par deux ou trois jours de repos -, au lieu que de pareilles interruptions dans l'action de couver, paroifTent contraires à Tordre de la Nature , & à ce qui s'obferve. dans toutes les efpèces con- nues des oifeaux , fi ce n'eft dans les pays où la chaleur de l'air Se du fol approche du degré néceffaire pour l'in- cubation (u). Quand les petits font écîos , il faut les laifïer fous la mère pendant vingt- ( f) Maifon Ruftîque, tome I, page 138. (t) /Eïian , Hifior. animal, lïb. V, cap. XXXI ï. (u) Voyez l'Hifîoire de V 'Juimche J tome II, page 212 Ù fuïv. Biv 3 2 Hijloire Naturelle quatre heures -, après quoi , on pourra les tranfporter fous une mue ( x ). Frifch veut qu'on ne les rende à la mère que quelques jours après (y). Leur première nourriture fera îa fa- rine d'orge détrempée dans du vin j du froment ramolli dans l'eau , ou même de la bouillie cuite & refroidie : dans la fuite, on pourra leur donner du fromage blanc bien preflé & fans aucun petit lait, mêlé avec des poireaux hachés, & même des fautereîles, dont on dit qu'ils font très- friands *, mais il faut auparavant ôter les pieds à ces infectes^ ). Quand ils auronr fix mois, ils mangeront du froment , de l'orge , du marc de cidre &: de poiré , & même ils pinceront l'herbe tendre -, mais cette nourriture feule ne fuffiroit point , quoiqu'Athénée les appelle gra- minivores. (x) Similiter ut gallinacei primo die non amoveantur » pojlzro die. cum educatrice transférait tur in caueam. Columelïe, lib, FIJI, cap. x i. (y ) Frifch , planche ex i x. (l) Columelïe, de Kz RufliU , lib. VIII, cap. xi. du Paon. 3 3 On a obfervé que les premiers jours îa mère ne revenoit jamais coucher avec fa couvée dans le nid ordinaire, nï même deux fois dans un même en- droit*, & comme cette couvée (î tendre , & qui ne peut encore monter fur les arbres, eft expofée à beaucoup de rifques, on doit y veiller de près pen- dant ces premiers jours, épier l'endroit que la mère aura choifi pour fon gîte, & mettre fes petits en fureté fous une mue ou dans une enceinte formée en plein champ avec des claies prépa- rées, &c. (a). Les paoneaux , jufqu'à ce qu'ils forent un peu forts, portent mal leurs ailes, les. ont traînantes (b)j 8c ne favent pas encore s'en fervir : dans ces commencëmens, la mère les prend tous les foirs fur fon dos, & les porte l'un -après l'autre fur la branche où ils doivent palier la nuit*, le lendemain matin 3 elle faute devant eux du haut de l'arbre en bas, ôc les accoutume à en (a) Maifon Ruftique, tome I, page 138. (h) Bélon, Nature des Oi féaux j page 234, Bv 54 Hijloire Naturelle faire autant pour la fuivre, & à faire ufage de leurs ailes (c). Une mère paone , 8c même une poule ordinaire , peut mener jufqu à vingt • cinq petits paoneaux , félon Co- lumelle ', mais feulement quinze , félon Palladius ; & ce dernier nombre eft plus que fumfant dans les pays froids, où les petits ont befoin de fe réchauffer de temps en temps, & de fe mettre à l'abri fous les ailes de la mère, qui ne pourroit pas en garantir vingt-cinq à la fois. On dit que (î une pouîe ordinaire , qui mène fes poufîins, voit une couvée de petits paoneaux y elle eft tellement frappée de leur beauté , qu'elle fe dé- goûte de fes petits 5 & les abandonne pour s'attacher à ces étrangers ( d ) ; ce que je rapporte ici non comme un (c) Maifon Ruîlique, tome I , page 139. (d) Coïumeïle, lib. VIII, cap. xi. Satis conveiih rnter autores : non debere alias gailinas qv.œ pullos fui gencris educant, in eodem loco pajhi ; nom cum confi- pexerunt pavoniam prolem ,fuos pullos diligere definunt... perofœ viddicet quod me magnitudine nec Jpecieparoni pares fuit. du Paon. 5 j fait vrai, mais comme un fair à vérifier ^ d'autant plus qu'il nie paroît s'écarter du cours ordinaire de la Nature , &que, dans les premiers temps, les petits paoneaux ne font pas beaucoup plus beaux que les poufîins. A mefure que les jeunes paoneaux fe fortifient, ils commencent à fe battre (fur tout dans les pays chauds), & c'en: pour cela que les Anciens , qui pa- rohTent s'être, beaucoup plus occupés que nous de l'éducation de ces oï- feaux (e)> les tenoient dans de petites cafés féparées (f): mais les meilleurs endroits pour les élever, c'étoit, félon eux, ces petites îles qui fe trouvent en quantité fur les cotes d'Italie (g) ^ telle , par . exemple , que celle de Pïa- nafie, appartenante aux Pifans (h); ce font en effet les feuls endroits ou fej Pavonis educatio magis urhani patris famîlicB quam tetrici rufiici curam pofcit. .... Columelîe lié. FUI, cap. xi. * (f) Varro, de Re Rufiicâ, lib. III, cap. VL (g) Coîumelle, loco citato. (h) Varro ? Iqcq çiwo* Bvj 3 6 Hljloire Natu re fie l'on puifle les Iaiffer en liberté, & pref- que dans l'état de fauvage , fans craindre qu'ils s'échappent, attendu qu'ils volent peu & ne nagent point du tout, & fans craindre qu'ils deviennent la proie de leurs ennemis, dont la petite île doit être purgée: ils peuvent y vivre, félon leur naturel & leurs appétits , fans contrainte, fans inquiétude, ils y profpéroient mieux , & ce qui n étoit pas négligé par les Romains , leur chair étoit d'un meilleur goût -, feulement pour avoir l'œil deiTus, & reconnoître il leur nombre augmentoit ou diminuoir, on les accoutumoit à fe rendre tous les jours à une heure marquée & à un certain lignai, autour de la maiion où on leur jetoit quelques poignées de grain pour les attirer ( i). Lorfque les petits ont un mois d'âge ou un peu plus 5 l'aigrette commence à leur poulïer , & alors ils font_ ma- lades comme les dindonneaux lorlqu'ils pouffent le rouge : ce n'eft que de ce moment que le coq-paon les reeonnoît pour les liens -, car, tant qu'ils n'ont (i) Columclle, loco cituto. du Paon. 3 7 point d'aigrette, il les pourfuîc comme étrangers (h) ; on ne doic néanmoins les mettre avec les grands que lorfqu'ils ont /ept mois , & s'ils ne Te perchoient pas d'eux-mêmes fur le juchoir, il faut ïes y accoutumer, & ne point fourTrir qu'ils dorment à terre, à caufe du froid 3c de l'humidité (i). L'aigrette eft compofée de petites plumes, dont la tige eft garnie depuis la bafe jufqu'auprès du iommet , non de barbes, mais de petits filets rares 8c détachés-, le fommec eft formé de barbes ordinaires unies enfembie, & peintes des plus belles couleurs. Le nombre de ces petites plumes eft variable-, j'en ai compté vingt-cinq dans un mâle , & rrente dans une fe- melle -, mais je n'ai pas obfervé un allez grand nombre d'individus pour aiïurer qu'il ne puifte pas y en avoir plus ou moins. L'aigrette n'eft pas un cône renverfé, comme on le pourroit croire*, fa bafe, (k) Paîîadius, de Re Rujlicâ , ïib. I, cap. XXVIII. (I) Coïumeïïe, loco citaîo. 3 8 Hijloire Naturelle qui efl: en haut, forme une elîipfe fort alongée, dont le grand axe eft pofé félon la longueur de la tête; toutes les plumes, qui la compofent , ont un mouvement particulier affez fenfible , par lequel elles s'approchent ou s'é- cartent les unes des autres , au gré de Toifeau, & un mouvement général par lequel l'aigrette entière , tantôt fe ren- verfe en arrière , & tantôt fe relève fur îa tête. Les fommets de cette aigrette ont , ainlî que tout le refte du plumage, des couleurs bien plus éclatantes dans le mâle que dans la femelle -, outre cela, le coq - paon fe diftingue de fa poule , dès l'âge de trois mois , par un peu de jaune qui paroît au bout de l'aile -, dans la fuite , il s'en diftingue par la grodeur, par un éperon à chaque pied, par la longueur de fa queue, êc par îa faculté de la relever & d'en é:aler les belles plumes, ce qui s'appelle faire la roue. "Wiilulghby croit que le paon ne partage qu'avec le dindon cette faculté remarquable (m) : cependant on ( m) Wiilulghby, Omithologia, page 112, du Taon. 39 verra, dans ïe cours de cette hiftoire, qu'elle leur eft commune avec quelques tétras ou coqs de bruyère , quelques pigeons, &c. Les plumes de la queue, ou plutôt ces longues couvertures , qui naiffent de de (Tus le dos auprès du croupion 5 font en grand ce que celles de l'ai- grette font en petit -, leur tige eft pa- reillement garnie, depuis fa bafe jufque près de l'extrémité, de filets détachés de couleur changeante , & elle fe ter- mine par une plaque de barbes réunies, ! ornée de ce qu'on appelle Y œil _, ou le S miroir: ceCc une tache brillante, émaiilée ; des plus belles couleurs, jaune, doré de plusieurs nuances, verd changeant en bleu &.en violet éclatant, félon les ditférens afpedts, & tout cela emprun- tant encore un nouveau luftre de la couleur du centre, qui eft un beau noir velouté. Les deux plumes du milieu ont en* viron quatre pieds & demi , & font les plus longues de toutes, les latérales | allant toujours en diminuant de lon- gueur jufqu'à la plus extérieure, l'aigrette 40 HiJIoire Naturelle ne tombe point, mais la queue tombe chaque année, en tout ou en partie, vers • la fin de juillet, & repoufle au printemps ', & , pendant cet intervalle , l'oifeau eft trifte & Te cache. La couleur la plus permanente de la tête, de la gorge, du cou 3c de la poitrine , c'eft le bleu avec différens reflets de violet, d'or & de verd écla- tant-, tous ces reflets, qui renaiflent & fe multiplient fans cefïe fur (on plu- mage, font une reflource que la Na- ture fembie s'être ménagée pour y faire paroître fuccefïïvement & fans confu- fion un nombre de couleurs beaucoup plus grand que fon étendue ne fembloit le comporter: ce n'eft qu'à la faveur de cette heureufe induftrie que le paon pou- voit fuffirè à recevoir tous les dons qu'elle lui defiinoit. De chaque côté de îa tête on voit un renflement formé par les petites plumes, qui recouvrent le trou de l'oreille. Les paons paroiflent fe carelTer réci- proquement avec le bec-, mais, en y regardant de plus près , j'ai reconnu j du Paon. 4 1 [qu'ils fe grattoient les uns ïes autres [autour de la tête, où ils ont des poux j très -vifs & très -agiles-, on les voit Icourir fur la peau blanche qui entoure ; leuts yeux , & cela ne peut manquer de leur caufer une fenfation incom- I mode -, auffi fe prêtent-ils avec beau- coup de complaifance , lorfqu un autre les gratte. Ces oifeâux fe rendent les maîtres idans la baffe-cour, & fe font refpe&er !de l'autre volaille, qui n'ofe prendre fa parure qu'après qu'ils ont fini leur. repas: leur façon de manger e(t à peu iprès celle des gallinacés, ils faififfent le igrain de la pointe du bec, & l'avalent fans le broyer. Pour boire ils plongent le bec dans l'eau, où ils font cinq ou fîx mouve- mens affez prompts de la mâchoire inférieure, puis, en fe relevant & tenant leur tête dans une iituation horizontale, ils avalent l'eau dont leur bouche s'étoit remplie, fans faire aucun mouvement du bec. Les aîimens font reçus dans l'œfo- phage , où l'on a obfervé un peu 4 2 Hijloire Naturelle au-defîus de l'orifice antérieur de l'euro- - mac, un bulbe glanduleux, rempli de!: petits tuyaux qui donnent en abondance! une liqueur limpide. L'eftomac eft revêtu à l'extérieur d'un grand nombre de fibres motrices. Dans un de ces oifeaux, qui a été diiTé«$ que par Gafpard Barthoïin, il y avoit bieiii deux conduits biliaires-, mais il ne fe trouva qu'un feul canal pancréatique! quoique d'ordinaire il y en ait deux dans les oifeaux. Le cœcum étoit double , ce dirigé: 'd'arrière en avant j il égaloit en lon- gueur tous les autres ïnteftms enfemble,. Se les furpaffbit en capacité (n ). Le croupion eft très -gros, parce qu'il! eft chargé des mufcles, qui fervent à rel dreder la queue & à l'épanouir. Les excrémens font ordinairement: moulés, & chargés d'un peu de cette? matière blanche , qui fe trouve fur les ex-- crémens de tous les gallinacés & de beau*- coup d'autres oifeaux. On m'aiîure qu'ils dorment, tantôt: (n) Voyez Aiïa Hafiiienjîa, année i6~2*t ebferv. 114. du Paon. 43 :n cachant fa tête fous l'aile , tantôt en àifant rentrer leur cou en eux-mêmes, k ayant le bec au vent. Les paons aiment la propreté , & :'eft par cette raifcn qu'ils tâchent de ecouvrir & d'enfouir leurs ordures , & ion parce qu'ils envient à l'homme les ivantages qu'il pourroit retirer de leurs pSrémens (o)> qu'on dit être ^ bons Potrr le mal des yeux -, pour améliorer ht terre, &c. mais dont apparemment Us ne connoiffent pas toutes les pro- jpriétés. Quoiqu'ils ne puiffent pas volet beaucoup, ils aiment à grimper -, ils Spaflent ordinairement la nuit fur les combles des maifons , où ils caufent beaucoup de-dommage, & fur les arbres les plus élevés -, c'eft de-ià qu'ils font fou- ivent entendre leur voix qu'on s'accorde là trouver défagréabie, peut-être parce iqu'elie trouble le fommeil, & d'après laquelle on prétend que s'en: formé (o) Fimum fuum reforbere traduntur , incidentes hominum utiïnatibus. Plin. lib. XXIX, cap. vu C'eft fur ce fondement qu'on impute au paon d'être envieux» 44 Hifioire Naturelle leur nom dans prefque toutes les langues (p). On prétend que îa femelle n'a qu'un feul cri qu'elle ne fait guère entendre qu'au printemps , mais que le mâle en a trois j pour moi , j'ai reconnu qu'il avoir deux tons, l'un plus grave, qui tient plus du hautbois j l'autre plus aigu, précifé- ment à l'octave du premier , & qui tient, plus des fons perçans de îa trompette*, & j'avoue qu'à mon oreille ces deux tons n'ont rien de choquant, de même que je n'ai rien pu voir de difforme dans Tes pieds -, & ce n'eft qu'en prêtant aux paons nos mauvais raifonnemens & même nos vices, qu'on a pu fuppofef que leur cri n'étoit autre chofe qu'un gémifîement arraché à leur vanité , toutes les fois qu'ils apperçoivent la laideur de leurs pieds. Théophrafle avance que leurs cris I fou vent répétés , font un préfage de pluie*, d'autres qu'ils l'annoncent auflï ïorfqu'ils grimpent plus haut que de (p) Folucres pleraque à fuis vocibus apvellara, Ut ha Upupa, Cuculus, Ulula. . . . Paio. Varro? h. Linguâ Lut in à, iib. IV. du Paon. 4 c coutume (q) ; d'autres que ces mimes cris p r on oflîqu oient la mort à quelque voifîn -, d'autres enfin, que ces oifeaux portoient toujours, fous l'aile, un morceau de racine de lin comme un amulette na- turel pour fe préierver des fafcina- • tions .... (r) y tant il eft vrai que toute chofe dont on a beaucoup parlé, a fait dire beaucoup d'inepties ! Outre les diftérens cris dont j'ai fait mention, le mâle & la femelle pro- ijduifent encore un certain bruit fourd, lun craquement étouffé , une voix in- térieure & renfermée , qu'ils répètent ifouvent Se quand ils font inquiets, 8c quand ils paroiiîent tranquilles ou même contens. Pline dit . qu'on a remarqué de la fympathie entre les pigeons 8c les : paons (f) ; Se Cléarque parle d'un de | ces derniers qui avoit pris un tel atta- i chement pour une jeune perfonne, que J (q) Voyez ïe Livre de Naturu rerum. (r) iEIian , Rijloria Animalium , lib, X I ? cap. xviii. (f) Plin. Hiflor. Animal. lib. X, cap. xx. 46 Hijloire Naturelle Tayant vu mourir, il ne put îui fur- vivre (t ). Mais une fympathie plus natu- relle & mieux fondée, c'eft celle qui a été obfervée entre les paons & les din- dons : ces deux oifeaux font du petit nombre des oifeaux qui redreiïént leur queue & font la roue , ce qui fuppofe bien des qualités communes, aufîi s'ac- cordent-ils mieux enfemble qu'avec tout le refte de la volaille -, & Ton pré- tend même qu'on a vu un coq-paon cou- vrir une poule d'inde (u) > ce qui indr- queroit une grande analogie entre les deux efpèces. La durée de la vie du paon eft de vingt-cinq ans, félon les Anciens (xjî* êc cette détermination me paroît bien fondée, puifqu'on fait que le paon eft: entièrement formé avant trois ans , Se que les oifeaux, en général, vivent plus long-temps que les quadrupèdes , parce (t) Voyez Athénée, Deijpnofoph. lib. XIII, cap. xxx. (u) Voye\ Bélon , Nature des Oifeaux , page 234. (x) A riftot. Hijïor. An imal. lib. VI, cap. iX. ~-¥lm.li!}.X,cajF. xx. du Paon. 4, que leurs os font plus dudKIes ; mais je îuis furpns que M Willulphby ait cru, fur l'autorité d'Élien , oue cet ;oifeau vivoit jufqu'à cent ans /d'autant pus que le récit d'Eiien eft mêlé de pilleurs circonitances vifiblemem ' fa- , Euleuies (y). m déjà dit que le paon fe nourriflbît de toutes fortes de grains comme les gal- linacés ^es Anciens lui donnoient ordi- nairement par mois un boifTeau de fro- ment, pefant environ vingt livres (v ) - : il eft bon de favoir que la fleur de fureau leur eft contraire (a), & que fe feuille d ortie eft mortelle aux jeunes paoneaux 3 ieion Franzius (b). Comme les paons vivent aux Indes dans letat de fauvage, c'eft auffi dans ce pays quon a inventé l'art de leur donner la cha (Te : on ne peut guère les approcher de jour, quoiqu'ils fe (y) Voyet fflim, de Naturâ Animal lib. XI cap. xxxiii. ' (l) Vairo, de Re Ruflkâ, fib. in, Cap. vi0 (a) Lmnaeus, tyj?. „«. edit. X, page 156, (b) Franzius, HiJJor. Animal, page 318, 4 8 Hijloire Naturelle répandent dans les champs par troupes afïez nembreufes, parce que, dès qu'ils découvrent le Chafleur, ils fuient de- vant lui plus vite que la perdrix,^ & s'enfoncent dans des brouiïailles où il n'eti guère poffible de les fuivre-, ce n'eu: donc que la nuit qu'on parvient k les prendre, & voici de quelle ma- nière le fait cette chatte aux environs de Cambaie. On s'approche de l'arbre fur lequel ils font perchés, on leur préfente une ef- pèce de bannière qui porte deux chan- delles allumées, Se où l'on a peint des paons au naturel -, le paon ébloui par cette lumière, ou bien occupé à confidé- rer les paons en peinture , qui font fur la bannière , avance le cou , le retire , l'aïonge encore, & lorfqu'il fe trouve dans un nœud coulant , qui y a été placé exprès, on tire la corde, & on fe rend maître de l'oifeau (c). Nous avons vu que les Grecs far- ioient grand cas du paon , mais ce n'étoit que pour raOTafier leurs yeux (c) Voyage de J. E. Tavernier, tome III , w 57. du Paon. 49 de la beauté de fon plumage •, au lieu que les Romains ,. qui ont pouffé plus ioin tous les excès du luxe , parce qu'ils étoient plus puiiTans , fe font raffafîés réellement de fa chair -, ce fut l'Orateur Hortenlîus qui imagina le premier d'en faire fervir fur fa table ( d) j & fon exemple ayant été fuîvi , cet oifeau de- vint très -cher à Rome, & les Empe- reurs renchérifTant fur le luxe des particuliers , on vit un Viteliius > un Héliogabale mettre leur gloire à rem- plir des plats immenles ( e ) ^ de têtes ou de cervelles de paons, de langues de phénicoptères , de foies de fcares (f)y & à en compofer des mets infipides , qui n avoient d'autre mérite que de fup- pofer une dépenfe prodigieule & un luxe exceffivement dedructeur. Dans ces temps -là, un troupeau de cent de ces oifeaux pouvoit rendre foixante mille fefterces , en n'exigeant (à) Varro , de Re Rufticâ ? lib. III , cap. VI. (e) Entre autres dans celui que Viteliius fe pïaifoit à nommer ['Égide de Pallas. (f) Suétone , dans la vie de ces Empereurs* Oifeaux j Tome IF* C j o Hijloire Naturelle de celui à qui on en confioit îe foin l que trois paons par couvée fgj ; ces foixante mille feflerces reviennent , félon l'évaluation de GafFendi , à dix ou douze mille francs -, chez les Grecs , le mâle Se la femelle fe vendoient mille dtagmes (h) , ce qui revient à huit cents quatre-vingt-fept livres dix fous , félon la plus forte évaluation *, & à vingt -quatre livres, félon la plus foible \ mais il me paroît que cette dernière efl beaucoup trop foihle , fans quoi le pafTage fuivant d'Athénée ne iignirleroit rien. N'y a- 1 -il pas de la fureur à nourrir des paons dont le prix n'eft pas moindre que celui des ftacues ( i ) ? ce prix étoit bieia tombé au commen- cement du xvi,? fiècle , puifque 3 dans la nouvelle Coutume du Bourbonnois , qui eft de 1521 , un paon n étoit eitimé que deux fous fix deniers de ce (g) Varro, de Re Rufihâ , lib. III, cap. VI. (Ti) Élien, Biflor. Animal, lib. V, cap. XXI. (i) An non furiofum cfi alere domi paroncs t cum zorum pretio queant emi fîatuœ? Anaxandrides apud 4.ther.*um ? lib, XI V, cap. xzr. du Paon. j i temps - là , que M. Dupré de Saint- Maur évalue à trois livres quinze fous d'aujourd'hui : mais il paroît que , peu après cette époque , le prix de ces oifeaux fe releva j car Bruyer nous apprend qu'aux environs de Liheux, où l'on avoit la facilité de les nourrir avec du marc de cidre , on en élevoic des troupeaux 3 dont on tiroit beaucoup de profit , parce que , comme ils étoient fort rares dans le refle du royaume 9 on en envoyoit de -là dans toutes les grandes villes pour les repas d'appa- reil (k) : au refte , il n'y a guère que les jeunes que l'on puiiïe manger , les vieux font trop durs , 8c d'autant plus durs que leur chair eCt naturellement fort sèche *3 & ceft fans doute à cette qualité "qu'elle doit la propriété fin- gulière 5 & qui paroît allez avérée , de fe conferver fans corruption pen- dant plufieurs années (l) ; on en fert (k) h Bruyer , de Re Cibarià, iib. XV \ cap. XXVIII. (I) Voyez D. Auguft. de Civitate Del , Iib. XXI, *ap, iy. — Aldrov. Avï, tom, II, pag. 27. Ci, j 2 Hijlolre Naturelle cependant quelquefois de vieux , mais ceft plus pour l'appareil que pour l'ufage ', car on les fert revêtus de leurs belles plu- mes j & c'en: une recherche de luxe alTez bien entendue, que l'élégance in- duftrieufe des Modernes a ajoutée à la magnificence effrénée des Anciens : c'é- toit fur un paon ainfi préparé que nos anciens Chevaliers faifoient , dans les grandes occasions , leur vœu , appelé le yœu de paon ( m). On employoit autrefois les plumes de paon à faire des efpèces d'éven- tails ( n ) ., on en formoit des couronnes, en guife de laurier , pour les Poètes appelés Troubadours (o) ; Gefner a vu une étoffe , dont la chaîne étoit de foie & de fil d'or , & la trame de ces mêmes plumes ( p ) ; tel éroit fans doute le man- teau , riflu de plumes de paon , qu'en- (vi ) Voyez Mém. de PAcad. des Infcrip. tomt XX, page 636. (n) Frifch , planche cxvm. (0) Traité des Tournois , par le P. Méneftrier, $&§*■ 4°- (pj Gefner j du Jiibus. .iv: PI . £. ntZi/ . fa. LE PAOK du Paon. 5 3 Voya îe Pape Paul III au Roi Pépin (q). Selon Aldrovande , les œufs de paon font regardés par tous les Modernes comme une mauvaife nourriture , tandis que les Anciens les mettaient au pre- mier rang , & avant ceux d'oie & de poule commune (r) : ii explique cette contradiction, en difant qu'ils font bons au goût & mauvais à la fanté (f) ; relie à examiner fi la température du climat n'auroit pas encore ici quelque influence. (q) Généalogie de Montmorency, page 29, (r) Athénée , Deipiwfoph. ïib.-II, cap. XVIJ. (f) Aïdrovande, Avi, tom. II ^ pag. 29. Cirj j4 Uijloire Naturelle •+*Mwmw**J**-***vrr7m LE PAON BLANC. Jji ciîmat n'influe pas moins fur le plumage des oi féaux que fur le pelage des quadrupèdes : nous avons vu , dans les volumes précédens , que ie lièvre , l'hermine & ia plupart des autres ani- maux , étoient fujets à devenir blancs dans les pays froids, fur -tout pendant l'hiver (a) ; Se voici une efpèce de paons , ou , fi Ton veut , une variété qui paroît avoir éprouvé les mêmes effets par la même caufe , & plus grands encore 5 puifqu'elle a produit une race confiante dans cette efpèce , & qu'elle femble avoir agi plus fortement fur les plumes de cet oiieau ; car la blancheur des lièvres & des hermines n'eft que paifagère , & n'a lieu que pendant î'hyver , ainfi que celle de la gelinotte blanche ou du lagopède -, au lieu que le paon blanc eft toujours blanc , & (a) Voyez tome VII àz cette Iliftoire Naturelle, pages 115 & 268 de l'édition en treize volumes. du Paon blanc. 5 j dans tous les pays , l'été comme l'hiver 9 à Rome comme à Tornéo } & cette couleur nouvelle ed: même fi fixe , que des œufs de cet oifeau pondus & éclos en Italie , donnent encore des paons blancs. Celui qu'Aldrovande a fait déf- ini er étoit né à Bologne , d'où il avoit pris occafîon de douter que cette variété fût propre aux pays froids ( b ) : cepen- dant la plupart des Naturaliftes s'accor- dent à regarder la Norwège , & les au- tres contrées du Nord > comme fon pays natal (c) ; & il paroît qu'il y vk dans l'état de fauvage -, car il le répand , pen- dant l'hiver , dans l'Allemagne , où on en prend affez communément dans cette faifon ( d ) ; on en trouve même dans des contrées beaucoup plus méridio- nales , telles que la France & l'Ita- lie (e ) j mais dans l'état de domefticité feulement. (b) Aïdrovand. Ornithologia, tom. II , pag. 95» (c) Frifch , planche ex x. — • Wiiivdghby 9 Ornithologia , pag. 113. (&) Frifeh , flanche cxx. (e) Aldjovande , Omitholegia , tom. Iï , pag. %u CÎV; j 6 Hijloire Naturelle M. Linnaeus allure en général , comme je l'ai dit plus haut , que les paons ne relient pas même en Suède de leur plein gré , & il n'en excepte point les paons blancs (f). Ce n'en: pas fans un ïaps de temps considérable , & fans des circonftances fingulières , qu'un oifeau , né dans les climats fi doux de l'Inde & de l'Aiïe > a pu s'accoutumer à l'âpreté des pays feptentrionaux j s'il n'y a pas été tranf- porté par les hommes , il a pu y paiTer , foit par le nord de l'Afîe 3 foit par le nord de l'Europe : quoiqu'on ne Tache pas précifément l'époque de cette mi- gration , je ioupçonne qu'elle n'eft pas fort ancienne i car îe vois , d'un côté , dans Aidrovande ( g) j Longolius , Sca- Il ajoute auffi les ifïes Madères, en citant Cadamofto, de Napigatione. Je n'ai point la Relation de ce Voyageur pour vérifier la citation; mais je vois, àmsVHiftoife générale des Voyages , tome II, y. 270, qu'on trouve des paons blancs à l'iile de Madère , & cela eft dit d'après licols & Cadamofto. (f) Habitat apud nojlraîes ravins , prœfcrtim in aviariis Magnatum non vero Jponte. Linnscus, Fauw Suecica, pag. 60 & 120. (g) Aldrovand. Omithologia , tome II, pag. 31. du Paon blanc. j 7 liger (h) & Schvvenckfeld (i) j que ïes paons blancs n'ont celle d'être rares que depuis fort peu de temps *, & , d'un autre coté , je fuis fondé à croire que les Grecs ne les ont point connus, puifqu'Ariftote ayant parlé , dans Ton Traité de la génération des Animaux (k) ^ des couleurs variées du paon, & tnfuite des perdrix blanches, des corbeaux blancs» des moineaux blams , ne dit pas un mot des paons blancs. Les Modernes ne difent rien non plus de l'hiftoire de ces oifeaux , fi ce n'eft que leurs petits font fort délicats à élever (l) : cependant il eft. vraîfem- blable que l'influence du climat ne s'en; point bornée à leur plumage , & qu'elle fe fera étendue plus ou moins jufque fur leur tempérament, leurs habitudes, leurs mœurs \ & je m'étonne qu'aucun Naturalise ne fe foit encore avilé d'ob-. (h) Exercitatio, LIX; & CCXXXVIII. (i) Schwenckfeld ? Aviarium SiUjia, pag-S^Y» (k) ÀriPcote , lib. V ', cap. vi. (I) Schwenckfeld , Aviarium SUeJUt 9£®g. 327, Cv j 8 HiJIoire Naturelle , &c. ferver les progrès, ou du moins le ré- sultat de ces obfervations plus intérieures & plus profondes 5 il me femble qu'une feule obfervation de ce genre feroit plus intéreflante , feroit plus pour l'Hiitoire Naturelle 3 que d'aller compter fcrupuleu- fement toutes les plumes des oifeaux , & décrire laborieufement toutes les teintes & demi -teintes de chacune de leurs barbes dans les quatre parties du Monde» Au refte , quoique leur plumage foit entièrement blanc , & particulièrement les longues plumes de leur queue : cepen- dant on y diftingue encore , à l'extrémité, des vertiges marqués de ces miroirs qui en faifoient le plus bel ornement (m) _, tant l'empreinte des couleurs primitives ctoit profonde ! Il feroit curieux de cher- cher à refïufciter ces couleurs , & de dé- terminer , par l'expérience , combien de temps & quel nombre de générations il faudroit dans un climat convenable , tel que les Indes , pour leur rendre leur premier éclat. (m) Frifch ? planche cxx. 59 LE PAON PANACHÉ. rRiscH croit que le paon panaché 3" n'eft autre chofe que le produit du mé- lange des deux précédens , je veux dire du paon ordinaire & du paon blanc *, & il porte en effet fur Ton plumage l'em- preinte de cette double origine -, car il a du blanc fur le ventre , fur les ailes êc fur les joues -, &, dans tout le refte , il ell comme le paon ordinaire , fî ce naeft que les miroirs de la queue rie font ni fî larges 3 ni lî ronds , ni ii bien terminés : tout ce que je trouve dans les Auteurs 7 fur i'hiftoire particulière de cet oifeau , fe réduit à. ceci 3 que leurs petits ne font pas aufîi délicats à élever que ceux du paon blanc. Pvj éo Tlijicïre Naturelle * LE FAISAN (a). Âl suffit de nommer cet oifeau pour fe rappeler le lieu de Ton origine -, le Faifan, ceft-à- dire, Poifeau du Phafe, etoit, dit- on 3 confiné dans la Colchide, avant l'expédition des Argonautes (b ); ce font ces Grecs qui , en remontant le Phafe pour arriver à Colchos > virent ces beaux oifeaux répandus fur les bords du fleuve , Se qui , en les rapportant -x Voyelles planches enluminées y n.° 121 , le mâle; & ;?.° 122, la femelle. fa) En Grec , $* page 402 , citant le P. Loyer. (n) Pîgafette ? page 92. (0) Olina , Uccellaria , pag. 49. — Âldrovande r Ornithologia , tom. II , pag. 50 & 51. Hieme per (yhas vagari Phafianos & fiepius Coloniœ in horto fuo inter falviam & rutam latitanum obfervajjefe iradiî Jtlbertus. (p) Hiftory of Harwich , Jppeni. pag. 397*- (q) Britifch Zooîogy, pag. 07. 64 Hijîoire Naturelle Zoologiites , en difant qu'en ÉcofTe quelques Gentilshommes élèvent de ces oifeaux dans leurs maifons ( ' r ). Boter dît encore plus formellement , que Tir- lande n'a point de fzifans(j). M. Linna^us n'en fait aucune mention dans le dé- nombrement des oifeaux de Suède ( t) ; ils étoient encore très- rares en Srléhe du temps de Schwenckfeld (uj: on ne faifoit que commencer à en avoir en Prufïe , il y a vingt ans ( ' x ) 3 quoique la Bohême en ait une très- grande quantité ( y ) ; & , s'ils fe font multipliés en Saxe , ce n'a été que par les foins du Duc Frédéric, qui en lâcha deux cents (r) Prodromus Hijhria Naturalîs Scotiœ , part. II . îib. m, cap. m, pag. 16. (f) Willulghby, Ornithologia , pag. il 8. (t) Voyei Linnaus , Fauna Suecica. (u) Rarijfima Avis in Silefià noflrà , nec ni fi ma- gnatibus familiaris , qui cum magno & Jingulaii ftudio aiere foïent. ichwenckfeld , Aviarium Siiejia , pag- 332- (x) Modo & in Prujjià colitur. Klein , Ordo Avimn-, pag- 114. (y) In Bonemià magna eorum copia* Ibidem. du Faifan. 6$ dans îe pays 3 avec défenfe de les prendre ou de les tuer (\}> Gefner , qui avoit parcouru les montagnes de Suifîe , af- fure n'y en avoir jamais vu (a) ; il eft vrai que Stumpfius afifure au contraire , qu'on en trouve dans ces mêmes mon- tagnes -, mais cela peut fe concilier , car il eft fort poffible qu'il s'en trouve en effet dans un certain canton , que Gefner n'auroit point parcouru , tel 5 par exemple , que la partie qui confine au Milancs , où Olina dit qu'ils font fort communs (b ) ; il s'en faut bien qu'ils foient généralement répandus en France \ on n'en voit /que très -rarement dans nos provinces \feptentrionales , & pro- bablement on ny en vetroît point du tout , ii un oifeau de cette diftinction ne de voit être le principal ornement des plaiiirs de nos Rois-, mais ce n'en: que par des foins continuels , dirigés avec la plus grande intelligence , qu'on peut les y fixer en leur faifant , pour (l) Aldrovand. Ornitholog. tome Iï ? pag. £i. (a) Gefner , de Avibus. (b) Olina ? Uccdiaria, pag. 49. 66 Hijioire Naturelle ainii dire , un climat artificiel convenable à leur nature -, & cela eft fi vrai , qu'on ne voit pas qu'ils fe foient multipliés dans la Btie , où il s'en échappe tou-^ jours quelques-uns des Capitaineries voifînes , & où même ils s'apparient quelquefois *, parce qu'il en: arrivé à M. le R.oi , Lieutenant des Chaires de Verfailles (cjj d'en trouver le nid Se les œufs dans les grands bois de cette province -, cependant ils y vivent dans l'état de liberté , état fi favorable à la multiplication des animaux , & néanmoins infuffifant pour ceux même qui , comme les faifans , paronTent en mieux fentir le prix lorfque le climat: eft contraire: nous avons vu, en Bour- gogne , un homme riche faire tous fes-; efforts & ne rien épargner pour eni peupler fa tetre , iituée dans l'Auxois ,, fans en pouvoir venir à bout : tout: cela me donne des doutes fur les deux: faifans que Regnard prétend avoir tué» (c) C'eft à ïuî que je dois îa plupart de ces faits: il eft peu d'hommes qui ait fi bien obfervéi ïes animaux qui font à fa diipofition , & qui ait communiqué fes obfervaûons avec plus de zèle. du Faijan* 6 y en Bothnie (d) 3 ainû* que fur ceux qu'Olaiis Magnus dît fe trouver dans là Scandinavie , & y paffer l'hiver fous la neige fans prendre de nourriture (e) : cette façon de paner l'hiver fous la neige 5 a plus de rapport avec les ha- bitudes des coqs de bruyère & des gelinottes 5 qu'avec celle des faifans, de même que le nom de galLifylvejlres qu'Olaiis donne à ces prétendus fai- fans , convient beaucoup mieux aux tétras ou coqs de bruyère \ & ma con- jecture a d'autant plus de force , que ni M. Linna!us , ni aucun bon Obfer- vateur , n'a dit avoir vu de véritables faifans dans les pays feptentrionaux ; en forte qu'on peut croire que ce nom de faifan aura été d'abord appliqué, par les habitans de ces pays , à des tétras ou des gelinottes , qui font en effet très - répandus dans le Nord , & qu'en- fuite ce nom aura été adopté , fans (à) Regnard , Voyage, de Lapponie , page 105. (e) Olaûs Magnus non folum Phafianos Jîve gallos fylveftres in quibufdam Scandin aviage 39. fgj Aidrovande , qui a obfervé & décrit cet du Faifan. 69 le rîifputer au paon pour ïa beauté -, jl a ie port aufïï noble , la démarche uiffi fière , & le plumage prefque âuffi liftingué -, celui de la Chine a même B couleurs plus éclatantes -, maïs il :i'a pas , comme le paon , la faculté •f étaler Ton beau plumage , ni de re- lever les longues plumes de fa queue j .acuité qui fuppofe un appareil parti- culier de mufcles moteurs dont le paon m pourvu , qui manquent au faifan 9 fe qui établirent une différence affez tonfidérabie entre les deux efpèces : Railleurs ce dernier n'a ni l'aigrette !fu paon , ni fa double queue , dont ...une plus courte en: compofée des |iritabîes pennes directrices , & l'autre .lus longue n'eft formée que des cou- jPttures de celles-là : en général , ie idfan paroît modelé fur des proportions Iipins légères & moins élégantes , ayant ,„ .feau avec foin , dit qu'H en a examiné un qui "'• îfoit trois livres de douze onces ( Vibras très "f.odecim unciarum ) , ce que quelques-uns ont rendu Jgt trois livres douze onces , c'eft une différence ï vingt -quatre onces fur trente -fix, 7o Eifloire Naturelle le corps plus ramaffé , le cou plus rac- courci , la tête plus grofle , &c Ce qu'il y a de plus remarquable dans fa phyiionomie , ce font deux pièces de couleur écarlate , au milieu defquelles font placés te yeux, & deux bouquets de plumes d'un verd-doré qui, dans le temps des amours , sélèvem de chaque côté au-deffus des oreilles: car , dans les animaux , il y a prefque toujours , ainfi que je l'ai remarqué une production nouvelle , plus ou rnoin fenfible , qui eft comme le lignai dun< nouvelle génération : ces bouquets d<: plumes font apparemment ce que Plin appeloit , tantôt des oreilles (h) j tantô de petites cornes (i) ; on fent à leu bafe une élévation formée par leu mufcle releveur (k): le faifan a, outr cela, à chaque oreille, des plumes dor (h) Geminas ex pluma aures fubmittunt fuèriguntqu Plin. Hifi. Kat. lib. X, cap. xxxvni. (i) Phafianœ corniculis. Ibid. lib. XI , ca XXXVII. (k) Aldrovand. Ornitholo». tom. II , pag. 5e. du Faifan. y t ,îl fe fert pour en fermer à fon gré ï ou- verture ^qui eft fort, grande (1). Les plumes du cou & du croupion [ont le bout échancré en cœur , comme terrâmes plumes de la queue du paon (m). | Je n'entrerai point ici dans le détail des couleurs du plumage * J je dirai seulement qu elles ont beaucoup moins d éclat dans la femelle que dans le maie , * que, dans celui-ci même, îes reflets fcn font encore plus fugitifs que dans le paon , & qu'ils dépendent non-feu- lement de ïinddQnce de la lumière, liais encore de la réunion & de la po- sition refpeclive de ces plumes -, car Ci ) >n en prend une feule à parr , les refiers Ij'erds s'évanouiiTent , & Ion ne voit à leur place que du brun ou du noir (n) : (l) AIdrovand. Ornitholog. tom. II, pag. 50. (m) Voyti Briflbn , Ornithologie, tome II, ^age 263.. ? 3 * Fbj^ les planches enluminées ,.n.° 121 , où les Oiueurs au plumage font repréfentées avec affez l exactitude, (n) Voyel Aldrovande \ Omithologia , tom. II, ag. 50. 7 7 2 Hijloire Naturelle les tiges des plumes du cou & du dos font d'un beau jaune -doré , & font l'effet d'autant de lames d'or (oj ; les couvertures du deflus de la queue vont en diminuant , & finiffent en efpeces de filets: la queue eft compofee de dix -huit pennes, quoique Schwenckfeld n'en compte que feize (p); les deux du milieu font les plus longues de toutes , & ensuite les plus voiiines de celles-là: chaque pied eft muni d'un éperon court & pointu , qui a échappé à quelques; Descripteurs , & même au Deiiinateur de nos planches enluminées, n.° inj les doists font joints par une membrane plus large quelle neft ordinairement dans les°oifeaux pulvérateurs (q) ; cette membrane interdigitale plus grande, femble être une première nuance par laquelle les oifeaux de ce genre fe rap- prochent des oifeaux de rivière -, & en effet , Aldrovande remarque que le (o) Koye? Aldrovande, Omithologia, tome II pag. 50. (p) Schwenckfeld , Jviarium Sihfi* > p. 33^ fqj Aldrovande, Ornitfologia, Icco citato. du Faifan. y $ faifan fe plaît dans les lieux marécageux -, & il ajoute, qu'on en prend quelquefois dans les marais , qui font aux environs de Bologne (r) : Olina , autre Italien (f) y & M. le Roi , Lieutenant des Chaflfes de Verfailies , ont fait la même ob- fervation *, ce dernier allure que c'efl toujours dans les lieux les plus humides & le long des mares , qui fe trouvent dans les grands bois de la Brie , que fe tiennent les faifans échappés des ca- pitaineries voifines ', quoiqu'accoutumés à la fociété de l'homme , quoique com- blés de fes bienfaits , ces faifans s'é- loignent le plus qu'il eft pofTible de toute habitation humaine-, car ce font des oifeaux très - fauvages , 8c qu'il en: extrêmement difficile d'apprivoifer : on prétend néanmoins qu'on les accou- tume à revenir au coup de fîfïlet (t) & (r) AIdrov. Ornithol.tom. II, pag. 51. (f) Olina, Uccellaria, pag. 49. (t) Voyei le Journal Économique , mois de Sep~ tembre 1753. H y a grande apparence que c'étoit là tout le favoir faire de ces faifans apprivoifés qu'on nourriffoit , feïon Éïien , dans la ménagerie du roi Oifeaux , Tome IV* D 74 ÏJiftoire Naturelle c'ert- à-dire , qu'ils s'accoutument à ve- nir prendre la nourriture que ce coup de lirïîet leur annonce roujours -, mais, des que leur beioin eft fatisfait , ils reviennent à leur naturel , cv ne con- noitfent plus la main qui les a nourris } ce font des efclaves indomptables qui ne peuvent fe plier à la fervitude , qui ne connoilîent aucun bien qui puiffe entrer en comparaifon avec la liberté , qui cherchent continuellement à la re- couvrer, Se qui n'en manquent jamais l'occafion ( ' u) ; les fauvages, qui viennent de la perdre , lont furieux \ ils fondent à grands coups de bec fur les compa- gnons de leur captivité , & n'épargnent pas même le paon ( xj. Ces oifeaux fe plaifent dans les bois des Indes. De Natarâ Anlmaîium , lib. XIII, cap. xv ni. (u) Non ojïanteche vinghin' alkvati ndla cafa , £f che fiino natl Jotto la gallina , non s'addomejlicar.o mai, ûii\i rïtengono la fahwiche.ua loro. Olina, Uccellaria, pag. 49. Cela eft conforme à ce que j'ai tu moi- même. (x) Voye\ Longolius apud Aldvùvauimn , Orni- thologia , }om. II, pag. 52. du Faifan. 7 5 en plaine , différant en cela des tétras ou coqs de bruyère., qui fe plaifent dans îes bois en montagne *, pendant la nuit , ils Te perchent au haut des arbres (y ) _, ils y dorment la tête fous Tarie : leur cri , c'eft-à-dire , le cri du mâle, car la femelle n'en a prefque point, eft entre celui du paon & celui de la peintade , niais plus près de celui-ci , & par conféquent très- peu agréable. Leur naturel eft fi farouche , que non - feulement ils évitent l'homme > mais qu'ils s'évitent les uns les autres , Ç\ ce neft au mois de mars ou d'avril, qui eft le temps où le mâle recherche la femelle \ & il eft facile alors de les trouver dans îes bois , parce qu'ils fe trahiiTent eux-mêmes par un battement d'ailes qui fe fait entendre de fort loin f%) ; les coqs-faifans font moins ardens que les coqs ordinaires : Frifch prétend que, dans l'état de fauvage , ils n'ont chacun qu'une feule femelle j mais l'homme 3 qui fait gloire de foumettre l'ordre de (y) Voyez Frifch , flanche cxxuu (l) Olina, Utedforia, page 49, Dij 7 6 Hijtoire Naturelle la Nature à Ton intérêt ou à Tes fan- tarfïes , a changé , pour ainfi dire , le naturel de cet oifeau , en accoutumant chaque coq à avoir jufqu' à fept poules , & ces fept poules à fe contenter d'un feul mâle pour elles toutes -, car on a eu la patience de faire toutes les ob- fervations nécetfaires pour déterminer cette combinaiibn , comme la plus avantageufe pour tirer parti de la fé- condité de cet oifeau (a): cependant quelques économises ne donnent que deux femelles à chaque mâle (b)3& j'avoue que ceft la méthode qui a le mieux réuïli dans la conduite d'une petite faifanderie que j'ai eu quelque temps fous les yeux. Mais ces dirlé- rentes combinaifons peuvent être toutes bonnes, félon les circonftances , la tem- pérature du climat , la nature du fol , ja qualité & la quantité de la nourri- ture , l'étendue & l'expofition de la (a) Voyez Journal Économique, Sep tembre 1753. —Le mot Faifanderie dans l'Encyclopédie. (h) Voyei Frifch , plancha cxxui. — Maifo» Ruftique , tome I, page 135. du Faifan. Jj faifanderie , les foins du Faifandier , comme feroit celui de retirer chaque poule auffitot après qu'elle eft fécondée par le coq , de ne les lui préfehtèr qu'une à une , en obfervanc les inter- valles convenables*, de lui donner, pen- dant ce temps , du blé farrazin & autres nourritures échauffantes , comme on lui en donne fur la fin de l'hiver , lorfqu'on veut avancer la faifon de l'amour* La faifane fait fon nid à elle feule y elle choiiit pour cela le recoin le plus obfcur de fon habitation; elle y emploie la paille , les feuilles & autres chofes femblabies -, & * quoiqu'elle le fade fort groiîièrement en apparence , elle le préfère, ainu fart , à tout autre mieux conftruit , mais qui ne le ieroit point par elle-même } cela eft au point que , fi on lui en prépare un tout fait & bien fait, elle commence par le détruire & en éparpiller tous les matériaux , qu'elle arrange enfuite à fa manière. Elle ne fait qu'une ponte chaque année , du moins dans nos climats j cette ponte eft de vingt œufs , félon les D iij 78 jtïijîoirz Naturelle uns (c) y & de quarante à cinquante, félon les autres , fur -tout quand on exempte la faifane du foin de cou- ver ( d) ; mais celles que j'ai eu occa- fion de voir , n'ont jamais pondu plus de douze œufs , & quelquefois moins , quoiqu'on eût l'attention de faire cou- ver leurs œufs par des poules com- munes : elle pond ordinairement de deux ou trois Jours l'un -, fes œufs font beaucoup moins gros que ceux ^ de poule > & la coquille en eft plus mince que ceux même de pigeons ; leur cou- leur eft un gris - verdâtre , marqueté de pentes taches brunes, comme le dit très-bien Ariilote (e)j arrangées en zones circulaires autour de l'œuf *, (c) Palladius, JeReRufticâ, lib. I , cap. 29. (d) Voyei Journal Économique , Sept. 1753. (t) Pun&is diftinga font ova Méleagridum & PM fianarum. Rubrum timuiculi efi modo minii. Hiftoria Animalium, lib, in, cap. 11. Pline altérant appa- remment ce paflage , a dit : Alio. punàis difimâa ui Mcleagridi ; alia rubri coloris ut Phajiavis , caichridi. Hiftoria Naturalis, lib. X, cap. lu. du Faifan. 79 chaque faifane en peut couver jufqu'à dix-huit. Si Ton veut entreprendre en grand une éducation de faifans , il faut y âzC- tiner un parc d'une étendue propor- tionnée, qui foit en partie gazonné & en partie femé de bunTons , où ces oifeaux puifTent trouver un abri contre Ja pluie êc la trop grande chaleur , Se îflêiîîe contre l'oifeau de proie : une partie de ce parc fera divifée en plu-* rieurs petits parquets de cinq ou iîx toifes en carré , faits pour recevoir cha- cun un coq avec fes femelles } on les retient dans ces parquets, foit en les éjointant , c''e il* à-dire , en leur coupant le fouet de Varie à Vendrait de la join- ture, ou bien en couvrant les parquets avec un filet : on fe gardera bien de renfermer placeurs maies dans la même enceinte j car ils fe battroxent certaine- ment , 8c finiroient peut-être par fe tuer (f) • il faut même faire en forte qu'ils ne puhTeot ni fe voir ni s'entendre , autrement les mouvemens d'inquiétude (f) Voyez le Journal Économique , Septembre 1753- Div 8o Hijïoire Naturelle ou de jalouiie que s'infpireroient les uns les autres, ces mâles, Ci peu ardens pour leurs femelles , & cependant fi ombrageux pour leurs rivaux ? ne man- queroient pas d'étouffer ou d'arfoiblir des mouvemens plus doux , & Tans iefquels il n'eft point de génération. Ainii , dans quelques animaux, comme dans l'homme, le degré de la jaîouiie n'eu: pas toujours proportionné au befoin de jouir. Paiiadius veut que les coqs foient de Tannée précédente (g); & tous les Naturalises s'accordent à dire qu'il ne faut pas que les poules aient plus de trois ans. Quelquefois , dans les endroits qui font bien peuplés de faifans , on ne met que des femelles dans chaque par- quet , & on ïailîe aux coqs fauvages le foin de les féconder. Ces oifeaux vivent de toutes fortes de grains & d'herbages , & Ton con- feiile même de mettre une partie du parc en Jardin potager , Se de cultiver dans ce jardin des fèves , des carottes , des pommes de terre , des oignons , (g) Journal Économique, Septembre 1753. du Faifan. 8 i des laitues & des panais, fur- tout des deux dernières , dont ils font très- friands: on dit qu'ils aiment aufîi beau- coup le gland , les baies d'aube-épine 8c la graine d'abfynthe ( h) ; mais le fro- ment eîl la meilleure nourriture qu'on puilfe leur donner , en y joignant les œufs de fourmis } quelques-uns recom- mandent de bien prendre g^rde qu'il n'y aie des fourmis mêlées , de peur que les faifans ne fe dégoûtent des œufs -, mais Edmond King veut qu'on leur donne des fourmis même, &: pré- tend que c'eft pour eux une nourri- ture très-falutaire , Se feule capable de ies rétablir îorfqu'ils font foibles & abattus-, dans la difette, on y fubititue avec fuccès des fauterelles , des perce- oreilles , des mille- pieds : l'auteur An- glois , que je viens de cher , allure qu'il avoir perdu beaucoup de faifans , avant qu'il connût la ptopriété de ces infectes j & que, depuis qu'il avort appris à en faire ufage , il ne lui en étoit pas mort un feul de ceux qu'il (h) Gerbiiion , Voyage, de la Chine & de h Tartane, Dv S 2 Hljlolre Naturelle avoit élevés (i). Mais quelque nour- riture qu'on leur donne , il faut la leur meiurer avec prudence , & ne peint rrop les engraiifer J car les coqs trop gras font moins chauds , & les poules rrop graiîes font moins fécondes , & pondent des œufs à coquille molle 8c faciles à écrafer. La durée de l'incubation e(t de vingt à vingt- cinq jours , fui van t la plupart des Auteurs (k) & ma propre obler- vatren : Pailadius la fixe à trente (l)* mais c'eft une erreur qui n'auroit pas du reparoître dans la Maifon Ruf- tique ( m ) ; car le pays où Pailadius écrivoit, étoit plus chaud que le nôtre, les œufs de faifans n'y dévoient pas être plus de temps à éclorre que dans le notre , où ils édp.fent au bout d'en- viron trois femames •, d'où il fuit que (i) Kqyqïes TraniaâionsPhilofophiques , n.°. 23, article vi. (k) Gefner. — Schwenckfeld. — Journal Éco- nomique.— M.ieRoi, &c. aux endroits cités. (Ij Pailadius, de ReRufiicà, lib. I, cap. XXIX. (m) Voyei tome I, page 135. du Fai/an. 8 5 îe mot trigefimus a éré fubilitué par les copiftes au mot vigefimus. Il faut tenir la couveufe dans un endroit éloigné du bruit Se un peu enterré , afin qu'elle y Coït plus à l'abri des inégalités de la température & des impreflions du tonnerre. Dès que les petits faifans font écïos y ils commencent à courir comme font tous les gallinacés -, on les laide ordi- nairement vingt -quatre heures fans leur rien donner *, au bout de ce temps , on met la mère & les petits dans une hoitc que l'on porte tous les jours aux champs , dans un lieu femé de blé , d'orge, de gazon, Se fur- tout abondant en œufs de fourmis : cette boite doit avoir. pour couvercle une efpèce de petit toit , fermé de planches légères , qu'on puifle ôter & remettre à volonté , félon les circonftances -, elle doit suffi avoir ? à l'une de fes extrémités, un retran- chement où l'on tient la mère renfer- mée par des cloifons à claire-voie , qui donnent padage aux faifandeaux ; du tefte , on leur laide toute liberté de Ifortir de la boîte 6c d'y rentrer à leur Dvj §4 Hijhire Naturelle gré j les glou (Terriens de îa mère prî- fonnièrë , & le befoin de le réchauffer de temps en temps fous Ces ailes , les rappelleront fans cède , & les empêche- ront de s'écarter beaucoup : on a cou- tume de réunir trois ou quatre couvées à peu près du même âge , pour n'en former qu'une feule bande capable d'oc- cuper la mère, & à laquelle elle puhTe fuiiire. On les nourrit d'abord , comme on nourrit tous les jeunes pouilins , avec un mélange d'ceufs durs , de mie de pain & de feuilles de laitue , hachés enfemble , & avec des œufs de fourmis de prés : mais il y a deux attentions efièntieiles dans ces premiers temps -, la première, eft de ne les point îaifler boire du tout , & de ne les lâcher , chaque jour, que lorfque la rofée eft évaporée, vu qu'à cet âge toute humidité leur eft contraire *, & c'eft , pour le dire en palTant , une des raifons pourquoi les couvées de faifans fauvages ne réuffiffent guère dans notre pays ; car ces failans , comme je l'ai remarqué plus haut , fe tenant par préférence du Faijan. 8 5 dans les lieux les plus frais & les plus humides , il eft driricile que les jeunes faifandeaux n'y périflerit . la féconde at- tention qu'il faut avoir , c'eit de leur donner peu & fouvent , & dès le matin , en entre -mêlant toujours les œufs de fourmis avec les autres alimens. Le fécond mois , on peut déjà leur donner une nourriture plus fubftan- cielle ', des œufs de fourmis de bois , du turquis , du blé , de l'orge , du millet , des fèves moulues , en aug- mentant infenfihlement la diftance des repas. Ce temps eft celui où ils commencent à être fujets à la vermine -, la plupart des Modernes recommandent, pour les en délivrer , de nettoyer la boîte , & même de la fupp rimer entièrement , à l'exception de fon petit toit , que l'on conferve pour leur fervir d'abri -, mais Oiina donne un confeil, qui avoit été indiqué par Ariftote , & qui me paroît mieux réfléchi & plus conforme à la nature de ces oifeaux -, ils font du nombre des pulvérateurs , & ils périflenc S 6 Hifioire Naturelle lorsqu'ils ne fe poudrent point ( n ). Olina veut donc qu'on mette a leur portée des petits tats de terte fèche ou de labion très-fin, dans leiquels ils puifTent fe vau- trer , & fe délivrer ainfi des piqûres in- commodes des infe&es ( o ). Il faut être aufn très - exact à leur donner de l'eau nette, & à la. ieur renouveler Souvent , autrement ils cour- roient tifque de la pépie , à laquelle il y auroit peu de remède , fuivanc les Modernes , quoique Paliadîus ordonne tout uniment de ia leur ôter , comme on i'ôte aux poulets , & de leur frotter le hec avec de l'ail broyé dans de la poix liquide. Le troilième mois amène de nou- veaux dangers : les plumes de leur queue tombent alors , & il ieur en poulie de nouvelles , c'en: une efpèce de crife pour eux comme pour les paons ', (n) Ariftote , Hijloria Animalium» lib. V, cap. xxxi. (o) Olina, Uccdlaria, pag. 49. du Faifan. 8 7 niais les œufs de fourmis font encore ici une reffourcè > car ils hâtent ïe mo- ment critique , & en diminuent le danger , pourvu qu'on ne leur en donne pas trop , car l'excès en feroit per- nicieux. A mefure que les jeunes faifandeaux deviennent grands , leur régime ap- proche davantage de celui des vieux 5 &, dès ïa fin du troiiième mois , on peut ies lâcher dans l'endroit que Ton veue peupler -, mais tel eft l'effet de la domef- ticité fur les animaux qui y ont vécu quelque temps , que ceux même qui , comme les faifans, ont le penchant le plus invincible pour la liberté , ne peuvent y erre rendus tout d'un coup de fans obferver des gradations \ de même qu'un bon eftomac > afroibli par des alimens trop légers , ne peut s'ac- coutumer que peu à peu à une nour- riture plus forte. Il faut d'abord tranf- porter la boîte qui contient la couvée^ dans l'endroit où on veut les lâcher \ on aura foin de leur donner la nourriture qu'ils aiment le mieux 3 mais jamais dans le même endroit > & en diminuant 8 8 Hïjîoire Naturelle la quantité chaque jour, afin de les obli- ger à chercher eux-mêmes ce qui leur convient, & à faire connoifîance avec la campagne •, lorfqu'ils feront en état de trouver leur fubhftance , ce fera le mo- ment de leur donner la liberté & de les rendre à la Nature -, ils deviendront bien- tôt aufîi fauvages que ceux qui font nés dans les bois , à cela prjs. qu'ils conler- veront une foi te d'affection pour les lieux où ils auront été bien traités dans leur pre- mier âge. L'homme ayant réum" à forcer ïe naturel du faifan , en l'accoutumant à fe joindre à plusieurs femelles, a tenté de lui faire encore une nouvelle violence, en l'obligeant de fe mêler avec une efpèce -étrangère , & fes tentatives ont eu quelques fuccès , mais ce n'a pas été fans beaucoup de (oins & de pré- cautions ( p) : on a pris un jeune coq- (p) Jamais les fliifans libres ne cochent les poules qu'ils rencontrent ; ce n'eft pas que ie coq ne taffe quelquefois des avances, mais la poule nelesfouffre point. C'ejl à M. le Roi , Lieutenant des ChaJJès de Verfailles, que je dois cette obfervation , & be*iucoup d'autres que j'ai inférées dans cet article : il Jhoit * du Faifan. 89 faifan , qui ne s'étoit encore accouplé avec aucune faifane , on Ta renfermé dans un lieu étroit: & foibiemenc éclairé par en haut -, on lui a choid de jeunes poules , donc le plumage approchoic de celui de la faifane ; on a mis ces jeunes poules dans une café , attenant à celle du coq - faifan , & qui n'en étoit féparée que par une efpèce de grille 5 dont les mailles écoient a (fez grandes pour laiffer palier la têce & le cou , mais non le corps de ces oifeaux : on a ainfî accou- tumé le coq - faifan à voir ces poules , & même à vivre avec elles , parce qu'on ne lui a donné de nourriture que dans leur café, joignant la grille de fépara- tion -, lorfque la connoiiîance a été faite , 8c qu'on a vu la faifon de l'amour approcher , on a nourri ce jeune coq & fes poules de la manière la plus propre à les échauffer & à leur faire éprouver le befoin de fe joindre; &9 quand ce befoin a été bien marqué , on a ouvert la communication : il eft fouhaiter que, fur l'hijloire de chaque oifeau , on eût à confulter quelqu'un qui eût autant de connoijfvices , de lumières & i'emprejjement à Us communiquer. ço Hifloire Naturelle arrivé quelquefois que le faifan , fidèle ! à la Nature , comme indigné de la t méfalliunce à laquelle on vouloit le* contraindre 9 a maltraité & même mis à mort les premières poules qu'on lui avoit données -, s'il ne s'adouciiïoit point , on îe domptoit en lui touchant le bçc avec un fer rouge d'une part , 8c de l'autre, en excitant fon tempéra- ment par des fomentations appropriées -, enfin le befoin de s'unir augmentant tous les jours, & la Nature travaillant fans cède contre elle-même , le faifan s'eft accouplé avec les poules ordi- naires y & il en a réfuîté des œufs pointillés de noir , comme ceux de l^. faifane > mais beaucoup plus gros , les- quels ont produit des bâtards qui par- ticipoient des deux efpèces , & qui étoient même > ielon quelques - uns , plus délicats 8c meilleurs au goût que les légitimes 5 mais incapables , à ce qu'on dit 3 de perpétuer leur race , quoique , félon Longolius, les femelles de ces mulets 3 jointes avec leur père , donnent de véritables faïfans. On a encore obiervé de ne donner au coq- du Falfan. $ i faifan , que des poules qui revoient jamais été cochées , Se même de les renouveler à chaque couvée , foie pour exciter davantage le faifan (car -l'homme juge toujours des autres êtres par lui- même ) , foit parce qu'on a prétendu remarquer que, lorfque les mêmes poules étoient fécondées une féconde fois par le même faifan, il en réfukoît une race dégénérée ( q). On dit que le faifan eft un oifeau ftupide , qui fe croit bien en fureté îorfque fa tête eft cachée , comme on l'a dit de tant d'autres , & qui fe laine prendre à tous les pièges *> iorfqium le chaiTe au chien courant , & qu'il a été rencontré , il regarde fixement le chien tant qu'il e!t en arrêt, & donne tout le temps au Chafîeur de le tirer à fon aife (r) : il fufrit de lui préfenter fa propre image , ou feulement un mor- ceau d'étoffe rouge fur une toile blanche , (q) Voyez Longoïius , Dialog. de Avibus.— Journaf Économique, Septembre 1753. — MilifonRuftique, tome I , page 135. (r) Olina, Uccellana, pag, 77, 92 Hijloire Naturelle pour l'attirer dans le piège : on le prenc encore en tendant des lacets ou de; filets fur les chemins où il paiTe, îe foii & le marin , pour aller boire *, enfin on le chafle à Toifeau de proie 3 & Ton prétend que ceux qui font pris de cette manière , font plus tendres & de meilleur goût ( f). L'automne, eft îe temps de Tannée où ils font le plus gras on peut engrarfïèr les jeunes dans i'épî- nette ou avec la pompe , comme toute autre volaille -, mais il faut bien prendre garde , en leur introduifant la petite bou- lette dans îe gofier, de ne leur pas ren- verfer la langue 5 car ils mourroient fur le champ. Un faifandeau bien gras eft un morceau exquis , &: en même temps une nourri- ture très- faine -, aufîi ce met a-t-il été de tout temps rélervé pour la table des riches *, & l'on a regardé comme une prodi- galité infenfée , la fantaihe qu'eut Hé- îiogabale d'en nourrir les lions de fa ménagerie. (f) Aldrovand. Omitholog. tom. II , pag. 57. .//: PI .H. pag.yz. LE r.\ISAN. du Faiprn. 93 Suivant Olina & M. le Roi , cet oifeau vit , comme les poules communes , envi- ron fix àfept ans (t) ; & c'eft fans aucun fondement qu'on a prétendu connoître fon âge par ie nombre des bandes tranf- verfales de fa queue. (t) Clina Uccellaria, pag. 49. 94 tîijloire Naturelle LE FAISAN BLANC! vJfn ne connoît pas aflez l'hiftoire del cette variété de l'efpèce du faifan, pouil favoir à quelle cauie on doit rapporterl îa blancheur de Ton plumage : l'analogiel nous conduiroit à croire qu'elle eft un efTetl du froid , comme dans le paon blanc4l Il eft vrai que le faifan ne s'eft pointl enfoncé dans les pays feptentrionaux au-l tant que le paon : mais aufîi (a blancheuil n'eft point parfaite , puifqu'il a , félon! M, Brifî'on (a) , des taches d'un violetl foncé fur le cou , & d'autres raches roufl filtres fur le dos \ & que , félon Olina , 1 les maies montrent quelquefois les cou-i leurs franches des faifans ordinaires futl la tête & fur le cou : ce dernier Auteurl dit que les faifans blancs viennent del Flandre *, mais fans doute qu'en Flandre ,1 on dit qu'ils viennent encore de plus loiol fu/Briffon, Ornithologie, tome I, page 1 6 8. du Faifan blanc. 9 * du coté du Nord : il ajoute que ies femelles font d'une blancheur plus par- faite que les mâles (h) ; & je remarque que la femelle du faifan ordinaire , a auffi [plus de blanc dans fon plumage que nen le mâle. (bj Kayq Olina, UcctUaria, par. 49. 9 6 Hifloire Naturelle , &c. t * ........ LE FAISAN VARIÉl Lomme le paon blanc, mêlé avec le paon ordinaire , a produit le paon varié ou panaché \ ainfi , Ton peut croire que le faifan blanc , fe mêlant avec le faifan ordinaire, a produit le faifan varié dont il s'agit ici, d'autant plus que ce dernier a exactement la même forme & la même grofteur que Telpèce ordinaire, & que ion plumage, dont le fond eft blanc, fe trouve femé de taches , qui réunifient toutes les couleurs de notre faifan (a), Frifch remarque que le faiian varié n'eft point bon pour la propagation (b ) (a) Voye\ Briflbn , Ornithologie , tome ', page 267. (b) Frifch, article de la planche CXXIV. LE C0CQU4R 97 LE COCQUAR* o u LE FAISAN BATARD. Flanche II éc ce volume, JU e nom de faifan-huneru _, que Frifch donne à cette variété du faifan, indique qu'il le regarde comme le produit du mélange du faifan avec la poule ordi- naire; & en effet , le Faifan bâtard repréfente lefpèce du faifair par Ton cercle rouge autour des yeux , & par {3. longue queue -, & il fe rapproche du coq ordinaire par les couleurs communes 8c obfcures de Ton plumage , qui a beau- coup de gris plus, ou moins foncé : le faifan bâtard eft auffi plus petit que le faifan ordinaire , & il ne vaut rien pour perpétuer Fefpèce , ce qui convient allez à un métis , ou , il 1 on veut , à un mulet. Frifch nous apprend qu'on en élève Oi/eauxy Tome IF. £ 9 8 Biftoire Naturelle , &c. beaucoup en Allemagne , à caufe du profit qu'on en retire, & c'ea en eftet un très-bon manger (a). (a) Voyex Frifch, planche ex XV* Nom. Ce feroit ici le lieu de parler du faifan- dindon , qui a tté vu en Angleterre , & dont M. Edwards a donné la defeription & la figure , planche cccxxxvn; mais j'en ai dit mon avis, ci- deffusj à l'article du Dindon. >zr: Pi ■ 711. Pa*. i,tf. LE C O C QIT AIL . 99 OISEAUX ÉTRANGERS Qui ont rapport au Faifan. 3 £ NEPLACEB.AI point , foUS Ce tîtfe , plusieurs oifeaux auxquels la plupart des Voyageurs & des Naturalises ont donné le nom de faifans , & qui fe trouvent même fous ce nom dans nos planches enluminées », mais que nous avons reconnu, après un plus mûr examen , pour des oifeaux d'efpèces fort dirTé rentes. De ce nombre font, i.° le faifan des Antilles de M. Briflbn (a) * qui eft le faifan de l'île Kayriouacôu du P. du Tertre (b) > lequel a les jambes plus longues & la queue plus courte que le faifan : 2.0 Le faifan couronné des Indes (a) Briflbn , Ornithologie , tome I , page 269, ~e géih Efj (b) Voyei ïe P. du Tertre, Hifloire générale des Anàlki, tome J, page 255. l i o 0 Hijloire Naturelle de M. Briffon (c) j qui eft repréfenté fous le même nom * , & qui ditrère du faiftn par fa conformation, totale, par h forme particulière du bec , par Tes mœurs , par fes habitudes , par Tes ailes qui iont plus longues , par fa queue plus^ courte & qui, à fa groiTeur près, paroîc avoir beaucoup plus de rapporr avec le genre du pigeon : 3.Q L'oifcau de l'Amérique *?* que nous avons fait repréfenter fous le nom de faijan huppé de Cayenne j parce qu'il sous ayoit été envoyé fous ce nom \ mais qui. nous paroît différer du faifan par fa arofteur , par le port de fon corps , par ion cou long & menu, fa tête petite, fes longues ailes, &c. 4.0 Le hecco-faifan de la Guiane ***, qui n eft rien moins qu'un faifan , comme il eft aile de s'en convaincre par la corn- paraifon "des figures : \c) Briiïbn, Orniti ologie, tomel, page 279. * Voyez les planches enluminée;, lï«° Iï8f M Koyq WBi û-c 337- des Oifeaux étrangers, &c. i o ï 5.0 Tous ïes autres hoccos d'Àmé~ rique , que M.rs Brîiïbn & Barrcre , & plufieurs autres , entraînés par leurs mé- thodes y ont rapportés au genre du faifan , quoiqu'ils en diffèrent par un grand nombre d'attributs , & par quel- ques-uns même de ceux qui avoient été choifis pour en faire ies cara&ères de ce genre. I. LE FAISAN DORÉ, o u Le TRICOLOR huppé de la Chine. Quelques Auteurs ont donné a cet oifeau le nom de f ai fan rouge (d) s on eût été prefque aufli-bien fondé à ïui donner celui de faifan bleu _, & ces pdeux dénominations auroient été aufïï imparfaites que celle du Faifan doré \ (à) Klein, Ordo Avium , pag, 114. — Aîbin ? tome III , page 15. E iiî I o z Uiftcire Naturelle puifque toutes îes trois , n'indiquant que l'une des trois couleurs éclatantes, qui brillent fur Ton plumage , femblent exclure îes deux autres : c'efl: ce qui m'a donné l'idée de lui impofer un nouveau nom , & j'ai cru que celui de Tricolor huppé de la Chine , le caraclériferoit mieux , puisqu'il pré- fente à l'efprit Tes attributs les plus apparens. On peut regarder ce faifan comme une variété du faifan ordinaire , qui s'eft embelli fous un ciel plus beau; ce font deux branches d'une même famille qui fe font féparées depuis long-temps, qui même ont formé deux races diftinctes , & qui cependant fe reconnoiffent en- core -, car elles s'allient , fe mêlent & produifent enfemble -, mais il faut avouer que leur produit tient un peu de la ltérî-- îité des mulets, comme nous le verrons plus bas -, ce qui prouve de plus en plus l'ancienneté de la féparation des deux races. Le tricolor huppé de la Chine efl plus petit que notre faifan -, & je doi< avertir à cette occafîon que , dans notn des Oifeaux étrangers , &c* roj planche enluminée , n.' 117, on a omis le module , qui doit être de deux pouces neuf lignes. La beauté frappante de cet oifeau îui a valu d'être cultivé & multiplié dans nos faifanderies , où il eft aftez commun aujourd'hui : fon nom de tricoîor huppé indique le rouge , . le jaune -doré & le bleu qui dominent | dans fon plumage, & les longues & | belles plumes qu'il a fur la tête , & qu'il relève> quand il veut, en manière de huppe -, il a l'iris , le bec , les pieds êc les ongles jaunes , la queue plus longue à proportion que notre faifan 3 plus émaiiîée , & en général le plumage plus brillant : au-deflus des plumes de la queue, forcent d'autres plumes longues & étroites , de couleur écarlate , dont îa tige eft jaune-, il n'a point les yeux entourés d'une peau rouge comme le faifan d'Eu tope j en un mot , il paroîc avoir fubi fortement l'influence du climat. La femelle du faifan doré eft un peu plus petite que le mâle , elle a la queue moins longue *, les couleurs de E iy ïC4 Hijtoire Naturelle fon plumage font fort ordinaires , 8c encore moins agréables que celles de notre failane j mais quelquefois elle devient avec le temps auiîi belle que îe maie : on en a vu en Angleterre , chez Miladi EiTex , qui , dans i'efpace de fix ans , avoir graduellement changé fa couleur ignoble de bécaife en la belle couleur du mâle, duquel elle ne Je diftinguoit plus que par les yeux & par la longueur de la queue ( e) : des per- fonnes intelligentes , qui ont été à portée s cTohferver ces cifeaux , m'ont allure que ce changement de couleur avoit lieu dans la plupart des femelles , qu'il commençoit lorfquelles avoient quatre ans , temps où le mâle commençoit auflï à prendre du dégoût pour elles & à les maltraiter -, qu'il leur venoit alors de ces plumes longues & étroites 1 qui , dans le mâle , accompagnent les plumes de la queue *, en un mot, que plus elles avançoient en âge , plus elles devenoient femblabîes aux mâles , comme cela a lieu plus ou moins dans prefque: tous les animaux. (e) ycyei Ed>yïir& ; phncht ixvn. des O [féaux étrangers > &c. i o ^ M. Edwards allure qu'on a vu pa- reillement chez le duc de Leeds, une faifane commune , donc ïe plumage étoit devenu femblable à celui du faifant mâle *, & il ajoute que de tels change- mens de couleurs , n'ont guère lieu que parmi les oifeaux qui vivent dans la domefticité (f). Les œufs de la faifane dorée ref- femblent beaucoup à ceux de ia peïn- tade , 8c font plus petits à proportion que ceux de la poule domeffcique * 8c plus rougeâtres que ceux de nos faifans. Le docleur Hans Sîoane a confervé un mâle environ quinze ans *, il paroîc que c'eft un oifeau robufte , puifqu'il vit il long- temps hors de fon pays 5 il s'accoutume fort bien au nôtre (g)3 êc y multiplie aflez facilement : il mul- tiplie même avec notre faifane d'Europe» M. le Roi , Lieutenant des Chaiîes de Verfailles, ayant mis une de ces faifanes de la Chine avec un coq-faifan (f) Edwards, Glanurcs , Partie IILe page 26$, (gj Ibidem, planche LXVIII. Ev 10 6 Hijioire Naturelle de ce pays-ci , il en a réfulté deux faifans mâles fort reffembfens aux nôtres , cependant avec le plumage mal teint , & n'ayant que quelques plumes jaunes fur la tête comme le faifan de la Chine : ces deux jeunes mâles métis ayant été mis avec des farfanes d'Europe , l'un féconda la Tienne la féconde année, & il en a réfulté une poule faifane , qui na jamais pu devenir féconde -, & les deux coqs métis n'ont rien produit de plus îufqu'à la quatrième année ^ temps où ils trouvèrent le moyen de s'échapper à travers leurs filets. Il y a grande apparence que le tricolor huppé dont il s'agit dans cet article , efl: ce beau faifan dont on dit que les plumes fe vendent à la Chine plus cher que l'oi- feau même (h) ; & que c'eft aufîï celui que Marco-Paolo admira dans un de fes voyages de la Chine , & dont la queue avoit deux à trois pieds de long. (h) Hiftoire générale des Voyages , tome VU page 487. des Oifeaux étrangers, &c. 107 I I. LE FAISAN noir & blanc de la Chine *. La figure de nos planches enlu- minées n'a été defïinée que d'après i'oifeau empaillé , Se je ne doute pas que celle de M. Edwards ( i) s <ïui a été faite & retouchée à îoifîr d'après le vivant , & qui a été recherchée pour les pius petits dérails d'après I'oifeau mort , ne repré- fente plus exactement ce faifan , & ne donne une idée plus jufte de fon port , de Ton air , &c. Il en: aifé de juger , par la feule inf- pection de la ligure , que c'eil une variété du faifan , modelée , pour la forme totale , fur les proportions du trî- color huppé de la Chine -, mais heaucoup * Voye\ les planches enluminées , n.° 12,$..} -Éè mâle; & n.° 124, la femelle. (i) Voyei Edwards , Hifi* Nat. des Oifeaux > planche lxvi. E vj io8 Hijtoire Naturelle plus gros , puifqu'il furpafle même le faifan d'Europe : il a avec ce dernier un trait de refîemblanee hitn remar- quable , c'efl: la bordure rouge des yeux qu'il a même plus large & plus éten- due*, car elle lui tombe, de chaque côté> àu-deflbus du bec inférieur en forme de barbillons, & d'autre part, elle s'élève comme une double crête au-deiïus du bec fupé rieur. La femelle eft un peu plus petite que le mâle, dont elle diffère beau- coup par la couleur j elle n'a ni le defius du corps blanc comme lui , ni le defïous d'un beau noir avec des reflets de pourpre *, on n'aperçoit , dans tout fon plumage, qu'une échappée de blanc au-deflous des yeux-, le refte eft: d'un rouge- brun plus ou moins foncé , excepté fous le ventre & dans les plumes latérales de la queue , où l'on voit des bandes noires tranfveriales fur un fond gris : à tous autres égards , la femelle diffère moins du mâle dans cette race , que dans toutes les autres races de faifan *, elle a , comme lui , une huppe fur la tête 3 les yeux entourés d'une des Oifeaux étrangers , &c. i o 9 bordure rouge , & les pieds de même couleur. Comme aucun Naturalise , ni même aucun Voyageur ,• ne nous a donné le plus léger indice fur l'origine du Faifara noir & blanc, nous fommes réduits fur cela aux feules conjectures : la mienne feroit, que de même que le faifan de Géorgie s'étant avancé vers l'Orient , 8c ayant fixé fon féjour dans ïes pro- vinces méridionales ou tempérées de ïa Chine , eft devenu le tricolor huppé *, ain(î , le faifan blanc de nos pays froids ou de la Tartarie , ayant pane dans les provinces feptentrionales de la Chine , eft devenu le faifan noir & blanc de cet article > lequel aura pris plus de grofTeur que le faifan primitif ou de Géorgie , parce qu'il aura trouvé , dans- ces provinces , une nourriture plus abon- dante ou plus analogue à fon tempé- rament , mais qui porte l'empreinte du nouveau climat dans fon port , fon air3 fa forme extérieure, femblabïe au port 9 à l'air, à la forme extérieure du tricolor huppé de la Chine , & qui a confervé du faifan primitif la bordure rouge des 1 1 o Hi/îoire Naturelle yeux, laquelle même a pris en lui plus d'étendue & de volume , fans doute par les mêmes caufes qui l'ont rendu lui- même plus gros qu'Aidrovande s nommé paon du Japon _> tout en avouant qu'il ne reflembloit à notre paon que pai les pieds & la queue ( d). Je lui ai donné le nom de Spïcifere . à caufe de l'aigrette en forme ^ aép qui s'élève fur la tcte : cette aigretti eft haute de quatte pouces , & paroi émaillée de verd & de bleu ^ le bec ef de couleur cendrée, plus long & plu menu que celui du paon \ l'iris eft jaune & le tour des yeux rouge comme dan (h) Voyei M. F Abbé Prévôt , Hifl. générale & Voyages, tome VI, page 487^ (c) Briffon, Ornithologie, tome I, page 289. (à) Aidrovand. Qrnithol. tom, II , p^g. 35. des Oifeaux étrangers , &c. i i 9 le faifan : les plumes de la queue font en plus petit nombre , le fond en eft plus rembruni Se les miroirs plus grands , mais briîlans des mêmes couleurs que dans notre paon d'Europe •, la diftri- bution des couleurs forme fur la poi- trine , le dos & la partie des ailes la plus proche du dos , des efpèces d'é- ■cailles qui ont différens reflets en difté- £ens endroits , bleus fur la partie des 'ailes la plus proche du dos , bleus & verds fur le dos , bleus , verds & dorés fur la poitrine *, les autres pennes de l'aile font vertes dans le milieu de leur longueur, enfuite jaunâtres, & finirent par être noires à leur extrémité : le îbmmet de la tête & le haut du cou ont ides taches bleues mêlées de blanc fur un fond verdâtre. Telle eft à peu près îa deferiptron qu Aidrovande a faite du mâle, d'après une figure peinte que l'Empereur du |Japon avoit envoyée au Pape -, il ne -dit point s'il étale fa queue comme notre paon *, ce qu'il y a de certain , ceft qu'il ne l'étalé point dans la figure d'Aldrovande > & qu'il y eft même no Hijlcire Naturelle repréfenté fans éperons aux pieds, quoî- qu'Aîdrovande n'ait pas oublié d'en faire paroître dans la figure du paon ordinaire, qu'il a placée vis-à-vis, pour fervir d'objet de comparaifon. Selon cet Auteur , ïa femelle eft plus petite que le mâle , elle a les mêmes couleurs que lui fur îa tête , le cou , la poitrine , ie dos & les ailes j mais elle en diffère en ce qu'elle a le defTous du corps noir, & en ce que les couvertures' du croupion , qui font beaucoup plus courtes que les pennes de la queue , font ornées de quatre ou cinq miroirs aîlez larges , relativement à îa grandeur des plumes : le verd eft la couleur do- minante de îa queue , îes pennes en font bordées de bleu , & les tiges de ces pennes font blanches. Cet oifeau paroît avoir beaucoup de rapport avec celui dont parie Kœmpfer dans fon hiftoire du Japon , fous le nom de f ai fan ( f) ; ce que< j'en (f) «H y a au Japon une efpèce defaifans, qui r> fe diflinguent par ia diverfité de leurs couleurs, p par l'éclat de leurs plumes, «Se par la beauté de »> leur queue, qui égale en longueur la moitié de des Oifeaux étrangers y &c. m j'en ai dit fuffit pour faire voir qu'il y a plulleurs traits de conformité & plu- iieurs traits de diffemblance , foît avec le paon, foîc avec le faifan ; & que par conféquent 5 il ne devoit point avoir d'autre piace que celle que je lui donne ici. I I L I/ÉPERONNIEm Cet oiseau n'eft guère connu que par la figure & la deicnption que M. Edwards a publiées du mâle & de la femelle (g) j & qu'il avoit faites fur ' ïe vivant. Au premier coup d'œil, le mâle ; îa hauteur d'un homme, & qui, par ce mélange « & par une variété charmante des plus belles cou- « [ leurs, particulièrement de i'or & de l'azur, ne <« cède en rien à ceïïe du paon. » Kœmpfer , Hifioire du Japon , tome I , page 112. * Vbye% les planches enluminées , n.os 452 & 493 (s) Edwards , Hifi. nat. ofBirds, planches LX VII &LXIX. Oifeaux j ?0/rce / Z7". 12 2 Hijlcire Naturelle paroît avoir quelque rapport avec îe faifan & le paon*, comme eux, il a la queue longue, il Ta femée de miroirs comme le paon , & quelques Naturalises s'en tenant à ce premier coup d'œil , l'ont admis dans le genre du faifan ( h) • mais quoique , d'après ces rapports fuperficiels , M. Edwards ait cru. pou- voir lui donner ou lui conferver le nom de faifan - paon , néanmoins , en y regardant de plus près , il a bien jugé qu'il ne pouvoir appartenir au genre du failan , i.° parce que les longues plumes de fa queue font arron- dies & non pointues par le bout : 2.° parce qu'elles font droites dans toute leur longueur , & non recour- bées en en bas-, 3.0 parce qu'elles ne font pas la gouttière renverfée par le renverfement de leurs barbes, comme dans le faifan ; 4.0 enfin , parce qu'en marchant , il ne recourbe point fa queue en en haut. Mais il appartient encore bien moins (h) Klein, Ordo Avium , page 114. — Britïbn,, Ornithologia, tome I> page 291, Genre VIÎ, Efpèce 12. des Olfeaux étrangers , &c. 123 à l'efpèce du paon , dont il diffère non - feulement par le rapport de la queue, par la configuration & le nombre des pennes dont elle eft compofée \ mais encore par les proportions de fa forme extérieure , par la groifeur de la tête & du cou, & en ce qu'il ne re- dreffe & n'épanouit point fa queue comme le paon (i) * qu'il n'a au ireu d'aigretre qu'une efpèce de huppe plate, formée par les plumes du fom- met de la tête qui fe relèvent , - 8c dont la pointe revient un peu en avant: enfin le mâle dirïère du coq -paon 8c du coq-faifan, par un double éperon qu'il a à chaque pied*, caractère prefque unique d'après lequel je lui ai donné le nom d'Éperonnier. Ces différences extérieures qui cer- tainement en fuppofent beaucoup d'autres plus cachées, paroîtront aiTez considérables à tout homme de fens , ' (i) M. Edwards ne dit point que cet oifeau fàffe la roue; & de cela feul je me crois en droit de conclure qu'il ne la fait point : un fait auflî coniidérable n'auroit pu échapper à M. Edwards z &, s'il l'eût obfervé , ii ne Pauroit point omis» Fi] ï 2 4 Hijîoire Naturelle Se qui ne iera préoccupe d'aucune mé- thode 5 pour exclure Tcperonnier du nombre des paons 8c des faifans , encore qu'il aie, comme eux, les doigrs féparés, les pieds nus , les jambes revécues de plu- mes jufqu'au talon , le bec en cône courbé, la queue longue & la tête, fans crête ni membrane : à la vérité, je fais tel Méthodifte qui ae pourreit, fans in- eonféquence , ne pas le reconncître pour un paon ou pour un faiian , puifqiul a tous les attributs par lequel ce genre eft caractirifé dans fa méthode ^ mais aufîî un Naturalise , fans méthode 8c fans préjugé, ne pourra le reconnoître pour le paon de la Nature; 8c que s'en-- ïuivra t-ii de-là, iinon que Tordre de la Nature eft bien loin de la méthode du Naturalise? En vain me dira -t- on que puifque l'oileau dont il s'ag;t ici a les princi- paux caractères du genre du faifan , les petites variétés par lefquelles il en diffère , ne doivent point empêcher qi^on ne le rapporte à ce genre j car je demanderai toujours , qui donc ofc (e croire en droit de déterminer ces des Oifeaux étrangers , &c. 1 1 j caractères principaux *, de décider , par exemple, que l'attribut négatif de n'a- voir ni crête ni membrane , foit plus eftentiel que celui d avoir la tête de telle ou telle forme , de telle ou telle groffeur *, & de prononcer que tous les oifeaux qui fe refTemblent par des caractères choifls arbitrairement, doivent auflî fe reffembler dans leurs véritables propriétés? Au refte , en refufant à l'éperonnier le nom de paon de la Chine , je ne fais que me conformer aux témoignages des Voyageurs qui aiîurent que, dans ce vafte pays , on ne voit de paons que ceux qu'on y apporte des autres contrées (k). L'éperonnier a l'iris des yeux jaune; ainh* que l'efpace entre la bafe du hect l'œil 8c le bec fupérieur rouge , l'infé- rieur brun -foncé & les pieds d'un brun- fale : fon plumage eft d'une beauté admirable -, h queue eft , comme fe l'ai dit, femée de miroirs ou de taches brillantes , de forme ovale , & d'une (k) Navarette, Deftriftion de la Chine* p. 43 Fiij 1 1 6 Hijîoire Naturelle belle couleur de pourpre avec des reflets bleus, verds & or-, ces miroirs font d'au- tant plus d'erfet, qu'ils font terminés & détachés du fond par un double cer- cle ^ l'un noir & l'autre orangé-obfcur : chaque penne de la queue a deux de ces miroirs accolés l'un à l'autre , la tige entre deux -, & malgré cela , comme cette queue a infiniment moins de plumes que celles du paon , elle eft beaucoup moins chargée de miroirs ; mais en récompenfe , l'éperonnier en a une très -grande quantité fur le dos; & fur les ailes , où le paon n'en a point du tout -, ces miroirs des ailes font ronds*, «Se comme le fond du plumage- eft brun, on croiroit voir une belle peau de martre zibeline enrichie de îaphirs , d'opales, d'émeraudes & de topafes. Les plus grandes pennes de l'aile n'ont point de miroirs , toutes les autres en ont^ chacune un, & quel qu'en foit l'éclat,, leurs couleurs, foit dans les ailes, foit" dans la queue, ne pénètrent point jufqu'à l'autre furface de la penne, dont le def- fous eft d'un fombre uniforme. des Oi/èaitx étrangers y&c. 127 Le mâle furpaiTe en groiîeur îe faifan ordinaire-, la femelle eft d'un tiers plus petite que le maie, & paroît plus leite & plus éveillée*, elle a, comme lui, Tins jaune, mais point de rouge dans le bec^ 8c la queue beaucoup plus petite : quoi- que les couleurs approchent plus de celles du mâle que dans Teipèce des paons 8c des faifans, cependant elles font plus niattes, plus éteintes, & n'ont point ce ïuflre, ce jeu, ces ondulations de lu- mière qui font un ii bel étiez dans les mi- roirs du mâle ( l ). Cet oifeau étoit vivant à Londres, Y année dernière , d'où M. le chevalier Codrington en a envoyé des deiîins coloriés à M. . Daubenton le jeune, d'après lefquels nous avons fait graver 8c enluminer les planches n.os 492 & 49 3 , dont le premier repréfente le maie , 8c le fécond la femelle de cet oifeau. (I) Voy&i Edwards y planches UCV.ll & IXIX» F iv 128 Hijîoire Naturelle LES HOCCOS. lous les oifeaux , que Ton défîgne ordinairement fous cette dénomination prife dans une acception générique , font étrangers à l'Europe , & appar- tiennent aux pays chauds de l'Amé- rique, les divers noms que les différentes tribus de fauvages leur ont donnés, chacune en fon jargon , n'ont pas moins contribué à enfler la lifte , que les phrafes multipliées de nos Nomen- cîateurs, & îe vais tâcher, autant que la difette d'obfervations me le permettra, de réduire ces efpèces nominales aux ef-. pèces réelles. Le HOCCO , proprement dit*. Planches IV & v de ce volume. Je comprends fous cette efpèce 5 * Voyt\ Us flanches enluminées , n,os 86 & 125- des Oifeaux étrangers-, &c. 129 non-feulement le mîtou & le mitou- poranga de Marcgrave que cet auteur regarde en effet comme étant de la même efpèce (a) ; le coq-indien de M.rsde l'Académie (b) ^ êc de plufieurs autres (c) > le mutou ou moytou de Laet (d) & de Léry (e) > le témo- cholii des Mexicains 5 & leur tepeto- tolt ou oifeau de montagne (f)> les quirizao ou curaiïb de la Jamaïque (g) _, ie pocs de Frifch (h) , le hocco^ de fa,) Marcgrave , HiJIoria Naturalis Brajiiienfis ? ïib. V, cap. ni , page 195. (h) Mémoires de l'Académie Royale des Sciences T tome III partie I ' , page 221. (c) Longolius, Dialogus de Avibus. — Gefner,, de Avibus, Iib„ III.. — Aldrovande, Grnithologia ? ïib. XIV, cap." XL , &c. (d) Laè't, Novus orbis , page 615.- fej Léry, Voyage au Bréjïl , page 173- (f) V'oyei Fernandez, HiJIoria Ad. nov. Hifp, cap. ci y page 35. (g) Hijloire Naturelle de la Jamaïque, par l& Chevalier Hans Sîoane, page 302. (kj Frifcb ? planche cxxi, F v 150 HiJIoire Naturelle Cayenne de M. Barrère (i) > le hocco de la Guîane ou douzième faifan de M. BriiTon ( k) ; mais j'y rapporte en- core comme variétés ie hocco du Brefil ou onzième faifan de M. Brifïon (l)\ fon hocco de Curafïou, qui eft Ton treizième faifan f/ra^ j le hocco du Pé~ rou*, & même la poule rouge du Pérou d'Albin fn)j le coxolifli de Fer- nandez ^o^j & le feizième faifan de M. BrhTon (p ). Je me fonde fur ce que cette multitude de noms défigne (i) Barrére , Onnthologiœfpacîmen , pag. 82 oc 83 ; S3 France Équinoxiale , jeags 140. ^X-^ BriiTon, Ornithologie, tome I , page 298. (I) Ibidem , page 296. (m) Ibidem, page 300. '* Voyelles planches enluminées , n.° 125. (n) Aibin, ÏK/?. jVdtf. &$ Oi féaux, tome III, flanche xl, « Elle eft de la même grandeur & » figure que la pouïe de Carafoxif tome II, planches » xxxi & xxxii J, & paroît être de la même eîpèce : » c'eft ainfi que parle Albin , qui a eu l'avantage de defiiner ces deux oifeaux vivans. (0) Fernandcz, Ilift. Avium, cap. XL, p. 23. (j) Briffon , Ornithologie } tome I , page 305. dès Oifeaux étrangers, &c. i 3 1 des oifeaux qui ont beaucoup de qua- lités communes , & qui ne diffèrent entr'eux que par la distribution des couleurs , par quelque diverfité dans la forme & les accefïoires du bec , Se par d'autres accidens, qui peuvent va- rier dans la même efpèce à raifon de l'âge , du fexe , du climat, & fur -tout dans une efpèce auffi facile à appri- voifer que celle-ci, qui même Ta été en plulieurs cantons, & qui, par con- féquent, doit participer aux variétés auxquels les oifeaux domefliques font fi fujets^;. ;V"',K . M,rs de l'Académie avoient ouï dire que leur coq indien avoit été apporté d'Afrique , où il s'appeloit ano ( r ) : mais , comme Marcgrave Si plufieurs autres Obfervateurs nous apprennent que c'eft un oifeau du Bre(il, Se que d'ailleurs on voit clairement en com- fq) Le Chevalier Hans Sloane dit précifément que leur plumage varie de différentes manières, comme celui de notre voïaiïfe ordinaire, tome II y page 302, planche cclx. (r) Mémoires de VA£'àd.émie? tome III, partie /,. page 223, F vj 132 HiJIoire Naturelle parant les defcriptions & les figures les plus exactes, qu'il a les ailes courtes 6c le vol pefant , il eft difficile de fe perfuader qu'il art pu traverfer d'un feul vol la varie étendue des mers, qui féparent les côues d'Afrique de celles du Brelil , & il paroit beaucoup plus naturel de fuppofer que les fujets ob- fervés par M.rs de l'Académie 5 s'ils étoient réellement venus d'Afrique , y avoient été portés précédemment du Brelil ou de queîqu'autre contrée du nouveau monde. On peut juger , d'après les mêmes raifons, ri la dénomination- de coq de Perfe , employée par Jonf- îon , eft applicable à l'oifeau dont il s'agit ici ( f). Le hocco approche de îa grolTeur du dindon ^ l'un de Ces plus remar- quables attributs, c'eft une huppe noire, êc quelquefois noire Se blanche, haute de deux à trois pouces , qui s'étend depuis l'origine du kec jufque derrière la tête , &z que l'oifeau peut coucher (f) Jomuv. J'appelle Cog de Perfe , difent M.* de i'Àcadémie , tome 111, partie l,jpage 223. des Oi féaux étrangers, &c> i 3 5: en arrière & relever à Ton gré, félon qu'il eft affe&é différemment : cette huppe eft compofée de plumes étroites comme étagées , un peu inclinées en arrière , mais, dont la pointe revient 8c fe courbe en avant. Parmi ces plumes, M." de l'Académie en ont remarqué plusieurs dont les barbes étoient ren- fermées jufqu'à la moitié de la longueur de la côte, dans une efpèce d'étui membraneux (t), La couleur dominante du plumage eM: le noir, qui, le plus fouvent, eO: pur & comme velouté fur la tëze Se fur le cou , & quelquefois femé de mouchetures blanches -, fur le refte du corps , il a des reflets verdâtres , &, dans quelques fujets, il fe change en mar- ron-foncé, comme celui de la planche [enluminée n.° 125. L'oifeau repréfenté dans cette planche n'a point du tout de blanc fous le ventre ni dans la queue, au lieu que celui de la planche , - n? 86, en a fous le ventre & au bout (t) Mémoires de l'Académie Ttom III, partie ty, page 221. 134 JJifioire Naturelle de îa queue -, enfin d'autres en ont fous le ventre & point à la queue, & d'autres en ont à la queue & point fous le ventre, & il faut fe fouvenir que ces couleurs font fujettes à varier, Toit dans ïeurs teintes, foit dans leur diftribution, félon la diffé- rence' du fexe. Le bec a îa forme de celui des gal- linacés, mais il eft. un peu plus fort-, dans les uns, il eft couleur de chair & blanchâtre vers la pointe, comme dans le hocco du Brefil de M. Brilîon -, dans les autres , le bout du bec fupérieur eft échancré des deux côtés , ce qui le fait paroîure comme armé de trois pointes , la principale au milieu , & les deux latérales formées par les deux échancrures un peu reculées en arrière, comme dans l'un des coqs indiens de M.rs de l'Académie (u); dans d'autres, il eft recouverr à fa bafe d'une peau jaune , où font placées les ouvertures des narines comme dans le hocco de la Guiane de M. Briiïon ( x ) ; dans (u) Mémoires de L'Académie , tome. III , partit I » page 225 ; & dans la ligure (c) de îa pi. x X XI s . (x) Briflbn, Ornithologie , page 298. des Oïfeaux étrangers, &c. 135 «3'autres, cette peau jaune Te prolongeant des deux cotés de la tête , va former autour des yeux un cercle de même couleur, comme dans le mitou-poranga de Marcgrave (y) ; dans d'autres, cette peau fe renfle fur la bafe du bec fu- périeur en une efpèce de tubercule ou de bouton arrondi arTez dur , & gros comme une petite noix. On croit com- munément que les femelles n'ont point ce bouton , 8c M. Edwards ajoute qu'il ne vient aux mâles qu'après la première année (\) , ce qui me paroît d'autant plus vraisemblable que Fer- nandez a obfervé, dans fon tepetototl, une efpèce de tumeur fur le bec , la- quelle n'étoit fans doute autre chofe que ce même tubercule qui commen- çoit à fe former (a) ; quelques individus, comme le mitou de Marcgrave , ont une peau blanche derrière l'oreille (y) Marcgrave , Hiftoria Avliun Brafil. p. 195. ( Z J Voyez Edwards , Hifloire, Naturelle des Oi- feaux rares, planche CCXCV. (a) Femandez, Hiftoria Avu nop: Uïfyaniœ, cap. Cl, page 35. i 3 6 Uîjloire Naturelle comme les poules communes*, îes pieds reilembleroient pour la forme à ceux des gallinacés s'ils avoient l'éperon, & s'ils n'étoient pas un peu plus gros à proportion -, du refte , ils varient pour la couleur depuis le brun noirâtre jus- qu'au couleur de chair (b). Quelques Naturaliftes ont voulu rap- porrer le hocco au genre du dindon*, mais il eft facile, d'après la defcription ci-deffus , & d'après nos planches enluminées, de recueillir les différences! nombreufes & tranchées qui féparent ces deux efpèces*: le dindon a ia tête petite & fans plumes, ainiî que le haut du cou, le bec furmonté d'une caron- cule conique & mufculeufe 9 capable d'exten/ion 8c de contraction , îes pieds armés d'éperons, & il relève les plumes de fa queue en faifant la roue , &c. au lieu que le hocco a la tête grofîe, le cou renfoncé, l'un & l'autre garnis de plumes , fur le bec un tubercule" rond , dur & prefque ofieux , & fur (h) Voyez la planche ccxcv à "Edwards. * Voye\ les planches enluminées .. ruos 86 & j 25, des Oifeaux étrangers 3 &c. 137 îe fommet de la tête une huppe mobile qui paroît propre à cet oifeau, qu'il baille & redreiTe à Ton gré-, mais perfonne n'a jamais dit qu'il relevât les pennes de la queue en faifant la roue. Ajoutez à ces différences, qui font routes extérieures , les différences plus profondes & tout aufïï nombreufes que nous découvre la direction. Le canal inteftinal du hocco eft beaucoup plus long , & les deux cœcum beaucoup plus courts que dans le din- don, fon jabot "eft auffi beaucoup moins ample, n'ayant que quatre pouces de tour: au lieu que j'ai vu tirer du jabot d'un dindon , qui ne paroiflbit avoir rien de Singulier dans fa conformation, ce qu'il falloir d'avoine pour remplir une demi-pinte de Paris , outre cela , dans le hocco , la fubflance charnue du géiier eil le plus fouvent fort mince , & fa membrane interne au contraire , fort épaiiTe 8c dure au point d'être eaf- fante -, enfin la trachée-artère fe dilate & fe replie fur elle - même , plus ou 138 H:jioire Naturelle moins vere, le milieu de la fourchette (c ) 3 comme dans quelques cil eaux aqua- tiques, tomes choies fort différentes de ce qui fe voit dans le dindon. Mais fi le hocco n'eft point un din- don , les Nomenclareurs modernes étoient encore moins fondés à en faire- un faifan-, car, outre les différences qu'il eft faciie de remarquer, tant au-dehors qu'au -dedans , d'après ce que je viens de dire, j'en vois une dèciCwc d;ns le naturel de ces animaux : le faifan eft toujours iauvage , & quoiqu'élevé de jeuneiîe, quoique toujours bien traité, bien nourri, il ne peut jamais fe faire à la domefticité*, ce n'eft point un do- meftique , c'eft un prisonnier toujours, inquiet , toujours cherchant les moyens d'échapper, & qui maltraite même les compagnons d'elclavage , fans jamais faire aucune fociété avec eux -, que s'il recouvre fâ liberté , & qu'il foit rendu à l'état de fauvage pour lequel il femble (c) Voyei Méra. de l'Acad. tome III, /. 22U p fui van us des Oifeaux étrangers y &c. i $y être fait , rien n'eft encore plus déliant & plus ombrageux, tout objet nouveau lui eft fufpedfc, le moindre bruic l'ef- fraie , le moindre mouvement l'inquiète *, l'ombre d'une branche agitée fuftit pour lui faire prendre fa volée , tant il eft. attentif à fa confervation : au contraire, îe hocco eft un oifeau paiMble , fans défiance , & même ftupide , qui ne voit point le danger, ou du moins qui ne fait rien pour l'éviter ^ il femble s'oublier lui-même , & s'intérefler à peine à fa propre exiftence. M. Àublet en a tué jufqu'à neuf de la même bande, avec le même fufil qu'il rechargea au- tant de fois qu'il fut néce flaire *, ils eurent cette patience : on conçoit bien qu'un pareil oifeau eft fociable , qu'il s'accommode fans peine avec les autres oifeaux domeftiques , & qu'il s'apprï- voife aifémentj quoïqu'apprivoifé il s'é- carte pendant le jour, & va même fort loin , mais il revient toujours pour coucher, à ce que m'aflure le même M, Aublet ; il devient même familier au point de heurter à la porte avec fon bec pour fe faire ouvrir, de tirer les i 40 Hijloire Naturelle domeftiques par l'habit ïorfqu'ils Feu- blienc , de fuivre Ton maître par-tout, &r s'il en eft empêché , de l'attendre avec inquiétude , & de îuî donner à. fon retour des marques de la joie la plus vive ('V^. ÎI eft difficile d'imaginer des mœurs: plus oppofées -, & je doute qu'aucun Naturalise , Se même qu'aucun No- menclaceur s'il les eût connus , eût entrepris de ranger ces deux oifeaux fous un même genre. Le hocco fe tient volontiers fur les montagnes , Ci l'on s'en rapporte à la lignification de fon nom Mexicain tepetotolt j qui veut dire oifeau de mon- tagne (e) : on le nourrit, dans la volière, de pain , de pâtée & autres chofes femblabîes (f) ; dans l'état de fauvage, les fruits font le fonds de fa fubiiftance : il aime à fe percher fur les arbres , fur-tout pour y paûer la nuit : il vole (à) Fernandez, Hifioria Avium nov, Hijfania, cap. cie (e) Idem, Ibidem. (f) Ibidem* Pl.ir- pag. i4< LE HOCCO MALE n.IK PL PTPaa.J^t des Oifeaux étrangers , &c. 1 4 1 pefamment, comme je l'ai remarqué plus haut , mais il a îa démarche ftère (g) : fa chair efr. blanche , un peu sèche, cependant îorfqu'eîîe eft gardée fuffifani- ment, c'eft un fort bon manger (h). Le chevalier Hans Sloane dit , en parlant de cet oifeau , que fa queue n'a que deux pouces de long (i) • fur quoi M. Edwards le relève , & prétend qu'en difant dix pouces au lieu de deux, M. Hans Sioane auroit plus approché du vrai (k) ; mais je crois cette cenfure trop générale Se trop ab- folue ; car je vois Aîdrovande qui, d'après le portrait d'un oifeau de cette efpèce, afïiire qu'il n'a point de queue (l) ; & de l'autre , M. Barrère qui rap- porte , d'après fes propres obfervations faites fur les lieux , que la femelle de (S) ïr°yel Barrère , France Équinoxiale , p. 139, (h.) Fernandez, Marcgrave & les autres. (i) Hans Sloane, Hiji. Nat, de la Jamaïque, tome II, page 302. (k) Edwards, Glanures , page 182. (IJ Aidrovand, OfnMolog. tom. II 3 pag. 332. 142 Uijîoire Naturelle Ton hocco des Amazones, qui eft le hocco de curafibu de M. Britlon, a la queue très-peu longue ( m) ; d où il s'enfuivrott que ce que le chevalier Hans Sloane die trop généralement du hocco, doit être reftremt à la feule femelle, du moins dans certaines races. I I, Le PAV XI ou le PIERRE*. Nous avons tait repréfenter cet M feau fous ie nom de Pierre de Cayenne ; & c eft en effet le nom qu'il portoit à la ménagerie du Roi, où nous l'avons fait defimer d'après le vivant : mais, comme il porte dans ion pays, qui eft le Mexique, le nom de pauxi , félon Fernandez (n)> nous avons cru devoir l'indiquer fous ces deux noms -, c eft ie (m) Barrère, Novum, Ornithol. fpeclmen , p. 83.: * Voyez les planches enluminées, n.° 78. i (n) Fernandez , Hiftoria Av'u nov. HiJpaJii*. cap, CLXXii. des Oifeaux étrangers ; &c, 145 quatorzième faifan de M. BriiTon, qu'il : appelle hocco du Mexique. Cet orfeau refïèmbie à plufieurs : égards au hocco précédent , mais il : en diiîère suffi en plufieurs points*, il \ na point , comme lui, la tête furmontée d'une huppe , le tubercule qu'il a fur ' ïe hec eft plus gros , fait en forme de j poire. & de couleur bleue. Fernandez dit que ce tubercule a la dureté de la pierre, & je foupçonne que c'en: de- là qu'eft venu au pauxi le nom d'oifeau à pierre, enfuïte celui de pierre, comme il a pris le nom de c#/a> ou de cushew blrdj & celui de poule Numidique de ce même tubercule, à qui les uns ont. trouvé de la reiTemblance avec la noix i d'Amérique appelée cufco ou cushew fojj & d'autres avec le cafque de la, peintade (/> ,). Quoi qu'il en foit, ce ne font pas-là les feules différences qui diftinguent le pauxi des hoccos préeédens j il eft plus (0) Voye\ Edwards , planche ccxcv. (?) Voyel Aldrovande, Ornithologia, tom. II3 page 234. 1 4 4 Hijioire Naturelle petit de taille, Ton bec eft plus fort,, plus courbé & prefque autant que celui d'un perroquet -, d'ailleurs il nous eft beaucoup plus rarement apporté que le hocco-, M. Edwards, qui a vu ce dernier dans prefque toutes les ména- geries, n'a jamais rencontré qu'un feul cufco ou pauxi dans le cours de Tes recherches (q) Le beau noir de Ton plumage a des reflets bleus & couleur de pourpre , qui ne par Giflent ni ne pourroient guère paroître dans la figure. Cet oifeau fe perche fur les arbres mais il pond à terre comme les faifans, mène fes petits & les rappelle de même : ïes petits vivent d'abord d'infectes, &> enfuite, quand ils font grands, de fruits, de grains 8c de tout ce qui convient à la volaille (r). Le psuxi eft aufîi doux , & fi l'on veut auiïï ftupide que les autres hoccosj car il fe biffera tirer jufquà fix coups (q) Voy^i Edwards , Bifloire Naturelle, des 01 féaux rares, planche CCXCV. (r) M. Aubïet. — Fernandez?^rtge 56. de des Oifeaux étrangers , &c. 145 de fufîï fans fe fauver , avec cela il ne fe laitfe ni prendre ni toucher, félon Fernandez (f) ; &" M. Aublec rn allure qu'il ne fe trouve que dans les lieux inhabités 5 c eft probablement Tune des caufes de fa rareté en Europe. ^ M. BrhTon dit que la' femelle ne diffère du mâle que par les couleurs, ayant du brun par- tout où ceïui- ci a du noir , & qu'elle lui e& fembïable dans tout ie refte (g) : mais Aldro- vande , en reconnoiiïânt que le fond de fon plumage en: brun , remarque qu'elle a du cendré aux ailes & au cou , ïe bec moins crochu , & point de queue (h) ; ce qui feroit un trait de conformité avec le hocco des Amazones de Bar- rère, dont la femelle , comme nous l'avons vu.,, a la queue beaucoup moins longue que le mâle fi)\ & ce'ne font pas les feuîs oifeaux d'Amérique qui (f) Fernandez , page 156". (g) Briffon, Ornithologie, tome I, page 303. (h) Voyei Aldrova.ide , Orn ithologia, tom II P"g-334' _j (ï) Barrère, Kov. Omith. fpecimsn, pàg: 82, ' Oifeaux j Tome iy\ G 146 Hljhire Naturelle n'aient point de queue j il y a même tel canton de ce continent , où les poules , tranfportées d'Europe , ne peuvent vivre long -temps fans perdre leur queue & même leur croupion, comme nous l'avons vu dans l'hiiloire du coq. I I I. V BOA Z I N *. Cet oiseau eft repréfenté dans nos planches enluminées , Tous le nom de Faifan huppé de Cayenne _> du moins il n'en diffère que très - peu , comme on peut en juger , en comparant notre planche 357 à la defeription de Her- nandez. Selon cet Auteur , l'hoazin n eft pas tout- à -fait auffi gros qu'une poule d'Inde 5 il a le bec courbé , la poi- trine d'un blanc -jaunâtre , les ailes & la queue marquées de taches ou raies blanches , à un pouce de diftance les unes des autres , le dos , le deflus du * Voye\ les planches enluminées, n.° 337. des Qifeaux étrangers , &c. 1 4 7 cou , les côtés de la têce d'un fauve- brun -, les pieds de couleur ohfcure : il porte une huppe , compofée de plumes blanchâtres d'un coté, & noires de l'autre •, cette huppe efl: plus haute & d'une autre forme que celle des hoccos , & il ne paroît pas qu'il puifle la bailler 8c la relever à fon gré -, il a aufîi la tète plus petite 8c le cou plus grcle. ' Sa voix eft très - forte , 8c c'eft moins un cri qu'un hurlement : on dit qu'il prononce fon nom , apparemment d'un ton lugubre & effrayant \ il n'en falloir, pas davantage pour le faire palier, chez des peuples greffiers , pour un oifeau de mauvais augure •, 8c , comme par- tout on fuppofe beaucoup de puiiTance à ce que l'on craint , ces mêmes peuples ont cru trouver en lui des remèdes aux maladies . les plus graves *, mais on ne dit pas qu'ils s'en nourrirent j ils s'en 1 abftiennent en effet , peut-être par une I fuite de cette même crainte , ou par répugnance , fondée fur ce qu'il fait fa pâture ordinaire de ferpens: il fe tient communément dans les grandes forêts 3 G i j ï 4 8 Hijloire Naturelle perché fur les arbres le long des eaux > pour guetter & furprendre ces reptiles» II Te trouve dans les contrées les plus chaudes du Mexique -, Hernandez ajoute qu il paroît en automne , ce qui feroic foupçonner que ceft un oifeau de paf- fage (a). M. Aublet rn'aiTure que cet oifeau , cuil a reconnu facilement fur notre planche enluminée , n.° 337, s'appri- voife -, qu'on en .voit par fois de do- (a) Voyez Hernandez, lib. IX, cap. x , p. 320. demandez parle d'un autre oifeau , auquel il donne >ïe nom à'hoaiïn, quoique, par fôn récit même, il foiî très - différent de celui dont nous venons de parler ; car , outre qu'il eft plus petit , fon chant eft fort agréable , & refiemble quelquefois à l'éclat de rire d'un homme , & même à un rire moqueur; & l'on mange fa chair , quoiqu'elle ne foitni tendre ni de bon goût: au refte , c'eft un oifeau qui ne s'apprivoife point. Voyez Hiftoria Avî. nov. Hifp, cap. lxi ,pag. 27. Je retrouverois bien plutôt l'hoafm dans un autre oifeau dont parle le même Auteur au chapitre cèxxïrr, page 57 , à la fuite du pauxï; voici fes termes : Alia avis Pauxi anmâîciida Ciconiec mûgnitudine , evior; cinerco , criflà 080 uncias longâ è multil àg'geratâ plumh . . . in amplitudiiicm orbicula- v.im pmeipue circa fummum dilatatis. Voilà bien la, Êinppe de i'hoazin , & fa taille, des Olfeaux étrangers , &c. i 49 rtieftiques chez les Indiens, & que îcs François les . appellent des paons : ils nourrirent leurs petits de fourmis 5 de vers & Vautres infedtes. I V, V YACO V. Cet oiseau s'eft nommé lui-même \ car Ton cri , félon Marcgrave , eft yacou ^ d'où lui eft venu le nom d'iacupema : pour moi , j'ai préféré celui d'Yacou , comme plus propre à le faire recon- naître routes les fois qu'an pourra le voir & l'entendre. Marcgrave eft le premier qui ait parlé de cet oifeau (a) ; quelques Na- turalistes , d'après lui , Font mis au nombre des faifans (b ) ; & d'autres , (a) Voyei Marcgrave , Hijloria Avium Brafil lib. V , cap. v , pag. 198. (b) Klein , Ordo Avium , pag. 114 , n.° 2, -—Ray, Synojfjfl AvU pag. 56 ? &c. G iij i j o Hijîoire Naturelle tels que M.rs Brifïbn (c) & Edwards (d) y l'ont rangé parmi les dindons -, mais il n'eit ni l'un ni l'autre : il n'eft point un dindon, quoiqu'il ait une peau rouge fous le cou 5 car il en diffère à beau- coup d'autres égards , & par fa taille , qui eft à peine égale à celle d'une poule ordinaire , & par la tète , qui eft en partie revêtue de plumes , & par fa huppe qui approche beaucoup plus de celle des hoccos que de celle du dindon huppé , & par Tes pieds , qui n'ont point d'éperons \ d'ailleurs on ne lui voit pas au bas du cou ce bouquet de crins durs , ni fur le bec cette caroncule mufculeufe qu'a le coq d'Inde , & il ne fait point la roue en relevant les plumes de fa queue : d'autre part , il n'eft point un faifan -, car il a le bec grcie 8c alongé , la huppe des hoccos, le cou menu , une membrane charnue fous la gorge , les pennes de la queue toutes égales , & le naturel doux & (c) BrilTon , Ornithologie, tomel, page 162. (d) Edwards, Hijîoire Nat. des Oi féaux rares , planche xm. des Oïfeaux étrangers , qui conjecture qu'elle n'a point de huppé (a) : d'après cette indication unique , & d'après la coinparaifon des figures les plus; exactes , Se des oifeaux eux-mêmes con- fervés , je foupçonne que celui que nous avons fait repréi enter * , fous ie nom de Faifan verdâtre de Cayenne _, & qu'on appelle communément Maraïl dans cette lie , pourroit être la femelle, ou du moins une variété de l'efpèce de l'yacou *, car Y y retrouve plufieurs rapports mar- qués avec. le guan de Ai. Edwards* ( planche Xlll ) 3 dans la grofTeur , la couleur du plumage , îa forme totale 5 à la huppe près que îa femelle ne doit point avoir } dans le port du corps 3 la (a) Edwards, Hijloire Nai. des Oifeaux rares- ? page 13. * Voyelles phmhe$ enluminées , n.° 338* G Y i j 4 HiJIoire Naturelle longueur de la queue , le cercle de peau roufte autour des yeux (h ) 3 l'efpace rouge & nu fous la gorge > la conforma- tion des pieds & du bec , &c. j'avoue que j'y ai aufli aperçu quelques différent ces *, les pennes de la queue font en tuyaux d'orgue , comme dans le faifan , & non point toutes égaies, comme dans le guan d'Edwards , & les ouvertures des narines ne font pas fi près de l'origine du bec : mais on ne feroit pas embarrailë de citer nombre d'efpèces, où la femelle diffère encore plus du maie , & où il y a des variétés encore plus éloignées les unes des autres. M. Aublet , qui a vu cet oifeau dans fon pays natal , m'aflure qu'il s'appri- voife très- aifément , & que fa chair ell délicate & meilleure que celle du faifan , en ce qu'elle elt plus fuccu- îente : il ajoute que c eft un véritable dindon j mais feulement plus petit que (b) Cette peau nue eu- bleue dans Pyacou, & ïouge dans le marail ; mais nous avons déjà obfervé la même variation de couleur d'un fexe à l'autre 3 dans les membranes charnues de ia peintade. des O if eaux étrangers , &c. i 5 5 celui qui s'efl: naturalifé en Europe, & c'efl: un trait de conformité de plus qu'il a avec l'yacou , d'avoir été pris pour un dindon. Cet oifeau Te trouve non-feulement à Cayenne , mais encore dans les pays qu'ar- rofe la rivière des Amazones , du moins à en juger par f identité de nom ; car M. Barrère parle d'un marail des Amazo- nes , comme d'un oifeau dont le plumage eft noir , le hsc verd , & qui n'a point de queue (c) : nous avons déjà vu, dans l'hiftoire du hocco proprement dit, & du pierre de Cayenne , qu'il y a voit , dans ces efpèces , des individus fans queue , qu'on avoir pris pour des femelles ; cela feroit-il vrai aufîi des maraiîs? Sur la plupart de ces oifeaux étrangers , & ii peu connus , on ne peut , ii on en: de bonne foi , parler qu'en héritant & pau conjecture. ( c) Pkafîanus , niger, aburus , vlvidi rojlro. France Equin. page 139. Nota. Je crois que cet Auteur a entendu , par le mot ïatîn barbare , aburus , fans queue ; ou qu'il aura écrit aburus au lieu de abrutus , qui , comme émus , pourrait fignifier arraché ? tronqué. Gvj i ; 6 }JiJïoire Naturelle V I. LE CA RA CA RA. J'appelle ainii, d'après Ion propre cri , ce bel oiieau des Antilles, dont le P. du Tertre a donné la defcription (a) ; fî tous les oifeaux d'Amérique , qui onc été pris pour des faifans , doivent fe rapporter aux hoccos , le Caracara doit avoir place parmi ces derniers j car les François des Antilies , & , d'après eux r le P. du Tertre, lui ont donné le nom de fàifàn : « Ce faifan , dit -il , eft un @i fort bel oifeau, gros comme un cha- w pon (b ) j plus haut monté , fur des » pieds de paon -, il a le cou beaucoup »plus long que celui d'un coq , 8c a» le bec & la tête approchant de ceux 3> du corbeau -, il a toutes les plumes (a) Le P. du Tertre , Hifioire générale des An- tilles, tome II, traité "v, §. \ui. (b) Comment le P. du Tertre, en parlant des oifeaux de cette grofîeur, a-t-il pu les délîgner fous le nom de cci tains petits oifeaux, comme il le fait a Y adroit cité, page. 255 ? des Oijeaux étrangers , &c. r j 7 du cou & du poitrail d'un beau « bleu-Luifant , & auffi. agréable que ce les plumes des paons , tout le dos ce eft d'un gris-brun , Se les ailes & la ce queue, qu'il a aiTez courtes 3 font ce noires. es Quand cet oifeau eft apprîvoifé j « il fait le , maître dans la maifon , & es en chaflTe , à coups de bec , les poules- ce d'Inde Se les poules communes , Se ce les tue quelquefois j il en veut même ce aux chiens 5 qu'il béque en traître ..... & J'en ai vu un...-, qui étoir ennemies mortel des Nègres , & n'en pouvoit«s fourrrir un feul dans la cafe qu'il ne ce béquât 5 par les jambes ou par les ce pieds, juiqu'à en faire fortir le fang. »■ Ceux qui en ont mangé , m'ont afiuré- que fa chair eft auiïi bonne que celle des faifans de France. Comment M. Ray a-t-iî pu "' foup- conner qu'un tel oifeau fût l' oifeau de- proie dont parle Marcgrave- , fous le même nom de caracara (c) ; il eft vrai qu'il fait la guerre aux poules -, mais - ; (c) Marcgraye y ffifî. Avium Brafil. pag. 21-ïi. i j 8 Hijloïre Naturelle c'ell feulement lorsqu'il eft apprivoifé , & pour les chafler , en un mot , comme il fait aux chiens & aux Nègres : on reconnoît plutôt à cela le naturel jaloux d'un animal domeftique , qui ne fou rire point ceux qui peuvent partager avec lui la faveur du maître , que les mœurs féroces d'un oifeau de proie , qui fe jette fur les autres oifeaux pour les déchirer 8c s'en nourrir : d'ailleurs il n'eft point ordinaire que la chair d'un oifeau de proie foit bonne à manger , comme l'eft celle de notre caracara : enfin il paroît que le caracara de Marcgrave a la queue & les ailes beaucoup plus longues à proportion , que celui du P. du Tertre. V I I. L E C HA CA ME L. FernAndez parle d'un oifeau, quij eft du même pays , & à peu près de] la même groileur que les précédens J & qui fe nomme, en langue Mexicaine . Chackalacamelt.j d'où j'ai formé le nom' de Chacamel , afin que du moins or. des Oifeaux étrangers > &c. 159 puiGTe le prononcer : fa principale pro- priété eft d'avoir le cri comme la poule ordinaire , ou plutôt comme piufïeurs poules -, car il eft , dît - on , (î fort & (î continuel , qu'un feul de ces oifeaux fait autant de bruit qu'une bafïe - cour en- tière ', & c eft de - là que lui vient fon nom mexicain , qui fîgnifie oifeau criard : il eft brun fur le dos , blanc tirant au brun fous le ventre , & le bec & les pieds font bleuâtres. Le chacamel fe tient ordinairement fur les montagnes , comme la plupart des hoccos , Se y élève fes petits (a), V ï I I. L E PA RRA KA Et l'HOITLALIOTL. . Autant qu'on peut en juger, par | ïes indications incomplètes de Fernandez | & de Barrère 3 on peut , ce me femble , ? rapporter ici , 1 .° le Parraka du dernier (a) Voyei Fernandez , Hift. Avi. nov. Hiftania 9 i cap. xli. i 6o Hijîoire Naturelle qu'il appelle faifan _> & dont il dit que ies plumes de la têce font de couleur fauve , & lui forment une efpèce de huppe (a) ; i.° l'hoitlaliotl ou oifeau long du premier ( b ) _> lequel habite les plus chaudes contrées du Mexique *, cet oifeau a la queue longue , les ailes courtes & le vol pefant > comme la plu- part des précédens j mais il devance , à la courfe , les chevaux les plus vires : il efr moins grand que les hoccos , n'ayant que dix -huit pouces de lon- gueur du bout du bec au bout de lai queue \ fa couleur générale. eft le blanc tirant au fauve -, les environs de la queue ont du noir mêlé de. quelques taches blanches \ mais la queue elle - même e(t d'un verd changeant , & qui a des< reflets , à peu près comme les plumes du paon. . Au fond , ces oifeaux font trop peu connus pour qu'on puiile les rapporter: rato fa) Barrère. , Phafiamis rertice fuîro , eu France Equinoxiale ? page 140. (b) Fernandez , Hijloria Av'u mv. Hi/}aniœ cap. lu , pag. 25. des Oifeaux étrangers, &c. i 6 1 furement à leur véritable efpèce -, je ne les pîace ici , que parce que le peu que l'on fait de leurs qualités, ïes rapproche plus des oifeaux dont nous venons de parler que de tous autres*, c'eft à i'ob- fervation à fixer leur véritable place : en attendant , je croirai avoir allez fait 3 (i ce que j'en dis ici peut infpirer , aux perfonnes qui fe trouveront à portée a l'envie de ïes connoître mieux , & d'en i donner une hiftoire plus complète» i 6 2 Hijioire Naturelle LES PERDRIX. Jljes espèces les plus généralemeni connues , font Couvent celles dont Thif toire eft le plus difficile à débrouiliet parce que ce font celles auxqueile chacun rapporte naturellement les ef pèces inconnues 3 qui fe préfentent 1 première fois , pour peu qu'on y aper çoive quelques traits de conformité , & fans faire beaucoup d'attention aux trait de dilTernbiance , Couvent plus nom breux -, en forte que de ce bizarre aflemi blage d'êtres , qui fe rapprochent , pa quelques rapports fuperflciels , mais qi fe répondent par des différences plu confidérables , il ne peut réfulter qu'u. cahos de contradictions d'autant plu révoltantes , que l'on citera plus de fait particuliers de l'hiitoïre de chacun , I plupart de ces faits étant contraire entr'eux , & a une abfurde incompat biiité, lorfqu'on veut les appliquer à un feule efpèce , ou même à un feul genre des Perdrix. 163 inous avons vu plus d'un exemple de cet inconvénient , dans les articles que nous avons traités ci-defîus , & il 7 a grande apparence que celui que va nous fournir l'article de la perdrix 3 ne fera pas ïe tfernier. Je prends pour bafe de ce que j'ai [Jà dire des perdrix , & pour première efpèce de ce genre , celle de notre perdrix grife , comme étant la plus ■connue , Se par conféquent la plus ; propre à fervir d'objet de comparai/on, pour bien juger de tous les autres oi- ifeaux dont on a voulu faite des perdrix > lîj'y reconnois une variété , & trois races confiantes. Je regarde comme races confiantes, i.° la perdrix grife ordinaire * , & comme variété de cette race , celle que M. Briflon appelle perdrix grife-blanche (a ) ; 1° la perdrix de Damas , non 'celle de Bélon (b) _, qui eft une gelinotte, x * Vbyei les planches enluminées , n.° 27. (a) Briflbn , Ornithologie, tomel, page 223, (b) Bélon ? Nature des Oifeaux 3 page 258. I 6 4 Hijîoire Naturelle mais celle d'Aldrovande (c) _, qui eft plus, petite que notre perdrix grife , & qui me paroîc être ïa même que la petite' perdrix de paiïage , qui eft bien connue de nos Chaffèurs *, 3.0 la perdrix de montagne , que nous avons fait repré- fenter *, & qui femble faire la nuance entre les perdrix grifes & les rouges. J'admets pour féconde efpèce , celle de la perdrix rouge , dans laquelle je reconnois deux races confiantes répan- dues en France , une variété & deux] races étrangères. Les deux races confiances de perdrix rouges du pays font , i.° celle de la planche enluminée, ri.9 1 50 : 2.0 La bartavelle de la planche enlu- minée, n.° 2.51. Et les deux races ou efpèces étran-: gères font , i.° la perdrix rouge de Barbarie d'Edurards„ planche LXX : i.° La perdrix de roche, qu on trouve fur les bords de la Gambra. Et, comme le plumage de la perdrix (c) Aldrovand. Ornitholog. tom. II , pag. 143,. * Voyt\ Us planches enluminées ., n.° 136* des Perdrix. i6$ rouge eft fujet à prendre du blanc, de même que celui de la perdrix grife , il en réfulte-, dans cette efpèce, une variété parfaitement analogue à celle que j'ai .reconnue dans l'efpèce grife ordinaire. J'exclus de ce genre plufieurs efpèces ^ui y ont été rapportées mal- à-propos. i.° Le francolm , que nous avons fait jepréfenter * , & que nous avons cru levoir féparer de la perdrix , parce qu'il ;n diffère non -feulement par la forme totale , mais encore par quelques ca- jactères particuliers , tels que les épe- lons, &c. { 1° L'oifeau appelle , par M. Brifîon, màrdrix du Sénégal ^ & dont il a fait fa j .luitième perdrix ( d) : cet oifeau , qui ft repréfenté fous le même nom de V jerdrix du Sénégal , nous paroît avoir ] lus de rapport avec les francolrns qu'avec ; ?s perdrix \ & , comme c'en: une efpèce iartîculière , qui a deux ergots à chaque ïuiibe , nous lui donnerons le nom de Ï h- ergot. y P Voyelles planches enluminées , n.os 147 & 148, fi (4) Brjfiçm, Ornithologie, tomeI? page 231, i 66 Hijloire Naturelle 3.0 La perdrix rouge d'Afrique *. 4.0 La troifième efpèce étrangère donnée par M. BriiTon , fous le non de grojje perdrix du Bréjil ( e) _, qu'i croit être le macucagua de Marcgrav» (f) j puifqu'il en copie la description Se qu'il confond mal- à -propos ave l'agamie de Cayenne * , lequel eft ui oifeau tout différent , & du macucagu.. & de la perdrix. 5.0 L'yambou de Marcgrave (g) qui qCi la perdrix du Bréfîl de M. Brilïbnl & qui na ni la formé, ni les habitudes I ni les propriétés des perdrix, puifque félon M. BriiTon lui-même (h) j il a I bec alongé, qu'il fe perche fur les arbres & que fes œufs font bleus. * ybye% les planches enluminées , n.° 180. (e) BriiTon, Ornithologie , tome I , page 22 7 1 Efpèce V . (f) Marcgrave , Hifloria Avium Brafil. p. 213. I * Voye\les planches enluminées , n.° 169. (g) Marcgrave , Hi florin Avium Brafil. p. içiA (h) Brifibn, Ornithologie, .tomel, page 2:7. des Perdrix. 167 6° La perdrix d'Amérique , de Ca- :esby (i) & de M. BriiTon^ , laquelle re perche auffi , & fréquente les bois plus que les pays découverts , ce qui ne con- yient guère aux perdrix que nous con- îoifions. | 7-° Une multitude d'oifeaux d'Amé- ique , que le peuple ou les voyageurs gfc jugé à propos d'appeler perdrix > gprès des reffemblances très -légères, |k' encore plus légèrement obfervées- m [ont les oifeaux qu'on appelle, à la [Guadeloupe , perdrix rouffes * perdrix [oires & perdrix grifes ., quoique,, félon W témoignage^ des perfonnes plus inf- jruites, ce ïoient des pigeons ou des iJDiirterelles, puifquns n'ont ni le bec, lii ia chair des perdrix , qu'ils fe perchent jjr les arbres, qu'ils y font leur nid, ■ils ne pondent que deux œufs, que |ïurs petits ne courent point dès qu ils pnt écïos j mais que les père & mère les ourriflent dans le nid, comme font les (i) Catesby, Appendix , planche -xn, avec une \%ure coloriée. (kj Briffon ? Ornithologie , tome I ? page 230, i 6 8 Bijloire Naturelle , &c. tourterelles (l) ; tels font encore, feloi toute apparence , ces perdrix à tête bleue que Carréri a vues dans les montagnes d< la Havane (m) ; tels font les manbourls . îes pégjffbus , les pégacans de Léry , & peut-être quelques-unes des perdrb d'Amérique, que j'ai rapportées au genre des perdrix, fur la foi des Auteurs lorfque leur témoignage n étoit point corn tredit pas les faits , quoiqu'il le foit , ; mon avis, par la loi du climat, à iaquelli un oifeau , aufïi pefant que la perdrix ne peut guère manquer d'être affujetti. (I) Voyez ïe P. du Tertre , Hijloire générale ié Antilles , tome II , page 254. ' (m) Gemelli Carréri , Voyages .... tome VI page 326. 1(3 9 * LA PERDRIX GRISE (a). Vuoiqu'Aldrovande, jugeant des autres pays par celui qu'il habit o It , diie que les Perdrix griies font com- munes par -tout, il eft certain néan- moins qu'il n'y en a point dans l'île , * Voyez Ifls planches enluminées , n.° 27. ij Comme ïe mâle & la femelle fe reflemHent tprefquen tout, nous ne donnons que 'l'un des cMuminS ^ "* P?'S ^ mu!tiPIier Ies -Poches (a) 1 En Latin, Perdix; en Efpagnoï , Perdis en Italien, Perdiçejen Allemand^ W-fc, ou FMun; en suédois, Rapp-hoena ; en Angïois, Partngde- enPoionois, Kuroptwa ; — Perdrix P^ 257; & Portraits |slj»r»ï<*0~,^ c , r & ->'> ** curerait dOneaux ^ 62, t//— Penlix mner fa cinerea Aidrovande, Ornithologie y tome II, paae TAn — Perdix. Friïch, ^/««cAe cx/r, avec 1 coloriée. La Perdrix grife. Briflbn, O; tome I, page, 2 19. ? Oijeauxj Tome IV; H 170 Hijloire Naturelle de Crète (b) ; & il ePc probable qu'il n'y en a jamais eu dans îa Grèce , , puifqu Athénée marque de la furprife; de ce que toutes les perdrix d'Italie n'a voient pas le bec rouge , comme] elles i'avoient en Grèce (c) ; elles ne: font pas même également communes j dans toutes les parties de l'Europe ; & il paroir en général quelles furent la: grande chaleur comme le grand froid ; car on n'en voit point en Afrique ni; en Lapponie (à) ; & les provinces^ lesi plus tempérées de la France & de i'Al-| lemagne, font celles ou elles abondent le plus : il eft vrai que Botériusa ditl 'qu'il n'y avoir point de perdrix en Irlande (c) ; mais cela doit s'entendre (b) Voyez les Obfervations de T3éIon , liv. TA ckajf. x. (c) Phyei Gefner , de Avibus , pag. 680. (i) LaBàrbjtiais ïe Gentil nous apprend qu'on ; tenté inutilement de peupler i'îleEou bon de Per- drix. Voyage autour du Monde, tome II, p. 10JJ fe) Voyei Aldrovande , OmitAologia , tom, Uj pag. 110, de la Perdrix grije. i 7 1 Ses perdrix rouges, qui ne fe rrouvent pas même en Angleterre ( félon les meilleurs Auteurs de cette nation), Se qui ne fe font pas encore avancées de ce côté-là au-delà des îles de Jerfey & de Guernefey : la perdrix grife eft aiïez répandue en Suède, où M. Linnœus dit qu'elle paGfe l'hiver fous la neige , dans des efpèces de clapiers qui ont deux ouvertures ( f ) ; cette manière : d'hiverner fous ia neige , refTemhie fort à la perdrix blanche dont nous avons rdonné i'hiftoire fous le nom de lago-- tpède ; 8c iî ce fait n'étoit point attefté par un homme de la réputation de M. Linnaeus , j'y foupçonnerois quelque bnéprife , d'autant plus qu'en France , ïles iongs hivers & fur- tout ceux où il [tombe beaucoup de neige , détfuifent fcune grande quantité de perdrix : enfin, homme c'eit un oifeau fort pefant 3 je loute qu'il ait patTé en Amérique j 8cJrrnv*ag^ 160., Hij i 7 2 Hificire Naturelle au genre des perdrix , en feront fépares dès qu'ils feront mieux connus. La perdrix grife diffère à bien desj égards de la rouge } mais, ce qui m'au-J torife principalement à en faire deux efpèces diftinétes , ceft que, félon h: remarque ^du petit nombre des Chaf- feurs qui favent obferver, quoiqu'elle' | fe tiennent quelquefois dans les mêmes endroits, elles ne fe mêlent point Tune ayec l'autre, & que fi Ton a vu quel- quefois un mâle vacant de Tune de;; deux efpèces , s'attacher à une paire j de l'autre efpèce , la fuivre & donne:! des marques d'empredement & même de jaïouhe , jamais on ne l'a vu s'ac- coupler avec la femelle , quoiqu'il éprou- vât tout ce qu'une privation forcée & le fpe&acle perpétuel d'un couplé heureux pou voient ajouter au penebani de la Nature & aux influences di| printemps. La perdrix grife eft aufll d'un na- turel plus doux que la rouge ( g) > H (g) M. Ray dit le contraire, page 57 def Synopjis, mais . comme il avoue qu'il n'y a poi« de la Perdrix grife, 173 n*eft point difficile à apprivoifer -, lorf- qu'elle n'eil point tourmentée , elle fe familiarife aifément avec l'homme -, ce- pendant on n'en a jamais formé de troupeaux qui fuilent fe lailTer conduire , comme font ïes perdrix rouges -, car . Olina nous avertit que c'eft de cette dernière efpèce que Ton doit entendre ce que les Voyageurs nous difent en ; général de ces nombreux troupeaux de i. perdrix qu'on élève dans quelques îles de la Méditerranée (h) : les perdrix .grifes ont auiïi imiiincl: plus fociaï entr'elles -, car chaque famille vit tou- jours réunie en une feule bande, qu'on [appelle volée ou compagnie _, jufquau ^temps où l'amour , qui l'avoir formée , la divife pour en unir les membres plus ,étroitement deux à deux -, celles même dont par^ quelque accident les pontes n'ont point réuffi , fe rejoignant en- semble & aux débris des compagnies de perdrix rouges en Angleterre , il n'a pas e'té à portée de faire la comparaifon par iui-même5 comme l'ont faite les Obfervateurs d'après qui je (h) Olina ? page 57, Hiij ï 74 Hijîoire Naturelle qui ont îe plus fourrer t , forment, fur h fin de l'été , de nouvelles compagnies fouvent plus nombreufes que les pre- mières, ce qui fuMftentjufqu' à la panade de Tannée fuivante. Ces oiieaux fe pkifent dans les psys à blé , Se fur- tout dans ceux où les terres font bien cultivées' 6c marnées , fans doute parce qu'ils y trouvent une nourriture plus abondante , foit en grains , foit en infectes , ou peut-être auill parce que les fels de la marne , qui contribuent il fort à la fécondité du fol , font analogues à leur tempé- rament ou à leur goût } les perdrix grifes aiment la pleine campagne , & ne fe réfugient dans les taillis & les: vignes que loriqu'elles font pourfuivres parle Chaileur ou par l'oifeau de proie*, mais jamais elles ne s'enfoncent dans les forêts , & Ton dit même aiïez com- munément qu'elles ne paflent jamais la nuit dans les buiiïbns ni dans les vignes -, cependant on a trouvé un nid de perdrix | dans un buifïbn au pied d'une vigne : elles commencent à s'apparier dès h fin de l'hiver 5 après les grandes gelées jl de la Perdrix grife. i 7 5 c'eft-à-dire , que chaque mâle cherche alors às'afïornr avec une femelle*, mais ce nouvel arrangement ne fe fait pas fans qu'il y ait entre les mâles , & quelque- fois entre les femelles , des combats fort vifs : faire la guerre & l'amour ne font prefque qu'une même chofe pour la plupart des animaux , & fur -tout pour ceux en qui l'amour eft un beforn aufîi preffant qu'il l'eil: pour la perdrix -, aufîi les femelles de cette efpèce pondent- elles fans avoir eu de commerce avec le mâle, comme les poules^ ordinaires. Lorfque les perdrix font une fois appa- riées, elles ne fe quittent plus, & vivent dans une union & une fidélité à toute épreuve : quelquefois , lorfqu'après la paria de , il furvient des froids un peu vifs , toutes ces paires fe réunifient 8c fe reforment en compagnie. Les perdrix grifes ne s'accouplent guère , du moins en France, que fur la fin de mars , plus d'un mois après qu'elles ont commencé de s'apparier , & elles ne fe mettent à pondre que dans les mois de mai 8c même de juin , lorfque H iv ïj6 Ui/loire Naturelle l'hiver a éré long : en général > elles | font leurs nids fans beaucoup de foins ; Se d'apprêts -, un peu d'herbe & de paille grofîièrement arrangées dans le pas d'un bœuf ou d'un cheval , quel- quefois même celle qui s'y trouve naturellement, il ne leur en faut pas. davantage : cependant on a remarqué que les femelles un peu âgées & déjà init-ruites par l'expérience des pontes précédentes , apportoient plus de pré- caution que les toutes jeunes , foit pour garantir le nid des eaux qui pour- roie^t le fubmerger , foit pour le mettre en fureté contre leurs ennemis , en choihflTant un endroit un peu élevé, & défendu naturellement par des broul- failles : elles pondent ordinairement de quinze à vingt œufs , & quelquefois jufqu'à vingt-cinq-, mais les couvées des toutes jeunes & celles des vieilles, lont beaucoup moins nombreufes , ainfi que les fécondes couvées que des perdrix de bon âge recommencent lorfque la première n'a pas réuffi , & qu'on appelle 3 en certains pays > des recoauées : ces âer la Perdrix grife. i 7 7 œufs font à peu près de la couleur de ceux de pigeon : Pline dir qu'ils font blancs (i) ; la durée de l'incubation efl d'environ trois femaines, un peu plus , un peu moins 3 fuivant les degrés de chaleur. La femelle fe charge feule de cou- ver j &, pendant ce tempe, elle éprouve Une mue confidérable , car prefque toutes les plumes du ventre lui tombent t elle couve ^vqc beaucoup d'aiEduicé ," & on prétend qu'elle ne quitte jamais fes œufs fans les couvrir de feuilles \ le maie fe tient ordinairement à portée du nid y attentif à fa femelle 3 ' & tou- jours prêt à l'accompagner iorfqu'eîle fe lève pour aller chercher de la nour- titure, 8c fon attachement e& fi fidèle & fi pur , qu'il préfère ces devoirs | pénibles à des plaiiirs faciles que lui [ annoncent les cris répétés des autres perdrix , auxquels il répond quelque- fois, mais qui ne lui font jamais aban- donner fa femelle pour fuivre l'étrangère 5 au bout du temps marqué , lorfque la faifon eft favorable, & que la couvée (i) PIïjie? lib. X, cap, iir. 178 HiJIolre Naturelle va bien , les pecirs percent leur coque adez facilement , courent au moment même qu'ils éclofent , & fouvent em- portent' avec eux une partie de leur coquille-, mais il arrive aufïï quelque- fois qu'ils ne peuvent forcer leur prifon , Se qu'ils meurent à la peine : dans ce cas , on trouve les plumes du. jeune oifeau collées centre les parois inté- rieures de l'œuf, & cela doit arriver nécessairement toutes les fois que l'œuÉ a éprouvé une chaleur trop forte : pour: remédier à cet inconvénient, on" mec 1 les œufs dans l'eau pendant cinq ou fîx minutes , l'œuf pompe à travers fa, coquille les parties les plus tenues de l'eau , & l'erlet de cette humidité eftl de difpofer les plumes qui font collées à la coquille à s'en détacher plus faci- lement j peut-être aufïï que cette elpèce de bain rafraîchit le jeune oifeâu , & ïui donne allez de force pour briier fa coquille avec le bec : il en elt de même des pigeons, & probablement de plu- sieurs oileaux utiles dont on pourra fauveçj un grand nombre par le procédé que je viens d'indiquer , ou par quelqu'autre procédé analogue. âe la Perdrix gri/e. i 75 Le mâle , qui n'a point pris de parc au foin de couver les œufs, partage avec la mère celui d'élever les petits -, ils les mènent en commun, les appellent fans ceffe , leur montrent la nourriture qui leur convient , & leur appren-» nent à fe la procurer en grattant la terre avec leurs ongles -, il n'eft pas rare de les trouver accroupis l'un auprès de l'autre , & couvrant de leurs ailes leurs petits poufïïns , dont les têtes fortent de tous côtés avec des yeux fort vifs : dans ce cas , le père & la mère fe déterminent difficilement à partir , & un Chafïeur , qui aime la confervation du gibier , fe détermine en- core plus difficilement à les troubler dan^ une fonction fi intéreflante 5 maïs enfin fi un chien s'emporte , & qu'il les approche de trop près , c'eft tou- jours le mâle qui* parc le premier, en pouffant des cris particuliers , réfervés pour cette feule circonftance j il ne manque guère de fe pofer à trente on quarante pas , & on en a vu piufieurs fois revenir fur le chien en battant des ailes ? tant l'amour paternel infpire de Hvj 1 S O Hiftoire Naturelle % courage aux animaux les plus timides ! mais quelquefois il infphe encore à ceux-ci une forte de prudence, & des moyens combinés pour fauver leur couvée: on a vu le mâle, après s'être! préfemé , prendre la fuïre : fuir pefamment & en traînant l'aile, commet pour attirer l'ennemi par Te d'une proie facile, & fuyant to. jours afTez pour n être point pris , mais pas alez pour décourager le ChaiTeur , il Técarie ce plus en plus de ia couvée , d'autre cozè , la femelle , quî part un înftant après le mile, s'éloigne beaucoup plus & toujours dans une autre direc- tion -, à peine s'ePr-elle abattue, ' e c revient fur le champ en courant le long des filions, & s'approche de fes petits , qui fe font blotis chacun de ion coté dans les herbes & dans les feuilles ; elle les raiîemble promptemenr ; &, avant que le chien, qui s'eft emporté après le maie , ai: eu le temps de revenir , elle îes a déjà emmenés fort loin , fans que le Chafîeur ait entendu le moindre bruit: c'elt une remarque allez généralement, vraie parmi les animaux-, cjue i'ardeur de la Perdrix grije. I l i qu'ils éprouvent pour l'acte de la géné- ration eit la mefure des foins qu'rls prennent pour le produit de cet acte : tout eft conféquént dans la Nature, & la perdrix en eft un exemple \ car il y a peu d'oi féaux auffi hic ifs, comme il en eft peu qui lorgnent leurs petits avec une vigilance plus ailidue & plus courageufe : cet amour de la ebuvéô dégénère quelquef : en fureur êontre le- couvées étrangères, cje la mèr z jvent & maltraite à grands ps de bec. Les perdreaux ont les pieds u en nziil.r.:: :e::e couleur s'éclairât en- :e & devient blanchâtre , puis elle & enfin devient tout- à- 1 :rx de trois ou quatre ans : c'eft un moyen de connoître tou- jours leur âge ; on le connoît encore à la ï : . ne fe : iernière me de l*aHe-3 laquelle eit pointue après la première mue, &qur, l'année furvante, eft entière- ment arrondie. La première nourriture dès perdreaux. ce iont les œufs de fourmis , ies petits infectes qu'ils trouvent fur la terre 3c ï 8 2 Hiftoire Naturelle les herbes \ ceux qu'on nourrit dans les maifons refufent la graine aftez long- temps , & il y a apparence que c'en; îeur dernière nourriture j à tout âge, ils préfèrent la laitue , la chicorée , le mouron , le laitron , le feneçon &J même la pointe des blés verds , des [le mois de novembre , on leur en trouve le jabot rempli j & , pendant l'hiver , ils favent bien l'aller chercher fous la neige ; lorfqu'elle eft endurcie par la geiée , ils font réduits d'aller auprès des fon- taines chaudes qui ne font point gla- cées, & à vivre des herbes qui croilîent fur leurs bords , & qui leur font très- contraires ; en été 3 on ne les voit pas boire. Ce n'efl: qu'après trois mois paflfés ," que les jeunes perdreaux pouiient le: rouge-, car les perdrix grifes ont aufîï du rouge à côté des temples entre l'œil & l'oreille , & le moment ou ce rouge commence à paroître , eft un temps de crife pour ces oifeaux , comme pour tous les autres qui font dans le cas *, cette crife annonce l'âge adulte : avant ce temps , ils (ont délicats , ont de la Perdrix grije. i 8 5 peu darle, 8c craignent beaucoup l'hu- midité*, maïs, après, qu'il eft palfé, ils deviennent robuftes , commencent à avoir de l'aile, à partir tous enfemble? à ne fe plus quitter -, & , fi on eft par- venu à difperfer la compagnie, ils favent fe réunir malgt é toutes les précautions du Chafteur. C'eft en fe rappelant qu'ils fe réu~ nifïent *, tout le monde connoît le chant des perdrix , qui eft fort peu agréable, c'eft moins un chant ou un ramage 3 qu'un cri aigre imitant allez bien le bruit" d'une feie ', & ce n'eft x pas fans intention que les Mythologiftes ont me- tamorphofé en perdrix l'inventeur de cet infiniment ( k) : le chant du mâle ne diffère de celui de la femelle qu'en ce qu'il eft plus fort 8c plus traînant-, le mâle fe diftingue encore de la femelle par un éperon obtus qu'il a à chaque pied 9 8c par une marque noire en forme de fer à cheval qu'il a fous le ventre , & que la femelle n'a pas. Dans cette efpèce , comme dans ik) Ovide ? Métamorphofis , lib. VIIL •î§4 HiJIoire Naturelle beaucoup d'sutres , il naît plus cfô mâles que de femelles ( l ) > & il im-i porte, pour la réufFite des couvées, de détruire les mâles furnuméraires , qui ne font que troubler les paires alTor- ties , & nuire à la propagation : la ma- nière la plus ufitée de les prendre , c'en: de les faire rappeler au temps de la panade par une femelle à qui , dans cette cïrconflance , on donne le nom de chanterelle : la meilleure , pour cet1 ufage, eiï celle qui a été priie vieille *, îes mâles accourent à fa voix & fe livrent aux ChalTeurs , ou donnent dans les piégés qu'on leur a tendus ; cet appeau naturel les attire fi puidamment , qu'on en a vu venir fur le toit des "mations & jufques fur l'épaule de l'Oi- feleur : parmi les pièges qu'on peut leur tendre pour s'en rendre maître , le plus fur & le moins fujet à inconvéniens , c'efl la tonnelle , efpèce de grande naife où font pou fiées les perdrix par un homme déguiié à peu près en vache > & pour que l'illufion fort plus (l) Cela a environ un tiers de plus , felofc M. le Roi. de la Perdrix grife. i % j complète , tenant en fa main une de ces petites clochettes. qu'on met au cou du bétail (m) ; Iorfqu elles font enga- . gées dans îes filets , on choifît à la main les mâles fuperflus , quelquefois même [tous les mâles, & on donne la libené aux I femelles. Les perdrix grifes font oifeaux ré- dentaires, qui non - feulement relient dans le même pays , mais qui s'écartent ; le moins qu'ils peuvent du canton oii ils ont paifé leur jeunelTe , Se qui y (reviennent toujours : elles craignent I beaucoup l'oifeau de proie j Iorfqu elles l'ont aperçu , elles fe mettent en tas les I unes contre les autres Se tiennent ferme , quoique l'oifeau , qui les voit aufîî fort bien , les approche de très - près en rafant la terre , pour tâcher d'en faire ; partir quelqu'une & de la prendre au ' vol : au milieu de tant d'ennemis Se de dangers , on fent bien qu'il en en: peu qui vivent âge de perdrix -, quel- ques-uns fixent la durée de leur vie à fept années , Se prétendent que la force (m) Voyei Oîina , page 57, i S 6 iïiftoire Naturelle de i'age & le temps de la pleine ponte ; eit de deux à trois ans , & qu'à fîx elles ne pondent plus. Olina dit qu'elles vivent douze ou quinze ans. On a tenté avec fuccès de les mul- tiplier dans les parcs , pour en peupler les terres qui en étorent dénuées , & l'on a reconnu qu'on pouvoit les élever h très -peu près, cemme nous avons die qu'on élevoit les faiians *, feulement il ne faut pas compter iur les œufs des perdrix domeftiques. Il eft rare qu'elles pondent dans cet état , encore plus rare qu'elles s'apparient êc s'accouplent 5 mais on ne les a jamais vus couver enj prifon , je veux dire, renfermées dansj ces parquets ou les faifans multiplient fi aifément. On efi: donc réduit à faire chercher par la campagne des œufs de- perdrix fauvages , & à les faire couver: par des poules ordinaires : chaque poule peut en faire éclorre environ deux dou- zaines , 8c mener pareil nombre de petits , après qu'ils font éclos : ils fui- vront cette étrangère comme ils auroient fuivi leur propre mère , mais ils ne. reconnoiflent pas Ci bien fa voix : ils de la Perdrix grife. i 8 7 la reconnouTent cependant îufqu'à un certain point -, & une pesdrix, ainfi élevée , en conferve toute fa vie l'ha- bitude de chanter aufïitôt qu'elle entend des poules. Les perdreaux gris font beaucoup moins délicats à élever que les rouges , & moins fujets aux maladies , au moins dans notre pays , ce qui feroit croire que c'eft leur climat naturel. Il n'e& pas même nécefTaire de leur donner des œufs de fourmis, & Ton peut les nourrir comme les poulets ordinaires , avec la mie de pain , les œufs durs , &c. Lors- qu'ils font aflfez forts 3 & qu'ils com- mencent à trouver par eux-mêmes leur fubhftance , on les lâche dans l'endroit même où on les a élevés , & dont , comme je l'ai dit , ils ne s'éloignent jamais beaucoup. La chair de ïa perdrix grife eft connue depuis très -long -temps pour être une nourriture exquife & îalutaire \ elle a deux bonnes qualités , qui font rarement réunies , c'eit d'être fuccu- lente fans être graiïe. Ces oifeaux ont vingt - deux pennes à chaque aile > & 1 8 8 Hïjloire Naturelle > &c. dix- huit à la queue , dont les quatre du milieu font de la couleur du dos (n ). Les ouvertures des narines , qui fe trouvent à la baie du bec, font plus qu'à I demi recouvertes par un opercule de même couleur que le bec, mais d'une fuhftance plus molle , comme dans les poules. L'éfpace fans plume , qui eft entre l'œil & l'oreille, eft d'un rouge plus vif dans le maie que dans la femelle. Le tube inteftinal a environ deux pieds & demi de long, les deux c&cum cinq à iix pouces chacun. Le jabot effc fort pe- tit ( ' o) j, & le géller fe trouve plein dé graviers mêlés avec la nourriture, comme c'éft l'ordinaire dans les granivores. (n) Wilïuïghby , page 120. (o) Ingluvies ampla, dit "Wiïïuïghby , page iioy mais les perdrix que j'ai fait ouvrir l'avaient ibrr petit. 1 89 LA PERDRIX GRISE-BLANCHE (a). ajettï perdrix a été connue d'A- iiftote (b)± & obfervée par Sca- .îiger (c) , puifque tous deux parlent de j perdrix blanche , & on ne peut point Soupçonner que ni l'un ni l'autre ait : voulu parler du lagopède appelé , mal- f à-propos , perdrix blanche par quelques--' ;! uns j car , pour ce qui regarde Ariftote , L il ne pouvoit avoir en Vue le lagopède qui eft étranger à la Grèce , à l'Afie Se à tous les pays où il avoit des cor- [ refpondances j & , ce qui le prouve , '; c'eft qu'il n'a jamais parlé de la pro- I priété caractérifeique de cet oifeau , qui (a) Voyz\ Briffon, Ornithologie-, tome I, p. 223. (b) Jam enim Perdix vifa eft alla , & Çorvàs , £3* ; PaJJèr. Ariftote , de Generatîone Anhnalium , lib. V y cap. VI. ( c) Scaliger , Exercitatioms in Cardanum , Eserçit. 59. Perdices aléas & Lejiores citavimus. i 9 o HiJIoire Naturelle eft d'avoir les pieds velus jufques fous les doigts-, & , à l'égard de Scalrger , il n'a pu confondre ces deux efpèces , puifque dans le même chapitre où il parle de la perdrix blanche qu'il a man- gée , il parle un peu plus bas & fort au long du Lagopus de Pline, qui a les pieds couverts de plumes. & qui eft notre vrai lagopède (d ). Au refte, il s'en faut bien que la perdrix grife -blanche foit aufli blanche que le lagopède , il n'y a que le fond de fon plumage qui foit de cette cou- leur 3 & l'on voit fur ce fond blanc les mêmes mouchetures que dans la per- drix grife , & diftribuées dans le même; ordre*, mais, ce qui achève de démon- trer que cette différence dans la couleur du plumage n'eft qu'une altération acci- dentelle , un effet particulier , en un mot, une variété proprement dite , &qui n'empêche point qu'on ne doive re- garder la perdrix blanche comme ap partenante à l'efpèce de la perdrix grife , c'eft que , félon les Naturalises , (à) Scaïiger 9 Excrcitationes in Cardanum , Exercit. 59. de la Perdrix grife-blanche. i 9 r & même félon les Chafïeurs , elle fe mêle & va de compagnie avec elle. Un de mes amis (e ) en a vu une compagnie de dix ou douze qui étoient toutes blanches , & ïes a aufîi vu fe mêler avec les grifes au temps de la pariade -, ces perdrix blanches avoient les yeux ou plutôt les prunelles rouges, comme les •ont les lapins blancs, les fou ris blanches, &c. Ton bec & Tes pieds étoient de cou-» leur de plomb. fe) M. le Roi? Lieutenant des Chafîes de Ver^ ailles. ->r X$2 Hijîoire Naturelle LA P E TITE PERDRIX GRISEE 3 'appelle ainiï la perdrix de Damas d'Aïdrovande , qui eft probablement la même que la petite perdrix de paffage gui Te montre de temps en temps eq différentes provinces de France. Elle ne diffère pas feulement de la perdrix grife par fa taille , qui eft confv tamment plus petite , mais encore pa* fon bec qui eft plus alongé , par Js couleur jaune de (es pieds, Se fur-toutl par l'habitude qu'elle a de changer dA lieu & de voyager. On en voit quel- quefois dans la Brie & ailleurs , paffei par bandes très-nombreuies , «Se pour-' îuivre leur chemin fans s'arrêter. Ui Chafteur des environs de Montbard qui chafloit à la chanterelle, au moi de mars dernier (1770), en vit un( volée de cent cinquante ou deux cens qui parut fe détourner , attirée par l cri de la chanterelle , mais qui > de I de la petite Perdrix grife. x 9 i 'le lendemain avoir entièrement difparu • ce ieul hit, qui eft très - certain , an- Inonce & lcs r,ppom & ,es ^^^^ ï" il y a entre ces deux per.drix -, ies •apports, puifqne ces perdrix étran- gères furent «tirées par Je chant dune Jerarnc gnfe ; les différences:, puif(Jue ps étrangères traversèrent fi tapidet tient un pays qui convient aux pet- ite gnfes & même aux rouges , Jes jnes & les autres y demeurant toute iam.ee ; & ces différences fiappofent un Fre minnâ, & par coi^cruent Une :utre organifauon , & au moins une autre [ace. : II ne faut pas confondre .cette per- fîix ae Damas "ou de Syrie , avec^fa poperdix d'Elieri^;', que Fon •oit aux environs d'Antiocbe, qui avoît s plumage noir, ie'faec de couleur auve, ia chair plus compare & d- oenleur goût, & le naturel plus fau. i«gf que les autres perdrix , car les omeurs, comme l'on Voit, ne Ce rap- portent point ; & Éiien ne dit pas que Y,; Élien, Je Najurâ A.dmalium , JH, XVIj Oifeaux j Tome IF. J X94 Hipire Naturelle , &c. fafyroperdix foît un oifeau de ^ paiïage i il ajoure , comme une fmgularité, qu'elle mangeoit des pierres, ce qui, cependant, eft allez ordinaire dans les granivores. Scaliger rapporte, comme témoin ocu- laire, un fait beaucoup plus lingulier qui a rapport à celui-ci ; c'eft que , dan! un canton de la Gafcogne, où le terrein eft fort fablonneux , la chair des perdra étoit remplie d'une quantité de petit grains de fable fort incommodes (b). (h) Scaliger, Comm, in P. h. an. de Plant, *9| LA PERDRIX DE MONTAGNE*. rT [Je fais une race diftin&e de cette «Perdrix , ^ parce qu'elle ne reîTembîe \m à Tefpèce^ grife ni à ïa rouge -, mais jfl feroit difficile d'affigner celle de ces -deux efpèces à laquelle elle doit fe rapporter -, car fi , dun côté, Ion allure quelle fe .mêle quelquefois avec les ■perdrix grifes (a)> dun autre côté, fa demeure ordinaire fur ies montagnes, & ïa couleur rouge de fon bec & de jfes pieds, ïa rapproche auffi beaucoup des perdrix - rouges , avec qui je loup- çonne fort qu'elle fe mêïe comme avec les grifes -, & , par ces raifons , je fuis porté Voyez tes planches enluminées, n.° 136. te, (a) Voyez BriiTon , Ornithologie , tome ï , page 226, ~ l 10 Hiftoire Naturelle, &c. à la regarder comme une race inter- médiaire entre ces deux efpèces prin- cipales : elle eft à peu près de la grofleur de la perdrix grife, & elle a vingt pennes: à la queue, 197 HGMBSRBHRSHSSfl LES PERDRIX ROUGES. La BARTAVELLE ou PERDRIX Grecque * Vj 'est aux Perdrix rouges , & prin> cipalement à la Bartavelle , que doit fe rapporter tout ce que les Anciens ont dit de ïa perdrix. Ariftote devoit mieux connoître ïa perdrix grecque qu'aucune autre , êc ne pouvoir guère connoître que des perdrix rouges , putfque ce font les feules qui fe trouvent dans ïa Grèce , dans les îles de la Médi- terranée (a) ; &, félon toute apparence, dans la partie de TA lie conquife par Alexandre , laquelle efl à peu près fituée fous le même climat que la Grèce & * Voyelles f Unifies enluminées , n.° 231. (a) Voye\ Béton, Nature des Qi féaux , p. 2*7; 1 m „ 198 Hifloire Naturelle la Méditerranée (b) 3 Se qui étoit pr<> ■ bablement celle où Ariftote avoit fesj principales correfpondances : à l'égard { des Naturalises , qui font venus depuis, tels que Pline, Athénée, Sec. on voit I afïez clairement que, quoiqu'ils cotvjl rftiilènt en Italie des perdrix, autres que || des rouges ( c ) j ils fe font contentés de copier ce qu'Ariftote avoit dit des per- drix rouges : il eft vrai que ce dernier reconnoît une différence dans le chant des perdrix (d) ; mais on ne peut en conclure légitimement une différence dans ï'efpèce *, car la diveriité du chant dépend ïouvent de celle de l'âge & du fexe \ elle a lieu quelquefois dans le même individu , Se elle peut être TerTei (b) Iï paroît que la perdrix des pays habités ouj connus par ies Juifs, (depuis l'Egypte j ufqu'à Ba- feyJone ) étoit ïa perdrix rouge, ou du moins n'étoit pas ïa grife , puifqu'elîe fe tenoit fur les montagnes. (Sicut perfequiiur Perdix in montibusj. Reg. lit. I, cap. xxfi* (c) Perdicum in Italiâ gains a'terum ejl corpon ■minus, colore obfcurius , roflro non cinnabariiio. Athen. (d) Ali& k«x*£/'£«« , tiliœ Tw'£x«. Ariftote , &ijkria J.nimalium , lib. IV, cap. ix». des Perdrix rouges. 195^ de quelque caufe particulière , 8é même de l'influence du climat , félon lies Anciens eux-mêmes , puifque .Athénée prétend que les perdrix , qui l'paiïbient de l'Attique dans la Béotie 9 f[fe reconnoiiToient à ce qu'elles avoienç changé de cri (e ) ; d ailleurs Théo- i phrafte , qui remarque aufîi quelques }. variétés dans la voix des perdrix, rela- tivement aux pays qu'elles habitent , ifuppofe exprellement que toutes ces I perdrix ne font point d'efpèces dilté- | rentes , puifqu'ii parle de leurs difre- : rentes voix dans fon livre de varia voce S Avium ejufdem gène ris (f). i ' En examinant ce que les Anciens Ont dit ou répété de cet oifeau , j'y ai | trouvé un allez grand nombre de faits i vrais & d'obfervations exacbes , mêlés d'exagérations & de fables, dont quel- ques Modernes fe font moqués ( gj * ce- qui n'étoit pas difficile j mais dont je me (e) Voy&i Gefher, de Avibus , pag. 671, (f) Il eft aifé de voir que ces mots , ejufdem genem* lignifient ici de ia même efpêce. (§) yo)'eK Wiiluïghby , Omitholoçia , pag. iso» * zoo Hijloire Naturelle prcpofe ici de rechercher le fondement dans les mœurs & le naturel même de h. perdrix» Ariftore , après- avoir dit que c'en: un ©ifeau pulvérateur , qui a un jabot, ur* gélier & de très- petits cœcum(h)_> qui vie quinze ans & davantage (i) _, qui,, de même que tous les autres oifeaux qui ont le vol pefant , ne conferuit point de nid , mais pond fes œufs àj plate-terre , fur un peu d'herbe ou de feuilles arrangées négligemment ( k ) j, & cependant en un lieu bien expofé & défendu contre les oifeaux de proie *, que , dans cette efpèce , qui eft très- lafcive , les mâles fe battent enrr'eux (h) Àriflote , Hifîoria Animçlium , lib. II t, cap. ultimo; & lib. VT, cap. IV. (i) Idem, ibidem, lib. IX, cap. vu. Gaza a mis mal- à -propos vingt -cinq ans dans fa traduction; erreur qui a été copiée par Aidrovande, Ornïtho- îogïa, lib. XIII, pag. 116, tom. II. Athénée fait' dire à Ariflote que la femelle vit plus long- temps que le mâle , comme c'eft l'ordinaire parmi les i oifeaux. Foye^Gefner , de Avibm , pag. 674. (k) Ariflote , Hijloria dttimgîkm, lib. VIj, ea£. i. des Perdrix rouges. loi avec acharnement dans la faîfon de l'a- mour, Se ont alors les tefticules très- apparens , tandis qu'ils font à peine r vifibles en hiver (l ) ; que les femelles .pondent des œufs fans avoir eu com- ^ merce avec le mâle (m) ; que le mâle , Se la femelle s'accouplent en ouvrant le bec Se tirant la langue ( n) ; que leur : ponte ordinaire effc de douze ou quinze ] œufs , qu'elles font quelquefois fi pref- \ fées de pondre , que leurs œufs leur i échappent par-tout où elles fe trouvent^; ( Ariftote , dis-je , après avoir dir toutes I ces chofes , qui font inconteftables Se ' confirmées par le témoignage de nos ' Obiervateurs , ajoute plufîeurs circonf- j tances où le vrai paroît être mêlé avec le faux , Se qu'il furïït d'analyfer pour (l) Ariftote , Hijloria Animalium , ïîB. III 0 cap. u (m) Idem, ibidem. (n) Idem, ibidem, lik V, cap. V. Avicenne a pris de-Ià i'occafion de dire que les perdrix fe pré- paroient par des baifers à des careffes plus intimes, comme les pigeons , mais c'eft une erreur. (o) Ariftote, Uijïoria Jnim&iïum, lib, IX j cap. vin. X Y toi HlJIoire Naturelle en tirer la vériré pure de tout mélanges II dit donc i.° que les perdrix femelles dépofen: ia plus grande partie de leurs œufs dans un lieu caché , pour les ga- rantir de la pétulance du mâle qui cherche à les détruire , comme faifant obftacle à Tes plaifïrs (p ) ; ce qui a été traité de fable par Wiiluighhy (<{) A mais, à mon avis, un peu trop abfolui ment, puifqu'en distinguant le phyrlque,^ •du moral , & féparant le fait obfervé' de l'intention fuppofée , ce qu'Ariftote a dk fe trouve vrai à la lettre , & fe réduit à ceci , que la perdrix a , comme prefque toutes les autres femelles parmi les oifeaux , l'initincl: de cacher fon nid , & que les mâles , fur-tout les fur- numéraires , cherchant à s'accoupler au temps de l'incubation , ont porté plus. d'une fois un. préjudice notable à la^ couvée , fans autre intention que celle de jouir de la couveufe -, c'eft par cette raifon que , de tout temps , on a recom-J mandé la deikuction de ces mâles fur* (q) Ariftote ? Hift. Animal. ïib. IX , cap. VIII^J, (y) Wjjlulgbby, Ornhholo^ia , pag. 120, des Perdrix rouges. %o$ numéraires , comme un des moyens les plus eilicaces de favorifer la multiplica- tion de l'efpèce , non - feulement des perdrix 5 mais de pluiieurs autres oifeaux fauvages. Ariftote ajoute , en fécond lieu, que -îa perdrix femelle partage les œufs d'une' feule ponte en deux couvées -, qu'elle fe charge de Tune & le mâle de l'autre , jufqu'à la fin de l'éducation des petits- qui en proviennent ( r) ; &■ cela con- tredît pofitivement l'inftindl qu'il, fup^ pofe au mâle , comme nous venons de^ le voir, de chercher à cafîer les cexifs- de fa femelle : mais , en conciliant Arif- tote avec lui-même & avec la yérité r on . peut dire que comme la perdrix femelle ne pond pas tous fes œufs dans- le même endroit , puifqu'ïls -lui échap- pent fouvent malgré elle par- tout où- elle fe trouve , & comme le maie par-7 tage apparemment dans cette eipèce 9- ou du moins dans quelques races de cetœ efpèce , ainii que dans la grife , (r) Ariftote, Hiftoria Anmçdium , iib. VI r «Cap. vin.' 2 04 Hifloire Naturelle le foin de l'éducation des perirs , on aura pu croire qu'il parrageoit auiii ceux de l'incubation, & qu'il couvoit à part tous les • œufs , qui n'étoient point fous la femelle. Ariftote dit , en rroifième lieu , que les mâles Te cochent les uns les autres > & même qu'ils cochenr leurs petits auffitôt qu'ils font en état de mar- cher (f) ; & l'on a mis cette afTertion au rang des abfurdités : cependant j'ai eu occafion de citer plus d'un exemple avéré de cet excès de nature , par lequel un mâle fe fert d'un autre mâle & même de tout autre meuble (t) ^ comme d'une femelle j & ce défordre doit avoir lieu ( à plus forte raifon ) parmi des oifeaux aufîi Iafcifs que les perdrix , donc les mâles , lorfqu'ils font bien animés , ne peuvent entendre le cri de leurs femelles fans répandre leur liqueur (f) Ariflote, Hifloria Jnimalium , lib, IX, cap. VIII. (t) Voyei ci-defïus I'hiftoire du coq , celle du ïapin , & les Gknures d'Edwards t} partie H, page 21. des Perdrix rouges. 20 j féniniale ( u) j & qui font tellement tranfportés Se comme enivrés dans cette Taiion d'amour , que , -malgré leur naturel fauvage , ils viennent quelquefois fe pofer jufque fur l'Oifeleur*, & combien leur ardeur n'eft-elle pas plus vive dans un climat auffi chaud que celui de la Grèce , & lorfqu'iîs ont été privés long- temps de femelles , comme cela arrive au temps de l'incubation (x) ! Ariftote dit , en quatrième lieu, que les perdrix femelles conçoivent & pro- iduifent des œufs lorsqu'elles fe trouvent fous le vent de leurs mâles, ou îorfque iceux-ci parlent au-defïus d'elles en volant , & .même lorsqu'elles entendent leur voix (y ) ; & on a répandu du •ridicule fur les paroles du Phiiofoplïe grec , comme Ci elles euflent (îgnifié qu'un courant, d'air , imprégné par. les .corpufcuïes fécondans du mâle , ou feulement mis en vibration par le fou (u) Eufiath apud Geîner 9 deAvihus, p. 673. (x) Voyz\ Ariftote, Hiftori :ato. (y) Ibidem, ïib. V5 cap. v. (x) Voyei Ariiïote, Hifioria . Animalium t Ïocq Btatô. to6 tJiJIoire Naturelle de fa voix , fufhfoit pour féconder' réellement une femelle -, tandis qu'elles ne veulent dire autre chofe , finon que îes perdrix femelles ayant le tempéra-- ment allez chaud pour produite des œufs d'elles-mêmes, & fans commerce avec le mâle , comme je l'ai remarqué" ci-defïus 5 tout ce qui peut excitet leur tempérament doit augmenter encore en' elles cette puifïànce j & l'on ne niera1 point que ce qui leur annonce la pré- fence du mâle ne puiiTe & ne doive* avoir cet effet , lequel d'ailleurs peut' être produit par un fimple moyen' mécanique" qu'Àriftote nous enfeigne ( \) j ou par le feul frottement qu'elles éprouvent en fe vautrant dans la pouf-; ïèrè* D'après ces faits , il efï aifé de con-** cevoir que quelque pafîion qu'ait la\ perdrix pour couver , elle en a queF-f- quefois encore plus pour jouir, & que'j, dans certaines circonftances , elle pré- férera le pïaiiir de le joindre à ion (\) Std idem fâciunf (nempe ova Kypênemiq féÀ yzphiria pariant) fi digita génitale palpe tur. Ariitote, J-Iifioria Jnimalimn/iib.Yl, cap. lié. des Perdrix rouges. 207 jmâie, au devoir de faire éclore Tes pe- tits -, il peut même arriver qu'elle quitte ;la couvée par amour pour la couvée pnême, ce fera lorfque voyant fon mâle : attentif à la voix dune autre perdrix ; qui le rappelle , & prêt à l'aller trouver , :elle vient s'offrir à fes defirs pour pré^- | venir une inconstance qui feroit nuiiîble à la famille , elle tâche de le rendre fidèle fen le rendant heureux (a).- '\ Elien a du encore que 3 îorfqu'on \ vouloir faire combattre: les mâles avec I plus d'ardeur , c'étoit toujouts en pré* j ïence- de leurs femelles -, jtarce qu'un f mâle 5 ajoure-r-il , aimeroit mieux mourir ; que de montrer de la lâcheté en pré- I fence de fa femelle , ou que de paroître devant elle aptes avoir été vaincu- (b)^ mais c'en: -encore ici le cas de féparer le fait de l'intention : il eft certain que (a) S&pè & femina. incubons exuvgit ,- cummarem. ftmiiKC venatrici attenderefenjerit, occurrenjquefe ipfam j>r On a profité de la connoifiance de j leur naturel pour les attirer dans Ifijj piège, Toit en leur préfer.tant une fe- melle vers laquelle ils accourent pour en jouir , foit en leur présentant un mâle fur lequel ils fondent pour le combattre (h) ; & Ton a encore tire partie de cette haine violente des mâles contre les mâles, pour en faire une lortrl de fpedtacîe , où ces animaux , ordinai- rement ii tîrrrdes & fi pacifiques , fe battent entr'eux avec acharnement , &|| on n'a pas manqué de les exciterll comme, je l'ai dit, par la préfence dej leurs femelles ( "i ) : cet ufage eft encoreJ très commun aujourd'hui dans l'île àti Chypre (k); & nous voyons, dansa Lampridius , que l'empereur Alexandre! Sévère samufoit beaucoup de ce genre i! de combats. (g) Ariftote , Hijlor. Animal. lib. IX, cap. VIII.I (h) Ibidem, iib. IV, cap. î. (i) Élien , de N attira Animalium , îib. IV , cap. lA (k) Voyez l'Hiftoire de Chypt de Françoil Stephano Lufignano. des Perdrix rouges. 2 1 3 LA PERDRIX Rouge d'Europe *. Planche VI de ce volume. UettePerdrix tient le milieu pour !a groffeur entre la bartavelle & la perdrix grife -, elle ncft^ pas auffi ré- îandue que cette dernière , & tout •limât ne lui eft pas bon : on la trouve îans la plupart des pays montagneux & tempérés de l'Europe , de TAiie & de 'Afrique -, mais elle eft rare dans les Pays-Bas (a)s dans plufieurs parties de ^Allemagne & de la Bohème , où l'on a tenté inutilement de la multiplier", quoique les faifans y euflent bien réuffi ' (b) ; on n'en voit point du tout en \ % foyei Us flanches enluminées, n.° 150, ' I (a) 'Voyei Aldrovande , Orn ithologia 3 tom, II , Jpag. 110. (h) Idem, ïbiâam , pag. Io6, 214 Hifloire Naturelle Angleterre (c) _, ni dans certaines îles des environs de Lemnos ( d); tandis qu'une feule paire , portée dans la petite île àÂnaphe (aujourd'hui Nanfio), y pullula tellement que les habitans furent fur le point de leur céder la place ( e) ;\ ce féjour leur eft fi favorable qu'encore aujourd'hui Ton eft obligé d'y détruire leurs œufs par milliers vers les fêtes de Pâques , de peur que les perdrix qui en viendroient,nedétruifent entièrement Ie< rnoifïons j & ces œufs , accommodés à toutes fauces , nourriifent les infulaires pendant plusieurs jours (f). Les perdrix rouges fe tiennent fur îes montagnes, qui produifent beaucoup de bruyères & de brouflfailles , & quel- quefois fur les mêmes montagnes ou fe trouvent certaines gelinottes 3 mai-à- (c) Voyez Ray , Synopjis Avium , pag. 57. — - Hifloire Naturelle des Oifeaux d'Edwards,^/, lxjc. (d) Anton. Liberalis apud Aldrov. tom. II , p. 1 1QV {e) Athénée , Deipnofoph , lib. IX. (f) Vovei Tournefort , Voyages du Levant* £ome I, page 275. des Perdrix rouges. 1 i 5 propos appelées perdrix blanches ; mais |dans des parties moins élevées , & par coniéquent moins froides & moins fau- jvages ( g ) : pendant l'hiver , elles fe recèlent fous des abris de rochers bien expo (es , & Ce répandent peu 5 le relie de Tannée , elles le tiennent dans les broufïailies , s'y font chercher long- temps par les ChaiTeurs , & partent [difficile nient : on ni'aiïiire qu'elles re- firent fouvent mieux que les grifes aux rigueurs de l'hiver, &que, bien qu'elles roient plus aifées à prendre dans les dirlérens pièges que les grifes, il s'en trouve toujours à peu près le, même nombre au printemps dans les endroits qui leur conviennent j elles vivent de grain 9 d'herbes, de limaces 3 de che- nilles , d'cEufs de fourmis & d'autres infectes -, mais leur chair fe fent quelque- fois des alimens dont elles vivent. Éiien rapporte que les perdrix de Cyrrha , ville maritime de la Phocide > fur le golfe de Çorynrhe , font de mauvais , (g) Stianfjîus'apud Gefner , de Ayibus?j?, 68a* 2 1 6 Hijloire Naturelle goût , parce quelles fe nourrirent d'ail (h). Elles voient pefamment Se avec effort, comme font les grifes , & on peut les reconnoître de même fans les voir, au feui bruit quelles font avec leurs ailes en prenant leur volée : leur inltmct eft de plonger dans les précipices lorfqu'on les furprend fur les montagnes , & de regagner le fommet lorfqu'on va à la remite : dans les plaines , elles filent droit & avec roideur -, lorfqu'elles font iuivies de près & pouffées vivement , elles fe réfugient dans les bois , fe per- chent même fur les arbres , & le terrent quelquefois 5 ce que ne font point lei perdrix grifes. Les perdrix rouges diffèrent encore des griles par le naturel & les mœurs .1 elles font moins iociaies : à la vérité | elles vont par compagnies ; mais il m règne pas dans ces compagnies une union aufH parfaite -, quoique nées : quoiqu élevées enfemble , les perdrîî (kj Élicn f de NatuTà 4vium , lib. IV , cap. x 1 11. rouget des Perdrix rouges. 2 x y rouges fe tiennent plus éloignées les unes des autres, elles ne partent point ensemble, ne vont pas toutes du même Uocc, & ne Te rappellent pas enfuite tiavecie même empreiïement, fi ce n'eft au temps de l'amour , & alors même chaque paire fe réunit féparément ; enhn , torique cette faifon eft palTée & que la femelle eft occupée à couver, le maie la quitte & la laifle feule ^chargée du {oin de la famille-, en quoi ■nos perdrix rouges paroifTent aufîï Mifterer des perdrix rouges de I'ÉgyDt<* ; buifque les Prêtres Égyptiens avoienr loioih, pour 1 emblème d'un bon mé- [ nage, deux perdrix, l'une mâle & ïaix„ Itre femelle, couvant chacune de fon I cote (i)t Par une fuite de leur naturel fau- I vage , les perdrix rouges que Ton tâche lue multiplier dans les parcs, & que lion eieve à peu près comme les fai- lans, font encore plus difficiles à élever exigent plus de /oins & de précautions (i) ^oyei Àldrovande, Omithologia , tome TI page 120. ... **^ |:-, Qifeauxj Tome IF, K x ï 8 Hîftoire Naturelle pour les accoutumer à la captivité, ou pour mieux dire, elles ne s'y accou- tument jamais, puîfque les petits per- dreaux rouges, qui font éclos dans la faifanderie , & qui n ont jamais connu la liberté, languiflent dans cette pnion, qu'on cherche à leur rendre agréable de toutes manières, & meurent bientôt d'ennui ou dune maladie qui en eft la fuite , fi on ne les lâche dans le temps où ils commencent à avoir la tête garnie de plumes. Ces faits 5 qui m'ont ete fournis pal M. le Roy , paroîffent contredire ce qu'on rapporte des perdrix d'Aile (h* & de quelques îles de l'Archipel ( ij. (h) In regione circa Trape^untem .... viài homi mm ducentem fecum fupra quatuor millia Perdicum.i iter faciebat per terrain, perdues per aerem rolabant aualducehat ad quoddam caflrum . . . . quod a Tr< leninte diftat trium dierum itinere : cum huic homu •mnefore .... libebat, Perdices omnes quiefcebant cm eum y caviebat de ipfis quantum volebat numerun Od.oricus de Foro-Juiii apud Gefner , de Jvibm page 675- (l ) Il y a des gens du côté de Veffa & d'Eiai (dans l'île de Scio ;, qui élèvent des perdrix av< foin- on les mène a la campagne cherche des Perdrix rouges. 219 & même de Provence où on en a vu des troupes nombreufes (m) j qui obèiC* foient à la voix de leur conducteur avec une docilité fîngulrère. Porphrre parle d'une perdrix privée venant de Carthage , qui accouroit à la voix de fon maître , le carefïoit , & exprimoit fon attachement par des inflexions de voix que le fentiment fembloit pro- duire, & qui étoient toutes différentes de Ton cri ordinaire (n). Mundella & Gefner en ont élevé eux-mêmes qui étoient devenues très-famiiières (o) ; il paroît même par plufieurs paflTages des ïeur nourriture comme des troupeaux de moutons; chaque familïe confie les fiennes au gardien com- mun , qui les ramène le foir ; & on les rappelle chez foi. avec un coup de fitHet, même pendant fa journée. Voyt\ Je Voyage au Levant de M. de Tournefort, tome I, page 386. (m) J'ai vu un homme en Provence, du côté de Gratte , qui conduifoit des compagnies de perdrix à ïa campagne, & qui ïes faifoit venir à lui quand 1ï vouïoit; H les prenoit avec la main, les mettoit dans fon fein, & ies renvoyok enfuite .... avec les autres. Ibidem. (n) Porphire, de Abflinentiâ à camibus t ïib. II£, (o) Voyei Gefner; de. Avibm, page 682. 2,20 Hijloire Naturelle Anciens qu'on en étoit venu jufqu'à leur apprendre à chanter ou à perfectionner leur chant naturel qui , du moins dans certaines races, padoit pour un ramage agréable (p ). Mais tout cela peut fe concilier en difant que cet oifeau eft moins ennemi de l'homme que de Teiclavage , qu'il eft des moyens d'apprivoiier & de iub- juguer l'animal le plus fauvage , c'eftJ à-dire, le plus amoureux de fa liberté, êc que ce moyen eft de le traiter félon fa nature , en lui laiifant autant de U4 bercé qu'il eft pofTible : fous ce point de vue , la fociété de la perdrix appri- yoiiée avec l'homme, qui fait s'en faire obéir, eft du genre le plus intéreiïant Se le plus noble -, elle n'eft fondée ni fur le befoin , ni fur l'intérêt, ni fur une douceur ftupide, mais fur la fympa- thie, le goût réciproque, le choix vol lontaire j il faut même, pour bien réuiîirj qu'elle foit abfoiument -volontaire & ■ (p) Athénée, Deipnofoph. — Piutarquc, Lr«f jtnimalit;;nt &c, Elien? de fraturà AininalijnF ÎÉÈ, IV, capc xiil. IIP -II- J?Z. f'i[<7- 2 20. LJV PERDÏUX HOUGE des Perdrix rouges, 22! ïibre : la perdrix ne s'attache à l'homme * ne le foumet à Tes volontés qu'autant que l'homme lui laille perpétuellement le pou- voir de le quitter : 8c iorfqu'on veut lui impofer une loi trop dure, une contrainte au-delà de ce qu'exige toute fociété; en un mot, Iorfqu'on veut la réduire à Tef- clavage domeftique, Ion naturel (î doux fe révolte, & le regret profond de fa li- berté perdue, étouffe en elle les plus forts penchans de la Nature j celui de fe con- ferver , on Ta vu fouvent fe tourmenter dans fa prifon jufqu'à fe cailer la tête 8c mourir j celui de fe reproduire*, elle y montre une répugnance invincible -, 8c 11 quelquefois on la vit cédant à l'ardeur du tempérament 8c à l'influence de la faifon , s'accoupler 8c pondre en cage, jamais on ne l'a vue s'occuper efficacement, dans la volière la plus commode 8c la plus fpa,~ cieufe, à perpétuer une race efelaye» Kiij 222 HiJIoire Naturelle , &c. M . n La PERDRIX ROUGE-BLANCHE fa). JLIans la race de îa Perdrix rouge» îa blancheur du plumage eft comme dans la race de la perdrix grife, un efTet acci- dentel de quelque caufe particulière, &* qui prouve l'analogie des deux races : cette blancheur n'eft cependant point uni- verfeile, car la tête conferve ordinaire* ment fa couleur-, le bec & les pieds xeftent rouges*, & comme d'ailleurs on la trouve ordinairement avec les perdrix rouges, on eft fondé à la regarder comme une variété individuelle de cette race de, perdrix. {a) Voyez Briflb}) , Ornithologie , tome I , p. 3 3 &! 22J LE FRANC0L1N\ \^i e nom de Francoïin eft encore un de ceux qui ont été appliqués à des oi- feaux fort différens: nous avons déjà vu ' ei-defTus qu'il avoit été donné à i'attagas^ • & il paroît , par un pafïage de Gefner 7 que l'oifeau connu à Venife fous le nom de francoïin ., eft une èfpèce de gelinotte ' ( ha\el-huhnj (a). Le francoïin de Napïes eft plus gros qu'une poule ordinaire, &à vrai dire> la longueur de fes pieds, de fon hec & de fon cou , ne permettent point d'en faire ni une gelinotte ni un fran- coïin (b). Tout ce qu'on dit du francoïin de * Voye\ les planches enluminées , n.os 147 & 148, (a) Ejl autem ( ' Francolinus ) eadem Germanorum Uaiel-huhn , ut ex icône Francolini Venetiis diSti quant doctijjimus Medicus Âloyfius Mundella ad me mifit citra ullam dubitationem cognovL Gefner, de Avibus 9 page 225. ' (b) Gefner, ibidem. K iv 224 Hijîoire Naturelle Ferrare , c'eft qu'il a les pieds rouges & vit de poilîons (c) : l'oifeau du Spitz- berg, auquel on a donné le nom de fr an- colin > s'appelle aulîi coureur de rivage s parce qu'il ne s'éloigne jamais beaucoup de ïa côte où il trouve la nourriture qui lui convient j favoir, des vers gris & des chevrettes-, mais il n'eit pas plus gros qu'une alouette (d). Le francolin donc Olina donne la defeription & la figure (e)y eft celui dont il s'agit ici: celui de M. Edwards en diffère quelques points (f) y Se paroît être exactement le même oifeau que le francolin de M. Tournefort (g) * qui fe rapproche auili de celui de Fer- rare, en ce qu'il fe plaît fur les côtes de îa mer & dans les lieux marécageux. (c) Alii alium quemâam Francolin um faciunt cru»- ribus rubris , pifeibus viventtm , Ferrariœ , ut audio , uotum. Gefner, ibidem. (à) Voyages de M. l'abbé Prévôt, /0772e XV* ■page 276. (e) CYmz,page 33. (f) Edwards , planche ccxlvi. (gj Voyages au Levant de M. de Tourneforr^ t'jme I, page 412$ & tome II, page, 103, du Francolin. 225 Enfin le nôtre paroît différer de ces trois derniers, ticuiières. Il eft certain que le francolin a beau- coup de rapports avec la perdrix : & cefl: ce qui a porté Clina , Linnsus & BriiTon à les ranger parmi les per- drix. Pour moi , après avoir examiner (h) Briffon ? Ornithologie. , tome I , page 245. Kv ti6 Hijîoire Naturelle de près & comparé ces deux fortes d'oifeaux, j'ai cru avoir obfervé entr'eux aiîez de différences pour les réparer-, en effet , le francolin diffère des perdrix, non-feulement par les couleurs du plu- mage , par la forme totale , par le porr de la queue & par ion cri, mais encore parce qu'il a un éperon à chaque Jambe (i) y tandis que la perdrix mâle n'a qu'un tubercule calleux aui lieu d'éperon. Le francolin eft aufîi beaucoup moins j répandu que la perdrix : il paroît qu'il I ne peut guère fubfifter que dans îesj pays chauds •, l'Efpagne 5 l'Italie & lai Sicile, font prefque les feuîs pays de- ï'Europe où il fe trouve *, on en voir aulîi à Rhodes (k)y dans l'île dej Chypre (l) >\ Samos (mjj dans lai i) Celui d'OIina n'en a point; mais il y a ap*J ïence qu'il a fait defliner la femelle. (k) Olina. (I) Tournefort. (m) Edwards M. Edwards dit qu'il n'e01 pas queftion du francolin dans le texte du Voyage $ au Levant de M. de Tournefort , quoiqu'il y ait I du Francolïn. iiy Barbarie, & fur -tout aux environs de Tunis (n) _, en Egypte , fur les côtes d'Afie (o) 8c à Bengale ( p ). Dans tous ces pays,- on trouve des francolins êc des perdrix qui ont chacun leurs noms ■diitinéts & leur efpèce féparée. La rareté de ces oifeaux en Europe, jointe au bon goût de leur chair, ont donné lieu aux défenfes rigoureufes qui ont été faites en plusieurs pays de les tuer -, & de-là on prétend qu'ils ont eu le nom de francolin^ comme jouiiTanc d'une forte de franchife fous la fauve- garde de ces défenfes. une figure de cet oifeau, fous le nom de Fran~ colin, forte d'oifeau qui fréquente les marais. Cette afiertion eft fautive ; voici ce que je trouve, tome I de ce Voyage , p âge t\i 2 j, édition du Louvre : « Les francolins n'y font pas communs (dans l'île de 1* Samos), & ne quittent pas ïa marine, entre le « petit Boghas & Cora, auprès d'un étang mare- <* eageux , on les appeïle Perdrix des prairies, >* ta figure de l'oifeau porte Amplement en tête I§ aom de francoîin. (n) Oiina, page 33. (0) Tournefortj Voyage ait Levant, tome IÏ-5- ,|>age 103, (v) Edwards, * «rrr *■ 228 HiJIoire Naturelle On fait peu de chofe de cet oifeau au- delà de ce que montre la figure : Ton plu- mage eft fort beau -, il a un collier très- remarquable de couleur orangée •, fa grofTeur furpafïe un peu celle de îa per- drix grife : la femelle eft un peu plus petite que le mâle, & les couleurs de fon plumage font plus foibles & moins variées. Ces oifeaux vivent de grains : on- peut les élever dans des volières ; mais il faut avoir l'attention de leur donner à chacun une petite loge où ils puiiïent fe tapir & fe cacher, & de répandre dans la volière du fable & quelques pierres de tuf. Leur cri eft moins un chant qu'urr fifflement très-fort qui fe fait entendre de fort loin (q). Les francolins vivent à peu près autant que les perdrix (r) : leur chair eft ex* quife ; elle eft quelquefois préférée à celle des perdrix & des faifans, (q) Olina. (t) Lkuu du Francolin. 229 M. Linnarus ( f ) prend la perdrix de Damas de WHIuIghby pour ïe fran- colin (t) 'j fur quoi il y a deux re- marques à faire ; ïa première , que cette perdrix de Damas eft plutôt celle de Bélon qui en a parlé le premier (u) 3 que celle de WHIuIghby qui n'en a parlé que d'après Bélon", la féconde y que cette perdrix de Damas diffère du francolin, & par fa petiterTe puifqu'elle eft moins grofTe que la perdrix grife, félon Bélon , & par fon plumage , comme on peut le voir en comparant les figures dans nos planches enluminées ; & par Ces pieds velus, qui ont empêché Bélon de la ranger parmi les râles de genêt ou les pluviers. M. Linna?us aurort dû reconnoître le francoliii de Tournefort dans celui d'Oîina, dont WHIuIghby fait mention (x ) ; enfin le naturalifte Suédois fe trompe encore en fixant exclufivement f/y'Linnaeus, Syjî. nat. edit. X,page 161. (t) Willulghby, Ornithologie , page 128, (u) Selon, Obferv. page 152. (x) WHIuïghbyj Ornithologie > page 125= z 3 o Hijîoire Naturelle y &c. l'Orient pour le climat du francolin; puifque cet oifeau fe trouve, comme je lai déjà remarqué, en Sicile, en Italie, en Efpagne, en Barbarie, 8c dans quel- ques autres contrées qui n'appartiennent point à l'Orient. Ariftote met l'attagen , que Bélon regarde comme le francolin , au rang des oifeaux pulvérateurs & frugivores (y) : Bélon lui fait dire de plus que cet oifeau pond un grand nombre d'oeufs flJ _, quoique cela ne fe trouve point à l'endroit cité } mais c'eft une confé- quence que l'on peut tirer , dans les principes d'Ariftote , de ce que cet oifeau eft frugivore Se pulvérateur. Bélon dit encore , d'après les Anciens, que le francolin eft fréquent dans la campagne de Marathon , parce qu'il fe plaît dans les lieux marécageux -, & cela s'accorde très-bien avec ce que M. de Tournefort rapporte des fran- colins de Samos (a). (y) Ariflote , Hijlor. Animal lib. IX , cap. XLIX, (\) Avis multipara eft attagen. Bélon, A7flf. des Oifeaux, page 241. (a) Tournefort 7 tome I,page 412» 3}| Le BIS-ERGOT. lu A première espèce qui nous paroît voiiine du francolin, c'eft l'oifeau qui nous a été donné fous le nom de Perdrix du Sénégal* : cet oifeau a à chaque pied deux ergots, ou plutôt deux tubercules de chair dure & calleufe, & comme c'efl une efpèce ou race particulière, nous lui avons donné le nom de Bis-ergot j à caufe de ce cara&ère de deux ergots qu'il a à chaque pied. Je ïe place à la fuite des francolins* parce qui! me paroîr avoir plus de rapports avec eux qu'avec les per- drix , foit par fa grolTeur , foit par la longueur du bec & des ailes, foit par fes éperons. * Voye\ les planches enluminées, n.° 137. 232 Hifîoire Naturelle Le GORGE-NUE ET LA PERDRIX Rouge d'Afrique: Let Oiseau, que nous avons vu vivant à Paris, chez feu M. le Marquis de Montmirail , a îe delîbus du cou 8c de îa gorge dénué de plumes & Ample- ment couvert d'une peau rouge -, le refte du plumage eft beaucoup moins varié & moins agréable que celui du francolrn. Le gorge-nue fe rapproche de cette efpèce par Tes pieds rouges & fa queue épanouie , 8c de l'efpèce précédente , qui eft celle du bis-ergot, par le double éperon qu'il a pareillement à chaque pied. Le défaut d'obfervations nous met hors d'état de juger à laquelle de ces deux efpèces elle relTemble le plus par fes mœurs ou par fes habitudes. M. Au- blet m'affine que c'eil un oifeau qui fe perche. du Gorge-nue. 233 La perdrix rouge d'Afrique* ell plus rouge que nos perdrix rouges, à caufe d'une large tache de cette couleur qu'elle a fous la gorge -, mais le refte de (on plumage eft beaucoup moins agréable : elle diffère des trois efpèces précédentes par deux caractères fort apparens, fes éperons plus longs & plus pointus, & fa queue plus épanouie que ne Font ordinaire- ment les perdrix -, le défaut d'obfervations nous mec hors d'état de juger fi elle en diffère auili par fes mœurs ou par fes habitudes. : * yoyei les planches enluminées, n.° i8o> 2j4 Hiftoire Naturelle OISEAUX ÉTRANGERS Qui ont rapport aux Perdrix. , I. J_j A Perdrix rouge de Barbarie, donnée par M. Edwards, planche LXX _, nous paroît être une efpèce différente de notre perdrix rouge d'Europe, elle efl: plus petite que notre perdrix grife -, elle a le; bec, le tour des yeux & les pieds rou- ges comme la bartavelle-, mais elle a fur ie haut des ailes des plumes d'un beau bleu bordé de rouge-brun-, & autour dui cou une efpèce de collier formé par des I taches blanches, répandues fur un fond! brun, ce qui, joint à fa petiteffe, diftin- gue cette efpèce des deux races de per-J drix rouges qui font connues en Europe. des Oifeaux étrangers , &c. 2 3 $ I I. La PERDRIX de Roche ou de la G ambra. Cette Perdrix prend fon nom des lieux où elle a coutume de fe tenir ?par préférence*, elle fe plaît, comme | les perdrix rouges , parmi les rochers ;& les précipices : fa couleur générale | eft un brun obfcur , & elle a fur la poitrine une tache couleur de tabac d'Efpagne. Au refte , ces perdrix fe rapprochent encore de la perdrix rouge par la couleur des pieds, du bec êc du tour des yeux ; elles font moins groffes que les nôtres , & retrouvent la queue en courant *, mais, comme elles , elles courent très - vite , & ont en gros la même forme (a) ; leur chair eft excellente. (a) Voye\ Journal de Stibbs, page 287; & l'abbé Prévôt 7 tome III, page g 09* 2 j 6 Hijloire Naturelle I I I. La perdrix m PERLÉE DE LA C H I N E. Cette Perdrix, qui n*eft connue que par la defcription de M. Brifïon f b )â , paroîc propre à l'extrémité orientale de lancren continent \ elle eft un peu plus groile que notre perdrix rouge , elle a i îa forme, le port de la queue, la briè- veté des ailes & toute la tournure de la perdrix -, elle a de notre rouge ordi- naire (n? \^o), la gorge blanche-, & de celle d'Afrique ( n? 180 ) > les épe- rons plus longs & plus pointus -, mais elle n'a p.is, comme elle, le bec Se les pieds rouges -, ceux-ci font roux, 8c le bec eu: noirâtre , ainii que les ongles : le fond de fon plumage eft de couleur obfcure égayée fur la poi- trine & les cotés par une quantité de petites taches rondes de couleur plus claire -, d'où j'ai pris occafion de la (h) Eriflon , Ornithologie , tome I , page 234, des Oifeaux étrangers , &c. 237 nommer perdrix perlée : elle a outre cela quatre bandes remarquables 3 qui partent delà baie du hec & fe prolongent fur les cotés de la tête 5 ces bandes font alternativement de couleur claire & rem»- brunie. ï V. | La PERDRIX : de la nouvelle Angleterre ( c\ Je mets cet oifeau d'Amérique & 'les fuivans à la fuite des perdrix, non que je les regarde comme de véritables perdrix, mais tout au plus comme leurs repréfentans , parce que ce font ceux des oifeaux du nouveau monde qui ont ïe plus de rapport avec les perdrix, lefquelles certainement n'ont pas l'aile. [ allez forte ni le vol allez élevé , pour avoir pu traverser les mers qui féparenc ;; le vieux continent du nouveau, L'oifeau dont il s'agit ici, eil plus petit que la perdrix grife ; il a l'iris fçj Brilibn, Ornithologie ? tomel, page 2 29, 2 3 8 Hijloire Naturelle, &c. jaune, le bec noir, la gorge blanche, & deux bandes de la même couleur qui vont de la bafe du bec jufque derrière la tête en payant fur les yeux-, il a auffi quelque» taches blanches au haut du cou : le delïbuï du corps eft jaunâtre rayé de noir, & deflùs d'un brun tirant au roux, à pet près comme dans la perdrix rouge, mai; bigarré de noir: cet oifeau a la queut courte comme toutes les perdrix-, il f< trouve non-feulement dans la nouvell* Angleterre , mais encore à la Jamaïque quoique ces deux climats foient dirle rens. M. Albin en a nourri affez long; temps avec du blé & du chenevis (dj. (à) Albin , tome I, page 25. Z39 LA CAILLE (a). Planche Vil de ce volume* héophrAste trouvent une iî grande refTemblance entre les Perdrix & les Cailles, qu'il donnoit à ces der- nières le nom de Perdrix naines ; & ce& fans doute par une fuite de cette méprife, ou par une erreur femblabie, que les Portugais ont appelé la perdrix çodornix j & que les Italiens ont appliqué le nom de coturnice à la bartavelle ou . "* Voyt\ les planches enluminées, îi»° 170.— Nota. Frifch prétend , planche cxvn, que, du temps de Charlemagne , on lui donnoit îe nom de Quacarà ; quelques-uns lui ont auffi donné celui de Currelius , & j'en dirai plus bas ia raifon : quoi qu'il en foit, ce« deux noms ont été omis par M. Briffon. (a) o'^u'è ? en Grec ; en Latin , Coturnix ; em Efpagnoï $ Cuad&rvix i en Italien , Quaglia ; en Allemand, Wachtd; en Anglois, Quail; en Po- îonois, Pr^epiorka. — Coturnix, Gefner9 Avium^ page 352. ..... . Aldrovande , AvL tome I ï , page 150 Frifch, pi. ex vu, avec une figure coloriée du mâle & une de Ja femelle?., 240 Hijîoin Naturelle perdrix grecque. Il efl: vrai que ïes perdrix & ïes cailles ont beaucoup de rapports entr'eliesj les unes & les autres font des oifeaux pulvérateurs , à ailes & queue courtes Se courant fort vite (b) ^ à bec de gallinacés 3 à plumage gris moucheté de brun & quelquefois tout blanc (c); du refte , fe nourriiïant, s'accoupîant , conftruifant leur nid, couvant leurs œufs , menant leurs pe- tits à peu près de la même manière, & toutes deux ayant le tempérament fort lafeif, & les mâles une grande difpofition à fe battte : mais quelque nombreux que foient ces rapports , ils1 fe trouvent balancés par un nombre prefqu'égal de diîlemblances, qui font' de Tefpèce des cailles une efpèce tout- à- fait féparée de celle des perdrix : en erlet, i.u les cailles font conftammentj plus petites que les perdrix , en com-i parant les plus grandes races des unes aux plus grandes races des autres 5 & (b) Curritfatîs velociter unde Currelium vulgo d'ici- mus. Comefto3 & al il. (c) Ariftote, lib. de Coloribus , cap. V I. de la Caille. 141 îes plus petites aux plus petites ; 2.0 elles n'ont point derrière les yeux cet efpace nu 8c fans plumes qu'ont les perdrix, ■ni ce fer- à -cheval que les maies de celles-ci ont fur la poitrine, 8c jamais bon n'a vu de véritables cailles à hec 8c pieds rouges ; 3.0 leurs œufs iont plus petits 8c d'une toute autre couleur *, 4.0 leur voix eft aufïi différente , 8c quoique ■îes unes 8c les autres faftent entendre leur cri d'amour à peu près dans le ,même temps, il n'en eft pas de même ;du cri de colère ; car la perdrix le fait ^entendre, avant de fe battre, & la caille lien Te battant (d) ; 5.0 la chair de celle- ci eft d'une faveur 8c d'une texture toute différente , 8c elle eft beaucoup ■plus chargée de graifte 5 6.° fa vie eft jplus courte -, 7.0 elle eft moins rufée que la perdrix , 8c plus facile à attirer dans le piège, fur -tout lorfqu'elie eft encore jeune & fans expérience : elle la les mœurs moins douces oc le naturel plus rétif ; car il eft extrêmement rare d'en voir de privées , à peine peut-on (à) Ariftote , Hijîor. Animal. lib. VIII , cap, XII, Oifèaux j Tome IV%. h 2,42 Hijloire Naturelle les accoutumer à venir à ia voix étant renfermées de jeu nèfle dans une cage-, elle a les inclinations moins fociales , car elle ne fe réunit guère par compa- gnies , Ci ce neft lorfque la couvée , encore jeune, demeure attachée à la mère, dont les fecours lui font nécef- faîres , ou lorfqu une même caufe agif- fant fur toute l'efpèce à la fois & dans le même temps , on en voit des troupes nombreufes traverfer les mers & aborder dans le même pays -, mais cette afibciatio» forcée ne dure qu'autant que la caufe qui l'a produite 5 car, dès que les cailles font arrivées dans le pays qui leur con- vient , & qu'elles peuvent vivre à leur gré , elles vivent folitairement. Le be- ioin de l'amour eft le feul lien qui les réunit, encore ces fortes d'unions font- elles fans confiftance pendant leur courte durée 5 car les mâles , qui recherchent les femelles avec tant d'ardeur , n'ont d'attachement de préférence pour au- cune en particulier. Dans cette eipèce, les accouplemens font fréquens , mais Ton ne vok pas un feul couple ; lorfque le defir de jouir a celle , toute, de la Caille. 243 Fociété elt. rompue entre les deux fexes; le mâle alors non-feulement quitte & fem- ble fuir fes femelles , mais il les repoufïe à coups de hec , & ne s'occupe en aucune façon du foin de la famille *, de leur côté, les petits font à peine adultes qu'ils fe féparent -, & , il on les réunit par force dans un lieu fermé , ils fe battent à ou- trance les uns contre les autres , fans distinction de fexe 3 & ils finiflent par fe détruire (e ). L'inclination de voyager & de chan- ger de climat , dans certaines faifons de Tannée, eft , comme Je l'ai dit ailleurs (f)y Tune des affe&ions les plus fortes de i'inf- un& des cailles. La caufe de ce defir ne peut être qu'une caufe très - générale , puifqu'elle agit non -feulement fur toute l'espèce, mais fur les individus même féparés , pour ainiî dire , de leur efpèce , & à fe) Les Anciens favoient bien cela, puifqu'ifs =cufoient des enfans querelleurs & mutins, qu'ils étoient quéreiïeurs comme des cailles tenues ea cage. Ariflophane. (f) Tome I de cette Hiftoire Naturelle des Oi- |eaux7pa^e 16* M 244 HiJIoire Naturelle qui une étroite captivité ne îaifTe au- cune communication avec îeurs fem- blables. On a vu de jeunes cailles élevées dans des cages , prefque depuis leur naifïance , & qui ne pouvoient ni connoître ni regretter la liberté , éprouver régulièrement deux fois par an , pendant quatre années , une inquié- tude Se des agitations fingulières dans îes temps ordinaires de la palTe ; favoir , au mois d'Avril & au mois de Sep*-, tembre *, cette inquiétude duroit environ trente jours à chaque fois , & recom- mençoît tous les jours une heure avant le coucher du foleii -, on voyoit alors ces cailles prifonnières aller & venir, d'un bout de la cage à l'autre , puis s'élancer contre le filet qui lui fervoit de couvercle , & fouvent avec une telle violence quelles retomboient tout étourdies : la nuit fe paiToit prelqu'en- tiérement dans ces agitations *, & le jour Suivant , elfes paroifloient triftes , abat- tues , fatiguées & endormies. On a remarqué que les cailles , qui vivent dans l'état de liberté , dorment aufti une grande partie de la journée j 8ç il l'or* de Id Caille. 245 ajoute à tous ces faits , qu'il eft très-rare de les voir arriver de jour, on fera, ce me femble , fondé à conclure que c'eft pendant la nuit qu'elles voyagent (g)» & que ce defir de voyager eft inné chez elles , foie qu'elles craignent les températures exceffives , puifqu elles fe rapprochent conftamment des contrées feptentrionales pendant Tété 3 & des méridionales pendant l'hiver -, ou , ce qui femble plus vraifemblable, qu'elles n'abandonnent fucceiTïvement les dif- férées pays , que pour parler de ceux où les récoltes font déjà faites dans ceux où elles font encore à faire , ck qu'elles ne changent ainfi de demeure que pour trouver toujours une nourri- ture convenable pour elles 3c pour leur couvée. Je dis que cette dernière caufe eft la plus vraifemblable j car , d'un coté , (g) Les cailles prennent leur voïée plutôt dé nuit que de jour. Béion , Nature des O i féaux , pags 26g. Et hoc femper noclu , dit Pline , en parlant des •volées de cailles qui , fondant toutes à la fois fur un navire pour ferepofer, le faifoient couler à-fbnef par Jeur poids* LiiJ 246 Uijloire Naturelle il eft acquis , par î'obfervation , que les cailles peuvent très - bien réiifter au froid, puifqu'il s'en trouve en IfîancJe, félon M. Horrebow (h) > 8c qu'on en a confervé , plusieurs années de fuite , dans une chambre fans feu , & qui même étoit tournée au nord , fans que les hivers les plus rigoureux aient paru les incommoder , ni même apporter ïe moindre changement à leur manière de vivre j d'un autre côté , ii femble qu'une des ehofes qui les fixent dans un pays , c'eft l'abondance de l'herbe ; puifque , felcn la remarque des Chaf- feurs , îorfque îe printemps eft fec , & que par conséquent l'herbe eft moins abondante , il y a auffi beaucoup moins de cailles le refte de l'année : d'ailleurs le befoin a&uel de nourtiture eft une caufe plus déterminante , plus analogue à l'inftinct borné de ces petits animaux, & fuppofe en eux moins de cette pré- voyance que les Philofophes accordent trop libéralement aux bêtes : lorfqu'ils (h) Voyci Horrebow , Hi poire générale des Voya- ges, tome V, page 203» de la Caille. 247 ne trouvent point de nourriture dans un pays , il e(l tout (impie qu'ils en aillent chercher dans un autre -, ce hefo'm \ eflTentrel les avertit , les preile , met en adiïon toutes leurs facultés *, ils quittent une terre qui ne produit plus rien pour eux j ils s'élèvent en l'air , vont à la dé- i' couverte d'une contrée moins dénuée , , s'arrêtent où ils trouvent à vivre : & l'habitude fe joignant à iniitincl: qu'ont tous les animaux , & fur - tout les animaux ailés , d'éventer de loin leur nourriture , il n'eft pas iurprenant qu'il en réfuite une affection, pour ainii dire, innée, & que les mêmes, cailles reviennent tous les ans dans les mêmes endroits -, au lieu qu'il feroit dur de fuppofer , avec Ariftôte (i) j que c'eit. d'après une connoilTance réfléchie des faifons qu'elles changent deux fois par an de climat, pour trouver toujours la température qui leur convient , comme faifoient autrefois les Rois de Perfe j encore plus dur de fuppofer (i) Ariftôte , lib. VIII > cap. xn. Liv 248 HiJIoire Naturelle avec Catesby (k) _, Bélon (l) & quelques autres , que lorsqu'elles changent de climat , elles pafTent , fans s'arrêter 5 dan« les lieux qui pourroient leur convenir en - deçà de la Ligne , pour aller cher- cher 3 aux Antipodes , précifément îc même degré de latitude auquel elles étoient accoutumées de l'autre côté de l'Equateur -, ce qui iuppoieroit des con- noiflances, ou plutôt des erreurs Scien- tifiques , auxquelles Tinftincl: brut eft beaucoup moins fujet que la raifon cul- tivée. Quoi qu'il era foit , iorfque les cailles font libres , elles ont un temps pour arriver , & un temps pour repartir : elles quittoient la Grèce , fuivant Arif- tote 3 au mors Bocdromion (rn) ^ lequel comprenoit la fin d'Août & le com- mencement de Septembre. En Silélie , (k) Voye\ Catesby , Tranfaëtions Philo fophiques-» ji.° 486 , art. vi, page 161. (I) Bélon, Nature des Oifeaux , page 265. (m) Voye\ Ariftote , Hijlor. Jrùmal, 1$, VIII,» çap. XIU de la Caille. 249 élîes arrivent au mois de Mai , & s'en vont fur la fin d'Août (n) ; nos Chaf- feins difent qu'elles- arrivent dans notre pays vers le 10 ou le 12. de Mai j Aioyfius Mundella dit qu'on les voit paroître , dans les environs de Venifc, vers le milieu d'Avril. Olina fixe leur arrivée , dans la campagne de Rome , aux . premiers jours d'Avril -, mais prefque cous conviennent qu'elles s'en vont à la première gelée d'automne (0) 3 dont l'effet eîl d'altérer la qualité des herbes , ëc de faire difparoîcre les infectes -, &c h les gelées du mois de Mai ne les dérerminent point à retourner vers le fud , c'eft une nouvelle preuve que ce n'eit point le froid qu'elles évitent, mais quelles cherchent de la nourri- ture > dont elles ne- font, point privées par les gelées du mois de Mai. Au reite , il ne faut pas regarder ces temps, marqués par les Observateurs , comme des époques fixes auxquelles la Nature (n) Voyei Schwenckfeïd , Âvïavium Sile/i^^ (0) Voyei Gefner,- êk 4'vibus , pag. 354, Lv 250 Hijïoire Naturelle daigne s'afïujettir , ce font au contraire des termes mobiles , qui varient entre certaines limites d'un pays à l'autre , fuivant la température du climat , & même d'une année à l'autre , dans le même pays , fuivant que le chaud & le froid commence plutôt ou plus tard , & que par conféquent la maturité des ré- coites & la génération des infectes , qui fervent de nourriture aux cailles , e(t plus ou moins avancée. Les Anciens & les Modernes fe font beaucoup occupés de ce palTage des cailles & des autres oifeaux voyageurs : les uns l'ont chargé de circonftances plus ou moins merveiileufes -, les au- tres , coniidérant combien ce petit oi- feau vole dirïicilement Se pefamment , l'ont révoqué en doute , que , fur une étendue de cote de quatre ou cinq milles , on en prend quelquefois jufqu'à cent milliers dans un jour, & qu'on les donne pour quinze jules le cent ( un peu moins de huit livres de notre monnoie ) à des efpèces de Courtiers , qui les font paiïer à Rome-, où elles font beaucoup moins commu-; nés ( c) ; il en arrive aufli des nuées, su printemps , fur les cotes de Pro- vence , particulièrement dans les terres de M. i'Evêque de Fréjus , qui avoiiinent h. mer *, elles font il fatiguées, dit -on, de la traverfée , que les premiers jours on les prend à la main. Mais, dira-t-on toujours, comment. (b) Aloyjius Mu n délia, apud Gefuerum , p. 3^4. fcj Voyez Gefner , de Apihus , pag. 356 : 8c AMrovarfde , OrnithoL tom. Il , pag. 164. Cette chaiïe eft li lucrative , que ie terrein où e . par les habitans de Nettuno, eft d'une chci - bitante. ~ de la Caille. i^y un oifeau fi petit , fi faible , & qui a ïe vol fi pelant &. Ci bas , peut - il , quoique prefTé par la faim , traverser ; de grandes étendues de mer ? J'avoue que , quoique ces grandes étendues de ; mer foient interrompues de diftance en diftauce par plufieurs îles , où les cailles peuvent fe repofer , teîies que Minorque 3 îa Corfe , la Sardaigne , ïa Sicile , les îles de Malte , de Rhodes , toutes les îles de TArchîpel , j'avoue , dis -je, ; , que , malgré cela , il leur faut encore du I iecours ', & Ariftote Ta voit fort bien fenti ; il favoit même quel étoit celui dont elles ufoicnt le plus communé- ment *, mais il s'étoit trompé , ce me ; fembîe , fur la manière dont elles s'en aidoient : te Lotfque le vent du nord . fouille , dit « ri , les cailles voyagent « heureufement 5 mais Ci c'ed le vent « du midi , comme fon effet eft d'ap- pefantir & d'humecter , elles volent « alors plus difficilement , & elles ex- « priment la peine Se l'effort par les co cris qu'elles font entendre en volant» ' (d). Je crois en effet que c'efi le vent (i) AxïRotç zHiJlor,4'iimaLlib,VlH, cap.xik 2 5 8 Hifioire Naturelle qui aide les cailles à faire îeur voyage , non pas le vent du nord , mais le vent favorable ; de même que ce n'eft point ie venc du fud qui retarde leur courfe , mais le vent contraire \ & cela eft vrar dans tous les pays où ces oifeaux ont un trajet coniïdérable à faire pardeffus les mers (c). M. le commandeur Godeheu a très- bien rémarqué qu'au printemps , les I cailles n'abordent à Malte qu'avec le nord- ou en: , qui leur eft conrraire pour- gagner la Provence , & qu'à leur re tour , c'eft le fud - eft qui les amène dans cette île , parce qu'avec ce vent , , elles ne peuvent aborder en Barbarie (f): nous voyons même que l'Auteur de îa Nature s'eft fervi de ce moyen , i comme le plus conforme aux loix gé- nérales qu'il avoir établies 3 pour envoyer ; de nombreules volées de cailles aux (&) Aura tamen vehi volunt propter pondus corporunf i virefque paivas. Pline , Hifloria Nat. lib. X , cap»- j XXIII. (f) Mémoires préfentés à l'Académie Royale de£ Sciences pur divers fc'avans, tome III, page 93. de la Caille, 259 Ifraéîîtes dans le défert (g) ; & ce vent , qui étoit le fud-oueft, paifoit en effet >en Egypte , en Ethiopie 3 fur îes côres de la mer Rouge , & , en un mot , dans les pays 01} les cailles font en abon- dance (h). Des Marins , que j'ai eu occafion de bconfulter , m'ont aiTuré que quand les cailles étoient furpiifes , dans ieur paf- iage , par le vent contraire , elles s'abat- Itoient fur les vaifTeaux qui fe trouvoient ■ ih. leur portée , comme Pline Ta remar- qué ( i ) j & tomboient fouvent dans îa ;mer , & qu'alors on les voyoit flotter & fe débattre fur les vagues y une aile en l'air , comme pour prendre le vent -, d'où quelques Naturalises ont pris occafion , de dire qu'en partant 3 elles fe munirloient (g) Tranjîulit aujlrum de cœlo & induxit in virtute ' fuâ Africum & pluit.fuper eos ficut pnlverem camus , & fîcut arenam maris volatiliapennata. Pfaïm. 77. (h) Sinus arabicus cotumicibus plurimum abundau TL]ofeiph.liè.lIItcaj>.i. (i) Advolant .... non fine periculo navigantium I cum appropinquapere, terris, quippè vdis fœpè infident, ) & kocfemper noEtu , merguntque navigial ?iinQ}, Hitt* ' 2V«f. lib. X, cap. xxi 11. ±6o Hijloire Naturelle d'un petit morceau de bois , qui pût îeuî iervir d'une efpèce de point d'appui ou de radeau , fur lequel elles fe délaf- foient de temps en temps , en voguant fur les flots 5 de la fatigue de voguei dans l'air (k) : on leur a fait auiïï porter, à chacune , trois petites pierres dans le bec , félon Pline (l) _, pour fe foutenir contre le vent ; & , félon Oppien (m) . pour reconnoître , en les laiiïant tombée une à une , iî elles avoient dépafTé la mer-, & tout cela fe réduit à quelque! petites pierres que les cailles avalent avec leur nourriture , comme tous le* granivores : en général , on leur a prêté des vues , une fagacité , un difeerne- ment , qui feroient prefque douter que ceux qui leur ont fak honneur de c (k) Voye% AIdrovande r Omithologia ,. tom.- II . Pag- *56- (l) Qnodji ventus agmeri adrerfo flatu , cœperit in-' àibere , pcndufcuUs appre/ienfis , aut gutture arenâ re* ■pkio ftabïlita volant, lïb. X, cap. XXIII. On voit, à travers cette erreur de Pline, qu'iï favoit mieux qu'Ariftote comment ïes cailles tiroient pary d\l vent pour pafler les mers. (m) Oppian. in Ixw„- de la Caille. 261 qualités en aient fait beaucoup d'ufage eux-mêmes. On a obfervé que d'autres oileaux voyageurs , tels que le Raie terreftre , accompagnoient les cailles , & que 1 oifeau de proie ne manquoit pas d'en attraper quelqu'une à leur arrivée > de -là on a prétendu qu'elles avorent de bonnes raifons pour Te choifir un guide ou chef d'une autre eipèce , que Ton a appelé roi de cailles (ortygometra) ; & cela , parce que la première arri- vante devant être la proie de l'oifeau jtamaffier , elles uchoient de détourner |ee malheur fur une tête étrangère (n). I Au relie , quoiqu'il foit vrai en gé- néral que les cailles changent de climat , il en refte toujours quelques-unes qui i n'ont pas la force de fuivre les autres, foit qu'elles ■ aient été bielïées à Faile , foit qu'elles 1 oient furchargées de graifTe , foit que, provenant d'une fecondeponte, elles (oient trop jeunes & trop foibles pu temps du départ \ ôc ces cailles ! (n) Primam earum terrée appropinquantem accipiter wBÉiit. Pline , Iq.co citato. Ac propterea opéra efi uni- r.verfis , ut folliciient arem generis externi per quemfruf- ■ mntur prima difcrimiiia. Solinu5? cap. XVUU z6z Hljtoire Naturelle traîneufes tâchent de s'établir dans î meilleures exportions du pays , où elL font contraintes de refter (oj. Le nombre en eft fort petit dans nos provinces -, mais les Auteurs de la Zoologie Bri- tannique aiïurent qu'une partie feulement, de celles qu'on voit en Angleterre , quitte entièrement file , Se que l'autre partie fe contente de changer de quartier, pafiant. vers le mois d'Octobre , de l'intérieuii des terres dans les provinces maritimes & principalement dans celle d'Elîex , où elles relient tout l'hiver : iorfque gelée ou la neige les obligent de quitter les jachères & les terres cultivées , elle; gagnent les côtes de la mer , où elle, fe tiennent parmi les plantes maritimes cherchant les meilleurs abris , & vivan de ce qu'elles peuvent attraper fur le algues , entre les limites de la haute £ balle mer : ces mêmes Auteurs ajouten que leur première apparition dans I< comté d'Eifex , fe rencontre exacte ment, chaque année, avec leur diiparitioj foj Coturniccs quoqut difccdtmt , nifi pauc<£ in lo> spricis remanfmnt. Ariflot. Hifîor. Animal, lib. VIII cap. xil. de la Caille. z 6 3 du milieu des terres (p). On dit aufîi qu'il en refte un allez bon nombre en Efpagne & dans le fud de l'Italie , où l'hiver n'eft: prefque jamais allez rude pour faire périr ou difparoître entière- ment les infedtes ou les graines qui leur fervent de nourriture.. ; A l'égard de celles qui parlent les mers , il n'y a que celles qui font fé- condées par un vent favorable qui arrivent heureufement 5 8c fi ce vent 'favorable foufïle rarement au temps de ïa paiïe , il en arrive beaucoup moins .dans les contrées où elles vont palier l'été: dans tous les cas, on peut juger alîez fûrement du lieu d'où elles vien- nent, par la direction du vent qui les apporte. Auffitôt que les cailles font arrivées dans nos contrées , elles fe mettent à ■ pondre-, elles ne s'apparient point, comme je l'ai déjà remarqué, 8c cela ' feroit difficile , 'fi le nombre des miles t; e(t , comme on l'aifure ^beaucoup plus : grand que celui des femelles -, la fidélité 3 (p) V°yz\ Britifch Zioology * page 87, 264 MiJIoire Naturelle h confiance, l'attachement perfonnel; qui feroient des qualités eftimables dans les individus , fetoient nuifibles a 1 efpece ;, la foule des mâles célibataires troubleroïc tous les mariages, & finirait par les rendre ftériles; au lieu que ny ayant point de mariage , ou plutôt n y en ayant qu'un feul de tous les mâles avec toutes les femelles , il y a moins de jaloulie , moins de rivalité , & , fi l'on veut , moins de moral dans leurs amours : mais aufll H y a beaucoup de phyfique ; ou a vu un mâle réitérer , dans un jour , jufqu a douze fois fes approches , avec pluheurs femelles indiftftftement -, ce n eft que dans ce fcns qu'on a pu dire que chaque mâle fuffifoit à pluheurs fe- melles (q) ; & k Nature,, qui leur infoirc cette efpèce de libertinage , en tire parti pour la multiplication de iel- pèce; chaque femelle dépoie de quinze à vingt œufs dans un nid quelle (ait creufer dans la terre avec fes ongles, qu'elle garnit d'herbes & de feuilles, fa) Vma Aldrovar.de , Omithohgia , tom. II, „,„,„; & Schwenckfeld , Ar'wwm Sdefi*. r =" v pag. 348- & de la Caille. 26 êc qu'elle dérobe autant qu'elle peut à l'œil perçant de l'oifeau de proie ; ces oeufs font mouchetés de brun fur un fond griiâtre -, elle les couve pendant environ trois femaines *, l'ardeur des mâles eft un bon garant qu'ils font tous fécond- dés , & il eft rare qu'il s'en trouve de ftériles. Les Auteurs de ia Zoologie Britan- nique difent que les cailles en Angle-' terre , pondent rarement plus de fix ; ou fept œufs ( r) ; Ci ce fait eft général | Se conftant , il faut en conclure qu'elles y font moins fécondes qu'en France, l en Italie , &c. rede à obferver fi cezzz : moindre fécondité tient à la température plus froide , ou à quelqu'autre qualité du climat. Les cailïëtaux font en état de courir 1 prefque en fortant de la coque, ainfî que ; les perdreaux -, mais ils font plus ro- f buftes à quelques égards , puifque , dans l'état de liberté, ils quittent lanière beau- ; coup plutôt , 8c que même , dès le huitième jour, on peut entreprendre de (r) Voyei Britifch Zooîogy , fag.,%1. Oifeaux j Tome IF* M 2 66 Hi/Ioire Naturelle les élever Tans fon fecours. Cela a donné lieu à quelques perionnes de croire que les cailles faiioient deux cou- vées par été ( fj ; niais j'en doute tort, fi ce n'en; peut-être celles qui ont été troublées & dérangées dans leur pre- mière ponte : il r/eft pas même avér| qu'elles en recommencent une autre lorfqu'elles font arrivées en Afrique au mois de ieptembre , quoique cela ioit beaucoup plus vraifembiable , puifqu'aij moyen de leurs migrations régulières , elles ignorent L'automne & l'hiver, 8c que l'année n'eft compefée pour elles que de deux printemps & de deux étés , comme li elles ne changeoient de climat que pour fe trouver perpétuelle- • ment dans la faifon de l'amour & de la fécondité. Ce qu'il y a de fur, c'en: qu'elles quittent leurs plumes deux fois par an y à la En de l'hiver & à la fin de ï'été ; chaque mue dure un mois , & (f) Aldrovande , Ornithologie, tom.H,p. 159 j prétend que les caijies de l'année fe mettent à pondra ; dès îe mois d'août, & que cette première couvée cft âe dix ceuis au moins. : de la Caille. z6y îorfque leurs plumes font revenues , elles s'en fervent auffitôt pour changer de cli- mat (i elles font libres -, Se li elles font en cage , c elt le temps où fe marquent ces inquiétudes périodiques 3 qui répondent au temps du paiTage. Il ne faut aux caiiletaux que quatre mois pour prendre leur accroiflement & fe trouver en état de fuivre .leurs pères ôc ï mères dans leurs voyages. La femelle diiière du mâle en ce I quelle eft un peu plus greffe félon \: Aldrovande ( d'autres la font égale , & i d'autres plus petite) -, quelle a la poi- [ .trine blanchâtre , parfemée de taches I noires & preique rondes , tandis qus le mâle Ta r.ouiïàtre (ans mélange d'autres L couleurs -, il a auiïi le bec noir , ainfî i que la gorge , & quelques poils autour 1 de la bafe du bec fupérieur (t) ; enfin [on a remarqué qui! avoir les tefticules (t) Voyez Alarovande , Oriùthologia , tom. XI 9 pag- 154- Nota. Quelques Naturaïiftes ont pris ïe mâle pour I ïa femelle ; jJai fui . i , dans cette bccàfîoii , l'avis des j Chafleurs, & fur-touï de ceux . qui ne lui fert que pour rappeler fon mile , Se quoique ce cri foit foible y êc que nous ne puiffions l'entendre qu'à i une petite diftance , les mâles y ac- courent de près d'une demi - lieue -, elle a auffi un petit ion tremblotant fri j cri. Le mâle eft plus ardent que la femelle , car celle-ci ne court point à la voix du mâle , comme le mâle accourt à la voix de la femelle dans, ( uj W jîluïghby 3 Ornithologie , pag. 1 2 g, de la Caille. 269 te temps de l'amour, & fouvent avec une relie précipitation , un. tel abandon de lui- même , qu'il vient la chercher jufque dans ?!Ïa main de foifeleur (xjè La caille , ainii que la perdrix & beaucoup d'autres animaux s ne produit que lorfqu'eile eft en liberté : on a beau fournir à celles qui font prifon- Uïères dans des cages , tous les maté- riaux qu'elles emploient ordinairement dans la conitruction de leurs nids , elles ne nichent jamais , & ne prennent au- cun foin des œufs qui leur échappent !:& qu'elles femblent pondre malgré I elles. On a débité pîufieurs abfurdités fur la génération des cailles *, on a dit d'elles comme des. perdrix , qu'elles étoient fécondées par le vent *, cela veut dire qu'elles pondent quelquefois fans le fe- cours du mâle (y)i on a dit qu'elles s'engendroient des thons que la met ; agitée rejette quelquefois fur les côtes de Lybie j qu'elles paroifïenr d'abord (x) Ariftote , Hijlor. Mimai, iib. VIII, cap. xn. (y) Ibidem, M iij 270 Hijloire Naturelle fous la forme de vers, en fuite fous celle ' de mouches , & que , grouillant par degrés , elles devenoient bientôt des fauterelles & enfin des cailles (\) ; c'eft- à-dire , que des gens groffiers ont vu des couvées de cailles chercher dans les ca- davres de ces thons laiffés par la mer , quelques infectes qui y étoient éclos , & qu'ayant quelques notions vagues des métamorphofes des infectes, ils ont cru qu'une fauterelle pouvoit fe changer en caille , comme un ver fe change en un ; infecte ailé -, enfin on a dit que le mâle s'accoupîoit avec le crapaud femelle (a) 3i ce qui n'a pas même d'apparence de fon- dement. Les cailles fe nourrirent de blé , de millet , de chenevis , d'herbe verte , d infectes , de toutes fortes de graines, même de celle d'ellébore \ ce qui avort donné aux Anciens de la répugna noçi pour leur chair , joint à ce qu'ils croyoient que c'étoit le - feul animal avec l'homme qui fût fujet au mal (l) fqyq; G efner, dz Avibus , pag. 355. (a) Phanodcmus apud Gcfncrum , pag. 355. de la Caillé. 271 eaduc (h) : mais l'expérience a détruit ce préjugé. En Hollande, où il y a beaucoup de ces oifeaux, principalement iur les côtes, on appelle les baies de brione ou cou- ievrée , baies aux cailles ( c) ; ce qui fuppofe en elles un appétit de préférence pour cette nourriture. II fe'mble que leur boire ne leur foit pas absolument néceflTaire , car des Chaffeurs m'ont allure qu'on ne les voyoit jamais aller à l'eau , & d'autres, qu'ils en avoient nourri pendant une année entière , avec des graines sèches & fans aucune forte de boiiîon , quoi- qu'elles boivent afïez fréquemment lorf- qu'elles en ont la commodité } ce retranchement de toute boiilbn eft même le feul moyen de les guérir lors- qu'elles rendent leur eau _, ceft - à - dire , îorfqu'elles font attaquées d'une • (h) Coturnicibus veratri (allas veneni) femen grati/t fimus cibus , quam ob caufameam damnaveremenje, &c. Pline, Hijt. Nat. lib. X, cap. xxm. (c) Apud Hollandos brioniœ acini quarte!? beyeiî ékuntur. Hadricin, Ji\n. Nomepçlat. Miy 2 7 * Hifioire Naturelle efpèce de maladie dans laquelle elles ont prefque toujours une goutte d'eauau bout du bec. Quelques - uns ont cru remarquer qu'elles troubloient l'eau avant que de boire , & Ton n'a pas manqué de dire que c'étoit par un motif d'envie , car on ne finit pas fur les motifs des bêtes*, elles fe tiennent dans les champs , les prés , les vignes , mais très - ratement dans les bois , & elles ne fe perchent jamais fur les arbres -, quoi qu'il en foit, elles prennent beaucoup plus de graille que les perdrix : on croit que ce qui y contribue 9 c'eft l'habitude où elles font de palfer la plus grande partie de la chaleur du jour fans mouvement ; , elles fe cachent alors dans l'herbe la plus ferrée , & on les voit quelquefois demeurer quatre heures de fuite dans îa même place , couchée fur le côté & les jambes étendues : il faut que le chien tombe abfolument delïus pour les i faire partir, On dit qu'elles ne vivent guère au-* • delà de quatre ou cinq ans , & Olina j regarde la brièveté de leur vie comme | de la Caille. 27$ une fuite de leur difpofîtron à s'en* graifïer ( d) : Artémidore l'attribue à leur cara&ère trifte & querelleur (e) ; 8c rel eft en effet leur caractère-, auffi n'a-t-on pas manqué de les faire battre en public pour amufer la multitude z Solon vouloir même que ies enfans 8i les jeunes gens vifïent ces fortes de combats pour y prendre des leçons dcL courage -, & il falloic bien que cette forte de gymnaftique, qui nous femble puérile, fur en honneur parmi les Ro- mains, & qu'elle tînt à leur politique 5 puifque nous voyons qu'Augufte punk de mort un Préfet d'Egypte pour avoir acheté & fait fervir fur fa table un de ces oifeaux, qui avoir acquis de la cé- lébrité par fes victoires *, encore aujour- d'hui on voit de ces efpèces de tour- nois dans quelques villes d'Italie *5 oii prend deux cailles à qui on donne à manger largement -, on les met enfuit^ vis-à-vis l'une de l'autre , chacune au bout oppofé d'une longue table , & Tors (d) Oïina, Uccellaria, pag. £& fej Artémidore 7 lib* III, cap* y, M v 2j4 Hijloire Naturelle jette entre deux quelques grains de millet ( car, parmi ïes animaux, il faut un fujet réel pour fe battre ) j d'abord elles fe lancent des regards menaçans , puis par- tant comme un éclair elles Te joignent, s'attaquent à coups de bec , & ne, ceiîent de fe battre, en dreftant ïa tête & s'élevant fur leurs ergots , jufqu'à ce que Tune chde à l'autre le champ de bataille (f) : autrefois on a vu ces ef- pèces de duels fe paiTer entre une caille & un homme , la caille étant mife dans une grande caille au milieu d'un cercle - qui étoit rracé fur le fond , l'homme lui frappoit la tête ou le bec avec un feul doigt, ou bien lui arrachoit quelques plumes j fi ïa caille, en fe défendant, ne fortoit point du cercle tracé , c'étoit fon maître qui gagnoit h gageure*, mais il elle mettoit un pied hors de la cir- conférence , c'étoit fon digne adver- saire antagoniste qui étoit déclaré vain? queut , &.Jes cailles, qui avoient été fou vent viciorieufes , fe vendoîent fort (f) y°yeX Aldrovande, Ornithologia , tome II ^ pag. 161. de la Caille. 1 7 f cher (g). Il eft à remarquer que ces oifeaux , de même que les perdrix & plufieurs autres, ne fe battent ainfi que contre ceux de" leur efpèce-, ce qui fup- pofe en eux plus de jaloufïe que de cou- rage ou même de colère. On juge bien qu'avec l'habitude de changer de climat, & de s'aider du vent pour faire fcs grandes traversées, la caille doit* être un oifeau fort répandu -, & en effet , on la trouve au cap de Bonne- epérance (h) & dans toute l'Afrique ha- bitable (ï) j :-.en Efpagne, en Italie (k) _, en France, en SuiiTe (l), dans les Pays - Bas (m) Se en Allemagne ( n ) ^ en Angleterre (o)jytn Ecofle (p) * ■ (g) Kojj/qJuî.PoîïuX, dehudis, lib. IX. (h) J^yqKolbe, tomel, page 152. (1) Voyez- FI. Jofeph , lib. III, cap. iT Comeilor, &c. (k) Voyez Aldrovande. (I) Stumpiius Aldrovandi , Omithologia , tom. II , pag. 157. (m) Aldrovande , ibidem. (n) Frffçb ? planche cxvn. (0) Britiilh Zoology, pag. 87. (p) Sibbaîdus ? Hijîoria Ammalium in Scotiâ § pag. 16. M v) 2j6 Hijloire Naturelle en Suède (q) > & jufqu'en Iflande (r) y & du côté de TEft en Pologne ( f) y en Rufîîe (t) _, en Tartane (uj j & )ufqu à la Chine ( x ) ; il eft même très - probable qu'elle a pu paiîer err Amérique, puifqu'elle fe répand chaque année aiTez près des Cercles polaires 9 qui font les points où les deux conti- nens Te rapprochent le plus -, & en effet on en trouve dans les îles Malouines , comme nous le dirons plus bas *, en gé- (q) Fauna Suecica, pag. 64* (r) Horrebow, Nouvelle Defcriptioncte l'Islanle, (f) Rzaczynsky, Ju&uarium Poloniœ, p. 376. , (t) In campis Rujficis 6* Podolicis reperiuntur co- iurnices Martin Cramer , de Poloniâ ; & Rzaczynsky , loco citato. (u) Gerbillon , Voyages faits en Tartarie à la fuite ou par ordre de l'empereur de la Chine. Vovez V Hijloire générale des Voyages , tome V ï I y pages 465 & 505, (x) Voyez Glanures ^/'Edwards, tomel, p. 78. Les Chinois, dit-il, ont auffi notre caille commune d"ans leur pays , comme il paroît vifiblement par teurs tableaux , où Ton retrouve Ton portrait d'après nature. de la Caille. 277 lierai, on en voit toujours plus fur les cotes de la mer & aux environs , que dans l'intérieur des terres. La caille fe trouve donc par -tout, & par-tout on la regarde comme un fort bon gibier , dont la chair eft de bon goût, & auflï faine que peut l'être ^une chair aufîï grafle i Aldrovande nous ap- prend même qu'on en fait fondre la graiffe à part , & qu'on h garde pour fervir d'afïàifonnement ( y ) î & nous avons vu plus haut que les Chinois fe fervoient de l'oifeau vivant pour s'é- chauffer les mains. On fe fert aufïï de îa femelle ou d'un appeau qui imite fon cri , pour attirer les mâles dans le piège *, on dit même qu'il ne faut que leur préfenter un miroir avec un filet au-devant, où ils fe prennent en accourant à leur image qu'ils prennent pour un autre oifeau de leur efpèce •, à îa Chine , on les prend au vol avec des troubles légères que les Chinois manient fort adroit e- (y) Voyzi Aldrovande , Qmithologia , tom. II 9 pag. 172. 2 7 S Hijloire Naturelle ment (\) ; &, en général, tous les pièges qui réuiîiiTent pour les autres oileaux, font bons pour les cailles, fur- tout pour les mâles qui font moins défians & plus ârdens pour leurs femelles, & que Ton mène par - tout où Ton veut , en imitant la voix de celles-ci. Cette ardeur des cailles a donné liett d'attribuer à leurs œufs ( a) _, à leur graifïè , &c. la propriété de relever les forces abattues <5c d'exciter les tempéra- mens fatigués , on a même été jufqu'à dire que la feule préfence d'un de ces oifeaux dans une chambre , procuroit aux perfonnes qui y couchoient , des fonges vénériens (bj ; il faut citer les erreurs afin qu'elles fe détruifent elles- mêmes. (l) Gemeïli Carréri. (a) Ova coturnicis inunâta ujlihus voluptaum indu mm &jjoîa îibidinem augwt. Kiranides. (b) Frifch , planche ex Vil. rL .a PI. FlZ./'at/.zyH. LA CAILLE . des Cailles. 279 LE CHROKIEL ou grande CAILLE de Pologne. sS ou s ne connoissons cette Caille que par le Jéfuite Rzaczynski , auteur Po- ionoîs , & qui mérite d'autant pïus de confiance fur cet article , qu'il parie d'un oifeau de Ton pays : elle paroît avoir la même forme , le même inftxnct que la caille ordinaire , dont elle ne ditière que par fa grandeur (a) ; c'efl: pourquoi Je la confidère Amplement comme, une va- riété de cette efpèce. Jobfon dit que les cailles de la Gambra font auffi greffes que nos bécalfes ( b) : fi. le climat n'étoit pas auffi différent, je croirois que ce feroit le même oifeau que celui de cet article. (a) Voyez Rzaczynski, Hijloria Nat. Poloniœ.^ fcag. 277, (b) Voyez CoIIedion de PurcbafT, tome II* '■''jage 1567. 2 S a Hijloire Naturelle La CAILLE blanche, Arïstote eft ïe feul qui ait parlé de cette Caille (a) > qui doit faire variété , dans Tefpèce des cailles , comme la per- drix grile - blanche & îa perdrix rouge- blanche font variété dans ces deux ef- pèces de perdrix *, l'alouette blanche dans celle des allouettes, &c. Martin Cramer parle des cailles au* pieds verdâtres (vircntibus pedibus) (b): eft-ce une variété de Tefpèce , ou ïîmpie* ment un accident individuel? (a) Voyei Ariftote, de Coloribus , eap. VI. *, (b) Mai tin Cramer, dePolaniâ, ïib.J, p. 474, des Cailles. 281 La CAILLE des Iles Mazovines*. vJn pourroit encore regarder cette ■efpèce comme une variété de Tefpèce ■commune qui efi: répandue en Afrique 8c ten Europe , ou du moins comme une efpèce très - voifïne $ car elle n'en paroîc 'différer que par la couleur plus brune de fon plumage, & par fon bec qui eft un peu plus fort. Mais ce qui s'oppofe à cette idée 3 c'effc le grand intervalle de mer qui fépare les contïnens vers le Midi -, & ïi faudroit que nos cailles eu dent fait un très - grand ■ voyage , fi Ton fuppofoit qu'ayant pane par le nord de l'Europe en Amérique 5 elles fe retrouvent jufqu'au détroit de Magellan -, je ne décide donc pas li cette caille des îles Malouines efl de la même efpèce que notre caille > ni fi elle en provient originairement , ou * Voye\ les planches enluminées , a.0 aas* 282 Hifloire Naturelle fi ce peft pas plutôt une efpèce proprJj & pa.ricuiière au climat des îles M* iouines. LLE\ La FRAISE ou C AI LL i> e la Chine*. Cet oiseau eft repréfenté , dans nos planches, fous le nom de Caille des Philippines s parce qu elle a été envoyée de ces îles au Cabinet-, mais eile fë trouve auffi à la Chine , & je l'ai ap~ pelée la Fraife i à caufe de I- efpèce de fraife blanche qu elle a fous la gorge , & qui tranche a autant plus que fon plu- mage eft d'un brun noirâtre : elle eft une fois plus petite que la nôtre. M. Edwards a donné la figure du maie, planche CCXLViij il diftère de la femelle , repréfenree dans nos planches enluminées , en ce qu'il eft un peu plus gros , quoiqu'il ne le ïoit pas^pïus qu'une alouette -, en ce qu'il a pius de caractère dans la phyfionomie , ** Voyli les flanches enluminées, n.° 126, des Cailles. 2,8$ les codeurs du plumage plus vives & plus variées,. & les pieds plus forrs. Le fuiet deflinc' & décrir par M. Edwards, • avoir écé apporrë vivanr de Nanquin en .Angleterre. Ces petites cailles ont cela de commun [avec celles de nos climats > quelles fe barreur à outrance les unes contre les autres, fur -tout les mâles-, & que les t Chinois font à cette occafion des gageures conhdérables , chacun pariant pour fon l oifeau, comme on fait en Angleterre pour lies coqs (a) : on ne peut donc guère ' dourer qu'elles ne foienr du même genre I de nos cailles , mais c eft probablement ' une efpèce différente de lefpèce com- mune s & c'eft par cette raifon que jai cru devoir lui donner un nom propre & parcicuher.. fa) Voyei George Edwards, Gleanings, tomeI5 page 78. a 8 4 Biftoire Naturelle Le TURNIX ou CAILLE d e Ma va g a s car *. 1M ou s avons DONNi à cette caille le nom de Turnix 3 par contraction de celui de Coturnlx , pour la diftrnguer de la caille ordinaire dont elle diffère à bien des égards 5 car premièrement, elle éft plus petite-, en fécond lieu, elle a le plumage différent, tant pour le fond des couleurs que pour Tordre de leur diftri- bution-, enfin elle n'a que trois doigts an- térieurs à chaque pied, comme les ou- tardes , & n'en a point de poftérieur. * Voyelles planches enluminées, n.° 171, des Cailles. 285 Le réveil-matin, ou la CAILLEbe Java (a). L&c9 291 que iorfque cet Auteur donne aux co- lins ïe nom de cailles ^ c'eft d'après îe vulgaire (f) j qui , dans l'impoiition des noms , fe détermine fouvent par des rapports fuperficiels , & que Ton opinion réfléchie eft que ce font des efpèces de perdrix. J'aurois donc pu , m'en rapportant à Fernandez , le feuf obfervateur qui ait vu ces oifeaux , placer les colins à la fuite des perdrix; mais j'ai mieux aimé me prêter, autant qu'il étoit pofîîble, à l'opinion vulgaire qui n'eft pas dénuée de tout fonde- ment , & mettre ces oifeaux à la fuite des caliés, comme ayant rapport aux cailles & aux perdrix. Suivant Fernandez , les colins font fort communs dans la nouvelle Ef- pagne $ leur chant , plus ou moins ( f ) Il dit toujours, en parlant de cette efpèce^ Coturnicis Mexicana (cap. XXIV ), Coturnicis vocales (c?L]}.XXXIV^,quamvocantCotuniîcem(cap.XXXI'SL)i & quand iï dit Coturnicis nofîra (cap. xxv ), il eft évident qu'il veut parier de ce même oifeau appelé Caille au Mexique, puifqu'ayant parlé dans le chapitre précédent de cette caille Mexicaine, iï dis ici (cap. xxv), Coturnicis nofirœ quoquz eft fpeciss, Nij 2 9 2- HiJIoire Naturelle 'Agréable , approche beaucoup de celui de nos cailles-, leur chair eft un manger très-bon & très-fain, même pour les malades, lorfqu'elle eft gardée quelques jours : ils fe nourrirent de grain, & on les tient communément en cage ( g) y ce qui me feroit croire qu'ils font d'un naturel différent de nos cailles & même de nos perdrix. Nous allons donner les indications particulières de ces oir féaux dans les articles fuivans. IL Le ZONÉCOLIN (h). Ce nom abrégé du nom Mexicain Quanht^onecolin > déligne un bifeau de grandeur médiocre , & dont le plu- mage eft de couleur obfcure -, mars ce qui le diftingue , c eft Ton cri qui eft allez flatteur , quoiqu'un peu plaintif, & la huppe dont fa tête eft ornée. Fernandez reconnoît, dans le même (g] lroyei Fernandez , Bi florin Jrium, cap. XXX IX. ' (hJVoyçz ibidem. des Oifeaux étrangers , &c. 295 chapitre, un autre colin de même plu- mage, mars moins gros & fans huppe \ ce pourroit bien être la femelle du pré- cédent , dont il né fe diftingue que par des caractères accidentels, qui font fujets à varier d'un fexe à l'autre. I I I. Le grand COLIN Q. C'est ici ïa plus grande efpèce de- tous ces Colins , Fernandez ne nous apprend point Ton nom -, il dit feule- ment que le fauve efb fa couleur do- minante, que la têre eit. variée de blanc 8c de noir, 8c qu'il y a auiïï du blanc fur le dos 8c au bout des ailes, ce qui doit contrarier agréablement avec la cou- leur noire des pieds & du bec. (i) Voye.i Fernandez, cap. xxxiX ; & Brifïbn^ Ornithologie, tome I? page 257. N n| 294 Hijhire Naturelle I V. Le CACOLIN. Cet oiseau, appelé Cacacolin par Fernandez, eft, feîon lui, une efpèce de caille (k) j c'eft-à dire de colin , de même grandeur, de même forme, ayant le même chant, fe nourrilTant de même, & ayant le plumage peint prefque des mêmes couleurs que ces cailles Mexi- caines. Nieremberg, Ray, ni M, Brifïoa M en parlent point. Le COYOLCOS. C'est aînfi que j'adoucis le nom Mexicain Coyolco^que : cet oifeau ref- femble par fon chant, fa grofïeur, fes mœurs , fa manière de vivre & de voler , aux autres colins -, mais il en diffère par fon plumage : le fauve mêlé (k) Cotimûcis voz Jfot titrii, dubium rejmndœj. Cap. xxxix. des Oifeaux étrangers ^ &c. 299 les oifeaux dont il s'agit ici, 8c fur-tout lorfque nous aurons Toccaiion de les voir vivans, nous les rapprocherons des efpè- ces avec lefq'uelles ils nous paraîtront avoir le plus de rapport, foit par la forme extérieure, foit par les mœurs & les habi- tudes naturelles. Au refte , le coîenicui efl de la gref- fe ur de notre caille, félon M. Briflon; mais il paroît avoir les ailes un peu plus longues : il éft brun fur le corps , gris file Se noir par-deflous -, il a la gorge blanche & des efpèces de four* cils blancs. V I I. rOCQCOLIN ou PERDRIX de montagne du Mexique (r )• Cette espèce que M. Seba a prfs pour le roliier huppé du Mexique ( f ) > (r) Voyei Fernandez , chap. lxxxv. Briiîbn* tome I, page 226, ( f ) Voyez Y Ornithologie de Briflbn, tome 11^ page. £4. En générai , ies roiliers ont le bec plus droit & ia queue plus longue que ïes perdrix. N vj 5CO 'Hijîoire Naturelle , &c. s'éloigne encore plus de îa caille 8c même de la perdrix que le précédent : elle eft- beaucoup plus grolTe, & fa chair n'eft pas moins bonne que celle de la caille , quoique fort au- de (Tous de celle de la perdrix. L'ococolin fe rapproche un peu de la perdrix rouge , par la couleur de fon plumage , de Ton bsc 8c de fes pieds -, celle du corps eft un mélange de brun, de gris- clair 8c de fauve j celle de la partie inférieure des ailes eft cendrée j îeur partie fupérieure eft femée de ta- ches obfcures , blanches 8c fauves , de même que la tête & le cou : il fe plaît dans les climats tempérés 8c même un peu froids , 8c ne fauroit vivre ni fe perpé- tuer dans les climats brûïans. Fernandez parle encore d'un autre ococolin , mais qui eft un oifeau tout différent, (t) Ococolin geiius Pici, roflro Ion go & aeuto..,, vivit in Tdicocanarum fylvamm arboribus , ubï fabule m eduçat; uon cantillat. Fernandez, cap. ccxu *%n?m 3 os LE PIGEON. Planche v 1 1 1 & fuivantes de ce volume, _L L étoit aise de rendre domeftiques des oifeaux pefans , tels que les coqs , les dindons & les paons ^ mais ceux qui font légers ,- & dont le vol eft ra- pide, demandoient plus d'art pour être fubjugués ', une chaumière baffe dans un terreîn clos, fufîit pour contenir, élever & faire multiplier nos volailles^ il faut des tours , des bâtimens élevés faits exprès, bien enduits en dehors 8c garnis en dedans de nombreufes cel- lules, pour attirer, retenir & loger les Pigeons -, ils ne font réellement ni do- meftiques comme les chiens & les che- vaux, ni prifonniers comme les poules, ce font plutôt des captifs volontaires, des hôtes fugitifs , qui ne fe tiennent dans le logement qu'on leur oiire qu'autant qu'ils s'y piaifent, autant qu'ils y trouvent la nourriture abon- dante , le gitQ agréable ôc toutes les 3 c % Hijloire Naturelle commodités, toutes ïes aifances nécef- faires à ia vie : pour peu que quelque chofe ïeur manque ou leur déplaile, ils quittent & fe difperfent pour aller ailleurs-, ii y en a même qui préfèrent conf- tamment ies trous poudreux des vieilles murailles aux boulins les plus propres de nos colombiers *, d'autres qui fe gîtent dans des fentes & des creux d'arbres-, d'autres qui femblent fuir nos habita- tions, & que rien ne peut y attirer*, i tandis qu'on en voit au contraire qui n'ofent les quitter , & qu'il faut nourrir autour de leur volière qu'ils n'aban-j donnent jamais. Ces habitudes oppo--j fées , ces différences de mœurs fem- j bleroient indiquer qu'on comprend fous le nom de pigeon _, un grand nombre d'efpèces diverfes dont chacune auroit fon naturel propre & différent de celui des autres : & ce qui fembleroit con- firmer cette idée, c'eft l'opinion de nos Nomencïateurs modernes qui comptent indépendamment d'un grand nombre de variétés, cinq elpèces de pigeons < fans y comprendre ni les ramiers ni les tourterelles. Nous féparerons d'abord du Pigeon. 305 ces deux dernières efpèces de celle des pigeons*, & comme ce font -en effet des ôiieaux qui diiièrent fpécifiquement les uns des autres, nous traiterons de chacun dans un article féparé. Les cinq efpèces de pigeons indiqués par nos Nomenclateurs font , i.° le pigeon domeftique j 2.0 le pigeon ro- main , fous fefpèce duquel ils com- prennent feize variétés -, 3.0 le pigeon bifet i 4.0 ïe pigeon de roche avec une varirécé*, 5.0 le pigeon fauvage (a) : Or ces cinq efpèces, à mon avis, n'en font qu'une , & voici la preuve : le [pigeon domeftique & le pigeon romain avec toutes fes variétés, quoique diffé- rens par la grandeur- & par les couleurs* font certainement de la même efpèce 3 pùifquils produtfent enfembîe des in- 'dividus féconds 8c qui le reproduifent. On ne doit - donc pas _ regarder les •pigeons de vciière &" les pigeons de colombier , c'eft-à-diré , les • grands & (a) Brifibn, Ornithologie, tome I? page 68 j.u£ ç-u'à 89. ' 304 Hijîoire Naturelle les petits pigeons domefliques , comme deux efpèces dirlér entes -, & il faut le borner à dire que ce font deux races dans une feule efpèee , dont Tune eft plus domeftique &_ plus perfectionnée: que l'autre •, de même, le pigeon bifet, ie pigeon de roche & le pigeon fau- ■; Vage , font trois efpèces nominales qu'on doit réduire à une feule, qui efl celle du bifet , dans laquelle le pigeon de roche &' le pigeon fauvage ne font que des variétés très-légères \ puifqueJ de l'aveu même de nos Nomenciateurs,, ces trois oifeaux font a peu près de la même grandeur \ que tous trois font de pafTage , fe perchent , ont en tout ; les mêmes habitudes naturelles , & ne diftèrent entr'eux que par quelques teintes de couleurs. Voilà donc nos cinq efpèces nomi- nales déjà réduites à deux -, favoir , le bifet & le pigeon *, entre lefquelïes deux „ fi n'^ a de diiiérence réelle, fînon que. le premier ed fauvage , & le fécond! eft domeftique : je regarde le biiec' comme la fouche première de laquelle tous les autres pigeons tirent leur ori* du Pigeon. 305 gine , & duquel ils diffèrent" plus ou moins , félon qu'ils ont été plus ou moins maniés par les hommes \ quoique je n'aie pas été à portée d'en faire l'épreuve, je fuis perfuadé que le bifec te le pigeon de nos colombiers pro- rîuiroient enfemble s'ils étoient unis^ (car il y a moins ïoin de notre petit Ipigeon domeftique au, bifet , qu'aux gros pigeons pattus ou romains avec efquels néanmoins il s'unit & produit: d'ailleurs nous voyons , dans cette es- pèce , toutes les nuances du fauvage au domeftique, fe préfenter fucceiïivement Se comme par ordre de généalogie, du plutôt de dégénération. Le bifec îous eft reptéfenté d'une manière à ne Douvoir s'y méprendre , par ceux de pos pigeons fuyards qui défertent nos colombiers, ck prennent l'habitude de le percher fur les arbres , c'en: la pre- mière & la plus forte nuance de leur :etour à l'état de nature: ces pigeons, quoiqu'élevés dans l'état de domefti- :ité , quoiqu'en apparence accoutumés comme les autres à un domicile fixe , t des habitudes communes 5 quittent 3c6 Hijîoire Naturelle ce domicile , rompent toute fociété < vont s'établir dans les bois -, ils retournei donc à leur état de nature pouffes p; ïeur feu! inftinct. D'autres apparemmeja moins courageux, moins hardis, quo' qu'également amoureux de leur libéra fuient de nos colombiers pour ali« habiter folitairement quelques trous c| muraille, ou bien en petit nombre ; réfugient dans une tour peu fréquentée & malgré les dangers, la dilette & folitude de ces lieux où ils manquer de tout , où ils font expoiés à la b< | ierre, aux rats, à la fouine, à la chouettej & où ils font forcés de fubvenir en toi temps à leurs befoins par leur feule in duitrie, ils reftent néanmoins conitan ment dans ces habitations incommode; êc les préfèrent pour toujours à 1er premier domicile , où cependant ils Coi nés, où ils ont été élevés, où tous 1< exemples de la fociété auroient dû Ici retenir*, voilà la féconde nuance : ce pigeons de murailles ne retournent pi en entier à l'état de nature , ils ne i perchent pas comme les premiers, l font néanmoins beaucoup plus près d du Pigeon. 307 ['état libre que de la condition domef- ïque. La troihème nuance eft celle de îos pigeons de colombiers, dont tout e monde coiinoît les mœurs, & qui5 :iorique leur demeure convient , ne „ abandonnent pas, ou ne la quittent que jour en prendre une qui convient en- :ore mieux, & ils n'en fortent que pour aller s'égayer ou fe pourvoir dans les phamps voilins : or , comme c'en: parmi les pigeons même que fe trouvent les luiards & les déferteurs dont nous vê- lions de parler, cela prouve que tous pont pas encore perdu leur inftindfc Il origine , & que l'habitude de la libre domefticité dans laquelle ils vivent, nV bas entièrement efhcé les traits de leur première narure à laquelle ils pourroienc encore remonter : mais il n'en eft pas le même de la quatrième & dernière faùance dans Tordre de dégénération \ ce ont les gros & petits pigeons de vo- lière, dont les races, les variétés, les 'mélanges font prefque innumérables , oarce que, depuis un temps immémorial, Is font abfoiument domeftiques -, & ■/homme, en perfectionnant les formes 3 c 8 Hifloire Naturelle extérieures, a en même temps aîté:| leurs qualités intérieures, & détruit ju qu'au germe du fenriment de la libertu ces oifeaux, îa plupart pïus grand:] plus beaux que les pigeons commun; ont encore l'avantage pour nous deti plus féconds, plus gras, de meiilei goût s & c'eft- par toutes ces raifoi qu'on les a foignés de plus près , < qu'on a cherché à les multiplier, malgi; toutes les peines qu'il faut fe donn< pour leur éducation & pour le fuco de leur nombreux produit & de lei pleine fécondité : dans ceux - ci, aucu ne remonte à l'état de nature , aucui même ne s'élève à celui de liberté, i ne quittent jamais les alentours de lei volière , il faut les y nourrir en toi temps*, îa faim la plus prefïante ne le détermine pas à aller chercher aiileur* ils fe laifîent mourir d'inanition plutc que de quêter leur fubfiftance j accou tumés à la recevoir de la main d l'homme ou à la trouver toute préparée toujours dans le même lieu , ils n favent vivre que pour manger , & n'or aucunes des reffources , aucuns de du Pigeon. 309 .petits taîens que le befoin infpire à tous ïes animaux : on peut donc regarder rette dernière clafîe dans Tordre des figeons , comme abfoiument donief- :ique, captive fans retour, entièrement dépendante de l'homme : & comme il 1 créé tout ce qui dépend de lui, on îe peut douter qu'il ne foit l'auteur lie toutes ces races efclaves , d'autant blus perfectionnées pour nous, qu'elles [ont plus dégénérées, plus viciées pour a Nature. Suppofant une fois nos colombiers Etablis & peuplés, ce qui étoit le pre-? [nier point & le plus difficile à rem- plir , pour obtenir quelqu'empire fur fine efpèce aufli fugitive, auffi volage, tan fe fera bientôt aperçu que, dans le brand nombre de jeunes pigeons que ces • kabiiiïernens' nous produiient à chaque [■aifon, il s'en trouve quelques-uns qui f/arient pour la grandeur , la forme & (es couleurs. On aura donc choiii les [Mus gros, les plus unguliers, les plus peaux, on les aura féparés de la troupe l'ommune pour les élever à part avec des "pins pius.affidus & dans une captivité 3 i o HiJIoire Naturelle plus étroite *, les defcendans de c efclaves choifis auront encore préfenj de nouvelles variétés qu'on aura di tinguées , féparées des autres , uniiTa; constamment & mettant eniemble cei qui ont paru les plus beaux ou les pli utiles, Le produit en grand nombu eft la première fource des variétés dai les efpèces : mais le maintien de ci variétés 9 & même leur multiplication dépend de la main de l'homme •, il fai recueillir de celle de la Nature les ir dividus qui fe rerîemblent le plus 3 h féparer des autres , les unir enfemble prendre les mêmes foins pour les vs riétés qui fe trouvent dans les nombreit produits de leurs defcendans , &, pa ces attentions fuivies, on peut svec $ temps créer à nos yeux , c'en:- à-dire amener à la lumière une infinité d'être i nouveaux que la -Nature feule n'auroi jamais produits*, les femences de tout*- matière vivante lui appartiennent , elh en compofe tous les germes des erre organifés*, mais la combinaison, la fuc-i ceiîion, i'aiiortnTement, la réunion 6i là réparation de chacun de ces êtreS; du Pigeon, 3 1 1 îépendent fouvent de la volonté de 'homme ; dès-lors, il eft le maître de :orcer la Nature par fes combinaifons & de la fixer par fon induiîrîe ; de leux individus (inguliers qu'elle aura [produits comme par hafard, il en fera une race confiante & perpétuelle , Se de laquelle il tirera plusieurs autres races qui, fans fes foins, n'aur oient jamais vu \e jour. Si quelqu'un vouloit donc faire Bniftoire complette & la defeription dé- maillée des pigeons de volière, ce feroir fcaoins l'hiftoire de la Nature que celle de l'art de l'homme *, & c'eft par cette : raifon que nous croyons devoir nous borner ici à une (impie énumérarion, [qui contiendra i'expofition des prin- Lpales variétés de cette efpèce , donc I le type ed moins fixe & la forme pius variable que dans aucun autre ranimai. Le Biset (b) ou pigeon fauvag© ( (h) Bifet. Bel on , Hijî. des Oifeaux , p. 3 1 1 . . . . ; jpifet,Croifeau. / par quelques Natura- lises , le nom de pigeons de roche ou [ rocheraies ; & , comme ils aiment aufti I les terres élevées Se les montagnes , d'autres les ont appelés pigeons de I montagne. Nous remarquerons même 1 que les Anciens ne connoifibient que cette efpèce de pigeon fauvage , qu'ils (1) Aîbin, tome 27, page 31 , avec une figure, planche xlvi. (f) Selon , Hifi. Nat. des Cifeaux, page 312. Oifeaux j Tome IF* O 5 1 4 Hi/loire Naturelle appeloient oW* ou Vinago j 8c qu'ils ne font nulle mention de notre bïfet , qui néanmoins eft le feul pigeon vrai- ment f.uvage , oc qui n'a pas pa(Të par ï'état de domesticité. Un fait , qui vient a l'appui de mon opinion lur ce point, c'eft que, dans tous les pays ou il y a des pigeons domeiuques , on trouve aufïi des oenis j depuis la Suède (g) jufque dans les climats chauds ( h) , (g) Columba cteruhfcens , collo nitido , macula. âupUci alarum nigricante* Linn. Faun. Suecica , n.° 174. (h) On trouve par -tout, dans la Perfe , des pigeons, fkuvages & domeftiqus ; mais lesf.iuvages font en bien plus grande quantité ; & , comme ia fiente de pigeon eft le meilleur fumier pou les me- lons , on élève grand nombre de pigeons , & avec foin, dans tout le royaume; c'eft, je crois, le pays du inonde où l'on fait les pius beaux colom- biers on compte pius de trois mille colombiers autour d'Hifpaham : c'eft un pïaiiir du peuple de prendre des pigeons à la campagne . . . par le moyen des pigeons appriroiles &; éievés à cet ufage , qu'ils font voier eï\ troupes , tout te ïongdujour, après ies pigeons fauvages ; is les înettent parmi eux, dans leur troupe, & les amè- nent ainfi au colombier. Voyagi dz Chardin , tome 11 , pages 29 & 30. Voyz\ aujji Tarcrnizr , tome 11/ pages 22 & 23, •— Les pigeons de l'île Rodrigue du Pigeon. 3 1 j au lieu que les bifets ne fe trouvent pas dans les pays froids , & ne res- tent que pendant Tété dans nos pays tempérés*, ils arrivent par troupes en Bourgogne 3 en Champagne , & dans les autres provinces feptentrionales de la France , vers la fin de Février & au commencement de Mars \ ils s'établif- fent dans les bois , y nichent dans des creux d'arbres , pondent deux ou trois œufs au printemps , Se vraifernblabie- ment font une féconde ponte en été y êc , à chaque ponte , ils n'élèvent que deux petits , & s'en retournent dans le mois de novembre •, ils prennent leur route du côté du midi , & fe rendent proba- blement en Afrique par l'Efpagne 5 pour y paiïer l'hiver. Le bifet ou pigeon fauvage , Se l'oenas ou ie pigeon déferteur , qui retourne à ï'état de fauvage , fe perchent 3 & , par font un peu plus petits que les nôtres, tous de couleur d'ardoïfe , & toujours fort gras & fort bons; ils perchent & nichent fur ïes arbres, & on les prend très- aifé ment. Voyage de Léguai , tomeI? page io6{ Oij 3 i 6 Hijtoire Naturelle cette habitude , fe diftinguent du pigeoft de muraille, qui déferte auflï nos colom- biers -, mais qui femble craindre de re- tourner dans les bois, & ne fe perche jamais fur les arbres : après ces trois pi- geons , dont les deux derniers font plus ou moins près de l'état de nature , vient ie pigeon (i) de nos colombiers * qui, comme nous l'avons dit, n'eft qu'à demi- domeftique 5 & retient encore , de Ton premier inflincc , l'habitude de voler en troupe : s'il a perdu le courage intérieur , (i) En Grçcjlïêpj^fà* en Latin , Columba;- enEfpagnoI, Colont ou Paloma; en Italien, Colombo t- Colomba ; en Allemand , Taube ou Tauben ; en Saxon , Duve ; en Suédois , Duwa ; en Anglois , JDove, commun dove hou fe pigeon ; enPoïonois, Golah. >— Pigeon. Béion , Hifloire Natur. des Oi féaux ^ page 313 .... Couïon, Colombe, Pigeon, Pigeon privé." Idem , Portraits d'Oifeaux . page 78 , a. — Columba vulgaris. Gefner, de Jiibus , page 279. — Co/ff/nta.-Profper. Alpin. JEgypt.\o\A, pag. 198. — Columba vulgaris. Sloane , Jamaïc. page 302. — Pigeon. Du Tertre , Bift. des Antilles , tome II , pa°-e 266. — r igeon fauvage ordinaire. Albin, tome 111, page 17 , avec une figure , planche xliu — LePigeon'domeitique. Briffon, Ornitliol. tomejj page 68. f Jrove% les planches enluminées , n.° 466, du Pigeon. 3 i y Ij d'où dépend le fentiment de l'indépen- dance , il a acquis d'autres qualités qui 3 ; quoique moins nobies , paroïflcnt plus I agréables par leurs effets. Ils produifent fouvent trois fois Tannée , & les pigeons ij de volière produifent jufqiTà dix & douze fois , au lieu que le bifet ne produit qu'une ou deux fois tour au plus *, com- bien de plaifirs de plus fuppofe cette dir- ' férence, fur- tout dans une efpèce qui i fembîe les goûter dans toutes leurs nuan- : ces , & en jouir plus pleinement qu'au- cune autre ! ils pondent , à deux jours | de diftance , prefqne toujours deux œufs , | rarement trois , & n'élèvent prefque ja- i mais que deux petits 5 dont ordinaire- ment l'un fe trouve mâle & l'autre fe- melle -, il y en a même plufîeurs ? & ce font les plus Jeunes, qui ne pondent qu'une fois *, car le produit du printemps eft toujours plus nombreux, c'eft-à- dire , la quantité de pigeonneaux , dans le même colombier, plus abondante qu'en automne, du moins dans ces climats. Les meilleurs colombiers , où les pigeons fe pîaifent & multiplient le plus, ne font O ïi} 3 î 8 Hijloire Naturelle pas ceux qui font trop voifins de nos habitations-, placez -les à quatre ou cinq cents pas de diflance de la ferme , fur îa partie la plus élevée de votre terrein, 8c ne craignez pas que cet éloignement nuife à leur multiplication-, ils aiment les lieux paifibles , la belle vue , l'expofition au levant , la fituaticn élevée , où ils puîMent jouir des premiers rayons du foleil -, j'ai fouvent vu les pigeons de plusieurs colombiers , fîtués dans le bas d'un vallon , en fortir , avant le lever du foleri , pour gagner un colombier fîtue au-deMus de la colline, & s'y rendre en fi grand nombre que le toic êtoît entièrement couvert de ces pigeons étrangers, auxquels les domiciliés étoient obligés de faire place , & quelquefois • même forcés de la céder : e'efr fur -tout au printemps & en automne qu'ils fem- • blent rechercher les premières influen- ces du foleil , la pureté de l'air & les lieux élevés. Je puis ajouter à cette remarque une autre oblervation, c'eft que le peuplement de ces colombiers ïîolés , élevés & fîtués haut , eft plus du Pigeon. 3 1 9 ; facile , 8c le produit bien plus nombreux que dans les autres colombiers. J'ai vu f rirer quatre cents paires de pigeonneaux | d'un de mes colombiers , qui , par fa ; fîtuation & la hauteur de la bâtifTe , étoit j élevé d'environ deux cents pieds au- deffus des autres colombiers , tandis que | ceux-ci ne produiioient que le quart ou i lé tiers tout au plus , c'enSà-dire , cent ou cent trente paires : il faut feulement j avoir foin de veiller à i'oifeau de proie , 1 qui fréquente de préférence ces colom- ! biers élevés & ifolés , & qui ne iaiUe pas '■ d'inquiéter les pigeons , fans néanmoins [ en détruire beaucoup *, car il ne peut faifîr que ceux qui fe féparent de la ; troupe. Après le pigeon de nos colombiers , v qui neft qu'à demi-domefïique , le pré- \ fentent les pigeons de volière , qui le ; font entièrement , & dont nous avons fi ; fort favorifé la propagation des variétés, j les mélanges & la multiplication des \ races , qu'elles demanderaient un volume j d'écriture Se un autre de planches , fi nous voulions les décrire Ôc les repré- Oir 3 20 UiJIoire Naturelle Tenter toutes; mais, comme je l'ai déjà fait fentir , ceci efi; plutôt un objet de curiofité & d'art qu'un fujet d'Hiftoire Naturelle j & nous nous bornerons à indiquer les principales branches de cette famille immenfe , auxquelles on pourra rapporter les rameaux & les rejetons des variétés fecondaires. Les Curieux en ce genre , donnent le nom de bifet à tous les pigeons qui vont prendre leur vie à la campagne , & qu'on mer dans de grands colombiers: ceux qu'ils appellent pigeons domefli- qu.es j ne fe tiennent que dans de petits colombiers ou volières , & ne fe ré- pandent pas à la- campagne j il y en a de plus grands & de plus petits •, par exemple , les pigeons culbutans & ïes pigeons tournans, qui font les plus petits de tous les pigeons de volière , ïe font plus que le pigeon de colom- bier , ils font aulfi plus légers de vol & plus dégagés de corps-, &, quand ils fe mêlent avec les pigeons de co- lombier , ils perdent l'habitude de tour- ner & de culbuter : il femble que ce du Pigeon. 321 foit Férae de captivité forcée qui leur fait tourner ïa têre , & qu'elle reprend ion afliette dès qu'ils recouvrent leur liberté. Les races pures, cefl:- à -dire , les variétés principales de pigeons domef- nques , avec lefquelles on peut faire toutes les variétés fecondaires de chacune de ces races, font, i.° les pigeons ap- pelés greffes gorges (k) j parce qu'ils ont la faculté d'enfler prodigieufement leur jabot en afpirant & retenant l'air -, 2.0 les pigeons mondains, qui font les plus recommandables par leur fécon- dité , ainfî que les pigeons romains , les pigeons pattus & les nonains (l) ; 3.0 les pigeons- paons (m) * qui élèvent & étaient leur large queue comme le dindon ou le paon *, 4.0 le pigeon cra- vate ou à gorge frifée (n) ; 5.0 le pigeon - coquille Hoilandois \ 6,° le (k) Voyez ïes planches vin Se îx de ce volume* (l) Voyez îa planche X de ce volume. (m) Voyez ïa planche xill de ce volume* (n) Voy^zh planche xiv de ce volume,- O-v - 322 Hijloire Naturelle pigeon-hirondelle-, 7.0 le pigeon-carme s 8.° le pigeon* heurté -, 9.0 les pigeons SuifTes -, 1 o.° le pigeon culbutant j 1 1.° le pigeon tournant. La race du pigeon greffe -gorge, efl compofée des variétés fuivantes. i.° Le pigeon grolTe- gorge foupe-en* vin > dont les mâles font très -beaux , parce qu'ils font panachés, êc dont les femelles ne panachent point. 2.0 Le pigeon groffe- gorge chamois panaché : la femelle ne panache point y ceft à cette variété qu'on doit rapporter le pigeon de la planche CXLVi de Frifch , que les Allemands appellent Kropf- taube ou Kroiiper 3 8c que cet Auteur a indiqué fous la dénomination de columba Jlrumofa feu columba œfophago infiato. 3.0 Le pigeon groiTe- gorge , blanc comme un cygne. 4.0 Le pigeon groffe- gorge blanc; pattu & à longues ailes qui fe croifent fur la queue, dans lequel la boule de la gorge paroît fort détachée. du Pigeon. 323 5.0 Le pigeon greffe- gorge gris pa- naché , & le gris doux , dont la cou- leur eft douce & uniforme par- tout le corps. 6.° Le pigeon grofTe- gorge gris-de- fer, gris barré & à rubans. 7.0 Le pigeon greffe- gorge gris piqué comme argenté. 8.° Le pigeon groffe - gorge -jacinte d'une couleur bleue ouvragée en blanc. 9.0 Le pigeon greffe - gorge couleur de feu *, il y a fur toutes les plumes une barre bleue & une barre rouge , 8c ïa plume eft terminée par une barre noire. 1 o.° Le pigeon groiTe - gorge couleur de bois de noyer. îi.° Le pigeon girofle- gorge couleur de marron , avec ies pennes de l'aile toutes blanches. 1 2.0 Le pigeon greffe- gorge maurin d'un beau noir velouté , avec les dix plumes de l'aile blanche ? comme dans la groffe - gorge marron -, ils ont tous deux la bavette ou le mouchoir blanc Ovj 324 Uifcoirc Naturelle fous le cou , & dans ces dernières races à voi blanc & à groiïe-gorge , la femelle eft fembîable au mâle \ au refte , dans toutes les races de groiTes- gorges d'o- rigine pure > c'eit - à - dire , de couleur uniforme , les dix pennes font toutes blanches jufqu'à la moitié de l'aile, & on peut regarder ce caractère comme général. 1 3.0 Le pigeon grolTe- gorge ardoifé, avec le vol blanc & la cravate blanche; la femelle eft fembîable au mâle. Voilà les races principales des pigeons à grofife- gorge *, mais il y en a encore plu(ieurs autres moins belles , comme les rouges 3 les olives , les couleurs de nuit , &c. Tous les pigeons en général ont plus ©u moins la faculté d'enfler leur jabot en infpirant l'air -, on peut de même le faire enfler en foufflant de l'air dans leur gofier : mais cette race de pigeons groiïe-gorge , ont cette même faculté d'enfler leur jabot fi fupérieurement, qu'elle doit dépendre d'une conforma- tion particulière dans les organes -, ce jabot ? prefqu'aufîi gros que tout le refte du Pigeon. 325 de leur corps , & qu'ils tiennent conti- nuellement enflé , les oblige à retirer ieur tête , & les empêche de voir de- vant eux : auffi 5 pendant qu'ils fe ren- gorgent , l'oifeau de proie les failit fans qu'ils l'apperçoivent -, on les élevé donc plutôt par curiofité que pour l'utilité. Une autre race eft celle des pigeons mondains : c'eft la plus commune , & en même temps la plus eftimée à eaufe de fa grande fécondité. Le mondain eft à peu près d'une moitié plus fort que le hïfet -, la femelle reftemble allez au mâle j ils produifent prefque tous les mois de l'année , pourvu qu'ils forent en petit nombre dans la même volière, & il leur faut au moins à chacun trois ou quatre paniers , ou plutôt des trous un peu profonds, formés comme des cafés , avec des planches , afin qu'ils ne fe voient pas lorfqu'ils couvent *? car chacun de ces pigeons défend non- feulement fon panier & fe bat contre les autres qui veulent en approcher 3 mais même il fe bat aufïi pour tous les paniers qui font de fon côté, 5 2 6 Hijloire Naturelle Par exemple, il ne faut que huit paires de ces pigeons mondains, dans un ef- pace cane de huit pieds de coiè : & les personnes qui en ont élevé, adu- lent qu'avec fix paires on pourroit avoir tout autant de produit -, plus on augmente leur nombre , dans un efpace donné , plus il y a de combats , de tapage & d'oeufs cafTés. Il y a , dans cette race, allez louvent des mâles {îériles & aufîi des femelles infécondes , & qui ne pon- dent pas. Ils font en état de produire à huit ou neuf mois d'âge -, mais ils ne font" en pleine ponte qu'à la troiiième an- née -, cette pleine ponte dure jufqu'à fix ou fept ans j après quoi , le nombre des pontes diminue , quoiqu'il y en ait qui pondent encore à l'âge de douze ans : la ponte des deux œufs fe fait quelquefois en vingt -quatre heures, & dans l'hiver en deux jours, en iorte qu'il y a un intervalle de temps différent , fuivant la faifon, entre la ponte de chaque œuf-, la femelle tient chaud fon premier œuf , fans néanmoins le du Pigeon. 327 couver aflîdument : elle ne commence à couver conftammcnt qu'après la ponte du fécond œuf j l'incubation dure or- [i dinairement dix -huit jours, quelquefois ï dix-fept, fur -tour en été, & jufqu'à I dix -neuf ou vingt jours en hiver : l'at- : tachement de la femelle à fes œufs eft fî grand , iî confiant, qu'on en a vu fourîrir les incommodités les plus grandes & les douleurs les plus cruelles plutôt que de les quitter. Une femelle entre : autres dont les pattes gelèrent Se tom- bèrent , & qui , malgré cette foufîrance & cette perte de membres , continua fa couvée jufqu'à ce que fes petits fufïenc éclos : fes pattes avoient gelé , parce que fon panier étoit tout près de la fenêtre de fa volière. Le mâle , pendant que fa femelle couve , fe tient fur le panier le plus voifin ? & au moment que , preiîée par îe befoin de manger , elle quitte fes œufs pour aller à la trémie, le mâle 3 qu elle a appelé auparavant , par ua petit roucoulement , prend fa place 9 couve fes œufs , & cette incubation 328 Uijîoire Naturelle du mâle dure deux ou trois heure* chaque fois , & fe renouvelle ordi- nairement deux fois en vingt- quatre heures. On peut réduire les vatiétés de la race des pigeons mondains à trois pour ïa grandeur, qui toutes ont pour caractère commun un filet rouge autour des yeux. i.° Les premiers mondains font des oifeaux lourds , & à peu près gros comme de petites poules , on ne les recherche qu'à caufe de leur grandeur-, car ils ne font pas bons pour la mul- tiplication. 2.0 Les fcagadais font des gros mor^ dains , avec un tubercule au-deffus du bec en forme d'une petite morille, & un ruban rouge beaucoup plus large au- tour des yeux , c efl - à - dire , une féconde paupière charnue rougeâtre , qui leur tombe même fur les yeux lorfqifiîs font vieux , & les empêche alors de voir : ces pigeons ne produifent que difficilement .Se en petit nombre, du Pigeon. 325 Les bagadais ont le bec courbé & crochu , & ils préfentent pïufîeurs va- riétés : il y en a de blancs, de noirs, de rouges , de minimes , &c. 3.0 Le pigeon Efpagnol , qui effc en- core un pigeon mondain aufîi gros qu'une poule , & qui eft: très -beau-, il ditrere du bagadais , en ce qu'il n'a point de morille au-delïus du bec, que la féconde paupière charnue eft moins Taillante , & que le hzc eft droit au lieu d'être courbé : on le mêle avec le bagadais , & le produit eu: un très -gros & très- grand pigeon. 4.0 Le pigeon turc qui a , comme ie bagadais , une girofle excroiftànce au - deftus du bec , avec un ruban rouge qui s'étend depuis le bec autour des yeux : ce pigeon turc eft très- gros, huppé , bas de cuiiïes , large de corps & de vol : il y en a de minimes ou bruns prefque noirs , tels que celui qui eft repréfeiué dans la planche CXLIX de Frifch 5 d'autres , dont la couleur eft gris - de - fer , gris - de - lin ', chamois 5 yo Hi/toire Naturelle 6 loupe- en- vin : ces pigeons font très -lourds , & ne s'écartent point de leur volière. 5.0 Les pigeons romains , qui ne font pas tout- à- fait iî grands que les turcs, mais qui ont le vol aufii étendu, n'ont point de huppe 5 il y en a de noirs , de minimes & de tachetés *. Ce font -là les plus gros pigeons domediques j il y en a d'autres de moyenne grandeur , & d'autres plus petits. Dans les pigeons pattus , qui ont les pieds couverts de plumes jufque fur les ongles , en d;ftrngue le pattu fans htppe dont Ftilch a donné la figure ? planche cxlVj fous la déno- mination de trummel tauhe en allemand, Se de eolûmbâ iympafnfans en latin , pigeon tambour en français *, & le pattu huppé dont le même Auteur a donné la figure , planche C X L IV j fous le nom de mon tauhe en allemand , & fous la dénomination latine , columha menf- trua feu crijlata pedïhus plumojis : ce * Voye\ les planches enluminées , n.° IIO. du Pigeon. 3 3 r pigeon pattu , que Ton appelle pigeon tambour , fe nomme auffi pigeon, glou g/ou j parce -qu'il repère continuelle- ment ce Ton , 8c que la voix imite le bruit du tambour entendu de loin ; ie pigeon pattu huppé eft auffi appelé pigeon de mois j parce qu'il produit tous les mors , & qu'il n'attend pas que Tes petits forent en état de manger feuls pour couver de nouveau ; c'efi: une race recommandable par ion utilité , c'en:- à - dire , par fa grande fécondité , qui ce- pendant ne doit pas fe compter de douze fois par an, mais communément de huit & neuf pontes i ce qui eil encore un très- grand produit. Dans les races moyennes & petites de pigeons domeftiques .. on drftingue le pigeon nonain dont il y a pluiïeurs variétés-, favuir , le foupe-en- vin , le rouge panaché , le chamois panaché -, mais dont les femelles de tous" trois ne font jamais panachées: il y a auffi, dans la race des nonains , une variété qu'on appelle pigeon maurin j qui eil . tout noir , avec la tête blanche , & le bout des ailes auffi blanc > & c'efr à 3j2 Hijloire Naturelle cette variété quon doit rapporter fe pigeon de la planche C L de Frifch , auquel il donne , en allemand , le nom de fchleyer ou parruquen taule ; & en latin , columba galerïta ; & qu'il traduit en françois par pigeon coè'fté \ mais en général tous les nonains 5 Toit maurins ou autres , font eoerres , ou plutôt ils ont comme un demi- capuchon fur la tête, qui defcend le long du cou , & s'étend fur îa poitrine en forme de cravate compofée de plumes redrefifées : cette variété eft voifine de la race du pigeon groiTe - gorge •, car ce pigeon coërîé eft de îa même grandeur , Se fait auffi un peu enfler fon jabot -, il ne produit pas autant que les autres nonains , dont les plus parfaits font tout blancs , 8c font ceux qu'on regarde comme les meilleurs de îa race } tous ont le bec très -court ^ ceux-ci produifent beau- coup , mais les pigeonneaux font très- petits. Le pigeon - paon efl: un peu plus gros que le pigeon nonain*, on l'ap- pelle pigeon -paon, parce qu'il peut redreffer fa queue & l'étaler comme du Pigeon. 333 îe paon. Les plus beaux de cette race ont jufqu'à trente -deux plumes à la queue , tandis .que les pigeons d'autres races n'en ont que douze *, iorfqu'iïg redrefTent leur queue, ils la pouffent en avant , & , comme ils retirent en même temps la tête en arrière , elle touche à la queue. Ils tremblent auilî pendant tout le temps de cette opéra- tion , foit par la forte, contraction de$ mufcles , foit par queîqu'autre caufe -, icar il y a plus d'une race de pigeons trembleurs^^ : ceii ordinairement quand ils font en amour , qu'ils étalent aïnfi leur queue -, mais ils le font aufïï dans ; d'autres temps. La femelle relève &- étale fa queue comme le mâle , & l'a tout aufii belle 5 il y en a de tout blancs , d'autres blancs , avec la tête (0) Nota. On connoît en effet un pigeon trem- bleur, différent du pigeon - paon , en ce qu'il n'a pas h queue fi large a beaucoup près. I e pigeon- paon a été indiqué par Wiilulghby & Ray , fous ïa dénomination , Columba tvemula laticauda ; & ïe pigeon trembleur fous celle de Columba tremulo. fflgafticauda. feu ncuricauda: celui-ci, fans relever ou étaler fa queue, tremble (djt-on)prefq;ue coiv* tinuellemçnt. 334 Hi/ioire Naturelle & la queue noires ; & c'en: à cette féconde variété qu'il faut rapporter le pigeon de ia planche c L I de Frifch , qu'il appelle , en allemand , pfau - taube ou hunerfchwant^ j & en latin columha cauiata : cet Auteur remarque que, dans ie même temps que le pigeon - paon étale fa queue , il agite fièrement & constamment fa tête & fon cou, à peu près comme l'oileau appelle torcol : ces pigeons ne volent pas aufîi-bien que les autres -, leur large queue eft caufe qu'ils font fouvent emportés par le] vent , & qu'ils tombent à terre : ainfî . on les élève plutôt par curiofité que pour l'utilité. Au refle , ces pigeons qui, par eux-mêmes, ne peuvent faire de longs voyages , ont été tranfportéî fort loin par les hommes \ il y a aux Philippines , dit Gemelli Carréri , des pigeons qui relèvent & étalent leur queue comme le paon. Les pigeons* PoIorois (p) font pîuî gros que les pigeons- paons : ils ont pour caractère d'avoir le bec très-groi (p) Voy^l la planche xi de ce volume. du Pigeon. 3 ^ j .& très -court, les yeux bordés d'un large cercle rouge , les jambes très* baiies : il y en a de dirïërentes cou- leurs, beaucoup de noirs , des roux, des chamois , des gris piqués , & de tout blancs, Le pigeon -cravate eft l'un des plus I petits pigeons -, il n'eft guère plus gros il qu'une tourterelle , 8c en les appariant ii enfemble , ils produisent des mulets ou j métis. On diftingu.eje pigeon- cravate du pigeon -nonain, en ce que le pigeon - cravate n'a point de demi- capuchon fur fe tête & fur le cou , & qu il n'a :précifément qu'un bouquet de plumes, qui femblent fe rebroulter fur la poitrine & fous ia gorges ce font de très-jolis pigeons , bien faits , qui ont l'air très- propre, & dont ii y en a de foupe- en-vin, de chamois, de panachés , de roux êc de gris , de tout blancs , & de tout noirs , & d'autres blancs , avec des manteaux noirs -, c'eft à cette der- nière variété qu'on peut rapporter le pigeon représenté planche Cxlvii de Frifch , fous le nom allemand Mow- çhen j & la dénomination latine , Goiumba \ 3 j 6 Hijïoire Naturelle collo hlrfuto. Ce pigeon ne s'apparie pas volontiers avec les autres pigeons , & n'eft pas d'un grand produit : d'ailleurs il eft petit , & fe laifïe aifé- ment prendre par l'oifeau de proie ; c'en: par toutes ces raifons qu'on en élève guère. Les pigeons qu'on appelle coquille- hollandois , parce qu'ils ont derrière la i tête des plumes à rebours, qui forment comme une efpèce de coquille , font suffi de petite taille *, ils ont la tête noire, le bout de la queue & le bout des ailes auiîi noirs , tout le relie du corps blanc. Il y en a auiïi à tête rouge , à tête bleue & à tête "& queue jaunes, êc ordinairement la queue eft de la même couleur que la tête ; mais le vol eft toujours tout blanc. La pre- mière- variété , qui a la tête noire , ref- femble fi fort à l'hirondelle de mer , que quelques-uns lui ont donné ce nom avec d'autant plus d'analogie , que ce pigeon n'a pas le corps rond comme la plupart des autres , mais alongé & fort dégagé. îl y a 3 indépendamment des têtes & queues du Pigeon, ^ -, queues bleues qui ont la coquille , dont nous venons de parler , d'autres pigeons qui ont Amplement le nom de tête Se queue bleues , d'autres de tête & queue noires , d'autres de tête Se queue ronges, Se d'autres encore, tête 8e queue jaunes v Se qui tous quatre ont l'extrémité des ailes de la même couleur que la tête j ils font à peu près gros comme les pigeons-paons -, leur plumage eO: très-propre Se bien, ; arrangé. Il y en a qu'on appelle auflî pigeons- hirondelles , qui ne font pas plus gros que des tourterelles , ayant le corps alongé de même, & le vol très léger-, tout le deiTous de leur corps eit blanc, ; 8c ils ont toutes les parties fupérieures . du corps ainfi que le cou , la tête . Se la queue noirs, ou rouges, ou bleus, : ou jaunes, avec un petit cafque de ces mêmes couleurs fur la tête -, mais te i de flous de la tête efl toujours blanc \ comme le deiTous du cou. C'ed: à . cette variété qu'il faut rapporter le pi- : geon cuirailé de Jondon ( q) Se de ( q ) Columha galeata. Jondon» Jyi. page 6|» Oifcaux j tome I F. P 3 3 3 Hijloire Naturelle Wiilughby ( r)i qui a pour caractère par- ticulier d'avoir les plumes de la tête , celles de la queue & les pennes des ailes tou-î jours de la même couleur, & ie corps dune couleur différente -, par exemple, le corps blanc, 8z la tête, la queue & les ailes noirs, ou de queiqu'autre couleur que ce loir. Le pigeon-carme, qui fait une autre race, efr peut-être le plus bas, Se le plus petit de tous nos pigeons -, iï paroît accroupi comme -l'cileau que i9on appelle le crapaud-volant : il eft aufli très - pattu , ayant les pieds fort courts, & les plumes des jambes très- longues. Les femelles & les mâles fe reffemblent , ainfi que dans la plupart des autres races j on y compte aufïi quatre variétés, qui font les mêmeà que dans les races précédentes *, favoir, les gtis-de-fer, les chamois, les foupe- en-vin & les gris- doux, mais ils ont tous ie deiTous du corps & des ailes blanc j tout le deiTus de leur corps étant des couleurs que nous venons (r) Columba gakata, Wilïulghby ? OrnitÀjolM pagç 132 j n.° iï. du Pigeon. 339 d'indiquer : iïs font encore remarquables par leur bec , qui eft plus petit que celui d'une tourterelle, & ils ont auffi une pe~ : tire aigrette derrière îa tête , qui poulie . en pointe comme celie de l'alouette ; huppée. Le pigeon tambour ou glou glou j dont nous avons parlé , que l'on ap^- I pelle ainfi, parce qu'il forme ce Ton glou. glouj qu'il répète fort fouvent lorfqu'il l| eft auprès de fa femelle, eft auffi un p pigeon fort bas Se fort pattu j mais il | eft plus gros que le pigeon - carme , I & a peu près de la taille du pigeon-, f? polonois. Le pigeon-heurté, c'eft - à - dire , mafqué comme d'un coup de pinceau i noir, bleu, jaune ou rouge, au-deiïiis I du bec feulement , & jufqu'au milieu de la tête, avec la queue de la mène \ couleur '8c tout le refte du corps : blanc , eft un pigeon fort recherché \ des Curieux: il n'eft point pattu, & eft i de la grolTeur des pigeons mondains i ordinaires. Les pigeons - fuiffes font plus petits que les pigeons ordinaires > & pas plus pi) 340 Hijioire Naturelle gros que les pigeons bifets j ils font de même tout auffi. légers de vol : îi y en a de plufieurs fortes , favoir , des panachés de rouge , de bleu , de jaune fur un fond blanc fatiné , avec un col- lier qui vient former un plaitron fur la poitrine, & qui eft d'un rouge rem- bruni j ils ont fouvent deux rubans fur les ailes, de la même couleur que celle du plaftron. Il y a d'autres pigeon s-fuiftes qui ne font point panachés , & qui font ardoifés- de couleur uniforme fur tout le corps , fans collier ni plaitron 5 d'autres qu'on appelle colliers jaunesjafpés _, colliers jaunes maillés; d'autres colliers jaunes fort maillés j ôcc. parce qu'ils portent des col- liers de cette couleur. Il y a encore, dans cette race de. pi- geons-milles, une autre variété qu'on ap- pelle pigeon a^uré y parce qu'il eft d'une couleur plus bleue que les ardoifés. Le pigeon culbutant eft encore un des plus petits pigeons \ celui que M. Frifçh a fait représenter, pi. cxlviii \ fous les noms de tummel taube > minier \ çolumba gefluofa feu gejlzçularia j eft d'un du Pigeon, 3 4 ï toux brun , mais il y en a de gris Se de variés de roux & de gris : il tourne fur lui-même en volant, comme un corps qu'on jetteroit en l'air, & c'eft par cette raifon qu'on l'a nommé pigeon culbutant ; il femble que tous Tes mouvemens fuppofent des vertiges, qui, comme je l'ai dit, peuvent être artribués à la captivité. Il vole très- vîte, s'élève le plus haut de tous, êc Tes mouvemens font très-précipités & fort irréguliers. Frifch dit que, comme par les mouvemens, il imite en quelque façon les geftes & les fauts des dan- feurs de corde 8c des voltigeurs , on lui a donné le nom de pigeon -panto* mime , columba gefîuofa. Au refte , fa forme eft a(îez fembiable à celle du bi~ fet, & l'on s'en fert -ordinairement pour attirer les pigeons des auttes colombiers a parce qu'il vole plus haut, plus loin & plus long - temps que les autres , & qu'il échappe plus aifément à l'oifeau de proie. Il en eft de même du pigeon tour- nant que M. BritTon (f)* d'après ( f) Columba percujjqr, Wiiïuîghby, Ornu/iofog» P n} 542 Hijloire Naturelle "WiHuïghby a appelé le pigeon batteur ; il tourne en rond lorfqu'ii vole, & bat fi fortement des ailes, qu'il fait autant de bruit qu'une claquette, & fouvent il fe rompt quelques plumes de l'aile par îa violence de ce mouvement qui fem- bîe tenir de la convulfion : ces pi- geons rournans ou batteurs font com- munément gris avec des taches noires iur des ailes. Je ne dirai qu'un mot de quelques autres variétés équivoques ou fecondaires dont les Nomenclateurs ont fait mention , &~qui re [fortifient fans doute aux races que nous venons d'indiquer, mais qu'on auroit quelque peine à y rapporter direc- tement & fûrement, d'après les descrip- tions de ces Auteurs -, tels font , par exemple, J.° le pigeon de Norwège, indiqué par Schwenckfeld (t) ^ qui eft blanc comme neige , & qui pourroit bien être un pigeon pattu huppé plus gros que les autres. $age 132,11.° 9. — Le Pigeon batteur. Briflbn, Ornithol. tome I , page 79. ft) SchwçucJdeJd, Tkriou SU. page 239, h du Pigeon. $4$ 2.0 Le pigeon de Crèce , fuivant drovande (u)3 ou de Barbarie, félon Wiilulgbby (x) * qui a le bec très-court & les yeux entourés d'une large bande de peau nue 3 le plumage bleuâtre & marqué de deux tacbes noirâtres fur chaque , aile. 3.0 Le pigeon - frifé de Schwenck- feld (y ) 8c d' Aldrovande ( % ) ., qui eft tout blanc & friié fur tout le corps. 4.0 Le pigeon- m eiTager de "Wiiïuî* ghby (cl) > qui reiTembie beaucoup au pigeon turc, tant par fon plumage brun que par Tes yeux entourés d'une peau nue s & Tes narines couvertes (ti) Aldrovande, Avi. tome II, page 478. ( x) Columba Barharica feu Numidica. WilïuTgh, Ornithol. page 132, n.° 8, planche xxxiv^ fous la dénomination de Columba Numidica feu Cypria. (y ) Columba crifpa. Schwenckfeld, Therlot. S'il. page 239. (l) Columba crifpis points. Aldrovande, 'Avi, tome 1 1, page 470 , avec une figure.' (a) Columba tabellaria. Wiîiuîghby, Omitholog, page 132, n.° 5, avec une figure, yl. xxxiv. P iy 3 44 Hijtoire Naturelle d'une membrane épaifTe : on s'eft, dit- on , fervi de ces pigeons pour porter promptement des lettres au loin , ce qui leur a fait donner le nom de mejfagers. 5.0 Le pigeon - cavalier de Willul- ghby (b) & d'Albin (c) , qui provient, dit-on , du pigeon grofle - gorge & du pigeon.- meiïager participant de l'un & de l'autre*, car il a la faculté d'enfler beaucoup fon jabot comme le pigeon greffe- gorge 3 ck il porte fur fes narines des membranes épaiiîes comme le pigeon melTager ; mais il 7 a appa- rence qu'on pourroit également fe fervir de tout autre pigeon pour porter de petites chofes, ou plutôt les rap- porter de loin -, il iurrît pour cela de les ieparer de leur femelle & de les trans- porter dans le lieu d'où. Ton veut rece- voir des nouvelles , ils ne manqueront pas de revenir auprès de leur femelle (b) Columba eques. Willuïghby, Ornitlwlog* page 132, n.° 12. (c) Pigeon- cavalier. Albin, toms II> page 30, avec une figure yfU$içfo xlv* du Pigeon. 345 ; dès qu'ils feront mis en liberté ( d)m On voit que ces cinq races de pigeons ne font que des variétés fe- condaires des premières que nous avons indiquées, d'après les obfervatîons de quelques Curieux , qui ont palTé leur vie à élever des pigeons , Se particu- lièrement du îleur Fournier qui en fait commerce , Se qui a été chargé , pendant quelques années, du foin des volières Se des baffes-cours de S. A. S. Monfeigneur le Comte de Clermont ; ce Prince , qui de très-bonne heure (à) Dans les colombiers du Caire, on fépare quelques mâles dont on retient ïes femelles, & on envoyé ces mâles dans les villes dont on veut avoir des nouvelles; on écrit fur un petit morceau de papier qu'on recouvre de cire après l'avoir' plié; on i'ajufte & l'attache fous l'aile du pigeon, mâle , & on le lâche de grand matin 5 après lui avoir bien donné à manger, de peur qu'il ne s'arrête ; il s'en va droit au colombier où ell fa fe- melle . . . . . il fait en un jour le trajet qu'un homme de pied ne fauroit faire en frx. Voyage de Fietro délia Vaile,. tome I, pages 416 cV 417. — On fe fert à Aiep de pigeons qui portent en moins de fis heures des lettres d*Alexandrette à Aiep, quoiqu'il y ait vingt-deux bonnes lieues* Voyage de Thévenot, tome II, page 73. . Pv 34^ Uiftoire Naturelle s'eit déclaré protecteur des Arts , tou- jours animé du goût des belles con- noiffances , a voulu favoir jufqu'ou s'étendoient en ce genre les forces de la N.iture *, on a railemblé , par Tes ordres , toutes les ëfpèces > toutes les races connues des oifeaux domeftiques, on les a multipliées & variées à l'infini j l'intelligence , les foins & la culture ont ici, comme en tout, perfectionné ce qui étoit connu , & développé ce qui ne l'étoit pas *, on a fait éclorre jufqu'aux arrière-germes de la Nature ; on a tiré de fon fein toutes les pro- ductions ultérieures qu'elle feule & fans aide n'auroit pu amener à la lumière; en cherchant à épuifer les tréfors de fa îèconditê, on a reconnu qu'ils étoient inépuifahles , & qu'avec un feul de fes modèles, c'eft-à- dire, avec une feule efpèce, telle que celle du pigeon ou de la poule, on pouvoir faire un peuple compofé de mille 'familles diffé- rentes, toutes reconnoiffables, routes nouvelles, toutes plus belles que Tef- pece dont elles tirent leur premièrç origine, du Pigeon. 347 Dès îe temps des Grecs , on con- noiiToit les pigeons de volière , puif- qu'Ariftote dit qu'ils produifent dix & onze rois Tannée, & que ceux d'E- : gypte produifent jufqu'à douze fois ( e ) ; ■ Ion pourroit croire néanmoins que les ; grands colombiers où les pigeons ne produifent que deux ou trois fois par i an, n'étoient pas fort en ufage du I temps de ce Philofophe : il compofe ïe genre columbacé de quatre efpèces ( f) i lavoir, le ramier ( palumbes) y la tourterelle fturturjjle hïfez (vinagojj 8c \ ïe pigeon ( columbus) ; Tous ont de certaines qualités qui leur font communes, l'amour de la fociété, rattachement à leurs femblab!es3 la douceur de mœurs, la chafteté, c'e(t- à-dire,la fidélité réciproque, & l'amour fans partage du mâle & de la femelle \ la propreté, le Coin de foi -même qui fuppofent l'envie de plaire *, l'art de fe donner des grâces qui le fuppofe encore plus -, les carefïes tendres , les mouvement doux, les baifers timides, qui ne de- viennent intimes & preffans qu'au mo- ment de jouir -, ce moment même ra- mené quelques inftans après par de nou- veaux defîrs, de nouvelles approches également nuancées, également fenties ; un feu toujours durable, un goût tou- jours confiant, & pour plus grand bien encore la- puilTance d'y fatisfaire fans celle : nulle humeur 3 nul dégoût , nulle querelle i tout le temps de la vie em- ployé au fer vice de l'amour & au foin de (es fruits -, toutes les fonctions pénibles également réparties j le mâle aimant allez pour les partager & même fe charger des foins maternels , couvant régulièrement à fon tour, & les œufs & les petits > 3 5 o Hijîoire Naturelle , &c. pour en épargner la peine à fa compagne, pour mettre entr'elle & lui cette égalité dont dépend le bonheur de toute union durable : quels modèles pour l'homme s'il pouvoic ou favoit les imiter ! PI. rm.iw.'JSo LE PIGEON GROSSE-GORGE. EE PIGEON GROSSE GOUGE ENFLEE. .irr PLX.paf.35o. IE PICrEON X OIS' AIN. if: J>/.JTZ. pa* LE PIGEÔ"N"-POLOjSrOIS. EE PIGEON DE EA JAMAËQUE X.E PIOEOK-PAO^T z;>j ir: jv. xiv. paq. LE PIGEON CRAVATE. 35* OISEAUX ÉTRANGERS Qui ont rapport du PlGEON. Il y a peu d'efpèces qui foient auffî généralement répandues que celles du pigeon^ comme il a l'aile très - forte, 8c le vol foutenu, ii peut faire aifément de longs voyage%': auffi la plupart des ra- ces fauvages ou domeftiques, fe trou- vent dans tous les climats j de l'E- gypte jufqu'en Norwège, on élève des pigeons de volière -, 8c , quoiqu'ils pros- pèrent mieux dans les climats chauds , ils ne laiifent pas de réuilir dans les pays froids, tout dépendant des foins qu'on leur donne , & ce qui prouve que l'efpèce en général ne crarnt ni le chaud ni le froid, c'eft que le Pigeon" fauvage ou bifet fe trouve également dans" prefque toutes les contrées des deux concinens (cl), (a) Les oifeaux,que les nabitans Je nos îles de l'Amérique appellent ramiers, font îes vrais bifets de l'Europe ; ils font paffagers &■ ne s'arrêtent 5J2 Hijloire Naturelle Le pigeon brun de la nouvelle Ef- pagne , indiqué par Fernandez, fous le nom Mexicain Cehoilotl (b) _, qui eft brun partout , excepté la poitrine & les extrémités des aiies qui font blanches, ne nous paroît être qu'une variété du bîfet : cet cifeau du Mexique a Je tour des yeux d'un rouge viÇy Tiris noire & les pieds rouges -, celui que le même Auteur ( c) indique fous jamais long-temps en un lieu; ils fuivent les graines qui ne mûrifîent pas en même temps dans tous les" endroits des îles ; ils branchent & nichent fur les plus hauts arbres deux ou trois fois l'année .... H n'eft pas croyable combien les Chafleurs en tuent. Loriqu'iïs mangent de bonnes graines, ils font gras iSecPauffi bon goût que les pige'ons d'Europe; mais ceux qui fe nourriflent de graines amères, comme. de celles de Pacomas, font amers comme de ia fuie. Du Tertre , Hift. des Antilles, tome II, page 256. — H y a des pigeons fur la côte de Guinée , qui font des plus communs, tels que nos pigeons des champs, & qui ne laiffent pas d'être un fort bon manger. Bofjnàti , Voyage de Guinée , page 242» ■ — H y a aux îles Maldives quantité de pigeons^.. r II y a a Calécut des pigeons fort gros 6k des paons fauvages. Koya^JePyrard, oages 131 cV 426. (o) Fernandez, Bifl. nov. Hifp. cap. cxxxil, page 42. (c) Ibidem, cap. LVI? page 26 ; & cap. lx? î*ge 57- des OiJèauX étrangers , &c. 353 îe nom de Hoilotlj qui eft brun, marqué de taches noires, n'eft vraifemblable- ment qu'une variété d'âge ou de fexe du précédent ; 8c un autre du même pays appelé Kacahoilotl , qui eft bleu fur toutes les parties fupérieures , Se rouge fut la poitrine 8c le ventre, n'eft peut-être encore qu'une variété de notre pigeon fauv^ge f dj j & tous trois me paroiflent appartenir à l'efpèce de notre pigeon d'Europe,, Le pigeon indiqué par M. Briflb-n (ejj fous le nom de -pigeon-violet de la Martinique y- 8c qui eft repréfenté * fous ce même nom de pigeon de la Martinique , ne nous paroît être qu'une très-légère variété de notre pigeon (dj Fernandez, Hijloria. nov. Hifp. cap. clix, (e) Columba cajlaneo violaeza ; ventre rufefeente: remigibus intérims rufis Columba violacea Mar- tinicana. Le pigeon violet de ïa Martinique. Briflon r Ornithologie , tome I , page 1 29, flanche XI I ' , fig. 1. — Perdrix roufle. Du Tertre," Hift. des An tilles y tome 1 1 , page 254, * Voysi Us planches enluminées 3 n.° i6%> 3J4 iJifloire Naturelle commun. Celui que ce même Au- teur ( f ) appelle fimplement pigeon de la Martinique , & qui eft i z- fenté * fous la dénomination roux de Ca\enne3 ne foraient ni i'un ni l'autre des efpèces différentes de celle de notre pigeon -, il y a même toute apparence que le dernier n' eft que la femelle du premier , 8c ç. s tirent leur origine de nos pigeons fuyards. On les appelle improprement perdrix à la Martinique , où il n'y a point de vraies perdrix-, mais ce font des pigeons qui ne rerTembîent à la perdrix que par la couleur du plu- mage, 8c qui ne diffèrent pas alTez de nos pigeons pour qu'on doive leur donner un autre nom j &, comme l'un (f) Columba fuperne fufco rufefeens , in fente dilate fulpo-vimicea ; torque violaceo aureo ; maculis in utrâque alfliiigris} re&ricièus lateraUbm teenià tranfversà nigrâ donatis, apice aibis Columba Martinicana. Le pigeon de la Martinique. On ï'appeîle à ïa Marti- nique perdrix. Briiïcn, Ornithologie, tome I, pages 103 & 104. * Voyez les planches enluminées, n.° 141. des Oifcaux étrangers , &c. 35^ nous eft venu de Cayenne , & l'autre de la Martinique, on peut en inférer que i'ef- pèce eft répandue dans tous les climats chauds du nouveau continent. Le pigeon décrit & defîïiié par M.\ Edwards, planche CLXXV ï j Tous îa dénomination de pigeon des Indes orientales j eft de la même grofteur que notre pigeon-biiet -, &, comme il n'en diftère que par les couleurs , on peut le regarder comme une variété pro- duite par l'influence du climat. Il eft remarquable en ce que Tes yeux font entourés d'une peau d'un beau bleu, dénuée de plumes , & qu'il reiè*/e fouvent & fubkernent la queue , lans cependant l'étaler comme le pigeon- paon. Il en eft de même du pigeon d'A- mérique, donné par Catefby ( g) j fous le nom de pigeon de p afflige 3 & par Frifch, fous celui de columba Ameri* cana (h)^ qui ne diftère de nos pi- fgj Catesby, Hifl. Nat. de la Caroline, tome Iy planche XXIII, avec une figure coloriée. (h) Frifch , planche CXLIl, avec une figure eoïoriée. 3 j 6 Hijloire Naturelle geons fuyards & devenus fauvages; que par les couleurs & par les plumes de la queue qu'il a plus longues, ce qui femble le rapprocher de la tourterelle -, mais ces différences ne nous paroillent pas fumiantes pour en faire une ef- pèce diftinéte & féparée de celle de nos pigeons. Il en eft encore de même du pigeon indiqué par Ray (i) * appelé par les Ànglois pigeon perroquet ■> décrit enfuite par M. Brilîon (k) ; & que nous avons fait repréfenter * fous la dénomination de pigeon-verd des Philippines : comme il eft de la même grandeur que notre pigeon - fauvage ou fuyard , 8c qu'il n'en diffère que par la force des cou- leurs, ce qu'on peut attribuer au climat chaud, nous ne le regarderons que comme une variété dans l'efpèce de notre pigeon. (i) Columba Maderas-patana variis coîoribus clt* ganter depi&a. Ray, Syft. Avi. page 196, n.° 15. (k) Le pigeon verd des Philippines. Brifibn^ Ornithologie, tome I, page 143, avec une figure, planche x 1 , fig. 2. * y°y^l tes planches enluminées > n.° 138. des Oifcaux étrangers , &c. $ fj Il s'ell trouvé, dans le cabinet du Roi, un oifeau fous le nom de pigeon verd eft de la grofïeur d'une tourterelle-, &, quoique diiiérenc par la diftribution des couleurs de celui auquel nous avons donné le même nom , il ne peut cependant .être regardé que comme une autre variété de l'ef-* pèce de notre pigeon d'Europe , & il 7 a toute apparence que le pigeon (l) BrifTon, Ornithologie , tome I , page 145. ^ Voye\ les planches enluminées , n.° 163. (m) Columba viridi-oliïacea ; dorfo caflaneo; remU gibus Jltpra nigris infra cinereis , cris extevioribus f avis ; pedibus nudis Columba virïdis Amèoimnfis. Le pigeon verd d'Amboine. Idem, ibidem/ avec une figure , planche g , §& 2, 3 5 8 Hijloire Naturelle verd de File Saint-Thomas , indiqué par Marcgrave (n) , qui eft de la même grandeur & figure de notre pigeon d'Eu- rope, mais qui en diffère ainfi que de tous les autres pigeons, par Tes pieds couleur de fafran , eft cependant encore une variété du pigeon fauvage. En géné- ral, les pigeons ont tous les pieds rouges, il ri y a de différence que dans Tintenlué ou la vivacité de cette couleur, & c'eft peut-être par maladie ou par quelqu autre çauie accidentelle , que ce pigeon de Marcgrave les avoir jaunes-, du refte, ri relîembïe beaucoup aux pigeons verds des Philippines & d'Amboine , de nos planches enluminées. Thévenot fait men- tion de ces pigeons verds dans les termes fuivans : « il fe trouve aux îndes, à Agra, » des pigeons tout verds , & qui ne dif- 3jfèrent des nôtres , que par cette cou- pleur.- Les cha fleurs les prennent ailé- ment avec de la glue » (o). Le pigeon de la Jamaïque, indiqué ( n) Columba fj'lreftris fpecies ex infulà Sancti Thoma. Marcgrave, Hijl: Rat. Brafd. page 213. (0) Voyages de Thévenot, tome III, page 73. des Oifeaux étrangers , &c. 359 par H.ins Sloane (p) > qui eft d'un brun- pourpré fur le corps, & blanc fous le ventre, & dont la grandeur eft à peu près la même que celle de notre pigeon fauvage, doit erre regardé comme une fimple variété de cette efpèce, d'autant plus qu'on ne le trouve pas à la Jamaï- en toutes faiions, &. qu'il n'y eft que connue oifeau de pa liage. Un autre qui fe. trouve dans le même pays de la Jamaïque, & qui n'eft encore qu'une variété de notre pigeon fauvage '-, c'eft celui qui a été indiqué par Hans Sloane ( q) 3 8c enfuite par Catefby (r)y fous la dénomination de pigeon à la cou- ronne Manche : comme il eft de la même groiïeur que notre pigeon fauvage, & qu'il niche & multiplie de même dans les trous dès rochers , on ne peut guère (p ) Columba minor ventre candldo. Sloane , Jamaïc. page 303 , planche cclxii , fig. 1. — ' Columba média ventre candi do. Browne, Nat. Hifi. of Jamaïc, page.469. ( q) Columba minor , capiîe albo. Goritas , de Oviedo. Sloane , Jamaïc. page 303 , planche cclxi , fig. 2. (y) Pigeon à la couronne blanche. Catesby, Hifl, de lu Caroline, tome I , page 25,. planche x x V> avec -une bonne figure coloriée, 3 6 o ïïïfîoire Naturelle , &c. douter qu'il ne foit de la même efpèce. On voit, par cette énumération, que notre pigeon fauvage d'Europe fe trouve au Mexique , à la nouvelle Eipagne , à la Martinique, à Cayenne , à la Caroline , à la Jamaïque , ceft-à-dire , dans toutes les contrées chaudes & tem- pérées des Indes occidentales-, &. qu'on le retrouve aux Indes orientales , à Am- boine, & jufqu'àux Philippines. LE RAMIER $6l LE RAMIER (a). Voye\ planche XV de ce volume. vjomme cet oifeau * eit beaucoup plus gros que le bifet, & que tous (a) Pigeon-ramier ; en Grec , Qkro-* , ou $krf* ; en Latin , Palumbes ; en Italien , Colombo torquato ; en Efpagnoî, Paloma tercat^; en Allemand , Riuvel* taube; en SuiiTe , Schlag-tub ; en Hoïlandois, Rin de les engraifTer & de ^es ^rc ^uki- plier -, il fe peut donc que nos grands pigeons de volière, & particulièrement les gros pattus s viennent originaire- ment des ramiers -, la feule choie qui paroîtroit s'oppofer à cette idée , c'eft que nos petits pigeons domeftiques produifent avec îes grands , au lieu qu'il ne paroît pas que îe ramier pro- duire avec îe bilet , puifque tous deux fréquentent îes mêmes lieux fans le mêler enfemble : la tourterelle, qui s'ap- privorle encore plus aifément que îe ramier , & que Ton peut facilement élever & nourrir dans îes mailons , pourroit , à égal titre , être regardée comme la tige de quelques - unes de (b J Palumbes antiqui cdlarcs habebant cuaspafcenda faginabant. Perrottus apud Gefnerum, 'de Avibus , pag. 31c. du Ramier. 363 nos races de pigeons domeftrqMes , Ci elle n'étoitpas, ainfi que le ramier, d'une eipèce particulière & qui ne fe mêle pas avec les pigeons fauvages : mars on peut concevoir que des animaux , qui ne fe mêlent pas dans l'état de nature , parce que chaque mâle trouve une femelle de fon eipèce , doivent ie mêler dans Tétât de captivité s'ils font privés de leur femelle propre & quand on ne leur otire qu'une femelle étrangère : îe bifet , ie ramier & la tourterelle ne fe mêlent pas dans les Lois , parce que chacun y trouve la femelle qui lui convient le mieux , c'eft- à-dire , celle de ion efpèce propre j mais il en: poŒble qu'étant privés de leur liberté & de leur femelle , ils s'unifient avec celles qu'on leur préfente j & , comme ces trois elpèces font fort voiimes y les individus , qui réfultent de leur mélange , doivent fe trouver féconds & produire par conféquent des races ou variétés confiantes -, ce ne feront pas des mulets (tériles , comme ceux qui proviennent de 1 anefle & du cheval , mais des métis féconds , comme ceux 364 Hiftoire Naturelle que produit îe bouc avec la brebis." A juger du genre columbacé > par toutes les analogies , il paroîr que , dans l'état de nature , Hya, comme nous l'ai- dons dit , trois efpèces principales , & deux autres qu'on peut regarder comme intermédiaires-, les Grecs avoient donné à chacune de ces cinq efpèces des noms diftérens , ce qu'ils ne fai- foient jamais , que dans ^ l'idée qu'il y avoir en effet diveriité d'eipèce -, la première & la plus grande , eft le phajfa ou phatta ., qui eft notre ramier -, la féconde, eft le péléias * qui eft notre Lifet ♦, la troifième , le trugon ou la tourterelle ; la quatrième , qui fait la ' première des intermédiaires , eft Yoenas qui , étant un peu plus grand que le bifet, doit être regardé comme une variété dont l'origine peur le rap- porter aux pigeons fuyards ou défer- Eeurs de nos colombiers -, enfin la cinquième , eft le phaps 3 qui eft un ramier plus petit que le phajfa ; Se qu'on a , par certe raifon , appelé palum- bus minori mais qui ne nous parole faire qu'une variété dans l'efpcce du du Ramier, 3 £5 ramier», car on a obfervé que, fuivans les climats , les ramiers font plus ou moins grands *, ainli, toutes les efpèces nominales , anciennes 8c modernes, fe réduifent toujours à trois , c'eûV à-dire , à celles du bifet , du ramier , & de ïa tourterelle, qui peut-être ont con- tribué toutes trois à ia variété pref- qu'infinie qui fe trouve dans nos pigeons domeftiques. ' Les ramiers arrivent dans nos pro- vinces au printemps , un peu plutôt que les bifets , 8c partent en automne un peu plus tard ; c'eft au mois d'août qu'on trouve en France les ramereaux en plus grande quantité , & ii paroïc qu'ils viennent d'une féconde ponte qui fe fait fur la fin de l'été -, car la première ponte , qui fe fait de très- bonne heure au printemps , eft fou- vent détruite , parce que le nid n'étant pas encore couvert par les feuilles , eft trop expofé. Il refte des ramiers, pen- dant l'hiver , dans la plupart de nos provinces ^ ils perchent comme les bi- fets , mais ils n'établiflent pas , comme eux , leurs nids dans des trous d'arbres % 366 Hijloire Naturelle ils les placent à leur fommet , & les conftruifent allez légèrement avec des bûchettes, ce nid eft plat & allez large pour recevoir le mâle & la femelle ; je fuis allure qu'elle pond de très- bonne heure au printemps , deux & fouvent trois œufs-, car on m'a apporté plufieurs nids où il y avoit deux & quelquefois trois rarnereaux ( c ) déjà « (c) M. Saïerne dit que ïes Poulailliers d'Or- s» léans achettent , en Eerri & en Sologne , dans la >i faifon des nids , une quantité conCdérabie de » tourtereaux , qu'ils foufflent eux-mCmes avec îa » bouche , ïes engraifient de millet en moins de >» quinze jours pour ïes porter enfuite à Paris ; >i qu'ils engraiflent Je même les rarnereaux; qu'ils #» y portent auffi des pigeons bifets & d'autres pi- » geons qu'ils appellent êssjsofies; que ces derniers » font, félon eux, des pigeons de colombiers deve. us » fuyards ou vagabords, qui nichent tantôt dans t) un endroit & tantôt dans un autre , dans les ?» églifes , dans des tours , dans des murailles de »» vieux châteaux ou dans des rochers. Onnthvlog, pag. lôi.ti JS'ota. Ce frit prouve que les Ramiers, ainiî que tous les pigeons & tourterelles , peuvent être élevés comme les autres oifeaux domeftiques, & que par conféquent , ils peuvent avoir donné naiiTance aux plus belles variétés & aux plus grandes Taces de nos pigeons de volière. M. le Roy, Lieu- tenant des chanes & Infpecleur du parc de Ver- failles } m'a aufil allure que les rarnereaux , pris au du Ramier. 367 forts au commencement d'avril -, quel- ques gens ont prétendu que, dans notre ciimat , ils ne produifent qu une fois i année , à moins qu'on ne prenne leurs petits ou leurs œufs , ce qui , comme Ton fait , force tous les oi- fe'aux à une féconde ponte. Cependant Frifeh alïure qu'ils couvent deux fois par an ( d ) 3 ce qui nous paroît très- vrai \ comme il y a confiance & fidé- lité dans l'union du mâle & de la femelle , cela fuppofe que le fend- aient d'amour & le foin des petits dure toute Tannée. Or la femelle pond quatorze jours après les approches du mâle ( c ) j elle ne couve que pendant quatorze autres jours , & il ne faut qu'autant de temps pour que les petits nid , s'apprivoifent & s'engraiflent très-bien , & que même des vieux ramiers pris au filet s'accoutument aifément à vivre dans des volières , où l'on peut , en les foufïïant , leur faire prendre graine en fort peu de temps. (d) Voye\ Frifeh , à l'article du Ringel - taube , planche cxxxvni. (e) Ariftote , Hifi. JnimaU lib. VI, cap. iv. Qiv 368 Hijloire Naturelle puiiTent voler & fe pourvoir d'eux- mêmes \ arnri , il y a toute apparence qu'ils produifent plutôt deux fois qu'une par an \ la première, comme je l'ai «lit , au commencement du printemps •, & la féconde , au folftice d'été , comme l'ont remarqué les Anciens : il eft très- certain, que cela eft ainfi dans tous les climats chauds Se tempérés , & très- probable qu'il en eft à peu près de même dans les pays froids. Ils ont un roucoulement plus fort que celui des pigeons , mais qui ne fe fait entendre que dans la faifon des amours & dans îes jours fereins j car , dès qu'il pleut , ces oifeaux fe taifent , 8c on ne les entend que très - rarement en hiver : ils fe nourriflent de fruits fauvages , de glands ,. de faine , de fraifes dont ils font très -avides, & aulîî de fèves Se de grains de toute efpèce j ils font un grand dégât dans les blés lorfqu'ils font verfés ^ & , quand ces alimens leur manquent , ils mangent de l'herbe : ils boivent à la manière des pigeons , ceft-à-dire, de fuite & fans relever la du Ramier. 369 tête qu'après avoir avalé toute l'eau dont ils ont befoin *, comme leur chair, & fur -tout Celles des jeunes, eft excel- lente à manger, on recherche foigneu- fement leurs nids , & on en détruk ainfî une grande quantité : cette dé^ vaftation , jointe au petit produit, qui si'eft que de deux ou trois œufs à chaque ponte, fait que Tefpèce n'efê nombreufe nulle part j on en prend 9 à îa vérité , beaucoup avec des filets dans les lieux de leur paffage , fur-tout dans nos provinces voifines des Pyrénées $ mais ce n'eft que dans une faiion , ôc pendant peu de jours. Il paroît que , quoique le ramier pré- fère les climats chauds & tempérés (f) $ il habite . quelquefois dans les pays feptentrionaux , puifque M. Linnsus le met dans la Me des oifeaux qui (f) Les rochers des deux îles de ïa Madeleine fervent de retraite à un nombre infini de pigeons- ramiers naturels au pays , & qui ne diffèrent de ceux d'Europe, qu'en ce qu'ils font d'une déiieatefle & d'un goût pïus exquis. Voyage, au Sénégal ])Q3° I\L Jdan fin, page 165. 3 70 Hijîoire Naturelle fe Trouvent en Suède (g) ; & il paroîc auffi qu'ils ont patte d'un con- tinent à l'autre ( h ) _, car il nous eit arrivé des provinces méridionales de l'Amérique , ainfi que des contrées (g) Linn. Faun. Suec. n.° 1 75. (h) A la Guadeloupe , les graines de bois d'Inde, qui étoient mûres , aboient attiré une infinité de ramiers ; ear ces oifeaux aiment paffionnément ces graines; ils s'en engraiflent à merveille, cV leur chair en contracte une odeur de girofie & de mu£ cade tout-à-fait agréable i uand ces oifeaux font gras, ils font extrêmement parefieux plufieurs coups de fufîl ne les obligent point de s'envoler; ils fe contentent de fauter d'une branche à l'autre , en criant & regardant tomber leurs com- pagnons. Nouveau Voyage aux îUs de l'Amérique , tome /£, page 4^6. — A la baie de Tous-les-Faints, irya deux fortes de pigeons -ramiers; les uns, de la grofieur de nos pigeons-ramiers ( d'Europe) j font d'un gris-obfcur ; les autres , plus petits , font d'un gris-ciair; les uns & ïes autres font d'un très- bon manger, & il y en a de fi grandes troupes depuis ïe mois de Mai jufqu'en Septembre , qu'un feu! homme en peut tuer neuf ou dix douzaines dans une matinée , lorfque le ciel eft couvert de brouil- lards & qu'ils viennent manger les baies qui croifient dans les forêts. Voyage de Dampier , tome. J V ' , page 66. TomlPr Pl.XfÇpaa.dyo LE RAMIER du Ramier, 57* les plus chaudes de notre continent ,' plufîeurs oifeaux qu'on doit regarder comme des variétés & des efpèces très- voifines de celle du ramier , & dont nous allons faire mention dans l'article fuivant. Qvj 3 7 * Hiftoire Naturelle OISEAUX ÉTRANGERS Qui ont rapport au Ramier, J-je Pigeon-ramier des Moluques, indiqué fous ce nom par M. Briflbn (a)-, & que nous avons fait repréfenter * avec une noix mufcade dans le bec , parce qu'il le nourrit de ce fruit -, quel- qu'éloigné que foit le climat des Mo- luques de celui de l'Europe , cet oifeau refiemble fi fort à notre Ramier , par îa grandeur & la figure , que nous ne pouvons le regarder que comme une variété produite par l'influence du climat. Il en eft de même de l'oiieau indi- qué & décrit par M. Edwards (b ) 3 (a) Ormthol. tom. î , pag. 148, avec une figure s planche xm , fig. 2. * Voyt\ les plajicàes enluminées , n.° 1 64. (I) Ibe triangidar Spmd pigeon. Hiji. ofBirds, des Oifeaux étrangers, &c. 373 Se qu'il dit fe trouver dans les provinces méridionales de la Guinée : comme il eft à demi - pattu & à peu près de la grandeur du ramier d'Europe , nous ie rapporterons à cette efpèce comme (impie variété, quoiqu'il en diffère par les couleurs, étant marqué de taches rriangulaires fur les ailes , & qu'il ait tout le defïbus du corps gris , les yeux entourés d'une peau rouge 8c nue, l'iris d'un beau jaune, le bec noirâtre -: mais toutes ces différences de couleur dans le plumage , le bec ëc les yeux , peuvent être regardées comme des variétés produites par le climat. Une troiiierne variété du ramier , qui fe trouve dans l'autre continent , c'eft le pigeon à queue annelée de la Ja- maïque , indiqué par Hans Sloane (c) & Browne, qui, étant de la grandeur à peu près du ramier d'Europe , peut y être rapporté plutôt qu'à aucune autre efpèce : il eft remarquable par (c) Columba caudà torquatà , feu fafciéfufcâ notata* Sloane, Jamaïc. pag. 302.— Columba major, nigw cçriilefans , caudâfafciaiâ. Browne,/.^, 374 Hijloire Naturelle la bande noire qui rraverfe la queue' bleue, par l'iris des yeux qui elr d'un rouge plus vif que celui de i'œil du ramier , & par deux tubercules qu'il a près de la bafe du bec. IL Le F O U N I N G O. L'oiseau appelé à Madagafcar Foumïn gp-menc-rabou 3 8c auquel nous conferverons partie de ce nom , parce qu'il nous paroît être d'une efpèce particulière , & qui, quoique voifine de celle du ramier , en difrère trop par la grandeur pour qu'on pui(Te le regarder comme une fimple variété (d)m M. Briffon a indiqué le premier cet (A) Nota. Ce qui nous fait préfumer que îe founingoeft d'une autre efpice ne celle de notre ramier , c'eft que ce dernier fe trouve dans ce même climat. " Nous vîmes (dit Bontekoe) dans » l'île de Mafcarenas , quartité de pigeons-nuniers » Meus, qui fe laifioient prendre à ia main; nous ^ en tuâmes ce jour-là prts de deux cens. . . . ?» nous y trouvâmes aulîi quantité de ramiers. » Voyage aux Indus omntaUs , page 16. des Oifeaux étrangers , &c. 3 7 j oifeau (e) 3 Se nous l'avons fait repré- fenter * fous la dénomination de- pigeon- ramier bleu de Madagafcar ; il efi; beau- coup plus petit que notre ramier d'Eu- rope , & de la même grandeur à peu près qu'un autre pigeon du même climat , qui paroît avoir été indiqué par Bontius (f)j & qui a enfuite été déetit par M. Briiïon ( g) * fur un individu venant de Madagafcar , où il s'appelle founingo maïtfou ; ce qui paroît prouver que , malgré la différence de couleur du verd au bleu , ces deux oiieaux font de la même efpè:e, & qu'il n'y a peut - erre entr'eux d'autre différence que celle du fexe ou de l'âge : on trouvera cet oifeau verd repréfenté (e) Le Pigeon - ramier bîeu de Madagafcar* Brifîon, Ornitkol. tome I, page 140, avec uns figure, planche xiv, fig, 1. '* Voye\ les planches enluminées , n.° il. ffj Columba virïdijjimi coloris. Bonti. Ind. or. pag. 62. (g) e Pigeon-ramier verd de Madagafcar. Ornith~ tome I ? page 142 7 avec une figure , planche xrv 7 fig. 1, 5 7 6 Hifioïre Naturelle fous îa dénomination de pigeon - ramier verd de Madagafçar * dans nos planches enluminées. I I I. Le RA MIRE T. L'oiseau repréfenté * * fous la dénomination de pigeon - ramier de Cayenne ^ dont l'efpèce eft nouvelle 3 6 n'a été indiquée par aucun des Naturalises qui nous ont précédés *, comme elle nous a paru différente de celle du ramier d'Europe 8c de celle du founingo d'Afrique , nous avons cru devoir lui donner un nom propre , 8c nous l'avons appelé Ramiret > parce qu'il eft plus petit que notre ramier j c'eft un des plus jolis oifeaux de ce genre , & qui tient un peu à celui de la tourterelle par la forme de fon cou & l'ordonnance des couleurs , mais qui * Voye\ les planches enluminées , n.° 1 1 I. ** Voyelles planches enluntinées , n.° 213. des Olfeaux étrangers, &c ^jy en diffère par la grandeur & par plu- fïeurs caractères qui le rapprochent plus des ramiers que d'aucune autre efpèce d'oifeau. I V. Le Pigeon des îles Nîncombar ou plutôt Nicobar , décrit & deffiné par Albin ( h ) j qui , félon lui , eft de la grandeur de notre ramier d'Europe , dont la tête & la gorge font d'un noir - bleuâtre , le ventre d'un brun» noirâtre , Se les parties fupérieures du corps Se des ailes variées de bleu , de rouge , de pourpre de jaune & de verd. Selon M. Edwards , qui a donné depuis Albin une très - bonne defeription Se une excellence figure de cet oifeau (i) , il ne paroiffoit que (h) Figeon de Nincombar. Albin, tom. II F, page 2,0 , avec des figures , planche x lvii , le mâle ; & planche x l v i 1 1 , la femelle. Nota. Cette différence de fexe , donnée par Albin , n'efl pas certaine : voyez, ci-après , ce qu'en dit M. Edwards. (i) Edwards, Glanans , page 271 & fuiv. planche cccxxxix* 3 7§ Hijîoire Naturelle de îa grofeur d'un pigeon ordinaire Les plumes fur le coup font longues & pointues comme celle d'un coq de bafle - cour , elles ont de très- beaux reflets de couleurs variées de bleu, de rouge , d'or & de couleur de cuivre •, le dos & le defïus des ailes font verds avec des reflets d'or & cuivre. ..... J'ai , ajoute M. Edwards , trouvé dans Albin des figures qu'il appelle le coq 8c la poule de cette efpèce ; je les ai exa- minées enfuite chez le Chevalier Sloane , & je n'ai pu y trouver aucune diffé- rence de laquelle on pouvoit conclure que ces oifeaux étoient le mâle Se la femelle Albin l'appelle pigeon Ninkcombar ; le vrai nom de l'île , d'où cet oiieau a été apporté , eft Ni- cobar il y a pluiieurs petites îles qui portent ce nom , & qui font iituées au nord de Sumatra. des Oifeaux étrangers, &c. 379 V. L'oiseau nommé par les Hollandoïs Crown-vogel > donné par M. Edwards > planche CCCXXXViu , fous le nom de gros pigeon- couronne des Indes; &, par M. Briiïon (k) 3 fous celui de faifan- couronné des Indes, * Quoique cet oifeau fort aufîi gros qu'un dindon , il paroît certain qu'il appartient au genre du pigeon \ il en a le bec , la tête , le cou , toute la forme du corps , les jambes , les pieds , les ongles , la voix , le roucou- lement , les mœurs , &c -, c'efi: parce qu'on a été trompé par fa grolTeur qu'on n'a pas longé à le comparer au pigeon , & que M. BrnTon 8c en- fuite notre DeiTinateur r l'ont appelé faifan ; le dernier volume des Oifeaux de M. Edwards n'avoit pas encore paru : mais voici ce qu'en dit cet (k) Brifîbn , Ornlthol. tome I , page 278 , pi. yi% * Vsyt\hî planches enluminées , n.° 118. 380 Hijïoire Naturelle habile Ornithologifte. « Il eft de îa *> famille des pigeons , quoiqu'aufli » gros qu'un dindon de médiocre gran- »deur M. Loten a rapporté o> des Indes plufieurs de ces oifeaux 3>vivans Il eft natif de l'île »de Banda M. Loten m'a » a libre que c'eft proprement un pigeon, m & qu'il en a tous les gefles & tous s»Ies tons ou roucouîemens en carefiant 33 fa femelle : j'avoue que je n'aurois 33 jamais fongé à trouver un pigeon dans »un oifeau de cette grofTeur , fans une » telle information y> (l ). Il eft arrivé à Paris tout nouvelle- ment , à M. le Prince de Soubife , cinq de ces oifeaux vivans ', ils font tous cinq fî reftemblans les uns aux autres , par îa groiïeur 8c la couleur , qu'on ne peut diftinguer les mâles & îes femelles ; d'ailleurs ils ne pondent pas, & M. Mauduit , très - habile Na- turalifte , nous a afturé en avoir vu plufieurs en Hollande , où ils ne pondent pas plus qu'en France. Je (l) Edwards , Glanures > page 269 & fuiv. des Oi/èaux étrangers, &c. 5 8 i me fouviens d'avoir Id dans quelques Voyages , qu'aux grandes Indes on élève & nourrit ces oifeaux dans des baffes - cours , à peu près comme les poules. 382 Hijloire Naturelle L A TOURTERELLE (a). JjaTourterelle aime peut-être plus qu'aucun autre oifeau , ia fraîcheur eu eue & la chaleur en hiver -, elle arrive dans notre climat fort tard au prin- temps , ce le quirte dès ia fin du mois d'août -, au lieu que les bifets êc les ramiers arrivent un mois plu- tôt , & ne partent qu'un mois plus tard , pîufieurs même reftent pendant l'hiver : toutes les tourterelles, fans en ( a ) La Tourterelle, en Grec, TfCym ; en Latin, Turtur ; en Eibcgnol , Tortota ou Tortora ; en Italien , Tortora , Tortorella ; en Allemand , Turtel , Turtel-taube; en Angîois, Turhe , Turhe- dore; en Suédois, Turtur-duj'wa ; en Polonois , Trakcwe. — Turterelfe. Bélon, Bifl. dis Oifeaux, page 300 Tourte , Turterelle , Torterelle , Tourterelle. Idem, Portraits d'OiJ'eaux , p. 77. a. -— Turtur. Gefner ? Avi. pag. 316. — Tortora nof- tratt. Oiina , pag. 34 , avec um figure. — Tour- te e!:e. Albin, tome 11, page gi, arec une figure. • — Turtur. Frifch, plandie xir , avec une figure coloriée. de la Tourterelle, 383 excepter une , Te réunifient en troupes -, arrivent, partent & voyagent enfemble ; elles ne féjournent ici que quatre ou cinq mois •, pendant ce court efpace de temps , elles s'apparient , nichent pondent & élèvent leurs petits au point de pouvoir les emmener avec elles. Ce iont les bois les plus fombres & les plus frais qu'elles préfèrent pour s'y établir , elles placent leur nid , qui eft prefque tout piat5 fur les plus hauts arbres , dans les lieux les plus éloignés de nos habitations. En Suède ( b ) j en Allemagne, en France , en Italie , en Grèce ( c) > & peut-être encore dans des pays plus froids & plus chauds , elles ne féjournent que pendant l'été 3 & quittent également avant l'automne : feulement Ariftore nous apprend qu'il en renie quelques - unes en Grèce 3 (h) Linnaeus, Faun. Suec. n.° 175. (c) Nec hièernare apud nos patiuntur Turtures. . . 8 volant gregatim Turturzs cum accedunt & abeunt. çoturnices quoquz dïfcedunt nijl paucce. locis apricis re? manferint: quoi & turtures faciunt. Ariiu Hift. Aiàrtu Jiï>.VIII,pag. 12, 584 Hifloire Naturelle dans les endroits îes plus abrités : cela (embîe prouver quelles cherchent les climats très - chauds pour y palîer l'hiver. On les trouve prefque par- tout ( d ) dans l'ancien continent , on les retrouve dans le nouveau ( e) & a (d) Nous vîmes, dans le royaume de.Siam, ?> deux fortes de tourterelles; la première eft fem- » blable aux nôtres & la chair en eft bonne , la ?> féconde a le plumage plus beau , mais la chair » en eft jaunâtre & de mauvais goût. Les cam- *? pagnes font pleines de ces tourterelles. ;> Second voyage de Siam , page 248; & Geronier, Hifl. JNat. & Polit, de Siam, page 35. — Les pigeons- ramiers & les tourterelles viennent aux îles Cana- ries des côtes de Barbarie. Eifi. gén. des Voyages , tome II, page 241. • — A Fida, en Afrique, il y a une fi grande quantité de tourterelles , qu'un homme , qui tiroit aiTez bien , vouloit s'engager à. en tuer cent en fix heures de temps. Bofman , Voyage -de Guinée, page 416. — Il y a des tour- terelles aux Philippines , aux îles de Pulo-condor , à Sumatra. Dampier , terne I , page 406; tome II , jiage 82; & tome III, page 155. — • Il y a ici (à la nouvelle Hollande ) quantité de tourterelles dodues 6c grafies , qui font un très -bon manger. Idem , tome IV, page 139. (ej Les campagnes du Chili font peuplées d'une infinité de la Tourterelle. 38^ & jufque dans les îles de ïa mer du infinité d'oifeaux , particulièrement de pigeons-ra- miers «Se de beaucoup de tourterelles. Voyage de Fréiier , page 74 Les pigeons - ramiers y font amers , & les tourterelles n'y font pas un grand régaï. Idem, page 111. — A la Nouvelle- Efpagne , il y a plufieurs oifeaux d'Europe , comme des pigeons , des tourterelles grandes comme celles d'Europe , & de petites comme des grives. Gemellî Caréri , tome VI, page 212. — Je n'ai vu ert aucun endroit du monde , une auffi grande quantité de tourterelles & de pigeons - ramiers , qu'à Areca au Pérou. Le Gentil , tome I , page 94* —•H y a, dans les terres de la baie de Cam- pêche , trois fortes de tourterelles ; ïes unes ont ie jabot blanc , ïe refte du piumage d'un gris tirant fur ïe bleu ; ce font ïes plus grofles , & elles font bonnes à manger. Les autres font de couleur brune par - tout ïe corps , moins graifes & plus petites que ïes premières : ces deux efpèces volent par paires , & vivent des baies qu'elles cueillent fur ïes arbres. Les trotlièmes font, d'un gris fort fombre , on ïes appelle tourterelles de terre ; elles font beau- coup plus groîfes qu'une alouette , rondes & dodues ; eiïes vont par couple fur la terre. Voyagé de Dampier , tome III, page 310. — On croie communément qu'il y a , à Saint-Domingue, des perdrix rouges & des ortolans ; on fe trompe y ce font différentes efpèces de tourterelles ; ïes nôtres y font fur -tout fort communes. Charlevoix ? Hifîoire de Saint-Domingue, tome I, pages 2S û* 29. — A îa Martinique & aux Antilles m les tourterelles ne fe trouvent guères que dags Oifeaux j Tome IF. R 3 8 S Uijloire Naturelle Sud (f) ; elles font , comme les pi- geons , fujettes à varier , & , quoique naturellement plus fauvages , on peut néanmoins les élever de même , & les faire multiplier dans des volières. On unit aifément enlemble les différentes les endroits écartés , où elles font peu charTées ; celles de FA mérique m'ont paru un peu ■ plus groffes que ceies de France Dans îe temps qu'elles font leurs petits , on en prend beaucoup de jeunes avec des filets , on les nourrit dans des volières , elles s'y eng aillent parfaitement bien 3 mais elles n'ont pas le goût fi fin que les fau- yages ; il eft prefque impoffibie de les apprivoifer. Celles qui vivent en liberté , fe nourrilTent de prunes de monbih & d'olives fauvages , dont les noyaux ïeur reftent affez longtemps dans le jabot ; ce qui a fait croire à quelques-uns , qu'elles mangcoient de petites pierres : elles font ordinairement fort graiïes & de bon goût. Nouveaux Voyages aux lies de l'Amé- rique , tome II, page £37. (f) Dans les îles enchantées de la mer du Sud", nous vimes des tourterelles qui étoient fi familières , qu'elles venoient fe percher fur nous. Hîftoire des Kavigat. aux terres auftrales , tome II , page ^2 .......... . H y a force tourterelles aux %ïe& Galia-pagos , dans ia mer du Sud ; elles font . fi privées , qu'on en peut tuer cinq ou fix dou- zaines, en une après-midi , avec un iimple bâton. Nouveaux Voyages aux lies de l'Amérique , tome II a f*f 67, de la Tourterelle. 587 variétés , on peut même les unir au pigeon , & leur faire produire des métis ou des mulets , & former ainfi de nou- velles races ou de nouvelles variétés individuelles. «J'ai vu, m'écrit un témoin digne de foi (g) _, dans le Bugey , chez « un Chartreux, un oifeau né du mélange « d'un pigeon avec une tourterelle j il ce étoit de la couleur d'une tourterelle ce de France ; il tenoit plus de la tour- et terelle que du pigeon } il étoit in- ce quiet , Se troubloit la paix dans Ia« volière. Le pigeon -père étoit dune ce très -petite efpèce, d'un blanc parfait, ce avec les ailes noires. » Cette obferva- tion , qui n'a point été fui vie jufqu'au point de favoir fi le métis , provenant du pigeon & de la tourterelle , étoit fécond , ou fi ce n'étoit qu'un mulet ftériie, cette* obfervation, dis-je , prouve au moins ïa très -grande proximité de ces deux efpèces : il eft donc fort pof- fible ? comme nous ï'avons déjà infi- nué, que les bifets, les ramiers & les (g) M. Hébert, que j'ai déjà cité plus d'une fois. Ri; 3 8 8 HiJIoire Naturelle tourterelles 3 dont ies efpèces paroilîent fe foutenir féparément & fans mélange , dans Tétat de nature , fe forent néan- moins fouvent unies dans celui de do- mefticité , & que de leur mélange , foient ïtTues la plupart des races de nos pigeons domefnques , dont quelques-uns font de la grandeur du ramier , & d'autres relTemblent à la tourterelle par la peti- teiTe , par la figure , &c. & dont plufieurs enfin tiennent du bifet 3 ou participent de fous trois. Et ce qui femble confirmer la ve- nté de notre opinion fur ces unions , qu'on peut regarder comme illégi- times , puifqu'elles ne fonr pas dans le cours ordinaire de la Nature , c'eft l'ardeur exceffive que ces oifeaux ref- fentent dans la faifon de l'amour : la tourterelle eft encore plus tendre , difons plus lafeive 5 que le pigeon , & met auiîi dans fes amours , des pré- ludes plus iinguliers. Le pigeon mâle fe contente de tourner en rond en piaffant & fe donnant des grâces au- tour de fa femelle. Le mâle tourterelle, de la Tourterelle. 389 fou dans les bois , foie dans une volière , commence par faluer la fienne , en fe profternant ■ devant elîe dix -huit ou vingt fois de fuite *, il s'incline avec vivacité 8c Ci bas , que fon bec touche à chaque fois la terre ou la branche fur laquelle il eft pofé *, il fe relève de même j les gémhlemens les plus tendres accompagnent ces falutations : d'abord la femelle y paroît infenfibîe *, mais bientôt: réniotien intérieure fe dé- clare par quelques fo'ns doux, quelques accens plaintifs qu'elle laifle échapper j & , lorfqu'une fois elle a fentî le feu des premières approches , elle ne ceiTe de brûler -, elle ne quitte plus fon mâle *, elle lui multiplie les baifers , les carefles , l'excite à la jouiffance & l'en- traîne aux plaifirs jufqu'au temps de la ponte , où elle fe trouve forcée de par- tager' fon temps , & de donner %des foins à fa famille. Je ne citerai qu'un fait, qui prouve allez combien ces oifeaux font ardens (h) ; c'eft qu'en mettant (h) La tourterelle , m'écrit M. îe Roy , diffère Kïtj 390 Hijloire Naturelle enfemble dans une cage , des tourterelles rriâies , & dans une autre des tourterelles femelles , on les verra Te joindre & s'ac- coupler comme s'ils étoient de fexe dif- férent j feulement cet excès arrive plus promptement & plus fouvent aux mâles qu'aux femelles : la contrainte & la pri- vation ne fervent donc fouvent qu'à met- tre la Nature en défordre , Se non pas à l'éteindre ! Nous connoîïïbns , dans Tefpèce de h tourterelle , deux races ou variétés confiantes 5 la première eft la tour- terelle commune*; la féconde s'appelle îa tourterelle à collier** > parce qu'elle porte fur le cou une forte de collier du ramier & du pigeon, par Ton libertinage & fon inconftance , malgré la réputation. Ce ne font pas feulement les femelles enfermées dans les volières qui s'abandonnent indifféiemment à tous* les mâles ; j 'en ai vu de fauvages , qui n'étoient ni contraintes ni corrompues par la domefticité , faire deux heuieux de fuite fans fortir de la me me tranche. * Voyeihs planches enlumine 'es , n.° 394. ** Ibid. n.°244. de la Tourterelle. 391 hoir *, toutes deux fe trouvent dans iiotre climat \ Se , lorfqu'on les unit en- fembîe 3 elies produifent un métis : celui que Schwenckfeld décrit , & qu'il appelle turturmixtus ( i) , provenoit d'un mâle de tourterelle commune & d'une femelle de tourterelle à collier , & tenait plus de la mère que du pères je ne doute pas que ces métis ne foient féconds , & qu'ils ne remontent à la race de la mère dans la fuite des générations. Au refte , la tourte- relie à collier èft un peu plus groiïe que la tourterelle commune , & ne diffère en rien pour le naturel & les mœurs : on peut même dire qu'en général les pigeons , les ramiers & les tourterelles , le refTemblent encore plus par l'inftincl; & les habitudes naturelles 3 que par la figure : ils mangent & boivent de même , fans relever la tête qu'après avoir avalé toute l'eau qui leur eft nécelfaire -, ils volent de même en troupes-, dans tous, la voix eft plutôe (i) Theriotrop. S'û.pag. 365. Ri? 5 9 * Hijloire Naturelle , &c. W gros murmure ou un gémîiïement plaintif, qu'un chant articulé: tous ne produifent que deux œufs , quelquefois trois, & tous peuvent produire piufîeurs fois Tannée, dans des pays chauds ou dans des volières. Torn-IT. Tl.XPT.pa.r. 3g a, LA TOUHTETIELLE COMMUNE TonvW. PLXFTT.paa. 3q. S0^^ʧèJM^ ■'^}Md»tffî$$& XA TOURTERELLE A COTEIEIL XVIir.piy. 3 f.g. i. — La Tourterelle a collier du énégal > flanche XI , fig. I ? Omitùol. tome I , pages 122 Ô* IÏ4« des Oifeaux étrangers , &c. 3 9 5 que par les couleurs -, ce qui doit être attribué à l'influence du climat. Nous préfumons même que la tour- terelle à gorge tachetée du Sénégal ( d) > étant de la même grandeur & du même climat que les précédentes , n en eft en- core qu'une variété. I 1 I. Le TO UROCCO. Mais il y a, dans cette même con-i trée du Sénégal, un oifeau , qui n'a été indiqué par aucun des NaturalilteS qui nous ont précédé, que nous^ avons fait repréfenter * , fous la dénomination de tourterelle à large queue du Sénégal * nous ayant été donné fous ce nom par M. Adanfon : néanmoins , comme cette efpèce nouvelle nous paroît réellement différente de celle de la tourterelle d'hu- rôpe , nous avons cru devoir lui donner (à) La Tourterelle à gorge tachetée du Sénégai Briffon , Ornithologie, tome I , p^ge 125 planche Vin, % 3- £ yoyeiks flanches enluminé® , n.° 3 29, 3 9 5 HiJIoire Naturelle le nom propre de tourocco j parce que cet oifeati ayant le bec & plufieurs au- tres caractères de la tourterelle 3 porte fa queue comme le hocco. I V. La TOURTELETTE, Un autre oiseau , qui a rapport à la tourterelle , elt celui qui a été in- diqué par M. BrilTon ( e ) ., & que nous avons fait repréfenter * fous la dénomination de tourterelle à cravate noire du cap de Bonne- efpérance ; nous croyons devoir lui donner un nom propre , parce qu'il nous paroît être d'une efpèce particulière & ditîérente de celle de la tourterelle -, nous l'appe- lons donc Tourtelette _, parce qui! eft beaucoup plus petit que notre tourte- relle *, il en diffère auiîi en ce qu'il a ia queue bien plus longue , quoique (e) "BrifTon, Ornithologie , tome I , page 120, fj>ec une figure, planche ix , fig. i. * Voye\ les flanches tnluminèts f n.° i/To» des Oifeaux étrangers , &c. 397 moins large que celle du tourocco 9 il n'y a que les deux plumes du milieu de la queue qui foient très - longues -, c'eit le mâle de cette efpèce qui eft repréfenté dans nos planches enlumi- nées y il diffère de la femelle en ce qu'il porte une efpèce de cravate d'un noir brillant fous le cou & fur la gorge j au lieu que la femelle n'a que du gris mêlé de brun fur ces mêmes parties : cet oifeau fe trouve au Sénégal comme au cap de Bonne - efpérance 5 8c probablement dans toutes les contrées méridionales de l'Afrique, V, Le T V R V E R T, Nous donnons le nom de Turvert h un oifeau verd qui a du rapport avec la tourterelle , mais qui nous paroîc être d'une efpèce diftincle ëc féparée de toutes les autres-, nous comprenons 5 fbus cette efpèce du turvert, les trois oifeaux repréfentés * j le premier de ces * Voyelles planches enluminées, 1e premier , n,° 142 £ hficQad, ïu° 214; le troifième ^ n.° il'], 3 3) S Hijîoïre Naturelle oifcaux a été indiqué par M. Briflon (f), fous la dénomination de tourterelle verte d' Ambolne > & , dans nos planches enluminées , fous celle de tourterelle à gorge pourprée dy Amboïne j parce que cette couleur de ia gorge eft le carac- tère îe plus frappant de cet oifeau (g) ; ïe fécond 3 fous le nom de tourterelle de Batavia _, n'a été indiqué par aucun Naturalise , nous ne le regardons pas comme formant ,une efpèce difîérente du turvert ; on peut préfumer qu'étant ffj Briflon, Ornithologie, tome I , page 152 ? evec une figure , planche XV , iîg. 2. (g) C'eft vraifemblablement à cette efpèce qu'iî faut rapporter les pafiages fuivans. « H y a ? dans » l'île de Java , un nombre infini de tourterelles 9i de couleurs différentes , de vertes, avec des taches r> noires & blanches; de jaunes & blanches, de ?? blanches & noires, & une efpèce dont ia couleur » eft cendrée : leur gro'fleur eft aufli différente que n leurs couleurs font variées; les unes font de la :» groffeur d'un pigeon , & les autres font plu3 ?» petites qu'une grive. »» Le Gentil, Voyage autour du Monde, tome III . page '4. « Il y a aux Philippines une forte de tourte- ri relie , qui a les plumes grifes fur le dos & bian- » ches fur l'eftomac , au milieu duquel on < oit une » tache rouge comme une plaie fraîche dont le fèng fomroitt » Gemelli Çacérij r«ro« V,pa$e 266'. des Oifeaux étrangers y &c. 399 du même climat & peu différent par la grandeur , la forme Se les couleurs , ce n'eft: qu'une variété peut-être de fexe ou d'zgç : le troifième , fous la dénomi- nation de tourterelle de Java _, parce qu'on nous a dit qu'il venoit de cette île , ainlî que le précédent , ne nous paroît encore être qu'une fimple variété du turvert , mais plus caraclérifée que la première, par la différence de la couleur fous les parties inférieures du corps» V L Cène sont pas-là les feules efpèces ou variétés du genre des tourterelles j car , fans fortir de l'ancien continent , on trouve la tourterelle de Portugal ( h) ^ qui en; Brune, avec des taches noires & blanches de chaque côté & vers le milieu du cou -, la tourterelle rayée de la Chine ( i) _, qui ed un bel oifeau dont (h) Colombe de Portugal. Aibin, tome IL page 3 T9 avec une ligure, planche XLViii* — Briiïon, Orni- thologie, tomel, page 98. ( i) Colombe de la Chine. Albin, tome III ^ page 19 , avec une figure , planche xlvi. — Briiïon^ Ornithologie y tome I ? page 107» 400 Hijloire Naturelle h tête & le cou font rayés de jaune 5 de rouge & de bianc -, la tourterelle rayez des Indes (k) , qui n'eft pas rayée longi- tudinalement fur ïe cou 3 comme la pré- cédente , mais tranfverfalement fur le corps 8c les ailes *, la tourterelle d'Am- hoirie (l) > aufïi rayée tranfverfalemenr de lignes noires fur le cou 8c la poi- trine j avec la queue très -longue : mars, comme nous n'avons vu aucun de ces quatre oifeaux en nature , 8c que les Au- teurs qui les ont décrits, les nomment colombes ou pigeons., nous ne devons pas décider fi tous appartiennent plus à la tourterelle qu'au pigeon. (k) Pigeon - barré. Edwards , Hijî. of Birds , tom. I , planche xvi. — Brifibn, Ornithologie , tome î 7 page 109. (I) Cdumla rufa , caudà longijjlmâ ; peunis col-' lum & petlus tegentibus nigricaiite tranfverfîm flria- zis ; remigièus fufcis , re&ricibus fufco - rufefcentibus Turtur Amboinenjîs. La tourterelle «d'Amboine, Ornitholog. page 127, ayeç uns pgure^ planche ix , fig. 3, des Oifeaux étrangers ; &c. 40 1 V I I. La TOURTE. Dans îe nouveau continent , on trouve d'abord la tourterelle de Canada , qui, comme je l'ai dit > eft de la même efpèce que notre tourterelle d'Europe. Un autre orfeau , qu'avec les Voya- geurs nous appellerons tourte j eic ceîui qui a été donné par Catesby (m) ., fous îe nom de tourterelle de la Caroline, II nous paroît être îe même * j la feule différence qu'il y ait entré ces deux oifeaux , eft une tache couleur d'or > mêlée de verd 8c de cramoifi , qui , dans ï'oifeau de Catesby , fe trouve au-defïbus des yeux , fur îes côtés du cou , & qui ne fe voit pas dans îe nôtre -, ce qui nous fait croire que îe premier eft îe mâle , 8c îe fécond la femelle : on peut , avec quelque fondement , rapporter à (m) Hiji. Nat. de ïa Caroline, tome I , page 24. > avec une figure coloriée. * Foye^ Us planches enluminées t iu° 175, 40 2 Hijîoire Naturelle cette efpèce ïe picacuroba du Brefil,' indiqué par Marcgrave ( ' n). Je préfume auiîi que îa tourterelle de ïa Jamaïque , indiquée par Albin ( o) y & enfuite par M. Brifibn (p ) _> étant du même climat que la précédente*, & n'en différant pas alTez pour faire une efpèce a part , doit être regardée comme une variété dans Tefpèce de la tourte , & cefl par cetre râifon que nous ne lui avons pas donné le nom propre & par- ticulier. Au refte, nous obferverons que cet oifeau a beaucoup de rapport avec celui donné par M. Edwards , & que le fien pourroit bien erre la femelle du nôtre ( q). La feule chofe qui. s'oppofe à cette préfomption 3 fondée lur les (n) Picacuroba Brafilienfîkus. Hift. Nat. ErafiL pag. 204. (o) Albin, tome II , page 32, avec une figure 9 planche xlix> (p) Omithol. tome I , page 135, avec une figure,. planche xin, fig. 1. * Voyelles planches enluminées , n.° 174. . v (q) Edwards ? Hift. Nat. ofBirds^xom. I, pi. XIV. des Oifeaux étrangers , &c. 403 reffemblances , c'eft la différence des climats : on a dît à M. Edwards que ion oifeau venoit des Indes orientales , Se le nôtre fe trouve en Amérique -, ne fe pourroit-ii pas qu'il y eût erreur fur le climat de M. Edwards ? ces oifeaux fe reffemblent trop entréux, 8c ne font pas allez différais " de la tourte , pour qu'on puiffe fe perfuader qu'ils font de climats fi éloignés*, car nous fommes allures que celui dent nous donnons la repréfentation , a été envoyé de la Jamaï- que au Cabinet du Roi. V I I ï. Le COCO T Z I N. L'oiseau d'Amérique, indiqué par Fernandez (r) > fous le nom de Cocof(in^ que nous lui conferverons , parce qu'il eft d'une efpèce différente de tous les (r) Cocotzin. Bifl. Nat. Nov.Wfp.^%. 24, eap. xliv. — Cocotti. Hem , ibidem , pag. 23 _, cap. XLil. — Cocotzin aliud genus. Idem, ibid. pao' 24 , cap. xliv. Nota. Ces trois oifeaux ne nous paroiffent être que de légères variétés dans la même efpèce, 404 Hijloire Naturelle autres ; & 3 comme il eft aufîi pins petit qu'aucune des tourterelles , plufieurs Naturalises Tout défigné par ce carac- tère 3 en lappelant petite tourterelle ( f) ; d'autres l'ont appelé ortolan (t) , parce que n'étant guère plus gros que cet oifeau , il eft de même très - bon à manger. On l'a repréfenté * fous les ([) Turtur minimus, alis macula fis. Ray, Syn, A?it?agi 184, 7/.° 25. — Turtur minimus , guttatus. Sloane, Jamaïc. pag gc^. — Columba fuhfufca mi- nima , Ùc. Browne , Nat. Hifî. of Jamaïc. pag. 469. Petite tourterelle tachetée. Caiesby , tome 1 , page 26 , avec une figure coloriée de la femelle , planche XXVI. (t) Ortolan de la Martinique. Du Tertre, Hifî, des Antilles t tome II ' , page 254. — Les oifeaux, à qui nos Infulaires donnent Te nom à'or.olan , ne font que des tourtereiles beaucoup plus petites que celles d'Europe Leur plumage eft d'un gris -cendré; le deffous de la gorge tire un peu fur le roux : elles vont toujours par couple, & on en trouve beaucoup dans les bois. Ces oi- feaux aiment à voir le monde , fe promenant dans les chemins fans s'effaroucher, & quand on les prend jeunes , ils deviennent très -privés ; ce •font des pelotons d'une graifîe qui a un goût excel- lent. Nouveau Voyage aux îles de /'Amérique , îomtlIt jpage 237. * Voye\ les planches enluminées > n.° 243. des Oi/iaux étrangers , &c. 405 dénominations de petite tourterelle de Saint-Domingue ^ figure 1 -, & petite tourterelle de la Martinique ^ figure 2. Mais, après les avoir examinés & comparés en nature 5 nous préfumons que tous deux ne font que la même efpèce d'oi- feau , dont celui repréfenté figure 2, eft le mâle •, & celui figure 1 , îa femelle. Il paroît auflî qu'on doit y rapporter le picuipinima de Pifon & de Marcgrave (u)y- 8c îa petite tourterelle d'Acapuïco , dont parle Gemelli Caréri ( x). Ainiî , cet oi- feau fe trouve dans toutes les parties mé- ridionales du nouveau continent, (u) Picuipinima. Pifon , Hifl. Nat. pag. 86. — > Picuipinima Bvajilknfibus. Marcgrave 5 Hifl. NaU Brajil. pag. 204. (x) Aux environs d'Acapuïco , on voit des tourterelles plus petites que les nôtres , avec ïa pointe des ailes coloriée, qui volent jufque dans les majfons. Gemeili Caréri 7 torns VI, page g. Fin du quatrième Volume, K ,&<■'■ \ t ^HtaM**f^i*