pyTTyr*TT^*T^?yj?f^jTj^ 3k^K>gscwg^raras^^ Il s 1 I % ^^^r^cgw^g^^acz HISTOIRE DES ILES ANTILLES D M L'AMERIQVE. ^gag*wa*^iim^ HISTOIRE NATVRELLE DES ILES ANTILLES D E ' L'AMER IQJ/Ei ParMr.Dz Roche fort* Tome Premier. A LYON, Chez CHRISTOFLE FOVRMY, rue Mercière, à la Bibliothèque. iM.DC.LXFlL I I I II I 1 I 7iXttct0*!arX*zei$G8 ÀMÔNSEIGNÈVR ■L'iHùftriffime & Révérend îfTnne CAMILLE DE NEVFVILLE ARCHEVESQ^VE & Comte de Lyon: tT 'rimât de France > Commandeur de* Ordres du Roy > Lieutenant General p sur fa Ma je ftê au Gouvernement de la Ville de Lyon y & Provinces d -i pour y croître , pour s'y plai- re $ ôc pour ne le quitter la*- \ : lJ EPÏSTRE mais? Car que peut dedrer ta Religion, que votre Pie- té netabliâTe dans votre mai- fon, &■ dans îes Eglifes de vo- ire Diocefe } Où 4e voit- elle plus pure & plus fain£ie cette Religion ^epe dans les Pro^ vinees où votre Autorité l'affermit , & la délivre du^ poilom caché d\nc Herefîe j>ernicicufe?LaVertu 11 a- 1 el- le pas chez, vous fon refuges, & la (cale ombre de vôtre Puiflince y. appuyée de l'in- nocence de vos mœurs , ne ehafïe- telle pas le vice , de: tous- les lieux où il fe décou- vre ? Mais ce n'efï pas dans les> feules afaires de la Religion* iasfX«Wtt^îgRarai8ga^^ i ^ EPîSTRË. $ om la. force de vôtre Êiptit" Si I & l'intégrité de vôtre Vertu fe font admirer. Car Dieu, qui vous a formé pour deux Occupations les plus impor- \ tantes de la vie, a bien voulu que le Roy, qui cft l'image d m ; : la Divinité, entrât en parta- ge de vôtre vigilance & de \ vos travaux, & que le Gou- > vernement Politique , receut * de vôtre conduite les mêmes <}j avantages, que donne vôtre Adminiftration fpir itueîle .Ec ^ certainemet que trouverons- y rous, dans la Politique donc vous-vous fervez, & dans vô- m*e: manière- de Gouverner,: ^ii ne ibiedigne d'admkanë^ ' ; 4 1 EPÎSTRE. qui n'aie pour but le folide intérêt du Prince , & qui ne vous gagne les cœurs de tous les Peuples que vous gouver- nez. Mais ce n eft pas à moy d étaler cette merveille , mm plume eft trop foible pour v ce grand fujet : il me fuffit, dbiiyr les voix véritables de ces mêmes Peuples, qui vous reconoifTent comme leur Pè- re & leur defenfeur ; & de joindre mon expérience à. leurs fentimens, laquelle me découvre dans vôtre Gran- deur, vne fource de bonté, que nul obftacle ne peut ta- rir, & que nui vfage ne peut: épuifer. C'eft donc Elle , qui EPISTRE m ayant donné la confiance,, me fait encore efperer , que vôtre Grandeur agréera mes tres-humbles refpe&s, & qu% Elle permettra que ce livre ait le bon-heur d entrer dans fon ample Bibliothèque, & que dans la place qu'il occu- pera , il renouvelle tous les iours à V.G.les fourmilions & lobeïflàncede celuy qui eft. De voftre Grandeur % Le tres-humble,tres< obeïffant> & cres-fidelie Serviteur, CHRIST O £ LE lOYRMYr ygvtgsaggs PREFACE. PI1P 0^5 avons le malheur dam- g§|§|| fe Relations que ton nom donne des pats lointains , & dansr- les écrits déquels on ne trouve pas de certitude ni dz fondement rf a? ce quen plufieurs fuiets ils ont pris le blanc pour le noir ^ que faute d' a- voir ou bien -compris ^ ou bien retenu les chofes^ ils ne nom les raportent pas dans leur naïve vérité : quoy: quauretfe leur intention ne foi t pas de nom tromper .Mais au contraire y c eflvn grand avantage^ quand de Uls Ouvrages font compofe^ par des Auteurs \on ton peut reconnoître $out enfemble ces trois conditions^, d'ejlre devint ère jfe\ , de ne point faire jeu de la vérité^ d'avoir de* là mémoire & de l'intelligence pour former leurs RelMims\ Gew p>i prendront le pêne >, dk? prêt ace: jet ter le s y eut fur fHifloire que nom, leur prejenions en ce Volume \j doi- vent efperer les dem premières de ces conditions que nous venons d é- tahlir , ce(l a dire en vn mot , la ftnceritèweu que ceft vne louange^ qiiil femble quvn chacun fe peut donner innocemment 5 k moins que fa propre cenfcience le démente. Mais pour les qualitez de fe/prif que nous avons reprefentées comme la troifiême condition^nousn en f au- rions prendre ( éloge ^ (ans faire vn trait de vanité. Nous ofons nous' promettre que le ///rrd'Hiftoire Naturelle & Mo- rale , que nous mettons fur le front de cet Ouvrage ', nefemhlera ni troph faflueus ni trop vafe^a cens qui dau gneront le confronter avec le corps de la pièce. Au moins 'avons- nous ta- ehéde proportionner la grandeur de £ édifice y a lamagnifîtwce dHj>w* yA^^sOÊÊ^^e^sfak^^. PREFACE | tail.Ce riefïpœs que nous-nous van- tions icy d'avoir compris dans ce Li~ \ r vre , tout ce que f on pourroi récrire fur lefujet des Antilles. On trouve- toit af[e\de matière pour en am- y ftifier de beaucoup î Histoire Natu- f*\ relie , &méme la Morale : Mais [\ quoy quil enfoitjl nous femble que s nous avons fat u fait en quelque for* te , ace que lefrontifpice du Livre ^ fait efpererau* Letfeurs , & que fi $ chaque partie du Nouveau Monde, £ était examinée aujfi particulière* ^ ment par les HiBoriensJ Ancien en y fer oit mie tu informé , quil n a eflé \ ! iitfqiiaprefent* ^ Nous avons ejlé obligez a tow- \ cher en quelques endroits \des fit jets /> dé-ja traitez par dïillu/lres Ecri- ]\ vains , & connus d'vne infinité de jfr perfonnes : non certes en intention eu de groffir notre volume , ou de i } nous élever au dé fus de ces grands î PREFACE, Auteurs : mais parce que fans cela nêtre Hiflotre eut eflé defeclueufe. Tout de même quvne Carte de la France ferait imparfaite fi fin Au- teur y avoit obmis quelques placer eonfiderables >fom ombre \que d'au* très Géographes les aur oient mar* quées en des Cartes particulières? de chaque Province du Royaume. Et neantmoins , nous^nous fommes re-* tranchez, en ces matières , autant quil nous é e't é poffible>comme en lot Defcription du Cocos de l'Ananas Cr de plufieurs autres chofe^ A î exemple de Lery é* de tE- fcarbot , ér <£ autres Hijloriens ^ $* par le confeil é fe invitations de quelques vns de nos amis , nous a* vons parfemécet Ouvrage dépara* le lies s & d'opcfitions empruntées de divers Pais & de divers Peuples^ Si queïcun trouve que cefl inîer* rompre le fil de t Histoire > akngew /iw^^c^nbr^v^c^a^^^agg^a^ PREFACE te parchemin , & âmufer le tapùy nous nous fiatons dans la?creancey quil y en aura d'autres , a qui ces petu enrichijfemens ne feront pas defagreables.Et s ils ne les confide- rentras comme de traits aparte- nansau dejfein effentieldu tableauT ils Us pourront regarder avec quel- que plaiflr y çjomme des bordures de fieurs y de fruits , é* ficifeaut-ypour £ ornement de la pièce. Four ne pas fatiguer le LeBeury in luy faifant faire de trop gran- des traites tout d'vne haléne , g£* pour ne point laffer fesyeu* parvne trop longue & trop wni forme tiffu-. re de périodes <& de dif cours r nom avons divife notre Hifloire en au- tant de Chapitres & £ Article s v que nous avons eflimé le pouvoir faire raifonablement^ é* tivec grâ- ce. Aï au en quelques endrou 5 lar mnt.extnre $> la liaifon de U m^^ 1 PREFACE. tiere ne nous ayans pas laifféla ÏU berté défaire des p au [es ^ '& de cou* per notre récit , comme nous f étof- fions voulu 3 cette contrainte nous fervira d'vne excufefujfifante. Le dif cours efi l'image de la pei*m fée. Mais le portrait repre fente la cbofeméme. Ceft pourquoy^nous ne nous femmes point contentez, defim* pies paroles dans cette Hiltoire* Nous y avons ajout é 'vn grand mm* bre de figures & de tailles douce s y félon les fuie t s qui nous font permis t pour e7^ imprimer plus puiffammenp. l'idée dans les efprits 3 far vne de- monflration fenÇible & palpable* Et nous n avons pas crè% que les cê~ lebres Auteurs qui ont excellemment reprefenté vne partie des mêmes chofes par le burin de leurs Gra- veurs , comme entr autres Charles de fEclufe , & le an de La'èt , nous- en dûffent détourner : veu que par aegsn^^raya^g I : —s PREFACE. 9 ces aides nous facilitons tintelli- * gence des matières ^ nous diver- ti ffons nos LeEteurs , en même tems que nous embéliffons & que nous fij enrichirons notre Hilioire. M ait fi (| la main du Graveur qui a tafché ^ àefuivrele crayon du Peintre , na pas bien conduit tous [es traits > no- nobfiant les foins & les adreffes de ceus qui en ont formé les dejjeinsjl s en faudra prendre feulement a fa v < foibleffe & afon inadvertence > & S) non pas reietter la faute fur les Di- £ relieurs de l'Ouvrage , qui ri ont cj rien oublié \ de tout ce quils ont cm pouvoir contribuera fa perfection. Pour les manquemens de ce Li- vresque peu vent efire venus de nous mêmes ,fans que le Scribe ni l Im- primeur y ayent rien contribuerons n aurons point de honte de les re- i% connoitre , & nous- nous garderons \ bien de les défendre^ quand on nom <Ç 1 i £7^35^SIi^^«S^âS*S$£355fîii^?5^i§S*Safl préface: les aura montrez, , fachans afféz> quelle efl lafoiblejfe , & de la mé- moire & du iugement de tous les hommes du monde. Seulement nota fup lions tem qui les auront remar- quex, de s* ap tiquer À e m- même s ce direfamem* Homo fum , humani à me nihil alienum puco. C eïl a dire de fe Convenir quils font fuie ts afe méprendre , & Àfe tromper comme toute autre perfon- ne. Jguaulieu donc de reprendre feverement , & avec rigueur , ce quils naprouverontpas dans notre Hi Boire jls nous en avertirent dou- cement é* en charite':& nous y dé- férerons autant que la r ai f on nom le pourra perfuader. Ainfi bien loin de nom en plaindre , nom leur en aurons de l'obligation* & le public m recevra de l'vtilite fi ce Livre fcS^ÉWfiÙ^sGES&SbSS 2&âS3£â&£2 PREFACE. efi mis encore vne autre fou en lu- mière* Noys citons fouvent avec hon<* neur^plufieursperfonnes de mérite de tomes fortes de conditions & qualitez^qui habitent dans les Co - lonies , que diverfes Nations dç £ Europe ont formées ans Antilles) Nom avons eBimé que nom en de- vions vfer de la forte , pour auto- riser par ce moyen nos Relations \& leur procurer plus £ éclat à1 plus de certitude. Nous avons aujjiproduy tes llluBres & irréprochables té- moins , pour defabufer plufieurs qui font fi mal informe^ de ces lies, %u ils feperfu aient) quelles ne fer- vent pour la plupart que de retrai- te aus banqueroutiers & ans gens àemauvaifevie. Le contraire é- tant neantmoms tres-averé, affa* voir 3 quelles font habitées par vne infinité d'homélies familles 3 qui y PREFACE. vivent civilement & en la crainte âe Dieu. Ce nefipas pour obliger cette Pro- vince très- renommée , en laquelle cette Hi Boire a eîlê mife fous la pre/fe , que nous avons toujours em- ployé le terme d'Hollaadois , four exprimer toute cette floriffante Na- tion , qui relevé de la Souveraineté des Hauts érPui£ans Seigneurs les Etats Gêner aus des Provinces Vnies des Païs - bas : mais feulement four nous rendre intelligibles À nos Fran- çois% en nous accommodant au flile communément receuparmj eus* qui comprend fous ce mot , tous les Ha- bitant des autres Provinces Confe* derées* TABLE kT55gt*^s*a«s>^ COPIES De quelques lettres choifies entre flufiemS antres , qui ont été ê~ tri tes de î Amérique en faveur de cette Histoire :- Et premièrement de celle que Mon- iteur le Chevalier de Lonvillers;Poin~ cy , Bailly & Grand Croix de l'Ordre èe S. lean deleruialem>Gommandeur d'Oifemôt> & de Couleurs, Chef d'E« feadre des Vailîeaus du Roy en Breta* gne 3 Lieutenant & Gouverneur Ge- neral pour fa Majefté ans Iles de l'A- mérique, nous écrivit après qiril en eut receu vn Exemplaire > &c en nous envoyant le Plan de fa Maifon , & le payfage de l'île de Saint Chdftofle. ONSIEVR, le riay point été furpris de la beauté de l'excellence de votre Livre yqm I Ce 1 s I I 1 i mmMM LETTRES. vom aveT^ pris la pêne ' de -n/ envoyer t0 ne peut rien finir dé votre bel esj>rits., qui ne fait parfaitement achevé : & U rnefemble que vom ave^fî heureufement reuffi dans cet Ouvrage \ que ie m affai- re que votre réputation en recevra vu grand éclat. Vos remarques font fî curieu- fes &fî véritables, & le difc ours fî po- li que vos amie n 'y peuvent rien defïrer' d'avantage* Tourmoy, ie me ve m feule- ment reiouir avec vow> d3vn fî beau fuc^ tés ,& vom rendre mille grâces s de ce/ sp4e vom vom ejîes fî avant âge ufiment< fouvenu demoy. le- vom envoyé en é« change le Plan de cette Maifon qmvom avez defîré* ly ayaioméc^y du pay~~ fage de notre Me, qui, ne vom defagreéra fat : &quoy qneVabfence de Monfîeur' jiubcr de Afi dél bourg y mayer vn peu mis en peine par qui vom faire tenir ces fetkes curiofîte\j> tay creu que Mon- sieur ICerkj?, marchand de Fleffingue fe- roit connu de vom s & qu'il s'aquixeroit volontiers de cette commiff on dont ie le ' charge par le Capitaine Antoine d'Ar* moyfe. le voudrois eslre affe^heurevs^ fmr vom témoigner en vne ocafîon dt jfklmi wT^^w^c^r^a^^g^^ LETTREES. plus d'importance, ma gratitude de tant d'autres obligations que ie vous ayy Vous pouvez bien croire 3 Mon fieur * que ie le feray toujiours avec ioye dans toutes celles qui s* o friront >■& que ie fuis de tout mon cœur3 MONSIEVR, Vôcres tres-humbk Serviteuiy Le Chevalier de Poincy, Be SXhriftoôc, le ic^Dec.1658. Eopie d'vne autre Lettre que le mê- me Seigneur nous adrefià^en nous en voyan t encore vn autre Gray on de fa Maifon. ONSIEVR, rjyreceu la tettre que vous ave^ prù la peine de m3 écrire le Jîxiéme dw mois de Mars dernier , & ie fm: bien aife que vous aye^greé les TMeaus de ma Maison & de notre Ile. Foslre Livre e$~i rempli de remarques tres*d&* mz&ëxzr LETTR E S. &es>& fi curieufes qu'il ne recevra qtivm wediocre enbelijfeme^t 5 en y awmant& vousconïure de croire >qu en toutes oc a fions ie vous fer ay paroitre,que ie fuis parfaitement. MONSIEVR, Votre très-humble Serviteur^ Le Chevalieb* de Poincy» 0c S.Chuftofie le i j.Iuiikt i6;9. Copie ^gbre^sreQsai LETTREES. r^ SI Copie de laLetere que Monfieur le >u Gouverneur de la Colonie de la Palme , nous a envoyée aufujet de ' f cette Hiftoire. I JyJONSIEVR, g Noslre Colonie doit beaucoup à vo~ Cj fre dfoff f plume y & au fêle que voiû avez, eu de la faire connoitre a Vau- tre Monde > ou fans t vos belles lumie* res j Von ne faMroit pas même fi elle fub- Jîfte en celuy cy : tellement que nom re~ connoiffons par vnc très agréable expc- rience >quen quelque part qii on vom trouve ïfiii dans lefein de Vite Hilpa- „ v niola ifoit dans celle de la Toïtiïêjoit U] S vos riches Ecrits yvom ejles par tout 0 F obligeant & le tout aimable. Il ny a aucun de notre Compagnie qui naît ces fentimehs ,qui ne vçm regarde comme vn ami intime y qui ne fonb ait e de vom re- voir dans ces Contrées 3 & de vom pou- voir vn iouf témoigner l'a reconnoijfance que nous vous devons 3à caufè de ce do us ^ \ fou venir que vous avez en de nous dans votm 1 1 1 i i \ LETTRES. ^otrevraye & incomparable Hiïloh^ des Antilles» Nom avons tout fuie t de donner ces éloges a cette excellente -pro- duction de vôtre eff rit , après tant de Relations fabuïeufes qui ont pajjé fom nos yem 3 & qui ont donné am Apàla- chites& am autres Indiens qui peu- plent ces Pais y vne toute autre face' qu'ils ri ont en éfet. Pour moy3 %ay du âêplaifir de ce que lors que cette Colo- nie naiffante eut le bien de vous poffe- der 3 te ne pus ioiiir quvn moment de ttoflre douce converfation. Vom fave^ Monjïeur , que la necejfitéde nos affai- res m* obligea de me rendre fur nos fron- tières pour op&fer nos forces 4 la dtfcen* te des Barbares > qui y avoient paru > &' que te pris congé de vom dans i'efèeran-- ce de vous trouver encore à la Palme & mon retour y mai* fans doute > vom' ne le fauries pas fi ie ne le vous difois% que iamais aucun vent ne* fut plus con» traire a mes 'inclinations , que celuy qui durant mon abfence fe rendit favo- rable a la continuation devoftre Voya- ge* 3 puis quen vous enlevant du milieu de mus ^ il ravit auffi les délices de nos cwurs y & nom priva d'vne très - fenjl^ Me consolation. Depuis ce tems4ky noué avons fquvent parlé de vous s & nom avons reconnu par vôtre digne Hïfioire* que l* amitié que nom avons pour vom efl réciproque s veu que vom avez* fi* bien confervé les Idées de la Palme y de^ Gofa , de Bemarin & des Provinces' voi fines y & que vam nom donnez, des en feignes illujlres de ce preciem Conve- nir. Certes y Monjieury quand bien vont' nomauriés laiffés dans ce profond filen- ce y ou nom fommes comme en fevelis de- puis tant d'années > nom dirions néant- n/oins de votre Hiïtoire^ quelle eft Mu- dkieufe y fidèle , & divertijfante y &' quelle efl richement embelie de toiu les agréemens y que les esfrits les plm déli- cats f auraient defirer y pour leur entière fmùfattion. F-ourfuivez. y Monfieur à • fi om aimer y & tenez, s'il vom plait pour affure que nom réfuterons a grand bon- heur d'aprendre que nos lettres vom a- yjent efté fidèlement délivrées y & que1 notu ayons toufiours part en vos afe~ fiions y de même qu'en vom honorans très* parfaitement > nom faifons des* prières- t i i i 1 i t LETTRE Sv p fief es à Dieu pour votre projperitê , & pour r heur eus fuccés de vos louables en* îreprifes* Ceft aujfi à fa feinte prote- Bio/i 5 que ie vom recommande en parti- culier s comme étant de tout mon cœur, MONSIEVR, Votre très- humble & très- abeiffant Serviteur, De Val Croissant» Se la Palme en l'Amérique Septentrionale > le 14* lu in 16 $ p. Copie dVne Lettre que Monfieiii? Edouard Graeves,Do&eur^r> Droit* & l'vn des Chefs & Dke&eurs des Familles étrangères qui font parmy les Apalaehites> nous à envoyée fur le fujet de cette Hiftoire y avec la Relation fort ample de tout l'é- tat de ce Pais- là > & les crayons de la montagne d'Olaimy, de la Ville de Melilot > & de la Plante fenfi»- «ifret mon ?A^>Mb^»rara TïïTTMl ! LETTRES. $ JMLonsievr, S Bien que nom vivions davs Fvne de) ' \ plm reculées Colonies de l1 'Amérique Se- ptentrionale , & que nom foyons prefque A prive^de tout commerce avec le reïle çj des hommes > qui font profejfion de re~ \R chercher les belles chofes & de leur don- f)i ner le prix qu'elles méritent \ nom a- [ ' vons neantmoins ejlé affez, heurem > que Jj de recevoir vn Exemplaire de V excellen- te HiUoire Naturelle & Morale des $ Iles Antilles , que vom a ve^ donnée au public. Et parce que vous avis eu la bon- \ té de vom fouvenir de nom >& de nom J^ nommer avec honneur en plufieurs en* ^k droits de votre Livre , & même d'y in- Ç! ferer a dejfein vne belle & iudicieufe ai- 5} greffon s qui ne traite que de nom > ie J ( crois ejlre obligé de vom en rendre de i tres-afetlueufes allions de grâces > & de $ vom ajfurer comme ie fais > que nom a* /* vons leu avec vn contentement extraor- S?! dinaire , cette Relation très . fidèle .& tres-exacle 3 que vom ave^compofée de ce petit Etat 3 fur les mémoires que feu , , Monfieur Brifiok^ vom avoit envoyez.. ! ? Tom. I. ** Nom y ifldï 855? LETTRES. Nous fouhaiterions , Monfieur > qui ce doEle Personnage > qm a laijfé parmi nous vite fi douce odeur de fes vert m , fut encore en vie four s'aquiter de la pro- . ynejfe qu'il vow avoit donnée y d'infor* mer encore plm amplement l'Europe, dç tout ce qu'il y a de plus rare & de plus tonfiderable dans ce Pats & dans les Provinces voijlnes. Car comme il avoit vnetresexatle connoifance de toutes ces chofesy & vne grâce incomparable à s* en exprimer de vive voix & par écrit > il eut efté fans doute aujfi foigèem de tenir fa parole avec honneur , qu'il avoit ejlé . facile & obligeant a la donner. Mais afin que dans cette perte qui vous ejl extrêmement fenfihls , vous ne foyez pas entièrement fruftré de cette douce attente 5 & del'efferance que vous en avez, fait concevoir an Public : nopts 'vous prions >MonJïeur,de recevoir le Ca~ yer qui acompagne les pre fentes, ou vous tïQUvere\les Crayons de la célèbre mon* tœgne A'Oh\my,de notre Ville de Melir lot ,& de la Plante fenfitive , avec vn récit véritable de notre petite Colonie y &~ défont ce dont nous avons cr eu vous devoir i^rregnb«*)»reg^ mm LETTRES. devoir informer >pour eflre aîouté fivom le tuge^ convenMe , à la deuxième Edition de votre Hiftoire. Nom avons auffi eftimé 9 Monfieurs que vous ne trouveriez point mauvais 3 *que nous ioignijfwns auffi a ces mémoires que nous confions a votre prudence , le iugement que nous avons pris la liberté de faire de tout votre digne Ouvrage, & la prière que nous vous faifons de le recevoir $ comme le fcntimefit ç encrai de tout ce qu'il y a d'honnêtes gens > d®%$ cette partie du nouveau Monde. De vray3 Monfieur, nous croirions commet- tre vne haute iniufice fi nous en v fions autrement, & fi nous ne conférions avec cette franchi fe & fin cite dont nom fai- fons prof ejfton : que vous avez, grande- ment obligé le public , en luy donnant vne pièce des plus acomplies en ce genre d'écrire > qui ayem encore veu le iour, & que nous ne doutons point quelle ne [oit dans ïaprobation vniverfelïe de tons ceus qui aiment les îles , & qu'en fuite , vous n'en receviez, vne grande louange. ' Mais agréez. , s'il vcm pi ait , Mon- jieur 9 que nous prenions la liberté- de •k-k vous L I I l i ! .-■a;;/;\v-..'' >J ,: LETT RE S. voma dire^ que d'abord novt* nom Comme s vn peu étonnez. , de ce que vous ne voh$ étiez, donné autrement a connoitre dans l'Exemplaire qui eft parvenu iufques à WWi que fous certaines lettres yqui nom iamais ejlê de mauvais augure. Nom 71 avons garde de chercher quelques œy~ fieres 3 qnvne ingenieufe fubtilité pour- roit facilement trouver dans ces Cara- Beres , ni de pénétrer dans les raifons qui voiu ont obligé d'en v(er de la forte 3 ■mais nom miufommesperfuaâez, que fi wotre mode/lie 3 par vne induflrie fem- hlable a celle de cet excellent Peintre de l'Antiquité, a voulu emprunter ce voile; vom étiez, aufft par vn fuccés tout pa- reil 9 fort bien reconnu a la délicat effe de vos traits 3 au* vives couleurs de vo- tre ftile s & par cette ravijfante Sym* metrie que votre pinceau a donnée a tou- tes les parties de cet excellent Ouvrage. Sans vom traiter avec des termes de jîaterie, qui font bannis par vn arrêt ir- révocable >& fans aucune eïferaçe de raA pelade toute la iurifdition de cette Repu\ blique : de qui pouvoit .- on atendre de\ defcriptions fi riches & fi naives,de toui c SSâçft^XiïMZ^^ L E f f BL-Ë S. ce qu'il y a de plus merveilleus dans ces Iles 3 oh les plus renommées Na~ tions àe l'Europe ont pouffé comme à l'envie des Colonies , que de celuy qui les a foïgneufement vifitées ? Et qui pou± voit nous en donner IHifloire avec plus de perfection : qu'une perfonr.e exempté de toutes les partialitez. Ô' de tous les preiugcZ. ou intérêts y qui infeclent la -plupart des Ecrivains du Jïecle : & qui se fi étudiée de conjiderer les chofes dans leur propre forme , fdns que l* envie > la ialoufîe 3 ou quelque autre paffion mail- gne> ayent tant foit peu altéré leur vraye & naturelle beauté. Soit que vous parliez, des miracles de la Nature , ou des mœurs des Barbares), ou de la police des habit an s étrangers; vous le faites avec tant de grâce > d'exa* B. tude>& de dextérité y que nous pouvons dire) que la cunofité laplw auide & la plus infatiable , s'en trouve fatisfaitti MakyCe qui donne plus de poids a notre admiration ; ce fi que vom avez, tiré ton- tes ces raretez. de votre riche fans ayant le premier pénétré dans ces fecrets y & traité de ces matières. * * * Bien ! LETTRES. Sien que lefu)et que vom maniez, foi? fmvent afezfierile & langui jfant y voi* remime quelquefois fauvagt r& obfcury voua le polijfel^p^r ta douceur de vos' expreffior/s , vom V éclaireras vos bel- les lumières , vom le fomenez par l& force de vos raifonnemens y vom ïani* ?nez,par la vigueur de vos petfe'es, vom V enrichi fé^de tant d'agréables p avale- les & de tudidcnfes opofitions , & vom le revêtez, de tant de preciem ornemey/s9, qu'on y trouve par tant vn dom ayœanty & dts chaires invifibles â qui lient les cœurs a & atirem les afieflions de tom cem qui le confiderent. Il efl vray y que votre ?nodefiieydans- la préface qualifie toutes ces beautés ^ces grâces > & ces rwhes obfervations , des bordures de fleurs y de finit s & d'oi* feam > qui ne font point de l'ejfence mais- de l'ornement du Tableau : Mais quant- a nom 3 nom les primerons toujours com- me vne raV'fifœnte broderie > qui rehauf- ' fie la valeur de la matière >ou fi vom nom' fermette^ de nom exprimer encore plm richement , comme autant de perles > de diamans x de rubis y& d'autres pierres precieufes Ï3ZÏ5*%^*!*^^ LETTRÉS. precieufes que vom y avez, Cernées 5 pour donner a tout le corps de cette Hifloire* tout r éclat & toute lapompe.quonpcur- roit defirer pour fin acowpliffement .Voi- la, > Monfieur y ce que nous avions a di- re en oros de votre travail* Mais 3 s'il nom esî encore permis de le conjîdefer en détail 3 trouve!^ bon3 Monfieur^qne nom vom déclarions fran- chement y que nom avons uy quelques- vns de vos amis qui vom ont connu am lies, quife persuadent > que Çans y p en- fer i vom ave^fait vn grand tort ans Pais que vom décrivez. 3 parce que vom les représentez» avec tant de naïveté dans leur beauté natnrelle\qu ils aprehenâenf? qu'il ny ait déformais perfonne qui for- me le dejfein de vifiter ces Hem pour léquels autrefois l'on ne craignoit point £ entreprendre de fi longs & de fi pe- rillem voy âges ^ put fqu on peut aprefent fi aifement contempler tout ce qu'il y # deplm beau & de plm rare , fans fortir du lieu de fa demeure >& merne fans qui* ter le cabinet :Mais nota ne vom cèlerons pas aujfi.qudy en a d* autres >& en beau- coup plm grand nombre s qui raifonnent •k* tom % 1 I I l 1 I 1 1 S K? LETTRE S. tout autrement 3 & qui s étendent qvm votre procédé aura vn [accès tout con* traire au ingénient des premiers. D'au- tant qu ils croyez t que v cm dépeignez. ces contrées fi belles &fi ravi gantes, que les Iles formées qui font tant vantées dans les f Mes, n en étant me des idées fort grojfîcres,& de léger t trayons : Von prendra volcrers la gêner eu fe refolution de les aller voir , pour conférer les ex- cellentes copies que vem leur avez rnifes en train , avec les Originam 5 & aïnfi contenter la veué , de ce que vcm dites eftrc y comme il Fefi en éfet > acompagnê de tant de charmes réels ^ de véritables délices. Et de vray , Monfieur , qui eft celuy qui en lifiwt vos âotlef écrits 3 n W m oit envie de voir ces belles plaines de quel- ques Iles que vom représentez , couver* tes de tant de trefors de la nature : & de confîdereren prefence>la hauteur prow digieufe^de ces montagnes 3qui, povr notts fervir de vos termes, font couronnées d'vne infinité d' arbres precieu- ,& rêvé* tués d'vne verdure éternelle ? Qjn nefe- roit épris de la beauté de tant de prof on* des SSofr^^g^ ■"■W LETT R/ËS.- Vallées & d'agréables collines, qui en âfc vertifant ces aimables payfages -, y for-. ment desperjfeUivesfi diverti (fiante s >que l-œil ne peut foufirir qu avec regret 3d% être tint [oit peu diverti deLi contemplation, de tous ces aimables obiet s ? Sur tout qui eji-ce y qui après avoir leu ce que vous dites de ce magnifique Palais de Mon* fteur le Gnivc, mur General de votre Nation â lequel vôm à écrive*^ d'vne architecture fi ac&mp lie , arrofié de tant de claires font aines i ombrage de tant de bois préviens & de bonne odeur, afifiorti de tout ce que l'artifice & la nature or.t de flm ravififiant,& même pourveu de tant de douceurs, quelles pokrr oient fiaire ta- rir les four ces de l'amertume : ne [oit en fuite tranjpôrté d'vn ardent defir devoir le glorie w afifiemblage de tant de rare* tez, & de tant de merveilles } qui kty ê± ioyeni autrefois inconnues } Il favidroit auffi eftre privé de l'vne des plm douces pafifiions , qui fiaient or- dinairement le'caur des hommes fi après' avoir leu votre Hffloire Von ne: de fi- toit de voir y non plus dans les livres* m dans- Us cabinets des curiem} mais- LETTRES. au lieu même de leur origine , tant de fortes de bêtes à quatre pieds, de reptiles & d'infeStes , & particulièrement ces incomparables Oifeam que vomj-epre- fente z. dans leur pompe , couverts dvn plumage diverfifié de tant de. vives & inaltérables couleurs â quelles femblent avoir épuifé tout ce qu'il y &de plm brillant & de plm laminem dans la na- ture,pour faire cefaperbe mélange} Vm envoyé bien àV Etir ope quelques ÂipomU les de ces léger s habiter? s de rair:maà^ autre quetans morts p ils perdent beat** coup de leur luBre& delem gmce:vem Jes^vezfi parfaitement bien décrits W votre Hïftoire, que nom non- perfuadws; mfément > ont vne certaine grâce y qui amoindrit d.e beaucoup l'hor- reur quon avoit conceuê de leurs corps Se aillez ouheriffeT^ de poil y & de tou- tes les prodigieufes dêfenfes dont leurs gueules font armées, La mer même cet- te inexorable ^qui ne refpetle aucunes au- tres loix que celles que fon Créateur luy .& impofées 3 y nourrit tant de poiffons âiferevs > & recelé dans fon vafte fein tant d ambre , tant de perles > tant de coraly& tant d'autres riches produBions que vous décrivez, ^que deformaisj 'on fe refoudra facilement à fe confier à fon m- çù fiance , pour avoir quelque part k te m fes trefbrs, ** 6 Vom u I 1 1 I I LEfTRES. auteurs y vous les avez, rendus telle- ment vôtres far ce h eau iour^ & fartons ces agreemens dont vous les aVel^ acom- pagnex > que ce fer oit vous faire torty fi l'on ne les contoit entre vos propres* richejfes. Bien que votre Nation yfoit tvne des pi m illuflres & des pi m gêner eu f es qui fo~ yent an Monde 5& qu on doive apeler vo- tre France >de même que ly ancienne terre de Canaan y le Tais de lavrayenobleJfe5 la parfaite en beauté ', la ioye de toute la terre x & quelle foip célébrée far tom l'Vnivers pour V œil de V Europe Ja Mer& des civilités, & la Maître jfe des belles fciences^de la bonne graee>& de tow les plm nobles exercices de la paix & de l@ guerre , de la Cour & du cabinet : vom ne négligez, pas mantmoinspar vnfonr* cille m dédain x les autres Peuples \ qui font dans fon ancienne alliance : mais vom louez, ce qui le mérite y parmp telle Nation qu'il fe rencontre u & voiu avez, fi bien partagé vos' 'Relations r que vom donneT^ a- chacune ce qui luy efi deu # fans qu. on y$m puijfe tfcufer ^gû£a^Ë&&m& LETTRE S. aDec luftice y de partialité ou de fiâtes*. ne. JDefettryque ces chaleur sprefque con- tinués qui régnent am Antilles y ne f "u f- fent tant [oit peu contraires au tempéra- ment de vos Letleurs > vom leur av e& fourni par Vne fage prévoyance >vn aima* ble rafraichijfement au milieu de leur eourfe y an rnoy-en de la Relation fi cn- rieufi & fi bien circonftanciée 3 de ces wifiles Habitans du Détroit de Davis,s qui paient les dém tiers de leur vie par* mi les glaces & les neiges qui couvrent leurs cavernes ::■ & le refle y dans les" eam avec les poijfons /comme pouf avoir fait l'arbre de leur généalogie,^ pont leur avoir donné la,connmffancé de leur vraf origine $'' fingulierement ^four les avoir produits à la face de ï Europe tels qu'ils font en éfet > ceft aff avoir ^ beaucoup moins barbares , qu'on ne les avoit crem ptfques-àprefent.NâM avons eu la curïofitê , de communiquer ce que vom en avel^dit \ a cens qui refient en- core au milieu de nom, & nous les avons*- entendu confirmer de vive voix , tout- ce que feu Mon fie ur Brifiok^ 'vous avoit wandé de leur # guerres .de leur religion* de leur langage > & de leurs mœursï tellement que tontes ces cbofes font fi véritables au fonds- > & en toutes leurs cir confiances 5 quon ne fauroit les re]e~ ter j fans démentir tout Vn peuple y qui par vne tradition confiante & vnanime% étant nourri dans cette créance 5 en fera fou] ourf le garant. Âiïiis ce ferait' peu 3 s" il n y avoit que cette Nation 3 qui fe refera encore de l'hument f au v âge > qui ' publias! vosper- fetlïons y & qui vous t é v oignaïl fesre- mnnmffantts : // eïi auffi ms-wjte* que' no4iS> aQkTK^V^^O^^A^g LETTRES. mus qui vivons entre quelques telles d-€ ces Peuples , & parmi d'autres > qm nous tachons de civiliser > teniors à gloire finguliere de nous aquiter de ces devoirs : & que nos Familles 3 qui ne c&mpofext a preferJ aucun corps dy étsit feparé d'avec eus>& qui ivtfques à rrain- tenant. ssétoie;?t contai tées d'avoir leur témoin au ciel , ayait ejU produites au iourpar votre Histoire, confejferJ quyel~ les [ont redevables à voire bonté r de toute la lumière dont elles iouiffent en l'Europe , & quelles vow en réitèrent par ma plume > leurs ylm cordiales actions de grâces. Recevez. - les s'ilvom pi ait y Monfieur , & en continuant de nom honorer de votre hier.venilUnce, qui nota eftfî avantageai e : Crojel^que notre Tlortàe 3 répandra volontiers & fans aucune referve tout ce quelle a de fleurs , pour orner la couronne qui esl deué a votre Hisloire , & que nos plaines y nos lacs 5 nos forets , & nos plm hautes montagnes n'orn 'point d'ha- bit'ans y qui n admirera ves écrits ? & qui ne forment des vœm pour votre Prcfpe- rite. Ce font* là leurs [entimens commur sy 6- i H i LETTRÉS. & les particuliers de celuy qui fera pouf tmfïourS) MONSIEYR, Vôtre très -humble, & très- affeéfcioné Seiviteur, Ebovard GraeVistv tte Nfelilot en îà Floride"' TA'BlE B^ssafti^'yac^casggi "^""S TABLE Des Chapitres, & des Arti- cles du premier Livre de l'Hiftoire Naturelle des Antilles. Chai?. I. ^MEtaJttmtion 4& An* ft* Ternir fnû're deVai*ydeLi nature- du Pais 0* des Peuples qui y habi- tent** p*g** I I. D* chacune des Antilles en particu- lier* 1 } Art.i . De l'Ile de Tabago. 1 4? z. De l'Ile de la Grenade* 5 1 3. De? l'Ile de Bekja. 49 4* De Vile de Saint Vincent. 5 % 5. De Vile de là Barboude. $■$■ 6. De Vile de Sainte Lucie. 5 7 7. De Vile y delà Martinique. 58 I I I. Des Iles Antilles qui, s'étendent vers le Nord** ,p<*g«74 ^ ' V*D* '-— — "■ TABLE. Atfï.f .2)2 V île delà Domin' que. "75 1 .De Il le de MarigAanîe. 7 g f. Des Iles des Saintes & des Oi- feam. 79 4. De l'Ile de la Deftrade. 80 5 . De ÏJle de la Gardefoupe, g 1 6. De rjle d' Arjigoa, 88 •y M l'Ile de Mor.t ferrât, 89 8 . De Nie Ce ta Bàrbfde, & de U Redende. 90 9. De l'Ile de Nieves. 94 I V De nie de Saint Chrijïoflc en par- ticulier, y $ V. Des Iles de dejfom le Vent. 1 1 8 art. ï. De r Ile de Saint Èhftachc* l\Ç). 2. De l'Ile de Saint Bartelerry. \ z~$~ 3. de l'Ile de Saba. ibid. 4. De Ule de Saint Martin. 125 5. De l'Ile de l'Angmtle. 1 2S 6. Bis Iles de Sombrere ^Anegade & des berges* ibid. 7. De l'Ile de Sainte Croix. 1 30 V I. Des Arbres qui croijfeht en ces Iles dont on f eut manger le fruit* 152. Art*, ï. Des Orangers 9 Grenadiers y & ï&s&ntt^&smm&iim 4 TABLE* & Citromers. i 3 j %, Du Goyavier. i 35 3. Du Papayer. 138 4. D^ Momin. 14* 5. P« IttnipJt. 14$ .6. D^ Rdfïnïer. 149 7. J)£ PAcaiou. 1 5 1 8. Des prunes Chaque. 155 5). Dn* Prunes de Mombain. 157, 10. Du Courbary. 158 1 1 . D# Figuier d'Inde. 159 j 2. D# Cormier. 1 6 1 1 3. J># Palmifie Epine m. \6i 1 4. Z>a Palmifie franc. 1 64 1 y. jD& Latanier, 1 70 1 5. D# C<9^/. 1 7 2 17, D« Cacao. 177 VII. JÔif-f Arbres qui [ont propres a bâtir : ou qui fervent a la Me- nuyferie : ou a la Teinture. 1 7 9 Art.ï, De de m fortes d'Acaiou. 180 2. De P A comas. 183 3. _D# bois de Rofe. ibid. 4. Du bois d'Inde. 1 86 §. De flufieurs bois rouq.es qui font propres a bâtir > & des bois de fer. 188 I i 1 I y % l ÏÏA I ^dà TABL e. & De plufiems Arbres dont le bois efl propre a la Teinture. i y Q 7. DuRoucou. ,q;. Wl I LDes arbres ^qm font vtïles a U Medecine.Et de quelques autres dont les Habitant des ^Antilles peuvent tirer de grands avanta- £es' 15)7 Art.i.D^ Cajfier ou Canificier. 1 n g z,Des Neis de Médecin*. lot 3« Du bois de Canelle. 4. Du Cottonnier. 5 . Du Savmnier. ;6. Du Paretuvier. 7. Du Caiebajfiër. 8. Du Mahot. ï X. Des sArbriJfeaus du Pais quipor*. tent des fruits 3 ou qui pouffent des racines qui font propres a la nourriture des Habit ans > ou qui fervent a d'autres vfages. 2 1 7 Ârtj. Du Manioc. 2 1 8 , Du Ricinus ou Palma ChriFli, m Des Bananiers & Figuiers. 223 , Du bois de Cor al. xij Du Jafmin & du bois de chandel- le* 250 X.Des 205 207 ioS 209 HZ 2I5 2. 3- 4. ik^ggiÉ^s^PBa^ TABLI X. Des Plantes* Herbages* & RAcine$ de la terre de Antilles. i$i ART.i,Df trou fortes He Pyman. ibid* i. Du Tabac. 235 $. De ï Indigo. h}7 4* Du Gingembre. 2 3 9 5. Des Patates. 24i ét De l'Ananas, 246 7. De Cannes de Sucre. 152. % I, De quelques mtres rares prodn- liions de la terre des Antilles >& âe plufieurs fortes de Légume^ de fleurs qui y croijjent. 255 A ^ t . 1 , Des Raque t tes. 2 5 £ 2. Du Cierge.. , 259 3. De plufieurs fortes de Lienes. 160 4. Des herbes toufiours vives. 16 1 5. Des plantes fenjîbles. 262 6. De plufieurs fartes de pou. 166 7. Des fèves & Fafeoles. z<$j S. Des Plantes & herbes qui peuvent avoir leur vfage en la Médecine ou au ménage. 268 9 . Des Melons d'eau. Xj2. 1 o. Des Lys des Antilles. 174. H, Û£ deus fortes des fleurs de la Paffion. 275 ix, De ï i I I i 1 LÀ ^\*^ÇSBS T À° B L E. 5 il. De V Herbe du Mufc. 280 X I I. De cinq fortes de beïles à ài.pieds> qu'on a tr&uvé dans ces /les. 281 Art.i. DeVOpaffum. 2S3 2. Du I avarié, 28$ 3. Du Tatou. 28^ 4. Del'Agouty. 287 5 . Des Rats Mufquez.. 1% 8 XIII. Des Reptiles qui fe voyent en ces Iles. 290 Art.i.D^ plujîeurs eff>eces de Serpens & de Couhvres. 291 2. Des Lez,ars. 296 3. Des Anoli*. 300 4. Des Roquets. 301 5 . -Dtfj- Mahoùyat. 302 ^. Dfj G ibes- Mouches. 303 7. D^j- Brochets de terre. 306 8. D,« Scorpions & d'vne autre effe- ce de danger eus Reptiles. 308 XIV. Des Infetles qui font communs aus Antilles. 210 Art. 1 . Des Soldats & des Limaçons» 3 11. 2. £>£.r Mouches Luminenfes. 315 3. D^j- Falanges. ^2.1 <\< Des Millepieds. 325 âû^)^â£Kâ T A B L E.' 5. Des araignées. 316 ■ é. DuTigre volant. 3 *8 ■ 7. Des Abeilles & de quelques autres Infeiïes. 3 3° XV. Des Oifeatu les plus confiderabks des Antilles. 351 Art.i. Des Frégates. 3 3 5 2. Des Fauves. 3 3^ 3, Des Aigrettes & de plufieur s au- tres Oifeam de Mer & de Ri- vière. 3 31 4. Du Grand Go fur. 3 3 8 5. Des Poules d'Eau. 3 39 6. Des Flammans. 3 4 l 7. De l'Hyrondelle de V Amérique. De flufieurs Oifiam de Terre. 345- Des Arrat. 34^ 343 35* 1 2 . Des Perriques. 3 S 3 1 3. DuTremblo. 35 4 14. Du Pajfereau de V Amérique. 355- î 5 . De F Aigle aOrinoque. 3 $6 2 6. Du Mansfeny. 3 57 TonU, *** 17 '.D« 8. I o. D*f Canidés. 1 1 . JD^ Perroquets. I T'A BLE, vG Du Colibry. ^| X V I. Des Poijfons de la Mer > & des 376 578 379 Rivières des Antilles. ,ART.i . Des Poijfons volans. z.Des Perroquets de Mer. % De la Dorade. 4. De la Bonite. 5 . De l'aiguille de. Mer. 6. De plujîeurs autres poijfons de la Mer & des Rivières.- 3 g G X V I I. Des Monflres Marins qui fi trouvent en ces quartiers. 3 g t art.i. De l'Ejpadon. jg/j z. Des Marfoums.. ,3 g y . $* Du Requïem. jg£ 4. De la Remore. 390 5 . Du Lamantin. ^1 6. Des Baleines & antre* Monjires 39 quiiichoùaa la rade de l'Ile de la Tortue en Van î 644. Avec vn récit suriem pahfir* ?ne gSM^3Hra^ TABLE. Itoede cmparaifon & de Dîgreffwn- agréable, touchant* plu faurs belles & rares cornes , qu'on a aportées depuis peu du détroit de Davis : & de la qualité de la Terre, & des mœurs des feuples , qui y habitent. 40j X I X. Des Poifons couverts de croûtes dures y m lieu de peau 3 & d'écaillés: deplu/ieurs rares Coquillages: & de quelques autres bellesproduïïtons de la Mertfuife trouvent ans Cojïcs des Antilles. Ir t . i ♦ Des Homars. x.De l~ «Araignée de mer* 5. Des Cancres* 4, Du Burgau. y* Du Cafque. 6. DuLambis., 7. Des Porcelaines. 8. Des Cornets de Mer. 5) ; Des Nacres de Perles. ï o. De plu fleur s autres fortes de Co quillages. ^6 1 lié D'vn Coquillage couvert de notes de Mufique. A6g 1 1.» Des- Pierres am yeux.., 468 1 5 9 D es Pommes de Mer. 470 44<£ 449 ibid. 450 45i 452, 4S3 454 457 459 *#-*■ 1-^.Des-- T'A B LE. î 4. Des Etoiles de Mer. 47 * l$.Des Arbres de Mer. 47* 1 6. Des Pannaches de Mer. 473 X X. De V Ambre .gris : de fon Origine & des marques de celuy qui s si bon &ptns mélange. Al$ X X I. De quelques Animatu Anfibks qui font communs en ces Iles. 486 ART.i. Dh Crocodilii. 487 2 . Des Tortues franches. 49 f 5. Des Tortues qu'on appelle Caoùan~ nés. |j 5oï 4. Des Tortues qù on appelle Carets. 502. . 5 . Delà fajfon qu'on pefche Us Tor~ . tués 3 & tout les antres gros Coif- fons des Antilles. J°4 6 .Des Tortues de terre & d'eau douce. 5°7- , . . XXII. Contenant les de fer iptions par- ticulières deflufieurs fortes de Crabes qui fe trouvent commune- ment fur la terre des Antilles. 511.' akt.i. Des Crabes qu'on nomme Tour- lourou* 5 l L leDes EassassM^aia^^ ■*^B TABLEE. 2. Des Crabes blanches. $1} 3. Des Crabes feintes 514 XXIII. Des Tonnerres : des Trem- blement de Terre ; & des Tempe- fies qui arrivent fonvent en ces Iles* 523- A R t . 1 . Des Tonnerres. 514 2. Ûes Tremblemens de Terre, ibid. 3. D'vne Tempefie que les Infulaires appellent Ouragan. 525 X X I V. De quelques autres incommo- dités dupais y & des remèdes qu'on y peut apporter. 5 $6 Art.i . Des Mouftiques3& des Marin- goks. 5 37 i. Des Gueffes & des Scorpions. 3 . Des Arbres de Mancenille. 5 40 4. Des Pons de bois. 5 47 3; Des Ravets. 549 6. Des Chiques. S S1 y. Remèdes contre la morfure des Ser- pens venimem^ contre les autres poi/ons tant de la terre que de la mer des Antilles. 5 5 £ 8. De I S» m i » e WèZ&L 8. De VEcmw de Mer. j^J $ « Pw Rats qui fwt communs m ce$- Ileso. ,r â» *fe Ai Toile dje fulîîoim Naturelle, HISTOIRE; MaaflÉi^iiCBraiBM I 1 I I ! I 1 S iA. l*.a ville loyale nes'iemoT ^^aqrcmacjuuujc- ^ ,^-.«y™«- ~~t,-~?.tp : -, *4 ri»,.,. Montagne d'oiimy.EUJemph du Soleil F ' Lefrmure de laThnte Senjitiue et de la / leur . Cintrât Jïauucif. S J ' HISTOIRE NATVRELLE & MORALE D E S ILES ANTILLES D E L'AMER IQ_VE LIVRE PREMIER, Comprenant l'Hiftoîrc Naturelle. Chapi tre Premier, De la Situation des Antilles en generatz De la Température de VAir : De td Nature du Fais \ & des Peuples qm y habitent* fjp|| Ntre le Continent de l'Ame- gjig} rique Méridionale 3 8c la partie Orientale de l'Ile de Saint Iean Porto- Tom.L A Rico i ■Se î i i P55^SH^ESKBffiffl^gJg@iJE5i0SOiai % Histoire Natvrelxe JUco , il y a plufieurs Iles , qui ont h figure à'vtî arc, & qui font difposées en celle forte j qu'elles font vne ligne oblique au travers de l'Océan. Elles font communément appellées, les Antilles de l'Amérique. Que fi Ton demande la raifon de ce nom là, ileft à croire , qu'elles ont été ainfi nom- mées, parce qu'elles font comme vne barrière au devant des grandes Iles, qui font appellées , les Iles de l' Ame-- rique. Et ainfi il faudroit écrire , ôc prononcer proprement Antilles , ce mot étant composé de celuy d'Ile , & de la particule Gréque x*^*^**^à^^^ des Iles Antilles. j On en conte en tout 28. princi- pales , qui font fous la Zone Torra- de* à prendre depuis l'onzième degré de rEquateur^ulqu'au dix-neuviéme* en tirant vers le Nord. Quelques-vns comme Linfcot en fon Hiftoire de l'Amérique /prenant le nom d'Antil- les en vne fignification plus générale* le donnent aus quatre grandes Iles* VEffagnole, ou Saint Vomingue, Cube* Jamaïque , & Porto - Rico 3 auffi bien qu'à ces autres vin gt-huk. L'air de toutes ces Iles eft fort tem- péré , & affez fain 3 quand on y eft acoûtumé. La pefte y étoit autrefois inconnue de même qu'en la Chine» & en quelques autres lieus de l'O- rient : Mais il y a quelques années, que la plupart de ces Iles furent af- fligées de fièvres malignes , que les Médecins tenoient pour contagieu- fes. Ce mauvais air , y airoit été ap- porté par des Navires qui venoient de la côte d'Afrique : Mais aujourd*huy on n'entend plus parler de femblabies maladies. A Lf i S I 1 I 4 Histoire Natvrelle Les chaleurs nJy font pas plus grandes qu'en France aus mois de Iuil- let & d'Aouft : Et par le foin de la di- vine Providence 9 entre les huit &c neuf heures de matin > il fe levé vn petit vent d'Orient 3 qui dure fouvent iufques fur les 4. heures du foir,& qui raffraifchit l'air , &c rend la chaleur plus fupportàble. lofeph Acofta dit., qu'aus grandes Iles de rAmerique3on ne fent ce raffraichiffement que vers Iç midy. Et c'eft ainfî que prefque fous toute l'enceinte de la Zone Torride, le Sage Maitre du Monde , 3 ordonné des vens frais ôc réguliers, pour tem- pérer les ardeurs du Soleil. , Il ne fait iamais de froid aus Antil- les : Auffi la glace n'y eft point conuç, ce feroit vn prodige que d'y en voir. Et jamais en w bords de verdure embellis UHyver ne fe montra^ qtten la neige des lys. Mais les nuits y font extrêmement fraiches, & fi l'on demeure découvert pendant ce tems-là^on eft fuj.ee à s'en- £nmetj& à gagner des grands & dan«> gereux aas^Kwg.^raaware^ des Iles Antilles. 5 gereus maus d'eftomac : Et on a re- niarqué,que tous ceux qui s'expofent à nud à cette delicieufe fraicheur, s'ils ne font faifis de maus d'eftomac , du moins ils deviennent pâles/jaunâtres, & boufis > & perdent en peu de tems, tout ce qu'ils avoient de couleur vive & vermeille. Il eft vray, que d'autres attribuent ces effets,à la nourriture de la Cajfave, que Ton mange ordinaire- ment en ces Iles au lieu de pain , & qui peut-être , a quelque qualité con- traire à la conftitution naturelle des Habitans de nos climats. On éprouve la même température durant la nuit au Perou,& dans les Maldives.Et ceus qui ont fait le voyage de Ierufalem, éc de tous les païs chauds, rapportent qu'autant que les chaleurs y font gra- des pendant le iour, autant les nuits y font froides. Ce qui arrivera caufe des grandes vapeurs que le Soleil élevé fur le jour,& qui venant à fe conden- fer la nuit,& à tomber en rosée , raf- ftaichiffent l'air merveilleufement. L'Equinoxe dure en ces Iles prés de la moitié de Tannée,& le refte du tems A 3 les I i 1 1 ! I ! W&t&Xfr&^m 6 Histoire Natvrelle les plus grands jours font de quatorze heures^ les plus courtes nuits de 10. Et c elt afnfi que la diuine Sageiîe, a donné aus terres qui font plus expo- fées aux ardans rayons du Soleil , des nuits fort longues & fort humides, pour reparer & remettre en vigueur, ce que cet Aftre fi voifin y a flétry ôc delïêché durant le iour. On n'y peut point divifer Tannée en quatre égales de diverfes parties, comme nous le faifons en l'Europe. Mais les pîuyes , qui y font fort fré- quentes depuis le mois d'Avril > iuk ques à celuy de Novembre^ les grâV des fécherefles qui dominent le relie du tems^font la feule difFërence*qu'on peut remarquer entre les faifons. Que fi on demande 5 comment on doit appeller ces deus diverfes C*n- ftitutions & Températures de l'air? C'eft en cet endroit où les opinions fe trouvent fort partagées.. Les vus veulent , que de même que les jours n'y ont prefque point de ces heures,, qu'on nomme Crepufcule3cp\\ tiennent k milieu entie le iour & la nuit 5 qu'- auffi^ %sstisn**i^*EPSf&ài&s&i ÊES IlBS AtfTItLES. f àûffi il n'y ait point de Printems ny d'Automne 3 qui faflcnt la liaifon de l'Eté y & d'vne efpece d'Hy ver qu'ils y admettent. Les autres maintiennent au côtraire.qu il n'y a aucune iufte ra^- fon5 qui puiffe obliger 3 à faire portet le nom d'Hy ver à iVnedeces faifens: à caufe que la terre n'y eft iamâis cou- verte de glace , ni de neige 3 qui font les triftes produ&ionsde rhyvermiais toujours revefiue d'vne agréable ver- dure y&c prefque en tout terns ^ cou- ronnée de fleurs & de fruits 3 quoy qu'en vne indifférente mefure. D'où ils concluent que le Printems > l'Eté, & l'Automne, y partagent l'année en trois diverfes & égales portions , en- core qu'on ne les puiffe pas difeernec fi aisément qu'en piufieurs autres en- droits du monde. Mais le fentiment des Peuples^ qui ont formé des Colonies en ces lles3ne s'accorde pas avec cette divifion, par- ce qu'ils prenent le tems des pluyes pour l'Hy ver>& celuy des féchereifes» qui eft beaUjriant & ferein3pour l'Eté. Il eft vray qu'Acofta au chapitre troi- A 4 ziéme § I 1 I 1 y Histoire Natvrilie zicme, du deuzie'me Livre de fon Hi- ftoire,quereile les Efpagnols qui par- lent de la forte , & qui prenent pour Hy ver ces mois pluvieus. Il foutient que le tems fec & ferein eft le vray Hyver dâs toute la ZoneTorride, par - ce qu'alors le Soleil eft le plus éloigné de cette Région, & qu'ab contraire là laifon des pluyes & des brouillais , y doit cftrc nommée l'Eté,à caufe de la proximité de cet Aftre.Mais bien qu'à parler proprement & à la rigueur,il fe falut icy ranger au fentimét d'Acofta, neantmoins puifque non feulement les Efpagnols, mais tant d'autres Na- tions,font accoutumées à tenir vn au- tre langage, il nous fera bien permis d'vfer de leurs termes , en vne chofe de fi petite importance. Au refte , quelque pluviéufe que puifTeeftre la faifondans les Antilles, ceus qui y ont demeuré plufieurs an- nées aifurêt , qu'il ne fe paffe prefque aucun iour , que le Soleil ne s'y fafle voir. Et c'eft ce que Ton dit auffi de l'Ile de Rhodes : A caufe dequoy tou- te l'antiquité l'a dédiée au Soleil, cro- yant iKranb^^rara^^^ des Iles Antilles. ^ yant qu il en avoit vn foin particulier Le flus &. reflus de la Mer eft re- glé en ces païs comme aus codes d e France : mais il ne monte que trois ou quatre pieds au plus. La plus grande partie de ces Iles, eft couverte de beaus bois , qui eftans Verds en toute faifon,font vne agréa- ble Perfpe&ive , & reprefentent vn Eté perpétuel. La terre y eft en plufieurs îieus anfïi belle , auffi riche, & auffi. capable de produire qu'en aucun endroit duMon- de. En effet , toutes celles de ces Iles qui font cultivées, donnent en abon- dance^dequoy vivre aus Habitans qui y demeurent : En quoy elles /ont bien différentes de ces païs de la nouvelle France, où les pauvres fauvages ont tant de peine à trouuer leur nourritu-r re, que leurs enfans en fortant Id maf tin de leurs Cabannes , & eus au mi- lieu de la campagne où ils font leur châtreront accoutumé de crier à haute voix, Vtne7sJtatovu> venez, CaFlors? ve- nez. Orignacs *, appellant ainfi au fe- • cours -de Uur neceffité , ces, animaus, A 5 qui y 1 % io Histoire Natvrelle qui ne fe prèfentent pas à eus fi fou- vent, qu'ils en auroient befoin. Ces mêmes Iles habitées sot pour- voies de bonnes fources d'eau douce,> de fontaines ,. de lacs 3 deruiffeaus.de puits ou decifternes:& quelques vnes d'entre elles ont auffi de belles rivie- res^qui arrofenc la terre fort agréable- ment. Il y a même en plusieurs lieus des eaus minerales>;dont on vfe avec heureus fuccés pour la guerifon de di- vers maus. Le foulfre, fe tire en pluf. jenrs endroits du fein des .montagnes,-, & les paillettes luifantes & argentées que les torrens & les rivières charient parmi le fable & l'écume de leurs eaus au tems de leurs débordemens/ont les Indices certains qu'il s'y forme du Criftal, & qu'il y a aufïLdes mines de ces precieus metaus, qui font tant re- cherchez delà plupart de hommes.. Les eaus courantes,qui méritent de porter le nom de Rivières n'y tarifsét iamais dans les plus grandes iecheref- fes , & font fort fécondes en poilïbns qui font pour la plupart differens de ceus qui fe voyent en Europe : Mais m 'àS2ttL^Ê*V^*^/i^l&**V\^1C*ZM ©es Iles Antilles- ii il s'en trouve en telle abondance aus coftes de la Mer, que les Habicans ne s'amufent pas fouvent à pefcher dans les nvierçs. La Vigne vient fort bien en ces Ues,& outre vne efpecede vigne fau- vage, qui croift naturellement parmy les bois>& qui porte de beaus & gros raifins * Ton voit en toutes celles qui font habitées s de belles treilles * & même en quelques endroits des Vi- gnes cultivées comme en France, qui portent deus fois Tannée* & quelque- fois plus fouvent > félon la taille & la culture qu'on leur donne* ayant égard ; à la Lune & à la faifon convenableo Leraifin en eft fort bon : mais le vin qqe Ton en tire n'eft pas de garde yôc ne fe conferve que peu de iours, c'eft pourquoy on ne s'amufe pas à en fai- re. Quant au Blé* qui vient en la neu^ ve Efpagne auffi bien qu'en lieu du monde 5 il croift feulement en herbe aus Antilles5& ne peut fer vir quà fai- re de la faueeverte3àcaufe que le fro* meut veut eftre hyverné, &que la i I 1 I i I I i i il Histoire Nâtvrëile terre eftant trop graftë en ce païs,elle pcufle tant d'herbe au -commencemët* qu'il ne refte pas allés de force à la ra- cine pour paflèr au tuyau > & former yn épy. Mais , s'y on avoit eilayé d'y femer de l'orge, du fei'gle , St d'autres grains qui veulent le chaud , il eft croyable, qu'il s y croiftroient en per- fection. Il eft vray/que quand tous ces grains y pourraient venir en maturité, les Habitans qui ont prefquefans pei- ne le Manioc, les Patates, le Mays, ôc diverfes autres efpeces de racines & de legumes^ne voudroient pas prendre le foin qu'il faut pour les cultiver. Tous les vivres naturels de cqs Iles font légers & de facile digeftion. Dieu l'ayât ainfi permis, à caufe que le pais étant chaud, on n'y doit pas tant char- ger fon eftomac , que dans les con- trées froides. De là vient, qu'on con- feille aus nouueaus venus, de mander peu & fouvent , pour fe bien porter. Les vivres n'y font pas auffi beaucoup de fang , ce qui eft caufe que les Chi- rurgiens y faignent fort peu. Pour ce qui regarde les Habitans de ces 'àj^i^sch^^Êe^SÊ^^ssFn^ — 1 î>£5 ItÊS ÂKTItLES. 1) ces îles» Elles font peuplées de 4«Na- %]j tions différentes ; Dont la première* ' s «Jui en eft Originaire^ qui les polie- ' : j de de tems immémorial > eft celle des CardibeSyQW Cannibales \ defquels nous ^ entreprenons de parler au long au 2. Livre de cette Hiftoire. Les autres 5. — font les François , les Anglais , 8c les S Hollandoù.Qes Nations étrangères ne 1 ^ fe font établies en ce païs5 que depuis sjl Tan 1625. Et depuis ce tems 5 elles \f s'y font tellement acruës^que la Fran- çoile 8c l'Angloife nommément 3 y lont aujourd'huy vn très - grand peu- ple : Comme il fe verra plus particu- lièrement dans la fuite de cette Hi- ftoire. I I I CHAPITRE IL | De chacune des Antilles en yj particulier. . 1 POvr obferver quelque ordre en la défcription que nous ferons dé chacune des Antilles en -particulier* ■ nous I 1 taz**-*frs*gïsmm ï^r Hl STOIltE N^T VRELL& nous les diftribuerons toutes en trois clartés : dont la premiere-comprendra les Iles qui approchent plus du Midyy & qui font les plus voifines de la Li- gne. La feconde3celles qui s'étendent plus vers le Nord; 8c la derniere^cel- les qu'on nomme ordinairement les Iles de deiïous le Vent > qui font aw couchant de l'Ile de Saint Chriftofle3 k plus renommée de^ toutes les An- tilles. ■ ARTICLE II 3c T Ile deTabagOy ou de fa Nouvelle Qùalcre. LA premier e,& la plus Méridiona- le de toutes les lies Antilles , que nous avons propoféde décrire au pre- mier Livre de cette Hiftoire, eft celle qui a efté connue iufqu'à prefent dâs coûtes les Cartes Geografiques,fous le nom de Tabago , & qui dépuis trente ans ou environ^ a aufïi efté appelée la Nouvelle Omlcre > ou bien Vvœlchre* félon Tortografe des Elamans. Elle eft* diftante dé l'Equateur en tirant veçs - m ^J^*&X*^\Z**X*^!à\ h II l^ljl 1 le Nord 3 d'onze degrez & féze fcru- pules. Son circuit eft du moins de trente- lieues , & fon étendue d'onze en longueur^fur la largeur de quatre,, & de^ quelque peu moins aus extre- mités.» Cette lie n'efi point herifleede- môtagnes fourciileufes& inaceffibles^ ni inondée de marécages^ ou couverte de bois impénétrables comme quel- ques autres des Antilles^qui font en* core poffedées par les Caraïbes. Mais en quelques endrois elle eft relevée en collines fortiagreables 3 puis après s'être abaiffée en des vallées extrême- ment diuertiflantes 5 elle s'élargit en dès plaines tres-fertiles 5>qui font re- vécues de Cèdres* de^Palmes, à'Ac*~ ]om >& Ajourna* 3 & de toutes fortes d'excellens Arbres d'vne hauteur & à vue groiïeur demefureé* qui faifans pa£ tout de merveilleufes perfpe&i- ves y femblent avoir efté plantez à» deffein 3 de fe promener fous leurs branches* ou d'y prendre le plaifir de la chalTe *,fans aucun empefche- #ient. L%in£ § i i fit? Histoire Natvreuë Quant aus qualitez de fon Terroir, il eft en quelques lieus léger 6c fablo- neus3en d'autres il eft parfemé de gra- vier y de de petits caillous * ailleurs il paroit gras de noirâtre : Se ceus qui l'ont vifitédans toute fon étenduë*de- puis fes plaines iufqu'au fomet de ks côtaus 5 raportent conftamment * que par tout il eft tres-propre a eftre culti- vé : Mais les arbres qui luy font en tout temps vne riche guirlande * font fans contredit fon plus precieus orne- ment. Les vos font chargez de bons fruits * qui peuvent contribuer beau- coup au rafraichifrernent>& au foûtien de la vie des hommes : & les autres ne fervent pas feulement à l'ornement des montagnes & au divertiflemét de la veuë> mais auffi à la charpente* à la menuyferie* à la teinture* & à la méde- cine : la folidité * la bonne odeur * la diferente couleur*& les vertus fecret- tes de leurs bois* de leurs fruits* &c de leurs feuilles* les rendant très-propres à tous ces vfages. Outre tous ces beam, Avrxes * qui font auffi communs à la plupart des autres a % des Iles Antilles. 17 autres Iles du voifmage ,il en croift plufieurs en celle-ci* qui lui font par- ticuliers,& qui la rendent recommen- dable : tels que font en premier lieu, ceus qu'on y a trouvez dépuis peu>qui portent des fruits qui ne font en rien diferens, quant à la forme extérieure, y( des Noix Mufcades qui nous viennéc jfij des Indes Orientales, & qui font pa- *> reillement couverts de Macis , c'eft à \\ dire d'vne petite feuille ou pellicule aromatique,qui eft entre la Noix & la $ rude écorce qui conferve & envelope (S tout le fruit. Mais quant aurefte, cette fi| forte de Mufcades eft d'vne faveur ^ plus piquâce que celle qui viét du Le- £ vant,& dVne odeur h foible qu ellefe îg) palîe aifément.Il eft neantmoins à ef- ^ perer.quç fi l'on prenoit le foin de dé- "; charger les arbres qui les portent, des ^ branches mortes ou fuperfluc ; qui les % ctoufent y Se les empefehent d^ rece- /} voir pleinement les rayons du Soleil, V elles viendroienten plus grande per- V fcétion, & feroient dVn goût plus a- ^ greable, & d'vne odeur plus douce & ] ( plus confiante. (tf 11 IIS •s _J ^Ç^ÏT^^MSM 1 1 1 ï8 HlStOTRE NatVRÉLIIe Il y croît aulîi prefque par tout des autres Arbres 3 que les Habitans ont appeliez Millepieds > Fromagiers, Bois de Canelle , 6c de Copal, dont nous fe- rons ic y les defcriptions^à caufe qu'ils font entièrement inconnasou fort ra- res aus autres Iles. Le Millefhds, eft ain.fi nommé D parce qu'il eft foûtenu d'vn nombre prefque infini de groifes racines>qui sot formées de fes propres branches 5 incontinent qu'elles tou- chent la terre y tellement qu'à la fin3 fon tronc devient d'vne groiféur pro^ digieufe. Ses feuilles font vn peu plus larges que celles du Laurier.. Il pro- duit vn fruit de la grofleur d'vne figue qui eft fort recherché des Perroquets. Ge fruit eft devancé d'vne fleur blan- che 3 fous laquelle on trouve ordinai* remet vne certaine gomme jaunej>qui a la vertu de guérir toutes fortes de dertres de de feus volages , qui vien- nent à la face ou aus mains. C'eft auffc dans les branches creufes de cet Ar- bre3 que les Abeilles de cette lieront' k plus fouveiit leur cire3& leur miel. Le Soù * d& Canelle, que les Floridiés appellent Av>^nw^^^L*^iwa^^g *^B £ËS ItËS AttTIIlÊFS* ï^ appellent Pauame98c nos François Saf*- faffra* > eft l'vn des plus beaus & des plus excellens Arbres , qui fe voyent en tout ce nouveau Monde. Il croit fort droit,& fon tronc s'élève iufqu'à vingt-cinq; ou trente pieds d'hauteur, avant que de pouffer les branches.Ses feuilles font approchantes en figure* en couleur ytk en odeur à celles du; Laurier. Son bois eft rougeâtre & de bonne fenteur , foiide 5vni > & très- propre affaire toute fortes de riches ouvrages de menuiferie : mais dans cette Ile > Tonne s'en feixà prefent qu'à bâtir des maifons. Ses branches font fi toufuës^qu'il ne peut rien croî- tre défous y qu'vne petite herbe cour- te3qui compofe en tout tems vn beau tapis vert y pour le divertiffement de ceus qui veulent iouïr de la delicieufe fraicheur quelles prefentent5à même tems qu'elles recréent également la veuë ôc l'odorat *, par la verdure per- pétuelle de leurs feuilles .,& lafouëve odeur qu'elles exhalent. Ces Arbres portent des graines Semblables à celles du poyvre rond* i i i i 1 i ^sv^s^^aâ 10 Histoire Natvrelle & bien qu elles (oient vn peu fortes, les Perroquets y trouvée- leurs délices; CVft auffi fur leurs brâches qu'ils font ordinairemét leur ramage importun, ôc où ils fe tiennent en toute ailurance fans pouvoir être aperceus^à caufe que leurs plumes sot de même couleur que les feuilles de ces Arbres fur lefquels ils fe plaifent. Leurs écorces aromati- ques font recherchées de tous ceus qui font travaillez de defluxiôs froides, Se leur decodion eft employée heureufe- ment aus "douleurs de reins procédan- tes de froid, comme auffi à la guerifon de la colique,à la dificulté de refpirer, & à décharger la poitrine des humeurs gluantes qui l'opretfent , cerne auffi à châtier les vens & toutes les obftru- dtiôs des parties baffes.Et cette même écorce étant féchée à l'ombre , donne encore vne faveur Ci agréable aus via- des qui en font aifaifon nées, qu'à cau- fe qu elle eft aprochante de celle de la Canelle,ron a appelle les Arbres qui en font couverts., de ce même nom. Le Copalyàom nous parlerôs en di- vers endrois de cette Hiftoire , eft vn Arbre 7ik^s>>re»^^^*aft«rere¥*ff^ *"*• des Iles Antilles. it Arbre d'vne belle môtre* lequel étant percé en fon croc ou en fes plus grpl- fes branches , jette vn baume de tres- douce odeur, qui gnerit en peu de tés toutes fortes de coupures., & fait fu- purer les tumeurs qui fe font amaf- sées en quelque partie du corps des hommes. I/écorce de cet Arbre eft rousâtre 3 & de même que le Gajfier, il perd fes feuilles durant les gran- des chaleurs, contre la nature de tous les autres , qui parent la terre de ces contrées ., & qui confervent en tout tems leur agréable verdure. Le Fromagierdk. vn Arbre qui viét dâs cette Ile d'vne groiFeur tout à fait extraordinaire x & d'vne figure bien différente de celle des autres de même nom ^ qui fe trouvent ailleurs 3 com- me nous le dirons en fon lieu. Il eft raviflant pour le bel ombrage qu'il donne 3 & pour le fruit merveilleus qu'il produit. Il confilteen vne gref- fe filique ligneufe , laquelle eft de la groflfeur d'vn œuf de Poule , & de la longueur d'vn demi-pied. Lors que ceçe rude envelope eft meure Je Soleil h m HlSTQIRE N AT V RELIE la fait ouvrir à moitié, & le vent l'a- yant: fait tomber, on trouve qu'elle eft remplie d'vn fin coton ou duvets lequel étant extrêmement dous,& de- iiè comme de la foye, feroit très-pro- pre à faire quelques beaus ouvrages* Cet Arbre a fans doute receu le nom qu'il porte , à caufe que fon bois qui 0& revécu par dehors d'vne icorce grisâtre 3 eft fi mola-ife, qu on le peut couper aujOTi aifément que du froma- ge Ceus qui ont eu la curiofité de pé- nétrer dans les bois d'haute fûtaye qui couronnét cette Terre, y ont auffi rencontré vn nombre bien confide- rable de ces Arbres , qui portent le fruit de Cacao , dont les Espagnols fe fervet en la compofition de ces pains tant prifez parmi eus,déquels ils font cet excellent bruvage , qui eft connu par tout fous le nom de Cicolate. Ils y ont auffi remarqué vne fort grande quâtité de ceus qu on apelle de Fuftok* dont le bois qui eft iaune eft employé avec heureus fuccés à la teinture : & vne infinité d'autres qui font en efti- me, ^s>^K^*g.^a,*aft^aisag£ des Iles Antilles. i| me , on bien à caufe qu ils font char- gez de ce precieus vermillon que les Jndiens nomment Moucqm,ou d'autant .qu'il diftile de leurs troncs des gom- mes & des raifines de hpne odeur, en allez grande abondance pour en tirer du profit. JLes Orangers , les Citron- niers aigres & dous , les Grenadiers, les Figuiers , les Goyaviers , les Mo- mins , les Bananiers , & les Papayers, y portent auffi des fruits autant beaus & délicats, qu en aucun autre endroit 4es Antilles. Tous les vivres qui fervent à la nourriture ordinaire des Habitans de ces païs chauds , croiifent auffi dans cette Ile en kur perfe<5K6,& avec vne telle facilité que fans beaucoup de travail , on y recueille du Ris, du gros Mil,dçs Pois & des Fèves, du Manioc dont on fait le pain qui eft en vfage dans la plus grande partie de l'Amé- rique , des Melons , 3c toutes fortes d'herbes potagères & de racines, qui font fort nourriflàntes & d \vn go£t relevé. Les^nanai &c les Patates y viennent auffi à merveille : & cette Terre I s I I 1 i i i ^sà t 24 Histoire Natvrelle Terre répond fi parfaitement à l'aten- te de ceus qui prenét le foin de la cul- tiver^qu'elle leur rend avec vne dou- ce vfure, toutes les femences quils jettent dans fon fein. On trouve dans cette feule Ile tou- tes les efpeces de Betes à quatre pieds, dont on voit feulement vne ou deus pour le plus aus autres Antilles. En premier lieu , Ton y rencontre com- munemét vne forte de Sangliers que quelques Indiens nomment I&VAru± 8c les àutïes>Paquires,c]x\i font diferés de ceus de nôtre Européen ce qu'ils ont Jes oreilles plus courtes^vn évent* ou comme veulent quelques-vns , le nombril fur le dos, «Se que leur gron- gnementeft beaucoup plus effroya- ble.!.Des Tatous ou àzsArmad'illes.$. Des Agoutis. 4.Des Rats tmfyueé^* on nomme en quelques endroits Pi- loris. 5. Vne efpece de petites Martes ou Fouines , que les habitans appel- lent Munkom. 6. Et même des Re- nards & des Chats fauvages, qui ont des peaus, qui font marquetées de di- verfes couleurs. La plupart de cesani- maus 'ikx>C ^i^XSV^ des Iles "Antilles.' 25 tnaus que nous décrirons en leur pro- pre lieu, fe retirent entre les fentes des rochers, ou dans les troncs des Arbres qui font creufez & minez de vieillefie, & quelquefois dans les tanières qu ils font fous la terre. Quant aus Oifeaus qui peuplent l'air de cette Ile , outre les Ramiers , les Tourtes,les Perroquets^ vne efpecc de Merles & de Grives qu'on y voit voler par troupes , il y a encore vne forte de Faisâs, que les habitans nom- ment Kaquereka , à caufe que dés le point du jour, ils répètent diftin&e- ment & à diverfes reprifes vn certain ramage , qui femble former ce mot, dont ils font vne mufique autant cho- quante & des-agreable aus oreilles de ceus qui n'y font pas encore acoûtu- niez, que leur chair efl: favoureufe & délicate à leur goût. Les bords de la mer qui entoure cette Ile , de des Rivières qui l'arrou- ienUont encore couverts d^Aigrettes, de Plongeons, de Canari* ôc de pln- iieurs autres fortes de beaus Oifeaus* qui le nournifent de petis Poiifons3 Tom.L B en l I % 1 i 1 i % K %6 Histoire Natvrelie cm de quelques infe&es qui flotent fur les eaus. Et le Continent qui n'en eft pas beaucoup éloigné, la remplit auf- fi d'vne infinité d'autres i qui ne pal- fent point jufqu aus Iles plus reculjfc.es* Quelques~vns font parez dJvne feule livrée : mais les autres ont le corps émaillé de tant de belles & de vives couleurs , que foit que Ton confidere l'agréable bigarrure de leur plumage, ou la merveilieufe induftrie avec la- quelle ils font leurs nids 3 ou l'agilité incomparable dont ils fendent l'air, ils four mirent vn très- ample fujet de célébrer le Seïgneur, qui a paré fi ma- gnifiquement tant de légères créatu- res, La Mer qui lave incelTammcnt les jbords de cette Terre3eft abondante en toutesfortes d'excellens PoiiTons.Les sroffes Tortues , durant le calme 8c le profond filence de la nuit , fortent par centaines de ce vaftefein de l'O- céan où elles fe font jouées pendant lé jour.pour cacher leur œufs à la faveur de la nuit, dans le fable mollet qui efl fur fes rivages. Les Qtrets , qui foni couvert* ■SXTCra^X^^^YiireNffSliT» *w des Iles Antilies. x? couverts de cette forte d'écaillés pre- cieufes dont on fait à prefent tant de beaus ouvrages ,qui enrichiiTent les cabinets des curieus, s'y viennent auffi rendre par troupes > pour y terrir en leur faiion : la nature leur ayant don- né cet inftint , qu'ils y trouveront des Aieus commodes > pour y mettre en dépoft y Tvnique efperance de la con- servation de leur efpece. Au Couchât de au Nord de cette Ile, il y a des havres & des mouillages £res-feurs& tres-cômodes pour toutes fortes de navires. Mais ce qui eft de plus merveilleus , &c d'vn Singulier avantage pour y atirer & conferver le commerce, c'eft que fes Habitans ont reconnu par vne douce expérience* qu'elle n eft point fujette à ces éfroya- bles tempeftes,que les Infulaires apel- lent Ouragans , qui font ailleurs tant de ravages. Nous ne rechercherons point curieufement 3 comment il fe peut faire, que toutes les autres terres des Antilles étans expofées fi fouvent à cette vniverfelle confpiration des vens , celle-cy feule en foit exempte* B 2 SC 2.5 Histoire Natvrellb Se jouiffed'vn calme parfait, pendant que tout le voifinage eft dans la con- fufion qui aeompagne ordinairement ce defordre : Mais en raportant cet ifet extraordinaire à Dieu feul qui eri eft le véritable Auteur, & lui donnant toute la gloire de cette illuftre mer* veille* nous dirons en admirant ce ra- re privilège , que fon adorable provi- dence a voulu déployer en faveur de cette Ile > que ces vtns fi légers & fi forts 3 qui bouleverfent les maifons, & defoient les campagnes , fortent du fonds de Tes inepuifables trefors , 3ç que n'ayans point d'autre force que celle qu'il leur infpire > ils ne fouflent que là , ou fâ tres-fage ordonnance les , adreffe. Cette lie, de même que quelques autres des Ântilles,a encore cet avan- tage très côfiderable^u'elle ne nour- rit aucune befte qui ait du venin. Il eft vray qu'on rencontre quelquefois parmi les forets le moins fréquentées, de monftrueus ferpens de douze à ! quinze pieds de long. Mais , outre qu'ils prenent la fuite à la rencontre des ■WS5J i des Iles .. Aêf-tillesv z$. des hommes 3 de qu'on n'a pas encore ouï dire >■ qu'ils leur ayent fait aucun mal y lors que les Nègres 3 qui font les ferviteurs perpétuels des Habitant ;. r de ce nouveau Monde > les trouvent à leur avantage 3 ils les tuent pour fe \C repaiftre de leur chair , laquelle ils di~ |jV fent eftre auffi délicate &c favoureuie à leur goût , que celle des meilleurs poiiïbns. Ils confervent auffi les dé- pouilles de ces épouvantables Repti- les , pour en accommoder les curieus qui en font état > à çaufe des écailles de diferente couleur dont elles font ^ émaillées avec vne fi admirable varie- S) té y 6c vn mélange fi fuperbe , qu'il ^ n'y a aucune tapilferie qui leur foit j*) comparable* wà Nous pouvons mettre auffi entre » > les faveurs que le Ciel a répâduës li- \) beralement fur cette Ile, qu à peine $ V en a-t'il aucune dans tout le vaite. gjj iein de l'Océan de l'Amérique, qui à *£ proportion de fon étendue > ait tant *Q de Rivières & de Fontaines d'eau vi- VA ve.que celfe-cy. Les anciens habitant * \ n'en avoyent autrefois remarqué que [ \ B 3 dix-huit-, n I LÀ r ou des rochers plus eminens que le refte du fôrrain* y précipitent leurs eaus avec tant d'impetuofité , qu'elles feroient capables de faire tourner avec vne fa- cilité nompareille,les roues des Mou- lins à fucre3 ou des machines à fier le: bois5 qu'on y voudroit drefier. Il y a encore dans cette Ile^plufieurs belles & grandes Prairies > qui font couvertes d'vne herbe très- propre à, nourrir & à engraifler le bétail,&: qui après la faifon des pluyes font émail- lées d'vne infinité de petites fleurs de diferentes figures > qui recréent mer- yeilleufement la veuë:mais les arbres & les plantes de cette terre en portent de fi ravilfantes * ôc d vne fi douce odeur* «aça pwakvjs? ^gygvNtfigq n ï>es Iles Ântilies. 31 odeur , qu'on ne s'arrête pas fouvent àconfiderer toutes ces menues pro- ductions des prairies y bien qu il foit confiant,- que les plus curieus y trou- yeroient la riche matière de leurs fpe- culations. Nous décrirons au Chapitre onziè- me de cette Hiftoire Naturelle > les fleurs qui font communes à toutes ces Iles 5 mais d'autant que celle - ci pro- duit vne forte de Lys qui n'eft point connue ailleurs > nous la reprelente- rons en cet endroit avec le plus de naïveté qu'il nous fera pofîihle. La Plante qui porte cette fleur my fterieu- fe 3 ne rampe point fur la terre où elle j>ourroit eftre foulée ans pieds des palfans , mais elle croiil fur le tronc ou fur les plus groiTes brâches de quel- ques vns de ces arbres precieus donc cette Ile eft avantageufement parée* &c ayant vn fi riche foûtien,elle s'ele- ve par toufes & par bouquets , com- me le Muguet ou le Lys des vallées* Cette incomparable fleur qui n'a pas plus d'étendue que celle du Narcyile* xeprefente fi parfaitement vn Lys en B 4 broderie 4 1 T % 1 I 1 I $t Histoire Nat vrille broderie d'argent, qu'il fcmble qne la nature ait déployé tout ce qu'elle a de plus rare dans fes trefors ,■ pour la produire dans cette Ile , avec toute la grâce 5c les attraits que les mains les plus adroites des brodeurs & des orfè- vres luy fauroient donner,pour la fai- re paroître avec toute cette pompe & tout cet éclat5qui Ta rendue digne d'- enrichir la couronne & la pourpre des plus auguftes Rois du Monde. Bien que cette place entre toutes les autres Antilles > foie la plus avancée vers la Ligne Equinoâiale , 8c par confequent la plus exposée aus ar- deurs du Soleil, l'Air y eft neant- moins extrêmement agréable & tern- peré.Il eft bien vray qu'à caufe decer- taines incommoditez qui acueillirent les premiers hommes qu'on y avoit portez pour la défricher 3 les envieus de cet établi fiement fe fervirent^tVue fi trifte ocafion>pour en dire des cho- fes difamatoires > comme fi cete ter- re eut dévoré fes habitans y &c n'eut pas efté digne d'eftre cultivée. Mais ces maladies qui pour lors luy étaient communes /ikv/Q4.ar^ mrn*k*avs;j&au fr»srvgKX*re des Iles Antilles. jj communes avec toutes les Iles qu'on découvre nouvellement > font à pre<- fent entièrement évanoiïye:; , 3c par la bénédiction du Seigneur 5 Ton y jouïtdVne fantéaufïi ferme, & d'vne conftitution de corps & d'efprit au- tant vigoureufe ,. qu'en aucune autre des Antilles. Cette Terre de même que les voifï- ii es êtoic autrefois peuplée de Caraï- bes rqui y avoient plufieurs beaus & grands Villages : maïs il y a prés d'viv iîecle qu'ils furent contrains de la* bandonner ,.&■ de fe retirer à rile de- Saint- Vincent 3 pour fe mettre à cou- Vert des -furprifes- fort fréquentes & des rudes affauts , qui leur y écoient livrez par les v^i^/^leursanciés <5c irréconciliables ennemis du Continét. Cette Ile étant ainfi deferte par k retraite des Caraïbes* &c apartenant de droit aus premiers qui rocuperoient, fa beauté , fa fertilité y & fa fïtuation fort aventageufe^convierentil y a en- viron trente ans3vne Compagnie de Bourgeois de la Ville de Fleflingue dy faire porter deus cens Hommes, à B 5 ddfeiî| i ! S 1 *yz*^z^*^v&m ? 34 Histoire Natvrelle delîein d'y jetter les premiers fonde- mens d'vne Colonie , à laquelle ils donnèrent déflors le nom de la Nou- velle O'ùdcre , qui efl: celuy de la plus célèbre &. de la plus peuplée de toutes les Iles qui compofent la Province de Zelande ; en laquelle leur Ville à tou- jours tenu vn rang très - conftdera- ble: mais les Indiens du voifmage s*é-^ tans liguez avec les Efpagnols de l!lle de la Trinité.refolurent de venir fon- dre d'vne commun acordfur ces nou- veaus venus,avât qu'ils enflent le loi- fir de mettre en bône defenfe le Fort, qu'ils avoient commencé de bâtir3 ÔC que le fecours qui leur avoitefté pro- mis fut arrivé. Ce funefte deflfein reufïït à ces bar* bares ainfi qu'ils fa voient proietté^: tellement,qu'aprés avoir taillé en pie- ces tous ceus qui eurent le courage de s'opofer à leurdefcenteydémoli la for- tereffe 3 & fait plufieurs prifonniers de guerre : ceus qui furent aflez heu- reus pour échaper le maifacre ou la ri captivité, aprehendans vn traitement pareil à celuy de leurs compagnons* furent; EJCKST^W^F des Iles Antilles. 35 furent d'avis de fe retirer ailleurs. Depuis cette déroute , cette Ile fut prés de vint années fans avoir aucuns habitans qui y fuiTent fermement ar- rêtez: mais en Tan mille fix cens cin- quante quatre 5 Meilleurs Adrien &c Corneille Lampfins, refolurec de fai- re peupler de nouveau cette belle Ile., fous les favorables aufpices des Hauts & Puifïàns Seigneurs les Etats Gene- raus des Provinces Vnies du Païs- bas : Et depuis onze ans que ces deus gefiereus Frères 3 ont formé &c~ heu- reufement exécuté ce grand deflêin,. ils y ont fait paiîer à leurs frais & dans- leurs propres vaiiTeaus ,vn nombre tres-côfiderables de braves hommes,, qui travaillent inceffamment à la dé- fricher a Se à relever gtorieufement le$ ruines de Tancienne Colonie que leurs compatriotes y avoient autrefois drefleê. Monfieur Adrien tampfins eft Di- re&enr de la Compagnie des Indes Orientales à la C h âbre de nidelbourgj êc Monfieur Corneille Lampfins^ fon frère > qui eft decedé depuis peu au g. &. grand' ! 1 i I 1 tiOZà 1 i ça. i i I ! . %4 Histoire Natvkeijii grand regret de tous ceus qui l'ont connue* étoit ancien Bourguemaiflre & Sénateur de k Ville de Fleffingue,, & Député perpétuel de la Province de Zelande > à rAflèmblée des Hauts Se PuifiTans Seigneurs les Eftats Ge- ïieraus des Provinces-Vnies.. Outre ces grandes charges & emU nentes dignitez^équelles ce Seigneur étoit revêtu de fon vivant >& dont il s'eft aquité avec beaucoup de louan- ge * l'on remarquoit en ta perfonne vne intégrité incorruptible ,.vn dous & facile accés>& vn grand zèle à con- ferver & à acroître la gloire &c la ré- putation de fa patrie T & à entretenir les Provinces confédérées 3 dans l'é- troite correfpondance, &: la parfai- te amitié des Puilïànces Souveraines, qui font dans leur ancienne alliance. D'où vient que le Roy tres-Chreftien à prefent heureufement régnant* vou- lant reconnoiftre les mérites de ce digne Sénateur , & les bons fervices; qu'il avoit rendus à fa Majefté *. ci* plufieurs oeafions importantes*de fans propre mouvement* certaine fcience* pleins i^^^^Mraym-r^wakVA^>ff^v^»srw^V>tf>S JLUIMULPJQ JRtf£ IlES ÂfcTXXXESa* ft"7 $ ïeine puiflance & authorité Royale* le créa Se déclara Baron > voulant qu'il fut reputé^cenfé Se apelléB a a o n De Ta b a g q , & que tel il fe pût nommer & apeler tant en juge- ment que dehors : Se qu'il jouît de cette dignité 5 titre 5c prééminence^ pleinement y paifiblement & perpé- tuellement y luy y fes hoirs y luccef- feurs Se ayans caufe tant mafles que femelles y en tels & pareils droits de noblelFe y autoritez 5 prérogatives^ privilèges > & prééminences rcn fait de guerre > alfemblées de Nobles 8c autres > comme en jouïflTent > vfent* & ont acouftumé d'en jouir les autres Barons du Royaume de France. Et que déformais luy & fa pofterité^puif- fent porter les armes efeartelées, ayant fur le tout vn Efcuiïon chargé de fleurs de Lys fans nombre y & ornée d'vne couronne perlée y ainfi qu elles ?emgtainte&. i I 1 I % I ^Vrf'i i i i u i ■M, : -jST» Hxsroijtfc NEww k;e &# ■I kv jwl, ■ranyfc«rafy lefquelles font lignées de fa main Royale,& feellées du grâd feau en cire verte,& en fuite vérifiées & enregiftrées au Parlement de Paris? Gui , & à ce contentant le Procureur General de fa Maiefté fuivant TÂrreft de vérification 5 en date du vint cin- quième May^> mille fix cens foixante* trois. D'autant que cette Ile eft au rang; des lies Antilles, & du nombre de cel- les qu'on nomme aufli les lies Carat-* fos y Se qu'en cette qualité 5 elle eft comprife dans la conceffion que la Compagnie des Indes- Occidentales a obtenue des Hauts & Puiffans Sei- gneurs les Eftats Generaus des Pro-* minces Vniès5 dés le commencement: qu'elle fut erigée5M.M.Hampfins ont apuyé l'établiirement qu'ils y ont fait9 1 I % f i 4© HlSTOlRE NaTVRELXÉ de rodbroy des Directeurs cômis des, Chambres refpe&ives de cette même Conipagnie^reprefentans rAffemblée des dixueuÊainfi qu'il paroitpar l'Ex- trait de leurs résolutions y en date du JU du mois de May^de l'année 1 65 5 . I/vne des conditions de cet Odroy^ portant expreflement* que celuy qui feroit nommé pour commander à cet- te Colonie naiiTante > feroit agréé &c confirmé en cette charge par les me- mes Hauts •& Puiflàns Seigneurs les Êftats Generaus.M.M. Lampfinsleur prefenteret Mon (ieur Hubert de Be- veren : & leurs Hautes Puiflànces état deucrrïent informées de la generofué, de l'expérience , de la fidélité > & de toutes les autres belles qualitez dont ce Gentil-homme eft richement pour- veu,, Se qui le rendent très-capable de cet employée munirent de leur ample Commiffion ,. le deuziéme du mois de Septembre en la même année mille fix cens cinquante cinq : en vertu de laquelle 5il eft entré en poiïeffion de ee Gouvernement^ au grand cotante- ment de êqus les Habitans dellle,. qpi ï)is îles Antilles, "0 ont tout fukt de fe lotier de fa tres-fa- ge conduite, & de tous les grands foins qu^l aporte pour procurer le bien ôc la gloire de leur Colonie y ôc Fentretenk dans les repos^ &la tran- quillité dont elle jouit. Il faut avouer , que cette Ile méri- tait bien d'avoir des Habitansxar ou^ tre ce que nous avons déjà dit > de la bonté de Pair qu'on y refpire, de l'in- comparable fertilité de fon terroir, de la beauté ravifiante des arbres qui le revêtent o & du criftal coulant des ri* vieres & Aqs fontaines qui l'arrousét, des excellens vivres qui y croiflent^du tniel & du fucrequi y diftilent 3 des precieufes marchandifès qui s'y re- cueillent 3 de la pefche ôc de la chaire jui y font abondantes,de la feureté ÔC commodité de fes ports & de fes ra- ies^ de tous les autres avantages qui a rendent recômendabie : état voifine lu Continent de l'Amérique méridio- nale 3 elle eft très-propre pour y en- retenirvn bon commerce avec les ^âçois* fe& Anglois,& les Efpagnols lui y ont des Colonies > comme auffi av ee J»lkqfc3tf^BJ?V^«l[gfc< : i I I I 1 1 1 I \9 I i m 4% Histoire NatvïUX£e avec les Aromgues y les Calibis 5 îes Caraïbes* &c plufieurs autres nations Indiennes, qui ont leurs Villages fur lé bord de la grande Rivière d'Orino- £0*3&lelong de la cofte de la mer. Pour alïùrer ce commerce, & met- ttt cette place en état de ne point re- douter les courfes des fauvages,ou les furprifes de quelque autre ennemi* M. M. Lampfins y ont fait bâtir trois Forterelîes.qui font à prêtent en très- bonne défenfe , & fuffifammëc pour- veuës de canons , & de toutes les au- tres munitiês de guerre & provi fions de bouche^qui font neceflaires pour a- fermir le repos des habitans,contenir lfes Brouillons dans le devoir, & don- nes; de la terreur aus envieus delà gloire de cette Colonie. La plus con-i fiderablede ces ForterefTes,& où Mo- fîeur le Gouverneur fait fa demeure! ordinaire, eft connue fous le nom M JLampfinbergue, pour la diftingner desj deus autres , qui font communément! apelées de Beveren&àz BelleviBe. La première eft bâtie fur vne agréa b1 r*so* -5EPS SES II ES AnTÏXIES. .4 'f 61ecolline> laquelle eft élevée de cin- quante pieds ou environ^ au defus du^ terrain que l'on'nôrae Lamfjïn-Baye^ êc où Ton a auffi ietté les fondemens d'vne Ville * qui porte le nom des Seigneurs de l'Ile* & qui eft déia en- richie d'Vne belle Se grande rue , en laquelle on voit l'EgMe, plufieurs a- greables maisôs couvertes de tuiles5&: acompagnées de Magazins fort amples & foiidement/batis5&: de. quelques au* très ornemens publics & particuliers^ qui font tous d'vne belle monftre au dehors y & tres-commodes au dedans» Cette Fortereffe côfifte en quatre ba- ftions3fur chacun defquels5 il y a vne bateriede plufieurs groffes pièces de canons > qui defendans la Ville &c la Campagne voifine 3 peuvent fou*- droyer tous les vaiiîeaus qui auroient l'allurance de moiiilier à cette Ba- ye y ou de porter des hommes à ter- re y lans en avoir obtenu la permif- fion. Ces quatre battions enferment dans leur enceinte le corps de garde^ i'arfenal muni de toutes fortes de bon- nes armes ^ la maifon de Monfieur le- Gouverneur i i 1 i ! ! 1 44 Histoire Natvreï,li Gouverneur 3 & les apartemens des Officiers 5 & des foldats de la garni- fon qui y eft entretenue. L'autre Fort qui eft appelle de j?*- veren > eft flanqué fur vn rocher % le-> ma quel étant inacceffible de quelque col y[ té qu'on le vueille aborder , eft enco- p re baigné de la mer 8c d'vne rivière %à d'eau douce > qui lui font vn large & S| j profond folle 3 en forme de demye « lune. La fituation de cette place eft fi ^ avantageufe * que félon le jugement de tous ceus qui s'entendent ans for- tifications 5 Ton pourroit avec peu de frais „ la mettre en état d'arrêter vue puifïànte armée: parce qu'outre qu'el- le n'eft commandée d'aucune monta-- $£ gne ou emmenée' qui foit au voifîna- ge y le roc fur lequel ce Fort eft bâti : ne peut eftre niminé>ni fapé > à caule \ de fa dureté naturele > Se des eaus qui ! ^ I l'entourent* Ioint que pour y entrer* ; '£*■ il faut traverfer la rivière > 3c monter par vn petit (entier pratiqué dans la j S i malle du rocher * & qui eft fi étroit, j qu'il n'y peut gaffer qu'vn homme de I front* tellement que les foldats qui le I gardent*. I II li I «fe^ >w—«.»f^g» nrr fSfmwnt,lBm.TSI9V}i^KSsKSmmà ©ES ÎLES ÂNTlilES. 45 gardent* n'ont pas beaucoup de peine à défendre cette avenue y &c d'enem- pefcher l'accès. Il eft auffi pourveu.de plufîeurs grofTes pièces dAartillerie de quinze à- dix-huit livres de baies, qui tiennent la rade & tout le Quartier voifin en feureté. Tout joignant cette Place } il y a vne langue de terre qui forme vne prefqu'Ile^fiir laquelle on a defiein de bâtir encore vne autre Vil- le>fous le no de la Nouvelle Flejfwgue. Le troifiéme Fort , qu'on apelle de Bellevifle , ne coniîfte qu'en vne Re- doute 5 qui eft conftruite entre deus Pointes > dont l'vne eft nommée de Caron > ôc l'autre de Sable. L'on a édi- fié depuis peu cette petite Forterefle^à deflein d'empefchcr les Indiés de faire quelques irruptiôsde l'Ile par ces en- droits-là. Car bié queM.M.Lampfins défirent que leurs fujcts entretiennent vne bône intelligence avec ces Barba- les, afin de les aprivoifer & de les at- tirer à la connoiilànce de Dieu , par toutes les voyes de douceur & de charité Chreftienne,fi eft-ce quils ne veulent pas qu'ils defeendent à tejrr.e, fans u 4^ Histoire Nattyrelle fans en avoir demandé & obtenu la licence de Monfieur le Gouverneur. Pour ce qui eft de l'état prefent de cette Colonie* les derniers mémoires ^ui en font venus nous aprenent qu'il y a dé-ja environ i 2. cens Habitant qui s'ocupent tous à cultiver le Tabac cm le Gingembre , ou le Coton , on l'Indigo , ou ces precieus Rofeaus dont on fait le Sucre 3 & qu'ils ont déjà lîx beaus Moulins pour brifer ces Cannes &c en exprimer le Suc. Il eft auffi confiant que les Navires qui en font retournez dépuis peu , ont dé- chargé à Fleffingue dâs les magazins de M. M. Lampfins 3 vne quantité bien notable de toutes ces fortes de marchandifes > qui étoient du crû & de la faiïbn de cette Ile:lefquelles auffi au raport des experts ont efté^ugées autant excellentes & auffi bien con*-i reeft parvenue iufques à nous. Article Zlkk* mrrm*n wxjvm ■ 1 szma des Iles Antilles. Article IL De Vile de U Grenade. 49, CEtte Ile,quieft fîtuée fur la hau- teur de 1 1. degrez,& i6,(cmfu- les au deçà de la Ligne , commence proprement le demy cercle des Antil- les. On luy donne fét lieues de lon- gueur,fur vne largeur inégale,elle s'ê- tend vers le Nord & Sud en forme de Croiflant.Les Frâçois s'y font placez il y a envirô fix ans.Ils eurét à leur ar. rivée beaucoup à démêler avec les Ca- raïbes, qui leur en concertèrent quel- ques mois par la force des armes, la paifiblepoflèffion. Mais enfin Mon- fieur du Parquet Gouverneur pour le Roy de ri le de la Martinique, qui a- pait entrepris à (es frais ces éublifle- |ens , les obligea , à luy laifler la ter- :e libre, par la confïderation de leurs propres Interefts , fondez principale- née fur le grand avâtage qu'ils rece- rroient du voifinage des Frâçois, qui es affifteroîent en tous leurs befoins. La Terre, y eft très-propre à pro- luire toute forte de vivres du païs., Tom.L C des I ' I a I 1 I I I I G 50 Histoire Natvrelxe des Cannes de Sucre > du Gingembre &: d'excellent Tabac. Elle jouyt d'va air bien fain.Elle eft pourveiie de plu- sieurs fources d'eau douce3& de bons mouillages pour les Navires* Il y a auffi vne infinité de beaus Arbres3dêt les vns portent des fruits delicieus à manger > & les autres font propres à bâtir des maifons. La pefche eft bon- ne en toute la cofte , & les Habitans fe peuvent étendre tant pour la pef- che 3 que pour la chaiTe>en trois ou quatre petis Ilets , qu'on nomme les Grenadins > qui font au Nord - Eft de cette terre. Mon iîeur le Comt^Capi- taine de la Martinique,a eftc le premier Gouverneur de cette Ile.Môfieur de la Vaumeniere , luy a fuccedé en cette charge.il a fous fa côduite plus de trois cens hommes bien aguerris,qui pour la plupart ont déjà demeuré en d'au- tres Iles3ôc qui s'entédét parfaitement à faire cultiver la terre , & à manier les armes^pour repouffer au befoin les efforts des Sauvages , & de tous ceus qui voudroient troubler le repos dont ils jouyf&ewii cette aimable demeure Moniieur jOa^. €+ fc-vvrw^ yy, vm *MV^ VSftT c; i des Iles Antilles. $ï Monfieur le Comte de Seryllac , a- Cf yant entendu le récit avantageas qu- - on faifoità Paris & ailleurs , de la \r bonté & beauté de cette Ile , la fait v ': acheter dépuis peu de Monfieur du A Parquet.Ce qui donne tout fujet (Tef- | erer,que dans peu de tems cette Co- l]X lonie,qui eft tombée en de fi bonnes ft mains,fera considérable pour le nom- i * bre de fes Habitans , & pour la quan- ^] ti&é des Marchandifes qu'elle fournira. Article III. De l'Ile de Bekja. * Ette Terre, eft diftante de la Li- gne de douze dégrez & vint- jgj cinq fcrupules. Elle a dix ou douze lieues de circuit , & elle ferbit aflTés fertile/i elle étoit cultivée. Il y a va fort bon Havre pour les Navires, qui y peuvent eftre à l'abry de tous vms: mais à caufe qu'elle eft dépourveuë i*eau douce , elle eft peu frequentce,(î :e n'eft de quelques Caraïbes de Saint ^ Vincent,qui y vont quelquefois faire ]y, a pefche, ou cultiver de petits jardins jw C 2 qu'ils A 2 Y/ 1 « « ï % '$$. Histoire Natvrelie » fiW.'W i^iivtt'fciV^ryvMjw^ î>és Îles Antilles 53 qui croiflent en leurs terres 3 s'ils ea ont befoin : pourveu qu'en échange? ils leur donnent des couteaus^des fer- pes 5 des coignées , ou quelques au- tres ferremens* dont ils font état- A caufe que cette place -, entre ton* tes celles que les Caraïbes pofledene aus Antilîes5eft la plus voifine du Cô- fcinent * où habitent les AroiiagneS leurs irréconciliables ennemis, ils y affignëtordinairementjle rendes- vous gênerai de leurs troupes 3 lors qu'ils ont formé le delïèin de les ataquer* C'eft auffi de cette Ile, que font forcis les plus vaillans hômes^qui àdiverfes reprifes, ont fait des descentes & des ravages dans les Colonies des Frâçois Se des Angloisjcorame nous le dirons en fon lieu* Article V. De l'Ile de la Barboude* L'Ile' que nos François appellent la Barboude , 5c les Anglois Bar- bade , eft îîtuée entre le treizième & le quatorzième degré , au Nord de C 3 l'Equateur, % I I I I I I g 5^ I m î:j i 54 Histoire Natvreiee rEquateur,à l'Orient de Sainte Âlou- fie <§c de Saint Vincent. Les Anglois^ qui y ont mené dés Tan mil fix- cens- vin t fét la Colonie qui l'habite enco- re à prefentjuy donnent envirô vint- cinq lieues de tour. Elle eft d'v-ne fi- gure plus longue que large. Il n'y a qu'vn feul ruiffeau en cette Ile , qui mérite de porter le nom de Rivière:: Mais la terre y étant prefque par tout p latte & vnie , elle a en plufieurs en- droits des Etangs , & des refervoirs* d'eau douce,qui iuppiéët au défaut des. fontaines de des rivières. La plupart; desmaifons,ontauiîides Cifternes,5c des puits , qui ne tarifent jamais. Du commencement qu'on cultiva: cette terre* ont tenoit qu'elle ne pro- mettoit pas beaucoup : Mais l'experié- ce a vérifié le contraire , 6t elle s'efë trouvée fi propre à produire du Ta- bac, du Gingembre , du Cotton , Se. particulièrement des Cannes de fucre,, quapres l'île de Saint Chriftofle, elle eft la plus fréquentée des Marchands,,: & la plus peuplée de toutes les Antil- ks.Dési'an mil fix cens quarante fix,.; ou éfecï^ ■ riruvini^fraug raœ= ifWWyL^WL&W+'à^fWf/VZàX/, ï)es tàzi Antïlles. 55 ■■©n y contoit environ vint mille Ha- bitans fans comprendre les Efclaves Nègres 3 que Ton tenoit moncer à vn nombre beaucoup plus grand. Il y a piufieurs places en cette Ile* qui portent à bon droit le nom de Villes: parce-qu'ony voit piufieurs bellesjongues & larges ruës^qui font bordées d'vn grand nombre de beaus édifices 3 oàles principaus -Officiers &Habitans de cette célèbre Colonie font leur demeure : Mais à confiderer toute cette Ile en gros,on laprendroic pour vne feule grade Ville5àcaufe que les maifons ne font pas fort éloignées les vnes des autres: Qu'il y en a auffi beaucoup de bien bâties 5à la fafibn de celles d'Angleterre : que les boutiques Se les magazins y font fournis de tou- tes fortes de Marchandifes : qu'on y tient des foires Se des marchez : Et que toute Hle^à l'imitation des gran- des Villes>eft divifée en piufieurs Par- roiiTes 5 qui ont chacune vne belte Eglife > où les Fafteurs qui y font en grand nombre, font lefervice Divin. Tous les plus confiderables Habi- C 4 tans i i ! I I 1 1 1 1 I 1 s m i. il i |£ Histoire Natvrelle tant de cette Ile y" font fermeméc éta- blis,&:^'y trouvét fi bien> qu'il arrive rareméc qu'ils la quittët,pour aller en vneautre. Ce qui n'eftpas étonnant* puifqu'elle leur fournit en abondance tous les meilleurs rafraichiflemens qui peuvent eftre tranfportez de l'Euro- pe 3 êc vne infinité de douceurs que ce nouveau Monde produit. Nous aprenons aufli^que cette Co- lonie s'eft tellemét acruë>que ne pou- vant plus contenir fans empreflèment le grand nombre de fes Habitans^elle a efté obligée pour fe mettre plus au large,de pouffer vne nouvelle Peupla- de dans le Continent de PAmerique Méridionale^ laquelle s'acroift de iour à autreaà la décharge^ au plus grand avantage de celle-cy3dont elle relevé. Cette Ile eft renommée par tout3 à caufe de la grande abondance d'excel- lent fucre , qu'on en tire depuis plu- jeurs années. Il eft vray5qu'il n eft pas fi blanc que celuy qui vient d'ailleurs, mais il eft plus eftimé des Raffineurs, par ce qu'il a le grain plus beau y Se qu'il foilfonne davantage 5 quand on le purifie. Arti m**- &es Iles Antilles. Article VI. De Vile de Sainte Lucie, 57 LEs François appellent communé- ment cette Ile Sainte Aloufie^Viç. eft fituée fur le treizième degré & 40. fcrupules au deçà de la Ligne. El- le n'eftoit par cy - devant fréquen- tée que par vn petit nombre d'In- diens * qui s'y plaifoient à caufe de la pefche qui y eft abondante. Mais les François de la Martinique/ont venus dépuis peu leur tenir compagnie.il y a deus hautes montagnes en cette Ile, qui font extrêmement roides. On les apperçoit de fort loin, & on les nom* me ordinairement, les Pitons de Sain- te AlouJïey2.x\ pied de ces montagnes; il y a de belles 8c agréables vallées* qui font couvertes de grands arbres* 8c arrofées de fontaines. On tient que l'air y eft bon , 8c que la terre y fera fertile, quand elle fera vn peu plus dé^* couverte , quellen'eft à prefent. Mon-fieur de Roffelan a étably cet- te Colonie Françoife ,,fous les ordres de Monfieur du Parquet jj qui l'avoiç C j ehoifjr î 1 i 1 i 1 I I 1 1 I I f j5 Histoire Naturelle choify pour y eftre fon Lieutenant;8c étant decedé en l'exercice de cette: charge de laquelle il s'aquittoit digne- ment y Monfieur le Breton Parifien a; efté mis en fa place. Article VIL De Vile de la Martinique. LEs Indiens appelloient cette fie* Maàanina j mais les Efpagnols luy ont donné le nom qu'elle porte à. prcfenc. Elle eft fur la hauteur de qua- torze degrez, & trente fcr-upules au deçà de la Ligne. Ceft vnc belle Se. grande terre -, qui a environ feize lie- ues en longueur , fur vnc largeur in- égale^ quarante cinq decircuit.Ceft auiourduy l'vnedes plus célèbres, 6c des plus peuplées des Iles Antilles. Les François, & lés Indiens occu* cent cette terres & y, ont vécu long- tems enfemble en fort bonne intelli- ' gence.Monfieur du Parquet,neveu de fetiMonfieur Defnambuc , qui don- na le commencement aus Colonies ïrançoifes qui font répandues en cts Antilles^ SE** «-■■iwirfcT«»rir.wrm"TMVgyaosa des Iles Antilles. 55? Antilles , comme nous le dirons cy après jen eft Gouuerneur pour le Roy, Se dépuis quelques années il en a aquis la Seigneurie. C'eft la plus rompue des Antilles, c'eft à dire la plus remplie de monta- gnes qui\ font fort hautes , Se entre- coupées d^ rochers inacceffibles. Ce qu'il y a de bonne terre 3 eft compofé en partie de Mornes, qui font des emi* nences prefque r.ondes,ain!i nommées au païs : de cotaus qui font parfaite- ment beaus5(on les appelle Cotkreszxx langage des Iles:) Et de quelques plai- nes ou ■valons, qui font extrêmement agréables. Les môtagnes,font tout à fait inha- ibita'blcsi&fervctde repaireaus beftes fauvages, aus ferpens , & aus couleu- vres , qui y font en fort grand nom- bre. Ces montagnes font couvertes de beaus bois,d3ont les arbres/urpaHent de beaucoup & en grofleur ,8e en hau- teur les nôtres de France y Se produi- sent des fruitsr& des graincs3d ont les iangliers & les oiféaus fe- repaiffent» Pour ce & en des fonds-, qui ne font pas de Ci prés favorifez de l'aimable prefence du Soleil. Car le Tabac qui fe cueille en ces endroits , eft toujours plein de taches jaunâtres,comme s'il étoit bru-. lé, & n'eft ni de bon goût,nide bon- de garde. Ces lieus étoufés font au(E fort mal-fàins, cens qui y travaillent* deviennent de mauvaife couleur , &c les nouveaus venus,qui ne font pas acoûtumez à cet air, y gagnent plutôt qu'ailleurs le mal d*eftomac, qui eft fi commun en ces Iles. Comme il y a deus fortes de Na- tions différentes en cette ten e^auffi eft elle rnr. ^rr-fc *^yy vww^ Xnt ÎLES ÂNTtLiSSv £f elle partagée entre l'vne & 1 autre,c*cft jC]j à dire entre les Indiens habitans naturels du païs s ôc les François>qiH ' \'l jetterent les fondernensde cette Co* ïonie au mois de Juillet de Tan mil tfj fie cens trente cinq, fous la fage cou- (^ chiite de Môfîeur Defnambuc 5 qui les $ fit paffer de Vile de Saint Chriftofle> s les mit en la paifible poffefïion de cet- [ l te terre* ôc après les avoir munis de <*■• tout ce qui étoit neceiïaire pour leur >% fufcfiftance 3 ôc pour leur feureté^ leur w laiffa Monfisur du Pont^pour côman- J der en qualité de fon Lieutenant. \ La partie de l'Ile , qui eft habitée /i par les Indiens , eft toute comprife en ^, vn quartier, qui Te nomme la Cabei- jfi] terre y fans autre diftin&ïon. |K Pour ce qui eft du païs occupé par 'x les Frâçois5& que Ton nomme Baffe- jtf terre , il eft divile en cinq quartiers* qui font la Café du Pilote 5 la Café Capot j le Carbecle Fort Saint Pier- re , 6>c le Prefcheur. En chacun de ces y quartiers il y a vn-e Eghfe.ou du ipoin-s ^ vne Chapelle 3vn Corps de garde, .*': & yne place d'Armes , autour ie \ ; laquelle 4| ^^â i I 0* laquelle on a bà'cy plufieurs beaus Se grands Magazins^pour ferrer les Mar- dhandifes qui viennent de dehors * &C celles qui fe font dans Hle.^ Le quartier delà Gafe du Pilote, eft ainfi appelle 3 à caufe d'vn Capitaine Sauvage 3 qui y demeuroit autrefois*, & qui tenoit à gloire de porter ce nom de Pilote \ que nos François luy avoient donné. Il étoit grand amy de Monfieur du Parquet ,- & c étoit luy qui l'a vertiilbit continuellement de- tous les deiïeins3qu£ ceus de fa Nation formoient alors contre nous. Au quartier de la Café Capot y il y a vne fort belle Savanne5 ( on appel- 'Ic-'ainfi aus îles les prairies & les heus de pâturage ) laquelle eft bornée d'vn- cofté dVne rivière > nommée la Ri- vière Capot3& de l'autre;, ie plufieurs belles habitations^ Le quartier du Carbet, a retenu ce nom 3 des Caraïbes , qui avoient au- trefois en cette place LVn de leurs plus grIdsVillages5& vne belle Gaze qu'ils -appellôient leCarbet> nom, qui cft encore à prefét commun à tousles> lieus^ ma* mm M.rfw« mrrét.tis fc^rMvsKsre^ bes ïms AkVi-l^es'a étoient bâties de la forte > cette tenu pefte qu'on nomme Ouragan 3 ne les pour toit; endommager. Cette maifon, eft entourée de plu- sieurs beaus jardins > qui font bordez: d'arbres fruitiers, & embellys de tou- tes les rarétez y. & curioïîtez du païs^ Monfieur le Gouverneur a quitté^cet- te demeure depuis environ deus ans5 à caufe comme auffi de plufieurs belles habitations qui en dépendent^ dVn grand nombre d'E- fclaves Nègres., qui les cultivent. Le Fort Saint Pierre y eft le quar- tier oà demeure prefentement Mon- fieur le Gouverneur. Il y a vne fort bonne batterie de plufieurs groffes pièces de Canons>partie de fonte ver- te, & partie de fer. Ce Fort comman- de fur toute la Rade.A vn jet de pier« re du logement de Monfieur le Gou- verneur, eft la belle Maifon des Iefui- tes 5 fituée fur le bord d'vne agréable Rivière y que l'on appelle pour cette raifon, ta Rivière des Iefuites. Ce rare edifice.qui pourroit en vn befoin fer- vir de Citadelle ., eft bâty folidement de pierres de taille & de briques.dVne ftrudure qui contente l'œil. Les ave-, nues en font fort belles y Se aus envi-, rons on voit de beaus jardins* & des vergers remplis de tout ce que les Iles produifent de plus délicieuse de plu*- iîeurs plantesyherbagesifteurs'ôc fruits q.a*on f a apportez de France. U y a même; rr^^BPm^smwSÊ »anf»^ 1 des Iles Antilles. £5 même vn plan de Vignes > qui porte de bons raifins,en ailés grande abon- dance , pour en faire du vin. Le quartier du frefcheur, contient vn plat païs fort confiderable pour fon étenduë,& plulîeurs hautes mon- tagnes > à la pente déquelles on voit vn grand nôbre de belles habitations* qui font de bon rapport. Entre la Cabes-terre & la Baffe -ter- re, il y a vn cul-de-fac3ou il fe trouve beaucoup de bois propre à mo iter le Tabac. On y va prendre auffi des ro- feaus,qui fervét à paliiïader les Cafés, & du Mahot franc, dont Pécorce fert à plufieurs vfages de la ménagerie. La plupart des maifons de cette Ile, font de charpente , fort commodes, & d'vne montre agréable : Les plus considérables font bâties fur œs emi- nences , que les Habitants appellent Mornes. Cette fituationavantageufe, contribue beaucoup à la fanté de ceus qui y demeurent,car ils y refpirent va air plus épuré que celuy des vallées; Et elle relevé merveilleufement la beauté de tous ces agréables édifices* lent 1 I S i l 1 ! i i s 1 §5 Histoire Natyrïlxe kur fournifiànt vue perfpeéiive fort divemfiante. La meilleure rade de cette Ile 5- eft entre le Carbety & le Fort Saint Pier- re. Elle efl: beaucoup plus aiïurée que celle des Iles voi fines 3 étant à demy entourée de montagnes affés hautes.,? pour la mettre à couvert des vens 3 Se y tenir les vaiifoius en feureté. Entre la Cafedu Pilote , & ce feire qu'on nomme ordinairement le Cul- de-fac des Salines, \l y a vn rocher vne^ demye lieue av^ant en mer , que l'on appelle le Diamant > à caufe de fa &- gure3 qui fertde rétraite à ¥iie infini- té d'Oifeaus , ,&c entre autres ans Ra- miers >qui y font leurs nids. L'accès en efl: difficile : mais on ne laifle pas de le vifiter quelqnesfois en pailànt^ pendant le terns que les petits clés Ra- miers ,- font, bons à manger. Le Crénagev eft fitué du même codé que ce Diamant i c'eft vn lieu m forme de Cul-de-iac^ou de fein^oi; | l'on mené les Navires pour les raf- raîchir s & pour les reparer en les tournant fur k cofté,. jufques à ce que i ^ — mm ■■■■nilfc jbii^.mT W1S ÏIES ÂNTIEIES.- #?r la quille apparoifle à découvert La mer y eft toujours calme: mais ce lien n'eftpas en bon air, & les- matelots- y font ordinairement pris de lièvres, qui pourtant ne font pas fort dangereufes,, puis qu'elles quittent le plus Couvent en changeant de lieu, Outre les Torrens^qui au tems des gluy.es coulent avec impetuofité par- my toutes les ravines de cette île >ow y conte jufqti'à* neuf ou dix rivieres^ confiderables,qui ne tarifent jamais*. Elles prenent leurs fources à la pente,, ou au pied des plus hautes monta- gnes,d'où elles roulent leurs eaus en- tre les vallons s. Se après avoir arrofé: la terre, elles fe déchargent en la mer» Leur voihnage eftfouvent incommo- de 6c dâgereux,àcaufe que lors qu'el- les fe débordent , elles déracinent les arbres , fappent les rochers , &; defo- lent les champs & les jardins, entrai- liant bien fou vent-dans les précipices*. les maifons qui font en la plaine , 8c tout ce qui s'oppofe à cette extraordi- naire rapidité de leur cours. Cèff auffi ce qui a côvié la plupart des Habitans da i i i i ■> â ^ 6% Histoire Natvrelie de cette Colonie 3 de choifir leurs de- meures au Commet de ces petites mon- tagnes 5 ou à la pente de ces eminen- ces , dont leur Ile eft richement cou- ?* ronnée: car elles les parent contre ces flC inondations. Mais ce qui eft de plus confiderable en cette terre^eft la multitude des Ha- bitans qui la poffedent > &: la culti- _ vent^qu on dit eftre à prefent de neuf 2 ou dix mille perfonnes , fans y com- prendre les Indiens , & les Efclaves Négres3qui font prefque en auffi grâd nombre. La douceur du Gouverne- ment , & la fituation avantageufe de cette Iie> côtribuent beaucoup à l'en- tretien , & à l'accroiflement de cette grande affluance de Peuple. Car pref- que cous les Pilotes des Navires Fran- çois &Hollandois qui voyagent en l'Amérique , ajuftent le cours de leur t\ navigatiô en telle forte, qu'ils la puit JL fent reconnoitre 9 &c aborder avant ^ toutes les autres > qui ne font pas fi <« bien fur leur route:& fi-toft qu'ils ont 5* ]■ jette l'acre à la rade de cette terre^pour WË y prédre les rafaichiffemens qui leur S* 1 il' font |; des Iles Antilies. 6$ font neceifaires , ils y font defcendre leurs paflagers , s'ils ne font expref- fément obligez de les conduire encore plus loin.il eft même arrivé fouvent, que des familles entières, qui étoient forties de Francien intention de paf- fer en d'autres Iles,qui font au delà de çelie-cy,& qui ne luy cèdent en rien, ni en bonté d'air , ni en fertilité de terroir,étans fatiguées Se ennuyées de la mer,s'y font arrêtées,pour ne point s'expofer de nouveau , à tant de dan- gers,dedégouts,& d'autres incomodi- tez , qui accompagnent infeparable- ment ces longs & pénibles voyages. Parmy cette grande multitude de peuple , qui compofe cette Colonie, il y a plufieurs perfonnes de merite,& de côditio qui après avoir lîgnalé leuc valeur, dans les armées de France, ont choify cette aimable retraitre , pour eftre le lieu de leur repos, après leurs honorables fatigues.Moiîeur de Gour- folas, Lieutenant General de Môfieut le Gouverneur,sy eft rédu recommâ- dable entre tousjfa fage conduite, fon affabilité > Se fon humeqr obligeante, luy 1 I i , I 70 Histoire Nâtvrexce luy onc aquis les affe&ions de cous les Habitans de 111c ■» & les refpefts de tous les étrangers qui y abordent. Monfieur Le Comte > & Monfieur de l/Oubiere3y font eonfiderez entre les principaus Officiers, Monfieur du Coudre 5 y a exercé vn fort longtems la charge de luge Civil & Criminel, avec beaucoup d'approbation. Au commencement de la deferi- ption de cette Ile > nous avons dit à deiTein^que les François & les Indiés, y ont vécu iong-tems ensemble en bonne intelligence : Car nous appre- nons des mémoires^ qui nous efté en- voyez dépuis peu 3 touchant l'Etat de cette Ile, quily-a environ quatre ans, que les Caraïbes font en guerre ou- verte avec les nôtres , que depuis ce tems-là^ces Barbares ont fait plufieurs ravages en nos quartiers \ & que ni les hautes montagnes > ni la profon- deur des précipices , ni l'horreur des vaftes & affreufes folitudes , qu'on a- voit tenues jufques alors pour vn mur impénétrable 3 qui feparoit les terres ies deus Natiôs^ne les ont pu empek cher ££&> des Iles Antilles. 71 & qu'ils avo- yent engagé fi avât tous cqs Sauvages en leur querelles, qu'ils étoient refo- lus de fe jettet d'vn côniun effort fur nous, & de nos accabler de leur mul- titude» L'On ne fait pas au vray , fi cette ligue générale dot on nous menaçoit S&Ë&J^ r^ygwftg^l taç$W<*Ki DES IlEs Antilles.1 73 a efb projettée:mais ileft côfïanc qu'- elle n'a point paru,& qu'après les pre- mières courfes, que les Caraïbes de la Martinique firent fur nos terres avec quelque avantageais ont dépuis fi mal tea'rdrm lem$ entrePrifes3& ils ont elle fi fouvent pourfuivis & repouflez des notres,avec perte de leurs princi- paux Chefs,qu'ils ont efté cotrains de- puis x. ans ou environ d'abandonner leurs Villages, & leurs Iardins à leur diicretiô, & de fe renfermer dans l'e- paifleur des bois,& parmy des monta- gnes ôc des rochers qui font prefquc inacceffibles. De forte que ceus qui conoiflcnt la valeur^l'experiencc&le bon ordrede nos Frâçois qui habitée cette lieront entièrement perfuadez, que fi ces Barbares,onc encore l'afmrâ- ce de forcir de leurs taniercs,pour ex- penmencer le fort des armes ,Sc pour lecoucr cette profonde confternation înlaqueHe ils vivenc»ils ferot cÔtrains >ar necefficéjon de leur quiccer l'entie- 'e pofleffion de cette terre, ou d'accé- der toutes les coditions fous lefquel- es ils voudront traicter de paix avec Tm'L D eas,' 1 1 1 1 I 1 74 Histoire Natvreiie eus,& renouvelier l'ancienne alliance "tju ils ont trop légèrement rompue. Dépuis la première édition de cette Hiftoire,nons avons elle plenemét in- formez de 1 état auquel eft à prêtent cette floriffante Colonie, & de Theu- reus fuccés des guerres qu elle a eues avec les Caraïbes-.Mais à caufe que cet Article eft déjà affez diffus A que ce te matière aparttent proprement à l'Hi- ftoire Morale,nous la remettrons avec toutes fes eirconltanees,au Chap.io. de notre fécond Livre, auquel nous traitons des guerres des Caraïbes. CHAPITRE III. Des lies Antilles qui s étendent vers le Nord. TOutes les Iles dont nous ferons la defeription en ce Chapitre,écâc fituées plus au Nord que les précé- dentes j jouïflent par confequent dV- ne température vn peu plus douce. Elles font auffi plus fréquentées que celles de Tabago,de la Grenade^ d§ ; S.Aloufie : 1 des Iles Antilles. 75* 5. Aloufie^à caufe que les Navires qui fe font rafraîchis à la Martinique, & qui défendent à Saint Chriftofle, les peuvent vifiter les vnes après les au- tres, fans fe détourner de leur route. Article I. De T Ile de la Dominique. CEtte Ile , eft fur la hauteur de quinze degrez & trente ferupu- les.On Teftime avoir en longueur en- viron tréze lieues, & en fa plus gran- de largeur vn peu moins.EUe a en fou centre plufieurs hautes montagnes, qui entourent vn fonds inacceffible, ou Ton voit du haut de certains ro- chers, vne infinité de Reptiles d'vne groffeur&dVne longueur effroyable. Les Caraïbes , qui habitent cette Ile en grand nombre ont fort long- tems entretenu cens qui les alloient vihter , du conte qu'ils faifoient,d'vn gros & monftrueus ferpenf,qui avoie ion repaire en ce fonds. Ils difoient qu'il portoit fur fa telle vne pierr* é- clatante comme vne EfcarboucWvn M^s^ssa» 76 Histoire Natvrelle prix inéftimable. Qu'il voiloit pour l'ordinaire ce riche ornement s d'vne petite peau mouvante,comme la pau* piere qui couvre l'œil : mais que quand il alloit boire,ou qu'il fe joiioit au milieu de ce profond abyfme, il le montroic à decouv«rt,& que pour lors les rochers,& tout ce qui ctoit à l'en- cour y recevait vn merveilleus éclat An feu qui fortoic de cette precieufe couronne* Le Cacique de cette Ile écoit au- tréfois des plus coniideres entre les antres de la même Nation. Et quand toutes? leurs troupes marchoient en bataille , contre les Arouagues leurs ennemis du Continent,celuy-cy ■ avait îa conduite de l'avantgarde , & écoit iignalé par quelque marque particu- lière, qu'il avoit fur fon corps. Et en- core à prefent,il tiêt vn rang de Prin- ce parmy cts Barbares, qui ont même tant de vénération pour luy , qu ils le portent fouvent fin* leurs épaules3dans vue forme de brancart, lors qu'il veut honorer de fa prefence leurs feftins,& leurs autres aflfemblées foiemnelles. Quand »-t rnnm, wrw^MVg VSSftg* bes Iles Antilles. 77 Quand il pafledes Navires François ■ prés de cette Ile,on voit auffi-tôtplu- îîeurs canots,en chacun déquels il y a 3^ou 4. Indiens au plus,, qui viennent covier les Capitaines de ces Vaiflèaitè, d'aller mouiller aus bênes rades qu'ils montrent : Ou du moins , ils prefen- tent des fruits de leur téiffa qu'ils ont apportez., & aptes avoir faieprefenc de quelques - vns des plus beaus ans Capitaines, & aus autres Officiers, ils offrent ce qui leur refte , en- échange de quelques hameçons , de quelques grains de criftal , ou d'autres menues bagatelles qui leur font agréables. Ceus qui ont vne connoiilànce par- ticulière de cette belle Ile, nous aiïk- rent , qu'elle eft iVne des meilleures, & des plus dignes d'eftre cultivée de toutes les Antilles , à caùfe des- excel- lentes vallées,& des plaines de grande étendue, qui font au pied des agréa- bles montagnes, qui luy font vne Ai- perbe couronne , & parce qu'elle eft rafraîchie plus qu'aucune autre, de plufieurs grandes fources , qui y for- ment des ruiifeaus & des rivières,. D 5 qui 1 •Se 1 I i 7$ Histoire Natvrelle qui font merveilieufement cômodes, On tient auffi>qu'il y a des perfonnes de qualité , qui ont deflfein d'obliger bientôt les Caraïbes , à recevoir des compagnons du dons repos 5c de la tranquilité qu'ils y refpirent. ; Article IL De l'Ile de Marigœlante. ON la met ordinairement fur % hauteur de quinze degrez &■ quarante fcrupuies.C'eft vne terre af- fez platte & remplie de bois , qui té- moignent qu'elle ne feroit pas infé- conde^ elle étoit cultivée. Elle a tou- jours été fréquentée des Indiens,, tant pour la pefche , que pour l'entretien de quelques petis jardinages qu'ils y ont. Les derniers avis., qui nous font ve- rnis des Antilles, portêt>que Monfîeur D'Houel , Gouverneur de la Garde- loupe , a nouvellement fait peupler cette Iie,& qu'il y a fait bâtir vn Fort* pour reprimer quelques Indiens * qui youloicnt s'oppofer à ce deflein y oc qui -m. m^-avi VWW^ga— ÊÊt ! $ës ÏIes Antilles 79 qui y avoient tué vint hommes* qu'il y avoit envoyez par avance > pour découvrir peu à peu la terre : & qu'à caufe de cet accidentel y en a fait paf- fer environ trois cens > qui fe reti* ïoknt la nuit en vn grand vaiffeau qu'ils avoient à la rade ? jufques à ce que la fortification fut en defenfe.Les Caraïbes de la Dominique , pour en- tretenir ramitiéqtuls ont avec les Habitans de la Gardeloupe > qui font leurs plus proches voifîn-s, difent qu'ils font innoeens de ce mafTacre* & en ont fait excufe à Monfieur d'- Hoiïel, l'imputant à cens- de leur Na- tion^qui habitent aus autres lies. Articu 1 1 L Des Iles des Saintes 5 & des Oifeans* ENtre la Dominique -3 & la Gardé- loupe y il y a trois ou quatre peti- tes Iles , fort proches les vnes des au- tres, qu'on nomme ordinairement les Saintes* Elles font fur la même hau- Jeur que M^rigdante , au couchant D 4 de 9 h 8© Histoire Natvrelie de laquelle elles font fituées b & iuf- ques à prefent , elles font defertes de inhabitées. l'Ile .ans Oifeém eft encore plus Oc- cidendentale que les Saintes. On la rage fur la hauteur de quinze .degrez, & quarante cinq fcrupules. Elle eft ain fi nommée caufe delà multitude d'Oifeaus5qui y font leurs nids iufques fur le fable , & au bord de la mer. Ils font pour la plupart fort faciles à pré- dre à la main3par ce que ne voyât pas fouvétdes hommes3ils n'en ont nulle crainte. Cette terre eft fort ba(Ie,& à peine la peut-on appercevoir.que l'on n'en foit bien prés. Article IV» De l'Ile de la Defiderade* ELle eft ainfi nommée > par ce que Chritfofle Colomb la découvrit la première de toutes les Antilles^en fou iecond voya-ge de l'Amérique. Et comme la première terre de ce Nou- veau Monde, fut appeliée par lx\y >San Salvador 3 au lieu qu elle fe nommoit auparavant ' ffE's Îles AnTiiië's". 8" r auparavant Guanahani > qui eft vnc des Lucayes , fut la hauteur de vint- cinq degrez 8c quelques fcrupules; ainfi 3 il nomma cette- cy la Defirée, à eaufe de i'accompliffement de foir fou hait. Elle eft'éloignéededix lieues de la Gardeloupe s en tirant vers le Nord-Eft : & de la Ligne.de feize de- grez s 5c dix fcrupules. Il y a a fiez de bonne terre en cette Ile, pour y dref- fer plufieurs belles habitations : c'etë pourquoy on efpere i qu'elle ne fer* pas long-tems fans eftre peuplée. Article V. De l'Ile de la Gardeloupe, CEtte Ile eft la grande , Se. IVne dès plus belles de toutes celles que les François poiîedent aus Antil- les. Elleétoit cy devant appellée par les Indiens Carucneira : mais les Efpa- gnols luy ont donné le nom qu'elle porte à prefent. Les vns la mettent precifémeut ait feixiéme degré r & les antres j adjouftent feize fcrupules, Eile a environ faisante lieues de D 5 xirçoi^ ! 1 1 AMggZÀ il:- $z Histoire Natvrelle circonférence, fur neuf on dix de lar- geur aus endroits où la terre s'étend d'avantage. Elle eft divifée en deus parties par vn petit bras de mer 3 qui iepare la Grand'terre^'avec celle qu'ô nomme proprement la Gardeloupe. La partie plus Orientale de celle-cy5 eft; appelles , Cabes-Terre, ôc celle qui eft au Couchant , Baffe-terre. Ce qu on nomme la Grand3Terre,a deus Salines,où l'eau de la mer fe for- me en fel,côme en plûjeurs autres Iles*, par la feule force du Soleii,faiis autre, artifice. La partie qui eft habitée , eft rele- vée en plufieurs endroits, 3c particu- lièrement en fon centre, de plufieurs^ hautes montagnes,dont les vnes font: heriifées de rochers pelés ôc affreus,* qui s'élevét du fein de plufieurs effro- yables precipices,qui les entourent>S£ les autres, font couvertes de beaus ar- fores,qui leur côposét en tout tenis vne guirlande agréable. Il y a au pied de: ces môtagnesiplûjeurs plaines dégrade étendue , qui font rafraichies par vu grand nombre de belles rivières , qui j convioienfc ! U-es Iles Antilles, 85- e'onyioient autrefois les flottes qui ve- noientd'Efpagne^.d'y venir puifer les eaus,qui leur étoient neceffaires^pour continuer leurs voyages* Quelques vnes-de ces rivières ,-.en fe débordant,, roulent des bâtons enfoufrez, qui ont paiTé par les mines de foulfre,qui font dans vne montagne des plus renom- mées de Tlle 3 qui vomit continuelle- ment de la fumée , & à laquelle on a donné pour ce fujet > le nom de SouU friere. Ily a auffi des fontaines d'eau boiiillâte5que l'expérience a fait trou- ver fort propres à guérir Fhydropifie, &c toutes les maladies qui provien- nent de caufe froide.Il y a deus grâds; foins de mer 3 entre ces deus terres, d'où les Habitans de Tlle qui fe plai- fent à la pefche^peuvent tirer en tou- te faifon des Tortues, de plufieurs au*- fres exceilens poilfons. - Cette terre commença d'eftre habi- tée par les Frâçpis^en Tan mil fix cen$> trente cinq. Meilleurs du Pleffis,& de 3L'Olive3 y eurent les premiers corn- mandemens avec égaleautorité. Mais> fe premier étant mort lefeptiéme B) § m©i$> I 1 1 §4 Histoire Natvreilê mois après ion arrivée 3 & Monfietir de POlive écant devenu inhabile au gouvernement P par la perce qu'il fit de fa veurë 3 les Seigneurs de la Corn* pagnie des Iles de l'Amérique > pri- rent à cœur de foûtenir cette Colonie Baillante 3 qui étoit extrêmement de- folée 5 3c de la pourvoir d'vn chef doué de courage , d'expérience 3 & de toutes les qualitez, qui font requifes en vn homme de commandement. A cet effet ils jetterent les yeusfur Mon- iteur Auber l'vn des Capitaines de 111e de S. Chriftofle 3 qui étoit pour lors à Paris. Le tems a amplement vé- rifié , que ces Meilleurs ne pouvoient pas faire vn meilleur chois : Car cet*- te aimable Colonie doit fa confer- vation > & tout le bon état auquel elle a été dépuis > à la prudence ±jteà la fage conduite de ce tres-digne Gou- verneur y qui fignala fon entrée en cette charge 3 par la paix qu'il fit a- vec les Caraïbes , 3c par plufieurs bons ordres qu'il établit pour le fou» lagement des Habitans 3 & pour ren- dre Tlle plus recommaudable : com>- me «*I5flWN eës Iles Antilles, 85 me nous le déduirons au Chapitre croifiémc du fécond Livre de cette Hiftoire. Monfieur d'Hoiïel.eft auiourdny Seigneur & Gouverneur de cette îles & depuis qu'il y a été étably , elle a pris encore vue toute autre face qu'- elle n'avoit auparavant >càt elle sJeft accrue en nombre d'HabitanSj qui y ont bâty plufienrs belles roaifons, & y ont attiré vn fi grand commerce,, qu elle eft à prefent l'vne des plus confiderables , & des plus floriffantes des Antilles. O y voit de belles plaines , fur Ief- quelles on fait paflcr la charrue pour labourer la terre -, ce qui ne fe prati- que point aus autres Iles : Apres quoy le Ris 3 le Mays , le Manioc donjon fait la CalTaue , les Patates., & même le Gingembre 3 & les Can- nes de fucre viennent le mieux du inonde. Les lacobins Reformez pofledenc vne partie de la meilleure terre de cette Ile 5 fur laquelle ils ont fait pla- neurs belles Habitations , qui font m I % $6' Hï S T O X &E; N AT V RB"E tE d3vn bon rapport. Elles doivent là- bon état auquel elles font 3 aus foins incomparables du P. Raymand Breton,-* qui lésa confervées à fon Ordre,par- niy plufieurs diffïcultez. La partie de 111e qu on nomme la Baffe - terre, eft enrichie d'vne petite- Ville 3 quis'àcroift tous les jours. El- le a déjà plufieurs ■■rues > qui font bor- dées d'vn grand nombre de beaus édi- fices de charpente 5 qui font pour \& plupart à deus étages 5 & d'vne ftru- éture commode^ agréable à la veu'é;* Elle eft auffi embellie de TEglife Par- roiffiale^ des Maifons des leluites ,•&.' des Carmes^queïvïonfieur le Gouver- neur y a appeliez dépuis peu -, & de' plufieurs amples Magazins 3- qui font sieceffaires pour la fubfiftance de cette aimable Colonie. Moniteur le Gouverneur^ fait fa de* meure en vn Château , qui n'eft pas^ fort éloigné de la Ville.Il eft bâty bien, fclidément 3 à quatre faces. Les coins- font munis d'éperons^ & de redoutes- de maflbnneried'vne telle épaiffeuiv qu'elle geut foûtenir la pefanteur de* glufieur^ | MS Il'ES ÂNTHLESV %- plufieurs pièces de Canon de fonte verte , qui y font pofées en batterie. Vn peu au delà de; ce Château ; il y a vne fort haute montagne y qui le pourroit incommoder :. mais Mon- iteur le Gouverneur ,: qui n'oublie; rien de tout ce qui peut contribuer & l'ornement & à la feuretédefon Ile,y a fait monter du Canonj&afin quvn ennemy ne fe puiffe emparer de cette place ,. il y a fait vne efpéce de Cita- delle „ qui eften tout tems pourveuë de vivres.,, & de munitions de guerre* Il y a auffi fait bâtir deslogémens^qui font capables de tenir à couvert les Soldats qui la gardent,.. & de fervir au befoinde retraite afluréeaus Habitas. La Cabes-Terre , -aaufllvn Fort, qui eft bien confiderable.Il eft bâty en vu lieu qu on nommoit autrefois la Café: au borgne. Il contient tout ce quar- tier-là en afïbrance. On l'appelle tk Fort de Sainte Marie. Meffieurs les Neveusde Monfieur d'Houd , ayans* contribué de leurs biens à lVfermiffe- ment de la Colonie de cette Ile y ew mit auffi Seigneurs en partie , &r ïtxm si 1 ! gS Histoire Naivuéils leur Iurifdiction s'étend iur ce quar- tier de ia Cabes-terre , qui leur eft é- chû en partage» Plufieurs perfonnes de condition, fe font recirées en cette Ile , de y onc faitdrefiTer vn grand nombre de Mou- lins à fucre. Monfieur de Boifieret y cfl Lieutenant General de Monfieur le Gouverneur. Monfieur Hynfelin* Monfieur du Blanc, Monfieur de Mé5 Monfieur des Prez,& Môfieur Poftel> y font eftimez entre les principaux Officiers, & les plus honorables Ha- bitans. Monfieur à3 Aucourt , perfon- saage d'vn rare favoir , & d'vne con- verfation fort douce,y exerce la chaiv ge de Lieutenant Civil & Criminel^ avec beaucoup de louange* Article V I> De l'Ile â'Antïgoœ. CEtte Ile eft fur la hauteur W DES II fi $ AjRTIIIES; ff Les Anglois, y ont vne Colonie de trois à quatre cens homraes>& y trou- vent dequoy fubfîfter commodément, Elle a cecy dç/fâcheus & de commua avec les Iles d'Antigoa , & de Mon- ter rat 0 que les Caraïbes de la Domi- nique & d'ailleurs,, y font fouvent de grands ravages. L'inimitié que ces Barbares ont conceuë contre la Na- tion Angloife eft fi gtande , qu'ils ne s'écoule prefque aucune, année, qu'ils ne faffent vne oudeus descentes à la faveur de la nuit^en quelcune des Iles qu'elle pofîède : & pour lors , s'ils ne fontpromptémentdécouvers & vive- ment repou0ez,ils maflacrenttous les kommes qu'ils, renconcrent^ils pillent les maifons & lesbrûlcnt,& s'ils peu- vent (e faifir de quelques femmes ou de leurs en fans., les font prifonniers de guerre3.& les enlèvent en leurs ter- res,avectout le butin qui leur mrékï. 111e qu'on appelle Redbnde ou Ro- tonde 3 àcaufe de fa figure 5 efl fur la hauteur de dix-fét degrez & dix feru- pules. Elle eft petite, & ne paroit de loin que comme vne grofle Tour : de felon- 92 Histoire Natvrelxe ieloii vne certaine face, on diroit que ce (croit vn grand Navire, quieft fous la voile. On la peut facilémçn t abor- der de tontes parts , à caufe que là nier qui l'entoure eft profonde , 8c tans rochers ou écueils j qui puifient mettre en danger les Navires. A R T I c I E IX. De l'Ile de Nieves. C'Eft vne petite terre , qui eft fi- tuée fur la hauteur du dixfetiéme degré & dixneuf fcrupules. vers le Nord. Elle n'a qu'environ fix lieues de tour, & dansfon milieu, vne feule montagne qui eft fort haute, & cou- verte de grands bois jufques au foru- met. Les habitations font tout à l'en- totir de la montagne, à commencer . depuis le bord de la mer , jufques à ce qu'on arrive au plus haut, où Ton peut commodément monter. On fait aifément Ôc par eau Se par terre, tout le circuit de cette Ile. Il y a plufieurs fourees d'eau douce, dont quelques- vues font allez fortes , pour porter leurs eaus jufques à la mer. Il y a même des Iles Antilles. 93 même vne fontaine > dont les eaus font chaudes ôc minérales. On a fait des bains tout proche de la fource, qui font fréquentez avee heureus fuc- cés ^ pour la guerifon des mêmes ma- ladies,qui demandent Tvfage des eaus de Bourbon, Les Anglois qui s'y font établis en Tan mil fix cens vinthuit,habitent fcette Ile au nombre d'environ trois mille hommes, qui y fubfiftent hono- rablement par le trafic qu ils y font de Sucre^de Gingembrc,& de Tabac. Cette Ile eft des miens policées de toutes les Antilles. La Iuftice s'y ad- miniftre avec grande fageife , par vn Confeil,qui eft compofé des plus no- tables^ de plus anciens Habitans de h Colonie. Les juremens,les larcins, 1 y vrognerie, la paillardife , & toutes fortes de diffolutions & de defordres5y font punis feverément. L'an mil fix cens quarante neuf, Monfieur Lake y commandoit. Depuis Dieu Ta appelle à foy.Ilétoit homme craignant Dieu, & favant;qui gouvernoir avec gran- de prudence^ grande douceur. Il 1 § I I i 1 i i =*~=» i i i 54 Histoire Natv.rel.ie Il y a trois Egiifes, qui font Ample- ment bâties-, mais en recompenfe el- les font commodément difpôfées pour y faire le Divin fer vice. Pour la feu- reté des vaiâfeaus qui font à la rade, Se pour empefeher la defeente que pourroit faire vn Ennemy,on y a bâty vn.Fort,où il y a plufieurs groiîes pie- ces de Canon , qui commandent fur la mer. Il tient auffi en aiïarance les Magazins publics , dans lefquels on décharge toutes les Marchandifes qui viennent de dehors , & qui font ne- ceiIàires«pour la fubfiftance des Habi- tans. Et cJelt de là, qu elles font puis après diftribuées à tous les particuliers qui en ont befoin , pourveu que ceus qui ont cette commiilion , les jugent capables de les payer au jour nommés & au prix, que Monfieur le Gouver- neur & Meilleurs du Confeii y ont mis, félon leur prudence,& équité. Ce qui rend encore cette Ile recom- mandable>eft qu'elle n' eft feparéeque par vn petit bras de mer , de celle de Saint ChriBofie , la plus belle & la plus renommée de toutes les Àn-| tilles, j I des Ile^ Antilles. $f dites, dont elle eft la Capitale. Décri- vant donc allez brièvement la plupart des autres Iles,iieft juftede nous écen- % dre vn peu davâtage fur celiecy.Et c'eft '* pourquoy nous en feros vn Chapitre à par^comme le fujet le mérite bien. %m t%î- >%m $m- m% >%m- >m&®& •&& $m h\ CHAPITRE IV. 4 À) De (lie de Saint chriïlofle en fa particulier. L'Ile de^ Saint ChrîFîofle , fut ainfi appelléepar Chrittofle Colomb, qui j- la voyant fi agréable , voulut qu'elle £ portait fon nom. A quoy il fut auffi jg convié par la figure d vne des mon- U tagnes qui font en cette lie , laquelle i ' porte fur fa croupe , comme fur Tvne de fes épaules vne autre plus petite montagne ; de même que Ton peint Saint. Chriftofle,côme vn Géant, qui ^ porte nôtre Seigneur fur les fiennes, V m forme à'm petit enfant. L'Ile eft [) fur la hauteur de dix-fét degrez 9 de \i vin t* cinq fcrupules, (ff Ceft r I 1 <$6 Histoire Natvreile C'eft le fiege des Gouverneurs Ge- neraus des François 8c des Anglois, qui pofTedent la plus grand'-part des Antilles : Monsievr le Cheva- lier de Poincy, Baillif 8c Grand- Croix de l'Ordre de Saint lean de Ierufaiem^Cômandeur d'Oyfemont 8c de Coulours,& Chef d'Efcadre des Vaiilèaus du Roy en Bretagne^Gentil- homme de fort ancienne Maifon^qui porte le nom de P o i n c y , exerce très dignement cette charge pour fa Majefté3 depuis environ dixneufans. Et l'on trouve en fa perfonne , toute la prudence , toute la valeur , toute l'expérience, 8c en vn mot toutes les hautes qualitez 3 qui font neceflàires pour achever vn grand Capitaine. C'eft aus foins & à la fageiïe de ce brave Seigneur3que Ton doitaujour- duy le bon Etat de cette Ile:Car l'ayât trouvée comme vn defert , il Ta enri- chie de plufieurs beaus édifices : Il la remplie de toutes les chofes neceflai- res à la vie:ïl y a attiré vne grade mul- titude de perlônes de toute condition* qui y vivent doucement 8c en repos. & - . des Iles Antilles 97 & il y a forraélaplus noble & la plus ample Colonie, que nôtre Nation aie eue iufqu'à prefent, hors des limites de la France. Il maintient cette Colo- nie par de bonnes lois politiques J Ôc militaires. Il rend vne fidèle iuftice a tous ceus de fon gouvernement, ayant éftably pour cet effet vn Con- ieil de gens de confideration.il prend vn foin charitable des pauvres ; des malades & des orfelins : En gênerai il foulage Se aide au beibin tous les ha- bitais de l'Ile, fubfiftant de les pro- pres bien , par fon bon ordre , & pat ion (Economie , fans eftie à charge à perfonne. Il traitte fplendidement les Etrangers qui le viennent vifiter , & lait vn accueil favorable à tous ceus qui abordent en fon Ile. Sa maifon eit conduite avec vn ordre qu'on ne ianroïc allez prifer. Dans la paix mê- me , on y voit faire les exercices de la guerre : Et en tout tems elle eft vne école de civilité , & de tontes fortes de vertiis.il fait obferver exa&emet la dilciplme militaire, pour tenir l'Ile en defcnf cdôner de la terreur à l'ennemy, Tm. L E & I I 1 i î :k^*3£**** 5)8 Histoire Natvrevle £V prêter au befoin fecours aus alliez, Il eft l'Arbitre de tous les différent qui furviennet entre les Nations voi- fines , & par fa fage conduite , il de- meure toujours en parfaite intelligen- ce avec les Anglois, les conviant par fes rares vertus , à l'honorer, & à dé- férer à les fentimens. Il peut mettre, fur pied en vn inftant plufieurs Com- pagnies de Cavalerie & environ huit à neuf mille hommes de pied. Enfin il a eu foin d'étendre le nom François en plufieurs lies , où il a étably des Colonies qui font àprefent florifFan- tes : Il a auffi envoie en la terre ferme de r Amérique, en vn endroit appelle Cap de Nord, des hommes qui entre- tiennent vn commerce avec les In- diens , & qui peuvent donner le fon- dement à vne ample Peuplade, par ce que ce lieu là ouvre l'entrée d'vn grâd .& bon Païs.Il étoit impoflible de paf- fer plus outre , fans arrêter quelque tems nos yeux fur vn fi digne Géné- rât Pourfuivons maintenant la descri- ption de Saint Chriftofle. L'Ile a environ vint-cinq lieues de tour. des Iles AntiliesT 59 tour. La terre en étant légère, & fa- .blonncufe, eft très-propre à produire toutes fortes de fruits du païs, & plu- fleurs de ceus qui eroiflenc en Europe. Elle eft relevée au milieu par de très- hautes montagnes , d'où coulent plu- sieurs ruiiîeaus.qui s'enflent quelque- fois fi promtément, par les pluies qui tombent fur les montagnes.fans qu'- on i'apperçoive à la pente, ni aus plaines ; que Ton eft fouvent furpris de ces torrens , qui débordent tout à coup. Toute l'Ile eft divifée en quatre Cantons : dont il y en a deus,qui font; tenus par les François , & les autres par les Anglois : mais en telle forte que Ton ne peut traverfer d'vn quar- tier à l'autre, fans paifer fur les terres de lVne ou de l'autre Nation. Les Anglois ; ont en leur partage plus de petites rivières que les Francois:Mais en recompenfe , ceux-cy ont plus de plat pais 5 & de terres propres à ê- tre cultivées. Les Anglôis font auffi en plus grand nombre que les nôtres: mais ils n'ont point de fi fortes pla~ E 1 CQ§ ■«■s I i p 1 I i*3*«*«****sC30a»» I I l|j I Si îoo Histoire Natv&elie ces de defenfe a & ne font pas fi bien armez.Les François ont quatre Forts, munis de quantité de Canons 5 qui portent loin en mer , dont celuy qui eft à la pointe de fable , a des fortifi- cations régulières comme vne Cita- delle. Le plus considérable après ce- luy-là 3 eft à la rade , ou au mouilla- ge qu'on appelle de la Baffe- terre. Il y a jour Se nuit en Tvn & en l'autre* des Compagnies de Soldats qui font bonne garde. Pour contenir aufliles quartiers en feureté , & prévenir les defordres , qui pourroient furvenir entre deus peuples differens , chaque Nation tient aus avenues de fes quar- tiers 5 vn corps de garde , qui fe ire- nouvelle par chacun jour. Les An- glois ont auffi de leur cofté deus pla- ces fortes 3 l'vne qui commande fur la grand'-rade > & l'autre fur vne autre defeente^qui eft joignant la pointe de fable. Cette Ile eft pourveuë dVne belle Saline, qui eft fur le bord de la mer, dans vn fein > que les habitans appel- ait ordinairement Cul- de- fac. Guc« res des Iles Antilles* ior res loin de-là il y a vne pointe de ter- re,qui s'avance fi prés de l'Ile de Nie- Ves , que le trajet de mer qui fepare ces deus places > n'a qu'vn petit quart de iieuë.» de forte qu'il s'efl: trouvé des hommes , qui Vont autrefois pafle à la Jiage, On tient qu'il y a vne Mine d'ar- gent à Saint Chriftofle : mais > com- me les falines , les bois 3 les rades, ôc les Mines font communes aus deus Nations, perfonne ne fe met en peine d'y regarder. loint qu'il faut vne gra- de puiiïance, & vne prodigieus nom- bre d'Efclaves pour vne telle entre- prife.La vraye Mine d'argent de cette Ile > c'eft le Sucre, * On fait aifément par terre , le tour de toute cette lie : mais on ne peut traverfer le milieu > à caufe de plu» iîeurs grandes & hautes montagnes, qui enfermét en leur fein d'effroyables precipices>& des fources d'eaus chau- des. Et même on y trouve du foulfre, quia donné le nôdeSoulfriere à lVne de ces montagnes. Depuis le pied des E 3 montagnes* I I i i 1 s m iimini 'iw ii in ni ni min m m\ m .il iihiii 102 Histoire Natvreile montagnes , en prenant la Circonfe- rance au dehors,toute la terre de cette Ile s'étend par vne péte douce iufques au bord de la mer,d*vne largeur inéga- le, felô que les môtagnes pouffent plus ou moins avant leurs racines,du cofté de la mer ,'ou que la mer s'avance, Se xeferre la terre contre les montagnes. Toute Tetenduë de bonne terre qui eft cultivée , iufques à la pente trop roide des montagnes, eft diviiée prei- que par tout, en plufieurs étages, par le milieu defquels paffent de beaus 5c larges chemins tirez en dfoite îigneY autant que les lieus le peuvent per- mettre. La première de ces lignes de~ communication , commence environ centpas audeffus du bord de la mer: l'autre , trois ou quatre cens pas plus haut , 6c ainfi. en montant iufques au fcroiziéme ou quatrième étage 5 d'où: l'on voit les habitations de défous, qui forment vn afped fort agrea- fcle. Chaque étage,qui fait comme vne ceinture ou plus grande ou plus petite à Tentour des montagnes, félon qu'il ea< des Iles Antilles. ioj en eft ou plus ou moins éloigne 5 a aufïi fes fentiers 3 qui comme autant de rues traversantes, donnent le libre accez à ceus qui font ou plus haut ou plus bas:Et cela avec vne fi belle fym- mccrie,-que lors que Ton fait par mer le tour de rile,il n'y a rien de plus a- greable5 que de voir cette divértiilan- te verdure de tant d'arbres qui bordée les chemins J & qui font ans lizieres, êc font les feparations de chaque ha- bitation. La veuë ne fe peut lafler de eonfiderer cette terre. Si elle fe porte en haut ^ elle fe trouve terminée par ces hautes montagnes, qui font cou- ronnées d'vne verdure eternelle>& re- vêtues de bois precieus. Si elle fe re- fléchit plus bas^elle apperçoit les lar- dins , qui prenant leur naiilance dés le lieu où les montagnes font acceffi- bles^étendent de là par vne douce & molle defeente > iufques au bord de la mer. Le beau vert naiflant du Tabac planté au cordeau > le laune pâle des Cannes de Sucre qui sot en maturité, & le vert brun du Gingembre 6c des Patates j font vn païfage Ci diverfifié, E 4 Se I i 1 i i i i i ^^ySHfrg^EfHSgySaVE 104 Histoire Natvrelle & vn émail fi charmant , qu'on ne peut 3 fans faire vn effort fur fon in- clination-, retirer la veuë de deffus.Ce ^ui recrée encore davantage les yeux* eft qu au milieu de chaque habitation ou Iardin3on remarque pîufîeurs bel- les maifons > de différente ftrufture* Celles nommémêt qui font couvertes de tuile rouge ou plombés y donnent vn grand luftre à cette aimable perfpe- <5live : Et par ce que l'Ile va toujours; en montantj'étage inférieur ne déro- be pas laveibde celuy qui eft plus avant en la terre 3 mais en vn inftant on voit tous ces beaus compartiment» tous ces chemins qui font comme ao- Sant d'allées de vergers > toutes ces. .bordures de differétes fortes d'arbres^ tous ces jardins plantez à la ligne de diverfes efpéces de fruits \ & tous ces» Jolis édifices , qui ne font diftans le plus fou vent que de cent pas s ou en- viron y les vns des autres: Et en vn mot > tant d'agréables objets fe pré- sentent aus yeux en même tems 3 que l'on ne fait à quoy s'arrêter» Il eft neceiTaire^pour la plus grande commodité: «S* ■^vvA^ary.'K^fc'^v^v^^ des Iles Antilles. 105 commodité des habitans 3 & la facili- té dé leurs employs, que leurs maîfons- foient feparées les vnes des autres, & placées au milieu de la terre qu'ils, cultivent : Mais les François , outre leurs demeures qui font ainfi écartées, ont encore bâty en leur quartier de la. Balle - tetre , vne agréable ville y qui s'augméte tous les )ours,& dont les e- difices font de brique de de charpen- te. Elle- dl prés de la rade où les vaif- feaus ont coutume de mouiller^ Tous les plus honorables Habitans de l'Ile, & les Marchâds étrangers y ont leurs Magazins.- On y trouve chez les Marchands Françoise Hollandois , qui font là leur refidence3d'excellent vin.de l'eau de vie,, de la bière,, toutes fortes d'é- toffes de foye ôc de laine , qui font propres pour, le païs^. généralement tous les rafraichiflemens qui ne croif- fent point en l'Ile,;& qui font necef- iaires pour l'entretien des habitant JL'on a de tout à vn prix raifonna- ble, en echangedes Marchandifes aui ^oiiTent en cette terre. Ceû.en œ 1 I 1 i 9 I m& Histoire Natvrellï? même lieu, où demeurent les artifansv qui s'occupent en divers métiers, qjû^/> font vtiles pour maintenir le commer- ce , & la focieté civile. On y voit de plus , vji Auditoire pour rendre la ïuftice , &: vne belle Eglife qui peut contenir vne fort nombreufe affem- blée.Tout cet édifice eft de charpante élevée fur vne baze de pierre de taille. Au Heu de vitres & de feneftres, il n'y a que des baluftres tournez. Le comble du couvert eft à trois fai- ftes,pour ne point donner tant de pri- feau vent , & la couverture eft de tuile rouge. Les Capucins ont eu quelques années la conduite de cette Eglife, & la charge des âmes parmy les Fran- çois de l'Ile : mais en Tan mil fix cens quarante fix ils furent difpenfez-de cet employ du commun avis des ha- bitans , qui les congédièrent civile* ment , & reçeurenS en leur place les lefukes & les Carmes,qui y ont à pre- fent , par les foins & la libéralité de îvJôfieur le General ôc des Habitas, de belles Maifôs,& de bonnes habitatiôs,. «w*kws*«i »avg\>««*,p ms- Iles Antilles, iûf qui font cultivées par vn grand nom- bre cTefclaves qui leur appartiennent, &c qui leur fourniflent dequoy fub- iîfter honorablement. Le P. Henry du Vivier à efté le premier Supérieur de la Maifon des lefuites. Sa douceur, &c fon aimable converfation, luy ont aquis le cœur de tous ceus de noftre Nation qui demeurent en cette Ile. : Monfieur le General a aufîi fait bâ- tir vn bel Hôpital en vn lieu fort fain, où les malades qui n'ont pas le moien defe faire guérir en leurs maifons, font fer vis ,&: nourris, & vifitez des Médecins & des Chirurgiens jufqu à leur cotivalefcence. Les Etrangers, qui tombent malades dansl'Ile % font auffireceus.il a encore mis ordre^que lesOrfelins foient placez en des mai- fons honorables, où ils font inttruits ôc nourris à fes frais. Entre les beaus, grands, & folides édifices que les François Se les An- glais ont bâty, en plufieurs endroits de cette île.le Ghateau de Monfieur le General 4e Po i kc y excelle fans con- tredit , & furpaffe d^ beaucoup tous ïoS Histoire Natvuelie les autres > c'eft pourquoy nous en fe* irons vne defcription particulière, Il eft placé en vn lieu frais &fain* fur la pente d'vne très-haute monta- gne couverte de grands arbres $ qui par leur verdure perpetuellejuy don- nent vne raviiïante peripeétive. tt eft éloigné du bord de la mer y d'vne bien petite lieue de France. L'on trouv ve au chemin qui y conduit » & qui monte- infaifiblernent x les agréables maifons de quelques- vns des princi* paus Officiers &. Habitans de L'Ile: & dés qu'on à coftoyévne petite emi- nençe qni le couvre , en venant de la Baffe-terre y on y eft conduit par vne- droite Se Large allée 3 bordée d'Oran- gers &c de Citroniers , qui fervent de paliffade>& qui recréent rnerveilleufe- ment l'odorat 8c la veiie:Mais ce beau Palais^ prefentant à l'œil vne fa^e ex- trêmement charmante>à. pêne la peut- on jetter ailleurs. Sa figure eft prefque quirrée 3< à1 trois étages bien proporticnez> fui- vant les régies d'vne exquife Archi- tecture, > qui y a employée pierre de taille^ fc*"Éfwaft^au tf-B"S; Ï£E>S, ÂKTILIES. £$£ faille, & la brique, avec vne belle fymmetrie. La face, qui fe prefente la< première y &: qui regarde l'Orient , ar au devant de fon entrée vn large efca- lier y à double rang, de degrez > avec vn beau parapet au deflîis > & celle qui a l'afpeâ: au Couchant ,- eft auffi embellie d'vn efcaliet tout pareil au* premier,& d'vne belle & grofle four-- ee d'eau vive^qui étant receiïe dans vil gr ad bafïïn,eft de là côduite par des ca- mus Cou-terrains en tous les offices. Les falles & les chambres font bien percées j, les planchers font faits à la Françoife,de bois rouge, folide, poly, de bonne odeur > & du crû de l'Ile. Le couvert eft fait en plate - forme, d'où l'on a- vne velie des plus belle* & des plus accomplies du monde. Les feneftrages font difpofez en bel" ordre : les veiïes de Leuant s'étendent le long de l'avenue , & percent dans de beaus vallons , plantez de Cannes de.Sucre , ôc de Gingembre. Celles du Couchant , font terminées par la montagne , qui n'en eft éloignée* %u'autant qpe la jufte proportiô le re- quiert^ S ! 1 1 J \ 1 1 1ÏO HlSTOIRE NATYREï^tE quiert,pour relever par le riche fondr qu'elle prefente >, la grâce 6c les per- fections de ce Palais. Quant aus ve- uësdu Midy . & du Nord, elles décou- vrent vne partie confiderable de nie,. & les courts^ les bâcimens, où .font- tous les offices neceflaires, pour Tac compliffement d'vne fi belle maifon. Dans Tefpace qui eft entre ce Châ- teau y & la montagne voifine , on a ménagé vn beau jardin 3 qui eft eu- rieufement entretenu. Il eft fourny de la plupart des herbes potagères^ quife voyent en France 9 8c enrichy d'vn parterre, rempli de fleurs rares & curieufes , qui font arrofées dVne claire fontaine ^ qui prend fa fource à- la pente de la montagne, & fans beaucoup d'artifice fait vn gros jed5 qui reiallit au milieu du lardin. Ce riche bâtiment eft fi bien pla- cé', &rafraichy fi agréablement des dous yens qui coulent de la mon- tagne , & de celuy d'Orient , qui eft le plus ordinaire du païs , qu aus plus grandes chaleurs de TEté, on y jpuyt -d'vne aimable température. /./iKWJWÏfc.1 «^ -+**à*\ rrmmm,\m~ fï ts in ■ p mmn B&ss Iles Antilles* I-îp G9èft v ne chofe div ertiifante au pot» fîble5 quand ans jours de rejouiflan- c^publique 5 on fait à Tlle des feus de joyé » pour les nouvelles de quel- que heureus fuccés des armes vi&o- rieufes de fa Majefté Tres-Chreftien- ne.Car alors les Clairons,& les Haut- bois font ouïr leur fon éclatant du haut de la platte- forme de ce Palais* en telle forte3 que les montagnes voi- fipes , les côtaus & les bois qui les eouvrent^retenti fient à ce bruit pené- trant>& forment vn aimable Eco5qui s'entend par toute Yîl^ôc bien avant en mer. Alors on voit auffi pendre du haut de la Terrafle,&: des feneftres de l'étage le plus élevé* les enfeignes femées de fleurs de Lis , de les dra- peaus de étédars^queMonfieur le Ge- neral a remportez fur les ennemis. Al'v-n des cotez de cette maifon^ii y a vue belle 6c grande Ghapelle^fort proprement ornée3où les Aumofniers de Monfieur le General font le fer- vice. Les Offices & les logemens des domefiiques vont en fuitte 3 &; font compris endeus corps de logis^ qpi I % i I ti£ H-rsTonu N'ATVRîtri' qui fontauffi bâtis de brique. A Tau- tire côté , mais vn peu plus loin 3 fur vne petite eniinence, on voit le quar- tier des EfclavesNégres^qai.occupent. g lufieurs petites maifons de bois ,8c de brique. On a donné à ce lieu le nomde la Ville D'Angole- Cette Maifon n'eft pas feulement Kcomraandable pour eôre fituée en bon air, pour eftre parfaitement bien bâtie y & pour les claires fources d'eaus qui la raffraichifTent, les beaus ïardins qui l'entourent^ les droites & fpacieufes avenues qui y conduis font les commodités des divers ofE- ces qui l'accompagnent, & pour tous les autres riches ornemens qui l'em- bellirent : Mais auffi pour eftre forti- fiée de redoutes ,& munie de groiFes pièces de Canon de fôte verte, & dra Arfenal, ou toutes fortes d'armes > ôc de provifios de poudre, de méfclie,& de balles/e trouvent en abondance. Ce ne feroit pas même allez pour kperfcûion de ce magnifique; Hoftelv qu'il eut tous ces rares avantages de m iutwc acde l'art, que nous, ve- nons5 1 bes Iles Antilles. îïj lions de décrire > fi après tout cela il étoit fitué en vn lieu defert > aride^ Se infruâueus 5 ôc qu'il faluft mandier d'ailleurs que de la terre qui l'envi- ronne > les moyens neceflàires pour fon entretenenient. Âuili n'a-til point €e défaut, Se la beauté s'y trouve join- te avec i'vtilité 3 par vn merveilleus aflemblage. Car de fes feneftres > on Voit dans la baiïecourt trois machi- nes 3 ou moulins propres à brifer les Cannes de Sucre^qui apportent à leus maiftrc.vn profitr& vn revenu allure, & qui va du pair avec celuy des plus nobles- Se meilleures Seigneuries de Frlce. Quant à la matière pour entre- tenir* les moulins3aflavoir les Cannes de Sucre^elle fe recueille des chams qui font ans environs^ qui les pro- cânifent à merveille. Plus de trois cens Négres,qui appartiennent à MonfieuL* le GeneraliCultivent ces terres,& font employez au fer vice de ces Moulins» & à. la fabrication de diverfes autres Marchandifes x que cette Ile produit keureuCemen t3 comme nous le dirons m fécond Livre de cette Hiftoire. Tout i I i i i M» À ii^,.nlNII iPP iIPlMwn îf 4 Histoire NAfvîtEiLfr Tout fe fait en cette' maifon 3 & en fes dépendances * fans confufion , Sz fans empreflèment. Ce grand nombre d'Efclaves Nègres eft fi bien policé* conduit & réglé , que chacun Le rend à l'exercice &à Pemploy qjii luy eft affigné par le Maître des ouvrages^ fans s'ingérer dans les offices de dans les occupations des autres^ Outre cette forte de gens qui font nez à lafervitude5 M'onfieur le Gene- ral a environ cent Domeftiques Fran- çois de Nation , qui font gage& pour le fervice de fa m ai f on a dont la plu- part font de diverfss profeffions 3 8c de divers métiers neceflaires en lafo- cieté €ivile/ur tout lefquels,lTnteii- dant de fa maifon a vne infpe&ion particulière. Monfieur le General a encore les Gardes de fa perfonne 'r qui l'accom- pagnent lors qu'il eft neceffaire^ fous la conduite- dVn Gapitaine 3 plutôt pour reprefenter la Majefté du Roy5 de qui il a l'honneur d'eftre Lieute- nant > que par aucun befoin qu'il en ait* eftant aimé^ôc chery de tous les François^ rarym^ft rifcv wr«Emrtr,vyfcJ DES IE-E'S' ÂNTI'IXtES-. I ï^ François , & révéré des Etrangers. A l'exemple de Monfieur le Gene- ral jrplufieurs Nobles & honorables familles 5 qui font venues de France* elïan.-r attirées par la douceur de (on Gouvernement ' y fe font fermement établies dans cette Ile *■& y ont bâty de belles de agréables maifons. Les plus remarquables font celles de Mei- lleurs-de Poincy3deTrévaL> & de Be- nevent, qui font trois braves Gentils- hommes, Neveus^de Monfieur le Gé- néral : le premier defquels eft Gou- verneur particulier de Saint Ghrifto- fle 5fous Monfieur fon Oncle, & les deus autres font Capitaines de leurs quartiers Feu Monfieur Giraud, entre fes au- tres Maifons > en avoit auffi fait bâtir vne prés de THoftel de Monfieur le. General, & vne autre à Cayonne3qui font des plus accomplies» Geperfon- nage 5 qui étoit de grand mérite 3 & qpi par fa lage conduite s'étoit acquis l'amitié de tous les Habitans des Iles5 portoitlà qualité de Sergent de ba- taille de: Saint Chriftofle s >& autres lies. 1 ce i I i ^s&à Il I 1111 I 1 s i k I h\6 Histoire Najvrelxë îles de deiïbus le Verft,c'eft a-dire, de S. Martin 3 de Saint Bartelemy & de Sainte Croix, qui font au Couchant de S.Chriftofle. Entre les maifons confiderables5 parmy nos François^on doit encore mettre celle de Monfieur Auber, qui a efté Gouverneur de la Gardeloupe. Elle eft dJvnc belle ftruéture > de boi& folide &c en bon fonds, 8c de plus,elle a vn bois de haute fûtaye , qui n'efil pas encore abbatu3& de la terre necte pour occuper cinquante Efclaves* quï travaillent au Sucr^ & au Gingem- bre.Mais ce qui luy donne plus de lu- ftre, eft qu elle eft placée au plus haat étage des Habitations du quartier de la montagne Plateau y 8c relevée fur vue eminëce, d'où l'on découvre plu- fîeurs belles demeures qui font au dé- fous3& autant loin en meivque la for- ce de l'œil fe peut étendre. Monfieur de la Roziere à prefent Maior de llle^ Monfieur de Saint Amant, Monfieur de l'Efperance 3 Monfieur de laRo- che^qui font Capitaines jtous les Offi- ciers en general>& tous les plus anciês- Habitons* N wre bis Iles, Antilles. 117 Habitans font bien logez. Les AngloiSj ont auiîi fait bâtir en leurs quartiers plûjeurs grâds & beaus édifices 3 qui relèvent merveilleufe- menc la beauté naturelle de cette lie* Les plus confiderables font ceus de Feu Monfieur Waïrmrd y premier Gouverneur General de cette Nation: de Feiï Monfieur Riche , qui fut fon Succefleur 3 de Monfieur Euret^c^xï exerce aujourduy cette charge avec grande louange , & de Monfieur le Colonel Greffrefon^vii font tous fi ac- complis, qu'ils doivent à bon droit c- tre nommez entre les plus belles 9 8c les plus commodes maifons des An* tilles. On conte auiïi iufques à cinq bel- les Eglifes â que les Anglois ont fait bâtir en cette Ile. La premiere5qu'on rencontre en fortant du quartier des François,eft à la pointe des Palmiftes; la fecôde prés de la grade rade,au def- fous de l'Hoftcl de Môfieur leur Gou- verneur;la troifiéme à la pointe de Sa- tie , & les dejis autres* au quartier de Cayonne. ri8 Histoire Nàtvïlexxs Cayonne, Les trois premières font dVne agréable ftru&ure félonie pais* ornées en dedans de belles chaires, 6c de fieges de menuîfene ., Se de bois precieus. Les Eeclefiaftiques y font envoyez de même qu'en toutes les autres Iles par les Evefques ^An- gleterre, déquels ils tiennent leur or- dination 3 6c ils y célèbrent le Service Divin,au grand contentement de tous ceus de leur Nation, & à l'édification ïnigulieredes étrangers, felo la Litur- gie de l'Egiife Anglicane, avec toute la gravitera modeftie &c la révérence, qui font requifes à la Maifon de Dieu, 6c au culte religieus,que tous les Fidè- les font obligez de luy rendre. CHAPITRE V, Des îles de dejfom le Vent* TOutes les Iles 3 qui font au Cou- chât de celle de Saint Chriftofle, ' fontordinairemét appellées les Iles de Aejfom le Vent : parce que le vent qui fouffle i jfcB^f.ym^i^.^fcV N^rarffr.V* ^ des Iles Antilles. iï^ fbuffle prefque toujours aus Antilles, eft vn vent d'Orient , qui participe quelquefois vu peu du Nord , de que ce n'eft que bien rarement vn vent du Couchât^ou du Midy.On en conte en tout neuf principales^defquelles nous traitterôsen ce Çhapitre/elon Tordre à peu prezqu elles tiennét en la Carte, A r t i c l e I. De Vile de Saint Eufîache. CEtte Ile eft au Nord ôc quarante minutes. Elle eft petite ? & ne peut avoir en tout, qu'environ cinq lieues de tour. Ce n'eft à propremét parler qu'vne mon- tagne y qui s'élève au milieu de l'O- céan , en forme de pain de Sucre : qui eft la même figure que reprefente le mont de Tabor^ck: le Pic de Tenerife: linon que ce dernier eft incompara- blement plus haut. Elle relevé de la Souveraineté de Meffieurs les Etats Generaus des Pro- yinces-Vnies , qui en ont concédé la Seigneurie^ ! 1 I I i i 1 i i I Ï2.0 Histoire Natvreile Seigneurie , & la propriété foncière^ Moniîeur Van Rée , & à fes Allbciez Honorables Marchands de Fleffin- gués en Zelande,qui y ont étabiy vne Colonie , compofée d'environ feize cens hommes, qui y font proprement accommodez., fous le dous Gouverne- ment de la Nation Hollandoife, Cette Ile eft la plus forte d'affiéte de toutes les Anf illes:car il n*y a qu'- vne bonne defcente^qui peut eftre fa- cilement défendue^ 5c où peu d'hom- mes pourroient arrêter vne armée en- tière* Outre cette fortification natu- relle 3 on y a bâty vn bon Fort , qui commande fur la meilleure rade , 5c bien avant en mer , par la portée de fon Canon. Les Habitans font tous commodé- ment logez, 5c proprement meublez, à Timitation de leurs compatriotes d'Hollande. Il ny a plus que le haut de la montagne , qui foit couvert de bois:tout le tour eft défriché.Et Ton ne fauroit croire qu'à péne> la grade qua- titéde Tabacqu'on en a tiré autrefois, & qu'on en tire encore iournellemét. Bien -que,, des Iles Antilles. hï> Bien que le Commet de la monta- gne de cette Ile paroifle fort pointu, fleft neantmoins creus 3 de a en fon centre vn fonds aflez vafte , pour en- tretenir quantité de Sauvagine , qui fe plait dans cette profonde retraitte. Les Habitans font foigneus de nour- rir fur leurs terres^toutes fortes de vo- lailles^ même des Porceaus , &~des Lapins^qui y foisonnent à merveille. Il n'y a point de Fontaines en cette lie; mais il y a prefentement fort peu de maifons ,1 qui n'ayent vne bonne Citerne , pour fuppléer à ce manque- ment. Il y a aufîî des Magazins , fî bien fournis de toutes les chofes* qui font necelfaires à la vie 3 & à l'en- tretien des Habitans , qu'ils en ont fouvent allez > pour en faire part à leurs voifins. Quant aus perfonnes qui compo- fent cette Colonie , il y a plufieurs familles honorables , qui y vivent Chrétiennement & fans reproche* ÔC qui n'ont jamais été flétries des crimes que quelques-vns leur impofçnt.Ceus qui ont vécu parmy ces gens- là > y Tom.I. F ont tœ Histoire Wat vrelie ont remarqué vn grad oL-dye>& beau- coup moins de dérèglement > qu'en diverfes autres Iles. Il y aauffi vue belle Eglife3 qui eft gouvernée par vn Pafteur Hôllandois. Monfieur de Graaf , qui eft à prefent Pafteur de l'Egtife de Trévers^en l'Ile d'Oiïalcre 3 en a eu autrefois la con- duite.Ily prefchoiten vn mêmeiour, ôc en vne même chaire^ en François, ôc en Flamand ; pour édifier les Ha- bitans de Fvne &: de l'autre langue, qui demeurent en cette Ile.Monfieur de Mey célèbre Prédicateur de l'Egli- fe de Midelbourg 3 qui entre autres é- crits a donné au publie vn do£te , &c curieus commentaire^ fur les lieus les plus difficiles des cinq livres de Moy- le, où il eft traitté des chofes naturel- les 3 fucceda à Monfieur de Graaf , ôc depuis quil a été rapellé pour iervir en fon Païs, Meffieurs les Directeurs de cette Colonie^ont toujours efté fort foigneus de demander au Synode de leur Province^de bons Se de fidèles ou- vriers pour eftre employez en cette petite portiô de la vigne du Seigneur. Arti j^gfifl kS. >C*¥»~L^W *W* —% des Iles Antilles^ 125" Article IL De Vile de Saint Bartelemy. L'Ile de Saint Bartelemy , eft au Nord-Eft de S. Chriftofle > fur le dixféttiéme degré. Elle a peu de terre propre à eftre cultivée , bien qu'elle îoit d'vn allez grand circuit. Môfieur le Bailly de Poincy /Gouverneur Ge- neral des François Ta fait habiter à {es dépensai y a environ quinze ans. L'on y trouve plufieurs beaus arbres fort eftimez, vue infinité d'oifeaus de diverfes efpecés , 3c de la pierre très- propre à faire de la chaux, qu'on y va quérir des autres Iles. Elle eft de dif- ficile accez pour les grands Naviresj à caufe qu'elle eft entourée de plu- fieurs rochers. Ceus qui fe plaifent à la Solitude, n'en fauroient defirer vne :plus accomplie. Article III. De Pile de Saha. ELle eft fituée au Nord-Oueft de Saint Euftache 3 fur la hauteur dir dixféttiéme degré P Se trente - cinq F z fcrupules. I «Se 1 s I 1 2 Ï2-4 Histoire Natvrelle fcrupules. On croiroit à la voir de loin, que ce ne feroït qu'vne roche: Mais la Colonie de Saint Euftache, qui y a fait paffer des hommes poin- ta cultif er , y a trouvé vne agréable vallée 9 & aflez de bonne terre pour employer plufieurs familles 3 qui vi- vent contentes , en cette aimable te* trattteJl n'y a point de mouillage à la eofte^que pour des Chaloupes. La pef- che y eft abondante. Et les foins que Monfîeur le Gouverneur de S. Eufta- che 5 a pris jufqu'à prefent de cette Peuplade^fontque les refraichifferaes necelfaires n'y manquent point. CHAPITRE IV. De l'Ile de Saint Martin. CEtte Ile eft fur la hauteur de dix- huit degrez &c feize fcrupules. Elle a environ 7. lieues de long > de quatre de large. Il y a de belles Sali- nes , qui avoient obligé FEfpagnol a y bâtir vn Fort * où il entretenoit vue Garnjfon, pour s'en conferver la propriété. Mais il y.a environ p. ans, qu il M^*mftfAiteXStX^JSS&ZWZW^^ des Iles Antilles. iij qu'il démolit le Fort 8c abandonna l'Ile. Ce qui ayant efté apperceu par Monfieurde Ruyter, qui comman- doit l'vn des grands Navires,que Mef- fieursLampfins envoyent d'ordinaire en l'Amérique , & qui pour lors cô- toyoitcette Ile de Saint Martin^il fae à S.Euftache lever des hommes^qu'il y amena pour l'habiter* & en pren- dre pofleffiê^an nom de Meffieurs les Eftats Generaus des^Provinces Vniés- La nouvelle de la fortie des Efpa- gnols de cette terre > étant venue au mênieterasàlaconnoifTance de Mo- iîeur le Generaides Françoise equip- pa promtement vn Navire, & y mit vn nombre de braves hommes , pour relever le droit & les prétentions de nôtre Nation, qui avoit pofledé cette Ile avant l'vfurpation de l'Efpagnoh Dépuis les François , 6c les Hollan- dois ont partagé cette terre à l'amia- ble, & ils y vivent enfemble, en fort bonne intelligence. Les Salines sot au quartier des Hol- landois-.mais les François en ont l'vfa- ge libre, Monfieur le General établie F 5 pour i 1 I I *j^a^>*»g~^jix*«frTjr*ifrgvs n4 Histoire Natvrelle pour fon Lieutenant en cette place Monfieui de la Tour. Et à prefent^c'eft Monfîeur de Saint Amant quiy-.com- Hiande.il a fous foy environ trois cens hommes , qui cultivent la terre 3 de font tous les devoirs poflibles , pour la mettre en réputation. Les Hollandois y font en aufll grand nombre que les François. Mef- fieurs Lampfins,& Môfieur van-Réea font les principaus Seigneurs, & Di- recteurs de cette Colonie. Ils ont en leur quartier de belles Habitations,, de grands Magazins , &c vn nombre bien confiderable de Négres,qui leur font ferviteurs perpétuels. Il n'y a point d'eau douce en cette Ile , que celle, qui au tems des pluies eft recueillie en des citernes , qui y font aflez communes. Il y a plufieurs Ilets à l'entour de cette terre, qui font tres-commodes , pour les menus di- verdifemés des Habitans : Il y a aufli des Etangs d'eau falée^qui s'avancent bien avât entre les terres, où l'on pef- chevneinfinitédebons poiflbns,par- liculierément des Tortues de mer. On trouve Cte!2&aC3&2£2>2 — — ' — — - «r des Iles Antilles. 127 [S trouve', dans des Bois des Porceaus JS\ fauvages *4,ês Ramiers > des Tourtes, ^ 8c des Perroquets fans nombre. On y voit plufieurs arbres g qui diftilent di- verfes fortes de gomme : mais ie Ta- bac qui y croift „ étant plus eftimé que celuy des autres Iles : c'eft ce qui & -xend fon comerce plus confiderable. A Les François de les Hollandois ont leurs Eglifes particulières^ quartiers V de leur Iurifdidbion. Monfieur des V Camps/ qui a efté le premier Pafteur 14 de TEglife Hollandoife, y fut envoyé ^ en cette qualité parle Synode des Egli- ^ fes Vallônes des Provinces-Vniesjqui Cj a cette Colonie fous fon infpe&ion km fpirituelle , &c étant decede en Texer- Si cice de cette charge > les premiers % Vaifleaus qui doivent partir pour ce ^ païs-là^y en doivent porter vn autre, qui a efté choifi pour fon fucceffeur, êc qui y doit prefeher le Saint Euan- gile du Seigneur, en l'vne ôc en Tau- ire langue» F*5» I I Ï28 Histoire Nàtvrellb Article V. VeT lie de l'Anguille. ELle porte ce nom, à caufe de fa fi- gure : car c'eft vne terre fore Ion- gue , 8c fort étroite , qui s'étend en ferpentant prés de Saint Martin, d'où on l'apperçoit à découvert. Il ne s'y trouve aucune montagne , la terre y eft par tout platte & vniê.A l'endroit où elle a plus de largeur , il y a vn é- tang, aatouiUuquel ^quelques famil- les An gloiies fe font placées dépuis fét ou huit ans , & où elles cultivent du Tabac , qui eft fort prifé de ceus quife connoilfent à cette Marchldife, €)n met cette Ile fur la hauteur de dixhuit degrez & vint fcrupules , ati deçà de la Ligne. Article VI. Des Iles de Sombrero , d*Anegad*e , & des Vierges. LA première de ces trois Iles eft fi- tuée au milieu des Bancs.qui bor- dent le Canal par où paflent les Na- vires, p 1 % des Iles Antilles 119 (^ vires , qui veulent retourner en Eu- rope. Elle eft fur le dixhuitiéme de- fti gré , & trente fcrnpules. Les Efpa» . ~ gnolsl'ont nommée Sombrero > à eau- afi le qu'elle a la figure d'vn -chapeau.- '4 Elle eft inhabitée.- ;/ Anegade y qui eft fous le même de- gré que Sombrero >eft auffi. delene, de de dangereus abord. Les Vierges grandes & petites .com-* prenent plufieurs^Iles qui lont mar- quées en la Carce fous ce nom. On en conte en tout douze ou treize. Elles s'étendent au Levant de l'Ile de Saint lean de Porto -Rico, fur la hauteur de dixhuit degrezau Nord de la Ligne. Entre ces Iles il y a de fort bons mouillages § pour mettre en feureté plufi-airs flottes. Les Efpagnols les vifitent fou vent pour la pefche > qui y eft abondante. Il y a auffi vne in- finité de beaus Oifeaus de mer & de terre. Mais il y a fi peu de bon ter- roir y qu'après l'avoir ciïàyé , &-' vi- fité en toute fon étendue y on a trou- vé y quif ne meritoit pas d'avoir des Babitans» 1 1 i$o Histoire Natv relie Article VIL De l'Ile de Sainte Croix. LA dernière de toutes les Antilles,, qui font au délions du Vent > efl celle 3 qui porte le beau nom de Sainte Croix. Elle eft fur la hauteur de dix- huit dé.giez 8c quelques Icrupules. Les Caraïbes > qui en furent chaffez par les Efpagnols > la nommoient Ay-ay. Elle étoit fort eftimée parmy eus : à caufe que c'écoit la première Ile que cette Nation avoit occupée aus Antilles^en venant du Nord cher- cher vne habitation commode > pour jetter les fondemens de leurs Colo- nies 3 comme nous le reprefenterons particulièrement au fécond Livre de cette Hiftoire > au Chapitre de leur Origine* La terre de cettç Ile rend avec beau- coup dvfure x tout ce qu on y feme. On y voit de belles de ipacieufes plai- nes déterre noire ôc facile à labourer. H y a auffi plufieurs arbres fort beaus* gfc precieus.qui font propres à la tein- ture^ % des Iles Antilles. ïy1 ture y de à la ménuiferie. L'air y eft Aj bon : mais les eaus n'y font pas beau- ^ coup (aines, fi on les boit incontinent S* qu'elles ont efté puifées- Pour leur ô~ v ter la mauvaife qualité qu'elles ont:>on gj les lai lie repofer quelque tems en des ' X vaiiTeaus de terre,ce qui les rend bon- ^ nés, & qui donne iujet de croire, qn- 4) elles ne font mauvaifes > qu'à caufe de A leur limon, comme celles du Nil. Jj Cette Ile eft maintenant en la pof- M feffion des François, qui en ont rele- Ôà vé glorieufement le débris. Apres les divers. changémens de Maîtres; qui y étoient furvenus en peu d'années, comme nous le dirons au Chapitre È deuziéme du fécond Livre de cette Hiftoire.Monfieur le General des Erâ- çois,qui la fait peupler à fes frais,lny a donné vn nouveau luftré,qui fait naî- tre l'efperance d'vne ample Colonie. Elle peut avoir neuf ou dix lieue's jjj de long y de prefcjue autant en fa plus ^ grande largeur. Les montagnes n'y È iont point fi hautes, nifi prelfées les î^ ¥nes cotre les autres, que l'on ne puif- £ç monter au deifus , 5c qull n'yrefte S 6 beaucoup v B5WS I$2 HSTOIRE NATVRELLE beaucoup de bonne terre^propre pour employer plufieurs milliers d'homes. «Sfr€£» •e$9<-£$8"€»€«9- €#3< €» W3* -&£* CHAPITRE VI. Zte/ Arbres qui croijfent en ces ]/es9 dont on $ eut manger le fruit. ENtre les Arbres > qui te trouvent en ces Iles , les vns portent de bons fruits qui aident à la nourriture de> Habitans , les autres iont propres à faire des bâtimens 5 ou bien ils fervent à la ménuiierie y ou à la tein- ture. Il y en aaufîi > qui font emplo- yez avec heureus fuccés en la Mede<* cine, & quelques autres qui recréent feulement l'odorat par leur fenteur agréable , & la veiie par la beauté de leur feuillage , qui ne flétrit iamais. De ceus qui portent des fruits bons à manger, & qui fe voyent en i'Euro- pe>on n'y rencontre que les Oran- gers y les Grenadiers , les Citraniers, & les Limoniers , dont la grofTeur* & frkv>rafc^^^*awa>fra^^ 1 *m DÈS IlBS ÀNTlLtES. Ï3? & la bonté furpafïè celle des mêmes efpéces qui croiffent ailleurs» Article 1. Des Orangers iGrenadiers>& Cïtroniers* QVant ans Oranges 5 il y en a de 2. forces aus Antilles *, elles font toutefois de même figure , Se on ne les peut difcerner que par le goût. Le s vnes font douces^ôc les autres aigres, les vnes & les autres extrêmement dé- licates v les aigres aportent vne gran- de commodité au ménage>car on s'en fert au lieu de verjus &c de vinaigre^ mais les douces excellent en bonté. Il eft vray que quelques-vns nomment les Oranges de la Chine Les Reynes des Oranges 3 & de vrais mufeats fous la figure ôc la couleur d'Oranges. Mais quelque eftime que Ton faiFe de l'agréable douceur de ces Chinoifes* il y en a qui préfèrent le goût excel- lent & relevé de celles de l'Amerf* que. Les Grenadiers creifsee aufli en pet- fe&ioB I I ! ; îJ4 Histoire Naturelle fedion en toutes ces Iles , Ôc y por- tent des fruits beaus à voir Ôc agréa- bles au goût. Ces Arbriffeaus fervent en plufieurs endroits de Palifade aus courts , 6c aus avenues des maifons, &c de bordure aus jardins. Pour les Citrons > il y en a de trois efpéces différentes en grofTeur , que Ton ne nomme pas pourtant toutes Citrons. La première forte 3 qui eft la plus belle & la plus grofle , eft ap- pelée Lime. Elle n'eft guère bonne qu à confire ,. noyant prefque point de jus.mais étant eôfite elle eft exceU îente.La féconde efpéce eft le Limon, de la même grotfeur que les Citrons 4|ui nous font apportez d'Efpagne- mais il a peu de jus à proportion de la grodèur. Le petit Ckrpn. qui fait la treizième efpéce eft le meilleur & le pluseftimé. Il nJa qu vne tendre pe- licule,& eft tout plein defuc extrême- ment aigre 3 qui donne bon goût aus viades5& fert à afiàifoner plufieurs ra- goûts. Il eft particulier à l'Ameriquey Quelques curieus ont auffi en leurs jardins des Citrons parfaitémét dou^ kan£ ^Kœ***SS*L*^Sj revarang ^ «5sre SKSW DES IlES A^TIXEES. tf§ tant en leur écorce qu'en leur fuc,qui ne cèdent: ni en groiIeuryni en laveur à ceus qui eroiffent en Portugal. Us ont aulli des Figuiers de la même ef- pece que ceus qui croiflët en la Fran- ce 5c ailleurs5&: qui ont cecy de parti- culieivque prefque toute Tannée^ls font chargez de fruits qui meurilfent à merveille dans ces païs chauds. Les Anglois de Tlle de la Vermude > en font vne boiiïon fort faine &: extre- memct agréable au goût^qui leur tient lieu de vinjaquelle eftât gardée^deviéx auffi forte que le vin d'Efpagne. Article I L Dpi Goyavier. Our commencer par les Fruitiers^ on fait état du Goyavier 3 qui ap- proche de la forme d3vn Laurier^ horfmis que fes feuilles font plus molles x d'vn vert plus clair & qu'el- les font cottonnées par deffous. Lé- corce de cet Arbre eflr fort déliée cv vnie. Il poulie plufieurs rejetions de fa xacine ,, qui font à la fin % fi on ne les arrache^ I i i % i I I, I I i I I l%6 HiStOlUÎÈ NatVRÈIIÎ arrache , vn bois épais fur toute là bonne terre voifine. Ses branches qui iont allés toufuës > font chargées deus fois Tan de petites fleurs blan- ches y qui font iuivies de plufieurs pommes vertes 3 qui deviennent iau- nés Se de bonne odeur > lors qu'elles font meures. Ce fruits qui fe nomme Goyave * eft orné au ddîus dVn petit bouquet en forme de couronne» & au dedans, fa chair eft blanche ou rouge, remplie de petis pépins comme eft la Grenade. Ce qui fait que les Holan- dois Tappellent Grenade douce. Il eft de lagrofleur d'vne pomme de Rénec- le , & il meurrt en vne nuit. Sa qualité eft de referrer le ventre eftant mangé vert : dont auflî plu- sieurs s*en fervent contre le fins de fang: Mais étant mangé meur^il a m cflfec tout contraire. Â&n <ï)^*itt^4V^*Zé^^*ï^^ DES ItBS ÂNTIttES. IJ7 J3> ART! ï 1 ^ ^ % 5"?^5 mKK i i « & 7i i .158 Histoire NatvreiXM Article III. Du Papayer. LE Papayer eft vn Arbre qui croifl: fans branches 5 de h hauteur de quinze à vint pieds * gros à propor- tion ^creus de fpongieus au dedans* d'où vient qu'on remployé à condui- re par tout oàTon veut > les ruîfleaus des fontaines. Il y en a de deus fortes* Fvne qui fe voit communément dans toutes les Iles. Ses feuilles font divi- fées en trois pointes, à peu prés com- me la feuille du Figuier* elles font at- tachées à de longues queiies,qui font greffes comme le pouce > de crenfes au dedans : Elles fortent de la cime de l'Arbre* d'où eftant recourbées3el- les couvrent plufieurs fruits ronds de la groiïèurd'vne poyre de Coin* qui croiflènt à Tentour du tronc » auquel iisdemeorent attachez.. L'autre ^^m^^^-^^^:^^ des Iles Antules. 'àj& 13$ -Jî^É^s^ L'autre 1 1 ! ! S I Wf&^^S^è 140 Histoire Natvrelle L'autre efpéce de Papayer fe tron- ve particulièrement en l'Ile de Sainte Croix. Elle eft plus belle & plus chargée de fuëilles que l'autre. Mais ce qui la fait eftimer d avantage, c'eft fon fruit qui eft de la gr odeur d vn Melon , & de la figure d'vne mam- melle , d'où vient que les Portugais l'ont nommé Mamao. Ces Arbres ont cecy de particu- lier,qu*ils donnent de nouveaus fruits chaque mois de l'année. La fleur de IVne & de l'autre efpéce eft de bon- ne odeur , & approchante de celle du lafmin. Mais on met entre les regales des Iles le fruit de la derniere3à caufe que quand il eft arrivé à fa perfe&i- on,il a vue chair ferme., qui fe coup- pe par tranches comme le Melon, de qui eft d'vn goût delicieus.Son Ecor- ce eft d*vn Iaune méfié de quelques lignes vertes,&: au dedâs il eft remply d'vne infinité de petis grains ronds gluâs & mollafles, d'vn goût picquât, & qui set l'épice.Ce fruit fortifie l'ef- tomac,&: aide à la digeftiô. Quelques vus le ïuâgctjcôme il vient de TArbre*, mais rgram^^ÉPPaMiK^^^ wz*m des Iles Antilles. ï4* i f«W»Sî 142 Histoire Natvrelie mais les délicats le préparent avec dm Sucre y Se en font vne forte de Mar- melade3qui eft fort agréable à la veuë* & delicieufe au goût5 lors notamment que la douceur naturelle de ce fruit eft relevée par quelles épiceries qu'ils y mettent.Ou bien ils le confiffent tout entier > ou coupé & feché par quar- tiers^en forme decorces de Citrons. Article iy, Dm Momin ,& des Cacbimas. LE Momin eft vne Arbre qui croii de la groffeur d'vn Pommier ^ <3c porte vn gros fruit de même nom que luy. Il eft vray que les infulaires rap- pellent ordinairement Camf®t3 àcaufe que la graine de cens qui fe yoyent parmy eus 5 à efté apportée de Cora- fol , qui eft vne Ile tenue dépuis vn long - tems par les Hollandois, qui y ont vn bon ForfcSç vne ample Colo- nie^qui s'eft étendue en plufieurs au- tres Iles voifines de celle-là. Ce fruit reflemble à vn petit Cocombre , qui n'eft. point meur. Il a la peau toujouts verte risgfrsacfc^\frdEffra^^ ©es Iles Antilles. 143 1 ï44 Histoire Natvrelle verte , & émaillée de plufieurs petis compartimens,en forme d'écaillés. Si on le cueille en fa maturité il eft blanc au dedans comme de la Crème , & d'vne douceur relevée par vne petite aigreur, qui luy donne vne pointe fort agréable. Ce fruit eft rafiraichif* fant au poflible ,& delicieus au goût. Il porte fa femence au milieu , qui eft de lagrofleur , & de la figure d'vne Fève extrêmement polie,&dela cou- leur d'vne pierre de touche , fur la- quelle on auroit tout fraichément é- prouvé vne pièce d'or, car elle paroit émaillée de petites veines dorées. Nous joignons les Cachimas avec le Momin à caufe que ces Arbres por- tent aufïi des fruits, qui ont le goût & la blancheur de la Crème , & que leur femence qui croift au milieu, eft prefque d'vne même figure & folidi- té. Mais il y a deus fortes de Cachïmas* Tvne qui eft fauvage 8c herifiee dJé- pines,eft chargée d*vn fruit de la grof- feur d vne pomme médiocre , qui a la peau relevée par boflettes , & qui de- meure tousjours verte & dure. Et quant ^/jw^¥V^\M^ m des Iles Antilles. 145 quant à Pautrcqu'on appelle ordinal- jEc remenc le Cachimas franc , ceft vn o* Arbre qui a Pécorce allez polie , & l «. qui dans la faifon , prefente vn fruit '* beaucoup plus gros que le premier,- A qui étant parvenu à fa maturité eft d'v- ( \ ne couleur vermeille , ôc donc la fub- ,\ fiance qui eft cachée fous cette peau, & eft blanche au poffible, & dVne très- "> douce faveur. Ces Arbres croiflent 1: allez hauts, ôc font couverts de feiiil- !]W les aprochantes à celles des Chata- $ gniers.Ceus qui mangent rarement de (S ces fruits, ont remarqué, qu'ils ont la p vertu d'exciter Papetit , & de purifier *J\ Peffomac des humeurs gluantes, qui y  étoyent atachées , ce qui fait , qu'ils les ont eneftime. Article V. Du Iumpa. LE Iumpa ou Genipa, qui eft le mé- ^ me Arbre que les Brefiliens nom- % met Iampaba, Ôc les Portugais lenipa- : \ po , croift de la groflèur d'vn Chacai- . gnier, fes rameras fe recourbent près Tom. L G de F«S75 a 146 Histoire Natvrelxe de terre,& font vn ombrage agréable* fes feuilles font longues comme celles J2J du Noyer. Il porte des fleurs pareil- ? les à celles du Narcifie , qui font de #a bonne odeur. Son bois eft folide, de couleur de gris de perle. Les Habi- tans des lies coupent les troncs de ces Arbres quand ils. font encore Ieu- nes, pour faire des afuts de fufils ôc de moufquets , parce que ce bois étant ^ mis facilement en œuvre, peut eftre & fous fort peu de fubftan- ce aigrette, raffraichiilante > & d'afïez bon goût , vn noyeau dut comme celuy des prunes* Article VTL I. De lyAca\ou. 3L y a trois fortes d'Arbres qui por* tent le nom À'Aca')on\ mais il n'y a que celuy que nous décrivons icy, qui porte du fruit. C'eft vn Arbre de moyenne hauteur , qui panche fes branches iufques à terre. Ses feuilles font belles &c larges,arrondies par de- vant > & rayées de plusieurs veines. Il porte des fleurs qui font blanches, lors qu'elles s'epanouilfent nouvelle- ment 3 puis après elles deviennent incarnates , Se de couleur de pourpre. Elles croiilènt par bouquets ocelles exhalent vne fi douce odeur /qu'on n'a point de pêne à difeerner l'Arbre qui les porte. Ces fleurs ne tombent point jufqnes à ce qu'elles foiét pouf- fées par vne efpece de Châtaigne faite en forme d'oreille > ou de rognon de G 4 lièvre i 1 ï I I I i I i l 152 Histoire Natvrelie 1/2 lièvre akOjgwaifr«rara^y^^ des Iles A&tilles. 153 lièvre. Quand cette châtaigne a pris fon accroiifement > il Te forme au def- fous vne belle pomme longuette, qui eft couronnée de cette creire , qui de- vient en meuriiiant d vne couleur d'- Olive , pendant que la pomme fe re- veftd'vne peau délicate, &c vermeille au poffible. Elle eft remplie au de- dans 5 de certains fiiamens fpongieus, qui font imbus d'vn fuc tout enfeni^ ble dons & aigre ,qui defakere gran- dement > & que Ton tient eftre tres- vtile à la poitrine x & ans défaillances de cœur 3 étant tempéré avec vn peu de Sucre. Mais > s'il tombe fur quel- que linge , il y imprime vne tache ronfle , qui demeure iuiques à ce que l'Arbre fleurifle de nouveau Les Indiens fontvn bruvage ex- cellent de ce fruit , lequel étant gardé quelques jours , a la vertu d'enyvrêr atiffi promtément que feroit le meil- leur vin de France. La nois qui eft au deflus étant brûlée* rend vne huile cauftiqueyde laquelle on fe fert heureu. femét pour amollira même pour ex- tirpel ces duretez qui croifsêt au pieds3 G I 1M I 1 i I r 1 I Ï54 Histoire Natvrelle & que l'on nomme Cors. Que s'y on la cafle x on trouve au dedans vu pi- gnon couvert d'vne tendre pellicule, laquelle étant ô.ée > eft d'vn tres-bon goût y Se a la vertu -d'échauffer & de £ortifier\iierveilleufement l'eftomac. Cet Arbre ne porte du fruit qu'- vne fois Tan , d'où vient que les Bré- siliens , content leur âge avec les nois qui croiifent fur cette pomme, en re- fe'rvât vne par chacune année>laquel~ le ils confervent avec grand foin,dans vn petit panieivqui n'eft deftiné qu'à cet vfage ..■ Si on fait vne incifion au pied de cet Arbre , il jette vne go m-? me claire ôc tranfparente , que plu- sieurs ont pris pour celle qui vient d'Arabie. La femence de l'Arbre eft en la nois5 qui produit aifément étant naife en terre» Èmm /iw^>^gwvsg^-^^iks.>^qrfcr^ bes Iles Antilles, ijfâ Article VIII. Des Prunes D'Icaque. L'Icaque eft vne efpece de petit prunier, qui croift en forme d'vn buiiïbn y les branches font en tout tems chargées de petites feuilles lon- guettes , elles font deus fois Tan é- maillées dVne infinitéde belles fleurs blanches , ou violettes , qui font fui- vies dVn petit fruit rond 5 de la grof- feur d'vne Prune de damas > & qui étant meur devient blanc ou violet* d€ même qu'écoit fa fleur. Ce fruit eft fortdous, & tellement aimé de cer- tains Sauvage; > qui demeurent pies du Golfe d'Hondures s qu'on les ap- pelle Icaques , à caufe de l'état qu'ils font de ces Prunes,qui leur fervent de nourriture. Ceus qui ont voyagé par* my ces Peuples 9 ont remarqué que Ibrs que ces fruits (ont en leur macu- rité,ils font fort foigneus de s'en con- ferver la propriété v & que pour em- pefener leurs voifins 3 qui n'en ont point en leur contrée > d'y venir faire aucun dégaft, iU tiennent durant tout G € ce i ij6 Histoire Natvrellb 1 § ce i>ïs Ilbs Antilles. 157 ce tés-là aus avenues de leur terre des cor ps-de- garde j compofez de lélice de leurs me Heurs Soldats5qui les repouf- fenc vivement avec la flèche , & la roalliië , s'ils ont Tailui-ance de fe pre- ienter. Article IX. Des Prunes de Monhain. E Aïonbaïn eft vn Arbre qui croît \ tort haut 3 6c qui produit auffi des Prunes longues éc jaunes , qui iont d'afïez bonne odeur : Mais le noyau écant plus gros que tout ce qu'elles ,onc de chair > elles ne font guère efti- niées, fi ce n'eft de quelques -vus, qui les mêlent dans les bruvages du Oïtï- cou de du Mabjy pour leur donner vu meilleur goût. Les Porceaus qui vi- vent dans les bois font toujours gras* lors que ces fruits font en maturi- té y parce qu'il en tombe vne grande quantité fous les Arbres , à mefure qu'ils meiiriflent , qui font recueillis avidement de ces animaus. Cet Arbre jette vne gomme jaune3 qui rend vne odeur encore plus pénétrante i q**e celle S \ ê 1 k I i Ï5$V HlSTOI&B NATV^ÈtLE celle du fruit. Les branches étant mi- féscn la terre, prenent aifément raci- ne, ce qui fait, qu'on les employé or- dinairement à fermer les parcs^oùl'on* nourrit le bétail. L A R T ï C LE Xi» Du Courbary. E Courbdry croift d'ordinaire plus haut,plus touffu^ plus gros* que le Mmha'w, Il porte vn fruit* dont la coque eft fort dure à caiTer; & & qui a environ quatre doigts de long, deus de large & vn dépais.Dans , la coque il a deus ou trois noyaus* couverts dVne chair fort pâteufe, qui eft jaune com^ne du Safran. Le goik an'en eft pas mauvais , mais on n'en peut faire d'excès , que l'eftomac n'en foit extrêmement chargé , .& que la gorge n'en foit enipefchée. Les Sau- vages, en cas de necefîué en font vne forte de brava ge , qui nVft pas désa- gréable étant bien préparé 3 c'eit à di- se , Jors qu'il a bien boiiiliy avec 1 eau» Son bois eft folide 5 de couleur ti- rant- rant fur le rouge. l'Arbre étant vieil" rend de la- gomme , qut s'endurcit au Soieil5&: qui demeure toujours claire^ tranfparente comme l'ambre jaune3ôc de bonne odeur. Que lques Indiens en ; forment des boutons de diveries figu- res*dont ils font des Bracelets , des Colliers & des pendans d'oreille, qui font beaus ï luifans, & de bonne fen— tèu-r. A R T I C L E X L Du Figuier d*lndeè M voit en la plupart de ces Ifes* vn gros Arbre , que ks Euro- péens ont nommé Figuier d'Inde > à •■; caufe qu'il porte vn petit fruit fans noyau 3 qui a la figure > & le g^ût ap- prochant des figu s de France. D'ail- kurs il ne relllmble de rien à nos Fi- guiers 3 car outre que la feuille eft de différente figure 3êc beaucoup plus é- tr-oite , il croift en des liéùs -> fi deme- furément gros 5 qu'il s'en rencontre qu'à peine plufieurs hommes pour- vmm embraffe^ parce que le tronc^ qui I § i I 1 1 i I iGo Histoire Natvre£îtE* qui le plus fouvent n'eft pas vny en (a circonférence , pouffe à (es coftez* dépuis ia racine julques a l'endroit où les branches pienent leur naiflance* certaines arciles , ou faillies y qui s'a- vancent Julquesà4. ou 5. pieds aus environs > & qui forment par ce mo- yen de profondes cannelures , enfon- cées comme des niches. Ces faillies* qui font de la même fubfiance que le corps de l'Arbre font auffi enveio- pées de la même écorce qui le cou- vre y ôc elles font de répailfeur de fée à huit pouces 3 à proportion de la groffeur du tronc qu'elles entourent. Le bois de cei Arbres , cft au dedans blanc de mollafle * & Ton coupe or- dinairement de ces longues pièces qu'il pouffe hors de fon tronc 3 pour faire des planches , des portes, & des tables, fans crainte que l'Arbre meu- re. Car il recouvre en peu de tems* fi proprement de fon écorce , la brè- che qui a elle faite >. qu'a peine peut on appercevoir que .l'on en ait rien enlevé. Tous cens qui ont demeuré en ï Ile de la 11 on m y qui cft fitùée.au coâé des Iles Antilies. iGt ttr codé Septentrional de l'Ile Efpagno- & le,ont veu au chemin qai conduit des plaines de la montagne , au village que nos François ont nommé Mil- plantage jvnde ces Arbres , qui peut facilement $enif à couvert plus de deus cens hommes fous l'ombre de Tes brâ- ches , qui font toufiours chargées de jplufieurs feuilles fi toufues , qu'on y trouve en voyageant, vne fraîcheur fort agréable , ôc vn cou veu bien allure contre la pluye. Article XII. Du Cormier* L y a en ces Ues,vne efpece de Cor- ^ 1 IL y a en ces Ues,vne efpece de Cor- ^r tnier , bien différent du Cormiec jg que l'on voit en France. Car il eft d'v- v ne hauteur exceffive fort beau à voir, ^ & orné de belles feuilles , & de plu- |K fieurs branches qui les accompa- >^gwtts^*?aw^xsrfc^ I « * *■ î&4 Histoire Natvrelie bouquet^qui eft compoféde plufieurs nois grisâtres, dures , & rondes, qui refierrent des noyaus qui foin bons à manger. C'eft auffide cette efpece de Palmes , que quelques Nègres tirent du vin > par le moyen des incifions qu'ils font au defîous de fes branches. Il y a apparence , que c'eft le même Arbre , que les Brefiliens nomment Article XIV. Du Palmifte Franc. A féconde efpece eft nommée* ^Palmiïle Pranc. Ceft vn grand Arbre droit & d'vne hauteur demefu- ré- .Les racines de cette efpece de Pal- mier, s'élèvent hors de tene tout au- tour de la tige , de la hauteur de deus ou trois pieds 3 Se de la groflèur d'vn baril. Ces racines font petites à pro- portion de la hauteur de l'Arbre qu'el- les foutiennéc: mais elles font entrela- cées fi étroitement, Se fi confufémenc * les vnes dans les autres ,, qu'elles luy fervent d'vn folide appuy.Cet Arbre a cecy *ftraw^mh^v^«»fcrtkVK«^^ w*wmwx n&6 Histoire Natvrelxb cecy de particulier 5 qu il eft ordinai- rement plus gros par le haut que par le bas. Quand il eft encore jeune , il a Técorce tendre , de couleur grisâ- tre > 8c marquée de pied en pied d'vn cercle , qui donne à cognoiftre à peu prés , combien il y a d'années qui! occupe la terre : Mais quand il a pris Ca confiftence , il devient par tout fi folide & fi vny > qu'on n'y peut plus rien remarquer. Son Commet y eft or- né de plufieurs belles branches ca- nelées & polies , qui font accompa- gnées de part & d'autre '"i dVne infi- nité de feuilles verteSiiongues, étroit tes 3 8c déliées ,, qui leur donnent vne merveiileufe grâce. Les plus tendres de ces branches 3 qui ne Cont pas en- core épanoiiyes , s'élèvent direâe- ment au milieu de Y Arbre / pendant que les autres qui Cont courbées tout autour , luy compoCent vnê riche 8c agréable couronne. Cet Arbre Ce décharge par chacun mois de quelcune de Ces branches , 8c d'Vne écorce 3 qui Ce détache de deC- Cous, laquelle eft longue de quatre ou >gtfW^y^Pafa^ des Iles Antilles. 167 cm cinq pieds, large de deus ou envi- ron , ôc de i'épaifleur dvn cuir pré- para Les HahitansdesIle£,nomment cette écoïct'Tacke> ôc ils Femplcyent pour la couverture de leurs Cuifines, ôc des autres petis aSicés de leurs [Habitations., de même qu'ils fe fer- vent des feuilles 3 treflées, 6c cordon- nées proprement àTvndes codez des branches , pour faire celle de leurs maifons. Nous avons à deflein rangé les Palmiftes à la fin des Arbres fruitiers qui fe trouvent en ces Iles , à caufe qu'ils contribuent tous , hormis le Latànier , à la nourriture des hom- mes. Car fi le Palmifte épineus , le- quel nous avons décrit en l'article précèdent , fournit du vin , celuy-cy porte au fomet de fon tronc. ôc com- me en fon cœur, vne moelle blanche, très -tendre , ôc tres-favoureufe qui a le goût d Noifette,étant mangée crue, & étant bouillie ôc aflaifonnéc avec plufieurs feuilles déliées , ôc blanches au poffible , qui l'entourent , ôc luy fervent comme de chemife , elle peuc tenir 1 i6î Histoire Natvrelie tenir vn rang considérable , entre les plus delicieus mets des Antilles. Les François , appellent cette fubftance raoëlieufe Se les feuilles qui i'enve- loppenc , Chou de Palmifle y parce qu'ils en mettent au potage,au lieu de chous 3 ou d'autres Herbes. Si l'on fend en deus le tronc de cet Arbre > de qu'on enlevé comme il fe peut faire aifément > vne certaine ma- tière filiafleufe & moliaffe qui eft au dedans > ce bois qui refte ainfi creu- fé , Se qui eft épais d'vn bon pouce, fournit de belles & longues goutie- rcs 3 qui font de durée. On s'en ferç. pour couvrir d'vne feule pièce le faî- te des Cazes , & pour conduire les eaus par tout où Ton veut. Les Tour- neurs & les Menùyfiers font auffi avec ce bois , qui eft préfque noir, Se te polit aifément > plufieurs beaus ôc rares ouvrages , qui font naturelle- ment marbrez. Pline fait des Arbres fi prodigieu- fement hauts , qu'vne flèche n'en peut atteindre le fommet quand elle eft tirée. Et l'Auteur de l'Hiftoire géné- rale ri****>sM^xsmrt\>îG*zriMssœ des Iles Antilles. 163 raie des Indes , parle d'vn Arbre de telle hauceur , qu'on ne fauroit jetter vne pierre à plein bras par deiïus.Mais encore que le Palmifte que nous dé- crivons iurpaife de beaucoup cous les autres arbres des Antilles , nous no- ferions pas dire qu'il foit d'vne hau- teur fi demefurée , puifque du pied ds l'arbre , on remarque facilement vne belle panache , qui iorrant du plus haut du tronc , eft toujours tournée au Soleil levant- Elle fe renouvelle gar chacune année, Se quand elle rit iortie de Ion étuy 3 elle eft émaillée d'vne infinité de petites fleurs jaunes, en forme de boutons dorez , qui ve- nins à tomber, font luivis de plulîeurs fruits ronds, & de la groflcoi dvn pe- tit œuf de poule. Ils font attachez en vn ieu! bouquet, Se afin que ces fleurs & cqs fruits foient confervez contre les injures du tems,ils so: couverts par deiîus d'vne écorce épailie,dure ce gri- sâ:re par le dehors, & d'vn vermeil do- ré par le dedans, qui aboutit en pointe. Ce precieus paraiol n'eft autre choie que Tetuy , qui referroit les fleuri Tm.L H avant ! 1 1 1 S 1 S ryo Histoire Natvrelle avant qu'elles follet épanouyesj&qui s'étant entre- ouvert par delïbus >s'élâr- git en vne figure creufe au milieu > ôc pointue aus extrémités * pour mieus couvrir & les fleurs & le fruit Doutant que cette efpece d'Ar- bres n'a point d5épines3on le nomme Palmifle Fvanc. Il y en a encore vne autre, forte > qui ne croift pas fi haut que celle- cy , qui porte vne petite graine ronde 3 que les Nègres font foigneus de recueillir., à caufe qu'elle fert à faire de beaus Chapelets qui font marbrezj& polis à merveille. A R T ICLE XV, Bu Latamer. LA troiziéme efpece de Palme eft nommée LMamer. Cet arbre éle- vé fa tige allez ha^t, mais il ne croift pas beaucoup en groiïeur. Au lieu de branches il n'a que des longues feuil- les 3 qui étant épanouyes font rondes par le haut , & plicées par le bas^à la façon d9vn Eventail. Elles font atta- chées à de grandes queuës,qui fortent de *«?rere**»'TMi>ii des Iles Àntixxes* ï?î I i i fé m H 2 g 1 I I I ïyi Histoire Natvrelle de certains filamens , qui encourent la tête du tronc > comme vne groffe toile routfe ÔC fort claire. Ces feuilles étant liées par petits faifîeaus, fervent à couvrir les cazes , & la peau qu'on enlevé de deffus les queues, eft propre à faire des cribles , des paniers , &* plusieurs autres petites curiofitez, que les Indiens tiennent entre leurs meu- bles plus precieus. Ils font aufjTi du bois de cet arbre > & de celuy du Pal- mifte Franc > des arcs / des malluës, dont ils fe fervent en leurs combats, au lieu dépées , des zagayes, qui font des petites lancés aiguës , qu'ils dar- dent avec la main contre leurs enne- mis , 5c ils en muniffent la pointe de leurs flèches , qui font par ce moyen auffi pénétrantes que fi elles étoient d'acier. Article XVI. Du Cocos. LA quatrième efpece de Palme , Se la plus excellente de toutes 3 eft celle qni porte k nom de Cocos , ce fameus Zu&aa fc>^*^>^^vxiariryvr^^avgvta^^^^gwi -i des Iles Antilles. 37} w 1* 1 H \ fatneus ! 1 yû^ I É I ï74 Histoire Natvrellb fanieus fruit dont les Hiftoriens di- fent tant de merveilles. Mais il faut remarquer que les Gocos qui fe trou- vent aus Indes Occidentales* ne croif- fent pas à beaucoup-prés fi hauts3que cens de l'Orient , le tronc pour l'or- dinairefn'excedant pas vint 3 ou vint- cinq pieds en hauteur , étant au refte d'vne groiTeurhien proportionnée. Il eft beaucoup plus chargé de branches 6c de feuilles que le Palmifte Franc- Les Iles de la Monaque ôc de Roatam^ qui iont au Golfe d'Hondures 5 font renommées pour l'abondance de ces Arbres. L'Ile de Saint Bartelemy en*5- tre les Antilles, en eftauffiornée, <$£ c'eft de là> qu'on en a apporté en ccU le Je Saint Chnftofle. Le fruit croift fur le tronc même* au pied des branches. Il a la forme d'vne nois, mais fans faire de compa- raifon pour la grofleur : car vn feul pefe quelquefois environ dix livres. Depuis que l'Arbre a commencé de porter > on ne le trouve jamais fans irait j car il en poulie de nouveaus par chacun mois de l'année. La coque eft r^V^^^Vk^>^rMrVV^*aV^W/W^^ÉWB ■ des Iles Antilles, 175 eft fi dure & fi épaiffe 3 qu'on la peut polir y de y graver diverfes figures* pour enrichir les coupes '} les bouteil- les^ plufieuvs autres vaiïïbus.qu'on en fait 5 pour le fer vice ordinaire du ménage. Elle eft entourée d'v ne grof- fe envelope y qui eft toute de fila- ■mens. Quand on a ouvert cette n'ois de Gocos , on trouve premièrement vne chair blanche comme neige qui eft nourriffante au poffible : & qui a le goût de T Amande. Cette fubftance -xnoëlleufe eft en fi grande quantité en , chaque fruit 3 qu'on en peut remplir Vn plat : Elle eft attachée fermement au dedans de la Goque , & en fon mi- lieu, elle contient vn grand verre d'v- ne liqueur claire ôc agréable 3 comme du vin mufeat j de forte qu'vne per- fonne fe pourroit bien contenter de l'vn de fes fruits,pour fon repas. C'eft cette eau feule , qui fe convertit en germe, & qui entre fes autres vertus, a la propriété d'effacer toutes les rides du vifage, & de luy donner vne cou^ leur blanche & vermeille , pourveu H 4 qu'on 1 1 1 t^a&à I I I i \ ij 1: V ^ l ** fff Histoire Natvrelle qu'on l'en lave auffi-toft, que le fruit eft tombé de l'Arbre. Qui defirera d'apprendre toutes les particularités du Cocos, de les grands vfages qu'il a tant en la Médecine, qu'en la Ménagerie, lira s'il luy plaît, la belle Se ample defeription que François Pyrard en a fait en fon traitté des Anirnaus , arbres & fruits de Indes Orientates.Où il reprefente, que les Peuples de ces païs-là trou- vent dans ce feul Arbre non feule- ment leur pain leurbruvage plus de- licieus, leur vétemeut,ieur huile, leur fucre,leor mîel,leur bautne,&jles me-, deetnes pour rétablir leur fanté , lors qu'elle eft altérée : mais , qu'ils en tirent encore ta matière , pour bâtir avec vne facilité & folidité nonpareil- le , leurs maifons , & les vaifTeaus, dont ils entretiennent le cômerce avec leurs voifins. De forte , que Ton voit ans Iles Maldives, des Navires qui ne font bâtis & chargés que de Co- cos , ayant réceu de cet Arbre mer- veilleus , planches , chevilles, corda- ges , cables , voiles , ancres , huile, vin, IMgg&O^gWg^^ra /ÀVVI¥WVV>C>a^<>Vh^»r»^ I des Iles Antilles. 177 vin s confitures 3 fucre, éôc diverfes autres chofes. &* Article XVI I. Du Cacao, % QVelques-vns 3 à caufe de la ref« femblancedesnoms5confondent V. quelquefois le Cocos y avec le Cacao, !" qui croift en la Province de Guatima- a) la , près la neuve Efpagne , qui eft M auffi vn fruit tres-renommé en toute @ l'Amérique , pour eftre le principal 3 ingrédient 3 qui entre en la compofi- £" tïo^n de la Chicolate > ou Chocolaté, dont on fait vn bruvage fouverain, pour fortifier la poitrine, diffiper tou- tes les humeurs malignes qui s'y atta- chent > châtier la gravelle, & tenir le corps frais 6c diipos , pourveu qu'on le prene modérément. ç Ce Cacao > qui fe trouvoit auffi aus & Antilles * en Tan 1649. dans le lardin *-r d'vn Habitât de l'Ile de Sainte Croix, eft à prefent connu en celle de Ta- bago* comme nous l'avons dit eu 1 fcago, comme nous l'avons dit en ^ £011 lieu, Ceft vn Arbre prefque à H j femblabie A h^rf^^y fembla, «**É**ïYK«Tfc»vv^fc»avgv>aw :«* des Iles Antilles. i?9 femblable à l'Oranger, .fînon qu'il ne croift pas du tout fi haut , 6c qu'il a les feuilles vn peu plus étendues. On le plante ordinairement en des lieus ombrageus,& même fous d'autres ar- bres , qui le puiffent défendre de l'ar- deur du Soleil, qui flétriroit fes feuil- les. Son fruit qui eft de la groffeur» 8c d'vne figure approchante de celle d'vn Gland, ou d'vne moyenne Oli- ve , fe forme dans de grofles coffes longuettes , qui font rayées, & divi- fées pas les cotez, comme il eft icyre- prefenté*- CHAPITRE VIL $ es Arbres qui font propres hhâtiry ou qui fervent k la Menuy^ ferie 3 ou AU Teinture. NOus avons iufques icy reprefen- té plufieurs beaus Arbres qui portent des fruits,qui contribuent à la noui'ritmx 5 ou au raffraichiffement- H: C des> I i I l i ! ! i, iSo Histoire Natvreile des Habitans des Antilles :& en ce Chap. nous nous propofons de trait- •ter des principaus , qu'on peut em- ployer vtilement , tant à bâtir des maifons5quJà les orner, par le moyen des beaus meubles de menuyferie,quJ- on en peut faire ; puis après nous considérerons tous les autres Arbres de diverles couleurs, qui font propres à la Teinture. Article I. De dent fortes d'Acajou. ]L y affort peu d'Iles^oè Ton ne trou- ve de beaus Arbres 3 qui Jfonr très- propres à bâtir des maifons, & à faire divers ouvrages de méauyferie.On fait particulièrement état de i* Acajou > qui croïft d'vne hauteur & d'vne gro fleur ii exceiîlve , que les Caraïbes c-kent fouvenc d'vn feul tronc 5 ces grandes Chaloupes i qu'ils appellent Pyrau- gués > qui font capables de porter cin- quante hommes, il pouffe plufieurs branches > qui font fort toufu'ês 3 à caufe ,v>^n^av^i*^ÉVr^v^y>rV y^ ^irvvvarii^ *t>». des Iles Antilles. i8î caufe de la multitude de feuilles donc elles font chargées * l'ombrage de cet arbre eft fortagreable:Et même quel- ques vns tiennent , qu'il contribue à la fantéde ceus qui le repolcnc def- fous. •Il y a deus fortes d' Acajou 5 qui ne font d>fferens qu'en la hauteur de leur tronc 3 3c en la couleur de leur bois. Celuy qui eft le plus eftimé, a le bois rouge , léger ; de bonne fenteur, 3c fort facile à élire mis en œuvre. On a remarqué par expérience > que le ver ne l'endommage point;qu'ilne Ce gourrit point dans Peau , quand il été^coupé en bonne Lune :|Et que les coffres 3c les aumoires qui font faites de ces bois , donnent vne bonne o- deur ans habits , 3c qu'ils les contre* gardent de toutes les vermines 3 qui s'engendrent 5 ou fegliflent aifément dans les coffres qui font faits d'vne autre matière. Ces proprietez font caufe que quelques-vns ont creu\que cet arbre étoit vne efpece de Cedre.On en faitauffidel'Efcente, pour couvrir lesmaifons. Les Capitaines des Na- vires, ê i 1 i i 1 1 I I ? I i- vf% HIstoïtve Natvrflle vieres , qui trafiquent aus Antilles, apportent Couvent des planches de ce bois qui font fî longues Se fi larges, qu'il n'en faut qu'v ne, p.our faire vne belle ôc grande Cable. L'autre forte âyAca)ou , eft de pa- reille figure quant au dehors ,• que celuy que nous venons de décrire^ nuis il ne croift pas du tout fi haut, & quand on a levé Técorce 5c l'au- bel 3 on trouve que le boîs eft blanc. Il eft auffi fort facile à mettre en œu. vre, quand il eft fraichement cou- pé -, mais fi on le laifle a l'air , il fe durcit en telle forte , qu'on a bie?i de là pêne à s'en fervir. Les Habitans des Iles , ne l'employent qu'à faute d'autre.à caufe qu'il eft fujet aus vers, & qu'il fe pourrit en peu de tems. Si on fait des incifions au tronc de ces arbres , ils jettent vne grande abon- dance de gomme , qui pourroit avoir quelque bon vfage, fionea avoit fait Telia y* • BES ÏXES AnTIILES; fS'p A R X I C L 2 IL De UAcomas, CEt Arbre cft bien suffi gros &c auffi haut que l'Acajou ,-& n'eft pas moins prifé des Archite&es , de des Menuy fiers. Ses feuilles font po- lies, & afles longuesili porte vn fruit de la groffeur d'vne prune , qui étant venu en fa maturités eft de couleur jaune,& beau à voir , mais il eft trojp amer pour eftre recherché des homes* Iles Ramiers s'en en graillent en vne faifon de l'année,, & pendant ce tems labeur chair eft de même goùt,quele fruit qu'ils ont mangé. Il a Técorce cendrée & raboteufe,Ie bois pefant &c ayfé à polir, & félonies lieus où il croiftjfon cœur eft rouge,ou jaunâtre^, ou tirant fur le violet.Si on ouvre l'é- corcevil en fort vne liqueur laiteufe^ qui fe durcit en forme de Gomme. A R T I G LE III. Du Boa de Rofe. 111 faut avouer , que fi les Habkans des Antilles ,.av oient delfein de s'y-" établir ^m.~^^é v^m^^* 7\ fc f? i I i II \84 Histoire Natvrëllb établir fermement > ils y pourroient trouver,non ieulement les chofes qui font neceffaires à l'entretien de la vie, mais encore les délices 6c les curioiî- tezjtant pour ce qui concerne la nour- riture,& le vétement>que pour ce qui regarde la ftrudturede leurs maifons, Se leur embeliiflement intérieur. Mais les douces penfées du retour au païs de leur naiflance, que la plupart con- fervent en leurs cœurs 3 leur font né- gliger tous les rares avantages que ces lies leur prefentent3& palier légè- rement par defïus la riche abondance des chofes precieules qu'elles produ-if-c fient 3 fans en tirer aucun profit. Car pour ne rien dire preientément de la grande facilité qu ils ont de faire des étoffes du Cottô qui y croift,de nour- rir en leurs parcs toutes fortes de vo- lailles^ de bétail domeftique 3 qui y foillonne autant qu'en lieu du monde; ils pourroient fans doute 5 recevoir beaucoup d'émolumens de plu Meurs bois precieus 5 qui feroient de grand viage non feulement polir les loger, & les meubler commodément : mais au (fi i**ift *^v CTTfcrv vr* »^vvv>,v>r^ v*m, des Iles Antilles. 185 auflipour en faire du commerce avec l'Europe. Les defcriptiôs que nous fe- rons de quelques vns de ces rares Ar- bresjtant au refte de ce Chapitre~qu'au fuivant, juftifieront cette porpofkion. Le Bois de Rofe5 étant propre non f > feulement à la Charpente , mais auffi \Ù à la Menuyferie, doit tenir le premier S) rang. Cet arbre croift dJv ne hauteur bien proportionnée à fa grofleur.Son tronc eft ordinairement 11 droit , que c'eft l'vn des plus agréables ornémens des forefts des Antilles. Il eft cou- vert des plufîeurs belles branches^qui font accompagnées de feuilles molles* velues d'vn cofté, Se longues à peu près comme celles du Noyer.En la fai- fondes pluyesil porte des fleurs blan- ches 3 de bonne odeur > qui croiffent par bouquets y Se qui relèvent mer- veilleufément la grâce naturelle de cet arbre. Ces fleurs font fuivies d'vne petite graine noirâtre Se polie. Lécor- ce de Ton tronc eftd'vn gris blanc. Son bois eft au dedans de couleur de feuille morte, Se quand le Rabot Se le Poliiïbir on patte par deffus on y remarque I I I I ïf(3 Histoire Natvrule remarque plofieurs veines de différent tes couleurs> qui font comme des on- des 5 qui luy donnent vn éclat mar- bré 5& vn loftre merveilleus. Mais, la douce odeur qu'il exhale,lors qu'on le met en œuvre i &c qu'on le manie*-* eft ce qui le fait prïfer davantage, & qui luy donne le beau nom qu'il porte : Quelques- vns ont même efti- rné que cette douce lenteur y qui eft encore plus agréable que celle de la Rofe , luy devoit donner le nom de bois de Cypre , & par effet ils le font paffer fous ce titre* en quelques-vnes des Antilles. Cet arbre croift dans toutes les lies de même fa (Ton, quant à la figure extérieure $ mais fon bois eft marbré de diverfes couleurs, feloir la différence des terroirs * ou il a pris fa naiiïance. Article IV. Du Bois D'Inde* CEt Arbre precieus & de bonne lenteur > fe trouve en fi grande abondance dans l'Ile de Sainte Croix,; SES IfIS ÂNTILLHS'. I & en plufîeurs autres^ qu'il y en a des forefts piefque contes entières* Il va du pair avec le bois de Roze j mais il croit beaucoup plus gros Ôc plus haut, lors qu'il rencontre vne bonne terre. Son tronc prend de profondes racines & s'eteve fort droit.Son écor- ce eft deliée^douce & vnie par tout, fa couleur eft d'vn gris vif & argenté,&: en quelques endroits elle tire fur le jaunerce qui fait remarquer cet arbre entre tous les autres.!! fleurit vne fois -l'an, au temps des pluyes3& pour lors il renouvelle vne partie de ton feuil- lage. Son bois eft très- folide^&: pefant au poffible > d'où vient qu'il iourFre d'être po!y3& que quelques Sauvages en font leurs mailuës. Apres qu'on a levé vn aubel vermeil , qui eft fous Ixcorce, on apperçoit le cœur de l'ar- bre qui eft extrêmement dur3& d'vne couleur violette, laquelle le fait beau- coup eftimer des curieus. La bonne odeur de cet Arbre re- fide particulièrement en fes feuilles* Elles font de pareille figure 3 que cel- les du Goyavier5 & quand on les ma- nie i 288 Histoire Nàtvrelle nie elles parfument les mains d'vne fenteur plus douce que celle du Lau- rier. Elles donnent à la viande 8c ans fauces vn goût fi relevé,, qu'on l'attri- bueroit plutôt à vne compofition de plufieurs fortes d'efpiceries 3 qu'à vne fimple feuille. On s'en fert anffi dans ks bains , que les Médecins ordon- nent pour fortifier les nerfs foulez^ pour defTHcher Tenfleure , qui refte ans jambes de ceus qui ont été travail* lez de fièvres malignes. Article V. De plufieurs h ois rouges qui font propret à bâtir) & des bon de fer. OVtre T Acajou, dont nous avons parlé au commencement de ce Chapitre, il y a encore en ces Iles plufieurs beaus arbres, qui ont le bois rouge , folide , & pelant , qui refifte aus vers , & à la pourriture. Ils font tous très-propres à bâtir des maifons, ôc à faire de beaus ouvrages de me- nuiferi'e. Mais on fait particulièrement état du -^i#>^^ y«ry v^^^WKSJv^ • IDE s îles Antilles. 1&5? Au h ois de fer , qui porte ce nom 3 à caufe qu'il furpaiïè en folidité > peian- teur , 8c dureté, tous ceus que nous avons d'écrits jufques à prêtent. Cet Arbre,qui doit eftre mis entre les plus hauts , &: les mieus proportionez des Antilles, eft revêtu de beaucoup de branches. Il porte de petites feuilles, qui aboutilîent en pointe , & font di- vifées prés de la queiie. Il fleurit deus fois rannée,affavoir ausmois de Mars & de Septembre. Ses fleurs , qui font de couleur de violette , font fuivies d'vn petit fruit , de la groflèur d'vne Cerize qui devient noir étant meur, '&Teft fort recerché des Oifeaus. LJé- corce du tronc eft brune. Le Bois eft dVn rouge bien vif , lors qu'il eft nouvellement coupé ; mais il fe ternit étant à l'air , & perd beaucoup de fon luftre. Le cœur de l'Arbre eft d'vn rouge fort obfcur , comme le bois de Brefil , & dVne telle dureté, que l'on doit avoir des coignées bien trenchantés,& qui foyent à l'épreuve, pour le pouvoir abbaçre : Mais fou bois étant beau, folide ? facile à polir* & ym^*t* i!mi^»iiWWaiK« i xpo Histoire Natyrelxe 6c plus incorruptible que le Cèdre Bs le Cyprès ■> il récompense abondam- ment par toutes ces bonnes qualitez^ la pêne qu'il donne 3 avant qu'on s'en pûiiTe fervir. Il y a encore vn autre' Arbre qui porte le même nom de Bois de fer* mais il n'eft pas comparable au pre- cedent.îl ne porte que de petites feuil- les 3 & quand il fleurit , il eft chargé d'vne infinité de Bouquets , qui s'élè- vent fur toutes fes branches ., comme autant de pannaches 5 qui les parent fort avantageufement. Il eft d'vne belle hauteur \ & il a l'aube! jaune cm. bianc/elon les lieus où il croift. Tout le bois de cet arbre , hormis le cœur qui eft fort petit 3 fort dur 3 & tirant fur le noir > eft fuiet aus vers > ce qui fait qu'on ne le met pas volontiers en œuvre 5 iî ce n'eft à faute d'autre. ' A ht i c l É VI. De plujieurs Arbres dont le Bois eft. propre a la Teinture, ENtre les Arbres qui croilTent aus Antilles , il y en a plufieurs qui fervent > i*^ft^^VK«^r^v^^^ry^vaftf*j des Iles Antilles. 191 fervent à la Teinture. Les plus efti- mez, Se les plus connus, font , le ^Boisde Brefil , le Bois laune, TEbé- ne verte , Se le Roucou. Le Bois de JBreJïl eft ainfî nommé, à caufe que le premier qui a efté ve'ti en Europe., avoit efté apporté de la Province du Brefil , où il croift en plus grande abondance, qu'en aucun; autre , endroit de Y Amérique. Cet ar- bre eft rare aus Antilles , & on n'en trouve qu'en celles > qui font les plus heriflees de rochers fecs Se arides. Son tronc n'eft pas droit comme celuy des autres arbres ; mais il eft tortu 3 ra- boteus , SC plein de nœuds à peu prés comme l'Epine blanche. Lors qu'il eft chargé de fleurs il exhale vne dou- ce fenteur , qui fortifie le Cerveau. Son bois eft recherché des Tour- neurs .y mais fon principal vfage eft en la Teinture. L'Ile de Sainte Croix eft renom- mée parmy toutes les autres , pour a- voir vne infinité d'Arbres rares Se precieiîs. On fait particulièrement é- tat d Vn, qui s'élève fort haut Se dont le & fc ! *-^G00&Jl i 1 1 i I ii Ï92 Histoire Natvrelle le bois qui eft parfaitement jaune, feu à la Teinture. Lors que bs An- glois tenoient cette Ile , ils en envo- yoient beaucoup en leur païs. On le nomme Bois Iaune, à caule de fa cou- leur,ou bien de Fuflokj ainfi que nous l'avons dit en la defc'rîption de l'Ile de Tabago, en laquelle cet Arbre eft auffi fort commun. L'Ebtne farte eft ordinairement employée à faire plufieurs excellens ouvrages de M'enuyferie,par ce qu'el- le prend aifément la couleur, & le lu- ftre de la v-raye Ebéne.mais fon meil- leur vfage eft en la Teinture , laquel- le elle rend d'vn beau vert naifîant. L'arbre qui porte ce bois , eft fore touffu, à caufe que fa racine pouffe vue grande quantité dere)ettons,qui rempefehent de croiftre (i haut ôc fi gros qu'il feroit , fi fa force étoit ra- maflee en vn feul tronc. Ses feuilles font polies , ôc dVn beau vert. Sous Fécorce il a environ deus pouces d'au- bel blanc , Se le refte du bois jufques au cœur , eft dVn vert fi obfcur,qu'ii approche du noir j mais quand on le polit, ses Iles Antilles. .195 polit 3 on découvre certaines veines jaunes qui le font paroîcre marbré. Article VIL Du Roue ou. C'Eft le même Arbre que les Bré- siliens nomment Vrucu: Il ne croît pas plus haut qu'vn petit Oran- ger. Ses feuilles qui font pointues par l'vn des bouts , ont la figure d'vii cœur. Il porte des fleurs blanches mê- lées d'Incarnat > Elles font composées de cinq feuilles, qui ont la forme dVne Etoile , & la largeur d'vne Ro- fe. Elles croiflènt par bouquets , aus extremitez des branches. Ces fleurs font fuivies de petites Cliques* qui re- ferrent plufieurs grains de la grolTeur d'vn petit pois, qui étant parvenus à maturité , font couvers d'vn vermil- lon le plus vif i Se le plus éclatant qu'on fauroit défi rer, Cette riche tein- ture qui eft enfermée en cette éebree, eft fi mollete, Se fi gluante, qu'elle s'attache aus doigts 9 auffi - tôt qu'on la touche. T™-1- I Pour 1 1 51 I 1 I I I I! 194 Histoire Natvrm.lb Pour avoir cetce precieufe couleur* on secoue dans vn vailTeau de terre les grains fur iefquels elle eft atta- chée s on verfe deiïus de l'eau tiède, dans laquelle on les lave iufques à ce qu'ils ayent quitté leur vermillon. Et puis quand on a iaillé repofer cette eau > on. fait fecher à l'ombre le marc, ou la lie épaiiTe qui fe trouve au fonds du vaiiïeau 3 & Ton en forme des Ta- blettes 3 ou de petites boules , qui font fort eftimées des Peintres > 8c des Teinturiers, lors qu elles font pu- res , & fans aucun mélange , comme font celles que nous venons dejii- crire. Le bois de cet Arbre fe brife faci- lement ; il eft très- propre pour entre* tenir le feu , & s'il eft entièrement ê- teint5&: qu'on en frotte quelque tems deus pièces Tvne contre l'autre > elles jettent des étincelles comme feroit vn rûfîl> qui allument le Cotton, ou tou- te autre matière fufceptible de feu^ que Ton a mile auprès polir les rece- voir fon écorce fert à faire des- cor- des qui font de durée. Sa racine don- t ne KâOiâùàUKS&KI 'j>e$ Iles Antilles, i^j # sy 1 i ne a ! 1. ^^WV^kN^^fcr^\ LE^ft»^rW7»Sgg^ i 1 1 ? 196 Histoire Natvrelle ne vn bon goût aus viandes^ôc quand. on en mec dans les fauces 3 elle leur communique la couleur>& l'odeur du Safran. Les Caraïbes > ont de ces Arbres en tous leurs lardins^ils les entretien- nent foigneufernent &' 'les vprifenc beaucoup * à càufe qu'ils en tirent ce beau vermillon dont ils le rougifletic le corps. Ils s'en fervent auffià pein- dre ,.& à donner du luftre aus plus; belles vaiffelles de leur petit ménage. On pourroit apffi mettre au rang âes Arbres qui font propres! là Tein-> turc , la plupart de ceus qui diftilemr des gommes: car cèus qui ont eftëcii- rieus d'en faire l'effay, ont remarqué, qu eftant méfiées dan s la TeinBirè, elles relèvent les couleurs les plus \ {ombres Se les moins claires rpïSvti * certain éclat , & vn fort beau iuftte/ quelles leur donnent. Chapi des Iles âhtilles. 197 CHAPITRE VII I. Des Arbres qui font vîiles a la mé- decine 3 Et de quelques autres dont Us Habitons des Antilles feuvent tirer de grands avan- tages. Î~Xleu ayant: ordonné à tous ks ^Peuples les bornes de leur habi- tatio^n'a alifle aucune Codée dépour- veuëde moyens neccflaires ^ pour y faire fubfiffcer commodément les hô- $aS§* qu'il y a placez ; 3c pour étaler devant leurs yeusjes richellès infinies de fon adorable Providence^ il a don- né à la terre la vertu de produire 3 non feulement les vivres qui font necef- faires pour leur nourriture j mais en- core divers antidotes > pour tes - >munir contre lesinfirmitez,dont il» peuvent être acuëillis , &■ plufieurs remèdes fouverainSj pour les en délivrer > lors qu'ils y font tombez. Pour ne rien di- re des autres endroits du monde , les Antilles poflèdent fans contredit tous I 3 ces j 1 1 1 20£2fi££ BfsâZSZ IWH 1 I Ï9B Histoire Natvrbllh ces rares avantages , en vn degré fort confiderable: Car elles ne fournirent pas Amplement à leurs Habitans vne agréable variété de fruits , de racines,,: d'herbages, de légumes , de gibier, de poiflbns, & d'autres délices pour cou- vrir leurs tables y mais elles leur pre- fentent encor vn grand nombre d'ex- cellcns remèdes , pour les guérir de leurs maladies.C -efl: ce que le Le&eur jadicieus pourra facilement remar- quer en la fuitte de cette Hiftoire Na- turelle, & particulieremet en ce Cha- pitre, où nous décrirons les Arbres qui font d'vn grand vfage en la Mé- decine. Article I. Du Cajfier ou Canificien C Et Arbre croît de la grofleur > 8c ptêque de la même 6gure quVn Pefcher,fes feuilles font longuettes & étroites: Elles tombent vne fois Tan pendant les feichereifesA quand la faifon des pluyes retourne , il en poulfe de nouvelles. Elles font pré- cédées «>W^i 1 ! i i i 200^ Histoire Natvrelie cédées de plnfieurs beaus bouquets de Heurs jaunes s auquelles fuccedent de longs tuyaus.ou de longues Cliques, qui viennent de la grcffeur d vn poul- ce , ou environ , & font quelquefois d'vn pied & demy , ou de dens pieds de long. Elles contiennent au dedans, comme en autant de petites cellules, cette drogue Medecinalc fi connue âts Apoticaires,que Ton appelle Caf- fe. Nos François nomment l'Arbre Cajfîer.oxx tamftctery Se les Caraïbes Mali Mali. Tandis que le fruit grof- fit & s'allonge , il eft toujours vert, mais quand il a pris fa confrftance, il devient en meuriflaht, bmn * ou vf8-: let, & demeure ainfi fufpendu à fes branches. Quand ce fruit eft meur &c fec, & que les Arbres qui le portent font agitez de grands vens 3 on entend de fort loin le bruit > qui eft excité par la collifion de cqs dures & longues Cliques s les vnes contre les autres. Cela donne lefpouvante aus Oifeaus, qui n'en ofent approcher ; & poul- ies hommes qui ne favent pas la cau- fe ^ttVgW»^ des Îles Antilles, ici fe de ce (on confus^s'ilsne voyent les Arbres mêmes émeus 3 8c choquans loirs branches 8c leurs fruits 3 ils s'i- maginent qu'ils ne ionc pas loin du bord de la mer^de laquelle ils croyenc entendre l'agitation : ou bien ils fe perfuadent^que ceft le Chamaillis de plufieurs foldats qui font aus mains. Ceft la remarque de tous cens qui ont vifité le fein y ou comme Ton nomme ordinairement 3 le Cul de-fac de l'Ile de Saint Domingue , où Ton voit des plaines entières > 8c de fort longue écenduc, , qui ne font couvertes d'au- cuns autres Arbres. Ceft auffi de là, félon toute apparence a qu'on a apor- té la femence de ceus qui croiffent a-us Antilles. Au refte, ces bâtons de Cafle qui viennent de l'Amérique^ font plus pleins 8c plus pelants que ceus qu'on apporte du Levant * & la drogue qui eft dedans 5 a tous les mêmes effets. Les fleurs du Caffier étant confi- tes en fncre 9 purgent benignement3 non ieulement le ventre , mais aulîî la veflie, Lqs bâtons du CaiTier lors I 5 qu'ils «j^i^-^arirM^"^^"™3™"" ï I i % ê 1 ioz Histoire^Natvrelle qu ils lont confies verts , ont auffi la même propriété. Mais la poulpe étant extraite du fruit meur , fait vne ope- ration plus prompte , & beaucoup plus l< iitbie. Plufieurs des Habtans du Eaïs fe trouvent bien d'en vfer chaque mois ,vn peu avant le repas: & ils ont remarqué, que ce dous Mé- dicament leur confervemerveiileufe- ment leur bonne conftitution. i i *» *? Article. IL Des Nois de Médecine. LEs Noté de Médecine y qui font m communes en toutes c^s Ilesy croiifent fur vn petit Arbre--, dont on fait le plus fouvent les feparations des Iardins & des habitations. Si Ton jl'empefche fa jufte croiffance,it mon- te à la hauteur d vn figuier ordinaire* duquel il a auffi la figure > fon bois e(l fort tendre 5c moëlleus, il produit plufieurs branches qui rampent con- fufément à Tentour du tronc. Elles font chargées de feuilles aiïez lon- gues,, des Iles Antilies» ioj I* S g*es^ ^wàWK+iMrr. I I $ pour leur fer vir de véhi- cule ôc de corredi£ ^ Les rameaus de cet Arbre érant couppés Se mis en terre., prénent faci- lement racine.Les Portugiis tirent de l'huile des pignons,quieft eftimée en la ménagerie > ôc qui peut auffi avoir jfon lieu en la Médecine. L Article III. Du Bois de CaneUe* 'Arbre , qui porte cette efpece de Canelle , qui eft fi commune en toutes 1 1 y*^ryiwff?*ii a <+r*%^A kVJS^n^/ % I 1 1 10G Histoire Na t vrex l e toutes les Iles, peut tenir place entre- ceus qui fervent à la Médecine , puif- que ion écorce aromatique eft re- cherchée de tous ceus qui font tra- vaillez cTaffe&ions froides , 6c emplo- yée pour décharger l'eftomac des hu- meurs gluantes & pituiteules qui l'op- preffent. La bonne odeur , de la ver- dure perpétuelle de ce-bel Arbre, ont perfuadé à quelques vns que c'etoit vne force de Laurier : Mais il croift beaucoup plus haut 3 fon tronc eftV auffi plus gros, fes branches font plus étendues , & fes feuilles 9 qui ne font pas du tout Û longues , font de beaig, coup plus douces , . & d3vn Vert plus gay. Son écjrce, qui eft cachée tous * vne peau cendrée t ft plus épaiffe , &■ dVne coulur plus blanche, que la Ganelle qui v enc du Levant: Elle eft* auffi d'vn goût plus acre & plus mor- dicant , mais étant féchée à l'ombre,- elle donne vne faveur tres-agreable aus viandes. Outre tous cqs Arbres precieur- que nous t rions de décrire 5 les îles de Tabagô^ delà Barbade , & de îainte ees Iles Antilles,, 207 Sainte Croix/ont eftimées entre tou- tes les autres > pour avoir plufieurs bois que IVfage a rendus recomman- dâmes en la Médecine. Car on y trou- ve du Sandale 5 du Gayae y êc même du Safafras 3 qui font allez connus^ fans qu'il foit befoin d'en faire des de- feriptions particulières» A K T I C LE IV. Du Cottortnier* 1 L y a encore plulîeurs autres Ar- JLbresj aiïèz communs par toutes ks Antilles 5 dont les Habitans peu- vent tirer de grandes cominoditez. Le Cottonnier > que les Sauvages ap- pellent Manoulou-Akecha 5 doit te- nir le premier rang 5 comme étant le plus vtile, Il croift de la hauteur d'vn Pefcher 1 II a Técorce brune 3 les feiiiiles petites 3 divifées en trois. Il porte vne fleur de la grandeur d'vne Rofe 3 qui eft foutenuë par le bas^fur trois petites feuilles vertes^ piquan- tes^qui l'enferrent. Cette fleur eft corn- pofée de cinq feuilles 5 qui font dVn jaune 1 gJIE/IW^ I I 2.08 Histoire Natvrellb jaune doré, elles ont en leur fonds de petites lignes de couleur de pourpre, & vn bouton jaune, qui eft entouré de partis filamens de même couleur. Les fleurs font fui vies d'vn fruit , de ligure ovale,qui eft de la grofleur d'v- ne petite nois avec fa coque. Quand -il eft parvenu à fa maturité, il eft tout noir par dehors , & il s'en trouve en trois endroits , qui font voir la blan- cheur du Cotton , qu'il referre fous cette rude couvertnre.On trouve dans chaque fruit > (et petites fèves 5 qui font la femence de l'Arbre. Il y a vne autre efpécede Cotton- mer , qui rampe fur la terre , comme la vigne deftituée d'appuis : c'eft cel- locy , qui produit le Cotton le plus fin & le plus eftimé. On fait de l'vn Bc de l'autre des toiles 3 &c plufieurs petites étoffes > qui font d'vn grand Vtage en la ménagerie. Article V. Du Savonnier. IL y a deus fortes d'Arbres, dont les Infulaires le fervent an lieu de Sa? on, des Iles Antilles. 209 Savon , Tvn a cette qualité en fon fruit , qui croift par grappes , rond, jaunâtre , ôc de la grotfeurd'vne pe- tite prune , qui a auffi vn noyau noir & dur, qui fe peut polir. On le nom- me communément Pomme de Savon. L'autre, a cette vertu en faracine,qui eft blanche & mollaffe. L'vn & l'au- tre rend l'eau blanche & écumeufe, comme feroit le Savon même, mais fi on vfoit du premier trop Couvent* ilbruîeroit le linge. L'on appelle ces Arbres Savonniers > à eau fe de la pro- priété qu'ils ont de blanchir. Article VI. Vu Paretuvier. CEt Arbre , ne fe plaît qu'aus marécages , &c aus bords de la mer.ll a la feuille verte,épaifle, & af- fez longue. Ses branches qui fe re- courbent contre terre /ne l'ont pas fi toft touchée,qu'elles prennent des ra- cines,&: pouffent vn autre Arbre,qui entrelace ordinairement fa tige & fes branches fi prés à prés , & à tant de réplis. ^L^^yA ^x^m^ \zmt-TaTLSA k % %\6 Histoire NAïvorïm répris , avec touc ce qu'il peut join- dre, que ces Arbres gagnent & occu- pent en peu de tems 5 tout ce qu'ils1- trouvent de bonne terre , qui eft par ce moyen rendue fi difficile à défri- cher, que Ton n'en peut attendre au- cun profit. Ceft fous ces Arbres, que les Sangliers , 8c autres belles Sauva* ges tiennent leur fort. Ils fervent anffi en quelques liens de rempart ans Ha- bitais des Iles , qui font aflurez que perfonne ne les furptendra de ce cofte là. Ils font encore très vtiles , en ce que n'y ayant point de Chefne en ces îles , leur écorce eft propre à tangêc les cuirs. Akti rwé& Tsïzs Â^pAmsr 01 I 1 I; ! . tu Histoire Natyrelie Article VIL Bu CalehaJJier. |L ne faut pas oublier le Calebaffier, Jqai fournie la plus grande partie des petits meubles du ménage des In- diens, & des Habicans étrangers, qui font leur demeure en ces Iles. C'eft vn Arbre , qui croift de la hauteur, de la grofleur , ôc de la forme d'vn gros Pommier. Ses branches font or- dinairement fort touffues. Ses feuilles qui font longuettes 3 étroites, & ron- des par le bout, font attachées par bouquets ans branches , & en qu^L ques endroits du tronc. Il porte des fleurs & des fruits prefque tous les mois de l'année. Lès fleurs font d'vn gris meflé de vert , & chargé de peti- tes taches noires, & quelquefois vio- lettes. Elles font fuivies de certaines pommes , dont à peine en peut - on trouver deusyqui foient de pareille grofleur , 6k: de même figure. Et com- me vn potier fait paroitre l'adreifè de fa main , en faifant fur vne même roue , ôc dVnc même malle de terre, des I I i I I «14 Hï STO I RE Na^TYREXLB des vaiffeaus d'vne forme ôc d'v ne ca- pacité différente: Ainfi la nature mon- tre icy fon induftrie merveilleufe , en ■ tirant d'vn.feul Arbre , des fruits di- vers en leur forme, & en leur grof- feur , encore qu'ils foient tous atta- chez à vne même branche , ,& pro- duits d'vne même fubftance. Ges fruits ont cecy de commun,qu- ils ont tous vne écorce dure, ligncu- fe , dVne épaiffeur & d'vne folidité requife pour s'en pouvoir fervir au ^îieu de bouteilles, de baffins, de cou- pes, de plats, d'écuelles , &: de tous les autres petis vaiffeaus, qui font jie- ceiîaites au ménage. Ils font remplis dVne certaine poulpe, laquelle étant bien meure, devient violette, de blanche qu'elle étoit auparavant. On trouve parmy cette fubftance,certains petis grains plats, & durs qui font la femence de l'Arbre. Les Chaffeurs des Iles , fe fervent de ce fruit pour é- tancher leur foif au befoin , & ils difent qu il a le goût de vin cuit : mais qu'il referre vn peu trop le ventre. Les Indiens poliflent Técorce, ôc ré- maillent BCR3S1 à des Iles Antilles. 21 j maillent fi agréablement avec du Rou- cou, de l'Indigo, & plufieurs autres belles couleurs , que les plus délicats • Ç peuvent manger & boire fans dégoût* çj| dans tes vaiffelles qu'ils en forment. U Jl y a auffi des Curieus^ qui ne les ^ eftiment pas indignes , de tenir place $ .entre les raretez de leurs cabinets. A R T I C L E V I J h Du Mahot. ÏL y a deus fortes d'Arbres qu'on appelle Mahot ^ aflavoir le Mahot franc & le Mabot d'herbe. Le premier g eft le plus recherché , parce qu'il eft m plus fort Jl ne devient pas fort grand* W mais il produit plufieurs branches.qui rampent contre terre. L'écorce en eft fort épaiffe , Se fort aifée à lever de deffus l'Arbre. On en fait de longues éguillettes , qui font plus fortes que ^ les cordes de Teil 3 dont on fe fert M en plufieurs endroits. On l'employé m ordinairement a monter les rouleaus < ' du Tabac •> & à attacher plufieurs chofesâ ^ê.^^^4 i^a^jw y rwws^w^* I 1 ^ ^ 216 Histoire Natvrelle chofes i qui font neceflaires au mena- nage. Pour ce qui eft du Mahot d'her- be, on s'en fert au défaut du premier; niais il pourrit facilement, & n'égale en rien l'autre par la force. Enfin il y a dans ces Iles plusieurs autres Arbres, qui ne fe voyent point en l'Europe, dont les vns recréent feulement la veuë, tels que font ce- luy qu'on appelle Mappou j & plu- fieurs fortes de Bois Epineus : Et les autres contentent l'odorat, parleur bonne lenteur : ou même ont des qua- litez venimeufes, comme V Arbre lai- tem. Ceiuy dont la racine étant bro- yée, & jettéVdans les Rivières eny- vre les Poiflons : le Mancelinier , le- quel nous décrirons en fon lieu /& vne infinité d'autres , qui ont tous le bois blanc , mol & de nul vfage , ÔC qui n'ont encore point de noms par- m y nos François. CHAPI des Iles Antilies.1 217 CHAPITRE IX. M) es Arbriffeam du Pms , qui por~ tent desfruis^ou qui pouffent des racines , qui font propres a la pourriture des Habit ans , ou qui fervent a d* autres vf âge s. Dieu ayant fait de la Terre vn feul Elément , l*a feparée en diverfes Contrées 3 à chacune defquelles il a donné quelque avantage & quelque coioimodité^qui ne fe trouve point aus autres ., afin que dans cette agréable variété , fa Providence fe puifife tant plus diftinétément reconnaître, ôc ad- mirer. Mais > il faut avouer „ qu'en la distribution que cette Divine Sageffe a fait de fes biens,ies Antilles ont efté fort richement partagées : Car pour nous arrêter fixement à la matière que nous tramons 3 non feulement les grands Arbres , que nous avons dé- crits aus Chapitres precedens3 contri- buent au logément^à la nourriture^au Tom. L K vêtement, M I if I I 1 riSf Histoire Nàtvrelli vêtement , à la confervation de la fan- té , &: à plufieurs aucres dous accom- moderaens des hommes qui y habi- tent 5 mais il y croift encore plufieurs ArbrifTeaus, qui pouffent des racines* pu qui portent des fruits qui fervent aus mêmes vfages3comme il fe pourra remarquer par la le&ure de ce Chapi- tre, A R T I C L E I. Du Manyoc. LEs Habitans des Iles > fe fervent au lieu de blé de la racine d'vn Ar- bnileau3qui fe nomme Manyoc>& que les Toupinambous appellent Manym> & d'autres Mandioque^ de laquelle on fait vn pain allez délicat* que Ton ap- pelle Cafave* Cette racine eft fi fé- conde 3 qu'vn arpent de terre qui en fera planté , nourrira plus de perfo.n- nes* que n'en pourroient faire fix^qui feroient enfemencez du meilleur fro- ment. Elle jette vn bois tôt tu * de la hauteur de cinq à fix pieds , qui eft très - facile à rompre «Se remply de petis nœuds. Sa feuille eft étroite des Iles Antilles, iij mw^mK^à I I li .**o Histoire NatvreES ÎLES ANTILLES. lit ^ garde en le plantant, de ne pas mettre ïffi ks nœuds en bas , parce que les bat- tons ne poufiTefoient point, tes In- ' •"'-' diens n'y font poinl -d'autre faflbn:- v mais pour l'avoir en faifon, ils ob fer- vent le decours de la Lune ,- 3c que la terre foit vn peu humectée. Il y a plufieurs fortes de ces Arbrif- m feaus y qui ne font differens , qu'en »>> la couleur de Técorce de leur bois, % 6c de leur racine. Cens qui ont l'écor- m ce, grife , ou blanche , ou verte.font ^ f ri pain de bon goût , 3c ils croiflfent en peu de tems:mais les racines qu'ils produifent ne font pas de fi bonne garde, & elles ne foifonnent point tant , que celles du Manyoc rouge ou violet, qui eft le plus commun , le plus eftimé , &c le plus profitable en %fj la ménagerie. Le fuc de cette racine , eft froid comme celuy de la ciguë > 3c c'eft vn poifon fi puiirant,que les pauvres In- diens des grandies Ues,étans perfécutez ^j à feu & à fang par les Efpagnols , 3c voulans éviter vne mort plus cruelle, fe fervoient de ce venin, pour fe faire £ 3 mourir l s lE/gUE^l I I il %xi Histoire Natvreile' mourir eus mêmes. On voit encore aujonrduy en l'Ile de Saint Domin-- gue , vn lieu nommé la Caverne des Indiens s ou fe trouvent les o'ffemens àe plus de quatre cens perfonnes^qui s'y donnèrent la mort avec ce poifon, pour échaper des mains à^s Efpagnols Mais au bout de vintquatre heures* que ce fuc fi venimeus pour toutes fortes d'animaus > eft ciré de fa ra- cine y il perd fa qualité maligne & dangereufe.. Article II, Du Ricinm , ou Pœlma Chrifiu ]L y a dans les Antilles 3 vne infi- nité de ces Arbrïfleaus que Ton nomme Palma Chrifti 3 ou Rkinm. Et ils crouTent fi hauts y & iî gros en quelques lieus , qu'on les prendroic pour vne efpece différente de cens que Ton voit en Europe, Les Nègres en amaffent la graine & en expriment l'huile, de laquelle ils fe fervent pour frotter leurs cheveus s & fe garentir de la vermine. Les qualités que luy donnent IWUMM 1 DVBS ÎLES ÂNTIIIIS. 113 donnent Galien & Diofcoride , ré- pondent bien à l'vfage qu'en tirent ces Barbares. La feuille de cet Ar- brifleau eft auflï fouveraine pour la guerifon de quelques vlceres y parce qu elle eft fort attractive. Article III, Des Bananiers , & Figuiers. L croift en toutes ces Iles deus for- ^ tes d' Arbrifleaus, ou plutôt de gros Rofeaus fpongiaus au dedans , qui viennent volontiers en terre grade, prés des rui(Teaus,ou dans les vallées, qui font à Tabry des vens. On les nomme ordinairement Bananiers , ou Planes & Figuiers , ou Pommiers de Taradis. Ces deus efpcces d'Arbrif- feaus ont cecy de commun entre eus, 1. Qu'ils croiiïent dépareille hauteur, aflavoir de douze ou de quinze pieds hors de terre : 2. Que leurs tiges qui font vertes , luifautes , fpongieufes & rempiyes de beaucoup d'eau , for- tent d'vn gros oignon en forme d'vne poire, qui eft muny de plusieurs petU K 4 tes 244 Histoire Natyrelxi des Iles Antilles* 225 tes racines blanches ,qui le lient avec la terre 13. Qu'ils pouffent proche leur pie des rejettons > qui produifeiit des fruits au bout de Tan : 4. Que quand on a coupé vnc des tiges pour avoir le fruit 5la plus avancée fuccede en la place , & ainfi l'Arbriffeau fe perpétue , & fe multiplie tellement qu'il occupe avec le temps , tout au- tant de bonne terre qui! en rencon- tre : 5 . Que la fubftance de l'vn 6c de l'autre eft mollafle y qui fe refout en eau > laquelle étant claire au poffible, a neantmoine la qualité de teindre le linge y & les étoffes blanches en cou- leur brune. 6.Que leur^ fruits font au fommet de chaque tige y en forme de greffes grappes youde gros bouquets. 7. Et que leurs feiiilles.qui font gran- des d'environ vne aulne &: vn quart, & larges de 'dix huit pouces 3 peuvent fervir dé nappes &■ de ferviettes^ôc é- tantféchrs^ tenir lieu de matelas & de lits, pour coucher mollement. Ces deus Arbriffeaus font encore seblables en cec^que de quelque fens que l'on coupe leur fruit , lors qu'il I 1 1 § E I ï *■ ^ **£ Histoire Natvrelle eft en maturité , la chair quî.çft blan- che comme nége , reprefente en fon milieu la figure d'vn Crucifix : cela paroit particulièrement quand on le coupe par rouelles délicates. Ceft pourquoy les Efpagnols croiroienc taire vn crime , d'y mettre le cou- teau , & fefcandalifentfort, de le voir trancher autrement qu'avec les dens. , Mais le Bananier a cecy de particu- lier : i . Son fruit eft long de douze à treze pouces 3 vn peu recourbé vers l'extrémité, gros à peu prés comme. le bras y au lieu que celuy du Figuier eft de la moitié plus petit , de la Ion- gueur de fîx pouces. 2. Le Bananier,, ne produit en Ton bouquet que vint- cinq ou trente Bananes pour le plus*, qui ne font point trop ferrées les vnes auprès âcs autres ; Mais le Figuier-, a quelquefois jufques a cent ou iix vint; figues ; qui font tellement vnies ÔC preffées les vnes contre les autres* qu'on a de la peine a les en détacher. 3- Les Bananes ont la chair ferme & folide.propre à eftre cuite, ou fous la m de* Iles Antilles. 227 ;^ la cendre , ou au pot avec la viande,* & ou confite , & féchée au four , ou ^ au Soleil , pour eftre gardée plus fa- *■' cilement. Mais la Figue , ayant vne q fubftance mollace , ne peut fervir à m tous ces vfages. gs Pour avoir ces fruits, on coupe M par le pie les Arbres , qui ne portent m qu vne feule fois en leur vie , & on r> foutient avec vne fourche la groflc % grappe , de peur qu elle ne fe froide m en tombant. Mais on n'y met pas vo- ^ lontiers la ferpc , que quand on ap- perçoit , qu'il y a quelques vns des fruits de chaque bouquet , qui ont la peau jaunejCar c'eft vn figne de ma- turité:& lors étant portez à la maifon, eeus qui étoient encore verts meurif- fent fueceffivement ,& Ton a chaque % jour du fruit nouveau. La Grappe a qui eft nommée Re- I gime par nos François , eft ordinaire" rit ! ment la charge d'vn homme-& quel- £ quefois il la faut mettre fur virlevier, èc la porter à deus fur les épaules, comme la grappe de raifin,queles EL- pions rapporterent.de la terre de Ca- k 6 Bâau> r>+^*Z*à*ïM&JÊ** I I I I li I 2i8 Histoire Natvrbele ïiaan. Qu ..lques-vns , ont trouvé ce fruit fi beau & fi deli.cat,quMs fe font imaginez que c'efl celuy du Paradis Terreftrè^dônt Dieu avoitdefendu à Adam & à Eve de manger.Auffi ils le nôment Figuier d'Adam y ou Pommier de Paradis. La feuille de ces Rofeaus, fe trouvant de la grandeur que nous, avons dit, étoit du moins bien propre, à couvrir la nudité de nos premiers parens. Et pour ce qui regarde la fi- gure du Crucifix ^ que Je. fruit repré- sente au dedans lors qu il effc coupé, ■ cela peut fournir vne ample matière de profondes fpeculations à ceus qui fe plaifent à fpiritualifer les fecrets de la Nature. Il y- en a qui difent , que là figurs d'vne Croix eft auffi marquée dans la femence de l'herbe que l'on nomme Mué. La petite Gentiane * ou Cruciatay a les feuilles difpofées en forme de Croix fur fa tige: &c il faut avoiïeiy q.ue la nature comme en fe jouant^s'eft plue à reprefenter de cette forte di- verfes figures y dans les plantes & dans les fleurs. Ain.fi il y en a qui fe rapportent TJ L^y^^v ses Iles Antilles. 2^5?- rapportent à la forme des cheveus, d'autres à celle desyeus , des oreilles, du nez , du cœur > -de la langue , des mains & de quelques autres parties du corps. Et ainfi il y a encore diverfes plantes farneufes, qui fembient repre- fenter plufieurs autres chofes , com- me des Aigles , des Abeilles, des Ser- pens , des pattes de Chat > des creftes- de Coq, des oreilles d'Ours > des bois de cetf,des ftéches.ôc femblabies;dont par fois même àcaufedecetterefïènv blance, ces plantes-là^portent le noim Nous ne les fpecifions pasicy , parc© que tous les Livres en font pleins. A R T I C L E IV. Du Bois âe Corah ]L y a encore en piufieurs Iles , vît petit Arbriffeau > qui porte vne graine rouge comme du Coral. EiïV croiftpar bouquets à l'extrémité de fes branches, qui en reçoivent vn grand luftre. Mais ces petits grains, ont vne petite marque noire à l'vn des bouts,qmle$ défigure, & km fait perdre l g s 1 r S I I 250 HisTOïjLB Natvreiije perdre leur prix,felon l'advis de quel- ques vns.Les autres difent tout aucô- traire 3 que cette bigarrure de cou- leurs 3 ne les rend que plus agréables» ©a s'en fert à faire des Braflèlets.- Article V. Du lafmin & du Bok de Chandelle. LEs Arbrifleaus* que nos François-; ont nomme lafmin > ôc Boit d& Chandelle > doivent eftre mis entre cens 3 qui font confiderable en lies». Car le premier porte vne petite fleur blanche , qui parfume tout la circon- férence de fa bonne odeurs & c'eft ce qui luy a acquis le nom qu'il porte.Et quant à Tautre^ il exhale vne û agréa- ble 8c fi douce fenteur , lors qu'on brûle fon bois fec 5 il eft auffi fi iufee- ptibie de feu 3 8c il rend vne flamme-' fi claire > à.caufe d'Vne certaine gom- me aromatique d'ont il eft imbu3 que e'eft avec raifon qu'il eft -recerché des Habitans poux Tvfage & l'entretien de leurs feus 5 &c pour leur tenir lieu de chandelle : .& de flambeau pendant : la nuit. * ^^F*v«P^*l DES ILES ANTILLES'. ï'$ V ' ^ CHAPITRE X. .; Des Plantes^ Merbages^ér Racine® de la terre àe s Antilles, A Près avoir reprefentc dans les Chapitres precedens *, tes Ar- bres & les Arbrifleaus > donc la terre des Antilles eft richement couverte-.il nous faut malmenât entrer en la con- sidération r de plufieurs rares Plantes.,, Herbes , & Racines dont elle eft auîîi ues-abondamment pour v eue, té A R T I C L E I. R* I I De trois fortes de Pyman. LA Plante 3 que nos François ap* ^ peilent Pyman ou Poyvre de l'A- mérique* eft la même que les naturels du pais nomment Axi ou Carme. Elle croift touffue > comme vn petit huit* ç fon fans épines. Sa tige,eft couverte m d\ne peau cendrée, elle porte plu* ^ fieurs petis rameaus, qui font chargez d'vae.. *^^Wi^K^,^VV^t*gl^kN«^» l 1 s» I 1*3.1 Histoire Natyrblolë dVne multitude-de feuilles longuettes, dentelées , 5c de couleur de vert naif* faut. Il y en a de trois fortes qui ne- font en rien differentes^qu'en la figure de Tecorceyou duftuit qu'elles porter. I/vne ne produit qtfvn petit boutton rougejonguet comme vn clou deGi- rofle^qui a au dedans vnefemence de- liée,beaucoup plus chaude que les épi- ces, qui viennent du Levant, & pref- que cauftique , qui communique fa- cilement cette qualité picquante , à* tout ce à- quoyon« l'employé.* L'autre Efpéce a vne écorce beau* coup plus groiTe * & plus longue,, qui devient parfaitement vermeille étant meure , ^fcr^v^^#É^fcv^^g^rvv^^r^k^^v<*grl■^l itfjH Histoire Natîrehe en a apporté de la graine en France & ailleurs, qui eft venue en perfe- ction. Mais le firme- ne vient pas du tout fi gros, qu'en l'Amérique. On fe ferc de cette écoffe, & de la graine qui eft dedans , au lieu de poyvre , parce que ce fruit donne vn goût relevé*, qui approche de celuy de cette épicc. ' Les effets neantmoins n'en font pas fi loiïablcs:Gar après qu'il a vn peu pi- qué la langue \ ëc enflammé le palais par fon acrimonie , au lieu de forti- fier , & d'échauffer la poitrine, il laf- foiblit , & y cauie des froideurs ; Ou plutoft, félon le fentinaent des Me- decjns, il ne réchauffe que trop, & ii raftbiblitpar fa vertu cauftique, n> caufant de froideur que par accident, entent, qu il diffipe l'humide radical, qui eft le fiege de la chaleur. C'eft pourquoy on remarque dans les Iles, que ceus qui s'en fervent ordinaire- ment en leur manger/ont fujets à des maus d'eftomac , & à contra&er vue couleur jaune. Arxi g#s ÎLES Antilms^. M$f [ï A"R T î C L E I I. fij D# Tabac, $e LA plante de 7^ bac 5ain(î appelle à1 caufe de l'Ile de Tabago, où félon l'opinion de quelques vns y elle a efté f .v premièrement découverte par les" Ef- jjjft pagnols > eft aufli nommé Nicotiatie,* Q\ du nom de Monfieur Nicot Médecin*; «?> qui la mit le premier en vfage en l'Eu- Jr toper > & qui renvoya de Portugal en m France. On la qualifie encore Her- be à la Reyne 5 parce qu'eftant ap- portée de l'Amérique , elle fut pre- » tentée a la Reine d'Efpagne , comme vne plante rare s & de merveilleufe g vertu. Les Efpagnols5luy donnent de plus le nom d1 Herbe Sainte , pour les excellens effets que l'expérience leur Uj en a fait fentir3comme témoigne Gar- cilafîo> au 25. Chapit. du 2. Livre de fon Commëtaire Royal des Yncasdu* j? Pérou. Enfin on l'appelle Petnn, bien ^C que lean de Lery s'en mette fort en % colère y foutenant que la plante qu'il ;■% aveuë au Brefil3&que les Taupi- nambous nomment Petun 5 eft tout $0 Histoire Nàtvreblé âfait différence de noftre Tabac. Le# Caraïbes, le nomment en leur langue naturelle T Ôuly. Oh ne connoiflbit autrefois dans les Iles d'autres Plan- ces de Tabac , que celles que les Ha- bitans nomment ordinairement Ta- bac vert , Se Tabac a la langue , à caufe d€ la figure de fa feuille : Mais dépuis qu'on y a apporté de la terre feinne.de la femencede celles qu'on appelle Ta* bat de Fennec & Tabac des Ama^o- nés 9 on les a auffi divifées en ces qua- tre iortes. Les deus premières font de plus grand rapport: Mais- les deus. au- tres font plus eiïimées,à càufe de leur bonne odeur. Toutes cqs fortes des plantes de Tabac , croifiTent aus Iles , de la hau- teur i'rn homme ôc d'avantage, lors qu'on n'empêche point leur crolflan- ce , en coupant le fommet de leurs tiges.. Elles- portent quantité de ft rel- ies vertes,longues, velues par dejETous3 qui J vient en abondance 3 6c en fa perfe- ction. C'eflria racine d'vne Plante, qui ne s'élève pas beaucoup hors de terre , qui a les feuilles vertes ôc lon- guettes \ comme celles des rofeaus3& des cannes de fucre. Sa Racine, fe ré- pand non en profondeur,mais en lar- geur^ eft couchée entre deus terres, comme vne main , qui a plufîeurs doigts étendus aus environs 5 D'où vient auffi qu'on l'appelle Patte, en- tre les habitans dés Iles. Cette plante fe peut proyignex de femence •> ou comme il fe pratique plus ordinaire- ligne I 1 % q :J.#0 HïSX^IRENAXVklLï.E des Iles Antilles. 141 ment3 de certaines petites racines, qui croiffent comme filets , autour de la vieille tige 8c des plus grofles racines, tout ainfi qu'aus Chervis. Elle croît facilement en toutes les Antilles , 8c particulièrement à S.Chriftofie. Audi depuis que le Tabac eft devenu à fi vil prix 3 plufieurs Habitans de cette Ile, fij ont fait trafic de Gingembre, avec vn ;'; heureux fuccez. Article V. Des Patates. re en paffant par forme de digreflion, que ces Toupinambom 9 qui font au- jourduy non feulement fort communs Tom. /.j L ca LA Patate que quelques - vns ap- ^r pellent Batate> eft vne racine qui jjg] eft prefque de la figure des Trufes des ^ jardins 3 qu? Ton nomme Tonpinam- ^ bons y ou Artichaut d'Inde > mais d'vn ^ goût beaucoup plus relevé > Se d'vne qualité beaucoup meilleure pour la famé. * Nous prendrons icy occafion de di- ]û en oaflanr oar forme de di^vefïïon* m % $42. Histoire Natvreils dhs Iles Antilles. 24$ en ces quartiers, mais fort vils& fore méprifez , & qui ne font guéres que la viande des pauvres gens , ont efté autrefois entre les plus rares délices. Car aus fuperbes feftins , qui fe fi- rent à Paris par les Princes,à quelques Ambairadeurs en Tan mil fix cens fei- ;zè , on en fervit comme d'vn mets precieus &.. exquis. Retournons ano- ure Patatt. Elle croit en perfection dans vne terre légère, moyenement humide,&: vn peu labourée. Elle poufTe quantité de feuilles mollaifes , d'vn vert fort brun , qui ont vue figure approchan- te de celle des Epinars. Elles forcent de plusieurs pampres qui rampent fur terre , & qui remplïffent incontinent au long & au large toute la Circon- férence. Et4 fi la terre eft bien prépa- rée 3 ces pampres forment en peu de rems diverfes racines , par le moyen de certains fibres ou filamens blan- châtres, qui fe pouffent de délions les nœuds , Se qui s'infinuent facilement en la terre- Elle porte vne fleur, de la couleur à peu- près qu'eft la racine, L z Se I 3c i i 1 1 i *44 Histoire Naturelle de en forme de clochette , au défaut de laquelle fe forme la graine. Mais ordinairement , pour provigner ce fruitjon prend feulement de ces pam- pres qui s'éparpillent par tout,comme nous avons dit,6c on les couche dans vne terre labourée , où au bout de deus ou trois mois ils ont produit leur racine : Laquelle a aufîi cette vertu, qu'étant coupée par rouelles & mife en terre , elle produit fa racine & fa feuille, comme fi elle avoit fa fe- mence , en chacune de (es moindres parties , de même que les Naturali- ses i'atribuent à la graine de la Co- riandre 6c à celle de TArmoife , de la- quelle ils difent de plus , qu'elle re- naift même de fa cendre. Ces Racines font de couleur diffé- rente , & dans vn même champ on en tirera quelquefois de blanches^qui font Ses plus communes, de violettes, de rouges , comme les Bettes-raves, de jaunes ^ &c de marbrées. Elles font toutes d'vn goût excellent. Car pour- veu qu'elles ne foient point remplies d'eau , & qu'elles f©ient creues en vn des Iles Antilles, i^f Vn terroir moyennement humide ÔC fec , qui participe de l'vn & de Tau* tre , elles ont le goût des Châtaignes* & font d'vne meilleure nourriture que la Caffaue, qui defféche le corps^ Car elles ne font pas fi arides. Auffi, plufieurs Anglois fe fervent de ces racines 3 au lieu de pain & de Caffa- ue , 8c les font cuire pour cet effet fous la cendre , ou iur les charbons* Car étant ainfi préparées , elles font de meilleur goût , de elles perdent cette qualité venteufe, qu'ont la plus- part des racines. Mais pour l'ordinai- re 3 on les fait cuire dans vn grand pot de fer , au fond duquel on met tant foit peu d'eau : Puis on étoup- pe foigneufemsnt avec vn linge l'o- rifice du couvercle , afin qu'elles cui- fent par cette chaleur étouffée. Et c'eft là le mets plus ordinaire des fervi- teuis &: des Eiclaves du Païs >qui les mangent ainfi forçant du pot 3 avec vne fauce compofée de Pyman > 6c de fuc d'Orange > que nos François appellent Pymantade. Il faut avouer, que fi cette racine L 3 n'écok i i I I I i i4& Histoire' Natvrelii n'écoit pas fi commune , elle ferolr beaucoup plus prifée. Les Efpagnoîs la mettent entre leurs délices , & ils Faprétent avec du beurre } du fucre^ de la mufcade 5 ou de la Canelle. Les autres la reduifent en bomllie, 3c y ajoutant force graifie* êc du poyure ou du Gingembre , trouvent que c'eft- vn excellent manger. Mais la plupart des Habit-ans des Iles n'y font pas tant de façon : Quelques vns auffi cueil- lent la tendre extrémité des pampres*- & après les avoir fait bouillir * ils les mangent en falad conforme d'Afper- ge>ou d'Houblon. A R T I C L E VI. De l'Ananas. L'Ananas , éft tenu pour le fruit le plus delicieus 3 non feulement de ces Iles y mais de toute l' Amérique. Il efi; auffi fi beau & d'vne odeur fi don* ce y qu'on diroit que la nature ait dé- ploie en fa faveur , tout ce qu'elle re- ferroit de plus rare^& de plus precieus en les trefors. Il F 1 248 Histoire NatvreIli Il croift for vne tige haute d'vn bon pied, qui eft revécue d'environ quinze ou leize feuilles , qui font de la longueur de celles des Cardes , de la largeur de la paume de la main , Ù de la figure de celles de 1? Alpes. El- les font pointues par le bouc , de mê- me que celles du Glayeul , vn peu cavées^par le milieu , & armées des deus côtés de petites épines , qui font fort pointues. Le fruit qui croift entre ces feuil- les , Se qui eft élevé fur cette tige, eft quelquefois de la groflèur à'vn Me- lon. Sa forme eft à peu prés fembhu ble à vne pomme de Pin. Son écorce, qui eft relevée de petits compartimens en forme d'écaillés , d'vn vert pale, bordé a incarnat , couchez fur vn fonds jaune, eft chargée en dehors,de plufieurs petites fleurs , qui félon les divers afpe&s du Soleil , fe revêtent d'autant de différentes couleursaqu'on en remarque en l'Arc en Ciel. Ces ; fleurs tombent en partie , à mefure que le fruit meurit. Mais ce qui luy donne plus de iuftre , & ce qui luy a acquis des îles Antilles. 249 acquis k titre de Roy entre les fruits, g eft quileft couronné d'vn gros bou- quet, tiflù de fleurs & de plusieurs fe- uilles folides &: dentelées j qui font d Vn rouge vif & luifant , §£ qui luf donnent vne merveilleufe graee. La chair> ou la poulpe qui eft con- tenue fous récoice^eft vn peu fibreu- fe j mais elle fe refout toute en fuc dans la bouche. Elle a vn goût fi re- levé, & qui luy eft Ci particulier, que ceus qui l'ont vouhu parfaitement dé- crire , ne pouvani le faire fous vne feule comparaiion,ont emprunté tout ce qui fe trouve de plus délicat , en l'Auberge > en la Fraife,au Mufcat,£c en la Rénette , & après avoir dit tout cela , ils ont efté contrains de confcf-- fer , qu'elle a encore vn certain goût particulier , qui ne le peut pas alte- rnent exprimer. La vertu , ou le germe, par lequel ce fruit fe peut perpétuer , ne con- fifte pas en fa racine , ou en vne pe- tite graine rouffe , qui fe rencontre fou vent en fa poulpe : Mais en cette guirlande dont il eft couvert.Car fi- tôt L 5 qu'elle' 9 1 1 1 7F?* l ijo Histoire Natvrelle qu elle eft mife en terre j elle prend" racine , elle pouffe des fueilles , & au bout de Tan elle produit vn fruit nou- veau. On voitfouvent de ces fruits, gui font chargez de trois de ces bou- quets,qui ont tous la vertu de confer- ver leur efpece. Mais chaque tige, ne porte du fruit qivvne feule fois., Il y en a de. trois ou quatre fortes^ que les habitans des Iles ont diftin- gués ou par la coukur,ou par la figu- re, ou par la faveur, afïavoir V Ananas blanc, le Pointu, & celuy qu'ils appel- lent la Renete.Cc dernier eft plus efti- mé que les deus autres-, a caufe que quand il eft bien meur.il poflfede pour le goût toutes ces rares qualitez que nous avons dîtes ; Il a auffi vne odeurr plus agreabkrque les autres,& il aga- ce moins les dens» Les Indiens naturels du Païs,& nos = Erançpis qui demeurent aus Iles,com- pofent de ce fruit vn très - excellent: bruvage,qui approche fort de la Mal- voifie , quand il eft gardé quelque, tems. On en fait auffi vne confiture iiquide.laquelie efUVne des plus bel- des Iles Antilles. 25* les Ar des plus délicatesse toutes cel- les que Ton apporte des Indes. Ou coupe auffi i'écorce en deus , Se on la confit à fec avec vne partie des feuil- les les plus deliées5puis après on la re- joint proprement félon l'art , Se on l'encroûte d'vne glace fucrée,qui con- ferve parfaitement la figure du fruit & de fes feiiiUes , Se qui fait voir en ces heureufes Contrées, nonobftant les chaleurs delà zone torride,vne douce image des trilles productions de l'hy- ver. On a mangé allés long tems de ce fruit , fans remarquer les rares viager qu'il a dans la Médecine ', Mai s à pre- fent,rexperience a fait connoiftre5que fon fuc a v ne vertu admirable pour re- créer les efprits 3 Se relever le cœur abbatu ; on l'employé auffi heureufe* menepour fort] fier l'eftomac, chafler lesdégouts,& rétablir rappecit.il fou* làge auffi merveilleufement ceus 3 qui font affligez de la gravelle.ou de fup- preffion d'vrine 3 Se même il détruit la force du poifon. Au défaut de ce ftuit ,Ia racine produit les mêmes ef- h & têts* "i 1 i ! 1 1 I 2f2 Histoire Naturelle fets. L'eau que l'on en cire par l'Alan- bic, fait vneoperacion pluspromce Se plus puiflante; mais à caufe qu'elle eft trop corrofive,& qu'elle offenie la boucherie palais & les vaiiTèaus vre- taires , il en faut vfer en bien petite quantité^ par l'avis d'vn favanc Mé- decin , qui faura donner vn corre- ctif ,: à cette acrimonie. A r t i c l s VIL Des Cames de Sucre. LE Rofeau > qui par [on fuc delL- cieus fournit la matière dont on. compofe le Sucre/ porte les feuilles femblablesaus autres rofeaus;que Ton voit aus marais Se au bord des étangs,, mais elles font vn peu plus longues, & vn peupkstrenchantes. Car fi on ne les empoigne avec adreffe , elles coupent les mains comme vn rafoir* On le nomme Canne de Sucre > & il croift de la hauteur de cinq à. fîx pieds y Se de la groiîeur de deus pou* ces en circonférence. Ileftdivifé par plufieurs nœuds , qui font ordinaire- ment éloignez de quatre ou cinq pou- ces- des Iles Antilles. 25 j ces les vns des autres. Et d'autant plus que cette diftancc eft grande^d'autanc plus auffi les Cannes font eftimées. eftre plus propres, à faire le Sucre, La tige poulie comme vn buiiïbn de longues feuilles vertes Se touffues^. du milieu defquelles s'élève la canne3 qui eft auffi chargée en fon fommet de plufîeurs feiiilles pointues , & d'vn panache dans lequel fe forme la femenceJE lie eft entièrement remplie d'vne moelle blanche & iucculanre, de laquelle on exprime cette douce liqueur > dont fe forme le Sucre. Elle vient en perfection dans vne terre graiïejegere >& moyennement: humide. On la plante en des filions, qu'on fait en égale diftance avec la hoiïe, ou avec la charrue , 6c qui font profons d'vn demy pied. On y couche des Cannes qui font meures , on les couvre de terrer& peu de tems apres^ chaque nœud forme vne racine , &c poufle fa feuille car en ca cas y le meilleur eft d'arracher au plu- toft toute la plante,& de la faire tou- te nouvelle» Encore que les Gannes foient meu- res au bout de neuf ou dix mois 5 el- les fe confervent bonnes fur le pied deus ans ,&; quelquefois trois ans entiers* après quoy., eues déperiffent. Mais le plus feur &-le meilleur eft de les couper tous les ans5 prez de terre,- & au défaut du dernier nœud. Lors que ces Cannes font en teur maturité 5 & que Ton marche fur les ehams5 on trouve ce dous raflraichif- fëment ,-&oncn fuee avec plaifir lé jus y qui eft excellent , ayant le même* goût que le fucre. Mais Ci Y on en prend trop ,on fe met en danger dVtv cours de ventre5& c'eftdequoy il fane: ver-tir les nouveaux venus 5 car ceus- des Iles Antilles. 2-5 y* qui font naturaiifez dans le Pais * n'y" font pas fifujets. Il y* a encore en quelques vues de ces lies > de ces belles- à- nes3qui produit le même effet. Et quel- ques vns affiliée Tavoir auffi remarqué après. i i i ijS Histoire ^Iatvriili après avoir mangé de la geleé de gros- eilles rouges, Ceus qui ont décri le Tmal > qui eft fi priféà caùfe de la precieufe tein-* tore dflécarlatte qu'il nourrit fur fes fe- uilles 3 le font tout pareil à la plante, dont nous venons de parler, hormis, qu'ils ne lujj donnent point de fruit, Quelques autres , 1 ont mife au rang des Chardons qui portent des figues, à cauie que le fruit en a la 'figure i 8e que quand il eft ■ ouvert au lieu de noyau", il n'a que des petits grains, tout pareils à cens de h figue. Il yen a encore dVne autre efpece, dont le fruit eft blanc 3 & dVn goût beaucoup plus dous,& plus lavoureas qae le rouge > dont nous venons de parler. Et même il s'en trouve vne autre 3 qui eft fans doute vne efpece de Tmal, (m laquelle on a veu des ver- miffëauSâ femblables en couleur à vn rubis : qui teignent en très - belle ôc tres-vive écarlate le linge , ou le drap for lequel on les écrafe. m S f L E S A K T ï I L E S". 2^ A R T I é L B 1 I, D# Cierge. LE Cfafcg» 3 qui eft airifi nommé paf nos François, à caufe de fa forme-, eft appelle par les Caraïbes Ah^uîercn, Ceft auffi vne efpece de gros Char- don , qui croift comme vn gros buif> fon touffo > & herïfle de toutes pairs d'ëpines-extremement pointues & dé- liées. Il pouffe en fon milieu neuf ou dix tiges fans branches ni feuilles, ■ qui font 'hautes de neuf à dix pieds* droites & oanelées comme de gros Cierges.- Elles font auffi munies de poignantes épines > comme d'aiguil- les fines, & perçantes au pofiible,qui ne permettent pas , qu'on le pu i fie toucher de quelque cofté que ce toit, I/écorce Se le dedans font allez mo- laffes & fpongieus* Chaque Cierge porte en vne faifon de Tannée , entre les rayes caneléesde fa tige3des fleurs jaunes ou violettes > aufquelles fucce- de vn fruit en forme de groiîè figue,- qui eft bon à -manger, &c affés délicat. Les oifeaus en font fort frians.mais ils ne I s 1 I \yjKEPO-&s rn^* ï 1 I « *> JC#0 Histoire Naturelle ne les peuvent béqueter qu'en volant, parce que les aiguillons qui le confcr- vent de toutes parts, ne leur fou firent; pas de s'arrefter fur ce buiffon, ni fur tes tiges. Mais les Indiens en déta- chent le fcuit,avec de petites perches rendues par le bout. Article m, JDe plnjîeur s fortes de Lienes. IL y a pîufieurs efpéces de bois raro- pans par terre , & qoi s'attachent aus Arbres,& empefehent fou veut de courir facilement par les forets. Les Habitans des Iles les nomment Lie* nés. Les vnes font en forme de gros Cable de Navire, Les autres portent des fleurs dediverfes couleurs. Et mê- me il s'en voit qui font chargées de greffes filiques tannées, longues dJvn bon pied > larges de quatre ou cinq pouces & dures comme l'écorce du chefne.dans lesquelles font contenus ces fruits curieus qu'on appelle Châ- taignes de mer , qui ont la figure d'vn cœur z & dont on fe fert fou vent a- près des Iles Antilles^ 1G1 près qu'on les a vuidez de leur poulpe* pour conferver du Tabac pulverifé,ou quelque autre poudre de bonne fen- fcçur. Ce que les Habitans des Iles ap- pellent Tommes de Lieens, eft vn fruit qui croift fur vne forte de Vime, qui s'attache aus gros Arbres , comme le Lierre.il eft de la groffeur d?vne baîe de jeu de paume,& couvert dVrie co- que dure , ôc d'vne peau verte 3 qui contient au dedans vne lubftance * la- quelle eftant meure a la figure , & le goût de Grofeilles. Article IV. J)es Herbes toufiours vives. ON trouve dans ces Antilles plu- fieurs efpéces d'Herbes tou- jours vives â dont les vnes croilTent fur le tronc des vieus Arbres , comme le Guy fur le Chêne : les autres croif- fent en terre Se fur des Rochers. Elles ont tant d'humidité naturelle > que bien qu'elles foient arrachées* &c luf- penduës la racine en haut >au milieu des chambres > où on les conferve par ornement 1 p .2.0! i Histoire Natvrelm ornement , &: pour recréer la veue^ dks ne quittent point leur verdure. Art i c x e V. Des Plantes fenfîbles. IL y a à Tabago vne efpece d'Her- be coufiours vive , qui d'abon-dant eafenfible.£lle croift haut dVn pied de demy , ou environ : la tige eit en- tourée dVne grande multitude de fe- uilles longues d'vn bon pied 3 larges de trois doits, dentelées à peu prés comme celle de la Fougere^us extré- mités de couleur verte entremêlée de petites taches brunes ôc rouges. En la faifon des fruits , il croît du milieu de cette plante vne fleur ronde , com- pofée de plusieurs feuilles , qui fon£ rangées eu même ordre que celles du Soucy. Mais elles font d'vn violet .clair , ôc ont ailés bonoe odeur eftanç maniées. La nature de cette Plante eft telle , que fi quelcun arrache de -fes feuilles, ou s'il les touche feule- ment.toute la Plante fe flétrit, & laik & tomber fes autres feuilles contre terre* p.ps Iles A$till.es> %$$ I P I 1 I |erre3 I m 264 Histoire Natvreile terre 3 comme fi on i'avoit foulée aus pieds. Ec félon le nombre des feuilles que l'on en a arrachées, elle demeure plus ou moins de temps à fe redref- tcr. lien croift vne femblable à Mada- galcar que les habitans appellent Haefi vel> c'eft à dire Herbe ayant vie. Mais ce n'eft pas la mémeefpece, qui ie voit à Paris au jardin du Roy, car elle a la feuille beaucoup plus petite,, &quin'eft ni tachetée ni dentelée: Et qui plus eft ; die ne produit point de fleurs. Outre que fesfeiiiiles eftant touchées 3 le reiïerrent en dedans par quelque forte de contradion.Au lieu que celle que nous décrivons , laif- le tomber les Tiennes à terre en de- hors. On voit encore vue autre efpece de Plante vive 3c fenfîble, en plufieurs ancres Ile,. Elle croift quelquefois de la hauteur d'vn Arbrifleau-Ellceft re- vêtue de beaucoup de petites bran- ches qui font chargées en tout tems dvne infinité de feuilles longuettes & étroites , qui font émaiilées en la faifon des Îles Antilles. 16$ -faifon des pluyes , de certaines me- nues fleurs dorées , qui réfemblenc à de petites étoiles.Mais ce qui fait que cette Plante eft eftimée l'vne de plus rares 5c des plus mervcilleufes du monde , eft qu'auffi-tôt qu'on là veut empoigner 3 elle retire fes feuilles 3 Se les recoquille fous fes petis rameaus, comme fi elles étoient flétries, puis el- le les épanouît de nouveau, quand on retire la main ôc qu'on s'en éloigne. Il y en a qui nomment cette Plan- te V Herbe Chafle , parce qirelle ne fauroit fouffrir qu'on la touche fans s*en offencer. Ceus qui ont paflfé par Tlfthme depuis Nombre de Dios juf- ques à Panama , racontent qu'il y a des bois entiers., davn Arbre nommé Senfîtif, auquel fi toft que l'on touche, les branches ôc les fciiilles s'élèvent avec grand bruit , & font enfemble la figure d'vn Globe. On voyoitàParis , au jardin du Pvoy il y a quelques années , vn Ar- bri fléau fenfuif , eftimé de grand prix. Mais quelcun s'eftant avifé de donner l'invention de le mettre au Tom* L M fonds s^<=^yj^zsx*ï*J*CJ^A I i€6 Histoire Naturelle fonds d'vn puits , pour le conferver contre le froid„&: les rigueurs de Thv- ver y il y mourut miferablement , au grand regret des Curieus. Article V I. De plujïeurs fortes de Pois. LA terre y produit par tout des le^ gumes , tels que font les pois Ôç les feyesjdepluiieurs fortes : Les Sau- vages Antiîlois les appellent en gê- nerai Mancomi. Pour les PoLs^ils font prefque tous de même efpece que ceus qui croiflent en l'Europe \ excepté ceus que Ton cueille fur vn petit ArbiïiTeau > qui eft de la hauteur du Geneft & a les ré- Milles petites , vertes, &: étroites. Il porte des Pois dans des goulIes3ou fili- ques3qui font attachés à fes branches. Ils font verts & plus petis que les or- dinairesj d'vn goût releyé,& fi faciles à cuire^qu'il ne leur faut quVn bouïl- t Ion. On les nome aus lies* Pot* $An~ gale , parce que la femenee eft ve- nue de ce païs là>comme il eft à croire. Il des Iles Antilles. i6y Il y en a d'vne autre forte^que l'on- fiiomme Pois , mais qui neantraoins ont la figure de Fèves, Ils font afles pecis. Et de cette efpece il y en a de blans 5 de noirs, de rouges^ou tannés, qui font tous excellens , &c qui vien- nent à maturité en trois mois. On les nomme à Saint Chriftofie > Tois An- glois. Article VII. Des Fèves , & Fafeoles. ENtre les Fèves & Fafeoles , il en croift aus Antilles de plusieurs efpéces, qu'on ne voit point en Fran- ce. Les plus communes font des blan- ches>à qui les premiers Habitans ont donné vn nom mal honnefte > à caufe de leur figure. Elles produifent leur fruit , qui eft bon à manger > fix fe- maines après avoir efté plantées. Les autres font diverfïfiées de plufieurs belles & différentes couleurs, comme celles que l'on nomme Fèves de Rome 3 on de Lombardie. Mais les plus confiderables pour leur rareté , font celles qu'on nomme M 1 Fèves I i l miSBSMXBWWÊB&â ^1 i I i iG% Histoire Nàtvreile Fèves defét ans , parce qu vue même tige porte fée ans entiers fans fe laf- fer , & s'étend fur les Arbres , fur les rochers , & par tout où elle peut atteindre. Et ce qui eft merveilleus, c'eft qu'en tout teins il y a du fruit en fleur i du fruit en vert, & du fruit en maturité. De forte qu'on y peut ad- mirer : Le PrintemS) & t Automne en vu même rameau. On dit la même chofe dVn certain Arbre d'Egypte > nommé Figuier d^j Fanion* où Ton voit toujours du fruit meur > du fruit preft à meurir , •& du fruit naiflant. Les Orangers ont vn femblable avantage. Article VII î. Des Plantes & herbes qui peuvent avoir leur vfage en la Médecine ou au ménage. Q Vaut aus Plantes qui peuvent a- >voir leur vfage en la Médecine. Il des Iles Antilles. 1&9 Il y en a plufieurs en ces Iles*defquel- les les propriétés ne font pas encore bien connues* Se quelques autres qui fe trouvent aulîi ailleurs. Telles que font la Scolopandre , vue eipece dA- loès y Se plufieurs fortes de Capillaires. Il y en a auffi quelques-vnes donc on a déjà fait l'expérience^ qui font re- connues pour être douées de grandes vertusjentje lefquelîes les plus prifées font le Ionc de fenteur $ le Edifier 9 & l'Herbe a tu flèches. Le Ionc Je fenteur eft toun fem- blable aus autres loncs qui croiflenc auprès des étangs & des rivieresîmais il pouffe vne racine ronde de la grof- feur dVne uoifette^qui rend vn odeur fort douce comme celle de l'Iris , Se qui étant féchée à l'ombre* Se réduite en poudre , a vne merveiileufe vertu pour aider les femmes qui iont en travail d'enfant > fi on leur en donne vne petite prile. Le Balifier croît de différente grof- feur & hauteur , félon les terroirs où il fe trouve , il fe plaît particulière^ nient dans des lieus humides. Ses M 3 feuilles è P I 0? 4 ■WWB i 1 270 HlSTOIRE NaTVREILE feuilles font fi grandes & fi larges*, que les Caraïbes en couvrent au'be- ifein leurs petites cabanes. Elles font .auffi employées pour adoucir les in- flammations des playes3 & pour faire des bains àceus qui ont des nerfs fou- ié^ou quelque autre debilité.Sa fleur,, qui croift comme vne pannache, qui cft compofée de plufieurs petites cou^- pes jaunes ou ronges à eft fuivie de boutons,qui font remplis d'vn grand nombre de grains gros comme des- pois, qui font fi polis & fi durs qu'on- m peut faire des Chapelets. L'Herbe ans flèches eft vne efpe* ce d'herbe trifte , car pendant le jour, (es fleurs font toujours fermées , & durant la nuit elles font epanoiiyes... Ses feuilles qui font d'vn beau vert*, font longues de fix ou.féi pouces ,. & larges de trois. Sa racine étant pilée,., a la vertu d'éteindre tout le venin des flèches enpoifonnées, étant appliquée fur la playe,le plus promtément qu'il eil poffibïe. La plupart des Herbes potagères que nous avons en France \ croiflenc suffi en &t$ ïtis Antilles. 271 en ces lies. Il eft vrtay qu'il y en a quelques vnes,comme font les Chous Ôc les Oignons, qui ne portent point de graine'.On n'en manque pas toute- lois pour cela ; car quant ans Çhous* lors qu'ils font en maturité , ils pro- duifent plufieurs rejettons , que l'oit tranfplante 3 Se qui en pouffent d'au- tres , qui deviennent auffi gros & auffi beaus>que s'ils v'enoient de grai- ne. Et pour ce qui eft des Oignons, les Navires y en apportent quantité,, qui produifent ■' beaucoup de vert>dont on fe fort ordinairement dans le pota- ge , Se dans les pois. Il y a auffi beaucoup de Melons cotn'munsjdont la graine à elle portée de ces quartiers * Mais a caufe de lax chaleur du pais j ils meurilïènt là plus facilement,, ont la chair plus fermcôc de meilleur goût > Se fontd'vne plus fove'ue odeur. Et ce qui eft l'excellen- ce, eft que l'on en a en toutes les fai- sons de l'année» 1 g i I 1 I 1 Z72 Histoire Natvreile Article IX, Des Melons d'eau. 1 L croift en ces pars là , vne autre jeipece de Melons, qui font corn- muns en Italie -, niais qui font fans comparaifon meilleurs en Egypte, & au Levant. Il en croift auiïi en quel- ques endroits de France, mais il ne valent rien. On les nomme Melons d'eau , parce qusils font remplis d'vne eau focrée , qui entrelaffe leur chair, qui cft pour l'ordinaire, vermeille, ,ôc rouge comme du.fangaus envi- rons du cœur , où font contenus les .grains de leur femence, qui font auffi de même couleur , 8c quelqucsfok Boirs. Leur écorce demeure toujours verte & fans odeur ,; de force que c'eft à la tige , plutoft qu'au fruit, qu'il faut diieerner leur maturité, ils croiffent fouvent plus gros que la tefte , d'vne forme ronde ou en ova- le. On les mange fans fel , ôc bien que Ton en mange en quantité , ils ne nuifent point à l'eftomac:Mais en ces païs-là qui font chauds,ils raftiaU chifle al ses Iles ântiiies* 175- ^*?rt/i^?qw^pa^ I 274 Histoire Natvrelle ehiiïent beaucoup , & provoquent l'appétit. On y cultive encore du Màys^ qu on nomme autrement Blé d'Efpa- gne * ou de Turquie , de toutes fortes de Milydcs Concombres, des Citrouilles, des Bettes - raves Se d'autres Racines y. qui font toutes extrêmement bonnes < & favoureufes. Art ici; e X. Des Lys des Antilles; EX parce qu il y en a qui pourroient: outre tout cela , demander des fleurs. Il y en exoift auffi de tres-bel- les, & de très-bonne odeur. Entre au- tres il s'y voit vne efpece de Lys blancs* d'vne merveiileufefenteunCar ils ont vne odeur pareille à celle du Iafmin,; mais fi penettante^qu'i! n'en faut que- vne fbur > pour parfumer vne cham- bre. L'Oignon & la feiiille font fem- blables à celles des Lys de France*., mais la fleur a (es feuilles éparpillées & divifées par petis lambeaus , corn, mè fi elles avpient efté découpe'es par plaïfiivavec des cizcaus. Il y a encore d'autres ™ des Iles Antilles. 275 •- d'autres Lys , qui font du tout fans jCjj pareils à nos Lys jaunes > ou oran- gers. Artich X L De dem fortes de fleurs de la Paflion.- ON voit ans Antilles vue Plante m tres-renommée pour la beauté £* de fes feuilles , la douce odeur de les ^T fleurs y 5c la bonté de fon fruit. Les Efpagnols l'appellent Grenadile 3 les Hollandois Eh an g u4ppel,8c nos Fran- çois la fleur de la Paffion, à caufe qu- elle porte cette rare fleur > en laquelle m on remarque avec admiration , vne >jj partie des inftrumens de la Paflion de ^j HÔtre- Seigneur 9 qui y font reprefen- m tez. Il eft vray , que quelques curieus- % qui l'ont confideréô attentivement,- ^ avouent 5 qu'ils y ont bien reconnu % .quelque reffemblance de la couronne m d'épines, des fotiets,des clous.du mar- teau^ de la Golomne : mais ils ajou- tent auffuque la plupart de" ces chofes y font figurées.à peu prés e« la même façon a aue les Vierges > les Lions A M- & kr * 1 7FW ï ï I I 9? 276 Histoire Natvrîue les Ours le font par les Conftellatkms cekftesjtellement y que pour trouver toutes ces enfeïgnes de la paflioa dans ces fleurs-là , ils difent après A- cofta au 27. Chapitre du Livre quatriè- me de [on Hifioire 3 qu'il tft befoin de quelque pieté , qui en feffe croire vue partie. Il y en a de plufieurs fortes , qui ont toutes cecy de communique s'y el- les ne rencontrent quelque arbre pour l'embraser, & fe foutenir , elles ram- pent fur la terre, comme fait le lierre; que leurs fleurs s'epanoiiiflTent après le lever du Soleil , & fe referment a- vaut qu'il fe couche ;& quelles pro- duifent vn fruit délicat & raffraichif- fantau poffible. Mais les feuilles , les fleurs, & les fruits de quelques-vnes, font fi differens en leur forme exté- rieure , qu'il ne faut pas s'étonner de ce que les Auteurs qui ont traitté de cette Plante , & qui ont ciû,qu'il n'y en avoit qu'vne feule efpece, ne fe font pas acordez,dans les defcriptions qu'ils nous en ont données. Les Ha- bitans du Brefil en content jufques W!CfV des Iles Antilles. 277 1 g I I I I zjï Hr stoi re Nattrell b |r fét force : mais aus Antilles , l'on n'en connoîc que les daus, donc nous avons icy fait mettre les figures. I/vne a les feiiilles affez larges , qui fonr partagées en cinq, fleurons ; dont ce- tuy du milieu eft rond par le haut , Se tes quatre autres le terminent en pointe. Sa fleur étant épanoiiye y effc plus ample qiv vne rofcEllc eft- enfer- rée prés du pied5 dans trois petites fer . uilles vertes y fon corps eft compofé de plufieurs autres belles feiiilles^dont les vnes font d5vn bleu celefte^qui eft parferaé de petites pointes rouges,qui ont la figure d3vne couronne 3 & les autres sot de couleur de pourpre. Tou- te cette belle fleur eft entourée d'vne infinité de menus filamens ondez.qui font comme les rayons de ce petit So- leil entre les fleurs s ils fontémaillez- de blanc 3 de rouge , de bleu 5 d'in- carnat 3: Se de plufieurs autres vives* couleurs 3 qui leur donnent vue mei> veilleufe grâce. L'autre force a auffi les feiiilles divifées en cinq parties comme la première : mais fafflèur, qui a la figure dVne petite coupe^bordée ;^iir/vi BES ÎLES ANTILTES'i ïfïfz par le haut de petits filets blancs & jCjj rouges, n'eft point fi étenduësie dedans eft orné de feuilles blanches , qui fe terminent en pointe.Ges deus efpéces de fleur de la Paffion,pouiîent de leur cœur vne petite Colomne ronde, qui |\ a fur fon chapiteau vn bouton chargé |$ de trois grains , qui ont la forme de h\ clous-.cette colomne eft accompagnée g de cinq filets blancs , qui fupportent de petites languettes jaunes > fembla* blés à celles qu'on voit dans la coupe des Lysi&c c'eft ce qu'on dit reprefen- ter les cinqplayes de nôtre Seignemv Ces fleurs , qui font d'vne douce odeur, venant à tomber, le bouton qui eft fur la colomne fe groffit tellement, qu/iLs'en forme vn beau fruit jaune, poly 3 6c de la groffeur dVne pomme médiocre. Son écorce eft aufli épaifle que celle d'vne Grenade y Se elle eft remplie dVn fuc delicieus au goût. i 1 i parmy lequel , il y a vn gr»and nom- â bre de pépins noirs 8c durs au pofli- m |J ble* On ordonne ce fruit , comme vu \fi 1 ble. On ordonne ce fruit , comme vu fouverain raffraichifFement , à ceus *:* qui om la fievre^ôc l'expérience a fait connokre? PStt^L<^XTO^gMCTS€^tt3^^ t 1 1 i 2.80 Histoire Naturelle connoître > qu'il avne finguhere ver- tu pour reveiller l'appétit* recréer les eiprits vitaus, & réprimer les ardeurs de l'eftomac. Les Habitans duBrefii entretiennent foignenfernent cette Plante^de laquelle ils fe fervent com- me d'vri Singulier ornement pour cou- vrir les berceaus & les cabinets de leurs jardins , car Ces feuilles Se fes fleurs leur fourniflent vn agréable ombrage; Se ils corapo-fent avec le fruit vn fyrop cordial , qui eft fore eftimé parmy eus > à caufe qu'outre les propriétés que nous avons déjà dites,it a encore cette qualité bien re- marquable^ ne biffer aucun dégoût, à ceus qui ont accoutumé d'en vfer, L'écorce de ce fruit Se fes fleurs étans confîtes , produifent tous les mêmes effets que le fuc* Article XIIv De l'Herbe de Mufc* ]L y a auiïï y ne Herbe > que 1 01 nomme Herbe de Mufc. Elle porte fa tige aires haut 5 6c elle croift touf- &ë>carame vn peut buiflbn- fans épU MÊSUSa L»ayiftifti^rM ^ "TO DES ÎLES ANTILLES. 2-Sl .'V nés. Ses feuilles font affez longues & jB| rudes 3 fes fleurs font jaunes fore bel- ^ les à voir , en forme de calice ou de ^ clochette 5 qui fe forment après en vu bouton allez gros , qui devient étant meur > d'vn blanc fatiné en dedans* & de couleur de mufe en dehors. La graine que ce bouton referre > tft auffi de cette même couleur brune: Elle fent parfaitement le Mufcquand elle eft nouvellement cueillie. Dont auffi elle eft nommée Graine de Mufçs. de elle conferve longtems cette odeurs pourveu qn*on la tienne en lieu fec> & dans quelque vaiileau * ou elle ne s'évente pas. Ainfi plufieui s autres Beibes.pta- fieurs Arbniïeaus 9 & même la plut- part de ces vîmes ou Lienes, qui ram- pent parmy les buiffons > &c qui s'e- lèvent fur les Arbres qui croisent dans les Antilles , poitent des fleurs auffi belles & agréables à la veue, qu'elles font douces 5c fovëues à l'o- dorat. De forte que bien touvent en allant par la campagne 3 on paffe en des Ueusjoù l'air en eft tout parfumé; Cha ^^EraMSlfigWMiK»^ ! I I 'Ml HïStOîRE NAïVREtLE' 4» ■£#£ £3^ #^3. £#| £$$ .£$£ j^| ^ .^ CHAPITRE XII. Dr ;/*£ fortes de Beftes h quatre pieds ; qtéon a trouvé en ces lies. Vaut que les Êfpagnols & les , Portugais eû.fïènt dreffé des Co- lonies en l'Amérique ,: on n'y voyoit ni Chevaus, ni Bemfs, ni Vaches,nï Moutons , ni Brebis, ni Chèvres, ni Porceaas , ni Chiens. Mais pour fa-' ciliter leuT*nauig;mons,& raffraichir kurs vaiflèaasdans le bcfoinjls jette- rait de cous ces animaus- en divers liens de ce nouveau Monde; où ils ont Bellement multiplié, qu à prefent ils y tont plus communs, qu'en aucun en- droit de l'Europe. Outre ce Bétail étranger , il a m de tout tems dans les Antilles quelques Beftes à quatre pieds , telles que font* rOpaffum , h I-avarù , le Tatou, l'A- gcuty ,& le Rat mufquê , dont nous ferons les deferiptions en ce Chapi- tre^ Auti bës Iles âh tille s. zB'f Article L De L'Qj?affkm. L'Opœffupî) qui eft le même animât que les Brefiliens nomment Cam- gueya, eft de la groiîeur d'vn Cochon de fix fcmainefs.il a le mùféâu- pointu,, la mâchoire d'en bas plus courte que ceiie de dcflus 9 comme îeporceaudes- oreilles 5- longues r larges & droites*: Se la queue longue 3 pelée par le bouc yôc recourbée. Il eft couvert fur« M dos d'vn poil noir entremêlé de gris yôc fous le ventre & fous lecol>, il eft jaunâtre. Il a des ongles extre* mement pointus^avec lefqnels il grim- pe légèrement fur les arbres. Il fe nourrit d'oifeaus > & il fait la chaffe ans poules comme le Renard, maison défaut de proye 5 il fe nourrit de fruits. Ce qui eft de particulier en cet Ani- mal 3 eft v que par vne fingularité bien remarquable 3 il a vne bourfe de fa peau même repliée fous> le ven- tre, dans laquelle il porte les petisjef- <|pels il lâche fur terre quand il veut». m- rearatt^saggaBB^^ 2 I I I 484 Histoire "Natvreilb en dtlleaant cette boni le naturelle* Puis quand il veut paffer outre > il Ta rouvre , ôC les pens rentrent dedans, & il les porte ainfi par tout.La femel- le les allaitte fans les pofer à terre jcar fes mammellesfont cachées dans cet- te bourfe , qm eft en dedans couverte d'vn poil beaucoup pins mollet, que celuy qui parbîc en dehors.La femelle produit ordinairement fix petis. Mais le mafle > qui. a auffi vn pareil lac na- turel fous le ventre , les porte à fon tour, pour foulagcr îa femelle , quoy qu'il ne les puiffe pas allaitter. Ces Animaus font communs dans la Vir- ginie 3 & dans la Nouvelle Efpagne. La Baleine,n'ayant pas receu de la na- ture la commodité dVn tel fac,a Vin- duftrie , à ce que dit Filoftrate, de ca- cher fes petis dans fa gneule.Et la Be- . lette aime tant fe petis* que craignant qu'on ne les Iuy dérobe elle les prend auffi dans fa gueule , & les remue de lieu en autre. BJIWW* des Iles Antilies. zî$ Article II. Du lavarù. IL y a auffi en quelques vues de ces Ilesjcomme à Tabago,vne efpece de Poreeaus fauvages , qui fe voyent pa- reillement au Brejîl, & en Nicaragua. Us font prefque en tout femblables aus Sangliers de nos forefts. Mais ils ont peu de lard > les oreilles courtes, prefque point de queue > & ils por- tent leur nombril fur le dos.. On en voit de tout noirs, & d'autres qui ont quelques tâches blanches.Leur gron- gnément eft auffi beaucoup plus effro- yable , que celuy des Poreeaus dôme- ftiques. On les nomme Iavaris. Cecte venaifon eft d'aflez bon goût : Mais elle eft difficile à prendre,à caufe que ce Sanglier ayant vn évent fur le dos, par lequel il refpire & rafraîchit fes poulmons , il eft prefque infatigable à la courfe,& s'il eft contraint de s'arrêter, &c qu'ilfok ponrfuivy des Chiens jil eft armé de defenfes fi poin- tues & fi trenchantes , qu'il déchire tous ceus qui ont raflurance de rap- procher. Artï 1 ! S ***i/J)Sè>œÈW'»*iœ!MX&âaCM 8 a8^ Histoire Natvr*u« Article II I. Dm Tatou. LEs Tatous 5 qui Ce trouvent auffi à Tabago -3 font armes dVne dure icaille de laquelle ils Ce couvrent & Ce parent comme dVne cuiraflè. Ils ont ■la f tefte d vu Cochon , le mufeau de même avec quoy ils fouillent la terre, Ils ont auffi en chaque patte cinq on- gles fort pointus, dont ûsfe fervent pour renverCer promtément la terre, &. découvrir les racines, dont ils s'en- graiffent pendant la nuit. On tient que leur chair eft délicate à manger, & qu'ils ontvn petit olîelet à la que- #e,qui périt la Curdité. L'on a expé- rimenté qu'il Coulage le bourdonne- ment* & qu ilappaiCe la douleur d'o- reille 3 le laiifant dedans enveloppé dans du cotton.il y en a qui font gros comme des Renards £ mais ceus qui iont à Tabago , font beaucoup plus péris. Quand ces Animaus font pourfui- vis , Ôc quand ils prenent leur repos, ce qu'ils font ordinairement du- rant iris%i»ffvyL'»^v?Wiy* ©es Iles Antilles, itj tant le jourP ils fe mettent en forme 4e boule, ôc ils carnaJTent fi bien leurs pieds, leur tefte , 5c leurs oreilles fous leurs écailles dures & folides^qu'il n'y a aucune partie de leur corps, qui ne foit.à couvert fous cette cuiraiïe natu- relle, qui efl; à l'épreuve des armes des «chaflèurs & des dens des chiens* & s'ils font prés de quelque précipice , ils fe laiflenc rouler du haut en bas, fans .crainte de (é faire mai. L'Infçot recite quaus Indes Orientales, en la Rivière de Goa , fut pris vn Monftre Marin, tout couvert d'écaillés dures à l'égal du fer* ôc qui lors qu'on le touchoit* feietiroit ainfi en vn.e pelotte. Article I W De V Agouty, L*jigputy eft de couleur brune ti- rant fur le noir. Il a le poil rude, .clair, & vne petite queue fans poil. Il adeus dens en la mâchoire d'en haut, & autant en celle d'en bas. Il tient fon manger en fes deus pattes de de^- vant,commerEfcurieu,Il jette vn cry comme *œàSiX?*îM***2iM*Q& I 1 i8§ Histoire Natvrelle comme s'il difoit diftinâement Cou- yê. On le pourfuit avec les chiens^ parce que fa chair > quoy quelle fen- te vn peu le fau vagin 3 eft eftimée de piufienrs", autant que celle du Lapin» Quand il eft chaffé , il fe fauve dans le creus des Arbres , d'où on le fait fortir avec la fumée, après qu'il a crié étrangement. Si on le prend jeune, il s'apHvoife aifément , ôc fers qu'on le met en colère , le poil de deffus fon dos s'herifle 5 & il frappe la terre de les pattes de derrière , comme font les lapins. Il eft aufli de même grof- feur. Mais fes oreilles font courtes &• rondes , & fes dens fonc trenchantes comme vn rafoir. Article V. Des Rats Mu [que s. LEs Rats Mujques , que nos Fran- çois appellent Piloris ,f ont le plus fouvent leur retraitte dans les trous de la terre 3 comme les Lapins , auffi ils fonc prefque de la même grofleur, nuis pour la figure 9 ils n'ont rien de I I i I 290 Histoire Mat vrille de différent de celle des gros Rats quf- on voit ailleurs , finonque la plupart ont le poil du ventre blanc comme les dirons , de celuy du refte du corps, noir ou tanné.Ils exhalent vne odeur Mufquée, qui abbat le cœur , & par- fume fi fort l'endroit de leur retraitte, .qu'il eft fort aiféde le difçerner. La terre ferme de l'Amérique nour- rit plufieurs beftes à quatre pieds, qui nefe trouvent en aucune de ..ces Iles, CHAPITRE XIII. Des Reptiles qui fevoyent en ces lies. A Près avoir reprefenté au Cha- pitre précèdent , les Beftes à quatre pieds, qui fe font trouvées aus Antiles , lors que les Colonies étran- gères s'y font établies : nous devons à prêtent" traitter des Reptiles , qui y fontauffien grande abondance : cal- ées animaus qui font naturellement ^inemis du froid, fe multiplient mer- veiileufemept BES ILES ÀNTItLBS.. Hft ^eilleufërnent dans ces pays chauds: loint que les grands bois , & les ro- chers de ces Iles * contribuent beau- coup à leur produ&ion , car ils leuc fervent de retraitte afluréc. Art i c i b I. JDe plufieurs efpeces de Serpens & de Couleuvres. IL y a fort peu de Beftes venimeufes dans les Antilles. Il eft vray qu'il y a beaucoup de Serpent 8c de Couleuvres de différence couleur ôc figure. Il s'en voit de neuf a dix pieds de long , Se de la groifeur du bras & de la cuifïe* On y a même vne fois tué vue de ces Couleuvres , qui avoit dans fon ven- tre vne Poule entière avec la plume, & plus d'vne douzaine d'œufs ^ayant furpris la poule comme elle couvoit. Il s'en eft trouvée vne autre^qui avoit englouty vn chat. D'où Ton peut ai- fément juger , de la groueur de ces Beftes. Mais quelques prodigieufes qu'elles foient , elles n'ont aucun venin en la plupart de ces Terres. Et même plu- N a fieurs ■éM'MiVV'^rtfW I I i I I 19* Hl STOIRE NATVREXLE iîeurs habitans , en ayans fur la cou* verture de leurs maifons, qui eft faite le plus fou vent des feuilles de Palme, ©u de Cannes de Sucre ; ils ne les en chaifent pas 3 à caufe qu'elles déni- chent & dévorent tous les Rats.Mais il faut tout dire , elles font auffi U guerre ans Poulets. On a encore re- marqué, que quelques-vnes ont l'a* dreffède gardera ne poule lors quelle couve , fans luy faire aucun mal pen^- dant ce tems-!à : Mais fi toft que les oeufs font éclos,elles mangent les pé- ris pouffins , Se du moins fuffoquent la poule , fi elles ne font pas allez puiflantes pour l'engloutir. Il y en a d'autres qui font parfaite- ment belles ôc agréables à voir : car elles font entièrement vertes s hor- mis fous le ventre , qu'elles font d'vn gris blanc. Elles font longues , d'vne aulne & demye , Se quelquefois de deus : Mais elles font fort déliées à proportion, n'eftant pour leplus,que de la grofleur du poulce. Elles ne vi- vent que de grenouilles , qu'elles é- pient prés des ruifleaus , ou d'oifeaus, quelles MVpÊLm*S4tx KVkwmrt*. ~**ra « DES ÎLES ANTILLES. *5>£ qu'elles guettent fur les Arbres , Ôc dans leurs nids , lors qu'elles y peu- vent atteindre. Ainfi cette efpece de Couleuvre eft noble pas deffus les au- tres : Car elle ne vit que de péfche ôc de chaffe. Quelques Habitans , qui font acoûtumez à voir toutes ces for- tes de Couleuvres , les manient fans crainte , ôc les portent en leur fein. Ceus qui ont voyagé en Aile ôc en Afrique , difent qu'ils y ont trouve quelque choie de femblable. Car ils rapportent qu'en la grande Tartane, il y a des montagnes , où fe ncurrif- fent des Serpens d'vne groffeur pro- digieufe , mais nullement venimeus, ôc très bons à manger : Et qu'au Ro* yaume de Syr , ils ont veu de ces Be- lles , fe jouer avec des enfans , qui leur donnoient vn morceau de pain. Ou dit auffi , que dans les Provinces des Antes , au Royaume du Pérou, il y a d'effroyables Couleuvres , lon- gues de vint-cinq à trente pieds , qui ne font mai à perfonne* Quant aus Iles de la Alartini- que y ôc de Sainte Aloufie , il n'en eft " N 5 pas i I I 1 1 P F i i WfT3«T7: _ l I I 194 Histoire Nattreiii pas de même qu'aus autres ; Antilles» Car il y en a qui ne font point dan- gereufes;, & d'autres qui le font beau- coup. Celles qui ne le font pas 3 font plus greffes y & plus iongues que les autres. C'eft pourquoy ceus qui ne les connoiffent pas 3 en ont plus de peur > que de celles qui font vé- ritablement à craindre. Neantmoins elles ne font aucun mal : au contrai- re ydez qu'elles aperçoivent vne per- fonne ., elles s'enfcyent avec diligen- ce. Ce qui eft caufe qu'on les appelle Courerefes. Elles ont auffi des taches noires ôc blanches fur le dos3qui fer- vent à les faire reconnoitre plus ai* fément. Les Couleuvres dangereufes font: de deus fortes. Les vues font grifes- fur le dos & fort veloutées. Les au- tres font toutes jaunes > ou rouffes &c effroyables à voir x à caufe de cette couleur > bien qu'elles ne foient pas plus dangereufes 3 &c peuteftre en- core moins 3 que les premières. Les vnes Se les autres ayment fort les Rats > auffi bien que celles qui n'ont pointe DES ÎLES AnTHLÉS. £%f mm de venin : Ec lors qu'il y en a beaucoup en vne café , c'eft merveil- le s'il n y a aufii des Couleuvres. EU les font de différente groiTeur & lon- gueur, Se l'on tient que les plus cour- tesifont celles qui font le plus à crain- dre. Elles ont la tefte platte & large, la gueule extrêmement fendue, & ar- mée de huit dens , & quelquefois de dixydônt les vnes font crochues com- me vn croiflant y & tellement poin- tuës.quil eft impoffible de s'imaginer rien de plus. Et comme elles font tou- tes creufes , c'eft par ce petit canal qu'elles font couler fubtilement leur venin 3 qui eft renfermé dans de pe- tites bourfes , ausdeus coftés de leur gueule, à l'endroit precifement où ré- pondent les racines de leurs dens.Elles ne mâchent jamais les alimens dont elles fe nourriflent : mais les avalent tout entiers^apres les avoir prelTez & aplatis,- s'ils font trop gros.Querques vns difent , que fi elles employoient leurs dens à les mâcher,elles s'empoi- fonnéroient elles mêmes, & que pour obvier à cela5elles couvrentleurs dens N 4 de m n I I 1 § 0f I I 1^6 Histoire Natvrelle de leurs gencives 5 lors qu'elles pré- sent leur nourriture. Ces Animaus font fi venimeus dans ces deus Iles > que quand ils ont pi- qué , fi Ton naa recours prormément à quelque puiflànt remède , la bleiïii- re fe rend incurable»en moins de deus heures. Ils ont cecyde bon * qu'ils ne vous mordent jamais , pourveu que vous ne les touchiés pas 3 ni rien fut quoy ilsfe repofent. Article IL Des Lezœrs. IL y a pîufieurs fortes de Lezœ?-$ dans ces Iles. Les plus gros & les plus eonfiderables -, font cens que quelques Indiens ont nommé Igua- nos 9 les Brefiliens Sensmhi , & nos Caraïbes Ouayamaca. Quand ils ont pris leur jufte confidence» ils ont en- viron cinq pieds de longueur , à me- furer depuis la tefte jufques à i'extre- mité de la queiie.qui eft bien auffi lon- gue que le reftedu corps:Et pour leur groileur elle peut eftre d vn pied en circou vv>>A^^ vWWvlW* 1^ iîes Iles Antilles'. 297 Sv circonférence. Selon les divers ter- m roirs , où ils fe nourriffenc * ils ont j[ aufïi la peau de différente couleur. Et Sg e'eft peuteftre pour ce fujet , que les |j Portugais lés ont nommés Caméléons, m & fe font perfuadez que s'en eftoit ^ vne efpece. En quelques Iles., les fe- jtf melles (ont couvertes d'vn beau vert* ï || qui cft marqueté de blanc ÔC de noir, & âc les maies font gris : En d'autres ils * font noirs»& les femelles font d'vn. gris clair , rayé de noir & de vert , il y a même des lieus.où les maies Se les femelles ont toutes les petites écailles de leur peau , fi éclatantes ,■ & fi cha* marrées , qu'on diroit à les voir de loin.qu ils foient couverts d'vnc riche toile d'or , ou d'argent. Ils ont fur le dos des épines en forme de créte,qu'ils || dteffent & couchent quand ils veu- lent, & qui vont toujours en amoin- driflant dépuis la telle jufque au bout -jjji de la queue. Ils font portez fur quatre pieds, qui ont chacun cinq griffes, qui lotit munies d'ongles fort pointus, lis font fort légers à la eourfe,& ils grim- fentdes mieusfur les arbres.- Mais N 5; foie: i § 1 r0 3.98 Histoire Natvrelxe foit qu'ils airaesu de confiderer les- hommes > ou qu'ils foient d'vn natu- rel ftupide,& peu apprehenfif, quand ils font apperçeus du chafleur y iis at- tendent patiemment le coup de flè- che 3 ou de fufii fans branler. Et mê- me y ils fouffrent qu'on leur mette au col vn las coulant •> qui eft attaché au bout de la perche, dont on fe fert ak fes fouvent5 pour les tirer de deffus tes Arbres où ils repofoient. Quand ils font en colere5ils enflent vn grand gofier , qui leut pend fous le col ôc qui les rend épouvantables 3 ils ont: auffi la gueule fort fendue 3 la langue épaiffe ,.& quelques dents allez poin- tues. Ils ne démordent pas aifément5 ce qu'ils ont vne fois ferré : mais ils n3ont point de venin. tes Femelles ont des œufs qui font de la groffeur de cens des Ramiers* mais ils ont la coque molle. Elles les pofent afïes profond dans le fable^qui ■eft au bord de la mer 3 ôc les laiffent couver au Soleil , d'où eft venu que quelques Auteurs , les ont mis entre Us animaus amfîbies,. Les Sauvages ont. «va* *ry «t^raviYfcVtir* wmmmt \ k^JWJiWj* ses Iles1 Antilles. 2^99 ont apris ause Européens jle moyen de prendre ces Lézards y & la hardietfe de les manger à leur exemple. Ils font très - difieiles à tuer. De forte qu à quelques vns yYon a donné jufques à~ trois coups de fufil , & emporté vne partie des entrailles.fans qu ils fartent abatus. Cependant^ leur mettant vn petit bois dans le nez, ou vne épingle entre içs deus yeus , y ayant là vn pe- jtirtrou , où l'épingle entre aifément^ on les fait mourir auffi-tôt. Les Ca- raïbes font fort adroits à les prendre avec vn laqs coulant , qu ils leur paf- fent fubtilement fur le cou , ou bien les ayant attrapés à la courfe , ils les faififfent dVne main par la qu^ue, la- quelle étant fort longue } dorjne vne belle prife:& avant qu ils fe puiflent retourner pour les mordre>ilsles pré- sent fur le chinon du col : Et |puisils leur tournent les pattes fur le êtes > ils lès lient 5 & les confervent ainfi eiv Vie plus de quinze jours , fans leur donner à manger.Leur chair eft blan- che 3 & en des endroits couverte de graiffe.Geus qui en vfent.la trouvent- N 6 f®ï& 1 1 $ I I 300 Histoire Natvrelle fort délicate 5 lors nommément qu'on a relevé vn certain goût fade qu'elle a naturellement , par de bonnes épices &c quelque fauce piquante, On ne conicille pas neantmoins d'en manger fouvent , à caufe qu'elle dcleche trop le corps 3 & luy fait perdre tout foa embon - point. Les œufs font fins glaire3& n'ont au dedans que du jau- ne, qui rend le potage auffi excellent,, que nos œufs de poule. Outre cqs gros Lezars yon en voit en ces Iles de quatre autres fortes qui lontdebeaucoupplus petis.Nos Fran- çois les nomment *dnolû9Roquets9Ma- boujas^&c Gobe- mouches* Article II I. Des jûnolis, LEs Anoliâ font, fort communs en toutes les habitations., Ils font de- là groflèur & de la longueur des Le- zars qu'on voit en France : Mais ils ont la telle plus lpnguette,lapeau jau- nâtre y Se fur le dos ils ont des lignes rayées de bleu ,de vert & de gris,qui prenent depuis le defliis de la telle* jofques É*»JWs*l des Iêes Antilles. $gî ynfques au bouc de la queiie. Ils fora leur retraitce dans les trous de la terre*. 8c c'eft de là que pendant la nuit ils fontvn bruit beaucoup plus péné- trant s 8c plus inportun que celuy des Cygales. Le jour ils (ont en perpé- tuelle adion > & Us ne font que rodei- aus environs des Cafes^pour chercher. dequoy fe nourir. Ar T I C LE IV. Des Roquets, LEs Roquets font plus petis que les Anolis. Ils ont la peau de coulent de feuille morte > qui efl marquée de petis points jaunes, ou noirâtres. Ils font portez fur quatre pieds3dont ceus de devant font ailes hauts. Ils ont les yeus étinceians 8c vifs au poiTible.Ils tiennent toufiours la telle élevée en l'air y 8c ils font fi difpos,qu ils faute- lent fans cefle^comme des oifeaus^lors qu'ils ne veulent pas fe fervir de leurs ailles. Leur queue eft telle- ment retroufîée fur le dos y quelle fait comme vn cercle 8c demy. lis prenent Si^ùî 1 i I 0£ I 77?* ï 1 I J0 2. HïS TOI RE NATV RELr E prenent plaifir à voir les hommes, SI- s'ils s'arrêtent au lieu où ils font , ils leur jettent à chaque fois des œillades, €Juand ils font v-n peu pourfuivis* ils ouvrent la gueule , 6c tirent la lan- gue comme de petits chiens de chaf- fc.- M. r t ï c r e V. Des Mahou]M. LEs MaboujM font de différente couleur.Ceus qui fe tiennent dans les arbres pourris^ & aus lieus maré- cageusi comme aufli dans les profon- des ^étroites vallées où le Soleil ne pénètre pas5 font noirs 6c hideus tout*. ce qui fe peut y &c c'eft fans doute ce^ qui a donné occafion de les appeller du même nom 5 que les Sauvages ont impofé au Diable. Ils ne font gros pour l'ordinaire:» qu'vn peu plus que le pouce 5 fur fix ou fét de longueur* Ils ont tous la peau comme huilée» M&t% r4V*a~Wà*;i . *aww>f*jig:ii ^ Art i c t e VI* JP^j Gdbe-mouches* C Eus que nos Français nomment; Gobe- mouches k caule de leur exer* eice le plus ordinaire 3& les Caraïbes ©ulleotma 3 font les plus petis de- tous les Reptiles qui font en ces Iles. Ils ont la figure de ceus que les Latins nomment SîellionesrWy en aqui fem- blent eftre couverts de brocatel de fin or , ou d'argent 5 d'autres qui font de; vert doré y & de diverfes autres ravif- fantes couleurs. Ils (mit fi familiers, qu'ils entrent hardiment dans les chambres , où ils ne font aucun mal: mais au contraire les purgent de mou* ches, & de pareille vermine.Ge qu'ils font avec vne telle dextérité, ôc agili- té, que les rufes des chaffeurs ne font pas àpnfer, en comparaifon de celles de cette petite BefteoGar elle fe tapit? et fe met comme en fentinelle lur quelque planche 5 fur la table 3 ou fur quelques autres meubles , qui foyent plus élevés que le pavé , ou elle ef~ pere que quelque mouche fe viendra^ gofer»* ^ i I I 1 m, I ! i i 304 Histoire Natv&blle pofeuEt appercevant (a.proye , elle la fuit par couc de l'œil > &c ne la quit- te point de veuëj faifant de fa tefte au- tant de différentes pofttires j que la mouche change de places. L'on di-' roit quelquefois , qu'elle fe lance à demy corps en l'air. Et fe tenant fur fes pieds de devant y haletant après fou gibier y elle entr'ouve fa petite gueule allez fenducjcomme fi déjà el- le ledevoroit & l'engloutiifoit par ef- perance. Aureûe^bien que l'on mené du bruit en la chambre > & que l'on s'approche d'elle , elle eft fi attentive à fa chafle^quelle n'abandonne point fon pofte j & ayant enfin trouvé fou avantage , elle s'élance fi- droit fur fa proye 3 qu'il arrive rarement qu'elle ïuy échape. C'eit vn diverti fferaent bien innocent, que de confiderer l'at- tention, que ces petites Beftes appor- tent y â chercher leur vie. Vyé plus elles font fi privées qn'el* fes montent fur la table quand on mange; & fi elles apperçoivent quel- que mouche^elles la vont prendre juf- çues £ar les aflietes de ceus qui man- gent^ A/^vyi^vv^' I des Iles Antilles. |q$ gent > & même fur les mains & fur les habits* Elles font d'ailleurs fi po- lies & fi nettes * qu'elles ne donnent point d'averfion ni de dégoût * pour avoir palfé (ur quelque viande. Pen- dant la nuit* elles tiennent leur partie eu cette mnfique que font les Anolis* & les autres petis Lezars. Et pour fe pérpetuer>elles font de petis œufs gros comme des pois > qu'elles couvrent d'vn peu de terre5les laiffant couver au Soleil.Si toft qu'on les tuë,ce qui eft fortaifé^àcauiede l'attention qu'elles apportent à leur chaflè, elles perdent incontinent tout leur luftre : l'or 5c l'azur , &c tout l'éclat de leur peau fe ternit3& devient pâle ôc livide. Si quelqii'vn de ces petis Reptiles que nous venons de décrire , d^voit eftre tenu pour vne efpece de Camé- léon , fe devroit eftre ce dernier , à eaufe qu'il prend volontiers la eou- leur,de tout ce fur quoy il fait fa refi- dence plus ordinaire. Gar ceus qu'on voit à l'entour des jaunes Palmes,fone entièrement verts comme les feuil- les de cet arbre. Ceus qui courene i 1 i i i i 4 i 1 I 'f06 HlSTOIRÉ NATVREftg fui: les orangers , font jaunes comme leur fruit» Et même il s?en eft trou- vé y qui pour avoir efté familiers dans vne chambre > où il y avoit vn tour de lit de taffetas changea^ pro- duifirent vne infinité depetis , qui a- voiét tout le corps émaillédediverfes couleurs y toutes fernbkbles à l'orne- ment du Heu où ils avoient accès. On pourroit penteft 'e attribuer cet effet* a la force de leur petite imagination: mais nous iaiffons cette fpeculation aus curieus. Article V IL Des Brochets de terre. 1% y a encore en plufieurs de ces I-le^ des Brochets de terre^ qui ont l'en- tière figure s la peauv Ôc la hure de nos Brochets de Rivière. Mais au lien de nageoires > ils ont quatre pieds^qui font fi foiblesj qu'ils fe traînent fur la terre en rampant , Se en ferpentant comme les Couleuvres 3 ou pour de- meurer en nôtre corhparaifon s com- me des Brochets ,, qui font hors de l'eau* rvv^' *«-fci**^ F5W A&Tfc i ses Iles Antilles. jcf l'eau. Les plus grands ne peuvent a- voir que quinze pouces de long 3 fur vne groffeur proporcionée. Leur peao? K~ eft couverte de petites écailles , qui font extrêmement Juifantes * & de couleur de gïis argenté. Quelques eu- rieus , en ont de petis en leurs Cabi- nets ,-qu on leur a fait pafferpour des Salemandres. ^ Pendant la nuit , ils font vn bruit S effroyable de deflous les rochers ., &c m du fonds des cavernes où ;ls fe tien- fy nent. Le fon qu'ils reodetitefl b^au- W coup plus fort r & plus defagreable que ceiuy des Grenouilles & des Gra- paus ,.& il fe change & fediverfifie, fuivant la yarieté des lieus^ où ils font ^ cachez. Ils ne fe montrent ptéfque ^ point > q»à l'entrée de la nuit , •&: % quand on en rencontre de jour 3 leur ^ mouvement ^ qui eft tel que nous a» vons dits donne de. la frayeur* § i i gra^KSMP*^^ 1 i |o8 Histoire NatvrelIe Article VII 1. Des Scorpions & d'vve autre efpece dèr âmgerem Reptiles, L y a auffî des Scorpions , qui ont la même forme>que ceus qu'on voit en France : mais ils n'ont pas vn venin: û dangereus, ils font jaunes, gris >ow bruns , félon les differens terroirs ok ils fe trouvent. En fouillant. dans les liens maréca- gens pour y faire des Puits: on des re- fervoirs d*eau>- on trouve fouvent vne< forte de Lezaf s hïdùus an poffible. Ils font de la longueur de fix pouces ou environ. La peau de leur dos eft noire* & parfernée de petites écailles grifes* qui femblent eftrc huilées , tant elles font luiiantes* Ils ont le déflous du ventre écaillé comme le dos : mais la peau qui le couvre , eft dJvn jaune pale. Lenr tefte eft petite & pointue. Leur gueule qui eft allez fendue , eft année de pluiïeursdens > qui font ex- trêmement «enchantes. Ils ont deus petis yeus r mais ils ne peuvent fup- pones la lumière du jour^car aufîî-tot qu'on FS5VW* fS9BB9nsiBsro des Iles Antilles. ?o# Gros Lezcïrt . ¥*©?" nommé Iquanes }< '% làrochci déterre. I i § r i i i i f î O Hï STOIRENATt RE&L E qu'on les a tirez de la terre , ils ta^ client incontinent de faire vn trou a- #ec leurs pattes , qui ont chacune cinq ongles durs &: crochus , avec quoy ils fe font ouverture de même que les Taupes, pour pénétrer par tout où ils veulent. Ils font grand ra- vage dans les jardins, rongeant les racines des Arbres & des Plantes* Leur morfurë eft auffi autant veni- meufe , que celle du plus dangereu's Serpent. >$m*m>m *m •*£* «» m& m> CHAPITRE XIV. Des InfeBes qui font communs am Antilles. ^"T On feulement les Cieus , 8c les JJN autres plus vaftes & plus relevez corps de la nature, racontent la gloire du Dieu fort : mais même les plus pe- tites & les plus ravalées de (qs produ- ctions , donnent auffi à connoitre l'ouvrage de fes mains, de faurniilènc à tous ceus qui les considèrent avec attention , vne riche & abondante matière ■DBS ÎLES ÂNTÎltHS. $Xt ■niatiere , pour exalter la puivTance, de fa ;Maicft.é;Saavjeraine.Çeft pourquoy nous croyons,que cens qui fe plaifenc à méditer les fecrets de la naturel de contempler les merveilles de Dieu,qui a tiré de Ces inépuifables trefors , tanç de riches ornemens, de proprietez oc- cultes , Se de rares beautez, pour en .revêtir les moindres de fes créatures: auront pour agréable , que nous don- nions ce Chapitre, à la confideration de quelques infcéfces , qui fe voyenç communément ans Antilles , Se qui font tous revêtus de quelques qualité? particulières , comme d'autant de ra- yons de gloire, qui foutiennent Se relèvent avec éclat, leur foibleire Sç ballelle naturelle. Articu I. J)es Soldats , &- des Limaçons., ENtre ips Infedes , qui lont eu abondance en cespaïs ehauds*il y a vne efpece d'Efcargots , ou de Lu maçons , que les François appellent Soldats sparce qu ils n'ont point de co* cuiilles qui leur foyent propres Se par- ticulières:, i I fi jîjl Histoirs Natvreixe ticulieres , de qu'il ne les forment pas de leur propre bave,comme le Lima- çon commun : mais* que.fi toft qu'ils iont produits de quelque matière cor- rompue > ou autrement > ils ont cet inftinft 3 pour mettre la foiblefle.de leur petit corps à couvert des iniures de l'air* & de l'atteinte des autres Be** ftes^de chercher vne maisô étrangère, ôc de s'emparer de tel coquillage qu'ils trouvent kur eftre propre 3 dans le- quel ils s'ajuftent & s'accommodent, comme les Soldats , qui n'ont point de demeure arréte'e \ mais qui font toujours leur maifon de celle d'au- truy y félon la rencontre .& la ne~ ceffité. On les voit plus ordinairement en des coques de Burgam > qui font de gros Limaçons demer,qu'ils rencon- trent à la cofte y à laquelle ils font pouffez, quand le poiflbn qui en étoit le premier hofte, eft mort. Mais > on trouve auffi de ces petis Soldats 5 en toutes fortes d'autres coquillages*mç- me en des coques de nois de Liénes, & on en a veu quelques- vns, qui s'é- toient des Iles Antilles^ 311 fourrez dans des pieds de groifes Cra- bes mortes. Ils ont encore cette indu- strie > qu'a mefure qu'ils groffiffent, ils changent de coquille/elon la pro- portion de leur corps 5 de en pren- nent vne plus ample^dans laquelle ils entrent quittant la premiere.De forte qu'on en voit de différentes faiïbns &C figures/elon la diverfitédes coquilla- ges qu'ils empruntent.il y a apparen- ce que c'eft de ces Soldats que Pline parle fous le nom d'vne efpece de pe- tite Ecrevifle , à qui il attribue le mê- me. Ils ont tout le corps fort tendre, hormis la tefte Se les pattes. Ils ont pour pied & pour defenfe , vn gros mordantjfemblable au pied d'vn gros Cancre , duquel ils ferment l'entrée de leur coquille 3 Se parent tout leur corps. Il eft dentelé au dedans , 8c il fenrefi fort ce qu il peut attraper, qu'il ne démord^point , fans empor- ter la pièce. Cet Infeéb va plus vifte que le Limaçon commun , & ne falit point de fa bave , l'endroit où il pan^e. Quand on prend ce Soldat il s'en Tm.J. O fafche, % J 1 I I 1 I ! 314 Histoire NATVRSLXiE Jafche , & fait du bruit. Pour luy fai- re rendre la maifon qu'il a piife , on ,cn approche le feu : ôc auijkot il fore de la place. Si on la luy prefentepouc y rentrer > il s'y remet par le démê- le. Quand il s*en rencontre piufieurs* qui veulent quitter çn même tems leur vieille maifon 3 Se s'emparer dV- ne nouvelle $ qui leur agrée à tous: ..c'eft alors qu'ils entrent en vne gran* de conteftation \ & qu après s'eftre (Opiniâtrez au.combat>& avoir jolie de leurs mordans * les plus foibles font enfin contrains de céder au vi&orieus, qui fe faifit auffitpt de la coquille , d# laquelle il joint en paix , comme d'y- . ne precieufe conquefte. Quelques yns des habitons en man- gent 3 comme on fait en quelques endroits les Efcargots : Mais ils. font plus propres à la Médecine > qu à la nourriture. Car étans ,ôtez de leur coquille 3 & mis au Soleil ? ils ren- dent vne huyle , qui eft fort profita- ble à la guerifon des goûtes froides, & qui s'employe auflfi heureufement, four amollir les duretez 3 & les cal- lus -zœiwtog+ni Il y a encore deus forces de petis Limaçons ,qui font fort beausXes vns font plats comme les bonnets de Baf- ques,&: de couleur brune. Les patres font pointus, 5c tournez en forme de vis de preffoir, ils font auffi rayez de petites bandes rouges > jaunes ôc vio- Jettes,qui les font eftlmer des Curieus. Article IL Des Mouches Lumineufes. ON voit en ces Iles plufieurs ef- peces de greffes Adouches de dif- férentes figures &c couleurs. Mais il faut donner le premier lieu, à celles que les François appellent Mouches Lumineufes , que quelques Sauvages nomment Cucuyos , 6c les Caraïbes ■CoyouyoUy d'vn nomapprochant.Cet- te Mouche n'efl: point recoin manda- ble pour fa beauté , ou pour fa figure* qui n'a rien d'extraordinairetmais feu- lement pour fa qualité lumineufe.Ei- le eft de couleur brune5 & de la grof- feur d'vn Hanneton. Elle a deus ailes O z fortes idM'HI 'jynnnf ï ï 1 1 i I 1 I I ! 1 Va $\6 Histoire Natv^eile fortes Se dures * fous iefquelies font deus ailerons fort déliez * qui ne pa- roiflent que quand elle vole. Et c'eft aufli pour lors que Ton remarque* qu elle a fous ces ailerons * vne clarté pareille à celle d'vne chandele, qui illumine toute la circonférence. Ou- tre 9 qu'elle a auffi fes deus yeus fi lu- ïBineuSsquM n'y a point de ténèbres* par tout où elle vole pendant la nuit* qui eft aufli le vray tems * qu'elle fe monftre en fon luftre. Elle ne fait nul bruit en volant, Se ne vit que de fleurs, qu'elle va cueillir fur les arbres. Si on la ferre entre les doits * elle eft fi polie & fi gliflante, qu'avec les petis efforts qu'elle fait pour fe mettre en liberté 3elle échape infenfiblement, Se fe fait ouverture. Si on la tient captive^eile referre tou- te la lumière qu'elle a fous fes aile- rons * Se n'éclaire que de fes yeus* Se. encore bien £oiblemét,au prix du iour qu'elle donne étant en liberté.Elle n'a aucûaiguillon3ni aucun mordant pour fa défenfe-Les Indiens font bien aifes d*en avoiten leurs maifons , pour les éclairer au lieu de lampes, Et d'elles fi*5C/4Wï> JKA comme des chandeles, pour aller la nuit à la chaf- fe. On dit auffi , que quelques autres Indiens expriment la . liqueur lumi- neufe , que ces Mouches ont en leurs yeus de fous le aîles>& qu'ils s'en frot- tent le vifage & la poitrine en leurs réjouïflances noéhirnes:Ce qui les fait paroitre au milieu des ténèbres^ corn* ma l5^v^vi^ii^V»^ffflft ^Ti^r v< *awvwy*r^ i KW tes îles An t lit «s- $*§ tht s'ils étoiént couverts de flamme3& comme dés fpe&res affreus >aus ycus de ceus qui les regardent. On prend aifément ces Mouche f durant la nuit. Et pour cet effet > il faut feulement remuer en l'air vn ti- fon allumé.Car incontinent que celles qui fortent du bois à l'entrée de la nuit y apperçoivent ce feu ,- croyant que ce foit de leurs compagnes, elles volent droit au lieu où leur parole cette lumière } fis on les abbat avec le chapeau , ou bien fe venant jetter d'elles mêmes contre le tifon > elles tombent étourdies à terre. Ce fera fans doute icy vnë choie dïvertififante de rapporter ce que Mo- fieur du Mon tel Gentil-homme Fran- çois jj perfonnageauffi fincere & aiifli digne de Foy qu'il ei\ Do&e Se Cu- rieusy & à la genereule libéralité du- quel nous devons beaucoup de belles ÔC rares remarques qui enrichirent cette Hiftoire > a nouvellement écrit fur ce fujet à lvn de fes amis. Voicy donc ce qu'il en dit : Etant m l'Ile BiftanioU>QM Saint Domingue , i* O 4 • me m i I ! § 1 $ié Histoire Natvrellb me futé [ornent arrêté à V entrée de la nuit au devant des petites cabanes 3 que nom y avions drefées pour y pajfer quel- ques iours ^ en attendant que notre Na- vire fut reparé : le me fuis dis-ie fouvent arrêté à confiderer l'air éclairé en plu* fieurs endrois , de ces petites étoiles er~ rames. Mais fur tout , c3 et oit vnechofe des pUu belles a voir > lors quelles s* ap- prochaient des grands arbres > qui por- tent vne efpece de Figues 3 & qui et a- yent ioignant nos huttes. Car elles fai- foient mille tours , tantofi ans environs* tantoft parmy les branches de ces arbres tonfm y qut cachaient pour vn tems la, lumière de ces pet is aftres > & les fai^ J oient tomber en éclypfe : & au même tems nom rendoient cette lumiere3& des rayons entrecoupez, au travers des fe- uilles* La clarté venoit a nos y eus tan- toft obliquement > & tantoft en droite ligne y & perpendiculairement. Puis ces Abouches éclattanies fe développant de Vobfcurité de ces arbres 5 & s* appro- chant de nous s nous les voyions, fur les Orangers voiftns 3 qu'ils mettaient tout, m feu â nous rendant la ve'ùe de leurs heaus y ~-*% « fcv h^i tt v>* ~* *v^ vn^w^^t^ des Iles Antilles, jit ht ans fruits dorez, , que le nuit nous a~ voit ravie >.é maillant leurs fleurs >& don*» nant vn coloris fi vif a leurs feuilles >que leur vert naturellement agréable > re- doublait encore & rehauffoit notable- ment fon luftre 3 par cette riche enlumè- fiure. le fouhaitois alors findufirie des Peintres, pour pouvoir repreftnter vné fiuit éclairée de tant defeu4>& vnpaifa- ge fi plaifant & fi luminemMe trouve^ fM mauvais > qne ie marrefie ft long tems a l'Hiftoire d'vne Mouche /puifque du Bartas luy a autrefois donné place entre les Oifeam > au cinquième tour de Ja première fémaine> & en a parlé ma- gnifiquement en ces termes* Déjà r ardent Cucuyes es Efpagne* nouvelles^ Porte demfem an front >& àem fem' fous les ailes. & aiguille du brodeur au rais de ce flambeausy Souvent d'vn Vu royal chamarre les rideaus : Jlws rak de ces brandons > durant la nukplus noire, 5 Mfin£mmi 1 ^ï r >; i 312 Histoire Natvkelle Uingenieus tourneur -polit en rondï l'y voire 1 A ces raiâ l'vfurier reconte fon tre- for, A ces rais V écrivain conduit fa f lu* me d'or. S'y l'on avoit vn vafe de fin criflal,& ijue l'on mit cinq ou fix de ces h elles 'Mouches dedans s il n'y a point de dou- te que la clarté ' qu 'elles rendraient , pour* r oit produire tous les admirables effets, qui font icy décrits par cet excellent Poète y & fournir oit vn flambeau vivant & incomparable. Mai* aurefie, dés qm ces Mouches font mortes, elles ne relui- jent plus. Toute leur lumière s'éteint avec: Leur vie. C'efi: là l'agréable récit da Boftre digne Gentil-homme. Article II L. Des Falanges.. POur venir ans autres efpéces de groffes Mouches -qui fe voyentaus Antilles 5 de que quelques v-ns nom- ment Ealanges :. outre les Cucuyos,, il BM*'fo« ÂNTIÎLLES. $lf îlyena qui font de beaucoup plus grofes,& d'vne étrange figure.il s'en trouve > qui ont deus trompes, pareil- les à celle de l'Eiefant : L'vne recour- bée en haut ,-& l'autre en bas. Quel- ques autres ont trois cornes , vne naiifant du dos 3-& les deus autres de la tefte. Lerefte du corps aufli bien que les cornes yeft noir & luyfant corne du jayet. Il y en a qui ont vne corne longue de quatre pouces* de la fafïbn d'vn bec de Béccaffe > liftée par dcflùs, & couverte d'vn poil folet par deilbus , laquelle leur fort du dos > de s'avance tout droit fur la tefte a au haut de laquelle il y a encore vne au- tre corne > femblable à celle du Cerf volant y qui eft noire comme ébéne* & claire comme du verre. Tout le corps eft de couleur de feuille morte., poly &■ damafle.Eiles ont ta tefte & le mufeau comme vn Singe 3 deus gros yeus jaunos & folides^vne gueule fen- due, &: des dens femblables à vne pe- ' tite foie. Ecoutons encore îcy ce que' rapporte à ce fujet noftre fidèle $£ eu-. rieus voyageur, g 6 r*p «afli&&»gM^»rffi»siaa r ! I 1 I 32,4 Histoire Nàtvrelie Fay vm , dit - il > vne efpece de ma greffes Mouches , belle en perfection* Elle et oit longue de trois pouces ou envi- ron. Elle avoit la tefie apurée , & de là fajfon de celle iïvne Sauterelle, finon que les dem yem étaient verts comme vne émeraude > & bordez, dvn petit filet blanc. Le dejfm des ailes * étoit d'vn violet luifant s darnajfé de divers corn* partimens.de couleur incarnate ^chauf- fée d'vn petit fil d'argent naturel. Au re- fie ces compartïmens étoientd'vne Sym~ métriefi bien obfervée.quil fembloit que le composé' le pinceau y eujfent emplo- yé toutes les régies de la PerfpeBivey& les adoucijfemens de la Peinture. Le dejfom du corps étoit de même couleur que la tefie 3 hormis > quil y av&it fix pieds noirs > repli e^proprement contre le ventre. Si on epano'ùijfoit les ailes 3qui Stoient dures & folides , on appercevoil dem ailerons , qui et oient pi m delie^ que de la toile de foye , & rouges com- me écarUte. le la vis en Vile de Sainte Croix y entre les mains dvn Anglois & yen couchai à l'heure même la defeription fur mes tablettes, le croiçis an commen- . cément ■^V^kVft^ ©es II- es Antilles. $zf eément qu'elle êtoit artificielle > # eau* fe de cet incarnadin fi vif , & de ce fi' let d! argent f mais l'ayant maniée > )e reconnu* que la nature étant fans douis enfesplus gay es humeurs, s'étoit diver- tie a parer fi richement cette petite Reî~ m entre les Infectes* Article IV» Des Mi/lepieds. CEt Infe&e eft ainfi nommé , h caufe de la multitude prefque in- nombrable de Tes pieds, qui henifent tout le deflbus de fon corps>&: qui luy fervent pour ramper fur la terre^avec vne viteife incroiable x lors notam- ment qui! fe fent poutiuivy. Il a de longueur fix pouces * ou environ. Le deilus de fon corps eft tout couvert à écailles tannées 3 qui font fort du- res , & emboittées les vnes dans les autres , comme les tuiles d'vn toit: mais ce qui eft de dangereus en cet animal > eft > qu'il a des mordans en fa tefte & en fa queue y dont il pin- ce û viyiment>& glilfè yn & mauvais- yenœ I fiG Histoire Natvrelle venin en la parue qu'il a blelTce que Tefpace de vint - quatre [heures ± &- quelquefois plus long temsyon y ref- fent vne douleur fort aiguë. A K T I- C I E V» Des Araignées. ON voit en plufieurs des Antilles^ de gro.fTes Araignées ^ que quel- ques vus ont mifes au rang des Falan- gesjàcaufe de leur figure monftrueu- ie> & de leur groffeur fi extraordinai- re , que quand leurs pattes font éten- dues y ell.es ont plus de circonféren- ce y que la paume de la main n'a de largeur. Tout leur corps eft compof& de deus parties , dont l'vne eft platte3 & l'autre d'vne figure ronde^qui abou- tit en pointe 2 comme vn œuf de pi- geon. Elles ont toutes 5 vn trou fur ie dos^qui eft comme leur nombril.Leur gueule ne peut pas facilement eftre difcernée 3 à caufe qu'elle eft prefque toute couverte fous vn poild'vn gris blanc | qui eft quelquefois entremet le-d&xouget Elle eft armée de part &' DES II ES Ântilosv- $vf: d'autre de deus crochets fort pointus*, qui font d'vne matière folide3 & d'vn noir fi poly ■& fi luifant3 que les Gu- ïieus les enchaiïent en or 3 pour s'en fervir au lieu de Curedens , qui font fort eftimez de tous ceus^qui connoif- fient la venu qu'ils ont5de p/eferver de douleur, & de toute corruption , les parties qui en font frottées. Qpand ces Araignées font deve- nues vieilles , elles font couvertes par tout d'vn duvet noirâtre , qui eft auffi dons , & auffi prefle , que du ve- lours. Leur corps eft fupporté par dix pieds , qui font velus par les co- tez y & heriffez en défous de petites pointes y. qui leur fervent pour s'ac- crocher plus aifément par tout , où* elles veulent grimper. Tous ces pieds fortent de la partie de devant "• Ils ont chacun quatre jointures ,. Ôc parle bout, ils font munis d'vne corne noi- re & dure, qui eft divifée en deus^ comme- vue petite fourche. Elles quittent tous les ans leur vieille peau, comme les ferpeilf , &'■ le&deas crochets qui leur fervent de I I f I I 1 }iî HïstoïKE Natvrexië dens & dedefenfe y ceus qui rencon* trent ces precieufes dépouilles y y peuvent remarquer la figure entière de leur corps 3 telle que nous l'avons fait dépeindre à la fin de ce Chapitre, Leurs yeus font fi petïs j & fi enfon- cez y qu*ils ne paroiilènt que com- me deus pétis points. Elles fe nour- rirent de mouches y & de femblables vermines , & on a remarqué qu*e>n quelques endroits ,- elles filent des; toiles qui font fi fortes , que les pé- ris oifeaus qui s'y embarralfent > ont bien de la pêne de s'en développer* On dit le même des Araignées > qui fe trouvent communément dans les îles Vermuàes , qui font habitées par les Ânglois ; iieft auffi fort proba- ble > qu'elles font d'vne même e£~ pece- Article ?L Du Tigre volant. ON a donné à cet Infed:e0 le nom de Tigre voUnt y à caufe qu'il eft marqueté par tmi. fou corps 3 de ta- JlWV^i r^^JS-ir^l j>es Iles Antilles. $1$ ehes de diverfesxouleurs , de même que le Tigre. ïl eftde la gtoflèur d'vn Cerf volant. Sa tefte eft pointue* , Se embellie de deus gros yeux , qui font auffi verts , & auffi brilïans qu'vne Emeraude. Sa gueule eft armée de deus crocs durs , Se pointus au poffi- ble , avec îefquels il tient Ta proye, pendant qu'il en tire le lue. Tout fou corps eft revêtu d'vne croûte dure Se brune > qui lui fert comme de cuiraf- fe. Ses ailes, qui font auffi d'vne ma- tière folide, couvrent quatre ailerons,- qui font auffi4deliez que de la toile de foye» Il a fix pattes , qui ont chacune trois jointures , Se qui font heriilées de plufieurs petites pointes. Durant le jour ,. il s'occupe continuellement à la chaiTe d'autres Infectes , Se pen- dant la nuit y il fe perche fur les ar- bres , d'pù il fait vn bruit tout pareil am chant des Cigales. i I RI Â&TI ^^^«y^w^K^ai^k^g^^ ! 1 I Ijô Histoire NATfRESfiE Article VII. JD'es Ahélïes> & de quelques autres In~ fe5les. LËs Abeilles 5 qu'on voit aus An- tilles ne font pas de beaucoup dif- férentes de celles 3 qai fe trouvent eir l'Amérique Méridionale : mais les- vncs & les autres 3 font plus petites que celles de l'Europe, Il y en a qui; font griles* 8c çTantres y qui font bru- , nes5 ou bleoësxes dernières font plus de cire êc de meilleur mielEiîes fe re- tirent tentes dans les fentes des ro- chers y ou dans le creus des arbres.- Leur cire eft motle > ôc dVne couleur* fi noire^qu'il n'y a aucun artifice^ qui foit capable de la, blanchir : mais en recompenfe 3 leur miel eft beaucoup plus blanc s plus dous & plus claiiv que celuy que nous avons en ces con- trées. On les peut manier fans aucun danger y parce qu'elles font preique toutes dépourveiies d'éguillons. On trouve encore dans ces Iles> pîufieurs CerfsVolans y & vue infinité de Sauterelles * &c de Papillons > qui font >» •**>* — t CTfc^»WM mit jy^a wr* -ym —*m >^v^g . i I J % ^é^A^SfGi^J^^^^A^ V 1 S \ I 1 p% Histoire Natvreile font beaus à mcrveille.il s'y voit aufïï & fur la terre , Se en l'air divers Infè- res fort importuns & dangereus, qui travaillent grandement les Habitans: mais , nous parlerons de ces incom- moditez,& de .quelques autres, dans les deus derniers Chapitres de ce pre- mier Livre. ja» m %m && m^m-^ m *#* m> CHAPITRE XV. Des Oifeaus les flm conftàerables des Antilles. TOutes les oeuvres de Dieu font magnifiques, il les a toutes faites avec fageife , la terre eft pleine de les biens : mais il faut avouer '{ -qu'entre toutes les Creatures,qui n'ont rien au delTus de la vie fenfitive > les Oifeaus publient plus hautement qu'aucunes autres, les inépuisables richefles de fa bonté & de fa providence : Et qu'ils nous convient , par la douce harmo- nie de leur chant, par l'aâivitc de leur vol, par les vives couleurs & par toute ras «ÎV55?i des Iles Antilles. 55 3 tonte la pompe de leur plumage , de loiier & glorifier cette Majefté Sou- veraine^qui les a fi avantageufement parez , & embellis de tant de rares perft&ions.Ceft aufli pour nous ani- mer à ces facrez devoirs > qu'après a* voir traitté des Arbres , des Plantes, des Herbages , des Belles à quatre pieds , des Reptiles & des InfeAes, dont la terre des Antilles eft couver- te, nous décrirons en ce Chapitre tous les plus rares Oifeaus, qui peu- plent l'air de cqs aimables Contrées, & qui enrichiflent la verdure éternel- le y de tant d'Arbres precieus, dont el- les font couronnées. Article Des Frégates. I. DEs qu'on . approche de ces Iles, plufieurs Oifeaus qui fréquen- tent la mer > viennent à la rencontre des Nauires, comme s'ils croient en- voiez,pour lesreconnoitre.Si toftque les nouveaus paflagers lès apperçoi- vent, ils fe perluadet qu'ils verront in- continent =a^>ftsyQW**<*gi^ r v( 334 Histoire 'Natv.rem.e' S* continent la terre ? Mais il ne fe faut pas flatter de cette efperance, infinies a ce cju on les voye venir par troupes. .> fu û ^ en a vne efpece , qu'écarte -> *ouvent e,n Pleine Mer , de plus de K deus cens lieues loin de terre, g Nos François les nomment fiw<. S* •■'«» a canfe de la fermeté & de la leee- jj i-ete de leur voLCes Oifeaus ont bien £ autant de chair qu vn Canart ; mais * ÏÏSZnt, ksr alIes beaucoup plus grandes, £ auffi ils fendent l'air , avec vne telle Z vicefe & i'apidité5qu'en peu de temps, g on les a perdu de veuë. Ils ont le plu- mage différent: car les vns font entiè- rement noirs •& les autres font tout gris , à la referve du ventre & des aî- r les> 1ui ^nt mêlées de quelques plu- / mes blanches. Ils font fort bons pef- v£ cheurs 5 car quand ils apperçoivent t> vn poiffon à fleur d'eau , ils ne man- p quent pas comme en fe jouant , de r(r l'enlever , & d'en faire curée. Us ont g fur tout vne adreiiè merveilleufe, à fe ,'.' faifir des pouffons volans ; car fi toft [£ qu'ils voyent , que cette délicate pro- fit Te fait heriflèr 1p« fin* «r âJuSà % I f e fait heriilk les eaus ] & quelle s en /i w ^-sfc Mr^ V^L^tfWA ^ ff«ir font blancs fous le ventre. Ils font de la grofleur d'vne poule d'eau 5 mais ils font ordinaire- ment fi maigres , qu'il ny a que leurs plumes qui les faite valoir. Ils ont les pieds comme les Cannes , & le bec pointu > comme les bèccaflès. Ils vi- vent de petis Poiflbns , de même que les Frégates, mais ils font les plus /la- pides de tous les Oifeaus de mer & de terre , qui font aus Antilles j car foie qu'ils fe laflent facilement de voler, ou qu'ils prenent les Navires pour des rochers flottans $ aufïitôt qu'ils en apperçoivent quelcun , fur tout fi la nuit approche , ils viennent inconti- nent fe pofer deflûs : Et ils font fi é- tourdis qu'ils fe laiflcnt prendre fans peine. Arti iThmvim ry.iai 1 ©ES IlES AHTIL£ES. Article III. il? £)es Aigrettes & de plufmrs autres Oijeam es Mer & de Riuigre. ON voit auffi près de ces Iles , Se quelquefois bien loin en Mer, des Oifeaus parfaitement blancs , qui ont le bec Se les pieds rouges comme du Coral ; Ils font vn peu plus gros que les Corneilles. On tient que c'eft vne efpéce d'Aigrette 3 à eau le qu'ils ont vne queiie qui eu compofée de deus plumes longues Se precieufes* qui les fait difeerner entre tous les autres Oifeaus > qui fréquentent la Mer. Entre les Oifeaus de Rivières 8c & d'Etangs : Il y a des Pluviers > des Plongeons , des Poules d'eau , des Can- narsydes Oyes Sauvages', vne efpece de petites Cannes ^m font blanches corne la neige par tout le corps.>& ont le bec Se les pieds tout noirs, Se àes Aigret- ^jyTvne blâcheur du tout admirable^ qui font de la groffeur dVn Pigeon^ Se qui ont le bec femblable à celuy Tom. L P de m i I i T^1 3 5§ Histotre Nàtvrelle de la Beccaire, & vivent de poiiTon, f fc< de la Beccaiie y de vivent de poiiîon, P aimant les fables & les rochers.^ Elles £ font particulièrement recherchées , à t* caufedeceprecieus bouquet de plu- r> mes fines &C déliées comme de la fo- > ye y dont elles font parées , & qui << leur donne vne grâce toute particu- y Hère. Mais parce que tous cqs Oifeaus r\ de Mer & de Rivière , font com- L muns ailleurs s il n'eft pas befoin de Si les décrire. ? Article IV. H & Du Grand Gofier. vV "I L y a encore vn gros Oifeau en j couces ces Iles , qui ne vit que de poiiîbn. Ileft de la groffeur d'vne. girofle Canne > &c d'vn plumage cen- dré Se hideus à voir. Il a le bec long y & plat, la tefte grofTe a les yeus petis ^j & enfoncez , ôc vn col allez court, f/S fous lequel pend vn Gofier3fi demelu- m -rement ample &c vafte,qu il peut con- [r* tenir vn grand feau d'eau.Ceft pour- g quoy nos gens l'appellent Grand Go- £ fer. Ces Oifeaus le trouvent ordinai- re ïement fur les arbr es, qui font au bord m de i > *^ ■" v^fc ^iw >wu mjwaMueaaaq ■** des Iles Antilles. 339 ide*la mer , ou ils fe tiennent en em- bufcadc pour épier leur proye. Car fi toft qu'ils voient quelque poiflbn à fleur d'eau, ôc à leur avantage , ils fe lancent deffus 5c l'enlèvent. Ils font fi goulus , qu ils avallent d'aflez gros poiffons tout d'vn coup , & puis ils retournent à leur fentinelle. Ils font auffi fi attentifs à leur péfche, que ne detournans point la veiie de deifus la mer, d'où ils attendent leur proyejon les peut facilement tirer de la terre, fans qu'ils fe donnent garde du coup. Ils iont fongearts ôc mélancoliques, comme il convient à leur employ. Leurs yeus font fi vifs &c fi perçans, qu'ils découvrent les Poillons bien loin en Mer , & plus d'vne braiTe de profondeur : mais ils attendent que le poiffon foit préfque à rkur d'eau.pour le ruer deifus : leur chair n'eft point bonne à manger. Article V. De Poules d'eau. LEs Iles , qu'on nomme les Vier- ges , font recommandables entr2 P x toutes ap€^i&iJigaElh»»riC««aiSiSaQfeO I WA 1 ■a €* fc I I! 1 I 34o Histoire Nàtvrelie toutes les Antilles , pour avoir vue infinité de beaus & de rares Qifeaus de mer & de terre. Car outre tous ' ceus dont nous venons de parler, qui y font en abondance ,. on y voit vne efpece de petites Poules d'eau , qui ont vn plumage raviirant. Elles ne font pas plus greffes qu vn pigeon- mais elles ont le bec plus long de beaucoup > de couleur jaune , & les cuiffes plus hautes^qui de même que les pieds , font d'vn rouge fort vif. Les plumes du dos & des ailes , & de la queue, font d'vn Incarnat iuifanr, entre-mélé de vert Se de noir , "qui fert comme de fons , pour relever ces éclatantes couleurs. Le deffous des ai- les & du ventre , eft d'vn jaune doré, Leur col & leur poitrine,font enrichis t$ Iles Antilles. 341 Ar t i c l e VI. Des Flammans. LEs étangs > êc les liens maréca- gens, qui ne font pas fouvem fré- quentez y nourriflent de beaus 6c grands Oifeaus > qui ont le corps de la groffeur àes Oyes faevages *• ôc de k figure de cens 3 que les Hollandois nomment LepeUér^a catt-fe de la for- me de leur bec , qui eft recourbé en faiïbn d'vne ciieilliere. Car ils ont le bec tout pareille col fort long, & les jambes 8c les cuifles fi hautes > que le refte de leur corps eft élevé de terre de deus bons pieds ou environ. Mais ils différent en couleur ,d'auta-nc qu'ils ont le plumage blanc quand ils font jeunes, puis après à mefure qu'ils croiflerHoil devient de couleur de Ro- fe y 8c enfin quand ils font âgez> il eft tout incarnat. Il y a apparence que c'eft à caufe de cette cou leur, ■ que nos François les ont nommés ÇlammansM fe trouve de ces mêmes Oifeaus , prés de Montpéiier , qui ont feulement le deiïbus des ailes 8c du eorps incarnat* p 3 ljMHHr7--|7-fT-|1î1 i I I ■S i I I ! I 11 I4z Histoire Natvrelle & le deiîus noir. Il s'en voit auffi ans îles i qui ont les ailes mêlées de quel- ques plumes blanches ôc noires. On ne les rencontre rarement qu'en troupe , & ils ont l'oiiye & l'odorat fi fubcils , qu'ils éventent de loin les chaiîeius , &c les armes à feu. Pour éviter aufli toutes furprifes, ils fe po- fent volontiers en des lieus décou- verts 3 ôc au mitieu des marécages» d'où ils peuvent appercevoir de loiu leurs ennemis , & il y en a toujours vn de la bande, qui fait le guet, pen- dant que les autres fouillent en l'eau, pour chercher leur nourriture:Et auffi toft qu'il entend le moindre bruit, ou? qu'il apperçoit vn homme , il prend leflbr, & il jette vn cri, qui fert de fi- gnalans autres pour le fuivre. Quand les chafleurs, qui fréquentent l'Ile de Saint Domingue , veulent abattre de ces Oifeaus , qui y font fort com- muns , ils fe mettent au de flous dut vent , afin que l'odeur de la poudre ne leur foit fi facilement portée, puis ils fe couvrent d'vn cuir de Bœuf , Se marchent fur leurs mains, pour con- trefaire des Iles Antilles. 545 trcfaire cette bête, iuiques à ce qu'ils foient arrivez en vn lieu d'où ils puiC- fent commodément tirer leur coup: & par cette rufe, ces Oifeaus qui font accoutumez de voir des Bœufs fauva- ges , qui descendent des montagnes pour venir aus abreuvoirs , font faits la proye des chafleurs. Ils font gras & ont la chair affez délicate. On confer- ve leur peau > qui eft couverte d'vn mol duvet 3 pour être employée aus mêmes vfages que celles du Cygne &c du Vautour, Article VII. De l'Hyronàelle de V Amérique. ÏL y a quelques années , qu'il fut aporté de ces Iles , à vn curieus de la Rochelle, vn Oifeau de la groflèur d'vne Hy^ondelle, & tout feinblable, excepté que les deus grandes plumes de la queiie écoient vn peu plus cour- tes y Ôc que fon bec écoit crochu, comme celuy d'vn Perroquet , 5c [es pieds comme cens d'vne Canne > le tout parfaitement noir 9 fi ce n'eft le P 4 deilbus \ HliS I 344 Histoire Natvrblï;i àeff vus du ventre , qu'il avoit blanc comme celuy des Hyrondelles^enfin,it leur r dTemblok fi fort hormis cete pe- i i i ! î ii litc dîfrerence5qiie nous ne le faurion^ mieus nommer op\ Hyronàelk £ Amé- rique* Nous luy avons à deffein don- né place après les Oifeaus de Mer de de Rivière , à caufe que la forme de fes pieds donne allez à connoître qu'il vit dans les eaus. Et parce qu'il eft fi rare, qu'aucun Auteur n'en a }ama\s parlé Uà* BES IlES AnTILIES. %4tf parlé que nous fachions*nous en don- nons icy la figure fidèlement tirée fur l'original y renvoyans celles des au- tres Oifeaus plus remarquables y que nous avons déjà décrits 3 ou que nous allons décrire* àla fin de ce Chapi- tre. A R TIC L S VII X De plusieurs Oifèam de terre. OVtre tous ces Oifeaus de Mer^de Rivières* & d'Etangs , on trouve en ces Iles vne tres-giande abondan- ce de Perdrisy de Tourtes^ Corneilles > & de Ramiers , qui mènent vn étran- ge bruit dans les bois.On y voit trois fortes de Poules , les vnes font Poules communes, femblables à celles de ces- quartiers ; les autres font de celles que nous nommons Toutes d'Inde: Et celles de la troifiéme forte 3 font vne efpece de Fœifans, que les Francçois à* l'imitation des Efpagnols > appellent: Poules Pintades y par ce qu'elles font comme peintes de couleurs blan- che^ôc depetis points* qui font com- ?^K»*a^,ttHffiSi^^ I i % 8 ! i 346 Histoire Natvrelle me autant d'yeusjfur vn fonds obfcur. Il y a auiïi plufieurs Merles >Griv es s Ortolans de Gros-becs > préfque touc femblables ans nôtres de même nom. Quant ans autres Oifeaus, qui font particuliers ans fovefts des Antilles, il y en a de tant de fortes ,St qui font fi richement , & fi pompeufement cou- verts : qu'il faut avouer que s'ils cè- dent à cens de l'Europe pour léchant: Ils le, furpafsét de beaucoup en beauté de plumage. Les deicriptions que nous allons faire, de quelques vns des plus confiderables 3 confirmeront fuffïiam- ment la vérité de cette propofîtion. Nous commencerons par les Per- roquets 3 qui félon leur différente groifeur font diftinguez en trois > ef- ;peces. Les plus grands font nommés :jirras9 Canidés ou Canives , les moin- dres Perroquets communs , 3c les plus petis Perriques. Article IX. Des Arras. LEs Arrat font des Oifeaus beaus par excellence > de la groffeut d'vn EeSKQRRHmsraQ des Iles Antilles. 547 cVvn Faifan : mais quant à la figure du corps , ils font fera blabl es aus Per- roquets.ïls onc tons la tefte allés grot- te y les yeus vifs 5c affiués,le bec cro^ chu s 5c vnc longue queue > qui eft compofée de belles glu me s, qui font, de diverfes couleurs,felon la différen- ce des Iles , où ils onc pris leur naif- Cance. On en voie qui ont la tefte» le deifus du col 3 & le dos de bleu celefte tabizé y le ventre & le deiïbus du col & des ailes, de iaune pâle > de la que- ue entièrement rouge. Il y en a d'au- tres > qui ont prefque tout le corps de couleur de feu > hormis qu'ils ont en leurs ailes quelques plumes., qui font iaunes s azurées 5c rouges. Il s'en trouve encore qui ont tout le pluma- ge méfié de ronge, de blanc > deblcii» de vert 5c; de noir , c'eft à dire de cinq belles 5c vives couleurs , qui font vn tres-agreable émail. Ils volent ordi- nairement par troupes. On iugeroit à leur pofture qu'ils font fort hardis Se refolus : car ils ne s'étonnent point du bruit des armes à feu, 5c fi le premier coup ne les a blefïez^ils attendent fans P 6 boogejr ilH 1 É- £*>U&J*&B*ZW***^^ ! I I 548 Histoire Naturelle bouger du lieu où ils font , vne deu- xième charge : mais il y en a plu- fieurs > qui attribuent cetteaiïiirance, à leur ftupiditc naturelle, plutôt qu'à leur courage. On les apprivoife allez aifément : on .leur apprend auffi à prononcer quelques paroles T mais ils ont pour la plupart^ la langue trop é- pai{Te,pour fe pouvoir faire entendre* auffi bien que les Canidés , &c les plus petis Perroquet s. Ils font fi ennemis du froid 3 qu'on a bien de la peine à leuE faire palier la mer. Article X. Des Canidés. ON eftivne beaucoup les Canidés? qui font de même groffeur que les precedens* mais d'vn plumage en- core plus raviiîant. Témoin celuy que Monfieur du Montel qui a fait plu- fleurs voyages en l'Amérique , de qui a foigneufément vifité toutes Iles , a véu en celle de Coraçao 3 & dont il îious donne cette exaile relation. Il méritait iy dit- il., de. tenir rang entre l&s CXSBkS*. ~1 DES ÎLES ANTILLES. J49 les plus beam Oifcam du monde. Je Vf confideray de fvpreT^ , & lemaniay fi Couvent étant en ce lieu là , que j'en ay encore les idées toutes fraîches. Il avoit tout le plumage fom le ventre > fom le* ailes & fom le col de couleur d'airer*- tabiTje : Le dejfm du dos 3 é' la moitié des ailes d'vn ble'ù celefte , & vif au pojfible. La queue & les grandes plumes des ailes , étoient entremêlées d'vn incarnadin éclatant à merveille y diverfifié d'vn bleu comme le deffvu du dos 3 d'vn vert naiffant>& d'vn noir lui- fant , qui rehauffoit & faifoit paroitre avecplm déclat yl'or& FaTvir de Van» tre plmnage. Mais ce qui étoit le plm beau 5 étoit fa t/efte , couverte d'vn petit' duvet de couleur de Rofe , marqueté de vert 3 de ]aUne 5 & de ble'ù mourant 3 qui s'étendoit en ondes iufques au dos. Ses paupières étoient blanches 3 & la prunelle de fes yem iaune & rouge> comrKe vn rubis dans vn chaton d'or. IV avoit fur la tefte > comme vne toque de plumes d'vn rouge vermeil > énncelant comme vn charbon allumé 5 qui ejloit bordée de plufieun autru plumes* pXm- ^M^m^sms^^e^Ê^ I5ô Histoire Natvreile plus petites, de couleur de gris de per~ le. jQue s'il et oit merveilleux pour cette riche parure 3 il n étoit pas moins apri* fer pour fa douceur : Car bien qu'il eut (e bec crochu > & que les ongles 3 ou fer- res défis pieds > dont il fe firvoit corn- me de mains > tenant fon manger \ & le portant au bec > fujfent fi perçantes & fi fortes y qu'il eut pu emporter la pièce de tout ce qu'il empoignoit : neantmoins il étoit fi privé > qu'il louait avec les petis en fans y fans les blejfer : Et quand on le prenoh 5 il refferroit fi bien fis on- gle s ^ que l'on nenfintoît aucunement les pointes. Il lé choit comme vn petit chien y avec fa langue courte & épaifje , cem qui l' amadouaient , & hty donnoient quelque f ri andi fi joignoit fa tejle a leurs iouès 3 pour les baifer & carejfer > & témoigna rit par mille foupleffes fa recon* noijfance, il fe laijfoit mettre en telle po- flure quon voulait , & prenoit plaifir àfe divertir de la forte > & a faire paf- fet le tems a fis amis. Maïs autant qu'il étoit dom & traittable > à cem qui luy f ai fuient du bien i autant était il mau- vais des Iles Antilles. $jf vais & irréconciliable 3 à cem qui l d- votera offenfé > & il les favoit fort bien difcerner entre les autres, pour leur don* ner quelques atteintes de fin bec & de [es ongle* J il les trouvoit afin avantage. Au refie il parloit Hollœndois,Efpa- gnol y & Indien : Et en ce dernier lan- gage il chant oit des airs comme vn In- dien même. Il contrefaifoit auffi toutes fortes de volailles > & d'autres animapps domejliqua. Il nommoit fis amis pdr nom &par fur nom s ac cour oit a eus > & voloitfur tvuyfi toji qu'il les appercevoït, notamment qua,nd il avoit faim. Que s'ils avoient eféab fins, & qu il ne les eut vem de long tems, il faifoit parohre la ioye qu'il avoit de leur retour , far des cris de réiouifance. Quand il avoit bien folâtré & iouê , & que Von ètoit ennuyé de fis careffes.il fi retiroit aufiiU te du couvert de la cafi de fin nourri fi fier , qui étoit vn Cavalier de la même Ile : Et de la il parloit, chant oit, & fai- foit mille fwgeries, fi mirant en fin plu- mage quil agencoit & paroit y nettoyoH & foliffiit avec fin bec. On n avoit point de ptine à le nourrir. Car non fiulem^ni I i i 1 i 1 I i IÇ'f Histoire Natvrelee feulement le pain dont on vfe en cette Ile i mOrU tom les fruits & toutes les ra- cines qui y croiffent , luy étoient agréa** blés. Et quand on luy en avoit donné plus qu'il nen avoit befoin > U cachoït foigneufement le refle ^fom les 'feuilles de la couverture de la café s & y avoit fe cours dans la neceffité : Enfn> ie n'ayy ïamauveu d'oifeauplus beau ni plm ai- ?nable. Il était digne d'être prefenté au Moy j fi on eufi pu le pajfer en Franc er C"eft-la5 ce qu'en rapporte ce noble & véritable Témoin^qui ajoute*- qu'il; avoit été apporté des Antilles à Mon- iteur Rodenborck y qtn étoit alors Gouverneur du Fort, 8c de la Colonie Hollandoife 5 qui eft en l'Ile de Ga- raçao. Article XL Des Perroquets» ON voit prefque par toutes les Antilles des Perroquets y que les Indiens habirans du pais appellent" en leur langue Kouléhuec36c qui vont par troupes comme les Etourneause Les chaffeurs es mettent au rang du gibier m & ne croient pa^gerdre- lm& a^hSL- ■ ■ ms Iies' Antieees.- 35 ^ poudre ni leur peine de les mettre bas, Car ils font auffi bons & auffi gras* que le meilleur poulet : fur tout quand ils font jeunes, ôc pendant le tems des graines, & des fruits de plufieurs Arbres,dont ils fe nourriffenulls font de différente groffeur de de différent plumage , félon la différence des lies. De forte que les anciens habitans fa- nent leeonnoître le lieu ou il font-nez», à- leur taille & à leur plume. Il en y a d'vne admirable forte en ïvnedcs Iles qu'on appelle berges» Ils ne font pas plus gros que l'Oileau que les Latins nomment Hupnpa 9 & ils ont prefque la même figure. Mais ils font d'vn plumage chamarré d'vne fi grande variété de couleurs,qu'ils re- créent merveilleufement la veué,& ce qui eft le principal ; ils apprenent par- faitement bien à parler, de contrefont fcout ce qu'ils entendent. A R T I G L E X I !<» Bts Verriques. LEs plus petis Perroquets * ne font pas plus gros qu'vn Merle^ ! ! 1 i ï 154 Histoire Natvrelle il s'en trouve même qui n'ont- pas plus de corps qu'vn PafTereau. On les nomme Per ri cjttes. Elles font couvertes cTvn plumage , qui eft entièrement vert y hormis que fous le ventre 8c aus bords des ailes & de la queue, »i|$ tire fur le iaune, Elles apprenentaufïi ' à parler & à fi ffler. Mais elles retien- nent toufiours quelque peu du fauva- gin. Ce qui fait qu'elles pincent bien fort , quand elles ne font pas en bon- ne humeur. Et fi elles peuvent avoir la liberté , elles gagnent les bois , où elles meurent Je faim. Car ayant efte nourries de icunefîe en la cage, où el- les trouvoient leur nourriture prépa- rée, eljes ne favent pas choifir les Ar- bres , fur léquels il y a des graines qui leur font propres. Article X 1 1 1. Du Tremblo. IL y a en quelques îles, particuliè- rement à la Gardeloupe , vn petit Oifeau que l'on nomme Tremble^ par- ce qu'il tremble fans celle principale- ment ^^1 des Iles Antilles. $£ ment des ailes qu'il entr'ouvre. Ilefc - de la çroiîeur d'vnecaillc,& fon plu- mage eftdVn gris vn peu plus obfcui> que celuy de l'Alouette* *v Article XIV. • Du Pajferem de l'Amérique. LEs Iles de Tabago & de la Bar- boude, comme étant les plus Mé- ridionales des Antilles, ont beaucoup de rares Oifeaus/qui ne fe voient pas en celles.qui font plus au Nord.lW'y en rencontre entre autres vn>qui n'eft pas plus gros qu vn Paffereau , & qui a vn plumage ravilfant : Car il a k tefte > le col > & le dos, d'vn rouge (i vif «5c fi éclatant, que lors qu'on le tient ferré en la main,& qu'on ne fait paroiftre que le col > ou le dos , on le prendroit même de fort prez, pour va charbon allumé. Il a le deffous des ai- les Se du vitre d'vn bleii celefte>ôMes plumes des ailes & de la queue > d'vn rouge obfcur,marquetéde petis points blancs , difpofez en égale diftance qui ont la figure de la prunelle dé fon oeil* S HP" S I 3f4 HïSÏOlfcE NàÏVRSIIé ttil. Il a suffi le bec & le ramage* cTvn Paiïereau; & pour ce fujet on l'a nommé à bon droit* Pajfereau de FA» inerique* Article X V. 2>£ V Aigle D'Orinoque* IL paife auffi fonvent de la terre fer** me j à ces mêmes îles* vne forte de gros Oifeau* qui doit tenir le premier fang. encre les Oifeaus de Proye. qui font aus Antilles, Les premiers habi- tans de Tabago* le nommèrent, -^if/r d'Orinoque * à eaufe qu'il eft de la groflèur & de la figure d'vne Aigle* & qu'on tient que cet Oifeau * qui îi'eft que paflager en cette Ile * fe voie communément en cette partie de l'A- mérique Méridionale * qui eftarroféc de la grande Rivière d'Orinoque» Toutfon plumage eft dVn gris clair* marqueté de taches noires * hormis que les extrémités de fes ailes 3c de fa queue* font bordées de jaune. Il a les y eus vifs & perçants. Les ailes fort longues * le vol roide &promtv ?eu la pefanteur de fon corps. Il fe sepaiffc taCtUU tfava v***r-<çr.i 1 ®€S Ï£ES ÂNTI118S. *$7 *epaift d'autres Qifeaus , fur lequels il fond avec furie , & après les avoir atterrez , il les déchire en pièces , Se les avale. Il a neantmoins tant de ge- nerofité, qu'il n'attaque jamais cens, qui font faibles & fans defenfe. Mais feulement les Arras , tes Perroquets, & tous les autres qui font armez com- me luy , de becs forts & crochus , ôc Je gnffes pointues, On a même re- marqué , qu il ne fe rue point fur foa gibier, tandis qu'il eft à terre, ou qu il eft pofé fur quelque branche: mais qu il attend qu'il ait pris i'effor, pour le combattre en l'air , avec va pareil avantage. Article XV I. Du M^nsfeny. LE Mansfeny eft auffi vne efpece de petite Aigle* qui vit auffi de Pro- ye 3 mais il n'a pas tant de cœur, que celle dont nous venons de parler, car il ne fait la guerre qu'aus Ramiers, aus Tourtes , aus poulets , Se aus au- tres péris Oifeaus 9 qui ne luy peu- vent refifter. Il 1 i l m l ^^^syQ^s^^gipa' I I I I I 558 Histoire Natvrelle Il y a encore dans ces Iles y ne in- finité d'autres Oifeaus de toutes fortes d'éfpeces , & dont la plupart n'ont point de noms. Article XVII. Du Colibry. POur couronner dignement, l'H- ftoire des Oifeaus de nos Antilles nous finirons par l'admirable Colibryy admirable pour fa beauté, pour fa pe- titeife, pour fa bonne odeur, & pour fa faffon de vivre. Car étant le plus petit de tous les Oifeaus qui fe voient, il vérifie glorïeufement le dire de Pli- ne , que Natura nufquam magis qukm in minimu tôt a eji. Il fe trouve de cqs Oifeaus,, dont le corps eft fi petit, qu'ils ne font guérés plus gros quvn Hanneton. Il y en a qui ont le plu- mage fi beau>que le col,les ailes & le dos reprefentent la diverfité de l'Arc- en-ciel , que les Anciens ont appelle Iris, de fille de l'Admiration. L'on ea voit encore , qui ont fous le col vn rouge fi vif, que de loin, on croiroit que wfcatui des Iles Antilles. 359 que ce feront vne efcarboucle.Le ven- tre & le dèffous des ailes eft d'vn jau- ne doré j les cuifles d'vn vert d'Eme* raude ; les pieds 6c le bec noirs com- me ébene polie>& les deus petis yeus, font deus diamans enchaffez en vne ovale de couleur. d'acier bruny. La tê- te eft d'vn vert naiffant qui îuy don- ne tant d'éclat quelle paroit comme dorée. Le malle eft enrichy d'vne pe- tite Hupe en forme d'aigrette , qui eft compofée de toutes les différentes çouleurs,qui emaillent ce petit corps, le miracle entre les Oifeaus , & l'y ne des plus rares productions de la natu- re. Il abaiffe & levé quand il luy plaie cette petite crefte de plumes , dont l'Auteur de la nature l'a fi richement couronné. Toutfon plumage eft auffi plus beau , & plus éclatant , que ce- îuy de la femelle. Que fi cet Oifeau eft mcrveilleus en fa caille , & en fon plumage , il n'eftpas moins digne d'admiration en Tadivité de fon vol , qui eft fi vite & fi précipité, qu'à proportion, les plus gros Oifeaus , ne fendent point l'air avec § *. 7> S 7 — v: -jfio Histoire ■Natvmlis" ^ avec tant de force, ôc ne font pas vit r0 èruit fi refonnant , que celuy qu'ex- ^ cite cet aimable petit Colibry , par le ? battement de fes ailes : Car on diroif \ ^ue ce foit vn petit tourbillon émeia K en l'air , &: qui fiffle aus oreilles. Et Sj fatce qu'il fe plaie à voler présdeceus ^ qui palFent , il furprend quelquefois Ç* fi inopinément , que bien fouvent il donne vne fubite , ôc innocente fra- yeur, à ceus qui t entendent plûtoft qu'on le pourroit prendre pour vne rofé de pierrerie > animée & volante en l'air. Aus lieus où il y a plufîeurs Cottonnicrs * on voit ordinairement quantité de Colibris. Bien que fon plumage perde beau- coup de fa grâce quand il eft mort > Ci eft ce qu'il eft encore fi beau.que l'on a veu des Dames en porter par curio- fité pour pendans d'oreilles. Ce que plufieurs ont trouvé leur eftre miens feant* que tous les autres. Ce merveilleus Oifeau , n'a pas feulement ta couleur extraordinaire- ment agréable : mais il y en a d'vne forte * qui après avoir recrée la veue", rejouïe encore &c contente l'odorat par fa fovëue odeur* qui eft aufli lou- ce,que celle de l'ambre & du mule les plus fins. Il bâtit le plus fouvent fon nid foas Tom.L Q^ vne 1 F i ! I §61 Histoire Natvre*le vne petite branche de quelque Oraii" ger ou Cottonnier , &c comme il eft proportions à la petiteflTe de fon corps, il le cache fi bien parmy les feuilles, Se le met fi induftrieufement à i'a- bry des injures de l'air , qu'il eft prek- que imperceptible. Il eft auffu fi b©n ÂrchitecT:e,que pour n'eftre point ex- pofé aus vens du Levant & du Nord, qui Couplent d'ordinaire en ces païs- là> il le place au Midy. Il le compofe au dehors de petis filets d'vne Plante que Ton nomme Pite , ôc dont nos Indiens font leurs cordes. Ces petis filamens font déliez comme des che* yeus , mais beaucoup plus forts. Il les lie & les entortille avec fon bec fi ferrement 3 à l'entour de la petite branche fourchue , qu'il a choifie pour y perpétuer fon efpece : que ce nid étant ainfi parmy les feuilles , &C fufpendu fous la branche , fe trouve comme nous ayons dit , & hors de la veu'é y & hors de tout péril. L'ayant rendu folide & remparé au dehors par ces filamens , & par quelques brins 4'écorces & de menues herbes3entre- lacez LJterOtV- des Iles Antilles. $6$ lacez les vns dans les autres avec va nierveilleus artifice 5 il le pare au de- dans du plus fin cotton , &c d'vn du- vet de petites piumes3pius molles que la foye la plus déliée. La femelle > ne fait communément que deus œufs* qui font en ovale > & de la grofTeur d'vn pois 3 ou fi vous voulés d'vne perle de conte. Nôtre brave Voyageur ne fe taira pas fur cette matière , elle eft trop digne de fes obfervations curieufes* Voicy donc ce qu'il en écrit entr'au- très choies à fon amy,enfes relations familières : On trouve par fois des nids de Colibry > fous les branches de quel- ques vnes de ces plantes de tabac ', qu'on laijfe croître auffi haut qu'elles peuvent* pour en avoir la graine* le me fouviens quvn de nos Nègres m en montra vn qui et oit ainfi fort proprement attaché fous vne de ces branches. Même com- me yétoi* à Saint Chrijîofle , a lapoin* te des Palmifies , vn Anglois ni en fit voir vn autre , qui tenoit a Vvn des ro~ feaus y qui foute noit la couverture de fa €afs, a Tabac } comme o?it parle aus Iles, m î 1 j CT^" 5^4 Histoire Natvrelii fay veu auffi vn de ces nids avec Us aufs, qui et oit encore attaché a la bran-* che3qui avoit eflé coupée pour V ornement du cabinet d'vn curieus , lequel avoit de plus encore le ma fie & la femelle fecs3 & confieriez, en leur entier. Et cefl Is ou ie confideray attentivement & le nia & toifeau. Et après avoir admiré Vœu* vrede Dieu en cette petite créature > je dis étant tout ravy a la veuê de ce nid, qui et oit de lagrojfeur d'vne nois9 Que la matière ou la figure Se fajfe icy confîderer9 Rien m fie doit accomparer A c,ette exquife Architecture $ Vne Jolide dureté Sy méfie avec la beauté Par vnfmgulier artifice : Carvn bec eft tout Vinfirummt jQui donne a ce rare édifice, Son plm preciem ornement* Au refte 3 il Te voit de ces Oifeaus prefque en toutes les Antilles > mais félon la diverfité des lies ils différent & de grofleur & de plumage, Les /plus ~~1 J^f/MAf^ dés Iles Antilles. $6$ plus beaus * Ôc les plus pecis de tous* fe trouvent en l'Ile d'Aruba y qui re- levé de la Colonie Holiandoife ,< qui eft à Coraçao. On pourroit peuteftré defirer icyy que nous parlaffions du chant de cet Oiteau3& qu'après avoir ravy la veuë* ôc fatisfait merveilleusement l'odorat* il contentaft encore l'ouïe par l'har- monie de fon chant. Quelques vns difent qu'en effet il y en a d'vne efpe- ce , qui chante en quelque faifon de l'année. Mais il y a grande apparen- ce y que ce qu'on appelle le chant du Colibry, n'e'ft autre chofe > qu vn pe- tit cry femblable à celtiy de la Cyga- le, qui eft toujours d'vn même ton. Mais quand il ne chanteroît pas , il poifede fans cela , allez d'autres rares avantages de la Nature, pour tenir rang entre les plus beaus , & les plus excellens Oifeaus.- Ceus qui ont demeuré au Bre- fil y nous rapportent conftammenty qu'il y a vn petit Oifeau nommé Go- nambuch , d'vn blanc luifant s qui a'a pas le corps plus gros qu'vn Q^ 5 Frelon jMFfr i î i^p^^j^x^M^^^JPSi^ W5* I 1 ! I 1 i $66 Histoire Natvreils Frelon , & qui ne doit rien au Ko£-- ligaol 5 pour le regard du chant clair & net. Peut-être que c'eft vne efpéce de Colihry , comme quelques vus le pofent.Mais toujours n'eft il pas com- parable , ni en beauté de plumage, ni: en odeur , 6c autres ravivantes qua- lités, à celuy que nous venons de dé- crire. Cdus-iàfont inieus rencontré, qui ont dit que ce chef d'œuvre de Na- ture , eft vneefpcce de ces petis Oi- feaus que quelques Indiens appellent Guaraciaba , ou Guacariga , c'eft adi- ré Rayon du Soleil , & Guaracigaba$ c'eft à dire Cheveu du Soleil, Les Es- pagnols les nomment Tomineïos , par ce que quand on en met vn avec fon nid dans vn trébuchet à pefer l'or , il. ne pefe ordinairement ,-que deus de ces petis poids , que les mêmes Elpa- gnols appellent , Tommos'^cék à di- re vint-quatre grains. Quelques -vus ont mis en avât,qu'- vne partie de ces admirables Colibris y font premièrement des Mouches, qui puis après fe transforment en Oifeaus* D'autres nu$i ^es Iles Antilies. 367 D'autres ont écrit , que les Antillois appelaient ces Oi-fcaos des Renez* parce qu'ils dorment la moitié de Tan- née comme les Loirs , & qu'ils fe ré- veillent au Printems, renailTant com- me de nouveau > avec cette agréable faifon. Même il y en a qui diient.que lors que les fleurs viennent à tom- ber 5 ils potfflent leur petit bec dans le tronc des arbres 5 de y demeurent fichez immobiles & comme morts durant fix mois , jufques à ce que la terre vienne à eftre couverte > d'vn nouveau tapis de fleurs. Mais nous n'avons garde de mefler tous ces con- tes ^ à la véritable Hiftoire de nôtre Colihr) v & nous ne les faifons que toucher du doigt en paffant. Nous fermerons ce Chapitre , par vne choie bien digne d'être remar- quée, & qui ne le voit point ailleurs, fi ce n'eft peut-être en la Guinée com- me Linfcot le rapporte. G'eft le mer- veilleus inftinâ:, que Dieu a donné à tous les petis Oileatts de l'Améri- que y pour conferver leur efpece. En ce qu'y ayant parmy les bois vne forte Q^ 4 de I ï I 1 I* $6% HïSTOIRE NaîVRRII de grades couleuvres vertes & menues qui rampétfur les arbres3& qui pour- raient s'entortillant de branche en branche aller manger les œufs des oi- feaus^dont elles font fort avides: Pour cm.pcLçher ces larroneffes d'atteindre à leurs nids* tous les petis Oifeaus* qui n'ont pas le bec allez fort > pour fe défendre contre leurs ennemis^font leurs nids au bout fourchuMe certains fiî mens y qui comme le lierre croif- fent à terre > s'élèvent à la faveur des Arbres* & s'étant pouffez jufqu'à leur fommet *ne pouvant aller plus outre* retombent en bas * quelquefois deus ou trois braffes ^ au deflbus des bran- ches. C'eft donc au bout de ces iiga- mens nommés Lienespàt nos Fran- çois , que les Oifeaus attachent for- tement leurs nids 3 avec vne telle in* duftrie, que lors qu'on les rencontre dans les bois > comme il y en a grand nombre 3 on ne peut allez admirer3ni la matière , ni l'ouvrage de ces petis édifices branlans. Pour ce qui eiî des Perroquets *& des autres Oifeaus qui font plus forts^ils font leurs nids dans les ^o- ï des Iles Antilles. $£9 les creus des arbres s ou fur les bran- ches,comme cens de par deçà : Gar ils peuvent rechaiîer avec le bec & les ongles y les Couleuvres qui leur font la guerre. On trouvera en la page fui vante, les Oifeaus les plus rares & les plus con~ fiderables que nous venons de décrire: mais y il faut confefler que le burin, ni même les pinceaus les plus delicas, ne leur fauroient donner la grâce, les iraits *ni toutes les vives couleurs, éont ils font naturellement parez GhAPX; G ! I I ! 1 I 570 Histoire Natvkelle J^cAxQte Dovtncqw **■— ™»-» r«mTm-i«rfcriflWy ^ dis Iles Antilles. 3711 CHAPITRE xvi. Des Poijfom de U Mer\ & des Ri~ vieres des Antilles. NOus ne prétendons pas de trait-- ter THiftoire des Poiffbns des Antilles, avec toute l'exactitude , que cette ample &■ féconde matière le pourroit délirer : mais , puis qu'après avoir confideré jufques icy , toutes les plus precieufes riche{res,dont Dieu a fort avantageufement pourveu les terres de ces heureufes Contrées,l5or- dre requiert, que nous parlions à pre- fent des produ&ions de la Mer qui les entoure , &: des Rivières qui les arrofent : nous nous propofons feule- ment de décrire brièvement dans ce Chapitre, les plus excellens Poi(Tons; qui s'y trouvent en abondance^ qui fervent à la nourriture de l'homme., afin que cette considération nous por- te à reconnaître, que fa tres-fage Pro* videncea déployé fes merveilles fur <3L *■ • kr I I I i ï \ i 371 Histoire NatVrellé les profondes eaiisa avec autant d'éclat & de libéralité que fur le fec , &: pair conte quent qu'il eft jufte que les Cieus & la Terre le louent ,1a Mer 6c tout ce qui fe remue' en elle. A R t 1 c l e L Des Poijfons volans. IL y en a qui tiennent pour vn con- te fait à plaiûr , ce que Y on dit des Toîjfovs volans ,. bien que les relation? de piuiïeurs farneus voyageurs en fai- fent foy. Mais quelque opinion qu'en puiiTent avoir cens qui ne veulent rien croire,que ce qu*ils ont veû,c'eft: ¥ne vérité très- confiante,. qu'en navi- geant,. dés qu'on a paiié les Canaries* jufques à ce que Ton approche des îles de l'Amérique , on voit fortir fouvent de la Mer ,. de grofles troup- pes de Polirons., qui volent la hauteur cTvne pique ,.& prés de cent pas loin,* mais pas davantage : par ce que leurs ailes fe lèchent au Soleil Ils. (ont prefque femblabies aus Harar,s , mais ils ont la tefte plus ronde , & ils; four j^. L-fc^S ri: I I I 1 1 i J74 Histoire Natvrellb font plus larges fur le dos. Ils ont les ailes comme vne Chauve-fouris , qui commencent vn peu au deilbus de la tefte , &: Secondent prefque iufques à" la queiiè. Il arrive fou vent , qu'ils donnent en volant contre les voiles des Navires, & qu'ils tombent même en plein jour fur le tilkc.Çeus qui en ont fait cuire , & qui ciî ont mangé- les trouvent fort delicas. Ge qui les oblige à quitter la mer, qui eft leur élément le plus ordinaire, eft qu'ils font pourfui vis- de plufieurs grands Poiiîbns , qui enfont curée. Et pour efquiver leur rencontre -, ils prennent vne fauflè route , fâifant vn bond en- l'air , & changeant leur nageoires en ailes , pour éviter le danger, mais , ils trouvent des ennemis en l'air \ au© bien que dans les eaus. Car il y a de certains Oifeaus marins , qui ne vi- vent que de proye, iefquels leur font auffi vne cruelle guerre, &: les pren- nent en volant *, comme nous l'avons* dé)a dit au Chapitre précèdent. Il ne fera peut-être pas defagrea* ble-à-ccus qui liront i'Hiftoiredecesï Boiiïbns^ L_ wfà mi i« t«t mi -m\ 1 0ES ÎÏES ÂWTïtï-FS; fff Poifïbns ailés du nouveau monde, de nous y voir ajouter pour cnrichiflè- ment 3 les paroles de ce grand Poëte3 qui dans fôn Idyle Heroique5nous té- moigne qu'avec plaifir il a Veu mille foisÇom les cercles brulans Tomber comme des deux- de vraw poijfonsvolans: Qui courus dans les flot s pat des mon- tres avides , Et mettant leur refuge en leurs ailes- timides - Au fein du pin vogueur pleuvotent de tous cote zy Et ionchoient le tillac de leurs corps; argent ez* M K T I CLE IL Des Perroquets de Mer. ÎL y a auffi en ces quartiers là des Poiiïbns^qui ont l'écaillé comme la Carpe, mais de couleur verte comme la plume d'vn Perroquet : d'où vient aufli que nos François les nomment Perroquets de Mer, Ils ont lesyeus> be&us* I ê i i ! ! i ! I $76 Histoire Natvrblee beaus & fort étincelans , les prunel- les claires comme du Griftal,qui font entourées d'vn cercle argenté , qui; eft enfermé dans Vn autre , qui eft d vn vertd'émeraude comme les écail- - les> de leur dos , car celles de deifous le ventre , font dVn vert jaunâtre. Ils n'ont point- de dents , mais -, ils ont ks mâchoires d'enhaut & d'en bas d'vn- os folide, qui eft extrêmement fort,de même couleur que leurs écail- les, & divifé par petis -compartimens beaus à voir. Ils vivent de Poiiîons a Coquille, & c'ét avec ces dures mâ- choires , qu'ils briient comme en- tm deus meules,-. les Huitres^les Mou- les , & les autres coquillages, afin de te repaître de leur chair. Ils (ont ex- cellens à manger,& fi gros, qu?il sJer^ voit qui pefent plus de vint livres» ' A R T I C LE II L De la Dorade.* LA Dorade, que quelques - vris- nomment Brame de Mer , y efir encore commune. Elle ace nom de Dorade** i^lfcB »*« *rmnm*r-*zm des Iles Antilles. ffj Dorade > parce que dans l'eau fa telle paroic d'vn vert doré y & tout le relie de fon corps jaune comme or 5 & azuré comme le Ciel ferain. Elle fe plaît à fuivre les Navires 3 mais elle nage d'vne telle viteflè>qu il faut eftre bien adroit^ pour la pouvoir atteindre avec la gaffe ou foine , qui font des inftruraens , avec leiqueh les Mate- lots ont de coutume de prendre ks- grosPoiirons:auffiils5en voitpeu,qui ait vne plus grande difpofition natu- relle à fendre les flots que celuy-cij car il a le devant de la telle fait en pointée dos heriffé d'épines qui s'é- tendent, jufques à la queue qui eft fourchu ë^deus. nageoires au défaut de la tefte,& autant fous le ventre,les é~ cailles petites^ tout le corps d'vne fi- gure plus large que girofle,, ce qui luy donne vu merveilleus empire dansées eaus. Il s'en trouve , qui ont environ cinq pieds de kngueur.Pluiieurs efti- rnent que leur* chair qui eft vn peu féche , eft auffi agréable au goût que celle de la Truitue ou du Saulmon^ jpourveu que fon aridité fok corrigée^ gag ! î _ I7§ Histoire Natvreule par quelque bonne lance. Lors que les Portugais voient que ces Dorades fui- vent leur Navirey ils Te mettent fur le beau pré 3 avec vne ligne à la main* au bout de laquelle il y a feulement vn morceau de linge blanc au haut de F hameçon 3 fans autre apas. Article IV, De la Bon&e. L y a vn autre PoiiTon^qui fuit ordi- nairement les Navires. On le nom- me Bonite* Il eft gros & fort charnu* Se de la longueur de deus pieds ou en- viron. Sa peau paroit d'vn vert fort ebfcur, Se blanche fous le ventre. Il n'a point d'écaillés fi ce n'eft ans deus coftésy où il en a deus rangs de fort petites y qui font couchées lur vne li- gne jaunâtre * qui s'étend de part &'■ d'autre 3 à commencer depuis la tefte jufquts à la queue qui eft fourchue» Il fe prend avec de gros hameçons* que l'on jette ans environs du Navi- re. Tout en avançant chemin , de fans caller les voiles on fait cette pefche.j Ce! 1 des II s s Antilles-. 37^ Ce Poiflbn eft goulu comme la Mo- rue , &fe prend avec toute forte d'a- morces 5 même avec les tripailles des^ Poiffons, qui ont efté eventrez.On le rencontre plus fouvent en pleine mer, qu'es coites. Il eft bon étant mangé frais î" mais il eft encore plus délicat*. lors qu'il a demeuré vn peu dans le §d > & dans le poivre , avant que de le faire cuire. Plufieurs tiennent 3 que ce PoiiTon eft le même que celuy que nous appelions Thon ^ 5c qui eft corn-- mun]en toutes les Coftes de la Mer Méditerranée L Article V, De ÏEgmlle de Mer. 'Egaille eft vn Poiflon fans * cailles, qui croiftdela longueur de quatre pieds ou environ. Il a la te- lle en pointe,, longue d'vn bon pied», les yeus gros du luilans qui (ont bor- dez de rouge, La peau de ion dos eft: rayée de lignes de bleu &■ de vert % ÔC celle de deifous fon ventre , eft d'vn blanc méfié de rouge* Il a huit Na- geoires». I >8o Histoire Natvrseib geoif es qui tirent fur le jaune & vne queiie fort pointue , qui a peut-être donné i'occafion de luy donner le nom qu'il porte , de même que la Si *> gwre de fa tefte 5 a convié les Hollan- K dois de i'appeller , Tabac- Pype s c'eftf ^ à dire Pi^e 4 Tabac. rÇA A R T I C L E V ï. De plujïeurs autres Poijfons de la Mer & des Rivières* LEs Côtes de cqs Iks ont a«(H des Carangues'tàts Mulets qui entrent v quelquefois en l'eau douce, & fe pef- e'hent datfs les Rivières y des Poijfons de roehe qui font rouges > & de di- verfes autres couleurs^ & fe prennent Y( auprès des Rochers j JD^jr 'Nègres ou tf diables de Mer3q\ii font de gros Poif- fons qui ont l'écaillé noire > mais qui ont la chair blanche & bonne au pof- ^' fibleâ& vne infinité d'autres Poi(Ions5 \" qui font pour la pkxfpart diflfcrens- de ^ cens qui le voient en Europe , & qui M'ont eacore point de noms panny mous* Pour- I % ■ ■i— ann BUM-f imT-r^ 1 s 38 1 Histoire Naturelle Pour ce qui eft des Rivières ; elles fournilTent vne grande abondance de bons Poiflfons aus Habitans des An- tilles 3 & s'il eft permis de comparer les petites chofesaus grandes* elles ne cèdent point à porportion de leur étendue en fécondité à la Mer* Il eft vray qu'elles ne produifene point de Brochets , de Carpes 3 ni de fembla- Bles Poiffons 5 qui font communs en ces quartiers «icy : mais il y en a gran- de quantité d'autres «J qui ne font con- nus que des Indiens3& dont quelques • vns approchent de la figure des nô- tres. CHAPITRE XVII. Des Monftres Marins qui fe tron~ vent en ces quartiers. C Eus qui ont décrit l'Hiftoire des Poifïbns s ont mis au rang des Baleines , tous ceus qui font d'vnej grofleur extraordinaire * de même, qu'ils ont compris fous le Titre de* Monftres* | — f "^» —"■ * *■ ^«rra »wmrr* issr DES ÎLES ÂNTI1LE€. jS| Monftresj tous ceus«là qui ont vne fi- gure hideufc, ou qui vivans de proye font des ravages dans les eaus, comme ■les Lions, les Ours* les Tigres, & les autres beftes farouches en font fur la terre. Nous dey on s parler dans ce Chapitre des vns & des autres 3 c'eft à dire des tous ceus qui font d'vne grof- feur prodigieufe* ou qui font effroya- bles pour leur forme hideufe à voir* & redoutables à caufe de leurs défen- ces. Etainfi , nous defcendrons pour vn peu de tems a dans les aby fines de cette grande & fpacieufe Mer , ou comme dit le Saint Roy qui a compo- fé les Sacrez Cantiques d'ifraë'lj il y a des Reptiles fans nombre fl des petites beftes avec des grandes 3 Se après y avoir contemplé les œuvres du Sei- gneur > nous en remonterons incon- tinét,pour célébrer fa bénignité ôc fes merveilles envers les fils des hommes» ARTICLE I, De l'Ejpadon. ENtre les Monftres Marins-, on re- marque particulièrement celuy que ■a^^og^^gs 1 I ! I 384 Histoire Natvrells que nos François nomment Effadofl, à caufe qu'il a au bouc de fa mâchoire d'enhaut vne defenfe de la largeur d'vn grand Coutelas ,qui a des dens . dures- & pointues des deus coftés. Il y a de ces Poiflons^qui ont ces defenfes longues d? cinq pieds , larges de fix pouces par lebas,& munies de vintféc dens blanches & folides en chaque rang > & le corps gros à proportion. Ils ont tous la tefte plate ôc hideufe, de la figure d'vn cœur > ils ont prés des y eus deus foufpiraus ^ par où ils rejettent Veau qu'ils ont avallée» Ils n'ont point d'écaillés , mais ils font couverts d'vne peau grife fur le dos,Sc blanche fous le ventre > qui eft rabo- fceufe comme vne lime. Ils ont fét na- geoires , deus à chaque cofté 3 deus autres fur le dos , & puis celle qui leur fert de quelle. Quelques-vns les appellent Voirons à Scie , ou Empe- reurs > à caufe qu'ils font la guerre à la Baleine 5 & bien fouvent la bleflent à mort, Art ©es Iles Antilles. Article IL Des Aîarfoiiins. LEs Morfomns font des Porceapu de Mer y qui vont en grande trou- pe y &c fe jouent fur la Mer , faifant des bonds , ôc fuivant tous vne même route. Ils s'approchent volontiers af- fez prés des Navires-, &: ceus qui font adroits à les harponner^en accrochent fouvent. La chair en eft a (fez noirâ- tre. Les plus gros n'ont qu'vn pou- ce ou deus de lard. Ils ont le mufeau pointu y la queue fort large y la peau grisâtre ,&vn trou fur la tefte , par où ils refpirent &: jettent T-au.Ils ron- flent prefque comme les Por<&aus de terre. Ils ont le fang chaud , & les Inteftins femblables à ceus du Por- ceau3 Se font prefque de même goût: mais leur chair eu de difficile dige- ftion. Il y a vne autre efpece de Marfo- mnsy qui ont le groin rond & mouiïîi comme vne boule. Et à caufe de la reflemblance de leur tefte avec le Froc des Moines. Quelques vns les appel- Té^. /. R lent, ■KWVV^^^ &J*ÙZ*?±4 p ! I I I $%6 Histoire Natvrelle lent , Têtes de Moine 3 ôc Moines d^ Mer. ArticU II I. Du Requiem.. LE Requiem eft vn efpeçe de Chien 9 ou de Loup de Mer , le plus gou- lu de cous les Polirons, & les plus avi- de de chair humaine. Il eft extrême- ment à craindre quand on fe baigne. Il ne vit que de proye a & il fuit lou- pent les Navires , pour fe repaître des immondices que l'on jette en Mer, Ces rnonftres paroilïent de couleur jaune dans l'eau.Il y en a qui font dV- ne grandeur & d'vne groflhir déme- surée j & qui font capables de cou- per tout net vn homme en deus,L?ur peau eft rude , & Ton en fait des li- mes douces , propres à polir le bois. Ils ont latefte plate,&: n'ont pas l'ou- verture de leur gueule tout au devant de leur mufeau , mais deffous. Ce qui fait , que pour prendre leur proye, il faut qu ils fe retournent le ventre preC que en haut. Ils ont les. dents tren- chantes i nnm mrm ■ — mw tiwafwsa T des Iles Antilles. 387 chantes fort aiguës Se fore larges, qui font dentelées tout autour, comme les dents d'vne feie. ïl y en a tels qui en ont trois de quatre rangs en chaque niachoire.Ces dents font cachées dans les gencives ; mais ils ne les font que trop paroître quand ils veulent. Ces cruels Dogues Marins font le iplus fouvent efeortez de deus ou trois peits PoifTons > Se quelquefois da- vantage qui les précèdent avec vn.e telle viteffe, & vn mouvement fi me- suré, qu'ils s'avancent 3 Se s'arrêtent plus ou moins , félon qu'ils apperçoi- vent que les Requiems s'avancent ou s'arrêtent. Quelques - vus les nom- mentRambos, ôc Pelegrimes. Mais nos Matelots les appellent les Pilotes an Requiem , par ce qu'il femble que ces petis Polirons le conduifent. lis n'ont qu'vn bon pied , ou environ de lon- gueur , ôc ils font gros à proportion, Mais au refte /ils ont L'écaillé parfe- mée de tant de belles , Se vives cou- leurs, que l'on diroit qu'ils foient en- tourez de chaînes de* perles, de corail, d'émeraudesj & d'autres pierreries. On R 2 ne ! MËG&k&Xs&Ët F E i i i ï 3SS Histoire Naturelle ne fauroit fe laifer de les confiderer en l'eau. G'efi: ainfi que la Baleine ne mar- che jamais 5 qu'elle n'ait devanc elle vn petit- Poiflbn , femblable au Gou- jon de Mer3 qui s'appelle pour cela la Guide. La Baleine le fuit > fe biffant -mener & tourner auffi facilernent>que le timon fait tourner le Navire , 8c en recompenfe auffi , au lieu que tou- te autrechofe , qui entredans l'hor- rible Caos de la gueule de ce Monftre, eft incontinent perdu & englouty, ce petit Poiflbn s'y retire en toute feu- reté 3 & y dort. Et pendant fon fom- meil la Baleine ne bouge > mais auf- fitoft qu'il fort elle fe met à le fuivre fans cefle. Et fi de fortune elle s'écar- te de luy 3 elle va errant ça & là > .fe iroiflant fouvent contre les rochers, comme y.n vaiflfeau qui n'a point de gouvernail. Ce que Plutarqne témoi- gne qu'il a veu en l'île d'Ànticyre. Il ! y a vne pareille focieté , entre le pe- tit Oifeau qu'on nomme le Roytelet & le Crocodyle.Et cette Coquille qu'- on appelle la Nacre,vit ainfi auffi avec; le H des Iles Antilles. 389 le Pinnothere^qui eft vu petit animal de la forte cTvn Cancre. C'eft ce que récite Michel de Montagne, œufecond Livre de fe s EJfais>Chapit.i 2. Au refte ta chair du Requiem n'eil point bonne, & Ton n'en mange qu'- en neceflité. On tient toutefois que quand ils font jeunes , ils ne font pas mauvais. Les curieus 3 recueillent ioï- gneufement la Cervelle qui fe trou- ve dans la tefte des viens, & après l'a- voir fait sécher 3 ils la confervent, & ils difent qu'elle eft tres'-vtile à ceus, qui font travaillez de la pierre > ou de la gravelle. Quelques Nations appellent ce Monftre Tiburon de Tuberon* Mais les François & les Portugais luy don- nent ordinairement ce nom de Re- quiem> c'eft à dire Repos, peuteftre par ce qu'il a accoutumé de paroître lors que le terns eft ferain & tranquille, comme font aufîi les Tortuës:ou plu- tôt s par ce qu'il envoyé promtément au repos,ceus qu'il peut attraper^ qui eft l'opinion la plus commune entre aos gens, qui l'appellent de ce nom, R j Son I I I I I II 590 Histoire" Natvreile Son foye étant bouilly^rend vne gran- de quantité dfhuyle* qui eft très- pro- pre pour entretenir les lampes , & &■ peau eft vtile aus Menuyfiers 3 pour polir leur ouvrage. o Article IV. De la Remore. Vtre ces Pilotes, dont nous a-. vons parlé : les Reqmems font: i bien fouvent accompagnez cTvne au- tre forte de petis Poiiîons 5 que les Hollandois appellent Suyger > par ce qu'ils s'attachent fous le ventre des Requiems, comme s'ils les vouloient fuçer. Nos François tiennent > que c'eft vne efpece de Re?nore> & ils leur ont donné ce nom , à eaufe qu'ils fe collent contre les Navires , comme s'ils vouloient arrêter leur cours. Ils croiffent environ de deus pieds de long,&: d'vne grofleur proportionée. Ils n'ont point d'écailles,mais ils font couverts par tout^dyne peau cendrée* qui eft gluante comme celle des An- guilles. Us ont la Mâchoire de deflus* vn mMïzxzrm "M i>Ê$ Iles Antilles. $Qf> f n pu plus courte que celle de deilous, au lieu de dens, ils ont de petites emi- nences3qui font allez forces poux brifer ce qu ils veulent avaller. Leurs yeusfont fort petis ,de couleur Jaune- Us ont des Nageoires & desEmpen- nures , comme les autres Poi ffons de Mer l mais ce qu ils ont de particu- lier , eft, qu ils ont la- tefte relevée d'vne certaine pièce faite en ovale, qui leur fert de cburonne.Elle eft plat- te 9 & rayée par defïus de plusieurs li- gnes, qui la rendent heriiïée. Ceft ouffi par cet endroit, que ces Poiflbns Rattachent fi fermement aus Navires &ausRequiems, qu'il faut fouvent les tuer y avant que de les pouvoir fe- parer. On en mange, mais c'eft au dé- faut d'autres Poiflbns , qui font plus v delicas. Articie V* Du Lamantin. ENtre les Monftres Marins qui font bons à manger , de que l'on ïeferve en provifion 3 comme on R 4 fait ■KWVCSQ^^^ 591 Histoire Natvrelle fait en Europe le Saumon, & la Mo- rue jon fait fur tout état aus Iles du Lamantin félon nos François^ou Na- marttin icManatySdon les Efpagnols* C'eft vn Monftre, qui croift avec l'â- ge d3vne grandeur ii étrange , qu'on en a veu qui avoient environ dix- huit pieds de long ^ Se fét de grof~ feur au milieu du corps. Sa telle a quelque refTemblance à celle d'vne Vache 3 d'où vient que quelques vns l'appellent Vache de Mer. Il a de pe- tis yeus , & la peau épaiife de couleur brune 5 ridée en quelques endroits de parfemée de quelques petis poils.Eftâc ieiche , elle s'endurcit de telle forte* qu'elle peut fervir de rondache impé- nétrable aus flèches des Indiés. Auffi, quelques Sauvages s'en fervent pour parer les traits de leurs ennemis , lors, qu'ils vont au combat. Il n'a point de Nageoires,mais en leur place>il a fous le ventre deus petis pieds^qui ont cha- cun quatre doits fort foibles > pour pouvoir fupporter le fais d'vn corps fi lourd & fi pefant : Et il n'efl; pour veu d'aucune autre defenfe. Ce Poiffon vit d'herbe ~T DES IlES ÀNTI11IS. 393 d'herbe qui croît auprès des Roches* de fur les baffes qui ne font couuertes que dvne btaffe, ou environ deau de Mer. Les femelles mettent leur fruit hors , à la faiîon des Vaches * & ont deus tenines avec iefquelles elles allai- tent leurs petits. Elles en font deus à chaque portée 3 qui ne les aban- donnent point iufques à ce qu'ils n> yent plus befoin de lait>& qu'ils puif- fent brouter l'herbe comme leurs mè- res. Entre tous les Poiffons , il tfy eh a aucun qui ait tant de bonne chair que le Lamantin, Car il n'en faut fouvent que deus ou trois , pour faire la char- ge d*vn grand Canot , de cette chair eft femblable à celle dvn animaUcr- reftre > courte , vermeille appeciiïan- te ,■& entre - méfiée de graille y qui eftant fondue ne fe rancit iamais. Lors quelle a efté deus ou trois jours dans le fel 5 elle eft meilleure pour h fanté que quand on la mange toute fraîche. On trouve plus fouvent ces Poiiïons à l'emboucheure des Rivie- ses d'eau- douce qu'en pleine Mer. Les R 5 curieus £94 Histoire Naturelle curieus , font graad état de certaines pierres qu'on trouve en leur tefte 3 à caufe qu'elles ont la vertu à ce qu'ils* difent > eftant recuites 0n poudre ^ de purger les reins de gravelle>& de bri- 1er même la pierre qui y feroit formée. Mais 3 à caule que ce remède eft vio- lent s on ae confeille à perfonne d'en, vfer3 fans l'avis d'vn fage ôc bien ex~ perimente Médecin. 1 Article V Iv Des Baleines & autres Monfires d& Mer. CEus qui voyagent en ces Iles,ap- perçoivent quelquefois iur leur route des Baleines qui jettent l'eau par leur évent de la hauteur d'vne pique., & qui ne montrent pour l'ordinaire qu'vn peu du dos > cjui paroit comme vne Roche, hors de l'eau. Les Navires font auffi par fois ef- cortez allez Long terns, par des Mon- ftres qui font dé la longueur^ & de la groifeur d'vne Chalouppe5& qui fem- bient prendre plaifîr à fe montrer.Les Matelots les nomment Morhom ou Souffleurs * , 1 SES ÎLES AtfTllLES. 35JJ! SoujfleHrs^aï ce que de tems en tems* ces prodigieus Poilîbn s mettent vue partie de leur tefte hors de l'eau, pour reprendre haleine. Et alors ils fouf- fient y 8c font écarter l'eau de devant leurs mufeaus pointus. Quelques vns difent , que c'eft vne efpece de gros Marfoiiins. A R T ICI E VIL Des Diables àe Mer. AVs coftes de ces Iles y il tombé quelquefois fous la Varre des Pefcheurs vn Monftre , que l'on met entre les efpeces de Diables de Merà caufe de fa figure hideufe. Il eft long d'environ quatre pieds, de gros à pro- portion. Il porte vne boffe fur le dos, couverte d'aiguillons pareils à ceus d'vn Heriiïbn. Sa peau eft dure , iné- gale y 8c raboteufe comme celle du< Chien de Mer , & de couleur noire*> M a la tefte platte 5 & relevée par def- fus de plufieurs petites bolfes > entre lefquelles on voit deus petis yeus fort: noirs. 5>a gueule qui eft demefuré- ment -fendue » eft armée de plufieurs R & denss I I «^Mre^^snigraisaBm^si^^ -y _ 1 1 II ! 1 396 Histoire Natvrelie dens extrêmement perçantes, dont il y en a deus qui font crochues Se an- nelées , comme celles d'vn fanglieiv Il a quatre nageoires Se vne queue allez large > qui eft fourchue par le bout. Mais ce qui luy a fait donner le nom de Diable de Mer, eft 3 qu'an deiïus des yeus > il a deus petites cor- nes noires aiîes pointues , qui fe re- coquillent fur fon dos comme celles des Béliers. Outre que ce Monftre eft laid au poffible 3 fa ckair qui eft mol- ïaffe Se filafeufe, eft vn vray poifon> car elle caufe des vomi {Te mens étran- ges ySc des défaillances > qui feroient iuivies de la mort , fi elles n'etoient promtement arrêtées par vne prife de bon Teriac, ou de quelque autre con- trepoifon. Ce dangereus animal n'eft recherché que des curieus ., qui fon i bien aifes d'en avoir la dépouille dans leurs cabinets» Ainfi ce Diable > qui n'a porté jamais dVtilitéaus hommes pendant fa vie^repaift au moins leurs yeus après fa mort. -Il y a encore vne autre forte de Dia- bles de Mer , qui ne font pas moins : > à vï hideux ~~\ des lus àk-thl-es: y$7 hideus que les precedens , encore qu'ils foient d'vne autre figure. Les- plus grands de cette efpece n'ont qu'- vn pied ou environ dépuis la tefte juf-- ques à la queiie. Ils ont prefque au- tant de largeur * mais quand ils veu- lent , ils s'enflent d'vne telle forte* qu'ils paroiiïent ronds comme vne boule.Leur gueule qui eft ailés féduëy eft armée de plufieurs petites dens ex- trêmement pointuës3& au lieu de lan- gue ils n'ont qxr vn petit os,qvri eft dur au poffibleXeurs yens font fort étin- celans,& fi petis & enfoncez en late- fte,qu'on a peine de difcerner la pru- neilclls o-nt entre. les yeus vne petite corne, qui rebroulïe en arrière, ôc au devât d'icelie vn filet vn peu plus grâd5 qui eft terminé par vn petit bouton* Outre leur queiie,qui eft corne le bout d'vne rame,ils ont deus empennuresy l'vne qui eft fur le dos > laquelle ils portent droite & relevée , & l'autre fous le ventre. Ils ont auffi deus na- geoires,qui répondent de chaque côté' du milieu du ventre > & qui font ter- minées en forme de petites pattes>qui ont- ! i I I I Si ^1 I98 Histoire Natvrelxe ont chacune huit doits , qui font wèm nis d'ongles allez piquans.Leur peau- eft rude ôc heriifée par tout , comme celle du Requiem y hormis fous le ventre. Elle eft d'vn rouge obfcur 3 8c marquetée de caches noires 5 qui font comme des ondes. Leur chair n'effc point bonne à manger. On les peut écorcher aifément > & après avoir remply la peau de cotton,, ou de feuil- les sèches on ltiy donne place entre les raretez des cabinets:Mais elle perd- beaucoup de fon luftre ^ lors que le PoilFon eft' mort, Ail T I CL E VI II* De la B&cune. ENtre les Monftres goulus & avi- des de chair humaine, qui fe trou- vent aux coftes de ces Iles, la Becnne eftjVndes plus redoutables. Ceftvn PoiïTon, qui eft de la figure dVn Bro- chet , qui croift de fét à huit pieds en1 longueur 5 & dVne grofleur propor- tionée. Il vit de proye 9 ôc il le lance defude 5comme va chien carnaffier,, rm »M'ai iras Iles Anti-lies'* 399 fur les hommes qu'il apperçoit en Peau. Outre qu'il emporte la pièce de tout ce qu il peut attraper 5 fes dens ont tant de venin > que leur moindre morfure devient mortelle 5 fi on n*as recours au même inftant à quelque puiflant remède > pour rabattre & di* ver tir la force de ce poifon^ A R T I C II IX. De la Beccajfe de Mer, IL y a encore vne autre forte de Z&* cunes que nos François ont nom- mée Beccajfe de Mer 3 à caufe de la fi- gure de fon bec > qui eft prefque pa- reil àceluy d'vne Beccaile^excepté^que la partie d'enhaut , eft plus longue de beaucoup,que celle d'en bas5 Se que ce Poifsô remue iVne & l'autre machoi- re>avec vne égale facilité. On en voit de fi gros & de fi longs y, qu'on peut: mefurer 4. bons pieds entre queue &C tefte , & iv. pouces en la largeur de chaque coftés qui répond aus ouïes.Sa tefte a préfque la forme de celle d'viv Borceau ^mais elle eft éclairée de deus gros i i i ! I W 400 Histoire NàtvRëém gros yeux3 qui font extrêmement; lut-* fans. lia la queu'e divifée en deus5SC des nageoires aux codés ôc au? défions du ventre,& vne empennure haute 3c relevée par degrez^comme vnecréfte* qui commence au fortunée de la téfte* & s'étend tout le long du dos>iufques prés de la queue*. Outre le bec long et foîide qui le fait remarquer entre- tous les Poirïbns, il a encore deus ef- peces de cornes duresy noires* & lon- gues d'vn pied & demy , qui pendent au défions de fors gofier > ôc qui lujr font particulières .,il les peut cacher ai- fément dans vne énfonçure qui eft fousfon ventre , $c qui leur fert de gaine. Il n'a point d'écaillés : mais il eft couvert dVne peau rude , qui eft noirâtre fur le dos 3 grife aus coftez* & blanche fous le ventre.On en peut manger fans péril , encore que fa- chair ne foit pas fi délicate, que cette? ic plufieurs autres Poiffbns.* &&$"#-. ©es Iles Âmtille&I 401' Article X. De VHeriJfon de Mer. L9HeriJfon de Mer qui fe trouve au- Ç\ en ces Cotes, porte à bon droi£ ce nom - là* Il eft rond comme vne boule > & tout revécu d'épines fort piquantes, qui le rendent redoutable» D'autres le nomment foison armé* Quand les Pefcheurs en prennent, ils les font lécher pour les envoyer aus curieus, qui les pendent par rareté e^ leurs cabinets, Cmkm r ! % I L __ C syadûn Gwawi "\ RESTEES' ÀftTlEL.BS» 4©|- •S&3 •gg&HMM"^ ^^:^:»^èt^ CHAPITRE XVIII. *&efcription particulière d'vne £p4 comt de Mer > qui s'échoua a lœ rade de l'Ile de la Tortue en (an 1 644. Avec vn récit curie m y far forme dfcomparaifon é* de digreffîGn agréable 5 touchant plufieurs belles $> rares corner quon a apporté depuis peu d& détroit de Davis \& de la quali- téàe la terre > é' des meurs des peuples qui y habitent» NOus ne pouvons mieus finir ce que nous avions à dire des Mon- tres marins, que par la defcription d'vn Poiiïon fi remarquable 5 & fi merveiileus , qu'il mérite bien d'a- voir vn Chapitre particulier. C'eft la Licorne demcr,<\w\ fe rencontre quel- quefois en ces quartiers. Il s'en é- choiia en Tan 1-644.- vne prodigieufe dJTnr W'-rt-fàW 1 1 1 1 I i 1 S' rô I 4©4 Histoire Natvrellb au rivage de l'Ile de la Tortue , voîfi» ne de l'Ile Hifpaniola * ou Saint Dô- niingue. Monfieur du Montel > en ayant vne connoiffance exacte com- me Témoin oculaire , nous en don- ne cette curieufe defcription. Cet- te Licorne , dit - il , pourfuivoit vne Carangue , qui efl vn Poiffon médio- cre s avec vne telle impetuofité 3 que ne s* ap percevant pas quelle avoit befoin de plvu grande eau pour nager > elle fe trouva la moitié du corps a fec3 fur vn grand bam de Cable , d'où elle ne put regagner la grande eau 9 & oh les habit ans de file Vaffommerent. Elle avoit environ dixhnit pieds de long > ê- tant de la grojfeur à' vne Barrique au fort du corps. Elle avoit fix grandes nageoires yde la faffon du bout des ra- mes de galère , dont dem étoient pla- cées au défaut des ouy'ès > & les quatre' autres a coté du ventre en égale dift an- ce : elles étoient d'vn rouge vermeil* Tout le dejfm de fon corps , et oit couvert de grandes écailles de la largeur d'vne pièce de cinquante huit fols léquelles é- tôient i des Iles Antilles. 405 îoient dyvn bleu , qui paroijfoit comme parfemé de paillettes d'argent, auprès du col [es écailles et oient plus ferrées, & de couleur brune > ce qui liïy faifoit comme vn collier. Les écailles fous le ventre étoient uunes : la queue four~ chue : la tefte vn peu plus grojfe que celle d'vn Cheval , & presque de la mê- me figure. Elle étoit couverte d'vne peau dure & brune : & comme la Licor- ne de terre , a vne corne au front , cette Licorne de mer , en avoit aujfi vne par- faitement belle au devant de la tefte, * longue de neuf pieds & demy. Elle é~ toit entièrement droite, & depuis le front eu elle prenoit fa naiffance , elle alloit toufiours en diminuant iufques à l'autre bout , qui étoit Jî pointu , quêtant pouf- fée avec force, elle pouvoit percer les ma~ tieres les plm folldes. Le gr$s bout , qui tenait avec la tefte , avoit feix,e pouces de circonférence , & dés la iufques ans dem tiers de la longueur de cette mer- veilleufe corne , il était en forme d'vne vis de prejfoir , ou pour miem dire.faf- fonné en ondes % comme vne colomne torfe i hormis que les enfonçures allaient toufiours r ! 1 I i ! I 1 406 Histoire Natvrelle toufiours en amoindrijfant , iufques a ce quelles furent remplies & terminées par qui étoit cou* mert par tout d'vn petit poil mollet 5 & & court comme du velours de couleur de feuille morte ? mais au dejfotts , elle ê- ioit blanche co?nme yvoire. Quant à Vautre partie qui paroijfoit toute nué> elle et oit naturellement polie > d'vn noir luifant y marqueté de quelques menus filets blancs & iaunes, & d'vnefolidité telle y qua peine vne bonne Urne en pou- voit - elle faire fortir quelque menue poudre. Elle n avoit point d'oreilles éle- vées y ?naû de m grandes oui es comme les autres Poijjons. Ses y eus et oient de la grojfeur dvn œuf de poule. Lapru~ nelle > qui étoit d'vn bleu celefle emaillé de iaune > étoit entourée d'vn cercle vermeil > qui étoit fuivy d'vn autre fort clair y & luyfant comme crijial. Sa bouche étoit affe\, fendue & garnie de flufieurs dens 5 dont celles de devant é- toient pointues & trenchames aupojfible, ~\ des Iles Antilles. 4^7 ;& celles de derrière tant de Tvm que de Vautre mâchoire y larges & relevées par petites bojfes. Elle avoitvne langue d'v- ne longueur ■& épaijfeur proportionée» qui étoit couverte d'vne peau rude & vermeille. Au refte , ce Poijfon prodi- gieiu avoit encore fur fa tejie , vne efpê- ce de cowonne rehauffée par defjus le trèfle du cuir , de dem pouces ou environ > & faite en ovale , de laquelle les extré- mités aboutiffoient en pointe : plus de trois cens perfonnes de cette Ile-la, man- dèrentÀe Ça chair en abondance y & la 11' rit trouvèrent extrêmement délicate. Elle étoit entrelardée d'v ne graiffe blanche y ,& étant cuite 3 elle fe levoit par écail- les y comme la morue fraîche : mais elle avoit vn goût beaucoup pbt* favourem, Cevu qui avoient veu ce rare Poijfon en vie > & luy avoient rompu l [échine à grands coups de leviers 3 difoient qu'il avoit fait de prodigiem efforts pour les percer avec fa corne y laquelle il ma- nioit & tournoit de toutes parts avec *vne d.exterité & vne viteffe incompara- ble , & que s'il eut eu affés aeauprur fe foutenir & pour nager tant foitpen.il les ! I 408 Histoire Natvreixe tes eut tom enfile\. Quand on Veut ev en- tré y on reconnut aifément qu'il fe nour- riffoit deproye 3 car on trouva en fes bo- ya>M>beaucoup d'écaillés de Poiffons. Les rares dépouilles de ce merveillem animal , & fur tout fa tefte, & la riche tome qui y étoit attachée , cm demeuré •prés de dem ans fufpendués au corps de ^garde de l'Ile , iufques à ce que Mon- Jîeur le Valeur qui m étoit Gouverneur > voulant gratifier Monfieur des Tran- farts y Gentilhomme de Saintonge , qui V étoit venu voir 3 luy fit prefent de cet- te corne» Mais quelque peu après mc~ tant embarqué dans vn vaijfeau de Flejfwgue avec le Gentil - homme , qui éivoit cette prccieufe rareté en vne longue coiffe „ notre vaijfeau fe biifa prés de l'Ile de laFayalcy qui eft l'vnt des Aco~ res. De forte que nom fifmes perte de toutes nos hardes & de toutes nos Mar- chandifes. Et ce Gentil- homme regretta fur tout fa caijfe. Iufques icy font les paroles de nôtre aimable Voyageur. On trouve en la mer du Nord vne autre efpece de Licornes 3 qui font Couvent pouffées par les glaces 3 aus coftes des Iles Antilles. 409 Coftes d'Iflande.Elies font d'vne lon- gueur & d'vne grolfeur fi prodigicufe, que la plupart des Auteurs qui en ont -efcrit , les mettent au rang des Balei^ nés. Elles ne font point couvertes d'é- caillés , comme celles dont nous ve- nons de donner la defeription ; mais d'vne peau noire & dure comme le Lamantin. Elles n'ont que deus na- geoires aus coftez , & vne grande &c large enpennure fur le dos , laquelle étant plus étroite au milieu, fait com- me vne double crefte , qui s'élève en vne forme trss - propre , pour fendre commodément les eaus. Elles ont trois trous en forme de foupiraus, à la naifiance de leur dos, par où elles vo- millènt en haut toute l'eau luperfluë qu'elles ont avallée , de même que les Baleines. Leur tête fe termine en poin- te, & au cofté gauche de la mâchoire d'enhaut , elle eft munie d'vne corne blanche par tout, comme la dent d'vn jeune Elefant •, qui s'avance quel- quefois de la longueur de quinze à feize pieds hors de la tefte. Cet- te corne eft tprfe en quelques en- Tom. L S drois^ m «rewg>fr3£»*itt^sagss^ ! I \ I I H I 410 Histoire Natvrexie drois a &: rayée par tout de petites lignes de couleur de gris de Perle > lé- quelles ne font pas feulement en la Cuperficie , mais qui pénètrent au de- dans de la ma(Te,qui eft creufe iufques au tiers, & par tout auffi folide,, qu'vn os le plus dur. Quelques- vns veulent que cette prominence , foit plùtoft vne dent quJvne Corne >à caufe qu'elle ne fort pas du front comme celle dont nous venons de parler , ni du deiïus de la tefte 3 comme celles des Taureaus & des Béliers ; mais de la mâchoire d'en haut dans laquelle le bout eft enchafle, comme font les de-as en leurs propres calîettcs. Ceusqui font de ce fenti- ment ajoutent y qu il ne £e faut pas é- tonner fi ces Poiifons n'ont quVne de cqs longues dens > veu que la rmi <ùere laquelle en pou voit produire ^•autres , s'eft entièrement epuifée pour former celle-cy , qui eft dvne longueur & d'vne groffeur fi prodi- gieufe , qu'elle fuffiroit bien pour en faire vne centaine. Or foit que cette pefante &c mer- veilleuic be$ Iles Antilles. 41.1 veillenfc défenfe donc ces monftrueus PoifTons font armez , foit appellée dent ou Corne : il eft confiant qu'ils s'en fervent , pour combattre contre les Baleines , de pour brifer les gla- ces du Nord , dans léquelles ils fe trouvent bien fouvent enveloppez^ cToù viét qu'on en a veu quelquefois, qui pour avoir fait de violens efforts, pour fe démefbr du milieu de ces montagnes glacées* avoyent non feu- lement emoufTé la pointe de cette lance naturelle ; -mais même l'avo- yent brifée & fracafTée en deus.Nous avons fait mettre en vne même plan- che les figures de la Licorne laquelle s'échoua en l'Ile de la 'Tortue, & dV- ne de celle^du Nord , afin que Ton puifle plus facilement difcerner la grande différence qui eft entre ces deus efpeces. Au même tems , que nous tirions de noftrc cabinet cette Hiftoire pouc la donner au public , vn Navire de Fleffingue commandé par Nicolas Tunes , dans lequel Monfieur Lamp- fius , les Sieurs Biens , Sandras , 3c S 1 d'autres ! I I 1 I I i 1 |ï> Histoire Natvrel^e rgÈv. ïi^à±^à.^s*n *v^w- d'autr< T vis Iles Antilles. 4*5 d'autres Marchands de la même Ville étoientintereflez, étant heureufement retourné du détroit de Davis s en a rap- porté entre autres rafétez , plusieurs excellentes dépouilles de ces Licornes de la mer du Nord,dôt nous venons de parler. Et a autit quelarelatfon qu oix nous a envoyée touchant ce voyage, peut donner de grandes lumières à la matière que nous traittons, nous cro- yons que le Le&eur cuneus trouvera bon, que nous le fervions de cette nouveauté par forme de digreffion, qui fera accompagnée de la même fi- délité, avec laquelle elle nous a efté communiquée. Le Capitaine de qui nous tenons ce recit3 étant party de Zelande fur la fin du Printems de Tan 1656. en inten- tion de découvrir quelque nouveau commerce es terres du Nord , arriva fm* la fin du mois de Iuin dans le Dé- troit de Davis > d'où étant entré dans vne rivière qui commence au foixante quatrième degré Se dix minutes de la ligne en tirant vers le Nord > il fie voile iufques au feptante deuzieme, S 5 fous I ! I I ! % 414 Histoire NAifRiui fous lequel la terre que nous alfen* décrire eft fituée. Dez que ks Habitons du Païs qui étoieiu à la pefche tmt nt apperçeu le ÎN?avire,il-s le vinrent reconnoicrea- vec kurs petis efqu^fs , qui ne font faits que pour porter vne feule per* fonne ,les premiers qui s'étoienc mis en ee devoir , en attirèrent tant d'au- tres aprez eux, qu'ils compoferent en* peu de tems vn efcorte de foixante & dix de ces petis vaiileaus, qui n'aban- donnèrent point ee Navire étran-çer3. iufques à ce qu'il eut mouillé à la meilleure rade 3 où ils luy témoignè- rent par leurs acclamations 3 & par tous les fignes de bien- veiiillance^ qu'on peut attendre d'vne Nation M peu civilizée > la joye extraordinaire qu'ils avoyent, de fon heureufe arru vée. Ces petis vaiffeaus font fi admi- rables^ foit qu'ils foyent confiderez en leur matière > foit qu'on ait égard à la merveilleufe induftrie dont ils font fallonnez > ou à la dextérité in- comparable avec laquelle ils font con- duits » quiis méritent bien , de tenir le 1 ^~*~v^ BtS IlES AîtfïJLlES. 41 5 le premier rang3 dans les defcriptions que cette agréable digreffion nous fournira. Ils font compofez de petis bois dé- liez , déquels la plupart font fendus en deus comme des cercles. Ces bois font attachez les vns avec les autres* avec de fortes cordes qui font faites de boyaus de Poiffons ., qui les tien- nent en arreft > & leur donnent la fi- gure qulls doivent avoir , pour eftre propres ans vfages aufquels ils font detëinez. Ils font couverts en dehors de peau de Chiens de mer , qui font iï proprement coufuës par enfemble38c I foigneufement enduites de ruine à l'endroit des coutures^que l'eau ne les peut aucunement pénétrer. Ces petis Bateaus font ordinaire*- ment de la longueur de quinze à feize pieds 3 Se ils p aivent avoir par le mi- lieu où ils ont plus de groiïeur 3 envi- ron cinq pieds de circonférence. C'cft aufTi dés cet endroit qu'ils vont eu appetiifant > de forte qu^ les extrême lez aboufiflènt en pointes , qui font S 4 munies m&£&£2&z6&L -416 Histoire Natvrible munies d'os blanc , ou de dépouilles des Licornes donc nous venons de parler. Le deilus eft tout plat Se cou- vert de cuir de même que le relie > &c ledeiïousala forme du ventre dVn gros PoiflTon : de loi te qu'ils font très- propres à courir fur les eaus. Us n'ont quvn£ feule ouverture » qui eft direftement au milieu de tout l'édifice. Elle eft relevée tout à Tentour dVn borddecofte de Baleine > êc elle eft faite à proportion 5 & de la grolîèur du corps d'vn homme. Quand les Sauvages qui ont inventé cette force de petis vaiifeaus s'en veulent fervir* foit pour aller à la pefche > ou pour fe divertir fur la nierais fourrent par cette onverture leurs jambes de leurs cuilTes5& s'étans mis fur leur feant^ils lient Ci ferrement la cafaque qui les couvre 3 avec le bord de cette ouver- ture^qu'ils iemblent être entez fur cet efquif,&: ne fairequ'vn corpsavecluy. Voila pour ce qui concerne la fi- gure Se la matière de ces petis vaif- feaus -.Confiderons à prefent , l'équi- page des hommes qui les gouvernent. Quand ^; ■Vi^^^- — ■ -^ ©es Iles Antixles. 417 Quand ils ont deffein d'aller fur mer* ils le couvrent par detî'us leurs autres habits d'vne Cafaque 5 laquelle nefë deftinée à aucun autrs vfage. Céc ha- bit de mer eft campoféde pkfieurs peaus > dénuées de leur poil 5 qui font fi bien préparées & vnies par enfem» Me , qu'on le croiroit eftre fait d'vne feule pièce. Il les couvre dépuis le fommet d£ la téfte , iufques au deflous du nombril. Il eft enduit par tout d*;v^ ne gomme noirâtre , laquelle ne fe âiffout point dans l'eau 5 & qui l'em- pefche de percer. Le Capuchon qui couvre la tefte > ferre fi bien fous ie col, & fur le front^quil ne leur lai {Te rien que la face à découvert. Lés man* clies font liées au poignet yôc le bas de cette cafaque ? eft aufiS attaché an bord de l'ouverture du v-atffeau^ avec tant de foin 5 de avec vne telle indu* ftrie y que le corps qui eft ainfi cou^ vert p fe trouve toujours à lec au -mi*, lieu des flots y qui ne peuvent mouil- ler avec tous leurs efforts >quc le vi* &ge & les mains.- Encore qu'ils n'ayent ni voiles^ ni. I ! I t 418 Histoire Natvrelle maft 3 ni gouvernail, ni compas , ni ancre , ni aucune des pièces de tout ce grand attirail ,- qui eft requis pour rendre nos Navires capables d'aller fur mer. Ils entreprenent néant-moins* de longs voiages > avec ces petis vaif- feaus , fur léquels ils femblent eftre coufu?. Us fe connoiflent parfaite- ment bien aus étoiles,- & ils n'ont be- foin d'autre guide pendant la nuit.Les rames dont ils fe fervent, ont vne lar- geur à chaque bout en forme de pa- lette, bc afin qu'elles puiflent coupper plus aifément les flots , & qu'elles foyent de plus grande durée 5 ils les enrichiifent d'vn os blanc » qui cou- vre les extremitez du bois,ils en gar- niiîent auffi le^ bords des palettes , & ils y attachent cet ornement avec des chevilles decornc,qui leur fervent ata* lieu de clous. Le milieu de ces rames eft embelly d'os, ou de corne precieufe* de même que les bouts,& c'cft par Ih qu'ils les tiennent afin quelles ne leur coulent des mains. Au refte , ils ma- nient ces doubles rames avec tant de ik$t£iké.&. de vitcCe, 5 que leurs pe- BÊS ÎLES AnTILLBS. $$$ eis vaiffeaus devancent aifément les Navires , qui ont depioyé tous leurs* Voiles^ & qui ont le vent & la marée favorables. Ils font fi apurez dans ces petis efquifs yôc ils ont vne fi grande adreiîe à les conduire, qu'ils leur font foire mille caracoles > pour donner dw divertilTement à ceus qui les regar- dent. Ils s'éfcriment auffi quelquefois contre les ondes y avec tant de force êc d'agilité , qu'ils les font écumes comme fi elles étoient agitées d'vne tude tempeft'e y ôc pour lors y on les prendroit plutôt pour des Monftres marins qui s'entrechoquent^que pour des hommes : Et même , pour mon-- t-rer qu'ils ne redoutent point les dan- gers y & qu'ils font en bonne intelli- gence avec cet Elément qui les nour- rit & les careffe, ils font le moulinet^ fe plongeans 3c roulans en lamer,pa£ jofois cofeentive^de tort© qu'ils peu- vent paiîer p&ur de vrais Àmfibies. Quand 1 1s ont deflein de- Étire quel-- «qûes Vôiages plus long£ que les or- dinaires 5 «H quand iU appréhendent^ jettes bien avant en pleine1 I I I I I 1 ! I 7** 410 Histoire Naturelle mer par quelque tempefte,ils portent; dans le vuidede leur vaifTeaUjVne vef- fie pleine d'eau douce , pour écanchei- leur-loi f3& duPoiflon léché au Soleil ou à la -gelce,pour s'en nourrir à faute de viandes fraiches,Mais,il arrive ra- ïémen-t qu'ils foyent réduits à recou- rir à ces provifionsiCar ils ont certai- nes flèches en forme de petites -lances* qui tout attachés fur leurs Bateaus* &: iefqueiies ils fa vent darder fi vi- vement fur les Poiffons qu'ils ren- contrent a qu'il n'arrive presque [a- rnais^q-u'its loyent fans ces rafraichif- ieraens. Ils n'ont point befoin de fm pour cuire leurs viandes * par ce que: fur la mer Se fur la terre , ils font ac- coutumez de les manger toutes crues,, ils portent auffi certaines dens de gros Poiflos^oa des broches d'es fo£t poin- tues > qui leur tiennent lieu de cou- teaus 5 car ils s'en fervent pour even- trer & trancher les Poifions qu'ils ont pris. Au rçfte il n'y peut point avoir de débats dans ces v-ai(Ièaus-3.piîis qu'* vo fe.ul homme en eft le Maicre * le Matelot^ le Pourvoyeur* & le Pilote** qui UHK31S « DES ÎLES ÂNTltlES. 4%t qui le peuc arrêter quand bon luy fem- ble , ou l'abandonner au gré da vent 6c de la uiarée,lors qu'il veut prendre le repos qui luy eft neceffair© pour re- parer les forces. En ce eas5U accroche ta rame à des courroyes de cuir de Cerf y qui font préparées à cet vfa- ge , & qui font attachées par bandes au deiïus de ce Batteau : ou bien il la He à vne bouele,laquelle pend au de- vant de fa cafaque. Leurs femmes, n'ont point lJvfage de ces petis Efquifs , mais afin qu'el- les puiifent quelquefois fe divertir fur la meilleurs maiys, qui ont beaucoup de douceur & d'amitié pour elles , les xonduifent en d'autres vailfeaus , qui font de la grandeur de nos Chalou- pes , & capables de porter cinquante perlonnes. Ils font faits de perches liées par enfemble , & ils font cou- verts depeaus de Chiens de mer, com- me ceus que nous venons de décrire. Ils peuvent eftre conduits à force de rames quand le tems eft- calme : mais- lors que le vent peut fervir , ils atta- chent au maft des voiles- de cuir» F ! I I I I t % 412. Histoire NATirRitit Or afin que la defcription de ces lares vaiiïeaus * & de ces hommes de mer y foit mieux éclaircie ôc commei animée.-: nous eivaVbns icy fait met- tre vne figure > laquelle a été tirée air naturel fur F brig-inaL Pour parler maintenant de la terre* en laquelle naifient ces hommes* qui font fi entendus eh la Navigation:les dégrcz y fous léqueis nous avons défa^ dit qu'elle eft fituée > témoignent af- fez 3 qu'elle eft d'vne très - froide conftitution.Jl eft vray^que durant le mois de luin & de luillet^qui compo- sent l'Eté de cette Contrée là s & qor font éclairez d'vn jour perpétuel 3 de Biéme que ceus de Décembre & de Janvier y n'y font qu5vne feule nuit^ l^air y eft chaud 5 agréable &ferein:- mais le refte de l'année s les jours qui s'allongent & s'accourciUTent alterna- tivement , font accompagnez de bro- uillards épais , de néges, ou depluyes glacées>qui fonr extrêmement -ftoides ëc inportuneSo Toute, la Terré qui eft prezdek* iiier^ elt £éche^& keuffée de piufieurs rocher des Iees Ântimbs* 4^ 1 3X)dk^ k 42.4 Histoire Natvrelm- rochers pelezjqui font affreus au pof- lîble , elle eft aufli inondée en beau- coup d'endroits 5 au tems que les nék ges fe fondent.de plusieurs effroyables torrens 5 qui roulent leurs eaus tiou- bles>dans le vafte fein de la mcr.Mais- lors qu'on a traverfé vne petite lieue de mauvais chemin 5 on rencontre de belles campagnes 5- qui font tapiffées durant l'Eté, -d'vne agréable verdure* On y voit aufli des montagnes , qui font couvertes de petis arbres,qui re- créent merveilleusement la veuë , &c qui nourrirent vne grande multitude d'oifeaus ôc de Sauvagine.Et on paile par des vallées y. qui l'ont arrofé^s de plufreurs claires & agréables rivières d'eau douce y qui ont afïez de force^ pour fe rendre jufques à la mer. Le Capitaine qui commandoit ce Navire de Fleffingue 3 étant defeèndu\ à terre avec vne partie defes gens^Sc Payant foigneufement viiitée^il y ren- contra entre autres chofe£ dignes de remarque > vne veine d'vne certaine ferre brtîne5parfernée de paillettes lui^ fentes 5£arg£nteées ^ de laquelle il fit - içnvgiifr" ^— DE S ÎLES AnTIIMS. 4j-f remplir vnc barrique-,- pour en faire répreuvetmais après avoir xté mile au creufet , on a trouvé qu'elle n'étoit propre qu'à encroûter des Boettes, &c quelques autres menus ouvrages de bois,aufquels elle donne vu fort beau luftre. Cet indice laiffe neantmoins quelque efperance , qu'on pourroit trouver des Mines d'argét parmy cet- te terre > fian avoit encore pénétré plus avant. Encore que ce Païs foie bien froid* on y voit plufieurs beaus 5c grâds Oi- feaus d'vn plumage blanc & noir , de de diverfes autres couleurs , que les Habitas écorchent,pour en manger la chaire pour fe couvrir de leurs depo- iïilles.On y trouve auffi des Cerfs,de» Heiâs,des Ours.des Renards,des Lie- vres,des Lapins, 6c vne infinité d'au- tres Beftes à quatre pieds , qui ont prefque toutes le poil blanc ou grisa- tre,fortépais,long5 doux3& très-pro- pre à faire de bons chapeaus , ou de belles & très-riches fourrures. Quant aus Peuples qui habitent cette terre * Nos Voyageurs y en ont . I I i S ¥ iê Histoire Nàt^relié 'ont vende cleus fortes , qui vivent ion* femble en bonne correfpondance &C parfaite amitié. Les vns font d'y fie fort baote ftature.bien faits de corps* ^e couleur afiez blanche y ôc fort ha- biles à la c^urfe. Les autres font de beaucoup plus petis> à vu teint olivâ- tre 3 & allés bien proportionnez en leurs membres f hormis qulls ont les jambes courtes Ôc greffes. Les pre- miers fe plaifent à la cliafiè, à laquel- le ils font portez parleur agilité. & leur belle difpofition naturelle .,. pen- dant que ceus-cy s'occupent à lapef- t£he. lis oat tous les dcns extrême- ment blanches & ferrées, ..les cheveux noirs , les yeus vifs > & les traits dis vifage fi hiikm faits^ qu'on n'y peut re- marquer aucune notable difformité* Ils font auffi tous fi vigoureus x ôc d'vne fi forte conftitucion , qu'on en, voit plufkurs qui ayans paffé h cen- tième année de leur âge , font encore fort alaigres & fort robuftcs. En leur converfation ordinaire ils paroiiFentdVne humeur gaye^hardie & courageufcÛs aiment les étrangers ©ES lî-IS ÂNTIXISS. $lf qui les vont vifiter ,à caufe qu'ils- , leur portent des aiguilles, des hame- çons , des coûteaus y des ferpes , des coignies , & tous les antres ferre- tnens qui leur font propres^&'dont ils font vne fi grande eftime qu'ils les a- chetent au prix de leurs propres ha- bits y & de tout ce qu'ils ont de plus* precieus ; mais ils font fi grands en-: Remis de toute noimauté , en ce qui concerne leurs vefteoiens , Se leu£ nourriture , qu'il fer oit- bien difficile* de leur faire recevoir aucun change- ment , ni en l'vn ni enl*autre.Encore qu'ils foyent l'vne des plus pauvres* &des plus Barbares Nations que le Soleil éclaire , ils fe croyent tres-heu- reus , & les mieus partagez du mon- de : Et ils ont fi bonne opinion de leur manière de vivre , que les civili- sez de tous les autres Peuples,, pafient auprès d'eux pour des a&iés mal-fean- tes>fauvages, Se ridicules au poffible0 Cette truite eftime laquelle ils ont eonceuë de leur condition , ne contri- bue pas peu à cette fati fanion , Se à ce contentement d'efprit qu'on lie fuis i m m I 1 ! I r4i%, Hi stoire Natvre&le fur leur vifage *, Ioint , qu'il ne s'en- tretiennent pas dans la vanité de plu- fieurs deffeins > qui pourroient trou- bler leur tranquillité : Ils ne fcavent ce que c'eft de tous ces foucis ron- geans s & de ces chagrins inpottuns, dont le defir déréglé des richefles tourmente la plupart des autres hom- mes.La commodité des beaus 6c fom- ptueus bâtimens > la gloire du fiecle, les délices des feftins,ia connoiifance des belles chofes38c tout ce que nous eftimons la douceur & le repos de la vie, n'ayant point encore pénétré iuf-. ques à eus ^ils ne font auffi travaillez d'aucune penfée de les poiïeder > qui pourroit interrompre le dous repos dont ils joiiifTent : mais tous leurs defleins font terminez à acquérir fans beaucoup d'empreflement y les chofes qui font precifément neceilàires pour leur vêtement , & pour leur nourri- ture. Leurs exercices les plus ordinaires, font la pefche & la chalFe : de encore qu'ils n'ayent point d'armes à feu 3 ni de filets ,, ringenieiue*neceflTué> leur a fuggeié dbs Iles Antilibs^ 429 fuggeré des autres induftries toutes particulières , pour y pouvoir reuffir. Us mangent toutes les viandes dont ils fe nourriffent , fans les faire cuire, & fans autre fauce>que celle que leur franc appétit leur fournit. Ils fe rienr de ceus qui font cuire le poilïbn ou la venaifon , car ils tiennent , que le feu confomme leur faveur naturelle , &c coût ce qui les rend plus agréables à leur goût* ; Encore qu'ils n ayent point belom de feu, pour cuire leurs viandes,ils en louent néanmoins grandement Tvfa- ge3 & leurs cavernes n'en font jamais dépourvencs durât l'Hy ver; tant pour éclairer & adoucir par fa lumière > la noirceur &C l'effroy de cette longue Buit, qui règne en leur Contrée 5 que pour tempérer par fon aimable cha- leur , la froidure qui les tient affiegez de toutes parts. Mais quand ils pren* nent leur repos , ou qu ils font con- trains de fortir de leurs grottes > ils fe muniflent d'vne certaine fourrureja- quelle par vu excellent trait de la Di- vine i : ! I i 8 l ! I, ¥ 4j0 HîST%*i*£ NATVREltS vine Providence, a la vertu de les ga- rantir parfaitement , contre toutes les iniures du froid , quand ils feroyent couchez au milieu des négés. Les habits des hommes confident en vneChemife,vn haut de chauffe, ^ne Cafaque& des bottines. LaGhe- mife ne bat que jufques au deflous des reins. Elle a vnCapuchon qui couvre la telle & le coLElte eft faite de veflies de gros Poiflons , qui font couppées"' par bandes d'vne égale largeur^ fort proprement coufuës par enfemble. Elle n'a point d'ouverture à la pou trine comme les nôtres; mais afin qu elle ne fe déchire en la vêtant , les bouts des manches , la tétiere , & le déffbus, font bordez d'vn cuir noix fort délie : félon la figure laquelle nous avons fait mettre en ce lieu. Leurs autres Habits,& même leurs bottines 3 font auffi de pièces rappor- tées comme leurs chemifes : mais ils font d'vne matière beaucoup plus for- te, aflavoir de peaus de Cerf 3 ou de Chien de mer , parfaitement bien préparées , 5ç garnies de leur poil. Celuy v^». ^ I ! I i & I % î 4J2, Histoire Natvreils Celuy du Sauvage duquel nous avons fait mettre icy le portrait tiré au naif fur l'original , étoit de peau de deus couleurs , les bandes étoyent coup- pées d'vne même largeur , 8c difpo- fées en vn fi bel ordre , qu'vne ban- de blanche , étoit coufuë entre deus brunes, par vne agréable aflèmblage. Le poil qui paroiilbit en dehors,étoit auffi poly , 8c auffi dous que du ve- lours , & il étoit fi bien couché , ôc les "diverfes pièces fe rapportoient fi parfaitement les vnes aus autres^qu'on. eut jugé au dehors , que tout l'habit avoit efté taillé d'vne feule peau. Pour ce qui concerne maintenant la forme de la cafaque de de tout l'ornement, extérieur du Sauvage qui en étoit pa- ré : le Graveur les a reprefentez fi naifvément en cette taille douce, que ce feroit vn travail inutile , daen vouloir faire vne plus ample descri- ption. Ces Sauvages qui habitent ce dé- troit,ne fortent jamais en campagne, fans avoir fur l'épaule vn carquois remply lx^a* ■"»** P£s Iles Antil£E3 455 Tarn, h T ïcmply i 434 Histoire Natvrelle remply de flèches , 6c Tare ou la lan- ce en la main. Quant aus flèches ils en ont de plufieurs fortes. Les vnes font propres pour tuer les Lièvres, les Renards , les Oifeaus , & toute forte de menu Gibier:& les autres ne font deftinées , que pour abbatre les Cerfs s les Helans , les Ours , & les autres greffes bettes. Celles-là n'ont qu'environ deus ou trois pieds de longueur 3 &c au lieu de fer , elles ont la pointe munye d'vn os délié y tren- ehant & fort aigu , qui al'vn des èô- tez herifle de trois ou quatre cro- chets y qui font qu'on ne les peut ar- racher du lieu qu elles ont percé/ans élargir la playe. Et celles-cy, qui ont du moins quatre ou cinq pieds de lon- gueur y font armées par le bout d'vn os pointo>qui a auffi des crochetSjqui font faits comme les dens d'vne Scie. Ils lancent ces dernières avec la main; mais pour leur donner plus de force, & faire qu'elles attaignent de plus loin, ils attachent à leur bras droit vn bois long d'vn pied ôc demy , qui a dVn coté vne altez profonds coulifle, dans y«* bes Iles Awtixî.es. 45S flans laquelle ils font paiTer le gro$ Bout de cette Iaveiine , laquelle étant dardée, reçoit par ce moyen vne plus forte impreffion,& fait vn effet beau^ coup plus violent. Ils portent aufli quelquefois à la main , vne efpece de lance , qui eft d'vn bois fort & pefant , lequel eft garny par le petit bout, dVn os rond, dont la pointe a efté aiguifée fur vne pierre , ou bien ils les muniifent de ces cornes , ou dens de Poiflons que nous avons décrites. Ces lances ont fét ou huit pieds d'hauteur , & elles font enrichies par le gros bout , de deus ailerons de bois , ou de coftes de Baleine,qui leur donnent vn peu plu$ de grâce , qu'elles n'auroyent fans cet ornement. Outre plufieurs fortes d'hameçons* dont ils fe fervent pour prendre les menus Poilfons qui fréquentent leurs Coftes , ils ont encore dîverfes efpe- ces de Iavelots , léquels ils fçavent lancer avec vne dextérité nonpareil- le , fur les gros & monftrueus Poi fi- ions qu'ils vont chercher en pleine T i mer» ! 1 I I I E I 1! 436 Histoire Natvrelle mer. Et afin que cens qu'ils onc blef- fez avec cette force de dards , ne fe puifTent couler au fonds de l'eau ôc fruftrer leur attente > ils lient au gros bout v ne courroye de cuir de Cerf, longue de vint cinq ou trente brafles, & ils attachent au bout de cette cour- roye 3 ou de cette ligne de cuir 3 vne veffieennee> laquelle retournant tou- jours au déffu.s de l'eau 3 leur marque l'endroit où eft le Poiffon > lequel ils attirent à eus 3 ou bien ils le con- duifent aiféme-nt à terre , après qu'il s'eft bien débatu & qu'il a epuifé fes forées. Les jeunes femmesportent vn ha- bit > qui n'eft pas de beaucoup diffé- rent de celuy des hommes : mais les vieilles 5 fe couvrent le plus Couvent* des dépouilles de certains gros Oi- feaus y qui ont lé-plumage blanc & îioir,&: qui font fort communs en cet- te terre. Elles ont l'adrefiede les écor- cher fi proprement* que ia~plume de- meure attachée à la peau. Ces habits ne leur battent que jufqu'au gras de la jambe, Elles font cemtesd'vne cour- roye DES ItES ÂNT1LÎ.ÊS: 4j7 loye de cuir.à laquelle au lieu de clefs elles attachent plusieurs offelet.s i qui font pointus comme des poin^on^3& de même longueur que de»s aiguilles de lefte. Elles ne portent ni -bracelets, ni colliers , ni pendans d'oreilles : mais pour tout ornement , elles fe font vue taillade en chaque joue, & elles rem- pli flent la cicatrice., d'vne certaine couleur noire,qui félon leur opinion* ks fait parokre beaucoup plus agréa- 'es. Pendant que les hommes fe diver- ti (Tent à la chalfe , ou à la pefche , el- les s'occupent à coudre des habits, & à faire des tentes, des'«paniers, & tous les petis meubles , qui font neceflai- res au ménage. Elbs prennent auffi vn grand foin des petis Enfans, 8c fi elles font obligées de changer de demeure , ou de fuivre leurs Maris eu quelque voyage , elles les portent ou les conduifent par tout où elles vont, de pour les defennuyer par le chemin, &: les appaifer lors qu'Us crient , el- les ont de petis Tambours , qui ionc couverts de veffies de Poiffons 3 fur T ) lequeis 1 I ! i: éi 1 4^8 Histoire Natvrellb îéquels elles savent faire de fi bons accords > que ceus des Tambours de Baique > ne font pas plus dous y ni plus agréables. Elles les fonnent auf- ii > peur donner l'épouvante , & faire prendre la fuite aus Ours , & aus au- tres Belles farrouches y qui viennent fouvent roder prés des cavernes , ow ces Sauvages fe retirent avec leurs fa- milles durant THyver , ou à l'éntour des tentes fous léquelles ils logent pendant l'Eté. Nous avons fait met- tre en ce lieu, le portrait d'vne de ces fermes vetuë de plumes 5 duquel on pourra inférer la grâce que lès autres peuvent avoir. Encore que ces pauvres Barbares n'ayent pas beaucoup de police 3 ils ont neantmoins entre-eux des Roy- telets ôc des Capitaines qui les gou- vernent^ qui prefident à toutes leurs : aflemblées. Ils élèvent à ces dignitez ceus qui font les mieus faits de corps^ ks meilleurs chaiîeurs , & les plus vaillans.Ils font couverts de plus bel- les peaus y & de plus precieufes four- rures que leurs fujet$j& pour marque de. r 440 Histoire Natvreili JFfM grandeur ■ ils portent vnc en- fy ieîgne5en forme.de roze de -broderie, /V laquelle eft confie au devant de leur > cafaque,& lors qu'ils marcherais font jN toujours efeortez de pluficurs jeunes £ hommes, qui font armez d'arcs & de Sj lèches ; & qui exécutent fidèlement y t0lls leurs com.manderaens. 7* Ils n*onc point 1 mduftrie de bâtir M .des maifonsi mais durant l'Eté /ils demeurent à la campagne fous des ten- tes-de cuir , léquelies ils portent avec eus, pour les drefier en tous les en- droits où ils trouvent bon de camper: 8c pendant l'Hyver ils habitent dans f* des cavernes , qui font faites naturel- \ lement dans les montagnes, ou qu'ils £ y ont creufées par artifice. V ^s ne fe trient , ni ne recueillent au- > cuns grains de la terre , pour l'entre- ^ ûen de leur vie. Ils n'ont point auflî > \ d'arbres.oude plantes qui leur portent 'v: des fruits, qui foyent bons à manger,. iî> hormis quelque peu de fraifes, & dV- ^ ne efpece de Framboifes : mais ils ne iubïiftent 5 comme nous l'avons déjà infinuc > que de leur chaffe & de leur peiche* 1 I % i 'û'es îles Antilles. 441 ' pefche. L'eau toute pure eft leur boif- ion ordinaire >■ de pour leur plus deli- cieufe regale > ils boivent le fang des chiens de mer, &: celuy des Cerfs , & des autres animausde terre qu'ils ont abbaui5,Ququïls ont fait tomber dans les pièges,-. qu'Us leur Içavent dreflèr» avec vn merveilleux artifice. L'H-yver pétant fi long Se lîrigou- rems en cette contrée où ils habitentail eft impoiîible qu'ils ne fonftrent beau- coup de dizette dorât cette trifte con- ftitution de rannée,notamniét pendât cette affteufe nuit qui les enveloppe deus mois entiers ;. mais outre qu'au befoin ils fupportentaifément la faim, ils ont tant de prevoyance3qruls font fécher en Efté le furplus de leur pefchq dC de leur çhaile y &z le mettent en-re- ferve > avec toute la graille y8c le fuif, qu'ils ont pu ramaffer, pour la.provi- fion de cette fâcheufe ôc ennuyeufe faifon. On dit même , qu'ils ion-t fi a- droits à Lire la chaffe à la faveur, de la jLune y que durant les plus epaiiles té- nèbres qui les couvrent, ils font rare- ment dégourveus de viandes fraiches* " t 5 : lis r ! ! i î 442 Histoire NATVRsiiE Ils n'ont pas la curioficé de voir d'autre pais que celuy de leur naiffan- ce y &c s'il arrive que quelque rude temp.ftcou quelque autre rencontre, les ait pouffez en quelque terre étran- gère , ils foûpirent perpétuellement après leur chère patrie , &C ils ne fe donnent point de repos > iufques à ce* qu'on les y ait rétablis : que fi l'on re» fufe5ou qu'on diffère trop à leur accor- der cette grâce, ils eiïàyent de s'y ren- dreau péril de leur vie y à la faveur de leurs petis vaifleaus , dans léquels ils s'expofent à tous les périls de la Mer, fans autre guide que celle des Etoiles, dont ils otn affez de connoiffance, pour régler leur navigation fur leur cours. Le langage dont il fe fervent 3 n'a rien de commun avec celuy de tous ks autres peuples de la terre. Nous en avons vn petit Vocabulaire : mais de peur de groffir vn peu trop cette digreffion , nous le referve- rons parmy nos mémoires , iufques à ce quVn fécond voyage qu'on projette pour ce Détroit, nous en ait: ms_^M des Iles Antilles. 443 air donne de plus claires lumiè- res. On n'a pas encore pu bien remar- quer quelle forte de religiôeft en vfa- ge parmy ces pauvres Barbares : mais par ce qu'ils regardent fouvent le So- leil^ qu'ils le montrent avec admira- tion , en élevant leurs mains en haut* on a inféré de- là , qu'ils le tenoient pour leur Dieu. Le Navire qui nous a four n y cet* te Relation , retourna de ce Détroit de Davis chargé de plufieurs bonnes &iarcha°ndifes , déquelles nous met- trons icy la Lifte, pour montrer que le froid qui règne en cette contrée, n'eft pas fi rigoureus , qu'il y ait gelé toute forte de commerce. 1 . Neuf cens peaus de Chiens de mer, longues pour la plupart de fet à huit pieds, marquetées , & ondées de noir , de rous , de jaune, de tanné, ÔC de plufieurs autres couleurs , qui relè- vement leur prix , par defius celles qu'on voit communément en Hol- lande. VS. Plufieurs riches peaus de Cerfs* > % & dJHr I 1 f 1 ! 444 Histoire Nâtvrhlle d'Helans , d'Ours , de Renards , ck Lietres, ôc des Lapins,- dont la plus grand part étoit parfaitemét blanche. 3. Vn grand nombre de precieutes fourrures , de diverfes Belles à quatre pieds , qui loin toutes, particulières à cette région , & qui n'ont encore point' de nom parmy nous. 4. Plulîeurs Pacquets de coftes de Baleine , d'vne longueur extraordi- naire» 5.. Des Habits complets des Habi- jtan.s du pais dont les vns étaient de peaus,,& les autres de dépouilles- d'oi- teaus } 3c de la figure que nous les a- y on s r e p r efen rez, 6", Plufiaus.de leurs Cheraife., fai- tes de veilles de Poifons,. fort propre- ment coufuës,de leurs bonets, gants,, & bottines , de- leurs carquois^fléches-, arcs . , .6c autres arme dont ils fe fer- vent ,. comme auffi plufi-eu-rs de leurs tentes, de leurs tacs , de leurs paniers & autres petis tneubles,dont ils vfent en leur ménage* 7. Vn grand nombre de ces petis ^aiifeausde mer , qui font faits pour portes BES ÎLES ÂN'TIt'LES. 4$f. parter vn feul homme.Vn grand Bac- teau long de quarante cinq pieds, qui1 pouvoit porter comm ode nient cin- quante perfonnes. 8. Mais ce qui cto;t de plus rare & de plus precieus yc'étoitvne quantité bien confiderable de ces dens ,•• on cornes de ces 'PoiJÏbns qu'on appelle Licornes de mer , qui (ont eftimées les plus grande;» les plus beiles3& Ses mieus proportionnées de toutes cel- les /.qu'on a voie veu'ës iufques à prê- tent. On en a envoyé quelques vires à Paris , & en d'autres endroits dei'Eu- ropeyqui y ont efté bien receuës: mais il y a grande apparence qu'elles feront encore plus prsfées 3 quand on aura la connoiffance des admirables vertus qu'elles ont en la Médecine». Car bien que leur beauté 3 3c leur ra- reté y leur doivent faire tenir le pre- mier rang entre les plus precieufes ri- ehefles des plus curieus cabinets: plu* fieurs célèbres Médecins & Apoticar- res de Dannemark-, &' d'Allemaig- ne y qui en ont fait les eiïàys uk dive&fes ! I 446 Histoire NÀTVREii^r diverfes rencontres, témoignent con* ftamment , qu'elles chaflent le venin*, & qu'elles ont toutes les mêmes pro- prietczi .qu'on attribue communeméc a la Corne de la Licorne de-terre. En voila ailés > & peut eftre que trop au^ goût de quelques vns5 pour vnc fim- pledigrefllon, *m #»«e> mmm mm® mfcmiï $m*- CHAPITRE XIX. Des Briffons couverts de crantes dm restau lien de peau & dï écailles» de plufieurs rares Caquillagesi ér de quelques autres belles pro- duBions de la Mer, qui fe trou** vent am Cojies des v Antilles '. A Moins* que d'avoir quelque par- ticipation de cette celefte Sapi- ence * qui fut autrefois adf eiîée à Sa- lômon , pour parler non feulement" des Arbres dépuis le Cèdre qui eftais &&an5 iufques à THiflbpe qui fort de- là,* D~Er Iles Antilles. 447 îà paroi: mais encore des Beftes , des Oifeaus , des Reptiles > & des Poif- fons : Il eft impoffible de fonder les- profons fecretsdes eaus,pour y conter toutes les excellentes créatures, qui fe jeiient dans leur fein > & remar- quer toutes les vertus, ■& les proprie- tez occultesidont elles font ennoblies» > Car cet Elément eft doué d'vne fe merveilleufe fécondité , qu il ne pro- duit pas feulement en toute abondan- ce des Poiffons de différentes efpc- qui fervent à la nourriture de ces l'homme, M qui font pour la plupart- dVne groiîeur demefuréeA d'vne fi* gure monftrueufe , comme nous ve- nons de- le monftrer dâsles Chapitres > precedens:mais encore^vne (1 grande multitude de precieus Coquillages ÔC d'autres Raierez, qu'il faut confeffer^ que la Divine Sagefle qui eft diverfe en toutes fortes,a tiré toutes ces riches beautez de fes inepuifables trefors^ pour faire paroîtrê la gloire de fa puiffance ,. au milieu des flots de la Mér:& pour nous convier doucement à ladrairation.de fes bontez,& de fca* adorable- : I I I 1 I § 4§ Histoire Natvréleb adorable Providence \ laquelle sV baiife iufque dans ia profondeur des abifmes , pour les peupler à'vn nom- bre de bonnes créatures,, qui ne fe vo- yent point ailleurs y & d'vme infinité d'autres,, qui portent les caradteres,&: les images des corps les plus confide- rables qui ornent les cieus > ou qui volent parmy les aiïs, ou qui embe- liflent la terre : d'où vient qu'on y trouve , comme nous le verrons en ce Chapitre 3 des Etoiles 3 des Cornets, des Trompettes ,. des Porcelaines* des Arbres ,des Pommes , des Châ- taignes^ Se toutes les plus raviffante* curiofitez , qui font prifées parmy les hommes.Or pour commencer par les Poifïbns, qui (ont couverts de croûtes dures & folides au heu d'écaillés > où de p-;au. Il y en a plofieurs efpeces en la Mer rSc aus Rivières des Antilles, On fait particulièrement état eles Homars y des Araignées , & des Can± ART; ©es Iles- Antilles-. 44$ Article h Des Homars. LEs Homars font vne cfpece dJ£« creviffes de même figure que cel- les de nos Rivières. Mais elles font fi greffes , qu'il n'en faut qu'vne pour remplir vn grand plat. Elles ont la chair blanche Se favour enfermais vn peu dure à digérer. Les Infulaires les- prennent pendant la nuit fur le fable*, ou fur les baffes de la Mer > Se à Paide d'vn flambeau ou de la clarté de la Lune 3 ils les enfilent avec vne petits fourche de fer. Article I L De l'Araignée de Mer. L'Araignée de Mer eft tenue pac quelques vnsx pour vne efpece de Cancres. &[\t eft couverte de de as fort dures écailles >- defquelles celle de del- fus eft relevée, Se celle de de flou s eft plus vnie , Se dentelée de pointes ru- des. Elle a plufieurs ïambes > .Se vne queue forte 5 Se longue quelquefois' d'environ f I I I 1 i i 7** 450 Histoire Natv&eilb d'environ vn pied. Quelques Sauvager- ies recherchent foigneufement , pouf en armer leurs ftéches.Quand ce Poif- fon efls feché au Soleil -, fon écaille devient luifante& comme diafane5en-< core qu'elle foit naturellement de €©uleur cendrée. A R ? I C n t III. Des Cancres. LEs Cancres ordinaires des Ântit les font delà même forme que cens qu'on pefcheés Goftes de France. Il y en a de différente grofïèur , mais ceus qui font les plus rares , font ceus qui vivent de prdye. Ils font affez communs en h plupart des Iles , fur tout aus Vierges. Ils fe tienent fous les troncs des arbres du rivage de la mer : & à l'exemple de ces Grenouil- les qu'on appelle Pefcheufes, ils épient de leur fort les Huîtres & les Mou- les 3 pour en faire curée, & ils s'y pre- nent par cette rufe merveilleufe.C'eft qu'ils ont reconnu que leurs mordans & leurs défenfes n'ont pas alfez de force DESÏEBS ÀOTlIEIB*". 4f$ force pour rompre les coquillages qui couvrent ces Poiffons delicats.De for- te quayans aufli remarqué qu'ils ou*- vrent plufieurs fois le jour leurs écaii> les , pour prendre le frais , ils en é~ pienc foigéufément le tsms , & s'é- tans garnis dVn petit caillou rond** qu ils ont choifi dans le gravier, ils le -tiennent preft en Tvne de leurs tenail- les , & s'aprochans de l'Huître , on de la Moule , le laiffent tomber avec , tant d'adreiïe dans fa coquille en- tr'ouverte^que ne fe pouvant plus re- fermer , le Poiflbn demeure la proye de ces fins chalîeurs. Quant aus Coquilles que Ton trou-* ve en ces Iles , dans les ances où la mer les poufle , elles font en grand nombre , & de plufieurs fortes.Voicy les plus recherchées ■■&. les plus confi- derables. A r t i cl e IV. Du Burgau. LT^Burgm, qui a }a figure d'vn EU maçon, étant dénué de la premiè- re croûte qui le reveft en dehors^, prefente: r i I S I 1 I I P" 451 Histoire Natvrellé prefcnte me Coquille argentée 5 & entrelacée de taches d'vn noir luifanr, d'vn vertgay, &- en matière de -Coquilu lage. Article Du Cafque. Y. LE Cafque y qui eft de différente grolfeur , à proportion des telles tant de Poillons qui en font revêtus* eft ainfi nommé à caufe de (a figure. Il eft doublé par dedans & fur les bords* qui font épais * plats * & dentelez, d'y n latin incarnat* extrêmement lui- fant. Et par le dehors * il eft faiïonné d'me des Iles Antilles. 455 ,3'vne agréable ruftique,relevée de plu. fleurs petites bofles , qui font entrela- cées de mille cornpartirnens , fur lé- quels on voit ondoyer vn pannache* de diverfes rares couleurs. Article VI. Du Larnbis. LE Larnbis a peut - eftre reçeu ce nom , à caufe que le Poiflbn qui le fait mouvoir^ la figure d'vnc gref- fe langue, qui lèche cette humeur gluante , qui s'atache fur les rochers que la mer baigne de fes flots. C'en: vn des plus gros Coquillages qui fe voient. Il eit retrourTé parTvndefes bords , comme pour faire mieus pa- roître, la belle couleur pourprine qui l'enrichit au dedas.Mais il faut avouer que fa malle étant allez groffiere * 6c heruTée par deilus de plufieurs boifes rudes &c pointues 5 luy fermsroit la por>te des cabinets , Ci l'artifice en luy enlevant fa première robe , ne dé- couvroit la bigarrure & la politeiïè de l'écaillé marquetée * qu'il por- le fous cet habit de campagne. Le Poiflon. i l I I I I 454 Histoire Natvrexi/e. j?oi(Toa , qui loge fous les caver- nes de cette petite roche mouvante* eft fi gros,qu*il en faut peu pour rem- plir vn plat. Il peut être admis fur les tables des délicats > pourveu qu'il foit bien cuit .> Se encore mieus poynré, pour corriger fon indigeftion.Et pour profiter de fa dépouille, étant calci- née & meflée avec du fable de riviè- re, on en compofe vn ciment, qui re- iîfte à la pluie & à toutes les iniures du tems. Ce lambisauffi, s'entonnant comme vn Cor de chafie , Se s'enten- dant de fort loin 3 quelques Habitans des Iles s'en fervenepour apeller leurs gens aus repas. Et les Indiens de l'A- mérique Septentrionale , l'ayans ré- duit en chaus, Se meflé avec vne cer- taine terre minérale, qu'ils tirent des montagnes ,en forment ces beaus pa- vez de leurs cabanes 3 dont nous par- lerons en fon lieu. Article VIL Des Porcelaines. LEs Porcelaines doivent être ran- gées entre les plus rares produ ûion^l X>BS ICES ANTIf.CE S. 4JI plions de l'Qcean : foie que Ton con- sidère cette agréable politeiTe,dont el- les font lilïees & au dehors ëc au de- dans ^ (oit que Ton faile réflexion fur tant de différentes & de vives cou- leurs ., dont elles font revêtues* Elles replient leur bord dentelé , ôc le rou- lent en dedans* &c bien qu elles {oient plus ou moins luftrées, elles font tou- tes d'vne même figure ovale., entre- bâillantes au milieu, & recoquillées par le bec.Mais il s'en trouve, qui font fort différentes en gr-ofleur & en cou- leur. Les plus ordinaires font d'vn jau- ne doré , niarqueté de petites taches blanches,, ou rouges, & Ton diroit de loin que cç font des marques de per- les,ou de grains de corat On en voit auffi de bleuâtres, d'écoilées, de grisa- itres.,deoryftalines,& de couleur d'A- ?gace,qui ont toutes vn mil fort attra- yant. Mais celles qui font les plus efti- mées des curieus, font de coraline in- carnate au dehors,& argentées au de- dans . ou bien elles font parées d'vn beau F 1 i 1 i 7=" - 45^> Histoire Natvrelle feeau bleu celefte au dedans , & d'vn riche porfire au dehors,rayéez de pe- tis filets dorez. On prife auffi avec raifon, celles. qui font par defïus cTvn. verc luifant comme émeraude, & em- perlées dans Pinterieur3au bord,ôc en leurs canelures.L'on met auffi dans ce même rang, celles qui font fur le dos dJvn noir luifant comme jayet , & quant au refte , é maillées d'vn bleu mourant , entrelacé de petites veines de pourpre. Enfin , il y en a qui font chamar- rées de tant de vives couleurs , qu'il femble que l'arc-en-ciel ait imprimé fur ces petites créatures, vn racourcy de fes plus ravifsâtes beautez:il y en a auffi vne infinité d'autres^qui font di- versifiées de tant de chifres Se de gro- tefques^qu'il eft à croire que la nature étoit en fa plus gaye humeur, quand el- le s'eft mife à produire ces merveilles. Mais le mal eft , que la mer qui les poffede comme fes plus precieus jo- yausy ne s'en deifaifit pas volontiers, & femble ne les donner qu'à contre coeur. Car fi les vens ne la mettoyent quelquefois ù^w- "T K&feaÉMsafeai&^^ ©es Iles Antilles. 457 quelquefois en colère » \&c qu'en fc> coiiant fes entrailles,ils ne foiiilloient jufques ua fonds de fes tréfors y po Bi- les enlever par force,elle jouïroit tou- te feule de ces richeiîes &c de ces beau- tez 5 fans nous en faire jamais de part. Les curieus pour en rehauffer le luftre y les placent félon leur rang, Se leur prix * dans de différentes cafletes doublées de velours vert, ou de quel- que autie riche étoffe.Et à l'imitation des Fieuriftes > qui qualifient leurs Tulipes 3t leurs Oeillets>des noms des Cefars & des plus illuftres Héros -, ils leur font porter les titres des Ernpe-* reurs&des Princes. Article VIII. Des Cornets de Mer. ON voit encore aus Antilles , de deus fortes de ces gros Coquilla- ges, que Ton appelle Cornets de Mer* qui font tournez par le bout en forme de vis. Les vns font blancs comme de i'yvoire , & ije cèdent en rien fom. I. V à I ï ! I l l II 7** 458 Histoire Nàtvreljle à fon luftre. Les autres fonc enrichis par dedans d'vn gris deperie,cxtremé- ment luifant -, de par dehors de plu- sieurs belles & vives couleurs > qui fe terminent quelquefois en écailles, ou fe répandent en forme d'ondes, qui fe pouifent & qui flottent les ynes fur les autres , depuis le bord de la large ou- verture de defliis, jufques à la pointe entortillée où elles meurent. Si l'on perce ces Cornets par le petit bout, on en fait vne efpéce d^inftrument de roufique, qui rend vn fon aigu & pef netrant , & qui jetant pouffé parles diverfes finuofités de ce Coquillage, fe fait entendre deloin,comme feroic celuy d'vn clairon. Mais il y a du fe- cret , à comparer le foufle qu'il faut pour les faire jouer* La Mer, auffi bien que les Archi- tectes , fe plait à produire des ouvra- ges de div.e.rfe ordonnance. Quelque- fois elle en fait à la rttftique, qui font tout nuds,& ont fort peu d'ornemens; Puis elle en fait de compofez par vn mélange des ordres > qui viennent au fecours hs vns des autres , avec tant de T ©es Iles Antilles. 4J9 âe mignardife & de delicatefle* qu'il n'y a rien de plus agréable à i'œil.Ce- ia fe remarque en vne infinité de Co- quilles , qui font diverfifiées de cent mille grotefques. On y peut remar- quer des laqs entrenoiiez^des efpéces de feuitages.,des faillies hors d'oeuvre* des culs de lampe > des pointes de dia- mant y des goûtes pendantes , des fufées , des chapiteaus > des moulures & vne in- finité d'autres fantaifies , & d'autres morefqaes 3 qui donnent fujet d'en- tretien & d'admiration aus curieus. Comme en effet , Ton ne fauroit ja- mais afles admirer par ces cchantil- ' Ions y la merveilleufe diverfité de tant de riches ouvrages, que les eausrefer- ¥ent dans leurs profons cabinets. Article IX. De la Nacre de Perle. LEs Coquilles ne donnent pas feu- lement vn diyertiflement agrea- ble.qui porte les hommes,par la con- V 1 fidcratio^ f I I 1 460 Histoire Natvreiie fideration (te ces pecis j, mais admira* blés ouvrages dé la nature , à bénir celuy qui en eft l'Auteur. Mais après avoir contenté les yeux > elles four- niffent auffi dequoy (atisfaire le goût, êc dequoy accroître les threfors. Car les Huîtres &c les Moules fervent au-s délices des tables : & ï Ecaille Na- crée on la Nacre de Perle , eft groffe de la Perle, qui enrichit les couron- nes des Rois. Il eft vray que ces Per- les ne fe trouvent qu'en femence au.s Antilles3& que c'eit î'Ifle de la Mar*- guérite, .6c la côte Méridionale de l'A- mérique > qui ont le bonheur de les recueillir entièrement formées. Mais fi les Antilles ne voyént point ce pre- cieus germe fe durcir en greffes Per- les , ces riches Coquilles , ne les laif- fent pas pourtant fans quelque avan- tage. Car elles leur offrent pour nour- riture le corps qu'elles enferment, & les deus parties de leur écaille argen- tée fourniffent chacune vne cuëlllier, qui peut paraître avec éclat fur la table. îl eft raal-aifé dédire fi la rofée qui tombe Hsafesgsaaggp^g^ des Îles Antilles. 4^1 tombe aus Antilles, n'tft pas allez fé- conde pour faite que les Mères Per- les, y produifent leurs fruits en perfe- ction : Ou fi après avoir receu cette fçmencc des Cieus , elles avortent, 8C n'ont pas allez de force naturelle pour la reteniiv Mais fans rechercher de quelle part vient le défaut ,- il eft af- furé qu'elles ont vne auffi forte incli- nation à fe délivrer de l'opprobre de la ftenlité,que celles qu on pcfch-e ans côtes de la Marguerite.- Car fi on fe Veut donner la curiofité d'épier leurs fecretes amours /de deflus les rochers au pieds defquels elles fe plaifent >• on apercevra qu'au lever de l'Aurore,- ei* les s'élancent plufieurs fois fur la fur- face de l'eau, comme pour faire hom- mage au Soleil levant : Puis tout à coup , on verra qu'elles ouvrent leur fein, & qu'elles s'épanoiiyirent fur ce lit mollet , pour attendre les premiers rayons de ce bel Aftre. Que fi elles font aflez heûreufes , pour recevoir quelques goûtes de la rofée, qu'il fait • diftiler des Cieus à fon lever, elles re- ferment promtément leurs écailles na- V 5 crées. ■£Së2& r i Si ! I 462. Histoire Natvreiee crées 5 de peur que quelque gourer d'eau faiée x ne vienne à corrompre ce germe celefte. Et puis elles (e re- plongent alégrementau fonds de leur couche. Vn Auteur nommé Fragofus, efti- me que les Perles s'engendrent dans* la chair de THuitre y comme la pier- re dans quelques animaus ,-d'vne hu- meur cralîe & vifqueufe , qui refte de l'aliment. Quelques Dodes Méde- cins, qui font auffi dans le même fen-» riment , appuyent cette opinion > fur ce que lolef à Cofta y Ecrivain fort croiable pofe pour con liant, aiTavoir* que les Efclaves qui pefchent les Per* les,plongent par fois jufques à douze brafTes dans la mer, pour chercher les Huitres , qui d'ordinaire font atta- chées aus rochers -.qu'ils les arrachent de-là, ôc reviennent fur l'eau en étant chargez : d'où ils concluent que du moins on ne peut pas dire > que ces Huitres- là, qui foiit attachées aus ro- chers3hument la fofée,& que par là fe faiîe la génération des Perles. Mais fans entrer en conteftatioti avec fe^L- DÉS IlBS ÂAtUtES. 45| Ai. ec ces Meilleurs, & fans rejeter ab- foloment leur opinion , laquelle a tes fondemens. On peut dire que le ré- cit très - véritable d'Acoftà touchant la pefehe des Perles , ne fait du tout! lien > contre le fentiment communé- ment reçeu de leur generationïCar il fe peut faire,que les meres^Perles qui ont conçeu de la rofée 3 fe fenKànf chargées de ceptecieus fruit> n'ayent plus d'inclination de fe faire voir fus la futface des eaus ; &c qu étant con- tentes du trefor quelles poffedent.el- îes s'attachent pour lors fixement aus lochers , d'où puis après , elles fonts arrachées avec violence. Article X. Diplupeurs autres fortes de Coquillages CEus qui au milieu des Villes les plus frequentéesjveuient contre- faire des deferts > des rochers , & des folitudes , ou qui dans les plaines de leurs jardins^uient élever des mon- tagnes dans lequellcs ils creufent des grottes y qu'ils encroûtent de toutes * V 4 les r i I î I 464 HlSTOlRE NATVRELIE: les plus curieufes dépouilles de h ïncu , & de la terre , trouveroyent et* la plupart de ces Iles y dequoy con~ tenter leur? inclination. Mais il fe- roit à craindre* que l'abondance & la diverficé.mettant en peine leur choiz,. me leur en causât du mépris : Car pour parler de quelques vnes , on y voit vue multitude innombrable de: Trowpes de mer >, d'Efcargots 3 ôc de petis Pignols-y argentins , étoilez/an- guins y verdâtres > rayez d'incarnat, mouehetez de mille fortes de couleurs* qui les font éclater parmy le fable* - comme autant de pierres precieutes. Le So\eil rehauffe merveilleufement leur lu%e. Et lors qu'après quelque rude tempefte , la mer a enrichy la Ûïrface de ces rivages* de tous ces pe- tis brillans *, l'œil en demeure telle- ment ébloiiy, que l'on eft obligé d'a- vouer 3 que la nature fait reluire avec majefté fa puifTance * Se montre ce qu'elle fait faire , en revêtant de tant de riches ornemens 5 & de tant de- belles lumieres5ces menues créatures. Nos Infuîaires ramalfent quelque- fois. éfcu. -/i>.^. d-es Iles Antilles. A$% fois par divmiflementcespetis jouets de la mer , & en ayant gercé le bout, ils les enfilent , pour en faire des bra- celets & des cordons : Mais la plupart des Indiens de l'Amérique Septen- trionale.les ont en vne bien plus hau- te eftime. Car ils s'en fervent pour leur trafic & pour leur menu com- merce , comme nous faifo.ns parmy nous, de l'or & de l'argent monnoyé; & ceux là , qui en ont le plus grand nombre , font eftimez les plus riches. Les Coquilles qui fervent à cette vla- ge , font de médiocre grondeur, d'vne folidité & d'vh luftre extraordinaire. Et pour eftre de mife en certains en- droits ,. elles doivent avoir été mo- quées par des Officiers deftinez à ce- la , qui y donnent le prix .& le cours, en y gravant de^certains petis cara- I j 1 I ! 466 Histoire Natvrelie Article XL D'vn Coquillage couvert de Notes de Jldujique* IL y a vn Coquillage fort considé- rable , que Monfieur du Montel croie que Ton peut trouver en quel- cunedes Antilles, bien qu'il n'en ait veu qu'à Coraço. Ileft d'vne figure vn peu diffreente des Porcelaine ,c'eft à dire vn peu plus ramafle. Ort le nomme Mujîcal , par ce qu'il porte fur le dos , des lignes noirâtres plei- nes de notes, qui ont vne efpecc de clé pour les mettre en chant, de forte que Ton dirait qu'il ne manque que la lettre, à cette tablature naturelle.Ce curieus Gentil- homme raporte, qu'il en a veu qui avoient^cinq lignes, vne clé & des notes , qui formoient vn a- cord parfait. Quelcun y avoit ajouté la lettre, que la Nature a voit oubliée^ & la faifoit chanter en forme de trio, dont l'air étoit fort agréable. Les beaus Efprits pourroient faire làdellus mille belles coniiderations. Ils m^sss^ma^mrM^ùs^mMsÊS^i des IiEs Antilles. 4^7 Ils diroiententr autres chofes, que fi felô l'opinion de Pythagore, les Gîeus ont leur harmonie , dont les dous ac- cords ne peuuent être entendus à caufe du bruit qu'on fait fur la terre, que fi les airs retéciiTent de la mélodie cTvne infinité d'oifeaus , qui y tienent leur partie, & que fi les hommes ont in- venté vneMufique à- leur mode , qui charme les cœurs par les oreilies:auffi k Mer, qui n eft pas toufiours agitée, a dans Ion empire des Muficiens^qui chantent d'vne faflbn qui leur eft particulière , les louanges du Souve* rain. Les Poètes adiouteroient , que ces Tablatures naturelles , font celles que les Sy renés avoient en mains dans kurs plus melodieus concerts : &€ qu'étant aperçues de quelque œil qui vint troubler leur paffetems , elles les iaifterent tomber dans les eaus,qni dé- puis les ont toufiours foigneufement eonfervées. Mais laiffant ces conce- ptions ■>. & leurs fernblabies , à ceux h qui elles apartienent, fuivonsle fil de îioftre Biftoire. v 6 àm& I I I 1 I S % t 1 ^ittfrthï r-i 468 Htstqîre Natvrïl'ie- Article X II. Des Pierres a%5 yeux. "T^Ncoreqaoa trouve de ces Pier- JQres bien avant en la terre * auffî bien qu'au bord de la nier : néant- moins puifque la plus commune opi- nion les tient pour vire production des eaus^nous leur donnerons place en ce lieu. On en voit qui font auffi larges qu'vn lyardj mais les plus petites tout les plus eftimées. A les coniiderer âHï? Soleîl3 on croiroit que ce ieroiede ces perles qu'on nomme Baroques 3 qui auroyent efté coupées en deus^tant el- les font claires , tranfparentes, 5c po- lies. Il y en a quelques vues , qui ont de petites veines rouges ou violettes^, qui leur donnent vn fort agréable é- rclat y félonies divers afpe&s qu'on les regarde. Elles portent toutes îa figure d'vn Limaçon gravée lur le cofté qui eft plat. Quand on les met fous la paupière /elles- fe roulent au- tour de la/ prunelle de l'œil & Ion dit^ qu'elles ont la vertu de la forti- fier % de reclairck* & de faire fortir. £Buraau Muhcal ue de mer gromgtr t fa tombez. G*cft pcuiqucy on les a ap- pelles u;vn nom , qui moudre leur Histoire Natyrellî ^. promptémenc 1rs fe.u.^qu: v .e.oyent s propriété. Article XI IL Des Pommes de Mer, OX rencontre en tttedc S. Mar- tin , ues fommt de /^r.heriilécs - a aiguillons perçons, qui forteqt i v- ne peiu brune : mais eu::: qui les rouir eft rue:; a elles (jaktent foutes ces épines & touces ce^êefen- ces 3 qu: leor font désormais inutiles: ri & taillant au ffi cecce crcu:e cendrée fcj qni les en velopoit , elles forii m :u::e S bUnch*u: de Lurs : ^ qui o lotit entre-beées de tant de èwppar- ttraens & de ^r-;:e: f.::u:ù:n ,qnc laigoillè ia rlus aurait Broder tronvercic bien empei chéefiellc les ;* vouloit îmiter.H femblc eue ces rr.es, pourroient ~:eu- être : peâs Hen '":■■:; ce M:r : eu dès CArf- s. mignes de Me? : Car étant eu "rie el.es ^ le::: ec èe 1: figure , &C de lu ::. dVr. gèût HeriiTon ; qu: fc faQDC 0D I I 6 il "\ dis Iles Antilles. en boule & qui t'arme de tou. traits 3 pGur fe rendre imprenable à' fon ennemy. Ou b:en3clles font ferai- blablcs a ces greffes & rudes envclo- pes3 armées d'épin. : t U Châtaigne , quand elle cft tur l'Ar- bre. Article XIV. Des Etoiles de Mer. A Configurer de pies toutes \l retez qu. fe txov - on diroit que le C^l ne veuille rien poiîedcr de beau 3 qu'il nen imprime yne reilêmbLnce en U .ime en fon miroir. C'eft pourquoy , l'on y voit to Etoiles <\u\ ont cinq poin- tes3ou cinq rryons, tuant :ur le jau- ne. Tout ce be^u compote» n'a qu'vn bon pied de Diamètre : Son epa:lfcur cft àVfl ; -ure^ & relevé, par de ptt::es belles > qui luy donnent : Si ces Etoiles de mer cèdent en grandeur &c nmiérc a celles des Cieus 3 elles les fnrpafletiti en ce qu'elles font ani- :i, & en ce que ûur mouvement n'eft * 471 H^T^Î^É NATVRBLLf v n'eft point forcé y & qu'elles ne font £j point fixes ni attachées en vne place. Car Le Poiiïon % à qui ce_riche domi- r* cile étoile eft éçheu en partage y fe £ promené comme il veut dans l'azur f des eaus pondant le calme: Muis-aufli- $ tôt qu'il prévoit Quelque orage rde ^ crainte d être poulie, fur la terre > qui rÇ m eft pas digne de poHçdcr les Affres^, ^ il jette deus petites an^£$__de^ion .Jf eorps , avec léquelies il s'accroch© fi^ *> fermement contre les rochers , que *> toutes les agitations des ondes irritées, ^ ne l'en peuvent détacher^ Sa vie eft >' entretenue par le moyen de la nourri- fc< ture qu'il prend^par vne petite ouver- S ture 3 qui luv fert de bouche ,.-.& qui ^ eft iuftement a*a centre de fon corps. r( Les curieus tirent ces Etoiles de leur jjj Giel humide , èc après les avoir fe- Q chées au Soleil p ils en parent leursi ?* Cabinets»- A It T ï' c l t XVo D&r Arbres àe Mer* *> XJ&r jirvre* ' ae jvier.- (£ W Esbancs des Rochers^ qui font ttc jka .couverts d'eau^ne peuvent foufrir îms ÂhtiêlêS. 47/ îa fterilité>& nonobftant la falure qui les baigne inceflamment , ils s'éfor-- cent de produire parmy l'herbe qui les ïeveft à&s Arbres qui font inconti- nent glacez dVn Salpêtre 5 qui les rend blancs au poffiblt\ Quelques vns les prenent pour vne efpeee de Gorah On en arrache de tomes figures 3 & de fibien fafïonnés 3 que l*œil- ne fe peut kiïèrd'en eonfxderer le£ grotcf- cpes* ' Âitiiei s X V h- Des Pannachtsàe Mer. ÏL y a auffi des Panriackes, qui font par manière de dire comme les bor- dures de ce grand l'ardin liquide y qui n'a jamais befoin d'être àrrofé.- Elles font tiiïuës fort délicatement , en for- me dVn riche point- coupe. Et félon la qualité dès Rochers oui elles ont leur racine, elles font auffi de différen- tes couleurs. Il feroit feulement à de- firer ? qu'elles euîfent vn peu plus de foiidité , pour Touffrir le voyage des xlles yXïi ces quartiers, CHA££ r i ! i i II w tmn«r; - If 7 4 Histoire 7$AivMêiiw chapî trâs Îles Antilles-. 47 f CHAPITRE xx, Dît Ambre. \ de fon origine, é" de$ marques de celuy qui e(i bon* & fansmélage* Y 9Aœ$rë gris fe trouve en pins JLi grande abondâce aiis Coftes de la f loride3qu en aucune des autres Con- trées de l'Amérique. Ceft pourquoy les Efpagnols y ont dfeffé des fort5y pour fe conferver h terre* pour enri^ chir ce nouveau monde. Les Maldivois appellent TAmbre- gris Panœhambar > c'eft à dire Ambré d'or y à caipfe de far valeur. Les habi- tans de Fés 5c de Maroc de les Ethio* piens 5 le nomment du même nom que la Baleine. G-e qui fait croire probablement 5 qu'ils omeftimé qu?il venoit de la "Baleine. Il eft tres-eêt^ tain* que ni Hippocrace, ni DiofcorU de > ni Gâlten > ri ont jamais ouï par- ler de [' Ambre-gris , non plus que de la pierre de Béloar > du Gayac>du SaC- fafras* de la Saïfepareille* de la Gom- me-goutte ^de la Raibarbe y du Mc- ehoacan 3 & ci^né infinité d'autres chofes, L'ambre- gris eft donc vne drogue^ dont la connoillànce eft tous à fait moderne * êc dont on ne fais pas l'origine. Quelques vns fe font imaginez que ceç- BESÎLFS AtiTIlLES. 477 cet Ambre , inconnu à i'antiquité,eft vn excrément des Baleines. D'autres croyent qu'il vient dies Crocodiles, parce que leur chair eft parfumée. Quelques autres & perfuadent > que ce font des pièces d'Iles , & des frag- mens de rochers cachez en la mer,& emportez par la violence des flots, parce qu'il fe recueille quelquefois des pièces de cet Ambre * qui péferrt jufques à cent livres > & de la lon- gueur de foixante paumes 9 & qu'au rapport de Linfcot 3 en Tan mil cinq cens cinquante cinq , il en fut trouvé ¥n morceau vers le Cap Comonn,du poids de trente quintaus. Il y en a qui cftiment que c'eft vne efpéce d écu- me de mer > qui s'ama-lTe & s'epaiffit avec le tems , par l'agitation des eaus de la mer : & qui fe durcit par la cha- leur du Soleil. Mais c'eft plus vrai-femblable- ment vne forte de Bitume5qui s'engé- dre au fond de la mer : Et lors qu'elle vient à eftre agitée extraordinaire- ment par quelque furieufe tempefte, elle décache ce Bitume de fon (w* & ! g- Jt 47S Histoire Natvre lis s> Se le porte fur fes rivages. Car en e£- ^ £ec , c'eft ordinairement après vne grande tempefte , que Ton en trouve fur les bords .-F iloft rate en la vie d'A- pollonius dit .3 que les Pantcres qui font à l'entour du moat Caucafe , ai- ment fore la bonne odeur de ce lieu- ,\ là. Mais il eft certain qu'entre autres ta belles y les Oifeaus fe montrent extre- !> mément amoureus de cet Ambre , & *> qu'ils le Tentent de fort loin. C'eft ( j>ourquoy dés que l'orage eft cefle, il \s le faut chercher & l'enlever en dili- ^ g-en.ee'- j autrement on le trouveroit fi tout mangé. Et ce n'eft pas fa bonne ii odeur 5 mais fa mauvaife , qui attire ^ ces Oiieaus.Car ce parfum û precieus ^ & fi admirable , lors qu'il eft encore frais y &c mol, & qu il ne fait quefor- £ tir de la mer,fent très- mauvais, & les y animaus y courent en même faifon, qu'ils vont ans charognes : Car fon odeur eft à peu près , comme du lard corrompu, il eft à croire, que c'eft pour cette raifon > que l'on a été Cil long-tems à le connoitre > & à s'enl \? fervir. Les Anciens iugeoient de fa )s vertu> \ l 1 s? A ©es Iles Antilles. 479 vertu , per fa mauvaife odeur , plutôt capablede faire mal au cœur^que de le réjouir 3 ainfi ils le rejettoient comme inutile, ou même nuifible. Ioinc, qu il ne fe trouve pas fi fréquemment , ni en fi grande quantité vers la Cofte de Grèce 3 ni dans l'Europe : & que les navigations aus Indes étoient rares autrefois. Les Renards ne s'en montrent pas moins paiïionez. Aus Païs où ille re- cueille en quantité, ces animaus font le guet à la Cofte , & auffitoft qu'ils en découvrent > ils s'en faififlent &C l'avalent. Mais après l'avoir gardé quelque tems dans leur ventre , ils le rendent fans qu'il fdit aucunement digéré : Seulement il y perd vne par- tie de fa qualités de fa bonne odeur, Ceft pourquoy cette forte d'Ambre, qu'on appelle Renarde, eft moins pri- fée que l'autre^ ne s'employe gueres qu'aus parfums. Il ne fera pas mal à propos de don- ner en paffant , le moyen de difcerneL le vray Ambre gris d'avec le faus^veu <^ue tous ceus qui en ont écrit > com- me r- — — ' 4§p Histoire Naïf Vielle ^ nie Gardas, Monard ,> Scaliger ^Fer* *fa dinand Lopés, Clufîus, ôc autres n'en ^ parient que fort fuccin dément ,\ & ^ lie nous em difent pas les marques ef- r* fencielles. S II faut favoir premièrement * que ^ F Ambre fe diftingue en gênerai 3 eu , 4 (celuy de la mer du Levant* 8c en ce- Çdi luy de la mer du Ponant. Celuy qui » fe prend à la cofte du Levant 3 6c par- * ticulierement à la cofte de la Barba- Y rie y où il fe trouve en grande quanti- ^ té & en groffes pièces , eft générale- ment noir, & ne féche jamais iî bien, - 1 qu'il fe puiffe réduire en poudre5com- f4 ^ne celuy du Ponant > quelque addi- tion qu'on y faile pour le pulvérifer. Il fe fond auffi plus facilement au feu* il eft de moins douce odeur 5 & de beaucoup moindre prix. On apporte peu de cet Ambre en ces quartiers, \\ parce qu'il n'y eft pas eftimé, 5c qu il *' n'eft guère bon pour la Médecine^ ni pour les parfums. L'Ambre du ponant* dont le meil- leur eft celuy de nos coftes , eft or- dinairement d'vn gris cendré : con> me i i des Iles Antilles. 481 nie fi Ton avoic meflé de la cendre parray de la cire : de fafTbn neant- rnoins , que la cendre y parut diltin- étement, & ne fe confondit pas avec la cire. Le deiïus ayant frayé fur le ri- vage, &C ayant plus fenty l'air , eft or- dinairement de couleur tannée, ou du moins plus blanc que le dedans , dur & folide en faflbn de croûte , & par fois meflé de fable, & de coquillages. Ce qui arrive,lors qu'étant mol com- me du Bitume ou de la poix , les or- dures s'y attachent facilement ; Et ce- la diminue fon prix , mais ne le rend pas moins bon. Pour favoir fi cet Ambre , qui eft de la meilleure efpéce eft bon , on re- gardera premièrement la figure , qui doit tirer pour l'ordinaire , à la ron- deur, par ce que toutes les chofes mo- yennement molles étant roulées par la mer , 3c pouflees fur le rivage, s'ar- rondilTenc. Il doit eftre encore en quelque faffon poly , & de couleur brune,entre gris de more & tâné.Que s'il eft bien fec,il faut qu'il foit fort lé- ger pour fa grofleur. Car par là, vous Tom. L X jugejiés / 48 i Histoire Natv relie ^ jugerés fi ce n'eft poinc vne mixtion. ^ de Colofone 3 de Bitume , de Ciresde Poix , 6c de Refîne > toutes ces cho- & {es pelant beaucoup plus. Vous con- ^ noitrez aufli pac là , fi parmy le bon L Ambre , on n'a point meflé de fable,* & ou fi ce n'eu: point de l'Ambre noir ^ du Levant. fr1 Si l'on ne veut pas rompre la pie- ^ ce , il faut prendre vne aiguille 3 & Ç faire chauffer , & en percer cette k lpiece d'Ambre. Vous remarquerés parce moyen fi elle entre aifément* qu'il n'y a point de pierres enclofes. Et en fentant la liqueur qui fouira par la chaleur de l'aiguille qui fondra l'Ambre , vous trouvères vne odeur, qui approche de celle de la cire gom- mée, & qui fe termine enfin en vne odeur ailes douce. Mais le plus affûté moyen , eft, ^1 après avoir fait le prix de la pièce '; : d'Ambre à condition qu'il foit bon.de (' la rompre. Ainfi vous reconnoîtrés £ s'il n'y a point de caillous.il faut corn- ifc me nous avons déjà dit , que i'Ara- & bre fe trouve de couleur cendrée , à £* petis I I * I l TA'/i** «^ \ des Iles Antilles. 48 j petis grains, comme font cens de nos Truffes. Lors qu'il eft récent , il eft plus brun que lors qu'il eft fort fec. :Mais pourveu qu'il ne s'éloigne guère de cette couleur,, & qu'il ne foit ni trop noir, ni trop blanc, il n'importe ; fur tout il faut qu'il paroifïè de couleur méfiée. Il faudra auffi prendre vn peu de l'intérieur de la pièce , ou de l'en- droit que l'on foupçonne le moins bon , 6c le mettre fur vn couteau que vous aurés fait chauffer , y écant mis, .il faut qu'il fonde auffi - tôt comme de la cire , & fi le couceau eft fort chaud , qu'il s'exhale tout fans rien laiffer. Vous prendrés garde en le faifant .ainfî fondre , s'il a à peu prés l'odeur que nous avons déjà dit * 6c qui ne fe peut guère reconnoicre, qu'on ne Tait expérimentée auparavant , par ce qu'elle luy eft particulière. Ec par là vous reconnoîtrés encore , s'il n'y a point de poudre méfiée parmy l'Am- bre. Lors qu'il fe fond vous pourrés auffi , fi vous voulés en faite l'effay, en prendre Tn peu Se le mettre fur la X x main.% r v i I 6 I 1 I I 484 Histoire Natvrelie main : Se. en retendant vous verres s'il n'y à rien de méfié. Il doit adhé- rer fi fortement à la main, qu'il ne {bit pas aifé de l'en ôter. Quand il fond il devient d'vne feule couleur, bien qu'auparavant il femble meflc,& il tire alors fur la Colofone. Il ne fe doit diiïbudre ni dans l'eau , ni dans Thuile. Ce n'eft pas qu'il n'y ait vn moien de le difioudre dans l'vne &C dans l'autre , par l'addition d'vne cer* taine chofe , que ceus qui la favent, tiennent fecrette. Il ne faut pas auili qu'il fe mette en poudre , fi ce n'eft qu'étant bien fec on le racle , & on le mefle avec quelque poudre bien fubti- le : encore prend il en partie au mor- tier, qu'il faut racler de tems en tems. Le noir ne fe met jamais bië en poudre, ni de cette faffion , ni d'aucune autre. La différence du noir d'avec le gris eft , premièrement fa couleur, qui tire jplus fur la poix noire* &c qui n'eft pas roeflée de grains gris - blancs , mais par tout égale. Le noir eft aufiî plus mol & plus pefant , & il fent plus le Bitume* II des Iles Antilles. 485 ïl y a vnetroifiéme efpece d'Ambré $ qui eft blanc , lequel comme die Fer- dinand Lopés * eft le plus rare * mais non pas le meilleur* comme ileftime: au contraire c'eft le moindre de tous: &c comme Ton n'en fait nul cas * 011 en transporte fort peu. Mais pour mieus dire * c'eft de l'Ambre* ou gris ou noir * lequel ayant été mangé 5c digéré par les Oifeaus * qui ont l'efto- mac fort chaud * devient ainfi blanc* comme font préque tous les excre- mens des OHeaus.Celuy que les Poif- fons ont dévoré * ce qui arrive fou- vent * n'eft guère altéré ni en fa cou- leur, ni en fa fubftance. Ce qui vient, de ce que les Poiifons ont Teftomac liioins chaud que les Oifeaus , & que pèut-eftre fentant cet Ambre plus chaud que leurs alimens ordinaires^ s'en trouvent travaillez* ils le vomif- fent promptement. Mais celuy que Ton appelle Renarde* eft préque tout corrompu * de de peu de valeur, à cau- fe de la chaleur de Teftomac des Re- nars*qui l'ont dévoré. Cet Ambre blanc * reflTembie à du X 3 Suif £i 4%6 Histoire Natvrellf fcJ Suif Mariné fe fond ailément, & fent" £1 vJeSuif, auffi quelques vns croyent, %j que ce n eft que du Suif Mariné. r Nous ne nous arrefterons pas à re- r* prefenter les Se fiftications qui fe font; S en l'Ambre , par ce qu'elles font in-- ^ finies, 8c qu'ilfuffit d'avoir donné les marques du bon. Nous ne dirons > ( rien auffi , des admirables vfages qu'ils > a en la Médecine , ni de toutes ies i bonnes q.ualitez,& fur tout de la dou- ^ €e odeur qu'il donne aus -liqueurs, aus / confitures, & à tout ce en quoy on Femploye : puifque les* Livres nou— veaus en font pleins , & que l'expéri- ence les témoigne» i 'S CHAPITRE XXL v > D^ quelques anmatu Amfîbies> qub font communs en ces lies. K Js T3^ur ne ^re qu'v^ volée des Oi- J. feaus de nos Antilles,& ne les pas feparer les vns d'avec les autres, nous K \ avons déjà parlé dans le fétiéme Cha- Ys pitre- ï des îles Antilies 4^7 jnt're'de cette Hiftoire 5 de -Oifeaùs que Von nomme de Rivière y &c qui vivent également & fur la terre & iur Feau. Il ne nous refte donc plus icy> qu à décrire quelques autres Amfi- Bies y qui font communs en ces fies. Article L Du Crocodile, "^"f Ous commencerons par le Croco* £N dik> que les Infiilaires nomment Cayement. Ceft vn monftre tres-dan- gereus, qui croift par fois d'vne grof- feur &-d'vne longueur énorme.On en apporte fi fouvent des dépouilles en France s qu'il n'eft pas necefîaire de nous étendre beaucoup fur fa deferi- ption. Cet Animal fe tient en la Mer ôC aus Rivières des Iles inhabitées , ÔC même fur la terre parmy les Rofeaus* Il eft hideusaupoffible.On tient qu il eft de longue vie > & que fon corps croift en toutes les di me n fions 3 iuf- ques à fa mort. Ce qui fait, qu'on ne X 4 fe f \ X l 7** 488 Histoire Naturelle ik doit pas étonncr,fi on en a veu^qui avoient dixhuit pieds de long , & qui ctoient gros comme vne Barrique. Il eft foutenu fur quatre pieds* qui font armez d'ongles crochus. Sa peau qui eft relevée par écailles , eft fi dure fur le dos^qu'vn coup de moufquet char- gé de baies ramées , ne fait que l'ef- fleurer légèrement; mais fi on le bief- fe fous le ventre,ou ans yeas^il eft in- continent arrêté. Sa mâchoire infé- rieure eft immobile. Il a la gueule fi deméfurement fendue , & heriiïée de tant de dens fi pointues & fi tran- chantes 3 qu'en vn coup* il peut cou- per vn homme en deus. Il court ailés vitte fur la terre>mats la pefanteur de fon corps 3 fait que (es pattes impriment dans le fable des traces auffi profondes 5 que feroit vn •cheval de carroflè. Et comme il n'a point de vertèbres à l'éfpine du dos, non plus que les Hyènes : il va tout droit, fans pouvoir tourner fon grand corps , que tout d'vne pièce. De for- te 3 que fi Ton en eft pourfuivy , il ne faut que prendre de faulfes routes 3 & courir -™ des Iles Antilles. 489 courir en biaifant & en lerpentant* pour l'éviter. Ceux qui fe nourrirent en Teau douce , fentent tellement le Mufc quand ils font en vie , que l'air en eft tout parfiiiïié , à plus de cent pas aus environs : Et même l'eau où ils font, en eft odoriférante. Cette remarque de la bonne odeur du Crocodile,nous montre en pajTant Terreur de Pline, qui s'écoit imaginé, que la feule Pan- thère entre tous les animaus étoit o- doriferante , comme il le dit en quel- que endroit : bien qu'ailleurs il écri- ve, que les entrailles du Crocodile fen- tent tres-bon , &; que cela vient des fleurs odoriférantes qu'il prend pour fa nourriture. Au refte cette odeur muiquée du Crocodile de l' Amérique % eft particulièrement renfermée , en certaines glâdules qui font aus Emon- éfcoires, qu'il a fous les cuillès, & qui eftant arrachées confervent encore Iong-tems cette odeur. Il eft à croire, que Dieu leur a dôné cette fenteur,afin que l'homme & les autres animaus, aufquels ce monftre carnacier fait vne X 5 cruelfe s 490 Histoire Natvkexxe £, cruelle guerre , puiifent à l'odeur dif- fj cerner le lieu où il Te cache 3 & s'en W donner garde, r* Ceus qui vivent en la Mer, ne fen- £ tent point le Mufc, mais les vns & les L> autres font extrêmement à craindre & quand on fe baigne.ou qu'on eft con- y traint de palier quelque rivière à la . ;1 nage. Cet horrible Monftre a vne il lufe pour faire curée des Bceufs& des £ Vaches. Ceft, qu il fe met aus aguets * y aus endroits des étangs3ou des Riviè- res d'eau douce , où ces animaus ont ^ coutume d'aller boire. Et quand il en Vj apperçoit quelcun à Ion avantage 3 îti fc( ferme les y eus à demy>& fe laiiïe com- 5 nae emporter au fil de l'eau , reffem- ^ Mant ainfi à vne groffe pièce de bois X pourry qui flotte. Par ce moyen s'é- 6 tant approché peu à peu de la pauvre ^ befte qui boit , Se qui ne fe donne pas > £1 garde de luy 5 la prenant en trahifon^ il s'élance tout à coup , & la faififlant C prontémsnt par les babines , il Tatire vl d'vne telle furie au fonds de Teau^qu il K ne la quitte point, qu'elle ne foit no- S\ féo>$c puis il en fait fon repas.il n'at- ** trape ' ¥ 1 KdiUA^^^ î>es Iles Antilles. 49* ! 1 S I I ? 492 Histoire Natvrelie trape pas feulement les bêtes , mais auffi les hommes par cette rufe. Té- moin ce que recite Vincent le Blanc, du ferviteur d'vn Conful d'Alexan- drie y qui voulant prendre vne de ces bêtes cruelles 3 qu'il eftimoit être vne pièce de bois , fut emporté par elle au fonds de Teau^fans qu il ait iamais pa- rudepuis.Mais ils ne contrefont point au milieu des rofeaus où ils fe tien- nent cachezjles plaintes & les gemif- femens des hommes comme ceus du Nil, pour attirer dans leurs pièges les pauvres paffans, qui touchez de corn- paffion fe détournent de leur chemin pour aller au fecours de ces prétendus affligez. Le païs de l'Amérique ne produit: pas auffi des hhnmrnons y qui étans les ennemis irréconciliables de ce monftre , ont auffi le courage de la dextérité de luy déchirer lés entrail- les. On voit fur tout abondance de ces Monftrueux Crocodiles aux Iles, qui pour ce fujet ont efïé nômées les Iles du Cayëman 3 ôcqui ne font fréquen- tées qu'au terns que Ton va tourne;: la gY<^ n. J des'Iles Antilles. 493 la Tortue : Car à caufe qu'après que Ton a pris la meilleure chair de la Tortue , on laifle le refte à l'abandon, oes Crocodiles viennent à troupe pen- dant la nuit , fe repaicrc des inteftins & des Carcaffes qu'on a biffez fur le fable. De forte que ceus qui font en garde pour tourner la Tortue, font obligez de porter de gros leviers de bois , pour fe parer contre ces &$fé- rnans> qu'ils aflbmment le plus iou- vent , après qu'ils leur ont rompu le dos avec ces leviers. Ces Animaus ont vne graifle blan- che , dont autrefois les Médecins fe fervoient pour refoudre les fluxions, qui procedoient d'humeur froide,par- ce qu elle eft chaude , & quelle eft compofée de parties fubtiles. Et par la même raifon , on en frottoit les malades dans l'accès de la fièvre, pour leur provoquer la fueur. Pline recite mille autres proprietez qui fe rencon- trent au Crocodile , pour la gueriion des maladies : Quelques vns , recer- chent foigneufement certaines peti- tes pierres en forme d'offelets qu'il a en ï l I I I PS I %% Hl STOIÎIE NAT VIVETLS en fa tefte.ôc les aiant réduite en pou-- dre , ils en vfent pour chaiïèr la gra- velie des reins. On dit auffi que les dens plus pointues de eee Animal, qui font à coité de chaque raachoire^font palier la douleur des dens 5 Se- les em- pefcherit de pourrir s peurveu qu'on aie foi m de les frotter tous les jours a- vee ces dens Cani n^s, Ainfi la tête des ; Dragons5&; des Grapaus^renferment des Pierres d'vne^merveiileuîe vertu3 ■ contre plufieurs rnaus» Et ainfi ces cruels Requiems que nous avons dé- crits cy deilus 5 fourniffent yn remède contre la pierre & la gravelle. Le fa- ge Auteur d# la Nature aiant voukb que nous receuffions quelque vtilïté^,- des chofes mêmes les plus contrai- res. Les Chinois favent prendfe & ap-- privoifer ces Crocodiles ? à ce que di- fent les Hiftoriens. Et quand ils les ont nourris quelque tems chezeus5&- bien engraiiïez > ils les tuent & les mangent. Mais les Européens qui en ont goûté 5 difent y que cette : chair bien que Manche & delicate^n'eft pas agréa - ^ dbs Iles Antilles* 495* agtcablcparce qu elle eft fade,& âm* çftre & par trop .mufquée.- A R T I -C L E IL Des Tortues Franches, ON prend en ces Iles plufieurs.for-'-- tes de Tortues de terre 9de mer*& ■ d'eau douce 3 qui font de différentes figures. Les Caraïbes les: nomment toutes Catallou, mais quand ils par- lent de celles de terre, ils ajoutent le mot àeNowim, qui fi gni fie la terre en leur langage 5 ou celuy de Tmat c'eft à dire de rivière, ou d'eau Les Tortue* de mer fe divifent or- dinairement parles Infulaires en Tor-- tue Franche , en celle qu'ils nomment Caouanne-i Se en Caret. Elles font pré- que toutes d'vne même figure -, Mais il n'yya queda chair de la première e*?- pecejqui foit bonne à ranger, fi ce n'eft en neceflité , & à faute d'au- tre chofe : de même , qu'il n'y a que récaille- de la dernière qui foit dé prix JLes Tortues Franches teks CaoSan* nu- F 49^, Histoire NatvreilB £ nés, font le plus fouvenc d'vn grofïèur > J fi demefurée , que la feule écaille He deilus a environ quatre pieds ôc demy 4 de longueur , h quatre de large. De- ^S quoy il ne fe faut pas étonner , vea £ qu'en l'Ile Maurice on en rencontre, f, qui peuvent marcher portant quatre [4 hommes : ,-Qu'Elian recite , que les \ 1 habitans de l'Ile Taprobane 3 en cou- v vroient leurs maîfons : Et qu au rap- £ port de Diodore de Sicile , certains ^ peuples des Indes Orientales,sJen fer- vent comme de petits Bateaus , fur lé- quels ils pafTent vn détroit de mer, qui les fepare de la terre-ferme. \s Ces animaux Amfibics ne viennent gueres à terre que pour pofer leurs œufs : Ils choifîfient pour cet effet vn y fable fort dons & fort délie > qui foit j fui" le bord de la mer , en vn endroit £ peu frequenté,& où ils puiflent avoir r } vn facile accès V: Les Infulaires qui vont en certain λ terns de Tannée aus Iles du Cayeman, <*- pour faire proviïîon de la chair des Tortues 5 qui y terrifient en nombre innombrables difent , qu'elles y abor- dent i S m M ©es Iles Antilles* 497 dent de plus de cent lieues loin > pour y pofer leurs œufs > à caufe de la fa- cilité du rivage qui eft b'as>& pat tout couvert d'vn fable molet. Le terrifla- ge des Tortues commence à la fin du mois d'Avril 5 & il dure jnfqucs à ce- luy de Septembre , &c c eft alors que Ton en peut prendre en abondance>ce qui fe fait en cette forte. A l'entrée de la nuit on met des hommes à terre 3 qui fe tenant fans faire de bruit fur la rade, guettent les Tortues lors qu elles fortencde la Mer pour venir pefer leurs oeufs dans le p 1 498 Histoire Natvrel££ fable. Et quand ils apperç.oivent qu'- elles font vu peu éloignées du bord de la mer^ qu'avec leurs pattes elles font au fable vn trou profond dVn pied & demy 5 & quelquefois d'à van* Ikge pour y poier leurs ceufsj pendant qu'elles fq|it occupées à fe vuider dans ce trou > ces hommes qui les épient les "Qir prenant, tes tournent fur le dos^ ôc étant en cette pofture,ëlles ne peu- vent plus fe retourner 5 ■■& demeurent? ainfî iniques au lendemain qu'on , les va quérir dans les chalouppes pour les apporter au NLvire* Lors qu'elles fbntainfî xenvêrlées (ur le dos, on less voit pleurer ,;&; on leur entend jetter- des foufpirs. Tout le monde fait que le Cerf pleure^lors qu'il eft réduit au$ abois. Et c'eft vue choie prefque in-- croyable, des cris &: des gemifîemens que' pouifent les GrQCodillc$;du fleuve eu .Nil, &■ des larmes qu'ils répandent fe voyans pris. Les Matelots des Navires qui vont en ces Iles du Cay'éman pour faire leur charge de Tortues , en peuvent faci- j ièment tourner chaque foir,en moins de- t 'W& li'E's AhtïXles. 499^ de trois heures5quarante ou cinquan- te r dont la moindre pefe cent cin- quante livres s & les ordinaires deus cens livres,& il y en a telie5qui a deus grands feaus d'œufs dans le ventre.* Ces œufs font ronds 3 de la groflèur dVne baie de )m de paume: Ils ont de la glaire, & vn moyeuf comme les œufs de poule, mais la coque n'en eft'4 pas fermerais molafle corne fi c'étoir du parchemin mouillé. On en fait des fticaiîées & des ameleces qui font aid- iez bonnes ; mais elles font plus fei- ches & plus arides , que celles qu'on fait avec des œufs de poule. Vne feu- le Tbrtuëà tant de chair ^qu'elle eft capable de nourrir foixante hommes par jour. Quand on les veut manger, on leur cerne l'écaillé du ventre, que lés Infulaires appellent le Flaftron de- àejfom , qui eft vnî à celuy de deflus par de certains cartilages, qui font aifés à couper. Tout le jour , les Ma- telots font occupés à mettre en pie- ces &C à falér ks Tortues , qu'ils ont prifes la nuit. La pluspart des Navires qui vont en ces Iles du CVy^^apres avoii- i s 500 Histoire Natvreilb avoir fait leur charge,c'eft à dire après lîx femaines,ou deus mois de demeure, s'en retournent aus Antilles > où ils vendent cette Tortue falée-, pour la nourriture du commun peuple & des Efclaves. Mais les Tortues qui peuvent échap- per la prife , après avoir pondu leurs ceufs à deus ou trois reprifes , s'en retournent au lieu d'où elles eftoient venues. Les œufs qu'elles ont cou- verts de terre fur le rivage de la mer, étàns éclos au bout de fix femaines par l'ardeur du, Soleil , 6c non par leur rcgard,comme Pline & quelques Anciens le font imaginez autrefois: auffi tôt que les petites Tortues ont brifé la Coque , qui les tenoit enve- lopées, elles percent iefable,& fortent de ce tembeau qui leur a donné naif- fance,pour fe rendre droit à la mer au- près de leurs mères , par vn inftin£b qu'elles ont reçeude la Nature. La chair de cette efpéce de Tortue, eft auffi délicate que le meilleur veau, pourveu qu'elle foit fraiche, & qu'el- le foit feulement gardée du jour au lende des Iles Antilles. 501 lendemain. Elle eft entremeflée de graille , qui eft d'vn jaune verdâtre ïtant cuite. Elle eft de facile dige- (lion , de fort faine j d'où vient , que quand il y a des malades, s'ils ne peu- vent fe guérir aus autres Iles , on les fait paifer aus Iles du Cayeman , dans les Navires, qui en vont faire la pro- vifion. Et le plus Couvent , ayans été rafraîchis de purgez par cette viande, ils retournent en bonne fanté. La graille de cette forte de Tortue , rend vne huile qui eft jaune , & propre à frire ce que Ton veut , lors qu'elle eft fraîche. Etant vieille , elle fert aus lampçs. Article III. Des Tortues qu'on appelle Caoùannes. LA Tortue qu'on nomme Caoùan* ne> eft de même figure que la pré- cédente , hormis qu'elle a la tefte vn peu plus gro(ïe \ Ellefe met en defenfe lors qu'on la veut approcher pour la tourner : mais fa chair étant noire , fillafeufe, & de mauvais goût, elle F ! i i I 1 T=^ ;5oi Histoire Natvrelxe elle n'eft point eftimée qu'à fauté d'autre : l'huile qu'on en tire n'eft auffi propre que pour entretenir les ;lampes. Article I V. jf)fcf Tortues quon appelle Carets* QVant à ia troifiéme efpéce de Tortue de mer , nos François la nomment Caret. Elle diffère des deus autres en groiîeur 5 étant de beau- coup plus pente 3 &" en ee quelle ne poie pas fes œufs dans le fable mais dans le gravier 3 qui eft méfié de petis caillousXa chair n'en eft point agréa- ble, mais les œufs font plus délicats* que ceus des autres efpéces.Elie ieroit autant négligée que la Cacuanne 5 n'é- toitque fon écaille precieufe > la fait ■foigneufcment rechercher. Elle eft compofée de quinze feuilles tant grandes que petites s dont dix font plates j quatre vn peu recourbées •, & celle qui couvre le col , eft faite en triangle cave, comme vn petit bou- clier.La dépouille d'vn Caret ordinai- re -DE S I L ES A-N T 1 1 L 1 S . j 0$ •re, pefe trois ou quatre livres: mais fon en rencontre quelquefois , qui ont l'écaillé fi epaiffe., & les fciiillesj 4ongues5 & fi larges > qu'elles pefen-t toutes enfemble :> environ fis ou iéc livres. C'eft de cette écaille de CmU qu'on fait à prefent tant de beaus pei- gnes ^tantde belles coupes^de riches boettes , de caiTettes, de petis Buffets, &c tant d'autres exçellens ouvrages, qui font eftimez de grand :prix. On $n enrichit auiïi les meubles des chambres > les bordures des miroirs, Jk des tableaus , & pour leur plus no- ble vfage 3 on en couvre ks petis li- vres de dévotion , qu'on veut por- ter en la poche. Pour avoir cette pre* xieufe écaille, il faut mettre vn peu de feu défous le plaftron de deifus , lur lequel les feuilles font attachées : car û tôt qu'elles tentent le chaud, on les enlevé fans peine , avec la pointe du couteau. Quelques vns aflurent que cette efpece de Tortue eft tellement vigou- reufe, que fon écaille luy étant ôtée, il r 504 Histoire Natvrelle' ^ il en renaift bien toc vne autre , fi on £j la remet incontinent en la mer. L'a- bondance du Caret , fe trouve en la > Peninfule de lucatan > Se en plufieurs o* petites Iles , qui font dans le Golfe r^ d'Hondures. Ce qui fait voir , que le S| bon Pirard étoit mal informé, lors ^ qu'au Chapitre deuxième de fon {* Traitté des animaus & des fruits des w Indes Orientales, il a dit que cette f forte de Tortue* > ne fe voyoit qu'aus \ Maldives & aus Filippines. K On tient que l'huile de Caret , a la £\ propriété de guérir toutes fortes de \* gouttes, qui proviennent de caufes / froides. On s'en fert auffi avec heureus K fuccés 3 pour fortifier les nerfs , Se a, pour appaifer les douleurs des reins, V ôc toutes les fluxions froides. Il g A R T I C L E V. T. ' De lafajfon qu'on pefche les Tortues , & t tous les autres gros Poiffons des C Antilles, \0 T Es Tortues de mer , ne fe pren- ne JL/nentpas feulement fur le fable* Ê Y/S \ des Iles Antilles. 505 en la manière que nous avons décrite cy dellùs : mais auiïi par le moyen d'-vn infiniment quel'on nomme Par- te. Ceft vne perche de la longueur d*vn demye pique,au bout de laquel- le* on fiche vn clou pointu par les , deus bouts,qui eft carré par lcmilieu, & de la groifeur du petit doigt. On l'enfonce jufques à moytié dans le bout de lavarre, où il entre fans for- ce. ]Quelques-vns font des entaillu- res du cofté qu'il fort , afin qu'il tien- ne plus fort, lors qu on l'a lancé dans l'écailiede la Tortue. Voicy comme les Pefcheurs font pour darder cette Varre. La nuit lors qu'il fait clair de Lnne, & que la Mec eft tranquille , le Maître Pelcheur3 qu'ils appellent Varreur , s' étant mis en vn petit efquif>qu ils nomment G*- not &vcc deus autres homme?, l'vn qui eft l'aviron , pour le remuer d'vn Se d'autre côté avec tant de vitetfe & de dextérité , qu'il avance autant & avec beaucoup moins de bruit 3 que s'il ê- toit poulie à force de rames. Et l'au- tre eft au milieu du Canot , où il tient Tm. h Y la r I I f 506 HlSTOÏRE NATYRiLi-E la Ligne, qui cft attachée au clou > t% état de pouvoir aifément & prompte- ment filer, lors que le Farreur aura frappé la Tortue. En cet équipage ils vont fans faire aucun bruit,où ils efperent d'en trou- ver : & quand le Varreur , qui fe tient tout droit fur le devant du Canot en apperçoit quelquVne à la lueur de la Mer , laquelle elle fait écumer en fortant par intervalles B, il montre du bout de fa Varre , qui doit fervir de compas à celuy qui gouverne le petit Vaiiteau l'endroit où il faut qu'il le conduife , & s'étant approché tout doucement de la Tortue , il luy lance avec roideur, cette Varre fur le dos. Le clou pénètre L'écaillé Se perce bien avant dans la chair, & le bois reyient fur l'eau. Auffi-tôt qu'elle fe fent bief- fée, elle fe coule à fonds avec le clou, qui demeure engagé en fon écaille. Et d'autant plus qu'elle fe remue Se s3agite,plus elle s'enferre* Enfin après s'être bien debatuë , (qs forces luy* manquant à caufe du fang qu'elle a perdu , elle feJaifïe prendre aifément, & .^. \ des Iles Aktilles. 507 ôc on la cire fans peine à bord du Ca- not y ou à terre. On prend en cette même forte le La- mantin > &.plufieurs autres gros poif- ions : mais au lieu d'vn clou , on met au bout de- la Varre vn harpon 3 ou vn javelot de fer , qui eft fait en for- me de celuy d'vne lance bien perçan- te. A côté de ce fer > il y a vn trou> auquel eft paffée vne corde , laquelle eft auffi entortillée à Tentour de la perche , en telle foute que quand le barreur l'a lancée de toute fa force fur te poiflbn , la corde coule facilement, pour luy donner la liberté de fe déme- ner dans l'eau : Se après qu'il a epui- fé toutes fes forces , qu'il eft réduit à l'extrémité, fi on ne le peut embar- quer dans le Canot, on le tire facile- ment fur le bord de la mer,où l'on Le divife par quartiers. Article VI. Djbs Tortues de Terre, & d'Eau douce. Es Tortues de Terre fe trouvent ien quelques lies près des Rivie- F i I I 7=n 508 Histoire Natvrelle res d'eau douce 3 qui font les moins fujettes aus debordemens,ou dans les étangs Se dans les marécages qui font bien éloignez de la Mer, Elles font .couvertes de tous cotez, d'vne dure & lolide croûte > qui ne fe levé point par écailles 3 comme celles des Tor- tues de mer >& qui eft fi épaifîe par tout > qu elle fert d'vn fort fi affiné à Tanimal qui y fait fa demeure > que quand les rolies d'vn chariot paiTc- roient par deffbs^elle ne feroit pas-bri- sée. Maïs ce qui eft de plus merveil- leus 3 eft 5 qu'il ne peut iamais eftre à l'étroit dans cette maifon mouvante: car elle s'élargit à mefure que le corps de fon hofte 5 prend de nouveaus ac- croiflemens, Le couvert de deflus eft en quelques- vnes de la longueur d'vn pied & demy. Il eft dVne figure ova- le* creusé comme vn bouclier, & en- richy par deflus de plufieurs rayes, qui font arrangées en difFerens par- quets 5 qui paroiflTent vn peu relevez* & qui forment plufieurs petits corn- partimens , d'vne parfaite fymmetrie: Tous cesemrelacemens font couchez fur èes Iles Antilles. 509 fur vn fond noir , qui eft émaillé en plufieurs eri4*b.its, de blanc & de jau- ne. Cette cfpece de Tortue > a la tefte fort hideufe , car elle eft femblable à celle d'vn ferpent. Elle n'a point de dens , mais feulement des mâchoires* qui font d'vn os aflez fort 3 pour bri*- fer ce qu'elle veut avaller.Eile eftfup- portée de quatre pieds > qui font bien foibles > pour foutenir la pefanteur de fon corps > auffi elle ne fe confie pas en leur légèreté , pour fe fauver , & gagner quelque retraitte, lors qu'elle eft pourfuivie : mais fi elle n'eft fur le bord des Rivières ou des étangs, dans léqueis elle fe puifle précipiter j elle ne recherche aucun autre abry, ni au- cun autre avantage, que le toi& de fa propre maifon , fous lequel de même que l'H'itiÏÏon.y'&c l'Armadille^elle retire promptément & feulement fa tefte > fes pieds &c fa queue s auf- fi tôt qu'elle craint le moindre dan- ger. La Femelle pofe des œufs de la grofleut de ceus d'vn pigeon : mais Y 5 vn r % % i 510 Histoire Natvreixe vn peu plus longuets.Elle les cache das^ le fable , & les confie au Soleil „ pour les cou ver & les faire éclore.Bien que qoeiques-vns tiennent , que la chair de ces Tortues de terre foit de difficile digeftiôn > cens qui en ont goûté > la rangent entre les viandes lés plus ex- quifes 5 &c les plus délicates de toute l'Amérique : Et lés Médecins du mïs^ confeillent à cens , qui font menacez: d'Hidropifie 3 d'en vfer fouvent,pour leur guerifon. Ils ont auflî reconnu par l'expérience qu'ils en ont faite* que leur fan g étant féché Se réduit en poudre > attire levenin des viperes,& àcs Scorpions, en l'appliquant fur la playe. Il eftauffi confiant, que la cen- dre de leur écaillé mêlée avec le bjanc d'vne œuf,guerit les crevaffes qui fur- vlennent aux mammelles des femmes qui allaitent; & que fi on s'en poudre la tefte > elle empefche les cheveus de tomber. Cnkvv B*S lit* ANTILLES 5II CHAPITRE XXII. Contenant les de fripons parti- culières de flufiewrs fortes de Crabes ', ayant la queue setrouiTée fous le ventre. Leur corps, qui eft tout couvert d'vne coque afîez dure* eft fupporté fur plufieurs pieds, qui font tous heriflez de petites pointes , qui fervent à les faire grim- per plusaifément, où elles ont e#- Y 4 vie I §n Histoire Natvrelle vie d'atteindre. Les deus de devant font fort gros : Pvn notamment , efir plus gros que l'autre. Nos François* appellent ces deus pattes de devancées Morâans ^parce qu'avec icelles elles pincent Ôc ferrent vivement ce qu'el- les attrapent. La partie de devant qui cft vn peu plus large & plus relevée que l'autre /pouffe en dehors deus yeux , qui font foliées, trans-parens Ôc de différente couleur. Leur gueule eft armée de deus petites dens blan« ches,qui font difpofées de chaque co- fié, en forme de tenailles trenchan- tes * dont elles couppent les feuilles, les fruits > ôc les racines des arbres* qui leur fervent de nourriture. Article I. Des Crabes qnon nomme Tourlourou^ IL y en a de trois fortes , qui diffé- rent en grofleur ôc en couleur. Les plus petites s font celles que Ton ap- pelle communément Tourlc&rot&.Elks ' ont la coque rouge marquée d'vne tache noire j elles font allez agréa- bles des Iles Antilles. ' >ij blés au goût : mais à caufe qu'il y a beaucoup à éplucher * & peu à pren- dre, & qu'on tient auffi, qu elles pro- voquent la dyffenterie, elles ne font recherchées que dans la necefficé. Art i c l e ï I. Des Crabes blmches* LEs autres font toutes blanches, & feiiennent ans pieds des arbres au bord de la mer , en des trous qu'elles font en terre , ôc où elles fe retirent comme les Lapins en leurs clapiers. Elles font les plus gvofles de toutes* & il s'en voit telles , qui ont en l'v ne de leurs pattes, la grolTeur d'vn œuf, de chair auffi délicate , que celle des Ecreviflés de rivière. Elles fe mon- trent rarement de jour , mais pendant la nuit 3 elles fortent en bandes de leurs tanieres,pour aller manger fous les arbres y & c'eft auffi en ce tems là, qu'on les va prendre à la lanterne, ©u aus ftambeaus. Elles fe plaifent particulièrement > fous les Paretu- Y 5 viersj f 7* ¥5V< 514 Histoire Natvrelle £, viers,& fous les autres arbres qui font £j au bord de la mer,&: dans les endroits ^ ks plus marécageus -.Quand on fouille r* dam la terre , ou dans le fable pour p£ les chercher en leurs retraittes , on C les trouve toujours à moitié le corps & dans TeaUjde même que la plupart des^ ^ autres animaus Amfibies. ^ A R T I C LE. ML J JD «• Crabes peintes. / Tk^ Ais celles de la troifiéme efpe- O JlYJL ce , laquelle tient le milieu en- vy tre les deus autres34ontnous venons * de parleront les plus belles, les plus \ merveilleufes > & les plus priiees de £ toutes. Elles ont bien la même figure <* que les précédentes ^mais félon les di- J vei'fes Iles, & les differens terroirs où ^ elles fe nourriffent , elles font peintes > 1 de tant de couleurs , qui font toutes fi \\ belles & fi vives > qu'il n'y a rien de > plus divertiffant 3 que de les voir en ^ plein jour roder feus les arbres , ou (£ elies cherchent leur nourriture. -Les ^ XnQs ont tout le corps de couleur vio* ^ lette II \ des Iles Antilies. 515 îecte pannaché de blanc : Les autres3 font dVn beau jaune , qui eft cha- marré de pluiîeurs petites lignes gri- sâtres Se pourprines , qui commen- cent à la gueule > & qui s'éparpillent fur le dos. Il y en a même quelques Vnes,qui fur vn fond tanné , font ra- yées de rouge^de jaune,& de vert,qui leur donne vn coloris le plus riche ÔC le mieus m elle , qu'on fe pourroit fi- gurer. On diroit à le voir de loin que toutes ces agréables couieursjdont el- les font naturellement émaillées , ne< font pas encore feiches.tant elles font lùifantes.ou qu on les ait fraîchement chargées de vernis > pour leur donner _ plus de luftre. Ces Crabes feinte* nz font pas com- me les blanches , qui n'ofent pas fe montrer de iour. Ca* on les rencon- tre fur tout le matin & léfbirv& après les pluyes fous les Arbres , où elles s'egayent par troupes. Elles fe laiflent- auffi approcher d'âiîez prés ; mais in- continent qu'on fait mine de les vou- loir arrêter avec vne baguette y car il feroit trop perilleus d*y emploiet Y 6 les r i i I I 51e Histoire Natvrelle les mains ; elles font leur retraitée,, fans tourner ledos à ceus qui les pour- rai vent , & en fe reculant de côté, elles montrent leurs dens , Se présen- tant leurs defenfes ouvertes, qui font ces deus tenailles ou mordans , qu'el- les ont en leurs pieds , elles s'en pa- rent tout le corps,& les font choquer de tems en tems Tvne contre l'autre, pour donner de la terreur à leurs enf- nemis j & en cette pofture ,,elles gaL- gnent leur fort, qui efl ordinairement ious la racine , ou dans le creus de quelque arbre pourri,ou dans les fen- tes des rochers. Ces Crabes ont cet inftincT: na- turel , d'aller tous les ans environ le mois de M iy , en la faifon des piuycs au bord de la mer fe laver,. & fécouër leurs oeufs pour perpétuer leurefpécc» Ce qu'elles font en cette forte*: Elles defeendent des montagnes en fi gran- de troupe, que les chemins & les bois en font tout couverts : Et elles ont cette addreife raerveilleufe , de pren- dre leur route vers la partie de l'Ile, où il j a des ances de fable,& des dé- - centes* v^LviW.^.. *W"j bes'Iles Antilles, ftj tentes y d'où elles peuvent commodé- ment aborder la mes. Les Habitans en font alors fors incommodez , parce qu'elles remplie fent leurs jardins , & qu'avec leurs mordans > elles coupent les pois , & les jeunes plantes de Tabac. On di- roit à voir l'ordre qu'elles gardent en cette defcente , que fe fer oit vne ar- mée qui marche en bataille. Elles ne rompent jamais leurs rangs. Et quoy qu'elles rencontrent en chemin, mai- fons, montagnes , rochers, ou autres ebftaeles , elles s'éforcent de monter dellus, afin d'aller toujours conftam- ment en ligne droite. Elles font alte dcus fois le jour3pendant la plus gran- de chaleur > tant pour repaître , que pour fe tepofer vn peujMais elles font plus de chemin de nuit que de jour, iufques à ce qu'enfin, elles - foient ar- rivées au bord de la mer. Lors qu'elles font ce voyage > el- les font graffes & bonnes à manger* les mâles étans pleins de chair y 6c les femelles remplies d'oeufs. Aufli en ce tenu - là* on en a provifion à fa porte» rr3*" 1 ! I I 1 I 5?lS HliST:OÏR* NaTVREÉLE porte. Et quelquefois > elles entrent même dans les maifons , quand les palifladesne font pas bien jointes, & qu'elles trouvent ouverture. Le bruit qu'elles font durant là nuit , eft plus grand qus-celuy des rats 5 6c empef- ehede dormir. Qijand elles font au: bord de la mer 3 après s'ëftre vn peu repofées ,- Se avoir confideré la mer,- comme la nourricebde leurs petis,elies s'approchent de fi prés, qu'elles puif- fent eftre baignées, à trois ou quatre reprifesjdes petites ondes qui flottenr fur le fable > puis s'étant retirées es bois , ou es plaines voiiînes pour fe delafler , les femelles retournent vne féconde fois à la mer,& s'étant vn peu lavées , elles ouvrent leur queue , la- quelle eft ordinairement ferrée fous le ventre , 6t elles fecoiient dans l'eaiv les petis œufs qui y étoient attachez. Puis s'étant encore lavées , elfes fe retirent avec le même ordre , quelles Soient venues» Les plus fortes regagnent incon- tinent les montagnes , chacune ao quartier d'où elle étoit partie , & pat > le des Iles Aktili^ 519 fe même chemin où elle avoit paiîé. Bais elles (ont alors , c'eft & dire , à* leur recour, pour la plupart fi foiblesj & fi maigres* quelles font contrain- tes , de s'arrêter es premières campa- gnes qu elles rencontrent,pour fe re- faire y &i reprendre leur première vi- gueur, avant que de grimper au fom- met des montagnes. Quant aus œufs qu'elles ont ainftj confiez à la mer , après avoir eftére- poufltz fur le fable mollet , ■& échau- £ez quelque temps par les rayons dis? Soleil y ils viennent enfin à s'eclorre^ & à produire de petites Crabes ^xx on voit par milions de la largeur d'vn liard gagner les knffons voifins , juf- ques à ce qu étant fortes , elles puif- fent fe rendre aus montagnes auprès de leurs mères. Ce qui eft de plus confiderable en ces Crabes , eft quvne fois Tan , af- favoir, après qu elles font retournées du voiage de la mer > elles fe cachent toutes en terre , durant quelques lîx fémaines : de forte qu'il n'en paroit aucune. Pendant ce tems - là , elles changent tt** F i I i I S ï 520 Histoire NatVreilê changent de peau , ou d'écaillé ,'& fe renouvellent entieren\em.Elles pouf- fent alors de la terre fi proprement à Tentrée de leurs tanières , que Ton n'en apperçoit pas l'ouverture. Ce qu'elles font pour ne point prendre d*air. Car quand elles pofent a-infi leur vieille robe >. tout leur corps eft com- me à nud y n'étant couvert que. d'vne pellicule tendre , & délicate* laquelle s'épaiffit & fe durcit peu à peu en croûte ; fuivant la folidité de celle qu'elles ont quittées. Monfieur du Montel rapporte>qu'il a fait creufer à defiein en des lieus» où il y avoit apparence qu'il y en eut de cachées. Et en ayant rencontré en- effet, qu'il trouva quelles écoyent comme enveloppées dans des feuilles d'arbres > qui fans doute y leur fer- voîent de nourriture & de nidjdurant cette retraite:mais elles étoient fi lan- guilTantes & fi incapables de fuppor- ter l'air vif3 qu'elles fembloient à de- my mortes 5 quoy que d'ailleurs elles fuiTent grafles3& tres-delicates à man- ger- Les Habitans- des Iles les-nora- ment \ des Iles Antilles 511 feent pour lors Crabes BourJîeres>&c les eftiment beaucoup. Tout auprès d'el- le^ > il voyoit leur vieille dépouille, c'eft à dire > leur coque qui paroiflbiç auffî entiere,que fi l'animal eut enco- re été dedans. Et ce qui eft merveil- leus.c'eft qu'à peine.quoy qui! y em- ployait de fort bons yeus , pouvoit il leconnoître d'ouverture , ou de fen- te , par où le corps de la befte fufl: forty y & fe fut dégagé de cette pri^ fon. Neantmoins , après y avoir pris garde bien exactement, il rernarquoit en ces dépouilles , vue petite fepara* tion du cofté de la queue' > par où les Crabes s'étoient développées» La manière plus ordinaire de les ap- prêter > eft toute la meme que celle des Ecreviilesen France : Mais ceus qui font les plus délicats, &. qui veu- lent emploier le tems qui eft requis, pour les rendre de meilleur goût,, prennent la pêne après les avoir fait bouillir , d'éplucher tout ce qu'il y a de bon dans les pattes 3 &c de tirer vue certaine lubftance huileufe* qui eft dans le corps , laquelle on nomme i I ï 1 i I i ! 4L*. Jrli. HîSTOÎRÊ MAfVRELLE Taumaty, & de fricaffer tout cela avec les œufs des femelles , y mêlant vn bien peu de pofure du paiV, & du foc d orange. Il faut avotiér que ce ra- goût eft IVh des plus excéllens 3 que Fon ferve aus Antilles. Ans Terres,où il f a plufieurs Af- Br'esdc Mancenillejes Crabes qui re- pairét ddïbus,ou qui vfent de ce fruits ont vne qualité venimeùfe. ©e forte que ceus-cpii en mangent x en font âangereufementmalades.Mais ms au- tres endroits elles font fort faines, & tiennent lieu de délices, comme les E- crevïifès -en Europe.Ceusqui font foi- gneus de conferver leur fanté, les ou- vrent auparavant que d*en manger, & fi le dedans du corps eft noir > ils tien- nent qu'elles font dangereufes s m n'ont garde d'en vfen Ciï'afï «■mm iiMiii«!^:«i^^i^ CHAPITRE XXIII. Jfej: Tonnerres, des tremblement de terre, & des Tempe/les qm arrivent fouvent cm m Ile$± COme il nya guéres de vifagè & beau & fi agicable, où Ton ne puifle remarquer quelque défaut v& qui ne foit (ujet à quelque tâche , ôt & quelque verrue : Ainfi les Antilles*; poffedant d'ailleurs toutes les beautez de tous les avantages qrçe nous avons reprefeîuea , & qui les rendent fî re- eommandables^ ont auffi leurs imper- fections , & quelques manquerons* qui terniffent cet éclat , & qui dimi- nuent ces agrémens & ce prix.Voicy quelques vnesdes principales incom- modités qui s'y rencontrent , & les ïemedes.qu'on y peut apporter. r i ■rr * ! fi ï 514 Histoire NatvreitLE Article I. Des Tcnnerres. £T premièrement^ lieu que dans toute k Cofte du Pérou l'on n'en- tend jamais tonner j icy les Tonner- res font frequens 3 & en quelques en- droits,ils font fi épouvantables^que le cœur le plus aiîuré tremble d'effroy,. quand cette puisante ôc magnifique voix du Clel/e fak entendre avec vu ion fi terrible. Article II. Des Tremblemens de terre. IEs Trembkmens de terre > y pro- *duifentauffi quelquefois de tnftes effets y Se émeuvent les fondemens de la terre > d'vne fecoufle fi violentes qu'on eft contraint de chanceler y aus lieus où Ton fe croiroit le plus affiné. Mais par bonheur , cela arrive rare- ment y &en quelques endroits, -^agi- tation n'eu pas fi grande. Arti ^- \ t>ES Iles Antilles. 521 Articu III. ï>3vne Tempefle que les InfuUires ap« fdhnt Ouragan. CE qui eft le plus à -craindre 3 eft vne confpiration générale de tous les Vens , qui fait le tour du Compas y en 1 eQpace de vint - quatre heures ■> Se quelquefois en moins de teros. .Elle arrive d'ordinaire es mois de luillet , d'Aouft, ou de Septembre. Hors de-là , on ne la craint pas. Au- trefois on ne 1 eprouvoit que de fét en fée znSySc quelquefois plus rarement: Mais dépuis quelques années , elle eft venue de deus en deus ans: Et en "vne feule année > on en a fouffert deus : Même peu après que Monfieur Auber euft efté envoyé pour corn* mander à la Gardeloupe, il y eut trois de ces orages en Pefpace d'vn an. Cette Tempefte , que les Infulaires appellent Ouragan , eft fi étrange, qu'elle brife de déracine les Arbres, dépouille de toute verdure ceus qu el- le n'enlevé point , defole les forêts entières, i l S I & | : §i€ Histoire Naturelle minière , détache les rochers du hai&t des montagnes, &les précipite dans ;le.s vallées s renverfe les cabanes > en- traine jufques à la mer les plantes .qu'elle arrache de la terre., faitvn dégaft vniverfel > de tout ce qu elle trouve à la Campagne : & en vn#mo£ laifle vne famine en tout le païs5 qui gémit long - teins en fuite de ce dé- iaftre,& qui a bien de la pine à répa- * xer ces ruines. Cet Ouragan > ne fait pas feulement fes ravages fur la terre; mais il émeut .encore vne telle tempefte fur la mer^ qu'elle femble fe mêler, de fe confon- dre avec l'Air Se les Cieux. Ce Tour- billon rmpetueus 5 brife & fracafle Jes Navires qui fe trouvent dans ks xoftes d Jettant les vns fur le rivage^Sc faifant plonger les autres dans la mer* De forte que ceus qui échappent de ce naufrage , ont grand fujet de louer Dieu. Ceus qui prenent garde aus fignes qui lont les avant-coureurs de cette Tempefte ont remarqué , qu'vn peu auparavant qu elle arrive > la mer de- vient \ £>£6-l& venoient mourir fur le ïivage. Ec F r i i I I I 7=** 5*8 Histoire Nat'yrîiib Et afin y que quelcun ne s'imagine" pas que ces aftres foyent coût à fait particuliers au nouveau Monde, nous ajouterons icy , quilYcftveu en ces contrées de France de fi épouvanta- bles Terapeftcs , que l'on ne les peut effimer autre chofe , tqne des Orna* gâns. L'An mil cinq cens quatre - vins dtohectf > il fe leva prés de Bordeaus vn vent fi violent & fi impetueus, qu'il rompit & déracina la plupart des grands arbres, qui eftoient forts pour refifter , principalement les Noyers, dont les branches font ordinairement fort étendues , & en tranfporta quel- ques vns , à plus de cinq cens pas du lieu où ils étoient. Mais les arbres les plus foibles > fk qui plioient 3 furent laifles. Vne partie du palais de Poi- tiers , en fut fort endommagée en fa couverture. Le Clocher de Cangres prés de Saumur > en fut abbatu. Di- vers autres Clochers , & plufieurs maifons de la campagne > en fouffri- rent beaucoup de mal. Quelques per- fcnnes,fe trouvant à cheval au milieu des \ 35sSS^!£*S^i des Iles Antilles. 529 des champs , furent emportées à plus- de foixante pas loin. Ce vent courut dépuis is voifinagede Bordeaus, juf- ques au Vendomois & au Perche : te- nant de large environ fix ou fée lieues, ôc on ne voyoit en tout cet efpace, que fracas d'arbres arrachez & ren- ver fez. Et f>our donner vue exemple d'vne efpéce d'Ouragan , qui fe foit particu- lièrement montré fur la mer* nous at- tacherons icy Textrait^qui nous a efté communiqué d'vne lettre écrite de la Rochelle, par vn honorable Mar- chand du lieu , à Tvn de fes amys &C correfpondans à Rouen , en datte du trentième Ianvier , mil fix cens qua- rante cinq. Voicy donc ce qu elle porte. Députa deus iours , nous fommes dans vne ajflitlion fenfible , au fnjet de l'ex- traordinaire tourmente qui a commence la nuit de Samedy dernier vinthuitiétne de ce mois > & qui continué encore.Nous voyons de dejfus noftre muraille > tren- te ou trente cinq Navires échouez* & brifezi a la Cofle , la plupart Anglois, Tom h Z avec 13© Histoire Natvrelle avec nombre de Marchandifes perdue?* Vn de ces Navires 3 de d'eus cens Ton" neaJu , a efté porté \ufques auprès â'vn moulin à vent , qui eft dousLe pieds plus haut que la hauteur ordinaire de la mer. Car V Orage na pas elle feulement en Voir : Mais cette Tempesle , a tellement èrneu & enflé la mer , quelle a pajfé bien-haut au dejfus de [es bornes or- dinaires \ fi bien que le dommage & le Mgafi quelle a fait fur la terre , eft fans comparaïfon fins grand , que celuy du naufrage des vaiffeaus. Tout le fet qui eft oit fur les marais h m , a efté em- porté', tous les bleds des terres baffes, & des marais deféiche^, ont efté inonder. Et dans l'Ile de Ré, la mer afafféd'vn cofté k Vautre a travers, &' y agaftévn &rand nmnbre devignes>& noyé force bè~ taiLDê mémoire d'homme, on navoitveu monter la mer fi haut , & elle eft entrée m des endroits , prés d'vn lieue avant dtws la terre. Si bien , que cens qui ont efté a Saint Chriftofie, difent, que l'Oii- , ragan qui y eft affés ordinaire , n eft pas plus épouvantable , qua été celuy - cy> \ quils ont appelle du même nom. Le vent \ étoit ^ des Iles Antilles. 5^1 êtoit Nord-Ou'èjt. On eflime le domma- ge , tant I la Mer qu'à la terre > fins de cinq cens mil efcus. On tient qu'il s* et -perdu environ deus mille cens de fel^qui font la charge de deus cens Navires , de trois cens tonne ans la pièce. Il s'efi aujfi ■perdu des Navires Hollandois devant Ré> a Bordeaus 3 & a Bayonne > qui e~ toient richement chargez.. D'où il appa- roir qu'il fait Couvent en Europe des Tempeftes.5 qui font auffi violentes, que celles qui font, tant aprehendées aus Antilles. Quelques vns , pour fe mettre à couvert de cette Bourrafque 3 aban- donnent leurs maifons 5 crainte d'e- itre envelopez fous leurs ruines s Se (e fauvent es cavernes & es fentes des rochers , ou bien fe tapilfent contre terre, au milieu des chams3ouils eflu- yent tout cet Orage. Les autres 5 ta- chent de gagner p"omptement> quel- que maiion du voifinage , qui fot af- fez folidement bàvie, pour refifter à toutes les fecouffes de cette Tempefte, Car par bonheur ; il y a maintenant aus Antilles plufieui s édifices 5 qui Z 1 peuvent m^j qu'il lance les é- clairs Se les charbons allumez : que la terre en tremble, que les montagnes croulent , & que les fondemens du monde font découverts : car ASC€U$ étt ftto , ~~X ides Iles AntiUës. $5) A ceus que Ces bontés ne fervent é* mouvoir Cette ejfroiable voix ne fait elle pas voir Vne Image de fa puisante ? Certes y qui ri y connoiïi fa haute Majeslé, jQui l'entend fans frayeur , rid pa4 de la confiance Mai* il a de l'impiété* Il faut donc, que ceus qui défirent d'eftrefans apprehenfion ,au milieu de ces defordies , ôc de ces émotions de la mer & de l'air , ayent recours à des recraicces plus affinées , ôc que pour cet eflkc, ils entrent dans le San-* âuaire de- Dieu , qu'ils fe logent à l'ombre du Tout- puiiïant , ôc qu'ils prennent le Seigneur pour leur retrai- te & pour leur forterefle. Il faut qu'- ils embraiïent avec vne foy vive, ce grand ÔC precieus falot qu'il a déployé en Ton Fils bien-aimé3 qui nous a dé- livre de toutes nos frayeurs par le fan g de la Croix, quia fait noftre paix , ôc qui feui peut appaifer les craintes ôc les orages de nos confeien- Z 5 ces V £i 534 Histoire Natvksiih v « ees 5 ôc donner vn vrai repos à nos a-: Ç mes , d'autant que 4 Celuy^quidu Tresh&kt implore l3#JJl« v fiance y fA E t dont Fefpoir pitié de confiance, y M'attend [on fieiours que de Ihj?3 ^ -Quelque péril qui le menace > Se peut promettre (ans auà&ce' ïa J)3avoir en fia faveur vn immobile- 5 II faut qu ils confinèrent pendant f( cette tempefte^ que c'tft Dieu qui tire \ les yens de Tes trefors , & qu'ils ne ^v {otifflent que par Ton ordre ; Que ces £ i efFroiablës Tourbillons 3 ces Tonner- ^ res grondans , ces noires obfcuritezj P qui voilent la face de la terre v& tou- ^ tes ces puiffantes agitations qui lafê- 1% couënt : ne font que des grcffieres £ ► idées, de ce jour épouvantable du Sei- v ; gneur , auquel les Cieux paieront ra- >t-\ pidement & eftânt misen feu feront V diffouts , & les elemens étan s embra- ie fez fe fondront, ôc la terre & les; Jp ; oeuvres qui font en elle , feront bru-» lées Ils doivent particulièrement recou- )s. I *&v % t\t m% fétâ ANTILLES. H5 k Dieu de tout leur cœur j & le prier qu'en contemplation des méri- tes infinis de Con Saint fils lefus y il luy plaife d'eftre appâile envers Tes ferviteurs j- èc qu'il daigne avoir pitié de fa terre. Ils fe doivent fouvenir, que Ion courroux ne dure qu'vn ma- ment:mais que fa bienveuillance dure toute vne vie. Que les pleurs logent ehés nous au foi r , & qu au matin il y a voix de réjouiffance.-Enfin ils drivée e'ftre fermement petfttadez, que celuy quia conté leurs cheveus,a auffi conté ' kurs jours : Qu'il ne les abandonne- ra point au befoin 5 mais qu'il les commettra à la charge de fes Anges de lumière , pour les contregarder parmy ces affteufes ténèbres, afin que nulle playe n'approche de leur taber- nacle. Mais pour avoir au befoin toutes ces douces penféeâ?^ pour éfke mu- nys au jour de la calamité , d'vne fi fainte confiance , iRfeat qu'en bien fkifant y ils recommandent par cha- cun jour leurs âmes au iouverain Créateur de toutes chofesjQu'ils î/etu* Z 4 dient r i i 1 r ï ti 5?£ Histoire Natvrellb client de cheminer en Sainteté & la- ftice devant îuy,durant toute leur vie; Qu'ils lavent leurs mains en innocen- ce, Se qu ils purifient leurs coeurs par la Foy , en fes precieufes promeflèsj êtans aflurez , qu'il tient les vens , & toutes les autres créatures en bride par fa pui(Tance,qu'il n'y en a aucune qui le pu-ifle mouvoir fans fa permiflîon, qu'il fait fervir à fa gloire les Feu?* les.Tonnerres , les Tempeftes , & les tremblemens de Terre, & qu'il les dirige au bien & au falut de les en- fans. •e»»*-s»-&5fr«» €$» $m %j& s^ >£#& CHAPITRE XXIV. De quelques autres incommodité^ du pais, & des remèdes qtion y peut apporter. OVtre les tremblemens de Terre, les Tonnerres &c les Ouragans, qui fecoihnt , & defolent fouvent la Terre des Antilles , comme nous ve- nons ~1 des Iles Antilles. 557 nons 'de le représenter : il y a enco* re quelques autres incommoditez qui font bien inportones > encore qu'elles ne foyent point tant à craindre que les précédentes. Nous leur avons re- fervé ce dernier Chapitre du premier Livre de cette Hiftoire y ou pour té- moigner la grande paffion que nous avons d'ettre affez heureus pour con- tribuer quelque choie au foulage- ment , & à l'entière fatisfa&ion des aimables Colonies de ce nouveau monde : nous propoferons les remè- des , que l'expérience des anciens Ha- bitans , & le jugement de plufieuvs célèbres Médecins , ont trouvé eftre les plus propres > U les plus effica- cieus , pour les munir contre leurs dangeréus effets. Article I. Des Mouïïiques,& des Maringoins. NOus donnerons le premier lieu à certains pecis Moucherons appeliez Moustiques > que Ton lent plutôt qu'on ne les voit > tant ils font petis Mais dans la foibléile £ 3 r i ! g I ï 538 Histoire Natvrelle de leur corps , ils ont vn aiguillon fi; piquant ,& venimeus, que l^ur pi- qûre caufe vne demangéaifon telle- ment importune vqu en s'écorchant quelquefois la peau à force de fe gratter, la bleflîire dégénère en vn vl- cere dangereus , fi Ton ri y aporte du- remède* li s'en trouve d'vne autre efpece5 . «jui font plus gros , & qui font vu bruit pareil à celuy que font les Mou- cherons , qui en France fe trouvent proche les étangs ,.& les lieus maré- cageus. On les nomme Mnringoins^ Us produifent le même effet que les jMonftiques > étant armez dVn petit trait 5 qui perce les habits > & même les lits branlans , dans léquels on re- pofe. Mais ils ont ceçy de particulier^ qu'ils ne lancent jamais leur petit é^ guillon 3 qu'ils n'ayent auparavant déclaré la guerre ,...& fonné la charge avec leur petite trompette ,qui donne Souvent plus de peur , que leur piqû- re ne fait de mal. Pour s'exempter de ces deus fortes de petites Beftes ,on a de coutume de placer m <-.. ^ i>rs Iles Antilles. 559 placer la Maifon , en vn lieu vn peu haut élevé 3 de luy donner air de cous codez , & de coupper cous les arbres qui empeichent le vent d'Oriencqui fonffle préque ordinairement en ces Iies>& qui chafle-au loin cqs malins te importuns ennemis. Ceus auffi qui ont des iogis bien fermez ,-& des lies bien clos n'en font point tant incommodez. Mais i Ci l'on en eft travailiéion n'a qu'à faire fumer du Tabac en la cham- bre.ou défaire vn feu, qui rende beau- coup de fumée j car par ces moiens,- on met en fuice ces petis perturba- teurs du repos des hommes. Que s'ils ontpiqué,& qu'on de fire de faire paf- fer bientôt la demangéaifon>& attirer tout le venin, qu'ils ont glilïe : il faut feulement mouiller l'endroit devinai- gre^oti de jus de petit Citron. Article II. Des Gnefpes , & des Scorpions, Es Gnefpes , & les Scorpions , font , communs en la plupart des Antil- les >Ces vermines sot de même fîratè* r i i s r 540 Histoire Natvrelle , &c auffi dangereufes > que celles des mêmes efpéces que Ton voie en beau- coup d'endroits de l'Europe. Les pi- qûres' des Guefpes , iont foulagées par le jus de la feuille de la Rue , & entièrement guéries, par vne fomen- tation du fouverain remède contre toutes fortes de venins , qui eft dif- penié fous le nom célèbre à' Orviétan. Et celles des Scorpions \ trouvent leur remède en la belle même 5 qu'il faut écraier deiïus, & à ion défaut > il faut recourir à l'huile qu'on appelle de Scorpion \ qui doit eftre commune par touta où il fe trouve de ces infecles.^ A R TIC LE. I ï I. Des Arbres de Mœncetnlle* EN la plupart de ces Iles > croifferut certains Arbres nommés Afaxcé- mlliers -, beaus à voir > qui portent d^es feuilles femblables à celles des Pommiers fauvages s & vn fruit que Ton appelle Mancenille , tout pareil à vne Pomme d'Apis,car il eft panaché de rouge a beau à merveille , &c d'viws odeur des Iles Antilles-. 541 odeur fi agréable, que Ton feroic in- continent invité à en goûter , fi l'on n'êtoit averty de fa qualité dangereu- se. Car bien qu'il foie dous à la bou- che,il eft fi funefte^que fi l'on en man- geoit, il en voyeroit dormir, non pour vinpt-quatre heures, comme vne cer- taine femence du. Pérou , & vne her- be de l'Orient , de laquelle Linfcoc parle amplement -*, mais |>our n'en ré- veiller iamais.' Tellement que ceft bien pis- , que ces Amandes d'vn fruic de la Mexique , qui Tentent le mufe, mais qu'après eftre mangées , lai (lent vn goût de pourriture. Et bien pis en- core , que ces belles pommes de So- dôme , qui étant ouvertes , ne pre- fentent que de la fuye , & de la pouf- fiere. Car fi vous avez le dépiaHir d'y eftre trompé, du moins ce îveft pa-s au danger de vôtre vie. Mais ces pom- mes venimeufes, fe peuvent compa- rer à la noix Indienne , qui croît en. lava. Elle reftemble à vne noix de Galle, & d'abord qu'on la mange, el- le a vn goût dAvelane y mais puis après > elle donne des angoififes mor- telles r i i I 5541 HÎTSTOI&E NaTTREIXE telles , & c'eft vn poifon très - dan^ gereus. Il Te' trouve auffi dans T Afri- que vn Arbre nommé Cofioma.qui ëfë chargé de pommes mortelles. L'Ar- bre des Maldives nommé Ambou^ot* m vn fruit qui n eft pas moins trom- peur,. &- moins pernicieus. Et le Ter- roir de Tripoiy en Syrie, produit cer- tains gros Abricots, -qui font fort be~ eaus à/œil,& fort favoureus au goûtj Mais les qualités en font fouvent mor- telles, ou du moins , elle&caufent de longues & fafcheufes maladies à ceus qui en mangent* Il croît des MancenillesAxxi le bord de la Mer & des Rivieres,& fi le fruit- tombe en l'eau , les poiiïbns qui en mangent ne manquent iamais. d'en mourir \ & encore qu il demeure lon- tems dans l'eau y,il n'y pourrit point; mais il fe couvre dVn falpetre , qur luy donne vne croûte folide , comme s'il êtoit petrefîé. Dans les Iles où cet Arbre croit en abondance , les Cou- leuvres y font venimeufes j Parce que quelques-vns croyent , qu'elles fuc- cent ^quelquefois de fen fruit. Les Crabes des Iles A^tili^esî fgf* Crabes mêmes ,.qui font -leur repaire fous ces Arbres 3 en contraârént vne qualité danger eufe * comme nous l'a- vons dit en fon lieu : & plufieurs ont &c malades pour en avoir mangé. D'où vient qu au tems que ces fruits étant fort meurs tombent à terre , on confeille à tous ceus qui font loig-neus de leur famé, de s'abftenir de manger des Crabes. Ny les Couleuvres 5ny les Crabes: ne vivent pas abfolument de pommes de Mancellines.Mais quand elles font - leur repaire fous cet Arbre > elles en tirent ftnfeâ:ion,& plus encor quand elles fuccent le venin de fon fruit. Il fe peut faire neantmoins , que ce qui eft mortel à quelques animaus , ne le foit pas à tous : Et même que ces In- fcftes 3 qui mangent fouvent de ce poifon, le changent en leur nourri- ture paria coutume & la continua- tion : Comme l'on dit de Mitridate0 Ainfiils peuuvent infeder ceus qui en mangent3n en recevant quant à eus aucun dommage. Sous Técorcedu tronc, & des bran- ches r 1 544 Histoire NaTvréLlê ches de ces Arbres, eft contenue v'nô certaine eau gluante,& blanche com- me du lait 9 extrêmement maligne & dangereufe. Comme il y a plufieurs Mancenilliers fur les chemins, fans y prendre garde y vous froifïes en paf- fant quelquVne de ces branches , ce lait j eu plutôt ce venin en fort & re- jaillit fur vous : s'il tombe fur vôtre chpmife 5 il y fait vne vilaine tache, qui paroît comme vne brûlure. Si c'eft fur la chair nue-, & qu'on ne la- ve promtement l'endroit qui a efté touché y il sy forme aufficôt des enle- vures & des ampoules. Mais ce qui ell le plus à craindre c'eft pour les yeus* Car fi par malheur vne goutte de cet- te eau cauftlque & venimeufe tom- be deffus, il s'y fera vne horrible in- flammation > & vous en perdrez la veue neuf iours durant y au bout dé- quels , vous recevrez du fouîage- nienr. La rosée , ou la pluye après avoir demeuré quelque temps fur les feuil- les des Mancenilliers , produifent te ie même effet > & fi elles tombent fur des Iles Antilles. 545 la peau, elles i'écorchent, comme fe- roit de l'eau forte. Ce qui ne. vaut guère- miens, que les gouttes de pluye de deiTous la ligne, qui font tellement: contagieufes , à ce qu'ailurent ceus qui les ont fenties , que fi elles tom- bent fur les mains , fur le vifage , ou fur quelque autre endroit du corps, qui fait à découvert > il s'y élevé auffi- tôt des veffies & des ampoules avec douleur, &: même fi Ton ne change promptement d'habits, on voit bien- tôt!: iô corps tout couvert de pullules, fans parler des vers qui s'engendrent couverts de puftules,dans les habits. L'ombre de cet Arbre nuit aus hommes , & fi l'on repofe deilbus, tout le corps enfle d'vne étrange faf- fon. Pline & Plutarque font mention, d'vn Arbre d'Arcadie , auffi dange- ïeus que celuy - cy : Et ceus qui onc voyagé aus Indes Orientales, rappor- tent,qu'il s'y trouve vne Herbe nom- mée Sapony, qui donne la mort à ceux qui couchent delïiis. Mais ce qui augmente les mauvaifes qualités du MmcemllkYy eft,que même la viande cuite r i i l I f4% HïSTOîftE NAfVîtïtlB cuite au feu de fan bois , contraflfe' quelque chofede malin , qui brûle la bouche & le goder. Les Sauvages Ami H ois, connoif- fans fort bien la nature de ces Manct- nilles > font entrer & le lait de l'arbre** ëc la rofée qui en tombe , 8c le fuc du" fruit en la compofition du venins dont ils ont accoutumé d'ernpoifori- lier leurs flèches. Pour guérir en peu de rems l'enflu- re &c les Puftules 5=quife forment ate corps* après avoir dormy par mégar- de à l'ombre de ces Arbres 5 ou après qu'on a été ar-rofé de la pluye , ou de la rofée qui tombe de deiïus leurs branches,-& même de ce lait > qqi eft: fous leurs écorces 5 il faut recourir promtement à vne efpece d'Efcargots, dont nous avons parlé cf de (Tus, fous le nom de Soldats , & il en faut tirer vne certaine eau claire 3 qui eft con- tenue dans leur coquille , & l'appli- quer fur la partie offenfée 9 ce remède rabat in côtinent le venin de cette brû- lante liqueur, Se met la perfonne hors de danger. L'huile 5 qui eft tirée fans fou «S ÏLT5S AtfïïL'tESV J»f feu de ce même efcargot , aauffi le même effet, que s'il eft arrivé à quel- cun5de manger du fruit de ces Arbres venimeus , il faudra qu'il vfe des mê- mes remèdes que noas pîefcrirons cf après 3 pour chaffér le venin des Ser- penSj &■ cous les autres poifons» A R T B'C FE I-V. Des Pons de l?où. 1£ y a auffi vne efpece de fourmis,, ou de vermiffeaus , qui ont vne pe- tite tache noire fur la tefte, &■ le refte du corps. tout blanc, lis s'engendrent de bois pourry -y & c'eft pour ce fil* jet * que nos François les nomment Fousdebois. Us ont le corps plus mo- kffeyque nos Fourmis ordinaires, Se neantmoins leur dent eft fi acérée, qu'ils rongent, le bois > &■ s'infinuent dans les coffres , qui font placez prés de terre 3 & en moins de deus jours, par ce qu'ils fe fuivent à la pilte/î l'on n'eft foigneus de les tuer5il y en entre fi grande quantité^qu'ils percent man- gent &■ décrurent, le lingeries habits, les* r ! I I 1 matous 54'3 Histoire Natvrellé les papiers 5 & tout ce qui eft dedans: Us mangent même ôc rongent telle- ment les mai trèfles fourches.qui fou- tiennent les cabanes communes,qu'ils- ks font enfin tomber à terre, fi Ton n'y apporte du remède. On empefche ces beftes là de s'en- gendrer , fi on ne laiffi point de bois a terre en batiiîant la maifon. Car ils s'engendrent de bois corrompu & pour ry : fi on brûle le bout de tous les bois qu'on plaine en terre : h in- continent que l'on en remarque quel- ques vns , on jette de l'eau chaude dans les trous , qu'ils peuvent avoir faits : fi on fufpend les coffres en l'air avec des cordes,comme on eft obligé de faire en divers endroits de l'Inde Orientale > afin qu'ils ne touchent point la terre, & fi on a foin de netto- yer Jouvent les chambres 3 & de n2 rien laiiler contre terre. On a encore remarqué y que pour leur couper che- min , il ne faut que frotter le lieu par ou ils paflent,de l'huile de cette efpe- ce de Palma Chrifti, dont les Nègres fe frottent la tefte^pour fe garentir-de dès Iles Antilles 549 ià vermine. L'huile de Lamantin 5 a auffi le même effet, & fi 1 on en verfe fur leur citadelle > qui eft vne four- milliere compofée de leur bave , la- quelle Us attachent autour des four* ches , qui foutiennent les cafés , ils l'abandonnent incontinent. Article V. Des Ravets. LEs Ravets font encore dangereus. Il y en a de deus fortes. Les plus gros font environ comme des Han- netons , & de même couleur : les au- tres font plus petis de la moitié. Les vns & les autres rodent principa- lement pendant la nuit > & fe ghflent dans les coffres , s'ils ne font bien fermez > faliiïcnt tout ce qu'ils trou- vent * & font affés de dégaft > mais non pas tant^ni fi promtement,que les Pous de bois ; On les appelle Ravets par ce qu'ils rongent comme les Rats tout ce qu'ils peuvent attraper. C'eft fans doute la même efpéce,quejlean de Lery nomme AraversSdoïi le lâgage F i i •5'SO HiSTeiRE NATT1CE*JL£ des Brefiliens. Cette vermine :J en .veut particulièrement aus livres & à leur coixvertureXes pous de bois n'en font pas moins, lors qu'ils y -peuvent mettre la dent- Mais ils ont cela de £ bon qu'ils refpe&ent les lettres ,% ÔC qu'ils le contentent de ronger la mar- ge des livres^ d'y faire des cizelures profondes* Car :> foit que l'ancre ne ■ioit pas à leur goût* ou pour quelque autre eau le , ils ne mangent l'iropref- fion , quen vne extrême famine^ôc a faute de toute autre cfaofe.Nous pour- rions faire voir des livres qui portent leur livrée, & les marques de leurs dens.Mais ils fontfrians de linge^par deflus toute autre chofe : Et quand ils peuvent entrer en vn coffre , ils pre- parent.en vne nuit plus d'ouvrage* que les plus habiles couturier , n'en pourroient rentraireen vn mois. Quant aus Mmm > encore qu'ils ne (oient pas fi habiles en befongne* ils n'épargnent rien* finon les étoffes de foye & de cotton. Celuy notam- ment , qui n'eft pas mis en œuvre* n'e-ft pas lelon leur appétit. Et fi l'on tient ms Iles Antilles. 55s trient les coffres fufpendus en l'air,' & qu'on en, entoure les cordes , qui les foutiennent:aufficôc qu'ils .font parve- nus à cexotton ,, qui embar aile leurs ■petis pieds, ils tachent de s en démê- ler , tk ils prennent incontinent vne auue 'route, Ceusqui ont à^s maifons '-de brique * ou de pierre^ne craignent p ;^: les Pom de bois -.-mais avec tous la s i\ s ont bien de la peine de s'; xjern| t 1 fa$ courfes * .& du de- gaft des Ravets. On a xieantmoins re- connu par expérience, qu'ils (ont en- nemis des bonnes odeurs, & qu'ils ne fe fourrent pas volontiers dans les .coffres* qui font faits de Cèdre, & de ces excellens bois de fenteur,qui fo»t communs en toutes les lies. Au Cai- re,on met les pieds des Cabinets dans des vaiiïeaus pleins d'eau : pour em- pefeher les fourmis d'y monter. Ce Secret qui eft bien aifé , produirok fans doute le métrée effet ans Antilles, !>our fe- munir contre les Fous de bois & les Ravets,dont nous venons de parler,6c mime contre les four mis, qui y font auffi exEieniément in.portu.ns. Artz ! i i 551 Histoire Natvrelle Article VI»' Des Chiques. CE qu'il y a de plus à craindre en toutes ces lies , font de certains péris cirons , qui s'engendrent dans la poudre 5 dans les cendres du foyera 6c en d'autres immondices. On les nom- me ordinairement Chiques Aïs fe four- rent le plus fouvent aus pieds >& fous les ongles des orteils 3 mais fi on les laifïe paflfer outre , &c qu'on ne les tire de bonne heure , ils gaignent toutes les antres parties du corps. Au commencement > ils ne caufent qu'v- 11e petite demangeaifon : Mais lors qu'ils ont percé la peau ^ ils excitent vne inflammation à la partie > qui eft infectée j & de petis qu'ils y étoient entrez^ ils déviennent en peu de tems de la groffeur d'vn pois>& produifent vne multitude de Lentes , capables d'en engendrer d'autres: Et en fuite>ii fe fait fouvent des vlceres aus lieus3 d'où on les a tirez. Les Sauvages 5 à ce que racontent ceus fi T>ES ÎLES ÂKTILIES. $$$ ceus qui ont converfé parmy eus,ont vne certaine gomme , de laquelle a- yant frotté leurs pieds , particulière- ment fous les ongles * ils ne peuvent eftre incommodez de cette vermine Mais , on confeilie à ceus qui n'ont pas la connoiflance de ce fecret , de le faire regarder aux pieds , par ceus qui s'entendent à découvrir , & à ti- rer ces dangereufes petites beftes, in- continent que Ton fent la moindre demangeaifon i à quoy les Indiens font fort adroits , & fort heureus. Il faut que ceus qui tirent ces Chiques* prennent bien garde à ne pas crever la poche,où ils font enclos;autrement il ne mâqiie jamais de demeurer quel- ques vns de leurs petis œufs , dont il s'engendre infailliblement d'autres Chiques. On croit aufli^que le Roucou dont les Caraïbes fe fervent pour fe rendre plus beaus5plus fouples,& plus agiles à la courfe 3 a la vertu de chaf- fer toutes cqs vermines, C'cft aufli vn bon remède 3 d'ar- rofer fouvent la chambre d'eau falée; de n'aller point nuds pieds* de porter Tom% L A a des r \ s 154 Histoire Natvrewe des bas de Chamois: & de fe tenir net- tement. Car il n'y a d'ordinaire que cens qui fe négligent , & qui fe tien- nent falément 3 qui en foyent fenâ- ■bleme.nt attaquez. Ces facheus Ci- rons y font les mêmes que les Brefï- liens appellent Tous > Se quelques au- tres Indiens NigM* Ceus qui ont des ylceres* qui leur font caufez par les Chi^msyioïs qu'ils n'ont pas èfté tirez ni a.lïës à tems, ni affés adroitement > font nommez, Jlddliffgres au ftile du pais. Ces vice- jres viennent auffi fouventefois, après quelque petite écorchure , qui fem- ble d'abord n'eftre que fort peu de çhofe. Mais après on eft tout étonné^ que cela devient grand comme le creus de la main % & alors vous avez beau y donner ordre : Car il faut que l'vlcere prenne fon cours. Il y en a même qui pour eftre plus petis y ne biffent pas d'eftre tres-dificiles à gué- rir : ces ylceres font de deus fortes. JLVne eft ronde > & l'autre inégale. L'vlcere rond eft beaucoup plus dif- ficile à guérir que l'autre, par ce qu'il à "l «DES ttES AnTIIXES. $$$ >a Ses bords de chair morte qui vien- nent tout à ljentour, & qui empirent le mal.Car tant que cette chair morte &c baveufey eft,l'vlcere ne peut gué- rir. Ceft pourquoy* lors qu'on penfe la playe * il faut toujours couper,juf- <{\x au vif cette chair morte * ce ^uî fait de cruelles douleurs. Entre les remèdes pour la guerifon de ces vlceres, on vfe de vert de gris, il la rend belle & nette. Il eft vrayâqu à caufe de la grande douleur que Ton fent , lors que Ton en frote la playe, on a plutôt recours à d'autres remè- des : mais aufli Ton ne guérit pas fi tôt. On fait encore vn onguent avec du Miel commun , vn peu de fort vi- naigre , & de poudre de vert de gris* qui eft fouverain pour guérir en peu de tems les vlceres.Et pour les préve- nir, on confeille de ne point négliger A a 2. la r i i i i I s r ||S Histoire Natvreili la moindre bleffure , ou égratinure* qui furvient en quelque patrie du corps que ce foit5 particulièrement aus pieds3ou aus jambes,mais d'y ap- pliquer quelque emplâtre^qui attire le îeu3quipourroiteftreenlaplaye5& au défaut de tout autre remède, d'y met* trc du moins des feuilles de Tabac.Et de fe fervir de jus de citron, ôc de vi- naigre,pour faire pafler la démangeai- fon, qui demeure après que les Mou- ftiques,ou les Maringoins ont piqué* plutôt que d'y cmploier les ongles. Article VIL Remèdes contre la morfure des Serpens itenimem , & contre tom les autres poifcns tant d^elaterre^ue de la mer des Antilles. NOus avons dît au Chapitre fixié- me de cette Hiftoire^qu il y avoit des Serpens 3 & des Couleuvres aus Iles de h Martinique & de Sainte Âloufie , qui ont vn dangereus ve- b in. Mais nous avons à deifein refer- yé pour ce lieu , les remèdes quJou ^peat des Iles Antilles. 557 peut heureufement emploier , pour en rabatre la force. Nous poferons donc premièrement , qu'ils doivent eftre mis en vfage -, & par dedans & pas dehors. Par dedans pour foula- ger & fortifier le cœur* & diflipes la qualité venimenfe qui le pourroit gagner , on fe fert avec heurcus fuc- cés de Theriaque , dé Mitridat , de Confe&ion d'Alkermes , de Baume d'Egypte 3 & du Pérou , deRhuë^ de Scordium , de Scorçonnaire , de Vi- périne, d'Angélique, de Gontrahier* va. Mais fur tout * il faut avaler avec vn peu d'eau de bourrache, ou de bu- glofe, ou de quelque autre liqueur* le poids d'vn efcu, de poudre du foye ôc du coeur des Vipères. En gênerai il faut v fer de toutes les chofes qui for- tifient le cœur , & qui réjoit lient &C réveillent les Efprks. Par dehors, on peut appliquer cous les remèdes , qui ont la vertu 3c la faculté d'attirer & diffiper toute forte de venin. Com- me font la Ventoufe appliquée fur la playe -fca-nfié'e , les Cornets , ôc tous les medicamens chauds , & at- A a 3 tradifs^ r I l ï * 8 % l II! 558 HISTOIRE NATVREIIB traclifs , tels que font le Galbanunv l'Ammoniac > la fomentation de vin cuit^avec la racine de Serpentaria, ou- la feuille d'Armoife > les Ails 6c les Oignons^la fiente de Pigeon, le fang; de la Tortue* de terre, féché & mis en poudre, de femblables. Il n'eft rien de plus aflîiré , que de: lier au deflus delà morfure le plus prontement que faire fe peupla partie- offencée : & de l'incifer auffitôt , &c même d'en emporter la pièce r ou du~- moins après l'avoir fcarifîée , d'y ap- pliquer !e plûtoft que Ton peut>le der- rière plumé d'vna Poule ,ou dVn Pi- geon pour en attirer le venin,& cette Poule,ou ce Pigeon eftant mort, il en faut reprendre vn autre , tant qu'ils r/y ait plus de venin à attirer. Il feroit auffi à defirer ^ que tous- les Habitans Aqs Antilles , euflent Tvfagede cet excellent Antidote, qui a été éprouvé en tant de licus, qui eft connu fous le nom fameus d'Orvie- tatiy&C qui fe débite à Paris au bout du Pont-neuf 3 au coin de la rue Dau- phine, àl'enfeignedu Soleil. Car cet admirable SSK^ç^S t>ES Uest AntiSies. 559 admirable fecret> a encre plufieurs au- tres rares qualitez, la vertu de chaffef le venin de toutes fortes de Serpens, & de rabattre la force des plus puif- fans poifonfr. Voici la faffon dont cens qui ont cftc mordus4 de Serpens veni- meus^s'en doivent fervir. t II en faut prendre la groffeur d'vne févey dillbusdans du vin. Et après il faut faire des tarifications fur la1 nvorfure > & tirer le fan g par le mo- yen de la ventoufe. Puis y appliquer vn peu d'Oïviecan, & prendre garde5 que le patient demeure éveillé $ au moins l'efpace de douze heures. *Ce puiflant remède, fe peut eonferver en ta bonté plufieurs années , pourveu qu'on ne le tienne pas en vn lieu chaud, où il fe puiffe defféeher. Et s'il devient fec , il le faut remettre en fa eonfîftance avec du miel rofat. On en trouve aulïi qui eft en'poudre. Quant au régime de vivre, qu'il faut tenir durant i'vfagedece remè- de > II faut éviter tous les alimens qui échaufent 8c brûlent le fan g , ou qui engendrent l'humeur mélancolique, A a 4 E& r I I i i rû P il 5^0 Histoire Natvreile Ec il fe faut abftenir entièrement àe la purgation &c de k faignée, de peur d'attirer le venin de dehors au dedans: û ce n'eft que le mal eût gagné les parties nobles : Auquel cas il faudroit purger affés copieuféraent, ôc vfer de bains , & de chofes capables d'ou- vrir les pores ^ & de provoquer la fueur. Que fi on eftoit réduit à telle ex- trémité > qu'on ne put recouvrer au- cun des Antidotes que nous venons de d'écrire : En voicy encore vn , qui eft fort commun & très facile à pra- tiquer. II faut que celuy qui a efté mordu d'vn animal venimeus 3 man- ge promtcmenc vne écorce de Citron tout frais -, car elle a la vertu de munir le cœur contre le venin* S'il eft pof- iible il faut lier la partie offenfée le plus ferre que Ton peut > au deiîiis de la morfure. I Ha faut en .fuitte fcari*' fier,& y appliquer fouvent delà fali- ve d'vn homme, qui foità ieun , & & on peut avoir la befte , qui a fait le mal 3 il luy faut couper la tefte >. & la broyer.iufques à ce qu'elle foit réduite en S^^^ëJSSB^^^MB^B&ft^^S^fe ©es Iles Antilles. $4\ en forme d'onguent 5 qu il faut appli- quer tout chaud fur la playe. Ceft le remède ordinaire 3 dont fe feivent les Habitans naturels du Brefil , pour fe garantir de la violence du venin de es dangereus & monftrueus Serpent* qu'ils appellent en leur langue Boici- vinga>&t que les EfpagnoU nomment CafcaveL Les derniers mémoires qui nous ont été envoiez de la Martinique, por- tent que quelques honorables Famil- les qui sot venues dépuis peudu Brefil avec leurs fervitcurs Nègres, pour de- meurer en cette lieront donnéaus Ha- bitans kcônoiffance de plufieurs her- bes & racines,qtti croiflentaus Antil- les aufli bien qu'au Brefil , & qui ont vne vertu fouveraine pour éteindre la force du venin de toute forte de Ser- pens, & des flèches envenimées. On fe peut fervir des mêmes remè- des que nous avons d'écrits cy-dellus* pour fe prémunir contre le venin de la Becune > 3c de tous les autres poif- fons dangereus , qui fe trouvent en ta mer.. Ils peuvent aufli eftre employez A a 5 avee r s % I '0i Histoire Natvreîli avec heureus fuccés , pour empefcher les pernicieus effets du fuc du Manioc,, de l'arbre de Maneeniile,6^ de la pi- qûre des Gncpesjdes Scorpions, & de Sous les autres Infe6tes vènimeus. Ârtich VII I. De l'Ecume ât Aier. S Eus qui pelchent ou qui fe bâl^ 9 -gnent en la Mer , font quelque- fois accueillis d'vne certaine écume .qui flotte au gré dk vent, comme vne* petite VvfTie de couleur de pourpre de différente figure y & agréable à voir; Mais à quelque partie du corps qu'el- le s'attache ,. elle y caufe en vn in* ftanc , vne tres-fenfible douleur , qui eft brûlante $ & piquante au poffible. Ee remède le plus prompt qu en peut apporter pour appaifer cette cuifante douleur, eft, d'oindre la partie offen- cée avec de l'huile de noix d'Acaïou, mêlée avec vn peu de bonne eau de vie : car vne chaleur en fait paffer v- ne autre»» T A R T IClE IX, Wer Rats qui [mt communfen ces lle$9 DEpuis qu'il fréquente aus Antil- les > vn fi grand nombre de Na- vires, & qu'il arrive affezr (cuvent que plufieurs s'échouent à la rade de ees Iles , où ils pourriiïent de vieil- lefle : les Rats , qm étoient autrefois inconnus aux Caraïbes > ont gagné la terre * & ils s'y font tellement mulci-- , gliez qu'en quelques endroits^ils font grand dommage aus patates* aus poi$5 aus feves,& particulièrement au maïs ou gros blé , qu'on nomme bli de- Turquie. Et nétoit que les Couleu- vres les detruifent , & les vont cher- cher bien avant dans les trous de la Eérre & des rochers oùils-fe fourrent* & même dans les couverts des mai- fons , qui font compoiez de feûHles des Palmes, ou de cannes de fucre^on auroit fans doute de la peine à cou- ferver dès vivres.. Il eft vray > qu'à prefent il y a des Chats en ces Iles». qui ne les épargnent pas. On a même dreiïides cliiens à leurfaire la guerre* & - ;< w&m 5^4 Histoire Nàïvr£Ile ëc c'eft vn plaifir de voir comme ils font fubtils à les éventer 3 & a- droits à leur donner la chalTe, & à les tuei\ Cette incommodité n'eft pas parti- culière aus Antilles, Et c'eft bien pis an Perou,car Garcilaffb en fon Com- mentaire Royal nous témoigne , que ces vilains animaus y étant en nom- bre prcfque ûifiny , y font par fois de grands dégâts, ravageant les Meus par ■où ils pafferit , defokuu les champs* &c rongeant les fruits mfques aus bourgeons > & à la racine, des Ar- bres. Lqs Habitans des Iles fe fervent encore d'vne invention qu'ils nom- ment Balan y pour empefeher que les Rats ne mangent leur catlaue^Sc leurs autres provisions. Ce Balan eft vne efpece de claye ronde 3 ou quarrée compofée de plufieurs bâtons /fur lé- quels ils ont coutume d'arranger la caffiiue > après qu'elle a cfté féchée au ' Soleil. Elle eft attachée au haut de la café avec vne liene; où vne corde^qui lient le Balan fufpendu en l'air. Et afin - ~\ des Iles Antilles. 5^5 afin que les Rats ne fe puiffent pas couler le long de la corde , & defcen- dre fur le Balan,ils font palFer la cor- de par vne calebaffe bien polie, qui demeure fufpendue* au milieu, de forte que les Rats étans parvenus jufques à cet endroit - là , ne trouvans point de prife pour arrefter leurs pieds , & apprehendans le mouvement de la ca- lebafle , ils n'ont pas l'ailurance de paifer outre. Sans ce petit fecret, les Habitans auroient de la peine à con* ferver leurs vivres. Voila comme le fage Auteur de la Nature a voulu par yn admirable contrepoids , qui balance toutes les perfedions de l'Vnivers,que les Païs qui ont quelques avantages pardeflus les autres , foient à l'oppofite fujects à des incommodités,qui ne fe rencon- trent point ailleurs : Et comme fa Di- vine Providence , qui pourvoit puif- famment aus befoins de fes creatures,a mis l'Antidote auprès du venin ,1e remède joignât le mal, & a même ou- vert devant l'homme, les inépuifables trefors de la grâce , & de la nature, pour F ! l 566 Hist.Nat.des ÎLES ÂKT. pour le prémunir contre les injures de Tair., les outrages des faifons , la vio* lence des poifons, &c de tout ce que la terre a produit de plus dangereuse de- puis qu'elle a été envenimée par le premier péché. fin du premier Livre de fHlBoirê Maturelte de$ Antilles, 1 i ■ v/.l