LT INR jure Ein (RL: HISTOIRE NATURELLE DES QUADRUPÉDES-O VIPARES , DE L’IMPRIMERIE DE DOUBLET. pr TER CI S F. BAIRD. S Lu “COL LE C'TION k LR DE $ PÈRES per e | RSS É Er IN Re à - (a anches QE ruine gs il x. es ÉTINTAC " ZA 9 LE * de M°le Comte DE LAC EPE DE. — ER Ayo surtt Se "< aux (Euvres Completes de 1 me, - | 5) à CPE e 7. e Le Fe AICS, bee 1819. RAPET editeur Fan Las | D— DEN NE: cu = | HIHI a age * DES QUADRUPÈDES- OVPARES , Par M. ve Comre De LACEPHr AAA ANA AAA NAVA SUITE ET COMPLÉMENT DES ŒUVRES DE BUFFON. TOME PREMIER. AVEC VINGT-DEUX NOUVELLES PLANCHES EN TAILL£E-DOUCE. s/ 7 IN ? f2£22 Fr5 8 10024 } pe 2 4 , ù bons F « re ES "4 L F ‘ À #7 EN y # 1 y E e PARIS, RAPET, RUE SAINT-ANDRÉ-DES-ARCS, N°. 41. Éditeur du TEMPLE DE LA GLoIRE, ou Zes Fastes militaires de la France, ouvrage in-folio, avec figures. = 1819. - . k : a 1 j { Er ae 0e Qi À. 5, 2 ER - f : EST NE: a LR, Mo A ‘ € “ - CT d ! PL » su Ge «ie FN IRD à \ « n ». ’ L PTT 1 à ER 4 À 1/27" TETE LE $ CA »: SCORE, Fa ad aan fr ” * j RE AE es EE 4 Œ \dtite #4 | ve PER VE À LU œ t Fa Ê ; « e. 2 | ‘ è £ é LE PRE « à . * ; t - ", L Ù he ) 2 F 5 à 1 = ” k: CE ‘ Se | 1 (Es AS RUN " 4 « j ROSE d 4 | . . \ ’ 4 : Re AU ARE + dE : s pa no A" nr AGE AENNN TA 1 r >, » 1 LR MRLCT D : | \ ‘ ñ eu cs . ES LOI FE NATURELLE. 2 PARA AAA AAA AA AAA AA AAA A AAA AAA AAA AA AAA AAA AAA AA AA AUIANRA MAAMAAAR AY QUADRUPÉDES OVIPARES. DISCOURS SUR LA NATURE DES QUADRUPÈDES OVIPARES, Lo. jette les yeux sur le nombre immense des êtres oïga- nisés et vivans qui peuplent et animent le globe, les premiers “ebjets qui attirent les regards, sont les diverses espèces des qua- drupèdes vivipares, et des oiseaux, dont les formes, les qualités et les mœurs ont été représentées par le génie dans un ouvrage immortel. Parmi les seconds objets qui arrêtent l'attention , se trouvent les quadrupèdes ovipares, qui approchent de très-près des plus nobles et des premiers des animaux par leur organisa- tion , le nombre de leurs sens, la chaleur qui les pénètre, et les habitudes auxquellesils sont soumis. Leur nom seul, en ind iquant que leurs petits viennent d’un œuf, désigne la propriété remar- quable qui les distingue des vivipares ; ils diffèrent d’ailleurs de ces derniers, en ce qu'ils n’ont pas de mamelles , en ce qu'au lieu d’être couverts de poil, ils sont revêtus d’une croûte osseuse, de plaques dures , d’écailles aiguës , de turbercules plus où moins saillans , ou d’une peau nue et enduite d’une liqueur visqueuse. Au lieu d'étendre leurs pattes comme les vivipares, ils les plient et les écartent de manière à être très-peu élevés au-dessus de la terre , sur laquelle ils paroissent devoir plutôt ramper que mar- cher. Cest ce qui les a fait comprendre sous la dénomination ZLacepède. 1. 1 : HISTOIRE NATURELLE. générale de reptiles, que nous ne leur donnerons cependant pas, et qui ne doit appartenir qu'aux serpens et aux animaux qui, presque entièrement dépourvus de pieds, ne changent de place qu’en appliquant leur corps même à la terre *. Lenrs espèces ne sont pas, à beaucoup près, en aussi grand nombre que celles des autres quadrupèdes. Nous en connoïssons à la vérité cent treize; mais MM. le comte de Buflon et Dauben- ton ont donné l'histoire et la description de plus de trois cents quadrupèdes vivipares. Il est cependant difhcile de les compter toutes, et plus difficile encore de ne compter que celles qui existent réellement. 11 n’est peut-être en effet aucune classe d'animaux à laquelle les voyageurs aient fait moins d'attention qu'à celles des quadrupèdes ovipares; c'est ordinairement d’après des rapports | vagues ou un coup -d’œil rapide qu'ils se sont permis de leur imposer des noms mal conçus; n'ayant presque Jamais eu recours à des informations sûres, ils ont le plus souvent donné le même nom à divers objets, et divers noms aux mêmes animaux : et combien de fables absurdes n’ont pas été accréditées touchant ces quadrupèdes , parce qu'on les a vus presque toujours de loin, ‘parce qu'on ne les a com munément recherchés que pour des pro- priétés chimériques ou exagérées, parce qu'ils présentent des qua- lités peu ordinaires, et parce que tous les objets rares ou éloignés passent aisément sous l'empire de l'imagination , qui les embellit ou les dénature * ! Les voyageurs ont-ils toujours reconnu d’ail- leurs les caractères particuliers et les traits principaux de chaque espèce, et n’ont-ils pas le plus souvent négligé de réunir à une description exacte de la forme l’'énumération des qualités et Phis- toire des habitudes ? Lors donc que nous avons voulu répandre quelque jour sur histoire naturelle des quadrupèdes ovipares , 1l ne nous à pas suffi d'examiner avec attention et de décrire avec soin un grand nombre d'espèces de ces quadrupèdes qui font partie de la collec- tion du Cabinet du Roi, ou que l'on a bien voulu nous procurer, ? 1 Voyez à ce sujet l'excellent ouvrage sur les quadrupèdes ovipares et sur les serpens , composé par M. Daubenton, et dont ce grand naturaliste a enrichi lEr- cyclopédie méthodique. Nous saisissons avec empressement cette première oc- gasion de lui témoigner publiquement notre reconnoissauce pour les secours que nous avons trouvés dans ses lumières et dans son amitié. _ 2 On trouvera particulièrement dans Conrad Gesner, De quadrup. ovip. l’énw- mération de toutes les propriétés vraies ou absurdes , attribuées à çes animaux. DS DISCOURS SUR LES OVIPARES. mu et dont plusieurs sont encore inconnues aux naturalistes; ce n’a pas été assez de recueillir ensuite presque toutes les observations qui ont été publiées sur ces animaux jusqu’à nos jours, et d’y joindre les observations particulières que l’on nous a communiquées, ou que nous avons été à porlée de faire nous-mêmes sur des indi- vidus vivans : nous avons dû encore examiner les rapports de ces observations avec la conformation de ces divers quadruvpèdes , avec leurs propriétés bien reconnues, avec l'influence du climat, et surtout avec les grandes lois physiques que la Nature ne révo- que jamais. Ce n’est que d’après cette comparaison que nous avons pu décider de la vérité de plusieurs de ces faits, et déterminer s'il falloit les regarder comme des résultats constans de l’organi- sation d’une espèce entière, où comme des produits passagers d’un instinct individuel, perfectionné ou afloibli par des causes acci- dentelles. Mais, avant de nous occuper en détail des faits particuliers aux diverses espèces, considérons sous les mêmes points de vue tous les quadrupèdes ovipares; représentons-nous ces climats favori- sés du soleil, où les plus grands de ces animaux sont animés par toute la chaleur de latmosprère qui leur est nécessaire. Jetons les yeux sur l'antique Egypte, périodiquement arrosée par les eaux d’un fleuve immense, dont les rivages, couverts au loin d’un limon humide , présentent un séjour si analogue aux habitudes et à la nature de ces quadrupèdes : ses arbres, ses forêts, ses mo- numens, tout, jusqu'à ses orgueilleuses pyramides, nous en mon- treront quelques espèces. Parcouronsles côtes brûlantes de l’Afri- que, les bords ardens du Sénégal, de la Gambie, les rivages noyés du nouveau monde, ces solitudes profondes où les qua- drupèdes ovipares jouissent de la chaleur, de l'humidité et de la paix; voyons ces belles contrées de l'Orient , que la Nature paroit avoir enrichies de toutes ses productions ; n'oublions aucune des îles baignées par les eaux chaudes des mers voisines de la zone torride ; appelons par la pensée tous les quadrupèdes ovipares qui en peuplent les diverses plages, et réunissons-les autour de nous pour les mieux connoître en les comparant. Observons d’abord les diverses espèces de tortues, comme plus semblables aux vivipares par leur organisation interne; considé- rons celles qui habitent lesbords des mers, celles qui préfèrent les eaux douces, et celles qui demeurent au milieu des bois sur les terres élevées; voyons ensuite les énormes crocodiles qui peu plent Le HISTOIRE NATURELLE. les eaux des grands fleuves, et qui paroissent comme des géans dé- mesurés à la tèle des diverses lésions de lézards; jetons les yeux eur les diflérentes espèces de ces animaux , qui réunissent tant de nuances dans leurs couleurs à tant de diversité dans leurs orga- nes, et qui présentent tous les degrés de la grandeur, depuis une longueur de quelques pouces jusqu’à celle de vingt-cinq ou trente pieds ; portons enfin nos regards sur des espèces plus petites ; considérons les quadrupèdes ovipares que la Nature paroît avoir confinés dans la fange des marais, afin d’im primer partout l’image du mouvement et de la vie : malgré la diversité de leur confor- mation , tous ces quadrupèdes se ressemblent entre eux, et difFè- rent de tous les autres animaux par des caractères et des qualités remarquables; examinons ces caractères distinctifs, et voyons d’a- bord quel degré de vie et d'activité a été départi à ces quadrupèdes. Les animaux diffèrent des végétaux, et surtout de la matière brute, en proportion du nombre et de l'activité des sens dont ils ont été pourvus, et qui, en les rendant plus ou moins sensibles aux impressions des objets extérieurs, les font communiquer avec ces mêmes objets d’une manière plus ou moins intime. Pour dé- terminer la place qu'occupent les quadrupèdes ovipares dans la chaîne immense des êtres, connoissons donc le nombre et la force de leurs sens. Ils ont tous reçu celui de la vue; le plus grand nom- bre de ces animaux ont même des yeux assez saillans et assez gros relativement au volume de leur corps. Habitant la plupart les rivages des mers et les bords des fleuves de la zone torride, où le soleil n’est presque jamais voilé par les nuages, et où les rayons lumineux sont réfléchis par les lames d’eau et le sable des rives, il faut que leurs yeux soient assez forts pour n'être pas allérés et bientôt détruits par les flots de Ia lumière que les inondent. L’or- gane de la vue doit donc être assez actif dans les quadrupèdes ovi- pares. On observe en eflet qu’ils aperçoivent les objets de très-lom.. D'ailleurs nous remarquerons dans les yeux de plusieurs de ces animaux une conformation particulière qui annonce un organe délicat et sensible ; ils ont presque tous les yeux garnis d’une membrane clignotante , comme ceux des oiseaux; et la plupart de ces animaux, tels que les crocodiles et les autres lézards, jouis= sent, ainsi que les chats, de la faculté de contracter et de dilater leur prunelle de manière à recevoir la quantité de lumière qui leur est nécessaire , ou à empêcher celle qui leur seroit nuisible d’en- êrer dans leurs yeux : par à, ils distinguent les objets au milieu DISCOURS SUR LES OVIPARES. de l'obscurité des nuits, et lorsque le soleil Le plus brillant répand ses rayons; leur organe est très-exercé , et d'autant plus délicat qu'il n’est jamais ébloui par une clarté trop vive. Si nous trouvions dans chacun des sens des quadrupèdes ovi- pares la même force que dans celui de la vue, nous pourrions attribuer à ces animaux une grande sensibilité ; mais celui de l’ouïe doit être plus foible dans ces quadrupèdes que dans les vi- vipares et dans les oiseaux. En effet , leur oreille intérieure n'est pas composée de toutes les parties qui servent à la perception des sons dans les animaux les mieux organisés, et l’on ne peut pas dire que la simplicité de cet organe est compensée par sa sensi- bilité , puisqu'il est en général peu étendu et peu développé. D'ailleurs cette délicatesse pourroit -elle suppléer au défaut des conques extérieures qui ramassent les rayons sonores comme les miroirs ardens réunissent les rayons lumineux , et qui augmen- tent par là le nombre de ceux qui parviennent jusqu’au véritable siége de l’ouie ? Les quadrupèdes ovipares n’ont reçu à la place de ces conques que de petites ouvertures, qui ne peuvent donner entrée qu'à un très-petit nombre de rayons sonores. On peut donc imaginer que l'organe de l’ouïe est moins actif dans ces qua- drupèdes que dans les vivipares. D'ailleurs la plupart de ces ani- maux sont presque toujours muets, ou ne font entendre que des sons rauques, désagréables et confus. Il est donc à présumer qu'ils ne reçoivent pas d'impressions bien nelles des divers corps sonores ; car l'habitude d'entendre distinctement donne bientôt celle de s'exprimer de même *. On ne doit pas non plus regarder leur odorat comme irès-fin. Les animaux dans lesquels il est le plus fort ont en général le plus de peine à supporter les odeurs très-vives ; et lorsqu'ils de- meurent trop long-temps exposés aux impressions de ces odeurs exaltées, leur organe s’endurcit, pour ainsi dire, et perd de sa sensibilité. Or, le plus grand nombre de quadrupèdes ovipares vivent au milieu de lodeur infecte des rivages vaseux et des marais remplis de corps organisés en putréfaction ;. quelques- ? On objectera peut-être que, dans le plus grand nombre de ces animaux, l'or gane de la voix n’est point composé des parties qui paroissent les plus nécessaires pour former des sons , et qu’il se refuse entièrement à des tons distincts et à une sorte de langage nettement prononcé: maïs c’est une preuve de plus de la foiblessa de leur ouïe; quelque sensible qu’elle pût être par elle-même, elle se ressentirois de l’imperfection de l’organe de leur voix. 6 HISTOIRE NATURELLE. uns de ces quadrupèdes répandent même une odeur qui devient très-forte lorsqu'ils sont rassemblés en troupes. Le siége de l’odo- rat est aussi très-peu apparent dans ces animaux, excepté dans le crocodile ; leurs narines sont très-peu ouvertes : cependant , comme elles sont les parties extérieures les plus sensibles de ces animaux, et comme les nerfs qui y aboutissent sont d’une gran- deur extraordinaire dans plusieurs de ces quadrupèdes , nous regardons l’odorat comme le second de leurs sens. Celui du goût doit en effet ètre bien plus foible dans ces animaux ; il est en raison de la sensibilité de l'organe qui en est le siége, et nous ver- rons dans les détails relatifs aux divers quadrupèdes ovipares, qu'en général leur langue est petite ou enduite d’une humeur visqueuse , et conformée de manière à ne transmettre que diflici- lement les impressions des corps savoureux. À l'égard du toucher, on doit le regarder comme bien obtus dans ces animaux. Presque tous recouverts d'écailles dures, en- veloppés dans une couverture osseuse, où cachés sous des bou- cliers solides , ils doivent recevoir bien peu d’impressions dis- tinctes par le toucher : plusieurs ont les doigis réunis de manière à ne pouvoir être appliqués qu'avec peine à la surface des corps; et si quelques lézards ont des doigts très-longs el trèes-séparés les uns des autres , le dessous même de ces doigts est le plus souvent garni d’écailles assez épaisses pour Ôter presque toute sensibilité à cette partie. Les quadrupèdes ovipares présentent donc, à la vérité, un aussi grand nombre de sens que les animaux les mieux confor- més : mais, à l’exception de celui de la vue, tous leurs sens sont si fotbles, en comparaison de ceux des vivipares, qu'ils doivent recevoir un bien plus petit nombre de sensations, communiquer moins souvent et moins parfaitement avec les objets exlérieurs, être intérieurement émus avec moins de force et de fréquence ; et c'est ce qui produit cette froideur d’aflections, cetle espèce d'a- pathie, cet instinct confus, ces intentions peu décidées, que l'on remarque souvent dans plusieurs de ces animaux. La foiblesse de leurs sens suffit peut-être pour modifier leur organisation intérieure, pour y modérer la rapidité des mouve- mens, pour y ralentir le cours des humeurs, pour y diminuer la force des frottemens, et par conséquent pour faire décroiire celte chaleur interne qui, née du mouvementet de la vie, les entretient à son tour; peut-être, au coniraire, celte foiblesse de DISCOURS SUR LES OVIPARES. leurs sens est-elle un effet du peu de chaleur qui anime ces,ani- maux. Quoi qu'il en soit, leur sang est moins chaud que celui des vivipares. On n’a pas encore fait, à la vérité, d'observations exactes sur la chaleur naturelle des crocodiles, des grandes tor- tues , et des autres quadrupèdes ovipares des pays éloignés ; le degré de cette chaleur doit d’ailleurs varier suivant les espèces, puisqu'elles subsistent à différentes latitudes : mais on est bien assuré qu'elle est, dans tous les quadrupèdes ovipares, imférieure de beaucoup à celle des autres quadrupèdes , et surtout à celle des oiseaux ; sans cela , ils ne tomberoiïent point dans un état de torpeur à un degré de froid qui n’engourdit ni les oiseaux ni les vivipares. Leur sang est d’ailleurs bien moins abondant ; 1l peut circuler long-temps sans passer par les poumons, puisqu'on a vu une tortue vivre pendant quatre jours, quoique ses poumons fussent ouverts et coupés en plusieurs endroits, et qu’on eût lié l'artère qui va du cœur à cet organe. Ces poumons paroissent d’ailleurs ne recevoir jamais d'autre sang que celui qui est néces- saire à leur nourriture : aussi celui des quadrupèdes ovipares étant moins souvent animé, renouvelé, revivilié, pour ainsi dire, par l'air atmosphérique qui pénèire dans les poumons, il est plus épais ; il ne reçoit el ne communique que des mouvemens plus lents, et souvent presque insensibles, et il y a Jong-temps qu'on a reconnu que le sang ne coule pas aussi vite dans cer- tains quadrupèdes ovipares , et, par exemple, dans les grenouilles, que dans les autres quadrupèdes et dans les oiseaux. Les causes internes se réunissent donc aux causes externes pour diminuer J’activilé intérieure des quadrupèdes ovipares, Si lon considère d’ailleurs leur charpente osseuse, on verra qu'elle est plus simple que celle des vivipares; plusieurs familles de ces animaux, telles que la plupart des salamandres, les gre- nouilles, les crapauds et les raines , sont dépourvues de côtes : les tortues ont, à la vérité, huit verièbres du cou ; mais, excepié les crocodiles qui en ont sept, presque tous les lézards n’en ont ja- mais au-dessus de quatre, et tous les quadrupèdes ovipares sans queue en sont privés, tandis que, parmi les oiseaux, on en compte ioujours au moins onze, et que l’on en trouve sept dans toutes les espèces des quadrupèdes vivipares *. Leur conduit in- * Les observations que j’ai faites à ce sujet sur les squelettes des quadrupèdes : ovipares du Cabinet du Roi s'accordent avec celles que M. Camper a bien voulu U HISTOIRE NATURELLE. testinal est bien moins long, bien plus uniforme dans sa gros- seur, bien moins replié sur lui-même ; leurs excrémens , tant liquides que solides, aboutissent à une espèce de cloaque com- mun * ; etil est assez remarquable de trouver dans ces quadru- pèdes ce nouveau rapport, non-seulement avec les castors, qui passent une très-grande partie de leur vie dans l’eau , mais encore avec Îles oiseaux qui s’élancent dans les airs et s'élèvent jusqu’au- dessus des nuées. Le cœur est petit dans tous les quadrupèdes ovipares, et n’a qu'un seul ventricule, tandis que, dans l’homme, dans les qua- drupèdes vivipares , dans les cétacées et dans les oiseaux, 1l est formé de deux. Leur cerveau est très-peu étendu , en compa- raison de celui des vivipares. Leurs mouvemens d'inspiration et d'expiration, bien loin d’être fréquens et réguliers , sont sou- vent suspendus pendant très-long-temps, et par des intervalles trés-inégaux. Si l’on observe donc les divers principes de leur mouvement vital, on trouvera une plus grande simplicité, tant dans ces premiers moteurs que dans les eflets qu'ils font naître ; on verra les différens ressorts moins multipliés ; on remarquera même, à certains égards, moins de dépendance entre les diflé- rentes parties : aussi action des unes sur les autres est-elle moin- dre, les communications sont-elles moins parfaites, les mouve- mens plus lents, les frottemens moins forts. Et voila un bien grand nombre de causes pour rendre ces machines plus uni- formes et moins sujettes à se déranger, c’est-a-dire, pour qu'il soit plus difficile d'arrêter dans ces animaux le mouvement vital, dont le principe, répandu en quelque sorte dans un espace plus étendu, ne peut être détruit que lorsqu'il est attaqué dans plu- sieurs points à la fois. Cette organisation particulière des quadrupèdes ovipares doit encore être comptée parmi les causes de leur peu de sensibilité ; et celte espèce de froideur de tempérament n'est-elle pas aug- mentée par le rapport de leur substance avec l’eau ? Non-seule- ment en effet ils recherchent la lumière active du soleil par dé- faut de chaleur intérieure , mais encore ils se plaisent au miliew D me communiquer par une lettre que ce célèbre anatomiste m’a écrite le 29 août 8786. * Les lézards , les grenouilles, les crapauds ni les raines, n’ont point de vessie proprement dites DISCOURS SUR LES OVIPARES. des terrains fangeux et d’une humidité chaude par analogie de nature. Bien loin de leur être contraire, cette humidité, aidée de la chaleur, sert à leur développement ; elle ajoute à leur vo- lume en s’introduisant dans leur organisation et en devenant portion de leur substance : et ce qui prouve que cette humeur aqueuse dont ils sont pénétrés n’est pas une vaine bouffissure, un gonflement nuisible, et une cause de dépérissement plutôt que d’un accroissement véritable, c’est que, bien loin de perdre quel- qu’une de leurs propriétés lorsque leur substance est, pour ainsi dire, imbibée de l'humidité abondante dans laquelle ils sont plongés, la faculté de se reproduire paroît s’accroître dans ces animaux à mesure qu'ils sont remplis de cette humidité chaude si analogue à la nature de leur corps. Cette convenance de leur nature avec l'humidité montre com- bien leur mouvement vital tient, pour ainsi dire, à plusieurs ressorts assez indépendans les uns des autres. En effet, cette sur- abondance d’eau est avantageuse aux êtres dans lesquels les mou- vemens intérieurs peuvent être raleniis sans être arrêtés, dans lesquels la mollesse des substances peut diminuer sans inconvé- nient la communication des forces, et dont les divers membres ont plus besoin de parties grossières et de molécules qui occu- pent une place, que de principes aclifs et de portions délicate- ment organisées : elle cause au contraire le dépérissement des êlres pleinement doués de vie, qui existent par une grande rapi- dité des mouvemens intérieurs, par une grande élasticité des diverses parlies, par une communication prompte de toutes Îes impressions , et qui ont moins besoin en quelque sorte d’être pourris que mis en mouvement, d’être remplis que d’être ani- més. Voilà pourquoi les espèces des animaux les plus nobles dé- sénèrent bientôt sur ces rivages nouveaux, où d'immenses forêts arrêtent et condensent les vapeurs de l’air, où des amas énormes de plantes basses et rampantes retiennent sur une vase bour- beuse une humidité que les vents ne peuvent dissiper, et où le soleil n’élève par sa chaleur une partie de ces vapeurs humides que pour en imprégner davantage l'atmosphère, la répandre au loin, eten multiplier les pernicieux effets. Les insectes, au con- traire, craignent si peu l’humidité, que c'est précisément sur les bords fangeux, à peine abandonnés par la mer, et toujours plongés dans des {lois de vapeurs et de brouillards épais, qu'ils 46 HISTOIRE NATURELLE. acquiérent le plus grand volume, et sont parés des couleurs les plus vives. Mais, quoique les quadrupèdes ovipares paroissent être pen fa- vorisés à certains égards , ils sont cependant bien supérieurs à de grands ordres d'animaux ; et nous devons les considérer avec d'autant plus d'atiention, que leur nature, pour ainsi dire , mi- partie entre celle des plus hautes et des plus basses classes des êtres vivans et organisés, montre les relations d’un grand nombre de faits importans qui ne paroissoient pas analogues , et dont on pourra entrevoir la cause par cela seul qu’on rapprochera ces faits et qu’on découvrira les rapports qui les lient. Le séjour de tous ces quadrupèdes n’est pas fixé au milieu des eaux ; plusieurs de ces animaux préfèrent les terrains secs et élevés; d’autres habitent dans des creux de rocher ; ceux-ci vivent au milieu des bois, et grimpent avec vitesse jus- qu'à l'extrémité des branches les plus hautes : mais presque tous nagent et plongent avec facilité, et c'est en partie ce qui les a fait comprendre par plusieurs naturalistes sous la dénomination générale d’amphibies. Il n’est cependant aucun de ces quadru- pêdes qui n'ait besoin de venir de temps en temps à la surface de l’eau, dans laquelle il aime à se tenir plongé. Tous les ani- maux qui ont du sang doivent respirer l'air de l'atmosphère : et si les poissons peuvent demeurer très long-temps au fond des mers et des rivières, c'est qu’ils ont un organe particulier qui sépare de l’eau tout l’air qu’elle peut contenir, et le fait parve- nir jusqu’à leurs vaisseaux sanguins. Les quadrupèdes ovipares sont donc forcés de respirer de temps en temps : l'air pénètre ainsi jusque dans leurs poumons ; il parvient jusqu’à leur sang ; 1] le revivifie, quoique moins fréquemment que celui des qua- drupèdes vivipares, ainsi que nous l'avons dit; il diminue la trop grande épaisseur de ce fluide , et entretient sa circulation. Les quadrupèdes ovipares périssent donc faute d'air, lorsqu'ils demeurent trop de temps sous l’eau; ce n’est que dans leur état de torpeur qu’ils paroiïssent pouvoir se passer pendant très-long- temps de respirer, une grande fluidité n'étant pas nécessaire pour le foible mouvement que leur sang doit conserver pendant leur engourdissement. Les quadrupèdes ovipares, moins sensibles que les autres, moins animés par des passions vives, moins agités au-dedans, moins agis- sans à l'extérieur, sont en général beaucoup plus à l'abri des dan- = DISCOURS SUR LES OVIPARES. 11 gers : ils s’y exposent moins, parce qu’ils ont moins d’appétits vio- lens; et d’ailleurs les accidens sont pour eux moins à craindre. Ils peuvent être privés de parties assez considérables , telles que leur queue et leurs patles, sans cependant perdre la vie * : quelques-uns d'eux les recouvrent, surtout lorsque la chaleur de l'atmosphère en favorise la reproduct m; et ce qui paroîtra plus surprenant à ceux qui ne jugent que d’après ce qu'ils ont communément sous les yeux , il est des quadrupèdes ovipares qui peuvent se mou voir long-temps après qu’on leur a enlevé la partie de leur corps qui paroit la plus nécessaire à la vie. Les tortues vivent plusieurs jours après qu'on leur a coupé la tête; les grenouilles ne meurent pas tout de suite, quoiqu’on leur ait arraché le cœur ; et, dès le temps d’Aristote, on savoit que, quelques momens après qu'on avoit disséqué un caméléon, son cœur palpitoit encore. Ce grand phénomène ne sufliroit-1l pas pour démontrer com- bien les différentes parties des quadrupèdes ovipares dépendent peu les unes des autres ? Il prouve non-seulement que leur sys- ième nerveux n'est pas aussi lié que celui des autres quadru- pèdes, puisqu'on peut séparer les nerfs de la tête de ceux qui prennent racine dans la moelle épinière, sans que l'animal meure tout de suite, ni même paroisse beaucoup souffrir dans les pre- miers momens; mais ne démontre-t-il pas encore que leurs vaisseaux sanguins ne communiquent pas enire eux autant que ceux des autres quadrupèdes, puisque sans cela lout le sang s’'échapperoit par les endroits où les artères auroient été coupées, et l’animal resteroit sans mouvement et sans vie ? Ceci s'accorde très-bien avec la lenteur et la froideur du sang des quadrupèdes ovipares ; et il ne faut pas être étonné que non-seulement ils ne perdent pas la vie au moment que leur tête est séparée de leur corps, mais encore qu'ils vivent plusieurs jours sans l’organe qui leur est nécessaire pour prendre leurs alimens. Ils peuvent 1 Voyez l’article des sa/amandres à queue plate. L'on conserve au Cabinet du Roi un grand lézard, de l'espèce appelée dragonne, auquel il manque une patte: il paroît qu’il lavoit perdue par quelque accident, lorsqu'il étoit déjà assez gros ; car la cicatrice qui s’est formée est considérable. C’est M. de la Borde , médecin du Roi à Cayenne, et correspondant du Gabinet du Roi, qui l’a envoyé. Il a rencontré dans l'Amérique méridionale un lézard d’une autre espèce, el n'ayant également que trois pattes. Il en fait mention dans nn re- oueil d'observations nonvelles et très-intéressantes, qu'il se propose de publier sur l’histoire naturelle de l'Amérique méridionale, se HISTOIRE NATURELLE; se passer de manger pendant un temps irès-long : on a vu même des tortues et des crocodiles demeurer plus d’un an privés de toute nourriture *. La plupart de ces animaux sont revêtus dé- cailles ou d’enveloppes osseuses, qui ne laissent passer la trans- piration que dans un petit nombre de points : ayant d’ailleurs le sang plus froid, ils perdent moins de leur substance , et par conséquent ils doivent moins la réparer. Animés par une moindre chaleur , 1ls n'éprouvent pas cette grande dessiccation , qui de- vient une soif ardente dans certains animaux ; ils n’ont pas be- soin de rafraîchir , par une boisson très-abondante, des vais- sceaux intérieurs qui ne sont jamais trop échauflés. Pline et les anciens avoient reconnu que les animaux qui ne suent point, et qui ne possèdent pas une grande chaleur intérieure , mangent très - peu. En effet, la perte des forces n'est-elle pas toujours proportionnée aux résistances ? les résistances ne le sont-elles pas aux frottemens , les frottemens à la rapidité des mouve- mens? et celle rapidité ne l’est-elle pas toujours à la chaleur inté- rieure ? Mais si les quadrupèdes ovipares résistent avec facilité à des coups qui ne portent que sur certains points de leur corps, à des chocs locaux , à des lésions particulières , ils succombent bientôt aux efforts des causes extérieures, énergiques et con< stantes, qui les attaquent dans tout leur ensemble ; ils ne peu- vent point leur opposer des forces intérieures assez actives ; et comme la cause la plus contraire à une foible chaleur interns est un froid extérieur plus où moins rigoureux , il n’est pas surprenant que les quadrupèedes ovipares ne puissent résister aux effets d’une atmosphère plutôt froide que tempérée. Voilà pourquoi on ne rencontre la plupart des tortues de mer, les crocodiles , et les autres grandes espèces de quadrupèdes ovi- pares , que près des zones torrides, ou du moins à des latitudes peu élevées, tant dans l’ancien que dans le nouveau continent; et non-seulement ces grandes espèces sont confinées aux envi- rons de la zone torride; mais encore, à mesure que les indi- vidus et les variétés d’une même espèce habitent un pays plus éloigné de l'équateur, plus élevé ou plus humide, et par con- séquent plus froid , leurs dimensions sont beaucoup plus petites. Les crocodiles des contrées les plus chaudes l’emportent sur les 3 Voyez les articles particuliers de leur histoire. DISCOURS SUR LES OVIPARES. 13 antres par leur grandeur et par leur nombre; et si ceux qui vivent tres-pres de la ligne sont quelquefois moins grands que ceux que l'on trouve à des latitudes plus élevées, comme on le remarque en Amérique, c'est qu'ils sont dans des pays plus peuplés, où on leur fait une guerre plus cruelle, et où ils ne trouvent ni la paix n1 la nourriture , sans lesquelles ils ne peu- vent parvenir à leur entier accroissement. La chaleur de l'atmosphère est même si nécessaire aux qua drupèdes ovipares , que lorsque le retour des saisons réduit les pays voisins des zones torrides à la froide température des con- irées beaucoup plus élevées en latitude , les quadrupèdes ovi- pares perdent leur activité , leurs sens s’émoussent, la chaleur de leur sang diminue, leurs forces s’affoiblissent ; ils sempressent de gagner des retraites obscures, des antres dans les rochers, des trous dans la vase, ou des abris dans les joncs et les autres végétaux qui bordent les grands fleuves. Ils cherchent à y jouir d'une température moins froide , et à y conserver, pendant quelques momens , un reste de chaleur prèt à leur échapper. Mais le froid croissant toujours , et gagnant de proche en proche, se fait bientôt sentir dans leurs retraites, qu'ils paroiïssent choï- sir au milieu de bois écartés, ou sur des bords inaccessibles , pour se dérober aux recherches et à la voracité de leurs enne- mis pendant le temps de leur sopeur, où ils ne leur offriroient qu’une masse sans défense et un appât sans danger. Ils s’endor- ment d’un sommeil profond ; ils tombent dans un état de mort apparente ; et cette torpeur est si grande, qu’ils ne peuvent être réveillés par aucun bruit , par aucune secousse , ni même par des blessures : ils passent inertement la saison de l'hiver dans cette espèce d’insensibilité absolue, où ils ne conservent de l'animal que la forme, et seulement assez de mouvement intérieur pour éviter la décomposition à laquelle sont soumises toutes les substances organisées réduites à un repos absolu. Ils me donnent que quelques foibles marques du mouvement qui reste encore à leur sang, mais qui est d’autant plus lent, que souvent il n’est animé par aucune expiration ni inspiration. Ce qui le prouve, c’est qu'on trouve presque toujours les quadru- pèdes ovipares engourdis dans la vase, et cachés dans des creux le long des rivages, où les eaux les gagnent et les surmontent souvent, où ils sont par conséquent beaucoup de temps sans 14 | HISTOIRE NATURELLE. pouvoir respirer , et où ils reviennent cependant à la vie des que la chaleur du printemps se fait de nouveau ressentir. Les quadrupèdes ovipares ne sont pas les seuls animaux qui s’engourdissent pendant l'hiver aux latitudes un peu élevées : les serpens, les crustacées, sont égalemeut sujets à sengourdir; des animaux bien plus parfaits tombent aussi dans une torpeur an- nuelle, tels que les marmoties, les loirs, les chauve-souris, les hérissons , elc. Mais ces derniers animaux ne doivent pas éprou- ver une sopeur aussi profonde. Plus sensibles que les quadru- pèdes ovipares, que les serpens et les crustacées, ils doivent con- server plus de vie intérieure : quelque engourdis qu’ils soient , ils ne cessent de respirer ; et cette action, quoique affoiblie , n’augmente-t-elle pas toujours leurs mouvemens intérieurs ? Si pendant l'hiver il survient un peu de chaleur, les quadru- pèdes ovipares sont plus où moins tirés de leur état de sopeur ; et voilà pourquoi des voyageurs qui, pendant des journées douces de l'hiver, ont rencontré dans certains pays des crocodiles et d’autres quadrupèdes ovipares doués de presque toute leur acti- vité ordinaire, ont assuré, quoiqu’à tort, qu’ils ne s'y engour- dissoient point. Ils peuvent aussi être préservés quelquefois de cet engourdissement annuel par la nature de leurs alimens. Une nourriture plus échauflante et plus substantielle augmente la force de leurs solides , la quantité de leur sang, l'activité de leurs humeurs, et leur donne ainsi assez de chaleur interne pour compenser le défaut de chaleur extérieure. Il arrive souvent que les quadrupèdes ovipares sont dans cet état de mort apparente pendant près de six mois, et même davantage : ce long temps n'empêche pas que leurs facultés suspendues ne reprennent leur activité. Nous verrons dans l’histoire des salamandres aquatiques, qu'on à quelquefois trouvé de ces animaux engourdis dans des morceaux de glace tirés des glacières pendant l'été, et dans les- quels ils étoient enfermés depuis plusieurs mois. Lorsque la glace éloit fondue, et que les salamandres étoient pénétrées d’une douce chaleur , elles revenoïient à la vie. Mais, comme tout à un terme dans la Nature, si le froid de- venoit trop rigoureux ou duroit trop long-temps, les quadru- pèdes ovipares engourdis périroient. La machine animale ne peut en eflet conserver qu’un certain temps les mouvemens in- térieurs qui lui ont été communiqués. Non-seulement une nou- velle nourriture doit réparer la perte de la substance qui se dis- DISCOURS SUR LES OVIPARES. 15 sipe; mais ne faut-il pas encore que le mouvement intérieur soit renouvelé, pour ainsi dire, par des secousses extérieures, et que des sensations nouvelles remontent tous les ressorts? La masse totale du corps des quadrupèdes ovipares ne perd aucune partie très-sensible de substance pendant leur longue torpeur ; mais les portions les plus extérieures, plus soumises à l'action desséchante du froid , et plus éloignées du centre du foible mouvement interne qui reste alors aux quadrupèdes ovi- pares, subissent une sorte d’altération dans la plupart de ces animaux. Lorsque cette couverture la plus extérieure de ces quadrupèdes n'est pas une partie osseuse et très-solide , comme dans les tortues et dans les crocodiles, elle se dessèche, perd son organisation, ne peut plus être unie avec le reste du COrps orga- nisé, et ne participe plus ni à ses mouvemens internes, ni à sa nourriture. Lors donc que le printemps redonne le mouvement aux quadrupèdes ovipares, la première peau , soit nue , soit garnie d'écailles, ne fait plus partie en quelque sorte du corps animé ; elle n’est plus pour ce corps qu’une substance étran- gere ; elle est repoussée, pour ainsi dire, par des mouvemens intérieurs qu'elle ne partage plus. La nourriture qui en entrete- noit la substance se porte cependant, comme à l'ordinaire, vers la surface du corps ; mais au lieu de réparer une peau qui n’a presque plus de communication avec l’intérieur , elle en forme une nouvelle qui ne cesse de s’accroître au-dessous de l'ancienne. Tous ces eflorts détachent peu à peu cette vieille peau du corps de l'animal , achèvent d’ôter toute liaison entre les parties intérieures et celte peau altérée, qui, de plus en plus privée de toute réparation , devient plus soumise aux causes étrangères qui tendent à la décomposer. Attaquée ainsi des deux côtés , elle cède, se fend ; et l'animal, revêtu d’une peau nou- velle, sort de cette espèce de fourreau, qui n’étoit plus pour lui qu’un corps embarrassant. C'est amsi que le dépouillement annuel des quadrupèdes ovi- pares nous paroït devoir s’opérer ; mais il n’est pas seulement pro- duit par l'engourdissement. Ils quittent également leur première peau dans les pays où une température plus chaude les garantit du sommeil de l'hiver. Quelques-uns la quittent aussi plusieurs fois pendant l’été des contrées tempérées. Le même effet est pro- duit par des causes opposées : la chaleur de l'atmosphère équivaut 16 HISTOIRE NATURELLE. au froid et au défaut de mouvement; elle dessèche également la peau, en dérange le tissu et en détruit l'organisation. Des animaux d'ordres très-différens des quadrupèdes ovipares éprouvent aussi, chaque année, et même à plusieurs époques , une espèce de dépouillement; ils perdent quelques-unes de leurs parties extérieures. On peut particulièrement le remarquer dans les serpens , dans certains animaux à poil, et dans les oiseaux. Les insectes et les végétaux ne sont-ils pas sujets aussi à une sorte de mue? Dans quelques êtres qu'on remarque ces grands change- mens, on doit les rapporter à la même cause générale. Il faut tou- jours les attribuer au défaut d'équilibre entre les mouvemens in- térieurs et les causes externes : lorsque ces dernières sont supé- rieures , elles altèrent et dépouillent ; et lorsque le principe vital lemporte, il répare et renouvelle. Mais cet équilibre peut être rompu de mille et mille manières , et les effets qui en résultent sont diversifiés suivant la nature des êtres organisés qui les épronvent. Il en est donc de cette propriété de se dépouiller , ainsi que de toutes les autres propriétés et de toutes les formes que la Nature distribue aux différentes espèces, et combine de toutes les ma- nières, comme si elle vouloit en tout épuiser toutes les modifi- calions. C’est souvent parce que nos connoissances sont bornées , que l'imagination la plus bizarre nous paroît allier des qualités et des formes qui ne doivent pas se trouver ensemble. En étudiant avec soin la Nature, non-seulement dans ses grandes productions, mais encore dans cette foule immense de petits êtres, où 1l sem- ble que la diversité des figures extérieures ou internes ; et par conséquent celle des habitudes, ont pu être plus facilement im primées à des masses moins considérables, l’on trouveroit des êtres naturels dont les produits de l'imagination ne seroienti sou- vent que des copies. IL y aura cependant toujours une grande dif- férence entre les originaux et ces copies plus ou moins fidéles : l'imagination , en assemblant des formes el des qualités disparates, ne prépare pas à cette réunion extraordinaire; elle n’emploie pas cette dégradation successive de nuances diversifiées à l'infini qui peuvent rapprocher les objets les plus éloignés, et qui, en déce- lant la vraie puissance créatrice, sont le sceau dont la Nature marque ses ouvrages durables, et les distingue des productions passagtres de la vaine imagination. / Lorsque les quadrupèdes ovipares quittent leur vieille couver- ture, leur nouvelle peau est souvent encore assez molle pour les % DISCOURS SUR LES OVIPARES. i7 rendre plus sensibles au choc des objets extérieurs : aussi sont ils plus timides, plus réservés , pour ainsi dire, dans leur dé- marche, etse tiennent-ils cachés au tant qu'ils le peuvent, jusqu’à ce que cette nouvelle peau ait été fortifiée par de nouveaux sucs nourriciers et endurcie par les impressions de l'atmosphère. Les habitudes des quadrupédes ovipares sont en général assez douces : Leur caractère esl sans férocité. Si quelques-uns d'eux, comme les crocodiles, détruisent beaucoup, c’est parce qu'ils ont une grande masse à entretenir * : mais ce n’est quedanslesarticles particuliers de cette Histoire que nous pourrons montrer com. ment ces mœurs générales et communes à tous les quadrupèdes ovipares sont plus où moins diversifiées dans chaque espèce par leur organisation particulière et par les circonstances de leur vie. Nous verrons, par exemple, les uns se nourrir de poissons: les autres donner la chasse de préférence aux animaux qui rampent sur la terre, aux petits quadrupèdes, aux oiseaux même qu’ils peuvent atteindre sur les branches des arbres : ceux-ci se nourrir uniquement des insectes qui bourdonnent dans l'atmosphère : ceux-là ne vivre que d'herbe, et ne choisir que les plantes par- fumées : tant la Nature sait varier les moyens de subsistance dans toules les classes , et tant elle les a toutes liées par un grand nom- bre de rapports! La chaine presque infinie des êtres, au lieu de se prolonger d’un seul côté , et de ne suivre > Pour ainsi dire È qu’une ligne droite, revient donc sans cesse sur elle-même , S'é= tend dans tous les sens, s'élève, s’abaisse , se replie; et par les dif- férens contours qu’elle décrit, les diverses sinuosités qu'elle for- me, les divers endroits où elle se réunit , ne représente-t-elle pas une sorte de solide , dont toutes les parties s’enlacent et se hent étroitement, où rien ne pourroit être divisé sans détruire l'en semble, où l’on ne reconnoît ni premier n1 dernier chainon >etoù même l’on n'’entrevoit pas comment la Nature a pu former ce tissu aussi immense que merveilleux ? Les quadrupedes ovipares sont souvent réunis en grandes trou pes; l'on ne doit cependant pas dire qu’ils forment une vraie so- ciété. Qu'est-ce en effet qui résulte de leur altroupement? aucun ouvrage , aucune chasse, aucune guerre, qui paroissent concer- tés. Ils ne construisent jamais d'asile; et lorsqu'ils en choisissent ELEVEUR CRE RE 07 * Voyez particulièrement l’histoire des crocodiles. Lacepède. 1. 2 18 HISTOIRE NATURELLE. sur des rivages, dans des rochers , dans le creux des arbres, etc., ce n'est point une habitation commode qu'ils préparent pour un certain nombre d'individus réunis, et qu’ils tâchent d’approprier à leurs différens besoins; mais c’est une retraile purement indi- viduelle, où ils ne veulent que se cacher, à laquelle ils ne chan- gent rien, et qu’ils adoptent également , soit qu’elle ne suflise que pour un seul animal, ou soit qu'elle ait assez d’étendue pour re- céler plusieurs de ces quadrupèdes. Si quelques-uns chassent ou pêchent ensemble, c'est qu'ils sont également attirés par le même appât ; s'ils attaquent à la fois, c'est parce qu'ils ont la même proie à leur portée; s'ils se défendent en commun , c’est parce qu'ils sont attaqués en même temps, et si quelqu'un d’eux a jamais pu sauver la troupe entière en l’aver- dissant par ses cris de quelque embüche, ce n'est point, comme on l'a dit des singes et de quelques autres quadrupèdes , parce qu'ils avoient été, pour ainsi dire, chargés du soin de veiller à la sûreté commune , mais seulement par un effet de la crainte que l'on retrouve dans presque tous les animaux, et qui les rend sans cesse atlenlifs à leur conservation individuelle. Quoique les quadrupèdes OTAPRNES paroissent moins sensibles que les autres quadrupèdes, ils n'en éprouvent pas moins ; au tetour du printemps, le sentiment impérieux de l'amour, qui, dans la plupart des animaux , donne tant de force aux blé foi- bles , tant d'activité aux plus lents, tant de courage aux plus là- ches. Malgré le silence habituel de plusieurs de ces quadrupèdes, ils ont presque tous des sons particuliers pour exprimer leurs dé- sirs. Le mâle appelle sa femelle par un cri expressif, auquel elle répond par un accent semblable. L'amour n'est peut-être pour eux qu’une flamme légère qu’ils ne ressentent jamais très-vive- ment, comme si lés humeurs dont leur corps abonde les garan- tissoient de cette chaleur intérieure et productrice qu’on a com- parée, avec plus de raison qu'on ne le pense, à un véritable feu, èt qui est de même amortie ou tempérée par tout ce qui tient au froid élément de l'eau. H semble cependant que la Nature a voulu suppléer , dans le plus grand nombre de ces quadrupèdes, à l’ac- livilé intérieure qui leur manque, par une conformation des plus propres aux jouissances de l'amour. Les parties sexuelles des mà- des sont toujours renfermées dans l’intérieur de leur corps , jus- qu'au moment où ils s’accouplent avec leurs femelles’. La chaleur Be 3 C’est par l'anus que les mâles des lézards et des tortues font sortir et introdui- DISCOURS SUR LES OVIPARES. 11 interne qui ne cesse de pénétrer les organes destinés à perpètuer leur espèce, doit ajouter à la vivacité des sensations qu’ils éprou- vent : et d’ailleurs ce n’est pas pendant des instans très-courts, comme la plupart des animaux, que les tortues marines et plu- sieurs autres quadrupèdes ovipares communiquent et reçoivent la flamme qu'ils peuvent ressentir; c’est pendant plusieurs jours que dure l'union intime du mâle et de la femelle, sans qu’ils pnis- sent être séparés par aucune crainte, ni même par des blessures profondes *. Les quadrupèdes ovipares sont aussi féconds que leur union est quelquefois prolongée. Parmi les vivipares, les plus petites espè- ces sonten général! celles dont les portées sont les plus nombreuses: cette loi, constante pour tous ces animaux, ne s'étend pas Jusque sur les durer ovipares , dans OU sa force est vaincue par la nature de leur organisation ; 1] paroît même que les gran- des espèces de ces derniers quadrupèdes sont quelquefois bien plus fécondes que les petites, comme On pourra le voir dans l'histoire des tortues marines, etc. ) Mais si les qua akh pèdes ovipares semblent éprouver assez vive- ment l'amour , ils ne ressentent pas de même la tendresse pater- nelle; ils abandonnent leurs œufs Apres les avoir pondus: la plu- part, à la vérité, choisissent la place où ils les déposent ; quelques uns, plus attentifs, la préparent et l’arrangent; ils creusent même des trous où ils les renferment et où 1ls les couvrent de sable et de feuillages. Mais que sont tous ces soins en comparaison de l’at- iention vigilante dont les petits qui doivent éclore sont l’objet dans plusieurs espèces d'oiseaux? Et l'on ne peut pas dire que la conformation de la plupart de ces animaux ne leur permel pas de transporter et de meltre en œuvre des matériaux nécessaires pour construire une espèce de nid plus parfait que les trous qu'ils creusent, etc. Les cinq doigts longs et séparés qu'ont la plupart des quadrupèdes ovipares, (r qualre pieds, leur gueule et leur queue, ne leur donneroient-ils pas en eflet plus de moyens pour y pârvenir ,que deux pattes et un bec n’en donnent aux oiseaux? La grosseur de leurs œufs varie, suivant les espèces, beaucoup . nd E Es = ê » = _— sent leurs parties sexuelles , et que ceux des grenouilles, des crapauds et des rai aes, répandent leur liqueur fécondante sur les œufs que pondent leurs femelles ; ainsi que nous le verrons dans les articles particuliers de leur histoire, 4 Voyez l’article de la £ortue franche, 20 :. HISTOIRE NATURELLE. plus que dans ces derniers animaux ; ceux des très-petits quadru- pèdes ovipares ont à peine une demi-ligne de diamètre, tandis que les œufs des plus grands ont de deux à trois pouces de lon- gueur. Les embryons qu'ils contiennent se réunissent quelquefois avant d’y être renfermés, de manière à produire des monstruo- sités, ainsi que dans les oiseaux. On trouve dans Seba la figure d’une petite tortue à deux iêtes, et l’on conserve au Cabinet du Roi un très-petit lézard vert qui a deux têtes et deux cous bien distincts *. L’enveloppe des œufs des quadrupèdes ovipares n’est pas la même dans toutes les espèces : dans presque toutes , et particu- lièrement dans plusieurs tortues, elle est souple, molle, et sem blable à du parchemin mouillé ; mais, dans les crocodiles et dans quelques grands lézards, elle est d’une substance dure et crêta cée comme les œufs des oiseaux, plus mince cependant, et par con- séquent plus fragile. Les œufs des quadrupèdes ovipares ne sont donc pas couvés par la femelle. L’ardeur du soleil et de l'atmosphère les fait ‘éclore, et l'on doit remarquer que, tandis que ces quadrupèdes ont besoin pour subsister d’une plus grande chaleur que les oiseaux, leurs œufs cependant éclosent à une température plus froide que ceux de ces derniers animaux. Il semble que les ma- chines animalesles plus composées , et, par exemple , celle des oiseaux, ne peuvent être mises en mouvement que par une chaleur extérieure très-active, mais que, lorsqu'elles jouent, les frottemens deleursdiverses parties produisent une chaleur interne qui rend celle de l'atmosphère moins nécessaire pour la conser- vation de leur mouvement. Les petits des quadrupèdes ovipares ne connoissent donc ja- mais leur mère ; ils n’en reçoivent jamais ni nourriture, ni soins, nl secours ; ni éducation ; ils ne voient ni n’entendent rien qu'ils puissent imiter ; le besoin ne leur arrache pas long-temps des cris, qui, n'étant point entendus de leur mère, se perdroient dans les airs, et ne leur procureroient ni assistance ni nourri- ture; jamais la tendresse ne répond à ces cris , el jamais il ne s’'é- tablit, parmi les quadrupèdes ovipares, ce commencement d’une sorte de langage si bien senti dans plusieurs autres animaux : 1 Ila été envoyé par M. le duc de la Rochefoucauld, qui ne cesse de donner des preuves de ses lumières et de son zèle pour l'avancemegt des sciences. DISCOURS SUR LES OVIPARES. oi ils sont donc privés du plus grand moyen de s’avertir de leurs différentes sensations, et d'exercer une sensibilité qui auroit pu s'accroitre par une plus grande communication de leurs affec- tions mutuelles. Mais si leur sensibilité ne peut être augmentée, leur naturel est souvent modifié. On est parvenu à apprivoiser les crocodiles, qui cependant sont les plus grands, les plus forts et les plus dangereux de ces animaux ; et à l'égard des petits quadrupèdes ovipares, la plupart cherchent une retraite autour de nos ha- bitations; certains de ces animaux partagent même nos demeu- res, où ils trouvent en plus grande abondance les insectes dont ils font leur proie; et tandis que nous recherchons les uns, tels que les petites espèces de tortues, tandis que nous les apportons dans nos jardins , où ils sont soignés , protégés et nourris, d’au- ires , tels que les lézards gris, présentent quelquefois une sorte de domesticité, moins parfaite, mais plus libre, puisqu'elle est entièrement de leur choix, plus utile, parce qu'ils détruisent plus d'insectes nuisibles, et, pour ainsi dire, plus noble , puis- qu'ils ne reçoivent de l'homme ni nourriture préparée ni retraite parliculière. Presque tous les quadrupèdes ovipares répandent une odeur forte, qui ne diffère pas beaucoup de celle du muse, mais qui est moins agréable, et qui par conséquent ressemble un peu à celle qu'exhalent des animaux d'ordres bien différens, tels que les serpens, les fouines, les belettes, les putois, les moufeltes d'Amérique ; plusieurs oiseaux, tels que la huppe , etc. Cette odeur plus ou moins vive est le produit de sécrétions pariicu- lières, dont l'organe est très-apparent dans quelques quadru pèdes ovipares, et particulièrement dans le crocodile, ainsi que nous le verrons dans les détails de cette Histoire. Les quadrupèdes ovipares vivent en général très-long-temps. On ne peut guère douter, par exemple, que les grandes tortues de mer ne parviennent, ainsi que celles d’eau douce et de terre, à un âge tres-avancé; et une irès-longue vie ne doit pas élonner dans ces animaux, dont le sang est peu échauflé, qui transpirent à peine, qui peuvent se passer de nourriture pendant plusieurs mois, qui ont si peu d’accidens à craindre, et qui réparent si aisément les pertes qu'ils éprouvent. D'ailleurs ils vivent pendant un bien plus grand nombre d'années que les quadrupédes vivipa- res, si l’on ne calcule l'existence que par la durée, Maïs si l’on veut 22 HISTOIRE NATURELLE. compter les vrais momens de leur vie, les seuls que l'on doive estimer , ceux où ils usent de leur force et font usage de leurs fa- cultés, on verra que, lorsqu'ils habitent un pays éloigné de la h- gme, leur vie est bien courte, quoiqu’elle paroisse renfermer un grand espace de temps. Engourdis pendant près de six mois, il faut d’abord retrancher la moitié de leurs nombreuses années ; et pendant le reste de ces ans qui paroïssent leur avoir été prodi- gués , combien ne faut-1l pas ôter de jours pour ce temps de ma- ladie où, dépouillés de leur première peau , ils sont obligés d’atten- dre dans une retraite qu’une nouvelle couverture les mette à l’a- bri des dangers ! combien ne faut-1l pas ôter d’instans pour ce sommeil journalier auquel ils sont plus sujets que plusieurs au— tresanimaux , parce qu'ils reçoivent moins de sensations qui les réveillent, et surtout parce qu'ils sont moins pressés par l’aiguil- Jon de la faim! II ne restera donc qu'un très-petit nombre d'an- nées où les quadrupèdes ovipares soient réellement sensibles et actifs, où ils emploient leurs forces, où ils usent leur machine, où ils tendent avec rapidité vers leur dépérissement. Pendant tont le temps de leur sopeur, inaccessibles à toute impression , froids, immobiles et presque inanimés , 1ls sont en quelque sorte réduits, à l'état des matières brutes, dont la durée est très-longue, parce que le temps n’est pour ces substances qu'une succession d'états: passifs et de positions inertes sans effets produetifs , et par consé- quent sans causes intérieures de destruction, bien loin de pou- voir être compté par de vives jouissances et par les effets féconds. qui déploient, mais usent, tous les ressorts des êtres animés. Plusieurs voyageurs ont écrit que quelques lézardset quelques quadrupèdes ovipares sans queue renferment un poison plus ou moins actif. Nous verrons dans les articles particuliers de celte: Histoire , que l'on ne peut regarder comme venimeux qu'un très- petit nombre de ces quadrupèdes. D'un autre côté, l’on sait qu’au- cun quadrupède vivipare et qu'aucun oiseau ne sont infectés de venin; ce n'est que parmi les serpens , les poissons, les vers, les insecies et les végétaux , que l’on rencontre plusieurs espèces plus ou moins venimeuses. [l sembleroit donc que abondance des sucs mortels est d’autant plus grande dans les êlres vivans, que leurs humeurs sont moins échaufées , et que leur organisation inté- rieure est plus simple. Maintenant nous allons examiner de plus près les divers qua- drupèdes ovipares dont nous avons remarqué les qualilés commu - DISCOURS SUR LES OVIPARES. 23 hes, et observé les attributs généraux. Nous commencerons par les diverses espèces de tortues de mer, d'ean douce et de terre; nous considérerons ensuite les crocodiles et les différens lézards, dont les espèces les plus petites, et particulièrement celles des sa lamandres, ont tant de rapports avec les grenouilles et les autres familles de quadrupèdes ovipares qui n'ont pas de queue, et par l'histoire desquels nous terminerons celle de tous ces animaux. Nous ne nous arrélerons cependant beaucoup qu'à ceux qui, par la singularité de leur conformation, l'étendue de leur voinine, la grandeur de leur puissance, la prééminence de leurs qualités , mériteront un plus grand intérêt et une attention plus marquée, Pour parvenir à peindre la Nature, tâchons de limiter: et de même que les espèces distinguées paroissent avoir été les objets de sa prédilection , qu’elles soient ceux de notre attention particu- lière, comme réfléchissant vers nous plus de lumière, et comme en répandant davantage sur tout ce qui les environne; et lors- qu'il s'agira de tracer les limites qui séparent les espèces les unes des autres, lorsque nous serons indécis sur la valeur des carac- ières qui se présenteront , nous aimerons mieux ne compicr qu'une espèce que d’en admettre deux, bien assurés que les in-- dividus ne coûtent rien à la Nature, mais que, malgré son im- mense fécondité, elle n’a point prodigué inutilement les espèces. Ses eflets sont sans nombre, mais non pas ies causes qu'elle fait agir. Nous croirions donc mal représenter laugnste simplicité de son plan, et mal parler de sa force, en lui rapportant sans raison une vaine multiplication d'espèces, nous pensons au Coniraire mieux révéler sa puissance en disant que toutes ces différences qui font la magrificence de l'univers, que toutes ces variétés qui l'em- bellissent, elle les a souvent produites en modifiant de diverses manières les espèces réellement distinctes. Bien loin d'enrichir la science, ne l'appauvrissons pas; ne la rabaissons pas en la sur chargeant d’un poids inutile d'espèces arbitraires, et n'oublions jamais que, du haut du trône sublime où siège la Nature, domi- nant sur le temps.et sur l'espace, elle n'emplote qu'un petit nombre de puissances pour animer la matière, développer tous les êtres et mouvoir tous les eorps de ce vasie univers. . SAAB VS M VU UV UV AAA AAA UV UV UV AAA AN AN AAA RAA TABLE ALPHABÉTIQUE De tous les noms que lon a donnés aux quadrupèdes ovipares, et dont il est fait mention dans ce owrage. À Aguaquaquan , voyez agua. ÂAlcbrenne, — salamandre ter- restre. ÂAlligator, — crocodile. Americima , — queue-bleue. Anguis quadrupes, — seps. Anoles, — améiva. Anolis, — améiva. Arrassade, — salamandre ter- restre. Ask, — salamandre à queue plate. Askalabotes , — galéote. Axolotl, — salamandre à queue plate. ÂAyamaka, — iguane,. B Basilicus americanus , — basi- lic. Barpayos djumrerys, — raine verte. Barpuyos ÉAuos , — grenouille commune. Bec à faucon , — caouane. Bec à faucon , — tortue caret. Bin jawacok jangur eckor, — lézard porte-crête. Blande, — salamandre terrestre. the Blue lizard, — agarmne. Boiah, — caméléon. Brochet de terre, -— lézard doré. Bufo ,, — crapaud commun. Bufo brasiliensis, — agua. Bufo calamita , — calamite. Bufo cornutus, — crapaud cor- «+ 16. Bufo fuscus, — crapaud brun. Bulo gibbosus, — crapaud bos- su. Bufo igneus, — couleur de feu. Bufo marmoratus, — crapaud marbré. Bufo obstetricans, — crapaud commun. Bafo pustulosus, — crapaud pusluleux. Bufo schreberianus, — rayon- veré. Bufo ventricosus, — crapaud ottreux. Bufo viridis, — crapaud vert. Bull-frog, — grenouille mugis- sante. Bumbos , — crocodile. C. Caiman, — crocodile. Caïman , — tupinambis. ) Caliscertula , — lézard vert. Canuaneros, — caouane. TABLE ALPHABÉTIQUE. Caret, — caouane. Caudi-verbera, — cordyle. hamæleo, — caméléon. Chamæleo africanus, — camé- léon. Chamæleo Bonæ-Spei, — ca- méléon. Ehamæleo candidus, — camé- léon. Chamæleo mexicanus, — camé- léon. Chamæleo Parisiensium, — ca- méléon. Chamæleo zeylanicus, — camé- léon. Chamsan , — crocodile. 25 Cordule, — salamandre à queue late. Cordylus, — dragonne. Cordylus hispidus, — tapaye. Cordylus orbicularis, — tapaye. Cordylus stellio, — stellion. Cordylus verus , — cordyle. Cossordilos, — stellion. Crocodile à bec allongé, — pa- vial. Grocodile à mâchoires allongées, avial. Crocodile à tête allongée, — za- vial. Crocodile terrestre , — scinque. Cururu , — pipa. LP Diasik , — crocodile. Doocame, — tortue bourbeuse. Doogame, — tortue bourbeuse. Draco major, — dragon. Draco minor, — dragon. Draco præpos, — dra son. Draco volans , — dragon. Dracanculus, — drayon. Dragon d'Amérique, amphibie qui voie, — basilic. F. Famocantrata, — lézard à tele plate. Famocantraton , — lézard à tte plate. Fardacho , — Zézard vert. Feuer krote , — couleur de feu. G. Gahote , — galéote. Galliwasp , — lézard doré. Galtabé, — éupinambis. Gecko muricatus , — geckotte. Gecko vérticillatus, — s'eckotte. Gekko teres, — gecko. Grenouille chan geante,—rayon- veré. Grenouille cinq-doigts, — gre- noutlle musissante. Grenouille mangeable, — sre- nourlle commune. Grenouille taureau |, — gre- nouille mugoissante. Gobe-mouche, — /ézard vert. the Green turtie, — sortue fran- che. Gros lézard, — iguane. Grosse Lorthe , — eboanrel Ground lizard, — améiva. 26 TABLE ALPHABÉTIQUE. Guan, — crocodile, Guanas, — isuane. Guana, — rou1ane. Guano., — tupinambis. the Guana, — iguane. Guaral, — lézard marbre: the Guana Lizard,— agame. HT: the Hawks bill turtle, — fortue Hyla ranæformis, — raine bos= careë. sue. Hécate, — tortue géométrique. Hyla rubra, — raine rouge. Hélioscope , — lézard plissé. « Hyla scleton, — raine orangée. Hyla aurantiaca , — raine oran- Hyla tibiairix, — raine flûteuse. ce. Hyla viridis, — raine verte. Hyla fusca, — raine brune. Hyla lictea , — raine couleur de lait. I. Tacare, — crocodile. Tguana tuberculata, — iguane. Touarucu , — dragonne. louete de agua, — salamandre Touana calotes, — galéote. à queue plate. Tguana chalcidica, — galéote. Togame, — tortue bourbeuse. Iguana clamosa, — téte- four- {sicame , — tortue grecque. chue. luruca, — caouane. Tguana cordylina, — agame. Iurucua, — tortue franche. Iguana delicatissima , — iguane. Yurucuja, — éortue franche. Iguanasalamandrina, — agame. K. Xæuæihtoy, — caméléon. Kobbera guion, — fouette-queue. Kaouane , — caouane. Kolotes, — galeote. Xehovy xepouiæ, — tortue srecque. Krauthun, — lézard vert. Kimbuta, — crocodile. Xpoxodtinos ; — crocodile. Kimsak, — crocodile. I. Lacerta abdominalis, — seps. Eacerta amboïnensis, = /é:ar@ Lacerta agama , — agame. porte-crête. Tacerta agilis, — /ézard gris. Lacerta anguina, — seps. Lacerta agilis (varietas B), — /é- Lacerta angulata, — lézard hexa- zard vert. gone. Lacerta algira, — algire, . Lacerta asurea, — lézard azuré. TABLE ALPHABÉTIQUE. Lacerta aurata, — Zézard doré. Lacerta basilicus, — Zézard ba- silice. | Lacerta bicarinata, — lézard sil- lonné. Tacerta bullaris, — /ézard rouge- gorge. Lacerta calotes, — galeote. Lacertacauda-cærulea,— queue- bleue. Lacertacaudi-verbera,— fouette- queue. Lacerta dracæna , — dragonne. Lacerla fasciata, — queue-bleue. Lacerta Japonica, — salaman- dre terrestre. Lacerla iguana , — iguane. Lacerta lemniscata, — /ézard galonné. Lacerta libyca , scinque. Lacerta marmorata, — lézard marbré. Pacerla mauritanica, — gec- Lotte. Lacerta maxima caudi-verbera, — dragonne. Lacerta minor cinerea maculata aSIAUICA , — grison. Lacerta monitor, — fupinam- bis. Lacerta nilotica, — lézard trian- gulaire Lacerta orbicularis , — {apaye. Tacerla palustris, — salamandre à queue plate. Tacerta plica , — lézard plissé. Lacerta principalis, — lézard large-doict. Lacerta punctata , — double- rire. Lacerta punctata, — sa/aman- dre ponctuée. Lacerta quinque-lineata , — 4é- zard strié. Lacerta scutata, —téte-fourchue. 27. Lacerta sex - lineala, — Zzard lion. Lacerta stellio , — stellion. Lacerta strumosa, — lézard groi- {reux. Lacerta superciliosa, — Zézar& sourcilleux. Facerta turcica , — grison. Lacerta umbra, — wmbre. Lacerta viridis, — lézard vert. Lacerta viridis jamaïcensis, — lézard rouge-gorge. Lacerta viridis punctis albis , — lézard vert. Lacerta vulsaris, — salamandre à queue plate, Lacertus aquaticus, — sa/aman- dre à queue plate. Lacertus cinereus minor , — roquet. Lacertus cordylus , — cordyle. Lacertus cyprius scincoïdes , — scinque. Lacertus ind'eus, — améiva. Lacertus indicus, — dragonne. Lacertus major cinereus macu- lalus , — améiva. Lacertus major viridis,--améivae, Lacerius marianus minor caudä cærule , — queue-bleue. Lacertus maximus,— crocodile. Lacertus viridis , — lézard vert. Lacertus viridiscarolinensis , — lézard vert. Lacertus volans, — dragon. La cicigna , — seps. Lagarüja , — lézard gris. Lagarto , — lézard vert. Lagator , — crocodile. Langrola , — lézard gris. the Large grey chamæleon, — caméléon. the Large spotted, — améiva.. Laverne, — salamandre terres- tre. Lazer, — lézard vert, 28 the Least light brown or grey lizard, — roquet. Leguan, — guane. Leguana , — iguane Leviathan, — crocodile. Lézard couleur de sang, — al- Qgtre. Lézard hexagonal , — /Zézard hexagone. Lézard moucheté , — éupinam- bis. Lézard rayé , — salamandre quatre-raies. TABLE ALPHABÉTIQUE. Lézard sauveur, — fupinambis: Lézard sauvegarde, — £upinam- bis. Lézard véloce , — lézard gris. Lézards amphibies d'Afrique , — salamandre à queue plate. Ligan, — crocodile. Ligan , — éupinambis. Ligans, — tupinambis. the Little brown lizard ; — /6- zard gris. the Lodger head - turtle , — caouane. M. Mabouya , — lézard doré. Marasandola , — salamandre à queue plate. Mirtil, — salamandre terrestre. Mouron, — salamandre terres- tre. Mus aquatilis, — tortue bour- beuse. Mus marinus, = fortue fran- che. N. Nesdoxpaxodtinos | — crocodile. O. Occiput fourchu , — réte-four- chue. Ophiomachus , — galéote: Oulla ouna , — lézard vert. P. Dpôves, — crapaud commun. Phrynum,— crapaud commun. Pistillonti , — stellion. Pluvine , — salamandre terres- tre, Poisson de Dieu, — tortue fran- che. Punter -maal, — salamandre terresire, R. Raine squelette, — raine oran- gees Rana, — grenouille commune. Rana, — raine verte. Rana americana , — épaule- armée. Rana aquatica, grenouille corm- mune. TABLE ALPHABÉTIQUE. Fana arborea , — raine verte. Rana bicoloris, — raine verte. Rana bufo, — crapuud commun. Rana cornuta,= crapaud cornu. FRana esculenta, — grenouille commune. Rana gibbosa, — crapaud bossu. Rara ous — gg enouille mugissante. Rana margarifera, — srenouille perlée. Rana marina, — épaule-armée. Rana marina maxima,—épaule- armée. Rana maxima, — patte-d'oie. Rana maxima americana aqua- tica, — srenouille mugtssante. Rana maxima compressa mis- cella,— srenoutlle mugissante Rana musica, — crapaud criard. Rana mutabilis, — rayon vert. Rana ocellata, — srenouille mu- 30 £gissante. Rana paradoxa, — jackie. Kana pentadactyla, — grenouille mugissante. : Rana piscis, — jackie. Rana ridibunda,—crapaud brun. Rana sitibunda, — crapaud vert. Rana surinamensis , — pipa. Rana typhonia, — grenouille galonnée. Rana ventricosa ,—crapaud got- treux. Rana venulosa , — grenouille réliculatre. Rana virginica, — grenouille galonnée. Rana viridis aquatica, — gre- noutlle commune. Ranunculus viridis, — raine verte. n Rat de mer, — Zortue luth. Rubeta, — crapaud commun. S. Sabutis , — tortues terrestres, peut-être tortues grecques. Salämander , — salamandre ter- restre. Salamandra aquatica, —- sala- mandre & queue plate. Salamandra atra, — salamandre terrestre. Salamandra ceylanica , — sala- mandre à queue plate. Salamandra, — gecko. Salamandra indica , — gecko. Salamandra maculosa, — sala- mandre terrestre. Salamandra minima fusca ma- culis albis notata,— mabouya. Salamandre , — Zézard doré. Salamanguesa , — salamandre terrestre. Salamategua,— sadamandre ter- restre. Sanki, — tortue grecque, Sargantana , — lézard gris. Eavpos Eyv0hos , = salarmandre & queue plate. Zavpos xpopos, — lézard vert. Exlyxos , — scinque. Zxryyos, — scinque. Scincus, — lézard doré. Seoul » — Scinque. Scincühs maximus fuscus, = Z6- zard doré. Scincus officinalis , — scinque. Scinq de terre , — pus doré. Scinq marin , — lézard doré. Senembi, — iauañel Seps argus, — lézard gris. Seps cærulescens, — lézard gri 18. Seps lemniscatus, — lézard ga- lonné, Seps muralis, — lézard gris Seps surinamensis , — améivæ, Seps terrestris, — lérard STES, Seps varins , — Zézard vert, 30 Sourd (le), — salamandre ter- r'esire. Stellio, — salamandre ponctuée. Stellion , — lézard vert. Stellione tarentole, -— stellion. TABLE ALPHABÉTIQUE. Stellio punotatus , — double- raie, Stellio salvator, — fupinambis. Stellio saurus, — éupinambis. Suisse, — salamandre terrestre. he" Taitah, — caméléon. Takaie, — crocodile. Tamacolin, — iguane. Tapayaxin, — stéllion. Tapayaxin ; — {apaye. Tartaruga , — tortue franche. Tassot , — salamandre à queue plate. Tejuguacu, — tupinambis. Temapara , — lézard marbré. Temapara -tupinambis , — {u- pinambis. Terrapène,—tortue séométrique. the Terrapin , — terrapène. Testudo atra, — tortue franche. Testudo caretta, — caouane. Testudo carinata, — tortue bom- bée. Testudo carolina, — {ortue cour- e-queue. Testudo cartilaginea , — ortue molle. Testudo cephalo , — caouane. Testudo coriacea ,— tortue luth. Testudo corticata vel corticosa , — caouane. Testudo denticulata , — éortue dentelée. Testudoeuropæa,—t{ortueronde. Testudo ferox , — tortue molle. Testudo fimbriata, — tortue scorpion. Testudo geometrica , — {tortue géométrique. Testudo græca , — tortue grec- He. Testudo imbricata , — fortue carel, Testudo lutaria, — /ortue bour- beuse. Testudo [yra , — tortue luth. Testudo marina, — tortue fran- che. Testudo marina vulgaris, — tortue franche. Testudo midas, — tortue fran- che. Testudo orbicularis , — tortue ronde. Testudos picla seu stellata, — tortue géométrique. Testudo pusilla, — sortue ver- millon. Testudo scabra , — tortue rabo- leuse. Testudo scorpioides |, — tortue scorpion. Testudo serpentina , — tortue serpentine. Testudo squammata , — tortue carel. Testudo terrestris amboinensis minor, — ortue raboteuse. Testudo terrestris major ameri- cana , — forlue courle-queue. Testudo terrestris pusilla ex In- dia orlentali, — tortue ver- millon. Testudo terrestris vulgaris , — torlue grecque. Testudo tessellata minor, — £or- lue géométrique. Testudo tessellata minor africa- na , — tortue vermillon. Testudo tessellata minor caroli- nensis, — /0rlue courle-queue. YABLE ALPHABÉTIQUE. 51 Testudo testa tessellata major ; Tortue bande blanche , — £or- — 1orlue géométrique. tue vermillon. Testudo virginea , — cortue ver- Tortue bâtarde ; — tortue nasi- nillon. corne. Testudo viridis, — tortue fran- Tortue coffre , — caouane. che. Tortue mercuriale, —tortue luth. Tilcuetz-pallin , wpinambis. Tortue midas, — tortue franche. Tiliguerta , — lézard vert. Tortue orbiculaire,—tortueronde Tiligugu , — mabouya. Tortue soldat, — tortue franche. Tilugoni , — mabouya. Tortue tuilée, — éortue caret. Tokaie , — gecko. Tortue verte, — tortue écaille- “Toad , — crapaud commun. verte. Tortue à clin, — tortue luth. Tortue verte, — tortue franche. Tortueamazone,—tortue écaille Tortuga de Garriga , — fortue verte. grecque. Tortue à bahut, — caouane. Triton crislatus, — salaman- dre à queue plate. Warral , — Zézard marbré. the Water eft, — salamandre à queue plate. Le Yvana,— iguane. Z. FZermouméah, — algire, AAA VUS VU UV AAA UN RAA AAA AU AU TABLE MÉTHODIQUE DES QUADRUPÉDES OVIPARES. PREMIÈRE CLASSE. + Quadrupèdes ovipares qui ont une queue. PREMIER GENRE. TORTUES: Le corps couvert d'une carapace. PREMIÈRE DIVISION. Les doigts très-inégaux, et allongés en forme de nageoires. ESPÈCES. CARACTÈRES. TORTUE FRANCHE. Un seul ongle aigu aux pieds de derrière. ECAILLE-VERTE. Des écailles vertes sur la carapace. CAOUANE. Deux ongles aigus aux pieds de derrière. TORTUE NASICORNE. Un tubercule élevé sur le museau. Les écailles du disque placées au-dessus CARET. les unes des autres, comme les ardoises | sur les toits. j La carapace de consistance de cuir, et re- Lury. ; : que MN L levée par cinq arêtes longitudinales. SECONDE DIVISION. Les doigts très-courts et presque égaux. ESPÈCES: CARACTÈRES, La carapace noire; les écailles striées dans TORTUE BOURBEUSE. leur contour, et pointüilées dans le centre. ToRTUE RONDE. La carapace aplatie et ronde, TABLE MÉTHODIQUE. 53 ESPÈCES. à CARACTÈRES. t TERRAFÈNE. La carapace aplatie et ovale. {La queue aussi longue que la carapace, TORTUE SERPENTINE. | qui paroît découpée par-derrière en cinq pointes aiguës. u jaune rougeâtre sur la tête et sur le TORTUE ROUGEATRE. D R plastron. La carapace relevée par trois arêtes longi- tudinales , les cinq écailles du milieu du disque très - allongées, le plastron TORTUE SCORPION. # ovale. TORTUE JAUNE. La carapace verte , semée de taches jaunes. La carapace souple, et sans écailles pro- TorTu 3 ; ? P Re prement dites. { La carapace tres-bombée , les bords très- ‘ TORTUE GRECQUE. larges, les doigts recouverts par une membrane. {Des rayons jaunes qui se réunissent Sur LA r s “ A TORTUE GÉOMÉTRIQUE. | chaque écaille, à un centre de la même couleur. Les écailles de la carapace blanchätres, et présentant de très-petites bandes noi- ToRTUE RABOTEUSE. râtres, celles du milieu du disque re- levées en arête, le piastron festonné par-devant. a carapace un peu en forme de cœur, les è L OR E Lee Le 2 © 1 , TORF GARE bords de cette couverture très-dentelés. | {La carapace très-convexe ; les écailles ver- Y k : EU ToRTUE 2OMBÉE. dâtres, rayées de jaune ; le plastron ( l LA ] ; ovale. {Les écailles de la carapace variées de noir, TORTUE VERMILLON. de blanc, de pourpre, de verdâtre et | de jaune. La carapace échancrée par -dévant ; les ToRTUE COURTE-QUEUE. écailles de cette couverture bordées de stries et pointillées dans le milieu. TORTUE CHAGRINÉE. Le disque osseux et chagriné. a co r : TA SA NOR £ uleu roussâtre , la carapace aplatie, les écailles minces. - . A . D cd ivne La conleur brun noirâtre , les écailles épaisses et très-douces au toucher. Lacepède, 1, “4 54 TABLE MÉTHODIQUE. SECOND GENRE. LEÉZARDS. Le corps sans carapace. PREMIÈRE DIVISION. La queue aplatie, cinq doigts aux pieds de devant. ESPÈCES. CROCODILE. CROCODILE NOIR. GAVIAL. Fou£TTE-QUEUE. DRAGONN£. TUBINAMEIS. LÉZARD SOURCILLEUX. TÊTE-FOURCHUE. \. LARGE-D0IGT, LÉZARD BIMACULÉ. LÉZARD SsILLONNÉ. CARACTÈRES. Quatre doigts palmés aux pieds de der- rière , la couleur d’un vert jaunätre. eine doigts palmés aux pieds de der- rière , la couleur noire. Quatre doigts palmés aux pieds de der- | rière, les mâchoires très-étroites et très- | | À | allongées. Cinq doigts palmés aux pieds de derrière. Cinq doigts séparés aux pieds de derrière, des écailles relevées en forme de crète sur la queue. Des doigts séparés à chaque pied; les écailles ovales, entourées de très - petits grains tuberculeux , et non relevées en forme de crête. Une arête saillante au-dessus des veux; des écailles relevées en forme de crête, depuis la tête jusqu’au bout de la queue. Deux éminences au-dessus de la tête. Une membrane sous le cou, l’avant-der- nière articulation de chaque doigt plus large que les autres. Deux grandes taches noirâtres sur les épau- les. Deux stries sur le dos, les côtés du corps lissés et relevés en arête , le dessus de a queue relevé par une double saillie. TABLE MÉTHODIQUE. 85 SECONDE DIVISION. t La queue ronde, cing doigts à chaque pied, et des écailles élevées sur le dos en forme de créte. ESPÈCES. CARACTÈRES. Une poche sous le cou; des écailles rele< IGUANE. vées en forme de crête sus la gorge, et depuis la tête jusqu’au bdut de la queue. BasiLic. Une poche sur la tête. Une membrane très-relevée , et une sorte LÉzARD -CRÊTE. EN ‘ POSE: CRERE de crête écailleuse au-dessus de la queue. Des écailles relevées au-dessous des ou ; vertures des oreilles, et depuis la tête e OTE. à = 2 P es RTE jusqu’au milieu du dos ; le dessus des © € ongles noir. Des écailles relevées en forme de crête au-dessus de la i spi : FR nE ss partie antérieure du dos; celles qui garnissent le derrière de la tête , tournées vers le museau. TROISIÈME DIVISION. La queue ronde, cinq doigts aux pieds de devant, des bandes ... écailleuses squs le ventre. ESPÈCES 4 CARACTÈRES.. HN OR ue grise , de grandes plaques sous È L ? ‘? € cou. ; La couleur verte, de grandes plaques sous LA LÉZARD VERT. leeou. |: ! CorpyLr. terminées en épines allongées , et qui La queue garnie de très-longues écailles forment des anneaux larges et festonnés. LÉZARD HEXAGONE 1. La queue présentant six arêtes très-vives. A La couleur grise ou verte, sans grandes écailles sous le cou. END TON - {Trois raies blanches et trois raies noireg de chaqué côté du dos. RE LA TT TE RON. LCR RTE TNT OUT TON OCT EM MEET EE 1? Nous n’avons pas vu l’hexagone , nous présumons qu’il a des bandes écail- leuses sur le ventre. S'il n’en avoit point, il faudroit le placer dans la quatrième division après Je téguixin. Re 417 ETS TABLE MÉTHODIQUE. ESPÈCES. t-LÉZARD GALONNÉ. des ha ronde > © ro ESPÈCES, m0 CAMÉLÉON. QUEUE-BLEUE. LÉZARD AZURÉ. :, GRISON, UMBRE 1, LÉZARD PLISSÉ. ALGIRE:. STELLION: ent 251SCINQUE, “'MABOUYA. YT LÉZARD DORÉ, CARACTÈRES. Depuis sept jusqu’à onze bandes blan- châtres sur le dos ; les cuisses mouche- tées de blanc. QUATRIÈME DIVISION. ing doigts aux pieds de devant, sans bandes écailieuses sous le ventre. CARACTÈRES. ne doigts réunis trois à trois , et deux à deux, par une membrane. Cinq raies jaunâtres sur le dos , la queue bleue. Des écailles pointues , le dos bleu. .f La couleur grise, marquée de points rous- sätres, des verrucs sur le corps. {Une callosité sur l’occiput, un pli sous la ” gueule, Deux plis sous la gueule, deux verrues garnies de pointes derrière les ouver- tures des oreilles. Quatre raies jaunes sur le dos. : ot le corps garni de tubercules aigus ; la queue couverte d’anneaux dentelés. Tout le corps garni d’écailles qui se recou- vrent comme les ardoises des toits , la mâchoire supérieure plus avancée que l'inférieure. Tout le corps garni d’écailles qui se recou- vrent comme les ardoises des toits, la mâchoire inférieure aussi avancée que .: la supérieure , la queue plus courte que le corps. Tout le corps garni d’écaïlles qui se recou- vrent comme les ardoises des toits, une raïe blanchâtre de chaque côté du dos, la queue plus longue que le corps. RE 1 Comme nousm’avons pas vu la queue bleue, l’azuré, le grison, l’umbre, nile plissé, nous pouvons seulement présumer, d’après les descriptions des auteurs; que ces cinq lézards n’ont point de bandes écailleuses sur le ventre. S’ilsen avoicnt, àl faudroit les placer dans la troisième division, à la suite du galonné. TABLE MÉTHODIQUE, , 37 ESPÈCES. CARACTÈRES. Dee Le corps arrondi et garni de pointes ai- { guës. SOATS Six raies jaunes sur la tête, cinq raies jau- Ë nes sur le corps. Des écailles relevées en forme de petites dents sous la gorge, le dessus des ongles noir, la queue relevée par neuf arètes longitudinales. | LEÉZARD MARBRÉ. La couleur de feuille morte, marquée de taches jaunes et noirètres; une petite membrane de chaque côté de l’extrémité des doigts. Roquer. La couleur verte, une vésicule rouge sous ROUGE-GORGE, la gorge. La couleur grise mêlée de brun , une poche F > F A LÉZARD GOITREUX. couverte de petits grains rougeätres sous la gorge. Técurxin. Plusieurs plis le long des côtés du corps. L’extrémité de la queue en forme de py- ; | ULAIRE. SET LÉZARD TRIANGULAIRE ramide à trois faces. Deux raies d'un jaune sale , et six rangées DouBLE-RAIE, ro de points noiratres sur le dos. » peti ile d SÉVHAERUE | De petites plaques écailleuses au pont es doigts. CINQUIÈME DIVISION. Les doigts garnis par-dessous de grandes écailles, qui'se récouvremt comme les ardoises des toits... ESPÈCES. à CARACTÈRES. Des tubercules sous les cuisses, de très- GECKo. petites écailles disposées sur la queue en bandes circulaires. GECKOTTE. Le dessous des cuisses sans tubercules. Le dessous du corps et de la tête très- TÊTE-PLATE, aplati ; la queue garnie, des deux côtés, d’une membrane. 58 TABLE MÉTHODIQUE. SIXIÈME DIVISION. Trois doigts anx pieds de devant et aux pieds de derrière. ESPÈCES. CARACTÈRES. _[Les écailles placées les unes au- dessus DEPS. des autres. CHALCIPE. Les écailles disposées en anneaux. SEPTIÈME DIVISION. Des membranes cn forme d'ailes. ESPÉCE. CARACTÈRES. Trois poches all 1 us ba ado o1s poches allongées et pointues sous la gorge. HUITIÈME DIVISION. Trois ou quatre doïgts aux pieds de devant, quatre ou cinq aux pieds de derriere. ESPÉCES. . CARACTÈRES. a queue ronde ; des taches jaunes , mar- L SALAMANDRE TERRESTRE. | ile de bintetions SALAMANDRE . (La queue garnie par-dessus et par-des- À QUEUE PLATE. sous d’une membrane verticale. SALAMANDRE PONGTUÉE. Deux rangs de points blancs sur le dos. QUATRE-RAIES. Quatre raies jaunes sur le dos. , De grandes écailles et des ongles recour= PARRONRE bés au-dessous des doigts. Trois doigts aux pieds de devant, quatre Troïs-DOIGTS, doigts aux pieds de derrière. ARE AAA VE MEME LAN AAA AAA UE AAA AE LR LA AR EURE LA AR UT SECONDE CLASSE. Quadrupèdes ovipares qui n’ont point de queue. PREMIER GENRE. GRENOUILLES. La téte et le corps allongés, l’un ou l’autre anguleux. ESPÈCES. CARACTÈRES. La couleur verte ; trois raies jaunes le long GRENOUILL . pi i Poe du dos, les deux extérieures saillantes. La couleur rousse; une tache noire de GRENOUILLE ROUSSE. chaque côté, entre les yeux et les pattes de devant. Des verrues sur le corps, le dessous de la GRENXO J LL i P ME: Le pp? » L ® Re partie postérieure parsemé de points. : La couleur noire; le dessus du corps hé- GRENOUILLE SONNANTE. rissé de points saillans, un pli trans- versal sous le cou. GRENOUILLE BORDÉE. Une bordure de chaque côté du corps. GRENOUILLE Le dessus du corps veiné, les doigts sé- RETICULAIRE. parés. Les doigts de chaque pied réunis par une PATTE-D'OIE. 5 que p P membrane. {Un bouclier chacun sur chaque épaule, EPAULE-ARMÉE. | quatre gros boutons à la partie posté- rieure du corps. GRENOUILLE Des tubercules sous toutes les phalanges MUGISSANTE:. . des doigts. GRENOUILLE PERLÉE Le tête triangulaire, de petits grains rou- geàtres sur le corps. La couleur verdàtre mouchetée , les cuisses JACKIE-. striées obliquement par derrière, GRENOUILLE GALONNÉE. Quatre ou cinq lignes longitudinales et relevées sur le dos. lo TABLÉ MÉTHODIQUE. SECOND GENRE. RAINES. Le corps allongé, des pelotes visqueuses sous les doigts. ESPÈCES. CARACTÈRES. rt; d ies jaunes, bordées RAINE VERTE, {Le dos vert; deux raies ] ; 4 . - 9 , - ndent depuis le té o ain ee | de violet, et qui s’étender ep . museau jusqu’aux pieds de derrière. RAINE BOSSUE. Une bosse sur le dos. La couleur brune, des tubercules sous les RAINE BRUNE, . pieds. a couleur blanche ou bleuâtre pâle, des L RAINE COULEU : ; DOTE OE LETE bandes cendrées sur le bas-ventre. RAINE FLUTEUSE. Des taches rouges sur le dos. La couleur jaune : le plus souverit une file RAINE ORANGÉE. de points roux de chaque côté du dos, qui est quelquefois panaché de rouge. a couleur rouge, quelquefois deux raies: ne a. É RAINE ROUGE. jaunes le long du dos. TROISIÈME GENRE. CRAPAUDS. Le corps ramassé et arrondi. ESFÈCES. CARACTÈRES.. Un tubercule en forme de rein, au-dessus: €RAPAUD COMMUN. à de chaque oreille. Des taches vertes, bordé 1 CRATAUD NEED M PP » ées de noir , et réunies plusieurs ensemble, RAYON VERT. Des lignes vertes en forme de rayons. » fÈe peau lisse, de grandes taches brunes , ERAPAUD BRUN. | un faux ongle sous la plante des pieds de derrière. Trois raies jaunes ou rougeâtres le long CALAMITE. du dos, deux faux ongles sous chaçus pied: de devant. CRAPAUD { Le dos d’une couleur olivâtre très-foncée, COULEUR DE FEU+ À et tachetée de noir, TABLE MÉTHODIQUE. 4 FSPÈCES. CARACTÈRES. Des tubercules en forme d’épines sur les APAUD PUSTUL . : Crar SQUREUX doigts , des pustules sur le dos. Un gonflement sous la gorge, les deux CRAPAUD GOITREUX. | doigts extérieurs des pieds de devant réunis. Une bande longitudinale pâle et dentelée CRAPAUD BOSSU. sur le dos , qui est convexe, en forme de bosse. a tête tres-large et très-plate, les veux PrpA. L es st SEE pe ue, très-petits et très-distans l’un de l’autre, Les paupières supérieures très-relevées en CRAPAUD CORNU. PRE PE 4 forme de cône aigu. Le dos gris, semé de taches roussâtres et AGUA. HT presque couleur de feu. Le dos marqué de rouge et de jaune cen- ‘CRAPAUD MARBRÉ, ; - k - dré , le ventre jaune moucheté de noir. Le dos moucheté de brun, les épaules re- , CRAPAUD CRIARD. levées et très-poreuses, cinq doigts à chaque pied. PARA AAA AAA AAA AMAR VA A AAA AAA AAA UNIES REPTILES BIPÉDES. l PREMIÈRE DIVISION. Deux pieds de devant. ESPÈCE CARACTÈRES, Des demi-anneaux sur le corps et sur le Lu ? à B1PÈDE CANNELE. ventre ; des anneaux entiers sur la queue, qui est très-courte. SECONDE DIVISION. Deux pieds de derrière. ESPÈCE. CARACTÈRES. Un sillon longitudinal de chaque côté du corps , les trous auditifs assez grands , Ja queue au moins aussi longue que le corps. SHELTOPUSIX. 40 HISTOIRE NATURELLE AAA AAA A A A AAA AAA A AAA AAA IMAVA e LES TORTUES. LE Nature a traité presque tous les animaux avec plus ou moins de faveur; les uns ont recu la beauté , d’autres la force, ceux-ci la grandeur ou des armes meurtrières, ceux-là des attributs d’in- dépendan ce, la faculté de nager, ou celle de s'élever dans les airs : mais, exposés en naissant aux intempéries de l'atmosphère, les uns sont obligés de se creuser avec peine des retraites souterrai- nes et profondes ; les autres n'ont pour asile que les antres téné- breux des hautes montagnes ou des vastes forêts ; ceux-ci, plus petits, sont réduits à se lapir dans les creux des arbres et des ro- chers, ou à aller se réfugier jusque dans la demeure de leurs plus cruels ennemis, aux yeux desquels ni leur petitesse ni leur ruse ne peuvent les dérober long -temps; ceux-là, plus malheureux, moins bien conformés où moins pourvus d’instinct, sont forcés de passer tristement leur vie sur la terre nue, et n'ont pour tout abri contre les froids rigoureux et les tempêtes les plus violentes que quelques branches d'arbre et quelques roches avancées ; ceux dont la demeure est la plus commode et la plus sûre ne jouis- sent de la douce paix qu'elle leur procure qu’à force de travaux et de soins : les tortues seules ont reçu en naissant une sorte de domicile durable. Cet asile, capable de résister à de très-grands efforts, n’est pas même fixé à un certain espace. Lorsque la nour- riture leur manque dans les endroits qu’elles préfèrent, elles ne sont pas contraintes d'abandonner un loit construit avec peine, de perdre tout le fruit de longs travaux, pouraller, peut-être avec plus de peine encore, arranger une habitation nouvelle sur des bords étrangers ; elles portent partout avec elles l'abri que la Na- ture leur a donné; et c’est avec toute vérité qu'on a dit qu’elles traînent leur maison, sous laquelle elles sont d'autant plus à couvert, qu’elle ne peut pas être détruite par les efforts de leurs ennemis. La plupart des tortues retirent quand elles veulent leur tête, leurs pattes et leur queue sous lenveloppe dure et osseuse qui les revêt par-dessus et par-dessous , et dont les ouvertures sont DES TORTUES: 45 assez étroites pour que les serres des oiseaux voraces ou les dents des quadrupèdes carnassiers n'y pénètrent que difficilement. De- meurant immobiles dans cette position de défense , elles peuvent quelquefois recevoir sans crainte comme sans danger les attaques des animaux qui cherchent à en faire leur proie. Ce ne sont plus des êtres sensibles qui opposent la force à la force, qui souffrent toujours par la résistance et qui sont plus où moins blessés par leur victoire même : mais, ne présentant que leur épaisse enve- loppe, c'est en quelque sorte contre une couverture insensible que sont dirigées iles armes de leurs ennemis; les coups qui les menacent ne tombent, pour ainsi dire, que sur la pierre, et elles sont alors aussi à l’abrisous leur bouclier naturel qu’elles pour- roient l'être dans le creux profond et inaccessible d’une roche dure. Ce bouclier impénétrable qui les garantit est} composé de deux espèces de tables osseuses, plus où moinsarrondies et plus où moins convexes. L’une.est placée au-dessus et l’autre au-dessoits du corps. Les côtes et l’épine du dos font partie de la supérieure, que l’on apyelle carapace; et l'inférieure, que l'on nomme plas- tron , est réunie avec les os qui composent Le sternum. Ces deux couvertures ne se touchent et ne sont attachées ensemble que par les côtés ; elles laissent deux ouvertures, lune devant, et l'autres derrière : la première donne passage à la tête et aux deux pattes de devant ; la seconde aux deux pattes de derrière, à la queue et à la partie du corps où est situé lanus. Lorsque les tortues veu- lent ou marcher ou nager, elles sont obligées d'étendre leur tête, leur couet leurs pattes, qui paroissent alors à l'extérieur ; el ces divers membres ainsi que la queue , le devant et le derrière du corps, sont couverts d’une peau qui s'attache au-dessous des bortis de la carapace et du plastron, qui forme plusieurs plis lorsque les pattes et la lêle sont retirées, qui est assez lâche pour se prèler à leurs divers mouvemens d'extension , et qui est garnie de pe- lites écailles comme celle des lézards, des serpens et des poissons, avec lesquels elle donne aux tortues un trait de ressemblance. La tête, dans presque toutes les espèces de ces animaux, cst un peu arrondie vers le museau, à l'extrémité duquel sont situées les narines. La bouche est placée en dessous; son ouverture s'é- tend jusqu’au-delà des oreilles. La mâchoire supérieure recou- vre la mâchoire inférieure. Elles ne sont point communément garnies de dents ; mais les os qui les composent sont festonnés et assez durs pour que les tortues puissent briser aisément des sub- 4% HISTOIRE NATURELLE stances irès-compactes. Cette position et cette conformation de leur bouche leur donnent beaucoup de facilité pour brouter les algues et les autres plantes dont elles se nourrissent. Dans pres- que toutes les tortues, la place des oreilles n'est sensible que par les plaques ou écailles particulières qui les recouvrent. Leurs yeux sont gros et saillans. Le plastron est presquetoujours plus court que la carapace, qui le déborde et le recouvre par-devant , et surtout par-derrière ; 1l est aussi moins dur, et souvent presque plat. Ces deux bouchers sont composés de plusieurs pièces osseuses, dont les bords sont comme dentelés, et qui s'engrénent les unes dans les autres d’une manière plus ou moins sensible; dans certaines espèces, celles du plastron peuvent se prêter à quelques mouvemens. La couver- ture supérieure, ainsi que l’inférieure, sont garnies de lames ou écailles qui varient par leur grandeur, par leur forme et par leur nombre , non-seulement suivant les espèces, mais même suivant les individus; quelquefois le nombre et la figure de ces écailles correspondent à ceux des pièces osseuses qu’elles cachent. On distingue les écailles qui revêtent la circonférence de la carapace, d'avec celles qui en recouvrent le milieu. Ce milieu est appelé disque; il est le plus souvent couvert de lreize où quinze lames, placées en long sur trois rangs : celui du mi- lieu est de cinq lames, et les deux des côtés sont de quatre. La bordure est communément garnie de vingt-deux ou vingt-cinq lames; le nombre de celles du plastron varie de douze à qua- iorze dans certaines espèces, et de vingt-deux à vingt-quatre dans d'autres. Ces écailles tombent quelquefois par l'eflet d'une grande dessiccation ou de quelque autre accident ; elles sont à dennu iransparentes, pliantes, élastiques : elles présentent dans certaines espèces, telles que le caret , etc., des couleurs assez belles. pour ètre recherchées et servir à des objets de luxe; et ce qui les rend d'autant plus propres à êlre employées dans les arts, c'est qu'elles se ramollissent et se fondent à un feu assez doux, de ma- nitre à être réunies, moulées, età prendre toutes sortes de figures. Les tortues sont encore distinguées des autres quadrupèdes ovi- pares par plusieurs caractères intérieurs assez remarquables, et particulièrement par la grandeur très-considérable de la vessie ,. qui manque aux lézards, ainsi qu'aux quadrupèdes ovipares sans queue. Elle: en diffèrent encore par le nombre des vertèbres du cou : nous era avons complé huñ dans la tortue de mer appelée DES TORTUES, 45 Za tortue franche , dans la grecque , et dans la tortue d’eau donce que nous avons nommée /& jaune , tandis que les crocodiles n’en ont que sept, que la plupart des autres, lézards n’en ont jamais au- dessus de quatre , et que les quadrupèdes ovipares sans queue en sont entièrement privés. Tels sont les principaux traits de la conformation générale des tortues. Nous connoissons vingt-quatre espèces de ces animaux: elles différent toutes les unes des autres par leur grandeur, et par d’autres caractères faciles à Gr TEE La carapace des grandes tortues a depuis quatre jusqu’à cinq pieds de long, sur trois ou quatre pieds de largeur : le corps entier a quelquefois plus de qualre pieds d'épaisseur verticale à l'endroit du dos le plus élevé. La tête a environ sept ou huit pouces de long et six ou sept ponces de large : le cou est à peu près de la même longueur , ainsi que Ja queue. Le poids total de ces grandes tortues excède ALAN ment huit cents livres, et les ee couvertures en pèsent à peu près quatre cents. Dans les plus petites espèces, au contraire, on ne compte que quelques pouces depuis l'extrémité du museau jusqu'au bout de la queue, même lorsque toutes les parties de la tortue sont étendues, et tout l'animal ne pèse pas quelquefois une livre. Les vingt-quatre espèces de tortues différent aussi beaucoup les unes des autres par leurs habitudes : les unes vivent presque toujours dans la mer; les autres, au contraire , préferent le séjour des eaux douces ou des terrains secs et élevés. Nous avons Cru d’après cela devoir former deux divisions dans le genre des tor- tues. Nous plaçons dansla première six espèces de ces animaux. les plus grandes de toutes, et qui habitent la mer de préférence. I1 est aisé de les nl d'avec les autres, en ce que leurs pieds ires- allongés, et leurs doigts très-inégaux en longueur et réunis par une SR représentent des nagcoires dont la longueur est souvent de deux pieds, et égale par conséquent plus du tiers de celle de la carapace. Leurs deux boucliers se touchent d’ail- leurs de chaque côté dans une plus grande portion de leur cir- conférence; l'ouverture de devant et celle de derrière sont par là moins res ,et ne laissent qu’un passage plus élroit à la grille des oiseaux de proie, et aux dents des caïmans, des tigres, des couguars, et des autres ennemis des tortues : mais la plupart des tortues marines ne cachent qu’à demi leur tête et leurs pattes sous leur carapace, et ne peuvent pas les y retirer en entier, comme 4 46 HISTOIRE NATURELLE les tortues d’eau douce ou terrestres. Les écailles qui revêtent leur plastron, au lieu d'être disposées sur deux rangs, comme celles ju plastron des tortues terrestres ou d’eau douce , forment qua- ire rangées, et leur nombre est beaucoup plus grand. Les tortues marines représentent parmi les quadrupèdes ovi- pares la nombreuse tribu des quadrupèdes vivipares composée des morses, des lions marins, des lamantins et des phoques, dont les doigts sont également réunis, et qui tous ont pluiôt des na- geoires que des pieds : comme cette tribu, elles appartiennent bien plus à l'élément de l'eau qu'à celui de la terre , et elles lient également l’ordre dont elles font partie, avec celui des poissons, auxquels elles ressemblent par une partie de leurs habitudes et de leur conformation. Nous composons la seconde division de toutes les autres tor- tues qui habitent, tant au milieu des eaux douces que dans les bois et sur des terrains secs; nous y comprenons par conséquent la tortue de terre nommée /a grecque , qui se trouve dans pres- que tous les pays chauds, et la tortue d’eau douce appelée /a bour-- beuse , qui est assez commune dans la France méridionale et dans les autres contrées tempérées de l'Europe. Toutes les tortues de cette seconde division ont les pieds très-ramassés, les doigts très- courts et presque égaux en longueur : ces doigts, garnis d’on- gles forts et crochus, ne ressemblent point à des nageoires. La carapace et le plastron ne sont réunis l’un à l’autre que dans une petite portion de leur contour : ils laissent aux différentes par- ties des tortues plus de facilité pour leurs divers mouvemens; et cette plus grande liberté leur est d'autant plus utile, qu’elles marchent bien plus souvent qu’elles ne nagent. Leur couverture supérieure est d’ailleurs communément bien plus bombée : aussi, lorsqu'elles sont renversées sur le dos, peuvent-elles la plupart se retourner et se remettre sur leurs pattes, tandis que presque toutes les lortues marines dont la carapace est beaucoup plus plate s'épuisent en efforts inutiles lorsqu'elles ont été retournées, et ne peuvent point reprendre leur première position. DES TORTUES. 47 RAA AM PAM M MAUR VUE LULU MMM UMR PREMIÈRE DIVISION. TORTUES DE MER, LA TORTUE FRANCHE :. . U. des plus beaux présens que la Nature ait faits aux habitans des contrées équatoriales, une des productions les plus utiles qu’elle ait déposées sur les confins de la terre et des eaux, est la grande tortue de mer, à laquelle on a donné le nom de tortue franche. L'homme emploieroit avec bien moins d'avantage le grand art de la navigation , si, vers les rives éloignées où ses dé- sirs l'appellent, il ne trouvoit dans une nourriture aussi agréa- ble qu'abondante un remède assuré contre les suites funestes d’un long séjour dans un espace resserré, et au milieu de substances a demi putréfiées , que la chaleur et l'humidité ne cessent d’alté- rer *. Cet aliment précieux lui est fourni par les tortues franches ; et elles lui sont d'autant plus utiles, qu'elles habitent surtout ces contrées ardentes où une chaleur plus vive accélère le dévelop- pement de tous les germes de corruption. On les rencontre en effet en très-grand nombre sur les côtes des îles et des conti- nens situés sous la zone torride, tant dans l’ancien que dans le nouveau monde. Les bas-fonds qui bordent ces iles'et ces con- tinens sont revètus d’une grande quantité d'algues et d’autres plantes que la mer couvre de ses ondes, mais qui sont assez près * En latin, estudo marina ,et mus marinus; en anglais, the green turtie; jurucua , au Brésil ; ARE Tel par les Portugais. 2 On fait des bouill ons de tortues franches , que l’on regarde comme excellens pour les pulmoniques , les cachectiques , les scorbutiqnes , etc La chair de cet animal renferme un suc adoucissant, nourrissant , incisif et diaphorétique , dont j'ai éprouvé de très-bons effets. (Note communiquée par M. de la Borde mé- decin du Roi à Cayenne.) 43 HISTOIRE NATURELLE. de la surface des eaux pour qu'on puisse les distinguer facilement lorsque le temps est calme. C'est sur ces espèces de prairies que l'on voit les tortues franches se promener paisiblement. Elles se nourrissent de l’herbe de ces pâturages. Elles ont quelquefois six ou sept pieds de longueur, à compter depuis le bout du museau jusqu'à l'extrémité de la queue, sur trois ou quatre de largeur, et quatre pieds ou environ d'épaisseur dans l'endroit le plus gros du corps : elles pèsent alors près de huit cents livres. Elles sont en si grand nombre , qu'on seroit tenté de les regarder comme une espèce de troupeau rassemblé à dessein pour la nourriture et le soulagement des navigateurs qui abordent auprès de ces bas- fonds ; et les troupeaux marins qu'elles forment le cèdent d’au- tant moins à ceux qui paissent l'herbe de la surface sèche du globe, qu'ils joignent à un goût exquis et à une chair succulente et sub- stantielle une vertu des plus actives et des plus salutaires. La tortue franche se distingue facilement des autres par la for- me de sa carapace. Cette couverture supérieure, qui a quelquefois quatre ou cinq pieds de long sur trois ou quatre de largeur, est ovale etentourée d’un bord composé de lames, dont les plus grandes sont les plus éloignées de la tête, et qui , terminées à l'extérieur par des lignes courbes, font paroître ce même bord comme onde : le disque ou le milieu de cette couverture supérieure est recouvert ordinaire- ment de quinze lames ou écailles , d’un roux plus ou moins som- bre, qui tombent souvent, ainsi que celles de la bordure, par l'effet d’une grande dessiccation ou de quelque autre accident , et dont la forme et le nombre varient d’ailleurs suivant l’âge et peut-être suivant le sexe; nous nous en sommes assurés en exa- minant des tortues de différentes tailles. Lorsque l’animalest dans l'eau , la carapace paroît d’un brun clair tacheté de jaune. Le plastron est moins dur et plus court que la carapace : il est garni communément de vingt-trois ou vingt-quatre lames, disposées sur quatre rangs *; et c’est à cause des deux boucliers dont la oo 1 Nouscroyons devoir rapporter ici les dimensions d’une jeune tortue franche qui n’avoit pas encore atteint tout son développement , et qui est conservée au Cabinet du Roi. Dans cette tortue, ainsi que dans celles dont il sera question dans cet ou» vrage, nous avons mesuré la longueur totale de l’animal , ainsi que la lon- gueur et la largeur de la carapace, en suivant la convexité de cette couverture supérieure. DE LA TORTUE FRANCHE. 3g tortue franche est armée, qu’on lui a denné le nom de so/dat dans certaines contrées. Les pieds de la tortue franche sont très-allongés; les doigts en sont réunis par une membrane : ils ressemblent beaucoup de vraies nageoires; aussi lui servent-ils à nager bien plus souvent qu'a marcher, et lui donnent-ils une nouvelle conformité avec les poissons et avec les phoques, qui habitent comme elle au milieu des eaux. Sans cette conformation , elle abandonneroit un élément où elleauroit trop de peine à frapper leau avec des pieds qui, pré- sentant une trop petite surface, n’opposeroient à ce fluide pres- que aucune résistance : elle habiteroïit sur la terre sèche, où elle muarcheroit avec facilité commeles tortues de terre , que l’on trouve au milieu des bois. Dans les pieds de derrière, le premier nt qui est le plus court, est le seul qui soit garni d’un ongle aigu et bien apparent; le second doigt l’est d’un ongle moins grand et plus arrondi, et les trois autres n’en présententque de membraneux et peu sensi- bles , tandis qu'aux pieds de devant les deux doigts intérieurs sont terminés par des ongles aigus, el les trois autres par des on- gles membraneux. Au reste, il se peut que la forme, le nombre et la position des ongles varient dans la tortue franche : mais ül n’y en a Jamais qu'un d’aigu aux pieds de derriere , et c’est un caractere distinctif de cette espèce. La tête, les patleset la queue, sont recouverles de petites écail- les, comme le corps des lézards , des serpens et des poissons; et, de même que dans ces animaux, ces écailles sont un peu plus grandes sur le sommet de la têle que sur le cou et sur la queue. L'on a prétendu que, malgré la grandeur des tortues franches, leur cerveau n'étoit pas plus gros qu’une jéve; ce qui confirme- roit ce que nous avons dit de la petitesse du cerveau dans les qua- drupèdes ovipares. La bouche, située au-dessous de la partie an- pieds. pou. lis. Longueur depuis le bout du museau jusqu’à l’extrémuté postérieure de la carapace. :/. + 4 + «ee 0 de se» « 3 » D» Poneuenr deld'tète. . rs see pond e » ee se sitter UD Ti 8 Larseur de frtétes "0 NS ee es ee se + 0 7 3 9 Hopguear della.lcarépaces 3/0 40/0 MS OM AOSENI SR OQRE Et TE 4 16 Largeur de la carapace. . . . . . . ... +... «4 + L 10 7 Longueur des pattes de devant. . .............. 1 Eu c: Longueur des pattes de derrière. . . . . . .. . . . . . . : 5x TN Nous avons compté neuf côtes de Eng à côté dans celte tte tortue. Lacepède, 1. 4 60 HISTOIRE NATURELLE térieure de la têle, s'ouvre jusqu’au-delà des oreilles. Les mâchoires ne sont point armées de dents, mais elles sont très-dures et très- fortes; et les os qui les composent sont garnis de pointes ou d’as- pérités. C'estavec ces mâchoires puissantes que les tortues coupent l'herbe sur les tapis verls qui revêtent les bas-fonds de certaines côtes, et qu’elles peuvent briser des pierres, et écraser les coquil- lages dont elles se nourrissent quelquefois. Lorsque les tortues ont brouté lalgue au fond de la mer, elles vont à l'embouchure des grands fleuves chercher l'eau douce, dans laquelle elles paroïssent se plaire, et où elles se tiennent pai- siblement la tête hors de l’eau, pour respirer un air dont la frai- cheur semble leur être de temps en temps nécessaire. Mais n’ha- bitant que des côtes dangereuses pour elles, à cause du grand nombre d’ennemis qui les y attendent, et de chasseurs qui les y poursuivent, ce n'est qu'avec précaution qu'elles goûtent le plai- sir de humer l'air frais et de se baigner au milieu d’une eau douce et courante. À peine aperçoivent-elles l'ombre de quelque objet à craindre, qu’elles plongent et vont chercher au fond de la mer une reiraite plus sûre. La tortue de terre a, de tous les temps, passé pour le symbole de la lenteur : les tortues de mer devroient être regardées comme l'emblème de la prudence. Cette qualité qui, dans les animaux , est le fruit des dangers qu’ils ont courus, ne doit pas étonner dans ces tortues, que l’on recherche d'autant plus, qu'il est peu dan- gereux de les chasser , el très-utile de les prendre. Mais si quel- ques traits de leur histoire paroïssent prouver qu’elles ont une sorte de supériorité d’instinct, le plus grand nombre de ces mê- mes traits ne monireront dans ces grandes tortues de mer que des propriétés passives, plutôt que des qualités actives. Rencon- irant une nourriture abondante sur les côtes qu’elles fréquentent, se nourrissant de peu et se contentant de brouter l'herbe, elles ne disputent point aux animaux de leur espèce un aliment qu'elles trouvent toujours en assez grande quantité. Pouvant d'ailleurs, ainsi que les autres tortues et lous les quadrupèdes ovipares, pas- ser plusieurs mois, et même plus d’un an, sans prendre aucune nourriture , elles forment un troupeau tranquille. Elles ne se re- cherchent point ; mais elles se trouvent ensemble sans peine, et y demeurent sans contrainte. Elles ne se réunissent pas en troupe guerrière par un instinct carnassier pour s'emparer plus aisément d'une proie dificie à vaincre; mais, conduites aux mêmes en- DE LA TORTUE FRANCHE. 52 droits par les mêmes goûts et par les mêmes habitudes, elles con- servent une union pe Défendues par une carapace osseuse, très-forte , et si dure que des poids irès-lourds ne peuvent l'écra= ser , garanties par cette sorte de bouclier, mais n’ayant rien pour nuire, elles ne redoutent point la société de leurs semblables , qu ‘elles ne peuvent à leur tour troubler par aucune offense. La douceur et la force pour résister sont donc ce qui distingue la tortue franche; et c’est peut-être à ces qualités que les Grecs firent allusion lorsqu'ils la donnèrent pour compagne à la beauté, lorsque Phidias la plaça comme un symbole añx pieds de sa Vénus. Rien de brillant dans ses mœurs, non plus que dans les cou- leurs dont elle est variée ; mais ses habitudes sont aussi constantes que son enveloppe a de ide. : plus patiente qu’agissante, elle n'éprouve presque jamais de désirs véhémens : plus prudente que courageuse, elle se défend rarement; mais elle cherche à se mettre à l'abri, et elle emploie toute sa force à se cramponner, lorsque , ne pouvant briser sa carapace, on cherche à l'enlever avec cetle couverture. La constance de ses habitudes paroît se faire sentir jusque dans ses amours. Non-seulement le mâle recherche sa femelle avec ar- deur , mais leur union la plus intime dare pendant près de neuf jours. C'est au milieu des ondes qu’ils s’accouplent, plastron con- ire plastron ; ils s’embrassent fortement avec leurs longues na- geoires ; ils voguent ensemble, toujours réunis par le plaisir , sans ne les flots amortissent la chaleur qui les pénètre. On prétend même que leur espèce de timidité naturelle les abandonne alors ; ils deviennent, dit-on, comme furieux d'amour ; aucun danger ne les arrête, et le Rat serre encore étroitement sa femelle lors- que, poursuivie par les chasseurs , elle est déjà blessée à mort et répand tout son sang. Cependant leur attachement mutuel passe avec le besoin qui lavoit fait naître. Les animaux n'ont point, comme l’homme, celte intelligence qui, en combinant un grand nombre d'idées morales , et en les réchauffant par un sentiment actif, sait si bien prolonger les charmes de la jouissance, et faire goûter encore des plaisirs si grands das les heureux souvenirs d’une tendresse tou- chante. La tortue mâle, après son accouplement, abandonne bientôt la compagne qu’elle paroïssoit avoir tant chérie; elle la laisse seule aller à terre, s’exposer à des dangers de toute espèce, pour dé- 52 HISTOIRE NATURELLF poser sur le sable les fruits d’une union qui sembloit devoir être moins passagère. JL paroit que le temps de l'accouplement des tortues franches varie dans les différens pays, suivant la température, la position en-deca ou au-delà de la ligne, la saison des pluies, eic. Cest vers la fin de mars ou dans le commencement d'avril qu'elles se recherchent dans la plupart des contrées chaudes de Amérique septentrionale, et, bientôl après, les femelles commencent à pon- dre leurs œufs sur le rivage. Elles préfèrent les graviers, les sa- bles dépourvus de vase et de corps marins, où la chaleur du so- leil peut plus aisément faire éclore des œufs, qu'elles abandon- nent après les avoir pondus ”. ” Il semble cependant que ce n'est pas par indifférence pour les petits qui lui devront le Jour que la mère tortue laisse ses œufs sur le sable: elle y creuse avec ses nageoires, et au-dessus de len- droitoù parviennent les plus hautes vagues, un ou plusieurs trous d'environ un pied de largeur, et deux pieds de profondeur ; elle y dépose ses œufs au nombre de plus de cent: ces œufs sont ronds, de deux ou trois pouces de diamètre , etla membrane qui les cou vre ressemble en quelque sorte à du parchemin mouillé. Ils ren- ferment du blanc qui ne se durcit point, dit-on, à quelque de- oré de feu qu’on l’expose, et du jaune qui se durcit comme celui des œufs de poule. Rien ne peut distraire les tortues de leurs soins maternels : uniquement occupées de leurs œufs , elles ne peuvent être troublées par aucune crainte; et comme s1 elles vouloient les dérober aux yeux de ceux qui les recherchent, elles les cou- vrent d’un peu de sable, mais cependant assez légèrement pour que la chaleur du soleil puisse les échaufler et les faire éclore. Elles font plusieurs pontes, éloignées l’une de l’autre de quatorze jours ou environ , et de trois semaines dans certaines contrées : ordinairement ellesen fonttrois. L'expérience des dangers qu’elles courent lorsque le jour éclaire les poursuites de leurs ennemis, et peut-être la crainte qu’elles ont de la chaleur ardente du soleil dans les contrées torrides, font qu’elles choisissent presque toujours le temps de la nuit pour aller déposer leurs œufs ; et c’est appa- . + . . . . t Ce fait est contraire à l'opinion d’Aristote et à celle de Pline: mais il a été mis hors de doute par tous les voyageurs et les vbservatenrs modernes. Il paroît que Pline et Aristote ont eu peu de renseignemens exacts relativemens aux quadrupèdes ovipares, dont ils ne connoissoient qu’un très-pelit nombre. DE LA TORTUE FRANCHE: 55 remment d'après leurs petits voyages nocturnes que les anciens ont pensé qu’elles couvoient pendant les ténèbres. Pour tous leurs petits soins, il leur fut un sable mobile. Elles ont une sorte d'affection marquée pour certains parages plus commodes, moins fre squentés ; et par conséquent moins dange— reux; elles traversent même des espaces de mer irès-étendus pour y parvenir. Celles qui pondent dans les îles de Caÿman, voisines de la côte méridionale de Cuba, où elles trouvent lespèce de rivage qu'elles préferent , \ stivtnt de plus de cent lieues de Mt - ; celles qui passent une grande partie de l’année sur les bords des îles Gallapagos, situées sous la ligne et dans la mer du Sud, se rendent pour leurs pontes sur les côtes occidentales de l'Amérique méridionale, qui en sont éloignées de plus de deux cents lieues: et les tortues qui vont apte leurs œufs sur les bords de l'île de l'Ascension font encore plus de chemin, puis- que les terres les plus voisines de celte île sont à trois cents lieues de distance. La chaleur du soleil suffit pour faire éclore les œufs des tortues dans les contrées qu’elles habitent. Vingt où vingt-cinq jours après qu'ils ont été déposés, on voit sortir du sable les petites torlues, qui présentent tout au plus deux ou trois pouces de Jongueur sur un peu moins de largeur, ainsi que nous nous en sommes assurés par les mesures que nous avons prises sur des tortues franches enlevées au moment où elles venoient d’éclore : elles sont donc bien eloignées de la grandeur à laquelle elles peuvent parvenir. Au reste, le temps nécessaire pour que les petites tortues puissent éclore doit varier suivant lai tempéra- ture. Froger assure qu'à Saint-Vincent, île du cap Vérd il ne faut que dix- -sept jours pour qu'elles sortent de leurs Lori mais elles ont besoin de neuf jours de plus pour devenir capables de gagner la mer. L'instinct dont elles sont déjà pourvues, ou, pour mieux dire , la conformité de leur organisation avec celle de leurs père et mère, les conduisent vers les eaux voisines , où elles doivent trouver la sûreté et l'aliment de leur vie. Elles s’y trai- nent avec lenteur; mais, trop foibles encore pour résister an choc des vagues, elles sont rejetées par les flots sur le sable du rivage , où les grands oiseaux de mer, les crocodiles, les tigres où les couguars se rassemblent pour les dévorer ; aussi n’en ÉcHE t-il que très-peu. L'homme en détruit d’ailleurs un grand nombre avant qu “elles ne soient dév eloppées ; on recher che même, dans 54 HISTOIRE NATURELLE les îles où elles abondent, les œufs qu’elles laissent sur le sable, et qui donnent une nourriture aussi agréable que saine. C’est depuis le mois d'avril jusqu’au mois de septembre que dure la ponte des tortues franches sur les côtes des îles de l'Ame- rique voisimes du golfe du Mexique; mais le temps de leurs di- verses pontes varie suivant les pays. Sur la côte d’Issini en Afrique, les tortues viennent déposer leurs œufs depuis le mois de septembre jusqu’au mois de janvier. Pendant toute la saison des pontes, l’on va non-seulement à la recherche des œufs, mais encore à celle des petites tortues, que l’on peut saisir avec facilité. Lorsqu'on les a prises, on les renferme dans des espaces plus ou moins grands, entourés de pieux, et où la haute mer peut parve- nir; et c'est dans ces espèces de parcs qu'on les laisse croître pour en avoir au besoin, sans courir les hasards d'une pêche incer- taie, el sans éprouver les inconvéniens qui y sont quelquefois attachés. Les pêcheurs chosissent aussi cette saison pour prendre les grandes tortues femelles , qui leur échappent sur les rivages plus difficilement qu’à la mer, et dont la chair est plus estimée que celle des mâies, surtout dans le temps de la ponte. Malgré les ténèbres dont les tortues franches cherchent, pour ainsi dire, à s’envelopper lorsqu'elles vont déposer leurs œufs , elles ne peuvent se dérober à la poursuite de leurs ennemis. A l'entrée de la nuit, surtout lorsqu'il fait clair de lune, les pê- cheurs, se tenant en silence sur la rive , attendent le moment où les tortues sortent de l’eau ou reviennent à la mer après avoir pondu ; ils les assomment à coups de massue, ou ils les retournent rapidement sans leur donner le temps de se défendre, et de les aveugler par le sable qu’elles font quelquefois rejaillir avec leurs nageoires. Lorsqu’elles sont très-grandes, il faut que plusieurs hommes se réunissent et quelquefois même se servent de pieux comme d'autant de leviers pour les renverser sur le dos. La tortue franchea la carapace trop plate pour se remettre sur ses pattes lors- qu'elle a été ainsi chavirée, suivant l'expression des pêcheurs. On a voulu rendre touchant le récit de cette manière de prendre les tortues , et on a dit que lorsqu'elles étoient retournées , hors d'état de se défendre, et qu’elles ne pouvoient plus que s’épuiser en valns efforts, elles jetoient des cris plainlifs et versoient un torrent de larmes. Plusieurs tortues , tant marines que terrestres, font entendre souvent un sifflement plus où moins fort, et même un gémissement très-distinct, lorsqu'elles éprouvent avec viva- DE LA TORTUE FRANCHE., 55 cité ou l'amour ou la crainte. Il peut donc se faire que la tortue franche jette des cris lorsqu'elle s’eflorce en vain de reprendre sa position naturelle, et que la frayeur commence à la saisir ; mais on a exagéré sans doute les signes de sa douleur. Pour peu que les matelots soient en nombre , ils peuvent, dans moins de trois heures, retourner quarante ou cinquante tortues qui renferment une grande quantité d'œufs. Ils passent le jour à mettre en pièces celles qu’ils ont prises pendant la nuit; ils en salent la chair, et même les œufs et les intestins. Ils retirent quelquefois de la graisse des grandes tortues jusqu’à trente-trois pintes d’une huile jaune où verdatre, qui sert à brûler, que l’on emploie même dans les alimens lorsqu'elle est fraîche , et dont tous les os de ces animaux sont pénétrés À ainsi que ceux des célacées; où bien ils les traînent, renversées sur leur carapace, jusque dans les parcs où ils veulent les conserver. Les pêcheurs des Antilles et des îles de Bahama, qui vont sur les côtes de Cuba, sur celles des iles voisines , et principalement des îles de Cayman, ont achevé de charger leurs navires ordi- nairement au bout de six semaines ou deux mois. Ils rapportent dans leurs îles les produits de leur pêche; et cette chair de tortue salée, qui sert à la nourriture du peuple ei des esclaves , n’est pas moins employée dans les colonies d'Amérique que la morue dans les divers pays d'Europe. On peut aussi prendre les tortues franches au milieu des eaux: On se sert d’une varre ou d’une sorte de harpon pour cette pêche ainsi que pour celle de la baleine; on choisit une nuit calme, où; la lune éclaire une mer tranquille. Deux pêcheurs montent sur un petit canot que l’un d'eux conduit; ils reconnoissent qu'ils sont près de quelque grande tortue à l'écume qu'elle produit lorsqu'elle monte vers la surface de l'eau ; ils s’en approchent avec assez de vitesse pour que la tortue n'ait pas le temps de s'échapper un des deux pêcheurs lui lance aussitôt son harpon avec tant de; force, qu’il perce la couverture supérieure et pénètre jusqu’à la chair. La tortue blessée se précipite au fond de l’eau : mais on lui lâche une corde à laquelle tient le harpon; et lorsqu'elle a perdu beaucoup de sang, il est aisé de la tirer dans le bâteau ou sur le rivage. On a employé dans la mer du Sud une autre manière de pé- cher les tortues. Un plongeur hardi se jette dans la mer, à quelque 56 HISTOIRE NATURELLE distance de l'endroit où, pendant la grande chaleur du jour, il voit les tortues endormies nager à la surface de l’eau; il se relève très-près de la tortue, et saisit sa carapace vers la queue. En enfonçant ainsi le derrière de l'animal, il le réveille, l’oblige à se débatire, et ce mouvement suffit pour soutenir sur l’eau la tortue et le plongeur qui l'empêche de s'éloigner jusqu’à ce qu'on vienne les pêcher. Sur les côtes de la Guiane , on prend les tortues avec une sorte de filet, nommé /a folle ; ik est large de quinze à vingt pieds, sur quarante ou cinquante .de long. Les mailles ont un pied d'ouverture en carré, et le fil a une ligne et demie de grosseur. On attache de deux en deux mailles deux flofs d’un demi-pied de longueur, faits d’une tige épineuse , que les Indiens appellent. MOouCou-moucou, et qui lient lieu de liége. On attache aussi au bas du filet quatre ou cinq grosses pierres, du poids de quarante où cinquante livres, pour le tenir bien tendu. Aux deux bouts qui sont à fleur d’eau , on met des bouées, c'est-à-dire, de gros morceaux de moucou-moucou , qui servent à marauer l'endroit où est le filet. On place ordinairement les folles fort près des. flots, parce que les tortues vont brouter des espèces de Jucus qui croissent sur les rochers dont ces petites îles sont bordées. Les pêcheurs visitent de temps en temps les filets. Lorsque la Jolle commence à caler, suivant leur langage , c'est-à-dire, lors- qu'elle s'enfonce d’un côté plus que de l'autre, on se hate de la relirer. Les tortues ne peuvent se dégager aisément de cette sorte de rels, parce que les lames d’eau, qui sont assez fortes près des îlots, donnent aux deux bouts du filet un mouvement conti- nuel qui les étourdit ou les embarrasse. Si l’on diffère de visiter les filets, on trouve quelquefois les tortues noyées. Lorsque les requins et les espadons rencontrent des tortues prises dans la Jolle, et hors d'état de fuir et de se défendre , ils les dévorent et brisent le filet. Le temps de foZ/er la tortue franche est depuis. Janvier jusqu’en mai. L'on se contente quelquefois d'approcher doucement, dans un esquif, des tortues franches qui dorment et flotient à la sur- face de la mer; on les retourne , on les saisit, avant qu’elles aient eu le temps de se réveiller et de s'enfuir; on les pousse ensuite devant soi jusqu'à la rive, et c’est à peu près de cette manière que les anciens les pêchoient dans les mers de l'Inde. Pline a écrit qu’on les entend ronfler d'assez loin lorsqu'elles dorment DE LA TORTUE FRANCHE. 57 en flottant à la surface de l’eau. Le ronflement que ce naturaliste leur attribue pourroit venir du peu d'ouverture! de leur glotte, qui est étroite, ainsi que celle des tortues de terre; ce qui doit ajouter à la facilité qu'ont ées animaux de ne point avaler l’eau dans laquelle ils sont plongés. Si les tortues demeurent quelque temps sur l'eau , exposées pendant le jour à toute l’ardeur des contrées équatoriales ; lorsque Ja mer est presque calme et que les petits flots, ne pouvant point atteindre jusqu’au dessus de leur carapace , cessent de le baigner, le soleil dessèche cette couverture, la rend plus légère, et em- pêche les tortues de plonger aisément : tant leur légèreté spéci- fique est voisine de celle de l’eau, et tant elles ont de peine à augmenter leur poids. Les tortues peuvent en effet se rendre plus ou moins pesantes, en recevant plus ou moins d'air dans leurs poumons , eten augmentant ou diminuant par là le volume de leur corps, de même que les poissons introduisent de l'air dans leur vessie aérienne lorsqu'ils veulent s'élever à la surface de l’eau ; mais il faut que le poids que les tortues peuvent se donner en chassant l'air de leurs poumons ne soit pas très-consi- dérable, puisqu'il ne peut balancer celui que leur fait perdre la dessiccalion de leur carapace, et qui n’égale jamais le seizième au poids total de l'animal , ainsi que nous nous en sommes assurés par l'expérience rapportée dans la note suivante *. La dessiccation de la carapace des tortues, en les empêchant de plonger, donne aux pêcheurs plus de facilité pour les prendre. Lorsqu’elles sont très-près du rivage où l’on veut les entraïner, elles se cramponnent avec tant de force, que quatre hommes ant quelquelois bien de la peine à les arracher du terrain qu'elles saisissent; et comme tous leurs doigts ne sont pas pourvus d'on- gles, et que, n'étant point séparés les uns des autres, ils ne peu- TS 1 Nous avons pesé avec soin la carapace d’une petite tortue franche : nous Vavons ensuite mise dans un grand vase rempli d’eau, où nous l’avons laissée un mois et demi; nous l'avons pesée de nouveau en la tirant de Veau, et avaut qu’elle eût perdu celle dont elle étoit pénétrée. Son poids a élé augmenté par Pimbibition de 45/,,8: la dessiccation que la chaleur du soleil produit dans la couverture supérienre d’une tortue franche qui flotte à la surface de la mer, ne peut donc la rendre plus légère que de 45/,,8: la carapace des plus grandes tortues ne pesant guère que deux cent soixante-dix-huit livres ou environ, l’ar- deur du soleil ne doit la rendre plus légère que de quarante-cinq livres , qui sont au-dessous du seizième de huit cents livres, poids total des très-grandes Lortues. 58 HISTOIRE NATURELLE vent pas embrasser les corps, on doit supposer dans les tortues une force tres-grande, qui d’ailleurs est prouvée par la vigueur de leurs mächoires, el par la facilité avec laquelle elles portent sur leur dos autant d'hommes qu’il peut y en tenir. On a même prétendu que, dans l'Océan indien, il y avoit des tortues assez fortes et assez grandes pour transporter quatorze hommes. Quel- que exagéré que puisse être ce nombre, l’on doit admettre dans la tortue franche une puissance d'autant plus remarquable, que, malgré sa force , ses habitudes sont paisibles. Lorsqu’au lieu de faire saler les tortues franches, on veut les manger fraîches et ne rien perdre du bon goût de leur chair ni de leurs propriétés bienfaisantes , on leur enlève le plastron, fa tête, les paites et la queue, et on fait ensuite cuire leur chair dans la carapace , qu sert de plat. La portion la plus estimée est celle qui touche de plus pres cette couverture supérieure ou le plastron. Cette chair, ainsi que les œufs de la tortue franche, sont principalement très-salutaires dans les maladies auxquelles Ics gens de mer sont le plus sujets; on prétend même que leurs sucs ont une assez grande activité, au moins dans les pays les plus chauds, pour être des remedes très-puissans dans toutes les maladies qui demandent que le sang soit épuré. IL paroît que c’est la tortue franche que quelques peuples amé- ricains regardent comme un objet sacré, et comme un présent particulier de la Divinité. Ils la nomment poisson de Dieu, à cause de l’eflet merveilleux que sa chair produit, disent-ils, lors- qu'on a a valé quelque breuvage empoisonné. La chair des tortues franches est quelquefois d’un vert plus ou moins foncé, et c’est ce qui les a fait appeler par quelques voyageurs, lortues vertes ; mais ce nom a été aussi donné à une seconde espèce de tortue marine : et d’ailleurs nous avons cru de- voir d'autant moins l’adopter , que cette couleur verdâtre de la chair n’est qu’accidentelle ; elle dépend de la différence des plages fréquentées par les tortues; elle peut provenir aussi de la diver- sité de la nourriture de ces animaux, et elle n’appartient pas dans les mêmes endroits à tous les individus. On trouve en effet sur les rivages des petites îles voisines du continent de la Nou- velle-Espagne, et situées au midi de Cuba , des tortues franches, dont les unes ont la chair verte , d’autres noire, et d’autres jaune. Seba avoit dans sa collection plusieurs concrétions semblables à des bézvards, d’un gris plus ou moins mêlé de jaune, et dont DE LA TORTUE FRANCHE. 59 la surface éloit hérissée de petits tubercules. Il en avoit reçu une partie des grandes Indes, et l'autre d’Amérique; on les lui avoit envoyées comme des concrétions très-précieuses, trouvées dans le corps de grandes tortues de mer. Les Indiens ÿ attachoient encore plus de vertu qu'aux bézoards orientaux, à cause de leur rareté, et ils les employoient particulièrement contre la petite vérole, peut-être parce que les tubercules que leur surface pré- sentoit ressembloient aux boutons de la pelite vérole. La vertu de ces concrétions étoit certainement aussi imaginaire que celle des bézoards tant orientaux qu'occidentaux ; mais elles auroient pu être formées dans le corps de grandes tortues marines, d’au- tres concrétions de même nature a yant élé incontestablement pro- duites dans des quadrupèdes ovipares, ainsi que nous le verrons dans la suite de cette Histoire. Mais si les bézoards des tortues ma- rines ne doivent êlre que des productions inutiles, 1l n’en est pas de même de tout ce que ces animaux peuvent fournir : non- seulement on recherche leur chair et leurs œnfs, mais encore leur carapace a éte employée par les Indiens pour couvrir leurs maisons; et Diodore de Sicile, ainsi que Pline, ont écrit que des . peuples voisins de l'Ethiopie et de la mer Rouge s’en servotent comme de nacelles pour naviguer près du continent. Dans les temps anciens, lors de l'enfance des sociétés, ces gran- des carapaces, d’une substance très-compacte et d'un diamelre de plusieurs pieds, étoient les boucliers des peuples qui n'a- voient pas encore découvert l'art funeste d’armer leurs flèches d’un acier trempé plus dur que ces enveloppes osseuses ; et les hordes à demi sauvages qui habitent de nos jours certaines contrées équatoriales tant de l’ancien que du nouveau monde, n'ont pas imaginé de défense plus solide. Les diverses grandeurs des lortues franches sont renfermées dans des limites assez éloignées, puisque, de la longueur de deux ou trois pouces, elles parviennent quelquelois à celle de six ou sept pieds ; ct comme cet accroissement assez grand a lieu dans une couverture très-osseuse , très-compacle, très-dure, et où par conséquent la matière doit être, pour ainsi dire, resserrée, pressée, et le dé- veloppement plus lent , il n’est pas surprenant que ce ne soit qu'a- présiplusieurs années que les tortues acquièrent tout leur volume. Elles n’atteignent à peu près à leur entier développement qu'au bout de vingt ans ou environ, et l’on a pu en juger d’une ma- nicre certaine par des tortues élevées dans les espèces de parcs Go HISTOIRE NATURELLE dont nous avons parlé. Si l’on devoit estimer la durée de la vie: dans les tortues franches de la même manière que dans les qua- drupèdes vivipares, on trouveroit bientôt, d’après ces vingtans employés à leur accroissement total, le nombre des années que la Nature leur a destinées; mais la même proportion ne peut pas être ici employée. Les tortues demeurent souvent au milieu d’un fluide dont la température est plus égale que celle de l'air. Elles habitent presque toujours le même élément que les poissons; elles doivent participer à leurs propriétés , et jouir de même d’une vie fort longue. Cependant, comme tous les animaux périssen E lorsque leurs os sont devenus entièrement solides, et comme ceux des tortues sont bien plus durs que ceux des poissons, et par con- séquent beaucoup plus près de l’état d'ossificalion extrême , nous ne devons pas penser que la vie des tortues soit, en proporlion , aussi longue que celle des poissons : mais elles ont avec ces ani- maux un assez grand nombre de rapports pour que, d’après les vingt ans que leur entier développement exige , on pense qu’elles vivent un très-grand nombre d'années, même plus d’un siècle; et dès-lors on ne doit point être étonné que l’on manque d’ob- servations sur un espace de temps qui surpasse beaucoup celui de la vie des observateurs. Mais si l’on ne connoît pas de fails précis relativement à la lon- gueur de la vie des tortues franches, on en a recueilli qui prou- vent que la tortue d’eau douce, appelée /a bourbeuse, peut vivre au moins quatre-vingts ans, et qui confirment par conséquenE notre Opinion touchant l’Âge auquel les tortues de mer peuvent pervenir. Cette longue durée de la vie des tortues les a fait re- garder par les Japonais comme un emblème du bonheur; et e’est apparemment par une suite de cette idée qu’ils ornent, des images plus ou moins défigurées de ces quadrupèdes, les temples de leurs dieux et les palais de leurs princes. Une tortue franche peut chaque été donner l'existence à près de trois cents individus, dont chacun , au bout d’un assez court espace de temps, pourroit faire naître à son tour trois cents pe- tites tortues. On sera donc émerveillé si l'on pense au nombre prodigieux de ces animaux dont une seule tortue peut peupler une vaste plage pendant la durée totale de sa vie. Toutes les €ôtes des zones torrides devroient être couvertes de ces quadrupedes , dont la multiplication , loin d’être nuisible , seroit certainement bien plus avantageuse que celle de tant d’autres espèces; mais à DE LA TORTUE FRANCEHE. Gt pee un trentième des peules tortues écloses peuvent parvenir à un certain développement : un nombre immense d'œufs sont d’ailleurs enlevés avant que les petits aient vu le jour; et parmi les tortues qui ont déjà acquis une grandeur un peu considérable, combien ne sont point la proie des ennemis de toute espèce qui en font la chasse, et de l’homme qui les poursuit sur la terre et sur les eaux ! Malgré tous les dangers qui les environnent, les tortues franches sont répandues en assez grande quantité sur ioutes les plages chaudes , tant de l’ancien que du nouveau con- tinent, où les côtes sont basses et sablonneuses ; on les rencontre dans l'Amérique septentrionale, jusqu'aux iles de Bahama , etaux côtes voisines du cap de la Floride. Dans toutes ces contrées des deux mondes, distantes de l'équateur de vingt-cinq ou trente clegrés, tant au nord qu'au sud, on retrouve la même espèce de tortues franches, un peu modifiée seulement par là différence de la température et par la diversité des herbes qu'elles paissent, ou des coquillages dont elles se nourrissent ; et cette grande et précieuse espèce de tortue ne peut -— elle pas passer facilement d’une île à une autre? Les tortues franches ne sont - elles pas en eflet des habitans de la mer plutôt que de la terre ? Pouvant demeurer assez de temps sous l’eau , ayant plus de peine à s’en- foncer dans cetélément qu’à s’y élever, nageant avec la plus grande facilité à sa surface, ne jouissent-elles pas, dans leurs migrations, de tout l'air qui leur est nécessaire ? ne trouvent-elles pas sur tous les bas-fonds l’herbe et les coquillages qui leur conviennent ? ne peuvent-elles pas d’ailleurs se passer de nourriture pendant plusieurs mois? et cette possibilité de faire de grands voyages m'est-elle pas prouvée par le fait, puisqu’elles traversent plus ‘ cent lieues de mer pour aller der leurs œufs sur les rivages qu’elles préfèrent, et puisque des navigateurs ont rencontré, à plus de sept cents lieues de tout: terre des tortues de mer d’une espèce peu différente de la tortue franche? Ils les ont même trou- vées dans des régions de la mer assez élevées en latitude, où elles dormoient paisiblement en flottant à la surface de l’eau. Les tortues franches ne sont cependant pas si fort attachées aux zones torrides, qu'on ne les rencontre quelquefois dans les mers voisines de nos côtes. Il se pourroit qu’elles habitent dans la Mé- diterranée, où elles fréquenteroient de préférence , sans doute, Jes parages les plus méridionaux, et où les caouanes, qui leur ressemblent beaucoup, sont en très-srand nombre. Elles de- 62 HISTOIRE NATURELLE vroient y choisir pour leur ponte les rivages bas, sablonneux, presque déserts et très-chauds, qui séparent l'Egypte de ia Bar- barie proprement dite, et où elles trouveroient la solitude, l’a- bri , la chaleur et le terrain qui leur sont nécessaires : on n’a du moins jamais vu pondre des tortues marines sur les côtes de Pro- vence n1 du Languedoc, où cependant l’on en prend de temps en temps quelques-unes. Elles peuvent aussi être quelquefois je- lées par des accidens particuliers vers de plus hautes latitudes sans en périr. Sibbald dit tenir d’un homme digne de foi, qu’on prenoit quelquefois des tortues marines dans les Orcades; et l’on doit présumer que les tortues franches peuvent non-seulement vivre un certain nombre d'années à ces latitudes élevées, mais même y parvenir à tout leur développement. Des tempêtes ou d'autres causes puissantes font aussi quelquefois descendre vers les zones tempérées el chassent des mers glaciales les énormes céta- cées qui peuplent cet empire du froid : le hasard pourroit donc faire rencontrer ensemble les grandes tortues franches et ces im- menses animanx ‘; et l’on devroit voir avec intérêt sur la surface de l'antique Océan, d’un côté les fortues de mer, ces animaux accoutumés à étre plongés dans les à rayons ardens du soleil, sou- verain dominateur des contrées torrides , et de l’autre les gants cétacées qui, relégués dans un séjour de glaces et de ténèbres, n'ont presque jamais reçu les douces influences du père de la lu- micre, et au lieu des beaux jours de la Nature, n’en ont presque jamais connu que les tempêtes et les horreurs. On peut citer surtout à ce sujet deux exemples remarquables En 1752, une tortue fut prise à Dieppe, où elle avoit été jetée dans le port par une tourmente : elle pesoit de huit à neuf cents livres , et avoit à peu près six pieds de long sur quatre pieds de largeur. Deux ans apres, on pècha dans le pertuis d'Antioche une tortue plus grande encore; elle avoit huit pieds de long; elle pesoit plus de huit cents livres; et comme ordinairement dan es tortues l’on doit compter le poids des couvertures pour près de Ja moitié du poids totäl, la chair de celle du pertuis d’Antioche de_ voit peser plus de quatre cents livres. Elle fut portée à l'abbaye de Longvau, près de Vannes en Bretagne : la carapace avoit cinq pieds de long. GR EG tete 1 On a pe de grandes tortues auprès de l’embouchure de Ia Loire, et un grand nombie de cac #4 alots ont été jetés sur les côtes ge la Bretagne id n'y à que peu d'années. DE LA TORTUE ÉCAILLE VERTE. 65 Ce n’est que sur les rivages presque déserts, et, par exemple, sur une partie de ceux de l'Amérique voisins de la ligne, et bai- gnés par la mer Pacifique, que les tortues franches peuvent en hberté parvenir à tout l'accroissement pour lequel la Nature les a fait naître, et jouir en paix de la longue vie à laquelle elles ont été destinées. Les animaux féroces ne sont donc pas les seuls qui, dans le voi- sinage de l’homme, ne peuvent ni croître ni se multiplier : ceroi de la Nature, qui souvent en devient le tyran, non-seulement repousse dans les déserts les espèces dangereuses , mais encore son insatiable avidité se tourne souvent contre elle-même, et relègue sur les plages éloignées les espèces les plus utiles et les plus dou- ces ; au lieu d'augmenter ses jouissances, il les diminue, en dé- truisant inutilement dans des individus privés trop tôt de la vie la postérité nombreuse qui leur auroit dû le jour. On devroit tâcher d’acclimater les tortues franches sur toutes les côtes tempcrées où elles pourroient aller chercher, dans les terres, des endroits un pen sablonneux et élevés au-dessus des plus hautes vagues, pour y déposer leurs œnfs et les y faire éclore. L’acquisition d’une espèce aussi féconde seroit certaine- ment une des plus utiles ; et cette richesse réelle, qui se conser- veroit et se multiplieroit d'elle-même, n’exciteroit pas au moins les regrets de la philosophie, comme les richesses funestes arra- chées avec tant de sueurs au sein des terres équatoriales. Occupons-nous maintenant des diverses espèces de tortues qui habitent au milieu des mers, comme la tortue franche, et qui lui sont assez analogues par leur forme, par leurs propriétés et par Jeurs habitudes, pour que nous puissions nous contenter d'indi- quer les différences qui les distinguent. RRARRAA AA AAA AAA AA A AAA A AA AA RAA AAA AAA AAA AAA AAA MAMAN LA TORTUE ÉCAILLE-VERTE. nn. ne conservons pas à la tortue, dont il est ici question , le nom de éortue verte, qui lui a été donné par plusieurs voyageurs, parce qu'on l'a appliqué aussi à la tortue franche, et que nous ne saurions prendre trop de précautions pour éviter l’obscurité de la nomenclature : nous ne lui donnons pas non plus celui de 64 HISTOIRE NATURELLE gorlue amazone qu'elle porte dans une grande partie de l'Ame= riquè méridionale , et qui lui vient du grand fleuve des Ama- zones, dont elle fréquente les bords, parce qu’il paroït que ce nom a été aussi employé pour une tortue qui n’est point de mer, et par conséquent qui est très-différente de celle-ci. Mais nous la nommons écaille-verte à cause de la couleur de ses écailles, plus vertes en eflet que celles des autres tortues ; elles sont d’ailleurs très-belles , très-transparentes , très-minces, et cependant pro- pres à plusieurs ouvrages. La tête des tortues écaille-verte est pe- tite et arrondie. Elles ressemblent d’ailleurs aux tortues franches par leur forme et par leurs moœurs : elles ne deviennent pas ce- pendant aussi grandes que ces dernières ; et, en général, elles sont plus petites environ d'un quart. On les rencontre en assez grand nombre dans la mer du Sud , auprès du cap Blanco de la Nouvelle-Espagne. Il paroît qu’on les trouve aussi dans le golfe du Mexique, et qu'elles habitent presque tous les rivages chauds du nouveau monde, tant en-deça qu’au-delà de la ligne; mais on ne les a pas encore reconnues dans l’ancien continent. Leur chair est un aliment aussi délicat et peut-être aussi sain que celle des tortues franches ; et il y a même des pays où on les préfère à ces dernières. Leurs œufs salés et séchés au soleil sont tres-bons à manger. M. Bomare est le seul naturaliste qui ait indiqué cette espèce de tortue que nous n'avons pas vue, et dont nous ne par- lons que d’après les voyageurs et les observations de M. le che- valier de Widerspach. RAA VER VIA AAA AAA AURA BA AAA VUE VITALE VENIR VER LA CAOUANE. FE plupart des naturalistes qui ont décrit cette troisième espèce de tortue de mer lui ont donné le nom de caret ; mais, comme ce nom est appliqué depuis long-temps par les voyageurs à la tortue qui fournit les plus belles écailles, nous conserverons à celle dont il est ici question la dénomination de caouane, sous laquelle elle est déjà tres-connue, et uniquement désignée par les naturels des contrées où on la trouve. Elle surpasse en grandeur la tortue franche, et elle en diffère d’une manière bien marquée par la grosseur de la tête, la grandeur de la gueule , lallonge- DE LA CAOUANE. 65 imient et la force de la mâchoire supérieure ; le cou est épais et couvert d’une peau lache, ridée, et garnie, de distance en dis- tance , d'écailles calleuses ; le corps est ovale, la carapace plus large au milieu et plus étroile par-derrière que dans les autres espèces. Les bords de cette couverture sont garnis de larmes pla- cées de maniere à les faire paroitre dentées comme une scie : le disque présente trois rangées longitudinales d’écailles ; les pièces de la rangée du milieu se relèvent en bosse et finissent par-der2 rière en pointe ; la couverture supérieure paroît d’un jaune ta- cheté de noir lorsque l'animal est dans l'eau. Le plastron se ter- mine du côté de l'anus par une sorte de bande un peu arrondie par le bout : il est garni communément de vingt-deux ou vingt- quatre écailles. La queue est courte. Les pieds , qui sont couverts d’écailles épaisses , et dont les doigts sont réunis par une mem- brane, ont une forme très-allongée, et ressemblent à des na- geoires, ainsi que dans la tortue franche : ceux de devant sont plus longs, mais moins larges que ceux de derrière ; et ce qui est un des caractères distinctifs de la caouane, c’est que les pieds de derrière , ainsi que ceux de devant , sont garnis de deux ongles aigus. : La caouane habite les contrées chaudes du nouveau continent, comme la tortue franche ; mais elle paroit se plaire un peu plus vers le nord que cette dernière. On la trouve moins sur les côtes de la Jamaïque. Elle habite aussi dans l’ancien monde : on ja trouve même irés-fréquemment dans la Méditerranée, où on en fait des pêches abondantes aupres de Cagliari en Sardaigne et de Castel-Sardo, vers le quarante-unième degré de latitude ; elle y pèse souvent jusqu'à quatre cents livres (poids de Sardaigne Ÿ Rondelet, qui habitoit le Languedoc, dit en avoir nourri une chez Int pendant quelque temps, apparemment dans quelque bassin. Elle avoit été prise auprès des côtes de sa province : elle faisoit entendre un petit son confus , et jetoit des espèces de sou- pirs semblables à ceux que l’on a attribués à la tortue franche. Les lames ou écailles de la caouane sont presque de nulle va- leur, quoique plus grandes que celles du caret, dont on fait dans le commerce un si grand usage : on s’en servoit cependant au trefois pour garnir des miroirs et d’autres grands meubles de luxe ; mais maintenant on les rebute, parce qu’elles sont toujours gâtées par une espèce de gale. On a vu des caouanes dont ka ça- ZLacepède, x, 5 66 HISTOIRE NATURELLE rapace étoit couverte de mousse et de coquillages , et dont Îes plis de la peau étoient remplis de petits crustacées. La caouane a l'air plus fier que les autres tortues : étant plus grande et ayant plus de force, elle est plus hardie ; elle a besoin d’une nourriture plus substantielle ; elle se contente moins de plantes marines; elle est même vorace; elle ose se jeter sur les jeunes crocodiles , qu’elle mutile facilement. On assure que, ponr attaquer avec plus d'avantage ces grands quadrupèdes ovipares, elle jes attend dans le fond des creux situés le long des rivages, où les crocodiles se retirent, et où ils entrent à reculons, parce que la longueur de leur corps ne leur permettroit pas de se re- tourner; et elle les y saisit fortement par la queue, sans avoirs rien à cramdre de leurs dents *, Comme ses alimens, trés en plus grande abondance du règne animal, sont moins purs et plus sujets à la décomposition que ceux de la tortue franche, et qu’elle avale sans choix des vers de mer, des mellasses , etc. , sa chair s’en ressent ; elle est huilense, rance , filamenteuse , coriace , et d’un mauvais goût de marine. L’odeur de musc, que la plupart des iortues répandent, est exal- tée dans la caouane, au point d’être fétide : aussi cette tortue est- elle peu recherchée. Des navigateurs en ont cependant mangé sans peine, et l’ont trouvée très-échauffante. On la sale aussi quel- quelois, dit-on , pour l’usage des nègres; tant on s'est empressé de saisir tontes les ressources que la terre et la mer pouvoient offrir pour accroître le produit des travaux de ces infortunés. L'huile qu'on retire des caouanes est fort abondante : elle ne peut être employée pour les alimens , parce qu’elle sent très-mauvais ; mais elle est bonne à brüler. Flle sert aussi à préparer les cuirs, et à enduire les vaisseaux, qu’elle préserve, dit-on, des vers, peut- _être à cause de la mauvaise odeur qu’elle répand. La caouane n’est donc point si utile que la tortue franche : aussi a-t-elle été moins poursuivie, a-t-elle eu moins d'ennemis à craindre , et est-elle répandue en plus grand nombre sur cer- faines mers. Naturellement plus vigoureuse que les autres tor- tues, elle voyage davantage : on l’a rencontrée à plus de huit cents lieues de la terre, ainsi que nous l'avons déjà rapporté. D'ail- leurs, se nourrissant quelquefois de poisson , elle est moins atta- RE 1 Note communiquée par M. Moreau de Saint-Méry, procureur-général au conseil supériegr de Saint Domingus. DE LA TORTUE NASICORNE. 67 chée aux côtes où croissent les algues. Elle rompt avec facilité de grandes coquilles , de grands buccins , pour dévorer l'animal qui y est contenu; et, suivant les pêcheurs de l'Amérique septen- trionale , on trouve souvent de très-grands coquillages à demi brisés par la caouane. Il est quelquefois dangereux de chercher à la prendre. Lors- qu'on s'approche d'elle pour la retourner , elle se défend avec ses pattes ei sa gueule ; et il est très-difficiie de lui faire lâcher ce qu’elle a saisi avec ses mâchoires. Cette grande résistance qu’elle oppose à ceux qui veulent la prendre, lui a fait attribuer une sorte de méchanceté ; on lui a reproché, pour ainsi dire , une juste dé- fense ; on a cendamneé l'usage qu'elle fait de ses armes pour sauver sa vie : mais ce n’est pas la premiére fois que le plus fort a fait un crime au plus foible de ce qui a retardé ses jouissances ou mélé quelques dangers à sa poursuite. Suivant Catesby , on a donné le nom de coffre à une tortue marine assez rare, qui devient extrèmement grande, qui est étroite, mais fort épaisse, et dont la couverture supérieure est beaucoup plus convexe que celle des autres tortues marines, C'est certainement la même que la tortue dont Dampier fait sa pre- mière espèce, et que ce voyageur appelle grosse tortue, tortue à bahut ou coffre. Toutes deux sont plus grosses que les autres lortues de mer, ont la carapace plus relevée, sont de mauvais goût, et répandent une odeur désagréable, mais fournissent une grande quantité d’huile bonne à brüler. Nous les plaçons à la suite des caouanes, auxquelles elles rous paroïissent appartenir, jusqu’à ce que de nouvelles observations nous obligent à les en séparer. RAA AAA AAA AAA AA AAA AAA AAA RAA AAA AA AAA AAA AA AURA AAA AR AAA MMA RAA AAMAMAIMMAMUAA LA TORTUE NASICORNE. eee Lxs naturalistes ont confondu cette espèce avec la caonane, quoi- qu'il soit bien aisé de la distinguer par un caractère assez sail- lant , qui manque aux véritables caouanes, et dont nous avons tiré le nom que nous lui donnons ici. Cest un tubercule d’une substance molle, qui s'élève au-dessus du museau, et dans lequel 68. HISTOIRE NATURELLE les narines sont placées. La nasicorne se trouve dans les mers di nouveau continent voisines de l'équateur. Nous manquons d’ob- servations pour parler plus en détail de cette nouvelle espèce de tortue ; mais nous nous regardons comme très-fondés à la sépa- rer de la caouane, avec laquelle elle a même moins de rapports qu'avec la tortue franche, suivant un des correspondans du Ca- binet du Roi. On la mange comme cette dernière, tandis qu’on ne se nourrit presque point de la chair de la caouane. Nous invi- tons les voyageurs à s'occuper de cette tortue, qui pourroit être la tortue bétarde des pêcheurs d'Amérique , ainsi qu’à observer celles qui ne sont pas encore connues. Îl est d'autant plus impor- tant d'examiner les diverses espèces de ces animaux, que, quoi- qu'elles ne soient distinguées à l'extérieur que par un très-peut noiabre de caractères, il paroît qu’elles ne se mêlent point en- semble, et que par conséquent elles sont très-différentes les unes des autres. AAA NU UV AN NS UNS AVS AA AU UV A NA VAS VA VV AV VU AV UV MURS LE CARET. Éo philosophe mettra toujoursau premier rang la tortue franche, mme celle qui fournit la nourriture la plus agréable et la plus salutaire. inais ceux qui ne recherchent que ce qui brille , préfe- verant ta tortue à laquelle nous conservons le nom de caref, qui st généralement donné dans les pays qu’elle habite. C'est alement cette tortue que lon voit revèêtne de ces belles Û 1} tes qui, dès Les siècles les plus reculés, ont décoré les palais Le :s somptueux : effacées dans des temps plus modernes par Por et par le feu que la taille a donné aux pierres dures spaventes , on ne les emploie presque plus qu'à orner les | iples, mais élégans , de ceux dont la fortune est plus : peut-être le goût plus pur. Si elles servent quelquelois auté, elles sont cachées par des ornemens plus éblouis- : recherchés qu'on leur préfère, et dont elles ne sont is, Mais «1 les écailles de la tortue caret ont perdu + leur comparaison avec des substances plus : la découverte du nouveau monde en à FILE 2 i PR | Que : quantité dans l’ancien, leur usage est devenu ba € Tome 1. fretre P 7. age 47 D ARE AIT GE MM SL 6 APCE SE SAME RE UT m1. Page 68. y ard Jeu. Cuyard eulp CLEO TR 1. US" QC RS DU CARET. 69 plus général : on s'en sert d'autant plus qu'elles coûtent moins. Combien de bijoux et de petits ouvrages ne sont poini garnis de ces écailles que tout le monde connoît , et qui réunissent à une demi-transparence l’éclat de certains cristaux colorés, el une souplesse que l’on a essayé en vain de donner au verre ! Il est aisé de reconnoître la tortue caret au luisant des écailles placées sur sa carapace , et surtout à la manière dont elles sont disposées : elles se recouvrent comme les ardoises qui sont sur nos toits. Elles sont d'ailleurs communément au nombre de treize sur le disque , et elles y sont placées sur trois rangs, comme dans la tortue franche. Le bord de la carapace , qui est beaucoup plus étroit que dans la plupart des tortues de mer, est garni ordinai- rement de vingt-cinq lames. La couverture supérieure , arrondie par le haut et pointue par le bas, a presque la forme d’un cœur. Le caret est d’ailleurs dis- tingué des autres tortues marines par sa tête et son cou, qui sont beaucoup plus longs que dans les autres espèces. La mâchoire supérieure avance assez sur l’inférieure pour que le museau ait une sorte de ressemblance avec le bec d’un oiseau de proie; et c’est ce qui l’a fait appeler par les Anglais bec à faucon. Ce nom a un peu servi à obscurcir l'histoire des lortues. Lorsque les na- turalistes on1 transporté celui de caret à la caouane, ils n’en ont point séparé celui de bec à faucon, qu’ils lui ont aussi appliqué; et, en histoire naturelle, lorsque les noms sont les mêmes, on n’est que trop porié à croire que les objets se ressemblent. On rencontre le caret , ainsi que la plupart des autres tortues, dans les contrées chaudes de l'Amérique; mais on le trouve aussi dans les mers de l'Asie. C'est de ces dernières qu’on apportoit sans douie les écailles fines dont se servoient les anciens, même avant le temps de Piine, et que les Romains devoient d'autant plus estimer qu'elles étoient plus rares et venoient de plus loin ; car 1l semble qu'ils n'attachoiïent de valeur qu’à ce qui étoit pour eux le signe d'une plus grande puissance et d’une domination plus étendue. Le caret n'est pointaussi grand que la tortue franche : ses pieds ont également la forme de nagcoires , et sont quelquefois garnis chacun de quatre ongies. La saison de sa ponte est communé- ment , dans l’Amérique septentrionale, en mai, juin et juillet. Il ne dépose pas ses œufs dans Le sable, mais dans un gravier mêlé de petits cailloux. Ces œufs sont plus délicats que ceux des autres espèces de tortues; mais sa chair n’est point du tout agréa- 70 HISTOIRE NATURELLE ble : elle a même, dit-on, une forte vertu purgative; elle cause des vomissemens violens. Ceux qui en ont mangé sont bientot couverts de petites tumeurs , et attaqués d’une fièvre violente , mais qui est une crise salutaire lorsqu'ils ont assez de vigueur pour résister à l’activité du remède. Au reste ; Dampier prétend que les bonnes ou mauvaises qualités de la chair de la tortue dé- pendent de l'aliment qu'elle prend ; et par conséquent très-sou- vent du lieu qu’elle babite. Le caret, quoique plus petit de beaucoupque la tortue franche, doit avoir plus de force, puisqu'on la cru plus méchant : il se défend avec plus d'avantage lorsqu'on cherche à le prendre, et ses morsures sont vives et douloureuses. Sa couveriure supé- rieure est plus bombée, et ses pattes de devant sont, en propor- tion de sa grandeur , plus longues que celles des autres tortues de mer : aussi , lorsqu'il a été renversé sur le dos, peut-il, en se balançant, s’incliner assez d’un côté ou de l’autre pour que ses pieds saisissent la terre, qu'il se retourne, et qu’il se remette sur ses quatre pattes. Les belles écailles qui recouvrent sa carapace pésent ordinairement toutes ensemble de trois à quatre livres, et quelquefois même de sept à huit. On estime le plus celles qui sont épaisses, claires , transparentes , d’un jaune doré, et jaspées de rouge et de blanc, ou d’un brun presque noir. Lorsqu'on veut les façonner, on les ramollit dans de l’eau chaude ; on les met dans un moule dont on leur fait prendre aisément la forme , à Yaide d’une forte presse de fer; on les polit ensuite, et on y ajoute les ciselures d'or et d'argent. et les autres ornemens étrangers avec lesquels on veut en relever les couleurs. On prétend que dans certaines contrées , et particulièrement sur les côtes orientales et humides de l'Amérique méridionale, le: caret se plaît moins dans la mer que dans les terres noyées, où ik trouve apparemment une nourriture plus abondante ou plus convenable à ses gouts. DU LUTH. rt AAA RAR ANA AAA AU AU NAS AA LA UV VU VU AN AAA ARANAIARAAN AN A ENS "LE’EUTEH ’: da plupart des tortues marines dont nous avons parlé ne sé- loignent pas beaucoup des régions équatoriales : la caouane n'est cependant pas la seule que l'on trouve dans une des mers qui baï- gnent nos contrées ; on rencontre aussi dans la Méditerranée une espèce de ces quadrupèdes ovipares , qui surpasse même quel- quefois par sa longueur les plus grandes tortues franches. On la nomme /e luth ; elle fréquente de préférence, au moins dans le temps de la ponte, les rivages deserts et en partie sablonneux qui avoisinent les Etats barbaresques ; elle s'avance peu dans la mer Adriatique ; et si elle parvient rarement jusqu'à la mer Noire , c'est qu'elle doit craindre le froid des latitudes élevées. Elle est distinguée de toutes les autres tortues tant marines que terrestres, en ce qu’elle n’a point de plastron apparent. Sa carapace est placée sur son dos comme une sorte de grande cuirasse : mais elle ne s'étend pas assez par-devant et par-derrière pour que la tortue puisse mettre sa tête , ses pattes et sa queue, à couvert sous cette sorte d’arme défensive. La tortne luth paroit se rapprocher par là des crocodiles et des autres grands quadrupèdes ovipares que peuplent les rivages des mers. La couverture supérieure est con- vexe, arrondie dans une partie dé son contour, mais terminée par-derrière en pointe si aiguë et si allongée , qu’on croiroit voir une seconde queue placée au-dessus de la véritable queue de Fa- nimal. Le long de cette carapace s'étendent cinq arêtes assez élevées, et dont celle du milieu est surtout trés-saillante. Quel- ques naturalistes ont compté sept arêtes, parce qu'ils ont com- pris dans ce nombre les deux lignes qui terminent Îà carapace de chaque côté. Cette couverture supérieure n’est point garnie d'é- cailles comme dans les autres tortues marines; mais cette espèce de cuirasse , ainsi que tout le corps, la tête, les pattes et la queue, est revêlue d’une peau épaisse qui, par sa consistance et sa cou- leur , ressemble à un euir dur et noir : aussi Linné a-t-il appelé la tortue luth, {a £ortue couverte de cuir, et a-t-elle plus de rap- port que les autres tortues marines avec les lamantins et ies 22 LR EN RE OR à a RL ANS Z En latin lyra. Rat de mer, et tortue & clin, parles pêcheurs de plusieurs contrées, 72 HISTOIRE NATURELLE phoques, dont les pieds sont recouverts d’une peau noirûtre et dure. Le dessous du corps est aplati. Les pattes, où plutôt les nagcoires de la tortue luth, sont dépourvues d'ongles, suivant la plupart des naturalistes; mais j’ai remarqué une membrane en {orme d’ongle aux pattes de derrière de celle que lon conser dans le Cabinet du Roi. La partie supérieure du museau est fendue de manière à recevoir la partie inférieure, qui est recourbée en haut. Rondelet dit avoir vu une tortue de cette espèce , prise à Frontignan, sur les côtes du Languedoc, longue de cinq coudées, large de deux , et dont on retira une grande quantité de graisse o1 d'huile bonne à brüler. M. Amoureux le fils, de la Société royale de Montpellier, a donné la description d’une tortue de e’tte espèce, pêchée au port de Gette , en Languedoc, et dont la longueur totale étoit de sept pieds cinq pouces. Celle qui a servi à notre description, et dont nous rapportons les dimensions dans la note suivante *, est à peu près de la même grandeur. Les tortues luth n’habitent pas seulement dans la Méditerra- née ; on les trouve aussi sur les côtes du Pérou, du Mexique, et sur la plupart de celles d'Afrique qui sont situées dans la zone torride. Il paroît qu’elles s’avancent vers les hautes latitudes de notre hémisphère , au moins pendant les grandes chaleurs. Le 4 août de l’année 1729, on prit à treize lieues de Nantes, au nord de l'embouchure de la Loire, une tortue qui avoit sept pieds un pouce de long, trois pieds sept pouces de large, et deux pieds d'épaisseur. M. de la Font, ingénieur en chef à Nantes, en envoya une description à M. de Mairan. Tous les caractères qui 3 Dimensions d’une tortue luth. pieds. pou. lp. Longueur totale , . . + . « . . SA 0 de e 5 2 LROSSEUT ES M A LUE NN AR PSN ER de. E 7 x Epaisseur. tee de nas x ee à AU Le A Lie 1 » Longueur de la carapace. . 4 . . . . . RER Te le ; A 2 Largeur de la carapace. . , . . < \ ARE x A : Longueur du couet dela tête. . .,. : «us so 1 Longueur des mâchoires. . . + . - . . - REPONSES » 6 GCrosseur du cou AN 2 1 > Grand diamètre des yeux . 4 . . . . . . . SEL NES a PAR » » Longueur des pattes de devant . « . . . . . LEUR 3 » Grosseur des pattes de devant. . . : . . + « . . A LA E 6 Bongueur des pattes de‘derrièré . . . . : - . . . «+. i » Grossenr dés pattes de derrière : . & « . » - : «+ 1 16 3 EG — = RO = os æœ # € Us ÿ Longueur de la queue . . que: a tee tel aa tel id" e d'a me DU LUTH. n3 y sont rapportés sont entièrement conformes à ceux de la tortne “luth conservée au Cabinet du Roi. A la vérité, il y est parlé de dents, qui ne se trouvent dans aucune tortue connue; mais 1l est aisé de prendre pour des dents les grandes éminences formées par “les échancrures profondes des deux mâchoires de la tortue luth : _ d’ailleurs la forme et la position de ces éminences répondent à celles des prétendues dents de la tortue pêchée auprès de Nantes. Cette dernière tortue luth poussoit d’horribles cris , suivant M. de Ja Font, quand on lui cassa la tête à coups de crochet de fer: ses hurlemens auroient pu être entendus à un quart de lieue; et sa gueule écumante de rage exhaloit une vapeur très-puante. En 1756, un peu après le milieu de l'été, on prit aussi une as- sez grande tortue luth sur les côtes de Cornouailles, en Aungle- terre. M. Pennant a donné, dans les 7ransactions philosophiques, : la description et la figure d’une très-petite tortue marine de trois pouces trois lignes de long, sur un pouce et demi de large. Il est évident, d’après la figure et la description, que cette très-jeune tor- tue étoit de l’espèce du luth , et avoit été prise peu de temps après sa sortie de l’œuf, ainsi que le soupçonne M. Pennant. Ce natura- liste avoit vu cette tortue chez un marchand de Londres, qui ignoroit d'où on l’avoit apportée. La tortue luth est une de celles que les anciens Grecs ont le mieux connues, parce qu’elle habitoit leur patrie. Tout le monde sait que , dans les contrées de la Grèce ou dans les autres pays si tués sur les bords de la Méditerranée, la carapace d’une grande tortue fut employée par les inventeurs de la musique comme un corps d’instrument, sur lequel ils attachèrent des cordes de boyau ou de métal. On a écrit qu'ils choisirent la couverture d’une tor- tue luth; et elle fut la première lyre grossière qui servit à faire goûter à des peuples peu civilisés encore le charme d’un art dont ils devoient tant accroître la puissance : aussi la tortue luth a-t- elle été, pour amsi dire, consacrée à Mercure, que l’on a regardé comme l'inventeur de la lyre‘: les modernes l’ont même souvent, à l'exemple des anciens, appelée /yre, ainsi que luth ; et 1l con- venoit que son nom rappelat le noble et brillant usage que l'on fit de son bouclier dans les premiers àges des belles régions bai- gnées par les eaux de la Méditerranée. 7h HISTOIRE NATURELLE FRA MIUAAMAAL RAR RARAAAAAAA AAA AA AAA AAA TU GAME SECONDE DIVISION. TORTUES D'EAU DOUCE ET DE TERRE. md ' LA BOURBEUSE :, De Le différentes tortues dont nous avons déjà écrit l'histoire non- seulement vivent au milieu des eaux salées de la mer, mais re- cherchent encore l’eau douce des fleuves qui s’y jettent ; elles vont aussi quelquefois à terre , soit pour y déposer leurs œufs, soit pour y paîlre les plantes qui y croissent. On ne peut donc pas les regarder comme entièrement reléguées au milieu des grandes eaux de l'Océan ; de même on doit dire qu'aucune des tortues dont 1l nous reste à parler n’habite exclusivement l’eau douce ou les terrains élevés. Toutes peuvent vivre sur la terre; toutes peuvent demeurer pendant plus où moins de temps au milieu de l'onde douce et de l'onde amère, el l’on ne doit entendre ce que nous avons dit de la demeure des tortues de mer, et ce que nous ajouterons de celle des tortues d’eau douce et des tortues de terre, que comme l'indication du séjour qu'elles préférent, plutot que d'une habitation exclusive. Tout ce qu'on peut assurer relative- ment à ces trois familles de tortues, c’est que le plus souvent on trouve la première au milieu des eaux salées , la seconde au mi- lieu des eaux douces, la troisième sur les hauteurs ou dans les bois ; et leur habitation particulière a été déterminée par leux conformation tant intérieure qu'extérieure , ainsi que par la dif. férence de la nourriture qu’elles recherchent, et qu'elles ne peu- vent trouver que sur la terre, dans les fleuves ou dans la mer. La bourbeuse est une des tortues que l’on rencontre le plus souvent au milieu des eaux douces. Elle est beaucoup plus petite qu'aucune tortue marine, puisque sa longueur , depuis le bout du museau jusqu'à l'extrémité de la queue, n’excède pas ordinai- rement sept ou huit pouces, et sa largeur trois ou quatre. Elle ES # Enlatin, saus aquatilis ; en japonais, jogame,ou doogame, ou doocame. Tome 1. 2 Page 74. A —— AR Æ Z X Æ Pretre’ pinx 3 Gayard Soul. / 1.La Bourbeuse ..... Page =4 “ d =, { 216 Onde se TL ele) 77: SN One CURE, 7 Do (Sù] Vs PPAEERE Pan Nu ira ONE EUR 114 \e UNE DE LA BOURBEUSE. 75 est aussi beaucoup plus petite que la tortue terrestre appelée Za grecque. Communément le tour de la carapace est garni de vingt- cinq lames bordées de stries légères; le disque l’est de treize lames striées de même, foiblement pointillées dans le centre, et dont les cinq de la rangée du milieu se relèventen arête longitudinale. Cette couverture supérieure est noirâtre et plus ou moins foncée. La partie postérieure du plastron est terminée par une ligne droite. La couleur générale de la peau de cette tortue tire sur le noir , ainsi que celle de la carapace. Les doigts sont très-distincts l’un de l'autre, mais réunis par une membrane : il y en a cinq aux pieds de devant, et quatre aux pieds de derrière; le doigt exiérieur de chaque pied de devant est communément sans on- gle. La queue est à peu près longue comme la moitié de la cou- verture supérieure : au lieu de la replier sous sa carapace , ainsi que la plupart des tortues de terre , la bourbeuse la tient étendue lorsqu'elle marche ; et c’est de là que lui vient le nom de rat aqua- tique ( mus aquatilis ) que les anciens lui ont donné. Lorsqu'on la voit marcher, on croiroit avoir devant les yeux un lézard dont le corps seroit caché sous un bouclier plus ou moins étendu. Ainsi que les autres tortues, elle fait entendre quelquefois un sifflement entrecoupé. On la trouve non-seulement dans les climatstempérés et chauds de l'Europe, mais encore en Asie, au Japon, dans les grandes Indes, etc. On la rencontre à des latitudes beaucoup plus élevées que les tortues de mer. On l’a pêchée quelquefois dans lesrivitres de la Silésie; mais cependant elle ne su pporteroit que très-diffi- cilement un climat très-rigoureux, et du moins elle ne pourroit pas y mulüplier. Elle s'engourdit pendant l'hiver, mème dans les pays tempérés. C'est à terre qu’elle demeure pendant sa lorpeur. Dans le Languedoc , elle commence vers la fin de l'automne à préparer sa retraite ; elle creuse pour cela unirou , ordinairement de six pouces de profondeur : elle emploie plus d’un mois à cef ouvrage. Îl arrive souvent qu'elle passe l'hiver sans être entière- ment cachée, parce que la terre ne retombe pas toujours sur elle lorsqu'elle s’est placée au fond de son trou. Dès les premiers jours du printemps, elle change d'asile ; elle passe alors la plus grande partie du tem ps dans l'eau ; elle s’y tient sou vent à la surface, et surtout lorsqu'il fait chaud et que le soleil luit. Dans l'été, elle est presque loujours à terre. Elle multiplie beaucoup dans plu- sieurs endroits aquatiques du Languedoc, ainsi qu'auprès du D in D SR mie on “à. 76 HISTOIRE NATURELLE Rhône, dans les marais d'Arles , et dans plusieurs endroits de la Provence *. M. le président de la Tour-d’Aigues, dont les lumiè- res et le goût pour les sciences naturelles sont connus ,a bien voulu m'apprendre qu’on trouva une si grande quantité de tortues bourbeuses dans un marais d’une demi-lieue de surface,fsitué dans la plaine de la Durance, que ces animaux suflirent pendant plus de trois mois à la nourriture des paysans des environs. Ce n’est qu'à terre que la bourbeuse pond ses œufs; elle les dé- pose, comme les tortues de mer, dans un trou qu’elle creuse, et elle les recouvre cle terre ou de sable. La coque en est moins molle que celle des œufs des tortues franches , et leur couleur est moins uniforme. Lorsque les petites tortues sont écloses , elles n’ont quelquefois que six lignes ou environ de largeur. La bourbeuse: ayant les doigts des pieds plus séparés, et une charge moins pe- sante que la plupart des tortues, et surtout que la tortue terrestre appelée /& grecque, il n'est pas surprenant qu’elle marche avec bien moins de lenteur lorsqu'elle est à terre et que le terrain est uni. Les bourbeuses , ou les tortues d’eau douce proprement dites, croissent pendant très-long-temps, ainsi que les tortues de mer: mais letemps qu’il leur faut pour atteindre à leur entier dévelop- pement est moindre que celui qui est nécessaire aux tortues franches , attendu qu’elles sont plus petites ; aussi ne vivent-elles pas si long-temps. On a cependant observé que lorsqu'elles n’é- prouvent point d'accidens , elles parviennent jusqu'a l’âge de qua- tre-vingts ans et plus; et ce grand nombre d'années ne prouve- t-il pas la longue vie que nous avons cru devoir attribuer aux grandes tortues de mer ? Le goût que la tortue d'eau douce a pour les limaçons, pour les vers et pour les insectes dépourvus d'ailes qui habitent les ri- ves qu'elle fréquente, ou qui vivent sur la surface des eaux, l’a rendue utile dans les jardins, qu’elle délivre d'animaux nuisibles, sans y causer aucun dommage. On la recherche d’ailleurs à causé de l'usage qu'on en fait en médecine, ainsi que de quelques au- tres tortues. Elle devient comme domeslique; on la conserve dans des bassins pleins d’eau, sur les bords desquels on a soin de mettre une planche qui s’étende jusqu’au fond, quand ces mêmes ? Ces faits m'ont été communiqués par M. de Tonchy, de la Société royale de Montpellier. DE LA RONDE. 79 bords sont escarpés, afin qu’elle puisse sortir de sa retraite et aller chercher sa petite proie. Lorsque l’on peut craindre qu’elle ne trouve pas une nourriture assez abondante, on ÿ supplée par du son et de la farine. Au reste, elle peut, comme les autres quadru- pèdes evipares , vivre pendant long-temps sans prendre aucun aliment et même quelque temps après avoir élé privée , d’une des parties du corps qui paroissent le plus essentielles à la vie, après avoir eu la tête coupée. Autant on doit la multiplier dans les jardins que lon veut garautir des insectes voraces , autant on doit l’empècher de péné- trer dans les étangs et dans les autres endroits habités par Les pois- sons. Elle attaque même, dit-on , ceux qui sont d’une certaine grosseur; elle les saisit sous le ventre, elle les ÿ mord et leur fait des blessures assez profondes pour qu'ils perdent leur sang et s’affoiblissent bientôt; elle les entraine alors au fond de l’eau , et elle les y dévore avec tant d’avidité , qu'elle n’en laisse que les arêtes et quelques parties cartilagineuses de la tète; elle rejette aussi quelquefois leur vessie aérienne, qui s'élève à la surface de l’eau ; et par le moyen des vessies à air que l’on voit nager sur les étangs, l’on peut juger que le fond est habité par des tortues bourbeuses. RAA ANAAAAANNANIAAINAAARAARAAANNAU AA ANA AA AAA AAA AARAAARAAAANIAAANS RAA 8/8 LA RONDE. Crsr dans l'Europe méridionale, suivant M. Linné, que l’on trouve celte tortue. Sa carapace est presque entièrement ronde, et c’est ce qui lui a fait donner le nom d’orbiculaire. Les bords de celte carapace sont recouverts de vingt-trois lames, dans deux individus conservés au Cabinet du Roï, et le disque l’est de treize. Ces lames sont très-unies , et leur couleur, assez claire , est semée de très-petites taches rousses plus ou moins foncées. Le plastron est échancré par-derrière, et recouvert de douze lames. Le mu- seau se termine par une pointe forte et aiguë, en forme de très- petite corne. La queue est très-courte. Les pieds sont ramassés, arrondis ; et les doigts, réunis par une membrane commune, ne sont en quelque sorte sensibles que par des ongles assez forts ét assez longs. Ces ongles sont au nombre de cinq dans les pieds de devant , et de quatre daps les pieds de derière. La tortue ronde 78 HISTOIRE NATURELLE habite de préférence au milieu des rivières et des marais, et ses habitudes doivent ressembler plus ou moins à celles de la bour- beuse , suivant le plus ou le moins d'égalité de leurs forces. On renconire les tortues rondes non-seulement dans les pays méridionaux de l'Europe , mais encore en Prusse. Les paysans de ce royaume les prennent et les gardent dans des vaisseaux qui contiennent la nourriture destinée à leurs cochons : ils pensent que ces derniers animaux s'en portent mieux et en engraissent davantage. Les tortues rondes vivent quelquefois plus de deux ans dans cette sorte d'habitation extraordinaire. Il se pourroit que la ronde parvint à une grandeur un peu considérable , malgré la petite taille des deux individus que nous avons décrits, et qui n’ont pas plus de trois pouces neuf lignes de longueur totale, sur deux pouces cinq lignes de largeur, parce que ces deux petites tortues présentent tous les signes du premier âge et d’un développement très-peu avancé. Si cela étoit, nous serions tentés de la regarder comme une variété de la terrapène, dont nous allons parler. Mais, jusqu’à ce que nous ayons recueilli un plus grand nombre d'observations, nous les séparons l’une de l'autre. Les petites tortues rondes que nous avons examinées nous ont présenté un fait intéressant; les avant-dernières pièces de leur plastron étoient séparées, et laissoient passer la peau nue du ven- tre, qui formoit une espèce de poche ou de gonflement plus con- sidérable dans l’une que dans l’autre, et au milieu duquel on dis- tinguoit, dans une surtout, l’origine du cordon ombilical. Nous invitons les naturalistes à remarquer si, dans les autres espèces , les très-jeunes tortues présentent cette scissure du plastron et cette marque d’un âge peu avancé. L’on a observé dans le croco- dile et dans quelques lézards un fait analogue , que l’on retrou- vera peut-être dans un très-grand nombre de quadrupèdes ovi- p2 res. LA TERRAPÈNE. Ne conservons à cette tortue de marais ou d’eau douce le nont de errapène qui lui a été donné par Brown. On la trouve aux Antilles, et particulièrement à la Jamaïque. Elle y est tres-cons- DE LA ROUGEATRE. 7 une dans les lacs et dans les marais, où elle habite parmiles plantes aquatiques qui y croissent. Son corps, dit Brown, est en général ovale et comprimé ; sa longueur excède quelquefois huit ou neuf pouces. Sa chair est regardée comme un mets aussi sain que délicat. Il paroît que cette tortue est la même que celle que Dampier a cru devoir nommer hécate. Suivant ce voyageur, cette dernière aime en effet l’eau douce; elle cherche les étangs et les lacs, d'où elle va rarement à terre. Son poids est de douze ou quinze livres. Elle a les pattes courtes, les pieds plats, le cou long et menu. Sa chair est un fort bon aliment. Tous ces caractères semblent con- venir à la terrapene. RAA VAS VISA AAA AAA VRAIS AMAR AAA AA RAA AAA VIA AAA VILA MAMA VON AA LALAR LA SERPENTINE. É- est aisé de distinguer cette tortue de toutes les autres par Îa longueur de sa queue, qui égale presque celle de la carapaces Cette couverture supérieure est un peu relevée en arête longitu- dinale, et comme découpée par-derrière en cinq pointes aiguës. -Les doigts des pieds sont peu séparés les uns des autres. La ser- pentine habite au milieu des eaux douces de la Chine. Il paroît que ses mœurs se rapprochent de celles de la bour- beuse, et que non-seulement elle détruit les insectes, mais encore qu'elle se nourrit de poissons. LRRVAAMAARAN ANNUAIRE ANUMAAR AAA AAARANARARANANAMAARS LA ROUGEATRE. El hi donnons ici la notice d’une tortue envoyée de Pensilvanie, sous le nom de tortue de marais, et décrite par M. Edwards. Le bout de sa queue est garni d’une pointe aiguë et cornée, comme celle de plusieurs tortues grecques et de la tortue scorpion. Ses doigts sont réunis par une membrane. Sa couleur générale est brune; mais les lames qui garnissent ses côtés , et les écailles qui recouvrent le tour de ses mâchoires et de ses yeux, sont d’un jaune rougeâtre que l’on retrouve aussi sur son plastron, 8o HISTOIRE NATURELLE RAA STATS VAR AVE DUR LA LR VU AT AA UV AAA LR A AIR AAA URI ARR AU LR RUN UV AA LU LAA LUN VIA AL. ] LA TORTUE SCORPION. een eg | C. à Surinam qu'habite celte tortue. Sa carapace est ovale, d’une couleur très-foncée, et relevée sur le dos par trois arètes longitudinales. Le disque est garni de treize lames, dont les cinq du milieu sont. tres-allongées , et on en compte communément vingt-trois sur les bords; douze lames recouvrent le plastron, qui n'est presque point échancré; la lête est couverte par-devant d’une peau calleuse, qui se divise en trois lobes sur le front. La tortue scorpion a cinq doigts à chaque pied; ils sont uu peu séparés et garnis d'ongles , excepté les doigts extérieurs des pieds de der- ricre. Mais ce qui lui a fait imposer son nom, et ce qui sert à la faire reconnoître, c’est une arme dure, en forme de corne ou dongle crochu, qu’elle porte au bout de la queue, et qui a une sorte de ressemblance avec laiguillon du scorpion. M. Linné a fait connoître cette tortue , dont on conserve au Cabinet du Roi plusieurs carapaces et plastrons. Ils ont été envoyés comme ayant appartenu à une petite tortue de marais qui habite dans les sa- vanes noyées de la Guiane , et qui ne parvient jamais à une taille plus considérable que celle qui est indiquée par les couvertures envoyées au Cabinet du Roï. Les plus grandes de Ces carapaces ont six ou sept pouces de longueur, sur quatre on cinq de lar- geur. Voilà donc une espèce de tortue d’eau douce ou de marais, dont la queue est garnie d’une callosité. Nous remarquerons un caractere presque semblable dans plusieurs tortues grecques ou tortues lerrestres proprement dites, et particulièrement dans celles qui ont alteint leur entier développement. VV UD NU AAA AAA A AAA UV UV VU VU AV UV AVE VU VE UV UV AVAL VV / LA JAUNE. Dans e e e . e 1 d Ni avons vu vivans plusieurs individus de cette espèce de tortue d’eau douce, qui n’a encore été décrite par aucun des na- turalistes dont les ouvrages sont le plus répandus. On les avoit DE LA JAUNE, 81 fait venir d'Amérique dans des baquets remplis d’eau, pour les employer dans divers remèdes. Cette jolie tortue parvient ordi- nairement à une grandeur double de celle des tortues bourbeuses. Une carapace qui avoit appartenu à un individu de cette espèce, et qui fait partie de la collection du roi, a sept pouces neuf lignes de longueur. La tortue jaune est agréablement peinte d’un vert d’nerbe un peu foncé, et d’un jaune qui imite la couleur de l'or. Ces couleurs règnent non-seulement sur sa carapace , mais encore sur sa tête , ses pattes , sa queue et tout son corps. Le fond de Ja couleur est vert, et c’est sur ce fond agréable que sont distribuées un très-grand nombre de très-petites taches d’un beau jaune, placées fort près les unes des autres, se touchant en quelques en- droits, imitant ailleurs des rayons par leur disposition, et for- mant partout un mélange très-doux à la vue. Le disque est or- dinairement recouvert de treize lames, et les bords de la cara- pace le sont de vingt-cinq. Le plastron eN garni de douze lames, et la partie postérieure de cette couverture est terminée par une ligne droite, comme dans la bourbeuse , avec laquelle la jaune a beaucoup de rapports. La forme générale de la tête est agréable; les pattes sont déliées , les doigts un peu réunis par une membrane, et armés chacun d’un ongle long, aigu et crochu. La queue est menue , et presque aussi longue que la moitié de la carapace; lorsque la tortue marche, elle la porte droite el étendue comme la bourbeuse. Elle se meut avec moins de lenteur que les tortues de terre , et elle est aussi agréable à voir par la nature de ses mou- vemens que par la beauté de ses couleurs. Lorsqu'elle va s’accou- pler, elle fait entendre un petit gémissement, un petit cri d'amour. Un individu de cette espèce a été envoyé au Cabinet du Roi. sous le nom de tortue terrestre. Ce qui a pu induire en erreur, c’est que toutes les tortues d’eau douce passent une très-grande partie de l’année à terre, ainsi que nous l'avons dit de la bourbeuse. On ne la rencontre pas seulement en Amérique; on la trouve encore dans l’île de l’Ascension , d’où il est arrivé un individu de cette espèce au Cabinet du Roi. Elle habite aussi dans les eaux douces de l’Europe, et n’y varie que par ses couleurs, qui sout quelquefois moins vives. Lacepède. 1. 6 2 HISTOIRE NATURELLE < LA MOLLE. Ces ce tortue est la plus grande des tortues d’eau douce : sa taille approche de celle des petites tortues marines. M. Pennant est le premier qui en ait parlé ; il avoit reçu cet animal de la Caroline méridionale. Le docteur Garden, à qui on avoit apporté deux individus de cette espèce, en avoit envoyé un à M. Ellis , et l’au- tre à M. Pennant. Ceite tortue se trouve dans les rivières du sud de la Caroline; on ly appelle éortue à écailles molles : mais comme elle n’a point d’écailles proprement dites, nous avons préféré de l'appeler simplement {a molle. Elle habite en grand nombre dans les rivières de Savannah et d’Alatamaha , et l’on avoit dit à M. Gar- den qu'elle étoit aussi très-commune dans la Floride orientale. Elle parvient à une grandeur considérable, et pèse quelquefois jusqu'à soixante-dix livres. Une de celles que M. Garden avoit chez lui pesoit de vingt-cinq à trente livres. Ce naturaliste la garda près de trois mois, pendant lesquels il ne #’aperçut pas qu’elle eût rien mangé d’un grand nombre de choses qu'on lui avoit présentées. La carapace de cet individu avoit vingt pouces de long et qua- torze de large ; la couleur générale en étoit d’un brun foncé, avec une leinte verdâtre:le milieu de cette couverture supérieure étoit dur, fort et osseux ; mais les bords et particulièrement la partie postérieure, étoient cartilagineux, mous, plians, ressem- blaut à un cuir tanné, cédant aux impressions dans tous les sens, mais cependant assez épais et assez forts pour défendre et garan- tir l'animal. Cette carapace étoit couverte vers la queue de pe- tites élévations unies et oblongues, et vers la tête, d'élév ations un peu plus grandes. _ Le plastron étoit d’une belle couleur blanchitre; il étoit plus avancé de deux à trois pouces que la carapace, de telle sorte que Jorsque l'animal retiroit sa tête, il pouvoit la reposer sur la partie antérieure, qui étoit pliante et carlilagineuse. La parue postérieure du plastron étoit dure, osseuse, relevée et con- formée de manière à représenter , selonM. Garden, une selle de cheval, DE LA MOLLE. 83 Ta tête éloit un peu triangulaire et petite relativement à la grandeur de l'animal; elle s’élargissoit du côté du cou, qui étoit épais, long de treize pouces et demi, et que la tortue pouvoit retirer facilement sous la carapace. Les yeûx étoicnt placés dans la partie antérieure et supérieure de la tête, assez près l’un de l'autre; les paupières étoient gran- des et mobiles; la prunelle étoit petite, et l'iris, entièrement rond et d’un jaune très-brillant, faisoit paroître les yeux trés-vifs. Cette tortue avoit une membrane clignotante qui se fermoit lors- qu’elle éprouvoit quelque crainte ou qu’elle s'endormoit. La bouche étoit située dans la partie inférieure de la tête, ainsi que dans les autres tortues; chaque mâchoire éloit d’un seul os : mais un des caractères les plus particuliers à ceite tortue étoit la forme et la position de ses narines. Le Gessus de la mâchoire su- périeure se lerminoit par une production carlilagineuse un peu cylindrique, longue au moins de trois quarts de pouce, ressem- blant au groin d’une taupe, mais tendre, menue ei un peu trans- parente. A l'extrémité de cette production éto'ent placées les ou- vertures des narines > qui s’'ouvroient aussi dans le pakus. « Les pattes étoient épaisses et fortes. Celles de devant avoient cinq dôigis, dont les trois premiers étoient plus forts, plus cou ris, que les deux autres. et garnis d'ongles crochus; à la suite du cin- quième doigt étoient deux éspèces de faux doigts qui servoient ‘à étendre une assez grande membrane qui les réunissoit tous. Les pattes de derrière étoient conformées de mème » excepté qu 711 n'y avoit qu'un faux doigt au lieu de deux; elles éloient, ainsi que celles de devant, recouvertes d’une peau ide d’une Us verdätre et sombre. La tortue mollea beaucoup de force; et comme elle est farouche, il arrive souvent que, lorsqu'elle est attaquée, elle se lève sur ses pattes, s'élance avec furie contre son ennemi, et le mord avec violence. La queue de lindividu apporté à M. Garden étoit grosse, large et courte. Cette tortue étoit femelle; elle pondit quinze œufs, et on en trouva à peu près un pareil nombre dans son corps lors- qu’elle fut morte. Ces œufs étoient païfaitement ronds, el à peu près d’un pouce de diamètre. La lortue molle est très-bonné à manger, et l’on dit même que sa chair est plus délicate que celle de la tortue franche, Nous présumons qu'à mesure que l'on connoîtra mieux Îles animaux du nouveau continent; on retrouvera, dans plusieurs 84 HISTOIRE NATURELLE rivières de l'Amérique tant septentrionale que méridionale, la tortue molle que l’on a vue dans celles de la Caroline et de la Floride. Pendant que M. le chevalier de Widerspach, correspon- dant du Cabinet du Roi, étoit sur les bords de lOyapok dans l'Amérique méridionale, ses nègres lui apportèrent la tête et plu- sieurs autres parties d’une tortue d’eau douce qu'ils venoient de dépecer, et qu'il a cru reconnoîlre depuis dans la tortue molle dont M. Pennant a publié la description. AAA AR RAA AAA AAA VU AAA AU VV LU VU UV UV AU. LA GRECQUE, OU LA TORTUE DE TERRE COMMUNE :. En O. nomme ainsi la tortue terrestre la plus commune dans la Grèce et dans plusieurs contrées tempérées de l'Europe. On Fa, pendant très-long-temps, appelée simplement éortue terrestre ; mais comme cette épithète ne désigne que la nature de son ha- bitation , qui est la même que celle de plusteurs autres espèces , nous avons préféré la dénomination adoptée par les naturalistes modernes. On la rencontre dans les bois et sur les terres élevées : äl n’est personne qui ne l'ait vue ou qui ne la connoisse de nom. Depuis les anciens jusqu'à nous , tout le monde a parlé de sa lenteur ; le philosophe s’en est servi dans ses raisonnemens , le pcête dans ses images , le peuple dans ses proverbes. La tortue grecque peut en effet passer pour un des plus lents des quadru- -pèdes ovipares ; elle emploie beaucoup de temps pour parcourir le plus petit espace : mais si elle ne s'avance que lentement , les mouvemens des diverses parties de son corps sont quelquefois assez agiles ; nous lui avons vu remuer la tête , les pattes el la queue , avec un peu de vivacité. Et même ne pourroit-on pas dire que la pesanteur de son bouclier , la lourdeur du poids dont elle est chargée , et la position de ses pattes, placées trop à côté du corps et trop écartées les unes des autres, produisent presque seules la lenteur de sa marche ? Elle a en eflet le sang aussi chaud RC TT D 0 AN ee EP te OA DE CU NON 3 En Languedoc, tortuga dé gârriga: enjaponais, ésicame, ou sanxi. ON Tome 1. Page 84. + — : sl) rt pre RE NET SK A nt WA SRE 4fl db PT w € Fe 11 Prétre PULL : Pavid. J cup ; 1: Mol? ©... Page Sa: 2 Aa Grecque. BR TE RON. Sa Geometrique Nr OL DE LA GRECQUE. 85 que plusieurs quadrupèdes ovipares qui s'élancent avec promp- titude jusques au sommet des arbres les plus élevés ; et quoique ses doigts ne soient pas séparés , comme ceux des lézards qui courent avec vitesse, ils ne sont cependant pas conformés de manière à lui interdire une marche facile et promple. Les tortues grecques ressemblent, à beaucoup d'égards, aux tortues d’eau douce. Leur taille varie beaucoup, suivant leur âge et les pays qu’elles habitent. Il paroît que celles qui vivent sur les montagnes sont plus grandes que les tortues de plaine. Celle que nous avons décrite vivante , et que nous avons mesu- rée en suivant la courbure de la carapace , avoit près de qua- torze pouces de longueur totale, sur près de dix de largeur. La tête avoit un pouce dix lignes de iong, sur un pouce deux lignes de largeur et un pouce d'épaisseur ; le dessus en étoit aplati et triangulaire. Les yeux étoient garnis d’une membrane cligno- tante; la paupière inférieure étoit seule mobile, ainsi que l'a dit Pline, qui a appliqué faussement aux crocodiles et aux qua- drupèdes ovipares en général cette conformation que nous avons observée dans la iortue grecque. Les mächoires étoient très-fortes et crénelées , et l’intérieur en étoit garni d'aspérités ‘que l’on a prises faussement pour des dents ; la peau recouvroit les trous auditifs. La queue étoit tres-courle ; elle n’avoit que deux pouces de longueur. Les paltes de devant avoient trois pouces six lignes jusqu’à l'extrémité des doigts, et celles de der- rière deux pouces six lignes. Une peau grenue et des écailles inégales, dures , et d’une couleur plus ou moins brune, cou- vroient la tête, les pattes et la queue; quelques-unes de ces écailles qui garnissoient l'extrémité des pattes éloient assez grandes , assez détachées de la peau et assez aiguës pour être confondues , au premier coup d'oeil, avec des ongles. Les doigts étoient ramassés ; et comme ils étoient réunis et recouverts par une membrane, on ne pouvoit les distinguer que par les ongles qui les terminoient. Les ongles des tortues grecques sont communément plus émoussés que ceux des tortues d’eau douce, parce que la grecqué les use par un frottement plus continuel et par une pression plus forte. Lorsqu'elle marche , elle frotte les ongles des pieds de devant séparément , et l’un après l’autre, contre le terrain ; en sorte que , lorsqu'elle pose un des pieds de devant à terre , elle appuie d’abord sur l’ongle intérieur, ensuite sur celni qui vient 8G HISTOIRE NATURELLE après. et ainsi sur tous successivement jusqu'à l’ongle extérieur : son pied fait, en quelque sorte, par là Feffet d’une roue , comme si la tortue cherchoit à élever très-peu ses paites , et à s’avancer par une suile de petits pas successifs, pour éprouver moins de résistance de la part du poids qw’elle traîne. Treize lames, siriées. dans leur contour , recouvrent la carapace : les bords sont garnis de vingt-qualre lames, toutes, et surtout celles de derrière, beaucoup plus grandes en proportion que dans la plupart des autres espèces de tortues; et, par la manière dont elles sont placées Les unes relativement aux autres, elles font paroître den- telée la circonférence de la couverture supérieure. Le plastron est ordinairement revêtu de douze où treize lames : il y en avoit treizé dans celle que nous avons décrite. Les lames qui recou- vrent la carapace sont marbrées de deux couleurs, l’une plus ou moins foncée , et l'autre blanchaire. La couverture supérieure de la grecque est très-bombée : Fin- dividu que nous avons décrit avoit quatre pouces trois lignes d'épaisseur ; et c'est ce qui fait que , lorsqu'elle est renversée sue le dos , elle peut reprendre sa première situation , et ne pas res- ter en proie à ses ennemis, comme les tortues franches. Ge n’est pas seulement à l’aide de ses pattes qu’elie s'efforce de se reiour- ner ; elle ne peut pas assez les écarter pour atteindre jusqu'à terre : elle se sert uniquement de sa tête et:de son cou, avec les- quels elle s'appuie fortement'contre le terrain, cherchant , pour ainsi dire , à se soulever, et se balançant à droite et à gauche, usqu'à ce qu'elle ait trouvé le côté du terrain qui est le plus in- liné, et qui lni oppose le moins de résistance. Alors; au lien de faire des efforts dans les deux sens, elle ne cherche plus qu'à se renverser du côle favorable, et à se retourner assez pour rencontrer da terre avec ses pattes, et se remettre entièrement sur ses pieds. [l paroit qu'on peut distinguer les mâles d'avec les femelles, en ce que celles-ci ont leur plastron presque plat, au lieu que les mäles l'ont plus ou moins concave, L'élément dans lequel vivent les tortues de mer et les tortues d’eau douce rend leur charge plus légère ; car tout le monde sait qu'un corps plongé dans l'eau perd toujours de son poids à mais celle des tortues de terre n’est pas ainsi diminuée. Le far- deau que la grecque supporte est donc une preuve de la force dont elle jouit : cette force est d’ailleurs confirmée par la grande facilité avec laquelle elle brise dans sa gueule des corps très-durs. 3 j J #3 DE LA GRECQUE. 8 Ses mâchoires sont mues par des muscles si vivaces, que l'on à remarqué dans une petite tortue dont la tête avoit été coupée une demi-heure auparavant , qu’elles claquoiïent encore avec un ‘bruit assez sensible ; et, des le temps d’Aristote, on regardoit la tortue comme l'animal qui avoit en proportion le plus de force dans les mâchoires. Mais ce fait n’est pas le seul phénomène remarquable que les tortues grecques présentent relativement à la difficulté que lon éprouve lorsqu'on veut ôter la vie aux quadrupèdes ovipares. François Redi a fait à ce sujet, en Toscane, des expériences dont nous allons rapporter les principaux résultats. Il prit une tortue grecque au commencement du mois de novembre ; il fit une large ouverture dans le crâne, et en enleva la cervelle, sans en laisser aucune portion dans la cavité qui la contenoit, et qu’il mettoya , pour ainsi dire, avec soin. Dès le moment que la cer- velle fut enlevée , les yeux de la tortue se fermèrent pour ne plus se rouvrir : mais l'animal ayant été mnis en liberté, conti- nua de se mouvoir et de marcher comme s'il n’avoit reçu aucun mal ; à la vérité, il ne s’avançoit , en quelque sorte , qu'en tà- tonnant, parce qu'il ne voyoit plus. Après trois jours , une nouvelle peau couvrit l'ouverture du crâne, et la tortue vécut ainsi, en exécutant tous ses mouvemens ordinaires, Jusqu'au milieu du mois de mai, c’est-à-dire, à peu près pendant six mois. Lorsqu'elle fut morte , Redi examina la cavité du crane d'où il avoit Ôté la cervelle, et il n’y trouva qu'un petit grumeau de sang sec et noir. Il répéla cette expérience sur plusieurs tor- tues tant terrestres que d’eau douce et même de mer ; et tous ces divers animaux vécurent sans cervelle pendant un nombre de jours plus ou moins considérable. Redi coupa ensuite la tête à une grosse tortue grecque ; et après que tout le sang qui pou- voit s’'écouler des veines du cou se fut épanché, la tortue con- tinua de vivre pendant plusieurs jours; ce dont il fut fagiie de s'apercevoir par les mouvemens qu’elle se donnoit ; el la ma- nière dont elle remuoit les pattes de devant et celles de derrière, Ce grand physicien coupa aussi la tête à quatre autres iorlues ; et les ayant ouvertes douze jours après cette opération, :l trouva que leur cœur palpitoit encore ; que le sang qui restoi à l'ani- mal, y entroit et en sortoit, et par conséquent que la lortue étoit encore en vie. Ces expériences , qui ont élé depuis répétées 88 HISTOIRE NATURELLE. par plusieurs physiciens, me prouvent-elles pas ce que nous avons déjà dit de la nature des quadrupèdes ovipares * ? La tortue grecque se nourrit d'herbes, de fruits, et même de vers, de limaçons et d'insectes : mais comme elle n’a pas l’habi- , tude d'attaquer des animaux qui aient du sang, et de manger des poissons comme la bourbeuse que l’on trouve dans les fleuves et dans les marais, où la grecque ne va point, les mœurs de cette lortue de terre sont assez douces; elle est aussi paisible que sa démarche est lente ; et la tranquillité de ses habitudes en fait aisément un animal domestique, que l'on peut nourrir avec du son et de la farine, et que l’on voit avec plaisir dans les jardins, où elle détruit les insectes nuisibles. Comme les autres tortues et tous les quadrupèdes ovipares, elle peut se passer de manger pendant irès-long-temps. Gérard Blasius garda chez lui une tortue de terre, qui, pendant dix mois, ne prit absolument aucune espèce de. noürrilure ni de boisson. Elle mourut au bout de ce temps; mais elle ne périt pas faute d'alimens, puisqu'on trouva ses intestins encore rem- phs d’excrémens , les uns noirâtres , et les autres verts et jaunes : elle succomba seulement à la rigueur da froid. Les tortues grecques vivent très-long-temps. M. François Cetti en a vu une en Sardaigne qui pesoit quatre livres, et qui vivoit depuis soixante ans dans une maison , où on la regardoit comme un vieux domestique. Aux latitudes un peu élevées , les grecques passent l’hiver dans des trous souterrains , qu’elles creusent même quelquefois, et où elles sont plus où moins en- gourdies , suivant la rigueur de la saison. Elles se cachent ainsi en Sardaigne vers la fin de novembre. Elles sortent de leurs retraites au printemps , et elles s’accou- plent plus ou moins de temps après la fin de leur torpeur, sui- vant la température des pays qu'elles habitent. On a écrit et ré- pété bien des fables touchant l’accouplement de ces tortues, lar- deur des mâles, les craintes des femelles, etc. La seule chose que lon auroit dû dire , c'est que les males des tortues grecques ont reçu des organes très-grands pour la propagation de leur espèce; aussi paroissent-ils rechercher leurs femelles avec ardeur , et ressentir l'amour avec force : on a même prétendu que dans les 0 ? t Voyez , à la tête de ce volume , le Discours sur la nature des quadrupèdes ovipares. DE LA GRECQUE. 89 contrées de l'Afrique, où elles sont en irès-grand nombre, les mâles se battent souvent pour la libre possession de leurs fe- melles , et que dans ces combals , animés par un des sentimens les plus impérieux , ils s'avancent avec courage , quoique avee lenteur , les uns contre les autres, et s’atlaquent vivement à coups de tête. Le temps de la ponte des torlues grecques varie avec la cha- leur des contrées où on les trouve. En Sardaigne, c'est vers la fin de juin qu’elles pondent leurs œufs ; ils sont au nombre de quatre ou de cinq, et blancs comme ceux de pigeon. La femelte les dépose dans un trou qu’elle a creusé avec ses pattes de devant, et elle les recouvre de terre. La chaleur du soleil fait éclore les jeunes tortues , qui sortent de l'œuf dès le commencement de septembre, n'étant pas encore plus grosses qu’une coque de noïx. La tortue grecque ne va presque jamais à l'eau ; cependant elle est conformée à l’intérieur comme iles tortues de mer * : si elle n’est point amphibie de fait et par ses mœurs, elle l’est donc jusqu’à un certain point par son organisalion. On trouve la tortue grecque dans presque toutes les régions chaudes et même tempérées de l'ancien continent, dans FEu- rope méridionale , en Macédoine, en Grèce, à Amboïne, dans ‘île de Ceylan, dans les Indes, au Japon, dans l'île de Bour- bon, dans celle de lAscension , dans les déserts de l'Afrique. C’est surtout en Libye et dans les Indes que la chair de la tortue de terre est plus délicate et plus saine que celle de plusieurs autres tortues; et l’on ne voit pas pourquoi il a pu être défendu aux Grecs modernes et aux Tures de s’en nourrir. Ce n’est que d’après des observations qui manquent encore , que l’on pourra déterminer si les tartues terrestres de PAmérique méridionale sont différentes de la grecque, st elles y sont na- turelles , ou sielles y ont été portées d’ailleurs. Dans cette mème partie du monde , où elles sont très-communes, on les prend avec des chiens dressés à les chasser. Ils les découvrent à la pisie; et lorsqu'ils les ont trouvées, ils aboiïent jusqu’à ce que les chas- .seurs soient arrivés. On les emporte en vie : elles peuvent peser 1 Gérard Blasins , en disséquant une tortue de terre, trouva son péricarde rempli d’ane quantité considérable d’eau limpide. Nous verrons , dans Partic}s du crocodile ; que le péricarde d’un alligator, disséqué par Sloane, éloit é5x- lement rempli d’eau. ôo HISTOIRE NATUREËLE de cinq à six Hvres, et au-delà. On les met dans un jardin oæ dans une espèce de parc : on les y nourrit avec des herbes et des fruits, et elles y multiplient beaucoup. Leur chair, quoiqu'ur peu coriace, est d'assez bon goût. Les petites tortues croissen® pendant sept ou huit ans. Les femelles s’'accouplent, quoiqu’elles n'aient acquis que la moitié de leur grandeur ordinaire : mais les mâles ont atteint presque tout leur développement lorsqu'ils s'unissent à leurs femelles ; ce qui paroîtroit prouver que, dans cette espece , les femelles ont plus de chaleur que les mâles, et oe qui sembleroit contraire à l’ardeur que les anciens ont attri- buée aux males , ainsi qu'a l'espèce de retenue qu’ils ont suppo- sée dans les femelles. À l'égard de l'Amérique septentrionale et des îles qui l’avoi- ‘sinent, il paroît que les tortues grecques s'y trauvent , avec quelques légères différences , dépendantes de la diversité du- climat. Leur grandeur , dans les contrées tempérées de l'Europe, est bien au-dessous de celle qu’elles peuvent acquérir dans les ré- gions chaudes de l'Inde. On a apporté de la côte de Coromandet une tortue grecque qui étoit longue de quatre pieds et demi. depuis l'extrémité du museau jusqu'au bout de la queue, et épaisse de quatorze pouces. La tête avoit sept pouces de long sur cinq de large; le cerveau et le cervelet n’avoient en tout que seize lignes de longueur sur neuf de largeur ; la langue, un pouce de longueur, quatre lignes de largeur, une ligne d'épaisseur ; la couverture supérieure, trois pieds de long sur deux pieds de large. Cette tortue étoit male , et avoit le plastron concave. La verge, qui étoit enfermée dans le rectum , avoit neuf pouces de longueur sur un pouce et demi de diamètre. La vessie éloit d’une grandeur extraordinaire ; on y lrouva douze livres d’une urine claire et limpide. La queue était très-grosse ; elle avoit six pouces de diamètre à son origine, et quatorze pouces de long. A près la mort de l’ani- mal, elle étoit tellement inflexible , qu'il fut impossible de Ia redresser ; ce qui doit faire croire que la tortue pouvoit s'en servir. pour frapper avec force. Elle étoit terminée par une pointe d'u ne snbstance dure comme de la corne, et assez semblable à celle que: lon remarque au bout de la queue de la tortue scorpion. Les grandes tortues de terre ont donc reçu , indépendamment de leurs boucliers, des armes offensives assez fortes : elles ont das DE LA GÉOMÉTRIQUÉ. gt maächoiïres dures et tranchantes , une queue et des pattes qu'elles pourroient employer à attaquer; mais comme eliés n’en abusent pas, et qu'il paroït qu’elles ne s’en servent que pour se défendre, rien ne contredit, et, au contraire , tout confirme la douceur des habitudes et la tranquillité des mœurs de la grecque. L'on conserve au Cabinet du Roi la dépouille de deux tortues grecques qui étoient aussi très-grandes : la carapace de l’une a près de deux pieds cinq pouces de longueur, et la seconde, près de deux pieds quatre pouces. Nous avons remarqué au bout de la queue de la première une callosité semblable à celle de la tortue de Coromandel : nous ne croyons cependant pas que cetle callosité soit un attribut de la grandeur dans les tortues grecques, Nousavons vu en effet une dureté semblableau bout d’une tortue vivante, qui étoit à peu près de la taille de celle que nous avons décrite au commencement de cet article : à la vérité, comme elle en difléroit par la couleur verdâtre et assez claire de ses écailles , 1l pourroit se faire que cet individu , sur lequel nous n'avons pu recueillir aucun renseignement particulier, constituât une variété constante, dont la queue seroit garnie d’une callosité beaucoup plus tôt que dans les tortues grecques ordinaires. Le Cabinet du Roi renferme aussi une tête de tortue deterreap- portée de Pile Rodrigue , et quia près de cinq pouces de longueur. RAA AAA VU PUR RAA RAA AAA APE VUE AMEL VS BULLE AE RAP E LAA 52 RAA, LA GÉOMÉTRIQUE. RES tortue terrestre a beaucoup de rapporis avec la grecque. Ses doigts, bien loin d'être divisés, sont réunis par une peau couverte de petites écailles, de manière à n'être pas distingués les uns des autres et à ne former qu’une patte épaisse et arron- die, au-devant de laquelle leurs extrémités sont seulement ir- diquées par les ongles : ces ongles sont au nombre de cinq dans les pieds de devant, et de quatre dans les pieds de derrière. D'assez grandes écailles reconvrent le bas des palles ; et comme elles n'y uennent que par leur base, et qu’elles sont épaisses et quelquefois arrondies à leur sommet, on les prendroït pour des ongles atia- chés à divers endroits de la peau. L’individu que nous avons g2 HISTOIRE NATURELLE décrit avoit dix pouces de long, huit pouces de large et près de quatre pouces épaisseur. La couverture supérieure de la tortue géométrique est des plus convexes. Les couleurs dont elle est variée la rendent très-agréable à la vue, Les lames qui revêtent les deux couvertures, et qui sont communément au nombre de treize sur le disque, de vingi-trois sur les bords de la carapace , ct de douze sur le plastron , se relèvent en bosse dans leur milieu : elles sont fortement striées, séparées les unes des autres par des espèces de sillons assez profonds, et la plupart hexagones. Leur couleur est noire; leur centre présente une tache jaune à six côtés, d’où partent plusieurs rayons de la même couleur. Elles montrent ainsi une sorte de réseau de couleur jaune , formé de lignes très-distinctes dessinées sur un fond noir, et ressemblant à des figures géométriques ; et c'est de là qu’a été tiré le nom que l’on donne à l’animal. On trouve cette tortue en Asie, à Madagascar, dans l’ile de l'As- ision, d'où elle a été envoyée au Cabinet du Roi, et au cap de Bonne-Espérance, où elle pond depuis douze jusqu’à quinze œufs. Plusieurs tortues géométriques différent de celle que nous venons de décrire, par le nombre et la disposition des rayons jaunes que présentent les écailles, par l'élévation de ces mêmes pièces, par une couleur jaunâtre plus ou moins uniforme sur le plastron , et par le peu de saillie des lames qui garnissent cette couverture inférieure. Nous ignorons si ces variétés sont constantes, si elles dépendent du sexe ou du climat, etc. Quoi qu’il en soit, nous croyons devoir rapporter à quelqu’une de ces variéiés, jusqu'à ce que de nouvelles observa- üons fixent les idées à ce sujet, la tortue terrestre appelée Lécate par Brown. Cetle dernière est, suivant ce voyageur, naturelle au continent de l'Amérique, mais cependant très-commune à la Jamaïque, où on en porte fréquemment. Sa carapace est épaisse, et a souvent un pied et demi de long : la surface de cette cou- verture est divisée en hexagones oblongs; des lignes déliées par- tent de leurs circonférences et s'étendent jusqu’à leurs centres , qui sont jaunes. Nous pensons aussi que cette hécate de Brown , aïnsi que la géométrique , sont peut-être la même espèce qué la £errapène de Dampier. Les £errapènres de ce navigateur sont beaucoup moins grosses que les lortues qu’il nomme lécates , et qui sont les ter- rapènes de Brown, ainsi.que nous l'avons dit. Elles ont le dos plus rond, quoique d’ailleurs elles leur ressemblent beaucoup. DE LA RABOTEUSE, 93 Leur carapace est comme naturellement taillée, dit ce voyageur; elles aiment les lieux humides et marécageux. On estime leur chair. 11 s'en trouve beaucoup sur les côtes de l'ile des Pins , qui est entre le continent de l'Amérique et celle de Cuba : elles pénè- trent dans les forêts, où les chasseurs ont peu de peine à les prendre. Ils les portent à leurs cabanes ; et, après leur avoir fait une marque sur la carapace, ils les laïssent aller dans les bois, bien assurés de les retrouver à si peu de distance, qu'après un mois de chasse, chacun reconnoît les siennes, et les emporte à Cuba. Au reste, nous ne cesserons de le répéter, l’histoire des tortues demande encore un grand nombre d'observations pour èlre entièrement éclaircie : nous ne pouvons qu'indiquer les places vides, montrer la manière de les remplir, et fixer les points principaux autour desquels il sera aisé d’arranger ce qui reste à découvrir. RAR VIE IAA A VAAAAVEA LAAAAAMAA VVR VUT AA LR LARAUR VUS RAA AA AAA AU VIA VS LA RABOTEUSE. Care petite espèce de tortue est terrestre, suivant Seba. Son museau se termine en pointe. Les yeux, ainsi que dans les autres tortues, sont placés obliquement. La carapace est presque aussi large que longue; les bords en sont unis par-devant et sur les côlés, mais inégalement dentelés sur le derrière. Les écailles qui les garnissent sont lisses et planes, excepté celles du dos, dont le milieu est rehaussé de manière à former une arête longitudi- nale : leur couleur est blanchâtre, traversée en divers sens par de très-petites bandes noiratres qui la font paroître marbrée. Le plastron est festonné par-devant : le milieu en étoit un peu con- cave dans l'individu que nous avons décrit, et qui avoit près de trois pouces de long, depuis le bout du museau jusqu’à lextré- mité de la queue, sur près de deux pouces de largeur. Suivant Seba , la raboteuse ne devient jamais plus grande. Cette tortue a cinq ongles aux pieds de devant, et quatre anx pieds de derrière, dont le cinquième doigt est sans ongle : la queue , est courte. La couleur de la tète, des pattes et de la queue, ressemble beaucoup à celle de la carapace : elle est d’un dé HISTOIRE NATURELLE blanc tirant sur le jaune, varié par des bandes et des taches brunes, mais plus larges en certains endroits , et surtout sur la iêle, que celles que l’on voit sur la couverture supérieure. C'est dans les Indes orientales , et particulièrement à Amboine, qu’ha- bile celte tortue, qui appartient aussi au nouveau monde , et ÿ vit dans la Caroline, PRARAMAMANAAMIAMAINAAAAAAN AAA AAA AAA MA à LA DENTELÉE, L ve rTE tortue n'est connue Que par ce qu'en a rapporté M. Linné. Ses doigts , au nombre de cinq dans les pieds de devant, et de quatre dans ceux de derrière, ne sont pas séparés les uns des autres; ils se réunissent de manière à former une patte ramassée et arrondie, comme celles de beaucoup de tortues ter resires. La couverture supérieure a un peu la forme d’un cœur : son diamètre est ordinairement d'un ou deux pouces ; les bords en sont dentelés, et comme déchirés. Les lames qui la recouvrent sont hexagones , relevées par des points saïllans; et leur couleur est d’un blanc sale. On trouve cette tortue dans la Virginie. AAA AAA AR AAA AA AL AA AAA AAA ARR AAA AA VAR ALLAET LA BOMBÉE. es O. rencontre dans les pays chauds, suivant M. Linné, cette tortue , qui doit être terrestre, et qui est distinguée des autres en ce que les doigts de ses pieds ne sont pas réunis par une mem- brane, que sa couverture supérieure est bombée, que les quatre lames antérieures qui garnissent le dos sont relevées en arête, et que le plastron ne présente aucune échancrure. Nous avons vu dans la collection de M. le chevalier de la Marck une carapace et un plastron de cette tortue. La carapace avoit six pouces de long sur six pouces et demi de large. L'animal devoit avoir deux pouces sept lignes d'épaisseur. Le disque éloit garni de treize lames légèrement striées, les bords de vingt-cinq, et le plastrom DE LA VERMILLON. 9 de douze. La carapace éloit d’un brun verdâtre, sur lequel des raies jaunes s’étendoient en tout sens. Les couleurs de la tortue jaune sont presque semblables ; mais elles sont disposées par taches, et non pas par raies, comme celles de la bombée. Le plastron étoit jaunatre. | RAR LV VUE AAA AAA AAA AA RAA AAA RAA AAA AAA RAA AAA AAA AAA AAA AAA AAA AAA AAA LA VERMILLON, il Av cap de Bonne-Espérance habite une petite tortue de terre, que Worm a vue vivante, et qu'il a nourrie pendant quelque temps dans son jardin. Des marchands la lui avoient vendue comme venant des Grandes-lndes, où il se peut en effet qu’on la trouve. La couverture supérieure de cette petite et jolie tortue est à peine longue de quatre doigts : les lames en sont agréable- ment variées de noir, de blanc, de pourpre, de verdâtre et de jaune; et lorsqu'elles s’exfolient, la carapace présente à leur place du jaune noirâtre. Le plastron est blanchâtre, et sur le sommet de la tête, dont on a comparé la forme à celle de la tête «dun perroquet, s'élève une protubérance d’une couleur de ver- millon mêlé de jaune. Cest de ce dernier caractère, par lequel elle a quelque rapport avec la nasicorne, que nous avons tiré le nom que nous lui donnons. Les pieds de cette torlue sont garnis de quatre ongles et d’écailles très-dures; les cuisses sont revêtues d’une peau qui ressemble à du cuir; la queue est effilée et irès- courte. La Nature a paré cette tortue avec soin; elle lui a donné la beauté : mais, en la réduisant à un très-petit volume, elle lui a Ôte presque tout l'avantage du bouclier naturel sous lequel elle peut se renfermer, car il paroît qu’on doit lui appliquer ce que rapporte Kolbe de la tortue de terre du cap de Bonne-Espérance. Suivant ce voyageur, les grands aigles de mer nommés orfraies sont très-avides de la chair de la tortue. Malgré toute la force de leur bec et de leurs serres , ils ne pourroient briser sa dure enve- loppe : mais ils lenlèvent aisément; ils l'emportent au plus haut des airs, d’où ils la laissent tomber à plusieurs reprises sur des rochers très-durs; la hauteur de la chute et la très-grande vitesse qui en résulte produisent un choc violent, et la couverture de 96 HISTOIRE NATURELLE là tortuè, bientôt brisée, livre en proie à l'aigle carnassier l’ani- mal qu’elle auroit mis à couvert si un poids plus considérable avoit résisté aux efforts de l'aigle pour l’élever dans les nues. De tous les temps on a attribué le même instinct aux aigles de l'Europe pour parvenir à dévorer les tortues grecques , et tout le monde sait que les anciens se sont plus à raconter la mort sin- sulière du fameux poëte Eschyle , qui fut tué, dit-on, par le choc d’une tortue qu'un aigle laissa tomber de très-haut sur sa tète nue. La tortue vermillon n'habite pas seulement aux environs du cap de Bonne-Espérance ; il paroit qu'on la rencontre aussi dans la partie septentrionale de l'Afrique. M. Edwards a décrit un individu de cette espèce qui lui avoit été a pporte de Sancta-Crux , dans la Barbarie occidentale. AA VU EU UN AR U UU UU LUUUU VUV US UV UV UV UV VUV MU VE LA COURTE-QUEUE. O% trouve à la Caroline cette tortue terrestre dont la tête et les pattes sont recouverles d’écarlles dures, semblables à des callo- sités. Les doigts sont réunis ; elle a cinq ongles aux pieds de de- vant, et quatre à ceux de derrière. Un de ses caracttres dis- Unctifs est d’avoir la queue des plus courtes ; mais elle n'est pas absolument sans queue, ainsi que l'a dit M. Linné. La couver- ture supérieure, échancrée par - devant en forme de croissant, n'offre point de dentelures sur les bords, et les lames qui la gar- missent sont larges , bordées de stries, et pointillées dans leur mi- lieu. I paroît que la courte-queue devient assez grande. On con- serve au Cabinet du Roi une carapace de cette tortue ; elle a dix pouces six lignes de long, et huit pouces dix lignes de large, RAIN A NV AU NAN ANR NU VU UV VER VU EU VU UV AMAANAMANARANRANY LA CHAGRINÉE. er me N ous donnons ce nom à une nouvelle espèce de tortue appor- tée des Grandes-Indes au Cabinet du Roi par M. Sonnerat. Elle Tome 4" + David Seulp* 4 e », 9: ... Pag 1.La Raboteuse. 7 x », l 98: NX haorineée . hate 2 2 ‘ DE LA CHAGRINÉE. @7 est très-remarquable par la conformation de sa carapace, qui ne ressemble à celle d'aucune tortue connue. Cette couverture sn- périeure a trois pouces neuf lignes de longueur, sur trois pouces six lignes de largeur ; elle paroït composée, pour ainsi dire, de deux carapaces placées l’une sur l’autre, et dont celle de dessus seroit plus élroite et plus courte. Cette espèce de seconde cara- pace qui représente le disque est longue de deux pouces huit Lignes, large de deux pouces, un peu saillante, osseuse, parse- mée d’une grande quantité de petits points qui la font paroître chagrinée ; et c’est de là que nous avons tiré le nom de l'animal. Ce disque est composé de vingt-trois pièces, qui ne sont recou- vertes d’ancune écaille. Seize de ces pièces, plus larges que les autres, sont placées sur deux rangs séparés vers la tête par une troisième rangée de six pièces plus petites; et ces trois rangs se réunissent à une dernière pièce qui forme la partie antérieure du disque. Les bords de la carapace sont cartilagineux ei à demi transparens ; 1ls laissent apercevoir les côtes de l'animal, le long desquelles cette parlie cartilagineuse est un peu relevée, et qui sont au nombre de huit de chaque côté. Ces bords sont par-der- rière presque aussi larges que le disque. Le plastron est plus avancé par-devant et par-derrière que la couverture supérieure ; 11 est un peu échancré par-devant, car- tilagineux, transparent , et garni de sept plaques osseuses, cha- grinées, semblables aux pièces du disque, différentes entre elles par leur grandeur et par leur figure, placées trois vers le devant, deux vers le milieu , et deux vers le derrière du plastron. La tête ressemble à celle des torlues d’eau douce; les rides de a peau qui environnent le cou montrent que l'animal peut l’al- longer facilement. Comme nous n'avons rien appris relativement aux habitudes de cette tortue, et comme les pattes et la queue manquoient à l'individu que nous venons de décrire, nous ne pouvons point dire si la chagrinée est terrestre ou d’eau douce. Cependant, comme sa couverture supérieure n’est presque pas bombée, nous présumons que cette tortue singulière est plutôt d'eau douce que de terre. Lacepède. 1 7 98 HISTOIRE NATURELLE PARA RAA AAA AA AAA A AAA RAA AE PE EEE LEVELS VE LA ROUSSATERE. CE nouvelle espèce de tortue a été apportée de l'Inde an Cabinet du Roi , ainsi que la chagrinée, par M. Sonnerat. Sa ca- rapace est aplatie, longue de cinq pouces six lignes, et large d'autant ; le disque est recouvert de treize lames; les bords le sont de douze. Ces écailles sont minces, légerement striées, unies dans le centre , d’une couleur roussätre très-semblable à celle du mar- ron ; et c’est de là que nous avons tiré le nom que nous lui don- nons. Le plastron est échancré par-derrière , et revêtu de treize lames. La iète est plus plate que celle de la plupart des autres tortues. Les cinq doigts des pieds de devant, ainsi que de ceux de derrière, sont-garnis d'ongles longs et pointus. La queue man- quoit à l'individu apporté par M. Sonnerat ; mais , quoique nous n'ayons pu juger de la forme de cette partie, nous présumons, d’après l’aplatissement de la carapace, et surtout d’aprés les on- gles qui ne sont point émoussés, que la tortue roussâtre est plu- 1ôt d’eau douce que terrestre. L’individu que nous avons décrit étoit femelle : aussi son plastron étoit-1l plat. Nous avons trouvé dans son intérieur plusieurs œufs d’une substance molle, ovales et iongs d'un pouce. PARA AAA IAA PA A AR AA AAA ARR AA AA A RAR RAR VRAI RAR AURA VARIE VER EE VRAI ES LA NOÏRATRE. ON nommons ainsi une tortue dont il n’est fait mention dans aucun des naturalistes et voyageurs dont les ouvrages sont le plus connus , et dont nous ne pouvons donner qu'une descrip- tion incomplète , parce que nous n'en avons vu que la cara- pace et le plastron, conservés au Cabinet du Roï. Cette carapace a cinq pouces quatre lignes de long, sur à peu près autant de large ; elle est un peu bombée, d’une couleur très-foncée et noiï- râtre. Le disque est recouvert de treize écailles épaisses, striées DES LÉZARDS. 99 dans leur contour, et si polies dans tout le reste de leur surface, qu'elles paroissent onctueuses au toucher. Les cinq écailles de la rangée du milieu sont un peu relevées , de manière à former une arête longitudinale ; les bords sont garnis de vingt-quatre lames ; le plastron est échancré par-derrière, et revêtu de treize écailles. Nous ignorons si celte tortue est terrestre ou d’eau douce, et dans quels lieux on la trouve. , DES LÉZARDS. Lr genre des lézards est le plus nombreux de ceux qui forment l'ordre des quadrupèdes ovipares. Après avoir comparé les uns avec les autres les divers animaux qui le composent, tant d'après nos observations que d’après celles des voyageurs ei des natura= listes, nous avons cru devoir en compler cinquante-six espèces, toutes différenciées par leurs habitudes naturelles et par des ca- ractères extérieurs. On peut distinguer facilement les lézards des autres quadrupèdes ovipares, parce qu'ils ne sont pas couverts d’une carapace comme les tortues , et parce qu'ils ont une queue, tandis que les grenouilles, les raïînes et les crapauds n’en ont point. Leur corps est revêtu d’écailles plus où moins fortes, ou de tubercules plus où moins saillans. Leur grandeur varie de- puis la longueur de deux ou trois pouces jusqu’à celle de vingt- six ou même trente pieds. La forme et la proportion de leur queue varient aussi : dans les uns, elle est aplalie ; dans jes au- tres, elle est ronde. Dans quelques espèces , sa longueur égale trois fois celle du corps; dans quelques autres, elle est tres- courte : dans tous, elle s'étend horizontalement , et est presque aussi grosse à son origine que l'extrémité du corps à laquelle elle est attachée. Les pattes de derriére des lézards sont plus longues que celles de devant. Les uns ont cinq doigts à chaque pied, d’autres n’en ont que quatre ou même trois aux pieds de derrière ou à ceux de devant. Dans la plupart de ces animaux, les cinq doigts des pieds de derrière sont inégaux ; le troisième et le quatrième sont les plus longs, et l'extérieur est séparé des autres comme me 100 HISTOIRE NATURELLE espèce de pouce, tandis qu’au contraire, dans les quadrupede# vivipares, le doigt qui représente le pouce est le doigt intérieur. Les phalanges des doigts ne sont pas toujours au nombre de trois ou de deux, comme dans les vivipares , mais quelquefois au nombre de quatre, ainsi que dans plusieurs espèces d'oiseaux ; ce qui donne aux lézards plus de facilité pour saisir les bran- ches des arbres sur lesquels ils grimpent. Les habitudes de ces animaux sont aussi diversifiées que leur conformation extérieure : les uns passent leur vie dans l'eau où sur les bords déserts des grands fleuves et des marais ; d’autres, bien loin de fuir les endroits habités, les choisissent de préfé- rence pour leur demeure : ceux-ci vivent au milieu des bois, et y courent avec vitesse sur les rameaux les plus élevés ; ceux-là ont leurs côtés garnis de membranes en forme d'ailes, par le moyen desquelles ils franchissent avec facilité des espaces éten- dus, el réunissent ainsi à la faculté de nager et à celle de grim- per aisément jusqu’au sommet des arbres, le pouvoir de s'élancer et de voler, pour ainsi dire, de branche en branche. Pour mettre de l’ordre dans l'exposition de ce grand nombre d'espèces de lézards, nous avons cru devoir réunir celles qui se ressemblent Le plus par leur grandeur, par leur conformation ex- térieure, et par leurs habitudes. Nous avons formé par là huit divisions dans ce genre. La première, qui renferme onze es- pèces, com prend les crocodiles, les fouette-queues, les dragonnes. ‘et les autres lézards qui ont tous la queue aplatie, et qui presque. tous parviennent à une longueur de plusieurs pieds. Dans la seconde division se trouvent les iguanes et d’autres lé+ zards moins grands, mais qui cependant ont quelquefois quatre ou cinq pieds de longueur, et qui sont distingués d'avec les au- tres par des écailles relevées en forme de crètes au-dessus de leur dos. Cette seconde division renferme cinq espèces. Dans la troisième nous plaçons le lézard gris si commun dans nos contrées, le lézard vert que l’on trouve en très-grand nom- bre dans nos provinces méridionales, et cinq autres espèces de lézards , tous distingués des autres, en ce qu'ils n'ont point de crêtes sur le dos, que leur queue est ronde, et que le dessus de leur corps est revêtu d’écailles assez grandes, disposées en bandes transversales. Ces bandes transversales manquent, ainsi que les crêtes, aux léxards de la quatrième divison ; ce défaut, joint à la rondeux DES LÉZARDS. Toi le leur queue, suffit pour les faire reconnoître, et ils forment vingt-une espèces, parmi lesquelles nous remarquerons princi- ‘palement le caméléon, le scinque faussement appelé crocodile éerrestre , etc. Le gecko, le geckotte, et une troisième et nouvelle espèce de lézards, composent la cinquième division; et leur caractère dis- æinctif est d'avoir le dessous des doigts garni de larges écailles ; placées les unes sur les autres comme les ardoises qui couvrent les toits. La sixième division comprend le seps et le chalcide, qui n’onf lun et l'autre que trois doigs, tant aux pieds de devant qu’à ceux de derrière. Les lézards de la septième division sont remarquables par les membranes en forme d'ailes dont nous venons de parler, Nous n'avons compté dans cette division qu’une seule espèce, à laquelle nous avons rapporté tous les lézards ailés décrits par les voya- geurs ; on en verra les raisons à l’article particulier du dragon. La huitième division enfin comprend six espèces de lézards , parmi lesquelles nous rangeons la salamandre terrestre et la salamandre aquatique. Toutes les six sont distinguées des autres, en ce qu'elles ont trois ou quatre doiïgis aux pieds de devant, et quatre ou cinq aux pieds de derrière. Nous laissons exclusi- vement à ces animaux le nom de sa/amandre, qui a été souvent attribué à plusieurs lézards, très-différens des vraies salaman- dres, et même très-différens les uns des. autres. [ls ont beau- coup de rapports avec les grenouilles ct les autres quadrupèdes ovipares qui n'ont pas de queue ; ils leur ressemblent non-seu- lement par leur peau dénuée d’écailles apparentes, mais encore par leurs habitudes ; par les espèces de métamorphoses qu'ils su- bissent avant de devenir adultes, et par le séjour plus où moins long qu’ils font au milieu des eaux ; ils s'en rapprochent encore par leurs parties intérieures, et par la forme et le nombre de leurs os. S'ils ont des vertèbres cervicales, de même que les au- ires lézards, ils manquent presque tous de côtes, comme les gre- nouilles , et ils font ainsi la nuance qui réunit les quadrupedes ovipares qui ont une queue, avec ceux qui en sont privés. Pres- que tous les lézards n’ont que deux ou quatre vertèbres cervi- cales : mais le crocodile, placé par sa grandeur et par sa puis- sance à la tête de ces animaux, et occupant, dans la chaîne qui les réunit, l'extrémité opposée à celle où se irouvent les sala- 102 HISTOIRE NATURELLE x + mandres , a sept verlébres au cou comme tous les quadrupèdeg vivipares ; il ie par là Les lézards avec ces animaux mieux orga- nisés, pendant que, d’un autre côté, il les rapproche des tortues de mer par une grande partie de ses habitudes et de sa confor- mation. RAA MAR AAA VIA UVAAAA AAA AAA SAR AURA A/R RAA RAA NANARANANA AARAARARAR AAA RVRANMANVA PREMIÈRE DIVISION. LEZ ARDS Dont la queue est aplatie, et qui ont cinq doigts aux pieds de devant. LES CROCODILES. Lionsou'ox compare les relations des voyageurs, les observations des naturalistes, et les descriptions des nomenclateurs, pour déterminer si l’on doit compter plusieurs espèces de crocodiles, ou si les différences qu’on a remarquées dans les individus ne tiennent qu'à l’âge, au sexe et au climat , on rencontre beaucoup de contradictions, tant sur la forme que sur la couleur, la taille, les mœurs et l'habitation de ce grand quadrupede ovipare. Les voyageurs lui ont rapporté ce qui ne convenoit qu'à d’autres grands lézards très-différens du crocodile par leur conformation et par leurs habitudes ; ils lui en ont même donné les noms. Ils on! dit que le crocodile s’appeloit tantôt Zgan , lantôt guan , noms qui ne sont que des contractions de celui du lézard iguane. C'est d’après ces diversités de noms, de forme et de mœurs, qu’ils ont voulu regarder les crocodiles comme formant plusieurs es- pèces distincles; mais lous les vrais crocodiles ont cinq doigts aux pieds de devant , quatre doigts palmés aux pieds de derrière, et n'ont d'ongles qu'aux trois doigts intérieurs de chaque pied. En examinant donc uniquement tous les grands lézards qui pré- sentent ces caracières, et en observant ailentivement les diflé- rences des divers individus, tant d’après les crocodiles que nous avons vus nous-mêmes que d'après les descriptions des auteurs DES CROCODILES. 10% et les récits des voyageurs, nous avons cru ne devoir compter que trois espèces ‘parmi ces énormes animaux. ï La première est le crocodile ordinaire où proprement dit, qui habite les bords du Nil ; on l'appelle a/ligator, principalement en Afrique, et l’on pourroit le désigner par le nom de crocodile veré, qui lui. a déjà été donné ; la seconde est le crocodile noir, que M. Adanson a vu sur la grande rivière du Sénégal; et la troisième , le crocodile qui habite les bords du Gage, et auquel nous conservons le nom de gavial, qui lui a été donné dans l’Inde. Ces trois espèces se ressemblent par les caractères distinc- tifs des crocodiles que nous venons d'indiquer ; mais elles diffe- rent les unes des autres par d’autres caractères , que nous rap- porterons dans leurs articles particuliers. On a donné aux crocodiles d'Amérique le nom de caïman , que l'on a emprunté des Indiens. Nous en avons comparé avec soin plusieurs individus de différens ages avec des crocodiles du Nil, et nous avons pensé qu is sont absolument de la même espèce que ces crocodiles d Egypte ; ; ils ne présentent aucune différence remarquable qui ne puisse être rapportée à l'influence du climat. En eflet, si leurs mâchoires sont quelquefois moins allongées, elles ne different jamais assez, par leur raccourcisse- ment , de celles des crocodiles du Nil, pour que les caïmans constituent une espèce distincte, d'autant plus que cette diffé- rence est très-variable, et que les crocodiles d'Amérique ressem- blent autant à ceux du Nil par le nombre de leurs dents, qu'un individu ressemble à un autre parmi ces derniers crocodiles. On a prétendu que le cri des caïmans étoit plus foible, leur coura ge moins grand , et leur longueur moins onde lee ; mais ccla n'est vrai tout au plus que des crocodiles de certaines contrées de l'Amérique, et particulièrement des côtes de la Guiane. Ceux de la Louisiane font entendre une sorte de mugissement pour le moins aussi fort que celui des crocodiles de l’ancien continent, qu'ils surpassent quelquefois par leur grandeur et par leur har- diesse, tandis que nous voyons d’un autre côté, dans l'ancien monde , plusieurs pays où les crocodiles sont presque muets, et présentent une sorte de lâcheté et de douceur de moeurs AN pour le moins à celles des crocodiles de Ja Guiane. Les crocodiles du Nil et ceux d'Amérique ne forment done qu'une espèce, dont la grandeur et les habitudes varient dans les deux continens, suivant la température, l'abondance de la 104 HISTOIRE NATURELLE nourriture, le plus ou moins d'humidité , etc. Cette première. éspèce est donc commune aux deux mondes, pendant que le crocodile noir n’a été encore vu qu'en Afr ique , et le gavial sur les bords du Gange. _ Les voyageurs qui sont allés sur les côtes orientales de l'Amé- rique méridionale disent que l'on y rencontre de grands quadru- pèdes OVipares , qu'ils regardent comme une petite espèce de Cäiman , bien distincte de l'espèce ordinaire. Cette prétendue es- péce de caïman est celle d’un grand lézard que l’on nomme dragonne > ét qui parvient quelquefois à la longueur de cinq ou SX pieds. Notre opinion à ce sujet a été confirmée par un fort n Oservaleur qui arrivoit de la Guiane, à qui nous avons montré la dragonne, et qui l’a reconnue pour le lézard qu’on y appelle Za Petile espèce de caïiman. Le navigateur Dampier a aussi voulu regarder comme une nouvelle espèce de crocodiles, de très-grands lézards que l’on. trouve dans la Nouvelle-Espagne ; ainsi que dans d’autres con- trées de l'Amérique, et auxquels les Espagnols ont donné éga— lement le nom de caëman; mais il nous paroît que les quadru- pèdes ovi pares, désignés par Dampier sous les noms de crocodile et de caïman, sont de l'espèce des grands lézards que l'on a nominés Jouette-queues. Ils présentent en eflet le caractère dis- ünctif de ces derniers; lorsqu'ils courent , ils portent, suivant Dam pier lui-même, leur queue retroussée et repliée par le bout en forme d'arc, tandis que les vrais crocodiles ont toujours la queue presque trainante. D'ailleurs les vrais crocodiles ont, dans tous les pays, quatre glandes qui répandent une odeur de musc bien sensible. Les grands lézards que Dampier a voulu comprendre parmi ces animaux n'en ont point, suivant lai: nous avons donc une nouvelle preuve que ces lézards de Dampier ne forment pas une quatrième espèce de crocodiles. Nous allons examiner de près les trois espèces que nous croyons devoir compter parmi ces lézards géans, en commen- gant par ceile qui habite les bords du Nil, et qui est la plus an- clénnement connue. DU CROCODILE, 105 RAA SAMIR MAMMA AAA NA AAA AA RAA AAA RAA AAA ANA LE CROCODILE, OU LE CROCODILE PROPREMENT DIT :. | Nature, en accordant à l'aigle les hautes régions de latmo- sphère, en donnant au lion pour son domaine les vastes déserts des contrées ardentes , a abandonné au crocodile les rivages des mers et des grands fleuves des zones torrides. Get animal énorme, vivant sur les confins de la terre et des eaux , étend sa puissance sur les habitans des mers et sur ceux que la terre nourrit. L’em- portant en grandeur sur tous les animaux de son ordre, ne parlageant sa subsistance ni avec le vautour, comme l'aigle, mi avec le tigre, comme le lion, il exerce une domination plus absolue que celle du lion et de l'aigle; et il jouit d’un empire d'autant plus durable, qu'appartenant à deux élémens :l peut échapper plus aisément aux piéges, qu'ayant moins de chaleur dans le sang il a moins besoin de réparer des forces qui s’'épuisent moins vile, et que, pouvant résister pluslong-temps à la faun, 1] livre moins souvent des combats hasardeux. Il surpasse , par la longueur de son corps, et l'aigle etle lion, ces fiers rois de l'air et de la terre ; et si l’on excepte les très- grands quadrupèdes, comme l'éléphant, l'hippopotame, etc., et quelques serpens démesurés, dans lesquels la Nature paroit se complaire à prodiguer la matière, il seroit le plus grand des animaux, si, dans le fond des mers dont il habite les bords, cetie Nature puissante n’avoit placé d'immenses célacées. IL est à remarquer qu'à mesure que les animaux sont destinés à fendre l'air avec rapidité, à marcher sur la terre, ou à cingler au milieu des eaux, ils sont doués d’une grandeur plus considérable. Les aigles et les vautours sont bien éloignés d'égaler en grandeur le oo 1 En latin, crocodilus ; alligator sur les côtes d'Afrique ; déasik par les Néègres du Séuégal ; Caiman en Amérique ; fakaïe par les S'amois ; /agartor dans l'Inde , par les Portugais ; jacare au Brésil ; xjémbuta dans l'ile de Cey- lan, selon Ray; Zeviathan de l’Ecriture, suivant Scheuchzer (Physique de Job) ; chimpsan en Egypte ; kémsak en certaines provinces de la Turquie. 106 HISTOIRE NATURELLE tigre, le lion et le chameau: à mesure même que les quadrupèdes vivent plus près des rivages, il semble que leurs dimensions augmentent, comme dans l'éléphant et dans l’hippopotame, et cependant la plupart des animaux quadrupèdes dont le volume est le plus étendu sont moins grands que les crocodiles qui ont atteint le dernier degré de leur développement. On diroit que la Nature auroit eu de la peine * donner à de très-grands animaux des ressorts assez puissans pour les élever au milieu d’un élément aussi léger que l'air, et même pour les faire marcher sur la terre, et qu'elle n’a accordé un volume, pour ainsi dire, gigantesque , aux êtres vivans et animés , que lorsqu'ils ont dû fendre l'élément de l’eau, qui, en leur cédant par sa fluidité, les a soutenus par sa pesanteur. L'art de l’homme, qui n’est qu'une application des forces de la Nature, a été contraint de suivre la même progres- sion : il n’a pu faire rouler sur la terre que des masses peu consi- dérables ; il n’en a élevé dans les airs que de moins grandes en- core; et ce n’est que sur la surface des ondes qu’il a pu diriger des machines énormes. Mais cependant comme le crocodile ne peut vivre que dans les climais très-chauds, et que les grandes baleines, etc. , fré- quentent de préférence, au contraire, les régions polaires, le crocodile ne le cède en grandeur qu’à un petit nombre des ani- maux qui habitent les mêmes pays que lui. C’est donc assez sou- vent sans trouble qu'il exerce son empire sur les quadrupèdes ovipares. Incapable de désirs très-ardens, il ne ressent pas la férocité *. S'il se nourrit de proie , sil dévore les autres animaux, s'il attaque même quelquefois l'homme, ce n'est pas, comme on Va dit du tigre, pour assouvir un appétit cruel, pour obéir à une soif de sang que rien ne peut étancher, mais uniquement pour satisfaire des besoins d'autant plus impérieux qu'il doit en- tretenir une masse plus considérable. Roi dans son domaine, comme l'aigle et le lion dans les leurs , 1l a, pour ainsi dire, leur noblesse, en même temps que leur puissance. Les baleines , les premiers des cétacées auxquels nous venons de le comparer, ne détruisent également que pour se conserver où se reproduire ; et voilà donc les quatre grands dominateurs des eaux, des ri- vages, des déserts et de l’air, qui réunissent à la supériorité de la force une certaine douceur dans l'instinct, et laissent à des T Aristote est le premier naturaliste qui l’ait reconnu. DU CROCODILE. 107 espèces inférieures , à des tyrans subalternes, la cruauté sans besoin. La forme générale du crocodile est assez semblable, en grand, a celle des autres lézards. Mais si nous voulons saisir les caractères qui lui sont particuliers, nous trouverons que sa tête est allongée, aplalie et fortement ridée, le museau gros et un peu arrondi: au-dessus est un espace rond, rempli d’une substance noirâtre 3 molle et spongieuse, où sont placées les ouvertures des narines; leur forme est celle d’un croissant , et leurs pointes sont tournées en arrière. La gueule s’ouvre jusqu’au-delà des oreilles. Les mâ- choires ont quelquefois plusieurs pieds de longueur : l'inférieure est terminée de chaque côté par une ligne droite: mais la supé- rieure est comme festonnée; elle s’élargit versie gosier de manière à déborder de chaque côté la mâchoire de dessous; elle se ré trécit ensuite, et la daisse dépasser jusqu’au museau, où elle s'élargit de nouveau, et enferme, pour ainsi dire, la mâchoire inférieure. Il arrive de là que les dents placées aux endroits où une mà- choire déborde l’autre paroissent à l'extérieur comimne des cro- chets ou des espèces de dents canines : telles sont les dix dents qui garnissent le devant de la mâchoire supérieure. Au contraire, les deux dents les plus antérieures de la mâchoire inférieure, non-seulement s’enfoncent dans la mächoire de dessus lorsque la gueule est fermée, mais elles y pénètrent si avant, qu'elles la traversent en entier, et s’élévent au-dessus du museau , où leurs pointes ont l'apparence de petites cornes ; c’est ce que nous avons trouvé dans tous les individns d’une longueur un peu considé- rable que nous avons examinés. Cela est même tres-sensible dans un jeune crocodile du Sénégal, de quatre pieds trois ou quatre pouces de long, que l’on conserve au Cabinet du Roi. Ce caractère remarquable n’a cependant été indiqué par personne, excepté par les mathématiciens jésuites que Louis XIV envoya dans l'Orient, et qui décrivirent un crocodile dans le royaume de Siam. Les dents sont quelquefois au nombre de trente-six dans la mâchoire supérieure, et de trente dans la mâchoire inférieure ; mais ce nombre doit souvent varier. Elles sont fortes, un peu creuses, striées, coniques, pointues , inégales en longueur, atta- chées par de grosses racines placées de chaque côté sur un seul rang, et un peu courbées en arrière, principalement celles qui 108 HISTOIRE NATURELLE sont vers le bout du museau. Leur disposition est telle, qe; quand la gueule est fermée, elles passent les unes entre les au— tres : les pointes de plusieurs dents inférieures occupent alors des: trous creusés dans les gencives de dessus, et réciproquement. MM. les académiciens qui disséquèrent un très-jeune crocodile amené en France en 1681, arrachèrent quelques dents, et er trouvèrent de très-petites, placées dans le fond des alvéoles; ce qui prouve que les premières dents du crocodile tombent, et sont remplacées par de nouvelles, comme les dents incisives de l'homme et de plusieurs quadrupèdes vivipares. La mâchoire inférieure est la seule mobile dans le crocodile, ainsi que dans les autres quadrupèdes. Il suffit de‘jeter les yeux sur le squelette de ce grand lézard, pour en être convaincu, malgré tout ce qu’on a éc rit à ce sujet. Dans la plupart des vivipares , la mâchoire inférieure , indé pendamment du mouvement de haut en bas, a un mouvement de droite à gauche, et de gauche à droite, nécessaire pour la trituration de la nourriture. Ce mouvement a été refusé au cro- codile, qui d’ailleurs ne peut mâcher que difficilement sa proie, parce que les dents d'une mâchoire ne sont pas placées de ma-— nière à rencontrer celles de l'autre: mais elles retiennent ow déchirent avec force les animaux qu’il saisit, et qu’il avale le plus souvent sans les broyer; il a par là avec les poissons un trait de ressemblance, auquel ajoutent la conformation et la position des dents de plusieurs chiens de mer, assez semblables à celles des dents du crocodile. Les anciens, et même quelques modernes, ont pensé que le erocodile n’avoit pas de langue : il en a ume cependant fort large , et beaucoup plus considérable en proportion que celle du bœuf, mais qu'il ne peut pas allonger ni darder à l'extérieur, parce qu’elle est attachée aux deux bords de la mâchoire inférieure par une membrane qui la couvre. Cetle membrane est percée de plusieurs trous, auxquels aboutissent des conduits qui partent des glandes de la langue. Le crocodile n’a point de lèvres : aussi, lorsqu'il marche ow qu'il nage avec le plus de tranquillité, montre-t-il ses dents, comme par furie ; et ce qui ajoute à Pair terrible que celte confor- mation lui donne, c'est que ses yeux étincelans, très-rapprochés Yuan de l'autre, placés obliquement , et présentant une sorte de vegard simistre, sont garnis de deux paupières dures, toutes les DU CROCODILE. 108 eux mobiles *, fortement ridées, surmontées par un rebord dentelé , et, pour aimsi dire , par un sourcil menaçant. Cet aspect affreux n’a pas peu contribue, sans doute, à la réputation de cruauté insaliable que quelques voyageurs lui ont donnée. Ses yeux sont aussi, comme ceux des oiseaux , défendus par une membrane clignotante , qui ajoute à leur force. Les oreilles, situées très-près et au-dessus des yeux ; sont re- couvertes par une peau fendue et un peu relevée, de manière à représenter deux paupières fermées; et c’est ce qui a fail croire à quelques naturalistes que le crocodile n’avoit paint d'oreilles, parce que plusieurs autres lézards en ont l'ouverture plus sen- sible. La partie supérieure de la peau qui ferme les orcilles est mobile ; et lorsqu'elle est levée, elle laisse apercevoir la mem- brane du tambour. Certains voyageurs auront apparemment pensé que cette peau , relevée en forme de paupières, recouvroit des yeux; et voilà pourquoi l’on a écrit que l’on avoit tué des crocodiles à quatre yeux. Quelque peu proéminentes que soient ces oreilles ,| Hérodote dit que les habitans de Memphis atiachoient des espèces de pendans à des crocodiles privés qu'ils nourrissoient. Le cerveau des crocodiles est très-petit. La queue est très-longue ; elle est , à son origine, aussi grosse que le corps, dont elle paroît une prolongation : sa forme apla- tie, et assez semblable à celle d’un aviron , donne au crocodile une grande facilité pour se gouverner dans l’eau , et frapper cet élément de manière à y nager avec vitesse. Indépendamment de ce secours, les doigts des pieds de derrière sont réunis par des membranes, dont il peut se servir comme d'espèces de nageoires. Ces doigts sont au nombre de quatre ; ceux des pieds de devant, au nombre de cinq : dans chaque pied , 1l n’y a que les trois doigts intérieurs qui soient garnis d'ongles, et la longueur de ces ongles est ordinairement d’un ou deux pouces. La Nature a pourvu à la sûreté des crocodiles, en les revêtant d’une armure presque impénétrable. Tout leur corps est couvert d'écailles , excepté le sommet de la tête, où la peau est collée immédiatement sur l'os ; celles qui couvrent les flancs , les pattes et la plus grande partie du cou, sont presque rondes, de gran- n EEE ten et dé 1 Pline a écri t que la paupière inférieure du grocodile étoit seule mobile ; mais l'observation est contraire à cette opiniqus 110 HISTOIRE NATURELLE deurs différentes , et distribuées irréguliérement; celles qui dé- fendent le dos et le dessus de la queue sont carrées, et forment des bandes transversales. I! ne faut donc pas , pour blesser le cro- codile, le frapper de derrière en avant, comme si les écailles se recouvroient les unes les autres, mais dans les jointures des bandes qui ne présentent que la peau. Plusieurs naturalistes ont écrit que le nombre de ces bandes varioit suivant les individus. Nous les avons comptées avec soin sur sept crocodiles de diflé- rentes grandeurs , tant de l'Afrique que de l'Amérique: l’un avoit treize pieds neuf pouces six lignes de long, depuis le bout du museau jusqu'à lextrémiié de la queue; le second, neuf pieds; le troisième et le quatrième, huit pieds; le cinquième, quatre; le sixième, deux; le septième éloi! mort en sortant de l'œuf. Ils avoient tous le même nombre de bandes, excepté cel ui de deux pieds , qui paroissoit , à la rigueur, en présenter une de plus que jes autres. Ces écailles carrées ont une tres-grande dureté, et une flexibi- lité qui les empêche d’être cassantes : le milieu de ces lames-pré- sente une sorte de crète dure, qui ajoute à leur solidité ‘; et, le plus souvent , elles sont à l'épreuve de la balle. L’on voit sur le milieu du cou deux rangées transversales de ces écailles à tuber- cules , l’une de quatre pièces, el l’autre de deux; et de chaque côté de la queue s'étendent deux rangs d’autres tubercules , en forme de crêtes , qui la font paroître hérissée de pointes, et qui se réu- nissent à une certaine distance de son extrémité, de manière à n'y former qu’un seul rang. Les lames qui garnissent le ventre, le dessous de la tête, du cou, de la queue, des pieds, et la face intérieure des pattes, dont le bord extérieur est le plus souvent dentelé, forment également des bandes transversales ; elles sont casrées et flexibles , comme celles du dos, mais bien moins dures et sans crêtes. Cest par ces parties plus foibles que les cétacées et les poissons voraces atlaquent le crocodile ; c'est par là que le dauphin lui donne la mort, ainsi que le rapporte Pline; et lors- que le chien de mer, connu sous le nom de poisson-scie , lui livre un combat, qu’ils soutiennent tous deux avec füurie, le poisson- scie, ne pouvant percer les écailles tuberculeuses qui revétent le dessus du corps de son ennemi, plonge et le frappe au ventre. re, 1 Les crêtes voisines des flanes ne sont pas plus élevées que les autres , et ne : nirs « . . 0 n peuvent point opposer une plus grande résistance à la balle, ainsi qu'on l’a écrit. Je m'en siws assuré par l'inspection de plusieurs crocodiles de divers pays. DU CROCODILE. 111 La couleur des crocodiles tire sur le jaune verdâtre, plus ou moins nuancé d’un vert foible, par taches et par bandes; ce qui représente assez bien la couleur du bronze un peu rouillé. Le dessous du corps, de la queue et des pieds, ainsi que la face in- térieure des pattes, sont d’un blanc jaunâtre. On a prétendu que le nom de ces grands animaux venoit de la ressemblance de leur couleur avec celle du safran, en latin crocus, et en grec xp5x05, On a écrit aussi qu'il venoit de xpoxos et de dues, qui signilie 4i- mide, parce qu’on a cru qu’ils avoient horreur du safran. Aristote paroît penser que les crocodiles sont noirs. Il y en a en ellet de très-bruns sur la rivière du Sénégal , ainsi que nous l'avons dit ; mais ce grand philosophe ne devoit pas les connoîlre. Les crocodiles ont quelquefois cinquante-neuf vertèbres, sept dans le cou, douze dans le dos, cinq dans les lombes, deux à la place de los sacrum , et trente-trois dans la queue : mais le nom= bre de ces vertèbres est variable. Leur oesophage est très-vaste et susceptible d’une grande dilatation : 1ls n'ont point de vessie comme les tortues ; leurs uretères se déchargent dans le rectum ; l'anus est situé au-dessous et à l'extrémité postérieure du corps; les parties sexuelles des mâles sont renfermées dans l'intérieur du corps, jusqu'au moment de l’'accouplement, ainsi que dans les autres lézards et dans les tortues; et ce n'est que par l'anus qu'ils peuvent les faire sortir. Ils ont deux glandes ou petites poches au- dessous des mâchoires et deux autres auprès de l'anus : ces quatre glandes contiennent une matière volatile qui leur donne une odeur de musc assez forte. ; La taille des crocodiles varie suivant la température des di- verses contrées dans lesquelles on les trouve. La longueur des plus grands ne passe guère vingt-cinq ou vingt-six pieds dans les climats qui leur conviennent le mieux ; il paroît même que, dans certaines contrées qui leur sont moins favorables, comme les côtes de la Guiane , leur longueur ordinaire ne s'étend pas au-delà de treize ou quatorze pieds *. Un individu de cette lon- * Quelques voyageurs ont attribué une grandeur plus considérable aw eroco- dile. Barbot dit qu'il s’en est trouvé dans le Sénégal et dans la Gambie qui n’a- voient pas moins de trente pieds de long. Suivant Smith , ceux de Sierra-Leona ont la même longueur. Jobson parle aussi d’un crocodile de trente-trois pieds de long ; mais comme il n’avoit mesuré que la trace que cet animal avoit laissée sur le sable, son témoignage ne doit pas être compté. _ Qa trouve, suivant Catesby, à la Jamaïqne, et dans plusieurs endroits du cou A2 HISTOIRE NATURELLE gueur, dont la peau est conservée au Cabinet du Roi, a plus de quatre pieds de circonference dâns l'endroit le plus gros du corps ; ce qui suppose une | huit à neuf pieds dans les plus grands crocodiles. Au reste, on pourra juger des propor- tions de ce grand quadrupède ovipare par la note suivante *, qui présente les principales dimensions de l'individu dont nous ve- nons de parler. C’est au commencement du printemps que l'amour fait éprou= ver ses feux au crocodile. Cet énorme quadrupède ovipare s’unit à sa femelle en la renversant sur le dos, ainsi que les autres lé- zards, et leurs embrassemens paroiïssent très-étroits. On ignore la durée de leur union intime : mais, d'apres ce que l'on a ob- servé touchant les lézards de nos contrées, leur accouplement, quoique bien plus court que celui des tortues, doit être plus pro- longé , ou du moins plus souvent renonvelé que celui de plusieurs vivipares; et lorsqu'il a cessé, l'attention du mâle pour sa com pagne ne passe pas lout-à-fait avec ses désirs, et il l’aide à se re- mettre sur ses pattes. On a cru pendant long-temps que les crocodiles ne faisoient qu’une ponte : mais M. de la Borde nous apprend que, dans l’A- mérique méridionale, la femelle fait deux et quelquefois trois rer tinent de l’Amérique septentrionale, des crocodiles de plus de vingt pieds de long. On peut voir dans Gesner (liv. IT, article du crocodile) tout ce que les an- ciens ont écrit touchant la grandeur de cet animal, auquel quelques-uns d’eux ont attribué une longuenr de vingt-six coudées. Hasselquist dit, däns son Voyage en Palestine , page 347, que les œufs de erocodile qu’il décrit avoient appartenu à une femelle de trente pieds. pieds. pou. lig r Longueur RODAIO NS PE re MS ete aa 13 9 & Longueur de la tête. . « + . . . + « « « . . 2 3 ÿ Longueur depuis l’entre-deux des yeux jusqu’au bout du muscan Ne At. is os DRE à ï 6 Longueur de la mâchoire supérieure « . « . +. + . E 10 Longueur de la partie de la mâchoire qui est armée de dents. UN MMS arret MUSIC ER TR Distance des deux yeux. + «+ + + « «+ + + + + + Grand diamètre dé l'œil 4 « «e + « + à + Circonférence du corps à l'endroit le plus gros . «+ « . Largeur de la tête derrière les yeux. «+ . . « « . « é e é é e Q ÿ GA WE ÿ Largeur du museau à l'endroit le plus étroit. . « . . Longueur des pattes de devant jusqu’au bout des doigts . Longneur des pattes de derrière jusqu’au bout des doigts. Longueur de la queue . . . . . + « + + « «+ « Circonférence de la queue à son grigine NE Sue ie MANS ÿ DOME MR EE m L__] 8 A bO Dm Em NN Ÿ D OO # DÜ CROCODILE. 113 ponies, éloignées l’une de l’autre de peu de jours; chaque ponte est de vingt à vingt-quatre œufs, et par conséquent 1l est possi- ble que le crocodile en ponde en tout soixante - douze; ée qui se rapproche de l’assertien de M. Linné, qui a écrit que les œufs du crocodile étoient quelquefois au nombre de cent. | La femelle dépose ses œufs sur le sablele long des rivages qu'elle fréquente. Dans certaines contrées, comme aux environs de Cayenne et de Surinam, elle prépare, assez près des eaux qu’elle habile, un petit terrain élevé, et creux dans le milieu; elle y ra- masse des feuilles et des débris de plantes, au milieu desquels elle fait sa ponte ; elle recouvre ses œufs avec ces mêmes feuilles ; il s’excite une sorte de fermentation dans ces végétaux, et c’est la chaleur qui en provient, jointe à celle de l'atmosphère, qui fait éclore les œufs. Le temps de la ponte commence, aux environs de Cayenne, en même temps que celui de la ponte des tortues, c'est-à-dire, dès le mois d'avril; mais il est plus prolongé. Ce qui “est très-singulier, c’est que l'œuf d’où doit sortir un animal aussi grand que l’alligator n’est guère plus gros que l’œuf d’une poule d'Inde, suivant Catesby. Il y a au Cabinet du Roi un œuf d'un RES de quatorze pieds de longueur, tué dans la haute Egypte au moment où 1l venoit de pondre : il est ovale et blanchâtre; sa coque est d’une substance crétacée, semblable à celle des œufs -de poule, mais moins dure; la tunique intérieure qui touche à l'enveloppe crétacée est plus épaisse et plus forte que dans la plu- part des œufs d'oiseaux. Le grand diamètre n'est que de deux pouces cinq lignes, et le petit diamètre d’un pouce onze lignes. J'en ai mesuré d’autres, pondus par des crocoililes d'Amérique, qui étoient plus allongés, et dont le grand diamètre étoit de trois pouces sept lignes, et le petit diamètre de deux pouces. Les petits crocodiles sant repliés sur eux-mêmes dans leurs œufs ; ils n’ont que six ou sept pouces de long lorsqu'ils brisent leur coque. On a observé que ce n’est pas toujours avec leur tête, mais quelquefois avec les tubercules de leur dos, qu'ils la cassent. Lorsqu’ils en sortent, ils traînent attachés au cordon ombilical, le reste du jaune de l'œuf, entouré d’une membrane , et une espèce d’arrière-faix composé de l'enveloppe dans laquelle ils ont été ren- fermés. Nous l'avons observé dans un jeune crocodile pris en sor- tant de l'œuf, et conservé au Cabinet du Roi. Quelque temps. après qu'ils sont éclos, on remarque encore sur le bas de leur ventre l'insertion du cordon ombilical, qui disparoît avecle temps; Lacepède, 1. 3 114 HISTOIRE NATURELLE et les rangs d'écailles, qui étoient séparés et formoient une fentes longitudinale par où il passoit , se réunissent insensiblement. Ce fait est analogue à ce que nous avons remarqué dans de jeunes tortues, de l'espèce appelée /& ronde, dont le plastron étoit fen- du , et dont on voyoit au dehors la portion du ventre où le cor- don ombilical avoit élé atlache. Les crocodiles ne couvent donc pas leurs œufs : on auroit dû le présumer d’après leur naturel, et l'on auroit dû, indépen- damment du-témoignage des voyageurs, refuser de croire ce que dit Pline du crocodile mâle, qui, suivant ce grand naturaliste, couve, amsi que la femelle, les œufs qu’elle a pondus. Si nous jetons en effet les yeux sur les animaux ovipares qui sont suscep- tibles d’affections tendres et de soins empressés, si nous observons ‘ des oiseaux, nous verrons que les espèces les moins ardentes en amour sont celles où le mâle abandonne sa femelle après en avoir joui; ensuite viennent les espèces où le mâle prépare le nid avec elle, où il la soulage dans la recherche des matériaux dont elle se sert pour le construire, où il veille attentif auprès d'elle pendant qu’elle couve, où il paroît charmer sa peine par son chant; et enfin celles qui ressentent le plus vivement les feux de l'amour, sont les espèces où le mâle partage entièrement avec sa compagne le soin de couver les œufs. Le crocodile devroit donc être regardé comine très-tendrement amoureux si le mâle couvoit les œufs, ainsi que la femelle. Mais comment attribuer cette vive, inlime et constante tendresse à un animal qui, par la froideur de son sang, ne peut éprouver presque jamais ni passions impétueuses , ni sentiment profond ? La chaleur seule de l'atmosphère , ou celle d’une sorte de {ermentation, fait donc éclore les œufs des croco- diles; les petits ne connoissent donc point de parens en nais- sant? : mais la Nature leur a donné assez de force dès les pre- imiers momens de leur vie pour se passer de soins étrangers. Des qu’il sont éclos, ils courent d'eux-mêmes se jeter dans l'eau , où ils trouvent plus de sûreté et de nourriture. Tant qu'ils sont en- core jeunes, ils sont cependant dévorés non-seulement par les poissons voraces, MAIS Encore quelquefois par les vieux croco- diles, qui, tourmentés par la faïm , font alors par besoin ce que eos enneeg ÉR 1 Cependant, suivant M. de la Borde, à Surinam , la femelle du crocodile se. tient toujours à une certaine distance de ses œufs, qu’elle garde, pour ainsi dire, et qu’elle défend avec une sorte de fureur lorsqu'on veut y toucher. DU CROCODILE, 115 d'autres animaux sanguinaires paroissent où anicnenent par cruauté. On n’a point recueilli assez d'observations sur les crocodiles pour savoir précisément quelle est la durée de leur vie; mais on peut conclure qu’elle est très-longue, d’après l'observation sui- vante, que M.le vicomte de Fontange, commandant pour le roi dans l'île Saint-Domingue, a eu la bonté de me communiquer. M. de Fontange a pris a Saint-Domingne de jeunes crocodiles qu’il a vus sortir de l'œuf; il les a nourris,et a essayé de les amener vi- vans en France : le froid qu'ils ont éprouvé dans la traversée les a fait périr. Ces animaux avoient déjà vingt-six mois, et ils n’a- voient encore qu’à peu près vingt pouces de longueur. On de- vroit donc compter vingt-six mois d’âge pour chaque vingt pou- ces que l'on trouveroit dans la longueur des grands crocodiles, si leur accroissement se faisoit toujours suivant la même propor- tion ; mais dans presque tous les animaux, le développement est plus considérable dans les premiers temps (de leur vie. L’ou peut donc croire qu'il faudroit supposer bien plus de vingt-six mois pour chaque vingt pouces de la longueur d’un crocodile. Ne comp- tons cependant que vingt-six mois, parce qu’on pourroit dire que, lorsque les animaux ne jouissent pas d’une liberté entière, leur accroissement est relardé , et nous trouverons qu’un crocodile de vingt-cinq pieds n’a pu atteindre à tout son développement qu’au bout de trente-deux ans et demi. Cette lenteur dans le dévelop- pement du crocodile est confirmée par l’observation des mission- maires mathématiciens que Louis XIV envoya dans l'Orient, et qui, ayant gardé un très-jeune crocodile en vie pendant deux miois, remarquèrent que ses dimensions n’avoient pas augmenté pendant ce temps d’une manitre sensible. Cette même lenteur a fait naître, sans doute, l'erreur d’Aristote et de Pline, qui pen- soient que le crocodile croissoit jusqu’à sa mort; et elle prouve combien la vie de cet animal peut être longue. Le crocodile ha- kitant en effet au milieu des eaux, presque autant que les lortues marines , n'élant pas revêtu d’une croûte plus dure qu’une cara- pace , et croissant pendant bien plus de temps que la tortue fran- che, qui paroît être entièrement développée après vingt ans, ne doit-11 pas vivre plus long-temps que cette grande tortue, qui ce- pendant vit plus d’un siecle? Le crocodile fréquente de préférence les rives des grands fleuves, doni les eaux surmoutent souvent leurs bords, el qui, couvertes 116 HISTOIRE NATURELLE d’une vase limoneuse, offrent en plus grande abondance les tes2 tacées , les vers, les grenouilles, les lézards dont il se nourrit. Il se plaît surtout dans l'Amérique méridionale , au milieu des lacs marécageux et des savanes noyées. Catesby , dans son AHis- toire naturelle de la Caroline, nous représente les bords fan- geux , baignés par les eaux salées, comme couverts de forêts épaisses d'arbres de banianes , parmi lesquels des crocodiles vont se cacher. Les plus petits s'enfoncent dans des buissons épais, où les plus grands ne peuvent pénétrer , et où ils sont à couvert. de leurs dents meurtrières. Ces bois aquatiques sont remplis de pois- sons destructeurs et d’autres animaux qui se dévorent les uns les autres : on y rencontre aussi de grandes tortues ; mais elles sont le plus souvent la proie de ces poissons carnassiers, qui, à leur tour , servent d'alhiment aux crocodiles, plus puissans qu'eux tous. Ces forêts noyées présentent les débris de cette sorte de carnage, et l'on y voil flotter des restes de carcasses d'animaux à demi dévorés. C’est dans.ces terrains fangeux que, couvert de boue , et ressemblant à un arbre renversé, il attend immobile, et avec la patience que doit lui donner la froideur de son sang, 1: moment favorable de saisir sa proie. Sa couleur , sa formé aliongte, son silence , trompent les poissons, les oiseaux de mer, les tortues, dont il est trés-avide. Il s’élance aussi sur les beliers, les cochons , et même sur les bœufs. Lorsqu'il nage, en suivant le cours de quelque grand fleuve, il arrive souvent qu’il n’é- lève au-dessus de l’eau que la partie supérieure de sa tête. Dans cette attitude, qui lui laisse la liberté des yeux , 1l cherche à sur- prendre les grands animaux qui s’'approchent de Fune ou de l'autre rive ; et lorsqu'il en voit quelqu'un qui vient pour y boire, il plonge, va jusqu’à lui en nageant entre deux eaux, le saisit par les jambes, et l'entraîne au large pour l'y noyer. Si la faim, ‘le presse, 11 dévore aussi les hommes, et particulièrement Îles Nègres , sur lesquels on a écrit qu’il se jette de préférence. Les très-grands crocodiles surtout , ayant besoin de plus d’alimens , pouvant être aperçus et évités plus facilement par les petits ani- maux, doivent éprouver plus souvent el plus violemment le tourment de la faim , et par conséquent êlre. quelquefois très- dangereux, principalement dans l’eau. C’est en eflet dans cet, élément que le crocodile jouit de toute sa force, et qu'il se remue avec agilité, malgré sa lourde masse; en faisant souvent entendre une espèce de murmure sourd et confus. S'il a de la peine à se DU CROCODILE. ‘117 tourner avec promptitude, à cause de la longueur de son corps, é’est toujours avec la plus grande vitesse qu’il fend l’eau devant lui pour se précipiter sur sa proie ; il la renverse d’un coup de sa queue raboteuse , la saisit avec ses grilles, la déchire ou la partage en deux avéc ses dents fortes et pointues , et l’engloutit dans une gueule énorme , qui s'ouvre jusqu'au-delà des oreilles pour la recevoir. Lorsqu'il est à terre , il est plus embarrassé dans ses mouvemens, el par conséquent moins à craindre pour les animaux qu'il poursuit : mais, quoique moins agile que dans l'eau, il avance très-vile quand le chemin est droit et le terrain uni ; aussi, lorsqu'on veut lui échapuer, doit-on se détourner sans cesse. On lit, dans la Description de la Nouvelle-Espagne , qu'un voyageur anglais fut poursuivi avec tant de vitesse par un monstrueux crocodile sorti du lac de Nicaragua, que si les Espagnols qui l’accompagnoient ne lui eussent crié de quitter le chemin battu et de marcher en tournoyant, il auroit été la prôie de ce terrible animal. Dans l'Amérique méridionale, sut- vant M. de la Borde, les grands crocodiles sortent des fleuves plus rarement que les petits; l’eau des lacs qu'ils fréquentent venant quelquefois à s'évaporer, 1ls demeurent souvent pendant quelques mois à sec, sans pouvoir regagner aucune rivière, Vi- vant de gibier, ou se passant de nourrilure, et étant alors très- dangereux. | IL y a peu d’endroits peuplés de erocodiles un peu gros, où lon puisse tomber dans l’eau sans risquer de perdre le vie. Ils ont souvent, pendant la nuit, grimpé ou sauté dans des canots, dans lesquels on étoit endormi, et ils en ont dévoré tous les passagers. Îl faut veiller avec soin lorsqu'on se trouve le long des rivages habilés par ces animaux. M. de la Borde en a vu se dresser contre les très-petits bâtimens. Au reste, en comparant les relations des voyageurs , il paroît que la voracité et la har- diesse des crocodiles augmentent, diminuent, et même passent entièrement , suivant le climat, la taille, Pâge, l'état de ces ani- maux , la nature et surtout l'abondance de leurs alimens. La faim peut quelquefois les forcer à se nourrir d'animaux de leur espèce , ainsi que nous l'avons dit ; et lorsqu'un extrême besoin les domine , le plus foible devient la victime du plus fort. Mais, d’après st ce que nous avons Exposé , l’on ne doit point pen- ser , avec quelques naturalistes , que la femelle du cr ocodile con= duit à l’eau ses petits lorsqu'ils sont éclos , et que le méle et la F18 HISTOIRE NATURELLE femelle dévorent ceux qui ne peuvent pas se traîner. Nous avons vu que la chaleur du soleil ou de l'atmosphère faisoit éclore leurs œufs, que les petits alloient d'eux-mêmes à la mer; et les cro- codiles n'étant jamais cruels que pour assouvir une faim plus cruelle, ne doivent point être accusés de l'espèce de choix bar- bare qu'on leur a imputé. Malgré la diversité des alimens que recherche le crocodile, a facihité que la lenteur de sa marche donne à plusieurs.animaux pour léviter, le contraint quelquefois à demeurer beaucoup. de temps et même plusieurs mois sans manger : il avale alors de pe- tes pierres et de petits morceaux de bois capables d'empêcher ses inteslins de se resserrer. Il paroît, par les récits des voyageurs, que les crocodiles qui vivent près de l'équateur ne s'engourdissent dans aucun temps, de l'année ; mais ceux qui habitent vers les tropiques, ou à des. latitudes plus élevées, se retirent, lorsque le froid arrive, dans: des antres profonds aupres des rivages, et y sont, pendant l'hi- ver, dans un état de torpeur. Pline a écrit que les crocodiles. passoient quatre mois de l'hiver dans des cavernes, el sans nour- riture ; ce qui suppose que les crocodiles du Nil , qui étoient les mieux connus des anciens, #engourdissoient déRUE la sai- son du froid. En Amérique, à une latitude aussi élevée que celle. de l'Egypte, et par conséquent sous une température moins. chaude , le nouveau continent étant plus froïd que l’ancien, les crocodiles sont engourdis pendant l'hiver. Ils sortent, dans la Caroline, de cet état de sommeil profond , en faisant entendre, dit Catesby, des mugissemens horribles qui retentissent au loin. Les rivages habilés par ces animaux peuvent être entourés d'é- chos qui réfléchissent les sons sourds formés par ces grands qua- drupèdes ovipares, et en augmentent Ja force de manière à jus- üfer, jusqu'à un certain point, le récit de Catesby. D'ailleurs M. de la Coudrenière dit que, dans la Louisiane, le cri de ces animaux n'est jamais répété plusieurs fois de suite, mais que leur voix est aussi forte que celle d’un taureau. Le capitaine Jobson assure aussi que les crocodiles , qui sont en grand nombre dans la rivière de Gambie en Afrique, et que les 'Nègres appellent bumbos, y poussent des cris que lon entend de fort loin. Ge voyageur ajoute que l’on &iroit que ces cris sortent du fond d’un A 5. Ce qui supposé, dans la voix du crocodile beaucoup de ons graves qui la rapprochent d'un mugissement bas et comme DU CROCODILE. 119 étouffé. Et enfin le témoignage de M. de la Borde, que nous avons déjà cité, vient encore ici à l'appui de l’assertion de Ca- tesby. ù Si le erocodile s’engourdit à de hautes latitudes , comme les au- tres quadrupèdes ovipares, sa couverture écailleuse n’est point de nature à être altérée par le froid et la diselte, ainsi que la peau du plus grand nombre de ces animaux , et il ne se dépouille pas comme ces derniers. Dans tous les pays où l’homine n’est pas en assez grand nombre pour le contraindre à vivre dispersé, il va par troupes nom- breuses. M. Adanson a vu, sur la grande rivière du Sénégal, des crocodiles, réunis au nombre de plus de deux cents, nageant ensemble la tête hors de l’eau , et ressemblant à un grand nombre de troncs d'arbres, à une forêt que les flots entraîneroient. Mais cet attroupement des crocodiles n’est point le résultat d’un ins- tinct heureux ; ils ne se rassemblent pas , comme les castors, pour s’occuper en commun de travaux combinés ; leurs talens ne sont pas augmentés par limitation ; ni leurs forces par le concert ; 1ls ne se recherchent pas, comme les phoques et les lamantins , par une sorte d'affection mutuelle : mais ils se réunissent parce que des appétits semblables les attirent dans les mêmes endroits. Cette habitude d’être ensemble est cependant une nouvelle preuve du peu de cruauté que l'on doit atiribuer aux crocodiles ; et ce qui confirme qu'ils ne sout pas féroces, c’est la flexibilité de leur na- turel : on ést parvenu: à les apprivoiser. Bans File de Bouton, aux Moluques, on engraisse quelques-uns de ces animaux, de- venus par là en quelque sorte domestiques ; dans d'autres pays, on les nourrit par osientation. Sur la côte des Esclaves, en Afri- que, le roi de Saba a, par magnificénce , deux étangs remplis de crocodiles. Dans la rivière de Rio-San-Domingo , également près des côles occidentales de l'Afrique, où les habitans prennent soin de les nourrir , des enfans osent, dit-on, jouer avec ces raonstrueux animaux. Les anciens connoissoient celte facilité avec laquelle le crocodile. se laisse apprivoiser ; Aristote a dit que, pour y parvenir, il sufhsoit de lui donner une nourriture abondante , dont le défaut seul peut le rendre irès-dangereux * T M. de la Borde à vu à Cayenne des caimans Dore avec des tortues dans un, bassin plein d’eau. Ils y vivent lons-temps sans faire même aucun mal aux tortnes. On-les nourrit avec les restes des cuisines. 120 HISTOIRE NATURELLE Mais si le crocodile n’a pas la cruauté des chiens de mer et ds plusieurs autres animaux de proie, avec lesquels il a plusieurs rapports, et qui vivent comme lui au milieu des eaux, il n’a pas assez de chaleur intérieure pour avoir la fierté de leur courage : aussi Pline a-t-il écrit qu'il fuit devant ceux qui le poursuivent, qu'il se laisse même gouverner par les hommes assez hardis pour se jeter sur son dos, et qu’il n’est redoutable que pour ceux qui fuient devant lui *. Cela pourroit être vrai des crocodiles que Pline ne connoissoit point, qui se trouvent dans certains endroits de l'Amérique , et qui, comme tous les autres grands animaux de ces contrées nouvelles où l'humidité l'emporte sur la chaleur, ont moins de courage et de force que les animaux qui les repré- sentent dans les pays secs de l’ancien continent ; et cette chaleur est si nécessaire aux crocodiles, que non-seulement ils vivent avec peine dans les climats très-tempérés, mais encore que leur grandeur diminue à mesure qu'ils habitent des latitudes élevées. On les rencontre cependant dans les deux mondes, à plusieurs degrés au-dessus des tropiques; l'on a même trouvé des pétrifi= cations de crocodiles à plus de cinquante pieds sous terre dans les nunes de Thuringe, ainsi qu'en Angleterre. Mais ce n’est pas ici le lieu d'examiner le rapport de ces ossemens fossiles avec les révolutions qu’ont éprouvées les diverses parties du globe. Quelque redoutable que paroisse le crocodile , les Nègres des environs du Sénégal osent l'attaquer pendant qu’ilest endormi , et tâchent de le surprendre dans des endroits où il n’a pas assez d'eau pour nager ; ils vont à lui audacieusement, le bras gauche enveloppé dans un cuir; ils l’attaquent à coups de fance ou de zagaie ; ils le percent de plusieurs coups au gosier et dans les yeux; ils lui ouvrent la gueule , la tiennent sous l’eau et l’em- péchent de se fermer , en plaçani leur zagaie entre les mâchoires, jusqu'à ce que le crocodile soit suffloqué par l'eau qu’il avale en : trop grande quantité. En Egypte, on creuse sur les traces de cet animal démesuré un fossé profond , que l'on couvre de branchages et de terre ; on effraie ensuite à grands cris le crocodile, qui , reprenant pour oo oo * On peut aussi voir dans Prosper Alpin ce qu'il raconte dela manière dont -les paysans d'Egypte saisissoient un crocodile , lui lioient la gueule et les pattes, le portoient à des acheteurs ; le faisoient marcher quelque temps devant eux apres l’avoir délié , rattachoient ensuite ses pattes et sa gueule, légorgeoient pour le dépouiller , etc. DU CROCOPILE. 121 aller à la mer le chemin qu'il avoit suivi pour s’écarter de ses bords, passe sur la fosse, y tombe, et y est assommé ou pris dans des filets. D’autres attachent une forte corde par une extrémité à un gros arbre; ils lient à l’autre bout un crochet et un agneau dont les cris atlirent le crocodile, qui, en voulant enlever cet appât , se prend au crochet par la gueulé; à mesure qu'il s'agite, le crochet pénètre plus avant dans la chair : on suit tous ses mouvemens en Jâchant la corde, et on attend qu’il soit mort pour le tirer du fond de Peau. | + Les sauvages de la Floride ont une autre manière de le pren- dre: ils se réunissent au nombre de dix ou douze; ils s’avancenk au-devant du crocodile qui cherche une proie sur le rivage; ils portent un arbre qu’ils ont coupé par le pied : le crocodile va à eux la gueule béante; mais en enfonçant leur arbre dans cette large gueule, ils l'ont bientôt renversé et mis à mort. On dit aussi qu'il ya des gens assez hardis pour aller, en nageani jusque sous le crocodile, lui percer la peau du ventre, qui est presque le seul endroit où le fer puisse pénétrer. - Mais l’homme n’est pas le seul ennemi que le crocodile ait à crain dre : les tigres en font leur proie ; l’hippopotame 1e pour- suit, et il est pour lui d'autant plus dangereux, qu'il peut le suivre avec acharnement jusqu’au fond de la mer. Les cou- guars , quoique plus foibles que lès tigres , détruisent aussi UE grand nombre de crocodiles. Ils attaquent les jeunes caïmans ; ils les attendent en embuscade sur le bord des grands fleuves , les saisissent au moment qu'ils montrent la tête hors de l'eau , etles dévorent. Mais lorsqu'ils en rencontrent de gros et de forts , ils sont attaqués à leur tour ; en vain ils enfoncent leurs grifles dans les yeux du crocodile, cet énorme lézard, plus vi- goureux qu'eux, les entraineau fond de l’eau. Sahs cé grand nombre d’ennetmis, un animal aussi fécond que le crocodile seroit trop muitiplié; tous les rivages des grands fleuves des zones torrides seroient infestés par ces animaux monstrueux, qui deviendroient bientôt féroces et cruels par: l'impossibilité où ils seroient de trouver aisément leur nourri- ture. Puissans par leurs armes, plus puissans par leur multi- tude, ils auroient bientôt éloigné l’homme de ces terres fe condes et nouvelles que ce roi de la Nature a quelquefois bien de la peine à leur disputer : car comment résister à tout ce qui donne le pouvoir, à la grandeur, aux armes, à la force et au 122 HISTOIRE NATURELLE nombre ? Prosper Alpin dit qu’en Egypte les plus grands cro= codiles fuient le voisinage de l’homme, et se tiennent sur les ri= vages du Nil, au-dessus de Memphis. Mais, dans les pays moins peuplés, il ne doit pas en être de même : ils sont si abondans dans les grandes rivières de T'Amazone et d'Oyapok, dans la baye de Vincent Pinçon , et dans les lacs qui y communiquent, qu'ils y gênent, par leur multitude , la navigation des pirogues; ils suivent ces légers bâtimens , sans cependant essayer de les renverser, et sans altaquer les hommes. Il est quelquefois aisé de les écarter à coups de rames, lorsqu'ils ne sont pas très- grands. Mais M. de k Borde raconte que, naviguant dans un canot le long des rivages orientaux de l'Amérique méridionale , 1] rencontra une douzaine de gros caïmans à l'embouchure d’une pelite riviere dans laquelle il vouloit entrer : il leur tira plu sieurs coups de fusil sans qu'ils changeassent de place. 11 fut tenté de faire passer son canot par-dessus ces animaux; 1l fut arrêté cependant par la crainte qu'ils ne fissent chavirer son pr bâ- timent, et qu'ils ne le dévorassent lorsqu'il seroit tombé dans l'eau. Il fut obligé d'attendre près de deux heures , après les- quelles les caïmans s'éloignèrent et lui laissèrent le passage libre. Hetwreusement un grand nombre de crocodilles sont détruits. avant d’éclore. Indépendamment des ennemis puissans dont nous avons déjà parlé, des animaux trop foibles pour ne pas fuir à Fapent de ces grands lézards cherchent leurs œufs sur les rivages où 1ls les déposent : la mang gouste, les singes , les sa- gouins , les tapajous , et plusieurs espèces oiseaux d’eau, s’en nourrissent avec avidité, et en cassent même un tres-osrand nombre, en quelque sorte pour le plaisir de se jouer. Ces mêmes œufs, ainsi que la chair du crocodile, surtont celle de la queue et du bas-ventré , servent de nourriture aux Nègres de l'Afrique, ainsi qu'à certains peuples de l'Inde et de l'Amérique. Ils trouvent délicate et succulente cette chair qui est très-blanche; mais 1l paroît que presque tous les Européens qui ont voulu en manger ont été rebutés par l'odeur de muse dont elle est imprégnée. M. Adanson cependant dit qu'il gouta celle d’un jeune crocodile tué sous ses yeux, au Sénégal, ef qu'il ne la trouva pas mauvaise. Au reste, la saveur de cetté chair doit varier beaucoup suivant l'âge , la nourriture et F'ctat de l'animal, On trouve quelquefois des bézoards dansle corps descrocodiles, DU EROCODILE. 195 ainsi que dans celui de plusieurs autres lézards. Seba avoit dans sa collection plusieurs de ces bézoards qui lui avoient été envoyés d'Amboine et de Ceylan : les plus grands étoient gros comme un œuf de canard, mais un peu plus longs, et leur surface présentoit des éminences de la grosseur des plus petits grains de poivre. Ces concrétions éloient composées, comme tous les bézoards, de couches placées au-dessus les unes des autres ; leur couleur étoit marbrée et d’un cendré obscur plus ou moins mêlé de blanc. | Les anciens Romains ont été long-temps sans connoître Îles crocodiles par eux-mêmes : ce n’est que cinquante-huit ans avant l'ère chrétienne que lédile Scaurus en montra cinq au peuple. Auguste lui en fit voir un grand nombre vivans, contre lesquels il fit combattre des hommes. Héliogabale en nourris- Les tyrars du monde faisoient venir , à grands frais, de | Fique, des crocodiles, des tigres, des Dons ils s'empr essoient réunir autour d'eux ce que la ierre paroit nourrir de plus féroce. Les crocodiles étoient donc, pour les Romains et d’autres an- ciens peuples, des animaux très-redoutables. Ils venoient de loin :il n'est pas surprenant qu'on leur ait attribué des vertus extraordinaires. Îl n'y a presque aucune partie dans les croca- diles à laquelle on n'ait attaché la vertu de guérir quelque ma- tadie. Leurs dents, leurs écailles, leur chair, leurs intestins, tout en étoit merveilleux. On fit plus dans leur pays natal : üls y inspiroient une grande terreur ; ils y répandoient quelquefois le ravage ; la crainte dégrada la raison , on en fit des dieux, on leur donna des prêtres; la ville d’Arsinoé leur fut consa- crée. On renfermoit religieusement leurs cadavres dans de hautes pyramides, auprès des tombeaux des rois; et mainte- nant dans cé même pays où on les adoroit il y a deux mille ans, on à nus leur tête à prix; Ct telle est la vicissitude des opinions humaines. 124 HISTOIRE NATURELLE \ RARAAA AAA URI A AAA ALAN AAA AA A AAA AAA AA AAA AA AA ML AAA AAA RAA AD: LE CROCODILE NOIR. Seconde espèce. cn D seconde espèce diffère de la première , en ce que sa couleur est presque noire , au lieu d’être verdâtre ou bronzée comme celle des crocodiles du Nil. C’est M. Adanson quia fait connoître ces crocodiles noirs , qu’il a vus sur la grande ri- vière du Sénégal. Leurs mâchoires sont plus allongées que celles des alligators ou crocodiles proprement dits. Ils sont d' leurs plus carnassiers que ces derniers , et pourroient par * séquent en différer aussi par des notées intérieurs , la divêe sité des mœurs étant très-souvent fondée sur celle de l’organi- sation interne. L'on ne peut pas dire qu'ils sont de la même espèce que le crocodile du Nil, qui auroit subi dans sa couleur ét dans quelques parties de son corps l'influence du climat , puisque , suivant le même M. Adanson, la rivière du Sénégal nourrit aussi un grand nombre de crocodiles verts , entièrement semblables à ceux d’'Egy pte. Non-seulement on n’a point encore observé ces crocodiles noirs dans le nouveau monde, mais aucun voyageur n'en a parlé que M. Adanson, et ce savant natura-. liste ne les a trouvés que sur le grand fleuve du Sénégal. ANA AU UV ANA A AE A A VU UV AAA UV AU AV UV UV VU YU UML VU UV UV MVL VAR LE GAVIAL. OU LE CROCODILE À MACHOIRES ALLONGÉES. T'roisième espèce. Carre troisième espèce de crocodile se trouve dans les grandes Indes : elle y habite les bords du Gange, où on la nommée ga- vil. Elle ressemble aux crocodiles du Nil par la couleur, et par les caractères généraux et distinctifs des croccdiles. Le on. a , Tome 1 AL, Massard loup £ Pretre pinx { ; 9 ; 7 1. Le Crocodile .....Page 109. De TO ANT RE RE L'ILE Fulambravconne 2-2" 6"0% 128. — a MAR TON OCR TE RAA L' D A AT LEA) HUM 40 EE EM A TRSRIE DUR 1 Ji HAUT #1 in (UT 0 LA PARLE STONE VSD per, Co DU GAVIAL. i95 comme les alligators, cinq doigts aux pieds de devant, et quatre doigts aux pieds de derrière ; 1! n’a d’ongle qu'aux trois’ doigts in- térieurs de chaque pied. Mais 1l diffère des crocodiles d'Egypte par des caractères parliculiers et très-sensibles. Ses mâchoires sont pins allongées et beaucoup plus étroites, au point de paroître comme une sorte de long bec qui contraste avec la grosseur de la tête. Les dents ne sont pas inégales en grosseur et en longueur comme celles des crocodiles proprement dits; elles sont plus nom- breuses ; et l’on conserve au Cabinet du Roi un individu de cette espèce , qui a environ douze pieds de long, et qui a cinquante- huit dents à la mâchoire supérieure , et cinquante à la mâchoire inférieure. NA Le nombre des bandes transversales et tuberculeuses qui gar- nissent le dessus du corps est plus considérable de plus d’un quart dans les crocodiles du Gange que dans l’alligator; d’ailleurs elles se touchent toutes, et les écailles carrées qui les composent sont plus relevées dans leurs bords, sans l'être autant dans leur centre, que celles du crocodile du Nil. Ces différences avec le cro- codile proprement dit sont plus que suffisantes pour constituer une espèce distincte. Les crocodiles du Gange parviennent à une grandeur très- considérable , ainsi que ceux du Nil. L'on peut voir au Cabinet du Roi une portion de mâchoire de ces crocodiles des grandes I1n- des, d’après laquelle nous avons trouvé que l'animal auquel elle a appartenu devoit avoir trente pieds dix pouces de longueur. * Au reste, nous ne pouvons donner une idée plus netie de ces énormes * Dimensions d'un crocodile à téte allongée. pieds. pou. lig. Liénaquent Cotale,:, 0 IS ETES RTS TN or À Lopgueur de: la'téte. 7 PONT EM. F0 rate et ee UE I Longueur depuisl’entre-deux des yeuxjusqu’au bout dumuseau. x Longueur de la mâchoire supérieutes 5,4. 4.44. +. 4 2 Longueur de la partie de la mâchoire qui est armée de dents, 1 pu Hélande desdeux) ven: ee RAR ES 6 ess ee D 3 Grand diamètre de lœil. . . . . . . : . . . . Ga te Ra EDS PRÈS ‘ » Circonférence du corps à l’endroit le plus gros. . . ..... 3 Circonférence de la tête derrière les yeux. : . . . . Mois ile » Circonféreuce du museau à l'endroit le plus étroit.. . . . . » Longueur des pattes de devant jusqu’au bout des doigts. . . Longueur des pattes de derrière jusqu’au bout des doigts. . Longueur de la queue. : ......... 4.4... . Circonférence de la queue à son origine. . . . . . . , . . DB Qu" D m D OO OÙ À D y NI 126 HISTOIRE NATURELLE animaux qu'en renvoyant à la figure et à la note précédente ,où nous rapportons les principales dimensions de l'individu de près de douze pieds, dont nous venons de parler. C’est apparemment de cette espèce qu’étoient les crocodiles vus par Tavernier sur les bords du Gange, depus Toutipour jus- qu'au bourg d’Acérat, qui en est à vingt-cinq cossés. Ce voya- geur aperçut un très-grand nombre de ces animaux couchés sur le sable ;il tira sur eux : le coup donna dans la mâchoire d'un grand crocodile, et fit couler du sang; mais l'animal se retira dans le fleuve. Le lendemain, Tavernier , en continuant de des- cendre le Gange, en vit un aussi grand nombre, également éten- dus sur le rivage ; 1l Hira sur deux de ces animaux deux coups de fusil chargé à trois balles : au même instant ils se renversèrent. sur le dos , ouvrirent la gueule, et expirèrent. Il paroit que le gavial n’étoit point inconnu des anciens, puis- qu'au rapport d’Elien, on disoit de son temps que l’on trouvoit | sur les bords du Gange des crocodiles qui avoient une espèce de corne au bout du museau. Mais M. Edwards est le premier natu- raliste moderne qui ait parlé du gavial : il publia, en 1756, La figure et la description d’un individu de cette espèce, dont il a comparé les mâchoires longues et étroites au bec du harle, et qu'il a nommé crocodile à& bec allongé. Cet individu , qui présen- toit tous les signes d’un développement peu avancé , avoit au- dessous du venire une poche ou bourse ouverte. Nous n'avons trouvé aucune marque d’une poche semblable dans le crocodile du Gange dont nous venons de donner les dimensions, ni dans un jeune crocodile de la même espèce ,et long de deux pieds trois pouces, qui fait aussi partie de la collection du Cabinet du Roi. Peut-être cetle poche s’eflace-t-elle à mesure que l’animal gran- dit, et n'est-elle qu'un reste de l'ouverture par laquelle s’insère le cordon ombilical ; ou peut-être l'individu de M. Edwards étoit- il d’un sexe différent de ceux dont nous avons vu la dépouiile. L'on conserve au Cabinet du Roi une portion de mâchoire garnie de dents, à demi pétrifiée, renfermée dans une pierre cal- caire trouvée aux environs de Dax en Gascogne, et envoyée au Cabinet par M. de Borda. Elle nous a paru, d’après l'examen que nous en ayons fait, avoir appartenu à un gavial. DU FOUETTE-QUEUE. 129 A WMAARA AAA MMA AR AAA RUE AAARANARANANANMAANMIAMAAMARAR LAVER AR LE FOUETTE-QUEUE. L: nom de Jouette-queue a été employé par différens naturalistes pour désigner diversés espèces de lézards qui peuvent donner à ieur queue des mouvemens semblables à ceux d’un fouet. Ce nom a été particulièrement appliqué au lézard dont il est ici question, et à la dragonne dont nous parlerors dans l’article suivant. Il en est résulté une obscurité d'autant plus grande dans les faits rap- portés par les voyageurs , relativement aux lézards, que le nom cordyle a été aussi donné par plusieurs auteurs à la dragonne, et | qu'ensuite le nom de fouette-queue a été lié avec celui de cordyle ; de maniere à être attribué non-seulement à la dragonne, qui a réellement la propriété de faire mouvoir sa queue comme un fouet, mais encore à d’autres espèces de lézards, privées de cette faculté, et désignées également par le nom de cordyle. Nous croyons donc, pour éviter toute confusion , devoir conserver uniquement au lézard dont il s’agit ici, le nom de fouette-queue. TI] habite les climats chauds de l'Amérique méridionale, et on le trouve particulièrement au Pérou. Il a quelquefois plusieurs pieds de longueur. Son dos est couvert de plaques carrées et d'écailles ovales qui garnissent aussi ses côlés. Sa queue, qui pa- roît dentelée par les bords , et qu'il a la facilité d’agiter comme un fouet , l'assimile un peu à la dragonne ; et la forme aplatie de cetté même queue, ainsi que ses pieds palmés , lé rapprochent du cro- codile, dont il est cependant bien aisé de le distinguer, parce que le crocodile n’a que quatre doigts aux pieds de derrière, tandis que le fouette-queue en a cinq à chaque pied. C’est ce qui nous a délerminés à regarder comme un fouette-quene l'animal re- présenté dans la planche CVIdu premier volume de Seba. M. Linné l'a rapporté au crocodile : mais il a cinq doigts aux pieds de der- rière; et, d’un autre côté; il ne peut pas être confondu avec la dragonne, puisque ses pieds. sont palmés. D'ailleurs Seba donne l'Amérique pour patrie à ce. grand lézard , ce qui s'accorde fort bien avec ce que M. Linné lui-même a dit de celle du fouette- queue. Nous croyons devoir observer aussi que le lézard repré- senlé dans Seba , tome F, planche CI, fgure 2 , et que M. Linné 128 HISTOIRE NATURELLE a indiqué comme un fouette-queue , est une dragonne, attendu que, quoique le dessinateur lui ait donné des membranesaux preds de derrière, il est dit dans le texte qu’il n'en a point. Le fouette-queue nous paroit être, ainsi que nous l'avons déjà dit”, le lézard que Dampier regardoit comme une seconde espèce de caïman d'Amérique. : 11 y a dans ile de Ceylan un grand lézard qui, par sa forme, ressemble beaucoup au crocodile ; mais il en difftre par sa langue bleue et fourchue, qu’il allonge d’une manière effrayante , lors- qu’il la tire pour siffler, ou seulement pour respirer. On le nom- me kobbera-guion. Il a communément six pieds de longueur. Sa chair est d’un assez mac at Il plonge souvent dans l'eau ; mais sa demeure ordinaire est sur la terre, où il se nourrit des oiseaux et des divers animaux qu'il peut saisir. Il craint l’homme, et n’ose rien contre lui; mais 1l écarte sans peine les chiens et plusieurs des animaux qui veulent lattaquer , en les frappant violemment avec sa queue, qu'il agile et secone comme un long fouet. Nous ignorons si les doigts de ses pieds sont réunis par des membranes : s'ils Le sont, il doit être regardé comme de la mème espèce que le fouette-queue du Pérou, qui peut-être aura subi, l'influence d’un nouveau climat; sinon il faudra le considérer comme une dragonne. RASAANAI VEINE PUR AURA AAA VAN AA ANA AAA AU AAA AURA NAT IAE AE RUE LEE AE LA DRAGONNE. Le dragonne ressemble beaucoup par sa forme au crocodile ; elle a, comme lui, la gueule très-large, des tubercules sur le dos, et la queue aplatie. Sa grandeur égale quelquefois celle des jeunes cimans. Sa couleur, d’un jaune roux foncé, et plus où moins mêlé de verdâtre , est semblable aussi à celle de ces animaux ; c’est ce qui a fait que, sur les côtes orientales de l'Amérique méridio- nale, elle a été prise pour une petite espèce de crocodile ou de caïman. Mais Ja dragonne en diffère principalement, parce que, au lieu d’avoir les pieds palmés, ses doigts, au nombre de cinq 1 Article des crocodiles. DE LA DRAGONNE. 129 à chaque pied, sont très-séparés les uns des autres, comme œux de presque tous les lézards. Ils sont d’ailleurs tous garnis d'ongles aigus et crochus. La tète, aplatie par-dessus, et comprimée par les côtés, a un peu la forme d’une pyramide à quatre faces, dont le museau seroit le sommet : elle ressemble par là à celle de plu- sieurs serpens, ainsi que la langue, qui est fourchue, et qui, loin d'être cachée et presque immobile comme celle du crocodile, peut être dardée avec facilité. Les yeux sont gros et brillans ; l'ou- verture des oreiiles est grande, et entourée d’une bordure d’é- tailles; le corps épais, arrondi, couvert d'écailles dures, osseuses RE 1 Le roquet que Sloane a décrit étoit beaucoup plus petit. Le corps n'AVOIE qu’un pouce de long, et la queue un pouce et demi. DU ROUGE-GORGE. 19g eu plétôl à l'agrément de sa course ; car il ne cesse, pour ainsi dire, de s’élancer avec tant de promptitude, que l'on a comparé la vivacité de ses petits bonds à la vitesse du vol des oiseaux. I} aime les lieux humides ; on le trouve souvent parmi les pierres, où il se plaît à sauter de l’une sur l’autre. Soit qu’il coure ou qu'il s'arrête, 1l tient sa queue presque toujours relevée au-dessus de son dos, comme le lézard de la Caroline , auquel nous avons conservé le nom de /ézard-lion. 11 replie mème cette queue, qui est très-déliée , de manière à ce qu’elle forme une espèce de cercle. Malgré sa pétulance, son caractère est doux; il aime la compagnie de l’homme, comme le lézard gris et le lézard vert. Lorsque ses courses répétées l'ont fatigué, et qu'il a trop chaud, il ouvre la gueule, tire sa langue, qui est très-large et fendue à l'extrémité , et demeure pendant quelque temps haletant comme les petits chiens. C’est apparemment celte habitude qui , jointe à sa queue retroussée et à sa tête relevée, aura déterminé les voyageurs à lui donner le nom de Zlézard-roquet. A détruit un grand nombre d'insectes ; il s'enfonce aisément dans les petits trous des terrains qu'il fréquente; et lorsqu'il y rencontre de pe- tits œufs de lézards ou de tortues , qui, n'étant revêtus que d’une membrane molle, n'’opposent pas une grande résistance à sa dent , on a prétendu qu'il s’en nourrissoit, Nous avons déjà vu quelque chose de semblable dans l’histoire du lézard gris ; et si le roquet présente une plus grande avidité que ce dernier ani- mal, ne doit-on pas penser qu'elle vient de la vivacité de la cha- leur bien plus forte aux Antilles, où il a été observé, que dans les différentes contrées de l'Europe où l'on a étudié les mœurs du lézard gris ? RAR VAAAARANAAAANAR AVR AAA AR AAA AA AAA AT AAA AAA AAA AR AA AAA ANA AA AVI LE ROUGE-GORGE., ts Le rouge-gorge, que l’on voit, à la Jamaïque, dans les haïes et dans les bois, est ordinairement long de six pouces, et de cou- leur verte ; il a au-dessous du cou une vésicule globuleuse qu'il gonfle très-souvent, particulièrement lorsqu'on l'attaque où qu'on l'effraie , et qui paroît alors rouge , ou couleur de rose. Il na point de bandes transversales sur le ventre ; la queue est ronde 200 HISTOIRE NATURELLE et longue. Sa parure est, comme l’on voit, assez jolie ; et c’est avec plaisir qu'on doit regarder l’agréable mélange du beau vert de son corps avec le rose de sa gorge. LE GOIÏTREUX. Lx goîtreux , qui habite au Mexique et dans l'Amérique méri- dionale , présente de belles couleurs, mais moins agréables et moins vives que celles du rouge-gorge : il est d’un gris pâle, re- levé sur le corps par des taches brunes, et sur le ventre par des bandes d’un gris foncé. La queue est ronde, longue, annelée, d’une couleur livide et verdätre à son origine. Il a, vers la poi- trine , une espèce de goitre, dont la sie est couverte de pe- tits grains rougeâtres , et qui s'étend en avant en s’arrondissant et en formant une très-grande bosse, Ce lézard est fort vif, très-leste , et si familier, qu’il se pro- mène sans crainte dans les appartemens, sur les tables, et même sur les convives. Son attitude est gracieuse, son regard fixe : il examine tout avec une sorte d'attention ; on croiroit qu'il écoute ce que l’on dit. Il se nourrit de mouches, d'araignées et d’autres insectes , qu'il avale tout entiers. Les goîtreux grimpent aisément sur les arbres ; ils s'y battent souvent les uns contre les autres. Lorsque deux de ces animaux s’attaquent , c'est toujours avec hardiesse ; ils s’avancent avec fierté ; ils semblent se menacer en agitant rapidement leurs têtes ; leur gorge s’enfle; leurs yeux étincellent ; ils se saisissent ensuite avec fureur , et se battent avec acharnement. D'autres goîtreux sont ordinairement spectateurs de leurs combats ; et peut-être ces témoins de leurs efforts sont- ils les femelles qui doivent en être le prix. Le plus foible prend la fuite ; son ennemi le poursuit vivement; il le dévore s’il Fat- teint : mais quelquefois il ne peut le saisir que par la queue, qui se rompt dans sa gueule, et qu’il avale; ce qui donne au lézard vaincu le temps de s'échapper. On rencontre plusieurs goitreux privés de queue : il semble que le défaut de cette parte influe sur leur courage, et même sur leur force ; ils sont timides, foibles et languissans, Il paroît que DU TRIANGULAIRE. 201 Ja queue ne repousse pas loujours, el qu’il se forme un calus à l'endroit où elle a été coupée. Le P. Nicolson, qui a donné plusieurs détails relatifs à l’his- toire naturelle du goitreux , l'appelle anolis, nom que l'on a donné à l’'améiva et à notre roquet : mais la figure que le P. Ni- colson a publiée prouve que le lézard dont il a parlé est celui dont il est question dans cet article. AAA AAA AAA ARR RAA REA LR AAA AD AAA AAA AAA AAA AAA AAA MURS LE TÉGUIXIN. 1: couleur de ce lézard est blanchâtre, tirant sur le bleu, diver- sifiée par des bandes d’un gris sombre, et semée de points blancs et ovales. Son corps présente un très-grand nombre de stries. La queue se termine en pointe; elle est beaucoup plus longue que le corps. Les écailles qui la couvrent forment des bandes trans- versales de deux sortes , placées alternativement : les unes s'éten- dent en arc sur la partie supérieure de la queue , que les autres bandes entourent en entier. Mais ce qui distingue principale- ment le téguixin, c’est que plusieurs plis obtus et relevés régnent de chaque côté du corps, depuis la tête jusqu'aux cuisses : on voit aussi trois plis sous la gorge. C'est au Brésil , suivant l’article de Seba , indiqué par M. Linné, qu'on trouve ce lézard , dont le nom téguixin a été donné au tu- pinambis par quelques auteurs. AAA ANA ANA UV VU UV VA MARAIS LE TRIANGULAIRE. ee mn Crsr dans l'Egypte qu'habite le lézard à queue iriangulaire. Ce qui le distingue des autres, c'est la forme de pyramide à trois faces que sa longue queue présente à son extrémité. Le long de son dos s'étend une bande formée par quatre rangées d’écailles qui diffèrent par leur figure de celles qui les avoisinent. Ces dé- tails suffiront pour faire reconnoîlre ce lézard par ceux qui l’au- 202 HISTOIRE NATURELLE ront sous leurs yeux. Il vit dans des endroits marécageux et voi- sins du Nil. Il a beaucoup de rapports, dans sa conformation, avec le scinque. C’est M. Hasselquist qui en a parlé le premier. Les Egyptiens ont imaginé un conte bien absurde à l’occasion du triangulaire : ils ont dit que les œufs du crocodile renfer- moïent de vrais crocodiles lorsqu'ils étoient déposés dans l’eau , et qu'ils produisoient les petits lézards dont il est question dans cet articie, lorsqu'au contraire ils étoient pondus sur un ter- rain sec. AAA RAA AA AAA AAA AA SA RAS AA AA APS AA AA AAA AA AAA AAA AAA AAA AAA PARA AE LA DOUBLE-RAIE. Le panne ne Cr lézard, que l’on rencontre en Asie , est communément tres- petit ; la queue est très-longue relativement au corps. Deux raies d’un jaune sale s'étendent de chaque côté du dos, qui présente d’ailleurs six rangées longitudinales de points noiratres. Ces points sont aussi répandus sur les pieds et sur la queue, et ils for- ment six autres lignes sur les côtés. Le corps est arrondi et épais. Seba avoit recu de Ceylan un individu de cette espèce. Suivant cet auteur, les œufs de ce lézard sont de la grosseur d’un petit pois. PAPA AAA AAA AAA AAA RAA AAA RAR AAA SR AAA AAA ANA D LE SPUTATEUR. ae cenig ne Nous avons décrit ce lézard d’après un individu envoyé de Saint-Domingue à M. d’Antic, et que ce naturaliste a bien voulu nous communiquer. Sa longueur totale est de deux pouces, et celle de la queue d’un pouce, Il n’a point de demi-anneaux sous le corps. Toutes ses écailles sont luisantes ; la couleur en est blanchâtre sous le ventre , et d’un gris varié de brun foncé sur le corps. Quatre bandes transversales d’un brun presque noir régnent sur la têle et sur le dos; une autre petite bande de la DU SPUTATEUR. 203 même couleur borde la mâchoire supérieure; et six autres bandes semblables forment comme autant d'anneaux autour de la queue. Il n'y a pas d'ouverture apparente pour les oreilles. La langue est plate, large, et un peu fendue à l’extrémité. Le sommet de la tête et le dessus du museau sont blanchâtres, tachetés de noir; les pattes variées de gris, de noir et de blanc. Il y a à chaque pied cinq doigts qui sont garnis par-dessous de petites écailles , et terminés par une espèce de pelole ou de petite plaque écail- leuse, sans ongle sensible. M. Sparman a déjà fait connoître cette espèce de lézard , dont il a trouvé plusieurs individus dans le cabinet d’histoire natu- relle de M. le baron de Geer, donné à l’Académie de Stockholm. Ces individus ne diffèrent que très-légèrement les uns des au- tres, par la disposition de leurs taches ou de leurs bandes. Ils avoient été envoyés, en 1755, à M. de Geer par M. Arcrelius, qui demeuroit à Philadelphie, et qui les avoit reçus de Saint- Eustache. M. Acrelius écrivit à M. de Geer que le sputateur habite dans les contrées chaudes de l'Amérique ; on ly rencontre dans les maisons, et parmi les bois de charpente : on l’y nomme wood- slave. Ce lézard ne nuit à personne lorsqu'il n’est point inquiété : mais il ne faut l’observer qu'avec précaution, parce qu'on l'irrite aisément. Il court le long des murs; et si quelqu'un , en s'arrè- tant pour le regarder, lui inspire quelque crainte, 1l s’a pproche autant qu'il peut de celui qu’il prend pour son ennemi ; il le considère avec attention, et lance contre lui une espèce de cra- chat noir, assez venimeux pour qu'une petite goutte fasse enfler la partie du corps sur laquelle elle tombe. On guérit cette enflure par le moyen de l’esprit-de-vin au de l'eau-de-vie du sucre mêé- lés de campbhre, dont on se sert aussi en Amérique contre la pi- qüre des scorpions. Lorsque l'animal s'irrile, on voit quelque- fois le crachat nôir se ramasser dans les coins de sa bouche. C'est de la faculté qu’a ce lézard de lancer par sa gueule une humeur venimeuse, que M. Sparman a tiré le nom de sputator qu'il lui a donné, et qui signifie cracheur. Nous avons cru ne devoir pas le traduire, mais le remplacer par le mot sputateur qui le rap- pelle. Ce lézard ne sort ordinairement de son trou que pendant le jour. M. Sparman a fait dessiner de très-petits œufs cendrés, tachetés de brun et de noir, qu'il a regardés comme ceux du spu- tateur, parce qu'il les a trouvés dans le même bocal que les m- 204 HISTOIRE NATURELLE dividus de cette même espèce qui faisoient partie de la collection de M. le baron de Geer. Nous croyons devoir parler ici d’un petit lézard semblable au spütateur par la grandeur et par la forme. Nous présaumons qu'il n’en est qu'une variété, peut-être même dépendante du sexe. Nous l'avons décrit d'après un individu envoyé de Saint- Domingue à M. d'Antic avec le sputateur ; et ce qui peut faire croire que ces deux lézagds habitent presque toujours ensemble , c'estque M. Sparman l’a trouvé dans le même bocal que les sputaleurs de la collection de M. de Geer : aussi ce savant na- turaliste pense-t-il, comme nous, qu'il n'en est peut-être qu’une variété. L'individu que nous avons décrit a deux pouces deux lignes de longueur totale, et la queue quatorze lignes ; il a, ainsi que le sputateur , le bout des doigts garni de pelotes écailleuses, que nous n'avons remarquées dans aucun autre lézard. Sa couleur , qui est le seul caractère par lequel il diffère du spulateur, est assez uniforme : le dessous du corps est d’un gris sale , mêlé de couleur de chair , et le dessus d’un gris un peu plus foncé, varié par de très-petites ondes d’un brun noi- râtre , qui forment des raies longitudinales. L’individu décrit par M. Sparman différoit de celui que nous avons vu, en ce que le bout de la quene étoit dénué d’écailles, apparemment par une suite de quelque accident. DU GECKO. , 205 AA AAA AAA AAA AAA AA AAA A AU CINQUIÈME DIVISION. LÉZARDS Dont les doigts sont garnis par-dessous de grandes écailles, qui se recouvrent comme les ardoises des toits ”. LE GECKO”. Res D. tous les quadrupèdes ovipares dont nous publions l’his- toire , voici le premier qui paroisse renfermer un poison mortel. Nous n'avons vu , en quelque sorte, jusqu'ici les animaux se développer , leurs propriétés augmenter et leurs forces s’ac- croître, que pour ajouter au nombre des êtres vivans , pour contre-balancer l’action destructive des élémens et du temps: ici la nature paroît , au contraire, agir contre elle-même; elle exalle, dans un lézard dont l'espèce n’est que trop féconde , une liqueur corrosive, au point de porter la corruption et le dépé- rissement dans tous les animaux que pénètre celte humeur active ; au lieu de sources de reproduction et de vie, on diroit qu'elle ne prépare dans le gecko que des principes de mort et d’anéantissement. Ce lézard funeste, et qui mérite toute notre attention par ses qualités dangereuses, a quelque ressemblance avec le camé- léon : sa tête, presque triangulaire, est grande en comparaison du corps; les yeux sont gros; la langue est plate, revêtue de petites écailles, et le bout en est échancré. Les dents sont aiguës, et si fortes, suivant Bontius, qu’elles peuvent faire impression sur des corps très-durs, et même sur l'acier. Le PE 1 On peut voir, dans la planche qui représente le gecko, l’arrangement de ces écailles au-dessous des doigts. 3 Tockaïe, par les Siamois. 506 HISTOIRE NATURELLE gecko est presque entièrement couvert de pelites verrues plus ou moins saillantes ; le dessous des cuisses est garni d’un rang de tubercules élevés et creux , comme dans liguane , le lézard gris, le lézard vert, l’améiva, le cordyle, le marbré, le ga- lonné, etc. Les pieds sont remarquables par des écailles ovales plus ou moins échancrées dans le milieu , aussi larges que la surface inférieure de ces mêmes doigis , et disposées régulière- ment au-dessus les unes des autres comme les ardoises ou les tuiles des toits ; elles revêtent le dessous des doigts, dont les côtés sont garnis d’une petite membrane qui en augmente la largeur, sans cependant les réunir. M. Linné dit que le gecko n’a point d'ongles : mais dans tous les individus conservés au Cabinet du Roi, nous avons vu le second, le troisième , le quatrième et le cinquième doigt de chaque pied garnis d’un ongle très-aigu , très-court et très-recourbé ; ce qui s'accorde fort bien avec lha- bitude de grimper qu'a le gecko , ainsi qu'avec la force avec laquelle il s'attache aux divers corps qu’il touche. Il en est donc des lézards comme d’autres animaux bien dif- férens , et, par exemple, des oiseaux : les uns ont les doigts des pieds entièrement divisés ; d’autres les ont réunis par une peau plus où moins lâche ; d'autres, ramassés en deux paquets ; ; et d’autres enfin ont leurs doigts ren > mais cependant garnis d’une membrane qui en augmente la surface. La queue du gecko est communément un pen plus longue que le corps ; seit cependant elle est plus courte; elle est ronde, menue , et couverte d’anneaux ou de bandes rentrés ne bles. te de ces bandes est composée de plusieurs rangs de très-petites écailles , dans le nombre et dans l’arrange- ment desquelles on n’observe aucune régularité , ainsi quenous nous en sommes assurés par la comparaison de plusieurs indi- vidus : c'est ce qui explique les différences qu'on a remarquées dans les descriptions des naturalistes, qui avoient compté trop exactement dans un seul individu les rangs et le nombre de ces très-petites écailles. Suivant Bontius, la couleur du gecko est d’un vert clair, ta- cheté d’un rouge très-éclatant. Ce même observateur dit qu’on appelle gecko le lézard dont nous nous occupons, parce que ce mot imite le cri qu'il jette lorsqu'il doit pleuvoir , surtout vers la fin du jour. On le trouve en Egypte, dans l’Inde, à Am- boine, aux autres îles Moluques , etc. Il se tient de préférence es: DU GEEK O. 20 dans les creux des arbres à demi pourris , ainsi que dans les endroits humides ; on le rencontre aussi quelquefois dans les maisons , où il inspire une grande frayeur, et où on s’empresse # de le faire périr. Bontius a écril en effet que sa morsure est ve- nimeuse , au point que, si la partie affectée n’est pas retranchée ou brûlée, on meurt avant peu d'heures. L’attouchement seul des pieds du gecko est même très-dangereux, et empoisonne, suivant plusieurs voyageurs, les viandes sur lesquelles il mar- che : l’on a cru qu'il les infectoit par son urine, que Bontius regarde comme un poison des plus corrosifs; mais ne seroit-ce pas aussi par l'humeur qui peut suinter des tubercules creux placés sur la face inférieure de ses cuisses? Son sang et sa salive, ou plutôt une sorte d’écume , une liqueur épaisse et jaune, qui s’épanche de sa bouche lorsqu'il est irrité , ou lorsqu'il éprouve quelque affection violente, sont regardés de même comme des venins mortels , et Bontius , ainsi que Valentyn , rapportent que les habitans de Java s’en servoient pour empoisonner leurs flèches. Hasselquist assure aussi que les doigts du gecko répandent un poison, que ce lézard recherche les corps imprégnés de sel marin , et qu'en courant dessus il laisse après lui un venin tres- dangereux. IL vit, au Caire , trois femmes près de mourir, pour avoir mangé du fromage récemment salé , et sur lequel un gecko avoit déposé son poison. 11 se convainquit de l'âcreté des exha- laisons des pieds du gecko, en voyant un de ces lézards courir sur la main de quelqu'un qui vouloit le prendre : toute la partie sur laquelle le gecko avoit passé, fut couverte de petites pustules, accompagnées de rougeur, de chaleur, et d’un peu de douleur , comme celles qu'on éprouve quand on a touché des orties. Ce témoignage formel vient à l'appui de ce que Bontius dit avoir vu. Il paroît donc que, dans les contrées chaudes de l'Inde et de l'Egypte , les geckos contiennent un poison dangereux et sou- vent mortel; 1l n'est donc pas surprenant qu'on fuie leur ap- proche, qu'on ne les découvre qu'avec horreur, et qu’on s'efforce de les éloigner ou de les détruire. Il se pourroit cependant que leurs qualités malfaisantes variassent suivant les pays, les saisons, la nourriture , la force et l’état des individus ?. 1 Les Indiens prétendent que la racine de curama (terre mérite ou safran 1n- dien ) est un très-bon remède contre la morsure du gecko. 208 HISTOIRE NATURELLE Le gecko, selon Hasselquist, rend un son singulier, qui res- semble un peu à celui de la grenouille, et qu'il est surtout facile d'entendre pendant la nuit. Il est heureux que ce lézard , dont le venin est si redoutable , ne soit pas silencieux , comme plu- sicurs autres quadrupèdes ovipares, et que ses cris très-distincts et particuliers puissent avertir de son approche et faire éviter ses dangereux poisons. Dès qu'ik a plu, il sort de sa retraite ; sa dé- marche est assez lente : il va à la chasse des fourmis et des vers. C’est à tort que Wurfbainius a prétendu dans son livre intitulé Salamandrologia , que les geckos ne pondoient point. Leurs œufs sont ovales , et communément de la grosseur d’une noisette : on peut en voir la figure dans la planche de Seba déjà citée. Les femelles ont soin de les couvrir d’un peu de terre, après les avoir déposés; et la chaleur du soleil les fait éclore. Les mathématiciens Jésiites envoyés dans les Indes orientales par Louis XIV ont décrit et figuré un lézard du royaume de Siam, nommé fockaie , et qui est évidemment le même que le gecko. L'individu qu'ils ont examiné avoit un pied six lignes de long, depuis le bout du museau jusqu'à l'extrémité de la queue. Les S'amois appellent ce lézard tockaie, pour imiter le cri qu'il jette; ce qui prouve que le cri de ce quadrupède ovi- pare est composé de deux sons proférés durement, difficiles à rendre, et que l’on a cherché à exprimer , tantôt par fockaie, tanlôt par gecko. RAR AAA VU VU VER VUE VE LUE VER AAA AAA AAA EUR RAR LE GECKOTTE. a “ Nous conservons ce nom à un lézard quia si une grande ressem- blance avec le gecko, qu'il est très-difficile de ne pas les confondre Pun avec l’autre, quand on ne les examine pas de près. Les na- turalistes n’ont même indiqué encore aucun des vrais caractères qui les distinguent. M. Lainné seulement a dit que ces deux lézards ont le même port et la même forme, mais que le gec- kotte, qu’il appelle Ze mauritanique, a la queue étagée, et que le gecko ne l’a point. Cette différence n'est réelle que pendant la jeunesse du geckotle : lorsqu' il est un peu agé, sa queue est au contraire beaucoup moims élagée que celle dû ne, DÜ GÉCKOTTÉE. 20%) Ées deux quadrupèdes ovipares se ressemblent surtout par la conformalion de leurs pieds. Les doisis du geckotte sont, comine ceux du gecko, garnis de membranes qui ne les réunissent päs, mais qui en élargissent la surface; ils sont également revéius par-dessous d'un rang d'écailles ovales, larges, plus où moins échancrées, et qui se recouvrent comme les ardoises des toils. Mais, en examinant atlenlivement un grand nombre de $eckos et de geckottes de divers pays, conservés au Cabinet du Roi nous avons vu que ces deux espèces difléroient donstitre rot June de l’autre par trois caractères très-sensibles : première ment, le geckotte a le corps plus court et plus épais que le gecko ; RE conlanient ») il n'a point au-dessous des cuisses un rang de tubercules comme le gecko; et troisièmement, sa queue est plus courte et plus grosse. Tant qu'il est encore jeune ; elle est re- couverte d’écailles, chargées chacune d’un tübercule en forme d’aiguillon , et qui , par leur disposition , la font paroître garnie d’anneaux écailleux : maïs à mesure que l'animal grandit , les anneaux les plus voisins de l'extrémité de la queue disparoissent ; bientôt 1l n'en reste plus que quelques-uns près de son origine, qui s’oblitèrent enfin comme les autres, de telle sorte que quand l'animal est parvenu à peu près à son entier développement, on n'en voit plus aucun autour de la queue : elle est alors beau- coup plus grosse et plus courte en proportion que dans le pre- mier âge ; et elle n’est plus couverle que de très-petites écailles , qui ne présentent aucune apparence d'anneaux. Le gecl me: est le seul lézard dans lequel on ait remarqué ce dense successif dans les écailles de la queue. Les tubercules, ou aiguil- lons, qui la revètent pendant qu'il est jeune , se retrouvent sur le corps de ce lézard, ainsi que sur les pattes : ils sont plus ou moins saillans; et sur certaines parties, telles que le derrière de la tête, le cou, et les côtés du corps, ils sont ronds, pointus, entourés de tubercules plus petits, et disposés en forme de ro- setle. Le geckotte habite presque les mêmes pays que le gecko; ce qui empêche de regarder ces deux animaux comme deux va- riétés de la même espèce, produites par une différence de cli- mat. On le trouve dans l'île d’Amboine , dans les Indes , et en Barbarie , d’où M. Brander l’a envoyé à M. Linné. L'on peut voir, au Cabinet du Roi, un très-petit quadrupède ovipare, qui ya été adressé sous le nom de {ézard de Saint-Domingue ; Lacepède. 1. 14 210 HISTOIRE NATURELLE c’est évidemment un geckotte : et peut-être cetle espèce se trou- ve-t-elle er effet dans Ie nouveau monde. On la rencontre vers les contrées tempérées, Jusque dans la partie méridionale de la Provence, où elle est tres-commune *. On l'y appelle £arente, nom qui a été donné au stellion et à une variété du lézard vert, ainsi que nous l'avons vu. On le trouve dans les masures et dans les vieilles maisons, où 1l fuit les endroits frais, bas et humides, et où il se tient commüuné- ment sous les toits. Il se plaît à une exposition chaude ; il aime le soleil : 1l passe l'hiver dans des fentes et dans des crevasses , sous les tuiles, sans y éprouver cependant un engourdissement parfait ; car, lorsqu'on le découvre, 1l cherche à se sau 7er , en marchant lourdement. Dès les premiers jours du printemps, 1l sort de sa retraite , et va se réchauffer au soleil ; mais il ne s’é- carte pas beaucoup de son trou, et il y rentre au moindre bruit. Dans les fortes chaleurs, il se meut fort vite, quoiqu'il n'ait jamais l’agilité de plusieurs autres lézards. Îl se nourrit princi- palement d'insectes. 1] se cramponne facilement par le moyen de ses ongles crochus et des écailles qu’il a sous les pieds : atrssi peut-il courir , non-seulement le long des murs, mais encore ‘au-dessous des planchers; et M. Olivier , que nous venons de citer , La vu demeurer immobile pendant très-long-temps sous la voûte d’une église. Il ressemble donc au gecko par ses habitudes, autant que par sa forme. On a dit qu'il étoit venimeux , peut-être à cause de ous ses rapports avec ce dernier quadrupède ovipare , qui, sui- vant un très-grand nombre de voyageurs, répand un poison mortel. M. Olivier assure cependant qu'aucune observation ne le prouve, et que ce lézard cherche toujours à s'échapper lorsqu'on le saisit. Les geckottes ne sortent point de leur trou lorsqu'il doit pleu- voir : mais jamais ils n’annoncent la pluie par quelques cris , ainsi qu'on l'a dit des geckos; et M. Olivier en a souvent pris avec des pinces, sans qu'ils fissent entendre aucun son. rt Note communiquée par M. Olivier, qui a bien voulu nous faire part des ob- servations qu'il a faites sur les habitudes de cette espèce de lézard. DE LA TÉTE-PLATE. ni PR AAA AN AAA AAA VAR LEA AAA RAA VAR AAA AA AA AAA A 1144412841) LA TÉTE-PLATE. N ous nommons ainsi un lézard qui n'a encore été indiqué par aucun naturaliste. Peu de quadrupèdes ovipares sont aussi re- marquables par la singularité de leur conformation. Il paroit faire la nuance entre plusieurs espèces de lézards : il semble par- ticulièrement tenir le milieu entre le caméléon , le gecko et la salamandre aquatique ; il a les principaux caractères de ces trois espèces. Sa tèle, sa peau et la forme générale de son corps, res- semblent à celles du caméléon ; sa queue, à celle de la sala- mandre aqualique , et ses pieds, à ceux du gecko : aussi aucun lézard n'est-il plus aisé à reconnoître , à cause de la réunion de ces trois caractères saillans ; ilen a d ailleurs de très-marqués, qui lui sont particuliers. Sa tête , dont la forme nous a MA le nom que nous don- nons à ce lézard , est très-aplatie; le dessous en est entièrement plat. L'ouverture de la gueule s'étend jusqu’au-delà des yeux les dents sont très-petites et en très-grand nombre; la langue est plate, fendue, et assez semblable à celle du gecko. La mâchoire inférieure est si mince, qu'au premier coup-d’œil on seroit tenté de croire que l’animal a perdu une portion de sa tête, et que cette mâchoire lui manque. La tête est d’ailleurs triangu- laire , comme celle du caméléon ; mais le triangle qu’elle forme est très-allongé, et elle ne présente point l’espèce de casque ni les dentelures qu’on remarque sur cette dernitre. Elle est arti- culée avec le corps, de manière à former en-dessous un angle obtus ; ce qui ne se retrouve pas dans la plupart des autres qua- drupèdes ovipares. Elle est très-grande ; sa longueur est à peu près la moitié de celle du corps. Les yeux sont très-gros et très- proéminens ; la cornée laisse apercevoir fort distinctement l'iris, dont la prunelle consiste en une fente verticaie, comme celle des yeux du gecko , et qui doit être très-susceptible de se dila- ter, ou de se contracter , pour recevoir ou repousser la lumière. Les narines sont placées presque au bout du museau, qui est mousse , et qui fait le sommet de l’espèce de triangle allongé formé par la tête. Les ouvertures des oreilles sont très-petites ; 21% HISTOIRE NATURELLE elles occupent les deux autres angles du triangle , et sont placées auprès des coins de la gueule, La peau du dessous du cou forme des plis : le dessous du corps est entièrement plat. Les quatre pieds du lézard à tête plate sont chacun divisés en cinq doigts : ces doigts sont réunis à leur origine par la peau des jambes, qui les recouvre par-dessus et par-dessous ; mais ils sont ensuite très-divisés , surtout ceux de derrière, dont le doigt in- icrieur est séparé des autres, comme dans beaucoup de lézards , de manière à représenter une sorte de pouce. Vers leur extré- milé, ils sont garnis d’une membrane qui les élargit, comme ceux du gecko et du geckotte ; et à cette mème extrémité, ils sont revêtus par-dessous de lames ou écailles qui se recouvrent comme les ardoises des toits : elles sont communément au nombre de vingt, et placées sur deux rangs qui s’écarient un peu l'un de Fautre au bout du doigt ; le petit intervalle qui sépare ces deux rangs renferme un ongle très-crochu , trés-fort , et replié en-dessous. La queue est menue, et beaucoup plus courte que le corps ; elle paroît très -large et très-aplatie, parce qu'elle est revêtue d’une membrane qui s'étend de chaque côté, et lui donne la forme d'une sorte de rame. Il est aisé cependant de distinguer la véritable queue que cette membrane recouvre , ét qui présente par-dessus et par-dessous une petite saillie longitudinale. Cette parte membraneuse n’est point, comme dans la salamandre aquatique, placée verticalement ; mais elle forme des deux côtés une large bande horizontale. La peau qui revêt la tête, le corps , les pattes et la queue du lé- zard à tête plate, tant dessus que dessous , est garnie d’un très- grand nombre de petits points saillans, plus ou moins apparens, qui se touchent et la font paroître chagrinée; et ce qui constitue un caractère jusqu'à présent particulier au lézard à tête plate, c'est que la partie supérieure de tout le corps est distinguée de la partie inférieure par une prolongation de la peau qui règne en forme de membrane frangée depuis le bout du museau jusqu’à l'origine de la queue, et qui s'étend également sur les quatre paties, dont elle distingue de même le dessus d’avec le dessous. Ce lézard n'a encore été trouvé qu'en Afrique; il paroît fort commun à Madagascar , puisque l’on peut voir dans la collection du Cabinet du Roi quatre individus de cette espèce envoyés de ætte Île. Cette collection en renferme aussi un cinquième que DE LA TÉTE-PLATE. Lai M. Adanson a rapporté du Sénégal ; et c’est sur ces cinq indivi- dus, dont la conformation est parfaitement semblable, que j'ai fait la description que l'on vient de lire. Le plus grand a de lou- gueur totale huit pouces six lignes , et la queue a deux pouces quatre lignes de longueur. Aucun naturaliste n’a encore rien écrit touchant cet animal : mais 1l a été vu à Madagascar par M. Bruyères, de la Société royale de Montpellier, qui a bien vou- lu me communiquer ses observations au sujet de ce quadrupède ovipare. La couleur du lézard à tête plate n’est point fixe, ainsi que celle de plusieurs autres lézards ; mais elle varie comme celle du caméléon, et présente successivement ou tout à la fois plu- sieurs nuances de rouge, de jaune, de vert et de bleu. Ces effets observés par M. Bruyères nous paroissent dépendre des différens états de l'animal, ainsi que dans le caméléon ; et ce qui nous le persuade, c'est que la peau du lézard à tête plate est presque en- tièrement semblable à celle du caméléon. Mais, dans ce dernier, les variations de couleur s'étendent sur la peau du ventre, an heu que, dans le lézard dont il est ici question , tout le dessous du corps, depuis l'extrémité des mâchoires jusqu’au bout dela queue, présente toujours une couleur jaune et brillante. M. Bruyères pense, avec toute raison, que le lézard que nous nommons Zéle-plate est le même que celui que Flaccourt a dési- gné par le nom fumocantrata, et que ce voyageur a vu dans l'ile de Madagascar. Cest aussi le famocantraton dont Dapper a parlé. Les Madégasses ne regardent le lézard à tête plate qu'avec une espèce d'horreur; dés qu'ils l’aperçoivent, ils se détournent , se couvrent même les yeux, et fuient avec précipitation. Flaccourt dit qu’il est très-dangereux, qu'il s’élance sur les nègres : et qu'il s'attache si fortement à leur poitrine *, par le moyen de la mem brane frangée qui règne de chaque côté de son corps, qu'on ne peut Pen séparer qu'avec un rasoir. M. Bruyères n’a rien vu de semblable : il assure que les lézards à tête plate ne sont point ve- nimeux : il en a souvent pris à la main ; ils lui serroient les doigts avec leurs mâchoires, sans que jamais 1l lui soit survenu aucun accident. Il est tenté de croire que la peur que cet animal inspire aux nègres vient de ce que ce lézard ne fuit point à leur appro- che, et qu’au contraire il va toujours au-devant d’eux la gueule RE + Le nom de famocantrata , que l’on a donné à ce lézard dans l'ile de Made gascar, siguilie qui saute à là poitrize. 214 HISTOIRE NATURELLE. béante, quelque bruit que l’on fasse pour le détourner: c’est ce qui Va fait nommer par des matelots français Le sourd ; nom que l’on a donné aussi dans quelques provinces de France à la salamandre terrestre. Ce lézard vit ordinairement sur lesarbres, ainsi que le caméléon ; il sy retire dans des trous, d’où il ne sort que la nuit et dans les temps pluvieux: on le voit alors sauter de branche en branche avec agilité. Sa queue lui sert à se soutenir, quoique courte; il la replie autour des petits rameaux. S'il tombe à terre, il ne peut plus s’élancer ; il se traine jusqu’à l'arbre qui est le plus à sa portée; il y grimpe, et y recommence à sauter de branche en branche. Il marche avec peine, ainsi que le caméléon; et ce qui nous paroît devoir ajouter à la difficulté avec laquelle 1l se meut quand il est à terre, c’est que ses pattes de devant sont plus courtes que celles de derrière, ainsi que dans les autres lézards, et que cependant sa tête forme par-dessous un angle avec le corps, de telle sorte qu’à chaque pas qu’il fait, il doit donner du nez contre terre. Cette conformation lui est au contraire favorable lorsqu'il s’élance sur les arbres, sa tète pouvant alors se trouver irès-souvent dans un plan horizontal. Le lézard à tête plate ne se nourrit que d'insectes : il à presque loujours la gueule ouverte pour les saisir; et elle est intérieurement enduïte d’une matière visqueuse ; qui les empêche de s'échapper. Seba a donné la figure d’un lézard qu’il dit fort rare, qui, sui- vant lui, se trouve en Egypte et en Arabie, et doit avoir beau- coup de rapports avec notre lézard a tète plate : mais si la des- criplion et le dessin en sont exacts, ils appartiennent à deux espèces diflérentes. On s'en convaincra, en comparant la des- criplion que nous venons de donner avec celle de Seba. En eflet, son lézard a, comme le nôtre, les doigts sarnis de mem- branes, ainsi que les deux côtés de la queue : mais il en diffère en ce que sa tête et son corps ne sont point aplatis; qu'iln’a point la membrane frangée dont nous avons parlé; que les pieds de derrière sont presque entièrement palmés; que la queue est ronde , beaucoup plus longue que le corps; et que la membrane qui en garnit les côtés est assez profondément festonnée. DU SEPS. 215 SIXIÈME DIVISION. LÉZARDS Qui n'ont que trois doigts aux pieds de devant et aux pieds de derrière. LE SEPS . à Lx seps doit être considéré de près, pour n'être pas confondu avec les serpens. Ce qui en effet distingue principalement ces der- nier d'avec les lézards, c'est le défaut de pailes et d'ouvertures pour les oreilles : mais on ne peut remarquer que difhcilement l'ouverture des oreilles du seps; et ses pattes sont presque invisi- bles par leur extrême petitesse. Lorsqu'on le regarde, on croiroit voir un serpent qui, par une espèce de monsiruosité, seroit né avec deux petites pattes auprès de la tête, et deux autres , très- éloignées , situées auprès de l'origine de la queue. On le croiroit d'autant plus, que le seps a le corps très-long et très-menu, et qu'il a l'habitude de se rouler sur lui-même comme les serpens. À une certaine distance on seroit même tenté de ne prendre ses pieds que pour des appendices informes. Le seps fait donc une des nuances qui lient d'assez près les quadrupèdes ovipares avec les vrais reptiles. Sa forme peu prononcée, son caractère ambigu, doivent contribuer à le faire reconnoître. Ses yeux sont très-pe- tits ; les ouvertures des oreilles bien moins sensibles que dans la plu- part des lézards. La queue finit par une pointe très aiguë ; elle est communément tres-courte : cependant elle éioit aussi longue que le corps dans l'individu décrit par M. Linné, et qui faisoit partie de la collection du prince Adolphe. Le seps est couvert d’écailles quadrangulaires, qui forment en tout sens des espèces de stries. Ce] * La cicigna, en Sardaigne. #16 HISTOIRE NATUREÉLEE La couleur de ce lézard est en général moins foncée sous le ventre que sur le dos, le long duquel s'étendent deux bandes dont la teinte est plus ou moins claire, et qui.sont bordées de chaque côté d’une petite raie noire. La grandeur des seps, ainsi que celle des autres lézards, va- rie suivant la température qu'ils éprouvent, la nourriture qu'ils trouvent, et la tranquillité dont ils jouissent. C’est donc avec rai- son que la plupart des naturalistes ont cru ne devoir pas assigner une grandeur déterminée comme un caractère rigoureux et dis- tincüf de chaqne espèce : mais 1l n’en est pas moins intéressant d'indiquer les limites qui, dans les diverses espèces, circonscri- vent la grandeur , et surtout d'en marquer les rapports, autant qu'il est possible, avec les différentes contrées, les habitudes, la chaleur, etc. Les seps, qui ne parviennent quelquefois, en Pro- vence et dans les autres provinces méridionales de France , qu'a la longueur de cinq ou six pouces, sont longs de douze ou quinze dans des pays plus conformes à leur nature. Il y en a un au Ca- binet du Roi dont la longueur totale est de neuf pouces neuf li- gnes; sa circonférence est de dix-huit lignes à l'endroit le plus gros du corps; les pattes ont deux lignes de longueur, et la queue est longue de trois pouces trois lignes. Celui que M. François Cetti a décrit en Sardaigne avoit douze pouces trois lignes de long ( apparemment mesure sarde ). Les pattes du seps sont si courtes, qu’elles n’ont quelquefois que deux lignes de long , quoique le corps ait plus de douze pou- ces de longueur. À peine paroissent-elles pouvoir toucher à terre, et cependant le seps les remue avec vitesse, et semble s'en servir avec beaucoup d'avantage lorsqu'il marche. Les pieds sont divi- sés en trois doists, à peine visibles , et garnis d'ongles, comme ceux de la plupart des autres lézards. M. Linné a compté cinq doigts. dans le seps qui faisoit partie de la collection du prince Adolphe de Suède; mais nous n’en avons jamais trouvé que trois dans les indi- vidus de différens pays que nous avons décrits, et qui sont au Ca- binet du Roi, avec quelque attention que nous les ayons consi- dérés, et quoique nous nous soyons servis de très-fortes loupes. C'est au seps que l'on doit rapporter le lézard indiqué par Ray sous le nom de seps ou de lézard chalcide; M. Linné nons pa- roit s'être trompé en appelant ce dernier lézard chalcide, et en le. séparant du seps. La description que l’on trouve dans Ray con- yient très-bien à ce dernier animal; les raies noires le long du Tome 1. Page 216. uns 44 pue LUCE ET SU lee ARLES un ua; L ji DAME. nn PALAIS PEN nu La u | MEET 1} rien 1. Le Gecko............ Page 205. 2. Le DEpS LR 21h. she Chalede 1. Plee pere Je. DU SEPS. 517 dos , et la forme rhomboïdale des écailles que Ray attribue à son lézard, sont en eflet des caractères dislinctifs du seps. Le lézard désigné par Columna sous le nom de seps ou de chalcide, séparé du seps par M. Linné, et appelé chalcide par ce grand naturaliste, est aussi une simple variété du seps, assez voisine de celle que l'on trouve aux environs de Rome, ainsi qu’en Provence, et dont on conserve un individu au Cabinet du Roi. Le lézard de Co- Jumna avoit, à la vérité, deux pieds de long , tandis que le seps des environs de Rome, que l’on peut voir au Cabinet du Roi, n’a que sept pouces huit lignes de longueur; mais il présentoit Jes caractères qui distinguent les véritables seps. L'animal que M. Linné a rangé parmi les serpens, qu’il a ap- pelé anguis quadrupède, et qu’il dit habiter dans l'ile de Java , est de même un véritable seps; tous les caractères rapportés par M. Linné conviennent à ce dernier lézard , excepté le défaut d’ou- vertures pour les oreilles , et les cinq doigts de chaque pied : mais, M. Linné ajoutant que ces doigts sont si petits, qu'on a bien de la peine à les apercevoir, on peut croire que l’on en aura aisé- ment compté deux de trop; d’ailleurs les ouvertures des oreilles du seps sont quelquefois si petites, qu’il paroit en manquer abso- lument. | C'est également au seps qu’il faut rapporter les lézards nom- més vers serpentiformes d'Afrique, et dont M. Linné a fait une espèce particulière sous le nom d’anguina; il suffit, pour s'en convaincre, de jeter les yeux sur la planche de Seba citée par le naturaliste suédois : la forme de la tête , la longueur du corps, la disposilion des écailles, la position et la briéveté des quatre pattes, se retrouvent dans ces prétendus vers comme dans le seps; et ce n'est que parce qu'on ne les a pas regardés d’assez pres, qu'on a altribué des pieds non divisés à ces animaux, que M. Linné s’est cru obligé par là de séparer des autres lézards. Suivant Seba, les Grecs ont connu ces quadrupèdes; ils ont même cru être infor- més de leurs habitudes en certaines contrées, puisqu'ils les ont nommés acheloi et elyoi, pour désigner leur séjour au milieu des eaux troubles et bourbeuses. On les rencontre au cap de Bonne- Fspérance, vers la baie de la Table, parmi les rochers qui bor- dent la rivière. Suivant la figure de Seba, ces seps du cap de Bonne-Espérance ont la queue beaucoup plus longue que le corps. Columna, en disséquant un seps femelle, en tira quinze fœtus is 218 HISTOIRE NATURELLE vivans , dont les uns étoient déjà sortis de leurs membranes, et les auires étoient encore enveloppés dans une pellicule diaphane el renfermés dans leurs œufs comme les petils des vipères. Nous remarquerons une manière semblable de venir au jour dans les petits de la salamandre terrestre; et ainsi non-seulement les di- verses espèces de lézards ont entre elles de nouvelles analogies, mais l’ordre entier des quadrupèdes ovipares se lie de nouveau avec les serpens, avec les poissons cartilagineux et d’autres pois- sons de différens genres, parmi lesquels les petits de plusieurs es- pèces sortent aussi de leurs œufs dans le ventre même de leur mère. Plusieurs naturalistes ont cru que le seps étoit une espèce de salamandre. On a accusé la salamandre d'être venimeuse; on a dit que le seps l’étoit aussi. Il y a même long-temps que lon a regardé ce lézard comme un animal malfarsant, le nom de seps que les anciens lui ont appliqué, ainsi qu'au chalcide, ayant été aussi attribué, par ces mêmes anciens , à des serpens très-veni- meux, à des millepieds et à d’autres bêtes dangereuses. Ce mot seps , dérivé de oœyre ( sepo , je corromps }, peut être regardé comme un nom générique que les anciens donnoitent à la plupart des animaux dont ils redoutoient les poisons, à quelque ordre d'ailleurs qu'ils les rapportassent. On peut croire aussi qu'ils ont très-souvent confondu , ainsi que le plus grand nombre des natu- ralistes venus après eux, le chalcide et le seps , qu'ils ont appelés tous deux non-seulement du nom générique de seps, mais en- core du nom particulier de chalcide. Quoi qu'il en soit, les observations de M. Sauvage paroissent prouver que le seps n’est point venimeux dans les provinces mé ridionales de France. Suivant ce naturaliste , la morsure des seps n’a Jamais été suivie d'aucun accident : il rapporte en avoir vu manger par une poule sans qu’elle en ait été incommodée. I ajoute que la poule ayant avalé un petit seps par la lête sans l'é- craser, 1l vit ce lézard s'échapper du corps de la poule, comme les vers de terre de celui des canards. La poule le saisit de nou- “veau ; 1l s’échappa de même : mais à la troisième fois elle le coupa eu deux. M. Sauvage conclut même, de la facilité avec laquelle ce petit lézard se glisse dans les intestins, qu'il produiroit un meilleur eflet dans certaines maladies que le plomb et le vif-ar- gent. M. François Cetti dit aussi que, dans toute la Sardaigne, 1l Wa jamais entendu parler d'aucun accident causé par la morsure DU SEPS. 219 du seps, que tout le monde y regarde comme un animal inno- cent. Seulement, ajoute-t-il, lorsque les bœufs ou les chevaux en ont avalé avec l'herbe qu'ils paissent , leur ventre s’enfle, et ils sont en danger de mourir, si on ne leur fait pas prendre une boisson préparée avec de l’huile, du vinaigre et du soufre. Le seps paroïit craindre le froid plus que les tortues terrestres et plusieurs autres quadrupèdes ovipares ; il se cache plus tôt dans la terre aux approches de l'hiver. Il disparoît en Sardaigne dès le commencement d'octobre, et on ne le trouve plus que dans des creux souterrains ; il en sort au printémps pour aller dans les endroits garnis d’herbe, où il se tient encore pendant l'été, quoique l’ardeur du soleil l'ait desséchée. M. Thunberg a donné , dans les Mémoires de l'Académie de Suède, la description d’un lézard qu’il nomme abdominal, qui se trouve à Java et à Amboine , quia les plus grands rapportsavec le seps , et qui n’en diffère que par la très-grande briéveté de sa queue et le nombre de ses doigts. Mais comme il paroit que M. Thunberg n’a pas vu cet animal vivant, et que, dans la des- cription qu'il en donne, il dit que l’extrémité de la queue étoit nue et sans écailles, on peut croire que l'individu observé par ce savant professeur avoit perdu une partie de sa queue par quel- que accident. D'ailleurs nous nous sommes assurés que la lon- gueur de la queue des seps étoit en général très-variable. D'un au- tre côté, M. Thunberg avoue qu’on ne peut à l'œil nu distinguer qu'avec beaucoup de peine les doigts de son lézard abdominal. TI pourroit donc se faire que l’animal eut été altéré après sa mort, de manière à présenter l'apparence de cinq petits doigts à chaque pied, quoique réellement il n’y en ait que trois, ainsi que dans les seps , auxquels il faudroit dès-lors le rapporter. Si au contraire le lézard abdominal a véritablement cinq doigts à chaque pied, il faudra le regarder comme une espèce distincte du seps, et le comprendre dans la quatrième division, où 1l pourroit être placé à la suite du sputateur. Au reste, personne ne peut mieux éclair- air ce point d'histoire naturelle que M. Thunberpg. 220 HISTOIRE NATURELLE AANAARNARANAANANAIAASS WW AN ANAANAAAAAAARAAAAARARAN ARR LE CHALCIDE. Lr seps n'est pas le seul lézard qui, par la petitesse de ses pattes à peine visibles, et la grande distance qui sépare celles de devant de celles de derrière, fasse la nuance entre les lézards et les ser- pens; le chalcide est également remarquable par la briéveté et la position deses pattes , demême que par l'allongement de son corps. M. Linné, et plusieurs autres naturalistes , ont regardé, ainsi que nous, lechalcide comme différent du seps,et ils ont dit que ces deux lézards sont distingués l’un de l'autre, en ce que le seps a la queue verticillée, tandis que le chalcide l’a ronde, et plus longue que le corps. Quelque sens qu’on attache à cette expression verticillée , elle ne peut jamais représenter qu'un caractère vague et peu sen- sible. D'un autre côté, il n’y a rien de si variable que les lon- gueurs des queues des lézards , et par conséquent toute distinction spécifique fondée sur ces longueurs doit être regardée comme nulle, à moins que leurs différences ne soient très-grandes. Nous avons pensé d’après cela que le lézard appelé chalcide par M. Linné pourroit bien n'être qu’une variété du seps, dont plusieurs indi- vidus ont la queue à peu près anssi longue que le corps. Nous l'avons pensé d'autant plus qu'il paroît que M. Linné n’a point vu le lézard qu’il nomme chalcide. Nous avons en conséquence examiné les divers passages des auteurs cités par M. Linné, rela- tvement à ce quadrupède avipare; nous avons comparé ce qu'ont écrit à ce sujet Aldrovande , Columna , Gronovius, Ray et Impe- rali : nous avons vu que tout ce que rapportent ces auteurs, Llant dans leurs descriptions que dans la partie historique, pouvoit s'appliquer au véritable seps. 11 paroït donc qu’on doit réduire à une seule espèce les deux lézards connus sous le nom de seps et de chalcide. Mais il y a , au Cabinet du Roi, un lézard quisresserable au seps par l'allongement de son corps, la pelitesse de ses pattes, le nombre de ses doigts, et qui est cependant d’une espèce dif- férente de celle du seps, ainsi que nous allons le prouver. Ce lézard n’a vraisemblablement été connu d'aucun des natura- listes modernes qui ont écrit sur le chalcide : c’est, en quelque: sorte , une espèce nouvelle que nous présentons, et à laquelle DU CHALCIDE. 221 nous appliquons ce nom de cAalcide, qui n’a été donné par M. Linné et les naturalistes modernes qu'à une variété du seps. . Notre chaleide , le seul que nous nommerons ainsi, diffère du seps par un caractère qui doit empêcher de les confondre dans toutes les circonstances. Le dessus et le dessous du corps et de la queue sont garnis dans le seps de petites écailles, placées les unes Sur les autres comme les ardoises qui couvrent nos loits; tandis que, dans le chalcide , les écailles forment des anneaux circulaires très-sensibles , séparés les uns des autres par des espèces de sillons , et qui revètent non-seulement le corps, mais encore la queue. Le corps de l'individu conservé au Cabinet du Roi a deux pouces six lignes de longueur : il esl plus court que la queue, et entouré de quarante-huit anneaux. La tête est assez semblable à celle du seps , ainsi que nous l'avons dit : mais il n’y a aucune ouverture pour les oreilles ; ce qui donne au chalcide un rapport de plus avec les serpens. Les pattes sont encore plus courtes que celles du seps, en proportion de la longueur du corps; elles n’ont qu’une ligne de longueur. Celles de devant sont situées très-près de la tête. Ce lézard n’a que trois doigts à chaque pied , ainsi que le seps. Il est d’une couleur sombre , qui peut-être est l’eflet de l’esprit- de-vin dans lequel il a été conservé, mais qui approche de Ia couleur de Fairain , que les Grecs ont désignée par le nom de chalcis ( dérivé de xarxos, airain ) lorsqu'ils ont appliqué ce nom a un lézard. Cet animal, qui doit habiter les contrées chaudes, a, par la conformation de ses écailles et leur disposition en anneaux, d’as- sez grands rapports avec le serpent orvet et les autres serpens , que M. Linné a compris sous la dénomination générique d’an- guis. Il en à aussi par là avec plusieurs espèces de vers, et surtout avec un reptile, dont nous donnerons l’histoire à la suite de celle des quadrupèdes ovipares, et qui lie l’ordre de ces der- mers avec celui des serpens encore de plus près que le seps et le chalcide. \ | Mais si les espèces de lézards dont nous traitons maintenant présentent, en quelque sorte , une conformation intermédiaire entre celle des quadrupèdes ovipares et celle des vrais reptiles, l'espèce suivante donne à ces mêmes quadrupèdes ovipares de nouveaux rapports avec des animaux bien mieux organisés, ef 292 HISTOIRE NATURELLE pa rticulièrement avec l'ordre des oiseaux , par les espèces d'ailes dont elle 4 été pourvue. SEPTIÈME DIVISION. LEZARDS Qui ont des membranes en forme d’ailes. © LE DRAGON. ss  ce nom de dragon , l'on conçoit toujours une idée extraor- dinaire. La mémoire rappelle avec promptitude tout ce qu’on a lu, tout ce qu'on a ouï dire , sur ce monstre fameux: l’imagina- tion s’enflamme par le souvenir des grandes images qu’il a présen- tées au génie poétique : une sorle de frayeur saisit les cœurs tinides ; et la curiosité s'empare de tous les esprits. Les anciens, les modernes, ont tous parlé du dragon. Consacré par la religion des premiers peuples, devenu l'objet de leur mythologie, mi- nistre des volontés des dieux , gardien de leurs trésors, servant leur amour et leur haine, soumis au pouvoir des enchanteurs, vaincu par les demi-dieux des temps antiques , entrant même dansles allégories sacrées du plus saint des recueils, il a été chanté par les premiers poëtes , et représenté avec toutes les couleurs qui pouvoient en embellir l'image. Principal ornement des fables pieuses imaginées dans des temps plus récens , dompté par les héros , et même par les jeunes héroïnes , qui combatioient pour une loi divine ; adopté par une seconde mythologie , qui plaça les fées sur le trône cles anciennes enchanteresses; devenu l’em- blème des actions éclatantes des vaillans chevaliers , il a vivifié la poésie moderne. ainsi qu'il avoit animé l'ancienne. Proclamé par la voix sévère de l’histoire, partout décrit, partout célébré, par- tout redouté, montré sous toutes les formes , toujours revêtu de la plus grande puissance, immolant ses viclimes par son regard , se transportant au milieu des nuées avec la rapidité de l'éclair, frappant comme la foudre , dissipant l'obscurité des nuits par DU DRACON. 223 l'éclat de ses yeux élincelans , réunissant l’agilité de l’aigle, la force du hon , la grandeur du serpent *, présentant même quel- quefois une figure humaine , doué d’une intelligence presque divine, et adoré de nos jours dans de grands empires de l'Orient, le dragon a été tout , et s’est trouvé partoul, hors dans fa Nature. Il vivra cependant toujours, cet être fabuleux, dans les heureux produits d’une imagination féconde; il embellira long-temps les images hardies d’une poésie enchanteresse : le récit de sa priissance merveilleuse charmera les loisirs de ceux qui ont besoin d’être quelquefois transportés au milieu des chimères, et qui désirent de voir la vérité parée des ornemens d’une fiction agréable. Mais à la place de cet être fantastique, que trouvons-nous dans la réa- lité? un animal aussi petit que foible, un lézard innocent ettran- quille , un des moins armés de tous les quadrnupèdes ovipares, et qui, par une conformation particuliere , a la facilité de se trans- porler avec agilité, et de voltiger de branche en branche dans les forêts qu’il habite. Les espèces d’ailes dont il a été pourvu, son corps de lézard, et tous ses rapports avec les serpens, ont fait trouver quelque sorte de ressemblance éloignée entre ce petit ant- mal et le monstre imaginaire dont nous avons parlé, et lui ont fait donner le nom de dragon par les naturalistes. Ces aïles sont composées de six espèces de rayons cartilagineux, situés horizontalement de chaque côté de l’épine du dos, et au- près des jambes de devant. Ces rayons sont courbés en arrière; 1Îs soutiennent une membrane, qui s'étend le long du rayon le plus antérieur jusqu’à son extrémité, et va ensuite se rattacher , en s'arrondissant un peu , auprès des jambes de derrière. Chaque aile représente ainsi un triangle , dont la base s'appuie sur lépine du dos; du sommet d’un triangle à celui de l’autre , il y a°à peu près la même distance que des pattes de devant à celles de der rière. La membrane qui recouvre les rayons est garnie d'écailies, ainsi que le corps du lézard, que l’on ne peut bien voir qu'ea regardant au-dessous des ailes, et dont on ne distingue par-des- sus que la partie la plus élevée du dos. Ces ailes sont conformées comme les nageoires des poissons, surtout comme celles dont les poissons volans se servent pour se soutenir en l'air. Elles ne res- semblent pas aux ailes dont les chauve-souris sont pourvues, et qui sont composées d’une membrane placée entre les doigts très- PS IE A À 1 Il y a des serpens qui on! plus de quarante pieds de long. 004% HISTOIRE NATURELLE longs de leurs pieds de devant; elles diffèrent encore plus de celles des oiseaux formées de membres que l’on a appelés leurs bras’ elles ont plus de rapport avec les membranes qui s'étendent des jambes de devant à celles de derrière dans le polatouche et dans le taguan , et qui leur servent à voltiger. Voilà donc le dragon qui, placé, comme tous les lézards, entre les poissons et les qua- drupèdes vivipares , se rapproche des uns par ses rapports avec les poissons volans , et des autres par ses ressemblances avec Îles polatouches et les écureuils, dont il est l’analogue dans son ordre. Le dragon est aussi remarquable par trois espèces de poches allongées et pointues , qui garnissent le dessous de sa gorge, et qu'il peut enfler à volonté pouraugmenter son volume, se rendre plus léger , et voler plus facilement. Cest ainsi qu'il peut un peu compenser l'infériorité de ses ailes, relativement à celles des oi- seaux , et la facilité avec laquelle ces derniers, lorsqu'ils veulent s'alléser, font parvenir l'air de leurs poumons dans diverses par- ties de leur corps. Si l’on ôtoit au dragon ses ailes et les espèces de poches qu'il porte sous son gosier, il seroit très-semblable à la plupart des lézards. Sa gueule est très-ouverle , et garnie de dents nombreu- ses et aiguës. Il a sur le dos trois rangées longitudinales de tuber- cules, plus ou moins saillans , dont le nombre varie suivant les individus. Les deux rangées extérieures forment une ligne courbe, dont la convexité est en dehors. Les jambes sont assez longues ; les doigts, au nombre de cinq à chaque pied, sont longs, séparés, et sarnis d'ongles crochus. La queue est ordinairement très-de- liée, deux fois plus longue que le corps, et couverte d’écailles un peu relevées en carène. La longueur totale du dragon n'excède guère un pied. Le plus grand des individus de cette espèce con- servés au Cabinet du Roia huit pouces deux lignes de long, depuis le bout du museau jusqu’à l'extrémité de la queue, qui est longue de quatre pouces dix lignes. Bien différent du dragon de la fable, il passe innocemment sa vie sur les arbres , où il vole de branche en branche, cherchant les fourmis , les mouches, les papillons, et les autres insectes dont il fait sa nourriture. Lorsqu'il s’élance d’un arbre à un autre , il frappe l'air avec ses ailes, de manière à produire un bruit assez sensible , etil franchit quelquefois un espace de trente pas. Il ha- bite en Asie, en Afrique et en Amérique. Il peut varier , suivant les différens climats, par la teinte de ses écailles ; mais 1l présente DU DRAGON. 225 souvent un agréabie mélange de couleurs noire, brune, presque blanche ou légèrement bleuâtre, formant des taches ou des raies. Quoiqu'il ait les doigts très-séparés les uns des autres, il n’est point réduit à habiter la terre sèche et le sommet des arbres; ses poches qu’il développe, et ses ailes qu'il étend, replie et contourne à volonté, lui servent non-seulement pour s’élancer avec vitesse, mais encore pour nager avec facilité. Les membranes qui com- posent ses ailes peuvent lui tenir lieu de nageoires puissantes, parce qu'elles sont fort grandes à porportion de son corps; et les poches qu’il a sous la gorge doivent, lorsqu'elles sont gonflées, le rendre plus léger que l'eau. Cet animal privilégié a donc reçu tout ce qui peut être nécessaire pour grimper sur les arbres, pour marcher avec facilité, pour voler avec vitesse, pour nager avec force : la terre, les forêts, l'air, les eaux, lui appartiennent éga- lement ; sa petite proie ne peut lui échapper. D'ailleurs aucun asile ne lui est fermé; aucun abri ne lui est interdit ; s’il estpour- suivi sur la terre, il s'enfuit au haut des branches , ou se réfugie au fond des rivières : il jouit donc d’un sort tranquille et d’une destinée heureuse ; car il peut encore , en s’élevant dans l'air, échapper aux animaux que l’eau n'arrête pas. M. Linné a compté deux espèces de lézards volans. Il a placé dans la première ceux de l’ancien monde, dont les ailes ne tien- nent pas aux pattes de devant, et dans la seconde ceux d’Amé- rique , dont les ailes y sont aitachées. Cette différence ne nous paroît pas suffire pour constituer une espèce distincte. D'ailleurs ce n’est que sur l'autorité de Seba, dont les figures ne sont pas toujours exactes , que M. Linné a admis l'existence de lézards volans dont les jambes de devant servent de premier rayon aux ailes; il n’en a jamais vu ainsi conformés : nous n’en avons ja- mais vu non plus ; et nous n'avons rien trouvé qui y eût rapport, dans aucun auteur, excepté Seba. Nous croyons donc ne devoir admettre qu’une espèce dans les lézards volans , jusqu’à ce que de nouvelles observations nous obligent à en reconnoître deux *. 1 M. Daubenton n’a compté, comme nous, qu’une espèce de lézard volant. Lacepède. 1. 13 258 HISTOIRE NATURELLE EAN RAA AAA A AAA AA AAA AAA AAA AAA TARA HUITIEME DIVISION. LÉZARDS Qui ont trois ou quatre doigts aux pieds de devant, et quatre ou cing aux pieds de derrière. LA SALAMANDRE TERRESTRE: EE [PF semble que plus les objets de la curiosité de l'homme sont éloignés de lui, et plus il se plaît à leur attribuer des qualités mer- veilleuses , ou du moins à supposer à des degrés trop élevés celles dont ces êtres, rarement bien connus, jouissent réellement. L'- magination & besoin , pour ainsi dire, d’être de temps en temps secouée par des merveilles. L'homme veut exercer sa croyance dans toute’sa plénitude ; il lui semble qu'il n’en jouit pas d’une manière assez libre quand 1l la soumet aux lois de la raison : ce n’est que par les excès qu’il croit en user; et il ne s’en regarde comme véritablement le maître que lorsqu'il la refuse capricien- sement à la réalité, ou qu’il l'accorde aux êtres les plus chiméri- ques. Mais il ne peut exercer cet empire de sa fantaisie que lors- que la lumière de la vérité ne tombe que de loin sur les objets de celte croyance arbiiraire; que lorsque l’espace, le temps ou leur nature les séparent de nous; et voilà pourquoi parmi tous Îles ordres d'animaux, il n’en est peut-être aucun qui ait donné lieu à tant de fables que celui des lézards. Nous avons déjà vu des propriétés aussi absurdes qu'imaginaires accordées à plusieurs es- À 1 Salamandra , en latin; salamanguesa et salamantegua , en Espagne ; samabras ou saambras, par les Arabes ; Le sourd , dans plusieurs provinces de France ; blande, dans le Languedoc et la Provence; p/uvine, en Dauphiné ; laverne, dans le Lyonnais; suisse, en Bourgogne; mirtil, dans le Poitou ; alebrenne ou arrassade, dans plusieurs autres provinces de France; z27ouror, en Normandie; salemander, eu Flandre ; puntermaal, en quelques endroits d'Allemagne, DE LA SALAMANDRE TERRESTRE. 227 péces de ces quadrupèdes ovipares : mais nous voici maintenant à l'histoire d'un lézard pour lequel l'imagination humaine s’est surpassée; on lui a attribué la plus merveilleuse de toutes les pro - priétés. Tandis que les corps les plus durs ne peuvent écha pper à la force de l'élément du feu , on a voulu qu’un petit lézard non- seulement ne füt pas consumé par les flammes, mais parvint même à les éteindre ; et comme les fables agréables s’accréditent aisément , l’on s’est empressé d'accueillir celle d’un peüt aninial si privilégié , si supérieur à l'agent le plus actif de la Nature, et qui devoit fournir tant d'objets de comparaison à la poésie, tant «l’emblèmes galans à l'amour, tant de brillantes devises à la va- leur. Les anciens ont cru à cette propriété de la salamandre : de- sirant que sou origine fût aussi surprenaute que sa puissance, et voulant réaliser les fictions ingénienses des poèées, ils ont écrit qu'elle devoit son existence au pluspur des élémens, qui ne pou- voit la consumer, et ils l'ont dite fille du feu, en lui donnant ce- pendant un corps de glace. Les modernes ont adopté les faibles ridicules des anciens, et comme on ne peut jamais s'arrêter quand on a dépassé les bornes de la vraisemblance, on est allé jusqu’à penser que le feu le plus violent pouvoit être éteint par la salamandre terrestre. Des charlatans vendoient ce petit lézard , qui, jeté dans le plus grand incendie, devoit, disoient-ils, en arrêter les progrès. El a fallu que des physiciens , que des philosophes, prissent la peine de prouver par le fait ce que la raison seule auroit dû démontrer; et ce n’est que lorsque les lumières de la science ont été très-répan- dues, qu’on a cessé de croire à la propriété de la salamandre. Ce lézard , qui se trouve dans tant de pays de l'ancien monde, et même à de très-hautes latitudes, a été cependant très-peu ob- servé, parce qu'on le voit rarement hors de son trou, et parcè qu'ila, pendant long-temps, inspiré une assez grande frayeur. Aristote même ne paroit en parler que comme d’un animal qu'il ne connoissoit presque point. Il est aisé à distinguer deftous ceux dont nous nous sommes oc- cupés, par la conformation particulière de ses pieds de devant , où il n’a que quatre doigts, tandis qu’il en a cinq à ceux de derrière. Un des plus grands individus de cette espèce conservés au Ca- binet du Roi a sept pouces cinq lignes de longueur, depuis le bout du museau jusqu’à l’origine de la queue, qui est longue de trois pouces huit lignes. La peau n’est reyêtue d'aucune écaille sensibie, mais elleest garnie d’une grande quantité de mamelons, et 228 _ HISTOIRE NATURELLE percée d’un grand nombre de petits trous , dont plusieurs sont très-sensibles à la vue simple, et par lesquels découle une sorte de Jait qui se répand ordinairement de manière à former un vernis transparent au-dessus de la peau naturellement sèche de ce qua- drupède ovipare. Les yeux de la salamandre sont placés à la partie supérieure de la tête, qui est un peu aplatie; leur orbite est saillante dans l'in- térieur du palais, etelle y est presque entourée d’un rang de très- petites dents , semblables à celles qui garnissent les mâchoires. Ces dents établissent un nouveau rapport entre les lézards et les poissons , dont plusieurs espèces ont de même plusieurs dents placées dans le fond de la gueule. La couleur de ce lézard est très-foncée ; elle prend une teinte bleuâtre sur le ventre, et présente des taches jaunes assez gran- des, irrégulières, et qui s’étendent sur tout ie corps, même sur les pieds et sur les paupières. Quelques-unes de ces taches sont par- semées de petits points noirs, et celles qui sont sur le dos se tou- chent souvent sans interrupüon , et forment deux longues bandes jaunes. La figure de ces taches a fait donner le nom de stellion à la salamandre, ainsi qu'au lézard vert, au véritable stellion , et au geckotte. Au reste, la couleur des salamandres terrestres doit être sujette à varier, et 1l paroît qu'on en trouve dans les bois humides d'Allemagne qui sont touts noires par-dessus et jaunes par-dessous. C'est à cette variété qu’il faut rapporter, ce me sem- ble, la salamandre noire que M. Laurenti a trouvée dans les Alpes, qu'il a regardée comme une espèce distincte, et qui me paroît trop ressembler par sa forme à la salamandre ordinaire pour en être séparée. La queue presque cylindrique paroît divisée en anneaux par des renflemens d’une substance très-molle. La salamandre terrestre n'a point de côtes, non plus que les grenouilles, auxquelles elle ressemble d’ailleurs par la forme gé- mérale de la partie antérieure du corps. Lorsqu'on la touche, elle se couvre promptement de cette espèce d’enduit dont nous avons parlé; et elle peut également faire passer très-rapidement sa peau de cet état humide à celui de sécheresse. Le lait qui sort par Îes petits trous que l'on voit sur sa surface est très-âcre; lorsqu'on en a mis sur la langue, on croit sentir une sorte de cicatrice à Vendroit où il a touché. Ce lait, qui est regardé comme un excel- lent dépilatoire, ressemble un peu à celui qui découle des plant DE LA SALAMANDRE TERRESTRE. 224 appelées #thyrmnales et des euphorbes. Quand on écrase, où seu- lement quand on presse la salamandre, elle répand d’ailleurs une mauvaise odeur qui lui est particulière. Les salamandres terrestres aiment les lieux hnmides et froids, les ombres épaisses , les bois touffus des hautes montagnes, les bords des fontaines qui coulent dans les près; ellesse retirent quel- quefois en grand nombre dans les creux des arbres, dans les haies, au-dessous des vieilles souches pourries; et elles passent l'hiver des contrées trop élevées en latitude dans des espèces de terriers où on les trouve rassemblées, et entortillées plusieurs ensemble. La salamandre étant dépourvue d'ongles, n'ayant que quatre doigts aux pieds de devant, et aucun avantage de conformation ne remplaçant ce qui lui manque , ses mœurs doivent être et sont en effet très-différentes de celles de la plupart des lézards. Elle est très-lente dans sa marche : bien loin de pouvoir grimper avec vitessesur les arbres , elle paroîtleplussouventsetrainer avec peine à la surface de la terre. Elle ne s'éloigne que peu des abris qu’elle a choisis; elle passe sa vie sous terre, souvent au pied des vieilles murailles. Pendant l'été, elle craint l’ardeur du soleil, qui la des- sécheroît , et ce n’est ordinairement que, lorsque la pluie ést prête à tomber, qu’elle sort de son asile secret, comme par une sorte de besoin de se baigner et de s’imbiber d’un élément qui lui est analogue. Peut-être aussi trouve-t-elle alors avec plus de facilité les insectes dont elle se nourrit. Elle vit de mouches, de scarabées, de Hmaçons et de vers de terre. Lorsqu'elle est en repos, elle se re- plie souvent sur elle-même comme les serpens. Elle peut rester quelque temps dans l’eau sans y périr; elle s'y dépouille d’une pellicule mince d’un cendré verdätre. On a même conservé des salamandres, pendant-plus de six mois, dans de l’eau de puits 3 on ne leur donnoit aucune nourriture; on avoit seulement le soin de changer souvent l’eau. On observe que toutes les fois qu'on plonge une salamandre terrestre dans l’eau, elle s'efforce d'élever ses narines au-dessus de la surface, comme si elle cherchoit l'air de l'atmosphère; ce qut est une nouvelle preuve du besoin qu'ont tous les quadrupèdes ovipares de respirer pendant tout le temps où ils ne sont pomt engourdis *. La salamandre terrestre n’a point d'oreilles appa- ar DE) OS ARCS SARA içi LS * Voyez le Discours sur la nature des quedrupèdes ovipares. 250 HISTOIRE NATURELLE rentes ; eten ceci elle ressemble aux serpens. On a prétendu qu’elle n'entendoit point; et c'est ce qui lui a fait donner le nom de sourd dans certaines provinces de France : on pourroit le présu- mer, parce qu'on ne lui a jamais entendu jeter aucun cri, et qu’en général le silence est lié avec la surdité. Ayant donc peut-être un sens de moins, et privée de la faculté decommuniquer ses sensations aux animaux de son espèce, même pas des $ons imparfaits, elle doit être réduite à un bien moindre degré d’instinct : aussi est-elle stupide, et non pas courageuse, comme on l'a écrit. Elle ne brave pas le danger, ainsi qu'on l'a prétendu ; mais elle ne l’aperçoit point : quelques gestes qu'on fasse pour l’éffrayer , elle s’'avance toujours sans se délourner de sa route. Cependant; comme aucun animal n’est privé du senti- ment nécessaire à sa conservalion , elle comprime, dit-on, rapi- dement sa peau lorsqu'on la tourmente , et fait rejaillir contre ceux qui l’attaquent, le lait âcre que cette peau recouvre. Si on la frappe, elle commence par dresser sa queue; elle devient ensuite immobile , comme si elle étoit saisie par une sorte de paralysie : car il ne faut pas, avec quelques naturalistes, attribuer à un ani- mal si dénué d’instinct assez de finesse et de ruse pour contrefaire la morte, ainsi qu'ils l'ont écrit. Au reste, 1l est difficile de la tuer; elle est très-vivace : mais trempée dans du vinaigre, ou entourée de sel en poudre, elle périt bientôt dans des convulsions, ainsi que plusieurs autres lézards et les vers. 11 semble que l'on ne peut accorder à un être une qualité chi- mérique sans lui refuser en même temps une propriété réelle. On a regardé la froide salamandre comme un animal doué du pou- voir miraculeux de résister aux flammes, et même de les étein- dre : mais en même semps ou l’a rabaissée autant qu'on l'avoit élevée par ce privilége unique. On en a fait le plus funeste des animaux. Les anciens, et même Pline, l’ont dévouée à une sorte d’anathème, en la considérant comme celui dont le poison éloit le plus dangereux : ils ont écrit qu’en infectant de son venin pres- que lous les végétaux d’une vaste contrée, elle pouvoit donner. la mort à des nations entières. Les modernes ont aussi cru pen- dant long-temps au poison de la salamandre; on a dit que sa mor- sure éloit mortelle, comme celle de la vipère: on a cherché et prescrit des remèdes contre son venin : mais enfin on a en recours aux observations, par lesquelles on auroit dû commencer. Le fa- meux Bacon avoit voulu engager les physiciens à s'assurer de DE LA SALAMANDRE TERRESTRE. 231 l'existence du venin de la salamandre; Gesner prouva , par lex- périence , qu’elle ne mordoit point, de quelque manière qu’on cherchât à l'irriter; et Wurfbainius fit voir qu'on pouvoit im- punément la toucher . ainsi que boire de l'eau des fontaines qu'elle habile. M. de Maupertuis s’est aussi occupé de ce lézard : en re- cherchant ce que pouvoit être son prétendu poison , il a démon- tré, par l'expérience, l'action des flammes sur la salamandre, comme sur les autres animaux; il a remarqué qu’à peine elle est sur le feu, qu'elle paroit couv-rte de gouttes de son lait , qui , ra- réfié par la chaleur, s'échappe par tous les pores de la peau , sort en plus grande quartité sur la tête, ainsi que sur les mamelons, et se durcit sur-le-champ. Mais on n’a certainement pas besoin de dire que ce lait n’est jamais assez abondant pour éteindre le moindre feu. M. de Manpertuis , dans le cours de ses expériences, irrita en vain plusieurs salamandres : jamais aucune n’ouvrit la bouche, ii fallut la leur ouvrir par force. Comme les dents de ces lézards sont très-petites , on eut beau- coup de peine à trouver un animal dont la peau fût assez fine pour être entamée par ces dents. Il essaya inutilement de les faire pénétrer dans la chair d’un poulet déplumé; il pressa en vain Îles dents contre la peau : elles se dérangirent plutôt que de l'ent- mer Il parvint enfin à faire mordre par une salamandre la cuisse d’un poulet dont ilavoit enlevé la peau. Il fit mordre aussi par des salimiandres récemment prises la langue et les lèvres d’un chien, ainsi que la langue d’un coq d'Inde : aucun de ces animaux n'é- prouva le moindre accident. M. de Maupertuis fil avaler ensuite des salamandres entières on coupées par morceaux à un coq d'Inde et à un chien, qui ne parurent pas en souffrir. M. Laurent a fait depuis des expériences dans les mêmes vues : il a forcé des lézards gris à mordre des salamandres, et il leur en a fail avaler du lait ; les lézards sont morts très-promptement. Le lait de la salamanc dé pris intérieurement pourroit donc être fui- neste et même mortel à certains animaux, surtout aux plus pe- tits; mais il ne paroit pas nuisible aux grands Animaux. On a cru pendant long -temps que les salamandres n'avoient point de sexe , et que chaque individu étoit en état d’engendrer seul son Due ble, comme dans En best espèces de vers. Ge n'est pas la fable la plus absurde qu’on ait imagince au sujet des salamaricdres. Mais si la manière dont elles viennent à la lumière 332 HISTOIRE NATURELLE n'est pas aussi merveilleuse qu’on la écrit, elle est remarquable en ce qu'elle diffère de celle dont naissent presque tous les autres lézards, et en ce qu’elle est analogue à celle dont voient le jour les seps ou chalcides , ainsi que les vipères et plusieurs espèces de serpens. La salamandre mérité par là l'attention des naturalistes, bien plus que par la fausse et brillante réputation dont elle a jouisi long -temps. M. de Maupertuis, ayant ouvert quelques salaman- dres, y trouva des œufs, et en même temps des petils tout for- més : les œufs étoient divisés en deux grappes allongées, et les pelits étoient renfermés dans deux espèces de tuyaux transparens; ils étoient aussi bien conformés et bien plus agiles que les sala- mandres adultes. La salamandre met donc bas des petits venus d’un œuf éclos dans son ventre, ainsi que ceux des vipères. Mais d’ailleurs on a écrit qu’elle pond. comme les salamandres aqua- tiques, des œufs elliptiques d’où sortent de petiles salamandres sous la forme de tétard. Nous avons souvent vérifié le premier fait, qui d’ailleurs est bien connu depuis long-temps : mais nous n'avons pas été à même de vérifier le second. Il serortintéressant de constater que le même quadrnpède produitses petits, en quelque sorte de deux manières différentes; qu’il y a des œufs que la mère pond ; et d’autres dont le fœius sort dars le ventre de la salamandre, pour demeurer ensuite renfermé avec plusieurs autres fœtus dans une espèce de membrane transparente, jusqu’au moment où il vient à la lumière Si cela étoit , on devroït disséquer des salamandres à différentes époques très-rapprochées , depuis le moment où elles s’'accouplent jusqu’à celui où elles mettent bas leurs petits; l'on suivroit avec soin l’accroissement successif de ces pelits venus à la lumière tout formés; on le compareroit avec le développement de ceux qui sortiroient de l'œuf hors du ventre de leur mère, etc. Quoi qu'il en soit, la salamardre femelle met bas des petits tout formés , et sa fécondité est lrès-grande : les naturalistes ont écrit depuis long -temps qu’elle faisoit quarante ou cinquante petits; et M. de Maupertuis a trouvé quarante-deux petites salamandres dans le corps d’une femelle, et cinquante-quatre dans une autre. Les petites salamandres sont souvent d’une couleur noire; pres- que sans taches, qu’elles conservent quelquelois peudant toute leur vie, dans certaines contrées où on les a prises alors pour une espèce particulière, ainst que nous l'avons dit. M. Thunberg a donné, dans les Mémoires de l Académie de Suède, la description d’un lézard qu’il nomme lézard du Japon, DE LA SALAMANDRE TERRESTRE. 233 et qui ne paroît différer de notre salamandre terrestre que’ par l'arrangement de ses couleurs. Cet animal est presque noir, avec plusieurs taches blanchätres et irrégulières , tant au-dessus du corps qu'’au-dessus des pattes. Le dos présente une bande d’un blanc sale, divisée en deux vers la tête, et qui s'étend ensuite irrégulièrement et en se rétrécissant jusqu’à l’extrémité de la queue. Cette bande blanchätre est semée de très-petits points, ce qui forme un des caractères distinctifs de notre salamandre ter- restre. Nous croyons donc devoir considérer le lézard du Japon décrit par M. Thunberg comme une variété constante de notre salamandre terrestre, dont l'espèce aura pu être modifiée par le climat du Japon. Cest dans la plus grande île de cet empire nom- mée Niphon que l’on trouve cette variété : elle y habite dans les montagnes et dans les endroits pierreux; ce'qui indique que ses habitudes sont semblables à celles de la salamandre terrestre, et confirme notre conjecture an sujet de l'identité d’espèce de ces deux animaux. Les Japonais lui attribuent les mêmes propriétés que celles dont on a cru pendant long-temps que le scinque étoit doué , ainsi qu’on les à attribuées en Europe à la salamandre à queue plate ; ils la regardent comme un puissant stimulant et un remède très-actif : aussi trouve-t-on aux environs de Jédo un grand nombre de ces salamandres du Japon , séchées et suspen- dues aux planchers des boutiques. ADDITION A L'ARTICLE DE LA SALAMANDRE TERRESTRE. Novs plaçons ici un extrait d’une lettre qui nous a été adressée par dom Saint-Julien, Bénédictin de la congrégation de Cluni. On y trouvera des observations intéressantes relativement à la manière dont les salamandres terrestres viennent au jonr. « Je trouvai à la fin du printemps de l’année dernière 1787 «une superbe salamandre terrestre ( de l'espèce appelée scorpion « dans la Basse-Guienne, et qu'on y confond même quelquefois « avec cet msecte )..... Ælle avoit ün peu plus de huit pouces « depuis le bout du museau jusqu'à l'extrémité de la queue. La 23% HISTOIRE NATURELLE € « € grosseur de son ventre me fil espérer de trouver quelque éclair2 cissement sur la génération de ce reptile ; en conséquence, je procédai à sa disseclion , que je commençai par l'anus. Dès que j'eus fait une ouverture d'environ un demi-pouce, je vis sortir une espèce de sac, que je pris d’abord pour un boyau : mais j'aperçus bientôt un mouvement irès sensible dans l’intérieur: je vis même, à travers la membrane fort mince, de petits corps “touvans ; je ne doutai point alors que ee ne fût des êtres ani- més , en un mot les petits de l'animal. Je conlinuai à faire sortir cette poche, jusqu’à ce que je trouvai un étranglement : « alors j'ouvris la membrane dans le sens de sa longueur ; je la trouvai pleine d’une espèce de sanie dans laquelle Les petits éloient pliés en double, précisément dans la forme que M. l'abbé « Spallanzani aitribue aux petits de la salainandre aquatique lorsqu'ils sont encore renlermés dans l’amnios. Bientôt cette « sanie se répandit ; les petits s'allongèrent, sautèrent sur la table « et parurent animés d’un mouvement très-vif. Ils étoient aw nombre de sept ou huit Je les examinai à la vue simple , et « un avec le secours de la loupe ; et je leur reconnus très-bien & la forme de petits poissons avec deux sortes de nageoires assez longues du côté de la tête ni étoit grosse par rapport au »s q 5 } PP “corps, et dont les yeux , qui paroïssoient lres-v:fS, étoient très- saillans ; il n’y avoit rien à la place des pieds de derrière, Comme la mère avoit élé prise dans l’eau et paroissait très- proche de son terme, je pensai que l’eau étoit lelément, qui convenoit à ces nouveau-nés; ce qui d'ailleurs se trouvoit confirmé par leur état pisciforme : c'est pourquoi je me pressai de les faire tomber dans une jatte pleine d’eau , où ils nagè- rent irès-bien. J'agrandis encore l'ouverture de la mère, et je fs soriir une seconde et puis une troisième poches semblables à la première, et séparées par des étranglemens. Ces poches ouvertes me donnerent des êtres semblables aux premiers et à peu près aussi bien formés : ils s'y trouvoient renfermés par huit ou dix en pelotons, sans aucune séparation ou dia- phragme , au moins sensible. Une quatrième poche pareille me donna des êtres de la même nature, mais moins formés ; ils étoient presque tous chargés sur le côté droit, vers le milieu ‘.du corps , d’une espèce de tumeur ou protubérance d’un jaune « foncé paroissant un peu sanguinolent : ils avoient néanmoins leurs mouvemens libres, pas assez pour sauter d'eux-mêmes ; DÉ LA SALAMANDRE À QUEUE PLATE. 235 « il fallut les retirer de leurs bourses avec des pinces. Enfin une « cinquième poche pareille me fournit des êtres semblables, dont « 1l ne paroïssoit que la moitié du corps depuis le milieu jus- « qu’au bout de la queue ; l’autre partie consistoit seulement en « un segment de cette matière jaune dont je viens de parler : la « partie formée avoit un mouvement sensible. Je retirai ainsi « vingt-huit ou trente petits tout formés qui nagèrent dans « l’eau , et qui vécurent dans mon appartement pendant vingt- « quatre heures. Les avortons informes se précipitèrent au fond, « et ne donnérent plus aucun signe de vie. La mère vivoit en- « core après que j'en eus tiré tous ses petits, formés ou imformes. « J'achevai de l'ouvrir, et à la suite de cette espèce de matrice « qui paroissoit n'être qu’un boyau étranglé de distance en dis- « tance, je trouvai deux grappes d'œufs de forme sensiblement « sphérique , d'environ une ligne de diamètre, et d’une matière « semblable à celle que j'avois vue adhérente aux deux difie- « rentes espèces d’avortons. Je ne comptai pas le nombre de ces « œufs ; mais j'appelle leurs collections grappes , parce que réel- « lement elles représentoient une grappe de raisin. Leur tige « éloit attachée à l’épine dorsale, derrière une bourse flottante « siluée un peu au-dessous du bras, de couleur brune foncée : « je reconnus cette bourse pour lestomac du reptile, parce que « l'ayant ouverte, j'y trouvai de petits limaçons , quelques sca- « rabées , et du sable noirâtre. » AV AV AA LV MA MA AAA AAAAA VU MAY UV UV VU VU UV UMA VUE VULUUV AS MAMA VAS LA SALAMANDRE A QUEUE PLATE *. Cr lézard , ainsi que la salamandre terrestre, peut vivre égale- ment sur la terre et dans l’eau : mais il préfère ce dernier élé- ment pour son habitation, au lieu qu'on rencontre presque toujours la salamandre terrestre dans des trous de muraille, ou dans de petites cavités souterraines ; et de là vient qu’on a donné à la salamandre à queue plate le nom de sa/amandre aquatique , et que M. Linné l’a appelée lézard des marais. Elle ressemble à 1 Tassot, en vieux francais; marasandolz, en italien; ask, en Ecosse, 236 HISTOIRE NATURELLE la salamandre dont nous venons de parler, en ce qu’elle a le corps dépourvu d'écailles sensibles, ainsi que les doigts dégarnis d'ongles , et qu’on ne compte que quatre doigts à ses pieds de devant : mais elle en diffère surtout par la forme de sa queue. Elle varie beaucoup par ses couleurs , suivant l’âge et le sexe. II paroît d’ailleurs qu'on doit admettre dans cette espèce de sala- mandre à queue plate plusieurs variétés plus ou moins cons- tantes, qui ne sont distinguées que par la grandeur et par les couleurs , et qui doivent dépendre de la différence des pays, ou même seulement de la nourriture : mais nous ne croyons pas devoir compter, avec M. Dufay, irois espèces de salamandre à queue plate; et si on lit avec attention son mémoire, on se con- vaincra sans peine, d'après tout ce que nous avons dit dans cette histoire, que les différences qu’il rapporte pour établir des di- versités d'espèces constituent tout au plus des variétés cons- tantes. Les plus grandes salamandres à quete plate n’excèdent guère la longueur de six à sept pouces. La tête est aplatie ; la Hingue large et courte ; la peau est dure, et répand une espèce de lait quand on la blesse. Le corps est couvert de irès-petites verrues saillantes et blanchâtres : la couleur générale, plus où moins brune sur le dos, s’éclaircit sous le ventre, et y devient d’un jaune tirant sur le blanc. Elle présente de petites taches , souvent rondes , foncées , ordimairement plus brunes dans le mâle, bleuâ- tres et diversement placées dans certaines variétés. Ce qui distingue principalement ie mäle, c’est une sorle de crête membraneuse et découpée, qui s'étend le long du dos, de- puis le milieu de la tète jusqu'à l'extrémité de la queue, sur la- quelle ordinairement les découpures s’effacent , ou deviennent moins sensibles. Le dessous de la queue est aussi garni dans toute sa longueur d’une membrane en forme de bande, placée verti- calement, qui a une blancheur éclatante , et qui fait paroitre _ plate la queue de la salamandre *. La femelle n’a pas de crête sur le dos, où l’on voit au contraire un enfoncement qtu s'étend depuis la tête jusqu’à l'origine de la queue. Cependant, lorsqu'elle est maigre, l’épine du dos forme quelquefois une petile éminence ; elle a sur le bord supérieur “ * Cette description a été faite d’après plusieurs individus conservés au Cabinet . du Roi. Tome 1. 10 Page 236. L — 7 7 = Lrétre pre. Ple pere Je 1.La Salamandre terrestre... Page 226. =} ts .La Salamandre à queue plate PO Go) SR ÉCOS- dise EME LT, 247. 7 DE LA SALAMANDRE A QUEUE PLATE. 247 de la queue une sorte de crête membraneuse et entière, et le bord inférieur de cette même queue est garni de la bande très-blanche qu’on remarque dans le mâle. En général, les couleurs sont plus pâles et plus égales dans la femelle ; elles sont aussi moins fon- cées dans les jeunes salamandres. La salamandre à queue plate aime les eaux limoneuses, où elle se plaît à se cacher sous les pierres ; on la trouve dans les vieux fossés , dans les marais, dans les étangs ; on ne la rencontre pres- que jamais dans les eaux courantes : l'hiver, elle se retire quel- quefois dans les souterrains humides, Lorsqu'elle va à terre, elle ne marche qu'avec peine et très- lentement. Quelquefois, lorsqu'elle vient respirer au bord de l'eau , elle fait entendre un petit sifflement. Elie perd difficile- ment la vie ; et comme elle n'est ni aussi sourde ni aussi silen- cieuse que la salamandre terrestre, elle doit, à certains égards, avoir l'instinct moins borné. Le conte ridicule qu’on a répété pendant tant de temps sur la salamandre terrestre, n’a pas été étendu jusqu’à la salamandre à queue plate. Mais, au lieu de lui attribuer le pouvoir fabuleux de vivre au milieu des flammes, on a reconnu dans cette sala- mandre une propriété réelle et opposée : elle*peut vivre assez long-temps, non-seulement dans une eau trés-froide , mais même au milieu de la glace. Elle est quelquefois saisie par les glaçons qui se forment dans les fossés, dans les étangs qu'elle habite : lors- que ces glaçons se fondent, elle sort de son engourdissement en même temps que sa prison se dissout , et elle reprend tous ses” mouvemens avec sa liberté. On a même trouvé, pendant l'été, des salamandres aquati- ques renfermées dans des morceaux de glace tirés des glacières, et où elles devoient avoir été sans mouvement et sans noutrri- ture depuis le moment où on avoit ramassé l’eau gelée dans les marais pour en remplir ces mêmes glacières. Ce phénomène, en apparence très-surprenant, n’est qu’une suite des propriétés que nous avons reconnues dans tous les lézards et dans tous les qua- drupèdes ovipares * La salamandre ne mord point, à moins qu'on ne lui fasse ou- vrir la bouche par force ; et ses dents sont presque impercepti- bles. Elle se nourrit de mouches, de divers insectes qu'elle peut 1 Voyez le Discours sur la nature des quadrupèdes ovipares. 238 HISTOIRE NATURELLE trouver à la surface de l'eau, du frai des grenouilles , etc. Elle est aussi herbivore ; car elle mange des lenlicules ou lentilles d'eau, qui flottent sur la surface des étangs qu’elle habite. Un des faits qui méritent le plus d’être rapportés dans l'luis- toire de la salamandre à queue plate , est la manière dont ses pe- tits se développent. Elle n’est point vivipare, comme la terrestre. Elle pond , dans le mois d'avril ou de mai, des œufs, qui, dans certaines variétés, sont ordinairement au nombre de vingt , for- ment deux cordons, et sont joints ensemble par une matière vis- queuse, dont ils sont également revêtus lorsqu'ils sont détachés les uns des autres. Ils se chargent de cette matière gluante dans deux canaux blancs et très-plissés , qui s'étendent depuis les pattes de devant jusque vers l’origine de Ïa queue , un de chaqne côté de l’épine du dos, et dans lesquels ils entrent en sortant des deux ovaires. On aperçoit, attachés aux parois de ces ovaires, une multitude de très-petits œufs jaunâtres : ils grossissent insensi- blement à l'approche du printemps, et ceux qui sont parvenus à leur maturité dans la saison des amours, descendent dans les tuyaux blancs et plissés dont nous venons de parler, et où ils doivent être fécondés. Lorsqu'ils sont pondus, ils tombent au fond de l’eau , d’où ils se relèvent quelquefois jusqu’à la surface des marais, parce qu'il se forme dans la matière visqueuse qui les entoure des bulles d'air qui les rendent très-légers; mais ces bulles se dissipent, et ils retombent sur la vase. À mesure qu'ils grossissent , l’on distingue au travers de la ma- tière visqueuse , et de la membrane transparente qui en est en- duite, la petite salamandre repliée dans la liqueur que contient cette membrane. Cetembryon s’y développe insensiblement ; bien- 1ôt il s'y meut, et s’y retourne avec une très-grande agilité ; et enfin au bout de huit ou dix jours, suivant la chaleur du climat et celle de la saison , il déchire par de petits coups réitérés la mem- brane, qui est, pour ainsi dire, la coque de son œuf *. Lorsque la jeune salamandre aquatique vient d’éclore, elle a, ainsi que les grenouilles, un peu de conformité avec les poissons. Pendant que ses pattes sont encore très-courtes , on voit de chaque et Li x C'est une membrane que M. l’abbé Spallanzani a appelée l’amnios de Ia jeune salamandre, ce grand observateur ne voulant pas regarder les salamandres aquatiques comme venant d'un véritable œuf. DE LA SALAMANDRE À QUEUE PLATE. 239 côlé, un peu au-dessus. de ses pieds de devant, deux petites houppes frangées, qui se tiennent droites dans l’eau , qu'on a comparées à de petites nageoires , et qui ressemblent assez à une plume garnie de barbes. Ces houppes tiennent à des espèces de demi-anneaux cartilagineux et dentelés, au nombre de quatre de chaque côté , et qui sont analogues à l'organe des poissons que l’on a appelé owes. Ils communiquent tous à la même cavité; ils sont séparés les uns des autres ;'et recouverts de chaque côté par un panneau qui laisse passer les houppes frangées. À mesure que l'animal grandit, ces espèces d’aigrettes diminuent et disparois- sent ; les panneaux s'attachent à la peau sans laisser d'ouverture; les demi-anneaux se réunissent par une membrane cartilagi- ñeuse ; et la salamandre perd l'organe particulier qu’elle avoit étant jeune. Il paroït qu'elle s'en sert, comme les poissons des ouies pour filtrer l'air que l'eau peut contenir, puisque, quand et par conséquent qu'elle y en refasse une nouvelle pendant cette saison xigoureuse, pour qu'on doive dire que la plupart des salaman- dres à queue plate ne s’engourdissent pas toujours pendant les grands froids de nos climats, et que, par une suite de ja tem- pérature un peu plus douce qu’elles peuvent trouver auprès des fontaines , et dans les différens abris qu’elles choisissent, il leur reste assez de mouvement intérieur, et de chaleur dans le sang, pour réparer par de nouvelles productions la perte des anciennes. L'on ne doit pas être étonné que cette reproduction de la peau des salamandres à queue plate ait lieu si fréquemment. L'élément qu'elles habitent ne doit-1l pas en eflet ramollir leur peau, et contribuer à l’altérer ? M. Dufay dit, dans le Mémoire dont nous avons déjà parlé, que quelquefois les salamandres aquatiques ne pouvant pas dé- pouiller entièrement une de leurs paties, la portion de peau qui y reste se corrompt, et pourrit la patte, qui tombe en entier, sans que l'animal en meure. Elles sont très-sujettes, suivant lui, à perdre ainsi quelques-uns de leurs doigts; et ces accidens arri- vent plus souvent aux pattes de devant qu'à celles de derrière. L’accouplement des salamandres aquatiques ne se fait point ainsi que celui des tortues et du plus grand nombre de lézards : il a lieu sans aucune intromission , comme celui des grenouilles : la liqueur prolifique parvient cependant jusquesaux canaux dans lesquels entrent les œufs en sortant des ovaires de la femelle, de même qu’elle y pénètre dans les lézards. Les salamandres à queue plate réunissent donc les lézards et les grenouilles par la manière dont elles se multiplient, ainsi que par leurs autres habitudes et leur conformation. Il arrive souvent que cet accouplement des salamandres à queue plate est précédé par une poursuite, répétée plusieurs fois, et mêlée à une sorte de jeu. On diroit alors qu'elles tendent à augmenter les plaisirs de la jouissance par ceux de la recherche, et qu’elles connoissent la volupté des désirs. Elles pré- ludent par de légères caresses à une union plus intime; elles semblent s'éviter d’abord , pour avoir plus de plaisir à se rap- Lacepède. 1. 16 242 HISTOIRE NATURELLE procher ; et lorsque, dans les beaux jours du printemps, la Na- ture allume le feu de l’amour , même au milieu des eaux , et que les êtres les plus froids ne peuvent se garantir de sa flamme, on voit quelquefois , sur la vase couverte d’eau qui borde les étangs, le mâle de la salamandre, pénétré de l'ardeur vivifiante de la sai- son nouvelle , chercher avec empressement sa femelle , jouer, courir avec elle, tantôt la poursuivre avec amour, tantôt la pré- céder, et lui fermer ensuite le passage, redresser sa crête, cour- ber son corps, relever son dos, et former ainsi une espèce d’ar- carde , sous laquelle la femelle passe en courant, comme pour lui échapper. Le mâlela poursuit; elle s'arrête : 1l la regarde fixement ; il s'approche de très-pres; il reprend la même posture ; la femelle repasse sous l'espèce d'arcade qu’il forme, s'enfuit de nouveau pour s'arrêter encore. Ces jeux amoureux , plusieurs fois répétés, se changent enfin en étroites caresses. La femelle, comme lassée d'échapper si souvent , s'arrête pour ne plus s'enfuir ; le mâle se place à côté d’elle, approche sa tête , et éloigne son corps souvent jusqu’à un pouce de distance. Sa crête flotte nonchalamment ; son anus est Lrès- ouvert; il frappe de temps en temps sa compagne de sa queue ; il se renverse même sur elle : mais, reprenant sa première position , c’est alors que, malgré la petite distance qui les sépare, il lance la liqueur prolifique;’et les vues de la Na- ture sont remplies, sans qu'il ÿ ait entre eux aucune union in- time et immédiate. Cette liqueur active atteint la femelle, qui devient immobile, et elle donne à l’eau une légère couleur bleuâ- tre. Bientôt le mâle se réveille d’une espèce d’engourdissement dans lequel il étoit tombé; il recommence ses caresses, lance une nouvelle liqueur , achève de féconder sa femelle , et se sépare d'elle. Mais, loin de l'abandonner, il s'en rapproche souvent, jusqu’à ce que tous les œufs contenus dans les ovaires et parvenus à l’é- tat de grosseur convenable soient entrés dans les canaux, où ils se chargent d’une humeur visqueuse , et qu'ils aient pu être tous fécondés Ge temps d'amour et de jouissances dure plus où moins, suivant la température , et quelquefois il est de trente jours. Matthiole dit que, de son temps, on employoit dans les phar- macies les salamandres aquatiques à la place des scinques d’'E- gypte, mais qu’elles ne devoient pas produire les mêmes eflets. Les salamandres aquatiques , jetées sur du sel en poudre, y périssent , comme les salamandres terrestres : elles expriment de DE LA SALAMANDRE A QUEUE PLATE. 245 toutes les parties de leur corps le suc laiteux dont nous avone parlé; elles tombent dans des convulsions, se roulent, et expirent au bout de trois minutes. Îl paroit, d’après les expériences de M. Laurenti , qu’elles ne sont point venimeuses, comme l'ont dit les anciens, et qu'elles ne sont dangereuses , ainsi que la sala- mandre terrestre , que pour les petits lézards. Les viscères de la salamandre aquatique ont été fort bien dé- crits par M. Dufay. Elle habite dans presque toutes les contrées, non-senlement de l'Asie et de l'Afrique, mais encore du nouveau continent. Elle ne craint même pas la température des pays septentrionaux, pusqu'on la rencontre en Suède, où son séjour au milieu des eaux doit la garantir des effets d'un froid excessif. On auroit donc pu lui donner le nom de lézard commun, ainsi qu’on l’a donné au lézard gris, et à un autre lézard désigné sous le nom de /ézard our. gaire par M. Linné, et qui ne nous paroït être tout au plus qu'une variété de la salamandre à queue plate. Mais ce lézard que M. Lin- né a nommé lézard vulsaire, n’est pas le seul que nous croyons devoir rapporter à la queue plate : le lézard aquatique, du même naturaliste, nous paroît être aussi de la même espèce. En effet : tous les caractères qu'il attribue à ces deux lézards se retrouvent dans les variétés de la salamandre à queue plate tant mâle que femelle , ainsi que nous nous en sommes assurés en examinant les divers individus conservés au Cabinet du Roi. On pourroit dire seulement que l'expression de cylindrique (feres et teretius- cula) que M. Linné emploie pour désigner la queue du Æzard vulgaire et celle du lézard aquatique, ne peut pas convenir à celle de la sa/amandre à queue plate. Mais il est aisé de répondre à cette objection. 1°. 1] paroît que M. Linné n’avoit pas vu le /zard aquatique , et Gronovius, qu'il cite relativement à ce lézard ,; dit que cet animal est presque entièrement semblabfe à celui que nous nommons queue plate ; 1l ajoute que la queue est un peu épaisse et presque carrée. 2°. La figure de Seba citée par M. Linné représente évidemment la queue plate. D'ailleurs il ÿ a plusieurs individus femelles dans l’éspèce qui fait le sujet de cet article dont la queue paroît ronde, parce que les membranes qui la garn issent | par-dessus et par-dessous sont très-peu sensibles. Plusieurs -mâles : lorsqu'ils sont très-jeunes , manquent presque absolument de ces membranes , et leur queue est comme cyhndrique. A l'égard de la queue du lézard vulgaire, M. Linné ne renvoie qu'à Ray, qui, 244 HISTOIRE NATURELLE à la vérité, distingue aussi ce lézard d'avec notre salamanäre , mais dont cependant le texte convient entièrement à cette der- nière. Nous devons ajonter que toutes les habitudes attribuées à ces deux prétendues espèces de lézards sont celles de notre s1lamandre à queue plate. Tout concourt donc à prouver qu’elles n’en sont que des variétés ; et ce qui achève de le montrer , c'est que Gronovius lui-même a trouvé une grande ressemblance entre notre salamandre et le lézard aquatique, et qu’enfin l'article et la figure de Gesner , que M, Linné a rapportés à ce prétendu lézard aquatique , ne peuvent convenir qu’à notre salamandre femelle. Cest donc la femelle de notre salamandre à queue plate, gui, très-différente en effet du mâle, ainsi que nous l'avons vu, aura été nommée Zézard aquatique par M. Linné et regardée comme une espèce distincte par ce grand naturaliste, ainsi que par Gronovius. Quelques différences dans les couleurs de cette femelle auront même fait croire à quelques naturalistes, et par- ticulièrement à Petivers, qu'ils avoient reconnu le mâle et la femelle; ce qui aura confirmé l'erreur. Quelque autre variété dans ces mêmes couleurs , ou dans la taille , aura fait établir une troisième espèce sous le nom de lézard vulgaire. Mais ce lézard vulgaire et ce lézard aquatique ne sont que la même espèce, ainsi que M. Linné lui-même l'avoit soupçonné, puisqu'il se demande ei le dernier de ces animaux n’est pas le premier dans son jeune âge ; et ces deux lézards ne sont que la femelle de notre sala- mandre , ce qui est mis hors de doute par les descriptions aux- quelles M. Linné renvoie, ainsi que par les figures qu'il cite , et surtout par celles de Seba et de Gesner. Au reste, nous n'a- vons adopté l'opinion que nousexposons ici qu'après avoir exa- minéun grand nombrede salamandres à queue plate, et comparé plusieurs variétés de cette espèce. C'est peut-être à la salamandre à queue plate qu'appartient l'animalaquatique connu en Amérique, et particulièrement dans la Nouvelle-Espagne, sous le nom mexicain d’axolotl, et sous le nom espagnol d’inguele de agua. {la été pris pour un poisson, quoiqu'il ait quatre pattes; mais nous avons vu que le scinque avoit élé regardé aussi comme un poisson , parce qu'il habite les eaux. L’axolotl a, dit-on , la peau fort unie, parsemée sous le ventre de petites taches, dont la grandeur diminue depuis le milieu du corps jusqu'à la queue, Sa longueur et sa grosseur sont DE LA QUATRE-RAIES. 245 2 peu prés celles de la salamandre à queue plate : ses pieds sont divisésen quatre doigts comme dans les grenouilles ; ce qui peut faire présumer que le cinquième doigt ne manque qu'aux pieds de devant, ainsi que dans ces mêmes grenouilles et dans la plu- part des salamandres. Il a la tête grosse en proportion du corps, fa gueule noire et presque toujours ouverte. On a débilé un conte ridicule au sujet de ce lézard. On a prétendu que la fe- melle étoit sujette , comme les femmes, à un écoulement pério- dique. Cette erreur pourroit venir de ce qu’on Fa confondu avec les salamandres terrestres qui mettent bas des petits tout formés. Et peut-être même appartient-1l aux salamandres terrestres plutôt qu'aux aquatiques. An reste, on dit que sa chair est bonne à manger, et d’un gout qui approche de celui de l'an- guille. Si cela étoit, il devroit former une espèce particulière , ou plutôt on pourroit croire qu'on n’auroit vu à la place de ce prétendu lézard qu’une grenouille qui n’étoit pas encore déve- loppée et qui avoit sa queue de têtard. Cest à l'observation à éclaircir ces doutes. RAMAAMAANAAANAN AAA AAA UV AAA A AU AA RAA A AAA A RAA AA AAA ES LA PONCTUÉE. Ox trouve dans la Caroline une Salamandre que nous appe- lons la ponctuée, à cause de denx rangées de points blancs qui varient la couleur sombre de son dos, et qui se réunissent en un seul rang.Ce lézard n’a que quatre doigtsaux pieds de devant ; tous ses doigts sont sans ongles, et sa queue est cylindrique. AAAVAAAANANAANAAAANAIAAA AAA AAA AU VU UV AAA A VER AM SS LA QUATRE-RAIES. ne M M : O N rencontre dans l'Amérique septentrionale une salamandre dontle dessus du corps présente quatre lignes jaunes. L’algire a également quatre lignes jaunes sur le dos; mais on ne peut 246 HISTOIRE NATURELLE pas les confondre , parce que ce dernier a cinq doigis aux pieds de devant , et que la quatrezraies n’en a que quatre. La queue de la quatre-raies est longue et cylindrique : on remarque quel- que apparence d'ongles au bout des doigts. RAA NRA LA EP RAAA AAA BAR VUE AAA VAR AA RAT RURAL AANAAAAAA AAA AAA AA AAA AAA AAA LE SARROUBEÉ. No us devons entierement la connoissance de cette nouvelle espèce de salamandre à M. Bruyères, de la Société royale de Montpellier, qui nous a communiqué la description qu'il en a faite , et ce qu’il a observé touchant cet animal dans l'ile de Ma- dagascar, où il l'a vu vivant, et où on le trouve en grand nombre. Aucun voyageur ni naturaliste n'ont encore fait men- lion de cette salamandre ; elle est d'autant plus remarquable , qu'elle est plus grande que toutes celles que nous venons de dé= crire. Elle a d’ailleurs des écailles très-apparentes; et ses doigts sont garnis d'ongles, au lieu que dans les quatre salamandres dont nous venons de parler, la peau ne présente que des ma- melons à la place d’écailles sensibles, et ce n’est que dans la quatre-raies qu'on aperçoit quelque apparence d'ongles. Nous placons cependant le sarroubé à la suite de ces quatre salaman- dres, attendu qu'il n'a que quatre doigts aux pieds de devant , et qu'il présente par là le caractère distinctif d'après lequel nous avons formé la division dans laquelle ces salamandres sont com- prises. Le sarroubé a ordinairement un pied de longueur totale. Son dos est couvert d’une peau brillante et grenue , qui ressemble au galuchat ; elle est jaune et tigrée de vert ; un double rang d’é- cailles d’un jaune clair garnit le dessus du cou , qui est très-large ; la tête est plate et allongée ; les mâchoires sont grandes , et s’é- tendent jusqu’au -delà des oreilles ; elles sont sans dents, mais crénelées ; la langue est enduite d’une humeur visqueuse , qui retient les petits insectes dont le sarroubé fait sagproie; les yeux sont gros; l'iris est ovale et fendu verticalement; la peau du ventree st couverte de petites écailles rondes et jaunes ; les bouts des doigts sont garnis , de chaque côté , d’une petite membrane, DE LA TROIS-DOIGTS. 27 et par-dessous d’un ongle crochu , placé entre un double rang d’écailles qui se recouvrent comme les ardoises des toits, ainsi que dans le lézard à tête plate , qui vit aussi à Madagascar, et avec lequel le sarroubé a de très--grands rapports. Ces deux derniers lézards se ressemblent encore, en ce qu’ils ont tous les deux la queue plate eLovale: maisils diffèrent l'un de l’autre, en ce que le sarroubé n’a point la membrane frangée qui s'étend tout autour du corps du lézard à tête plate; et d’ailleurs il n’a que quatre doigts aux pieds de devant, ainsi que nous l'avons dit. Le nom de sarroubé qui lui aété donné parles habitansde Ma- dagascar, paroît à M. Bruyères dérivé du mot de leur langue sarrout , qui signifie colère. Ces mêmes habitans redoutent le sarroubé autant que le lézard à la tête plate; mais M. Bruyères pense que c'est un animal très-innocent , et qui n'a aucun moyen de nuire. Il paroît craindre la trop grande chaleur : on le ren- contre plus souvent pendant la pluie que pendant un temps sec, et les nègres de Madagascar dirent à M. Bruyères qu’on le trou- voit en bien plus grand n ombre dans les bois pendant la nuit que pendant le jour. ANA AAA AY LRRAARNAANMMMAY AR AAA AAA AA AA AN AN LA TROIS-DOIGTS. Nos nommons ainsi une nouvelle espèce de salamandre dont aucun auteur n’a encore parlé, et qu'il est très-aisé de distin- guer des autres par plusieurs caractères remarquables. Elle n'est point dépourvue de côtes , ainsi que les autres salamandres; elle n'a que trois doigts aux pieds de devant , et quatre doigts aux pieds de derrière ; sa téte est aplatie et arrondie par-devant ; la queue est déliée, plus longue que la tête et le corps, et l'animal la replie facilement. C'est à M. le comte de Mailly, marquis de Nesle, que nous devons la connoissance de cette nouvelle espèce de salamandre , dont il a trouvé un individu sur le cratère même du Vésuve, environné des laves brülantes que jette ce volcan. C'est une place remarquable pour une salamandre qu'un en- droit entouré de matières ardentes vomies par un volcan; beau- 218 HISTOIRE NATURELLE coup de gens pourroiïent même regarder la proximité de ces ma- tières comme une preuve du pouvoir de résister aux flammes, que lon a attribué aux salamandres : nous n’y voyons cependant que la: suite de quelques accidens et de quelques circonstances. particulières quiauront entraîné l'individu trouvé par M. le mar- auis deNesle, auprès des lavesenflammées du Vésuve; leur ardeur- auroit bientôt consumé la salamandre à trois doigts , ainsi que tout autre animal, si elle n’avoit pas été prise avant d’être ex- posée de trop près, ou pendant trop long-temps, à l’action de ces matières volcaniques, dont la chaleur éloignée aura nui d’au- tant moins à cetie salamandre, que tous les quadrupèdes ovipares se plaisent au milieu de la température brûlante des contrées de la zone torride. M. le marquis de Nesle a bien voulu nous envoyer la sala- mandre à trois doigts qu'il a rencontrée sur le Vésuve, et nous saisissons cetle occasion de lui témoigner notre reconnoissance pour les services qu’il rend journellement à l’histoire naturelle: L'individu apporté d'Italie par cet illustre amateur, étoit d’une couleur brune foncée, mêlée de roux sur la tête, tes pieds, la queue et le dessous du corps. 11 étoit desséché au point qu'on pouvoit facilement compter au travers de la peau les vertèbres et les côtes. La tête avoit trois lignes de longueur , le corps neuf hgnes, et la queue seize lignes et demie. FRANS AA ARR RAI ER RAR AVR AR AAA AA AA RAR AA AA AAA A PPPRRARAANAN ARR DES QUADRUPÉDES OVIPARES QUI N'ONT POINT DE QUEUE. Îr. ne nous reste , pour compléter l’histoire des quadrupèdes ovi- pares, qu'à parler de ceux de ces animaux qui n'ont point de queue. Le defaut de cette partie est un caractère constant et très- sensible, d’après lequel ilest aisé de séparer cette seconde classe d’a- vec la premiere, dans laquelle nous avons compris les tortues et. les lézards, qui tous ont une queue plus ou moins longue. Mais, indépendamment de cette différence , les quadrupèdes ovipares sans queue présentent des caractères d’après lesquels il est facile DES OVIPARES SANS QUEUE, 218 de les distinguer. Leur grandeur est toujours très-limitée, em comparaison de celle de plusieurs lézards ou tortues : la longueur des plus grands n'excède guère huit ou dix pouces ; leur corps n’est point couvert d’écailles ; leur peau , plus ou moins dure, est garmie de verrues ou de tubercules, et enduite d’une humeur visqueuse. La plupart n'ont que quatre doigts aux pieds de devant, et par ce caractère se lient avec les salamandres; quelques-uns, au lieu de n'avoir que cinq doigts aux pieds de derrière, comme le plus grand nombre des lézards, en ont six, plus ou moins mar- qués. Les-doigts , tant des pattes de devant que de celles de der- rière, sont séparé$ dans plusieurs de ces quadrupèdes ovipares , et réunis dans d’autres par une membrane, comme ceux des o1- seaux à pieds palmés , tels que les oies, les canards, les mouettes, etc. Les pattes de derrière sont , dans tous les quadrupèdes ovipa- res sans queue, beaucoup plus longues que celles de devant : aussi ces animaux ne marchent-ils point, ne s’avancent jamais que par sauts, et ne se servent de leurs pattes de derrière que comme d’un ressort qu'ils plient et qu’ils laissent se débander en- suite pour s'élancer à une distance et à une hauteur plus ou moins grandes. Ces pattes de derrière sont remarquables, en ce que le tarse est presque toujours aussi long que la jambe propre- ment dite. Tous les animaux qui composent ceite classe ont d’ailleurs une charpente osseuse bien plus simple que ceux dont nous venons de parler. Ils n’ont point de côtes, non plus que la plupart des salamandres ; ils n'ont pas même de vertèbres cervicales, on du moins ils n’en ont qu’une ou deux : leur tête est attachée presque immédiatement au corps, comme dans les poissons, avec lesquels ils ont aussi de grands rapports par leurs habitudes, et surtout par la manière dont ils se multiplient *. Ils n’ont aucun organe extérieur propre à la génération : les foetus ne sont pas fécondés dans le corps de la femelle ; mais, à mesure qu’elle pond ses œufs , le mâle les arrose de sa liqueur prolifique, qu'il lance par l'anus. Les petits paroissent pendant long-temps sous une espèce d'enve- RNA PU EP a ra UT D PM ne 2 * Les quadrupèdes ovipares sans queue manqnent de vessie proprement dite, de même que les lézards , le vaissean qui contient leur urine différant des vessies proprement dites, non-seulement par sa forme et par sa grandeur, mais encoré DE à : } par sa position, ainsi que par le nombre et la nature des canaux avec lesquels al commmbique, 12 250 HISTOIRE NATURELLE loppe étrangère, sous une forme particulière, à laquelle on a donné le nom de tétard , et qui ressemble plus ou moins à celle des poissons; et ce n’est qu'à mesure qu’ils se ÉPOREESS qu'ils acquièrent la véritable forme de leurs pe Tels sont les faits généraux communs à tous les M adiue ds ovipares sans queue. Maïs si on les examine de plus près, on verra qu'ils forment lrois troupes bién distinctes , tant par leurs habi- tudes que par leur conformation. Les premiers: ont le corps allongé, ainsi que la tête, l’un ou l'autre anguleux et relevé en arêtes longitudinales ; le bas du ventre presque toujours délié, et les pattes très-longues; le plus souvent la longrieur de celles de devant est double du diamètre du corps vers la poitrine, et celles de derrière sont au moins de la longueur de la tête et du corps. Ils présentent des proportions agréables; ils sautent avec agilité. Bien loin de craindre la lu- mière du jour , ils aiment à s’imbiber des rayons du soleil. Les seconds, plus petits en général que les premiers, et plus sveltes dans leurs proportions, ont leurs doigls garnis de petites pelotes visqueuses, à l’aide desquelles ils s’attachent, même sur la face inférieure des corps les plus polis. Pouvant d’ailleurs s’é- lancer avec beaucoup de force, ils poursuivent les insectes avec vivacité jusque sur les branches et les feuilles des arbres. Les troisièmes ont, au contraire, le corps presque rond, la tête très-convexe, les pattes de devant très-courtes ; celles de derrière n'égalent pas quelquefois la longueur du corps et de la tête; ils ne s’élancentqu'avec peine. Bien loin de rechercher les rayons du soleil, ils fuient toute lumière : ce n'est que lorsque la nuit est venue qu'ils sortent de leurs trous pour aller chercher leur proie. Leurs yeux sont aussi beaucoup mieux conformés que ceux des autres quadrupèdes ovipares sans queue, pour recevoir la plus foible clarté ; et lorsqu'on les porte au grand jour, leur prunelle se contracte , et ne présente qu’une fente allongée. Ils différent donc aulant des premiers et des seconds, que les hiboux et les chouettes diffèrent des oiseaux de jour. Nous avons donc cru devoir former trois genres diflérens des quadrupèdes ovipares sans quene. Dans le premier , qui renferme la grenouille commune, nous plaçons douze espèces, qui toutes ont la tête et le corps aliongés, et l’un ou l'autre anguleu x. Nous comprenons dans le second genre la petite grenouille DE LA GRENOUILLE COMMUNE. 2% d'arbre , connue en France sous le nom de raine où de rainette, et six autres espèces, qu'il sera aisé de distinguer par les pelotes visaueuses de leurs doigts. Nous composons enfin le troisième genre , dans lequel se trouve le crapaud commun , de quatorze espèces, dont le corps m1 la tête ne sont relevés en arêtes saillantes. ; Ces trente-trois espèces, qui forment les trois genres des gre- nouilles, des raines et des crapauds, sont lesseules que nous comp- tions dans la classe des quadrupèdes ovipares sans queue , et aux- quelles nous avons cru, d’après la comparaison exacte des des- criptions des auteurs, ainsi que d’après les individus conservés au Cabinet du Roi, devoir réduire toutes celles dont les naturalistes et les voyageurs ont fait mention. RAA VU AANAANAAANV VAANAAAANNAMMAN NAARAANMANARANARAAANA AR) PREMIER GENRE. Quadrupèdes ovipares sans queue, dont la tête et le corps sont allcngés, et l’un ou l’autre ansuleux. Ps $ GRENOUILLES. LA GRENOUILLE COMMUNE. Cor un grand malheur qu’une grande ressemblance avec des êtres ignobles ! Les grenouilles communes sont en apparence si con- formes aux crapauds, qu’on ne peut aisément se représenter les unes sans penser aux autres; on est tenté de les comprendre tous dans la disgrace à laquelle les crapauds ont été condamnés, et de rapporter aux premières les habitudes basses , les qualités dégoû- tantes, les propriétés dangereuses des seconds. Nous aurons peut- être bien de la peine à donner à la grenouille commune la place qu'elle doit occuper dans l'esprit des lecteurs, comme dans la Na- ture : mais il n’en est pas moins vrai que s’il n’avoil point existé de crapauds, si l’on n’avoit jamais eu devant les yeux ce vilain 2) | HISTOIRE NATURELLE objet de comparaison , qui enlaidit par sa ressemblance autant qu'il salit par son approche, la grenouille nous paroîtroit aussi agréable par sa conformation que distinguée par ses qualités, et intéressante par les phénomènes qu’elle présente dans les diver- ses époques de sa vie; nous la verrions comme un animal utile dont nous n'avons rien à craindre, dont l'instinct est épuré, et qui, joignant à une forme svelte des membres déliés et souples, est paré des couleurs qui plaisent le plus à la vue, et présente des- nuances d'autant plus vives, qu’une humeur visqueuse enduit sa peau el lui sert de vernis. Lorsque les grenouilles communes sont hors de l’eau , bien. loin d'avoir la face contre terre, et d’être bassement accroupies dans la fange comme les crapauds, elles ne vont que par sauts très-élevés ; leurs pattes de derrière, en se pliant et en se déban- dant ensuite, leur servent de ressort, et elles y ont assez de force pour s'élancer souvent jusqu’à la hauteur de quelques pieds. On diroit qu’elles cherchent l'élément de l'air comme le plus pur ; et lorsqu'elles se reposent à terre, c’est toujours la tête haute, leur corps relevé sur les pattes de devant, et appuyé sur jes pattes de derrière ; ce qui donne bien plutôt attitude droite d’un animal dont l'instinct a une certainte noblesse, que la posi- tion basse et horizontale d’un vil reptile. La grenouille commune est si élastique et si sensible dans tous ses points, qu'on ne peut la toucher, et surtout la prendre par ses pattes de derrière, sans que tout de suite son dos se courbe avec vitesse, et que toule sa surface montre, pour ainsi dire , les mouvemens prompts d’un animal agile qui cherche à s'échapper. Son museau se termine en pointe; les yeux sont gros, brillanset entourés d’un cercle couleur d'or; les oreilles placées derrière les yeux, et recouvertes par une membrane; les narines vers le sommet du museau ;et la bouche est grande et sans dents ; le corps , rétréci par-derrière, présente sur le dos dés tubercules et des aspérités. Ces tubercules ; que nous avons remarqués si souvent sur les qua- drupèdes ovipares , se trouvent donc non-seulement sur les cro- codiles et les très-grands Kzards, dont ils consolident les dures écailles, mais encore sur des quadrupèdes foibles, bien plus petits , qui ne présentent qu'une peau tendre, et n’ont pour défense que l'élément qu'il habitent , et asile où ils vont se réfugier. DE LA GRENOUILLE COMMUNE. 253 Le dessus du corps de la grenouille commune est d’un vert plus ou moins foncé ; le ue est blanc. Ces deux couleurs, qui s'accordent très-bien et forment un assortiment élégant, sont re- É. ées par trois raies jaunes qui s'étendent le long a dos; les deux des côtés forment une saillie, et celle du milieu présente au con- traire une espèce de sillon. À ces couleurs jaune, verte et blan- che , se mêlent des taches noires sur la partie inférieure du ventre . et à mesure que l'animal grandit, ces taches s'étendent sur tout le dessous du corps, et même sur sa partie supérieure. Qu'est-ce qui pourroit donc faire regarder avec peine un être dont la taille est légère , le mouvement preste, l'attitude gracieuse ? Ne nous inter- disons pas un plaisir de plus, et lorsque nous errons dans nos belles campagnes, ne soyons pas fâchés de voir les rives des ruis- seaux embellies par les couleurs de ces animaux innocens , et animées par leurs sauts vifs et légers; contemplons leurs petites manœuvres; suivons-les des yeux au milieu des étangs paisibles, dont ils diminuent si souvent la solitude sans en troubler le cal- me; voyons-les montrer sous les nappes d’eau les couleurs les plus agréables, fendre en nageant ces eaux tranquilles, souvent même sans en rider la Rens , et présenter les douces teintes que donne la transparence des eaux. Les grenouilles communes ont quatre doigts aux pieds de de- vant, comme la plupart des salamandres ; les doigts des pieds de ‘derrière sont au nombre de cinq , et réunis par une membrane : dans les quatre pieds, le doigt intérieur est écarté des autres, et le plus gros de tous. Elles varient par la grandeur , suivant les pays qu’elles habi- tent, la nourriture qu’elles trouvent , la chaleur qu’elles éprou- vent , etc. Dans les zones tempérées , la longueur ordinaire de ces animaux est de deux à trois pouces, depuis le museau jus- qu'à l'anus. Les pattes de derrière ont quatre pouces de longueur quand elles sont étendues, et celles de devant environ un pouce et demi. Il n’y a qu'un ventricule dans le cœur de la grenouille com- mune, ainsi que dans celui des autres quadrupèdes ovipares. Lorsque ce viscère a été arraché du corps de la grenouille , il conserve son battement pendant sept ou huit minutes, et même pendant plusieurs heures, suivant M. de Haller. Le mouvement du sang est inégal dans les grenouilles ; 11 est poussé goutte à 254 HISTOIRE NATURELLE goutte , et à de fréquentes reprises ; et lorsque ces animaux sont jeunes, ils ouvrent et ferment la boucheet les yeux à chaque fois que leur cœur bat. Les deux lobes des poumons sont composés d'un grand nombre de cellules membraneuses destinées à rece- voir l'air, et faites à peu près comme les alvéoles des rayons de miel : l'animal peut ïes tendre pendant un temps assez long, et se rendre par là plus léger. Sa vivacité, et la supériorité de son naturel sur celui des ani- maux qui lui ressemble le plus, ne doivent -elles pas venir de ce que, malgré sa petite taille, elle est un des quadrupèdes ovi- pares les mieux partagés pour les sens extérieurs ? Ses yeux sont en effet gros et saillans, ainsi que nous l'avons dit; sa peau molle, qui n'est recouverte ni d'écailles, ni d’enveloppes osseuses , est sans cesse abreuvée et maintenue dans sa souplesse par une hu- meur visqueuse qui suinte au lravers de ses pores : elle doit donc avoir la vue très-bonne, et le toucher un peu délicat ; et si ses oreilles sont recouvertes par une membrane, elle nen a pas moins l'ouïe fine, puisque ces organes renferment dans leurs cavités une corde élastique que l'animal peut tendre à volonté, et qui doit lui communiquer avec assez de précision les vibra- tions de l'air agilé par les corps sonores. Cette supériorité dans la sensibilité des grenouilles les rend plus difficiles sur la nature de leur nourriture ; elles rejettent tout ce qui pourroit présenter un commencement de décompo- sition. Si elles se nourrissent de vers, de sangsues, de petits lima- cons, de scarabées et d’autres insecles tant ailés que non ailés, elles n’en prennent aucun qu'elles ne l’aient vu remuer, comme si elles vouloient s'assurer qu’il vit encore : elles demeurent im- mobiles jusqu’à ce que l'insecte soit assez près d'elles ; elles fon- dent alors sur lui avec vivacité, s’élancent vers cette proie, quel- quefois à la hauteur d’un ou deux pieds, et avancent, pour lat- traper, une langue enduile d’une mucosité si gluante, que les insectes qui y touchent y sont aisément empêtrés. Elles avalent aussi de très-pelits fimaçons tout entiers : leur oœsophage a une grande capaciié ; leur estomac peut d’ailleurs recevoir, en se di- latant, un grand volume de nourriture ; el tout cela, joint à l'activité de leurs sens, qui doit donner plus de vivacité à leurs appétits, montre la cause de leur espèce de voracité : car non- seulement-elles se nourrisent des très-petits animaux dont nous DE LA GRENOUILLE COMMUNE. 255 venons de parler, mais encore elles avalent souvent des animaux plus considérables, tels que de jeunes souris , de petits oiseaux, et même de petits canards nouvellement éclos, lorsqu'elles peu- vent les surprendre sur le bord des étangs qu’elles habitent. La grenouille commune sort souvent de l’eau , non-seulement pour chercher sa nourriture, mais encore pour s'imprégner des rayons du soleil. Bien loin d'être presque muette, comme plu- sieurs quadrupèdes ovipares , et particulièrement comme Îa sala- mandre terrestre, avec laquelle elle a plusieurs rapports, on l’en- tend de très-loin, dès que la belle saison est arrivée, et qu’elle est pénétrée de la chaleur du printemps, Jeter un cri qu’elle ré- pète pendant assez long-temps, surtout lorsqu'il est nuit. On di- roit qu'il y a quelque rapport de plaisir où de peine entre la gre- nouille et l'humidité du serein ou de la rosée , et que c’est à cette cause que l’on doit attribuer ses longues clameurs. Ce rapport pourroit montrer pourquoi les cris des grenouilles sont, ainsi qu'on l'a prétendu, d'autant plus forts que le temps est plus dis- posé à la pluie, et pourquoi ils peuvent par conséquent annon- cer ce météore. Le coassement des grenouilles, qui n’est composé que de sons rauques, de tous discordans et peu distincts les uns des autres, seroit très-désagréable par lui-même, et quand on n'entendroit qu’une seule grenouille à la fois : mais c’est toujours en grand nombre qu’elles coassent ; et c’est toujours de trop près qu'on entend ces sons confus , dont la monotonie fatigante est réunie à une rudesse propre à blesser l'oreille la moins délicate. Si les grenouilles doivent tenir un rang distingué parmi les quadru- pèdes ovipares, ce n’est donc pas par leur voix : autant elles peuvent plaire par l'agilité de leurs mouvements et la beauté de leurs couleurs, autant elles importunent par leurs aigres coasse- mens. Les miles sont surtoul ceux qui font le plus de bruit ; les femelles n'ont qu'un grognement assez sourd, qu'elles font en- tendre en enflant leur gorge : mais lorsque les males coassent, ils gonflent de chaque côté du cou deux vessies qui, en se remplis- sant d'air, et en devenant pour eux comme deux instrumens re- tentissans, augmentent le volume de leur voix. La Nature, qui n’a pas voulu en faire les musiciens de nos campagnes, n’a donné à ces instrumens que de la force , et les sons que forment les gre- nouilles males, sans être pius agréables , sont seulement entendus e plus loin que ceux de nu Éuches, 256 HISTOIRE NATURELLE Ils sont seulement plus propres à troubler ce calme des belles nuits de l'été, ce silence enchanteur qui règne dans une verte prairie, sur le bord d’un ruisseau tranquille , lorsque la lune éclaire de sa lumière paisible cet asile champêtre, où tout goù- teroit les charmes de la fraicheur, du repos, des parfums des fleurs , et où tous les sens seroient tenus dans une douce extase, si celui de l’ouïe n'étoit désagréablement ébranlé par des cris aussi aigres que forts, et de rudes coassemens sans cesse renou- velés. Ce n’est pas seulement lorsque les grenouilles mâles coassent que leurs vessies paroissent à l’extérieut; on peut, en pressant leur corps, comprimer l'air qu’il renferme, et qui, se portant alors dans ces vessies , en étend le volume et les rend saillantes. J'ai aussi vu gonfler ces mêmes vessies, lorsque j'ai mis des gre- nouilles mâles sous le récipient d’une machine pneumatique, et que j'ai commencé d'en pomper l'air. Indépendamment des cris retentissans et long-temps prolon- gés que la grenouille mâle fait entendre si souvent, elle a d’ail- leurs un son moins désagréable et moins fort, dont elle ne se sert que pour appeler sa femelle : ce dernier son est sourd et comme plaintif, tant il est vrai que l’accent de l'amour est toujours mêlé de quelque douceur. Quoique les grenouilles communes se plaisent à des latitudes très-élevées, la chaleur leur est assez nécessaire pour qu’elles per- dent leurs mouvemens, que leur sensibilité soit très-affoiblie et qu’elles s’engourdissent dès que les froids de lhiver sont venus. C'est communément dans quelque asile caché très-avant sous les eaux, dans les marais et dans les lacs, qu’elles tombent dans la torpeur à laquelle elles sont sujettes. Quelques-unes cependant passent la saison du froid dans des trous sous terre, soit que des circonstances locales les y déterminent, ou qu’elles soient sur- prises dans ces trous par le degré de froid qui les engourdit. Elles sont alimentées , pendant le temps de leur long sommeil , par une matière graisseuse renfermée dans le tronc de la veine-porte. Cette graisse répare jusqu’à un certain point la substance du sang et l’entretient de manière qu’il puisse nourrir toutes les parties du corps qu'il arrose. Mais, quelque sensibles que soient les gre- nouilles au froid, celles qui habitent près des zones torrides doi- vent. être exemptes de la iorpeur de l’hiver, de même que les crocodiles et les lézards qui y sont sujets à des latitudes un peu DE LA GRENOUILLE COMMUNE. 197 élevées, ne s’engourdissent pas dans les climats très-chauds. On tire les grenouilles de leur état d’engourdissement en les portant dans quelque endroit échauflé , et en les exposant à une température artificielle, à peu près semblable à celle du prin- temps. On peut successivement , et avec assez de promptitude, les replonger dans cet état de torpeur, ou les rappeler à la vie, par les divers degrés de froid ou de chaud qu’on leur fait subir, A la vérité, il paroït que l'activité qu’on leur donne avant le temps ou elles sont accoutumées à la recevoir de la Nature, de- vient pour ces animaux un grand eflort qui les fait bientôt périr. Mais il est à présumer que, si l’on réveilloit ainsi des grenouilles apportées de climats très-chauds où elles ne s'engourdissent ja- mais , bien loin de contrarier les habitudes de ces animaux, on ne feroit que les ramener à leur état naturel; et ils n’auroient rien à craindre de l'activité qu’on leur rendroit. On est même parvenu, par une chaleur artificielle, à remplacer assez la cha- leur du printemps, pour que des grenouilles aient éprouvé, l’une auprès de l’autre, les désirs que leur donne le retour de la belle saison. Mais, soit par défaut de nourriture, soit par nne suite des sensations qu'elles avoient éprouvées trop brusquement, et des efforts qu’elles avoient faits dans un temps où communément il leur reste à peine la plus foible existence, elles n’ont pas sur- vécu long-temps à une jouissance trop hâlée. Les grenouilles sont sujettes à quitter leur peau, de même que les autres quadrupèdes ovipares : mais cette peau est plus souple, plus constamment abreuvée par un élément qui la ra- mollit, plus sujette à ètre altérée par les causes extérieures. D'ailleurs les grenouilles, plus voraces, et mieux conformées dans les organes relatifs à fa nutrition, prennent une nourriture plus abondante, plus substantielle , et qui, fournissant une plus grande quantité de nouveaux sucs, forment plus aisément une nouvelle peau au-dessous de l'ancienne. Il n’est donc pas surpre- nant que les grenouilles se dépouillent très-souvént de leur peau pendant la saison où elles ne sont pas engourdies, et qu’alors elles en produisent une nouvelle presque tous les huit jours. Lorsque l’ancienne est séparée du corps de l'animal , elle ressemble à une mucosité délayée. C'est surtout au retour des chaleurs que les grenouilles com- munes, ainsi que tous les quadrupèdes ovipares, cherchent à sur avec leurs femelles : il croît alors aux pouces des pieds Lacepède. 1. 17 258 HISTOIRE NATURELLE de devant de la grenouille mâle, une espèce de verrue plus ou moins noire,et garnie de papilles. Le mâle s’en sert pour rete- nir plus facileme nt sa femelle : ; il monte sur son dos, et l’em- brasse d’une manière si étroite avec ses deux pattes de devant, dont les doigts s’entrelacent les uns dans les autres, qu’il faut em- ployer un peu de force pour Îles séparer , et qu’on n’y parvient pas en arrachant les pieds de derrière du male. M. l'abbé Spal- lanzani a même écrit qu'ayant coupé la tête à un mâle qui étoit- accouplé , cet animal ne cessa pas de féconder pendant quelque temps les œufs de sa femelle, et ne mourut qu'au bout de quatre heures. Quelque mouvement que fasse la femelle, le male la re- tient avec ses pattes, et ne la laisse pas échapper, même quand elle sort de l’eau : ils nagent ainsi accouplés pendant un nombre de jours d'autant plus grand que la chaleur de l'atmosphère est moindre, et ils ne se quittent point avant que la femelle ait pondu ses œufs. C'est ainsi que nous avons vu les tortues de mer demeurer pendant long-temps intimement unies, et voguer sur la surface des ondes, sans pouvoir être séparées l’une de l’autre. Au bout de quelques jours , la femelle pond ses œufs, en fai- santentenare quelquefois un coassement un peu sourd: ces œufs forment une espèce de cordon , étant collés ensemble par une ma- tière glaireuse dont ils sont enduits. Le mâle saisit le moment où ils sortent de l'anus de la femelle pour les arroser de sa li- queur séminale , en répétant plusieurs fois un cri particulier ; et il peut les féconder d'autant plus aisément , que son corps dépasse communément par le bas celui de sa compagne : il se sépare ensuite d’elle, et recommence à nager, ainsi qu’à remuer ses pattes avec agilité, quoiqu'il ait passé la plus grande partie du temps de son union avec sa femelle dans une grande immo- bilité, et dans cette espèce de contraction qni accompagne quel- fois les sensations trop vives. Dans les différentes observations que nous avons faites sur les œufs des grenouilles, et sur les changemens qu’elles subissent avant de devenir adultes, nous avons vu, dans les œufs nou- vellement pondus, un petit globule, noir &’un côté et blanchätre de l'autre, placé au centre d’un autre globule, dont la substance glutineuse et transparente doit servir de nourriture à l'embryon, 1 M. Linné, vraisemblablement d’après Frédéric Menzius, a été tenté de rez garder cette espèce de verrue comme la partie sexuelle du mâle. Pour pen qu'il eût réfléehi x cette opinion, il auroit été le premier à la rejeter. DE LA GRENOUILLE COMMUNE. 239 et est contenue dans deux enveloppes membraneuses et concen- triques : ce sont ces membranes qui représentent la coque de l'œuf *. Après un temps plus ou moins long , suivant la température, le globule noir d’un côté et blanchâtre de l’autre se développe et ‘ prend le nom de tétard: cet embryon déchire alors les enve- loppes dans lesquelles il étoit renfermé, et nage dans la liqueur glaireuse qui l’environne , et qui s'étend et se délaye dans l’eau, où elle flotte sous l'apparence d’une matière nuageuse; il con- serve pendant quelque lemps son cordon ombilical, quiest atta- chéa la tête , au lieu de l'être au ventre, ainsi que dansla plupart des autres animaux. Îl sort de tewips en temps de la malitre gluante, comme pour essayer ses forces, mais il rentre souvent dans cette petite masse flotiante qui peut le soutenir ; il y revient non-seulement pour se reposer, mais encore pour prendre de la nourriture. Cependant il grossit toujours ; on distingue bientdt sa tête, sa poitrine , son ventre et sa queue dont il se sert pour se mouvoir. La bouche des tétards n’est point placée , comme dans la gre- ñouille adulte , au-devant de la tête, mais en quelque sorte sur la poitrine : aussi, lorsqu'ils veulent saisir quelque objet qui flotie à la surface de l’eau, ou chasser l'air renfermé dans leurs pou- mons, ils se renversent sur le dos, comme les poissons dont la bouche est située au - dessous du corps; et ils exécutent ce mou- vement avec tant de vitesse, que l'œil a de la peine à le suivre. Au bout de quinze jours, les yeux paroissent quelquefois en- core fermés ; mais on découvre les premiers linéamens des pattes de derrière. À mesure qu'elles croissent, la peau qui les revêt s'étend en proportion. Les endroits où seront les doigts sont marqués par de pelits boutons; et , quoiqu'il n’y ait encore aucun os, la forme du pied est très-reconnoissable. Les pattes de de- vant restent encore entièrement cachées sous l'enveloppe : plu- A IDE DE DE RD SE CONS 1 M. abbé Spallansani , ne considérant la membrane intérieure qui enveloppe le tétard que comme un amnios , a proposé de séparer les grenouilles , les cra- paudset les raines, des ovipares, pour les réunir avec les vivipares ; mais nous n’avons pas cru devoir adopter l’opinion de cette habile naturaliste. Comment éloigner en effet les grenouilles, les raines et les crapauds, des tortues et des lézards , avec lesquels ils sont liés par tant de rapports, pour les rapprocher des vivipares , dont ils diffèrent par tant de caractères intérieurs ou extérieurs ? 266 HISTOIRE NATURELLE sieurs fois les presque triangulaire , irès-élargi vers la tête, convexe par-dessus, et plat par-dessous. Les pieds de devant, qui n'ont que quatre doigts, sont assez courts et épais ; ceux de derrière, qui en ont cinq, sont au contraire déliés et très-longs : les ongles sont plats et arrondis. 276 HISTOIRE NATURELLE La raine verte saute avec plus d’agilité que les grenouilles , parce qu’elle a les pattes de derrière plus longues en proportion de la grandeur du cerps. C'est au milieu des bois, c'est sur les branches des arbres qu’elle passe presque toute la belle saison. Sa peau est si gluante , etses pelotes visqueuses se collent avec tant de facilité à tous les corps, quelque polis qu’ils soient, que la raine n’a qu’à se poser sur la branche la plus unie , même sur la surface inférieure des feuilles, pour s’y attacher de ma- nière à ne pas tomber. Catesby dit qu’elle a la faculté de rendre ces pelotes concaves, et de former par là un petit vide qui l'at- tache plus fortement à la surface qu’elle touche. Ce même au- teur ajoute qu'elles franchissent quelquefois un intervalle de douze pieds. Ce fait est peut-être exagéré ; mais , quoi qu'il en soit, les raines sont aussi agiies dans leurs mouvemens que dé- liées dans leur forme. Lorsque les beaux jours sont venus , on les voit s’élancer sur les insectes qui sont à leur portée ; elles les saisissent et les e- tiennent avec leur langue, aimsi que les grenouilles; et sautant avec vilesse de rameau en rameau, elles y représentent jusqu’à un certain point les jeux et les petits vols des oiseaux, ces légers habitans des arbres élevés. Toutes les fois même qu'aucun pré- jugé défavorable n’existera contre elles , qu'on examinera leurs couleurs vives qui se marient avec le vert des feuillages et l'émail des fleurs ; qu’on remarquera leurs ruses et leurs embuscades ; qu'on les suivra des yeux dans leurs petites chasses; qu'on Îles verra s’élancer à plusieurs pieds de distance , se tenir avec faci- Bité sur les feuilles dans la situation la plus renversée , et s’y placer d’une manière qui paroîtroit merveilleuse , si l'on ne connois- soit pas l’organe qui leur a été donné pour s'attacher aux corps les plus unis, n’aura-t-on pas presque autant de plaisir à les ob- server qu'à considérer le plumage, les manœuvres et le vol de plusieurs espèces d'oiseaux ? L’habitation des raines au sommet de nos arbres est une preuve de plus de cette analogie et de cette ressemblance d’habi- tudes que l’on trouve même entre les classes d'animaux qui pa- roïssent les plus différentes les unes des autres. La dragonne, l'iguane , le basilic, le caméléon , et d’autres lézards très-grands, habitent au milieu des bois, et même sur les arbres; le lézard ailé s'y élance comme l’écureuil ,‘avec une facilité et à des dis- tances qui ont fait prendre ses sauts pour une espèce de vol. Nous DE LA RAINÉ VERTE OÙ COMMUNE. 277 retrouvons encore sur ces mêmes arbres les raines, qui cepen- dant sont pour le moins aussi aquatiques que terrestres, et qui paroissent si fort se rapprocher des poissons ; et tandis que ces raines , ces habitans si naturels de l’eau , vivent sur les rameaux de nos forêts, l’on voit, d’un autre côté, de grandes légions d'oiseaux presque entièrement dépourvus d'ailes n'avoir que la mer pour patrie , et, attachés, pour ainsi dire, à la surface de l'onde , passer leur vie à la sillonner ou àse plonger dans les flots. H en est des raines comme des grenouilles : leur entier déve- Joppement ne s'effectue qu'avec lenteur ; et de même qu'elles demeurent long-termps dans leurs véritables œufs, c’est-à-dire , sous l'enveloppe qui leur fait porter le nom de tétards , elles ne deviennent qu'après un temps assez long en état de perpétuer leur espèce : ce n’est qu’au bout de trois ou quatre ans qu’elles s’accouplent. Jusqu'à cette époque, elles sont presque mueties : les mâles mêmes qui, dans tant d'espèces d'animaux, ont la voix plus forte que les femelles , ne se font point entendre, comme si leurs cris n’étoient propres qu’à exprimer des désirs qu'ils ne ressentent pas encore, et à appeler des compagnes vers lesquelles ils ne sont point encore entraînés. C'est ordinairement vers la fin du mois d'avril que leurs amours commencent : mais ce n’est pas sur Îles arbres qu’elles en goû- tent les plaisirs; on diroit qu'elles veulent se soustraire à tous les regards, et se mettre à l'abri de tous les dangers, pour s’occu- per plus pleinement , sans distraction et sans troubie , de l’objet auquel elles vont s'unir ; on bien il semble que, leur première patrie étant l'eau, c'est dans cet élément qu’elles reviennent jouir dans toute son étendue d’une existence elles y ont reçue , et qu’elles sont poussées par une sorte d’instinct à ne donner le jour à de petits êtres semblables à elles que dans les asiles favorables où ils trouveront en naissant la nourriture et la sûreté qui leur ont été nécessaires à elles-mêmes dans les preiniers mois où elles ont vécu; ou plutôt encore c'est à l'ean qu'elles retournent dans le temps de leurs amours, parce que ce n'est que dans l'ean qu'elles peuvent s’anir de la manière qui convient ie mieux à leur organisation. Les raines ne vivent dans les bois que pendant le temps de leurs chasses: car c'est aussi au fond'des eaux et dans le limon. des licux marécageux qu’elles se cachent pour passer le temps de Fhiver et de leur engourdissement. 278 HISTOIRE NATURELLE On les trouve donc dans les étangs dès la fin du mois d'avril , ou au commencement de mai : mais, comme si elles ne pou- voient pas renoncer , même pour un temps très-court, aux branches qu’elles ont habitées, peut-être parce qu’elles ont be- soin d'y aller chercher l'aliment qui leur convient le plus lors- qu’elles sont entièrement développées, elles choisissent les en- droils marécageux entourés d'arbres : c’est là que les mâles gon- flant leur gorge , qui devient brune quand ils sont adultes, poussent leurs cris rauques et souvent répélés ; avec encore plus de force que la grenouille commune. À peine Fun d'eux failsl entendre son coassement retentissant , que tous les autres mêlent leurs sons discordans à sa voix; et leurs clameurs sont si bruyantes , qu'on les prendroit de loin pour une meute de chiens qui aboient, et que, dans les nuits tranquilles , leurs coasse- mens réunis sont quelquefois parvenus jusqu’à plus d'une lieue, surtout lorsque la pluie étoit prête à tomber. Les raines s'accouplent comme les grenouilles : on aperçoit le male et la femeile descendre souvent au fond de l'eau pendant leur union, ef y demeurer assez de temps; la femelle paroît agi- tée de mouvemens convulsifs , surtout lorsque le moment de la ponte approche ; et le mâle y répond en approchant plusieurs fois l'extrémité de son corps, de manière à féconder plus aisé- ment les œufs à leur sortie. Quelquelois les femelles sont délivrées, en peu d'heures, de tous les œufs qu’elles doivent pondre; d’autres fois elles ne s'en débarrassent que dans quarante-huit heures, et même quelquefois plus de temps : mais alors il arrive souvent que le mâle lassé, et peut-être épuisé de ffigue, perdant son amour avec ses désirs, abandonne sa femelle, qui ne pond plus que des œufs stériles. La couleur des raines varie après leur accouplement : elle est d’abord rousse, et devient grisàtre {achetée de roux ; elle est en- su:le bleue , et enfin verte, Ce n’est ordinairement qu'après deux mois que les jeunes raïnes on! la forme qu’elles doivent conserver toute leur vie : mais dès qu'elles ont atteint leur développement, et qu'elles peuvent sau- ter et bondir avec facilité, elles quittent les eaux et gagnent les bois. On fait vivre aisément la raine verte dans les maisons , en jui fournissant une température et une nourriture convenables, Comme sa couleur varie très-souvent, suivant l'âge, la saison et DE LA BRUNE. 279 le dimat, et comme lorsque l'animal est mort, le vert du dessus de son corps se change souvent en bleu, nous presumons que l'on doit regarder comme une variété de cette raine celle que M. Boddaert a décrite sous le nom de grenouille à deux cou- leurs. Cette dernière raine faisoit partie de la collection de M. Schios- ser, et avoit été apportée de (Œuinée. Ses pieds n'étoient pas pai- més; ses doigts étoient garnis de pelotes visqueuses : elle en avoit quatre aux pieds de devant, et cinq aux pieds de derrière. La couleur du dessus de son corps étoit bleue, et le jaune régnoit sur tout le dessous. Le museau étoit un peu avancé; la tête plus large que le corps , et la lèvre supérieure un peu fendue. On rencontre la raine verte en Europe , en Afrique eten Amt- rique. Mais, indépendamment de celle espèce, les pays étrangers offrent d’autres quadrupèdes ovipares sans queue, et avec des plaques visqueuses sous les doigts. Nous allons présenter les carac- tères particuliers de ces diverses raines. LARANANARNANMANANR AA NAAANY AARAANAARAAAAANAR A ARAAANAN AAA AA VUR VUT EVE LA BOSSUE. Ox trouve dans l'ile de Eemnos une raine qu’il est aisé de dis- tinguer d'aveclesautres, parce que sur son corps arrondi et plane s'élève une bosse bien sensible. Ses yeux sont saillans; et les doigts de ses pieds , garnis de pelotes gluantes comme celles de la raine commune, sont en même temps réunis par une membrane. Elle est la proie des serpens. Il paroît que cette espèce, qui appartient à l'ancien continent, se rencontre aussi à Surinam ; mais elle y a subi l'influence du climat, et y forme une variété distinguée par les taches que le dessus de son corps présente. PRRANAS AAA R VA AAA ARR RAA RAA RAA AAA AVR A/R AAA UV AAA LU RAA VRAI UE AAA AURAS LA BRUNE. Cerre raine, que M. Laurenti a le premier décrite, sans indi- quer son pays natal, mais qui nous paroït devoir appartenir à 26w HISTOIRE NATURELLE YEurope, est distinguée d’avec les autres par sa couleur brune, et par des tubercules en quelque sorte déchiquetés qu'elle a sous les pieds. La raine ou grenouille d'arbre dont parle Sloane sous le nom de rana arborea maxima, et qui habite la Jamaïque, pourroit bien être une variété de la brune; sa couleur est foncée comme celle de la brune. A la vérité, elle est tachetée de vert, et ellea de chaque coté du cou une espèce de sac ou de vessie conique ; mais les différences de cette raine qui vit en Amérique, avec la brune qui paroît habiter l'Europe, pourroient être rapportées à l’in- fluence du climat, ou à celle de la saison des amours , qui, dans presque tous les animaux, rend plusieurs parties beaucoup plus apparentes. CAT AAMANAAAEA LA LARAARAAAATAMANARGUVEA VE TARA ARAAAARAA A UMARAAAMRAA LA COULEUR-DE-LAIT. Eirx habite en Amérique : sa couleur est d’un blanc de neige , avec des taches d’un blanc moins éclatant ; le bas-ventre présente des bandes d’une couleur cendrée pâle ; l'ouverture de la gueule est très-grande. Une variété de cette espèce , au lieu d’avoir le des- sus du corps d’un blanc de neige, l’a d’une couleur bleuâtre un peu plombée. LA FLUTEUSE. Cire espèce a le corps d’un blanc de neige suivant M. Lau- renti, de couleur jaune suivant Seba , et tacheté de rouge.’Les pieds de derrière sont palmés , et le mâle , en coassant, fait enfler deux vessies qu'il a des deux côtés du cou , ef que l’on a comparées à des flütes. Suivant Seba , elle coasse mélodieusement : maïs je crois qu'il ne faut pas avoir l'oreille très-délicate pour se plaire à la mélodie de la flteuse Cette raïne se tait pendant les jours froids et pluvieux, et son cri annonce le beau temps; elle est opposée en cela à la grenouille commune, dont le coassement est au con- DE LA ROUGE. 28» traire un indice de pluie. Mais la sécheresse ne doit pas agir éga- lement sur les animaux dans deux climats aussi différens que ceux de l’Europe et de l'Amérique méridionale. Le male de la raine cou- leur-de-lait ne pourroit-il pas avoir aussi deux vessies, qu’il n'en- fleroit et ne rendroit apparentes que dans le temps de ses amours, et dès-lors la flûteuse ne devroit-elle pas être regardée comme une variété de la couleur-de-lait ? PARA AAA AAA ME AAA AAA AAA ER L'ORANGÉE. EE É- corps de cette raine est jaune, avec une teinte légèrede roux, et son dos est comme circonscrit par une file dé points roux plus ou moins foncés. Seba dit qu’elle ne diffère de la flüteuse que par le défaut des vessies de la gorge. Elle vit à Surinam. On rencontre au Brésil une raine dont le corps est d’un jaune tirant sur la couleur de l'or. Son dos est, à la vérité, panaché de rouge, et on l’a vue d’une maigreur si grande, qu’on en a tirélenom de raine squelette qu’on lui a donné : mais les raines, ainsi que les grenouilles , sont sujettes à varier beaucoup, par l'abondance ou le défaut de graisse, même dans un tres-court espace de temps. Nous pensons donc que la raine squelette , vue dans d’autres mo- mens que ceux où elle a été observée, n’auroit peut-être pas paru assez maigre pour former une espèce différente de l'orangée, mais simplement une variété dépendante du climat, ou d’autres circonstances. AAA AAA AAA AAA AAA AT AAA AAA AARAANAARARARARARAAA RS LA ROUGE. Cx la trouve en Amérique; elle a la tête grosse, l'ouverinre de la gueule grande, et sa couleur est rouge. M. le comte du Buffon a fait mention, dans l’histoire des per- roquels appelés cricks, d’un petit quadrupède ovipare sans queue de l'Amérique méridionale, dont se servent les Indiens pour don- 282 HISTOIRE NATURELLE ner aux plumes des perroquets une belle couleur rouge ou jaune: ce qu'ils appellent {apirer. Ils arrachent pour cela les plumes des jeunes cricks qu'ils-ont enlevés dans leur nid; ils en frottent la place avec le sang de ce quadrupède ovipare; les plumes qui re- naissent après celte opération , an lieu d’être vertes, comme au- paravant, sont jaunes ou rouges. Ce quadrupède cvipare sans queue vil communément dans les bois. Il ya au Cabinet du Rot plusieurs individus de cette espèce, conservés dans l’esprit-de-vin, d’après lesquels il est aisé de voir qu’il est du genre des raines, puusqu'ila des plaques visqueuses au bout des doigts; ce qui s’ac- corde fort bien avec l'habitude qu’il a de demeurer au milieu des arbres.Îf paroît que la couleur de cette raine tire sur le rouge; elle présente sur le dos deux bandes longitudinales, irrégulières , d’un blanc jaunâtre, ou même couleur d'or. Il me semble qu'on doit regarder cette jolie et petite raine comme une variété de la rouge , ou peut-être de l’orangée. Combien les grenouilles , les crapauds et les raines ne varient-ils pas, suivant l’âge, le sexe, Ja saison et l'abondance ou la disette qu’ils éprouvent! La raine à tapirer a, comme la rouge, la tête grosse en proportion du corps, et l'ouverture de la gueule est grande. Au reste, 1lest bon de remarquer que nons relrouvons sur les raines de PAmérique méridionale les belles couleurs que la Na- ture y a accordées aux grenouilles , et qu’elle y à prodiguées aussi avec tant de magnificenceaux oiseaux ,aux insectes et aux papii- Jons. DU CRAPAUD COMMUN. 283 RAA MAUVE MAT VU AAA LR AT LEA LE AUS LVL VUE LULU LUE VUS LU LVL RAA VUE VAT TROISIÈME GENRE. Quadrupèdes ovipares sans queue, qui ent le corps ramassé et arrondi. CRAPAUDS. LE CRAPAUD COMMUN :. Drrurs long-temps l'opinion a flétri cet animal dégoûtant, dont l'approche révolte tous les sens. L'espèce d'horreur avec laquelle on le découvre est produite même par l’image que le souvenir en retrace : beaucoup de gens ne se le représentent qu'en éprou- vantune sorte de frémissement , et les personnes, qui ont le tem- pérament foible et les nerfs délicats, ne peuvent en fixer l'idée sans croire senlir dans leurs veines le froid glacial que l’on a dit accompagner l’attouchement du crapaud : tout en est vilain, Jus- qu’à son nom , qui estdevenu le signe d’une basse difformité. On s'é- tonne toujours lorsqu'on le voit constituer une espèce constante, d'autant plus répandue que presque toutes les températures lu conviennent, et en quelque sorte d'autant plus durable que plu- sieurs espèces voisines se réunissent pour former avec lui une fa- mille nombreuse. On est tenté de prendre cet animal informe pour un produit fortuit de l'humidité et de la pourriture, pour un de ces jeux bizarres qui échappent à la Nature; eton n'ima- gine pas comment celle mère commune, qui a réuni si souvent tant de belles proportions à tant de couleurs agréables , et qui même a donné aux grenouilles et aux raines une sorte de grâce, de gentillesse et de parure , a pu imprimer au crapaud une forme si hideuse. Et que l’on ne croie pas que ce soit d’après des con- ventions arbitraires qu’on le regarde comme un des êtres les plus défavorablement traités : il paroît vicié dans toutes ses parties. ? Bufo, en latin; £oad, en anglais, : 28% HISTOIRE NATURELLE S1l a des pattes, elles n’élèvent pâs son corps disproportionné au-dessus de la fange qu'il habite. S'il a des yeux , ce n’est point, en quelque sorte , pour recevoir une lumière qu'il fuit. Mangeant des herbes puantes ou vénéneuses, caché dans la vase, tapi sous des tas de pierres , retiré dans des trous de rocher, sale dans son habitation, dégoûtant par ses habitudes , difforme dans son corps, obscur dans $es couleurs , infect par son haleine, ne se soulevant qu'avec peine , ouvrant, lorsqu'on l'attaque , une gueule hideuse, n'ayani pour toute puissance qu’une grande résistance aux coups qui le frappent, que l’inertie de la matière , que l'opiniâtreté d’un être stupide, n’employant d'autre arme qu’une liqueur fétide qu'il lance, que paroît-il avoir de bon, si ce n’est de chercher, pour ainsi dire, à se dérober à tous les yeux, en fuyant la lu- micre du jour ? Cet être ignoble occupe cependant une assez grande place dansle plan de la Nature : elle l’a répandu avec bien plus de profusion que beaucoup d’objets chéris de sa complaisance maternelle. Il sem- ble qu'au physique, comme au moral , ce qui est le plas mauvais est le plus facile à produire; et, d’un autre côté, on diroit que la Nature a voulu, par ce frappant contraste, relever la beauté de ses autres ouvrages. Donnons donc dans celte histoire une place assez étendue à ces êlres sur lesquels nous sommes forcés d'arrêter un moment lattention : ne cherchons même pas à ménager la déli-\ catesse; ne craignons pas. de blesser les regards, et tâchons de montrer le crapaud tel qu'il est. Son corps, arrondi et ramassé, a plutôt l'air d’un amas informe et pétri au hasard , que d'un corps organisé, arrangé avec ordre, et fait sur un modèle. Sa couleur est ordinairement d’un gris li- vide, tacheté de brun et de jaunâtre; quelquefois , au commen- cement du printemps, elle est d’un roux sale , qui devient ensuite, tantôt presque noir, tantôt ohvâtre, et tantôt roussätre. Il est encore enlaidi par un grand nombre de verrues ou plutôt de pus- tales d’un vert noirâtre, ou d’un rouge clair. Une éminence très- allongée, faite en forme de rein, molle et percée de plusieurs pores très-visibles , est placée au-dessus de chaque oreille. Le con- duit auditif est fermé par une lame membraneuse. Une peau épaisse, dure, et très-difficile à percer, couvre son dos aplati; son large ventre paroît toujours enflé; ses pieds de devant sont très-pen allongés, et divisés en quatre doigts, landis que ceux | DU CRAPAUD COMMUN. 995 “de derrière ont chacun six cloigts réunis par Une membrane. Au lieu de se servir de cette large patte pour sauter avec agilité , il ne l'emploie qu’à comprimer la vase humide sur laquelle il repose; et au-devant de cette masse, qu’est-cequ’on distingue? une tête un peu plus grosse que le reste du corps , comme s’il manquoit quel- que chose à sa diflormité; une grande gueule garnie de mächoires raboteuses, mais sans dents; des paupières gonfkes, et des yeux assez gros, saillans , et qui révoltent par la colère qui paroît sou- vent les animer. On est tout étonné qu’un animal qui ne semble pétri que d’une vile et froide boue puisse sentir l’'ardeur de la colère, comme si la Nature avoit permis ici aux extrêmes de se mêler, afin de réunir dans un seul être tout ce qui peut repousser intérêt. Il s’irrite avec force pour peu qu ‘on le touche; il se gonfle, et tâche d'employer ainsi sa vaine puissance : il Hite long-iempsaux poids avec lesquels on cherche à écraser , et il faut que toutes ses parties et ses vaisseaux soient bien peu liésentre eux, puisqu'on a vu des crapauds qui, percés d’outre en outre avec un pieu , ont cependant vécu plusieurs jours, étant fichés contre terre. Tout se ressent de la grossièreté de l'atmosphère ordinairement répandue autour du crapaud, et de la disproportion de ses mem- bres ; non-seulement il ne peut point marcher, mais il ne saute qu'à une très-petite hauteur : lorsqu'il se sent pressé, 1l lance contre ceux qui le poursuivent , les sucs fétides dont il estimbu ; il fait jaillir une liqueur limpide que l'on dit être son urine, et qui, dans certaines circonstances, est plus où moins nuisible. Î] trans- pire de tout son corps une humeur laïiteuse, et 1l découle de sa bouche une bave qui peut infecter les herbes et les fruits sur les- quels il passe, de maniere à incommoder ceux qui en mangent sans les laver. Cette bave et cette humeur laiteuse peuvent être un venin plus ou moins actif, ou un corrosif plus ou moins fort, suivant la température, la saison, et la nourriture des crapauds, l'espèce de l'animal sur lequel il agit , et la nature de la partie qu'il attaque. La trace du crapaud peut donc être, dans certaines cir- constances, aussi funeste que son aspect est dégoütant. Pourquoi donc laisser subsister un animal qui souille et la terre et les eaux, et même le regard ? Mais comment anéantir une espèce aussi fe- conce et répandue dans presque toutes les contrées ? Le crapaud habite pour l'ordinaire dans les fossés , surtout dans ceux où une eau fétide croupit depuis long-temps; on le 5 Le doist intérieur est gros, mais très-court ét peu semsihle dans le squelette. 286 HISTOIRE NATURELLE trouve dans les funfers, dans les caves, dans les autres profonds ; dans les forêts où 1l peut se dérober aisément à la clarté qui le blesse en choisissant de préférence les endroits ombragés , som- bres, solilaires, en s’enfonçant sous les décombres, et sous les tas de pierres : el combien de fois n’a-t-on pas été saisi d’une espèce d'horreur, lorsque , soulevant quelque gros caillou dans des bois hunmudes , on a découvert un crapaud accroupi contre terre, ani- mant ses gros yeux, et gonflant sa masse pustuleuse ? C’est dans ces divers asiles obscurs qu'il se tient renfermé pen- dant tout le jour , à moins que la pluie ne l’oblige à en sortir. Il y a des pays où les crapauds sont si fort répandus, comme auprès de Carthagène et de Porto-Bello en Amérique , que non- seulement lorsqu'il pleut ils y couvrent les terres humides et ma- récageuses , mais encore les rues, les jardins et les cours , et que les habitans de ces provinces de Carthagène et de Porto - Bello ont cru que chaque goutte de pluie étoit changée en crapaud. Ces animaux présentent même, dans ces contrées du nouveau monde, un volume considérable ; les moins grands ont six pouces de longueur. Si c'est pendant la nuit que la pluie tombe, ils aban- donuent presque tous leur retraite, el alors ils paroissent se tou- cher sur la surface de la terre, qu’on diroit qu’ils ont entièrement envahie. On ne peut sortir sans les fouler aux pieds, et on pré- tend même qu'ils y font des morsures d'autant plus dangereuses, aue, indépendamment de leur grosseur, ils sont, dit-on, trés- venimeux. Il se pourroit en eflet que l'ardeur de ces contrées, et la nourriture qu'ils y prennent, viciassent encoredavantage la na- ture de leurs humeurs. Pendant l'hiver, les crapauds se réumissent plusieurs ensemble, dans les pays où la température, devenant trop froide pour eux, les force à s'engourdir : 1ls se ramassent dans le même trou , appa- remment pour augmenter et prolonger le peu de chaleur qui leur reste encore. C'est dans ce temps qu’on pourroit plus facile- ment les trouver , qu'ils ne pourroient fuir, et qu'il faudroit chercher à diminuer leur nombre. : Lorsque les crapauds sont réveillés de leur long assou pissement, ils choisissent la nuit pour errer et chercher leur nourriture : ils vivent, comme les grenouilles, d'insectes, de vers, de scarabées, de limaçons; mais on dit qu'ils mangent aussi de la sauge, dont ils aiment l'ombre , et qu'ils sont surtout avides de ciguë, que l’on a quelquefois appelée /e persil du crapaud. DU CRAPAUD COMMUN. 287 Toorsque les premiers jours chauds du printemps sont arrivés, on les entend , vers le coucher du soleil, jeter un cri assez doux : apparemment C’est leur cri d'amour ; et faut-il que des êtres aussi hideux en, éprouvent l'influence, et qu’ils paroïissent même le ressentir plus tôt que les autres quadrupèdes ovipares sans queue? Mais ne cessons jamais d’être historien fidèle; ne négligeons rien de ce qui peut diminuer l’espèce d'horreur avec laquelle on voit ces animaux; et en rendant compte de la manière dont ils s’unis- sent n’ometions aucun des soins qu'ils se donnent, et qui pa- roitroient supposer en eux des attentions particulières, et une sorte d'affection pour leurs femelles. C’est en mars ou en avril que les crapauds s ‘accouplent: le plus souvent c'est dans l’eau que leur union a lieu, ainsi que celle des grenouilles et des raines. Mais le mâle saisit sa femelle souvent fort loin des ruisseaux et les marais; 1l se place sur son dos, l'embrasse étroitement, la serre avec force: la femelle, quoique surchargée du poids du mâle , est obligée quelquefois de le porter à des distances considérables , mais ordinairement elle ne laisse échapper aucun œuf que lorsqu'elle a rencontré l’eau. Ils sont accouplés pendant sept ou huit jours, et même pen- dant plus de vingt, lorsque la saison ou le climat sont froids; ils coassent tous deux presque sans cesse. et le mâle fait souvent en- tendre une sorte de grosnement assez fort , lorsqu'on veut l’arra- cher à’sa femelle , ou lorsqu'il voit approcher quelque autre mâle, qu’il semble regarder avec coitre, et qu'il tâche de repousser en allongeant ses pattes de derrière. Quelque blessure qu’il éprouve, il ne la quitte pas : si on l'en sépare par force , il revient à elle dès qu'on le laisse libre, et 1l s’accouple de nouveau , quoique privé de plusieurs membres, el tout couvert de plaies sanglantes. Vers la fin de l'accouplement, la femelle pond ses œufs ; le mâle les ramasse quelquefois avec ses pailes de derrière, et les entraîne au-dessous de son anus, dont ils paroïssent sortir; il les féconde et les repousse ensuite. Cès œufs sont renfermés dans une liqueur transparente, visqueuse, où ils forment comme deux ons toujours attachés à l’anus de la femelle. Le mâle et la femelle mon- tent alors à la surface de l’eau pour respirer; au bout d’un quart d'heure ils s’'enforicent une seconde fois pour pondre ou féconder de nouveaux œufs ; et ils paroissent ainsi à la surface des marais, et disparoïssent plusieurs fois. À chaque nouvelle ponte, les cor- dons qui renferment les œufs s’allongent de quelques pouces : 288 HISTOIRE NATURELLE il y a ordinairement neuf ou dix pontes. Lorsque tous les œufs sont sortis et fécondés, ce qui n'arrive souvent qu'après douze heures, les cordons se détachent: ils ont alors quelquefois plus de quarante pieds de long; les œufs dont la couleur est noire v sont rangés en deux files, et placés de manière à occuper le plus petit espace possible : on à rencontré de ces œufs à sec dans le fond de bassins et de fossés dont l’eau s’étoit évaporée. Les crapauds craignent autant la lumière dans le moment de leurs plaisirs que dans les autres instans de leur vie : aussi n’est- ce qu’à la poinie du jour, et même souvent pendant la nuit, qu'ils s'unissent à leurs femelles. Les besoins du mâle paroissent sub- sister quelquefois après que ceux de la femelle ont été satisfaits, c’est-à-dire apres la ponte des œufs. M. Roesel en a vu rester accouplés pendant plus d’un jour, quoique la femelle ni le mâle ne laissassent rien sortir de leur corps, et qu’en disséquant la femelle, il ait vu ses ovaires vides. On retrouve donc dans cette espèce la force tyrannique du mâle, qui n'attend pas, pour s'unir de nouveau à sa femelle, qu’un besoin mutuel les rassemble par la voix d’un amour commun , mais qui la contraint à servir à ses jouissances lors même que ses désirs ne sont plus partagés ; et cet abus de ja force qu'il peut exercer sur elle ne paroît-il pas exis- ter aussi dans la maniere dont il s’en empare, pendant qu'ils sont encore éloignés du seul endroit où ses jouissances semblent pou- voir être communes à celle qu’il s’est soumise? Il se fait porter par elle, et commence ses plaisirs, pendant qu'elle ne paroît ressentir encore que la peine de leur union. Nous devons cependant convenir que, dans la ponte, les mâles des crapauds se donnent quelquefois plus de soins que ceux des grenouilles, non-seulement pour féconder les œufs, mais encore pour les faire sortir du corps de leurs femelles, lors- qu'elles ne peuvent pas se défaire seules de ce fardeau. On ne peut guère en douter d’après les observations de M. Demours sur un crapaud terrestre trouvé par cet académicien dans le Jardin du Roi, surpris, troublé, sans être interrompu dans ses soins, et non -seulement accouplé hors de l’eau, maïs encore aidant avec ses pattes de derrière la sortie des œufs, que la femelle ne pouvoit pas faciliter par les divers mouvemens qu’elle exécute lorsqu'elle est dans l'eau *. NA. Re ST Len A ONE dei * Laurent a fait une espèce particulière du crapaud observé par M. Demouis; DU CRAPAUD COMMUN. 289 Au reste, des œufs abandonnés à terre ne doivent pas éclore, à moins qu'ils ne iombent dans quelques endroits assez obscurs, assez couverts de vase, et assez po d'humidité, pass que les petits crapauds puissent s'y nour:ir et s'y dév lopper Les cordons augmentent de volume ei même 1 et en même proportion que les œufs, qui, au bout de dix où douze jours, ont le double de grosseur que lors de la porte; 1: globules renfermés dans ces œufs, et qui d’abord sont noirs d’un coté et blanchätres de l’autre, se couvrent peu à peu de Hineam:as ; au dix-septième ou dix-huitième jour on apérçoit ie petit tétard ; deux ou trois jours après il se dégage de la matière visqueuse qui enveloppoit les œufs; il s’eflorce alors de gagner la surfice de l'eau , mais il retombe bientôt au fond ; au bout de queluries jours il a de chaque côté du cou un organe qui a quelques "apports avec les ouïes des poissons ; Qui est divisé en cinq ou six appen- dices frangées, et qui disparoît tout-à-fait le vingt-troisieme ou de vingt-quatrième jour. il sembie d’abord ne vivre que de Ia vase et des ordures qui nagent dans l'eau , mais, à mesure qu'il devient plus gros, il se nourrit de plantesaquatiques. Son déve- loppement se fait de la même manière que celui des jeunes gre- nouilles ; et lorsqu'il est entièrement forme , il sort de l’eau , et va à terre chercher les endroits humides. Il en est des crapauds communs comme des autres quadru- pèdes ovipares : ils sont beaucoup plus grands et beaucoup plus venimeux à mesure qu'ils habitent des pays plus chauds et plus convenables à leur nature. Parmi les individus de cette espèce qui sont conservés au Cabinet du Roï, il ÿ en a un qui a quatre pouces et demi de longueur, depuis le museau jusqu’à l’anus. On en trouve sur la côte d'Or d’une grosseur si prodigieuse, que lors- qu’ils sont en repos, on les prendroit pour des tortues de terre : ils y sont ennemis mortels des serpens; Bosman a été souvent le témoin des combats que se livrent ces animaux. Il doit être cu- rieux de voir le contraste de la lourde masse du crapaud, qui se gonfle et s’agite pesamment, avec lesmouvemens prestes et rapides des serpens, lorsque, irrités tous les deux, et leurs yeux en feu, l’un résiste par sa force et son inertie aux efforts que son ennemi il lui a donné le nom de bufo obstreticans : mais nous ne voyons rien qui doive faire séparer cet animal du crapaud commun. 1 Les œufs des crapauds se dévelo; pent , quoique la température de l'atmosphère ne soit qu'a six degrés au-dessus de zéro du thermomètre de Réaumur. Lacepède. 1. 19 290 HISTOIRE NATURELLE fait pour l’étoufler au milieu des replis de son corps toriueux, et que ious deux cherchent à se donner la mort par leurs mor- sures et leur venin fétide, ou leurs liqueurs corrosives. Ce n’est qu'au bout de quatre ans que le crapaud est en état de se reproduire. On a prétendu que sa vie ordinaire n’étoit que de quinze ou seize ans : mais sur quoi J'a-t-on fondé ? avoit-on suivi avec soin le même crapaud dans ses retraites écartées ? avoit-on recueilli un assez grand nombre d'observations pour reconnoître la durée ordinaire de la vie des crapauds, indépen- damment de tout accident et du défaut de nourriture ? Nous avons au contraire un fait bien constaté, par lequel il est prouvé qu’un crapaud a vécu plus de trente -six ans : mais la manière dont il a passé sa longue vie va bien étonner ; elle prouve jusqu’à quel point la domesticité peut influer sur quelque animal que ce soit, el surtout sur les êtres dont la nature est plus sus- ceptible d’aliération , et dans lesquels des ressorts moins compli- qués peuvent plus aisément , sans se rompre ou se désunir, être pliés dans de nouveaux sens. Ce crapaud a vécu presque toujours dans une maison où il a été, pour ainsi dire, élevé et apprivoisé. Il n'y avoit pas acquis , sans doute, cette sorte d'affection que l’on remarque dans quelques espèces d'animaux domestiques , -et qui étoit trop incompatible avec son organisation el ses mœurs; mais il y étoit devenu familier. La lumière des bougies avoit été pendant long-temps pour lui le signal du moment où il alloit recevoir sa nourriture : aussi non - seulement il la voyoit sans crainte, mais même 1! la recherchoit, I étoit déjà très-gros lors- qu'il fut remarqué pour la première fois ; 1l habitoit sous un es- calier qui éloit devant la porte de la maison ; il paroïssoit tous les soirs au moment où il apercevoit de la lumière , et levoit les yeux comme s'il eût atiendu qu'on le prît et qu'on le portât sur une table, où il trouvoit des insectes, des cloportes, et surtout de petits vers qu’il préféroit peut-être à cause de leur agitation continuelle : il fixoit les yeux sur sa proie ; tout d’un coup il lançoit sa langue avec rapidité et les insectes ou les vers y demeu- roient attachés, à cause de l’humeur visqueuse dont l'extrémité de cette langue étoit enduite. : Comme on ne lui avoit jamais fait de mal, il ne s’irritoit point Jorsqu’on le touchoit ; il devint l'objet d’une curiosité générale, elles dames mêmes demandèrent à voir le crapaud familier. F1 vécut plus de trente - six ans dans cette espèce de domest:- __. DU CRAPAUD COMMUN. 291 cité ; et il auroit vécu plus de temps peut-être, si un corbeau apprivoisé comme lui ne l’eût attaqué à l'entrée de son trou, ét ne lui eùt crevé un œil, malgré tous les efforts qu’on fit pour: le sauver. Il ne put plus atiraper sa proie avec la même facilité, parce qu'il ne pouvoit juger avec la même justesse de sa véritable place : aussi périt-1l de langueur au bout d’un an. Les différens faits observés relativement à ce crapaud pendant sa domeslicité prouvent peut-être qu'on a exagéré la sorte de méchanceté et les goûts sales de son espèce. On pourroit dire ce- pendant que ce crapaud habitoit Angleterre, et par conséquent à une latitude assez élevée pour que toutes ses mauvaises habitudes fussent tem pérées par le froid. D'ailleurs trente-six ans de domesti- cité, de sûreté et d’abondance, peuvent bien changer les inclina- tions d’un animal tel que le crapaud, le naturel des quadrupèdes ovipares paroiïssant, pour ainsi dire, plus flexible que celui des animaux mieux organisés. Que l’on croie tout au plus qu'avec moins de dangers à courir, et une nourriture d’une qualité par- üculitre, l'espèce du crapaud pourroit être perfectionnée comme tant d’antres espèces. Mais ne faudra-t-il pas toujours reconnoîire dans les individus dont la Nature seule aura pris soin, les vices de confornation et d'habitudes qu’on leur a attribués ? Comme l'art de l'homme peut rendre presque tout utüle, puisqu'il change quelqueiois en médicamens salutaires les poi- sons les plus funestes, on s’est servi des crapauds en médecine ; on les y a employés de plusieurs manières et contre plusieurs maux. On trouve plusieurs observations , d’après lesquelles :l paroi- troit , au premier coup d'œil, qu’un crapaud a pu se développer _et vivre pendant un nombre prodigieux d’années dans le creux d’un arbre ou d’un bloc de pierre , sans aucune communication avec l'air extérieur. Mais on ne l’a pensé ainsi que parce qu’on n'avoit pas bien examiné l'arbre ou la pierre avant de trouver le crapaud dans leurs cavités. Cette opinion ne peut pas être ad- mise ; mais cependant on doit regarder comme très-sûr qu’un crapaud peut vivre très-long-temps , et même jusqu’à dix-huit mois, sans prendre aucune nourriture , en quelque sorte sais respirer , et toujours renfermé dans des boîtes scellées exacte- ment. Les expériences de M. Hérissant le mettent hors de doute; et ceci est une nouvelle confirmation de ce que nous avons dit dans notre premier Discours touchant la nature des quadrupèdes oVipares, 292 HISTOIRE NATURELLE Voyons maintenant les caractères qui distinguent les crapauds difiérens au crapaud commun, tant en Europe que dans les pays élrangers : il n’est presque aucune latitude où la Nature n'ait prodigué ces êtres hideux , dont il semble qu’elle n’a diver- sifié les espèces que par de nouvelles difformités , comme si elle avoit voulu qu'il ne manquât aucun trait de laideur à ce genre disgracié. AA AAA AAA ASE LARMES VE AAA VA LUE VUE LAURE LE VERT. Ox trouve auprès de Vienne , dans les cavités des rochers ow dans les fentes obscures des murailles, un crapaud d’un blanc livide , dont le dessus du corps est marqué de taches veries légè- rement ponctuées , entourées d’une ligne noire, et, le plus sou- vent, réunies plusieurs ensemble. Tout son corps est parsemé de verrues , excepté le devant de la gueule ét les extrémités des pieds; elles sont livides sur le ventre, vertes sur les taches vertes, et rouges sur les intervalles qui séparent ces taches. Il paroïît quedes liqueurs corrosives que répand ce crapaud peuvent être plus nuisibles que celles du crapaud commun : sa respiration est accompagnée d’un gonflement de la gueule. Dans la colère , ses yeux étincellent; et son corps , enduit d’une hu- meure visqueuse , répand une odeur fétide, semblable à celle de la morelle des boutiques ( solanum nigrum ), maïs beaucoup plus forte. Il tourne toujours en dedans ses deux pieds de devant. Comme il habite le même pays que le crapaud commun, on ne peut décider que d’après plusieurs observations si les diflérences qu’il présente, quant à ses couleurs, à la disposition de ses verrues, eic., doivent établir entre cet animal et le crapaud commun une diversité d'espèce ou une simple variété plus ou moins constante. Suivant M. Pallas, le crapaud vert, qu'il nomme rana sitibunda , se trouve en assez grand nombre aux environs de la mer Cas- pisnne. 22 292 5 Page Tome 1. AS M K RQ? (© ny | Le) Ce] | 4 es) | ITS | ; ll . l , ue LL à ET | er. [a pan ln. 2 = el | È LS NN Ÿ ES Ex De « Le Brun. Ÿ. DU RAYON-VERT, 293 BALAI LU AAA ELA MU UE UT AAA AAA LE RAYON-VERT. Nov plaçons à la suite du vert ce crapaud, qui pourroit bien n'en être qu’une variété. Il est couleur de chair; son caractère distinctif est de présenter des lignes vertes, disposées en rayons, Il a été trouvé en Saxe. Nous invitons les naturalistes qui habitent l'Allemagne à re- chercher si l’on ne doit pas rapporter au rayon-vert, comme une variété plus ou moins distincte, le crapaud trouvé en Saxe, parmi des pierres, par M. Schreber, et que M. Pallas a fait con- noitre sous le nom de grenouille changeante. Ce crapaud est de la grandeur de la grenouille commune ; sa tête est arrondie ; sa bouche sans dents ; sa langue épaisse et char- nue ; les paupières supérieures sont à peine sensibles ; le dessus du corps est parsemé de verrues. Les pieds de devant ont quatre doigts ; ceux de derrière en ont cinq, réunis par une membrane. M. Edler, de Lubeck, a découvert que ce crapaud change sou- vent de couleur, ainsi que le caméléon et quelques autres lézards; ce qui établit un nouveau rapport entre les divers genres des quadrupèdes ovipares. Lorsque ce crapaud est en mouvement, sa couleur est blanche, parsemée de taches d’un beau vert, et ses verrues paroissent Jaunes. Lorsqu'il est en repos, la couleur verte des taches se change en un cendré plus ou moins foncé. Le fond blanc de sa couleur devient aussi cendré lorsqu'on le touche et qu'on l’inquiète. Si on l’expose aux rayons du soleil dont il fuit la lumière, la beauté de ses couleurs disparoît, et il ne pré- sente plus qu’une teinte uniforme et cendrée. Un pans de la même espèce, trouvé engourdi par M. Schreber ? présen toit entre les taches vertes une couleur de chair MONS AE à celle du rayon-vert. 29% HISTOIRE NATURELLE RARARAARARARANRAARARLARANRAAA LAS RAA VURAE LUE VA RAA AA LULU LL ELA SAR AAA GENS SO LE BRUN. a Cr crapaud a la peau lisse ,sans aucune verrue, et marquetée de grandes taches brunes qui se touchent : les plus larges et les plus foncées sont sur le dos , au milieu et le long duquel s'étend une petite bande plus claire. Les yeux sont remarquables en ce que la fenie que laisse la paupière en se contractant est située vertica- lement au lieu de l’être transversalement. Sous la plante des pieds de derrière qui sont palmés, on remarque un faux ongle qui a la dureté de la corne. La femelle est distinguée du mâle par les taches qu’elle a sous le ventre. Ce crapaud se trouve plus fréquemment dans les marais qu’au mieu des terres. Lorsqu'il est en colère, il exhale une odeur fétide semblable à celle de l'ail, ou de la poudre à canon qui brüle ; et cette odeur est assez forte pour faire pleurer. Dans l’accouplement, le mâle paroît prendre des soins parti- culiers pour faciliter la ponte des œufs de Ja femelle. Roesel soup- çonne qu'il est venimeux ; et Âctius et Gesner assurent même qu'il peut donner la mort, soit par son souffle empoisonné lors- qu'on l'approche de irop près, soit lorsqu'on mange des herbes imprégnées de son venin. Sans doute l'assertion de Gesner et d’Actius peut être exagérée : mais 1} restera toujours aux cra- pauds, et surtout au crapaud brun, assez de qualités malfai- santes pour justifier Faversion qu'ils inspirent. I paroît que c'est le crapaud brun que M. Pallas a nommé rana ridibunda ( grenouille rieuse }, qui se trouve en grand sombre aux environs de ia mer Caspienne , et dont le coasse- ment, entendu de loin, imite un peu le bruit que l'on fait en riant. DU CALAMITE. 295 L RAR LAVANDE LAN AS AAA IAA LR AVIAIRE LUE LE AU MAÉ LUE AA AAA GAL AA LUE A LA RAL LE CALAMITE. C'rsr encore un crapaud d'Europe qui a beaucoup de ressem- blance avec le crapaud brun , mais qui en diffère cependant assez pour constituer une espèce distincte. Il a le corps un peu étroit. Ses couleurs sont très-diversifiées : son.dos, qui est olivâtre, présente trois raies longitudinales, dont celle du milieu est cou- leur de soufre , et les deux des côtés, ondulées et denlelées , sont d’un rouge clair, mêlé d’un jaune plus foncé vers les parties in- férieures ; les côtés du ventre, les quatre pattes et le tour de la gueule , sont marquetés de plusieurs taches inégales et olivâtres. Voila la disposition générale des couleurs de la peau, sur la- quelle s'élèvent des pustules brunes sur le dos, rouges vers les côtés, d’un rouge pâle près des oreilles , et d’une couleur de chair éclatante vers les angles de la bouche , où elles sont groupées. L'extrémité des doigts est noirâtre, et garnie d’une peau dure comme de la corne, qui tient lieu d’ongle à l'animal. Au-dessous de la plante des pieds de devant se trouvent deux espèces d'os ou de faux ongles , dont le calamite peut se servir pour s'accro- cher : les doigts des pieds de derrière sont séparés. Le calamite se tient, pendant le jour, dans les fentes de la terre et dans les cavités des murailles. Au lieu d’être réduit à ne se mouvoir que par sauts, comme les autres quadrupèdes ovipares sans queue, il grimpe, quoique avec peine, et en s’arrêtant sou vent. À l’aide de ses faux ongles et de ses doigts séparés, il monte quelquefois le long des murs, jusqu’à la hauteur de quelques pieds , pour gagner sa retraite. On ne trouve pas ordinairement les calamites seuls dans leurs trous ; ils y sont rassemblés et ramassés au nombre de dix ou douze. C'est la nuit qu’ils sortent de leur asile, et qu'ils vont chercher leur nourriture. Pour éloigner leurs ennemis , ïls font suinter au travers de leur peau une liqueur dont l'odeur, sen- blable à celle de la poudre enflammée , est encore plus forte. Au mois de juin , ceux qui ont atieint l’âge de trois ans, et à peu près leur entier accroissement, se rassemblent pour s'ac- coupler sur le bord des marais remplis de jones, où ils font en- 296 HISTOIRE NATURELLE endre un coassement retentissant et singulier. On pourroit pen- ser que les hab'tudes particulières de ces crapauds influent sur la nature de leu : humeurs, et empêchent qu’ils ne soient ve- nimeux ; cependant Roëesel a présumé le contraire, parce que, suivant Iu:, les cigogres, qui sont fort avides de grenouilles, n'atiaquent point les cälamites. PANIER EVER SIA VAN VIA VE METAL VAS VU AAMMAS LE COÛULEUR-DE-FEU". € M. Laurenti a découvert ce crapaud sur les bords du Danube. C'est un des plus petits Son dos , d’une couleur olivâtre très- foncée , est tacheté d’un noir sale ; mais le ventre, la gueule, les pattes et la plante des pieds, sont d’un blanc bleuâtre , tachété d'un beau vermillon , et c’est de là que lui vient son nom. Toute la surface de son corps est parsemée de petites verrues. Quand il est exposé au soleil, sa prunelle prend une figure parfaitement triansculare , dont le contour est doré. Cette espèce est très-nom- breuse dans es marais du Danube. Une variété de ce crapaud a le ventre noir, tacheté et ponctué de blanc. On trouve le couleur-de-feu à terre pendant l’automne. Lors- qu on l'approche et qu'il est près de l’eau , 1l s'y élance avec légè- reté, ainsi que les grenouilles ; mais s'il ne voit aucun moyen d'échapper, il s’affaisse contre terre comme pour se cacher. Dès qu'ou le touche, sa tête se contracte et se jette en arrière; si on le tourmente , il exhale une odeur fétide, et répand par l'anus une sorie d’écrme. Son coassement , qu'il fait entendre sans en- Îler sa gorge , est une sorte de grognement sourd et entrecoupé, qui quelquefois se prolonge et ressemble un peu, suivant M. Lau- renti, à la voix d’une personne qui rit. Les œufs, hors du corps de la femelle, sont disposés par pelo- tons, ainsi que ceux des grenouilles , au lieu d’être rangés par files, comme les œufs du crapaud commun. Et ce qu’il y a de remarquable dans les habitudes de ce petit animal, qui semble faire, à certains égards, la nuance entre les crapauds et les gre- 0 D = EPP * Feuer krote , en 4llemend, DU BOSSU. 297 nouilles, c’est qu'au lieu de craindre la lumiere, 1l se plait, sur le bord de l'eau, à s’imbiber des rayons du soleil. Il ne paroït pas , d’après les expériences de M. Laurenti, que les humeurs du couleur-de-feu aient d'autre propriété nuisible que celle d’as- soupir certains pelits animaux , tels qué les lézards gris, qui sont très-sensibles à toute sorte de venin, ainsique nous l'avons déjà dit. RAA RIRE MMA LR 1 PARA AAA A AAA EU AAA AAA AAA AR LE PUSTULEUX. mg Ox+ trouve dans les Indes ce crapaud , remarquable par ses doigts garnis de tubercules semblables à des épines, et par les vésicules ou pustules qui le couvrent. Sa couleur est d’un roux cendré ; elle est plus claire sur les côtés et sur le ventre, où elle est tachetée de roux. Il a quatre doigts séparés aux pieds de de- vant, et cinq doigts palmés aux pieds de derrière. AR AAA A MAAAAA AA AA VV AA A AV MAV MUV AV AAAA MULMMA MMAY ns 0 - LE GOITREUX. Ç ox corps arrondi est d’une couleur rousse. Son dos est sillonne par trois rides longitudinales ; son bas-ventre paroît enflé; et cet animal est surtout distingué par un gonflement considérable à la gorge. Les deux doigts extérieurs de ses pieds de devant sont réu- nis. Il habite dans les Indes. AA MAR A AAA A AAA A AAA A A A AA A A MU EVE A MM AA MA MMA Au LE BOSSU. A 1 S 4 La tête de ce crapaud est très-petite, obtuse et enfoncée dans la poitrine. Son corps ridé, mais sans verrues , est très-convexe. Sa gouleur est nébuleuse; son dos présente une bande longitudinal 298 HISTOIRE NATURELLE un peu pâle et dentelée. Tous ses doigts sont séparés les uns des autres : 1l en a quatre aux pieds de devant, et six aux pieds de der- rière. On le trouve dans les Indes orientales , ainsi qu'eh Afrique. L’individu que nous avons décrit a été apporté du Sénégal au Cabinet du Roi. RAARAANAARAA VAR RAA AAARAA AAA AAA AAA AR AR AA NA RAA AAA AAA AA AAA AAA ARR LE PIPA:. D: tous les crapauds de l'Amérique méridionale, l’un des plus remarquables est le pipa. Le mâle et la femelle sont assez diffé- rens l’un de l’autre, tant par la grandeur que par la conforma- ton, pour qu'on les regarde , au premier coup d'œil, comme deux espèces très-distinctes. Aussi, au lieu de décrire l'espèce en général, croyons-nous devoir parler séparément du mâle et de la elle. Le mäle à quatre doigts séparés aux pieds de devant , et cinq doigts palmés aux pieds de derrière. Chaque doigt des Eee de décant est fendu à l'extrémité en quatre petites parties. On à peine à distinguer le corps d’avec la tête. L'ouverture de la gueule est très-grande ; les yeux, placés au-dessus de la tête, sont très- petits et assez distans l'un de l’autre. La tête et le corps sont très- aplatis. La couleur générale en est olivâtre, plus ou moins claire, et semée de tres-petites taches rousses ou rougeätres. La femelle diffère du mâle, en ce qu’elle est beaucoup plus grande. Elle a également la tête et le corps aplatis ; mais la tête est triangulaire, et plus large à la base que la partie antérieure du corps. Les yeux sont très-petits et très-distans l’un de l'autre, ainsi que dans le mâle. Elle a de même cinq doigts palmés aux pieds de derrière, et quatre doigts divisés aux pieds de devant; mais chacun de ces quatre doigts est fendu à l’extrémité en quatre petites parties plus sensibles que dans le mâle. Son corps est communément hérissé partout de très-petites verrues. L’individu femelle qui est conservé au Cabinet du Roi a cinq pouces quatre lignes de longueur, depuis le bout du museau jusqu'à l'anus. L_? Cururu, dans l'Amérique méridionale. DU PIPA. 298 Ce qui rend surtout remarquable ce grand crapaud de Suri- nam , c’est la manière dont les fœtus de cet animal croissent, se développent et éclosent. Les petits du pipa ne sont point conçus sous la peau du dos de leur mère, ainsi que l’a pensé mademoi- selle de Mérian, à qui nous devons les premières observations sur cet animal; mais, lorsque Les œufs ont été pondus par la fe- melle et fécondés par le mâle de la même manière que dans tous les crapauds , le mâle, au lieu de les disperser, les ramasse avec ses pattes, les pousse sous son ventre, et les étend sur le dos de la femelle , où ils se collent. La liqueur nt da mâle fait en- fler la peau et tous les tégumens du dos de la femelle, qui forment alors autour des œufs des sortes de cellules. Les œufs cependant grossissent, et doivent éprouver, par la chaleur du corps de la mère, un développement plus rapide en proportion que dans les autres espèces de crapauds. Les petits éclosent , et sortent ensuite de leurs cellules, après avoir passé en quelque sorte par l’état de tétard; car ils ont, dans les premiers temps de leur développement, une queue qu ls n'ont plus quand ils sont prêts à quitter leurs cellules. Lorsqu'ils ont abandonné le dos de leur mère, celle-ci, en sé frottant contre des pierres ou des végétaux, se dépouille des por- tons de cellules qui restent encore, et de sa propre peau, qui tombe alors en Pape pour se renouveler. Mais la Nature n’a jamais présenté de phénomènes isolés ; l'ex- pression d’extraordinaire où de singulier n’est point absolue , mais seulement relative à nos connoissances, et elle ne désigne en général qu’un degré plus ou moins grand dans une propriété déjà existante ailleurs : aussi la manière dont les petits du pipa se développent n’est point, à la rigueur, particulière à cette es- pèce; on en remarque une assez semblable, même parmi les quadrupèdes vivipares, puisque les petits du sarigue ou opos- sum ne prennent, pendant quelque temps, leur accroissement que dans une espèce de poche que la femelle a sous le ventre. Au reste, il paroît que la chair de ce crapaud n’est pas malfai- sante ; et, suivant le rapport de mademoiselle de Mérian , les në- gres en mangent avec plaisir. 300 HISTOIRE NATURELLE AAA AAA AAA AA AAA VAT VA RAR AA VIT AAA RAARAAAE AA AAA RAA AAA MAR LE CORNU. Cr crapaud , que l’on trouve en Amérique , est l’un des plus hideux : sa tôle est presque aussi grande que la moitié de son corps; l'ouverture de sa gueule est énorme , sa langue épaisse et large; ses paupières ont la forme d’un cône aigu , ce qui le fait paroître armé de cornes dans lesquelles ses yeux seroient placés. Lorsqu'il est adulte , son aspect est affreux ; il a le dos et les cuisses hérissés d'épines. Le fond de sa couleur est jaunâtre; des raies brunes sont placées en long sur le dos, et en travers sur les pattes et sur les doigts. Une large bande blanchâtre s'étend depuis la tête jusqu'a l'anus. À l'origine de cette bande, on voit de chaque côté une petite tache ronde et noire. Ce vilain animal a quatre doigts séparés aux pieds de devant, et cinq doigts réunis par une membrane aux pieds de derrière. Suivant Seba , la femelle diffère du mâle ,en ce que ses doigts sont tous séparés les uns des autres. Le premier doigt des quatre pieds , étant d’ailleurs écarté des au- tres dans la femelle , donne à ces pieds une ressemblance impar- faite avec une véritable main , réveille une idée de monstruosité , et ajoute à l'horreur avec laquelle on doit voir cette hideuse fe- melle. Rien en effet ne révolte plus que de rencontrer au milieu de la diormité quelques traits des cbjets que l'on regarde comme les plus parfaits. RAR AAA AAA AAA AA AAA AA AA A AAA AAA EU AGE L’'AGUA. Cr grand crapaud , que l’on appelle au Brésil aguaquaquan, et dont le dessus du corps est couvert de petites éminences, est d’un gris cendré semé de taches roussâtres , presque couleur de feu. Il a quatre doigts séparés aux pieds de devant, et cinq doigts pal- més aux pieds de derrière. L'on conserve au Cabinet du Roi un individu de cette espèce, qui a sept pouces quatre lignes de lon- gueur , depuis le bout Gu museau jusqu’à l'anus. DU CRIARD. 301 LE MARBRÉ. Cr animal ressemble un peu à l’agua. Il a, comme ce dernier, quatre doigts divisés aux pieds de devant, et cinq doigts palmés aux pieds de derrière; mais il paroît être communément beau- coup plus petit. D'ailleurs le dessus du corps est marbré de rouge et d’un jaune cendré, et le ventre est jaune , moucheté de noir. RARAAAANA AAA AAA AAA AAA AAA RASE NUE LR à LE CRIARD. 1 criard, que lon trouve à Surinam, est un des plus gros cra- pauds. Sa peau est mouchetée de pue et de brun, et parsemée de verrues. Les épaules couvertes de points lan, de même que le ventre, sont relevées en bosse, et percées d’une multitude de petits trous. Il est aisé de le distinguer du marbré et du pipa que l’on trouve aussi à Surinam , parce qu'il a cinq doigts à cha- que pied ; les doigts des pieds de devant sont séparés , et ceux des pieds de derrière à demi palmés. Il habite les eaux douces, où il ne cesse de faire entendre son coassement désagréable; c’est ce qui V'a fait appeler /e musicien par M. Linné : mais le nom de criard, que lui a donné M. Daubenton, convient bien mieux à un ani- mal dont la voix rauque et discordante ne peut que troubler les concerts harmonieux ou le silence paisible de la Nature, et qui ne peut faire entendre qu’un coassement aussi désagréable pour l’o- reille que son aspect l'est pour les yeux. 302 HISTOIRE NATURELLE n148041%%144134:14h311%%17 RAA RAA RAA AAA AAA IAA AAA AUS VRAI A ARE REPTILES BIPÉDES. Nous avons vu le seps et le chalcide se rapprocher de l’ordre des serpens par l'allongement de leur corps et la briéveté de leurs paties : nous allons maintenant jeter les yeux sur un genre de repliles qui réunit encore de plus près les serpens êt les lézards. Nous ne le comprenons pas parmi les quadrupèdes ovipares, puis- que le caractère distinctif de ce genre est de n'avoir que deux pieds : mais nous le plaçons entre ces quadrupèdes et les serpens, Les reptiles qui le composent diffèrent des premiers, en ce qu'ils n’ont que deux pattes au lieu d’en avoir quatre; et 1ls sont dis- tingués des seconds par ces deux pieds qui manquent à tous les serpens. Îl seroit d’ailleurs fort aisé de les confondre avec ces der- niers , auxquels ils ressemblent par l'allongement du corps, les proportions de la tête et la forme des écailles. L'on a doute pendant long-temps de l'existence de ces animaux ; et en effet tous ceux que l’on a voulu jusqu'à présent regar- der comme des reptiles binèdes étoient des seps ou des chal- cides qui avoient perdu, par quelque accident, leurs pattes de devant ou celles de derrière : la cicatrice étoit sensible ; et ils pré- sentoient d’ailleurs tous les caractères des seps ou des chalcides : ou bien c’éloient des serpens mâles que l’on avoit tués dans la saison de leurs amours, lorsqu’au moment d'aller s'unir à leurs femelles 1ls font sortir par leur anus leur double partie sexueile, dont les deux portions s’écartent l’une de l’autre, et, étant gar- nies d’aspérités assez semblables à des écailles, peuvent être prises, au premier coup d’œil, pour des pattes imparfaites. On nous a souvent envoyé de ces serpens tués peu de temps avant léur accouplement, et qu’on regardoit comme des serpens à deux pieds, tandis qu’ils ne différoient des autres qu’en ce que leurs parties sexuelles éloient gonflées et à découvert. C'est parmi ces serpens surpris dans leurs amours que nous croyons devoir comprendre celui que M. Linné a placé dans le genre des anguis , et qu’il a nommé anguis bipède. On doit encore rapporter les prétendus reptiles bipèdes dont DES REPTILES BIPÈDES. 303 on a fait mentioh jusqu’à présent, à des larves plus ou moins développées de grenouilles, de raines, de crapauds et même de salamandres, tous ces quadrupèdes ovijpares ne présentant sou vent que deux pattes dans les premiers temps de leur accroisse- ment. Tel est, par exemple, l'animal que M. Linné a cru devoir placer non-seulement dans un genre, mais même dans un ordre particulier, et qu'il a appelé sirène lacertine. Il avoit été envoyé de Charles-town, par M. le docteur Garden, à M. Ellis : il avoit été pris à la Caroline , où on doit le trouver assez fréquemment, puisque les babitans du pays lui ont donné un nom ; ils lappel- lent rmud insguana. On le trouve communément sur le bord des étangs, et dans des endroits marécageux, parmi les arbres tombés de vétusté, etc Nous avons examiné avec soin la figure et la description que M Ellis en a données dans les 7ransactions philosophiques; et nous n'avons pas douté un seul moment que cet animal, bien loin de constituer un ordre nouveau, ne fül une larve; il a les caractères généraux d’un animal imparfait, et d’ailleurs 1l a les caractères particuliers que nous avons trouvés dans les salamandres à queue plate. A la vérité, cette larve avoit trente-un pouces de longueur ; elle éloit par conséquent beau- coup plus grande qu'aucune larve connue ; et c’est ce qui a em- pêché M. Linné de la regarder comme un animal non encore développé. Mais ne doit-on pas présumer que nous ne connois- sons pas tous les quadrupèdes ovipares de l'Amérique septen- trionale, et qu'on n’a pas encore découvert l’espèce à laquelle appartient ceite grande larve ? Peut-être l'animal dans lequel elle se métamorphose vit-1il dans l’eau de manière à n'être aperçu que très-difficilement. Cette larve, envoyée à M. Ellis, manquoit de pieds de derrière; ceux de devant n’avoient que quatre doigts, ainsi que dans nos salamandres aquatiques; les ongles étoient irès-petits ; les os des mâchoires crénelés et sans dents; il y avoit des espèces de bandes au-dessus et au-dessous de la queue; et de chaque côté du cou étoient trois protubérances frangées , assez semblables à celles qui partent également des deux côtés du cou, dans les salamandres à queue plate. Mais si jusqu’à présent les divers animaux que l’on a considérés comme de vrais reptiles bipèdes doivent être rapportés à des es- pèces de quadrupèdes ovipares, ou de serpens, nous allons don- ner, dans l'article suivant, la description d’un animal qui n’a que deux pieds, que l'on doit regarder cependant comme entièrement 36/4 HISTOIRE NATURELLE développé, et qu'il ne faut compter, par conséquent, ni parnii les serpens, n1 parmi les quadrupèdes ovipares. Nous traiterons ensuite d’un autre bipède qui doit être compris dans le même genre , et que M. Pallas a fait connoître. PREMIÈRE DIVISION. BIPEDES Qui manquent de pattes de derrière. LE CANNELÉ. Novs nommons ainsi un bipède qui n’a encore été décrit par aucun naturaliste, et dont aucun voyageur n’a fait mention. Il a été trouvé au Mexique par M. Vélasquès , savant Espagnol, qui la remis, pour nous l'envoyer, à M. Polony, habile médecin de Saint-Domingue : et c’est madame la vicomtesse de Fontanges, commandante de cette île, qui a bien voulu l’apporter elle-même en France , avec un soin que l’on nese seroit pas attendu à trouver dans la beauté, pour un reptile plus propre à l'effrayer qu’à lui plaire. Ce bipède est entièrement privé de pattes de derrière. Avee quelque soin que nous l'ayons examiné, nous n'avons aperçu dans toui son corps aucune cicatrice, aucune marque qui pül faire soupçonner que l'animal eût éprouvé quelque accident, et perdu quelqu'un de ses membres. Il a beaucoup de rapports, par sa con- formation générale, avec le lézard que nous avons nommé chal- cide; les écailles dont il est revêtu soni également disposées en anneaux : mais il diffère du chalcide , non-seulement en ce qu'il n'a que deux pattes, mais encore en ce au’il a la queue très-courte, au lieu que ce dernier lézard l'a très-longue, en proportion du corps, Il est tout couvert d’écailles, presque carrées, et disposées en demi-anneaux sur le dos, ainsi que sur le ventre; ces demi- anreaux se correspondent de manière queles extrémités des demi DU CANNELÉ. 305 anneaux supérieurs aboutissent à la ligne qui sépare les demi-an - neaux inférieurs, C'est par cette disposition qu'il diffère encore des chalcides , dont les écailles forment des anneaux entiers au- tour du corps. La ligne où se réunissent les demi-anneaux supé- rieurs et les demi-anneaux inférieurs, présente, de chaque côté et le long du corps , une espèce de sillon qui s'étend depuis la tête jusqu’à l'anus. La queue, au lieu d’être couverte de demi-anneaux, ainsi que le corps, est garnie d’anneaux entiers , com posés de petites écailles de mème formeet de même grandeur que celles des demi-an- neaux. L’assemblage de ces écailles forme un grand nombrede stries longitudinales; laréunion des anneaux produit aussi un très-grand nombre de cannelures transversales , et c’est de là que nous avons tiré le nom de cannelé que nous donnons au bipède du Mexique. Nous avons compté cent cinquante demi-anneaux sur le ventre de cet animal, ettrente - un anneaux sur sa queue, qui et grosse et ar- rondie à l'extrémité. La longueur totale de cet individu est de huit pouces six lignes; celle de la queue, d’un pouce; et son diametre, dans sa plus grande grosseur, est de quatre lignes. La tète a trois li- gnes de longueur; elle est arrondie par-devant , et on a peine à l« distinguer du corps. Le dessus en est couvert d’une grande écaille ; le museau est garni de trois écailles plus grandes que celles des anneaux, et dont les deux extérieures présentent chacune un très-petit trou , qui est l'ouverture des narines. La mâchoire in- férieure est aussi bordée d’écailles un peu plus grandes que celles des anneaux ; les dents sont très-petites ; les yeux à peine visibles et sans paupieres : je n’ai pu remarquer aucune apparence dé trous auditifs. Les pattes , qui ont quatre lignes de longueur , sont recouvertes de petites écailles, semblables à celles du corps, et disposées en anneaux ; il y a, à chaque pied, quatre doigts bien séparés, garnis d'ongles longs et crochus; et à côté du doigt exté- rieur de chaque pied, on aperçoit comme le commencement d’un cinquième doigt. Nous n'avons pu remarquer aucun indice de pattes de derrière, ainsi que nous l'avons dit, aucun anneau du corps ni de la queue n'est interrompu, et rien n'indique que l'animal ait éprouvé quelque accident, ou reçu la plus légère blessure. L'ouverture de l'anus s'étend transversalement ; et sur son bord supérieur, nous avons compté six tubercules percés à leur extrémité, et entièrement semblables à ceux que nous avons vus sur la face intérieure des cuisses de l’iguane, du lézard vert, du gecko, etc. Lacepède, 1. 29 306 HISTOIRE NATURELLE La queue du bipède cannelé étant aussi grosse à son extrémité que la tête de cet animal, il a beaucoup de rapports, par sa con- formation générale, avec les serpents que M. Tinné a nommés am- phisbènes, dont les écailles sont également disposées en anneaux; Îles yeux très-peu visibles, la tête et le bout de la queue presque de la même grosseur , et qui manquent aussi de trous auditifs. C’est parmi ce genre d’amphisbènes qu’il faudroit placer le can- nelé s’il n’avoit point deux pattes; et c’est particulièrement avec ce genre qu'il lie l’ordre des quadrupèdes ovipares. Comme cet animal a été envoyé an Cabinet du Roi dans du tafia , nous n’a- vons pu juger de sa couleur naturelle; mais nons avons présumé qu'elle est ordinairement verdâtre, el plus claire sur le ventre que sur le dos. Nous ignorons si on le trouve en très-grand nom- bre au Mexique, et quelles sont ses habitudes; mais nous pen- sons, d’après sa conformation , assez semblable à celles des seps et des chalcides, que son allure et sa manière de vivre doivent res- sembler beaucoup à celles de ces derniers lézards. RAA MA AAA AAA RAA AAA AA RAA AAA AA AR A AA AA AAA AAA AAA RAA AAA AAA AAA RAR AAA AAA AA A/R ST SECONDE DIVISION. BIPÉDES Qui manquent de pattes de devant. LE SHELTOPUSIK. . Novs donnons ici une notice d’un reptile à deux pattes, dont M. Pallas a parlé le premier. Nous lui conservons le nom de sheltopusik que lui donnent les habitans des contrées qu’il ha- bite; quoiqu'ils appliquent aussi ce nom à une véritable espèce de serpent, parc qu'il ne peut y avoir aucune équivoque relativement à deux animanx d’ordres ou du moins de genres différens. On le trouve auprès du Wolga, dans le désert sa- blonneux de Naryn , ainsi qu'aux environs de Terequm, prés du Kumam. Il demeure de préférence dans les vallées ombra- DU SHELTOPUSIK. 307 gées , etoù l'herbe croît en abondance. Il se cache parmi les ar- brisseaux, et fuit dès qu'on l'approche. TI fait la guerre aux petits lézards , et particulièrement aux lézards gris. Sa tête est grande, plus épaisse que le corps; le museau est obtus ; les bords de la gueule sont revètus d’écaillés un peu plus grandes que celles qui les touchent; les mâchoires garnies de petites dents, et les na- rines bien ouvertes. Le sheltopusik à deux paupières mobiles et des ouvertures pour les oreilles, semblables à celles des lé- zards. Le dessus de la tête est couvert des grandes écailles ; celles qui garnissent le corps et la queue, tant dessus que dessous , sont un peu festonnées et placées lès unes au-dessus des autres, comme les tuiles sur les toits. De chaque côté du corps s'étend une espèce de ride ou de sillon longitudimal; à l'extrémité dé chacun de ces sillons et auprès de Janus, on voit un très-petit pied, couvert de quatre écailles, et dont le bout se partage en deux sortes de doigts un peu aigus. La queue est beaucoup plus longue que le corps. La longueur totale du sheltopusik est or- dinairement de plus de trois pieds, et sa couleur, qui est assez uniforme sur tout le corps, est d’un Jaune pâle. On trouvera dans la note suivante * les principales dimensions de ce bipède, que M. Pallas a disséqué avec beaucoup de soin. pieds. pou. lig. * Longueur depuis le bont du museau jusqu’à l’anus. . . . . 1 GERS Longueur de la qneue. . . . . . . . . RS dia t S ICNETES LUTTE Longueur de la tête, depuis le museau jusqu'aux trous au- COURS Ne me te RE TS ed Da 1e rations ee t 62 Circonférence de la tête à sa base. . . . . . de AE TS LA 3 5 Circonférence du corps aü-devant de l’anus. . . . . . . . . . » 325 Circonférence de la queue à son origine. ..,...,... » DEN Loncuens des pieds. t JUL ENS RS 2 de à La sa 0 UNE = SYNOPSIS METHODICA QUADRUPEDUM OVIPARORUM. CLASSIS PRIMA. Quadrupedes ovipari caudati. GENUS PRIMUM. TESTUDO. Corpus testä obtectum. DIVISIO PRIMA. Rens pinni-formibus ; digitis valdè inæqualibus et elongatis. SPECIES. CHARACTERES. TESTUDO MARINA VULGARIS. Unguibus acutis plantarum solitariis. TESTUDO VIRIDI-SQUAMOSA. Squamis testæ superioris viridibus. CAoUANA. Unguibus acutis plantarum binis. TESTUDO NASICORNIS. Naso tuberculoso instar cornu elevato. CARETTA. Squamis disci imbricatis. Testà coriaceà, longitudinaliter quin- LyRA. que-angulata. DIVISIO SECUNDA. Digitis brevioribus et subæqualibus. SPECIES. CHARACTERES. Testà superiore nigrà , scutellis striatis TESTUDO LUTARIA. : : in medio punctatis. A Q Q A . É 1CU RE OR ICULARIS a superiore planiusculà et orb SYNOPSIS. METHODICA. 303 $PECIES. TERRAPEN, TESTUDO SERPENTINA. TESTUDO SUBRUBRA. TESTUDO SCORPIOIDES. TESTUDO FLAVA. TESTUDO MOLLIS. TESTUDO GRÆE€A, "FESTUDO GEOMETRICA. TESTUDO SCABRA. TESTUDO DENTICULATA. TESTUDO CARINATA. TESTUDO MINIATÀ. TESTUDO BREVICAUDATA. | TESTUDO PUNCTATA. TESTUDO SUBRUFA. TESTUDBO SUBNICRA. See. CHARACTERES. Testà superiore planiusculà et ovatà. Caudà longitudine testæ superioris pos- ticè acutè quinque-dentatæ. aculis flavis subrubrisque supra capuk et testam inferiorem. Testà superiore tribus lineis longituui- nalibus elevatà , quinque scutellis medii dorsi elongats , testà inferiore està superiore viridi, flavo macu- Li th superiore plicatili absque scutel- #1 “frs: {Testä superiore valde carinatà , marg:i- nibus latissimis, digitis membranä coopertis. Scutellis centro flavis flavoque radia- Scutellis albescentibus nigroque fascia- ts, in medioque dorsi valide eleva- is ; testà inferiore anticè denticu- Testäsuperiore subcordiformi, margine admodüm denticulatà. Test superiore valdè carinatà , scutel- lis subviridibus fiavoque lineatis ; tesià inferiore ovatà. utellis nigro, albo, purpuieo, sub- viridi, flavoque variegatis. Testà superiore anticè emarginatà ; scu- tellis striatis in medioque punctaus. Disco osseo punctatoque. Colore subrufo, testà superiore de- pressà , scutellis tenuibus. Colore subnigro , scutellis crassis vai dèque levibus. 3+6, SYNOPSIS METHODICA. GENUS SECUNDUM: LACERTUS. Corpus absque testa. DIVISIO PRIMA. Caucé compressé , pedibus anterioribus quinque-digitatis: SPECIES. Se CHARACTERES. “TA. nee : posterioribus quatuor digita- tis palmatisque, colore viridi luteo. Pedibus posterioribu uatuo 191. €ROCODILUS NIGER. bus posterioribus quatuor digi tatis palmatisque , colore nigro. tis palmatisque ; mandibulis coarctis, et elongatis. { Pedibus posterioribus quatuor-digita- GAVIAL. Pedibus posterioribus quinque-digita- “CAUDI-VERBERA. : us palmatisque. Pedibus posterioribus quinque-digitatis DRACÆNA. fissisque , squamis erectis supra can. dam. TÉRENAUÈTÉ Pedibus fissis, squamis squamulis cir- cumdatis. Squamis supra oculos et ab occipite ad ÉACERTUS SUPERCILIOSUS. aremialco ennleeccehis. Capitis parte superiore quasi bifur- catà. LACERTUS CAPITE . BIFURCATUS. FÉCERNTUS EATE DIGHTATUS articulis penultimus latioribus. Supra humeros binis nigrisque macu- LACERTUS BIMACULATUS, Le Duabus striis supra dorsum, latevibos plicatis, caudà supra duplici cariné. angulatà. ie infra collum, digitorura ELACERTUS SULCATUS. SYNOPSIS METHODICA. 3rx DIVISIO SECUNDA. Caudé rotundé , pedibus quinque-digitatis , dorso squamis erectis cristaio. SPECIFS. CHARACTERES. oulari 1amis à capitë FARIPS Sacco gulari dentato, squamis à capite ad extremitatem corporis erects. Basiziscus. Sacco supra caput erecto. Latà membranà squamisque supra LACERTUS CRI À : L COLE caudam erectis. Squamis circa aurium aperturas et ab CALOTES. occipite ad medium dorsi erectis ; unguium parte superiore nigrà. Abba Squamis supra partem anteriorem dor- ï si, erectis, occipitisque reversis: DIVISIO TERTIA. Caudé rotundé , pedibus anterioribus quinque digitaiis semiannulis squarnosis infr@ COTpus. SPECIES. .. CHARAETERES.- Colorecinereo, squamis majoribus a1- LACERTUS CINEREUS. ; fra collum. Colore viridi, squamis majoribus in- LACERTUS VIRIDIS. fra collum Circum caudam squamis in spinas desi- LAcERTUS CORDYLUS. nentibus annulosque latos et dent culatos componentibus. LACERTUS HEXAGONUS". Caudà sex-angulalà. Colore cinereo aut viridi, absque santa AMEIVA. Ë Un a mis majoribus infra collum. : nf: * DL Lucaiede tie Tribus Hneis albis totidemque nigris a utroque latere dorsi. 1 . . « A. 3 1 Hexagonum à me non visum semiannulos squamosos infra corpus habere præsumo : si hisce aupulis caret, post tegujzin ju quarta divisivne iustribtuuns exit. 312 SYNOPSIS MFTHODICA. SBACIES. CHARACTERES. | À septem usque ad undecim lineis al. LAGERTUS LEMNISCATUS. bescentibus supra dorsum, femori- bus albo punctatis. DIVISIO QUARTA. Caudé roturd&, pedibus anterioribus quinque-digitatis , absque serniannulis squamosis. SPECIES. CHARACTERES. CHAMÆLEO. ie ternis et binis membranà coa- dunatis. OR CE rt nes Quinque Jineis subflavis supra dorsum, caudà cyaneà. LACERTUS AZUREUS. Squamis acutis , dorso azureo. TAcERrUS CIN ERdoEMe VOD eMeraCEns subrufo punctato; verrucis supra dorsum. Umgra *. Occipite calloso, plicà gulari. upliei plicà gulari , binis verrucisspi- LACERTUS PLICATUS. Duplici phcäà gulari , binis verrucisspi nosis Circa aurium aperturas. ALGIRA. Quatuor lineis flavis supra dorsum. Tuberculis acutis supra infraque cor- STELLIO. pus, caudà annulis squamosis den- ticulatisque circumdatà. Squamis imbricalis , mandibulo supe- SCIN CUS. À : riore longiore. MaAgouyA Squamis imbricatis, mandibulis æqua- libus , caudà corpore breviore. Squamis imbricatis, lineà albescente LACERTUS AURATUS. ab utroque latere dorsi, caudà cor- pore longiore. TAPAYA. Corpore rotundato muricatoque. 1 Descriptiones auctorum indicant lacertos caudâ-cyanenm , azureum , cinera- ceum, umbram , plicatumque, à me non visos, semiannulis squamosis infra ven trem carere : si hos semiannulos squamosos haberent, in tertia divisione annume= randi essent, postque lacertum lemniscatum igscribendi. SYNOPSIS METHODICA. 313 SPECIES. CHARACTERES: Sex lineis flavis supra caput et quinqne LACERTUS STRIATUS. £ Ê quaq supra dorsum. Squamulis erectis infra collum, un- LACERTUS MARMORATUS. guium dorso nigro, caudà noyvem- angulatà. Colore xeramphelino flavo subnigro- RoQUuET. que maculato , membranulà ab utro- que latere ultimi digitorum articuis. Colore viridi, vesieulà rubrà infra col- LACERTUS COILO-RUBER. lum. Colore cinereo fusco variegalo, vesi- LACERTUS STRUMOSUS. culà granulis subrubris conspersà 1n- fra collum. TEGUIXIN. Lateribus valdè plicatis. LACERTUS TRIANGULARIS. Extremitate caudæ triangulatä. Duabus lineis subflavis , sexque subui- LACERTUS BI-LINEATUS. grorum punctorum ordinibus supra R dorsum. Verrucis squamosis infra ultimum di- SPUTATOR. g. gitorum articulum. DIVISIO QUINTA. Squamis majoribus imnbricatis infra digitos. SPECIES. CHARACTERES. Femorum superficie inferiore verruco- GECKo. sa, caudà squamulis lemniscos circu- (| lares componentibus tecta. Femorum superficie inferiore absqu GECKOTUS. PApER IFRS ARAIRS tuberculis. Capitis corporisque superficie inferior: LACERTUS CAPITE-PLANUS. planà , ab uiroque latere caudæ men- branà horizontal: D 14 SYNOPSIS METHODICA. DIVISIO SEXTA. Pedibus ter-digitafis. SPECIES. CHARACTERES, SEPS. Squamis imbricatis. CHALCIDES. Squamis annulos componentibus. DIVISIO SEPTIMA. Alis membranaceis. SPECIES. CHARACTERES. Drico li trinis elongatisque infra col ne lum. DIVISIO OCTAVA. Pedibus anterioribus ter aut quatuor posterioribusque quatuor aut quinque-digitatis. SPECIES. CHARACTERES. SaLAMANDRA rerresrris, | Caudà rotundà, maculis flavis nigro- 1 que punctatis. SALAMANDRA CAUDA- Supra infraque caudam membranà ver- PLANA. À tocali. SALAMANDRA PUNCTATA. Dorso dupluci serie albo punctato. SALAMANDRA QUATUOR- En ; LINEATA. | Dorso lineis quatuor flavis. SARROURE Unguibus incurvatis, majoribusque : squamis infra digitos imbricatis. SALAMANDRA TER-— { Pedibus anterioribus ter-digitatis, pos- DIGITATA. terioribusque quatuor. SYNOPSIS METHODICA. 315 RAA MARAIA AAA AAA ANAAANA RAA AAARAAMAA ANA. CLASSIS SECUNDA. Quadrupedes ovipari ecaudati. GENUS PRIMUM. RANA. Caput corpusque elongata , unum aut alterum angulosurm. SPECIES. RANA VULGARIS. RANA RUFA. RANA PLUVIALIS. RANA SONANS. RANA MARGINATA. RANA RETICULARIS. RANA PALMATA. RANA HUMERIS ARMATA. RANA BOANS. RANA GEMMATA. JACKIE. : RANA LEMNISCATA. CHARACTERES. Colore viridi, tribus lineis flavis su- pra dorsum , exterioribus elevatis. Jatere oculos inter et pedes anterio- {te rufo , maculà nigrà ab utroque res. Verrucis supra dorsum, ano subtus puuctato. dorsum , plicà transversali infra col- Jum. = nigro, punctis elevatis supra Eateribus marginatis. Corpore venuloso, pedibus fissis. Pedibus auterioribus posterioribusque palmatis. Supra humeros scuto carnoso , quatuor verrucis ad anum. Tuberculis infra singulos digitorum.ar- ticulos. Capite triangulari, granulis subrubris supra dorsum. Colore subviridi maculato , femoribus posticè et oblique striatis, Quatuor aut quinque lineis longitudi- nalibus elevatisque supra dorsum. 316 SYNOPSIS METHODICA. GENUS SECUNDUM. HYLA. Corpus elongatum ; verrucæ viscosæ infra digitos. SPECIES. CHARACTERES. : Dorso viridi , duabus lineis flavis mar FYLA VIRIDIS SEUVULGARIS.{ gineque violaceis à capite ad pedes posteriores protensis. HyLA G1B8054. Gibbo supra dorsum. HYLA FUscaA. Colore fusco , pedibus infra verrucosis. Colore albo séu leviter cæruleo , abdo- HYLA LACTEA. É À ; mine cinereo fasciato. HyYLA TIBIATRIX. Maculis rubris supra dorsum. U Colore flavô ; utroque latere dorsi ru YLA AURANTIACA. bro aliquando variegati , sæ piüs ru- forum punctorum serie distincto. Colore rubro , aliquandd duabus lineis. HyLA RruBRA. 2 flavis supra dorsum. GENUS TERTIU M. BUFO. Corpus coarctatum ef rotundatum. SPECIES. CHARACTERES. [EE ANSE AI EE Tuberculo reniformi ab utroque latere ; pone auris aperturant. FAO MERS Maculis viridibus nigro marginatis con fluentibusque. BUFO VIRIDI-RADIATUS. Lineis viridibus radiatis. Cute lævi, maculis maximis fuscis, Buro Fruscus.. tuberculo calloso infra pedes poste- r1ores. L Tribus lineis flavis aut subrubris lon- C gitudinalibusque supra dorsum , tu- 5 reel | berculis callogs binis infra pedes an- teriores. SYNOPSIS METHODICA. 317 SPECIES. CHARACTERES, Buro IGNICOLOR. Dorso olivaceo nigroque maculato. Tuberculis spinosis supra digitos, pus- O S'T US, , Gi Buro PUSTULOS | tulis supra dorsum. BuFo STRUMOSUS. Jugulo prominulo, duobus digitis ex- rioribus pedum anteriorum, mem- branâ unitis. DL LOSEEMSRRE Fascià longitudinal: pallidà et denticu- latà supra dorsum gibbosum. VE Capite compresso latissimoque, oculis minimis et valdè distantibus. Ipebri -ioribus in modum conti connut Palpebris superioribus in modum con elevatis. Aie eh Dorso cinereo et rufo subrubroque ma- culato. é marmorato ; PANIER ARS Dorso rubro subflavoque ma ; ventre flavo, maculis nigris. Buro cLAMOsUSs. tis porosisque , pedibus anterioribus Dorso fusco maculato, humeris eleva- posterioribusque quinque-digitatis. RAR SEA AAA AAA AAA AAA AMAR LME IG REPTILIA BIPEDA. DIVISIO PRIMA. Pedibus anterioribus. SPECIES. CHARACTERES, J Squamis dorsi abdominisque semiannu- BUFO CANALICULATUS. los, squamis caudæ annulos integros | componentibus. DIVISIO SECUNDA, Pedibus posterioribus. S PECTES. CHARACTERES. Sulco longitudinali ab utroque latere dorsi , aperturà aurium magnâ, cau- dæ longitudine corporis longitudini saltem æquali. SHELTOEUSIK. 518 ÉLOGE l AAA AAA AAA AAA AAA ATARI AAA AAA AA AAA AAA AAA MAMA Ant ÉLOGE DU COMTE DE BUFFON. J E préparois ce nouveau volume, entrepris pour compléter l'Histoire naturelle, p'abliée avec tant de succès par le grand homme qui faisoit un des plus beaux ornemens de la France, lorsqu'il a terminé sa glorieuse carrière. Toutes les contrées éclairées par la lumière des sciences , après avoir retenti, pen- dant sa vie, des applaudissemens donnés à ses triomphes, ont répété plus haut encore après sa mort les accens de l'admira- tion, auxquels se sont mêlés ceux des regrets ; et la postérité a commencé, pour ainsi dire, de couronner sa statue. Au milieu de tous les hommages rendus à sa mémoire , que ne puis-je faire entendre une voix éloquente qui rédige son éloge dans le sanc- tuaire même consacré par son génie à la science qu'il ché- rissoit ! Lorsque Platon quitta sa dépouille mortelle pour s'élever à limmortalité , ses disciples en pleurs se rassemblèrent sur le promontoire fameux ‘, voisin de la célèbre Athènes, où ils avoient si souvent entendu sa voix imposante et enchanteresse ; ils répétèrent leurs tendres piaintes sur ce même rocher antique contre lequel venoient se briser les flots de la mer agitée, et où leur maitre, assis comme le maître des dieux sur le sommet du mont Olympe, leur avoit si souvent dévoilé les secrets de la science et ceux de la vertu. Ils consacrèrent ce mont à leur père chéri; ils en firent, pour ainsi dire, un lieu saint, et pour charmer leur peine, diminuer leur perte , et se retracer avec plus de force les vérités sublimes qu’il leur avoit montrées, ils chantèrent un hymne funèbre , et peignirent dans leurs chants tristes et lugubres , et son génie , et leur douleur. Que ne pouvons-nous aussi, nous tous qui, consacrés à l’é- tude de l'histoire naturelle, avons reçu les leçons , avons en ; Le promonteire de Sunium. El est déerit et représenté dans le Voyage du jeune 4 nacharsis. DE BUFFONX. 319 tendu la voix du Platon moderne, chanter en son honneur un hymne funéraire : Rassemblés des divers points du globe, où chacun de nous a conservé cet amour de la Nature qu'il savoit inspirer si vivement à ses disciples , que ne pouvons-nous pé- nétrer (ous ensemble jusqu’au milieu des plus anciens monu- mens élevés par celte Nature puissante, porter nos pas vers ces monts sourcilleux dont les cimes , toujours couvertes de neiges et de frimas, dominent sur les nuées, et semblent réunir le ciel avec la ierre! C’est sur ces masses énormes, sur ces blocs immenses de granits, que les siècles ont attaqués en vain, et qui seuls paroissent avoir résisté aux combats des élémens et à toutes les révolutions éprouvées par le globe de la terre; c’est sur ces tables respectées par le temps que nous irions graver le nom de Buflon; c’est à ces antiques témoins des antiques bou- leversemens de notre planète que nous irions confier le souvenir de nos regrets et de notre admiration : tout autre monument seroit trop périssable pour une aussi longue renommée. Élevons-nous du moins par la pensée au-dessus de ces rocs escarpés , avançons sur le bord des profonds abîmes qui les en- tourent , et parvenons jusqu'au sommet de ces monts entassés sur d'autres monts. La nuit règne encore ; aucun nuage ne nous dérobele firmament ; l'atmosphère la plus pure laisse resplendir les étoiles à nos yeux; nous voyons ces astres fixes briller des feux qui leur sont propres, et les astres errans nous renvoyer une douce lumière; ravis d’admiration , plongés dans une méditation profonde, nous croyons voir Ze génie de la Nature dans la con- éemplation de l'univers * ; tout nous rappelle ces vives images prodiguées par Buffon avec tant de magnificence, ce tableau mo- bile des cieux, que, dans sa noble audace , il a tracé avec tant de grandeur * ; et debout sur les lieux les plus élevés du globe, nous entonnons un hymne en son honneur. Nous te saluons , 6 Buffon, peintre sublime de ce spectacle au- guste ; toi dont le génie hardi , non content de parcourir l’im- mencité des cieux ,et de chercher les limites de l’espace, a voulu remonter jusques à celles du temps*. 1 Voyez la planche qui sert de frontispice à la Théorie de la terre de M. de Buffon. 2 Introduction à l’histoire des minéraux , par M. de Buffon. 3 Articic de la formation des planètes ; première et seconde Vues de la Nuture, etc. par M. de Buffon. 320 ELOGE Tu as demandé à la matière par quelle force pénétrante ces astres immobiles, ces pivots embrasés de l'univers , brälent des feux dont ils resplendissent. Tu as demandé aux siècles par quel moteur puissant ces autres astres errans , qui brillent d’une lumiere étrangère et circulent en esclaves soumis autour des soleils qui les maîtrisent, furent placés sur la route céleste qui leur à été prescrite ; et reçurent le mouvement dont ils paroissent animés. Nous te saluons, 6 chantre immortel des cieux : que le firmament semé d'étoiles, que toutes les clartés répandues dans l’espace , que tout ce magnifique cortége de la nuit rappelle à jamais ta gloire. Cependant les premiers feux du jour dorent l'Orient ; l’astre de la lumière se montre dans toute sa majesté; il rougit les cimes isolées qui s'élancent dans les airs, etétincelle, pour ainsi dire, contre les immenses glaciers qui investissent les monts. Une va- peur épaisse remplit encore le fond des vallées, et dérobe les collines à nos yeux, Une vaste mer paroît avoir envahi le globe; quelques pics couverts de glaces resplendissantes se montrent seulement au-dessus de cette mer immense dont les flots légers, agités par le vent, roulent en grands volumes, s'élèvent en tour- billons , et menacent de surmonter les roches les plus hautes. Nous croyons voir , avec Buflon , la terre encore couverte par les eaux de l'Océan, et recevant au milieu des ondes sa forme , ses inéoalités , ses montagnes , ses vallées ; et notre hymne continue. Nous te saluons , 6 Buffon , toi dont le génie, après avoir parcouru l’immensité de l’espace et du temps , a plané au-dessus de notre globe et de ses âges ? Tu as vu la terre sortant du Sein des eaux , les montagnes secondaires s’élevart par les efforts accumulés des courans du vaste Océan; les vallons creusés par ses ondes rapides ; les végé- taux développant leurs cimes verdoyantes sur les premières hauteurs abandonnées par les eaux ; ces bois touffus livrant leurs dépouilles aux flots agités ; les abimes de l’ Océan recevant ces dépôts précieux comme autant de sources de chaleur et de feu pour des siècles à venir, et les plaines de la mer peuplées d’ani- maux dont les débris forment de nouveaux rivages ou exhaussent des anciens. Tu as vu le feu jaillissant avec violence des entrailles de la t Tiorie de lat erre et Epoques dela Nature, par M. de Buflon. DE BUFFON. 32x erre, sur le bord des ondes qui se retiroient , élevant par son effort de nouvelles montagnes ; ébranlant les anciennes , couvrant les plaines de torrens enflaminés ; et les tonnerres retèntissans, des foudres rapides , les orages des airs, mélant leur puissance à celle des orages intérieurs de la terre et des tempétes de la ner, Nous te saluons , toi dont les chants ont célébré ces grands objets : que le feu des volcans, qué les ondes agitées , que les tonnerres des airs, rappellent à jamais ta gloire ! Mais la vapeur épaisse se dissipe, et nous laisse voir des plaines immenses , des coieaux fertiles, des champs fleuris, des retraites tranquilles. O Nature, in te montres dans toute ta beauté ! Les babitans des airs, voltigeant an milieu des bocages, saluent par leur chant l’astre bienfaisant , source de la chaleur ; l'aigle alter vole jusqu'au-dessus des plus hautes cimes * ; le cheval belli- queux, relevant sa mobile crinière , s'élance dans les vertes prai- ries ; les divers animaux qui embellissent le globe paroissent en auelque sorte à nos yeux. Saisis d’un noble enthousiasme, en- traînés par l'espèce de délire qui s'empare de nos sens, nous croyons nous détacher , pour ainsi dire, de la terre, et voir le globe roulant sous nos pieds nous présenter successivement toute sa surface. Le tigre féroce, le lion terrible régnant avec empire dans les solitudes embrasées de l'Afrique ; le chameau , suppor— tant Ja soif au milieu des sables brülans de l'Arabie ; l'éléphant des grandes Indes, étonnant l'intelligence humaine par l’étendue de son instinct; le castor du Canada, montrant par son industrie ce que peuvent le nombre et Le concert ; les singes des deux mondes, imitaleurs pélulans des mouvemens de l’homme; les perroquets richement colorés des contrées voisines de l’équateur , le brillant oiseau-mouche et le colibri doré du nouveau continent, le ka- michi des côtes à demi noyées de la Guiane; tous passent sous nos yeux. Fien ne peut nous dérober aucun de ces objets que Buflon a revêtus de ses couleurs éclatantes; et au milieu des su- Jets de ses magnifiques tableaux, nous voyons sur tous les points de la terre habitable le chef-d'œuvre de la force productrice, ? Voyez particulièrement dans l’Histoire des Quadrupèdes et des Oiseaux, ar M. de Buffon, les articles du cheval, du tigre , du lion, du chameau , LR. : Tr de l’éléphant, du castor, des singes, de l'aigle ; des perroquets, de l'oiseau mouche , du kamichr , ete, Lacepède. 1, 21 322 ELOGE DE BUFFON. l'homme , qui par la pensée a conquis le sceptre de la Nature, domté lesélémens , fertilisé la terre , embelli son asile , et créé le bonheur par l'amour et par la vertu. Depuis le pôle sur lequel brille l’ourse , depuis les bornes du vaste empire de la souveraine de la Néva *, et cette contrée fertile en héros, où Reinsberg * voit les arts cultivés par des mains victorieuses, jusques aux plages ardentes du Mexique et aux sommets du Potosi, quelle partie du globe ne nous rappelle pas des tributs offerts au génie de Buffon? Nous voyons au milieu de Athènes moderne ces lienx fa- meux consacrés à la science ou aux arts sublimes de l’éloquence et de la poésie, ces temples de la Renommée, qui parleront à jamais de la gloire de Buffon, où il a laissé des amis , des com- pagnons de ses travaux, un surtout, qui, né sous le même ciel , et réuni avec lui dès sa plus tendre jeunesse, a partagé sa gloire et ses couronnes. Nous croyons entendre leurs voix ; et ce con- cert de louanges du génie et de l'amitié retentissant j usques au fond de nos cœurs, nous nous écrions de nouveau : Nous te saluons , 6 Buffon, toi qui as chanté les œuvres de la création sur La lyre harmonieuse ; toi qui d’une main habile as gravé, sur un monument plus durable que le bronze, les traits augustes du roi dela Nature ; qui l'as suivi d’un œil attentif sous tous les climats , depuis le moment de sa naissance jusques à celui où il disparoit de dessus la terre. À ta voix, la Nature a ras- semblé ses différentes productions ; les divers animaux se sont réunis devant toi; tu leur as assigné leur forme, leur physiono- mie, leurs habitudes , leur caractère, leur pays, leur nom. Que partout tes chants soient répétés , que tout parle de ioi! Poëte sublime , tu as célébré et tous les êtres et tous les temps. # C’est principalement de la Russie, ainsi que de l'Amérique septentrionale et méridionale, que l’on s’est empressé d'offrir à M. de Buffon les divers objets d'histoire naturelle qui pouvoient l’intéresser. Ilena recu de plusieurs souverains , et surtout de l’impératrice de toutes les Russies. 2 Château du Brandebeurg, appartenant au prince Henri de Prusse. Avee quel plaisir M. de Buffon ne parloit-il pas de son dévouement pour ce prince ! combien ne se plaisoit-il pas à rappeler les marques d’attachement qu’il en avoit recues, ainsi qu’à s’entretenir de l’amitié que lui a toujours témoignée la digne comjagyne d’un grand et célèbre ministre du meilleur des rois { AAA AAA AAA RAA A VAR TA AAA AAA AUS AAA AAA MA AU AAA TABLE ALPHABÉTIQUE Des divers noms donnés aux Serpens, et dont il est fait mention dans cet ouvrage. A À berdeen, voyez éryx. Adder , — vipère commune. AËg, — céraste. Æsping, — chersea. Ak-dshilan , — couleuyre dione. Alp,=— céraste. Amiudutus, — ammodyte. Amphisbæna, — amphisbène enfiumé. Amphisbæna alba , — blanchet. Amphisbæna flava, — æmphis- bene enfurné. Amphisbæna fuhsinosa, — am- phisbène enfumé. Ainphisbæna magnifica ,—aæm- plusbène enfumé. Amphisbæna prima subargen- tea , — lombric. Amphisbæna varia , — amphis- bène enfurmé. Amphisbæna vulgaris, — am- plhisbène enfumé. Anguille de haie, — couleuvre à collier. Anguiliedeshaies, —-couleuvre verle et jaune. Anguis Æsculapii, — couleuvre d Esculape. Anguis boa, — devin. Anguis calamaria, — calmar. Auguis cerastes,—anguis COrnu. Anguis colubrina , — anguis colubrin. Anguis crotalophorus , — boi- quir&. Anguis flagelliformis , — fi. Anguis fragilis, — orvet. Anguis jaculus, — trait. Angus laticauda, — queue-lan- céolée. Anguis lumbricalis, — /ombric. Anguis maculala, — miguel. Anguis meleagris, — peintadé. Anguis reticulata, — réseau. Anguis rostratus,—anguis long nez. Anguis schytale, — rouleau. Anguis tessellata, — miguel, Anguis ventralis, —anguis jaune el brun. Anilios, — /ombric. Anvoye, orvet. Apachycoatl, — couleuvre pé- talaire. Aspic, — vipère d'Égypte. Aspide del corno ,-— ammodyte. Aspis Cleopairæ, — vipère d'Egypte. Aspis colore ferrugineo ,—cher- se&. Aspis cornu, — ammodyte. Ayug, — boiquira. B. Pali-salan-boekit, — bali, Blind worm , — orveë, Boa, — devin. Boa aurantiaca, — bojobr. 324 Boa canina, — bojobi. Boa constrictor, — devin. Boa contortrix, — groin. Boa exigua, == hipnale. Boa hoïrtulana, — broderie. Boa murina , — bo rativore. TABLE ALPHABETIQUE. Boa thalassina , — bojobi. Bodly, — amphisbène enfumé, Boicininga , — boiquira. Boicinininga , — boiquira. Boiguacu , — devin. C. Cacadora, — devin. Cæcilia Gesneri, orvet. Cæcilia glutinosa, — cœcile vis- queux. Cæcilia tentaculata, — ibiare. Cœcilia typhlus, — orvet. Cæcilia vulgaris, — orvet. Carbon, — couleuvre à collier. Carbonazzo,--couleuvreà collier. Cascavel, — boiquira. Casca vela, — boiquira. Caudisona "dryi inas, — dryinas. Caudisona dunssus: — durissus. Caudisona oriénialis —dryinas. Caudisona terrifica, —- boiquira. Cega , — amphisbène enfumé. Cenchoa, — cenco. Cenchria, — cenchris. Cenchrias , — aminodyte. Cenchris, — devin. Cenchris tardigrada major lutea, maculis nigris notata, — de- vin. Cencoat], seconde espèce,--cenco. Cerastesagilis,—couleuvre agile, Cerastes aurora, — aurore. Cerastes candidus , — couleuvre très-blanche. Cerastes cobella , — cobel. Cerastes lacteus, — Zacté. Cerastes mexicanus, — couleu- vre pélalaire. Cerastes nebulatus, vre nébuleuse. Cerastes plhicatilis, — Dali, Cerastes rhombeatus, — cou- leuvre rhomboidale. — couleu- Cerastes severus, — couleuvre hébraique. Cerchrias, — ammodyte. Ceristalis, -— céraste, Chasseur, — devin. Chain snake, — chaîne. Chayquarona , — chayque. Coach-whip-snake, — fil. Cobra atropos, — atropos. Cobra de las cabecas, — am- phisbène enfumé. Cobra de cabelo, — naja. Cobra de capello, — naja. Cobra de corais, — 1biboca. Cobra de veado , — devin. Cobra vega , — amphisbène en- fumé. Collier , — demi-collier. Coluber Æsculapii , — couleuw- vre bande notre. Coluber æstivus , — couleuvre verdätre. Coluberagilis, —couleuvre agile." Coluber ahæiulla, — borga. Coluber albus, — couleuvre blanche. Coluber alidras, — alidre. Coluber ammodytes, — ammo- dyte. Coluber angulatus, — couleu- vre anguleuse. Coluber annulatus, — couleu- vre blanche et brune. Coluber atrox, — coul. atroce. Coluber aulicus, — laphiati. Coluber berus, — vipère com- mune, TABLE ALPHABÉTIQUE. Coluber buocatus , — couleuvre joufflue. Coluber carinatus , — couleuvre ; carenée. Coluber calamarius, — calmar. Coluber candidus, — couleuvre blanchätre. Coluber canus, — grison. Coluber cobella , — cobel. Coluber cærulescens, — cou- leuvre bleuâtre. Coluber cæruleus, — bluet. Coluber cerastes, — céraste. Coluber cinereus, — couleuvre cendrée. Coluber constrictor, -— lien. Coluber corallinus , — corallin. Coluber cornutus , — céraste. Coluber cyaneus, — couleuvre verte et bleue. Coluber dipsas, — dipse. Coluber doliatus, — couleuvre annelee, Coluber domesticns , — coueu- vre domestique. Coluber domicella, — couleuvre des dames. Coluber exoletus, — couleuvre décolorée. Coluber fasciatus, = vampum. Coluber filiformis , — fl. Coluber fulvus, — couleuvre notre el fauve. Coluber fuscus , — couleuvre sombre. Coluber getulus, — chaîne. Coluber guttalus, — #yrie. Coluber guttatus, — couleuvre mouchetée. Coluber hippocrepis, — fer-à- cheval. Coluber hydrus, — 2ydre. Coluber jaculatrix, — dard. Coluber jngularis, — rouge- gorge. Coluber lacteus, — lacté, 335 Coluber laticaudatus, — cou/eu- vre queue-plate. Coluber lebetinus , — Zébetin. Coluber lemniscatus, — couleu- vre galonnée. Coluber lineatus, — couleuvre rayée. Coluber maurus, — couleuvre maure. Coluber melanocephalus, —#éte- noire. Coluber miiaris , — couleuvre miliaire. à Coluber mexicanus, — couleu- vre mexicaine. Coluber Minervæ, — couleuvre de Minerve. Coluber molurus , — molure. Coluber monilis, — demi-collier Coluber mucosus, — couleuvre muqueuse. Coluber mycterizans,—couleu- vre nasique. Coluber natrix, — couleuvre à collier. Coluber nebulatus, —couleuvre nébuleuse. Coluber niveus, — couleuvre tres-blanche. Coluber ordinatus, — 1bibe. Coluber ovivorus, — couleuvre ovivore Coluber padera , — padire, Coluber pallidus, — couleuvre âle. Coluber pelias,—couleuvre pélie. Coluber petalarius, — couleuvre pétalaire. Coluber petola , — pétole. Coluber plicatilis, — bal. Coluber prester, — vipère notre. Coluber pullatus, — couleurre minime. Coluber pnnctatus, — coueuvre ponctuée. Coluber reginæ, — régine, 325 Coluber rhombeatus , — couleu- vre rhomboidale. Coluber saturninus, — couleu- vre salurnine. Coluber saurita, — saurite. Coluber scaber, — couleuvre rude. Coluber schyta , — couleuvre schyte. Coluber scutatus, = couleuvre cuirassée. Coluber severus , — couleure hébraïque. Coluber sibilans, — malpole. Coluber simus , — couleuvre ca- Imu:e. Coluber sirtalis, — couleuvre sirtale. Coluber situla, — coul. situle. Coluber stolatus, — chayque. Coluber striatulus ,— couleuvre siriée. Coluber triscalis , — ériscale. Coluber typhius, — éyphie. Coluber Lyria , — bvrie. Coluber vipera, — vipère d'É- £gypte. Coluber vipera Anglorum, — vipère noire. Coluber viridissimus, — couleu- vre verle. | Coluber vittatus, -— couleuvre rubanée. TABLE ALPHABÉTIQUE. Colubro nero, — couleuvre à collier. Constrictor auspex, — devin. Consirictor diviniloquus, — de- vin. Constrictor formosissimus, — devin. Constriclor rex serpentum , = devin. Copper-belly snake, — couleu- vré striée. Coronella austriaca, — couleuvre lisse, Coronella petola, — pétole. Couleuvre chasseuse , — devin. Couleuvre commune, — cou- leuvre à collier. Couleuvre commune , — cou- leuvre dEsculape. Couleuvre commune , — orveé. Couleuvre commune, — quaire- raies. Couleuvre commune , — cou- leuvre verte et jaune. Couleuvrejaune,—fer-de-lance. Couleuvre rousse,--fer-de-lance. Couleuvre vulgaire , — couleu- vre suisse. Coureresse, — couresse. Crotalus horridus , — boiquira. Crotalus RE AS millet. Crotalus mutus, — boa muet. Cynchrias , — ammodyte. D. Dépone, devin. Bipsade, — vipère notre. Draco , — devin. Draco serpens , — devin. Dipsasindica,--couleuvreatroce. Druinus, — ammodyte. Double-marcheur , — amplhis- berne enfumé. E. Fcacoail, — boiquira. Extdbeæ, “vipés ecommune femelle Exss, = vipére Commune mile. Embamina, — devir. impereur, . — devire. Envdris, — enydre. TABLE ALPHABÉTIQUE. 327 F. Fedagoso, devin. Gerende, — devin. Grand serpent d’eau , — devin. Giarende, — devin. Grande couleuvre , — devin. Giboya, — devin. Green snake, — coul. verdätre. Glass snake , — anguis jaune et Guimpe, — couleuvre ovivore. brun. Guimpuaguara , — couleuvre Gorende, — devin. ovivore. Grand hydre, — devin. Hog-nose snake, — groin. Hydrus, — eouleuvre à collier. Tbiboca, — zbibe. Jiboya, — devirr. Ibijara , — amphisbène enfumé. Jurucucu, — devin. Jaculus , — aurore. 4 K. Kepusns, — céraste. KsŸn, — lébetin. Kokura , — demi-collier. L. Lamanda, — devin. Laticauda scutata,--queue plaie Jangnasige, — anguis long-nez. Lemnisque,-couleuvre galonnée. Laticauda imbricata, — queue- Losange, — laphiati. lancéolée. M. Malpolon, — couleuvre asiati- Mère de l'eau, — devin. que. Miliaris, — ammodyée. Malpolon, — malpole. Minia, — devin. Mamballa, — devin. Moqueur, — eouleuvre rubance. Mangeur de chenilles, — cou- leuvre agile, N, Naja brasiliensis , — serpent à Naja fasciata, == naja. lunettes du Pérou. Naja lulèscens ,— naja, 328 Naja maculata, — naja. Naja non naja, — naja. Naja siamensis, — raja. Nalle pambou , — naja. Nez retroussé, — couleuvre na- sique. Natrix Æsculapii,--bande.-noire. Natrix ahæiulla, — boiga. Natrix aulica, — laphiati. Natrix cærulescens , — couleu- vre bleuätre. Natrix exoleta , — couleuvre dé- colorée. Natrix filiformis , — fi1. Natrix flagelliformis , — couleu- vre nasique. TABLE ALPHABÉTIQUE. Natrix hippocrepis, = fer-à- cheval. Natrix lemniscata, — couleuvre galonnée. Natrix mucosa,—couleuvre mu- queuse. Natrix longissima, — couleuvre à collier. Natrix mycterizans, — couleu- vre nasique. Natrix saturnina, = couleuvre saturnine. Natrix tarquata , — couleuvre à collier Natrix vitlata, — couleuvre ru- banée. Natrix vulgaris, —coul, à collier. 0. Ophria, — ophrie. Oular sawa--cou!.jauneet bleue. F Herpie, —couleuvre d'Esculape. Parterre, — broderie. Polonga , — gevin. Polpogs , = devin. R. Ratile snake, — boiquira. Regina serpentum, — boiquira Reine des serpens, — devin. Ringed snake, -— couleuvre à collier. Roi des serpens ,— devin. S. Schuppen-schlange, — anguis long-nez. Serpe nero, —couleuvre a collier. Serpens aquatilis. == devin. Serpens domesticusnigricanscar- bonarius,—couleusre à collier Serpens indicus coronatus , — naja. Serpens indicus gracilis viridis, — boipa. Serpens palustris , — derin. Serpens peregrinus, — devin. Serpent âpre, — cou/euvre rude. Serpent aveugle, — æmphisbène enf::mé. Serpent baï-rouge , — couleuvre blanche et brune. Serpent de blé , == couleuvre ta- chetée. Serpent à chaine, — chaîne. Serpent à chapelet, — couleuvre mouchetée. Serpent à chaperon , — 74ja. Serpent à collier, —coul à collier. Serpent coral, — anguis rouge. erpent cornu , — ammodyte. Serpent cornu , — cér@sle. Serpent couronné, — 724ja. Serpent des dames, — couleuvre des dames. TABLÉ ALPHABÉTIQUE. Serpent fétiche , — daboie. Serpent idole , — dabote. Serpent impérial, — devin. Serpent à large queue, — queue- lancéolée. Serpent à large queue , — queue- plate. Serpent à lunetles , — naja. 329 Serpent d'oreille, — lombric. Serpent à queue plate, —plature. Serpent sans tache, — couleuvre très-blanche. Serpent à sonnette, — dryinas. Serpent tigré, — aspic. 4 . Serpent à ventre couleur de cui- vre, — couleuvre striée. Serpent mangeur de rats, — boa Serpent de verre,—GAnSuis jaune rativore. et brun. Serpent nageur, — couleuvre à Serpent de verre, — orvet. collier. Toœæ œbên,— {yrie. Tamacuilla huilia , — devin. Tangedor , — boiquira. Tetrauchoalttleoa , — bojobi. Teuthlaco , — durissus. Teuthlaco zauhqui, — boiquira. Teuthlaco zouphy, — durissus. Sipedon , — sipède. T. Tehua , — broderie. Tleoa, — broderie. Trasgobane, — amphisbène en- furné. Triangle , — couleuvre joufflue. Typhlops, — orvet. V.-W. Water snake, — couleuvre à collier. Water viper.— serpent à son- nette piscivore, Viper, — vipère commune. Vipera anglica nigricans , — vi- père noire. Vipera Brasiliæ caudisona |, — boiquira. Vipera caudisona , — boiquira. Viperaindica vittata gesticularia —naj«. Vipera maculata, — aspic. Vipera Mosis,--vipère commune. Vipera pileata, — naja. Vipera vera Indiæ orienta lis, — vipère commune. Vipèére cornüe, — céraste. Vipère coinue d’'Îlyrie , — am- mod te. Vipère d’eau, — serpent à son- nelle piscivore. Vipère du Japon, — couleuvre hébraïque. Vipère jaune de la Martinique, — fer-de-lance. X. Xalxalhua , — devin. Xaxathua, — devin. Xequipiles, — dard. A - Yacu-mama, — devin. Yellow snake, — devin. 330 HISTOIRE NATURELLE. AAA AARARARARANANS AAAANNAANAANAANAIY LARAANAARAANRRANS RS DISCOURS SUR LA NATURE DES SERPENS. À la suite des rombreuses espèces des quadrupèdes et des oi- seaux, se présente l'ordre des serpens ; ordre remarquable en ce qu'au premier coup d'œil, les animaux qui le composent parois- sent privés de tout moyen de se mouvoir , et uniquement destinés. à vivre sur la place où le hasard les fait naître. Peu d'animaux cependant ont les mouvemens aussi prompts et se transportent avec autant de vitesse que le serpent ; il égale presque, par sa. rapidité , une flèche tirée par un bras vigoureux, lorsqu'il s’é- lance sur sa proie ou qu’il fuit devant son ennemi : chacune de ses parties devient alors comme un ressort qui se débande avec violence ; il sembie ne toucher à laterre que pour en rejaillir , et», pour ainsi dire , sans cesse repoussé par les corps sur lesquels il s'appuie , on diroit qu’il nage au milieu de l'air en rasant la surface du terrain qu'il parcourt. S'il veut s'élever encore davan- tage , 1l le dispute à plusieurs espèces d'oiseaux par la facilité avec: laquelle il parvient jusqu’au plus haut des arbres , autour des- quels 1l roule et déroule son corps avec tant de promptitude , que ‘œil a de la peine à le suivre. Souvent même, lorsqu'il ne change. pas encore de place, mais qu'il est prêt à s’élancer, et qu'il est agilé par quelque affection vive , cemme l'amour , la colère où la crainte, il n’appuie contre terre que sa queue, qu’il replie en contours sinueux ; 1l redresse avec fierté sa tête; 1l relève avec vitesse le devant de son corps, et, le retenant dans une attitude droite et perpendiculaire , bien loin de paroîlre uniquement des- tiné à ramper , il offre l’image de la force , du courage, et d’une sorte d'empire. Placé par la Nature à la suite des quadrupèdes ovipares, res- semblant à un lézard qui seroit privé de pattes, et pouvant sur- tout être quelquefois confondu avec les espèces que nous avons nommées seps et chalcide", ainsi qu'avec les reptiles bipéèdes”, le serpent réunit cet ordre des quadrupèdes ovipares à celui des. PS ne md Fe 1 Voyez l’article du seps et celui du chalcide, dans l'Histoire naturelle des quadrupèdes ovipares. ? Article des reptiles b'pèdes , à la suite de l'Histoire des quadrupèdes, @vipares. DICOURS SUR LES SERPENS. 351 poissons, avec plusieurs espèces desquels il a un grand nombre de rapports extérieurs, et dans lesquels il paroît en quelque sorte se dégrader par des nuances successives offertes par les anguilles, les murènes proprement dites, les gymnotes , elc. Malgré la grande vitesse avec laquelle le serpent échappe , porr ainsi dire, à la surface sur laquelle il s’'avanee, plusieurs points de son corps portent sur la terre, même dans le temps où il pa- roît le moins y toucher ; et il est entièrement privé de membres qui puissent le tenir élevé au-dessus du terrain , ainsi que les qua- drupèdes : aussi le nom de reptile nous a-t-il paru lui appartenir principalement, et celui de serpent vient-il de serpere, qui dé- signe l’action de ramper. Cette forme extérieure, ce défaut absolu de bras, de pieds, et de tout membre propre à se mouvoir, le caractérise essentiellement, et empêche qu’on ne le confonde , même à l'extérieur, avec aucun des animaux qui ont du sang, et particulièrement avec les murènes proprement dites, les an- guilles et les autres poissons, qui ont tous des nageoires plus ou moins étendues et plus ou moins nombreuses. Les limites qui circonscrivent l’ordre des serpens sont donc tracées d’une manière précise, malgré les grands rapports qui les lient avec les ordres voisins. Leurs espèces sont en grand nombre; nous en décrivons plus de cent quarante dans cet ouvrage : quelques-unes parviennent à une grandeur très-considérable ; elles ont plus de trente pieds , et souvent même de quarante pieds, de longueur *. Toutes sont couvertes d’écailles ou de tubercules écailleux, comme les lézards et les poissons, qu’elles lient les uns avec les autres; mais ces écailles varient beaucoup par leur forme et par leur grandeur : les unes, que l’on nomme plaques, sont hexagones, étroites et très-allongées; les autres, presque rondes, ou ovales, ou rhom- boïdales, ou carrées : celles-ci entièrement plates; celles -là re- levées par une arête sailante , etc. Toutes ces diverses sortes d’é- caïlles sont différemment combinées dans les espèces particulières de serpens : les uns en ont de quatre sortes, les autres de trois, les autres de deux; les autres n'en ont que d’une seule sorte; et c’est principalement en réunissant les caractères tirés de la forme, du nombre et de la position de ces écailles, que nous avons pu par- venir à distinguer non-seulement les genres, mais encore les es- * Voyez à ce sujet, dans cette Histoire naturelle, l’article du devrn. 332 HISTOIRE NATURELLE. pèces de serpens, ainsi qu'on pourra le voir dans la table métho- dique de ces animaux. S1,avant d'examiner les habitudes naturelles de ces reptiles, nous voulons jeter un coup d’œilsurleur organisation interne, etsi nous commençons par considérer leur tête, nous trouverons que la boîle osseuse en est à peu près conformée comme celle des quadru= pèdes ovipares : cependant la partie de cette boîte qui représente l'os occipital, et qui est faite en forme de triangle dont le sommet est tourné vers la queue, ne paroît pas en général avancer au- tant vers le dos que dans ces quadrupèdes ; elle garantit peu l’ori- gine de la moelle épinière, et voilà pourquoi les serpens peuvent êlre attaqués avec avantage, et recevoir aisément la mort par cet endroit mal défendu. Le reste de leur charpente osseuse présente de grands rapports avec celle de plusieurs espèces de poissons; mais elle offre cepen- dant une conformation qui leur est particulière , et d’après la- quelle 1l est presque aussi aisé de les distinguer que d’après leur forme extérieure. Elle est la plus simple de toutes celles des ani- maux qui ont du sang : elle ne se divise pas en diverses branches pour donner naissance aux pattes comme dans les quadrupèdes , aux ailes comme dans les oiseaux, etc.; elle n’est composée que d’une longue suite de vertèbres qui s'étend jusqu’au bout de la queue. Les apophyses ou éminences de ces vertèbres sont placées, dans la plupart des serpens, de manière que l'animal puisse se tourner dans tous les sens, et même se replier plusieurs fois sur lui-même ; et d’ailleurs, dans presque tous ces reptiles, ces vertè- bres sont très-mobiles , les unes relativement aux autres, l’ex- trémité postérieure de chacune étant terminée par une sorte de globe qui entre dans une cavité de la vertèbre suivante, et y joue Hbrement comme dans une genouillère. De chaque côté de ces vertèbres, sont atiachées des côtes, ordinairement d'autant plus Jongues qu'elles sont plus près du milieu du corps, et qui, pou- vant se mouvoir en différens sens, se prêtent aux divers mouve- mens que le serpent veut exécuter. Vers l'extrémité de la queue, les vertèbres ne présentent plus que des éminences, et sont dé- pourvues de côtes". 1 J'ai voulu savoir si le nombre des vertébres et des côtes des serpens a quel- que rapport coustant avec les différentes espèces de ces animaux, J'ai disséqué plusieurs individus de diverses espèces de serpens, et j’ai remarqué que le n6mbye DISCOURS SUR LES SERPENS, 335 Ces vertèbres et ces côtes composent toute la partie solide du corps des serpens : aussi leurs organes intérieurs ne sont-ils dé- fendus, dans la partie de leur corps qui touche à terre, que par les plaques ou grandes écailles qui les revêtent par-dessous, et par une matière graisseuse considérable que l’on trouve souvent entre la peau de leur ventre et ces mêmes organes. Cette graisse doit aussi contribuer à entretenir leur chaleur intérieure, à pré- server leur sang des effets du froid, et à les soustraire, pendant quelque temps, à l’engourdissement auquel ils sont sujets, dans certaines contrées , à l'approche de l'hiver; elle leur est d'autant plus utile, que la chaleur naturelle de leur sang est peu considé- rable : ce fluide ne circule dans les serpens qu'avec lenteur, rela- tivement à la vitesse avec laquelle il coule dans les quadrupèdes vivipares et dans les oiseaux. Ët comment seroil-il poussé avec autant de force dans les reptiles que dans les oiseaux et les vivi- pares, puisque le cœur des serpens n’est composé que d’un ven- tricule ?, et puisque la communication entre le sang qui y arrive et le sang qui en sort peut êlre indépendante des oscillations es poumons et de la respiration, dont la fréquence échauffe etanime le sang des vivipares et des oiseaux ? Le jeu du cœur et la circulation ne seroient donc point arrêtés dans les serpens par un très-long séjour sous l’eau , et ces animaux pourroient resier habituellement dans cet élément , comme les poissons, si l’air ne leur étoit pas nécessaire, de même qu'aux quadrupèdes ovipares, pour entretenir dans leur sang les quali- tés nécessaires à son mouvement et à la vie, pour dégager ce fluide des principes surabondans qui en engourdiroient la masse, ou y porter ceux de liquidité qui doivent l’animer”*. Les serpens ne peuvent done vivre dans l’eau sans venir souvent à la surface, et la respiration leur est presque aussi nécessaire que si leur cœur éloit conformé comme celui de l’homme et des quadrupèdes vivi- des vertèbres et des côtes augmentoit ou diminuoit dans Îles couleuvres, les boas, et les serpens à sonnettes, avec celui des plaques qui recouvrent le dessous du corps de ces reptiles ; de telle sorte qu’il ÿ avoit toujours une vertèebre et par conséquent deux côtes, pour chaque plaque. Mais mes observations n’ont pas été assez multipliées pour que j'en regarde le résultat comme constant. Voyez dans Particle intitulé , Nomenclature des serpens , ce que l’on peut penser du rapport du nombre de ces plaques avec l’âge ou le sexe des reptiles, etc. 1 L’oreillette du cœur de plusieurs espèces de serpens est conformée de manière a paroître double, ainsi que dans un grand nombre de quadrupèdes ovipares ; mais aucun de ces reptiles n’a deux ventricules. 2 Discours sur la nature des quadrupèdes ovipares, 334 HISTOIRE NATURELLE. pares, et que la circulation de leur sang ne dût avoir lieu qu’au= tant que leurs poumons aspireroient l'air de l'atmosphère. Mais leur respiration n’est pas aussi fréquente que celle des quadru- pèdes vivipares et des oiseaux; au lieu de resserrer et de dilater leurs poumons par des oscillations promptes et régulières, ils laissent échapper avec lenteur la portion d’air atmosphérique qu'ils ont aspirée avec assez de rapidité , et ils peuvent d'autant plus se passer de respirer fréquemment, que leurs poumons sont très- grands en comparaison du volume de leur corps , ainsi que ceux des tortues , des crocodiles , dessalamandres , des grenouilles, etc., et que dans certaines espèces , telles que celle du boiïquira, la lon- gueur de ces viscères égalant à peu près les trois quarts de celle du corps, ils peuvent aspirer à la fois une irès-grande quantité d'air. Îls sont pourvus de presque autant de viscères que les animaux les mieux organisés ; ils ont un œsophage ordinairement très- long , et susceptible d’une très-grande dilatation , un estomac , un foie avec son conduit, une vésicule du fiel, une sorte de pan- créas , et, de longs intestins , qui, par leurs circuits, leurs divers diamètres, et les espèces de séparations transversales qu'ils con- tiennent , forment plusieurs portions distinctes analogues aux intestins grêles et aux gros intestins des vivipares, et, après plusieurs sinuosilés , se terminent par une portion droite, par une sorte de rectum, comme dans les quadrupèdes. Ils ont aussi deux reins, dont les conduits n’aboutissent pas à une vessie proprement dite, ainsi que dans les quadrupèdes vivipares, mais se déchargent dans un réservoir commun , semblable au cloaque des oiseaux, et où se mêlent de même les excrémens, tant solides que liquides. Ce réservoir commun n’a qu’une seule ouverture à l'extérieur ; 11 renferme, dans les mâles, les parties qui leur sont nécessaires pour perpétuer leur espèce, et qui y demeurent cachées jusqu’au moment de leur accouplement : c’est aussi dans l’intérieur de ce réservoir que sont placés, dans les femelles , les orifices des deux ovaires ; voilà pourquoi, dans la plupart des serpens, et excepté certaines circonstances rares , voisines de l'acconplement de ces animaux, on ne peut s'assurer de leur sexe d’après la seule con- sidération de leur conformation extérieure. Presque toutes les écallies qui recouvrent les serpens , et parti- culiérement les grandes lames qui sont situées au-dessous de leur corps, sont mobiles indépendamment les unes des autres : ils peuvent redresser chacune de ces lames par un muscle par- DISCOURS SUR LES SERPENS. 38 VYQ üculier qui y aboutit. Des-lors chacune de ces pièces , en s’élevant et en se rabaissant, devient une sorte de pied, par le moyen du- quel ils trouvent de la résistance, et par conséquent un point d'appui dans le terrain qu'ils parcourent, et peuvent se jeler, pour ainsi dire, dans le sens où ils veulent s’avancer. Mais les ser- pens se meuvent encore par un moyen plus puissant; ils relèvent en arc de cercle une partie plus ou moins étendue de leur corps; ils rapprochent les deux extrémités de cet arc, qui portent sur la terre; et lorsqu'elles sont pres de se toucher, lune ou l'autre leur sert de point d'appui pour s’élancer , en aplatissant la partie qui étoitélevée en arc de cercle. Lorsqu'ils veulent courir en avant, c'est sur l'extrémité postérieure de cet arc qu'ils s'appuient; et c'est au contraire sur la partie antérieure, lorsqu'ils veulent aller en arrière. Chaque fois qu’ils répètent cette action , ils font, pour ainsidire, un pas de la grandeur de la portion de leur corps qu'ils ont cour- bée, sans compter l’élendue que peut donner à cet intervalle par- couru l’élasticité de cette mème portion deleur corps qu'ils ont pliée, et qui les lance avec roideur en se rétablissant. Ces arcs de cercle sont plus ou moins élevés, où plus où moins multipliés, dans chaque individu, suivant son espèce, sa grandeur, ses propor- tons, sa force, ainsi que le besoin qu'il a de courir plus ou moins vite, et tous ces arcs, en se débandant successivement, produi- sent celte sorte de mouvement que l’on a appelé vermiculaire, parce que les vers proprement dits, qui sont dépourvus de pieds, ainsi que les serpens, sont également obligés de l’'employer pour changer de place. Pendant que les serpens exécutent ces divers mouvemens, ils portent leur tête d'autant plus élevée au-dessus du terrain, qu'ils ont plus de vigueur et qu’ils sont animés par des sensations plus vives; et comme leur tète est articulée avec l’épine du dos, de maniere que la face forme un angle droit avec cette épine dor- sale, les serpens ne pourroient point se servir de leur gueule, ne verroient point devant eux, et ne s'avanceroieut qu’en tâton- nant dans les momens où ils rélèvent la partie Ia plus antérieure de leur corps, s'ils n’en replioient alors l’extrémité de manière à conserver à leur tête une position horizontale. Quoique toutes les portions du corps des serpens jonissent d'une grande élasticité, cependant, dans le plus grand nombre d'espèces , ce ressort ne doit pas être également distribué dans 336 HISTOIRE NATURELLE toutes les parties : aussi la plupart des serpens ont-ils plus de fa- cilité pour avancer que pour reculer. D'ailleurs les écailles qui les revêtent , et particulièrement les plaques qui garnissent le dessous du ventre, se recouvrent mutuellement, et sont cou- chées de devant en arrière les unes au-dessus des autres. Il ar- rive de là que lorsque les serpens les redressent , elles forment contre le terrain un obstacle qui arrête leurs mouvemens , s'ils veulent aller en arrière ; tandis qu’au contraire, lorsqu'ils s’avan- cent, la surface qu’ils parcourent applique ces pièces les unes contre les autres dans le sens où elles se recouvrent naturel- lement. Quelques espèces cependant , dont le corps est d’une grosseur à peu près égale à ses deux extrémités, et qui, au lieu de pla- ques, n’ont que des anneaux circulaires, paroiïssent jouir de la faculté de se mouvoir presque aussi aisément en arrière qu'en avant, ainsi que nous le verrons dans la suite * : mais ces espèces ne forment qu’une petite partie de l'ordre dont nous traitons, Lorsque cerlains serpens , au lieu de se mouvoir progressive- ment pendant un temps plus ou moins considérable , et par une suite d’eflorts plusieurs fois répélés, ne cherchent qu'à s’élancer tout d’un coup d’un endroit à un autre, ou à se jeter sur une proie par un seul bond, ils se roulent en spirale au lieu de for- mer des arcs de cercle successifs ; 1ls n’élèvent presque que la tête au-dessus de leur corps ainsi replié et contourné ; ils tendent , pour ainsi dire, toutes leurs parties élastiques , et réunissant par là toutes les forces particulières qu'ils emploient lune après l’autre dans leurs courses ordinaires, allongeant tout d’un coup toute leur masse, et leurs ressorts se débandant tous à la fois, ils se déroulent et s’élancent vers l’objet qu’ils veulent atteindre, avec la rapidité d’une flèche fortement vibrée, et en franchis- sant souvent un espace de plusieurs pieds. Les serpens qui grimpent sur les arbres, s'y retiennent en en- tourant les tiges et les rameaux par les divers contours de leur corps ; ils en parcourent les branches de la même manière qu'ils s’avancent sur la surface de la terre ; ils s’élancent d’un arbre à un autre, ou d’un rameau à un rameau, en appuyant contre l'arbre une portion de leur corps, et en la pliant de manière qu’elle fasse une sorte de ressort , et qu’elle se débande avec force ; RSR LE AE 22 2 DD SO © Articles des serpens amphishèges. DISCOURS SUR LES SERPENS. 339 ou bien ils se suspendent par la queue, et, balançant à plusieurs reprises leur corps qu'ils allongent avec effort, ils atteignent la branche à laquelle ils veulent parvenir, s’y attachent en l'em- brassant par plusieurs contours de leur parte antérieure, se res- serreni alors, se raccourcissent, ramassent, pour ainsi dire, leur corps, et retirent à eux leur queue qui leur avoit servi à se sus- pendre. Les très-grands serpens l’'emportent en longueur sur tous les animaux, en y comprenant même les crocodiles, dont la gran- deur est la plus démesurée, et qui ont depuis vingt-cinq jusqu’à trente pieds de long, et en n’en exceptant que ss baleines et les autres grands cétacées. À l’autre extrémité cependant de l'échelle qui comprend tous ces reptiles arrangés par ordre de grandeur, on en voit qui ne sont guère plus gros qu’un tuyau de plume, et dont la longueur, qui n’est que de quelques pouces, surpasse à peine celle des plus petits quadrupèdes , tant ovipares que vi- vipares. L'ordre des serpens est donc celui où les plus grandes et les plus petites espèces diffèrent le plus les unes des auires par la longueur. Mais.si, au lieu de mesurer une seule de leurs dimen- sions, on pèse leur mase, on trouvera que la quantité de ma- üére que renferment les serpens les plus gigantesques est à peu près dans le même rapport avec la matière des plus petits rep- tiles , que la masse des grands éléphans, des hippopotames, etc. , avec celle des rats, des musaraignes, des plus peuts quadrupèdes vivipares. Ne pourroit-on pas penser que, dans tous les ordres d'animaux, la même proportion se trouve entre la quantité de matière mo- delée dans les grandes espèces, et celle qui est employée dans les petites ? Mais , dans l’ordre des serpens, tous les développemens ont dü se faire en longueur plutôt qu’en grosseur : sans cela, ces reptiles, et surtout ceux qui sont énormes, privés de pattes et de bras, auroient à peine exécuté quelques mouvemens très-lents. La vitesse de leur course ne doit-elle pas en effet être propor- lionnée à la grandeur de l'arc que leur corps peut former pour se débander ensuite ? Auroient-ils pu se plier avec facilité, et cher- cher sur la surface du terrain des points d'appui qui remplaças- sent les pieds qui leur manquent ? Ne pouvant ni attéindre leur proie, ni échapper à leurs ennemis, n'auroient-ils pas été comme. des masses inertes exposées à tous les dangers et bientôt détruites? Lacepède. 1. 4 A RO TAOE PE ET. 538 HISTOIRE NATURELLE. La matière a donc dû être façonnée dans une dimension beau coup plus que dans une autre, pour que le produit de ce travail pût subsister, et que l’ordre des serpens ne fût pas anéanti , où du moins très-diminué ; et voilà pourquoi la même proportion de masse se trouve entre les grands et les petits reptiles d’un côté, et les grands et les petits quadrnpèdes de l’autre , quoique les énormes serpens l’emportent beaucoup plus par leur longueur sur les plus petits de céux que l’on connoît, que les éléphans ne surpassent les musaraignes et les rats par leur dimension la plus étendue. Entre les limites assignées par la Nature à la longueur des ser- pens, c’est-à-dire, depuis celle de quarante ou même cinquante pieds jusqu'a celle de quelques pouces, on trouve presque tous les degrés intermédiaires occupés par quelque espèce ou quelqne variété de ces reptiles , au moins à compter depuis les plus courts jusqu’à ceux qui ont vingt ou vingt-cinq pieds de longueur. Les es- pèces supérieures paroissent ensuile comme isolées : ceci se trouve conforme à ce que l'on a déjà remarqué dans les quadrupèdes vi- vipares *, et prouve également que dans la Nature les grands ob- jets sont moins liés que les petits par des nuances intermédiaires. Mais voilà donc, depuis la petite étendue de quelques pouces jusqu’à celle de vingt-cinq pieds, presque toutes les grandeurs intermédiaires représentées par autant d'espèces, ou du moins de races plus où moins constantes ; et cela ne sufhroit-1l pas pour montrer la variété qui se trouve dans l’ordre des serpens ? 11 semble, à la vérité, au premier coup d'œil, que des espèces très- multipliées doivent se ressembler presque entièrement dans un ordre d'animaux dont le corps, toujours formé sur le même mo- dèle, ne présente aucun membre extérieur et saillant qui, par sa forme et le nombre de ses parties, puisse offrir des différences sensibles. Mais si l’on ajoute à la variété des longueurs des ser- pens celle des couleurs éclatantes dont ils sont peints, depuis le blanc et lé rouge le plus vif jusqu’au violet le plus foncé, et même jusqu'au noir ; si l'on observe que ce grand nombre de couleurs sont merveilleusement fondues les unes dans les autres, de ma- nière à ne présenter que très-rarement la même teinte, lors- qu’elles sont diversement éclairées par les rayons du soleil; si l'on se retrace tout à la fois ce nombre de serpens dont les uns ES 2 Voyez les articles de l'éléphant et des autres quadrupèdes, DISCOURS SUR LES SERPENS. 339 n'offrent qu'une seule nuance, tandis que les autres brillent de plusieurs couleurs plus ou moins contrastées, enchaînées, pour ainsi dire, en réseaux, distribuées en lignes, s'étendant en raies, disposées en bandes, répandues par taches, semées en étoiles, représentant quelquefois les fignres les plus régulières, et souvent les plus bizarres ; et si l’on réunit encore à toutes ces différences celles que l’on doit ürer de la position, de la grandeur et de la forme des écailles, ne verra-t-on pas que ] ordre des ser pens est un des plus variés de ceux qui peuplent et embellissent la sur- face du globe ? Toutes les espèces de ces animaux habitent de préférence les contrées chaudes ou tempérées : on en trouve dans les deux mondes , où ils paroissent à peu près également répandus en raison de dla chaleur, de l'humidité, et de l'espace libre. Plu- sieurs de ces espèces sont communes aux deux conlinens; mais il paroît qu'en général ce sont les plus grandes qui appartiennent à un plus grand nombre de contrées différentes. Ces grandes espèces ayant plus de force et des armes plus meuririères, peuvent exécuter leurs mouvemens avec plus de promptitude soutenir pendant plus de temps une course plus rapide, se dé- fendre avec plus d'avantage contre leurs ennemis , chercher et vaincre plus facilement une proie, se répandre bien plus au loin, se trouver au milieu des eaux avec moins de crainte, nager &vec plus de constance, lutter contre les flols, voguer avec vi- tesse au milieu des ondes agilées, et traverser même des bras de mer étendus. D'ailleurs ne pourroit- on pas dire que le mouls des grandes espèces est plus ferme , moins soumis aux influences de la nourriture et du climat ? Les petites espèces ont pu êtreai- sément altérées dans leurs proportions, dans la forme ou le “ombre de leurs écailles, dans la teinte ou la distribution de leurs couleurs, de manière à ne plus présenter aucune image de leur origine : les changemens qu'elles auront éprouvés n’au- ront point porté uniquement sur la surface ; ils auront pénétré, pour ainsi dire , dans un intérieur peu susceptible de résis- tance : toutes ces variations auront influé sur leurs habitudes ; et ne pouvant pas nppésee de grandes forces aux accidens de toute espèce, non plus qu'aux vicissitudes de l'atmosphère, e, leurs mœurs auront changé de plus en plus,.et tout aura si is t va- rié dans ces petits animaux , que bientôt les diverses races sor- tes d'une souche commune n'auront pas présenté assez de r'es- 340 HISTOIRE NATURELLE. semblancé pour constituer une même espèce. Les grands ser- pens au contraire peuvent bien offrir, sous les divers climats, quelques différences de couleurs où d’habitudes qui marquent l'influence de la terre et de Pair , à laquelle aucun animal ne peut se soustraire : mais , plus indépendans des circonstances de lieux et de temps, plus constans dans leurs habitudes, plus inal- térables dans leurs proportions, ils doivent présenter plus souvent, dans les pays les plus éloignés , le nombre et la nature derapports qui constituent l'identité de l'espèce. Ce seront quelques uns de ces grands serpens, nageant à la surface de la mer, fuyant sur les eaux un ennemi lrop à craindre pour eux, ou jetés au loin par les vagues agilées , élevant avec fierté leur tète au-dessus des flots, et se recourbant avec agiliié en replis tortueux, qui auront fait dire , du pe de Pline, ainsi que le rapporte ce grand listes qu'on avoit vu des migrations par mer de dragons ou send serpens partis d'Éthiopie , et ayant près de vingt idées de longueur , et qui auront donné lieu aux di- vers récits semblables de plusieurs voyageurs modernes. Mais il n'en esl pas des serpens comme des quadrupèdes vi- vipares : moins parfaits que ces animaux, moins pourvus de sang , MOINS doués de chaleur et d’activité ere plus rap- prochés des insectes, des vers, des animaux les moins bien or- ganisés , ils ne craignent Héint l'humidité lorsqu'elle est combi- née avec la hate elle semble mème leur être alors très-favo- rable ; et voilà pourquoi aucune espèce de serpent ne paroît avoir dégénéré en Amérique : on doit penser, d’après les récits des voyageurs, qu’elles n'ont rien perdu, dans ces pays nou- veaux, de leur grandeur ni de leur force; et même dans les icrres les plus inondées de ce continent, les grands serpens pré- sentent une longueur peut-être plus considérable que dans les autres parties du nouvean monde ? Si l'humidité ne nuit pas aux diverses espèces de serpens, le défaut de chaleur leur est funeste : ce n’est qu'aux environs des contrées équatoriales qu'on rencontre ces énormes reptiles, l'ef- froi des voyageurs; et lorsqu'on s’'avance vers les régions tem- pérées, et sur-tout vers les contrées froides , on ne trouve que de très-petites espèces de serpens. L'on peut présumer que ce n'est pas la chaleur seule qui leur r Voyez les articles particuliers de cette histoire, DISCOURS SUR LES SERPENS. 341 est necessaire; nous sommes assez porlés à croire que, sans une certaine abondance de feu électrique répandu dans l'atmosphère, tous leurs ressorls ne peuvent pas êlre mis en Jeu avec avan- tage, et qu'ils ne jouissent pas par conséquent de ioute leur activité. Il semble que les temps orageux, où le fluide éiec- trique de l'atmosphère est dans cet état de distribution inégale qui produit les foudres , animent les serpens au lieu de les ap- pesantir,, ainsi qu'ils abattent l’homme et les grands quadrupèdes : c’est principalement dans les contrées très-chaudes que la cha- leur, plus abondante, peut, en se combinant, produire une plus grande quantité de fluide électrique; c’esten eltet vers ces contrées équaioriales que le tonnerre gronde le plus souvent et avec Le plus de force ; et voilà donc deux causes, l'abondance de la cha- leur, et la plus grande quantité de feu électrique, qui retiennent les grandes espèces de l’ordre des serpens aux environs de l'e- quateur et des tropiques. On a écrit mille absurdités sur l’accouplement des serpens : la vérité est que le mâle et la femelle, dont le corps est très- flexible , se replient l’un autour de l'autre , et se serrent de si près, qu'ils paroissent ne former qu’un seul corps à deux têles. Le mâle fait alors: sortir par son anus les parties destinées à {é- conder sa femelle, et qui sont doubles dans les serpens, ainsi que dans plusieurs quadrupèdes ovipares ,et communément celte union intime est longuement prolongée *. Ne A Re "tr Ne 1 Sans cette durée de leur accouplement il seroit souvent infécond : ils n’ont point, en effet, de vésicule séminale, et il paroît que c’est dans cette espèce de réservoir que la liqueur prolifique des animaux doit se rassembler, pour que, dans un court espace de temps, ils puissent en fournir une quantité suffisante à la fécondation. Les testicules où cette liqueur se prépare ne peuvent la laisser échapper que peu à peu; et d’ailleurs les conduits par où elle va de ces testicules aux organes de la génération , étant très-longs, très-étroits, et plusieurs fois re- pliés snr eux-mêmes, dans les serpens , il n’est pas surprenant qu’ils aient besoin de demeurer long-temps accouplés pour que la fécondation puisse s’opérer. Il en est de même des tortues et des autres quadrupèdes ovipares, qui, n’ayant pas non plus de vésicule séminale, demeurent unis pendant un temps assez long; et cette union très-prolongée est, en quelque sorte, forcée dans les serpens, par une suite de la conformation de la double verge du mâle ; elle est garnie de petits piquans tournés en artière, et qui doivent servir à l’animal à retenir sa femelle, et peut- être à l’animer. Au reste, l'impression de ces aiguillons ne doit pas être très-forte sur les parties sexuelles de la femelle, car elles sont presque toujours cartilagi- neuses. On peut consulter à ce sujet, dans les Transactions philosophiques , n°. 144, les observations de M. Tyson, célèbre anatomiste, dont nous adoptons ici l’opinion. 342 HISTOIRE NATURELLE. Tous les serpens viennent d’un œuf, ainsi que les quadrupèdes ovipares , les oiseaux et les poissons : mais, dans certaines es- pèces de ces reptiles, les œufs éclosent dans le ventre de la mère, et ce sont celles auxquelles on doit donner le nom de aipères , au lieu de celui de vivipares, pour les distinguer des animaux vivipares proprement dits *. Le nombre des œufs doit varier suivant les especes. Nous igno- rons s'il diminue en proportion de la grandeur des animaux, ainsi que dans les oiseaux, et de même que le nombre des pe- ttis dans les quadrupèdes vivipares: on a jusqu’à présent trop peu observé les mœurs des reptiles, pour qu’on puisse rien dire à ce: sujet. L'on sait seulement qu’il y a des espèces de vipères qui donnent le jour à plus de trente vipereaux; et l’on sait aussi que le nombre des œufs, dans certaines espèces de serpens ovipares. des contrées tempérées, va quelquefois jusqu'à treize. Les œufs, dans quelques espèces, ne sortent pas l’un après Fautre immédiatement : la femelle paroit avoir besoin de se reposer aprés la sortie de chaque œuf, IL est même des espèces : Nous croyons , pour éviter toute difficulté relativement à cette expression d’ovipare et à la propriété qu’elle désigne , devoir exposer ici la différence qu’il y a entre les animaux vivipares proprement dits et les ovipares ; différence qui a été. très-bien sentie par plusieurs naturalistes. On peut , à la rigueur, regarder tous les animaux comme venant d’un œuf; et dès-lors il sembleroit qu’on ne pourroit distinguer les vivipares d’avec les ovipares que par la propriété de mettre au jour. des petits tout formés , ou de pondre des œuts. Mais l’on doit admettre deux sortes. d'œufs. Dans la première, le fœtus est renfermé dans une enveloppe que l’on nomme amios, avec un peu de liqueur qui peut lui fournir le prenner aliment ; mais comme cette liqueur n’est pas suffisante pour le nourrir pendant son déve- loppement, l'œuf est lié par un cordon ombilical , ou par quelque autre commu- nication , avec le corps de la mère, ou quelque corps étranger dont le fætus tire sa nourriture : cel œuf ne pouvant pas suffire à Paccroissement ni même à l’en- tretien de l’animal , n’est donc qu'un œufincomplet ; et tels sont ceux dans lesquels, sont renfermés les fœtus de l’homme et des animaux à mamelles, qui ne peuvent point être appelés ovipares, puisqu'ils ne produisent pas d'œuf parfait propre- ment dit. Les œufs de la seconde sorte sont , au contraire, ceux quicontiennent nou-seulement un peu de liqueur capable de sustenter le fœtus dans les premiers. momens de sa formation, mais encore toute la nourriture qui lui est nécessaire jusqu’au moment où il brise ou déchire ses enveloppes pour venir à la Iumière, Ces derniers œufs sont pondus bientôt après avoir été formés ; ou s’ils demeurent dans le ventre de la mère, ils n’y tiennent en aucune manière; ils en sont entière- ment indépendans , ils n’en reçoivent que de la chaleur, ils sont véritablement complets; ce sont des œufs proprement dits, et tels sont ceux des oiseaux, des poissons, des serpens et des quadrupèdes qui n’ont point de mamelles. Œous ces. animaux doivent être appelés ovipares, parce qu'ils viennçut d'un véritable œuf; DISCOURS SUR LES SERPENS. 325 où cette sortie est assez difficile pour être très-douloureuse. Une couleuvre femelle qu’un observateur avoit trouvée pondant ses œufs avec lenteur et beaucoup d'eflorts, et qu’il aida à se débar- rasser de son fardeau, paroiïssoit recevoir ce secours, non-seu- lement sans peine , mais même avec un plaisir assez vif; et em frottant mollement le dessus de sa tête contre la main de lob- servateur , elle sembloit vouloir lui rendre de douces caresses pour son bienfait. L'on ignore encore combien de jours s’écoulent dans les di- verses espèces, entre la ponte des œufs et le moment où le ser- penteau vient à la lumière. Ce temps doit être très-relatif à la chaleur du climat. Les femelles ne couvent point leurs œufs ; elles lesabandonnent après la ponte ; elles les laissent quelquefois sur la terre nue, sur- tout dans les contrées très-chaudes : mais le plus souvent elles les couvrent avec plus où moins de soin, suivant que l'ardeur du soleil et celle de l’atmosphere sont plus ou moins vives ; nous verrons même que certaines espèces qui habitent les contrées et si dans quelques espèces de l’ordre des poissons ou de celui des quadrupèdes sans mamelles , ou de celui des serpens, les œufs éclosent dans le ventre même de Ja mère, d’où les petits sortent tout formés, ces œufs sont toujours des œufs par- faits et isolés ; les animaux qui en éclosent doivent être appelés evipares ; et si on en nomme quelques-uns vipéères ou vivipares, pour les distinguer de ceux qu pondent , et dont l’incubation ne se fait pas dans le ventre même de la mère, il ne faut point les considérer comme des vivipares proprement dits, ce nom p’appar- tenant qu'aux animaux dont les œufs sont incomplets et ne contiennent pas toute Ja nourriture nécessaire au fœtus. On doit donc distinguer trois manières dont les animaux viennent au jour ; premièrement, ils peuvent sortir d’une enveloppe à la- quelle on peut, si l’on veut , donner le nom d’œuf, mais qui ne forme qu'un œuf imparfait et nécessairement lié avec un corps étranger ou le ventre de la mère - secondement , ils peuvent venir d’un œuf complet et isolé, éclos dans le ventre de fa mère; et troisièmement , ils peuvent sortir d’un œuf aussi isolé et complet, mais pondu plus ou moins de temps avant d’éclore. Ces deux dernières manières sont es mêmes quant au fond ; elles diffèrent beaucoup de la première, mais elles ne diffèrent l’une de l’autre que par les circonstances de Pincubation; dans la se- conde, la chaleur intérieure du ventre de la mère développe le véritable œuf, tandis que, dans la troisième, la chaleur extérieure du corps de la mére, ou la chaleur plus étrangère du soleil et de l’atmosphère , le fait éclore. Les animaux qui viennent au jour de la seconde ct de la troisième manière sont donc égale- ment ovipares : j’ai donc été fondé à donner ce nom, avec la plupart des natu- ralistes, aux tortues, crocodiles, lézards, salamandres » grenouilles, et autres quadrupèdes sans mamelles; et tous les serpens, même les vipères, doivent être aussi regardés comme de vrais ovipares, très-difiérens également , par eur maniè:e de venir au jour, des viviprares proprement dits, 344 HISTOIRE NATURELLE, tempérées , les déposent dans des endroits remplis de végétaux en putréfaction , et dont la fermentation produit une chaleur active :. He: Si l’on casse ces œufs avant que les petits soient éclos, on trouve le serpenteau roulé en spirale. Il paroît pendant quelque temps immobile : mais si le lerme de sa sortie de l'œuf n’étoit pas bien éloisr", 1l ouvre Îa gueule et aspire à plusieurs re- prises l'air de l'atmosphère ; ses poumons se remplissent, et le jeu alternatif des inspirations et des expirations est pour lui un nouveau moteur assez puissant pour qu'il s’agite, se déroule et commence à ramper. Lorsque les petits serpens sont éclos, ou qu’ils sont sortis tout formés du ventre de leur mère, ils traînent seuls leur frêle existence; ils n'apprennent de leur mère , dont ils sont séparés, ni à distinguer leur proie , ni à trouver un abri; ils sont ré- duits à leur seul instinct : aussi doit-il en périr beaucoup avant _ qu'ils soient assez développés et qu’ils aient acquis assez d’ex- périence pour se garantir des dangers. Et si nous voulons re- chercher quelle peut-être la force de cet instinct, si nous exa- minons pour cela les sens dont les serpens ont été pourvus, nous irouverons que celui de l'ouïe doit être très-obtus dans ces animaux. Non-seulement ils sont privés d’une conque exté- rieure qui ramasse les rayons sonores, mais ils sont encore dé- pourvus d’une ouverture qui laisse parvenir librement ces mêmes rayons jusqu'au tympan, auquel ils ne peuvent aboutir qu'au travers d’écailles assez fortes et serrées l’une contre l’autre. Leur odoral ne doit pas être très-fin, car l'ouverture de leurs nannes est pelite et environnée d'écailles : mais leurs yeux, garnis, dans la plupart des espèces , d’une membrane cligno- tante qui les préserve de plusieurs accidens et des effets d’une lumière presque toujours trop vive dans les climats qu'ils ha- bitent, sont ordinairement brillans et animés, irès-mobiles , trés-saillans , placés de manière à recevoir l’image d’un espace étendu ; et la prunelle pouvant aisément se dilater et se contrac- ter, admet un grand nombre de rayons lumineux, ou arrête ceux qui nuiroïent à ses organes *. Leur vue doit donc être, et T Voyez particulièrement l’article de /2 couleuvre & collier. 2 Lorsque la prunelle est resserrée , elle est très-allongée, comme dans les chats, les oiseaux de proie, de nuit , etc., et elle forme une fente horizontale dans DISCOURS SUR LES SERPENS. | 345 est en effet, très-perçante. Leur goût peut d’ailleurs être assez actif, leur langue étant déliée et fendue de manière à se coller aisément. contre les corps savoureux *. Leur toucher même doit être assez fort. Ils ne peuvent pas, à la vérité, appliquer immédiatement aux différentes surfaces la partie sensible de leur corps; ils ne peuventrecevoir par le tact l'impression des ob- jets qui les environnent , qu'au travers des dures écailles qui les revêtent; ils n’ont point de membres divisés fen plusieurs parties, des mains, des pieds, des doigts séparés les uns des autres, pour embrasser étroitement ces mêmes objets: mais comme ils peuvent former facilement plusieurs replis autour de ceux qu'ils saisissent, qu’ils les touchent, pour ainsi dire, par une sorte de main composée d'autant de parties qu'il y a d'écailles dans le dessous de leur corps, et que par là ils doivent avoir un toucher plus parfait que celui de beaucoup d'animaux , et particulièrement des quadrupèdes ovipares , nous pensons qu'ils sont plus sensibles que ces derniers , et qu'ils ne cèdent en activité intérieure qu'aux quadrupèdes vivipares et aux oi- seaux, D'ailleurs, l'habitude d'exécuter avec facilité des mou- vemens agiles et de s'élancer avec rapidité à d'assez grandes dis- tances ne doit-elle pas leur faire éprouver dans un temps tres- court un grand nombre de sensations quiremontent , pour ainsi dire , les ressorts de leur machine, ajoutent à leur chaleur inté- rieure , augmentent leur sensibilité , et par conséquent leur ins- iinct? La patience avec laquelle ils savent attendre pendant très- long-temps dans une immobilité presque absolue le moment de se Jeler sur leur proie, la colère qu'ils paroissent éprouver lors- qu’on les atiaque , leur fierté lorsqu'ils se redressent vers ceux qui s'opposent à leur passage, la hardiesse avec laquelle ils s'é- Li certaines espèces , et verticale dans d’autres , quand la tête du serpent est paral- Jèle à l'horizon. z Elle est ordinairement étroite, mince, déliée, et composée de deux corps longs et ronds, réunis ensemble dans les deux tiers de leur longueur. Pline a écrit qu’elle étoit fendue en trois : elle peut-te paroître lorsque le serpent l’agite vivement; mais elle ne lesc réellement qn’en deux. Dans la plupart des espèces elle est renfermée presque en entier dang un fourreau , d’où l’animal peut la faire sortir en l’allongeant ; il peut même là darder hors de sa gueule sans remuer ses mâchoires, et sans les séparer l’une de l’autre, la mâchoire supérieure ayant au- dessous dn museau une petite échancrure par où la langue peut passer, et par où, en effet, on voit souvent déborder les deux peintes de cet organe, même dans l'état de repos du serpent, 316 HISTOIRE NATURELLE. Jancent même contre les ennemis qui leur sont supérieurs, Jeux fureur lorsqu'ils se précipitent sur ceux qui les troublent dans leurs combats ou dans leurs amours , leur acharnement lors- qu'ils défendent leur femelle , la vivacité du sentiment qui sem- ble les animer dans leur union avec elle, ne prouvent-ils pas , en effet , la supériorité de leur sensibilité sur celle de tous les ani- maux , excepté les oiseaux et les quadrupèdes vivipares? Non seulement plusieurs espèces de serpens vivent tranquillement auprès des habitations de l’homme, entrent familièrement dans ses demeures , s’y établissent même quelquefois et les délhivrent d'animaux nuisibles , et particulièrement d'insectes malfaisans ; mais l’on a vu des serpens, réduits à une vraie domesticité , donner à leurs maîtres des signes d’attachement supérieurs à tous ceux qu'on a remarqués dans plusieurs espèces d'oiseaux et même de quadrupèdes, et ne le céder, en quelque sorte, par leur fidélité, qu’à l'animal même qui en est le symbole *. Il en est des serpens comme de plusieurs autres ordres d’ani- maux : ceux qui sont irès-grands , sont rarement plusieurs en- semble. Il leur faut trop de place pour se mouvoir, trop d’es- pace pour chasser; doués de plus de force et d’armes plus puis- santes, ils doivent s'inspirer mutuellement plus de crainte. Mais ceux qui ne parviennent pas à une longueur très-cons:i- dérable , et qui n’excèdent pas sept ou huit pieds de long, ha- bitent souvent en très-srand nombre , non-seulement sur le même rivage ou dans la même forêt , suivant qu'ils se nour- rissent d’animaux aquatiques ou de ceux des bois, mais dans le même asile souterrain ; c'est dans des cavernes profondes qu'on les rencontre quelquefois entassés , pour ainsi dire, les uns contre les autres, repliés et entrelacés de telle sorte, qu'on croiroil voir des serpens à plusieurs têtes. Lorsqu'on néanee dans ces antres ténébreux , on n'entend d'abord que le petit bruit qu'ils peuvent faire au milieu des feuilles sèches, ou sur le gravier, en se tournant et en se retournant, parce que , na- turellement paisibles lorsqu'on ne les attaque point, ils ne cher- chent alors qu’à se cacher davantage , ou continuent sans crainte leurs mouvemens accoutumés : mais sion les effraie ou les irrite par un séjour trop long dans leurs repaires , on entend autour de soi leurs sifflemens aigus; et si l'on peut apercevoir les objets A tu ir ua id Net 3 Voyez particulièrement l'article de /a couleuvre commune. DISCOURS SUR LES SERPENS. 347 à l'aide de la foible clarté qui parvient dans la caverne, on voit un gran d nombre de têtes se dresser au-dessus de plusieurs corps écailleux , entortillés et pressés les uns contre les autres, et tous les serpens faire briller leurs yeux et agiter avec vitesse leur langue déliée, Telle est l'espèce de société dont ces animaux sont suscep- tibles : mais , dépourvus de mains et de pieds, ne pouvant rien porter qu'avec leur gueule, ils sont plusieurs ensemble sans que leur union produise jamais aucun ouvrage combiné, sans que leurs eflorts particuliers tendent à un résultat commun, sans qu'ils cherchent à rendre leur retraite plus commode; et peut-être est-ce par une suite de ce défaut de concert dans leurs mouve- mens, qu'on ne les voit point se réunir contre les ennemis qui les attaquent , ni chasser en commun une proie dont ils vien- droient plus aisément à bout par le nombre. Ils éprouvent, pendant l'hiver des latitudes élevées, un en- gourdissement plus ou moins profond et plus ou moins long, suivant la rigueur et la durée du froid : ce ne sont guère que les petites espèces qui tombent dans cette torpeur , parce que les très-grands serpens vivent dans la zone torride , où les saisons ne sont jamais assez froides pour diminuer leur mouvement vital au point de les engourdir. Ils sortent de leur sommeil annuel lorsque les premiers jours chauds du printemps se font ressentir ; mais ce qui peut paroître singulier , c’est qu'ainsi que les quadrupèdes ovipares, et presque tous les animaux qui passent le temps du froid dans un état de sopeur , ils se réveillent de leur sommeil d’hiver lorsque la tem- pérature est encore moins chaude que celle qui n’a pas suffi, vers la fin de l'automne, pour les tenir en activité. On a ob- servé que ces divers animaux se retiroient souvent? pendant lautomne, dans leurs asiles d'hiver , et s’y engourdissoient à une température égale à celle quiles animoit au printemps. D'où vient donc cette différence d’eflets de la chaleur du printemps et de celle de l'automne? Pourquoi, vers la fin de l'hiver, le même degré de chaleur produit-il un plus haut degré d'activité dans lesanimaux ? C’est que la chaleur du printemps n’est point le seul agent qui ranime alors et mette en mouvement les ani- maux engourdis. Dans ceite saison, non-seulement l’aimosphère commence à Ctre pénétrée de chaleur, mais encore élle se rem- plit d’une grande quantité de fluide électrique qui se dissipe 348 HISTOIRE NATURELLE. | avec les orages de l'été ; et voilà pourquoi on n'entend jamais pendant l'automne un aussi grand nombre d’orages ni de conps de tonnerre aussi violens, quoique quelquefois la chaleur de ces deux saisons soit égale. Ce feu électrique est un des grands asens dont se sert la Nature pour animer les êtres vivans; il nest donc pas surprenant que, lorsqu'il abonde dans l’atmos- phére, les animaux, déjà mus par cette cause puissante, n’aient besoin ; pour reprendre tous leurs mouvemens, que d’une cha- leur égale à celle qui les laisseroit da ns leur état de torpeur, si elle agissoit seule. La plupart des animaux qui ont assez de chaleur intérieure pour ne pas s'engourdir, et l'homme même, éprouvent cette différence d'action de la chaleur du printemps et de celle de l'automne; ils ont, tout égal d’ailleurs, bien plus de forces vitales et d'activité intérieure dans le commen- cement du printemps qu'à l'approche de l'hiver , parce qu'ils sont également susceptibles d'être plus ou moins animés par le Huide électrique, dont l'action est bien moins forte dans l’au- lomne qu'au printemps. Quelque temps après que les serpens sont sortis de leur -tor- peur, 1ls se dépouillent comme les quadrupèdes ovipares , et revêlent une peau nouvelle; ils se tiennent de mème plus ou moins cachés pendant que cette nouvelle peau n’est pas encore endurcie * : mais le temps de leur dépouillement doit varier sui- vant Îes espèces, la température du climat, et celle de la saison. C'est mème dans les serpens que les anciens ont principalement observé le dépouillement annuel ; et comme leur imagination riante et féconde se plaisoit à tout embellir, ils ont regardé cette opération comme une sorte de rajeunissement, comme le signe d'une nouvelle existence, comme un dépouillement de la vieil- lesse, et êne réparation de tous les effets de l’âge : ils ont consa- crée cette idée par plusieurs proverbes; et supposant que le serpent reprenoit chaque année des forces nouvelles avec sa nouvelle parure, qu'il jouissoit d’une jeunesse qui s'étendoit autant que sa vie, et que cette vie elle-même étoit très-longue , ils se sont dé- terminés d'autant plus aisément à le regarder comme le symbole de l'éternité , que plusieurs de leurs idées astronomiques et reli- gieuses se lioient avec ces idées physiques. * L'on trouvera, à l'article de /a couleuvre d’'Esculape , Vexposition tès- détaillée de la manière dont se fait le dépouillement des serpens. DISCOURS SUR LES SERPENS. 34 On ignore, dans le fait, quelle est la longueur de la vie des serpens. On doit croire qu'elle varie suivant les espèces, et qu’elle “est d'autant plus considérable qu'elles parviennent à de plus grandes dimensions : mais on n’a point, à ce sujel, d'observations précises et suivies. Et comment auroiït-on pu en avoir? La con- formation extérieure de ces reptiles est trop simple et trop peu variée pour qu'on ait pu s'assurer d’avoir vu plusieurs fois le même individu dans les bois ou dans les autres endroits où ils vivent en liberté : et d'ailleurs les grands serpens ont toujours inspiré trop de crainte pour qu'on ait osé essayer de les observer avec assiduité ; les moins grands ont été aussi l’objet d’une grande frayeur, ou leur petitesse, ainsi que la nature de leurs retraites, les ont dérobés aux regards de ceux qui auroient voulu étudier leurs habitudes. Mais si nous manquons de faits posilifs et de preuves directes à ce sujet, nous pouvons présumer, par analo- gie, qu'en général leur vie comprend un grand nombre d'années. Les quadrupèdes ovipares, avec lesquels ils ont de très-grands rapports, tant par leur conformation intérieure, la température de leur sang, le peu de solidité de leurs os, leurs écailles, etc. , que par leurs habitudes , leur engourdissement périodique et leur dépouillement annuel , jouissent , en général, d’une vie assez longue. Les très-srandes espèces de serpens doivent donc vivre très-long-temps; si nous les comparons en effet avec les croco- diles, qui ne parviennent de Ja longueur de quelques pouces à celle de vingt-cinq ou trente pieds qu'au bout de trente ans *, nous trouverons que les serpens dont la grandeur excède quel- quefois quarante pieds ne doivent y parvenir qu'au bout d’un temps pour le moins aussi long. Ces énormes serpens sortent en effet d’un œuf, comme les crocodiles ; leurs œufs sont à peu près de la même grosseur que ceux de ces derniers animaux , et le fœ- tus ne doit guère avoir plus de deux pieds de long lorsqu'il éclôt, à quelque espèce démesurée qu’il appartienne : nous avons vu et mesuré de jeunes serpens évidemment de la même espèce qua ceux qui parviennent à trente ou quarante pieds de long, et leur longueur n’étoit qu'environ de trois pieds, quoique leur confor- mation et la position de leurs diverses écailles annonçassent qu’ils étoient sortis de leur œuf depuis quelque temps lorsqu'ils A " Voyez l’article du crocodile dans l’Héstoire naturelle des quadrupèdes evipares, 350 HISTOIRE NATURELLE. avoient été tués. Mais si ces grands serpens ont besoin au moins du même temps que les crocodiles pour atteindre à leur entier développement, ne doit-on pas supposer que leur vie est aussi longue ? Sa durée seroit bien plus considérable , ainsi que celle de presque tous les animaux qui vivent dans l’état sauvage, et qui ne reçoi- vent de l’homme ni abri ni nourriture, s'ils pouvoient passer par: un véritable état de vieillesse, et si le commencement de leur dépérissement n'étoit pas presque toujours le terme de leur vie. Presque aucun des animaux qui sont dans le pur état de nature ne prolonge son existence au-delà du moment où ses forces com- mencent à s’afloiblir. Cette époque qui, dans l’homme placé au milieu de la société , n'indique tout au plus que les deux tiers de sa vie, marque la fin de celle de l’animal sauvage. Des le moment que sa vigueur diminue, 1l ne peut ni atteindre à la course les animaux dont il se nourrit, ni supporter la fatigue d’une longue recherche pour se procurer les alimens qui lui conviennent, ni échapper par la fuite aux ennemis qui le poursuivent, ni aita- quer ou se délendre avec des armes supérieures ou égales. Dès- lors ayant moins de ressources lorsqu'il auroit besoin de plus de secours, exposé à plus de dangers lorsqu'il a moins de puissance et de légèreté pour s’en garantir, manquant le plus souvent d'ali- mens lorsqu'il lui est plus nécessaire de réparer des forces qui s’épuisent plus vite, sa foiblesse va toujours en augmentant; la vieillesse n’est pour lui qu'un instant très-court, auquel succède une décrépitude dont tous les degrés se suivent avec rapidité : bientôt retiré dans son asile, où même quelquefois il a bien de la peine à se traîner , 1l meurt de dépérissement et de faim , ou est dévoré par des animaux plus vigoureux que lui; et voilà pour- quoi l’on ne rencontre presque jamais d’animal sauvage avec les signes de la caducité. Il en seroit de même de l’homme qui vi- vroit seul dans le véritable état de nature; sa vie se termineroit toujours au moment où elle commenceroit à s’affoiblir : la société seule , en lui fournissant les secours, les abris , les divers alimens, a prolongé des jours qui ne peuvent se soutenir que par ces forces étrangères; l'intelligence humaine a doublé, pour ainsi dire, la vie que la Nature avoit accordée à l’homme; et si les produits de cette intelligence , si les résultats de la socièté, si les arts de toute espèce ont amené les excès qui diminuent les sources de lexis- tence, ils ont créé ces secours puissans qui empêchent qu'elles ne DISCOURS SUR LES SERPENS. 551 &anssent presque au moment où elles commencent à n'être plus si abondantes. Tout compté, ils ont donné à l'homme bien plus d'années par tous les biens qu'ils lui procurent, qu’ils ne lui en ont Ôté par les maux qu'ils entrainent. Les animaux élevés en domes- ticité, jouissant des mêmes abris, et trouvant touiours à leur por- tée la nourriture qui leur convient, parviendroient presque tous, tomme l’homme, à une longue vieillesse; ils recevroient ce bien- fait de nos arts en dédommagement de la liberté qui leur est ra- vie, si l'intérêt qui les élève ne les abandonnoit dès que leurs forces afloiblies et leurs qualités diminuéesles rendent inutiles à nos jouissances. Lorsque les très-grands serpens sont encore éloignés de leur courte vieillesse, lorsqu'ils jouissent de toute leur activité et de toutes leurs forces, ils doivent les entretenir par une grande quantité de nourriture substantielle : aussi ne se contentent-ils pas de brouter l'herbe ou de manger des graines et des fruits , ils dévorent les animaux qu’ils peuvent saisir; et comme, dans la plupart des serpens , la digestion est très-longue, et que leuts ali- mens demeurent tres-long-temps dans leur corps, les substances animales qu'ils avalent , et qui sont très-susceptibles de putréfac- tion, s’y décomposent et s’y corrompent au point de répandre l'odeur la plus fétide. I est arrivé à plusieurs voyageurs, et par- liculierement à M. de la Borde, qui avoient ouvert le corps d’un serpent, d’ètre comme sufloqués par l'odeur forte et puante qui s’exhaloit des restes d’alimens que l'animal avoit encore dans les intestins. Cette odeur vive pénètre le corps du serpent, et, se fai- sant sentir de très-loi , annonce à une assez grande distance l'approche du reptile. Fortifiée, dans plusieurs espèces, par celle qu’exhalent des glandes particulières , elle sort, pour ainsi dire, par tous les pores, mais se répand suriout par la gueule de l’ani- mal; elle est produite par un grand volume de miasmes corrup- teurs et de vapeurs méphitiques, qui, s'étendant jusqu’à la vic- time que le serpent veut dévorer, l’investit, la suffoque, ou, ajoutant à la frayeur qu'inspire la présence du reptile, l'enivre, lui Ôôte l’usage de ses membres, suspend ses mouvemens, anéantit ses forces , la plonge dans une sorte d’abattement , et la livre sans défense à l'animal vorace et carnassier. Cette vapeur putride, qui produit des effets si funestes sur les animaux qui y sont exposés, et qui a donné lieu à tant de contes bigares et absurdes, forme une sorte d’atmosphère empes- 355 HISTOIRE NATURELLE. tée autour de presque tous les grands reptiles, soit qu’ils aient du venin, ou qu'ils n’en soient pas infectés; et elle ne doit être pres- que jamais rapportée à la nature de ce poisson, qui, malgré son activité , ne répand pas souvent une odeur sensible, même lors- qu'il est mortel. Lorsque les serpens se sont précipités sur les animaux dont ils se nourrissent , 1ls les retiennent en se roulant plusieurs fois au- tour d'eux, et en les serrant dans leurs nombreux replis; ils Les dévorent alors; et ce qui sert à expliquer comment ils avalent des volumes très-considérables, c’est que leurs deux mâchoires sont articulées ensemble de manière à pouvoir se séparer l’une de l'autre, et s'écarter autant que la peau de la tête peut le per- mettre : cette peau obéissant avec facilité aux efforts de l'animal, et les deux os qui forment les deux côtés de chaque mâchoire, n'étant réunis vers le museau que par des ligamens qui se prêtent plus ou moins à leur séparation, il n’est pas surprenant que la gueule des serpens devienne une large ouverture par laquelle ils peuvént engloutir des corps très-gros. D'ailleurs , comme ils com- mencent par briser au milieu de leurs contours les os des ani- maux et les autres substances irès-dures qu’ils veulent avaler; comme ils s’aident, pour y parvenir plus facilement , des arbres, des grosses pierres et de tous les corps très résistans qui peuvent être à leur portée; comme ils les enveloppent dans les mêmes re- plis que leurs victimes, et qu'ils s'en servent comme d'autant de leviers pour les écraser, il est encore moins étonnant que leurs alimens, étant broyés de manière à céder aux différentes pres- sions, et élant enduits de leur bave et d’une liqueur qui les rend plus souples et plus gluans, puissent entrer en grande masse dans leur gueule très élargie; ils serrent même souvent leur proie avec tant de force et de promptitude, que non-seulement ils la com- priment, la brisent et la concassent, mais la coupent comme le fer le plus tranchant. Les anciens connoissoient cette manière d'attaquer qu'emploiïent presque tous les serpens , et surtout les très-grandes espèces. Pline a écrit même que lorsque ces énormes reptiles avoient avalé quel- que grand animal, et par exemple une brebis , ils s’efforçoient de le briser en se roulant en plusieurs sens et en comprimant ainsi avec force les os et les différentes parties de l’animal qu'ils avoient dévoré. Leurs alimens étant triturés et préparés avant de parvenir dans S DISCOURS SUR LES SERPENS. 355 eut esiomac, il est aisé de voir qu'ils doivent être aisément digé- rés, d'autant plus que leurs sucs digestifs paroissent très-abondans, leur vésicule du fiel, par exemple, étant en général très-grande en proportion des autres parties de leur corps. La masse des alimens qu'ils avalent est quelquefois si grosse, relativement à l'ouverture de leur gosier, que, malgré tous leurs eflorts, l’écartement de leurs mâchoires et l'extension de leur peau , leur proie ne peut entrer qu’à demi dans leur estomac. Eiendus alors dans leur retraite, ils sont obligés d'attendre que la partie qu’ils ont déjà avalée soit digérée, et qu’ils puissent de nouveau écraser, broyer, enduire et préparer les portions trop grosses ; et on ne doit pas être étonné qu’ils ne soient cependant pas étouflés par cetie masse d’alimens qui remplit leur gosier et y interdit tout passage à l'air : leur trachée-artère, par où l'air de l'atmosphère parvient à leurs poumons *, s'étend jusqu'au-dessus du fourreau qui enveloppe leur langue; elle s'avance dans leur bouche de manière que son ouverture ne soit pas obstruée par un volume d’alimens suffisant néanmoins pour remplir toute la ca- pacité du gosier ; et l'air ne cesse de pénétrer plus où moins libre- ment dans leurs poumons , jusqu’à ce que presque toutes les por- tons desanimaux qu’ils ont saisis soient ramollies, mêlées avec les sucs digestifs, triturés, etc. Quelques efforts qu’ils fassent cependant pour briser et concasser les os, ainsi que pour ramollir les chairs et les enduire de leur bave, il y a certaines parties, telles, par exemple, que les plumes des oiseaux, qu’ils ne peuvent point ou presque point digérer, et qu'ils rejettent presque toujours. Lorsque leur digestion est achevée, ils reprennent une activité d'autant plus grande que leurs forces ont été plus renouvelées; et pour peu surtout qu'ils ressentent alors de nouveau l'aiguillon de la faun, 1ls redeviennent très-dangereux pour les animaux plus fotbles qu'eux ou moins bien armés. Ils préludent presque tou- jours aux combats qu'ils livrent par des sifflemens plus ou moins forts. Leur langue étant très-déliée et très-fendue , et ces animaux la lançant en dehors lorsqu'ils veulent faire entendre quelques sons , leurs cris doivent toujours être modifiés en sifflemens: ét il est à remarquer que ces sifflemens, plus ou moins aigus, ne pa- ? Il n’y a point d’épiglotte pour fermer l’ouverture de la trachée ; cette ouver- ture neconsiste communément que dans une fente très-étroite, et voila pourquoi Les serpens ne peuvent faire entendre que des sifflemens. Lacepède. 3 23 854% HISTOIRE NATURELLE. roissent pas être, comme les ‘cris de plusieurs quadrupèdes ou le ‘chant de plusieurs oiseaux, une sorte de langage qui exprime les sensations douces aussi-bien que les affections terribles; ils n’an- noncent, dans les grands serpens , que le besoin extrême, ou ce- lui de l'amour, ou celui de la faim. On diroit qu'aucune affection aisibie ne les émeut assez vivement pour qu'ils la manifestent par l'organe de la voix. Presque-tous les animaux de proie, tant de l'air que de la terre, les aigles, les vautours, les tigres, les léopards, les panthères , ne font également entendre leurs cris ou leurs hurlemens que lorsque leurs chasses commencent, ou qu’ils se livrent des combats à mort pour la libre possession de leurs #emelles. Jamais on ne les a entendus, comme plusieurs de nos animaux domestiques-et la plupart des oiseaux chanteurs , radou= cir, en quelque sorte, les sons qu’ils peuvent proférer, et exprimer par une suite d’accens plus ou moins tranquilles une joie paisible, une jouissance douce, et, pour ainsi dire, un plaisir innocent : eur langage ne signifie jamais que co/ere et fureur; leurs cla- meurs ne sont que des bruits de guerre ; elles n’annoncent que le désir de saisir une proie et d’immoler un ennemi, ou ne sont que Yexpression terrible de la douleur aiguë qu'ils éprouvent, lorsque leur force trompée n’a pu les garantir de blessures cruelles, ni leur conserver la femelle vers laquelle ilsétoient entraînés par une puissance irrésislible, Si les sifflemens des très-grands serpens étoient entendus de Join comme les cris des tigres, des aigles, des vautours, etc. , ils serviroient à garantir de l'approche dangereuse de ces énormes reptiles : mais ils sont bien moins forts que les rugissemens des grands quadrupèdes carnassiers et des oiseaux de proie. La masse seule de ces grands serpens les trahit et les empêche de cacher leur poursuite : on s'aperçoit facilement de leur approche, dans les endroits qui ne sont pas couverts de bois, par le mouvement des hautes herbes qui s’agitent et se courbent sous leur poids; et on les voit aussi quelquefois de loin repliés sur eux-mêmes, et présentant ainsi un cercle assez vaste et assez élevé. Soit qu’ils recherchent naturellement l'humidité, où que l’ex- périence leur ait appris que le bord des eaux, dans les contrées torrides , éloit toujours fréquenté par les animaux dont ils font leur proie, et qu'ils peuvent y trouver en abondance et sans la peine de la recherche l'aliment qu'ils préfèrent , c'est aupres des mares, des fontaines , ou des bords des fleuves, qu’ils choisissent DISCOURS SUR LES SERPENS. 355 leur repaire. C'est là que, sous le soleil ardent des contrées équa toriales, et, par exemple, au milieu des déserts sablonneux de l'Afrique, 1ls attendent que la chaleur du midi amène au bord des eaux les gazelles, les antilopes , les chevrotains, qui, consu- més par la soif, excédés de fatigue, et souvent de disette an milieu de ces terres desséchées et dépouillées de verdure, vien- nent leur livrer une proie facile à vaincre. Les tigres et les autres animaux moins allérés d’eau que de sang, viennent aussi sûr ces rives , plutôt pour y saisir leurs victimes que pour y élancher leur soif. Attaqués souvent par les énormes serpens, ils les atta- quent eux-mêmes. C’est sûrtout au moment où la chaleur de ces centrées est rendue plus dévorante par l'approche d’un orage qui fait briller les foudres et entendre ses affreux roulemens, et où l’action du fluide électrique répandu dans l'atmosphère donne en quelque sorte une nouvelle vie aux reptiles, que, tour- mentés par une faim extrème , animés par toute l'ardeur d’un sable brûlant et d’un ciel qui paroît s'allumer , environnés de feu , et le lançant, pour ainsi dire, eux-mêmes par leurs yeux éuncelans , le serpent et le tigre se disputent avec le plus d’achar- nement lngte de ces Are si souvent ensanglantés. Des voya- geurs disent avoir vu ce spectacle terrible; 1ls ont vu un tigre furieux , et dont les rugissemens portoient au loin l'épouvante, saisir avec ses grifles, Her avec ses dents , faire couler le sang d’un serpent démesuré, qui, roulant son corps gi gantesque, et sifllant de douleur et de rage, serroit le tigre dans ses contours multipliés , le couvroit de son écume rougie, l’étouffoit sous son poids, et faisort craquer ses Os au milieu de tous ses ressorts ten- dus avec force : mais les efforts du tigre furent vains , ses armes furent impuissantes , et il expira au milieu des replis dé l'énorme reptile qui le tenoit enchaîné. Etque l'on ne soit pas étonné de la grande puissance? des ser- pens : si les animaux carnassiers ont tant de force dans leurs mà- choires , quoique la longueur de ces mächoires n'excède guère un pied, et qu’ils n'agissent que par ce levier unique, quels effets ne doivent pas produire dans les serpens un très-grand nombre de leviers composés des os, des vertébres et des côtes, et qui, par l'articulation de ces mêmes vertèbres, peuvent appliquer avec facilité aux corps que les serpens veulent saisir et écraser ? A la force et à l'adresse les serpens réunissent un nouvel avan- tage : on ne peut leur Ôter la vie que difficilement, ainsi qu'aux 356 HISTOIRE NATURELLE, quadrupèdes ovipares; et ils peuvent, sans en périr, perdre uñe portion de leur queue , qui repousse presque toujours lorsqu'elle a été coupée *. Mais ce n'est pas seulement par des blessures qu'il est difficile de les faire mourir ; on ne peut y parvenir qu'avec peine par une privation absolue de nourriture, puis- qu'ils vivent plusieurs mois sans manger * ; et mêmeil leur reste encore quelque sensibilité lorsqu'ils ont été privés pendant long- temps et presque entièrement de lair qui leur est nécessaire pour respirer. Redi a fait des expériences à ce sujet ; il a placé des serpens dans le récipient d’une machine pneumatique; etaprès en avoir pompé presque tout l'air , 1l les a vus donner encore quelques signes de vie au bout de près de vingt-quatre heures ° Cette expérience montre comment ils peuvent parvenir à tout leur accroissement , jouir de toute leur force , et même choisir de préférence leur demeure au mulieu des marais fangeux dont le: exhalaisons empestées corrompent l'air, le rendent moins propre à la respiration , et produisent dans l'atmosphère l'effet d’un commencement de vide. Quoique de tous les temps les serpens, et surtout les très- grandes espèces , ainsi que celles qui sont venimeuses , aient dû inspirer une frayeur très-vive, leur forme remarquable et leurs habitudes singulières ont attiré sur eux assez d'attention pour qu'ou ait reconnu leurs qualités principales. Il paroît que les an- ciens connoissoient , même dès les temps les plus reculés , toutes les propriétés que nous venons d’exposer. Il faut qu’elles aient été observées dans ces temps antique dont il nous reste à peine quelques monumens 1mparfaits , et qui ont précédé les siècles nommés Léroïques , où la plupart des idées religieuses des Écyp- tiens et des Grecs ont commencé à prendre ces Prés brillantes qui oni fourni tant d'images à la poésie. Si nous ouvrons en effet les livres des premiers poëles dont les ouvrages sont parvenus jusqu'à nous, si nous consultons les fastes de la mythologie grec- que, 51 nous réunissons sous un même point de vue les différentes parües de ces anciennes traditions où le serpent est employé comme emblème, nous trouverons que les anciens lui ont atiri- bué, ainsi que nous, une grandeur très-considérable, qu'ils 1 Les anciens ont exagéré cette propriété des reptiles : Pline à écrit que Lorsqu'on arrachoit les yeux a un jeune serpent , il s’en formoit de nouveaux, 2 Voyez les divers articles de cette Histoire. 3 Boyle a fait aussi des expériences analogues. DISEOURS SUR LES SERPENS. 357 sembloient regarder comme dépendante du séjour de ce reptile- au milieu des endroits marécageux et humides, puisqu'ils ont supposé qu’à la suite du déluge de Deucalion ; le limon de la terre engendra un énorme serpent qu'Apollon tua par ses flèches, c'est-à-dire, que le soleil fit périr et dessécha par la chaleur de ses rayons. Ils lui ont aussi donné la force : car en parlant du combat d’Achéloüs contre Hercule, ils ont supposé que le premier de ces deux demi-dieux avoit revêtu la forme du ser- pent pour vaincre plus aisément son redoutable adversaire, C’est son agilité et la promptitude de tous ses mouvemens qui J'ont fait choisir par les auteurs de la mythologie égyptienne et grecqué pour le symbole de la vitesse du temps et de la rapidité avec [a- quelle les siècles roulent à la suite les uns des anires : et voilà pourquoi ils l'ont donné pour emblème à Saturne, qui désigne ce temps; et voilà pourquoiencore ils l'ont représenté se mordant la queue, et formant ainsi un cercle parfait, pour peindre la succession infinie des siècles de siècles, pour exprimer cette durée éternelle dont chaque instant fuit avec tant de vitesse, et dont l'ensemble n’a ni commencement ni fin. C'est ainsi qu’il étoit figuré en argent dans un des temples de Memphis, comme l’at- testent les monumens échappés au ravage de ce même temg- dont il étoit le symbole; et c’est encore ainsi qu'il étoit représenté autour de ces tableaux chronologiques où divers hiéroglyphes retraçoient aux yeux des Mexicains, de ce premier peu pie du nouveau monde, ses années, ses mois, et les divers événemens qui en remplissoient le cours. Les anciens ne lui ont-ils pas aussi attribué l'instinct étendu que les voyageurs s'accordent à reconnoître dans cet être remar- quable ? Ils ont anobli, exagéré cet instinct; ils l'ont décoré du nom d’intellisence , de prévoyance, de divination *; et voilà op 1 Les habitans d’Argus vénéroient les serpens. Les Athéniens disoient, suivant Hérodote, qu’on avoit vu dans le temple un grand serpent gardien et protecteur de la citadelle; ct même Jupiter étoit adoré sous la forme d’un serpent dans plusienrs endroits de la Grèce. Mais, pour avoir une idée plus précise des opinions des anciens touchant Vintelligence , la vivacité et les autres qualités des serpens, On peut consulter Plutarque , Eusèbe, Shaw, et M. Savary. Les Esyptiens l’'employoient , dans leur langue symbolique, pour désigner le soleil, Il représentoit aussi, pour ce peuple, le bon génie, la bonté suprême et infinie, dont le nom cneph Vi fut donué , suivant Eusebe ; et les Phéniciens le nommoient de même, agathe daimon , bon génie. 328 HISTOIRE NATURELLE. pourquoi placé autour du miroir de la déesse de la prudence, il fut consacré à celle de la santé, ainsi qu'à Esculape, adoré à Épidaure sous la forme d’un serpent. N'ont-il: pas reconnu sa iongue vie, lorsqu'ils ont femt que Cadmus et plusieurs autres héros avoient été mélamorphosés en serpens, comme pour dé- signer la durée de leur gloire, et que, le choisissant pour repré- senter les mânes de ce qui leur étoit cher, ils l’ont placé parmi les tombeaux *? N'ont-ils pas fait allusion à l’effroi qu'il mspire, et principalement au poison mortel qu'il recèle quelquefois , lors- qu'ils Font donné aux Euménides , dont il entoure et hérisse la tête; à l'Envie, dont il perce le cœur; à la Discorde, dont il arme les mains sanglantes ? Et cependant, par un certain con- irasie d'idées que l'on rencontre presque toujours lorsque Îles ob- jels ont été examinés plusieurs fois et par divers yeux, n'ont-ils pas vu dans le serpent cette beauté de couleurs et ces proportions. déliées que nous y ferons plus d'une fôis remarquer? Ne lui ont-ils pas accordé la beauté, puisqu'ils ont dit que Jupiter , qu, pour plaire à Léda, aveit pris la forme élégante du cygne, avoit choisi celle du serpent pour obtenir Les faveurs d’une autre divi- nité ? Toutes ces idées, répandues des contrées de PAsie ancien- nement peuplées *, s'étendant parmi les sociétés à demi policées. oo 1 Voyez à ce sujet, dans le cinquième livre de l’Enéide , la belle description du serpent qu'Énée vitautour du tombeau de son père. 2 Un roi de Calécut avoit ordonné que celui qui tueroit un serpent seroit: puni aussi rigoureusement que s’il avoit tué un homme. Il regardoit les serpens comme descendus du ciel, comme doués d’une puissance divine, et même comme des divinités, puisqu'ils pouvoient donner la mort en un instant Dès les tenips les plus reculés, le serpent a été aussi regardé par les Indiens comme le symbole de la sagesse; et leur religion avoit consacré cette idée. ( Mé- moire manuscrit de feu M Commerson sur l’Æutorrha-Badhe , commentaire du hasta où Shastah, le plus ancien des livres sacrés des habitans de l’Indostan. et de la presqu'île en-deca du Gange.) « Les Egyptieus peignoicnt un serpent, couvert d'écailies de différentes couleurs, « roulé sur lui-même. Nous savons par l'interprétation qu'Horus Apollo donne des. « hiéroglyphes égyptiens, que, dans ce style, les écailles du serpent désignoïient les « étoiles du ciel. On apprend encore , par Clément Alexandrin , que ces peuples « représentoient la marche oblique des astres par les replis tortueux d’un serpent. « Les Egyptiens, les Perses, peignoient un homme nu, entortillé d’un serpent ; « sur les contours du serpent étoient dessinés les signes du zodiaque. C’est ce « qu’on voit sur différens monumens antiques, et en particulier sur une représen- « tation de Mithras, expliquée par l'abbé Banier, et sur un tronçon de statue « trouvé à Arles en 1608. IL n’est pas douteux qu’on a voulu représenter par ceë + emblème la route du soleil dans Les douze signes, et son double mouvement an- DISCOURS SUR LES SERPENS. 35%: de l'Amérique et parmi les hordes sauvages de l'Afrique , accrues. par leur éloignement de leur origine, embellies par l'imagination, altérées par l'ignorance, falsifiées par la superstition et par la crainte, lui ont attiré les honneurs divins, tant dans l'Amérique qu'au royaume de Jaida , et dans d’autres contrées, où il a encore ses temples, ses prêtres, ses victimes ; et pour remonter de ja, considération d'objets profanes et du spectacle de la raison hu- maine égarée , à la contemplation des vérités sacrées dictées par la parole divine , si nous jetons un œil respectueux sur le plus: saint des recueils, ne voyons-nous pas toutes les idées des anciens. sur les propriétés du serpent s’accorder avec celles qu’en donne l'écrivain sacré , toutes les fois qu'il s’en sert comme de symbole 7 Grandeur, agilité, vitesse de mouvement, force, armes funestes, beauté, inteligence, instinct supérieur, tels sont donc les traits sous lesquels les serpens ont été montrés dans tous les temps ; et en cherchant ici à présenter cet ordre nombreux et remarquable, je n'ai fait que rétablir des ruines, ramasser des rapports épars, en lier l’ensemble, et exposer des résultats généraux, que les an-— ciens avoient déjà recueillis. C'est donc la grande image de ces êtres distingués, déjà peinte par les anciens, nos maîtres en tant, de genres , que je viens d’essayer de montrer, après avoir tâche de la dégager du voile dont l'ignorance , l'imagination, et l'a- « nuel et diurne , qui, en se combinant, font qu’il semble s’avancer d’un trop: « ques à l’autre par des lignes spirales. On retrouve cet hiéroglyphe jusque chez les « Mexicains : ils ont leur cycle de cinquante-deux ans , représenté par une roue ; «cette roue est environnée d’un serpent qui se mord la queue, et par ses nœuds « marque les quatre divisions du cycle..…., 11 est évident que les figures des con- « stellations, les caracières qui désignent jes signes du zodiaque, et tout ce qu’on « peut appeler la notation astronomique, sont les restes des anciens hiéro»lyphes, « Il est remarquable que les Chinois appellent les nœuds de la lune, La tête et la « queue du ciel, comme les Arabes disent la tête et la queue du dragon. Le dra- « gon est, chez les Chinois, un animal céleste : ils ont apparemment confondn « ces deux idées … Ilest encore fait mention dans l’'£dda d'un grand serpent qui « environne la terre. Tout cela a quelque analogie avec le serpent, qui partout « représente le temps, et avec le dragon, dont la tête et la queue marquent les « nœuds de l'orbite de la lt « superstition , ce préjugé u dis que ce dragon cause Îles éclipses. Mais cette Sel qui se retrouve en Amérique comme en Asre, «n’indique-t-il pas une source commune , et ne place-t-1il pas:même plus nalir- « rellement cette sour ce au Nord, oùpeut exister la seule communication possible «entre l’Asie et l'Amérique, et d’où les hommes.ont pu descendre facilement de «toutes parts vers le Midi, pour habiter l'Amérique, la Chine , les Indes, ete. Pos ( M, Bailly, de l'Académie Française , de celle des Sciences, et de celle des Ans- griptions , Héstoire de l’asironomie ancienne, page 515.) * # 360 _ HISTOIRE NATURELLE. mour du merveilleux, l'avoient couverte pendant une longue suite de siècles; voile tissu d’or et de soie, et qui embellissoit pent-être l'image que l’on voyoit au travers, mais qui n’étoit que ouvrage de l’homme, et que le flambeau de la vérité devoit consumer pour n'éclairer que l'ouvra ge de la Nature. COR VAR AVE VE VUAR VV UMA VILA DRE VOA AA AAA TU LA MAUMARAE A NOMENCLATURE ET TABLE MÉTHODIQUE DES SERP ENS. D nn Re Nous venons de voir que, malgré le grand nombre de ressem- blances que présentent les diverses espèces de serpens, elles dif- fèrent Les unes des autres, non-seulement par la teinte et la dis- tribution de leurs couleurs , Mais encore par le nombre, la gran- deur, la forme et l'arrangement de leurs écailles, autant que par leurs habitudes, et particulièrement'par la nature de leur habita- tion, ainsi que de la nourriture qu'elles recherchent. L'ordre des "serpens étant d’ailleurs assez nombreux , et renfermant plus de cent quarante espèces *, nous avons cru ne pouvoir en traiter avec clarté qu’en établissant dans l’ordre de ces reptiles quelques divisions générales, fondées sur la différence de leur conforma- ton extérieure, ainsi que sur celle de leurs mœurs. Nous les avons réumis en huit diflérens groupes, et nous en avons formé huit genres. Le premier est composé des serpens qui ont un seul rang de grandes éeailles sous le ventre, et deux rangs de petites plaques sous la queue. Nous les appelons couleuvres (en latin coluber ) avec la plupart des naturalistes récens , et particulièrement avec M. Linné; et ce genre comprend la vipère commune, l’aspic, la couleuvre proprement dite , la couleuvre à collier, la quatre-raies, 1 Nous décrivons dans cet ouvrage , non-se nt plus de cent quarante, mais même plus de cent soixante serpens ; cependant, comme plusieurs de ces animaux, au lieu de former plas de cent soixante espèces, ainsi que nous le pré- sumons, pourront, dans la suite, n'être regardés, d'après de nouvelles obser vations des voyageurs ou des naturalistes, que comme des variétés dépendantes de l’âge ou du sexe, nous avons cru ne devoir parler ici que de cent quarante espèces. NOMENCLATURE DES SERPENS. 561 cinq serpens très-communs en France, et qui forment, a avec l’or- vet, et peut-être la couleuvre d Ra pts les seules espèces qu’on y ait encore observées. : Nous plaçons dans le second genre les serpens qui n'ont qu’un seul rang de grandes plaques, tant au-dessous du corps qu'au-dessous de la queue ; et ce genre présente les plus grandes espèces , auxquelles nous laissons le nom générique de boa, par lequel elles ont été désignées en latin par Pline et les autres an- ciens auteurs, et en français, ainsi qu’en latin, par le plus grand nombre des naturalistes et des voyageurs modernes, et qu’on a ainsi nommées, parce qu'on a écrit qu’elles se nourrissoient avec plaisir du lait des vaches. Le troisième genre est composé des serpens qui ont de grandes plaques sous le ventre et sous la queue, dont l'extrémité est ter- minée pardes écailles articuléeset mobiles, auxquelles ona donné le nom de sonnettes * : nous leur conservons le nom générique de serpent à sonnette *. Dans le quatrième genre l’on trouvera les serpens qui n'ont au-dessous du corps et de la queue que des écailles semblables a celles du dos; nous leur laissons le nom générique d’anguis. Et c’est dans ce genre qu'est placé l’orvet, serpent très-commun dans quelques-unes de nos provinces méridionales. Nous comprenons dans le cinquième genre ceux qui sont en- tourés partout d’anneaux écailleux, el que les naturalistes ont déjà appelés amphisbenes. Nous comptons dans le sixième les serpens dont les côtés du corps sont plissés, etque l’ona nommés cæciles (en latin cæcrlia). Dans le septième genre doivent être mis ceux dont le dessous du corps présente, vers la tête, de grandes plaques, ne montre ensuite que des anneaux écailleux, et dont la queue, garnie de ces mêmes anneaux à son origine, n'est revêtue que de simples écailles à son extrémité. Nous les appelons /angaha , avec les na- turels dun pays où on les trouve. Et enfin nous plaçons dans le huitième le serpent qui a sa peau revêtue de petits tubercules, et que nous nommons lacrochorde de Java, avec M. Hornstedt, qui en a publié la description * 2 Voyez la description de ces écailles ou sonnettes dans l’article du bozguira. 2 En latin crotalus. 3 M, Linné a divisé les serpens en six gnres, auxquels nous avons ajouté celni des Zangaha , que M. Bruyères, de la Société Royale de Montpellier, a le pre- 362 HISTOIRE NATURELLE. “Dans chaçun de ces huit genres, différenciés par des signes ex térieurs très-constans et tres-faciles à reconnoitre, il seroit à dé- sirer que l'on pût former une sous-division, d’après une pro- priélé bien importante dont nous allons parler. Chacun de ces genres présenteroit deux groupes secondaires : l’on placeroit dans le premier les serpens dont les pelits éclosent dans le ventre de leur mère , et auxquels on doit donner le nom de vipères; et l’on comprendroit dans le second les serpens proprement dits, et qui pondent des œufs. Cette distribution si naturelle et fondée sur d'assez grandes différences intérieures, ainsi que sur un fait remarquable, devroit faire partie de tout arrangement métho- dique destiné à faire reconnoîitre l'espèce et le nom des divers individus : mais pour cela 1l faudroit qu’on eût trouvé des carac- tères extérieurs consta ns et faciles à voir, qui distinguassent les vipères d'avec les serpens proprement dits. Un fort bon obser- vateur, M. de la Borde, correspondant du Cabinet du Roi à Cayenne, a cru remarquer que toutes les espèces de serpens dont les petits éclosent dans le ventre de leur mère sont venrmeuses, et que par conséquent elles ont toutes des crochets ou dents mo- biles semblables à celles de la vipère commune d'Europe. Si celte observation importante , que nous avons vérifiée sur plusieurs espèces de serpens reconnus pour vipères, pouvoil s'appliquer également à toutes les espèces de reptiles qui viennent au jour tout formés, et si ces dents mobiles ne garnissoient les ma- choires d’aucun serpent ovipare, on pourroit regarder ces cro- chets comme des caractères distinctifs de la sous-division des vipères, dans chacun des huit genres des reptiles. Ge caractère est d'autant plus remarquable, qu’il nous a paru toujours réuni avec une conformation particulière des mâchoires, que nous croyons de voir faire connoitre ici. Dans toutes les espèces de couleuvres à crochets que nousavons examinées , nous n'avons trouvé à la mâchoire supérieure qu'un seul rang de petites dents crochues et recourbées en arrière: c'est à l'extérieur de ce rang qu’est placé, de chaque côté, un crochet plus ou moins long, creux , percé vers ses deux extrémités, en- veloppé dans une gaine, d’où lanimal peut le faire sortir ; et eq mier fait connoître dans le Journal de physique du meis de février 178%, et celui que M. Hornstedt a décrit dans Les Mémoires de l’Académie de Stockholm , £ =Q- n°: PTS année 1787, page 300. NOMENCLATURE DES SERPENS. 363 auprès de sa base sont deux ou trois crochets semblables , quel- quefois cependant plus petits, et destinés à remplacer le pre- mier , lorsque quelque accident en prive le reptile *. La ma- choire inférieure ne présente également qu’un seul rang de dents; mais les deux os qui la composent, l’un à droite et l’autre à gauche, bien loin d’être articulés ensemble au bout du museau, ne sont réunis que par la peau et les muscles. Ils sont toujours très- écartés l’un de l'autre, et terminés par des dents crochues, moins petites que les autres dents, mais qui ne sont ni creuses, ni percées, ni mobiles, comme les vrais crochets placés dans la mà- choire supérieure, et ne peuvent distiller aucun venin. Dans les couleuvres qui n’ont point de vrais crochets mobiles, toutes les dents sont au contraire presque égales. Les deux os de la mâchoire inférieure ne sont pas articulés ensemble ; mais ils sont courbés l’un vers l’autre, et ils sont rapprochés au point de paroître se toucher. Ea mâchoire supérieure est garnie de deux rangs de denis : l'exténieur est à la place des crochets mobiles, et l'intérieur s'étend très-avant vers le gosier *. Cependant, comme l’on devroit désirer un caractère plus extérieur, et par conséquent plus facile à apercevoir, ces crochets on dents mo- biles pouvant d'ailleurs être quelquefois confondus avec les dents crochues , mais immobiles, de plusieurs espèces de serpens venus d'un œuf éclos hors du ventre dela mêre, j'ai observé avec soin un grand nombre de couleuvres, et j'ai remarqué que dans ce genre les espèces dont les mâchoires éloient garnies de crochets, avoient le sommet de la tête couvert de pelites écailles à peu près semblables à celles du dos, et que presque toutes les autres Favoient revêtu au contraire d'écailles plus grandes que celles du dessus du corps, d’une forme très-différente , toujours au nombre de neuf, et placées sur trois rangs ; le premier et le se- cond, à compter du museau, étant composés de deux écailles , je troisième de trois, et le quatrième de deux. Nous ne croyons pas néanmoins que l’on doive établir une sous-division rigou- 0 LU D D I CS D ED EE ED EE À 7 Article de la wipère commune. 2 Voyez l'article de la vipère commune, relativement au jeû des mâchoires et des os qui les composent. 3 Quelqnes serpens venimeux, et par conséquent à crochets, ont quelquefois entre les yeux trois écailles un peu plus grandes que celles du dos; mais je n’2x vu que sur la tête du naja les neuf grandes écailles qui garnissent celle dela plupart des cœouleuvres ovipares etnon venimeuses. 364 HISTOIRE NATURELLE. reuse dans le genre des couleuvres, et à plus forte raison dans chaque genre de serpens, avant que de nouvelles et de nom- breuses observations aient mis les naturalistes à portée de com- pléter notre travail à ce sujet. Nous croyons devoir nous eonten- ter, en attendant, de séparer , dans la partie historique de chaque genre, les espèces reconnues pour de vraies vipères, ou que nous considérerons comme telles à cause de leur conformation exté- rieure , de leurs crochets mobiles , et de leur venin, d'avec les autres que nous regarderons comme ovipares , jusqu’à ce que les voyageurs aient éclairci l’histoire de ces espèces peu connues, et presque toutes étrangères. Le genre des couleuvres étant très-nombreux, et par consé- quent les espèces qui le composent ne pouvant pas être reconnues irès-aisément, non-seulement nous aurions voulu pouvoir. sépa- rer les vipères de celles qui pondent, mais nous aurions désiré pouvoir diviser ensuite les couleuvres ovipares en deux sections différentes. Nous avons pensé à faire ce partage d’après la propor- uon de la longueur du corps et de celle de la queue, ainsi que d'après la grosseur ou la forme déliée de cette dernière partie : mais, indépendamment que cette proportion et cetle forme ont été jusqu’à présent très-peu indiquées par les naturalistes et les voyageurs , et que nous n’aurions pu, d’après cela, classer les espèces que nous n'avons pas vues, et dont nous ne parlerons que d’après les auteurs, nous avons cru nous apercevoir que cette proportion varloit suivant l’âge ou le sexe, etc. Nous devons donc uniquement inviter les voyageurs , el ceux qui ont dans leur collection un grand nombre d’individus de la même espèce, à déterminer, par des observations très-multipliées , les limites de ces variations. Lorsque ces limites seront fixées, on pourra éta- blir une division exacte entre les deux sections que l’on formera dans la grande famille des couleuvres ovipares, et dont les carac- tères distinctifs seront tirés de la grosseur de la queue et de sa longueur comparée avec celle du corps. Nous ne pouvons main- tenant que chercher à indiquer des signes caractéristiques de chaque espèce, très-marqués et très-faciles à saisir , afin de di- minuer le plus possible l'inconvénient d'un trop grand nombre d'espèces renfermées dans le même genre. Nous avons donc laissé d'autant moins échapper les traits de leur conformation exté- rieure qui ont pu nous donner ces caractères sensibles, que, ans celle altention de rechercher tous les moyens de distinguer NOMENCLATURE DES SERPENS. 365 les espèces , les naturalistes et les voyageurs auroient élé très- souvent embarrassés pour les reconnoiître. Lorsqu'en effet les ser- pens sont encore jeunes , ils ne ressemblent pas loujours aux serpens adultes de leur espèce ; ils en diffèrent souvent par la teinte de leurs couleurs; et s'ils n’en sont pas distingués par la disposition générale de leurs écailles, 1ls le sont quelquefois par le nombre de ces pièces. On peut reconnoître facilement leur genre ; mais il seroit souvent difficile de déterminer leur espece, en n'adoptant pour caractère spécifique que celui qui a été admis jusqu'à présent par le plus grand nombre des naturalistes, et qui a été principalement employé par M. Linné. Ce caractère con- siste dans le nombre des grandes et des petites plaques situées au- dessous du corps et de la queue. Nous pensons, d’après des obser- vations et des comparaisons très-multipliées que nous avons faites sur plusieurs individus d’un grand nombre d'espèces con- servées au Cabinet du Roi, ou que nous avons vues dans difflé- rentes collections ; que le nombre de ces plaques peut varier sui- vant l’âge, augmenter à mesure que les serpens grandissent, et dépendre d’ailleurs de beaucoup de circonstances particulières et accidentelles. Nous n'avons pas cru cependant devoir rejeter un caractère aussi simple, aussi sensible, et qui ne s’efface pas lors même que l'animal a été conservé pendant long-temps dans les cabmets : nous l'avons employé d'autant plus qu'il établit une grande unité dans la méthode, et qu'il est quelquefois le seul indiqué par les auteurs pour les espèces que nous n'avons pas vues. D'ailleurs nous marquerons toujours séparément, ainsi que les naturalistes qui nous ont précédés, le nombre des plaques qui revêtent le dessous du corps, et celui ‘des plaques situées au-des- sous de la queue ; et comme il peut être trés-rare que ces deux nombres aient varié dans le même individu, l’un pourra servir a corriger l’autre. Mais nous avons cru que ce caractère tiré du nombre des écailles placées au-dessous du corps ou de la queue de- voit être réuni avec d’autres caractères. Nous avons donc multiplié nos observations sur le grand nombre de serpens que nous avons été à portée d'examiner : nous avons comparé le plus d'individus de chaque espèce que nous avons pu, afin de parvenir à distin- guer les formes constantes d'avec celles qui sont variables. Nous n'avons presque pas voulu nous servir des nuances des couleurs, si peu permanentes dans les individus vivans, et si souvent alté- rées dans les animaux conservés dans les collections. Malgré 366 HISTOIRE NATURELLE. cette contrainte que nous nous sommes imposée, nous croyons être parvenus à trouver ce que nous désirions. Nous avons pensé que neuf caractères diflérens pouvoient, par leurs diverses com- binaisons avec le nombre des grandes ou des petites plaques pla- cées sous le corps et sous la queue, suffire à distinguer les espèces des genres les plus nombreux, d'autant plus qu'on peut y ajou- ter, dans certaines circonstances, un dixième caractère souvent aussi permanent et plus apparent que les neuf autres. Nous tirons principalement ces caractères de la forme des écailles. En eflet, si les plaques du dessous du corps ont à peu près la mème forme dans tous les serpens, si elles sont presque toujours très-allongées, si elles ont le plus souvent six côtés très- inégaux , et si elles ne varient guère que par leur longueur et leur largeur , la forme des écailles qui revèlent le dessus du corps n'est pas la même dans les diverses espèces : dans les unes, ces écailles sont hexagones ; dans les autres , ovales où taillées em losange ; plates et unies dans celles-ci ; relevées dans celles-là par une arèête très-saillante; se touchant quelquefois à peine, ou se recouvrant au contraire comme les ardoises des toits. Voilà donc sept formes différentes et bien distinctes que les écailles du dos peuvent présenter. De plus, si quelques espèces de serpens ont le dessus de la tête recouvert d’écailles semblables à celles du dos, les autres ont, ainsi que nous venons de le dire, cette partie du corps défendue par des lames plus grandes, au nombre de neuf, et placées sur trois rangs; ce qui compose un huitième caractère spécifique. Nous tirons le neuvième de la forme et quelquefois du nombre des écailles placées sur les mâchoires ; et tous ces caractères nous ont paru constans dans chaque espèce , et indépendans du sexe ainsi que de l’âge. D'ailleurs, autant les nuances des couleurs sont variables dans les serpens , autant leurs distributions générales en taches, en bandes , en raies, etc., sont le plus souvent permanentes , de telle sorte que, dans une même espèce de serpens distingués par un grand nombre de taches , quelques individus peuvent, par exemple, être blanchâtres avec des taches vertes, et d’autres jaunes avec des taches bleues : mais dans la même espèce ce sont presque toujours des taches disposées de la même manière. Cette distribution de couleurs est d’ailleurs peu altérée dans les serpens qui font partie des collections , et ce n’est que la nuance NOMENCLATURE DES SERPENS. 36% des diverses teintes qui change après la mort de l'animal, ou naturellement, ou par l’eflet des moyens employés pour le con- server. Gependant, comme l’âge et le sexe peuvent introduire d'assez grands changemens dans la distribution des couleurs, nous n'em- ployons qu'avec réserve ce dixième caractère. Cest d'après les principes que nous venons d'exposer que nous avons fait la Table suivante. Les espèces n’y sont pas pré- sentces dans le même ordre que celui dans lequel nous avons ex- posé quelques traits de leur histoire. Nous avons dû, en eflet, pour bien présenter ces traits, séparer, par exemple, les vipères d'avec les couleuvres ovipares, qui en diffèrent beaucoup par leurs habitudes ; traiter d'abord de la vipère commune, comme du serpent le mieux connu , et dont on est en Europe très à por- tée d'étudier les mœurs ; commencer l’histoire des couleuvres ovi- pares par celle de la couleuvre verte et jaune, ainsi que de la conleuvre à collier, que l'on rencontre en très-grand nombre en France, et dont les habitudes naturelles peuvent être trés-aise- ment observées, etc. Dans la Table méthodique, au contraire, où nous n'avons dû chercher qu'à donner aux naturalistes, et principalement aux voyageurs , le moyen de reconnoitre les di- verses espèces, de voir si elles n’ont pas élé décrites, ou de leur rapporter les observations des différens auteurs, nous avons cru diminuer beaucoup le nombre des comparaisons qu'ils aurotent été obligés de faire, et leur épargner beaucoup de recherches, en plaçant les espèces d’après l’un des caractères que nous avons em- ployés, en les rangeant, par exemple, d’après le nombre des pla- ques qui revêtent le dessous du corps, et en commencant par les espèces qui en ont le plus *. Cette Table est divisée en dix colonnes. La première présente les noms des espèces; la seconde , le nombre des grandes plaques, des rangées de petites écailles, ou des anneaux écailleux qui revêtent le dessous du corps des ser- pers, ou le nombre des plis que l’on voit le long des côtés du corps, selon le genre auquel ils appartiennent. Les espèces sont placées, ainsi que nous venons de le dire, suivant le nombre oo 2 Nous n’avons jamais compris dans le nombre des plaques du dessous du corps les grandes écailles, ordinairement au nombre de deux ou de trois, qui les sépa- sent de l'anus. 368 HISTOIRE NATURELLE. de ces grandes plaques, rangées de petites écailles , anneaux écail- leux ou plis latéraux, afin qu’on puisse trouver très-aisément une espèce de serpent que nous y aurons comprise , ou celles avec lesquelles 1l faudra comparer le reptile dont on voudra connoître l'espèce. La troisième colonne renferme le nombre des paires de pe- tites plaques, où de grandes plaques, où de rangées de petites écailles, ou d’anneaux écailleux , que l’on voit sous la queue des serpens , ou le nombre des plis latéraux placés le Jong de cette partie. La quatrième offre la longueur totale des reptiles ; et la cin- quième la longueur de leur queue. Ces longueurs ne sont souvent ni les plus grandes ni les plus petites que présentent Les espèces ; elles ne sont que les longueurs mesurées sur les individus que nous avons décrits; et nous n’en avons fait mention dans notre Table méthodique que pour indiquer le rapport de la longueur totale des reptiles à celle de leur queue *. La sixième colonne apprend si les serpens ont des crochets ve- nimeux ou non, et laquelle de leurs deux mâchoires est armée de ces crochets. La septième désigne le défaut de grandes écailles sur la partie supérieure de la tête, ou le nombre et l’arrangement de ces grandes pièces, lorsque le dessus de la tête des serpens en est garni. Cette expression abrégée, neuf sur quatre rangs, signifie qu’elles sont grandes, conformées et placées à peu près comme celles qui couvrent une partie de la tête de la couleuvre à collier, de la couleuvre verte et jaune, et du plus grand nombre de couleuvres sans venin. Il est bon d'observer que, dans certaines espèces , comme, par exemple, dans celle du molure, la grande pièce du milieu du troisième rang, à compter du museau , est quelquefois divisée par une suture; ce qui pourroit faire croire que la tête de ces espèces de reptiles est couverte de dix grandes pièces. Sur la huitième colonne est marquée la forme des écailles du dos : leur figure , en losange, ou ovale, ou hexagone, peut être variable ; mais nous n'avons jamais vu des individus de la même ————————————_—————————————.——— 1 Nous venons de voir que ce rappert varioit dans plusieurs espèces deserpens, suivant l’âge ou Le sexe : cependant, comme il paroït constant dans le plus grand nombre d’espèces de reptiles, ou du moins que ses variations y sont renfermées dans des limites très-rapprochées, nous avons cru qu’il pourroit servir asses sou- vent à reconnoître l’espèce des individus que l’on examineroit. NOMENCLATURE DES SERPENS. 369 espèce avoir, les uns des écailles unies, et les autres des écailles relevées par une arête. La neuvième colonne montre quelques traits remarquables de la conformation des serpens; et enfin la dixième indique leurs couleurs. Nous nos sommes attachés beaucoup plus à désigner la disposition de ces couleurs que leurs nuances; et c'est aussi le plus souvent à cette disposition qu'il faut presque uniquement avoir égard. Quelques nuances sont cependant peu sujettes à varier sur l'animal vivant, et même à être altérées par les divers moyens employés pour la conservation des reptiles; nous les avons mar- quées de préférence dans la Table méthodique *. Au reste, il ne faut pas perdre de vue que c’est uniquement d’après la réunion de plusieurs caractères que l'on devra presque toujours se décider sur l'espèce du serpent que l’on examinera. Les places vides de la Table méthodique pourront être remplies avec le temps; elles présenteront alors des caractères dont nous n'avons pas pu parier à cause du mauvais état des serpens que nous avons vus, ou de la trop grande briéveté des descriptions des naturalistes. ? On s’apercevra aisément, en lisant les divers articles «de cet ouvrage, qu'il étoit impossible de donner dans des planches noires une idée de toutes les cou- leurs brillantes, et surtout des reflets variés d’un grand nombre de serpens. Nous aurions désiré substituer des planches enluminées à ces planches notes; mais on ne peut pas faire, dans un seul pays, des dessins enluminés et exacts , d'animaux qui, habitant presque toutes les contrées des deux mondes, ne peuvent être trans- portés vivans qu’en très-petit nombre, et dont les couleurs s’altèrent d’abord après leur mort. Ce ne sera qu'après beaucoup de temps qu’on pourra réunir des dessins en couleur de tous les reptiles connus, dessinés en vie et daus leur pays patal, par différens voyageurs. Au reste, nous devons prévenir que nos descriptions indiquent quelquefois une distribution de couleurs un peu différente de celle que la gravure présente, parce que quelques dessins ont été faits d’après des individus dont les conleurs étoient altérées, quoique leurs formes fussent bien conservées : nous avons été bion aises que le dessinateur ne représentât que ce qu’il avoit sous les yeux ; mais nous avons fait notre description d’après tout ce que nous avons pu recuéillir de plus certain relativement aux couleurs de l’animal en vie. Quelquefois aussi la gravure n’a pu indiquer la véritable forme des écailles, dont on trouve la description dans le texte. Lacepède. 1, | 2% HISTOIRE NATURELLE. 445211424411 443%4:42111114414411%143%31441%41%201410 3541 04% 3) AAA MANIA AAA AAA EMEA I TABLE MÉTHODIQUE SER PREMIER Serpens qui ont de grandes plaques sous le corps. COULEUVRES. Colubri. CARACTÈRES. | RE OS 2 PLAQUES ESPECES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS AU EU et à paires de petites plaques ; $ : ou en RES Tongueur de la queue. venin. À Couleuvre | jaune et bleue. 312 / 9 pieds. | Coluber 93 flavo-cœrulus. | C. double-tache. 297 1 pi. 8 po. 2 lig. C. bimaculatus, 72 3 pouces 10 lignes. l C. galonnée. 250 | C. temniscatus. 56 15 É SRE ET EG open an oo an ne “ Molure. 248 6 pieds. | [| Molurus. | 59 TABLE MÉTHODIQUE. 37 des Animaux sans pieds et sans nageoires. PENS. GENRE. et deux rangées de petites plaques sous la queue. COULEUVRES. Colubri. oo SUITE DES CARACTÈRES. ÉCAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du dessus de la tête du dos. de la conformation exterieure. Des raies bleues bordées de jaune, ae grandes. se croisent et forment une sorte de treillis sur un fond bleuâtre. SUR SR ER EE SES Rousse , de petites taches blanches irrégulières , bordées de noir et assez neuf sur quatre | unies et en lo- | éloignées l’une de l’autre; deux taches rangs. sange. blanches derrière la tête. La tête très-allongée et large par-der- rière: La tête blanche ; le museau noir ; une bande noire et transversale entre les neuf sur qnatre | rhomboïdales | Yeux ; le dessus du corps noir, avec des rangs. et unies. bandes transversales blanches ; de trois en trois , une bande quatre fois aussi large que les deux autres. Le corps aussi gros que la tête. tre tirent mapenttn dan Blanchâtre; une rangée longitudinale de grandes taches rousses bordées de neufsur quatre | ovales etunies. | brun ; d’autres taches presque sen.blables rangs. le long des côtés du corps. La tête très-allongée, et large par- derrière, C. domestique. | | C. domesticus. —— d Fer-a-cheval | Hippocrepis. | C. de Minerve. C. Minerræ. !| Situle. | . " Siltula. | Dhara. Dhara. ” Fer-de-lance. C. lanceolatus. C. rude. C. scaber. C. mouchetée. Ci guttatus. Queue-plate. | C. Laticaudatus. CARACTÉÈRES. PR PLAQUES dn dessous du corps et paires de petites plaques sous la queue 245 LONG UEUR TOTALE et longueur de la queue, pres de 2 pieds. —— CROCHETS a venin. | 1 pi. 2 po.2 lig. | à la mâ- 2 pouces 1 ligne. 2 pieds. — 2 pouces 9 lignes. choire supérieure. | * ÉCAILLES du dessus de la tête. neuf sur quatre rangs. semblables a celles du dos. neuf sur quatre rangs. ÉCAILLES du dos. RO AR | ovales et rele- vées par une arête, relevées par une arête. rhomboïdales et unies. TABLE MÉTHODIQUE. SUPTE DES GARACTÉMRES. PP Livide; un grand nombre de taches SR à $ © À) (tn se D'un vert de mer; une bande brune Jaune ou grisätre ; quelquefois mar- OT CUT MONT CERCLE TC LCI 14 D'un gris livide ; trois rangées longi- | Desssus du corps d’un'cendré blenâtre, D en COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. Une bande divisée en deux, présen- tant deux taches noires , et placées entre les yeux. rousses ; des taches en croissant sur la tête ; une bande transversale brune entre les yeux; une tache en forme d’arc vers Pocciput. le long du dos ; trois bandes brunes sur la tête. Grise ; une bande longitudinale bordée de noir. Le dessus du corps d’un gris un peu cuivré; toutes les écailles bordées de blanc ; le dessous du corps blanc. Le corps très-menu. brée de brun et de blanchâtre, avec une tache très-brune et allongée derrière cha- | que oil. 1 Le dessus de Ja tête aplati de manière | à représenter une sorte de triangle. Le dessus du corps ondé de noir et de À brun ; une tache noire placée sur le som- met de la tête, et qui se divise en deux dans la partie opposée au museau, tudinales de taches ronges dans la rangée || du milieu, et jaunes dans celles des cô- tés ; le dessous du corps blanchâtre avec des taches carrées , noires et placées al- térnativéement à droite et à gauche. de larges bandes transversales très-bru- nes , et qui font lé tour du corps. La queue très-aplatie par les côtés, et terminée par deux grandes écailles. GE 1 RS HISTOIRE NATURELLE. CARACTÈRES. à PLAQUES ESPECES, du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE ,| CROCHETS À et et à paires de petites plaques longueur de la queue. venin. sous la queue. C. rousse. 224 1 pi. 5 po. 4 lig. | C. rufus. 68 3 pouces. C. tigrée. 2923 1 pied 1 po.6 lig. | à la mà choire Î C. tigrinus. 67 2 po. supérieure. &| Cenco. 220 4 pieds. Cenco. 124 1 pied 4 pouces. €. blanchâtre. 220 C. candidulus. 5o C. recticulaire. 218 1 pieds 11 pouc. Ü C. reticulatus. 83 10 pouce. | 1 Quatre-raies. 218 3 pieds 9 pouces. €. quatuor-lineatus. TE 8 pouces 0 lignes. Large-tête. 218 4 pieds 9 pouces. C. laticapitatus. 52 7 pouces. er, EE ttntEtR C. noire et fauve. 218 1 pied 11 pouces. C. nigro-rufus. 31 2 pouces. TABLE MÉTHODIQUE. 375 SUITE DES CARACTÉÈRES. ] ] e d d . . eee neuf sur quatre | rhomboïdales Rousse ; le dessous du corps blan- rangs. et unies. ehâtre. Le dessus du corps d’un ro lan- semblables ovales et rele- + Ê me si ; châtre , et présentant des taches foncées da vees par une b d , d . celles du dos arête longi- M “oe à L : à D La tête semblable à celle de la vipère tudinale. commuLe. Brunes ; des taches blanchâtres , quel- quefois des bandes transversales et blan- ches. La tête très-grosse et presque globu- leuse ; le corps très-délié, —— neuf sur quatre ovales etunies. rangs. Y GAL UTE Blanchâtre ; des bandes transversales |f brunes. ARE en neuf sur quatre | ovales et en Les écailles du dessus du corps d’une rangs, losange. couleur päle et bordées de blanc. Blanchäâtre ; quatre raieslongitudinales d’une couleur très-foncée ; les deux ex- térieures se réunissant au - dessus du museau. Deux paires de petites plaques entre les grandes et l'anus. ovales et rele- neuf#ir quatre! vées par une rangs. arête ; celles descôtésunies. Blanchâtre ; de grandes taches irrégu- hères d’une couleur foncée, et réunies plusieurs ensemble ; des taches plus pe- ttes, et disposées longitudinalement de chaque côté du ventre. Le museau terminé par une grande |} écaille presque verticale ; les écailles du dos un peu séparées l’une de l'autre vers la tête. neuf sur quatre | ovales et unies. rangs, Des bandes transversales noires , ordi- nairement au nombre de vingt-deux , et autant de bandes fauves bordées de blanc et tachetées de brun, placées alternati- vement ; quelquefois le museau et Ia par- tie supérieure de la tête noirâtres. neuf sur quatre | hexagones rangs. et unies. 376 HISTOIRE NATURELLE. TA, di CARACTÈRES EE is RACTÈRES. Ù QUE : ESPÈCES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS et à paires de petites plaques longueur ES la quete. venin. sous La queue. C. verte. 217 " pieds 2p0.9 Lig. C. viridissimus. | 122 7 pouces 1 ligne. C. miuime. 217 3 pieds 2 po.6 lig. C. pullatus. | 108 1 pied. C. bleuâtre. 21) C. subcyancus. 170 oo EEE À RER SE A 1=< Chaîne. 219 2 pieds 6 pouces. Caïen«a. 44 6 pouces. 7 | pcmmemmemmenmmnememmeemmumencemm À nameememenmet Triangle. 213 2 pieds 7 po. 2lig. Triangulum. 43 3 pouces. an gnnee PT C. Pétaiaire. 21e I Tr pied 9 pouces. 9 pouces. E: petalari us. 102 4 pouces 9 lignes. Tyrie. 210 Tyria. 83 om nee À mcm nu EE em Pétole. 209 Petola. 90 C. très-blanche. 209 à la ma- | 6 pieds. Te choire C. candidissimus. 62 supérieure DUREE LE Cr SR ES EEE DC MEN CE RE C. haje, 207 C. haje. 109 TABLE MÉTHODIQUE. 377 SUITE DES CARACTÉRES. mm" ÉCAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du s Re déesse la ie du dos. de la conformation extérieure. neuf sur quatre - Verte, plus claire sous le ventre que ovales et unies. | rangs. sur le dos. Minime ; quelquefois des bandes trans- versales noires ; chaque écaille du dos à demi bordée de blanc. La tête allongée; d’assez grandes écailles sur les lèvres. neufsur quatre rangs. Bleuêtre ; la tête couleur de plomb. D'un bleu très-foncé ; de petites taches jaunes disposées en bandes transversales et très-étroites ; le dessous du corps bleu, avec de petites taches jaunes presque carrées. CRU HEMRNRE (CREER EPP Blanchâtre ; une tache triangulaire | chargée d’une autre tache triangulaire neufsur quatre | umieseten | plus petite sur le sommet de la tête ; des rangs. losange. taches rousses , irrégulières , et bordées de noir sur le dos ; une tache noire allon- gée et placée obliquement derrière cha- que œil. neufsur quatre à Noiràtre ; des bandes très-irrégulières ovales et unies. Led LbdeL 4 rangs. transversales et blanches. Blanchâtre ; trois rangs loñgitudinaux de taches rhomboïidales et brunes. neufsur quatre teste Livide ; des bandes transversales d’une rangs. ‘ | couleur rougeûtre. Très-blanche. La moitié de chaque écaille-; blanche ; des bandes blanches placées oblique- nient ; le reste du corps noir. 29 ESPÈCES. C. verte et jaune. C. viridi-flasus. | Dione. Dione. C. double-raie. C. bilineatus. C. ovivore. C. ovivorus. Lacté. C. lacteus. | 14° de Gronovius. 14a Gronovi. C. muqueuse. C. mucosus. C. cendrée. C. cinereus. || Padere. Padera. PLAQUES du dessous du corps, et CROCHETS L et à LONGUEUR TOTALE, paires de petites plaques lougueur de la queue. venin. sous la queue. u 206 4 pieds 107 I pied 206 3 pieds 66 6 pouces 205 2 pieds 1 pouce. 09 6 pouces 6 lignes. 203 73 203 1 pied 6 pouces. | à la mà- choire 392 1 pouce 7 lignes. | supérieurc 202 96 200 140 200 57 108 TABLE MÉTHODIQUE. 379 SUITE DES CARACTÈRES. ÉCAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du des ne: du dos. de la conformation extérieure. Po | on, D'un vert noirâtre; plusieurs raies longitudinales , composées de petites ta- ches jaunes et de diverses figures ; le ventre jaunâtre ; une tache et un point noir aux deux bouts de chaque grande | plaque. neuf sur quatre unies. rangs. Le dessus du corps gris ; trois raies longitudinales blanches , et d’autres raies longitudinales brunes ; le dessous du corps blanchâtre , avec de petites raies brunes , et souvent de petits points rou- geatres. ms neufsur quatre | unies et en lo- Les écailles rousses et bordées de jaune ; rangs. sange. deux bandes longitudinales jaunes. D'un blanc de lait; des taches noires arrangées deux à deux; la tête noire, avec une petite bande blanche longitu- dinale. neuf sur quatre | hexagones rangs. et relevées par une arête. Des taches brunes. ü Le tête bleuâtre ; des raies transver- sales comme nuageuses et placées obli- quement sur le dos. Les yeux’assez gros ; les angles de la tête très-marqués. Grise ; le ventre blanc; les écailles de la queue bordées de couleur de fer. '] RES PR Ts Tee RE nn ° Le dessus du corps blanc; plusieurs ta- ches placées par paires le long du dos, et | réunies par une petite raie; autant de | taches isolées sur les côtés. 580 HISTOIRE NATURELLE. CARACTÈRES. " PLAQUES ESPECES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE ,| CROCHETS ; et et a paires de petites plaques longueur de la queue. Susan sous la queue. LES Naja. 197 4 pi. 4po. 6 lig. | à la mà- choire Naja. 58 7 pouces 10 lig. |supérieure. C. Peruvir. EP ALRENRERE MONDPAE7e TNT _. De LS COR et Rte | ons cn sm STE Aus mmiret | que Panne BE ee ne C. du Pérou. C. du Brésil. C. Brasiliæ. Grosse-tète. 196 2 pieds 5 pouces. C. capitatus. 77 6 pouces 3 lig. C. atroce. 106 I pied. à la ma- choire C. atrox. 2 pouces 2 lignes. | supérieure Rouge-gorge. Collo-ruber. 102 Triscale,. 195 1 pi. 4 po. 6 lig. | Triscalis. 86 3 pouces 10 lignes. Corallin. 103 à la ma- choire supérieure. # 1 3 pieds. C. corallinus. 82 . ÉCAILLES du dessus de la tête. rangs. | neuf sur quatre rangs. peufsur quatre rangs. semblables à celles du dos. neuf sur quatre ran®s. SUITE DES ÉCAILLES du dos. aeuf sur quatre | ovales et unies. ovales et unies. ovales et relevées par une arète. ovales et unies. arrondies vers la tête, et pointues du côté de la queue. TABLE MÉTHODIQUE. SR Dpeu CRE D’un roux clair, avec des bandes trans- 38r CARACTÈRES. COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. Jaune ; une bande transversale large et foncée sur le cou; une raie souvent bordée de noir, repliée en avant des deux côtés, terminée par deux crochets tournés en dehors , imitant des lunettes, et placée sur la partie élargie du cou du mâle. Une extension membraneuse de chaque coté du cou. À peu près comme dans le naja. Le cou ne présente point d’extension membraneuse. versales brunes ; une grande tache blan- che en forme de cœur, chargée de quatre taches noires, et placée sur l’extension membraneuse. Une extension membraneuse de cha- que côté du cou. D’une couleur foncée; des bandes transversales et wrégulières , d’une cou- leur très-claire. La queue terminée par une pointe très- déliée. Cendrée ; des taches blanchîtres. La tête très-large. Toute noire ; la gorge couleur de saug. Le dessus du corps d’un vert de mer ; quatre raies longitudinales rousses , qui se réunissent en trois, en deux, etenfin en une , au-dessus de la queue. D'un vert de mer , trois raies longitu- dinales et rousses; le dessous du corps blanchätre et pointillé de blanc. Les écailles du dos sont disposées sur seize rangs longiludinaux, et un peu séparés les uns des autres. 589 HISTOIRE NATURELLE. \ CARACTÈRES. ESPÈCES a 14 du dessous du corps, et paires de petites pla sous la queue, LONGUEUR TOTALE,| CROCHETSM “ et a rene 15e de Gronovius. 191 15a Gronovir. 7D 28e de Gronovius. 28a Gronoviti. 195 C. blanche et brune. 190 C. albo-fuscus. 1 pied 6 pouces. 4 pouces 6 lignes. C. cuirassée. 100 C. scutatus. men 17e de Gronovius. 189 | 174 Gronovii. 122 D ——— ER D RER <> MR Grison. 188 €. cineraceus. 70 : —_—_—— ER Péle. 187 ui, Le UN GC: asiatique. 187 | C. asiaticus. 76 2 pouces 3 lignes. anne ns [mn | pommes Lieu. 186 7 pieds. Lrisgamen. 92 EE & 5 = Couresse, 185 2 pi. 10 po. 7 lig. ARE Cursor. 105 9 pouces 7 lignes. h As — ER TERME ECTS) ones | C. nébuleuse. 189 €, nebulosus. 85 TABLE MÉTHODIQUE. 383 EEE EE SUITE DES CARACTÈRES. CCR ECAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du L dessus de la tête. du dos. de la conformation extérieure. mean one EE, Brune ; des points blancs. | RRQ | ne Pomme | M Des raies transversales blanches et noires. Blanchôtre ; des taches brunes, arron- | S dies, et réuni ts » Îl neuf sur quatre Éésesatosales - ; et réunies en plusieurs endroits ; | rangs eux taches derrière les yeux ; le dessous du corps roussitre. Noire; le dessous du corps de la même || couleur, avec des taches blanchâtres , | presque carrées, placées alternativement à droite et à gauche , et en très-petit nom- bre sous la queue. Les grandes plaques revêtent près des | deux tiers de la circonférence du corps ; |} la queue est triangulaire. | x |. Pourprée ; des taches noires. | Le dessus du corps blanc; des bandes | transversales roussätres; deux points. d’un blanc de neige sur les côtés. Noire ; le derrière de la tête brun; le | dessous du corps vert et bordé de chaque | » e Cd | côté d’une ligne jaune. meuf sur quatre | rhomboïdales Des raies longitudinales sur le dos; les! > rangs. et unies. écailles bordées de blanchâtre. | msn PT no Ven 0 -lauiD pit 1 Ve FEU CONNE S | ° D'un bleu très-foncé. le dessous du | corps d’une couleur bleuâtre ou bronzée; | | quelquefois la gorge blanche. Verdâtre ; deux rangées Jlongitudi- | ovales etunies. | nales de petites taches blanches et al- | longées. l ne SR ae LÉPRANNN "ERRONLE NT RANNEURe Le dessus du corps nué de brun et | dec endré; le dessous varié de brun et, deb lanc. ueufsur quatre rangs. | © 54 HISTOIRE NATURELLE. CARACTÈRES. se x PLAQUES ESPECES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS et et a paires de petites plaques longueur de la queue. VER sous la queue. 0 Laphiati. 184 Laphiati. 60 C. agile. 184 1 pied 8 pouces. C. agilis. À 50 4 pouces 3 lignes. SERRE Æ « Schokari. 185 2 pieds. Schokari. 144 6 pouces. Sibon. 180 Sibon. 85 20e de Gronovius. 180 20G Gronofit. 80 Hydre. 180 3 pieds. Hydrus. 66 C. brasilienne. 180 3 pieds. à la mâ- choire Brasiliensis. 46 5 pouces 6 lignes. supérieure. se ne Bande-noire. 180 C. nigro-fasciatus. 43 C. aurore. 179 Aurora. 27 TABLE MÉTHODIQUE. 385 SUITE ÉCAILLES ÉCAILLES du dud dessus de la tête, ns di neufsur quatre | en losange rangs. et unies. neufsur quatre rangs. rhomboïidales. L semblables ovales à et relevées celles du dos. neuf sur quatre rangs. ZLacepède. 1. par une arête. ovales etunies. DES CARACTÈRES. LS, COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. Grise ou rousse ; des bandes transver- | sales blanches ou jaunâtres , divisées en deux de chaque côté ; le sommet de la tête blanc. Des bandes transversales et irréguliè- res , alternativement blanches et brunes : les bandes brunes, quelquefois pointillées de noir. D'un cendré brun ; quatre raies lon- gitudinales blanches, le dessous du corps jaunâtre et pointillé de brun vers | la gorge. Le corps tres-menu. Le dessus du corps brun mêlé de blanc ; le dessous blanc tacheté de brun. La queue courte et menue. Variée de blanc et de brun. (Nota.) I est à présumer que cette cou- leuvre est de la méme espéce que Le sibon. | Olivâtre, mêlée de cendré; quatre, rangs longitudinaux de taches noirûtres, | disposées en quinconce ; le dessous du | corps tacheté de jaunàtre et de noirâtre. | De grandes taches ovales , rousses et bordées de noirâtre ; d’autres petites ta- ches brunes. Une bande noire entre les yeux; le dessus du corps livide; plusieurs bandes transversales et noires, dont quelques- unes font le tour du corps. Grise ; une bande longitudinale jaune; : la tête jaune, avec des points rouges. | 26 386 HISTOIRE NATURELLE. D CARACTÈRES. | No, PLAQUES ESPÈCES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS et et a paires de petites pla u ù Lys longueur de la queue. venin. sous la queue. à C. lisse. 178 1 pi.9po. olig. . C. lœvis. 46 3 pouces 3 lignes. | , | | Ibiboca. 176 5 pi. 5 po. 6 lig. Ibiboca. 121 1 pi. 7 po. 1 lig. | C. d’'Esculape. 175 3 pieds 10 pouces. | C. Æsculapi. 64 9 pouces 3 lignes. | _22a Gronovii. 60 | Nasique. 173 4 pieds 9 pouces. | C. nasutus. ES 1 pied 1 1 pouces. 25e de Gronovius. 172 | 235a Gronovii, 142. . Suisse. ‘ C. suisse 170 3 pieds. | C. Lelceticus. 127 L Demi-collier. 170 1 pieü 7 pouces. Semimonile. 85 4 pouces 10 ligues. È C. azurée. 170 2 pieds. | C. cæruleus. 64 5 pouces 3 lignes. TABLE MÉTHODIQUE. z em NE >. SUITE DES CARACTÈRES ÉCAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du dede là (tee du dos. de la conformation extérieure. Bleuâtre; deux taches d'un jaune foncé | derrière la tête; deux rangées longi- neufsur quatre tudinales de taches plus petites, celles rangs. très-unies. d’une rangée correspondant aux inter- valles de l’autre ; quelques taches sur les cotés; de plus grandes taches sur le ventre. Les écailles du dos grisätres et bordées neufsur quatre rhomboïdales | de blanc. rangs. et unies. Les écailles du dos un peu séparées les unes des autres en quelques en- droits. nn : TM Ne : ovales et rele- Rousse; une bande noirâtre et longi- neufsur quatre vées par une | tudinale de chaque côté du dos ; une rangs. arête; celles | rangée de petites taches triangulaires et descôtésunies. | blanchâtres de chaque côté du ventre. D’uu cendré bleuâtre. (Seba, Mus. 2, tab. 33, fig. 1.) nn menaces. ee Verdâtre; quatre raies longitudinales neufsur quatre | rhomboïdales | sur le corps; deux autres raies longitu- rangs. et unies. dinales sur le ventre. Un prolongement écailleux au bout du museau, qui est très-allongé. Bleue ; une ligne latérale noire. Grise; de petites raies noires sur les côtés ; une bande lon gitudinale composée de raies transversales plus étroites et plus * |! ovales et rele- vées par une arète. päl ni “ST SN AC enlosangeetre-| Brune; de petites bandes transversales | 5 à din 8 levées par une | blanchâtres ; trois taches brunes et allon- | arête longitu- | gées sur la tête ; trois taches rondes et dinale. blanches sur le cou. r ? Bleue, foncée sur le dos , très-claire neufsur quatre ovales et unies, . À ? rangs. sous le ventre. 388 ESPÈCES. | C. à collier. C. torquaius. EEE | C. hébraïque. C. hebraicus. | C. blanche. | C. albus, C. rayée. C. lineatus. Daboie. 1 Daboie. 1 Trois-raies. C. terlineutus. Boiga. || Boiga. Chapelet. Catenula. C. filifornus. HISTOIRE ‘NATURELLE. CRIS DES CARACTÈRES. | —— PLAQUES du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS k et et a paires de petites plaques longueur de la quéue, venin. sous la queue A 170 2 pieds. 53 4 pouces. RE aan nn) 170 a la mà- choire 42 supérieure, 170 20 ; ERA | RNA SRE ee 169 84 pd EE ee nd 169 3 pieds 5 pouces. 46 5 pouces o lignes. Est in En 109 1 pi. D po. 6 ig 34 2 pouces 8 lignes. 166 3 piels. 128 1 pied 5 pouces. 166 1 pi. 5 po. 6 lig. 105 5 pouces6 lignes. 165 1 pied 6 lignes. 108 4 pouces 6 lignes. TABLE MÉTHODIQUE. DUPEMTE DES C ARACTÉRES. TU p ÉCAILLES du dessus de la tête. neuf sur quatre rangs. semblables a celles du dos. neuf sur quatre ra n55 . neufsur quatre rangs. neuf sur quatre rangs. neuf sur quatre ran95. ÉCAILLES du dos. ovales et relevées par une arûte, M ovales et relevées par une arête. en losange et unies. unies. unies et en losange. en losange et relevées par une arète, COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure, Grise; deux rangées longitudinales de 389 petites taches d’une couleur très-foncée ; | deux autres rangées extérieures de taches | plus grandes , noires et irrégulières ; deux grandes taches blanchätres sur le cou ; le ventre varié de noir, de blancet de bleuâtre. Les écailles des côtés unies et plus grandes que celles du dos. Re TT en unes Roussâtre ; des taches jaunes, bordées de rouge-brun, et représentant des ca- ractères hébraïques. Blanche, ordinairement sans taches. Bleuâtre ; quatre raies brunes qui se prolongent depuis la tête jusqu’à l’extré- mité de la queue. Blanchâtre ; trois rangs longitudinaux de grandes taches ovales , rousses et bor- dées de noir ou de brun. Rousse ; trois raies longitudidales qui s'étendent depuis le museau jusqu’au- dessus de la queue. D'un bleu changeant en vert; trois petites raies longitudinales couleur d’or; une petite bande blanche et bordée de noir le long de la mâchoire supérieure. - Le corps très-délié. Bleue ; deux raies longitudinales blan- ches ; dans le milieu une raie longitu- dinale noire, chargée de taches ovales blanches et de points blancs placésalier- nativement ; deux rangs longitudinaux de points noirs sur le ventre. La tête grosse et aplatie par-dessus et par les côtés ; le corps très-délié. Noire ou livide ; le dessous du corps blanchäire. | La tête grosse; le corps très-délié, tm, mire HISTOIRE NATURELLE. CARACTÈRES. : PLAQUES ESPECES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE ,| CROCHETS | et et a paires de petites plaques], ueur de la queue. venin. sous la queue. < 25e de Gronovius. 165 25a Gronovii. 74 C. à zones. 165 1 pied. C. cinctus. 85 1 pouce 6 lignes. Bluet. 105 C. subcœruleus. 24 C. annelée. 164 7 pouces 4 lignes. C. doliatus. 43 1 pouce 5 lignes. AR | Dard. 163 Jaculus. "7 eme 1 C. mibaire. 162 C. miliaris. 59 C. chatoyante. 161 1 pied 6 pouses. C. versicolor. 113 GP | Malpole. 160 1 pied 10 pouces. \ Malpolon. 100 5 pouces 6 lignes. 1 28e de Gronovius. 160 \ 28a Gronovii. 60 TABLE MÉTHODIQUE. DART CONTE EDR 7 ES. mm PT, ÉCAILLES du dessus de la tête. EN Eten À (e neuf sur quatre rangs. neuf sur quatre rangs. neuf sur quatre rangs. neuf sur quatre rangs. ÉCAILLES du dos. SRI À rhomboïdales et unies. ovales. unies et en losange. ovales et relevées par une arête. 7 Blanche ; partie de bleuñâtre. COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. Blanche ; des bandes transversales d’une couleur foncée. (Seba, Mus. 2, tab. 21, fig. 5.) TE em Blanche ; souvent quelques écailles tachetées de roussêtre à leur extrémité ; des bandes transversales d’une couleur très-foncée , qui font tout le tour du corps. que mi-parties de blanc et de bleuètre ; le dessous du corps blanc ; la queue d’un bleu foncé sans aucune tache. La queue tres-céliée. des bandes transversales noirâtres , qui se réunissent à d’autres bandes semblables placées sur le ventre, mais sans se correspondre exactement ; le cou blanc; le dessus de la tête noirâtre. dinales noirâtres et bordées d’un noir foncé ; celle du milieu plus large que les deux extérieures ; le dessous du corps | blanchâtre. Le dessus et les côtés du corps bruns; une tache blanche sur chaque écaille ; le dessous du corps blanc. oo Grise ; une bande longitudinale brune, composée de petites raies trar sversaies et disposées en zigzag ; les plaques rou- geâtres , tachetées de blanc et bordées en rt Bleue: de très-petites taches noires disposées en raies longitudinales ; une sit blanche bordée de noir sur le sommet de la tête. La langue longue et très-déliée ; le corps très-menu. Des raies blanches et noires transver# ! sales. EEE RER ARRET RTE PSP DOTE RAR EC ET PESTE RE © —— —— SUITE DES CARACTÈR Les écailles qui garnissent le dos pres- | Gris cendré; trois bandes longitu- | 392 ESPÈCES. 29e de Gronovius. 294 Gronovié, C. carénée. C, carinatus. C. rhomhoïdale. €. rhombeatus. Saurite. Saurita. C. verditre. C. subviridis. C. pâle. C, pallidus. Lébetin. Lebetinus. Aspic. ASpis. 34a Gronovii. Cenchrus. Cenchrus. C: schythe. C, schythus. HISTOIRE NATURELLE. 34e de Gronovius. CARACTÉÈÉRES. PLAQUES { du dessous du corps : LONGUEUR TOTALE, CROCHETS. Là et an PARAPENTE plaques longueur de la quene, venin. sous la queue. 199 d 42 157 115 197 1 piedopo og. 70 4 pouces 4 lignes. 156 121 15) le tiers de la longueur 144 du corps. RE 155 ï : pied 6 pouces. 96 RE 155 à la ma- er ; choire 46 supérieure. 155 3 pieds. à la ma- = choire 97 9 pouces 8 lignes. | supérieure.s ES 153 | Fes 5o , es | ne nes 153 a pieds. 4 Ce - 47 9 pouces 7 lignes. na \ À 1535 1 pic d 6 pouces. | à la ma- . a choire 91 ; 1 pouce 7 Ligues. supérieure. ÉCAILLES du dessus de la tête. À A RER À 2 dem neuf sur quatre rangs. neuf sur quatre rangs. semblables a celles du dos. neufsur quatre rangs. | Lacepède. 1. TABLE MÉTHODIQUE. 3 de) SUITE DES CARACTÉÈRES. TEE "ON SN. k ÉCAILLES du dos. RE ovales et relevées par une arète. unies. ovales et unies. ovales et relevées par une arête. hexagones et unies. COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. D'un roux plus ou moins foncé. (Seba, Mus. 1, tab. 53, fig. 6.) Toutes les écailles du dessus du corps couleur de plomb et bordées de blanc; | le dessous du corps blanchâtre. Le des relevé en carène. Bleue ; des taches bleues en losange | et bordées de noir. Brune ; trois raies longitudinales blan- ches ou vertes ; le ventre blanc. Le corps très-délié Bleue ou verte; le dessous du corps d’un vert plus ou moins mêlé de jaune. D'un gris pâle; un grand nombre de poiuts bruns et de taches grises répan- dues sans ordre; une ligne noire de | chaque côté du corps. Le corps et la queue très-déliés. Nuageuse ; le dessous du corps parsemé || de points roux ou noirs. Trois rangées longitudinales de taches rousses bordées de noir. Blanche; des raies et des taches noires. Le dessus du corps marbré de blan- châtre et de brun; des bandes trans- | versales étroites, irrégulières et blan- châtres. Noire; le dessous du corps très-blanc. A ; La tète a un peu la forme d’un eœur. ati 394 HISTOIRE NATURELLE, CARACTÈRES. 4 « PLAQUES | ESPECES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE, CROCHETS | et et à MP PE | longueur de la queue. venin. Dipse. 152 a la mi- choire | Dipsas. 159 supérieure. C. maure. 152 C. maurus. 66 C. noire. 152 2 pieds 9 lignes. a la ma- a choire C. niger. 32 2 pouces 4 lignes. | supérieure. Sirtale. 150 2 pieds. Sirtalis. 114 Tête-triangulaire. C.capiteæriangulatus. Cobel. Cobella. Triple-rang. C. terordinatus. Chersea. Chersea. C. sombre. NU C. subfuscus. 3 pouces 9 lignes. mm DRE TE de 150 ä la ma- choire 64 supérieure. PR ES A RE 150 1 pi. 4 po. 9 lig. 54 5 pouces 10 lignes. te tes 150 1 pied 10 lignes. 52 4 pouces. Se 150 à la mà- choire 34 supérieure. TABLE MÉTHODIQUE. ÉCAILLES du dessus de la tête. neuf sur quatre rangs. ne trois sur deux ral1gs. oo semblables a celles du dos. ueufsur quatre rangs. neuf sur quatre rangs. semblables à celles du dos. SUITE DES ÉCAILLES du dos. ovales. Re ovales et relevées par une arête. ovales et relevées par une arête. relevées par une arête. en losange et unies. ovales et relevées par une arête, relevées par une arête. CARACTÉÈRES. COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. ————— Les écailles bleuâtres et bordées de blanchâtre; les grandes plaques blan- ches; une raie bleuâtre et longitudinale au-dessous de la queue. La queue longue et déliée. Brune; deux raies longitudinales ; des bandes transversales et noires depuis les raies jusqu'’au-dessous du corps; le ventre noir. Noire ; quelquefois des taches d’un noir plus foncé, et disposées comme celles de la vipère commune. Brune; trois raies longitudinales d’un vert changeant en bleu. Verdatre ; des taches de diverses figures sur la tête, et réunies sur le corps en bande irrégulière et longitudinale; les grandes plaques d’une couleur foncée, et bordées de blanchatre. : La tête presque triangulaire ; le corps délié du coté de la tête. D'un gris cendré; un grand nombre de petites raies blanches placées oblique- ment; quelquefois une tache“eblique et livide derrière chaque œil, et des bandes transversales et blanchätres sur le dos. Blanchätre; trois rangs longitudinaux de taches d’une couleur foncée ; le des- sous du corps varié de blanchatre et de brun. D'un gris d’acier ; une tache noire en forme de cœur sur la tête, et une bande composée de taches noires et rondes sur le dos. D'un cendré mêlé de brun ; une tache brune et allongée derrière chaque œil. 396 HISTOIRE NATURELLE. SERRE RS LS C à RACTÈRES. Frs x PLAQU ESPECES. du FR, (0 , [LONGUEUR TOTALE, | CROCHETS et et à paires de petites plaques longueur de la queue. venin. sous la queue. | 33e de Gronovius. 149 335a Gronovii. 63 nom Ûî îmm…- mea ne nil TT De ee A me Dee Mélanis. 148 a la mä- choire Melanis. 27 supérieure. C. décolorée. 147 C. exoleius. 132 C. saturnine. 147 C. saturninus. 120 Céraste. ; 147 2 pieds. à la mà- choire Cerastes. 65 4 pouces 6 lignes. [supérieure Vipère. 146 2 pieds. à la mà- —_—_——— choire V'ipera, 39 4 pouces. supérieure. {| Sipede. 144 Sipedon. 73 Chayque. 143 à la mà- choire | Chaiïqua. 76 supérieure. C. violette. 143 1 pied 5 po. 3 lig. C, violaceus. 25 2 pouces 3 lignes. L. RE TABLE MÉTHODIQUE. Re ee mme. Re ES semblables à £ celles du dos. semblables à celles du dos. neuf sur quatre rangs. SUITE DES AR TT OT le ct ÉCAILLES ÉCAILLES du dessus ‘le la tête. du dos. ovales et relevées par une arête. nn relevées par une arête. unies et en losange. CAR ACTEÈRES. TP COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. Blanche; des raies noires et trans- versales. Noire; le dessous du corps couleur d'acier avec des taches plus obscures et d’autres taches bleuâtres et comme nua- geuses vers Ia gorge et des deux côtés du corps. D’un bleu clair imélé de cendré; les lèvres blanches. Le corps tres-délié. La tête couleur de plomb; le dessus du corps d’une couleur nuageuse melée de livide et de cendré. Les yeux assez gros. Jaunäâtre ; des bandes transversales ir- régulières et d’une couleur plus ou moins foncée. Une petite corne de nature écailleuse au-dessns de chaque œil. D'un gris cendré ; des‘taches noiratres formant une bande dentelée , et disposée en Zigzag. Brune. Deux bandes blanchätres et longitu- dinales ; deux points noirs sur chaque grande plaque; neuf taches rondes et noirätres de chaque côté du cou du male. Violette; le dessous du corps blan- châtre avec des taches violettes, irrégu- lières, placées alternativement à droite et à gauche. | 398 HISTOIRE NATURELLE. CARACTÉÈÉRES. : PLAQUES ESPECES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE ,| CROCHETS ! et et a paires de petites plaques|| eur de la queue venin. sous la queue. P C. rubanée. 142 De C. vittatus. 78 36e de Gronovius. 142 36a Gronovii. Go Ammodyte, 142 à la mà- choire Ammodytes. 33 supérieure | C. symétrique. 142 1 pi. 5 po. 6 lig. C. symmetricus. 26 _ | 2 pouces 3 lignes. | Tête-noire. 140 2 pi. 1 po. 7 lig. C. capile niger. 62 4 pouces 6 lignes. rer mme um Typhie. 140 Typlius. 53 Calmar. 140 C. calemarius. 22 ÉCAILLES du dessus de la tête. semblables ET celles du dos. neufsur quatre rangs. neuf sur quatre rangs. TABLE MÉTHODIQUE. 399 | SUITE DES CARACTÉÈÉRES. om om, ÉCAILLES du t'os. ovales et petites. ovales et unies. ovales et unies. ovales et unies. COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. Blanchâtre ; plusieurs raies longitu= | dinales noires ou brunes ; la tête noire avec plusieurs petites lignes blanches | et tortueuses ; les grandes plaques bor- dées de brun ; une bande blanche, lousi- | tudinale et dentelée sous la queue. La tête très-allongée et large par-der- rière. | _ Bleuaire; les grandes plaques blan- l châtres, avec des tach:: noires et un! léger sillon longitudin: | (Seba, Mus. 2, tab. 55, fig. 4.) Des taches noires forsiant une bande | lougitudinale et dentelé. Une LL éminence mobile et deux tubercules sur le museau. Foncée; une rangée de petites taches noires de chaque côté du dos, auprès de la têtc; des bandes et des demi-bandes | transversales, et placées symétriquement Le dessus du corps brun; la téte noire; le dessous du corps varié de blanchâtre et d’une couleur très-foncée , par taches transversales et rectangulaires. | | Bleuatre. | | | Livide; des bandes transversales bru- | * . nes; des rangs de points bruns; des ta- | ches presque carrées et placées syméfr 1 quement sous le corps ; une raie longitu- dinale et couleur de feu sur la queue. à À ° sur le ventre. 400 HISTOIRE NATURELLE. CARACTÉÈRES. TT « PLAQUES | ESPECES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE, | CROCHETS ; et et à paires de petites plaques longueur de la queue. Sens sous la queue. | Ibibe. 120 2 pieds. Tbibe. 72 4 pouces 10 lig. = tan GRASSE LEE De rene Régine 197 | C. Recinæ. 70 | C. ponctuée. 136 C. punctatus. 45 38e de Gronovius. 136 38a Gronovii. 39 ee RE ER RS ET D Tomas À eme cac sen 59e de Gronovius. 155 39a Gronovsii. 42 me — RS UE LE EE | PS À nmmennnnn mate C. mexicaine. 134 C. mexicanus. 77 Lutrix. 134 Lutrix. 27 Lan n = re CN ER Hæmachate. 132 1 pied 4po.blig. | à la màâ- choire | Aæmachata. 22 1 pouce 10 lignes. | supérieure Bali. ; En 6 pieds 6 pouces. Bali. 46 Atropos. 131 à la mâ- choire A1r0pos. 22 supérieure TABLE MÉTHODIQUE. &ox RQ QC QT UN SUITE DES CARACTÈRES. mn ÉCAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS da du d de la conf Eri desaié de tite. u dos. e la coniormation exterieure. PRISES ETES IEP LE Er RTE TE ET ne Bleue ou verte, tachetée de noir ; une | rangée de points noirs de chaque côté du | ovales corps; quelquefois une raie longitudinale neufsur quatre | Ce relevées pr dos. , - rangs. par une arête. Quelquefois quatre grandes plaques | entre l’anus et les premières paires de petites. D À (oo Le dessus du corps brun; le dessous varié de blanc et de noir. | D'un gris cendré; le dessous du corps | jaune, avec neuf petites taches noires dis- posées sur trois rangs, chacun de trois taches. Variée de couleur de fer, de bleu et de blanc. Blanche, des taches blanches et noires. Le dessus et le dessous du corps jaunes; les côtés bleuätres. EEE neufsur quatre Ne Rouge; des taches blanches. rangs. et en losange. SEEN EEE PI FA Une bande longitudiuale rouge et ta- chetée de blanc , de chaque côté du corps, dont le dessus est jaunâtre mêlé de blanc; quatre rangs longitudinaux de points jau- nes sous le corps. _meufsur quatre | rhomboïdales rangs. et unies. Re | Blanchäôtre; quatre rangs longitudinaux semblables ovales de taches rousses, rondes et blanches a et relevées dans leur centre ; des taches noires sur celles du dos. | par unearête. | la tête. - La ?te a un peu la forme d’un cœur. | Lacepède. É: 28 4o2 HISTOIRE NATURELLE. FAT 2 Lsmenle RE RDF ÈU % { CARACTERES. PLAQUES ESPÈCES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS 1 et À et a PE ens La dc L EM longueur de la queue. vénin. . Vampum. 128 1 pied 10 pouces. | V’ampur. 67 6 pouces. : C. striée. 126 | €, striatus 45 : C. camuse. 124 | | À \ C. simus. 46 | Alidre. 121 | Alidras. 58 2 ; C. verte et bleue. 119 2 pieds. . €. viridi-cœruleus. 110 6 pouces. Fonsncnmenemmsmenmmmcmmmeneneenmemsere ! C. tachetée. 11 2 pieds. 9 ! _ C. maculatus. 70 5 pouces 4 lignes. ER A LA :C des dames. 118 C. domicellarum. 6o dl iC. d'Égypte. 118 | à 1 ma cho re | C. Ægyptiacus. 22 supérieure. | C. anguleuse. 117 HE C. angulatus. Ta Lee ÊÉCAILLES da dessus de la tête. neufsur quatre ran ss. grandes. neufsur quatre rangs. neuf sur quatre rangs. ÉCAILLES du dos. ovales et relevées par une arête. hexagones et relevées par une arête. très-petites. ovales ,unpeu échancrées, et relevées par une arête. TABLE MÉTHODIQUE. SUITE DES CARACTÈRES mm emnemmegnn, 403 COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. Bleue; des bandes transversales blan-— ches et partagées en deux sur les côtés ; une pelite hande transversale brune sur | chaque grande plaque. La tête petite à proportion du corps. Brune ; le dessous du corps d’une cou- leur pâle. Une petite bande noire et courbée entre les yeux ; une croix blanche, avec un point noir au milieu sur le sommet de la tête ; le dessus du corps varié de noir et de blanc; des bandes transversales blanches ; le dessous du corps noir. La tête arrondie, relevée en bosse, et le museau tres-court. D'un blanc éclatant. D'un bleu foncé ; le dessous du corps d’un vert päle. — Blanchätre ; de grandes taches en lo- sange ou irrégulières, roussätrés et bor- dées de noir ou de brun; le ventre blan- châtre et quelquefois tacheté. Blanche; des bandes transversales, irrégulières et noires; une raie noi- râtre, irrégulière et longitudinale sous le ventre. D'un blanc livide ; des taches rousses. Le derrière de la tête relevé par deux bosses. Blanchätre ; des bandes brunes, noi- râtres vers leurs bords, anguleuses et très-larges vers le milieu de la longueur du corps. 404 HISTOIRE NATURELLE. CARACTÉÈRES. Te . PLAQUES ESPECES. du dessous du corps, [LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS à et et a Ps #6 longueur de la queue.| venin. | | Léberis. 10 à la mà- choire Leberis. 5o supérieure. C. joutilue. 107 C. Buccatus. 72 Argus. Argus. SECOND Serpens qui ont de grandes plaques BOA. MP MA 6 ; 290 3 pouces 6 lignes. Broderie. 128 7 pouces. Rand TRE RS motte ne Ophrie. 281 Bo& ophrias. 64 Enydre. 270 B. enydris. 115 passes Nr Cenchris. 265 B. cenchrie. B. rativore. 254 2 pieds 6 pouces | B. murina. 65 4 pouces 2 lignes. TABLE METHODIQUE. 405 SUITE DES CARACTÈRES. ECAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du descat de la tôte: du dos. de la conformation extérieure. eine re Des raies transversales, étroites et noires ; la tête blanche avec deux taches rousses sur le sommet; et une tache triangulaire sur le museau. Rousse; des bandes transversales et blanches. RSS | Une tache blanche sur chaque écaille ; plusieurs rangs de taches blanches, ron- des, bordées de rouge, et rouges dans leur centre. Le derrière de la tête relevé par deux bosses. sENRE. ous le corps et sous la queue. BOA. Une chaïne de taches irrégulieres en forme de broderie, le long du dos, et surtout sur la tête. semblables “4 ‘ a fs a ire Gi La tête large par-derriéere ; le museau || celles du dos. ; allongé. D TT TS Te = Brune. RES | rem | ay D'un gris varié d’un gris plus clair. Les dents de la mächoire inférieure tres-longues. Vo SR Ge 2 du De RS nd Ed DR D'un jaune clair; des taches blan- chäâtres et grises dans leur centre. RE DE GC IEEE à Blanchatre ou d’un vert de mer; cinq rangées longitudinales de taches rousses, le à ] 3 , \ PAPES rhomboïdales | dont plusieurs sont chargées de taches | Re dés et unies. blanchätres. | a La tête large par-derrière ; le museau } allongé ; de grandes écailles sur les lèvres. 406 HISTOIRE NATURELLE. CARACTÉRES. EE —— 4 ESPECES. PLAQUES LONGUEUR TOTALE ,| CROCHETS du dessous du corps, et et a du dessous de la queue, longueur de la queue. venin. Schytale. 250 | À. schytale. 70 | quelquefois | Devin. 2/6 plus de 30 pieds. | B. divinatrix. 54 ordinairement le 9e de la longueur du corps. | B. muet. 217 à da M4 choire B. muta. 34 supérieure. | Bojobi. 203 2 pieds 11 pouces. | B. bojobi. 77 7 pouces. | Hipnale. 179 1 pied 11 pouces. B. hipnale. 120 3 pouces. Groin. 150 2 pieds. 3 | B. porcaria. 4o 8 pouces. TABLE MÉTHODIQUE. ra _ _ SUITE DES CARACTÉÈRES. RE , ÉCAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du D IS ete du dos. de la conformation extérieure. D'un gris mêlé de vert; des taches noires et arrondies le long da dos; d’au- | tres taches noires vers leurs bords, blaïi- ches dans leur centre et disposées des deux côtés du corps. des points noirs for- mant des taches in yées sur le ventre. De grandes taches ovales souventéchan- crées a chaque bout et en demi-cercle. Diabl bordées d'une couleur foncée , et entou- FINE hexagones rées d’autres petites taches. a | - : et unies. Le museau allongé et terminé par une celles du dos. 5 P grande écaille presque verticale ; la tête élargie par-derrière ; le front élevé; un sillon lougitudinal sur la tète. Des taches noires, rhomboïdales et réu- nies les unes aux autres L’extrémité de la queue garnie par- dessous de quatre rangs de petites écailles. Verte ou orangée ; des taches irrégu- lières, éloignées l’une de l’autre, blan- semblables rhomboïdales | ches ou jaunatres, et bordées de rouge. a et unies. La tete large par-derrière ; le museau celles du dos. allongé; les lèvres garnies d’écailies grandes et sillonnées. eu ge APR D NUS CR NE Re Jaunâtre ; des taches blanchâtres bor- semblables rhomboïidales | dées d’un brun presque noir. Di. FEES | et unies. Les lèvres garnies d’écailles très-gran- RE | des et sillonnées. ARS de cchgdlit Cendrée; des taches noires disposées semblables régulièrement ; des bandes transversales ï jaunes vers la queue. “celles du dos. Le museau terminé par une grande écaille relevée. Dep — 4o8 HISTOIRE NATURELLE. TROISIEMI Serpens qui ont le ventre couvert de grandes plaques ou par de grandes pièces articulées le SERPENS A SONNETTE. Crotali. CARACTÉÈRES. Po 1 ESPECES. PLAQUES LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS du dessous du corps, L - et et a du dessous de la queue. longueur de la queue. venin. Boiquira. 182 4 pieds 10 lignes. | à la mä- ane Be choire Crotalus Boiquira. 27 4 pouces. supérieure CE ES RS SEE LE = nee ER NS ER | Durissus. 172 1 pi. 5 po. 6 lig. | 3 la mäâ- a - choire Crot. durissus. 21 1 pouce 5 lignes. {supérieure 2 FE OR Re ms Sr SORT Dryinas. 165 a la ma- ———— | choire Crot. dryinas. 30 supérieure nm DE PR Millet, 132 1 pied 3po. 1olig.| à la mà- sr — | choire Crot. miliarius. ae: 1 pouce ro lignes |supérieure TRE mme | Serpent à sonnette ES piscivore. 5 pieds. meer à choire Crot. piscivorus. ETS QUATRIEM! Serpens dont le dessous du corps et de la queuw ANGUIS. Angues. Rangs d'écailles sous le corps et sous la queue. Rouleau. 240 2 pieds 6 pouces. | Anguis cylindrica. 13 1 pouce. TABLE MÉTHODIQUE. 4og GENRE. et la queue terminée par une grande pièce écailleuse , unes dans les autres, mobiles et dbruyanies. RES. | | SUITE DES CARACTÉ | D PR TE | ÉCAILLES | du | dessus de la tête. du dos. ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS de la conformation extérieure. À : ovales D'un gris jaunêtre: ur ds — |} Re troie pes .— En gris Jaunâtre; une rangée lon] no et relevées Situdinale de taches noires bordées de | | 8$- par une arete. | blanc. ‘” Î À mme ve. (2 AVES < d ; bi: mn ee its a | < ! ovales | ariée de Dlanc et de jaune; des ta- |! six sur trois MASE j ] ’ LCR et relevées ches rhomboïdales noires et blanches | og par une-arête. | dans leur centre. t A Se int s DE = RO mm Ë d ue Blanchêtre ; des taches d’un jeune plus lei > d & : . . : j D ns. D etrelevées où moins clair. par üne arête. | S-ITOUE RE Grise; trois rangs longitudinaux de neuf sur quatre pe re taches noires ; celles dela rangée du ri |} rangs. ne lieu roûges dans leur centre, et séparées || par une arête. l’une de l’autre par une tache rouge. Brune; le ventre et les côtés du cou noirs, avec des bandes transversales jau- nes et iriégulières, La queue téeriinée par une pointe lon- gue et dure, D (honte | . L st garni d’écailles semblables à celles du dos. ANGUIS. Angues. Les diverses écailles blanchés bordées de roux; des banäes transversales d’une * {rois grandes. unies. couleur foncée, et dont plusieurs se réu- nissent. Lacepède. 1. 29 L # 114 HISTOIRE NATURELLE. | RL mm en Ro Emme im 3l CARACTÈRES. A — E S F E de ES. RANGS D’ÉCAILLES LONGUEUR TOTALE,{ CROCHETS sous le corps et à 5 et sous la queue. longueur de la queue. venin. Rouge. 240 1 pied 6 pouces. An, rubra. 12 6 lignes. CEE DE > ER SERRE Lombric. 230 8 pouces 11 lignes. } les mächoires presque 4 : toujours F 1/2 Ligne. | An. lumbricalis “| /2 ligne Me den -nez. ] À Long nez 218 ; pied. An. nasuta. 12 ER X EL MÉRITE SE ER DETTE EE nent Queue-lancéolée. 200 An. laticauda. 5o An, cornu. 200 An. cornut@. 15 + | ET 7 me ER PRG ST RESTO Miguel 200 1 pied. Micuel 12 5 lignes. F DE RES Trait. 186 Sagitta. 29 = CR 297 me SEE De RE En | à Core EP EME CPE RER Colubrin, 180 An. Colubrina. 18 Réseau. I ris) An. reticulata. 37 = EEE RE D _ RS ne TE RE De Peintade. 165 Meleagrrs. 35 Orvet. 13) 3 pieds. | Orvef. 199 1 pied 6 pouces. TABLE MÉTHODIQUE. ir SUITE DES CARACTÈRES ECAILLES ECAILLES COULEUR ET TRA:TS PARTICULIERS du Hesdasidé là tête du dos. de la conformation extérieure. es J Les écailles ronges et bordiées de blanc ; trois grandes hexagones des bandes transversales no:râtres au- sur deux rangs et unies. dessus et au-dessous du corps Le dessus et le dessous du corps d’un tres-unies blanc livide. et très-petites. La bouche au-dessous du museau et res-petite , ainsi que l’anus. trois grandes. D'uu noir verdätre; une tache jaune sur le museau ; deux bandes obliques de | la même couleur sur la queue; le ventre jaune. La b'uche au-dessous du museau, qui est très-allongé; la queue terminée par une pointe dure. La queue très-comprimée par les côtés, et terminée en poiute. Deux dents qui percent la lèvre supé- rienre et ont l'apparence de deux petites cornes. nee . . PER Jaune ; une ou trois raics lougitudi- neuf sur quatre unies. nales brunes; des bandes transversales 1 L4 s A rangs. trés-étroites et de la même couleur. L'ARMÉE Les écailles qui recouvrent le ventre sont un peu plus larges que celles qui garnissent ie dos. mg En a — grandes Variée de brun et d’une couleur pâle. ae neo ae cernes nn Les écailles brunes et blanches dans leur centre. Verdätre ; plusieurs rangées longitu- dinales de points noirs ou bruns. ne VS D) Les écailles du dessus du corps rousses h et bordées de blanchätre : quatre raies lon- ueufsur quatre ER gitudinales brunes ou noires; le ventre dec pre d’un brun très-foncé; la gorge marbrée de blanc, de noir et de jaunûtre. HISTOIRE NATURELLE MR UT. Mi sun eus + mt V GS Der dre rm TRRn A TES » ve TS CARACTÈRES. TE ESPECES. RANGS D'ÉCAILLES [|LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS sous le corps et a et sc:s la queue. longueur de la queue. venin. Au, jaune et brun. 197 1 pieu 6 pouces. An. flavofusca. 223 1 pi. 1 po. 6lig. la lonsueur 126 e de la queue, un peu plus grande que celle du corps. Eryx. Eryx. 13506 Plature. ; 1 pied f pouces. les corne, mäachoires Platura. 2 pouces. sans dents. CINQUIÉME Serpens dont le corps et la queuë AMPUISBENES. Amplisbæncæ. Anneaux du corps et anneaux @e la quete. mr ms — ! Blanchet. 293 rp'.bpo.olig. | 1 | — —— | | Amphisbæna alba. 10 1 pouce 6 lignes. | RÉ A — | a, Amphisbène j enfumé. 200 1 pied 1 po. 6 lig. ÆAmphisbæna 5a 6 lignes. Juliginosa. _ SIXIÈME Serpens dont les côtés du corps présenteni CŒCILES. Cœciliæ. Plis des côté s du corps, ct plis des côtés de la queue Cœcile visqnenx. 340 Cœcilia glutinosa. 10 | TABLE MÉTHODIQUE. SUITE) DES ICARACTÉÈRES. ÉCAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du See : bn lasse ans u dos. de la conformation extérieure. Cr astmmtmn, | mener een hee ep. À … , Le D . D'un vert mélé de brun; plusieurs rangées longitudinales de points jaunes ; le ventre jaune. pipes) nnpnnescnsmmesmnememesns nn see EE D'un roux cendré: trois raies noires et longitudinales, La mächoire supérieure un peu plus avancée que l’inférieure. arrondies EU unies. 1e arrondies, très - petites, et placées a côté les unes des autres. GENRE. | : sont entourés d'anneaux écailleux. AMPHISBÈNES. Amphisbæne. 2 et RSS Noire; le dessous du corps blanc; la queue variée de bianc et de noir. À La queue comprimée par les côtés, et un peu arrondie à son extréinité. ° = L2 a Six sur trois Blanche. rangs. s Huit tubercules près de l’anus. LEUR CRE), PR RER LARE EE : i Noirâtre , variée de blanc. Six sur trois ’ G& . “ one Huit tubercules près de l'anus. GENRE. une rangée longitudinale de plis. CŒCILES. Cuciliæ. # Brune; une raie blanchätre sur les cÔlés. HISTOIRE NATURELLE. a | | mm CARACTÉÈRES. ER ESPECES. , PLIS LONGUEUR TOTALE,| CROCHETS |" des côtés du corps, $ | et plis et à l des côtés de la queue. [longueur de la queue.| venin. | Ibiare. | : | 135 1 pied. } Ibrare. Serpens dont le dessous du corps, présentant vers la téte écailleux , et dont l’extrémité de la queue LANGAHA. Zangaha. Grandes plaques et anneaux écauleux. Langaha de Madagascar. | 184 - à la mà- Langaha 2 pieds 8 ponces. choire Madagascar. 42 supérieure. . HUITIEMHN Serpens qui ont le corps et l ACROCHORDES. Acrochordi. Acrochorde de Java. 8 pieds 3 pouces. | ÆAcrochordus Javan. II pouces. Fo | TABLE MÉTHODIQUE. | 415 Ro SUITE DES CARACTÈRES ECAILLES ÉCAILLES COULEUR ET TRAITS PARTICULIERS du ; k: desserte du dos. de la conformation extérieure. RE | fer-de-lance parvient ordinairement à la longueur de cinq ou six pieds; c’est un des plus grands serpens venimeux , et uu de ceux dont le poison est le plus actif. Il n’est encore que Lrès- peu connu des naturalistes ; M. Linné même n’en a point parlé. On ne l'a observé jusqu’à présent qu'à la Martinique, et peut- être à la Dominique et à Cayenne, et c'est de la première de ces îles qu'est arrivé l'individu conservé au Cabinet du Roï, et que nous allons décrire : aussi les voyageurs l'ont-ils appelé jusqu’à présent vipère jaune de la Martinique. Nous n'avons pas cru devoir employer cette dénomination, parce que la couleur de celte espèce n’est pas constante ,et que la moitié à peu près de individus qui la composent présente une couleur différente de la jaune. Nous avons préféré de tirer son nom de la conforma- tion parliculière et très-constante de sa tête. La vipère fer-de-lance a cette partie plus grosse que le COTPS ; etremarquable par un espace presque triangulaire, dont les trois angles sont occupés par le museau et les deux yeux. Cet espace, relevé par ses bords antérieurs , représente un fer de lance large à sa base , et un peu arrondi à son sommet. Lestrous des narinessont très-près du bout du museau, les yeux sont gros, ovales, et placés obliquement. Lorsque le fer-de-lance a acquis une certaine grosseur on remarque de chaque côtede sa tête, entre ses narines et ses yeux, une ouverture qui est très-senstble dans les individns conservés au Cabinet du Roi, et que l'on a regardée comme les trous auditifs de ce serpent. Chacun de ces trous est, en eflet, l’extrémilé d’un petit canal qui passe au-des- sous de l'œil, et qui nous a paru aboutir à l'organe de l'ouie. Comme nous n'avons examiné que des fers-de-lance conservés depuis long-temps dans l’esprit-de-vin, nous n'avons pu nous assurer de ce fait , qu’il seroit d'autant plus intéressant de vériher, que l’on n’a encore observé dans aucune autre espèce de serpent des ouvertures extérieures pour les oreilles. S'il étoit bien cons- DA RE EN D EP "Et RS orme 1 Vipère jaune de la Martinique. 460 HISTOIRE NATURELLE taté, on ne pourroit plus douter que le serpent fer-de-lance n'eût des ouvertures extérieures pour l'organe de l’ouïe, de même que les lézards, avec cette différence cependant que, dans ces der- niers animaux, ces ouvertures sont situées derrière les yeux, amsi que dans les oiseaux et les quadrupèdes vivipares , au lieu que le fer-de-lance les auroit entre les yeux et le museau. De chaque côté de la machoire supérieure on aperçoit un et quelquefois deux ou même trois crochets , dont l'animal se sert pour faire les blessures dans lesquelles il répand son venin. Ces crochets, d’une substance très-dure , de la forme d’un hamecon, et communément de la grosseur d’une forte alène, sont mobiles, creux depuis leur racine jusqu’à leur bord convexe, qui pré- sente une petite fente, et revêtus d’une membrane qui se retire et les laisse paroître lorsque l'animal ouvre la gueule et les re- dresse pour s’en servir. Leur racine est couverte par un petit sac d’une membrane très-forte qui renferme le venin de l'animal , et qui, suivant l’auteur d’un Mémoire sur la vipère jaune de la Martinique, publié dans les Vourelles de la république des lettres et des arts, peut contenir une demi-cuillerée à café de liqueur. Au reste, ce sac ne nous a pas paru le vrai réservoir du poison , que nous avons cru voir dans des vésicules placées de chaque côté à l'extrémité des mâchoires, comme dans la vipère commune d'Europe , et qui, par un conduit particulier, parviendroit à la cavité de la dent, pour sortir par la fente située dans la partie convexe de ce crocbet ?. Le venin de la vipère fer-de-lance est presque aussi Hquide que de l'eau , et jaunâtre comme de Fhuile d'olive qui commence à s'altérer. La douleur qu'excite ce venin dans les personnes blessées par la vipère est semblable à celle qui provient d'une chaleur brülante ; elle est d’ailleurs accom pagnée d’un grand accablement. Mais ce poison, qui n’a ni goût ni odeur, ne paroit agir que lors- qu'il est un peu abondant ou qu'il se mêle avec le sang, puisqu'on a quelquefois sucé impunément les plaies produites le plus ré- cemment par ja morsure du fer-de -lance, et il est aisé de voir , en comparant ces faits avec ceux que nous avons rapportés à l'ar- NE R ? Comme nous n'avons élé à méme de disséquer que des vipères fer-de-lance conservées depnis long-temps dans l’esprit-de-vin , et dont les jiarties molles, ainsi que Îes humeurs, étoient très altérées, nous ne pouvons rien assurer 2 ce sujet. \ DE LA VIPÈRE FÈR-DÉ-LANCE. AN ticle de la vipère commune d'Europe, que les organes relatifs au venin, la nature de ce suc funeste, et la forme des dents, sont à peu près les mêmes dans la vipère européenne et dans celle de la Martinique. La langue est très-étroite, très-allongée , et se meut avec beau- coup de vitesse; les écailles du dos sont ovales et relevées par une arête , la couleur générale du corps est jaune dans certains indi- vidus, grisatre dans d’autres; et ce qui prouve qu’on ne peut pas regarder les individus jaunes et les mdividus gris comme formant deux espèces distinctes, ni même deux variétés constantes , c’est qu'on trouve souvent dans la même portée autant de vipereaux gris que de vipereaux jaunes. Nous avons vu dans la collection de M. Badier, très-bon observateur, une variété du fer-de-lance qui, au lieu de présenter la couleur jaune, avoit le dos marbré de plusieurs couleurs plus ou moins livides ou plus ou moins brunes, et étoit d’ailleurs distinguée par une tache très- brune placée en long derrière les yeux et de chaque côté de la tète. Le fer-de-lance a communément deux cent vingt-huit grandes plaques sous le corps, et soixante-une paires de petites plaques sous la queue. Nous avons trouvé ces deux nombres sur un isdividu dont la longueur totale étoit d’un pied deux pouces deux lignes, et la longneur de la queue de deux pouces une ligne. Nous n'avons compilé que deux cent vingt-cinq grandes plaques , et cinquante- neuf paires de petites , sur un autre individu , qui cependant étoit plus grand et avoit deux pieds six lignes de longueur totale. Lorsque le fer-de-lance se jette sur l'animal qu’il veut mordre, al se replie en spirale, et, se servant de sa queue comme d’un point d'appui ,1ls’élince avec la vitesse d’une flèche ; mais l’espace qu'il parcourt est ordinairement peu étendu. Ne jouissant pas de lagilité des autres serpens , presque toujours assoupi, surtout lorsque la tempéralure devient un peu fraîche, 1l se tient caché sous des tas de feuilles , dans des troncs d'arbres pourris, et même dans des irous creusés en terre. Il est très-rare qu'il pénètre dans les maisons de la campagne, et on ne le trouve jamais dans celles des villes; mais il se retire souvent dans les plantations de cannes à sucre , où :l est attiré par des rats, dont il se nourrit. Îl ne blesse ordinairement que lorsqu'on le touche et qu’on l'irrite, mais ül ne mord jamais qu'avec une sorte de rage. On peut être averti de son approche par l'odeur fétide qu’il répand , et par le cri de @erlains oiseaux, tels que la gorge-blanche, qui, troublés appa- 462 HISTOIRE NATURELLE remment par sa ressemblance avec les serpens qui les poursui- ventsur les arbres et les ÿ dévorent,se rassemblent etvoltigent sans cesse autour de lui. Lorsqu'on est surpris par ce serpent, on peut lui présenter une branche d'arbre, un paquet de feuilles, ou tout autre objet qui captive son attention et donne le temps de s’ar- mer; un coup sufhit quelquefois pour lui donner la mort. Quand on lui a coupé la tête, le corps conserve pendant quelque temps un mouvement vermiculaire. C'est dans le mois de mars ou d'avril que ce dangereux reptile s’accouple avec sa femelle; ils s'unissent si intimement , et se ser- rent dans un si grand nombre de contours , qu’ils représentent , suivant M. Bonodet de Foix, deux grosses cordes tressées ensem- ble. Ils demeurent ainsi réunis pendant plusieurs jours, et on doit éviter avec un très-crand soin de les troubler dans ce temps d'amour et de jouissance, où de nouvelles forces rendent leurs mouvemens plus prompts et leur venin plus actif. La mère porte ses petits pendant plus de six mois, suivant l’auteur du Mémoire déjà cité; et ce temps, beaucoup plus long que celui de la gesta- tion de la vipère commune, qui n’est que de deux ou trois mois, seroit cependant proportionné à la différence de la longueur du corps de ces deux serpens, le fer-de-lance parvenant à une lon- gueur double de celle de la vipère commune d'Europe. Suivant certains voyageurs, ses petits sortent tout formés du ventre de leur mère, qui ne cesse de ramper pendant qu’ils vien- nent à la lumière; mais, suivant M. Bonodet de Foix, 1ls se dé- barrassent de leur enveloppe au moment même où la femelle Jes dépose à terre. Chaque portée comprend depuis vingt jusqu’à soixante petits, et 1l paroît que le nombre en est toujours pair. 1ls ont, en naissant, la grosseur d’un ver de terre , et sept ou huit pouces de long ; lorsqu'ils sont adultes, ils parviennent jusqu'a la longueur de six pieds, ainsi que nous l'avons dit, et ont alors, dans le milieu du corps, trois pouces de diamètre. On en voit de plus gros et de plus longs; mais ces individus sont rares. Le fer-de-lance se nourrit de lézards améiva , et même de rats, de volaille , de gibier et de chats. Sa gueule peut s’ouvrir d’une manière démesurée , et se later si considérablement , qu'on lui a vu avaler un cochon de lait; mais un serpent de cette espèce, ayant un jour dévoré un gros sarigue , enfla beaucoup et mourut. Lorsque la proie qu’il a saisie lui échappe , il en suit les traces en se traînant avec peine; cependant, comme il a les yeux et l'odo- * DE LA VIPÈRE FER-DE-LANCE. 463 ai excellens , il parvient d'autant plus aisément à l’atteindre ; qu elle est bientôt abattue par la force du poison qu'il a distillé dans sa plaie. Il l'avale toujours en commençant par la tête ; et lorsque cette proie est considérable , il reste souvent comme ten- du et dans un état d’engourdissement qui le rend immobile jus- qu'à ce que sa digestion soit avancée. I! ne digère que lentement ; et lorsqu'on a tué un fer-de-lance quelque temps après qu'il a pris de la nourriture , il s'exhale de son corps une odeur fétide et insupportable. Quelque dégoût que doive inspirer ce serpent, des nègres, et même des blancs, ont osé en manger, el ont trouvé que sa chair étoit un mets agréable. Cependant la mauvaise odeur dont elleest imprégnée lorsque l'a- nmimal est vivant, doit se conserver après la mort de la vipère, de mauiére à rendre cette chair un aliment aussi rebutant que le veiun du serpent est dangereux. On a écrit que ce poison étoit si funeste, qu’on ne connoissoit personne qui eût été guéri de la morsure du fer-de-lance ; que ceux qui avoient été blessés par ses crochets envenimés mouroient quelquefois dans l’espace de six heures , et toujours dans des dou- leurs aiguës; que le venin des jeunes serpens de cette espèce don- noiït aussi la mort, mais que le partie mordue par ces jeunes reptiles n’enfloit point ; que le blessé n’éprouvoit que des douleurs légères, où mème ne souffroit pas, et qu’il se déclaroit souvent une paralysie sur des parties différentes de celle qui avoit été mordue. Nous avons lu en frémissant qu’un grand nombre de remèdes ont été employés en vain pour sauver les jours des infortunés blessés parle fer-de lance, et que l'on étoit seulement parvenu à diminuer les douleurs de ceux quiexpirent quelques heures après par l'effet funeste de ce poison terrible. M. Bonodet de Foix croit devoir affirmer , au contraire , qu'exceplé certaines circonstances par- ticulières, où le remède est même toujours efficace, la guérison est aussi prompte qu'assurée; que les moyens de l'obtenir sont aussi simples que multipliés ; quela manière de les employer est connue des nègres et des mulatres; que plusieurs traitemens ont été suivis du plus heureux succès , quoïqu’ils n’eussent été com- mencés que douze ou même quinze heures après l'accident ; que la situation du malade n'est point douloureuse, et qu’il périssoit sans sortir de l'assoupisesment profond dans lequel il éloit tou- jours plongé dès le moment de sa blessure, L’activit: du venin du fer-de-lance doit varier avec l’âge de l'animal, la saison et la tem- 464 HISTOIRE NATURELLE pérature. Mais, quoi qu’il en soit, pourquoi un être aussi funeste existe-t-il encore dans des iles où il seroit possible d’éteindre son odieuse race ? pourquoi laisser vivre une es pèce que l'on ne doit voir qu'avec horreur? et pourquoi chercher uniquement des remèdes trop souvent impuissans contre les maux qu'elle pro- duit, lorsque, par une recherche obstinée et une guerre à toute outrance , l’on peut parvenir à purger de ce venimeux reptile les diverses contrées où 1l a été observé ? # RARAMAAAAMAN VVANAIA AAA AAA AAA RAA AA AAA ARR AA AAA RAA VV LA TÊTE TRIANGULAIRE. Nous donnons ce nom à une couleuvre envoyée au Cabinet du Roi sous le nom de vipere de l’île Saint- Eustache. Elle a beau- coup de rapport, par la disposition de ses couleurs , avec la Vipère commune : elle est verdâtre, avec des taches de diverses figures sur la tête et sur le corps, où elles se réunissent pour for- mer une bande irrégulière et longitudinale. Les grandes pla- ques qui revêtent son ventre, et qui sont au nombre de cent cinquante , sont d’une couleur foncée et bordée de blanchâtre. Elle a soixante-une paires de petites plaques sous la queue. Nous avons tiré son nom de la forme de sa tête, qui paroît d'autant plus triangulaire , que les deux extrémités des mâchoires supérieures forment, par derrière, deux pointes irés-saillantes. Cette vipère est armée de crochets creux et mobiles. Les écailles, semblables à celles du dos, garnissent le sommet de la tête ; elles sont en losange et unies , au lieu d’être relevées par une arète, comime celles qui recouvrent le dos de la vipère commune. Le corps est très-délié du côté de la tête. L’individu que que nous avons décrit avoit deux pieds de longueur totale, et sa queue trois pouces neuf lignes. RAS III LANTA AAAUEULA LE DIPSE. AA RAAAAAAAAAAAIAAAAAAAAAU/ O+ rencontre en Amérique, et particuhèrement à Surinam, suivant Seba, ce serpent venimeux, dont le dessus du corps est SK KR & 2 LE PSN Ps CUIR Fe rie a+. 1, LaVipere fer-de-lance-# "Pare 4bo. = { 2. La Tete triangulaire... 464. ST L'Atropos SANTE EN DER Late DU LÉBERIS. 465 couvert d'écailles ovales , bleuâtres dans le centre, et blanchâtres sur les bords. Les grandes plaques qui revêtent le ventre de cette couleuvre sont blanches, et au nombre de cent cinquante-deux. La queue est longue, très-déliée , et garnie en dessous de cent trente-cinq paires de petites plaques, le long desquelles on voit s'étendre une raie bleuâtre. La mâchoire supérieure est armée de crochets mobiles, comme dans les autres espèces de serpens venimeux. AAAAANNV MAMAN RAAAANAR AAA AAA L’'ATROPOS. Cr serpent venimeux , qui se trouve en Amérique, mérite bien le nom que M. Linné lui a donné, par la force du poison qu’il recèle ; et c’est en effet à une parque qu’il convenoit de consacrer un reptile aussi funeste. Sa tête a un peu la forme d’un cœur ; ile présente plusieurs taches noires , ordinairement au nombre de quatre , et elle est garnie par-dessus d’écailles ovales, relevées par une arte, et semblables à celles du dos. La couleur générale du dessus du corps est blanchâtre , et au- dessus de ce fond s'étendent quatre rangs de taches rousses, ron- cles, assez grandes, et chargées dans leur centre d’une petite tache blanche. L’atropos a cent trente - une grandes plaques sous le ventre , et vingt-deux paires de petites plaques sous la queue. RAD VA BIAA AA VAR AAA VIA AE AR VAE AAA AA AAA AS AAA VIA AAA AA RE LE LÉBERIS. a Carre couleuvre est venimeuse; le dessus de son cerps est cou- vertde raies transversales, étroites et noires; elle a cent dix grandes plaques sous le corps , et cinquante paires de petites plaques sous la queue. On la trouve dans le Canada, et c’est M. Kalm qui l'a fait connoître. Lacepède, 1. 466 HISTOIRE NATURELLE PAVAAANA AA RAA ANA VS RAA AAA AAA AAA AA AAA AA AAA AA VAR VI AAA RAA VU ARS LA TIGRÉE. Nous ignorons de quel pays a été envoyé au Cabinet du Roi ce serpent , dont la mâchoire supérieure est armée de crochets mo- biles, Sa tète ressemble beaucoup à celle de la vipère commune; le sommet en est garni de petites écailles ovales, relevées par une arèle, et semblables à celles du dos. Le dessus du corps est d’an roux blanchâtre : 1l présente des taches foncées, bordées de noir, semblables à celles que l’on voit sur Jes peaux de panthères, ou d’autres animaux du même genre, répandues dans le commerce sous le nom de peaux de tigre; et voilà pourquoi nous avons désigné cette couleuvre par l'épithète de tigrée. L'individu que nous avons décrit avoit deux cent vingt-trois grandes plaques, et soixante- sept paires de petites ; sa longueur totale étoit d’un pied un pouce six lignes, et celle de sa queue de deux pouces. RARAAAAAR AAA UE AAA RAA AAA AAA AA AA AAA RAA AS AAA AAA AAA AAA AAA AAA VE COULEUVRES OVIPARES. a Ct LA COULEUVRE VERTE ET JAUNE OU LA COULEUVRE COMMUNE. Garenne Nous n'avons parlé jusqu’à présent que de reptiles funestes, de poisons mortels, d'armes dangereuses et cachées ; nous ne nous sommes occupés que de récits effrayans, d’images sinistres. Non-seulement les contrées brülantes de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique, nous ont présenté un grand nombre de serpens venimeux ; Mais nous avons vu ces espèces terribles braver les rigueurs des climats septentrionaux , se répandre dans notre Europe, infester nos contrées , pénétrer jusqu'auprès de nos @e- DE LA COULEUVRE VERTE ET JAUNE. 467 meures. Environnés , pour ainsi dire, de ces ministres de la mort, nous n'avons, en quelque sorte, considéré qu'avec effroi la surface de la terre. Enveloppée dans un voile de deuil , la Na ture nous a paru multiplier sur notre globe les causes de des- truction , au lieu d’y répandre les germes de la fécondité. Cette seule pensée à changé pour nous la face de tous les objets ; notre imagination trompée a empoisonné d'avance nos jouissances les plus pures : la plus belle des saisons , celle où tout semble se 72- mimer pour s'aimer et se reproduire , n’auroit plus été pour nous que le moment du réveil d’un ennemi terrible armé contre nos jours ; la verdure la plus fraîche , les fleurs les plus richement colorées , étalées avec magnificence par une main bienfaisante et conservatrice, dans la campagne la plus riante, n’auroient été à nos yeux qu'un tapis perfide étendu par le génie de la desiruc- tion sur les affreux repaires de serpens venimeux ; et les rayons vivifians du soleil le plus pur ne nous auroient parn inonder l'atmosphère que pour donner plus de force aux traits empoison- nés de funestes reptiles. Hätons-nous de prévenir ces effets ; fai- sons succéder à ces tableaux lugubres des images gracieuses ; que la Nature reprenne, pour ainsi dire, à nos yeux son éclat et sa pureté. Les couleuvres que nous avons à décrire ne nous pré- senteront ni venin mortel, ni armes funestes; elles ne nous montreront que des .mouvemens agréables, des proportions iégères, des couleurs douces ou brillantes : à mesure que nous . nous familiariserons avec elles, nous aimerons à les rencontrer dans nos bois, dans nos champs, dans nos jardins ; non-seule- ment elles ne troubleront pas la paix de nos demeures champé- tres , ni la pureté de nos jours les plus sereins , maïs elles augmen- teront nos plaisirs en réjouissant nos yeux par la beauté de leurs nuances et la vivacité de leurs évolutions ; nous les verrons avec intérêt allier leurs mouvemens à ceux des divers animaux qui peuplent nos campagnes, se retrouver sur les arbres jusqu’au milieu des jeux des oiseaux, et servir à animer, dans toutes ses parties, le vaste et magnifique théâtre de la Nature printanière. Commençons donc par celles que lon rencontre en grand nombre dans les contrées que nous habitons. Parmi ces serpens, le plus souvent très-doux, et même quelquefois familiers, nous devons compter la verte et jaune, ou la couleuvre commune. Ce serpent , dont M. Daubenton a parlé le premier, est très- commun dans plusieurs provinces de France, et surtout dans 468 HISTOIRE NATURELLE les méridionales ; il en peuple les bois, les divers endroits retirés et humides. Il paroïît confiné dans les pays tempérés de l’ancien continent ; on ne l’a point encore trouvé dans les contrées très- chaudes de l’ancien monde, non plus qu'en Amérique; et il ne doit point habiter dans le Nord , puisque le célèbre naturaliste suédois n’en a point fait mention. Il est aussi innocent que la vipère est dangereuse : paré de couleurs plus vives que ce reptle funeste, doué d’une grandeur plus considérable, plus svelte dans ses proportions, plus agile dans ses mouvemens, plus doux dans ses habitudes , n'ayant aucun venin à répandre , il devroit être vu avec autant de plaisir que la vipère avec effroi. Il n’a pas, comme les vipères, des dents crochnes et mobiles; il ne vient pas au jour tout formé; et ce n’est que quelque temps après la ponte que les petits éclosent. Malgré toutes ces dissemblances qui le dis- tinguent des vipères, le grand nombre de rapports extérieurs qui l'en rapprochent , ont fait croire, pendant long-temps ; qu’il étoit venimeux. Cette fausse idée a fait tourmenter cette innocente couleuvre ; on l’a poursuivie comme un animal dangereux ; et 1l n’est encore que peu de gens qui puissent la toucher sans crainle , et même la regarder sans répugnance. Cependant cet animal, aussi doux qu'’agréable à la vue, peut être aisément distingué de tous les autres serpens , et particuliè- sement des dangereuses vipères , par les belles couleurs dont il est revêtu. La distribution de ces diverses couleurs est assez cons- tante; et, pour commencer par celles de la tête, dont le dessus est un peu aplati , les yeux sont bordés d’écailles jaunes et pres- que couleur d’or, qui ajoutent à leur vivacité. Les mâchoires, dont Le contour est arrondi, sont garnies de grandes écailles d’un jaune plus ou moins pâle, au nombre de dix-sept sur la mà- choire supérieure , et de vingt sur l’inférieure *. Le dessus du corps, depuis Le bout du museau jusqu'à l'extrémité de la queue, est noir, ou d’une couleur verdâtre très-foncée, sur laquelle on voit s'étendre, d’un bout à l'autre, un grand nombre de raies composées de petites taches jaunâtres de diverses figures, les unes allongées , les autres en losange, etc., et un peu plus grandes 1 Ily a communément treize dents de chaque côté au rang extérieur de la mâchoire supérieure et de la mâchoire inférieure ; il y en a ordinairement dix de chaque côté au rang intérieur des, deux mâchoires ; ainsi la verte et jaune à le plus souvent quatre-vingt-douze dents crochues ; mais immobiles, blanches et transparentes. DE LA COULEUVRE VERTE ET JAUNE. 46 vers les côtés que vers le milieu du dos. Le ventre est d’une cou- leur jaunâtre : chacune des grandes plaques qui le couvrent pré- sente un point noir à ses deux bouts, et y est bordée d’une très- petite ligne noire ; ce qui produit, de chaque côté du dessous du corps, une rangée très-symétrique de points et de petites lignes noirâtres , placées alternativement. Cette jolie couleuvre parvient ordinairement à la longueur de trois on quatre pieds, et alors elle a deux ou trois pouces de cir- conférence dans l’endroit le plus gros du corps. On compte com- munément deux cent six grandes plaques sous son ventre, et cent sept paires de petites plaques sous sa queue , dont la lon- gueur est égale le plus souvent au quart de la longueur totale de l'animal. Elle devient même beaucoup plus grande lorsqu'elle parvient à un âge avancé, et elle peut d'autant plus aisément échap- per aux divers PET auxquels elle est exposée, et par consé- quent atteindre à son entier développement, que non-senlement elle peut recevoir des blessures considérables sans en périr, mais même vivre un très-long-temps, ainsi que les autres reptiles ; sans prendre aucune nourriture ? D'ailleurs la couleuvre verte et jaune se tient presque tou- jours cachée, comme si les mauvais traitemens qu'elle a si sou- vent reçus l'avoient rendue timide; elle cherche à fuir lorsqu'on l2 découvre ; et non-seulement on peut la saisir sans redouter un poison dont elle w’esl jamais mfectée, mais même sans éprouver. d'autre résistance que quelques efforts qu’elle fait pour s’échap- per. Bien plus, elle devient docile lorsqu'elle est prise ; elle subit uue sorte de domesticité; elle obéit aux divers mouvemens qu’on veut lui faire suivre. On voit souvent des enfans prendre deux serpens de cette espèce, les attacher par la queue, et les con- traindre aisément à ramper, ainsi attelés, du côté où ils veulent les conduire. Elle se laisse entortiller autour des bras ou du cou, 1 On en a vu passer plusieurs mois sans manger. Un de mes amis m'a écrit qu'il avoit vu une jeune couleuvre ( vraisemblable ment de l'espèce dont il s’agit dans cet article ), trouvée dans une vigne par des paysans, et attachée au bout d’un très-long échalas , y être encore en vie au bout de huit jours, quoiqu'elle n'eût pris aucun aliment. (Lettre de D1. l’abbe Carrière, curé de Roquefort , près d'Agen. ) C'est avec bien du plaisir que je paye ici un tribut de tendresse et de recon- noissance à ee pasteur aussi éclairé que vertueux, et qui, dans le temps, voulus bien se charger d'élever ma jeunesse. 470 HISTOIRE NATUREILE rouler en divers contours de spirale, tourner ef retourner en diflérens sens, suspendre en différentes positions, sans donner au- cun signe de mécontentement : elle paroït même avoir du plaisir à jouer ainsi avec ses maîtres ; el comme sa douceur et son dé- faut de venin ne sont pas aussi bien reconnus qu’ils devroient l'être pour la tranquillité de ceux qui habitent la campagne, des charlatans se servent encore de ce serpent pour amuser et pour tromper le peuple, qui leur croit le pouvoir particulier de se faire obéir, au moindre geste, par un animal qu'il ne peut quel- quefois regarder qu’en tremblant. Il y a cependant certains momens, et même certaines saisons de l’année, où la couleuvre verte et jaune, sans ètre dangereuse , montre ce désir de se défendre ou de sauver ce qui lui est cher, si naturel à tous les animaux, On a vu quelquefois ce serpent, surpris par l'aspect subit de quelqu'un, au moment où il s’avan- çoit pour traverser une route, ou que, pressé par la faim, il se jetoit sur une proie, se redresser avec fierté, et faire entendre son sifflement de colère. Mais dans ce moment même, qu’auroit-on eu à craindre d'un animal sans venin , dont tout le pouvoir n’au- roit pu venir que de l'imagination frappée de celui qu’il auroit at- taqué , et dont la force et les dents même ne sont dangereuses que pour de petits lézards et d’autres foibles animaux qui lui servent de nourriture ? Dans tous les endroits où le froid est rigoureux, la couleuvre commune s'enfonce, des la fin de l'automne , dans des trous sou- terrains ou dans d’autres creux, où elle s'engourdit plus où moins complétement pendant l'hiver. Lorsque les beaux jours du prin- temps paroissent , ce reptile sort de sa torpeur , et se dépouille comme les autres serpens. Revétu ensuite d’une peau nouvelle, pénétré d'une chaleur plus vive, et ayant réparé toutes les pertes qu'il avoit éprouvées par le froid et la diète, 1l va chercher sa compagne , et faire entendre, au milieu de l’herbe fraiche, son sifflement amoureux. Leur ardeur paroît très-vive; on les a vus souvent s'élancer contre ceux qui étoient venus troubler leurs amours dans la retraïte qu'ils avoient choisie. Cette aflection du mâle et de la femelle ne doit pas étonner dans un animal capable d’éprouver, pour les personnes qui prennent soin de ui lorsqu'il est réduit à une sorte de domesticité, un attachement très-fort, et qu'on a voulu même comparer à celui des animaux auxquels #ous accordons le plus d'instinct; et v'est peut-être à Fespèce de DE LA COULEUVRE À COLLIER. Lst Ja couleuvre verte et jaune qu'il faut rapporter le fait suivant, attesté par un naturaliste très-digne de for. Cet observateur a vu une couleuvre, qu'il a appelée Le serpent ordinaire de France, tellement aflectionnée à la maîtresse qui la nourrissoit, que ce serpent se glissoit souvent le long de ses bras, comme pour la caresser , se cachoït sous ses vêtemens, ou alloit se reposer sur son sein. Sensible à la voix de celle qu’il paroissoit chérir , il alloit 4 elle lorsqu'elle Fappeloit ; il la suivoit avec constance; il recon= noissoit jusqu’à sa maniere de rire; il se tournoit vérs elle lors- qu'elle marchoit, comme pour attendre son ordre. Ce même na- turaliste à vu un jour la maîtresse de ce doux et familier serpent le jeter dans l'eau pendant qu'elle suivoit , dans un bateau, le courant d’une grande rivière : le fidèle animal, toujours attentif à la voix de sa maîtresse chérie , nageoïit en suivant le bateau qui la portoit ; mais la marée étant remontée dans le fleuve , et les vagues contrariant les efforts du serpent, déjà lassé par ceux qu'il avoit faits pour ne pas quitter le bateau de sa maîtresse , le malheureux animal fut bientôt sabmerge. Peut-être faut-il rapporter aussi à la coulenvre verte et jaune un serpent de Sardaigne que M. Cetti a fait connoître, et que l'on nomme colubro uccellatore, parce qu’il grimpe sur les arbres pour y chercher les œufs et même les petits oiseaux , dont il se nourrit. Ce reptile est très-commun en Sardaigne. Sa longueur est ordi- naitrement de quarante pouces , et sa plus grande grosseur de deux. La couleur de son dos est noire, variée de jaune; et le jaune est aussi la couleur du dessous de son corps. Il a deux cent dix- neuf grandes plaques , et cent deux paires de petites. Il n’est point venimeux. PS AAA AAA AAA AAA AUS AAA LAB AULE AA MIA EMA A AA ES LA COULEUVRE A COLLIER”"., DS Cr encore dans nos contrées que se trouve en trés-grand nom- bre ce serpent, aussi doux, aussi innocent , aussi familier , que la couleuvre verte et jaune. Ses habitudes ne différent pas, à beau- z En Sardaigne, colubro nero, serpe nero, carbon, carbonazto ; anguirte de haie. 472 HISTOIRE NATURELLE coup d’égards, de celles de cette couleuvre. Il paroît cependant qu'il se plaît davantage dans les lieux humides, ainsi qu’au milieu des eaux; et c'est ce qui lui a fait donner par plusieurs natura- listes le nom de serpent d’eau , de serpent nageur, d’anguille de haie *, etc. Il parvient quelquefois à la longueur de trois ou quatre pieds. Sa tête est un peu aplatie , comme celle de la couleuvre commune : le sommet est recouvert par neuf grandes écailles dis- posées sur quatre rangs, dont le premier et le second, à compter du museau, sont composés de deux pièces; le troisième l'est de trois, et le quatrième de deux. Cette disposition la distingue de la vipère commune , aussi-bien que la forme de son museau, qui est arrondi, au lieu d’être terminé par une écaille presque verii- cale , comme dans cette même vipère. Sa gueule est très-ouverte ; les deux mâchoires présentent, au lieu de crochets mobiles, un double rang de dents, mais immobiles, assez petites, et tournées vers le osier : dix-sept écailles revêtent à l'extérieur chacune de ces mâchoires ; et celles qui recouvrent la mâchoire supérieure sont blanchâtres et marquées de cinq ou six petites raies d’une couleur très-foncée. On voit sur le cou deux taches d’un jaune pâle ou blanchâtre, qui forment comme un demi-collier, d’où est venu le nom que nous conservons à ce serpent ; et ces deux taches, très-semblables, sont d'autant plus sensibles , qu’elles sont placées au-devant de deux autres triangulaires et très-foncées. Le dos est recouvert d'’écailles ovales relevées par une arête, et plus grandes que celles qui garnissent les côtés, et qui sont unies. Tout le dessus du corps est d’un gris plus ou moins foncé, mar- quelé de chaque côté de taches noires irrégulières et plus ou moins grandes, qui aboutissent aux plaques du ventre; et au milieu des deux rangées formées par ces taches , s'étendent , depuis la tête jusqu'à la queue, deux autres rangées longitudinales de taches plus petites et moins sensibles. Le dessous du ventre est varié de noir, de blanc et de bleuâtre, mais de manière que les taches noires augmentent en nombre et en grandeur, à mesure qu'eiles sont plus près de la queue, où les plaques sont presque entière- ment noires. Ïl y a communément cent soixante-dix grandes pla- ques sous le ventre, et cinquante-trois paires de petites plaques sous la queue *. Te * Ce nom d’anguille de haïe a été aussi donné, dans plusieurs provinces, a la couleuvre verte et jaune. ? Nous avons compté soixante paires de petites plaques dans quelques individus, - DE LA COULEUVRE À COLLIER 473 La couleuvre à collier ne renfermant aucun venin, on la ma- nie sans danger ; elle ne fait aucun eflort pour mordre; elle se défend seulement en agitant rapidement sa queue, et elle ne re- fuse pas plus que la couleuvre commune, de jouer avec les en- fans. On la nourrit dans les maisons, où elle s’accoutume si bien à ceux qui la soignent , qu'au moindre signe elle s’entortille au- tour de leurs doigts, de leurs bras, de leur cou, et les presse mol- lement comme pour leur témoigner une sorte de tendresse et de reconnoissance. Elle s'approche avec douceur de la bouche de ceux qui la caressent ; elle suce leur salive , et aime à se cacher sous leurs vêtemens, comme pour s'approcher davantage de ceux qui la chérissent. En Sardaigne, les jeunes femmes élèvent les couleuvres à collier avec beaucoup d’empressement, leur donnent à manger elles-mêmes, prennent le soin de leur mettre dans la gueule la nourriture qu’elles leur ont préparée ; et les habitans de fa campagne les regardent comme des animaux du meilleur au- gure , les laissent entrer librement dans leurs maisons et croiroient avoir chassé la fortune elle-même, s'ils avoient fait fuir ces in- nocentes petites bêtes. | Il arrive cependant quelquefois que lorsque la couleuvre à col- lier est devenue très-forte , et qu'au lieu d’avoir été élevée en do- mesticité , elle a vécu dans les champs et dans l'état sauvage, elle perd un peu de sa douceur, et que si on Firrite en larrachant , par exemple , à ses jouissances , elle anime ses yeux, agite sa lan- gue , se redresse avec vivacilé, fait claquer ses mâchoires, el serre fortement avec ses dents la main qui cherche à la saisir. La couleuvre à collier dépose ses œufs dans les trous exposés au midi, sur le bord des eaux croupissantes, ou plus communément sur des couches de fumier. Ces œufs, qui sont gros à peu près comme des œufs de pie, sont collés ensemble par une matière gluante en forme de grappe; elle a par là un nouveau rapport avec les poissons et certains quadrupèdes ovipares, tels que les crapauds, les grenouilles, etc. dont les œufs sont de même collés ensemble et réunis de diverses manières. Les œufs de la couleuvre à collier, déposés dans des fumiers, ont donné lieu à une fable à laquelle on a cru pendant long- temps; on a prétendu qu'ils avoient été pondus par des coqs; et comme on en a vu sortir de petits serpenteaux, on a ajouté que les œufs de coq renfermoient toujours un serpent, que le coq ne Jes couvoit point, mais que lorsqu'ils étoient placés dans un en- 474% HISTOIRE NATURELLE droit chaud, comme parmi des végétaux en PURARENOR, is. pr oh toujours des serpens. On assure qu'il est aisé de distinguer les œufs qui ont été fè- condés d'avec ceux qui ne le sont pas , et qu'on appelle des œufs clairs , en les mettant sur l'eau : les œufs clairs sont les seuls qui surnagent. La coque est composée d’une membrane mince, mais compacte et d’un tissu serré. Le petit serpent y est roulé sur lui-même au milieu d'une matière qui ressemble à da blanc d'œuf de poule ; on y remarque un placenta; et le cordon ombilical est attaché au ventre un peu au-dessus de Fanus. La chaleur seule de Fatmo- sphère, et celle des matières végétales pourries, font éclore ces œufs. Peut-être dans des contrées plus voisines de la zone torride que celles où ils ont été observés , l’ardeur du soleil sufhroit pour faire sortir les petits serpens de tt coque. Nous avons vu, en effet, dans l'Histoire des quadrupèdes ovipares , les ob dé- poser leurs œufs sur ke sable dans les contrées brûlantes de l’Afri- que ; mais sur les plages plus humides et moins chaudes de l’Amé- rique méridionale , ils les placent au milieu d’un tas de matières végétales , dont la fermentation favorise l'accroissement du fœtus et la sortie de l'œuf Ces œufs de couleuvre à collier sont ordinairement au nombre de dix-huit ou vingt * : aussi l'espèce du serpent à collier seroit- elle beaucoup plus nombreuse qu'elle ne l’est, s’il ne devenoit pas la proie de plusieurs ennemis même irès-foibles, dans le tem ps qu'il est encore jeune et sans force pour se défendre ; les pies, les mésanges, les moineaux le dévorent, et les grenouilles mêmes s’en nourrissent lorsqu'elles peuvent le saisir sur le bord des marais qu'elles habitent. Il rampesur la terre avec une très-grande vitesse ; il nage auss , mais avec plus de difficulté qu'on ne l’a cru. Pendant que l'été règne, il vit souvent dans les endroits humides, ainsi que nous l'avons dit ; mais on le trouve quelquefois dans les buissons : d'autres fois il se place sur les branches sèches et élevées des chènes , des saules, des érables, sur les saillies des vieux bâtimens, ? Quelquefois ce nombre n’est que de quatorze ou quinze. Gesner a écrit qu'on lui apporta, vers la fin du mois de juin , une femelle de l’espèce dont il est question dans cet article, et que , deux joors après, elle pondit quatorze euf Œuts, DÉ LA COULEUVRE À COLLIER. 495 sur tous les endroits exposés au midi, el où le soleil donne avec plus de force; il sy replie en divers contours, où sy allonge avec une sorte de volupté, toujours cherchant les rayons de l’astre de la lumière, toujours paroissant se péné- trer avec délices de sa chaleur bienfaisante. Mais, lorsque la fin de l'automne arrive, il se rapproche des lieux les moïns froids ; il vient auprès des maisons, et se retire enfin dans des trous souterrains à quinze ou vingt pouces de profondeur, souvent au pied des haies, et presque toujours dans un en- droit élevé au-dessus des plus fortes inondations; quelquefois il s'empare d’un trou de belette où de mulot, d’un conduit creusé par une taupe , d’un terrier abandonné par un lapin, et il passe dans l’engourdissement la saison du grand froid. Lors- qu'ilest adulte , l'ouverture de sa gueule , son gosier et son esto- mac peuvent être très-dilatés , ainsi que ceux des autres serpens , et il se nourrit alors non-seulement d’herbes, de fourmis et d'autres insectes , mais même de lézards, de grenouilles et de petites souris ; il dévore aussi quelquefois les jeunes oiseaux , qu'il surprend dans leurs nids au milieu des buissons, des haies, des branches de jeunes arbres, sur lesquels il grimpe avec faci- Jité. Non-seulement il se suspend aux rameaux par le moyen des divers replis de son corps, mais il s'accroche avec sa lêle ; et comme elle est plus grosse que son cou, il la place souvent entre les deux branches d’une tige fourchue, pour qu'arrêtée par sa saillie, elle lui serve comme d’une espèce de crochet et de point d'appui. Son odeur est quelquefois assez sensible, surtout pour les chiens et les autres animaux, dont l’odorat est très-fin. Il aime beaucoup le lait; les gens. de la campagne prétendent qu'il entre dans les laiteries , et qu'il va boire celui qu'on y conserve. On assure même qu'on l'a trouvé quelquefois replié autour des jambes des vaches, suçant leurs mamelles avec avidité, et les épuisant de lait au point d'en faire couler du sang. Pline a rap- porté ce fait, qu’à la vérité il attribuoit à une autre espèce de serpent que celle dont il est ici question. On a prétendu aussi que le serpent à collier entroit quelquefois par la bouche dans le corps de ceux qui dormoient étendus sur lherbe fraîche , et qu'on l'en faisoit sortir en profitant de ce même goût pour le Jait, et en l'atürant par la vapeur du lait bouilli que l'on approchoïit 476 HISTOIRE NATURELLE de la bouche ou de l'anus de celui dans le corps duquel il s'étoit glissé *. La couleuvre à collier se trouve dans presque toutes les con- trées de l'Europe ; et 1l paroït qu’elle peut supporter les climats irés-froids, puisqu'elle vit en Écosse et en Suide. On a A iploye sa chair en médecine. M. Cetti a fait mention d’un serpent de Sardaigne qu’on y nomme zageur où vipère d’eau: la couleur de ce reptile est cendrée et variée par des taches blanches et noires; il n’a point de venin , et sa longueur ordinaire est de deux pieds. Peut-être appartient-il à l’espèce de la couleuvre à collier, qui auroit subi, d'une manière plus où moins marquée, FN ue du dithät de la Sardaigne, plus chaud que celui de nos contrées. RAA AA A AA AU EU UV AA VAR A EMA MS LA LISSE. f Csrre couleuvre a beaucoup de rapports, par sa conformation et par sa grandeur, avec le serpent à collier ; elle est, comme ce dernier reptile, très-commune dans plusieurs contrées de l'Eu- rope, et particulierement anx envir ons de Vienne en Autriche, où elle a été très-bien décrite et observée avec soin par M. Lau- rent. Elle se trouve aussi dans quelques provinces septentrio- nales de France, et nous en avons vu un individu dans la col- leclion de M. d’Antic : mais comme le commencement de notre article sur la nomenclature des serpens étoit déjà imprimé lorsque nous avons su que la lisse n'étoit pas étrangère à nos contrées, nous ne l'avons pas comprise parmi les serpens de France, dont nous avons rapporté les noms dans ce même ar- ticle relatif à la nomenclature des reptiles. Les habitans de la campagne ont souvent confondu la lisse avec la couleuvre à collier, ou ne l'ont regardée que comme une variété de celte 1 L'on peut voir particulièrement à ce sujet , dans les NMémoÿires des curieux de la Nature , une observation très-détaillée du docteur Fromman , médecin de Franconie, et d’après laquelle on pourroit penser que, dans certaines circon- stances, 11 seroit difficile de faire sortir le serpent par la bouche, sans risquer de faire étouffer celui qui l’auxroit avalé. DE LA LISSE. 477. dernière; et leur opinion a pu être fondée sur ce qu’on les a vues quelquefois accouplées ensemble. Elles forment cependant deux différentes espèces, et il est aisé de distinguer l’une de l'autre par la forme des écailles qu’elles ont sur le dos. Celles du serpent à collier sont relevées par une arête, ainsi que nous l'avons dit, au lieu que celles de la couleuvre dont il est ici question sont très-unies , et c'est de là que nous avons tiré le nom de lisse que nous avons cru devoir lui donner. Le sommet de la tête de cette couleuvre est garni de neuf grandes écailles très-luisantes et très-polies , disposées sur quatre rangs , comme celles que l’on voit sur la tête de la conleuvre à collier et de la couleuvre verte et jaune. Ses yeux sont couleur de feu, et placés au milieu d’une bande tres-brune qui s’é- tend depuis le coin de la bouche jusqu'aux narines ; les écailles qui couvrent les mâchoires sont bleuâtres. On voit sur le derrière de la tête deux taches assez grandes d’un jaune un peu foncé; et depuis cet endroit jusqu’à l'extrémité de la queue, rè- gnent des taches plus petites disposées sur deux rangs, et placées de manière que celles d’une rangée correspondent aux inter- valles qui séparent les taches de l’autre rang. Le fond de la cou- leur du dos est bleuâtre, mêlé de roux vers les côtés du corps, où l’on remarque aussi quelques taches. Les plaques qui revêtent le dessous du corps et de la queue sont très-polies , très - lui- santes, un peu transparentes, blanchätres, et présentent des taches rousses , ordinairement d'autant plus grandes qu’elles sont plus près de l'anus ; et les jeunes individus ont quelquefois le dessous du corps et la queue d’un roux très-vif, qui approche au rouge. La lisse paroît aimer les endroits humides; on la trouve com- munément dans les vallons ombragés. Il est quelquefois aisé de l'irriter , lorsqu'elle est dans l'état sauvage : mais , en la prenant jeune, on parvient aisément à la rendre très-douce et très- familière ; et l'on est d'autant moins fâché de la voir dans les maisons, qu’elle ne répand point de mauvaise odeur sensible , au moins dans les contrées un peu froides. Elle n'a point de crochets mobiles ; elle ne contient aucun venin, et M. Laurent r Les grandes plaques sont communément au nombre de cent soixante-dix« hait, et les paires de petites plaques au nombre de quarante-six, 878 HISTOIRE NATURELLE s'en est assuré en éprouvant les effets de sa morsure sur des chiens, des chats et des'pigeons. La lisse se trouve non-seulement en Europe, mais dans les Indes occidentales et dans les grandes Indes, d’où un individu de cette espèce a été envoyé pour le Cabinet du Roi. M. Laurent regarde, avec raison , comme une variété de cette espèce , une couleuvre dont Seba a donné la figure (tome I, pl. 52, fig. 4), et qui en différoit un peu par la couleur rouge du dos, en suppo- sant que cette teinte ne fût pas un effet de l’esprit- de - vin sur l'individu décrit par Seba. Nous aurions regardé aussi comme une couleuvre lisse, le serpent dont Gronovius a parlé? (n. 22), que Seba a fait représenter (iome IT, pl. 33, fig. 1), et qui a de très-grands rapports avec ce reptile, si M. Laurent ,qui a observé la lisse vivante, n’avoit dit expressément qu’elle éloit très-diffé- rente de ce serpent de Gronovius. M. Cetti a fait mention d’une couleuvr e de Sardaigne , appelée vipera di secco , vipère de terre. Elle inspire une grande frayeur aux habitans de la campagne , quoiqu’elle ne soit pas venimeuse; elle n’a point de crochets mobiles ; sa longueur est de plus detrente pouces ; le dessous de son corps est noirâtre, et le dessus tacheté de noir, comme le dos de la vipère commune, dit M. Cetti : peut- être ce serpent est-il une variété de la couleuvre lisse. 424142324503 1111012130 0323339447 13131%30 400200 3n4100304314135521204431420213043133112%14n%3h844 322%) LA QUATRE-RAIES. a ELLELELaLLcLLc Nous donnons ce nom à une couleuvre envoyée de Provence au Cabinet du Roi, et dont le dessus du corps, plus ou moins blan- châtre ou fauve, présente quatre raies foncées quien parcourent toute la longueur. Les deux raies extérieures se prolongent jusqu'au dessus des yeux, derrière lesquels elles forment une espèce de tache noire très-allongée; elles s'étendent ensuite jus- qu'au - dessus du museau, où elles se réunissent. Le dessus de la iête est recouvert de neuf grandes écailles disposées sur quatre rangs, ainsi que dans la couleuvre à collier et dans la ? Ce serpent décrit par Gronovius avoit çent soixante-quatorze grandes plaques et soixante paires de petites. DU SERPENT D'ESCULAPE. 479 verte et jaune. Les écailles du dos sont relevées par une arête ; celles qui garnissent les côtés du corps sont unies. L'individu de cette espèce envoyé au Cabinet du Roi avoit deux cent dix-huit grandes plaques, et soixante-treize paires de petites’. Sa lon- gueur totale étoit de trois pieds neuf pouces, et celle de sa queue de huit pouces six lignes. Nous ignorons quelles sont les habitudes de la quatre - raiés ; mais comme sa conformation ressemble beaucoup à celle de la couleuvre verte et jaune, et qu'elles habitent le mème climat, leurs mamières de vivre doivent être très-analogues. RARAAAARAAARAA IAE VV RAA RAA BALE A AAA RAR RAA AAA AAA AR AA AVR AA LE SERPENT DESCULAPE. (C nom a été donné à plusieurs espècés de serpens, tant par les voyageurs que par les naturalistes; 1l a été attribué à des ser- pens d'Europe et à des serpens d'Amérique : mais nous ne le con- servons à aucune autre espèce qu'à celle qui se trouve aux environs de Rome, et qui paroît être en possession , depuis plus de dix- huit siècles , de cette dénomination de serpent d’ Esculape, comme s1 l'innocence des habitudes et la douceur de ce reptile l’avoient fait choisir de préférence pour le symbole de la divinité bienfai- sante, très-souvent désignée , ainsi que nous l'avons dit, par l’em- blème du serpent *. Nous ne donnerons donc ce nom de serpens£ d Esculape, n1 à la couleuvre que M. Linné a appelée ainsi , ni à plusieurs autres espèces que Seba a nommées de même; er nous croyons d'autant plus que la description que nous allons faire concerne le serpent d’Esculape des anciens Romains, que l’indi- vidu qui en a été le sujet a été envoyé des environs de Rome au Cabinet du Roi. La tête de ce serpent est assez grosse en proportion du corps; le dessus en est garni de neuf grandes écailles , disposées sur qua- tre rangs, comme dans la verte et jaune. Celles qui couvrent le dos sont ovales et relevées par une arête ; mais celles qui revêtent les côtés sont unies.gLa couleur générale du dessus du corps est + On voyoit, entre l’anus et les grandes plaques, deux paires de petites. 2 Discours sur la nature des serpens. 480 HISTOIRE NATURELLE d'un roux plus ou moins clair; et l’on voit, de chaque côté du dos, une bande longitudinale obscure et presque noire, surtout vers le ventre. Les écailles qui touchent les grandes plaques du dessus du corps sont blanches, et la moitié de ces écailles, la plus voisine de ces grandes plaques, est bordée de noir ; ce qui forme, de chaque côté du ventre, une rangée de petits triangles blan- châtres. Nous en avons compté cent soixante-quinze grandes et soixante-quatre paires de petites : les unes et les autres sont blan- châtres, et tachetées d’une couleur foncée. La longueur de la queue étoit de neuf pouces trois lignes dans l'individu ‘qui fait partie de la Collection du Roi, et la longueur totale, de trois pieds dix pouces. Ce serpent , qui a de grands rapports, ainsi qu’on peut le voir, avec la couleuvre verte et jaune, la couleuvre à collier, la lisse et la quatre-raies , est aussi doux, et peut-être même maturelle- ment plus familier, que ces quatre couleuvres. Il se trouve dans presque toutes les régions chaudes où tempérées de l’Europe, en Espagne , en Italie, et particulièrement aux environs de Rome. Non-seulement il se laisse caresser par les enfans et manier par des charlatans, qui s’en servent pour s’'attribuer, aux yeux du peuple, un pouvoir merveilleux sur les animaux les plus funes- tes, mais il se plaît dans les lieux habités; il s’introduit dans les maisons, même quelquefois 1! se glisse innocemment jusque dans les lits. Ses autres habitudes doivent ressembler beaucoup à celles de la couleuvre commune et de la couleuvre à collier. M. de Faujas de Saint-Fond a eu la bonté de me donner une dépouille de serpent trouvée dans une de ses terres, auprès de Montelimart en Dauphiné : comme elle est très-entière , et qu'il est extrêmement rare d’en avoir d'aussi bien conservées, je l'ai examinée avec soin, et avec d'autant plus d'attention, qu’elle dé- montre d’une maniere incontestable la manière dont se dépouille le serpent auquel elle a appartenu ; et qu'après avoir comparé les diverses observations recueillies au sujet du dépouillement des reptiles, on peut croire que tous les serpens se dépouillent à peu près de la même manière. J'ai d'abord cherché de quelle espèce étoit le serpent dont cette dépouille avoit fait partie. Il étoit évi- demment du genre des couleuvres. J’a1 compté les grandes et les petites plaques ; jai trouvé cent sorxante-seize grandes plaques, etquatre-vingt-neuf paires de petites. La couleuvre verte et jaune ayant ordinairement deux cent six grandes plaques, et la cou- DU SERPENT DESCULAPE. 81 leuvre à quatre raies enayantdeux cent dix-huit, j'ai cru nedevoir pas leur rapporter le serpent dont j'avois la dépouille sousles yeux, d'autant plus que la quatre-raies a deux paires de petites plaques entre les grandes plaques et l'anus, et que sur la dépouille on ne voit, dans cet endroit, qu'une paire de petites plaques. La lisse et la couleuvre à collier m'ont paru aussi avoir trop peu de rap- ports de conformation et de grandeur avec le serpent dont j'exa- minois la dépouille, pour être de la même espèce *, Ainsi, parmi les diverses couleuvres observées en France, ce n’est qu’à celle d'Esculape que j'ai cru devoir rapporter ce serpent. Il se rappro- che en effet beaucoup de cette couleuvre d'Escuiape , par le nom- bre des grandes et des petites plaques, par la forme des écailles” qui garnissent le dos, les côtés du corps, le sommet de la tête et les mâchoires, par les proportions des diverses parües, et enfin par la grandeur , la dépouille que M. de Faujas de Saint-Fond m'a procurée, ayant quatre pieds cinq pouces de longueur totale, et un pied quatre lignes depuis l'anus jusqu’à Fextrémité de la queue. Je n’ai pu juger de la ressemblance ou de la difiérence des couleurs de ces deux serpens, la dépouille étant très-mince, sè- che, transparente, et entièrement décolorée. Quoi qu'il en soit, l'objet intéressant n’est pas de savoir à quel reptile a appartenu ia dépouille trouvée dans la terre de Saint-Fond , mais de prouver, par celte dépouille, la manière dont le serpent a dû quitter sa vicille peau. Cette dépouille, quoique entière, est tournée à l'envers d’un bout à l’autre ; elle présente le côté qui étoit l’intérieur lorsqu'elle faisoit partie de l'animal. Le reptile a dû commencer de s’en débarrasser par la tête, n'y ayant pas d'autre ouverture que fa gueule par où il ait pu sortir de cette espèce de sac. Lorsque le serpent exécute ete opération , les écailles qui recouvrent les mâchoires sont les premières qui se retournent en se détachant du palais et en de- meurant toujours tres-unies avec les écailles du dessus et du des- sous de la tète. Ces dernières se retournent ensuite jusqu'aux coins de la gueule, et on pourroit voir alors la iète du serpent, depuis le museau jusque derrière les yeux, revêtue d’une peau nouvelle, et faisant effort pour continuer de se dégager de l'espèce cle four- et 1 Nous avons vu que la couleuvre à collier a ordinairement cent soixante-dix grandes plaques et soixante paires de petites , et que la lisse a quarante-six paires se petites plaques, et cent soixante-dix-buit grandes plaques ou ét ailles. nr Lacepède. 1. 34 482 HISTOIRE NATURELLE reau dans lequel elle est encore un peu renfermée. Cé fouireait continue de se retourner comme un gant, de telle manière que, pendant que la véritable tête de l'animal s'avance dans un sens pour s'en débarrasser, le museau de la vieille peau, qui est tou- jours bien entière, s'avance , pour aiñsi dire, vers la queue, pour que celle vieille peau achève dese retourner. Les yeux se dépouil- lent comme le reste du corps ; la cornée se détache en entier, ainsi que les paupières de nature écaïlleuse, qui l'entourent, et elle conserve sa forme dans la dépouille desséchée, où elle présente, à l'extérieur, son côté concave, attendu que cette dèpouille n’est que la peau retournée. Les écailles s’enlèvent en entier avec la parie de l'épiderme à laquelle elles étoient attachées. Get épi- derme forme une sorte de cadre autour de chaque écaille , ainsi qu'autour de chaque plaque, grande ou petite. Ce cadre ne suit pas précisément le contour de chaque écaille ou de chaque plaque; mais 1] fait le tour de la partie de la plaque on de l'écaille qui te noit à la peau et qui ne pouvoit pas s’en séparer dans les divers mouvemens de l'animal. Ces différens cadres, qui se touchent, forment une sorte de réseau moins transparent que les écailles, qui paroissent en remplir les intervalles comme autant de facettes et de lames presque diaphanes. Le serpent, en se retournant en différens sens, et en se frottant contre le terrain qu’il parcourt, ainsi que contre les divers corps qu'il rencontre , achève de se dé- barrasser de sa vieille peau, qui continue de se retourner. Le mu- seau de cette vieille peau dépasse bienlôt l'extrémité de la queue dans le sens opposé à celui dans lequel s’avance le serpent , de telle sorte que , pendant que le reptile, revêtu d’une peau et d’é- cailles nouvelles, sort de son fourreau qui se replie en arrière, ce fourreau paroît comme un autre reptile aui engloutiroit le serpent, et dans la gueule duquel on verroit disparaitre l’extré- mité de sa queue. Vers la fin de l'opération, le serpent et la dé- pouille , tournés en sens contraire , ne tiennent plus Pun à l'autre que par la dernière écaille du bout de la queue, qui se détache aussi, mais sans se retourner *. On verra aisément. que cette ma- nière de quitter la vieille peau a beaucoup dé rapports avec celle dont se dépouillent les salamandres à queue plate *. 1 Nous avons déposé au Cabinet du Roi la dépouille trouvée dans la terre de M. de Faujas. 2 Article des salamandres à queue plate, DU DEMI-COLLIER. 483 RAI VAR à 2 AAA AAA AA VUE RAA VU VMS AAA LR AAA VAR AAA AMV ES LA VIOLETTE. en N ous donnons ce nom à une espèce de couleuvre dont un indi- vidu fait partie de la collection du Roï. Ce serpent n’est point venimeux; ses mâchoires sont garnies d’un double rang de petiies dents immobiles, et ne présentent point de crochets mobiles et creux. fl a le sommet de la tête garni de neuf grandes écailles pla- cées sur quatre rangs, comme dans la couleuvre verte etjaune; son dos est revêtu d’écailles unies en losange, et d’un violet plus ou moins foncé; el le dessous de son corps est blanchâtre, vec des taches violettes irrégulières, assez grandes et placées alterna- tivement à droite et à gauche. Nous avous compté cent quarante- trois grandes plaques, et vingt-cinq paires de petites. L'individu que nous avons mesuré avoit deux pouces trois lignes depuis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue , et si longueur totale étoit d’un pied cinq pouces trois lignes. ARR ELU METRE LEUR RE ES LE DEMI-COLLIER. Ox conserve au Cabinet du Roi un individu de cetteespèce, qui y a été envoyé du Japon sous le nom de tokura. Il a un pied sept pouces de longueur totale, et quatre pouces dix lignes depuis l'anus jusqu'à l'extrémité de la queue. Îl n’est point venimeux et n'a point de crochets mobiles. Le sommet de sa tête est garni de neuf grandés écailles qui forment quatre rangs : celles du dos sont en losange et relevées par une arête. Nous avons compté cent soixante-dix grandes plaques , et quatre-vingt-cing paires de petites *. Les couleurs du serpent demi-collier sont très-agréables : on voit sur son dos, dont la couleur générale est brune, de petites TUTO Te — "EE 2 L’individu décrit par M. Linné avoit cent Soixante-quatre gr andes plaques; ét quatre-vingt-deux paires de petites. 484 HISTOIRE NATURELLE bandes transversales blanchâtres et bordées d’une petite raie plus foncée que le fond ; le dessus de sa tête est blanc, bordé de brun, et présente trois taches brunes et allongées : mais ce qui sert sur- tout à le faire distinguer, ce sont trois taches rondes et blanches placées sur son cou, et qui forment comme un demi-collier, Cette couleuvre se trouve non-seulement au Japon, mais en- core en Amerique. PAU VU ANR AN VU UV VV AU UV RAA AU VV AN AR VV AV AU AU UV LU VER UE VU UV MAUURASE LE LUTRIX. ss Lx couleurs de ce serpent sont peu nombreuses, mais forment un assortiment aussi agréable etaussi brillant que simple; le des- sus et le dessous de son corps sont jaunes, et ses nuances ressor- tent d'autant mieux, qu'il a les côtés bleuâtres. Cette couleuvre, que M. Linné a fait connoître, se trouve dans les Indes ; l'individu qu'il a décrit avoit cent trente-quatre gran- des plaques, et vingt-sept paires de petites. Nous ignorons quelles sont ses habitudes naturelles ; M. Linné ne la pas regardé comme venimeux. AAA UV AAA VU UV VU AMAR ANA A VU UV RAA A UV VU M EU VMS LE BALI. à an ce que l’on connoît des mœurs de ce beau serpent, au- quel nous conservons, avec M. Daubenton, la première partie du nom trop dur et composé ( bali-salan-boeki£ ) qu'il porte dans son pays natal, c’est qu'il vit dans les contrées les plus chau- desde l'Asie, et particulièrement dans l'ile de Fernate. Les écailles qui revêient le dessus de son corps sont en losanges umies , d’un jaune très-pâle, et blanches à leur extrémité. Des deux côtés du corps règne une bande longitudinale dont on a comparé la cou- leur au rouge du corail. L'extrémité des écailles qui forment celte bande est également bordée de blanc. Les grandes plaques qui garnissent le dessous du corps sont blanchâtres; les deux bouis de chacune présentent un point jaune plus ou moiïns foncé; et 16 r 4 Tome 1, 66 [ commune ..... Page 4 — Couleuvre 1 La P mx relre 7 3 LES RATES re a coll . La Couleux 9 4 s ME Ne Dé TBÈUSE RDA TON DE LA COULEUVRE DES DAMES. 85 comme les écailles qui les touchent sont blanches et marquées chacune d’un point jaunâtre, tout le dessous du corps du ser- pent présente quatre cordons longitudinaux de points plus ow moins jaunes, qui se marient d’une manière très-agréable avec la blancheur du ventre, et servent à distinguer le bali d'avec les autres serpens. Les petites plaques qui revêtent le dessous de la queue sont blanches et ont chacune une tache jaune; ce qui forme deux files de points jaunâtres semblables à ceux que lon voit sur le ventre. Cette espèce devient assez grande, et l'individu conservé au Ca- binet du Roi, et sur lequel nous avons fait notre description , avoit six pieds six pouces de longueur. Le bali a ordinairement cent trente-une grandes plaques sous je corps, et quarante-six paires de petites plaques sous la queue *. PRE VE LR VU REA AAA AR RAA MUR EVA RA AURA RAR ARRIVA AAA AA RAR AURA RAA AIO LA COULEUVRE DES DAMES. Mo un des plus jolis et des plus doux serpens. Sa petitesse, ses proportions, plus sveltes encore que celles de la plupart des autres espèces, ses mouvemens agiles, quoique modérés, ajoutent au plaisir avec lequel on considère le mélange de ses belles teintes. Il ne présente cependant que deux couleurs, un beau noir et un blanc assez pur; mais elles sont si agréablement contrastées ou réunies , et si animées par le luisant des écailles , que cette parure élégante et simple attire l'œil et charme d'autant plus les regards, qu’elle n'éblouit pas comme des couleurs plus riches et plus écla- tantes. Des anneaux noirs traversent le dessus du corps et de la queue, et en interrompent la blancheur. Ces bandes transver- sales s'étendent jusqu'aux plaques blanches qui revêlent le des- sous du ventre ; leur largeur diminue à mesure qu'elles sont plus près du dessous du corps, etla plupartvontse réunir sousle ventre à une raie noirâtre et longitudinale qui occupe le milieu des grandes plaques. Cette raie, ainsi que les bandes transversales , sont irré- gulières et quelquefois un peu festonnées; maïs celte irrégularité, bien loin de diminuer l'élégance de la parure de la couleuvre des mr ET Le sommet de la tête est garni de nenf écailles disposées sur quatre rangs. ps 486 HISTOIRE NATURELLE dames, en augmente la variété. Le dessus de la petite, tête de ce serpent présente un mélange gracieux de noir et de blanc, où cependant le noir domine. Les yeux sont très-petits, mais ani- més par la couleur noirâtre qui les entoure. Comme plusieurs autres serpens , celui des dames est très-fami- Lier ; il ne s'enfuit pas, et même il n’éprouve aucune crainte lors- qu'on l'approche : bien plus , il semble que, très-sensible à la frat- cheur plus ou moins grande qu’il éprouve quelquefois, quoiqu'il habite des climats très-chauds , il recherche des secours qui l'en garantissent; et sa petitesse, son peu de force, l'agrément de ses cou- leurs , la douceur de ses monvemens, l'innocence de ses habitudes, inspirentaux Indiens un tel intérêt pour ce délicat animal , que le sexe le plus timide, bien loin d’en avoir peur, le prend dans ses mains , le soigne , le caresse. Les dames de la côte de Malabar, où il est très-commun, ainsi que dans la plupart des autres con- irées des grandes Indes, cherchent à réchauffer ce petit animal lorsqu'il paroît languir et qu’il est exposé à une trop grande frai- cheur, produite par la saison des pluies, les orages ou d’autres accidens de l'atmosphère; elles le mettent dans leur sein, elles l'y: conservent sans crainte et même avec plaisir, et le petit serpent, à qui ious ces soins paroissent plaire, ne leur rendant jamais que aresse pour caresse, justifie Leur goût pour cet animal paisible. Elles le tournent et retournent également dans le temps des cha- Icurs, pour en recevoir à leur tour une sorte de service et être rafraichies par le contact de ses écailles, trop polies pour n'être pas fraîches, Lorsque , dans nos climats tempérés, la beauté veut produire ur effet contraire et réchauffer ses membres délicats, elle a quelquefois recours à des animaux plus sensibles, et com- munément plus fidèles, qui, par une suite de leur conformation plus beureuse, expriment avec plus de vivacité un attachement qu'ils éprouvent avec plus de force : mais lorsqu’elle désire, comme. dans l'Inde, de diminuer une chaleur incommode par Pattouche- ment de quelque corps froid, bien loin de se servir d'êtres ani- més, qui, par leurs caresses répétées, ajouteroient au plaisir qu’elle a de tempérer les effets d'une chaleur excessive, elle ne recher- che que des matières brutes et insensibles; elle n’emploie que de petits blocs de marbre, des boules de cristal ou des plaques mé- talliques; elle ne peut voir qu'avec effroi nos doux et paisibles serpens, tandis que, dans les contrées équatoriales des grandes Indes, où vivent des serpens énormes, terribles par leur forçe | DE LA BLANCHE. 487 ou funestes par leur poison, la crainte qu'inspirent ces reptiles dangereux n’est Jamais produite par les serpens innocess ct foi= bles, tels que la couleuvre des dames AAA AA VA AAAAAARAAA AU AAA AAA Su 1620) LA JOUFFLUE. M. Linné a fait connoître cette couleuvre, qui se trouve dans les grandes Indes. Le dos de ce serpent est raux, et présente des bandes blanches disposées transversalement. 4 tête est blanche comme les bandes transversales ; mais on voit sur le sommet deux petites taches rousses, et sur le museau une tache triangu- laire et de la même couleur. Il a ordinairement cent sept g srandes plaques et soixante-douze paires de petites. NAYU VULANNY AAA ANA NV AVR AVS AA SARA VER LB LA BLANCHE. eee re ms OO pourroit , au premier coup d'œil, confondre cette conlenvre avec la très-blanche, dont nous avons déjà parlé : toutes les deux sont ordinairement d’un très-beau blanc, qui n'est relevé par aucune tache ; mais, pour peu qu ‘on les examine avec attentio: à on voit qu’elles différent beaucoup lune de Fautre. Ea blaache n’a que cent soixante-dix grandes plaques et vingt paires de pe- ütes, au lieu que la très-blanche a on lnasronon soixante paires de petites et deux cent neuf grandes plaques. Nous avons répété, à la vérité, très-souvent que le nombre des plaq ues, grandes où petites, n'étoit presque jamais constant; mais nous n'avons vu , dans aucune espèce de serpent , ce nombre varier de cent soi- xante-dix à deux cent neuf pour les grandes lames, et en même temps de vingt à soixante pour les petites. D'ailleurs la conlenvre lanche n’est pas venimeuse, et ses mächoires ne sont pas gar unies de crochets mobiles, comme celles de la très- blanche, qui con- oo rm Z Cette dernière espècea, suivant M. Linuë, cent dix-huit grandes plaques et soixante paires de petites, 488 HISTOIRE NATURELLE tent un venin très-aciif. Ainsi leurs propriétés sont encore plus différentes que leurs conformations ; ces propriétés sont même trop dissemblables pour que leurs habitudes naturelles soient les mêmés ; et en ouire, c’est en Afrique qu’on trouve la très-blanche, et la couleuvre blanche habite les grandes Indes. On a donc été très-fondé à les regarder comme appartenant à deux espèces très- distinctes. RAR AB RAA AA AVR VAN AAA AAA AA AA NRA AN AA AVE AA APR AVES LAVE AAA AVR BA UA AVR VA ARR LR AAA VU URL A LE TYPHIE, Ge ns en Ce serpent se trouve dans les grandes Indes, et c’est M. Linné qui l'a fait connoitre. Suivant ce naturaliste, cette couleuvre est bleuêtre et a cent quarante grandes pes et cinquante-trois paires de pelites. L'on conserve au Cabinet du Roi un serpent dont le dessus du corps est d’un vert lres-foncé , et ne présente aucune tache , non plus que le dessus du corps du typhie. Comme il a cent quarante- une grandes plaques et cinquante paires de petites, et que par là il se rapproche beaucoup de cette dernière couleuvre, il se pour- roit d'autant plus qu'il fût de la même espèce, que la couleur verte de l'individu de la collection du Roi, ou la couleur bleue de celui qu'a décrit M. Linné, sont peut-être l’eflet de l’esprit- de - vin dans lequel les deux serpens ont été conservés. Nous croyons donc ne pouvoir mieux placer que dans cet article la description de cette couleuvre, d’un vert très-foncé, qui fait partie de ia collection de sa majesté. Sa longueur totale est d’un pied sept pouces six lignes, et la longueur de sa queue, de trois pou- ces diliones. Neuf écailles, placées sur quatre rangs, garnissent le sommet de sa tête; elie n’a point de crochets mobiles; les écailles qui revétent son dos sont ovales et relevées par une arête. Le dessous du corps est jaunâtre , et chaque grande plaque présente deux taches noirâtres ; ce qui forme deux espèces de raies longi- tudinales : la plaque la plus voisine du dessous du museau n'offre point de tache , et on n’en voit qu’une sur les deux plaques qui la suivent. 11 n’y a sous la queue qu’une rangée de ces taches not- râires. DE LA BANDE-NOIRE. 489 AAA AAA AA AAA BV UV UV MU UV AV AA VU VU VU MU VU AU VU VU a LE RÉGINE. C'rsr un serpent des grandes Indes, dont M. Linné a donné la description. Le dessus du corps de cette couleuvre est d’un brun plus ou moins foncé, et le dessous est varié de blanc et de noir. Elle a cent trente-sept grandes plaques et soixante-dix paires de petites. On sait qu’elle ne contient pas de venin; mais on ignore quelles sont ses habitudes naturelles. LA BANDE-NOIRE. med Css une des couleuvres auxquelles plusieurs naturalistes ont donné le nom de serpent d'Esculape , que nous avons conservé uniquement à une espèce des environs de Rome. Elle n’est point venimeuse el ne fait aucun mal à ceux qui la manient. On voit entre ses deux yeux une bande noire assez marquée, et placée au-dessus de neuf grandes écailles qui revêtent le sommet de sa tête , et y sont disposées sur quatre rangs, comme dans la cou- leuvre commune verte et jaune. Le dos est garni d’écailles ovales et unies. Le fond de sa couleur est pâle, et il présente plusieurs bandes transversales noires, assez larges, et dont quelques-unes s'étendent sur le ventre et font le tour du corps. La bande-noire a ordinairement cent quatre-vingls grandes plaques et quarante- trois ipaires de petites. Sa longueur totale est de dix-huit pouces et celle de sa queue, de trois. On trouve ce serpent dans les In- des, et, suivant M, l'abbé Molina, il est très-commun dans le Chili, où il n’a quelquefois que cent soixante-seize grandes pla- ques et quarante-deux paires de petites, et où il parvient à la lon- gueur de trois pieds. 490 HISTOIRE NATURELLE PAR LAARAAR VAARAA LAVE UT UE MUR EMA VAARAARA LUE UML VUE VIA LE AVR RARE VUE L'AGILE. ne Ox n'a qu'a jeter les yeux sur cette couleuvre, dont le corps est très-menu relativement à sa longueur, pour voir qu’elle doit mériter le nom d’agtle : ses proportions très-déliées annoncent en effet la vitesse et la légèreté de ses mouvemens. L'individu que nous avons décrit, el qui fait partie de la collection de sa majesté , a un pied huit pouces de longueur, depuis le bout du museau jusqu'à l'extrémité de la queue , qui est longue de quatre pouces irois lignes ; sa iète est couverte de neuf grandes ee. disposées sur quatre rangs ; ses mâchoires ne sont point armées de crochets mobiles ; les yeux sont gros, et d'un œil à l'autre s'étend une petite bande brune d’autant plus aisée à distinguer, que le reste du dessus de la tête est d’un blanc assez éclatant. Les écailles qui revêtent le dos de cette couleuvre sont en losange et unies. Tout le dessus du corps présente des bandes transversales irrégulières , alternativement blanches et brunes, et le dessous du corps est blanchätre *. Suivant M. Laurent , les bandes brunes que l’on voit sur le dos de la couleuvre agile sont poinlillées de noir. Ce serpent doit se nourrir principalement de chenilles; car c'est sous le nom de mangeur de chenilles qu'il a été envoyé au Cabinet da Roi. On le trouve dans l'ile de Ceylan. RAA SRARAAAER VUE AL UE VOA TE VALUE VAE MAUVE AURAIENT LE PADÈRE. DesRase ne. Lrs couleurs de ce serpent présentent une distribution assez remarquable : le dessus de son corps est ‘blanc, et sur ce fond éclatant l'on voit plusieurs taches brunes disposées Le long du r Nous avons compté dans un individu ceut soixante-quatorze grandes plaques et soisante paires de petites ; mais ordinairement l’agile n’a que cinquante paires de petites plaques, et a cent quatre-vingt-quatre grandes plaques ou lames, DE LA QUEUE-PLATE. &oi dos, placées par paires, et réunies par une petite ligne. Les côtés du corps offrent un égal nombre de taches isolées. On trouve cette couleuvre dans les grandes Indes, et elle a cent quatre-vingt- dix-huit grandes plaques et cinquante-six paires de petites. RAAMVIA VILA AARAAAAMAAAAAMIAUE LVIAAS AA AVES DL VR RL EE IULA VE EU RASE LE GRISON. 4 VAT couleuvre est blanche : mais son dos présente des bandes iransversales roussâtres ; ce qui, à une petite distance, doit la faire paroître d’un gris plus ou moins foncé : aussi avons-nous adopté le nom de grison qui lui a été donné par M. Daubenton. On voit sur les côtés de ce serpent deux points d’un blanc de neige. Il a cent quaire-vingt-huit grandes plaques et soïxante- dix paires de petites, et n’a encore été observé que dans les Indes. PARA VA RAI AA AAA RAR LA VAUT A ARR PUR AA VAANAALLAAAT AAA UV LA QUEUE-PLATE, | ee est très-aisé de distinguer ceite couleuvre d’avec les autres serpens du même genre que l’on a observés jusqu’à présent. Sa queue, au lieu d’être ronde comme celle de la plupart des autres couleuvres , est comprimée par les côtés, et tellement aplatie, surtout vers son extrémité, que l'on pourroit la comparer à une lame verticale ; et le bout de cette qneue si comprimée est ter- miné par deux grandes écailles arrondies et appliquées l’une contre l’autre dans le sens de l’aplatissement. Lorsque la cou- leuvre se meut, sa queue ne touche à terre que par une espèce de tranchant occupé par les paires de petites plaques, qui sont très-peu sensibles et ne diffèrent guère en grandeur des écailles du dos. Cette conformation doit faire présumer que la couleuvre se sert peu de sa queue pour ramper, et cette partie paroît lui être bien plus utile pour frapper à droite ou à gauche, ou pour se diriger en nageant et agir sur l’eau comme par une espèce d'aviron. On pourroit donc croire que ce serpent vit beaucoup plus au milieu des eaux que dans les endroits secs ; mais on ne F 402 HISTOIRE NATURELLE connoît pomt ses habitudes naturelles , et l’on sait seulement qu'il se trouve dans les grandes Indes. I! y a quarante-deux paires de petites plaques , placées sur l’es- pèce de tranchant que présente sa queue ; ainsi que nous venons de le dire, et deux cent vingt-six grandes plaques garnissent le dessous de son ventre. Sa tête est couverte de neuf grandes écailles, disposées sur quatre rangs. Nous avons cru apercevoir deux crochets mobiles à la mâchoire supérieure , et dès-lors nous aurions placé la queue-plate parmi les couleuvres vénéneuses ; mais l'individu que nous avons décrit n'étoit pas assez bien con- servé dans toutes ses parties pour que nous n’ayons pas préféré de suivre l'opinion de M. Linné, qui a très-bien connu la couleuvre dont 1l s'agit dans cet article. Nous laisserons donc la queue-plate parmi les couleuvres qui n’ont pas de venin, jusqu’à ce que de nouvelles observations aient confirmé nos doutes relativement à la forme de ses dents et à Ja nature de ses humeurs. Les écailles du dos de la queue-plate sont rhomboïdales et unies. Le dessous du corps est presque blanc ; le dessus est d’un cendré bleuâtre, et présente de larges bandes, d’une couleur irès-foncée, qui s'étendent jusque sur le ventre , et font le tour du corps. L'individu que nous avons décrit avoit deux pieds de lon- gueur tolale , et sa queue étoit longue de deux pouces neuf lignes. LARAV AARARAAA AU A A AR AU CAVAAN AA NAN AAA AU AU SA AU AV ANR RAR AURA VU LA BLANCHATRE. Crrre couleuvre est blanchâtre, et présente des bandes trans- versales brunes. Elle a deux cent vingt grandes plaques et cin- quante paires de petites. Elle se trouve dans les Indes. On conserve au Cabinet du Roi une couleuvre qui a de très- grands rapports avec la blanchâtre, mais qui cependant a un trop petit nombre de grandes plaques pour que nous puissions assurer qu'elle soit de la même espèce. Elle n’a en eflet que cent quatre-vingl-trois grandes plaques ; le dessous de sa queue est couvert de quatre-vingt-sept paires de petites ; sa têle garnie de neuf grandes écailles ; son dos couvert d’écailles en losange et unies ; sa mâchoire supérieure sans crochets mobiles ; et ses couleurs ressemblent à celles de la blanchâtre *. ! Sa longueur Lotale est d’un pied huit pouces neuf lignes, et celle de sa queue, de cinq pouces neuf lignes. DU TRISCALE. 493 AAA MARRANT AAA AAA NV VE AA RAA VE: VV UM MES LA RUDE. ms Lys écailles qui revêtent le dos de cette couleuvre sont relevées par une arêle , de manière à être un peu rudes au toucher; et de là viennent les divers noms qui lui ont été donnés par les naturalistes. Le dessus de sa tête présente une tache noire qui se sépare en deux dans la partie opposée au museau, et le dessus du corps est comme ondé de noir et de brun. On la trouve dans les Indes, et elle a ordinairement deux cent vingt-huit grandes plaques et quarante-quatre paires de petites. RAA AA AAA AAA AI ARR VV AAA VAS VAS LE TRISCALE. Les couleurs dont brillent à nos yeux les belles fleurs qui déco- rent nos parterres ne sont peut-être ni plus vives ni plus variées que celles qui parent la robe d'un grand nombre de serpens. Voici une de ces couleuvres dont les teintes sont distribuées de la ma- nière la plus agréable. Il paroît qu’elle se trouve dans les Indes orientales et occidentales , et nous allons décrire un individu de cette espèce, conservé au Cabinet du Roi, et qui y a été envoyé d'Amérique. On voit s’'élendre sur son dos, dont la couleur est d'un vert de mer, quatre raies rousses qui doivent paroitre comme dorées lorsque l'animal est en vie et qu’il est exposé aux rayons du soleil. Les quatre raies se réunissent en trois, ensuite en deux, et enfin forment une seule raie qui se prolonge au-dessus de la queue. Cette couleuvre a un pied quatre pouces six lignes de longueur totale ; sa queue est longue de trois pouces dix lignes ; le sommet de sa tête est couvert de neuf grandes écailles, et celles du dos sont ovales et unies: ce qui ajoute à la beauté des cou- leurs que présente cette couleuvre *. er] “ Le triscale a ordinairement cent quatre-vingt-quinre quatie-vingt-six paires de petites, graudes plaques, et 49% HISTOIRE NATURELLE LA GALONNÉE. mes P ARM1 les serpens aussi agréables à voir qu'innocens et mémé familiers , la galonnée doit occuper une place distinguée. Son museau est noirâtre , et au-dessus de sa tête, qui est blanche , on voit une bande noire transversale. Le dessus du corps est noir ; mais il présente un très-grand nombre de bandes transversales blanches, dont les largeurs sont inégales et combinées avec symé- trie : de trois en trois bandes, il y en a une quaire fois aussi large que les deux qui la précèdent, à compter du museau; et de toute cette disposition il résulte un mélange de blanc et de noir d’au- tant plus agréable , que les écailles du dos, étant très-unies , rendent plus vives les couleurs de la galonnée. Ces mêmes écailles du dos sont rhomboïdales. La tête n'est pas plus grosse que le corps; son sommet est garni de neuf grandes lames placées sur quatre rangs. La galonnée a deux cént cinquante grandes plaques et trente-cinq paires de petites. Il paroît que cette couleuvre he parvient qu'à une longueur très-peu considérable , et tout au plus d’un ou deux pieds. Elle habite en Asie ; et comme elle est très-douce, on la voit sans peine dans les maisons , où elle peut plaire par lagilité de ses mouvemens, ainsi que par l’assortiment de ses couleurs, et où elle doit détruire beaucoup d'insectes, toujours très-incommodes dans les pays chauds. RAA AAA AE RAA AAA VU L’ALIDR E. Voici encore une preuve bien sensible de ce que fous avons dit relativement à l'insuffisance d’un seul caractère pour distinguer les diverses éspèces de sernens. L'alidre ressemble, par sa coù- leur, à la couleuvre blanche; elle est, comme cette dernière, d’un blanc trés-éclatant, presque toujours sans tache : mais elle en diffère par le nombre de ses grandes plaques, beaucoup moiris DE LA COULEUVRE DE MINERVE. 4095 &onsidérable que le nombre des grandes plaques de la couleuvre x . x . . . blanche, et par celui des petites plaques, qui est, au contraire, moins grand dans la blanche que dans l'alidre, Ce dernier serpent se trouve dans les Indes, ainsi que la cou- leuvre blanche. L’ANGULEUSE. D de l'Asie que cette couleuvre a été apportée en Europe. Elle n'est point venimeuse et n’a point de crochets mobiles. Le dessus de sa tête est couvert de neuf grandes écailles, disposées sur quatre rangs : celles que l’on voit sur le dos sont ovales, un peu échancrées et relevées par une arête; mais on ne remarque aucune ligne saillante sur celles qui bordent les côtés. La couleur du des- sus du corps est blanchâtre, avec des bandes brunes , noirâtres dans leurs bords, anguleuses et plus larges vers le milieu de la lon- gueur du corps que vers la queue ou vers la tête. Les grandes plaques présentent des laches carrées et disposées alternativement d’un côté et de l’autre; elles sont commmunémeñt au nombre de cent dix-sept, et les paires de petites plaques au nombre de soixante-dix. Les individus de cette espèce que l’on a observés n'avoient guère plus d’un pied de longueur. AA MANIA AAA UV MAIN ES LA COULEUVRE DE MINER VE. Le serpent étant pour les anciens Grecs un des éemblèmes de la prudence, avoit élé consacré à Minerve, qu'ils regardoient comméë la déesse de la sagesse. Les Athéniens avoient gravé son image au tour des autels et des statues de cette divinité, qu’ils avoient chot- * sie pour la protectrice de leur ville. [ls regardèrent la fuite d’uri serpent qui s’'échappa de leur citadelle comine la marque du courroux de la déesse ; et c’est peut-être pour rappeler cette opt- nion religieuse que M. Linné a donné le nom de serpent de NMi- nerve à la couleuvre dont il est question dans cet article. Nous 496 HISTOIRE NATURELLE croyons devoir d'autant plus le lui conserver , qu’un des souve-= nirs les plus agréables et les plus touchans est celui des siècles fa- meux de la Grèce, où la belle Nature et la liberté ont produit tant de grands hommes, et les arts qui les ont immortalisés. Îl est heureux qu'un petil objet , revêtu d’un grand nom, puisse quel- quefois éveiller de grandes idées , et que la vue d’une simple cou- leuvre puisse retracer quelque image de l’ancienne Grèce à ceux qui rencontreront ce foible serpent sur les lointains rivages de l'Inde où il habite. La couleuvre de Minerve est d’une couleur agréable; le dessus de son corps est d’un vert de mer plus ou moins foncé, et le long de son dos règne une bande brune. On voit sur la têle de ce ser- pent trois autres bandes de la même couleur. I a deux cent trente- huit grandes plaques, et quatre-vingt-dix paires de petites, AA AAA AAA AAA AAA AA PAPA AS NRA NRA AAA AA RAA RAA APPART RAA y LA PÉTALAIRE:. Ux individu de cette espèce fait partie de la collection du Roi. Ïi a un pied neuf pouces de longueur totale, et sa queue quatre pouces neuf lignes. Il n’a point de crochets mobiles : neuf grandes écailles couvrent le dessus de sa tête et sont disposées sur quatre rangs ; celles que l’on voit sur le dos sont presque ovales et unies. Ya couleur du dessus du corps est noirâtre, avec des bandes irès- irrégulières, transversales et blanches. On remarque d’autres ban- des blanches et transversales sur les paires de petites plaques, qui sont d’un gris foncé et au nombre de cent cinq. Il y a deux cent onZe grandes plaques blanches et bordées de gris; ce qui forme sous le ventre de petites bandes transversales. Le blanc et le noir qui composent les couleurs principales de la pétalaire sont contrastés et nuancés de manière à rendre sa pa- rure très-agréable. Ce serpent est très-doux , et mème familier ; il s'introduit sans crainte dans les maisons, y passe sa vie sous les toits, et y devient lrès-ulile en y faisant la guerre aux insectes et même aux rals, dont il détruit un grand nombre; il se nourrit aussi de petits otseaux. On le trouve non-seulement en Asie, et ? Apachycoatl, par les Mexicains. DE LA MILIAIRE. kgf particulierement dans l’île d’Amboine, mais encore en Amérique, et surtout au Mexique, où on le nomme apachycoatl*. 2 AAA AAA AAA AMAR AAA AR AAA RAA A RAA AAA AAA AAA AAA AAA LA MINIME. Corre couleuvre d'Asie a quelquefois le dessus du corps d’une seuie teinte, et d’une couleur tannée ou minime plus ou moins foncée ; d’autres fois elle présente sur ce fond des bandes transver- sales noires : mais un de ses caractères distinctifs est d’avoir cha- cune des écailles qui revêtent le dessus de son corps à demi bor- dée de blanc; ce qui fait paroître son dos pointillé de la même cou- leur. Les côtés de la tête sont d’un blanc très-éclatant , avec des ta- ches noires; et le dessous du corps est d’une teinte plus claire que le dessus, et quelquelois tacheté de brun. Telles sont les couleurs que présente la minime, qui parvient quelquefois à une lon- gueur assez considérable. Un individu de cette espèce , conservé au Cabinet du Roiï, a trois pieds deux pouces six lignes de lon- gueur totale, et sa queue un pied. Ses mâchoires ne sont point armées de crochets mobiles ; de grandes écailles couvrent ses 1è- vres. Sa tête est allongée , et le sommet en est garni d’autres écailles plus grandes que celles des lèvres, au nombre de neuf; et dispo- sées sur quatre rangs *. PE NA AR VAS AAA ANA IA RAS AAA AAARAA AIR AAA D LA MILIAIRE. ee | x parure de cette couleuvre est élégante. Le dessus et les côtés du corps sont bruns; mais leur couleur sombre est relevée par r Cette espèce est très-sujette à varier, tant par la distribution de ses couleurs, que par le nombre de ses plaques. M. Linné a compté sur l’individu qu’il a décrit, deux cent douze grandes plaques sous le ventre, et cent deux paires de petites plaques sous la queue; et nous avons vu dans la collection de M. d’Antic une couleuvre pétalaire qui avoit deux cent seize grandesjplaques et cent six paires de petites. 2 Cette espèce a, suivant M. Linné, denx cent dix-sept grandes plaques et cent huit paires de petites; mais ce nombre est assez souvent moins considérable. Lacepide. 1. 35 4.98 HISTOIRE NATURELLE une lache blanche que présente chaque évaille. Le dessous du corps est blanc cumme les taches. On trouve cette couleuvre dans les Indes. Elle a ordinairement cent soixante-deux grandes pla- ques et cinquante-neuf paires de petites. RAA RAA AAA AMAR RAR AA AAA VAR MURALE RAR RAA AR VA AAA AAA AR LD LA RHOMBOÏDALE. Cor dans les Indes que se trouve cette couleuvre. Et qu'on ne soit pas étonné du grand nombre de serpens que lon a observés dans les pays voisins des tropiques : non-seulement ils y éprouvent le degré de chaleur qui paroït convenir le mieux à leur nature, mais les petites espèces y trouvent en abondance les insectes dont elles se nourrissent. L’on diroit que c’est précisément dans ces contrées brûülantes, où pullulent des légions innombrables d’in- sectes et de vers , que la Nature a placé le plus grand nombre de serpens, comimne si elle avoit voulu y réunir tout ce qui détruit ces vers et ces insectes nuisibles ou incommodes,, qui, par leur excessive multiplication, couvriroient bientôt ces terres équalo- riales , en interdiroient l'entrée à l’homme et aux animaux, en dépouilleroient les arbres, en feroient périr les végétaux jusque dans leurs racines , et rendroient ces terres fertiles des déserts sté- riles, où, réduits à se dévorer mutuellement, ils ne laisseroient bientôt que leurs propres débris. Un grand motif se réunit donc à tous ceux dont nous avons déjà parlé, pour que les habitans de ces contrées voisines des tropiques soient bien aïses de voir leurs demeures entourées des serpens qui ne sont pas venimeux. Parmi ces innocentes couleuvres, la rhomboïdale est une de celles que l'on doit rencontrer avec le plus de plaisir; lassortiment de ses couleurs la rend en effet très-agréable à la vue : le dessus de son corps est d’un bieu plus ou moins clair, et présente des taches noires percées dans leur milieu , où l’on voit la couleur bleue du fond , et qui a un peu la forme d’une losange. Ces taches noires se marient très-bien avec le bleu qui les fail ressortir. La rhomboïdale a communément cent cinquante-sept grandes plaques et soixante-dix paires de petites. DU MALPOLEÉ. 49 AAA ANA A A A UT EU A A AE UV AAA AU A A MS LA PALE, EE LA couleur de ce serpent est d’un gris pâle avec un grand nom- ‘bre de points bruns et de taches grises répandues sans ordre ; on voit de chaque côté du corps une ligne noirâtre plus ou moins tendue. En tout, les couleurs de la couleuvre pâle sont très-peu brillantes. Elle n’a point de crochets mobiles. Le dessus de sa tête est recouvert par neuf grandes écailles ; celles du dos sont ovales et unies. Le corps est ordinairement très-menu en comparaison de sa longueur ; et la queue est si déliée, qu'on a peine à comp- ter les petites plaques qui en garnissent le dessous. L’individu dé- crit par M. Linné avoit à peu près un pied et demi de longueur, cent cinquante-cinq grandes plaques et quatre-vingt-seize paires. de petites. C’est dans les Indes qu’on trouve la couleuvre pale. £ RAA AAA VIA UVT LA RAYÉE. ne NARNIA RAA AAA VAE Qoarer raies brunes s'étendent sur le dos de cette couleuvre, se prolongent jusqu'à l'extrémité de la queue, et se détachent d’une maniere très-agréable sur le fond de la couleur qui eg bleuâtre. Le ventre est blanchâtre et recouvert de cent soixante meuf grandes plaques. On compte quatre-vingt-quatre paires de petites plaques sous la queue de ce serpent , qui ne parvient ja= mais à une longueur considérable , et qui se trouve en Asie. ANAAARARARAA AAA A AAA RAA AAA VAR AAA RAA AA RAR RAR AAA AA AAA AAA AA LE MALPOLE. Crrre espèce varie beaucoup, suivant les pays qu’elle habite. Nous allons la décrire d’après un individu conservé au Cabinet du Roi. Le dessus de Ja tête du malpole est couvert de neuf grandes 50 HISTOIRE NATURELLE écailles , et le dos est garni d’écailles ovales et relevées par ure arête. Il a la langue tres-longue et très-déliée ; ce qui doit lui don- ner beaucoup de facilité pour saisir et retenir les insectes dont ik se nourrit. Ses couleurs sont très-belles, et distribuées d’une ma- nière très-agréable ; mais, comme elles sont aisément altérées par l'esprit-de-vin dans lequel on conserve F’animal, il est très-difi- cile d’avoir des dessins exacts du malpole, d'après les individus qui font partie des collections d'histoire naturelle. I] est bleu , et présente un grand nombre de taches noires très-petites, et dis- posées de manière à former des raies longitudinales ; au-dessus des deux dernières plaques qui garnissent le sommet de la tête, à compter du museau, on voit une tache très-blanche, bordée de noir , et placée la moitié sur une de ces deux plaques, et la moi- tié sur l’autre. Le corps du malpole est très-mince en proportion de sa longueur. Ce serpent doit donc pouvoir se tenir avec faci- lité au plus haut des arbres, s’y entortiller autour des branches, s'y suspendre et y poursuivre les petits animaux dont il fait sa proie. Il habite l'Asie , et peut-être l'Afrique et l'Amérique *. RAA AAA AAA I NAANNY AAA AIN LA VIAANN AAA AAA LE MOLURE. Cr une des grandes couleuvres qu’on aït encore observées : et non-seulement le molure se rapproche, par sa longueur, de quelques espèces du genre des boa, dont nous traiterons dans cet euvrage; mais il a beaucoup de rapports avec ces grandes et re- marqua bles espèces par sa conformation , et particulièrement par celie de sa tête. Cette partie du corps du molure est très-large par derrière, moins large vers les yeux, très-allongée, très-arrondie à l'endroit du museau, et peut être comparée, pour sa forme, à la téte d’un chien, aimsi que l’a été celle de plusieurs boa par un grand nombre de naturalistes. Le dessus de cette même partie est garni de neuf srandes écailles, comme dans la couleuvre verte D mm, 1 Le malpole a ordinairement cent soixante grandes plaques et cent paires de petites. La Longueur totale de l'individu :que nous avons décrit étoit d’un pied dix pouces, et celle de sa queue de cinq pouces six lignes. F DE LA DOUBLE-RAIE. 502 et jaune. Le molure n’a point de crochets mobiles et ne contient pas de venin; les écailles qui revêtent son dos sont grandes, ovales et unies. Il n’a ordinairement que deux cent quarante-huit gran- des plaques et cinquante-neuf paires de petites; mais nous avons compté deux cent cinquante-cinq grandes plaques et soixante- cinq paires dé petites au-dessous du corps ou de la queue d'un individu de cette espèce , conservé au Cabinet du Roi. Cet indi- vidu a six pieds de longueur totale, et neuf pouces depuis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue, dont, par conséquent, la lon- gueur n’est qu’un huitième de celle de l'animal entier. Le molureest d’un roux blanchâtre , et présente une rangée lon- gitudinale de grandes taches rousses, bordées de brun ; on voit le long des côtés du corps d’autres taches qui ressemblent plus ou moins à celles de cette rangée longitudinale, | Cette couleuvre se trouve dans les Indes, et sa conformation peut faire présumer que ses habitudes ont beaucoup de rapports avec celles des boa. RAR AAA VUE UE ELA RAA IA LUE LR LUE LA ER MAUR HUE LEA LA DOUBLE-RAIE. Nous ignorons dans quel pays on trouve cette couleuvre que nous allons décrire d’après un individu qui fait partie de la col- lection de sa majesté; mais, comme cet individu a été envoyé au Cabinet du Roi avec un molure, il se pourroit que la double-raie se trouvât dans les Indes comme ce dernier serpent. La double- raie n’a point de crochets mobiles : le dessus de sa tête présente neuf grandes écailles; celles que l’on voit sur le dos sont unies et en losange. Elle à ordinairement deux cent cinq grandes plaques et quatre-vingt-dix-neuf paires de petites. Ses couleurs sont très-brillantes , et elle peut être comptée par- mi les serpens que l'on doit voir avec le plus de plaisir. Deux bandes longitudinales d’un jaune qui, dans l'animal vivant, doit approcher de la couleur de lor, règnent depuis le derrière de la tête jusqu’au-dessus de le queue : le fond sur lequel elles s'éten- dent est d’un roux plus ou moins foncé ; et comme chaque écaille est bordée de jaune, toute la partie du dessus du corps qui n'est pas occupée par les deux bandes jaunes paroït présenter un L2 50 , HISTOIRE NATURELLE très-grand nombre de petites raies longitudinales de la même couleur *. PVR AAA AA AAA RAA RAA AV AAA AURA AAA AAA MA AAA AAA AAA MUR. LA DOUBLE-TACHE. Lrs couleurs de cette couleuvre sont aussi agréables que ses proportions sont légères ; le dessus de son corps est roux; sur ce fond on voit de petires taches blanches irrégulières , bordées de noir , assez éloignées l’une de l’autre, disposées le long du dos ; et deux taches blanches, plus grandes que les autres, paroissent derrière la tête. Cette dernière partieest un peu conformée comme dans le molure ; le sommet en est garni de neuf grandes écailles ; les mâchoires ne présentent pas de crochets mobiles, et les écailles du dos sontunieset en losange. L’individu que nous avons décrit, et qui a été envoyé au Cabinet du Roi avec la double-raie et Île molure , a deux cent quatre-vingt-dix-sept grandes plaques et soixante-douze paires de petites. Sa longueur totale est d’un pied huit pouces deux lignes, et celle de la queue de trois pouces dix lignes. RAR AAA RAA AAA AAA AURA AA AU AAA LR AMANARE LRU LAAUR AVR AA VUUUR ARIANE UAR VUR. LE BOIG À. ne Qu l'on se représente les couleurs les plus riches et les plus agréa- blement variées dont la Nature ait décoré ses ouvrages, et l’on #'aura peul-être pas une idée exagérée de la beauté du serpent dont nous nous occupons. Le boiga doit, en effet, par la richesse de sa parure, tenir dans son ordrele même rang que loiseau-mouche: dans celui des oiseaux : même éclat, même variété de nuances, méme réunion de reflets'agréables dans ces deux animaux, d’ait- leurs si diférens l’un de l’autre. Les couleurs vives des pierreries et Féclat brillant de l'or resplendissent sur les écailles du boiga , ainsi * L’individu que nous avons décrit avoit deux pieds un pouce de longueur totale, et sa queue étoit longue de six pouces six lisnesa ————————————————— lrètre--prx.. lie Doimas.: te ttbare 2.Le Chapelete ee rer ee BELLE MDADOLE 222 RE ET DU BOIGAÀ: 50% que sur les plumes de l’oiseau-mouche ; et comme si, en embellis- sant ces deux êtres, la Nature avoit voulu donner à l’art un modèle parfait du plus bel assortiment de couleurs, les teintes les plus brunes, répandues sur l’un et sur l’autre au milieu des nuances les plusclaires , sont ménagées de manière à faire ressortir, par um heureux contraste, les couleurs éclatantes dont ils brillent. La tête du boiga, assez grosse en proportion de son corps , est recouverte de neuf grandes écailles disposées sur quatre rangs. Ces neuf plaques , ainsi que les autres écailles qui garnissent le dessus de la tête de ce serpent , sont d’un bleu foncé et comme soyeux ; une bande blanche qui règne le long de la mâchoire supérieure relève cet espace azuré, au milieu duquel on voit briller les yeux du boiga , et qui ressort d'autant plus, qu’une petite bande noire s'étend entre le bleu et la bordure blanche. Tout le dessus du corps , jusqu’à l'extrémité de la queue , est également d’un bleu variant par reflets, et présentant mème , à certaines expositions, le vert de l’'émeraude. Sur ce beau fond de saphir règne une espèce de raie ou de chaînette que l’on croiroit dorée par l'art, et qui s'étend jusqu'au bout de la queue; et non-seulement celte espèce de riche broderie présente l'éclat métallique de l'or , lorsque l'a- pimal est encore en vie, mais même, lorsqu'il a été conservé pendant long-temps dans l'esprit-de-vin , on croiroit que les écailles qui composent celte petite chaîne sont autant de feuilles d’or appliquées sur la peau du serpent. Tout le dessous du corps et de la tête est d’un blanc argentin , séparé des couleurs bleues du dos par deux autres petites chaines dorées qui, de chaque côté , parcourent loute la longueur du corps. Mais on n'auroit encore qu’une idée imparfaite de la beauté du boiga , si l’on se représentoit uniquement cet azur et ce blanc agréablement contrastlés et relevés par ces trois broderies dorées ; il faut se peindre tous les reflets du dessus et du dessous du corps, et les diflérenies teintes de couleur d'argent, de jaune, de rouge et de noir, qu'is produisent. Le bleu et le blanc, au travers des- quels il semble qu'on aperçoit ces teintes merveilleusement fon- dues , mêlent encore la douceur de leurs nuances à la vivacité de ces divers reflets, de telle sorte que, lorsque le boiga se meut, l'on croiroit voir briller , au-dessous d’un cristal transparent et quelquefois bleuâtre, une longue chaîne de diamans, d'émeraudes, de topazes, de saphirs et de rubis ; et ilest à remarquer que e’est dans les belles et brülantes campagnes de l'Inde ,woù Jes cristaux 50% IISTOIRE NATURELLE et les pierres dures présentent les nuances les plus vives , que la Nature s’est plue, pour ainsi dire , à réunir ainsi sur la robe du boiga une image fidèle de ces riches ornemens. Le boiga est un des serpens les plus menus relativement à sa longueur : à peine les individus de cette espece que l’on conserve au Cabinet du Roi, et dont la longueur est de plus de trois pieds, ont-ils quelques lignes de diamètre ; leur queue est presque aussi longue que leur corps, et va toujours en diminuant, de manière à représenter une aiguille très-déliée , quelquefois cependant un peu aplatie par-dessus, par-dessous et par les côtés. Les boigas joi- gnent donc des proportions très-sveltes à la richesse de leur pa- rure : aussi leurs mouvemens sont-ils très-agiles , et peuvent-ils, en se repliant plusieurs fois sur eux-mêmes, s’élancer avec rapi- dité, s’entortiller aisément autour de divers corps, monter, descendre, se suspendre, et faire briller en un clin d'oeil, sur les rameaux des arbres qu'ils habitent, l’azur et l'or de leurs écailles luisantes et unies. Ils se nourrissent de petits oiseaux qu'ils avalent avec assez de facilité, malgré la petitesse de leur corps, et par une suite de la faculté qu'ils ont d'élargir leur gosier , ainsi que leur estomac. D'ailleurs l’on doit présumer qu'ils ne cherchent à dévorer leur proie qu'après l'avoir comprimée, ainsi que les grands serpens écrasent et compriment la leur. Le boiga se tient caché sous les feuilles pour surprendre les oiseaux; il les attire, dit-on, par une espece de sifflement qu'il fait entendre , et qui, imitant appa- remment certains sons qui leur sont familiers où agréables, les trompe et les fait avancer vers le serpent qui les attend pour les dévorer. On a même voulu distinguer par le beau nom de chant le sifHement du boiga * ; mais la forme de sa langue allongée et divisée en deux , ainsi que la conformation des autres organes qui lui servent à rendre des sons, ne peuvent produire qu’un vrai sifflement , au lieu de faire entendre une douce mélodie. Le boiga, non plus que les autres serpens prétendus chanteurs, ne mérite donc que le nom de siffleur. Mais si la Nature n’en a pas fait un des chäntres des campagnes , il paroît qu’il réunit un ins- tinct plus marqué que celui de beaucoup d’autres serpens, à des mouvemens plus prompis et à une parure plus magnifique. Dans l'ile de Bornéo , les enfans jouent avec lui ; on les voit manier … + Voyez la Description du cabinet de Scba. DE LA SATURNINE. 505 sans crainte ce joli serpent , l'entortiller autour de leur corps, le porter dans leurs mains innocentes , et nous rappeler cet em- blème ingénieux imaginé par la spirituelle antiquité , cette 1mage touchante de la candeur et de la confiance, qu'ils représentoient sousl a forme d’un enfant souriant à un serpent qui le serroit dans ses contours. Mais, dans cette charmante allégorie , le serpent receloit un poison mortel, au lieu que le boiga ne rend que des caresses aux jeunes Indiens , et paroît se plaire beaucoup à être tourné et retourné par leurs mains délicates. Comme c’est un spectacle assez agréable que de voir , dans les vertes forêts, des animaux aussi innocens qu'’agiles , faire briller les couleurs les plus vives et s'élancer de branche en branche, sans être dangereux ni par leurs morsures ni par leur venin, on doit regretter que l’espèce du boïga ait besoin, pour subsister, d’une chaleur plus forte que celle de nos contrées, et qu’elle ne se trouve que vers l'équateur , tant dans l’ancien que dans le nouveau continent *. PRAIRIE LE BU TAAAE ELTAVRAVAAAE VAR VASE AR LA SOMBRE. Dioranr M. Linné, cette couleuvre a beaucoup de rapports, par sa conformation , avec le boiga ; mais ses couleurs sont aussi som- bres et aussi monotones que celles du boiga sont brillantes et va- riées. Elle est d’un cendré mêlé de brun, et derrière chaque oeil on aperçoit une tache brune et allongée. Elle a ordinairement cent quarante-neuf grandes plaques el cent dix-sept paires de petites, RAA AAA MAMAN AB RAS AA AA AAA AAA AAA AA RAA AAA AAA AAA AURAS AA AAA AAA AAA NAAAAS AA AA LA SATURNINE. La couleur de cette couleuvre est comme nuageuse et mêlée de livide et de cendré ; sa tête est couleur de plomb; ses yeux sont 1 Le boiga a communément cent soixante-six grandes plaques , et cent vingt- huit rangées de petites ; mais ce nombre varie très-squvent , ainsi que dans les autres espèces de serpens. Û 506 HISTOIRE NATURELLÉ grands, et elle a ordinairement cent quarante-sept grandes pla ques et cent vingt paires de petites. Nous ne pouvons rien dire des habitudes naturelles de ce ser= pent; nous savons seulement qu’il habite dans les Indes. AAA LAVE AVOIR ML VUE VB ELVAA AA MU PARA AR AAA AR MAMA RAA RAAAARAAUS LA CARENÉE. Corre couleuvre ressemble beaucoup à la saturnine par les di- verses nuances qu’elle présente. Chacune des écaiiles qui garnis- sent le dessus de son corps, est couleur de plomb et bordée de blanc ; le dessous de son corps est blanchâtre. Elle habite dans les Indes , comme la saturnine : mais un de ses caractères distinctifs est d’avoir le dos relevé en carène ; et de là vient le nom que lui a donné M. Linné. Elle a communément cent cinquante- sept grandes plaques et cent quinze paires de petites. LA DÉCOLORÉE. Cerre couleuvre ressemble beaucoup au boiga par sa confor- mation , ainsi que la sombre ; mais elle n’a point, non plus que celte dernière , les couleurs éclatantes ni la riche parure du boiga. Ses nuances sont cependant agréables; elle est d’un bleu clair mêlé de cendré, et Les écailles qui recouvrent ses mâchoires sont blanches. On la trouve dans les Indes, de même que le boiga et ia sombre. Elle a ordinairement cent quarante-sept grandes pla- ques et cent trente-deux paires de petites. PARA AAA AAA VAR AAA AAA PARA VRAI AA AA AAA AAA AVR AA RAA AAA AA RAA RAA VID LE PÉLIE. NE. Linné a fait connoître cette espèce de couleuvre , dontun in- dividu faisoit partie de la collection de M. le baron de Geer. Elle est brune derrière le sommet de la tête et les yeux, et noire dans DU FIL. 507 le reste du dessus du corps; le dessous du ventre et vert et bordé de chaque côté d’une ligne jaune. Ce serpent présente donc une distribution de couleurs différente de celle que l’on remarque dans la plupart des autres couleuvres , dont les nuances les plus brillantes parent la partie supérieure de leur corps. Le pélie se trouve dans les Indes ; il a ordinairement cent quatre-vingt-sept grandes plaques et cent trois paires de petites. RARAANANR AAA MAI AA AAA AAA AAA LE FIL. RARAARAANARANAAAAAAM/SÈ Cr serpent est un de ceux dont le corps est le plus délié : aussi se roule-t-il avec facilité aulour des divers arbres, et parcourt- il avec vitesse les branches les plus élevées. On le trouve dans les Indes tant orientales qu'occidentales, et on l'y voit souvent, dans les bois de palmiers, se suspendre aux rameaux en différens sens, s'étendre d’un arbre à l’autre, ou se coller, pour ainsi dire, si intimement contre le tronc qu'il enloure, qu’on l'acomparé aux lianes qui s’attachent ainsi aux arbres et aux arbrisseaux , et qu'un individu de cette espèce a été envoyé au Cabinet du Roi sous le nom de serpent à liane d’ Amérique. Ses yeux sont gros ; il n’a pas de crochets mobiles, et n’est dangereux en aucune ma- nière ; le dessus de sa iète , qui est très- grosse à proportion du corps , est garni de neuf grandes écailles, et celles de son dos sont en losange, et relevées par une arête. S1 la forme de cette couleuvre est svelte et agréable , ses cou.- leurs ne sont pas brillantes ; le dessus de’son corps est noir, ou d'un livide plus ou moins foncé, et le dessous blanc ou blanchâtre. I! a ordinairement cent soixante-cinq grandes plaques , et cent cinquante-huit paires de petites. L'individu que nous avons dé- crit a un pied six lignes de longueur totale, et quatre pouces six lignes depuis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue. M. Laurent a vu une couleuvre qu'il a regardée, avec raison, comme une variété de cette espèce, et qui n’en différoit que par deux raies brunes qui partoient des yeux, et s’'étendoient sur le dos, où elles devenoient deux rangées de petites taches obliques. C'est peut-être aussi à la couleuvre Le #1 qu'il faut rapporter le serpent de la Caroline figuré dans Gatesby ( tome ET. pl. 54 ), 508 HISTOIRE NATURELLE Ce reptile est d’une couleur brune, parvient quelquefois à la longueur de plusieurs pieds, ressemble beaucoup au fil par sa conformation , a de même le corps très-menu , et a étécomparé à un fouet , à cause de sa forme très-déliée , et de la vitesse de ses mouvemens. LA CENDRÉE, O N peut se représenter bien aisément les couleurs de cette cou- leuvre; elle est grise, avec le ventre blanc, et les écailles de la queue sont bordées d’une couleur qui approche de celle du fer. C'est M. Linné qui l’a fait connoître ; elle habite dans les Indes, etelle a communément deux cents grandes plaques et cent trente-sept paires de petites. CAR AV VARA UVUV VUU UU AU AU LU AV RAS VU UV AU UE UM MARIA ME MU M AY LA MUQUEUSE, Ps Cxrre couleuvre est du grand nombre de celles que M. Linné a fait connoître; et suivant ce grand naturaliste, elle se trouve dans les Indes. Sa tête est bleuâtre, et les angles en sont très- marqués. Elle a de grands yeux ; et l'on voit de petites raies noires sur les écailles qui couvrent ses machoires , et le dessus de son corps présente des raies transversales, placées oblique- ment, et comme nuageuses. Elle a ordinairement deux cents grandes plaques et cent quarante paires de petites. RAA ANA RD VAR AAA MANIA LEE LUE AA AMAR RRARRA RAA AAA RAA AAA AAA LA BLEUATRE. sense re couleuvre a deux cent quinze grandes plaques et cent soixante-dix paires de petites : c’est une de celles qui en ont le plus grand nombre, et cependant il s’en faut de beaucoup que DE L'HYDRE. 569 ee soit une des plus grandes. C'est que la largeur des grandes et des petites plaques varie beaucoup dans les reptiles, non- seulement suivant les espèces, mais même suivant l’âge ou le sexe des individus ; et voila pourquoi deux serpens peuvent avoir le même nombre de grandes et de petites plaques, non- seulement sans présenter la même longueur totale, mais même sans que la même proportion se trouve entre la longueur du corps et celle de la queue. Le nom la de bleuâtre désigne couleur du dessus de son corps, qui ordinairement ne présente pas de tache, et qui est garni d'écailles unies ; sa tête est couleur de plomb. C'est des Indes que cette couleuvre a élé apportée. L41441:214314:151h5131 MAMMA AAA AAA AAA AAA AAAAN/V A L'HYDRE. "RUE à M. Pallas"que nous devons la description de cette cou- leuvre, dont les habitudes rapprochent, pour ainsi dire , l’or- dre des serpens de celui des poissons. L’hydre n’a jamais été vue, en effet, que dans l’eau, suivant le savant naturaliste de Pé- tersbourg; et l’on doit présumer, d'après cela, qu’elle ne va à terre que très-rarement , ou pendant la nuit pour s’accoupler , pondre ses œufs, ou mettre bas ses petits, et chercher la nour- riture qu’elle ne trouve pas dans les fleuves. C’est aux environs de la mer Caspienne qu’elle a été observée, et elle habite non- seulement les rivières qui s’y jettent , mais les eaux mêmes de cette médiierranée. Elle ne doit pas beaucoup s'éloigner des ri- vages de cette mer, quelquefois très-orageuse, non-seulement parce qu’elle ne pourroit pas résister aux eflorts d’une violente tempête , mais encore parce que, ne pouvant pas se passer de respirer assez fréquemment l'air de l'atmosphère , et par consé- quent étant presque toujours obligée de nager à la surface de l’eau , elle a souvent besoin de se reposer sur les divers endroits élevés au-dessus des flots. Elle parvient ordinairement à la longueur de deux ou trois pieds ; sa tête est petite ; elle n’a point de crochets mobiles; sa langue est noire et très-longue , et l'iris de ses yeux jaune ; le dessus de son corps est d’une couleur olivâtre, mêlée de cen- 510 HISTOIRE NATURELLE dré, et présente quatre rangs longitudinaux de taches noirâtres, disposées en quinconce. On voit aussi sur le derrière de la tête quatre taches noirâtres, allongées , et dont deux se réunissent, en formant un angle plus ou moins ouvert. Le dessous du corps est tacheté de jaunâtre et de noirâtre qui domine vers l'anus ; et surtout au-dessous de la queue. Elle a cent quatre-vingts grandes plaques (sans compter quatre écailles qui garnissent le bord antérieur de l'anus) et soixante-six paires de petites. CRAN AAA AT LL AA RAA LUS VE A AAA AAA AAA AAA AA LA CUIRASSÉE. Cine couleuvre , que M. Pallas a décrite, a beaucoup de rap- ports avec la couleuvre à collier, non-seulement par sa con- formation , mais encore par ses habitudes. Elle passe souvent un temps très-long dans l’eau ou sur le bord des rivières ; mais elle se lient aussi très-souvent sur les terres sèches et élevées. C’est sur les bords du Jaïk , fleuve qui sépare la Tartarie du Turkestan , et qui se jette dans la mer Caspienne, qu'elle a été observée. Elle parvient quelquefois à la longueur de quatre pieds; elle n’a point de crochets mobiles; l’iris de ses yeux paroît brun; tout le dessus de son corps est noir; et le dessous , qui est de la même couleur , présente des taches d’un jaune blanchâtre, presque carrées, placées alternativement à droite et à gauche, et en très-petit nombre sous la queue. Les grandes plaques qui re- couvrent son ventre, sont au nombre de cent quatre-vingt- dix ; leur longueur est assez considérable poux qu’elles embrassent presque les deux tiers de la circonférence du corps; et voilà pourquoi M. Pallas a donné à cette couleuvre l’épithète de scutata, que nous avons cru devoir remplacer par celle de cuirassée, les grandes plaques formant en effet comme les lames d’une longue cuirasse qui revétiroit le ventre du serpent. La queue présente la forme d’une pyramide triangulaire très- allongée , et le dessous en est garni ordinairement de cinquante paires de petites plaques, | DU CHAPELET. 611 RDA LA VA VA VE AVATAR LUI MUR VAE LUE UMA LULU LAVAMUUTMAARMAS LA DIONE : LP semble que c'est à la déesse de la beauté que M. Pallas à voulu , pour ainsi dire, consacrer cette couleuvre, dont il a le premier publié la description ; il lui a donné, en effet ,un des noms de cette déesse , et cette dénomination étoitdue, en quelque sorte, à l'élégance de la parure de ce serpent, à la légèreté de ses mouvemens, et à la douceur de ses habitudes. La couleur du dessus du corps de la dione est d’un gris très-agréable à la vue, dit M. Pallas, et qui souvent approche du bleu; elle est relevée par trois raies longitudinales d’un blanc très-éclatant , que font ressortir des raies brunes placées alternativement entre les raies blanches ; et les diverses teintes de ces couleurs doi- vent être bien assorties , puisque M. Pallas, en faisant allusion à ses nuances , donne à la dione l’épithète de très-élégante (e/ecan- #issima). Le dessous de son corps est blanchâtre avec de petites raies d’un brun clair, et souvent de petits points rougeâtres. La dione parvient à la longueur totale de trois pieds, et alors sa queue a communément six pouces de longueur. Son corps est délié; le dessus de sa tête est couvert de grandes écailles; elle ne con- tient aucun venin ,etelleest aussi douceet aussi peu dangereuse que ses couleurs sont belles à voir. Elle habite les environs de la mer Caspienne ; on la trouve dans les déserts qui environnent cette mer, et dont la terre est, pour ainsi dire, imprégnée de sel. Elle se plaît aussi sur les collines arides et salées qui sont près de l’Irtish *. CARAMEL AAA VAR NUL UV LE CHAPELET :. RAA AVR VA RAAAAAYE Non-sulement les couleurs du chapelet sont très-agréables à voir et présentent les nuances les plus douces , mais elles offrent encore 3 Ak-dshilan, par plusieurs peuples de l’empire de Russie. 2 La dione a ordinairement depuis cent quatre-vingt-dix jusqu’à denx cent -six grandes plaques, et depuis cinquante-huit jusqu’à soixante-six paires de etites. $ A ne faut pas confondre ce serpent avec une couleuvre de la Caroline, à 512 HISTOIRE NATURELLE un arrangement et une symélrie que lon est tenté de prendre pour un ouvrage de l'art, et qui sufiroient seuls pour faire re- connoître celle couleuvre. Le dessus de son corps est bleu, et présente trois raies longitudinales; les deux raies des côtés sont blanches; celle du milieu est noire et chargée de petites taches bianches parfaitement ovales, et alternativement mêlées avec des points blancs. De chaque côté de la tête on voit trois et quelque- fois quatre taches à peu près de la grandeur des yeux, et formant une ligné longitudinale dont le prolongement passe par l'endroit de ces organes. Le dessus de la tête offre aussi des taches d’un bleu clair, bordées de noir , et très-symétriquement placées. Le des- sous du corps est blanc, et à l'extrémité de chaque grande pla- que on voit un tres-pelit point noir ; ce qui forme deux rangées de points noirs sous le ventre. Telles sont les couleurs de la couleuvre à chapelet : son corps est d’ailleurs tres-délié ; les écailles qui garnissent son dos sont umes et en losange ; neuf grandes écailles couvrent le sommet de sa tête, qui est grande en proportion du corps, et aplatie par- dessus , ainsi que par les côtés. Le chapelet n’a point de crochets mobiles. Nous avons décrit cette espèce, sur laquelle nous n'a- vons trouvé aucune observation dans les naturalistes, d’après un individu conservé au Cabinet du Roi. Ce serpent a cent soixante- six grandes plaques, cent trois paires de petites, un pied cinq pouces six lisnes de longueur totale, et cinq pouces six lignes de- puis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue. RAA A AAA AAA AAA AAA RAA AAA AA PVR AE AAA AAA AAA AAA AU RAA VAN AAA ANR BARRY NY LE CENCHRUS. Crsr sous ce nom que cette couleuvre a été envoyée au Ca- binet du Roi. Elle se trouve en Asie. Elle n’a point de crochets mobiles; le dessus de sa tête est couvert de neuf grandes écailles placées sur quatre rangs ; le dos l’est de petites écailles unies et hexagones; le dessus du corps , marbré de brun et de blanchâtre, présente des bandes transversales irrégulières, étroites et blan- laqueile Catesby a donné le nom de chapelet, et dont nous parlerons dans cet ouvrage , sous le nom de couleuvre mouchetée. DE LA SYMÉTRIQUE. 515 châtres, et le dessous est varié de blanchâtre et de brun. L'in- dividu que nous avons décrit a deux pieds de longueur totale, trois pouces sept lignes depuis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue, cent cinquante-trois grandes plaques et quarante-sept paires de petites. RAA AE TEA VU LUE EUAR LILAS US MATE VAE LAVER ALBI AAA AA L'ASIATIQUE. Crese de lAsie, et peut-être de l'ile de Ceylan, que l’on a en- voyé cette couleuvre au Cabinet du Roi. Des raies dont la cou- leur a été altérée par l'esprit-de-vin dans lequel on a conservé l'animal, s'étendent le long du dos de ce serpent ; les écailies qui garnissent le dessus de son corps sont bordées de blanchâtre, rhomboïdales et unies. Le sommet de sa tête est couvert de neuf grandes écailles. Il n’a point de crochets mobiles. Sa longueur totale est d’un pied, et celle de sa queue, de deux pouces trois lignes. I à cent quatre-vingt-sept grandes plaques et soixante- seize paires de petites. Il paroit, par des notes manuscrites en- voyées avec ce reptile, qu’il a reçu dans plusieurs contrées de l'Inde le nom de malpolon , qui y a été donné à plusieurs es- pèces de serpens, et que nous avons conservé, avec M. Dauben- ton, à une couleuvre dont nous avons déjà parlé. AAA AAA AURAS AAA AAA AAA RAA RAA AAA AA AAA RAS AA VBA AAA AAVE LA SYMÉTRIQUE. Lr nom de cette couleuvre désigne l’arrangement très-régulier de ses couleurs. Le dessus de son corps est brun, et de chaque côté du dos l’on voit une rangée de petites taches noirâtres , qui s'étend jusqu’au tiers de la longueur du corps. Le dessous de la queue est blanc; le dessous du ventre.est de la même couleur, mais présente des bandes et des demi-bandes transversales et brunes, placées avec beaucoup de symétrie. Cette couleuvre n’est pas venimeuse. Elle a neuf grandes écailles sur la tête, et des écailles plus petites, unies et ovales, garnis+ Lacepède. 1. 3% 514 HISTOIRE NATURELLE. | sent son des *. L'individu que nous avons décrit, et qui fait par- tie de la collection du Roï , a cent quarante-deux grandes plaques et vingt-six paires de petites. On trouve la symétrique dans l’île de Ceylan. RAA VAE AA AAA AA LAVE A VAS AAA AA AAA AAA VU AA AAA AVR AAA AAA VA DR n LA JAUNE ET BLEUE. es ©) Crsr une très-belle ét en même temps tres-grande couleuvre de l'ile de Java; les habitans de cette ile la nomment oular-sawa (serpent des champs de riz ), apparemment parce qu’elle se plait dans ces champs. Elle y parvient jusqu’à la longueur de neuf pieds; mais les individus de cette espèce qui, au lieu d’ha- biter dans les basses plantations , préfèrent de demeurer dans les bois touffus et sur les terrains élevés, ont une grandeur bien plus considérable , et leur longueur a été comparée à la hauteur d’un arbre. Lorsque la jaune et bleue a atteint ainsi tout son dévelop- pement, elle est dangereuse par sa force, quoiqu'elle ne contienne aucun poison; et non-seulement elle se nourrit d'oiseaux , ou de rats et de souris, mais des animaux même assez gros ne peuvent quelquefois échapper à sa poursuite, et deviennent sa proie. Sa iète est plate et large; le sommet en est garni de grandes écailles, el il paroît, par la description qui en a été donnée dans les He- noires de la Société de Batavia , que ces écailles sont au nombre de neuf, et disposées sur quatre rangs, comme dans la verte et jaune. Les mâchoires ne sont pas armées de crochets mobiles, mais de deux rangs de dents pointues , recourbées en arrière , et dont les plus grandes sont le plus près du museau. Ce très-grand ser- pent a l'iris jaune ; le dessus de sa tête est d’un gris mêlé de bleu; Von voit deux raies d’un bleu foncé commencer derrière les yeux, s'étendre au-dessus du cou, et s’y réunir en arc, à un pouce de distance de la tête; une troisième raie de la même couleur règne depuis le museau jusqu’à l’occiput, où elle se divise en deux pour embrasser une tache jaune, chargée de quelques points bleus. 1 La longueur totale de cet individu est d’un pied cinq pouces six lignes, et éclle de la queue, de deux pouces trois ligues. 2 Qudar-sawa, par les habitaus de l’île de Java. DU DABOIE. 515 Le dessus du corps présente des espèces de compartimens très- agréables ; 1l paroït comme divisé en un très-crand nombre de carreaux , et représente un treillis formé par plusieurs raies qui se croisent. Ces raies sont d’un bleu éclatant, et bordées d’un jaune couleur d’or. Le milieu des carreaux est, sur le dos, d’un gris changeant en jaune , en bleu et en vert, suivant la manière dont il réfléchit la lumière; il est d’un gris plus clair sur les côtés du corps , ainsi que sur la queue, où les carreaux sont plus petits que sur le dos; et chaque côté du corps présente une rangée lon- gitudinale de taches blanches, placées aux endroits où les raies bleues se croisent. Il est aisé de voir, d’après cetie description, que les couleurs qui dominent dans ce beau serpent sont le bleu et le jaune, et c'est ce qui nous a fait préférer le nom que nous avons cru de- voir lui donner. Il a quelquefois trois cent douze grandes pla- ques et quatre-vingt-ireize paires de petites. AAA A RAA NN VU AAA AU UV MAUVUVU UUV UV AUVAARANIY AAA ARAAARAAAARANANNY LA TROIS-RAIES. Nous donnons ce nom à une couleuvre d'Afrique, dont le des- sus du corps présente en eflet trois raies longitudinales : elles par- tent du museau , et s'étendent jusqu'au-dessus de la queue; la couleur du fond qu’elles parcourent est d’un roux plus ou moins clair. Neuf grandes écailles garnissent le sommet de la tête; les mâchoires ne sont pas armées de crochets mobiles, et les écailles du dos sont en losange et unies. Un individu de cette espèce, con- servé au Cabinet du Roi, a un pied cinq pouces six lignes de longueur totale, deux pouces huit lignes depuis l'anus jusqu'à l'extrémité de la queue, cent soixante-neuf grandes plaques et trente-quatre paires de petites. AV AAAANNAAAAANA ANA AAA ANA VUU EN UV UV EU MAMAANUUA UT AAA LE DABOÏIE. \ oxcr une de ces espèces remarquables de serpent que la supersti- tion a divinisées. C’est dans le royaume de Juida, sur les côtés 516 HISTOIRE NATURELLE occidentales d'Afrique , où elle est répandue en très -grand ñnom- bre, qu'on lui a érigé des autels; et il semble que ce n'est pas la terreur qui courbe la tête du Nègre devant ce reptile, puisqu 5l m'est redoutable n1 par sa force, ni par aucune humeur venimeuse, Selon plusieurs voyageurs , le daboïe est remarquable par la vi- vacité de ses couleurs et par l'éclat de ses écailles. Le dessus du corps est blanchâtre , et couvert de grandes taches ovales plus ou moins rousses , bordées de noir eu de brun, et qui s'étendent sur trois rangs , depuis la tête jusqu’au-dessus de la queue. Suivant le voyageur Bosman, le daboiïe est rayé de blanc, de jaune et de brun; et suivant Desmarchais, le dos de ce serpent présente un mélange agréable de blanchâtre qui en fait le fond, et de taches ou de raies jaunes , brunes et bleues; ce qui se rapproche beau- coup des teintes indiquées par Bosman, et ce qui pourroit bien n'être qu'une mauvaise expression d’une distribution et de nuances de couleurs irès-peu différentes de celles que nous venons d'in- diquer. La tête du daboie est couverte d’écailles o vales, relevées par une arête, et semblables à celles du dos *; il parvient quelquefois à la longueur de plusieurs pieds *. L’individu que nous avons décrit, et qui est conservé au Cabinet du Roï, a trois pieds ré pouces de longueur totale, et la queue, cinq pouces neuf lignes ° Les Di tades 5 daboie sont d'autant plus Lo. , qu Gil n'est presque jamais obligé de se défendre : il a peu d'ennemis à crain- dre dans un pays où il est servi avec un respect religieux, et d’où lon tâche d’écarter tous ceux qui pourroient lui nuire. Les ani- maux même qui seroient les plus utiles sont exclus des contrées où l’on adore le serpent daboie, à cause de la guerre qu'ils lui fe- roient. Le cochon particulièrement, qui fait sa proie de plusieurs espèces de reptiles , et qui attaque impunément, suivant quelques voyageurs , les serpens les plus venimeux, est poursuivi, dans le royaume de Juida , comme un ennemi public ; et malgré tous les 1 Nous avons déja remarqué , dans d’autres articles, que le daboie , quoique dépourvu de crochets mobiles, avoit, comme le plus grand nombre de serpens venimeux , le sommet de la tête couvert d’écailles semblables à celles du dos. 2 la dû être assez difficile, pendant long-temps , d’avoir des daboies en Europe, les rois nègres, par respect pour ces reptiles , ayant défendu , sous peine de mort, à leurs sujets, de transporter ces serpens hors de l’Afrique, ou de livrer leur dépouille aux étrangers. 3 Nous avons compté cent soixante-neuf grandes plaques sous le ventre de cet individu , et quarante-six paires de petites plaqnes sous sa queue. DU DABOTE. 5ry avantages que les Nègres pourroient en retirer, ils ne voient dans cet animal que celui qui dévore leur dieu. Bien loin de chercher à nuire à l’homme, le daboie est si fa- milier, qu'il se laisse aisément prendre ét manier , et qu'on peut jouer avec lui sans courir aucun danger. On diroit qu'il réserve toute sa force pour le bien de la contrée qui le révère. Il n’attaque que les serpens venimeux, dont le royaume de Juida est infesté ; il ne détruit que ces reptiles funestes, et les insectes on les vers qui dévastent les campagnes. C’est sans doute ce service qui l'a rendu cher aux premiers habitans du pays où on l'adore ; on n'aura rien négligé pour multiplier ou du moins conserver une espèce aussi précieuse ; on aura attaché la plus grande importance aux soins qu'on aura pris de cet animal utile ; on l'aura regardé comme le sauveur de ces contrées si souvent ravagées par des légions d’in- sectes ou des troupes de reptiles venimeux; et bientôt la supersti- tion , aidée du temps et de l'ignorance, aura altéré l'ouvrage de la reconnoissance et celui du besoin :. Le culte des animaux qui ont inspiré une vive terreur n'a élé que trop souvent sanguinaire; on n’a sacrifié que trop souvent des hommes dans leurs temples: le serpent-dieu des Nègres n'ayant jamais fait éprouver une grande crainte, n’a obienu que des sa- crifices plus doux, mais que ses prêtres ne cessent de commander avec une autorité despotique. L'on n’immole point des hommes devant le serpent daboie; mais on livre à ses ministres les plus belles des jeunes filles du royaume de Juida. Le prétendu dieu, que l’on nomme /e serpent fétiche , ce qui signifie l’étre conserva teur, a un temple aussi magnifique que le peut être un bâtiment élevé par l’art grossier des Nègres. IL y reçoit de riches offrandes ; on lui présente des étofles de soie, des bijoux, les mets les plus délicats du pays , et même des troupeaux : aussi les prêtres qui le servent jouissent-ils d’un revenu considérable, possèdent-ils des terres immenses, et commandent-ils à un grand nombre d’es- claves. Afin que rien ne manque à leurs plaisirs, ils forcent les pré- tresses à parcourir, chaque année, et vers le temps où le maïs commence à verdir, la ville de Juida et les bourgades voisines. Armées d’une grosse massue, et secondées par les prêtres, elles TL 1 Ou pourroit croire aussi que quelque événement cxtraerdinairs aura sédui$ Pimagination des Nègres et enchaîné leur raison. 518 HISTOIRE NATURELLE assommerolent sans pilié ceux qui oseroient leur résister; elles forceni les Ngresses les plus jolies à les suivre dans le temple; et le poids de la crédulité superstitieuse pèse si fort sur la tête des Nègres, qu'ils croient qu'elles vont être honorées des approches du serpent protecteur , et que c’est à son amour qu’elles vont être livrées. Ils reçoivent avec respect cette faveur signalée et divine, On commence par instruire les jeunes fillesà chanter des hymnes, et à danser en l'honneur du serpent ; el lorsqu'elles sont pres du temps où elles doivent être admises auprès de la prétendue divi- nité, on les soumet à une cérémonie douloureuse et barbare; car la cruauté naît presque toujours de la superstition. On leur 1m- prime sur la peau , dans toutes les parties du corps, el avec des poinçons de fer, des figures de fleurs, d'animaux, et surtout de serpens. Les prêtresses les consacrent ainsi au service de leur dieu ; et c’est en vain que leurs malheureuses victimes jettent les cris les plus plaintifs que leur arrache le tourment qu’elles éprou- vent : rien n'arrête leur zèle inhumain. Lorsque la peau de ces infortunées est guérie, elle ressemble, dit-on, à un satin noir à fleurs, et elle les rend à jamais l’objet de la vénération des Nigres. Le moment où le serpent doit recevoir la Négresse favorite arrive enfin; on la fait descendre dans un souterrain obscur , pendant que les prêtresses et les autres jeunes filles céltbrent sa destinée par des danses et des chants qu’elles accompagnent du bruit de plusieurs instrumens retentissans. Lorsque la jeune Né- gresse sort de l'antre sacré , elle reçoit le tire de femme du serpent; elle ne devient pas moins la femme du Nègre qui parvient à lui phire, mais auquel elle inspire à jamais la soumission la plus aveugle , ænsi que le plus grand respect. Si quelqu’une des femmes du serpent trahit le secret des plaisirs des prêtres en révélant les mystères du souterrain, elle estaussitôt enlevée et mise à mort ; et l’on croit que le grand serpeul est venu lui-même exercer sa vengeance , en l’emportant pour la faire brûler. Mais arrètons-nous : l’histoire de la superstition n’est point celle de la Nature: Elleest trop liée cependant avec les phénomènes que produit cette Nature puissante et merveilleuse , pour être tout-à-fait étrangère à l’histoire des animaux qui en ont été l'objet. DE L'ARCUS. 519 RAA AAA AA AE LA A AA ARR RAR AA ULTRA AA RAA VUS AAA LE SITULE. ME serpent se irouveen Esypte, où il a été observé par M. Has- selquist; sa couleur est grise, et il présente une bande longitudi- nale , bordée de noir. Il a communément deux cent trente-six grandes plaques et quarante-cinq paires de petites. RAA AN VU AV IARAAAANA AAA ARAAIU AU AAA NAAAN AAA AAA IAA AAA AA AAA LE TYRIE. Lys terres de l'Egypte, périodiquement arrosées par les eaux d’un grand fleuve , et échauflées par les rayons d’un soleil très- ardent, présentent aux diverses espèces de serpens, au moins pendant une grande partie de l’année, cette humidité chaude qui convient si bien à la nature de ces reptiles. Nous ne devons donc pas être étonnés qu’on y en ait observé un grand nombre. Parmi ces serpens d'Egypte nous devons compter le tyrie, que M. Hasselquist a fait connoître ; 1l a ordinairement deux cent dix grandes plaques et quatre-vingt-trois paires de petites; 1l n’est point venimeux, et le dessus de son corps, qui est blanchâtre, présente trois rangs longitudinaux de taches rhomboïdales et brunes. Il paroît que c'est au tyrie qu'il faut rapporter le serpent que M. Forskael a décrit sous le nom de couleuvre mouchetée ( co/uber guttatus ), qu'il a vu en Egypte, et que les Arabes nomment {& œbén. ANA AN AAA AAA AN ANA VAN ANA AU ANA A AR AAA MA MAN AAA L’'ARGUS. Cx serpent d'Afrique est remarquable par la forine de sa tête; le derrière de cette partie est relevé par deux espèces de bosses 520 HISTOIRE NATURELLE ou d'éminences très-sensibles. Les écailles qui garnissent le dos de ce serpent présentent chacune une tache blanche; mais d’ail- leurs on voit sur son corps plusieurs rangs de taches blanches, rondes, rouges dans leur centre, bordées de rouge, ressemblant à des yeux, et c’est ce qui lui a fait donner le nom d’argus par les naturalistes *. RAA AA VAR RAA AR AAA AA AE LA AAA VA AA RAS AA AAA AAA AAA AA RAA RAR RAR AAA AA AAA. LE PÉTOLE. ee Ga au milieu des contrées ardentes de l'Afrique que l’on trouve cette couleuvre. La couleur du dessus de son corps est ordinairement d’un gris livide, relevé par des bandes transver- sales rougeätres ; le dessous du corps est d’un blanc mêlé de jaune, et presente oct des bandes transversales, d’une couleur rougeâlre ou très-brune. Le sommet de la tête n garni de neuf grandes écailles, et le dos, d’écailles ovales et unies. Cette cou- leuvre n'a point de crochets mobiles : on ignore quelles sont ses. habitudes ; elle a le plus souvent deux cent neuf grandes plaques et quatre-vingi-dix paires de petites. LA DOMESTIQUE. ee ne Lx nom de cette couleuvre annonce la douceur de ses habitudes : c'esten Barbarie qu’on la trouve , et c’est dans les maisons qu’elle habite; elle y est dans une espèce d'état de domesticité volon- taire, puisqu'elle n’y à point élé amenée par la force, et qu’elle n'y est retenue par aucune contrainte ; c'est d’elle-même qu’elle: a choisi la demeure de l'homme pour son asile. L’on voudroit qu’une sorte d'affection l’eût ainsi conduite sous le toit qu'elle partage ; qu'une sorte de sentiment l’'empêchât de s’en éloigner , et qu’elle montrât sur ces côtes de Barbarie, si souvent arrosées t On ne connoît point le nombre des grandes ni des petites plaques de cette couleuvre. DE LA MAURE. 523 de sang, le contraste singulier d’un serpent aussi affectionné, aussi fidèle, que doux et familier, avec le spectacle cruel de l’homme gémissant sous les chaines dont l’accable son semblable. Mais le besoin seul attire la couleuvre domestique dans les mai- sons, et elle n’y demeure que parce qu’elle y trouve avec plus de facilité les petits rats et les insectes dont elle se nourrit. Sa couleur est souvent d’un gris pâle, avec des taches brunes ; elle a entre les deux yeux une bande qui se divise en deux, et présente deux taches noires. Ses grandes plaques sont ordinairement au nombre de deux cent quarante-cinq, et elle a quatre-vingt-quatorze paires de petites plaques. RAARAAR AAA ARS VISANT A AA AAA AAA MBA AA AAAAARAARAE AAA AARAAATARAE L'HAJE. Carre couleuvre devient très-grande , suivant M. Linné. Elle se trouve en Egypte, où elle a été observée par M. Hasselquist. Ses couleurs sont le noir et le blanc ; la moitié de chaque écaille est blanche ; il y a d’ailleurs sur le dos des bandes blanches, pla- cées obliquement ; tout le reste du dessus du corps est noir *. Ce serpent n'étant pas venimeux, selon M. Linné , ne doit pas être confondu avec une couleuvre d'Egypte qui porte aussi le nom d’Aaje, et qui contient un poison très-actif. La force de ce venin a été reconnue par M. Forskael ; mais ce naturaliste n’a point donné la description de l’haje dont il a parlé *. RAA VERSA VRAI AAA ERA AA AA LABELS AAA AAA AAMAATE TEE LA MAURE. re a été ainsi appelée à canse de ses couleurs, et parce qu’elle se trouve aux environs d'Alger. M. Brander énvoya à M. Linné un individu de cette espèce. Le dessus de son corps 1 M. Linné à écrit que l’haje avoit deux cent sept grandes plaques et cent neuf paires de petites. 3 Coluber haje-nascher, par les Arabes, 524 . HISTOIRE NATURELLE pouvoit faire pourrir les chairs sur lesquelles cette vapeur s6- tendoit. La troisième, nommée kannarch æsuæd , est toute noire, ovi- pare, et de la longueur d’un pied ou environ. Sa morsure n’est pas dangereuse, mais produit un peu d’enflure. On arrête par des ligatures la propagation du venin ; on suce la plaie ; on em- ploie diverses plantes comme spécifiques , et les Arabes racon- tent gravement que ce serpent entre quelquefois par un côté dans le corps des chameaux, qu’il en sort par l’autre côté, et que le chameau en meurt si on ne brule pas la blessure avec un fer rouge. Nous invitons les voyageurs qui iront en Arabie, non-senle- ment à décrire ces trois couleuvres, mais même à rechercher l'origine des contes d’Arabes auxquels elles ont donné lieu ; car il y a bien peu de fables qui n’aient pour fondement quelque vérité. RAA RAR AAA RAA AAA AAA AAA RAR VA AAA AAA AAA RAA AAA RAR A/R LA ROUGE-GORGE. O+ peut reconnoitre aisément cette couleuvre qui se trouve en Egypte : elle est toute noire, excepté la gorge, qui est couleur de sang. Elle a communément cent quatre-vingt-quinze grandes plaques et cent deux paires de petites. M. Hasselquist l’a observée. PARA RAR ANA AR RAR AAA AVR AE VU VAR A AAA LUS AAA AA AA AA AURA AAA RAR LALULR LAN 2 L’'AZURÉE. O+ trouve cette couleuvre aux environs du Cap-Verd. Son nonx indique sa couleur ; elle est d’un très-beau bleu , quelquefois foncé sur le dos, très-clair et presque blanchâtre sous le ventre et sous la queue. Elle n’a point de crochets mobiles. Le sommet de sa tête est garni de neuf grandes écailles ; disposées sur quatre rangs, et celles que l’on voit sur le dos sont ovales et unies. Un individu de cette espèce, conservé au Cabinet du Roi, a deux pieds de longueur totale, cinq pouces trois lignes depuis Fanus DE LA NASIQUE. 525 jusqu'à l'extrémité de la queue, cent soixante-onze grandes pla- ques et soixante-quatre paires de petites. RAA AA VAR VERRA ELA VE AA VIA VRAI AAA AAA RAA MA VER AA RAA AAA AAA ULAAALAS AAA LA NASIQUE. N, us donnons ce nom à nne couleuvre dont le museau est en eflet très-allongé, et qu'il est très-facile de distinguer par là des serpens de son genre connus jusqu’à présent. Elle a le devant de la tête très-allongé, très-étroit, très-aplati par-dessus et par- dessous , ainsi que des deux côtés, et terminé en pointe de ma- nière à représenter une petite pyramide à quatre faces, dont les arêtes serolent très-marquées. Le dessus de la tête est recouvert de neuf grandes écailles , placées sur quatre rangs. La mâchoire inférieure est arrondie, plus large et plus courte que la supé- rieure. Les yeux sont gros, ronds , et placés sur les côtés de la tête ; et l’on voit à l'extrémité du museau un petit prolongement écaillenx , un peu relevé , et composé d’une seule pièce qui pa- xoit comme plissée. C’est apparemment de ce prolongement que Catesby a voulu parler, lorsqu'il a dit que le serpent dont il est C1 question avoit le nez retroussé ; et c’est peut-être en faisant allusion à l'air singulier que cetle conformation donne à ce rep- tile que M. Linné l’a désigné par le nom de mycterisans, qui signifie moqueur. Les deux mâchoires sont garnies de fortes dents, qui ne dis- &illent aucun poison, suivant Gronovius. Catesby dit aussi que la nasique n’est point dangereuse , et nous n’avons trouvé de cro- chets mobiles dans aucun des individus de cette espèce que nous avons examinés. Cependant nous devons prévenir que M. Linné a écrit qu’elle étoit venimeuse. Le dessous de Ja tête est blanchâtre, et toutes les autres parties de ce serpent présentent communé- ment une couleur verdâtre, relevée par quatre raies blanchâtres, qui s'étendent de chaque côté du corps, presque jusqu’à l’extré- mité de la queue , et par deux autres raies longitudinales placées sur le ventre *. Les écailles du dos sont rhomboïdales et unies; ordinairement la queue n’est pas aussi longue que la moitié du rl paroît que la distribution des couleurs de la nasique varie assez souvent. 526 HISTOIRE NATURELLE corps qui est très-mince en proportion de sa longueur. L’indi- vidu que nous avons décrit, et qui est conservé au Cabinet du Roi, n'avoit, en quelques endroits de son corps, que cinq-ou six lignes de diamètre , et cependant il avoit quatre pieds neuf pouces de longueur *. Nous avons compté cent soixante-treize grandes plaques sous son corps, et cent cinquante-sept paires de petites plaques sous sa queue. On a écrit que , malgré sa petitesse, la nasique se nourrissoit de rats : mais quoique son gosier et son estomac puissent s'étendre aisément, ainsi que ceux des autres serpens , nous avons peine à croire qu’elle puisse dévorer des rats, même les plus petits ; elle doit vivre de scarabées ou d’autres insectes, dont on a dit en effet qu’elle faisoit sa proie ; et elle les saisit avec d'auiant plus de faci- lité, que, suivant Catesby, elle passe sa vie sur les arbres, cachée sous les feuilles et entortillée autour des rameaux, qu’elle peut parcourir avec rapidité. Elle n’attaque point l’homme, et on la trouve dans l’île de Ceylan, en Guinée, ainsi que dans la Caro- line, et plusieurs autres contrées chaudes du nouveau monde. CRAN AY AAA A NV ANS VV RAA A AAA AAA AR A AR RAA RAA LA GROSSE-TÈTE. Nous donnons ce nom à une coulcuvre d'Amérique qui, en ef- fet, a la tête beaucoup plus grosse que la partie antérieure du corps. Elle n’a point de crochets mobiles; neuf grandes écailles, disposées sur quatre rangs, couvrent le sommet de sa tête, et celles qui garnissent son dos sont ovales et unies. Un individu de cette espèce, conservé au Cabinet du Roi, a deux pieds cinq pouces six lignes de longueur totale, et six pouces trois lignes depuis l’anus jusqu’à l'extrémité de la queue, qui se termine par une pointe très-déliée. Nous avons compté cent quatre-vingt-treize grandes plaques et soixante-dix-sept paires de petites. Le dessus d u corps de la grosse-tête est d’une couleur foncée, relevée par des bandes transversales et irrégulières d’une couleur plus claire ; mais l’individu que nous avons “décrit éloil trop altéré L] 1 Laqueue étoit longue d’un pied onze pouces. DE LA MOUCHETÉE. 527 par l’esprit-de-vin, dans lequel il avoit été conservé , pour que nous puissions rien dire de plus relativement aux couleurs de cette espèce. RAA AAA VOA VA VIA AT AAA AA VOS LUNA VUE AA AAA VE TVA VIS VAR ALU LES LULU AAA UMAMALS LA COURESSE. event C'ssr de la Martinique que cette couleuvre a été envoyée au Ca- binet du Roi, par feu M. de Chanvalon, Ses couleurs sont belles : le dessus de son corps est verdâtre, et présente deux rangées lon- gitudinales de petites taches blanches et allongées; le dessous et les côtés du corps sont blanchâtres. Celte couleuvre n’a point de crochets mobiles. Le sommet de sa tête est garni de grandes écailles, et le dos l’est d’écailles ovales et unies. L’individu que nous avons décrit: avoit denx pieds dix pouces sept lignes de longueur totale, neuf pouces sept lignes de- puis l'anus jusqu’à l’extrémité de la queue, cent quatre-vingt-cinq grandes plaques, et cent cinq paires de petites. La couresse est aussi timide que peu dangereuse; elle se cache ordinairement lorsqu'elle aperçoit quelqu'un, ous’enfuitavec tant- de précipitation, que c’est de là que vient son nom de couresse , ou coureresse. AR ARBRE AA AA AAA AAA AAA AAA AAA AA UV AAA AAA AA AAA AAAAAAUMIRANA LA MOUCHETÉE. C'est nn très-beau serpent , et dont les habitudes diffèrent beau- coup de celles de la nasique , du boïga , et d’autres couleuvres qui se tiennent sur les arbres : 1l passe sa vie dans des trous souter- rains, Où 1l trouve apparemment, avec plus de facilité qu’ail- leurs , les vers et les insectes dont il se nourrit. C’est dans la Ca- roline qu'il a été observé par MM. Catesby et Garden ; et lorsque, dans les mois de septembre et d'octobre, on fait dans cette con- trée la récolte des patates , on le trouve souvent dans des cavités auprès des racines de ces plantes, qui peut-être servent de nour- riture à sa pelte proie. Son corps est cependant très-menu en 598 HISTOIRE NATURELLE proportion de sa longueur, et il est en tout conformé de manière à pouvoir parcourir les rameaux des arbres les plus élevés avec au- tant de rapidité que la plupart des couleuvres qui vivent dans les forêts et sur les plus hautes branches : tant il est vrai que les habi- tudes des animaux sont le résultat, non-seulement de ieur con- formation, mais de plusieurs circonstances qu'il est souvent très- difficile de deviner. Le dessus du corps de la mouchetée est d’un gris hvide, et pré- sente de grandes taches d’un rouge très-vif, arrangées longitu- dinalement; on voit de chaque côté un rang de taches jaunes, qui correspondent aux intervalles des taches rouges, et souvent une bande longitudinale noire. Le dessous du corps présente des taches noires, carrées, et placées alternativement à droite et à gauche. Cette espèce n’est pas venimeuse; elle a ordinairement deux Cent vingt-sept grandes plaques et soixante paires de petites. AA AAA AAA VAL AAA LA AAA A MAS AAA AAA MMA MAUVE LA CAMUSE. NL. le docteur Garden 2 fait connoître cette espèce, qu’il a ob- servée dans la Caroline, et dont ila envoyé un individu à M. Linné. Elle a la tête arrondie, relevée en bosse, et le museau court ; ce qui l’a fait nommer par M. Linné, coluber simus ( couleuvre ca- muse). On voit , entre les yeux de ce serpent, une petite bande noire et courbée ; sur le sommet de sa tête paroît une croix blan- che, marquée au milieu d’un point noir ; le dessus du corps est varié de noir et de blanc, avec des bandes transversales de cette dernière couleur, et le dessous du corps est noir. £ Cette espèce a cent vingt-quatre grandes plaques et quarante- six paires de petites. AAA A AAA AU M AAA VU AU VAR VUS AU UV UV MU UV VV MU MU VU MU AMAMY LA STRIÉE. Nous ne connoissons cette couleuvre que par ce qu’en a dit M. Linné ; le nom qu'elle porte lui a été donné à cause des DE LA PONCTUÉFE. boÿ diverses siries quejprésente son dos, et qui doivent être produites par la forme des écailles, relevées vraisemblablement par uné arête longitudinale. Ge serpent ne parvient point à une grandeur considérable; le dessus de son corps est brun, et le dessous d’une couleur pâle ; sa têle est couverte d’écailles lisses. On le trouve à la Caroline, et c’est M. le docteur Garden quia envoyé à M. Linné des individus de cette espèce *. Il se pourroit qu'on dût regarder comme une couleuvre striée, un serpent de la Caroline figuré dans Catesby (tome IX, pl. 46): ceserpent a , en eflet , les écailles du dos relevées par une arête , le sommet de sa tête garni de neuf grandes écailles lisses , le dessus de son corps brun , et le dessous d’un rouge de cuivre , qui, altéré par lesprit-de-vin ou par quelque autre cause , peut aisément devenir , après la mort de animal, la couleur pâle indiquée par M. Linné pour le dessous du corps de la striée. Ce serpent figuré dans Ca- tesby se tient souvent dans l’eau, et, suivant ce naturaliste, doit se nourrir de poissons; 1l dévore aussi les oiseaux et les autres petits animaux dont il peut se rendre maître. Sa hardiesse est aussi grande que ses mouvemens sont agiles; il entre dans les basses-cours, y mange la jeune volaille, et y suce les œufs : mais il n'est point venimeux. | RAA AA AAA VERS LA AAA AE RAA AAA AAA AA UMA AAA AR AA VAL LA PONCTUÉE. Czrre couleuvre présente ordinairement trois-couleurs : le des- sus de son corps est d’un gris cendré , le dessous jaune; et, sous le ventre , on voit neuf petites taches ou points noirs, disposés sur trois rangs de trois points chacun. Cette espece habite la Caroline, où elle a été observée par M. le docteur Garden. La ponctuée a cent trente-six grandes plaques et quarante-trois paires de petites. . 1 La striée a cent vingt-six grandes plaques et quarante-cinq paires de petites. Lacepède. 1. , 37 #50 HISTOIRE NATURELLE RAA AAA AR AA LV REV EE TM LAURE LE BLUET. Cssr en Amérique qu'on trouve ce serpent, dont les couleurs présentent un assortiment agréable et, pour ainsi dire, élégant. Le dessus de son corps est ue. et M écailles qui avai ut le os de celte couleuvre sont ovaies et presque mi-parties de blanc et de bleu ; le sommet de la tête est bleuâtre ; la queue, très-déliée, surtout vers son extrémité, d’une couleur bleue, plus foncée que celle du corps , et sans aucune tache". AAA AAA AE AAA A RAR AAA UMA VERRA AAA NAT AA AA LE VAMPUM. kr est le nom que ce serpent porte dans la Caroline et dans Ia, Virginie, suivant Catesby, et il a été donné à cette couleuvre, à cause du rapport que les nuances et la disposition de ses couleurs ont avec une monnoie des [Indiens , nommée #ampum. Cette monnoie est composée de petites coquilles taillées d’une manitre régulière , et enfilées avec un cordon bleu et blanc. Le dessus du corps du serpent est d’un bleu plus où moins foncé , et quelque- fois presque noir sur le dos, avec des bandes blanches transver- sales , et partagées en deux sur les côtés ; le dessous du corps est d’un bleu plus clair, avec une petite bande transversale brune sur chaque grande plaque; et de toute cette disposition de couleurs 1l résulte des espèces de taches, dont la forme approche de celle des coquilles tailiées qui servent de monnoie aux Indiens. Le vampum parvient jusqu’à cinq pieds de longueur; il n’est point venimeux, mais vorace; et il dévore tous les petits ani- maux, trop foibles pour lui résister. Sa tête est petite, en propor- &ion de son corps; elle est couverie de neuf grandes écailles, et celles du dos sont ovales et relevées par une arète * 1 Le bluet a cent soixante-cinq grandes plaques et vingt-quatre paires de etites. 8 Le vampum a cent vinst-khuit grandes plaques et soixante-sept paires de DE LA TÉTE-NOIRE. 551 RAA A VU LA LU VA AIS UT LR TE UT RAR US AR ELA VA MA VA VEUT LE COBEL. a Crrre couleuvre se trouve en très-grand nombre en Amérique. Elle est d’un gris cendré , et présente un grand nombre de petites aies blanches, et placées obliquement relativement à l'épine du dos. Quelquefois elle présente aussi des bandes transversales et blanchätres. Le dessous du corps est blanc ; le ventre traversé par un grand nombre de bandes noïirâtres, el inégales , quant à leur largeur; et l’on voit derrière chaque œil une tache d’une couleur un peu livide, et placée obliquement comme les petites raies du dos. Le sommet de la tête est couvert te neuf grandes écailles dis- posées sur quatre rangs , et cette couleuvre a cent cinquante gran- des plaques et cinquante- quatre paires de petites. Un individu de cette espèce, que nous avons décrit, avoit un pied quatre pouces neuf lignes de longueur totale , et sa queue étoit longue de trois ponces dix lignes. BAS VAN RAR AAA VAR AA AAA AA AAA VAR VUE EUR RURALE VAR VAR AAA LA TÉTE-NOIRE. Cr serpent a , en eflet, la tête noire, et le dessus du corps brun ; il présente quelq uefois des taches blanchâtres , et placées transver- salement. Le dessus du corps est varié de blanchâtre, et d’une couleur très-foncée, par taches, dont la plupart sont placées transversalement et ont la forme d’un parallélogramme. Les écailles qui couvrent la tête sont grandes, au nombre de neuf, et disposées sur quatre rangs. Gelles qui garnissent Le dos sont ovales et unies. La tête-noire se trouve en Amérique, et elle a ordinai- rement * cent quarante grandes plaques et soixante-deux paires de petites. petites. Un jeune individu de cette espèce , conservé au Cabinet du Roi, a un pied dix pouces de longueur totale, et sa queue est longue de six pouces 1 Un individu de cette espèce, conservé au Cabinet du Roi, a deux pieds ja ©. HISTOIRE NATURELLE RAA AR VAR AMAR AAA VA LRU AMAR VAT AAA VAE L’'ANNELÉE. De Cire couleuvre habite la Caroline, ainsi que Saint-Domingue, d'où un individu de cette espèce a été envoyé au Cabinet du Roi. Ces noms de diverses parties de l’Amérique voisines des tropiques retracent toujonrs l’image de terres fécondes , qu’une humidité abondante et les rayons vivifians du soleil couvrent sans cesse de nouvelles productions, bien plus précieuses et moins funestes que les métaux trop recherchés qu’elles cachent dans leur sein. L'art de l'homme ne doit, pour ainsi dire, dans ces terres fertiles , que modérer les forces de la Nature. Ce qui appartient à ces cli- mats favorisés , attirera donc toujours l'attention ; nous n’avons pas besoin de chercher à l'environner d’ornemens étrangers, pour faire désirer de le connoître ; et les personnes même qui n'au- ront pas résolu de suivre l’histoire naturelle jusque dans ses pe- tits rameaux seront toujours bien aises d'observer, en quelque sorte, de près tous les objets que l'on rencontre dans ces belles et lointaines contrées. L'annelée est d’un blanc ordinairement assez éclatant , et pré sente des bandes transversales noires , ou presque noires, qui s'étendent sur le ventre, et forment des anneaux autour du corps; mais la partie supérieure et la partie inférieure de ces anneaux ne se correspondent pas exactement. Quelquefois une petite bande lonsitudinale , d’une couleur très-foncée, règne le long du dos ; le cou est blanc : le dessus de la tête, presque noir, et garni de neuf grandes écailles ; le dos est couvert d’écailles unies et en lo- sange. Un individu de cette espèce, qui fait partie de la collec- tion du Roi, a sept pouces quatre lignes de longueur totale, et un pouce cinq lignes depuis l'anus jusqu’à l'extrémité dela queue. L'annelée n’a point de crochets mobiles *. a —————————————————— an pouce sept lignes de longueur totale , et quatre pouces six lignes depuis l’anus jusqu’à l'extrémité de la queue. : 1 Elle a le plus souvent cent soixante-quatre grandes plaqnes et quarante-trois paires de petites. 18 Page 582. Se BSSSS SSSR CE a ro Dequevawiller DE Trètre. px. ; x / 1. La Mouchetee. ....Page 527. bb — 2 1danelee APRES, La Chotoyante.. 0644. « \ « D ABURE ;) 5 DE LA LAPHIATI 533 DAT VA LV VU AAA LA AAA AAA VU AAA VVAAIAAA AAA VA AAA AAA AAA AARAAS TA AAA ARS L’AURORE. Lr: couleurs de cette coulenvre peuvent la faire distinguer de Join : une bande longitudinale d’un beau jaune règne au-dessus de son corps, et paroit d'autant plus vive, que le fond de la cou- leur du dos est d’un gris pâle , et que souvent chaque écaille comprise dans la bande est bordée d'orangé ; le dessus de la tête est jaune avec des points rouges; et c’estce mélange d’orangé, de rouge et de jaune, qui a fait donner à la couleuvre aurore le rom qu'elle porte. Ce serpent se trouve en Amérique, et a cent soixante- dix-neuf grandes plaques et trente-sept paires de petiles. REA AAA AAA A AA A A AAA AA A AA AAA VIA PARAMARARAMAARARAS LE DARD. EPL SET O Crrre couleuvre a beaucoup de rapports, suivant M. Linné, avec la rayée. Elle est d’un gris cendré, avec une bande noirûtre, dont les bords sont d’un noir foncé, et qui s'étend au-dessus du dos, depuis le museau jusqu’à l'extrémité de la queue; une bande semblable, mais plus étroite , règne de chaque côté du corps, dont le dessous est blanchätre. Ge serpent a été vu à Surinam *. Il est bon d'observer que ce nom de dard ( jaculus) a été donné à plu- sieurs serpens tant de l’ancien que du nouveau monde, à cause de la faculté qu’ils ont de s’élancer , pour ainsi dire, avec la rapi- dité d’une fleche. SRRANNANY UV NU M VU AAA AAA ANA MUVRARRANAR AAA AAA AAA AS LA LAPHIATI Tr est le nom que l’on a donné, dans l'Amérique méridionale, à cette couleuvre du Brésil , dont les couleurs sont très - belles , * Le dard a cent soixante-trois grandes plaques et soixante-dix-sept paires de petiles. 534 HISTOIRE NATURELLE suivant Seba. M. Linné, qui la décrite, lui en attribue de moins brillantes; mais peut-être les nuances de l'individu qu'il a ob- servé avoient-elles été altérées. Selon ce naturaliste, la laphiati est grise , avec des bandes transversales blanches, qui se divisent en deux de chaque côté. Si les quatre extrémités de ces bandes se réunissent avec celles des bandes voisines , la distribution de couleurs indiquée par M. Linné sera à peu près semblable à celle dont parle Seba ; mais ce dernier auteur suppose du roux à la place du gris, et du jaunâtre à la place du blanc. Le sommet de la tête de la laphiati est blanc. Cette coulenvre à cent quatre-vingt-quatre grandes plaques et soixante paires de petites. AAA AM AAA VAN AAA A AU AAA AU AV AAA UV MAY LA VUV LE 4 LA NOIRE ET FAUVE. nas nm Tr nom de cette couleuvre désigne ses couleurs : son corps est entouré en effet de bandes transversales noires, ordinairement au nombre de vingt-deux, et d’autant dé bandes fauves, bor- dées de blanc et tachetées de brun, placées alternativement. Le museau et la partie supérieure de la tête sont quelquefois noi- râtres. La queue de ce serpent est très-courte, et n’a guère de lon- gneur que le douzième de la longueur du corps. On trouve la noire et fauve à la Caroline, où elle a été observée par M. Garden. Elle a deux cent dix-huit grandes plaques et irente-une paires de petites *. LU AU A AAA AN A AAA AAA A A A A AV A A AAA AA RS LA CHAINE. Carssur a donné la figure de ce serpent, qu'il a vu dans la Ca- roline , et qui y a été ensuite observé par M. le docteur Garden. Le dessus du corps de cette couleuvre est d’un bleu presque noir ; : ; tie t Le sommet de sa tête est garni de neuf grandes écailles , son dos l’est d écailles hexagpnes et unies. Une noire et fauve, conservée au Cabinet du Roi, a un pied ouze pouces de longueur totale, ct sa queue est longue de deux pouces. DE LA RUBANÉE. 535 avec des bandes jaunes transversales très-étroites , et composées de petites taches qui leur donnent l'apparence d’une petite chaine. Le dessous du corps est de la même couleur bleue, avec de pe- tites taches jaunes presque carrées. La longueur de la queue de ce serpent n’est ordinairement ‘qu'un cinquième de celle du corps. L'individu décrit par Catesby avoit à peu près deux pieds et demi de longueur totale *. RARAAAAARAA AAA VAR AA RAA AA AAA AAA AS AAA VRAI A A EE AAA LA RUBANÉE. P LUSTEURS raies en forme de rubans , et d’une couleur noire ou très-foncée, s'étendent au - dessus du corps de cette couleuvre, sur un fond blanchätre. Les grandes plaques qui revêtent le des- sous du ventre sont bordées de brun, et l'on voit sous la queue une pelite bande longitudinale blanche et dentelée. La tête est noire, avec de petites lignes blanches et tortueuses ; elle est d’ailleurs irés-allongée, large par-derrière, et semblable, en petit, à la tête d’un chien, de même que celle du molure, de la couleuvre dou- ble-tache et de plusieurs boa. Les écailles qui recouvrent le dos sont ovales et petites * La rubanée fait entendre un sifflement plus fort que celui de plusieurs autres couleuvres , lorsqu'elle est effrayée par la pré- sence soudaine de quelque objet ; c'est ce sifflement AQU lques voyageurs ont appelé une sorte de rire moqueur, ou l'expression d’un désir assez vif d’être regardée et admirée pour ses couleurs; et c’est pour indiquer quelle espèce avoit donné lieu à cette er- reur, que M. Daubenton a appliqué à la rubanée le nom de serpent moqueur, dont on s'étoit déjà ‘servi pour désigner plu- sieurs serpens. La rubanée se trouve en Amérique, et peut-être aussi en Âsie. * La chaîne a deux cent quinze grandes plaques et quarante paires de petites. 2 Cette coulenvre a ordinairement cent quarante-denx grandes plaques æ soizante-dix-huit paires de petites, 536 HISTOIRE NATURELLE RAR VUE PME ALL ML UMA LA UE RUE VRAI AV, LA MEXICAINE. M. Linné a nomimé ainsi une couleuvre dont ila parléle premier. Elle se trouve en Amérique, etvraisemblablement au Mexique. Elle doit, comme les autres petits serpens , y servir de proie à l’hoazin , espece de faisan , qui habite les contrées de l'Amérique septentrionale voisines des tropiques, et qui fait la guerre aux serpens ;, de même que les aigles, les ibis, les cigognes , et plusieurs antres oiseaux. Dans les pays encore très-peu habités, où une chaleur très-forte et des eaux stagnantes , sources de beaucoup d'humidité, favorisent la multiplication des divers reptiles, il est avantageux , sans doute, que les serpens venimeux, et dont la morsure peut donner la mort , soient détruits en très - grand nombre; on devroit désirer de voir anéantir ces espèces funestes , etilnest point surprenant que les oiseaux qui en font leur pâture, que les 1bis en Egypte, les cigognes dans presque toutes les con- trées , et particulièrement en Thessalie, aient été regardés comme des animaux tutélaires, et que la religion el les lois se soient réunies pour les rendre en quelque sorte sacrés. Mais pourquoi ne pas laisser subsister les espèces qui, ne contenant aucun poi- son, et ne jouissant pas d’une grande force , ne peuvent être dan- gereuses ? Pourquoi ne pas les laisser multiplier, surtout auprès des campagnes cultivées, qu'elles délivreroient d’un grand nombre d'insectes nuisibles, et où elles ne pourrotent faire aucun dégât, puisqu'elles ne se nourrissent pas des plantes qui font l’espoir des cultivateurs ? Parmi ces espèces, plus utiles qu'on ne l’a cru jusqu’à présent, l'on doit compter la mexicaine, puisque, suivant M. Linné, elle n’est point venimeuse, et qu’elle ne parvient pas à une grandeur considérable. Elle a cent trente-quatre grandes plaques et soi- xante-dix-sept paires de petites. C'est tout ce que M. Linné à publié de la conformation de ce serpent DE LA NÉBULEUSE. 537 ARR AAA EE AAA AAA AAA AAA ANA AA AAA AU VV AY At LE SIPÉDE. a) Cr serpent a été observé par M. Kalm, dans l'Amérique septen- trionale. Sa couleur est brune, et il a ordinairement cent qua- rante-quatre grandes plaques etsoixante-treize paires de petites. AAA VU MU AVG VU MU UE VUE UV UV AU UV A AAA VS AU AV VU VU AA LR ARR LA VERTE ET BLEUE. C ETTE couleuvre ressemble beaucoup, par sa conformation, au boiga : elle en a les proportions légères, mais elle n’en présente pas les couleurs brillantes ; celles qu’elle offre sont cependant très- agréables. Le dessus de son corps est d’un bleu foncé sans aucune tache, et le dessous ; d’un vert pale. Ce serpentne parvient pas ordinairement à une longueur con- sidérable : sa longueufftotale est communément de deux pieds, et celle de sa queue, de six pouces. Il a le sommet de la tête garni de grandes écailles , le dos couvert d’écailles ovales et unies, cent dix-neuf grandes plaques et cent dix paires de petites. On trouve la verte et bleue en Amérique. M. Linné l’a placés parmi les couleuvres qui n’ont pas de venin. AV ARAMANAANAANUV AMAR ANA A A AA AAA UV AMV A AS LA NÉBULEUSE. Les couleurs de cette couleuvre ne sont pas irès-agréables, et c'est une de celles que l’on doit voir avec le moins de plaisir. Elle a le dessus du corps nué de brun et de cendré, Le dessous va- rié de brun.et de blanc. C'est donc le bleu qui domine dans les couleurs qu’elle présente, sans qu'aucune distribution symétri- que, ou qu'aucun contraste de nuances, compense l'ellet des teintes obscures que lon voit sur ce serpent. 558 HISTOIRE NATURELLE La nébuleuse habite l'Amérique, et'elle a ordinairement cent quatre-vingt-cinq grandes plaques et quatre-vingt-une paires de petites. Elle n’est point venimeuse, suivant M. Linné; mais il arrive quelquelois que lorsqu'on passe trop près d'elle, et qu’on l’excite ou l'effraie , elle se dresse , s’entortille autour des jambes, et les serre assez fortement. RAA AAR RANAAAVBAULR VUR VA AVR VA ANA AA AAA LEA LUE AA AR AA TUE VIA UMA LE SAURITE. ons, Cr serpent a beaucoup de rapports avec les lézards gris et les lézards verts, non-seulement par les nuances de ses couleurs , mais encore par son agilité ; et voilà pourquoi il a été nommé sau- rile | qui vient du mot grec eæÿpos ( lézard ). Son corps est irès-dé- hé; ses proportions sont agréables, et l’on doit le rencontrer avec d'autant plus de plaisir, qu'élant très-actif, 1l réjouit la vue par la rapidité et la fréquence de ses mouvemens. Le saurite est d'un brun foncé, avec trois raies longitudinales blanches où vertes, qui s'étendent depuisga tête jusqu'au-dessus de la queue. Il a le ventre blanc, cent cinquante-six grandes plaques et cent vingl-une paires de pelites. On le trouve dans la Caroline ; 1l n’est point venimeux. RAARAA IAA AA AAA VAR RAA VA AAA AA AA RAA AA AA AAA AA RAA AURA AVR LE LIEN. DER espèce de serpent est irès-répardue dans la Caroline et dans la Virginie , où elle a été observée par MM. Catesby et Smith. Elle a le dessus du corps d’un noir très-foncé et très-éclatant ; le dessous d’une couleur bronzée ou bleuâtre, quelquefois la gorge blanche et les yeux étincelans. Cette couleuvre parvient à la lon- gueur de six ou sept pieds. Elle n’est point venimeuse, mais très- forte, se défend avec obstination lorsqu'on l'attaque, saute même contre ceux qui lirritent, s’entortille autour de leur corps ou de leurs jambes, el les mordavecacharnement; mais sa mosure n’est DU SIRTALE 539 point dangereuse. Élle dévore desanimaux assez gros, tels que des écureuils; ee avale même quelquefois les petites grenouilles tout entières; et comme elles sont très-vivaces , on l’a vue en rejeter en vie. Elle se bat avec avantage contre d’autres espèces de ser- pens assez grands , et particulièrement contre les serpens à son- nettes, auxquels elle donne la mort en se pliant en spirale autour de leur corps, se contractant avec force et les serrant jusqu’à les étoufler. La couleuvre lien fait aussi la guerre aux rats et aux souris, dont elle paroît se nourrir avec beaucoup d’avidilé , et qu'elle poursuit avec une très-grande vitesse jusque sur les toits des mai- sons et des granges. Elle est par là très-utile aux habitans de la Caroline et de la Virginie; elle sert même plus que les chats à délivrer leurs demeures des petits animaux destructeurs qui les dévasteroient, parce que sa forme très-allongée et sa souplesse lui permettent de pénétrer dans les pelits trous qui servent d'a- sile aux souris où anx rats : aussi plusieurs Américains cher- _chent-ils à conserver et même à multiplier cette espèce *. RAA AAA AAA AA AA AA AAA UV AURA AAA AVR AA AAA AVR VUE AVR AAA AVR AA RAR AR LE SIRTALE. M. Kalm a observé dans le Canada cette espèce de couleuvre, dont les couleurs, sans être très-brillantes, sont assez agréables, et ressemblent beaucoup à celles du saurite. Elle a le dessus du corps brun, avec trois raies longitudinales d’un vert changeant en bleu. Le dos paroît légèrement strié, suivant M. Linné; ce qui suppose que les écailles qui Le couvrent sont relevées par une arête. Le sirtale a cent cinquante grandes plaques et cent quatorze paires de petites. * Le lien a cent quatre-vingt-six grandes plaques et quatre-vingt-deux paires de petites, 5io HISTOIRE NATURELLE RAARAAAA NA IAAR AA AAA AVENIR AR RAR URL AA WAVE VA RAR AAA NA A AS RAA RAA AAA LU AAA LA QE LA BLANCHE ET BRUNE. à Carre couleuvre habite l'Amérique. Le dessus de son corps est d’une couleur blanchâtre , avec des taches brunes, arrondies, et réunies deux ou trois ensemble en plusieurs endroits; on en voit deux derrière les yeux. Le dessous de son corps est d’un blanc tirant plus ou moins sur le roux. Elle a le sommet de la tête garni de neuf grandes écailles disposées sur quatre rangs, le dos couvert d'écailles lisses et ovales, cent quatre-vingt-dix grandes plaques et quatre-vingt-seize paires de petites. La blanche et brune n’a point de crochets mobiles. Un indi- vidu de cette espèce, conservé au Cabinet du Roi, a un pied six pouces de longueur totale , et sa queue est longue de quaire- pouces six lignes. RAA LR AR AN AAA EAU R VU AVR VRA VALVE AVAL RAS UT IVAA AAA AAA RAY LA AAA AAA AAA AAA, LA VERDATRE,. Ces Le couleurs de celte couleuvre sont très-agréables; maïs sa douceur est encore plus remarquable. Le dessous de son corps est d’un vert plus ou moins clair ou plus ou moins mêlé de jaune; le dessus est bleu , suivant M. Linné, et vert, suivant M. Ca- tesby, qui l'a observée dans le pays qu’elle habite. C’est dans la Caroline qu’on la rencontre. Aussi déliée , aussi agile que Île boïiga , elle peut, comme lui, parcourir les plus légers rameaux des arbres les plus élevés ; et c’est sur les branches qu’elle passe sa vie , occupée à poursuivre les mouches et les petits insectes dont elle se nourrit. Elle est si familière , et l’on sait si bien, dans la Caroline, combien peu elle est dangereuse , que, suivant Ca- tesby, on se plaît à la manier, et que plusieurs personnes la portent sans crainte dans leur sein. N’étant vue qu'avec plaisir, on ne cherche pas à la détruire : aussi est-elle très-commune dans la plupart des endroits garnis d'arbres ou de buissons ; et ce doit être un spectacle agréable que de voir les innocens ant- \ DU CENCO. | 5äi maux qui composent cette espèce, entortillés autour des bran- ches, suspendus aux rameaux, et formant, pour ainsi dire, des guirlandes animées au milieu de la verdure et des fleurs, dont l'éclat n’efface point celui de leurs belles écailles. La verdâtre a cinquante-cinq grandes plaques et cent quarante- quatre paires de petites. La longueur de la quene est ordinaire- ment un tiers de la longueur du corps, et les écailles du dos ne sont point relevées par une arête. RAA AAA AAA AAA MARAIS AAA AAA RAA AAA RAA AR AA AAA LA VERTE. Cr nom désigne très-exactement la couleur de cette couleuvre , dont le dessus et le dessous du corps sont en effet d’un beau vert, plus clair sous le ventre que sur le dos. Ce serpent a le sommet de la tête couvert de neuf grandes écailles , disposées sur quatre rangs ; le dessus du corps garni d’écailles ovales et unies ; deux cent dix-sept grandes plaques et cent vingt-deux paires de pe- tites. Ses mâchoires ne sont point armées de crochets mobiles, et un individu de cette espèce, conservé au Cabinet du Roi, a deux pieds deux pouces neuf lignes de longueur totale, et sept pouces une ligne de puis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue. AAAARAA RAA NRA AAA ARR AAA AA AE AA AA PARA AAA A LE CENCO. PARA RAA AAA SIAUIA Cr serpent a la tête très-grosse à proportion du corps : elle est d’ailleurs presque globuleuse, ses angles étant peu marqués, et la couleur de cette partie est blanche, panachée de noir. Le cenco parvient quelquefois à la longueur de quatre pieds sans que son corps, qui est très-délié, soit alors beaucoup plus gros qu'une plume de cygne. La longueur de la queue est ordinairement égale au tiers de celle du corps. Le cenco a le sommet de la tête couvert de neuf grandes écailles , le dos garni d'écailles ovales et unies , le dessus du corps brun, avec des taches blanchâtres ; ou d'un brun ferrugineux, accompagnées, dans quelques individus, 54s HISTOIRE NATURELLE d’autres taches plus petites, mais de la même couleur, et quel- quefois avec plusieurs bandes iransversales et blanches. Il se trouve en Amérique, et il y vit de vers et de fourmis". RAR AAA AAA AAA AAA A EMMA AA AURA AR AA RAA AAA AAAIRAAAA AAA AAA LE CALMAR. He couleuvre est d’une couleur livide, avec des bandes transversales brunes , et des points de la même couleur disposés de manière à former des lignes. Le dessous de son corps présente des taches brunes, comme les points et les bandes transversales, presque carrées , et placées syméiriquement. On voit sur la queue une raie longitudinale et couleur de fer. Ce serpent, qui n’est remarquable ni par sa conformation n1 par ses couleurs, habite en Amérique, et a cent quarante grandes plaques et vingl-deux paires de petites. AAA AAA A VU AAA VE UV VU LEAVE VEUVE LUE NUIT UE IAUT INVITER VAAIAMAIN/VA L’OVIVORE. De M. Linné a donné ce nom à une couleuvre d'Amérique, dont il n'a fait connoître que le nombre des plaques ; elle en a deux cent trois, et soixante-treize paires de pelites. Il cite, au sujet de ce serpent, Kalm, sans indiquer aucun des ouvrages de ce natu- raliste, et Pison, qui, selon lui, a nommé l’ovivore guinpua- guara, dans son ouvrage intitulé : Medicina Brasiliensis. Pison y dit, en effet, que l’on trouve dans l'Amérique méridionale un serpent qui se nomme guinpuaguara ; mais on ne voit dans Pison , ni dans Marcgrave, son continuateur, aucune description de ce reptile, ni aucun détail relatif à ses habitudes. M. Linné a vraisemblablement nommé cette couleuvre ovivore, pour mon- trer qu’elle se nourrit d'œufs, ainsi que plusieurs autres serpens, et qu’elle en est même plus avide. oo 1 Il a deux cent vingt grandes plaques et cent vingt-quatre paires de petites, DE LIBIBE. 545 PRAVESAVE UVEAAATUS VU ULTIMATE AURAI MITA MA LE FER-A-CHE VAL. Ox voit , sur le corps de cette couleuvre, un grand nombre de taches rousses , disposées sur un fond de couleur livide. Le dessus cle la tète présente des taches en croissant, l’entre-deux des yeux une bande transversale et brune, et l’occiput une grande tache en forme d'arc ou de fer-à-cheval. Telles sont les couleurs de ce serpent d'Amérique, qui a deux cent trente-deux grandes pla- ques et quatre-vingts paires de petites. L'on conserve au Cabinet du Roi une couleuvre qui a beau coup de rapports avec le fer-à-cheval. Elle à le sommet de la tête garni de neuf grandes écailles; le dos couvert d’écailles rhomboï- dales et unies ; Le dessus du corps livide avec des taches brunes ; quatre taches noirâtres et allongées de chaque côté de la partie antérieure du corps ; quatre autres taches noirâtres, également allongées, placées sur le cou, et dont les deux extérieures sont inclinées et se*rapprochent vers l’occiput ; un pied dix pouces de longueur totale ; quatre pouces six lignes depuis l'anus jusqu'à extrémité de la queue, deux cent quarante-une grandes pla- ques, et soixante-dix-neuf paires de petites : elle n’est pas veni- meuse , non plus que le fer-à-cheval. RER ANR IAA AAA AA AAA AAA AA VA ARS RAA VUE VAR VE VAAAAAAAMAAANVE L’'IBIBE. No us conserverons à cette couleuvre le rom d’ibibe, qui lui a été donné par M. Daubenton , et qui est une abréviation du nom ibiboca, sous lequel elle est décrite dans Seba. Ce serpent a été observé, dans la Caroline, par MM. Catesby et Garden ; il est d’un vert tacheté, suivant Catesby, et bleu, suivant M. Linné, avec des taches noires comme nuageuses. On voit, de chaque côté du corps, une rangée de points noirs, placés ordinairement à l'extrémité des grandes plaques ; et quelquefois une raie d’un vert foncé , ou, au. contraire, d’une couleur assez claire, s'étend le long du dos. 544 HISTOIRE NATURELLE L'ibibe a le sommet de la tête garni de neuf grandes écailles ; le dessus du corps couvert d’écailles evales , et leve par une arête; cent trente-huit grandes plaques, et soixante-douze paires de petites. | Un individu de cette espèce , qui fait partie de la collection de sa majesté , a deux pieds de longueur totale, et sa queue’est longue de quatre pouces dix lignes. La disposition des grandes écailles qui couvrent le dessous de sa queue n’est pas la même que dans les autres espèces de couleuvres ; il présente quatre grandes plaques entre l'anus et les premières paires de petites. L’ibibe n’est pomt venimeux; il se glisse quelquefois dans les basses-cours ; il y casse et suce les œufs, mais il n’est pas ordi- nairement assez grand pour dévorer même la plus petite volaille. PARA VALUE VAR VAL RAA AVR SAR AAA VIA AAA VAS LUS MIA AAA VER LA CHATOYANTE. ML. le comte de Rasoumowsky nomme ainsi une petite cou- leuvre qui se trouve aux environs de Lausanne. Elle parvient à un pied et demi de longueur, et à la grosseur d’une plume d'oie ou de cygne; elle est luisante comme si elle étoit enduite d'huile ; le dessus de son corps est d’un gris cendré, avec une bande Ion- gitudinale, brune, formée de petites raies transversales , et dis- posées en zigzag; les grandes et les petites plaques sont d’un rouge Dunes tachetées et blanc et bordées de bleuâtre du côté de l'extrémité de la queue. Ces plaques sont chatoyanies au grand jour , et produisent des reflets d’un beau bleu. Les écailles du dos le sont aussi, mais beaucoup moins. Une tache brune, un peu en forme de cœur, est placée sur le sommet de la tête, qui est couvert de neuf grandes écailles *. Les yeux sont noirs, petits, animés , et l'iris est rouge. On a rencontré la chatoyante auprès des eaux ou dans des fossés humides. M. le comte de Rasoumowsky ne la regarde pas comme venimeuse. 1 La chatoyante a depuis cent cinquante-six jusqu’à cent soixante-une granctes plaques et cent treize paires de petites, DE LA SUISSE. 545 2 RAR VUE VU AVR EUR LE TUE AA VUS LAN VUE LAN AAA LR AL UE VERRA LE RAT VAT AULULA NC ARA SUIVRA LA SUISSE. Ci M. le comte de Rasoumowsky qui a fait connoître cette couleuvre; 1l l'a nommée couleuvre vulgaire : mais, comme cette épithète de vulgaire a été donnée à plusieurs espèces de serpens, nous avons«ru ne pouvoir éviter toute confusion qu’en dési- gnant par un autre nom le reptile dont nous traitons dans cet arlicle. Nous l’indiquons par celui du pays où il a été observé. Il est d’un gris cendré , avec de petites raies noires sur les côtés; et l'on voit sur le dos une bande longitudinale, composée de pe- tites raies transversales , plus étroites et d’une couleur plus pâle; le dessous du corps est noir avec des taches d’un blanc bleuâtre, beaucoup plus grandes sous le ventre que sous la queue”. La couleuvre suisse parvient jusqu’à trois pieds de longueur : elle paroît aimer le voisinage des eaux et les ombres épaisses; on la trouve dans les fossés et dans les buissons qui croissent sur un terrain humide; et on la rencontre aussi dans les bois du Jorat. Elle dépose ses œufs, enété, dans des endroits chauds, et surtout dans du fumier où elle les abandonne : on a assuré à M. Rasou- mowsky qu'ils étoient attachés ensemble, et au nombre de qua- rante-deux on plus ; ils sont renfermés dans une membrane blanche, mince comme du papier, et qui se déchire facilement. Le serpenteau est plein de force et d’agilité en sortant de l'œuf; il a quelquefois alors plus d'un demi-pied de longueur , et ses couleurs sont plus claires que celles des couleuvres suisses adul- tes. Le peuple regarde ces serpens comme venimeux; mais ils n'ont point de crochets mobiles, et leur mâchoire supérieure est garnie, de chaque côté, d’un double rang de petites dents aiguës et serrées. : 1 Les écailles du dos de la couleuvre suisse sont ovales et relevées par une arête ; elle a jusqu’à cent soixante-dix grandes plaques et cent vingt-sept paires de petites. Lueepède, 1. 38 5 “6 546 HISTOIRE NATURELLE PARA PUR UNIS VAR PLATE VAR AE LA VU LV A VU AAA VA RAA LL L'EBIB ONE À :. Ce nom d’ibiboca a été donné par les voyageurs et les natura- listes à plusieurs espèces de serpens, très-différentes l’une de l'autre; nous le réservons à la couleuvre dont il est question dans cet article, et qui a été envoyée sous ce nom au Cabinet du Roi. C'est dans le Brésil qu'on la trouve; elle n’est point venimeuse ; et nous allons la décrire d’après l'individu qui fait partie de la collection de sa majesté. Elle a le dessus de la tête garni de neuf grandes écailles; le dos couvert d'écailles rhomboïdales, unies, grisätres et bordées de blanc * ; cinq pieds cinq pouces six lignes de longueur totale; un pied sept pouces une ligne depuis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue; cent soixante-seize grandes plaques, et cent vingt-une paires de petites °. AA AAA AAA MAMIE VAE LA VAR LAVAL AAA VU AA UE EVUEMMAMALE LA TACHETÉE. Nous donnons ce nom à une couleuvre de la Louisiane, dont le dessus du corps est blanchâtre , avec de grandes taches en forme de losange, quelquefois irrégulières, d’un roux plus ou moins rougeñtre , et bordées de noir ou d’une couleur très-foncée. On voit souvent, depuis le cou jusqu'au quart de la longueur du corps, une double rangée de ces taches, disposées de manière à x Cobra de coraïs , au Brésil. 2 "Les écailles du dos sont , en plusieurs endroits, un peu séparées les unes des autres. 3 L’individu du Cabinet du Roi étoit mâle; il avoit été mis dans l’esprit-de- vin pendant que ses deux verges sortoient par son anus: chacune est longue de six lignes, et a six lignes de diamètre ; lorsqu'elle s’épanouit , l'extrémité, qu'on pourroit comparer à une fleur radiée, présente ciuq cercles concentriques de membranes plissées et frangées , autour desquels on voit quatre autres cercles de piquans de nature un peu écailleuse et longs de deux lignes : la surface extérieure est hérissée de petits piquans presque imperceptibles. DU TRIANGLE. 547. former une raie en zigzag. Le ventre est blanchâtre el quelque- fois tacheté. Cette couleuvre n’est point venimeuse ; elle a neuf grandes écailles sur le sommet de la tête; des écailles hexagones, et rele- vées par une arête sur le dos; cent dix-neuf grandes plaques et soixante-dix paires de petites *. Il paroït qu’elle est de la même espèce que le serpent figuré dans Catesby ( tome IT, planche 55 ), Ce reptile se trouve dans. la Virginie et dans la Caroline, où on l'appelle serpent de blé, à cause de la ressemblance de ses couleurs avec celles d’une es- pèce de maïs ou de blé d'Inde, et où il pénètre quelquefois dans Îes basses-cours pour sucer les œufs. . RE AAA AAA AAA AA ARS VAT VA VRAI VAR RAA UV LA 2 RAA AA AAA AAA AAA LE TRIANGLE. Nous nommons ainsi cette espèce de conleuvre, parce qu’on vait sur le sommet de sa tête, qui est garni de neuf grandes écailles, une tache triangulaire, chargée, dans le milieu, d’une autre ta- che triangulaire plus petite, et d’une couleur beaucoup plus'claire ou quelquefois plus foncée. Des écailles unies et en losange cou- vrent le dessus du corps, qui est blanchâtre, avec des taches rousses , irrégulières, et bordées de noir. On voit un rang de pe- dites taches de chaque côté du dos, et une tache noire, allongée, et placée obliquement derrière chaque œil. Le triangle se trouve en Amérique, et n’est point venimeux. Un individu de cette espèce, envoyé au Cabinet du Roi, a deux pieds sept pouces deux lignes de longueur totale, trois pouces de- puis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue , deux cent treize grandes plaques, et quarante-huit paires de petites. om mm t Une couleuvre tachetée, conservée au Cabinet du Roi, a deux pieds de longueur totale , et sa queue est longue de cinq pouces quatre lignes. 348 HISTOIRE NATURELLE RIM VU QUA SA AAA LVL EAU LUE VAILLANT AR AAA AMASANE LE TRIPLE-RANG. ns Le nom que nous avons crü devoir donner à cette couleuvre désigne la disposition de ses couleurs : le dessus de son corps est blanchâtre ,avec trois rangées longitudinales de taches d’une cou- leur foncée; et le dessous est varié.de blanchâtre et de brun. Elle n'est point venimeuse; elle a neuf grandes écailles sur le sommet de la tête, des écailles ovales ; et relevées par une arête sur le dos; cent cinquanie grandes plaques et cinquante-deux paires de pe- iites ; élle habite en Amérique. 3419413351: 523:44:5321%142414244342) AAA VAE A AAA AAA AAA LA RÉTICULAI RE. Corre couleuvre de la Touisiane ressemble beaucoup par ses couleurs à l'ibiboca. Les écailles que l’on voit sur la partie supé- rieure de son corps sont blanchâtres et bordées de blanc : comme les bordures se touchent, elles forment une sorte de réseau blane au travers duquel on verroit le corps de l'animal; et voilà pour- quoi nous l'avons nommée lu réticulaire. Elle est distinguée de l'ibiboca par plusieurs caractères, ét surtout par le nombre de ses plaques , trop différent de celui des plaques de ce dernier serpent, pour que ces deux couleuvres appartiennent à la même espèce *. Parmi les réticulaires que nous avons décrites, nous en avons vu une qui est conservée au Cabinet du Roi, et qui a trois pieds onze pouces de longueur totale, et dix pouces depuis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue. LE 1 Un individu de cette espèce, envoyé au Cabinet du Roi , a un pied dix pouces de longueur totale , et sa queue est longue de quatre pouces. 2 Les mâchoires de la réticulaire ne sont point armées de crochets mobiles ; elle a la tête couverte de neuf grandes écailles : le dos garni d’écailles unies et en losange; deux cent dix-huit grandes plaques et quatre-vingts paires de petiles. DE LA ROUSSE. 549 MAN AAA NN AAA NAN AAA 8 AA NV NRA NA I A A AAA AR UV VV V6 LA COULEUVRE A ZONES. Cr serpent est blanc par-dessus et par-dessous ,avec des bandes transversales plus ou moins larges, d’une couleur très-foncée, qui, comme autant de zones, le ceignent et font le tour de son corps. On voit dans les intervalles blancs quelques écailles tache- tées de roussâtre à leur extrémité; et toutes celles qui garnissent les lèvres où le dessus de la tête sont blanchâtres et bordcées de roux ou de brun *. La couleuvre à zones a beaucoup de rapports avec l’annelée et avec la noire et fauve; mais, indépendamment d’autres difié- rences, elle est séparée de la première par la disposition de ses couleurs, et de la seconde par le nombre de ses plaques. Elle n'est pas venimeuse. RAA AAAAANAARAANARR ANR ANAAARRAAANNAARAAAAAAAANAN AAA AA RARAAAAAAAANAAN RAA IAAAAAANAN ANA APE LA ROUSSE. pese couleuvre a le dessus du corps d’un roux plus ou moins foncé, et le dessous blanchätre. C'est de la couleur de son dos que vient le nom que nous avons cru devoir lui donner. Elle n’est point venimeuse; mais nous ignorons quelles sont ses habitudes naturelles. Nous avons décrit cette espèce d’après un individu conservé au Cabinet du Roi, et qui a un pied cinq pouces quatre lignes de longueur totale, et trois pouces depuis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue. La rousse a neuf grandes écailles sur la partie supérieure de la têle , le dos couvert d’écailles rhomboïdales et unies, deux cent vingt-quatre grandes plaques et soixante-huit paires de petites. Nous ne savons pas quel est le pays où on la trouve. je de, Lu tre 2 EEE 1 Une couleuvre à zones, qui fait partie de la collection du Roi, a neuf grandes écailles sur le sommet de la tête, des écailles rhumboïdales et unies sur le dos , un pied de longueur totale, un pouce six lignes depuis l’anus jusqu’à l’ex- trémité de la queue, cent soïxante-cinq grandes plaques et trente-cinq paires de petites, 359 HISTOIRE NATURELLE PARU VU IA EAU AAA AR RAEN A QAVE TUTELLE VU TEUU TR UV VER AA VUS AVIARTAAT LA LARGE-TÉÊTE. Nous nommons ainsi ceile couleuvre parce que sa tête, un peu aplatie par-dessus et par-dessous, est très-large à proportion du corps. C’est M. Dombey qui l'a apportée de l'Amérique méridio- male au Cabinet du Roi. La couleur du dessus du corps de ce ser- pent est blanchâtre, avec de grandes taches irrégulières d’une couleur très-foncée, et qui se réunissent en plusieurs endroits le long du dos, et surtout vers la tête, ainsi que vers la queue. Le dessous du corps est également blanchâtre, mais avec des taches plus petites, plus éloignées l’une de l’autre, et disposées longitudi- valement de chaque côté du ventre. Le museau de cette couleuvre est terminé, comme celui de plusieurs vipères venimeuses , par une grande écaille relevée, presque verticate, pointue par le haut et échancrée par le bas; cependant elle n’a point de crochets mobiles, et le sommet de sa tête est garni de neuf grandes écailles : celles qui revêlent le dos sont ovales, unies, et un peu séparées l’une de l'autre vers la téte , comme sur le naja. L’individu que nousavons décrit avoit quatre pieds neuf pouces de longueur totale, sept pouces depuis l'anus jusqu’à l'extrémité de la queue, deux cent dix-huit grandes plaques et cinquante- deux paires de petites. Avant de passer au genre des boa, il nous resteroit à parler de quinze couleuvres dont Gronovius a fait mention; mais, comme #l n'est entré dans presque aucun détail relativement à ces rep- tiles , el que nous ne les avons pas vus, nous avons cru ne devoir pas en traiter dans des articles particuliers, et ne pouvoir même rien décider relativement à l'identité ou à la différence de leurs espèces avec celles que nous avons décrites. Nous nous sommes coutentés de les placer à leur rang dans notre table méthodique , en y rapportant le petit nombre de caractères indiqués par Gro- novius, en renvoyant aux planches quil a citées, en désignant uniquement ces couleuvres par le numéro des articles de Grona- vius où 1} en est question, et en ne leur donnant aucun nom nues qu'à ce qu'elles soient mieux connt + DU DEVIN. 55% RARMAAAAAAIAN AV ANAARAARAAANNU ANA NU VU AAA NU US LU AV AAAS AAA AAA MAR SECOND GENRE. SERPENS Qui ont de grandes plaques sous le corps et sous la queue. BO A. LÉ DENINT N ous avons considéré à la tête du genre des couleuvres les di verses espèces de vipères, ces animaux funestes et d'autant plus dangereux que, distillant sans cesse le venin le plus subtil, ils masquent leur approche, déguisent leurs attaques , se replient en cercle, se cachent, pour ainsi dire, en eux-mèmes, comme pour dérober leur présence à leurs victimes , s’élancent sur elles par des sauts aussi rapides qu'inattendus , ne parviennert à les vaincre que par leurs poisons mortels, et n’emploient que cette arme traîtresse qui pénètre comme un irait invisible, et dont la valeur ni la puissance ne peuvent se garantir. Nous allons parler main- tenant d’un genre plus noble ; nous allons traiter des boa, des plus grands et des plus forts des serpens, de ceux qui, ne contenant aucun venin, n'attaquent que par besoin, ne combattent qu'avec audace, ne domtent que par leur puissance, et contre lesquels eat z Le devin, au Mexique ; xaxathua , xalxalhua (l’empereur), dans le même pays ; tamacuilla huilia, dans d’autres contrées de l’Amérique ; cacadora , ou couleuvre chasseuse, aux environs de l’Orenoque; jurucueu, dans le Brésil ; borguacu , giboya ou Jiboya , et la reine des serpens, ainsi que Jauca acanga # au Brésil; la manda (qui veut dire ro des serpens), à Java ; mamballa et po- longa , à Ceylan; giarende, Serende, gorende , fedagoso et cobra de veado, . . Le / L] , , par les Portugais; serpent impérial, dépone, dans plusieurs contrées. 55? HISTOIRE NATURELLE on peut opposer les armes aux armes, le courage aü courage, la force à la force, sans craindre de recevoir , par une piqûre insen- sible, une mort aussi cruelle qu'imprévue. _Parmi,ces premières espèces, parmi ce genre distingué dans l'ordre des serpens, le devin occupe la première place. La Nature l'en a fait roi par la supériorité des dons qu’elle lui a prodigués; elle lui a accordé la beauté, la grandeur, lagilité, la force, l’in- dustrie; elle lui a en quelque sorte tout donné, hors ce funeste poison départi à certaines espèces de serpens, presque toujours aux plus petites, et qui a fait regarder l’ordre entier de ces ani- maux comme desobjets d’une grande terreur. Le devin est donc parmi les serpens comme l'éléphant ou le lion parmi les quadrupèdes : il sarpasse les animaux de son ordre par sa grandeur comme le premier, et par sa force comme le se- cond. Il parvient communément à la longueur de plus de vingt pieds; et, en réunissant les témoignages des voyageurs , 1l paroît que c'est à cette espèce qu’il faut rapporter les individus de qua- rante ou cinquante pieds de long, qui habitent, suivant ces mêmes voyageurs, les déserts brülans où l’homme ne pénètre qu'avec peine. | C'est aussi à cette espèce qu'appartenoit ce serpent énorme dont Pline a parlé, et qui arrèta, pour ainsi dire, l’armée romaine auprès des côtes septentrionales de l'Afrique. Sans doute il y a de l'exagération dans la longueur attribuée à ce monstrueux ani- mal ; sans doute 1l n'avoil point cent vingt pieds de long, comme le rapporte le naturaliste romain : mais Pline ajoute que la dé- pouille de ce serpent demeura long-temps suspendue dans un temple de Rome, à une époque assez peu éloignée de celle où il écrivoit , et, à moins de renoncer à tous les témoignages de l'his- toire, on est obligé d'admettre l'existence d’un énorme serpent, qui, pressé par la faim, se jeloit sur les soldats romains lorsqu'ils s’écarloient de leur camp, et qu'on ne put mettre à mort qu’en employant contre lui un corps de troupes, et en l'écrasant sous les mêmes machines militaires qui servoient à ces vainqueurs du monde à renverser les murs ennemis. C'éloit auprès des plaines sablonneuses d'Afrique qu’ent lieu ce combat remarquable. Le serpent devin se trouve aussi dans celte partie du monde; et comme c’est Je plus grand des serpens, c’est un individu de son espèce qui doit avoir luité contre les armées romaines. Ce mot de Rome antique désigne toujours k puissance et la vicloire; DU DEVIN. 553 c’est donc la plus grande preuve que l'on puisse rapporter en fa- veur de la force du serpent dont nous écrivons l’histoire, que d'exposer les moyens employés par les conquérans de la terre pour le soumettre et lui donner la mort. Le devin est remarquable par la forme de sa tête, qui annonce, pour ainsi dire, la supériorité de ss force, et que l’on a com- parée, avec assez de raison, à celle des chiens de chasse appelés chiens couchans. Le sommet en est élarsi, le front élevé et di- visé par un sillon longitudinal ; les orbites sont saillantes , et les yeux très-gros; le m useau est allongé et terminé par une grande écaille blanchâtre, tachetée de jaune , placée presque verticale- ment, et échancrée par le bas pour laisser passer la langue ; l'ou- verture de la gueule très-grande. Les dents sont très-longues *; mais le devin n'a point de crochets mobiles : quarante- quatre grandes écailles couvrent ordinairement la lèvre supérieure, et cinquante-trois la lèvre inférieure. La queue est très-courte en proportion du corps, qui est ordinairement neuf fois aussi long que cette partie; mais elle est très-dure et très-forte *. Ce serpent énorme est d’aillenrs aussi distingué par la beauté des écailles qui le couvrent et la vivacité des couleurs dont il est peint, que par sa longueur prodigieuse. Les nuances de ces cou- leurs s’effacent bientôt lorsqu'il est mort ; elles disparoiïssent plus ou moins, suivant la manière dont il est conservé et le degré PR RBRAT EL OR SON OE BELLE RP SE OR RP STAR EN EE ER EEE GT 1 Cieyerus rapporte que, cherchant à avoir le squelette d'un de ces grands ser- pens , ses domestiques en firent cuire les chairs dans de l’eau où l’on avoit mis de la chaux vive. Un d'eux voulant nettoyer la téte du serpent, dont la cuisson avoit détaché les chairs, se blessa au doigt contre les grosses dents de Panimal. Cet accident fut suivi d’une enflure avec inflammation dans la partie affectée, d’une fièvre continue et de délire, qui ne cessèrent qu'après qu'on eut employé les re- mèdes conveuables , et particulièrement une composition appelée lapis serpen- tinus, et que les Jésuites faisoient alors dans l'Inde. Toute vésicule et toute chaïr avoient été emportées pr la chaux vive, observe l’auteur. Par consé- quent, on ne doit attribuer à aucune sorte de vexin les accidens dont il parle ; et ce fait ne peut pas détruire les observations plusieurs fois répétées, qui prou- vent que le devin n'est point venimeux : d’ailleurs nous venons de voir que sa gueule ne renferme point de crochets mobiles, ainsi que nous nous en Sommes assurés nous-mêines. 2 Le sommet de la tête du devin est couvert dé: ailles hexagones, petites; unies et semblables à celles du dos; deux rangées longitudinales de grandes écailles s'étendent de chaque côté des grandes plaques, qui sont moins longues que dans la plupart des coulenvres, et dont on compte deux cent quarante-six Sous le corps et cinquante-quatre sous la quene. 554 HISTOIRE NATURELLE d'aération qu'il peut subir. Il n’est pas surprenant, d’après cefx; qu'elles aient été décriles si diversement par les auteurs, et qu’il ait élé représenté dans des planches, de manière que les différens individus de cette espèce aient paru former jusqu'à neuf espèces différentes. Mais il y a plus : les couleurs du serpent devin va- rient beaucoup, suivant le climat qu'il habite , et apparemment suivant l'âge, le sexe, etc. Aussi croyons-nous très-inutile de dé- crire dans les plus petits détails celles dont il est paré ; nous pen- sons devoir nous contenter de dire qu'il a communément sur la tête une grande tache d’une couleur noire ou rousse très-foncée , qui représente une sorte de croix dont la traverse est quelquefois supprimée. Tout le dessus de son dos est parsemé de belles et grandes taches ovales, qui ont ordinairement deux ou trois pou- ces de longueur , qui sont très-souvent échancrées à chaque bout en forme de demi-cercle, et autour desquelles l’on voit d’autres taches plus petites de différentes formes ; toutes sont placées avec autant de symétrie; et la plupart sont si distinguées du fond par des bordures sombres qui , en imitant des ombres, les détachent et les font ressortir, que, lorsqu'on voit la dépouille d'un de ces ser peus , on croil moins avoir sous les yeux un ouvrage de la Na- ture qu'une production de l’art compassée avec le plus de soin. Toutes ces belles taches, tant celles qui sont ovales que les ta- ches plus petites qui les environnent , présentent les couleurs les plus agréablement mariées et quelquefois les plus vives. Les ta- ches ovales sont ordinairement d'un fauve doré, quelquefois noires où rouges et bordées de blanc; et les autres, d’un chätain plus on moins clair, on d’un rouge très-vif, semé de points noirs ou roux, ofrent souvent, d'espace en espace, ces marques bril- * Jantes que l'on voit resplendir sur la queue du paon ou sur les ailes des beaux papillons, et qu’on a nommées des yeux, parce qu'elles sont com posées d'un point entouré d’un cercle plus clair où plus obscur. Le dessons du corps du devin est d’un cendré jaunâtre, mar- bré ou tacheté de noir. On a assez rarement l'animal entier dans les collections d’his- toire naturelle; mais il n’est guère aucun cabinet où la peau de ce serpent, séparée des plaques du dessous de son corps, ne soit étendue en forme de larges bandes, On leur: a donné divers noims, suivant la grandeur des individus, les pays d'où on les a reçus, les variciés de leurs couleurs, et les différences qui peuvent se DU DEVIN. D5 trouver dans les petites taches placées autour des taches ovales. Mais quelles que soient ces variétés d'âge, de sexe ou de pays, c’est toujours au serpent devin qu’il faudra rapporter ces belles peaux; et jusqu'à présent on ne connoîl point d'autre serpent que ce dernier qui soit doué d’une taille très-considérable, et qui ait en même temps sur le dos des taches ovales semblables à celles que nous venons d'indiquer. Lorsque l’on considère la taille démesurée du serpent devin, Von ne doit pas être étonné de la force prodigieuse dont il jouit. Indépendamment de la roideur de ses muscles , 1l est aisé de con- cevoir comment un animal qui a quelquefois trente pieds de long peut, avec facilité, étouffer et écraser de très-gros animaux dans les replis multipliés de son corps, dont tous les points agissent ;. et dont tous les contours saisissent la proie, s'appliquent intime- ment à sa surface, et en suivent toutes les irrégularités. Cette grande puissance , cette force redoutable , sa longueur gigantesque ; l'éclat de ses écailles , la beauté de ses couleurs, ont inspiré une sorte d’'admiration mêlée d’effroi à plusieurs peupies encore peu éloignés de l’état sanvage ; et comme tout ce qui pro- duit la terreuret l'admiration, tout ce qui paroît avoir nne grande supériorité sur les autres êtres , est bien près de faire naître dans des têtes peu éclairées l’idée d’un agent surnaturel, ce n'est qu'avez une crainte religieuse que les anciens habitans du Mexique ont vu le serpent devin. Soil qu'ils aient pensé qu'une masse consi- dérable , exécutant des mouvemens aussi rapides , ne pouvoit être mue que par un souffle divin, ou qu’ils n’aient regardé ce serpent que comme un ministre de la toute- puissance céleste, il est de- venu objet de leur culte. Ils l'ont surnommé empereur , pour désigner la prééminence de ses qualités. Objet de leur adoration, il a dû être celui de leur attention particulière; aucun de ses mou- vemens ne leura, pour ainsi dire , échappé; aucune de ses actions ne pou voit leur être indifférente :ils n’ont écouté qu'avec un fré- missement religieux les siffHlemens longs et aigus qu’il fait en- tendre ; ils ont cru que ces sifflemens, que ces signes des diverses affections d’un être qu'ils ne voyoient que comme merveilleux et divin , devoient être liés avec leur distinée. Le hasard a fit que ces siflemens ont été souvent beaucoup plus forts où plus fré- quens dans les temps qui ont précédé les grandes tempêtes , les td pestiléntielles, les guerres cruelles ou les autres cala- mités publiques. D'ailleurs les grands maux physiques sont sou 556 HISTOIRE NATURELLE vent précédés par une chaleur violente, une sécheresse extrême, un état particulier de l'atmosphère, une électricité abondante dans l'air, qui doivent agiter les serpens et leur faire pousser des sifflemens plus forts qu’à l'ordinaire :aussi les Mexicains n’ont re- gardé ceux du serpent devin que commel’annonce des plus grands nalheurs , et ce n’est qu'avec consternation qu'ils les ont entendus. Mais ce n’est pas seulement un culte doux et pacifique qu'il a obtenu chez les plus anciens habitans du nouveau monde; son image y a été vénérée, non-seulement au milieu des nuages d’en- cens, mais même de flots de sang humain, versé pour honorer le dieu auquel ils l’avoient consacré , el qu'ils avoient fait cruel?, Nous ne rappelons qu’en frémissant le nombre immense de vic- mes humaines que la hache sanglante d’un fanatisme aveugle et barbare à immolées sur les autels de la divinité qu'il avoit in- ventée; nous ne pensons qu'avec horreur aux monceaux de têtes et de tristes ossemens trouvés par les Européens autour des tem- ples où le serpent sembloit partager les hommages de la crainte; etlant l faut de temps, dans tous les pays , pour que la raison brille de tout son éclat , la superstition, quia, pour ainsi dire ; civinisé le devin, n’a pas seulement régné en Amérique; aussi grand, aussi puissant , aussi redoutable dans les contrées ardentes de Afrique, il y a inspiré la même terreur, y a paru aussi mer- veilleux, y a élé également regardé par des esprits encore trop peu élevés au-dessus de la brute, comme le souverain dispensa- teur des biens et des maux. On l'y a également adoré; on en a fait un dieu sur les hrûlantes côtes du Mozambique, comme auprès du lac de Mexico, el il paroit même que le Japonais s’est prosterné devant jui. Mais si l'opinion religieuse ne l’a pas fait régner sur l’homme dans toutes les contrées équatoriales , tant de l'ancien que du nouveau continent, il n’en est presque aucune où il n'ait exercé sur les animaux l'empire de sa force. Il habite en eflet presque tous les pays où il a trouvé assez de chaleur pour ne rien perdre de son activité, assez de proie pour se nourrir , el assez d’espace pour n'être pas trop souvent tourmenté par ses ennemis ; il vit A SN He RE QE NERO ï La divinité suprême des Mexicains, nommée vitzilipuztli, éloit représentée tenant dans sa main droite un serpent, par lequel nous devons croire, d’après tout ee que nons venons de dire, qu’ils vouloient désigner l'espèce du serpent devin. Les temples ct les autels de cette divinité, à laquelle ils faisoient des sacrifices barbares, offroieni l’image dn serpent. DU DEVIN. 557 dans les Indes orientales et dans les grandes îles de l'Asie, ainsi - que dans les parties de l'Amérique voisines des deux tropiques : il paroît même qu'autrefois il habitoit à des latitudes plus éloi- gnées de la ligne, et qu’il vivoit dans le Pont, lorsque cette contrée, plus remplie de bois, de marais , et moins peuplée lui présentoit une surface plus libre ou plus analogue à ses ha- bitudes et à ses appélits. Les relations des anciens doivent don- ner une bien grande idée de l’haleine em pestée qui s’exhaloit de sa gueule, puisque Métrodore a écrit que l’immense serpent qu'il a placé dans cette contrée du Pont, et qui devoit être le devin , avoit le pouvoir d’atlirer dans sa gueule béante les o1- seaux qui voloient au-dessus de sa tête, même à une assez grande hauteur. Ce pouvoir n’a consisté sans doute que dans la corruption de l’haleine du serpent, qui, viciant l'air à une très- petite distance, et l’imprégnant de miasmes putrides et délé- tères , a pu , dans certaines circonstances , étourdir des oiseaux , leur ôter leurs forces, les plonger dans une sorte d’asphyxie , et les contraindre à tomber dans la gueule énorme ouverte pour les recevoir. Mais quelque exagéré que soit le fait rapporté par Métrodore, il prouvela grandeur du serpent auquel il l’a attri- bué, et confirme notre conjecture au sujet de l'identité de son espèce avec celle du devin. D'un autre côté, peu de temps avant celui où Pline a écrit , et sous l'empire de Claude, on tua auprès de Rome, suivant ce naturaliste, un très-grand serpent du genre des boa, dans le ventre duquel on trouva le corps entier d’un petit enfant , ét qui pouvoit bien être de l’espèce du devin. J'ai souvent oui dire aussi à plusieurs habitans des provinces méridionales de France, que dans quelques parties de ces provinces, moins peuplées, plus couvertes de bois, plus entrecoupées par des col- lines , d’un accès plus difficile , et présentant plus de cavernes et d’anfractuosités |, on avoit vu des serpens d’une longueur très-considérable , qu'on auroit dû peut-être rapporter à l’es- pèce ou du moins au genre du devin *. t Schwenckfeld dit, dans son Histoire des reptiles de la Silésie, qu'un homme digne de foi lui avoit assuré qu’on trouvait dans cette province des ser- pens longs de huit coudées et de la grosseur du bras : il les appelle Loa, nacrix domestica , serpens palustris , serpens aquatilis, anguis boa, draco serpens. Il est dit dans les Mémoires des Curieux de la Nature, pour l’année 1682, que peu de temps auparavant on avoit pris, auprès de Lausanne en Suisse, un si 558 HISTOIRE NATURELLE Mais c’est surtout dans les déserts brülans de lAfrique, qu'exerçant une domination moins troublée, 1l parvient à une longueur plus considérable. On frémit lorsqu'on lit, dans les relations des voyageurs qui ont pénétré dans l’intérieur de cette partie du monde, la manière dont l'énorme serpent devin s’a- vance au milieu des herhes hautes et des broussailles, ayant quelquefois plus de dix-huit pouces de diamètre, et semblable à une longue et grosse poutre qu'on remueroit avec vitesse, On aperçoit de loin , par le mouvement des plantes qui s'inclinent sous son passage , l'espèce de sillon que tracent les diverses on- dulations de son corps; on voit fuir devant lui les troupeaux de gazelles et d’autres animaux doni il fait sa proie; et le seul parti qui reste à prendre dans ces solitudes immenses , pour se garantir de sa dent meurtrière et de sa force funeste, est de nettre le feu aux herbes déja à demi brülées par l’ardeur du soleil. Le fer ne suffit pas contre ce dangereux serpent, lorsqu'il est parvenu à toute sa longueur , et surtout lorsan’il est irrité par la faim. L'on ne peut éviter la mort qu’en couvrant un pays immense de flammes qui se propagent avec vitesse au milieu de végétaux presque entièrement desséchés , en excitant ainsi un vaste incendie, et en élevant, pour ainsi dire, un rempart de feu contre la poursuite de cet énorme animal. Îl ne peut être, en eflet, arrêté, ni par les fleuves qu'il rencontre, mi par les bras de mer dont il fréquente souvent les bords ; car il nage avec facilité, même an milieu des ondes agitées ; et c'est en vain, d’un autre côté, qu'on voudroit chercher un abri sur de grands arbres; il se roule avec prompiüitude jusqu’à Fextré- mité des cimes les plus hautes : aussi vit-il souvent dans les forêts, Enveloppant les tiges dans les divers replis de son corps, il se fixe sur les arbres à différentes hauteurs, et y demeure souvent long-temps en embuscade, attendant patiemment le passage de sa proie. Lorsque, pour l’atteindre ou pour sauter sur un arbre voisin, il a une trop grande distance à franchir , il entortille sa queue autour d’une branche , et suspendant son grand serpent, que sa circonférence égaloit celle de deux cuisses trés-grosses. La relalion ajoutoit que ce serpent étoit monstrueux , et qu’il avoit des oreilles ; et il est à remarquer que, dans presque tous les récits vagues et peu circonstanciés que l’on a faits concernant les énormes serpens des provinces méridionales de France, on leur a toujours supposé des oreilles, quoique aucune er de serpent n'ait même d'ouverture apparente pour l'organe de l’ouie. DY DE VIN: 559 corps allongé à cette espèce d’anneau , se balançant et tout d’un œup s'élançant avec force, 1l se jette comme un trait sur sa vichme, ou contre l'arbre auquel 1l veut s'attacher. Il se retire aussi quelquefois dans les cavernes des montagnes, et dans d’autres antres profonds où il a moins à craindre les allaques des ennemis, et où 1l cherche un asile contre les tem- péralures froides , les pluies trop abondantes, et les autres acci- dens de l'atmosphère qui lui sont contraires. Îl est connu sous le nom trivial de grande couleuvre sur les rivages noyés de la Guiane : il y parvient communément à la grandeur de trente pieds, et même , dans certains endroits, à celle de quarante. Comme le nom qu'il y porte y est donné à presque tous les serpens qui joignent une grande force à une lon- gueur considérable , et qui en même temps n'ont point de venin, et sont dépourvus des crochets mobiles qu'on remarque dans les vipères, on est assez embarrassé pour distinguer parmi les di- vers faits rapportés par les voyageurs , touchant les serpens, ceux qui conviennent au devin. Il paroît bien constalé cepen- dant qu'il y jouit d'une force assez grande pour qu’un seal coup de sa queue renverse un animal assez gros, et même l'homme le plus vigoureux. Il y attaque le gibier le plus diffi- cie à vaincre ; on l’y a vu avaler des chèvres et étouffer des couguars, ces représentans du tigre dans le nouveau monde. Il dévore quelquefois, dans les Indes orientales, des animaux encore plus considérables , où mieux défendus, tels que des porc-épics , des cerfs et des taureaux; et ce fait effrayant étoit. déjà connu des anciens. Lorsqu'il aperçoit un ennemi dangereux, ce n’est point avec ses dents qu'il commence un combat qui alors seroit trop désa- vantageux pour lui: mais il se précipite avec tant de rapidité sur sa malheureuse victime , l'enveloppe dans tant de contours, la serre avec tant de force , fait craquer ses os avec tant de vio- lence , que, ne pouvant ni s'échapper, ni user de ses armes , êt réduite à pousser de vains mais d’affreux hurlemens, elle est bientôt élouflée sous les eflorts multipliés du monstrueux rep- tile. Si le volume de l'animâl expiré est trop considérable pour que le devin puisse lavaler, malgré la grande ouverture de sa gueule, la facilité qu’il a de l'agrandir, et lextension dont presque tout son corps est susceptible , 1l continue de presser sa 560 HISTOIRE NATURELLE proie mise à mort ; il en écrase les parties les plus compactes ; et , lorsqu'il ne peut point les briser avec facilité, il l’entraîne en se roulant avec elle aupres d’un gros arbre , dont il ren- ferme le tronc dans ses replis; 1l place sa proie entre l’arbre et son corps; 1l les environne l’un ét l’autre dans ses nœuds vi- goureux; et, se servant de la tige noueuse comme d’une sorte de levier , il redouble ses efforts, et parvient bientôt à com- primer en tout sens, et à moudre, pour amsi dire, le corps de lanimal qu’il a immolé. Lorsqu'il a donné ainsi à sa proie toute la souplesse qui lui est nécessaire, il l’allonge en continuant de la presser, et di- minue d'autant sa grosseur ; il limbibe de sa salive où d’une sorte d'humeur analogue qu’il répand en abondance; il pétrit, pour ainsi dire, à l'aide de ses replis , cette masse devenue in- forme, ce corps qui n’est plus qu’un composé confus de chairs ramollies et d'os concassés : c’est alors qu'il avale, en la pre- nant par la tête, en lattirant à lui, et en l’entrainant dans son ventre par de fortes aspirations plusieurs fois répétées. Mais , malgré cetie préparation , sa proie est quelquefois si volumi- neuse, qu'il ne peut l’engloutir qu'à demi : il fant qu'il ait di- géré au moins en partie la portion qu'il à déjà fait entrer dans son corps , pour pouvoir y faire pénétrer l'autre ; et l'on a sou- vent vu le serpent devin ;, la gueule Héreitlétat ouverte et remplie d’une proie à demi dévorée, étendu à terre, et dans une sorte d'inertie qui accompagne presque toujours sa di- gestion. Lorsqu’en eflet il a assouvi son appétit violent, et rempli son ventre de la nourriture nécessaire à l’entrelien de sa grande masse, ilperd, pour un temps, son agilité et sa force ; il est plongé dans une espèce de sommeil ; 1l git sans mouvement , comme un lourd fardeau , le corps prodigieusement enflé ; et cétengourdissement, qui dure quelquefois cinq ou six jours , doit être assez profond ; car, malgré tout ce qu'il faut retranz cher des divers récits touchant ce serpent , il paroït que, dans différens pays , particulièrement aux environs dé j'isthme de Panama en Amérique , des voyageurs , rencontrant le devin à demi caché sous l'herbe épaisse des forêts qu’ils tra- versoient , ont plusieurs fois marché sur lui dans le temps où sa dicebtion le tenoit dans une espèce de torpeur. Îls se sont même reposés , a-t-on écril , sur son corps gisant à terre, et qu ils DU DEVIN. 56x prenoient , à cause des feuillages dont il éloït convert, pour un tronc d'arbre renversé, sans faire faire aucun mouvement au serpent assoupi par les alimens qu’il avoit avalés , ou peut-être engourdi par la fraîcheur de la saison. Ce n’est que lorsqu’allu- ma nt du feu trop près de l'énorme animal , ils lui ont redonné par cette chaleur assez d'activité pour qu’il recommencçât à se mouvoir, qu'ils se sont aperçus de la présence du grand replile, qui les a glacés d’effret , et loin duquel ils se sont précipités. Ce long élat de torpeur a fait croire à quelques voyageurs que le serpent devin avaloit quelquefois des animaux d’un volume si considérable, qu’il étoit étouffé en les dévorant ; et c’est ce temps d'engourdissement que choisissent les habitans des pays qu’il fré- quente pour lui faire la guerre et lui donnerla mort : car quoi- que le devin ne contienne aucun poison , il a besoin de tant con- sommer , que son voisinage est dangereux pour l’homme et surtout pour la plupart des animaux domestiques et utiles, Les habitans de l'Inde, les Nègres de l'Afrique, les sauvages du nou- veau monde, se réunissent plusieurs autour de Fhabitation du serpent devin. Ils attendent le moment où 1l a dévoré sa proie, et hâlent même quelquefois cet instant en attachant auprès de l'an- tre du serpent quelque gros animal qu'ils sacrifient , et sur lequel le devin ne manque pas de s’élancer. Lorsqu'ilest repu , il tombe dans cet affaissement et cette insensibilité dont nous venons de parler ; et c’est alors qu’ilsse jettent sur lui, et lui donnent la mort sans crainte comme sans danger. Îls osent, armés d'un simple lacs, s'approcher de lui et l'étrangler , ou ils l'assomment à coups de branches d'arbres *. Le désir de se délivrer d’un animal z Nous croyons qu’on verra ici avec plaisir le récit de la manière dont , suivant Diodore de Sicile, on prit en Egypte, et sous un Ptolémée, un serpent énorme, qui, a cause de sa grandeur , ne peut être rapporté qu’a l'espèce du devin. « Plusieurs chasseurs, encouragés par la munificence de Ptolémée , résolurent de lui amener à Alexandrie un des plus grands serpens. Cet énorme reptile, long de trente coudées , vivoit sur le bord des eaux : il y demeuroit immobile, couché à terre, et son corps replié en cercle; mais lorsqu'il voyoit qnelque animal approcher du rivage qu'il habitoit, il se jetoit sur lui avec impétuosité , le saisissoit avec sa gueule , ou l’enveloppoit dans les replis de sa queue. Les chasseurs l'ayant apercu de loin, imaginèrent qu’ils ponrroient aisément le prendre dans des lacs et l’entourer de chuînes. Ils s’avancèrent avec courage ; mais lorsqu'ils furent plus près de ce serpent démesuré, l'éclat de ses yeux « étincelans, son dos hérissé d’écailles, le bruit qu’il faisoit en s’agitant , sa « gueule ouverte et armée de dents longues et srochues, son regard terrible ét Lacepède. 1. « & A 59 562 HISTOIRE NATURELLE destructeur n’est pas le seul motif qu'on ait pour en faire la chasse. Les habitans dé l'ile de Java, les Nègres de la côte d'Or et plusieurs autres peuples mangent sa chair, qui est pour eux un mets agréable; dans d’autres pays, sa peau sert de parure ; les babitans du Mexique se revêtoient de sa belle dépouille; et dans ces temps antiques où des monstres de toute espèce ravageoient des contrées de l’ancien continent , que l’art de l’homme commen- çoit à peine d’arracher à la Nature, combien de héros portèrent la peau de grands serpens qu'ils avoient mis à mort, et qui étoient vi D blblement de l'espèce ou du genre du Aie comme des marques de leur valeur et des trophées de leur victoire ! C'est lorsque la saison des pluies est passée dans les contrées équatoriales , que le devin se dépouille de sa peau altérée par la disette qu'il éprouve quelquefois, ou par l'action de l’atmo- sphère, par le frottement de divers corps, et par toutes les autres causes extérieures qui peuvent la dénaturer. Le plus souvent 1l se lient caché pendant que sa nouvelle peau n’esl pas encore en- durcie , et qu’il n’opposeroit à la poursuite de ses ennemis qu’un corps foible et dépourvu de son armure. Il doit demeurer alors renfermé ou dans le plus épais des forêts, ou dans les antres ji fonds qui lui servent de retraite. Nous pensons , au reste, qu'or — « féroce, les glacèrent d’effroi : ils osèrent cependant s’avancer pas à pas, et jeter « de foris liens sur sa queue ; maïs à peine ces liens eurent-ils touché ls mons- « trueux animal, que , se retournant avec vivacité, et faisant entendre des siffies « mens aigus , il dévora le chasseur qui se trouva le plus près de lui, en tua un « sccond d’un coup de sa queue , et mit les autres en fuite. Ces derniers ne vou- « lant cependant pas renoncer à la récompense qui les attendoit, et imaginant « un nouveau moyen, firent faire un rets composé de cordes très-grosses , et pro- « portionné à la grandeur de l’animal : ils le placèrent auprès de la caverne du « serpent, et ayant bien observé le temps de sa sortie et de sa rentrée , ils profi- « terent de celui où l’énorme reptile étoit allé chercher sa proie, pour boucher « avec des pierres l’entrée de son repaire. Lorsque le serpent revint, ils se mon- « trèrent tous à la fois avec plusieurs hommes armés d’arcs et de frondes , plu- « sieurs autres à cheval , et d’autres qui faisoient résonner à grand bruit des « trompettes et d’autres instrumens retentissans, Ce serpent, se voyant entouré « de cette multitude, se redressoit et jetoit l’effroi, par ses horribles sifflemens, « parmi ceux qui l’environnoient : mais effrayé lui-même par les dards qu’on lui « lancoit, la vue des chevaux , le grand nombre de chiens qui aboyoient , et le « bruit aigu des trompettes, il se précipita vers l’entrée ordinaire de sa caverne; « la trouvant fermée , et toujours troublé de plus en plus par le bruit des trom- « pettes , des chiens et des chasseurs , il se jeta dans le rets, où il fit entendre « des sifflemens de rage : mais tous ses efforts furent vains, et sa force cédant à « tous les coups dont on Passaillit, et à toutes les chaînes dont on le Jia, on le @ conduisit à Alexandrie, où une longue diète apaisa sa férocité. » DU DEVIN. | 563 dinairement il ne s’engourdit complètement dans ascune saison de l'année. Il ne se irouve , en eflet, que dans les contrées très voisines des tropiques, où la saison des pluies n’améne Jamais une température assez froide pour suspendre ses mouvemens vitaux; et comme cette saison des pluies varie beauüconp dans les différentes contrées équaloriales de l’ancien et du nouveau conti- nent, et qu'elle dépend de la hauteur des montagnes, de leur situation , des vents, de la position des lieux, en-decà où au-delà de la ligne , etc., le temps du renouveliement de la peau et des forces du serpent doit varier quelquefois de plusieurs mois et même d’une demi-année. Mais c’est toujours lorsque le soleil du printemps redonne l’activité à la Nature, que le serpent devin, rajeuni, pour ainsi dire, plus fort , plus agile, plus ardent que jamais, revêtu d’une peau nouvelle, sort des retraites cachées où il a dépouillé sa vieillesse, et s’avance l’œil en feu sur une terre embrasée des nouveaux rayons d’un soleil plus actif. Il agite sa grande masse en ondes sinueuses au milieu des bois parés d’une verdure plus fraiche ; faisant entendre de loin son sifflement d’a- mour, redressant avec fierté sa tête, impatient de la nonvelle flamme qu'il éprouve, s'élançant avec impétuosité, il appelle, pour ainsi dire , sa compagne, à laquelle il s’unit par des liens si étroits, que leurs deux corps ne paroissent plus en {former qu’un seul. La fureur avec laquelle le devin se jette alors sur ceux qui F'approchent et le troublent dans ses plaisirs, ou le courage avec lequel il demeure uni à sa femelle malgré la poursuite de ses ennemis et les blessures qu'il peut recevoir , paroïssent être les effets d’une union aussi vivement sentie qu’elle est ardemment recherchée : point de constance cependant dans leur affection ; lorsque leurs désirs sont satisfaits, le mâle et la femelle se sépa- rent, bientôt ils ne se connoissent plus, et la femelle va seule, au bout d'un temps, dont on ignore la durée, déposer ses œufs sur le sable ou sous des feuillages. C'est ici l'exemple le plus frappant d’une grande différence entre la grosseur de l'œufet la grandeur à laquelle parvient l'a- nimal qui en sort. Les œufs du devin n’ont, en eflet, que deux ou trois pouces dans leur plus grand diamètre. Toute la matière dans laquelle le foetus est renfermé n’est donc que de quelques pouces cubes; et cependant le serpent, lorsqu'il a atteint tout son développement , ne çontient-il pas quarante ou cinquante pieds cubes de matière ? 564 HISTOIRE NATURELLE Ces œufs ne sont point couvés par la femeile ; la chaleur de J’atmosphè: e les fait seule éclore ; ou tout au plus dans certaines contrées, comme celles, par exemple, où l'humidité domine trop sur la chaleur , la femelle a le soin de pondre dans quelques en- droits plus abrités, et où des substances fermentalives et ramas- sées augmentent, par la chaleur qu’elles produisent, l'effet de celle de l'atmosphère. On ignore combien de jours les œufs de- meurent exposés à cette chaleur avant que les petits serpens éclosent. La grande différence qu'il y a entre la petitesse du serpent contenu dans son œuf, et la grandeur démesurée du serpent adulte, doit faîre présumer que ce n'esi qu’au bout d’un temps très-long que le devin est entièrement développé: et n'est-ce pas une preuve que ce serpent vit un assez grand nombre d'années ? Le nombre de ces années doit en effet être d'autant plus consi- dérable , que le devin est aussi vivace que la plupart des autres serpens. Ses différentes parties jouissent de quelques mouvemens vitaux, même après qu’elles ont été entièrement séparées du reste du corps. On a vu, par exemple, la tête d’un devin, coupée dans le moment où le serpent mordoit avec fureur, continuer de mor- dre pendant quelques instans, et serrer même alors avec plus de force la proie qu'il avoit saisie , les deux mâchoires se rappro- chant par un effet de la contraction que les muscles éprouvoient encore. Lorsque cette contraction eut entièrement cessé , on eut de la peine à desserrer les mâchoires , tant les parties de la tète étoient devenues roïdes ; ce qui fit croire qu'elle conservoit quel- que action , lorsque cependant il ne lui en reste plus aucune. PARA VUE DURS VBA VAR RAR AER LR ARARAVIA RAA LRAAARLR VRAIES RAA VAL RS L'HIPNALE. Css un assez beau serpent, qui, ainsi que le devin, appartient _ au genre des bo: , et a de grandes plaques sous la queue ainsi que sous le corps, mais qui lui est bien inférieur par sa longueur et par sa force. On le trouve dans le royaume de Siam. Le plus grand nombre des individus de cette espèce qui ont été cons ervés .dans les cabinets n’avoient guère qu’un pouce et demi de circon- érence , et deux ou trois picds de longueur ; et telles éloient à DU BOJOBI: 565 peu près les dimensions de ceux qui sont décrits dans Seha ?, Ca serpent est d’un blanc jaunâtre, tirant plus ou moins sur le roux: le dessous du corps est d’une couleur plus claire , et Séba dit qu'on y remarque des taches noirâires : mais nous n'en avons vu aucun vestige sur l'individu qui est conservé dans l’esprit-de- vin au Cabinet du Roi. Le dos est parsemé de taches blanchôtres, bordées d’un brun presque noir. Malgré leur irrégularilé , ces taches sont répandues sur le corps de l'hipnale de manière à le varier de couleurs agréables à la vue, et à représenter assez bien une riche éloffe brodée. Suivant Seba , la femelle ne diffère du mâle que par sa tête, qui est plus large. L'un et l'autre l'ont assez grande, sans que cependant elle paroisse disproportionnée. Le tour de la gueule présente une sorte de bordure remarquable que l’on observe dans plusieurs boa, mais qui est ordinairement plus sensible dans Fhipnale à proportion de sa grandeur ; elle est composée de grandes écailles très-courbées, concaves à l'extérieur, et qui, étant ainsi comme creusées , forment une sorte de petit canal qui borde les deux mâchoires. On a mis ce serpent au nombre des cérastes où serpens cornus : il leur ressemble en eflet par ses proportions ; mais les cérastes ont deux rangées de petites plaques sous la queue, et d’ailleurs il n’a aucune apparence de cornes. Îl se nourrit de chenilles , d'araignées, et d’autres petits insectes ; et comme il est très-agréable par ses couleurs, sans être dangereux, on doit le voir avec plaisir vemir dans les environs des habitations, les délivrer d’une vermine toujours trop abon- dante dans les pays très-chauds, Îl a ordinairement cent soi- xante-dix-neuf grandes plaques sous le corps , et cent vingt sous la queue. Les écailles qui recouvrent sa tête sont semblables à celles du dos ; mais le dessus du museau présente quatorze écailles un peu plus grandes. BAARANANNANRANY NARNIA AN AV NAS AV AU VAN RAR AU RAR A NV AU RAY AU NY LE BOJOBL Quorocs le bojobi n'égale point le serpent devin par sa force , sa grandeur ni ia magnificence de sa parure, quoiqu'il cède en * Un hipnale qui fait partie de la collection du Roi à un pied onze pouces de longueur totale, et sa queue est longue de trois pouces. 566 . HISTOIRE NATURELIE tout à ce roi des serpens , il n’en occupe pas moins une place dis- lnguée parmi ces animaux, et peut-être le premier rang lui appartiendroit si l'espèce du devin étoit détruite. La longueur à laquelle 21 peut parvenir est assez considérable, et il ne faut pas en fixer les limites d’après celles que présentent les individus de celte espece conservés dans les cabinets *. Il doit être bien plus grand lorsqu'il a acquis tout son développement ; et s’il faut s'en rapporter à ce qu'on a écrit de ce boa , sa longueur ne doit pas être très-inférieure à celle du serpent devin. L'on a dit qu'il se jetoit sur des chiens et d’autres gros animaux, et qu’il les dévo- roit *; et à moins qu'on ne lui ait attribué des faits qui appar- tiennent au devin, le bojobi doit avoir une longueur et une force considérables pour pouvoir mettre à mort et avaler des chiens et d’autres animaux assez gros. Ce ser pent , qui ne se trouve que dans les conlrées équatoriales, babite également l’ancien el le nouveau monde ; mais iloffre, dans les grandes Indes et en Amérique, le signe de la différence du chimat dans les diverses nuances qu’il présente, quoique d’ail- leurs le bojobi de l'Amérique et celui des Indes se ressemblent par la place des taches , la proportion du corps, la forme de la tête, des dents , des écailles , par tout ce qui peut constituer l’identité d'espèce. Le bojobi du Brésil est d’un beau vert de mer plus ou moins foncé , qui s'étend depuis le sommet de la tête jusqu’à l’ex- trémité de la queue , et sur lequel sont placées, d'espace en espace, des taches blanches irrégulières, dont quelques-unes approchent un peu d’une losange, et qui sont toutes assez clair-semées et dis- tribuées avec assez d’elégance pour former sur le corps du bojo- bi un des plus. beaux assortimens de couleurs. Ses écailles sont d'ailleurs extrêmement polies et Inisantes * ; elles réfléchissent si vivement la lumière, qu’on lui a donné, ainsi qu’au serpent de- vin. le nom indien de éeoa, qui veut dire serpent de feu : aussi, lorsque le bojobi brille aux rayons du soleil, et qu'il étale sa croupe resplendissante d’un beau vert et d’un blanc éclatant, dr na CO mem mené cum 2 done mm 1 L'individu que nous avons décrit, et qui fait partie de la collection de sa ma- jesté , a “cux pieds onze pouces de longueur totale, et à peu près sept pouces de- puis lPanus jusqu’à l’extrémité de la queue. 2 M. Linné paroît avoir adopté cette opinion en donnant au bojobi l'épithète de canina , de même qu'il a donné celle de murina à un boa qui se nourrit de Ta!s. 3 Elles sont rhomboïdales. Tome 1. >] : Ta CE _ es > _ = TES : frètre PALE E ’ bb Dequev awillers Je. Le Dent se" Eare 551. A | hs 2.e,Bayorb1 RO... 60. 3. La Broderie ..”......068. DU RATIVORE. 567 on croiroit voir une longue chaîne d’émeraudes , au milieu de laquelle on auroit distribué des diamans; et ces nuances sont rele- vées par la couleur jaune du dessous de son ventre , qui, à cer- tains aspects, encadre, pour ainsi dire , dans de l'or, le vert et le blanc du dos. Le bojobi des grandes Indes ne présente pas cet assemblage de vert et de blanc; mais il réunit l'éclat de l'or à celui des rubis. Le vert est remplacé par de l’orangé, et les taches du dos sont jaunâtres et bordées d’un rouge très-vif. Voilà donc les deux va- riétés du bojobi , qui ont reçu l’une et l'autre une parure éclatante d'autant plus agréable à l’œil que le dessin en est simple ei par conséquent facilement saisi. On doit considérer ces serpens avec d'autant plus de plaisir, qu'il paroît qu'ils ne sont point venimeux, qu'ils ne craignent pas l’homme, et qu'ils ne cherchent pas à lui nuire. S'ils n'ont pas une sorte de familiarité avec Ini comme plusieurs couleuvres, s'ils ne souffrent pas ses caresses ,ils ne fuient pas sa demeure ; 113 vont souvent dans les habitations. Ils ne font de mal à personne si on ne les attaque point : mais on ne lesirrite pas en vain ; ils mordent alors avec force, et même leur morsure est quelque- fois suivie d’une inflammation considérable, qui, augmentée par la crainte du blessé, peut, dit-on, donner la mort si on n'y ap- porte point un prompt remède, en nettoyant la plaie, en cou- pant la partie mordue, etc. Néanmoins, suivant les vovageurs, qui attribuent des suites funestes à la morsure du bojobi, ces ac- cidens ne doivent pas dépendre d’un venim qu'il ne paroit pas contenir; et ce n’est que parce que ses dents sont très-acérées * qu'elles font des blessures dangereuses, de même que toutes les espèces de pointes ou armes trop effilées *. AAA AVR AE AAA AAA AAA AA AAA AR A UE AAA AREAS AR AI AL AAA ALT LE RATIVORE. O+ trouve en Amérique, ainsi qu'aux grandes Indes, ce boa, dont la tête est conformée à peu près comme celle du devin, et 1 Il y a deux rangs de dents à la mâchoire supérieure ; les plus voisines du mu- seau sont longues et recourbées comme les crochets à venin de la vipère , mais elles ne sont ni mobiles ni creuses. 2Le bojobi a ordinairement deux cent trois grandes plaques sous le corps , et L: 568 HISTOIRE NATURELLE couverte d’écailles rhomboïdales, unies, ainsi que celles du dos, et à peu près de la même grandeur. Il n’a point de crochets à ve- nin, et ses lèvres sont bordées de grandes écailles. Le dessus du corps de ce boa est blanchâtre on d’un vert de mer, avec cinq rangées longitudinales de taches. Ea rangée du milieu est composée de taches rousses , irrégulières, blanches dans leur centre, placées très-près l’une de l’autre, et se touchant en plusieurs endroits : les deux raies suivantes sont formées de taches roussâtres, chargées d’un demi-cercle blanchâtre du côté de lin- térieur; ce qui leur donne l'apparence des taches appelées yeux sur les ailes des papillons. Les deux rangées extérieures présentent enfin des taches rousses qui correspondent aux intervalles des ran- gees dont les taches ressemblent à des yeux. On voit sur le der- rière de la tête cinq autres taches rousses et allongées, dont les deux extérieures s’élendent jusqu'aux yeux du serpent. Le rativore a ordinairement deux cent cinquante-quatre gran- des plaques sous le corps, et soixanie-cinq sous la queue. Un in- dividu de cette espèce, apporté de Ternate au Cabinet du Roi, a deux pieds six pouces de longueur , et sa queue est longue de qualre pouces deux lignes. Îl se nourrit de rats et d’autres petits animaux, ainsi que plu- sieurs autres serpens. S LA BRODERIE. < tous nommons ainsi le boa dont 1l est question dans cet articie, parce qu'en eflet on voit régner au-dessus de son corps et de sa queue une chaîne de taches de différentes formes et de différentes grandeurs, nuées de bai brun , de châtain pourpre et de cendré Blanchâtre, qui représentent une broderie d'autant plus riche, que lorsque le soleil darde ses rayons sur les écailles luisantes du — soixante-dix-sept sous la quene. Le dessus de sa tête est garni d’écailles sembla. bles à celles du dos. Les deux os qui composent chaque mâchoire sont très-sépa- rés l’un de l’autre dans la partie du museau , et ainsi qu’on le voit dans la vipère commune. Les lèvres sont couvertes de grandes écailles, sur lesquelles on observe an sillon assez profond , et qui sont communément au nombre de vingt-trois sw? k " : . ‘ : de Ne MR . 2 mâchoire supérieure, et de vingt-cinq sur linféricure, de DU GROIN. 56g serpent, elles réfléchissent un éclat très-vif. Voilà pourquoi ap- paremment ce boa a été appelé dans la Nouvelle-Espagne, amsi que le devin, le bojobi, et plusieurs autres reptiles, 4/hua où tleca , c'est-à-dire, serpent de feu. Mais c'est sur sa tête que cette brillante broderie, composée de taches et de raies plus pelites et souvent plus LU , présente un dessin plus varié. M. Linné, comparant ce riche assortiment et cette disposition agréable de couleurs à la distribution de celles qui décorent un parterre, a donné l’épithète de Aortulana au boa dont nous parlons; mais nous avons préféré le nom de broderie, comme désignant d’une manière plus exacte l’arrangement et l'éclat des belles couleurs de ce serpent. Il se trouve au Paraguay, dans l'Amérique méridionale, ainsi que dans la Nouvelle-Espagne. Comme il n’a encore été décrit que dans les cabinets, et que ses couleurs ont dû être plus ou moins allérées par les moyens employés pour ly conserver, on ne peut point déterminer la vraie nuance du fond sur lequel s'étend la broderie remarquable qui le distingue * ; il paroit seulement que le dos est bleuâtre; le ventre est blanchâtre et tacheté d’un roux plus ou moins foncé. L'individu qui fait partie de la collection du Roi a deux pieds trois pouces six lignes de longueur totale, et sa queue est longue de sept pouces. AAA AAA AN AAA NA NAN AAA AAA AAA AV AA ARR VRAIS LE GROIN. Ex forme de la tête de ce boa lui a fait donner par M. Daubenr- ton le nom que nous lui conservons ici. Le museau est en effet ter- miné par une grande écaille relevée; la tête est d’ailleurs très-large, tres-convexe, et couverte d'écaiiles semblables à celles du dos, ainsi que us le plus grand nombre de boa. Le groin se trouve dans la Caroline, où il a été observé par MM. Catesby et Garden. Ni M. Catesby, ni M. Einné, à qu M. Garden avoit envoyé des individus de cette'espèce, n’ont vu les mächoires du boa groin garnies de crochets mobiles et à venin: 1 Le boa broderie a le dessus de la tête couvert d’écailles rhomboïdales, unies et semblables à celles du dos ; deux cent quatre-vingt-dix grandes plaques sous Le corps, et cent vingt-huit sous la queue. Il n’a point de crochets A venin. &no. HISTOIRE NATURELLE mais cependant M. Linné dit positivement qu’en disséquant ce serpent il a trouvé les vésicules qui contiennent la liqueur vé- néneuse. Le dessus du corps du groin est cendré on brun avec des taches noires disposées régulièrement , et des taches transversales jaunes vers la queue. Le dessous présente des taches noires , plus petites, sur un fond blanchâtre. Ce boa ne parvient ordinairement qu’à la longueur d’un ou deux pieds, suivant Catesby ; et celle de la queue égale le plus souvent le tiers de la longueur du corps *. ; PAR RAA AAA AUS PARA VRAIES LAS AURA AE VER AAA VAR ARR RAA AE LE CENCHRIS. Le: boa se trouve à Surinam ; 1l est d’un jaune clair avec des ta- ches blanchâtres, grises dans leur centre , et qui imitent des yeux, comme celles que l’on voit sur les plumes de plusieurs oiseaux, ou sur les ailes de plusieurs papillons. Il a, suivant M. Linné, qui en a parlé le premier, deux cent soixante-cinq grandes plaques sous le corps, et cinquante-sept sous la queue. RAR U ARS AR VU AL AA AA ERA LA AA MMA RASE AA LM RAA RAR VARIANT LE SCHYTALE. Le boa doit parvenir à une grandeur tres-considérable , et jouir de beaucoup de force, puisque, selon M. Linné, il écrase et en- gloutit dans sa gueule des brebis et des chèvres. Le dessus de son: corps est d’un gris mêlé de vert; on voit des taches noires et ar- rondies le long du dos, d’autres taches noires vers leurs bords, blanches dans leur centre, et disposées des deux côlés du corps; le ventre en présente d’autres de la même couleur, mais allon- gées , et comme composées de plusieurs points noirs réunis en- semble. Re De SN: Le he LAN dur aile Neo à APN ge EC RES : Le groin a cent cinquante grandes plaques sous le corps et quarante sous la QUEGEs DU MUET. 571 On le trouve en Amérique. Il a deux cent cinquante grandes plaques sous le corps, et soixante-dix sous la queue. RAI VVV AAA AAA NV AAA A EU UV VV AV ANS VU VV UV SARNIA ANR L'OPHRIE. — (él N individu de cette espèce faisoit partie de la collection de M. le baron de Geer, et a été décrit, pour la première fois, par M. Linné. L'ophrie a beaucoup de rapports, par sa conforma- tion , avec le devin : mais il en diffère par sa couleur, qui est brune, et par le nombre de ses grandes plaques. Il en a deux cent quatre-vingt-une sous le ventre , et soixante-quaire sous la queue. RAR AAAAA AAA VANAAA AA AAA AAA RAR VAUT RAA VUE VUE VER URL AAA R L'ENYDRE. Léon connoît peu de chose relativement à cette espèce de boa, que M. Linné a décrite le premier, et dont un individu faisoit partie de la collection de M. le baron de Geer. L’enydre est d’une couleur grise, mais qui présente plusieurs nuances assez différentes l’une de l’autre. Il paroït, par ce qu'en dit M. Linné, que les dents de la mâchoire inférieure de ce ser- pent sont plus longues, en proportion de la grandeur de lani< mal , que dans la plupart des autres boa. On trouve l'enydre en Amérique ; il a deux cent soixante-dix grandes plaques sous le corps, et cent quinze sous la queue. AAA ANA VAR VA AAA VIS ARR LA LU LRRAAL ERA VU UVR VAR VAN ARR VVRAAN VRAI UE RAA LR RAA LE MUET. ms M. Ligué a donné ce nom à un grand serpent de Surinam, qu’il a placé dans le genre des serpens à sonnette, à cause des grands rapports de conformation qui le rapprochent de ces reptiles, mais LE 572 HISTOIRE NATURELLE que nous comprenons dans Je genre des boa, parce qu'il a de grandes plaques sous le corps et sous la queue, comme ces der- niers , el qu'il n'a point la queue terminée par une ou plusieurs grandes pièces de nature écaillense, comme les serpens à sonnette- C'est à cause de ce défaut de pièces mobiles et sonores, que M. Linné l’a nommé /e muet. Ce reptile a l'extrémité de la queue garnie par-dessous de quatre rangs de petites écailles dont les an- gles sont très-aigus. Les crochets à venin que l’on voit à sa mà- choire supérieure sont effrayans par leur grandeur , selon M. Lin- né. Son dos présente des taches noires rhomboïdales et réunies les unes aux autres. Îl a deux cent dix-sept grandes plaques sous le ventre ,et trente-quatre sous la queue. RAD AE AAA AE UE AVS VAL AV AU AAA AV AU AA AE VU VV RAA # TROISIÈME GENRE. » SERPENS Qui ont le ventre couvert de grandes plaques, et la queue terminée par une grande pièce de nature écailleuse ,; où par plusieurs grandes pièces articulées les unes dans les autres, mobiles ei bruyantes. Res es SERPENS A SONNETTE. LE BOIQUIRA :. Le voyageur égaré au milieu des solitudes brülantes de FAfr:- que, accablé sous la chaleur du midi, entendant de loin le ru- gissement du tigre en fureur qui cherche une proie, et ne sachant comment éviter sa dent meurtrière, ne doit pas éprouver un fré- à D D A RTS Em 1 Boicininga et boïcinininga ; ecacoatl ; casca vela ou cascavel, par les Portugais ; rangedor , par les Espagnols ; the rattle snake , par les Anglais. EDp id DU BOIQUIRA. 573 missement plus grand que ceux qui, parcourant les immenses forêts des contrées chaudes et humides du nouveau monde, sé- duits par la beauté des feuillages et des fleurs, entraînés comme par une espèce d’enchantement au milieu de ces retraites riantes, mais perfides, sentent lout-à-coup l’odeur fétide qu’exhale le boi- quira, reconnoisse le bruit de la sonnette qui termine sa queue, et le voient prêt à s’élancer sur eux. Ce terrible reptile renferme en effetun poison mortel ; et, sans excepter le naja, 1l n’est peut-être aucune espèce de serpent qui contiennent un venin plus actif Le boïquira parvient quelquefois à la longueur de six pieds, et sa circonférence est alors de dix-huit pouces”. L'individu que nous avons décrit, et qui est conservé au Cabinet du Roi, a qua- tre pieds dix lignes de long, en y comprenant la queue, qui à quatre pouces , et qui, dans cetle espèce, ainsi que dans les autres serpens à sonnette déjà connus, est très-courte à proportion du corps. Sa tète aplatie est couverte, auprès du museau, de six écailles plus grandes que leurs voisines, et disposées sur trois rangs trans- versaux, chacun de deux écailles. Les yeux paroissent étincelans , et luisent même dans les téne- bres, comme ceux de plusieurs autres reptiles, en laissant échap- per la lumière dont ils ont été pénétrés pendant le jour; et ils sont garnis d’une membrane clignotante, suivant le savant ana- tomiste Tyson, qui a donné une description très-étendue, tant ces parties extérienres que des parties intérieures du boïquira. La gueule présente une grande ouverture; et le contour en est de quatre pouces dans l'individu de la collection du Roi. La langue est noire , déliée, partagée eg deux, renfermée en parlie dans une gaine, et presque toujours l'animal l'étend et l'agite avec vilesse. Les deux os qui forment les deux côtés de la mà- choire inférieure ne sont pas réunis par-devant, mais séparés par un intervalle assez considérable , que le serpent peut agrandir lorsqu'il étend la peau de sa bouche pour avaler une proie volu- mineuse. Chacun de ces os est garni de plusieurs dents crochues, ? Hernandès ne lui donne que quatre pieds de longueur; Marcgrave, un peu plus de quatre pieds; et Pison, cinq : mais Kalm a écrit que les plus gros boi- quira qu'on ait vus dans l'Amérique septentrionale tétoient longs de six pieds. &uwant Catesby, les plus grands serpens à sonnette ont près de neuf pieds de longueur. 574 HISTOIRE NATURELLE tournées en arrière, d'autant plus grandes qu’elles sont plus près du museau, et qui, par une suite de cette disposition , ne peuvent point lâcher la proïe qu’elles ont saisie , et la retiennent dans la gueule du boiquira, pendant qu'il Finfecte du venin qui tombe de sa mâchoire supérieure. C’est, en effet, sous la peau qui re- couvre cette mâchoire, et de chaque côté, que nous avons vu les vésicules où le poison se ramasse. Lorsque le serpent comprime ces vésicules , le venin se porte à la base de deux crochets très- longs et très-apparens, attachés au-devant de la mâchoire supé- rieure; ces crochets, enveloppés en partie dans une espèce de gaîne, d'où ils sortent lorsque l’animal les redresse, sont creux dans presque toute leur longueur ; le venin y pénètre par un trou dont ils sont percés à leur base, au-dessous de la gaine, et en sort par une fente longitudinale que l’on voit vers leur pointe”. Cette fente a plus d’une ligne de longueur dans l'individu conservé au Cabinet du Roi, et les crochets sont longs de six lignes. Indé- pendamment de ces crochets, qui paroissent appartenir à toutes les espèces de serpens venimeux , et que nous avons vus, en ellet, dans les vipères , les cérastes, les naja, eic., la mâchoire supé- rieure est garnie d’autres dents plus petites et plus voisines du gosier vers lequel elles sont tournées, et qui servent, ainsi que celles de la mâchoire inférieure , à retenir la victime que les cro- chets percent et imbibent de venin. Les écailles du dos sont ovales et relevées dans le milieu par ine arête qui s'étend dans le sens de leur plus grand diamètre. On a écrit qu'elles sont articulées si Hbrement, que l'animal, lorsqu'il est en colère, peut les redresser; mais le mouvement qu'il leur donne doit être peu considérable , puisque nous nous sommes as- surés qu'elles tiennentaà la peau dans presque toute leur iongueur et toute leur largeur”. Le déssous du corps, ainsi que le dessous 2 Lorsqu'on presse la racine de ces crochets, il coule abondamment de leur extrémité une matière verte, qui est le venin. Ce venin donne une couleur verte au linge sur lequel on le répand ; et plus on lessive ce linge, plus il devient vert. Ë nas 7 2 Chacune de ces plaques est mue par un muscle particulier , dont une extré- trémité s'attache au bord supérieur de la plaque inférieure , et l’autre à peu près au milieu de la face interne de la plaque supérieure. D'ailleurs chaque plaque Q d b \ l’ r Er 2 d A 5 À ve C7 2 tient, par ses deux HDouts, à lextréemité des cotes, et cette extrémite est un ferme point d'appui sur lequel porte la plaque, et qui sert a l’animal à élever ou à abaisser cette plaque avec force, par le moyen du muscle dont nous venons de parier. " DU BOIQUIRA. 578 de la queue, sont revêtus d’un seul rang de grandes plaques comme da ns le genre des boa; nous en avons compté vingi-sept sous la queue, et cent quatre-vingt-deux sous ie ventre de l’indi- vidu qui fait partie de la collection du Roi. M. Linné en a compté cent soixante-sept sous le corps, et vingt-trois sous la queue de celui qu'il a décrit *. LA couleur du dos est d’un gris mêlé de jaunätre, et sur ce fond on voit s'étendre une rangée longitudinale de taches noires, bordées de blanc”. Sa queue est terminée, comme dans presque tous les serpens de son genre, par un assemblage d’écailles sonores qui s’emboîtent les unes dans les aulres, et que nous croyons d’autant plus devoir décrire ici en détail, que la considération attentive de leur forme et de leur position peut nons éclairer relativement à leur pro- duction ainsi qu'à leur accroissement. Cette sonnette du boiquira est composée de plusieurs pièces, dont le nombre varie depuis un jusqu’à trente et même au-delà *. Toutes ces pièces sont entièrement semblables les unes aux au- ires, non seulement par leur forme, mais souvent par leur gran- deur; elles sont toutes d’une matière cassante, élastique, demi- transparente, et de la même nature que celle des écailles. La pièce la plus voisine du corps, et qui le touche immédiatement, forme, comme toutes les autres, une sorte de pyramide à quatre faces, dont deux faces opposées sont beaucoup plus larges que les deux autres; on peut la regarder comme une espèce de petit étui ter- miné en pointe, et qui enveloppe les dernières vertébres de la queue, Elle est moulée sur ces dernières veriebres, dont elle n'est séparée que par une membrane très-mince, et auxquelles elle est appliquée de manière qu’elle suit toutes les inégalités de leurs élé- valions. Elle présente trois bourlets circulaires qui répondent à trois de ces élévations ; leur surface est raboteuse comme celle de ces éminences sur lesquelles ils se sont moulés ; 1ls sont creux, ainsi que le reste de la pièce : le premier bourlet, c’est-à-dire , le 1 Tyson en a trouvé cent soixante-huit sous le corps et dix-neuf sous la queue du boiquira qu'il a décrit. 2 Le docteur Tyson a très-bien fait connoître deux petites glandes qui s'ouvrent dans le rectum du boiquira auprès de l’auns, et qui contiennent une liqueur un peu épaisse et d’une odeur forte et très-désagréable. 3 Pour bien entendre ce que nous allons dire, on pourra jeter les yeux sur la planche où nous avons fait représenter une sonnette, sa coupe longitudinale, ct une des pièces qui la composent vue séparément, 556 HISTOIRE NATURELLE plus proche de l'ouverture de la pièce, a le plus grand diamètre ; et le plus petit diamètre est celui du troisième bourlet, Toutes les pièces de la sonnette sont emboîtées l’une dans l’au- tre, de manière que les deux tiers de chaque pièce sont renfermés dans la pièce qui la suit, à commencer du côté du corps. Des trois bourlets que présente chaque pièce , deux sont cachés par la pièce suivante ; le premier bourlet est le seul qui paroisse. La piece située au bout de la sonnette opposé au corps est la seule dont lestrois bourlets soient visibles, et qui montre sa vraie forme en son entier; et la sonnette n’est composée, à l'extérieur, que de celte pièce, et des premiers bourlets de toutes les autres. Les deux derniers bourlets de chaque pièce, qui ne peuvent pas être vus, sont placés sous les deux premiers de la pièce sui- vante. [ls en occupent le creux ; ils retiennent cette pièce, et lem- pêchent de se séparer du reste de la sonnette : mais, comme leur diamètre est moins grand que celui des premiers bourlets de Îa pièce suivante, chaque pièce joue librement autour de celle qu’elle enveloppe, et qui la retient. Aucune pièce, excepté la plus voi- sine du corps, n'est liée avec la peau de l'animal, ne tient au corps du serpent par aucun muscle, par aucun nerf, par aucun vaisseau ‘, ne peut recevoir par conséquent ni accroissement ni nourriture , et n’est qu’une enveloppe extérieure qui se remue lorsque l’animal agite l'extrémité de sa queue, mais qui se meut uniquement, comme se mouvroit tout corps étrange qu’on au- roit attaché à la queue du serpent*. Cette conformation de la sonnette semble très-extraordinaire au premier coup d'œil; cependant elle cessera de le paroitre, si l'on veut en déduire avec nous la manière dont la sonnette a dû être produite. Les différentes pièces qui la composent n’ont été formées que successivement : lorsque chacune de ces pièces a pris son accrois- sement, elle tenoit à la peau de la queue; elle n’auroit pas pu * On a écrit le contraire ; mais nous nous sommes assurés de la conformation que nous décrivons ici. r . . ? ON AS 2 La sonnetie du boiquira est placée de manière que ses côtés les plus larges sont verticalement lorsque le serpent est sur son ventre : elle ne touche pas immé- diatement aux grandes plaques qui garnissent le dessous de la queue; mais entre ces grandes plaques et le bord de la première pièce, on voit une rangée de petites écailles semblables à celles du dos. La sonnette de l’individu conservé au Cabinet du Roi a neuflisnes de hauteur, un pouce neuf lignes de longueur, et est con'posée dé six pièces, DU BGIQUIR A. 53% Yecevoir sans cela la matière nécessaire à son développement, et d’ailleurs on voit souvent, sur les bords des pièces qui ne tien- nent pas immédialement au corps du serpent, des restes de la peau de la queue, à laquelle elles éloient attachées. Quand une pièce est formée , il se produit au-dessous une nou- velle pièce entièrement semblable à l’ancienne, et qui tend à la détacher de l'extrémité de la queue. L'ancienne pièce ne se sépare pas cependant tout-à-fait du corps du serpent ; elle est seul: ment repoussée en arriere : elle laïsse, entre son bord et la peau de la queue, un intervalle occupé par le premier bourlet de la nou- velle pièce ; mais elle enveloppe toujours le second et le troisième bourlet de cette nouvelle pièce, et elle joue lHbrernent autour de ces bourlets qui la retiennent. Lorsqu'il se forme une troisième pièce , elle se produit au-des- sous de la seconde, de la même manière que la seconde au-dessous de la première ; elle détache également de l'extrémité de la queue la seconde pièce qu'elle fait reculer, mais qu’elle retient par ses bourlets. - Si les dernières vertèbres de la queuëé n'ont pas grossi pendant que la sonnette s’est formée, chaque pièce qui s’est moulée sur ces vertèbres a le même diamètre, et la sonnette paroît d’une égale largeur jusqu’à la pièce qui la termine; si, au contraire, les vertè- bres ont pris de l'accroissement pendant la formation de la sonnette, les bourlets de la nouvelle piece sont plus grands que ceux de la pièce plus ancienne, et le diamètre de la sonnette diminue vers la pointe. Dans les divers serpens à sonnette qui sont conservés au Cabinet du Roi, la sonnette est d’un égal diamètre vers sa pointe et à son origine; mais, dans plusieurs sonnettes détachées du corps du serpent, el qui font aussi partie de la collection de sa majesté, nous avons vu les pièces diminuer de grandeur vers l'extrémité de la sonnette. Il est évident, d'après ce que nous venons de dire, qu’il ne peut se former qu’une pièce à chaque mue particulière que le serpent éprouve vers l'extrémité de sa queue. Le nombre des piè- ces est donc égal à celui de ces mues particulières : mais, conime l'on ignore si la mue particulière arrive dans le même tem ps que la mue générale du corps et de la queue, si elle a lieu une fois ou plusieurs fois par an, le nombre des pièces non-seulement ne prouve rien pour la ressemblance ou la différence des espèces, Lacepède, 1. 40 \ 578 HISTOIRE NATURELLE mais ne peut rien indiquer relativement à Pâge du serpent, ainsi qu’on l'a écrit. Une nourriture plus abondante et une tempéra- ture plus où moins chaude peuvent d'ailleurs augmenter ou di- minuer le nombre des mues dans la même année; et voilà pour- quoi, dans certains individus , la sonnetle est partout d'un égal diamètre, parce que, pendant le temps de sa production , les dernières vertèbres n’ont pas grossi d’une manière sensible; tandis que, dans d’autres individus, les mues ont été assez éloignées pour que les vertèbres aient eu le temps de croître entre la for- mation d’une pièce et celle d’une autre. fl pourroit donc se faire que la sonnette d’un individu qui, dans différentes années , au- roit éprouvé des accidens très-différens , füi d’un égal diamètre dans quelques-unes de ses portions , et allit en diminuant dans d'autres. D'un autre côté, on verroit de vieux serpens avosr des sonneltes d’une longueur prodigieuse et presque égale à la longueur du corps, si les pièces qui les composent ne se desséchoient pas prompiement; mais, comme elles ne tirent aucune nourriture de animal et ne sontabreuvées par aucun suc, elles deviennent très- fragiles ,se brisent et se séparent souvent par l'effet d’un frottement assez peu considérable. Voilà pourquoi le nombre des pièces n’in- dique jamais le nombre de toutes les mues particulières que Fani- mal peut avoir éprouvées à l'extrémité de sa queue. Si même, dans Ja mue générale des serpens à sonnette, qui doit s'opérer de la même manière que celle des couleuvres, et pendant laquelle la vieille peau del'animal doit se retourner en entier comme un gant, etainsi que nous l'avons vu; si, dans celte mue générale, le dépouillement s'étend jusqu'aux dernières vertèbres de la queue et emporte la première pièce de la sonnette, toutes les autres pièces doivent être avec elles séparées du corps du reptile; et dès-lors les sonnettes ne seroient jamais composées que de pièces toutes produites dans l'in- tervalle d’une mue générale à la mue générale suivante. Toutes les parties des sonnettes étant très-sèches , posées les unes au-dessus des autres, et ayant assez de jeu pour se frotter mutuel- lement lorsuu’elles sont secouées, 1l n’est pas surprenant qu'elles produisent un bruit assez sensible; nous avons éprouvé, avec plusieurs sonnettes à peu près de la grandeur de celle dont nous venons de rapporter les dimensions ; que ce bruit , qui ressemble à celui du parchemin qu'on froisse, peut être entendu à plus de soixante pieds de distance. Il sernit bien à désirer qu'on pût l’en- tendre de plus loin encore, afin que Fapproche du boiquira, étant DU BOIQUIRA. En moins imprévue, fut aussi moins dangereuse. Ce serpent est ,en ellet, d'autant plus à craindre, que ses mouvemens sont souvent irès-rapides; en un clin d'œil, il'se replie en cercle, s'appuie sur sa queue, se précipite comme un ressort qui se débande, tombe sur sa proie , la blesse, et se retire pour échapper à la vengeance de son ennemi : aussi les Mexicains le désignent-ils par le nom d'ecacoatl, qui signilie /e vent. Ce funeste reptile habite presque toutes les contrées du nou- veau monde , depuis la terre de Magellan jusqu’au lac Cham- plain, vers le quarante - cinquième degré de latitude septentrio- nale. Il régnoil, pour ainsi dire, au milieu de ces vastes contrées à où presque aucun animal n'osoit en faire sa proie, et où les an- ciens Américains, retenus par une crainle superstitieuse, redou- toient de lui donner la mort; mais, encouragés par l'exemple des Européens, ils ont bientôt cherché à se délivrer de cette es- pèce terrible. Chaque jour les arts et les travaux, purifiant et fer- tilifant de plus en plus ces terres nouvelles, ont diminué le nom- bre des serpens à sonnette et l’espace sur lequel ces repliles exercoient leur funeste domination se rétrécit à mesure que l'empire de l’homme s'étend par la culture. Le boiquira se nourrit de vers *, de grenouilles, et même de lièvres : il fait aussi sa proie d'oiseaux et d’écureuils ; car il monte avec facilité sur les arbres, et sy élance avec vivacité de branche en branche, ainsi que sur les pointes de rochers qu’il habite , et ce n'est que dans la plaine qu’il court avec difficulté, et qu'il est plus aisé d'éviter sa poursuite. Son haleine empestée, qui tronble quelquefois les petits animaux dont il veut se saisir, peut aussi empêcher qu'ils ne lui échap- pent. Les Indiens racontent qu'on voit souvent le serpent à son- nette entortiilé à l’entour d’un arbre, lançant des regards ter- ribles contre un écureuil, qui, après avoir manifesté sa frayeur par ses cris et son agitation, tombe au pied de l'arbre, où il est dévoré. M. Vosmaër, qui a fait à la Haye des expériences sur les effets de la morsure d’un boïquira qu'il avoit en vie , dit que les oiseaux et les souris qu'on lui jetoit dans la cage où il étoit ren- fermé témoignoient une grande terreur; qu'ils cherchoïent d'a- 2 M. Tyson a trouvé un grand nombre de vers du genre des lombrics dans l'estomac et dans les intestins d’un boiquira. On en trouve anssi quelquefois dans ecnx de la vipère commune, 580 HISTOIRE NATURELLE bord à se tapir dans un coin, et qu'ils courotent ensuïte, cominé saisis de douleurs mortelles , à la rencontre de leur ennemi, qui ne cessoit de sonner de sa queue : mais cet effet d’une vapeur méphitique et puante a été exagéré et dénaturé au point de deve- nir merveilleux. On a dit que le boïquira avoit, pour ainsi dire, la faculté d’enchanter l'animal qu'il vouloit dévorer ; que, par la puissance de son regard , il le contraignoit de s'approcher peu à peu et de se précipiter dans sa gueule ; que l’homme ne pouvoit résister à la force magique de ses yeux étincelans, et que, plein de trouble, 1l se présentoit à la dent envenimée du boiquira, au lieu de chercher à l’éviter. Pour peu que les serpens à sonnette eussent été plus connus, et qu’on se füt occupé de leur histoire, on auroit bientôt, sans doute , ajouté à ces faits merveilleux de nouveaux faits plus merveilleux encore. Et combien de fables n’auroit-on pas substiluées au simple effet d’une haleine fétide, qui même n'a jamais élé ni aussi fréquent ni aussi fort que cer- tains naturalistes l'ont pensé ! L'on doit présumer , avec Kalm, que le plus souvent lorsqu'on aura vu un oiseau ou un écureuil, ou tout autre animal, se précipiter, pour ainsi dire , du haut d’un arbre dans la gueule du serpent à sonnette, il aura été déjà mordu par le serpent ; qu'il se sera enfui sur l'arbre ; qu'il aura exprimé par ses cris et son agilation l’action violente du poison laissé dans son sang par la dent du reptile ; que ses forces se seront insensi- ble;nent affoiblies ; qu’il se sera laissé aller de branche en bran- che, et qu'il sera tombé enfin auprés du serpent , dont les yeux enflammés et le regard avide auront suivi tous ses mouvemens, et qui se sera de nouveau élancé sur lui lorsqu'il l'aura vu pres- que sans vie. Plusieurs observa lions rapportées par les voyageurs, et particulièrement un fait rapporté par Kalm, paroissent le prouver. On a écrit que la pluie augmentoit la fureur du boiquira ; mais il faut que ce soit une pluie d'orage, car il ne craint point d'aller à l’eau. C’est lorsque le tonnerre gronde qu'il est le plus redou- table ; on frémit lorsqu'on pense à l'état affreux et aux angoisses mortelles qu'éprouve celui qui, poursuivi par un orage terrible, au milieu des ténèbres épaisses qui lui dérobent sa route, cherche un asile sous quelque roche avancée, contre les flots d'eau qui tombent des nues, aperçoit au milieu de l’obscurité les yeux étin- celans du serpent à sonnette, et le découvre à la clarté des éclairs, agitant sa queue et faisant entendre son sifflement funeste. DU BOIQUIRA. 58x Un animal qui ne paroît né que pour détruire devroit-il donc aussi sentir les feux de l'amour ? Mais la même chaleur qui anime tout son être , qui exalle son venin , qui ajoute à ses forces meurtrieres , doit rendre aussi plus vif le sentiment qui le porte à se reproduire. 11 ne pond qu’un assez petit nombre d'œufs; mais, comme il vit plusieurs années, l'espèce n’en est que trop multipliée. Pendant l'hiver des contrées un peu éloignées de la ligne, les boiquira se retirent en grand nombre dans des cavernes, où ils sont presque engourdis et dépourvus de force. C'est alors que les Nègres et les Indiens osent pénétrer dans leurs repaires pour les détruire, et même s'en nourrir; car, malgf le dégoût et l’hor- reur que ces reptiles inspirent , ils en mangent, dit-on, la chair, et elle ne les incommode pas, pourvu que le serpent ne se soit pas mordu lui-même. Voilà pourquoi, a-t-on ajouté, ii faut tuer promptement le boiquira , lorsqu'on veut le manger ; il faut lui donner la mort avant qu'il ne s'irrite, parce qu’alors il se mor- droit de rage. Mais comment concilier cette asserlion avec le témoignage de ceux qui prétendent qu’on peut manger impu- nément les animaux que sa morsure fait périr, de même que les sauvages se nourrissent, sans aucun inconvénient, du gibier qu'ils ont tué avec leurs flèches empoisonnées ? Cette dernière opinion paroit d'autant plus vraisemblable , que le boiquira sem- bleroit devoir se donner la mort lui-même, si la chair des ani- maux percés par ses crochets devenoit venimeuse par une suite de sa morsure. Les Nègres saisissent le boiquira auprès de la tête, et il ne lui reste pas assez de vigueur, dans le temps du froid, pour se dé- fendre ou pour leur échapper. 11 devient aussi la proie de con- leuvres assez fortes, qui doivent le saisir de manière à n’en être pas mordues : ; et l’on doit supposer la même adresse dans les cochons marrons, qui, suivant Kalm , se nourrissent , sans in- convénient, du boiquira , dressent leurs soies dès qu'ils peuvent le sentir, se jettent sur lui avecavidilé, et sont garantis, dans cer- taines parties de leur corps, du danger de sa morsure , par la: rudesse de leur poil, la dureté de leur peau et l'épaisseur de leur graisse *. z Voyez l’article de Za couleuvre lien. 2 Le boiquira est très-vivace, ainsi que les autres serpens. AI. Tyson rapporte 582 HISTOIRE NATURELLE Lorsque le printemps est arrivé dans les pays élevés en lati- tude et habités par les boiquira , que les neiges sont fondues et que l'air est réchauflé , 1ls sortent pendant le jour de leurs re- traites, pour aller s’exposer aux rayons du soleil. Ils rentrent pendan! la nuit dans leurs asiles, et ce n’est que lorsque les ge- lées ont entièrement cessé qu'ils abandonnent leurs cavernes , se répandent dans les campagnes , et pénètrent quelquefois dans les maisons. On ose observer le temps où ces animaux viennent se chauffer au soleil, pour les attaquer et en tuer un grand nombre à la fois. Pendant l'été, ils habitent au milieu des montagnes élevées, composées de pierreScalcaires , incultes et couvertes de bois, telles que celles qui sont voisines de la grande chute d’eau de Niagara. Ils y choisissent ordinairement les expositions les plus chaudes et les plus favorables à leurs chasses ; ils préfèrent le coté méridional d’une montagne, et le bord d’une fontaine ou d’un ruisseau ha- bité par des grenouilles , et où viennent boire les petits animaux dont ils font leur proie. Ils aiment aussi à se mettre de temps en temps à l'abri sous un vieux arbre renversé; et voilà pourquoi , suivant Kalm, les Américains qui voyagent dans les forêts in- festées de serpens à sonnette, ne franchissent point les troncs d'arbres couchés à terre , qui obstruent quelquelois le passage : ils aiment mieux en faire le tour; et s’ils sont obligés de les tra- verser, ils sautent sur le tronc du plus loin qu'ils peuvent, et s'élancent ensuite au-delà. Le boiquira nage avec la plus grande agilité ; il sillonne la sur- face des eaux avec la vitesse d’une flèche. Malheur à ceux qui naviguent sur de petits bâtimens auprès des plages qu'il fré- quente ! Ils s’élancent sur les ponts peu élevés ; et quel état affreux que celui où lout espoir de fuir est interdit, où la moindre morsure de l'ennemi que l’on doit combattre donne la mort la plus prompte, où il faut vaincre en un instant, ou périr dans des tourmens horribles ! que celui qu’il disséqua vécut quelques jours après que sa peau eut été déchirée, et qu’on Jui eut arraché la plupart de ses viscères. Pendant ce temps ses poumons, qui, vers le devant du corps, étoient composés de petites cellules, comme ceux des grenouilles, se terminoient par une grande vessie transparente et forte , eb avoient près de trois pieds de longueur , ne se dilatèrent et ne se contractèrent point alternativement , mais dem curèrent enflés et remplis d’air jusqu'au moment où l’animal expira. DU BOIQUIRA. 583 Le premier effet du poison est une enîlure générale ; bientôt la bouche s’enflamme et ne peut plus contenir in langue , deve- nue trop gonflée ; une soif dévorante consume ; et si l'en cherche à l'étancher, on ne fait que redoubler les tourmens de son agonie. Les crachats sont ensanglantés ; les chairs qui environnent la plaie se corrompent et se dissolvent en pourriture ; et sartout si c'est pendant l’ardeur de la canicule, on meurt quelquefois dans cinq ou dix minutes, suivant la partie où l'on a été mordu. On a écrit que les Américains se servoient, contre la morsure du boiquira , d’un emplatre composé avec la tète même du serpent écrasé. On a prétendu aussi qu'il fuit les lieux où croît le dic- tame de Virginie, et l’on a essayé de se servir de ce dictame comme d’un remède contre son venin’; mais 1l paroït que le véritable antidote, que les Américains ne vouloient pas décou- vrir, et dont le secret leur a été arraché par M. Teinnint, mé- decin écossais , est le poligale de Virginie, sénéka ou sénéga ( po- lygama senega ). Cependant il arrive quelquefois que ceux qui ont le bonheur de guérir ressentent périodiquement , pendant une ou deux années, des douleurs irès-vives , accompagnées d’enflure ; quelques-uns même portent toute leur vie des mar- ques de leur cruel accident, et restent jaunes ou tachelés d’autres couleurs. Le capitaine Hall Le _dans la Caroline > plusieurs expériences iouchant les effets de la morsure du boiquira sur divers antmaux. I! fit attacher à un piquet un serpent à sonnette, long d'environ quatre pieds ; trois chiens en furent mordus : le premier mourut en quinze secondes ; le second , mordu peu après , périt au bont de deux heures dans des convulsions ; le troisième , mordu après une demi-heure, n'offrit d'effets visibles du venin qu'au bout de irois heures. Quatre jours après, un chien mourut en une demi-mimute , et un autre ensuite en quatre minutes ; un chat fut trouvé mort le lendemain de l'expérience, On laissa écouler trois jours; une grenouille mordue mourut en deux minutes, et un poulet de ? On lit dans les Transactions philosophiques , année 1665, qu’en Virginie, en 1657, au mois de juillet, on attacha au bout d'une longue baguette des femiles de dictame que lon avoit un peu broyées, et qu ’on les Piocha pe museau d’un serpent à sonnette, qui se tourna et s’agita vivement , comme pour les éviter, mais qui mourut avant une demi-heure, et parut n'expirer que par lcfet de l'o- deur de ces feuilles, 584 HISTOIRE NATURELLE trois mois, dans trois minutes, Quelque temps après , on mit au- près du boiïquira un serpent blanc, sain et vigoureux ; ils se mordirent lun l'autre : le serpent à sonnette répandit même quelques gouttes de sang ; 1l ne donna cependant aucun signe de maladie, et le serpent blanc mourut en moins de huit minutes. On agita assez le boiïquira pour le forcer à se mordre lui-même, et 11 mourut en douze minutes. Aïnsi ce furieux reptile peut tourner contre lui ses armes dangereuses , et venger ses victimes. Tranquilles habitans de nos contrées tempérées , que nous sommes plus heureux, loin de ces plages où la chaleur et l’hu- midité règnent avec tant de force ! Nous ne voyons point un serpent infecter l’eau , au milieu de laquelle il nage avec facilité ; les arbres , dont il parcourt les rameaux avec vitesse ; la terre, dont il peuple les cavernes ; les bois solitaires , où il exerce le mème empire que le tigre dans ses déserts brülans, et dont l’obs- curité livre plus sûrement sa proie à sa morsure. Ne regrettons pas les beautés naturelles de ces climats plus chauds que le nôtre, leurs arbres plus touffus, leurs feuillages plus agréables, leurs fleurs plus suaves, plus belles : ces fleurs, ces feuillages, ces ar- bres, cachent la demeure du serpent à sonnette. PARAMETERS LE MILLET. Ce serpent à sonnette a été observé dansla Caroline par MM. Gar- den et Catesby. Nous allons le décrire d’après un individu con- servé dans le Cabinet du Roï. Le dessus de son corps est gris, avec trois rangs longitudinaux de taches noires; celles de la rangée du milieu sont rouges dans leur centre, et séparées l’une de l'autre par une tache rouge. Le dessus de la tête est couvert de neuf écailles plus grandes que celles du dos, et disposées sur quatre rangs; la mâchoire supérieure est garnie de deux crochets mobiles et trés-allongés. Les écailles qui revêtent le dos sont ovales, et re- levées par une arête. Le milleta ordinairement cent trente-deux grandes plaques sous le corps, et trente-denx sous la queue. L’in- dividu qui fait partie de la collection du Roi a quinze pouces dix lignes de longueur tolale, et sa queue est longue de vingt-deux lignes ; sa sonnetie est composée de onze pièces, a une ligne de lar- Tome 1. 20 | | L à + È = /retre PRE Sr: , Îeguevauvillers Je. 1. Le Boiquira.. NL Page b72. L 2De Millet. "1.58L —— —— —————— — 0 à.le Durissus. 8 DU DURISSUS,. 685 geur dans son plus grand diamètre, el est séparée des grandes plaques par un rang de petites écailles. AV AA LA AAA AAA AAA A AA AA AE VRAI AA VRAI UMA AA AAA AAA A2 LE DRYINAS. Pisoos tous les serpens à sonnette ont les mêmes habitudes naturelles : nous ne répélerons pas ici ce que nous avons dit à l'article du boiquira, et nous nous contenterons de rapporter les traits principaux de la conformation du dryinas. Ce dernier reptile est blanchâtre , avec quelques taches d’un jaune plus ou moins clair. Ïl a ordinairement cent soixante-cinq. grandes plaques sous le corps, et trente sous la queue. Le dessus de sa têle présente deux grandes écailles, et celles qui garnissent son dos sont ovales, et relevées par une arète. On le trouve en Amérique. RARA AAA AAA LUI AAA AAA AAA US VA UT AAA VAR AAA AAA RAA AR AAA AAA AA AA AAA AAA AAA RAA V2 AAA LE DURISSUS. Cr serpent a le dessus du corps varié de blanc et de jaune , avec des taches rhomboïdales, noires et blanches dans leur centre. Le sommet de sa lète est couvert de six grandes écailles, placées sur trois rangs. Le dos est garni d’écailles ovales, et relevées par une arête. L'individu que nous avons décrit, et que nous avons vu au Cabinet du Roï , n’avoit qu’une pièce à sa sonnette; sa longueur totale étoit d’un pied cinq pouces six lignes , et celle de sa queue, d’un pouce huit lignes. Il avoit des crochets à venin, longs de quatre lignes, et dont l'extrémité étoit percée par une fente d'une ligne de longueur. Il paroissoit que lorsque l'animal étoit en vie, il pouvoit faire avancer au-delà des lèvres les deux os de la mà- choire inférieure , qui n'étoient réunis que par des membranes, et que l’on voyoit armés de dents tournées en arrière, et plus grandes vers le museau que vers le gosier *. nn SEE ER RRQ RRQ | | à * Le durissus a ordinairement cent soixante-douze grandes plaques sous le corps, et vingt-unc sous la queue. 580 HISTOIRE NATURELLE RARE BUY UAA VE AA UVS AAA AAA RARE LVL D VER VE LAB LV PLU, LE PISCIVORE. : Cons Catesby qui a parlé le premier de la conformation et des habitudes de ce serpent, que l’on trouve dans la Caroline, où ik porte le nom de serpent à sonnette. Sa queue n’est cependant pas garnie de pièces mobiles et un peu sonores ; mais elle est terminée par une pointe de nature écailleuse, longue ordinairement d'un demi-pouce, et dure comme de la corne. Cette espèce d'arme a slonné lieu à plusieurs fables. On a prétendu qu’elle étoit aussi Uangereuse que les dents de l'animal , qu’elle pouvoit également Hong la mort, et que mème lorsqu'elle perçoit le tronc d’un jeune arbre dont l'écorce étoitencore tendre , les fleurs se fanoient dans le même instant, la verdure se flétrissoit, l'arbre se, dessé- choit et mouroit. La vérité, relativement aux propriétés du pis- civore , est, suivant Calesby, que sa morsure peut être très-fu- neste. Sa tête est grosse, son cou menu, sa mâchoire supérieure armée de grands crochets mobiles. Le dessus de son corps, qui a quelquefois cinq ou six pieds de longueur, présente une ccienr brune; le ventre et les côtés du cou sont noirs, avec des bandes jaunes, transversales et irrégulières. Il est très-agile et très-adroit à prendre des poissons : on le voit souvent, pendant l'été, étendu aulour des branches d’arbres qui pendent sur les rivières ; il y saisit avec rapidité le moment de surprendre lesoiseaux qui vien- nent se reposer sur l'arbre, ou les poissons qu'il aperçoit dans l'eau ; il s’élance sur ces derniers, les poursuit en nageant et en plongeant avec beaucoup de vitesse, en prend d'assez gros qu'il entraîne sur le rivage et qu’il avale avec avidité ; et voilà pour- quoi nous l'avons nommé péscivore. Îl se précipite aussi quelque- fois, du haut des branches où il se suspend , sur la tête des hommes qu'il voit passer au-dessous de lui dans un bateau, DE L'ANGUIS. 587 RAA EE RAS UT VAR LA RRTUVR AABAMAR VEMAMEA QUATRIÈME GENRE SERPENS Dont le dessous du corps et de la queue est garnë d'écailles semblables à celles du dos. ANGUIS. Les serpens de ce genre sont très-diflérens des autres, par leur conformalion extérieure. Au lieu d’avoirau-dessous de leur corps de grandes plaques, faites en forme de bandes transversales, et une ou deux rangées de ces mêmes plaques au-dessous de leur queue , ils sont couverts partout de petites écailles semblables à celles que les couleuvres , les boa, les serpens à sonnette et la plu- part des autres reptiles ont au-dessus du dos. Les écailles de la rangée du milieu du dessous du corps et de la queue sont cepen- dant , dans quelques anguis, un peu plus grandes que les autres ; et c’est celles-là qu’il fautalorscompter pour reconnoître plus aisé- ment l'espèce de l'animal, de même que l’on compte dans les boa et dansles couleuvres les grandes pièces qui revêtent le dessous de leur corps. Ces grandes plaques, couchées les unes sous les autres sous le ventre et la queue des couleuvres et des boa ,se redressent contre le terrain lorsque ces serpens veulent aller en arrière, et leur opposent alors une résistance plus où moins forte : aussi les anguis, qui n'ont pas de grandes pièces, peuvent-ils exécuter des mouvemens en tout sens avec plus de facilité que la plupart des autres reptiles; et c’est ce qui leur a fait attribuer , par des voya- geurs, le nom d’amphisbène ou de double marcheur * : mais cette dénomination nous paroît devoir mieux convenir au genre des serpens à anneaux, auxquels, en efket, M. Linné l’a attachée ex- clusivement. 1 Plusieurs anguis ont été envoyés d'Amérique ou d’ailieurs au Cabinet du Roi, sous le nom d'amplhisbène. 588 HISTOIRE NATURELLE Comme la plupart des expressions exagérées ont produit assez souvent des erreurs grossières où des contes ridicules, on n'a pas dituniquementquelesanguis pouvoientsemouvoirenarrièrepres- que aussi bien qu’en avant: on a prétendu encore qu’ils pouvoient se conduire et courir pendant long-temps, dans les deux sens, avec une égale facilité ; qu’ils avoient des yeux à chaque extré- mité du corps, pour discerner leur route en avant et en arrière; qu'ils y avoient même une tête complète; qu'on s'exposoit aux mêmes dangers, en les saisissant par l’un ou l’autre bout; qu’ils étoient très à craindre pour les petits animaux dont ils se nour- rissoient , parce que jamais le sommeil ne les empêchoit de s’aper- cevoir du voisinage de leur proie; que pendant qu’une tête dor- moit, l’autre veilloit, etc. Mais c’est assez rapporter les opinions que l’on ne doit pas craindre de voir se répandre, et que par conséquent on n'a pas besoin de combattre. Nous devons même convenir que la conformation des anguis est une des plus pro- pres à faire naïitre ces erreurs: leur queueest , en effet, très-grosse en comparaison du corps, et son extrémité arrondie ressemble d'autant plus à une tête, même lorsqu'on la considère à une pe- tite distance , que les diverses taches qui varient ordinairement sa couleur sont disposées de manière à représenter des yeux, des narines et une bouche. D'ailleurs les yeux des anguis étant très- petits, on a de la peine à les distinguer à l'endroit où ils sont réellement , et on peut plus facilement être trompé par leur appa- rence. C’est cette petitesse des yeux des anguis qui les a fait nom- mer serpens aveugles par plusieurs voyageurs : mais celte déno- mination, qui, à la rigueur, ne convient à aucun serpent, ne doit pas être du moins appliquée aux anguis , ni aux «mphisbènes ou serpens & anneaux ; nous ne l’emploierons que pour désigner les dimensions encore plus petites des yeux des serpens , que M. Linné a nommés cœcilia , et que nous nommons d’après lui eæciles. DE L'ORVET. 589 RAA REVERS VRAI EM LIEU LAURE VRAIES L’'ORVETR:. Là re Ce serpent est très-commun en beaucoup de pays : il se trouve dans presque toutes les contrées de l’ancien continent, depuis la Suède jusqu'au cap de Bonne-Espérance. 11 ressemble beaucoup à un quadrupède ovipare dont nous avons déjà indiqué les rap- ports avec les anguis, et auquel nous avons conservé le nom de seps}; il n’en diffère même en quelque sorte à l’extérieure que parce qu'il n’a pas les quatre petites pattes dont le seps est pourvu: aussi ses habitudes sont-elles d'autant plus"analogues à celles de ce lézard, que le seps, ayant les pattes extrêmement courtes, rampe plutôt qu'il ne marche, et s’avance par un mécanisme assez semblable à celui que les anguis emploient pour changer de place. La partie supérieure de la tête est couverte de neuf écailles dis- posées sur quatre rangs, mais différemment que sur la plupart des couleuvres : le premier rang présente une écaille, le second deux, et les deux autres en offrent chacun trois. Les écailles qui garnissent le dessus et le dessous de son corps sont très-petites, plates, hexagones, brillantes, bordées d’une couleur blanchâtre, et rousses dans leur milieu; ce qui produit un grand nombre de très-petites taches sur tout le corps de l'animal. Deux taches plus grandes paroïssent l’une au-dessus du museau, et l’autre sur le derriere de la tête, et 1l en part deux raies longitudinales , brunes ou noires, qui s'étendent jusqu’à la queue, ainsi que deux autres raies d’un brun chätain qui partent des yeux. Le ventre est d’un brun très-foncé, et la gorge marbrée de blanc, de noir et de jaunâire. Toutes ces couleurs peuvent varier suivant le pays, et peut-être suivant l'âge et le sexe. Maïs ce qui peut servir beau- coup à distinguer l'orvet d'avec plusieurs autres anguis, c’est la longueur de sa queue, qui égale et mème surpasse quelquefois celle de son corps; l'ouverture de sa gueuie s'étend jusqu’au-delà des yeux; les deux os de la mâchoire inférieure ne sont pas sé- emmener ere ecanmeernnetere gente tnt 1 Couleuvre commune, en Picardie et dans plusieurs auires provinces de France ; serpent de verre , anvoye. 590 HISTOIRE NATURELLE parés l’un de l'autre comme dans un grand nombre de serpens, et en cela l’orvet ressemble encore au seps et aux autres lézards. Ses dents sont courtes, menues, crochues, et tournées vers le gosier. La langre est comme échancrée en croïssant. On a écrit que ses yeux étoient si petits, qu'on avoit peme à les distin- guer: cependant, quoiqu'ils soient moins grands à proportion que ceux de bearcoup d’autres serpens, ils sont très-visibles , et d’ailleurs noi s et très-brllans *. Il ne parvient guère a plus de trois pieds longuenr. On a vrétrils que sa morsure éloit très-dangereuse * : maisil n'a point de crochets mobiles , et d’après cela seul on auroit dû supposer qu’il n'avoit point de venin ; d’ait- leurs les expériences de M. Laurent l'ont mis hors de doute. De quelque manière qu'on irrite cet animal ,il r mord ‘int, mais se contracte avec force, et se roidit, dit M Laurent, au uint d’avoir alors l'inflexibilité du bois. Ce naturaliste fut obligé d'ouvrir par force la bouche d’un orvel, et d'y introduire la peau d’un chien, que les dents de l'animal trop courtes et trop menues ne purent percer. De ptiles oiseaux employés à la mème expérience, et blessés par lereptile, ne donnèrent aucun signe de venin. La chair nue d’un pigeon fut aussi mise sous les dents de l'orvet, qui la tint serrée pendant long-temps, et la pénétra de la liqueur qui étoit dans sa bouche; le pigeon fut bientôt guéri de sa blessure, sans donner aucun indice de poison. Lorsque la crainte ou la colère contraignent l'orvet à tendre ainsi tous ses muscles et à roidir son corps, 1l n’est pas surpre- nant qu’on puisse aisément , en le frappant avec un bâton ou même une simple baguette, le diviser et le casser, pour ainsidire, en plusieurs petites parties : sa fragilité tient à cet élal de roideur et de contraction, ainsi que l’a pensé M. Laurent, qui a très-bien observé cet animal, et elle est d'autant moins surprenante, que ses vertèbres‘sont très- cassantes par leur nature, comme celles de presque tous les petits serpens et des petits lézards , et que ses r Les écailles qui recouvrent ses lèvres ne sont pas plus grandes que celles qui revêtent son dos ; aucunes de celles qui garnissent le dessous de son corps, ne sont plus g grandes que leurs voisines. Il en a ordinairement cent trente-cinq rangs sous le corps, et autant sous la queue. 2 Schweuckfeld, dans son Hrstoïire des reptiles de la Silésie, a écrit que dans cette province on regardoit l’orvet comme venimeux. 3 Les auteurs de la Zoo/ogie britannique disent qu’en Angleterre l’orvet n’est point regardé comme dangereux. Tome 1,. tù en Page $90 : 1} Î POAAACL IAA LIL LE } Bêtre unix ? b Plee pere Je F 1. LOrvetfn . 77... Page 589 . / 2 eos EREEN".:.:. do7 Pbelombrie.. . ..1..::600. DE L’ORVET. 5gi imuscles sont composés de fibres qui peuvent aisément se séparer. C’est cette propriété de l’orvet qui l’a fait appeler par M. Linné, anguis frägile, et qui Va fait nommer par d’autres auteurs, ser- pené de verre. On vient de voir que l'orvet se trouve en Suède : il habite aussi l'Écosse ; et, d’après cela, il paroît qu'il ne craint pas le froid au- tant quela plupart desserpens, quoiqu'il soit en assez grand nom- bre dans la plupart des contrées tempérées et même chaudes de l'Europe. Il a pour ennemis ceux des autres serpens , et particu- lièremeni les cigognes, qui en font leur proie d'autant plus aisé- ment, qu'il ne peut leur opposer ni venin, ni force, ni même un volume considérable. Il s’accouple comme les autres reptiles ; le mâle et la femelle s'entortillent l’un autour de l’autre, se serrent étroitement par plusieurs contours et pendant un temps assez long. On a vu des orvets demeurer ainsi réunis pendant plus d’une heure. Les pe- tits serpens de cette espèce n'éclosent pas hors du ventre de leur mère, comme la plupart des couleuvres non venimeuses; mais ils viennent au jour tout formés. Un très-bon observateur *,ayant ouvert deux femelles, trouva dix serpens dans une, qui étoit longue de treize pouces , et sept dans l’autre, qui n’avoit qu'un pied de longueur. Ges petits serpens éloient parfaitement formés ; ils ne différoient de leur mère que par leur grandeur , et par leurs couleurs , qui étoient plus foibles : les plus grands avoient vingt- une lignes , et les plus petits, dix-huit lignes de longueur. Le temps de la portée des orvets est au moins d’un mois, et M. de Sept-Fontaines , que nous venons de citer, s’en est assuré en gar- dant chez lui une femelle qui ne mit bas qu'un mois après avoir été prise. Elle ne parut pas grossir pendant sa captivité. C’est ordinairement après les premiers jours de juillet que l’or- vet paroît revêtu d’une peau nouvelle dans les provinces septen- trionales de France. Son dépouillement s'opère comme celui des couleuvres; il quitte sa vieille peau d'autant plus facilement, qu'il trouve à sa portée plus de corps contre lesquels il peut se frotter : 1l arrive seulement quelquefois que la vieille peau ne se retourne que jusqu'à l'anus , et qu'alors la queue sort de l’enve- loppe desséchée qui la recouvroit, comme une lame d'épée sort de son fourreau. 4 M. de Sept-Fontaines. bas HISTOIRE NATURELLE L'orvet se nourrit de vers, de scarabées, de grenouilles, de petits rats, et même de crapauds; il les avale le plus souvent sans les mâcher : aussi arrive-t-1l quelquefois que de petits vers viennent jusqu’à son estomac, pleins encore de vie, et sans avoir reçu aucune blessure. M. de Sept-Fontaines a trouvé dans le corps d’un jeune orvet un lombric ou ver de terre long de six pouces, et de la grosseur d’un tuyau de plume : le ver étoit encore en vie,et s'enfuit en rampant. Malgré leur avidité naturelle , les orvets peuvent demeurer un très-srand nombre de jours sans manger, ainsi que les autres serpens, et M Desfontaines en à eu chez lui qui se sont laissé mourir au bout de plus de cinquante jours, plutôt que de tou- cher à la nourriture qu’on avoit mise auprès d'eux, et qu’ils au- roient dévorée avec précipitation s'ils avoient été en liberté. L'orvet habite ordinairement sous terre dans des trous qu'il creuse ou qu'il agranditavec son museau : mais, comme il a besoin derespirer l'air extérieur, il quitte souventsaretraite; l'hiver même il Sons la neige quicouvreles campagnes, et élève son museau au-dessus de sa surface, la température assez douce des trous souterrains qu'il choisit pour asile l'empêchant ordinaire- ment de s'engourdir complètement pendant le froid. Lorsque les chaleurs sont revenues, 1l passe une grande partie du jour hors de sa retraite ; mais le plus souvent il s’en éloigne peu, et se tient toujours à portée de s’y mettre en sûreté. IL se dresse fréquemment sur sa queue , qu’il roule en spirale, et qui lui sert de point d'appui, et 1l demeure quelquefois long- temps dans cette situation. Ses mouvemens sont rapides , mais moins que ceux de la couleuvre à collier. Îl ne répand pas com- munément d’odeur désagréable *. f Personne n’a mieux étudié les habitudes de l’orvet que M. de Sept-Fontaines, à qui nous devons la connoissance de la plupart des details que nous venons de rapporter. DE LA PEINTADE. 593 il PER AAA AT VAR MAR AMAR ALLER AE AU AAA LAS VAI NARANANNAANVIE L'ÉRY2% \ Cr anguis a beaucoup de rapports avec l'orvet, dont il n’est peut-être qu’une variété. Il a le dessus du corps d’un roux cendré, avec trois raies noires très-étroites qui s'étendent depuis le der- rière de la tête jusqu’à l’extrémité de la quene. Ses yeux sont à peine visibles. Il a la mâchoire supérieure un peu plus avancée que l'inférieure. Ses dents sont assez longues relativement à sa grandeur , égales et un pen courbées vers le gosier. Ses écailles sont arrondies , un peu convexes, luisantes et unies. Sa queue est un peu plus lengue que le reste du corps. IT a cent vingt-six rangs d’écailles au-dessous du corps, et cent trente-six au-dessous de la queue. On le trouve en Europe, particulièrement en An- gleterre , et il habite aussi plusieurs contrées de l'Amérique. EVA MAMAN AMAR ANA NU MAMAN AMI A, LA PEINTADE. Nous conservons ce nom à un anguis qui se trouve dans les Indes. Il a cent soixante-cinq rangs d’écailles sous le corps, trente- deux sous la queue, et le dessus du corps verdâtre, avec plusieurs rangées longitudinales de points noirs ou bruns. Il nous semble qu’on doit regarder comme une variété de cette espèce un anguis que M. Pallas a observé sur les bords de la mer Caspienne , et qui a à peu près la longueur d’un pied; la grosseur du petit doigt; cent soixante-dix rangs d'écailles sous le corps; trenle-deux rangs sous la queue ; la tête grise, tachetée de noir ; le corps noir, pointillé de gris sur le dos, et de blan- châtre sur les côtés ; la queue longue de deux pouces , et variée de blanc. 5 Aberdeen, dans plusieurs endroits de l'Angleterre, parce qu’on le trouve davs l’Aberdeenshire. Lacepède. 1, 4: HISTOIRE NATURELLE RAAIAAAAAAA ANA VAR AAA VAR AVATAR VRAI AA UV AR VRAI AAA AS LE ROULEAU. res Cr anguis se trouve dans les deux continens. Il est très-com- mun en Amérique, ainsi que dans les grandes Indes; mais c’est toujours dans les pays chauds qu'on le rencontre. Sa iète un peu convexe par-dessus, et concave en-dessous , est à peine disiin- guée du reste du corps par trois écailles plus grandes que les autres qui la couvrent. Ses dents sont asseznombreuses ; et comme elles sont toutes égales et qu'il n’a pas de crochets mobiles, l'on doit présumer qu'il n’est point venimeux. Le corps et la queue sont garnis par-dessus et par-dessous d’écailles blanches bordées de roux! , et lout le corps est varié par des bandes transversales, aui, en formant des anneaux de couleur, gardent leur parallé- lisme ou se réunissent avec plus ou moins de régularité. L'on ne sait pas précisément à quelle grandeur peut parvenir le serpent rouleau ; mais, d’après les divers individus qui ont été décrits par les naturalistes, et ceux qui sont conservés au Cabinet du Roi, nous présumons qu'elle n'est jamais très-considérable ; que le diamètre de cet anguis n’est ordinairement que d’un demi-pouce, et que sa longueur n'excède guère deux ou trois pieds *. Il se nourrit de vers, d'insectes, et surtout de fournus; et voilà tont ce que l’on connoît des habitudes de ce serpent. PANIER VV UMR CE LE A LE COLUBRIN. ns ma NL. Hasselquist a fait connoître cet anguis que l'on trouve en Egypte. Ce serpent a le corps varié d’une manière très-agréable , de brun et;d’une couleur pâle. On a compté cent quatre-vingts rangs d'écailles sous son corps, et dix-huit sous sa queue. 1 Le rouleau a deux cent quarante rangs d’écailles sous le corps, et treize rangs sous la queue. 24€ noue 3 ë , 1 * ÿa queu£ est trés-courte en proportion dan corps; dont la longueur est le plus souvent trente fois plus considérable que celle de La queue. \ » DU MIGUEL ne) AAA AAA AAA A AAA RAR I AA A AAA AU VAR AA AA LV LE FTRATE Crr anguis habite en Egypte, ainsique le colubrin , et c’est aussi M. Hasselquist qui l'a fait connoitre. Ce serpent a cent quatre- vingt-six rangs d'écailles sous le corps, et vingt-trois sous la queue ; celles qui garnissent son ventre sont un peu plus larges que celles qui recouvrent son dos. RAA AAA TS RAARAMAMAAUE 112: ANA VAGUE ARRETE MINT LIAUVT * LE CORNU. € ET anguis a beaucoup de rapports avec la couleuvre céraste ; il a, comme ce dernier reptile, deux espèces de cornes sur Ja tête: mais nous avons vu que dans le céraste ces éminences tiennent à la peau et sont de nature écailleuse, au lieu que dans le cornu ce sont deux dents qui percent la lèvre supérieure et ressemblent à deux petites cornes. On trouve cet anguis en Egypte, où il a été observé par M. Hasselquist , et où vit aussi le céraste. Le cornu a deux cents rangs d’écailles sous le ventre, et quinze sous la queue. AAA ARARANAAAAAAAUAAARAR AR ANRAAARAN ANR VAAANARAAARNIAN ANRAMANANARS LE MIGUEL. Ter est le nom que l’on donne à cet anguis dans le Paraguay et dans plusieurs autres contrées de l'Amérique méridionale. Les écailles qui le couvrent sont brillantes et unies. Le dessus de son corps est jaune, et présente une et quelquefois trois raies longi- tudinales brunes, avec des bandes transversales très-étroites et de la même couleur. Le miguel & deux cents rangs d’écailles sons le ventre , et douze sous la queue. On voit neuf grandes écailles sur la partie supérieure de sa tête. Un individu de cette espèce, 506. HISTOIRE NATURELLE conservé au Cabinet du Roi, a un pied de longueur totale, et sa queue est longue de trois lignes. ER VV AN UV VV UV UV AU VU AU LU AU AV VU VUS UV VU UE VA AU MU MU VU MU AU ARS LE RÉSEAU. Cr ançuis a les écailles qui garnissent le dessus de son corps brunes et blanches dans leur centre ; ce qui le fait paroîre comme couvert d’un réseau brun. On le trouve en Amérique. Il a cent soixante-dix-sept rangs d'écailles sous le ventre, et trente- sept sous la queue. Le dessus de sa tête est revêtu de grandes écailles. AAA AAA AV RAA AAA RAR VAR LE JAUNE ET BRUN. Cr anguis se trouve en grand nombre dans les bois de la Ca- roline et de la Virginie, où il a été observé par MM. Catesby et Garden, et où on ne le regarde pas comme dangereux. Il paroît moins sensible au froid que les autres serpens des mêmes pays, puisqu'il se montre beaucoup plus lôt au printemps. Il est, pour ainsi dire, aussi fragile que l’orvet; les fibres qui composent ses muscles peuvent se séparer très-aisément : pour peu qu'on le frappe, il se partage, comme l'orvet, en plusieurs portions, et il a été appelé serpent de verre, de même que ce reptile. Sa lon- gueur n'excède guère dix-huit pouces , et sa queue est trois fois aussi longue que son corps. Son ventre est jaune, et paroît comme réuni au reste du corps par une suture. Le dos est d’un vert mêlé de bran, avec un grand nombre de très-petites taches jaunes, arrangées très-régulièrement. La description de M. Linné semble indiquer que les écailles qui garnissent le dessus du corps sont relevées par une arête. La langue est échancrée par le bout, à peu près comme celle de lorvet. Le jaune et brun a cent vingt- sept rangs d’écailles sous le corps, et deux cent vingt-trois sous la queue. DU ROUGE. #24 AAA ILE AAA VO LUEUR VARIE VAT AAAAATVMUUAUT LE TAAUULE AA AA AE VE RAM AAMMAAAE LA QUEUE-LANCÉOLÉE. a Ce anguis diflère de ceux que nous venons de décrire par la forme de sa queue, qui est comprimée par les côtés : cette partie se termine d’ailleurs en pointe; elle est, ainsi que le dos, d’une couleur pâle, avec des bandes taansversales brunes, et cinquante rangs d’écailles en garnissent le dessous. On compte deux cents rangs d’écailles sous le corps. La queue-lancéolée se trouve à Surinam. Il se pourroit qu'on düt rapporter à cette espèce le serpent à queue aplatie, vu par M. Banks près des côtes de la Nouvelle-Hollande, dela Nouvelle-Guinée et de la Chine, nageant et plongeant avec facilité pendant les temps calmes, et déerit par M. Vosmaër *. PARA VALUE LR LRU UIAS VIA AURA LRU S LT AR LAVABLE VER VEUVE MATE VAR LE ROUGE. Ce anguis a été envoyé de Cayenne au Cabinet du Roi par M. de la Borde. Les écailles du dos sont d’un beau rouge; ce qui lui a fait donner le nom de serpent de corail par les habi- ans de la Guiane : mais nous n’avons pas cru devoir lui con- server cette dénomination , de peur qu'on ne le confondit avec la couleuvre Ze corallin dont nous avons parlé. Le dessous de son corps est dun rouge plus clair. Toutes ses écailles sont hexagones et bordées de blanc, et 1l est d’ailleurs distingué des autres anguis par des bandes transversales noirâtres qui s’éten- dent non-seulement sur le dessus, mais encore sur le dessous du corps. Lorsque ce serpent est en vie, ses couleurs sont très- éclatantes : mais autant son aspect est agréable, autant il faut fuir son approche; sa morsure est venimeuse et très-dange- reuse , suivant M. de la Borde. Il porte le nom de vipère à la 4 On pent consulter a ce sujet l’article du serpent à large queue dans le Die- tionnaïre d'histoire naturelle par M. Valmont de Bomare. 50€ NN HISTOIRE NATURELLE Guiane : et ce qui prouve que ce nom doit lui appartenir , c’est que jou a reçu au Cabinet du Roi, avec l'individu que nous decrivons, deux serpenteaux dela mêmeespèce, sortis tout formés du ventre de leur mère. Le rouge a, ainsi que d’autres anguis, la rangée du milieu du dessus du corps et de la queue composée d'écailles un peu plus grandes que leurs voisines. Nous avons compté dans cette rangée deux cent quarante pièces au-dessous du corps, et douze seulement au-dessous de la queue, qui est très-courte * Il paroît que c’est le même animal que celui dont le P. Gu- milla à parlé sous le nom de serpent coral dans son Histoire naœ- turelle de l RAR el pour lequel nous renvoyons à la note suivante * r L’individu envoyé aa Cabinet du Roi avoit un pied six pouces de longueur totale ; et sa queue étoit longue de six lignes. z Je ne puis passer sous silence le serpent coral, qu’on nomme ainsi à cause de sa couleur incarnate , et qui est entremélée de taches noires, grises, blanches et jaunes. Ce serpent supporte également tous les climats; ce qui n'empêche pas que ses couleurs ne se ressentent de leur variété : mais son venin conserve toujours la même force, et il n’y en a point, si l’on en excepte ia couleuvre macaurel, dont Ja morsure soit plus dangereuse. . Parlons maintenant des remèiles qu’on a tronvés contre la morsure de ces rep- iles... On peut se servir de la feuille de tabac, qui est un remède effi- cace contre la morsure des couleuvres, quelle qu’en soit l'espèce. Il suffit d’en mâcher une certaine quantité, d’en avaler une?partie, et d'appliquer l’autre sur la plaie perdant trois ou quatre jours , pour n'avoir rien à craindre. J’en ai fait l’es- sai plusieurs fois sur des malades et même sur des couleuvres : après les avoir étourdies d’un coup de bâton, je leur ai saisi la tête avec une petite fourche, et leur ayant fait ouvrir la bouche en la pressant, j’ai mis dedans du tabac mâché ; et aussitôt elles ont été saisies d’un tremblement général, qui n’a fini qu'avec leur vie , la couleuvre étant restée froide et roide comme un bâton. Un troisième remède dont ou pent se servir, c’est la pierre orientale. Tlle n’est autre chose qu'un morceau de corne de cerf qu’on fait calciner jusqn’àa ce qu'il ait pris la couleur du charbon; il s’attache de lui-même à la plaie, et at- tire tout Le venin qui est dedans : mais il en faut quelquefois ples de six morceaux, et le plus sûr est de mâcher du tabac en même temps. Lorsque l'endroit le permet, on applique sur la plaie quatre ventouses sèches , dont la première dispose les chairs, la seconde attire une liqueur jaune, la troi- sième une pareille liqueur teinte de sang , et la quatrième le sang tout pur, après quoi il ne reste plus de venin dans la plaie. Voici un cinquième remède dont on a éprouvé l'effet, Il consiste en une bonne quantité d’eau-de-vie, dans laquelle on a délayé de la poudre à canon, et à la troisième dose Le venin perd toute son activité. { Histoïre naturelle de l'Oreno- que, waduction française; Lyon, 1758 ; tome TITI, page 89 et suivantes.) DE LA PLATURE. PAT TE VRAI IAA RME RE AAA ARR AAA A LATE QUE RAA AAA RRAAAARAA VAN LE LONG-NE7. C'rsr M. Weigel, naturaliste allemand, qui a fait connoître cette espèce d'anguis, remarquable par l'allongement de son mn- seau. Ce prolongement est très-sensible, la lèvre de dessous étant beaucoup moins avancée que la supérieure , contre Île bord inférieur de laquelle elle s'applique, et la bouche étant par là un peu située au-dessous du museau. La lonsueur totale de l'individu décrit par M. Weigel étoit à peu près d’un pied ; une pointe dure terminoit la queue. La couleur du dessus du corps de cet anguis étoit d’un noir plus où moins tirant sur le verdâtre; on voyoit une tache jaune sur le bout du museau , et à l'extrémité de la queue, sur laquelle on remarquoit deux bandes obliques de la même couleur, qui étoit aussi celle du ventre, et s'étendoit même , dans certains endroits, sur les côtés du corps. Ce serpent avoit deux cent dix-huit rangs d'é- cailles sous le corps , etdouzesous la queue. Il avoit étéapporté de Sarinam. 122420224234: 440044) %33134134:h4141%4%3%314313%54h44%%%22522%11%:%5752:585421%%n541%%911556) LA PLATURE. Cr serpent a beaucoup de ressemblance avec Ia queue-fancéo- lée :il a, comme ce dernier anguis, la quene comprimée et aplatie par les côtés; mais celle de la queue-lancéolée se ter- mine en pointe, au lieu que la queue de la plature a son ex- trémité arrondie, M. Linné a fait connoître cette espèce de ser- pent, dont un individu faisoit partie de la collection de M. Zier- vogel, apothicaire à Copenhague. La tète de la plature est allongée ; sés mâchoires sont sans dents. Cet anguis a un pied et demi de longueur totale, et deux pouces depuis l'anus jusqu'à l’extrémité de la queue. Le dessus de son corps est noir, le dessous blanc, et la queue variée de blanc et de noir. Les écailles qui recouvrent ce serpent sont arrondies, ne se recouvrent pas les unes les autres, et sont s: petites, qu'on ne peut pas les compter. 690. HISTOIRE NATURELLE RAA VEN AA AT SARA AA AVES ES VUS LR AR LUE E RORAAAA AAA NIANAARAA RAA AA AANANYS LE LOMBRIC:. Le des caractères auxquels on fait le plus d'attention lorsqu'on exami ixe le lombric, c'est la proportion générale de son eorps, mois gros vers la tête qu'à l'extrémité opposée, de telle sorte ce si on ne considéroit pas la position des écailles de cet anguis, on seroit tenté de prendre le bout de sa queue pour sa tête, d'autant plus que celte dernière partie n'est pas plus grosse que. l'extrémité du corps à laquelle elle tient , et que les yeux ne sont que de petits points très-peu sensibles, et recouverts par une membrane , ainsi que ceux des amphisbènes. Le museau du lombric est 1rès-arrondi et percé de deux petits trous presque invisibles , qui tiennent lieu de narines à l'animal; mais il ne présente d’ailleurs aucune ouverture pour la gueule ; ce n’est qu'au-dessous du museau, et à une petite distance de cette ex- trémité , qu'on aperçoit une petite bouche dont les lèvres n’ont que deux lignes de tour dans le plus grand mdividu des lombrics conservés au Cabinet du Roi. La mâchoire inférieure , plus courte que celle de dessus, s'applique si exactement conire cette mâchoire supérieure, qu'il faut beauconp d'attention pour re- connoître la place de la bouche lorsqu'elle est fermée. Nous n'avons pu voir des dents dans aucun des lombricsque nous avons examinés ? ; mais noüs avons remarqué dans tous une petite lançue appliquée et comme collée contre la mâchoire supé- rieure. Le corps entier du lombric et presque cylindrique , exeepté à l'endroit de la tête qui est un peu aplati par-dessus et par- dessous. Ce serpent estentièrement recouvert detrès-petites écailles très-unies et très-luisantes , placées les unes au-dessus des autres comme les ardoises sur les toits, toutes de même forme et de ième grandeur, tant sur le ventre que sur la queue et sur Île dos, et présentant partout une couleur uniforme d’un blanc 1 Anilios, dans l’île de Chypre ; serpent d’oreille , dans l'Inde. 2 Le lombric étoit regardé , à la Jamaïque, comme venimeux ; wais Brown dit qu'il n’a jamais pu constater l’existence du venin de ce reptile. DU LOMBRIC. 601: livide , de telle sorte que le dessous du corps n’est distingué du dessus ni par la forme, ni par la position, ni par la couleur des écailles. Le museau est convert par-dessus de trois écailles un peu plus grandes que celles du dos , et placées à côté l’une de l’autre, et trois écailles semblables en revêtent le dessous au- devant de l'ouverture de la bouche. L’anus est situé très-près de l'extrémité du corps, dont il n’est éloigné que d’une ligne et demie dans/ un des individus que nous avons décrits. Cette ouverture, faite en forme de fente très-élroile, n'avoit, dans cet individu , qu'une demi-ligne de Jongueur , et ne pouvoit être aperçue que lorsqu'on phoit le corps de l'animal du côté opposé à celui où étoit l'anus. La très-courte queuedu lombric est terminée par une écaille pointue et dure; la manière dont nous l'avons vue repliée dans plu- sieurs anguis de cette espèce , et la force avec laquelle elle étoit roidie , ainsi que le reste du corps, prouvent la facilité avec laquelle le lombric peut se tourner et se replier en différens sens. Nous ignorons jusqu’à quelle grandeur les lombrics peuvent parvenir. Le plus grand de ceux que nous avons vus avoit huit pouces onze lignes de longueur, et deux lignes de diamètre dans l’endroit le plus gros du corps. Il avoit été apporté de File de Chypre sous le nom d’anilios. Mais ce n’est pas seulement dans cette île qu'il habite; on le trouve aussi aux grandes Indes, d’où on a envoyée au Cabinet du Roi un très-petit ser- pent long de quatre pouces neuf lignes, et n'ayant pas une ligne de diamètre , mais qui d’ailleurs est entièrement semblable au lombric , et qui évidemment est un jeune animal de la même espèce. Îl est arrivé sous le nom de serpent d'oretlle : nous ne savons pas ce qui peut avoir donné lieu à cette dénomination. La conformation du lombric, la grande facilité qu’il a de se replier plusieurs fois sur lui-même , et celle avec laquelle 1l peut s'insinuer dans les plus petites cavités, doivent donner à sa ma- mière de vivre beaucoup de ressemblance avec celle de l’orvet, dont il se rapproche à beaucoup d’égards, ainsi qu'avec celle de plusieurs vers proprement dits, que l’espèce du lombric lie, pour ainsi dire, à l’ordre des serpens par de nouveaux rapports, et particulièrement par la petitesse de son anus, ainsi que par la position de sa bouche. 602 HISTOIRE NATURELLE PARAIT VUE AA AR AAA AA AAA AA AAA A AR A MAMA M AAA AA AA AA AA RAA CINQUIÈME GENRE. SERPENS Dont le corps et la queue sont entourés d’'anneaux écailleux. AMPHISBÈNES. Ce me L’'ENFUMÉ:. 14 est tres-facile de distinguer les amphisbènes de tous les ser- pens dont nous avons déjà parlé : non-seulement ils n’ont point de plaques sous le corps ni sous la queue , mais les écailles qui les revètent sont presque carrées, plus où mois régulières, disposées transversalement, et réunies l’une à côté de l'autre, de manière à former des anneaux entiers qui environnent l'animal. Le dessus et le dessous du corps et de la queue se ressemblent si fort dans les amphisbènes, que, lorsque leur tête et leur anus sont cachés, l’on ne peut savoir s'ils sont dans leur position naturelle où ren- versés sur le dos; on pourroit même dire que, sans la position de leur tête et celle de leur colonne vertébrale, plus voisine du dessus que du dessous du corps, ils trouveroient un point d'ap- pui aussi avantageux dans la portion supérieure de ces anneaux que dans l’inférieure , et qu'ils pourroient également s’avancer en rampant sur leur dos et sur leur ventre. Mais s'ils sont privés de cetie double manière de marther par la situation de leur tête et par celle de leur colonne vertébrale, cette forme d'anneaux éga- lement construits au-dessus et au-dessous de leur corps leur donne une grande facilité pour se retourner , se replier en diffe- rens sens comme les vers, et exécuter divers mouvemens inter- 1 Ibijara, par les Brasiliens ; bodty, cega, cobre vega, et cobra de las ea- becas, par les Portugais. DE L'ENFUMÉ. | 603 dits aux autres serpens. Trouvant d'ailleurs dans ces anneaux Îa même résistance, soit qu'ils avancent ou qu'ils reculent, ils peuvent ramper presque avec une égale vitesse en avant et en arrière ; et de là vient le nom de double-marcheur où d’amphis- bène qui leur a été donné. Ayant la queue très-orosse el ter- minée par un bout arrondi, portant souvent en arriere cette extrémité grosse et obtuse, el lui faisant faire des mouvemens que la têle seule exécute communèment dans beaucoup d’autres reptiles , il n’est pas surprenant que leur manière de se mouvoir ait donné lieu à une erreur semblable à celle que les anguis ont fait naîlre : on a cru qu'ils avoient deux têtes, non pas placées à côté l’une de l’autre, comme dans certains serpens monstrueux, mais la première à une extrémité du corps, et la seconde à l’autre. On ne s’est pas même contenté d’admeltre cette conformation extraordinaire, on a imaginé des fables absurdes que nous n’a- vons pas besoin de réfuter. On a cru et écrit très- sérieusement que, lorsqu'on coupe un amphisbène en deux par le milieu du corps, les deux têtes se cherchent mutuellement; que; lorsqu'elles se sont rencontrées , elles se rejoignent par les extrémités qui ont été coupées, le sang servant de glu pour les réunir ; que si on les coupe en trois morceaux, chaque tête cherche le côté qui lui appartient, etque, lorsqu'elle s'y est attachée, le serpent se trouve dans le même état qu'avant d'avoir été divisé; que le moyen de tuer un amphisbène est de couper les deux têtes avec une petite partie du corps, et de les suspendre à un arbre avec un cor- deau ; que même cette manière n'est pas très-stre; que lorsque les oiseaux de proie ne les mangent point, ét que le cordeau se pourrit, l’amphisbine, desséché par le soleil , tombe à terre; qu’à la premiere pluie qui survient, 1l renaît par le secours de l’hu- midité qui le pénètre ; que, par une suite de cette propriété, ce serpent réduit en poudre est le meilleur spécifique pour réunir et souder les os cassés, etc. Combien d'idées ridicules le défaut de lumières et le besoin du merveilleux n’ont-ils pas fait adopter! L'espèce de ces amphisbènes la plus anciennement connue est celle de l'enfumé. Le nom de ce ser pent Jui vient de sa couleur, qui est en effet très-foncée, presque noire , et variée de blanc. 11 parvient communément à la longueur d’un pied ou deux ; mais sa queue n'excède presque jamais celle de douze on quinze lignes On compte ordinairement deux cents anneaux sur le corps de l’enfumé, ct trente sur sa queuc, 60% HISTOIRE NATURELLE Ses yeux sont non-seulement très-petits, mais encore recouverts et comme voilés par une membrane : c’est cette conformation singulière qui lui a fait donner , aïnsi qu'aux anguis, le nom de serpent aveugle , et qui établit un nouveau rapport entre ce reptile et les murènes, les congres, et les anguilles, qui d'ailleurs ressemblent, à beaucoup d’égards , aux serpens, et que l’on a quelquefois même appelées serpens d’eau. L'enfumé habite les Indes orientales, particulièrement l'ile de Ceylan : on le rencontre aussi en Amérique. On ignore une grande partie de ses habitudes ; mais l’on sait qu'il se nourrit de vers de terre , de mollasses, de divers insectes, de cloportes , de : scolopendres, etc. Il fait aussi la guerre aux fourmis, dont il pa- roît qu’il aime beaucoup à se nourrir. Bien loin de chercher à dé- truire ou diminuer son espèce, on devroit donc tâcher de la multiplier dans les contrées torrides , si souvent dévastées par des légions innombrables de fourmis, qui s’avançant en colonnes pres- sées, et couvrant un grand espace, laissent parlout des traces funestes que l'on prendroit pour celles de la flamme dévorante. L’enfumé fait aisément sa proie de ces fourmis ainsi que des vers, des larves d’insectes , et de tous les petits animaux qui se cachent sous terre , la faculté qu'il a de reculer ou d'avancer sans se blesser lui donnant, ainsi que sa conformation générale, une très-grande facilité pour pénétrer dans les retraites souterraines des vers, des fourmis et des insectes. Il peut d’ailleurs fouiller la terre plus profondément que plusieurs autres serpens, sa peau étant très-dure, et ses muscles très-vigoureux. Quelques voya- geurs ont écrit qu'il étoit venimeux ; nous avons trouvé cepen- dant que ses mâchoires n’étoient garnies d'aucun crochet mobile. On voit au-dessus de son anus huit petits tubercules percés à leur extrémité, et qui communiquent avec autant de petites glandes; ce qui lui donne un nouveau rapport avec le bipède cannelé *, ainsi qu'avec plusieurs espèces de lézards *. Voyez l’article du bipède cannelé, à la suite de l’Histoire naturelle des qua drupèdes ovipares. 2? L’enfumé a Le dessus de la tête garni de six grandes écailles placées sur trois. rangs. DE LIBIARE. 65 RIM VAR AAA, AAARAA; RAA AAA VA AA MARAIS LE BLANCHET. Cr amphisbène diffère principalement de celui que nous ve- nons de décrire par le nombre de ses anneaux et par sa couleur. il est blanc, et souvent sans aucune tache. Le dessus de sa tête est couvert, ainsi que celle de l’enfumé, par six grandes écailles disposées sur trois rangs, dont chacun est composé de deux pièces. On compte communément deux cent vingt-trois anneaux autour de son corps, et seize autour de sa queue. On voit au- dessus de l'ouverture de l'anus huit tubercules semblables à ceux que présente l’enfumé , mais moins élevés et moins grands. Un blanchet conservé au Cabinet du Roi a un pied cinq pouces neuf lignes de longueur totale, et sa queue n’est longue que d’un pouce six lignes. Nous n'avons pas vu de crochets mobiles dans les blanchets que nous avons examinés. RSA AA AAA AAA AAA AE VB AU LA VI VBALUIS LUR AA AA AAA AA LAS VVIAAAUIS AAA SIXIÈME GENRE. SERPENS Dont les cotés du corps présentent une rangée longitudinale de plis. CŒCILES. nc L'IBIARE. La forme de ce serpent est cylindrique; un individu de cette espèce, décrit par M. Linné, avoit un pied de longueur, et étoit épais d’un pouce. L'ibiare paroît n'être couvert d'aucune écaille, on remarque cependant sur,son dos de petits points un peu sail- Les” 606 | HISTOIRE NATURELLE Jans dont la nature pourroit approcher de celle des écailles. Le museau est un peu arrondi ; la mâchoire supérieure , plus avancée que l'inférieure, est garnie auprès des narines de deux petits bar- billons ou éentacules très -courts et à peine sensibles; ce qui donne à l’ibiare un rapport de plus avec plusieurs espèces de poissons. Ses yeux sont très-pelits, et recouverts par une mem brane, comme ceux de quelques autres serpens , et de plusieurs poissons de mer ou d’eau douce. Sa peau est plissée de chaque côté du corps, et y forme communément cent trente-cinq rides ou plis assez sensibles. Sa queue est très-courte; elle présente des rides annulaires comme le corps des vers de terre appelés {um- brics. On le trouve en Amérique. Il est à désirer que les voyageurs observent ses habitudes naturelles. LE VISQUEUX. Carre espèce de cœcile habite les Indes. Elle a les yeux encore plus petits que l'ibiare , etses côtés présentent un plus grand nombre de plis : on en compte trois cent quarante le long du corps , et dix le long de la queue. Sa couleur est brune , avec une petite raie blanchâtre sur Les côtés. Tome 1. ln, h Wan an [0 ! PEN] ou a an D pu An dr ma FL m A di \ ce mn HAE AL ALU ANA \ LEA + r] - Pretre purx 1. Le Blanchet . .... Page 6od. D'HLADIATE EL. | ibid. SAIY Angaha + ARMES TE Go7. sa DU LANGAHA DE MADAGASCAR. 6Go7 ES 142002801300 203%h%4n4140140 4404480402 EA bone 1 VRAAARAAMIRAAAUNARAAA ER AMNAANMAAR “ Li 7 \ A SEPTIÈME GENRE. SERPENS Dont le dessous du corps présente de grandes plaques , sur lesquelles on voit ensuile des anneaux écailleux , et dont l’extrémité de la queue est garnie par- dessous de très - peliles écailles. Dance nee de LANGAÏTA. EE LANGAHA DE MADAGASCAR. AL brubnseecae hi Scier toyalé dd Mohtpulet :à BUbIE D premier la description de ce serpent qu'il a observé dans l’île de Madagascar. Cette espèce réunit lrois caractères remarquables ; lan , des couleuvres; le second, des amphisbènes; et le troisième, des anguis : elle a, comme les anguis , une partie du dessous de Ja queue recouverte de petites écailles, des anneaux écailleux comme les amphisbènes , et de grandes plaques sous le corps comme les couleuvres; elle appartient dès-lors à un genre très- distinct et tres-facile à reconnoitre , auquel nous avons conservé le nom de /angaha qu’on lui donne à Madagascar, L'individu de l'espèce du langaha de Madagascar, décrit par M. Brugnière, avoit deux pieds huit pouces de longueur totale, et sept lignes de diamètre dans la partie la plus grosse de son corps. Le dessus de sa tête étoit couvert de sept grandes écailles placées sur deux rangs ; la rangée la plus voisine du museau présentoit trois pièces, et l’autre rangée en présentoit quatre. Sa mâchoire supérieure étoit terminée par une appendice lon- gue de neuf lignes, tendineuse, flexible , très-pointue et revêtue de très-petites écailles; ce qui lui donnoit un nouveau rapport 608 HISTOIRE NATURELLE avec la couleuvre nasique. Elle avoit, suivant M. Brugnière, de dents de même forme et en même nombre que celles de la vi- père. Les écailles qui revètoient le dos étoient rhomboïdales , rou- geâtres, et l’on voyoit à leur base un petit cercle gris avec un point jaune. On comptoit sur la partie inférieure du corps cent quatre-vingt-quatre grandes plaques blanchâtres , luisantes, d'autant plus longues qu’elles étoient plus éloignées de La tête , et qui formoient enfin autour du corps des anneaux entiers au nombre de quarante-deux. Après ces anneaux ,ou plutôt vers le milieu de l’endroit garni par ces anneaux écailleux , commen coit la queue apparente que recouvroient de très-petites écailles; mais la véritable queue étoit beaucoup plus longue, puisque l'anus étoit placé entre la quatre-vingt-dixième et la quatre- vingt-onzième grande plaque, au milieu de quatre pièces écail- leuses. M. Brugnière ayant vu trois langaha de Madagascar , s’est assuré que le nombre des grandes plaques et des anneaux étoit varia ble dans cette espèce : un de ces trois individus , au lieu de présenter les couleurs que nous venons d'indiquer, étoit violet avec des points plus foncés sur le dos. Les habitans de Madagascar craignent beaucoup le langaha i et en effet, la forme de ses dents, semblables à celles de là vipère, doit faire présumer qu'il est venimeux. DE L'ACROCHORDE DE JAVA. 60g HUITIÈME GENRE. SERPENS Qui ont le corps et la queue garnis de petits tubercules. ACROCHORDES. a L’'ACROCHORDE DE JAVA :. M. Hornstedt a observé et décrit ce serpent, qu'il a cru de- voir placer dans un genre particulier, et que nous séparerons, avec lui, des genres dont nous venons de parler, jusqu’à ce que de nouvelles observations aient fixé la véritable place que ce reptile doit occuper. Le corps.et la queue de ce serpent sont garnis de verrues ou tubercules relevés par trois arêtes, et qui, devant ressembler beaucoup à de petites écailles, rapprochent l'acrochorde de Java du genre des anguis, e t particulièrement de la plature, dont les écailles sont très-petites et très-difficiles à compter. Mais l’acrochorde de Java est beaucoup plus grand que la plupart des anguis : l'individu décrit par M. Hornstedt avoit à peu près huit pieds trois pouces de longueur totale; sa queue éloit longue de onze pouces, et son plus grand diamètre excédoit trois pouces. IL étoit femelle, et l’on trouva dans son ventre cinq petits tout formés et longs de neuf pouces. L’acrochorde de Java a le dessus du corps noir, le dessous blanchâtre , les côtés blanchâtres tachetés de noir : ses couleurs ont donc beaucoup de rapports avec celles de la plature. Sa tête est aplatie et couverte de petites écailles ; l'ouverture de sa gueule est petite : il n’a point de crochets à venin ; mais un mn La peau de l’acrochorde de Java, décrit par M. Hornstedt, a été déposée dans le cabinet d'histoire naturelle du roi de Suède. Lacepède. 1. 42 %, 6io .. HISTOIRE NATURELLE double rang de dents garnit chaque mâchoire. L’endroitle plus gros du corps est auprès de l'anus , dont l'ouverture est étroile. Il a la queue très-menue : celle de l'individu décrit par M. Hornstedt n’avoit que six lignes de diamètre à son origine. C'est dans une vaste forêt de poivriers, près de Sangasan, dans l’île de Java, que cet individu fut trouvé. Des Chinois que M. Hornstedt avoit avec lui mangèrent la chair de ce rep- tle, et la trouverent excellente. VA AAA AAA AA AAA AVI AAA RAA VD RAM MIARAMAMTUAUGA DES SERPENS MONSTRUEUX. Nous venons de présenter la description des diverses espèces de serpens que les naturalistes ou les voyageurs ont fait connoî- tre; de mettre sous les yeux les traits de leur conformation ex- térieure , ainsi que les principaux points de leur organisation interne ; de donner, pour ainsi dire, du mouvement et de la vie à ces représentations inanimées , en indiquant les grands résultats de l’organisation et de la forme de ces reptiles; de comparer avec soin leurs propriétés et leurs formes; de rassem- bler les attributs communs à ioutes les espèces comprises dans chaque genre, et d’en former les caractères distinctifs de chacun de ces groupes. Nous élevant ensuite à une considération plus étendue , nous avons essayé de réunir toutes les qualités, toutes les facultés , toutes les habitudes, toutes les formes qui nous ont paru appartenir à lous les genres de serpens, et d’en composer le tableau général de l’ordre entier de ces animaux, que nous avons placé au commencement de notre examen détaillé de leurs espèces particulières. Nous avons recherché dans ces formes, dans ces habitudes , dans ces propriétés, celles qui sont constantes, et celles qui sont variables. Parcourant , à l’aide de imagination , les divers points du globe pour y reconnoître les diflérentes-espèces de serpens , nous n’avons jamais cessé, lorsque nous avons retrouvé la mème espèce sous différens climats, de marquer , autant qu'il a été en nous, l'influence de la température et des accidens de l'at- mosphère sur sa conformation ou sur ses mœurs. Nous avons toujours voulu distinguer les facultés permanentes qui appar- _ DES SERPENS MONSTRUEUX. Gi fiennent véritablement à l'espèce, d'avec les propriétés passa- geres et relatives produites par! Jâge, par les circonstances des lieux ou par celles des temps. Il ne nous reste plus, pour donner de l’ordre des serpens l'idée la plus étendue et la plus exacte qu'il soit en notre pou- voir de faire naître, qu'à mettre un moment sous les yeux les grandes variétés auxquelles les individus peuvent être soumis, les écarts apparens dont ils peuvent être l'exemple, les diverses monstruosités qu'ils peuvent présenter. Quelque isolés que paroissent ces objets, quelque passagers, quel- que éloignés qu’ils soient des objets ordinaires de l'étude du natu- raliste qui ne recherche que les choses constantes, ne considère que les espèces, et compte pour rien les individus , ils répandront une nouvelle lumière sur l’ensemble des faits permanens et gé- néraux que nous venons de considérer. Au premier coup d’œil, une monstruosité paroït une excep- tion aux loïs de la Nature ; ce n’est cependant qu’une exception aux effets qu’elles produisent ordinairement. Ces lois, toujours immuables comme l'essence des choses dont elles dérivent, ne varient ni pour les temps ni pour les lieux : mais, suivant les circonstances dans lesquelles elles agissent, leurs résultats sont accrus ou diminués ; leurs diverses actions se combinent ou se désunissent. Lorsque ces actions se joignent l’une à l’autre, les produits qui avoient toujours été séparés se trouvent réunis, et voilà comment se forment les monstres par excès. Lorsqu’au contraire les différens effets de ces lois constantes se séparent, pour ainsi dire, et ne s’exécutent plus dans le même sujet, les résultats ordinaires des forces de la Nature sont diminués ou disparoissent , et voilà l’origine des monstres par défaut. Les monstres sont donc des effets d’une composition ou d’une décomposition opérées par la Nature dans ses propres forces, et qui, bien supérieures à tout ce que l’art pourroittenter, peuvent nous dévoiler, pour ainsi dire, le secret de ces forces puissantes et merveilleuses, en les montrant sous de nouveaux points de vue; de même que, par la synthèse ou l'analyse, nous découvrons dans les corps que nous examinons de nouvelles faces ou de nouvelles propriétés. : L'étude des monstruosités , surtout de celles qui sont les plus frappantes et les plus extraordinaires, peut donc nous conduire quelquefois à des vérités importantes , en nous montrant! de nou- 612 HISTOIRE NATURELLE velles applications des forces de la Nature, et par conséquent en nous découvrant une plus grande étendue de ses lois. Lorsqu'en comparant la durée de ces résultats extraordinaires avec celle des résultats les plus communs, on cherchera combien la réunion ou le défaut de plusieurs causes particulières influe non-seulement sur la grandeur des effets, mais encore sur la longueur de leur existence, on trouvera presque toujours que les monstres subsistent pendant un temps moins long que les êtres ordinaires avec lesquels ils ont le plus de rapports, parce que les circonstances qui occasionent la réunion ou la sépara- tion des diverses forces dont résulte la monstruosité n'’agissent presque jamais également et en même proportion dans tous les points de l'être monstrueux qu’elles produisent ; et dès-lors ses différens ressorts n'ayant plus entre eux des rapports convenables, comment leur jeu pourroit-il durer aussi long-temps ? Rien ne pouvant garantir les serpens de l'influence plus ou moins grande de toutes les causes qui modifient lexistence des êtres vivans, leurs diverses espèces doivent présenter et pré- sentent en effet , comme celles des autres ordres, non-seulement des variétés de couleur , constantes ou passagères , produites par la température , les accidens de l'atmosphère ou d’autres circons- tances particulières, mais encore des monstruosités occasionées par ce qu'ils éprouvent , soit avant d’être renfermés dans leur œuf, et pendant qu’ils ne sont encore que d’informes embryons, soit pendant qu’ils sont enveloppés dans ce même œuf ou après qu'ils en sont éclos, et lorsqu’étant encore très-jeunes, leur or- ganisation est plus tendre et plus susceptible d’être altérée. Mais, comme ils n’ont ni bras ni jambes, ils ne peuvent être, à l’ex- térieur , monstrueux par excès ou par défaut que dans leur tête ou dans leur queue; et voilà pourquoi, tout égal d’ailleurs , on doit moins trouver de serpens monstrueux que de quadrupèdes, d'oiseaux, de poissons , etc. Il arrive cependant assez souvent que , lorsque les serpens ont eu leur queue partagée en long par quelque accident, une por- tion de cette queue se recouvre de peau , demeure séparée, et forme une seconde queue quelquefois conformée, en apparence, aussi bien que la première , quoiqu’une seule de ces deux queues renferme des vertèbres, ainsi que nous l'avons vu pour les Ké- sards. Mais cette espèce de monstruosité, produite par une di- vision accidentelle, est moins remarquable que celle, que l'on & I ET TS EE TT "2 DES SERPENS MONSTRUEUX,. 613 observée dans quelques serpens nés avec deux têtes. L'exemple d’une monstruosité semblable, reconnue dans presque tous les ordres d'animaux , empêcheroit seul qu’on ne révoquât en doute l'existence de sous serpens. À la vérité, plusieurs voyageurs ont voulu parler de ces serpens à deux tètes, comme d'une espèce constante : induits peut-être en erreur par ce qu'on a dit des serpens nommés amphisbènes , auxquels on a attribué pen- dant long-temps deux têtes , une à chaque extrémité du corps , et dans lesquels on a supposé la faculté de se servir mdifféremment de l’une ou de l'autre, ils ont confondu avec ces amphisbènes les serpens à deux têtes placées toutes les deux à la même extré- mité du corps, et qui ne sont que des monstruosités passagères. Plusieurs personnes arrivées de la Louisiane m'ont assuré que ces serpens à deux têtes y formoient une espèce très-permanente, et qui se multiplioit par la génération , ainsi que les autres es- pèces de serpens. Mais, indépendamment de toutes les raisons d’analogie qui doivent empêcher d’admetire cette opinion, au- cun de ces voyageurs n’a dit avoir vu un de ces serpens femelles metire bas des petits pourvus de deux têtes comme leur mère, ou pondre des œufs dont les fœtus présentassent la même con- formation extraordinaire ; et ces serpens à deux têtes ne doivent jamais être regardés que comme des monstruosités accidentelles ; ainsi que les chiens , les chats , les cochons, les veaux et les autres animaux que l’on a également vus avec deux têtes très-distincies. Il peut se faire que des circonstances particulières relatives au climat rendent ces monstres plus communs dans certains pays que dans d’autres : et des observateurs peu difficiles n'auront eu besoin que d'apercevoir deux ou trois individus à deux têles dans la même contrée, quoiqu’à des époques très éloignées, pour accréditer tous les contes répandus au sujet de ces repliles; d’au- tant plus que lorsqu'il s’agit de serpens où d’autres animaux qui demeurent pendant long-tempsrenfermés dans leurs retraites, qui se cachent à la vue de l’homme, et qu’il est par conséquent assez difficile de rencontrer , deux ou trois individus ont suffi quelquefois à certains voyageurs pour admettre une espèce nou- velle, eti peuvent, en eflet, sufire lorsqu'il ne s’agit pas d’une conformation des plus extraordinaires. Les anciens, ainsi que les modernes, ont parlé de l'existence de ces reptiles monstrueux et à deux têtes. Aristote en fait men- on. Elien dit que, de son temps, on en voyoil assez souvent 614 HISTOIRE NATURELLE dans le pays arrosé par le fleuve Arcas ; qu'ils étoient longs de trois ou quatre coudées ; que la couleur de leur corps étoit noire, et celle de leurs têtes blanchâtre. Aldrovande avoit dans son ca- binet, à Bologne , un de ces serpens à deux têtes. Joseph Lanzont et d’autres observateurs en ont vu, et l’on en conserve mainte- nant un dans le Cabinet du Roi. Ce dernier reptile a de longueur totale dix pouces deux lignes; sa queue est longue d’un pouce six lignes, et sa circonférence est d'un pouce une ligne dans l'endroit le plus gros du corps. Les écailles qui revêtent son dos sont ovales et relevées par une arète. Il n’a qu'un seul cou, mais deux têtes égales, et longues chacune de huit lignes ; les écailles qui en garnissent la partie supérieure sont semblables à celles du dos; une grande écaille recouvre chaque œil; les deux bouches renferment une langue fourchue , ainsi que des crochets creux et mobiles. Les deux têtes sont réunies de manière à former un angle de plus de cent cinquante degrés; et lorsque les deux bouches sont ouvertes, on peut voir le jour au travers de ces deux bouches et des deux yosiers joints ensemble. On peut observer, un peu au-dessous du cou, un pli assez considérable que fait le corps, et qui est produit par la peau du côté gauche, plus courte dans cette partie que la peau du côté droit. La couleur du dessus du corps a été altérée par l’esprit-de-vin; elle paroît d’un brun plus ou moins foncé, et le dessous du corps est blanchâtre : nous avons compté deux cent vingt-six grandes plaques et soixante paires de petites. Ce reptile monstrueux ap- partient évidemment au genre des couleuvres ; il doit être placé parmi les venimeuses, et peut-être étoit-il de l'espèce de la vi- père fer-de-lance. Nous ignorons d’où il a été apporté au Cabinet de sa majesté. Mais ce n’est pas seulement dans leurs collections que les natu- ralistes ont vu des serpens à deux têtes. Rédi en a observé un vivant *. {l l'avoit trouvé, au mois de janvier, aux environs de : Nous donnons dans cette note un extrait de la description des parties inté- rieures de ce reptile, faite par Rédi. « Ce serpent avoit deux trachées-artères, et par conséquent deux poumons, « lesquels étoient tout-à-fait séparés l’un de l’autre : le poumon droit paroissoit « évidemment plus gros que le gauche ; la figure en étoit semblable à celle des « poumons des vipères et des autres serpens, c’étoit une espèce de sac membra- DES SERPENS MONSTRUEUX. 7615 Pise, et étendu au soleil, sur les bords de l’Arno. Ce reptile étoit mâle , sa longueur de de palmes, et sa grosseur égaloit celle du petit déc Sa couleur approchoit de cale de la rouille; il avoit sur le dos et sur le ventre des taches noires, moins foncées au- dessous du corps; une bande blanche formoit une sorte de collier autour de ses deux cous, et une bande de la même couleur en- touroit l'extrémité de la queue, qui étoit parsemée de taches blan- ches. Chaque cou étoit long de deux travers de doigt; les deux cous el les deux têtes étoient entièrement semblables et très-bien conformés ; chaque gueule renfermoit une langue fourchue à son extrémité, mais ne présentoit point de crochets mobiles et à ve- a AN PA a PE NN ee ? «1 9x ON « neux fort long, dont la surface intérieure étoit semée de petites éminences répan- « dues sans ordre ; il étoit manifestement composé de deux différentes substances, « et tout-a-fait semblable au poumon du serpent décrit par Gérard Blasius. « Il se trouva deux cœurs enveloppés chacun de leur péricarde, et ayant chacun « leurs vaisseaux sanguins : ces deux cœurs différoient en cela seul que le droit « étoit plus gros que le gauche. « Il y avoit deux æœsophages et deux estomacs assez longs, comme dans tous « les serpens. Ces estomacs s’unissoient dans un seul intestin qui leur étoit com- & mun ; à l’endroit de leur réunion l’on apercevoit sur la surface interne de cha- « cun un petit amas circulaire de glandes ou mamelons très-petits, aigus et rou- « geûtres , semblables à ceux qui, dans les volatiles, tapissent le dedans de la « partie inférieure de l’æsophage.... Une file de mameions semblables, mais beau- & coup plus petits et qu’on ne pouvoit distinguer qu'a l’aide du microscope, ré- « gnoit sur toute la longueur du canal qui composoit les deux œsophages et les « deux estomacs. « L’intestin , après ses circonvolutions ordinaires , alloit s’ouvrir dans le cloa- que de l’anus. Les estomacs étoient totalement vides ; il y avoit seulement dans le canal des intestins quelques petits restes d’excrémens et un peu de matiere muqueuse , dans laquelle étoient engagés, et, pour ainsi dire, embourbés, un grand nombre de vers très-petits , les uns d’un beau blanc, les autres rongeä- tres, et tous pleins de vie. J’avois cependant gardé ce serpent enfermé pendant trois semaines dans un vaisseau de verre, où il ne voulut prendre aucune sorte de nourriture , comme c’est 18 coutume de plusieurs serpens. Celui-ci avoit deux foies ; et dans le droit, qui étoit plus grand que le gauche, il se trouva cinq. petites vésicules rondes et distendues , dent chacune renfermoit un ver de même espèce que ceux qui étoient dans la aide des intestins. « Chacun des deux foies avoit sa veine propre qui régnoit sur toute sa lon- gueur ; et comme il y avoit deux foies, il y avoit aussi deux vésicules du fiel. Ces L2ARLARRLRR RAR A vésicules n’étoient point infixées ou incrustées Bns le foie ; au contraire, elles en étoient séparées et même un peu éloignées, comme c’est l’ordinaire dans les vipères et dans les autres serpens. « Dans le serpent à deux têtes que je décris, la vésicule du fiel étoit beaucoup « plus grande dans le foie droit que dans le gauche : elle communiquoit par un petit RniAan « conduit au lobe droit du foie. Le canal cystique sortoit du milieu de cette vé : & sicule ou à peu près, et alloit verser la bile dans les intestins. Du bord du foic & 616 . HISTOIRE NATURELLE. nin. Rédi éprouva les effets de la morsure de ce reptile sur diveré animaux qui 1 n'en ressenlirent aucun effet fâcheux. Ce serpent ne vécut que jusqu’au tommencement de février ; et ce qu dya d'assez remarquable, c'est que la tête droite Ru mourir sepf heures avant la gauche. A ”" « = EL PS M"m = Lo «€ «€ droit naissoit un autre petit conduit biliaire qu’on nomme hépatique : il étoit isolé ; et.sans s'approcher de la vésicule , il alloit déboucher dans les intestins à quelque distance du canal cystique. Ge second conduit biliaire ou conduit hé- patique manquoit au foie gauche ; du moins je ne pus l’y apercevoir, Ce foie avoit seulement une vésicule du fiel d’où partoit un canal cystique qui aboutis- soit dans l'intestin, et y avoit sôn insertion séparément des deux autres con- duits : l'embouchure de celui-ci étoit marquée, dans la cavité intérieure de l’in- testin , par un mamelon fort gonflé. « Tous les mâles de l’espèce des serpens et des lézards ont deux verges et deux testicules : il sembloit donc que ce serpent qui avoit deux têtes, et dont les viscères étoient doubles , dût avoir quatre verges et quatre testicules; cepen- dant il n’avoit que deux testicules et deux verges. Les testicules étoient blancs, comme à l’erdinaire, un peu allongés ; ils avoient tous leurs appendices, et se trouvoient placés comme ils ont coutume d’être, non pas à côté l’un de l’autre, mais l’un un peu plus haut, c’est-à-dire , plus près de la tête, que l’autre. Les deux verges, conformées à l’ordinaire , avoient leur position accoutumée dans la queue; elles étoient hérissées de pointes à leur extrémité, comme elles le sont dans les vipères et dans les autres serpens qui se traînent sur le ventre. « En pressant les deux verges de ce serpent à deux têtes, j’en fis sortir la liqueur séminale ordinaire , dout l’odeur est forte et désagréable. J’ai eu occasion d’ob- server deux serpens à deux queues, et je ne leur ai trouvé non plus que deux verges , et non pas quatre, de même qu'aux lézards verts et aux lézards a deux queues. « Les deux cerveaux contenus dans les deux têtes étoient semblables entre eux, tant pour le volume que pour la conformation. Les deux moelles épinières, après avoir traversé respectivement les vertèbres des deux cous, se réunissoient à la naissance du dos en un seul tronc, qui régnoit jusqu’a l’extrémité de la & queuc. } FIN DU PREMIER VOLUME, ns AS IAA MAARAMMAAA AAA AAA AA AAA AA A AAA MA AAA AAAMAANAA dé Dis sur la nature des qua- pag. 1 Le Gavial. drupèdes ovipares. Table Alphabétique de tous les noms que lon à donnés aux quadrupèdes ovipares , et dont il est fait mention dans cet ouvrage. Les Tortues. La Tortue franche. écaille verte. La Couane. La Tortue Nasicorne. Le Caret. Le Luth. TORTUES D'EAU-DOUCE ET DE TERRE. Le Lé La Bourbeuse. La Ronde. La Terrapène. La Serpentine. La Rougeâtre. La Tortue Scorpion: La Jaune. La Molle. La Grecque. La Géométrique. La Raboteuse. La Dentelée. La Bombée. La Vermillon. La Courte-Queue. La Chagrinée. La Roussâtre. La Noirûtre. TABLE DES ARTICLES CONTENUS DANS CE VOLUME. Le Crocodile noir. Le Fouette-Queue. La Dragonne, Le Tupinambis. Le Sourcilleux. 24 La Tête-Fourchue: 42 Le Large-Doigt. 43 Le Bimaculé. 63 Le Sillonné. 64 L'Iguane. 67 Le Basilic, 68 Le Ce TÉ Le Galéo . 5 PER À rd gris. 74. Additôn au Lézard gris 77 Le I/zard vert 78 Le Grdyle. 806 1é Lion. ib. Le Galonné. 82 Le Lézard cornu. 84 La Tête-Rouge. 9 Le Lézard Quetz-Paléo. 95 Le Caméléon. 94 La Queue-Bleue. id. L’Azuré. 95 Le Grison. 96 L’Umbre. ë6. Le Plissé. 98 L’Algire. id. Le Stellion. 99 Le Scinque, 102 Le Mabouya, 103 Le Doré. pag. 124 43 1b. 127 128 132 135 136 137 138 6. 139 146 148 150 15r 152 157 158 164 165 cb. 167 168 169 170 171 172 183 tb. 184 zb. iB. 185 186 188 190 19 # Le Tapaÿe. Le Strié. -4 Le Marbré. + Le Roquet. Le Rouge Gorge. Le Goitreux. Le Teguixin. Le Triangulaire. La Double-Raye. Le Sputateur. Le Gecko. Le Gekcotte. La Tête-Plate. Le Seps. Le Chalcide. Le Dragon. DES SALAMANDRES, La Salamandre terrestre, Addition à la Salamandre ter- restre. La Salamandre à queue-pkte. La Ponctuée. La Quatre-Raies, Le Sarroubé. La Trois-Doigts. Des Quadrupèdes ovipares qu n’ont point de queue. La Grenouille commune. La Rousse. La Pluviale. La Sonnante. La Bordée. La Réticulaire. La Patte-d’Oie. L’Epaule-Armée. La Mugissante. La Perlée. La, Jackie. La Galonnée. La Grenouille écailleuse. La Raine verte, ou commune. La Bossue. La Brune. La Couleur-de-Lait. La Flüteuse. TABLE. pag. 195 L’Orangée. pag. oBt 196 La Rouge. ëbs ib. __ DES CRAPAUDS, 198 Le Crapaud commun. 283 100 Le. Vert. 292 200 Le Rayon-Veri. 205 201 Le Brun. 204 ib. Le Calamite. 295 202 Le Couleur-de-Feu: 206 ib. Le Pustuleux. 297 205 Le Goïtreux. ib. 208 Le Bossu. ib. 213 Le Pipa. 293 215 Le Cornu. 300 220 L’Agua. ib. 222 Le Marbré. 3or Le Criard. zB. 296 REPTILES BIPÈDES. 302 Le Cannelé. 304 253 Le Sheltopusik. 306 235 Synopsis Hethodica quadrupedum 245 Oviparium. 308 ib. Eloge du Comte de Buffon. 318 246 Table Alphabétique des noms 247 donnés auxserpens, etdontil est fait mention dans cet ou- 248 vrage. 323 251 Discours sur la nature des ser- 64) pens. 330 À7 Nomenclature et Table Métho- ëx \ dique des serpens. 360 26€ La Tipère commune. 417 266 La Vigre Chersea. 430 ib. L’Aspi, 432 267 In Vipèruoire. 4353 268 La Mélanis, 435 269 La Schythe." 55, 270 LA Vipère d Ebte 4536 273 L? Ammoûdyte. 457 ib. Le Céraste. 439 275 Le Serpent a lunette 44% 270 Le Serpent à lunettes bp érou 5e ib. Le Serpent à lunettes dü Gil AEEn 280 Le Lébétin. 453 ib, L'Hébraique. #l & \ RE - AM ur DEL SSL mel Le Chayquè pag. 454 La Pâle. Le Lacté. _ :b. La Rayée. Le Corallin. 455 Le Malpole. ib. L’Atroce. 456 La Molure. 5oo lHæmachate. 10, RD Paie. 5or La Très-Blanche. 457 La Double-Tache. 502 La Brasilienne. 458 Le Boiga. ib. La Vipère fer-de-lance. 459 La Sombre. 503 La Tête triangulaire. 464 La Saturnine. ib. Le Dipse. i6. La Carénée. 504. L’Atropos. 465 La Décolorée. ib. Le Léberis. id. Le Pélie. ib. La Tigrée. 466 Le Fil. 505 La Cendrée. 506 pou ODREUYRESS La Muqueuse. ib. La Couleuvre commune, 466 La Bleuñâtre. ib, à collier, 471 L'Hydre. 5o7 La Lisse. 476 La Cuirassée. 5ro La Quatre-Raies. 478 La Dione. 5rx Le Serpent d’Esculape. 479 Le Chapelet. ib. La Violette. 483 Le Cenchrus. 512 Le Demi-Collier. ib. L’Asiatique. 513 Le Lutrix. 484 La Jaune et Bleue. 514 Le Bali. ib. La Trois-Raies. 15 La Couleuvre des dames. 485 Le Daboie. tb. La Joufflue. 487 Le Situle. 519 La Blanche. ib. Le Tyrie. ibs Le Typhie. 488 L’Argus. id. Le Régine. 439 Le Pétole. 590 La Bande- Noire. ib. La Domestique. ib. L’Agile. 4oo L'Haje. Dot Le Padère. ib. La Maure. Bb, Le Grison. 4o1 Le Sibon. 592 La Queue-Plate. i6ô. La D’hara. cb. La Blanchôtre. 492 La Schokari. 523 La Rude. 495 La Grosse-Tête. 526 La Triscale. ib, La Couresse. 527 La Galonnée. 494 La Mouchetée. cb, L’Alidre. cb. La Camuse. 528 L’Anguleuse. | 495 La Striée, cb. La Couleuvre de Minerve. i5. La Ponctuée. 529 La Pétalaire. 496 Le Bluet. 550 La Minime. 497 Le Vanpum. éb. La Miliaire. ib. Le Cobel. 534 La Rhomboidale. 498 La Tête-Noire. iB. DE ne % :Le Dard. La Laphiati. | " La Noire et Fauve. La Chaîne. La Rubanée. La Mexicaine. Le Sipède. La Verte et Jaune. La Nébuleuse. Le Saurite. Le Lien. Le Sirtale; La Blanche et Brune. La Verditre. La Verte. Le Cenco. Le Calmar. L'Ovivore. Le Fer-à-Cheval. L'Ibibe. La Chatoyante. La Suisse. L’Ibiboca. La Tachetée. Le Triangle. Le Triple-Rang. La Réticulaire. La Couleuvre à zones. La Rousse. La Large-Tète, Le Devin. L’Hipnale. Le Bojobi. ‘ PCT an à ÿ TABLE. … 539 533 ib. pag. *pu tps * Fer Le Rativore. La Broderie. Croint. LéCenchris: Le Schytale. è L’Ophrie. L'Enydre. Le Muet. Le Boiquira. + Le Millet. Le Dryinas. Le Durissus: + Le Piscivore: L’Anguis. L'Orvet. - L'Eryx. La Peintadé. Le Rouleau. Le Colubrin. Le Trait. Le Cornu. Le Miguel. Le Réseau. Le Jaune et Brun. La Queue-Lancéolée. + Le Rouge. Le Long-Nez. La Plature. Le Lombric. L’'Enfumé. . Le Blanchet. L’Ibiare. Le Visqueux. . Langaha de Madagascar. FIN DE LA TABLAH, ay, a SMITHSONIAN NULLE