«>» -0 à&'« ■ ..<*»■ 1^- •^^ &¥\ ^ > r. }à ^S^ HARVARD UNIVERSITY. LIBRARY OF THE MUSEUM OF COMPARATIVE ZOOLOGY LiBRARY OF SAMUEL GARMAN 0CT5 1928 HISTOIRE NATURELLE DES POISSONS. STRASBOUnC, IMPRIMERIE DE F. G. LEVRAULT. HISTOIRE NATURELLE ;V DES POISSOI\S, PAR M. LE B.^^ CUVIER, Pair de France, Grand-Officier de la Le'gion d'honneur, Conseiller d'État et au Conseil royal de l'Instruction publique , l'un des quarante de l'Académie française, Associé libre de l'Académie des Belles-Lettres, Secrétaire per- pétuel de celle des Sciences, Membre des Sociétés et Académies royales de Londres, de Berlin, de Pétersbourg , de Stockholm, de Turin, de Gœttingue , des Pays-Bas, de Munich, de Modène, etc.; ET PAR M. A. VALENCIENNES, Professeur de Zoologie au Muséum d'Histoire naturelle , Membre de l'Académie royale des sciences de Berlin , de la Société zoologique de Londres , etc. TOME DOUZIÈME. A PARIS, Chez F. G. LEVRAULT, rue de la Harpe, n." 81; STRASBOURG, même Maison, rue des Juifs, n.° 33 j BRUXELLES, Librairie parisienne, rue de la Magdeleine, n.°438. 1837. p •<* AVERTISSEMENT. 1_Je douzième volume comprend l'histoire des gobies et des genres démembrés de celui du même nom, tel qu'il avait été composé par les successeurs d'Artedi et de Linné. Nos lecteurs verront que j'ai dû faire plusieurs cbangemens a. nos travaux préliminaires sur l'Iclithyologie , dont M. Cuvier a présenté un aperçu dans le second volume du Règne animal. Outre l'éta- blissement de quelques genres nouveaux, qui recevront, j'espère, l'approbation des natura- listes , j'ai fait une réforme importante dans la famille des gobioïdes , en en retirant les labraoc de Pallas ou les chirus de Steller. M. Cuvier a cru que ces poissons n'avaient pas d'appendices cœcales , et cependant les des- criptions de Pallas et de Tilesius sont si positives sur ce point, qu'il est impossible de douter que ces poissons soient dépourvus de ces organes; le nombre même en est assez considérable. Cette VJ AVERTISSEMENT. disposition anatomique du canal intestinal est d'ailleurs tout-à-fait en rapport avec un autre caractère, qui avait également échappé à M. Cuvier, et que j'ai découvert au moment délivrer à l'impression l'histoire de ce genre. Ce caractère consiste en ce que le sous-orbi taire donne en arrière une longue apophyse qui se porte vers l'angle du préopercule et le recouvre souvent. Les labrax sont donc de vrais percoïdes à joues cuirassées, et qui doivent être placés près des hémitriptères ou des hémilépidotes. Nous aurons donc à en parler dans un de nos prochains supplémens. J'ai laissé à la suite des gobioïdes les callio- nymes et les genres voisins , ayant cru toutefois devoir mettre en appendice à ce chapitre le genre si extraordinaire des coniéphores. Enfin , je termine ce volume par l'histoire naturelle des acanthoptérygiens à pectorales pédiculées, en éta- blissant un nouveau genre dans le groupe des bau- droies et en cherchant à démontrer les nombreu- ses affinités qui lient les batrachoides à la famille dans laquelle M. Cuvier les a si justement réunis. Après cet exposé, je continuerai d'adresser nos remercîmens aux naturalistes éclairés et zélés qui veulent bien contribuer à nous four- nir des matériaux précieux pour la continua- tion de nos travaux. AVERTISSEMENT. vij M. Gaîmard est de retour de la seconde expé- dition en Islande : dans ce voyage il a fait d'u- tiles et fructueuses recherclies pour l'ichthyo- logie en particulier; il a su se procurer les saumons des eaux douces de l'Islande , et il a été assez heureux pour rapporter deux exem- plaires du bogmare ou vagmaer : l'un d'eux est un poisson de près de huit pieds , et quoique un peu mutilé (il l'a ramassé échoué sur la côte) , il montre que les conjectures de M. Cuvier , sur ce poisson , étaient très-fondées , et que , ainsi que nous l'avons fait voir tome X , page 346 , cette espèce est du genre trachyptère. M. Heudelot, qui parcourt avec tant de zèle les contrées arrosées par le Sénégal , nous a pro- curé plusieurs poissons intéressans de ce fleuve. 31. Dussumier n'a pas négligé dans son der- nier voyage à la côte malabare , et dans sa tra- versée, de faire de nouvelles observations sur les poissons ; une des plus intéressantes sera la série de recherches faites sur les coryphènes , d'oii il résulte que la crête interpariétale du mâle est beaucoup plus élevée que celle de la femelle, et que cette disposition donne une configuration toute différente à la tête des individus des deux sexes d'une même espèce de coryphène. Ces nou- velles observations nous obligeront a faire un jour une revue de ce genre; mais pour qu'elle Viij AVERTISSEMENT. porte fruit, il est nécessaire d'attendre encore de nouveaux documens, que les voyageurs s'em- presseront sans doute de recueillir. Nous devons les attendre avec d'autant plus de confiance, que les nouveaux travaux des natu- ralistes sur l'histoire naturelle des poissons se poursuivent avec activité. Les nouvelles reclierclies de mon ami, M. Agassis , sur les poissons de la Suisse , et parti- culièrement des cyprins du lac de Neufcliâtel; celles de M. Heckel , sur les poissons du même genre, et la belle monographie que ce savant vient de publier en commun avec M. Fitzinger, sur les esturgeons, sont la preuve de ce que j'avance. En Angleterre, M. Yarell vient de terminer, à la satisfaction géuérale, le second volume de ^ son Iclithyologie. Pourquoi faut -il que nous ayons à déplorer la perte d'un des hommes laborieux et savans de ce pays , M. Ed. Bennett, enlevé dans la force de l'âge , et dont les tra- vaux et la correspondance nous ont été autant utiles , que l'amitié nous était précieuse. Au Jardin des Plantes, Décembre 1856. TABLE DU DOUZIÈME VOLUME. SUITE DU LIVRE QUATORZIEME, Pages. Plancli : GOBIOÏDES 1 CHAPITRE IX. Des Gobies (Gobivs^ nob.) i Des Gohics des mers d'Europe 9 Le Gobie commun (Gohîus niger.^ L.) Ihid. Le Gobie à deux teintes ( Gobius hicolor^ Gm.) . 1 9 Le Gobie paganel {Gobius paganellus^ L.) .... 20 Le Gobie céphalote (Gobius capito^ nob.) .... 21 Le Gobie à gouttelettes (Gobius guttatus^ nob.) 24 Le Gobie bordé (Gobius limbatus^ nob. ) 26 344 Le Gobie lote (Gobius loia^ nob.) 2-7 Le Gobie ensanglanté (Gobius cruentatus ^ Gm.) 29 Le Gobie doré (Gobius auratus^ Riss.) 3i Le Gobie à joue poreuse (Gobius geniporus^ nob.) 3 2 Le Gobie Lesueur (Gobius Lesueuriiy Riss.) ... 33 Le Gobie à haute dorsale de la Méditerranée (Go- bius jozoj Lin.) 35 Le Gobie à longs rayons (Gobius longiradiatus ^ Risso) 38 Le Gobie buliotte (Gobius minutus ^ Penn.). ... 39 Le Gobie à quatre tacîics ( Gobius cpiadrimacu- latus ^ nob. ) 44 X TABLE. Pages. Plancbi Le Gobie à deux taches (Gobais Ruthensparri ^ Euphrasen; Gohius punctatus^ Yarell) 48 Le Gobie réticulé (Gobius reticulatus^ nob.).. . 5o Le Gobie Coulon (Gobius Colonianus ^ Riss.) . . 5 1 345 Le Gobie d'eau douce ( Gobius Jlimatilis^ Bonn.) 5 2 Des Gobies étrangers 64 Des Gobies étrangers de la forme du vulgaire j avec de l'effilé aux pectorales 55 Le Gobie de Madère (Gobius maderensisj nob.). Ibid, Le Gobie endormeur ( Gobius soporator ^ nob.) . 5 6 Le Gobie à points blancs ( Gobius albopunctatusy nob.) 57 Le Gobie à nuages et à points blancs ( Gobius ne- bulo-punctatus j nob.) 5 8 Le Gobie élégant ( Gobius elegans^ K. et V. H.) . Ibid, Le Gobie cycloptère (Gobius cj^clopterus ^ nob.) 5 9 Le Gobie à grosses joues (Gobius buccatus^ nob.) 60 Le Gobie jaune (Gobius Jlai^us ^ nob.) Ibid. Le Gobie à queue tachetée (Gobius baliurus ^ K.etV. H.) 61 Le Gobie à points verts ( Gobius viridipunctatus nob.) 62 Le Gobie d'Ehrenberg ( Gobius Ehrenbergii^ nob.) 6 3 Le Gobie à joue rayée ( Gobius genit^ittalus , nob.) 6 4 Le Gobie à tête nue (Gobius nudicepSj nob.). . 65 Le Gobie à préopercule armé ( Gobius oplopo- muSy nob.) è& Le Gobie deiui-cerclé (Gobius seniidolietus ^ nob.) 6 7 TABLE. XJ Pages. Planch. Le Gobie kokoa (Gohius hokius^ nob.) ...;.. 68 Le Gobie giuris ( Gohius giiiris^ Hamilt. Buchan.) 7 2 Le Gobie biocellé (^Gohius hiocellatus ^noh.) ... 73 Le Gobie de Célèbes {Gohius Celehius ^ nob.). , 74 Le Gobie de Russel {Gohius Russeliij nob.). . . j5 Le Gobie catebou (Gohius catebus^ nob.) 76 Le Gobie kora {Gohius kora^ nob.) 77 Le Gobie à fil {Gohius Jilosus y nob.) 78 Le Gobie à nageoires pointues ( Gohius acutipen- nisy nob.) 80 Le Gobie à soies {Gohius setosusj nob.) 81 Le Gobie porte-crin {Gohius criniger, nob.) ... 82 Le Gobie nébuleux {Gohius nehulosus ^ Forsk.). 84 Le Gobie à venin {Gohius venenatuSj nob.) ... 85 Le Gob'iek grosses canines {Gohius cajiinuSyTïoh.) 86 Le Gobie à quatre pores ( Gohius quadriporuSj nob.) 87 Le Gobie unicolor {Gohius wmco/orjK.etV.H.). 88 Le Gobie à deux dards ( Gohius h itelatus y noh.) . 89 Le Gobie à fil court {Gohius hrei^iJiUs ^ nob.). . 90 Le Gobie papillon {Gohius papilio ^ nob.) gi Le Gobie phalène ( Gohius phalœna^ nob.) . ... 92 Le Gobie sphynx {Gohius sphjnx^ nob.) 93 Le Gobie chinois {Gohius sinensis^ nob. ; Bostri- che chinois y Lacép.) 94 Le Gobie à cinq ocelles {Gohius quincjueocellatus ^ nob.; Gohius sejiiitœniatus yEhv.) g 5 XIJ TABLE. Pages. Plancli»' Le Gobie de Bosc (Gobius Boscii, Lacé]). ^Gobiii s auridi/jallidus jMitch.) 96 Le Gobie awaou (Gobius ocellaris^ Brouss. , i)ec. ichth.) g 8 Le Gobie à nageoires noires (Gobius Jiigripiimis ^ nob.) loi Le Gobie pâle (Gobius pallidus^ nob.) 102 Le Gobie de Guam (Gobius Guamensis j nob. ) . . 1 o3 Le Gobie banane (Gobius banana^ nob.) Ibid. Le Gobie de la Martinicjue (Gobius Martinicus ^ nob.) io5 Le Gobie porte-fJs (Gobius jilifer^ nob.) 106 Le Gobie des Papous (Gobius Papuetisi s yiioh.) . . Ibid. Le Gobie neigé (Gobius im>eatus^ nob.) 107 Le Gobie arabique (Gobius bimaculatus ^YhvQwh. ; Gobius arabicus^ Gm.). ...» 108 Le Gobie de Mertens (Gobius Mertensii^ nob.) . . 1 1 o Le Gobie à épine cachée (Gobius crjptocentrus ^ nob. ; Crjptocentrus meleagris^ Eiirenb.) ... 1 1 1 346 Le Gobie paon (Gobius pavoninus ^ ElirenJj. ) . . . 112 Le Gobie ventral (Gobius ventrcdis^ Ehrenb.) ... 1 1 3 Le Gobie lancette (Gobius lanceoîalus ^ Bl.). . . . 1 15 Le Gobie bacalaou (Gobius bacalaus^ nob.) .... 119 Le Gobie émeraude (Gobius smaragdus ^ nob.) . 120 Le Gobie taïasica (Gobius hrasilicnsis^ Bl. ) 121 • « < TABLE. Xnj Pages. Plaiicli. Le GoLie à moustaclies (Gohius injstacinus^ noh.) 124 Le Gohie à grosse tête {Gohius macrocephalus^ Pall.) 126 Le Gobie à tentacules (Gohius tentacularis ^ nob. ) 128 Le Gobie cyprin {Gohius cjprjnoides^ Pall.). , 129 Le Gobie à crête de coq ( Gohius crisla gallij nob.) 1 3 o Le Gobie petite coryphène (GoZ'à/^ corjpJiœnuîa ^ nob.) i3i Le Gobie bistrion ( Gohius hisirio , K. et V. H. ) . 1 3 2 347 Le Gobie à cinq traits (Gohius ciuincjuestrigalus ^ nob.) i34 Le Gobie à tète rude (Gohius ecliinocephcdus ^ Ebrenb. ) 134 Le Gobie des îles des kims (Gohius amiciensis^ nob.) i35 Le Gobie de Comraerson ( Gohius Commersonii^ nob. ; Gohius niger^ Lacép.) 136 Le Gobie bleu (Gohius cœruleus , Lacép.) i 3 7 Le Gobie Gutam (Gohius Guiam^ Ham. Bucîian.) 1 3 8 Le Gobie cbinois (Gohius chinensis^ Osbeck \ Go- hius eleatrisy Linn.) ^ i38 XIV TABLE. CHAPITRE X. Pages. Plancii. Des Gobioïdes i39 Le Gobioïde Broussonnet (Gohioides Brousson- netiy Lacép.) Jhid. 348 CHAPITRE XI. Des ApocrypteSj des Trypauchènes et des Am- blyopes 142 Des Apocryptes ^ Ibid. L'Apocrypte bato ( Apocrjptes hato , nob.) .... 143 349 L'Apocrypte cbangua {Apocryptes cl langu a ^noh.'^ Gohius chajiguuj Ham. Buch.. ^ Eleotris lan- ceolata^ Bl. Schn.) 14^ L'Apocrypte à longues dents (Apocryptes den- tatuSy nob. ) 14^ L'Apocrypte à dents en peigne (Apocryptes pec- tinirostris , nob. ; Gohius pectinirostris , Linn.) 1 5 o L'Apocrypte à large gueule (Apocrjptes rictuo- sus , nob. ) i5i Des Trypâuchènes i52 Le Trypaucliène gaîne ( Trypaucken vagina^ nob.) 1 5 3 3 5 o Des Amblyopes 167 L'Amblyope Hermannien (Amhljopus Herman- nianus y nob. ; Tœnioïde Hermannien^ haicé)^.) i5g 35 1 L'Amblyope mayenne (Amhljopus mayenna, nob.) i63 L'Amblyope rose (Amhljopus roseus^ nob.) ... 164 TABLE, XV Pages. Plancli; L'Amblyope sevety {Amhljopus cœculus ^ nob. ; Cepola ccecula^Bh Schn.; Gobius anguillaris ^ Linn.) i65 L'Amblyope grêle (^Amhljopus gracilis j iiob.) . . 166 CHAPITRE XIL Les Sicydiums (Sicydium ^ nob.) 167 LeSicydium de Plumier (Sicydium Plumieri^ nob. ; Gobius Plumieriy BI. Schn.) 168 Le Sicydium tête de lièvre (Sicjdium îagocepha- luiHy nob.; Gobius lagocephalus ^ Pall.). . . 174 Le Sicydium à large tête (Sicydium laticeps^ nob.) 177 Le Sicydium à tête de chien (Sicydium cynoce- phalum jTïoh.) Ibid. 35 2 CHAPITRE Xin. Des Périophthalmes (Periophthalmus ^ Bl. Schn.)j ET DES BOLÉOPHTHALMES (BoLEO- PHTHJLMUS y nob. ) 179 Des Pétiiophthalmes 180 Le Périophthalme Kœlreuter (Periophthalmus Kœlreuteri^ Bl. Schn.-, Gobius Kœlreuteri^ Pall. et Gmel.) 181 Le Périophthalme à treize rayons (Periophthal- mus tredecimradiatus j nob.; Gobius tredecim- radiatusj Ham. Buch.) 189 Le Périophthalme papillon (Periophthalmus pa- pilioj Bl. Schn.) 190 353 Le Périophthalme rayé d'argent (Periophthalmus argentilineatus y nob. ) . 191 XVJ TABLE. P.-)gei. Plan cil ; Le Périoplithalme de Schlosser {PeriopJilliahnus Schlosseri^ Bl.; Gohius ScJilosseri^ Pall.). . . 192 Le Périophtbalmc à sept rayons {PeriopJiiJialmiis septemrndiatus ^noh. ; Gohius septemradiatns^ Ham. Buclian.) 196 Le Périoplithalme à neuf rayons (^Periophthalmus jioi^einrcuUaius , nob. ; Gohius uoi^emradiatus^ Hara. Buch.) Ihid. Le Périophthalme de Freycinet (Periophthalmus Frejcinetiy nob.) 197 Des Boléophthalmes 198 Le Boléophthalme de Boddaërt (Boleophthalmus Boddaertiy nob.; Gohius Boddaerti ^ Pall.), . 199 Le Boléoplitbalme PHnien ( Boleophthalmus Pli- nianuSy nob. ; Gohius Plinianus^ Hamilt. Buch.) 2 o 5 Le Boléophthalme de Dussumier {Boleophthalmus Dussumieri y nob.) 207 364 Le Boléophthalme à longues dents (Boleophthal- mus dentatuSj nob.)" 208 355 Le Boléophthalme porte -mât (Boleophthalmus histophojus j nob.) 210 Le Boléophthalme vert {Boleophthalmus viridis^ nob.; Gohius inridis^ Ham. Buch.) 2i3 Le Boléophthalme laok {Boleophthalmus lao- kus) 214 Le Boléophthalme de Chhie {Boleophthalmus sinicus , nob.) 2 1 5 Le Boléophthalme chinois {Boleophthalmus chi- nensisy nob. ) Ihid. TABLE. Xvij CHAPITRE XIV. ^ Page». Plancb . Des Eléotris (Eleotris ^ Gron.), et des Phi- LYPNEs ( PnirrpNuSj nob.) 2i6 Des ELÉOTras 217 L'Eléotris téiard (Eléotris gjrinus y-Qoh.) 220 356 L'Eléotris guavina (Eléotris giicwina^ nob.). ... 223 L'Eléotris mulet (Eléotris mugiloides , nob.) ... 226 L Eléotris à grandes écailles (Eléotris grandi- stjuama ^ nob.) 229 L'Eléotris à émeraude (Eléotris smaragdus^ nob.) 2 3 1 L'Eléotris à museau obtus (Eléotris sima^ nob.) 2 32 L'Eléotris noir (Eléotris nigra ^ Q. et G.). . . . 2 33 L'Eléotris à tête poreuse (Eléotris porocephala. nob.) 237 L'Eléotris ophicépbale (Eléotris ophicephalus ^ K.etV. H.) 239 L'Eléotris de Madagascar (Eléotris Madagasca- riensisy nob.) 240 L'Eléotris ^er\é ( Eleott^is margaritacea^ nob.). Ihid. L'Eléotris à front bombé ( Eléotris tinnifrons^ nob. ; Sciœna macrolepidota ^ Bl.) 241 L'Eléotris aux ouïes armées (Eléotris helobran- cha^ nob.) 243 L'Eléotris à épaulette noire (Eléotris humer alis ^ nob.) 246 L'Eléotris gobie (Eléotris gohioides^ nob.). , . 247 L'Eléotris cyprin (Eléotris cjprinoides ^ nob.).. 248 12. b XVllj TABLE. Pages. Planch. L'Eléotris rayé (Eleotris radiata^ Q. etG.). . . 2 5o L'Éléotris Taiboa (Eleotris strigata^ nob. ; Go- hiiis strigatusj Brouss. et Gm.) 25 i L'Eléotris muraille ( Eleotris muralis^ Q. et G.) . 2 53 35 7 L'Eléotris à six gouttes ( Eleotris sexguttata , nob.) 254 Des Philypnes {Philypnus^ nob.) 255 Et en particulier du Pbilypue àovva.cnx {Philjpnus dormitator^ nob.; Platjcephalus dormitatory Bl. Schn.) Ihid. 35 8 CHAPITRE XV. De quelques genres voisins des Goeioïdes. . , 262 Des Callionymes (Callionymus ^ Linn.). . . . Ihid. Le Callionyme lyre ou doucet ( Callioujmus Ijra , Linn.) 266 Le Callionyme dragonnet ( CalliÔnjmus dracun- culuSj Linn.) 274 Le Callionyme guitare {Callionyinus cithara , nob. ; Callionymus maculalus ^ Rafin.). ...'..... 280 Le Callionyme réticulé ( Callionjnnus réiiciilatus ^ nob.) 284 Le Callionyme à bandes ( Callionymus Jasciatus, nob.) 285 Le Callionyme lacert ( Callionymus lacerta , nob. ; CalUonjinus fcstii'us , Pall. ; Callioujmus ad- mirabilisj Risso) 286 Le Callionyme de Lesueur (Callionymus Sueurii, nob.). 291 TABLE. XIX Pages. Plancb. Le Callionyine de Risso (^Callionjmus Rissoij Lesueur) 293 Le Callionyine bélène ( CaUionjmus hehnus j Risso) 294 Des Callionymes étrangers , 296 Le Callionyme oriental ( CaUionjmus orientalisj Bl. Schn.) 297 Le Callionyme à cornes courbes (CaUionjmus curmcorhis^ nob.). . . .."V^i'l l 298 Le Callionyme japonais (CaUionjmus japonicus ^ Houttuyn) 299 Le Callionyme flèche {CaUionjmus sagitia , Pall. ) 3 o 1 Le Callionyme à corne simple (CaUionjmus sim- plicicornisy nob.) 3o3 Le Callionyme à filaraens ( CaUionjmus JUameîu- tosuSj nob.) Ibid. 35g Le CallionjTne à grands opercules ( CaUionjmus opercularisj nob.) 3o5 Le Callionyme linéolé (CaUionjmus lineoïatuSj nob.) 307 Le Callionyme ocellé (CaUionjmus oceUaius j Pall.) 3 09 Le Callionyme à doigt libre ( CaUionjmus dactj- lopus ^ Ed. Benn.) 3io De l'Hémérocet (Hemerocœtes^ nob.) 3ii Et en particulier de l'Hémérocet acanthorhynque ( Hemerocetes acanthorlijnchos j nob . ; CaUio- njmus acanthorhjnchos ^ Forst. ; CaUionjmus monopterjgius y Bl. Schn.) Ibid. XX TABLE. Pages. Plancli. Du Tkichonotë ( TrichonotuSj B1. Schn.) . . . 3 1 5 Le Trichonote porte -soie ( Trichonotus setigei'j Bl. Schn.) 3i6 Des Platyptères 32o Le Platyptère âpron (Platjptera aspro, K. et V. H.) 321 36o APiPENDICE AU CHAPITRE XV. Du CoMÉPHORE (^CoMEPHORUSj Lacép.) 327 Le Coméphore du Baikal ( Comephorus Baika- lensis j Lacép. ; Callionjinus Baihalensis , Pallas) 329 36i LIVRE QUINZIÈME. Des Acanthoptérygiens a pectorales pé- DICULÉES 335 CHAPITRE PREMIER. Des Baudroies (Lopuius^ Linn.) 339 La Baudroie commune (Lophius piscatorius^ Linn.) 344 D'une seconde espèce de Baudroie des mers d'Europe 371 36a Des Baudroies de rÂilanticjue 379 La Baudroie d Amérique (Lophius yàmericanus ^ nob.). , 38i La Baudroie à vomer lisse (Lophius v orner inus ^ noL. ) Ibid. La Baudroie épineuse {Lophius seiigerus^Y^d\][ ) . 383 TABLE. XXJ CHAPITRE II. Pages. Plancb. Des Chironectes {Chironectes^ Cuv. ; An- TENNARius^ Comm.) 389 Le Chironecte peint {Chironectes pictiis ^ noh.) . 3^3 363 Le Cbironecte renflé ( Chironectes tumidiis^ nob.). 397 Le Chironecte uni (Chironectes lœi^igatus, Cuv.). 399 Le Chironecte de l'Isle-de-France ( Chironectes nesogallicus ^ nob.) 401 Le Chironecte marbré ( Chironectes marmoratus^ nob.) 402 Le Chironecte âpre {Chironectes hispidus^ nob.) 407 Le Chironecte rude {Chironectes scaher ^ nob.). 412 Le Chironecte du prince {Chironectes principis ^ nob. ) 416 Le Chironecte de Mentzel {ChiroTiectes Mentzeliî, nob.) 417 Le Chironecte à deux ocelles {Chironectes hiocel- latus j Cuv.) Ihid. Le Chironecte à ocelles ( Chironectes ocelîatus^ nob.) 419 Le Chironecte à beaucoup d'ocelles ( Chironectes multioceïlatus y nob.) 420 Le Chironecte panthère {Chironectes pardalis^n.) Ihid, 364 Le Chironecte pavonin {Chironectes pai^ofiinus y nob. ) 421 Le Chironecte varié {Chironectes variegatus^ nob.) 422 Le Chironecte à poils fourchus {Chironectes fur- cipilis ^ Cuv.) 423 Le Chironecte porte-monnaie ( ChiroTiectes num- mifer^ Cuv.) 426 • • XXIJ TABLE. Pages. Plancli. Le Chironecte aux points verts ( Chironectes chlo- rostjgina^ Ehr.) 426 Le Chironecte Comraerson ( Chironectes Commer- soniij Cuv.; Lophie Cojnmerson jhacéTp.) . . Ihid. Le Chironecte bossu {Chironectes tuherosusj Cuv.) 428 Le Chironecte rouge (^Chironectes coccineus^ Less. Garn. ) 43o Le Chironecte de Bougainville ( Chironectes Bou- gaint^ilUij nob. ) 43i Le Chironecte hérissé ( Chironectes hirsutus^ nob. ; Lophius hirsutus^ Lacép.) 434 Le Chironecte lisse (^Chironectes Icef^is ^ nob.; Lophius lœ(^is j Lacép. ; Chironectes unipcnnis ^ Cuv.) 437 CHAPITRE IIL Des Malthées et des Halieutées 438 Des Malthées Ihid. La Malthée vespertilion (Malihœa vespertilio , n. ) 440 La Maldiée longirostre , ou le Guacucuja de Margrave ( Malthœa longirostris ^nob.) 460 365 La Malthée à nez court (Malthœa nasuta^ nob. ; Malthœa cuhifrons ^ Richardson). 462 La Malthée à stigmates (Malthœa notata^ nob. ) . 45 3 La Malthée étroite (Malthœa angusta ^woh.) ... 454 La Malthée tronquée (Malthœa triincata^ nob.) . Ihid. Des Halieutées (Halieutj^a ^xïoh.) 455 L'Halicutée étoilée (Halieutœa stellata, noh.). . 456 366 « • • TABLE. XXllJ CHAPITRE IV. Pages. Plancb. Des BATKACHOÏDESjLacép. (Batrjchus^ Sclin.) 466 Le Batrachoïde grognant (Batrachus gruimienSj Bl.) Ihid. Le Batrachoïde de Dussumier (Batrachus .Dussu- inierij nob.) 474 ^67 Le Batraclioïde moucheté (^Batrachus apiatus^ nob. ) 477 Le Batrachoïde tau (Batrachus taii^ nob. ; Gadus tau j Linn. ; Xjophius hufo , Mitsch.) 478 Le Batrachoïde de Gronovius {Batrachus Gro- nom^ nob.) 482 Le Batrachoïde à deux épines {Batrachus hispinisy Bl.Schn.) 484 Le Batrachoïde varié (Batrachus variegatus^ nob.; Batrachoides variegatus ^ Lesueur.) . . Ibid, Le Batrachoïde à épines cachées (Batrachus crjptocenirus ^ nob.; Pacamo^ Margr.). ... 486 Le Batrachoïde à quatre épines (Batrachus cjua- drispinisj nob.) 486 Le Batrachoïde de Surinam ( Batrachus surina- mensisy Bl. Schn.; Batrachoïde tau, Lacép.) . 488 Le Batrachoïde à lunettes (Batrachus conspicd- lum^ nob.; Gadus tau^ Bl.) 49 5 Le Batrachoïde ponctué (Batrachus punctulatus j nob.) 497 XXIV TABLE. Page». Plancli. Le BatrachdidehaThn j Batî'ackus barbatus j nob. ; Batrachiis didactjlus ^ Bl. Schii.) 498 Le Batrachoïdé très-poreux (Batrachus porosis- simus^ nob.; Nicjui^ Margr.) 5oi Le Batrachoïdé poreux {Batrachus porosus j nob.) 5 o 6 368 HISTOIRE DES POISSONS, SUITE DU LIVRE QUATORZIEME. GOBIOÏDES. CHAPITRE IX. Des Gohies {Gobais y nob.) J_jes anarrhiques n'ont point de ventrales ; les blennies et leurs dëmembremens ont des ven- trales jugulaires; déjà dans les opistognathes ces nageoires sont tliorachiques et complètes. Mais la famille d'Acanthoptërygiens, à laquelle tous ces genres appartiennent, possède beau- coup d'autres poissons à ventrales thoraciques , et tellement semblables, que Linné les avait réunis dans son genre Gohius, quoiqu'ils n'aient pas tous à beaucoup près le caractère qu'il assi- gne à ce genre, et qui consiste , suivant l'auteur du Sfstema naturœ, en ventrales réunies en une seule nageoire. 12. 1 22 LIVRE XIV. GOEIOIDES. | § Plusieurs, en cfTet (ce sont nos Eleotris '), les ont tout-à-fait divisées, malgré toutes les autres analogies qui les rapprochent des gobies pro- prement dits. Mais parmi ceux même qui possèdent ce caractère de ventrales réunies, on peut faire encore de nombreuses distinctions. Déjà Blocli, dans son Système posthume, en a séparé, sous le nom de Périophthalmes , ceux dont les yeux, rapprochés sur le vertex, sont garnis de paupières. Lacépède avait aussi dis- tingué ceux qui n'ont qu'une dorsale, et qu'il nomme Gobioïdes ; et ceux dont les trois na- geoires verticales sont contiguès , et qu'il nomme Tœnioïdes : mais outre ces séparations nous en ferons encore quatre. Nous séparons premièrement des Gobies ordinaires, où nous ne laissons que les poissons qui ont des dents en velours , souvent avec une rangée plus forte à l'extérieur, des espèces où les dents, sur une seule rangée aux deux mâ- choires, et presque horizontales à l'inférieure, y ont en outre plus intérieurement deux ca- nines rapprochées l'une de l'autre : ce sont nos Apocryptes. Secondement, d'autres qui ont à la mâchoire supérieure des dents innombrables, serrées, fines et flexibles comme des cheveux, 1. Et en partie les gobiomores de Lacépède. CHAP. IX. GOBTES. 5 mobiles sur la gencive , comme celles des salarias , e t des dents tout aussi fines , mais plus courtes et horizontales au bord de la mâchoire inférieure , avec une rangée de plus fortes implantées sur l'os lui-même , les deux antérieures plus grandes et crochues j nous les appelons Sicydium. Nous détachons des Gobioïdes de Lacépède une espèce remarquable par une fossette qu'elle a de chaque côté sur la nuque, et nous lui donnons le nom générique de Trjpauchene, Les Périophthalmes seront pour nous ceux qui ont des dents en velours, et nous en dé- membrons les espèces qui, avec les yeux rap- prochés et garnis de paupières comme les leurs , ont des dents analogues à celles des apocryptes; nous les appelons Boléophthalmes. Quant aux Eleotris, nous n'avons à en dé- tacher qu'une espèce, qui, avec les dents en velours ou en cardes, communes à tout ce genre, a des dents à l'extrémité antérieure du vomer : nous l'appellerons génériquement Phi- Ijpnus, d'après son nom colonial de dormeur. Après tous ces retranchemens, le genre Go- bie , ainsi restreint aux espèces à deux dorsales, à ventrales réunies , à dents en velours ou en cardes, est encore très-nombreux en espèces, et pour le débrouiller il est nécessaire d'y éta- blir des subdivisions d'un ordre inférieur, dont 4 LH^RE XIV. GOBIOlDES. nous donnerons la clef un peu plus loin, at- tendu que c'est surtout pour les gobies étran- gers qu'elles sont nécessaires. Il y en a cependant aussi plusieurs espèces dans nos mers, et qui peuvent suffisamment se subdiviser d'après le nombre des rayons de leur seconde dorsale, et par quelques détails relatifs aux rayons de leur pectorale. K«/3;o5-, que Pline a rendu par gohio^, était chez les Grecs un petit poisson littoral et saxatile ^, qui habitait aussi les rivières ^, et dont on faisait assez d'usage dans les repas que les auteurs comiques"* ou diététiques^ en aient souvent parlé. Comme les poissons du genre dont nous par- lons daus ce chapitre se nomment gb à Venise, Rondelet et ses successeurs en ont conclu qu'ils étaient ces zoùf^m des Grecs et ces gobiones des Latins ; et même on a repris récemment M. Cuvier d'avoir douté de cette synonymie.^ Il y a cependant preuve sans réplique que le Kûoj^ioç n'était point un de nos gobies d'au- 1. En traduisant, t. I, 1. IX, c. LXXXIII, p. 555, édition d'Hardouin, un passage de Théophraste, sur les z&)/2/o/ pris dans la glace. — 2. Arist., 1. VIII,c. i3. — 3. L. VIII, c. 19; et Dorion, ap. Athén., 1. VU, c. 17. — 4. Ibid. , 1. III, c, 24 ; 1. VII, en, ex Sotade, — 5. Hicesius et Dioclès, ap. Athén., 1. VII, c. 17J Galen., deAlim.fac, 1. III, c. 29,répèteOribas., Med.coU., 1. II. — 6. Mertens,vo_y.à Venise, I, p. 421. CHAP. IX. GOBIES. S }ourd'hui. Aristote attribue au kûj/3;os- de nom- breuses appendices cœcales*, et nos gobies n'en ont aucunes. Élien' et Oppien^ le rangent avec les Scorpions, les Arondes, les Vives, et pré- tendent que ses piqûres sont, comme les leurs, venimeuses sans être mortelles : or, il n'y a guère de poisson plus innocent que nos gobies 5 leursr os operculaires n'ont aucune armure; quoique acanthoptérygiens, leurs rayons simples sont flexibles et ne peuvent blesser. Il n'y a point de comparaison à en faire sous ce rapport avec ceux auxquels on associe le Kœ(èioç. Il est vrai que les noms de gohio et de gobius ont aussi été quelquefois accompagnés par les Latins d'é- pithètes inconciliables avec ce qui est rap- porté du Kûo[?)toç, et qu'ils parlent alors de quelque autre poisson. Ainsi Ovide dit posi- tivement que le gobius n'a point d'épines. Luhricus et spina noeuus non gobius uila. ^ et Ausone décrit son gobio de manière à ne laisser aucun doute sur son espèce : Tu quo^ue Jlumineas ùiter memorande cohortes Gobio y non major geminis sine pollice palmisy Prœpinguis y ter es ^ oi^ipara congestior ahoi Propexicjue jubas imitatus gobio barbi. 5 l.Arist.,Hist.,II,c. 17. — 2. TElian., 1. II, c. 5o. _ 3.0pp., Hal. , 1. II, V. 48 et suiv 4. Ovid. ,llal. , v. 128. — 5, Aiison. ,. Mosdî.f V. i3i. 6 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Il est évident que ce gobio d'Ausone n'est point un gobie, mais bien notre goujeon (cy- prinus gobio^ Linn.): peut-être en est-ce de même du gobius d'Ovide. Ce pourrait bien être aussi dans ce sens que Juvenal en parle, lorsqu'il l'oppose au mulle pour le prix : Etiam ciiîH piscis emetur Nec viuUum cupiasj cum sit tïbi gobio tantum In îoculis. 1 et Martial, lorsqu'il fait commencer par ce poisson le repas en Vënétie : In Venetis sint tante licet cont^ma terris Principium cenœ gobius esse solet. Il y a donc tout lieu de croire que, si Pline, en traduisant Tliëophraste, a mis gobius pour xûùliios, il a été induit en erreur parla ressem- blance des noms. Athénëe et d'autres nous apprennent que le îiûol?)ioç s'appelait autrement KÔo^og et kôo^ov, et en supposant que kmBûos ne soit qu'une autre manière de prononcer aorros, on arriverait au chabot [cottus Linn.); poisson en effet littoral, dont il y a une espèce fluviatile qui a les rayons épineux de la dorsale forts et poignaus , et dont le préopercule et l'opercule sont armés d'épines 1. Juvcn. , sat. XI, v. 35. CHAP. IX. GOBIES. 7 qui infligent des piqûres très - douloureuses. C'est là, je crois, le vrai kûo(^/oç des Grecs. Si l'on voulait absolument chercher quel nom ils ont donne à nos gobies d'aujourd'hui, celui qui paraîtrait le plus vraisemblable, serait à mon gré celui de (pvx,k (phj-cis ou pïiuca, comme écrit Gaza). En effet, ce (pv^is^ qu'Aris- tote distingue du kûû(^ioç , qu'il range parmi les poissons saxatiles *, qui se nourrit d'algues et de crabes, qui change de couleur selon les sai- sons, étant tacheté au printemps et blanc pen- dant les autres temps de l'année, est, selon le naturaliste grec^, le seul des poissons de mer qui fasse un nid avec des feuilles, du moins à ce que l'on rapporte , et qui y dépose ses œufs. Movrf dé ccvtij rm OocKKocrrlcùu î%ôvûiv ^lÇoc^ccç 'zs-otsTcct > ûoç (Pccai, Koci TiKTociov rocis (^i^ccau Or, d'a]3rès les observations d'Olivi , rapportées par M. de Mertens, un des nombreux gobies de la Mé- diterranée qu'Olivi regardait comme le gobius nîger de Linné, fait un nid dans les algues et les zostéra; il nous apprend que le mâle s'y tient pour y féconder les œufs que les femelles viennent y déposer; qu'il attend l'éclosion de ces œufs, et qu'il défend même les petits qui en proviennent. D'ailleurs cette habitude de se 1. L. vm, c. 2. — 2. Ibid., c. 3o. 8 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. tenir dans des trous pour y épier leur proie , est , comme nous le verrons plus loin , commune à plusieurs espèces. C'est par ces difFérens rappro- chemens que M. Cuvier a conclu que le phycis des anciens est un de nos gobies de la Méditer- ranée. Aristote est le seul qui rapporte ce fait, puis- que Pline , qui le raconte, n a fait que copier et traduire le texte du philosophe grec; le peu que les autres auteurs disentdu (pvKÏs ne contredit pas cette assertion, et nous voyons même Op- pien* faire vivre le (puK^^ parmi les roches cou- vertes d'algues, et Speusippe, dans Athénée^, le compare au channa et âu perça, ce qui prouve- rait que la taille de leur (pvKÏç ne s'éloignait pas de celles de nos gobies. L'épithète de rouge , que Marcellus Sidetes^ donne à soiiÇvkiç, con- vient encore à quelques-uns de nos gobies. Nos pêcheurs leur donnent en plusieurs en- droits le nom de boulereau ou de buhotte : dans quelques autres on les nomme poisson de fer. 1. liai., 1. 1, V. 126. — 2. L. VII, p. 319. — 3, Vers 29. CHAP. IX. GOBIES. 9 DES GOBIES DES MERS D'EUROPE. Nous allons en faire connaître les nom- breuses espèces en commençant par la des- cription de celle qui paraît se montrer en plus grande abondance sur nos côtes. Le GOBIE COMMUN. {Gohius niger, L.) L'espèce la plus commune sur nos côtes de l'Océan, et qui paraît répondre le mieux à la description de Linné et à la figure de Bloch, est un petit poisson oblong, un peu déprimé à la tête et assez comprimé vers la queue, qui diminue peu de hauteur. Celle prise aux pectorales est d'un peu plus du sixième de sa longueur totale, et son épaisseur ou sa largeur au même endroit est encore de quelque chose de plus. Sa tête, à peu près aussi large, est d'un cinquième moins haute, et sa lon- gueur est du quart de celle du poisson. Le crâne est large, légèrement convexe; les joues sont un peu bombées; le museau est obtus et d'une circonscnp- tion horizontale à peu près parabolique. L'œil est ovale et son plus grand diamètre occupe le deuxième quart de la longueur de la tête, et est un peu dirigé vers le haut. L'espace entre les yeux est à peu près des deux tiers du diamètre transverse de l'œil. La bouche n'est fendue que jusque sous le milieu de l'œil; elle descend peu en arrière. Ses mâchoires n'a- vancent pas plus l'une que l'autre; la supérieure est 10 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. un peu prolraclile; et des lèvres membraneuses tes garnissent. Le maxillaire est grêle et se cache lors de la rétraction sous un repli membraneux en avant de la joue. Chaque mâchoire a une large bande de dents en velours et une rangée extérieure de dents en cro- chets, qui dépassent les autres et dont on compte dix-huit ou vingt à chaque mâchoire : il n'y a aucunes dents au palais ni à la langue, qui est très-libre, large et obtuse. L'ouverture antérieure de la narine, placée à égale distance de l'œil et du bout du museau, a un petit filet membraneux ; la postérieure est un petit trou rond un peu plus près de l'œil : on ne les voit guère ni l'une ni l'autre. Le sous - orbitaire ne se montre point au dehors. Le préopercule est taillé en demi -cercle, sans épines ni dentelures. L'opercule, mince et obius, n'occupe horizontalement que le quart de la lon- gueur de la tête. L'orifice des ouïes est vertical. La membrane adhérente au côté de la poitrine, très-peu en avant et au-dessous de la base de la pectorale , contient cinq rayons, dont le supérieur est élargi, et l'inférieur très-grêle et caché sous les tégumens de la poitrine; la pointe du quatrième excède un peu le bord de la membrane. Les pectorales sont ovales, de plus du cinquième de la longueur totale; leurs six ou sept premiers rayons sont courts, libres de la membrane sur plus des deux tiers de leur longueur, et leurs branches effilées res- semblent à des poils ou à des brins de soie : les au- tres, au nombre de seize, ont la forme et la consistance ordinaires, et sont liés par la membrane. CHAP. IX. GOBIES. H Les deux ventrales sont réunies en une seule, qui sort sous le tronc, exactement entre les naissances des pectorales : son ensemble est ovale, et de moins du sixième de la longueur totale. Les deux épines, placées chacune de son côté , sont les plus courts des douze rayons. Une membrane transversale, du quart à peu près de sa longueur, va d'une épine à l'autre, et forme ainsi avec les nageoires mêmes une espèce d'entonnoir ou de ventouse très-oblique. Le bout de l'épine forme de chaque côté de cette membrane une petite pointe. La première dorsale naît à peu près à l'aplomb de la naissance des pectorales, et occupe la même lon- gueur qu'elles; elle a six rayons grêles et flexibles, dont les antérieurs ont à peu près moitié de la hauteur du corps; les deux derniers diminuent un peu, et la membrane s'abaisse jusqu'au pied de la deuxième, dont le premier rayon , simple , grêle et flexible , est aussi élevé que les antérieurs de la première ; ceux qui le suivent, au nombre de quatorze et à peu près de même hauteur, sont branchus : le dernier est même divisé jusqu'à sa base, en sorte qu'il pourrait compter pour deux. Des individus venus de la Méditerranée , et d'ail- leurs entièrement semblables , ont un rayon de plus. L'anale commence un peu plus en arrière et finit un peu plus tôt que la deuxième dorsale, à laquelle d'ailleurs elle répond pour la hauteur. Elle n'a qu'un rayon simple et douze branchus. Entre ces deux na- geoires et la caudale est une portion de queue du sixième de la longueur totale , d'un tiers moins 12 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. longue que haute , et dont l'épaisseur ne fait guère que le tiers de la hauteur. La caudale est arrondie et du sixième de la lon- gueur ; elle a treize rayons entiers et quelques petits en dessus et en dessous. Entre l'anus et les orifices de la vessie et de la génération est un tubercule charnu cylindrique, en forme de petite verge. B. 5;D.6_l/14îA. 1/12;C. ISjP.T eHBj V. 1/5. Les écailles sont rondes; la partie découverte de leur contour est finement ciliée. Le reste est presque entièrement occupé par les stries de l'évenlail, au nombre de quinze ou seize, qui leur donnent à la loupe l'apparence d'une coquille bivalve à rayons, . d'une pèlerine (pecten Lam.), par exemple. La nuque et le crâne ont des écailles, mais il n'y en a point sur le museau , les joues, les opercules et les mâchoires. La ligne latérale paraît marcher en ligne droite le long du milieu du corps; mais elle est si peu marquée qu'on pourrait contester son exis- tence. Il y a au-dessous de l'œil, à la peau qui re- couvre les sous-orbitaires, six lignes verticales un peu relevées et formées de points saillans et serrés. Plus en arrière sur la joue sont deux Hgnes sem- blables, mais longitudinales, entre lesquelles il y en a deux verticales; et sur la nuque, entre les pectorales et en avant de la dorsale, il y en a quatre longitu- dinales aussi, dont les extrêmes sont très-rappro- chées des pectorales; mais dans cette espèce ces lignes de la nuque sont beaucoup moins marquées que dans quelques-unes des suivantes : certains individus ne les laissent même presque pas apercevoir. GHAP. IX. GOBIES. 15 Tout ce poisson est d'un brun olivâtre, varié par de grandes marbrures nuageuses d'un brun plus foncé. Les nageoires, les dorsales et la caudale ont des bandes nuageuses noirâtres, mal tracées, sur un fond ; brunâtre. La partie antérieure du bord de la première t dorsale est blanche. Les pectorales sont olivâtres, ■ marquées vers leur base de lignes brunes, et d'une i tache brune ou noirâtre sur le haut de leur base, à [ la racine de leurs rayons eiElés. L'anale est d'un brun ; plus uniforme; la ventrale est grise. | Cette description est faite sur un individu de trois pouces six lignes, envoyé avec plusieurs autres de La Rochelle. Quelquefois les teintes sont disposées de manière à laisser le long de chaque flanc une ou deux séries de taches plus pâles que le fond ; d'autres fois c'est une série de taches plus brunes, mais toujours nuageuses. En ouvrant l'abdomen, on voit que le foie occupe presque tout l'hypocondre gauche. Ce viscère est triangulaire, pointu en arrière, et à son angle supé- rieur et interne est attachée et suspendue, dans le côté droit, une très -petite vésicule du fiel, qui paraît d'un beau blanc. Le canal intestinal se com- ' pose d'un œsophage et d'un estomac formant un \ tube cylindrique, court, à parois assez épaisses, à j veloutée ridée longitudinalement; une valvule sen- î sible au dehors des parois de l'intestin marque le pylore. L'intestin suit en ligne droite, en ayant un diamètre plus large que celui de l'estomac. Il fait un pli vers la fm de la cavité abdominale et remonte vers le diaphragme ; arrivé sous le bord ante'rieur du foie, ■14 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. il se replie et se porte en ligne droite à l'anus. La rate est fort petite. Je ne trouve pas de vessie natatoire. Les laitances constituent deux rubans grêles qui entourent les deux replis de l'intestin par leur extrémité anté- . rieure; le péritoine est brunâtre, glacé d'argent. Le crâne est aplati , sans crête saillante j ce n'est qu'à l'occiput que les crêtes se montrent, et fort petites : la mitoyenne est la plus saillante. La face supérieure du crâne esta peu près un rectangle transverse. Les orbites, très- rapprochés, ne laissent entre eux qu'un frontal moyen fort étroit. Le frontal postérieur forme une petite pointe à l'angle postérieur de l'orbite; à l'autre angle le frontal antérieur se dilate en une petite lame verticale qui forme un bord saillant: les autres détails de la tête n'ont rien qui ne se juge à l'extérieur. Le corps de l'hyoïde est comprimé; la branche supérieure du surscapulaire, suspendue à la crête in- termédiaire du crâne de chaque côté, laquelle est plus rapprochée de la mitoyenne que de l'externe, qui est simple et grêle. L'autre branche, qui est en dessous et fort grêle, s'appuie au crâne lui-même, pres- que comme si c'était un osselet de l'ouïe. L'huméral, le cubital, le radial , sont fort étroits; ces deux derniers surtout semblent de simples crêtes du premier; mais les os du carpe sont au contraire très-dilatés en avant et en arrière; et comme ils sont fort rétrécis dans leur milieu, ils semblent former deux rangées, une antérieure et une postérieure. Les os du bassin sont joints en une pièce rectangulaire, évidée en dessous en triangle, pour les muscles inférieurs de la ventrale. L'épine a douze vertèbres abdominales et seize eau- CHAP. IX. GOBIES. 1 ÎS dales, y compris la dernière en éventail. Les apo- physes veriicales des unes et des autres sont grêles, ainsi que les interépineux ; les apophyses transverses des vertèbres abdominales ne sont pas très-larges; leur position est à peu près horizontale; les deux dernières se dilatent un peu et prennent une posi- tion plus oblique : il n'y en a point à la queue, etc. ^ C'est très-probablement ce gobie qui a été représenté avec l'épithète de nige?', par Ron- delet, p. 200; et copié par Gesner, p. 385, Aldrov. On ne pourrait en rapprocher le gobiiis de Schonevelde^ que par l'épithète de Jiiger qu'il lui donne , et par la teinte générale qui lui est assignée dans la courte description qui suit. Nous avons dit que c'était celui auquel la description de Linné convenait le mieux; mais nous sommes loin d'y rapporter tous les syno- nymes que ce grand homme, et ensuite Gmelin, a mis à la suite de la phrase caractérisque. Nous ne comprenons pas comment Linné , dans sa XIL^ édition, a si mal copié les nom- bres attribués par Osbeck au poisson que ce voyageur regardait comme le gohiiis niger. 1. M. Rosentlial a représenté, pi. 20, fig. 9, le squelette d'un gohius qu'il nomme niger ; mais la figure pouvait convenir aussi au bicolor ou à quelque espèce voisine. 2. Schon., p. 36. 16 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Les voici pris dans l'ouvrage même d'Osbeck : B. 4; D. 1/10; A. 13 j C. 18; P. 10; V. 1/5. On voit qu'ils s'éloignent trop de ceux du poisson de nos côtes pour les regarder comme identiques. Cette citation a été cependant copiée, avec les nombres fautifs, par Gmelin et parLacépède, qui font alors du gobie noir un poisson de l'océan Atlantique boréal et de plusieurs mers de l'Asie. Us auraient pu, en cela, être corrigés par Bloch, qui a évité de citer Osbeck. Les trois Eleotris de Gronovius' sont des espèces de gobies des mers du Brésil. Nous re- connaissons dans les figures de Gesner^ etd'Al- drovande^ des espèces toutes différentes que nous placerons convenablement plus loin : et quant à celles de Willughby , nous voyons clairement qu'il a confondu plusieurs espèces de l'Océan et de la Méditerranée. Nous savons que ce poisson est très-com- mun sur nos côtes ; nous le verrions entrer dans la Baltique , selon le témoignage de Schone- velde, et nous le retrouvons cité par Muller"*, et dans un catalogue manuscrit que S. A. B. le Prince Christian de Danemarck avait envoyé 1. Mus., 2, n° 170; et Zooplijl., n.° 280. — 2. Aq., 596. ■ — 3. Fisc, 97. — 4, Prod. Zoologiœ DanicoBf p. 44^ «•" 33. CHAP. IX. GOBIES. 17 à M. Cuvier. Si Linnë ne l'a pas mentionné dans son Fauna suecica, M. Retzius' a rectifié cette omission, et M. Nilsson^ le compte aussi parmi les poissons des côtes de la Norwége et de la Baltique. L'espèce ne paraît pas s'avancer plus loin vers le Nord; car Fabricius, Mohr, Faber et Ricliardson n'en font pas mention dans leurs différentes Faunes du cercle arc- tique. Elle parait au contraire se rencontrer sur les côtes d'Angleterre. Pennant, du moins, cite pour son black-gohj des caractères qui ren- trent assez dans ceux que nous attribuons à l'espèce dont il s'agit ici. Si Shaw^ n'a fait autre chose que de copier Bloch, Turton'* cite les deux auteurs anglais sous son gobius nigerj, et donne d'ailleurs des nombres conformes aux nôtres; c'est par de semblables motifs que nous ajouterons à cette liste MM. Coucli^ et Low^j mais nous en exclurons le gobius niger de Donovan, lequel est d'une tout autre espèce. M. Jenyns ^ a également un G. niger dans son Traité des animaux vertébrés de la Grande- Bretagne, et nous sommes de son avis en re- 1. Fauna suec. , éd. Retz. , p. 326, n." 48- — 2. Prod. Ichth. Scand., p. g3. — 3. Gen. ZooL,ÏV, part, ii , lib. 34. — 4. Brit. Faun. , p. 94. — 5. Lund. irans. , t. XIV, p. 77. — 6. Faun. OrCf p. 2o5. — 7. Manuel of Brit. vert, an., p. 385. 12. 2, 18 LIVUE XIV. GOBÏOÏDES. gardant le gohiiis niger de Fleming* comme de la même espèce que le prétendu gobius niger de Donovan. Peu de temps avant M. Je- nyns, M. Yarell^ a publié une charmante figure de notre gobie , dans son iritéressante Histoire des poissons de la Grande-Bretagne; mais tous ces auteurs s'accordent à le regarder comme rare sur les côtes d'Angleterre. Il fraie en Mai ou Juin, et les petits abondent dans l'été et sont d'mie couleur plus claire et plus brillante en dessous que les adultes. Son nom anglais le plus commun paraît être rockfishj les pécheurs de Cornouailles assu- rèrent à Willughby^ que le gobie s'attache aux rochers au moyen de sa ventrale, et que c'est de là que lui vient ce nom à Pensance; mais je crains qu'i^n'y ait ici quelque confusion avec certains petits lépadogasters, quoique ce- pendant M. Jenyns attribue la même habitude au gobie. Ce nom se transformerait aux Orca- des, selon M. Low, en rockfishick. Les pécheurs de la Baltique lui donnent le nom de kûeling; les Danois le changent en kullingy mais ils le nomment aussi smôr -huting selon Millier, et smôr- but ling selon S. A. R. le Prince Christian 1. Hlsi. of Brit. an., p. 206. — 2. Brit. Fish. , t. I, p. aSi, — 3. WiJI., p. 206. CHAP. IX. GOBIES. 19 de Danemarck, qui croit aussi que les Norwë- giens désignent ce poisson sous le nom de aat. Selon M. Nilsson , les pêcheurs suédois le nom- meraient smor-hult. Nous ne croyons pas que les ichthyologistes qui nous ont fait connaître les poissons de la Méditerranée aient déterminé convenable- ment l'espèce à laquelle ils ont appliqué le nom de ^obius niger. C'est ainsi que M. Risso a donné sous ce nom une description dont les nombres se rapprochent assez de notre espèce, mais dont les caractères ne sont pas suffisamment précisés. Le GOBIE A DEUX TEINTES. {Gobiiis bicolore Gm.) Avec ces gobies communs de couleur oli- vâtre en est venu un de La Rochelle que Ton n'en avait pas distingué et qui mériterait mieux l'épithète de niger. Il est un peu plus alongé, a un rayon de plus à la deuxième dorsale. D. 6 — 1/15; A. 1/13, etc. CeUe espèce est uniformément brune, et a toutes les nageoires brunes ou noirâtres sans raies. La pre- mière dorsale a un large bord blanc, et au-dessous une nébulosité plus noire que le fond ; la seconde a un fin liséré blanc. 20 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. C'est probablement celui que Brùnnich a désigne par cette phrase . fuscus pinnis omni- bus nif^ris. D. 6 — 16; A. 15. Gmelin lui a imposé l'épithète de hicolor, mais il ne nous paraît pas très-sûr que le gobie auquel M. Risse l'a appliqué, soit de notre espèce, il pourrait bien n'être qu'une variété de notre gobius niger. Le Gobie paganel. (Gobius pagcmellus , L.) La Méditerranée a un gobie très-semblable à notre première espèce pour les formes, si ce n'est que son tronc paraît un peu plus gros , plus bombé à sa partie antérieure, où sa hau- teur est le cinquième de sa longueur, et qui a aussi les filamens de ses pectorales un peu plus longs. Il est brun, nuage de brun plus foncé, quelquefois d'un brun roussâtre. Ses nageoires verticales sont brunes ou noirâtres, quelquefois avec de petites taches plus pâles; mais le bord de la première dorsale a toujours une large bande orangée. Le ventre estpâle ou jaunâtre ; il y a des taches pâles aux côtés de la mâchoire infé- rieure, et tiès-souvent une série de points noirs le long de la ligne latérale. La ventrale est tantôt blanchâtre, tantôt grise. Les pectorales ont souvent leurs rayons teints d'orangé ou de roux. D. 6— 1/13; A. 1/12, etc. Nous en avons des individus de cinq pouces. CHAP. IX. GOBIES. 21 C'est manifestement le deuxième gobie de ,"Willughby, p. 207, qu'il dit se nommer pa- aanello à Venise, et par conséquent c'est le gobius paganellus d'Artedi et de Linné , dont le caractère, linea lutea transi^ersa in summo pinnœ dorsalisprimœ, lui convient très-bien; mais ce nom àepaganello est apparemment ou a été générique, et il n'est pas bien prouvé que les espèces qui le portent dans Bélon, p. 235, et dans Gesner,p. 897% soient identiques avec celle de Willugliby et de Linné. Cela n'est sur- tout pas probable an paganellus de Rondelet, qui, dit-il p. 196, est le plus grand des gobies. Il entendait infailliblement parler de l'espèce suivante. Artedi ajoute, en hésitant, à la synonymie du G.pa^anellus la fig. 1 1, pi. 1 5, de Jonston; mais cette figure, copiée de Salviani,pl. 214,%. 2, n'est qu'une image altérée, où la deuxième dorsale est divisée, et que l'on ne peut rap- porter à aucune espèce. Le GOBIE CÈPHALOTE. {Gobius capito j nob.) Le plus grand des gobies européens que nous connaissions, et qui a dix pouces de lon- 1. Copie AIdrov., pi. 97, fig. 1. 22 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. gueur et quelquefois davantage, paraît avoir e'të négligé, ou confondu jusqu'à présent avec le gobiiis niger. Il a en effet de grands rapports de couleurs avec lui, mais il en diffère beau- coup par la proportion des yeux. Dans le gobie noir ordinaire de nos côtes de l'Océan , fœil occupe le quart de la lon- gueur de la tête j il n'y a entre cet organe et le bout du museau que la longueur d'un diamètre, et entre les yeux pas beaucoup plus que la moitié. Dans ce grand gobie de la Méditerranée, l'œil a à peine le sixième de la longueur de la tête. Sa dis- tance au bout du museau est double de sa longueur, et celle d'un œil à l'autre est d'un quart plus grande que Je diamètre. Sa tête est aussi plus renflée, sur- tout de la partie des joues. La membrane antérieure de sa ventrale, qui est fort épaisse, a de chaque côté un lobe arrondi , ce qui la rend comme trilobée. Du reste ses caractères sont à peu près semblables, et il a les mêmes rayons efKlés aux nageoires. Ses nombres sont comme aux précédens. D. 6— 1/13 ou 14; A. 1/12, etc. Les lignes de la joue sont assez peu marquées; , mais on lui en voit quatre petites longitudinales, sur un arc de la nuque entre les préopercules, et quatre autres, moins sensibles, entre les bases des pectorales. La couleur de son corps est olivâtre, variée de marbrures noirâtres , semées par-ci par-là de points CHAP. IX. GOBIES. 25 noirs. Sa tête est presque toute brune. La gorge, le ventre et la ventrale tirent au blancliâtre. Les autres nageoires sont olivâtres, avec de petites taches noires sur les rayons, A la première dorsale ces taches se confondent presque en une espèce de nébulosité. L'anatomie nous y a fait observer les par- ticularités suivantes : Le foie est ici presque en entier dans le coté droit. Un très -petit appendice passe à gauche de l'œso- phage. Les nombreux canaux biliaires se réunissent dans le centre de cette masse irrégulièrement trian- gulaire pour former un long canal cystique , ter- miné par une vésicule du fiel, globuleuse, de la grosseur d'un pois de moyen volume. Le canal cho- lédoque est fort long et va déboucher en arrière près du second repli de l'intestin. L'œsophage est très-large, plus que le fond de l'estomac, qui se plie vers l'arrière de l'abdomen , au milieu du tube cylin- drique qui le constitue. Une forte valvule marque le pylore. Peu après , le duodénum se plie , et l'intestin se porte à l'anus en ayant vers le milieu de cette anse une valvule qui indique la naissance du gros intestin , lequel est court et d'un diamètre peu supé- rieur à celui de l'intestin grêle. La mte est petite. Les ovaires sont deux longs sacs étroits, contenant les œufs fins comme de la graine de pavot et qui sortent par une ouverture tubuleuse pratiquée à l'extrémité de l'appendice anal; cet appendice n'est pas, comme je l'ai déjà dit , un caractère distinctif du sexe. Il n'y a pas de vessie aérienne, celle de l'urine est 24 LIV. XIV. GOBIOÏDES. un long tube étroit récurrent, situé entre les deux ovaires. Le péritoine est noirâtre. Cette -description est faite sur des individus venus des Martigues et de Naples. Le GOBIE A GOUTTELETTES. {Gohius giUtatiis, nob. j Gesn. , ^^. 696.) Des gobies venus de Sicile, qui paraissent fort semblables à ce gobius capitOj et qui ap- prochent de sa taille, ont cependant l'œil un peu moins petit. Le noir et l'olivâtre de leur tronc et de leurs nageoires sont plus tranchés. Les taches de leurs premières dorsales forment souvent des lignes continues; celles de l'anale sont presque effacées, et surtout leur joue et leur épaule sont semées de gouttelettes rondes et blan- châtres. Les lignes de pores sont semblables à celles du gobie céphalote. La ventrale a de chaque côté de ^ sa membrane antérieure un angle saillant obtus, et l'intervalle est en arc rentrant : elle, n'est pas si épaisse que celle du précédent. D. 6 — 1/13 ou U; A. 1/11. Les observations anatomiques suivantes viennent confirmer les différences spécifiques extérieures. Le foie est sous l'œsophage dans le milieu de l'abdomen; il ne forme qu'un seul lobe ovoïde plus étroit de l'arrière. Sur le centre de la face supérieure , CHAP. IX. GOBIES. ■ 25 qui est creuse, on voit la réunion des canaux biliaires qui donnent de même dans un long canal cistique. La vésicule du fiel est ronde et petite comme un pois. L'œsophage et l'estomac, confondus, forment un sac court, qui se rétrécit avant de se de'gager du foie. Une valvule épaisse marque le pylore; la veloutée qui est au-devant de la valvule a des rides parallèles et lon- gitudinales; celle du duodénum porte de petites houppes de villosité. L'intestin grêle fait plusieurs ondulations dans ses deux plis. Le rectum est court, et pas plus large que l'intestin qui le précède. Les deux laitances forment deux rubans aplatis , arrondis aux deux bouts , de moitié de la longueur de la cavité abdominale; communiquant avec la verge par un canal déférent du cinquième environ de la longueur du ventre. A ce canal est attaché un second corps plus aplati et plus court que la laitance , mais qui paraît tout-à-fait de même nature. Cette sorte de laite supplémentaire m'a paru avoir son canal déférent donnant aussi dans l'appendice anal. La bonne con- servation des viscères de l'individu que j'ai disséqué m'a laissé voir avec certitude cette singulière confor- mation qui existe aussi dans le gobius niger^ et chez lequel les laitances accessoires sont deux rubans aussi longs que la laitance elle-même. Entre les deux grandes laitances existe la vessie urinaire, qui est étroite, aussi longue que les testicules, et qui reçoit dans son extrémité inférieure, près de sa communication avec l'extérieur, les longs uretères qui appartiennent à des reins très-petits, situés très en avant sous les premières vertèbres. 20 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Cette espèce a une vessie natatoire fort petite y comme un petit pois argenté , et située sous la partie antérieure des laitances. Notre plus grand individu est long de près de huit pouces. C'est manifestement à ce poisson qu'appar- tient la figure envoyée de Venise à Gesner, et gravée p. 3g6 de ses Aquatilia. Elle est même fort bonne et peut-être la seule de ce temps- là d'après laquelle on puisse déterminer un gobie ; ce qui n'a pas empêché que précisément celle-là n'ait été reproduite par aucun des au- teurs subséquens. Le GOBIE BORDÉ. {Gobais Umhatiis , nob. ) M. Laurillard a rapporté de Nice un gobie semblable clu gobius guttatus^ pour les formes et pour les proportions de l'œil; mais où le noirâtre se perd par nuages dans un fond grisâtre, qui devient olivâtre vers le ventre. Les taches des nageoires verticales se confondent en nébulosités, et tous les sommets des rayons y sont blancs, ce qui y forme un liséré de cette couleur. La pectorale est pointillée de blanchâtre. Il y a à la joue, à l'oper- cule et à l'épaule, au lieu de gouttelettes, des points pâles très-serrés et peu apparens. D. 7 — 1/13; A. 1/11, etc. CHAP. IX. GOBIES. 27 Les lignes de pores sont à peine en vestiges. Les angles de la membrane antérieure de sa ventrale sont plus pointus que dans le gobius guttatus. Dans le frais, d'après la description de M. Lau- rillard, le tronc est brun, avec des taches irrégulières plus foncées, et le tout pointillé de jaunâtre. Les na- geoires, d'un brun verdâtre, sont bariolées de Jaune grisâtre, et leur bordure est bleue. L'individu est long de sept pouces. Le GOBIE LOTE. {Gobiiis lota^noh.) Les eaux douces des environs de Bologne ont donné à M. Savigny un gobie assez sem- blable au G. guttatus par les couleurs , mais qui s'en distingue aisément par sa tête , plus haute que large , et par l'absence de franges ou de rayons effilés dans le haut de la pectorale. Quelques rapports de ses couleurs avec celles de la lote, nous ont engagés à lui en affecter l'épi thète. Sa tête est d'un quart plus haute que large, et comprise plus de quatre fois dans la longueur totale. Son œil n'a guère plus d'un sixième de la longueur de la tête, mais il est placé un peu plus en avant que dans le G. caplto et dans le G. guttatus. La distance d'un œil à l'autre est juste du diamètre transverse de l'œil. La membrane antérieure de sa ventrale est 28 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. fort courte, et ses pointes se joignent de chaque côté aux bords du disque. Sa caudale est un peu pointue. D. 6 — 1/14 ; A. 1/13. Les lignes de points au-dessus de l'oeil et à la joue, sont bien marquées; mais c'est à peine si l'on peut apercevoir celles de la nuque, excepté deux, immédiatement au-devant de la première dorsale. Le tronc a des marbrures d'un brun foncé sur un fond jaunâtre ou roussâtre. La première dorsale a trois bandes noirâtres ; la deuxième et la caudale, de nombreuses taches noi- râtres sur leurs rayons; l'anale est brune ou noirâtre sans taches. La ventrale est grise ou verdâtre; son rebord antérieur ne forme point d'angles, La pec- torale a des lignes transverses , brunes , nombreuses, et à sa base vers le haut une tache noire prononcée, presque ocellée. Il y a aussi une tache noire plus marquée que les autres marbrures , au côté de la queue près de la base de la caudale. La joue, l'opercule et l'épaule ont des gouttelettes de la couleur du fond ou blanchâtres. La gorge, la poitrine, le ventre et même le dessous du tronc , le long de la caudale, n'ont point de taches. Nos individus ont près de sept pouces. M. Bibion a rapporté de Sicile une variété de cette espèce où le ventre, la ventrale et l'anale sont jaunes, et où les taches ou les lignes des autres nageoires sont rousses. M. Delalande en a pris aux Martigues une autre variété, au contraire, plus brune que celle CHAP. IX. GOBIES. 29 de Bologne, mais offrant du reste les mêmes caractères. Ce poisson serait donc du nombre de ceux qui habitent à la fois les eaux douces et celles de la mer. Le GOBIE ENSANGLANTÉ. (Gobiiis cruentatus j Gm.) Lun des gobies les plus répandus dans la Méditerranée, et celui qu'il est le plus facile de reconnaître quand il est frais, c'est le gohie ensanglanté (^gobîus cruentatus de Gmelin), décrit pour la première fois , mais sans nom , par Brûnnicli i^Ichthjhol. Massil., p. 3o), et reconnaissable aux taches rouges de diverses parties de son corps, surtout de ses lèvres, de ses joues et de ses nageoires. Comparé avec notre première espèce, il a la tête moins large à proportion (sa largeur ne dépasse pas sa hauteur); l'œil plus grand (de près du tiers de la longueur de la tète), plus rapproché de l'autre (d'un demi-diamètre); les rayons effilés de ses pec- torales moins nombreux (il n'y en a que trois ou quatre) et moins divisés : il en est de même des rayons ordinaires de ces nageoires. La membrane antérieure de sa ventrale est courte. Les épines se joignent aux bords de la nageoire, et ne forment point d'angle saillant. D. 6 — 1/14, dont le dernier double j A. 1/13, etc. Je ne lui vois que quatre lignes verticales de points sous l'œil : mais les deux longitudinales de la joue 50 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. sont bien prononcées. Il y en a quatre sur la nuque, dont les deux mitoyennes en ont en avant une trans- verse, qui fait avec elle un II grec. Ce poisson est d'un brun roussàtre, marbré d'un brun plus foncé. Ses lèvres, les branches de sa mâ- choire inférieure, le tour de ses joues, ont de larges taches d'un beau vermillon. Des taches semblables sont plus ou moins serrées sur ses nageoires, dont les verticales ont aussi du noirâtre à l'extrémité des rayons, et quelquefois des points bruns sur leur lon- gueur. La ventrale est plus souvent grise. L'espèce atteint six pouces et au-delà. Nous avons reçu ce gobie en nombre de presque toutes les parties de la Méditerranée , de Toulon par MM. Riener et Banon; de Mar- tigues par M. Delalande; d'Iviça par M. De Laroche , de Corse par M. Payraudeau , de Nice par M. Laurillard, de Naples par M. Savigny, de Messine par M. Bibron, de Malte par M. Leach; en sorte que nous devons regarder cette espèce comme la plus commune , au moins dans la partie de cette mer qui est en deçà de la Sicile : elle passe même le détroit de Gi- braltar ; car MM. Quoy et Gaimard l'ont prise à Algésiras. On la nomme à Toulon gobi-roujé, à Nice gohou rou^e; à Venise paganello de mary (Vaspréo, de sasso. Briinniclî (p. 3o), et Gmelin d'après lui CHAP. IX. GOBIES. 51 (p. 1 198), se demandent si ce ne serait pas le jozo de Salviani (p. 214? fig- 3); mais l'œil de- ce jozo est beaucoup trop petit. M. Risso nous apprend que le gobie ensan- glante se tient parmi les rochers, que l'on en prend toute l'année et que sa chair est délicate. Le GOBIE DORÉ. {Gobais auratus , Riss. ^) M. Cuvier a cru pendant quelque temps que le gobie doré de M. Risso était un eleoti^is, et c'est ainsi qu'il l'a cité dans son Règne ani- inaly tome II, p. 247. Des observations faites sur des individus mieux conservés, m'ont ap- pris que l'espèce est un vrai gobie, qui repré- sente à peu près en petit le gobie noir. Son œil est un peu plus grand ; il a plus du quart de la longueur de la tête, qui, elle-même, a près du quart de celle du corps. Sa joue a sept ou huit lignes, qui partent de l'œil en rayons; mais on ne lui en voit ni à l'opercule, ni à la tempe, ni à la nuque, et c'est à peine si deux ou trois rayons se détachent de ses pectorales. D. 6 — 1/13 ou 14 ; A. 1/13 ou 14 , etc. Il paraît d'un jaune d'ocre plus ou moins doré, avec quelques nuages brunâtres et une tache d'un 1. Riss. , i/*^ édit. , p. 160; 2.*^ édit. , p. 283. 32 LIVRE XIV. GOEIOÏDES. brun foncé ou d'un noir violet sur le haut de la base de la pectorale. Nos individus ne passent pas deux pouces et demi : selon M. Hisso l'espèce en atteint un de plus. Elle est commune dans la mer de Nice, où on la nomme gobùu Jaune; se tient dans les rochers profonds; se prend en Février, Juillet et Septembre, et est fort bonne à manger. Le GOBIE A JOUE POREUSE. {Gohius geniporuSyiioh.) Cette espèce, envoyée de Naples par M. Sa- vigny, de Sicile par M. Bibron, et de Malte par M. le docteur Leach, a les écailles un peu plus fortes que la plupart des précédentes : on en compte cinquante-trois sur une ligne longitudinale. Ses proportions sont aussi un peu plus alongées. Sa hauteur aux pectorales, qui est aussi égale à son diamètre transverse mesuré au même endroit, est sept fois et jusqu'à sept fois et demie dans sa longueur totale ; la longueur de sa tète n'y est guère plus de quatre fois, et elle n'a en hauteur que moitié de sa longueur, et guère plus en largeur. L'œil occupe le deuxième quart de la lon- gueur de la tête. Il n'y a pas plus d'un demi-diamètre d'un œil à l'autre. La mâchoire inférieure avance un peu. Les dents sont très-fmes. Il n'y a point de véritable effilé à la pectorale. La ventrale , aussi longue CHAP. IX. GOBIES. 33 que les pectorales, n'a en avant aucune membrane pour compléter le lourde sa concavité. L'espace entre la caudale et les deux autres nageoires verticales est de plus du septième de la longueur du corps. D. 6— 1/13, A. 1/12, etc. Cinq ou six lignes de pores sont très-marquées sous l'oeil; les antérieures sont irrégulières : il y en a quatre obscures sur la nuque et deux peu mar- quées devant la dorsale. Quatre ou cinq gros pores se voient le long du bord du préopercule, à com- mencer près de l'œil. Ce poisson est brun. Une suite de marbrures irré- gulières d'un brun-noir règne tout le long du flanc. La membrane des nageoires est noirâtre, avec des bandes nuageuses plus pâles. Le bout des rayons de la dorsale et de l'anale est blanc. Il y a des points bruns ou noirs sur les rayons de la caudale. D'autres individus sont beaucoup plus clairs , va- riés de blanc et de roux, avec les marbrures de la ligne latérale brunes. Le blanc, qui donne à la tête ses teintes variées, est quelquefois lacté; souvent il est distribué en gout- telettes. Notre plus grand individu n a que cinqpou- ces et quelques lignes. Le GoBiE Lesueur. {Gobius Lesueurii, Riss.) Cette jolie espèce a été découverte par M. Risso, qui lui a donné (2.^ éd., p. 284) le nom 12. 3 54 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. d'un naturaliste courageux, dont le talent a été d'un grand secours pour l'histoire naturelle. Elle est alongée et un peu comprimée j sa hauteur est sept fois dans sa longueur; sa tête y est près de cinq fois, d'un tiers moins haute que longue, et d'un quart moins large que haute : il n'y a pas un demi- diamètre entre les yeux. Le museau tombe rapide- ment et la mâchoire inférieure proémine un peu. Les écailles sont plus grandes qu'à aucune autre es- pèce; de l'ouïe à la caudale, je n'en compte que vingt- six ou vingt-sept, et il n'y en a que quatre ou cinq en ligne verticale. D. 6 — 1/14 ; A. 1/14 -, etc. Ce poisson est couleur de chair ou rosé, avec des teintes jaunâtres. Quelques individus offrent, le long des flancs, des apparences de taches grisâtres. Sur sa joue et son opercule se voient trois lignes obli- ques jaunes, qui descendent en avançant. Ses nageoi- res verticales ont des lignes transverses jaunâtres. Il y a du noirâtre vers le bord de la première dorsale. Les pectorales sont rosées; la ventrale d'un gris bleuâtre; la caudale rosée et jaunâtre, avec deux lignes verticales grises. La taille de nos individus est de dix-huit lignes à deux pouces : ils nous ont été envoyés par M. Risso lui-même, avec une figure coloriée, et c'est sur ces documens que nous avons fait notre description. 1. M. Risso dit A. 10 j mais c'est une erreur. CHAP. IX. GOBIES. 35 Ce petit poisson se trouve toute rannëe près des côtes de Ligurie parmi les algues. Le GOBIE A HAUTE DORSALE. {Gohiiis jozo. Lin.) Les deux espèces qui vont suivre, se distin- guent de tous leurs congénères de la Médi- terranée par la hauteur de leur dorsale. Celle qui fait le sujet de la présente description a la nageoire plus élevée que l'autre. Sa hauteur est sept fois dans sa longueur. La lar- geur de sa tête égale à peu près sa hauteur. Son mu- seau est très-obtus. L'œil, à peu près rond, prend le deuxième quart de la longueur de la tête. Il n'y a d'un œil à l'autre qu'un demi -diamètre. Le troi- sième, le quatrième et le cinquième rayon de la première dorsale se prolongent en filets minces et flexibles, quelquefois de près du tiers de la longueur du corps. La hauteur de la deuxième dorsale est du cinquième de cette longueur; celle de l'anale du sixième. Ces deux nageoires font un peu la pointe en arrière. La longueur de la caudale et celle des pectorales et de la ventrale, qui sont toutes un peu pointues, est aussi à peu près du cinquième de celle du corps. La membrane antérieure de la ventrale est du cin- quième à peu près de sa longueur, et n'a de chaque côté qu'une petite pointe à peine saillante. D. 6 — 1/12; A. 1/11; C. 15; P. 15; V. 1/5. S6- LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Les trois ou quatre premiers rayons de ses pec- torales sont un peu effilés. Il y a cinq lignes de points sous l'œil, les deux horizontales de la joue, les quatre de la nuque avec la transverse, et six autres avant la dorsale, dont les quatre du milieu forment un carré j les deux latérales sont tout près de la base des pectorales. Les écailles sont plus larges que longues , finement ciliées à leur bord visible , et ont un éventail de vingt- cinq ou trente rayons. La teinte générale est un brun pâle; les nageoires sont un peu plus noirâtres, surtout la ventrale et l'anale; il paraît même que dans le frais la ventrale est d'un gris bleuâtre assez marqué. Sur la première dorsale, près de son bord , entre ses premiers rayons, se voient une ou deux taches noires rondes, et les deux dorsales ont souvent des lignes longitudinales brunâtres ou fauves. Mais dans beaucoup d'individus, surtout les plus petits, les teintes sont plus brunes; les nageoires noirâtres; toute la moitié supérieure de la première dorsale est presque nOire. Il y a sou- vent le long du milieu de chaque côté une série de petites taches noires éloignées l'une de l'autre. Notre plus grand individu n'a que cinq pouces. C'estincontestablementici le troisième gobie de Willugbby, p. 207, qu'il croit le jozo de Salviani, et le ^ohie blanc de Rondelet, et dont, d'après Artedi [Sjn., p. 4?? i^'° ^ ) Lbmé ( éd. 1 o, p. 263 , n.° 5 ) a fait son gobiusjozOj, qui CHAP. IX. GOBIES. 37 a conservé ce nom dans toutes les éditions suivantes. Il ne connaissait ce poisson que de la Méditerranée, ainsi que le prouve la des- cription faite, sous ce même nom, dans le Prodrome du tome II du Musée du Prince Adolphe-Frédéric. Mais d'une part il est impossible que ce soit le j'ozo de Salviani (p. 214, %• 82*), qui n'a qu'une première dorsale peu élevée 5 de l'autre c'est encore bien moins le gobiiis alhiis de Ron- delet (1. VI, c. 18, p. 200)5 ^^^ ^^ prétendu gobie n'est qu'une clupée , probablement la ruélettey comme chacun peut s'en assurer au premier coup d'œil jeté sur la figure. C'est bien le troisième gobie de Willughby que Gronovius décrit sous le nom de gobiiis alhescenS) ossiculis pinnœ dorsalis priniœ prœaltis setiforinihus (Mus.jH^ 1 76 et Zooph., n.° 27 5), quoiqu'il le confonde avec le deuxième ou le paganellus. Quant à Bloch, si c'est le poisson de Wil- lughby qu'il a voulu représenter dans sa plan- che 107, fig. 3, on doit dire que sa figure est bien peu correcte : la première dorsale y est trop peu élevée, la seconde trop courte, etc. 1. Le feuillet où devaient être les descriptions relatives à celte planche, manque, du moins dans beaucoup d^exemplaires de Salviani. 38 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. M. Risso a décrit la variété pâle de cette espèce sous le nom àe jozo, et la variété noi- râtre sous celui de nebulosiis , emprunté de Forskal, qui lavait donné à une espèce voi- sine de la mév Rouge. Nous nous sommes assurés de cette syno- nymie par les échantillon^ que M. Risso a en- voyés au Cabinet du Roi, et par une figure qu'il nous a communiquée. Cette espèce est répandue dans toute la Mé- diterranée, et tous les parages de cette mer, Alexandrie même, nous l'ont envoyée; mais elle doit être rare dans l'Océan, car nous ne l'en avons reçue que de La Rochelle. Toutefois nous croyons pouvoir y rapporter le poisson de la Baltique que Siemssen a donné comme le gobiusjozo et dont il dit : gohius ra- diis dorsalibus eminentihus setaceis. Il donne aux nageoires une couleur bleue. Les nombres s'accordent assez bien. Le GOBIE A LONGS TRAYONS. (Gobius longiradiatus i Risso, 2.^ éd., p. 286.) Il est très-voisin du précédent et a les mêmes formes, si ce n'est que la seconde dorsale est moins haute à proportion. Peut-être que ces individus sont des femelles du G. jozo. CHAP. IX. GOBIES. 3^ Ses deux dorsales, sa caudale, et le plus souvent , ses pectorales, ont des lignes brunes en travers des rayons, ou au moins des points bruns. La ventrale, dont la membrane antérieure est courte et n'a pas de pointes latérales , est blanche; l'anale blancliâtre, avec un peu de noirâtre vers le bord. Il n'y a pas de taches noires à la première dorsale, mais on voit souvent des points noirs sur une ligne le long du milieu du tronc. Nous avons reçu de Nice et de Malte des in- dlvidus de cette espèce, en teintes assez pâles; d'autres de Sicile, d'ailleurs très -semblables, sont beaucoup plus bruns. Les plus grands ne passent pas cinq pouces. Le GOBIE BUHOrTE. {Gohius minutiis^ Penn.) Un gobie, peut-être aussi commun que le noir sur nos côtes de l'Océan, mais qui de- meure dans des dimensions plus petites , a été décrit et très-bien représenté par Pennant*, sous le nom de tacheté^ il croit que c'est Ya- phja de Rondelet. Schneider le cite comme synonyme du gohius apJvya , et il est très-vrai que la figure d'aphya de Rondelet (p. 210) lui ressemble beaucoup. Cependant, comme 1. Brit. Zool, n." 96 et pi. XXXVU. 40 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. nous n'avons jamais reçu cette espèce de la Méditerranée, nous hésitons à adopter cette synonymie. Dans aucun cas ce ne pourrait être Xapliya tel que le définit Linné, avec dix-sept rayons à la deuxième dorsale. C'est plus sûrement le gobius albescens pinnis utris- que dorsalibus altitudine œquaUbuSy de Gro- novius.* La description qu'il en donne ne peut laisser aucun doute, quoiqu'il le confonde aussi avec l'apliya de Rondelet; avec le §obie blanc du même auteur, qui estune clupée; et même avec son blennius, qui est un callionjme. Mais je ne sais sur quel fondement on a pu penser que c'est le gobius minutus de Pallas; car tout ce que Pallas dit de ce gobius minutus^, c'est qu'il le croit très-différent de Xalbescens de Gronovius, et il n'en donne d'ailleurs ni des- cription ni figure. Je devine encore moins pourquoi Bloch, dans son Système posthume, en fait un eleo- tris, ^ La tête de ce gobie a le quart de la longueur totale, mais elle est plus étroite qu'à beaucoup d'autres es- pèces. Sa hauteur n'est que moitié de sa longueur, 1. Zooph. 1, p. 8i , n.'' 276. — 2. Spicil ZooL VIII, p. 4, — 3. Eîeoiris minuta, Bl. Schii., p. %€>. CHAP. IX. GOBIES. A\ et c'est à peine si elle a quelque chose de plus en . largeur. L'œil en occupe le second quart. Sa mâchoire inférieure est un peu plus avancée que l'autre; sa hau- teur aux pectorales est un peu plus de six fois dans sa longueur. Sa ventrale n'est attachée que sous le tiers antérieur des pectorales. Ses dorsales n'ont que la hauteur du corps ; et , la seconde étant assez courte, l'espace entre elle et la caudale est de plus du sixième de la longueur totale. Du reste ses formes sont les mêmes que dans la plupart des autres gobies. Il n'a pas de rayons effilés aux pectorales, et je ne lui vois de lignes de pores ni à la joue ni à la nuque. D. 6 — 1/10 j A. 1/10; C. 18 j P. 19 ; V. 1/5. Sa teinte générale est grisâtre ou fauve clair. Son dos est semé de très-petits points bruns ou noirâtres mal prononcés. Ses dorsales et sa caudale ont des points bruns sur leurs rayons. La première dorsale a souvent entre ses deux derniers, vers le bord, une tache noire ou noirâtre mal terminée. Nos individus ne passent pas trois pouces. Ce petit gobie est appelé buhotte sur les côtes de Basse-Normandie. Duhamel l'a repré- senté sous ce nom^, et M. Deslongchamps, professeur d'histoire naturelle à la faculté des sciences de Caen , à qui nous nous étions adressés pour avoir la buhotte, Fa trouvée encore nom- mée ainsi par les pécheurs. 1. Pèches, 2.* part., sect. VT, pi. III, ti^. 3. 42 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Nous voyons par une lettre de M. Feray à M. de Lacépède , que vers l'emboucliure de la Seine, où l'on en prend beaucoup, il se nomme hour^uette. La même espèce nous a été envoyée de La Rochelle par M. d'Orbigny, d'Abbeville par M. Bâillon , et je l'ai souvent pécliée à Dieppe. Pennant* l'a vu prendre en quantité dans les filets à crevettes , sur les côtes sablonneuses du pays de Galles, dans l'été de 177^, et M. Do- novan^ nous apprend qu'il y en a toute l'année dans la baie de Beaumaris, en face de l'ile d'An- glesea, près de l'embouchure de la Saverne, et en d'autres endroits de l'Angleterre on en voit souvent avec des salicoques dans les petites fla- ques d'eau que la marée descendante laisse entre les rochers ; et l'on en prend souvent aussi avec les melets [clupea sprattus). Aussi le trouvons-nous cité dans Turton^, dans Fleming"^ et dans Jenyns. ^ M. Yarell^ en donne une fort bonne figure, et il nous apprend que ce petit poisson re- monte dans la Tamise, d'où les pêcheurs le 1. Zool. brlt., loc. cit. — 2. Brit. fishes , II, pi. 38. — 3. BriU Faun., p. 94? n." ^o. — 4. Hist. of Brit. an., p. 206, n.° 118. — 5. Man. of Brit. vert, an., p. 3o6, n." G3 6. Brit. fishes, p. 258. CHAP. IX. GOBIES. 45 lui ont apporte sous le nom de Polowig ou de Polljbait. M. d'Orbigny, qui la observé souvent dans les réservoirs des marais salans des environs de La Rochelle, assure qu'il y établit sa de- meure sous une coquille, autour de laquelle il trace dans la vase des routes en rayons divergens, et où il se tient en sentinelle pour guetter les petits animaux qui tombent dans ces sillons. Sitôt qu'il en aperçoit un , il fond à l'instant dessus et l'emporte dans sa demeure. On voit que ces habitudes ne sont pas sang rapport avec celle du go de Venise. M. Beckm'a appris que la femelle entre dans le Categat, dans le Limfiord, en Avril et Mai, pleine d'œufs d'une grosseur extraordinaire et d'un beau jaune. Si l'espèce remonte ainsi vers le Nord, elle n'a pas été bien caractérisée par les auteurs qui ont écrit sur l'ichthyologie des côtes septen- trionales. M. Retzius et Faber l'ont confondue avec l'espèce que nous décrirons plus loin sous le nom de gobius Ruthensparri, Les petites crevettes forment sa principale nourriture : on en trouve presque toujours dans son estomac. 44 LIVRE XIV. GOCIOÏDES. Le GOBIE A QUATRE TACHES. (Gobius (juadrimacidatiis j nob.) M. Laurillard a rapporté de Nice un petit gobie fort semblable à la buhotte, et qui a le même nombre de rayons, ou même encore un de moins : D. 6 — lyiO ou 9; A. 1/10 ou 9, etc.; mais dont la tête est un peu plus longue à propor- tion, et l'œil de près d'un tiers plus grand. Sa cou- leur est un fauve pâle, finement pointillé sur le dos de brun clair. Ses dorsales et sa caudale sont couvertes de très-petits points noirâtres et nuageux; les autres nageoires sont blanches. Quatre taches rondes et noires sont distribuées à égales distances le long de chacun de ses flancs. L'individu n'a que trois pouces. Je soupçonne que c'est ici le gobiits aphia de la deuxième édition de M. Risso, p. 281, qui, ainsi que nous l'avons déjà fait remarquer, est entièrement différent de Yaphia de la pre- mière, p. i56, quoique l'auteur cite celui-ci comme identique. L'aphia dont nous parlons, celui de la deuxième édition, est indiqué cependant comme ayant trois taches noires de chaque côté du corps, et sept rayons à la première dorsale ( D. 7 — 9; A. 10), ce qui le rapprocherait de l'espèce qui va suivre. CHAP. TX. GOBIES. 45 Il ressemble aussi beaucoup au marsione de WiUugliby (pi. n.° 12, fîg. 5), quoique cette figure ne montre pas de taches. C'est, à ce qu'il paraît, sur ce marsione , qu'il regarde comme identique avec Xapliya de Rondelet (p. 210), que Willughby a fait (p. 207) la description d'où Artedi et Linné ont tiré, pour le gobius aphja, leur caractère de dix-sept rayons à la deuxième dorsale ; mais je crois que ce nombre est dans Willughby le résultat d'une faute d'im- pression: car, outre que sa figure, et celle de Rondelet qu'il y rapporte, sont faites d'après une espèce à deuxième dorsale courte et de peu de rayons , il donne onze rayons à l'anale , ce qui ferait entre ces deux nageoires une diffé- rence plus grande que nous en observons dans les autres espèces; et d'ailleurs nous n'avons trouvé le nombre de dix-sept rayons dans au- cun gobie de nos mers. Nous avons donc cru devoir supprimer dans la liste des gobies le gobius aphja, et cela d'au-^ tant plus que ce nom (ïaphja ne désignait point chez les anciens une espèce en particulier. cc(pvyji ciphya, que Pline rend par apua, si- gnifie non engendré y non produit à la manière ordinaire, de (piao [gigno), et de l'a privatif.^ 1. Athén., I. VII, c. 21. 46 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Les Grecs désignaient par ce nom ces amas de petits poissons qui restent ensemble quel- que temps après être éclos, et que l'on peut prendre et faire frire ou griller en masse. On les nomme encore aujourd'hui sur les côtes de Provence et de hi^uïie nonnat (non né, non natus). C'est un mets agréable et dont on voit que les Athéniens faisaient grand cas : il en est sans cesse question dans les auteurs comiques. Agoracrite, dans la pièce des Chevaliers d'A- ristophane, V. 641 et suivans, l'emporte sur Cléon, uniquement pour avoir annoncé la bonne nouvelle que les aphyes sont à bon mar- ché. Apicius, selon Suidas, voulant satisfaire l'ardent désir que le roi Nicomède avait d'en manger, parvint à les imiter en découpant des raves en filamens, et dans le livre qui porte le nom de ce fameux gourmand (1. IV, c. 2 ), on enseigne un moyen encore plus simple avec des filamens de poissons. L'origine de cette dénomination d'aphye, aussi bien que de celle de nonnatj, est, qu'on regardait ces petits poissons comme produits par une génération spontanée , comme nés de l'écume ou du limon de la mer ou de la pluie. Aristote, 1. VI, c. 1 4, tout en adoptant cette opinion comme vraie, par rapport à une cer- CHAP. IX. GOBIES. 47 taine espèce, celle qui portait en particulier le nom d'àcPfoff ou à'écume^ ajoute que d'au- tres aphyes sont de ve'ritable frai de poissons determine's, et nomme entre autres Yaphje cohite, qui venait de certains petits gobies.* Dorion et Icésius parlaient aussi de cette aphye cobite.^ En effet, dans le nombre des nonnats ou aphyes que l'on recueille sur les côtes de la Méditerranée, il en est un qui provient d'un gobie. On nous en a envoyé une masse de Nice, que l'on confondait avec le nonnat de l'athérine, mais que nous avons bientôt re- connue n'être composée que de petits gobies à ventrales réunies, longs de six lignes, d'une ligne de diamètre, blancs, avec de grands yeux noirs, et qui justifient très-bien cette épithète diaphja, donnée selon Athénée à plusieurs courtisanes remarquables par leurs formes grêles, leur beau teint, et leurs grands yeux. Mais dans cet état et avec des nageoires dont il était impossible de compter les rayons, 1. Il j avait, en outre, l'aphje phalérique, qui venait des sardines ou des feintes, l'aphje des anchois, celle des menides, celle des muges. (Arist., îoc. cit.., reproduit Athén., I. VU, c. 8.) Il j en avait encore une qui venait de l'athérine et que Ton nom- mait ^^^jf/«j, et une auti'c des mulles, nommée triglitis. (Alhén., Ioc. cit. ) 2, Alhén., ibid. 48 LIVRE XIV. GOniOÏDES. nous n'avons pu en déterminer l'espèce. 11 est probable au reste que la plupart des espèces du genre donneraient également du nonnat ou de l'apliye. Le GOBIE A DEUX TACHES. (Gohius Ruthensparri , EiipLrasen; Gohiiis piincta- tiis , Yarell.) Nos côtes de la Manche possèdent un petit gobie joliment coloré, que M. Audouin nous a rapporté de Granville, et que nous avons aussitôt reconnu pour celui dont M. Donovan a donné la figure (t. Y. pi. io4) sous le nom très-impropre de gohius nige?\ Le nombre de rayons que cet auteur représente exacte- ment, aurait dû le détourner de cette erreur. Presque seul dans le genre, ce petit poisson en a sept a la première dorsale, et la seconde n'en a que onze, comme dans la buhotte ou gob. minulus; mais il diffère d'ailleurs beaucoup du minulus par la forme de sa tête, qui est plus courte et plus large : elle est quatre fois et demie dans la longueur du poisson. La distance d'un œil à l'autre est de plus d'un dia- mètre. La mâchoire inférieure avance plus que l'autre. La pectorale n'a point d'effilé, et le rebord antérieur de la ventrale est fort petit. D. 7 — 1/10; A. 1/41; C. 13, etc. Ce poisson a le corps roussâtre pâle, un peu teinté de cendré à la tête. Les écailles de son dos ont des CHAP. IX. GOBIES. 49 traits bruns, qui forment comme des mailles. Une suite de petites taches blanchâtres règne le long de la ligne latérale. Il y a une tache noire bien marquée derrière la pectorale, et une autre à chaque côté de la base de la caudale. Cette dernière nageoire a des suites verticales de points bruns sur les rayons , et il y en a aussi sur ceux des deux dorsales, mais moins foncés; les autres nageoires sont blanchâtres. Les lèvres sont noirâtres. M. Yarell a bien reconnu la fausse dénomi- nation que Donovan avait appliquée à son pré- tendu gobius niger^ et il a publié une ex- cellente figure de la présente espèce sous le nom de gobiiis tripunctatus. Il nous apprend qu'elle se trouve sur différentes côtes de l'An- gleterre et de l'Irlande , aussi revient-elle dans l'ouvrage de M. Jenyns sous la dénomination de M. Yarell. Mais ces auteurs n'ont pas observé que déjà depuis long -temps l'espèce avait été bien dé- crite par Euphrasen , qui indique très-exacte- ment les dispositions des couleurs, et, ce qui est plus caractéristique encore , le nombre sept des rayons de la première dorsale. C'est pour cela que nous avons conservé le nom que le naturaliste danois avait donné à ce poisson, comme expression de sa gratitude envers le chevalier de Ruthensparre. 12. 4 50 LIVRE XTV. GOBIOÏDES. Nos individus n'ont que deux pouces. La figure de M. Donovan en a plus de trois , mais nous la croyons plus grande que nature. Son original venait de la côte de Devonshire. Le GOBIE RÉTICULÉ. {Gobius reticulatus j nob.) M. Bibron a rapporté de Sicile un petit gobie fort semblable au premier coup d'œil à ce G. Ruthensparri ; mais dont la tête est bien plus grande; elle a près du quart de la longueur totale, et sa largeur est des deux tiers de sa longueur. Les yeux sont aussi plus rapprochés : il n'y a entre eux que moitié de leur dia- mètre. Son tronc est gros de l'avant, comparative- ment à l'amincissement de sa queue. Son diamètre aux pectorales est cinq fois et demie dans la longueur totale : celui de sa queue y est quatorze fois. Sa première dorsale n'a que six rayons comme à l'ordinaire. Sa ventrale, remarquable par sa grandeur, et attachée sous le tiers antérieur de la pectorale, la dépasse de moitié. D. 6 — 1/9; A. 1/9, etc. Dans la liqueur, tel que nous l'avons, il paraît d'un fauve clair. Sur le dos et les flancs , les loges de chaque écaille, entourées d'une ligne noire, forment une sorte de réseau. Il y a un point noir sur l'aisselle de la pectorale, et un de chaque côté de la base de la caudale : entre l'œil et l'angle de la bouche en sont CHAP. IX. GOBIES. 51 deux, et deux autres sous la pointe de la mâchoire inférieure. Les rayons des dorsales et de la caudale ont des points bruns; les autres nageoires sont blan- ches. Notre individu a deux pouces et demi. M. Laurillard en a pris à Nice un de deux pouces , tout semblable , si ce n'est que ses pec- torales sont grises et qu'on lui voit deux ou trois vestiges de taches noirâtres le long du flanc. Le GOBIE COULON. {Gohius Colonianus 3 Riss.) C'est encore ici un petit gobie de la Médi- terranée, remarquable par la hauteur de sa dorsale et par l'ocelle dont elle est ornée. M. Risso vient de le décrire dans sa deuxième édition, p. 285, et lui a donné le nom de M. Coulon, de Neufchâtel, amateur éclairé de l'histoire naturelle , qui a bien voulu nous don- ner un individu parfaitement préparé de cette espèce; mais nous en avions déjà reçu un de feu Pérou. Sa hauteur fait le sixième de sa longueur; son épais- seur, les deux tiers de sa hauteur, La longueur de sa tête est du quart de sa longueur totale, et elle n'a guère en hauteur plus de trois cinquièmes de sa lon- gueur, ni en largeur plus de moitié. La hauteur de la première dorsale est supérieure d'un cinquième à 52 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. celle du corps sous elle, mais elle n'a point de rayons prolongés; la deuxième n'a guère que moitié de la hauteur de la première. Il n'y a pas d'effilé aux pec- torales : la ventrale ne les dépasse point. D. 6>— 1/10 j A. 1/10, etc. Sa teinte générale est fauve, semée et comme saupou- drée d'une infinité de très-petits points noirâtres, qui se rapprochent d'espace en espace pour former sur le flanc des taches nuageuses. Les nageoires sont jau- nâtres; le bord supérieur de la première est d'un gris bleuâtre avec trois lignes blanches ondulées, et entre les deux derniers rayons, vers le bord, est une tache ronde et noire, entourée d'un cercle blanc. Nos individus n'ont pas tout- à -fait trois pouces. Le GoBiE d'eau douce. ( Gohius Jluviatilis j Bonnelli. ) Les eaux douces de l'Italie possèdent vm go- bie difFérent de tous ceux de la mer, et dont on doit la connaissance à feu M. Bonnelli. Ce zélé naturaliste nous en avait envoyé des in- dividus pris dans les rivières de Sardaigne et dans le lac d'Aviglione, et il nous en est venu du lac Majeur, recueillis par M. Savigny et par M. le comte Borroméo. 1. M. Risso dit 7; mais je n'en trouve que 6 dans mes deux individus. CIIAP. IX. GOBIES. 55 Ce gobie est arrondi de l'avant, et Son diamètre aux pectorales est du sixième de sa longueur. Sa tête en a le quart et est d'un tiers moins haute que lon- gue. Sa largeur égale presque sa hauteur. Ses yeux sont petits, du cinquième de la longueur de la tête, et l'intervalle qui les sépare est égal à un diamètre. Sa nuque est un peu renflée j son museau est obtus; ses mâchoires à très-peu près égales. Sa ventrale est petite et n'a que moitié de la longueur des pectorales, qui ont le quart de celle du poisson. Il y a près de quarante écailles sur une ligne lon- gitudinale. Le petit nombre des rayons de son anale est remarquable. D. 6_ 1/10; A. 1/7. Le corps de ce poisson est d'un jaune verdâtre pâle, qui dans la liqueur devient d'un gris roussâtre. Beaucoup d'individus ont de chaque côté huit ou dix lignes verticales plus pâles. Il y a quelquefois une tache noirâtre au-dessus de l'aisselle de la pec- torale. Près du bord de la première dorsale règne une bande noire ; la seconde et la caudale ont des points bruns sur leurs rayons. Lalongueur de cette espèce ne passe pas trois pouces. Ce poisson paraît sujet à une maladie parti- culière; du moins beaucoup des individus venus du lac Majeur ont sur le corps et sur les nageoires de petits tubercules noirs, semës irrégulièrement , et qui rappellent un peu ceux qui, dans le même lac, dans quelques-uns des 54 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. lacs voisins et même dans la Seine, paraissent aux mois d'Avril et de Mai, à l'ëjioque du frai, sur le corps de diverses espèces de cyprins, et qui ont fait croire que le pi^o ou pigus de Rondelet était d'une espèce distincte. DES GOBIES ETRANGERS. D'après ce que Ton vient de voir sur les go- bies de nos mers, on comprendra à quel point les gobies étrang'ers doivent être nombreux et difficiles à grouper. La plupart n'offrent point de caractère susceptible à servir à une divi- sion générique, et leurs variations en divers sens passent si insensiblement les unes dans- les autres, qu'il est même difficile d'établir dans le genre de bonnes subdivisions. Un d'eux cependant se distingue nettement par des tentacules aux sourcils ; un ou deux autres, par une crête membraneuse sur le ver- tex; caractères qui rapprochent un peu ces deux groupes des blennies : d'autres se font remar- quer par la petitesse extrême de leurs écailles; d'autres par des dents canines; d'autres encore par la prolongation d'un ou de deux de leurs rayons dorsaux en filament : il y en a, enfin, que leur tête, de forme singulière, peut distin- guer plus ou moins. CHAP. IX. GOBIES. 55 C'est d'après ces considérations que nous en disposerons l'histoire, sans prétendre que ces groupes soient naturels ni préférables à beau- coup d'autres combinaisons que l'on jurait pu choisir. Nous mettrons cependant en tête les espèces les plus semblables à notre gobie noir ou vulgaire. DES GOBIES ÉTRANGERS de la forme du vulgaire , avec de V effilé aux pectorales. Les deux Océans possèdent des gobies à tête ronde, obtuse; à joues renflées; à rayons su- périeurs de la pectorale effilés, comme dans le G. niger ou le G. capito. Le Gobie de Madère. {Gobius maderensiSy nob.) M.Richardson en a rapporté un de Madère, entièrement semblable au gobius niger de nos côtes, par les formes et par les nombres: D. 6 — 1/13; A, 1/12; le dernier double, etc.; mais autrement coloré dans la liqueur. Son corps paraît d'un brun de chocolat, avec une douzaine de lignes verticales noirâtres , peu marquées. Toutes ses nageoires sont noires : dans quelques in- dividus il y a des taches demi-transparentes entre les rayons des dorsales. 56 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Nos individus sont longs de cinq et de six i pouces. Ils ont été pris à la ligne avec des mouches artificielles. II y en a un dans la mer des Antilles, Le GOBIE ENDORMEUR. {Gobius soporator^ nob.) Nous lui donnons cette épithète parce que c'est celle qu'il porte à la Martinique, d'où il nous a ëtë envoyé par M. Achard. Les Espa- gnols de la Havanne , où il se trouve aussi , le connaissent sous le nom de mapo^ qu'ils don- nent encore à d'autres gobies. Sa tête a le quart de la longueur totale, et elle est d'un quart moins haute et moins large que longue. Ses yeux , placés au quart antérieur , ont le sixième de la longueur de la tête en diamètre, et sont distans d'un diamètre et demi. En avant d'eux le profil tombe rapidement, en sorte que le museau est extrêmement obtus. Ses deux mâchoires sont presque égales j sa bouche, à peu près horizontale, n'est fendue que jusque sous le miUeu de l'œil ; ses dents de la rangée antérieure dépassent peu les autres. Sa première dorsale ne s'élève pas plus que la se- conde, dont le dernier rayon, ainsi que celui de l'anale, s'alonge un peu en pointe. Sa caudale, ar- rondie, a le sixième de la longueur, et c'est aussi à peu près la dimension des pectorales et de la ven- trale. CHAP. IX. GOBIES. 57 Malgré ses rapports avec nos grandes espèces d'Eu- rope, les rayons de sa seconde dorsale et de son anale sont bien moins nombreux. D. 6 — 1/9; A. 1/8 j le dernier double; C. 15; P. 15 et 5 effilés; V. 1/5. Tout ce poisson est d'un brun de bistre foncé, et en dessous d'un gris brunâtre. Ses nageoires sont brunes; les dorsales ont des taches nuageuses plus foncées; l'anale en a aussi , mais à sa partie inférieure ; sa base est blanchâtre; sur la caudale ce sont des traits régulièrement disposés en travers des rayons. Nos individus sont longs de quatre pouces. Le GOBIE A POINTS BLANCS. {Gobius albopunctatus , nob.) La mer des Indes en a un que Péron avait rapporté du grand Océan, sans préciser le lieu où il lavait pris. Il est gris-brun, nuage de brun plus foncé, et tout semé de points blancs sur les joues, les opercules et tous les côtés du corps, où chaque écaille a un de ces points. Le dessous est gris blanchâtre ou gris pâle; les nageoires sont grisâtres; il y a sur les rayons des dorsales et de la caudale des points bruns peu marqués; la ventrale est blanchâtre, et l'anale a quel- quefois une légère teinte de noirâtre vers le bord. D. 6— 1/9; A. 1/8. Nos individus sont longs de deux et trois pouces. Nous avons appris le lieu de leur ori- 68 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. gine par ceux qui nous ont été envoyés de risle-de-France par M. Desjardins. Le GOBIE A NUAGES ET A POINTS BLANCS. {Gobius nehulo-punctatus , nob.) Cet observateur très-zélé nous a envoyé de la même île un gobie très-semblable au précédent pour les formes, pour l'effilé de la pectorale, pour les nombres des rayons, D. 6 — 1/9; 1/8, pour les points blancs semés sur un fond gris-brun, et où des nuages plus foncés forment des espèces de bandes; mais toutes les nageoires sont noirâtres. La première dorsale a à son bord une large bande blanche; les sommets des rayons delà seconde sont aussi blancs. On n'aperçoit de points plus foncés que vers la base des rayons supérieurs de la caudale. Sa longueur est également de trois pouces. Cette espèce a aussi été trouvée dans la mer Rouge par M. Elirenberg. Le GOBIE ÉLÉGANT. (Gobius eleganSy K. et V. H.) MM. Kuhl et Van Hasselt en ont recueilli un à Java , X à museau obtus, à corps assez grêle, qui paraît d'un gris-brun pâle, et a sur le dos des suites peu régu- lières de petits points bruns, le long du flanc une CHAP. IX. GOBIES. 59 suite de petites lignes , et plus bas une suite de taches rondes de la même couleur. Le dessous de la mâ- choire inférieure de chaque côté a deux traits bruns en travers. Il y a de petits traits bruns entre les rayons de ses dorsales, des points bruns sur ceux de sa cau- dale, et des points blancs alternant avec des points bruns sur ceux de ses pectorales. Dans le frais, le fond de la couleur est un gris oli- vâtre, et le sommet de la première dorsale est jaunâtre. D. 6 — 1/10; A. 1/9, etc. Sa taille approche de trois pouces. La même espèce a été rapportée de Vani- kolo et de la Nouvelle-Guinëe par MM. Quoy et Gaimard, et de Bombay par M. Dussumier. Son individu paraît d'un brun fauve. Le GOBIE CYCLOPTÈRE. {Gobius cjclopterus y nob.) MM. Quoy et Gaimard en ont pris au havre Carteret de la Nouvelle- Irlande, un petit, re- marquable par sa large tête et sa ventrale aussi ronde qu'aux Sicy- diums. La largeur de sa tête égale sa longueur et est presque double de sa hauteur. La tête fait le quart de la longueur totale. Il est gris, marbré de brun pour- pre, mais d'une manière peu distincte. D. 6—1/9; A. 1/8, etc. Il n'est long que de deux pouces. GO LIVRE XIV. GOBIOÏDES. On trouve dans les deux mers plusieurs autres de ces gobies plus ou moins semblables à notre noir par leurs formes, mais sans effilé aux pec- torales. Tels sont, Le GOBIE A GROSSES JOUES. (Gobius buccatuSj nob.) Cette espèce a été apportée par Pérou. Elle est remarquable par ses grosses joues, qui lui rendent la tête, qui est près du quart de la lon- gueur totale, aussi large que longue et de plus d'un tiers plus large que haute. Sa bouche est presque ver- ticale. Ses yeux n'ont en diamètre que le sixième de la longueur de la tête, et sont à près de deux dia- mètres l'un de l'autre. D. 6 — 1/11; A. 1/10. Ses écailles sont médiocres. Elle paraît toute brun foncé; un peu plus fauve en dessous; ses nageoires sont brunes; le bord de la première dorsale est pâle. La longueur de l'individu est de six pouces. On ignore le lieu précis où il a été pris. Le GOBIE JAUNE. (^Gohius flavus , nob.) Cette espèce , envoyée de Surinam au Musée royal des Pays-Bas par M. Dieperink , CHAP. IX. GOBIES. 61 a la hauteur six fois dans la longueur; la tête cinq fois; la caudale, un peu pointue, aussi cinq fois; l'œil un peu en arrière du deuxième quart, écarté de l'autre de près d'un diamètre; le profil descendant par un quart de cercle, et la courbure transverse du museau presque égale; la bouche horizontale, fendue jusque sous l'arrière de l'œil; la mâchoire inférieure mince; les dents, extrêmement fines, sur une bande peu large; les écailles médiocres. On ne lui voit point de lignes à la joue, ni d'effilé aux pectorales. D. 6 -1/11; A. 1/10, etc. Ce petit poisson, long de trois pouces, paraît en- tièrement d'un jaune clair tirant au fauve. Le GOBIE A QUEUE TACHETÉE. ( Gohius baliurus, K. et V. H.) Cette espace , ainsi nommée par MM. Kuhl et VanHasselt, a les joues moins renflées que les précédentes; sa hauteur du sixième de la longueur totale; la tête de près du quart, et moitié moins haute et moins large que longue; l'œil du quart de sa longueur et rappro- ché de l'autre d'un tiers de son diamètre; les dents, même du rang inférieur, fort petites; les écailles grandes, même à la nuque. Trois ou quatre lignes de points se montrent sous son œil. Sa caudale , un peu arrondie, n'a pas le cinquième de la longueur totale. D. 6 — 1/10; A. 1/9. Dans la liqueur il paraît fauve clair, avec quelques 62 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. nuages grisâtres légers le long du flanc. Une tache ronde et brune est de chaque côté de la base de la caudale, dont les rayons ont des points blancs sur un fond brunâtre. La ventrale et le bord de l'anale sont blancs; le reste des nageoires est grisâtre, et il y a un peu de noirâtre au bout des derniers rayons de la première dorsale. Dans le frais, le fond de la couleur est un gris olivâtre, et on aperçoit quelques lignes longitudi- nales brunâtres sur la deuxième dorsale. Notre individu est long de trois pouces. Le GOBIE A POINTS VERTS. {Gobius viridi-punctatus y nob. ) M. Dussumier en a rapporté un de Bombay, qui est à peu près de la forme du G, baliurus, mais qui a les dents latérales un peu en crochets ou en petites canines. Sa joue a deux lignes de points. Les écailles de sa nuque sont plus petites, comme à l'ordinaire. Dans la liqueur il paraît d'un brun fauve, avec des points plus pâles, semés sur les côtés, et une série de quatre ou cinq taches plus brunes le long du flanc. Sa dorsale a sur le tiers supérieur une ligne longitudinale brune , et le bord est pâle. Sa ventrale et son anale tirent au noirâtre : les autres nageoires sont de la couleur du corps. A l'état frais il est fauve, varié de brun verdâtre, et ses points sont d'un vert métallique très-brillant. D, 6— 1/10; A. 1/9. CHAP. IX. GOBIES. 63 Notre plus grand individu a trois pouces et demi, mais l'espèce en a jusqu'à cinq. Elle se tient près du rivage et vit long-temps hors de l'eau. Les Indiens la mangent. Il n'y a guère à douter que ce ne soit le Nuna Motta de Russel (fig. 52, p. 4i)î qui a les mêmes formes, les mêmes nombres, la même taille, et est brun pâle avec cinq taches noi- râtres le long du flanc, des points azurés épars sur les côtés, et des nageoires non tachetées. Sa caudale est un peu pointue. Le GoBiE d'Ehrenberg. {Gobius Ehrenhergii, nob.) Cette espèce a ëtë prise à Alexandrie par M. Ehrenberg, qui en a donné des échantil- lons à notre Muséum. Elle est reconnaissable à de grandes écailles, s'avan- çant jusque sur la nuque; à de très-petites dents, même au rang externe ; et à l'alongement graduel des rayons de sa deuxième dorsale, dont les derniers sont d'un tiers plus hauts que le corps. Sa tête est d'un cinquième de la longueur totale, d'un tiers moins haute que longue, et presque aussi large que haute. Son œil occupe le deuxième quart de la longueur de la tête. Sa pectorale a quelque ap- parence d'effilé. Sa caudale, un peu pointue, approche du quart de la longueur totale; l'espace sous la na^ geolre qui la précède , en a plus du sixième. 64 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. D. 6 _ 1/10 ; A. 1 — 1/9. Le poisson paraît noirâtre avec un point bleu sur beaucoup de ses écailles ; il y en a d'assez nombreux sur la joue et l'opercule. Les dorsales ont cinq ou six lignes longitudinales noires, étroites, sur un fond gris. Il y a des points noirs sur les rayons de la caudale. Notre plus grand individu n'a pas tout-à- fait quatre pouces. Le GOBIE A JOUE RAYÉE. (Gobais genivlttatus , nob.) C'est un petit gobie apporté d'Otaïti par MM. Lesson et Garnot, à mâchoire supérieure plus protractile qu'à l'ordi- naire, sans que pour cela il ressemble aux espèces de la division des Awaous; à tête de plus du cinquième de la longueur, de près de moitié moins haute que longue et encore un peu moins haute que large. L'œil occupe le deuxième quart. Le museau tombe rapi- dement. Sa caudale est pointue et aussi longue que sa tête. Sa première dorsale est moins élevée que le tronc; la seconde la surpasse un peu, surtout vers l'arrière. D. 6 — 1/11; A. 1/11.' Ses écailles sont médiocres. Il paraît fauve avec douze bandes verticales étroites brunâtres. Tout le long du flanc, sur une assez grande hauteur, il y a un point ou petit trait noir sur chaque écaille. Une large bande brune descend obliquement 1. Les derniers doubles, comme, au reste, dans tout le genre. CHAP. IX. GOBIES. G5 de l'œil sur la joue, jusqu'au bord inférieur du préo- percule. Les nageoires ont des nuages bruns. L'individu n'a que deux pouces et demi. Le GOBIE A TÈTE KUE. {Gobiiis nudiceps , nob.) Il a été apporté du cap par feu Delalande. Sa tête, du quart de la longueur totale, est moitié moins haute que longue, et encore d'un cinquième moins large que haute. Son profil descend peu et ne se courbe presque pas. Son œil , du cinquième de la longueur de la tête, est séparé de l'autre d'un dia- mètre. Ses dents du rang externe sont assez pronon- cées, mais il n'y a pas de canines. On y observe cette particularité, que sa tête, sa nuque presque jusqu'à la première dorsale , et la base de sa pectorale, manquent d'écaillés : le corps en a de médiocres. Les dorsales sont peu élevées, et les autres nageoires peu prolongées. D. 6—1/11; A*. 1/10, etc. Ce poisson paraît noirâtre tirant à l'olivâtre. Une bande d'un noir bleuâtre, lisérée d'un côté d'une ligne blanchâtre, règne verticalement sur la base de sa pec- torale. Sur un fond gris , sa première dorsale a trois bandes longitudinales noirâtres, et le bord jaune clairj la seconde a une douzaine de lignes noirâtres obli- ques : son bord est pâle. La caudale a des points noirâtres sur ses rayons j les autres nageoires sont uniformément grises. Nos individus sont longs de quatre pouces. 12. 5 66 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Le GOBIE A PRÉOPERCULE ARMÉ. ( Gohius oplopomus y nob. ^ ) M. Ehrenberg a distingué comme genre sous le nom à'oplopomus un petit poisson dont le bord de son prëopercule a vers l'angle deux petites proéminences en forme de dents; mais d'ailleurs tous ses caractères sont ceux d'un gobie. Sa bouche paraît avoir des dents fort régulièrement rangées et serrées. Sa hauteur, ainsi que la longueur de sa tête, sont chacune quatre fois et un quart dans la longueur du corps. La Hgne de son profil baisse un peu de la nuque aux yeux et tombe ensuite. Sa première dorsale est d'un tiers plus haute que le corps; la se- conde et l'anale n'ont que la hauteur du corps. La caudale, tronquée, a un peu plus du cinquième de sa longueur. D. 6 — 1/9 ; A. 1/9 , le dernier double. Ses écailles sont grandes. C'est un joli petit poisson, verdâtre en dessus, blanchâtre en dessous, qui a le long du milieu du flanc une suite continue de taches noires; des ocelles bleus sur les joues, les opercules et tout le dos, entremêlés de points pourpres; des taches ou ocelles pourpres sur la moitié inférieure des dorsales; des points noirs sur la première moitié de la caudale; une large bande longitudinale bleue sur le milieu de l'a- 1. Oplopomus puîcher. Ehrenb., ZooA pisc , pi. 9, fig. 6. CHAP. ÏX. GODIES. ()7 nale, et des lignes pourpres vers sa base. Ses pecto- rales sont blanches , sa ventrale noirâtre vers le bout. Tl n'est long que de deux pouces et demi. M. Elirenberg l'a eu a Massuah. Le GOBIE DExMI-CERCLÉ. {Gobais semidoliatus, nob.) Vanikolo a donné à MM. Quoy et Gaimard un très-petit gobie à deuxième rayon prolonge, remarquable par sa coloration. Il est d'un brun marron foncé, avec des bandes pales lisérées de noir, qui commencent sur le museau et se continuent sur le dos, où elles s'affaiblissent et se perdent entre les deux dorsales. Il y en a deux en avant des yeux, deux entre eux, trois à la nuque et deux sous la première dorsale : la joue en a trois verti- cales, l'opercule une et l'épaule avant la pectorale une. Le deuxième rayon de la première dorsale est à peu près de la hauteur du corps. D. 6 — 1/9; A. 1/8, etc. Ses dents sont très-fines. Je ne lui vois point de canines. Sa longueur n est que d'un pouce. Le priolepis mica de M. Ehrenberg (pi. g, fîg. 8 ) ne paraît en différer que par une taille encore moindre (g lignes), et par une teinte jaune et un plus petit nombre de lignes. Cen est probablement un jeune individu; cependant il 68 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. lui représente les ventrales séparées : mais il arrive souvent aux petits gobies de pareils ac- cidens. Les Indes orientales possèdent des gobies analogues parleur tête alongée et déprimée, et le petit nombre des rayons de leur deuxième dorsale , à la buhotte de nos côtes delà Manche (gobius minutus) , et aux petites espèces euro- péennes voisines de celle-là; mais ces poissons indiens arrivent à de bien plus grandes tailles. Le GOBIE KOKOU. {Gobius kokius i nob.^) Nous plaçons en première ligne dans ce nom- bre, une espèce fort répandue aux Indes, que nous appelons et que nous regardons comme le koku de Russel. Sa hauteur aux pectorales est près de sept fois dans sa longueur, et il n'a qu'un cinquième de moins en épaisseur. Sa tète, alongée et déprimée, du quart de sa lon- gueur totale, pourrait au premier aspect le faire con- fondre avec certains platycéphales ; mais elle n'a les côtés ni tranchans ni épineux. Sa largeur vers la nuque est d'un quart supérieur à sa hauteur. Le profil est presque rectiligne, et les côtés de la tête se rap- 1. Koku, Russel, n.° LL CHAP. IX. GOBIES. 69 prochent aussi à peu près en ligne droite pour for- mer en avant un museau obtus. L'œil a le sixième, et dans les grands individus le septième de la lon- gueur de la tête, en y comprenant la proéminence de la mâchoire inférieure, et est placé à peu près au milieu de cette longueur, dirigé un peu vers le haut et distant de l'autre d'environ un diamètre. La mâ- choire inférieure dépasse la supérieure, et c'est elle qui fait le bout du museau. La bouche descend obliquement en arrière pres- que jusque sous le bord antérieur de l'œil. En dehors des dents en velours, il y en a une rangée de fortes et pointues, mais peu serrées. La langue est large, plate, tronquée et échancrée en avant, lisse et fort libre. Le quatrième rayon des branchies est aplati et plus large que les autres j le cinquième , au contraire , est presque comme un fil. La joue a des lignes longitu- dinales assez marquées. La hauteur de ses dorsales est des trois quarts de celle du corps , et la longueur de ses pectorales et de sa caudale d'un peu moins du cin- quième de la longueur totale. Sa caudale est arrondie. Il n'y a point d'effilé à ses pectorales. Sa ventrale, pres- que aussi longue que les nageoires de la poitrine, est arrondie et a en avant une membrane transverse mince, de plus du sixième de sa longueur. B. 5 ; D. 6 — 1/9 ; A. 1/8 ; le dernier est double à ses deux nageoires; C. 13 et quelques petits; P. 20; V. 1/5. Les écailles sont grandes : on n'en compte que trente et quelques de l'ouïe à la caudale. A la nuque , au ventre et à la caudale elles sont plus petites. Elles 70 LIVUl:; XIV. GOBIOIDKS. sont pentagones, et la pointe de l'éventail, qui a vingt-six ou vingt-sept sillons, se porte jusqu'à l'angle de la partie visible, et se montre ainsi en dehors sur le milieu de chaque écaille. Les bords visibles ont des cils serrés et très-réguliers, et les deux côtés des stries longitudinales beaucoup plus fines que celles de l'éventail. On ne peut distinguer de ligne latérale. Dans la liqueur ce poisson paraît d'un fauve plus ou moins brun. La tête a de petits points bruns. Cinq grandes taches nuageuses brunes occupent le dos : la première avant la première dorsale, la seconde des deux côtés de cette nageoire, la troisièmedes deux côtés delà deuxième dorsale, les dernières sur le dos de la queue. Cinq autres taches semblables sont placées le long de chaque flanc, de manière à répondre aux intervalles de la série impaire du dos : la première derrière la pectorale, la cinquième à la base même de la caudale. Dans beaucoup d'individus les intervalles des taches sont encore semés de points noirâtres irréguliers et nuageux. Sur les rayons de la seconde dorsale et de la cau- dale sont des points bruns, qui forment des séries transversales. La première dorsale a toujours une petite tache noire vers le bas de son premier rayon, mais le reste de son étendue est blanc ou grisâtre. La pectorale a une tache brune à sa base ; les autres sont d'un fauve clair. Dans le frais le fond de la couleur est verdâtre plutôt que fauve. Selon Russel, la tête et le dos sont d'un vert foncé, \ CHAP. IX. GOBIES. 71 le venire blanchâtre; la ventrale a une légère teinte jaunâtre et l'anale une rougeâtre. Nos plus grands individus n'ont que six pou- ces, et Russel dit que l'espèce n'en passe pas huit (anglais). Il nous en a ëtë envoyé de l'Isle-de-France par M. Desjardins, du Malabar par M. Dussu- mier, et de Pondichëry par M.Lesclienault. Ce dernier nous apprend que l'espèce vit dans l'eau douce. Selon M. Desjardins, elle remonte de la mer dans les rivières. M. Dussumier se l'est aussi procurée en i835 dans les eaux douces d'Alipey, et ses notes in- diquent que le fauve domine dans la couleur du poisson frais. Le koku de Russel, n.° LI , est aussi évidem- ment le même poisson; ses formes et ses cou- leurs sont absolument identiques, seulement il lui donne un rayon de plus à l'anale. Mais une différence si légère, et qui est peut-être individuelle, ne peut faire établir une espèce. Ainsi koku est son nom sur la côte d'Orixa : à l'Isle-de-France, où il est fort estimé, on l'appelle héchiqiie ou hissique^ comme d'autres gobies. Nous ignorons son nom à la côte de Coromandel. 72 LIVRE XIV. GOEIOÏDES. Le GOBIE GIURIS. {Gobiiis gmm , Hamilt. Buchan.O Les étangs de Calcutta nourrissent un gobie de cette série, fort semblable au précédent, et que je crois le G. giuris de Hamilton Bucha- nan. Ses formes et ses nombres sont les mêmes que dans le kokius ; mais sa caudale est un peu plus courte , ses dents un peu plus fortes, et son œil est surtout plus grand et plus avancé : il occupe à peu de chose près le deuxième quart de la longueur de la tète. D. 6 — 1/9 î A. 1/8, etc. Les taches du corps , les points bruns des dorsales et de la caudale, la petite tache noire du premier rayon du dos , sont à peu près semblables, mais d'une teinte plus faible : les taches disparaissent même sur quelques individus. Dans le frais, selon M. Dussumier, le fond des couleurs est d'un fauve verdâtre; la caudale est toute verdàtre ; M. Buchanan lui donne quelques reflets dorés. Nos échantillons rapportés du Bengale par M. Dussumier, sont longs de trois ou quatre pouces. Ils correspondent de tous points à la figure et la description que M. Hamilton 1. Poiss. du Gange, p. 5i, pi. 33, fig. i5. CHAP. IX. GOBIES. 73 Buchanan* donne de son G. giuris^ qui y dit-il, est commun dans tous les étangs et toutes les rivières des provinces arrosées par le Gange, et fournit une nourriture agréable et légère, très-recherchée par les habitans. Il atteint jus- qu'à douze pouces de longueur. M. Dussumier en a trouvé à Bombay d'une teinte fauve, au lieu de verdâtrej mais que nous regardons comme une simple variété. Le GOBIE BIOCELLÉ. {Gobius biocellatuSj nob.) M. Raynaud a rapporté de Pondichéry un petit gobie de la forme de ce G. giuris^ dont la tête est seulement un peu plus longue , et les yeux plus grands et plus rapprochés. D. 6 — 1/10 ; A. 1/9. Il est gris-brun j plus pâle en dessous : des lignes légèrement brunes suivent les séries longitudinales des écailles; on voit sur les flancs cinq ou six taches nuageuses brunes, mal marquées; il y a des points blanchâtres au bas des joues et sur la mâchoire infé- rieure, mais presque effacés. Le fond des dorsales est brunâtre; il y a sur la première, vers le bord supé- rieur, deux ocelles, c'est-à-dire deux taches noires, entourées de blanc : l'une entre le premier et le deuxième rayon, l'autre entre le cinquième et le 1. Poiss. du Gange, p. 5i. T'^ LIVRE XIV. GOBIOÏDES. sixième. L'anale est brunâtre avec des taclies blan- ches. Sur la caudale sont des lignes de points bruns. L'individu n'a pas trois pouces. Le GOBIE DE Célèbes. (Gobius Celebius , nob.) Un gobie fort semblable au G. giurisy même par ses taches, a été trouvé dans les eaux dou- ces de l'ile de Célèbes par MM. Quoy et Gai- mard. Sa tête est un peu plus large; ses dents de la rangée externe sensiblement moins grandes, et sa deuxième dorsale a un rayon de moins. D. 6 — 1/8; A. 1/8, le dernier double, etc. Sur un fond fauve-brun on voit le long de cha- cun de ses flancs cinq taches nuageuses noirâtres et deux impaires sur son dos ; savoir ; une entre les deux dorsales et une derrière la seconde. Il y a une petite tache noire au bord postérieur de sa première dorsale, au bout du sixième rayon. A la base de la pectorale, vers le haut, est une tache noire, et ses rayons, ainsi que ceux de la deuxième dorsale et les intervalles de ceux de la caudale, ont des points roux. L'anale est fauve et a du noirâtre vers le bord. La ventrale est brune. Nos individus sont longs de quatre pouces. I CHAP. IX. GOBIES. 75 Le GOBIE DE RUSSEL. (Gobiiis Hussein j nob.) M. Leschenault nous a envoyé de Pondi- cliéry un gobie très-semblable au G. kokius, et dans lequel nous croyons retrouver le bullee korah de Russel(n.° 53); du moins ce huilée korali en a tous les caractères, excepté que Russel lui attribue un rayon de plus* à la deuxième dorsale. ^ Sa tête est plus large que celle du gobie kokou, et son museau plus obtus, plus arrondi en avant. La largeur de sa tête est des trois cinquièmes de sa longueur : dans le G. kokius elle n'en a que moitié. Ses yeux sont aussi plus petits et plus écartés; leur dia- mètre est du huitième de la longueur de la tête, et ils sont distans de deux diamètres l'un de l'autre. Tout d'ailleurs en lui, pour les formes, est comme dans le G. giuris : écailles , langue , dents, lignes de la joue. Il y a un rayon de moins à la deuxième dor- sale. B. 5 ; D. 6 — 1/8 ; A. 1/8, les derniers doubles ; C. 15 et quel- ques petits; P. 21; V. 1/5, Dans la liqueur il parait fauve clair avec des ves^ tiges, à peine apparens, de taches rondes et grises le long de chaque flanc. La deuxième dorsale et la caudale ont des traits bruns sur leurs rayons , qui y 1. 11 en compte onze; savoir : l'épine et la deuxième branche du dernier , qu'il compte pour un ; ce n'est qu'un seul de différence. 76 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. formeni des suies transversales; sur la première dor- sale on n'en voit guère qu'au premier rayon. Russel y marque une petite tache noire semblable à celle des précédentes. Les autres nageoires n'en ont point du tout. Dans le frais, selon Russel, le fond de la couleur est d'un brun assez foncé. Notre individu est long de sept pouces et demi •: celui de Russel était de la même taille. Le GOBIE CATEBOU. {Gobiiis catebiis, nob.) Une espèce voisine a les yeux encore plus petits, la caudale plus longue, et surtout les dents plus fortes. Les antérieures d'en bas, au nombre de six ou huit, sont de véritables canines, et les latérales ne sont plus en velours, mais en grosses cardes. La longueur de la tête et celle de la caudale sont chacune du quart de la longueur to- tale. L'œil a le neuvième de la longueur de la tête , et la distance entre les yeux est de plus de deux diamètres. La dorsale et l'anale sont plus hautes et plus taillées en pointe que dars les deux précédens. Les rayons de la première dorsale se prolongent un peu en filets. Sa caudale est assez pointue. B. 6 î D. 6 — 1/9; A. 1/8, le dernier double j C. 16 et quelques petits ; P. 22 ; V. 1/5. Dans son état actuel ce poisson parait d'un fauve verdâtre; on y aperçoit des vestiges de taches, mais CHAP. IX. GOBIES. 77 très-effacés. Il y a beaucoup de traits bruns sur les rayons de sa deuxième dorsale et entre ceux de la caudale. Ses autres nageoires sont plus ou moins grises. Nous en avons un individu de dix pouces et un de sept; tous les deux rapportés de Ran- goon, dans le pays des Birmans, par M. Ray- naud. Le nom birman de l'espèce, selon ce voya- geur, est catebou. Il nous est venu des individus de la même espèce, de Pondichéry par M. Leschenault, du Bengale par M. Duvaucel, et du Malabar par M. Dussumier. Le GOBIE KORA. {Gobius kora, nob.) Le korali motta que nous ne connaissons que par M. Russel (I, p. 4o, pi. 5o), appar- tient à la même série que les précédens, et ressemble même beaucoup à ce G. catebus par sa grande caudale un peu pointue, et ses petits yeux; seulement ses dorsales et son anale ne sont point taillées en pointe. B.5;D. 6 — 1/10; A. 1/9; C. 18; P. 18? V. 1/5. Il est jaune clair, et a des taches obscures; savoir, une grande ovale autour de la base de chaque dor- sale; une sur le dos de la queue; une de chaque côté 78 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. au-dessus de la pectorale, et cinq le long de chaque flanc jusqu'à la caudale. Les nageoires sont d'un jaune plus foncé. On voit des points bruns sur les rayons des deux dorsales et des pectorales. L'individu représenté par M. Russel était long d'un pied. Cet auteur le croit le G. lago- cephalus; mais c'est une erreur, que réfuterait le seul aspect de la figure de ce dernier, telle que l'ont donnée Kôlreuter et Pallas. Le GOBIE A FIL. ( Gobais Jilosus y nob. ) Celte espèce remarquable par une tête apla- tie et obtuse et par le filament de sa première dorsale , nous a été envoyée de l'Isle-de-France par M. Desjardins. Sa hauteur et sa largeur aux pectorales sont du sixième de sa longueur, mais il s'amincit vers la queue. Sa tête a un peu plus du quart de sa longueur totale, est d'un quart moins large et de moitié moins haute que longue. Sa mâchoire inférieure proémine, et la circonscription horizontale de son museau est pres- que demi-circulaire. Ses yeux sont à la face supé- rieure, n'ont en largeur que le sixième de la lon- gueur de la tête, et sont écartés d'un diamètre. Les dents sont en fin velours; c'est à peine si le rang extérieur se distingue des autres. La langue est plate, large et échancrée en avant. Le deuxième rayon de la première dorsale se pro- CHAP. IX. GOBIES. 79 longe en un fil mince du double de la hauteur du corps. La caudale, un peu pointue, a près du quart de la longueur du corps, et il y a autant d'espace entre elle et l'anale et la deuxième dorsale. Les pec- torales sont un peu moindres et n'ont pas d'effilé. La ventrale, un peu pointue, a quelque chose de moins que les pectorales; sa membrane antérieure est de plus du quart de sa longueur. B. 5j D. 6 _ 1/9 j A. 1/8, le dernier double; G. 15; P. 19; V. 1/5. Dans la liqueur ce poisson paraît fauve , plus clair en dessous. Son dos et ses côtés sont irrégulièrement semés de points bruns noirâtres, qui le long du flanc se rapprochent d'espace en espace pour former des taches. Les dorsales ont des doubles points bruns sur leurs rayons, formant quatre rangées longitudinales. Il y en a de semblables sur les six ou sept rayons intermédiaires de la caudale, disposés sur sept ou huit rangées; mais les rayons extrêmes n'en ont pas. L'a- nale est fauve, très-pâle, avec un peu de noirâtre le long du bord, qui lui-même est blanc. Nos individus sont longs de quatre pouces et demi. Nous réunissons en un petit groupe des go- bies des Indes qui manquent de canines, et qui ont dans le prolongement de quelques parties de leurs nageoires une réunion de caractères qui les rend assez faciles à reconnaître. Bien que cette distinction soit artificielle, elle est 80 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. cependant commode dans ce nombre assez considérable d'espèces étrangères. Le GOBIE A NAGEOIRES POINTUES. {Gohiiis aciitipennis j nob.) Un gobie apporté du Malabar, en 1827, par M. Dussumier, a la première dorsale et la cau- dale prolongées en pointes 5 et ce qui d'ailleurs le distingue des précédens, c'est que le cinquième rayon de la première dorsale est le plus long : il a souvent près de moitié de la longueur to- tale. Le premier est plus court d'un tiers, et les autres grandissent par degrés ; le sixième est court. Sa cau- dale, pointue, a le tiers de la longueur totale. Sa tête, au contraire, ainsi que sa hauteur aux pecto- rales , n'en ont que le sixième. Sa tête est d'un quart moins haute, et d'un tiers moins épaisse que longue, à profil rond, à joues assez renflées. Ses yeux, du cinquième de la longueur de la tête, sont rapprochés d'un demi-diamètre. Ses dents sont très- fines. Ses pectorales et sa ventrale sont pointues, ainsi que sa deuxième dorsale et son anale. D. 6_i/10; A. 1/11. Ses écailles sont assez grandes. Il paraît fauve avec des taches nébuleuses noi- râtres, peu apparentes, le long du dos et du flanc. Une ligne bleuâtre descend de l'œil à l'angle de la bouche. Les deux dorsales ont des lignes longitudi- nales étroites et grises. La caudale est verticale j le CHAP. IX. GOBIES. 81 bord antérieur des deux premières et le supérieur de la troisième sont fortement marqués de points noirs et blancs. Il est long de trois pouces et demi. Le GOBIE A SOIES. {Gobais setosiis y nob.) M. Leschenault a envoyé de Pondiche'ry un gobie tout semblable à ce G. acutipennis pour les formes; mais sa tête est un peu plus longue à proportion (elle fait le cinquième de la longueur totale) , et il n'y a point de taches sur son corps , ni de lignes sur ses nageoires j on voit seulement des points bruns sur le premier rayon de chacune de ses dorsales. Il a , comme le piécédent, un trait brun bleuâtre, descendant de l'œil jusqu'au bas de la joue. Dans le frais, la teinte générale est gris clair. Ses nombres sont les mêmes. D.6— 1/10; A. 1/11. Ses écailles sont assez grandes. Sa taille est de deux pouces et demi, mais l'espèce en atteint quatre. On le nomme à Pondichëry Nation Ouloiwé, comme d'autres espèces du genre. Ce nom si- gnifie Oulouvë venimeux, et cependant on mange le poisson sans scrupule. 12. 6 LIVRE XIV. GOBIOIDES. Le GOBIE PORTE- CRIN. {Gohius criniger, nob.) MM. Quoy et Gaimard ont pris à la Nou- velle-Guinée un gobie à museau court €t à caudale ronde, sans effilé à la pectorale; qui a le deuxième rayon de sa première dorsale prolongé en un filet très-fin , moitié plus élevé que le corps. Sa hauteur est du sixième de sa longueur totale; sa tête, du quart de cette même longueur, est de deux cinquièmes moins haute que longue, et d'un quart moins large que haute. Ses dents sont petites, même les extérieures. Son œil occupe le deuxième quart de la longueur de sa tête , et est distant de l'autre d'un demi-diamètre. Une particularité remarquable que celte espèce partage avec le gobie à tête nue, est de n'avoir point d'écaillés à la nuque jusque tout près de la première dorsale ; celles du corps sont grandes. D. 6— 1/9; A. 1/9. Dans la liqueur il paraît d'un gris-brun pâle , semé irrégulièrement sur le dos et les flancs de petites taches brunâtres. Il y a en outre de chaque côté trois grandes taches d'un brun foncé; Vune derrière la pec- torale, la seconde sous l'arrière de la deuxième dor- sale, la troisième à la base de la caudale; le dos en a trois moins prononcées : une au-devant, la seconde sous l'arrière de la première dorsale, la troisième im- médiatement derrière la seconde. La joue a deux ta- ches verticales brunâtres et l'opercule en a une. CHAP. IX. GOBIES. 83 La deuxième dorsale a quatre taches brunes dans les intervalles de chaque rayon; et il y en a aussi sur la première, mais celles-ci sont plus confluentes. Les autres nageoires sont grises. Il y a du noirâtre au bord de la caudale et de l'anale. La pectorale a un arc brun vers sa base. Dans le frais, le fond de la couleur est jaunâtre. L'individu a près de cinq pouces. Ce poisson a été trouve à marée basse sur les récifs du havre Dorey à la Nouvelle-Guinée, où il est fort abondant. Sa ventrale, disent MM. Quoy et Gaimard, lui servait à se fixer hors de l'eau et à sauter à sa surface. Le fil de la première dorsale n'est proba- blement qu'une marque du sexe ; car nous avons un petit individu apporté du Malabar par M. Dussumier, qui est dépourvu de ce pro- longement, mais qui du reste a absolument tous les caractères du précédent, sa nuque nue , ses grandes taches, etc.; seulement les taches de sa première dorsale sont moins régulières ; celles de la seconde forment trois rangées, il en a dans tous les intervalles des rayons de sa caudale, et une ligne longitudinale noirâtre règne sur le milieu de son anale. Le fond de sa couleur paraît fauve. Il est long de deux pouces. 84 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Le GOBIE NÉBULEUX. {Gobais Jiebidosus j Forsk.) Tl doit beaucoup ressembler au précédent. Son deuxième rayon dorsal est aussi prolongé en un fil mince noir, double en hauteur de la membrane. Selon le voyageur qui l'a décrit, ses écailles sont assez grandes, rliomboïdales, dures j sa caudale est ronde; il a pour nombres : B.7'5D. 6 — 11; A. lljC. 14;P. 18; V. 12. Il est blanchâtre et a sur la tête, sur le dos et sur les flancs des taches brunes qui confluent en nuages. Ses dorsales et sa caudale ont sur un fond transpa- rent beaucoup de petites taches brunes. Ses pectorales , glauques, ont à leur base des taches brunes peu mar- quées. Ses ventrales sont noirâtres. Il est long de trois pouces et de la grosseur du doigt. Les Arabes le nomment liout-eddjinn (pois- son du diable), peut-être parce qu'ils le croient venimeux. Nous opposerons aux espèces précédentes une autre tribu de gobies pourvus de ca- nines assez fortes. Les espèces que nous avons vues, sont pour la plupart originaires de la 1. Aucun goble n'a plus de cinq rayons aux branchies; il j a sans doule ici quelque erreur ou quelque faute d'impression. CHAP. IX. GOBIES. 85 mer des Indes. Nous croyons cependant devoir en rapprocher un poisson de l'Adantique, dont Bosc et ensuite le D."^ Mitchill ont parlé, et que nous n'avons pas encore réussi à nous procurer; et une autre espèce que Levaillant avait prise à Surinam. Le GOBIE A VENIN. (Gobius venenatus y nob.) Cette espèce est due à M. Lesclienault, qui l'a envoyée de Pondichéry, sous le nom de Nation Oulouifé, commun dans ce pays -là à plusieurs gobies, et dont la signification pré- sente l'idée de venin; idée qui n'est sans doute venue que de ses dents canines j nous avons toutefois cru devoir lui donner un nom spéci- fique qui rappelât la dénomination des pé- cheurs de la côte de Coromandel. Elle se distingue par des écailles plus grandes que dans la plupart des espèces voisines, et surtout par ses dents de la mâchoire inférieure, au nom- bre seulement de dix, dont les deux mitoyennes sont plus grandes, et les deux extrêmes de chaque coté, plus longues et plus grosses, se recourbent un peu en arrière comme des crochets de serpens venimeux. Sa première dorsale n'a point de prolon- gement. Sa tête n'est pas plus large que haute, quoi- que ses joues soient assez renflées. Elles ont deux lignes longitudinales. On volt deux petits pores au 86 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. bord du préopercule. Les yeux ont le cinquième de la longueur de la tête, et leur intervalle n'égale pas leur diamètre. D. 6 — 1/10 ; A. 1/9. Ce gobie paraît fauve avec une bande plus brune, mais mal prononcée, le long du flanc, et un point nacré sur chaque écaille. De chaque côté au-dessus de l'ouïe est un ocelle blanchâtre, entouré de noirâtre, qui y forme une sorte d'ornement. Une ligne noirâtre suit la longueur de sa deuxième dorsale à quelque distance du bord. Il y a du noirâtre entre les rayons de sa caudale et vers le bord de son anale. Il est long de cinq pouces. Le Gobie a grosses canines. {Gobius caninus, nob.) MM. Kuhl et Van Hasselt ont envoyé de Java une espèce infiniment voisine de la pré- cédente, et quia, comme elle, de grandes écailles , marquées chacune d'une tache nacrée, deux petits poresau préo- percule, et les dents latérales d'en bas en crochets j mais les mitoyennes sont plus fmes et plus nom- breuses. La tête est un peu plus comprimée. Il y a un rayon de moins aux nageoires verticales. D. 6 — 1/9 5 A. 1/8, etc. Au-dessus de l'ouïe est, au lieu d'un ocelle, une tache ronde et bleue. Sur le dos sont cinq grandes taches impaires brunes, et sur chaque flanc cinq CHAP. IX. GOBIES. 87 autres, qui alternent avec celles-là et dont la dernière est à la base de la caudale- La deuxième dorsale a sur un fond brun des lignes transparentes tranchées, de directions variées, qui forment même des espèces d'ocelles vers le bord entre les rayons. Le mâle a trois ou quatre rayons de sa première dorsale alongés en fils très-fins : les deuxième et troisième sont plus hauts que le corps. Les autres nageoires sont grises ou brunâtres. La femelle, d'ailleurs entièrement sembla- ble, n'a pas ces prolongemens, et ses canines latérales d'en bas sont beaucoup plus petites : elle a des taches transparentes à sa caudale et à son anale. Nos individus sont longs de quatre et cinq pouces. Le GOBIE A QUATRE PORES. {Gohius quadriporus y nob.) Ce gobie est voisin des deux précédens par ses grandes écailles; son profil se courbe de même; il a deux lignes très-prononcées sur la joue. Les deux pores du bord montant de son préopercule sont très- ouverts , et il y en a encore deux plus petits au-des- sus. Les dents du rang externe sont fines, et en bas il a de chaque côté deux petites canines. Sa première dorsale ne prolonge point ses rayons. Peut-être n'est- ce qu'une femelle. D. 6 — 1/9 j A. 1/9. 88 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Dans son état actuel (dans la liqueur) il paraît entièrement fauve avec des lignes plus pales, qui suivent les rangées d'écaillés. Entre les rayons des dorsales sont des taches irrégulières , brunâtres. Les tempes n'ont aucune marque. L'individu est long de cinq pouces. Il nous a été donné par feu M. Levaillant, qui le disait de Surinam. Le GOBIE UNICOLOR. ( Gohius unicolor, K. et V. H. ) Cest un petit gobie des rivières de l'île de Java, voisin de ceux dont nous venons de parler par ses grandes écailles et par ses canines , mais à profil plus droit, à bouche plus verticale, à mâchoire infé- rieure plus montante, et dont l'œil n'a que le sixième de la longueur de la tête et est séparé de l'autre de tout un diamètre. Outre les deux canines de chaque côté de la mâchoire inférieure, il en a une de chaque côté de la supérieure, et les autres dents sont fort petites. Les lignes de la joue sont très-prononcées, et l'infé- rieure remonte en avant jusqu'à la narine; mais je ne puis voir de pores à son préopercule. Ses dorsales sont de près de moitié moins hautes que le corps. D. 6 — p- 1/10; A. 1/9; le dernier double aux deux nageoires comme dans toutes les autres espèces. Il paraît brun fauve. Le milieu de chaque écaille semble avoir une tache pâle. Sa première dorsale est CIIAP. IX. GOBIES. 89 blanche, la seconde a des lignes obliques grisâtres. Une ligne de celte couleur marche longitudinalement sur l'anale près de sa base. Sa caudale, qui est un peu pointue, offre quelques apparences de points bruns. La taille de notre individu est de trois pouces. Une figure, qui porte le même nom dans les dessins de nos deux jeunes voyageurs, est peinte de brun-fauve et a beaucoup de jaune aux dorsales et à la caudale. Le GOBIE A DEUX DARDS. {Gohius hitelatuSj nob.) Il appartient aussi à cette petite série à dents canines, mais il se distingue des autres espèces du genre , parce que le premier rayon de cha- cune de ses deux dorsales est fort, roide et poignant, et nullement flexible. Ses formes sont à peu près celles des précédens; hauteur cinq fois dans la longueur; tête quatre fois et quelque chose; épaisseur deux fois dans la hauteur; profil descendant obliquement, légèrement convexe; dorsales un peu moins hautes que le corps, etc. Ses canines sont petites et pointues; ses écailles grandes. D, 6 — 1/10; A. 1/9, etc. Sur un fond qui paraît grisâtre, il a des traits na- crés sous l'œil, à la joue, à la tempe; des points 90 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. nacrés inégaux sur le corps; quelques petites taches noires le long du dos, qui paraissent des ocelles, à cause de traits nacrés qui y touchent, et quelques autres sur les côtés de la queue. Les nageoires pa- raissent jaunâtres. Il y a des points bruns sur la cau- dale. Nos individus n'ont que deux pouces : ils ont été pris dans la mer Rouge par M. Ehren- Lerg. Le GOBIE A FIL COURT. {Gobius brevifilis j nob.) M. Reynaud a apporté de Pondiclicry un gobie qui a le deuxième et quelquefois le troisième rayon alongés en fils; mais où le second même n'excède guère la hauteur du corps. Ses dents du rang externe sont fines, et il y en a de chaque côté une en cro- chet, mais si petite qu'on ne la distingue qu'à peine des autres. D. 6 — 1/9 ; A. 1/9. Il paraît fauve avec des nuages brunâtres formant de petites et de grandes taches, mais peu apparentes. Il n'a ni taches ni ocelles aux tempes. Sa gorge, son ventre, sont blanchâtres. Ses dorsales et sa caudale ont sur un fond jaunâtre des rangées de petites taches d'un brun foncé. Son anale est jaunâtre, lisérée de brun. Il y a aussi un petit liséré brun tout autour de sa ventrale, qui est blanchâtre ou grisâtre. Ses pec- torales sont jaunâtres, sans taches. CHAP. IX. GOBIES. 91 Nous en avons reçu deux individus, longs chacun de trois pouces. Le GOBIE PAPILLON. ( Gohius papilioy nob. ) Cette jolie espèce a été envoyée de l'Isle-de- France par M. Mathieu. Sa forme est un peu comprimée j sa hauteur est cinq fois dans sa longueur, et sa tête a quelque chose de plus ; mais elle est de plus d'un quart moins haute que longue. L'épaisseur du poisson n'est que moitié de sa hauteur. Le museau est obtus. L'œil occupe le deuxième quart de la longueur de la tête, et est écarté de l'autre de près d'un diamètre. Le troisième rayon de la dorsale est dans un indi- vidu d'un cinquième plus élevé que le corps , et ce même individu a de chaque côté à la mâchoire infé- rieure une canine ou dent en crochet plus grande que les autres, qui sort un peu de la bouche et que l'on ne voit pas dans ceux dont la dorsale est plus basse : ce sont probablement des marques du sexe mâle, La caudale est arrondie, du cinquième de la longueur totale. D. 6 — 1/14 ; A. 1/14. Ses écailles sont médiocres ou même petites, sur- tout à la nuque. Le fond de la couleur paraît un brun marron assez foncé. Quatre lignes noires et étroites descendent ver- ticalement, la première du milieu de la première dor- 92 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. sale, les trois autres des deux exlrémués et du milieu de la seconde vers le bas du corps. Six rubans blancs nacrés, lisérés de brun, remontent verticalement du ventre et se perdent sur le flanc. Le premier, mal terminé, est dans l'aisselle de la pectorale; le cin- quième et le sixième au-dessus du commencement de l'anale. La joue a quelques points, et l'opercule deux ou trois taches nacrées, llsérées de brun. Sur le cin- quième rayon de la première dorsale est une tache ronde et noire, et il y en a une semblable à la cau- dale, près de sa base et de son bord supérieur. Nos individus n'ont que deux pouces; il y en a un de trois , en partie décoloré , dans le cabinet de Berlin, et qui faisait partie des collections de Bloch, et où on lui a donné 1 epithète trop peu caractéristique defasciatus. Nous sommes assuré de la justesse de notre rapprochement par la comparaison que M. Liclitenstein a bien voulu nous en laisser faire. Le GOBIE PHALÈNE. (Gohiiis phalœna, nob.) Cette espèce , fort semblaJ^le à la précédente , a été rapportée de Vanikolo par MM. Quoy et Gaimard. Son corps, de même forme que le G. papî/io^ a les mêmes nombres ( D. 6. — 1/143 A. 1/14) et les mêmes écailles. Il est brun foncé. Trois séries de points ou de lignes nacrées occupent la joue et CHAP. IX. GOBIES. 95 l'opercule. Dix lignes nacrées , disposées par paires, y remontent du ventre vers le dos, où leur teinte s'af- faiblit. L'espace entre les lignes de chaque paire est plus large et plus noir que les intervalles des groupes. La première paire répond au milieu de la ventrale; la cinquième est à la base de la caudale. Cette nageoire a une tache noire au même endroit que dans l'espèce précédente, c'est-à-dire, près de sa base et de son bord supérieur; de plus, elle est blanchâtre et bordée tout autour de noirâtre. La première dorsale est brune, et a une tache noire et ronde entre le quatrième et le cinquième rayon ; la seconde, brune aussi, a un bord blanchâtre suivi d'un bord noir. L'anale n'a que le bord noir et est brune, ainsi que les pectorales et la ventrale. Notre individu est long de trois pouces. Le GOBIE SPHYNX. (Gobais sphjnjc j nob.) Les mêmes naturalistes ont rapporté de la Nouvelle-Guinée un gobie qui se rapproche beaucoup des deux précédens. Notre individu a la canine latérale , mais les rayons de sa première dorsale ne sont pas prolongés. Ses nombres sont les mêmes. D. 6- 1/14^ A. 1/14. Il paraît d'un gris-brun argenté, avec six larges bandes verticales brunes, dont la première est à la nuque; la dernière à la base de la caudale. Des points 94 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. nacrés, lisérés de brun, se montrent sur les joues, sur l'opercule et sur les bandes brunes. Le ventre est bordé par douze demi-cercles ou lignes nacrées, rap- prochées par paires, qui ne remontent pas au-delà du tiers de la hauteur du tronc : les premières ré- pondent à la base de la pectorale, la dernière touche à l'anus. La caudale a près de sa base, vers son bord supérieur, un point noir entouré d'un cercle blanc. Il n'y a pas de tache à la première dorsale, qui est grise; mais les trois autres nageoires verticales ont sur un fond grisâtre des taches transparentes rondes, en- tourées d'un liséré brunâtre, et qui forment plusieurs séries. Il y en a de semblables en travers de la ventrale. Ce joli poisson est long de trois pouces et demi. Le GOBIE CHINOIS. {Gohius sînensis, nob.; Bos triche Chinois, Lacé^.) C'est très-probablement près de ce sphynx que devra être placé, lorsqu'on le connaîtra mieux, un poisson représenté dans les peintures chinoises de la bibliothèque du Muséum, et que M. de Lacépède aura emprunté pour faire son hostriche chinois (t. III, p. 1417 pl- i4> fig. 2). C'est bien sûrement un gobie d'après l'en- semble de sa conformation; mais on ne peut voir sa ventrale ni compter le nombre des rayons de ses autres nageoires. CHAP. IX. GOBIES. 95 Sa couleur est un gris olivâtre assez uniforme , et il a sur la base de sa caudale une tache ronde, bleue, entourée d'un cercle rouge. La figure le représente long de cinq pouces. Le GOBIE A CINQ OCELLES. {Gobius quinqueocellatus , nob.; Gobius semitœnia- tus, Elir.) Nous trouvons dans les figures exécutées à Massuah par M. Ehrenberg, celle d'un petit gobie voisin des précédens , mais remarquable par cinq ocelles, dont trois sur sa deuxième dorsale et deux sur sa caudale. Ses formes ressemblent à peu près à celles des pré- cédens. Ses troisième et quatrième rayons dorsaux sont presque aussi hauts que le corps. Nous ne savons pas s'il a des canines. Son corps est brun tacheté de bleu pâle, avec des lignes verticales au nombre de six ou sept, dont quelques-unes ne sont pas entières. Sa tète a sur un fond rose quatre traits longitudinaux d'un bleu noir. On voit du jaune entre les deux du milieu et les deux inférieurs. Ses pectorales sont jau- nes avec trois traits noirs vers le haut de leur base, et une tache brune au-dessus de l'aisselle. D. 6 — 1/13 5 A. 1/11? Les Arabes le nomment tahak. La disposi- tion des raies du corps lui avait fait donner, par M. Ehrenberg, une épithète qui ne le dis- tingue pas suffisamment du précédent, et qui 96 LIVRE XIV. r.OBIOÏDES. est moins caractéristique que celle que nous proposons. Le GoBiE DE Bosc. {Gohius Bosciij Lacép. 5 Gobiiis virldipallidus , Mitch.) Cette espèce doit aussi, a ce que je soupçonne, venir dans le groupe que nous traitons, à cause de ses raies et des nombres de ses rayons. Mal- heureusement, ne l'ayant jamais reçue, quoique Bosc la dise assez commune à la Caroline , je ne puis en juger que sur une esquisse peu finie, et une note succincte de ce naturaliste , les mêmes documens qui ont servi de base à l'article de M. de Lacëpède (t. II, p. 555), et à sa figure (pi. 16, fig. 1). Bosc dit ce poisson sans écailles, et lui a imposé en conséquence l'épithète d'«- lepidotus, que Schneider lui a conservée ' ; mais ce serait le seul exemple du genre, et l'on peut croire que les écailles étaient seulement petites et peu apparentes. Nous devons remarquer cependant que M. Mitchill s'exprime de la même manière sur son Eohius viridipallidus y qui sous tous les rap- ports est manifestement de la même espèce.* 1. Bl. Schn., add., p. 547. — 2. Mitchill, Trans. of New- York , I, p. 579, et pi. I, fig. 8. Ses nombres sont indiqués B. 4; D. 6 — 14; A. 12^ C. \1; P. 16, V. 12. CHAP. IX. GOBIES. 97 Cet auteur le représente six fois aussi long que liaut; à tête de plus du cinquième de la longueur totale, d'un quart moins haute que longue j à museau court, obtus; à bouche très -peu fendue; à caudale arrondie du sixième de la longueur du corps, et lui compte : D. 7 — 14j A. 10; C. 18 ; P. 18; V. 8; nombres dont le dernier est évidemment faux, et dont les premier et troisième auraient besoin d'être vérifiés. Sa couleur est grise, d'un brun verdâtre selon M. Mit- chill, ponctuée de brun, avec sept bandes verticales irrégulières , plus pâles , qui remontent sur les dorsa- les. Ses nageoires sont brunes. Sa taille est de deux pouces et demi. Il se trouve communément dans la baie de Chaileston. On ne le mange point. M. Mitchill dit son G. viridipallidus de la baie de New- York, et assure qu'il s'attache avec tant de force aux pierres par le moyen de sa ventrale, que l'individu qu'il a décrit avait été enlevé de l'eau par un pécheur d'huîtres avec la pierre à laquelle il tenait. Cet individu était long de trois pouces et demi (anglais). On pourrait réunir sous le nom diAwaous un petit nombre d'espèces de gobies qui ont la tête plus alongée, ou du moins qui parais- 12. 7 98 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. sent avoir la face plus longue, à cause de la position reculée de l'œil sur la joue. Nous en avons de l'Inde et de l'Amérique : mais celles-ci ont encore un caractère tout particulier. Le GOBIE AWAOU. ( Gohius ocellaris , Brouss. , Dec. ichth. ^ ) Celui-ci se distingue par une physionomie particulière qui tient à ce que son œil est un peu plus près de l'ouïe que du bout du museau , et à ce que son profil en avant de l'œil descend lentement avec une légère convexité, ce qui lui rend la tête plus conique que celles des autres espèces. Sa hauteur aux pectorales est d'un peu moins du cinquième de sa longueur totale; sa tête en a plus du quart, et sa hauteur à la nuque n'est pas des deux tiers de sa propre longueur. Son épaisseur est des trois quarts de sa hauteur. L'œil n'a en diamètre que le sixième de la longueur de la tétcj il est placé tout près de la ligne du profil, à trois de ses diamètres du bout du museau, et séparé par deux diamètres de celui de l'autre côté. Quelques lignes se montrent sous l'œil, mais très-peu apparentes. Sa mâchoire supé- rieure avance plus que l'autre et est protractile. Les dents sont en fin velours sur des bandes étroites, sans que la rangée extérieure surpasse les autres. La hau- 1. Cop. Encycl. méth. , Icht. , fig. \^2. CHAP. IX. GOBIES. 99 leur des nageoires verticales est de moitié de celle du corps; les pectorales ont le cinquième de sa lon- gueur. La ventrale , presque aussi longue que les pec- torales et de forme ovale, a en avant une large mem- brane, mais sans pointes latérales. La caudale est ar- rondie et d'un peu plus du sixième de la longueur du poisson. D. 6 — 1/10; A. 1/10 ; C. 15; P. 14; V. 1 — 1/10. Il Y a environ soixante écailles de l'ouïe à la cau- dale, et dix-sept ou dix-huit sur une ligne verticale, plus larges que longues , à cils fins et serrés le long de leur bord visible, à dix-huit rayons à leur éven- tail. Celles du dos, en avant de la première dorsale, sont plus petites que les autres. Dans la liqueur, nos individus paraissent d'un brun roussâtre , plus foncé à la tête; le museau, les joues, les opercules ont un très-petit pointillé noirâtre. Le dos et les flancs sont semés de petites taches noirâ- tres assez rapprochées, mais peu marquées, quelque- fois il y en a une bande brune le long du milieu du corps. La première dorsale est noirâtre et il y a une tache noire plus foncée entre le cinquième et le sixième rayon, et entre celui-ci et le dos; la seconde est noi- râtre, et porte sur sa moitié ou ses deux tiers inférieurs trois ou quatre rangées longitudinales de traits noirs; sa caudale en a six ou sept rangées; son bord a quel- quefois un liséré blanc. Les autres nageoires sont d'un gris noirâtre, sans taches. Nos individus, longs de cinq pouces ou à peu près, viennent des eaux douces de l'Isle-de- '1 00 LIVUE XIV. GOLIOÏDES. France, d'où ils ont été apportés par MM. Qnoy et Gaimard ou envoyés par M. Desjardins. Nous les croyons de même espèce que celui que Broussonnet à tait connaître sous le nom cle gobhis ocellaris. Dans sa description des couleurs il dit le corps de son poisson mêlé par des nuages d'oli- vâtre et de noir; son abdomen et sa poitrine glauques et sans taches; sa première dorsale semblable au dos; la seconde et la caudale verdâtres ; leurs rayons mar- qués de points bruns ; la pointe de la seconde dorsale d'un roux sale, l'anale d'un brun verdàlre à bord transparent ; la tête, les pectorales et les ventrales noirâtres. H y a une tache noire ronde entre le cin- quième et le sixième rayon de la première dorsale, et c'est de là que le nom de l'espèce est dérivé. L'individu d'après lequel Broussonnet a fait sa description, appartenait à la collection dont Banks lui avait fait présent; il avait été pris dans un ruisseau d'eau douce à Otaïti par MM. Banks et Solander; et Broussonnet nous dit que l'es- pèce portait dans l'île, selon ce dernier, le nom d'«wr/ozi. En effet, Solander en parle sous ce nom et sous ceux dieruhe et dieruwhe dans ses manus- crits; mais il y appelle l'espèce gobius puncta- tus. L ayant vue à l'état frais, il en décrit les couleurs un peu autrement. Le poisson est CHAP. IX. GOBIES. 101 duii olivâtre clair, semë de points noirs iné- gaux, et qui sont plus petits sur la tète; il a le dessous blanchâtre ^ le fond de la première dorsale est verdâtre, avec des nuages bruns et roussâtres; la deuxième est demi -trans- parente; les pectorales, transparentes, ont des rayons verts à points bruns, etc. Le GOBIE A NAGEOIRES NOIRES. {Gohiiis nigripinniSj nob.) Parmi les poissons rapportés de l'île de Bour- bon par M. Leschenault, il s'en trouve un que nous avons cru long-temps identique avec le précédent, mais qui, d'après un examen plus minutieux, nous a paru devoir appartenir sinon à une autre espèce, au moins à une variété très- distincte. Sa tête est un peu plus comprimée; son œil un peu plus grand, ses lignes de points sont plus ap- parentes; les yeux paraissent un peu plus grands; les lèvres sont plus épaisses; la bouche est plus fendue; sa deuxième dorsale et son anale ont un rayon de moins. D. 6 — 1/9 ; A. 1/9. Sa tête et toutes ses nageoires sont noires ou noi- râtres sans ponctuation. Nos individus ont de quatre à cinq pouces. ] 02 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Le GOBIE PALE. {Gobiiis pallidiis j nob.) MM. Lesson et Garnot ont rapporté de Tlsle- de -France une autre espèce très- voisine des deux prëcëdentes, qui paraît s'écarter encore un peu plus de la première. Sa tête est plus large. Il y a d'un œil à l'autre deux diamètres d'œil. Le profil de son museau n'est point arqué et descend par une ligne oblique, et droite. D. 6 — 1/10; A. 1/10. Le dernier est double jusqu'à sa base dans l'une et dans l'autre. Les écailles ont jusqu'à vingt-cinq rayons à leur éventail; celles de l'avant du dos ne diffèrent pas sensiblement des autres par leur grandeur. Le corps est brun clair , la tête grise , la gorge et le ven- tre blancbâtres. La première dorsale a à peine une teinte de noirâtre; la deuxième et la caudale, brunes mais claires, ont leurs traits bruns étendus sur toute la longueur de leurs rayons. Les pectorales, de la même couleur, n'ont aucuns traits. La ventrale et l'a- nale sont blancbâtres avec quelques teintes brunes. La papille génitale est très-large, comprimée d'avant en arrière et de forme carrée. Notre individu est long de sept pouces. CHAP. IX. GOBIES. i03 Le GOBIE DE GuAM. {Gobius Guamensis y nob.) Les mêmes voyagem-s ont pris dans les eaux douces de l'île Guam un gobie de ce petit groupe , à profil arqué comme celui du G. ocellaris^ mais dont les yeux sont écartés comme dans le G. pallidus. Ses formes, ses petites dents en fin velours, ses nombres, la disposition de ses marbrures noires, sont les mêmes que celles de notre gobie awaou. Les marbrures for- ment souvent une série plus suivie le long du milieu du flanc, mais il n'a point de taches noires à sa pre- mière dorsale qui est grise, avec des points bruns, peu marqués sur ses rayons j la deuxième et la cau- dale ont des traits prononcés comme dans les précé- dens. En général, ces quatre espèces sont fort voisines. Dans le frais, d'après un dessin de MM. Quoy et Gai- mard, celle-ci a le dos et le côté d'un gris brun, le ventre et le fond de la couleur des nageoires jaune pâle. Nos individus sont longs de six pouces et demi. Le Gobie banane. {Gobius bananaj nob.) Cette espèce, que M. Ricord nous a envoyée de Saint-Domingue, a un aspect particulier, qu elle doit à un museau plus alongé qu'à l'or- 4 04 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. dinaire, et à la protractilite plus grande de sa mâchoire supérieure : deux circonstances qui la rapprochent un peu des awaous de la mer des Indes ; mais le corps du poisson est bien plus alongé. Sa hauteur est un peu plus de sept fois dans sa longueur totale, et sa tête un peu plus de quatre fois. La hauteur de sa tête ne fait que moitié de sa propre longueur, et sa largeur ne l'excède pas beaucoup. L'œil est juste au milieu de la longueur, dont il prend un peu moins du cinquième, il est près de la ligne du front et séparé de Vautre d'un peu moins d'un diamètre. En avant de l'œil , le museau s'abaisse par une ligne oblique légèrement convexe, et il a aussi une légère convexité transversale. La bouche est ho- rizontale et prend les deux tiers de la longueur du museau comptés jusqu'à l'œil. Les mâchoires sont égales lors de la rétraction; elles n'ont que de petites dents et point de canines. Les dorsales sont d'un quart moins hautes que le corps, et la caudale, tronquée, n'a que le sixième de la longueur totale. D. 6 — 1/10 î A. 1/10. Les écailles sont médiocres : celles de la nuque sont petites. Le corps paraît brun clair, semé de petites marbrures nuageuses brunes et foncées. Les rayons des dorsales et de la caudale ont des points bruns; l'anale et la ventrale sont blanchâtres, la pectorale est grise. ^ Notre individu est long de cinq pouces; mais l'espèce atteint la taille du merlan. CHAP. IX. GOBIES. 405 On la trouve dans la rivière d'Acul h Haïti. Les nègres, qui en font peu de cas, l'appellent banane, nom qu'ils donnent à d'autres poissons et même de genre fort éloigné, tels que le Bu- tirin. Le GoBiE DE LA Martinique. (Gobius Martinicus y nob.) La Martinique a un gobie très-semblable à ce banane, , mais dont l'œil est plus petit; il n'a qu'un septième de la longueur de la tête, et est à un diamètre entier de celui de l'autre côté; il est d'ailleurs placé de même, c'est-à-dire au milieu, ou occupant le quatrième sep- tième de la longueur de la tète et près de la ligne du profil. Les nombres sont les mêmes. D. 6 _ 1/10; A. 1/10, etc. Ce poisson paraît gris, avec des taches brunes sur les rayons des dorsales et de la caudale, et des nua- ges également bruns dans les intervalles des rayons des dorsales. Nos individus sont longs de six et de sept pouces. Quand ce gobie sera mieux connu, on dé- montrera peut-être qu'il n'est cj[u'une variété de l'espèce précédente. Nous trouvons encore à former une petite série distincte d'espèces qui ont le corps court 40G LIVRE XIV. GOBIOÏDES. et de très-petites écailles comme perdues dans la peau. Celles-ci vivent toutes dans la mer des Indes. Le GOBIE PORTE-FILS. (Gobius Jilifer, nob.) Ce gobie de la mer des Indes, couvert de très-petites écailles, a le corps alongé (sa hauteur est sept fois et demie dans sa longueur, et sa tête quatre fois ) , et tous les rayons de la première dor- sale prolongés en fils : les trois premiers sont les plus longs et de près du tiers de la longueur totale; la caudale, pointue, en a un peu moins du tiers, mais plus du quart. Les dents du rang externe sont plus fortes, et il y en a deux ou trois de cliaque côté plus grosses et plus pointues encore que les autres. D. 6— 1/10; A. 1/9. Les écailles ne se marquent sur la peau que comme des points. Quoique mal conservé, on voit sur les joues, l'opercule et l'épaule de ce poisson de très- petites taches rondes d'un blanc pur, entourées d'un liséré brun; le reste paraît gris, mais on ne peut juger de sa vraie couleur. L'individu est long de cinq pouces. Le Gobie des Papous. •< ( Gobius Papuensis, nob.) Un autre gobie, alongé et à petites écailles, a été pris à la Nouvelle-Guinée par MM. Quoy et Gaimard. CHAP. IX. GOBIES. 407 Sa caudale esl aussi irès-longue el très-pointue : elle a près du tiers de la longueur totale; la tête en a le cinquième, la hauteur du corps en fait le neuvième. Sa tète est d'un tiers moins haute que longue, et d'un tiers moins large que haute. Ses yeux sont très-rap- prochés et au milieu de la longueur de la tête, dont ils ont le quart en diamètre. La bouche descend obliquement. Les dents supérieures de la rangée ex- terne sont plus fortes. Les rayons, peu inégaux, de la première dorsale n'excèdent pas beaucoup la hauteur du corps. Ceux de la seconde les égalent ou à peu près, et vont en s'alongeant vers l'arrière. D. 6 _ 1/12 ; A. 1/13 , le dernier double. Dans son état actuel il paraît gris-brun, nuage de brun, et a vers la base de la caudale une tache ronde d'un brun foncé : à la base de sa pectorale en est une brunâtre. Son ventre est blanchâtre. Il paraît avoir eu sur beaucoup d'endroits de son corps de très-petits points blancs. Ses dorsales ont de fines lignes longi- tudinales brunâtres. Il y a les trois lignes ordinaires sous son œil, et deux longitudinales sur la joue et son opercule. Sa longueur est de cinq pouces. Le GOBIE NEIGÉ. (Gobius niveatiis , nob.) Le plus grêle de ces gobies à très -petites écailles a été envoyé de Java au Musée royal de Hollande par MM. Rulil et Van Hasselt. 4 08 LIVRE XIV. GOr.lOÏDES. Sa hauteur est jusqu'à dix fois et demie dans la longueur totale, la tête six fois, la caudale quatre. Sa lête est deux fois moins haute que longue. Son mu- seau est obtus et arrondi. Les joues ont des lignes longitudinales. Ses dorsales sont plus hautes que le corps, et la seconde l'est plus que la première. D. 6 — 1/1 1 ; A. 1/10 , le dernier est double dans l'une et l'autre? G. 15, etc. Le corps paraît gris -brun foncé; les joues, les opercules, l'épaule, le ventre et souvent tout le des- sous de la queue, semés de points blancs serrés. Des points brun foncé forment des rangées sur les rayons de toutes les nageoires, même de la ventrale. Sa longueur est de trois pouces et demi. Le GOBIE ARABIQUE. {Gohius bunaciilatus j,^lirenh. ; Gobais arahicus, Gm.) Un quatrième de ces gobies à petites écailles a été rapporté de la mer Rouge par M. Ehren- Lerg, qui l'a nommé G. himaculatiis. Sa hauteur est sept fois, sa tête quatre fois et demie dans la longueur du corps. Ses joues renflées rendent sa tête aussi large que haute, mais elle est de plus d'un tiers moins haute que longue. L'œil en occupe le deuxième cinquième. Les dents du rang externe sont prononcées, quoique fines, et il y en a deux plus longues au milieu de la mâchoire supérieure et deux canines de chaque côté à l'inférieure. Les deuxième et troisième rayons de la preniièrc dorsale CHAP. IX. GOBIES. 100 sont cVun tiers plus élevés que le corps. Sa caudale est pointue et du cinquième de la longueur totale. D. 6 _ 1/12 ou 1/13; A. 1/il ou 1/12, etc. Dans la liqueur il parait noirâtre; le dessous, plus pâle, a des bandes transversales brunes; les dor- sales ont de fines lignes longitudinales, qui sur la première sont marquées de petits points noirs. La caudale est noirâtre et a le bord supérieur blanchâtre; les autres nageoires sont d'un noirâtre uniforme. Mais la figure, flûte d'après le frais par M. Ehrenberg, présente des teintes bien différentes. Le fond est vert bleuâtre, semé de points rouges et bleus. Au-dessus de la pectorale on voit deux taches bleues longues, l'une a la suite de l'autre. Il y a des points rouges sur la caudale et sur la base des dor- sales, dont la première a les rayons jaunes, tachetés de vert et terminés en rouge, et la seconde les a verts terminés en bleu. L'anale a deux raies noirâtres sur un fond rose, etc. Nos plus grands individus n'ont que trois pouces. • Je ne doute presque pas que ce gobie de M. Ehrenberg ne soit le même que Forskîii (p. 23 et 24) avait pris mal à propos pour le G. anguillaiis de Linnë, et qui est enregistré dans Gmelin (p. 1 198) sous le nom de G. ai^a- bicus. Il est décrit comme verdâtre, avec beaucoup de taches d'un rouge violet et de points bleus. Cinq 110 LIVRE XTV. GOBIOÏDES. des rayons de la première dorsale s'alongent en fila- mens rouges. Ses écailles sont Irès-peliies et font pa- raître la peau nue. Sa caudale est pointue. Il est long comme le petit doigt, mais plus mince, et Forskal lui donne pour nombres : B. 4; D. 6— 14; A. 13; C. 17;?. 16;V. 12; mais on sait combien on a été sujet à l'erreur sur les rayons des ouïes dans ce genre et les genres voisins. Son nom arabe, comme celui du blennie à quatre plumes, est koschar eddjin {scierie du diable). Le GoBiE DE Mertens. ( Gohius Mertensiij, nob. ) Nous trouvons dans les dessins qui nous ont été communiqués par M. de Mertens, une espèce infiniment voisine de ce G. bimacu- latuSy que nous désirons consacrer à la mémoire de l'estimable naturaliste qui l'a découverte. 0 Ses formes sont les mêmes, et ses nombres diffè- rent peu. D. 6 _ 1/13 ; A. 1/14. Sa caudale est de même longue et pointue. Tout ce poisson est vert, piqueté de noir, et a les nageoires rougeâtres. Il est long de trois pouces. CHAP. IX. GOBIES. 1 1 1 Le GOBIE A ÉPINE CACHÉE. {Gohius ciyptocentriis , nob. ; Cryptocentrus rnelea- griSj Ehrenb.) Cette espèce, que M. Ehrenberg a cru pou- voir distinguer gënériquement à cause d'une petite pointe dirigée en avant, qui est au bas de son opercule, cachée sous le bord du préo- percule , se rapproche d'ailleurs beaucoup des précédentes par ses très-petites écailles; mais sa caudale est plus courte : elle ne fait guère plus du cinquième de sa longueur, et n'est que médio- crement pointue. La longueur de sa tête est la même; elle en a les trois cinquièmes en hauteur, et un peu moins de moitié en épaisseur. Sa hauteur n'est guère plus de cinq fois dans sa longueur totale. Son œil est élevé, rapproché de l'autre, et du cinquième de la longueur de la tête : son museau n'est pas plus long. Les dents du rang externe sont assez fortes à la mâ- choire supérieure, et au milieu on en voit deux un peu plus longues. Les rayons des dorsales ne sur- passent pas la hauteur du corps. D. 6— 1/iO; A. 1/9, etc. Dans la liqueur il paraît d'un brun noirâtre, avec beaucoup de bandes verticales étroites plus pâles et de nombreux petits points blancs sur les côtés de la tête, l'opercule, l'épaule, la pectorale et le devant du dos. Les dorsales sont grisâtres, avec des taches transparentes, et au milieu de quelques-unes de ces 112 LIVRE XIV. GODIOÏDES. taches se voit un point très -noir. Il y a aussi des taches transparentes à l'anale sur un fond gris, mais les autres nageoires sont d'un gris plus ou moins jaunâtre ou noirâtre, sans taches. La figure de M. Ehrenberg représente le corps gris rougeâtre, les lignes verticales jaunes, les points bleus, entremêlés de quelques taches rouges aux côtés de la tête; elle place trois traits verticaux rouges lisérés de bleu sur la joue; les nageoires y sont rougeâtres; la première dorsale a le bord rouge; on voit sur la seconde une rangée de points noirs qui en suit le milieu, et il V a sur l'anale des lignes jaunes et rouges. Ce poisson est long de quatre pouces. M. Ehrenberg l'a pris à Massuah. Le GOBIE PAON. (Gohius paçoninus, Ehrenh.) L'un des plus beaux gobies, celui que M. Eh- renberg a fort justement intitulé gohius pavo- ninuSy appartient aussi à ce groupe à petites écailles. Sa hauteur est six fois dans sa longueur, sa tête quatre fois et demie, et sa caudale, rhomboïdale, quatre fois. Son œil occupe le troisième sixième de la lon- gueur de la tête, il est près de la ligne du profil, et à moins d'un diamètre de l'autre. Le museau est court CHAP. IX. GOBIES. 115 et obtus. Ses dorsales, surtout la seconde, ont près du double de la hauteur du corps. D. 6 — 1/11 j A. 1/9, etc. Dans la liqueur il paraît d'un brun verdâtre foncé, avec des points nacrés le long du dos, et de chaque côté six ou sept lignes de points de même couleur descendent du dos vers le ventre en se portant obli- quement en avant. La tête, l'épaule et le commen- cement du dos ont des taches rondes d'un noir pour- pré , lisérées de nacre. Des ocelles semblables , mais plus petits, sont répandus dans les intervalles des rayons des deux dorsales. L'anale a des taches blan- ches; la pectorale, des lignes transverses de points blanc mat sur un fond brun; la ventrale a le fond plus pâle; la caudale est brune, avec une bande cou- leur d'ocre près de son bord postérieur. Dans le frais, le fond de la couleur est verdâtre, surtout à la tête; celui des dorsales jaunâtre; celui de l'anale rosé. Le milieu des ocelles de la téta , de l'épaule et même des dorsales est cramoisi. Cette jolie espèce a été découverte par M. Ehrenberg à Massuah. Elle atteint quatre pouces. Le GOBIE VENTRAL. {Gobiiis 'ventralis , Ehrenb.) Nous croyons pouvoir placer ici ce gobie de Massuali , que nous ne connaissons que par un dessin de M. Ehrenberg. 12. 8 ^14 LIVRE XIV. GOBIOÎDES. Sa hauteur est six fois et demie dans sa longueur; sa tête et sa queue arrondie y sont chacune cinq fois; son profil tombe obliquement; son œil occupe le deuxième quart de la longueur delà tête près du front; ses dorsales et son anale dépassent peu la hauteur de son tronc. D. 6 — 1/10; A. 1/9. Il a le dos brun grisâtre, le ventre blanc, des points et des petites lignes bleus sur les côtés delà tête; plu- sieurs taches oblongues de cette couleur, forment une ou deux séries irrégulières le long du flanc, des lignes brunes traversent longitudinalement les dorsales et l'anale , et des traits bruns et verticaux colorent la caudale. L'individu est long de trois pouces et demi. Les côtes occidentales d'Amérique nourris- sent des gobies dont nous n'avons point encore trouvé les formes dans les espèces originaires des Indes. Le corps est long et cylindrique , et la queue alongée se termine en une pointe unique et aiguë, qui a souvent fait donner à ces poissons le nom de lancettes. Le GOBIE LANCETTE. {Gohius lanceolatus , Bl.) Sa longueur , et surtout l'excessif alongement de sa caudale, donnent à cette espèce un as- pect bien différent des gobies courts et gros CHAP. IX. GOBIES. i15 de nos mers, et cependant elle en a tous les caractères génériques et même les nombres de rayons. Sa hauteur est jusqu'à onze fois dans sa longueur totale, dont sa caudale prend près d'un tiers. Son épaisseur est des trois cinquièmes de sa hauteur. La longueur de sa tète est sept fois dans sa longueur to- tale j elle est d'un tiers moins haute que longue et d'un quart moins épaisse que haute. Son profil est à peine arqué, si ce n'est à l'extrémité, qui est arrondie. L'œil, voisin de la ligne du profil, a le cinquième de la lon- gueur de la tête en diamètre, est à un diamètre et demi du bout du museau, et sa distance de l'autre est de moins d'un diamètre. Les deux mâchoires sont pres- que égales.' La bouche descend obliquement en ar- rière jusqu'à l'aplomb du bord postérieur de l'œil, dont sa commissure est distante de deux diamètres. Les dents sont en fin velours, la rangée extérieure à peine plus grande. Sa langue est assez libre, large et obtuse, et, par une singularité remarquable, sa base, à l'endroit oi^i s'articulent les parties inférieures des arcs branchiaux , est d'un nacré brillant nuancé de vert ou de bleuâtre. H y a sous l'œil quatre lignes sail- lantes verticales assez irrégulières; deux longitudinales sur la joue et l'opercule, qui en a encore une verti- cale; mais je n'en vois pas à la nuque. La longueur de la pectorale est sept fois et demie dans celle du poisson. Cette nageoire a dix-neuf rayons, dont le premier seul est simple et détaché des autres aux deux tiers. La ventrale sort à peu près sous la naissance des pectQrales et les égale presque en Ion- H 6 LIVRE XIV. GOmoÏDES. gueur. Sa membrane antérieure est assez grande et s'y joint sans pointes latérales. Les rayons de la pre- mière dorsale se prolongent un peu en soles flexibles hors de sa membrane; il y en a six, et la hauteur des troisième, quatrième et cinquième surpasse de moitié celle du corps sous eux. La seconde est d'un tiers moins haute que le corps et a un rayon simple et treize branchus, dont le dernier, un peu prolongé en pointe, est fourchu jusqu'à la racine : l'anale en a un de plus. D. 5 — 1/13; A. 1/14; C. 15 ; P. 19; V. 1/5. La longue caudale est taillée en pointe aiguë, et de manière que ses rayons extrêmes sont huit fois plus courts que ceux du milieu. L'anus se trouve placé au tiers antérieur du corps; son appendice péniforme est peu développé. Les écailles deviennent plus grandes vers l'arrière du corps qu'à sa partie antérieure, au point qu'en les comptant sur une ligne longitudinale, les trente-cinq dernières occupent un tiers de plus en longueur que les trente-cinq premières. Leurs nombres varient de même sur des lignes verticales ; en avant il y en a plus de vingt , au-dessus des troisième ou quatrième rayons de l'anale dix ou douze. Leurs côtés sont rectilignes et finement striés en longueur, leur bord radial trilobé, le bord visible demi-circulaire et finement cilié; il y a vingt- cinq rayons serrés et plus à leur éventail. Je ne puis dis- tinguer de ligne latérale. Tel que nous l'avons dans la liqueur, ce poisson paraît d'un gris-brun un peu roussiitre; trois ou quatre CHAP. IX. GOBIES. 117 poinls noirâtres se montrent sur le devant du pre- mier rayon de la dorsale antérieure. C'est à peine si l'on aperçoit un léger nuage noirâtre sur le côté, derrière la pectorale. M. Poey, qui nous a donné une figure de ce gobie, faite à la Havane, nous dit que le corps et les nageoires sont d'un brun verdâtre clair, excepte l'extrémité de la ventrale, qui tire au bleuâtre. Il ajoute que la partie brillante qui est à la base de la langue, l'a fait nommer par les ha- bitans de Cuba, emei^elda ou émeraude. On le prend dans cette île sur les fonds vaseux. Il est commun dans les rivières de la Marti- nique , où on le nomme Y endormi, et dans le langage corrompu des nègres, le zendormu M. Pley nous l'en a envoyé sous ce nom. Selon Blocli% ce serait aussi dans les ruis- seaux et les rivières de cette île qu'il aurait été vu par le père Plumier; mais une note , qui paraît tirée des manuscrits de ce savant minime, et qui a été insérée en Mars 175^, par Gauthier, fils, dans ses Observations périodiques, p. aSg, annonce que l'on en trouve beaucoup dans les petites plages de la Martinique, qu'il se tient dans les endroits pierreux, et qu'on le pèche difficilement. 1. Grande Iclitliyol., t. II, p. 8. 118 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Sa chair , y est-il dit , est excellente , approche du goût de l'anguille, et il a quelquefois vingt pouces de longueur. * Gronovius l'a parfaitement décrit^; il l'ap- pelle gobius cauda longissima, acuminata^ et lui attribue distinctement quatorze rayons à la deuxième dorsale, comme nous les lui avons observés; mais il lui rapporte une figure^ qui donne à cette même nageoire vingt et un rayons, ce qui n'empêche pas que Pallas"^ n'établit sur cette double indication son gobius océaniens. Le père Plumier avait observé le même pois- son dans son lieu natal, et en avait tracé une figure où, comme à son ordinaire, il n'avait pas compté scrupuleusement le nombre des rayons; car il y en marque dix-neuf ou vingt. Copiée par Aubriet dans les Vélins du Mu- séum, cette figure a passé dans l'ouvrage de M. de Lacépède^ Une copie plus exacte a été 1. La figure d' Aubriet, copiée de Plumier et gravée dans Lacé- pède, fait le corps, la deuxième dorsale et l'anale olivâtres, avec des reflets dorés; la tête bleue; la première nageoire jaune; la pectorale et l'anale rouges, nuancées de jaune; la ventrale rouge: mais tout cela parait sortir de l'imagination du peintre. Gauthier, qui a aussi copié cette figure de Plumier (dans lesObserv. périod. de Toussaint, t. II, p. 2ôç), ij^j), et plus exactement qu'Aubriet, n'a qu'une teinte olivâtre pale. 2. Zoophil., p. 82, n.° 277. — 3. Idem, pi. 4, fig. 4- — 4. Sfucil zool, VUl, p. 4. — 5. T. II, pi. XV, fig. 1. CHAP. IX. GOBIES. 111) publiée par Gauthier {loc. cit.)-^ et il s'en trou- vait encore une autre dans les mains de Bloch, qui en parle dans son article sur le gobius lan- ceolatus^y mais si confusément qu'on ne sait pas bien si sa figure (pi. 38, fig. i) est prise de Plumier ou de la nature. Dans ce dernier cas, et en la supposant exacte, elle annoncerait une espèce différente; car elle donne dix-huit rayons à la seconde dorsale, et Bloch répète ce nombre dans son texte, tandis que notre poisson n'en a réellement que quatorze. Nous sommes certains cependant qu'il y en a dans la collection de Bloch un individu à quatorze rayons comme les autres, en sorte qu'il pourrait bien n'avoir pris ce nombre de dix-huit que dans la figure de Plumier. Le GOBIE BACALAOU. ( Gobais bacalaus , nob. ) Nous retrouvons les formes du gobie lan- cette et les mêmes nombres de rayons dans un poisson qui nous a été envoyé du Brésil par M. Delalande et par M. Menestrier, et qui a seulement la ligne du profil un peu plus convexe. On y distingue un peu mieux la tache laté- 1. Iclit., 2.'- part. , p. 7. 1 20 LIVRE XÏV. GOBIOÏDES. raie , et il y en a une plus marquée de chaque côté de la base de la caudale, qui souvent y est triangu- laire. Dans les jeunes sujets, où les nageoires ne sont pas usées, la première dorsale et la caudale ont quelque- fois chacune le tiers de la longueur totale. M. Levaillant nous avait donné un individu de cette espèce venu de Surinam, et nous avons trouve de semblables dans le cabinet de feu M. Richard , qui les avait probablement eus de Cayenne. M. Poey nous en a donné un de Cuba, où on le nomme aussi emeralda. M. Menestrier nous dit que les Portugais de Eio-Janeiro appellent ce poisson hacalliao^ Sahara y et dans une figure jointe à son envoi, il le peint d'olivâtre clair en dessus, et de blanchâtre en dessous. Le GOBIE ÉMERAUDE. (Gobais smaragdus, nob.) Il y a encore dans File de Cuba une autre emeralday dite cabezona^ ou à grosse tête, et qui a les mêmes formes que les deux gobies précédens; mais dont la têie plus grosse est pres- que aussi large que haute, et dont le corps .et les 1. Bacalbaô signifie morue sèche. CHAP. IX. GOBIES. 121 naceoircs, d'un brun verdàlre plus Intense, surtout à la tête, sont semés de petites taches jaunes et rondes. Sa langue a la même partie brillante à sa base, et sa taille est la même. M. Poey nous en a donné un individu de quatre pouces, dont la caudale a dix-huit lignes, et la première dorsale neuf. Il paraît brun roussâtre foncé, avec des nuages noirâtres et de petites taches plus pâles. Ses dorsales et ses pectorales ont des points bruns entre leurs rayons : ses autres nageoires sont d'un gris ou d'un brun uniforme. D. 6/11 ; A. 1/11 5 C.15; P. 16; V. 1/5. Je ne trouve de traces de ces gobies à longue queue pointue, ni dans Margrave ni dans Parra. Le GOBIE TAÏASICA. (Gobiiis hrasiliensis 3 Bl., Syst.) On trouve dans celle des collections de pein- tures laissées par le prince Maurice , qui est in- titulée liber Mentzeliiy une figure assez mau- vaise d'un gobie qui a plus de sept fois la longueur de sa tête, et onze fois sa hauteur aux pectorales, et qui est semé de taches trans- versales noires sur un fond vert, avec des pec- torales et une anale jaunes, une caudale ob- longue et comme tronquée. 122 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Cette figure paraît avoir servi de fondement à l'espèce que Bloch a établie dans son Sjstema, p. 69 ( a ce qu'il dit lui-même d'après les ma- nuscrits du prince), et qu'il nomme gobiits brasiliensis. Il lui donne des nombres déter- minés de rayons, et qui seraient bien extraor- dinaires dans ce genre. D. 18 — 21 ; A. 19, etc. Mais il est probable qu'il aura compté les rayons sur une figure dont d'autres auteurs n'auraient jamais songé à faire attention h ce détail. Ce que d'ailleurs il n'a pas remarqué, c'est que cette figure a été copiée en petit et peu exactement, sous le nom de taïasica, dans Margrave (p. i44) et dans Pison (p. 68). Le premier l'accompagne d'une description faite, à ce que je crois, d'après la figure, et ' lui attribue huit ou neuf pouces de longueur; le second en fait un petit poisson et n'en dit que des généralités qui peuvent convenir à tous les gobies,soit le G. lanceolatus, soit le G. haca- lauSy etc. M. Lichtenstein , dans son Commentaire sur Margrave % pense avoir retrouvé le taïasica dans un gobie du Brésil, long de six ou sept pouces , à queue ronde , d'un gris sale semé de 1. Acad. de Berlin, 1820 — 1821 , p. Sj. CHAP. IX. GOBIES. 125 petits traits bruns, dont la tête a le cinquième de la longueur totale , et dont les nombres sont : D. 6 — 12; A. 12; C. 15; P. 16; V. 1/5; et il nomme ce poisson gobius taïasica. Il nous semble que la proportion de la tête est trop grande pour se rapporter à la figure dont il s'agit, et d'ailleurs, d'après la diminu- tion qu'éprouvent d'ordinaire les poissons re- présentes dans les recueils du prince Maurice, cette figure, longue de neuf pouces, nous paraît devoir être celle d'un individu plus grand. Or, nous avons reçu de M. Plée un gobie qui nous paraît répondre aux proportions de cette figure : onze fois sa hauteur dans sa lon- gueur, et sept fois celle de sa tête, et qui a dix- sept pouces de long. Ses nombres sont : D. 6— 1/16; A. 1/15; le dernier double dans l'une et dans l'autre. Sa tête ressemble à celle du gobie lancette; ses écailles vont de même en grandissant vers l'arrière; sa première dorsale n'a que des rayons grêles, qui ne s'élèvent pas plus que ceux de la seconde. La caudale est cassée dans notre in- dividu, comme elle paraît l'avoir été dans ce- lui de la figure, en sorte que nous ne pouvons assigner sa forme avec précision; et cet individu est en général trop mal conservé pour que nous puissions donner son rapprochement avec celui ^24 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. du prince pour plus qu'une conjecture; mais comme cet individu est bien certainement d'une espèce différente de toutes celles que nous décrivons dans ce chapitre, il était de notre devoir d'appeler sur lui l'attention des voyageurs qui trouveront l'occasion d'en com- pléter la description et l'histoire. Nous avons encore à parler de trois espèces, qui ont toutes des caractères saillans et qui empêchent de les réunir en un seul groupe ou à ceux que nous avons déjà formés. Le GOBIE A MOUSTACHES {Gohiiis mystacinus y nob.) est une espèce facile à caractériser par ses maxillaires prolongés, comme dans les opis- tognatlies, jusqu'au bord du préopercule. Sa hauteur est cinq fols et demie dans sa longueur; sa tête y est à peine quatre fois, et est d'un tiers moins haute que longue et d'un quart moins épaisse que haute. L'œil occupe le deuxième quart dans le haut, séparé à peine de l'autre par un demi-diamètre. Le profil descend assez rapidement en arc de cercle. Les dents sont très-fines, même sur le rang externe : il n'y a pas de canines. Le long maxillaire est étroit, ne s'élargit nullement en arrière et s'v termine en pointe mousse : 11 s'écarte aisément de la joue. Les CHAP. IX. GOBIES. 125 ouïes sont un peu plus ouvertes que dans la plupart des autres espèces du genre. La caudale, un peu pointue, a le quart delà lon- gueur du corps; les pectorales ont la même taille; la ventrale, un peu plus courte, se termine également en pointe ; la première dorsale est triangulaire et à peu près de la hauteur du corps : la seconde l'égale. D. 6 — 1/10; A. 1/9, etc. Les écailles sont médiocres. Le corps paraît fauve, avec six bandes verticales brunâtres, à peine appa- rentes. De très-petits points bruns se voient sur l'o- percule. La première dorsale est d'un gris foncé, et au milieu règne obliquement une large bande trans- parente; les autres nageoires sont grises. C'est un petit poisson de deux pouces seu- lement, envoyé de Java par MM. Ruhl et Van Hasselt. Ces deux observateurs l'avaient appelé pulverulentiis ; mais nous avons cru pouvoir en cette occasion nous écarter de notre res- pect ordinaire pour leurs noms, afin de lui en donner un qui exprimât son singulier ca- ractère spécifique. De tous les gobies , celui qui s'écarte peut- être le plus du reste du genre , qui s'y trouve le plus isolé, le moins susceptible de se grou- per avec d'autres, c'est bien l'espèce de la mer Caspienne que Pallas a décrite sous le nom de i 2G LIVRK XIV. GOBIOÏDES. GOBIE A GROSSE TÈTE ( Gohius macrocephalus , Pall. ' ) , et qui a en effet la tête déprimée et presque circu- laire, du tiers de la longueur totale, aussi large que longue, et d'un tiers plus large que haute. Le tronc entre les pectorales, quoique renflé, est déjà d'un tiers moins large que la tête, et la queue diminue encore beaucoup de hauteur et surtout d'épaisseur. Les yeux sont à la face supérieure, à peine du sixième de la longueur de la tête, à trois diamètres l'un de l'autre. La bouche, fendue au bord antérieur de la tête, ne pénètre pas à plus de moitié de la distance du bout du museau à l'œil; mais elle ne laisse pas d'être fort large, à cause de la configuration de la tête. Les mâchoires sont à peu près égales, garnies de lèvres épaisses, fort larges vers la commissure. Les dents sont en velours ras, ce que Pallas exprime en disant : margine uiriusque maxillœ crasso scaher- rimo. L'orifice antérieur de la narine, un peu proémi- nent, est fort près de la lèvre supérieure. Les joues, renflées, ont des verrues coniques, cornées, assez grandes (probablement des proéminences du préo- percule); l'orifice des ouïes est étroit au-devant des pectorales. Pallas n'y compte que quatre rayons, mais il pourrait, comme tant d'autres observateurs, en avoir négligé un. La première dorsale est petite, et n'a, selon l'auteur, 1. ISov. ad. Pelrop. , I, p. 52 , cl pi. 7 , fig. 4? 5 el G. CHAP. IX. GOBIES. 127 que irois rayons simples et très-flexibles; la seconde et Tanale sont basses ; la caudale est un peu pointue, du sixième de la longueur; les pectorales sont grandes, épaisses à la base : il n'est point fait mention d'effilé. La ventrale les surpasse encore; elle est circulaire, de plus du quart de la longueur totale. B. 4 ? D. 3 — 1/^ ; A. 1/8 ■? C. 13 ; P. 16 ; V. 1/5. Les écailles ne paraissent que comme une scabro- slté, qui sur la tête est fort rude; mais tout le des- sous du poisson est lisse. Sur la nuque et sur le dos sont quatre rangées de petits tubercules ronds; il y en a de chaque côté un de plus, en sorte que la queue en paraît hexagonale. On en voit aussi quel- ques petits entre les yeux et sur l'opercule. Près de l'anus est le lobule génital ordinaire. Dans la liqueur, tel que l'a vu Pallas, ce poisson paraît d'un gris cendré en dessus et blanchâtre en dessous. L'individu était long de quatre pouces. On trouve cette espèce aux embouchures des rivières et des ruisseaux qui se jettent dans la mer Caspienne, et dans ceux de ses golfes où l'eau a le moins de mouvement. Se tenant pres- que toujours au fond de l'eau, on la prend rarement. Un troisième gobie qui se distingue ëminem- 1. Pallas ne donne pas le nombre des rajons de l'anale. i28 LIVRE XIV. GODIOÏDES. ment par le tentacule cutané et pointu qu'il porte sur chaque sourcil comme tant de blen- nies, est Le GOBIE A TENTACULES. {Gohius tentacularis , noh.) 11 a été envoyé de Java par MM. KuLl et Yan Hasselt. Son corps est alongé, comprimé, et il a la queue pointue, ce qui le rapproche un peu des lancettes. Sa hauteur est de sept à huit fois dans sa longueur; sa tête six fois ; il est d'un tiers moins épais que haut. Son œil est un peu plus en arrière que le deuxième quart, et rapproché de l'autre d'un demi- diamètre. Sa bouche descend en arrière jusque sous l'aplomb du milieu de l'œil. Ses dents du rang externe sont petites et égales. Sa première dorsale est d'un tiers et la deuxième près de moitié moins élevée que son corps. Sa caudale, pointue, prend les deux septièmes de la longueur du poisson. D. 6 — 1/12 ; A. 1/13 , etc. Ses écailles, petites à la nuque, médiocres sur les flancs, deviennent assez grandes sur les côtés de la queue. Il parait fauve, mais comme MM. Kuhl et Van Hasselt lui avaient donné pour épithète le mot eryihrinus ^ je le suppose rouge ou rougeâtre à l'état frais. La gorge, la ventrale, l'anale, ont conservé des couleurs blanchâtres, avec une teinte cendrée : l'anale a un liséré noirâtre suivi d'un bord blanc. Les autres nageoires paraissent jaunâtres. CHAP. IX. GOBIES. 429 Nos individus sont longs de quatre pouces: ils viennent de Java. Nous venons de voir dans l'espèce précé- dente un caractère qui nous rappelle celui qui est si commun dans les blennies. Les deux qui suivent ont une crête sur la tête 5 caractère qui ne montre pas moins la justesse des vues de M. Cuvier, et le rapport intime qui lie les blen- nies aux gobies. Le GOBIE CYPRIN. {Gobiiis cfprinoides , Pall.) Pallas a décrit un petit gobie, remarquable par une crête membraneuse peu élevée , qui remonte depuis l'intervalle des yeux jusqu'à la première dorsale. Son corps comprimé , élevé au milieu, son profil descendant obliquement et d'une manière uniforme, et ses grandes écailles, lui donnaient quelque ressem- blance avec le rotengle ( Cyprînus erythrophthalmuSy Linn. ) ou la rosse ( Cyprinus ruiiliis, Linn.), qui ont déterminé l'auteur à l'appeler cyprinoïde. D'après la figure et la description de Pallas , sa hauteur au milieu est trois fois et deux tiers dans sa longueur totale; la longueur de sa tête y est quatre fois; la hauteur de la tête à la nuque est des trois quarts de sa longueur. Son œil, tout près de la ligne 12. 9 1 30 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. du profil, occupe le deuxième cinquième de la lon- gueur de la tête. Ses dorsales, à peu près égales, ont les deux tiers de la hauteur. Sa caudale est arrondie. B.4?D. 6— 10; A. 9 ou IO3 C. 15; P. 18; V. 1/5. L'individu était long de trois pouces cinq lignes, et d'un brun grisâtre. Il se trouvait dans la collection du docteur Van Hoey, mé- decin de la Haye, et on le croyait d'Amboine. Nous n'en avons jamais reçu de semblables des Moluques, mais M. Poey nous en a ap- porté un de la Havane, qui réunit tous les caractères de ce cyprinoïde. Les Espagnols de Cuba, où il n'est pas très- commun, le nomment niapOf comme d'autres gobies. Nous l'appelle- rons : Le GOBIE A CRÈTE DE COQ. (Gobhis crista galli, nob.) Sa hauteur au milieu, ainsi que la longueur de sa tête, est quatre fois dans sa longueur totale; son épais- seur, une fois et dçmie dans sa hauteur. Son profil descend obliquement sans ressaut ni convexité parti- culière. L'œil occupe le deuxième quart de la lon- gueur de la tête, et il y a un diamètre d'intervalle entre les yeux. Les dents des deux mâchoires sont en fin velours, avec\ine rangée extérieure plus forte. Sur la joue sont des lignes obliques peu marquées. Une petite crête membraneuse basse commence entre CHAP. ÏX. GOBIES. 131 les yeux et se termine à la nuque. Les dorsales ont à peu près moitié de la hauteur. La caudale , ar- rondie, est quatre fois et demie dans la longueur to- tale. Le cinquième rayon des branchies n'est qu'un fil très-mince : les autres sont assez forts. B. 5; D. 6— 1/9; A. 1/8; C. 15; P. 18; V. 1/6. Les écailles sont grandes : il n'y en a que vingt- cinq de l'ouïe à la caudale j sur le devant du dos elles sont plus petites. Le corps est d'un fauve brun; la première dorsale est noire, surtout vers le milieu du bord; la seconde noirâtre; les autres grises. Il y a des points brunâtres nombreux entre les rayons de la caudale. Notre individu n'a que deux pouces et demi. Nous terminerons cette longue série d'es- pèces par quelques très-petits gobies de la mer des Indes , remarquables par une grosse tête , un petit œil, et un profil presque vertical en avant de l'œil; leur nuque manque d'ëcailles , comme dans le G. nudiceps et le G. criniger. Il y en a trois très-comprimés : de ce nom- bre est Le GOBIE PETITE CORYPHÈNE. {Gobius coijphœnula, nob.) Il a en très-petit quelque ressemblance avec les dorades. 1 32 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Son corps, très-comprimé, n'a que trois fois sa hauteur en longueur. Sa tête n'est pas si longue que haute, et sa longueur n'est que quatre fois dans celle du poisson. Son profil est tranchant et en quart de cercle. Son œil, du tiers de la longueur de la tête, tout près de la ligne du profil, touche presque à ce- lui de l'autre côté. Sa bouche est horizontale, et dé- passe à peine l'aplomb du bord postérieur de l'œil. Ses dorsales n'ont que moitié de la hauteur du corps: la première est même encore un peu plus basse et a les rayons égaux. Sa caudale est arrondie et du cin- quième de la longueur totale. Sa ventrale est extrê- mement petite. D. 6 — 1/9 ; A. 1/8 ; C. 19 et quelques petits ; P. 17 j V. 1/5 ? Ses écailles , s'il en a , se réduisent à des points. Notre individu n'est long que de quinze lignes. Dans son ëtat actuel il paraît d'un fauve uni- forme. MM. Quoy et Gaimard l'ont eu à Guam, l'une des Mariannes. Le GOBIE HISTRION. ( Gohius histrio ^ K. et V. H. ) Il a été observé d'abord à Bantam, près du détroit de la Sonde, par MM. Ruhl et Van Hasselt, qui en ont envoyé le dessin de Java au Musée royal de Hollande, et qui l'ont nommé gohius histrio, sans doute parce qu'ils CHAP. IX. GOBIES. 135 lui ont trouvé de la ressemblance avec le lo- phius histrio de Linné, qui est l'un de nos chironectes. MM. Quoy et Gaimard en ont rapporté de- puis un échantillon pris à Tongatabou , l'une des îles des Anais. En effet, ce gobie paraît gros et court comme ce lophie, et sa coloration l'en rapproche aussi. Ses proportions sont à peu près les mêmes que celles du précédent: hauteur trois fois dans la longueur; tête quatre fois, et un peu plus haute que longue; épais- seur près de quatre fois dans la hauteur; bouche peu fendue; ventrales très-petites; nombres peu différens- D. 6 — 1/10; A. 1/9. Mais son œil est beaucoup plus petit. On lui voit deux ou trois petits tubercules peu saillans au front, et quelques fortes canines au-devant des mâchoires. Son corps entier est d'un bel aurore , plus foncé vers le dos, avec des suites de taches, de bandes et de lignes irrégulières d'un bleu foncé, verticales à la tête et lon- gitudinales sur le corps. Deux de ces lignes se voient sur la base de la pectorale; mais le reste des nageoires est jaune ou orangé. L'individudeMM.RuhletVanHasseltn était long que de deux pouces et demij celui de MM. Quoy et Gaimard n'a que dix-huit lignes et est tout décoloré : je ne puis lui apercevoir d'écaillés. '134 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Le GOBIE A CINQ TRAITS. ( Gohius qulnquestrigatus , nob.) La troisième espèce , fort semblable à la se- conde, mais un peu moins haute de l'avant , et sans tuber- cules au front , a sur un fond qui paraît d'un brun roussâtre, cinq lignes étroites, verticales, blanches; deux sur la joue, deux sur l'opercule, une près de la base de la pectorale. Ses nageoires sont brunes j les pointes des rayons du dos jaunâtres. D. 6 — 1/10 ; A. 1/9. Nos individus n'ont qu'un pouce de long. Ils viennent aussi de ïongatabou. Deux autres ont au contraire le corps épais et la tête presque globuleuse. Le GOBIE A TÈTE RUDE. (Gobius echinocephalus 3 Ehr. ) Il a aussi sa hauteur trois fois et quelque chose dans sa longueur; sa tête y est quatre fois, et est aussi haute que longue, et d'un quart seulement moins large que haute, d'ailleurs elle est également convexe dans tous les sens. Les yeux sont séparés par plus de deux diamètres. Les dents sont très-fines et égales aux deux mâchoires. La caudale est arrondie, et la ventrale est aussi ronde et aussi concave que celle des sicydiums. Les écailles CHAP. IX. GOBIES. ISS sont assez grandes. La peau de la tête est âpre par de petits points saillans, qui rappellent ceux de la peau des tétrodons. Il y a en outre à la joue quelques petits tubercules, percés chacun d'un pore. D. 6 — 1/10; A. 1/9. D'après un dessin de M. Ehrenberg, ce pe- tit poisson a sa partie antérieure du corps d'un rouge brun, la postérieure d'un brun foncé, teint de rougeâtre. Dans la liqueur il paraît aujourd'hui entièrement noirâtre. Sa longueur n'est que de quatorze lignes. Il a été pris à Massuah. Le GOBIE DES ILES DES AMIS. {Gobius amiciensis y nob.) Tongatabou a donné encore un gobie sem- blable au précédent pour la tête et pour la plupart des caractères; mais le corps est un peu plus alongé, sa hauteur est quatre fois dans sa longueur; et il a quatre canines, deux de chaque côté sur le devant de la mâchoire inférieure. Le corps paraît avoir été d'un brun roussâtre, avec les nageoires brunes plus foncées. D. 1/10; A. 1/9, etc. Il est long de dix-huit lignes. La même espèce, à ce que je crois, s'est trou- vée au havre Carteret, à la Nouvelle-Irlande; mais l'échantillon a moins d'un pouce , et sa ma- "1 36 LIVRE XIV. GOBÏOÏDES. choire inférieure n'a qu'une canine de chaque côté. Nous devons enfin mettre à la fin de ce genre quelques gobies dont la place paraît dou- teuse; ne les ayant pas vus par nous-mêmes, ils sortent , par conséquent , des règles que nous nous sommes prescrites, de ne rien placer dans notre ouvrage que nous ne l'ayons suffisamment examiné. Le GOBIE DE COMMERSON. {Gobius Commersonii y nob.; Gobiiis niger, Lacép., 1. 11,668.) Ce poisson, que nous ne connaissons que par la description du savant voyageur dont nous lui affectons le nom, nous paraît devoir encore être placé parmi les espèces incertaines. Sa hauteur est le cinquième de sa longueur : sa tête en a plus du quart. Ses écailles sont menues, ses joues renflées; sa mâchoire supérieure est plus longue que l'autre et rétractile; ses dents sont très-rases; sa langue tronquée et même un peu échancrée; ses yeux, à la partie supérieure , à peine distans d'un diamètre. B. 4?D. 6 — 1/11 j A. 1/11, le deuxième double; C. 15, P. 15; V. 1/5. Il est tout entier d'une couleur noirâtre, tirant quelquefois au bleuâtre ou au brun verdâtre : le ventre est plus pâle. CHAP. IX. GOBIES. 137 Sa longueur est d'environ six pouces. On le trouve à l'Isle-de-France aux embou- chures des rivières, surtout aux endroits où le fond est vaseux. On en fait grand cas comme d'un aliment sapide et léger. Nous devons faire remarquer que Lacépède, en publiant cette espèce sous le nom de Gohius niger, ne la regardait pas comme identique avec celle du même nom dans Linnë. Le GOBIE BLEU. {Gohius cœruleus , Lacép., II, 56o.) Commerson a décrit un petit gobie à tête obtuse; à petits yeux écartés; à dents marquées à la mâchoire inférieure, mais très -rases à la supé- rieure; à écailles rudes; à rayons de la première dor- sale prolongés en soie, dont il marque les nombres, B. 4 ?D. 6 _ 1/11 , dont le dernier double et prolongé ; A. 1/10 , le dernier double ; C. 14 et quelques petits; P. 20; V.1/5. Sa hauteur est six fois et demie dans sa longueur, et sa tête aussi. Il est entièrement d'un beau bleu: plus pâle en dessous, excepté la caudale, qui est oran- gée et bordée de noir. Sa taille est de trois à quatre pouces. Commerson l'observa en Janvier 1771, aux embouchures des rivières de l'île de Bourbon. Les nègres s'en servent pour appâter leurs li- gnes. i58 LIVRE XIV. GOEIOIDES. Le GOBIE GUTAM. ( Gobius Gutam , Ham. Buclian. ) C'est une petite espèce des Indes, décrite par M. Buchanan, et dont la figure a été don- née par M. Gray, dans son Prodromusfaunce indicœy pi. 2 , fig. i . Les formes de son corps et de sa tête paraissent peu différer de celles du gobius niger, mais ses dor- sales sont plus hautes que le corps; la première est pointue: ses deux premiers rayons sont les plus grands. Sa mâchoire supérieure avance plus que Tautre. Le GOBIE CHINOIS. (Gobius chi/iensisj Osbeck, p. 260; trad. ail., 34o; Gobius eleotriSj Linn. , édit. XII, p. 449? "^ Chiii. sinn-hao.) C'est une espèce encore plus mal connue, dont Osbeck donne les nombres comme il suit : B.5jD.6 — lljP. 18 ; V. 8, réunis en entonnoir î A. 8 5 C. 12. Le corps est rond , verdâtre. Écailles petites , rhomboidales , vertes ; mâchoires inférieures plus avancées ; dents en plusieurs rangées , petites , poin- tues; yeux supérieurs. CHAP. X. GOBIOÏDES. 159 CHAPITRE X. Des Gobioïdes, Lacëp.; et en particulier du Gohioïde Broussonnet. Les gobioïdes de Lacëp ède ne diffèrent gë- nëriqiiement des gobies que parce que leurs rayons du dos, soit épineux, soit mous, sont tous rëunis dans une seule nageoire égale, basse, qui règne jusqu'à la caudale. On ne connaît bien qu'une espèce de ce genre; car le gobius anguillaris de Linné, que Lacëp ède y range, est un amblyope , et le gobius melanurus, qui n'est indiqué que par son nom dans la première Décade de Broussonnet, ne peut pas être regardé comme un poisson connu; enfin, le gobioïde smjrnéen est un poisson d'une tout autre famille , du genre Gycloptère. Le GoBioïDE Broussonnet. ( Gobioïdes Broussonneti ^ Lacép. , t. II , p. i 80. ) ^f Ce gobie, que Schneider, dans ses Addi- tions au Système de Bloch, p. 548, a nommé gobius oblongus, a été décrit par Lacépède d'après un individu de l'ancienne collection du Stadhouder, dont on ignorait l'origine. Depuis lors j'en ai acheté un autre à Amster- 140 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. dam, qui m'a été donné comme venant du Pérou. C'est un poisson alongé à tête courte, à queue poin- tue , à petites écailles. Sa hauteur est onze fois dans sa longueur , sa tête y est sept fois, sa caudale cinq. Sa tête, haute comme le corps, est d'un tiers moins large. Son profil descend peu; son museau est obtus; son œil, à peine du septième de la longueur de la tête, est à deux fois cette distance du bout du mu- seau, à quatre de l'ouïe, et n'est séparé de celui de l'autre côté que d'un diamètre. La bouche descend obliquement en arrière jusque sous l'aplomb du mi- lieu de l'œil; elle n'a que des dents en velours très- ras sur une bande étroite, avec une rangée de plus longues, mais encore très-fines et très-serrées. Il n'y en a ni au palais ni à la langue, qui est large, obtuse et peu libre. L'opercule prend plus du tiers de la longueur de la tête. L'orifice branchial, quoique ou- vert seulement dans la partie verticale, est néanmoins assez ample. La pectorale n'a guère plus du douzième de la longueur totale; on ne lui voit point d'efElé. La ventrale, un peu plus longue, fait parfaitement l'entonnoir. La dorsale commence à l'aplomb du mi- \' lieu de la pectorale; sa hauteur moyenne est à peu près du tiers de celle du corps; elle a sept rayons simples et quinze branchus, vingt-deux en tout, dont le dernier double (ce que Lacépède a compté vingt- trois); elle se joint juste à la naissance de la caudale. La distance du museau à l'anale est des deux cin- quièmes de la longueur totale. L'anale a un rayon simple et quinze rameux, dont le dernier double. CHAP. X. GOBIOÏDES. 441 B. 6; D. 7/15; A. 1/15 j C. 18 et quelques petits; P. 18; V. 1/5. Sur le devant les écailles ne se marquent que comme des pores; elles grandissent un peu vers l'arrière, mais demeurent toujours fort petites. La couleur pa- raît fauve en dessus, blanchâtre en dessous. Vingt et quelques taches triangulaires brunes occupent toute la longueur du dos et se joignent par des lignes ou bandes obliques à autant de taches noirâtres, qui régnent tout le long du flanc au milieu de la hauteur. Les rayons des nageoires sont jaunâtres, et leurs membranes transparentes. La dorsale a sur la sienne un léger nuage gris en avant de chaque rayon : la caudale est un peu plus brune. Ce poisson a un canal intestinal fort long et replié sur lui-même un grand nombre de fois; il forme un tube très -fin, dont les parois sont très -minces. Le foie, composé d'un très-grand nombre de lobules, se porte dans l'hypocondre gauche jusqu'au fond de l'abdomen , le lobe droit est très-court. La rate, noire, alongée, est re jetée loin de l'estomac, entre le rectum et le second repli du duodénum. L'individu est une femelle dont les œufs sont d'une petitesse extrême, et qui a une papille génitale assez courte. Il n'y a point de vessie aérienne, les reins sont fort gros. Notre plus grand individu est long de neuf pouces. • 442 LIVRE XIV. GOCIOÏDES. CHAPITRE XL Des Apocryptes , des Trypauclienes et des Amblyopes. DES APOCRYPTES. Les Indes orientales possèdent des poissons à ventrales réunies comme celles des gobies , à deux dorsales, à corps alongë, à longue cau- dale pointue comme le gobie lancette ; mais qui se distinguent parce que leurs dents, poin- tues et séparées, sont sur une seule rangée à chaque mâchoire, sans dents en velours, et qu'il y en a deux un peu en arrière dans la mâchoire inférieure. Leurs écailles sont géné- ralement très-petites. Nous avons cru devoir en faire un petit genre séparé, et leur affecter spécialement le nom ai apocryptes, sous lequel Osbeck avait com- pris une de leurs espèces observée près de Canton, celle qui est devenue ensuite le ^o- hiiLS pectinirostris de Linné. Buchanan en a décrit deux autres, qui portent au Bengale le nom de chan^ua^ en commun avec les am- 1. Il j en joint une troisième , son Gobiusviridis ,^\. ù2 , fîg. 12 , mais qui est un pcriophthaline. CHAP. XI. APOCRYPTES. 143 blyopes, dont elles ont toutes les habitudes, cest-a-dire qu'elles s'enfoncent comme elles dans la vase des étangs et de rembouchure des rivières. Leur nom générique à la côte de Coroman- del est vettj (manche ou gaine de couteau), et il leur est également commun avec les am- blyopes et même avec les trypauchènes. L'Apocrypte bato. {Apoayptes hato, nob.; Hamilt. Buchan.,pl. Sy, % 10.) La première des espèces de Buclianan, qu'il nomme hato, semblerait, par ses formes et ses vingt et un rayons à la seconde dorsale , répondre au poisson dont Gronovius a donné la figure {Zooph.j, pi. 4> fig- 4 )? t^^^^ en la rap- portant mal a propos au gobie lancette d'Amé- rique : cependant il lui représente des écailles, dont celui de Buchanan serait privé, ou n'en aurait du moins que de beaucoup plus petites, et ses nageoires ont aussi d'autres proportions. Le bato^ d'après Buchanan^ a le corps glissant, un peu transparent, sans écailles, d'un vert pâle en dessus, semé de nombreux points noirs, blancs en dessous, argentés aux flancs; ses nageoires dorsales sont aussi ponctuées. 1. Poiss. du Gange, p. ^o. 144 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Sa langue a à sa base le même renflement vert et doré que celle du gobiiis lanceolaius d'Amérique. D'après la figure (pi. Sy, fig. lo), sa hauteur est près de dix fois dans sa longueur, dont la tète prend un sixième et la caudale deux septièmes. Son œil est placé au tiers antérieur de la tête près de la ligne de profil, et à partir de là en avant, cette ligne se courbe en quart de cercle, La mâchoire inférieure est un peu plus courte. Sa première dorsale n'est pas plus haute que la se- conde, et celle-ci n'occupe qu'un peu moins du tiers de sa longueur totale. Ses nombres sont : D. 5 — 21; A. 22, etc. Cest un petit poisson de cinq pouces, qui se trouve aux embouchures du Gange. Le gobie dont Gronovius donne la figure a, avec les nombres et la forme de tête du G. bato , sa deuxième dorsale plus étendue en longueur; elle a près de moitié de celle du poisson, et sur la gravure on lui a marqué des écailles à peu près aussi grandes qu'au gobie lancette d'Amérique. D. 5 — 21; A. 18, etc. La figure lui donne cinq pouces et demi. Nous aurions peut-être été tentes d'établir deux espèces sur ces indications, si M. Du- vaucel ne nous avait envoyé du Bengale un gobie qui nous paraît donner un moyen d'ex- pliquer leurs différences : c'est bien certaine- ment le bato. CHAP. XI. APOCRYPTES. 145 Il en a exactement les nombres et les formes, mais il n'est pas vrai qu'il soit privé d'écaillés : elles sont plus ou moins cachées sous l'épiderme, et peut-être qu'à l'état de vie, elles le sont encore par une couche muqueuse épaisse qui rend le corps glissant. Quoique petites, on les enlève aisément; elles sont rondes, fine- ment striées et ciliées à la partie visible, avec huit ou dix rayons et autant de crénelures au bord radical. Cependant Gronovius les a représentées trop grandes et a un peu trop alongé son poisson. L'œil a le cinquième de la longueur de la tête; il y a un diamètre d'œil entre les yeux et jusqu'au bout du museau, lequel est arrondi dans les deux sens. La bouche, à peu près horizontale, n'est fendue que jusque sous le milieu de l'œil et ne prend que le quart de la longueur de la tête. La mâchoire inférieure est un peu plus courte ; il y a à chacune à peu près vingt dents fines, pointues, sur une rangée; au milieu de l'inférieure, un peu en dedans, en sont deux placées sur un tubercule plus élevé que le bord de la mâ- choire. Z^'Apocrypte changua. {Âpocrjptes changua y nob. ; Gobiiis changua , Hamilt. Buch.; Eleotris lanceolata^ Bl. Schn.) Une autre espèce, publiée parM. Buchanan, est son gobius changua (pi. 5, fig. lo), qui se distingue par les trente ou trente et un rayons de sa seconde dorsale. M. Leschenault nous l'a aussi envoyée de 12. lO 146 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Pondichéry, où elle se nomme Jiei-vetly {yetty gras). M. Rayiiaud l'a rapportée de Rangoon, et M. Reinwardt de Batavia. Je me suis assuré par une confrontation directe avec l'original de Bloch, que c'est Fe- leotris lanceolata de ce naturaliste ' ; mais bien certainement elle n'appartient pas au genre eleotris, méine d'après la définition que Bloch lui a donnée; sa ventrale est sous tous les rap- ports une ventrale de gobie. Sa hauteur est neuf fois dans sa longueur, sa tête sept fois, sa caudale près de cinq, ses pectorales et sa ventrale neuf. Le bout du museau est arrondi dans les deux sens; le diamètre de l'œil est du sixième de la longueur de la tête; il est à un diamètre du bout du museau, et il n'y a pas un diamètre d'un oeil à l'autre. La bouche, presque horizontale, n'est fendue que jusque sous le bord postérieur de l'oeil, et ne prend que le tiers de la longueur de la tête. Ses dents, fines et pointues , mais bien distinctes, sont à chaque mâchoire sur une rangée de vingt-quatre. Les deux dorsales sont basses et à peine du tiers de la hauteur. D. 5 — 1/30 ; A. 1/29. Tout le corps est couvert de si petites écailles, qu'elles ne se montrent que comme une légère fipreté; mais quand on les enlève, on voit qu'elles sont ron- des, finement striées de lignes concentriques, avec 1. Sjst. pojih., pi. 15, p. 67. CHAP. XI. APOCRYPTES. 147 quelques rayons et cinq ou six crénelures vers le bord radical. Tout ce poisson est gris-brun tirant un peu au gris jaunâtre en dessous ; des marbrures nuageuses brunes, peu apparentes, se montrent en divers endroits du dos. On voit quelques points brunâtres sur les côtés du museau et aux joues. Les rayons de la caudale et les derniers de la deuxième dorsale ont des points bruns. Ce poisson a le foie aussi considérable que celui du gobioïde Broussonnet, mais le canal intestinal, quoique replié plusieurs fois sur lui-même, est beau- coup plus court. Le péritoine est d'un noir d'encre assez intense ; et l'on voit briller au-dessus du rectum , vers le fond de l'abdomen, un corps ovale alongé, qui est une très-petite vessie aérienne. Les organes sexuels n'étaient pas assez développés pour que je puisse en parler. Notre individu a près de six pouces. M. Les- clienault en a dessiné un de sept. Cet observateur nous annonce que l'on trouve ces poissons aux environs de Pondi- chéry , aux embouchures des rivières et dans les étangs salés; ils s'y tiennent près des bords, enfoncés dans la vase. L'individu de Bloch venait de Tranquebar. M. Buchanan a pris les siens aux embou- chures du Gange. La figure que Bloch donne de ce poisson % 1. Sjst. posth., pi. i5. 448 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. est défectueuse , surtout en ce qu'elle fait les yeux trop petits, la caudale trop longue, et les écailles beaucoup trop grandes. Celle de M. Buchanan' est au contraire fort exacte. Zy'APOCRYPTE A LONGUES DENTS. {Apocijptes deiitatuSj, nob.) Un troisième de ces apocryptes, dont M. Buclianan n'a point parlé, a été envoyé aussi par M. Leschenault de Pondichéry, ori il se nomme simplement vettj, et a été retrouvé au Bengale par M. Bélanger et par M. Dussu- mier. Il est remarquable parla grandeur de ses dents et la petitesse de ses yeux; ce dernier caractère conduit presque aux amblyopes. Sa hauteur est environ quatorze fois dans sa lon- gueur , sa tête huit, sa queue quatre et demie, les pec- torales et la ventrale dix et demie. Son oeil est du sixième de la longueur delatête, àundiamèlreet demi du bout du museau, à un demi-diamètre de l'autre oeil. Le museau est arrondi dans les deux sens; les mâchoires égales; la bouche horizontale, fendue jus- que sous l'arrière de l'oeil, et porte à chaque mâ- choire une vingtaine de dents, dont les dix du mi- lieu sont plus grandes que les autres. Celles de la mâchoire inférieure sont disposées horizontalement, et l'on y voit les deux intérieures implantées sur un tubercule. Les dorsales sont basses. La membrane de 1. Poiss. du Gange, pi. 5, fig. lo. CHAP. XI. APOCRYPTES. 149 ' la première se continue assez loin jusqu'à la base de la seconde. D. 5 — 1/31; A. 1/30. Les écailles sont fort petites , mais d'ailleurs sem- blables à celles des précédens. Tout le poisson paraît d'un brun olivâtre, plus pâle en dessous. Il y a des points bruns sur les rayons de la caudale, dont le fond est roux. Je n'ai pu observer les viscères de cette espèce, mais j'ai fait sur le squelette les obser- vations suivantes : Le crâne de cet apocrypte est plus étroit que ce- lui des gobies, mais presque aussi plat. L'orbite a en arrière la deuxième petite pointe que nous remar- querons dans les boléophthalmes. Les os de l'épaule sont semblables à ceux des gobies; ceux du carpe sont grands, rectangulaires et presque membraneux. Le bassin est plus court que dans les gobies. L'épine du dos, quoique plus alongée, n'a pas plus de ver- tèbres : douze abdominales, quinze caudales; toutes, excepté la dernière, en forme de cônes, disposées la pointe en avant et la base en arrière. Les apophyses verticales tiennent à la partie antérieure et rélrécie de leur corps. Les interépineux sont fort petits, et les côtes fort grêles et fort courtes. Les habitudes de cette espèce sont lesmêmes que celles du nei-vettj ou changua : elle se tient dans la vase sur les bords des rivières près de leur embouchure, ou dans les lacs 150 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. sales. M. Dussumier l'a trouvée dans les étangs de Calcutta. Les Indiens la mangent. Sa longueur est de six à huit pouces. Z/'ApO CRYPTE A DENTS EN PEIGNE. {Jpocr}'ptes pectinirostris , nob.; Gobais pectiniros- tris, Linn.) A en juger par la description que donne Osbeck* de son apocrjptes chinensisy et par celle de Linné ^, à laquelle est jointe une pe- tite figure, ce poisson ne doit pas différer beau- coup du précédent. Il a de même le corps aloiigé, comprimé; la cau- dale poizitue; les écailles à peine visibles; les dents découvertes, et celles de la mâchoire inférieure diri- gées horizontalement : mais on lui donne d'autres nombres de rayons. D. 6 — 26; A. 25; C. 15; P. 19; V. 1/5. Sa mâchoire supérieure a de chaque côté trois canines, et l'inférieure deux. Les yeux sont fort haut placés et très-rapprochés. Les rayons de la première dorsale s'alongent un peu en filets. Le dos est gris, avec des nuages rougeâtres et bleuâ- tres; le ventre est blanchâtre, les nageoires sont grises ; les dorsales ont des lignes transversales bleues et des taches noires vers la base. Il est long d'un empan. 1. Voj. p. i3o, et Irad. ail., p. 170. — 2. Amœn. ac, t. IV, pi. 3, fig. 3. CHAP. XI. APOCRYPTES. 151 Les Chinois de Canton nomment ce pois- son fai-Juj ils le prennent en tendant sur le bord de la mer des nattes qui le retiennent lors du reflux. Il saute alors avec vivacité, et lorsqu'il ne voit aucun moyen d'échapper, il s'enfonce dans le sable à un pied de profon- deur; mais on le poursuit dans tous ses refuges. Frit dans Fhuile, il fait avec le riz une des principales nourritures des pauvres.' jL'Apocrypte a large gueule. {Apociyptes rictuosiis , nob.) M. Leschenault nous a envoyé de Pondichéry un gobioïde à caudale quelquefois plus longue même que celles des lancettes d'Amérique, dont il se rapproche d'ailleurs par la grandeur des écailles , mais qui se distingue par les vingt- sept rayons de sa deuxième dorsale. On l'ap- pelle en ce pays koudiré-vetty (vettj chei^al). Sa hauteur est jusqu'à quatorze fois dans sa lon- gueur totale, dont la caudale, dans ceux qui l'ont bien entière, fait plus du tiers; mais cette longueur de la caudale varie en général dans toutes ces espèces ; elle diminue avec l'âge, probablement par la détrilion. Sa tête est six fois dans la longueur et aussi large que haute , au moins en arrière. L'œil est petit : son diamètre est plus de cinq fois dans la longueur de 1. Osbcck, loc, cil. 152 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. la tête. Le museau est obtus, arrondi iransversalementi La gueule descend obliquement en arrière et est fen- due jusqu'au-delà de l'œil. L'œil prend près de moitié de la longueur de la tête. Les mâchoires ne se dépassent pas , et n'ont que des dents excessivement fines et au nombre de plus de cinquante à chacune. La langue, épaisse, a à sa base la même partie bleue et brillante, comme une éme- raude. Les écailles , comme dans legobius lanceolatus , vont en grandissant vers l'arrière. La première dorsale s'élève peu au-dessus de l'autre. D. 6 — 1/27 ; A. 1/-26. La couleur est un gris -brun clair en dessus, blan- châtre en dessous. On voit des points bruns sur les rayons de la caudale. Cette espèce atteint six et sept pouces de longueur. Elle se tient dans la vase, et l'on en prend en abondance à l'embouchure de la ri- vière d'Arian coupang : elle est bonne à manger. LES TRYPAUCHENES {Trypauchen, nob.). Sous ce nom, qui signifie nuque percée (de T^uTra et de xvxrjv), nous formerons un petit genre dont nous ne connaissons jusqu'à présent qu'une espèce, et qui, avec la ventrale en ven- touse des gobies, avec une dorsale unique et une anale qui vont rejoindre la caudale, se dis- tingue par ce caractère tout particulier, qu'au- CHAP. XI. TRYPAUCHÈNES. 155 dessus de l'opercule et dans la membrane qui se joint à la nuque, est creusée une fossette profonde que l'on prendrait d'abord pour un trou qui pénétrerait aussi dans la cavité bran- chiale, et semblable à celui des callionymesj mais qui en diffère beaucoup, en ce que son fond n'est pas percé et ne communique, pas avec les branchies. C'est un de ces caractères dont on trouve plus d'un exemple dans la na- ture, et que l'on dirait n'avoir pour objet que d'établir un intermédiaire , un passage entre deux genres voisins. Le Trypauchène. ( Trjpauchen vagina^ nob. ) La seule espèce de ce genre que nous possé- dions, a été décrite par Bloch', sôus le nom de gobius vagina. 11 favait reçue de John, selon lequel on la nommerait à Tranquebar, sewi^ôti (gaine ou manche de couteau rouge), comme un amblyope, avec lequel il paraît qu'on la confond en plus d'un endroit; car M. Dussumier l'a rapportée de Bombay pêle- mêle avec cet amblyope. A Pondichéry l'on paraît l'en avoir distinguée, et M. Leschenault nous apprend qu'on l'y nomme nalla-tannj^ 1. Svst. , p. 73, n.° 20. 154 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. neï-vettj^ ou vettj gras d'eau douce. Vetty (manche ou gaine de couteau) est, comme nous l'avons dit, une dénomination générique, commune sur la côte de Coromandel aux apo- cryptes, aux amblyopes et h ce trypauchène, et vettj gras {neï-vettj) est, comme nous venons de le voir, le nom spécifique de notre apocrypte changua, qui est Xeleotris lanceolata deBloch ou le gobius changua de Buchanan. Ce poisson a le corps alongé et comprimé; sa hau- teur est du dixième de sa longueur; son épaisseur n'est pas tout-à-fait moitié de sa hauteur. Sa tête est sept fois et quelque chose dans sa longueur totale, et elle a en hauteur les trois cinquièmes de sa lon- gueur, et en épaisseur plus de moitié de sa hauteur. La ligne du crâne est droite et tranchante, ensuite le profil descend obliquement par une ligne droite. Cette partie de la face est un plan triangulaire, dont la pointe remonte au-dessus des yeux; le reste du profil, en courbe convexe, appartient à la mâchoire inférieure, dont les branches sont très-hautes; c'est elle qui forme l'extrémité antérieure, la bouche étant fendue obliquement sur le bout du museau, et en ligne un peu courbe, qui descend en arrière. L'œil est fort petit : sa distance au bout de la mâchoire supérieure est le tiers de sa dislance au bout de l'o- percule. Il n'y a pas tout-à-fait aussi loin d'un œil à l'autre. Chaque mâchoire a une rangée de dents poin- tues inégales, et plus en arrière une bande étroite de dents en velours ; il n'y en a point au jialais ni CHAP. XI. TRYPAUCHÈNES. 155 sur la langue, qui est libre, obtuse et assez aplatie en avant. Le préopercule et l'opercule sont plus ou moins arrondis, sans épines ni dentelures. La membrane des ouïes se fixe au côté de l'isthme, et le haut de l'opercule par sa membrane à l'épaule; en sorte que la fente des ouïes est réduite à sa partie verticale. Au- dessus de l'opercule, dans la membrane qui joint son bord supérieur à la nuque et à l'épaule, est une fossette ovale et profonde, que l'on prendrait d'abord pour un trou pénétrant, mais dont le fond n'est pas percé. Il n'y a que quatre rayons branchiostèges. La ventrale et les pectorales sont pointues et très-petites, ayant à peine le seizième de la longueur totale. L'en- tonnoir de la ventrale est bien prononcé. La dorsale est basse, surtout de l'avant; en arrière elle s'élève un peu par degré; il en est de même de l'anale, et l'une et l'autre se joignent à la caudale par une membrane, de façon que l'on voit cependant leur distinction. L'anus est au tiers antérieur; la caudale est pointue et du sixième environ de la longueur. B. 4; D. 6/49; A. 1/45; G. 17; P. 17; V. 1/5.' Les écailles sont fort sensibles et présentent l'ap- parence d'un rets à mailles rhomboïdales; il y en a environ soixante-dix sur une ligne longitudinale, et douze ou quinze sur une ligne verticale; elles sont rondes , et à la loupe on voit que leur partie extérieure est très-finement siriée et ciliée, et que leur éventail a 1. Bloch compte : D. 56; A. 44; John : D. 53; A. 44; mais ce sont de légères différences dues au plus ou moins d'attention de l'obsenaleur. 156 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. . dix OU douze rayons et autant de crénelures peu marquées. La ligne latérale n'est qu'une légère strie longitudinale marchant par le milieu de la hauteur. Dans la liqueur nos individus paraissent bruns ou fauves. A l'élat frais le poisson est rougeàtre. Sa taille est d'environ huit pouces. Le foie de ce irypauchen est très-gros, car il occupe tout le côté droit du ventre. L'intestin est replié sept à huit fois sur lui-même, mais il est cependant encore plus court que celui des apocryptes. Le rectum est large. Les ovaires sont petits , cylindriques , rejelés vers le fond de l'abdomen; les œufs sont d'une petitesse excessive. Je ne vois pas de vessie aérienne, le péri- toine est rougeàtre. Le crâne a la face supérieure à peu près carrée. Une crête longitudinale assez forte s'unit au front , qui forme entre les orbites une lame verticale un peu élargie en avant et en dessus. Il n'y a en arrière de l'orbite que la pointe du frontal postérieur : la lame de l'antérieur est réduite à rien. Les os de l'épaule sont grêles et étroits, et ceux du carpe très-petits. Il y a dix vertèbres abdominales et vingt -quatre cau- dales, etc. Du reste ce squelette ressemble au précé- dent pour la plupart des détails. Nous avons pu comparer le poisson deBloch, long d'environ six pouces, avec nos individus; il est un de ceux que M. Lichtenstein nous a confiés avec la plus grande libéralité : qu'il en reçoive ici de nouveau l'expression de notre sincère reconnaissance. CHAP. XI. AMBLYOPES. 157 L'espèce est, selon M. Leschenault, plus rare a Pondicliéry que plusieurs autres vettjs. On la trouve dans les étangs d'eau douce, dans la vase. Elle se mange. John la dit peu estimée. Nous l'avons reçue aussi du Bengale par M. Bélanger, et de Bombay par M. Dussumier; ainsi l'on peut supposer qu'elle habite au moins toute la presqu'île de l'Inde en deçà du Gange. LES AMBLYOPES (Jmblvopus, nob.). Par ce nom, que nous croyons devoir subs- tituer à celui de tœnioïde , qui est susceptible d'équivoque, et que son auteur, M. de Lacé- pède, n'a accompagné que d'une définition à la fois fausse et incomplète, nous désignons des poissons alongés, à ventrale de gobie, dont les trois nageoires verticales sont réunies; dont la bouche, armée de dents crochues et décou- vertes, est fendue verticalement, et dont sur- tout les yeux sont tellement petits , qu'à moins d'enlever la peau on a peine à les distinguer. C'est de cette particularité que nous dérivons le nom d'amblyope d'àjwÊXivojTroçr (à vue faible). Ces poissons ressemblent beaucoup aux try- pauchènes, mais leur tête n'est pas si compri- mée, et ils n'ont pas le trou de chaque côté de la nuque, qui caractérise cet autre genre. 158 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. M. de Lacépède a décrit (t. IV, p. 533) un de ces poissons, qu'il compare aux cëpoles et nomme tœnioïde herniannien; et comme il ne cite aucune autorité, ceux qui ne con- naissent pas les matériaux dont il a disposé, pourraient croire que sa description est faite d'après nature , et qu'il a observé en effet les barbillons, les facettes de la tête, l'absence de nageoire caudale, dont il parle expressé- ment, et ils s'étonneraient seulement qu'il ait négligé de parler de tant de choses essentielles, et notamment des nombres des rayons des nageoires, qu'ailleurs il a été en général assez soigneux de donner. La vérité est qu'il n'a rédigé son article que sur sa gravure {ib.^ pi. i4, fig- 1)5 ^^^ cette gra- vure n'est que la copie peu exacte d'une pein- ture chinoise du Recueil du Muséum d'his- toire naturelle, et que c'est par la faute du graveur que les rayons de la caudale ont dis- paru, que les dents ont été changées en bar- billons et qu'il y a des points noirs sur les nageoires, que les pectorales ressemblent à de l'effilé, etc. Quant à la ventrale, la figure originale ne la montre pas mieux que la gra- vure, et il était permis de ne pas la recon- naître pour une ventrale de gobie. Shaw, qui ne connaissait ce poisson que CHAP. XI. AMBLYOPES. -159 par Lacëpède, est peut-être excusable d'en avoir fait une cépole^; mais ce qui est tout- à-fait impardonnable, c'est que Bloclî ait agi de méme% lui qui en a reçu de John et en a même fait graver^ un dessin fort exact, où sur- tout la ventrale est parfaitement représentée. Ce qui n'est guère moins singulier, c'est que personne, avant M. Buchanan'*, ne se soit aperçu que le gobiiis anguillajis de Linné est du même genre, et cependant la descrip- tion de Linné est aussi claire que caractéris- tique. ^ Z/'Amblyope Hermannien. {Ambljopus Hermannianus , nob. ; Tœnioïâe Her- mannien, Lacép.) Bien que Ton ne puisse pas être absolument certain que ce soit ici l'espèce à laquelle M. de Lacépède a donné cette épithète, nous la lui donnons nous-mêmes, d'une part, parce que sa ressemblance avec la figure chinoise dont Lacépède a tiré son article, est plus grande 1 . Cepola Hermanniana , Shaw. Gen. zool. , t. IV, pari. 2 , p. 191. — 2. Cepola cœcula , Bl. Sclin., p. 241, n." 3. — 3. Ib.^ pi. 54. — 4. Gangei. Fishes , p. 56. 5. Gobius angidllaris finna dorsali unica , habit, in China. D. 52 ; P. 12; V. 10; A. 43; C. 12. Corpus lubricum anguillœ, pingue^ subdiaphana cute ut venœ transpareant ; pinnœ omnes rubrœ; dorsalis et ani in caudam excurrenies. Os simum, deniibns crserium; pinnœ pectorales valde parvœ, rotundatœ. , 400 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. que celle d'aucune des espèces suivantes, et de l'autre, pour ne pas anéantir un hommage qui avait été rendu à un naturaliste digne d'éloges. Son corps est tout d'une venue, seulement un peu comprimé en arrière, à peu près comme celui d'une anguille; mais la différence est grande en avant, où il a l'air d'avoir été tronqué, à cause de la direction verticale de la mâchoire inférieure. Sa hauteur est environ treize fois dans sa longueur; son épaisseur est des deux tiers de sa hauteur; la longueur de la tête est du septième de celle du pois- son , et c'est aussi à peu près celle de la caudale pointue à laquelle s'unissent une anale et une dorsale, longues et basses. La mâchoire inférieure remonte verticalement au- devant de la supérieure, et ferme ainsi le bout du mu- seau comme un couvercle dont la charnière serait en bas. La fente de la bouche est aussi elle-même presque verticale, et la mâchoire supérieure forme un demi-cercle, auquel s'adapte la mâchoire inférieure. Chaque mâchoire a huit ou dix dents découvertes, longues, crochues et très-pointues, et celles de l'une croisent celles de l'autre quand la bouche se ferme; il y en a de plus à la mâchoire inférieure une impaire plus en dedans : le palais n'en a aucunes. La langue est une masse charnue, lisse, sphérique, qui a l'air de fermer le gosier comme un bâillon. L'œil est un petit point presque imperceptible, à une distance du museau qui équivaut au cinquième de la longueur de la tête, et la distance d'un œil à l'autre est à peu près la même. Au-devant de chaque CHAP. XI. AMBLYOPES. 161 œil sont deux peiis irous très-rapprocliés, comme des piqûres d'aiguilles , qui sont les orifices de la narine. La tête est à peu près cylindrique. Au travers des tégumens se voit le bord arrondi du préopercule. L'opercule, à peu près du quart de la longueur de la tête, n'a aussi ni pointe ni autres éminences. Les membranes des ouïes s'attachent, chacune de son coté, à l'isthme, en sorte que l'orifice branchial n'est que vertical, et ne s'ouvre point en dessous; elles ont chacune cinq rayons, dont le premier est large et plat, La pectorale, fort petite, est près de vingt-sept fois dans la longueur du corps; ses rayons sont au nombre de quinze. La ventrale est presque trois fois aussi lon- gue, ovale; sa membrane antérieure est fort courte, ainsi que ses deux épines, qui du reste ne font point de sailhe. La dorsale commence au premier cinquième du corps et l'anale au deuxième. Je compte à la pre- mière six rayons simples et quarante branchus, à la seconde un simple et trente-sept branchus, et il en reste ainsi quinze pour la caudale. Cependant, comme les trois nageoires verticales ne sont pas séparées, on pourrait aussi compter autrement : au total il y en a toujours quatre-vingt-dix-neuf B. 5 ; D. 6/40 ; A. 1/37 ; C. 15 ; P. 15 ; V. 1/5. Derrière l'anus est la papille génitale ordinaire. On ne voit point d'écaillés à la peau : les inscriptions tendineuses des muscles y marquent des impressions en demi-cercle. La ligne latérale est une simple strie, qui suit en ligne droite le milieu de la hauteur du corps. Dans la liqueur ce poisson paraît brun ou grisâtre, 12. 11 462 LIVRE XIV. GOniOÏûES. et ses nageoires sont noiràires. A l'état frais, il est d'un rouge plus ou moins foncé, plus ou moins san- guin. Sur noire peinture chinoise, on lui donne sur un fond rose à reflets dorés, des arcs transverses tirant au lilas, et on lui colore les nageoires en rouge un peu orangé. Dans une autre peinture chinoise qui est à Londres, il est d'un rose un peu jaunâtre, avec des veines et des taches roses. Nos plus grands individus sont longs de dix pouces. Ils viennent des étangs de Cal- cutta, et nous les devons à MM. Duvaucel et Dussumier; c'est le chcmgua des habitans du Bengale j décrit et représenté par M. Bu- chanansous le nom de gobioicles ruhicundus.^ M. Raynaud nous l'a aussi rapporté de Ban- goon , où les Birmans le nomment majenna. Le foie de ce gobioïde est remarquable par son volume et par la longueur de ses lobes. En ouvrant l'abdomen, on voit dans la partie supérieure la masse de ce viscère arrondie en dessous, creuse en dessus pour recevoir l'œsophage , et donnant ensuite deux lobes longs et étroits qui embrassent l'intestin et atteignent à l'extrémité de la cavité du ventre. Le lobe droit a un petit lobule latéral. La vésicule de fiel est longue, mais fme comme un gros crin. Le canal intestinal est simple, étroit, peu replié : cette espèce a une vessie aérienne à la partie antérieure du ventre; elle est argentée et nacrée. 1. Hamill. Buchan. , Ganget. fishes , p. 36, pi. 5, fig. 9. CHAP. XI. AMBLYOPES. 105 L'amblyope est de tous les poissons de la famille des gobies celui qui a sur le crâne la plus haute crête longitudinale; elle le parcourt tout entier et se porte jusque sur le front , qui s'élargit entre les orbites en une figure rhomboidale. L'apophyse postorbitaire et celle du frontal postérieur sont grandes et dirigées oblique- ment en avant; mais le frontal antérieur ne donne qu'une petite pointe. Les mâchoires sont très-fortes; le maxillaire est plus épais qu'aux gobies. Les os de l'é- paule sont aussi minces , mais ceux du carpe sont beau- coup plus petits. Les os du bassin , plus petits qu'aux gobies , forment à leur face supérieure une carène ana- logue, quoique plus faible, à celle des sicydiums.il y a onze vertèbres abdominales et dix-sept caudales, con- formées à peu près comme dans le irypauchen* L'Amblyope mayenna. {Amhljopus mayenna j nob.) Sous ce nom de mayenna, qui est proba- blement générique chez les Birmans , M. Ray- naud a rapporté de Rangoon un poisson de ce genre, dont le corps est plus comprimé et plus aminci en arrière; la caudale et les pectorales plus longues : la première n'est que quatre fois et demie dans la lon- gueur totale , et les autres sept fois : la tête y est six fois. Sa dorsale et son anale ont quelques rayons de moins. D. 6/37 5 A. 1/35 j G. 15. 164 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. M. Raynaud le peint d'un brun assez foncé. Les individus qu'il a rapportés sont longs de quatre à cinq pouces. Nous en avons aussi de semblables du Ben- gale et encore de plus petits. //'Amblyope rose. {Amhljopus roseus , nob. ) M. Dussumier a trouvé à Bombay une es- pèce à corps plus comprimé, à tête plus petite , à dents plus menues, et qui a les pectorales et la caudale presque aussi longues que le Mayenna. La longueur de sa tête est huit fois dans sa lon- gueur totale, celle de sa caudale quatre fois et deux tiers; celle des pectorales huit fois et demie. Ses rayons sont un peu plus nombreux. D. 6/43; A. 1/41. Sa couleur est rose, avec des nageoires verticales noirâtres. Les individus n'ont que quatre pouces et demi* M. Dussumier dit que l'espèce arrive à quinze ou à dix-huit pouces , qu elle est assez abondante pendant toute l'année dans le canal de Bombay, et qu'on la mange , quoique peu estimée. Nous en avons eu un de sept pouces parmi les collections de M. Polydore Boux. CHAP. XI. AMBLYOPES. 165 Z/'Amblyope SEVETY. {vàmbljopus cœculus, nob. ; Cepola cœcula j Bl. Scha. ? Gohius anguillariSjlÀnn..'}) M. Leschenault a envoyé de Pondichëry, sous le nom commun de sei>eti, deux espèces de ce genre, différentes entre elles; mais qui ont toutes les deux les pectorales petites et la caudale courte comme la grande espèce du Bengale. Il leur donne indistinctement une couleur de sang foncée, et les dit de bon goût. Ces poissons abondent dans les étangs d eau salée de Pondichéry et s'y tiennent dans la vase. La première de ces espèces a la tête sept fois dans sa longueur totale, la caudale quinze fois, la pecto- rale vingt et une. Sa dorsale est basse et épaisse, au point qu'il faut la disséquer pour en compter les rayons. Sa caudale est assez distincte des deux autres nageoires verticales. D. 6/435 A. 1/44; C. 13. Les individus sont longs de près de six pouces. Le cepola cœcula de Bloch * porte aussi à Tranquebar le nom de se\^ettj, que John écrit sewvoti et traduit dans un autre endroit^ va- gina cultri ruhra. Cependant il ne l'enlumine 1. Sjst. , p. 24i. — 2. Ib. , p. 73. 166 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. (pi. 54) que d'un gris bleuâtre, et ne donne de rose qu'aux pectorales et à la ventrale. Il compte pour les rayons : D. 50 ; A. 45 ; ce qui, à notre manière, donnerait D. 6/44; A. 1/^2. Néanmoins sa figure répond si bien à cette première espèce de Pondichéry, que nous croyons devoir l'y rapporter. C'est aussi de toutes nos espèces celle dont se rapproche le plus le gobius anguillaris de Linné, dont les nombres sont marqués : D. 52; A. 43 ;C. 12. Ses autres caractères ne sont que génériques. X' Amblyope grêle. {Ambljopus gracilis t nob.) L'autre de ces espèces de Pondichéry est la plus grêle du genre. A peu près ronde, elle a sa hauteur près de vingt fois dans sa longueur totale; sa tête y est neuf fois, sa caudale dix, sa pectorale près de trente. C'est aussi l'espèce qui a le plus de rayons. D. 6/49 j A. 1/48 j C. 12. Sa longueur est aussi de près de six pouces. CHAP. XII. SICYDIUMS. 4 G7 CHAPITRE XII. Les Sicfdiums (^Sicydium , nob.) Sous ce nom, qui signifie petite ventouse (de aïKvccy ventouse), nous formons un petit genre de poissons confondus avant nous parmi les gobies, et qui ont en effet aussi les ventrales réunies , mais pour former une sorte de cloche ou de bassin rond , concave , adhérent presque également de toute part; dont les mâchoires ont de plus une rangée de dents égales, ser- rées et flexibles , et en outre quelques fortes dents plus en dedans à la mâchoire inférieure. Ce genre est remarquable par les rapports qui l'unissent à trois autres différents. Ses dents sont en partie semblables à celles des salarias; sa ventrale ressemble à celle des cycloptères plus qu'à celle des gobies; mais pour tout le reste c'est des gobies, et des gobies à queue ronde, qu'il se rapproche; aussi a-t-on laissé parmi eux les deux espèces que Ton en a connues jusqu'à présent. L'une de ces espèces, originaire d'Amérique , et qui a été décrite et représentée depuis long- temps par Plumier, n'a été connue que par les travaux de Bloch (pi. 178, fig. 3) et de Lacépède ( p. 562 ) : c'est le ^ohius Plumieri de ces natu- 1G8 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. ralisteâj l'autre, qui appartient à la mer des Indes, avait été publiée plus tôt. Rcelreuter (p. 428, pi. 9, fig- 3 et 4) l'a fait connaître en 1764? dans le tome IX des Novi commentarii de Pëtersbourg, et Pallas en a donné une se- conde description en 1770, dans le huitième cahier de ses Spicilegia (p. 1 4, pi. 2, fig. 6 et 7), et lui a imprimé le nom de gobius lagocephalus. Nous en avons deux autres espèces, aussi de la mer des Indes. Le SicYDiuM DE Plumier. (SicfdiwJi Plumierij, nob.; Gobius Plwnieri ^Bloch, pi. 178,% 5;Lacép., t. II, pi. 16, fig. 2.) Plumier avait fort bien dessiné ce poisson, et avait entre autres passablement rendu sa ventrale; la figure de Lacépède n'est prise que d'une copie déjà un peu altérée par Aubriet, et cependant elle est moins infidèle que celle de Bloch, qui a changé la ventrale comme à plaisir et pour pouvoir dire dans son texte qu'elle n'est point propre à faire l'ofEce de ven- touse, ce qui est fort loin d'être vrai. Sa léte courte, large, à contour demi -circulaire; ses petits yeux écartés, sa gueule presque semblable à celle de certains crapauds, lui donnent une appa- rence très-différente de celle des gobies. Toutes ses formes sont lourdes. Presque rond en avant, sa liau- CHAP. XII. SICYDIUMS. 169 leur et sa largeur , à peu près égales entre elles , ont le septième de sa longueur j en arrière il est plus com- primé, mais non moins haut. La longueur de sa tête approche du cinquième de celle du poisson; elle a un tiers de moins en largeur et moitié moins en hau- teur; sa convexité est légère et égale à peu près en long et en travers. Le contour horizontal de son museau est en demi-cercle. L'œil, à égale distance du bout du museau et de l'ouïe, est rond et n'a en diamètre que le septième de la longueur de la tête : d'un œil à l'autre il y a deux diamètres. L'orifice antérieur de la narine est à moitié distance entre l'œil et le bout du museau; l'autre est beau- coup plus près de l'œil : tous deux sont comme de légères piqûres d'aiguille. La lèvre supérieure, char- nue et pendante, recouvre les dents, rangées sur une seule ligne au nombre de plus de cent, fines comme des cheveux, crochues et très -pointues au bout, flexibles comme celles des salarias et de couleur dorée. Derrière ces dents singulières il n'y en a point d'au- tres, et le voile, ordinaire à cet endroit dans pres- que tous les poissons , y commence immédiatement. La lèvre inférieure, charnue aussi, est beaucoup moins saillante, et laisse à nu une rangée de dents fines et dorées comme les premières, mais beaucoup plus courtes, et qui ne forment en quelque sorte que des cils très-courts, extérieurs à la mâchoire. Plus en dedans et à la place ordinaire est une rangée de vérita- bles dents au nombre de douze ou quatorze, fermes, coniques et pointues et un peu crochues; au milieu de celte mâchoire inférieure, entre ces deux rangées de 1 70 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. dénis, se voient deux petites proéminences rondes et charnues, et il y en a une autre, oblongue, de chaque côté près de la commissure. La langue est large, ob- tuse, convexe, peu libre, peu charnue, et n'a point de dents, non plus que le palais, qui a au-dessus de la langue une proéminence formée par le vomer. Le préopercule et l'opercule sont arrondis. La mem- brane des ouïes s'attache inférieurement au côté de la poitrine, de manière à ne laisser qu'un orifice ver- tical en avant de la pectorale, de moins de moitié de la hauteur du corps. La dissection y démontre quatre rayons. Les pectorales sont ovales, assez charnues à leur base, et ont dix-neuf rayons, tous branchus, dont les mitoyens sont les plus longs ; leur longueur est cinq fois et demie dans celle du poisson. Les ventrales sont réunies de manière à former une vraie ventouse circulaire, dont le diamètre surpasse un peu le sep- tième de la longueur du corps. Le bord en est formé en avant par la membrane antérieure, qui est assez charnue, et dans le reste du contour par les dix rayons mous, tous courts, fort branchus et évasés en éventail. Le milieu, qui est la peau même de la poitrine, occupe le tiers du diamètre et est marqué tout autour par six petites fossettes. On ne peut douter qu'ainsi disposée cette ventouse ne puisse, en faisant le vide, fixer le poisson aux divers corps, comme celle du cycloptère. La première dorsale commence au-dessus du milieu des pectorales; ses troisième, quatrième et cinquième rayons se prolongent en soies flexibles; les troisième CHAP. XTI. SICYDIUMS. 1 71 et quatrième jusqu'au double de la hauteur du corps: • il y en a six, comme dans le plus grand nombre des gobies. La seconde commence immédiatement derrière la première, à peu près sur le milieu de la longueur totale 5 elle surpasse un peu la hauteur du corps, et se compose d'un rayon simple et de dix branchus, dont le dernier est double : les postérieurs vont en s'a- longeant un peu. L'anale lui répond , est un peu moins haute et un peu moins longue, et a un rayon simple et dix branchus, dont le dernier aussi double. L'espace entre ces deux nageoires et le milieu de la caudale est du sixième de la longueur totale, d'un tiers moins haut que long, et trois fois moins épais que haut. La caudale a aussi le sixième de la lon- gueur et est arrondie; elle a dix-sept rayons bran- chus, dont les extrêmes, fort courts, en ont encore quelques petits en dessus et en dessous. B. 4îD. 6 — l/lOj A. l/lOjC. 11; P. 19 ; V. 1/5. Entre l'anus et l'orifice génital est la papille com- mune aux gobies et aux blennies. La tête, la gorge, l'épaule près la pectorale, toutes les nageoires, sont nues. Les écailles, médiocres sur le dos et les côtés, deviennent très -petites sous le ventre; on en compte près de quatre-vingts sur une ligne longitudinale, et plus de trente sur une ligne verticale; elles sont plus longues que larges, minces, flexibles, très-finement ciliées au bord libre; leur éventail, qui en couvre presque toute la surface, a une vingtaine de rayons. C'est à peine si le bord radical est crénelé. On ne peut distinguer la ligne latérale» ^72 LIVRE XIV. GOBIOÏDËS. La plupart des individus sont olivâtre foncé, tirant au jaunâtre sur les côtés, au blanchâtre vers le ventre. Les dorsales, lespeciorales, l'anale, tirent au noirâtre; mais il y a des variétés dans ces couleurs, et nous en avons un qui est irrégulièrement marbré de noir sur un fond jaune sur les côtés, et blanc à la tête et à la poitrine : ses nageoires sont presque noires. Le plus grand que nous ayons est long de cinq pouces ; celui de Plumier en avait six. Ce missionnaire nommait ce poisson cepha- lusjliwialis minor vulgo sucet^ et ce dernier nom, qui était de son temps usité à la Marti- nique, annonce que l'emploi de sa ventrale, comme moyen de se fixer, n'était pas ignoré des colons. Il le dit fort multiplié dans les rivières des Antilles, et assure qu'il est de bon goût et facile à digérer.^ Nos échantillons ont été pris par M. Pley dans la rivière d'Anaguabo à Porto-Rico. Les Espagnols de cette ile nomment l'es- pèce el olwo. Les viscères de ces poissons ressemblent à ceux des salarias^ c'est-à-dire qu'ils ont comme eux un canal intestinal roulé sur lui-même comme celui de nos têtards de grenouille. L'individu que j'ai disséqué, long de cinq pouces six lignes, contenait dans sa cavité abdominale, d'un pouce cinq lignes , un canal intestinal qui , développé, 1. Bloch , part. 5, p. i25. CHAP. XII. SICYDIUMS. 175 a un pied dix pouces sept lignes. Il était replié qua- torze fois sur lui-même. L'estomac est un peu plus large que le reste du tube digestif. Le foie est très-petit; la rate à peine grosse comme un grain de chenevis, au centre de la masse intestinale; les deux laitances étaient de simples filets : il n'y a point de vessie aérienne, le péritoine est brun foncé. La tête du sicydium de Plumier dans le squelette est fort différente de celle du gobie, par la forme ronde en avant et par la largeur du front entre les orbites. La convexité antérieure du museau est cou- verte par les os du nez et les premiers sous-orbitaires; quant aux autres, ils sont réduits à peu près à rien : le maxillaire n'est aussi qu'un léger filet. Le dessus du crâne est large, légèrement convexe sans crête; c'est à peine s'il y en a vestige à l'occiput, qui est très-peu élevé. Le surscapulaire est étroit; les os du carpe sont très-larges et non rétrécis dans leur milieu. Les os du bassin sont réunis en une espèce de coffre triangulaire, dont une des arêtes est supé- rieure, et qui doit loger des muscles puissans. L'épine du dos et ses accessoires sont comme dans les gobies : douze vertèbres abdominales; quinze caudales; les dernières apophyses transverses de l'abdomen obli- ques, dilatées, formant une espèce de bassin; des côtes grêles avec leurs appendices , etc. i7A LIVRE XTV. GOBIOÏDES. Le SiCYDIUM TÊTE DE LIÈVRE. {Sicjdiuni lagocephaliim , nob. ; Gobais lagocepha- lus, Pall.) La description de cette espèce par Rœlreu- ter% est très-détaillëe et très -exacte, et bien que Pallas dise la sienne plus complète (/?/e- nioreniY') je ne trouve pas que cette assertion soit justifiée. Cependant la figure de Pallas^, copiée dans l'Encyclopédie méthodique"^, sans être même absolument exacte (les dorsales y sont mal rendues), est faite d'après un indi- vidu mieux conservé que celui de Rœlreuter.^ Ce naturaliste ignorait la patrie de l'espèce; Pallas la croyait d'Amérique , mais elle est cer- tainement des Indes. Nous l'avons reçue plu- sieurs fois des eaux douces de l'Isle-de-France et de l'île de Bourbon par MM. Lesclienault, Quoy et Gaimard, Desjardins et Dussumier. Sa ressemblance avec l'espèce de Plumier est frap- pante pour les formes générales et pour tous les carac- tères génériques ; cependant sa tête est moins large à proportion : sa largeur ne surpasse pas sa hauteur; ses dorsales sont moins hautes; le troisième rayon de la première, qui est le plus long, n'a que la hauteur du 1. No«. comm. Petrop. , t. IX , p. 428. — 2. Spic. zool. , t. VIII , p, 14.— 3. W., pi. 2, fig. 5, 6et7.— 4.Fig. i4i — b.L.cii., pi. 9,fig. 5el 4. CHAP. XII. SICYDIUMS. 175 corps, et la seconde dorsale a moitié moins. Il y a un rayon de plus à cette nageoire, ainsi qu'à l'anale. D. 6 — 1/11; A. 1/11. Les petites dents flexibles sont si déliées, que celles d'en bas ont échappé aux deux célèbres naturalistes que nous avons cités. Quant aux fortes dents de la mâchoire inférieure, il y en a d'abord deux grandes crochues en avant, puis quatre ou cinq petites de chaque côté , dont les dernières reprennent quelquefois un peu de force. Ses écailles en avant du dos et sous le ventre sont aussi grandes que les autres, ce qui le dislingue sensi- blement et de l'espèce de Plumier et de l'espèce noire: elles ne sont très-petites que tout-à-fait près la nuque. Dans la liqueur il paraît d'un gris-brun roussâtre, souvent avec de grands nuages plus bruns, tantôt sur le dos, tantôt le long des flancs. Ses nageoires sont brunâtres, excepté la ventouse, qui est blanchâ- tre, ainsi que le ventre. La deuxième dorsale a quatre ou cinq points bruns immédiatement derrière chaque rayon. L'anale a un liséré noirâtre et ensuite un blanc. La caudale est inégalement noirâtre avec un bord blan- châtre en dessus et en dessous, plus large vers le bout. La taille de nos individus ne passe pas trois pouces et demi. Ce poisson est très-commun dans les rivières et les étangs des îles de France et de Bourbon, M. Dussumier nous a appris qu'on le connaît sous les noms de bissique, hichique ou hëchi^ que, qui dans ces colonies sont communs à plusieurs gobies. 476 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Il atteint rarement quatre pouces de lon- gueur, et on le dit très-agrëable à manger lors- qu'il est frit. Onjassure que l'adulte ne va jamais à la mer; mais il paraît que ses œufs y sont entraînes par les courans, et que c'est là seulement qu'ils éclosent; car il remonte, en quantités innom- brables dans les rivières, surtout à l'époque des nouvelles lunes, de très-petits individus, qui ont tous les caractères de l'espèce, et qui, au dire de plusieurs pécheurs, en sont la nou- velle progéniture. C'est une sorte de nonnat, analogue à celui des gobies de la Méditerranée. Ils se glissent à travers les galets et par toutes les plus pe- tites ouvertures qui peuvent les ramener à l'eau douce : des paniers d'osier placés à cet effet, en sont proraptement remplis. Les négresses s'y rendent en foule, creusent de petites mares près du rivage, où il leur suffit du moindre morceau d'étoffe pour en prendre des milliers. M. Dussumier nous certifie qu'à l'embouchure de la petite rivière de Saint-Denis, il y a des jours où cette pêche fournit la charge de plu- sieurs chevaux. Les colons font grand cas d'un plat de ces petits bichiques préparés au cary. CHAP. XII. SICYDIUMS. \^7 Le SiCYDIUM A LARGE TÊTE. {Sîcydiwn laticeps y nob.) Les eaux douces de l'île de Bourbon pos- sèdent un autre sicydium, qui a la tête d'un tiers plus large que haute, renflée en avant des yeux ; les dents internes de la mâchoire in- férieure à peu près égales, et au nombre de six de cha- que côté • le troisième rayon de la première dorsale pro- longé en un filet de moitié plus élevé que le corps; le quatrième l'égalant presque; toutes les écailles à peu près égales , même celles de la nuque. D. 6 —, 1/11, le dernier double j A. 1/10, le dernier double. Tout ce poisson paraît noirâtre et sans taches; le dessous de la gorge et du ventre est un peu plus gris; la caudale a une teinte blanchâtre dans son contour. Nos individus sont longs de quatre pouces : nous les devons à M. Leschenault. Le SiCYDIUM A TÊTE DE CHIEN. {Sicjdium cjnocephalurn ^ nob.) Cette quatrième espèce a été prise dans les eaux douces qui descendent à la rade de Ma- nado dans l'île de Célèbes, et a été rapportée par MM. Quoy et Gaimard, qui l'ont appelée gobius cjnocephalus y sans doute à cause des dents de sa mâchoire inférieure. 12. 12 4 78 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Sa tête plus plate , plus étroite qu'aux précédentes, est à peine plus large que haute. Les deux dents du milieu et les deux dernières de la rangée interne de sa mâchoire inférieure (qui en compte douze) sont plus grandes que les autres. Toute la partie du corps entre la tète, la première dorsale et l'anus, est couverte d'écaillés bien plus petites que celles qui couvrent les autres parties du tronc, comme dans l'espèce de Plumier. La première dorsale n'est pas plus haute que le corps, et la deuxième l'est moitié moins. Les nombres sont les mêmes. D. 6 — 1/11, le dernier double; A. 1/10, etc. Dans la liqueur, tout ce poisson paraît d'un noir tirant à l'olivâtre en dessous; mais à l'état frais, selon MM. Quoy et Gaimard , il est brun foncé , et ses na- geoires sont en grande partie d'un jaune verdâtre. Nos individus ne passent pas quatre pouces. CHAP. XIII. PÉRIOPHTHALMES. 179 CHAPITRE XIII. Des Périophthalmes {Periophthalmus , Bl. Sclm. ) ; et des Boléophthalmes (^Boleophthalmus y nob. ). ' Bloch, dansson Système posthume, a formé avec raison mi genre distinct des gobioïdes dont les yeux, saillans et rapproches, ont des paupières membraneuses derrière lesquelles ils peuvent s'abriter, et dont les pectorales, enve- loppées sur une partie de leur longueur de muscles et d'une peau le plus souvent ëcailleuse, ont l'air d'être portées sur des espèces de bras : conformation dont nous retrouverons des exemples dans les genres des baudroies et des batrachus. Ces poissons ont les ventrales réunies comme les gobies. Les orifices étroits de leurs ouïes, leur permettant de vivre long-temps hors de l'eau, en font des espèces d'amphibies, que l'on voit ramper ou sauter sur la vase et sur les herbes du rivage, plus souvent encore que nager ou plonger dans la profondeur. Ils pour- suivent ainsi les petits animaux dont les bords des eaux fourmillent; et si ce genre de vie les met à l'abri des attaques des grands poissons, 180 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. qui ne peuvent autant approcher de ces bords vaseux , la facilite que leur donnent leurs pau- pières, de s'enfoncer dans la boue sans se blesser les yeux, leur fournit aussi le moyen d'échapper au bec des oiseaux de proie. J'ai cru devoir, d'après leurs dents , les subdiviser encore en deux genres : les Périoph- thalmes propres, dont les dents sont disposées uniformément sur une rangée et plus ou moins verticales; et les Boléophthalmes, où les dents d'en bas sont petites et dirigées horizontale- ment, si ce n'est deux fortes et placées plus en dedans : disposition qui rappelle celle des apo cryptes. DES PÉRIOPHTHALMES. Le premier de ces deux genres, outre ses dents, se reconnaît encore à un profd qui tombe rapidement au-dessous des yeux, et fait ainsi avec la ligne de la nuque un angle peu obtus, à la pointe duquel sont enchâssés les yeux, rapprochés l'un de l'autre, munis d'une paupière inférieure très-marquée et sus- ceptible de se redresser d'une façon très-sin- gulière. Il en existe deux subdivisions; dans les uns le disque des ventrales est séparé dans son CHAP. XIU. PÉRIOPHTHALMES. 181 milieu presque jusqu'à la base, ce qui les rap- proche un peu des ëlëotris, avec lesquels La- cëpède les a même confondus sous le nom de gohiomores ; dans les autres ce disque est entier comme dans les vrais gobies. Le Périophthalme Roelreuter. (Periophthalmus Kœlreuteri y Bl. Schn. ; Gohius Kœlreuterly Pall. et Gmel.) Parmi les espèces à ventrale très-ëcliancrëe , la plus répandue est celle à laquelle Pallas^ a attaché le nom de Rœlreuter, naturaliste, qui en avait donné la première description % et qui avait travaillé utilement à l'Ichthyologie, avant de se rendre célèbre par ses belles expériences sur les mulets végétaux; mais Pallas et Rœlreuter n'en ont eu que des échantillons décolorés, et en ignoraient la patrie : double lacune, à laquelle nous sommes heureusement en état de suppléer. Nous avons reçu ce poisson en bon état des Séchelles et des étangs salés de Calcutta, par M. Dussumier; de Bombay, par feu M. P. Roux; du port Praslin à la Nouvelle- Irlande, des eaux douces de Waigiou, de File d'Oualanetde celle deBouron,parMM.Lesson et Garnot j de la Nouvelle-Guinée et de l'île de 1. Sfic. , t. VIIl, p. 8, pi. 2 , fig. I : cop. Encjcl. mélh. , Ichtjol., n." log. — 2. AW. comm. Petrop., t. VIII, p. 42i« 182 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Vanikolo , par MM. Quoy et Gaimard ; M. Rap- pel en a pris dans la mer Rouge : ainsi il habite toute l'étendue de la mer des Indes. Sa hauteur aux pectorales est du septième de sa longueur ou d'un peu moins, et le corps est à cet endroit d'un cinquième moins large que haut : il diminue en arrière, surtout en épaisseur. Sa tête est quatre fois et demie dans sa longueur, et sa caudale , un peu pointue , cinq fois et demie ou six fois. La hauteur et la largeur de sa tête sont éga- lement des trois cinquièmes de sa hauteur. La ligne du dos se continue horizontalement jusqu'aux yeux, ce qui prend aussi les trois cinquièmes de la lon- gueur de la tête. En avant des yeux le profil tombe verticalement ; sa courbure transverse est demi-circu- laire. Les yeux sont placés ainsi à l'angle que les deux lignes font ensemble; leurs paupières supérieures, ou plutôt les portions opaques de leur cornée, se touchent. En dessous un repli de la peau de la joue forme une paupière inférieure très-prononcée, et telle que l'on n'en voit peut-être pas dans aucun autre genre de poissons, et au-dessous de cette paupière est une fossette assez profonde. Un autre repli de la peau, suspendu aux sous-or- bitaires , tombe au-devant de la mâchoire supérieure et lui fournit ainsi une double lèvre fort épaisse, qui a de chaque côté une petite production anguleuse. Il y a en outre la véritable lèvre supérieure membraneuse. Elle est fort prononcée, surtout sur les côtés, où elle s'élargit en arrière sous le voile dont nous venons de parler; de manière à représenter un maxillaire dilaté, CHAP. Xm. PÉRIOPHTHALMES. 183 tandis que le vrai maxillaire est court, prismatique et caché sous la peau. Le diamètre de l'œil est du cinquième de la longueur de la tête. La bouche, située tout au bas de la chute du profil , est horizontale et fendue jusque sous l'aplomb du bord antérieur de l'œil, ce qui ne prend guère qu'un cinquième de la longueur de la tête. Les dents, sur une seule rangée, au nombre de vingt ou vingt-quatre à chaque mâchoire, sont coniques, grêles, légère- ment courbées, peu aiguës; il n'y en a point au palais ni à la langue, qui est ronde, bombée, dure et adhé- rente. Je ne vois à la narine qu'un seul orifice très- petit, un peu en avant de l'angle antérieur de l'œil. La cavité où il conduit est petite, et sa membrane n'est point plissée. Les pièces operculaires et les rayons branchiostèges enveloppés d'une peau lâche, ne montrent pas au de- hors leurs nombres ni leurs articulations. L'opercule attaché à l'épaule par sa partie supérieure, et la mem- brane branchiostège attachée sous l'isthme sous le bord même de l'opercule , ne laissent aux ouïes qu'un assez petit orifice , prenant du niveau du milieu de la hauteur de la pectorale à celui de la ventrale. La dis- section découvre cinq rayons branchiostèges, dont le premier est dilaté et aminci au point d'avoir autant d'étendue que le subopercule sous lequel il est caché ; les deux suivans sont grêles comme à l'ordinaire; le quatrième est de nouveau mince et élargi; le cin- quième enfin est menu comme un fil. ^ 1. On voit que c'est par erreur que Pallas a écrit (/. cit., p. 9) Membrana branchialis biradiaia. 184 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. La pectorale (à la prendre de l'aisselle) a le tiers de sa longueur enveloppée de chair et couverte d'é- cailles , ce qui lui forme une espèce de pédicule soutenu intérieurement ^ar les os du carpe, dilatés et soudés en une seule pièce. Le pédicule compris, sa longueur est du cinquième de celle du corps; elle est coupée en ovale et a douze rayons tous branchus, excepté le supérieur. La ventrale, attachée entre les pectorales, est de moitié plus courte, et s'étale en un large disque arrondi, plat, fortement échancrée au milieu, où les deux nageoires qui la composent ne sont réunies que par une membrane de moitié plus courte; elle n'a point en avant de rebord comme dans les gobies ou les sicydiums. La première dorsale commence à l'aplomb du tiers antérieur de la pectorale, et finit précisément sur le milieu du corps du poisson : son étendue est du cin- quième delà longueur totale. Il faut faire remarquer, comme une particularité notable, que le nombre de ses rayons varie de douze à quinze , selon les individus. Les premiers rayons ont moitié en sus de la hauteur du corps; les derniers diminuent, et la nageoire va en s'arrondissant et en s'abaissant en arrière : dans les fe- melles elle est moins grande. La seconde commence presque immédiatement après, et est un peu moins longue et deux fois moins haute; elle a un rayon simple et onze branchus, dont le dernier, double jusqu'^ sa racine , pourrait être compté pour deux. L'anale, qui lui correspond pour la position, est d'un tiers moins haute et a un rayon de moins. Entre CHAP. XIII. PÉRIOPHTHALMES. 185 ces deux nageoires et la caudale est un espace du cin- quième de la longueur totale, mais deux fois moins haut et quatre fois moins large. La caudale a à peu près la même longueur et est ovale; elle paraît poin- tue quand ses rayons se resserrent : elle en a treize entiers, dont les extrêmes diminuent beaucoup et sont accompagnés de quelques autres très-courts. B. 6 ; D. de 12 à 15 — 1/11 j A. 1/10 j C. 13 ; P. 12 ; V. 1/5. Ce poisson n'a que de petites écailles, dont on comp- terait une centaine de l'ouïe à la caudale, toutes ron- des, minces j finement striées au pourtour, et très-fine- ment pointillées sur leur disque, mais sans éventail proprement dit; elles sont encore plus petites aux joues et aux opercules , et il n'y en a point sur le devant de la tête ni aux nageoires, la base des pectorales exceptée. On ne voit pas de ligne latérale. La couleur est un gris-brun tirant au cendré bleuâ- tre, plus brun à la tête, où le poisson est pointillé de blanchâtre. La gorge, le ventre, le bord inférieur de la queue, l'anale et la face inférieure de la ventrale, sont blanchâtres; la face supérieure de la ventrale est grise, pointillée de blanc; c'est aussi l'apparence des pectorales et de la caudale, ce qui résulte des points bruns disposés par paires sur leurs rayons. Les bords supérieur et inférieur de la caudale sont blanchâtres. La première dorsale est d'un brun foncé et a des points blancs vers le bas et l'arrière, principalement sur ses rayons ; son bord est occupé par un large ruban noir et un liséré blanc. La seconde est brune, semée de points blancs plus nombreux, et a sa moitié supé- rieure occupée longitudinalement par un ruban noir 486 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. entre deux raies blanches, dont celle du bord est plus large. Dans le frais , d'après un dessin de MM. Lesson et Garnot, le corps est gris foncé sur le dos, teint de jaune sur les flancs ; le fond des dorsales est rougeâtre, et le bord de la seconde, au-dessus de sa raie noire, est rouge; la caudale a un peu de jaunâtre. Le foie de ce poisson est très-volumineux, le lobe unique qui le compose remplit toute la cavité abdo- minale , et sur sa face supérieure, creusée en gouttière, repose l'intestin , qui est court, simple , et ne fait que deux replis avant de se rendre à l'anus. Dans le squelette le crâne est plat comme celui des gobies, la crête mitoyenne est presque nulle. Il y a onze vertèbres abdominales et quinze caudales. Nos individus sont longs de six pouces, et l'espèce ne passe guère cette mesure. * Ce poisson est commun aux Séchelles, où on le nomme cahot-sauteur, pour le distin- guer de notre salarias verniiculé , qui s'y nomme simplement cahot ou caheau; mais ce nom et celui de cahos, emprunté évidem- ment de notre chahot ou cotte d'Europe, est donné dans toutes les Indes à une multitude de gobioïdes et de blennioïdes de genres dif- fère ns. Celui-ci, dit M. Dussumier, vit dans les ruisseaux, et va quelquefois à leur emboucliure dans feau saumâtre. Il peut vivre fort long- CHAP. Xm. PÉRIOPHTHALMES. 187 temps hors de l'eau, il court assez vite en s'aidant de ses pectorales et de sa queue, qu'il avance à droite et a gauche. On les voit souvent se pour- suivre sur le sable en redressant leur première dorsale , lorsqu'on les menace ; ils entrent dans les interstices des rochers et dans les trous des crabes; ils se fixent aussi fréquemment aux parois verticales des jetées ou des rochers, au moyeu de leur ventrale. La ressemblance de leur tête avec celle de certains reptiles, lorsqu'elle paraît hors de l'eau, et la manière dont ils rampent sur la vase, inspire de la répugnance, au point que les esclaves même refusent de s'en nourrir. Il y en a dans le Recueil de Vlaming, n.° 25 , une assez bonne figure, copiée, mais avec une enluminure fausse , dans Renard (part. I , fol. i o, fig. 65) et dans Valentyn (n.° i4o)' Selon ces auteurs, son nom malais est ikan-lazakes^y qui pourrait indiquer les mouvemens conti- nuels de ces poissons (de lasah ou lessah, in- quiet, remuant). Les indigènes de Waigiou l'appellent kalolo. On pourrait rapporter à cette espèce la mau- vaise figure de Seba ( t. III, pi. 2g, n.° 1 7 )> si les dorsales n'y étaient pas si mal exprimées. Je soupçonne qu'on doit regarder comme une variété de ce périophthalme Rœlreuter, -188 LIVRE XIV. GOBÏOÏDES. OU au moins comme une espèce très-voisine , Xapocrjptes cantonensis d'Osbeck (p. i3i, trad. ail. 171), ou tan-nao des Chinois de Canton, qui, au dire de ce voyageur suédois, avait la caudale pointue, la première dorsale carrée, la seconde plus basse et plus longue; la bouche petite, presque ronde; la tête grosse, semée de petits points blancs ; le corps blan- châtre et gris noirâtre; la deuxième dorsale transparente avec des lignes noires. L'auteur compte les rayons : B. 4, D. 11— lOî A. 13; C. 18; P. 10; V. 6/6. Nous avons fait remarquer plus haut que Linné les change sans en dire le motif, et met: D. 6 — 14; A. 13, etc.; en même temps il regarde l'espèce comme identique avec le gobiusniger^ mais il est très- probable qu'il avait sous les yeux un poisson différent de celui qu'Osbeck a décrit : la seule caudale pointue empêcherait que l'on ne rap- portât ce dernier au gobius niger. Osbeck observa ce poisson près de Canton, avec celui que nous avons décrit précédem- ment sous le nom diapocrjptes pectinirostris. Les nattes tendues lors du reflux en retenaient beaucoup qui sautaient sur le fond laissé à sec, ou s'enfonçaient même dans la vase pour échap- per aux pêcheurs. CHAP. XIII. PÉRIOPHTHALMES. 4 B9 Ces deux poissons forment avec le riz une partie essentielle de la nourriture des pauvres. Le Périophthalme a treize rayons. {Periophthalmus tredecimradiatus y nob.; Gohius tredecimracliatus , Buclian. ) J'ai tout sujet de croire que le gohius tre- decimradiatus de Buclianan^ est aussi très- voisin de ce périophthalme Kœlreuter; mais il semble en différer spécifiquement. Il a les caractères généraux des périophdialmes : des dents fortes, droites, séparées. Ses dorsales sont rapprochées ; le premier rayon de la première nageoire du dos est double de la hauteur de la membrane; les autres ne la dépassent pas. La ventrale est profondé- ment échancrée. D. 13 — 1/12, le dernier double ; A. 1/10, îd. ; C. 14 et plus petits;?. 12 ?V. 1/5-' Son corps est décrit comme brunâtre, avec du noirâtre sur les côtés et beaucoup de petits points verts. Ses dorsales, noires à la base, sont bleues vers les bords, qui sont tachetés de rouge. Les pectorales sont olivâtres avec du bleu à leur membrane. L'anale est tachetée de noir. C'est un petit poisson des eaux du Gange. 1. Poiss. du Gange, p. 48. 2. Buchanan ne donne que trois rayons aux ouïes, mais c'est une erreur commise le plus souvent par ceux qui ont décrit des poissons de ce genre. 190 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. y Le Périophthalme papillon. {Periophthalmus papilio, Bl. Scli.) L'Atlantique possède un périophthalme fort semblable au periophthalmus Kœlreuteri, par les formes , si ce n'est qu'il est un peu plus court, que ses dents sont plus grosses et moins nombreuses : il n'y en a que dix ou douze en haut, et quatorze ou seize en bas, D. 12 — 1/12 ou 13, dont le dernier double 3 A 1/9 ou 10 , id. ; P. 14, etc. Il paraît entièrement brun , sans taches sur le corps. Sa première dorsale, d'un noir tirant au violet, a une bande d'un blanc violâtre qui suit le bord , laissant en dehors à peu près autant de noir, et un fin liséré blanc, La seconde a sur un fond brun-noir deux lignes longitudinales blanches. Les autres nageoires sont brunes. Nos individus sont longs de quatre et de six pouces. Le plus grand a été donné au Cabinet du Roi par M. Delcambre, qui, le voyant courir sur la plage du Sénégal comme un lézard , le tua d'un coup de fusil. Un second a été en- voyé de Corée par M. Rang. 11 y en a un troisième, petit, en herbier, donné autrefois au Cabinet par Adanson, le- quel dit qu'il marche et saute à mer basse sur CHAP. XIII. PÉRIOPHTHALMES. 491 la vase du fleuve, et qu'il est appelé tihilank par les nègres. L'espèce ne nous paraît différer en rien de seu- sible du periophtliahnus papilio^, que Bloch assure avoir reçu de Tranquebar. Ce serait une circonstance assez rare, que l'existence d'une même espèce dans les parties chaudes des deux océans, surtout quand elle n'a pas l'habitude de faire de longues courses en pleine mer, ni de suivre les navires. Mais on sait combien il faut se défier des assertions de Bloch, sur les localités. jLe Périophthalme rayé d'argent {Periophthalmus argentilmeatus , nob.) est une jolie espèce, toute semblable, pour les formes, au périophthalme Kœlreuter. Cependant les proéminences anguleuses de la double lèvre sont encore plus pointues. D. 15 — 1/11; A. 1/10, etc. La couleur est grise nuagée de brun, et blanchâtre en dessous. Une vingtaine de lignes verticales argentées, étroites , peu régulières , occupent les côtés du corps ; des points blancs sont semés sur les joues. Sa pre- mière dorsale a des points blancs plus gros, ronds, irrégulièrement placés sur un fond gris, et une large 1. Bl. Schn., p. 55, pi. i4. ^92 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. bande noire parallèle au bord. La deuxième a, comme le périophlhalme Kœlreuter, une large bande noire entre deux lignes blanches , et des points blancs ; il y a du brun sur la caudale et la pectorale 3 l'anale et le dessous des ventrales sont blanchâtres. Nos individus n'ont que deuxpouces et demi. Ils viennent des eaux saumâties de l'île de Waigiou et de celle d'Oualan, d'où ils ont été apportes par MM. Lesson et Garnot, qui en ont trouvé aussi à la Nouvelle-Guinée ; M. Ray- naud en a pris de semblables dans l'Irrawaddy, etMM.Ruhl et Van Hasselt en ont envoyé de Java au Muséum loval de Hollande. Le Périophthalme de Schlosser. {Periophthalmus Schlosseri^ Bl. Sclin.; Gobius Schlosserij Pall.) Parmi les périophthalmes à ventrales réunies jusqu'au bord, on doit remarquer en premier lieu celui que Pallas ' a consacré à la mémoire de Schlosser, médecin d'Amsterdam, dans le cabinet duquel il l'avait vu. A part la réunion de ses ventrales, sa forme géné- rale est absolument la même que celle du périoph- thalme Kœlreuter; sa tête, ses yeux, ses lèvres, ses ouïes 1. Spic. , t. VIII, p. 1 , pi. 1 , fig. 1-4 : cop. Encycl. mélh. , Icht. , n.' 137. CHAP. XIII. PÉRIOPHTHALMES. 495 et leurs rayons, ses nageoires, tout est semblable, si ce n'est que la première dorsale est un peu moins grande et n'a que huit rayons, et que la pectorale est écailleuse sur les deux tiers de son étendue. Ses écailles et une partie de ses dents sont aussi beaucoup plus fortes; les cinq ou six mitoyennes, et surtout celles de la mâchoire supérieure, sont grandes, coniques, très - pointues ; mais les latérales sont petites : il y en a en tout environ vingt -quatre. La mâchoire inférieure peut en avoir dix-huit ou vingt, plus égales et aussi coniques et pointues. Les deux proéminences anguleuses de la duplicature à la lèvre supérieure sont aiguës ; mais la lèvre même s'élargit moins sur les côtés que celle du périophthalme Kœlreuter. La ventrale forme un disque rond et plat, non ëchancré, mais seulement un peu creusé dans son milieu, et qui a en avant un vestige de rebord. B. 6' 5 D. 8 — i;i2; A. 1/12, le dernier double comme d'or- dinaire ; G. H 5 P. 15; V. \lb. M Les joues, les opercules sont couverts de grandes écailles comme le corps. Il n'y en a que cinquante et quelques de l'ouïe à la caudale, et quinze ou dix- huit sur une ligne verticale, un peu plus longues que larges, trilobées à leur bord radical, marquées au bord externe de stries fortes et en partie écartées, au nombre de vingt ou vingt-cinq, et aveq un gra^xd éventail de plus de quarante stries. ..,. . Pour achever sa description,, nous dirons aue sa 1. Pallas ne lui donne que trois rajons; c'est une erreur.;; yjj 1 2. 1 3 194 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. hauteur est six fois dans sa longueur, que sa léte y est quatre fois; qu'elle est aussi large que haute; mais que le tronc aux pectorales a un quart de moins en largeur qu'en hauteur. Notre individu, que nous avons quelque sujet de croire le même que celui de Schlosser et de Pallas, paraît aujourd'hui entièrement d'un brun roussâtre pâle; la première dorsale est plus brune et a un liséré blanchâtre ; la deuxième a une large bande longitudinale brune, et un bord pâle. Le dessous du corps, la ventrale et l'anale sont plus pâles. Il est long de neuf pouces. Schlosser l'avait reçu d'Amboine, où il est nommé, comme le périophthalme Rcelreuter, cahoSf et poisson chinois, parce que les Chinois de cette île sont les seuls des habitans qui s'en nourrissent; ce qui n'était cependant pas une raison pour que Bloch lui attribuât la Chine pour patrie, comme il le fait dans son Système, p. 65. Ses habitudes sont les mêmes que dans les autres espèces du genre. C'est principalement sur la vase qu'on le prend; il y rampe, ainsi que sur les herbes aquatiques, avec beaucoup de vitesse, y donnant la chasse aux crevettes, aux petits crabes et aux animaux semblables; un autre poisson le menace-t-il, il pénètre aus- CHAP, XIII. PÉRIOPHTIIALMES. 495 sitôt dans cette vase, et s'y cache dans la pro- fondeur: l'ëtroitesse de ses ouïes , les paupières qui garnissent ses yeux, le préservent des in- convéniens de cette boue épaisse. On ne comprend pas comment Pallas a pu regarder lelëotris n.'^ i6g de Gronovius' pour ce përioplithalme 5 c'est un gobie ordinaire, à six rayons à la première dorsale. Quant au gobius barbants de Linnë, que Pallas rapporte aussi à cette espèce d'après les douze rayons de sa première dorsale, ce serait bien plutôt le përiophthalme Kœlreuter. J'adopte encore moins pour synonyme de notre espèce actuelle, quoique Pallas le dise aussi, le muclfish de Sloane^ D'après la descrip- tion ce serait notre eleotris guaviîuiy l'auteur lui donne expressëment deux ventrales; la ligure qui n'en reprësente qu'une, doit au contraire avoir ëtë faite d'après notre gobius soporator^ mais mal conserve: ni l'une ni l'autre ne peut concerner un përiophthalme. 1. Mus. icht., t. Il, p. i6. — 2. Jam., t. II, p. 285 et 286, pi. 249, %. I. i96 LIVRE XIV. GOBÏOÏDES. Le Périophthalme a sept rayons. {Periophthalmus septemradialus ^ nob. ; GohUis septemradiatus , Buclian., p. 4^.) M. Buchanan décrit cette espèce comme voi- sine du periophthalmus Schlossei^i. Ses dents sont droites aux deux mâchoires; il y en a peu à l'inférieure : la supérieure en a davantage. Le premier rayon de la dorsale est le plus long, mais aucun n'excède beaucoup la membrane. D. 7 — 1/12; A. 1/1 3, etc.- Les écailles sont toutes imbriquées; on n'y voit point de tubercules comme dans certains boléopli- llialnieSc L'auteur ne mentionne pas le fond de sa couleur, mais parle de bandes noirâtres à peine sensibles, et de points blancs ou bleuâtres peu nombreux. La pre- mière dorsale est noire et a le bord transparent; la seconde est transparente, avec deux raies longitudi- nales noires. Cest un petit poisson. Le Périophthalme a neuf rayons. (Periophthalmus novemradiatus , nob.; Gohius novemradiatus , Buclian. ) Le pohius noveniradiatus de Buchanan ( p. 47 , pi. 2 , fig. i4 ) paraît encore devoir être placé ici. 1. Il compte les rayons des ouïes plus mal encore que dans les autres espèces, et ne leur en donne que deux. CHAP. XIII. PÉRIOPHTHALMES. 197 C'est un petit poisson qui a tous les caractères du genre; ses grandes dents inférieures sont au nombre de six ; sa première dorsale , un peu plus haute que le tronc, a neuf rayons, dont le premier se prolonge en un fil du double de la hauteur des autres; sa ven- trale ne fait pas l'entonnoir, et est un peu bilobée. D.9— .1/12, le dernier double; A. 1/13, /J.,C. 13; P. 13; V. 1/5.' Sa surface n'est nullement tuberculeuse; on voit quelques points blancs sur ses parties inférieures. Sa première dorsale est noire, bordée de blanc; sa mem- brane entre les trois premiers rayons est rouge, et il y a quelque mélange de blanc vers l'arrière. La seconde est blanche, avec deux bandes longitudi- nales noires; il y a une grande tache couleur de rouille sur la pectorale. La figure le fait paraître long de deux pou- ces trois lignes. Le Périophthalme de Freycinet. {^Periophthalmiis Frejcinetij nob.) Suivant l'exemple de nos prédécesseurs , nous nommerons cette espèce d'après le voya- geur à qui nous la devons; l'individu que possède le Cabinet du Roi, a été tué d'un coup de fusil, sur les bords de la rivière de Babao à Timor, par M. le capitaine Freycinet, pendant son voyage autour du monde. 1. Buchanan n'a pu découvrir aucun raj'on aux ouïes, ce qui prouve qu'il était peu exercé à la dissection. 1 98 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Elle ressemble beaucoup, pour les formes, aupé- rioplithalme Schlosser , mais le corps est un peu plus alongé ; sa hauteur est à peu près six fois et demie dans sa longueur. Ses yeux sont moins gros, et ses dents, surtout les supérieures, sont plus longues; et ce qui la distingue surtout, c'est qu'elle ji'a que quatre rayons à sa première dorsale, laquelle est aussi haute que le corps, mais quatre fois moins longue que haute. D. 4 — 1/12; A. 1/12, etc. Dans la liqueur ce poisson paraît d'un brun noi- râtre assez uniforme. Le bord supérieur des deux dorsales est blanchâtre. L'individu est long de sept pouces. DES BOLEOPHTHALMES. Je sépare des përiophthalmes certains go- bioïdes, en partie confondus avec eux jusqu'à ce jour, et qui en diffèrent à peu près comme les apo cryptes se distinguent des gobies ordi- naires, c'est-à-dire par leurs dents; celles de la mâchoire supérieure demeurant droites et assez fortes , au moins au milieu; celles de la mâchoire inférieure étant très-fines et disposées horizon- talement, excepté deux , placées plus en dedans, et qui demeurent fortes, pointues et relevées. La tête des boléophthalmes est plus oblon- gue et n'a pas le profil du museau aussi haut, ni aussi vertical quecelui des périophthalmes^leurs CHAP. XIII. BOLÉOPHTHALMES. "199 écailles sont petites et quelquefois impercep- tibles 5 leur première dorsale ne passe pas cinq rayons, et leurs pectorales n'ont pas toujours la base ëcailleuse. Du reste ils ressemblent aux pe'riophthalmes parla plupart des caractères, notamment par la double lèvre, par le rap- ' prochement des yeux et par les deux paupières qui les enveloppent lors de la rétraction. Le nom que je leur impose exprime la faculté qu'ils ont de relever subitement les yeux au- dessus de. leur niveau ordinaire, comme s'ils les faisaient sortir de leurs orbites, comme s'ils les âmdaienly de (^oKv, jac tus y et d'o^p^aA/uos- , oculiis. Leur genre de vie est le même que celui des périopli thalmes. Le BOLÉOPHTHALME DE BODDAERT. {Boleophthalmus Bocldaerti,noK ; Gobais Boddaerti, Pall.) Tel est celui que Pallas a nommé d'après Pierre Boddaèrt, médecin de Flessingue et d'Utrecht, auteur d'un tableau de mammifères et de quelques autres écrits sur l'histoire na- turelle. La description que Pallas en publie , faite, à ce €[u'il parait, d'après un individu mâle, est de Boddacrt lui-même, et fort in- 200 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. complète, en partie même erronnée , el sa figure médiocre. Mais il a reparu une figure bien meilleure , d'un individu que nous croyons être la femelle, dans le Système de Bloch, pi. 16, sous le nom de gobius striatus, p. 7 1 • Comment Bloch a-t-il fait de ce poisson un gobie en même temps qu'il place le hoddaërt dans ses éléotris ? C'est une de ces bizarreries dont le Système posthume fourmille et qu'il n'est donné à personne d'expliquer. Ce qui est certain , c'est que les poissons que nous allons décrire sont identiques avec ce ^ohius striât us. L'espèce en paraît très-répandue : nous l'a- vons reçue des Moluques par M. Eeinwardt, de Pondichéry par MM. Leschenault et Ray- naud, du Bengale par M. Bélanger, et de Bom~ bay par M. Dussumier, et nous en avons vu un beau dessin fait a Malacca pour le maj or Farkliar. C'est le nettee-kunla-inottah de Russel (t. I, p. 42, n.° 54). A Pondichéry, selon M. Lesche- nault, son nom malabare ou plutôt tamoule est vettj-mine; Bloch dit qu'à Tranquebar c'est attieo veoti, et, comme à son ordinaire, il se figure que ce sont des mots malais : le nom malais du genre est à Malacca même hloodo, et celui de l'espèce, hloodo-chiena. Les Anglais établis dans ces contrées, l'appellent CHAP. XIII. BOLÉOPHTHALMES. 201 mudfish (poisson de vase), comme beaucoup d'autres gobioides. Tout fait croire que c'est lepit-Jish de Nieuhof, copié par Willughby*, poisson qui, dit l'auteur, se tient dans les lieux vaseux et est cependant d'un goût délicat j il se meut avec tant de rapidité qu'il peut sauter d'un fossé dans un autre.^ M. Lesclienault dit que son vetty-mine habite les étangs salés des environs de Pondi- chéry, et qu'il est difficile à prendre, parce qu'il s'enfonce dans la vase et échappe aux filets des pêcheurs. M. Dussumier fait un récit à peu près semblable de ceux qu'il a eus à Bombay; ils vivent sur la vase dans les endroits où il y a peu d'eau. Les naturels s'en nourris- sent avec plaisir. La hauteur du corps est un peu plus de six fois dans sa longueur, et il est d'un quart moins large; sa tête y est quatre fois et demie, et sa hauteur, qui est des deux tiers de sa longueur, surpasse peu sa largeur. La ligne du front va, en se courbant un peu, jus- qu'au bout du museau, où remonte aussi la courbe de la gorge. Le museau est obtus; la courbe trans- versale de la tête arrondie; les mâchoires sont à peu près égales ; la bouche descend un peu et prend deux cinquièmes de la longueur de la tête. Les yeux oc- cupent le deuxième cinquième de cette même lon- 1. App.,ip\. 8, 11." I 2. Will., 1. 1^ Jpp., p. 6. 202 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. gueur; leurs paupières supérieures se louchenl et sont aussi distinctes que les inférieures, mais brunes et grenues comme la peau de la tête; les inférieures sont lisses, minces et demi-transparentes; réunies, elles cachent l'œil aussi complètement que les pau- pières de l'homme ou d'aucun autre animal. L'ori- fice supérieur de la narine est tout près de l'angle antérieur de l'œil et fort petit : je n'en vois pas d'infé- rieur. Sur le devant de la mâchoire supérieure sont six dents verticales coniques, pointues, trois de chaque côté, avec un vide au milieu; les côtés de la même mâchoire en ont chacun vingt à vingt-cinq, coniques aussi , mais excessivement petites. A la mâchoire in- férieure il y en a une rangée presque horizontale, de trente-six au moins de chaque côté, toutes extrêmement fines, et qui, vues à la loupe, sont tronquées oblique- ment et légèrement échancrées; et un peu en dedans, en avant, il y en a deux droites et pointues. Le palais n'en a point. La langue, qui est ronde, bombée et fixée, en manque également. L'orifice des ouïes est petit et seulement vertical. La peau de la tête ne laisse pas apercevoir la dis- tinction des pièces operculaires. L'opercule est pres- que membraneux. H y a cinq rayons à la membrane, dont le premier et le quatrième sont dilatés comme dans les espèces précédentes. La pectorale, du sixième de la longueur totale, a ses deux tiers écailleux, et sa partie nue est arrondie et étalée de manière à for- mer l'apparence d'un croissant. La ventrale, d'un tiers plus courte que la pectorale, est ovale et fait bien l'entonnoir, au moven de sa membrane anté- CHAP. XIII. BOLÉOPHTHALMES. 205 Heure, qui est du quart de sa longueur et aussi pro- noncée qu'à beaucoup de gobies. La première dorsale commence à l'aplomb du milieu de la pectorale; elle n'a que cinq rayons. Dans certains individus que nous supposons les mâles, ces rayons s'alongent en filets, dont le troisième, qui est le plus long, a plus du tiers delà longueur totale: ce sont ceux-là qui ressemblent à la figure de Pallas. Dans d'autres in- dividus , qui paraissent ou des femelles ou d'une espèce infiniment voisine (tels que les représente la figure de Blocli), les rayons sont beaucoup plus courts et même ne dépassent pas la membrane, ils n'ont que la hauteur du corps. La base de cette première dorsale n'est que moitié de la hauteur du tronc; un intervalle pareil la sépare de la deuxième, qui a un peu plus de moitié de la hauteur et est trois fois et demie aussi longue que haute. L'anale , aussi longue , mais de plus de moitié moins haute , lui correspond pour la position et le nombre des rayons. Entre ces deux nageoires et la caudale, qui est un peu pointue, est un espace égal à cette nageoire même et du neuvième de la longueur totale. B. 5 ; D. 5 — 1/24; A. 1/25, les derniers doubles ; C. 16 , dont les latéraux très-courts; P. 19 ; V. 1/5. Les écailles, fort petites en avant, le deviennent un peu moins en arrière; il y en a au moins quatre- vingts entre l'ouïe et la caudale, presque rondes, à éventail de ving-cinq rayons, et plus singulièrement ondulés. Celles de la tête sont encore plus petites, et on a peine à les apercevoir, parce que toute cette partie, ainsi que la nuque et l'épaule, sont couvertes 204 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. de petits tubercules mousses , serrés , qui en rendent l'aspect rude, mais qui cèdent au toucher. Lelobule génital est petit et obtus. Dans la liqueur ce poisson paraît d'un gris foncé, avec sept ou huit bandes noirâtres de chaque côté, mal terminées, descendant obliquement en avant; par-ci par-là se montrent de petites taches blanchâtres. La première dorsale, d'un brun violet, est semée de petits points blancs , plus ou moins nombreux ; sur la seconde se voient le long de la base sept taches blanc de lait, et sur sa hauteur quatre rangées de traits longitudinaux de la même couleur : le bord paraît olivâtre. Les autres nageoires sont grises ou brunâtres; mais la pectorale a une ligne pâle le long de la base de ses rayons, et un liséré noirâtre à son bord. L'intérieur de la bouche est noirâtre. A l'état frais, le fond de la couleur est d'un brun ou d'un gris tirant à l'olivâtre. Les taches du corps sont d'un vert métallique très-brillant ; les points et les traits des dorsales, d'un bleu céleste : il y a du rosé aux pectorales et à la ventrale. Nos individus ont quatre et cinq pouces : l'espèce en atteint six. D'après une figure de M. Farkbar, que nous croyons pouvoir rapporter à cette espèce, il paraît qu'elle aurait la faculté de gonfler ex- traordinairement ses joues. Dans les boléophthalmes l'intestin est enroulé sur lui-même sept à huit fois. Il est donc un peu plus court que celui des sicydiums avec lesquels ils ont CHAP. XIII. BOLÉOPHTHAlmES. 205 encore l'analogie d'avoir le foie très-petit. Le rectum est large et dilaté , le diamètre de l'insteslin grêle est au contraire si petit, qu'il paraît filiforme. Le squelette des boléophtlialmes ressemble beau- coup à celui des gobies; cependant le crâne y est moins plat. La crête mitoyenne, quoique peu élevée, règne sur toute sa longueur; les orbites s'élèvent au- dessus de son niveau ; le front dans leur intervalle est réduit à une lame verticale mince. Outre la petite pointe du frontal postérieur, il y en a une placée plus haut, et que je crois du frontal principal. Ses sous-orbitaires sont tout aussi atrophiés; leur radial et leur cubital se détachent beaucoup plus de l'hu- méral, et ont de larges échancrures. Les os du carpe sont aussi très-alongés, dilatés aux deux bouts; ceux du bassin ne sont unis qu'à leur partie postérieure : j'y compte douze vertèbres abdominales et seize cau- dales , à peu près semblables à celles des gobies , etc. Le BOLÉOPHTHALME PlINIEN. (Boleophthabnus Plinianus, nob.; Gobais Plinianus, Hamilt. Buchan. ) Hamilton Buchanan* a donné le nom de Pline à ce poisson, parce qu'il le supposait un de ceux des Indes dont Pline parle (1. I, c. 19), comme sortant sur la terre et retour- nant ensuite dans les rivières ^j mais ce pas- 1. Poiss. du Gange, p. 45, pi. 35, fig. i5. 2. Exit in terram — et in Indiœ fluminibus certum genus piscium ac deinde resilit. 200 LIVKE XIV. GOBIOÏDES. sage , expliqué par celui de Théophmste , dont il est tiré, se rapporte bien mieux aux oplîicépliales, et il est singulier que M. Buclia- nan ne s'en soit pas aperçu, lui qui nous a si bien fait connaître les habitudes de ces der- niers, et les grands voyages qu'ils font quel- quefois par terre. Ce qui est manifeste, d'après sa description , c'est que ce gohius plinianus est un boléoplîthalme, et si voisin du Boleo- phthabnus Boddaerti , qu'il n'en diffère que par les couleurs et par une pre- mière dorsale moins élevée, et que l'on pourrait l'en croire une simple variété. Ses dents j indiquées en détail par l'auteur, sont exactement disposées de même; les grandes de la mâchoire supérieure sont au nombre de six. Les proé- minences de la double lèvre sont pointues. La tête est aussi toute couverte de petits tubercules. La pre- mière dorsale est arrondie, deux fois plus élevée que la deuxième; ses rayons en sortent d'un tiers. Sa caudale est ovale ; sa ventrale en entonnoir oblique. D. 5 — 1/25 5 A. 1/25 ; G. 17 , dont plusieurs très-courts; P. 17 : V. 1/2. ■ D'après la figure, sa hauteur est six fois et quel- que chose dans sa longueur. Il est brunâtre en des- sus, blanchâtre en dessous, et a plusieurs bandes noires incomplètes et irrégulières (la figure les re- 1. Buchanan ne compte aussi que trois rajons aux ouïes, toujours par la même erreur. CHAP. XIII. BÉOLÉOPHTHALMES. 207 présente verticales, croisées par une bande longi- tudinale). La première dorsale est jaune, semée de points bleus; la seconde est obscure, avec des traits incomplets blancs et bleus , lisérés de noir. Il y a un liséré noir aux pectorales et à la caudale. L'intérieur de la bouche est noirâtre. C'est, dit M. Bucbanan, l'espèce la plus com- mune au Bengale. Nous avons reçu de ce pays des bolëoplithalmes qui lui répondent par les formes, mais dont les couleurs sont tellement altérées, que nous n'oserions répondre de leur identité. Le BOLÉOPHTHALME DE DuSSUMIER. {Boleophthalmus Dussuinieri ^ nob.) Les eaux de Bombay ont procuré à M. Dus- sumier un boléophthalme assez semblable au boléophthalme Boddaért, mais bien distinct, auquel nous croyons juste de donner le nom du voyageur plein de zèle qui l'a découvert, et à qui la zoologie et l'ichthyologie en particulier doivent tant d'autres services. La forme de sa tête est la même que celle du bo- léophthalme Boddaért, mais son corps est plus alongé à proportion : il comprend cinq fois et demie la lon- gueur de sa tête et plus de sept fois sa hauteur. Ses dents sont à peu près semblables , si ce n'est que les deux intérieures d'en bas, au lieu d'être droites, sont 208 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. fortement crochues et recourbées vers le gosier. La tête et les parties voisines ont bien aussi des tubercules , mais beaucoup plus petits, plus serrés, et réduits à une simple scabrosité peu sensible à la vue. La pre- mière dorsale n'a pas tout-à-fait la hauteur du corps. La caudale est très-pointue. D. 5 — 1/27 ; A. 1/25, les derniers doubles, etc. Il paraît dans la liqueur d'un grisviolâtre, plus pâle en dessous. De très-petits points bruns sont semés sur le bas de la joue, sur la pectorale et les parties voi- sines du tronc; il y en a aussi à la gorge, mais plus clair-semés. La première dorsale est d'un gris violet, toute semée de petits points noirs serrés. La seconde a sur sa base des taches blanches comme dans le pré- cédent, et sur sa hauteur des traits blancs, mais dis- posés moins régulièrement : le tout sur un fond noirâtre. La caudale est noirâtre, bordée de blanchâtre; la ventrale et l'anale sont blanchâtres , avec quelques points bruns épars; l'intérieur de la bouche n'est pas noir. Notre individu a près de six pouces. Le BOLÉOPHTHALME A LONGUES DENTS. (^Boleophthalnius dentatus , nob.) C'est encore ici une espèce découverte à Bombay en iSs-jf par M. Dussumier. Quoique voisine de la précédente, elle s'en distin- gue aisément par ses écailles presque imperceptibles et par les longues dents de sa mâchoire supérieure. CHAP. XIII. BOLÉOPHTHALMES. 209 Ses formes sont aussi un peu plus alongées, et son museau tombe un peu plus obliquement. Sa hauteur est plus de huit fois dans sa longueur, sa tête cinq fois; la largeur de sa tête est à peu près la même que sa hauteur, qui est aussi celle du corps; mais celui-ci diminue par degré d'épaisseur. Sa caudale, pointue, prend le quart de sa longueur totale. L'œil occupe sur le haut le troisième septième de la lon- gueur de la tête. La bouche est fendue jusque sous l'arrière de l'œil. Les proéminences de la double lèvre sont fort obtuses. Les dents sont faites et dis- posées comme celles du boléophlhalme Boddaërt, avec cette différence que les six antérieures d'en haut sont beaucoup plus grandes et sortent de la bouche, descendant au-devant de la mâchoire inférieure. La pre- mière dorsale est aussi haute que le corps, et un peu plus longue que haute; la deuxième, qui commence immédiatement après, est d'un tiers moins haute et deux fois plus longue. L'anale est encore moitié moins haute que la seconde dorsale, mais elle lui répond à peu près en longueur. L'espace entre ces nageoires et la caudale n'est pas du vingtième du corps. B. 5 ; D. 5 — 1/26 ; A. 1/26 ; C. 15 ; P. 18 j V. 1/5. Les écailles ne se montrent que comme des points ; arrachées et vues à une forte loupe, elles paraissent ovales et striées en cercles et en rayons : en dessous et vers l'arrière du tronc elles se marquent cependant davantage. Dans la liqueur ce poisson paraît gris cendré, plus pâle en dessous. On aperçoit quelques petits points bruns sur l'opercule et la base de la pectorale. 12. l4 210 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. La première dorsale est d'un gris violâtre, semée de points noirs assez serrés; la seconde est d'un noir violet, et a sur sa base les mêmes sept taches et sur sa hauteur les mêmes quatre ou cinq rangées longi- tudinales de traits blancs que dans le boléophthalme Boddaèrt. La caudale est toute noirâtre; l'anale et la ventrale sont blanchâtres , les pectorales grises; il n'y a point de teinte noire dans la bouche. Nos individus sont longs de six pouces. Le Boléophthalme porte-mat. {^Boleophthalmiis histophorus, nob.) La hauteur de sa première dorsale sur une base étroite , la fait ressembler à un mât, et c'est de cette circonstance que nous avons tiré son nom spécifique. L'espèce se distingue d'ailleurs des précédentes par sa nudité, par l'étroitesse de son orifice branchial, qui n'est ouvert que dans une partie plus basse que la pectorale. Sa hauteur, mesurée à cette nageoire, est jusqu'à dix fois et demie dans sa longueur; son épaisseur au même endroit est d'un tiers moindre. La longueur de sa tête est cinq fois et demie dans la longueur totale, et elle n'a que moitié de sa longueur en hauteur et en largeur. Les yeux occupent dans le haut et près l'un de l'autre, le troisième sixième de la longueur de la tête ; ils ont les deux paupières des périophthalmes. Le museau est ar- rondi dans les deux sens, la bouche horizontale, fen- due jusque sous l'œil. La double lèvre est courte, CHAP. XIII. boléophthalmes. 211 mais a de chaque côté un appendice anguleux ; la véritable lèvre supérieure a de petites proéminences ou de petits festons; sous chaque branche de la mâ- choire inférieure est une suite de très-petits tenta- cules coniques, et il y en a un plus grand sous la symphyse. Les dents du milieu de la mâchoire su- périeure, grêles, pointues et assez longues, sont au nombre de douze ; les latérales sont à peine sensibles au tact; à la mâchoire inférieure il y en a quinze de chaque côté, presque horizontales, très-fines, pointues, non échancrées, et deux plus longues, aiguës et un peu crochues , au milieu et un peu en dedans. La langue est courte, légèrement convexe, peu libre : il n'y a point de dents non plus qu'au palais. L'ouverture des ouïes est percée au niveau du dernier tiers de la pectorale, très-près de la base de la ventrale, et ne prend que le tiers de la hauteur de la tète. Les branchies ont cinq rayons, dont le premier est mince et dilaté, au point d'égaler pres- que le sous- opercule en largeur; les autres sont grêles, même le quatrième. La pectorale est à moitié enveloppée de peau et de muscles, et du dixième de la longueur du poisson : elle a dix-huit rayons. La ventrale est ovale, un peu moins longue que les pectorales, et a une assez large membrane en avant. La première dorsale a plus du quart de la longueur du poisson, ou deux fois et demie la hauteur du tronc sous elle ; sa base ou sa longueur ne fait que le cinquième de sa hauteur. Elle a cinq rayons enveloppés d'une peau épaisse et flexibles comme des fils sur une grande partie de leur 212 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. longueur. Trois seulement montrent un peu de leur sommité libre. La deuxième dorsale et l'anale commencent un peu après le premier tiers du corps, et finissent l'une et l'autre très-près de la caudale ; elles sont très-basses et l'on a peine à compter leurs rayons. La caudale, au contraire, est quatre fois et demie seulement dans la longueur totale, et très-pointue. B. 5 ; D. 5 — 1/26 ; A. 1/25 ; C. 17 j P. 17 ; V. 1/5. Il n'y a point.d'écailles : la peau n'offre, même à la loupe, que de petits pores ou points enfoncés, assez serrés. Dans la liqueur ce poisson paraît gris, un peu plus brun vers le dos, avec une teinte un peu cui- vrée. Le long de chaque flanc sont dix ou douze traits bruns verticaux, très-fins, qui ne prennent que moitié de la hauteur, et dont plusieurs manquent souvent. De petits points bruns très-clair-semés se voient sur la tête , le dos et la base de la pectorale. Il y en a de plus serrés sur la caudale, qui y forment des rangées verticales irrégulières , au nombre de sept ou huit. M. Dussumier, qui a rapporté de Bombay les poissons de cette espèce, dit qu'à l'état frais leur dos est gris; leurs côtés blancs, avec des raies verticales noires; le dessous blanc; les pecto- rales et les ventrales rosées, ainsi que la partie inférieure de la caudale, dont le reste est gris pointillé de noir. Ils sont très -communs à Bombay; ils se CHAP. XIII. BOLÉOPHTHALMES. 215 tiennent au bord de la mer sur la vase, où on les voit sans cesse sauter : ils vivent très-long- temps hors de l'eau. Les Maures du pays les nomment nitua, nom commun à tout le genre. On en apporte aussi de sales et de sëchës de Surate, en grande quantité, et ils sont ainsi consommes par les habitans , qui les mangent avec du riz bouilli. M. Dussumier a trouvé la même espèce très- abondante sur la vase des rives du Gange, où elle court et saute à la poursuite des petits crustacés. Si on veut prendre ces poissons, ils s'enfoncent avec beaucoup de vitesse dans la vase, et quand elle est trop dure, ils cherchent à la hâte quel- que trou de crabe pour s'y réfugier : quand ils sont dans l'eau, ils montrent souvent leur tête à la surface. . Le BOLÉOPHTHALME VERT. {Boleophthalmus viridis, nob, ; Gobius virîdis , Hamilt. Buchan. ^) Il suffit d'un coup d'œil sur la figure que M. Buchanan a intitulée ainsi, pour juger qu'elle offre absolument tous les caractères de forme de nosboléophthalmes;ses nombres de rayons^ 1. Poiss. du Gange, p. 42, pi. 32, fig. 12. 2. Il ne lui compte que trois rajons aux branchies, mais c'est eAidemment une el'reiu'. 214 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. son alongement , sa nudité , sa première dorsale haute, et jusqu'aux tentacules de sa mâchoire inférieure , en font une espèce très- voisine de la précédente; mais l'auteur lui attribue une teinte d'un vert foncé sur le dos , sur les dor- sales et sur la caudale , et sème toutes ces parties de points noirs , sans lignes verticales. La première dorsale et la caudale sont lisérées de noir : le dessous est blanc. Des observations plus suivies nous appren- dront toutefois si cette différence tient à l'es- pèce, ou si elle n'est que la marque d'une variété. M. Buchanan a pris ce poisson aux bouches du Gange. Nous trouvons encore dans des recueils de peintures, faits aux Indes ou à la Chine, des figures qui annoncent des espèces de périoph- thalmes ou de boléophth aimes différentes de toutes celles qui précèdent; mais dont il est difficile d'assigner la place avec précision, parce que ni les dents ni les nombres des rayons n'y sont suffisamment indiqués. Ainsi, dans les peintures faites àMalacca pour le major Farkhar, il en est une qui paraît repré- senter un boléoplithalme brun, semé de petites taches orangées; il est intitulé hloodolaok : on pourrait l'appeler holeophthalmus laokus. CHAP. XIII. BOLÉOPHTHALMÈS. 215 Dans le recueil des peintures chinoises du Muséum en est un autre, qui a la première dor- sale courte et haute , mais un peu moins que celle du boleophthalmiis histophorus^ la se- conde est aussi fort longue, mais au total sa forme est moins grêle que dans celui que nous venons de nommer; il est gris - brun , tout finement pointillé de même couleur, avec de petites taches êparses et des points verts , semés çà et là; ses pectorales tirent à l'orangé : nous l'appellerons boleophthalmiis sinicus. Dans le recueil fait à Canton et que nous devons à M. Dussumier, en est un troisième, aussi à première dorsale haute et pointue; gris , finement pointillé de brun , et ayant çà et là des groupes de points blancs et de points verts, épars sans régularité ; quatre bandes d'un gris plus foncé marquent la base de ses pectorales : il prendra le nom de holeophthalmus chinensis. Le tout en attendant que l'on ait pu avoir à leur sujet des renseignemens plus complets. 216 LIVRE XIV. GOBIOÏDES, CHAPITRE XIY. Des Eléotris {Eleotris, Gron.), et des Philypnes {Philj-pnus, nob.)» Nous avons établi au commencement de ce volume, page 3, que nous avions à faire un groupe des gobioïdes à ventrales séparées. Ces espèces viennent se ranger pour la plupart dans le genre Eléotris tel que M. Cuvier l'a conçu, mais qu'il n'a pas suffisamment bien caractérisé dans le Règne animal(2.^éd.,p.246), car il a omis de parler de la disposition des dents de ces poissons. La plupart d'entre eux ont le palais lisse 5 ce sont toutes les espèces dont nous allons donner l'histoire , et qui sont ou nouvelles ou mentionnées par nos prédé- cesseurs, et citées dans les notes du genre eléotris de M. Cuvier. Mais l'espèce donnée dans cet ouvrage comme type du genre, dif^ fère essentiellement de toutes les autres par la présence de dents en carde sur le chevron du vomer. Cette espèce, inconnue à M. Cuvier lors de la première édition du Règne animal, n'aurait pas servi de type au genre dans la se- conde édition, s'il l'avait comparée avec celles dont il avait composé son genre eléotris dans CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 217 la première; aussi ai-je préféré donner à son eleotris dormitatrix un nom générique dis- tinct, et conserver la dénomination d eleotris aux espèces que M. Cuvier avait d'abord voulu réunir sous ce nom. On peut remarquer que M. Cuvier a indiqué dans la note 3 de la seconde édition du Règne animal (t. II, p. 246), la réforme du genre procliilus, rapproché des énoploses et autres percoïdes voisins, dans la première édition ( t. II, p. 294), et qu'il avait établi pour placer deux éléotris dont Bloch avait fait des sciènes, sans qu'ils eussent aucun des caractères essen- tiels de cette famille. J'ai cru devoir donner ces explications à nos lecteurs, qui n'auraient pu sans cela se rendre raison des changemens qui semblent ici exister dans la méthode que m'a tracée le grand naturaliste dont je continue les travaux. DES ÉLÉOTRIS {Eleotris^ Gron.). Ce genre ressemble à celui des gobies pres- que en toutes choses, si ce n'est que ses ven- trales sont séparées et que ses ouïes ont six rayons; du reste il a les mêmes nageoires, les mêmes intestins, le même lobule derrière l'anus et en avant de l'orifice génital. Il pré- 218 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. sente des variations correspondantes dans les formes générales, les proportions et la confi- guration des nageoires, la grandeur des écailles, les tégumens de la tête; la plupart de ces es- pèces ont même des couleurs obscures plus ou moins analogues à celles des gobies. En un mot, la ressemblance de ces deux genres est telle, même pour les habitudes, qu'ils ont reçu les mêmes noms, celui de donneur ou d'e/z- dormi, dans nos colonies françaises; celui de guai^ina dans les colonies espagnoles. Gronovius, qui a le premier proposé ce genre, mais en le limitant mal, car il y laisse de vrais gobies , en a pris le nom dans Athé- née, où sAsûol^iç est annoncé comme un pois- son du Nil, mais sans aucun caractère qui puisse ie faire reconnaître. Bloch, dans son Systema, a aussi un genre éléotris, mais qu'il distingue des gobies par un caractère inintel- ligible, et ou il entasse en effet plusieurs vrais gobies avec un ou deux éléotris, tels que nous les entendons. L'idée que M. de Lacépède se faisait de ses gobiomores (t. II, p. 583) rentre à peu près dans celle des éléotris actuels; mais il place en tête du genre un poisson d'une tout autre famille , le pasteur ou nomeus {liarder de Margrave, 1 53), lequel est un scombéroïde (noire nomeus Mau- CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 219 ritii). Il avait été induit sans doute en erreur par Gronovius et Gmelin, qui en avaient fait un gobie (gobius Grononi, Gmel.), malgré ses grandes ventrales bien distinctes. 11 y ajoute le gobius Kœlreuter, qui est un përiophthalme; enfin, il fait un genre, sous le nom barbare de gobio?7ioroïde{p. 5g2 ), de Xamore pixuma de Margrave, ou gobius Pisonis, Gmel., qui est un véritable éïéotris, parce qu'il le confond avec un autre poisson à dorsale unique, dont il ne nous a pas été possible encore de déter- miner l'espèce. Nous ne connaissons d' éïéotris que des mers chaudes , mais il s'en trouve dans les deux océans. Quelques-uns surpassent tous les go- bies pour la taille. Ce sont en général des pois- sons paresseux, qui se tiennent tranquillement dans la vase ou dans des trous de rochers. La plupart fournissent un aliment agréable et de facile digestion. Les espèces d'éléotris sont certainement les poissons les plus propres à prouver combien est peu fondée l'idée de regarder la papille anale comme une marque distinctive du sexe mâle. Dans toutes celles que j'ai disséquées, j'ai observé cette papille de forme variée selon les espèces, autant et souvent plus développée chez les femelles que chez les mâles. J'ai soin 220 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. de le faire remarquer dans les articles qui vont suivre. Nous parlerons d'abord des espèces de l'At- lantique. L'Éléotris têtard. {Eleotris gyn^mus, nob.) Il y a dans les îles et sur le continent de l'A- mérique un ëlëotris connu à Saint-Domingue sous le nom de têtard, et à la Martinique sous celui de dormeur ou d'endormi, qui paraît même y être confondu avec le poisson dont nous faisons le genre suivant ; mais qui , en outre du caractère générique , s'en distingue aisément par ses formes plus courtes, son œil plus grand, plus avancé, et sa bouche plus oblique, et d'autres caractères. Son œil occupe le deuxième cinquième de la lon- gueur de la tète; la fente de sa bouche descend rapi- dement en arrière jusque sous le milieu de l'œil; les dents y sont, aux deux mâchoires, en fin velours et égales; il n'y en a point au vomer, ni aux palatins. Les lignes de la joue, excepté une, se marquent peu; en général , les écailles des côtés de la tête sont très- petites et se voient peu : il paraît que les joues peuvent se gonfler dans certains momens d'une manière remarquable. Les rayons de la première dorsale sont grêles et flexibles. D.6— 1/8;A. 1/8;C. 15; P. 16: V. l/b. CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 221 Celte espèce est d'un brun olivâtre foncé et uni- forme, et elle a sur les nageoires verticales beaucoup de petits traits ou de points bruns sur les rayons. On lui voit sur la tempe derrière l'œil deux traits bruns, qui manquent cependant à certains indi- vidus. Nos observations anatomiques confirment les res- semblances extérieures avec les gobies; un foie petit, réduit à un seul lobe en travers sur l'œsophage; l'es- tomac n'est qu'une simple continuation du canal di- gestif, qui fliit deux ondulations avant sa terminaison à l'anus; les reins sont deux rubans grêles le long de la colonne vertébrale. Dans le squelette le front est rétréci, et le crâne n'a aucunes crêtes, mais il est légèrement convexe. Je compte onze vertèbres abdominales et quinze cau- dales ; les deux dernières abdominales ont les apo- physes un peu dilatées et obliques : celle qui suit les a en anneau, et tient par l'apophyse inférieure au troisième in ter épineux de l'anale. Nos individus ne passent pas six pouces: ceux de la Martinique sont dus à M. Gainot, ceux de Saint-Domingue à M. Ricoid. Ces der- niers ont été pris dans la rivière Artibonite. Le Musée de Hollande en a reçu un de Surinam par M. Dieperink , et feu M. Levaillant nous en a donné quelques petits des eaux douces de la même colonie. Je trouve cette espèce représen- tée dans la collection des peintures du Mexique, sous le nom de ^uavina real, qui paraît indi- 222 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. quer quelque supériorité. En effet M. Ricord nous assure que l'espèce est très - estimée à Saint-Domingue, surtout pour les malades, comme légère et d'une digestion facile. C'est de tous nos éléotris celui qui nous paraît ressembler le plus à Xamore giiazu de Margrave (p. 166) et de Pison(p. 72). Cepen- dant, comme Margrave, tout en lui comptant sept nageoires (sans la caudale), dit des infé- rieures qu'elles sont Jointes (junctas), il ne serait pas impossible que cet amore guazu fût un vrai gobie. U amore pixiwia de Margrave (p. 166) et de Pison (p. 72), est une copie rapetissée d'une mauvaise figure qui se trouve dans le Liber Mentzelii (p. Sg), où elle est intitulée amore- cima, et enluminée d'un vert presque noir sur le dos, et d'un blanc jaunâtre aux côtés et sur le ventre. Il semblerait appartenir à un éléo- tris, si la première dorsale n'en paraissait pas si longue et composée de tant de rayons. En attendant Gronovius* en a fait un synonyme de son premier éléotris, qui pourrait se rap- porter au têtard ou au guavina; mais peut- être au premier de préférence, à cause de la nudité et du renflement des joues. 1. Mus., t. U, p. 16, n.° 168. CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 223 Cest sur cet article de Gronovius que Walbaum (t. III, p. 2o5) a établi son gohius amorea, et Gmelin son gobius Pisonis que Bloch^ met à la suite de ses élëotris, en se demandant si cène serait pas un périophthalme. Cette dernière conjecture n'a aucun fondement. Pison et Margrave comparent cet amore pixuma au tamoata (le calliclite, silurus cal- lichtjs, Lin.) pour la taille, la couleur et le goût, et Pison ajoute qu'il habite les étangs d'eau douce. Z/'Éléotris guavina. {Elëotris guavina, nob. ) On trouve encore à la Martinique un éléotris qui y partage le nom de donneur avec notre première espèce , quoiqu'il en diffère beau- coup; mais nous avons fait remarquer qu'il s'y donne aussi à d'autres gobies et éléotris, comme celui de guavina dans les colonies espa- gnoles. C'est précisément celle-ci qui a été re- présentée par Parra (pi. Sg , fig. i ) , sous le nom de guavina. Sa tête est plus grosse , plus courte , plus renflée ; son corps plus court, sa queue plus haute, ses écailles plus petites, que dans l'éléotris têtard. 1. Sjst. posth..p. 68. 224 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Sa hauteur est six fois dans sa longueur. Sa queue, quoique comprimée , est presque aussi haute que son tronc. Sa tête a le quart de la longueur totale j sa hau- teur est des trois cinquièmes de sa longueur, et sa largeur de près de quatre cinquièmes. Ses joues sont renflées, sa mâchoire supérieure bombée, l'inférieure un peu plus avancée, leur circonscription transverse en arc de moins d'un demi-cercle; l'œil, d'un huitième de la longueur de la tête, à deux diamètres du bout du museau, à trois de celui de l'autre côté. La narine postérieure est tout près de l'œil; l'autre tout près du rebord sous lequel rentre le maxillaire : celle-ci a un très-petit tentacule. Les dents sont en velours bien plus ras que celles de l'éléotris têtard. Il n'y en a aucune au vomer. Sa première dorsale n'a pas tout- à-fait moitié de la hauteur du corps; la seconde en a les deux tiers : ses derniers rayons s'alongent un peu en pointe : l'anale lui répond sous tous les rapports. Les autres nageoires ne diffèrent point de celles de notre première espèce. B. 6; D. 7 — 1/10; A. 1/10, le dernier double; C. 15 et quel- ques petits; P. 16; V. 1/5. Il y a plus de quatre-vingt-dix écailles sur une ligne entre l'ouïe et la caudale, et près de quarante sur une ligne verticale ; au ventre elles deviennent fort petites : la tête en a jusque tout près du bout du museau. Ces écailles sont arrondies et ont au milieu un cercle lisse, duquel partent les rayons de l'éventail, au nombre de plus de vingt, pour plus de moitié de la circonférence. Tout ce poisson est d'un brun foncé noirâtre , plus CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 225 clair et un peu roussâtre à la gorge , à la poitrine et au ventre. Les nageoires sont presque noires ou ta- chetées et pointillées de noir sur un fond noirâtre ; il y a du gris blanchâtre au bord de la deuxième dor- sale, de l'anale, des ventrales et aux bords supérieur et inférieur de la caudale. Cette espèce avait les viscères mieux con- serves que la précédente ; elle m'a montré que le foie est très -petit et réduit à un seul lobe sous l'œsophage, lequel est large à son origine, et se rétrécit en arrière, de sorte qu'un étranglement bien distinct marque le cardia. L'estomac à cet endroit semble se boursoufïler pour embrasser la base de l'œsophage. La crosse, qui est grosse et ronde, est dans le côté gauche du ventre. L'estomac se porte ensuite dans l'hypocondre droit et se rétrécit bientôt. Une valvule forte ferme le pylore. L'intestin se rend droit à l'anus. Le rectum , qui est court , est mar- qué par une dilatation. Je trouve dans le mâle que je dissèque une petite laitance supplémentaire, semblable à celle des autres gobies. La grande lai- tance est très-longue et tient presque toute la capacité de l'abdomen. Il y a une vessie aérienne; les reins sont grêles, ainsi que la vessie urinaire, qui est ré- currente. La nourriture consiste en petits crustacés. M. Dieperink en a envoyé de Surinam au Musée de Hollande un individu d'un brun roussâtre, avec des apparences de bandes blan- 12. l5 22G LIVRE XIV. GOBIOÏDES. châtres; mais qui ne nous paraît qu'une variété individuelle. Nos individus noirs sont longs de neuf pou- ces. Ils nous ont été envoyés de la Martinique par M. Plée et par M. Garnot. La figure de Parra (pi. 39, fig. 1 ) représente bien ce pois- son, et donne surtout le vrai caractère de sa tête : la première dorsale y est cependant un peu trop haute. Selon lui l'espèce est répandue dans toutes les rivières de l'ile de Cuba. Elle atteint dix- huit à vingt-deux pouces de longueur, et on l'estime beaucoup comme aliment. L'individu envoyé de Surinam avait été pris dans la mer. Il paraît que l'espèce traverse l'Atlantique. Adanson a donné autrefois au Cabinet du Roi une peau en herbier que nous ne jiouvons distinguer en rien d'essentiel de ce guavina, et qu'il assure être celle d'un poisson qui se tient dans la vase du Sénégal, et que les nègres nomment boudé. Z/'Éléoïris mulet. {Eleolris mugiloides , nob.) Xi, Cette espèce se nomme mulet à la Marti- nique, et ressemble en effet beaucoup à un CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 227 muge ou à quelque cyprin à dos élevé. Sa tête , plus courte qu'au guavina , est plus haute en arrière, non bombée au museau; sou front descend obliquement en surface plane ; son corps est aussi plus haut et plus comprimé, et ses écailles plus grandes même qu'au pre- mier dormeur. Sa hauteur, à la naissance de la première dorsale, est du quart de sa longueur; son épaisseur de moitié de sa hauteur. Sa tête n'a guère plus du cinquième de sa longueur; elle est d'un cinquième moins haui|^ à la nuque, et sa largeur y est d'un quart moindre que sa hauteur. L'œil, à peu près du cinquième de la lon- gueur de la tête, est à deux diamètres du bout du museau et à trois de l'autre œil. La mâchoire supé- rieure avance un peu plus. Les dents sont en fin velours sur une bande assez étroite : le palais n'en a aucunes, La deuxième dorsale, l'anale, la caudale, se prolongent un peu plus en pointe que dans le gua- vina : les ventrales même se terminent en filets. La deuxième dorsale a deux rayons de moins, et l'anale souvent un de plus. B. 6; D. 7 — 1/85 A. 1/9 ou I/IO5 C. lÔj P. 14; V. 1/5. Le nombre des écailles de l'ouïe à la caudale ne va pas à plus de trente-cinq sur une rangée, et dans l'endroit le plus haut il n'y en a guère que douze, toutes à peu près hexagonales, aussi larges que longues, et sillonnées d'un éventail de quatorze ou quinze rayons. Sur la tête elles sont plus petites 228 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. et cependant encore bien supérieures à celles des es- pèces précédenies. Sa couleur paraît un brun noirâtre. Sur les na- geoires sont des bandes ou des séries de taches noires qui sur les dorsales sont disposées obliquement; il y en a au moins six ou sept rangées, trois ou quatre sur l'anale, vers sa base seulement, et huit ou neuf sur la caudale. Les pointes des rayons de la deuxième dorsale et de l'anale sont blanchâtres. Celte espèce a la cavité abdominale plus courte, mais beaucoup plus haute; aussi a-t-elle une vessie aérienne plus grande que celle des autres espèces ; Je repli du péritoine qui la soutient en dessous , est fort épais et argenté vers la pariie postérieure. L'estomac m'a paru très-petit, mais suivi d'un canal intestinal long, grêle et replié nombre de fois sur lui- même, et donnant dans un rectum court, mais assez large. Je dois cependant faire remarquer que ces viscères n'étaient pas bien conservés. Les ovaires étaient remplis d'oeufs plus petits que des grains de pavot; ils formaient un gros lobe , dont la portion postérieure se portait dans l'abdomen au- delà de la fin du rectum; aussi l'ovaire a-t-il un petit lobule récurrent pour venir déboucher tout près du cloaque. La papille génitale de cette femelle est dé- veloppée sous la forme d'une languette charnue, dirigée en arrière , échancrée dans le milieu, et décou- pée de chaque côté en fines dentelures. La face infé- rieure de la papille est creusée d'un petit sillon. Son crâne se distingue par la grande saillie des lames antérieure et postérieure de l'orbite, et par celle CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. ' 229 de la crête externe ou temporale, tandis que la mi- toyenne est fort petite, et que les intermédiaires sont presque entièrement effacées. Il y a onze vertèbres abdominales et quinze caudales, comme dansl'éléotris têtard. Les côtes sont longues et assez fortes. Nos individus ne passent pas sept pouces. Ils nous ont été envoyés de la Martinique par MM. Plée et Garnot. Nous en avons un plus petit, pris dans les eaux douces de Surinam par feu Levaillant, qui nous l'a donné. Le sciœna maculata de Blocli (pi. 299), que nous avons en ce moment sous les yeux, n'est autre chose qu'un très-petit individu de cette espèce, mal conservé, et altéré dans ses couleurs. Blocli, selon son usage, l'a repré- senté plus en grand, et a transformé en taches bien terminées les altérations nuageuses des teintes. L'espèce se trouve aussi parmi les figures faites au Mexique , et que nous avons citées plusieurs fois; elle y porte le nom de gobius striât us. Zi'ÉLÉOTRIS A GRANDES ÉCAILLES. {Eleotris grandisquama ^ nob.) 11 a les écailles de la tête beaucoup plus grandes encore que l'éléotris mulet, et sous 250 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. ce rapport, non moins que par la foime de son corps, il ressemble encore davantage aux muges. Son tronc est moins élevé et moins comprimé, et sa tête beaucoup plus déprimée. Sa hauteur est près de cinq fois dans sa longueur; elle est d'un tiers moins large que haute. Sa tête est du quart de la longueur totale, de près de moitié moins haute que longue. Sa largeur égale sa hauteur. Toute sa face supérieure est plane et garnie d'écaillés aussi grandes que celles du corps. Il y en a également de grandes sur les joues et aux opercules; c'est à peine si l'on en compte trente sur une ligne depuis l'ouïe jusqu'aux petites delà base de la caudale. L'œil occupe sur le côté le deuxième cinquième de la longueur de la tête : il est à deux diamètres de l'autre. La fente de la bouche va à peine jusque sous son bord antérieur. Les dents sont en velours. Les nageoires s'alongent moins que dans le mulet La caudale est arrondie. 0.6 — 1/8; A. 1/9, etc. Notre individu, conservé dans la hqueur depuis long -temps, paraît d'un brun roussâtre foncé. Sa deuxième dorsale et son anale ont des taches noirâ- tres, nuageuses, placées peu régulièrement. Il est long de cinq pouces. Nous en ignorons l'origine, mais nous avons sujet de le croire d'Amérique comme les prë- cedens. CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 231 Z'Éléotris ÉMERAUDE. (Eleotris smaragdus j noh.) C'est une espèce plus alongëe qu'aucune autre, apportée de Cuba par M. Poey, et qui a été appelée dans cette île esmeralda negra, à cause de sa ressemblance de forme avec les ^ohius lanceolatus et gobiiis baccalaus, aux- quels appartient proprement ce nom ô^esme- ralda. Sa hauteur est près de dix fois dans sa longueur ; sa tête n'y est que cinq fois : elle n'a en hauteur que moitié de sa longueur; sa largeur est d'un cinquième plus considérable. L'œil occupe le deuxième sixième de la longueur, à un diamètre et demi de l'autre. Le museau est obtus, la mâchoire inférieure plus avan- cée; la bouche, tombant rapidement en arrière, n'est pas fendue jusque sous l'œil. Les dents sont en fm velours : je n'en vois pas au vomer. L'orifice des ouïes n'est ouvert que dans sa partie verticale. La première dorsale n'a que des rayons très-frêles. Aucune des trois nageoires verticales n'excède la hauteur du corps. La caudale est pointue et de près du quart de la longueur totale. Les ventrales n'ont que les deux tiers des pectorales, qui sont six fois et demie dans la longueur du poisson. B. 5; D. 6 — 1/16; A. 1/9, etc. Les écailles sont fort petites. Tout le poisson est d'un brun foncé, un peu plus gris en dessous ; les na- 232 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. geoires un peu plus pales; des points plus bruns se voient sur les rayons des dorsales. Notre individu est long de cinq pouces : l'es- pèce en atteint huit. On la mange. Z^'Éléotris a museau obtus. {Eleotris sima, nob.) Nous avons encore des eaux douces de la Veia-Ciuz un petit ële'otiis remarquable par son museau obtus , qui descend par une ligne presque verticale du sommet du front à la bouche. La mâchoire inférieure dépasse un peu la supérieure. L'œil est petit. Toutes les nageoires sont arrondies. Les écailles sont médiocres , sur trente-deux rangées entre l'ouïe et la caudale. D. 8 — 9; A. 10 5 C. 15; P. 14; V. 1/5. La papille génitale est oblongue et terminée en pointe , le tube excréteur des laitances est dans cette espèce à la face supérieure. Tout le corps est verdâtre ou noirâtre ; les nageoires, grises, ont des points roussâtres sur les rayons. La longueur de nos individus est de trois pouces. Les élëotris des Indes ne sont pas moins nombreux que ceux de l'Amérique, et l'on CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 255 pourrait même e comparer quelques-uns de l'ancien monde à ceux du nouveau conti- nent. Ils vivent pour la plupart dans les eaux douces , et on en a pour preuve les coquil- lages fluviatiles, surtout du genre mélanie, que nous avons trouvés dans l'estomac des in- dividus soumis à nos recherches anatomiques. L'espèce la plus répandue de toutes est Z/'Éléotris noir. {Eleotris nigra, Q. et G.) Il ressemble assez au guavina d'Amérique par les formes de sa tête, la petitesse et l'écar- tement des yeux; cependant il s'en laisse aisé- ment distinguer par des écailles plus grandes, d'autres nombres de rayons , etc. M. Desjardins nous apprend que l'on nomme ce poisson à l'Isle-de-France Yendormij, parce qu'il se tient dans les creux des rochers, et ne s'y meut qu'avec lenteur. On l'y appelle aussi cabot noir. C'est un poisson d'eau douce. MM.QuoyetGaimardetM.Dussumierl'ont trouvé dans les rivières de cette île. Celui-ci en a pris dans le Gange, et en a même retiré des puits de la côte de Malabar; il en a eu aussi dans la rade de Bombay. L'espèce se porte fort loin dans l'Orient : car 234 LIVRE XÏV. G013I0ÏDES. MM. Kuhl et Van Hasselt en ont envoyé de Java; Quoy et Gaimard en ont rapporté de l'île Guam et de celle de Waigiou ; Lesson et Gainot d'Otaïti et de Boiabora, deux des iles de la Société, et M. Goudot de Madagascar. Forster l'a connue à Otaïti, et en a laissé une figure reconnaissable et une description assez exacte^ d'après de petits individus; mais, par une bizarrerie de jugement difficile à expliquer, il l'a rangée parmi les loches et l'a nommée co- bitispacifica. Schneider Vu transportée parmi les pœcilies : c'est son pœcilia fusca^ y mais comme les deux genres ont les ventrales sous l'abdomen, il est clair qu'un poisson qui les a sous les pectorales ne peut y appartenir. Sa hauteur est cinq fois dans sa longueur; le corps est en avant aussi large que haut : en arrière il est comprimé. Sa téie se déprime un peu , et à la nuque elle a un cinquième ou un sixième de moins en hauteur qu'en largeur. Sa longueur est d'un tiers supérieure à sa hauteur, et fait le quart de celle du poisson. La circonscription horizontale de son museau est en arc de cercle fort obtus. Sa mâchoire inférieure dé- passe l'autre. Sa bouche descend rapidement, mais ne va que jusque sous le milieu de l'œil, qui lui- même n'a qu'un septième de la longueur de la tête, dont il occupe le troisième septième : il est à trois 1. Sauf un rajoii de moins au\ branchies. 2. Bloch Schn. , p. 455. CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 235 diamètres de celui de l'autre côté. Les dents sont en velours sur des bandes assez larges; il n'y en a point au vomer. La langue est large, obtuse, très-libre et lisse. Il y a six lignes verticales de points sous l'œil j deux horizontales sur la joue; deux sur l'opercule, dont la supérieure se courbe en arrière vers le bas. Le contour du préopercule, arrondi comme dans les au- tres espèces, a près de l'angle une petite épine dirigée obliquement vers le bas. L'ouïe est fendue jusque sous l'aplomb du bord montant du préopercule. La première dorsale n'a pas moitié de la hauteur du corps sous elle; la seconde s'élève un peu plus de l'arrière. La caudale est pointue. Les pectorales ont un sixième de la longueur totale, et les ventrales un peu moins. B. 6; D. 6 — 1/8,- A. 1/8, le dernier double' ; C. 15 et quel- ques petits; P. H; V- 1/5. Il y a soixante - cinq écailles de l'ouïe aux petites de la base de la caudale , et vingt-deux ou vingt-trois du dos à l'abdomen, bien carrées, le bord visible seul un peu arqué, et sillonnées de plus de quarante ravons à l'éventail. Sa couleur est d'un brun noirâtre, tirant au gris- brun verii le ventre; chaque écaille est plus noire au milieu , ce qui forme sur les côtés des lignes lon- gitudinales plus ou moins sensibles. La première dor- sale est marbrée, plutôt que rayée, de brun noirâtre sur un fond grisâtre; la deuxième a de très-nombreux 1. Forstcr compte A. 10, à cause de ce rajon qu'il prend pour deux. 23G LIVRE XIV. GOBIOÏDES. traits bruns en forme de V ou de chevrons renversés. Il y a aussi des traits bruns en travers des rayons de la caudale, et quelques-uns vers la base de l'anale: à la pectorale ce sont plutôt des points des deux côtés des rayons. Il y en a des individus plus pâles et d'autres plus foncés. Quelquefois ils sont d'un brun assez pâle ou même tirant au roussâtre. L'individu que j'ai disséqué était une femelle ayant encore les sacs d'ovaires remplis d'œufs d'une peti- tesse excessive. Ces deux organes s'ouvrent presque directement dans deux conduits renfermés à l'exté- rieur dans un repli cutané formant une papille large, épaisse, aplatie, creusée d'un sillon à la face inférieure, et échancrée vers le milieu. Dans cette échancrure se volent les orifices de chaque conduit; ils sont bor- dés d'un repli de la peau, qui forme une sorte de cuilleron. Ce sillon ne paraît pas communiquer avec ces ouvertures. L'anus est très-petit et en avant de la papille. Le foie est médiocre, a un seul lobe et est situé en travers , un peu plus à droite qu'à gauche. Les autres viscères étaient détruits. J'ai trouvé dans l'abdomen des débris du melania vlrgulata et quelques individus entiers. Son squelette ressemble beaucoup à celui de l'éléo- iris têtard ; il a cependant le crâne et le front plus larges, mais le crâne y est de même sans crête. Je ne compte que dix vertèbres abdominales; la dernière a les apophyses transverses irès-dilalées : toutes les suivantes les ont en anneaux. On pourrait cependant prendre la première pour une onzième abdominale: alors il y en aurait quatorze à la queue. CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 257 Ce poisson est très-estimé à l'Isle-de-France. On le mange en friture. Ue'léotris noir de Waigiou, décrit et repre'- sentë par MM- Q uoy e t Gaimard dans le Voyage de M. Freycinet (p. aSg, pi. 70, fîg. 2), com- paré scrupuleusement à ces cabots noirs de risle-de-France, n'en diffère en rien. Je regarde Xeleotris Mauritianus de M. Bennett *, comme étant de la même espèce. Z/'Éléotris a tête poreuse {Eleotris porocephala :, nob.) est un poisson qui pourrait être comparé à Yeleotris grandisfjuama qiie nous avons décrit parmi les espèces d'Amérique. C'est un éléotris à grandes écailles, même sur sa tête, qui est aplatie; recueilli aux Séchelles par M. Dussu- mier, et à la Nouvelle-Irlande par MM. Quoy et Gaimard. Sa hauteur est du sixième de sa longueur , sa tête en prend le quart, et sa caudale, pointue, a la même pro- portion. En avant le tronc est aussi large que haut. La tête , moitié moins haute que longue , a un tiers de plus en largeur qu'en hauteur; tout le dessus en est plan. Les yeux, d'un peu moins du cinquième de la longueur de la tête et dirigés de côté, sont à deux diamètres et un quart l'un de l'autre, à un diamètre et demi du 1. Zool. prod.y i83o - i83i , part, I, p. 166. 258 LIVRE XIV. GOEIOÏDES. bout du museau. La bouche descend faiblement en arrière et est fendue jusque sous le milieu de l'œil. C'est à peine si la mâchoire inférieure dépasse l'autre. Les dents sont en fin velours ras , sur de larges ban- des. La narine antérieure, tout près de la lèvre, a un appendice cutané assez notable; l'autre, plus près de l'œil, est un simple trou. Un peu au-dessus est un pore enfoncé. Immédiatement derrière l'œil est une fossette qui donne dans un petit canal aveugle, et le long du bord montant du préopercule sont quatre gros pores. L'ouïe s'ouvre jusque sous le milieu du préopercule. La première dorsale n'a que moitié de la hauteur; la deuxième et l'anale sont un peu hautes. Les pec- torales ont un peu moins du cinquième de la lon- gueur, et les ventrales, pointues, sont encore un peu plus courtes. Il n'y a pas d'effilé aux pectorales. B. 65 D.6 — lyS; A. 1/7, les derniers doubles; C 17 et quel- ques petits ; P. 15 j V. 1/5. Il n'y a que trente-quatre à trente-six écailles de l'ouïe à la caudale, aussi larges que longues, un peu trilobées au bord radical, et à vingt-cinq rayons à l'éventail. Celles du dessus de la tête, plus grandes même que celles du corps, sont plus rondes et ont moins de rayons; elles lui donnent presque l'appa- rence d'un ophicéphale. La couleur paraît entièrement brun roussâtre, plus clair en dessous. La plupart des écailles des côtés ont un brun noirâtre à leur base, ce qui fait autant de petites taches, mais peu marquées. La première dor- sale est brune; la seconde, brune aussi, a des points CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 259 d'un brun plus foncé sur ses rayons, et le bord blanchâtre, La caudale est de même, et ses bords supérieur et inférieur sont blanchâtres. Le bord de l'anale est semblable, mais je ne lui vois point de taches. La papille génitale est simple et alongée, mais aplatie vers l'extrémité , qui n'a point d'échancrure. Je l'ob- serve de même forme dans les deux sexes. L'intestin est assez long et fait deux replis sur lui-même. L'es- tomac est petit, mais l'œsophage est large. Il y a une vessie natatoire assez grande. Nos individus ont jusqu'à huit pouces de longueur. M. Dussumier nous assure qu'aux Sëchelles ce poisson habite les mares d'eau douce et les ruisseaux. On l'y nomme cabeau ou cabot, comme d'autres gobioïdes. Frit, il ressemble pour le goût à notre goujon. X'Éléotris ophicéphale. {Eleotris ophicephalus ^ K. et V. H,) Cette espèce ressemble autant qu'il est pos- sible à la précédente : mêmes formes, mêmes nombres (D, 6 — 1/8; A, 1/7, etc.), mêmes écailles, même tête, simulant celle des ophicéphales, même appendice cutané aux narines antérieures; mais je ne lui vois qu'un seul pore, au bord inférieur du préopercule : son corps, d'un 240 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. brun roussâtre, a non pas des taches éparses, mais cinq ou six lignes longitudinales de chaque côté, d'un brun foncé; les ventrales et l'anale sont blan- châtres. L'individu est long de six pouces. Il a été envoyé de Java par MM. Ruhl et Van Hasselt. Éléotris de Madagascar. {Eleotris Madagascariensis , nob.) M. Goudot a trouvé à Madagascar avec Xeleotris nigra une autre espèce, à corps couvert de grandes écailles, sur quarante ran- gées entre l'ouïe et la nageoire de la queue, ayant quatre pores le long du bord du préopercule; les dents en cardes, celles du rang externe plus fortes; à papille génitale digitée, dont le corps, noir sans taches, a la caudale et la seconde dorsale semées de petits points roussâtres. Ces nageoires sont alongées. D. 6 — 95 A. 7; C. 15; P. 16; V. 1/5. Un sillon remarquable existe sur la tempe, au- dessus de l'œil et de l'insertion du préopercule. La longueur de nos individus est de neuf pouces et demi. Z;'Éléotris pçrlé. {ELeotris margaritacea , nob.) Une autre espèce, voisine de celle-ci par la grandeur des écailles, CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 241 a aussi, comme elle, un sillon sur la tempe, mais il est moins profond ; les nageoires sont moins alongées, la caudale étant presque ronde. Les nombres sont les mêmes.. La couleur est brune, avec des taches blanches et nacrées sur les flancs, formant trois rangées peu distinctes : il y en a aussi sur la caudale. L'individu est long de six pouces, et vient de Yanikolo , d'où il a été rapporté par MM. Quoy et Gaimard. Z'Éléotris a front bombé. (^Eleotris twnifrons y nob.j Sciœna macrolepidota de Bloch.) Nous soupçonnions depuis long-temps le sciœna macrolepidota de Bloch , de n'être qu'un éléotris (pi. 298), et la complaisance qu'a eue M. Lichtenstein de confier ce poisson à notre examen, nous a mis à même de cons- tater la justesse de notre conjecture. Les écailles du corps sont aussi grandes que dans les deux précédens; mais celles du dessus de sa tête sont bien plus petites. Ses nombres ne sont pas non plus les mêmes, et ce qui d'ailleurs le distingue de toutes les espèces du genre, c'est qu'il a le front bombé entre les yeux, qui sont tout-à-fait dirigés de côté. Sa plus grande hauteur, à l'endroit de la naissance 12. 16 242 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. de la première dorsale, qui est aussi de la longueur de sa tête et de sa caudale, est un peu moindre que le quart de la longueur totale; sa largeur est un peu plus de moitié de sa hauteur. La ligne du dos va en baissant un peu, en sorte qu'au-dessus de l'oper- cule la tête n'a en hauteur que les trois quarts de sa longueur. Le dessus du crâne est plat, mais le front entre les yeux est convexe dans les deux sens. L'œil occupe le deuxième quart de la longueur de la tête à près de trois diamètres de celui de l'autre côté. La bouche descend rapidement, mais ne va pas plus en arrière que le bord antérieur de l'œil. Les dents sont en fin velours. Les narines n'ont pas de lobule cu- tané. Il y a deux petits pores le long du bord mon- tant du préopercule. Les nageoires sont disposées à peu près comme dans les précédens ; mais les nombres de rayon s en sont différens. B. 6; D. 7 — 1/8; A. 1/10, les derniers sont doubles'; C. 16 et quelques petits; P. 13; V. 1/5. Le lobule génital est grand et ovale. Je compte trente écailles entre l'ouïe et la caudale; la tête en a une vingtaine sur chaque ligne, depuis le bout du museau jusqu'à l'aplomb de l'ouïe; ^Telles de l'oper- cule sont presque égales à celles du corps. Celles-ci, un peu plus longues que larges, à cils du bord visible très-courts et très-fins, à bord radical presque coupé carrément, ont un éventail de dix-huit rayons , dont la pointe atteint jusqu'à leur bord extérieur. i. Bloch a compté pour deux le dernier rajon de la dorsale. CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 243 Aujourd'hui l'individu , à peu près décoloré, paraît d'un fauve clair , avec quelques points plus bruns sur la deuxième dorsale. Il est long de six pouces. Bloclî, dans sa figure, lui en donne dix, le peint de six larges bandes verticales violâtres, sur un fond gris-fauve ; met des taches ou des points bruns à toutes les nageoires verticales, et colore les ventrales en rouge. Il est difficile de dire ce qui dans tout cela a pu tenir au plus de fraîcheur de l'individu ou à l'imagina- tion si fertile de l'auteur. L'agrandissement de sa figure lui était coutumier, et nous avons déjà vu qu'il l'a aussi pratiqué pour son sciœna maculata, qui est notre eleotris mu- giloides. Il dit avoir acheté ce poisson à une vente hollandaise , dont le catalogue l'indiquait comme originaire des Indes. L'espèce doit être rare, car je n'en ai point vu d'autre individu. Éléotris aux ouïes armées. {Eleotris belobrancha, nob.) C'est une espèce à tête plate et nue , dé- couverte dans les eaux douces de Manado, île de Gélèbes, par MM. Quoy et Gaimard, 244 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. et qui offre un caractère singulier dans les- pointes que forment deux de ses rayons bran- chiaux. La hauteur du corps est le septième de sa longueur ; elle est (aux pectorales) d'un cinquième plus large que haute, mais sa queue est comprimée; sa tête, du quart de la longueur totale, est de moitié moins haute que longue et d'un tiers moins large; mais quand ses ouies se dilatent, elle devient presque aussi large que lon- gue. La circonscription horizontale de son museau est fort obtuse; ses mâchoires sont presque égales; sa bouche est fendue jusque sous l'arrière de l'œil, lequel occupe le deuxième sixième de la longueur de la tète, à un diamètre et demi de celui de l'autre côté. Les joues sontassez renflées. Une ligne enfoncée entoure le sour- cil et se prolonge jusqu'au haut de l'ouïe. Les dents sont en velours; leur rang extérieur est plus prononcé. Les ouies n'ont d'ouvert que leur partie verticale. En dedans de l'angle postérieur de la mâchoire infé- rieure se voient deux petites épines, qui appartien- nent au premier et au deuxième rayon branchiostège, lesquels, au lieu d'adhérer simplement, comme à l'or- dinaire, par leur base à la face latérale de l'os hyoïde, prolongent en avant cette base en une pointe aiguë, qui se sent sous la peau. Les dorsales n'ont que moitié ou les deux tiers de la hauteur du corps; la deuxième, ainsi que l'anale qui lui répond, est moins longue que haute. La cau- dale est ronde, de moins du sixième de la longueur. La pectorale en a un peu plus, et ses premiers rayons sont courts, fins et effilés, comme dans nos gobies CHAP. XIV. ÈLÉOTRIS. 245 communs d'Europe. Les ventrales sont obtuses et un peu plus courtes que les pectorales. B. 6; D. 6 — 1/7; A. 1/7, le dernier double; C. 15; P. 14, sans compter l'effilé; V. 1/5. Le lobule génital est médiocre et pointu. U y a près de soixante- dix écailles de l'ouie à la caudale, et environ vingt-quatre du dos au ventre, plus longues que larges, tronquées carrément au bord radical, finement ciliées au bord visible, et marquées d'un éventail de quinze à dix-huit rayons. Sa couleur est un brun foncé, qui passe au brun pâle ou à l'olivâtre sous le ventre. Le milieu de cha- que écaille est plus foncé , ce qui produit tout le long du corps des lignes étroites d'un brun un peu plus foncé. Les nageoires sont plus ou moins teintes de roux ou d'orangé, surtout la seconde dorsale et l'a- nale, et aux bords supérieur et inférieur de la caudale. La première dorsale est plus noirâtre, mais a un large bord orangé. Les ventrales tirent plus à l'olivâtre. On voit quelquefois des points bruns sur certains endroits. Les viscères ressemblent à. ceux des espèces de l'Inde par une plus grande longueur du canal digestif, replié deux fois sur lui-même. La vessie aérienne est grande. Le squelette a, comme dans les éléotris têtard et noir, le crâne dépourvu de crête; mais le front y est beaucoup plus étroit entre les yeux. La queue com- mence sous la onzième vertèbre : il y en a en tout vingt-cinq. Nos individus sont longs de six et sept pouces. 246 livre xiv. gobioïdes. Z/'Éléotris a épaulette noire. {Eleotris humeralis , nob.) Nous devons à M. Bélanger un élëotris du Bengale, remarquable par une tête plus dé- primée que dans aucun autre , et par la tache noire de la base de sa pectorale. Sa hauteur est d'un peu plus du sixième de sa lon- gueur. Sa tête y est comprise trois fois et demie; elle est fortement déprimée et aplatie. Quand ses oper- cules sont fermés , elle n'a en largeur que moitié de sa longueur; mais ses ouïes étant fendues jusque sous le milieu de sa mâchoire Inférieure, les opercules peuvent s'écarter de façon à la faire paraître aussi large que longue. La circonscription horizontale de son museau est parabolique. Sa mâchoire inférieure dépasse la supé- rieure. Ses dents sont en fin velours. Son œil occupe le troisième sixième de sa longueur, et est à deux dia- mètres de celui de l'autre côté. Le front , le dessus du museau, la joue et l'opercule, sont garnis d'écallles petites, adhérentes et fort âpres. Une fossette ovale entre l'oeil et le museau contient les deux orifices de la narine, dont le postérieur est bien plus grand que l'autre. La première dorsale n'ai pas moitié de la hauteur du corps : la deuxième et l'anale sont un peu plus élevées. La longueur des pectorales est du cinquième de celle du corps. Les ventrales, un peu jugulaires, bien séparées et pointues, n'ont que les deux tiers CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 247 de la longueur des pectorales. La caudale est ronde et d'un peu moins du cinquième. B. 6; D. 6 — 1/8; A. 1/S, le dernier double; P. 18; V. 1/5. Le lobule génital est petit et conique. Les écailles du corps sont grandes, un peu plus larges que longues, légèrement trilobées au bord radical; leur éventail a dix-huit rayons ; leur partie visible est finement ciliée. Ce poisson paraît brun. Sa première dorsale est noirâtre; la seconde et l'anale ont sur un fond brun des séries de taches plus transparentes ; les ventrales sont brunes. Les pectorales ont des rayons d'un brun jaunâtre, et sur la base de leurs rayons , du neuvième au seizième, est une large tache ronde et noire, entre deux taches plus petites, l'une au-dessus, l'autre au- dessous, et de couleur jaunâtre : le tout entouré de brun. Notre individu est long de cinq pouces. Z'Éléotris gobie. {Eleotris gobioides, nob.) Les eaux douces qui se jettent dans la baie des Isles, au nord-est de la Nouvelle-Zélande, nourrissent un éléotris qui ressemble singu- lièrement aux gobies les plus communs sur nos côtes. Sa hauteur est du sixième de sa longueur; sa tète y est trois fois et deux tiers, et d'un tiers moins haute et moins large que longue. L'œil occupe le deuxième cinquième de la longueur de la tète, à un 248 LIVRÉ XIV. GOBIOÏDES. peu plus d'un diamètre de distance de l'autre. Le museau est obtus, et le profil descend très-peu; la bouche, au contraire, descend vite. Les dents sont en fin velours. Les ouïes ne sont fendues que jusque sous le bord montant du préopercule. Le front , le museau, la joue, sont nus. H y a quelques lignes sur la joue. Un sillon longitudinal sur la nuque mar- que le renflement de ses muscles. Les nageoires ver- ticales n'ont pas moitié de la hauteur du corps. La caudale est ronde, du septième seulement de la lon- gueur du corps. B. 6; D. 6 — 1/10 5 A. 1/9, le dernier double, etc. Les écailles sont grandes, au nombre de trente- cinq environ de l'ouïe à la caudale ; elles sont légère- ment lobées à leur bord radical, et ont vingt rayons à l'éventail, etc. Dans la liqueur il paraît d'un brun roussâtre avec des taches nuageuses plus foncées. Une ligne verti- cale blanche, nettement dessinée sur un fond brun, marque la base de sa pectorale. Ses autres nageoires sont brunes. Il y a sur les verticales des séries de taches plus pâles. Dans les jeunes sujets les nageoires ont moins de brun. Nos individus ne passent pas quatre pouces. On les doit à MM. Lesson et Garnot, Quoy et Gaimard. Z/'Éléotris cyprin. {Eleolris cjprinoides, nob.) Parmi les éleotris des contrées orientales il en est un qui ressemble singulièrement à CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 249 un petit cyprin, tel que l'ablette (cjprinus alhurnus) ou quelque espèce voisine. Son corps est comprimé, son ventre convexe, son museau pointu et sa bouche très-petite. Sa plus grande hauteur, qui est à l'anus, est cinq fois dans sa longueur : c'est aussi la mesure de sa tête et de sa caudale. Elle n'a en épaisseur que moitié de sa hauteur. Les lignes supérieure et inférieure de son profil, à peu près droites, se rapprochent en angle aigu pour former son museau. Son œil a plus du quart de la longueur de sa tètej il n'y a pas un diamètre de l'œil au bout du museau, et la bouche ne prend pas même toute cette longueur. Ses dents sont en fin velours. Les dorsales n'ont guère plus de moitié de la hauteur du corps. B. 5? D. 6 — 1/9; A. 1/9;C.15; P. 15; V. lA Le lobule génital est large, carré et échancré. Les écailles sont grandes; on n'en compte que vingt-six ou vingt-huit entre l'ouïe et la caudale, et neuf ou dix du dos au ventre, plus larges que longues, fine- ment ciliées, à quinze rayons à l'éventail, qui s'étend jusqu'au bord visible. Dans la liqueur ce petit poisson paraît uniformé- ment fauve, avec une tache noirâtre au haut de la base de la pectorale. Sur les dorsales, des traits bruns lais- sent des taches rondes, transparentes. Il y a aussi des traits bruns sur la caudale. Nos individus n'ont que deux pouces et demi. Ils ont été pris dans la rivière Saint- Maurice à l'île de Bourbon par M. Leschenault. 250 livre xiv. gobioïdes. Z/'Éléotris rayé. {Eleotris radiata^ Q. et G.) Cette jolie espèce a été prise pai MM. Quoy et Gaimard à l'entrée de la rivière Tamise, au nord - est de la Nouvelle - Zélande , en Février 1827. Sa hauteur est sept fois et quelque chose dans sa longueur; sa tête y est quatre fois et sa caudale cinq fois. Son tronc est en avant de moitié moins large que haut : en arrière il se comprime davantage. Sa tête, au contraire, est déprimée, deux fois plus longue et d'un quart plus large que haute. Son œil occupe le deuxième quart et est à un diamètre et demi de son opposé. La mâchoire inférieure avance un peu et la bouche descend un peu en arrière. D. 6— 1/9; A. 1/9, etc. Ses écailles sont médiocres. Dans la liqueur ce petit poisson paraît rougeâtre et a de chaque côté douze bandes verticales brunâ- tres; ses nageoires sont blanchâtres; la première dor- sale a deux bandes longitudinales noires, dont la supérieure est large et dentelée; la deuxième en a trois moins bien marquées , l'anale une. Sur la caudale sont beaucoup de lignes verticales brunes. Il y a à la base de la pectorale une ligne étroite noirâtre. Dans le frais , d'après la description des deux voyageurs qui l'ont découvert, le fond est nacré, blanchâtre en dessous; les bandes d'un gris verdâtre. L'individu n'a que deux pouces. CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 251 La mer des Indes a d'autres ële'otrîs assez diffërens des précëdens par leurs petites écailles, leur forme comprimée et l'ëlëvation de leur première dorsale , et surtout parce qu'ils ont un rayon de moins à la membrane brancliiostège. On peut les comparer aux gobies à petites ëcailles de la même mer, que nous avons fait remarquer dans l'histoire de ce genre. Z'Éléotris Taiboa. {Eleotris strigata, nob. ; Gobius strigatus, Brouss. et Gm.) C'est l'espèce la plus commune de ce groupe : dëcouverte à Otaïti lors du premier voyage de Cook, elle a ëtë bien reprësentëe et dëcrite avec dëtail par Broussonnet, dont elle com- mence la première et unique Dëcade iclithyo- logique. Le Cabinet de Hollande en possède un individu venu de Java, et celui de Paris en a un des Moluques. Cependant l'espèce doit être rare : car aucune de nos grandes expédi- tions ne l'a rapportée. Sa hauteur est six fois dans sa longueur; son épais- seur deux fois dans sa hauteur. Sa tête est quatre fois et deux tiers dans sa longueur totale, et de mêmei hauteur et épaisseur que la partie antérieure du tronc. 252 LIVRE XIV. GOBIOIDES. La caudale est à peine plus longue que la tête et pa- raît un peu pointue. L'œil a un peu plus du cinquième de la longueur de la tête, et est placé un peu plus avant que le milieu : sa distance de l'autre est d'un diamètre et un tiers. Les dents sont en velours : celles du rang extérieur plus longues, grêles, sépa- rées j le palais n'en a aucune, non plus que la langue, qui est assez libre et obtuse. La première dorsale a ses rayons en partie pro- longés en fils grêles ; le deuxième, qui est le plus long, a jusqu'à deux fois et demie la hauteur du corps. La seconde dorsale et l'anale sont longues et peu élevées. La longueur des pectorales et des ventrales, qui est la même, est du sixième du total. Les ven- trales sont pointues et rapprochées à leur base. B. 5 ; D. 6 — 1/18 ; A. 1/17 ; C. 15 et quelq. petits ; P. 18; V. i/5 ; le dernier de la deuxième dorsale et de l'anale est double, et Broussonnet l'a compté pour deux. Ses écailles sont très-petites, aussi longues que larges, très-finement ciliées et marquées d'un éventail de huit ou neuf rayons; la tête n'en a aucunes. Dans la liqueur ce poisson paraît fauve grisâtre. Quatre ou cinq lignes fauves régnent longitudinale- ment sur la base de ses dorsales; un ruban étroit, argenté, liséré de noir ou de violet, prend depuis la lèvre supérieure près de la commissure, et traverse • longitudinalement la joue et l'opercule jusqu'à l'ouïe. Au-dessous sont deux autres lignes argentées, qui montent obliquement en arrière: l'une sur la joue, l'autre sur l'opercule. L'opercule a aussi un ou deux points argentés. Près de son bord antérieur, de cha- ^ CHAP. XIV. ÉLÉOTRIS. 255 que côté du tronc, cachées par la pectorale, sont trois lignes verticales noirâtres. Dans le frais, selon Broussonnet, le fond de la couleur est d'un jaune verdâtre , un peu transparent. Les individus que nous avons observés ont l'un cinq pouces, l'autre quatre seulement. Celui de Broussonnet en a cinq et demi. /v'Éléotris muraille. {Eleotris muralis^ Q. et G.) MM. Quoy et Gaimard ont pris à Tukopia un petit poisson du groupe du Taiboa , et à peu près de la même forme, si ce n'est que sa deuxième dorsale et son anale n'ont que douze rayons mous; que le troisième rayon de sa première dorsale n'a qu'une fois et demie la hau- teur du corps; que ses ventrales sont d'un quart plus courtes que ses pectorales , et que sa caudale prend plus du quart de sa longueur totale : sa tête en a le cinquième. B. 5 ; D. 6 — 1/12 ; A. 1/12 , etc. Dans la liqueur il paraît gris roussâtre, avec trois lignes longitudinales blanchâtres Hsérées de brun, et réunies d'espace en espace par des traits verticaux, en sorte qu'elles forment un dessin semblable à des assises de pierre de taille. Sur l'opercule et sur la joue régnent aussi trois lignes longitudinales argentées, lisérées de brun, qui se changent quelquefois en points argentés. On voit aussi trois ou quatre points 2M LIVRE XIV. GOBIOIDES. OU peiites taches de cette couleur, près de la base de la pectorale. La première dorsale a une tache noire à sa pointe, et cinq ou six lignes verticales grises; sur la seconde, les lignes se changent en partie en taches ou en traits irréguliers. La caudale a des taches rondes ou oblongues, brunes, entre ses rayons : il n'y en a point sur l'anale, qui est transparente; mais un ruban blanc opaque suit la longueur de sa base. D'après un dessin de MM. Quoy et Gaimard il paraît que dans le frais la plupart de ces lignes et de ces taches sont rouges sur un fond vert clair, qui devient blanchâtre en dessous ; on y voit même une ligne rouge sur l'anale. Les individus n'ont que trois ou quatre pouces. Éléotris a six gouttes. {Eleotris sexguttata, nob.) M. Raynaud a trouvé à Trinquemalë, dans l'île de Ceylan, un poisson tout-à-fait sem- blable au muralis pour les formes et pour les nombres des rayons, qui a même les lignes grisâtres des dorsales et la tache noire au sommet de la première; mais les autres nageoires ni le corps n'en ont aucune, ou l'on voit seulement sur la joue et l'opercule deux rangées lon- gitudinales de points argentés, de trois chacune. Le corps paraît gris, les nageoires transparentes et un peu jaunâtres. Les individus sont longs de cinq pouces. CHAP. XIV. PHILYPNES. 255» DES PHILYPNES {Philypnus^ nob.), et en particulier du Philypne dormeur. {Philfpnus dormitator, nob.; Platjcephalus dormi- tator, Schn.) J'ai séparé des éléotris de M. Cuvier, sous le nom de philjpnuSj, un grand poisson de nos colonies américaines, où il est confondu avec les autres éléotris, sous le nom de dor- meur, qui a des dents en carde sur le chevron du vomer en outre de celles qui existent plus grosses sur les mâchoires. La seule espèce connue a été observée à la Martinique par le père Plumier, qui l'intitule dans ses manuscrits ceplialus seu asellus pa- lustris, vulgo le donneuj^^ et en a laissé une figure assez exacte (sauf l'oubli des écailles), gravée en petit dans le Système posthume de Bloch (pi. 12), mais sous le nom fort impropre de platycephalus dorrnitator. M. de Lacépède, qui n'a point connu l'ar- ticle de Bloch, en a rédigé un sur la figure de Plumier, de la Bibliothèque du Roi, et a in- titulé l'espèce gohiomore dormeur.^ M. Cuvier n'ayant pas fait attention au ca- 1. Lacép., t. n, p. 699. 25G LIVRE XIV. GOCIOlDES. ractère fourni par les dents vomëriennes, l'avait confondu avec ses ëléotris, et même, à cause de sa taille, l'avait cité dans son Règne ani- mal; c'est son eleotris dormitatrix. Nous avons reçu ce poisson de la Martinique. Il se trouve aussi à Saint-Domingue, nommé- ment dans la rivière d'Acul, où il partage avec d'autres espèces le nom de têtard et celui de poisson banane, qui s'y donne aussi au ^los- sodonte. D'autres individus nous sont venus de Porto- Rico, où Fespèce est connue sous le nom de guanna, en commun même avec des gobies. C'est un poisson assez long, à tronc arrondi, à tête déprimée. Sa hauteur aux pectorales est près de sept fois dans sa longueur, et sa largeur au même endroit a quel- que chose de plus. Au ventre sa hauteur augmente et est de plus du sixième ; mais son épaisseur diminue au contraire un peu. Sa queue se comprime de plus en plus, La longueur de sa tète est trois fois et demie dans la longueur totale; sa largeur, quand les ouïes sont fermées, est des trois septièmes de sa longueur j mais lorsque les ouïes s'ouvrent, elle en prend les trois quarts. Sa hauteur à la nuque n'est que des deux cinquièmes de sa largeur. La ligne du profil est à peu près droite et descend peu. La mâchoire inférieure dépasse la supérieure: leur circonscription horizontale est à peu près para- CHAP. XIV. PHILYPNES. 257 bolique. L'œil n'a guère en longueur que le neuvième de celle de la lêle, et est placé à trois de ses dia- mètres longitudinaux du bout du museau, à cinq de celui de l'opercule, et à trois de l'œil de l'autre côté. L'orifice postérieur de la narine est à un demi- diamètre du bord antérieur de l'œil j l'autre est à peu près à la même distance en avant, mais un peu plus bas : tous les deux sont de petits trous ronds. La bouche, presque horizontale, est fendue jusque sous le milieu de l'œil; le maxillaire grossit peu en arrière et se cache sous le sous-orbitaire. Les dents sont en fortes cardes sur une large bande aux deux mâchoi- res j celles du rang externe un peu plus grosses, plus écartées, d'une forme plus conique; il y en a une bande de plus petites en travers du devant du vomer j les os palatins n'en ont aucunes, «non plus que la langue, qui est large, plate, obtuse et très-libre de sa partie antérieure. L'angle du préopercule est arrondi et son bord entier; l'opercule prend le tiers de la longueur de la tête, et son bord membraneux supérieur forme un angle saillant. Les membranes branchiostèges ne se joignent à l'isthme que vis-à-vis de l'œil, en sorte que les ouïes sont fort ouvertes. Ces membranes sont épaisses et ont six rayons assez forts, dont le premier et le quatrième sont plus larges que les autres : le quatrième fait un peu saillir sa pointe comme dans beaucoup de gobies. La pectorale a des écailles à sa base, sur près d'un tiers de sa longueur; elle est arrondie du septième de la longueur totale, et a seize rayons, dont le pre- 12. 17 258 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. iiiier et le dernier fort petits. Les ventrales naissent entre les pectorales , un peu plus en arrière , et sont à peu près d'un quart moins longues; non-seulement elles sont distinctes l'une de l'autre, mais elles sont séparées par un intervalle égal à moitié de leur lar- geur, où il n'y a cependant point d'écaillé particu- lière; leur forme est demi-ovale; elles ont une petite épine du tiers de leur longueur, et cinq rayons bran- chus, dont le quatrième est le plus long. La première dorsale commence à l'aplomb du tiers antérieur de la pectorale et finit au-dessus de son extrémité; elle a six rayons assez fermes, excepté à leur pointe, dont les trois premiers ont à peu près les deux tiers de la hauteur du corps; les autres di- minuent un peu; le sixième est un peu plus écarté. Le commencement de la seconde dorsale est juste sur le milieu du poisson; elle est un peu plus haute que la première, et a une épine d'un tiers plus courte que les rayons branchus, qui sont au nombre de neuf, ou de dix, si Ton compte pour deux le der- nier, qui en effet est divisé jusqu'à la racine. La même chose a lieu à l'anale, qui, bien qu'un peu plus courte que la deuxième dorsale, a le même nombre de rayons et lui répond^ entièrement. La caudale est arrondie, du sixième de la longueur totale, et a treize rayons entiers, dont le supérieur n'a point de branches; on en voit quelques petits au-dessus et en dessous. B. 6; D. 6 — 1/9; A. l/9jC. 13; P. 16; V. 1/5. Derrière l'anus est la papille génitale , aplatie d'avant en arrière, large, obtuse et un peu dentelée. On compte soixante et quelques écailles sur une CHAP. XIV. PHILYPNES. 259 ligne de l'ouïe à la base de la caudale, où il y en a ensuite de petites, et une trentaine sur une ligne verticale à l'aplomb des ventrales; elles vont en gran- dissant un peu vers l'arrière : en dessous, et surtout à la poitrine, elles deviennent plus petites. Il y en a aussi de petites à la joue, au front et même sur une partie de la membrane des ouïes. Le museau et les mâchoires en sont dépourvus , ainsi que les nageoires, excepté la base de la pectorale et de la caudale. Ce qui paraît de chaque écaille est rhomboïdal. Prises au milieu du corps, elles sont minces, d'un tiers plus longues que larges, très- finement striées et ciliées au bord externe, légèrement trilobées à leur bord radical , et marquées d'un éventail de quinze rayons. La joue a trois stries longitudinales, analogues à celles des gobies; mais je n'en vois pas sur la nuque. On ne peut distinguer de ligne latérale. Ce poisson a le dos et les flancs d'un brun foncé tirant à l'olivâtre, avec de grands nuages noirâtres, irréguliers et mal prononcés. Le dessous tire au jau- nâtre. Ses nageoires sont olivâtres , et les verticales ont entre les rayons trois ou quatre rangées de taches noirâtres; à la pectorale ce sont des traits noirâtres le long des rayons, et pour chacun au nombre de six ou sept paires. Les rayons des ventrales ont cha- cun cinq ou six taches noirâtres. Le foie est large, aplati, et donne dans l'hypo- condre un prolongement triangulaire qui dépasse la moitié de l'abdomen. L'estomac est grand et renflé; l'intestin qui le suit ne fait que deux replis, et il est court. Le rectum est un peu dilaté. Il y a une grande 260 LIVRE XIV. GOBTOÏDES. vessie natatoire, à parois très-minces et comme mem- braneuse. Le péritoine est argenté. Le dessus de la tête de ce poisson est plat, son front large, son crâne plus large que long, son occi- put à peu près de niveau avec le crâne. La crête mitoyenne est triangulaire et n'occupe que moitié de la longueur du crâne; les intermédiaires, au con- traire, occupent cette longueur toute entière, et vont se joindre à une crête transversale qui règne der- rière les orbites. Les os de l'épaule sont comme dans les gobies. Il n'y a pas d'échancrure au cubital ni au radial. Les os du carpe forment aussi deux rangées ; ceux du bassin n'ont qu'un plan, et demeurent sépa- rés. Il y a en tout vingt-six vertèbres rétrécies dans leur milieu, et dont les apophyses verticales se diri- gent obliquement en arrière; c'est à l'apophyse dor- sale de la quatrième que s'attache le premier interépi- neux delà première dorsale; l'inférieure de la quator- zième se joint au huitième interépineux de l'anale seu- lement : et c'est là que l'on pourrait commencer la queue. Les deux apophyses transverses de la trei- zième sont réunies en anneau; les autres abdominales sont courtes et Hbres, plus larges cependant vers l'arrière. Nos individus sont longs d'un pied ou treize pouces, etil y en a un de Porto-Rico, envoyé par M. Plée, long de dix-huit pouces. Les autres viennent de Saint-Domingue par M. Ricord , et de la Martinique par M. Garnot. C'est d'après l'un de ces individus prêté CHAP. XIV. PHILYPNES. 261 par nous à M. Guérin , qu'on voit une figure de cette espèce dans l'Iconographie du Règne animal, sous le nom d'eleotj'is dormitatrix, La figure de Plumier représente des taches plus nombreuses, mais ce n'est probablement qu'une variété individuelle. Nous en trouvons une figure dans la collec- tion des dessins du Mexique de MM. Sessé et Mocigno , qui est intitulée gobiiis nebulosus^ vulgo guavina Javera, 2G2 LIVRE XIV. GOlilOÏDES. CHAPITRE XY. De quelques genres voisins des Gobioïdes, Après les genres que nous venons de décrire, et qui ont des rapports si évidens avec les blennies et les gobies, que leur réunion consti- tue deux familles très-naturelles , il nous reste à faire l'histoire de quelques-uns, qui semblent devoir devenir à eux seuls le type de famille naturelle; mais comme nous n'avons pas encore un assez grand nombre d'espèces connues, pour en asseoir notre jugement à leur sujet, nous préférons les placer en quelque sorte en appen- dice, auprès des familles avec lesquelles ils ont le plus d'affinité. DES CALLIONYMES (Caluonymus, Linn.). KaAA/ftJvujuoff (beau nom) était, comme Schnei- der l'a établi, un des synonymes de l'urano- scope. M. Cuvier a déjà démontré, en faisant l'histoire de ce poisson , que cette synonymie est prouvée par un passage d'Athénée' et par deux de Pline ^ et par les observations anato- 1. Athénée,!. VIII, p. m. 356. — 2. Pline, 1. XXXII, c. 7, p. 582, el c. XI, p. 5g3, édition Hardouin. CHAP. XV. CALLIONYMES. 265 iniques d'Aristote. Le naturaliste grec dit en effet que la vésicule du fiel du KaAA/cwvu/^o? est plus grande que dans aucun autre poisson, à proportion de la grosseur de son corps : asser- tion vraie pour l'uranoscope , mais qui ne l'est point pour celui auquel Linné a définitivement appliqué le nom de callionjmus. Nous voyons l'auteur du Sjstema naturœ réunir encore dans la neuvième édition le callionyme avec l'uranoscope; mais dans la dixième il sépara avec raison deux espèces pour en faire son genre Callionjmus , et il laissa l'u- ranoscope devenir le type d'un genre fort bien caractérisé. Mais Linné gâta dès l'origine ce genre , qu'il établissait en y adjoignant le poisson qu'il nommait callionjmus indicus; lequel est , comme M. Cuvier l'a fait voir (t. IV, p. 227), un platycépliale. Aucun changement ne survint dans la dou- zième édition, et si Gmelin ne corrigea point l'erreur de Linné dans sa treizième édition, les additions qu'il fit au genre, bonnes en partie, auraient pu être meilleures, parce qu'il était dirigé parles savans travaux de Pallas. Celui-ci fit connaître plusieurs callionymes nouveaux, ignorés du temps de Linné ^ et décrivit comme un callionyme le j)oisson rare et curieux qu'il observa sur le Baikal. 204 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Cependant ce poisson, qui manque de ven- trales , au lieu d'être conservé parmi les callio- nymes, aurait dû être distingué comme genre, à cause de ce caractère. C'est ce que fit M. de Lacépède (t. II , p. 3 1 2 et 3 1 3) sous le nom de coméplîore, mais en le classant, à cause de Tabsence de ventrales, dans un ordre différent et éloigné des callionymes; puis M. de Lacépède retira du genre de Linné encore le callionjmus indiens pour en faire son genre Calliomore, lequel a dû rentrer dans les platycéphales de Bloch. Il est résulté de ce travail que le genre callio- nyme de M. de Lacépède a été réduit à ses véritables limites et à cinq espèces. Shaw^ n'a rien changé au travail de Gmelin; mais Blocli, dans son édition posthume, a laissé tout-à-fait de côté le callionynius haikalensis de Pallas, et a fort mal à propos ajouté à ses callionymes l'espèce de Forster, qui n'a qu'une seule nageoire du dos. Par une idée encore moins heureuse il a fait du callionjinus indiens un hatracliuSy ne reconnaissant pas dans la des- cription du grand maître Suédois son platyce- plialus spatula. D'un autre côté Bloch faisait connaître un nouveau genre de poissons à rayons antérieurs de la dorsale prolongés en longs filamens, et à nageoires ventrales jugu- CHAP. XV. CALLIONYMES. 26S laires et conformées comme celles des callio- nymes, c'est-à-dire que les rayons internes sont plus longs que les externes. Malgré que les ouïes soient très -fendues, comme dans le plus grand nombre des autres poissons, M. Cuvier le rapproche des callio- nymes, et en effet, ils ne sont pas sans rap- ports; ils en ont aussi avec les gobies, prin- cipalement dans la disposition des ventrales; car ceux-ci ont les rayons internes plus longs que les externes, mais réunis pour former la nageoire en ventouse, qui les caractérise. Que l'on suppose les deux nageoires séparées, comme nous les voyons déjà dans les éléotris, mafs plus écartées, et nous avons les ventrales ' de la plupart des genres dont nous parlons dans ce chapitre. La simplicité de leur canal intestinal réunit également tous ces poissons. Quant aux coméphores, ils présentent une anomalie semblable à celle que nous avons i en- contrée dans plusieurs autres genres, et M. Cu- vier a suffisamment démontré qu'une méthode fondée sur la position des nageoires, et surtout des ventrales, rompt beaucoup plus que toute autre les rapports naturels. Il résulte des retranchemens que le genre Callionyme des auteurs a subis, qu'il est carac- térisé par ses ouïes ouvertes par un seul trou 266 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. de chaque côté de la nuque, et parce que les nageoires ventrales, placées sous la gorge, sont écartées et plus larges que les pectorales. Leur tête est oblongue et déprimée; leur bouclie est très-protractile, et l'angle inférieur du préopercule donne en arrière une apophyse plus ou moins longue, qui est terminée par des pointes divergentes. Les dents sont en velours aux mâchoires, mais ils en manquent au palais. Leur peau est généralement lisse, et le plus souvent ornée de couleurs vives et agréablement distribuées. Leur chair est blan- che, légère, mais de peu de goût. Nous en avons deux sur nos côtes de la Manche. Plusieurs auteurs les regardent conïme étant de la même espèce et de sexe difFérent. Nous allons commencer par décrire le plus grand. Le Callionyme lyre ou doucet. {Callionjmus Ijra, Linn.) C'est en même temps l'un des plus beaux du genre. La tête, aplatie horizontalement, forme un triangle isocèle, dont la base, d'un angle préoperculaire à l'autre , quand les préopercules sont écartés , égale presque la longueur, et cette longueur, en la pre- nant du museau à la nuque, est quatre fois et demie CHAP. XV. CALLIONYMESr 267 dans la longueur totale; mais prise jusqu'au bout de l'opercule (comme on le sent au travers de la peau), elle n'y est pas tout-à-fait quatre fois. La hauteur de la tête n'a que le tiers de cette longueur. A partir des opercules, le tronc, d'abord aussi fort déprimé, va en se rétrécissant , et finit par avoir en hauteur, à la racine de sa caudale, le vingt-quatrième de la lon- gueur totale , et moitié moins en largeur. La bouche est fendue sous le bout du museau, La mâchoire supérieure avance un peu plus que l'autre, même dans l'état de rétraction; elle ne prend guère plus du quart de la longueur de la tête, et n'arrive par conséquent pas jusque sous le bord an- térieur de l'œil; quand elle s'ouvre, la mâchoire in- férieure peut s'abaisser jusqu'à faire un angle droit avec le dessous de la tête. La mâchoire supérieure est aussi très-protractile, et s'abaisse beaucoup dans la protraction; ce qui donne alors au poisson une phy- sionomie très-singulière. Les yeux sont à la surface supérieure , au troisième cinquième de la longueur de la tète, à un demi- diamètre l'un de l'autre. Les premiers sous-orbitaires, qui sont alongés et qui descendent fort en avant des yeux , soutiennent un grand voile membraneux, ou double lèvre, sous lequel se retire la mâchoire inférieure lors de la rétraction, et qui la couvre presque entièrement. Les dents sont en cardes très -fines et serrées aux deux mâchoires sur des bandes assez larges; il n'y en a ni au palais ni à la langue, qui est petite, plate, arrondie, et comme tranchante en avant et peu libre. 268 LIVRE XIV. GOBÎOÏDES. La narine a un peu en avant de l'œil un Irès-pelit orifice, un peu rebordé, difficile à voir; et il m'a été impossible d'en découvrir un second; la cavité de la narine elle-même est extrêmement petite et sans replis intérieurs. Les bords du préopercule n'ont aucune dentelure; de son angle naît une proémi- nence qui se divise en trois petites épines; deux recourbées et dirigées vers le haut, la troisième pres- que horizontale. Il y en a de plus au bord inférieur de cette proéminence une quatrième, mais récur- rente ou dirigée en avant. L'orifice de chaque ouie se réduit à un trou ovale, situé près de la nuque, bordé d'une production de la peau, qui lui forme une sorte de valvule qui en laisse sortir l'eau venant de la bouche , mais empêche qu'elle n'y entre du dehors. Tout le reste de la fente branchiale est fermé par la peau; en le disséquant on trouve que l'opercule est fort petit , et que c'est le subopercule qui, remontant derrière l'opercule et s'y dilatant, y prend la place occupée d'ordinaire par l'opercule lui-même. Il est mince et comme fibreux à son bord, et donne en dessous une longue production grêle, que l'on pourrait être tenté de prendre pour un rayon branchiostège. Les véritables rayons ne se voient bien que par la dissection, et sont au nombre de six, fins comme des cheveux; les trois premiers remontent en se contournant autour de l'opercule, connue dans l'anguille : l'épaule n'a point d'armure. La pectorale, d'un peu moins du sixième de la longueur totale, a le bord postérieur de sa moitié CHAP. XV. CALLIONYMES. 2G9 supérieure en arc concave, ce qui lui forme une petite pointe au neuvième et au dixième rayon; elle en a en tout vingt, tous fourchus, excepté le premier; les derniers sont les plus petits. Les deux ventrales, fort larges, attachées chacune au côté du corps sous l'opercule, écartées de toute la largeur du tronc, se dirigent horizontalement et se joignent en arrière par une petite membrane à la base de la pectorale. Leur épine est très -petite et flexible; mais leurs rayons mous, qui vont en s'alongeant du premier au dernier, ont chacun jusqu'à sept ou huit branches. La première dorsale, haute et triangulaire, naît entre les bases des pectorales, et a quatre rayons flexibles, dont le premier s'alonge quelquefois en un fil de plus de moitié de la longueur du corps. Le commencement de la seconde, peu éloignée de la première, répond à peu près au commencement du troisième cinquième de la longueur totale; elle occupe un quart de cette longueur; sa hauteur est d'un peu moins de moitié de sa longueur; mais ses derniers rayons forment la pointe; elle en a neuf en tout, dont le dernier double, et tous articulés, mais sans branches, excepté les deux derniers, qui sont fourchus. L'anale commence et finit un peu plus en arrière que la deuxième dorsale et est de moitié plus basse; elle a aussi neuf rayons, dont le dernier, double, est prolongé en pointe. La caudale , égale en longueur à l'espace qui la sépare de la deuxième dorsale, et d'un peu moins du cinquième de celle du poisson, est coupée carrément, et a dix rayons articulés, dont 270 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. le supérieur et les deux inférieurs sont sans branches, et les autres fourchus. Il n'y a d'écaillés sur aucune partie du corps. La ligne latérale se marque par une suite étroite de lé- gères et petites élevures, et se continue en serpen- tant un peu depuis le dessus du trou branchial, jus- que sur le cinquième rayon de la caudale, où elle s'évanouit. Le lobule génital est assez long, grêle et pointu. Ce poisson est fort agréablement coloré; le fond est en dessus d'un assez bel orangé, et blanc en des- sous; le dos a sur l'orangé des taches arrondies, inégales, irrégulières, quelquefois confluentes, d'un lilas clair, liséré de violet; il en est de même aux joues et aux opercules, où elles sont cependant plus petites et plus serrées : aux côtés du museau elles s'unissent en deux ou trois lignes obliques; le long des bords du triangle formé par la tête, et le long du flanc, elles se rapprochent et s'unissent en partie pour former une bande longitudinale, mais peu régu- lière, et au-dessous est une véritable bande continue, parallèle à la première, et qui sépare l'orangé d'avec le blanc du ventre. On voit de plus ci et là quelques nuages brunâtres : entre autres une tache transverse au dos, sous les deux derniers rayons de la deuxième dorsale. Les dorsales sont orangées : la première a à sa base trois ou quatre taches rondes, et au-dessus autant de longues bandes verticales, une entre chaque paire de rayons, toutes lilas, lisérées de violet. La seconde dorsale est aussi en partie orangée, avec quatre bandes CHAP. XV, CALLIONYMES. 271 longitudinales lilas, lisérées de violet. Les pectorales sont transparentes et ont leurs rayons orangé. Les ventrales sont noirâtres et ont à leur base des- taches rondes, et vers l'arrière des lignes bleues lisérées de violet. L'anale est teinte de noirâtre; la caudale aussi, mais a du jaune sur ses rayons et quelques taches bleues vers sa base. On voit par cette description que l'enlu- minure de Bloch (pi. 161) est presque entiè- rement fausse. Le callionyme a le foie assez gros, composé d'un seul lobe à peu près trapézoïde, descendant plus dans le côté droit que dans le gauche. Ses bords sont en- tiers, sa face inférieure est légèrement convexe, et la supérieure peu excavée. On voit au-dessus d'elle et à droite une petite vésicule du fiel attachée près du bord postérieur du viscère. Un canal cholédoque, de longueur médiocre, donne dans l'estomac, au- dessus et en avant de l'étranglement et de l'épaissis- sement du canal intestinal, qui paraît indiquer la place de la valvule du pylore. Il faut d'ailleurs avouer que cette valvule n'existe qu'à peine à l'intérieur du tube. Celui-ci a peu de longueur; il commence par un œsophage et un estomac confondus, assez larges. L'intestin diminue de diamètre après l'endroit que je regarde comme le pylore; il se porte à droite, se plie bientôt brusquement pour redescendre très-peu au-delà de sa première courbure; il va un peu obli- quement vers le haut, en travers de la cavité abdomi- nale, déboucher dans un rectum presque aussi large 272 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. que l'estoinac. Les parois sont partout très-minces,"^ et la veloutée est garnie de fines papilles, disposées presque toujours en hexagones plus ou moins régu- liers, et qui près du pylore semblent être réunies en lignes longitudinales et parallèles. Les laitances du mâle que je dissèque sont fort petites, et n'occupent en longueur que le tiers pos- térieur de la cavité abdominale : elles sont au-dessus de la vessie urinaire. Les deux canaux déférens pas- sent sous elle et au-dessus du rectum, et aboutissent à la papille génitale, qu'ils traversent jusqu'à son exli'émité. Il n'y a point de vessie aérienne. Les reins sont très-gros; ils forment de chaque côté de l'épine une masse jaune, qu'on aperçoit aisé- ment à travers le péritoine qui la recouvre. Ils con- vergent l'un vers l'autre et se touchent, mais sans se confondre, au-dessous de l'insertion des muscles rétracteu^'s du pharynx. Les uretères sont longs, assez gros; ils donnent près du collet dans une grande vessie urinaire qui remonte au-dessus du rectum , y étant accolée par un tissu cellulaire assez dense. Le coeur est petit, mais triangulaire; son bulbe aortique est alongé et peu gros. En étudiant le squelette, on voit que la face est deux fois et demie plus longue que le crâne, lequel est plat, quadrilatère; et porte en arrière une crête mi- toyenne, dont l'arête supérieure est élargie de chaque côté. Le frontal postérieur donne une pointe dirigée en avant, qui va rejoindre celle du sous-orbitaire, . qui la regarde. Le scapulaire est grêle et réduit à un simple stylet osseux, qui va de l'occipital latéral à CHAP. XV. CALLIONYMES. 275 riiuméral; lequel, par sa forme et la large ceinture qu'il fait en arrière de la tête, mérite ici une atten- tion particulière. De l'articulation de cet os avec le scapulaire naît une large lame en ceinture que l'on peut appeler le corps de Fhuméral. Cette lame descend d'abord verticalement en se pliant sur deux plans, l'un externe et parallèle à l'axe du corps, l'autre en dedans et perpendiculaire à ce même axe. La seconde por- tion de riiuméral se porte en dessous de la poitrine dans le même sens que la lame interne dont je viens de parler, et en faisant un angle un peu ouvert avec la lame externe. En dessous et en arrière de cette, lame, vis-à-vis de l'angle, se délaclie une seconde lame, parallèle à l'autre, et qui élargit beaucoup la surface de la ceinture inférieure de la poitrine. Une autre apophyse, mince et étroite, se porte en arrière jusqu'à la hauteur des os du carpe : entre ces deux lames on voit le grand trou humerai. Au haut du corps de cet humerai et au-dessus de son apophyse horizontale, à l'endroit de son articulation, s'insère le cubital, formant une lame élargie, qui se porte horizontalement en arrière, et atteint presque le premier rayon de la pectorale. Sous la seconde apophyse horizontale existe le radial, qui a lui-même une crête longitudinale. Il résulte de ces dispositions des espaces assez graiids pour loger les muscles puissans , qui font de ce poisson un être très-voisin des acanthoptérygiens à pectorales pédiculées. Les os du carpe sont sur deux rangées , une anté- rieure, composée de trois os triangulaires, et une 12. 18 274 LÏVRE XIV. GOBIOÏDES. postérieure, d'osselets de même forme; mais beau- coup plus petits. L'os stylo ide est très - délié et assez long. Les os du bassin, articulés sur la cein- ture humérale, sont minces et plats, donnant de leurs angles postérieur et interne une apophyse qui va rejoindre celle du côté opposé, et augmenter la solidité de la suture osseuse, formée sous le ventre par la réunion de ces différentes pièces, La colonne vertébrale a huit vertèbres abdomi- nales et treize caudales, suivies de la dernière en éventail, qui reçoit la nageoire de la queue. Les ver- tèbres sont longues, lisses, sans crêtes latérales, et même les apophyses transverses des abdominales sont courtes et peu saillantes. Les côtes sont très-grêles et déliées. Les apophyses épineuses sont peu élevées , et reçoivent des interépineux plus larges, articulés sur elles très-obliquement d'avant en arrière; ceux qui répondent à la dorsale antérieure sont beaucoup plus courts que ceux de la seconde ou de l'anale» Le Callionyme dragonnet. {Callionjmus dracunculus, Linn.) Ce n'est très-probablement que la femelle du callionymus Ijra; on les prend presque toujours ensemble, et leur seule difïérence consiste en ce que le dragonnet a la tête un peu plus courte, la pre- mière dorsale beaucoup plus basse, le lobule génital beaucoup plus petit, et enfin les couleurs moins CHAP. XV. CALLTONYMES. 275 vives : toutes circonstances assez communément in- dicatives du sexe féminin. Cependant plusieurs auteurs, nommément Duhamel, contestent que les lyra soient tou- jours mâles et les dragonnets toujours femelles, et, si Ion excepte Pallas, la plupart des natu- ralistes les ont considères comme deux espèces. N'ayant pu encore nous assurer complètement de ce qu'il en est, nous nous bornerons à décrire ici le dragonnet comparativement avec le callion^me lyre. La couleur est de même orangée en dessus j mais les taches y sont plus petites, plus nombreuses et moins vives, plus grisâtres. Il n'y a de bandes laté- rales ni interrompues ni entières. Par-ci par-là sont des taches nuageuses brunes : la tache transverse sous les deux derniers rayons dorsaux s'y fait bien remar- quer. La première dorsale a ses deux premiers rayons et leur intervalle orangés, le reste noirâtre. La seconde est orangée sans lignes longitudinales. L'anale est blanche, opaque, les pectorales et les ventrales sont blanchâtres, à rayons orangé clair. La caudale est grisâtre, et a une raie noirâtre entre \% septième et le huitième rayon. L'enluminure de Bloch (pi. 162, fig. 1) est encore plus fausse que celle du callionymus lyra. Ce dragonneau , qui reste dans des dimen- 270 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. sions toujours plus petites, n'offre clans la disposition de ses viscères, ou dans les parties de son squelette, aucune autre différence que celle relative à sa taille; mais on n'y voit rien qui puisse être considéré comme spécifique. Si l'on s'en fiait à la plupart des nouveaux ichtliyologistes , la lyre et le dragonnet habite- raient également l'Océan et la Méditerranée; mais je ne crois point qu'ils se trouvent dans cette dernière mer. Nous n'en avons jamais reçu; ils ont été inconnus des ichthyologistes du seizième siècle : car le dracunculus ou lacert de Rondelet (1. X, c. 12, p. 3o4)) qu'on rapporte ordinairement au lyra, est une autre espèce, celle que nous décrirons plus loin sous le nom de callionj mus f estions. Willugliby (p. i36), Ray (p. 79), Artedi {Gen._, p. 49; Sjn.j p. 77 ), n'ont parlé que du poisson de Rondelet, et d'après cet auteur le Ijj'a de Briinnicli \ lequel au reste s'apercevait déjà que son poisson ne cadrait point avec les caractères assignés au vrai Ijra par Linné, est en effet ui^ autre espèce, celle que nous ap- pelons C. cithaj^a, et je ne doute point que ce C cithara ne soit aussi le C. Ijra de M. Risso. Quant au C lyrci et au C dracunculus de 1. Ichi. mas., p- *7- CHAP. XV. CALLIONYMES. 277 M. Rafinesque, comme il ne les a pas décrits, il est probable qu'il ne les a nommés, comme plusieurs autres de ses poissons de Sicile, que surlafoid'autrui. Sa troisième espèce, C.macu- latus\ est incontestablement notre C.cithara. Il est bien certain , au contraire , que ces poissons habitent nos côtes de l'Océan, et qu'ils remontent assez haut vers le Nord ; nous les avons recueiUis nous -même à Caen et à Fécamp, et nous les avons reçus de La Ro- chelle, par M. d'Orbigny; de Granville, jiar M. Audouin , et d'Abbeville , par M. Bâillon. Il en vient même quelquefois au marché de Paris. Il y a dans la collection des peintures sur vélin, commencée sous les auspices de Gaston, frère de Louis XIII , une figure du callionynius lyra par Robert, son peintre, intitulée espèce lie rouget rare y qui a été attribuée au père Plumier et gravée sous son nom dans l'oryc- tologie de Dargenville (pi. 26, fig. B ). M. de Lacépède a reproduit la même figure (t. II, pi. 10, fig. 1); mais sans en indiquer la source ni en remarquer l'identité avec celle de Dargenville. Plusieurs autres auteurs ont men- tionné et représenté ces lyres de l'Océan. Tyson ^ la décrit sous le nom de grondin jaune. Bor- 1. Caraiieri, p. 2 5, pi. 5 . fig. i. — 2. Tians. phii., l. XXIV. 278 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. lase, dans rHistolre naturelle de Cornouailles (p. 270, pi. 26, fig. 10), en donne une qui avait été prise en 17 56 dans la baie du mont Saint-Michel. Pontoppidan, dans celle de Nor- wége (pi. 21 ), l'intitule poisson volant , et assurément fort mal à propos. Linné la cite dans la Faune de Suède. Strœm, dans son ouvrage sur le bailliage de Sœndmœr ( t. I, p. 278), la décrit fort exactement, mais aussi sous le nom de poisson volant. Petiver en a une figure dans son Gazophilaciuni (pi. 22, fig. 2), et il y en a une autre dansSeba (t. III , pi. 3o , n.° 7 ) ; mais il s'en trouve encore de meilleures dans Duhamel (sect. 5, pi. 10); dans Pennant' et dans Mïiller^; dans Bloch (pi. 161 ) et dans Donovan (pi. 9). Pennant la dit commune sur la côte de Scarborough. Millier assure qu'elle n'est pas rare dans le golfe de Drœbach en Norwége.^ Wormius l'avait eue près du cap Scaven en Jutland, et M. Nilson la compte parmi ses poissons de Norwége; Linné, dans le Categat et le détroit d'OEresund^ Low la cite dans sa Faune des Orcades. Si, comme le croit Pennant^, le drackfish 1. Zool. brit. , t. III, pi. 27, n." 69. — '2. Zool. dan., t.I, pi. 27. — 3. Mûller, Zool. dan., p. 21, pi. 28. — 4. Faun. suec., loc. cit. — 5. IVIeilens, Anim. Spitz. , p. i43. CHAP. XV. CALLIONYMES. 279 de Merteiîs' est notre callionyme, l'espèce se porte jusqu'au Spitzberg; et cependant Mohr ni Faber ne la nomment point parmi les pois- sons de l'Islande , ni Fabricius parmi ceux du Groenland. Mais je ne vois pas qu'elle pé- nètre dans la Baltique. Fischer ni Georgi ne la citent, et Pallas déclare ignorer si elle habite les mers septentrionales de l'empire de Russie. Le callionjnius lyra se nomme à Dieppe chiqueur, et le dragonne t doucet. A Caen le premier s'appelle saçarj, à Fécamp lai^andière^, à Brest cornard. Leur nom anglais , selon M. Couch , est sculpin^ ; et je trouve dans les notes de M. Noël que dans quelque^ parties de l'Ecosse il porte le nom de gowdie'^ ou de chanticleer. Ces noms nous sont confirmés par l'autorité de M. Fleming, qui ajoute, comme noms an- glais, à celui de jellow gurnard, ceux de rockett ou de illeck. M. Yarell le nomme jello w-sku Ipin . Les Norwégiens l'appellentyce^mg^^ et dans le Catalogue que S. A. R. le prince de Dane- _^ , • • — 1. Brit. zooh, 1. 111, p. i46. — 2. Duhamel, 2.*part., secl. 5, p. 11 6. — 3. Trans. Linn., t. XIV, i." part,, p. 71. 4. M. Yarell fait dériver ce mot de goivdie , de gowd, doré ou jaune, et qui vient lui-même du. mot français gaude , plante à fleur jaune. 5. Mùiler, Zool. dan., t. 1- p. 28. 280 LIV. XIV. GOBIOÏDES. marck avait adressé à M. Cuvier, je trouve ce- lui de Jlockfisk pour le callionjmus ljra,ex. ceux de fjaersing ou de soej^drage pour le callionjmus clracunculiis. Ni Linné ni Retzius ne leur donnent de nom suédois. Leur chair est légère et de bon goût; mais comme ils vivent isolés et ne sont nulle part bien communs, on n'en fait pas de pêches expresses, et l'on n'a que ceux qui se pren- nent par hasard aux filets ou aux hameçons.* Le callionjmus Ijra que représente Dono- van^, avait été pris avec des éperlans sur la côte ouest de l'Angleterre. Pennant dit qu'il se tient d'ordinaire à trente et quarante braises, et qu'on le trouve souvent dans l'estomac de la morue.^ Millier a trouvé dans l'estomac de ce poisson des débris d'oursins , d'astéries et de crevettes. M. Yarell y ajoute des vers, des mollusques et des testacés , qui sont avalés tout entiers. Le Gallionyme guitare. ( Callionjnus citharay nob. j Call. viaculatus, Rafîn. ). Cette jolie espèce est celle dont le mâle a été décrit dans la Méditerranée par Bfùnnich 1. Duhamel, secl. 5, p. ii6. — 2. Donovan , ad tab. 9. -»- 3. Peanant; Brit. zool. , f. III, p. \!S. CHAP. XV. CÂLLIONYMES. 281 et par M. Risso comme si c'était le C. lyra de Linné et des autres naturalistes du Noi'd. M. Rafinesque l'a reconnue le premier comme dif- férente, ce qu'elle est en effet sans aucun doute, mais nous regrettons de ne pouvoir adopter fepitliète de iiiaculatus (j^'AXm. avait donnée, attendu qu'il conviendrait également bien à toutes les autres espèces du genre. C'est l'espèce mentionnée sous le nom de C citliara ^^di^xh^ notre travail commun , dans le Règne animal (2.^ édit. , t. II , p. 248 ? note). Sa tête est aussi courte que celle du calUonymus dracunculus ou calUonymus lyra femelle; son mu- seau est plus obtus; ses yeux plus grands à propor- tion que dans tous les autres. Les sous - orbitaires , dépassant un peu la double lèvre, forment de chaque côté une petite proéminence. L'épine du préopercule se recourbe, et a trois pointes, comme dans le callio- nyme lyra^ mais beaucoup plus petites à proportion. Sa première dorsale a quatre rayons fins comme des cheveux, dont le premier a plus de moitié de la longueur du corps : les autres diminuent par degrés. Ceux de la seconde, au nombre de neuf, n'ont qu'un quart de moins, et se trouvent par conséquent quatre fois plus élevés que le corps, du moins les antérieurs: en arrière ils diminuent un peu. Ceux de l'anale, au nombre de huit, sont de moitié moindres, mais plus égaux entre eux. Dans l'une et l'autre de ces nageoires le dernier rayon est double. D. 4 — 9j A. 8jC. 13. 282 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Le fond de la couleur, qui dans la liqueur se change en gris, est dans le frais d'un jaune verdàire. Quelques petites taclies nuageuses noirâtres sont éparses çà et là ; mais le long du flanc régnent deux rangées de gouttelettes argentées : en avant il y en a même trois rangées, un peu irrégulières. La joue, les ventrales et les pectorales ont aussi de petites gouttes semblables. Ses dorsales sont très-agréable- ment peintes de séries de gouttelettes blanches, et d'autres séries d'ocelles ou de taches d'un vert noi- râtre, qui se croisent. Cela est surtout très-remar- quable sur la deuxième ; elle a huit lignes, presque continues, formées par des gouttes blanches, opaques, "très -rapprochées, qui montent en croisant oblique- ment les rayons, et se dirigeant un peu en avant; et dans chacun des intervalles de ces mêmes rayons sont cinq ocelles grisâtres. Le centre de ces ocelles devient noirâtre ou noir dans les plus voisines du dos, en sorte qu'ils forment trois rangées longitu- dinales de taches noires, régnant sur la moitié infé- rieure de la nageoire, et croisées obliquement par les lignes de gouttes blanches. La première dorsale offre moins de régularité; cinq ou six taches noires et autant de gouttes blan- ches y sont presque en quinconce. La caudale paraît de la teinte du corps sans aucunes taches. L'anale a toute sa moitié inférieure d'un noir bleuâtre , passant par nuances au transparent de sa base. La taille de ce callionyme est beaucoup moindre que celle de la lyre : il ne paraît guère passer quatre ou cinq pouces. CHAP. XV. CALLIONYMES. 283 Des individus pris avec ceux que nous venons de décrire, et que nous regardons comme les femelles, s'y rapportent à peu près comme le callionymus dracunculus au callionymus lyra. Avec la même forme de tête, les mêmes grands yeux, ils ont des dorsales basses : la première est très-petite j la seconde , d'abord aussi haute que le corps, va en s'abaissant en arrière. Le corps a des taches plus ou moins sem- blables à celles du mâle, mais beaucoup moins vives et moins nombreuses. Les nageoires n'en ont que de faibles, et qui disparaissent même tout-à-fait dans plusieurs individus. Cette espèce nous est venue de Malte par M. Leach , de Sicile par M. Bibron , de Naples par M. Savigny, de Martigues et de Marseille par M. Delalande. Selon Brùnnich, le nom de ce callionyme à Marseille est nioulette. M. Risso, qui l'avait d'abord appelé niouletto (i/^ ëdit.,p. io3 et io4), lui laisse ensuite le nom de lainhert^ qui à Nice est générique pour les callionymes (2.^ édit., p. 262). Nous voyons par une note d'Adanson qu'il est aussi en usage à Marseille, et qu'on l'y prononce linihert. A Venise on nomme les espèces de ce genre lodra et lodrin^ et en Sicile vallisu et anpiscica.'^ 1. Naido, Journal de physique de Pavie, t. XVII; p. 226. ■— 2. Rafiuesque, Indice, p. 12, et Caratl., p. 26. 284 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. M. le prince de Musignano a reconnu comme nous l'espèce décrite par M. Rafinesque, et a donne une fort élégante figure du mâle et de la femelle dans sa Faune d'Italie. La Méditerranée a encore trois espèces de callionymes , non moins jolies que le C. cithara. L'une d'elles est Le Callioîjyme réticulé. { Callionjinus reticulcitus y nob.) Elle nous a été donnée par M. Bâillon, qui l'a reçue de Malaga. Son museau est un peu plus long et plus pointu que dans le calUonymus ciihara : il a aussi trois rayons à la pointe du préopercule. Le premier rayon dorsal s'alonge en fil d'un peu plus du quart de la longueur totale, La seconde dorsale n'a pas trois fois la hauteur du corps, et l'anale est de moitié moindre, en sorte que l'une et l'autre est plus basse que dans le callio- nymiis ciihara. La deuxième dorsale a un rayon de plus. D. 4 — 10. A. 8, etc. Il y a sur la seconde dorsale trois rangées de taches brunes semblables à celles du calUonymus ciihara; mais les intervalles sont remplis de cercles et de rubans ondulés, blancs, avec un liséré mince, brun et blanc; d'où résulte un ensemble très-agréable à l'œil. La pre- mière a deux ou trois de ces rubans ondules et à double CHAP. XV. CALLIONYMES. 28S liséré, et deux ou trois taches noires. Quatre lignes semblables, mais plus étroites, parcourent parallèle- ment toute la longueur de l'anale, dont le bord est noirâtre. Sur l'anale , entre les rayons supérieurs, sont des traits obliques ; entre les autres des longitudinaux, tous blancs, lisérés de brun. On voit aussi quelques taches semblables sur la joue et à la base de la ven- trale. La longueur de notre individu est de trois pouces et demi. Le Callionyme a bandes. {Callionjmus fasciatus , nob.) C'est encore ici une belle et nouvelle es- pèce, apportée de Sicile par M. Bibron. Sa tête est plus large, et son museau plus obtus qu'aux précédens. La pointe de son préopercule a trois épines. Son premier rayon dorsal n'a guère que le double de la hauteur du tronc sous lui, et ne se prolonge presque pas hors de la membrane. Toute la deuxième dorsale égale ce premier rayon de la première , et même le surpasse un peu. L'anale n'a pas moitié de sa hauteur. D. 4 — 10; A. 9, le dernier double, elc. Le fond de la couleur paraît olivâtre, avec six ou sept larges bandes verticales, noirâtres, nuageuses et irrégulières. Tout le dessous de la gorge entre les branches de la mâchoire inférieure est noir. Par -ci par-là sont des taches rondes et ovales, qui parais- 280 LIVRE XTV. GOBIOÏDES. sent blanchâtres et un peu lisérées; sur la joue on en voit d'oblongues, nacrées, fortement lisérées de brun ou de violet : il y en a aussi quelques petites sur la base de la pectorale et de la ventrale. Celle - ci a à son bord, sur les trois derniers rayons, une large bande noire. Il y a quelques points noirs sur la pec- torale. La deuxième dorsale a dans chaque intervalle de rayon quatre taches ovales noires, ce qui lui en fait quatre rangées longitudinales, croisées oblique- ment par des lignes de petites taches ovales, lisérées de violet, presque continues; lesquelles lignes mon- tent obliquement en avant. La première dorsale a la même coloration, mais moins régulière. L'anale a six lignes nacrées, longi- tudinales, très-fines, et le bord noirâtre. La caudale est toute semée de petits points nacrés, lisérés de brun, et a deux lignes verticales de points noirâtres. Sa longueur est de trois pouces. Nous en voyons une bonne figure dans l'iconographie du Règne animal (Poiss., pi. 4o, fig. 2) faite d'après l'individu déterminé par nous, et que nous avons prête à M. Guériu. Le Callionyme lacert. {Callionjmus lacerta:, nob.; Calllonymus festivus , Pall.; Callionjmus admirahilis y Risso.) Cette charmante espèce, l'un des plus jolis poissons de la mer, est précisément celle que Rondelet a représentée (1. X, c. 12, p. 3o4) CHAP. XV. CALLIONYMES. 287 SOUS le nom de lacert en français , et de dra- cunculus en latin, et dont on s'est obstiné à rapporter l'image au callionynius Ijra; aussi la critiquait-on sans cesse comme inexacte, comme n'offrant que la première dorsale, etc. C'est au contraire la deuxième que l'on y voit plus distinctement, parce qu'en effet c'est elle qui est la plus grande, et qui seule a des rayons prolongés ; mais la première y paraît aussi , quoique un peu confusément. D'ailleurs la des- cription que Rondelet en donne, bien meil- leure que la plupart de celles de son livre, ne peut laisser aucun doute, et n'aurait pu prêter à aucune équivoque. C'est aussi ce poisson que Pallas a décrit sous le nom de callionynius festums^ ^ et Risso (2.^ édit. , p. 264? pi. 6, n.° 1 1) sous celui de callionjmus adniijYihilis ; épitliètes méritées l'une et l'autre par les belles broderies qui décorent ses flancs et ses dorsales. C'est également celui que M. de Laroche a décrit et représenté^ sous le nom de callionj- mus pusillus. Nous nous en sommes assurés non-seulement par sa figure et sa description, qui sont faites un peu légèrement, mais par 1. Zoog.ross.y t. IU,p. i46. — 2.Ann.cluMus., t. XUI,p. 33o, pi. 25, fig. 16. 288 LIVRE XTV. GOBIOÏDES. réchantlllon même qui lui a servi et qui est conservé au Cabinet du Roi. Sa tête est un peu large et courte. Il y a trois épines à la pointe de son préopercule. Sa première dorsale n'a pas son premier rayon plus élevé que le tronc sous elle; la deuxième est plus haute, surtout en arrière, et de plus ses deux premiers rayons s'a- longent en fils qui ont les deux tiers de la longueur du corps j le troisième et le quatrième se prolongent aussi quelquefois; les deux derniers (car il n'y en a que six) soutiennent la pointe de la nageoire. La caudale est pointue et a près du tiers de la longueur totale. D. 4 — 6 ; A. 9 , etc. Le dernier rayon de l'anale et de la dorsale pourrait fort bien compter pour deux, tant les deux branches sont séparées, même à la racine, et l'on aurait alors : D. 4 — 7;A. 10. Tout le dessus est brun, avec de petits points et lignes noirâtres, mêlés de points blanchâtres ou nacrés, lisérés de noir; on en voit surtout quelques- uns plus marqués à la joue et à la base de la pecto- rale, et il y en a deux plus grands sur l'occiput, près des orifices des ouies. Ce qui surtout forme un caractère remarquable, ce sont quatorze ou quinze lignes verticales nacrées, lisérées de brun ou de violet, qui occupent toute la longueur du flanc, depuis l'aisselle de la pectorale jusqu'à la base de la caudale. Le dessous est grisâtre. Les dorsales sont transparentes, la seconde ayant des CHAP. XV. CALLIONYMES. 289 lignes continues, argentées ou nacrées, lisérées de violet, au nombre de six, parfaitement dessinées et montant obliquement en arrière j sur la première, ces lignes sont un peu interrompues et au nombre de trois seulement. Ces nageoires ressemblent à une belle gaze rayée d'argent. Il y a des lignes semblables , au nombre de quatre ou cinq, longitudinales, en partie interrompues, sur la moitié supérieure de la caudale : son bord infé- rieur est noirâtre. L'anale est transparente et a le bord noirâtre. La base de la pectorale et toute la ventrale sont semées de points blancs ou nacrés, lisérés de brun. Nos individus sont longs de trois et de quatre pouces. Les femelles ont les mêmes formes de tête et de corps ; . les mêmes couleurs sur le dos, variées de teintes sem- blables : les bandes verticales des flancs non moins vives ; mêmes nombi^es de rayons : D. 4 — 6 ; A. 9 ; mais leur première dorsale est toute noirâtre. La deuxième n'est pas plus haute que la première, et n'a que des points bruns sur ses nageoires, et de fins traits longitudinaux blanchâtres entre eux. Il en est de même de la moitié supérieure de sa cau- dale. Ses pectorales et ses ventrales n'ont que des points bruns sur leurs rayons. La caudale n'a pas le quart de la longueur totale. Nous trouvons une figure très-belle du mâle et de la femelle dans la Faune italienne du prince de Musignano. 12. 19 290 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Le maie a le dos peint d'un rouge vif de cinabre, réticulé de vert ; les yeux d'un beau bleu ; le ventre blanc. La première dorsale a une grande tache noire; la seconde, trois rangées de gros points gris sur un fond jaunâtre, et une bordure rousse. L'anale, blanche, a une large bordure noire, La caudale, rousse, a ses deux filets mitoyens prolongés en fils. Le dos de la femelle y est coloré en rouge, le ventre argenté, le tout réticulé de larges marbrures noirâtres, La première dorsale, basse, a quelques teintes rou- geâtres en avant, et beaucoup de noir; la seconde, rousse, bordée de rouge, a quatre rangées de points noirs. L'anale, transparente, a une bordure rousse, lisérée en dehors de noir. La ventrale est rouge, avec deux séries de points noirs, La caudale a quatre raies noirâtres. Ce sont de ces individus femelles ou des mâles mutilés qui ont servi de type à l'espèce àxi callionjmus pusillus , lelle qu'elle est pré- sentée dans la deuxième édition de M. Risso (p. 264); mais cet auteur l'a confondue mal a propos avec l'espèce décrite par Lesueur sous le nom de callionymus Risso, laquelle, comme nous allons le voir, a huit rayons à la seconde dorsale. Ce beau callionyme est rare à Iviça, où les pécheurs ne paraissent pas même l'avoir re- marqué, ni lui avoir donné de nom'. Elle se 1. Laroche, Ann. du Mus., t. XUI, p. 33o. CHAP. XV. CALLIONYMES. 291 montre à Nice, au printemps et en été, dans la légion des Galets\ Selon Rondelet, on en prend pendant la canicule dans les parages d'Agde; mais elle est rare, et, de son temps, les pécheurs, admirateurs de la beauté de ce poisson, et plus soigneux apparemment que ne le sont aujourd'hui ceux d'Iviça, avaient soin de le faire remarquer aux amateurs de l'ichthyologie. Les trois espèces suivantes, aussi de la Mé- diterranée, n'offrent que des formes et des cou- leurs plus communes. Le Callionyme de Lesueur. {CalLionjmus Sueuriij nob.) La première paraît être commune à la Médi- terranée et à l'Océan; car nous l'avons reçue de Naples par M. Savigny, et tout naus fait croire que c'est celle qui a été découverte au Havre par M. Lesueur, et qu'il a décrite et représentée* sous le nom de callionjme élégant. Il nous a paru cependant plus convenable de lui don- ner le nom de fauteur qui l'a fait connaître le premier, que de lui conserver une épithète l.Risso, 2.* édit., p. 264. — 2. Bull. phil. de i8i4> F- 6, pi. i,f5g. 17. 292 LIVRR XIV. GOBIOÏDES. qui lui convient l)ien peu; car c'est proba- blement l'espèce la moins élégante du genre. Nous pensons au reste que c est précisément cette espèce qui a été donnée par Rondelet ( 1. VII , c. 8 , p. 2 1 4 ) sous le nom de belenus^ et nous le lui aurions conservé, si M. Piisso ne l'eut transféré à une autre. La figure de Ron- delet est très - reconnaissable , et nous ne saurions nous empêcher à ce sujet d'admirer l'attention, si étonnante pour son temps, que ce grand ichthyologiste avait portée sur les plus petits poissons. En voilà deux qu'il avait très- bien connus, et qui pendant plus de deux siècles avaient été négligés de tous ses suc- cesseurs. Sa forme est à peu près celle du callionymusfestîvus femelle ; mais ses dorsales sont plus basses ; la première surtout est entièrement petite, et la deuxième a neuf rayons, ainsi que l'anale. lia, comme ce callionyme,le dessus brun, varié de petites taches grises, de petits points et de petits cercles noirâtres, se mêlant les uns dans les autres; et on lui voit même deux taches pâles à l'occiput. Mais ses côtés n'ont point de traits verticaux, et sont seulement brun-fauve, semés de points noirs; le dessous est d'un fauve ou d'un gris sale. Ses nageoires ont des points bruns sur leurs rayons. La première dorsale est presque toute noire. Nos individus de Napîes n'ont guère que CHAP. XV. CALLIONYMES. 293 deux pouces. M. Lesueur eu donne au sien deux et demi. Le Callionyme de Risso. {CallionjmuS Rissoi, Lesueur.) Cette espèce, fort voisine de la précédente, a aussi été découverte par M. Lesueur, mais dans la Méditerranée seulement. Il l'a décrite et représentée dans le même mémoire \ Nous lui conservons le nom qu'il lui a donné, et qui est en si juste estime parmi les iclitliyologistes. Sa première dorsale est un peu moins petite que celle du précédent; la seconde est un peu plus haute, surpassant même la hauteur du corps; elle a un rayon de moins, et le dernier s'alonge en pointe aiguë. D. 4— 8; A. 9. Sa couleur ne diffère presque pas de celle de l'espèce suivante. Tout le dessus du corps est brun, varié de points et de très-petits cercles noirs, qui se mêlent les uns aux autres. Il y a deux taches pâles sur l'occiput. Les côtés n'ont aucun vestige de barres argentées, et sont simplement brun clair ou fauves, semés de points noirs. Sous la queue ces points de- viennent un peu plus gros et moins nombreux. Le dessous de la gorge et le ventre sont fauve pâle sans taches. La première dorsale est noirâtre, avec quelques 1. Bull, phil., p. 5 ; pi. 1, fîg. 17. 294 LIVRE XIV. GOBIOIDES. i points noirs et blancs sur les rayons. La seconde, à peu près transparente, a des points blanchâtres épars et une ligne de même teinte sur une partie de la base. L'anale est pâle et a le bord d'un noir bleuâtre. Les autres nageoires ont des points noirâtres à leurs rayons, sur quatre rangées aux pectorales et à la cau- dale; ils sont irrégulièrement disposés sur les ven- trales. Notre individu venu de Naples est long de deux pouces. C'est aussi la dimension de celui de M. Lesueur, qui a été pris sur le rivage de Nice. Deux autres individus , venus de Naples en même temps, et qui ont les mêmes formes, les mêmes nombres de rayons, à peu près la même coloration , mais dont la deuxième dor- sale va en s'abaissant en arrière, au lieu d'y faire la pointe, nous paraissent des femelles de la même espèce. Le Gallionyme bélène. (Callionj'mus belenus 3 Kisso.) Nous avons de la Méditerranée un autre cal- lionyme à huit rayons à la seconde dorsale, qui nous paraît celui que M. Risso décrit sous le nom de belenus (2.^ édit., p. 268), quoique le vrai belenus de l^ondelei (1. VII, c. 7, p. 21 4) nous paraisse pltitôt notre caUioujmiis Suearii. CHAP. XV. CALLIONYMES. 295 Il a exactement la même forme, les mêmes nombres de rayons que le callionymus Rissoi; son anale est également bordée d'un noir bleuâtre; sa deuxième dorsale a aussi sur sa base des traits longitudinaux blancs et des points bruns; mais son corps est en entier d'un cendré pâle, varié çà et là de quelques points brunâtres ou jaunâtres , peu apparens. Il y a des points semblables sur les rayons de la caudale , et quelquefois aussi sur ceux de la pectorale. Dans le frais les côtés ont une teinte argentée. Nous en avons des individus de près de trois pouces : on les a envoyés de Nice. Il serait très-possible que ce ne fut qu'une variété de couleur du précédent. Le mâle et la femelle de ce poisson sont très-bien figurés dans l'ouvrage du prince de Musignano. Le mâle est gris, pointillé de noirâtre; la ventrale, l'anale et la caudale sont bordées de noir : quatre raies plus pâles traversent cette dernière nageoire. La première dorsale est foncée; la seconde, trans- parente, a près de sa base une rangée de points noirs, et les deux derniers rayons prolongés en soie. Ils n'existent pas dans la femelle, qui a ses nageoires plus basses et un peu autrement colorées. La seconde dorsale, très-grise, a des rangées de points presque effacées. La caudale a cinq bandes pâles, presque égales de ton. La pectorale, la ventrale et l'anale sont grises, sans taches ni bordures. Je pense même que le callionymus Mori- sonii de ]\ï. Risso (2.^ édit. , p. 265 ), qu'il avait 296 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. nommé d'abord callionjîne Jleche (i/^ édit., p. io5), ne diffère point de ce belenus : à la vérité, il lui attribue neuf rayons à la seconde dorsale, et même sa figure (pi. 6, n.° 12) lui en marque dix; mais il peut avoir compté le dernier pour deux; et quant au filet qui ter- mine cette deuxième dorsale, à en juger par la figure , il n'a rien de plus que ce que j'observe dans beaucoup d'individus de helenus. Le reste de la description ne concerne que les cou- leurs, et se concilierait très-bien avec ce que montrent encore nos individus conservés dans la liqueur. DES CALLIONYMES ÉTRANGERS. La mer Atlantique ne paraît posséder d'autre caîlionyme que le doucet, qui n'habite même qu'une partie assez limitée de ses côtes. L'A- mérique, dans aucune de ses parties, ni la côte occidentale de l'Afrique, ne nous ont envoyé aucun poisson de ce genre, et aucun auteur n'y en a décrit; mais il en existe plu- sieurs dans la mer des Indes, et ils sont remar- quables pour la plupart par des formes singu- lières; cependant il ne s'en trouve pas dans ces grands recueils hollandais, ori tant de poissons curieux sont représentés. CHAP. XV. CALLIONYMES. 297 Pallas est le premier qui en ait fait connaître : il en a décrit deux espèces; mais Houttuyn, Tlîunberg, et Blocli dans son Système, en ont publie trois autres, auxquels nous en ajoute- rons quelques-uns. Le Callionyme oriental. {Callionjjnus orientalis y Bl. Sclin.) Il ne nous est connu que par la figure et la description de Bloch.* Il a de grands rapports avec notre collionymus cîihara; mais sa deuxième dorsale est moins haute; son anale l'est davantage; sa caudale et surtout ses pectorales sont beaucoup plus longues. Son épine préoperculaire est courte, et la patte d'oie divisée en trois dents. Sa tête ressemble à celle du callionymus lyra. Le premier rayon de sa première dorsale égale la moitié de la longueur totale, et le second lui cède peu. La deuxième dorsale et l'anale ont près du double delà hauteur du corps; la pectorale a plus du quart, et la caudale, qui est un peu pointue, plus du cin- quième de la longueur totale. ^ Le corps est orangé, semé de taches noirâtres, et d'autres, plus petites et blanches, sont éparses entre elles. Les dorsales et l'anale ont des taches rondes et 1. Sjst. posth., p. 4i 7 pi- 6. 2. Bloch donne les nombres comme 11 suit : D. 3 — 10; A. 12; C. 8 ; P. 4 : V. 7. Mais je doule beaucoup de l'exactitude des trois derniers, et sa figure même eu montre quatre à la première dorsale. 298 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. brunes dans les intervalles de leurs rayons, et sur les dorsales il y a en outre des points blancs. L'anale est teintée de noirâtre et devient presque noire sur toute sa partie inférieure. H y a trois bandes brunes ou noires en travers de la pectorale et cinq sur la cau- dale. Les ventrales sont grises et bien moindres que les pectorales, ce qui est rare dans ce genre. La figure est longue de six pouces. Blocli avait reçu ce poisson de Tranquebar. Le Callionyme a cornes courbes. ( Callionjmus curvicornis, nob.) Tous les callionymes européens ont le pré- opercule armé à son angle d'une épine dont l'extrémité se relève et se divise en trois pointes aiguës, dirigées vers le haut en patte d'oie : le plus ou moins de grosseur de ces pointes fait leur seule différence. Cette armure est plus variée dans ceux des Indes. L'espèce actuelle, qui nous a été envoyée de Bourbon par M. le capitaine Mylius, gouver- neur de cette île , a cette production du préopercule plus longue qu'à aucune espèce d'Europe, plus fortement recourbée vers le haut, et la patte d'oie s'y divise en quatre pointes, toutes un peu inclinées en avant. Il y a de plus à la base de la production et avant sa courbure, une cinquième pointe (ou plutôt une première), adhérente à sa face CHAP. XV. CALLIONYMES. 299 externe, et dirigée en avant, comme dans la plupart des espèces suivantes. Du reste sa tête est triangu- laire, très-plate, trois fois plus large que haute, d'un tiers plus longue que large, et d'une longueur con- tenue quatre fois et demie dans celle du poisson, dont la caudale, pointue, prend un peu plus du quart. Ses dorsales, à peu près égales, ne sont pas de beau- coup plus hautes que le corps : la seconde, ainsi que l'anale, se prolongent en pointe en arrière. D. 4 — 9; A. 9, le dernier double; C. 11 ; P. 18; V. 1/5. Dans la liqueur ce poisson paraît brun en dessus, plus pâle en dessous, avec une teinte légèrement argentée aux flancs. Un individu a sur le brun beaucoup de très-petits cercles un peu plus foncés, mais à peine apparens. Sa première dorsale a un large ocelle noir entouré de blanc, et l'anale un bord noirâtre j un autre individu, dont le bruji est plus uniforme , a l'ocelle fort petit et tout au bord de la nageoire. Son anale est toute blanchâtre. Ce sont pro- bablement des signes de sexes. Dans tous les deux, la seconde dorsale et la caudale ont de fines marbrures grisâtres ; les autres nageoires sont grises. Le Callionyme japonais. ( CalUonjmus japonicus , Houttuyn. ) C'est auprès de ce callionyme à cornes cour- bes que doit être placée l'espèce du Japon, indiquée par Houttuyn, et que nous n'au- rions jamais pu reconnaître ni rapprocher de 300 LIVRE XIV. GOBIOlDES. ses congénères, sans la complaisance de M. Lichtenstein. Ce poisson est un de ceux que M. Langs- dorff a cédés au Cabinet de Berlin et que j'y ai observés. Sa tête ressemble beaucoup à celle de l'espèce précédente, tant pour ses proportions propres que sous le rapport de leur comparaison avec le corps. La corne courbée est plus courte qu'à l'autre espèce, et la patte d'oie n'a que trois épines en haut, et, de plus, celle-ci est dirigée en avant comme dans les autres callionymes. L'angle postérieur de l'orbite porte une petite épine dirigée en avant. La caudale de l'individu que nous décrivons, étant un peu cassée, nous ne pouvons pas savoir quelle était sa longueur, qui devrait être considérable d'après les expressions d'Houttuyn , qui dit : cauda muUum elongala. La première dorsale est basse et triangulaire; la seconde est au?si longue que l'anale. Cette description est faite sur un individu desséché, de quatre poncées et demi, déposé dans le Cabinet de l'université de Berlin, sous le nom japonais de urotschL Dans son état de dessiccation il paraît uni- formément brun, avec du noir à la dorsale; mais il y a lieu de croire que ce poisson, frais, avait quelques taches ou points, car M. Langs- dorfF, qui le rapportait au genre des platycé- pliales, lui avait donné fépithète de piinclatus. CHAP. XV. CALLTONYMES. 501 Le Callionyme flèche. ( CalUonpnus sagitta , Pallas. ) Cette espèce, qui nous a été envoyée de Pondicbéiy, est beaucoup plus courte et plus large de l'avant que la précédente. La largeur de sa tête, prise entre les bases de ses deux épines préoperculaires, égale presque sa lon- gueur, mesurée du bout du museau aux extrémités des opercules, et cette longueur n'est que trois fois et demie dans celle du corps. La tête n'a en hauteur que le quart de sa longueur. Le museau est obtus. Les yeux, à la surface supérieure, du cinquième environ de la longueur de la tête, et à pareille dis- tance du bout du museau, n'ont entre eux que le tiers de leur diamètre. Les productions du préoper- cule ne se recourbent pas vers le haut, mais s'écartent un peu en dessous en demeurant horizontales, et ont quatre et quelquefois cinq pointes, dont trois se diri- gent vers le dessus de, la tête; il y a de plus à la base une petite épine récurrente , comme d'ordinaire. Tout le tronc est déprimé. La première dorsale est extrêmement petite; la deuxième n'a qu'une hauteur médiocre , et se termine un peu en pointe, ainsi que l'anale. La caudale est tronquée et ne fait que le cinquième de la longueur totale. D. 4 — 9;A. 9; C. 10; P. 18; V. 1/5. Dans la liqueur ce petit poisson paraît d'un fauve clair; tout le dessus est bariolé par de petits cercles 302 LIVRE XIV. GOCIOÏDES. bruns, et de petits points qui se mêlent en partie les uns dans les autres. La première dorsale est d'un noir profond; les autres nageoires ont des points bruns sur leurs rayons, excepté l'anale, qui est d'un fauve clair égal , comme tout le dessous. Nos individus n'ont que trois pouces. Nous rapportons à ce poisson le callionj- miis sa^itta, décrit par Pallas% parce qu'il ne paraît en différer que par les couleurs. Ses formes, les proportions de ses par- lies, ses nombres de rayons, sont les mêmes; seule- ment il est en dessus d'un brun assez uniforme ; il a sur les côtés des taches noirâtres, et sa première dor- sale est blanche, avec une bande noirâtre. Il y a des points bruns sur les autres nageoires, l'anale exceptée, qui est blanchâtre. Un des individus de Pallas, venu d'Am- boine, était long de trois pouces, et avait au bout de la queue un filament membraneux qui manquait aux autres. Nous n'en avons qu'un de deux pouces, et qui manque aussi de ce filament, mais qui du reste ressemble complètement à celui de Pallas. Il a été envoyé de Bourbon par M. le baron Mvlius. 1. Spîcil., t. Vin, p. 29, pi. 4j fig^ 4 et 5. CHAP. XV. CALLIONYMES. 305 Le Callionyme a corne simple. {^Callionymus simpliclcoimis , nob.) MM. Quoy et Gaimard ont pris à^l'ile Guam un très-petit callionyme, à peu près de la forme du précédent; à tête cependant un peu plus étroite, et à museau un peu plus pointu, dont l'épine préoperculaii'e a les dentelures si petites qu'il faut une loupe pour les distinguer, en sorte qu'elle paraît simple à l'œil nu. Les proportions des nageoires sont les mêmes; mais il y a un rayon de moins à la deuxième dorsale et à l'anale. D. 4 _ 8; A. 7, etc. Le dos est brun clair, semé de petites taches plus pâles, bordées de brun plus foncé, et dans les inter- valles de points et de petits traits d'un brun plus foncé. Le dessous est plus pâle et uniforme. La pre- mière dorsale est transparente, avec une bande noi- râtre mal terminée, parallèle au bord; les autres na- geoires ont quelques points bruns sur leurs rayons. L'individu n'est long que de dix-huit lignes. Le Callionyme a filamens. {CalUonjmus filamentosus, nob.) C'est encore ici une espèce très-remarquable, due à MM. Quoy et Gaimard , qui l'ont prise dans la rade de Manado , de l'île de Célèbes. 504 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. Sa tête est à peu près comme dans les précédens , et seulement un peu plus obtuse. Ses épines préopercu- laires ont chacune à leur bord interne sept à huit dents pointues, assez petites, mais pas autant que dans le caJlionynms siwpUcicornis. Celle du bord externe, près de leur racine, est forte. La première dorsale a son premier rayon libre, grêle et du quart de la lon- gueur du corps; les trois autres soutiennent une nageoire triangulaire un peu plus haute que le corps : la seconde, d'abord aussi haute, s'abaisse vers son mi- lieu, et son dernier rayon s'alonge de nouveau pour faire la pointe : celui de l'anale la forme de même. La caudale est quatre fois et demie dans la longueur; mais ses deux rayons mitoyens se prolongent en fils aussi longs que la nageoire elle-même. D. 4 — 9; A. 9; C. 10;-P. 21; V. 1/5. Ce poisson est en dessus d'un brun foncé, avec de petites taches nuageuses, plus pâles, cernées de traits noirs et d'autres points ou traits noirâtres. Le dessous est d'un brun plus clair ou grisâtre. Sur les flancs sont des points noirs plus ou moins intenses. La première dorsale a en avant des points noirs et bruns sur un fond transparent; en arrière elle est noire avec deux lignes transparentes. La deuxième est toute semée de petites taches et de lignes brunes ou olivâtres, mêlées de points noirs. La moitié supé- rieure de sa caudale a entre ses rayons de grandes taches noirâtres, avec un point noir au milieu, et les intervalles ont des lignes onduleuses jaunes et lilas. La partie inférieure n'a point de taclies; les lignes s'y continuent un peu. L'anale est transparente et a CHAP. XV. CALLIONYMES. " 305 le bord noirâtre. Les pectorales ont des points noirs sur leurs rayons ; les ventrales en ont même dans leurs intervalles : leur bord est brunâtre. Nos individus sont longs de quatre pouces, et, avec les fils de la queue, de cinq. Le G.\LLIONYME A GRANDS OPERCULES. ( Callionjmus opercularis , nob.) Cette espèce diffère assez des autres par ses orifices branchiaux, pour devenir peut-être un jour le type d'un sous-genre particulier. Dans toutes les espèces dont nous avons parlé jusqu'ici, cet orifice se montre comme un petit trou percé derrière l'occiput, à la face supérieure du crâne j dans celle-ci il est caché par une longue production pointue de l'opercule, et par une membrane qui attache cette production à la nuque, et il se présente, quand on écarte l'opercule, comme une fente trans- versale sous la portion de membrane dont nous ve- nons de parler; ce qui n'empêche pas que tout le reste de l'orifice branchial ne soit fermé, comme à l'ordinaire, par une membrane qui contient cinq rayons. D'ailleurs ce poisson est conformé comme les au- tres callionymes, et ressemble même beaucoup au callionymus curvicornis par sa large tête et sa petite première dorsale. En ne comptant pas cette production de l'oper- cule dont je viens de parler, la tête est aussi large 12. 20 30G LIVRE XIV. GOBTOÏDES. / que longue, comprise quatre fois dans la longueur totale. Le museau est presque arrondi. La bouclie. Large, très-protraciile, n'a que des dents très -rases et sur des bandes fort étroites. Les yeux , d'un peu moins du quart de la largeur de la tête, s'écartent l'un de l'autre d'un diamètre et demi, La corne préoperculaire est droite ; son bord supérieur est armé de six dents pointues, dirigées en avant, et sa pointe en a encore une ou deux petites; mais il n'y en a point de récurrentes, La première dorsale a moitié de la hauteur du corps; la seconde la surpasse peu, et ne fait pas la pointe en arrière, non plus que l'anale, La caudale est tronquée et d'un peu plus du cinquième de la longueur totale. B. 5;D. 4 — 9j A, 9; Cil; P. 19; V. lA Dans la liqueur ce poisson a le dessus brun-fauve clair, semé en avant de petits points un peu plus foncés. Sa première dorsale est brune; les rayons de la seconde, et ceux du bord supérieur de la pectorale et de la caudale, ont des points bruns sur un fond pâle. Le dessous et l'anale sont blanchâtres ou gris pâle. Les ventrales sont noirâtres. Notre individu a près de quatre pouces: l'espèce ne devient pas plus grande. On en pèche abondamment à l'embouchure de la rivière d'Arian-Goupan pendant les mois de Novembre, de Décembre et de Janvier, et il y est très-rare pendant le reste de l'année. Son nom tamoule est topelan-kontjiou^ ce CHAP. XV. CALLIONYMES. 507 qui signifie fretin (petit poisson) à chapeau. On ne le mange pas. Nous devons tous ces détails à M. Lesclie- nault, qui nous a envoyé le poisson en 1818. Le Callionyme linéolé. {CalUonjmus lineolatus , nob.) Quoique l'opercule de cette espèce n'ait point de prolongement particulier, son orifice branchial est placé de même sous la membrane qui joint l'opercule à la nuque, et non pas ou- vert en dessus comme dans les autres. Sa tête est moins aplatie; sa hauteur fait moitié de sa longueur; sa bouche est fort petite, et ses dents très-rases. La Hgne de son museau, qui est court, descend assez rapidement. Ses grands yeux, rap- prochés l'un de l'autre, regardent un peu de côté. Son épine préoperculaire se termine en pointe aiguë, un peu arquée en dedans, et a deux petites cornes dirigées vers le haut. Dans le mâle, la première dorsale est deux fois €t demie plus haute que le corps et forme un bel éventail ; la seconde n'a que la hauteur ordinaire , et son dernier rayon, ainsi que celui de l'anale, se prolonge un peu en pointe. Dans la femelle, la pre- mière dorsale n'est pas plus haute que l'autre. La caudale, tronquée, est quatre fois et demie dans la longueur totale. D. 4 — 8 ; A. 7 , elc. » 308 LIVRE XTV. GOBIOÏDES. Le inale est un beau poisson olivâtre, avec de grandes marbrures nuageuses brunes , et ayant sur les côtés et sous la queue des taches rondes, et plus bas des lignes interrompues, longitudinales, nacrées, et lisérées de brun. La première dorsale, sur un fond olivâtre, a des rubans ou des lignes nacrées, lisérées de brun ou de violet, dont deux transverses à sa partie anté- rieure, et cinq ou six verticales, interrompues, à sa partie postérieure. La deuxième dorsale a des taches noirâtres et aussi vers l'arrière des lignes nacrées tracées dans le sens des rayons. La caudale est olivâtre avec deux suites verticales de taches noirâtres. L'anale, blanchâtre à sa base, a sa moitié inférieure noirâtre: on y voit aussi quelques lignes nacrées. Les pectorales sont orangées et les ventrales noirâtres^ La femelle est beaucoup moins belle : ses mar- brures sont moins marquées, ses lignes nacrées moins apparentes. Nos individus sont longs de quatre pouces. Comme ils sont desséchés ou altérés par la liqueur, il se pourrait bien que dans l'état frais leurs couleurs fussent plus brillantes que nous ne les avons décrites. Au reste , ce n'est que par conjecture que nous supposons que les plus beaux individus sont les mâles; nous n'en avons pas eu de propres à être disséqués, et ce seraient plutôt des femelles, si ce que Pallas dit de l'espèce suivante est fondé. Nous en avons reçu un de Pondichéry par CHAP. XV. CALLIONYMES. 509 M. Sonnerai, et les autres ont été envoyés de l'île de Bourbon par M. le baron Mylius. Le Callionyme ocellé. {Callionjmiis ocellatuSj Pallas.) Nous ne le connaissons que par la figure et la description de Pallas*; il doit être fort voisin de ce linéolé : La forme de sa tête est la même, ainsi que la pro- portion de sa bouche; mais ses yeux sont plus petits. L'épine de son préopercule est simple. L'auteur, en parlant du trou branchial , dit : foramina ad nucham ulrinque^ et pour le callionyme flèche il emploie l'expression -.foramina supra nucham; ce qui montre bien qu'il en avait saisi la différence. C'est seulement pour n'avoir pas trouvé le petit lobule génital, que Pallas a jugé que les individus à première dorsale haute sont les femelles. La première dorsale y est aussi haute, et fait de même l'éventail. Les nombres des rayons sont pareils, D. 4 — 8; A. T; C. 10; P. 20; V. \/h. La couleur du corps est brune, marbrée de nuages bruns avec des points blancs. Il y a sur la première dorsale des lignes brunes, entourées de lignes blan- ches bordées de noir, et dans les intervalles des trois premiers rayons quatre grands ocelles bruns , avec 1. Spic, t. VUl, p. 26, pi. 4^ %• 1 - 5 ; cop. Encycl. métb. %. 95. 51 0 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. un point noir dans le centre, et entourés d'un cercle blanc liséré de noir. L'individu décrit par Pallas n'était long que de deux pouces et demi; il assure que l'on en envoyait souvent d'Amboine en Hollande; cependant nous n'en avons jamais reçu d'au- cun des voyageurs qui ont parcouru la mer des Indes. Le Callionyme a doigt libre. ( Callionjmus dactjlopuSj Ed. Benn.) Nous terminerons ce genre par une espèce très-remarquable , qui nous a été communiquée par M. Edouard Bennett, et dont il y a plu- sieurs échantillons dans le Cabinet de la So- ciété zoologique de Londres. Elle nous paraît appartenir au groupe du calUo- nymus lineolatus et du callionymus ocellatus ; son museau du moins est semblable. La pointe de son préopercule est droite et fort aiguë, et a trois petites dents récurrentes à son bord externe. Les deux pre- miers rayons de la dorsale antérieure sont prolongés en filets de moitié de la longueur du corps; la seconde est autant et plus baute que le corps ; l'anale l'est un peu moins. La caudale est tronquée, d'un peu moins du quart de la longueur totale. La pectorale est coupée comme dans tout le genre; mais ce qui dislingue essen- tiellement cette espèce de toutes celles que l'on con- CHAP. XV. CALLlONYMES. 311 naît, c'est que le premier rayon mou de chaque ventrale est sans branches , d'un tiers plus long que les autres, et dégagé de la membrane jusqu'à sa base, comme les filets qui sont sous les pectorales des trigles et de polynèmes. D. 4 — 8; A. 7;P.17; C. 10; V. 1/5. \ Le corps est en dessus d'un brun marbré de brun plus foncé, et blanchâtre en dessous. Il y a des lignes longitudinales brunes sur la deuxième dorsale. La caudale a à sa partie supérieure quatre bandes brunes et des lignes blanches, et sur sa partie inférieure des points blancs. La longueur de l'individu est de cinq pouces. DE L'HÉMÉROCET (Hemerocœtes, uoh.), et en particulier de Z'Hémérocet acantho- RHYNQUE. {Heînerocœtes acanthorhjnchos y r\oh.-^ Callionjrmus acanthorhjnchos y Forsl. ; Callionjmiis monopte- rjgiuSj Bl. Schn.) On doit nécessairement faire un genre par- ticulier du poisson dont Forster avait laissé une description manuscrite sous le nom de callionymus acantliorhynchos , et qui a paru dans le Bloch posthume (p. 40^^^^ celui de callionymus nionoptery^ius. Sa figure, laisse'e aussi par Forster et conservée à la biblio- I 512 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. thèque de Banks, a complété nos idées à son sujet, et nous a prouvé que ce n'est aucun des poissons que nous avons eus sous les yeux. Nous le recommandons aux naturalistes qui auront occasion de faire des récoltes dans les parages où il a été vu pour la première fois, c'est-à-dire à la Nouvelle-Zélande. Il doit y vivre dans le fond de l'eau 5 car l'individu dé- crit par Forster ne fut pas péché, mais rejeté sur le rivage par une tempête. Comme le nom de kocKAwwixoç ^ l'un de ceux de l'ui anoscope , a été, depuis Linné, appliqué par tous les naturalistes aux poissons dont nous parlons dans ce chapitre, et qui sont tous bien éloignés de l'uranoscope , j'ai cru pouvoir prendre, sans grand inconvénient, pour le nom de ce nouveau genre dont nous avons à faire connaître l'espèce, un de ceux que Rondelet et Bélon ont cru être syno- nymes du callionyme des Grecs. Cette asser- tion n'est pas aussi bien démontrée pour Yvf^B^oKoirvis ^ qu'elle l'est pour le callionyme j car, ainsi que M. Cuvier l'a fait voir (t. III, p. 3oo ) , le passage d'Oppien , cité par Ron- delet à l'appui de cette conjecture, convient peut-être mieux à la baudroie ou à un platy- céphale qu'à l'uranoscope , et encore moins qu'au callionyme tel que nous l'entendons. Ce CHAP. XV. HÉMÉROCETS. 313 nom peut donc être regarde comme mi de ceux que nous lisons dans les anciens sans que nous puissions en déterminer l'application. On voit que le genre est distingué des cal- lionymes, parce que le poisson n'avait qu'une seule dorsale, et secondement, parce que le palais avait des dents, tandis que celui des callionymes est lisse. Voici la description de la seule espèce con- nue, et que nous avons combinée d'après la figure de Forster et l'article de Bloch. Le corps est alongé comme celui de plusieurs clinus, et approche de la forme cylindrique. Sa hauteur est dix ou onze fois dans sa longueur. Sa tête, deux fois plus longue que haute, prend le cinquième de cette longueur. L'œil, à peu près au milieu, a en longueur un peu moins du quart de celle de la tête; il est rapproché de celui du côté opposé et semble avoir une paupière {rnemhrana niclilans semilit- naris) : ce sont les termes de Forster. Jusqu'entre les yeux le crâne est horizontal; plus en avant le museau s'abaisse obliquement par une ligne légèrement concave, en sorte que le bout en est déprimé , et en même temps un peu obtus et légèrement échancré. Les narines sont entre les yeux (sans doute en avant) et très -près l'une de l'autre. La mâchoire supérieure est un peu plus longue. La lèvre supérieure est double, et Forster dit qu'elle a en avant deux épines , mais n'exphque pas autrement 314 LlVttE XIV. GOBIOÏDES. à quoi ces épines appartiennent. La langue est lisse. Le palais a des papilles et de iietites dents {^pala- ium papillosurn denticulatuni) ; mais sur les dents des mâchoires Forster garde le silence. Les opercules n'ont qu'une pointe simple (^calcar simpîex)j mais on ne voit pas si c'est à l'opercule même ou au préopercule. Les ouïes sont fermées et percées seulement dans le haut d'un trou ovale et tubuleux, comme des callionymes ; le nombre des rayons branchiostèges est de sept. Les ventrales sont à peine plus en avant que les pectorales, de grandeur médiocre, arrondies; les pectorales, un peu plus longues (du dixième de la longueur totale), paraissent ovales. La dorsale unique, qui commence à l'aplomb du milieu de la pectorale, s'étend jusques assez près de la caudale, et est à peu près d'un quart moins haute que le corps. A la manière dont Forster exprime le nombre de ses rayons {aculeis 4o), on pourrait croire qu'il n'y en a que d'épineux, comme dans les gonnelles. L'anale, beaucoup plus basse, est presque aussi étendue en longueur; elle commence sous l'aplomb de la pointe des pectorales, et finit au même endroit que la dorsale. L'espace entre ces deux nageoires et la caudale, est vingt-trois ou vingt-quatre fois dans la longueur totale; la caudale elle-même, qui est tronquée, y est dix fois. B. 7; D. 40: A. 37; C. 10; P. 17; V. 1/5. Tout le corps est couvert d'écaillés, que la figure représente aussi grandes que dans le gobie lancette , par exemple. Il y en a sur le crâne, la joue, les oper- CHAP. XV. HÉMÉROCETS. 315 cules î le museau en est dépourvu. La ligne latérale est droite et suit le milieu de la hauteur. La figure représente le poisson d'une teinte rosée, nuancée de brun. D'après la description il serait d'un livide rougeâtre et aurait la dot-sale tachetée de rouge. Il est long de près de huit pouces.^ Autant que l'on en peut juger d'après cette description, ce poisson serait peut-être aussi voisin des clinus et des blennechis que des callionymes ; mais ce qui est incontestable, c'est qu'il doit former un genre distinct des uns et des autres; donc les véritables affinités ne pourront être fixées que lorsque l'on con- naîtra son anatomie. ¥ DU TRICHONOTE (Tricbonotus, Bl Schn.). Nous n'avons plus les mêmes incertitudes sur le genre des Trichonotes, depuis que M. Liclitenstein a bien voulu nous laisser exa- miner le poisson original même de Bloch. La forme des ventrales convient en tous points à celle des callionymes, et leur canal intestinal, simple et sans cœcum, établit des affinités suffisantes pour justifier la place que 1. Forsler dit huit pouces et un quart ; mais il se sert de pouces anglais. 31 G LIVRE XÏV. GOBIOÏDES. M. Cuvicr avait assignée à ce genre. Nous de- vons cependant faire remarquer que les ouïes très-fendues de ce poisson sembleraient l'éloi- gner de ce groupe^ On ne connaît qu'une seule espèce, et même que le seul individu qui est conservé dans le Cabinet de l'université de Berlin , et sur lequel nous avons fait la description suivante: Le Trichonote porte-soie. ( Trichonotus seligery Bl. Schn., p. 179, pi. 39.) Son corps est alongé, presque cylindrique, ter- miné en avant par un museau aigu, et en arrière par une grande caudale également pointue. Sa hau- teur est plus de douze fois dans sa longueur totale; son épaisseur est des deux tiers de sa hauteur. Sa tête est légèrement déprimée, et la mâchoire inférieure dépasse l'autre. Si on ne prenait la longueur de la tête que de la nuque, elle serait neuf fois dans la longueur totale; mais comme l'opercule se prolonge en arrière , en le comptant , elle n'y est qu'un peu plus de six fois. Les deux yeux , très-rapprochés, se touchent pres- que en dessus, et occupent le troisième quart de l'espace entre le bout du museau et la nuque. La bouche est fendue jusque sous le milieu de l'œil; de petites dents en velours sur une bande étroite garnissent les deux mâchoires , le devant du vomer et les palatins. La langue est très-libre, étroite ^ lisse, obtuse. Le préopercule est arrondi et a le bord entier ; CHAP. XV. TRICHONOTES. 317 l'opercule, augmenté du subopercule, se porte en arrière jusque sur la base de la pectorales Les ouïes sonttrès-fendues; leurs membranes ne s'unissent que sous l'œil j elles contiennent chacune sept rayons branchiostèges. La pectorale et la ventrale sont pointues , la pre- mière, du dixième environ de la longueur totale, a douze rayons; la seconde, plus longue (du huitième de la longueur) , s'attache un peu plus en avant, et se porte un peu plus en arrière. La dorsale commence vis-à-vis la base de la pectorale par deux filets grêles, non articulés, du tiers delà longueur du corps; les cinq premiers rayons suivans, simples aussi, mais beaucoup plus courts, sont suivis à leur tour de quarante-deux rayons articulés , mais simples et non divisés, formant avec eux une nageoire à peu près aussi haute que le corps, et qui ne laisse entre elle et la caudale qu'un espace de moins du vingtième de la longueur totale. L'anale a trente-huit ravons, dont les trois premiers sont simples, inarticulés, et les autres sont divisés, articulés et ramifiés, comme à l'ordinaire des autres rayons mous. Elle est à peu près aussi haute et se porte aussi loin en arrière , mais elle ne commence que sous le treizième rayon dor- sal, les deux filets compris. La caudale est grande et pointue, de plus du cinquième de la longueur totale; elle porte treize rayons. B. 7j D. 7/42j A. 3/35; C. 13; P. 12; V. 1/5. Il y a environ cinquante écailles sur une rangée longitudinale, et sept ou huit seulement sur une ligne verticale; toutes sont minces, un peu plus 518 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. longues que larges, très-finement striées en rayons. La partie cachée l'est presque aussi finement que le reste; elle n'a point de crénelures, mais seulement deux ou trois larges festons obtus. La ligne latérale est droite, suit le milieu du corps, et ne marque pas de tubulures simples et continues. L'individu est entièrement décoloré par l'action de l'esprit de vin, et il paraît élre fauve uniforme, sans laisser aucunes traces de taches ou de rayures. Bloch le dit jaune; mais il faut bien entendre que cette expres- sion s'applique à l'individu jauni par une longue macération dans la liqueur. Voici les observations anatomiques que nous avons faites sur ce poisson. La longueur de la cavité abdominale fait le sep- tième de la longueur totale, et l'œsophage et l'esto- mac en occupent les six septièmes. C'est un long sac étroit, cylindrique, arrondi en arrière, et à parois minces et sans plis intérieurs. Presque vers le fond du sac et sur le côté droit on voit l'ouverture du pylore : il n'y a aucun appendice cœcal. L'intestin , qui est très-étroit, remonte à droite de l'estomac, se plie sous le diaphragme , et se porte directement à l'anus. A la hauteur du pylore il y a une valvule qui marque le commencement du rectum, lequel est un peu dilaté. Les organes de la génération sont très- petits et rejetés vers l'arrière de l'abdomen, entre la pointe CHAP. XV. TRICHONOTES. 319 de l'eslomac et l'anus. Il n'y a point de vessie aérienne. Les reins sont petits et aussi rejetés vers l'arrière de l'abdomen; mais ils sont plus alongés que les organes génitaux. Le foie est très-petit, et nous a paru se pro- longer entre l'estomac et l'intestin en une languette fort étroite et fort mince. Le péritoine est très-mince, transparent et nullement argenté. Nous avons trouvé dans l'estomac une petite sèche et des débris de petites crevettes. > L'individu que j'ai mesuré est long de sept pouces et quelques lignes. Je crois que c'est par une faute d'impression que Bloch a dit que le poisson qu'il a décrit était long de neuf pouces. 11 lui donne pour patrie les Indes orientales, sans dire d'après quelle autorité. L'aspect du poisson et sa conservation me font croire que Bloch avait acheté cet individu dans quelque cabinet de Hollande. Rien ne me paraît donc moins certain que cette indication. La figure qu'il en a publiée n'est pas d'une scrupuleuse exactitude. Ainsi la forme des ventrales n'a pas été bien rendue par son dessi- nateur; la caudale est représentée trop courte et pas assez pointue. On n'a pas d'autre renseignement sur ce poisson , qui doit être fort rare , puisque aucune des nombreuses collections que nous avons visitées, ni les nôtres, ne le possèdent encore aujourd'hui. 320 LIVRE XÎV. GOBIOÏDES. DES PLATYPTÈRES. Nous plaçons ici un genre de poissons dont les rapports essentiels sont avec les cléotris, mais qui , par la forme, la position des dorsales et celle des ventrales, semblent se rapprocher aussi à quelques égards des aprons et des pla- tycëphales. Il a été découvert dans les eaux douces de Bantam par M. Van Hasselt, l'un des deux jeunes et mallieureux naturalistes que nous avons déjà cités plusieurs fois, à qui il n'a manqué, pour prendre dans la science un rang très- élevé, que le bonheur de revenir dans leur patrie, et de publier eux-mêmes les observations qu'ils avaient faites avec non moins de sagacité que de [courage et de per- sévérance. Ce voyage à Bantam, fait après la mort de son ami, M. Ruhl, est ce qui lui a donné a lui-même le coup mortel. Depuis lors, MM. Quoy et Gaimard ont retrouvé ce poisson dans les eaux douces de Célèbes. Les caractères des platyptères consistent en deux dorsales bien séparées, une tête hori- zontalement triangulaire, la bouche sous le bord du museau , sans dents au palais , et de grandes ventrales attachées sous une poitrine aplatie et plus en arrière que les pectorales; leurs dents sont en velours sur des bandes CHAP. XV. PLATYPTÈRES. 524 étroites. Il y a six rayons à leurs ouïes, et l'on aperçoit quelques dentelures peu sensibles à l'angle seulement de leur prëopercule. Ils ont derrière l'anus la papille charnue com- mune à toute cette famille. Le Platyptère apron. {Platjptera aspro , K. etV. H.) Le corps est oblong, presque cylindrique ou même un peu déprimé de l'avant, tout-à-fait plat sous la tête et sous la poitrine, légèrement comprimé vers la queue. Sa hauteur est six fois dans sa longueur, et son épaisseur aux pectorales égale au moins sa hauteur. La tête a sa longueur comprise cinq fois et demie dans celle du corps ; elle est d'un tiers moins haute, et d'un cinquième plus large que longue; le profil en des- cend peu. Vus d'en haut, son museau et les angles de ses préopercules paraissent presque former un triangle équilatéral. L'angle antérieur ou lé museau est arrondi. L'œil, dont le diamètre n'est pas du quart de la longueur de la tête, est placé assez haut et plus près de l'ouïe que du museau. Entre les deux yeux est un espace double de leur diamètre 3 une très- petite crête cutanée et crénelée forme une sorte de sourcil au-dessus de chaque œil. La bouche est ou- verte transversalement en demi-cercle sous le bout du museau, fort petite et garnie de dents en fin ve- lours. Il n'y a aucunes dents au palais ni sur la langue, qui est pointue et assez libre. La mâchoire supérieure 12. 21 522 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. est assez protractile et garnie de lèvres membra- neuses. Les deux orifices de la narine sont l'un au- devant de l'autre, et au-devant de l'œil, au premier quart de l'intervalle qui les sépare du bout du museau. Les sous-orbitaires sont hauts et lisses ; ils ne cou- vrent que le tiers ou le quart antérieur de la joue, et leur bord postérieur est vertical et rectiligne. Le bord du montant du préopercule, placé presque sous l'œil, est entier et légèrement concave; son bord inférieur, entier aussi, s'unit en avant aux sous-orbi- taires, qui forment un rebord sous lequel se cache le maxillaire. Il y a à l'angle du préopercule deux ou trois petites dentelures obtuses, à peine visibles. L'opercule eijt petit, sans épine, un peu écailleux vers le haut ; son union avec le sous-opercule se fait par une ligne oblique, et le sous-opercule a moitié de sa largeur. Le crâne est très- court, en triangle dont la pointe est en arrière, lisse, sauf la petite crête dentelée du sourcil. Les membranes branchiales sont fort découvertes; elles s'unissent latéralement à un isthme très-large et plat; elles ont chacune six rayons, dont les premiers sont aplatis. La poitrine est plate : les ventrales , écartées , grandes et en général taillées comme dans les aprons , sortent sous le tiers antérieur du bord inférieur des pectorales; elles ont une très -petite épine, et leurs rayons, divisés dès la naissance, ont des branches si régulièrement placées les unes à côté des autres , qu'on serait tenté de les prendre pour des rayons même, et d'en compter dix-huit ou vingt; mais la dissection fait voir qu'il n'y en a que cinq princi- CHAP. XV. PLATYPTÈRES. 325 paux comme à l'ordinaire. Les pectorales sont amples et sortent d'une base oblique ; elles ressemblent, pour la forme et l'étendue, à celles des cottes et des scor- pènesj mais leurs rayons, au nombre de vingt et un, sont tous branchus. Il y a deux dorsales fort séparées ayantles deux tiers de la hauteur du corps , et qui n'ont chacune guère plus de hauteur que de longueur. La première a sept rayons non articulés, mais grêles et flexibles j les deux premiers sont les plus élevés , et les autres décrois- sent peu. La deuxième a sept rayons mous, précédés d'une épine grêle et de moitié moins élevée : le dernier est fourchu jusqu'à sa base. L'anale répond à cette seconde dorsale, et a de même une épine et huit rayons mous. L'anus est un peu en avant de l'anale, sous le milieu de l'intervalle entre la première et la deuxième dorsale ; à son arrière est un lobe charnu comme dans les gobies, mais large et échancré. L'in- tervalle entre les nageoires verticales et la caudale est de plus du quart de la longueur totale ; la cau- dale en occupe le sixième; elle est coupée carrément et a treize rayons entiers. B. 6 j D. 7 — 1/8; A. 1/8 ; C. 13; P. 21 ; V. 1/5. La base de la caudale est un peu écailleuse. Il n'y a point d'écaillés sur les autres nageoires, et la tête n'en a que sur l'arrière du crâne et le haut de l'oper- cule. Celles du corps sont assez grandes; on en compte environ trente, de l'ouïe aux petites de la base de la caudale, et dix ou douze sur une ligne verticale, un peu plus longues que larges, coupées carrément au bord radical, qui est un peu trilobé, 324 LIVRE XIV. GOEIOÏDES. marqué d'un éventail de neuf ou dix stries. Le bord paraît à la loupe finement dentelé. La ligne latérale commence presque à l'œil, gagne le haut de la pec- torale, descend sous la première dorsale jusqu'au tiers ou au quart inférieur de la hauteur; elle fait un ou deux légers festons, et sous le commencement de la seconde dorsale elle remonte vers le milieu, où elle reste jusqu'à la caudale. Tout ce poisson, dans la liqueur, est en dessus d'un brun plus ou moins foncé, et blanchâtre en dessous. Ses dorsales ont chacune sur un fond blan- châtre deux ou trois bandes irrégulières noirâtres, formées par des points serrés; il y en a aussi sur la caudale, mais encore plus irrégulières. Les pecto- rales sont brunes en dessus, avec des lignes de points plus bruns et blanchâtres en dessous. Les ventrales sont blanchâtres , avec une légère teinte de brun et de jaune en dessus. Le foie du platyptère est mince, petit, triangu- laire , jaunâtre et placé presque en entier dans l'hy- pocondre droit. La vésicule du fiel est de la grosseur d'un grain de chenevis. Le canal cholédoque est assez long, et s'ouvre dans l'intestin peu en arrière du diaphragme. Le canal intestinal est un simple tube qui n'offre aucun renflement; il diminue insensi- blement de largeur, et fait deux plis à des distances à peu près égales entre elles. Il n'y a aucuns appen- dices cœcales. La rate est petite, alongée et placée à la droite de l'intestin, vers le milieu de la longueur de l'abdomen. Les ovaires, quand ils sont pleins, remplissent la CHAP. XV. PLATYPTÈRES. 325 moitié postérieure de l'abdomen ; les œufs sont plus petits que de la graine de pavot. Il n'y a pas de vessie aérienne. Les reins sont petits, séparés à peu près pendant la moitié de leur longueur. Le péritoine est mince et noirâtre. Nous avons trouvé des petits insectes dans le tube intestinal. Le Cabinet royal de Hollande possède le squelette de ce platyptère , et grâce à la géné- rosité avec laquelle M. Temminck m'a com- muniqué, pendant mon séjour à Leyde, les trésors de ses collections, j'ai pu y faire les observations ostéologiques suivantes : Le crâne est légèrement bombé, lisse, sans crête longitudinale sur les frontaux : deux très-petites s'é- lèvent sur les occipitaux latéraux, et une mitoyenne, plus basse, sur l'interpariétal , se porte Jusque sur la première vertèbre. Les os du nez sont larges , aplatis et étendus horizontalement au-devant des yeux. Le sous-orbitaire est très-petit, étroit, un peu élargi en arrière, sans donner l'apophyse qui s'articule avec le préopercule. Le préopercule est creusé en une large fosse qui occupe toute la joue; son bord horizontal et le vertical sont relevés, arrondis et épaissis, et trois ou quatre petites pointes se voient à l'angle de cet os. L'opercule est très-mince et triangulaire. Le sursca- pulaire est grêle, en forme de stylet. Les maxillaires supérieurs sont petits, épais, élargis, et toute la bran- che horizontale est garnie de dents en velours, fines et très-nombreuses. On compte onze vertèbres abdo- 326 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. minales et seize caudales. Les interépineux de la première dorsale sont placés sur les quatrième, cin- quième, sixième et septième apophyses épineuses. La huitième apophyse épineuse est libre; et les neuvième, dixième et onzième, elles quatre apophyses épmeuses des premières vertèbres caudales, portent les interépi- neux de la deuxième dorsale. L'anale répond aux cinq îremières vertèbres caudales. Les côtes sont grêles et 1 &' petites, au nombre de dix, elles ont chacune leur apo- physe styloïde presque aussi longue que la côte elle- même. J'ai comparé avec soin les platyptères de Célèbes avec ceux de Bantam sans y découvrir aucune difFérence qui puisse être regardée comme spécifique. Dans la liqueur ils parais- sent plus roux, mais le dessin fait sur les lieux , par M. Quoy, les peint aussi de brun. Il paraît que les jeunes individus ont des teintes plus claires. Une petite figure de M. Van Hasselt est enluminée d'un jaune citron avec des rayures obliques sur la caudale. C'est l'une de ces deux variétés, considérée d'abord comme une espèce distincte, qui aura donné lieu à l'établissement des deux espèces nominales mentionnées dans la seconde édition du Règne animal ( t. II, p. ^4^ ? ^^^^ ^ )• Le plus grand individu que nous ayons vu n'a que sept pouces ; il vient de Bantam, où les naturels appellent l'espèce gankub hatoe. CHAP. XV. COMÉPHORES. 327 APPENDICE AU CHAPITRE XV. DU COMÉPHORE (Comepborus, Lacép.)- Le callionjmus Baicalensis de Pallas *, dont Lacépède a fait son genre Coméphore, ne peut évidemment pas être rapporté aux cal- lionymes. Il n'en a pas les ouïes fermées, percées d'un seul trou à la partie supérieure; elles sont au contraire très-fendues , autant et plus que dans les trichonotes et les autres genres voisins. L'absence de ventrales est une anomalie d'un ordre encore plus élevé : cependant la gran- deur des pectorales; le petit nombre des ver- tèbres abdominales, comparé à celui de la queue ; les rayons fins et peu divisés des na- geoires; la simplicité du canal intestinal, peu- vent permettre de laisser ce poisson fort sin- gulier là où, par un sentiment plus singulier que bien motivé, Pallas a placé cet être rare. J'avoue moi-même que je ne saurais d'ailleurs lui trouver une autre place dans la série ich- thyologique. La description que Pallas^ en a donnée. 1. Premier Vojage , t. III , p. 290 , et /Ipp. , p. 707 ; et trad. fr. , 1793, t. IV, p. 4o3, et App. , p. 49- — 2. Nov. act, Peirop., t. I,p. 349,pl. 9,fig. »• 328 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. ainsi que la figure qui l'accompagne, ne laissent rien à désirer. J'ai pu cependant donner sur lui des détails plus minutieux, grâce aux soins que S. A. I. la grande-duchesse Hélène de Russie a mis à faire rechercher ce poisson pour l'offrir à M. Cuvier. Hélas ! ce poisson , qu'il avait tant désiré de connaître , n'est arrivé que dans ces derniers jours de tristesse et d'angoisses, où nous entourions de soins inutiles cette noble et belle intelligence, qui s'est conservée forte et intacte dans le corps malade tant qu'il y a eu en lui souffle de vie. Il est très-difficile de se procurer le poisson du Baikal, parce qu'il habite dans les profon- deurs les plus grandes du lac. Il n'en sort que par suite des grandes tempêtes d'été, qui tour- mentent les abîmes, et pour arriver mort à la surface des eaux, ou venir échouer sur les rives. Pallas, qui avait exagéré la finesse des rayons de la dorsale et de Fanale, en disant d'eux, dans son Voyage : extj^emo quasi cirrhiferis, a été cause du nom générique que ce poisson gardera. Cet illustre voyageur s'est un peu mo- difié dans la description détaillée, qu'il a insérée dans les Acta petropolitanaj car il n'y dit plus que extremo quasi in cirrJiuni mollem ter- minatis^ ce qui veut dire que l'extrémité des rayons dépasse un peu la membrane de la na- CHAP. XV. COMÉPHORES. 329 geoire. Gmelin , ayant pris son caractère dans le récit du voyage , a supprimé extrenio^ et s'est exprimé sur les rayons en disant : radiis cir~ rhiferisy M. de Lacépède, ayant paraphrasé Gmelin, suppose que les rayons de la seconde dorsale et de l'anale, fins comme des cheveux, dépassent de beaucoup la membrane , et c'est de là qu'il a imaginé le nom de comépliore pour dénomination générique d'un poisson qu'il a placé , suivant sa méthode, dans Tordre des apodes. Le CoMÉPHORE DU Baikal. {Comephorus Baikalensis , Lacép.; Callionjmus Baikalensis 3 Pallas.) Sa forme générale, un peu plus grosse en avant, lui donne quelque ressemblance avec certains gades, le merlan ou la morue, par exemple. La tête seule ressemble davantage à celle du brochet, à cause de l'aplatissement du crâne et de la position élevée des yeux, qui, sans être verticale, est du moins telle- ment haute, que le cercle de l'orbite entaille le profil du crâne. Le corps est comprimé : le crâne seul est aplati. L'épaisseur, prise aux pectorales, est des deux tiers de la hauteur au même endroit; laquelle est un peu moindre du huilième de la longueur totale. Le corps s'amincit assez en arrière; car le tronçon delà queue, compris enire la dorsale, l'anale et la caudale, a 330 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. une épaisseur égale à sa hauteur, et qui ne fait plus que le tiers de la plus grande hauteur du corps. La tête est grande, aplatie en dessus et sur les côtés, et arrondie en dessous, La face supérieure du crâne, le limbe du préopercule et les branches de la mâchoire inférieure, sont caverneuses. La lon- gueur de la tête est comprise trois fois et demie dans celle du corps. La largeur du crâne fait les trois quarts de sa hauteur. La circonscription horizontale du museau est parabolique j mais on ne peut pas dire que le museau soit déprimé. L'œil est placé sur le haut de la joue, de manière à ce que l'orbite échancre profondément la ligne du profil; mais cet organe est situé sur le côté et non sur le dessus de la tête; il est éloigné du bout du museau de deux fois la longueur de son diamètre, qui est un' peu plus court que le cinquième de la longueur de la tête. La bouche est large et bien fendue jusqu'à la moitié de la longueur de la tète. Il n'y a point de lèvres à la mâchoire supérieure, et celle de l'infé- rieure est tellement mince, qu'on ne la voit que vers la commissure. L'intermaxillaire est un os long et grêle, le long duquel est couché un maxillaire tout aussi grêle, plus court que le précédent de sa partie antérieure seulement. Les dents sont en fm velours et réduites à une simple scabrosité, même visible quand la bouche est fermée. Examinées à la loupe, on s'aperçoit que plusieurs de ces dents sont crochues, courbées en arrière, et que leur pointe acérée est dirigée vers le fond de la bouche. Il y a quelques petites dents sur CHAP. XV. COMÉPHORES. 531 une bande courte et étroite aux palatins et sur le chevron du vomer. La mâchoire inférieure dépasse la supérieure. La langue est obtuse, courte, hbre et portée sur un os hyoïde, dont le corps fait une carène obtuse, mais élevée , dans l'intérieur de la bouche. Je ne vois qu'un seul orifice à la narine, assez grand et percé au mi- lieu de l'intervalle entre le bout du museau et l'angle antérieur de l'œil. Le long de son sous-orbitaire il y a trois gros pores comme des petites fosses, creusées entre la peau et l'os, et par derrière il y a trois cavernes ovales sur l'os, mais fermées par la peau de la joue. Je vois de même trois pores de chaque côté sous la branche de la mâchoire inférieure , et il y en a cinq sur le bord du préopercule. Les os sont dans un tel état de mollesse, qu'il est impossible de distin- guer la plupart d'entre eux, quand leur contour n'est pas déjà marqué par la peau qui les recouvre. Ainsi, le sous-orbitaire n'est pas reconnaissable. Le préopercule se montre par le contour arrondi de son limbe. L'opercule est triangulaire. Quant au sous- opercule et à l'interopercule, on ne peut les dis- tinguer Les ouïes sont très -largement fendues. La mem- brane branchiostège a six rayons assez gros. Les quatre branchies ont des râtelures en fines cardes, portées sur des pédicules alternes sur l'os branchial. Les peignes des branchies ont disparu dans les in- dividus que j'ai à ma disposition. Le mastoïdien et le surscapulaire se montrent à l'extérieur par une 332 LIVRE XIV. GOBIOÏDES. carène; ils portent les os du bras assez larges, et qui doivent être très -solides quand le poisson est bien conservé; car ils sont beaucoup plus durs que les autres os. La pectorale, attachée sur une sorte de pédicule, est comprise à peu près deux fois et demie dans la longueur du corps; elle a treize rayons, fins comme des cheveux, très -flexibles, tous simples et sans aucunes articulations. Il n'y a aucuns vestiges de ventrales. Le premier rayon de la première dorsale est inséré vis-à-vis la base de la pectorale; il est suivi de sept rayons simples, très-fins, très-flexibles, sans aucune division ni articulations, et si peu élevés, qu'ils n'ont pas le quart de la hauteur du corps sous eux. La seconde dorsale et l'anale se correspondent parfaitement. Les rayons vont en croissant jusqu'au sixième , qui sur- passe un peu en longueur la hauteur du corps sous lui. Les rayons mous, comme tous les os du pois- son j sont gros, mais sans division en branches tii articulations. La caudale seule a les rayons fouicLus à deux divisions et articulés. Les points de sutures font de petites nodosités sur les rayons. Cette na- geoire est peu fourchue. B. 6,D.8— 28; A. 34; G. 21; P. 13; V. 0. Je n'aperçois aucune trace d'écaillés sur le corps du poisson. La ligne latérale est tracée très-près du dos, et de couleur un peu brune. Sa couleur paraît avoir été jaunâtre ou verdâtre, à reflets argentés et avec des points noirâtres, parse- més, très-fins et plus visibles à la loupe qu'à l'œil nu. Les nageoires sont transparentes, avec les rayons * CHAP. XV. COMÉPHORES. 355 bruns, comme des cheveux châtains. La caudale seule est jaunâtre ou verdâtre plus brillant sur la base. Les individus sont si gras qu'ils semblent se ré- soudre en graisse ou en adipocire dans l'esprit de vin. Ils n'étaient pas assez bien conservés pour que je puisse en faire une anatomie bien détaillée. J'ai pu voir cependant que l'estomac est petit, terminé en pointe, et que sa branche montante est très-prononcée; que le canal intestinal ne fait que deux replis; qu'il est étroit; je ne vois point d'ap- pendice cœcal; il n'y a pas de vessie natatoire. Malgré l'extrême mollesse des os, on voit bien que le squelette est fibreux. Le crâne, plat, a une très- petite crête mitoyenne, comme celle des gobies ou des callionymes. Je compte huit vertèbres abdominales et trente- cinq caudales à la colonne vertébrale. La dernière vertèbre est en éventail assez solide. Telle est îa description que j'ai faite d'après nature de cette espèce rare et curieuse. Pallas nous apprend que les habitans des bords du lac Baikal assurent ne connaître ce poisson que depuis 1770. On ne le prend jamais vivant, mais seulement lorsque les tempêtes d'été, venant du Nord, le rejettent sur le rivage; on en voit quelquefois en grande quantité morts à la surface ou amassés en tas sur les bords. Il est trop huileux pour être mangé : les 334 LIVEE XIV. GOBIOÏDES. corbeaux mume n'en veulent pas; mais on les fait bouillir pour en extraire l'huile, que l'on vend aux Chinois. Les Russes le nom- ment galomjaenka. C'est avec le phoque, que Pallas croyait être le Ph. vitulina, oi le Salmo oxjrhjnchus , le seul habitant des eaux de ce grand lac, situe sur les frontières de la Chine. 33S LIVRE QUINZIEME. ACANTHOPTÉRYGIENS A PECTORALES PÉDICULÉES. M. Cuvier, créateur de cette famille de poissons, a, par une importante réforme de la classification de ses prédécesseurs , ramené le genre Lophius et ses démembremens dans le grand groupe des Acanthoptérygiens. En effet, l'ensemble de leur organisation les y appelle : les deux dorsales, la composition de foreille, la liberté des canaux semi-circulaires dans l'intérieur du crâne, la disposition des viscères digestifs, celle des organes de la géné- ration chez le mâle et la femelle; la nature et la disposition du maxillaire, de l'intermaxil- laire; celle des dents implantées sur ceux-ci, sur la mâchoire inférieure , et souvent sur les palatins et le vomer, tous ces caractères en font de vrais acanthoptérygiens. Le squelette lui-même, quoique peu dur, est fibreux, et, comme nous le démontrerons sur la baudroie [lophius piscatorius , Linn.) en particulier, les os et osselets du crâne sans exception , ceux des mâchoires, des opercules. 536 LIVRE XV. de l'épaule, de 1 épine, des nageoires, de l'os hyoïde et des ouïes, sont tous les mêmes. Les caractères distin ctifs des poissons de cette famille consistent, i." dans l'absence presque générale d'écailles, qui sont remplacées dans un de leur genre, celui des malth ées , par des tuber- cules osseux, et dans plusieurs espèces de celui des cliironectes, par de petits grains armés d'é- pines 5 2.° dans le prolongement de deux os du carpe, mais non pas de l'avant-bras, c'est-à- dire du cubital et du radial, comme l'avait d'abord pensé M. Cuvier, et qui forment une espèce de bras soutenant la nageoire pecto- rale comme une sorte de main; 3.° dans fou- verture des ouïes, pratiquée par un trou rond ou par une fente verticale dans la peau der- rière l'insertion de la pectorale, et n'étant plus une large fente ouverte derrière le bord de l'opercule et du sous-opercule ; et 4-° enfin j'a- joute à ces caractères , déjà reconnus par M. Cu- vier, un dernier qui me paraît d'une haute valeur ichthyologique : l'absence de l'os sous-orbitaire. Deux genres, celui des Baudroies et celui des Chironectes, ont encore un caractère par- ticulier et distinctif, et qui consiste dans des rayons libres et attachés sur le dessus de la tête. M. Cuvier a reconnu que ces filets osseux et libres ne sont que des rayons détachés de la PECTORALES PÉDICULÉES. 557 première dorsale. Ils sont au nombre de trois : les deux premiers sont supportés par une crête osseuse qui ne fait pas partie des os du crâne, mais qui y est fixée par des ligamens , et que M. Cuvier regarde comme un interépineux couché horizontalement sur le crâne; le troi- sième est articulé sur l'interpariétal. Ces arti- culations se font par anneaux; mode d'arti- culation dont plusieurs poissons dans diffé- rens ordres nous ont déjà fourni des exemples. M. Cuvier, en fixant les idées des natura- listes sur cette orgai^isation si singulière , avait cru d'abord devoir rapprocher les lophius* de la Camille des percoïdes; mais de nouvelles études l'ont fait changer de manière de voir, et il expose ses nouvelles idées , dans les géné- ralités de son mémoire sur les chironectes, de la manière suivante^: la position de la pre- mière dorsale avancée sur la tête se retrouve dans le genre cristiceps. Les callionymes n'ont qu'unpetit orifice branchial; le ^obius macro- cephalus de Pallas a la tête déprimée et élar- gie; les périophthalmes, les boléophthalmes ont les nageoires déjà pédiculées, et ces pois- sons marchent et courent sur la vase après leur proie, comme le font les chironectes; eu I —, — I . — 1-- .1.. .1 I»' 1. Cuvier, Règne anim. , i/* éclit. , t. II, p. 3o8 2. Mém. du Mus. , t. III, p. 420. 12. 22 338 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. un mot, tout lui prouve que la famille des poissons à pectorales pédiculées est très-voisine de celle des Gobioïdes; la plupart ont aussi, comme ces derniers, un canal intestinal simple et sans cœcums. Je dois cependant faire remar- quer que les baudroies en ont deux près du pylore , et que sous ce rapport elles montrent aussi de l'affinité avec les percoïdes; mais ces affinités entre les genres de plusieurs familles prouvent de plus en plus comme dans les familles naturelles bien faites il y a une sorte de balancement ou de répétition des genres de chaque groupe. M. Cuvier, en prenant le genre lophius de Linné et d'Artèdi, en a retiré, sous le nom de malthées les espèces à peau rude, et a re- connu dans le lopliius liistrio le genre que Commerson avait voulu établir sous le nom d'antenjiarius, et que M. Cuvier a nommé chironectes ; nom qui a prévalu, parce qu'il est plus caractéristique que celui proposé par le courageux et infortuné compagnon de Bou- gainville. Enfin, j'établis moi-même un quatrième genre, dont M. Cuvier n'avait pas aperçu les caractères. Les batraclioïdes de Lacépède, ou les batrachus, Sh., sont placés dans la même famille , mais en les caractérisant mieux. CHAP. I. BAUDROIES. 559 CHAPITRE PREMIER. Des Baudroies [JLopliius, Art.). Ce genre, créé et nommé par Artedi, d'après les données que lui fournissaient Bélon, Ron- delet, Salviani, est un de ceux que les natu- ralistes doivent regarder comme un des plus naturels, et qui cependant a été le plus mal caractérisé déjà par son créateur Artedi, en même temps que ses rapports naturels ont été long-temps méconnus. Artedi ^ commence par donner ce poisson comme n'ayant pas de membrane branchio- stège ( nienihrana hranchiostega nulla). Or, c'est de tous les poissons celui dont cette mem- brane est la plus grande et la plus développée , puisqu'elle forme le grand sac qui embrasse le cou, la base des pectorales, et donne au corps sa forme remarquable. D'ailleurs Artedi place la baudroie parmi ses branchioste^i , c'est-à-dire parmi ses poissons à squelette fibreux, et il n'en fait pas un cartilagineux. En cela il est plus judicieux que Linné, qui, dans son Système, regarde les branchiostegi d'Artedi comme devant former avec les raies 1. Artedi, Gen., t. XLI, p. 62. 340 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. et les squales, vrais cartilagineux, un ordre d'animaux qu'il ne place pas dans la classe des poissons, mais dont il compose son groupe des amphihia nantes. Voilà donc le genre lophius retiré de la classe des poissons, et paraissant d'abord daus la dixième édition caractérisé par les mots: spiracula solitariapone branchia j pinnœ pec- torales hranchiisinsidentes, dernière partie du caractère fort juste, et exprimée d'une manière fort heureuse j mais dans l'idée de Linné l'ex- pression de spiracula ne convient pas à un poisson respirant comme la baudroie. Linné ajoute à ce caractère : hranchiœ très tantinn, caractère fort juste pour la baudroie, et unique dans la classe des poissons. Le professeur d'Upsal ajoute aussi : dentés plurinii minuti , caractère que Gmelin gâte, en ajoutant à cette phrase' : lin^ua lata, dentihus arniata; car la langue n'est pas très-large, et surtout n'a aucunes dents, ainsi que nous le ferons voir dans la description de la baudroie. Le genre d'Artedi se compose de deux espèces, le lophius piscatorius et le lophius vespertilio , auquel Linné ajoute le lophius histT^iOj, sans rien changer à la formation de ce genre jusque dans la douzième édition. Gmelin a faitplusieurs doubles emplois d'es- CHAP. I. BAUDROIES. 541 pèces douteuses, mais n'y a pas introduit d'a- nimaux étrangers. Les trois espèces de Linné sont devenues les types des trois genres dans lesquels M. Gu- vier a divisé la famille. Lacépède a tout aussi mal encore présenté les caractères du genre, puisqu'il le suppose composé de poissons cartilagineux ayant une membrane des branchies, sans opercule. Or, la baudroie et les autres poissons de cette famille ont les pièces operculaires comme à l'ordinaire. D'ailleurs les espèces qu'il réunit dans son genre lophie appartiennent, comme celles de Linné, aux trois genres de Cuvier. Le genre lophius, réduit par les travaux de ce grand zoologiste, et rapproché de sa véritable place , ne comprend plus que les es- pèces à tête excessivement grande relativement au reste du corps , large et déprimée , épineuse y à gueule très-fendue, armée de dents coniques et grêles , sur les mâchoires, sur les palatins, et le plus souvent sur le chevron du vomer,sur les pharyngiens supérieurs et inférieurs, mais point sur la langue. Les baudroies ont une grande membrane branchiostège soutenue par six rayons, et recouvrant trois branchies seule- ment de chaque côté. Il n'y a point de bran- chie supplémentaire adhérente à l'opercule.. 342 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Cette pièce, le sous-opercule et Imteroper- cule sont cache's dans les muscles; mais le prëopercule est plus visible. Il n'y a point de sous-orbitaire : c'est une seconde anomalie, non moins remarquable que celle du nombre des branchies. Ces poissons ont deux dorsales, et les trois premiers rayons de la nageoire antérieure semblent se détacher d'elle et se porter en avant sous forme de longs filets terminés par des lambeaux charnus. Ces filets sont articulés par un anneau sur un cercle correspondant d'un os long et courbe sur le crâne. Ce mode d'articulation en anneau des rayons des na- geoires avec les interépineux, est plus commun qu'on ne le pense dans les poissons. Les chéto- dons, les silures, quelques cyprins, en ofïVent des exemples. Les muscles moteurs de ces filets dans la baudroie sont également analogues à ceux qui meuvent les autres rayons, mais ils sont plus divisés *, de sorte que M. Cuvier a complètement raison, en regardant ces filets comme appartenant à la dorsale, et l'os d'arti- culation comme leur interépineux. Leur estomac est très-grand et très-charnu; 1. Vojez Baillj, Annales des sciences nalurellcs, recherches sur les rayons des baudroies. CHAP. I. BAUDROIES. o45 l'intestin, court, a deux cœcums à son origine. Ces poissons nagent difficilement; aussi se tiennent-ils le plus souvent sur le sable et caches sous la vase , laissant leurs filets flotter librement au-dessus d'eux, et attirant ainsi les poissons, sur lesquels ils se précipitent, quand ceux-ci sont à leur portée. C'est-là à quoi se réduit le merveilleux instinct de la pêche de la baudroie. On dit qu'elles peuvent vivre long-temps hors de l'eau, et nous rapportons l'assertion de Rondelet à leur sujet; mais nous n'avons jamais vu la baudroie des cotes de l'Océan avoir la vie tenace : j'en ai observé plu- sieurs mourir très-peu de temps après qu'on les avait sorties de l'eau, et avoir la vie moins dure que les spares, les canthères, les trigles et autres poissons avec lesquels on les prenait. Nous en avons trouvé une ligure très-recon- naissable dans l'Encyclopédie japonaise et dans le Livre japonais sur les poissons, que nous avons cité si souvent; mais on pourrait douter que ce fut précisément notre baudroie d'Eu- rope. Nous avons reçu des baudroies des côtes de l'Amérique, mais qui peuvent être d'espèce différente : ni Parra ni Margrave ne font men- tion de ce poisson. Nous n'en avons jamais eu des mers équatoriales. Bloch, à la vérité, cite comme un synonyme 344 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. de notre baudroie le rana piscatrix de Suri- nam de Fermin ; mais quand on remonte à la source, on trouve que cet ignorant médecin a nommé ainsi Isijackie^ ou le têtard du rana paradoxa. ^ Une espèce en est commune sur nos côtes de l'Océan et dans la Méditerranée. Il paraît que cette mer en nourrit des variétés que l'on a regardées comme étant d'une seconde espèce. Nous en avons reçu d'autres de locéan Atlan- tique : l'une pécliée à New- York et à Pliiladel- pliie , et d'autres provenant du cap de Bonne- Espérance. Enfin, nous en avons des mers orientales de l'Inde, et les ouvrages japonais, comme nous venons de le dire, en contiennent aussi des figures. Nous allons commencer nos descriptions par celle de l'espèce commune aux deux mers d'Europe. La Baudroie commune. {Lophius piscatoriiis j Linn.) Il n'est pas de poisson pins célèbre que la baudroie, et, si l'on en croit certains natura- listes, son instinct et sa conformation con- courent également à en faire un être anomal et étonnant. Elle a des ruses aussi singulières 1. Fermin, Description de Surinam, t. II, p. 204- CHAP. I. BAUDROIES. 545 que variées : elle pêche à la ligne, elle pèche à la nasse; non contente d'attirer les autres poissons par l'appât de ses tentacules, elle en prend aussi dans les vastes sacs qui entourent ses branchies 5 et ces sacs, formes par la mem- brane branchiostège, soutenus par des rayons jDroportionnés à leur grandeur, ne sont point garantis par des pièces operculaires, en sorte que son genre est isolé dans la nature , et ne ressemble à aucun autre par ses organes auxi- liaires de la respiration. La vérité est, que la baudroie a toutes les mêmes pièces qui composent ces organes dans les autres poissons; que la proportion seule établit entre elle et le reste de sa classe cjuel- que différence apparente plutôt que réelle, et que, si ce que l'on a dit de son instinct n'est pas plus exact que ce que Ton a avancé touchant sa structure, son histoire deviendra beaucoup moins merveilleuse. C'est sans doute l'énorme disproportion de sa tête, et la figure vraiment extraordinaire qui en résulte, qui ont fait de la baudroie l'objet de tant de récits divers. Cette tête est plate et d'une largeur prodi- gieuse : elle offre plus de surface que tout le corps. Une gueule énorme s'ouvre à sa partie antérieure; ses membranes branchiostèges, au 546 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. lieu de s'ecliancrer et de ne s'attacher que sous la gorge ou tout au plus aux côtés de la poi- trine, se prolongent jusque derrière les pecto- rales, et s'ouvrent dans leur aisselle par un orifice étroit; en sorte que les pectorales, d'ailleurs portées sur des espèces de bras prolongés, ont presque l'air de sortir des sacs branchiaux. Que l'on ajoute les nombreux ten- tacules qui entourent cette tête, les filets dé- tachés qui la surmontent, la position des yeux au milieu de la face supérieure, et l'on com- prendra comment l'aspect de ce poisson a pu avoir à la fois quelque chose d'effrayant et de dégoûtant, et faire imaginer au peuple toute sorte de contes sur ses facultés. La description suivante a été faite sur un individu en bon état, et rapporté de Nice par M. Laurillard. Dans l'état de repos, et lorsqu'elle n'enfle ni sa gorge ni ses sacs branchiaux, la tête de la baudroie a en longueur les deux cinquièmes de celle du corps, et encore un peu plus en largeur; mais elle est si plate, que sa hauteur n'égale pas celle du corps; qui elle-même ne fait pas le dixième de la longueur totale. Derrière les pectorales la largeur du corps fait le quart de sa longueur, et il va en diminuant jusqu'à la base de la caudale, dont la hauteur est comprise vingt- quatre fois dans la longueur totale. Le contour de la tête est presque circulaire ; l'arc CHAP. L BAUDROIES. 347 formé par la muclioire supérieure est moins courbe, celui de l'inférieure l'est davantage, en sorte que celle-ci avance d'un seizième environ de la lon- gueur totale. L'ouverture de la gueule, d'un angle à l'autre, a les trois quarts de la plus grande largeur de la léte, qui est un peu à l'arrière des yeux. Ceux- ci sont à la face supérieure, un peu plus près du museau que de la nuque , et avec leur intervalle occupent le tiers de la largeur à cet endroit. Leur intervalle est à peu près double du diamètre de leur globe; mais le cercle transparent de la cornée est plus étroit de moitié. Leur position est à peu près horizontale, mais ils peuvent se diriger vers le ciel ou vers le côté. Leur intervalle est concave. L'arcade sourcilière, qui fait le bord interne de l'orbite, est saillante et armée de deux épines j elles se prolon- gent chacune en avant en une crête fortement rabo- teuse et qui règne jusqu'au bout du museau, où elle s'écarte un peu en dessous. Au bout de chacune de ces crêtes sont deux épines, qui appartiennent au palatin; et un peu plus en dedans se voit le pédi- cule charnu et dilaté en petite cupule qui soutient la narine de ce poisson : au-devant de ces pointes est la racine du maxillaire, qui marche transversa- lement, suivant le bord de la mâchoire supérieure, formée, comme à l'ordinaire, par l'intermaxillaire. Nous avons déjà dit combien la mâchoire inférieure avance sur l'autre. Elles ont chacune une rangée de dents coniques, droites, longues et pointues, mais très-inégales entre elles, alternativement plus petites et plus longues, et attachées de manière que 548 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICUL.ÉES. les plus longues sont sur le bord interne de l'os, et les plus petites sur le bord externe. Les intermaxillaires en ont deux rangs vers le milieu, et les mitoyennes du rang supérieur et in- terne sont les plus longues; celles de leur partie externe sont au contraire les plus petites, et celles qui bordent la partie postérieure de l'os sont courtes, coniques, crochues, espacées et assez fortes. Le vo- mer, qui est très-élargi en avant, en a une ou deux à chaque angle, et il y en a un rang de six ou huit le long du bord externe de chaque palatin. Il n'y a point de dents sur la langue, qui, à vrai dire, n'existe presque pas, mais dont il se montre une apparence quand l'os hyoïde fait saillie sur le fond de la bou- che. Les arceaux des branchies n'ont pas non plus de tubercules dentés; mais les os pharyngiens, qui se trouvent fort en avant, à cause de l'énorme ou- verture de la bouche, sont armés de dents en petit nombre , mais aussi fortes et aussi pointues que celles des mâchoires. Il y en a deux rangs sur chaque pha- ryngien inférieur, un le long de chaque bord : les supérieurs en ont deux rangs transversaux. C'est la position avancée des pharyngiens inférieurs qui a fait croire mal à propos à divers naturalistes que la baudroie a des dents sur la langue. Toutes ces dents ont une certaine mobilité, du moins dans les jeunes individus et lorsqu'elles ne sont pas encore bien soudées aux mâchoires. Pour revenir au crâne, il est un peu concave; il a deux épiiles derrière l'orbite , et une plus en arrière à l'angle de la tempe. La joue est très-large, horizon- CHAP. I. BAUDROIES. 349 laie, couverle seulement par la peau, et sans aucun sous-orbitaire : il n'y en a pas même en avant de roeil. Elle est bordée en arrière, comme à l'ordinaire, par le préopercule, dont le limbe se courbe en arc de cercle, et a sur son arête une petite e'pine dans le haut et deux vers le bas. Entre ces dernières et la commissure des lèvres en est encore une, qui appar- tient à l'os de la mâchoire inférieure. Derrière le milieu du préopercule en est une qui appartient àl'interopercule, ou placée parallèlement au bord du préopercule et presque cachée par lui - même dans le * squelette. Toute la région operculaire et scapulaire est en- veloppée au-dessus par une peau continue , en sorte qu'on ne distingue pas sans dissection les diverses parties; mais en suivant le bord externe de la tète, en arrière de l'épine de la mâchoire inférieure, on trouve d'abord une légère interruption des os, puis une épine dirigée en avant, et une autre un peu au- dessus, qui appartiennent au subopercule; le reste du bord de la tète, jusqu'à la base de la pectorale, est soutenu intérieurement par des espèces de rayons cartilagineux flexibles, qui sont des subdivisions de cet os suboperculaire, comme nous verrons qu'il lui est fourni une ou deux dans les Z'flr/ra^'AM^; mais dans la baudroie cet os en donne une vingtaine, tous très- grêles. Le doigt sent aussi sous cette peau l'os oper- culaire, qui est divisé en deux branches par une grande échancrure : l'une, plus large et plus épaisse, descend en ligne droite depuis l'articulation jusque derrière les deux épines du subopercule, et s'y ter- 150 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. mine par une petite pointe dirigée en dessous ; l'autre est très-grêle, et ressemble à un filet plus qu'à un lobe d'opercule : elle se termine à peu près à l'endroit oii se terminent aussi les filets du subopercule. Plus en arrière encore se sentent les os de l'épaule, qui, de même que les précédens, ne se montrent au- dehors que par leurs épines. Cependant le surscapu- laire n'existe pas, et il n'y a pas d'épine au scapu- laire; mais le grand os humerai en a une dans le haut, placée derrière celle de la tempe, et une dans son milieu , au-dessus du pédicule de la pectorale ; cette épine du milieu est divisée en trois pointes placées obli- quement. Ce pédicule de la pectorale est lui-même enveloppé dans une continuation de la peau , en sorte qu'on ne voit sortir que sa partie rayonnée, qui a l'air d'être attachée à l'angle postérieur et externe de cet énorme disque de la tête. Cette partie rayonnée est coupée carrément, presque aussi longue que large, et d'environ le septième de la longueur totale; elle contient vingt-trois rayons, dont les bouts, sortant de la membrane, y forment de petits festons. Vu en dessous, le grand disque de la tête paraît entièrement aplati et lisse. Les ventrales s'attachent sur une ligne qui le tra- verse à peu près dans son milieu; la distance de leur hase est d'un peu moins du tiers de sa largeur, et, se dirigeant de côté, elles n'atteignent pas ses bords; leur longueur n'est que du neuvième de la longueur totale; elles ont cinq rayons mous, presque égaux, sortant un peu de la membrane, et une petite épine h leur bord externe. CHAP. I. BAUDROIES. 351 Les portions latérales du disque laissent aperce- voir au doigt les rayons branchiostèges , qui partent d'un os hyoïde à peu près parallèle à la mâchoire inférieure, et se courbent à peu près parallèlement pux bords de la tête; il y en a six, dont les externes se prolongent jusque sous le pédicule de la pectorale. L'ouverture des branchies est sous la fin de ce pédi- cule, et la peau qui l'entoure s'unit à celle qui le couvre, en sorte qu'il a l'air de sortir de l'orifice branchial; les deux orifices sont ainsi fiDrt écartés l'un de l'autre, placés chacun sous l'angle postérieur du grand disque de la tête, ou plutôt de celui de la tête et de l'épaule; ils donnent issue chacun à une espèce de large canal, qui vient des branchies et qui est tapissé en dessous par la membrane branchio- slège et par ses rayons, et abrité en dessus par les os du bras, ceux de l'épaule et les pièces opercu- laires ordinaires. Un repli de la peau forme en dedans du pédicule de la pectorale une cloison verticale, qui doit agir comme une valvule dont l'usage est d'empêcher l'in- troduction de l'eau dans l'intérieur de la branchie par l'ouverture de l'ouïe. Cette disposition était né- cessaire pour un poisson osseux, privé d'évent, et qui, caché dans la vase, aurait blessé l'organe si déli- cat des ouïes, si une eau sale ou chargée de gravier avait pu entrer par les fentes branchiales. C'est dans la partie antérieure de ce canal que sont cachées les branchies, qui ne sont qu'au nombre de trois, le quatrième arceau, qui existe comme à l'ordinaire, ne portant point de franges vasculaires, 352 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. et ne laissant point d'ouverture entre lui et le troi- sième. L'anus est à quelque distance en arrière des pec- torales et à peu près au milieu de la longueur du corps. Le corps, derrière les épaules, n'est plus qu'un, cône mince et un peu déprimé, portant en dessus et en dessous une dorsale et une anale molles, qui se répondent à peu près, mais dont la dernière est un peu plus courte et plus haute; elle a dix rayons; la seconde dorsale en a onze ou douze, et en avant une petite épine; l'espace nu qu'elles laissent derrière elles fait le treizième de la longueur totale, et la cau- dale en fait le sixième : elle est coupée carrément et n'a que huit rayons. Il nous reste à parler maintenant de la première dorsale et des rayons qui s'en détachent en avant; car il semble qu'on doit regarder comme des rayons épineux les filets que ce poisson porte sur la tète, articulés à des pièces osseuses impaires, que l'on peut considérer comme des interépineux détachés : ce sont les trois premiers de ces rayons qui s'isolent ainsi; les deux premiers sont attachés, à une seule pièce osseuse, que l'on sent sous la peau comme une crête verticale mobile. Le premier de tous est entre les deux narines; il est grêle; sa longueur fait à peu près la moitié de celle du corps, et il se termine par un lambeau membraneux , bifurqué et subdivisé à sa base, et qui, dans un individu bien conservé, a les deux cinquièmes de la longueur de la tige os- seuse qui le supporte. Le second est à peu de dis- lance ( à peu près sur le milieu de l'espace entre CHAP. I. BAUDROIES. 3o3 l'œil et le bout du museau), à peu près aussi gros que le premier, et bien moins long, n'ayant que les trois septièmes de la longueur de l'antérieur et terminé d'ordinaire en pointe simple, mais il est garni sur toute sa longueur de lambeaux charnus. Le troisième est sur le crâne, entre les épines des tempes, articulé sur une petite crête très -différente de la première et plus fixe , de plus de moitié plus court que le second; il se termine en pointe simple, comme le précédent, et est garni de lambeaux charnus et nombreux. La véritable première dorsale est insérée sur le dos, entre les pectorales, et composée de trois rayons mu- nis à leur base d'une membrane , qui descend promp- tement et se perd sur le dos sans atteindre le rayon suivant; le premier, qui est le plus long, n'a pas le septième de la longueur du corps. B. 6;D. 3 — 3 — 12; A. 10; C. 8; P. 13;V. 1/5. Tout le corps est couvert d'une peau molle, lisse, sans écailles ni âpretés , coloré en dessus d'un brun olivâtre, en dessous de blanchâtre; les pectorales et la caudale tirent au brun noirâtre. Des lambeaux cutanés, déchiquetés ou ciliés, ou de la forme que les botanistes nomment pinnatifide, et de différentes longueurs, adhèrent en grand nom- bre au pourtour de la mâchoire inférieure et aux bords tranchans des côtés de la tête, et il y en a de semblables des deux côtés du corps, jusqu'auprès de la queue, qui ajoutent encore à tout ce que ses proportions, ses épines et ses filets donnent d'extra- ordinaire à son apparence. 12. 23 554 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Les individus à dorsale courte nous ont paru en avoir moins que les autres. Ce poisson si bizarre de forme est en même temps un très-grand poisson ; les individus de trois et de quatre pieds de longueur ne sont point rares : on en apporte même quelquefois de cette taille à Paris 5 et je vois sur les notes recueillies à Caen par M. Cuvier, en 1789, qu'il en avait vu qui étaient longs de six pieds. Pontoppidan en possédait un qui, bien que desséché, était long de sept pieds' j et Duha- mel va jusqu'à avancer qu'il y en a de dix.^ On a long-temps rangé la baudroie parmi les poissons cartilagineux , mais fort à tort. Ses os sont bien fibreux, et ses fibres ne manquent pas de dureté ; mais les fibres et les lames qui les composent ne sont pas aussi rapprochées, leur tissu n'est point aussi dense que dans les autres poissons; du reste les centres d'ossifica- tion d'où ces fibres partent, sont les mêmes, et par conséquent aussi les articulations et les sutures qui divisent les os. 1. liist. nat. of Norwaj , t. II, p. i52. M. de Lacépède dit douze pieds, parce qu'il cite Pontoppidan, d'après Blocli, qui met trois aunes et demie, et que M. de Lacépède a pris les aunes de Berlin pour des aunes de Paris. D'ailleurs, M. Faber dit que la taille du poisson a été exagérée par les traducteurs allemands ou anglais de Pontoppidan , qui ne donnait à son poisson que deux aunes etdemie,oucinqpieds. — 2. Pèches, 2.* part. , secl. 9, p. 294. CHAP. I. BAUDROIES. 355 Le crâne, de forme oblongue, un peu plus large et légèrement concave en arrière, et dont la conca- vité devient plus profonde en avant des yeux, a des sutures qui pamissent peu, parce que les lames os- seuses minces, qui forment les bords des os, glissent les unes sur les autres; mais on y reconnaît sans exception les mêmes os que dans le poisson le mieux conformé, A la face, la principale ditférence est que le tem- poral s'unit sans suture visible avec le préopercule, et ne fait qu'un os avec lui; mais on retrouve tous les autres grands os. Parmi les petits , il manque les os propres du nez, ce qui s'explique par la conformation de la narine, et je n'aperçois non plus aucun sous-orbitaire, ni aucun des petits os de la tempe. Les quatre arceaux des branchies ne se composent chacun que d'une pièce, et les petits os qui les unissent ordinairement en avant , manquent tout-à-fait : il n'y a à leur place qu'une membrane ; voilà pourquoi il n'y a pas de langue. L'os hyoïde a conservé davantage sa composition ordinaire. Le surscapulaire manque , comme dans les batrachus. Le scapulaire est oblong, suspendu au mastoïdien , et collé au-devant du grand os humerai. Le filet claviculaire est grêle, flexible et d'une seule pièce aussi comme dans les batrachus. Le cubital est fort distinct, quoique petit, et laisse un vide à sa base. Le radial ne se voit point, et paraît réduit à l'état de cartilage. Les deux os longs, qui forment le pédicule de la pectorale , ou ce que l'on a nommé le bras, représentent ceux que nous appelons car- 556 LIVRE XV. PECTORALES PÉDTCULÉES. piensj l'inférieur est double de l'autre en longueur, et élargi obliquement vers la nageoire , qu'il porte seul. Les os du bassin sont en forme d'équerre, comme dans les platycéphales. Une branche va s'at- tacher par des ligamens au milieu de la partie infé- rieure du grand os humerai; l'autre va s'unir à celle de l'os de l'autre côté , et forme avec elle une barre ou un pubis qui tient les deux ventrales écartées. L'épine se compose de trente vertèbres ' , toutes sans apophyses iransverses et sans aucunes côtes. La quatorzième commence à donner une apophyse épi- neuse en dessous , et c'est à celle de la quinzième que s'attache le premier interosseux de l'anale. Nous avons déjà vu que les interépineux avancés sur la tête sont couchés en longueur. Il en est de même des trois qui portent la première dorsale; ils sont plus longs que larges, et portés, le premier, sur l'ex- trémité des apophyses épineuses de la deuxième et de la troisième vertèbre; le second, sur celles de la quatrième et de la cinquième ; le troisième sur celle de la sixième. L'articulation par anneau est plus prononcée dans le premier des filets de la tête : mais elle existe plus ou moins dans tous. Les interépineux de la deuxième dorsale et de l'anale penchent entre les apophyses épineuses des vertèbres. Le svstème nerveux et les organes des sens de la baudroie ne sont pas moins conformes mm^mm^^^m—^ i i i ■ i ■ ■■■■■■ i ■■ . i .-■- ^— i — ^— ■ m^ ■ ■ lai ■ i i ii» 1. Le prince de Musignano dit qu'il en a vu varier le nombre de vingt-neuf à trente et une. CHAP. I. BAUDROIES. 357 que son squelette à ce qu'on observe dans les poissons osseux. Elle a le même encéphale qu'eux pour l'essentiel ; ses nœuds olfactifs ou lobes antérieurs distincts l'un de l'autre, ovales; les lobes creux ou hémisphères, plus grands du double; les tubercules de leur inté- rieur, au nombre de quatre, un peu alongés; un cervelet de plus de moitié moindre que les hémi- sphères; les renflemens de derrière le cervelet, très- forts; une glande pituitaire considérable, placée fort en avant, et ne tenant au cerveau que par un pédon- cule très-alongé, etc. ^ On a prétendu que leur moelle ëpinière est plus courte que leur épine, et ne Va que jus- que vers la huitième vertèbre^; mais cette assertion est contraire aux observations ana- tomiques que nous avons faites. Nous avons vu la moelle épinière se prolonger, comme à l'ordinaire, dans toute l'étendue de la co- lonne vertébrale ; elle se divise seulement de bonne heure en faisceaux, simulant une soite de queue de cheval. L'oreille est aussi construite sur le plan des pois- 1. Vojez-en les figures clans le Mémoire de Camper sur l'ouïe des poissons, imprimé dans ceux des savans étrangers de l'Aca- démie des sciences, t. VI, 1774? et réimprimé dans la collection de ses opuscules, par Herbell, t. II, cah. 2 , pi. 1 , fig. ». Il y en a aussi, mais assez mal terminées, dans rAna'omie comparée du cerveau, de M. Serres, pi. 7, fig. 179, 180, 182, 188 et 189. "2. Arsakj, De cerebr. et medulL spin. pisc , p. 5. 358 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. sons osseux; le labyrinthe est dans la même cavité que le cerveau ; les canaux semi-circulaires ne sont retenus que par des poulies étroites ; il y a de petites pierres dures dans le sac vesiibulaire, dont l'une est en forme de lame ovale et dentée.^ Nous avons constaté par nos dissections que son œil est dans le même cas, et semblable dans ses parties essentielles à celui de tous les poissons osseux : sa sclérotique est renforcée par deux pièces cartilagi- neuses irrégulières; entre la lame externe et métallique et la lame noire de la ruischienne, est le corps glandu- leux et rouge, propre à cet ordre de poissons. La ruis- chienne produit un petit ligament pour l'attache du cristallin. L'organe de l'odorat est celui par lequel la baudroie semble différer le plus des autres poissons , soit osseux , soit cartilagineux. Elle a bien deux orifices à sa narine; mais on ne les trouve que quand on observe ce tube sur des individus bien entiers, ils sont percés à l'extrémité du tube. Cet organe s'élève sur un pédicule membraneux, et quand on ouvre au sommet la membrane de ce pédicule, elle semble s'épanouir comme le calice d'une fleur. Le fond de ce calice est divisé en lamelles saillantes, et le nerf olfactif, après avoir traversé l'axe du pédicule, se divise et se rend dans toutes les lames. ^ 1. Voyez, pour la description de l'oreille de la baudroie, le Mémoire de Camper que nous venons de citer, et le travail l'écenl cl si exact de M. Brcsclict sur l'oreille des animaux vertébrés. 2' Scarpa , De auditu et olfactu , p. 68 , S» ï ' j pb 4 > %• i • CHAP. I. BAUDROIES. .5S9 Le poisson dresse ces pédicules et les dirige vers les objets dont il veut percevoir l'odeur, presque comme le limaçon dirige ses cornes. Nous avons vu que dans le commun des poissons la narine a bien généralement sa membrane pituitaire divisée en lamelles , mais elle est ûxée dans le fond d'une cavité cernée par les os, et immobile. , Nous avons signalé la grande différence qui existe dans le système respiratoire du poisson, dont les trois lames branchifères reçoivent des branches de la huitième paire, comme à l'or- dinaire. Quant au système digestif et aux dif- férentes annexes du canal intestinal, nous y observons les particularités suivantes. Le foie est peu considérable, et composé d'un seul lobe: situé en travers sous l'œsophage, plus à gauche qu'à droite. La vésicule du fiel est grande et suspendue à un long canal cholédoque, dont le diamètre est assez gros , et qui la tient assez loin en arrière du foie. Ce canal monte sous le foie, puis il se courbe pour descendre vers le pylore, afin de s'ouvrir sur la partie supérieure de l'intestin, dans l'espace moyen qui correspond aux deux cœcums. L'œsophage est très-large, mais fort court; il se dilate en un vaste estomac très-musculeux , et qui n'a en dedans aucunes rides. Le pylore s'ouvre à sa partie latérale et antérieure près du cardia. L'intestin, qui le suit, est assez gros 5G0^ LIVRE XV. PECTORALES PÉDiCULÉES. et peu long; ses parois sont charnues et épaisses; il fait plutôt des ondulations dans la partie droite de la cavité abdominale que de véritables replis. A son origine il a deux cœcums courts et obtus, attachés vers sa face inférieure. La rate est peu considérable; sa forme est ovale et aplatie. Les sacs qui contiennent les ovaires, sont énormes; ce sont deux longs et vastes tubes ondulés, attachés dans la cavité abdo- minale le long de l'épine. Dans un assez grand indi- vidu ces sacs soufflés sont devenus presque aussi gros que le colon d'un cheval. Ces germes d'œufs, en assez grand nombre, mais très-petits, n'adhèrent que sur le tiers supérieur de leur pourtour; le reste du sac est lisse, mince et transparent. Il est pro- bable que dans le temps du frai ces oeufs grossis- sent et qu'ils remplissent alors le grand vide. Il n'y a pas de vessie natatoire. Les reins sont gros, peu alongés, de forme ovale, placés chacun dans un petit enfoncement qui leur est propre. Ils ne se réunissent pas en arrière, ainsi que cela a lieu dans un si grand nombre d'acan- thoptérygiens. Leurs uretères sont fort longs et fort gros; ils aboutissent dans une vessie urinaire simple, en ov^le alongé, d'une assez grande capacité, ses tuniques sont épaisses, membraneuses et translucides. Le péritoine est blanc; mais nous le voyons d'un noir profond dans les individus qui appartiennent à la variété dont la dorsale antérieure est basse. Les deux appendices cœcales qui accompagnent le pylore me paraissent aussi un peu plus longues dans la bau- droie à nageoires hautes; d'ailleurs les viscères se ressemblent pour le reste. /f CHAP. I. BAUDROIES. 361 La baudroie est plus ou moins répandue dans toutes les parties de la Méditerranée, et dans beaucoup de parages de l'Océan. Nos pécheurs en prennent dans le golfe de Gas- cogne aussi bien que dans la Manche ^ elle va mérne bien plus au Nord : nous savons que de nos jours on en a péché aux Orcades. ^ Bloclî (t. m, p. io4) en a reçu de la mer du Nord; Schonevelde (p. Sg) la compte parmi les poissons du Holstein; Linné^ parmi ceux de la Suède; Pontoppidan"^, Nilson'*, Miiller^ et S. A. R. le prince royal de Danemarck , parmi ceux du Danemarck et de la Norwége; Mohr^ et Faber^ parmi ceux de l'Islande. Mais elle se montre très-rarement au-delà du soixantième degré de latitude nord. On la rencontre à des intervalles éloignés, à Feroè"^; elle n'est pas nommée dans la Faune du Groen- land de Fabricius, et l'on ne peut aujour- d'hui affirmer qu'elle se trouve dans la baie d'Hudson, malgré la note que M. Richardson^ a insérée dans sa Faune de TAmérique boréale. Elle est également rare dans la Baltique; aussi 1. Low, Fauna orcadensîs , p. i85. — 2. Fauna suec. , p. 298, et Retz, p. 5o8. — 3. Nova hist.,t. II, p. 2 44 4. Ichth. Scand. y p. 101. — 5. Prod. zool. dan. y p. 38, n." Jai. — 6. Hist. nat. Isl. , p. 61 , n." 108. — 7. Naturg. der Fische Islands , p. 55. — 8. Faber, loc. cit. , p. 58. — 9. Faun. hor. Amer.f t. III, p. io5. 362 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. ,Wolf ne la cite-t-il point parmi les poissons de Prusse. Le Catalogue de S. A. R. le prince royal de Danemarck, envoyé à M. Cuvier, confirme son existence, mais rare, dans cette mer; et Bloch, Nilson et Faber donnent des preuves de sa présence clans différens parages de ce grand golfe intérieur. L'étonnement qu'elle a carisé quelquefois en Angleterre pourrait aussi faire penser qu'elle n'y est pas très-commune; mais cela doit plu- tôt tenir à la figure extraordinaire du poisson qu'à sa grande rareté. Ainsi M. Yarell (t. I , p. 2 7 «) nous apprend dans son intéressant ouvrage sur les poissons d'Angleterre, que la baudroie a été prise sur les côtes d'Irlande, à Londonderry, à Antrim, à Dublin, à Waterford et a Cork; sur celles d'Angleterre, à Cornouailles , Devon- sliire, Norfolk et Yorkshire; et en Ecosse, sur les côtes du comté de Fortli et sur les îles du Nord. Toutefois M. Jenyns ^ dit qu'on la prend sur la plupart des côtes de la Grande-Bretagne, mais par hasard : taken occasionnellj on most parts of the coast. D'ailleurs Turton^, Fle- ming^, Donovan (pL 101 ), parmi les auteurs récens, Pennant et Shaw, dans le dernier siècle, l'ont fait figurer dans leurs ouvrages. 1. Man. of. hrit. vert, anim, , p. SSg. — 2. Brit. faun. , p. 1 15. — 3. Brit. anim.f p. 21 4- CHAP. I. BAUDROIES. JSGS La petitesse de ses ouvertures branchiales , et le peu de communication qu'elles ont avec l'extérieur, pourraient faire supposer que la baudroie vivrait long- temps hors de l'eau; c'est en effet ce qui est rapporté déjà par Rondelet, qui raconte en avoir vu une subsister deux jours entiers parmi les herbes sur le rivage. Cette bau- droie saisit même à la patte un jeune renard qui rodait auprès d'elle pendant la nuit, et le retint jusqu'au lendemain dans ses dents crochues, ce qui prouve une assez grande force dans ses mâchoires. J'ai déjà fait observer que celles que j'ai eu l'occasion de voir prendre, ne m'ont pas offert la même ténacité de vie. Aristote^ se demande pourquoi la baudroie seule parmi les cartilagineux produit des œufs, et non des petits vivans; à quoi il répond que ses petits, à cause de la grandeur de leur tête et les aiguillons dont elle est armée , n'auraient pu sortir de son corps ni y rentrer. Il y avait une bien meilleure réponse à faire, c'est que la baudroie n'est pas un cartilagineux, et d'ail- leurs il s'en faut beaucoup que les autres car- tilagineux soient tous vivipares; enfin, ni les poissons cartilagineux ni les autres ne font rentrer leurs petits dans leur corps. 1. De gen. anim. , t. III, c. 3. 564 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. La quantité innombrable d'œufs que con- tiennent ses ovaires devrait multiplier la bau- droie à rinfini, et cependant elle n'est nulle part très-nombreuse, ce qu'Aristote ^ cherche encore à expliquer, en disant que, la baudroie frayant près des rivages, beaucoup de ses œufs et des petits qui en naissent sont dévorés par les autres poissons. Peut-être l'habitude qu'elle a de se tenir enfoncée dans la vase, erapéche-t-elle qu'on ne la prenne souvent dans les filets; et si la ma- nière de se nourrir est celle qu'on lui attribue, elle ne doit pas aisément mordre à f hameçon. C'est une imagination de Duhamel, fondée sur une fausse analogie, de croire que les sexes des baudroies se distinguent, comme ceux des raies et des squales, par les appen- dices des nageoires ventrales; cela n'est pas même possible , puisque les ventrales des bau- droies sont sous la gorge, et non aux côtés de l'anus et près des orifices de la génération, comme dans les raies et les squales. On pense bien qu'un poisson si grand et si hideux a dû être remarqué partout et recevoir toute sorte de noms, souvent même d'injurieux. Les Allemands du Nord lui donnent, selon 1. Hisi. anim., l. \l, c. 17. CHAP. I. BAUDROIES. 565 Bloch, celui de loup de mer [Seewolf). Ceux de diahle et de crapaud de nier, et d'autres sem- blables, lui ont été prodigués en France, en Angleterre, en Italie, en lllyrie, comme aux scorpènes et aux cottes; à Paris on y joint celui de salope. M. YarelP dit que les pécheurs d'Ecosse la nomment wide gab. C'est aussi sa laideur qui en Sicile lui a fait donner celui de lamia% et ceux de magata et de giuna di mar^. Le nom de baudroie^ o\x de baudreuiP, qu'on lui donne à Marseille, vient, dit-on, de ce qu'on lui trouve quelque ressemblance avec cette sorte de bourse attachée à la ceinture, qu'on appelait autrefois particulièrement bau- drier, de balteus et de (?)ccXccvlm. A Montpellier on la nomme galanga_, terme dont on ne nous donne pas l'explication; à Bordeaux pêche- teau^j en Espagne, sur les côtes de Galice pej'e sapo oupijotin^ y en Portugal embarroco.^ Dans le Nord nous trouvons que M. Nilson lui donne pour nom suédois celui de liaf- paddo, et pour noms norwégiens ceux de paddefisk, marulk, bredjlab ; et dans le Ca- talogue déjà cité de S. A. R. le prince royal de Danemarck, celui de steenulk y est men- 1. Brit.fish. , p. 269. — 2. Salvien. — 3. ^aûnesque , Indice , etc. , p. 42. — 4. Rondelet, Bélon ,etc. — S.Biûnnich, p. 7. — 6. Ron- delet. — 1. Comide, p. i34. — 8. Sahien, etc. , p. \^o. 366 LIVRE XV. PECTORALES PÉDIGULÉES. tionnë comme dénomination des pêclieurs de Norwege, et ceux de ulk et de havtaske comme nomenclature danoise. M. Faber dit que le premier de ces deux noms est danois, et que son nom islandais est marJmutr, lequel est différent de celui cité par Molir, et que cet auteur indique être blagumme ^ mais M. Fa- ber fait observer que sous ce nom, les Islandais désignent tous les grands poissons qu'ils voient rarement, et qu'ils ne connaissent pas bien. Le nom de lophius a été fabriqué par Ar- tedi et tiré de Ao(p;«, éminence ou crête, parce que la baudroie offre de tous côtés des crêtes et des parties saillantes. C'est la forme de sa gueule qui lui a valu le nom de grenouille {(^cfl^cc%oç, rana), sous lequel elle est désignée par les Grecs et par les Latins, avec Tépithète de marine^ celle de pêcheur^ pécheresse^ qui, aussi bien que les noms de pêcheteau , pejotin , poisson pêcheur^ est relative à lindustrie qu'on lui attribue. Cette industrie l'avait rendue célèbre dès l'antiquité; elle n'est pas mentionnée par les naturalistes^ seulement, les poètes et les philo- 1. lào-TPcL^oç etXtciq. Aristote, Jlist. anim, , 1. IX, c. 07; Baxpavoç ùxieûç, MVicrn , Hist. anim. , 1. IX, c. 24; Pline, rana et rana piscairix , 1. IX, c. 24 et 42. — 2. Aristote, ^lian, Pline, loc, cit. CHAP. I. BAUDROIES. 367 sophes s'en étaient aussi emparés : les uns pour embellir leurs chants^; les autres pour la citer en exemple de la sagesse de la nature^; mais nous n'oserions dire si les modernes n'ont pas reproduit des récits semblables sur la foi de ces anciens témoignages plutôt que sur des observations directes. Du moins remarquons- nous plus d'une contradiction et dans les causes qu'on assigne à cette industrie, et dans la ma- nière dont on dit qu'elle s'exerce. On suppose que la faiblesse de ce poisson et le peu de rapidité de ses mouvemens, sont ce qui lui rendait un moyen particulier né- cessaire pour se procurer des alimens; et d'un autre côté on prétend qu'il est capable de poursuivre des chiens de mer et de s'en rendre maître, et qu'il s'en est trouvé plusieurs fois dans son estomac. Cette opinion a même en- gagé les pêcheurs anglais à rendre la liberté aux baudroies qu'ils prennent, parce qu'ils contribuent à diminuer le nombre de ces squales, beaucoup plus nuisibles aux autres poissons que les baudroies elles-mêmes.^ 1. 0pp., liai., I. II, V. 86. 2.Cicéron, De nat. deor., 1. II, c. 125. Ranœ auiem marinœ dicaniur ohruere sese arena solere , et moveri prope aquam , ad quas quasi ad escam pisces cum accesserint confici a ranis alqiie consumi. 3. Pennant, Brit. zool., t. III, p. 206. 368 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Leur faiblesse est si peu réelle que l'on en a vu se défendre contre les pécheurs*; et le fait que nous avons rapporté ci-dessus , d'après Rondelet, prouve combien leurs mâchoires sont vigoureuses. Cicéron fait simplement agiter un peu la surface du sable par le poisson; selon Aris- tote, que Pline, Oppien et Élien ont suivi, c'est au moyen des filamens qui terminent son premier rayon libre, qu'il attire ses victimes. Pontoppidan croit que c'est plutôt par les nom- breux lambeaux cutanés qui lui entourent les mâchoires et qui ressemblent à autant de vers. On a cherché aussi à prêter urf usage aux sacs que forme sa membrane branchiale; quel- ques-uns ont cru qu'ils offrent un asile à ses petits dans les momens de danger^; ce qui est très-peu vraisemblable; car ce poisson, étant ovipare, ne conserve pas de rapport avec ses petits. D'autres naturalistes, ayant trouvé de petits poissons qui s'y étaient embarrassés, ont conclu que la baudroie emploie ces sacs comme des filets, et qu'elle a aussi reçu de la nature cette manière de pécher en quelque sorte à la nasse^; conjecture qui n'est guère plus vraisemblable 1. Pontoppidan , p. 162, note. — 2. Pennanl, ubisupr.,]^. 107. — 3. Geoffroy, Ann. du Mus. , t. X, p. 48o. CHAP. I. BAUDnoiES. 369 que la première , quand on remarque combien l'orifice de ces branchies est étroit et caché, quelle difficulté les poissons auraient même de le trouver pour s'y introduire, et surtout quand on songe que la baudroie elle-même ne saurait comment les en faire sortir pour les amener à sa bouche , en supposant qu'elle puisse parvenir à les y faire pénétrer. Sans être très-bonne, la chair de la bau- droie n'est pas entièrement dédaignée comme aliment; on la compare pour le goût à quel- ques chiens de mer: nous avons même vu plus haut que M. Risso parle d'une variété con- nue à Nice sous le nom de ^annelli^ qui serait d'un goût exquis. La figure que Bélon a donnée de la bau- droie (p. 77) est entièrement controuvée, ou faite de mémoire; celle de Rondelet ( p. 363 ) n'est pas non plus entièrement exacte, et la meilleure du seizième siècle est la gravure de Salvien (fol. -139). Bloch (pi. 87) et Duhamel ( sect. 10, pi. 18) en ont donné aussi d'assez bonnes; cependant elles ont été surpassées par celle de Pennant ^ , qui ne laisse presque rien à désirer. Nous n'en dirons pas autant de celle que M. de Lacépède (t. I, pi. i3, fîg. 1) a fait « 1. Brit. zool., t. III, pi. 18. 12. 24 370 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. copier sur une ancienne peinture de la col- lection des Vélins, qui elle-mcme était imitée de la seconde figure d'Aldrovande ' ; elle est tout-à-tait monstrueuse, ou faite d'idée, man- que d'anale, a des rayons libres presque égaux, tous beaucoup trop grands , etc. Nous devons faire remarquer la planclie de Donovan (pi. loi), publiée depuis ces travaux, et qui est très-bonne; et surtout l'ex- cellente figure du titre de l'article ^ de M. Yarell sur la baudroie, et le trait placé comme vi- gnette. M. le prince de Musignano a aussi, dans sa Faune italienne , donné une baudroie adulte, qui répond parfaitement, parles pro- portions et la longueur du filet, à l'individu de Nice qui a servi de type à notre des- cription. Ce savant auteur a ajouté avec raison les figures d'individus à filets courts , qui sont des jeunes; et nous en avons dans nos collections plusieurs individus venus de Nice par M. Laurillard, de Corse parM. Payraudeau, de Sicile par M. Bibron , qui répondent par- faitement à ces figures , toutes enluminées de cendré violâtre plus ou moins foncé. Nous allons parler avec détail de ces différens indi- vidus dans l'article suivant. 1. De fisc, p. 467. — 2. Brit.fish., p. 269. CHAP. I. BAUDROIES. 57] D'une seconde espèce de Baudroies des mers d'Europe, Pendant long-temps l'espèce de la baudroie d'Europe nous a paru isolée dans son genre, et en effet les espèces voisines, que divers au- teurs prétendaient avoir découvertes dans les mers d'Europe, ne sont rien moins que bien caractérisées. Ainsi la baudroie que M. de Lacépède a nommée de Ferguson, et qui est gravée dans les Transactions philosophiques (t. LUI , pi. 1 3), ne repose que sur un croquis fait à la hâte et par une personne sans connaissance d'his- toire naturelle, d'après un individu que l'on montrait dans une foire, et qui n'était qu'une baudroie ordinaire , défigurée par les hommes grossiers qui en amusaient la populace. C'est une baudroie à peu près dans le même état qui a été figurée par Leight^ sous le nom de rana piscatrix. La baudroie alongée de Mount's bay en Cor- nouailles, gravée dans Borlase^, dont Pennant a voulu faire une espèce à part {lopliius cor- nuhicus de Shaw), n'est qu'une baudroie or- 1. Hist. nat. du comté de Lancashire, p. 186, pi. 6, fig. 5. — . 2. Hist. nat. de Cornouailles, pi. 27 , fig. 6. 372 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. dinaire desséchée daps une certaine portion de la tête. L'auteur ne l'ayant pu comparer qu'à un dessin laissé par Jago ^ , et fait d'après un animal frais , il n'est pas étonnant qu'elle lui ait paru en différer beaucoup. La baudroie de Montin^, que Gmelin a prétendu distinguer sous le nom de lophius barbatus , n'est, ainsi que l'a très-bien dit Bloch, qu'une baudroie ordinaire, dont les rayons libres étaient cassés. Retzius^ croit pouvoir la caractériser au moins comme variété, en donnant à la bau- droie ordinaire des lambeaux simples, et à celle de Montin des lambeaux à trois divi- sions; mais toutes les baudroies ont ces organes déchiquetés et ciliés de plusieurs dentelures et filamens. Retzius, lorsqu'il a cru le contraire, n'avait vu apparemment la baudroie ordinaire que desséchée. M. Maximilien Spinola'^ annonce une bau- droie particulière , nommée biidegasso par les pêcheurs génois; mais il se borne à indi- quer comme un de ses caractères, la forme triangulaire qu'elle porte au sommet de son 1. Histoire naturelle de Cornouailles, fîg. 3. — 2. Mém. de l'Ac. de Stockholm, 1779? 3.* cah., pi. /j. — 3. Fauna suec., édit. de Retz, p. 3o8. — 4, Ann. du Mus., t. X, p. 376. CHAP. I. BAUDROIES. 575 premier rayon libre , et n'entre point dans le détail de sa description. M. Risso* parle aussi d'une baudroie plus rousse , qui demeurerait dans des dimensions moins fortes, et que les pêcheurs de Nice nomment gajinelliy il ajoute qu'elle est d'un goût exquis, mais lui-même déclare qu'il ne croit pas devoir la regarder comme une es- pèce à part. Pour sortir des incertitudes où des indica- tions si incomplètes ne pouvaient manquer de nous laisser, nous avons dû revoir compa- rativement toutes les baudroies qui se sont trouvées à notre disposition. Tout ce qu'elles nous ont offert à l'extérieur, s'est réduit à quel- ques différences dans les proportions des filets et dans les pointes des épines de la tête j ainsi quelques individus nous montrèrent un pre- mier filet plus court que le deuxième , et surtout leur troisième filet et tous ceux qui composent la petite nageoire de la nuque, étaient singu- lièrement courts et grêles. Il nous semblait que ces mêmes individus avaient la tête armée sur les côtés d'épines plus saillajites et plus aiguës, mais ces légers caractères à eux seuls ne nous auraient point encore paru suffisans 1. Ichthjol. de Nice, p. 48. 374 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. pour diviser une espèce que tant de siècles ont regardée comme unique, si, en examinant le squelette, nous n'avions trouvé que ces bau- droies à aiguillons plus pointus, à filets de la première dorsale y^lus grêles, n'ont constam- ment que vingt-cinq vertèbres à leur ëpine du dos, tandis que les grandes baudroies ordi- naires en ont constamment trente. Une diffé- rence aussi considérable n'a pas paru à M. Cuvier de nature à être regardée comme ac- cidentelle. Il avait cru également que la première dorsale était toujours plus basse chez les individus de l'espèce à vingt-cinq vertèbres, et il avait pensé devoir établir une seconde espèce de baudroie, qu'il a indiquée dans la seconde édition tiu Règne animal, sous le nom de lopliius pari>ipinnis. Le prince de Musignano, profitant de l'obser- vation de M. Cuvier, a , dans sa Faune italienne, figuré cette prétendue seconde espèce sous le nom de lophio martino des pêcheurs de Rome, de boldro huono de ceux de la Toscane, et de bucligo de ceux de la Ligurie; } ajoutant le nom nicéen de gannelli. Il regarde cette baudroie comme le lophius bugadessa de Spinola et de Risso; et, tout en se demandantsi c'est le lophius paivipinnis de Cuvier, il critique le caractère du CHAP. I. BAUDROIES. 375 nombre des vertèbres cité par notre grand ana- tomiste; car selon M. le prince de Musignano, cette lophie bugadesse n'aurait jamais moins de vingt-six vertèbres, mais il croit que leur nom- bre peut s'élever jusqu'à trente ;le lophius pisca- torius offrirait une variation semblable dans le nombre de ses vertèbres, et en aurait de vingt- sept à trente etune. Comme le squelette examiné par M. Cuvier n'a que vingt -cinq vertèbres, nous devons en conclure que les variétés assez nombreuses que nous remarquons dans le nombre des rayons et dans la coloration, se rencontrent également et d'une manière plus notable dans le nombre des vertèbres de ces différens poissons, et qui varient entre les deux limites de vingt-cinq et de trente et une. Je suis donc porté à conclure qu'il n'existe qu'une seule espèce de baudroie , et cette opinion est fondée sur la comparaison d'une série de seize individus de toutes tailles, de- puis un de deux pouces trois lignes jusqu'à ceux de cinq pieds , que nous avons ensemble sous les yeux. Il sont tous de la Méditerranée ou de rOcéan. Le plus petit, celui de deux pouces, vient de Nice; il a été donné au Cabinet du Roi par M. Savigny. Le disque de sa tête ne fait encore que le tiers de 576 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. la longueur totale; et les pectorales, aussi longues, paraissent beaucoup plus alongées que celles des in- dividus adultes. Il en est de même de la queue, me- surée depuis la fente des ouïes ; elle paraît avoir un plus grand nombre de papilles sur la peau, et sur- tout sur les pectorales , dont le bord semble être finement cilié. La couleur est grise, mêlée de rous- sâtre, et agréablement marbrée de brun. D. 3 — 11, etc. Je retrouve à peu près les mêmes caractères de forme et de couleur dans mi individu long de cinq pouces, et qui a été donné au Cabinet par M. Lesueur, lequel avait eu ce poisson au Havre. Mais déjà le disque s'est agrandi, et les pectorales ne semblent plus être aussi longues , quoiqu'elles le paraissent encore davantage que dans ceux qui sont plus grands. Les villosités de la pectorale sont encore abondantes, mais les cils du bord libre ne dépassent plus la membrane. La première dorsale est haute, comme M. Cuvier l'entendait, et les nombres sont : D. 3 — 11. Une troisième baudroie de Nice, par M. Sa- vigny, longue de neuf pouces, a la première dorsale haute, et douze rayons à la seconde. Ses pectorales prennent les proportions que nous trouvons à celles des adultes. Les villosités du corps sont plus rares j elles forment des franges CHAP. I. BAUDROIES. 377 découpées le long des mâchoires, surtout de l'infé- rieure, et de chaque côté de la queue. D. 3 — 12. J'en ai une autre de la même taille, qui vient de Marseille, d'où elle a été rapportée par feu M. Delalande. Celle-ci est grise ou mieux d'un brun mêlé de rous- sâtre, et au lieu de marbrures elle a tout le dessus du corps couvert de petits cercles rapprochés et dont la circonférence est dessinée par un sablé de très -petits points noirâtres. Le ventre est blanc; les pectorales sont plus noires en dessus- les franges du corps sont plus rares. La première dorsale est basse; la seconde n'a que neuf rayons. D. 3 — 9 , etc. Le premier rayon libre est très-grêle. Une autre baudroie, que feu M. de La- roche avait péchëe à Barcelonne, a également la dorsale basse , neuf rayons à la seconde , le premier libre grêle, de nombreuses franges courtes et bien découpées autour du corps ; elle est unifor- mément roux très-pâle. D. 3 _ 9. C'est celle qui se rapporte le mieux à ce que M. Cuvier appelait lophius paruipinniSj ou que le prince de Musignano a figuré sous le nom de lophius bugadessa. 378 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. M. Laurillard en a rapporté deux autres de Nice : elles ont onz^ pouces de longueur. Toutes deux sont rousses, avec des cercles brun foncé , nombreux , petits et rapprochés sur le dos j le corps garni de nombreuses franges; la première dorsale basse : mais l'une a huit rayons à la seconde dorsale, et l'autre en a dix. D. 3 — 8 ou 10. M. Eisso regardait cette variété comme son lophie bugadesse. Une autre baudroie, venant de Sicile par M. Bibron, a une couleur noirâtre très-prononcée, le premier filet très-grêle et court, la première dorsale haute, la seconde dorsale a douze rayons. Les franges sont épaisses, longues, noires, bien découpées. D. 3 — 12. L'individu n'a que neuf pouces. J'en ai une plus grande , d'un pied sept pouces; elle est originaire de Corse; elle faisait partie des collections de M. Payraudeau. Elle a les mêmes couleurs foncées, les mêmes franges. Sa seconde dorsale a onze rayons. D. 3 — 11, etc. Enfin je citerai un individu long de qua- torze pouces, péché dans la baie de la Somme et envoyé par M. Bâillon. CHAP. I. BAUDROIES. 379 Sur un fond gris ses marbrures ressemblent à celles des deux premiers petits individus dont j'ai parlé. D. 3 — 11. Les filets antérieurs sont courts et semblables à ceux des baudroies de Nice à huit ou neuf rayons à la seconde dorsale. On voit par cet exposé que les rayons de la seconde dorsale varient de huit à douze, limites aussi considérables pour des quantités si petites, que celles du nombre des vertèbres. Quant à la hauteur de la première dorsale, comme les rayons sont plutôt empâtés dans la peau commune du corps que dans une mem- brane distincte, ainsi que celle des autres acan- thoptérygiens, je crois que ce caractère est de peu de valeur, et que les naturalistes incline- ront à croire, comme moi, à une seule espèce de baudroie. Cet exemple est une nouvelle preuve que, pour établir une espèce, il faut faire sur les individus qui doivent y être rap- portés, les mêmes observations nombreuses et minutieuses que l'on répète surles espèces pour former de leur réunion un genre naturel. Des Baudroies de V Atlantique. Nous avons reçu une baudroie des côtes de l'Amérique septentrionale qui nous a été 580 LIVRE XV. PECTORALES PÉDTCULÉES. envoyée de Philadelphie par M. Lesueur. Ce n'est qu'avec doute que je lui donne un nom spécifique, parce que le seul individu que je possède n'est pas suffisamment bien conservé pour établir des caractères de l'espèce. Je la distingue cependant sous le nom de La Baudroie d'Amérique {Lophius Americanus y nob. ), parce que je lui trouve les dents de l'intermaxillaire sensiblement plus petites , et celles des palatins plus grosses que les dents correspondantes de notre espèce d'Europe. L'apophyse épineuse des palatins, qui saille sur le dessus de la tête derrière le maxillaire, est courte et mousse ; mais le préparateur ayant enlevé tout le crâne, je ne puis rien dire de ces différentes parties de la tête. Les filets de la tête sont également enlevés; on voit, malgré leur mauvaise conservation, que les trois rayons de la dorsale antérieure sont petits et en partie cachés sous la peau; je ne trouve que huit ou neuf rayons à la seconde. D. 3 — 8 ou 9; A. 12; C. 14; P. 23; V. 1/6. Le voile de la mâchoire inférieure, qui recouvre la pointe de la langue, est évidemment beaucoup plus large que dans aucun des individus d'Europe que j'ai vus. La couleur, brune en dessus, est blanche en des- sous. Le dos est couvert de très-petits ocelles très- ^ CHAP. I. BAUDROIES. 581 nombreux , et les ventrales sont noires. La coloration de ces nageoires me paraît aussi être caractéristique. Nous regardons cette espèce comme celle que M. Mitcliill a mentionnée dans son Mémoire sur les poissons de New- York sous le nom de lophius piscatorius, La Baudroie a vomer lisse. {Lophius vomerinuSj nob.) Nous avons reçu des mers du cap de Bonne- Espérance deux baudroies, dont une nous paraît, comme tant d'autres poissons de cette rade, semblable à ceux de notre mer Médi- terranée; elle n'a que huit ou neuf rayons à la seconde dorsale. La seconde, que l'on pourrait prendre au premier examen pour la même espèce que celle de nos mers, s'en distingue cependant par un caractère remarquable, et qui consiste dans l'absence de dents à l'extrémité du vomer; elle a d'ailleurs d'autres caractères, plus difficiles à apercevoir, mais qui ne constituent pas moins l'espèce. Semblable pour les formes générales, la tête est aplatie, et sa circonscription horizontale est à peu près circulaire. Les épines susorbitaires sont plus minces et les rugosités des crêtes antérieures du crâne plus faibles. 382 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. 4. Les dents de l'intermaxillaire sont plus petites et plus serrées, surtout celles qui sont près de l'angle de la bouche; il en est de même des dents palatines. Les deux filets antérieurs, placés de même, sont à peu près égaux, et le premier ne fait que le quart de la longueur totale. La seconde dorsale et l'anale ont chacune un rayon de moins, et la pectorale trois. D. 6 — 10; A. 9; C. 8; P. 26; V. 1/5. La peau, nue et sans écailles, a de nombreux lambeaux frangés , placés comme ceux de notre bau- droie, et la couleur paraît en différer fort peu. Les viscères ressemblent aussi à ceux de la bau- droie de nos mers : un foie petit j un très-vaste esto- mac, très-charnu, ayant deux appendices cœcales au pylore; mais qui me paraissent plus longues qu'à notre espèce d'Europe; les intestins faisant deux re- plis; il n'y a point de vessie aérienne; les reins sont courts, épais, ovales, semblables à ces glandes dans les moutons, et situés vers le tiers supérieur de l'abdomen. Deux longs uretères vont déboucher dans une vessie urinaire assez grande. L'individu a été envoyé au Muséum par M. Veneaux ; il est long de deux pieds trois pouces. CHAP. I. BAUDROIES. 383 D'une Baudroie des mers de la Chine et du Japon. La Baudroie épineuse. {Lophius setigerus , Walil.) Il est certain qu'il y a une baudroie dans les mers du Japon. Nous en avons pour première preuve la ligure gravée dans le Livre japonais, dont nous avons déjà fait plusieurs fois men- tion, et qui offre tous les caractères du genre; mais qui, de même c|ue toutes celles de cet ouvrage, n'est pas assez exacte dans les détails, pour que l'on puisse établir les caractères de l'espèce. Son nom, d'après la lecture que M. Abel Remusat a bien voulu nous en donner, est en chinois hoa-tsi- jou^ et en japonais angoou. D'un autre côté Wahl, savant botaniste da- nois, a publié* une baudroie qu'il nomme lophius setigerus, et qu'il assure venir de la Chine, et Bloch^ en a donné une qu'il regarde comme la même, et qu'il nomme lophius vi- viparus. L'individu de Wahl était fort petit (de trois pouces); sa figure ressemble entièrement à 1. Mémoires de la Société d'hist. nat. de Copenhague, t. IV, i/^ cah., p. 2i4, pi. 3,fig. 5 et 6. — '^^.Systema,^, i42,pl. 32, 384 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. notre espèce d'Europe ; la tête s'y montre plus étroite 5 mais notre baudroie l'a souvent ainsi dans certaines positions de ses mâchoires et de ses branchies. Son caractère le plus apparent semble consister en ce que les épines du dessus de l'œil et de la tempe sont plus multipliées; l'auteur en compte cinq de cha- que côté de la crête orbitaire, et cinq sur chaque tempe. Quant à celles des pièces oper- culaires et die l'épaule , il ne paraît pas y avoir de différence. Wahl ne parle que de quatre filets, deux en avant et deux en arrière, sans qu'il paraisse avoir vu aucune dorsale antérieure, et il ne donne à la dorsale et à l'anale que cinq rayons chacune. La figure donnée par Bloch paraît faite sur un individu plus âgé. Sa ressemblance avec notre espèce commune est également très- grande; elle marque encore un plus grand nombre d'épines sur le museau, entre les yeux et à la tempe, que celle de Wahl; elle place trois rayons libres sur la tête et deux, libres aussi, à l'endroit de la première dorsale. Le texte, comme celui de Wahl, ne donne à la deuxième dorsale et à l'anale que cinq rayons; mais la figure en marque huit à la première et neuf à l'autre. CIÎAP. I. BAUDROIES* 385 Nous nous sommes procuré deux petites baudroies des mers de Canton, et qui ont effec- tivement les caractères signales par les deux auteurs que nous venons de citer ; nous devons au moins les supposer de ces contrées, puis- que nous les avons trouvées dans des boîtes d'insectes préparés en Chine, et tous recon- nus par les entomologistes qui les ont exa- minés pour être de ce pays. Ces deux baudroies ont encore plusieurs caractères, que ces auteurs ont omis, et qui constatent par leur ensemble qu'elles sont d'une espèce particulière. Le crâne a des épines plus nombreuses , plus pointues, non- seulement sur les orbites et sur les crêtes sourcilières ; mais les tempes en sont toutes hérissées. Il y a trois épines fasciculées sur l'épaule. Le maxillaire a la surface externe rude et cinq à six tubercules, terminés en pointe mousse. Le palatin donne derrière la narine deux épines, sortant du même point; il n'y en a qu'une dans celles d'Europe. Les dents externes de l'intermaxillaire semblent plus • fines 5 celles des palatins, plus grosses; il y en a sur les angles du chevron du vomer. Les filets des dorsales me paraissent plus grêles et plus longs. Les nombres sont un peu différens. D. 3 — 9? A. 9; C. 9; P. 17; V. 1/5. Elles ont des marbrures sur les pectorales ; le reste de la couleur est difficile à retrouver. Les deux auteurs cités au commencement 12. a5 58G LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. de cet article s'accordent à dire que la langue ( c'est-à-dire le fond de la bouche au-devant des pharyngiens) est noire, tachetée de blanc, et notre figure japonaise indique aussi quelque chose de semblable. Ce poisson a d'ailleurs autour des mâchoires et le long des côtés du corps des appendices ou lambeaux cutanés, pareils à ceux de la baudroie d'Europe. Voilà tout ce que l'on peut tirer des articles de ces deux écrivains, qui, comme on voit, ne s'accordent pas entièrement. Bloch a nommé ce poisson lophius vivi- paruSy parce que, dit-il, il en avait un petit encore muni de son vitellus; mais s'il ne l'a pas tiré de la matrice libre d'enveloppe, ce vitellus ne prouverait rien : on trouverait les œufs de beaucoup de poissons dans cet état avancé, qui n'en sortent pas moins du corps avant que le petit ne soit éclos. On ne doit pas, au reste, rapporter à ces baudroies orientales le lophius duhius de John White ', qui est un hatrachus, comme nous le verrons à ce genre. Shaw a placé à la suite de ses lophius un poisson fort extraordinaire de la mer du Sud, que nous n'avons pas vu, et sur lequel nous 1. Vo;yage à la Nouvelle-Galles du Sud, p. 265. CHAP. I. BAUDROIES. 587 ne pouvons raisonner que d'après les figures qu il en a publiées dans son Naturalist' s mis- cellany (pi. 202 et 2o3). Son corps est aplati horizontalement, près de deux fois plus long que large; le contour en est ovale, en pointe obtuse en avant, ré- trëcie en arrière, et terminé par une partie arrondie. Sur cette partie postérieure s'élève une espèce de queue courte et grêle, qui a une nageoire en avant de sa base, deux sur sa longueur, ce qui pourrait être regardé comme trois dorsales; une terminale (la caudale) et une sous sa base (peut-être l'anale). Il n'y a aucune apparence de nageoires paires; seule- ment les bords du corps montrent des stries qui pourraient être les extrémités des rayons de très -grandes pectorales, analogues a celles des raies et des torpilles. La bouche est fendue au bout du museau; la mâchoire supérieure est un peu plus longue que l'autre : toutes les deux sont garnies de plusieurs rangées de dents à trois pointes. Les yeux sont sur le dos au pre- mier tiers de la longueur, assez rapprochés l'un de l'autre. Ce poisson est noir dessus, excepté le mu- seau, qui est blanc, ainsi que tout le dessous du corps. Les figures, ni le texte très-abrégé de l'au- 588 LIVRÉ XV. PECTORALES PÉDICULÉES. teur, ne nous apprennent rien sur les branchies ^ sur les narines et sur l'anus. Sliaw est indécis s'il ne doit pas regarder cet animal comme le jeune de quelque triché- cus ou de quelque cétacé^ mais cette conjec- ture est plus malheureuse encore que celle qui l'a fait placer parmi les lophies. Je ne peux douter que ce ne soit quelque chondroptérygien , voisin des torpilles, dans la préparation duquel on aura effacé les trous des ouïes. La partie ovale répond aux ailes, aux pectorales, et l'arrondissement de l'arrière aux ventrales j ensuite vient une queue très- semblable à celle de ces deux genres. Ces conjectures ont été confirmées dans une lettre écrite par M. Gray à M. Cuvier; mais ce savant zoologiste dit que le poisson de Shaw n'est pas conservé dans le Muséum britannique , de sorte que M. Gray n a pu vé- rifier cette conjecture sur la nature même. CHAP. II. CHÏRONECTES. 589 CHAPITRE IL Des Chironectes ( Chironectes , Cuv. , ^ntennarius, Comm.). Dans la grande famille des baudroies, le genre des chironectes se reconnaît sur-le-champ à sa tête comprimée verticalement, au lieu d'être déprimée, comme dans les baudroies proprement dites et dans les malthées, et à ce que derrière les trois rayons libres du dessus de sa tête il n'y a pas d'autre nageoire épineuse , séparée de la molle, comme la vraie baudroie en a une sur le devant du dos. Ce sont d'ailleurs des poissons qui restent dans des dimensions petites ou médiocres, et qui n'ont rien de cette grosse tête, ni de cette vaste gueule, qui effraient dans les baudroies: la plupart se font remarquer en revanche par la faculté de gonfler leur corps comme un ballon, en avalant de l'air, et en remplissant de ce fluide un grand estomac membraneux, ainsi que le font aussi les tétrodons et les diodons. La position respective de leurs ventrales et de leurs pectorales, et les pédicules sur les- quels ces dernières nageoires sont portées, leur donnent l'air d'avoir quatre pieds , et ce sont les ventrales qui représentent ceux de devant ^ 590 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. en sorte que l'emploi des quatre extrémités est chez eux entièrement interverti. La petitesse de leur orifice branchial , qui n'est qu'un trou rond, caché dans l'aisselle de leur pectorale, leur permet de rester long-temps dans l'air, et ils en profitent pour ramper sur les varecs et sur la vase; c'est ainsi qu'ils poursuivent leur proie, du moins c'est là ce que disent Renard et Valentyn. Commerson se borne à les repré- senter comme des espèces d'amphibies. La gueule est fendue plus ou moins verti- calement; leurs intermaxillaires, leur mâchoire inférieure, le bout antérieur et transverse de leur vomer, leurs palatins et leurs pharyngiens, portent des dents en cardes fines, c'est-à-dire, serrées, grêles et pointues sur plusieurs rangs; mais la langue n'en a aucune. Les yeux sont petits et rapprochés du front; on ne voit d'épines à aucune partie de la tête ni des opercules; toutes les pièces operculaires sont cachées sous la peau, encore bien plus com- plètement que dans la baudroie, et autant que dans les tétrodons; la membrane des ouïes a six rayons comme dans la baudroie, mais les branchies mêmes ne sont pas réduites à trois : il y en a quatre, comme dans les poissons ordinaires. La partie postérieure du corps ne s'amincit pas CHAP. II. CHIRONECTES. 391 comme dans la baudroie ordinaire, ce qui établit encore une différence entre les deux genres. La dorsale occupe une grande partie du dos, et se porte bien plus en avant que l'anale. Les proportions des rayons libres du dessus de leur tête, et les lambeaux qui s'y attachent, varient beaucoup , selon les espèces ; il y en a même une où. les deuxième et troisième rayons sont unis en une membrane, et une autre où tous les trois sont unis entre eux et avec la seconde dorsale. La pectorale, comme dans les baudroies, est portée sur une espèce de bras, formé par le prolongement de deux des os du carpe; mais il est en grande partie caché sous la peau , à moins que l'animal ne veuille le faire saillir. Ses rayons, au nombre de dix ou onze, sont disposés en éventail, et leurs bouts sor- tent de la membrane, de manière à figurer autant de petits ongles; il en est de même des bouts des rayons de la ventrale, et il paraît que cette conformation contribue à aider le poisson dans cette sorte de mouve- ment que l'on a comparée a une reptation. Sans doute, il n'est plus nécessaire aujour- d'hui de réfuter l'erreur de Seba, qui a donné (t. I, pi. -^4? fig- 7) comme de jeunes clii- ronectes, des scyllées, genre de mollusques 592 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. gastéropodes, maintenant bien connu\ On nommait alors les lopliies en général rana piscatrix, et on se croyait obligé de leur trouver une métamorphose comme aux gre- nouilles ordinaires. Il est arrivé pour ce genre des chironectes, comme pour la plupart de ceux qui ont des formes un peu extraordinaires, qu'on s'est attaché de préférence à ces caractères com- muns, sans donner assez d'attention aux dif- férences des espèces; en sorte que chaque observateur a cru avoir retrouvé l'espèce vue par ses prédécesseurs, lorsque souvent il n'a- vait qu'une espèce congénère. Linné avait rassemblé sous le nom de lophius histrio, tous les articles écrits avant lui sur les chironectes par différens auteurs, ce qui fait qu'il est maintenant difficile , pour ne pas dire impossible, de savoir quelle espèce il a voulu désigner sous ce nom. M. de Lacépède a commencé à nous ap- prendre, d'après les observations de Commer- son, que les espèces de ce genre sont plus multipliées qu'on ne le pensait. Shaw en a ajouté quelques-unes à celles de M. de Lacépède, et, plusieurs voyageurs en 1. Voyez Cuvier, Mémoires sur ranatotnie des Mollusques. CHAP. II. CHIRONECTES. 393 ayant encore apporte de nouvelles au Cabinet du Roi, M. Cuvier en a décrit jusqu'à dix*, et aujourd'hui nous allons en porter le nombre encore plus haut, car nous en avons sous les yeux que nous croyons pouvoir former jusqu'à dix-huit espèces; et nous en trouvons encore dans les auteurs huit qui ne se rapportent point aux nôtres d'une manière certaine.. Cependant parmi ces huit que nous n'avons pas vues, il en est plusieurs dont les différences pourraient ne reposer que sur l'inexactitude des observateurs ou des dessinateurs , et même parmi les nôtres quelques-unes pourraient ne paraître à d'autres naturalistes que des variétés. Commerson avait eu l'idée d'établir ce genre, ainsi que nous le voyons par les notes ma- nuscrites jointes à ses dessins, et il se pro- posait de lui donner le nom dVmteJViaj^iiiSj beaucoup moins significatif que celui de M. Cuvier. Le Chironegte peint. {Chironectes pictus, nob.) Le chironecte qui mériterait proprement le nom de lisse^ celui auquel appartient la figure des Mémoires du Muséum (t. III, pi. 16, fig. 1), et qui répond spécialement à la variété b de 1. Mémoires du Muséum, t. III, p. 4i8 et suivantes. 394 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Bloch' [lopJiius histrio pictus)^ ne nous est venu que de l'Atlantique. Nos échantillons dont l'origine est la plus certaine, sont dus h M. Levaillant, qui les avait apportés de Surinam. M. Cuvier le regardait autrefois comme identique avec le lophius lœuigatus de M. Bosc, avec le lophius tiimidiis d'Osbeck, et avec quelques autres qui ont à peu près les mêmes formes et les mêmes distributions de couleurs ; mais de nouvelles comparaisons nous ont appris à y discerner quelques diffé- rences, dont nous devons compte à nos lec- teurs , sans prétendre qu'elles soient assez importantes pour motiver aux yeux de tout le monde l'établissement de plusieurs espèces. Le corps de ce cbironecte de Surinam est com- primé; deux fois et demie aussi long que haut, et deux fois aussi haut que large. La longueur de sa tête est trois fois un quart dans sa longueur totale. Son profil va en descendant obliquement depuis sa nuque, qui est un peu renflée, jusqu'au bout de sa mâchoire inférieure , qui avance un peu devant l'autre, la bouche étant fendue presque verticalement sur le bout du museau; ce qui rend le museau lui- même très- court. L'œil est deux fois plus près de l'extrémité du museau que de l'ouïe, ou plutôt que de ce qui serait l'ouïe, si tout l'appareil operculaire 1. 5yj/. , cdit. Schn., p. \^2. CHAP. II. CHIRONECTES. o9S n'était pas enveloppé par la peau. Le premier et le second rayon libre sont sur l'œil : le premier sur la base du deuxième; le troisième est sur la nuque, à laquelle il adhère par sa membrane. La hauteur du premier n'est que du quart de celle du corps à la nuque. Les deux autres en ont le double; ceux-ci paraissent gros, à cause de la peau qui les enve- loppe, et qui est garnie de lambeaux déchiquetés; mais le premier n'est qu'un fil mince et roide, ter- miné par une petite houppe de filamens charnus. La seconde dorsale occupe un espace qui est deux fois et demie dans la longueur totale; elle n'a guère que le tiers de la hauteur du corps à la nuque. L'anale correspond au tiers postérieur de la seconde dor- sale, et est un peu plus haute. L'espace entre ces deux nageoires et la caudale est à peu près du hui- tième de la hauteur totale, et aussi haut que long. La caudale est arrondie, et sa longueur fait le quart du total. La pectorale répond à l'intervalle du der- nier rayon libre et de la deuxième dorsale ; elle est au tiers de la hauteur. Sa longueur totale, y compris son pédicule ou son bras, est deux fois et demie dans celle du corps; mais, en ne prenant que sa partie rayonnée, elle n'en a que le septième. Cette partie se compose de rayons à peu près égaux, qui forment une es- pèce d'éventail , et dont les bouts sortent de la membrane comme autant de petites pointes ; on dirait de petits ongles. Dans l'aisselle de cette na- geoire est un trou rond , à bord simplement mem- braneux, qui est l'orifice par où l'eau sort des N ï>96 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. -- branchies, en passant sous le bras. La gorge et la '• poitrine font saillie vers le bas. Les ventrales s'alta- < chent à leur partie inférieure, très-près l'une de fi! l'autre, et un peu plus avant que les pectorales. ' ' Leur forme est pointue, et leur longueur est de près du quart de la longueur totale. L'anus est devant la base de l'anale et à peu près au milieu du corps, la caudale comprise. Je compte douze rayons à la deuxième dorsale 5 sept à l'anale j >- dix ou onze à chaque pectorale; cinq à chaque -' ventrale, tous articulés. Ceux de la dorsale, de la ■ . caudale, des pectorales, se divisent chacun en deux * '■ branches. Les autres ne se divisent pas. B. 6; D. 3— 125 A. 7; G. 11 j P. 11; V. 5. Toute sa peau est lisse et ne présente pas y même à la vue simple , ces très-petits grains que l'on aper- çoit dans les espèces suivantes. On n'y en voit qu'à la - • loupe. Des appendices ou lambeaux cutanés , minces, Iransparens, en partie déchiquetés, en garnissent tout le corps, et principalement la tête, la gorge et le dessous du ventre, où ils sont plus serrés qu'ailleurs. Il y en a aussi sur les côtés; mais en moindre nombre. Les jeunes individus sont ceux où l'on en voit le plus, et où ils sont le mieux conservés. Sa couleur est un gris-blanc roussâtre, avec des - marbrures d'un brun roussâtre, nuancées de brun noirâtre : celles des côtés du dos sont dirigées en longueur, et bordées vers le bas de lignes blanches ou de séries de points blancs. Sur le dos même ce sont des taches éparses et irrégulières. Les nageoires ' les ont en forme de lignes. Sur la dorsale on en voit CHAP. II. CHIRONECTES. 397 six OU sept, obliques; celles de l'anale sont aussi obliques et au nombre de trois ou quatre. La caudale en a quatre ou cinq, transversales; elles varient da- vantage sur les pectorales. Les flancs, les côtés de la tête et du ventre sont semés de petites taches rondes ou ovales et d'un beau blanc mat, en partie lisérées de brun. Des points de la même couleur se voient aussi sur une pai;tie des tachés brunes du dos et des nageoires. Au total, ce mélange de trois cou- leurs produit un effet fort agréable. Il y a de ces poissons de six et huit pouces de longueur; mais la plupart des individus conserves au Cabinet du Roi, sont beaucoup plus petits, et parmi ceux-là plusieurs ont ëtë pris par M. Kiener au milieu de l'Atlantique, dans la traversée d'Europe à Rio-Janeiro. Je rapporte volontiers à cette espèce la fi- gure de Linné *, et sur laquelle il donne quel- ques détails (p. 160) sous le nom de ^uaperva sinensis. Ces détails se rapportent malheureu- sement à des particularités génériques, mais non à l'espèce proprement dite. Le Chirowecte renflé. (Chironectes tumidiis, nob.) On trouve dans les fameux amas de varecs flottans, qui couvrent certains parages de l'At- 1. Reise durch ÏVestgothland , pi. 3, fig. S, a eih. 598 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. lantique, de très-petits chironectes, fort sem- blables à cette première espèce; mais dont le troisième rayon libre est couché sur la nuque, et tellement abaissé par la membrane qui l'y retient, qu'il ne paraît que par son extrémité en forme de léger tubercule. Le second est libre, et le premier, comme à l'ordinaire, sur la base du second, mais si petit et si grêle qu'on a peine à le découvrir. Les taches sont moins nombreuses, arrondies, nuageuses , roussâtres , semées de points bruns et ne formant pas des lignes sur les nageoires, ni des bandes suivies sur les côtés du dos ; mais il y a aussi des points blancs. Les individus de ces chironectes que le Cabinet du Roi possède, sont dus à Përon; mais il paraît que c'est cette espèce ou variété que M. Bosc a prise dans les mêmes parages , et qu'il a décrite dans le Dictionnaire d'his- toire naturelle de Déterville. Il lui refuse à la vérité le petit premier rayon; mais il est si petit qu'il n'est pas étonnant qu'il ait échappé dans une inspection rapide. C'est immanquablement aussi ce chironecte qu'Osbecka recueilli, toujours sur ces mêmes fucus, et que Linné ^ décrit sous le nom de lo- phius tinnidus; mais cette description et celle d'Osbeck^ lui-même s'attachent à des carac- 1. Muséum d'Adolphe Frédéric, p. 56. — 2. Vojage à la Chine , p. 4oo. CHAP. II. CHIRONECTES. 599 tères génériques plutôt qu'à ce qui aurait aidé à distinguer l'espèce. Osbeck imagine que les feuillets membra- neux qui garnissent le corps de ce poisson, ont pour but de faire que les autres poissons ou les oiseaux de mer, le confondant avec le varec, soient moins disposés à l'attaquer. Nous laissons au lecteur à juger de la justesse de cette conjec- ture. Le Chironecte uni. {Chironectes lœvigatuSi Cuv.) Un cliironecte rapporté de la Caroline par M. Bosc, et qu'il n'a point distingué de son lopliius lœ^igatuSy lui ressemble en effet beaucoup , ainsi qu'à celui de Surinam ^ mais ses marbrures sont noirâues, plus coniinues; il y en a davantage sur les côtés. Les points blancs sont plus petits, plus clair- semés; ceux des flancs forment quelquefois des cercles autour des lambeaux cutanés. Le troisième rayon libre, celui de la nuque, paraît plus gros et moins alongé. Le premier existe, mais si grêle qu'on a peine à le voir. L'anatomie de ce chironecte nous a fourni les observations suivantes, soit sur les viscères, soit sur le squelette. Le foie est gros, situé en travers sous l'œsophage, plus gros dans le côté gauche que dans le droit. A l'extrémité de la pointe du lobe droit est une petite vésicule du fiel, de forme ronde et suspendue à un 400 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. canal cholédoque, fort long, assez gros, qui dé- bouche dans l'inteslin, auprès du pylore. L'estomac est petit, arrondi, à parois très-plissées en dedans. Il ne me paraît pas susceptible de se di- later, à cause de l'épaisseur de ses parois. Le pylore s'ouvre auprès du cardia. Le duodénum est très -gros, et ses parois sont épaisses. Arrivé à l'arrière de l'estomac, l'intestin se plie, remonte au- dessus du pylore, d'où il descend vers l'anus, en . diminuant de diamètre. La rate est petite, ronde, cachée sous le foie, entre l'estomac et le duodénum. La vessie aérienne est grande, ronde, à parois minces et membraneuses, non argentées. La vessie urinaire est double, c'est- à-dire, qu'elle présente deux lobes arrondis, placés de chaque côté de l'intestin. Le squelette de ce chironecte est encore plus mou, plus membraneux que celui de la baudroie; mais, du reste, il est composé à peu près de même, sauf la forme comprimée de la tête, des épaules et du bassin. Les pédicules des épaules y sont formés aussi de deux os du carpe très-alongés, et les rayons du dessus de la tête sont attachés à des interépineux, couchés sur le crâne. Le nombre de ses vertèbres esj; de dix-huit, dont neuf abdominales, toutes com- primées. Les trois dernières abdominales ont des apophyses épineuses inférieures, dont la dernière est assez longue. Toute la queue en a, en dessus et en dessous, d'assez hautes. Les interépineux des derniers rayons de la dorsale penchent entre les apophyses supérieures. CHAP. II. CHIRONECTES. 401 Cest probablement cette espèce ou cette "variëtë que M. Mitchill^ représente (sans des- cription) sous le nom de lophius gibbiis. Il y marque bien le premier rayon , mais il n'y donne qu'une faible idée des appendices cu- tanés, sans doute pour n'avoir possédé qu'un individu trop petit. Le Muséum a reçu dernièrement un de ces poissons très-bien conservé par les soins de mon ami, le docteur Holbrock de Charleston, qui publie sur les reptiles des États-Unis un des plus importans ouvrages sur cette branche de la zoo- logie. Le Chironecte de l'Isle-de-France. (Chironectes nesogallicus j, nob.) Un chironecte, rapporté de l'Isle-de-France par M. Mathieu, est un peu plus grenu que les précédens. Il a la nuque plus bombée, et les deuxième et troisième rayons plus courts que noire première es- pèce; mais le premier, et le pinceau qui le termine, sont semblables. C'est presque le fond de sa couleur qui est noirâtre et varié de marbrures grisâtres; il a en outre sur les flancs deux larges taches rondes et blanchâtres. Les bandes de ses nageoires sont plus larges et plus nuageuses, et il a des points blanchâ- tres semés partout. 1. Mémoire sur les poissons de New- York, pi. 6, fig. 9. 12. 26 402 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Përon en a rapporté un semblable, mais plus petit, et où le roux remplace le noirâtre. Nous avons confié cet individu à M. Guérin, pour en publier une figure dans l'Iconographie du Règne animal. (Poiss., pi. l[i, fîg. 2.) Le ChI RONEOTE MARBRÉ. {Chironectes marmoratus^noh.) MM. Lesson et Garnot ont rapporté des mers orientales des cbironectes d'une espèce qui paraît plus sûrement distincte de notre première que ne le sont les précédentes. Sa peau se montre, à l'œil nu, légèrement grenue, c'est-à-dire, couverte dans sa totalité de grains infi- niment petits et serrés les uns contre les autres, que le toucher percevrait à peine, s'il n'était aidé de la vue armée d'une loupe. Ses marbrures sont tout-à-fait éparses, irrégulières; celles du dos sont plus larges et plus serrées; celles du ventre plus pe- tites , plus clair-semées , souvent réduites à des points. Les bandes des nageoires sont plus irrégulières, plus souvent interrompues ou anastomosées les unes avec les autres. Le premier rayon libre est très -court, grêle, faible, difficile à voir, et dans plusieurs in- dividus il n'existe certainement pas. L'œil est plus petit, et le deuxième et le troisième rayon plus courts que dans notre première espèce, et même le troi- sième est attaché d'assez près à la nuque , pour que dans les individus qui ont la peau gonflée, comme CHAP II. CHIRONECTES. 405 il arrive quelquefois , il puisse échapper à un ob- servateur superficiel. Dans les individus conservés dans la liqueur, le fond de la couleur paraît blanchâtre; mais dans le frais, d'après le dessin de M. Lesson, c'est un jaune- d'ocre plus ou moins vif, selon les places. Les lam- beaux cutanés de la face supérieure sont jaunes; les inférieurs blanchâtres. Dans le chironecte marbré, l'estomac est un grand sac, dont les parois sont très-minces. L'intestin fait deux replis sur lui-même avant de se rendre à l'anus. Il y a une petite vessie natatoire, globuleuse, dont les parois sont membraneuses et ont peu d'éclat. Le péritoine est de la plus belle couleur d'argent mat. Les naturalistes de l'expédition Duperrey ont rencontre ce poisson nageant en grandes troupes sur une mer calme, le long des côtes de la Nouvelle-Guinée. Ils en ont publié une figure dans la Relation du voyage de la Co- quille (Poiss., n.° 16, fig. 2). M. Bélanger nous l'a envoyé récemment de Mahé, où on le nomme, dit-il, cada-poudoni, et M. Dussumier l'a pris en abondance dans la rade de Bombay. Il me parait que c'est plus particulièrement à ce chironecte que ressemble la figure, d'ail- leurs assez mauvaise, de Klein % et c'est pro- bablement aussi celui dont Bloch^ a fait sa 1. Miss. , t. III, pi. 3, fig. 4' — 2. Sjst., édit. de Schn., p. i42. 404 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. variété c du lophius histrio , ou son lophius histrio niannoratus. Le lopliius raninuSj observé dans la mer du Japon par M. Tilesius, et représenté dans le onzième tome des Mémoires des naturalistes de Moscou (pi. 16), me paraît ne pas assez diffé- rer de ce marbré pour le regarder comme d'une espèce distincte. L'auteur ne lui donne pas de premier rayon libre, ce qui s'accorde avec ce que nous avons observé sur plusieurs de nos individus. Ses marbrures sont un peu différen- tes, mais il n'y a peut-être pas deux individus qui se ressemblent entièrement à cet égard. Il faudrait encore parler ici du lopliius con- cincinensis de Shaw, si Ton pouvait déchiffrer la figure monstrueuse qu'il en donne, oii l'on ne voit aucun rayon libre 5 mais comme elle a été faite sur nature vivante par un simple amateur, on peut croire que fauteur du dessin , comme il arrive souvent, a représenté d'une manière vague ce qu'il a vu sans attention, et qu'il n'avait sous les yeux qu'une de nos espèces ou variétés précédentes : peut-être la dernière , à en juger par la distribution des couleurs. CHAP. IT. CHIRONECTES. 40S Nous sommes contraints de parler presque de la même manière du chironecte représenté dans la Zoologie du voyage de M. Freycinet (pi. 65, fig. 3), sous le nom de baudroie ^éographiq ne. Cette figure , copiée d'un dessin fait en mer, et non vérifiée sur l'original, pourrait n'être qu'une représentation imparfaite de quelqu'une des espèces précédentes. On a oublié le premier rayon libre , le second est représenté avec des dentelures; on y a mis, au lieu du troisième, une nageoire à trois rayons; on n'en a donné que six à la seconde dorsale et à la pectorale, et que trois aux ventrales; la caudale , au con- traire, en a reçu un grand nombre : toutes choses tellement singulières, que l'on ne pour- rait les admettre comme vraies sans avoir le poisson sous les yeux. Le texte dit qu'il avait été pris sous la ligne, près de la Nouvelle-Guinée , dans une touife de fucus. Il est de notre devoir cependant de faire remarquer que la figure 4 ( 1. 1, pi. 74 ) de Seba offre ou des anomalies ou des erreurs sembla- bles. Par les couleurs elle ressemble beaucoup aux espèces ou aux variétés que nous venons de décrire; mais elle n'a point de premier rayon libre ; le second y est très-marqué, et au lieu du 406 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. troisième il y a une nageoire à quatre rayons, qui s'unit par une membrane basse à la seconde dorsale, laquelle n'en a que neuf. Nous devons donc recommander aux voya- geurs d'examiner s'il existe de ces poissons analogues aux chironectes , où le troisième rayon libre soit remplacé par une nageoire à plusieurs rayons. Ce serait une analogie de plus qu'ils auraient avec les baudroies pro- prement dites, et l'on y trouverait des motifs sufïisans pour les ériger en un genre particulier. Les chironectes lisses ou à peu près lisses que nous avons décrits jusqu'ici, se ressemblent tellement, quà l'exception peut-être du cbir. marbré, bien des naturalistes pourraient dou- ter qu'ils formassent des espèces différentes. Le même doute ne peut subsister par rap- port à ceux qui vont suivre; ils sont bien sépa- rés des précédens, ne fût-ce qu'à cause de la rudesse extrême de leur peau; mais, de leur côté , plusieurs d'entre eux se ressemblent si fort que l'on hésitera sans doule aussi à reconnaître comme des caractères d'espèces toutes les lé- gères différences que nous y avons signalées. Les observations des voyageurs, si jamais ils les font avec l'attention nécessaire, nous éclai- reront peut-être un jour à ce sujet. CHAP. II. CHIRONECTES. 407 Le Chironecte âpre. {Chironectes hispidus, nob.; Chironectes lophotesy Cuv., Mém. du Mus.) Aussi l'un de ces chironectes très-abondans sur les côtes de la mer des Indes, et qui a été représenté dans les Mémoires du Muséum ( t. III, pi. 17,%. 2 ), sous le nom de chironectes lophoteSy mais que je crois le même que le lophiushispidus de Bloch*, offre des rapports si frappans avec un autre qui vient des Antilles, que, sans cette diversité d'origine, nous les aurions probablement laissés ensemble. Ses formes sont un peu plus courtes et plus grosses que dans ceux dont nous avons parlé jusqu'ici. Il paraît pouvoir gonfler davantage son ventre, et toute sa peau est garnie d'aspérités fines et serrées. Une suite de tubercules âpres comnrfence sur le museau aux côtés des premiers rayons libres, se contmue jusqu'à la tempe, et forme ensuite une espèce de ligne latérale, en marchant parallèlement à la courbe du dos jusque vers le milieu de la seconde dorsale, où elle s'infléchit vers le bas, pour se perdre peu après entre la fin de cette dorsale et celle de l'anale. Une suite de tubercules semblables sur la joue mar- que à peu près la courbe du préopercule. Des lam- beaux cutanés, très-petits, se montrent en quelques endroits, surtout vers la gorge, 1. Sjst., édit. Schn., p. i43;n." 6. 408 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Le premier rayon libre, tout-à-fait sur le bout du museau et bien séparé du second, a le tiers à peu près de la hauteur du corps, et se termine par une bouppe ovale dans la plupart des individus, mais qui, dans les mieux conservés, est comprimée, triangu- laire, alongée et ciliée. Le second rayon ne surpasse pas le premier en hauteur; mais la peau molle qui l'enveloppe le rend plus épais. Il est lui-même peu consistant. Le troisième rayon , à peu près de même hauteur, est retenu par sa membrane contre la nu- que, de manière à ne pouvoir beaucoup s'élever. Le fond de la couleur de ce poisson est d'un jaune-brun. Des taches ou des lignes noires s'y dis- tribuent d'une manière qui ne manque pas de régu- larité; celles du crâne, de la nuque et du dos, sont transversales, et s'étendent verticalement sur la dor- sale, où elles se divisent quelquefois en taches. Celles de la joue partent obliquement et comme en rayon- nant vers l'arrière et vers le bas; celles des flancs se rendent obliquement en avant, surtout en con- vergeant vers la base de la pectorale. L'anale et la caudale ont des taches plutôt que des bandes. La pectorale et l'anale ont de petites taches; il y en a jusque sur la langue; mais le dessous de la gorge et le ventre sont d'un jaune-d'ocre uniforme. La lige du premier rayon libre est annelée de jaune et de brun. Cette description suffit pour donner une idée gé- nérale de la distribution de ces raies et de ces taches noires ; mais il y a des variétés d'un individu à l'autre, pour leur nombre, pour leur largeur, pour leur inierrupiion , et le fond jaune, selon M. Dussumier, CHAP. II. CHIRONECTES. 409 devient souvent plus ou moins blanchâtre, etc. Ces variétés ne sont pas assez grandes toutefois pour que l'on n'y reconnaisse pas la même espèce. M. Leschenault, qui nous en a envoyé plu- sieurs individus, nous dit que ce chironecte est nommé à Pondicliéiy para-mine , ce qui signifie poisson rocher. Il parvient à une lon- gueur de neuf pouces; son aspect est hideux, et son odeur nauséabonde; il est rare sur cette côte, et il ne paraît pas qu'on l'y mange. M. Bélanger nous l'a envoyé sous le nom de toumbi. Ce poisson, qui se tient parmi les rochers à une assez grande profondeur, se nourrit de petits crustacés. M. Dussumier l'a rapporté de la rade de Bombay, et nous l'avons aussi trouvé parmi les collections de feu M. Roux de Marseille. C'est le même poisson que Bussel repré- seute (fig. 19) et qu'il prend pour le lophius histrio y et en effet il n'est pas moins XJiistrio que ne le sont tous les autres. On le nomme à Vizagapatam kappa-niura-nioja. C'est aussi celui que décrit et représente Rœl- reuter*, et même sa figure est très-bonne. On ne comprend pas comment Schneider^ a pu être tenté de la rapprocher du lophius stellatus. 1. Novi commentarii de Pétersbourg, l. X, p. SSj, pi. 8, fig. 1. — 2. Bloch , S^'st., p. 34> 410 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Commerson a laisse sous le nom générique àiantennarius, et avec l'épithète àe pinniceps, une description fort détaillée, qui convient entièrement à nos individus, si ce n'est que le premier rayon portait trois lambeaux à son sommet. La figure qui correspond à cette des- cription est aussi, sauf cette circonstance, très-semblable à celle que nous avons publiée, si ce n'est qu'il y a moins de lignes et qu'elles y sont plus interrompues, en sorte que nous ne pouvons guère douter que cette différence ne soit accidentelle. Le dessinateur avait éti- queté sa figure Riq net- à-la-houppe, et c'est elle que M. de Lacépède a fait graver pour représenter le lophius histrio de Linné j mais on a déjà vu que ce lophius histrio embrasse vaguement tout le genre, sans pouvoir s'ap- pliquer particulièrement à une espèce. Commerson n'avait eu de ce poisson qu'un individu déjà un peu altéré, qui avait été pris à l'ile des Tonneliers près de l'Isle-de-France. Il était long de quatre pouces : les nôtres n'en ont généralement guère davantage. Cependant MM. Quoy et Gaimard ont rapporté un indi- vidu pris dans les Moluques , qui a près de dix pouces. Nous croyons d'autant plus aujourd'hui à ce rapprochement, que nous venons de recevoir CHAP. II. CHIRONECTES. 411 l'espèce de Bourbon , où M. Nivoy l'a recueillie pour le Muséum. Elle habite dans d'autres parages de la mer des Indes; M. Eaynaud l'a rapportée de Cei- lan; MM. Quoy et Gaimard, d'Amboine; et MM. Lesson et Garnot, de Borabora : ainsi elle est répandue dans tout le grand océan Indien. C'est ce qui me fait croire que le lopliius striatus de Shaw^ devait ressembler à ce chi-- ronecte âpre; nous le regardons comme de la même espèce. Sa houppe est semblable, mais il paraît qu'on l'a dessiné d'après un individu sec et mal préparé, dont le ventre, au lieu d'être gonflé, était tiré en longueur, et où les ventrales et l'anale n'ont pas été vues par le dessinateur. Si cette conjecture était vraie , la seule différence réelle qu'il présenterait, consisterait dans des lignes noires, beaucoup plus multipliées et moins prolongées, qui lui couvrent tout le corps; il a aussi, comme notre chironecte à houppe , la langue tachetée de noir et blanc. M. Gray, qui a examiné avec soin les indi- vidus sur lesquels Shav^^ a décrit cette espèce, a cru y reconnaître le chironecte scaher de la monographie de M. Cuvier, qui est en effet 1. Nalur. miscell., t. V; pi. 175/ j \oo- .. 412 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. l'espèce la plus voisine du chironecte âpre. Mais comme Shaw nous apprend que c'était un des poissons recueillis à Otaïti, lors du premier voyage du capitaine Cook , nous devons plutôt le rapporter à une espèce des Indes qu'à une espèce américaine. L'individu de Shaw est long de trois pouces.* Le Chironecte rude. {Cliironecles scabei^ Cuv.) C'est au premier de ces chironectes indiens (au Chir. hispidus) que ressemble celui qui paraît être le plus commun aux Antilles. L'âpreté de sa peau, les tubercules de son sour- cil, de sa joue, de la ligne latérale, les proportions de son corps, de ses nageoires, sont les mêmes. Ses taches et ses lignes sont distribuées d'une manière semblable. Il paraît seulement en avoir davantage. Ses lignes s'élargissent et se divisent plus souvent "en taches; elles deviennent surtout ovales ou rondes ^^^tir les nageoires; mais ces variétés, ne tenant qu'aux t;:>eouleurs, rentrent dans celles que nous avons déjà observées dans l'espèce des Indes. Tous nos individus -■'de l'espèce d'Amérique, et c'est là jusqu'à présent le principal de leurs caractères^ ont leur premier rayon libre terminé par deux longues lanières ou deux feuilles membraneuses. Nous avons reconnu que l'individu décrit 1. Shaw, Gêner, zool., t.V, part. 2, p. 385. CHAP. II. CHIRONECTES. 415 dans les Mémoires du Muséum (t. III, p. 42 5), et représenté (pi. 16, fig. 2) sous le nom de chironecte rude ( cJiironectes scaher ) , ap- partient à cette espèce; mais, ses couleurs étant mal conservées, cette figure n'a pas les taches assez nettes. Nous avons depuis lors reçu de ces poissons de la Martinique par M. Plée , dont les caractères sont mieux prononcés. Les nageoires supérieures et les côtés du corps ont quelques filamens; mais dans un individu plus petit, qui vient aussi de la Mar- tinique, et que nous avons trouvé dans le cabinet de M. Richard, tout le corps et les membres sont garnis de filamens longs et grêles, dont la plupart sont en forme de plu- mes ou branchus comme de petits arbrisseaux. Il paraît que dans tous ces chironectes ces appendices s'usent et se perdent avec l'âge, et qu'il faut les observer dans de jeunes sujets pour les voir dans leur intégrité. C'est à cette espèce qu'appartient l'indi- vidu apporté de la Trinité par M. Robin, dont M. Cuvier fait mention ( loc. cit., p. 427). Les viscères du chironectes scaher que j'ai pu exa- miner, n'étaient pas entiers; on pouvait juger que l'estomac de ce chironecte est très-ample, arrondi, très-dilatable. Ses parois sont minces et chargées en dedans de rides irrégulières , petites et nombreuses. 414 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. La vessie natatoire est globuleuse, peu grande. Ses parois fibreuses sont argentées. Les ovaires sont grands; ils occupent toute la longueur de l'abdomen. Browii ' et Gronovius ^ décrivent un cliiro- necte d'Amérique, à peau rude, à lambeau du premier rayon fourchu; mais ils ne s'attachent, comme presque tous les autres naturalistes, qu'à des caractères communs à plusieurs es- pèces, et ne parlent point de la disposition des taches; en sorte qu'il est difficile de dire s'ils ont voulu parler de celle-ci , ou de quelqu'une des suivantes. Le guaperua de Margrave paraît se rapporter plus précisément à notre espèce actuelle. Il a la peau rude, et l'auteur décrit ses cou- leurs comme il suit^: « Color cutis ex obscure ruhricans cui fus- ^cus admixtus, et per totum corpus maculas « Jiabet mgras figura undarum ipinnœ et hra- « chia etiam ejusdem sunt coloris, sedpinna in « dorso, in quolibet latere, quatuor habet ma- « culas nigras majores, cauda vero et omnes i^pinnœ minores elegantervariegatœsunt. " Je dois dire, cependant, que j'ai rarement trouvé les taches de la dorsale au nombre de quatre seulement. 1. Jamaic.,^. 4^7 2. Zoophyl.,^. 58, n." 2io. — Z.Brasil., p. i5o. CHAP. II. CHIRONECTES. 415 La figure ne peut nous aider à reconnaître l'espèce; car elle n'est pas de l'auteur, mais transposée par l'éditeur Laét de l'ouvrage qu'il avait fait sur l'Amérique, ori elle avait déjà paru (p. 5^4) sous le nom de pira-utœwah. Je la crois plutôt du chironectes fiircipilis, dont je parlerai plus bas. Il y a dans le Recueil du prince Maurice une figure peinte, intitulée ^uaperva, et qui ressemble beaucoup mieux à notre espèce. Au surplus, ce que Margrave ajoute sur ce poisson peut également s'appliquer à toutes les espèces à peau rude, qui sont celles dont le ventre se gonfle le plus. « Ventriculum hahet duos digitos longum, « cum orificio très digitos longo^ et duo cir- « citer ampli, cjuod in ipsas fauces inseritur: « unde ventriculum inflare instar utriculi « potest — natans egregie explicat pinnas et « injlat se ut instar orbis seu pilei appareat. "* Ainsi on voit que ces poissons s'enflent par le même mécanisme que les tétrodons, c'est- à-dire en remplissant d'air leur estomac. Il me paraît que c'est aussi cette espèce du chironecte rude qui a servi particulièrement de modèle à la figure du lophius histrio de Bloch (pi. 3), qui montre les mêmes feuilles au premier rayon, la même âpreté de la peau, 416 LIVRE ÎY. PECTORALES PÉDICULÉES. à peu près les mêmes filamens et les mêmes taches ; seulement je vois dans l'enluminure des points blancs, dont je ne trouve pas de traces dans mes individus. Enfin, je dois y rapporter encore une figure de Plumier, grossièrement copiée par Aubriet, dans la collection des Vëlins du Muséum, et intitulée : Rana piscatrix minima, que M, de Lacépède cite (t. I, p. 821 ) sous son lophie histrion. Le Ghironecte du prince. {Chironectes principisy nob.) Il y a d'ailleurs, soit dans le Liber principis , soit dans le Liber Mentzelii, d'autres figures de chironectes, qui ne se rapportent ni à cette espèce, ni même à aucune de celles que nous connaissons. Celles du prince sont intitulées ^uaperva, comme celle que nous avons citée. La première est d'un brun très -foncé, semé de points noirs sur le corps et les nageoires. La dorsale a seulement une rangée de ces points. Le deuxième rayon est fort libre, et le premier a sa soie deux fois plus longue que le second, et terminée par une petite houppe ronde. La seconde, à peu près de même forme, a la deuxième dorsale plus longue; le premier rayon terminé en spirale, et tout le corps CHAP. II. CHIRONECTES. 417 noir, avec deux taches blanches et rondes sur chaque flanc , et l'une au-dessus de l'autre. D'après les notes écrites de la main du prince Maurice, sous ses trois figures de ^uaperva, les poissons atteindraient un pied de longueur. Le Chironecte de Mentzel. {Chironectes Mentzelii, nob.) La figure de Mentzel ne porte pas de nom. La soie du premier rayon libre n'y dépasse pas le deuxième , et se termine par une très-petite houppe. Tout le corps est peint de noir, avec quelques grandes marbrures vertes. Nous ne citons ici ces figures, et nous ne reul donnons des noms spécifiques, que pour fixer l'attention des voyageurs, et les engager à rechercher les espèces qui leur ont servi de modèles. Le Chironecte a deux ocelles. {Chironectes biocellatus , Cuv.) Un autre chironecte d'Amérique, à peau rude, a été représenté dans les Mémoires du Muséum (t. III, pi. l'y, fig. 3), et décrit par M. Cuvier (p. 427) sous le nom de chironecte bio celle. Il ressemble au chironecte rude par la taille, par la scabrosité de la peau, par le nombre des 12. 27 418 LIVRE XV. PECTORALES rÉDICULÉES. rayons. Les tubercules y sont moins nombreux et moins marqués. Les appendices plus courts et plus rares ; mais elle en a aussi deux sous la gorge, plus charnus et couverts d'une peau rude. Le deuxième et le troisième rayon libre sont plus longs et plus dégagés. Le premier est plus court que le deuxième, et terminé par deux lambeaux grêles et courts. Le fond de sa couleur paraît brun. Une bande irrégulière noire part de devant la dorsale et descend obliquement en avant vers la pectorale. Une autre bande semblable va de devant le deuxième rayon dorsal, vers le coin de la bouche. Quelques taches noires sont éparses sur les côtés; mais ce qu'il y a de plus remarquable sont deux taches en forme d'œil, noires, entourées d'un cercle blanc ou jaune, dont l'une est sur la base de la dorsale, entre le neuvième et le dixième rayon, et l'autre sur la queue, vers le bord dorsal, à la base de la caudale.^ Les nageoires n'ont pas d'autres taches. L'extensibilité de cette espèce est très- grande. Nous avons disséqué le chiionecte bio celle. Il a le foie petit, plus porté dans le côté droit que dans le gauche. L'œsophage est très-court, à parois assez épaisses. Comme dans le chironecle scaber, il se dilate promp- tement en un vaste estomac arrondi, à parois minces. Le pylore s'ouvre vers le haut de l'estomac, sur la droite. Il n'y a pas d'appendices cœcales qui l'en- 1. Ces ocelles ne sont pas assez niafaués dans la planche des Mémoires du Muséum. CHAP. II. CHIRONECTES. 419 tourent. Le canal intestinal est simple, étroit, et fait deux replis avant de se rendre à l'anus. La rate est petite, globuleuse, cacliée entre l'estomac et l'in- testin. Les laitances sont médiocres, peu étendues en longueur, placées vers le milieu de l'abdomen, et f débouchent dans le cloaque par un canal assez long. La vessie natatoire est médiocre, arrondie. Ses parois brillent d'un vif éclat argenté. Les reins sont petits. La vessie urinalre est grande, simple et membraneuse. Le Chironecte a ocelles. {^Chironecles ocellatus , nob.) J'avais pense d'abord que ce chh^onecte biocellé était l'espèce que Parra a représentée dans ses poissons de la Havane (pi. i ), et dont Bloclî fait sa variété cl du lopliius 1ns- trioj ou son lopliius histrio ocellatus *; et il faut convenir que ces deux poissons se ressem- blent beaucoup. Cependant la figure de Parra place les taches ocellées autrement : l'une au milieu de la base de la dorsale au sixième rayon, et l'autre verticalement au-dessous, vis-à-vis l'anus; elle a aussi des taches sur les nageoires, et ses bandes ne sont pas tout-à-fait pareilles. L'auteur dit que le fond de sa couleur est blanc. Il le donne comme un poisson rare qu'on ne mange pas. 1. S^st. i édit. Schneider, p. i43. 420 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Nous espérions avoir le vérital)le poisson de Parra, dans un individu que M. Poey nous a apporte récemment de Cuba 5 mais il s'est encore trouvé différent. Le Chironecte a beaucoup d'ocelles. {Chironectes multiocellatus , nob.) Son premier rayon est bien plus long (du quart de la longueur totale), très-menu et sans liouppe. Tout son corps est d'un rouge de corail, semé de diverses taches et de traits noirs ou noirâtres, H y a un ocelle noir, entouré d'un cercle blanc, sur les liuitième, neuvième et dixième rayons de la dorsale; un demi-ocelle semblable à son bord , entre le troi- sième et le quatrième; un sur l'anale; trois en triangle sur la caudale, et un sur le flanc, derrière la pectorale. Les Espagnols de cette île appellent tous ces çMwowQcles pescador ^ nom qui exprime leurs rapports avec la baudroie. Nous avons reçu cette même espèce ou va- riété de la Martinique par M. Garnot. Le Chironecte panthère. {Chironectes pardalis y nob.) Nous avons reçu de la rade de Corée, par M. Rang, un autre petit chironecte très-voisin des précédens. Le premier filet est très-grêle et n'a que le cinquième de la longueur totale; une très- petite houppe le ter- chap. il chironectes. 421 mine. Le second et surtout le troisième rayon sont très-forts. Sur un fond rouge tout le corps est mou- cheté de taches noirâtres ou grisâtres, et, en outre, il y a un grand nombre de points et d'ocelles noirs très -brillants, qui relèvent la couleur du poisson. Trois des plus grands sont sur le bord de la seconde dorsale; on en voit en même nombre et de même grandeur sur la caudale, sur l'anale et sur le côté interne de la pectorale , et il y en a deux petits sur la ventrale; un autre, plus grand, et dont le cercle est bien tranché, existe sous le milieu de la base de la seconde dorsale. D'autres , plus petits , sont épars sur le corps. L'individu a deux pouces et demi. Le Chironecte pavonin. ( Chironectes pavoninus , nob. ) Le Cabinet de l'université de Gœttingue en possède un, où les ocelles sont encore arranges un peu différemment. Il y en a deux petits sur la première moitié de la dorsale, et un plus grand sur sa partie postérieure; un sur le flanc en avant de la pectorale, et un der- rière; deux sur l'anale, et quelques points noirs sur la dorsale. Le corps est rouge, à grandes marbrures verdâ- tres, ponctué de vert, surtout sous le ventre. Les ocelles sont d'un noir profond, bordés de blanc. Les bords des nageoires sont blancs. J'ai vu et dessiné d'après nature ce chiro- 422 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. iiecte lors mon passage à Gœttingue en 1828, quand j'ai accompagné M. A. de Humboldt en Allemagne. Le ChI RONEOTE VARIÉ. {Chironectes varie gains , nob.) Nous possédons un autre chironecte, d'un roux qui paraît avoir été nuageux, à une tache noire et ronde sur la base même de l'anale, au quatrième rayon. On aperçoit quelques autres taches, moins nettes, sur sa dorsale et sa caudale, et quelques points de la même couleur à divers endroits du corps. Son troisième rayon libre paraît avoir été court et attaché de près. Nous ne pouvons décrire les deux premiers qui sont mutilés. L'individu est long de six pouces, et dessé- ché, en sorte que nous ne pouvons parler non plus de ses appendices. On trouve dans les papiers de Commerson une phrase conçue ainsi: Antennarius chi- ronectes , riibens, maculismoinsincequalihus raris inspersus; mais la description est restée en blanc. Parmi les dessins du même natura- liste il en est un sans étiquette, qui paraît cor- respondre à cette phrase; il est gris, avec des nuages roussâtres et quelques taches noires éparscs, dont une sur l'anale, une sur la dor- sale, mais aucune sur la queue. Son premier rayon est long et trcs-gréie; le second court, CHAP. II. CHIRONECTES. 423 obtus et un peu crochu j le troisième plus long que le premier, et aussi un peu arqué, est retenu d'assez près par sa membrane. C'est d'après ces deux documens que M. de Lacé- pède a établi son espèce du lophie chironecte (t. V% p. 32 1, pi. 14? fig- 2), à laquelle nous soupçonnons beaucoup qu'appartient l'indi- vidu que nous venons de décrire. Il nous paraît évident que c'est aussi le même poisson que Shaw a représenté sous le nom de lophius pictus, dans son Natiu^alisf s Miscel- lany (pi. 176, fig. 1 ), et dans sa Zoologie gé- nérale (t. V, part. 2, pi. i65); il représente le premier rayon comme terminé par un triple îil; mais, d'ailleurs , sa figure correspond entiè- rement à celle de Gommerson, même pour les couleurs. Son individu venait de la mer du Sud. he Chironecte a poils fourchus. ( Chironectes furcipilis , Cuv, ) Nous pouvons placer ici le chironecte furci- pilis de Cuvier', qui a, comme le scaber et Xocellatus, un double lambeau au bout de son premier rayon. Son nom vient de ce que sa scabrositése prolonge en véritables poils visibles à l'œil nu et sortant par 1. Mém. du Mus., t. III, p. Sag, pi. 17, fig. 1, 424 LIVRE XV. PECTORALES PÉDiCULÊES. paires, comme deux branches de fourche, d'autant de très -petits tubercules. Vers la tête se voient aussi de petites touffes for- mant des tubercules , des appendices grêles, fili- formes, sont épars sur différens endroits du corps. Le deuxième rayon est plus long que la tête, grêle ^ bien dégagé , entièrement en forme de corne. La membrane du troisième s'étend jusqu'à la base de la dorsale. Quant au premier, il est aussi long que le deuxième, et terminé par deux petits tentacules courts. Sa couleur est un gris foncé, diversifié par des marbrures noirâtres le long du dos, par des taches irrégulières sur les flancs. On ne voit presque point de taches sur les nageoires. On ignore d'où cette espèce est venue au Cabinet du Roi. C'est de toutes celles que nous décrivons celle qui ressemble le plus à la figure du pira- utoësvah de Laèt *, que l'on a annexé ensuite (comme nous l'avons dit ci-dessus) à la des- cription du guaperva de Margrave ^. On ne doit pas oublier que c'est sur cette figure et sur cette description, combinées, que Wil- lughby a d'abord établi cette espèce, qu'il a rangée à la suite des baudroies, et avec la- quelle Linné a réuni ensuite, dans sa dou- zième édition, celle de l'Atlantique, pour cons- tituer, du tout ensemble, son lophius histj^io. 1. Desc. Ind. occid. , p. 574. — 2. Brasil , p. i5o. CHAP. II. CHIRONECTES. 425 Le Chironecte porte-monnaie. (^Chironectes nummiferj Cuv.) Nous avons encore de ces chironectes à peau rude qui, par la disposition de leurs taches, semblent annoncer des espèces particulières. Ainsi, il y en a un tantôt entièrement brun rous- sâtre, tantôt marbré de roussâtre et de blanchâtre ou de roux plus clair, par grandes taches nuageuses, sur le corps; par petites taches, sur les nageoires; et qui, de plus, a une large tache ronde et noire sur la basé de la dorsale, sur le huitième et le neuvième rayon. Toutes les nageoires sont pointillées de noi- râtre. Je ne lui vois pas d'appendices, même sous la gorge. Son deuxième rayon est bien dégagé, moins long que la tête. Le premier, plus court que le se- cond , est terminé par une petite houppe; le troisième n'est retenu que par une membrane assez lâche. Les individus ne sont longs que de trois pouces. M. Cuvier a fait graver ce poisson dans les Mémoires du Muséum ( t. III, pi. 17, fig. 4) d'après un individu desséché, dont il ne con- naissait pas l'origine. Depuis nous avons acquis la certitude que c'est bien d'une espèce distincte dont il s'agit 5 car M. Dussumier vient d'en rapporter de la rade de Mahé sur la côte de Malabar. Ce voya- geur nous dit aussi que ce poisson se gonfle et flotte sur l'eau comme un diodon. 426 LIVRE XV. PECTORALES PÉDlCULÉES. Le Chironecte a points verts. (Chironectes chlorostjgma, Elirenb.) M. Ehrenberg a dessiné à Massuah un petit individu, qui nous paraît voisin de cette es- pèce, et qui avait le corps brun rougeâtre, marbré de brun pâle. La tache de l'arrière de sa dorsale d'un vert foncé, en- touré d'un cercle blanc, et toutes les nageoires bor- dées d'un jaune verdâtre. D. 4; A. 6; C. 9; P. 10. Je fais connaître cette espèce sur le dessin que M. Ehrenberg a eu la libéraUté de me communiquer pendant mon séjour à Berlin, en 1828. Le Chironecte Commerson. (^Chironectes Commersonii , Cuv.j Lophie Commer- son , Lacép. ) Commerson a laissé dans ses manuscrits une description très -détaillée d'un poisson qu'il nomme antennarius bwertex, totus ater, puncto medioriun laterum alho , et M. de La- cépède a établi (t.I,p. 827) sur cette descrip- tion une espèce de lophie, à laquelle il a donné le nom du courageux observateur qui l'a dé- couverte. CHAP. II. CHIRONEGTES. 427 M. Cuvier l'a décrite de nouveau avec le même nom spécifique dans son Mémoire sur les Chironectes \ d'après un individu apporté de risle-de-France par M. Mathieu, que l'on conserve au Cabinet du Roi, et dont il a donné la figure ^ Sa taille et sa forme sont les mêmes que dans le chironectes liispidus et dans le chironectes scaber. Il a la même rudesse de peau et les mêmes tu- bercules au sourcil, à la joue et à la ligne latérale; et sa faculté de se gonfler ne doit pas être moindre que dans ces deux espèces; mais ses deuxième et troisième rayons sont encore plus courts et plus gros, et le troisième plus enveloppé dans la peau du dos. Le premier est extrêmement grêle, plus long que le deuxième, et terminé par un très-petit tenta- cule. La scabrosité du corps est égale partout, et l'on n'y voit d'appendices d'aucunes sortes. Un brun- noir très -foncé et uniforme, colore le corps et les nageoires, et n'est varié que par un point d'un beau blanc, placé de chaque côté au-dessus de l'ais- selle de la pectorale. Les pointes des rayons des pec- torales et des ventrales sont aussi de couleur blanche; ce qui, au premier coup d'œil, fait croire qu'il y a des ongles. La dorsale a dans cette espèce quatorze rayons , et l'anale huit. M. de Lacépède (t. I,pl. i4, fig'3) a rap- 1. Mém.duMus.,t.ni,p.43i._2. /éfW.,pl. 18, fig. 1. 428 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. porté à cette espèce une figure, laissée aussi par Commerson, mais sans étiquette. Elle semble en effet en présenter plusieurs carac- tères, notamment les quatorze rayons de la seconde dorsale ; mais on n'y voit pas le point blanc du coté, et son troisième rayon y est représenté en forme de bosse, comme il est dans l'espèce suivante, plutôt qu'en forme de nageoire, tel qu'on le voit dans celle-ci. Je crois avoir trouvé une mauvaise figure de ce chironecte de Commerson dans le Pie- cueil de Corneille de Vlaming. Renard en donne une copie tout-à-fait monstrueuse et défigurée (t. I, pi. 43, fig. 212) : le poisson s'y nomme sambia-itang. Le Chironecte bossu. {Chironectes tuherosiiSj Cuv.) M. Mathieu a aussi rapporté de l'Isle- de- France une espèce de chironecte différant du commersonien, que M. Cuvier a désigné par l'épithète de bossu [chironectes tiibero- sus) * , parce que son troisième rayon libre n'a point de 1. Cuvier, Mém. du Mus., t. III, p. 432. CHAP. II. CHIRONECTES. 429 membrane derrière lui; mais qu'il est court, gros, arrondi, et représente absolument un tubercule ou une petite bosse. Le deuxième est court, libre, et en forme de petite corne émoussée. Le premier n'est qu'un fil très -mince, et double en longueur du deuxième. Ce chironecte est globuleux, et ses pec- torales et ses ventrales ne laissent point paraître leurs pédicules hors de la peau. On n'en voit que la partie rajonnée. La peau est légèrement âpre. On y voit les séries ordinaires de tubercules, mais aucuns lambeaux ni appendices. Sa couleur paraît avoir été un gris roussâtre, marbré de noirâtre, de manière que dans ce fond noirâtre le roussâtre paraît par grandes taches arron- dies. Les pectorales, les ventrales, l'anale et la cau- dale, sont lisérées de noirâtre. Les deux dernières ont en outre sur leur milieu une large bande de cette couleur. Les individus que nous possédons n'ont que deux pouces. MM. Quoy et Gaimard en ont rapporté un petit individu pris dans le havre Carteret, à la Nouvelle-Irlande. L'espèce nous paraît nouvelle, à moins que ce ne soit celle que Commerson avait dési- gnée par cette phrase : Antennjrius bigib- BUSj, nigro et gi^iseo variegatus j mais dont la description est restée en blanc. C'est sur cette phrase que M. de Lacépède (t. I, p. 325) a établi son lophie double-bosse. 450 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Le Chironecte rouge. (Chironectes coccineiiSj, Less. Garn.) Le dernier chironecte que nous ayons à décrire dans cette tribu à peau rude , et Tun de ceux dont l'âpreté est la plus forte, a été rapporté par MM. Lesson et Garnot de l'Isle- de-France, dont les parages sont si féconds en espèces de ce genre. Il est un peu plus oblong que les autres; toute- fois la flaccidité de la peau de son ventre indique qu'il peut aussi se gonfler. Toute sa surface est très- âpre. Sa tête et son museau sont si courts que la fente de sa gueule descend un peu d'arrière en avant (elle est plus que verticale). Son premier rayon libre , placé entre les yeux, est un fil court, roide, terminé par un très-petit lambeau ; il n'a que le septième ou le huitième de la hauteur du corps. Le second, un peu plus en arrière, n'est pas plus haut; mais plus gros, obtus, âpre et recourbé comme une petite corne de bouc. Le troisième est tout-à-fait couché sur la nuque et retenu par la peau , qui ne laisse pa- raître que son extrémité comme une légère proémi- nence. A sa suite vient une seconde dorsale, longue et basse, de douze rayons. L'anale est aussi plus basse €t plus longue que dans la plupart des autres es- pèces; mais elle a, comme à l'ordinaire, sept rayons. Les tubercules du sourcil et de la ligne latérale sont pour la plupart plutôt enfoncés que saillans. Les autres détails de sa structure n'ont rien de particulier. CHAP. II. CHIRONECTES. 431 Sa couleur paraît d'un rouge de corail, varié de taches nuageuses et de points mal terminés, noi- râtres, et d'autres taches nuageuses d'un gris jaunâtre. Il y a surtout de chaque côté, au-dessus de la pec- torale, une grande partie noirâtre, et je crois voir sur le milieu de chaque flanc un point rond et blanc, analogue à celui que nous avons observé dans le chironecte de Commerson, La longueur de ce poisson est de quatre pouces et demi. Les naturalistes qui l'on découvert en ont donne une figure dans la Relation de la Co- quille. (Poiss., n.° 16, fig. 1.) Le Chironecte de Bougainville. {Chironectes Bougaimnlli , noh.) M. le baron de Bougainville a rapporté de son voyage autour du monde, sur la frégate la ThétiSy un chironecte différent de tous ceux que nous avons décrits , par la presque -nullité de son deuxième et de son troisième rayon , qui ne paraissent plus que comme deux légères tubérosités de la nuque, et sont même dans quelques individus presque entièrement cachés sous les tégumens. Le premier est un petit fil très- court, un peu renflé à son extrémité. La peau de ce poisson est lisse et comme charnue. Des séries de petits grains y forment une eUipse sur le front , une ligne transverse sous la gorge et une 452 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICCT.ÉES. ligne latérale en forme de f\j, c'est-à-dire, convexe vers le haut à sa partie antérieure, et concave à la postérieure. Son museau est très -court. Sa gorge convexe; il ne paraît pas susceptible d'un très-grand renflement. Le bord postérieur de sa dorsale et de son anale adhère à la base de sa caudale. La pre- mière a quinze rayons, et la seconde huit. C. 10;P. 3; V. 5. La taille de nos individus est de deux pou- ces ou deux pouces et demi, et leur couleur paraît un roussâtre clair, tirant sur l'orangé. Shaw a donné dans son Natiiralisfs Miscel- lanj (pi. 176, fig. 2) et dans sa Zoologie géné- rale (t. V, part. 2, p. 386, pi. i65, fig. 2), sous le nom de lophius niarmoratus , un chi- ronecte fait à peu près comme le coccineiis , qui porte sur le bout du museau un premier rayon grêle, terminé par deux iilamens, et de la longueur de la tête, où l'on ne voit pas de deuxième ni de troisième rayons libres, dont la dorsale semble avoir plusieurs rayons épineux, comme dans les acan- thoptéryglens ordinaires. Sa couleur est marbrée de noir, de rouge, de bleuâtre, etc., et ses nageoires pectorales ne mon- trent pas de pédicule. Si cette figure était exacte, il n'est pas dou- teux que l'espèce devrait former un nouveau sous-genre; mais comme elle a été faite dans la mer du Sud, et que le poisson même ne CHAP. II. CHIRONECTES. 455 paraît pas avoir été vu par des naturalistes, on peut soupçonner que l'on n'a peint qu'un chironecte dont le deuxième et le troisième rayon étaient à peu près cachés sous les té- gumens, et dont on n'a pas bien compté les autres rayons. Ce sera un fait à vérifier par les voyageurs. J'explique de la même manière les figures 3 et 6 de la planche 74? toine I, de Seba. La figure 3 a un premier rayon divisé au sommet en deux filamens, et un deuxième rayon; mais on ne lui en yoit point de troi- sième. La distribution de ses taches fait croire qu'elle n'est qu'un chironectes scaher. La figure 6 ressemble par ses taches à notre chironectes lœvigatusj mais elle n'a aucun rayon libre. Nous ne doutons pas qu'elle n'ait été faite d'après un individu desséché et mutilé. Il nous reste à parler, à la suite des chiro- nectes, de deux espèces qui nous semblent pouvoir former ou une petite subdivision de ce genre, ou peut-être un genre particulier dans la famille des poissons à pectorales pédiculées, attendu que leursdeuxième et troisième rayons, grêles, élastiques et alongés, ne sont pas déta- chés l'un de l'autre, mais unis par une seule membrane en une nageoire, qui ne diffère 12. 28 454 LIVRE XV. PECTORALES TÉDICULÉES. d'une première nageoire ordinaire que par sa position sur le vertex. Le premier rayon seul est libre et terminé par un petit tenta- cule; encore dans la deuxième espèce sa base est-elle jointe au suivant par une petite mem- brane. Ces poissons ont le corps et surtout la queue plus alongés que les autres cbironectes. Leur estomac n'est pas susceptible de la même di- latation; leur squelette est plus dur et a plus de vertèbres. Ils avaient été recueillis par Pérou; e^ M. de Lacépède en a donné une description dans le quatrième volume des Annales du Muséum (p. 202) , et les a fait figurer (pi. 55 , fig. 3 et 4)- M. Cuvier en a donné de nouvelles des- criptions et d'autres figures dans les Mémoires du Muséum (t. III, p. 4^4? P^- 1^? ^g- ^ et 3 ) , en changeant mallieureusement les noms spécifiques donnés par M. de Lacépède, quoiqu'ils n'entraînassent pas de confusion avec ceux des espèces précédemment décrites. Le Chironecte hérissé. ( Chironectes hirsutiis, nob. ; Lophius hirsutus, Lacép.) Le premier est le chwonecte hérissé de M. de Lacépède {loc. cit., fig. 3), nom que M. CHAP. II. CHIRONECTES. 435 Cuvier a change en celui de lophiiis punctatus.^ Il n'est pas aussi comprimé ni aussi couri que les cliironectes ordinaires. Sa longueur comprend quatre fois sa hauteur. L'ouverture de sa bouche est petite, dirigée en avant et non vers le ciel. Son premier rayon, terminé par un petit tentacule, est bien distinct des deux suivans, qui forment sur son vertex une nageoire triangulaire, à peu près des deux tiers de la hauteur du corps, et cette nageoire du vertex est elle-même bien séparée de la deuxième dorsale. La scabrosité de la peau n'est pas très-forte. On voit, à la loupe, qu'elle se forme de petits grains , terminés chacun par une pointe simple. Le bras qui porte la pectorale est très-saillant. Le trou qui sert d'orifice à la branchie est un peu au-dessus de l'aisselle. Je compte à la deuxième dorsale dix-neuf rayons; à l'anale, neuf; à la caudale, neuf; aux pectorales, sept ; aux ventrales , quatre et une très-petite épine. Tous ces rayons sont articulés et simples, excepté ceux de la queue, qui sont fourchus. Le dessus et les côtés du corps sont d'un gris- roussâtre pâle, semé de points brun foncé. On voit de pareils points, mais moins nombreux et moins marqués, sur la dorsale et sur l'anale. Au bord de la dorsale, sur le devant, aux deuxième, troisième et quatrième rayons, se voit une tache noire assez grande. Le dessous du corps est blanchâtre, ainsi que les nageoires paires et l'anale. 1. Mém. du Mus., t. III, pi. 18, fig. 2. 456 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Les individus sont longs de quatre pouces. Ce cliironecle hérissé, que nous trouvons différer sensiblement des autres par ses formes, a aussi dans ses viscères des différences en rapport avec celles que nous observons à l'extérieur. L'estomac est si petit, ses parois sont si épaisses, que ce poisson ne peut probablement pas se gonfler. Il n'y a pas non plus de vessie natatoire. Le foie est médiocre, trièdre, situé presque en travers sous la gorge, et s'avançant plus dans l'hy- pocondre droit que dans le gauche. Le pylore, sans appendices cœcales, s'ouvre auprès du cardia. L'm- testin est gros, et ses parois très -minces; il va en diminuant de l'estomac à l'anus, après avoir fait deux replis inégaux et flexueux. La rate est très- petite, ronde, de couleur noire; elle est cachée entre l'estomac et les intestins. Les laitances sont petites, rejetées vers l'arrière de l'abdomen, et elles débou- chent dans le cloaque par un canal fort court. Les reins sont petits, globuleux, situés vers l'avant de l'abdomen, sous l'estomac; ils donnent dans une vessie urinaire assez grande, dont les parois sont très -minces. Le squelette du chironecte hérissé a les os plus durs que celui du chironectes pic tus. Ses pièces operculaires sont plus développées et se rapprochent davantage des formes ordinaires. On y compte vingt- deux vertèbres, dont douze abdominales. CHAP. II. CHIRONECTES. 457 Le Chironecte lisse. {Chij'onectes IceviSj nob, ; Lophius Icevis, Lacép.j Chironectes unipenniSy Cuv.) Le second, que M. Cuvier a nomme chiro- necte unipenne, parce qu'une seule membrane unit ensemble les rayons antérieurs et ceux de la seconde dorsale, en s'abaissant toutefois beaucoup entre le premier et le deuxième, ainsi qu'entre la nageoire du vertex , composée du deuxième et du troisième, et la véritable deuxième dorsale, a été décrit et figuré sous le nom de lophie lisse (^lophius Icevis), par M. de Lacépède. * Ses proportions sont à peu près les mêmes que dans le précédent. Sa scabrosité, quoique formée de même, est un peu moins rude au toucher. Il est d'un brun-roussâtre clair, nuancé sur le dos d'un brun - roussâtre un peu plus foncé. Sa dorsale est encore plus brune vers le bord. D. 3— 16 j A. 9;C. 9jP. 7;V.l/4. Le Cabinet du Roi n'en possède qu'un in- dividu long de deux pouces. 1. Ann. du Mus.^ t. IV, pi. 55, fig. 4- 438 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. CHAPITRE III. Des MaltJiées et des Halieutées. DES MALTHEES. MocKBvi signifie de la cire ramollie*. On trouve ce nom dans Oppien parmi ceux de plusieurs grands poissons cartilagineux , et l'espèce qui le porte y est désignée comme remarquable par sa mollesse. ^ Suidas, qui la place dans une énumëration du même genre , dit qu'elle est difficile à vaincre^ Sur ces deux traits Bélon a pensé que la malthée était la baudroie, et, bien que son opinion n'ait pas été adoptée, et n'ait peut-être pas dû l'être, M. Cuvier a cru pouvoir s'en prévaloir pour dériver de ijlkKBv} le nom de malthœa, qu'il a donné à un petit genre démembré de celui des baudroies. Ces malthées ont, comme les baudroies, la partie antérieure du corps aplatie et élargie, les pectorales portées sur des pédicules, l'o- 1. Suîd.,i. II, p. 86. *. Hal., I. Ij V. 571 : Mct-XQn S^, n fxctXctySxriv iTreûVVfXOç 3. O Kdi S'v(Ta.V7ctyun'i^ûi' îç-t, Suid., 1. 1. CHAP. III. MALTHÉES. 439 rilice de la branchie caché dans l'aisselle; mais elles manquent entièrement de première dorsale. Leur corps est couvert en dessus d'une peau dure et tuberculeuse, et garni tout autour de filamens charnus ; leur museau est proéminent; leur bouche est petite, ou- verte sous le museau, mais assez protraclile; un pédicule particulier, attaché à leur museau et terminé par un pinceau de filets charnus, représente seul les rayons libres de la bau- droie. Ces poissons sont les seuls parmi ceux de cette famille qui aient un sous-orbitaire : c'est une de ces anomalies fréquentes que l'ob- servation de la nature nous oppose aux. ca- ractères généraux établis dans nos méthodes. Quand on examine les différentes citations en- tassées par Linné sous son lophius vespertilio , il est très - difficile de dire quelle est parmi les espèces que nous allons successivement décrire, celle qu'il avait sous les yeux; et cepen- dant Klein avait déjà compris et indiqué que la malthée figurée par Seba était d'une espèce différente de celle de Margrave. Gmelin, Shaw, Lacépède, n'ont pas profité de cette observa- tion, de sorte que le travail nous est resté à faire tout entier. Cependant nous laisserons l'épithète de ves- 440 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. pertilio à l'espèce qui nous paraît la plus com- mune , sans y rapporter toutefois , comme synonyme , le lophius vespertilio de Linné. La Malthée vespertilion. (^Malthea vespertilio , nob.) Uespèce la plus commune du genre, ou du moins celle dont nous avons le plus d'indivi- dus, nous vient d'Amérique, et nous paraît avoir été confondue avec celle qui avait été décrite dès le commencement du dix-septième siècle par Margrave. Sa forme étrange l'a fait comparer à une chauve-souris; mais celte comparaison est loin d'en donner une idée juste. La partie antérieure de son corps, comprenant la tête, la cavité des branchies, représente un cœur, tel qu'on le dessine sur les cartes à j ouer.Une proéminence avancée au-dessus de la bouche, d'environ le dixième de la longueur totale, en forme la pointe. Chacun des lobes se prolonge un peu pour former le pé- dicule de la pectorale, et se termine en forme de coude, d'où la nageoire même se dirige en dehors et en avant. La largeur de cette partie antérieure entre les deux préopercules est égale à sa longueur, qui fait à peu près moitié de celle du corps ; elle est en même temps assez plate. Son épaisseur verti- cale n'est que du cinquième de la longueur totale. CHAP. III. MALTHÉES. 441 D'entre ces lobes part le tronc, qui est un cône à peu près aussi long que la partie antérieure; mais qui, vers sa base, n'a guère qu'un peu plus du tiers de la largeur de cette partie. A l'extrémité du corps est la caudale. Toute la face supérieure du poisson et toute la queue sont couvertes d'une peau dure et raboteuse, qui se replie même un peu sous ses bords; mais la face inférieure du disque n'a qu'une peau flexible et rude au toucher. La pointe saillante du museau est formée par les frontaux antérieurs. Les yeux sont ouverts aux côtés de sa base, et dirigés latéralement sous cette base. Le profil descend verticalement jusqu'à la bouche, qui est fendue horizontalement au bord inférieur et fort petite, ses angles répon- dant au milieu de chaque œil. La mâchoire supé- rieure, dans l'état de repos, avance un peu plus que l'inférieure; mais elle est protractile, et alors elle descend au-devant, et la bouche se dirige vers le bas. C'est dans la partie verticale du profil, entre la pointe saillante du museau et la bouche, que sont compris les os propres du nez; ils sont assez mo- biles et terminés chacun en petite pointe vers le bas. En dehors d'eux est, de chaque côté, un sous- orbitaire qui donne aussi une petite pointe, et sous lequel se cache le maxillaire; il en sort même à peine quand les intermaxillaires se portent le plus vers le bas. Les dents sont en velours ras sur une bande étroite à chaque mâchoire, au vomer et au palatin. La base de la langue a aussi des âpretés fort sensibles. 442 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Les deux ouvertures de la narine, petites et rappro- chées, sont entre le nasal et le sous-orbitaire, sous l'angle latéral de la base de la pointe du museau. Le dessous de cette base est évasé et creusé d'une fosse triangulaire, de laquelle sort un filet, terminé par un pinceau charnu, seul vestige de ces rayons qui garnis- sent la tête des baudroies et des. chironectes. Les bords extérieurs de la partie antérieure et élargie du corps sont mobiles et soutenus en avant par l'angle du préopercule, et dans le reste de leur lon- gueur par le bord externe d'un très-grand suboper- cule, qui se prolonge en pointe presque jusqu'au coude de la pectorale. Le reste de cet os est à la face supérieure de cette partie élargie. Plus en avant, à cette même face, est l'opercule, dont l'articulation est à quelque distance en arrière de l'œil , et qui se divise en deux branches, aboutissant toutes les deux au subopercule. Plus en dedans est l'os surscapu- laire , qui contribue aussi à soutenir cette face de la partie élargie, mais plus près du milieu du corps. Toutefois nous ne parlons de ces os que pour faire comprendre à quoi répond ce singulier élargisse- ment. On ne distingue aucun d'eux à l'extérieur, sous la peau dure et raboteuse qui les couvre en dessus, connue le reste du corps. L'orifice de la branchie est un trou rond de peu de largeur, percé à la face supérieure dans l'aisselle du pédicule de la pectorale entre les os de ce pédicule et le claviculaire. La peau qui garnit le dessous du corps étant plus flexible que celle du dessus, on sent un peu au travers les rayons branchiostèges sous les côtés du ► CHAP. III. MALTHÉES. 445 grand élargissement. Les pédicules des pectorales viennent à leur suite. La longueur de leur partie sortante, prise du côté de l'aisselle, est du neuvième de celle du corps, et celle de la pectorale, du sixième. Quand elle est bien étendue, sa largeur égale sa lon- gueur. Son bord est un peu arrondi, et elle a onze rayons, dont les bouts dépassent à peine la mem- brane. Au milieu de la longueur de cette même partie sont les ventrales, écartées l'une de l'autre d'une distance qui égale le tiers de la largeur à cet en- droit; elles-mêmes sont plus courtes que celle-là, et ne peuvent atteindre le bord. Leur forme est oblongue, un peu plus élargie vers le bout, où les cinq petites pointes, dans lesquelles se divise leur bord, font reconnaître leurs cinq rayons, que l'on sentirait difficilement au travers de la peau épaisse qui les revêt. L'anus est fort loin derrière les ventrales, pré- cisément au milieu de la longueur totale, et l'anale fort loin derrière l'anus et au-delà du tiers posté- rieur; elle est à peu près de la hauteur du corps; mais sa longueur ne fait pas le tiers de sa hauteur; elle n'a que quatre rayons. La dorsale répond au milieu de l'intervalle qui est entre l'anus et l'anale ; elle est encore plus basse que l'anale, et n'a aussi que quatre rayons, tous simples. La caudale n'a pas tout- à-fait le sixième de la longueur totale; elle est coupée à peu près car- rément, et a neuf rayons; le deuxième, le quatrième et le septième sont revêtus, du côté droit, d'une peau rude , qui les fait paraître de ce côté plus gros que les autres. Il en est de même du côté gauche 444 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. pour le prernier, le troisième et le sixième, d'où il arrive que la caudale, quand elle est repliée, paraît entièrement rude. Toute la peau de ce poisson est finement grenue et chagrinée, et elle est en outre semée de tuber- cules d'une dureté osseuse et de différentes formes et grosseurs. Ceux de la région inférieure et anté- rieure sont à peine plus gros que le reste des petits grains. Derrière l'anus ils deviennent déjà larges et striés en rayons; mais sont encore très-plats à la face supérieure; les plus grands régnent sur le crâne et tout le long du dos, ainsi que sur les bords de la partie élargie : ils s'y touchent les uns les autres et y forment une sorte de cuirasse. Chacun d'eux consiste en un cône à base circulaire, strié en rayons par des lignes grenues et terminé par une pointe conique, qui, dans un grand nombre, est elle-même hérissée de pointes plus petites. Quelques tubercules semblables, mais plus clair-semés et en partie plus petits, se voient sur les parties latérales du grand élargissement, entre la suite continue du milieu et celle des bords, en sorte que sur chacune de ces parties latérales il y a un espace moins garni que le reste. La portion opaque de la cornée, qui, dans la plupart des poissons, tient lieu de paupière supé- rieure, est elle-même chagrinée et garnie, le long de son bord, de très -petits tubercules, semblables à ceux que nous venons de décrire. Les individus bien conserves ont autour des bords de la partie élargie un grand nom- bre de tilamens courts et très-déliés. CHAP. III. MALTHÉES. 445 Tout le dessus de ce poisson paraît d'un brun noirâtre, le dessous d\ui gris-blanc rous- sâtre, les bouts des pectorales noirâtres. Dans le frais le dessus est d'un gris -brun pâle, et le dessous d'un rouge pâle, selon une note que nous trouvons dans les papiers de M. Richard. On dit qu'il peut arriver a dix-huit pouces de longueur; nous n'en avons pas de plus de huit ou dix pouces. La cavité abdominale de ceUe malthée est large, mais déprimée. Il en résulte que les viscères y sont établis presque sur un même plan. L'hjpocondre gauche contient le grand lobe du foie. Le droit est remph par les circonvolutions de l'intestin. L'estomac occupe à peu près la ligne médiane. Le foie est assez gros; son lobe droit est à peine le quart en volume du gauche. Sous lui, on voit la vésicule du fiel, qui est globuleuse, de taille moyenne. Le canal cholédoque est gros et long j il rampe sous le côté interne du lobe droit, passe sur l'œso- phage et reçoit en cet endroit un gros vaisseau hé- patique du lobe gauche; il débouche sur le côté antérieur du duodénum , assez loin du pylore. L'œsophage est assez large, plissé en dedans. L'es- tomac est médiocre, à peu près triangulaire. Sa pointe postérieure atteint à la moitié de l'abdomen. Ses parois sont minces, peu musculeuses, et n'ont 446 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. pas de plis à l'intérieur. On remarque seulement qu'auprès du pylore la veloutée est hérissée de pa- pilles assez grosses. Sur sa face inférieure j du côté gauche, on voit naître une branche très -courte, étroite, mais à parois très-musculeuses. Là se trouve la valvule du pylore. L'intestin qui le suit est très- large; il donne en arrière, de chaque côté de la branche montante, deux petits renflemens, qui peu- vent être considérés comme un vestige d'appen- dices cœcales. Le duodénum se contourne entre les deux branches du foie; ayant dépassé la pointe de l'estomac , son diamètre diminue. L'intestin fait alors deux replis et quelques circonvolutions avant de se rendre à l'anus. Le rectum est un peu élargi. La rate est petite, noire, et placée entre le duodénum et l'esto- mac. Les vésicules des laitances étaient fort peu dé- veloppées au moment où cet individu avait été pris. Les reins sont petits, étroits, placés de chaque côté de l'épine sous l'œsophage ; ils ne se réunissent pas^ ils versent l'urine dans une vessie très-grande. Il n'y a pas de vessie aérienne. Nous avons trouvé de pe- tites coquilles dans l'estomac. Nous avons déjà indiqué, en parlant de l'extérieur, quelques-unes des particularités du squelette. Nous en ajouterons ici quelques autres. La tête proprement dite, c'est-à-dire la face et le crâne, ne prend pas le tiers en longueur de la partie élargie. Le reste est soutenu au miheu par l'épine, et sur les côtés, par les os operculaires et par ceux de l'épaule. L'opercule est fourchu et ressemble presque à une caudale de poisson. Le subopercule a son bord externe arrondi CHAP. III. MALTHÉES. 447 el d'une épaisseur énorme. A sa face supérieure, en avant, esl un sillon large et profond, pour loger le lobe externe de l'opercule. Son bord postérieur est oblique et échancré en arc de cercle. Le lobe externe termine le bord de l'os, et est de même extrêmement gros 5 il se termine en pointe peu aiguë. Le lobe in- terne est plat, large et diiigé vers l'épine. La pointe du lobe interne de l'opercule pose sur son bord interne jusque près de sa pointe. ^ Cette maltbëe a été observée dans les eaux qui baignent les parties chaudes et orientales de l'Amérique : on n'en a jamais reçu de la mer Pacifique, ni de celle des Indes, ni des côtes d'Afrique. Les individus qui font partie de la collection du Jardin des plantes, sont venus de Porto- Rico par M. Plée, de la Martinique par M. Garnot; mais M. Lapilaye en a fait présent d'un bel individu qui avait été péché au banc de Terre-Neuve. Il y a lieu de croire que c'est un de ces poissons des zones intertropicales, qui suivent les eaux chaudes du Gulf-strœm , ce grand courant de l'Atlantique, et qui s'éga- rent ainsi dans des latitudes assez élevées. l.M.Rosenlhal,Tabl.ichthyoI.,pl. i Cj,ûg. 2, donne un squeletle qu'il croil celui du lophius histrio ou d'un chironecte; mais qui est nianifeslement du lophius vespertilio, c'est-à-dire, d'une de nos malthées; et, à ce qu'il nous paraît, de notre mahhœa angusta. 448 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Brown, qui l'a aussi Irès-bieu représentée^ à la Jamaïque, lui transfère mal à propos (p. 4^7)? ^^ pour avoir mal lu l'inscription de la planche de Willughby , le nom de gua- perva, qui appartient au chironecte. Niclîolson, dans son Histoire naturelle de Saint-Domingue (p. 347 et 348, pi. 7, fig. 3), en a décrit et fait graver une qu'il avait prise à Léogane; il ajoute que l'espèce n'y est pas commune. Edwards (pi. 283, fig. 1) ne l'a dessinée que d'après un individu mal conservé, dont il n'assigne pas la patrie. L'original de la figure de Bloch (pi. 1 10) a été fait par Plumier à la Martinique ; elle est assez bonne, mais la couleur est trop claire. Celle de DuliameP pèclie par l'absence de la dorsale et du tentacule sotis la corne du museau, et parce que le peintre a placé des tubercules sur la peau de dessous du disque : le reste n'est pas mal; mais cet auteur connaissait assez peu les poissons pour avoir pris celui-ci (p. 281 ) pour une petite raie de Cayenne; cependant il n'est pas très-certain que cette figure n'appartienne pas à l'espèce à longue corne. 1. His. nat. Jam., pi. 48, %• 5. _ 2. Pèches, 2.' part., sect. 9, pi. i6. CHAP. III. MALTHÉES. A Ad Parra (pi. 4,p-5) Fa très-bien dessinée et décrite à la Havane, où on la nomme diahlo. M. Plée nous apprend qu'à la Martinique on la nomme sourissole, petite licorne de mer et chau^e-soiiris. Mais de tant d'auteurs qui en ont parlé , il n'en est aucun qui nous ait rien appris d'inté- ressant sur son histoire j ils s'accordent seule- ment à dire qu'on ne la mange point. Toutes les figures que nous venons de citer représentent la même espèce , celle que nous avons décrite, et qui a pour caractère parti- culier un museau en forme de corne, dont la longueur est d'à peu près le dixième de la longueur totale, et les ichthyologistes récens n'en reconnaissent point d'autres. Klein seul, d'après une figure de Seba (t. I, pi. -y 4? fig- ^)? ^^i montre un museau beau- coup moins long, a soupçonné' qu'elle pour- rait bien indiquer une deuxième espèce, et en effet, en examinant de près les différentes malthées à museau saillant du Cabinet du Roi, nous y avons reconnu cette seconde espèce, même nous en avons encore découvert deux ou trois autres. 1. Miss. , l, III, p. 17. 12. 29 A^O LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. La Malthée longi rostre ou le Guacucuja DE Margrave. {Malthœa loiigiroslris , nob.) L'espèce que Margrave a fait connaître sous le nom de guacucuja, et que nous venons de reconnaître dans des individus envoyés de Bahia au Musée de Genève, par M. Blanchet, est une espèce distincte, et facile h caractériser par la longueur de sa corne: elle ne fait pas même lout- à-fait le sixième de la longueur du corps, prise de l'extrémité même de la proéminence du museau au bord de la caudale. Les tubercules osseux sont un peu plus rares et moins gros. D. 4; A. 4: C. 9; P. 14; V. 1/5. La couleur paraît avoir été brune dessus, et rouge dessous. Les tempes et les côtés du dos près des pre- mières vertèbres dorsales, les joues et le tour de l'œil, le pourtour des ouvertures branchiales et les côtés de la queue, sont semés de grosses taches noirâtres, entourées de fin liséré blanc, qui forme une sorte de réseau, dont les mailles couvrent les côtés du disque, les nageoires pectorales et la caudale. Nos individus ont onze pouces ; mais nous en avons de plus petits qui ont les mêmes des- sins 5 dont nous ne voyons aucune trace sur les individus de l'espèce précédente. La coloration de ces individus expliquera CHAP. III. MALTHÉES. 451 la description de Margrave, dont on ne se ren- drait pas compte sur les individus de l'espèce des Antilles. ,c In utroque autern latere undecim nigras « hahet maculas lentis magnitudine etjiE^ura, « binas ac binas juxta se positas : prope in- « sertionem utriuscpie brancliii etiam niidtas « ejusmodi maculas nigras liabet et ibidem « in quolibet latere for amen par<^mm in corpus « in swnma, in lateribus , circa oculos, in ex- « tremis branchiis, mire variegatur punctulis « albisy nigris, lineisque itidem albis et nims, « ut vix exprimi posset a pictore. '' Nous avons des individus qui offrent des variétés de couleurs assez grandes : un d'eux n'a de taches et de lignes blanches qu'auprès des ouïes; mais la longueur de la corne rostrale est constante. Margrave l'a décrite le premier au Brésil *, et en a donné une figure un peu grossière , mais au total assez exacte. Les Brésiliens, selon cet auteur, la nomment guacu-cuja: ce nom est écrit dans le livre du prince et dans celui de Mentzel, guacucua, et cette figure du Liber Mentzelii s'accorde parfaitement avec notre espèce; mais ce n'est point de ces recueils que 1. Bras. , p. i45. 452 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. la figure de Margrave est prise, bien que celles qu'ils contiennent fussent beaucoup meilleures. Willugbby en a une plus soignée (pi. E, t. II, fig. 3); mais il emprunte de Margrave sa des- cription (p. 89'). La Malthée a nez court. {Malthœa nasuta, nob.; Malthœa cuhifrons, Ricliarclson.) Nous en avons une autre espèce à museau court, qui a été fort mal représentée par Seba (t. I, pi. 74, fig. 2). Le museau n'a que le quinzième de la longueur totale. Les disques écailleux qui hérissent et arment sa surface, ne sont pas des cônes réguliers comme dans l'espèce précédente; mais des disques à peu près plats ou très -peu élevés, du milieu desquels s'élève une pointe conique, souvent aussi divisée en pointes plus petites. Une différence très-sensible , même à l'extérieur par le tact, c'est que le suboper- cule, qui, dans la première espèce avait son lobe externe aussi large que l'interne, et beaucoup plus gros, ainsi que tout le bord, l'a, dans celle-ci, beaucoup plus étroit et plus mince. Seba dit que son individu venait de Curaçao ; mais elle se porte bien plus au Nord. M.Richardson n'a pas reconnu notre malthœa nasuta dans la mauvaise figure de Seba, et il L Et non page 218, comme disent Bloch et ceux qui l'ont copie. CHAP, m. MALTHÉES. 4S3 en a publié une bonne figure et une descrip- tion très -complète dans son Faiina horealis ainericana (pi. 96), et la nomme malthœa cii- hifrons (p. io3). Il a reçu l'individu qu'il a dé- crit, de M. Audubon, qui le tenait de la côte de Labrador. On n'a rien appris de ses mœurs; son estomac était rempli de petits crustacés. Nous en avoirs reçu de la Martinique par M. Keraudren , de Saint-Domingue par M. Pi- chon, et de New-York par M. Milbert. On pourrait croire que leurs différences tien- nent au sexe, et nous engageons les voyageurs à examiner ce qu'il peut y avoir de vrai dans ce soupçon; mais on ne peut pas l'étendre aux espèces qui vont suivre. La Malthée a stigmates. {^Malthœa notata^ nob.) MM. Leschenault et Doumerc nous ont envoyé de Surinam quelques individus d'une petite espèce, à museau à peu près dans la proportion de la précédente, à bord du préopercule presque aussi gros que dans notre première, dont les écussons sont moins nom- breux etmoing saillans que dans l'une et dans l'autre, sur le dos et sur les côtés de la partie élargie, et qui se distingue surtout par trois ou quatre petites taches rondes et noires, placées de chaque côté de 454- LIVRE XV» PECTORALES PÉDICULÉES. l'épine, vers le milieu de la partie élargie, à égale distance de l'œil et de l'orifice branchial. Les individus ont trois pouces et demi. Un autre individu, de même taille, nous a été envoyé de Nevs^-York, par M. Milbert. ha Malthée étroite. {Malthœa angusta,Tioh.) D'autres maltliées , venues aussi de la Guyane hollandaise, ont le museau encore plus court, de moins du ving- tième de la longueur totale. Leur armure est aussi faible que celle de l'espèce précédente; mais elles n'ont pas de taches noires, et il nous paraît que leur partie antérieure n'a pas la faculté de s'élargir autant que les autres. Les individus sont longs de quatre pouces. C'est d'un individu de cette espèce que nous parait pris le squelette représente dans Hosentbal (pi. 19, (ig. 1). La Malthée tronquée. {Malthœa Iriincala, nob.) Nous en avons enfin une dont l'orisine n'est malheureusement pas indiquée avec précision, mais que nous avons lieu de croire aussi des mers chaudes de l'Amérique, CHAP. m. MALTHÉES. A^^ Son museau est non - seulement plus court que clans toutes les autres , mais ne s'aiguise nullement en pointe, et est au contraire en forme d'arc, à peu près arrondi. Ses disques écailleux, un peu plus forts que dans les deux espèces précédentes, n'égalent pas ceux des deux premières. Son subopercule est moins profondément échancré que dans les autres, et le bord en est moins gros. Notre individu est long de cinq pouces. Les nombres des rayons sont les mêmes dans toutes ces malthëes. DES HALIEUTÉES { H jlieut^ j , noh.). M. Cuvier n'a fait attention, pour diviser les lophius d'Artedi et de Linné en trois genres, qu'à la figure plus ou moins extraordinaire du corps de ces difFérens poissons, et au nombre et à l'arrangement des nageoires dorsales. Ce qui m'étonne, c'est qu'il n'ait pas examiné avec plus de soin la disposition des dents, qui pou- vaient lui fournir de bons caractères pour di- viser cette famille de poissons. Il n'aurait pas manqué d'établir un quatrième genre dans ce groupe, en séparant des malthées, qui sont toutes originaires d'Amérique , un poisson de la mer des Indes, qui leur ressemble par la nature de ses tégumens; mais qui s'en éloigne par la 456 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. forme arrondie de son corps, parle manque de prolongement du museau, et qui a le palais lisse et sans aucunes dents. La faculté de pê- cher, attribuée généralement au lophius pisca- torius, m'a suggéré le nom générique que j'ai adopté pour ce poisson démembré des lopliies. De àiXteix, pèche, d'où vient xAisùç ou ÙAisvrriS) pécheur, j'ai formé le nom d'halieutée. On n'en connaît encore qu'une espèce, dé- crite depuis long- temps comme une baudroie, mais sous différens noms spécifiques. Z/'Halieutée étoilée. {Halieutœa slellata, nobJ) Elle est originaire des mers orientales , élar- gie en avant, et couverte d'une peau tubercu- leuse comme celle des malthées d'Amérique; mais dont la partie élargie, au lieu de la forme d'un cœur, a presque celle d'un cercle, où sur- tout le museau n'est aucunement avancé ni aiguisé, mais fait partie de la courbe générale. M. Wahl en a donné en 1797, d'après un individu venu de la Chine, une description 1. LopJiius siellaius, Wahl, Mém. de la Soc. d'hist. nat. de Copenh., t. IV, cah. i , p. 214, pi- 3, fig. 5 et 4 j Lophie Faujas , Lacép. , t. I; Lophius muricat us, Shayv , Gen. zooh, t. V, 2/part., p. 082, pi. 162 j Le Diable de mer rouge du Japon, Tilesius, Vojage de Krusenstern, pi. 61, fig. 5 et 4. CHAP. III. HALIEUTÉES. 457 détaillée et une bonne ligure, dans le premier cahier du quatrième volume des Mémoires de la société des naturalistes de Copenhague (p. 2i4j pi- 3, fig. 3 et 4)? sous le nom de lophius stellatus, sous lequel l'espèce a passé, dans le système de Bloch (édit. de Schn., p. 142). En 1798, M. de Lacépède, qui ne connais- sait point le mémoire de Wahl, en a donné une autre description (t. I, p. 3i8), et l'a nommée lophie Faujas. C'est de lui que Sliaw a emprunté son article sur cette espèce ^; mais il en a changé le nom en celui de lophius muricatus , sans motif, et sans rappeler le nom de Wahl, quoique la date de son volume, qui est de 1 8o4? lui eût bien laissé le temps d'avoir connaissance de l'écrit du naturaliste danois. Je pense que c'est le même poisson qui est gravé dans le Voyage de Rrusenstern (pL 61), sous le nom de diable de mer rouge du Japon; du moins sa figure ne diffère-t-elle que par un peu plus de largeur de la partie antérieure, ce qui peut tenir à une légère contraction des parties mobiles qui la soutiennent. La partie antérieure, aplatie et élargie de ce pois- son, est aussi large que longue, et a le contour cir- ■* — -■ ■ _^_ Il 1. Gen. zool., t. V, part. 2 , p. 582, pi. 162. 458 LIVRE XV. PECTORALES PEDICULÉES. culaire, produisant seulement de chaque côté en arrière une légère proéminence , d'où sort la pecto- rale. La partie postérieure et rétrécie , y compris la caudale, est d'un tiers moins longue que l'anté- rieure et trois fois moins large même à sa base; elle s'amincit encore en arrière. La bouche est fendue sous le bord antérieur, et très -peu arquée. Sa lar- geur, d'un angle à l'autre, fait à peu près le tiers du grand disque circulaire. Les dents sont en velours ras très-fin, encore plus que celui des malthées, sur les deux mâchoires; mais je n'en vois aucunes sur les os du palais ni sur le chevron du vomer. Le museau n'avance point au- delà de la bouche, et dans sa hauteur, au-dessus de la mâchoire supérieure, est un creux où se loge un pédicule terminé par un tubercule divisé en trois lobes arrondis et analogue au même organe dans les malthées. Les deux ouvertures de la narine sont percées de chaque côté de ce creux. L'antérieure ou plutôt l'inférieure est légèrement tubuleuse. Les yeux sont à la face supérieure, près du bord antérieur, écartés l'un de l'autre de quatre de leurs diamètres. L'intervalle qui les sépare est plane, mais leur orbite se relève un peu, et ils se dirigent un peu en dehors. Les orifices des branchies s'ouvrent aussi à la face supérieure, un peu en avant de l'angle que le bord postérieur du grand disque fait avec le corps. Ce sont deux trous ovales et assez petits. La pectorale sort du bord latéral et postérieur du disque. Dans l'état de repos, elle est dans un plan horizontal, un CHAP. III. HALIEUTÉES. 4b9 peu dirigé en avant. Ses rayons antérieurs ou in- ternes sont les plus longs , et les suivans se raccour- cissent par degrés. J'en compte en tout treize. Les ventrales s'attachent sous le milieu du grand disque, à une distance l'une de l'autre qui égale le tiers de sa largeur ; elles-mêmes sont plus courtes , étroites , à cinq rayons à peu près égaux. La dorsale est sur la naissance de la partie rétrécie étroite et composée de quatre rayons. L'anus est à peine plus en avant que la dorsale; mais l'anale est un peu plus en ar- rière; elle n'a aussi que quatre rayons. La caudale fait à peu près le cinquième de la longueur totale, et a neuf rayons ; elle est coupée carrément. D. 4^ A. 4; C. 9; P. 13; V. 1/5. Tout le dessus du corps de ce poisson est hérissé de petites pointes coniques et droites, qui s'implantent dans la peau par trois ou quatre petites racines, en sorte que leur base paraît comme étoilée. Le dessous est lisse, mais semé, de très-petits grains épars et distans les uns des autres. Tout autour de la circonférence du disque, sous ses bords latéraux, autour de la bouche et sur les côtés de la partie rétrécie, sont des pinceaux de filamens charnus, qui n'excèdent pas en longueur les petites pointes dont le corps est hérissé. On voit aussi quelques-uns de ces fila- mens sur l'œil , à la paupière et autour des orifices des branchies. Les rayons branchiostèges se mon- trent au travers de la peau, à la face inférieure, entre le bord du disque et la ventrale. Il y en a six , qui paraissent assez forts, et dont les troisième, quatrième et cinquième, s'étendent jusque vers la base de la pectorale. 4C0 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Dans la liqueur , ce poisson paraît , en dessus , d'un gris roussâtre, avec quelques marbrures nua- geuses d'un roux vineux. Le dessous est blanchâtre. D'après la figure de Krusenstern, le poisson frais est d'un roux un peu tirant à l'aurore, avec des marbrures plus pâles. Les nageoires sont teintes de rose ou de pourpre pâle. Nous n'avons pu encore faire l'examen de la splanclinologie ou de l'ostëologie de ce singu- lier poisson, dont nos individus nous viennent généralement desséchés et mis au milieu de boîtes d'insectes de la Chine. Sa grandeur ne paraît pas devenir considé- rable. L'individu de M. Wahl n'avait que trois pouces. Celui qui a servi de modèle à M. de Lacépède, n'est pas plus grand. Celui de M. Kru- senstern en a près de cinq; et nous nous en sommes procuré récemment un de cette taille. \ CHAP. IV. BATRACHOÏDES. ^6l CHAPITRE lY. Des Batrachoïdes {BatracJius , Sclm.). Voici un genre de poissons qui a été bien diversement ballotté. Les Hollandais de Batavia avaient appliqué à une de ses espèces le nom de knorrlian, qui à la lettre signifie coq bruyant, coq gro- gnant ^ et qui appartient proprement au petit coq de bruyère [tetrao tetrix, Lin.); mais que l'on a aussi donné en Europe à différens poisson du genre des trigles ou grondins. Les Hollandais, comme à leur ordinaire, l'ont transporté soit à des oiseaux, soit à des pois- sons de leurs colonies, et ils nomment ainsi une outarde du Cap [otis cajfra^), et diverses sortes de cottes ou de scorpènes. C'est Nieuliof qui l'a appliqué à un poisson du genre actuel, probablement à cause de la ressemblance qu'il lui trouvait avec les acan- thoptérygiens de la famille des percoïdes à tête cuirassée, et Willughby l'a latinisé en galliis grunniens. C'est ainsi que l'épithète de grun- niens est restée à l'une de ses espèces, et nous 1. C'est l'oiseau que les ornithologistes ont nommé À:or/iO« par corruption de la dénomination hollandaise. 462 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. pouvons dire même qu'on lui avait supposé, d'après ce nom, la faculté de faire entendre un son plutôt qu'on ne l'avait constatée, jus- qu'au moment où M. Buclianan s'en est assuré par lui-même. Linné, qui en connaissait deux espèces, si semblables entre elles qu'il faut de fattention pour les distinguer, les avait placées dans deux genres très-difFérens : il nommait l'une gadiis tau, et l'autre cottus grimniens. M. de Lacépècle sépara le gadus tau des gades , et le plaça dans son genre batrachoïde* ; mais en l'associant à un poisson d'une tout autre famille, le hlennius raninus de Linné, ou gadus raninus de Mùller^, et en laissant toujours le cottus grunniens parmi les cot- tes.^ C'est Bloch qui, dans son ouvrage posthume àviSjstenia^y a rapproché ces deux poissons et a établi pour eux son geme hatrachus, mais en le gâtant , comme à son ordinaire , par l'in- troduction d'espèces qui n'y appartiennent point; telles que le calUonjmus indicus de Linné, qui est un platycéphale, le même que l'insidiateur; le guanna de Parra, qui est un . 1. Laccpède,t.ll,p.45i. — 2. /i/J.,t.II,p. 455. — 3. B/û?., t. III, p. 252. — 4. Edit.Schn., p. 42. CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 465 eleotris; qui parait encore sous d'autres noms, ainsi que nous l'avons vu à son article. Lorsque l'on a écarte du genre hatrachus les espèces hétérogènes, il reste encore un certain nombre de poissons, remarquables par leur large tête plate; par leur gueule ample- ment fendue, le plus souvent garnie tout au- tour de lambeaux cutanés; par une première dorsale très -petite et à peine sortant de la peau; par des pectorales portées sur des bras courts et plats; par des ventrales jugulaires à trois rayons, dont le premier est alongé et élargi en forme d'épée, au moyen de la mem- brane qui le revêt. Ils ont des dents aux mâ- choires, au-devant du vomer et aux palatins; six rayons aux ouïes, qui ne sont pas fendues jusque sous la gorge; une dorsale et une anale longues et basses. Un caractère générique fort singulier, con- siste en ce que leur sous -opercule est aussi considérable que l'opercule , et qu'il se termine également par de fortes épines, auxquelles se joi- gnent même des branches cartilagineuses ; mais leur préopercule n'a point d'armure. L'absence du sous-orbitaire , que je regarde comme un caractère de famille , mérite aussi une attention toute particulière; car on ne saurait prendre pour analogue de cette pièce osseuse la lame ^ 464 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. couchée sur le haut du maxillaire, laquelle est une division de cet os que l'on rencontre dans un grand nombre de poissons, notam- ment dans les liolocentrimi , qui ont un sous- orbitaire très-développé. Leur canal intestinal n'a ni cul -de -sac stomacal ni ccecums au pylore; leur vessie natatoire est très -remarquable par sa forme profondément fourchue en avant, par les li- gamens grêles qui l'attachent aux premières vertèbres, et par les muscles qui la revêtent sur les côtés. La véritable place de ces poissons est assez difficile à assigner, et même je ne vois guère que les baudroies avec lesquelles ils aient quelques rapports. La grandeur de leur gueule, les ten- tacules dont elle est entourée, le même nom- bre de rayons à leurs ouïes; leur membrane branchiostège, s'unissant assez haut au côté de la gorge; la position jugulaire de leurs ventrales; l'absence du sous- orbitaire; l'importance de leur subopercule, et le prolongement des os du carpe, qui fournissent une espèce de bras à leurs pectorales, sont les bases sur lesquelles ces rap- ports s'établissent; et les différences qui s'élèvent contre eux, prises de l'absence de vessie nata- toire dans les baudroies, et de la nature moins solide de leur squelette, ne sont pas telles que CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 465 l'on n'en voie d'aussi fortes dans beaucoup d'autres familles naturelles. Quelques ichthyologistes ont cru devoir faire remarquer des affinités entre les batra- clioïdes etlesuranoscopes;mais ceux-ci devien- nent bien diffërens quand on fait attention à leur organisation intérieure, et qu'on ne s'ar- rête pas aux ressemblances extérieures ; encore les similitudes se réduisent-elles à la configu- ration externe de la tête; mais le crâne nu et osseux des uranoscopes, les fortes épines de l'épaule , l'absence de ces armures aux opercu- les, la pectorale non pédiculée, le canal intes- tinal pourvu de cœcums, deviennent des ca- ractères qui démontrent une organisation fort différente entre eux et nos batrachoïdes. Il y a de ces hatrachus dans les deux océans : dès le dix-septième siècle , Margrave en a décrit deux au Brésil, et Nieuhof un dans les Indes orientales; mais l'Europe n'en possède point. On peut les subdiviser selon que leur peau est nue ou écailleuse, et selon qu'ils ont ou non des lambeaux ou barbillons autour des mâchoires. 12. 3o 466 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Le Batrachoïde grognant. {Batrachus grunniens , Bl. ^) Nous décrirons d'abord l'espèce la plus ré- pandue dans la mer des Indes , et qui nous paraît avoir etë représentée par Seba et par Bloch, en même temps qu'il nous semble que c'est une de celles que Linné a eues sous les yeux lorsqu'il a fait son article du cottus grun- niens: c'est à elle que nous réserverons ce nom spécifique, bien que la faculté qu'il indique soit probablement commune au genre tout entier. Elle a , comme toutes les autres, la tête et le devant du corps larges et déprimés, la queue amincie et comprimée, la gueule très-fendue, et la mâchoire inférieure plus avancée que l'autre. Sa hauteur aux pectorales est plus de six fois dans sa longueur, et sa largeur, au même endroit, n'y est guère que trois fois et demie. Sa tête s'élargit même encore un peu entre les joues. Sa longueur fait le tiers de la longueur totale. Le diamètre de l'œil est du sixième de la longueur de la tête, et il n'est distant du bout du museau que de la longueur de son diamètre. La distance d'un œil à l'autre n'est 1. Seba, t. m, pi. 28a; Bloch, p. 179. CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 467 que d'un diamètre et demi. La fente de la bouche va jusque sous le bord postérieur de l'orbite; elle est presque horizontale. La mâchoire supérieure, courbée en arc de cercle , a d'un angle à l'autre environ la moitié de la longueur de la tête. Les inter- maxillaires ne s'étendant pas à toute sa largeur, les maxillaires se complètent vers les angles. L'inférieure est moins obtuse et avance davantage. Les dents intermaxillaires sont en velours , et ne prennent guère que moitié de la largeur de la bouche; mais il y a en arrière d'elles une rangée de dents coniques, courtes, serrées, implantées dans le bord antérieur du vomeret les bords externes des palatins, laquelle suit la courbure de la mâchoire supérieure dans toute son étendue. L'inférieure a une rangée de dents semblables, qui est double dans son milieu. Il n'y a point de vraie langue, et le plancher de la bouche est lisse et uni. Le dessus de la tête est en- tièrement plat. L'orbite ne s'élève point au-dessus. L'œil, quoique très-près du plan supérieur, se dirige sur le côté. Il n'y a pas de sous-orbitaire, et la joue est charnue et renflée. Le préopercule ne se marque ni par des épines ni par des dentelures; mais on sent dans la membrane de la valve operculaire trois épines, dont les deux supérieures appartiennent à l'opercule, et la troisième, au sous -opercule, qui en a encore une cartilagineuse. Ce sous -opercule (chose remarquable) est aussi grand que l'opercule, et contribue presque autant que lui à la formation de la valve qui ferme l'ouïe. Chacun de ces os a de plus une pointe dirigée vers le bas; mais qui demeure 468 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. cachée sous les tégumens et ne se sent pas même au doigt. L'ouverture de l'ouïe est verticale et de peu d'étendue. La membrane brancliioslège s'unissant à la peau dès le devant de la base de la pectorale , et en dehors et en arrière de la ventrale, il n'y a, par con- séquent, point d'isthme ou de pédicule pectoral apparent à l'extérieur. Tout le dessous de cette large tête forme une gorge unie et plane. Néanmoins on sent sous la peau les six rayons assez développés de la membrane des ouïes. La pectorale est ovale , un peu pointue et assez courte; elle n'a que le cinquième de la longueur totale. Sa base, formée par le carpe, est charnue sur environ un quart de sa longueur; elle a vingt- trois ou vingt-quatre rayons, dont les mitoyens sont les plus longs, et dont les extrêmes sont très-courts et difficiles à compter. Les ventrales sont insérées sous la gorge et au-des- sous de l'opercule, bien avant la sortie des pectorales ; leurs pointes atteignent à peine la base des rayons de celles-ci. Le premier rayon est épineux et très-court; mais il s'unit intimement au premier rayon mou, et les deux ensemble sont revêtus d'une membrane pointue , aplatie et élargie, qui les prolonge du double et leur donne la forme d'une lame de sabre; le dessous de cette lame est garni de petits feuillets transversaux, ce qui donne à ce rayon l'apparence d'une ventouse. Il y a ensuite un deuxième rayon mou, fourchu et très-bran- chu, mais dont les ramifications sont presque cachées dans l'épaisseur de la membrane. La première dorsale se cache si bien sous la peau et dans les chairs, qu'il CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 469 faut chercher avec le doigt les pointes de ses rayons, pour apercevoir son existence, et cependant elle se compose de trois épines fortes et pointues, mais cour- tes , qui répondent à l'aplomb tiré sur la base des pecto- rales, et qui ne se voient bien que dans le squelette. La seconde est longue et basse , et a vingt rayons mous et rameux, et quelquefois vingt et un ou vingt-deux. ^ L'anale répond à peu près aux trois quarts pos- térieurs de cette seconde dorsale; elle est de même longue et basse, et a seize rayons. La portion de queue en arrière de ces deux nageoires est très-courte, et n'a en hauteur que le douzième de la longueur du corps. Elle se termine par une caudale ovale, qui en fait le septième, et qui compte douze ou treize rayons, dont les mitoyens sont les plus longs. On doit donc exprimer ces nombres comme il suit: B. 6 ; D. 3 — 20 ou 21 î A. 16 ; C. 13 ; P. 23 ; V. 1/2. Toute la peau de ce poisson est nue, lisse, molle et spongieuse. La ligne latérale ordinaire se marque par une suite de pores, qui marche parallèlement au dos, à peu près au tiers supérieur de la hauteur, en com- mençant au-dessus de l'opercule. Une autre série de pores, toute semblable, commence sous l'ouïe, passe sous la pectorale, et marche ainsi au tiers inférieur, parallèlement à la ligne du ventre. Ces deux lignes ne se terminent qu'à la caudale. La tête de ce batrachoide est garnie de beaucoup 1. On voit par ces nombres que nous avons ici l'espèce de Bloch , mais seulement la variété /3 de celle de Linné. La variété a. est d'une autre espèce, probablement de celle qui suit. 470 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. de lambeaux cutanés, déchiquetés, ciliés, ou divisés en filamens. On en compte six ou sept sous chaque branche de la mâchoire inférieure; trois ou quatre le long de chaque maxillaire; six ou sept font le tour de la joue et répondent au préopercule; quelques petits flottent sur la joue même près du maxillaire; un assez fort se voit sur l'orbite et un petit sur la narine, etc. : au bas de la joue, derrière la commissure des mâchoires, s'ouvre un trou qui pénètre assez avant. Sa couleur est en dessus un brun clair, varié par des marbrures de diverses nuances de brun foncé, nuageuses, très -irrégulières, formant en partie des espèces de bandes incomplètes sur le corps. La gorge, la poitrine et le ventre, sont blancs. La dorsale est blanchâtre, marquée de six ou sept bandes verticales brunes. L'anale en a quatre ou cinq semblables. Il y en a quatre ou cinq sur le premier rayon de la ventrale. La caudale en a aussi cinq ou six. Des lignes tranversales, serrées, occupent toute la pectorale. M. Dussumier nous fait connaître que les mar- brures du poisson frais sont verdâtres sur un fond brun. Sa grandeur est de huit à dix pouces, et va quel- quefois jusqu'à douze et treize. L'examen anatomique de la cavité abdominale nous a fait remarquer qu'elle est divisée en plusieurs fosses; les deux plus notables sont situées de chaque côté des vertèbres, dont le corps fait une saillie assez grande pour les séparer, et elles sont limitées en avant par une bride transversale, formée par un repli élevé CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 471 du péritoine : dans ces deux fosses creusées à la partie supérieure et antérieure de la cavité du ventre, sont situées les deux divisions de la vessie aérienne. A l'ouverture de l'abdomen on voit le foie for- mant une masse jaune, assez grosse, dont la partie droite se prolonge en une longue languette divisée, et qui passe sur la porlion droite de la vessie aérienne. La pointe de ce lobe droit dépasse même la vessie. L'estomac est petit, arrondi. L'intestin fait plusieurs ondulations courtes; la rate est située entre la vessie aérienne et le canal intestinal : elle est ob- longue et noirâtre. La vessie natatoire est fort curieuse dans ce genre. Elle^ est divisée en deux vessies secondaires, égales entre elles, ovoïdes, plus longues que larges, et réunies par un canal transversal et très -étroit par leur partie postérieure. Les parois de chaque vessie sont argentées et fibreuses sur les faces supérieures et inférieures, et musculeuses sur les faces latérales. La direction des fibres de ces nmscles est perpendiculaire au grand diamètre de la vessie. Je ne vois pas qu'elles donnent en avant des filets qui se dirigent vers le crâne. Entre les deux divisions des muscles de la vessie sont logés les deux grands muscles suspen- seurs et rétracteurs du pharynx et de l'œsophage. Cet appareil musculaire de la vessie doit contribuer, comme dans les autres poissons grondeurs, au bruit que les batrachoïdes font entendre. La femelle, que je dissèque, est longue de cinq pouces; ses œufs ont le diamètre de grains de chenevis. Entre ces gros œufs on en voit de plus petits ; mais rien ne montre que 472 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULE ES. les poissons soient vivipares, el je ne trouve non plus ce fait avancé par aucun observateur. Les reins sont courts et peu gros; ils commencent d'abord à être divisés et logés dans la fosse supé- rieure de l'abdomen ; ils se réunissent après avoir dépassé la vessie aérienne, et donnent par un long uretère dans une vessie urinaire, divisée en cul-de-sac oblong, et se montrent dans l'ouverture du ventre comme deux cœcums, flottant le long de chaque côté des organes génitaux. Nous avons un sqLielette de ce hatrachus grunniens. Les particularités de son ostëo- logie sont les mêmes que dans le hatj\achus surinamensis. Nous renvoyons à l'article de celui-ci j dont nous décrirons le squelette en détail. Qu'il nous suffise de remarquer ici que le hatrachus grunniens a deux filets cartilagineux au-dessus de l'épine de son préopercule, qu'on lui compte vingt- neuf vertèbres, dont douze abdominales, et que les osselets alongés de son carpe sont au nombre de quatre seulement. Seba a donné une assez bonne figure de cette espèce (t. III, pi. 28, fig. 4)? celle de Bloch (pi. 179) est peu exacte pour le détail des tentacules, et ne marque pas bien la sin- gulière structure de la ventrale, ni les deux lignes latérales; celle de M. Buchanan, sans CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 473 être parfaite, est encore préférable à toutes les autres. Nous avons reçu un de nos individus de Java par M. Leschenault. M. Kubl en a aussi envoyé de cette île au Musée de Hollande. Nous ne trouvons non plus aucune diffé- rence spécifique entre notre poisson et le ba- trachoïde Gangene de M. Buchanan^; car nous ne considérons que comme des inad- vertances ce que dit l'auteur, que son poisson n'a que quatre rayons aux ouïes, et manque de ligne latérale. Il faut de l'attention pour découvrir les pores qui composent les deux lignes que nous avons décrites, et on a peine à compter sans dissection les rayons des ouïes. M. Buchanan a pris ce poisson aux bouches du Gange, et il nous apprend que lorsqu'on l'effraie, il fait entendre un craquement remar- quable. M. Dussumier dit qu'on le mange à Bom- bay. Cet habile observateur a fait attention à la singulière épaisseur du premier rayon de la ventrale, et il pense que le poisson peut faire le vide au moyen de l'épatement de ce rayon , et se fixer aux corps sous-marins. L'espèce paraît donc habiter toutes les parties 1. Poiss. du Gange, pi. i4 > %• S. <^. 474 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. de la mer des Indes; mais c'est pour l'avoir confondue avec quelqu'une de celles qui vont suivre, que presque tous les naturalistes ont répété qu'elle se trouve aussi en Amérique. Cela n'est pas vrai, du moins de la côte orientale ou atlantique, où Fou trouve cependant une es- pèce dont la ressemblance était de nature à faire illusion. Le Batrachoïde de Dussumier. {Batrachus Dussiimierij nob.) La mer des Indes possède un autre batra- choïde, qui diffère non-seulement par ses cou- leurs, mais par des barbillons beaucoup moins apparens et moins nombreux, et c'est celui-là que nous croyons avoir été vu et représenté par Nieuhof. M. Dussumier vient de nous l'apporter de la côte du Malabar. Ce qui le distingue par-dessus tout, c'est d'avoir au palais et à la mâchoire inférieure des bandes étroiies de dents en velours, au lieu de dents fortes et coniques. Il y a sept ou huit petits barbillons sous la mâ- choire inférieure; un autre, assez petit, au bout du maxillaire; trois à peine visibles au bas du préo- percule, et un fort petit sur l'œil. Je n'aperçois point i de trou au bas de sa joue. Toute sa partie supérieure CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 475 est d'un brun très- foncé j le reste, d'un gris -brun olivâtre; trois larges bandes mal terminées descen- dent du brun-noir du dos sur l'olivâtre des flancs. Ses teintes, vues fraîches par M. Dussumier, sont un verdàtre foncé, marbré de jaune sale. Les nageoires sont de ce même gris olivâtre et noircissent vers leurs bords, sans lignes distinctes. Du reste, ses formes et les nombres de ses rayons sont les mêmes qu'à la première espèce. L'examen anatomique de ce poisson con- firme notre distinction spécifique. Nous lui trouvons un foie plus large, plus mince, et donnant de sa partie droite et antérieure un pre- mier lobe mince, subdivisé lui-même ou comme frangé, et dont l'angle postérieur passe sur la vessie aérienne. Sous ce lobe on voit le foie se prolonger en une lame, aussi très -mince, peu découpée, qui va sous la vessie jusque vers le fond de l'abdomen, et recouvre la plus grande partie de la laitance droite. La vésicule du fiel, suspendue à de nombreux vais- seaux liépato - cystiques , est grosse et arrondie. Son canal cholédoque est assez gros, et donne dans le duodénum, à quatre lignes en arrière du pylore. L'estomac est grand ,pyriforme; mais aplati en dessus, convexe en dessous, et pointu du côté du pylore. Ses parois musculaires sont très-épaisses; sa veloutée est chargée de plis ou de grosses rides longitudi- nales ; il n'y a point de cœcums au pylore. Le duo- dénum sort de la face inférieure de l'estomac; son diamètre égale au moins celui de l'estomac. Ses pa- 476 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. rois sont très -minces, et la veloutée a des mailles hexagonales. L'intestin, après avoir fait quelques ondulations et s'être rétréci de plus de moitié, se rend au rectum, qui est court, droit, à peine plus large. Les laitances, quoique paraissant pleines, sont deux corps cylin- driques, grêles et longs de la moitié de la cavité abdominale. La vessie aérienne, divisée en deux comme celle du précédent, est plus courte; ses parois muscu- laires sont recouvertes à l'extérieur d'une plus grande membrane fibreuse et argentée. La membrane propre, interne, est très-mince et argentée. Les corps rouges se réduisent à deux petits points , ils reçoivent une artère assez forte, qui sort de l'artère mésentérique, en arrière de la naissance de la vessie, se porte sur le devant de son extrémité arrondie, fait un long trajet entre les fibres nmsculeuses de la paroi externe, se ramifie plusieurs fois, et a l'air de se terminer par une patte d'oie, en pénétrant dans l'intérieur de l'organe. Je fais cette remarque, parce qu'on pourrait facilement prendre ce vaisseau pour un filet ou une corne fournie par la vessie elle-même , et qui remon- terait vers le crâne. Les reins sont gros, à peu près semblables à ceux de l'espèce précédente, et donnent dans une vessie urinaire faite de la même manière, mais dont les cornes sont plus longues. Sa taille paraît aussi la même. Nos individus sont longs de huit à dix pouces. La figure de Nieuhof, reproduite par Wil- CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 477 lughby ^ est grossière et faite d'après un indi- vidu desséché. Le lophius dubius de L White^ ne nous paraît aussi qu'un individu desséché de cette espèce : il en a la forme, la couleur; on y aperçoit même un vestige de lambeau. Le Batrachoïde moucheté. {Batrachus apiatuSy nob.) Les mers du Cap nourrissent aussi leur ba- trachoïde, et qui est très-facile à confondre avec celui de l'Inde , à cause de la distribution des marbrures. Sa tête, déprimée, égale en longueur sa largeur d'un opercule à l'autre, et est comprise trois fois dans la longueur du corps, sans compter la cau- dale; celle-ci, ronde, est six fois et demie dans la longueur totale. Il n'y a point de tentacule sur l'œil; point à la peau qui recouvre l'angle de l'intermaxil- laire. On voit cependant quelques traces de lambeaux le long du bord de la joue, au-dessous de l'œil et sur l'opercule; en dessous, il n'y a que de très -petites franges cutanées, et elles sont peu nombreuses. Ce qui caractérise déjà cette espèce à l'extérieur, c'est le réseau qui est jeté sur toute la partie antérieure de la tête, et qui ressemble tout-à-fait à un gâteau d'abeilles. Les dents sont obtuses sur les mâchoires. Sur le 1. Will., y4pp. f^l. 4 jfig- 1. —2. Voy.ioSouikwales,^, 265. 478 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. chevron ciu vomer et sur la partie antérieure du pa- latin, il y a une bande étroite et courte de petites dents arrondies en tubercules mousses. On ne trouve que trois épines à l'angle de l'oper- cule. D. 3 — 20; A. 17; C. 13; V. 3. Tout ce poisson est marbré par de grandes taches noires et bien tranchées sur un fond jaunâtre. Ces marbrures forment deux grandes taches irrégulières sur les tempes, qui descendent sur les côtés du corps. Les autres forment quatre bandes transversales plus ou moins foncées. La troisième paraît devoir être constamment divisée en deux. Sur le bout du museau les marbrures forment une sorte de réseau. Les nageoires sont tachetées de noir. M. Delalande nous a fait connaître l'exis- tence de cette espèce au Cap , en en rappor- tant un individu de deux pouces et demi de long; depuis, M. Raynaud l'a retrouvé dans cette mer, et y a pris un individu long de quatre pouces. Le Batrachoïde tau. (Batrachus taiij nob.; Gadus tau y Linn.j Lophius bufo, Mitchill.) Nous venons de dire que les côtes de l'A- mérique sur l'Atlantique possèdent un batra- choïde très-semblable à celui des Indes. CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 479 Il en a, en effet, toutes les formes jusque dans le moindre détail. Sa peau, ses barbillons, les lam- beaux de ses sourcils, sont semblables; mais il a vingt -six ou ving-sept rayons à la deuxième dor- sale; et vingt-deux à l'anale. Ses dents sont un peu plus fortes. Les épines de sa première dorsale, plus saillantes, forment une véritable petite nageoire. Les pectorales sont rondes et non pas ovales, et ses couleurs sont plus sombres. Il est gris -brun, marbré et tacheté par nuages de brun noirâtre. Ces taches sont diversement configu- rées : tantôt plus grandes, moins nombreuses, tan- tôt plus étendues et divisées en petites ondulations; mais elles n'ont point ces apparences de marbrures tranchées qu'on leur voit sur l'espèce des Indes. La dorsale a aussi sept bandes noirâtres, mais plus obli- ques que dans le précédent. L'anale a cinq de ces bandes, et les intervalles sont quelquefois teints de jaune. Les lignes sur les pectorales, les bandes sur la caudale et sur les ventrales, diffèrent peu de ce qu'on voit dans notre première espèce. La gorge et la poitrine sont quelquefois grises, quelquefois blan- châtres. B.6;D.3— 26,2Tou28; A. 22; C. 14; P. 20; ¥.1/2. Le batrachus tau a le foie plus gros que les autres batrachoïdes, divisé en deux lobes principaux, par- tagé en plusieurs autres plus petits et comme frangés. Celui que l'on peut appeler le droit, est plus grand que l'autre. La vésicule du fiel est petite, et le canal cholédoque médiocrement long. L'œsophage est court , renflé , comme arrondi. 480 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Un léger étranglement marque le cardia. Puis vient l'estomac, qui ressemble à une petite bouteille ren- versée. A l'extrémité de son col est le pylore , au- près duquel s'ouvre le canal cholédoque. L'intestin flût sept à huit ondulations avant de se rendre à l'anus. Le duodénum est très -large, plus que l'estomac. L'intestin devient ensuite assez étroit, et il se dilate enfin en un large rectum. La rate est petite, ovale, rouge, placée à gauche du pylore. Les ovaires sont deux sacs cylindriques occupant la seconde moitié de l'abdomen ; ils sont remplis d'œufs très- gros. La vessie natatoire est petite et bifurquée. Vers le ; ^ milieu de sa cavité unique elle est percée, en dessus, d'un trou assez grand , qui reçoit un vaisseau sanguin très- considérable. Son muscle propre l'entoure des deux côtés, en se réunissant sous son extrémité pos- térieure. Les reins sont très-gros, placés sur la vessie natatoire; ils donnent dans une vessie urinaire, bi- furquée, dont la corne droite est de moitié plus petite que la gauche. Nous en avons des individus depuis six jus- qu'à dix pouces, qui nous ont été envoyés de New-York par M. Milbert. L'espèce se nomme aux États-Unis toad-Jîsh [poisson crapaud)'^ elle est décrite en détailsous ce nomparM.MitchilP: cenaturalisteenfaitun 1. Mém. de New-York, t. I, p. 465 - 465. CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 481 lophie, et le nom scientifique qu'il lui impose est lophius bufo; mais ce poisson était déjà décrit, et par un auteur célèbre : car, on ne peut en douter, c'est le vrai gadus Tau de Linné. En effet, ce grand homme avait reçu son poisson de Garden, sous ce même nom de toad-Jish'^ : avec les caractères communs aux autres batraclioïdes , il lui donne précisément les mêmes nombres de rayons que nous venons d'indiquer (D. 3 — 26; A. 22.), et il ajoute: corpus mucosum ; ce qui exclut l'idée d'écaillés. Comment, avec de telles données, Bloch a-t- il pu transférer ce nom de gadus Tau à un ba- trachoïde écailleux , et qui n'a que vingt rayons à la seconde dorsale ? Il a probablement été trompé par les taches de sa tête, entre les- quelles le fond noir représente un T. Mais les expressions de Linné : caput verlice T notato, ne se rapportent pas aux couleurs, mais à deux crêtes saillantes, l'une transversale, l'autre lon- gitudinale, qui sont sur le crâne de tous les batraclioïdes, et qui se montrent au travers de la j)eau quand elle commence à se dessécher. Au reste, Linné lui-même a fait un double emploi de ce poisson, car aucun autre ne peut avoir fourni la variété « de son cottus 1. Syst. nat.f édil. 12, t. I , p. 44o. 12. 3l 482 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES, ^runniens, qui a vingt-six rayons à la deuxième dorsale, et vingt-deux à l'anale. C'est à ce batrachoïde tau qu'il faut rapporter le batrachoïde Verneulle ( batraclioides Ver- nullas), décrit par M. Lesueur, dans les Mé- moires du Muséum ( t. V, p. 157) et dessiné (pi. 1 7 ). Nous en sommes d'autant plus certains , que cet excellent observateur a bien voulu nous envoyer un de ses individus. Nous croyons même y pouvoir rapporter aussi les variétés a et Z» de son batrachoïde varié (^batracJioides variegatus), telles qu'il les a décrites dans le Journal des sciences natu- relles de Philadelphie, en Mars 1824. Ce poisson se trouve aussi dans le golfe du Mexique. M. Poey l'a dessiné à la Havane , et nous dit qu'il s'y nomme sapo, ce qui en espa- gnol signifie crapaud 5 ainsi on lui a donné le même nom partout. On le prend dans la vase, et il conserve assez long-temps sa vie à l'air. Sa chair na rien de dangereux. Le Batrachoïde de Gronovius. {Batrachus Gronovii, nob.) Outre ce batrachoïde à vingt-six rayons à la seconde dorsale, il paraît qu'il y a aussi sur les côtes de l'Amérique une espèce qui n'en CHAP. IV. BATRACHOÏDES, 485 a que vingt et un ou vingt-deux, et qui, à cet égard , ressemblerait encore plus que le batra- choïde tau au batrachus grunniens de la mer des Indes. Malheureusement nous ne l'avons pas vue, et ne pouvons rapporter à son sujet que ce que nous trouvons dans les auteurs. En effet, Gronovius' décrit un individu du Brésil qu'il confond même avec l'espèce des Indes (batrachus grunniens), et encore plus à tort avec le nigui de Margrave, et qui semble en effet avoir tous les caractères du premier, si ce n est qu'il lui compte vingt-deux rayons à la seconde dorsale et vingt-»-neuf à l'anale. Il y a des tentacules sur les sourcils, au- tour de la mâchoire inférieure; la bouche et le palais sont garnis de dents fortes et coniques; la peau est lisse; la couleur est brune, variée de rougeâtre et salie de blanchâtre. Son individu était long de quatorze pou- ces; c'est une espèce à retrouver, et que je nomme d'après Gronovius, qui Fa seul men- tionnée. 1. Mus. ichth., 1. 1, p. 46. 484 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Le Batrachoïde a deux épines. (Batrachus hispinis , Bl. Sclin.) Forster, de son côté, parle d'un poisson de la Terre-de-Feu, qu'il avait nommé callionjinus hispinisy et que Bloch range parmi ses ha- trachus. La description qu'il en fait le pré- sente comme très -semblable à l'espèce des Indes, et lui donne vingt-trois rayons à la seconde dorsale et dix -huit à l'anale; mais je ne sais comment accorder avec l'idée qu'il s'agisse d'un batrachoïde, les expressions : ric- tus imuSy parons; rostrwn brève, ru^osum. L'individu n'avait que trois pouces. Je doute beaucoup que ce poisson soit bien placé. Le Batrachoïde varié. {Batrachus variegatus , nob.; Batrachoides varie- gatuSy Lesuenr. ) Enfin, M. Lesueur décrit, dans le Journal des sciences naturelles de Philadelphie, un batrachoïde qu'il appelle hatr. varie^atus^ et auquel il donne à la seconde dorsale depuis vingt et un jusqu'à vingt-huit rayons. Comme nous ne connaissons pas d'exemple d'une pareille variation dans les nombres des rayons d'une même espèce, nous soupçonnons que les individus à vingt et un rayons étaient CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 485 dune espèce voisine de celle de Gronovius; et ceux à vingt-six et à vingt-huit, de celle du tau. Toutefois nous retirons déjà de l'espèce éta- blie par M. Lesueur, les variétés a et /3, que nous rapportons , d'après l'examen des indivi- dus, au batrachoïde tau. Il ne serait pas impossible que les individus à vingt-huit rayons à la dorsale, n'appartinssent à l'espèce suivante. Il resterait donc à reprendre ce batrachoïde, et à le comparer avec soin, soit avec le batr. tau, soit peut-être avec le hatr. grunniens : c'est ce que M. Lesueur sera plus en état de faire que personne. Le Batrachoïde a épines cachées. {Batrachus crjptocentrus , nob,; Pacamo^ Marg.) Nous avons reçu de Bahia un autre batra- choïde, dans lequel nous n'avons pas eu de peine à reconnaître le pacamo de Margrave. Comparé au batrachus tau^ un de ses caractères les plus saillans consiste dans la brièveté des trois rayons épineux de sa dorsale, qui sont cachés sous la peau et ne se relèvent pas pour former cette sorte de première dorsale, que l'on observe dans le ba- trachoïde auquel nous comparons ce pacamo. Les dents, et surtout les palatines, sont plus grosses et plus nombreuses. L'intervalle entre les yeux est plus élroitj le lambeau sur l'œil plus long et plus large^ 486 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. ceux du dessous de la mâchoire inférieure plus rares, moins frangés ; quatre paraissent un peu plus grands et semblent expliquer l'assertion de Margrave, qui ne donne au pacamo que quatre barbillons. Les crêtes du crâne ne sont pas aperçues aussi facilement à travers la peau, et ne dépeignent pas ce T, dont Linné s'est servi pour caractériser l'espèce américaine qu'il avait l'intention de faire connaître. La tête est beaucoup plus large. Son diamètre d'un opercule à l'autre est le quart de la longueur du corps, la caudale non comprise. L'épaisseur ne fait pas la moitié de cette largeur. Le tronc reste aplati jusqu'au-delà de la naissance de la dorsale; il devient très-comprimé près de la queue. La caudale arrondie est très -petite; les autres nageoires sont épaisses et plus basses que celles du batrachus tau. D. 3 — 28;A.22jC. 13? P.21î V. 2. La peau, lisse et flasque, qui recouvre ce poisson, n'a pas d'écaillés. A l'angle supérieur et inférieur de l'ouïe on voit commencer une série de gros pores ouverts sur les côtés du corps, et rendus plus visi- bles par la couleur blanche de leur ouverture, qui se tranche sur le fond noirâtre du poisson. Ces séries forment les lignes de taches dont parle Margrave, et qui rendent son poisson si reconnaissable. Un petit individu a le dessous de la gorge varié de mar- brures blanchâtres; le dessus du corps offre çà et là des taches noires. La couleur du plus grand individu est plus uni- forme et plus foncée. Il est long de treize pouces. Le petM n'en a que sept. CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 487 Ce pacamo a reçu des Portugais , suivant Margrave, le nom dienxaroco, qui est en Portugal le nom de la baudroie. Ce qui con- firme encore nôtre rapprochement, c'est que nous trouvons sous ces mêmes noms de pa- camo et dUenxaroco, une figure de notre pois- son fort reconnaissable et même plus exacte que celle de Margrave , dans un ancien ma- nuscrit que M. Geoffroy Saint-Hilaire avait rapporté de Lisbonne et qu'il avait donné à M. Cuvier. Margrave dit qu'on prend le pacamo entre les rochers, qu'on lui enlève aisément la peau, qu'il est gras et très-bon à manger, surtout grillé. Nos individus ont été cédés au Musée de Paris par celui de Genève, qui les tenait de M. Blanchet, négociant, établi à Bahia. Le Batrachoïde a quatre épines. {Batrachus quadrispinis , nob.) Pérou a rapporté de la mer des Indes un batrachoïde semblable au hatr. grunniens^ même par le peu d'apparence de la première dor- sale et par la forme ovale des pectorales; mais dont le profil est plus convexe, et qui a deux fortes épines au sous-opercule comme à l'opercule; en sorte que 488 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. sa valve opeiculaire en a quatre. L'épine supérieure de chacun de ces deux os est double de l'inférieure. D. 3 — 19;A. 16;C. 13; P. 20; V. 1/2. Sa couleur est biune, pointillée d'une maniè;-e serrée, d'un brun plus foncé. Sous la gorge et sous le ventre le fond est plus pâle, et les points plus larges et moins serrés. L'individu est long de six pouces. Je crois que c'est cette espèce que M. Le- sueur a décrite dans le Journal des sciences naturelles de Philadelphie, sous le nom de hatrachoides diemensis. Les espèces précédentes n'ont point d'é- cailles , et portent au sourcil un lambeau cu- tané; celles qui vont suivre sont garnies sur tout le corps de petites écailles; les lambeaux ciliés de leurs mâchoires et de leurs joues sont nombreux, mais elles n'en ont aucun au-dessus de l'œil. Le Batrachoïde de Surinam. ( Batrachus surlncnnensis , Bl. , Syst. , édit. Schn. , pi- 7 ; Batrachoïde tau, Lacép., t. II, p. 1 , pi. 12.) Nous décrirons d'abord l'espèce dont Bloch a donné une figure dans son Sjstenia ( pi- 7 ) sous le nom de batrachus siu^inamensis. Nous possédons roiiginal de cette figure, qui était desséchée dans le Cabinet de feu CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 489 Levaillant, si connu par ses voyages et ses tra- vaux en ornitliologie. Ainsi nous sommes bien assures de l'espèce, mais nous sommes certains en même temps que c'est pour n'avoir vu que cet individu desséche, que Bloch lui refuse des barbillons, et donne neuf rayons à ses ventrales : deux caractères entièrement faux, qui ne pourraient qu'induire les naturalistes en erreur, et qu'il nous aurait été impossible de rectifier avec certitude, sans le hasard heu- reux qui nous a fait obtenir la preuve du con- traire en vérifiant les caractères sur le poisson même de Bloch. Nous avons eu des échantillons plus frais de cette espèce , qui venaient tous de Suri- nam, en sorte que nous croyons devoir dou- blement lui laisser lepithète qu'elle a reçue de Bloch, Les habitans de cette colonie lui donnent le nom de motto. Loin d'être imberbe, c'est celle qui a les lambeaux les plus nombreux; ils sont cutanés, courts, larges et divisés en une multitude de petits cils ou filamens très-déliés; il y en a onze ou douze en partie sur deux rangs sous chaque branche de la mâchoire inférieure; il y en a autant de chaque côté, le long du bord inférieur de la joue, du préopercule et de l'opercule. Le devant du museau en a aussi quelques petits ; mais il n'y en a point sur l'œil. 490 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Du reste, cette espèce, quanta sa forme générale, ressemble assez au batrachoïde tau et au bairachus grunniens. Sa tête n'est ni moins large, ni moins plate; mais ses yeux sont beaucoup plus petits et écartés l'un de l'autre de huit ou dix fois leur dia- mètre. A côté de l'œil commence une espèce de fente ou de repli de la peau , qui règne sur le haut de la joue. Le trou de derrière la commissure existe comme dans les batrachoides à peau nue. Les dents palatines et les latérales de la mâchoire inférieure sont serrées , coniques et mousses. Les pre- mières sont même sur deux rangs. Le devant de la mâ- choire inférieure en a en cardes , dont le rang antérieur est plus fort. Aux intermaxillaires elles sont en fort velours. Il y a deux épines à l'opercule et deux au sous-opercule ; c'est la supérieure du sous-opercule qui est la plus longue. Les trois épines dorsales sont fortes , et bien que courtes , elles se montrent au dehors. Les pectorales sont rondes : le bras qui les porte est bien prononcé. Les ventrales sont un peu plus courtes que dans les précédens ; elles ont trois rayons comme à l'ordinaire, et si Bloch leur en donne neuf, c'est qu'il a compté leurs branches et non leurs racines. B. 6 j D. 3 — 28 ou 29 j A. 26 j C. 13^ P. 22; V. 1/2. Le front, les joues, les mâchoires, la membrane branchiostège et les nageoires, n'ont pas d'écaillés; mais sur tout le corps, dans la gorge et sur la nuque, il y en a de très-petites, rondes, molles, nul- lement âpres, et qui paraissent, à la loupe, finement striées en rayons. Les deux lignes latérales se mar- CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 491 quent par de petites élevures contiguësj mais elles disparaissent l'une et l'autre à peu près vers le mi- lieu de la longueur du tronc. Ce poisson est brun clair, diversement marbré et piqueté de brun foncé. Il y a surtout trois ou quatre larges marbrures, qui font des bandes irrégulières sur le dos et une sur la nuque. Les pectorales n'ont que des points bruns. La dorsale a des lignes obli- ques, irrégulières et mêlées. Il en est de même de l'anale. Le dessous de la gorge et du ventre est blanchâtre, ainsi que les ventrales. Nous avons fait des observations anatomi- ques fort étendues et complètes, sur les vis- cères et sur l'ostëologie de ce batrachoïde. Le foie du batrachus surinamensis est petit, composé de deux lobes très-minces, inégaux, dont le droit, trois fois plus long que le gauche, descend dans l'hypocondre et se porte assez loin en arrière du pylore. La vésicule du fiel est petite, attachée au haut du lobe du foie, et donne un canal cholédoque fort long, qui se porte en arrière et qui va s'ouvrir dans l'intestin , derrière le pylore. L'œsophage est court et large ; il se dilate très-peu pour former un estomac alongé, qui ne diffère du reste de l'intestin que par la grandeur du diamètre. Une valvule assez épaisse marque le pylore j puis le canal continue à se porter en arrière; mais avant de se rendre à l'anus, il fait deux replis sur lui- même; il diminue peu à peu de grosseur; il n'y a pas d'appendices cœcales. La rate est petite, attachée 492 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. auprès du cardia sous le lobe droit du foie. Les lai- tances sont peu grandes et rejetées vers le fond de l'abdomen. La vessie natatoire est composée de deux lobes parallèles, réunis entre eux dans leur moitié postérieure. Chaque lobe donne en avant un tube capillaire, assez long, qui se porte en avant et qui paraît aboutir à un petit trou de la base du crâne sur le côté du basilaire. Il est possible que ce canal ne soit autre que le vaisseau artériel qui se rend aux corps rouges ; mais je n'ai pu m'en assurer positive- ment. Les parois de la vessie sont épaisses, ayant de chaque côté un muscle très-fort, composé de libres transverses. Les reins sont très -gros et donnent dans une vessie mince, divisée en deux longues cornes. Un grand squelette de ce batracbus de Surinam nous a présenté, d'une manière très-sensible, les caractères ostéologiques communs à tout le genre. Le crâne est remarquable par sa surface plate, que parcourt longitudinalement dans son milieu une crête sagittale droite; une autre crête transversale, per- pendiculaire sur l'extiémité antérieure de la première, se rend d'une apophyse postorbitaire à l'autre ; elle est un peu arquée en avant : c'est cette crête qui, avec la sagittale, représente la lettre T. Au-devant d'elle, sur toute son étendue, règne un sillon assez profond ; du milieu duquel en partent deux autres, qui font en- semble un angle ou la lettre V, et qui se rendent chacun à l'apophyse ante'orbilaire. De son côté, la crête occi- pitale est encore plus arquée que celle dont nous chap. IV. batrachoïdes. 495 venons de parler. L'arrière du crâne n'a point d'autre crête longitudinale; mais il a de chaque côté un angle, dans lequel se confond le sur-scapulaire s'il existe, et auquel est suspendu le scapulaire ; le maxillaire est composé de deux pièces distinctes. On ne voit aucunes traces d'os du nez, ni de sous- orbitaire. La première vertèbre, distincte quant à son corps, soude son apophyse épineuse à la crête verticale de l'occiput, qu'elle prolonge. De chaque côté de cette apophyse, s'attache un os particulier, qui marche pa- rallèlement au scapulaire, et va, en s'élargissant un peu, s'insérer à la proéminence postérieure du grand os humerai, auquel il sert ainsi d'arc-boutant. Je ne connais pas d'exemple de cette conformation dans d'autres genres. Comme cette première vertèbre n'a point de côtes , des anatomistes systématiques pourraient croire que c'est la côte qui s'est déplacée et agrandie; mais, comme l'os coracoidien ne se com- pose que d'une seule pièce en forme de stylet grêle, ce pourrait bien être sa pièce supérieure qui aurait ainsi dépassé l'huméral pour aller fixer son extré- mité supérieure à la première vertèbre. Les os cubital et radial, s'ils existent jamais séparé- ment, se soudent de très- bonne heure au grand os humerai, et n'ont que de petites dimensions. Ce sont les os du carpe , développés et surtout alongés , qui composent l'espèce de bras sur lequel la pecto- rale est portée. Ils sont au nombre de cinq, dont l'inférieur est de beaucoup plus large. Nous avons déjà parlé suffisamment, dans la des- 494 LIVRE XV. PECTORALES PÊDICULÊES, criplion extérieure, des particularités qui concer- nent les os de la face et les opercules. Une particularité remarquable des poissons de ce genre, c'est la manière dont s'attache leur première dorsale; elle n'a que deux interépineux fortement réunis ensemble, et qui s'enfoncent de manière que l'aphophyse épineuse de la troisième vertèbre est chassée entre eux. Les trois rayons de la nageoire sont articulés sur ces deux interépineux, et le deuxième rayon paraît être porté sur tous les deux. Cette espèce a trente-neuf vertèbres, c'est-à-dire, dix de plus que le balrachus grunniens. Ce surplus appartient à la queue. Il n'y en a de même que douze à l'abdomen. Les côtes sont grêles et simples. Nous avons des individus de quinze à seize pouces. J'en ai vu et dessine un bel exemplaire dans le Musée de Bruxelles; on l'y a reçu de Suri- nam : il a été donné à cet établissement par M. Falk. C'est bien certainement un poisson de cette espèce que M. de Lacépède a fait graver (t. II, pi. 12, fig. i) pour représenter son batrachoïde tau (nous avons encore son original); mais ce n'est ni le gadus tau de Linné, ni celui de Bloch. CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 495 » Le Batrachoïde a lunettes. {Batrachus conspicillum , nob.j Gadus tau,^\.) A la suite de ce grand batrachoïde de Surinam doit venir celui que Bloch a confondu fort mal à propos avec le gadus tau de Linné, et qu'il a représenté sous ce nom (pi. 67, fig. 2 et 3 ). Nous l'appellerons le batrachoïde à lu-" nettes (batrachus conspicillum) y parce que son caractère le plus apparent consiste en deux taches rondes, grises, qu'il a sur le crâne, et qui rappellent un peu la forme d'une paire de lunettes. Quoique écailleux comme le précédent, il en diffère a. plusieurs égards. Ses yeux sont plus grands, plus rapprochés; ses barbillons, plus longs, plus grêles, non ciliés. Ses dents plus fines; il n'a qu'une épine à son subopercule; trois en tout comme le batrachus tau et le batrachus grunniens. Sa seconde dorsale n'a, comme dans ce dernier, que vingt rayon», et son anale que seize. Les autres nombres sont les mêmes. Ses couleurs sont aussi à peu près semblables j elles consistent également en piquetures et en mar- brures brun foncé sur un fond plus clair, formant en partie par leur rapprochement des espèces de bandes transverses , irrégulières. Il y en a aussi une étroite entre les yeux, et une derrière; c'est der- rière celle-ci que sont les deux taches grises ou brun A^(y LÏVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. clair, dont nous avons parlé, et la bande qui les précède s'avance entre elles comme une pointe brune. C'est dans cet accidentde couleur que Blocli a cru voir un T, ce qui l'a déterminé à prendre ce poisson pour le tau de Linné ; mais la grande différence des nombres de rayons de la dorsale et de l'anale , qu'il a comptés exacte- ment comme nous, aurait dû, à elle seule, le détourner de cette idée. M. de Lacépède donne à son gâchis tau vingt-trois rayons à la seconde dorsale, ce qui ne s'accorderait ni avec Linné ni avec Bloch : c'est le nombre qu'a marqué son dessinateur j mais le fait est que son individu, qui est un hatrachus Surinam ensis , en a vingt -neuf, comme toute l'espèce à laquelle il appartient. Nous avons acquis la certitude que M. de Lacépède a le plus souvent pris ses caractères sur les dessins qu'il a fait faire , et non sur la nature elle-même. Nous avons reçu cette espèce du Cabinet de Vienne , et son pays natal ne nous est pas connu. L'individu n'a pas tout - à - fait cinq pouces de longueur. Blocli ne dit pas non plus d'où venait le sien, qui n'était pas plus grand. CHAP. IV. BATRACHOIDES. 407 Le Batrachoïde ponctué. ( Batrachus punctulatus , nob. ^ ) Le batrachoïde figuré par Spix , et décrit par M. Agassissous le nom que nous lui avions com- muniqué, quand il a bien voulu soumettre les planches de ce grand ouvrage à notre exa- men, pour la détermination des espèces en- core non nommées par Spix, est une espèce bien voisine du batrachus surinamensis. Le nu de la tête, les écailles du corps, les tenta- cules des narines, les barbillons de la mâchoire inférieure, sont semblables. Tout le corps et les na- geoires sont couverts de taches noires de différentes grandeurs. La tête n'a que des points noirs, serrés et très -nombreux. Le fond de la couleur est brun- olivâtre sur le dos et jaune pâle sur les nageoires. D.3 — 21î A. n;C. 4— 10_4;P. 22; V. 5. M. Agassis dit que les ventrales ont cinq rayons. Je n'en trouve que trois dans tous ceux que j'ai exa- minés. Les individus conservés dans le Musée de Munich sont longs de dix pouces, et ils ont été pris sur les côtes de l'Atlantique. 1. Agassis apud^ç\Xf Fisc. Bras., p. i33, pi. 74- 12. 32 498 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Le Batrachoïde barbu. {Batrachus barbatus ^nob.; Batrachus didactjlus, Bl. Schn.) Bloch met en tête de son genre batrachus, et nomme batrachus didactjluSy une espèce de la côte de Guinée, à corps écailleux, dont la dorsale et Fanale ont les mêmes nombres de rayons, et les valves operculaires le même nombre d'épines que dans notre batrachus conspicillum, et il en donne une longue des- cription, que Schneider a encore augmentée d'un long supplément^ mais ces deux auteurs ne se sont attachés, comme il n'arrive que trop souvent, qu'à des caractères communs à tous les batrachoïdes j en sorte qu'il n'en résulte rien d'où l'on puisse conclure avec certitude si c'est une espèce particulière. Mais grâce à la générosité de M. Lichtenstein , nous avons pu encore éclaircir les doutes qui restaient à son sujet. Il se distingue de tous les précédens par la sim- plicité des lambeaux charnus de la mâchoire infé- rieure. Il y en a douze de chaque côté de la sym- physe, et en arrière sous la branche de la mâchoire une petite série de cinq de chaque côté. Cette dis- position, assez régulière, m'a paru devoir être notée. Un autre petit barbillon, simple et pointu, est à CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 499 l'angle de la mâchoire; il y en a un court et palmé au-devant de la narine. Les dents sont fines et serrées. Les trois premières épines de la dorsale sont bien cachées sous la peau , qui est couverte de petites écailles enfoncées comme des points sous le derme. La tête nue a des petits traits nombreux, qui for- ment une sorte de vermicellures remarquables sur ces parties. Déjà Schneider avait remarqué que la ventrale a trois rayons comme les autres nageoires. C'est pour ne pas perpétuer l'erreur de Bloch que nous avons changé le nom spécifique du poisson. B. 6; D. 3 —21; A. 15; C. 13; P. 22; V. 3. Bloch, qui a oublié la première dorsale, compte, sauf les ventrales et les rayons branchiostèges, à peu près comme nous. B. 5; D. 20 ; A. 16; G. 12 ; P. 22 ; V. 2. La couleur du poisson conservé dans le Musée de Berlin, est devenue jaunâtre uniforme; mais il est facile de juger que le poisson a été décoloré par l'action de l'alcool. Cet individu est long de dix pouces et demi, et large de quatre pouces : c'est ce que Blocli a voulu dire par sa phrase négligée , pedalis et quatuor polliciuni latus; j'en fais la remar- que, parce que l'on pourrait facilement croire que l'individu a seize pouces de longueur. Nous aurons encore à demander aux voya- bOO LIVRE XV. PECTORALES rÉDICUELÉS. geurs de rechercher la seetoad de Barbot*, dont les épines dorsales sont plus saillantes que celles de l'espèce décrite ci-dessus, et qui ont la dorsale, l'anale, la caudale et la pectorale couvertes de deux séries de points noirâtres. Barbot le dit un poisson de petite taille, ser- vant de nourriture aux Noirs; et qu'il a nommé seetoad ^ à cause de la ressemblance de sa bouche avec celle des grenouilles. Pour parler convenablement de cette es- pèce, et la rapprocher de celles quelle avoi- sine, il faudrait savoir si elle a des écailles sur les flancs, des tentacules sur les sourcils, et autres caractères qui restent à connaître. Au- cun voyageur ne nous l'a encore rapportée de la côte d'Afrique. Les côtes orientales et occidentales de l'Amé- rique méridionale produisent des poissons qui forment une division assez nettement séparée des autres batrachoïdes, puisqu'ils manquent à la fois d'écaillés et de barbillons; leurs dents coniques sont assez différentes, et les lignes de pores, qui dessinent la peau comme rm ta- touage, offrent des caractères singulièrement remarquables. Cependant l'ensemble des autres 1. Collect. of voyages and traçels , t, V, 1. III; chap. 16, p. 223. CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 501 caractères ne nous a pas paru s'éloigner assez des autres batrachoïdes, pour faire de ceux-ci un genre particulier. Le Batrachoïde très- poreux. {Batrachus porosissimus ^ nob.; Niqiii, Margr.) Cette espèce nous vient des côtes orientales de l'Amérique, baignées par l'Atlantique. Sa forme est plus alongée que dans les batrachoïdes précédens. Sa tête plus étroite; sa queue plus grêle; sa mâchoire inférieure a en avant de petites dents, et de chaque côté quatre grandes, crochues et poin- tues; les intermaxillaires les ont en fin velours. Le vomer n'en a que deux : une à chaque angle, plus longue que toutes les autres , grêles et pointues , représentant de véritables canines. Chaque palatin en a une rangée de petites , pointues et inégales. Son opercule n'a qu'une épine pointue, dirigée en arrière, et sa pointe descendante fait une équerre avec elle. Le subopercule n'a que la pointe descen- dante qui ne paraît pas ; en sorte que la valve oper- culaire n'a qu'une épine dirigée en arrière. On n'en voit que deux petites au-devant de sa dorsale , en- core la première ne sort-elle pas de la peau. Une petite proéminence de la peau du museau donne sur le milieu de la mâchoire supérieure deux petits lobes cutanés. Les pectorales sont pointues , et la caudale ovale. La dorsale et l'anale sont très-longues. B. 6 ; D. 2 — 36 5 A.. 27 j C, 14î P. 19 ; V. 1/2. 502 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. Ce que ce poisson a de plus remarquable, ce sont les lignes de pores qui occupent les diverses parties de son corps. Il y en a d'abord une de chaque côté sur le crâne et la nuque , qui se rapprochent au pied de la dorsale, et ensuite se continuent tout le long de cette nageoire. Le dos en a de chaque côté une seconde, parallèle à celle- là j mais à pores moins nombreux. Une troisième part de chaque côté de l'angle du crâne, fait au-dessus de la pectorale une inflexion, pour se rapprocher des précédentes; puis redescend et marche au tiers environ de la hauteur du corps jusqu'à la caudale; une quatrième suit le bord de la mâchoire inférieure, celui du préoper- cule, et traverse l'opercule jusqu'à sa pointe, où elle se termine; une cinquième est de chaque côté de la gorge, près de l'os de la mâchoire, et va se ter- miner sur le subopercule ; une sixième prend du milieu du dessous de la gorge et va finir sur la membrane branchiostège; une septième, en dedans de la précédente, se prolonge entre les ventrales et le long du tiers inférieur du corps jusqu'à la cau- dale ; une huitième naît sous le milieu de la poitrine, vis-à-vis la base des pectorales, et,s'écartant de chaque côté, forme un ovale alongé, se rapproche de l'anus, et de là se continue tout du long de la base de l'anale jusqu'à la caudale; il y en a aussi une transversale ou oblique derrière la ventrale ; une sur la base de la pectorale, et une autre en arrière de son ais- selle. Ce poisson est gris-brun dessus; blanc argenté aux flancs et au ventre. La dorsale et l'anale sont blan- ♦ CHAP. IV. BATRACHOÏDES. 503 châtres, bordées de brun. La pectorale a des lignes longitudinales, et la ventrale a son bord externe brunâtre. La caudale, blanchâtre à sa base, est brun- noirâtre sur le reste de son étendue. Certains individus ont sur le brun du dos cinq ou six larges taches transversales noirâtres. Le plus grand que nous ayons n'a pas plus de six pouces; mais il y en a au Cabinet de Berlin qui nous paraissent de la même espèce, et qui en ont neuf. Voici ce que leur anatomie nous a offert de plus remarquable : Le foie est plus petit que dans le balrachoïde de Surinam, et les deux lobes sont plus égaux. La vési- cule du fiel est plus petite, et le canal cholédoque est surtout beaucoup plus court. L'œsophage est très-court, et l'estomac fort petit. L'intestin se replie et remonte du côté gauche entre les deux lobes du foie; puis il fait deux replis à peu près égaux avant de se rendre à l'anus. Il est enveloppé d'une mem- brane très-mince, d'un noir assez profond. La vessie natatoire est bilobée comme celle du batrachoïde de Surinam; mais elle n'a pas de petits appendices en avant. Ses parois sont plus minces , et ses muscles propres beaucoup plus petits; elle brille d'un bel éclat d'argent mat. Les ovaires sont médiocres et contiennent des oeufs fort gros. Les reins sont petits. La vessie urinaire est profondément fourchue. Le péritoine est noir comme de l'encre. Le squelette ressemble beaucoup à celui des autres 504 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICULÉES. balrachoides : il a les mêmes sillons sur le crâne; les mêmes os pour le soutien de l'épaule; le même pro- longement du carpe, etc. L'opercule y est réduit à la forme d'une équerre, dont une branche donne sa pointe postérieure ; l'autre , sa pointe descendante. Ses vertèbres sont au nombre de quarante-deux, dont onze abdominales. Il est essentiel de remarquer que les côtés de la base du crâne sont simplement membraneux dans leur portion qui enveloppe les sacs à pierres des oreilles. Cette espèce remarquable nous a été ap- portée de Surinam par MM. Leschenault et Doumerc, de Cayenne par M. Poiteau, de Rio-Janéiro par M. Delalande, et de Sainte- Catherine, du Brésil, par MM. Lesson et Garnot. Il nous paraît que c'est ici le véritable niqui de Margrave (p. 178), le deuxième niqui de Pison (p. 2g5), que la plupart des iclityolo- gistes ont pris pour le hatrachus grunniens. Nous en jugeons par la figure, où Margrave a marqué beaucoup de pores, bien qu'il ne les ait pas tracés aussi régulièrement qu'ils le sont, et où il place deux petits points sur le bout du museau, une seule épine à l'opercule, et deux en avant de la dorsale; par la grandeur, qu'il dit de six ou sept pouces, toute la des- cription y répond aussi fort bien, hors deux points que nous ne pouvons expliquer, la CHAP. IV. BATRACHOÏDES.' 505 bouche sans dents, et les ventrales jointes^ mais nous aimons mieux croire à quelque con- fusion , que de ne pas appliquer à notre espèce un article qui, pour tout le reste, lui convient si exclusivement. Margrave dit que ce poisson se cache dans le sable, et blesse ceux qui y marchent; on le mange, mais après avoir enlevé son foie, qui passe pouif" mi poison mortel : les Hollandais du Brésil, fondés sans doute sur la ressem- blance des habitudes, lui avaient transféré le nom de pietennan, qui, dans leur pays, est celui de la vive. Le ^vQmiev niqui de Pison (p. 294) est une , mauvaise figure de cette espèce, copiée du Liher Mentzelii (p. 101), mais inexactement; car on a oublié les dents, et l'on ajoute sur la tête des écailles qui ne sont pas dans l'ori- ginal. Cet original , long de neufpouces et demi , a le dos et les flancs brun-rougeâtres; le ventre verdâtre; les joues vertes, tachetées avec des points qui sont peut- être l'indication des pores; la base des pectorales rouge, et les na- geoires noirâtres bordées de blanc. Pison assure que ses piqûres causent des douleurs excessives, et paralysent quelquefois les membres sur lesquels elles ont percé. Il dit qu'on les guérit par l'application de 506 LIVRE XV. PECTORALES PÉDICDLÉES. la racine de mangue (mangifera indica), grillée et broyée; ce remède augmente d'abord la dou- leur, mais il la fait cesser promptement. Le Batrachoïde poreux. (^Batrachus porosits_, nob.) L'épithète que nous donnons à cette espèce , indique ses affinités avec la précédente, et en même temps une de ses différences principales. Elle a en effet moins de pores, et plusieurs lignes sont moins visibles; telles sont celles des joues et de l'occiput. On retrouve une ligne sous le bord delà mâchoire inférieure et deux autres sous le ventre, qui passent entre les ventrales et viennent se joindre sous la gorge; mais on n'en voit pas d'autres. Ainsi, il n'existe plus celle qui partait du milieu de la gorge pour se rendre sur la membrane branchiale; celle qui se rendait sur le préopercule, et celles qui contournaient les pectorales. D'ailleurs la forme de la tête, du corps, sont semblables; mais les dents palatines sont plus égales, plus nombreuses et beaucoup moins longues que celles du précédent. D. 2 — 35; A. 30, etc. La couleur est fauve, rembrunie et marbrée de noirâtre sur le dos. Cette teinte devient plus claire sur les côtés de la queue ; le dessous est blanc. La dorsale jaune et tachetée de brun. La pectorale est noire avec quelques taches rousses à la base. CHAP. IV. BATRACHOÏDES. S07 M. d'Orbigny nous a envoyé cette espèce de Valparaiso. Depuis, M. Gay en a rapporté de nombreux individus du même endroit ; et nous a appris que ce poisson est connu sous le nom de peis vagre, et qu'il vit toute l'année sur les fonds sablonneux ou parmi les pierres. Sa nourriture consiste en sardines, et, ajoute M. Gay, en fucus, ce qui nous paraît extraor- dinaire, à cause de la conformation des dents. Ils se tiennent isolés ou réunis en petit nom- bre. On ne les mange qu'après leur avoir ôté la peau qui est trop baveuse. Ils nagent si lentement qu'on peut, pour ainsi dire, les prendre à la main. La piqûre de l'aiguillon de l'opercule fait beaucoup souftVir les per- sonnes qui en sont atteintes. FIN DU TOME DOUZIEME. AYIS AU RELIEUR POUR PLACER LES PLANCHES. Planches. 344. Gohius limhatus ] - ^ • ^ ^ , . , . } vis-a-vis la page 2 6 345. Gobais colomanus J 346. Gohius crjptocentrus j 347. Gohius histrio j * * * * 348. Gohioides Broussonneti. . . . ) , , ^ I ,.140 349. yépociyptes Bato. j 35 o. Trjpauchen vagina | ' rg 3 5 1 . Amhljopus Hermanianus . . J 35 2. Sicjdium cjnocephalum 178 3 5 3. Periophtlialmus papilio 190 354. Boleophthalinus Dussumieri \ g 355. Boleopliihalmus dentatus . . . j 35 6. Eleotris gjrrinus 220 357. Eleotris muralis 254 35 8. Philypnus dormitator 258 359. CalUonjmus filamentosus 3o4 3 60. Platjpiera aspro 324 3 61. Comephorus Baikalensis 33o 362. Lophius piscatorius 346 363. CJdroiiectes pictus | 364. Chironectes pardalis j 3 65. Malthœa longirostris 4^0 366. Halieutœa stellata 4 •''6 367. Batrachus Dussumieri 474 3 68. Batrachus porosus '^06 NB. Nous donnons avec cette livraison % planche n." 287 , qui appartient au lonie X , et qui par mégarde n'a pas encore, été donnée aux souscripteurs. 400 ■^ •i> F»* '*- >:a :SJ?Q O j^- -&C-. . ^• .«'»/• f- n» 4f^ ^0>^ ^ ^ / 0 ■> <> «s ^toj.B ^^ '^-^i a