Line Le. a, SENS HISTOIRE MATURELLE MATIÈRES GÉNÉRALES TOME DIX-SEPTIÈME. 4 j AM ci nf KES à L \ mn à ati HISTOIRE : nn NATURELLE Par BUFFON, an PERRER AU CITOYEN LACEPEDE, MEMBRE DE L'INSTITUT NATIONAL. MATIERES GÉNÉRALES. TOME DIX-SEPTIEME. VIT MT tt naine, Po COLLECTION. A PARI SN Museut, A LA LIBRAIRIE STÉRÉOTYPE DE P. DIDOT L’AINÉ, GALERIES DU LOUVRE, N° 3, ET FrRamin DIDOT, RUE DE THIONVILLE, N° 116. AN VII. — 1799. Be :‘ PIS TOTRE MA URELLE F: SUITE DE LA PARTIE EXPÉRIMENTALE. ONZIÈME MÉMOIRE. ÆExpériences sur la force du bois, L> principal usage du bois dans les bâti- mens et dans les constructions de toute es- pèce, est de supporter des fardeaux. La pra- tique-des ouvriers qui l'emploient, n’est fon- dée que sur des épreuves, à la vérité souvent réitérées, mais toujours assez grossières : ils me connoissent que très-imparfaitement la 1 LEA: Er Le LAPS AT LANTA ET 4 01 RE Cr AIT e) 6 HISTOIRE NATURELLE force et la résistance des matériaux qu'ils mettent en œuvre. J’ai tâäché de déterminer avec quelque précision la force du bois, et j ai cherché les moyens de rendre mon tra- vail utile aux constructeurs et aux charpen- tiers. Pour y parvenir, j'ai été obligé de faire rompre plusieurs poutres et plusieurs solives de différentes longueurs. On trouvera, dans la suite de ce Mémoire, le détail exact de toutes ces expériences : mais je vais aupara- vant en présenter les résultats généraux, après avoir dit un mot de l’organisation du bois et de quelques circonstances particu- lières qui me paroissent avoir échappé aux physiciens qui se sont occupés de ces ma- tières. * Un arbre est un corps organisé dont la structure n’est point encore bien connue. Les expériences de Grew, de Malpighi, et sur-tout celles de Hales, ont, à la vérité, donné de grandes lumières sur l’économie végétale, et il faut avouer qu’on leur doit presque tout ce qu'on sait en ce genre : mais dans ce genre, comme dans tous les autres, on ignore beaucoup plus de choses qu’on n’en sait. Je ne ferai point ici ka description aua- : | | PARTIE EXPÉRIMENTALE. . tomique des différentes parties d’un arbre, cela seroit inutile pour mon dessein ; il mé suffira de donner une idée de la manière dont les arbres croissent, et dé la façon dont le bois se forme. | Une semence d'arbre, un gland qu’on jette en terre au printemps, produit au bout de quelques semaines un petit jet tendre ‘et herbacé, qui augmente , s'étend, grossit, durcit, et contient déja, dès la fin de la pre- . mière année, un filet de substance ligneuse. A l'extrémité de ce petit arbre , est un bou ton qui s’épanouit l’année suivante, et dont il sort un second jet semblable à célui de la premièreannée, mais plus vigoureux, qui grossit et s'étend davantage , durcit dans le même temps , et produit un autre bouton qui contient le jet de la troisième année, e£ ainsi des autrès jusqu à ce que l'arbre soit parvenu à toute sa hauteur : chacun de ces boutons est une espèce de germe qui contient le petit arbre de chaque année. L’accroisse- ment des arbres en hauteur se fait donc par plusieurs productions semblables et an- nuelles ; de sorte qu'un arbre de cent pieds de haut est composé , dans sa longueur , de Pa 8 HISTOIRE NATURELLE. plusieurs petits arbres mis bout à bout, dont le plus long n’a souvent pas deux pieds de hauteur, Tous ces petits arbres de chaque année ne changent jamais daus leurs dimen- “ions ; ils existent dans un arbre de cent ans sans avoir grossi ni grandi; ils sont seule- ment devenus plus solides. Voilà comment se fait l’accroissement en hauteur ; l’accrois- sement en grosseur en dépend. Ce bouton qui fait le sommet du petit arbre de la pre- Mmière année, tire sa nourriture à travers la substance et le corps même de ce petit arbre: mais les principaux canaux qui servent à conduire la séve, se trouvent entre l'écorce et le filet ligneux; l’action de cette sève en mouvement dilate ces canaux et les fait sros- sir, tandis que le bouton, en s’élevant, les tire et lesalonge; de plus, la séve, en y cou- lant continuellement , y dépose des parties fixes qui en augmentent la solidité : ainst, dès la seconde année , un petit arbre contient déja dans son milieu un filet ligneux en forme de cône fort alongé, qui est la produc- tion en bois de la première année, et une couche ligneuse aussi conique qui enveloppe ce premier filet et le surmonte, et quiest la ni Li PARTIE EXPÉRIMENTALE. ë production de la seconde année. La troisième couche se forme comme la seconde; il en est de même de toutes les autres qui s’enve- Joppent successivement et continüment; de sorte qu’un gros arbre est un composé d'un grand nombre de cônes lisneux qui s’enve- loppent et se recouvrent taut que l'arbre grossit. Lorsqu'on vient à l’abattre, on compte aisément, sur la coupe transversale du tronc , le nombre de ces cônes, dont les sections forment des cercles ou plutôt des couronnes concentriques ; et on reconnoit l’âge de l’arbre par le nombre de ces cou- ronnes, car elles sont distinctement séparées les unes des autres. Dans un chène vigoureux, | l'épaisseur de chaque couche ou couronne est de deux ou trois ligues; cette épaisseur est d’un bois dur et solide : mais la substance qui unit ensemble ces couronnes, dont le prolongement forme les cônes ligneux , n’est pas à beaucoup près aussi ferme; c’est la partie foible du bois, dont l’organisation est différente de celle des cônes ligneux , et dé- pend de la façon dont ces cônes s’attachent et s’uuissent les uns aux autres, que nous aHons expliquer en peu de mots, Les canaux La xo HISTOIRE NATURELLE. ongitudinaux qui portent la nourriture au bouton , non seulement prennent de l’éten- due et acquièrent de la solidité par l’action et le dépôt de la séve, mais ils cherchent encore à s'étendre d’une autre façon: ils se ramifient dans toute leur longueur, et poussent de petits fillamens comme de petites branches, qui, d’un côté, vont produire l'écorce, et, de l’autre, vont s'attacher au bois de l’année précédente , et forment entre les deux couches du bois un tissu spongieux qui, coupé transversalement , même à une assez grande épaisseur, laisse voir plusieurs petits ‘ trous à peu près comme on en voit dans la _ dentelle ; les couches du bois sont doncunies les unes aux autres par une espèce de réseau. Ce réseau n’occupe pas à beaucoup près au- tant d'espace que la couche ligneuse ; il n’a qu'environ une dei-ligne d'épaisseur : cette épaisseur est à peu près la même dans tous les arbres de même espèce, au lieu que les couches lisneuses sont plus ou moins épaisses, et varient si considérablement dans Ja même espèce d'arbre, comme dans le chêne, que j'en ai mesuré qui avoient trois lignes et demie, et d’autres qui n’avoient qu’une demi-ligue d'épaisseur. % PARTIE EXPÉRIMENTALE. 16 Par cette simple exposition de la texture du bois, on voit que la cohérence lonsitudi- nale doit être bien plus considérable que l'union transversale ; on voit que dans les petites pièces de bois , comme dans un bar- reau d’un pouce d'épaisseur, s’il se trouve quatorze ou quinze couches ligneuses , il y aura treize ou quatorze cloisons , et que par conséquent ce barreau sera moins fort qu’un pareil barreau qui ne contiendra que cinq ou six couches et quatre ou cinq cloisons ; on voit aussi que dans ces petites pièces, s’il se trouve une ou deux couches ligneuses qui soient tranchées par la scie, ce qui arrive souvent , leur force sera considérablement diminuée : mais le plus grand défaut de ces petites pièces de bois, qui sont les seules sur lesquelles on ait jusqu’à ce jour fait des expé« riences , c'est qu'elles ne sont pas composées comme les grosses pièces; la position des couches ligneuses et des cloisons dans un barreau est fort différente de la position de ces mêmes couches dans une poutre, leux figure est mème différente, et par consé= quent on ne peut pas estimer la force d’une grosse pièce par celle d'un barreau. Un ra. HISTOIRE NATURELLE. moment de ATOME fera sentir ce que je viens de dire. Pour former une poutre, il ne faut qu'équarrir l'arbre, c’est-à-dire , enlever quatre segmens cylindriques d'un bois blanc et imparfait, qu'on appelle aubier; dans le cœur de l'arbre, la première couche lisueuse reste au milieu de la pièce , toutes les autres couches enveloppent la première en forme de cercles ou de couronnes cylindriques; le plus grand de ces cercles entiers a pour dia- inètre l'épaisseur de la pièce ; au-delà de ce cercle , tous les autres sont tranchés , et ne forment plus que des portions de cercles qui vont toujours en diminuant vers les arêtes de la pièce : ainsi une poutre quarrée est composée d'un cylindre continu de bon bois bien solide, et de quatre portions angu- Jaires tranchées d’un bois moins solide et plus jeune. Un barreau tiré du corps d’un gros arbre ou pris dans une planche, est tout autrement composé: ce Sont de petits sesmens longitudinaux des couches annuelles , dont la courbure est insensible ; des segmens qui tantôt se trouvent posés parallèlement à une des surfaces du barreau , et tantôt plus ou moins inciinés; des segmens qui sont plus D" L PARTIE EXPÉRIMENTALE, 13 ou moins longs et plus ou moins tranchés, et par conséquent plus ou moins forts. De plus, il y a toujours dans un barreau deux positions , dont l’une est plus avantageuse que l’autre ; car ces sesmens de couches li gneuses forment autant de plans parallèles. Si vous posez le barreau de manière que ces plans soient verticaux, il résistera davantage que dans une position horizontale ; c’est comme si on faisoit rompre plusieurs plan- ches à la fois, elles résisteroient bien davan- tage étant posées sur le côté que sur le plat. Ces remarques font déja sentir combien on doit peu compter sur les tables calculées ; ow sur les formules que différèns auteurs nous ont données de la force du bois, qu’ils n’a- voient éprouvée que sur des pièces dont les plus grosses étoient d’un ou deux pouces d'épaisseur , et dont ils ne donnent ni le nombre des couches ligneuses que ces bar- reaux contenoient , ni la position de ces couches , ni le sens dans lequel se sont trou- vées ces couches lorsqu'ils ont fait rompre le barreau; circonstances cependant essentielles, comme on le verra par mes expériences et par les soins que je me suis donnés pour 2 14 HISTOIRE NATURELLE: découvrir les effets de toutes ces différencesi Les physiciens qui ont fait quelques expé- riences sur la force du bois, n’ont fait au= cune attention à ces inconvéniens ; mais il. y en a d’autres peut-être encore plus grands qu'ils ont aussi négligé de prévoir ou de pré— venir. Le jeune bois est moins fort que le bois plus âgé : un barreau tiré du pied d'un arbre résiste plus qu’un barreau qui viené du sommet du même arbre ; un barreau pris à la circonférence près de l’aubier est moins fort qu'un pareil morceau pris au centre de l’arbre. D'ailleurs le degré de des- séchement du bois fait beaucoup à sa résis= tance : le bois verd casse bien plus difficile- ment que le bois sec. Enfin le temps qu’on emploie à charger les pièces pour les faire rompre, doit aussi entrer en considération, parce qu'une pièce qui soutiendra pendané quelques minutes un cértain poids, ne pourra pas soutenir ce poids pendant une heure; ef j'ai trouvé que des poutres qui avoient cha- cune supporté sans se rompre pendant un jour entier neuf milliers, avoient rompu au bout de cinq ou six mois sous la charge de six milliers, c'est-à-dire, qu'elles n'avaient pas PARTIE EXPÉRIMENTALE. 15 pu porter pendant six mois les deux tiers de la charge qu "elles avoient portée pendant un jour. Tout cela prouve assez combien les expé- riences que l’on a faites sur cette matière sont imparfaites , et peut-être cela prouve aussi qu'il n’est pas trop aisé de les bien faire. Mes premières épreuves , qui sont en très- grand nombre, n’ont servi qu'à me faire reconnoitre tous les inconvéniens dont je viens de parler. Je fis d’abord rompre quelques barreaux , et je calculai quelle devoit être la force d’un barreau plus long et plus gros que ceux que j'avois mis à l’épreuve ; et ensuite ayant fait rompre de ces derniers, et ayant comparé le résultat de mon calcul avec la charge actuelle, je trouvai de si grandes différences , que je répétai plusieurs fois la même chose sans PEMVOR rapprocher le cal- cul de l'expérience ; j’essayai sur d’autres longueurs et d’autres grosseurs , l'événement : fut le même; enfin je me déterminai à faire une suite complète d'expériences qui püt me servir à dresser une table de la force du bois, sur laquelle je pouvois compter , et que tout le monde pourra consulter au besoin. Je vais rapportet, en aussi peu de mots FA SUR LS MO #6 HISTOIRE NATURELLE qu’il me sera possible , la manière dont j'ai exécute mon projet. | ' J'ai commencé par choisir, dans un canton de mes bois, cent chènes sains et bien vigou— reux, aussi voisins les uns des autres qu’il a été possible de les trouver, afin d’avoir du bois venu en même terrain, car les arbres de différens pays et de différens terrains ont des résistances différentes; autre inconve- nient qui seul sembloit d'abord anéantir toute l'utilité que j'espérois tirer de mon travail. Tous ces chênes étoient aussi de la même espèce, de la belle espèce , qui pro- duit du gros gland attaché un à un ou deux à deux sur la branche ; les plus petits de ces arbres avoient environ deux pieds et demi de circonférence , et les plus gros cinq pieds: je les ai choisis de différente grosseur, afin de me rapprocher davantage de l’usage ordi- naire. Lorsque les charpentiers ont besoin d’une pièce de cinq ou six pouces d’équarris- sage, 1is ne la prennent pas dans un arbre qui peut porter un pied, la dépense seroit trop grande, et il ne leur arriveque trop sou-/ vent d'employer des arbres trop menus et où ils laissent beaucoup d’aubier : car je ne parle La L n PARTIE EXPÉRIMENTALE. r4 _ pas ici des solives de sciage qu’on emploie quelquefois, et qu’on tire d’un gros arbre ; ce- pendant il est bon d'observer en passant que ces solives de sciage sont foibles, et que l’u- . sage en devroit être proscrit, On verra, dans la suite de ce Mémoire; combien il est avan- tageux de n’employer que du bois de brin. Comme le degré de desséchement du bois fait varier très-considérablement celui de sa résistance , et que d’ailleurs il est fort diffi- cile de s’assurer de ce degré de desséchement, puisque souvent de deux arbres abattus en même temps ,. l’un se dessèche en moius de temps que l’autre , j'ai voulu éviter cet in- convénient, qui auroit dérangé la suite com- parée de mes expériences , et j'ai cru que jaurois un terme plus fixe et plus certain en prenant le bois tout verd. J’ai donc fait couper mes arbres un à un à mesure que j'en avois besoin : le même jour qu’on abat- toit un arbre , on le conduisoit au lieu où il devoit être rompu ; le lendemain les charpentiers l’équarrissoient et des menui- _siers le travailloient à la varlope, afin de lui donner des dimensions exactes, et le surlen= demain on le mettoit à l'épreuve. 2 :8 HISTOIRE NATU RÉCEET re Voici en quoi consistoit la machine avec | laquelle j'ai fait le plus grand nombre de mes expériences. Deux forts tréteaux de sept pouces d’équarrissage, de trois pieds de hau- teur et d'autant de longueur, renforcés dans leur milieu par un hois debout ; on posoit sur ces tréteaux les deux extrémités de la pièce qu’on vouloit rompre. Plusieurs boucles quarrées de fer rond , dont la plus grosse portoit près de neuf pouces de largeur inté- rieure , et étoit d’un fer de sept à huit pouces de tour ; la seconde boucle portoit sept pouces de largeur , et étoit faite d’un fer de cinq à six pouces de tour , les autres plus petites ; on passoit la pièce à rompre dans la boucle de fer : les grosses boucles servoient pour les. grosses pièces, et les petites boucles pour les barreaux. Chaque boucle, à la partie supé- rieure , avoit intérieurement une arête ; elle’ étoit faite pour empêcher la boucle de s’in— cliner , et aussi pour faire voir la largeur du fer qui portoit sur Les bois à rompre. À la partie inférieure de cette boucle quarrée, on. avoit forgé deux crochets de fer de même grosseur que le fer de la boucle ; ces deux crochets se séparoient , et formoient une -(PARTIE EXPÉRIMENTALE. r9 boucle ronde d’environ neuf pouces de dia- mètre, dans laquelle on mettoit une clef de bois de même grosseur et de quatre pieds de longueur. Cette clef portoit une forte table de quatorze pieds de longueur sur six pieds _de largeur, qui étoit faite de solives de cinq pouces d'épaisseur , mises les unes contre les autres , et retenues par de fortes barres : on Ja suspendoit à la boucle par le moyen de la grosse clef de bois , et elle servoit à placer les poids, qui consistoient en trois cents quar- tiers de pierre , taillés et numérotés, qui pe- soient chacun 25, 50, 100, 15oet 2o0olivres; on portoit ces pierres sur la table, et on bâtissoit un mässif de pierres large et long comme la table , et aussi haut qu’il étoit nécessaire pour faire rompre la pièce. J’ai cru que cela étoit assez simple pour pouvoir en donner l’idée nette sans le secours d’une figure. On avoit soin de mettre de niveau la pièce et les tréteaux, que l’on cramponnoit , afin de les empêcher de reculer ; huit hommes chargeoient continuellement la table, et commençoient par placer au centre les poids de 20olivres, ensuite ceux de 150, ceux de 100, ceux de 50, etenfinau-dessus ceux de 25 livres. L'AIR DNS AU EC ANNE REUTS Ka'a ORALE, * | ATEN Ha RUE As à to HISTOIRE NATURELLE. Deux hommes portés par un échafaud sus4 pendu en l’air par des cordes, plaçoient les poids de 5o et 25 livres, qu'on n’auroit pu arranger depuis le bas sans courir risque d’être écrasé ; quatre autres hommes ap- puyoient et soutenoient les quatre angles de- Ja table, pour l'empêcher de vaciller, et pour la tenir en équilibre; un autre, avec une longue règle de bois , observoit combien la pièce plioit à mesure qu’on la chargeoïit, et un autre marquoit le temps et écrivoit la charge, qui souvent s’est trouvée mon-— ter à 20, 25, et jusqu’à près de 28 milliers de livres. J'ai fait rompre de cette façon plus de cent piéces de bois, tant poutres que solives, sans compter 300 barreaux, et ce grand nombre de pénibles épreuves a été à peine suffisant _ pour me donner une échelle suivie de la force du bois , pour toutes les grosseurs et lon- gueurs; jenai dressé une table, que je donne à la fin de ce Mémoire: si on la compareavec celles de M. Musschenbroeck et des autres physiciens qui ont travaillé sur cette matière, on verra combien leurs résultats sont diffé- xens des miens. } mt) PARTIE EXPÉRIMENTALE. or Afin de donner d'avance une idée juste de cette opération par laquelle j’ai fait rompre les pièces de bois pour en reconnoître la force, je vais rapporter le procédé exact de l’une de mes expériences , par laquelle on pourra juger de toutes les autres. Ayant fait abattre un chêne de cinq pieds de circonférence, je l’ai fait amener ettravailler le même jour par des charpentiers; le len- demain , des menuisiers l’ont réduit à huit pouces d'équarrissage et à douze pieds de lon- gueur. Ayant examiné avec soin cette pièce, je jugeai qu’elle étoit fort bonne; elle n’avoit d'autre défaut qu'un petit nœud à l’une des faces. Le surlendemain , j'ai fait peser cette _ pièce : son poids se trouva être de 409 livres. Ensuite l’ayant passée dans la boucle de fer, _ et ayant tourné en haut la face où étoit le petit nœud, je fis disposer la pièce de niveau _ sur les tréteaux; élle portoit de six pouces sur chaque tréteau: cette portée de six pouces étoit celle des pièces de douze pieds ; celles de vingt-quatre pieds portoient de douze pouces, et ainsi des autres, qui portoient toujours d'un demi-pouce par pied de lon- gueur. Ayant ensuite fait glisser la boucle _»»2 HISTOIRE NATURELLE. de fer jusqu’au milieu de la pièce, on souleva à force de leviers la table, qui , seule avec les boucles et la clef , pesoit 2500 livres. On commença à trois heures cinquante-six m1i- nutes : huit hommes chargeoient continuel- lement la table ; à cinq heures trente-neuf minutes, la pièce n’avoit encore plié que de deux pouces , quoique chargée de 16 mil- liers ; à cinq heures quarante-cinq minutes, elle avoit plié de deux pouces et demi, et elle étoit chargée de 18500 livres ; à cinq heures cinquante-une minutes , elle avoit plié de trois pouces, et étoit chargée de 21 milliers ; à six heures une minute , elle avoit plié de trois pouces et demi ,etelle étoit chargée de 23625 livres : dans cet instant , elle fit un éclat comme un coup de pistolet; aussitôt on discontinua decharger, et la pièce plia d’un demi-pouce de plus, c’est-à-dire, de quatre pouces en tout. Elle continua d’'é- clater avec grande violence pendant plus d'une heure, et il en sortoit, par les bouts, une espèce de fumée avec un sifflement. Elle plia de près de sept pouces avant que de xompre absolument , et supporta, pendant fout ce temps, la charge de 23625 livres. Une A PARTIE EXPÉRIMENTALE. 23 partie des fibres ligneuses étoit coupée net comme si on l’eût sciée, et le reste s’éloit rompu en se déchirant, en se tirant et lais- sant des intervalles à peu près comme on en voit entre les dents d’un peigne; l’arête de la boucle defer, qui avoit trois lignes de largeur, et sur laquelle portoit toute la charge, étoit entrée d’une ligne et demie dans Le bois de la pièce, et avoit fait refouler, de chaque côté, ._ un faisceau de fibres, et le petit nœud qui étoit à la face supérieure , n’avoit point du tout contribué à la faire rompre. J'ai un journal où il y a plus de cent expé- riences aussi détaillées que celle-ci , dont il y en a plusieurs qui sont plus fortes. J'en ai fait sur des pièces de 10, 12, 14, 16, 18, 20, 22, 24,26 et 28 pieds de longueur et de toutes grosseurs; depuis quatre jusqu’à huit pouces d’équarrissage , et j'ai toujours pour une même longueur et grosseur fait rompre trois : ou quatre pièces pareilles, afin d’être assuré de leur force respective. À La première remarque que j'ai faite, c'est que le bois ne casse jamais sans avertir, à moins que la pièce ne soit fort petite ou fort _sèche : lé bois verd casse plus difficilement 24 HISTOIRE NATURELLE, que le bois sec, et en général le bois qui à du ressort, résiste beaucoup plus que celui qui n’en a pas : l’aubier, le bois des bran- ches, celui du sommet de la tige d’un arbre, tout le bois jeune est moins fort que le bois plus âgé. La force du bois n’est pas propor- tionnelle à son volume; une 'pièce double ou quadruple d’une autre pièce de mème longueur , est beaucoup plus du double ou du quadruple plus forte que la première : par exemple, il ne faut pas quatre milliers pour rompre une pièce de dix pieds de lon- gueur et de quatre pouces d’équarrissage , et il en faut dix pour rompre une pièce double; il faut vingt-six milliers pour rompre une pièce quadruple, c’est-à-dire, une pièce de dix pieds de longueur sur huit pouces d’é- quarrissage. Îl en est de même pour la lon- gueur. Il semble qu'une pièce de huit pieds et de même grosseur qu'une pièce de seize pieds, doit, par les règles de la mécanique , porter juste le double ; cependant elle porte beaucoup moins. Je pourrois donner les rai- sons physiques de tous ces faits, mais je me borne à donner des-faits : le bois qui, dans ke même terrain, croit le plus vite, est le PARTIE EXPÉRIMENTALE. 25 plus fort ; celui qui a crû lentement , et dont les cercles annuels, c’est-à-dire, les couches ligneuses sont minces, est plus foible que l’autre. J'ai trouvé que la force du bois est propor- tionnelle à sa pesanteur , de sorte qu'une pièce de même longueur et grosseur, mais plus pesante qu’une autre pièce, sera aussi plus forte à peu près en même raison. Cette remarque donne les moyens de comparer la force des bois qui viennent de différens pays et de différens terrains , et étend infiniment l'utilité de mes expériences : car, lorsqu'il s'agira d’une construction importante ou d’un ouvrage de conséquence, on pourra aisé- ment , au moyen de ma table , et en pesanË les pièces , ou seulement des échantillons de ces pièces , s'assurer de la force du bois qu’on emploie , et on évitera le double inconvé- - mient d'employer trop ou trop peu de cette matière , que souvent on prodigue mal-à- propos , et que quelquefois on ménage avec encore moins de raison. | On seroit porté à croire qu’une pièce qui, comme dans mes expériences , est posée librement sur deux tréteaux, doit porter ô C7 DT NN A MEANS EME 26 HISTOIRE NATURELLE. beaucoup moins qu'une pièce retenue par les deux bouts , et infixée dans une muraille, comme sont les poutres et les solives d'un bâtiment; mais si on fait réflexion qu'une pièce que je suppose de vingt-quatre pieds de longueur , en baissant de six pouces dans son milieu , ce qui est souvent plus qu’il n'en faut pour la faire rompre, ne hausse en même temps que d’un demi-pouce à chaque bout, et que mêine elle ne hausse guëre que. de trois lignes, parce que la charge tire le bout hors de la muraille, souvent beaucoup plus qu’elle ne le fait hausser, on verra bien que mes expériences s'appliquent à la posi- tion ordinaire des poutres dans un bâtiment: la force qui les fait rompre, en les obligeant de plier dans le milieu et de hausser par les bouts , est cent fois plus considérable que celle des plätres et des mortiers, qui cèdent et se dégradent aisément ; et je puis assurer, après l’avoir éprouvé, que la différence de force d’une pièce posée sur deux appuis et libre par les bouts, et de celle d’une pièce fixée par les deux bouts dans une muraille bâtie à l'ordinaire, est si petite, qu’elle ne mérite pas qu’on y fasse attention. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 27 J'avoue qu’en retenant une pièce par des ancres de fer, en la posant sur des pierres de taille dans une bonne muraille, on aug- mente considérablement sa force. J’ai quel- ques expériences sur cette position , dont je pourrai donner les résultats. Javouerai _ même de plus, que si cette pièce étoit in- vinciblement retenue et inébranlablement contenue par les deux bouts dans des en- châtres d’une matière inflexible et parfaite- ment dure, il faudroit une force presque infinie pour la rompre; car on peut dé- montrer que, pour rompre une pièce ainsi posée , il faudroit une force beaucoup plus grande que la force nécessaire pour rompre une pièce de bois debout , qu’on tireroit ou qu’on presseroit suivant sa longueur. Dans les bâtimens et les contignations or- dinaires , les pièces de bois sont chargées dans toute leur longueur et en différens points, au lieu que , dans mes expériences, toute la charge est réunie dans un seul point au milieu : cela fait une différence considé- rable , mais qu’il est aisé de déterminer au juste ; c'est une affaire de calcul que tout constructeur un peu versé dans la mécanique pourra suppléer aisément. | - 28 HISTOIRE NATURELLE: Pour essayer de comparer les effets du temps sur la résistance du bois, et pour re connoître combien 1l diminue de sa force, j'ai choisi quatre piroes de dix-huit pieds de longueur sur sept pouces de grosseur ; j'en aï fait rompre deux, qui, en nombres ronds , | ont porté neuf milliers chacune pendant une heure : j'ai fait charger les deux autres de six milliers seulement, c’est-à-dire, des deux tiers de la première charge, et je les ai laissées ainsi chargées, résolu d'attendre l'événement. L'une de ces pièces a cassé au bout de cinq mois et vinst-cinq jours, et l’autre au bout de six mois et dix-sept jours. Après cette expérience , je fis travailler deux autres pièces toutes pareilles , et je ne les fis charger que de la moitié, c'est-à-dire, de 45oo livres; je les ai tenues pendant plus de deux ans ainsi chargées: elles n’ont pas rompu, mais elles ont plié assez considérablement. Ainsi, dans des bâtimens qui doivent durer long-temps, il ne faut donuer au bois tout au plus que la moitié de la charge qui peut le faire rompre , etil n’y a que dans des cas pres- sans et dans des constructions qui ne doivent pas durer, comme lorsqu'il faut faire un PARTIE EXPÉRIMENTALE. 29 pont pour passer une armée, ou un échafaud pour secourir ou assaillir une ville , qu'on peul hasarder de donirer au art les deux tiers de sa charge. ja Je ne sais s’il est nécessaire d’avertir que j'ai rebuté plusieurs pièces qui avoient des défauts, et que je n’ai compris dans ma table que les expériences dont j'ai été satisfait. J'ai encore rejeté plus de bois que je n’en ai employé : les nœuds, le fil tranché et les autres défauts du bois sont assez aisés à voir; mais 1l est difficile de juger de leur effet par rapport à la force d’une pièce ; il est sûr qu'ils la diminuent beaucoup, et j’ai trouvé un moyen d'estimer à peu près la diminu- ton de force causée par un nœud. On: sait qu'un nœud est une espèce. de cheville adhé- renée: à l’intérieur du bois; on peut même connoître , à peu près, par le nombre des cercles annuels qu’il contient, la profondeur à laquelle il pénètre. J’ai fait faire des trous en. forme de cône et de mème profondeur dans des pièces qui étoient sans nœuds, et j'ai rempli ces trous avec des chevilles de même figure; j'ai fait rompre ces pièces, et j ai reconnu par-là combien les nœuds ôtent 3 = 3o HISTOIRE NATURELLE. de force au bois, ce qui est beaucoup au‘delà de ce qu'on pourroit imaginer : un nœud qui se trouvera ou une cheville-qu’on mettra, à la face inférieure, et sur-tout à l’une des “arêtes, diminue-quelquefois d’un quart la force de la pièce. J'ai aussi essayé de recon- noiître, par plusieurs expériences, la dimi- nution de force causée par le fil tranché du bois. Je suis obligé de supprimer les résul- tats de ces épreuves, qui demandent beaucoup de détail : qu'il me soit permis cependant de rapporter un fait qui paroîtra singulier: c’est qu'ayant fait rompre des pièces courbes, telles qu’on les emploie pour la construction des vaisseaux, des dômes, etc. , j'ai trouvé qu’elles résistent davantage eu opposant à la charge le côté concave. On imagineroit d'abord le contraëre, et on penseroit qu'en opposant le côte convexe, comme la pièce fait voûte, elle devroit résister davantage : cela seroit vrai pour une pièce dont les fibres longitudinales seroient courbes naturelle- ment, c'est-à-dire, pour une pièce courbe dont le fil du bois seroit continu et non : tranché ; mais , comme les pièces courbes dont je me suis servi, et presque toutes celles # PARTIE EXPÉRIMENTALE.. 2% dont on se sert dans les constructions, son prises dans un arbre qui a de l'épaisseur, la partie intérieure de ces couches est beaucoup plus tranchée ‘que la partie extérieure, et par conséquent elle résiste moins, comme vie l'ai trouvé par mes expériences. l 11 sembleroit que des épreuves faites avec tant d'appareil et en si grand nombre ne de- _vroient rien laisser à desirer, sur-tout dans une matière aussi simple que celle-ci : ce- pendant je dois convenir, et je lavouerai volontiers , qu’il reste encore bien des choses à trouver; je n’en citerai que:quelques unes. On ne connoiît pas le rapport de la force dé la cohérencedlongitudinale du bois à-la force de son:union transversale, ‘c’est-à-dire ; quelle force il faut pour rompre.et quelle force il fant pour: fendre: une pièce. On ne connoît. pas la résistance du bois: dans dés positions différentes de celle que supposent mes expériences ; positions Cependant assez ordinaires dans les hâtimens , «et sur:les= quelles il seroit très-important d’avoir des règles certaines : je veux parler de la force des bois debout, des ‘bois inclinés, dés bois retenus par une seule.de leurs extrémi- 32 HISTOIRE NATURELLE. tés, etc. Mais en partant des résultats dé mon travail, on pourra païrveñir aisément à ces connoissances qui nous manquent! . Passons maintenant au détail x mes _ riences. J'ai d’abord recherché quels étoient là den! sité et les poids du bois de chène dans les différens âges, quelle proportion il y a entre la pesanteur du bois qui occupe/le centre et la pesanteur du bois de la circonférence, et encore. entre là pesanteur du bois parfait et celle de l’aubier, etc. M. Duhamel m'a dit qu'il avoit faitdes expériences à ce sujet : l'attention scrupuleuse avec laquelle: les miennesont été faites , me donné lieu de croire qu'elles se trouveront d'accord avec les siennes... 1 | : opel nf J'ai fait tirer un: bloc du pied d'un chêne abattu le même jour; et ayant posé la! pointé d’un compas au centre des cercles annuels; j'ai décrit une circonférence de cercle autour de ce centre, et ensuite ayant posé la pointe du compas au milieu de l’épaisseur de l’au- bier, j'ai décrit un pareil cercle dans l’au- bier; j'ai. fait ensuite tirer de ce bloc deux petits cylindres, l’un de cœur de chêne, et * PARTIE EXPÉRIMENTALE. 33 l’autre d’aubier, et les ayant posés dans les bassins d’une bonne balance hydrostatique, et qui penchoit sensiblement à un quart de grain, je les ai ajustés en diminuant peu à peu le plus pesaut des deux; et lorsqu'ils m'ont paru parfaitement en équilibre, je les ai pesés ; ils pesoient également chacun 571 grains : les ayant ensuite pesés séparé— ment dans l’eau, où je ne fis que les plonger un moment, j'ai trouvé que le morceau de cœur perdoit dans l’eau 317 grains, et le, morceau d'aubier 344 des mêmes grains. Le peu de temps qu’ils demeurèrent dans l’eau, rendit insensible la différence deleur augmen- tation de volume par l’imbibition de l’eau, qui est très-différente dans le cœur du chêne ei dans l’aubier. Le même jour, j'ai fait faire deux autres cylindres, l’un de cœur et l’autre d’aubier de chêne, tirés d’un autre bloc, pris dans un arbre à peu près de même âge que le premier et à la même hauteur de terre : ces deux - cylindres pesoient chacun 1978 grains; le morceau de cœur de chêne perdit dans l’eau 1635 grains, et le morceau d’aubier 1784. Eu comparant cette expérience avec la pre- 34 HISTOIRE NATURELLE. mière, on trouve que le cœur de chêne ne perd dans cette seconde expérience que 507 ou euviron sur 371, au lieu de 317 =, et dé même, que l’aubier ne perd sur 371 grains que 530, au lieu de 344; ce qui est à peu près la même proportion entre le cœuret l’aubier: la différence réelle ne vient que de la densité différente , tant du cœur que de l’aubier'du second arbre, dont tout le bois en géneral étoit plus solide et plus dur sé le bois du premier. Trois jours après, j'ai pris dans un des morceaux d’un autre chêne abattu le même jour que les précédens, trois cylindres, l’un au centre de l'arbre, l’autre à la circonfé- rence du cœur, et le troisième à l’aubier, qui pesoient tous trois 975 grains dans l'air; et les ayant peses dans l’eau, le bois du centre perdit 873 grains, celui de la circonférence du cœur perdit 906, et l’aubier 938 grains: En comparant cette troisième ‘expérience avec les deux précédentes, on trouve que 371 grains LG cœur du premier chêne perdant 317 grains :, 371 grains du cœur du second chène auroient dû perdre 332 grains à peu près ; et de même, que 371 grains d'aubier. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 35 du premier chêne perdant 344 grains, 371 grains du second chêne auroiént dû perdre 330 grains, et 371 grains de l’aubier du troi- sième chêne auroient dû perdre 356 grains; ce qui ne s'éloigne pas beaucoup de la pre- mière proposition, la différence réelle de la perte, tant du cœur que de l’aubier de ce troisième chêne, venant de ce que son bois étoit plus léger et un peu plus sec que celui des deux autres. Prenant donc la mesure moyenne entre ces trois différens bois de chêne , on trouve que 371 grains de cœur perdent dans l’eau 319 grains + de leur poids, et que 371 grains d’aubier perdent 343 grains de leur poids : donc le volume du cœur du chène est au volume de l’aubier :: 319: : 343, et les masses :: 543 : 319 :; ce qui fait envi- ron un quinzième pour la différence entre les poids spécifiques du cœur et de l’aubier. J’avois choisi, pour fairé cette troisième expérience , un morceau de bois dont les couches ligneuses m'avoient paru assez égales dans leur épaisseur, et j’enlevai mes trois cylindres de telle façon, que Le centre de mon cylindre du milieu , qui étoit pris à la cir- conférence du cœur, étoit également éloigné 36! HISTOIRE NATURELLE, : ‘du centre de l'arbre où j’avois enlevé mon premier cylindre de cœur, et du centre du cylindre d’aubier : par-là j’ai reconnu que la pesanteur du bois décroît à peu près en progression arithmétique ; car la perte du cylindre du centre étant 873, et celle du cylindre d’aubier étant 938, on trouvera, en prenant la moitié de la somme de ces deux nombres, que le bois de la circonférence du cœur doit perdre 905 =, et, par l’expérience, je trouve qu'il a perdu 906 : ainsi le bois, depuis le centre jusqu’à la dernière circon— férence de l’aubier, diminue de densité en progression arithmétique. Je me suis assuré, par des épreuves sem- blables à celles que je viens d'indiquer, de la diminution de pesanteur du bois dans sa longueur : le bois du pied d’un arbre pèse plus que le bois du tronc au milieu de sa hauteur, et celui de ce milieu pèse plus que le bois du sommet, et cela à peu près en progression arithmétique , tant que l'arbre prend de l’accroissement ; mais il vient un. temps où le bois du centre et celui de la circonférence du cœur pèsent à peu près éga- Jement, et c'est le temps auquel Le bois est dans sa perfection. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 39 Les expériences ci-dessus ont été faites sux des arbres de soixante ans, qui croissoient en- core, tant en hauteur qu’en grosseur; et les ayant répétées sur des arbres de quarante-six ans, et encore sur des arbres de trente-trois ans, j'ai toujours trouvé que le bois du centre à la circonférence, et du pied de l'arbre au sommet, diminuoit de pesanteur à peu près en progression arithmétique, Mais , comme je viens de l'observer, dès que lesçarbres cessent de croître, cette pro— portion commence à varier. Jai pris dans le tronc d’un arbre d’environ cent ans trois cylindres, comme dans les épreuves précé- dentes , qui tous trois pesoient 2004 grains dans l'air; celui du centre perdit dans l’eau 1713 grains, celui de la circonférence du cœur 1718 grains, et celui de J'aubier 779. grains. Par une seconde épreuve , j'ai trouvé que de trois autres cylindres pris dans le tronc d'un arbre d'environ cent dix ans, et qui pesoient ‘dans l'air 1122 grains, celui du centre perdit 1002 grains dans l’eau, celui de la circonférence du cœur 997 grains , et celui de l’aubier 1023 grains. Cette expé- | Mat, gén. XVIL. METAL 4 à rience prouve que a cœur n’étoit. DS la he partie la plus solide de l’arbre, et elle prouve | en même temps que l’aubier est plus pesant et plus solide dans les vieux Sa dans les jeunes arbres. * . J'avoue que, dans les re climats, dans les différens terrains, et même dans le même terrain, cela varie prodigsieusement, et qu’on peut trouver des arbres situés assez heureusement pour prendre encore de l'ac- croissement en hauteur à l’âge de cent cin— quante ans ; ceux-ci font une exception à la règle : mais, en général, il est coustant que le bois augmente de pesanteur jusqu’à un certain âge dans la proportion que nous avons établie; qu'après cet âge le bois des différentes parties de l'arbre devient à peu prés d’égale pesanteur, et c'est alors qu'il est dans sa perfection; et enfin que, sur son déclin, le centre de l’arbre venant à s’obs- truer, le bois du cœur se dessèche, faute de uourriture suffisante, et devient plus léger que le bois dela circonférence à proportion de la profondeur, de la différence du terrain, et du nombre des circonstances qui peuveut — PARTIE EXPÉRIMENTALE. 39 prolon ger ou raccourcir le temps de l’'accrois- sement des arbres. , Ayant reconnu, par les expériences pré- cédentes, la différence de la densité du bois dans les différens âges et dans les différens états où il se trouve avant que d’arriver à sa perfection, j'ai cherché quelle étoit la dif- férence de la force, aussi dans les mêmes différens âges ; et pour cela, j'ai fait tirer du centre de plusieurs arbres, tous du même âge, c'est-à-dire, d'environ soixante ans, plusieurs barreaux de trois pieds de longueur sur un pouce d'équarrissage, entre lesquels j'en ai choisi quatre qui étoient les plus par- faits ; ils pesoient, as 24 3me 4me barreau. onces,. onces. onces. onces, 15 26. 26. 265. 26. Ïls ont rompu sous la charge de or) E0gt 272l . 252) Ensuite j'ai pris plusieurs morceaux du bois de la circonférence du cœur, de même longueur et de même équarrissage , c’est-à— dire , de trois pieds sur un pouce , entre les- quels j'ai choisi quatre des plus parfaits ; ils pesoient : à HISTOIRE NATURELLE: RU EU ON Le pe barreau. | dt onces. onces. onces. onces. 526 20 14 11 295 25, 25-74 252. Ils ont rompu sous la charge de 2621 " 2961 29! 2931, Et de même ayant pris pe morceaux d’aubier, ils pesoient , E°E ed Dep 4% barreau. “ onces, onces onces. onces. mi 25 24 24. 24. Is ont rompu sous la charge de 5408 24217 94 | 210 Ces épreuves me firent soupçonner que fa force du bois pourroit bien être proportion- nelle à sa pesanteur; ce qui s’est trouvé vrai, comme on le verra par la suite de ce Mé- moire. J'ai répété les mêmes expériences sur des barreaux de deux pieds, sur d’autres de dix-huit pouces de longueur et d’un pouce d’équarrissage. Voici le résultat de ces expé- yiences. La PARTIE EXPÉRIMENTALE. 4 BARREAUX DE DEUX PIEDS *. Poids. ex 24 Dee 4e barreau. , onces. che ol , -onces. onces, Centre. 17. 16. 16. 162. Crcont A TD. TO. | ID-2.) . 1957. Aübier. 147 O4 ‘144, 14. | Charges. Sem 450) 4201 4191 ‘4obl Circonf. 3561 3501 3461 3461. Mali ao P'O4t 325! ‘9161 : BARREAUX DE DIX-HUIT POUCES. Poids. rer Dir. de Darren onces, onces. onces. onces. Circonf. 1255, 125 2° / Aubier, OI HI. II. 1155 ‘| Charges. Centre. 4881 4861 4781 4771. Circonf. 460! (HOent AAT TS At Aubier. 4301 4381 4281 4281 * Il faut remarquer et nee l'arbre étoit assez gros, le bois’ de Ia circonférencé étoit beaucoup plus éloigné du.bois du centre que de celui de laubier, Æ 4 HISTOIRE NATURELLE BARREAUX D’UN PIED. 4 Poids. | 1 21 3me … 4me barreau, onces. onces. onces. onces. Centre. . : 82. 2 1e. One Circonf. 8. 22. ie. 7e Aubier. Te Te 7. 6. Charges. Centre.’ 764! 761! 700! mor, - Circonf. 7211 oo! 693! 698! “a LL Aubier. 66681 . 6521 : 65rb. © 643. En comparant toutes ces experiences, on . voit que la force du bois ne suit pas bien exactement la mème proportion que sa pe=. santeur ; : mais on voit toujours que cette pe- santeur diminue, comme dans les premières expériences, du centre à la circonférence, On ne doit pas s’etonner de ce que ces expe- riences ne sont pas suffisantes pour juger exactement de la force du bois ; car les bar- reaux tirés du centre de l’arbre sont autre-. nent composés que les barreaux de la circon- férence ou de l’aubier, et je ne fus pas long temps sans m’appercevoir que cette AE A dans la position tant des couches ligneuses \ = « A À ] | PARTIE EXPÉRIMENTALE. 43 que des cloisons qui les unissent, devoit in- fluer beaucoup sur la résistance du bois. J’examinai donc avec plus d’attention la forme'et la situation des couches ligneuses dans les différeus barreaux tirés des différentes parties du tronc de l'arbre: je vis que les bar- reaux tirés du centre contenoient dans le mi- lieu un cylindre de bois rond, et qu'ils n'é- toient tranchés qu'aux arêtes ; je vis que ceux de la circonférence du cœur formoient des plans presque parallèles entre eux, avec une courbure assez sensible, et que ceux de l’au- bier étoient presque absolument parallèles avec une courbure insensible. J’observai de plus que le nombre des couches ligneuses varioit très-considérablèement dans les diffe- xens barreaux, de sorte qu’il y en avoit qui ‘ne contenoient que sept couches ligneuses , et d’autres en contenoient quatorze dans la même épaisseur d’un pouce. Je m'apperçus aussi que la position de ces couches ligneuses ét le sens où elles se trouvoient lorsqu'on faisoit rompre le barreau , devoient encore faire varier leur résistance, et je cherchai les moyens de connoitre au juste la proportion le cette variation. &4 HISTOIRE NATURELLE. 15 ti J'ai fait tirer du même pied d'arbre, à la ‘ circonférence du cœur, deux barreaux de trois pieds de longueur sur un pouce et demi d'équarrissage ; chacun de ces deux barreaux contenoit quatorze couches ligneuses presque. parallèles entre elles. Le premter pesoit3livres 2 onces +, et le second 3 livres 2 onces =. J'ai fait rompre ces deux barreaux, en les exposant de façon que , dans le premier, les couches ligneuses se trouvoient posées hori- zontalement ; et, dansle second , elles étoient situées verticalement. Je prévoyois que cette dernière position devoit être avantageuse; ef en effet, le premier rompit sous la charge de 852 livres, et le second ne rompit que sous celle de 972 livres. ; | J'ai de même fait tirer plusieurs petits bar- reaux d’un pouce d’équarrissagse sur un pied de lngugur; l’un de ces barreaux, qui pesqie 7 onces 5, et contenoit douze couches 'li- ‘gneuses posées horizontalement ; a rompu sous 784,livres ; l’autre , qui pesoit 8 onces , et contenoit aussi douze couches ligneuses posées verticalement , n'a rompu que sous 860 livres. Des deux autres pareils barreaux , dontle Fa PARTIE EXPÉRIMENTALE. 45 premier pesoit 7 onces, et contenoit huit couches ligneuses, et le second 7 onces —, et contenoit aussi huit couches ligneuses, le premier , dont les couches lisneuses étoient posées horizontalement, a rompu sous 778 livres ; et l’autre, dont les couches étoient posées verticalement , a rompu sous 828 livres. J'ai de même fait tirer des barreaux de deux pieds de longueur sur un pouce et demi d’équarrissage. L’un de ces barreaux, qui pesoit 2 livres 7 onces -—, et contenoit douze couches lisneuses posées horizontalement, a rompu sous 1217 livres; et l’autre, qui pesoit 2 livres 7 onces=, et qui coutenoit aussi douze couches lisneuses, a rompu sous 1294 livres. Toutes ces experiences concourent à prou- ver qu'un barreau ou une solive résiste bien davantage lorsque les couches ligneuses qui le composent, sont situées perpendiculaire- ment ; elles prouvent aussi que plus il y a de - couches lisneuses dans les barreaux ou autres petites-pièces de bois, plus la différence de la force de ces pièces dans les deux positions opposées est considérable. Mais comme je 'étois pas encore pleinement satisfait à cet 1.2” AE Vu" ONE JAN out TRE et 4 RATE + Al Get: # die K 2 l'A ? + 46 HISTOIRE NATURELLE: à à! égard, j'ai fait la mème expérience sur des | planches mises les unes contre les autres, et . je les rapporterai dans la suite, ne voulant point interrompre ici l'ordre des temps de mon travail, parce qu’il me paroît plus na- turel de donner les choses comme on les a faites. HIER Les expériences précédentes ont servi à me guider pour celles qui doivent suivre; elles m'ont appris qu'il y a une différence consi- dérable entre la pesanteur et la force du bois dans un mêmearbre, selon que ce bois est pris au centre ou à la circonférencede l’arbre; elles m'ont fait voir que la situation des couches ligneuses faisoit varier la résistance de la même pièce de bois; elles m'ont encore appris que le nombre des couches ligneuses influe sur la force du bois, et dès lors j'ai reconnu que les tentatives qui ont été faites jusqu’à présent sur cette matière, sont insuf- fisantes pour déterminer la force du bois : car toutes ces tentatives ont été faites sur de petites pièces d’un pouce ou un pouce et demi d’équarrissage, et on a fondé sur ces expé- riences le calcul des tables qu’on nous a don nées pour la résistance des poutres, solives no LS 4 | " pARTIE EXPÉRIMENTALE. 4 et pièces de toute grosseur et longueur, sans avoir fait aucune des remarques que nous avons énoncées ci-dessus. Après ces premières connoissances de la force du bois, qui ne sont encore que des notions assez peu complètes, j'ai cherché à en acquérir de plus précises ; j’ai voulu m’as- surer d’abord si de deux morceaux de bois de même longueur et de mème figure, mais dont le premier étoit double du second pour la grosseur, le premier avoit une résistance double , et pour cela j'ai choisi plusieurs morceaux pris dans les mêmes arbres et à la même distance du centre, ayant le même mombre d'années, situés de la même façon avec toutes les circonstances nécessaires pour établir une juste comparaison. | J'ai pris à la mème distance du centre d’un arbre , quatre morceaux de bois parfait, chacun de deux pouces d’équarrissage sur dix — huit pouces de longueur; ces quatre morceaux ont rompu sous 3226 , 5062, 2983 et 2800 livres, c'est-à-dire, sous la charge moyenne de 3040 livres. J'ai de même pris quatre morceaux de dix-sept lignes, foibles d’équarrissage, sur la même longueur, 4 HISTOIRE NATURELLE. R ce qui fait à très - peu près ‘la moitié de Bron des quatre premiers morceaux, et j'ai trouvé qu'ils ont rompu sous 1304, 1974, 13531, 1108 livres ,c’est-à-dire,au pied moyen, | sous 1252 livres. Et de même j'ai pris quatre morceaux d’un pouce d’équarrissage, sur la même longueur de dix-huit pouces, ce qui fait le quart de grosseur des premiers, et j'ai trouvé qu'ils ont rompu sous 526, 517, boo, 496 livres, c’est-à-dire, au pied moyen, sous b10 livres. Cette expérience fait voir que la force d’une pièce n’est pas proportionnelle à sa grosseur; Car ces grosseurs élant 1, 2, 4, lés charges devroient être 510, 1020, 2040, | au lieu qu’elles sont en effet 510, 1252, 30403 ce qui est fort différent, comme l’avoient déja remarqué quelques auteurs qui ont écrit sur la résistance des solides. | | - J'ai pris de même plusieurs barreaux d’un pied, de dix-huit pouces; de deux pieds et. de trois pieds de longueur, pour reconnoître si les barreaux d’un pied porteroient une fois autant que ceux de deux pieds, et pour m’as- surer si la résistance des pièces diminue jus- tement dans la même raison que leur lon- gueur augmente. Les barreaux d’un pied +400 PARTIE EXPÉRIMENTALE.. 49 supportèrent, au pied moyen, 765 livres ; ceux de dix-huit pouces, 5oo livres ; ceux de deux pieds, 369 livres; et ceux de trois pieds, 250 livres. Cette expérience me laissa dans le doute, parce que les charges n’étoient pas fort différentes de ce qu’elles devoient être; car, au lieu de 765, 500, 369 et 230, la règle du levier demandoit 765, b10 :, 382 et 255 2 ? _ = . c Et : r livres, ce qui ne s'éloigne pas assez pour pou- voir conclure que la résistance des pièces de bois ne diminue pas en même raison que leur longueur augmente : mais, d’un autre côté, cela Ss’éloigne assez pour qu’on sus- pende son jugement; et en effet on verra par la suite que l'on a ici raison de douter. J'ai ensuite cherché quelle étoit la force du bois , en supposant la pièce inégale dans ses dimensions ; par exemple, en la supposant d’un pouce d'épaisseur sur un pouce et demi de largeur, et en la plaçant sur l’une et en- suite sur l’autre de ces dimensions ; et pour cela j'ai fait faire quatre barreaux d’aubier de dix-huit pouces de longueur sur un pote et demi d’une face , et sur un pouce de l’autre face: Ces quatre barreaux, posés sur la face d'un pouce, ont supporlé , au pied moyen, 5 Le f ‘ t l 5o HISTOIRE NATURELLE: 723 livres, et quatre autres barreaux tout semblables, posés sur la face d’un pouce et demi, ont supporté, au pied moyen, 035 livres et demie. Quatre barreaux de bois par- fait, posés sur la face d'un pouce, ont sup- porté, au pied moyen, 77h, et sur la face d'un pouce et demi, 998 livres. nl faut tou- jours se souvenir que, dans cés expériences, : j'avois soin de choisir des morceaux de bois à peu près de même pesanteur, et qui conte- noient le mème nombre de couches ligneuses posées du même sens. Avec toutes ces précautions et toute l’at— tention que je donnois à mon travail, j’a- vois souvent peine à me satisfaire; je m’ap- percevois quelquefois d’irrégularités et de variations qui dérangeoient les conséquences que je voulois tirer de mes expériences, et j'en ai plus de mille rapportées sur un re- gistre , que j'ai faites à plusieurs desseins , dont cependant je n'ai pu rien tirer, et qui m'ont laissé dans une incertitude manifeste à bien des égards. Comme toutes ces expé- riences se faisoient avec des morceaux de hois d'un pouce , d’un pouce et demi ou de deux pouces d’équarrissage , il falloit une [ PARTIE EXPÉRIMENTALE. Sr attention très-scrupuleuse dans le choix du bois, une égalité presque parfaite dans la pesanteur , le même nombre dans les couches ligneuses ; et outre cela, il y avoit un in- conuvénient presque inévitable, c’étoit l'obli- quite de la direction des fibres, qui souvent rendoit les morceaux de bois tranches, les uns d’une couche, les autres d'une demi- couche, ce qui diminuoit considérablement la force du barreau. Jene parle pasdesnœuds, des défauts du bois, de la direction très- oblique des couches ligneuses ; on sent bien que tous ces morceaux étoient rejetés sans se donner la peine de les mettre à l’épreuve. Enfin de ce grand nombre d'expériences que _ j'ai faites sur de petits morceaux, je n’en ai pu tirer rien d’assuré que les résultats que j ai donnés ci-dessus , et je n’ai pas cru devoir hasarder d'en tirer des conséquences géné- rales pour faire des tables sur la résistance du bois. Ces considérations et les regrets des peines perdues me déterminèrent à entreprendre de faire des expériences en grand : je voyois clai. rement la difficulté de l’eutreprise ; mais je ñe pouvois me résoudre à l’abandonner , et 52 HISTOIRE NATURELLE. heureusement j’ai été beaucoup plus satisfait que je ne l’espérois d’abord. PREMIÈRE EXPÉRIENCE. Jar fait abattre un chêne de trois pieds de circonférence , et d’environ vingt-cinq pieds de hauteur;ilétoit droitetsans branches | jusqu'à la hauteur de quinze à seize pieds: je l'ai fait scier à quatorze pieds , afin d'éviter les défauts du bois, causés par l’éruption des branches, et ensuite j’ai fait scier par le mi- lieu cette pièce de quatorze pieds ; cela m’a donné deux pièces de sept pieds chacune; je les ai fait équarrir lelendemain par des char- pentiers , et le surlendemain je les ai fait travailler à la varlope par des menuisiers , pour les réduire à quatre pouces justes d’é- quarrissage, Ces deux pièces étoient fort saines et sans aucun nœud apparent : celle qui provenoit du pied de l'arbre, pesoit 60 , livres ; celle qui venoit du dessus du tronc, pesoit 56 livres. On employa à charger la première vingt-neuf minutes de temps; elle plia dans son milieu de trois pouces et demi avant que d’éclater ; à l'instant que la pièce NT o cs ”: 14 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 53 eut éclaté, on discontinua de la charger; elle continua d’éclater et de faire beaucoup de bruit pendant vingt-deux minutes ;elle baissa dans son milieu de quatre pouces et demi, et rompit sous la charge de 5350 livres. La se- conde pièce, c’est-à-dire, celle qui provenoit de la partie supérieure du tronc, fut chargée en vingt-deux minutes : elle plia dans son milieu de quatre pouces six lignes avant que d'eclater ; alors on cessa de la charger; elle continua d’eclater pendant huit minutes, et elle baissa dans son milieu de six pouces six ligues , et rompit sous la charge de 5275 livres. EE Daxs le même terrain où j’avois fait cou- per l'arbre qui m'a servi à l'expérience pré- cédente, j'en ai fait abattre un autre presque semblable au premier ; il étoit seulement un peu plus élevé , quoiqu’un peu moins gros : sa tige étoit assez droite; mais elle laissoit paroiître plusieurs petites branches de la pros- seur d'un doigt dans la partie supérieure, et à la hauteur de dix-sept pieds, elle se divisoié 5 ’ 54 HISTOIRE NATURELLE: en deux grosses branches ; j'ai fait tirer de cet arbre deux solives de Lil pieds de lon gueur sur quatre pouces d’équarrissage, et je les ai fait rompre deux jours après, c'est-à- dire , immédiatement après qu’on les eut travaillées et réduites à la juste mesure. La première solive, qui provenoit du pied de l'arbre, pesoit 68 livres, et la seconde, tirée de la partie supérieure de la tige, ne pesoit que 65 livres. On chargea cette première S0— live en quinze minutes: elle plia dans son milieu de trois pouces neuf lignes avant que d’éclater ; dès qu’elle eut éclaté, on cessa de charger; la solive continua d’éclater pendant dix minutes; elle baissa dans son milieu de huit pouces, après quoi elle rompit, en fai- sant beaucoup de bruit, sous le poids de 4600 livres. La seconde solive fut chargée en treize minutes : elle plia de quatre pouces huit lignes avant que d’éclater; et après le premier éclat , qui se fit à trois pieds deux pouces du milieu, elle baissa de onze pouces en six minutes, et rompit , au bout de ce temps , sous la charge de 4500 livres. ; { 47 # “ PARTIE EXPÉRIMENTALE. : 55 TT. | LE même jour, je fis abattre un troisième chène voisin des deux autres, et j'en fis scier la tige par le milieu; on en tira deux solives de neuf pieds de longueur chacune sur quatre pouces d’équarrissage ; celle du pied pesoit #7 livres, et celle du sommet 71 livres ; et les ayant fait mettre à l'épreuve, la première fut chargée en quatorze minutes, elle plia de quatre pouces dix lignes avant que d’éclater, et ensuite elle baissa de sept pouces et demi, et rompit sous la charge de 4100 livres : celle du dessus de la tige, qui fut chargée en douze minutes , plia de cinq pouces et demi , éclata ; ensuite elle baissa jusqu’à neuf pouces , et rompit net sous la charge de 5950 livres. | Ces expériences font voir que le bois du pied d’un arbre est plus pesant que le bois du haut de la tige ; elles apprennent aussi que le bois du pied est plus fort et moins _ flexible que celui du sommet. ar \ ATEN. \ Na +4 AU AUNN gi ou Far PME, 3 » 56 . HISTOIRE NATURBULE. L4 I Y. Jar choisi dans le même canton où j'avois déja pris les arbres qui m'ont servi aux expériences précédentes , deux chênes de même espèce, de même grosseur, et à.peu près semblables en tout ; leur tige avoit trois pieës de tour, et n’avoit guère que onze à douze pieds de hauteur jusqu'aux premières branches : je les fis équarrir et travailler tous deux en même temps, et on tira de cha- cun une solive de dix pieds de longueur sur quatre pouces d’équarrissage ; l’une de ces solives pesoit 84 livres, et l’autre 82; la pre- mière rompit sous la charge de 3625 livres , Let la seconde sous celle de 3600 livres. Je dois observer :ici qu’on employa un temps égal à les charger, et qu'elles éclatèrent toutes deux au bout de quinze minutes; la plus légère plia un peu plus que l’autre, c'est-à-dire, de six pouces et demi,iet LES UE de cinq pouces dix lignes. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 57 . J'aAr fait abattre, dans le même endroit, deux autres chènes de deux pieds dix à onze pouces de grosseur , et d'environ quinze pieds de tige ; j'en ai fait tirer deux solives de douze pieds de longueur et de quatre pouces d'é- quarrissage : la première pesoit 100 livres, et la seconde 98; la plus pesante a rompu sous la charge de 3050 livres, et l’autre sous celle de 2925 livres, après avoir plié dans leur milieu , la première jusqu'à sept , et la seconde jusqu'à huit pouces. Voilà toutes les expériences que j'ai faites sur des solives de quatre pouces d’équarris- sage; je n'ai pas voulu aller au-delà de la ‘longueur de douze pieds , parce que, dans l'usage ordinaire, les constructeurs et les charpentiers n’emploient que très-rarement des solives de douze pieds sur quatre pouces d'équarrissage, et qu’il n'arrive jamais qu’ils se servent de pièces de quatorze ou quinze pieds de lonsueur et de quatre pouces de grosseur seulement, En comparant la différente pins des Be \ À ; À EN f ; Ve ET ÿ : 58 HISTOIRE NATURELLE solives employées à faire les expériences ci- dessus , on trouve , par la première de ces expériences , que le pied cube de ce bois pe- soit 74 livres £ ; par la seconde, 73 livres £ ; par la troisième ,74; par la quatrième, 747; et par la cinquième, 742: ce qui marque que le pied cube de ce bois pesoit en nombres-. moyens 74 livres <-. Eu comparant les différentes charges des pièces avec leur longueur , on trouve que les pièces de sept pieds de longueur supportent 5313 livres; celles de huit pieds, 4550 ; celles de neuf pieds, 4025; celles de dix pieds, 3612 ; et celles de douze pieds, 2987 livres : au lieu que, par les règles ordinaires de la mécanique , celles de sept pieds ayant sup= porté 5313 livres, celles de huit pieds auroient dû supporter 4649 livres ; celles deneufpieds”, 4121 ; celles de dix pieds , 3719; et celles de douze pieds , 3099 livres; d’où l’on peut déja soupçonner que la force du bois décroit plus qu’en raison inverse de sa longueur. Comme il me paroissoit important d'acquérir une certitude entière sur ce fait, j'ai entrepris de faire les expériences suivantes sur des so- e lives de cinq pouces d'équarrissage, et de LA PARTIE EXPÉRIMENTALE. 59 toutes longueurs , depuis sept pieds jusqu’à vingt-huit. , : NL Comme je m’étois astreint à prendre dans le même terrain tous les arbres que je desti- . mois à mes expériences , je fus obligé de me borner à des pièces de vingt-huit pieds de longueur : n'ayant pu trouver dans ce canton des chênes plus élevés, j'en ai choisi deux dont la tige avoit vingst-huit pieds sans grosses branches , et qui en tout avoient plus de quarante-cinq à cinquante pieds de hauteur ; ces chênes avoient à peu près cinq pieds de tour au pied. Je Les ai fait abattre le 14 mars 1740; et les ayant fait amener le même jour, je les ai fait équarrir le lendemain : on tira de chaque arbre une solive de vingt-huit pieds de longueur sur cinq pouces d’équar- rissage. Je les examinai avec attention pour. reconnoitre s'il n’y auroit pas quelques nœuds ou quelque défaut de bois vers le milieu, et je trouvai que ces deux longues pièces étoient fort saines : la première pesoit 364 livres, et la seconde 360. Je fis charger la plus pesante "A st TA. lé V'A4 l'en. PR OT LATE k, , d nrR CT TAN 1 } F4 + ON AN EN UP | F Ru ta LAURE 6o HISTOIRE NATURELLE avec un équipage léger : on commença # deux heures cinquanté-cinq minutes ; à trois heures, c'est-à-dire , au bout de cinq mi nutes , elle avoit déja plié de ‘trois pouces dans son milieu , quoiqu’elle ne fût encore chargée que de 500 livres; à troïs heures cinq minutes, elle avoit pliéde sept pouces, etelle étoit chargée de 1000 livres ; à trois heures dix minutes, elleavoit plié de quatorze pouces sous la charge de 1500 livres ; enfin à trois heures douze à treize minutes, elle avoit plié de dix-huit pouces, et elle'étoit chargée de 1800 livres. Dans cet instant, la pièce éclata violemment; elle continua d’éclater pendant quatorze minutes, et baissa de: vingt-cinq pouces , après quoi elle rompit.net au milieu sous ladite charge de 1800 livres. La seconde . pièce fut chargée de la mème façon : on com- mença à quatre heures cinq minutes ; on la chargea d’abord de 500 livres, en cinq mi- nutes elle avoit plie de cinq pouces ; dans les cinq minutes suivantes on la chargea encore de 500 livres, elle: avoit plie de onze pouces et demi; au bout de cinq ‘autres minutes, elle avoit plie de dix-huit pouces et démisous da charge de 1500 livres ; deux minutes après, oi | Re _ PARTIE EXPÉRIMENTALE. Gt: elle éclata sous celle de 175olivres, et, dans ce moment, elleavoit plié de vingt-deux pouces, On cessa de la charger; elle continua d’écla- ter pendant six minutes, et baissa jusqu'à vingt-huit pouces avant que de rompre en- tièrement sous ceite charge de 1760 livres. } Nil. da - CoMMeE la plus pesante des deux pièces _de’ l'expérience précédente avoit rompu net dans son milieu, et que le bois n’étoit point éclaté ni fendu dans les parties voisines de la rupturé, je pensdi que les deux morceaux de cette pièce rompue pourroient me servir pour faire des expériences sur la longueur de quatorze pieds : je prévoyois que la partie supérieure de cette pièce peseroit moins et roinproit plus aisément que l’autre morceau qui provenoit de la partie inférieure du tronc; mais en même temps je voyois bien ‘qu’en prenant le terme moyen entre Les résistances de ces deux solives, j’aurois un résultat qui ne s'éloigneroit pas de la résistance ‘réelle -d’une pièce de quatorze pieds, prise dans un arbre de cette hauteur ou enyiron. J'ai donc | | 6 62 HISTOIRE NATURELLE. faitiscier le reste des fibres qui unissoien£ encore les deux parties ; celle qui venoit du pied de l'arbre se trouva peser 185 livres, et celle du sommet 178 livres = La première fut chargée d’un millier dans les cinq premières minutes; elle n’avoit pas pliétsensiblement sous cette charge ; on l’augmenta d'un se- cond millier de livres dans les cinq minutes suivantes, ce poids de deux milliers La fit plier d’un pouce dans son milieu ; un troi- sième millier en cinq autres minutes la fit, plier eu tout de deux pouces ; un quatrième. millier Ja fit plier jusqu'à trois pouces et demi; et un cinquième millier, jusqu’à cinq pouces et demi : on alloit continuer à. la charger ; mais après avoir ajouté 250 aux cinq milliers dont elle étoit chargée , il se fit un éclat à une des arêtes inférieures; on dis- continua de charger, les éclats continuèrent, et la pièce baissa dans le milieu jusqu’à dix, pouces avant que de rompre entièrement sous cette charge de 5250 livres ; elle avoit supporté tout ce poids pendant quarante-une minutes. Fr. PU On chargea la seconde pièce comme on avoit chargé la première, c ’est-à-dire, d'un ù Fr Aù " \ s @ | PARTIE EXPÉRIMENTALE, 63: millier par cinq minutes: le premier millier Ja fit plier de trois lignes; le second, d’un pouce quatre lignes ; le troisième, de trois poucés ; Le quatrième , de cinq pouces neuf lignes : on chargeoit le cinquième millier lorsque la pièce éclata tout-à-coup sous la charge de 4650 livres; elle avoit plié de huit pouces. Après ce premier éclat, on cessa de charger ; la pièce continua d’éclater pendant une demi-heure , et elle baissa jusqu’à treize pouces , avant que de rompre eutièrement sous cette charge de 4650 livres. La première pièce, qui provenoit du pied de l’arbre, avoit porté 5250 livres , et la se conde , qui venoit du sommet, 4650 livres : cette différence me parut trop grande pour statuer sur tette expérience ; c’est pourquoi je crus qu'il falloit réitérer, et je me servis de la seconde pièce de wingt-huüit pieds de la sixième expérience. Elle avoit rompu en éclatant à deux pieds du milieu, du côté de la partie supérieure de la tige : mais la partie inférieure ne paroissoit pas avoir beaucoup souffert de la rupture, elle étoit seulement fendue de quatre à cinq pieds de longueur, et la fente, qui n’avoit pas un quart de ligne L #, 6, HISTOIRE NATURELLE. d'ouverture , pénétroit jusqu raies moitié où environ de l'épaisseur de la pièce. Je résolus, malgré ce petit défaut, de la mettre'à l’é- précédentes ; on commença à midi vingt minutes : le premier millier la fit plier de près d’un pouce ; le second , de deux pouces dix lignes; le troisième , de cinq pouces trois ligues ; et un poids de 150 livres ajouté , aux trois milliers la fit éclater avec grande force; l'éclat fut rejoindre la fente occasion- née par la première rupture , et la pièce baissa de quiuze pouces avant que de rompre entièrement sous cette charge &e 3150 livres. Cette expérience m’apprit à me défier beau- coup des pièces qui avoient été rompues ou chargées auparavant ; CAT 1l se trouve ici une différence de près de deux milliers sur cinq dans la charge, et cette différence ne doit être attribuée qu’à la fente de la pre- mière rupture qui avoit affoibli la pièce. Étant donc encore moins satisfait après celte troisième épreuve que je ne l’étois après les deux premières, je cherchai dans le méme terrain deux arbres dont la tige pûe preuve; je la pesai, et je trouvai qu'ellepe- soit 183 livres. Je la fis charger comme les 4 => = Pa. PARTIE EXPÉRIMENTALE.. 65 [" me fournir deux solives de la même longueur de quatorze pieds, sur cinq pouces d’équarris- sage ; et les ayant fait couper le 17 mars, je les fis rompre le 19 du même mois : l’une des. pièces pesoit 178 livres , et l’autre 176. Elles se trouvèrent heureusement fort saines et sans aucun defaut apparent ou caché. La pre- mière ne plia point sous le premier millier ; elle plia d’un pouce sous le second, de deux pouces et demi sous le troisième, de quatre pouces et demi sous Le quatrième, et de sept pouces un quart sous le cinquième. On la chargea encore de 400 livres, après quoi elle fit un éclat violent , et continua d’éclater pendant vingt-une minutes : elle baissa jus qu'à treize pouces, et rompit enfin sous la charge de 5400 livres. La seconde plia un peu sous le premier millier ; elle plia d’un pouce trois lignes sous le second , de trois pouces sous le troisième, de cinq pouces sous le quatrième , et de près de huit pouces sous le cinquième : 200 livres de plus la firent écla- ter. Elle continua à faire du bruit et à baisser pendant dix-huit minutes, et rompit au bout de ce temps sous la charge de 520olivres. Ces deux dernières expériences me satisfirent ;! W ù qi AS RAP AC) ER Su à sut SA à 66 HISTOIRE NATURELLE. pleinement, et je fus alors convaincu que les pièces de quatorze pieds de longueur, sur cinq pouces d’équarrissage, peuvent! porter au moins cinq milliers, tandis que, par la’ loi du levier, elles n’auroient dû porter que le double des pièces de vingt-huit pi ; c'est-à-dire, 3600 livres ou environ. TT TT * Favoris fait abattre le même jour deux autres chênes, dont la tige avoit environ seize à dix-sept pieds dehauteursans branches, et j'avois fait scier ces deux arbres en deux parties égales; cela me donna quatre solives de sept pieds de longueur sur cinq pouces d'équarrissage. De ces quatre solives, je fus obligé d'en rebuter une qui provenoit de la partie inférieure de l’un de ces arbres, à cause d’une tare assez considérable ; c’étoié. un ancien coup de cognée que cet arbre avoit reçu dans sa jeunesse, à trois pieds et demi au-dessus de terre. Cette blessure s’étoit re- couverte avec le temps; mais la cicatrice n’étoit pas réunie et subsistoit en entier, ce qui faisoit un défaut très-considérable. Je Li L à QU ù : 1e, O4 ' LAMPE AR LA 0 x PARTIE EXPÉRIMENTALE. 67: jugeai donc que cette pièce devoit être reje- tée. Les trois’'autres étoient assez saines ét n'avoient aucun défaut; l’une provenoit du pied , et les deux autres du sommet des arbres : la différence de leur poids le mar- quoit assez ; car celle qui venoit du pied pesoit 94 livres, et des deux autres, l’une pesoit go livres , et l’autre 88 livres et demie. Je les fis rompre toutes trois le même jour 19 mars. On employa près d’une heure pour charger la première ; d’abord on la chargeoit de deux milliers par cinq minutes. On se servit d’un gros équipage qui pesoit seul . 2500 livres. Au bout de quinze minutes, elle étoit chargée de sept milliers ; elle n’avoit encore plié que de cinq lignes. Comme la difficulté de charger augmentoit, on ne put, dans les cinq minutes suivantes, la charger que de 1500 livres ; elle avoit plié de neuf lignes. Mille livres qu’on mit ensuite dans lek cinq minutes suivantes, la firent plier d’un pouce trois lignes; autres mille livres en cinq minutes l’amenèrent à un pouce onze lignes ; encore mille livres , à deux pouces six lignes. On continuoit de charger ; mais Ja pièce éclata tout-à-coup et très-violemment huile ne .. ide 68 HISTOIRE NATURELLE. sous la charge de 11775 livres. Elle continuä d’éclater avec grande violence pendant dix minutes , baissa jusqu'à: trois pouces sir ligues, et rompit net au milieu. 4 La seconde pièce , qui pesoit 90 livres , fut chargée comme la première; elle plia plus aisément, et rompit au bout de trente-cinq minutes sous la charge de 10950 livres : mais il y avoit un petit nœud à la surface infé- rieure qui avoit contribué à la faire rompre. La troisième pièce, qui ne pésoit que 88 livres et demie, ayant été chargée en cin- quante-trois minuies , rompit sous la charge de 11275 livres. J’observai qu’elle avoit en- core plus plié que les deux autres ; mais on manqua de marquer exactement les quanti- tés dont ces deux dernières pièces plièrent à mesure qu'on les chargeoit.. Par ces trois épreuves il est aisé de voir que la force d’une pièce de bois de sept pieds de longueur , qui ne devroit être que quadruple de la force d’une pièce de bois de 28 pieds, est à en prés trs | M \ P PARTIE EXPÉRIMENTALE. 69 I X. : Pour suivre plus loin ces épreuves, et m'assurer de cette augmentation de force en détail et dans toutes les longueurs des pièces de bois, j'ai fait abattre, toujours dans le même canton, deux chênes fort lisses, dont la tige portoit plus de vingt-cinq pieds sans aucune grosse branche ; j'en ai fait tirer deux solives de vingt-quatre pieds de lon- gueur sur cinq pouces d'équarrissage : ces deux pièces étoient fort saines et d’un bois liant qui se travailloit avec facilité. La pre- mière pesoit 310 livres, et la seconde n’en pesoit que 507. Je les ai fait charger avec un petit équipage de 500 livres par cinq minutes. La première a plié de deux pouces sous une charge de 5oo livres, de quatre pouces et demi sous celle d’un millier, de sept pouces et demi sous 1500 livres, et de près de onze pouces sous 2000 livres ; la pièce éclata sous 2200, et rompit au bout de cinq minutes , après avoir baissé jusqu’à quinze pouces. La seconde pièce plia de trois pouces ,six pouces, À neuf pouces et demi, treize pouces, sous les 4 66 À M # DT ed) OP 7 RARE #4 par GÉTMR ot + SES AS ñ M m HISTOIRE NATURELLE. \ charges successives et accumulées de 600 ; 4 1000, 1500 et 2000 livres, et rompit sous 2195 livres , après avoir baissé jusqu’à seize . pouces. D # X. À *.. 0 Iz me, falloit deux pièces de douze pieds … de longueur sur cinq pouces d’équarrissage, pour comparer leur force avec celle des pièces | de vingt-quatre pieds de l'expérience précé- … dente ; j'ai choisi pour cela deux arbres qui étoient à la vérite un peu trop gros, mais que j'ai été obligé d'employer faute d’autres. Je les ai fait abattre le même jour avec huit autres arbres ; savoir , deux de vingt-deux pieds, deux de vingt, et quatre de douze à treize pieds de hauteur. Jai fait travailler le Jendemain ces deux premiers arbres ; et en. ayant fait tirer deux solives de douze pieds de longueur sur cinq pouces d’équarrissage, | J'ai été un peu surpris de trouver que l’une | des solives pesoit 157 livres, et que l’autre w ne pesoit que 138 livres. Je n’avois pas encore . trouvé d'aussi grandes différences , même à. beaucoup près , dans Le poids de deux pièces … } PARTIE EXPÉRIMENTALE. £ semblables ; je pensai d’abord, malgré l’exa- men que j'en avois fait, que l’une des pièces étoit trop forte et l’autre trop foible d’é- quarrissage : mais les ayant bien mesurées par-tout avec un troussequin de menuisier, et ensuite avec un compas courbe, je recon- mus qu’elles étoient parfaitement égales; et comme elles étoient saines et sans aucun dé- faut, je ne laissai pas de les faire rompre toutes deux, pour reconnoître ce que cette difference de poids produiroit. On les char- gea toutes deux de la même façon , c'est-à- dire, d’un millier en cinq minutes. La plus pesante plia de =, £,.1+, 24,4, 5 pouces et demi dans les cinq, dix, quinze, vingt, vingt-cinq et trente minutes qu’on employa à la charger ; et elle éclata sous la charge de 6050 livres, après avoir baissé jusqu’à treize pouces avant que de rompre absolument. La moins pesante des deux pièces plia de 4,1, 2, 35, 5+, dans les cinq, dix, quinze, vingt et vingt-cinq minutes, et elle éclata sous la charge de 5295 livres, sous laquelle , au bout de sept à huit minutes, elle rompit entièrement. On voit que la différence est ici à peu près aussi grande dans les charges que 72 HISTOIRE NATU RELLE: ui dans les poids. et que la pièce légère étoié très-foible. Pour lever les doutes que j'avois sur cette expérience , je fis tout de suite tra- vailler à un autre arbre de treize pieds de longueur, et j'en fis tirer une solive de douze pieds de longueur sur: cinq pouces. d’équar- | rissase. Elle se trouva peser 154 livres , et eile éclata après avoir plié de cinq pouces neuf lignes sous la charge de 6100 livres. Cela me fit voir que les pièces de douze pieds sur cinq pouces peuvent supporter environ 6000 livres, tandis que.les pièces de vingt-quatre pieds ne portent que 2200 ; ce qui: fait un poids beaucoup plus fort que le double de 2200 qu’elles auroient dû porter par là loi du levier. Il:me restoit, pour me satisfaire sur toutes les circonstances de cette expé-— rience, à trouver pourquoi, dans un même terrain, il se trouve quelquefois des arbres dont le bois est si différent en pesanteur et en résistance; j’allai, pour le découvrir, visiter le lieu, et ayant sondé le terrain au près du tronc.de l'arbre qui avoit fourni. la pièce légère, je reconnus qu'il yavoit un peu d'humidité qui séjournoit au pied de cet arbre par la pente naturelle du lieu, .4e6 | PARTIE EXPÉRIMENTALE. 973 j'attribuai la foiblesse de ce bois au terrain humide où il étoit crû : car je ne m’apperçus pas que la terre fût d’une qualité différente ; et ayant sondé dans plusieurs endroits, je trouvai par-tout une térre semblable. On verra” par l'expérience suivante, que les différens terrains produisent des bois quisont quelquefois de pesanteur et de force encore plus inégales. X I. Jar choisi dans le mème terrain où je prenois tous les arbres qui me servoient à faire mes expériences, un arbre à peu près de la même grosseur que ceux del’ expérience neuvième , et en même temps j'ai cherché un autre arbre à peu près semblable au pre- mier, dans un terrain différent. La terre est forte et mêlée de glaise dans le premier ter- rain; et dans le second, ce n’est qu’un sable presque sans aucun mélange de terre. J'ai fait tirer de chacun de ces arbres une solive de vingt-deux pieds sur cinq pouces d’ équar- rissage. La première solive, qui venoit du terrain fort, pesoit 281 livres: l’autre, qui Mat, gén. XVII. 7 SR h 74 HISTOIRE NATURELLE. 10} yenoit dü Lerrain sablonneux , ne pesoit que 239 livres ; ce qui fait une différence de près d’un sixième dans le poids. Ayant mis à l’é- preuve la plus pesante de ces deux pièces, < elle plia de onze pouces trois lignes avant que d'éclater, et elle baissa jusqu'à dix-neuf pouces avant que de rompre absolument ; elle supporta pendant dix-huit minutes une charge de 2975 livres : mais la seconde pièce, ! qui venoit du terrain sablonneux, ne plia que de cinq pouces avant que d’éclater, et ne baissa que de huit pouces et demi dans son milieu, et elle rompit au bout dé trois mi- nutes sous la charge de 2350 livres; ce qui fait une différence de plus d’un cinquième dans la charge. Je rapporterai dans la suite quelques autres expériences à-ce sujet. Mais revenons à notre échelle des résistances , sui- vant les différentes longueurs. KE XIE D # deux solives de vingt pieds de longueur sur cinq pouces d'équarrissage , prises dans le même terrain , et mises à l'épreuve le même jour , la première, qui pesoit 263 livres, l PARTIE EXPÉRIMENTALE. "5 supporta pendant dix minutes une charge de 3275 livres , et ne rompit qu'après avoir plié dans son milieu de seize pouces deux lignes ; la seconde solive, qui pesoit 259 livres, sup- porta pendant huit minutes une charge de 3175 livres, et rompit après avoir plié de vingt pouces et demi. X. 1. LA . J'AI ensuite fait faire trois solives de dix pieds de longueur et du même équarrissage de cinq pouces. La premièrepesoit 132 livres, et a rompu sous la charge de 7225 livres au bout de vingt minutes, et après avoir baissé de sept pouces et demi. La seconde pesoit 13e livres ; elle a rompu après vingt minutes sous Ja charge de 7050 livres : elle a baissé de six pouces neuf lignes. La troisième pesoit 128 livres et demie; elle à rompu sous la charge de 7100 livres, après avoir baissé de huit pouces sept lignes met cela au bout de dix-huit minutes. w f | En comparant cette expérience avec la pré- cédente, on voit que les pièces de vingt picds L sur cinq pouces d'équarrissage peuvent por- f : AE AM TRS TERRE su pau di | 76 HISTOIRE NATURELÈE, ter une charge de 3295 livres, et celles de dix : pieds de longueur et du même équarrissage de cinq pouces, une charge de 7125 livres ; au lieu que, par les règles de la mécanique , elles n’auroient dû porter que 6450 livres. X I1.W: AYANT mis à l'épreuve deux solives de dix-huit pieds de longueur sur cinq pouces d'équarrissage , j'ai trouvé que la première pesoit 232 livres, et qu’elle a supporté pen- dant onze minutes une charge de 375olivres, après avoir baissé de dix-sept pouces, et que la seconde , qui pesoit 251 livres , a supporté une charge de 3650 livres pendant dix mi= nutes , et n'a rompu qu spi avoir ei de quinze pouces. » où AYANTde même mis à l'épreuve trois solives de neuf pieds de longueur sur cinq pouces d’équarrissage , j’ai trouvé que lapre- mière , qui pésoit 118 livres, a porté pendant éinquante-huit minutes une charge de 8400 | PARTIE EXPÉRIMENTALE, #y ‘Jivres, après avoir plié, dans son milieu, de six poucés ; la seconde, qui pesoit 116 livres, a supporté pendant quarante-six minutes une charge de 8325 livres, après avoir plie, dans son milieu, de cinq a quatrelignes; et la troisième, qui pesoit 115 livres, a sup- porté pendant quarante minutes une charge de 8200 livres, et elle a plié de cinq pe dans son milieu. Comparant cette expérience avec la précé- dente, on voit que les pièces de dix-huit pieds de longueur sur cinq pouces d'équarris- sage portent 37oolivres , et que celles deneuf pieds portent 8308 livres ;, au lieu qu’elles n’auroient dû porter, fers les règles . ap vier, que 7400 livres. ue, X VIH ENFIN ayant mis à l’épreuvedeux solives de seize pieds de longueur sur cisq pouces d'équarrissage; la première, qui pesoit 20 livres, a porte pendant dix-sept minutes une charge de 4425 livres, et elle a rompu après - avoir baissé de seize pouces ; la seconde, qui pesoit 205 livres, a porté pendant quinze 7. in RNA LETTRE nr La "NS a A 8 HISTOIRE dei TURELLE. Su / ÿ à D minutes une charge de 4:75 livres, et-elle a rompu après avoir baisse de douze pouces et demi. | % XNA 0 ET ayant mis à l’épreuve deux solives-de huit pieds de longueur sur. cinq pouces d'é= quarrissage; la première, qui pesoit 104 livres, porta péndant quarante minutes une charge. de ggo0livres, et rompit après avoir baisse de cinq pouces; la seconde, qui pesoit 102 livres, porta pendant trente-neuf minutes une charge de 9675 livres, et rompit après avoir plié de quatre pouces sept lignes. | Comparant cetie expérience avec la précé- dente, on voit que la charge moyenne des pièces de seize pieds de donne ue sur cinq pouces d’équarrissage , est 4350 livres, et que celle des pièces de huit pieds et du même équarrissage , est 9787 =, au lieu que, par la règle du levier , elle devroit être de 8700 livres. Il résulte de toutes ces expériences , que la résistance du bois n’est point en raison in- verse de sa longueur , comme on l’a cru jus- PARTIE EXPÉRIMENTALE» 79 qu'ici, mais que cette résistance décroit Lrês- considérablement à mesure que la longueur des pièces augmente, ou, si l’on. veut, qu'elle augmente beaucoup à mesure que cette lon- gueur diminue. 1 n’y a.qu'à jeter les yeux sur la table ci-après pour s'en convaincre: on voit que la charge d’une pièce de dix pieds | est le double et un neuvième de celle d'une pièce devingtpieds; que la charge d’une pièce de neuf pieds est le double etenviron le hui- tième de celle d’une pièce de dix-huit pieds; que la charge d’une pièce de hui pieds est le double et u# huitième presque juste de celle | d’une pièce de seize pieds ;, que la charge d’une pièce de sept piedsest le double a coup plus d'un huitième de celle de quatorze pieds.: de sorte qu’à mesure que la longueur des pièces diminue, la résistance augmente, et cette augmentation de résistance) croît de plus en plus. | On peut objecter ici . cette règle + l'augmentation de lg résistance qui croît de plus en plus , à mesure que les pièces sont moins longues , ne s’observe pas au-delà de la longueur de vingtpieds , ‘et que les expé- . xiences rapportées ci-dessus sur des pièces j 8 Li gs HISTOIRE NATURELLE. de vingt - quatre ‘et dé vingt = huit pieds ; prouvent que la résistance du boisaugmente plus dans une pièce de quatorze pieds ; com- parée à une pièce de vingt-huit, quedans une pièce de sept pieds, comparée ‘à une pièce de quatorze; et que de même cette résistañce augmente plus que la règle ne le demande dans une pièce de douze pieds , comparée à | une pièce de vingt-quatre pieds : mais iln’y a rien là qui se contrarie , et cela n'arrive ainsi que par un effet bien naturel; c’est que la pièce de vingt-hüit pieds et celle de vingts quatre pieds, qui n’ont que cinÿ pouces d’é- _quarrissage , sont trop disproportionnées dans leurs dimensions, et que le poids de la pièce même est une partie considérable du poids total qu’il faut pour la rompre; car il ne faut que 1775 livres pour rompre une pièce de vingt-huit pieds, et cette pièce pèse 362 livres. On voit bien que le poids de la pièce devient dans ce cas une partie con— sidérable de la charge qui la fait rompre ; et d'ailleurs ces longues pièces minces pliant beaucoup avant de rompre, les plus petits défauts du bois, et sur-tout Le fil tranché, contribuent beaucoup plus à la rupture. # v PARTIE EXPÉRIMENTALE. 8 IL seroit aisé de faire voir qu’une pièce pourroit rompre par son propre poids, et que la longueur qu’il faudroit supposer à cette pièce proportionnellement à sa grosseur, n'est pas, à beaucoup près, aussi grande qu'on pourroit l’imaginer, Par exemple , en partant du fait acquis par les expériences ci-dessus , que la charge d’une pièce de sept pieds de longueur sur cinq pouces d’équarris- sage, est de 11525, on concluroit tout de suite que la charge d’une pièce de quatorze pieds est de 5762 livres ; que celle d’une pièce de vingt-huit pieds est de 2881 ; que celle d'une pièce de cinquante-six pieds est de 1440 livres , c’est-à-dire ‘la huitième partie de la charge de sept pieds, parce que la pièce de cinquante-six pieds est huit fois plus longue : cependant, bien loin qu'il fût besoin d’une charge de 1440 livres pour rompre une pièce de cinquante-six pieds sur cinq pouces seulement d'équarrissase, j'ai de bonnes raisons pour croire qu’elle pour- xoit rompre par son propre poids. Mais ce. n'est pas ici le lieu de rapporter les recherches que j'ai faites à ce sujet , et je passe à une autre suite d'expériences sur des pièces de \ n ! : PACA 1 NE NU M dt li À LA 682 HISTOIRE NATURELLE. six pouces d’équarrissage , depuis huit pieds jusqu'à vingt pieds de longueur. X VAL EL J’Ax fait rompre deux solives de vingt pieds de longueur sur six pouces d’équar- rissage; l’une de ces solives pesoit 377 livres, et V’autre 375 : la plus pesante a rompu au bout de douze minutes sous la charge de 5025 livres, après avoir plié de dix-sept pouces ; la seconde, qui étoit la moins pesante, a rompu en onze minutes sous la charge de 4875 livres, après avoir plié de quatorze pouces. ù | J'ai ensuite mis à l’épreuve deux pièces de dix, pieds de longueur sur le même équarris- sage de six pouces : la première, qui pesoit 188 livres, a supporté pendant quarante-six mi- nutes une charge de 11475 livres, et n’a rompu qu’en se fendant jusqu’à l’une deses | extrémités ;. elle a plié de huit pouces : la se- conde, qui pesoit 186 livres, a supporté pen- dant quarante-quatre minutes une charge de . À e | 11025 livres; elle a plié de six pouces avant que de rompre. * N PARTIE EXPÉRIMENTALE. 83 ATX | AYANT misàl’épreuvedeux solives de dix- huit pieds de longueursur six pouces d'équar- rissage , la première, qui pesoit 334 livres, a porté pendant seize minutes une charge de 5625 livres : elle avoit éclaté avant ce temps ; mais je ne pus appercevoir de rupture dans les fibres, de sorte qu'au bout de deux heures ét demie , voyant qu’elle étoit. toujours au même point, et qu’elle ne baissoit plus dans son milieu, où elle avoit plié de, douze pouces trois lignes, je voulus voir si elle pourroit se redresser , et je fis ôter peu à peu tous les poids dont elle étoit chargée : quand tous les poids furent enlevés , elle ne de- meura courbe que de deux pouces, et le len- demain elle s'étoit redressée au point qu’il n'y avoit que cinq lignes de courbure dans son milieu. Je la fis recharger tout de suite, el elle rompit au bout de quinze minutes, sous une charge de 5475 livres, tandis qu'elle avoit supporté, le jour précédent , une charge plus forte de 250 livres, pendant deux heures et demie. Cette expérience s'accorde avec Les . : + & HISTOIRE NATURELLE. Ait précédentes, où l’on a vu qu’ ie pièce qui a supporté un grand fardeau pendant quel- que temps, perd de sa force même sans avertir et sans éclater. Elle prouve aussi que le bois a un ressort qui se rétablit jusqu'à un certain point, mais que ce ressort étant bandé autant qu’il peut l'être sans rompre, il ne peut pas se rétablir parfaitement. La seconde solive, qui pesoit 3321 livres, sup- porta pendant quatorze minutes la charge de 5500 livres, et rompit après avoir plié de dix pouces. | Ensuite ayant éprouvé deux solives de neuf pieds le longueur sur six pouces d'équar- rissage; la première , qui pesoit 166 livres, supporta pendant cinquante-six minutes la charge de 13450 livres, et rompit après avoir plié de cinq pouces deux lignes ; la seconde, qui pesoit 164 hvres <, supporta pendant cinquante-une EE ie une charge de 12850 livres , et rompit après avoir plié de cinq pouces. | WE LA / …. A PARTIE EXPÉRIMENTALE. 85 + À. J’Ax fait rompre deux solives de seize preds de longueur sur six pouces d’équarris- sage : la première, qui pesoit 294 livres, a supporté peudant vingt-six minutes une charge de 6250 livres , et elle a rompu après avoir plié de huit pouces ; la seconde, qui pe- soit 293 liv., a supporté pendant vingt-deux minutes une charge de 6475 livres, et elle a rompu après avoir plié de dix pouces. Ensuite ayant mis à l’épreuve deux solives de huit pieds de longueur sur le même équar- rissage de six pouces ; la première solive, qui _pesoit 149 livres, supporta pendant une | heure vingt minutes une charge de 15700 livres, et rompit après avoir baissé de trois pouces sept lignes; la seconde solive, qui _ pesoit 146 livres, porta pendant deux heures cinq minutes une charge de 15350 livres, ‘et rompit aprés avoir plié dans le milieu de quatre pouces deux lignes. Le FU OU FA 86 HISTOIRE NA RU XXI. AYANT pris deux solives de quatorze pieds de longueur sur six pouces d’ équarrissage; la premiére, qui pesoit 256 livres, à supporté pendant quarante-six minutes la charge de 7450 livres, et elle a rompu, après avoir plié « dans le milieu de dix pouces; la seconde, qui ne pesoit que 254 livres, a supporté pendant une heure quatorze minutes la charge de 7500 livres , et n’a rompu qu'après avoir plié de ouze pouces quatre lignes. Ensuite ayant mis à l'épreuve deux solives de sept pieds de longueur sur six pouces d’e- quarrissage ; la première , qui pesoit 128 liv, a supporté pendant deux heures dix minutes une charge de 19250 livres, et a rompu après avoir plié dans le milieu de deux pouces huit lignes : la seconde, qui pesoit 126 Liv. #, a supporté pendant une heure quarante-huit minutes une charge de 18650 livres ; elle a" rompu après avoir plié de deux pouces. EE 2 L' ù L “are 4 “P, / \ a, | W PARTIE EXPÉRIMENTALE. 87 D Xi LA: ENFIN. ayant mis à l'épreuve deux solives de douze pieds de longueur sur six pouces d’équarrissage ; la première, qui pesoit 224 fivres, a supporté pendant quarante-six mi- nutes la charge de 9200 livres, et a rompu après avoir plié de sept pouces; la seconde, qui pesoit 221 livres, a supporté pendant cin- _quante-trois minutes la charge de 9000 livres, \ et a rompu aprés avoir he de cinq Dore dix lignes. J'aurois bien voulu faire rompre des so- lives de six pieds de longueur , pour les com- parer avec celles de douze pieds; maisil auroit fallu un nouvel équipage » parce que celui dont je me servois étoit trop large, et me pouvoit passer entre les deux tréteaux sur ‘lesquels portoient les deux extrémités de la pièce. expériences , on voit que la charge d'une pièce de dix pieds de longüeur sur six pouces d'équarrissage, est le double et beaucoup plus d'un septième de celle d’une pièce de vinst - En comparant les résultats ds toutes ces. ee 88 HISTOIRE NATURELLE. Ne pieds ; que la charge d’une pièce de neuf pieds est le double et beaucoup plus d’un sixième de celle d'une pièce de dix-huit pieds; que la charge d’une pièce de huit-pieds est le double et beaucoup plus d’un cinquième de celle d'une pièce de seize pieds; et enfin que la charge d’une pièce de sept pieds est le double et beaucoup plus d'un quart de celle d'une pièce de quatorze pieds sur six pouces d’équarrissage : aiusi l'augmentation de la résistance est encore beaucoup plus grande, à proportion, que dans les pièces de cinq pouces d’équarrissage. Voyons maintenant les expériences que j'ai faites sur des pièces de sept pouces d'équarrissage. HX XL LE J'aAr fait rompre deux solives de vingt pieds de longueur sur sept pouces d’équarris- sage : la première de ces deux solives, qui pesoit 505 livres, a supporté pendant trente- sept minutes une charge de 8550 livres, et a rompu après avoir plié de douze pouces sept lignes; la seconde solive, qui pesoit 5oo liv.; a supporte pendant vingt minutes une charge rt) \ PARTIE EXPÉRIMENTALE. &) ‘de 8000 livres, eta rompu après avoir plié de douze pouces. spl Ensuite ayant mis à l'épreuve deux solives de dix pieds de longueur sur sept pouces d’équarrissage ; la première, qui pesoit 254 livres, a supporté pendant deux heures six minutes une charge de 19650 livres, et elle a rompu après avoir plié de deux pouces sept lignes avant que d'éclater, et baissé de treize pouces avant que de rompre abso- Jument ; la seconde solive, qui pesoit 252 livres, a supporté pendant une heure qua- rante-neuf minutes une charge de 19500 livres, et elle a rompu après avoir plié de trois pouces avant que d'éclater, et de neuf pouces avant que de rompre entièremenk. XXL V: J'Ar fait rompre deux soliyes de dix-huit pieds de longueur sur sept pouces d’équar- rissage : la première, qui pesoit 454 livres, a supporté pendant une heure huit minutes une charge de 9450 livres, et elle a rompu après avoir plié de cinq pouces six lignes avant que d'éclater, et de douze pouces avant 8 AU KA CNNNOROU AL TRS q \ à F “tr AA We AE PT g HISTOIRE NATURELLE. que de rompre; la seconde, qui pesoit 450 » livres, a supporté pendant cinquante-quatre, | minutes une charge de 9400 livres, et ellea | rompu après avoir plié de cinq pouces dix lignes avant que d’éclater, et ensuite de neuf _ pouces six ligues avant que de rompre abso-— Jument. Ensurte ayant mis à l'épreuve deux solives de neuf pieds de longueur sur lemêmeléquar- xissäce de sept pouces; la première solive, / qui pesoit 227 livres, a supporté pendant deux heures une charge de 22800 livres, et elle a rompu après avoir plié de trois pouces une ligne avant que d'éclater, et de cinq pouces six lignes avant que de rompre ab- solument ; la seconde solive, qui pesoit 225 | livres, a supporté pendant deux heures dix- huit minutes une charge de 21900 livres, et -elle a rompu après’avoir plié de deux pouces onze lignes ayant que d’éclater , et de cinq pouces deux lignes avant que de rompre en- tièrement. * ? PARTIE EXPÉRIMENTALE. 9 KUXV: J'Ax fait rompre deux solives de seize pieds de longueur sur sept pouces d'équar- rissage : la première, qui pesoit 406 livres, a supporté pendant quarante- sept minutes uue charge de 11100 livres, et elle a rompu après avoir plié de quatre pouces dix lignes _ avant que d'éclater, et de dix pouces avant que de rompre absolument ; la secbnde, qui pesoit 405 livres, a supporté pendant cin- quante-cinq minutes une charge de 10900 livres , et elle a rompu après avoir plié de cinq pouces trois lignes avant que. d’éclater , et de onze pouces cinq lignes avant que de xompre entièrement. Ensuiteayant mis à l'épreuve db solives de huit pieds de longueur sur le mème équar- rissage de sept pouces; la première, qui pesoit 204 livres, a supporté- pendant trois heures - dix minutes une charge de 26150 livres, et elle a rompu après avoir plié de deux pouces neuf lignes avant que d’éclater , ct de quatre pouces avant que de rompre en- tiérement ; la seconde solive, qui pesoit 202 DE A NO PRISES EEERIER EE d \ , L LA : ÿ2 HISTOIRE NATURELLE. livres !, a supporté pendant trois hévireé ù qnatre minutes une charge de 25950 livres, et elle a rompu après avoir plié de deux pouces six lignes avant que d’éclater , et de trois pouces neuf lignes avantque de FE entièrement. XX VE J'AI fait rompre deux solives de quatorze pieds de longueur sur sept pouces d’équar- rissage : la première, qui pesoit 351 livres, a supporté pendant quarante-une minutes une charge de 13600 livres, et elle a rompu après avoir plié de quatre pouces deux lignes avant qué d’éclater, et de sept pouces trois lignes avant que de rompre; la seconde solive, qu£ pesoit aussi 351 livres , a supporté pendant cinquante- huit minutes une charge de 12850 livres, et elle a rompu après avoir plié de trois pouces neuf lignes avant que d’éclater, et de huit pouces une ligue avant que de rompre absolument. Ensuite ayant fait faire deux solives de sept pieds de longueur sur sept pouces d’e- quarrissage, et ayant mis la première à l'e= % Î PARTIE EXPÉRIMENTALE 93 preuve , elle étoit chargée de 28 milliers, lorsque tout-à#coup la machine écroula : c'étoit la boucle de fer qui avoit cassé net dans ses deux branches, quoiqu’elle fût d'un bon fer quarré de dix-huit lignes de gros— seur ; ce qui fait 348 lignes quarrées pour chacune des branches , eu tout 696 lignes de fer qui ont cassé sous ce poids de 28 milliers, qui tiroit perpendiculairement. Cette boùcle avoitenviron dix pouces de largeur sur treize pouces de hauteur, et elle étoit à très-peu près de la même grosseur par-tout. Je re- marquai qu’elle avoit cassé presque au mi- lieu des branches perpendiculaires , et non pas dans les angles, où naturellement j'au- rois pensé qu’elle auroit dû rompre. Je re- marquaiaussi, avec quelque surprise, qu'on ‘pouvoit conclure de cette expérience qu'une ligne quarrée de fer ne devoit porter que 40 livres; ce qui me parut si contraire à la vérité, que je me déterminai à faire quelques expé- riences sur la force du fer, . je rappor- terai dans la suite. Je n'ai pu venir à bout de faire rompre mes solives de sept pieds de longueur sur sept pouces d'équarrissage. Ces expériences 04 “HISTOIRE NATURELLE. ont été faites à ma campagne, où il me fut PARAITRE de trouver du fer plus gros que celui que j’avois employé, et je fus oblige de - me contenter de faire faire une autre boucle pareille à la précédente, avec laquelle j'ai fait le reste de mes expériences sur la force, du bois. X X VIL | à " | AYANT mis à l'épreuve deux solives de onze pieds de longueur sur sept pouces d’e— .… quarrissage ; la première’, qui pesoit 302 liv., a supporté pendant une heure deux minutes la charge de 16800 livres, et elle a;rompu après avoir plié de deux pouces onze lignes avant que d'eclater , el de sept pouces six lignes avant que de rompre totalement ; la seconde solive, qui pesoit 301 livres, a sup- porté pendant cinquante-cinq minutes une charge de 15550 livres, et elle a rompu après avoir plié de trois pouces quatre lignes avant que d'éclater, et de sept pouces AYANT que de rompre entièrement. En comparant toutes ces expériences sur des pièces de sept pouces d'équarrissage, je » PARTIE EXPÉRIMENTALE. 95 trouve que la charge d’une pièce de dix pieds de longueur est le double et plus d’un sixième de celle d’une pièce de vingt pieds; que la charge d’une pièce de neuf pieds est le double et près d’un cinquième de celle d’une pièce de dix-huit pieds; que la charge d’une pièce de huit pieds est le double et beaucoup plus d’un cinquième de celle d’une pièce de seize pieds : d’où l’on voit que non seulement l’unité qui sert de mesure à l’aug- mentation de la résistance , et qui est ici le rapport entre la résistance d’une pièce de dix pieds et le double de la résistance d'une pièce de vingt pieds, que non seulement, dis-je, cette unité augmente , mais même que l'augmentation de la résistance accroit toujours, à mesure que les pièces deviennent plus grosses. On doit observer ici que les dif: férences proportionnelles des augmentations de la résistance des pièces de sept pouces sont moindres, en comparaison des aug- mentations de la résistance des pièces de six pouces, que celles-ci ne le sont en com- paraison de ceiles de cinq pouces : mais cela doit être, comime on le verra par la com | paraison que nous ferons des résistances avee - les épaisseurs des pièces. 96 HISTOIRE NATURELL: E. D Venons ‘enfin à la dernière fuite de mes expériences sur des pièces de huit pence d'équarrissage. XX VIE J’a1 fait rompre deux solives de vingt pieds de longueur sur huit pouces d’équar- rissage : la première, qui pesoit 664 livres, a supporté pendant quarante - sept minutes une charge de 1175 livres, et elle a rompu après avoir d’abord plié desix pouces et demi avant que d’éclater , et de onze pouces ayant que de rompre absolument ; la seconde so- live, qui pesoit 660 livresi, a supporté pen= dant quarante-quatre minutes une charge de 11200 livres, et elle a rompu après avoir plie de six pouces juste avant que d’éclater, et de neuf pouces trois lignes avant que de rompre entièrement. Ensuite ayant mis à l'épreuve deux pièces de dix pieds de longueur sur huit pouces . d’équarrissage; la première, qui pesoit 331 livres, a supporté peudant trois heures vingt minutes la charge énorme de 27800 livres, après ayoir plié de trois pouces ayant Ld Ca PARTIE EXPÉRIMENTALE. 97 que d’éclater, et de cinq pouces neuf lignes avant que de rompre absolument ; la seconde pièce, qui pesoit 330 livres, a supporté pen-. dant quatre heures cinq ou six minutes la charge de 27700 livres, et elle a rompu . après avoir d’abord plié de deux pouces trois lignes avant que d’éclater, et de quatre pouces cinq lignes avant que ‘de rompre. Ces deux pièces ont fait un bruit terrible en rompant ; c’étoit comme autant de coups de pistolet à chaque éclat qu’elles faisoient , et ces expériences ont été les plus pénibles et les plus fortes que j'aie faites : il fallut user de mille précautions pour mettreles derniers poids , parce que je craignois que la boucle de fer ne cassât sous cette charge de 27 mil- hiers, puisqu'il n’avoit fallu que 28 milliers pour rompre une semblable boucle. J’avois mesuré la hauteur de cette boucle avant que de faire ces deux expériences , afin de . voir si le fer s’alongeroit par le poids d’une charge si considérable et si approchante de celle qu’il falloit pour la faire rompre : mais ayant mesuré une seconde fois la boucle, et cela après les expériences faites, je n'ai pas trouvé la moindre différence; la boucle avoit, | 9 98 HISTOIRE NATURELLE, _ comme auparavant, douze pouces et demi de longueur, et les angles étoient aussi droits qu’ils l’étoient avant l'épreuve. > Ayant mis à l'épreuve deux-solives de dix- huit pieds de longueur sur huit pouces d’é- quarrissage; la première, qui pesoit 594 livres, a supporté pendant cinquante-quatre mi- nutes la charge de 13500 livres, et elle a rompu après avoir plié de quatre pouces et demi avant que d’éclater, et de dix pouces deux ligues avant que de rompre ; la seconde solive, qui pesoit 593 livres, a supporté pen- dant quarante -huit minutes la charge de 12900 livres, et ellea rompu après avoir: plié de quatre pouces une ligne avant que d’éclater , et de sept pouces neuf lignes avant: que de rompre absolument. 1 T9M XXIX. J’aAr fait rompre deux solives de seize pieds de longueur sur huit pouces d’équar- tissage :la première de ces solives, qui pesoit 5928 livres, a supporté pendant une heure huit: minutes la charge de 16800 livres , et elle a’ plié de cinq pouces deux lignes avant que PARTIE EXPÉRIMENTALE. 99 d’éclater , et de dix pouces environ avant que de rompre ; la seconde pièce, qui ne pe- soit que 524 livres, a supporté pendant cin- quante-huit minutes une charge de 15950 livres, et elle a rompu après avoir plié de trois pouces neuf lignes avant que d’éclater, et de sept pouces cing lignes avant sh de rompre totalement. Ensuite j'ai fait rompre deux solives de quatorze pieds de longueur sur huit pouces d’équarrissage : la première, qui pesoit 461 - livres, a supporté pendant une heure vingt- six minutes une charge de 20050 livres, et elle a rompu après avoir plié de trois pouces dix lignes avant que d’éclater, et de huit pouces et demi avant que de rompre absolu- ment ; la secondesolive, qui pesoit 459 livres, a supporte pendant une heure et demie la charge de 19500 livres, et elle a rompu après avoir plié de trois pouces deux lignes avant que d’éclater ;, et de huit pouces avant que de rompre entièrement. Enfin ayant mis à l’épreuve deux solives de douze pieds de longueur sur huit pouces d’équarrissage; la première, qui pesoit 397 livres, a supporté pendant deux heures cinq Mi Cu fan 9 RS EMAUN Lines 700 HISTOIRE NATURELLE. minutes la charge de 23900 livres, et elle a rompu après avoir plié de trois pouces juste avant que de rompre; la seconde, qui pesoit 395 livres et demie, a supporté pendant deux heures quarante-neuf minutes la chargede 23000 livres, et elle a rompu après avoir plié de deux pouces onze lignes avant que d’éclater , et de six poucés huit lignes avant que de rompre entièrement. | Voilà toutes les expériences que j'ai faites sur des pieces de huit pouces d'équarrissage. J'aurois desiré pouvoir faire rompre des pièces de neuf, dehuit et de sept pieds de longueur, et de cette même grosseur de huit pouces: mais cela me fut impossible, parce que je manquois des commodités nécessaires , et qu'il m'auroit fallu.des équipages bien plus forts que ceux dont je me suis servi, et sur lesquels, comme on vient de Le voir, on mettoit près de vingt-huit milliers en équi- libre ; car je présume qu’une pièce de sept pieds de longueur sur huit pouces d’équarris- sage auroit porté plus de quarante-cinq mil- liers. On verra dans la suite si les conjec- tures que j'ai faites sur la résistance du bois pour des dimensions que je n’ai pas éproû- vées, sont justes ou non. 7 cn. S, ke PARTIE EXPÉRIMENTALE. rot Tous les auteurs qui ont écrit sur la résis- tance des solides en général, et du bois en particulier, ont donné, comme fondamentale, Jlarèglé suivante : La résistance est en raison “inverse de la longueur, en raison directe de la largeur, et en raison doublée de la hau- eur. Cette règle est celle de Galilée, adoptée par tous les mathématiciens’, et elle seroit vraie pour des solides qui seroient absolu- ment inflexibles, et qui romproient tout-à- coup; mais dans les solides élastiques, tels que Je bois, il est aise d’appercevoir que cette règle doit être modifiée à plusieurs égards. M. Bernoulli a fort bien observe que, dansla rupture des corps élastiques, une partie des fibres s’alonge , tandis que l’autre partie se raccourcit, pour ainsi dire, en refoulantsur elle-même. Voyez son Mémoire dans ceux de l'académie, année 1705. On voit, par les expériences précédentes, que, dans les pièces de mème grosseur, la règle de la résistance de la raison inverse de la longueur s’observe d'autant moins que les pièces sout plus courtes. IL en est tout autrement de la règle dela résistance en raison directe de la largeur et du'quarré de la hauteur ; j'ai calculé la 9 Ji A ÿ EN OPA PREMIER Ue 102 HISTOIRE NATURELLE. table septième à dessein de m' assurer de la va- riation de cette rêgle : on voit dans cette table LL" 4 | * 4 - les résultats des expériences , et-au-dessous les produits que donne cette règle: Fai pris pour unités les expériences faites sur les pièces de cinq pouces d’équarrissage , parce que j'en ai fait un plus grand nombre sur. cette dimension que sur les autres. On peut observer dans cette table, que plus les pièces sont courtes , et plus la règle approche de Ja vérité, et que, dans les plus longues pièces, comme celles”de dix-huit à vingt pieds, elle s’en éloigne. Cependant, à tout prendre, on peut se servir de la règle générale avec les modifications nécessaires pour calculer la résistance des pièces de bois plus grosses et plus longues que celles dont j’ai éprouvé la résistance ; car, en jetant les yeux sur cette même table, on voit un grand accord entre la règle et Les expériences pour les différentes grosseurs , etil règne un ordre assez constant dans les différences, par rapport aux lon- gueurs et aux grosseurs , pour juger de la modification qu'on doit faire à cette règle. ES Ze RE mn = PARTIE EXPÉRIMENTALE. 103 TABLES DES EXPÉRIENCES + #" _ Sur la force du bois. PREMILRE TABLE. Pour les pièces de quatre pouces d’équarrissage. Flèches de Long. | Poids la courbure à Fr Temps Îdes pièces employé à;dans l’ins- des des Char charger lesitant où ci ‘ pièces. elles com- pièces. À pièces. |mencent à rompre, , Pieds. | Livres. | Livres. Heu Minas Pouc. Lig. 6390. où 294) 5. 6. $ | Co | 7.4 61. Lomme ol 22%, 4: 6. AV 6BiLMGob.l.o. xl 3 9. 8.4 GM_| mob 0. 1344) 447770. Nico tail di To. 9.54 ‘es MONO ON TA 0 "6. 1 omadtel) 18). ro: Dr 02: | HO lN On OL P 6 "#61 208). 500.) 0... O1) 7 Oo. Fer 06 f 2080 0: fm es [ A da hu A va su GORE Er ds SECONDE: TABLE. ‘Pour les pièces de quatre pouces d’é Ta re Long. Poids | Fenpede Fliche de UE la courbure des … des Charges. AorPALE à avant que D RER d’ éclater. pièces. | pièces, {la rupture. Pieds. | Livres. | Livres. | Heur. Min | Pouc. Lig. | 4. : | 17779. 10 ODA MEME 7.4 86. 1125 0. 53.. D ON 104. ::] 0000. VOL 461 | Ds 8.4 102..1 9070. | Oo: 30..4 12 - I. T104 8400. 0. #26. 4.8: 0 9..4 116..| 8325. | 0e 28..1 3. 3. 119.1" "6200: _G200.| o. 26. Be : 26 1924) 7225. 7225.) 0. 21..| 3. Le 10..4 130..| "7050. 0. 20: BL 46: 120+. _7100. 1 On! 20 21 Mi 1e 156. | "6080. o 3.5 6. ". 4 154..| 6100. da OUJE De 0. 178... 5400. 0. 204,16... 0: 14..d sf 9200.| 0. .18..1 8 3. 209..1 4429.) © 17..| 8 tr. 16. .9 2093..| 4275.["o. 460. | 87708 232..1 3750. o. 11..| 8 oo. 18..{ 231.. ‘3050.| o. 10.. 6. 2. 2631. | ‘3275:| "ot QE." ra 20.4 299..| 3175.| 0. 8..{10. . o. 22. | ’28r.. | 2979 10..1IT. 3. | 9310..| 2200.| ©. r16,./1T- 0. oG 4 307... 21241 © EP IE 20 D LL AB 1000.! 6: A7 RFO D 26. ‘4 1790. À : TROISIÈME TABLE. Pour les pièces de six pouces d’équarrissage. Long. | Poids nn | Fièches de des _ des Charges. Fou Te sig pièces. | piéces. la M Ébnee, pa À Pi ds. | Livres. Livres. |Heur. Min. Pouc. Lig. 74. 120 19250. I. 40.. * Te: 1261. | 18650. 1. 38..| 149..115700.! 1. 12.,| 2 4. 84 146... 19350.! I. 10..| 2. 9. 4 166. | 13450.! o. 56.112 6. : 9.4 1642 PATIO OS NE. _2. 10. | 188 + Tm75f 61: 461: 113." oo. sys “4 FHDc LEO 0) 48,1 119, : GO: Re ci 224 9200. o. 31 4, : "0: Ù 221..| ÿ9o00.| o. 32..| 4. 7. : 255,1 740011: 0) : 2586 | F4. 6: 4.4 294 HOUD 0. 22Re jé 2: 204.1 6280 0.:2b,1115. 6. De 208, 1 O4704k © 102.19. … 10, 334..| 5625.| o. 16. | ET ie HR IS PEB HO Das DO à O. 37m. | Ho85il o.:12.:1 9. 6. de 379... |o 40706, 0: 1h | G To L : = - EE mel * On n’a pas pu observer Ia se dont les pièces de sept pieds ont plié dans leur milieu, à cause de l'épaisseur de la boucle, 106 HISTOIRE NATURELLE, QUATRIÈME TABLE. Pour les pièces de sept pouces d'équarrissage. Long. | Poids Temps de- puis le rer. des des. Ghies éclat jus FT FAR {l'instant de pièces. | pièces. la rupture. Eu | Livres. | Livres. Heur. Min. m7. d oO. ao. : el 8 4 204..| 26150. 2. 6.. "À 201.1 25950.! 2 x13.. | " 227..] 22000.| I. 40.. ri 208 21000. T. 37. | 254. u 19690. Le EL Ra À 252..] 19300.! Te 16.. jh 302..1 16800. | 1. 3.. AU: 208, l'an re es " 35... 13600:! 0: : 55. 4.9: 351..| 12850.1 o. 48. 406..| 1I100.| ©. 41. de 403..| 10900.| 0. 36.. 18 454..} 9450.! O..27.. °°? 450..l 9400.! o. 22.. 505 BDD: 0. STAR ne 500 8000. 13... - Flèches de : la courbure avant que : d’éclater. Pouc. Lig. “be À es 2. 6. + T. Au. TE. 2 in EE eh EURE 3. __ 4. OS de © 10 4: | pu Du 0 M Où I Le Oo PARTIE EXPÉRIMENTALE. 107 CINQUIÈME TABLE. Pour les pièces de huit pouces d’équarrissage. Re - Poids des des pièces. | pièces. Pieds. | Livres. | Livres. LÀ Bar. 33r..| 27800. 331. .| 27700. der We 23900. 12.4 3951. 23000. f 461..| 20050. ir 459. . 19500. 528..| 16800. nee 524. .| 15950. “ce | 504... | 13500. _18..4 593. jee 664..| 11770. jo 660. Charges.|éclat jus Temps de- Flèches de puis le 1er.|7, courbure d:| avant que l'instant de} éclater. la rupture. ne emmamtnsd Heur. Min.|Pouc. 5," Ho. a, 58... I... SOLE 2e DenLPA à À | 12200:1 0. 28, Lig. 3. O0. SOURIS. LA oO. Die tp Si 10, 3. 2. 4 LE HER du eue TO. RE 6. 6. 6. Oo. ae REG ner pe Aer verre rs error u 18 HISTOIRE NATUREBLE. SIXIÈME TABLE. À Pour les charges moyennes de toutes les -#xpé- 7 ; riences précédentes. ‘ 1 A PP 4 À H | Long GRO SSE U\RrsS des à = pièces. | 4 pouces. ÿ pouces Ê pouces | pouces [9 pouces Pieds Livres. À Livres Livres Livres. À Livres. 24 Ti, l'O318: ÎET025. [T6950.. 718.4 4550... 9787 =: (15520. 126050. T9..1 4025.. | 33084. 13150... |22350.. ho. 2018. 1 7E2D.e (T1250.. 19479... | 27790 12.1 2007<. 6075.. 9100..|r16175..| 23450 ha. . LT If 3906: | 7475... | 13225... | 10775. T6 lee 4350: "6362. }rre00.11f-a6amt AE A PET EU 3700. : "55621. 9245. 13200. Ta0..{.......] 3225. | 4050..| 83h.) tr467 Fcode PRE ee | FAdie TS 2162 = | RS AN A 1779 MU Et Hi en: PARTIE EXPÉRIMENTALE. 109 SEPTIÉÈME TABLE. CoMPARAISON de la résistance du bois trouvée par les expériences précédentes , et de la résistance du bois sui- vant la règle que cette résistance est comme la largeur de la pitce, multipliée par le quarré de la hauteur, en supposant la même longueur. * Les astérisques marquent que les expériences n’ont pas été faitesa G RO :SLS'E. UMR (S: des PR... CE 4 pouces. | 5 pouces. 6 pouces. | 7 pouces. # 8 pouces. f ’ OÙ Cm somme on monster, (| MxRomeernenrmns) Livres. Livres. Livres. 18050. Wa 48100. |. pieds. Livres. Livres. DIE. à g.- s 11525. 47049 <. 5901... 199152. | 31624 à. (47106 <. 4450 UT. f 15525. | 26050. | *39750. L À JOII +. ÿ 9787- 4 169124.|26856 2.140069 :. _f 4025... 1 $ 13150. | 22350. .|* 32600. LS À 42935. 8306 k 4 14356 +. 22708 :.| 34037. 10479. . 27750. 12312. .| 10551..| 20104. PNEUS À 6075. 4 9100.. | 16175..| 23450. I re HETO' 10497 &.| 16660 :.1 24083 +. 20 DOMART CN ES EEE 7 16 4 2 ECS © à 4350 ss. 036 à . 18/4 2. h3ro. tee | os. lien NORME AE Mat, gén X VII. DOUZIÈME MÉMOIRE. ARTICLE PREMIER Moyen facile d'augmenter la solidité , la force et la durée du bois. To ne faut pour cela qu'écorcer l’arbre du haut en, bas dans le temps de la séve, et le laisser sécher entièrement sur pied avant que de l’abaitre. Cette préparation ne de- mande qu’une très-petite dépense : on va voir les précieux avantages qui en résultent. Les choses aussi simples et aussi aisées à trouver que l’est celle-ci, n’ont ordinaire- ment, aux yeux des physiciens, qu'un mé- rite bien léger : mais leur utilité suffit pour les rendre dignes d’être présentees; et peut— ètre que l'exactitude et les soins que j'aijoints à mes recherches, leur feront trouver grace devant ceux même qui ont le mauvais goût de n'estimer d’une découverte que la peine - N PARTIE EXPÉRIMENTALE. x1r et le temps qu'elle a one J'avoue que je suis surpris de me trouver le premier à an- noncer celle-ci , sur-tout depuis que j'ai lu ce que Vitruve et Evelin rapportent à cet égard. Le premier nous dit, dans son Ærchifecture, qu'avant d’abattre les arbres, il faut les cer- ner par le pied jusque dans le cœur du bois, et les laisser ainsi sécher sur pied ; après quoi als sontbien meilleurs pour leservice ,auquel on peut même les employer tout de suite. Le second rapporte, dans son 7'raité des foréts, que le docteur Plot assure, dans son ÆZistoire naturelle, qu'autour de Haffon en Angle- terre , on écorce les gros arbres sur pied dans le temps de la séve, qu'on les laisse sécher jusqu’à l'hiver suivant, qu'on les coupealors, qu'ils ne laissent pas que de vivresans écorce, que le bois en devient bienplus dur, et qu’on se sert de l’aubier comme du cœur. Ces faits sont assez précis , et sont rapportés par des auteurs d’un assez grand crédit pour avoir mérité l'attention des physiciens et même des architectes ; mais il y a tout lieu de croire qu'outre la négligence qui a pu les empêcher jusqu ici de s’assurer de la vérité de ces faits, la crainte de contirevenir à l'ordonnance des SO PAR EE ARE TON TAN OR EEE D \ * 112 HISTOIRE NATURELLE. eaux et forêts a pu retarder leur curiosité. ILest défendu, sous peine de grossesamendes, d'écorcer aucun arbre, ét de le laisser sécher sur pied. Cette défense, qui d’ailleurs est fondée , a dû faire un préjugé contraire, qui sans doute aura fait regarder ce que nous venons de rapporter, comme des faits faux, ou du moins hasardés ; et je serois encore moi-même dans l'ignorance à cet égard, si les attentions de M. le comte de Maurepas pour les sciences ne m’eussent procuré la liberté de faire mes expériences , sans avoir à craindre de les payer trop cher. ù Dans un bois taillis nouvellement abattu, et où j'avois fait réserver quelques beaux arbres, le 3 de mai 1733, j'ai fait écorcer sur pied quatre chênes d'environ trente à qua- rante pieds de hauteur , et de cinq à six pieds de pourtour. Ces arbres étoient tous quatre très-vicoureux , bien en séve, et àgés d'en- viron soixante-dix ans. J'ai fait enlever l’é- corce depuis le sommet de la tige jusqu'au pied de l’arbre, avec une serpe. Cette opéra tion estaisée, l’écorce se séparant très-faci- lement du corps de l’arbre dans le temps de la séve. Ces chênes étoient de l'espèce com ” PARTIE EXPÉRIMENTALE. 113 mune dans les forêts, qui porte le plus gros gland. Quand ils furent entièrement dépouil- lés de leur écorce, je fis abattre quatreautres chênes de la même espèce, dans le même terrain , et aussi semblables aux premiers que je pus les trouver. Mon dessein étoit d’en faire écorcer le même jour encoresix, et en abattre six autres; mais je ne pus achever cette opé= ration que le lendemain. De ces six chênes écorcés , 11 s’en trouva deux qui étoient beau- coup moins en séve que les quatre autres. Je fis conduire sous un hangar les six arbres abattus, pour les laisser sécher dans leur écorce jusqu'au temps que j en aurois besoin pour les comparer avec ceux que j’avois fait dépouiller. Comme je m'imaginois que cette opération leur avoit fait srand tort , et qu’elle devoit produire un grand changement, j'allai, - plusieurs jours de suite, visiter très-curieuse- ment mes arbres écorcés ; mais je n’apperçus aucune altération sensible pendant plus de deux mois. Enfin, le 10 de juillet, l’un deces chènes, celui qui étoit le moins enséve dans le temps de l’écorcement, laissa voir les premiers symptômes de la maladie qui devoit bientôt le détruire ; ses feuilles commencèrent à 10 14 1 LE La nl Palo 4 Feat. CL NS COR INRNEANT AE RER", Œ RS HN ne EE ME Lit t La MA AT CRAN) WA l x14 HISTOIRE NATURELLE. jaunir du côté du midi, et bientêt jaumirent : entièrement, séchèrent et tombèrent, de sorte qu'au26 août il ne lui en restoit pas une. Je le fis abattre le 30 du même mois. J’étois présent. Il étoit devenu si dur, que la cognée avoit peine à entrer , et qu'elle cassa, sans que la mai-adresse du bücheron me parût y avoir part. L'aubier sembloit être plus dur que le cœur du bois, qui étoit encore humide et plein de séve. | Celui de mes arbres qui, dans le temps de Yécorcement, n’étoit pas plus en séve que le \ précédent, ne tarda guère à le suivre ; ses feuilles commencèrent à changer de couleur au 13 de juillet , et il s’en défit entièrement avant le 10de septembre. Comme je craignois d’avoir fait abattre trop tôt le premier, et que l'humidité que j'avois remarquée au de- dans indiquoit encore quelque reste de vie, je fis réserver celui-ci pour voir s’il pousse- roit des feuilles au printemps suivant. Mes quatre autres chènes résistèrent vigou. reusement ; ilsne quittèrent leurs feuilles que quelques jours avant le temps ordinaire, et même l’un des quatre, dont la tête étoit légère. et peu chargée de branches ,.ne les quitta PARTIE EXPÉRIMENTALE. «18 qu'au temps juste de leur chüûte naturelle : imais je remarquai que les feuilles, et même quelques rejetons de tous quatre, s’etoient desséches du côté du midi plusieurs jours auparavant. Au printemps suivant, tous ces arbres de- vancèrent les autres , et n’attendirent pas le tempsordinaire du développement des feuilles pour en faire paroitre ; ils se couvrirent de verdure huit à dix jours avant la saison. Je prévis tout ce que cet effort devoit leur coù- ter. J’observailes feuilles ; leur accroissement fut assez prompt, mais bientôt arrêté , faute de nourriture suffisante. Cependant elles vé- curent : inats celui de mes arbres qui, l’an- née précédente, s’étoit dépouillé le premier, sentit aussi le premier tout l'effet de l’état d'inanition et de sécheresse où 1l étoit réduit; ses feuilles se fanèrent bientôt, et tombèrent pendant les chaleurs de juillet 1734. Je le fs abattre le 30 août, c’est-à-dire, une année après celui qui l'avoit précédé. Je jugeaiqu'il étoit au moins aussi dur que l’autre, et beau- coup plus dur dans le cœur du bois, qui étoit à peine encore un peu humide. Je le fis con- duire sous un haugar, où l'autre étoit déja APN Re TE né a pet NATURELLE. avec les six arbres dans leur écorce, auxquels je voulois les comparer. Trois des quatre arbres qui me restoient, quittèrent leurs feuilles au commencement de septembre ; mais le chêne à tête légère les conserva plus long-temps , et il ne s’en défit entièrement qu’au 22 du même mois. Je lé Üs réserver pour l’année suivante, avec celui des trois autres qui me parut le moins ma- lade , et je fis abattre les deux plus foibles en octobre 1734. Je laissai deux de ces arbres exposés à l’air et aux injures du temps, et je fis conduire l’autre sous le hangar. [ls furent trouvés très-durs à la cognée, et le cœur du bois éloit presque sec. FER Au printemps 1735, le plus vigoureux de mes deux arbres réservés donna encore quel- ques signes de vie; les boutons segonflèrent, mais les feuilles ne purent se développer: l'autre me parut tout-à-fait mort. En effet, Vayant fait abattre au mois de mai, je re- connus qu'il n’avoit plus d'humide radica}, et je le trouvai d’une très- grande dureté, tant en dehors qu’en dedans. Je fis abattre le dernier quelque temps après, et je les fis con- duire tous deux au hangar, pour étre mis ” PARTIE EXPÉRIMENTALE. 3117 avec les autres à un nouveau genre d’é- preuve. Pour mieux comparer la force du bois des arbres écorcés avec celle du bois ordinaire, j'eus soin de mettre ensemble chacun des six chênes que j'avois faitamener en grume, avec un chêne écorcé, de même grosseur à peu près; car j'avois déja reconnu par expe- rience que le bois dans un arbre d’une certaine grosseur éloit plus pesant et plus fort que le bois d’un arbre plus petit, quoi- que de même âge. Je fis scier tous mes arbres par pièces de quatorze pieds delongueur; j'en marquai les centres au-dessus et au-dessous; je fis tracer aux deux bouts de chaque pièce un quarré de six pouces et demi, et je fis scier et enlever les quatre faces, de sorte qu'il ne me resta de chacune de ces pièces qu’une solive de quatorze pieds de longueur sur six pouces très-juste d’équarrissage : je les fs tra- vailler à la varlope, et réduire , avec beau- coup de précaution , à cettemesure dans toute leur longueur, et j'en fis rompre quatre de chaque espèce, afin de reconnoître leur force et d'être bien assuré de la grande différence que j y trouvai d’abord, x18 HISTOIRE NATURELLE. … La solive tirée du corps de l'arbre qui avoit péri le premier après l’écorcement, pesoit 242 livres ; elle se trouva la moins forte de toutes, et rompit sous 7940 livres. | Celle de l’arbre en écorce que je lui compa- xai , pesoit 234 Hyr elle rompit sous 7520 livres. La solive du second arbre écorcé pesoit 249 livres ; elle plia plus que la première, et rompit sous la charge de 8362 livres. Celle de l’arbre eu écorce que je lui com- parai, pesoit 236 livres ; elle rompit sous la charge de 7385 livres. : La solive de l'arbre écorcé et laissé aux injures du temps pesoit 258 livres; elle plia encore plus que la seconde, et ne rompit que sous 8926 livres. 3 Celle de l'arbre en écorce que je lui com- parai, pesoit 239 livres, et rompit sous 7420 livres. | Enfin la solive de mon arbre à tête légère, que j'avois toujours jugé le meilleur, se trouva en effet peser 263 livres , et porta, avant que de rompre, 9046 livres. | L'arbre que je lui comparai, pesoit 238 Livres, et rompit sous 7500 livres. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 119 Les deux autres arbres écorcés se trouvèrent défectueux dans leur milieu, où il se trouva quelques nœuds , de sorte que je ne voulus pas les faire rompre; mais les épreuves ci- dessus suflisent pour faire voir que le bois . écorcé et séché sur pied est toujours plus pesant et considérablement plus fort que le bois gardé dans son écorce. Ce que je vais rapporter ne laissera aucun doute sur ce fait. * Du haut de la tige de mon arbre écorce et laissé aux injures de l'air , j'ai fait tirer une solive de six pieds de longueur et de cinq pouces d’équarrissage. [l se trouva qu'à l’une des faces il y avoit un petit abreuvoir, mais qui ne pénétroit guère que d'un demi-pouce, ét à la face opposée une tache large d’un pouce, d’un bois plus brun que le reste. Comme ces défauts ne me narurent pas con- sidérables, je la fis peser et charger : elle pesoit 75 livres. On la chargea, en une heure cinq minutes, de 8500 livres, après quoi elle craqua assez viclemment. Je crus qu’elle älloit casser quelque temps après avoir cra- qué , comme cela arrivoit toujours ; mais ayant eu la patience d'attendre trois heures, et voyant qu'elle ne baissoit ni ne plioit, je 150 HISTOIRE NATURELLE continuai à la faire charger, et au bout d’une autre heure elle rompit enfin, après avoir craqué pendant une demi-heure sous la charge de 12745 livres. Je n'ai rapporté le détail de cette épreuve que pour faire voir que cette solive auroit porté davantage sans les petits défauts qu’elle avoit à deux de ses faces. | | Une solive toute pareille, tirée d’un pied d’un des arbres en écorce, ne se trouva peser que 72 livres ; elle étoit très-saine et sans aucun défaut. On la chargea en une heure trente-huit minutes , après quoi elle craqua très-léoèrement, et continua de craquer de quart d'heure en quart d'heure pendant trois heures entières, et rompit au bout de ce temps sous la charge de 11889 livres. Cette expérience est très-ayantageuse au “bois écorcé; car elle prouve que le bois du dessus de la tige d’un arbre écorcé , même avec des défauts assez considérables, s’esé trouvé plus pesant et plus fort que le bois tiré du pied d’un autre arbre non écorcé, qui d’ailleurs n’avoit aucun défaut : mais ce qui suit est encore plus favorable. De l’aubier d'un de mes arbres écorcés, PARTIE EXPÉRIMENTALE. 2x j'ai fait tirer plusieurs barreaux de trois pieds de longueur sur un pouce d’équarris- sage, entre lesquels j'en ai choisi cinq des plus parfaits pour les rompre. Le premier pesoit 25 onces -+, et rompit sous 287 livres; le second pesoit 2% onces £, et rompit sous 291 livres :; le troisième pesoit 23 onces +, et ra sous 275 livres ; le quatrième pesoit 25 onces =, el rompit sous 39 livres ; et le cinquième pesoit 23 onces , et rompit sous 291 livres 5. Le poids moyen est à peu près 23 onces +, et la charge moyenne à peu prés 287 livres. Ayant fait les mêmes épreuves sur plusieurs barreaux d’aubier d’un des chênes en écorce, le poids moyen se trouva de 23 onces —, et la charge moyenne de 248 livres ; et ensuite ayant fait aussi la même chose sur plusieurs barreaux de cœur du même chêne en écorce, le poids moyen s'est trouvé de 25 onces =, et la charge moyenne de 256 livres. Ceci prouve que l’aubier du bois écorcé est non seulement plus fort que l’aubier ordi- maire, mais même beaucoup plus que le cœur de chêne non écorcé, quoiqu'il soit moins pesant que ce dernier. 11 LP AE QE NA TIME ER L°1 ‘ Fr, LE ( WA HR US A! ‘122 HISTOIRE N ATURELLE. Pour en être plus sûr encore, j'ai fait tirer de l’aubier d’un autre de mes arbres écorces, plusieurs petites solives de deux pieds de lon- sueur sur un pouce et demi d’équarrissage, entre lesquelles je ne pus en trouver que trois d'assez parfaites pour les soumettre à l’é- preuve. La première rompit sous 1294 livres ; la seconde, sous 1219 livres ; la troisième, sous 1247 livres, c’est-à-dire, au poids moyen sous 1953 livres : mais de plusieurs solives semblables que je tirai de l’aubiér d’un autre arbre en écorce, le poids moyen de la charge ne se trouva que.de 997 livres ;’ ce qui fait une différence encore plus grande que dans l'expérience précédente. De l’aubier d’un autre arbre écorcé et sé- ché sur pied, j'ai fait encore tirer plusieurs barreaux de deux pieds de longueur sur un pouce d’équarrissage, parmi lesquels j'en ai choisi six, qui, au poids moyen, ont rompu sous la charge de 5o1 livres, et il n’a fallu. que 353 livres au poids moyen pour rompre plusieu rs solives d’aubier d’un arbre en écorce qui portoit la même longueur et le même équarrissage, et même il n’a fallu que 379 livres au poids moyen pour rompre plu- PARTIE EXPÉRIMENTALE. 123 sieurs solives de cœur de chène en écorce’ | Enfin de l’aubier d’un de mes arbres écor- cés j'ai fait tirer plusieurs barreaux d'un pied de longueur sur un pouce d'équarrissage , parmi lesquels j'en ai trouvé dix-sept assez DU die mis à l'épreuve. Ils pesoient 7 onces — au poids moyen, et il a fallu, pour les or , la charge de 798 livres; mais le poids moyen de plusieurs barreaux d’aubier d'un de mes arbres en écorce n’étoit que de 6 onces =, et la charge moyenne qu'il a fallu, pour les rompre, de 629 livres, et la charge moyenne pour rompre de semblables bar- reaux de cœur de chêne en écorce, par huit différentes épreuves , s’est trouvée de 731 livres. L’aubier des arbres écorcés et séchés sur pied est donc considérablement plus pe- sant que l’aubier des bois ordinaires, et beau- coup plus fort que le cœur même du meiileur bois. Je ne dois pas oublier de dire que j'ai remarqué , en faisant toutes ces épreuves , que la partie extérieure de l’aubier étoit celle qui résistoit davantage, en sorte quäl falloit constamment üne plus grande charge pour. rompre un barreau d’aubier pris à la dernière circonférence de l'arbre écorcé , que pour A 124 HISTOIRE NATURELLE. rompre un pareil barreau pris au-dedans. Cela est tout-à-fait contraire à ce qui arrive dans les arbres traités à l’ordinaire, dont le bois est plus léser et plus foible à mesure qu'il est le plus près de la cirfconférence. J'ai dé- terminé la proportion de cette diminution en pesant à la balance hydrostatique des morceaux du centre des arbres, des mor- ceaux de la circonférence du bois parfait , ‘ et des morceaux d’aubier; mais ce n’est pas ici le lieu d’en rapporter le détail : je me con- tenterai de dire que, dans les arbres écorvés, la diminution de solidité du centre de l'arbre a la circonférence n’est pas, à beaucoup près, aussi sensible, et qu’elle ne l’est même point du tout dans l’aubier. Les expériences que nous venons de rap- porter, sont trop multipliées pour qu'on puisse douter du fait qu’elles concourent à élablir : il est donc très-certain que le bois des arbres écorcés et séchés sur pied est plus dur, plus solide, plus pesant et plus fort que le bois des arbres abattus dans leur écorce; et de là je pense qu’on peut conclure, qu'il est aussi plus durable. Des experiences £mmediates sur la durée du bois seroient, 2 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 125 encore plus concluantes : mais notre propre durée est si courte, qu'il ne seroit pas rai- sonnable de les tenter. Il en est ici comme de l’âge des souches, et en général comme d'un très-grand nombre de vérités impor-. tantes que la briéveté de notre vie semble nous dérober 4 jamais : il faudroit laisser à la postérité des expériences commencées; il faudroit la mieux traiter que l’on ne nous a traités nous-mêmes : car le peu de-traditions physiques que nous ont laissé nos ancêtres, devient inutile par le défaut d’exactitude ou par le peu d'intelligence des auteurs, et plus encore par les faits hasardés ou faux qu'ils n'ont pas eu honte de nous transmettre. La cause physique de cette augmentation de solidité et de force dans le bois écorcé sur pied, se présente d’elle-mèe : il suffit de savoir que les arbres augmentent en gros- seur par des couches additionnelles de nou- veau bois qui se forment à toutes les séves entre l'écorce et le bois ancien. Nos arbres écorcé®ne forment point de ces nouvelles couches ; et quoiqu'ils vivent après l’écorce- ment, ils ne peuvent grossir. La substance destinée à former Je nouveau bois se trouve 1] 18 PO N CL OS VON EPP NORMES ED QU & WT ALIM \ s | fa À CAES ù \ i 126 HISTOIRE NATURELLE. donc arrêtée et contrainte de se fixer dans. tous les vides de l’aubier et du cœur mème de l'arbre : ce qui en augmente nécessaire= ment Ja solidité, et doit par conséquent aug- menter la force du bois ; car j’ai trouvé, par plusieurs épreuves, que le bois le plus pe sant est aussi le plus fort. Je ne crois pas que l'explication de cet effet ait besoin d’être plus détaillée : mais, à cause de quelques circonstances particulières qu'il reste à faire entendre, je vais donner le résultat de quelques autres expériences qui ont rapport à cette matière. Le 18 décembre , j'ai fait enlever des cein- tures d’écorce de trois pouces de largeur , à trois pieds au-dessus de terre, à plusieurs chênes de différens âges, en sorte que l’au- bier paroissoit à nud et entièrement decou— vert. J'interceptois par ce moyen le cours de la séve qui devoit passer par l'écorce et entre l'écorce et lé bois : cependant, au printemps suivant, ces arbres poussérent des feuilles. comme les autres, et ils leur ressen#bloient en tout; je n'y trouvai même rien de remar- quable qu'au 22 de mai; j’apperçus alors de petits bourrelets d'environ une ligne de } PARTIE EXPÉRIMENTALE. 127 hauteur au-dessus de la ceinture, qui sor- toient d’entre l'écorce et l’aubier tout autour de ces arbres. Au-dessous de cette ceinture il ne paroissoit et il ne parut jamais rien. Pendant l'été, ces bourrelets augmentèrent d'un pouce en descendant et en s'appliquant sur l’aubier. Les jeunes arbres formèrent des bourrelets plus étendus que les vieux , et tous conservèrent leurs feuilles, qui ne tom- bèrent que dans le temps ordinaire de leur chüte. Au printemps suivant, elles reparurent un peu avant celles des autres arbres : je crus remarquer que les bourrelets se gonflèrent un peu , mais ils ne s’étendirent plus. Les feuilles resistèrent aux ardeurs de l'été, et ne tombèrent que quelques jours avant les autres. Âu troisième printemps, mes arbres se parèrent encore de verdure et devancérent les autres : mais les plus jeunes, ou plutôt les plus petits, ne la conservèrent pas long- temps, les sécheresses de juillet les dépouil- \èrent; les plus gros arbres ne perdirent leurs feuilles qu'en automne, et j'en ai eu deux qui en avoient encore après le quatrième printemps : mais tous ont péri à la troisième ou dans cêtte quatrième année depuis l’en- { 28 HISTOIRE NATURELLE. lèvement de leur écorce. J'ai essayé la force du bois de ces arbres ; elle m'a paru plus grande que celle des bois abattus à l’ordi- naire : mais la différence qui, dans lés bois entièrement écorcés, est de plus d’un quart, n’est pas à beaucoup près aussi considerable ici, et même n'est pas assez sensible pour que je rapporte les épreuves que j'ai faites à ce sujet. Et en effet ces arbres n’avoient pas laissé que de grossir au-dessus de la cein- ture; ces bourrelets n’étoient qu’une expan- sion du /ber qui s’étoit formé entre le bois et l'écorce : ainsi la séve, qui, dans les arbres entièrement écorces, se trouvoit contrainte de se fixer dans les pores du bois et d’en aug- menter la solidité, suivit ici sa route ordi- naire , et ne déposa qu’une petite partie de sa substance dans l’intérieur de l'arbre ; le reste fut employé à la formation de ce bois imparfait dont les bourrelets faisoient l’ap- pendice et la nourriture de l'écorce, qui vé- cut aussi long-temps que l'arbre mème. Au- dessous de la ceinture, l’écorce vécut aussi ; mais il ne se forma ni bourrelets ni nou- veau bois: l’action des feuilles et des parties supérieures de l'arbre pompoit trop puis- | 5 Le 4 de ‘ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 129 samment la séve pour qu'elle pût se porter vers l'écorce de la partie inférieure; et j’ima- gine que cette écorce du pied de l'arbre a plu- tôt tiré sa nourriture de l'humidité de l’air que de celle de la séve que les vaisseaux la- téraux de l’aubier pouvoient lui fournir. J'ai fait les mêmes épreuves sur plusieurs espèces d’arbres fruitiers : c’est un moyen sûr de hâter leur production; ils fleurissent quel- quefois trois semaines avant les autres, et donnent des fruits hâtifs et assez bons la première année. J'ai mème eu des fruits sur un poirier dont j avois enlevé non seulement l'écorce, mais même tout l’aubier ; et ces fruits prématurés éloient aussi bons que les autres. J'ai aussi fait écorcer du haut en bas de gros pommiers et des pruniers vigou- reux. Cette opération a fait mourir , dès la première année, les plus petits de ces arbres; mais les gros ont quelquefois résisté pendant deux ou trois ans : ils se couvroient, avant la saison , d'une prodigieuse quantité de fleurs ; mais le fruit qui leur succédoit, ne venoit jamais en maturilé, jamais même à une grosseur considérable. J’ai aussi essayé de rétablir l'écorce des arbres qui ne leur est L v # * n ‘330 HISTOIRE NATURELLE 4 que trop souvent enlevée par différens aeci= dens, et je n'ai pas travaillé sans succès: mais cette matière est toute différente de celle que nous traitons ici, et demande un détail particulier. Je me suis servi des idées que ces expériences im ont fait naître, pour mettre à fruit des arbres gourmands et qui poussoient trop vigoureusement en bois. J'ai fait le premier essai sur un coignassier, le 3 avril; j'ai enlevé en spirale l’ecorce de deux branches de cet arbre : ces deux seules branches donnèrent des fruits ; le reste de l'arbre poussa trop vigoureusement et de- meura: stérile. Au lieu d'enlever l'écorce, j'ai quelquefois serré la branche ou le tronc de l'arbre avec une petite corde qu de la filasse ; l'effet étoit le même, et j'avois le plaisir de recueillir des fruits sur ces arbres stériles depuis long-temps. L'arbre en gros- sissant ne rompt pas le lien qui le serre: 1l . se forme seulement deux bourrelets, le plus gros au-dessus ct le moindre au-dessous de la petile corde; et souvent, dès la première ou la seconde année , elle se trouve recouverte et incorporée à la substance même de l'arbre. De quelque façon qu’on intercepte donc la. \ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 1x séve, on est sûr de hâter les productions des arbres, sur-tout l'épanouissement des fleurs et la production des fruits. Jene donnerai pas l'explication de ce fait ; on la trouvera dans la Sratique des végétaux. Cette interception de la séve durcit aussi le bois, de quelque façon qu’en la fasse; et plus elle est grande, plus le bois devient dur. Dans les arbres en- tièrement écorcés , l’aubier ne devient si dur que parce qu'étant plus poreux que le bois parfait, il tre la séve avec plus de force et en plus grande quantité. L’aubier extérieur la pompe plus puissamment que l’aubier in- térieur ; tout le corps de l’arbre tire jusqu’à ceque les tuyaux capillaires se trouvent rem- plis et obstrués. Il fautune plus grande quan- tité de parties fixes de la séve pour remplir la capacité des larges pores de l’aubier, que pour achever d'occuper les petits interstices du bois parfait : mais tout se remplit à peu près également; et c’est ce qui fait que dans ces arbres la diminution de la pesanteur et de la force du bois, depuis le centre à la circonférence , est bien moins considerable que dans les arbres revêtus de leur écorce ; et ceci prouve en même temps que l’aubier * 132 HISTOIRE NATURELLE: de ces arbres écorcés ne doit plus être regardé comme un bois imparfait, puisqu'il a acquis en une année ou deux , par l’écorcement, la solidité et la force qu’autrement il n’auroit acquise qu’en douze ou quinze ans; car il faut à peu près ce temps dans les meilleurs terrains pour transformer l’aubier en bois parfait. On ne sera donc pas contraint de retrancher l’aubier, comme on l’a toujours fait jusqu'ici, et de Le rejeter : on emploïera les arbres dans toute leur gro$eur ; ce qui fait une différence prodigieuse, puisque l’on aura souvent quatre solives dans un pied d'arbre duquel on n’auroit pu en tirer que deux : un arbre de quarante ans pourra ser— vir à tous les usages auxquels on emploie un arbre de soixante ans ; en un mot, cette pra- tique aisée donne le double avantage d’aug- menter non seulement la force ét la solidité, mais encore le volume du bois. Mais, disa-t-on, pourquoi l'ordonnance a-t-elle défendu l’écorcement avec tant de sévérité? n'y auroit-il pas quelque inconvé- : nient à le permettre, et cette opération ne fait-elle pas périr les souches? Il est vrai qu'elle leur fait tort : mais ce tort est bien LR) DA AN EOE ea: VAT : Dé] 4 V1 RS: “ EC #2 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 133 moindre qu’on ne l’imasine, et d’ailleurs 1f n’est que pour les jeunes souches, et n’est sensible que dans les taillis. Les vues de l'ordonnance sont justes à cet égard , et sa sévérité est sage : les marchands de bois fout écorcer les jeunes chênes dans les taillis, pour vendre l'écorce, qui s’emploie à tanner les cuirs ; c'est-là le seul motif de l’écorce- ment. Comme il est plus aisé d'enlever l’é- corce lorsque l'arbre est sur pied qu'après qu’il est abattu, et que de cette façon un plus petit nombre d’ouvriers peut faire la même quantité d’écorce , l'usage d’écorcer sur pied se seroit rétabli souvent, sans la rigueur des lois : or pour un très-léger avan- tage, pour une façon un peu moins chère d'enlever l'écorce, on faisoit un tort consi- dérable aux souches. Dans ün canton que j'ai fait écorcer et sécher sur pied , jen ai compté plusieurs qui ne repoussoient plus, quantité d’autres qui poussoient plus foi- blement que les souches ordinaires : leur Jlangueur a même été durable; car, après trois ou quatre ans, j'ai vu leurs rejetons ne pas égaler la moitié de la hauteur des rejetons ordinaires de même âge. La défense d’écorcex 12. 334 HISTOIRE NATURELLE. “sur pied est donc fondée en raison; il con= _viendroit seulement de faire quelques excep- ‘tions à cette règle trop générale. Il en est tout autrement des futaies que des taillis : il faudroit permettre d’écorcer les baliveaux et tous les arbres de service; car on sait que les futaies abattues ne repoussent presque rien ; que plus un arbre est vieux lorsqu'on l’abat , moins sa souche épuisée pent pro- duire. Ainsi, soit qu’on écorce ou non , les souches des arbres de service produiront peu : lorsqu'on aura attendu le temps de la vieil- lesse de ces arbres pour les abattre. A l’égard des arbres de moyen âge qui laissent ordi- nairement à leur souche la force de repro- ‘duire , l'écorcement ne la détruit pas; car ayant observé les souches de mes six arbres écorcés et séchés sur pied, j'ai eu le plaisir d'en voir quatre couverts d’un assez grand nombre de rejetous : les deux autres n’ont poussé que très - foiblement ; et ces deux souches sont précisément celles des deux arbres qui, dans le temps de l’écorcement , étoient moins en séve que les autres. Trois ans après l'écorcement , tous ces rejetons -avoient trois à quatre pieds de hauteur ; et ( PARTIE EXPÉRIMENTALE. 135 je ne doute pas qu'ils ne se fussent élevés bien plus haut si le taillis qui les environne . et qui les a devancés, ne les privoit pas des influences de l'air libre, si nécessaire à : l'accroissement de toutes les plantes. Ainsi l’écorcement ne fait pas autant de mal aux souches qu'on pourroit le croire. Cette crainte ne doit donc pas empêcher l’é- iablissement de cet usage facile et très-avan- tageux : mais il faut le restreindre aux arbres destinés pour le service , et il faut choisir le temps de la plus grande séve pour faire cette opération ; car alors les canaux sont plus. ouverts, la force de succion est plus grande, les liqueurs coulent plus aisément , passent plus librement, et par conséquent les tuyaux capillaires conservent plus long-temps leur puissance d'attraction , et tous les canaux ne se ferment que long-temps après l’écor- cement : au lieu que, dans les arbres écorces avant la séve, le chemin des liqueurs ne se trouye pas frayé, et, la route la plus com- mode se trouvant rompue avant que d’avoir servi, la séve ne peut se faire passage aussi facilement ; la plus grande partie des canaux . ze s ouvre pas pour la recevoir, son action d à Up pe OO NS GP M NL ET OUR, APE ON RON ER PET DRE TOR PRET es ñ fi PAU D OUR ET TRE ADAM NEA l A AS MALE 0 VA + 336 HISTOIRE NATURELLE, pour y pénétrer est impuissante, ef ces tuyaux seyres de nourriture sont obstrués faute de tension : les autres ne s'ouvrent jamais autant qu’ils l’auroient fait dans l’état naturel de l’arbre; et à l’arrivée de la seve, ils ne présentent que de petits orifices, qui, à la vérité, doivent pomper avec beaucoup de force, mais qui doivent toujours être plutôt remplis et obstrués que les tuyaux ouverts et distendus des arbres que la séve a humectés et préparés avant l’écorcement : c'est ce qui à fait que, dans nos expériences, les deux arbres qui n’étoient pas auÿsi en séve que les autres, ont péri les premiers, et que leurs souches n’ont pas eu la force de reproduire. Il faut donc attendre le temps de la plus grande séve pour écorcer : on ga- gnera encore à cette attention une facilité très-srande de faire cette opération, qui, dans un autre temps , ne laisseroit pas d’être assez longue, et qui, dans cette saison de la séve, devient un très-petit ouvrage, puisqu'un seul homme monté au-dessus d'un grand arbre, peut l’écorcer du haut en bas en moins de deux heures. | Je n’ai pas eu occasion de faire les mêmes és “js | | PARTIE EXPÉRIMENTALE. 137 épreuves sur d’autres bois que le chène : 1 mais je ne doute pas que l’écorcement et le desséchement sur pied ne rendent tous les bois, de quelque espèce qu'ils soient , plus compactes et plus fermes : de sorte que je : pense qu'on ne peut trop étendre et trop recommander cette pratique. } MR DECRE IL Expériences sur le desséchement du bois à l'air, et sur son imbibition dans l’eau. EXPÉRIENCE PREMIÈRE. Pour reconnoître le temps ef la gradation du desséchement. LE 22 mai 1733, j'ai fait abattre un chêne âgé d'environ quatre-vingt-dix ans, je lai fait scier et équarrir tout de suite, et j'en ai fait tirer un bloc en forme de parallélipi- 1 . : te pède de quatorze pouces deux lignes et demie 12 OMIS ù ‘ À on 138 HISTOIRE NATURELLE. de hauteur , de huit pouces deux lignes d'é- paisseur , et neuf pouces cinq lignes de lar- geur. Je m'étois trouvé réduit à ces mesures, parce que je ne voulois me servir que du bois parfait qu’on appelle Ze cœur , et que j’avois fait enlever exactement tout l'aubier ou bois blanc. Ce morceau de cœur de chêne pesoit d’abord 45 livres 10 onces ; ce qui revienta très-peu près à 72 livres 3 onces le pied cube. TABLE Du desséchement de ce morceau de bois. Nota. Il étoit sous un hangar à l’abri du soleil. Poips du bois. ANNÉES, MOISet JOURS. liv. onces. Made sa Ne 10. 24. 0 34 ON 2e » 0e sie à MA PAR D RAR La à le dx 7 à 441010 he PAIN He 28 + 0 ve He ASS NET EN 20. 4e doutes CHARME LORS En LE ee à JUIN à à de ee 028 028 QT aUNS ER SROMAROEES PARTIE EXPÉRIMENTALE. 139 Poips du bois. ANNÉES, MOIS et JOURS, , | d ao onces. a. LOL dia pate VAE | O de 2e dd Na LN0 Den A NE RA M | 40 7. BON ASIN Dog 4 ED j |. June, M ns OU Le 34% 0. HO EN A 36 TE SO M AUS 561 104 ! 2/01 ONE BG te AT TU Le JAN Li Sepiembré...:.26..,.:......, 00 Le ‘Oetobre .:. ./.. 20 empe sec. 130, 9: Moscinbre: 72 "SSNSECA, le 35) 4e FAYODHRENS Le SN die ce 7: pluie... SD. 4 Hire Belle A 10e 20 humide. :: 155, 3%: 172% Janvier. : :.... 12 tvamable. :1485, 32. A0) pelée: .:... 35. 1°: Hem. MB ec 39 Re. ù AP SAVOIES ee 0 00 0 ns +. Masse ce lus 9; tempsdoux.|34 151. plie: 4 he 00 + de CAE AE em ed Se ro LUE Te RE Roc uure 34, 17, TEMPS LS ER PA M 33,12. LE NN tte Art 326 O0 HOME... - PCA. ae M NP RE rpiembre.. lab... BL Wie 1 Octobre ....:.. 215 ASE EE AURA EN GAL y Dnambre une. pee. de 32 vue 140 HISTOIRE NATURELLE. nee ANNÉES, MOIS et JOURS. Shi liv. onces.} 1734. Décembre... | 36 200 MEN 92 ar 1790: Janvier. 0.10 260 RRPANENE 32 12. Février. do DO) De L'une 32 122: NAArSR UD SOS ROUE NES 132, 13. AVE AQU DES à D EN Me Be Ds TS GE RE 32 7. Ë 5600 7 EAN NE 2. ue da UE 32 6. Jnlet. D SAN MEL Na Ne) Abby: AE AG SUIS HAN Sépiemhée 4h20 de APN | 32 . Octabte.. 0e 026 000 TN CUR Poe me Norenbre: 512206 meet l'E A Décembre: .., 426700 2 UE LR QE 1736. Février. .... 26 San) DOME |32 ‘dL Mari ei 9 ARE AM 132. F5) SAN Le OA A AT, ER tro MévVMer. 0.020 tt UP SI 1O:. 1730. Février ..:.. EE PA dti, ma 1739. Février. . :., CU MA TRE de 37 D. 1740. Février... ee BEN 1741. Février. .... SN PORT SL dAes de 1742. Févmer..... RAS NL 0e di ASE DEA a 1743. Février... Una de US DR TT 1744. Février. .... ME de : RAS Sly T4 Cette table contient, comme l'on voit, la quantité et la proportion du desséchement pendant dix années consécutives. Dès la 4 PARTIE EXPÉRIMENTALE. x4r septième année,le desséchement étoit entier. Ce morceau de bois, qui pesoit d’abord 45 livres 10 onces, a perdu en se desséchant “14 livres 8 onces, c’est-à-dire, près d’un tiers de son poids. On peut remarquer qu'il a fallu sept ans pour son desséchement entier, mais qu'en onze jours il a été sec au quart, et qu'en deux mois il a été à moitié sec, puis- qu’au 2 juin il avoit deja perdu 3 livres 9 onces , et qu’au 26 juillet 1733 il avoit déja perdu 7 livres 4 onces, et qu'enfin il étoit aux trois quarts sec au bout de dix mois. On doit observer aussi que, dès que: ce morceau a été sec aux deux Liers ou envi- ron,, il repompoit autant et même plus d'humidité qu’il n’en exhaloit. EXPÉRIENCE Il. Pour comparer le temps et la gradation du desséchement. LE 22 mai 1734, j'ai fait scier dans le tronc du même arbre qui m'’avoit servi à l’expé- rience précédente, un bloc dont j'ai fait tirer un morceau tout pareil au premier, et qu'on 142 HISTOIRE NATURELLE _a réduit exactement aux mêmes dimensions. Ce tronc d'arbre étoit depuis un an , c’est-à- dire, depuis le 22 mai 1735 , exposé aux in— jures de l'air; on l’avoit laissé dans son écorce ; et pour l'empêcher de pourrir, on avoit eu soin de retourner le tronc de temps en temps. Ce second morceau de bois a été pris tout auprès et au-dessous du premier. TABLE } Du desséchement de ce morceau. ANNÉES, MOIS et JOURS. Poips du bois. . 1934. Mai... .:...23, à 6 E'dumat/2420 0 24, 14e EE 24, à 8h dusoir.|41 12° 25, à Obdumat.i4r: 104 26: 146 ue sas NAT NE Br NA NOIRS Des cn à +2 ARABES 29 serre te D MURS ! AO, 4.0 012 te RENNES Juin. s de sis à Bob is ae 0e ARS EL EEE 6; a sun a 0 te RNA RENE TO, 4 » + 4040 04 el OR ENNS TAN A AMEN l': 1301 "A 104 ve SN SOIR 26. 4 40 I RNE e PARTIE EXPÉRIMENTALE. 143 ét e PAR Poips ANNÉES, MOIS et JOURS. du bail liv. onces np Cduler. 6...) 7 AN ME 37 19 PORN. AU ee DT UT 20% 12 D NAME 37 $ AO Line à SGUÉ Mbibhe 136 6: Septembre... .26...,: 1 MEME AA NES AE dos Clordbre-...... PO Ne eee 135 1: Novembre..... DO) ANA, 35 . Décembre. ... DO. dau ti de | 35 5 1739. .Janvier,. ..... 72: RS OT OR A : 130 L PENTIER... AD EAU 2e 39 du !. | ETC SANS TO EL EE 5 Pal lesel se D Merde rie 134 LE, MER nn. 50 2 NP ARR RE 4 | 9e D lc. EE MN Eten an [34 EL Jehet. N° 01, 26 NN ARE 199 DE. Le. 20 FT RER Ru 320 Cr ce de (de ee Hp se 20: a. sn. 22 14. MRÉtbbre.. 1... 2 age fee AA 32 14: Novembre. .... DER PAR 32 (T0: Décembre... 20 MN eus e 33 = 17306. Février... ...…. ADS tas SEE D A De. LL 20 alain eo) shetste lee 32 6. AMEL. 4. 26. 'u RAI LEE à 32 3. 1737. Février... ... ee Ne ee D de... 2. 20..4-s 02. ns HIOD HO AA Hello. à à à « - à DD Res de -.131 10: HAO dem. 10. 1 DÉFI EC, RUE UUS À MP dE. Lo PGI ee 137 6. PRES! . 0 OA RE Due dE dl SE ND: dE. AVION ER ANA DL A TAN dem...» : Ro An 32, 4 Î — .. + e ® Co e ® e» e e e e F e 0 e à 144 HISTOIRE NATURELLE. ‘4 En A in ant cette table avec à première, ; on voit qu'en une année entière le bois en grume ne s’est pas plus desséché que le bois travaillé ne s’est desséché en onze jours. On _ voit de plus qu’il a fallu huit ans pour l’en- tier desséchement de ce morceau de bois qui avoit été conservé en grume et dans son écorce pendant un an; au lieu que le bois travaillé d’abord s’est trouvé entièrement à sec au bout de sept ans. Je suppose que ce morceau de bois pesoit autant ,et peut-être un peu plus que le premier, et cela lorsqu'il étoit en grume et que l’arbre venoit d’être abattu, le 23 mai 1733, c’est-à-dire qu’il pesoit alors 45 livres 10 ou 12 onces. Cette supposition est fondée , parce qu’on a coupé et travaillé ce morceau de bois de la même façon et exactement sur les mêmes dimen- sions , et qu'au bout de dix années, et après son desséchement entier , il s’est trouvé ne différer du premier que de trois onces ; ce qui est une bien petite différence, et que j'attribue à la solidité ou densité du premier morceau, parce que le second avoit été pris immédiatement au-dessous du premier , du coié du pied de l'arbre. Or on sait que plus à PARTIE EXPÉRIMENTALE. 145 on approche du pied dé l’arbré, plus le bois a de densité. À l'égard du desséchement de ce morceau de bois ; depuis qu'il a été tra- vaillé, on voit qu'il a fallu sept ans pour le dessécher entièrement comme le premier morceau , qu’il a fallu vingt jours pour des- sécher au quart ce second morceau , deux mois et demi environ pour le dessécher à moitié, et treize mois pour le dessécher aux trois quarts. Enfin on voit qu’il s’est réduit comme le premier morceau aux deux tiers environ de sa pesanteur. Il faut remarquer que cet arbre étoit en séve lorsqu'on le coupa le 23 mar-1733, et que par conséquent la quantité de la séve se trouve, par cette expérience, être un tiers de la pesanteur du bois, et qu’ainsi il n’y a dans le bois que deux tiers de parties solides et ligneuses, et un tiers de parties liquides, et peut-être moins, comme on le verra par la suite de ces expériences. Ce desséchement et cette perte considérable de pesanteur n’a rien changé au volume ; les deux morceaux de bois ont encore les mêmes dimensions , et je n’y ai remarqué ni raccourcissement ni rétrécissement : aius] Ja séye est logée dans Met, gén, XV I1, 13 146 BR TEL NATURELLE les interstices des parties ligneuses ;. et ces interstices restent vides et les mêmes après l'évaporation des parties humides qu’ils con- tiennent. | | On n’a point observé é que ce bois, quoique coupé en pleine séve, ait été piqué des vers ; il est très-sain , et les deux morceaux ne sont gercés ui l'un ni l’autre. } EXPÉRIENCE 1IIl. Pour reconnoître si le desséchement se faif proportionnellement aux surfaces. LE 8 avril 1735, j'ai fait enlever par un menuisier un petit morceau de bois blanc ou aubier d’un chêne qui venoit d’être abattu; et tandis qu’on le façonnoit en forme de pa- rallélipipède, un autre menuisier en façon- noit un autre morceau en forme de petites planches d’égale épaisseur. Sept de ces petites planches se trouvèrent peser aulant que le premier morceau, et la superficie de ce mor- ceau étoit à celle des planches comme 10 est à 54 à très-peu près. 1 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 147 T'ANB LE De la proportion du desséchement, LA _ Nota. Les pesanteurs ont été prises par le moyen d’une balance qui penchoit à un quart de grain. Poids du seul} Poids des 7 ANNÉE, MOIS ét JOURS.Ù ,jorceau, morceaux. 1734. Avril. À grains. grains. 8 à 2 heures du soir...lor 89.....| 9 r89- 8 à roheures du soir:.f4r30..... roët- 9ù ro heures du matn. Dr A Le PO AE MMA ARS *..11973..... r9r2+ PNR pe 4 PAPAS sos s Me LOT ee oo + 1628 + LDesesssssseeseusese “NrO25 2152: 1589: 13, temps serein. ......f 17782. ... 1565: [4, SECS «5 = nn se ° + + I Mas est O>:. 22 | 1 RP AMC RS ag ii Nes Poeme ti: :.11684...:.!1518. on... L656€....!1505È+ : 18,1dem..... FEBRALNE FA 1030... ,. 1502. DOS EMMErS IT CLS *.[16082.... L. oO HAE: : :{:.., 40 1960... rh. LE SO PP . 1976... 4. | 1406. 22, Re. . DC EE NU, Le AE I148r. 23 , chaud De ble à CP PRE: à LA 1556.,...! 1465. . s Sd dei. 19901. ...| 1486. Re.) 2.543 : 482. a. 7 CPP 19928, ...) 1479. ANNÉE, MOISet JOURS. 1734. À vol. 273 SOC dise sois de .. eee 29 » Ven Mis COR 30, pe Due su Ver Mai. MES Moda Li LE 29% vent et Dh it sl Juin. | 6 ph Aie en Juillet. Avant que d'examiner ce qui résulte de cette expérience, il faut observer qu'il falloit quatre cent quatre-vingt- -douze des grains [4 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 149 dont je me suis servi pour faire une once, et que le pied cube-de ce bois, qui étoit de l'aubier, pesoit à très-peu près 66 livres ; que le morceau dont je me suis servi, con- tenoit à peu près sept pouces cubiques , et chaque petit morceau un pouce, et que les surfaces étoient comme 10 est à 34. En consultant la table, on voit quele dessé— chement dans les huit premières heures st, pour Île morceau seul, de 59 grains; et pour les sept morceaux, de 208 grains. Ainsi la proportion du desséchement est plus grande que celle des surfaces; car le morceau perdant 59, les sept morceaux n'auroient dû perdre que 200 <. Ensuite on voit que, depuis dix heures du soir jusqu'à sept heures du matin, le morceau seul a perdu 60 grains , et que les sept morceaux en ont perdu 130; et que par conséquent le desséchement, qui d’abord étoit trop grand proportionnellement aux surfaces ,,est main- tenant trop petit, parce qu'il auroit fallu, pour que la proportion ïht juste, que le morceau seul perdant 60, les sept morceaux eussent perdu 204,au heu qu ‘ils n HN que 130. rbriotoituaue: 1923158 La 13 “50 HISTOIRE NATURELLE. En comparant le terme suivant 'eestast à dire, le quatrième de la table, on voit que | cette proportion diminue très-considérable- ment , en sorte que les sept morceaux ne perdent que très-peu en comparaison de leur surface ; et dès le cinquième terme , il se trouve Gb le morceau seul perd plus que les sept morceaux, puisque son desséchement est de 93 grains, et que celui des sept mor- ceaux n'est que de 84 grains. Ainsi le dessé- chement se fait ici d’abord dans une propor- tion un peu plus grande que celle dessurfaces, ensuite dans une proportion plus petite; et enfin il devient plus grand où la surface est la plus petite. On voit qu’il n’a fallu que cinq jours pour dessécher les sept morceaux, au point que lemorceau seul perdoit plus ensuite que les sept morceaux. On voit aussi qu’il n'a fallu que vingt-un jours aux sept morceaux pour se dessécher entièrement, puisqu'au 29 avril ils ne pe- soient plus que 1447 grains +, ce qui est le plus grand degré de ‘légéreté qu’ils aient acquis, et qu’en moins de vingt - quatre heures ils étoient à moitié secs, au lieu que le morceau seul ne s’estentièrement desséché -_ PARTIE EXPÉRIMENTAL. 15€ . qu en quatre mois et sept jours, puisque c'est au 15 d'août que se trouve sa plus grande légéreté, son porn n'étant alors que de 1461 grains , et qu’en trois fois vingt - quatre heures il étoit à moitié sec. On voit aussi que les sept morceaux ont perdu , par le des- séchement , plus du tiers de leur pesanteur, et le morceau seul à très-peu près le tiers. EXPÉRIENCE IV. Sur le même sujet que la précédente. LE 9 avril 1734, j'ai fait prendre dans le tronc d’un chêne qui avoit été coupéet abattu trois jours auparavant, un morceau de bois en forme de cylindre, dont j'avois déterminé la grosseur (en mettant la pointe du compas dans le centre des couches annuelles, afin d'avoir la partie la plus solide de cet arbre, qui avoit plus de soixante ans. J'ai fait scier en deux ce cylindre pour avoir deux cy- lindres égaux, et j'ai fait scier de la même Xaçon en trois l’un de ces cylindres. La su- perficie - des trois morceaux cylindriques étoit à la superficie du cylindre, dont il ! L RIUUA + CUT TOME SR nn 132 HISTOIRE NA TURELLE. n ’avoient que le tiers de la hauteur, comme | 43 est à 27,etle poids étoit égal; en sorte quele | cylindre seul pos aussi-bien que les trois : cylindres, 28 onces #, et ils auroient pesé en- . viron nee 14 onces, SI on les eût travaillés le jour même que l arbre avoit été abattu. | TANT _ Du desséchement de ces morceaux de bois. ANNÉE, MOIS et ons more Poids des. 3 morceaux. RSS EE 1734 Avril, onces. onces, . Soie heures du matin. 1.20 ...]..207e à 6 heures du maun.|,.285 ...1..28£ ED Re À 20... 275 Don ole note ab da en de RDS NS ie en EE 6 CN ) Fi. à 24 ITU A EU 2 4 Poe 2m ver 26, Dites nets obrhspon lt 6 ie HOT ON ie IRL RENTE TS D. TIONR ECOLE 061 VC AN EAEEP E Ps. be PRE RS ea (ER ER DD à 1e oeteie Dis aile ue one +25 Te 2 dr 55 MIO US, 097 D, SEE 292, ù 2 da F DANDE s tar à ie tel d ose 0 à e 2 M0) à Ù di 24827 CR 235 CE PPEEEEE EE REPONSES CEE Lu PARTIE EXPÉRIMENTALE. 153 ‘Poids du seul {Poids des 3 ÎANNÉE, Moiset JOURS.| morceau. LE MS EE) EEE m— | 1734 | onces. onces. Avril. 7 HORS RPM ORE ..23Ée | 25 RAT Pages Le22 : D ME LEE PES 24370 2923 27 «24e 2: 15 PRESS SANG PO 1-22 $ NEA 2953 ? 2 _ 29e... EE El PA 17 É Le DER EI CR RENE ° ER RAR Mai er ne ee) 35 als I e 2e 4 0,9 e es 2032.00 MALTE À n14+4 M PEN PAR SRE DE «1e 2 e 212 3 23 15 es: semwud3200e +215 5 232 2° QD EEE EE ee LE Eur 217 DR FN bee rie 21 Fi D'ololeie eo le ee a CP ES RS MAUR: ANA 16 35 Los. do 2 SE Ce Dress... 223. V1 FAO : O el ns RARES 217... OZ 2 _ ..2013. ss © Eu 2 3 Gui its 215... 201$. : D Ets 6 . dessssouss ss leo + + 20e LA + RUE 217 201+ £ CR Dr ee le . Dan Juillet. 26... et hi 2012 + 0. mana Verre 207" 25 Août. BOT TS 10 td e € Triés Btniembre.26..:.:..0,l..20-2%. Octobre. 26 CE eee e.e « Novembre, 26........ Décembre. 26....... 217 ; e . » 32° Ÿ . D D =. O LL 3 CS] mr 4 “VASTE LA LE, Rier, LAC SRIOMERON CREER AN ee re EL ES à M Ads à (WP Lin CE db" ED Ca LATE AQU f à ki | 554 HISTOIRE NATURELLE | On voit par cette expérience , comparée avec la précédente , que le bois du centre on cœur de chêne ne se dessèche pas tout- à-fait autant que l’aubier , en supposant même que les morceaux eussent pesé 30 onces au lieu de 28°, et cela à cause du desséche- ment qui s est fait pendant trois jours, de- puis le 6 avril qu’on a abattu l'arbre dont ces morceaux ont été tirés, jusqu’au 9 du même mois, jour auquel ils ont été tirés du centre de l’arbre et travaillés. Mais en par- tant de :8 onces , ce qui étoit leur poids réel, on voit que la proportion du dessé- chement est d’abord beaucoup plus grande que celle des surfaces , car " morceau seul ne perd le premier jour que - d'once, et les trois morceaux perdent 2, au lieé qu'ilsn’au- roient dû perdre que £+2X 16. En pre- nant le desséchement du second jour, on voit que le morceau seul a perdu #, et les trois morceaux + ,et que par conséquent il est à très-peu près dans la même proportion avec les surfaces qu’il étoit le jour précedent, et la différence est en diminution. Mais dès le troisième jour le desséchement est en moindre proportion que celle des surfaces 3 PARTIE EXPÉRIMENTALE, 155 car les surfaces étant 27 et 43, les desséche- mens seroient comme 5 et 7 €, s'ils étoient en même proportion; au lieu que les dessé- chemens sont comme b et 7,ou et --. Ainsi, dès le troisième jour , le desséchement qut d’abord s’étoit fait dans une plus grande proportion que celle des surfaces , devient plus petit, et au douzième jour le desséche- ment des trois morceaux est égal à celui du morceau seul; et ensuite les trois morceaux continuent à perdre moins que le morceau seul. Ainsi le desséchement se fait comme dans l'expérience précedente, d'abord dans une plus grande raison que celle des surfaces, ensuite dans une moindre proportion ; et enfin il devient absolument moindre pour Ja surface plus grande. L'expérience suivante confirmera encore cette espèce de règle sur le desséchement du bois. EXPÉRIENCE vV. J’Ax pris dans le même arbre qui m'avoit servi à l'experience précédente, deux mor- ceaux cylindriques de cœur de chêne, ious deux de quatre pouces deux lignes de dia- mé ; et d’un pouce quitte Aigues a épais | seur. J'ai divisé l’ün de ‘ces morceaux en À à huit parties par huit rayons ! tirés du centre, et j'ai fait fendre ée morceau en huit, selon la direction de ces rayons. Suivant ces me— sures, la superficie des huit morceaux est à très-peu près double de celle du seul morceau, et ce morceau seul, aussi-bien que ie re morceaux, pesoient M 11 onces +, ce qui revient à très-peu près à 7o livres lé pied cube. Voici la table de leur desséchement. On'doit observer, comme dans l'expérience précédente, qu’il y avoit trois jours que l'arbre dont j'ai tiré ces morceaux de bois, étoit abattu, et que par conséquent la quan- tité totale du desséchement doit étre aug mentée de quelque chose: VA PARTIE EXPÉRIMENTALE. 157 | TABLE Du desséchement d’un morceau de bois k et de huit morceaux, desquels la-superficie étoit double de celle du premier morceau, le poids étant le k même. Poids du seul} Poids des 8 ANNÉE, MOIS et JOURS. morceau: morceaux. 1734. Avril. FPE -] 9 à 6 heures du soir...| rr + 11%: 110 à 6 heures du matin. TT 5° 113 Par dem... LE Tr 2: IT ° DRE Rubens ec D 'UTE au To, LES 2 ÉLUS" PEL CAPES 10 2e 10%, PIE. HSE SERRE TER 10 52e 10 3:. he... 10 32° RE r A ES UT, À TO 3 Die LE RE TES 10 73e CETE LOIR ES ESP PR az LES LES OR EAP 32° Vas MGR AN shsicis alien a eo 0e » à 34e nn Dire CAR ER A ee 8. a de Ne a a LES «5 32° U +, 13 € 21 EL LLLUELLUSL nr ve 32° 32° « 10 Bdesnsssoss ess ses 32° be. A te 0 5 . 8 ;1. LA LETTRE PROREAAUS Le O+, PE sie Diable misteisie à eja éie. d 7. BE. 8 > 3 O 6 9 2 SGD ter ter ss es 9e res 32° 72° / 14 158 HISTOIRE NATURELLE oo RE Poids du seul| Poids des 8 morceau, morceaux, : \ ANNÉE, MOIS et JOURS. | Re CES CR ce] QT NET EU RÉ \ t34 onces. onces. | L 29 7 Avril. DU. à Seat TN 8 ==. 21 ne À Re AE QE D 32° 8 37° Mai. Fe Me A 6 32° O 7:° 23 7 rare se © = bless Ô 32° 4 8 31° EPA MAÉ B3:° CES NE RU © CES ETS Deosossese ETS G 37° : Es CAPE n En O'Tze 0 3x: 22 G ITosessesse 832 8 32° 2lessos.eee 12° 0:33 RL BE 7 LA PA NAMUR 2 83z- 6 37° À 29e... G 32° Ô 33 Juin. Gas. D 47° ’ 6 37°: 20. SE cie Gare 8 Juillet. 26. EE LUE G 32e Ge Août. AN ADMET, ADR : O 37e 8 ze Septembre. 26........1. G °;e 8 Ze Octobre. 26.,1.....21 92% 8 —. Novembre. 26......,..1 8-7. 8 Décembre. 26. . et ee 8. 9 Te On voit ici comme dans les expériences précédentes , que la proportion du desséche- ment est d’abord beaucoup plus grande que . 1,,930, 23, 74 2 39 9 4. F.230% 19 (at 2 39 10 7. POIDS des deux à | morceaux de bois. FUN Ë LL Temps pendant POIDS MOIS lequel les bois des deux pit à ont. resté 4 | Lorceaux de bois. | JOURS. DER | ru liv. onc gr. 1744. | 230 141,34: Avril. ..2t, beau. 24 heures.ÿ 2d, 39 EL1090 90 T4) Gui 22 beau. 24e 4 a! 39 11 6. 6 I 30 19 6. 29 vent, 241... 4 2 39 12 5. 1 € Z 39 EL 24, pluie. 24... 2130 13. 5. , L.900 12)8 25, pluie. 24... By 40 13 724 4 LE 39 I LE 26, sec. . 24e 4 2 30 14 2. CUT 39 3 D « 27 9 vent. 24 .00e } 2 39 15 4. : T 3 1: 2% pluie. re DE } 2 28 : ». Neue ge 29, beau.| 24....... 4 2iAit 1 +. | 1,39. 0. 141 30 > SEC... Zhonsese } Zi AG dE 7. nn | WT Sd) 6%» Mai. TAF beau. Zhosresse : 211! 40 D F5 6, 4 2, chaud. -_DAeoosss 4 à Fra 3 Li: 2 6 7.h 3, beau.| 24....... j S 3 É | NE 30.174070 4,-beau. 24 esse 4 214 C4. T7. A T, 7) Ho 9, beau. 24... 4 7 £ : 4. ANNÉE, MOIS. et JOURS. 11744. 4 Mai. ....6, vent. 17, pluie. 8, pluie. 13, vent. 15, vent. 17, pluie. 19, pluie. 23, beau. 25, pluie. 27, beau. 29, beau. 31 , beau. L 9, beau.) 24 heu res. ND M D MH NE D mi D Hi N° mi Ro 4 0 le NO HN M NS ei 0 bi KO ei Ro des deux morceaux de bois. À 39 Temps pendant POIDS lequel les bois À ont resté à l’eau. Liv. onces. gr. zer. 39 ; 21. 40 : bel bd bed | | OR I m5 DO 0UAO UAO Oo NO Qt OO OI HR ft Co SR | let bel fe D 4 D D N #1 OH \0 CORRE Sim à R » OU OUT OT UTI I ON US Um LD O9 OT 0 UT M JR Het Temps pendant POIDS MOIS lequel les bois des deux et ont resté à ; morceaux de bois, l'eau. J OU Rs. Ps Deere RCE RENE ARE pe EE ES TG liv. onc. gr 1744. “ A A Hem ..2Neec.. | 2 jours. .… À Lie E ii 4, pluie. 2... k x Ë à 6, sec..| 2 D 1401-10 | Li CA] à 20260 eee 2 40 T4 7. SA sell 2... md: pa . 10, sec.. 2......... 5 ‘ha 5 6. L 4 0 Eee na AMEN vd 3 49 | 6 5. 2 AI » | ASE 14, chaud. 2.........À : je 7 2. À », 16 , pluie. 2......... : 7 : pe 16, couy.| 2........./ : 4 É 4 Gi : 20 pluie. 2........4 F “u É 22} convi] 2,.....0. hs Durs :: Sacha 25 2, 4 À . de 7, ». 20% sil 27... 4 à je D û | 28, SECe « 7 he f 5 M di do, sec. . 2... 7 L à ” A POIDS. patine cn MOIS _ lequel les bois ; des deux et P Lu à resté à morceaux de bois. 4 JOURS L r EEE 4 Let one) er 1744. La 40 T4 .. Juillet...2,chaud.l 2 jours... 4 : d'A 10 42 4, pluie. 2...) ÿ 7 8 5. er NN D 6, pluie. 2.2 2.48 à T ». à . Zossssouee ÿ Fe È 8, vent 4 2 41 10 ». Le 10, On a été dé de les changer dé cuvier , deux cercles s'étant brisés. i 12, pluies 4 jours. à Fa de F 16, pluie. #s + nr Fe “ à AS PA 7. de 243 conti] 4.5 SRE 28, beau. freres... à ; Fi 5 E Août... 1°, vent. durs... d : : e se Ds COMM 4... 4 be & “É 2 9,chal. A 4... 4 : a de Je 13, pluie: presse % E 3 37, vent} 4... 7: à 2 “ 3: RO Douuul POuRs BIOS lequel les bois des deux et ont resté à | morceaux de bois. JOURS. D | Ca EEE or OPA RCA TN A 744 + ; D A de MT Aout. . .21 » pluie. 4 JOUTSe « « À 24, 42 5 4. L'ErI VE . 25, var. 4....... 4 7 de / bo 1142) D) 4%: 29, beau.| 4......... J » F 7 si Pop 025 beau 4.,....... : : Le. G “; TI à 2 e MP PCOnL 4... co. 4 > e 9 ii po) a 10, VAL... Aesocuooee 4 2 42 10 5, SE NON Dean 4....., 07 4 5 dE IT 4. dl di. ARE 2 à 29 beau 4.......:1 4 : 5 a É POCHE - 4:42. 4 : r je 2 30, beau.| 4......... 4 à Le fe Diobré. 4) vent 4..:,..::. 4 j : " si x T 42 5 PAL MONT TE AMENER 4 à ie 2. à FN 42 D miphmel 4.2... 4 5 7 L 8 a 3 I : 42 6. 16, pluie. RQ 2 3 ue 4 PANNE TES ANNÉE ). LANCER UES ea Temps pendant|" M ui lequel les bois et it ont resté 2 # 1744. {Octob. 20, pluie.| 4 jours... 4 24, pluie. 26, gelée. Nov...,.x%. beau. 5 , pluie. 9, beau. 13, beau.| 17, pluie. 21 9 Var... 20, nelge FAP à 4 et gelée. Déc: ic Sell 40.125 ! 7, Var... 4er... { Eragelest 4. .:..0.0x 4 15 ,pluie, 4 neige. POIDS des deux morceaux de bois. E MN MN EN HN EN HN mt À D Om D EN AD HN Pi N HR D © ND WOR CR CNT H Os or e SA % s HRObhe vs ve RRORRE Qu ED NO RE y» SRE éc : Déc. ...19,pluie,l 4jours..... | EU 7 1%.43 3 4 - lard. 24.43 9 TH) e0S 23,pluie,| 8......... 4 ë 13 AU EIge . A 43 Dis 3 » neige, 5 ME 1% 49710 : 6 dégel, 1745. Janvier. .8,brouil-| 8....... + EU A lard et 3, pis II pluie à : I ; M Ace 0. ......:. 4 2 13 2 : 149 D 2 nAfogclée) 8......,4. £ dégel] *. hPa HFévrier. “neige. 8..,...... J ne # Wa Gi à AE Le AE Re . 9» pluie. ERA . 33 AE 17, pluie :, M: CPR EE 43 2:23. | le. C1 va 2 44 DE Pa Peut B:.,...... 4 é : a NNEÉE A * Temps pendan POIDS MO1Ss lequel les bois des deux es? st resté à morceaux de bois. JOURS jo lv. onc. gr. * Le baquet étoit entièrement gelé; il n’y avoit qu’une Pinte d’eau qui ne fût point glacée. On avoit changé les} bois deux jours auparavant pour relier le baquet. ANNÉE, Temps pendant| POIDS se ain 4 lequel les bois des deux et ont resté à : ae réa DRE UE de bois. SAT, AU 4 ‘1745. à Ï { Era Ë oui liv. onc. "er. L: | Mars. .. 5,bean',] 8jours.. ...2 11.43 11) 41 gelée. 29.44 ‘4 2) v3, gelée. es tes 43 EL os 6 8 29, bed} G.....1. 8 8 Aro. ee a LE + EE di 4%: 19 4: HE il 43 15 3; 44 6 ». ABTIS 201 44, D 14: HAS I 9: 44 7 2: 3 15 2. 16 ,beau, À 2431008 “ < "pluie. ST 7) D LINE t Les bois étoient si fort serrés par la glace , qu’il a fallu y| jeter de l’eau chaude. Ils ont passé la nuit dans la cuisine| . auprès de la cheminée, et ils ont été pesés douze heures | après l’eau chaude mise dans ce cuvier, 2 Il est visible ici que c’est la vicissitude du temps qui détermine le plus ou le moins d'augmentation, après un | pareil nombre de jours. Les bois ont considérablement aug- menté cette fois, parce que les deux jours qui ont précédé celui qu’on les a pesés, il à fait une pluie continuelle par un vent du couchant, et le lendemain il a encore continué de pleuvoir un peu, et ensuite un temps couvert et humide. T4 ] SECs e. +0. Faite 22, pluie. 30, beau. te. + W mb ND PR MR EN HN HN MH NH + EN ô 8. Mai. 4.4 8j pluie. G::::i320 8 1745. Mai. .24, chaud, Juin... Août.. pluie. «.I, froid, giboul. 0, frais. chaud. 17, frais, vent. 25, pluie. vent. -.3, pluie, chaud. II > Var.. 19, pluie, chaud. 27, beau. -.4, pluie. 12, pluie. 20, pluie. 28, pluie, beau. Mer beau. _ 21, beau, Temps pendant | lequel les bois ont .. EN 4 Duo ons 4 dé ER 4 AN AA { “ie +. ES Une 4 16,.......9 A0 14e. À resté . à l’eau. BROIDS des deux morceaux de bois. AR qe ane PR RSR liv. en ts 44 bHNMbER MN ANARARHbRARMbRANHbRER bi ans + Pr NO O à O OO HR DOUNI D onc. bei - bed bel - bel - [er bd DUR mm UE CO NO ON C0»! bei ul ren ÿ I] © "+ H M UN OR R OU WI OMR HR bi Oh Rk y ANNÉE, MOIS iete) ,. TOURS. Temps pentanel POIDS equel les bois ARRETE ont resté 3 | | DES UERR : “1 l’eau. morceaux de bois.} ue re ._Hv. énigr) [Octoh.. 7 sec..| 16 Mare | ne T ee 4,45). 9. % x 23, beau. Ebis 4 : . PU: ie 5 .6 zx. Nov..... Où var! 10... ÿ e 28 ï rs KA pe | | s 8 24, hum.! 16 "4 . 25 4 n | | 4) ë Déc....1o, gelée.| 16... 14 - ae : pe | 5 L 26; hurm. _I6.. CT p: k 35 "s é | "3 LA - 20 ‘À 1746. L. | Janv...i1, var..l 16........ 4 x # £ À 2 | De 27, gelée. BB. a bol , 35 é 8. Lib ( 2" HD 12)»: Fév....12, pluie. 16. SA Æ 45 6 4. LE 2 45 12/2: 28, dégel.k 16........ 4 I 45 5 ‘# Mars. .16, gelée.! 16......... 35 es 4 “dégel. { 2 45 13 ». Avril.z%s vent,! 16....:.... ke: 0 0 nejge: 4 2 49 13 ». 17, sec.. ARC 14), de D 49. 4 I VE ARMES Valeo RS LA 45 EXO 2 | 12 45 13 >.) A N N E E, Temps pendant POIDS MOIS hors J lgele bois] des deux l’eau. morceaux de bois. JOURS. 1746. à | liv. onc. gr. Mai 19, sec et} 16 jours... f 1°".49 10 >. | chaud. | J 24, 46 D nn. 4 plu.) 16... ...... La 00 + 249 14 2 ORNE 16... 1 4941070 | 2 46 >) SRE) Juillet. .6, variab.| s chaud. s2Vbsee:. Août....7, hum! 23,chaud. EN OX bei OT © CON [Sept...….8, pluie. : 24 3 SEC. Octob..10, hum. fæi ©\ ® ° e e * - : À Ps SEE ES 6 Ne NE ND -RNNe Min en NON NS AN (@>\ Lo Co ON ON & 3 3 1 ; | 4 26, beau] 16........ j Je ë >. 4 De Nov....1r, var..| 16... 5 46 (22e A0, 400" 2: 27, frim.| 16... is . | - 4607. ) D 12, hum! 16... a " Pare | = 7 "4: 29, hum. Pis ARE AO TT 2 Mar, gén, & y Ir. 16 ANUS 1 AN AMIS RE Y SAV CUT ON ke pas. Ro ; « . Ÿ Î a Temps pendant POIDS: MOIS lequel les bois’ DS CR et ont resté à Ù l’eau. morceaux de bois.f | JOURS. | IR CESSER LA : tu liv. onc. gr Janv.. -14, gelée. 16 jours. Re à 1°r,40 Es { 24; 407 ‘D'ua 30, hum! 16......... Ÿ 1.40 2,3. É340 43m Nm Pévenre 19 9 OS TO... NS 4 L:460 1 ES | 2 46 6, ::2, Mars...3, dégel.| 16... 4 T 446. 3% 2.1 ; 2 46 8 >». 19» froid] 16........$ 1 46 2 8. 2.146 610, Avril. +4) pluie.l 16........ 4 A NS EL | 2,46, 9 20, seC...| 16 ri nt . Sr ar ER Mai....6, temp.| 16......... 4 E:.40 0 4 3:40, . 9. 4. 22, var.) 16... a. É.40 7.008 2 46 9 >. Juiu....7, pluv.| 16... "3214 I pe Ô cu 23, temp.] 16........ FC oi pluvieux.| . 4 2er D 2 40, 12104 Juillet..9, var..| 16... . fa, 4 T 40" 20 25, chaud! 76... ...... ? # ” wi et bum. Août. .10,chaud,! 16........ { À je 14 # vent. 26, chaud, | 16,,,,... À Ë je É ‘ pluie. 4 ST 2 46 19 ». ANNÉE, MOIS et JOURS. D Sept..Tr, sec.. 27, pluv.. Octob.27, beau , couvert. Nov...27, bruines peud. 8 jours. Déc. .27, pluv.. 1748. Janv..27, gelée, AnIEe et dégel. év...27, dégel, et doux. {Mars. 27, froid. Avril..27, froid et pluv. ‘Mai...27, sec et froid. Juin. ,27, sec... Juillet..27, chal. et pluie. Août...27, chal. brouillards. V Sep. ,27, pluv.. Temps pendant lequel les bois .. resté l’eau. 16 jours... HË POIDS des deux morceaux de bois. Dé mbAR D EN ON mm D Hi N ri D ei D HN HN onc, te = OX CR D DOMRE ND ON HR US D EN v ANNÉE, M4 RE | Temps pendant POIDS et on rene D de deu JOURS. l’eau. morceaux de bois. Es : liv. onc. gr Octob.27, hum.} 3 jours. . À er 47 : 24, 47 7 4 Nov...27, gelée. 30... RE A Ad se à 2 EME NN Rés: Aa TEE act IE 4 LA NAN et vent. V2 4 UN D 1749- | Janv..27, pluv..} 30........ 4 . ï . / L Fév...27, pluie] 30........ 4 47. ke ensuite sec. pi si Mars..27, pluv..! 30.....1. «À j cp 4: pi Avril..27, vent.. 30... HOT. ar chaudi 30, 4e 4 Jui 2 vaL LE 30.1: QE Julles.sys var. 4/30. 3401 Août..27, pluv..| 30......... EN NI ei s ©9 #4 O OI O9 © OS ONO JO C9 09 OI CN U Sepi ar, sec | Sos.) À { À Octob.27, sec. 304... 4 t 47. 10 Nov...27, pluv..l 30,,,..2.. Déc...27, gelée, D = NO EN D IN RD ei N° ri N° et D EN ri N 1 D 4 EN Dù | ANNÉE, MOIS et JOURS. 1790. Janv..27, hum. Fév... .27 var... [Mars..27, beau. Le Secet. Maï...27, pluv.. Juin..27, bruine. Juillet.27, chal.. Août..27, pluve. Sept. .27, bruine. Octob.27, beau... couvert, Nov...27, pluv.. 1791 *, Janv...27, pluv.. |Fév...27, gelée. * On a oublié de peser les deux morceaux de bois dans le mois de décembre, : Temps pendant lequel les bois ! ont resté à l’eau. Î Î 30 jours. . 4 re POIDS des deux HE T er, 47 24. 47 47 47 47 48 bLHbHRAHAbANRHNAHNRAbMHRHR M + SI I 40 2), 48 I 40 2 40 16 ! morceaux de bois. De 8 + + 5 ER K ÿ ANNÉE, MOIS et JOURS. E7OT. ]Mars.. 27% pluv.. Avril. .27, pluie.. Mai...27, var... Juin..27, chal.. fAoût..27, temp. Octoh.27, pluv.. Awrik. . 27, sec: Juin...27,chaud, pluv. Août. .27, var.. Octiob..27, beau. Déc. .. 27 ; pluv. d Temps pendant lequel les bois ont resté à l’eau. EE en | 30 jours... 4 60.. 60. Go en) { 60 À 60.. d Spor set morceaux de bois, b HN EE D D Pr ND M D Om D ri D HN EN ri D Fi des deux { 0 IQ RE TETE DE TEE DE D ANNEE, Temps pendant POIDS MOIS lequel les’ bois des deux et de resté à Imorceaux de bois, eau. IQURS. Uz753. 7 3 iv. onc.\ gr. us 40/10 14: Fév. CE 27 5 His 6o Jours. . J 24, 40 II 6 ) ! T 48 II 4. Avril. . 27, pluv. 6... 2 48 12 », On voit par cette expérience qui a duré vingt ans : | 1°. Qu’après le desséchement à l’air pen- dant dix ans , et ensuite au soleil et au feu pendant dix jours , le bois de chêne parvenu au dernier degré de son desséchement , perd plus d’uu tiers de son poids lorsqu'on le tra- vaille tout verd , et moins d’un tiers lors- qu'on le garde dans son écorce pendant un an , avant de le travailler : car le morceau de la première expérience s’est, en dix ans, xeduit de 45 livres 10 onces à 29 livres 6 onces 7 gros; et le morceau de la seconde expérience s’est réduit, en neuf ans, de 42 livres 8 onces à 29 livres 6 onces. 2. Que le bois gardé dans son écorce, avant d'être travaillé, prend plus promp- 1 N = r Pa" F2) NT 188 HISTOIRE NATURELLE tement et plus abondamment l'eau, et par conséquent l'humidité de l’air , que le bois travaillé tout verd : car le premier morceau, qui pesoit 29 livres 6 onces 7 gros lorsqu'on l'a mis dans l’eau, n’a pris en une heure que 2 livres 8 onces 3 gros, tandis que le second morceau, qui pesoit 29 livres6onces, a pris dans le même temps 3 livres 6 onces. Cette différence dans la plus prompte et la plusabondanteimbibition s’est soutenue:trés- long-temps : car, au bout de vingt-quatre heures de séjour dans l’eau , le premier mor- ceau n’avoit pris que 4 livres 15 onces 7 gros , tandis que le second a ‘pris dans le même temps 5 livres 4 onces 6 gros. Au bout de huit jours, le premier morceau n’avoit pris que 7 livres 1 once 2 gros , tandis que le second a pris dans le même temps 7 livres 12 onces 2 gros. Au bout d’un mois, le pre- mier morceau navoit pris que 8 livres 12 onces, tandis que le second a pris dans le même temps 9 livres 11 onces 2 gros, Au bout de trois mois de séjour dans l’eau, le premier morceau n’avoit pris que 10 livres 14 onces 1 gros, tandis, que le second a pris dans le même temps 11 livres 8 onces 5 gros. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 1% Enfin ce n’a été qu’au bout de, quatre ans sept mois que les deux morceaux se sont trouvés à très-peu près égaux en pesanteur. 3°. Qu'il a fallu vingt mois pour que ces morceaux de bois, d’abord desséchés jusqu’au dernier degré, aient repris dans l’eau autant d'humidité qu’ils en avoient sur pied et au moment qu’on venoit d'abattre l'arbre dont ils ont été tirés : car, au bout de ces vingt mois de séjour dans l’eau , ils pesoient 45 livres quelques onces, à peu près autant que quand on les a travaillés. 4°. Qu’après avoir pris pendant vingt mois de séjour dans #l’eau autant d'humidité qu'ils en avoient d’abord, ces bois ont con- tinué à pomper l’eau pendant cinq ans : car, au mois d'octobre 1751, ils pesoient tous deux également 4o livres. Ainsi le bois plongé dans l’eau tire non seulement autant d’hu- midité qu'il contenoit de séve , mais encore près d’un quart au-delà ; et la différence en poids de l’entier desséchement à la pleine imbibition, est de 30 à 50 , ou de 3 à 5 en- viron. Un morceau de bois bien, sec qui ne pèse que 3 livres, en pesera 5 lorsqu’il aura séjourné plusieurs années dans l’eau, \ DAAN T L L dn " Le À so HISTOIRE NATURELLE. | 5%, Lorsque l’imbibition du bois dans l’eau est plénière , le bois suit au fond de l’eau les vicissitudes de l'atmosphère : il se trouve toujours plus pesant lorsqu'il pleut, et plus léger lorsqu'il fait beau , comme on le voit par les pesées de ces bois dans les dernières années des SEE de en 1751, 1752 et1753; en sorte qu’on pourroit dire, avec juste rai son , qu'il fait plus humide dans l'eau lors- qu'il pleut que quand il fait beau temps. EXPÉRIENCE VIII. Pour reconnoître la différence de l'imbibition des bois, dont la solidité est plus ou moins grande. ù LE 2 avril 17355, j'ai fait prendre dans un chène âgé de soixante aus, qui venoit d’être abattu , trois petits cylindres, l’un dans le centre de l'arbre, le second à la circonfe-— rence du bois parfait , et l’autre dans l’au- bier. Ces trois cylindres pesoient chacun 985 grains. Je les ai mis dans un vase rempli d’eau douce tous trois en même temps, et. je Les ai pesés tous les jours pendant un mois, pour voir dans quelle proportion se faisoit Yeur imbibition. £ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 194 TABLE De l'imbibiion de ces cylindres de bois. Poids des trois cylindres, Circonf. CE VU Re: Tan cœur. AUBIER, 4 CESR EE} grains. grains. grains. 985..1 985..] 985. IOI11..N 1016..! 1065. TO21..] 1027..| 1065. 1023..] 1034..| ro73 £. 1030... ro40°.| ro8r. 1035..) 1044..1 1083. 1036 ..| 1048..| 1088 1. 1037..| ïrodr..| 1090. 1039... TO40. . 1099. 1092 :. 1056.. 1004. 1042..1 1059..| 1078. 1049..f 1061..{ 1076 +. 1048 :.| 1064..| 1079 :. 1050 $.| 1065..| 1078. 1051 ..| 1066. 1074. IO5I :.| 1067..| 1072. 1092..! 1068..| 1073. 1053../ 1069..| 1o7r. 1056..} 1o72..) 1072. 1057..l 1073..) 1070. 1097 =}. 1075 1.| ro78 1, 10584. 1077..| 1074 à. 1059... 1078 1. 1074. 1060... 1079. 1074. Poids des trois cylindres. Circonf. du cœur. 1735. grains. grains. grains. Avril:.:20:se0.ÉTr068 : . 1087 ..| 1074 . Mi... 5, chaud..| 1068 :. TOO! -.| 1071. 9, Sec....} 1072 ..| 1093 ..| 1071. 13, chaud. .| 1073 ..| 1095 5.| 1070. 21, pluie. .| 1075 ..| 1107 ..| 1070. 25, pluie. . 1077 :.| 1103 :.| 1084. 2, sec....} 1076 ,.| 1103 1.| 1071. 10, hum...} 1082 ..| 1108 ..| 1078 =. 18, sec....] 1080 ..| 1105 ..| 1064. 6; pluie. .| 1088 ..| 1109 ..| 1069. 19, pluie. | 1096 ..| 1112 ..| 1077. 25, pluie. .| 1113 ..| 1126 ..| 1008. . 25, sec...) 1112 :.| 2222 4%} 1009! . 29, pluie. .| 1120 ..| 1126 ..| 1002. . 25, pluie. | 1128 ..| 1130 ..| 1124. CŒUR. Cette expérience présente quelque chose de fort singulier. On voit que, pendant le premier jour, l’aubier, qui est le moins solide des trois morceaux, tire 80 grains pesant d’eau, tandis que le morceau de la circonférence du cœur n’en tire que 51, le morceau du centre 26 , et que le lendemain ce même morceau d'aubier cesse de tirer l’eau; L. PARTIE EXPÉRIMENTALE,, 103 en sorte que, pendant vingt-quatre heures ‘entières , son poids n’a pas augmenté d’un seul grain , tandis que les deux autres mor- _ ceaux continuent à tirer l’eau et àaugmenter de poids; eten jetant les yeux sur la table de l’imbibition de ces trois morceaux , on voit que celui du centre et celui de la circonfé- rence prennent des augmentations de pesan- teur depuis le 2 avril jusqu’au 10 juin , au lieu que le morceau d’aubier augmente et diminue de pesanteur par des variations fort irrégulières. Il a été mis dans l'eau le 1°: avril à midi; le ciel étoit couvert, et l’air hu- mide : ce morceau pesoit, comme les deux autres, 985 grains. Le lendemain, à dix heures du matin, il pesoit 1065 grains. Ainsi, en dix-huit heures , il avoit augmenté de 80 grains, c’est-à-dire, environ - de son poids total. IL'étoit naturel de penser qu’il continueroit à augmenter de poids : cepen- dant , au bout de dix-huit heures, il a cessé tout d’un coup de tirer de l’eau , et il s’est passé vingt-quatre heures sans qu’il ait aug imenté; ensuite ce morceau d’aubier a repris de l’eau , et a continué d'en tirer pendant six jours, en sorte qu'au 10 avril il avoit | F 194 HISTOIRE NATURELLE. tiré 107 grains + d’eau : maisles deux jours 4 suivans, le 11 et le 12, 1l areperdu 14 grains; ce qui fait plus de la moitié de ce qu’il avoit tiré les six jours précédens. Il a demeuré presque stationnaire et au même point pen- dant les trois jours suivans, les 13, 14 et 15, après quoi il a continué à rendre l’eau qu il a tirée; en sorte que, le 19 du même mois, il se trouve qu'il avoit rendu 21 grains : de- puis le 10. Il a diminué encore plus aux 13 et 21 du mois suivant, et encore plus au 18 de juin , car il se trouve qu’il a perdu 28 grains < depuis le 10 avril. Après cela, il a augmenté pendant le mois de juillet, et au 25 de cé mois il s’est trouvé avoir tiré en total 113 grains pesant d’eau. Pendant lemois ” d'août il en a repris 33 grains; et enfin il a augmenté en septembre, et sur-tout en oc- tobre , si considérablement, que, le 25 de ce dernier mois, ilavoit tiré en total 159 grains. Une expérience que j’avois faite dans une autre vue, a confirmé celle-ci; je vais en. rapporter le détail pour en faire la compa- ralson. J'avois fait faire quatre petits cylindres d'aubier de l'arbre dont j'avois üiré les petits / 13 PARTIE EXPÉRIMENTALE. r95 morceaux de bois qui m'ont servi à l’expé- rience rapportée ci-dessus. Je. les avois fait travailler le 8 avril, et je les avois mis dans le même vase. Deux de ces petits cy- lindres avoient été coupés dans le côté de l'arbre qui, étoit expose au nord lorsqu'il étoit sur pied, et les deux autres petits cy- lindres avoient été pris dans le côté de l'arbre qui étoit exposé au midi. Mon but, dans cette expérience, étoit de savoir si le bois de la partie de l’arbre qui est exposée au midi, est plus ou moins solide que le bois qui est exposé au nord. Voici la propor- tion de leur imbibition. NN VER ai AAACENIEPNIENTT @, À FA 196 HISTOIRE NATURELLE. TABLE De l’imbibition de ces quatre cylindres. 5 Poids des mor-lPoids des DATES ceaux septentrio- des naux. naux. PESÉES. L'un. | L'autre. 1735. grains. | grains, | grains. MES NP ME 30. | 78.. Septembre.... 25. Octobre....... 25. | 84: mÔôr- ceaux méridio- L'un. } L'autre. À ons GENE grains ' PARTIE EXPÉRIMENTALE. 197 Cette expérience s'accorde avec l’autre, et on voit que ces quatre morceaux d'aubier augmentent et diminuent de poids les mêmes jours que le morceau d’aubier de l’autre expé- rience augmente ou diminue, et que par conséquent il y a une cause générale qui pro- duit ces variations. On en sera encore plus convaincu , après avoir jeté les yeux sur la table suivante. | Le 11 avril de la même année, j'ai pris un . morceau d’aubier du même arbre, qui pesoit, avant que d’avoir été mis dans l’eau, 7onces 3 gros. Voici la proportion de son imbibi- tion. 17 L \ PE NON NE ER EE 1 x98 HISTOIRE NATURELLE: LS TR * [Poips. } ANNÉE, MOIS et JOURS. du mor- | ceau. 1735. } onces, Avis: 3.410 HSE 12.| 751 13.| 7 À. 14.] PE 15. 7 2 10: 7% 17.1 74° 10. 74 19. 7 Er De TES SR PTE 25.1 7%. Jun, oi an NSP Juillet. 4, 22040 NRA Août. : 5, M QUE CSSS Septembre... 77., 44110 Nes Oétobhré.. : it UE NI a + Cetteexpérience confirmeencoreles autres, etonne peut pas douter , à la vue de ces tables, des variations singulières qui artivent au bois daus l’eau. On voit que tous ces mor- ceaux de bois ont augmenté considérable- ment au 25 juillet, qu'ils ont tous diminué PARTIE EXPÉRIMENTALE. 19 considérablement au 25 août, et qu'ensuite ils ont touë augmenté encore plus considé- rablement aux mois de septembre et d’oc- tobre. | Ilest donc très-certain que le bois plongé dans l’eau en tire et rejette alternative- ment dans une proportion dont les quantités sont trés-considérables par rapport au total de l’imbibition. Ce fait , après que je l’eus absolument vérifié, m’étonna. J'imaginai d’abord que ces variations pouvoient dé-. pendre de la pesanteur de l’air ; je pensai que l'air étant plus pesant dans le temps qu’il fait sec et chaud , l’eau chargée alors d'un) plus grand poids, devoit pénétrer dans les pores du bois avec une force plus grande; et qu'au contraire lorsque l’air est plus léger, l’eau qui y étoit entrée par la force du plus grand poids de l’atmosphère, pouvoit en ressortir : mais cette explication ne va pas avec les observations ; car il paroiît au con- traire, par les tables précédentes, que le bois dans l’eau augmente toujours de poids dans les temps de pluie, et diminue considéra- blement daus les temps secs et chauds, et c'est ce qui me fit proposer, quelques années € Pi d IR SES CE REP PI | h ” dANÈ A L dr { CU >. u \ x { t | La 200 HISTOIRE NATURELLE. après, à M. Dalibard de faire ces expériences sur le bois plongé dans l’eau, en comparant les variations de la pesanteur du bois avec les mouvemens du baromètre , du thermo- mètre et dé l’hygromètre ; ce qu’il a exécuté avec succès et publié dans le premier, vo- lume des Mémoires étrangers imprimés par ordre de l'académie. EXPÉRIENCE IX. Sur l’imbibition du bois verd. LE oavril 1755, j'ai pris dans le centre d’un chêne abattu le même jour , âgé d'envi- ron soixante ans, un morceau dé bois cylin- drique qui pesoit 11 onces; je l'ai mis tout de suite dans un vase plein d’eau, que j'ai eu soin de tenir toujours rempli à la rfi hauteur. PARTIE EXPÉRIMENTALE. »or TABLE De l'imbibition de ce morceau. de cœur de chène *. POIDS} : du cœur ANNÉE, MOIS et JOURS. de chêne. 1735. onces, en A ae IT. 10.1) II Te II.) 21%. 3 12.1 11 +. 23: | 11 14.1 112. 19.1 115. 16.1 112. 27.| 11. 10.1 11 È. 19.1 11. 20.1 11. 21.1 115. 223 DE 2 SEA 25.1 11 5 29.| 11. # L'eau, quoique changée très - souvent, prenoit une couleur noire peu de temps après que le bois y étoit plon- gé; quelquefois cette eau étoit recouverte d’une espèce de pellicule huileuse, et le bois a toujours été gluant jusqu’au 29 avril, quoique l’eau se soit clarifiée quelques jours au« paravant, v) J A (El : Ÿ « LL VA La: VAR Li we AE AE AE VU, ILE ENTREE MA TH UE + A : , V4 / 22 HISTOIRE NATURELLE. POIDS. : du cœur ANNÉE, MOISet JOURS. Ts chène CREER RE 1735. onces, Maé du sven sise US RSS 11.5. 46 13.| 115$. Juin. delai ee » Ne SEEN II 1. 30. 1r 5 aa + L2 Juillet... 4 000 UNSS AOÛT, 20 1.2 4 I ES 11 2% Septèmbre, :..4 44 Reese Octobre: 2... 444 AANDESRNESEE Il paroît, par cette expérience , qu’il y a dans le bois une matière grasse que l’eau dissout fort aisément ; 11 paroïît aussi qu'il y a des parties de fer dans cette matière grasse, qui donnent la couleur noire. On voit que le bois qui vient d’être coupé, n’ausgmente pas beaucoup en pesanteur dans l'eau, puisqu'en six mois l’augmentation * On voit que, dans les temps auxquels les aubiers des expériences précédentes diminuent au lieu d’augmentes de pesanteur dans l’eau, le bois de cœur de chêne n'augmente xi ne diminue. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 203 m'est ici que d’une douzième partie de la pesanteur totale. ÉEXBÉRIENCE X. Sur l’imbibition du,bois sec, tant dans l’eau douce que dans l’eau salée. LE 22 avril 1735, j'ai pris dans une solive de chêne, travaillée plus de vingt ans aupa- ravant , et qui avoit toujours été à couvert, deux petits parallélipipèdes d’un pouce d’é- quarrissage sur deux pouces de hauteur. J’a- . vois auparavant fait fondre dans une quan- tité de 15 onces d'eau, une once de sel marin. Après avoir pesé les morceaux de bois dont je viens de parler , et avoir écrit leur poids , qui étoit de 450 grains chacun , j'ai mis l’un de ces morceaux dans l’eau salée, et l’autre dans une égale quantité d’eau commune. Chaque morceau pesoit, avant que d’être dans l’eau , 450 grains; ils y ont été mis à cinq heures du soir, et on les a laissé surna- ‘ ger librement. 204 HISTOIRE NATURELLE … « TABLE ol ME . De l’imbibition de ces deux morceaux de bois. ‘ : | ANNÉE, MOIS et JOURS.: 1735. Avul.22,à 7 du soir. ; à 1ob du soir. 23, à GE du mat. à 6k du soir. 24, à 6h du mat. 25, même heure. D MENT PAL ER NEO * Il s’étoit formé de petits crystaux de sel tout autour du , morceau, un peu au-dessous de la ligne de l’eau dans la- _ Aquelle il surnageoit, à Ù ‘ # PARTIE EXPÉRIMENTALE. 205. ANNÉE, MOIS et JOURS. 1735. . | grains. 0 ..| 648. MANGA 35.1 663<. sesesess.s.| 770..| TOI. SAR ses...) 7022.) 736. De dpt aie e 2 -.| 7962. DR. AE 760. J'ai observe dans le cours de cette expé- rience , que le bois devient plus glissant et plus huileux dans l’eau douce que dans l’eau salée; l’eau douce devient aussi plus noire. Il se forme dans l’eau salée de petits crystaux qui s’attachent au bois sur la surface supé- rieure, c’est-à-dire, sur la surface qui est la plus voisine de l'air. Je n’ai jamais vu de crystaux sur la surface inférieure. On voit, par cette expérience, que le bois tire l’eau douce en plus grande quantité que l’eau salée. On en sera convaincu en jetant les yeux sur les tables suivantes. Le même jour, 22 avril, j'ai pris dans la 18 206 HISTOIRE NATURELLE. mème solive six morceaux de bois d’un pouce d’équarrissage qui pesoient chacun 430 grains; j'en ai mis trois dans 45 onces d’eau salée de 3 onces de sel , et j'ai mis les trois autres dans 45 onces d’eau douce et dans des vases semblables. Je les avois numérotés : 1, 2, 3, etoient dans l’eau salée; et les numéros 4, 5, 6 ,étoient dans l’eau douce. PARTIE EXPÉRIMENTALE. _ 207 TABLE De l’imbibition de ces six morceaux. Nota. Avant d’avoir été mis dans l’eau, ils pesoient tous 450 grains; on les a mis dans l’eau à cinq heures et demie du soir. | } ANNÉE, MOIS et JOURS Vu te des ne Mo PESÉES. M1:2, 3:14, 5% 61 1735. grains, | grains. | ..] 450. Lis, 22 à 6 heures He En et demie. er | 457 A5 “ .] 450. à 7 heures Si | 238. 56... ? à 6 heures Fe ) de et demie. 453... | 4592. 4, ES 458...| 466. à 9 heures 457... | 465. et demie 435. D 40e. 22 à 6 heures . pr du matin. 7 k 475. à 6 heures 1 ji pe. . du soir. et ne 471... | 400 j Bo] be 24, même 44 ne heure. ) ? _—_— janut nt RSA TE | 28 HISTOIRE NATURELLE. ANNÉE, MOIS et JOURS des PESÉES. 1735. | Avril. torsesee M NE à À ! De see à 0 US 1 RE ! Sn Re ! Dre ! des t dun ! Mass PRE a Le Un 2)/àv46 al 4.0.0 e.ece Poips |Poips des des numéros | numéros 1, 23760 do So. be grains, | grains. 490i..| 518. 486:..| 516. 405<..| 513. DOI 532. 497... | 529 499...|] 527 2077..| 945. JO4e . | 540. 499=.. | 539. DE D 'OU 209...1 592: 2091. 5ôI. 917... 560: 213... 5572 907... 5552 222..:| 57 220..| 568. 912=..| 567. 227 579. Has 571: Dre 970 530:..] 582. 929..-| 577. 9191.-| 575. 967.:. | 600. 964... | 594. 299... | 593 “ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 209 ANNÉE, MOIS et JOURS Poips | Porps ; des des des d numéros | numéros PESÉES. M2:23.14; 5; 6. eee COÉÈE. EL CS RS nd 1735. | grains. grains. 973 621, Li FRERE ns Ou sm tee É 6131, 9612. 606. | JB I. 6342. Pond UV LS 578. 6321, 970...) 6241, . 200: 008. 7 2%. ; 582. À 648. 079... | 637. 597... | 670. Edo nee ee à ! 584. 655. - 583...| 640. 619:..| 682. 2Desooorse 618.. 667. l 62, 1 664: [un.......... 6 à 6 heures) 622... 694. du soir.9 620:..1 680. “613... 6702 , 628... | 703. messe ses 627 696, U20: .. 691 : : ‘645... e 24. Done “4 a. . tt Ga. 713: ES | At AE 648....| 729. 18 210 HISTOIRE NATURELLE. ANNÉE, MOIS et JOURS Poips} Poips des des numéros | numéros 1,2, 3.) 4; 5; 6. ul = . grains. | grains, | 688...| 747. ne #4 742. : .| 736. | 702: 746 LE ie 757%. 751. LYS Il résulte de cette expérience et de toutes les précédentes : te ù 1°. Que le bois de chêne perd environ un tiers de son poids par le desséchement , et que les bois moins solides que le chêne “Eve plus d’un tiers de leur poids : ; 2°. Qu'il faut sept ans au moins pour des- sécher des solives de 8 à 9 pouces de grosseur, et que par conséquent il faudroit beaucoup $ plus du double de temps, c’est-à-dire, plus de quinze aus, pour dessécher une poutre de 16 à 18 pouces d’équarrissage ; | PARTIE EXPÉRIMENTALE. 1x 3°. Que le bois abattu et gardé dans son écorce se dessèche si lentement, que le temps qu’on le garde dans son écorce , est en pure perte pour le desséchement, et que rar conséquent il faut équarrir les bois peu de temps après qu’ils auront été abattus ; 4°, Que quand le bois est parvenu aux deux tiers de son desséchement, il commence à repomper l'humidité de l'air, et qu'il faut par conséquent conserver dans des lieux fermes les bois secs qu’on veut employer à la menuiserie : 5°, Que le desséchement du bois ne dimi- nue pas sensiblement son volume , et que la quantité de la séve est le tiers de celle des parties solides de l'arbre ; 6°. Que le bois de chêne abattu en pleine séve , s’il est sans aubier, n’est pas plus sujet aux vérs que le bois de chêne abattu dans toute autre saison ; 7°. Que le desséchement du bois est d'abord eu raison plus grande que celle des surfaces, et'ensuite en moindre raison ; que le dessé- chement total d'un morceau de bois de vo- lume égal, et de surface double d’un autre, se fait eu deux ou trois fois moins de temps; Lo M Et dd Let CAN " “Sr2 HISTOIRE NATURELLE. que le desséchement total du bois à volume égal et surface triple se fait en cinq ou six fois environ moins de temps; | 8°. Que l'augmentation de pesanteur que le bois sec acquiert en repompant l’humidite de l’air, est proportionnelle à la surface ; 9°. Que le desséchement total des bois est proportionnel à leur légéreté, en sorte que l'aubier se dessèche plus que le cœur de chêne, dans la raison de sa densité relative, qui est à peu près de — moindre que celle du cœur ; | 10° . Que quand le bois est entièrement desséché à l'ombre , la quantité dont on peut encore le dessecher en l’exposant au soleil, et ensuite dans un four échauffé à 47 degrés, ne sera guère que d’une dix-septième ou dix-huitième partie du poids total du bois, et que par conséquent ce desséchement arti- ficiel est coûteux et inutile : | 11°. Que les bois secs et légers , lorsqu'ils sont plongés dans l’eau, s’en remplissent en 1rès-peu de temps; qu’il ne faut, par exemple, qu’un jour à un petit morceaud’aubier pour se remplit d'eau , au lieu qu'il faut vingt jours à un pareil morceau de cœur de chène; PARTIE EXPÉRIMENTALE. 213. 2°. Que le bois de cœur de chène n’aug- mente que d'une douzième partie de son poids total, lorsqu'on l’a plongé dans l’eau au moment qu'on vient de le couper, et qu'il faut même un très-long temps pour qu il augmente de cette RUz Eee partie en pesanteur; 13°. Que le bois plongé dans l'eau douce la tire plus promptement et plus abondam- ment que le bois plongé dans l’eau salée ne tire l’eau salée ; 14°. Que le bois plongé dans l’eau s'im- bibe bien plus promptement qu'il ne se des- sèche à l’air, puisqu'il n’a fallu que douze jours aux morceaux des deux premières experiences pour reprendre dans l’eau la moitié de toute l'humidité qu'ils avoient perdue par le desséchement en sept ans , et qu’en vingt-deux mois ils se sont chargés d'autant d’humidite qu'ils en avoient jamais eu, en sorte qu'au bout de ces vingt-deux mois de séjour dans l’eau, ils pesoient autant que quand on les avoit coupés douze ans au- paravant ; | 15°. Enfin que , quand les bois sont entiè- xement remplis d’eau ,'ils éprouvent au fond \ dl PA dE LU AN lobe } AD 1e 2 jte A Le k | 214 HISTOIRE NATURELLE de l’eau des variations relatives à celles de : V'atmosphère , et qui se reconnoissent à la variation de leur pesanteur; et quoiqu’on ne _- sache pas bien à quoi correspondent ces va- riations , on voit cependant en général que le bois plongé dans l’eau est plus humide Jorsque l'air est humide , et moins humide lorsque l'air est sec , puisqu'il pèse constam- | ment plus dans les temps de pluie que dans les beaux temps. ARTICLE IIl. Sur la conservation et le rétablissement des forêts. LE bois, qui étoit autrefois très-commun en France, maintenant suffit à peine aux usages indispensables, et nous sommes me- nacés pour l'avenir d’en manquer absolu- ment. Ce seroit une vraie perte pour d'État d’être obligé d’avoir recours à ses voisins ; et de tirer de chez eux, à grands frais, ce que nos soins et quelque légère économie peuvent. nous procurer : mais il faut s’y prendre à temps ; il faut commencer dès aujourd'hui; PARTIE ÉXPÉRIMENTALE. 215 var si notre indolence dure, si l’envie pres— sante que nous avons de jouir continue à augmenter notre indifférence pour la posté- rité, enfin si la police des bois n’est pas reé- | formée, il est à craindre que les forêts, cette partie la plus noble du domaine de nos rois, ne deviennent des terres incultes , e£ que le bois de service , dans lequel consiste üne partie des forces maritimes de l’État, ne se trouve consommé et détruit, sans espé- rance prochaine de renouvellement. Ceux qui sont préposés à la conservation des bois, se plaignent eux-mêmes de leur dépérissement : mais ce n’est pas assez de se plaindre d’un mal qu’on ressent déja, et qui me peut qu’augmenter avec le temps, il em faut chercher le remède; et tout bon citoyen doit donner au public les expériences et les réflexions qu’il peut avoir faites à cet égard. Tel a toujours été le principal objet de l’aca- démie, l'utilité publique est le but de ses tra» vaux. Ces raisons ont engagé feu M. de Réau- mur à nous donner, en 1721, de bonnes remarques sur l’état des bois du royaume. Il pose des faits incontestables, il offre des vues saines, et il indique des expériences (e pi À PAT A A 216 HISTOIRE NATURELLE. qui feront honneur à ceux qui les exécute- _ ront. HApAES par les mêmes motifs, et me trouvant à portée des bois, je les ai observés avec une attention particulière; et enfin, animé ve les ordres de M. le comte de Mau- répas , j'ai fait plusieurs expériences sur ce, sujet. Des vues d'utilité particulière autant que de curiosité de physicien , n’ont porte à faire exploiter mes bois taillis sous mes yeux ; j'ai fait des pépinières d’arbres fores- tiers ; j'ai semé et planté plusieurs cantons de bois ; et ayant fait toutes ces épreuves en orand , je suis en etat de rendre compte du peu de succès de plusieurs pratiques qui réussissoient en petit, et que les auteurs d'agriculture avoient recommandées. Il en est ici comme de tous les autres arts : le modèle qui réussit le mieux en petit , sou- vent ne peut s’exécuter en grand. Tous nos projets sur les bois doivent se . réduire à tâcher de conserver ceux qui nous restent, et à renouveler une partie de ceux que nous avons détruits. Commençons par exa- minerles moyens de conservation, après quoi nous viendrons à ceux de renouvellement. Les bois de service du royaume consistené #1 À "Aie 4 a PARTIE EXPÉRIMENTALE. 219 dans les forêts qui appartiennent à sa ma-— jesté, dans les réserves des ecclésiastiques et des gens de main-morte, et enfin dans les baliveaux que l’ordonnance oblige de laisser dans tous les bois. | On sait, par une expérience déja trop longue, que le bois des baliveaux n’est pas de bonne qualité, et que d’ailleurs ces baliveaux font tort aux taillis. Jai, ob- servé fort souvent les effets de la gelée du printemps dans deux cantons de bois taillis voisins l’un de l’autre. On avoit conservé dans l’un tous les baliveaux dequatre coupes successives ; dans l’autre on n’avoit conservé que les baliveaux de la dernière coupe. J'ai reconnu que la gelée avoit fait un si grand tort au taillis surchargé de baliveaux, que Yautre taillis la devancé de cinq ans sur douze. L'exposition étoit la même; j’ai sondé le terrain en différens endroits, il étoit sem- blable. Ainsi je ne puis attribuer cette dif- férence qu’à l'ombre et à l'humidité que les baliveaux jetoient sur le taillis, et à l’obs- tacle qu'ils formoient au desséchement de cette humidité, en interrompant l’action du vent et du.soleil. Met, gén, XVII, fs 19 PPT MOTORS 218 HISTOIRE NATURELLE. Les arbres qui poussent vigourensemént en bois , produisent rarement beaucoup de fruit; les baliveaux se chargent d’ uné grande quantité de glands, et annoncent par Lt | leur tee On imagineroit qué ée gland devroit repeupler et garnir lés bois :‘mais cela se réduit à bien peu de chose ; car'de plusieurs millions de ces graines quitombent au pied des arbres, à peine en voit-on lever * quelques centaines , et ce petit nombre'es£ bientôt étouffé par l’ombre continuelle et le manque d'air, ou supprimé par le! dégoit: tement de l'arbre, ét par la gelée qui est toujours plus vive près de la surface de la terre, ou enfin détruit par les obstacles que ces jeunes plantes trouvent dans un terraïri traversé d’une infinité de racines et d'herbes de toute espèce. On voit, à la vérité, quelques arbres de brin dans les taillis :'ces arbres viennent de graines; car le chêne ne sé mul: tiplie pas par rejétons au loin, et ne pousse pas de la racine: mais: ces arbres de brin sont ordinairement dans les endroits clairs des bois , loin des gros baliveaux, et sont dué aux mulots ou aux oiseaux, qui, en trans- vortant les glands, en sèment une grandé v 2,4 Adé Aersens | ; PARTIE EXPÉRIMENTALE. 219 quantité. J'ai su mettre à profit ces graines que les oiseaux laissent tomber. Favois ob- servé dans un champ qui, depuis trois où quatre, ans, étoit demeuré sans culture, qu'autour de quelques petits buissons qui sy trouvoient fort loin les uns des autres, plusieurs petits chênes avoient paru tout d'un. coup; je reconnus bientôt par mes yeux que cette plantation appartenoit à des geais qui, en sortant des bois, venoient d'habitude se placer sur ces buissons pour manger leur gland, et en laissoient tomber la plus graude partie, qu’ils nese donnoient jaïnais la peine de ramasser. Dans un terrain que j'ai planté dans la suite, j’ai eu soin d’y mettre de petits buissons ; les oiseaux s'en sont emparés, et ont garni les environs d'une grande quantité de jeunes chênes. Il faut qu'il y ait déja du temps qu'on ait commencé à s’appercevoir du dépérissement des bois , puisqu’autrefoisnos rois ont donné des ordres pour leur conservation. La plus utile de ces ordonnances est celle qui établit dans les bois des ecclésiastiques et gens de main-morte la réserve du quart pour croître en futaie; elle est ancienne, et a été donnée 4 Li TS 20 HISTOIRE NATURELLE pour la première fois en 1573, confirmée en 1597, et nie À demeurée sans éxécu- tion jusqu’à l’année 1669. Nous devons sou: haiter qu’on nese relâche point à cet égard Ces réserves sont un fonds, un bien réel pour l'État, un bien de bonne nature; Car elles /ne sont pas sujettes aux défauts des baliveaux : on en auroit bien senti les avantages, si jusqu’à présent Le crédit, plutôt que le besoin, u’en eût pas disposé. On préviendroit cet abus en supprimant l'usage arbitraire des permissions, eten établissant un temps fixe pour la coupe des réserves : ce temps seroit plus ou moins long , selon la qualité du ter- rain , ou plutôt selon la profondeur du sol ; car cette attention est absolument nécessaire. On pourroit donc en régler les coupes à cin- quante ans dans un terrain de deux pieds et demi de profondeur , à soixante - dix ans dans un terrain de trois pieds et demi , et à cent ans dans un terrain de quatre pieds et démi et au-delà de profondeur. Je donne ces termes d’après les observations que j ’ai faites, au moyen d’une tarière haute de cinq pieds, avec laquelle j'ai sondé quantité de terrains : rien n’a été mieux imaginé, et. R l 1 _ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 22 où j'ai examiné en même temps la hauteur, la grosseur et l’âge des arbres; cela se trou- vera assez juste pour les terres fortes et pe- trissables. Dans les terres légères et sablon- neuses , on pourroit fixer les termes des coupes à quarante, soixante et quatre-vingts ans ; on perdroit à attendre plus long-temps, et il vaudroit infiniment mieux garder du “bois de service dans des magasins , que de le laisser sur pied dans les forêts, où ilne peut manquer de s’altérer après un cer- tain âge. bis RE Daus quelques provinces maritimes du royaume ; comme dans la Bretagne, près d'Ancenis, il y a des terrains de communes qui n ont jainais été cultivés, et qui, sans ‘être en nature de bois, sont couverts d’une iufinité de plantes inutiles, comme de fou- gères, de genêts et de bruyères, mais qui sont en mème temps plantés d'une assez srande quantité de chènes isolés. Ces arbres, souvent sâtés par l'abroutissement du bétail, ne s'élèvent pas ; ils se courbent, ils se tor- tillent , et ils portent une mauWwaïse figure, dont cependantion tire quelqueavantage, car ils «peuvent fournir.un grand nombre ‘de Ta 19 | ia 22 HISTOIRE NATURELLE. k pièces courbes pour la marine ; «et par cette raison ils méritent d’ètre conservés. Cepen- dant on dégrade tous les jours ces espèces de plantations naturelles ; les seisneurs donnent ou vendent aux paysans la liberté de couper dans ces communes; et il est à craindre que ces magasins de: bois courbes ne soient bientôt épuisés. Cette perte seront considérable ; car les bois courbes de bonne qualité, tels que sont ceux dont-je viens de parler,sont fort rares. J'ai cherchéles moyens de faire des bois courbes, et j'ai sur cela des expériences commencées qui pourront réus- sir, etque je vais rapporter en deux mots. Dans'un taïllis, j'ai fait couper à différentes hauteurs, savoir, à deux, quatre, six, huit, dix et douze pieds au-dessus de terre, les tiges de plusieurs jeunes arbres, et quatre années ensuite j'ai fait couper le sommet des jeunes branches que ces arbres étètés ont produites ; la figure de ces arbres est devenue, par cette double opération, si irré- sulière , qu’il n’est pas possible dela décrire, et je suis persuadé qu’un jour ils fourniront du bois courbe. Cette façon de! courber le bois seroit bien plus: simple et'‘bien-plus ‘ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 229 aisée à pratiquer que celle de charger d’un poids -ou d’assujettir par une corde la tête des jeunes arbres, comme quelques gens - l'ont proposé *. Tous ceux: qui connoissent un peu Îes bois, savent que la gelée du printemps est Je fléau des taillis ; c’est elle qui, dans les endroits bas et dans les petits vallous, sup- prime continuellement les jeunes rejetons, et empêche le bois de s'élever : en un mot, elle fait au bois un aussi grand tort qu'à toutes les autres productions de la terre; et si ce tort a jusqu'ici été moins connu, moins sensible, c’est que la jouissance d’un taillis étant éloignée , le propriétaire y fait moins d'attention , et se console plus aisément de la perte qu’il fait : cependant cette perte n’en est pas moins réelle, puisqu'elle recule son ‘revenu de plusieurs années. J'ai tâché de prévenir, autant qu'il est possible, les * Ces jeunes arbres que j'avois fait étêter en 1734, et dont on avoit encore coupé la principale branche‘en 1737, mont fourni, en 1760 , plusieurs courbes 1rès-bonnes , et dont cire suis servi pour lcékoues des marteaux ‘ét des ssañlers de mes forges. RES A LME Ft 224 HISTOIRE NATURELLE. LA TT NE mauvais effets de la geléé, en étudiant la façon dont elle agit; et j'ai fait sur cela des expe-. riences qui m'ont appris que la gelée agit. bien plus violemment à l’exposition du midi. qu’à l'exposition du nord ; qu’elle fait tout périr à l’abri du vent, tandis qu’elle épargne tout dans les endroits où il peut passer libre- ment. Cette observation, qui est constante, fournit un moyen de préserver de la gelee quelques endroits des taillis, au moins pen— dant les deux ou trois premières années, qui sont le temps critique, et où elle les attaque : avec plus d'avantage. Ce moyen consiste à observer, quand on les abat, de commen-. cer la coupe du côté du nord: Il est aisé d'y obliger les marchands de bois en mettant cette clause dans leur marché, et je mesuis déja très-bien trouvé d'avoir pris cette pré- caution pour quelques uns de mes taillis. Fa Un père de famille, un homme arrangé qui sé trouve propriétaire d'une quantité un peu considérable de bois taillis, commence par les faire arpenter , borner, diviser, et mettre en coupe réglée ; il s'imagineique c'est là le plus haut point d'économie: tous les ans il vend le mème nombre d'arpeuss _ LA PARTIE EXPÉRIMENTALE. 225 de cette: façon, ses bois deviennent un re- venu annuel. Il se sait bon gré de cette règle, et c’est cette apparence d'ordre qui a fait prendre faveur aux coupes réglées. Cepen- dant il s’en faut bien que ce soit là le moyen de tirer de ses taillis tout le profit qu'on en pourroit obtenir. Ces coupes réglées ne sont bonnes que pour ceux qui ont des terres éloi- gnées qu’ils ne peuvent visiter : la coupe ré- * glée de leur bois est une espèce de ferme ; ils comptent sur le produit , et le reçoivent sans se: donner aucun soin. Cela doit convenir à grand nombre de gens; mais pour ceux dont l'habitation se trouve fixée à la campagne, et même pour ceux qui y vont passer un cer- tain temps toutes lés années , il leur est facile de mieux ordonner les coupes de leurs bois taillis. En général , on pent assurer que, dans les bons terrains, on gagnera à les at- tendre, et que, dans les terrains où il n’y a pas de fond, il faut les couper fort jeunes ; mais il seroit à souhaiter qu’on püt donner de la précision à cette règle, et déterminer au juste l'âge où l’on doit couper les taillis, Cet âge est celui où l'accroissement du bois commence à diminuer. Dans les premières À À . { ANA LA Rai ah" sol | | 226 HISTOIRE NATÜRELLE. années ; le bois croît de plus en plus, e 'est- à-dire que la production de là seconde année est plus considérable que celle de la première année; l’accroissement de la troisième année est plus grand que celui de la seconde : ainsi l'accroissement du bois augmente jusqu'à un certain âge, après quoi il diminue. C’est ce point, ce z2axinum, qu'il faut saisir pour tirer de son taillis tout l'avantage et tout le profit possible. Mais comment le recon- noitre? comment s’assurer de cet instant? Il . n’y'a que des expériences faites en grand, des expériences longues et penibles, des ex- périences telles que M. de Réaumur les a indiquées , qui puissent nous apprendre l’âge où les bois commencent à croître de moins en moins. Ces expériences consistent à cou— per et peser tous les ans le produit de quel- ques arpens de bois, pour comparer l’'aug- mentation annuelle, et reconnoitre, au bout de plusieurs années, l’âge où elle commence à diminuer. J'ai fait plusieurs autres remarques sur la conservation des bois, et sur les changemens qu'on devroit faire aux réglemens des forêts, que jesupprime, comme n’ayaut aucun rap- we PARTIE EXPÉRIMENTALE. 227 port avec des matières de physique; mais je me dois pas passer sous silence ni cesser de recommander le moyen que j'ai trouvé d’aug- menter la force et la solidité du bois de ser- vice, et que j'ai rapporté dans le premier article de ce Mémoire. Rien n’est plus simple ; car il ne s’agit que d’écorcer les arbres, et les laisser ainsi sécher etmüûrir surpiedavant que de les abattre. L'aubier devient, par cette opération, aussi dur que le cœur de chène : il augmente considérablement de force et de densité, comme jem’en suisassuré par un grand nombre d'expériences, et les souches de ces arbres écorcés et séchés sur pied’ ne laissent pas que de repousser et de ‘reproduire des rejetons. Ainsi il n’y a pas le moindre inconvénient à établir cette pra- tique, qui, en augmentant la force et la durée du bois mis en œuvre, doit en dimi- nuer la consommation, et par conséquent doit être mise au nombre des moyens de. conserver les bois. Venonsmaintenant àceux qu'on doit employer pour les renouveler. Cet objet n’est pas moins important que le premier. Combien y a-t-il dans le royaume. de terres inutiles , de landes, de bruyères ,. 228 HISTOIRE NATURELLE. de communes qui sont absolument. stériles ! La Bretagne, le Poitou, la Guienne, la Bourgogne, la Champagne, :et ‘plusieurs autres provinces, ne/contiennent que trop | de ces terres inutiles. Quel avantage pour l'État si on pouvoit les mettre en valeur! La | plupart de ces terrains étoient autrefois en nature de bois, comme je l’ai remarqué dans plusieurs de ces cantons déserts ;: où l’om trouve encore quelques vieilles souches pres- que entièrement pourries. ll est à croire qu’on a peu à peu dégradé les hois de ces terrains; comme on dégrade aujourd’hui les communes de Bretagné , et que, par la succession des temps , on les a absolument dégarnis. Nous pouvons donc raisonnablement, espérer de rétablir ce que nous avons détruit. On n'a pas de regret à voir des rochers nuds, des montagnes couvertes de glace, ne rien pro- duire ; mais comment peut-on s’accoutumer à souffrir au milieu des meilleures provinces d'un royaume , de bonnes terres en.friche, des contrées entières mortes pour l'Etat ?. Je dis de bonnes terres, parcequej'enaivuet j'en ai fait defricher qui non seulement étoient de qualité à produire de bon bois, mais même ‘ Li PARTIE EXPÉRIMENTALE. 229 des grains de toute espèce. Il nes’agiroit donc que de semer ou de planter ces terrains : mais ‘il faudroit que cela pût se faire sans grande dépense; ce qui ne laisse pas que d'a- voir quelques difficultés, comme on jugera par le détail que je vais faire. Comme je souhaitois de m’instruire à fond sur la manière de semer et de planter des bois , après avoir lu le peu que nos auteurs d'agriculture disent sur cette matière, je me suis attaché à quelques auteurs anglois, comme Evelin, Miller, etc., qui me pa- roissent être plus au fait, et parler d’après l'experience. J'ai voulu d’abord suivre leurs méthodes en tout point, et jai planté et semé des bois à leur façon; mais je n’ai pas été long-temps sans m’'appercevoir que eette façon étoit ruineuse , et qu'en suivant leurs conseils, les bois , avant que d’être en âge, m'auroient coûté dix fois plus que leur va- leur. J'ai reconnu alors que toutes leurs expériences avoient été faites en petit dans des jardins, dans des pépinières, ou tout au plus dans quelques parcs, où l'en pouvoit cultiver et soigner les jeunes arbres; mais ce n’est point ce qu'on cherche quand on veut 20 DEN ORNE VPN INTERNE RSA A di NE AN EE 230 HISTOIRE NATURELLE. ul planter des bois : on a bien:de la peine à se résoudre à la première dépense nécessaire: comment ne se refuseroit-on pas à toutes les autres, comme celles de la culture, de l’en-. tretien , qui d’ailleurs deviennent immenses lorsqu'on plante de grands cântons? J'ai donc été obligé d'abandonner ces auteurs et leurs méthodes , et de chercher à m’instruire par d’autres moyens, êt j'ai tenté une grande quantité de façons différentes, dont la plu- part, je l’avouerai, ont été sans succès , mais qui du moins m'ont appris des faits, et m'ont mis sur la voie de réussir. Pour travailler, j’avois toutes les facilités qu'on peut souhaitèr, des terrains de toute espèce, en friche et cultivés, une grande quantité de bois taillis, et des: pépinières . d'arbres forestiers , où je trouvois tous les jeunes plants dont j’avois besoin. Enfin j'ai commencé par vouloir mettre en nature de bois une espèce de terrain de quatre-vingts arpens, dont 1l y en avoit environ vingt en. friche, et soixante en terres labourables, pro-. duisant tous les ans du fromentet d’autres grains, même asséz abondamment. Comme sion terrairm étoit uaturellement divise en ST ere +1 À de \ 9 11 44 ; . PARTIE EXPÉRIMENTALE. 23r deux parties presque égales par une haïe de bois taillis, que l’une des moitiés étoit d’un miveau fort uni, et que la terre me paroissoit être par-tout de même qualité, quoique de profondeur assez inégale, je pensai que je pourrois profiter de ces circonstances pour commencer une expérience dont le résultat est fort éloigné, mais qui sera fortutile; c’est de savoir, dans le mème terrain , la diffé— rence que produit sur un bois l'inégalité de profondeur du sol, afin de déterminer plus juste que je ne l’ai fait ci-devant , à quel âge on doit couper les bois de futaie. Quoique j'aie commencé fort jeune, je n’espère pas que je puisse mé satisfaire pleinement à cet égard ; même en me supposant une fort longue vie ; mais j'aurai au moins le plaisir d'observer quelque chose de nouveau tous les ans : pourquoi ne pas laisser à la postérité _ des expériences commencées ? J’ai donc fait diviser mon terrain par quart d’arpent, et à chaque angle j'ai fait sonder la profondeur avec ma tarière; j'ai rapporte sur un plan tous les points où j'ai sonde, avec la note de la profondeur du terrain et de la qualité de lä pierre qui se trouvoit au-dessous, dont la 232 HISTOIRE NATURELLE. “mèche de la tarière ramenoit toujours des échantillons : et de cette façon , j'ai le plan 1 de la superficie et du fond de ma plantation; \ plau qu'il sera aisé quelque jour de! compa” rer avec la production *. Après cette opération Diéliaiuaire ! j'ai partagé mon terrain en plusieurs cantons, que j'ai fait travailler différémment. Dans l'un, j'ai fait donner trois labours à la char- rue; dans un autre, deux labours ; dans un ‘ Us Lis > * Cette opération ayant été faite en 1734 et F6 4 bois semé la même année, on a recepé les jeunes plants en 1736 pour leur donner plus de vigueur. Vingt ans après, c’est-à-dire, en 1796 ils for- moient un bois dont les AR avoient communé- ment huit à neuf pouces de tour au pied du tronc. On a coupé ce bois la même année, c’est-à-dire, vingt-quatre ans après l’avoir semé, Le produit n’a pas été tout-à-fait moitié du’ produit d’un bois an- «ien de pareil âge dans le même Lerraln : MAIS AU— jourd' bu, en 1774, ce même. bois, qui n’a que se1ze ans, est aussi garni et produira loui autant que les bois anciennement plantés ; et malgré Piné- galité de la profondeur du terrain, qui varie depuis un pied et demi jusqu’à quatre pieds ét demi, on ne s’apperçoit d'aucune äifférence dans la grosseur sles baliveaux réservés dans les 1aillis, C IX PARTIE EXPÉRIMENTALE, 233 troisième, un labour seulement ; dans d’au- . tres , j'ai fait planter les glands à la pioche, -et-sans avoir labouré ; dans d’autres, j'ai fait simplement jeter des glands, ou je les ai fait placer à la main dans l'herbe; dans d’autres, j ai planté dé petits arbres que j'ai tirés de _ sués bois: dans d’autres, des arbres de même espèce, tirés de mes pépinières; j'en ai fait semer et planter quelques-uns à un pouce de profondeur ;, quelques autres à six pouces; dans d’autres, j'ai semé des glands que j'a- vois auparavant fait tremper dans différentes. liqueurs ;, comme dans l’eau pure , dans de la lie de vin, dans l’eau qui s’étoit ésouttée d'un fumier, dans de l’eau salée. Enfin, dans plusieurs cantons, j'ai semé des glands avec de l’avoine ; dans plusieurs autres, j’en ai semé que j’avois fait germer auparavant dans de la terre. Je vais rapporter en peu de mots le résultat de toutes ces épreuves, et de plu- sieurs autrés que je supprime ici, pour ne. pas rendre cette énumération trop longue. La nature du terrain où j'ai fait ces essais, m'a paru semblable dans toute son étendue ; c'est une terre fort pétrissable , un tant soit peu mêlée de glaise, retenant l'eau lone- 234 HISTOIRE NATURELLE. | ’ ou u AA NA temps, et seséchant assez difficilement, for- mant par la gelée.et par la sécheresse ne: 0 espèce de croûte avec plusieurs petites: fentes à sa surface , produisant naturellement ne grande quantité d’hièble dans: les endroits cultivés, et de gemièvre dans les endroits en friche. Ce terrain est environné‘de tous côtés | de bois d’une belle venwe. Jai fait semer avec soin tous les: glands un à un, et à un pied de distance les uns des autres,-ide sorte qu'il en est entré environ douze mesures: ow boisseaux de Paris dans chaque arpent. Je . LÉ L L2 * !. " crois qu'ilestnécessaire de rapporter ces faits, pour qu’on puisse juger plus sainement de ceux quidoivent suivre. | L'année d'après , j'ai observé avec PRE attention l’état de ma plantation , et: j'ai reconnu que, dans le canton dont j'espérois de plus , et que j'avois fait labouxer trois fois et semer avant l'hiver , la plus grande partie des glands n'avoient paslewé; les pluies de l'hiver avoient tellement battu-et corroyé la terre , qu'ilsn'avoient pu perceri: le petit nombredeceux quiavoient pu trouverissue n'avoit paru, que fort tard, environ à la fin dejuin;iis étmientfoilles, eflés; larfeudie e * PARTIE EXPÉRIMENTALE. 235 étoit jaunâtre, languissante, et ils étoient si loin les uns des autres, le canton étoit si peu garni, que j'eus quelque regret aux soins qu'ils avoient coûté. Le canton qui wävoit eu que deux labours, et qui avoit aussi été semé avant l'hiver ,' ressembloit assez au premier ; cependant il yavoit un plus grand nombre de jeunes chênes, parce que la terre étant moins divisée par le labour, la pluie n'avoit pu la battre autant que celle du pre- mier canton. Le troisième , qui n’avoit eu qu'un seul labour, étoit , par la même rai- son , un peu mieux peuplé que le second ; ais cependant àl l’étoit si mal, que plus des trois quarts de mes glands avoient éncore manqué. | Cette épreuve me fit connoître que, dans les terrains forts et mêlés de glaise, ïl ne faut pas labourer et semer avant l'hiver : jen fus entièrement convaincu en jetant les yeux sur les autres cantons. Ceux que j'avois fait labourer et semer au printemps, étoient bien mieux garnis : mais cé qui me surprit , c’est que les endroits où j'avois fait planter le gland à la pioche, sans ‘ancune culture précédente, étoient considérablement 236 HISTOIRE NATURELLE. | plus peuplés que les autres: ceux même où. l’on n’avoit fait que “cacher les glands sous 4: l'herbe , étoient assez bien fournis, quoique les mulots, les pigeons ramiers, et d’autrés animaux, en eussent emporté une grande quantité. Les cantons où les glands avoient | été semés à six pouces de profondeur, se trouvèrent beaucoup moins garnis que ceux | où on les avoit fait semer à un pouce oudeux de profondeur. Dans un petit canton où j'en avois fait semer à un pied de profondeur ; ïl nen parut pas un, quoique dans un ‘autre endroit où j'en avois fait mettre à neuf pouces , ilien eût levé plusieurs. Ceux qui avoient été trempés pendant huit jours dans la lie de vin et dans l’égout du fumier, SOT— tirent de terre plutôt que les autres. Presque tous les arbres gros et petits que j'avois fait tirer de mes taillrs, ont'péri à la première ou à la seconde année, tandisque ceux que j'a voistirés de mes pépinières, ont presque tous réussi. Mais ce qui me donna le plus de sa- tisfaction , ce fut le canton où: j’avois fait planter au printemps les slandsique j'avois fait auparavant germer dans de la terres n'enayoit presquepoint manqué :à lawérité; / PARTIE EXPÉRIMENTALE. 237 ils ont levé plus tard que les autres; ce que j'attribue à ce qu’en les transportant ainsi tout germés, on cassa là radicule de plu- sieurs de ces glands. ” Les années suivantes n’ont apporte aucun changement à ce qui s’est annoncé dés la première année. Les jeunes chênes du can- ton labouré trois fois sont demeurés tou- jours un peu au-dessous des autres : ainsi je crois pouvoir assurer que pour semer une terre forte et glaiseuse, il faut conserver le gland pendant l'hiver dans la terre , en fai- sant un lit de deux pouces de.slands sur un lit de terre d’un demi-pied ; puis un lit de terre et un lit de glands , toujours alternati- vement , et enfin en couvrant le magasin d’un pied de terre pour que la gelée ne puisse y pénétrer. On en tirera le gland au: com- mencement de mars, et on le plantera à un pied de distance. Ces glands qui ont germé, sont déja autant de jeunes chênes. et le suc- cès d’une plantation faite de cette façon n’est pas douteux; la dépense même n'est pas - considérable, car il ne faut qu’un seul labour. Si l’on pouvoit se garantir des mulots et des oiseaux ,- on réussiroit tout de même et sans PE AUTEUR : 14 al” 238 HISTOIRE NATUREL \ : x ' 14 À y aucune dépense, en mettant..en automne le gland sous l'herbe; car il perce et s'enfonce de lui-même, et réussit à merveille sans aucune culture dans les friches dont le gazon est fin , serré et bien garni, ce qui: indique presque toujours un terrain ferme et glaiseux, Comme je pense que la meilleure façon de semer du bois dans un terrain fort et mêlé de glaise est de faire sgermerles glands dans la terre , 1l est bon de rassurer sur le petit inconvénient dont j'ai parlé. On trans- porte le gland germé dans des mannequins, des corbeilles, des paniers, et on ne peut éviter de rompre la radicule de plusieurs de ces glands : mais cela ne leur fait d'autre mal que de retarder leur sortie: de terre de quinze jours ou trois semaines; ce qui même n’est pas un mal, parce qu'on évite par-là celui que la gelée des matinees de mai fait aux graines qui ont levé de bonne heure, et qui est bien plus considérable. J'ai pris des olands germés auxquels j'ai coupé le tiers , la moitié, les trois quarts ; et même toute la radicule ; je les ai semés dans un jardin où je pouvois les observer à teute heure : ils ont tous levé; mais les plus mutilés ont leve \ \ LE y PARTIE EXPÉRIMENTALE.l 229 Jes derniers. J'ai semé d’autres glands germés auxquels, outre la radicule, j'avois encore ôtél’un des lobes; ils ont encore levé : mais si on retranche les deux lobes , ou si l’on. coupe la plume, qui est la partie essentielle de l’embryon:végétal , 1ls périssent égale- ment. 3 FT 4 | Dans l’autre moitié de mon terrain, dont je n'ai pas encore parlé, il y a un canton dont la terre est bien moins forte que celle que j'ai décrite ; et où elle est même mêlée de quelques’ pierres à un pied de profondeur; c’étoit un champ qui rapportoit beaucoup de grain , et qui avoit éte bien cultive. Je le fis labourer avant l'hiver; et aux mois de novembre , décembre et février , jy plantai une collection nombreuse de toutes les . espèces d'arbres des forêts, que je fis arracher dans mes bois ‘taillis de toute grandeur , depuis trois pieds jusqu’à dix et douze de hauteur. Une grande partie de ces arbres n’a pas repris; et de ceux qui ont pousse à la première séve, un grand nombre a péri pendant les chaleurs du mois d'août; plu- _ sieurs ont péri à la seconde, etencored’autres” la troisième et la quatrième année : de sorte A ATEN NAT A ETS TEE ARE ï 240 HISTOIRE NATURELLE. de que de tous ces arbres , quoique plantés et. arrachés avec soin, et même avec des précau- ons peu communes, il ne m'est resté que. des cérisiers , des aliziers, des cormiers, des : frênes et des ormes; encore les aliziers et les, frênes sont-ils Janguissans , ils n’ont pas augmenté d'un pied de hauteur en cinq ans ; les cormiers sont plus vigoureux ; mais les merisiers.et les ormes sont ceux qui de tous: ont le mieux réussi. Cette terre se couvrit pendant l’été d’une prodigieuse quantité de mauvaises herbes ; dont les racines détrui sirent plusieurs de mes arbres. Je fis semer aussi dans ce canton des glands germés; les mauvaises herbes en étouffèrent une grande partie. Ainsi je crois que dans les bons. ter- rains, qui sont d'une nature moyenne entre, les terres fortes et les terres légères , il con- vient de semer de l’avoine avec les glands, pour prévenir la naissance des mauvaises herbes, dont la plupart sont:vivaces, et qui font beaucoup plus de tort aux jeunes chênes que l’avoine, qui cesse de pousser des racines au mois de juillet: Cette observation est sûre; car, dans le même terrain, les glands que javois fait semer avec l'avoine, avoient Nr” sn ST à LA é % N # PARTIE EXPERIMENTALE. 241 mieux réussi que les autres. Dans le reste de mon terrain, j'ai fait planter de jeunes chênes , de l’ormilleet d’autres jeunes plants tirés de mes pépinières, qui ont bien réussi: : ainsi je crois pouvoir conclure , avec con- noissance de cause, que c’est perdre de l’ar- gent et du temps que de faire arracher de jeunes arbres dans les bois pour les trans- planter dans des endroits où on est obligé de les abandonner et de les laisser sans cul- ture , et que quand on veut faire des plan- tations considérables d’autres arbres que de chêne ou de hêtre, dont les graines sont fortes , et surmontent presque tous les obstacles , il faut des pépinières où l’on. puisse élever et soigner les jeunes arbres pendant les deux premières années ; après quoi on les pourra planter avec succès pour faire du bois. : M'étant donc un peu instruit à mes dé- pens en faisant cette plantation , j’entrepris _PFannée suivänte d'en faire une autre presque dussi considérable dans un terrain tout dif- férent; la terre y est sèche, légère, mèlée de gravier , et le sol n’a pas huit pouces de profondeur, au-dessous duquel on trouve la 21 232 HISTOIRE NATURELLE. ÿ ‘ \ pierre. J'y fis aussi un: grand nombre d'é= : preuves dont je ne rapporterai pas le détails je me contenterai d'avertir qu'il faut labou=. rer ces terrains et les semer avant l'hiver. Si l’on ne sème qu’au printemps, la cha- leur du soleil fait périr les graines : si on se contente de les jeter owde les placer sur la terre, comme dans les terrains forts , elles se dessèchent et périssént, parce que l'herbe qui fait le sazon de ces terres légères, n’est pas assez garnie et assez épaisse pour les ga- rantir de la gelée pendant l'hiver, et de l'ardeur du soleil au printemps. Les jeunes arbres arrachés dans les bois réussissent en-— core moins dans ces terrains que dans les terres fortes; et si on veut les planter, il faut le faire avant l'hiver avec de jeunes piani pris en pépinière. Je ne dois pas oublier dé rapporter une expérience qui a un rapport immédiat avec notre sujet. J'avois envie de connoitre les: espèces de terrains qui sont absolument con- traires à la végétation, et pour cela j'ai fait remplir une demi-douzaine de grandes caisses à mettre des orangers, de matières toutes; différeutes : la première, de glaise bleue; la “ + PARTIE EXPÉRIMENTALE. 243 seconde, de graviers gros comme des-noi- settes; la troisième, de glaise couleur d'o- range; la quatrième, d’argille blanche; la cinquième, de sable blanc; et la sixième, de fumier de vache:bien pourri. J'ai semé dans chacune de ces caisses un nombre égal de glands, de châtaignes, et de graines de frêne, et jai laisse les caisses à l'air sans les soigner et sans les arroser : la graine de frêne n’a levé dans aucune de ces terres ; les châtaignes ont levé et ont vécu, mais sans faire de progrès, dans la cäisse de‘glaise bleue; à l’égard des glands, il en à levé une grande quantitédans toutes Îles caisses, à l’exception de celle qui _contenoit la glaise oraugée, qui n’a rien pro- duit du tout. J'ai observé que les jeunes chènes qui avoient levé dans la glaise blue et dans l’arsille , quoiqu’un peu eflilés au sommet, étoient4orts et vigoureux en com paraison des autres; ceux qui étoient dans le fumier pourri, dans le sable et dans le gra- vier, étoient foibles , avoient la feuille jaune, et paroissoient languissans. En automne, j'eu fisenlever deux dans chaque caisse: l’état des racines répondoit à celui de la tige; car, dans les glaises, la racine étoit foïte, et 244 HISTOIRE NATURELLE. wétoit proprement qu'un'pivot gros et ferme, | ae de trois à quatre pouces, qui n’avoit | qu'une ou deux ramifications. Dans le gra- vier,au contraire, et dans le sable ,la racine s'étoit fort alongée, ets'etoitprodigieusement divisée ; elle ressembloit , si je puis m’expri- mer ainsi, à une longue coupe de cheveux. Dans le fumier, la racine n’avoit guère qu'un pouce ou deux de longueur, et s’étoit divisée, dès sa naissance, en deux ou trois cornes courtes et foibles: Il est aisé de donner les raisons de ces différences ::mais je ne veux ici tirer de cette expérience qu’une vérité utile; c'est que le gland peut venir dans tous les terrains. Je ne dissimulerai pas cependant que j'ai vu, dans plusieurs. provinces de France, des terrains d’une vaste étendue cou- verts d’une petite espèce de bruyère, où je n'ai pas vu un chêne, ni aucune autre espèce d’arbres : la terre de ces cantons est légère comme de la cendre noire, poudreuse, sans aucune liaison. J'ai fait ultérieurement des expériences sur ces espèces de terres, que je rapporterai dans la suite de ce Mémoire, et qui m'ont convaincu que si les chènes n’y peuvent croître, les pins, les sapins, et peut: PARTIE EXPÉRIMENTALE. 245 ètre quelques autres arbres utiles, peuvent y . venir. J’ai-eleve .de graine et je cultive ac- _tuellement une srande quantité de ces arbres: jai remarqué qu'ils demandent un terrain semblable à celui que je viens de décrire. Je suis donc persuadé qu'il n’y a point de ter- rain, quelque mauvais, quelqu’ingrat qu’il paroisse , dont on ne pût tirer parti, Méme pour plañter des bois ; il ne s’agiroit queide ‘comnoître les espèces d'arbres qui convien- droient aux diférens terrains. RTICLE PV Sur La culture. eé. l'exploitation des . forêts. Daxs les arts qui sont de nécessité pre- mière, tels que l’agriculture, les hommes, même les plus. grossiers, arrivent, à force d'expériences , à des pratiques utiles : la ma- uière de cultiver le blé, la vigne, Les légumes et.les autres productions de la terre que lo recueille, tous les ans..est, mieux. .et plus 24 rs PT 246 HISTOIRE NATURELLE. généralement. connue : que la façon d’entre: À tenir et cultiver une forêt; et quand inémé la culture des champs! seroit défectueuse à plusieurs égards, ilest pourtant certain que les. usages établie! sontfondés sur des expé- riences continuellement répétées, dont-iles resultats sont des espèces/d'approximations du vrai. Le cultivateur ; éclairé par un inté- vêt toujours nouveau, apprend à ne passe tromper, ou du:moinus à se tromper peu,{#sur les moyens de rendre sonterrain plus fertile. Ce même intérêt se trouvant par-tout, il seroit naturel de penser que les hommes ont donné quelque attention à la culture des bois: cependant rien n’est moins connu, rien n'est plus négligé; le bois paroît être un présent de fa Nature, qu’il sûffit de recevoir tel qu’il sort de ses mains. La nécessité de le faire valoir ne s’est pas fait sentir; et la ma- ière d'en jouir n'étant pas fondée sur des expériences assez répétées , on ignoré jus—. qu'aux moyens les plus simples de consérvér les forêts et d'augmenter leur produit. Je n’ai garde de vouloir insintèr par-là que les réhtréhes et les observations que) "ai faites sur a matière soient d'es déconver tes pe 2 on à PARTIE EXPÉRIMENTALE: 247 adimirables ; je dois avertir, au contraire, que ce sont des choses communes, mais que leur utilité peut rendre importantes. J'ai déja donné, dans l’article précédent , mes vues sur ce sujet; je vais dans celui-ci étendre ces vues, en présentant de nouveaux faits. + Le produit d’un terrain peut se mesurer par la culture; plus la terre est travaillée, . plus élle rapporte de fruits : mais cette vé- rite, d'ailleurs si utile, souffre quelques ex- ceptions, et dans les: bois une culture pré- maturée et mal entendue:cause la disètie au lien de produire l'abondance; par exemple, on imagine, et je l'ai cru long-temps, que la meilleure manière demettre un terrain en nature. de. bois est de nettoyer ce terrain, et de le bien cultiver avant que de semer le gland ou les autres graines qui doivent un jour le couvrir de bois, etje n'ai été désabusé de ce prejuge, qui paroît si raisopinable, que par une longue suite d'observations. J'ai fait des semis Wen pes et des plantations assez vastes; je les ai faites avec précaution:; ; jai souvent fait arracher les gemièvres ,- les bruyères ; et jusqu'aux-moindres plantes que Je resardois comme nuisibles, pour cultiver 11 248 HISTOIRE NATURELLE. à fond , et par plusieurs labours, les terrains que je voulois ensemencer. Je ne doutoispas du succès d’un semis fait avec tous ces soins ; mais au bout de quelques années, j'ai re. connu que ces mêmes soins n’avoient SérVI | qu'à retarder l’accroissement de mes'jeunes plants, et que cette culture précédente;:qui » m'avoit donné tant d'espérance ; m'avoit causé des pertes considérables : ordinaire- ment on carie pour acquérir, ici st dé- pense nuit à l'acquisition. DEN Si l’on veut donc réussir à faire croître du : bois dans un terrain de quelque qualité qu’il soit, il faut imiter la Nature; il faut:y planter et y semér des épines et des buissons qui puissent rompre la force du vent ; dimi- nuer celle de la gelée et s'opposer à l’intem- périe des saisons; ces buissons sont des abris qui garantissent les jeunes plants, et les pro- tégent contre l'ardeur du soleil et la rigueur des frimas. Un terrain couvert , ou plutôt à demi couvert de genièvres, de bruyères, est un bois à moitié fait, et qui a peut-être dix ans d'avance sur un terrain net et’ cultive, Voici les observations qui nr’en ont assuré. J'ai deux pièces de terre d'environ qua- PARTIE EXPÉRIMENT A LE+ 249 rantearpens chachne, semées en bois depuis neuf ans: ces deux pièces sont environnées de tous côtes de bois taillis. L'une des deux étoit un champ cultivé: où a semé également et en même temps plusieurs cantons dañs cette pièce, les uns dans ke milieu de la pièce, les autres le long des bois taillis; tous les cantons du milieu sont dépeuplés , tous ceux qui avoisinent le bois sont bien gariis. Cette différence n’étoit pas sensible à la pre- mière année, pas même à la seconde; mais je me suis apperçu à là troisième année d'une petite diminution dansile nombre des jeunes plants du cauton du milieu ,et les ayant ob= servés exactement , j ai vu qu’à chaque été et à chaque hiver des années suivantes, 1l en a péri considérablement, et les fortes selées de 1740 ont achevé de désoler ces cantons, tan- dis que tout est florissant dans les parties qui s'etendent le iong des bois taillis, les jeunes :- arbres y sont verds |'Vigoureux , plantés tous les uns contre les autres, et ils se sont élevés sans aucune culture à quatre ou cinq pieds de hauteur : 1l est évident qu’ils doivent leur accroissement au bois Voisin, qui leur a servi d'abri contre les injures des saisons. Cette ao HISTOIRE/NA DUR ELLE. pièce de quarante arpensest actuellement en- vironnée d’une lisière, de cinq à six perches de largeur, d’un boïs naissant qui donne les plus belles espérances; à mesure qu'on s'é- loigne pour gagner le milieu, le terrain est amoihs garni; et quand on arrive à douze ou quinze perches de distance des bois tailis ;-à paine s’apperçoit-on, qu'il ait été: planté. L'exposition trop découverte est laseule cause de,cette différence, car le terrain ést absolu- ment le même au milieu de la pièce et le long du bois: ces terrains avoient en:même temps reçu les mêmes cultures; ils avoient été semés de la même façon et avec les mêmes graines. J’ai eu occasion de répéter cette ob- servation dans des sémis encore plus vastes, où j'ai reconnu que le milieu des pièces est toujours dégarni,'et que, quelque attention qu'on ait à resemer cette partie du terrain. tous les ans, elle ne peut se couvrir de bois, et reste en pure perte au propriétaire. Pour remédier à cetinconvénient, j'at fait daire deux fossés qui se coupent à angles droits dans le milieu de cespièces , et j'ai fait planter des épines ; du. peuplier, et d'autres bois blancs, tout le long de ces fossés : cet LA ’ Om s CONT. A LAURE LS: AGE en F RON Lu à n L 4 PARTIE EXPÉRIMENTALE. -25r abri, quoique léger, a suffr pour garantir les, jeunes plants voisins. du fossé; et, par cette petile dépense , j'ai prévenu la perte totale: de la plus grande partie deyma em L'autre pièce de quaraite arpens dont j ai parlé, étoit,avant la plantation, composée de: vingt arpens d’un terrain net et bien cultivé, et devingt autres arpens'en friche et recou-- verts d'un grand nombre de genièvres et d'é- pines : j'ai fait semer en mème temps la plus grande partie de ces deux terrains ; mais, comme on me pouvoit pas cultiver celui qui étoit couvert de genièvres ; je me suis con- tenté d'y faire jeter des slamds:à la main sous les genièvres, et j'ai fait mettre dans les. places découvertes le gland sows:le gazon au moyen d’un seul coup de pioche; on y avoit: même épargné la graine dans l'incertitude du succès , et je l’avois fait p:odiguer dans le. terrain cultivé. L'événement a été tout diffé- rent de ce que j'avois pensé ‘le terrain dé-: couvert et cultivé se couvrit à la première: aunée d’une grande quantité de jeunes chênes; : mais peu à peu cette quantité'a diminué , et: elle seroit aujourd’hui presque réduite à rien sans Les soins que je me suis donnés pour en #2 HISTOIRE! NATURELLE. conserver le reste. Le terrain au contraire qui étoit couvert-d'épines et de Ecran - est devenu en neuf ans un petit bois , où les jeunes chènes se sont élevés à cinq à six/pieds de hauteur. Cette observation prouvetencore mienx que la première combien l'abri est nécessaire à la conservation et à l’accroisse- ment des jeunes plants; car je n’ai conserve ceux qui étoient dans le terrain trop: décou— vert, qu’en plantant au printempsides bou: tures de peupliers et des épines, qui , après avoir pris racine, ont fait un peu de couvert, et ont défendu des ; jeunes, chênes trop foibles pour résister par:eux-mêmes à la rigueur des saisons. ÉLIRE TNT Hat 0 tte out - Pour convertir en Lois un chats ou tout: autre terrain: cultivé, le plus difficile est donc de faire du couvert. Si l’on abandonne un champ , il faut vingt ou trente ansà Ja, Nature pour yfaire croître des épines:et des bruyères; ici il faut une culture qui, dans un an ou deux, puisse mettre le * rie au même état où l se trouve nd uñe non- culture de vingt ans. | J'ai fait à ce sujet différentes tentatives ; j'ai fait semer de l’épine, du genièvre et'plu- PARTIE EXPÉRIMENTALE. 253 sieurs autres graines avec le gland : mais il faut trop de temps à ces graines pour lever et s'élever, la plupart demeurent en terre pen- dant deux ans ; et j'ai aussi inutilement essayé des graines qui me paroissoient plus hâtives , il n'y a que la graine de marseau qui réussisse et qui croisse assez prompte- ment sans culture : mais je n’ai rien trouvé deimieux pour faire du couvert, que de planter des boutures de peuplier ou quelques pieds de tremble en même temps qu’on sème le gland dans un terrain humide ; et, dans des terrains secs, des épines, du sureau, eË quelques pieds de samach de Virginie; ce dernier arbre sur-tout , qui est à peine connu _des gens qui ne sont pas botanistes, se mul- tiplie de rejetons avec une telle facilité, qu’il suffira d'en mettre un pied dans un jardin pour que tous les ans on puisse en porter un grand nombre dans ses plantations; et les racines de cet arbre s’étendent si loin , qu'il n’en faut qu'une douzaine de pieds par ar- pent pour avoir du couvert au bout de trois ou quatre ans.: on observera seulement de les faire couper jusqu’à terre à la seconde année , afin de faire pousser un plus graud Mer, gén, XVII 22 Rs d j À AA * ! rs + we SU #4} RTL TS ORNE A PE LA \ API ON MES We id RARE QUO ; 254 HISTOIRE NATURELLE. ! nombre de rejetons. Après le sumach, le tremble est le meilleur, car il pousse des rejetons à quarante ou cinquante pas; et j'ai garni plusieurs endroits de mes .planta- tions, en faisant seulement abattre quelques trembles qui s’y trouvoient par hasard. Il est vrai que cet arbre ne se transplante pas aisément , ce qui doit faire préférer le.su- mach : de tous les arbres que je connois 1 C@SE le seul qui, sans aucune culture , croisse: et multiplie au point de garnir un terrain -en aussi peu de temps ; ses racines courent presque à la surface de la terre; ainsi elles ne font aucun tort à celles des ; jeunes chênes, qui pivotent et s’enfoncent dans la profon- deur du sol. On ne doit pas craindre. que ce sumach ou les autres mauvaises espèces de bois, comme le tremble , le peuplier et le marseau , puissent nuire aux bonnes espèces, comime le chêne et le hêtre : ceux-ci ne sont foibles que dans leur jeunesse; et après avoir passé les premières années à l’ombreetà l’abr£ des autres arbres, bientôt ils s’éleveront au- "17 TIR PU, NA Lea dessus, et, devenant plus forts, ils étouffe- ront tout ce qui Les envirounera.. Je l'ai dit et je Le répète, on ne peut trop / 1 PARTIE EXPÉRIMENTALE.- 255 cultiver la terre lorsqu'elle nous rend tous les ans Le fruit de nos travaux ; mais lorsqu'il faut attendre vingt-cinq ou trente ans pour jouir , lorsqu'il faut faire une dépense con sidérable pour arriver à cette jouissance, on a raison d'examiner , on a peut-être raison de se dégoûter. Le fonds ne vaut que par le revenu : et quelle différence d’un revenu annuel à un revenu éloigné , même in= certain ! TE J'ai voulu m'assurer , par des expériences constantes, des avantages de la culture par rapport au bois; et pour arriver à des con- noissances précises, j'ai fait semer dans un jardin quelques glands de ceux que je semois en même temps et en quantilé dans mes bois; j'ai abandonné ceux-ci aux soins de la Nature , et j'ai cultivé ceux-là avec toutes les recherches de l’art. En cinq années les chênes de mon jardin avoient acquis une tige de dix pieds , et de deux à trois pouces de diamètre , et une tête assez formée pour pouvoir se mettre aisément à l'ombre des- sous ; quelques uns de ces arbres ont mème donné , dès la cinquième année , du fruit, qui, étant semé au pied de ses pères , a pro- 256 HISTOIRE NATURELLE. duit d’autres arbres redevables de leur nais- sance à la force. d’une culture assidue et étudiée. Les chênes de mes bois, semés en même temps, n’avoient, après cinq ans, que deux ou trois pieds de hauteur (je parle des plus vigoureux , car le plus grand nombre n’avoit pas un pied) : leur tige étoit à peu près grosse comme le doigt ; leur forme étoit celle d’un petit buisson ; leur mauvaise figure, loin d'annoncer de la postérité , laissoit douter s'ils auroient assez de force pour se conserver eux-mêmes. Encouragé par ces succès de culture, et ne pouvant souffrir les avortons de mes bois , lorsque je les comparois aux arbres de mon jardin, je cherchai à me tromper moi-même sur la dé- pense, et j'entrepris de faire dans mes bois un canton assez considérable , où j'éleverois les arbres avec les mèmes soins que dans mon jardin : il ne s’agissoit pas moins que de faire fouiller la terre à deux pieds et demi de profondeur, de la cultiver d'abord comme ou cultive un jardin, et, pour améliorations, de faire conduire dans ce terrain , qui me paroissoit un peu trop ferme et trop froid, plus de deux cents voitures de mauvais bois, é PARTIE EXPÉRIMENTALE. 257 de recoupe et de copeaux que je fis brüler sur. la place , et dont on méla les cendres avec la terre. Cette dépense alloit déja beaucoup au-delà du quadruple de la valeur du fonds ; mais je me satisfaisois , et je voulois avoir du bois en cinq ans. Mes espérances étoient fondées sur ma propre expérience, sur la nature d'un terrain choisi entre cent autres terrains, et plus encore sur la résolution de ne rien épargner pour réussir; car C'éloit une expérience : cependant elles ont élé trompées ; j'ai été contraint, dés la pre- mière année, de renoncer à mes idées , et à la troisième j'ai abandonné ce terrain avec un dégoût égal à l’'empressement que j'avois eu pour le cultiver. On n’en sera pas surpris lorsque je dirai qu'à la première année, outre les ennemis que j’eus à combattre, comme les mulots , les oiseaux, etc. la quantité des mauvaises herbes fut si grande, qu’on étoit obligé de sarcler continuelle- : ment , et qu’en le faisant à la main et avec la plus grande précaution, où ne pouvoit cependant s'empêcher de déranger les racines des petits arbres naissans ; ce qui leur cau- soit-un préjudice sensible. Je me souvins LA : Es, NE QU ANR EONER E PEN AT MANN Er / Û ; à LR A ON MENT M s à \ (NTI ! HU Ç EN LOL FM ds OX: 258 HISTOIRE NATURELLE: alors, mais trop tard, de la remarque des jardiniers, qui, la première année, n'’at- tendent rien d’un jardin neuf, et qui ont bien de la peine dans les trois premières an nées à:purger le terrain des mauvaises herbes dont il est rempli. Mais ce ne fut pas là le plus grand inconvénient : l’eau me manqua pendant l'été; et ne pouvant arroser mes jeunes plants, ils en souffrirent d'autant plus qu'ils y avoient été accoutumés au prin- temps : d'ailleurs le grand soin avec lequel on Ôtoit les mauvaises herbes par de petits labours réitérés , avoit reudu le terrain net , ‘etsur la fin de l'été la terre étoitdevenuebrû- lante et d’une sécheresse affreuse ; ce qui ne seroit point arrivé si on ne l’avoit pas culti- vée aussi souvent, et sion eût laissé les mau- vaises herbes qui avoient crû depuis le mois de juillet. Mais le tort irréparable fut celui que causa la gelée du printemps suivant : mon terrain , quoique bien situé, n'étoit pas assez éloigne des bois pour que la trans- piration des feuilles naissantes des arbres ne se répandit pas sur mes jeunes plants; cette humidité accompagnée d’un vent de nord les fit geler au 16 de mai, et, dès ce jour, _ / PARTIE EXPÉRIMENTALE. 259 je perdis presque toutes mes espérances. Ce- pendant je ne voulus point encore abandon- ner entièrement mon projet; je tâchai de remédier au mal causé par la gelée, en fai- ee couper toutes les parties mortes ou ma- lades. Cette opération fit un grand bien ; mes jeunes arbres reprirent de la vigueur ; et comme je n’avois qu'une certaine quan- tité d’eau à leur donner, je la réservai pour le besoin pressant; je diminuai aussi le nombre des labours, crainte de trop dessé- cher la terre, et je fus assez content du succès de ces petites attentions : la séve d'août fut'abondante , et mes jeunes plants pous- sèrent plus vigoureusement qu’au printemps. Mais le but principal étoit manqué; le srand et prompt accroissement que je desirois, se réduisoit au quart de ce que j'avois espéré, et de ce que j'avois vu dans mon jardin : cela ralentit sig mon ardeur , et je me contentai , après avoir fait un peu élaguer mes jeunes plants, de leur donner deux la- bours l’année suivante, et encore y eut-il un espace d'environ un quart d’arpent qui fut oublié, et qui ne reçut aucune culture. Cet oubli me valut une connoissance ; car ’ ju QE UD » mA AC PAT NN Fa 260 HISTOIRE NATURELLE. j'observai, avec quelque surprise, que les jeunes plants de ce canton étoient aussi vi-— goureux que ceux du canton cultivé; et cette remarque changea mes idées au sujet de la culture , et me fit abandonner ce ter- rain, qui m'avoit tant coûté. Avant que de le quitter , je dois avertir que ces cultures ont cependant fait avancer considérablement l'accroissement des jeunes arbres, et que je ne me suis trompé sur cela que du plus au moins. Mais la grande erreur de tout ceci est la dépense : le produit n’est point du tout proportionné; et plus on répand d’ar- gent dans un terrain qu’on veut convertir en bois, plus on se trompe: c’est un intérêk qui décroit à mesure qu’on fait de plus grands Fonds. Il faut donc tourner ses vues d'un autre côte , la dépense devenant trop forte; il faut renoncer à ces cultures extraordinaires , et même à ces cultures qu’on donne ordinaire- ment aux jeunes plants deux fois l’année eu serfouissant légèrement la terre à leur pied : outre des inconvéniens réels de cette der- nière espèce de culture, celui de la dé- pense est sufhsant pour qu’on s'en dégoûte PARTIE EXPÉRIMENTALE. 264. aisément , sur-tont si l’on peut y substituer quelque € chose de meilleur et qui coûte beau- “coup moins. Le moyen de suppléer aux labours et presque à toutes les autres espèces de cul- tures , c’est de couper les jeunes plants jus- qu'auprès de terre: ce moyen, tout simple qu’il paroît À est d’une utilité infinie; et lorsqu'il est mis en œuvre à propos , il accé- 1ère de plusieurs années le succès d'une plan- tation. Qu'on me permette, à ce sujet, un peu de détail , qui peut-être ne déplaira pas aux amateurs de l’agriculture. Tous les terrains peuvent se réduire à deux espèces : savoir, les terrains forts et les ter- rains légers : cette division, quelque générale qu’elle soit, suffit à mon dessein. Si l’on veut semer dans un terrain léger ,on peut le faire labourer ; cette opération fait d'autant plus d'effet et cause d'autant moins de dépense que le terrain est plus léger :il ne faut qu'un seul labour , et on sème le gland en suivant la charrue. Comme ces terrains sont ordi- nairement secs et brülans, il ne faut point arracher les mauvaises herbes que produit d'été suivant ; elles entretiennent une frai- 262 HISTOIRE NATURELLE. . cheur bienfaisante, et garantissent les petits chênes de l’ardeur du soleil ; ensuite venant à périr et à sécher pendant l'automne, elles servent de chaume et d’abri pendant l'hiver, et empêchent les racines de geler : il ne faut donc aucune espèce de culture dans ces ter- rains sablonneux. J'ai semé'en bois un graüd nombre d’arpens de cette nature de terrain, et j'ai réussi au-delà de mes espérances : les racines des jeunes arbres, trouvant une terre lésère et aisée à diviser , s’étendent et pro- fitent de tous les sucs qui leur sont offerts ; les pluies et les rosées pénètrent facilement jusqu'aux racines. Il ne faut qu’uñ peu de couvert et d’abri pour faire réussir un semis dans des terrains de cette espèce : mais il est bien plus difficile de faire croitre du bois dans des terrains forts, et il faut une pra- tique toute différente. Dans ces terrains , les premiers labours sont inutiles et souvent nuisibles ; la meilleure manière est de plan- ter les glands à la pioche sans aucune culture. précédente: mais il ne faut pas les abandon- ner comme les premiers, au point de les perdre de vue et de n’y plus penser ; il faut au contraire les visiter souvent ; il faut ("0 OT TIRE PEUT CET \ La à KL LS nd va SE % PARTIE EXPÉRIMENTALE. 263 observer la hauteur à laquelle ils se seront élevés la première année , observer ensuite s'ils ont poussé plus vigoureusement à la seconde année qu'à la première , et à la troi- sième qu'à la seconde. Tant que l’accroisse- ment va en augmentant, ou même tant qu’il se soutient sur le même pied, il ne faut pas y toucher : mais on s’appercevra ordinairement à la troisième année que l'accroissement va en diminuant; et si on attend la quatrième, la cinquième, la sixième, etc. , on reconuoi- | tra que l'accroissement de chaque année est toujours plus petit. Ainsi, dès qu'on s'apper- cevra que, sans qu'il y ait eu de gelées ou d’autres accidens, les jeunes arbres com mencent à croître de moins en moins, il faut les faire couper jusqu’à terre au mois de mars , et l’on gagnera un grand nombre d’années./ Le jeune arbre livré à lui-même dans un terrain:fort et serré, ne peut étendre ses racines ; la terre trop dure les fait refou- ler sur elles-mêmes ; ; les petits filets tendres : et herbacés , qui doivent nourrir l'arbre et former la nouvelle production de l’année, ne péuvent pénétrer la substance trop ferme de la terre : ainsi l'arbre jJanguit privé de ANNE ANT ITTEZ UV 4 FLE # 264 HISTOIRE NATUREDLE. nourriture, et la production annuelle dimis nue souvent jusqu’au point de ne donner que des feuilles et quelques boutons. Si vous cou- pez cet arbre , toute la force de la séve se porte aux racines, en développe tous les germes, et, agissant avec plus de puissance contre le terrain qui leur résiste, les j jeunes racines s'ouvrent des chemins nouveaux, et divisent par le surcroit de leur force cette terre qu’elles avoient jusqu'alors vainement attaquée ; ellés y trouvent abondamment des sucs nourriciers; et dès qu’elles sont établies dans ce nouveau pays, elles poussent avec vigueur au dehors la surabondance de leur nourriture, et produisent , dès la pre- mière année, un jet plus vigoureux et plus élevé que ne l’étoit l’ancienne tige de trois ans. J’ai si souvent réitéré cette expérience, que je dois la donner comme un fait sûr, et comme la pratique la plus utile que je con noisse dans la culture des boi Dans uu terrain qui n’est'que ferme sans : être trop dur , il suffira de receper une seule fois les jeunes plants pour les faire réussir. J'ai des cantons assez considérables d’une terre ferme et pétrissable, où les jeunes \ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 265 plants n’ont été coupés qu’une fois, où ils scroissent à merveille, et où j'aurai du bois taillis prêt à couper dans quelques années. Mais j'ai remarqué dans un autre endroit où IX terre est extrêmement forte et dure, qu'ayant fait couper à la seconde année mes jeunes plants, parce qu'ils étoient languis- sans, cela n’a pas empêché qu'au bout de quatre autres années on n’ait été obligé de les couper une seconde fois; et je vais rap- porter une autre expérience , qui fera voir la nécessité de couper deux fois dans de cer- tains cas. ; fe J'aifait planter, depuis dix ans, un nombre très-considérable d’arbres de plusieurs es- pèces ,«comme des ormes, des frênes, des charmes:, éte. La première année, tous ceux qui reprirent poussèrent assez vigoureuse- ment ; la seconde année, ils ont poussé plus foiblement; la troisième année, plus languis- samment : ceux qui me parurent les plus malades, étoient ceux qui étoient les plus gros et les plus âgés lorsque je les fis transplanter. Je voyois que la racine w’avoit pas la force de nourrir ces grandes tiges; cela me déler- mina à les faire couper. Je fis faire la même 29 | 2er Ÿ La À Ie “! SITE » ant ak Ë di d # | 1 u je Nb | h 266 “HISTOIRE NATURELLE. opération aux plus petits lesannées suivantes, parce que leur langueur devint telle, que, sans un prompt secours, elle ne laissoit plus rien à espérer. Cette première coupe renou— vela mes arbres et leur donna beaucoup de vigueur , sur-tout pendant les deux pre- mières années ; mais à la troisième, je m’ap- perçus d’un peu de diminution dans, l’ac- croissement : je. l’attribuai d’abord à la. température des saisons de cetteannée, qui n’avoit pas été aussi favorable que celle des années précédentes; mais je reconnus clai- rement, pendant l’année suivante, qui fut heureuse pour les plantes, que le mal n’avoit pas été causé par la seule intempérie des sai- sons; l’accroissement de mes arbres conti- nuoit à diminuer, et auroit toujours dimi- . nué, comme je m'en suis assuré en laissant sur pied quelques uns d’entre eux, si je ne les avois pas fait couper une seconde fois, Quatre ans se sont écoulés depuis cette se- conde coupe; sans qu'il y ait eu de diminu- tion dans l’accroissement, et ces arbres ; qui sont plantés dans un terrain qui est en friche depuis plus de vingtans, et qui n’ont jamais élé cultivés au’pied, ont autant de force et 4 / L PARTIE EXPÉRIMENTALE. 267 Ja feuille aussi verte que des arbres de pépi- nière; preuve évidente que la coupe, faite à propos, peut suppléer à toute autre culture. Les auteurs d’agriculture sont bien éloignés de penser comme nous sur ce sujet; 1ls ré- pètent tous, les uns après les autres, que pour avoir une futaie, pour avoir des arbres d’une belle venue, il faut bien se garder de - couper le sommet des jeunes plants, et qu’il faut conserver avec grand soin le z#7ontant, c’est-à-dire, le jet principal. Ce conseil n’est bon que dans de certains cas particuliers ; ‘mais il est généralement vrai, et je puis l’as- surer,; après un très-srand nombre d'expé- riences, que rien n’est plus efficace pour re- dresser les arbres, et pour leur donner une tige droite et nette, que la coupe faite au pied. J'ai même observé souvent que les futaies venués de graines ou de jeunes plants n’é- toient pas si belles n1 si droites que les futaies venues sur les jeunes souches. Ainsi on ne doit pas hésiter à mettre en pratique cette espèce de culture si facile et si peu coûteuse. Il n’est pas nécessaire d’avertir qu’elle est encore plus indispensable lorsque les jeunes plants ont été gelés : il n'y a’ pas d'autre EL eo TU 268 HISTOIRE NATURELLE. moyen pour les rétablir que de les receper. x On auroit dû, par exemple, receper tous les taillis de deux ou trois ans, qui ont été gelés au mois d’ octobre 1740. Jamais gelée d’au- tomne n’a fait autant de mal. La seule, façon . d'y remédier, c’est de couper : on sacrifetrois ans pour n’en pas perdre dix ou douze. À ces observations générales sur la culture du bois, qu’il me soit permis de joindre quelques remarques utiles , et qui doiyant même préceder toute culture. Le chène et le hêtre sont les seuls arbres ; à l'exception des pins et de quelques autres de moindre valeur, qu’on puisse semey avec succès dans des terrains incultes. Le hêtre peut être semé dans les terrains légers; la graine ne peut pas sortir dans une terre forte, parce qu'elle pousse au dehors son enveloppe au-dessus de la tige naissante : ainsi il lui faut une terre meuble et facile à diviser, sans quoi elle reste et pourrit. Le chène peut être seme daus presque tous les terrains; toutes les autres espèces d’arbres veulent être semées en pépinière, et ensuite transplantées à l’âge de deux ou trois ans. | Il faut éviter de mettre ensemble les arbres. 1 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 269 quine se conviennent pas : le chêne craint le voisinage des pins, des sapins, des hêtres et de tous les arbres qui poussent de grosses ra- cines dans la profondeur du sol. En général, pour tirer le plus grand avantage d'un ter- rain, il faut planter ensemble des arbres qui tirent la substance du fond en poussant leurs racines à une grande profondeur, et d’autres arbres qui puissent tirer leur nour- riture presque de la surface de la terre, comimne sont les trembles , les tilleuls, les marseaux et les autres dont les racines s’e- tendent et courent à quelques pouces seu- lement de profondeur, sans pénétrer plus avant. | + TU Lorsqu'on veut semer du bois, il faut at- tendre une année abondante-en glands, non seulement parce qu'ils sont meilleurs et “moins chers, mais encore parce qu'ils ne seront pas dévorés par les oiseaux , les mulots et lessangliers, qui ; trouvant abondaminent du gland dans les forêts, ne viendront pas attaquer votre semis; Ce qui ne manque ja- mais d'arriver dans des années de disette. On n’imagineroit pas jusqu'à quel point les seuls mulots peuvent détruire un semis. Jen avois 25 11) po Li à wo HISTOIRE NATURELLE … fait un, il y a deux ans, de quinze à seize arpens; j'avois semé au mois de novembre: au bout de quelques jours, je m'apperçus que les mulots emportoient tous les glands. Ils habitent seuls, ou deux à deux, et quelque- fois trois à quatre, dans un même trou. Je fis découvrir quelques uns de ces trous ; et je fus épouvanté de voir dans chacun un demi- boisseau et souvent un boisseau de glands, que ces petits animaux avoient-ramassés. Je donnai ordre sur-le-champ qu’on dressât dans ce canton un grand nombre de piéges, où pour touteamorce on mit une noix grillée ; en’ moins de trois semaines de temps on m'apporta près de treize cents mulots. Je ne rapporte ce fait que pour faire voircombien -ils sont nuisibles, et par leur nombre, et pat leur diligence à serrer autant de glands qu'il peut eu entrer dans leurs trous. «. A sims Ed. + Ld PARTIE EXPÉRIMENTALE. 27# f A ROT I COLE WT Addition aux observations précédentes, . Dans un grand terrain très-ingrat et mal situé, où rien ne vouloit croître, où le chêne, le hêtre et les autres arbres fores- tiers qué j'avois semés n'avoient pu réûssir, où tous ceux que j'avois plantés ne pouvoient s'élever , parce qu’ils étoient tous les ans sai- sis par les gelées, je fis planter, en 1754, des arbres toujours verds; savoir, une centaine de petits pins*, autant d’épicéas et de sapins que j'avois élevés dans des caisses pendant trois ans. La plupart des sapins périrent dès la première aunée, ‘et les épicéas dans les années suivantes ; mais les pins ont résisté, ei se sont emparés d'eux-mêmes d’un assez srand terrain. Dans les quatre ou cinq * Pinus silvestris Genevensis. 272 HISTOIRE sir premières années, leur accroissement étoit : à peine sensible. On ne les a ni cultivés ni recepés ; entièrement abandonnés aux soins de la Nature, ils ont commencé, au bout de dix ans, à se montrer en forme de petits buis- sons. Dix ans après, ces buissons, devenus bien plus gros, rapportoient des cônes, dont le vent dispersoit les graines au loin. Dix ans après, c'est-à-dire, au bout de trente ans, ces buissons avoient pris de la tige; et aujourd’hui, en 1774, c'est-à-dire, au bout de quarante ans, ces pins forment d'assez grands arbres, dont les graines ont peuplé le terrain à plus de cent pas de distance de chaque arbre. Comme ces petits pins venus. de graine étoient eu trop grand nombre, sur. tout dans le voisinage de chaque arbre, j'en ai fait enlever un très-grand nombre pour les transplanter plus loin, de manière qu'au- jourd’hui ce terrain, qui contient près de quarante arpens, est entièrement couvert de pins, et forme un pelit bois toujours verd daus un grand espace qui de tout temps avoit éte stérile. Lorsqu'on aura donc des terres ingrates où Le bois refuse de croître, et des parties-de Cdt Le PARTIE EXPÉRIMENTALE: 273 “errain situées dans de petits vallons en mon- tagne , où la gelée supprime les rejetons des chènes et des autres arbres quiquittent leurs feuilles , la manière la plus sûre et la moins coûteuse de peupler ces terrains est d'y plan- ter de jeunes pins à vingt ou vingt-cinq pas les uns des autres. Au bout de trente ans, tout l’espace sera couvert de pins, et, viugt ans ‘après, on jouira du produit de la coupe de ce bois, dont la plantation n'aura presque rien coûté; et quoique la jouissance decette espèce de culture soit fort éloignée, la très- petite dépense qu’elle suppose, et la satisfac- tion de rendre vivantes des terresabsolument mortes, sont des motifs plus que suffisans pour déterminer tout père de famille et tout bon citoyen à cette pratique utile pour la postérité : l'intérêt de l'État , et, à plus forte raison, celui de chaque particulier est qu'il ne reste aucune terre inculte : celles-ci, qui de toutes sont les plus stériles, et paroissent se refuser à toute culture, deviendrontnéan-— moins aussi utiles que les autres; car un bois de pins peut rapporter autant et peut-être plus qu’un bois ordinaire , et, en l’exploi- fant convenablement, devenir un fondsnon LA _ #74 HISTOIRE NATURELLE. seulement aussi fructueux, mais aussi du+ rable qu'aucun autre fonds debois. La meilleure manière d'exploiter les: taillis ordinaires, est de faire coupe nette, en lais- sant le moins de baliveaux qu'il est possible, Il est très-certain que ces baliveaux font plus de tort à l'accroissement des taillis , plus de perte au propriétaire, qu'ils ne donnent de bénéfice , et par conséquent il y auroit de l'avantage à les tous supprimer; mais, comme l'ordonnance prescrit d’en laisser au moins seize par arpent, les gens les plus soigneux. deleurs bois, ne pouvant se dispenserde cette | servitude mal entendue, ontau moins grande attention à n’en pas laisser davantage, et . font abattre à chaque coupe subséquente ces baliveaux réservés. Dans un bois de pins, l'exploitation doit se faire tout autrement... Comme cette espèce d'arbre ne repousse pas sur souche ni des rejetons au loin, et qu’il ne se propage et multiplie que par les graines qu'il produit tous les ans, qui tombent au pied où sont transportées par le vent aux environs de chaque arbre , ce seroïit détruire ce bois que d’en faire coupe nette ; il faut y laisser cinquante ou soixante arbres par PARTIE EXPÉRIMENTALE: 275 arpent, ou, pour mieux faire encore, ne conper que la moitié ou le tiers des arbres alternativement, c’est-à-dire, éclaircir seu-— lement le bois d'un tiers ou de moitié, ayant soin de laisser les arbres qui portent le plus de graines. Tous les dix ans , on fera, pour ainsi dire, une demi-coupe , ou même on pourra tous les ans prendre dans ce taillis le bois dont on aura besoin. Cette dernière maniere, par laquelle on jouitannuellement d’une partie du produit de son fonds, est de toutes la plus avantageuse. | L'épreuve que je viens de rapporter a été faite en Bourgogne, dans ma terre de Buffon, au-dessus des collines les plus froides et les plus stériles; la graine m'étoit venue des montagnes voisines de Genève. On ne con- noissoit point cétte espèce d'arbre en Bour- gogne, qui y est maintenant naturalisé, et assez multiplié pour en faire à l’avenir de très-grands cantons de bois dans toutes les terres où les autres arbres ne peuvent réussir. Cette espèce de pin pourra croitre et se mul- tiplier avec le même succès dans toutes nos provinces, à l'exception peut-être des plus. méridionales, où l’ontrouveuneautre espèce \ ’ > , d ( ... LD ENMINNANEE 236 HISTOIRE NATURELLE. de pin, dont les cônes sont plus alongés , et qu’on cofnoit souslenom de pin maritime ,ou. pin de Bordeaux, comme l’on connoit celui SEEN TCCPRNET PA DRE OANI LOC AE TN PAPER { A: We Us (Re { dont j'ai parlé, sous Le nom de pin de Genève. Je fis venir et semer, il y a trente-deux ans, | une assez grande quantilé de ces pins de Bordeaux; ils n’ont pas, à beaucoup près ; aussi bien réussi que ceux de Genève : Ce pendant il y en a quelques uns qui sont même d’une très-belle venueparmilesautres, et qui produisent des graines depuis plusieurs années ; mais on ne s'apperçoit pas que ces graines réussissent sans culture, et peuplent les environs de ces arbres , comme les graines du pin de Genève. À l'égard des sapins et des épicéas, dont j'ai voulu faire des bois par cetté même mé- thode si facile et si peu dispendieuse , j’a- vouerai qu'ayant fait souvent jeter des graines de ces arbres en très-grande quantité dans ces mèmes terres où le pin a si bien réussi, je. n’en ai jamais vu le produit, ni même eu Ja satisfaction d’en voir germer quelques unes autour des arbres que j’avois fait plan— ter, quoiqu'ils portent des cônes depuis plu- sieurs années. ÎL faut donc un autre procéde, / 4 pts, ne 1 \ \ A: HN £s % { PARTIE-EXPÉRIMENTALE. 277 ou du moins ajouter! quelque chose à celui que je viens de donner, si l’on veut faire des bois de ces deux dernières'espèces d'arbres toujours verds. . ji Dans les bois ordinaires, c’est-à-dire, dans ceux qui sont plantés de chênes, de hêtres, de charmes , de frênes, et d’autres arbres dont l’accroissement est plus prompt, tels que les trembles, les bouleaux, les marseaux, les coudriers, etc., il y a du bénéfice à faire couper au bout de douze à quinze ans ces dernières espèces d'arbres , dont on peut faire des cercles ou d’autres menus ouvrages ; on coupe en mème temps les épines et autres mauvais bois. Cette opé- ration ne fait qu'éclaircir le taillis; et bien loin de-lui porter préjudice , elle en accélère l'accroissement : le chêne, le hêtre et les autres bons arbres n’en croissent que plus vite; en sorte qu'il y a le double avantage de tirer d'avance une partie de son revenu par la vente de ces bois blancs, propres à faire des cercles, et de trouver ensuile un 24 278 HISTOIRE NATURELLE: 4 taillis tout composé de bois de bonne essence _et d’un plus gros volume. Mais ce qui peut dégoûter de cette pratique utile, c’est qu'il | faudroit, pour ainsi dire, la faire par ses mains ; car en vendant le cerclage de ces bois aux bücherons où aux petits ouvriers. qui emploient cette denrée, on risque tou- jours la dégradation du taillis : 1l est presque impossible de les empêcher de couper furti- vement des chênes ou d’autres bons arbres ; et dés-lors le tort qu’ils vous font, fait une grande déduction sur le bénéfice, et quelque- fois l’excède. IL Dans les mauvais terrains, qui n’ont que six pouces ou tout au plus un pied de pro- fondeur , et dont la terre est graveleuse et maigre , on doit faire couper les taillis à seize.ou dix-huit ans; dans les terrains mé- diocres, à vingt-trois ou vingt-quatre ans; etdans les meilleursfonds, il faut les attendre jusqu’à trente : une expérience de quarante aus m'a démontre que ce sont à très-peu près les termes du plus grand profit. Dans mes f \ ES “PARTIE EXPÉRIMENTALE. 279 terres et dans toutes celles qui lesenvironnent, même à plusieurs lieues de distance , on choi- sit tout le gros bois , depuis sept pouces de tour et au-dessus, pour le faire flotter et l’en- voyer à Paris , et tout le menu bois est con- somme par le chauffage du peuple ou par les forges ; mais dans d’autres cantons de la province où il n’y a point de forges, et où les villages , éloignés les uns des autres, ne font que peu de consommation, toutlemenu bois tomberoit en pure perte si l’on n’avoit trouvé le moyen d'y remédier en changeant. les procédés de l'exploitation. On coupe ces taillis à peu près comme j'ai conseillé de cou- per les bois de pins, avec cette différence qu’au lieu de laisser les grands arbres, on ne laisse que les petits. Cette manière d’exploi- ter les bois en les /ardinant est en usage dans plusieurs endroits ; on abat tous les plus beaux brins, et on laisse subsister les autres, qui, dix ans après, sont abattus à Jeur tour , et ainsi de dix ans en dix ans, ou de douze en douze ans, on a plus de moitié coupe, c'est-à-dire, plus de moitié de pro- duit. Mais cette manière d’exploitation, quoiqu'utile, ne laisse pas d’être sujette à | 280 HISTOIRE NATURELLE: à des inconvéniens ; on ne peut abattré les plus. grands arbres sans faire souffrir les petits: d’ailleurs le bûcheron étant presque tou- jours mal à l’aise, ne peut couper la plupart 4 de ces arbres qu’à un demi - pied et souvent plus d’un pied au-dessus de terre, ce qui fait un grand tort aux revenues ; ces souches élevées ne poussent jamais des rejetons aussi | vigoureux ni en aussi grand nombre que les souches coupées à fleur de terre, et l’une des plus utiles attentions qu'on doive donner à l'exploitation des taillis , est de faire couper tous les arbres le plus près de terrequilest , possible. I V. LEs bois occupent presque par- tout le haut des côteaux et les sommets des collines et des montagnes d'une médiocre hauteur. Dans ces espèces de plaines au-dessus des montagnes, 1l se trouve des terrains enfon- cés, des espèces de vallons secs et froids, qu’on appelle des combes. Quoique le terrain de ces combes ait ordinairement plus de pro- fondeur et soit d'une meilleure qualité que 2 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 26% celui des parties élevées qui les environnent, le bois néanmoins n’y est jamais aussi beau ; ilne pousse qu’un mois plus tard, et souvent il y a de la différence de plus de moitié dans l'accroissement total. À quarante ans, le bois du fond de la combe ne vaut pas plus que celui des côteaux qui l’environnent vaut à vingt ans. Cette prodigieuse différence est occasionnée par la gelée, qui, tous les ans et presque en toute saison, se fait sentir dans ces combhes , et, supprimant en partie les jeunes rejetons , rend les arbres raffaus, ra- bougris et galeux. J'ai remarqué dans plu- sieurs coupes où l'on avoit laisse quelques bouquets de bois , que tout ce qui étoit au— près de ces bouquets et situé à labri du vent de nord, étoit entièrement gâté par J'effet de la gelée, tandis que tous les endroits exposés au vent du nord n’étoient point du tout gelés. Cette observation me fournit la véritable raison pourquoi les combes et les lieux bas dans les bois sont si sujets à la gelée, et si tardifs à l’égard des terrains plusélevés, où les bois deviennent irês-beaux, quoique souvent la terre y soit moins bonne que dans les combes ; c'est parce que l'humidité et Les. 24 L HA UN. OR AREA L77 lies 7 4 7 L 0? pr 4 te) MU NN: ARE or YEN À 4 À RAS 2 à UN MON PNE } W re ra él Qu) Var L'N V u \ ) 14 OU * s LA À 282 HISTOIRE NATURELLE. brouillards qui s'élèvent de la terre, séjour: nent dans les combes, s’y condensent, et, par ce froid humide , occasionnent la gelée, tan- dis que , sur les lieux plus élevés, les vents divisent et chassent les vapeurs nuisibles, et les empêchent de tomber sur les arbres, ou du moins de s’y attacher en aussi grande quantité et en aussi grosses gouttes. Il y a de ces lieux basoù il gèle tous les mois de l’au2” née; aussi le bois n’y vaut jamais rien. J'ai quelquefois parcouru en été, la nuit, à la chasse, ces différens pays de bois , et je me souviens parfaitement que, sur les lieux éle- vés, j'avois chaud, mais qu'aussitôt que je descendois dans ces combes, un froid vif et inquiétant , quoique sans vent, me Saisis- soit, de sorte que souvent à dix ‘pas de dis- tance on auroit cru changer de climat : des charbonuiers qui marchoient nuds-pieds , trouvoient la terre chaudesur ceséminences, et d’une froidure ‘insupportable dans ces petits vallons. Lorsque ces combes se trouvent situées de manière à être enfilées par les vents froids et humides du nord-ouest, la gelée s’y fait sentir, même aux mois de juillet et d'août : le bois ne peut y croître; lesgenièvres PARTIE EXPÉRIMENTALE. 283 même ont bien de la peine à s’y maintenir ; et ces combes n'offrent, au lieu d’un beau taillis semblable à ceux qui les environnent, qu'un espace stérile, qu’on appelle zre chaume, et qui diffère d’une friche en ce qu'on peut rendre celle-ci fertile par la ch ture , au lieu qu'on ne sait comment cu ver ou peupler ces chaumes qui sont au mi- lieu des bois; les grains qu’on pourroit y semer, sont toujours détruits par les grands froids de l'hiver ou par les gelées du prin- temps : il n'y a guère que le blé noir ou sar- rasin qui puisse y croître, et encore le pro- duit ne vaut pas la dépense de Ja culture ; ces terrains restent donc déserts , abandonnés A et sont en pure perte. J'ai une de ces combes au milieu de mes bois, qui seule contient cent cinquante arpens, dont le produit est presque nul. Le succès de ma plantation de pins, qui n’est qu’à une lieue de cette srande combe, m'a déterminé à y planter de jeunes arbres de cette espèce. Je n'ai commencé que depuis quelques années; je vois déja, par le progrès de ces jeunes plants, que quelque jour cet espace stérile de temps immémo- rial sera un bois de pins tout aussi fourni que $e premier que j'ai décrit. PI Fe Va VER ai “4 * ‘ ‘ ‘ “284 HISTOIRE NATURELLE. f = FE \ 0 i i | J'Az fait écorcer sur pied des pins, des sapins , et d’autres espèces d'arbres toujours verds; j'ai reconnu que cesarbres, dépouillés Mur écorce, vivent plus long-temps que les chènes auxquels on fait la même opéra- tion, et leur bois acquiert de même plus de dureté, plus de force et plus de solidité. IE seroit donc très-utile de faire écorcer sur pied les sapins qu’on destine aux mâtures des vaisseaux, en les laissant deux, trois et même quatre ans sécher ainsi sur pied; ils : acquerront une force et une durée bien plus grande que dans leur état naturel. Il en est de même de toutes les grosses pièces de chêne que l'on emploie dans la construction des vaisseaux ; elles seroient plus résistantes , plus solides et plus durables, si on les tiroit d'arbres écorcés et séchés sur pied avant de les abattre. À l'égard des pièces courbes, il vaut mieux prendre des arbres de brin de la grosseur né- cessaire pour faire une seule pièce courbe, que de seier ces courbes dans de plns grosses LATE ). PARTIE EXPÉRIMENTALE. 285. pièces : celles-ci sont toujours tranchées et foibles, au lieu que les pièces de brin, étant - courbées dans du sable chaud, conservent presque toute la force de leurs fibres Iongi- tudinales. J'ai reconnu, en faisant rompre des courbes de ces deux espèces, qu'il y avoit plus d’un tiers de différence dans leur force; que les courbes tranchées cassoient subite- ment, et que celles qui avoient été courbées par la chaleur graduée et par une charge constamment appliquée , se rétablissoient presque de niveau avant que d’eclater et se rompre. | \ NA. OX est dans l’usage de marquer avec un gros marteau , portant empreinte des armes du roi ou des seigneurs particuliers, tous les arbres que l’on veut réserver dans les bois qu'on veut couper. Cette pratique est mau- vaise; on enlève l'écorce et une partie de l'aubier , avant de donner le coup de mar- teau. La blessure ne se cicatrise jamais par- faitement, et souvent elle produit un abreu- voir au pied de l'arbre. Plus la tige en est & | A x LA RNTIOe T P 286 HISTOIRE NATURELLE. menue, plus le mal est grand. On retrouve | _ dans l’intérieur d’un arbre de cent ans, les ‘coups de marteau qu’on lui aura donnés à vingt-cinq, cinquante et soixante - quinze ans, et tous ces endroits sont remplis de pourriture, et forment souvent des abreu= voirs ou des fusées en bas ou en haut qui gâtent le pied de l'arbre. Il vaudroit mieux marquer avec une couleur à l’huileles arbres qu'on voudroit réserver; la dépense seroit à peu près la même, et la couleur ne feroit aucun tort-à l'arbre, et dureroit ad moins pendant tout le temps de l’exploitation. VIT. ON trouve communément dans les bois deux espèces de chênes, ou plutôt deux va- riétés remarquables et différentes l’une de l’autre. à plusieurs égards. La première est le chêne à gros gland, qui n’est qu’un à un, ou tout au plus deux à deux , sur la branche: l'écorce de ces chênes est blanche et lisse; la feuille grande et large; le bois blanc, liant, très-ferme , et néanmoins très-aisé à fendre. La seconde espèce porte ses glands en bou= PARTIE EXPÉRIMENTALE. 287 quets ou trochets comme les noisettes, de trois, quatre ou cinq ensemble ; l'écorce en est plus brune et toujours gercée , le bois aussi plus coloré, la feuille plus petite, et l'accroissement plus lent. J’ai observé que dans tous les terrains peu profonds; dans toutes les terres maigres, on ne trouve que des chènes à petits glands en trochets, et qu'au contraire on ne voit guère que des chènes à gros glands dans les très-bons ter- rains. Je ne suis pas assure que cette variété soit constante et se propage par la graine ; mais j'ai reconnu , après avoir semé, plu- sieurs années , une très-graude quantité de ces'slands , tantôt indistinctement et mélés, et d’autres fois séparés , qu’il ne m'est venu que des chênes à petits glands dans les mau- vais terrains , et qu'il n'y a que dans quel- ques endroits de mes meilleures terres où i£ se trouve des chênes à gros glands. Le bois de ces chênes ressemble si fort à celui du châtaignier par la texture et par la couleur, qu’on les a pris l’un pour l’autre : c’est sur cette ressemblance, qui n'a pas été indiquée, qu'est fondée l'opinion que les charpentes de nos anciennes églises sont de bois de châtai- 288 HISTOIRE NATURELLE. “guier. J'ai eu occasion d’en voir quelques unes , et j'ai reconnu que ces bois prétendus de châtaignier étoient du chène blanc à gros lélands, dont je viens de parler , qui étoit autrefois bien plus commun qu'il ne l'est aujourd’hui, par une raison bien simple : c’est qu'autrefois , avant que la France ne fût aussi peuplée , il existoit une quantité bien plus grande dé boïs en bon terrain ; et par conséquent une bien plus grande quan- tite de ces chênes dont le bois ressemble à celui du châtaignier. Le châtaiguier affecte des terrains particu- liers; il ne croît point ou vient mal dans toutes les terres dont le fond est de matière calcaire : il y a donc de très-srands cantons et des provinces entières où l’on ne voit point de châtaiguiers dans les bois , et néanmoins on nous montre dans ces mêmes cantons des charpentes anciennes qu'on prétend être de chätaignier , et qui sont de l’espèce de chêne dont je viens de parler. Ayant compare le bois de ces chènes à gros glands au bois des chênes à petits glands dans un grand nombre d'arbres du même âge, et depuis vingt-cinq ans jusqu'à cent ! 1 tdi deb) # : Tai ‘PARTIE EXPÉRIMENTALE. 289 ans et au-dessus, j'ai reconnu que le chêne à gros glands a constamment plus de cœur. et moins d'aubier que le chêne à petits * glands dans la proportion du double au simple : si le premier n’a qu’un pouce d’au- bier sur huit pouces de cœur, le second n'aura que sept pouces dé cœur sur deux pouces d’aubier; et ainsi de toutes les autres mesures : d'où il résulte une perte dudouble lorsqu'on équarrit ces bois; car on ne peut tirer qu’une pièce de sept pouces d’un chêne à petits glands , tandis qu'on tire une pièce de huit pouces d’un chêne à gros glands de mème âge et de même grosseur. On ne peut donc recommander assez la conservation et le repeuplement de cette belle espèce de chêne, qui à sur l’espèce commune le plus ‘grand avantage d’un accroissement plus prompt, et dont le bois est non seulement plus plein, plus fort, mais encore plus élastique. Le trou fait par une balle de mous- quet dans une planche de cechènese rétrécit, par le ressort du bois, de plus d’un tiers de. plus que dans le chène commun, et c est une raison de plus de préférer ce bon chêne pour Ja construction des vaisseaux ; le boulet de Met. gén XVII. 25 f # « D TE | À, F4 AN" JR WAR LA PAL PS ET ‘ SUP NT SR MNTUNEROUIE ml M AA 1" ya o / | Red / LU TM « CRE a ‘ (4 290 HISTOIRE NAT URELLE. +4 canon ne le feroit point éclater, et les trous il seroient plus aisés à boucher. En général , plus les chènes croissent vite, plusils forment de cœur, et meilleurs ils sont pour le service, à grosseur égale; leur tissu est plus ferme que celui des chênes qui croissent lentement, parce qu'il y a moins de cloisons, moins de séparation entre les couches ligneuses dans le même espace. Ne TREIZIÈME MÉMOIRE. -Æecherches de la cause de l’excentricité des couches, ligneuses qu’on apperçoit quand on coupe horizontalement le tronc d’un arbre ; de l'inégalité d'épaisseur, et du différent nombre de ces couches, tant dans le bois formé que dans l’aubier.- Par MM. DuuAaAmEeLzet DE BUFFON. O N ne peut travailler plus utilement pour la physique, qu’en constatant des faits dou- teux, eten établissant la vraie origine de ceux qu'on attribuoit sans fondement à des causes imaginaires. ou insuffisantes. C’est dans cette vue que nous avons entrepris , M. de Buffon et moi, plusieurs recherches d'agriculture; que nousavons, par exemple, fait des observations et des expériences sur l'accroissement et l'entretien des arbres, sur leurs maladies et sur leurs défauts, sur les | \ à a+". ll ÿ+ [' Ê 292 HISTOIRE NATURELLE. doute plantations et sur le rétablissement sa forêts, etc. Nous com ençons à rendre compte à l'académie du succès de ce travail, par l'examen d’un fait dont presque tous les auteurs d'agriculture font mention, mais qui n’a été ( nous n’hésitons pas de le dire) qu’entrevu, et qu’on a pour cette raison attribue à des causes qui sont bien éloignées de la vérité. V Tout le monde sait que quand on coupe horizontalement le tronc d’un chêne, par exemple, on apperçoit dans le cœur et dans l’aubier des cercles ligneux qui l’enveloppent; ces cercles sont séparés les uns des autres par d’autres cercles lisneux d’une substance plus rare , et ce soni ces derniers qui distinguent et séparent la crue de chaque année : il est naturel de penser que, sans des accidens par- ticuliers , 1ls devroient être tous à peu près d’égale épaisseur, et égalentent éloignés du centre. | IL en est cependant tout autrement , et la plupart des auteurs d'agriculture, qui ont reconnu cette différence , l'ont attribuée à : différentes causes, et en ont tiré diverses conséquences. Les uns, par exemple, veulent PARTIE EXPÉRIMENTALE. 293 quon observe avec soin la situation des jeunes arbres dans les pépinières, pour les orienter dans la place qu’on leur destine; ce que les jardiniers appellent planter à la bous- sole : ils soutiennent que le côté de l'arbre qui étoit oppose au soleil dans la ‘pépinière, souffre immanquablement de son action lorsqu'il y est exposé. D'autres veulent que les cercles Pa hcil de tous les arbres soient excentriques , et tou- jours plus éloignés du centre ou de l’axe du tronc de l'arbre du côté du midi que du côté du nord; ce qu’ils proposent aux voyageurs _ qui seroient égarés dans les forêts, comme un moyen assuré de s'orienter et de retrou- ver leur route. | Nous avons cru devoir nous assurer par nous-mêmes de ces deux faits; et d’abord, pour reconnoître si les arbres transplantés souffrent lorsqu'ils se trouvent à une situa- tion contraire à celle qu'ils avoient dans la pépinière, nous avons choisi cinquante ormes qui avoient été élevés dans une vigne, etnon pas dans une pépinière touffue, afin d’avoir des sujets dont l'exposition füt bien décidée. J'ai fait, à une mémélauteur, élever tous ces 294 HISTOIRE NATURELLE: arbres, dont le tronc avoit douze à treize pouces de circonférence ; et avant de les ar || racher, j'ai marqué d’une petite entaille le côté exposé. au midi; ensuite je les ai fait planter sur deux lignes , observant de les, mettre alternativement , un dans la situa- tion où il avoit été élevé, et l’autre dans une situation contraire, en sorte que j'ai eu vingt- cinq arbres orientés comme dans la vigue, ‘à comparer avec vingt-cinq autres qui. étoient dans une situation tout opposée. En | les plantant ainsi alternativement, j'ai évite- tous les soupçons qui auroient pu naître des veines de terre, dont la qualité change quel- quefois tout d’un coup. Mes arbres sont prêts à faire leur troisième pousse , je les ai bien examinés, il ne me paroît pas qu'il y ait aucune différence entre les uns et les autres. IL est probable qu'il n'y en aura pas dans la suite ; ; car si le changement d'exposition doit produire er LE chose , ce ne pe être que dans les premières années, el jusqu’à ce que les arbres se soient accoutumés aux im-— pressions du soleil et du vent, qu’on prétend être capables de produire un effet sensible sur ces jeunes sujets. 1 ) GPL MAT PARTIE EXPÉRIMENTALE. 295 Nous ne déciderons cepen dant pas que cette attention est superflue dans tous les cas ; car nous voyons , dans les terres lépères, les pêchers et les abricotiers de haute tige, plane. tés en espalier au midi, se dessécher entière ment du côté du soleil, et ne subsister que par le côté du mur. Il semble donc que dans les pays chauds, sur le penchant des mon- tagnes au midi , le soleil peut produire un effet sensible sur la partie de l'écorce qui lux est exposée ; mais mon expérience décide incontestablement que, dans notre climat et dans Les situations suites , il est inutile d'orienter les arbres qu’on transplante : c’est : toujours une attention de moins, quine lais- seroit pas que de gêner lorsqu'on plante des “arbres en alignement ; car pour peu que le tronc des arbres soit un peu courbe, ils font une grande difformité quand on n’est pas le maître de mettre la courbure dans le sens de l'alignement. À l'égard de l'excentricité des ‘couches li .sneuses vers le midi, nous avons rémarqué que les gens les plus au fait de l'exploitation des forêts ne sont point d'accord sur ce point. Tous, à la vérité, conviennent de à HISTOIRE NATURELLE. : l'excentricite des couches anminetlén à : maisles uns prétendent que ces couches sont plus épaisses du côté du nord, parce que, disent- ils, le soleil dessèche le côté du midi; etils appuient leur sentiment sur le prompt ac- croissement des arbres des pays septentrio- naux, qui viennent plus vite et grossissent davantage que ceux des pays meridionaux. D'autres au contraire, et c'est le plus grand nombre , prétendent avoir observé que les couches sont plus épaisses du côté du midi; et pour ajouter à leur observation un raisonnement physique , ils disent que le soleil étant le principal moteur de la séve, il doit la déterminer à passer avec plus d’a- bondance dans la partie où ila le plus d’ac- tion , pendant que les pluies ‘qui viennent souvent du midi, humectent l'écorce, la L2 *. La ° nourrissent , ou du moins préviennent le desséchement que la chaleur du soleil age pu causer. j. . Voilà donc des no de doute entre éeux- là même qui sont. dans l'usage actuel /d’ex- ploiter des bois, et on ne doit pas s'en étonner ; car les différentes circonstances produisent des variétés considérables dans l’accroisse- \ CA PARTIE EXPÉRIMENTALE: 297 ment des couches ligneuses. Nous allons le prouver par plusieurs expériences. Mais, avant que de les rapporter, il est bon d’avertir que nous distinguons ici les chênes, d’abord en deux espèces; savoir, ceux qui portent des glands à longs pédicules, et ceux dont les glands sont presque collés, à la branche. Chacune de ces espèces en donne trois autres ; savoir , les chênes qui portent de très-gros glands, ceux dont les slands sont de médiocre grosseur , et enfin ceux dont les glands sont très-petits. Cette division, qui seroit grossière et imparfaite pour un botaniste , sufhit aux forestiers ; et nous l’avons adoptée, parce que nous avons cru appercevoir quelque dif- férence dans la qualité du bois de ces espèces, et que d’ailleurs il se trouve dans nos forêts un très-grand nombre d’espèces différentes de chênes dont le bois est absolument sem-— blable , auxquelles par conséquent nous n'a» vons pas eu d'égard. EXPÉRIENCE PREMIÈRE. LE 27 mars 1734, pour nous assurer si les arbres croissent du côté du midi plus que du FONTTNENE ENNEMI ATTE | FE a SE ! 98 HISTOIRE NATURELLE. côté du nord , M. de Buffon a fait couper un chêne à gros gland, âgé d'environ soixante ans, à un bon pied et demi au-dessus de la surface du terrain , c’est-à-dire, dans l’en- : droit où la tige commence à se bienarrondir, car les racines causent toujours un elargisse- _ ment au pied des arbres ; celui-ci étoit situé dans une lisière découverte à l’orient , mais un peu couverte au nord d’un côté, et de l’autre au midi. Il a fait faire la coupe le plus horizontalement qu’il a été possible; et ayant mis la pointe d’un compas dans le centre des cercles annuels, il a reconnu qu'il coïncidoit avec celui de la circonférence de : l'arbre, et qu'ainsi tous les côtés avoient également grossi: mais , ayant fait couper ce même arbre à vingt pieds plus haut , le côté du nord étoit plus épais que celui du midi; il a remarqué qu'il y avoit une grosse branche du côté du nord , un peu au-dessous - des vingt pieds. 1 k 2e EXPÉRIENCE II. LE même jour, il a fait couper de lafmême façon , à un pied et demi au-dessus de terre; PARTIE EXPÉRIMENTALE. 299 un chêne à petits glands , âgé d'environ quatre-vingts ans, situé comme le précédent ; il avoit plus grossi du côté du midi que du côté du nord. Il a observé qu'il y avoit au dedans de l’arbre un nœud fort serré du côté du nord , qui venoit des racines. MU EXPÉRIENCE III. LE même jour, il a fait couper de même un chêne à glands de médiocre grosseur, âgé de soixanteans, dans une lisière exposée au midi ; le côté du midi étoit plus fort que celui du nord , mais il l’étoit beaucoup moins que celui du levant. Il a fait fouiller au pied de l'arbre, et il a vu que la plus grosse racine étoit du côté du levant; il a ensuite fait cou- per cet arbre à deux pieds plus haut, c’est-à- dire, à près de quatre pieds de terre en tout, et à cette hauteur le côté du nord étoit plus épais que tous les autres. EXPÉRIENCE I. LE même jour, il a fait couper à la même Hauteur un chène à gros glands , âge d'environ — 300 IISTOIRE NATURELLE. soixante ans se dans une lisière exposée au. levant , et il a trouvé qu àl avoit également grossi de tous côtés; mais, à un pied et demi . plus haut, c’est-à-dire, à trois pieds au-dessus : de la terre, le côté du midiétoit un peu plus … épais que celui du nord. EXPÉRIENCE Y. UX autre chêne à gros glands , âgé d’envi- ron trente-cinq ans, d’une lisière exposée au : levant, avoit grossi d'un tiers de plus du côté du midi que du côté du nord, à un pied au-dessus de terre: mais à un pied plus haut cette inégalité diminuoit déja; à un pied plus haut, il avoit également grossi de tous côtés : cependant, en le faisant encore cou- per plus haut, le côté du midi étoit un tant soit peu plus fort. EXPÉRIENCE VI. UX autre chène à gros glands, âgé de trente-cinq ans, d'une lisière exposée au midi, coupé à trois pieds au-dessus de terre, étoit un peu plus fort au midi qu’au nord, .. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 3or mais bien plus fort du côté du levant Jos d'aucun autre côté. EXPÉRIENCE VII. UN autre chène de même âge et mêmes glands, situé au milieu des bois, étoit égale- ment crû du côté du midi et du côté du RE et plus du côté du levant que du côté du cou- chant. | EXPÉRIENCE VIIL | LE 29 mars 1734, il a continué ces épreuves , et il a fait couper, à un pied et démi au-dessus de terre, un chêne à gros glands, d’une très-belle venue ; âgé de qua- rante ans , dans une lisière exposée au midi ; il avoit grossi du côté du nord beaucoup plus que d'aucun autre côté, celui du midi étoit même le plus foible de tous. Ayant fait fouiller au pied de l'arbre , il a trouvé! que la plus nee racine étoit du côté du nord. 26 OUR NU: NL) AUTO) LU OM AGE Au et 1 PARA F6 PVR LU NE RARE AE CS TEEN | “%; A1 1 Dar ve LP. "14 32 HISTOIRE NATURELLE: % 4 w EXPÉRIENCE IX. ET UXx autre chène de même espèce, même âge,età la même position, coupé à la même hauteur d'un pied et demi au-dessus de la surface du terrain, avoit grossi du côté du | midi plus que du côté du nord. Il a fait fouiller au pied, et il a trouvé qu’il y avoit une grosse racine du côté du midi, et qu'il 7 , e 0 Q A L x y en paroissoit point du côté du nord. EXPÉRIENCE X. UN» autre chêne de même espèce , Mais âgé, de soixante ans, et absolument isolé, avoit plus grossi du côté du nord que d’au- cun autre côté. En fouillant, il a trouvé que la plus grosse racine étoit du côté du nord. Je pourrois joindre à ces observations beau- coup d’autres pareilles que M. de Buffon a fait exécuter en Bourgogne, de même qu'un grand nombre que j'ai faites dans la forèt d'Orléans, quise montent à l’examen de plus de quaraute arbres, mais dont il m'a paru Lé tri C2 PARTIE EXPÉRIMENTALE, 303 inutile de donner le détail. Il suffit de dire . qu’elles décident toutes que l’aspect du midi ou du nord n’est point du tout la cause de l'excentricité des couches ligneuses , mais qu'elle ne doit s’attribuer qu'à la position des racines et des branches, de sorte que les couches lignouses sont toujours plus _épaisses du côté où il y a plus de racines ou de plus vigoureuses. Il ne faut cependant pas manquer de rapporter une expérience que M. de Buffon a faite, et qui est absolument décisive. Il choisit ce même jour, 29 mars, un chêne isolé, auquel il avoit remarqué quatre ra- cines à peu prè égales et disposées assez régu- lièrement , en sorte que chacune répondoit à très-peu près à un des quatre points cardi- maux; et l'ayant fait couper à un pied et demi au-dessus de la surface du terrain ,il trouva, comme il le soupçonnoit, que le centre des _ couches ligneuses coïncidoit avec celui de la _circonférence de l'arbre, et due par consé- quent il avoit grossi de tous côtés également. Ce qui nous a pleinement couvaincus que la vraie cause de l’excentricité des couches Jigneuses est la position des racines, et quel- D ti à Ne 304 HISTOIRE NATURELLE. quefois des branches , et que si tas du midi ou du nord, etc. influe sur les arbres pour les faire grossir inégalement, ce ne peut être que d’une manière insensible, puisque, dans tous ces arbres, tantôt c’étoient Les cou- ches ligneuses du côté du midi qui étoient les plus épaisses , et tantôt celles du côté du nord ou de tout autre côté, et que, quand nous avons coupé des troncs d'arbres à différentes hauteurs, nous avons trouvé les couches li- gueuses tantôt plus épaisses d’uncôté, tantôt d’un autre. | Cette dernière observation m'a engagé à faire fendre plusieurs corps d'arbres par le milieu. Dans quelques uns, le cœur suivoit à peu près en ligne droite l’axe du tronc: mais dans le plus grand nombre, et dans les bois même les plus parfaits et de la meilleure fente , il faisoit des inflexions en forme de Zzigzag ; outre cela, dans le centre de presque. tous les arbres, j'ai remarqué, aussi-bien que M. de Buffon, que dans une épaisseur d’un pouce , ou un/pouce et demi, vers le centre, il y avoit plusieurs petits nœuds, en sorte que le bois ne s’est trouvé bien franc qu ‘au-delà de cette petite épaisseur. PARTIE EXPÉRIMENTALE. 305 Ces nœuds viennent sans doute de l’érup- tion des branches que le chêne pousse en _ quantité dans sa jeunesse, qui, venant à pe rir , se recouvrent avec le temps, et forment ces petits nœuds auxquels on doit attribuer eu partie cette direction irrégulière du cœur qui n’est pas naturelle aux arbres. Elle peut venir aussi de ce qu’ils ont perdu dans leur jeunesse leur flèche ou montant principal par la gelée, l’abroutissement du bétail, la force du vent ou de quelque autre accideut ; car ils sont alors obligés de nourrir des branches latérales pour en former leurs tiges; et le cœur de ces branches ne répondant pas à celui du tronc, il s y fait un changement de direction. Il est vrai que peu à peu ces branches se redressent ; mais 1l reste touiours ‘une inflexion dans le cœur de ces arbres. Nous n'avons donc pas apperçu que l’expo- sition produisit rien de sensible sur l’épais- seur des couches ligneuses , et nous croyons que quand on en remarque plus d'un côte que d’un autre, elle vient presque toujours de l'insertion des racines, ou de l’éruption de quelques branches, soit que ces branches existent actuellement, ou qu'ayant péri, leur 306 HISTOIRE NATURELLE. tx place soit recouverte. Les plaies Lichir ia A Ja gelivure, je double aubier, dans un même arbre, peuvent encore produire cettéaugmen- tation d'épaisseur des couches ligneuses : mais _- nous la croyons absolument indépendante : ; #: de l'exposition ; ce que nous allons’ encore prouver par plusieurs observations Far lières. OBSERVATION PREMIÈRE. Tour le monde peut avoir remarqué dans les vergers , des arbres qui s’emportent, comme disent les jardiniers, sur une de leurs branches, c'est-à-dire, qu'ils poussent sur cette branche avec vigueur, pendant que les autres restent chétives et languissantes, Si l’on Fuite au pied de ces arbres pour exa- miner leurs racines, on trouvera à peu Fe la même chose qu’au dehors de la terre, c'est- à-dire, que du côté de la branche vigoureuse il y aura de vigoureuses racines , pendant que celles de l’autre côté seront en mauvais état. + .. 2 RÉRTS RRRSS ve ! f |) PARTIE EXPÉRIMENTALE. 307 OBSERVATION. II 4 We" Qu'ux arbre soit planté entre un gazon et une terre façonnée, ordinairement la partie _ de l’arbre qui est du côté de la terre labourée, _ sera plus verte et plus vigoureuse que celle qui répond au gazou. OBSERVATION IIT. 7 . ON voit souvent un arbre perdre subite- ment une branche; et si l’on fouille au pied, on trouve le plus ordinairement la cause de cet accident dans le mauvais état où se trou- vent les racines qui répondent à la branche | qui a péri. OBSERVATION IV. Sr on coupe une grosse racine à un arbre, comme on le fait quelquefois pour mettre un arbre à fruit, ou pôur l’empécher de s’em- porter sur une branche, on fait languir la partie de l'arbre à laquelle cette racine cor- respondoit : mais il n’arrive pas toujours 4 qu" Ar dns HE NEA We it TAN 308 HISTOIRE NATURELLE. que ce soit celle qu’on vouloit affoiblir, arce qu'on n’est pas toujours assuré à quelle q P } partie de l'arbre une racine porte sa nourri- La ture , et une même racine la porte souvent à plusieurs branches ; nous en allons dire quelque chose dans un moment. OBSE R V ATOM # Qu’o Nxfende un arbre, depuis une de ses branches , par son tronc, jusqu’à une de ses racines, on pourra remarquer que les racines, de même que les branches, sont formées d'un faisceau de fibres, qui sont une éonhi nuation de fibres tongiindfianss du tronc de l'arbre. * | Toutes ces observations semblent prouver LE. | que le tronc des arbres est composé de diflé- rens paquets de fibres longitudinales, qui répondent par un bout à une racine, et par l'autre, quelquefois à une, et d’autres fois à plusieurs branches ; en sorte que chaque faisceau de fibres paroît recevoir sa nourri- ture de la racine dont il est une continuation. Suivant cela, quand une racine périt,ils'en nd PARTIE EXPÉRIMENTALE. 309. devroit suivre le desséchement d’un faisceau de fibres dans la partie du tronc et dans la branche correspondante ; mais il faut remar- quer : 1°. Que, dans ce cas, les branches ne font que languir, et ne meurent pas entièrement. 2°. Qu'ayant greffé par le milieu sur un sujet vigoureux une branche d’orme assez forte, qui étoit chargée d’autres petites branches , les rameaux qui étoient sur la partie inférieure de la branche greffée, pous- sèrent, quoique plus foiblement que ceux du sujet. Et j'ai vu, aux Chartreux de Paris, un oranger subsister et grossir en cette situa- tion quatre ou cinq mois sur le sauvageon oùilavoitété greffe. Ces expériences prouvent que la nourriture qui est portée à.une partie d’un arbre , se communique à toutes les autres, et par conséquent la séve a un mou- vement de communication latérale : on peut voir sur cela les expériences de M. Hales, Mais ce mouvement latéral ne nuit pas assez au mouvement direct de la séve , pour l’em- pêcher de se rendre en plus grande abondance à la partie de l’arbre et au faisceau même des fibres qui correspond à la racine qui la + Ld ” L PRET « dd: LOTO Ar 2 CE à D Lot D'ÉRANT ERNL, \ RE LME PROS MEME I < 310 HISTOIRE NATURELLE fournit, et c'est ce qui fait qu’elle se-dis- tribue principalement à une partie des branches de l’arbre, et qu’on voit ordinaire- ment la partie de l’arbre où répond une racine vigoureuse, profiter plus que tout le reste , comme on le peut remarquer sur les arbres des lisières des forêts ; car leurs meil- Jeures racines étant presque toujours du côté du. champ, c’est aussi de ce côté que les couches ligneuses sont communément les plus épaisses. Ainsi il paroït, par les expériences que nous venons de rapporter, que les couches ligneuses sont plus épaisses dans les endroits de l’arbre où la séve a été portée en plus grande aboudance, soit que cela vienne des racines ou des branches ; car on’sait que les” unes et les autres agissent de concert pour le. mouvement de la seve. C’est cette même abondance de séve qui. fait que l’aubier se transforme plutôt en bois : c’est d’elle que dépend l'épaisseur relative du bois parfait avec l’aubier dans les diffé rens terrains et dans les diverses espèces ; car Vaubier n’est autre chose qu’un bois impar- fait , un bois moins dense, qui a besoin que are 7 re | ce PARTIE EXPÉRIMENTALE. 3tr la séve le traverse , et y dépose des parties fixes pour remplirses pores, et le rendre sem- blable au bois : la partie de l’aubier dans la- quelle la séve passera en plus grande abon- dance, sera donc celle qui se transformera “plus promptement en bois parfait, et cette transformation doit , dans les mêmes espèces, suivre la qualité du terrain. en EXPÉRIENCES. ® | M. de Buffon a fait scier plusieurs chênes à deux ou trois pieds de terre ; et ayant fait polir la coupe avec la plane, voici ce qu’il a \Temaïrque : | À Un chêne âgé de quarante-six ans environ avoit d'un côté quatorze couches annuelles d'aubier , et du côté opposé il en avoit vingt; cependant les quatorze couches étoient d'un quart plus épaisses que les vingt de l’autre côté. Un autre chêne qui ne du même äge, avoit d'un côté seize couches d’aubier , ‘et du côté opposé il en avoit vingt-deux ; cependant les seize couches étoient d’un quart plus épaisses que les vingt-deux. 32 HISTOIRE NATURELLE. Un autre chène de même âge avoit d’un | | côté vingt couches d’aubier, et du côté op— à posé il en avoit vingt-quatre; cependant les. vingt couches étoient d’un cs er que les vingt-quatre. Un autre chêne de même âge avoit d’un 4 côté dix couches d’aubier, et du côté gp posé il en avoit quinze; cependant les dix | couches éloient d’un sixième plus épaisses que les quinze. | Un autre Chêne de même âge avoit d'un côté quatorze couches d’aubier, et de } autre. vingt-une; cependant les quatorze couches À étoient d’une épaisseur Pre double de. celle des vingt-une. R | Un chène de même âge avoit d’un côté. ouze couches d’aubier, et du côté opposé im en avoit dix-sept; cependant les onze couche : étoient d’une épaisseur double de celle des. dix-sept. | Il a fait de SU observations sur les trois espèces de chènes qui se trouvent le plus, ordinairement dans les forêts, et il ny 1 point apperçu de différence. 1 Toutes ces expériences prouvent que ra paisseur de l’aubier est d'autant plus grande à À % £ PARTIE EXPÉRIMENTALE. 313 que le nombre des couches qui le forment est plus petit. Ce fait paroît singulier ; l’ex— plication en ést cependant aisée. Pour la rendre plus claire , supposons, pour un ins- tant, qu'on ne laisse à un arbre que deux racines , l'une à droite, double de celle qui est à gauche : si onin’a point d'attention à la communication latérale de la séve, le côté droit de l'arbre recevroit une fois autant de nourriture que le côté ganche ; les cercles annuels grossiroient donc plus à droite qu’à gauche, et en même temps la partie droite de l'arbre se trausformeroit plus promptement . en bois parfait que la partie gauche , parce qu’en se distriuant plus de séve dans la . partie droite que dans la gauche, il se dépo- seroit dans les interstices de l’'aubier un plus grand nombre de parties fixes propres à for- mer le bois. Il nous paroît donc assez bien prouvé que de plusieurs arbres plantés dans le même terrain, ceux qui croissent plus vite ont leurs couches ligneuses plus épaisses , et qu'en même temps leur aubier se convertit plutôten bois que dans les arbres qui croissent lentement. Nous allons maintenant faire Fafr — # A M 314 HISTOIRE 4 | à. voir que les chènes qui sont crûs dans les. terrains maigres, ont plus d’aubier, par pro » portion à la quantité de leur bois, que ceux qui sont crûs dans les bons terrains. Effecti= , vement, si l’aubier ne se convertit en bois parfait qu’à proportion que la séve qui le traverse y dépose des parties fixes ,il est clair que l’aubier sera bien plus long-temps à se convertir en bois dans les terrains maigres que dans les bons terrains. C’est aussi ce que j'ai remarqué en exami=< k nant des bois qu'on abattoit dans une vente ;! dont le bois étoit beaucoup meilleur à une de ses extrémités qu’à l’autre , simplement. parce que le terrain y avoit plus de fonds. : : Les arbres qui étoient venus dans la partie où il y avoit moins de bonne terre, étoient moins gros, leurs couches ligneuses étoient plus minces que dans les autres; ils avoient un plus grand nombre de couches d’aubier, et même généralement plus d’aubier par pro= portion à la grosseur de leur bois: je dis par proportion au bois ; car si on se contentoié, de mesurer avec un compas l'épaisseur de. l’aubier dans les deux terrains, on le trou veroit communément bien plus épais dans le bou terrain que dans l’autre. { l PARTIE EXPÉRIMENTALE, 315 M. de Buffon a suivi bien plus loin ces observations ; car , ayant fait abattre dans un terrain sec et graveleux, où les arbres com- mencent à couronner à trente ans , un grand nombre de chênes à médiocres et petits glands, tous âgés de quarante-six ans , il fit aussi abattre autant de chènes de même espèce et du même âge dans un bon terrain, où le bois ne couronne que fort tard. Ces deux terrains sont à une portée de fusil l’un de l’autre, à la même exposition, et ils ne diffèrent que par la qualité et la profondeur de la bonne terre, qui, dans l’un, est de quelques pieds, et dans l’autre, de huit à neuf pouces seu- lement. Nous avons pris » avec une règle et un compas , les mesures du cœur et de l’au- bier de tous ces différens arbres ; et après avoir fait une table de ces mesures, et avoir. pris la ca tee entre toules, nous avons trouve, 1°. Qu’à l’âge de quarante-six ans, dans le terrain maigre , les chênes communs ou de glands médiocres avoient 1 d’aubier et 2 “e de cœur, et les chênes de petits glands, d’aubier et 1 +2 dé cœur. Ainsi, dans le terrain maigre, les premiers ont plus du _ double de cœur que les derniers, -P 316 HISTOIRE NATURELLE | Lil 2°. Qu’au même âge de quarante-six ans, dans un bon terrain, les chènes communs … avoient 1 d’aubier et 3 decœur, etles chènes de petits glands, 1 d’aubier et 21 de cœur. Ÿ é . Ainsi, dans les bons terrains, les premiers! ont un sixième de cœur plus que les derniers. 3°. Qu'au même âge de quarante-six ans, dans le mème terrain maigre, les chênes . communs avoient seize ou dix-sept couches lisneuses d’aubier, et les chênes de petits glands en avoient vingt-uue. Ainsi l'aubier se convertit plutôt en cœur dans les chènes communs que dans les chênes de petits glands. | 4°. Qu’à l’âge de quarante-six ans, la gros- seur du bois de service, y compris l’aubier des chênes à petits glauds dans le mauvais terrain, est à la grosseur du bois de service des chênes de même espèce dans le bon ter- rain, comme 21 < sont à 29; d’où l’onttire, en supposant les hauteurs égales , la propér- tion de la quantité de bois de service dans le bon terrain à la quantité dans le mauvais terrain, comme 841 sont à 462, c’est-à-dire, presque double ; et comme les arbres ‘de même espèce s'élèvent à proportion de la L ai! ie” PARTIE EXPÉRIMENTALE, 37 bonté et de la profondeur du terrain, on peut assurer que la quantité du bois que four- nit un bon terrain «est beaucoup plus du double de celle que produit un mauvais ter- rain. Nous ne parlons ici que du bois de ser— vice, et point du tout du taillis ; car, après avoir fait les mêmes épreuves et les mêmes calculs sur des arbres beaucoup plus jeunes, comme de vingt-cinq à trente ans, dans le bon et le mauvais terrain , nous avons trouvé que les différences n’étoient pas, à beaucoup près, si grandes : mais comme ce détail seroit un peu long , et que d’ailleurs il y entre quel- ques expériences sur l’aubier et le cœur du chêne selon les différens âges, sur le temps absolu qu’il faut à l’aubier pour se transfor- mer en cœur, et sur le produit des terrains maigres, compäré au produit des bons ter- xaimns , nous ne le tout à un autre Mémoire. Il n'est donc pas douteux que, dans les terrains maigres, l’aubier ne soit plus épais, par proportion au bois, que dans les bons terrains ; et quoique nous ne rapportions rien ici que sur les proportions des arbres L2 LA L1 .l qui se sont trouvés bien sdins, cependant 27 88 HISTOIRE NATURELLE. noùs remarquerons en passant que ceux qui | étoient un peu gâtés, avoient toujours plus . d’aubier que les autres Nous avons pris aussi les mêmes proportions du cœur et de l’au- bier dans les chènes de différens âges , étnous avons reconnu que les couches ligneuses étoient plus épaisses dans les jeunes arbres que dans les vieux, mais aussi qu’il y en avoit une bien moindre quantité. Concluons , donc de nos expériences et de nos observa- tions, j 1°. Que, dans tous les cas où la séve est portée avec plus d’abondance , les couches ligneuses , de même que les couches d’au- bier, y Sont épaisses, soit que l'abondance de cette séve soit un effet de la bonté du ter- rain ou de la bonne constitution de l'arbre, soit qu’elle dépende de l’âge de l'arbre, de la position des branches ou des racines, etc, 2°. Que l’aubier se convertit d'autant plus tôt en bois , que la séve est portée avec plus : d’abondance dans les arbres ou dans une porz . tion de ces arbres que dans une autre ; ce qui est une suite de ce que nous venons de dire. | (ur 3°, Que l’excentricité des couches lisneuses PARTIE EXPÉRIMENTALE. 319. dépend entièrement de l'abondance de la séve, qui se trouve plus grande dans une portion d’un arbre que dans une autre; ce qui esttoujours produit par la vigueur des racines ou des branches qui répondent à la partie de l'arbre où les couches sont les plus épaisses et les plus éloignées du centre. : 4°! Que le cœur des arbres suit très-rare-— ment l'axe du tronc; ce qui est produit quel- quefois par l'épaisseur inégale des couches ligneuses dont nous venons de parler, et quelquefois par des plaies recouvertes on des extravasions de substance, et souvent'par les accidens qui ont fait périr le montant prin- cipal. QUATORZIÈME MÉMOIRE. j € Observations des différens effets que pro- duisent sur les végétaux les srandes gelées d'hiver et les petites gelées du printemps. Par MM. DunAMELz et DE BUFFON. - L, physique des végétaux, qui conduit à la perfection de l’agriculture, est une de ces sciences dont le progrès ne s’augmente que par une multitude d'observations qui ne x peuvent être l’ouvrage ni d’un homme seul, ni d’un temps borné : aussi ces observations ne passent-elles guère pour certaines que lorsqu'elles ont été répétées et combinées en différens lieux , en différentes saisons , et par différentes personnes qui aient eu les mêmes idées. C’a été dans cette vue que nous nous sommes joints , M. de Buffon et moi, pour L travailler de concert à l’éclaircissement d’un nombre de phénomènes difficiles à expliquer 1 a ‘HISTOIRE NATURELLE. 32r dans cette partie de l’histoire de la Nature, de la connoissance desquels il peut résulter une infinité de choses utiles dans la pratique de l’agriculture. L'accueil dont l'académie a favorisé les prémices de cette association , je veux dire le Mémoire formé de nos observations sur l’ex- centricité des couches ligneuses , sur l’iné- galité de épaisseur de ces couches, sur les circonstances qui font que l'aubier se con-— vertit plus tôt en bois, ou reste plus long- temps dans son état d’aubier; cet accueil , dis-je, nous. a encouragés à donner égale- ment toute notre attention à un autre point de cette physique végétale, qui ne deman- ” doit pas moins de recherches , et qui n’a pas moins d'utilité que le premier. La gelée est quelquefois si forte pendant l'hiver, qu'elle détruit presque tous les végé taux, et la disette de 1709 est une époque de ses cruels effets. Les grains périrent entièrement ; quelques espèces d'arbres, comme les noyers, périrent “aussi sans ressource : d'autres, comme les oliviers, et presque tous les arbres fruitiers, furent moins maltraités ; ils repoussèrent de EURE at ur RU Le) 322 HISTOIRE NATURELLE. te dessus leur souche, leurs racines n 'ayantpoint ‘été endommagées : enfin plusieurs: es 4 arbres plus vigoureux poussèrent au prin-. temps presque sur toutes leurs branches » et ï ° ne parurent pas en avoir beaucoup souffert. Nous ferons cependant remarquer dans la suite les dommages réels et irréparables ques cet hiver leur a causés. Une gelée qui nous prive desychoses les . plus nécessaires à la vie, qui fait périr entie- . rement plusieurs espèces d'arbres utiles, et. n’en laisse presque aucun qui ne se ressente. de sa rigueur , est certainement des plus re- … doutables. Ainsi nous avons tout à craindre . des grandes gelées qui viennent pendant l’hi- . ver, et qui nous réduiroient aux dernières | extrémités si nous en ressentions plus sou, vent les effets ; mais heureusement on ne. peut citer que deux ou trois hivers qui, comme celui de l’année 1709, aient produit une calamité si générale. — © Les plus grands désordres que causent jamais les gelées du printemps , ne portenk pas, à beaucoup près, sur des choses aussi essentielles, quoiqu’elles endommagent les grains, et principalement le seigle, lorsqu'il \ , Wu | PARTIE EXPÉRIMENTALE 323 est nouvellement épié et en lait; on n'a ja- mais vu que cela ait produit de grandes di- settes : elles n'afflectent pas les parties les plus solides des arbres, leur tronc ni leurs branches ; mais elles détruisent totalement leurs productions; et nous privent de récoltes de vins et de fruits, et, par la suppression des nouveaux bourgeons, elles causent un dommage considérable aux forêts. Ainsi, quoiqu'il y ait quelques exemples que la-gelée d’hiver nous ait réduits à man- quer de pain, et à être privés pendant plu- sieurs années d’une infinité de choses utiles que nous fournissent les végétaux, le dom- mage que causent les gelées du printemps nous devient encore plus important, parce . qu’elles nous affligent beaucoup plus fré- quemment ; car , comme 1l arrive presque tous les ans quelques gelées en cette saison, il est rare qu’elles ne diminuent nos reve— nus. À me considérer que les effets de la gelée; même très-superficiellement, on apperçoit déja que ceux que produisent les fortes gelées d'hiver, sont très-différens de ceux qui sont occasionnés par les gelées du printemps, 4 hp NU AREA LE FT VON ATARI « ÿ ñ | ' 4 324 HISTOIRE NATURELLE. puisque les unes attaquent le corps mêmetet. les parties les plus solides des arbres aulieu. que les autres détruisent simplement leurs productions, et s'opposent à leurs accroisse- mens. C’est ce qui sera plus amplement prouvé dans la suite de ce Mémoire. Mais nous ferons voir en même temps ! qu’elles agissent dans des circonstances bien différentes , et que ce ne sont pas toujours les terroirs, les expositions et les situations où l’on remarque que les gelées d'hiver ont produitde plus grands désordres, qui souffrent le plus des gelées du primtemps. On conçoit bien que nous: n’avons pas pu parvenir à faire cette distinction des effets de la gelée qu’en rassemblant beaucoup d’obser. vations , qui rempliront la plus grandepartie de ce Mémoire. Mais seroient-elles simple- ment curieuses, et n’auroient-elles d’utilité que pour ceux qui voudroient Nat ar: la cause physique de la gelée ? Nous espérons de plus qu’elles seront profitables à l’agriculture, et que, si elles ne nous mettent pas à portée de nous garantir entièrement des torts que nous fait la gelée, elles nous donneront des moyens pour en parer une partie : cest ce A. ÿ —— PARTIE ÉXPÉRIMENTALE. 325 que nous aurons soin de faire sentir à mesure _ que nos observations nous en fourniront l’oc- _ casion. Il faut donc en donner le détail, que nous commencerons par ce qui regarde les grandes gelées d'hiver; nous parlerons en- suite des gelées du printemps. Nous ne pouvons pas raisonner avec au- tant de certitude des gelées d’hiver que de celles du printemps, parce que , comme nous l'avons déja dit, on est assez heureux pour n'éprouyer que rarement leurs tristes effets. : La plupart des arbres étant , dans cettesai- son , depouillés de fleurs, de fruits et de feuilles , ont ordinairement leurs bourgeons endurcis et en état de supporter des gelées assez fortes, à moins que l’été précédent n’ait été frais ; car ,encecas, les bourgeons n’é- ‘tant pas parvenus à ce degré de maturité que Les jardiniers appellent aofté, ils sont hors d'état de résister aux plus médiocres gelées d'hiver : mais ce n’est pas l’ordinaire , et le plus souvent les bourgeons mürissent avant l'hiver, et les arbres supportent les rigueurs . de cette saison sans en être endommagés, à moins qu'il ne vienne des froids excessiis , Mat, gén, XVII, 28 SONT SE, ni da gi Mrs MALTE f ÿ FA HAN } 326 HISTOIRE at joints à des circonstances fâcheuses ÿ dois nous parlerons dans la suite. ar . Nousavons cependant trouvé dans les forèts beaucoup d'arbres attaqués de défauts consi= dérables , qui ont certainement été produits par les fortes gelées dont nous venons de parler, et particulièrement parcelle de 1709; car, quoique cette enorme gelée commence à être assez ancienne, elle a produit dans les arbres qu’elle n’a pas entièrement détruits, des défauts qui ne s’effaceront jamais. Ces défautssont, 1°. des gerces qui suivent _ la direction des fibres, et que les gens de lorêts appellent gelivures ; 2°. Une portion de bois mort rome dans le bon bois, ce que quelques forestiers appellent /a gelivure entrelardée ; Enfin le double aubier, qui est une cou- ‘ronne entière de bois imparfait, remplie et recouverte par de bon bois. Il faut détailler ces défauts, et dire d’où ils procèdent. Nous allons commencer par ce qui regarde le double aubier. C4 L'aubier est, comme l’on sait, une cou- ronne ou une ceinture plus ou moins épaisse de bois blanc et imparfait, qui, dans presque- PARTIE EXPÉRIMENTALE. 327 tous les arbres , se distingue aisément du bois parfait, qu'on appelle /e CŒuUT , par la diffé- rence de sa couleur et de sa dureté. Il se trouve immédiatement sous l'écorce , et ül enveloppe le bois parfait , qui, dans les arbres sains, est à peu près de la même cou- leur, depuisla circonférence jusqu'aucentre ; mais dans ceux dont nous voulons parler, le bois parfait se trouve séparé par une seconde couronne de bois blanc, en sorte que sur la coupe du tronc d’un de ces arbres, on voit alternativement une couronne d’aubier, puis une de bois parfait, ensuite une seconde couronne d’aubier , et enfin un massif de _ bois parfait. Ce défaut est plus ou moins grand et plus ou moins commun, selon les différens terrains et les différentes situations : dans les terres fortes et dans le touffu des : forêts ;: il est plus rare et moins considérable que dans les clairières et dans les terres légères. : À la seule inspection de ces couronnes de bois blanc , que nous appellerons dans la suite le faux aubier , on voit qu’elles sont de mauvaise qualité. Cependant , pour en être plus certain, M. de Buffon en a fait { à Se à 328 HISTOIRE NATURELLE. À faire plusieurs petits soliveaux de deùx pieds | 4 de longueur, sur neuf à dix lignes d’équar- » rissage ; et en ayant fait faire de pareils de - véritable aubier , il a fait rompre les uns et ! les autres en les chargeant dans leur milieu ; 4 et ceux de faux aubier ont toujours rompu | sous un moindre poids que ceux du véritable D aubier , quoique, comme l’on sait:, la force de l’aubier soit très-petite en CORRE de celle du bois forme. Il a ensuite pris plusieurs morceaux de ces deux espèces d’aubier, il les a pesés dans. \’air et ensuite dans l’eau, et il a trouvé. que la pesanteur spécifique de l’aubier na-. turel étoit toujours plus grande que celle du. faux aubier. Il a fait ensuite la même expé-. _rience avec le bois du centre de ces mêmes: arbres , pour le comparer à celuide la cou-: ronne qui se trouve entre les deux aubiers, et il a reconnu que la différence éloit à peu près celle qui se trouve naturellement entre la pesanteur du bois du centre de tous les arbres et celle de la circonférence : ainsi tout ce qui est devenu bois parfait dans ces. arbres défectueux, s’est trouvé à peu près. daus l'ordre ordinaire. Mais 1l n'en est pas” 4 e% Le | “0e PARTIE EXPÉRIMENTALE. 329 de même du faux aubier , puisque, comme le prouvent les expériences que nous venous de rapporter , il-est plus foible, plus tendre et plus léger que le vrai aubier, quoiqu'il ait été formé vingt et vingt-cinq ans aupara- vant; ce que nous avons reconnu en comptant _ les cercles annuels, tant de l’aubier que du bois qui recouvre ce faux aubier : et cette observation, que nous avons répétée sur nombre d'arbres, prouve incontestablement que ce défaut est une suite du grand froid dé 1709 ; car ilne faut pas être surpris de trouver toujours quelques couches de moins que le nombre des années qui se sont écou- lées depuis 1709 , non seulement parce qu’on ne peut jamais avoir par le nombre des cou- ches ligneuses l’âge des arbres qu’à trois où quatre années près, mais encore parce que les premières couches ligneuses qui se sont formées depuis 1709, étoient si minces et si confuses, qu’on ne peut les ASURENCE bien exactement. Il est encore sûr que c’est la portion de l'arbre qui étoit en aubier dans le temps de la grande gelée de 1709, qui, au lieu de se perfectionner et de se convertir en bois , est | | 28 330 HISTOIRE Ma à au contraire devenue plus défectueuse; om n’en peut pas douter après les expériences que M. de Buffon a faites pour s'assurer de la qualité de ce faux aubier. | D'ailleurs il est plus naturel de penserque l'aubier doit plus souffrir des grandes gelées .que le bois formé, non seulement parce qu'étant à à l'extérieur de l'arbre il est plus exposé au froid, mais encore parce qu'il coutient plus de séve, et que les fibres sont plus tendres et plus délicates que celles du bois. Tout cela paroit d’abord souffrir peu de difficulté; cependant on pourroit objecter l'observation rapportée dans l’Æiséoire de l'académie, année 1710, par laquelle il pa- roît qu’en 1709 les jeunes arbres-ont mieux supporté le grand froid que les vieux arbres. Mais comme le fait que nous venons de rapporter est certain , il faut bien qu’il y ait quelque différence entre les parties orga- niques , les vaisseaux, Les fibres , les vési- cules, etc. de l’aubier des vieux arbres et de celui des jeunes : elles seront peut-être plus souples, plus capables de prêter dans ceux- ci que dans les vieux, de telle sorte qu’une force qui sera capable de faire rompre les ! PARTIE EXPÉRIMENTALE. 33 unes, ne fera que dilater les autres. Au reste; comme ce sont là des choses que les yeux ne peuvent appercevoir, et dont l’es- prit reste peu satisfait, nous passerons plus légèrement sur ces conjectures , et nous. nous contenterons des faits que nous avons bien observés. Cet aubier a donc beaucoup souffert de la gelée, c’est une chose incon- testable ; mais a-t-1l été entièrement désor- ganisé ? Il pourroit l'être sans qu'il s'en füt suivi la mort de l’arbre; pourvu que l'écorce füt restée saine, la végétation auroit pu continuer. On voit tous les joirs des saules et des ormes qui ne subsistent que par leur écorce ; et la même chose s’est vue lons- temps à la pépinière du Roule sur un oran- ger qui n'a péri que depuis quelques années. Mais nous ne croyons-pas que je faux an- bier dont nous parlons soit mort; il m'a toujours paru être dans un état bien diffe- rent de l’aubier qu’on trouve dans les arbres qui sont attaqués de la gelivure entrelar- dée, et dont nous parlerons dans un mo- ment. IL a aussi paru de même à M. de Buffon, lorsqu'il en a fait faire des soliweaux et des cubes pour les expériences que nous avons NL ET ORNE SAINTES A EMA R UNE PANTAENTR OT s'y LPO EUR pe el AQU | ÿ Jet | EU us UN + d * RU \ 332 HISTOIRE NATURELLE. 4 rapportées : et d’ailleurs, s’il eût été désorga= nisé, comme il s'étend sur toute la circon- Ÿ férence des arbres , il auroit interrompu le ? mouveinent latéral de la séve , et le bois du « centre, qui se seroit trouvé recouvert par cette enveloppe d’aubier mort, n’auroit pas pu végéter, il seroit mort aussi, et se seroit / altéré; ce qui n’est pas arrivé, comme le. prouve l'expérience de M. de Bufion , que je . pourrois confirmer par plusieurs que jai exécutées avec soin , mais dont je ne par-. lerai pas pour le présent, parce qu’elles ont été faites dans d’autres vues. Cependant | on ne conçoit pas aisément comment cet aubier a pu être altéré au point de ne pou— . Voir se convertir en bois , et que bien loin qu'il soit mort, il ait même été en état de fournir de la séve aux couches ligneuses qui se sonf formées par-dessus dans un état de perfection qu’on peut comparer au bois des, arbres qui n’ont souffert aucun accident. Il faut bien cependant que la chose se soit passée finsi, et que le grand hiver aitcausé une maladie incurable à cet aubier; car:s'il étoit mort aussi-bien que l’écorce qui lere- : couvre, 1l n’est pas douteux que l'arbre ua PARTIE EXPÉRIMENTALE. 333 auroit péri entièrement : c’est ce qui est ar- rivé en 1709 à plusieurs arbres dont l’écorce s’est détachée, qui, par un reste de séve qui étoit dans leur tronc, ont poussé au printemps, mais qui sont morts d’épuise- ment avant l’automne, faute de’ recevoir assez de nourriture pour subsister. Nous avons trouvé de ces faux aubiers qui étoient plus épais d’un côté que d’un autre ; ce qui s'accorde à merveille avec l’état le plus ordinaire de l’aubier. Nous en avons aussi trouvé de très-minces ; apparemment qu'il n’y avoit eu que quelques couches d’au- Dier d'endommagées. Tous ces faux aubiers ne sont pas de la même couleur, et n’ont pas souffert une altération égale; ils ne sont pas aussi mauvais les uns que les autres; et cela s'accorde à merveille avec ce que nous avons dit plus haut. Enfin nous avons fait fouiller au pied de quelques uns de ces arbres, pour voir si ce même défaut existoit aussi dans les racines; mais nous les ayons trouvées très-saines. Ainsi il est probable que la terre qui les recouvroit les avoit garanties du grand froid. Voilà donc un effet des plus FN des 3 HISTOIRE NATURELLE. gelées d'hiver, qui, pour être renfermé dans A ATP CAN ln ART UP L © l'intérieur des arbres, n’en, est pas moins à - craindre, puisqu'il rend les arbres qui en sont attaqués, presque inutiles pour toutes sortes d'ouvrages; mais, outre cela, il est très- fréquent, et on a toutes les peines du monde à trouver quelques arbres qui en soient to- talement exempts : cependant on doit con- clure des observations que nous venons de rapporter , que tous les arbres dont le bois ne suit pas une nuance réglée depuis le centre, où il ‘doit être d’une couleur plus foncée, jusqu auprés de l’aubier, où la couleur s’éclaircit un peu, doivent être soupçonnés de quelques défauts , et même être entière- ment sic pour les ouvrages de consé- quence, si. la différence est considérable. Disons maintenant un mot de cet autre défaut que nous avons appelé /a gelivure entrelardee. | En sciant horizontalement des pieds d'arbres, on apperçoit quelquefois un mor- ceau d’aubier mort et d’écorce desséchée, qui sont entièrement recouverts par le bois vif. Cet aubier mort occupe à peu près le quart de la circonférence dans l'endroit du } LA Le | \ + PARTIE EXPÉRIMENTALE, 335 tronc où il se trouve: il est quelquefois plus brun que le bon bois, et d’autres fois presque blanchâtre. Ce défaut se trouve plus fré- quemment sur les côteaux exposés au midi que par-tout ailleurs. Enfin par la profondeur où cet aubier se trouve dans le tronc, il paroît dans beaucoup d'arbres avoir péri en 1709, et nous croyons qu’il est dans tous une suite des grandes gelées d'hiver qui ont fait entièrement périr une portion d’aubier et d’écorce, qui ont ensuite été recouverts par le nouveau bois; et cet aubier mort se trouve presque toujours à l’exposition du. midi, parce que le soleil venant à fondre la glace de ce-côté, 1l en résulte une humidité qui resèle de nouveau et sitôt après que le soleil a disparu ; ce qui forme un verglas qui, comme l’on sait, cause un préjudice con sidérable aux arbres. Ce défaut n’occupe pas ordinairement toute la longueur du tronc, de sorte que nous avons vu des pièces équar- ries qui paroissoient très-saines , et que l’on n’a reconnues attaquées de cette gelivure que quand on les a eu refendues pour en faire des planches ou des membrières. Si on les eût employées de toute leur grosseur, où Les précipiter leur dépérissement. Nous avons dit encore que les fortes gelées. d'hiver faisoient quelquefois fendre les arbres ! suivant la direction de leurs fibres, et mème avec bruit : ainsi il nous reste à rapporter les Ü observations que nous avons pu faire sur cet accident. » On trouve dans les forêts, A arbres qui, ayant été fendus suivantla direction de leurst fibres, sont marqués d’une arête qui est for. mée par la cicatrice qui a recouvert ces ger=, çures, qui restent dans l’intérieur de ces arbres sans se réunir, parce que, comme nous le prouverons dans une autre occasion il ne se forme jamais de réunion dans les! fibres ligneuses sitôt qu’elles ont été séparées, ou rompues. Tous les ouvriers regardent. toutes ces fentes comme -l’effet des gelées. d'hiver; c’est pourquoi ils appellent des ge= livures toutes les gerçures qu’ils apperçoiven# dans les arbres. Il n’est pas douteux que Id séve, qui augmente de volume lorsqu'elle vient à geler, comme font toutes les liqueurs PARTIE EXPÉRIMENTALE. 337 aqueuses, peut produire plusieurs de ces ger- cures; mais nous croyons qu'il y en à aussi qui sont indépendantes de la gelée, et qui sont occasionnées par une trop grande abon- dance de séve. | Quoi qu'il en soit, nous avons trouvé de ces défectuosités dans tous les terroirs et à toutes les expositions, mais plus fréquem- ment qu'ailleurs dans les terroirs humides, et aux expositions du nord et du couchant : peut-être cela vient-il dans un cas de ce que le froid est plus violent à ces expositions, et dans l’autre, de ce que les arbres qui sont dans les terroirs marécageux, ont le tissu de leurs fibres ligneuses plus foible et plus rare, et de ce que leur séve.est plus abondante et plus aqueuse que dans les terroirs secs; ce qui fait que l'effet de la raréfaction des liqueurs par la gelée est plus sensible, et d'autant. plus en état de désuuir les fibres ligneuses , qu'elles y apportent moins de résistance. Ce raisonnement paroît être confirmé par une autre observation : c’est que les arbres résineux , comme le sapin, sont rarement endommasés par les grandes gelées : ; ce qui peut venir de ce que leur séve est résineuse, a, LU 338 HISTOIRE NATURELLE, 2 _ parfaitement, et qu'au lieu Dm me volume àx-la gelée , comme l’eau , elles en diminuent lorsqu’elles se figent *. Au reste ; nous avons scié plusieurs arbres attaqués de cette maladie, et nous avons presque toujours trouvé , sous la cicatrice proéminente dont nous avons parlé , un dé- pôt de séve ou de bois pourri, et elle ne°se. distingue de ce qu’on appelle dans les forêts des abreuvoirs ou des gouttières que parce * M. Hales, ce savant observateur, qui nous à tant appris de choses sur la végétation, dit, dans son livre de la Szatique des végétaux, page 19, que ce sont les plantes qui trauspirent le moins qui résistent le nrieux au froid des hivers, parce qu’elles n’ont besoin pour se conserver que d’une très-petite quantité de nourriture. [l prouve, dans le même endroit, que les plantes qui conservent leurs fewilles | pendant l'hiver, sont celles qui transpirent le moins. Cependant on suit que l’oranger, le myrte, /et encore plus le jasmin d'Arabie , etc. sont très- sensibles à la gelée, quoique ces arbres conservent leurs feuilles pendant l'hiver : 1l faut donc avoir re- cours à une autre cause pour expliquer pourquoi certains arbres qui ne se dépouilient pas pendant l'hiver, supportent si bien les plus fortes gelées, l' PARTIE EXPÉRIMENTALE. 33 que ces défauts, qui viennent d’une altéra- tion des fibres ligneuses qui s’est produite intérieurement, n’ont occasionne aucune ci- catrice qui change la forme extérieure des arbres; aulieu queles gelivures, qui viennent d'une gerçure qui s’est étendue à l'extérieur , et qui s’est ensuite recouverte par une cica= trice , forment une arête ou une éminence en forme de corde qui annonce le vice inté— rieur. u | Les grandes gelées d'hiver produisent sans doute bien d’autres dommages aux arbres, et nous avons encore remarqué plusieurs dé- fauts que nous pourrions leur attribuer avec beaucoup de vraisemblance : mais, comme, nous n'avons pas pu nous en convaincre pleinement , nous n’ajouterons rien à ce que nous venons de dire, et nous passerons aûx observations que nous avons faites sur les effets des gelées du printemps, après avoir dit un mot des avantages et des désavantages des différentes expositions par rapport à la gelée; car cette question est trop intéressante à l’agriculture pour ne pas essayer de l’éclair- cir, d'autant que les auteurs se trouvent. dans des oppositions de sentimens plus } { EL EPA M: sl \ ds du PQ 1 MT ENEEN HU e SUR r— - x ' VIN 1 va 34 HIS TOIRE NATURELLE, capables de faire naître des doutes que d'aug. meuter nos connoissances , les uns prétendant | que la gelée se fait sentir plus vivement à | .Vexposition du nord, les autres voulant que … ce soit à celle du midi ou du couchant; et tous ces avis ne sont fondés sur aucune ob- , servation. Nous sentons cependant bien ce - qui a pu partager ainsi les sentimens , et c’est ce qui nous a mis à portée de les concilier. Mais, avant que de rapporterles observations et les expériences qui nous y ont conduits, il est bon de donner une idée plus +xacte de la Hp >” Il n’est pas douteux que c’est à l’exposi- tion du nord qu’il fait le plus grand froid : elle est à l'abri du soleil, qui peut seul, dans les grandes gelées, tempérer la rigueur du froid ; d’ailleurs elle est exposée au vent de nord, de nord-est et de nord-ouest , qui sont les plus froids de tous, non seulement à en juger par les effets que ces vents pro- duisent sur nous, mais encore par la liqueur des thermomètres, dont la décision est bien plus certaine. Aussi voyons-nous AU long de nos espa- liers , que la terre est souvent gelée et endur: on! PARTIE EXPÉRIMENTALE. 34 cie toute la ne au nord , pendant qu’elle est meuble et Lu on la peut labourer au midi. Quand , après cela, il siteède une forte gelée pendant la nuit, il est clair qu il doit faire bien plus froid dans l’endroit où il y a déja de la glace que dans celui où la terre aura été nutee par le soleil ; c’est aussi pour cela que même, dans les pays chauds , on trouve encore de la neige à l'exposition du nord sur les revers des hautes mon- tagnes : d’ailleurs la liqueur du thermomètre se tient toujours plus bas à l'exposition du nord qu’à celle du midi; ainsi il est incon- testable qu'il y fait-plus froid et a ’ily gèle plus fort. En faut-il davantage pour faire conclure que la gelée doit faire plus de désordre à cette exposition qu’à celle du midi? et on se con-. firmera dans ce sentiment par l’observation que noûs avons faite de la gelivure simple, que nous avons trouvée en plus grande quantité à cette exposition qu'à toutes les autres. | | Effectivement il est sûr que tous les acci- | dens qui np uniquement de la grande _ 342 HISTOIRE NATURELLE. “4 force de la gelée, tels que celui dont nous venons de parler, se trouveront plus ré quemment à l'exposition du nofd que par- tout ailleurs. Mais est-ce toujours la grande « force de la gelée qui endommage les arbres , et n’y a-t-il pas des accidens particuliers qui font qu’une gelée médiocre leur cause beau- coup plus de préjudice que ne font les gelées beaucoup plus violentes, quandelles arrivent L. ‘dans des circonstances heureuses ? Nous en avons deja donné un exemple en parlant de la gelivure entrelardée , qui est produite par le verglas, et qui se trouve plus fréquemment à l’exposition du midi qu'à toutes les autres, et l’on se souvient bien encore qu’une partie des désordres qu'a pro- duits l’hiver de 1709, doit être attribuée à un faux dégel, qui fut suivi d’une gelée encore - plus forte que celle qui l’avoit précédé. Mais les observations que nous avons faites sur les effets des gelées du printemps , nous four- nissent beauconp d'exemples pareils , qui prouvent incontestablement que ce n’est pas aux expositions où il gèle le plus fort et où il fait le plus grand froid , que la gelée fait le plus de tort aux végétaux; nous en allons < Lm Wu PARTIE EXPÉRIMENTALE. 343 donner le détail, qui va rendre sensible La | proposition générale que nous venons d’a- yancer , et nous commencerons par une ex-— périence que M. de Buffon a fait exécuter en grand dans ses bois, qui sont situés près de | : Montbard en Bourgogne. IL a fait couper, dans le courant de l'hiver 1754, un bois taillis de sept à huit arpens, si- tué dans un lieu sec, sur un terrain plat, bien découvert et environné de tous côtés de terres labourablés. Îl a laissé dans ce même bois plusieurs petits bouquets quarrés sans les abattre, et qui étoient orientés de façon que chaque face regardoit exactement le midi, Ie nord , le levant et le couchant. Après avoir bien fait nettoyer la coupe, il a observé ayec soin , au printemps, l'accroissement du jeune bourgeon, principalement autour des bou- quets réserves : au 20 avril 1l avoit poussé sensiblement dans les endroits exposés au midi, et qui, par conséquent, étoient à l'abri du vent du nord par les bouquets ; c’est donc en cet endroit que les bourgeons poussèrent les premiers et parurent les plus vigoureux. Ceux qui étoient à l'exposition du levant pa- rurent ensuite, puis ceux de l'exposition du \ LA à PEN TTE .» ; “et Ex pl LR He Ph La Mir NE id L { das HISTOIRE NATURELLE, couchant, et enfin ceux de l'exposition du. nord. AE ae: Le 98 avril, la gelée se Gt48dtr cer te de ment le matin, par un vent du nord , le ciel 3 étant fort serein et l'air fort sec , sur-tout depuis trois jours. TS IL alla voir en quel état étohéa les bour- geons autour des bouquets, et il les trouva _gâtés et absolument noircis dans tous les en- droits qui étoient exposés au midi et à l’abri du vent du nord, au lieu que ceux-qui étoient exposés au vent froid du nord, qui souffloit encore, u’étoient que légèrement : endommagés , et il fit la mème observation . autour de tous les bouquets qu'il avoit fait réserver. À l'égard des expositions du levant et du couchant, elles étoient, ce jour-là , à peu près également endommagées., Les 14, 15 et 22 mai, qu’il gela assez vive- ment par les vents de nord et de nord-nord- ouest , il observa pareillement que tout ce qui étoit à l'abri du vent par les bouquets, ï étoit très-endommagé, tandis que ce qui avoit été exposé au vent, avoit trés-peu souf- ‘ fert. Cette expérience nous paroît décisive et fait voir que, quoiqu'il gèle plus fort aux : ! / PARTIE EXPÉRIMENTALE. 345 . endroits exposés au vent du nord qu'aux ‘autres, la gelée y fait Éd nn moins de tort aux végétaux. Ce fait est assez opposé au préjugé ordi- maire; mais il n'en est pas moins certain, et même il est aisé à expliquer : il suffit pour cela de faire attention aux circonstances dans lesquelles la gelée agit, et on reconnoiïtra que . l'humiditéest la principale cause de ses effets, en sorte que tout ce qui peut occasionner cette humidité, rend en mème temps la gelée _ dangereuse pour les végétaux, et tout ce qui dissipe l'humidité, quand même ce seroit en augmentant le froid, tout ce qui dessèche diminue les désordres de la gelée. Ce fait va être confirmé par es d'observa= tions. :- Nous avons souvent remarqué que dans les endroits bas, et où il règne des brouillards, 1x gelée se fait sentir plus vivement et plus souvent qu'ailleurs. Nous avons, par exemple, vu en automne et au printemps les plantes délicates gelées dans un jardin potager qui est situe sur le. . bord d'une rivière, tandis que les mêmes plantes se conservoient bien dans un autre 4 pots qui est situé a la Han Doll 1 { forêts, le bois n’est jdmais d’une belle venue même, dans les vallons et les lieux bas des ni d’une bonne qualité, quoique souvent ces vallons soient sur un meilleur fonds que le L. reste du terrain. Le taillis n’est jamais beau dans les endroits bas ; et quoiqu'il y pousse \ plus tard qu ailleurs, à cause d’une fraîcheur | qui y est toujours concentrée, et que M. de Buffon m'a assureavoir remarquée même l'été en se promenani la nuit dans les bois, car il a y sentoit sur les eminences presque au tant de chaleur que dans les campagnes découvertes, | et dans les vallons il étoit saisi d’un froid vif et inquiétant ; quoique, dis-je, le bois y: pousse plus tard qu'ailleurs, ces pousses sont encore endommagées par la gelée, qui, eu satant les principaux jets , oblige les arbres … à pousser des branches latérales, ce qui rend. les taillis rabougris et hors d’élat de faire jamais de beaux arbres de service : et ce que nous venons de dire ue se doit pas seulement entendre des profondes vallées, qui sont si susceptibles de ces inconvéniens, qu’on eu remarque d’exposées au nord et fermées du côté du midi en cul-de-sac, dans lesquelles 4 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 347 | il gèle souvent les douze mois de l'année ; : mais on remarquera encore la même chose dans les plus petites vallées , de sorte qu'avec un peu d'habitude on peut reconnoître sim plement à la mauvaise figure du taillis la pente du terrain. C’est aussi ce que j'ai re- marqué plusieurs fois, et M. de Buffon l’a particulièrement observé le 28 avril 1734; car ce jour-là les bourgeons de tous les taillis d'un an, jusqu'à six et sept, étoient gelés dans tous les lieux bas, au lieu que, dans les endroits élevés et découverts, il n’y avoit que les rejets près de terre qui fussent gâtés. . La terre étoit alors fort sèche , et l'humidité de l'air ne lui parut pas avoir beaucoup con- . tribué à ce dommage. Les vignes non plus que les noyers de la campagne ne gelèrent pas : cela pourroit faire croire qu'ils sont moins délicats que le chène; mais nous pen- sous qu'il faut attribuer cela à l’humidité , qui est toujours plus grande dans les bois que dans le reste des campagnes , car nous. avons remarqué que souvent les chênes sont fort endommagés de la gelée dans les forêts, pendant que ceux qui sont dans les haies ne le sont point du tout. 348 HISTOIRE NATURELLE: Dans le mois de mai 1736, nous avons encore eu occasion de répéter deux fois cette observation , qui à même été accompagnée À de circonstances particulières, mais dont . nous sommes obligés de remettre le déqail à un autre endroit de ce Mémoire, pour en faire mieux sentir la singularité. Les grands bois peuvent rendre les taillis X qui sont dans leur voisinage, dans le même état qu’ils seroient das le fond d’une vallée: : aussi avons-nous remarqué que le long et près des lisières de grands bois , les taillis sont | plus souvent endommagés par la gelée que … dans les endroits qui en sont éloignés; comme dans le milieu des taillis et dans les bois où on laisse un grand nombre de baliveaux, elle se fait sentir avec bien plus de force que dans ceux qui sont plus découverts. Or tous les désordres dont nous venons de parler, soit. à l'égard des vallées, soit pour ce qui se trouve le long des grands bois, ou à couvert par les baliveaux , ne sont plus considérables dans ces endroits que dans les autres, que parce que le vent et le soleil ne pouvant dissiper la transpiration de la terre et des.” plantes, il y reste une humidité considé- ff LÉ po 14108 PARTIE EXPÉRIMENTALE. 34) rable, qui, comme nous l'avons dit, cause un très-grand préjudice aux plantes, Aussi remarque-ton que la gelée n’est ja- mais plus à craindre pour la vigne, lesfleurs, les bourgeons des arbres, etc. que dors- qu’elle succède à des brouillards, ou même -à une pluie, quelque légère qu'elle soit: toutes ces plantes supportent des froids très- considérables sans en être endommagées lors- qu'il y a quelque temps qu'il n’a plu, et que la terre est fort sèche, comme nous l’avons encore éprouvé ce printemps dernier. C’est principalement pour cette même rai- son que la gelée agit plus puissamment dans les endroits qu'on a fraichement läbourés qu'ailleurs, et cela parce que les vapeurs qui s'élèvent continuellement de la terre, transpirent plus librement et plus abondam-, ment des terres nouvellement labourées que des autres; il faut néanmoins ajouter à cette raison , que les plantes fraîchement labou- rées poussent plus vigoureusement que les autres, ce qui les rend plus sensibles aux effets de la ‘gelée. De même, nous avons remarqué que dans les terrains Jégers et sablonneux la gelée à | 30 : - \ céd ! D PA P ul VER A \ \ n°! \ 350 HISTOIRE NATURELLE. | fait plus de dégâts que dans les terres fortes, en les supposant également sèches, sans doute | parce qu'ils sont plus hâtifs, et encore plus parce qu’il s'échappe plus d’exhalaisons des. ces sortes de terres que des autres, comme nous le prouverons ailleurs; et si une vigne nouvellement fumée est plus: sujette à être: endommagée de la gelée qu'une autre, n’est- ce pas à cause de l'humidité qui s D des fumiers ? Un sillon de vigne qui est le long d'un. champ de sainfoin ou de pois, etc. est sou- vent tout perdu de la gelée lorsque le reste de la vigne est très-sain ; ce qui doit certaine- ment être attribué à la transpiration du sain. foin ou des autres plantes qui portent une humidité sur les pousses de la vigne. Aussi, dans la vigne, les verges qui sont | de long sarment, qu'on ménage en taillant,. sont-elles toujours moins endommagées que la souche , suür-tout quand, n'étant pas atta- chées à l’échalas , elles sont agitées par le vent qui ne tarde pas de les dessécher. | La même chose se remarque dans les bois, et j'ai souvent vu dans les taillis tous les bourgeons latéraux d’une souché entièrement æ LD PARTIE EXPÉRIMENTALE. 351 sâtés par la gelée, pendant que les rejetons supérieurs n’avoient pas souffert: mais M. de Buffon a fait cette même observation avec plus d’exactitude ; il lui a toujours paru que la gelée faisoit plus de tort à un pied de terre qu'à deux, à deux qu’à trois, de sorte qu’il faut qu’elle soit bien violente pour gâter les bourgeons au-dessus de quatre pieds. Toutes ces observations, qu’on peut re- garder comme très-constantes , s'accordent donc à prouver que le plus souvent ce n’est pas le grand froid qui endommage les plantes chargées d'humidité; ce qui explique à merveille pourquoi elle fait tant de dé- sordres à l'exposition du midi, quoiqu'il y fasse moins froid qu’à celle du nord; et de même la gelée cause plus de dommage \ à l’exposition du couchant qu'à toutes les autres, quand, après une pluie du vent d'ouest, le vent tourne au nord vers le soleil couché, comme cela arrive assez fréquem- ment au printemps, ou quand, par un vent d'est, il s’èleve un brouillard froid avant le lever du soleil, ce qui n’est pas si ordinarre. IL y a aussi des circonstances où la gelée -fait plus de tort à l'exposition du levant qu'à mou KR: Fes de ne tn LC ue M ù se: qi LA 352 HISTOIRE NATURELLE. 14 toutes les autres : s Mais, comme nous avons - plusieurs observations sur cela , nous rap porterons auparavant celle que nons avons faite sur la gelée du printemps de 1736, qui nous a fait tant de tort l’année dernière. Comme il faisoit très-sec ce printemps, ila gelé fort long-temps sans que cela ait endom- magé les vignes; mais il n’en étoit pas de même dans les forêts, apparemment parce qu’il s’y conserve toujours plus d'humidité qu'ailleurs : en Bourgogne, de même que dans la forêt d'Orléans , les taillis furent endommagés de fort bonne heure. Enfin la gelée augmenta si fort, que toutes les vignes à furent perdues, malgré la sécheresse qui continuoit toujours; tais au lieu que c’est ordinairement à l’abri du vent que la gelée fait plus de dommage, au contraire, dans le printemps dernier, les endroits abrités ont été les seuls qui aient été conservés ; de sorte que, dans plusieurs clos de vignes entourés de murailles, on voyoit les souches le long de l'exposition du midi être assez vertes, pen-- dant que toutes les autres étoient sèches comme en hiver, et nous avons eu deux can- tons de vignes d’épargnés, l’un parce qu'il PARTIE EXPÉRIMENTALE, 353 étoit abrité du vent du nord par-une pépi- nière d’ormes, et l’autre parce que la vigne étoit remplie de beaucoup d’arbres fruitiers. Mais cet effet est très-rare , et. cela n’est arrivé que parce qw’il faisoit fort sec, et que les vignes ont résisté jusqu’à ce que la gelée soit devenue si forte pour la saison , qu’elle pouvoitendommager Les plantesindependam- ment de l'humidité extérieure; et, comme nous l'avons dit, quand la gelée endommage les plantes indépendamment de cette humi- dité et d’autres circonstances particulières, c'est à l'exposition du nord qu’elle fait le plus de dommage, parce que c’est à cette exposition qu’il fait plus de froid. sai Mais il nous semble- encore appercevoir une autre cause des désordres que la gelee produit plus fréquemment à des expositions qu’à d’autres, au levant, par exemple, plus qu’au couchaut ; elle est fondée sur l’obser- vation suivante, qui est aussi constante au les précédentes. Une gelée assez vive ne cause aucun pré- * judice aux plantes quand elle fond avant que le soleil les ait frappées : qu’il gèle la nuit, si le matin le temps est couvert, s’il tombe - 59 4 AA a ANR NME NONERES 354 HISTOIRE NATURELLE. une petite pluie, en un'motsi, par quelque cause que ce puisse être, la-glace fond dou- _ cement et Hide dede de l’action du soleil, ordinairement elle ne les endommage | pas; et npus AA OMRÉ souvent sauvé dés plantes assez délicates qui étoient par hasard restées à la gelée, en les rentrant dans la serre o4 J avant le lever du soleil, ou simplement en les couvrant avant que le soleil eût douné dessus. Une fois entre autres , il étoit survenu en automne une gelée £rès-forte pendant que nos orangers étoient dehors ; et comme :} étoit tombé de la pluie la veille, ils étoient tout couverts de verglas : on leur sauva cet accident en les coufrant avec des draps avant le soleil levé, de sorte qu'il n’y eut que les jeunes fruits et les pousses Les plus tendres qui en furent endommagés ; encore sommes- nous persuadés qu’ils ne l’auroient pas éte si la couverture avoit été plus épaisse. De mème, une autre année, nos geranium, et plusieurs autres plantes qui craignent le verglas, étoient dehors lorsque tout-à-coup le vent, qui étoit sud-ouest, se mit au nord, et fut si froid, que toute l’eau d'une pluie 4 | À Fi PARTIE EXPÉRIMENTALE., 355 abondante qui tomboit, se geloit, et dans un instant tout ce qui y étoit exposé fut couvert de glace : nous crûmes toutes nos plantes perdues ; cependant nous les fimes porter dans le fond de la serre, et nous fimes fermer les croisées ; par ce moyen nous én eûmes peu d’endommasgées. : Cette précaution revient assez à ce qu’on pratique pour les animaux : qu'ils soient itransis de froid , qu'ils aient un membre gelé, on se donne bien de garde de les expo- ser à une chaleur trop vive; on les frotte avec de la neige, ou bien on les trempe dans de l’eau , on les enterre dans du fumier; en un mot, on les réchauffe par degrés et avec meénagement. De même, si l’on fait dégeler trop préci- pitamment des fruits, ils se pourrissent à l'instant, au lieu qu'ils souffrent beaucoup moins de si on les fait dégeler peu à peu. Pour expliquer comment le soleil produit tant dé désordres sur les plantes gelées, ‘quelques uns avoient pensé que la glace, en se fondant, se réduisoit en petiles gouttes d’eau sphériques , qui faisoient autant de 356 HISTOIRE NATURELLE. | petits miroirs ardens quand le soleil donnoît « dessus; mais, quelque court que soit le foyer d'une loupe, elle ne peut produire de chaleur À qu’à une distance, quelque petite qu ’elle soit, | et elle ne pourra pas produire un grand effet sur un corps qu'elle touchera : d’ailleurs la. goutte d’eau qui est sur la feuille d’une plante, estapplatie du côté qu’elle touche à la plante; | ce qui éloigne son foyer. Enfin, si ces gouttes d'eau pouvoient produire cet effet , pourquoi les gouttes de rosée, qui sont pareillement sphériques, ne le produiroient-elles pas aussi? Peut-être pourroit-on penser que les parties les plus spiritueuses et les plus vola- tiles de la séve fondant les premières , elles seroientévaporées avant que les autres fussent en état de se mouvoir dans les vaisseaux de la plante; ce qui décomposeroit la séve. Mais on peut.dire en général que la gelée augmentant le volume des hqueurs, tend les vaisseaux des plantes, et que le dégel ne se. pouvant faire sans que les parties qui com- posent le fluide gelé entrent en mouvement, ce changement se peut faire avec assez de douceur pour ne pas rompre les vaisseaux les plus délicats des plantes, qui rentreront te | * PARTIE EXPÉRIMENTALE, 357 peu à peu dans leur ton naturel, et alors les plantes n’en souffriront aucun dommage : mais, s’il se fait avec trop de précipitation, ces vaisseaux ne pourront pas reprendre sitôt le ton qui leur est naturel, après avoir souf- fert une extension violente; les liqueurs s’é- vaporeront, et la plante restera dessécheée. _ Quoi qu’on puisse conclure de ces conjec- tures, dont je ne suis pas à beaucoup près satisfait, il reste toujours pour constant : 1°. Qu'ilarrive, à la vérité rarement qu’en hiver ou au printemps les nn soient en- dommasées simplement par la grande force de la gelée, et indépendamment d'aucune circonstance particulière; et, dans ce cas, c’est à l'exposition du nord que les plantes souffrent le plus. 2°. Dans le temps d’une gelée qui dure plusieurs jours, l’ardeur du soleil fait fondre la glace en quelques endroits, et seulement pour quelques heures; car souvent il resèle avant le coucher du soleil, ce qui forme un verglas très-préjudiciable aux plantes, et on sent que l’exposition du midi est plus sujette à cet inconvénient que toutes les autres. 3°. On a vu que les gelées du printemps PME EL Fe NE VEN \ f 1R& LA, 2 358 HISTOIRE NATURELLE. font principalement du désordre tan les endroits où il y a de l'humidité : Les terroirs 4 qui transpirent beaucoup, les fonds des . vallées, et généralement tous A endroits qui ne pourront être desséchés par le vent” Ê et le soleil, seront donc plus endommagés | î que les autres. R ‘1 Enfin si, au printemps, le soleil qui donne « sur les plantes gelées, leur, occasionne un dommage plus considérable , il est clair que ce sera l'exposition du levant, et ensuite du midi, qui souffriront le plus de cet accident. Mais, dira-t-on, si cela est, il ne faut douc! plus planter à l'exposition du midi en à-dos. (qui sont des talus de terre qu'on ménage dans les potagers ou le long des espaliers),. les giroflees , les choux des avents, les laitues” d'hiver, les pois verds, et les autres plantes délicates auxquelles on veut faire passer l'hiver, et que l'on souhaite avancer pour le printemps; ce sera à l'exposition du nord qu’il faudra dorénavant planter les pèchers et les autres arbres délicats. Il est à propos. de détruire ces deux objections, et de faire voir qu'elles sont de fausses So it de ce que nous ayons avance. “1 PARTIE EXPÉRIMENTALE, 359 On se proposé différens objets quand on met des plantes passer l’hiver à des abris exposés au midi : quelquefois c’est pour hâter leur végétation ; c'est, par exemple, dans cette intention qu’on plante le longs des espaliers quelques rangées de laitues, qu’on appelle, à cause de cela, des laitues d'hiver, qui résistent assez bien à la gelée, quelque part qu'on les mette, mais qui avancent da- vantage à cette exposition : d’autres fois , c’est pour Les préserver de la rigueur de catte saison , dans l'intention de les replanter de bonne heure au printemps ; on suit, par exemple, cette pratique pour les choux qu’on appelle des avents, qu’on sème en cette saison le long d’un espalier. Cette espèce de choux, de même que les broccolis, sontassez tendres à la gelée, et périroient souvent à ces abris si on n’avoit pas soin de les couvrir pendant les srandes gelées avec des paillassons ou du fumier soutenu sur des perches. _ Enfinon veut quelquefois avancer la végé- tation de quelques plantes qui craignent la gelée, comme seroient les giroflées, les pois verds, et pour cela on les plante sur des à-dos bien exposés au midi; mais de plus on les [) 36 HISTOIRE NATURELLE. | défend des grandes gelées en les couvrant lorsque le temps l'exige. 4 On sent bien, sans que nous soyons obligée M de nous étendre davantage sur cela, que l’ex- position du midi est plus propre que toutes M “à 4 , L4 r . [x les autres à accélérer la végétation , et on vient de voir que c’est aussi ce qu’on se pro-— Û pose principalement quand on met quelques plantes passer l'hiver à cette exposition, puis- . qu’on est obligé, comme nous venons de le _ dire, d'employer, outre cela, des couver-. tures pour garantir de la gelée les plantes qui : sont un peu délicates ; mais il faut ajouter que, s’il y a quelques circonstances où la gelée fasse plus de désordre au midi qu'aux autres expositions , il y a aussi bien des cas qui sont favorables à cette exposition, sur-tout quand il s’agit d’espalier. Si, par exemple, … peudant l’hiver,il ya quelque chose à craindre des verglas, combien de fois arrive-t-il que la chaleur du soleil, qui est augmentée par la réflexion de la muraille, a assez de force pour dissiper toute l'humidité, et alors les plantes sont presque en sûreté contre le froid! De plus, combien arrive-t-il de gelées sèches : qui agissent au nord sans relâche , et qui me. PARTIE EXPÉRIMENTALE, 36r sont presque pas sensibles au midi! De même au printemps on sent bien que si, après une pluie qui vient de sud-ouest ou de sud-est, le vent se met au nord, l’espalier du midi étant à l'abri du vent, souffrira plus que les autres. Mais ces cas sont rares, et le plus souvent c’est après des pluies de nord-ouest ou de nord-est que le vent se met au nord; ‘et alors l’espalier du midi ayant été à l'abri de la pluie par le mur, les plantes qui y seront auront moins à souffrir que lesautres, non seulement parce qu’elles auront moins reçu de pluie, mais encore parce qu'il y fait toujours moins froid qu'aux autres exposi- tions, comme nous l'avons fait remarquer au commencement de ce Mémoire. De plus, comme le soleil dessèche beau= coup la terre le long des espaliers qui sont au midi, la terre y transpire moins qu’ail- leurs. On sent bien que ce que nous venons de dire, doit avoir son application à l'égard des pèchers et des abricotiers, qu’on a coutume de mettre à cette exposition et à celle du levant; nous ajouterons seulement qu'iln’esé pas rare devoir les pêchers geler au levant et Mat, gén, XNII 31 ; Lu) TAF SUR AR UD MUR UML NA = 362 HISTOIRE NATURELLE. au midi, et ne le pas être au couchant ou même au nord : mais , indépendamment de cela, on ne peut jamais compter avoir beau- coup de pêches et de bonne qualité à cette « dernière exposition ; quantité de fleurs tom- bent tout entières et sans nouer; d’autres, après ètre nouées , Se détachent de l’arbre, et celles qui restent ont peine à parvenir à une maturité : j'ai même un espalier de pé- — 6. + Re OR Et chers à l’exposition du couchant, un peu. déclinante au nord, qui ne donne presque pas de fruit, quoique les arbres y soient plus beaux qu'aux expositions du midi et du. nord. Ainsi on ne pourroit éviter les inconvé- niens qu’on peut reprocher à l'exposition du midi à l'égard de la gelée, sans tomber dans | d’autres plus fàcheux. Mais tous les arbres délicats, comme les figuiers, les lauriers, etc. doivent être misau midi, ayant soin, comme l’on fait ordinai- rement , de les couvrir; nous remarquerons | seulement que le fumier sec est préférable … pour cela à la paille, qui ne couvre jamais st exactement, et dans laquelle ilreste toujours un peu de grain qui attire les mulots et les benne > PARTIE EXPÉRIMENTALE. 363 rats, qui mangent quelquefois l’écorce des arbres pour se désaltérer dans le temps de la gelée, où ils ne trouvent point d’eau à boire, ni d'herbe à paitres; c’est ce qui nous est arrivé deux à trois fois : mais quand on se sert de fumier, il faut qu’il soit sec, sans quoi il s’échaufferoit et feroit moisir les jeunes branches. Toutes ces précautions sont cependantbien inférieures à ces espaliers en niche ou en ren- foncement, tels’qu'on en voit aujourd’huiau Jardin du roi; les plantes sont, de cette ma- nière, à l'abri de tous les vents, excepté celui du midi , qui ne leur peut nuire : le soleil, qui échauffe ces endroits pendant le jour, empêche que le froid n’y soit si violent pen- dant la nuit, et on peut avec grande facilité mettre sur ces renfoncemens une légère cou- verture, qui tiendra les plantes qui y seront ; dans un état de sécheresse infiniment propre à prévenir tous les accidens que le verglas et les gelées du printempsauroient pu produire, et la plupart des plantes ne souffriront pas [l . d’être ainsi privées de l'humidité extérieure, _ parce qu’elles ne transpirent presque pas dans l'hiver, non plus qu'au commencement x 5 è LS PR ONE ONE ee ER gen rate à Cl N7VYer ‘a PPS UC } r "HET WA An: Ces Le LS « 364 HISTOIRE NATURELLE: du printemps, de sorte que l’humidité de l'air suffit à leur besoin. Mais puisque les rosées rendent les plantes si susceptibles de la gelée du printemps, ne : pourroit-on pas espérer que les recherches que MM. Musschenbroeck et du Fay ont faites | sur cette matière, pourroient tourner au. profit de l’agriculture? car enfin puisqu'il y a des corps qui semblent attirer la rosée, pendant qu’il y en a d’autres qui la repous- sent, si on pouvoit peindre, enduire ou cré- 7 tie end Ù pir les murailles avec quelque matière qui : repousseroit la rosée, il est sûr qu’on auroit lieu d’en espérer un succès plus heureux que de la précaution que. l’on prend de mettre une planche en manière de toit au-dessus des espaliers; ce qui ne doit guère diminuer l'a- bondance de la rosée sur lés arbres, puisque AT. du Fay a prouvé que sonventelle ne tombe pas perpendiculairement comme une pluie, mais qu’elle nage dans l'air et qu’elle s’at- tache aux corps qu’elle rencontre, de sorte ” qu ’1l a souvent autant amasse de rosée sous un toit que dans les endroits entièrement découverts. Il nous seroit aisé de reprendre toutes PARTIE EXPRIMENTALÉE, 365 \ nos observations , et de continuer à en ti- rer des conséquences utiles à la pratique de l'agriculture ; ce que nous avons dit, par exemple, au sujet de la vigne, doit détermi- ner à arracher tous les arbres qui empêchent le vent de dissiper les brouillards. Puisqu en läbourant la terre on en fait sor- tir plus d'exhalaisons, il faut prêter plus d'attention à ue pas La faire labourer dans les temps critiques. _ On doit défendre expressément qu’on ne sème sur les sillons de vigne des plantes po- tagères, qui, par leurs transpirations, nui- roient à la vigne. | On ne mettra des échalas aux vignes que le plus tard qu'on pourra. On tiendra les haies qui bordent les vignes du côté du nord, plus basses que de tout autre côté. On préférera à amender les vignes avec des terreaux plutôt que de les fumer. Enfin, si on est à portée de choisir un ter- rain , on évitera ceux qui sont dans des fonds ou dans les terroirs qui HR parens beau- . coup. | Une partie de ces précautions peut aussi 3l potagères , que tes ardiial de pu empressés de mettre au pied de leurs buis ; sons , et encore plus le vs. de leurs espa- liers. Te) S'il y a des parties hautes et d’ autres basses dans les jardins, on pourra avoir Fr attention 4 de semer les plantes priudtäauièr es et délicates sur le haut, préférablement au bas, à moins qu’on n'ait dessein de les couvrir avec des cloches, des châssis, etc.; car dans le cas où l'humidité ne peut nuire, il seroit souvent avantageux de choisir les lieux bas pour être à l’abri du vent du nord et de nord-ouest. On peut aussi profiter de ce que nous avons dit à l'avantage des forêts ; car si on a des réserves à faire, ce ne sera jamais dans les endroits où Ja gelée cause tant de dom- mage, Si on sème un Hoiss on aura attention de mettre dans les vallons, des arbres qui soient plus durs à la gelée quele chêne. Quand on fera des coupes considérables, . on mettra dans les clauses du marché, qu’on Les commencera toujours du côté du nord , wé ù "Corel \ PARTIE EXPÉRIMENTALE.. 367 afin que ce vent, qui règne ordinairement dans les temps des gelées, dissipe cette hu- midité qui est préjudiciable aux taillis. _ Enfin si, sans contrevenir aux ordon- nances, on peut faire des réserves en lisières, au lieu de laisser des baliveaux qui , Sans pouvoir jamais faire de beaux arbres, sont, à tous égards , la perte des taillis, et parti- culièrement dans l’occasion présente, en retenant sur les taillis cette humidité qui est si fâcheuse dans les temps de gelée, on aura en même temps attention que la lisière de réserve ne couvre pas le taillis du côté du nord. | Il y auroit encore bien d’autres consé- quences utiles qu'on pourroit tirer de nos observations : nous nous contenterons cepen- dant d’en avoir rapporté quelques unes, parce qu'on pourra suppléer à ce que nous ayons omis , en prétant un peu d'attention aux observations que nous ayons rapportées. Nous sentons bien qu’il y auroit encore sur cette matière nombre d'expériences à faire; mais nous avons cru qu'il n’y avoit aucun inconvénient à rapporter celles que nous avons faites : peut-être même engageront- la même matière; et si elles ne P du pas cet effet, elles ne nous empècheront pas de suivre les vues a LS nous avons ‘encore x sx 15 : Fin du tome dix-septième, D TABLE Des articles contenus dans ce volume. Suite de la partie expérimentale. Oxzièue Mémorre. Expériences sur le force du bois, page 5. Douzrème MÉMOIRE. Article premier. Moyen facile d'augmenter la solidité, la force et la durée ‘du bois, I10. Article IT. Expériences sur le desséchement du bois à l'air, et sur son imbibition dans l’eau, 137. Arucle III. Surla conservation et le rétablissement des forêts, 214. rucle IV. Sur la culture et l'exploitation des forêts, 245. rticle V. Addition aux observations précé- dentes, 271. j L | REIZIÈME MÉMOIRE. Recherches de la cause de l’excentricité des couches ligneuses qu’on ap percoit quand on coupe horizontalement le tronc d’un arbre; de l’inéoalité d’épaisseur, et du diffé- rent nombre de ces Couch ee > tant dans le bois iormé que dans l’aubier, 207. 7 QuATORZIÈME Ménorre. C _ différens effets que per eur Né sur dx) | les grandes gelées d'hiver et bi spots ae Ja PRES, Jao. A AMIS EE HEAR F5 & : . du k 4: _ = = 548 3 x . . ÿ J . ù p” 3 ax ; 0 E ; _ "4 Pa LP 2 ” < "1 d 2 = » s É. 3 à F } 11 AE QE & RAC 2 à “ \ DE L'IMPRIMERIE DE PLASSAN. l ju Le PE RER RL 3 9088 00769 652