-4 "T. 3 :■* >**< ^%- 4-' «^ » - V %u HARVARD UNIVERSITY. LIBRARY • )F THE MUSEUM OF COMPARATIVE ZOOLOGY ^^>\^^ LIBRARV OF LOUIS CA150T, U.C., 1S58. GIFT OF ^: HENRY B. BIGELOW. \ i7?y m 1^1 -3 ^^r .s:lii»> pî-i 3 2044 072 195 274 m -^x» w \ HISTOIRE NATURELLE !D E s QUADRUPÈDES OVIPARES ET DES SERPENS. TOME PREMIER. X.PauJ ^ — camélëou. Kaouane, — caouane. Ï£Apyv^, — crapaud commun. Phrynum , — crapaud commuu. Pisîilloni, — stellion. Plui-ine , — salamandre terrestre. 2 i8 TABLE Poisson de Dieu , — tortue franche. Punter-maal, — salamandre terrestre. R Paine squelette , — '.raine orangée. Rana, — grenouille commune. Pana, — raine verte. Rana aniericana, — epaule-armëe. . Rana aquatica, — grenouille commune. . Rana arborea ,. — raine verte. Rana bicolojis, — raine verte. Rana hufo, — crapaud commun. Rana cornuta, — crapaud cornu. Pana esculenta, — grenouille commune*'' RaJia gibbosa , — crapaud bossu. Rana halecina , — grenouille mugissante. Rana margaritifeTa , — grenouille perlée* Rana marina, — ëpaule-armée. Rana marina maxima , — epaule-armëe. Rana maxima, — patte-d'oie. Rana maxima americana aquatica, — gre- nouille mugissante. Rana maxima compressa miscella, — gre- nouille mugissante. Pana musica, — crapaud criard, Rana mutabilis , — rayon-verd. ALPHABÉTIQUE. 19. Rana ocellata, — grenouille mugissante. Rana paradoxa, — jackie. Rana pentadactyla, — grenouille mugis- sante. Rana piscis, — jackie. Rana ridihunda , — crapaud brun. Rana sitihunda , — crapaud verd. Rana suîinamensis , — pipa. Rana typhonia, • — grenouille galonnée. Rana i^enîricosa, — crapaud goitreux. Rana penulosa , — grenouille rëticulaire. Rana cirglnica, — grenouille galonnée. Rana viridis aquatica, — grenouille com- mune. Ranunculus viridis, — raine verte. Rat de mer, — tortue luth. Rubeta, — crapaud commun. S Sabutis, — tortues terrestres, peut-être tor- tues grecques. Salamander , — salamandre terrestre. Salamandra aquatica , — salamandre à queue plate. Salamandra atra, — salamandre terrestre. Salamandra ceylanica , — salamandre à queue plate. ûô TABLE Saiamandm, — gecko. Salamandra indica, — gecko. Salamandra maculosa, — salamandre ter- restre. Salamandra minima fusca maculis albis fiotata, ■— mabouya. Salamandre , ■— lézard doré. Salamanguesa , — salamandre terrestre. Salamantegua , — salamandre terrestre. Sanki, — tortue grecque. Sargantana, — lézard gris. 2<«up(^ ÊVtfJ))(^^ — salamandre à q^ueue plate. 2fl«yp@o ;^;pop(^ , — lézard verd. 2x/y>c(^ , — scinque. 2>t/yy(^^ — scinque. Scincus, — lézard doré. Scinciis , — scinque. Scincus maximus fiiscus^ — lézard doré. Scincus officinalis j — scinque. Scinq de terre , — lézard doré. Scinq maiin, — lézard doré. Senemhi , — iguane. Seps argus , — lézard gris. Seps cœrulescens , — lézard gris. Seps lemniscatus , — lézard galonné ALPHABÉTIQUE. 21 Seps muralis , — lézard gris. Seps surin a mensis , — améiva. Seps terrestiis, — lézard gris. Seps V avili s , — lézard verd. Seps viridis, — lézard verd. Sourd {le), — salamandre terrestre. Stellio, — salamandre ponctuée. Stellion , ^— lézard verd. Stellione tarentole, — stellion. Stellio punctatus , — double-raie. Stellio saluator, — tupinambis. Stellio saurus, — tupinambis. Suisse, — salamandre terrestre. Taitah , ' — caméléon. Takaie, — crocodile. Tamacolin , — iguane. Tapayaxin , — stellion. Tapayaxin , — tapaye. Tartaruga , — tortue franche. Tassot, — salamandre à queue plate. Tejuguacu , — tupinambis. Temapara , — léaard marbré. Te/napara-tupinambis", — tupinambis. Terrapène , — tortue géométrique. 22 TABLE the Teirapin , — terrapène. Testudo atra , — tortue franche. Testudo caretta , — caouane. Testudo carinata y — tortue bombe'e. Testudo carolina, — tortue courte-queue. Testudo cartilaginea, , — tortue molle. Testudo cephaiô , — caouane. Testudo coriacea , — tortue luth. Testudo cortïcata pel corticosa , — caouane. Testudo denticulata, — tortue dentelée. Testudo europœa, — tortue ronde. Testudo ferox, — tortue molle. Testudo Jimb/iata , — tortue scorpion. Testudo geomettica , — tortue géométrique. Testudo grœca , — tortue grecque. Testudo imbiicata , — tortue caret. Testudo lutaria , — tortue bourbeuse. Testudo lyra> — tortue luth. Testudo marina , — tortue franche. Testudo marina vulgaris , • — tortue franclie. Testudo midas, — tortue franche. Testudo orhicularis , — tortue ronde. Testudo picta seu stellata, • — tortue géomé- trique. Testudo pusilla, — tortue vermillon. Testudo scahra, — tortue raboteuse. ALPHABÉTIQUE. sli Testudo scorpioïdes , — tortue scorpion. Testudo sei-pentina, — tortue serpentine. Testudo squamata, — tortue caret. Testudo teirestris aniboinensis minor, — tor- tue raboteuse. Testudo teirestris major americana , — tortue courte-queue. Testudo terrestris pusilla ex India orientali, — tortue A'errnillon. Testudo terrestris vulgaris, — tortue grecque, Testudo tessellata jninor, — tortue géoiiié- trique. Testudo tessellata jninor af ricana , — tortue vermillon. Testudo tessellata minor carolinensis , — tortue courte-queue. Testudo testa tessellata major, — tortue géo- niétrique. Testudo virginea,- — tortue vermillon. Testudo piridis, — tortue franche. Tilcuetz-pallin, — tupinambis. Tiliguerta, — lézard verd. Tiligugu , — mabouya. Tilingoni, — mabouya. Tokaie , — gecko. Toad, — crapaud commun. 24 TABLE. Tortue à clin , — lortue luth. Tortue amazone, — tortue écaille verte. Tortue à bahut, t- caouaue. Tortue bande blanche , — tortue vermillon. Tortue bâtarde, — tortue nasicoriie. Tortue coffre , — caouane. Tortue mercuriale, — tortue luth. Tortue midas , — tortue franche. Tortue orbiculaire , — tortue ronde. Tortue soldat, — tortue franche. Tortue tuilée, — tortue caret. Tortue vei'te, — tortue ëcaille-verte. Tortue verte, — tortue franche. Tortuga de Garriga , — tortue grecque. Triton cristatus, — salamandre à queueplate. Warral, — lézard marhré. the Water eft, — salamandre à queue plate. Yvana, — iguane. Zermeù?ncah , — algire. TABLE MÉTHODIQUE DES QUADRUPÈDES OVIPARES. PREMIÈRE CLASSE. Quadiupèdes ovipares qui ont une queue. PREMIER GENRE. TORTUES. Le corps couuerl d'une carapace. PREMIÈRE DIVISION. Les doigts irès-inegaux y et alongés en J'arme de nageoires. ESPECES. CA RÀCTE RES. TORTU E fUn seul ongle aigu aux ] F R ANC H S. i de derrière. 26 TABLE ESPÈCES. CARACTÈRES. 'Des écailles vertes sur la ca- EC AILLE-VERTE lapace. ^ ^ f Deux onsles aigus aux pieds C AO U ANE. i , , °.^ ^ ^ (. de difiTiere. Tortue f NASICORNE. [_ Un tubercule élevé sur le museau. Les écailles du disque pla- cées au-dessus les unes des \ autres, comme les ardoises sur les toits. r u T H. < La carapace de consistance de cuir, eti'elevéeparcincj arêtes longitudinales.] SECONDE DIVISION. ILes doigts très-courts et presque e'gaux. ESPÈCES. CARACTÈRES. ILa carapace noire; les écailles striées dans leur contour, et poiutillées dans le cen- tre. Tortue RONDE. MÉTHODIQUE. 27 ESPÈCES. CARACTÈRES. < La carapace applatie et ronde. Te rrapÈNE. La carapace applaiie et ovale» fLa queue aussi longue c|ue la carapace, qui paroît dé- coupée par -derrière en cjnq pointes aiguës. Tortue f Du jaune rougeâtre sur la ROUGE ATRE. 1 tête et sur le plastron. Tortue scorpion. ''La carapace relevée par trois arêtes longitudinales, les cinq écailles du milieu du disque très-alongées, le plastron ovale. Tortue f La carapace verte, semée de jaune. 1 taches jaunes. Tortue jLa carapace souple , et sans MOLLE. 1 écailles proprement dites. ILa carapace très-bombée , les bords très-larges , les doigts recouverts par une membrane. ^d TABLE ESPÈCES. CARACTÈRES. (Des rayons jaunes qui se réunissent sur chaque écaille , à un centre de la même couleur.^ Les écailles de la carapace blanchâtres, et présentant Tortue I ^^ très-petites bandes uoi- rIboteuse. \ ï'^^li^es, celles du milieu du disque relevées en arêie, le plastron festonné par- devant. Tortue \^^ carapace un peu en forme DENTELÉE. ) ^^e cœur, les bords de cette ^ couverture très-dentelés. {La carapace très - convexe ; les écailles verdâtres, rayées de jaune ; le plastron ovale. (Les écailles de la carapace variées de noir, de blanc, de pourpre, de verdâtre et de jaune. !La carapace échancrée par- devant ; les écailles de cette couverture bordées de stries etpointillées dans le milieu. METHODIQUE. 29 ESPÈCES. CARACTERES. J Le disque os Tortue Jj^^ disque osseux et cliagriué. CH AGRI NÉE. r Tortue I ROUSSATRE. 1 f Tortue I NOIRATRE. I La couleur roussatre, la ca- rapace applalie, les écailles miuces. La couleur brun noirâtre, les écailles épaisses et très- douces au toucher. SECOND GENRE. LÉZARDS. Le corps sans carapace. PREMIÈRE DIVISION, T^a /jjieue applatie g cinq doigts aux pieds de devant» ESPÈCES. CARACTÈRES. rQualre doigts palmé; ROC GDI LE. } pieds de derrière, la co \ leur d'uu verd jaunâtre- mes aux cou- 3o TABLE ESPÈCES. CARACTÈRES, f 'rocodile noir.-\ Quatre doigts palmes aux- pieds de derrière, la cou- leur noire. Quatre doigis palmi's aux Gavial. ) V^^^^ ^^ derrière , ]cs luâ- choires très-éiroites et très- alongées. Fouette-queue, /^'"^'^"^gfs palmes aux pieds l de derrière. Cinq doigts s«5parés aux pieds Dragonne. ) ^^ dm-ière, des écailles relevées en forme de créie sur la queue. Des doigts séparés à chaque I pied; les écailles ovales, TUPINAMBIS. ^ entourées de très-peliis grains tuberculeux, et non relevées en forme de crête. 'Une arête saillante au-dessus L E' Z A R D ) ^^^^ ^^^'^ ' ^^^ «écailles re- SOURCILLEUX.^ ^^'^^' ^'' ^"'"^^ ^^ "^^^' depuisla tête jusqu'au bout de la queue. Large-doigt. MÉTHODIQUE. 3î ESPÈCES. CARACTÈRES. TÊTE-FOURCHUE./Deux émiuences au-.îessu3 l de la tête. Uue membrane sous Ife cou , l'avant-dernièfe articula- tion de chaque doigt plus large que les autres. LÉZARD fDeux grandes taches nei- SIMACULÉ. 1 râtres sur les épaules. 'Deux stries sur le dos, les T . I côtés du corps plissés et LEZARD I fij relevés en arête, le dessus de la queue relevé par une double saillie. SILLONNÉ. SECONDE DIVISION. JLa queue ronde, cinq doigts à chaque piedj ei des écailles élevées sur le dos en forme de - ■ . , > ^-. ■■■■'.: crête. ■ ESPÈCES C ÀR A'c'tI'RÏS. \ •i'-'\ A'x'i '^■'■.1 'Une poche sous le cou; des écailles relevées. eu forme \ Iguane. •{ de crête sous la gorge, et depuis la tête jusqu'au bout de la queue. 22 TABLE ESPÈCES. CARACTÈRES. Basilic. Une poche sur la tête. I Une membrane très-relevée, Lézard j ^^ une sorte de crête écail- PORTE-CRÈTE.j Jeuse au-dessus de la y queue. ÎDcs écailles relevées au-des- sous des ouvertures des oreilles, et depuis la tète jusqu'au milieu du dos; le dessus des ongle.s noir. Des écailles relevées en forme de crête au-dessus de. la A G A M E. } P""""''^ antérieure du dos; celles qui garnissent le derrière de îa tête, tournées vers le museau. TROISIÈME DIVISION. Za gueue ronde, cinq doigts aux pieds de dcpant, des landes écailleuses sous le ventre. ESPÈCES. CARACTÈRES. XiZARD GRI s./^^ ^^"^^""^ g"^^» ^° grandes ( plaques sOus le cou. M É T H O D 1 Q U E.' 33 ESPÈCES. CARACTÈRES. _ , „ f La couleur verte, de grandes Lez A R D VERD.{ , / ^ (, plaques sous le cou. 'La queue garnie de trts- longues écailles terminées CORDYLE. / en épines alongées, et qui forment des anneaux larges et festonnés. LÉZARD fLa queue présentant si?: HEXAGONE *. I arêtes très-vives. La couleur grise ou verte , A M É I V At ^ sans grandes écailles sous le cou> Trois raies blanches et trois LÉZARD LIO N."( raies noires de chaque côté du dos. 'Depuis sept jusqu'à onze 1/ É Z A R D I bandes" blanchâtres sur le GALONNÉ. I dos ; les cuisses mouche- tées de blanc. * Nous n'avons pas vu l'hexagone, nous présumoas qu'il a des bandes écailleuses sur le ventre. S'il n'en avoit point , il faudroit le placer dans la quatrième division , après le téguixin. 34 TABLE QUATRIÈME DIVISION. X.a queue ronde, cinq doigts aux pieds de dei>anîj, sans bandes écaiUeuses sous le ventre. ESPÈCES. CARACTÈRES, f Les doigts rJunis trois à Caméléon. / trois, cl deux à deux, par une meiïibrâue. Queue-bleue. /^''''ï ""^^^^ jaunâtres sur le f .•\~,r vc ( dos, la queue bleue. Lézard azuré. /^^^ ^^^'^^^^ pointues, le dos 1 bien. TLa couleur grise , marquée G R I s o N. < de points roussâtres ; des y verrues sur le corps. U M B R E *. (^^^ callosité sur rocçiput» \ un pli sous la gueule. * Comme nous n'avons pas vu la queue-bleue, l'azuré, le grison , l'umbre , ni le plissé , nous pouvons seule- ment présumer, d'après les descriptions des auteurs , que ces cinq lézards n'ont point de bandes écaiUeuses survie, ventre. S'ils en avoient , il faudr.oit les placer dans la troi-? Sième division , à la suite du galonné. MÉTHODIQUE. 3â DSPÈCIS. CARACTÈRES. rDeux plis sous la gueule , T ' • I deux verrues garnies de Lézard plisse. J ,.,=', pointes derrière les ouver- tures des oreilles. ^ ( Quatre raies jaunes sur le Al gire. "S j l dos. Tout le corps garni de tu- r> ^ I bercules aigus , la queue erte d anneaux den- riout le I bercu ON. < I couve l. télés. ''Tout le corps garni d'écaillés qui se recouvrent comme S C I N Q U E. ^ les ardoises des toits , la mâchoire supérieure plus avancée que l'inférieure. 'Tout le corps garni décailles qui se recouvrent comme les ardoises des toits, -la MaBOUîA. { mâcbuire inférieure aussi avancée que la supérieure, la queue plus courte que le corps. T A P A Y E. 36 TABLE ESPÈCES. CARACTÈRES. Tout le corps garni d' écailles qui se recouvrent comme _ , . r les ardoises des toits, une Lézard DORE. < • . i , . , , raie clancnatre de chaque côté du dos, la queue plus longue c[ue le corps. i Le corps arrondi et garni de \ pointes aiguës. {Six raies jaunes sur la tête» cinq raies jaunes sur le corps. Des écailles relevées en forme de petites dents sous la LÉZARD MARBRÉ.'^ gorge, le dessus des ongles noir, la queue relevée par neuf arêies longitudinales. La couleur de feuille morte, marquée de taches jaunes R 0 Q U B T. K et noirâtres ; une petite membrane de chaque coté de l'extrémité des doigts. (La couleur verte, une vési- KOUGE-GORGE. < , , i cule rouge sous la gorge. La couleur grise mêlée de LÉZARD brun, une poche couverte GOITREUX. I de petits grains rougeaires sous la gorge. M È T HO D I Q U E. 37 ESPÈCES. CARACTÈRES. ■ ^ _, ' ( Plusieurs plis le loDe des c6- Teguixin. > ,,' ^ I tes du corps. T - f L'extrémité de la queue en Lézard I ? TRIANGULAIRE.! ^orme de pyraimde a trois V. laces. /■Deux raies d'un jaune sale, D OUB LE-RAIE. < et six rangées de points (. noirâtres sur le dos. „ ( De petites plaques écailleu- Sputateur. -^ ^ ,, , l ses au bout des doigts. CINQUIÈME DIVISION. X.es doigts garnis par-dessous de grandes écailles^ (jui se recout>rent comme les ardoises des toits* ESPÈCES. CARACTÈRES. {Des tubercules sous les cuis- ses, de très-petites écailles disposées sur la queue en bandes circulaires. Geckotte. i^"" '^^''''"' ^^^ ^"^''" ^^"s l tubercules.^ iLe dessous du corps et de la tête très-applati- la queue garnie, des deux côtés, d'une nnembrane. 38 TABLE SIXIÈMEDIVISION. Trois doigts aux pieds de datant et aux pieds de derrière* ESPÈCES. CARACTÈRES. (Les écailles placées les unes S F. P S. lacée au- dessus et Tautre au - dessous du corps. Les côtes et Tépine du dos font partie de la supérieure , que Ton appelle carapaces- lit rinférieure, que Ton womvaG plastion , est réunie avec les os qui composent le" sternum. Ces deux couvertures ne se tou- chent et ne sont attachées ensemble que par les côtés ; elles laissent deux ouver- tures , l'une devant , et l'autre derrière : la première donne passage à la tête et aux , deux pattes de devant ; la seconde aux deux pattes de derrière , ii la queue et à la partie du corps où est situé l'anus. Lorsque les tortues veulent ou marcher ou nager , elles sont obligées d'étendre leur tête, leur col et leurs pattes , qui paroissent alors à l'extérieur ; et ces di- vers membres , ainsi que la queue , le devant et le derrière du corps , sont cou- verts d'une peau qui s'attache au-dessous des bords de la carapace et du plastron , qui forme plusieurs plis lorsque les pattes ïo6 HISTOIRE NATURELLE , et la tète sont retirées , qui est assez ïâclie pour se prêter à leurs divers luouveiiiens d'extension , et qui est garnie de petites écailles comme celle des lézards , des ser- pens et des poissons , avec lesquels elle' donne aux tortues un trait de ressem- blance. La tète , dans presque toutes les espèces de ces animaux , est un peu arron- die vers le museau , à Fextrémité duquel sont situées les narines. La bouche est placée en dessous ; son ouverture s'étend jusqu'au-delà des oreilles. La mâchoir© supérieure recouvre la mâchoire infé- rieure. Elles ne sont point communément garnies de dents ; niais les os qui les composent, sont festonnés et assez durs pour que les tortues puissent briser aisé- ment des substances très-compactes. Cette position et cette conformation de leur bouche leur donnent beaucoup de facilité pour brouter les algues et les autres plantes dont elles se nourrissent. Dans presque toutes les tortues , la place des oreilles n'est sensible que par les plaques ou écailles particulières qui les recou- vrent. Leurs yeux sont gros et saillans. DES TORTUES. T07 Le plastron est presque toujours plus court que la carapace , qui le déborde et le recouvre par-devant, et sur-tout par-der- rière ; il est aussi moins dur, et souvent presque plat. Ces deux boucliers sont composés de plusieurs pièces osseuses , dont les bords sont comme dcjitelés , et qui s'engrènent les unes dans les autres d'une manière plus ou moins sensible ; dans certaines espèces , celles du plastron peuvent se prêter à quelques mouverneus. La couverture supérieure, ainsi que Tin- férieure, sont garnies de lames ou écailles qui varient par leur grandeur, par leur forme et par leur nombre , non seulement suivant les espèces, mais même suivant les individus ; quelquefois le nombre et la figure de ces écailles correspondent à ceux des pièces osseuses qu'elles cachent. On distingue les écailles qui revêtent la circonférence de la carapace, d'avec celles qui en recouvrent le milieu. Ce milieu est appelé disque; il est le plus souvent couvert de treize ou quinze lames, placées en long sur trois rangs : celui du milieu est de cinq lames , et les deux io8 HISTOIUE NATURELLE des côtés sont de quatre. La bordure est. commuuément garnie de vingt-deux ou yingt-cinq lames ', le nombre de celles du plastron Tarie de douze à quatorze dans certaines espèces, et de yingt-deux.ù Tingt-quatre dans d'autres. Ces écailles toudDcnt quelquefois par Teffet d'une grande dessiccation ou de quelque autre accident-, elles sont à demi transparentes, pliantes , élastiques : elles présentent dans certaines espèces, telles que le caret , etc., des couleurs assez belles pour être reclicr- cbées et servir à des objets de luxe ; et ce qui les rend d'autant plus propres à être employées dans les arts , c'est qu'elles se ramolfissent et se fondent à un feu assez doux , de manière à être réunies , mou- lées , et à prendre toutes sortes de figures. Les tortues sont encore distinguées df s autres quadrupèdes ovipares par plu- sieurs caractères intérieurs assez remar- quables , et particulièrement par la gran- deur très-considérable de la vessie, qui manque aux lézards , ainsi qu'aux qua- drupèdes ovipares sans queue. Elles en diffèrent encore par le nombre des ver- DES TORTUES. 109 tèbres du cou ; nous eu avons compté linit dans la tortne de mer appcleç la tortue franche , dans la grecque^ et dans la tortue d'eau douce que nous avons r.ommée la jaune, tandis que les croco- diles n'en ont que sept, f[ue la plupart des autres lézards n'en ont Jamais au- dessus dp quatre, et que les quadrupèdes ovipares sans queue en sont entièrement privés. Tels sont les principaux traits de la conformation générale des tortues. Nous connoissons vingt-quatre espèces de ces animaux; elles diffèrent toutes les unes des autres par leur grandeur , et par d'autres caractères faciles à distinf^uer. La carapace des grandes tortues a depuis quatre jusqu'à cinq pieds de long , sur trois ou quatre pieds de largeur : le corps entier a quelquefois plus de quatre pieds d'épaisseur verticale à l'eudroit du dos le plus élevé. La tcte a environ sept ou huit pouces de long et six ou sept pouces de large : le cou est à peu près dp la même longueur, ainsi que la queue. Le poids total dç ces grandes tortues excède ordi- Cyi-ya'c;, I- 10 110 HISTOIRE NATURELLE uairemcnt liuit cents livres, et les deux couvertures eu pèsent à peu près quatre cents. Dans les plus petites espèces , au, contraire , on ne compte que quelques pouces depuis rexti:éiuité du mviseau jusqu'au bout de la queue , même lors- que toutes les parties de la tortue sont étendues , et tout l'animal ne pèse pas quelquefois une livre. Les vingt - quatre espèces de tortues diffèrent aussi beaucoup les unes des autres par leurs liabitudes : les unes vivent presque toujours dans la mer; les autres , au contraire , préfèrent le séjour des eaux douces ou des terrains secs et élevés. Nous avons cru d'après cela devoir former deux divisions dans le genre des tortues. Nous plaçons dans la première six espèces de ces animaux , les plus grandes de toutes, et qui habitent la mer de préférence. Il est aisé de les distinguer d'avec les autres , en ce que leurs pieds très-alongés , et leurs doigts très - inégaux en longueur et réunis par une membrane , représentent des na- geoires dont la longueur est souvent de D E s T O R T U E s. m deux pieds, et égale par conséquent plus du tiers de celle de la carapace. Leurs deux boucliers se touchent d'ailleurs de chaque côlé dans une plus jurande por- tion de leur circonférence ; Touverture de devant et celle de derrière sont par-là moins étendues , et ne laissent qu'uu ])assage plus étroit à la griffe des oisenux de proie, et aux dents des caunajis, des tigres, des couguars, et des autres einiemis des tortues : mais la plupart des tortues marines ne cachent qu'à demi leur tête et leurs pattes sous leur carapace , et ne peuvent j)as les y retirer eu entier, comme les tortues d'eau douce ou ter- restres. Les écailles qui revêtent leur plas- iron, au lieu d'être disposées sur deux rangs, comme celles du plastron des tor- tues terrestres ou d'eau douce, forment quatre rangées, et leur nombre est beau- cou |> plus grand. Les tortues marines représentent parmi les quadrupèdes ovipares la nombreuse tribu des quadrupèdes (vivipares com- posée des /morses, des lions marins, des lamanlius et des phoques, dont les doigts 112 HÎStOlRE NATURELLE v^ont également réunis , et qui tous ont plutôt des nageoires que des pieds : comme cette tribu, elles appartiennent bien plus à l'élément de l'eau qu'à celui de la terre, et elles lient également Tordre dont elles font partie, avec celui des poissons, aux- quels elles ressemblent par une partie de leurs habitudes et de leur conformation. Nous composons la seconde division de toutes Jes autres tortues qui habitent, tant au milieu des eaux douces que dans les bois et sur des terrains secs j nous y comprenons par conséquent la, tortue de terre nommée /a giecque, qui se trouve dans presque tous les pays chauds, et la tortue d'eau douce appelée la bourheuse , qui est assez commune dans la France méridionale et dans les autres contrées tempérées de l'Europe. Toutes les tortues de cette seconde division ont les pieds très-ramassés , les doigts très-courts et presque égaux en longueur :. ces doigts, garnis d'ongles forts et crochus, ne res- semblent point à des nageoires. La cara- pace et le plastron ne sont réunis l'un à l'autre que dans une petite portion de D E s T O R T U E s. tt3 leur contour : ils laissent aux diCfcrentes parties des tortues plus de facilité pour leurs divers mouveuieus ; et cette plus grande liberté leur est d'autant plus utile, qu'elles marchent bien plus souvent qu'elles ne nagent. Leur couverture su- ])érieure est d'ailleurs coniniunénientbieii plus bombée : aussi , lorsqu'elles sont renversées sur le dos, peuvent - elles la plupart se retourner et se remettre sur leurs pattes , tandis que presque toutes les tortues marines, dont la carapace est l^eaucoup plus plate, s'épuisent en efforts iiîutiles lorsqu'elles ont été retournées, et ne peuvent point reprendre leur pre- jiiière position. 10 114 HISTOIRE NATURELLE PREMIÈRE DIVISION. TORTUES DE MER. LA TORTUE FRANCHE *. U N des plus beaux présciis que la Nature ait faits aux liabitaus des contrées équa- toriales , une des productions les plus utiles qu'elle ait déposées sur les conlius de la terre et des eaux, est la grande tor- tue de mer, à laquelle on a donné le nom de tortue franche. L'homme emploieroit avec bien moins d'avantage le grand art de la navigation, si, vers les rives éloignées où ses désirs l'appellent , il ne trou voit dans une nourriture aussi * En latiu, iestndo marina., et mus marinas j en anglois, the green tiirtlc ; jurucua j au Brésil; tartaruga y par les Poringais. 'loin J // /./]/(/ //^. f'>r^-. y LA TORTUE FRANCHE. ^.I.ÏL CARE.T. pauifuer un remède assure contre les suites funestes d'un long séjour dans un espace resserre , et au milieu de substances à demi putréfiées, que la clia- bur et l'humidité ne cessent d'altérer *. Cet aliment précieux lui est fourni par les tortues franches ; et elles lui sont d'autant plus utiles, qu'elles habitent sur- tout ces contrées ardentes où une cha- leur plus vive accélère le développement de tous les germes de corruption. Ou les rencontre en effet en très-grand nombre sur les côtes des îles et des contineus si- tués sous la zone torride, tant dans l'an- cien que dans le nouveau monde. Les bas-fonds qui bordent ces îles et ces con- tineus, sont revêtus d'une grande quan- tité d'algues et d'autres plantes que la mer couvre de ses ondes, mais qui sont * On fait des bouillons de tordues francbes, que l'on regarde comme excellens pour les puliiioni- <|iies, les cachectiques, les scorbutiques, etc. La chjir de cet animal renferme un suc adoucissant, nourrissant, incisif et diaphorétique, dont j'ai éprouvé de très-bons effets. Q Note communiquée par M' de la Burdej médecin du roi à Cayewie.') it6 histoire naturelle assez p'iès' de ia surface des eanx poîir qu'on piiisse les distinguer Facilement lorsque le temps est calme. C'est sur ces espèces de .prairies que Ton voit les tor- tues franches se promener paisiblement. Elles se nourrissent de l'iierbe de ces pâtuiragcs. jElies-ont quelquefois six ou sept pieds de longueur, à compter depuis le bout du museau jusqu'à l'extrémité de Iq. queue, sur trois ou quatre de largeur et quatre pieds ou environ d'épaisseur dans l'endioit le plus gros du corps : elles pèsent alors près de huit cents livres. Elles sont en si grand nombre , qu'on seroit tenté de les regarder comme une espèce de troupeau rassemblé à dessein pour la nourriture et le soulagement des navigateurs qui abordent auprès de ces bas - fonds ; et les troupeaux marins qu'elles forment, le cèdent d'autant moins à ceux qui paissent l'herbe de la surface sèche du globe, qu'ils joignent à un goût exquis et à une chair succulente et subs- tantielle une vertu des plus actives et ' des plus salutaires. La tortue franche se distingue facile- D E s T O R T U E s. 117 ment des autres par la forme de sa cara- pace. Cette couverture supérieure, qui a quelquefois quatre ou cinq pieds de long sur trois ou quatre de largeur, est ovale et entourée d'un bord composé de lames, dont les plus grandes sont les plus éloi- gnées de la tcte, et qui, terminées à l'exté- rieur par des lignes courbes, font paroître ce même bord comme onde : le disque ou le milieu de cette couverture supérieure est recouvert ordinairement de quinze lames ou écailles , d'un roux plus ou inoins sombre , qui tombent souvent , ainsi que celles de la bordure, par l'effet d'une grande dessiccation ou de quelque autre accident ^ et dont la forme et le nombre varient d'ailleurs suivant l'âffe o et peut-être suivant le sexe; nous nous en sommes assurés en examinant des tortues de différentes tailles. Lorsque J'animai est dans l'eau, la carapace paroît d'un brun clair tacheté de jaune. Le plas- tron est moins dur et plus court que la carapace : il est garni communément de vingt-trois ou vingt-quatre lames, dispo- îi8 HISTOIRE NA.TURELLE sées sur quatre rangs "^ ; et c'est à cause des deux boucliers dout la tortue franche est armée , qu'on lui a donné le nom de soldat dans certaines contrées. Les pieds de la tortue franche sont très- alongés; les doigts en sont réunis par une membrane : ils ressemblent beaiicoup à * Nous croyons devoir rapporter ici les dirnen- sious d\inc jeune tortue Tranche qui u'avoit pas encore atteint tout son développement, et qui est conservce au Cabinet du roi. Dans cette tortue, ainsi que dans celles dont il sera question dans cet ouvrage, uous avons mesure la longueur totale de l'animal, ainsi que la longueur et la largeur de la carapace, en suivant la convexité de cette couverture supérieure. pieds, pouces, lignes. Longueur depuis le bout du museau jusc[n'à l'extrémité postérieure tte la carapace.. 3 » » Longueur de la tête 378 Largeur de la tcle «09 Longueur de la carapace i il 6 Largeur de la carapace i lo 7 Longueur des pattes de devant.. l 2 3 Longueur des pattes de derrière. » 11 » Nous avons compté neuF cotes de chaque cote dans cette jeune tortue. D E s T O R T U E s. iig de vraies iiai^coiics ; aussi lui scrvciit-ils à iiai^cr bien plus souvent quTi inarelier, et lui donueut-ils une nouvelle conl'or- milé avec les poissons et avec les phoques, qui habitent comme elle au milieu des eaux. Sans cette co qui leur ressemblent beaucoup, sont en très-grand nombre. Elles devroient y choisir pour leur ponte les rivages bas , sablonneux^ presque déserts et très -chauds , qui sé- parent TEgypte de la Barbarie propre- JiiciU dite 3 et où elles trouveroicnt la 13 iDO HISTOIRE NATURELLE solitude, l'abri, la chaleur et le terrain qui leur sont nécessaires : on n'a du moins jamais vu pondre des tortues marines sur les côtes de Provence ni du Languedoc , où cependant Ton en prend de temps en temps quelques unes. Elles peuvent aussi être quelquefois jetées par des accidens particuliers vers de plus hautes latitudes , sans en périr. Sibbald dit tenir d'un homme digue de foi, qu'on prenoit quel- quefois des tortues marines dans les Orcades ; et l'on doit présumer que les tortues franches peuvent non seulemeut vivre un certain nombre d'années à ces latitudes élevées , mais même y parvenir à tout leur développement. Des tempêtes ou d'autres causes puissantes font aussi quelquefois descendre vers les zones tem- pérées et chassent des mers glaciales les énormes cétacées qui peuplent cet empire du froid : le hasard pourroit donc faire rencontrer ensemble les grandes tortues franches et ces immenses animaux*; et * On a pris de grandes tortues auprès de l'em- bouchure de la Loire, et un grand nombre de ca- chalois ont été jetés sur les cotes de la Breiagnc il n'y a que peu d'années. DES TORTUES. i5i l'on dcvroit voir avec intcrct sur la sur- face de Taiitiquc Océan , d'un côté les tortues de mer, ces animaux: accoutumés à être plongés dans les rayons ardeus du soleil, souverain dominateur des contrées torrides, et de l'autre les grands cétacécs qui, relégués dans un séjour de glaces et de ténèbres, n'ont presque jamais reçu les douces influences du père de la lumière ^ et au lieu des beaux jours de la Nature, n'en ont presque jamais connu que les tempêtes et les horreurs. On peut citer sur-tout à ce sujet dcus exemples remarquables. En lyôa, une tor- tue fut prise à Dieppe, où elle avoit été jetée dans le port par une tourmente : elle pesoit de huit à neuf cents livres, et avoit à peu près six pieds de long sur quatre pieds de largeur. Deux ans après, on pêclia dans le pertuis d'Antioche une tortue plus grande encore; elle avoit huit pieds de long; elle pesoit plus de huit cents livres ; et comme ordinairement dans les tortues l'on doit compter le poids des couvertures pour près de la moitié du poids total , la chair de celle du A HISTOIRE NATURELLE peituis d'Aiitioclie devoit peser plus de quatre cents livres. Elle fut portée à Tabbaye de Longvau , près de V au nés eu Bretagne t la carapace avoit cinq pieds de long. / Ce n'est que sur les rivages presque dé- serts , et j par exemple, sur une partie de ceu3§: de PAmérique voisins de la ligue, et baignés par la mer Pacifique , que les tortues franches peuvent eu liberté par- venir à tout raccroissemeut pour lequel la Nature les a fait naître ^ et jouir en paix de la longue vie à laquelle elles ont été destinées. Les animaux féroces ne sont donc pas les seuls qui , dans le voisinage de Hioni- me, ne peuvent ni croître ni se multiplier : ce roi de la Nature, qui souvent en devient le tyran , non seulement repousse dans les déserts les espèces dangereuses , mais encore son insatiable avidité se tourne souvent contre elle-même, et relègue sur les plages éloignées les espèces les plus utiles et les plus douces; au lieu d'aug- menter ses jouissances, il les diminue, en détruisant inutilement daus des indi- DES TORTUES. i5j vidiis privés trop tut de la vie la pos- térité nombreuse qui leur auroit dii le jour. On devroit tâcher d'acclimater les tor- tues franches sur toutes les côtes tempé- rées où elles pourroient aller chercher dans les terres, des endroits un peu sablon- neux et élevés au-dessus de», plus hautes vajîues, pour y déposer leurs œufs et les y faire éclore. L'acquisition d'une espèce aussi féconde seroit certainement une des plus utiles ; et cette richesse réelle , qui se conserveroit et se multiplicroit d'elle- même , n'exciteroit pas au moins les regrets de la philosophie , comme les richesses funestes arrachées avec tant de sueurs au sein des terres équatoriales. Occupons-nous maintenant des diverses espèces de tortues qui habitent au milieu des mers comme la tortue franche, et qui lui sont assez analogues par leur forme, par leurs propriétés et par leurs habi- tudes , pour que nous puissions nous contenter d'indiquer les diflcrcnces qui les distinguent. i54 HISTOIRE NATURELLE LA TORTUE ÉCAILLE-VERTE, iS ous ne conservons pas à la tortue dont il est ici question, le nom de tortue verte, qui lui a été donné par plusieurs voya- geurs , parce qu'on Ta appliqué aussi à la tortue franche, et que nous ne saurions prendre trop de précautions pour évitei» l'obscurité de la nomenclature : nous ne lui donnons pas non plus celui de tortue amazone qu'elle porte dans une grande partie de TAmérique méridionale , et qui lui vient du grand fleuve des Amazones dont elle fréquente les bords , parce qu'il paroît que ce nom a été aussi employé pour une tortue qui n'est point de mer, et par conséquent qui est très-différente de celle-ci. jMais nous la nommons écaille- verte à cause de la couleur de ses écailles y plus vertes en effet que celles des autres tortues ; elles sont d'ailleurs très-belles , très -transparentes, très - minces , et ce- D E s T O R T U E s. i55 pendant propres à plusieurs ouvrages. La tête des tortues écaille-verte est pe- tite et arrondie. Elles ressemblent d'ail- leurs aux tortues franches par leur forme et par leurs mœurs : elles ne deviennent pas cependant aussi grandes que ces der- nières ; et, en général, elles sont plus petites environ d'un quart. On les ren- contre en assez grand nombre dans la nier du Sud, auprès du cap Blanco de la nouvelle Espagne. Il paroît qu'on les trouve aussi dans le golfe du Mexique, et qu'elles habitent presque tous les rivages chauds du nouveau monde, tant en-decà qu'au-delà de la ligne ; mais on ne les a pas encore reconnues dans l'ancien con- tinent. Leur chair est un aliment aussi délicat et peut-être aussi sain que celle des tortues franches; et il y a même des pays oii on les préfère à ces dernières. Leurs œufs salés et séehés au soleil sont très-bons à manger. M. Bomare est le seul naturaliste qui ait indiqué cette espèce de tortue que nous n'avons pas vue, et dont nous ne parlons que d'après les voyageurs et les observations de M. le chevalier de Widerspach. i56 HISTOIHE NATURELLE LA CAOUANE. XJA plupart des naturalistes qui ont dé- crit cette troisième espèce de torti.'C de mer, lui out donné le nom de caret; mais comme ce nom est appliqué depuis long- temps , par les voyageurs , à la tortue qui fournit les plus belles écailles, nous conserverons à celle dont il est ici ques- tion, la dénomination de caonane t sous laquelle elle est déjà très-connue, et uni- quement désignée par les naturels des contrées oii on la trouve. Elle surpasse en grandeur la tortue franche , et elle eu diffère d'une manière bien marquée par la grosseur de la tête , la grandeur de la gueule , l'alongement et la force de la mâchoire supérieure; le cou est épais et couvert d'une peau lâche , ridée , et gar- nie, de distance en distance, d'écaiiies cal- leuses; le corps est ovale , et la carapace D E s T O R T U E s. 167 plus large au milieu. et plus étroite par- derrière que dans les autres espèces. Les bords de cette couverture sont garnis do lames placées de manière, à les faire pa- roître dentées comme une scie : le disque présente trois rangées longitudinales d'é- ijailles ; les pièces de la rangée du milieu se relèvent en bosse et finissent par-der- rière en pointe; la couverture supérieure paroît d'un jaunetacliete.de noir, lorsque l'animal est dans Teau. Le plastron se termine du coté de l'anus par une sorte de bande un peu arrondie par le bout : il ejsti. garni communément de vingt- deux ou vingt -quatre écailles. La queue est courte. Les pieds , qui sont couverts d'é- cailles épaisses , et dont les doigts sont réunis par une membrane, ont une forme très- aiongée , et ressemblent à des na- geoires, ainsi que dans la tortue franche : ceux de devant sont plus longs , mais moins larges que ceux de derrière ; et ce qui est un des caractères distinctifs de la caouane, c'est que les pieds de der- rière , aijisi que ceux de devant, sont garnis de deux ongles aigus. i4 ï58 HISTOIHE NATURELLE La caouaiic habite les contrées chaudes du nouveau continent , comme la tortue franche ; mais elle paroît se plaire un peu plus vers- le nord que cette dernière. On la trouve moins sur les côtes de la Jamaïque. Elle habite aussi dans l'aneieu monde : on la trouve même très-fréquem- ment dans la Méditerranée, où on en fait des pêches abondantes auprès de Cagliarî en Sardaigne et de Castel-Sardo , vers le quarante -unième degré de latitude; elle y pèse souvent jusqu'à quatre cents livres (poids de Sardaigne). Rondelet, qui habi- toit le Languedoc, dit en avoir nourri une chez lui pendant quelque temps , iipparemmcnt dans quelque bassin. Elle avoit été prise auprès des côtes de sa province : elle faisoit entendre un petit son confus, et jetoit des espèces de sou- pirs semblables ù ceux que Ton a attribués à la tortue franche. Les lames ou écailles de la caouane sont presque de nulle valeur, quoique plus grandes que celles du caret, dont on fait dans le commerce un si grand usage : on s»Vn servoit cependant autreTois pour D E s T O R T U E s. 159 garnir des miroirs et d'autres grands meubles de luxe ; mais maintenant on les rebute, parce qu'elles sont toujours gâtées par une espèce de gale. On a vu des caouanes dont la carapace étoit cou- verte de mousse et de coquillages, et dont les plis de la peau étoient remplis de petits crustacées. La caouaue a Tair plus fier que les au- tres tortues : étant plus grande et ayant plus de force, elle est plus hardie; elle a besoin d'une nourriture plus substan- tielle; elle se contente moins de plantes marines; elle est même vorace; elle ose se jeter sur les jeunes crocodiles , qu'elle mutile facilement. On assure que , pour attaquer avec plus d'avantage ces grands quadrupèdes ovipares , elle les attend dans le fond des creux situés le long des rivages, où les crocodiles se retirent, et où ils entrent à reculons , parce que la longueur de leur corps ne leur permettroife pas de se retourner ; et elle les y saisit fortement par la queue, sans avoir rien à craindre de leurs dents *. * Note commuuiquée par M. Moreau de Saint- i6o HISTOIRE NATURELLE Comme ses alimens, tirés en plu>> grande abondance du règne animal, sont moins purs et plus sujets à la décomposition que ceux de la tortiie franche, et qvi'elle avale sans choix des vers de mer , des mollasses , etc. , sa chair s'en ressent ; elle est huileuse , rance , filamenteuse , coriace, et d'un mauvais goût de marine. L*odeur de musc , que la plupart des tortues répandent , est exaltée dans la caouane , au point d'être fétide ; aussi cette tortue est-elle peu recherchée. Des navigateurs en ont cependant mangé sans peine , et Tout trouvée très-échauffante. On la sale aussi quelquefois , dit-on , pour l'usage des nègres; tant on s'est empressé de saisir toutes les ressources que la terre et la mer pouvoient offrir pour accroître le produit des travaux de ces infortunés. L'huile qu'on retire des caouanes est fort abondante : elle ne peut être employée pour les alimens , parce qu'elle sent très- mauvais ; mais elle est bonne à brûler. Elle sert aussi à préparer les cuirs , et à Méry, procureur-général au conseil supérieur de Saint-Domingue. DES TORTUES. i6i enduire les vaisseaux , qu'elle préserve , dit-ou, des vers, peut-être à cause de la mauvaise odeur qu'elle répaud. La caouaue n'est donc point si utile que la tortue franche : aussi a-t-elle été moins poursuivie , a-t-elle eu moins d'en- nemis à craindre, et est-elle répandue eu plus grand nombre sur certaines mers. Naturellement plus vigoureuse que les autres tortues, elle voyage davantage: on l'a rencontrée à plus de huit cents lieues de terre, ainsi que nous l'avons déjà rapporté. D'ailleurs , se nourrissant quelquefois de poisson , elle est moins attachée aux cotes où croissent les algues. Elle rompt avec facilité de grandes co- quilles , de grands buccins , pour dévorer l'animal qui y est contenu ; et , suivant les pécheurs de l'Amérique septentrio- nale, on trouve souvent de très-grands coquillages à demi brisés par la caouane. Il est quelquefois dangereux de cher- cher à la prendre. Lorsqu'on s'approche d'elle pour la retourner, elle se défend avec ses pattes et sa gueule: et il est très- difficile de lui faire lâcher ce qu'elle a 162 HISTOIRE NATURELLE saisi avec ses mâchoires. Cette grande ré^ sistance qu'elle oppose à ceux qui veulent la prendre, lui a fait attribuer une sorte de méchanceté ; on lui a reproché , pour ainsi dire, une juste défense; on a con- damné Pusage qu'elle fait de ses armes pour sauver sa vie : mais ce n'est pas la première fois que le plus fort a fait un crime au plus foible de ce qui a retardé ses jouissances ou mêlé quelques dangers à sa poursuite. Suivant Catesby, on a donné le nom. de coffre à une tortue marine assez rare , qui devient extrêmement grande, qui est étroite, mais fort épaisse , et dont la cou- verture supérieure est beaucoup plus con- vexe que celle des autres tortues marines. C'est certainement la même que la tortue dont Dampier fait sa première espèce , et que ce voyageur appelle grosse tortue , tor- tue à bahut ou coffre. Toutes deux sont plus grosses que les autres tortues de mer, ont la carapace plus relevée, sont de mouvais goût, et répandent une odeur désagréable, mais fournissent une grande quantité d'huile bonne à brûler. Nous les D E s T O R T TJ E s. j63 plaçons à la suite des caouaiies , aux- quelles elles nous paroissent appartenir, }usqu'*à ce que de nouvelles observations MOUS obligent à les en séparer. l64 HISTOIRE NATURELLE LA TORTUE NASICORNE. 1-iES naturalistes ont confondu cette espèce avec la caouane , quoiqu'il soit bien aisé de la distinguer par un carac- tère assez saillant, qui manque aux véri- tables caouanes , et dont nous avons tiré le nom que nous lui donnons ici. C'est un tubercule d'une substance molle, qui s'élève au-dessus du museau , et dans lequel les narines sont placées. La nasi- corne se trouve dans les mers du nouveau continent voisines de réquateur. Nous manquons d'observations pour parler plus en détail de cette nouvelle espèce de tortue ; mais nous nous regardons comme très - fondés à la séparer de la caouane , avec laquelle elle a même moins de rapports qu'avec la tortue franche, suivant un des correspondans du Cabinet du roi. On la mange comme DES TORTUES. i65 cette deruière, tandis qu'on ne se nourrit presque point de la chair de la caouane. Nous invitons les voyageurs à s'occuper de cette tortue, qui pourroit être la tortue hâtarde des pêcheurs d'Amérique , ainsi qu'à observer celles qui ne sont pas en- core connues. 11 est d'autant plus impor- tant d'examiner les diverses espèces de ces animaux, qvie quoiqu'elles ne soient distinguées à l'extérieur que par un très- petit nombre de caractères , il paroît qu'elles ne se mêlent point ensemble, et que par conséquent elles sont très-diffé- rentes les unes des autres. IÔ6 HISTOIRE NATURELLE LE CARET. X-iE philosophe mettra toujours au pre- mier rang la tortue franche , comme celle qui fournit la nourriture la plus agréable et la plus salutaire ; mais ceux qui ne re- cherchent que ce qui brille, préféreront la tortue à laquelle nous conservons le nom de caret, qui lui est généralement donné dans les pays qu'elle habite. C'est principalement cette tortue que l'on voit revêtue de ces belles écailles qui , dès les siècles les plus reculés , ont décoré les palais les plus somptueux : effacées dans des temps plus modernes par l'éclat de l'or et par le feu que la taille a donné aux pierres dures et transparentes , ou ne les emploie presque plus qu'à orner les bijoux simples , mais élégans, de ceux dont la fortune est plus bornée , et peut- être le goût plus pur. Si elles servent D E s T O R T U E s. 167 quelquefois à paver la beauté, elles |sont cachées par des ornemens plus éblouissans ou plus recherchés qu'on leur préfère , et dont elles ne sont que les supports. Mais si les écailles de la tortue caret ont perdu de leur valeur par leur comparaison avec des substances plus éclatantes ^ et parce que la découverte du nouveau inonde en a répandu une grande quantité dans l'an- cien, leur usage est devenu plus générait on s'en sert d'autant plus qu'elles coûtent moins. Combien de bijoux et de petits ouvrages ne sont point garnis de ces écailles que tout le monde connoît , et qui réunissent à une demi-transparence l'éclat de certains crvstaus colorés , et une souplesse que Ton a essayé en vain de donner au verre ! Il est aisé de reconnoître la tortue caret au luisant des écailles placées sur sa ca- rapace, et sur- tout à la manière dont elles sont disposées : elles se recouvrent comme les ardoises qui sont sur nos toits. Elles sont d'ailleurs communément au nombre de treize sur le disque , et elles y sont placées sur trois rangs , comme ï68 HISTOIRE NATURELLE dans la tortue franche. Le bord dé Ja carapace, qui est beaucoup plus étroit que dans la plupart des tortues de mer, est garni ordinairement de Tingt-ciuq lames. La couverture supérieure , arrondie pa? le haut et pointue par le bas, a presque la forme d'un cœur. Le caret est d'ailleurs distingué des autres tortues marines par sa tête et son cou , qui sont beaucoup plus longs que dan^i les autres espèces. La mâchoire supérieure avance assez sur l'inférieure pour que le museau ait une sorte de ressemblance avec le bec d'un oiseau de proie; et c'est ce qui Va fait appeler par les Anglois dec à faucon. Ce nom a un peu servi à obscurcir l'histoire des tortues. Lorsque les naturalistes ont transporté celui de caret h. la caouane, ils n'en ont point séparé celui àe bec à faucon, qu'ils lui ont aussi appliqué; et, en his- toire naturelle , lorsque les noms soiit les inêmes , on n'est que trop porté à croire que les objets se ressemblent. On ren- contre le caret , ainsi que la plupart des autres tortues , dans les contrées chaudes D E s T O R T U E s. 169 de rAuicriqne ; mais on le trouve aussi dans les mers de TAsic. C'est de ces der- iiicrcs qu'on apportoit sans doute les écailles fines dont se servoicnt les an-^ tiens, m^ême avant le temps de Pline, et que les Romains dévoient d'autant plus estimer qu'elles étoient plus rares et ve- noient de plus loin ; car il semble qu'ils n'attaclioient de valeur qu'à ce qui étoit pour eux le signe d'une plus grande puis- sance et d'une domination plus étendue. Le caret n'est point aussi grand que la tortue franche : ses pieds ont égaleinent la forme de nageoires , et sont quelque- fois garnis chacun de quatre ongles. La saison de sa ponte est communément, dans l'Amérique septentrionale, en mai, juin et juillet. Il ne dépose pas ses œufs dans le sable , mais dans un gravier mêlé de petits cailloux. Ces œufs sont plus dé- licats que ceux des autres espèces de tor- tues ; mais sa chair n'est point du tout agréable : elle a même, dit-on, une forte vertu purgative; elle cause des vomisse- îiicns violens. Ceux qui en ont mangé, sont bientôt couverts de petites tumeurs, ij Ï70 HISTOIRE NATURELLE et attaqués d'une fièvre yiolente , maïs qui est une crise salutaire lorsqu'ils ont assez de vigueur pour résister à l'activité du remède. Au reste , Dampier prétend que les bonnes ou mauvaises qualités de la chair de la tortue dépendent de l'ali- ment qu'elle prend, et par conséquent très-souvent du lieu qu'elle habite. Le caret, quoique plus petit de beau- coup que la tortue franche, doit .avoir plus de force, puisqu'on l'a cru plus mé- chant : il se défend avec plus d'avantage lorsqu'on cherche à le prendre , et ses morsures son-t vives et douloureuses. Sa couverture supérieure est plus bombée , et ses pattes de devant sont, en propor- tion de sa grandeur, plus longues que celles des autres tortues de mer : aussi , lorsqu'il a été renversé sur le dos , peut- il , en se balançant, s'incliner assez d'un côté ou de l'autre pour que ses pieds sai- sissent la terre, qu'il se retourne, et qu'il se remette sur ses quatre pattes. Les belles écailles qui recouvrent sa carapace pèsent ordinairement toutes ensemble de trois ù quatre livres , et quelquefois même de D E s T O R T U E s. 171 sept à huit. On cstiuie le plus celles qui sont épaisses, claires; transparentes, d'un jaune doré, et jaspées de rouge et de blanc , ou d'un brun presque noir. Lors- qu'on veut les façonner, on les ramollit dans de l'eau chaude ; on les met dans un moule dont on leur fait prendre ai- sément la forme , à l'aide d'une forte presse de fer; on les polit ensuite, et on y ajoute les ciselures d'or et d'argent, et les autres oruemeus étrangers avec les- quels on veut en relever les couleurs. ' Ou prétend que, dans certaines con- trées , et particulièrement sur les côtes, orientales et humides de l'Amérique mé- ridionale , le caret se plaît moins dans la mer que dans les terres novées , où il trouve apparemment une nourriture plus abondante ou plus convenable à ses goûts. Ï72 HISTOIRE NATURELLE LE LUTH La plupart des tortues marines dont nous avons parlé, ne s'éloignent pas beau- coup des régions équatoriales : la caouane n'est cependant pas la seule que l'on, trouve dans une des mers qui baiguen^ nos contrées; on rencontre aussi dans la Méditerranée une espèce de ces quadru- pèdes ovipares , qui surpasse même quel- quefois par sa longueur les plus grandes tortues franches. On la nomme le luth ; elle fréquente de préférence , au moins dans le temps de la ponte , les rivages déserts et en partie sablonneux qui avoi- sinent les états barbaresques ; elle s'a- ■vance peu dans la mer Adriatique ; et si elle parvient rarement jusqu'à la mer * En latiu , lyra. Hat de mer, el tortue à clin , V^r les pêcheurs fie plusieurs conirées. , Te m J J'I 2JW ^72 u LE LUTH 7 T. A ro:ndï: J S^.enteurs de la urus.que eomure nttaeT-^' d-nrstrunaent , sur lequel il, Hietal. On a emt qu'ils choisirent la cou- verture d'une tortue luth; et telle fut ia prem.ère lyre grossière qui serait à fene goûter à des peuples peu civilisés encore , le charme d'un art dont ils de- To.ent tant accroître la puissance ; aussi la tortue luth a-t-elle été, pour ainsi dire consacrée à Mercure, que l'on a regarde' comme 1 inventeur de la Ivre : les mo- dernes l'ont mén^e souvent, à l'exemple des anciens, appelée /j,e . ainsi que fo//5 ■ et .1 couveuoit que son nom rappe- lât le noble et brillant usage que l'on fit de son bouclier dans les premiers âges des belles régions baignées par les eaux de la Méditerranée. %» Tbni .2. n5Jho3 pln«; particuliers ù cette tortue étoit la forme et la position de ses narines. Le dessus de la mâchoire supérieure se ter- minoit par une production cartilagi- neuse un peu cylindrique , longue au moins de trois quarts de pouce , ressem- blant au groin d'une taupe, mais tendre, menue et un peu transparente. A Textré- mitc de cette production étoient placées les ouvertures des narines, qui s'ouvroient aussi dans le palais. Les pattes étoient épaisses et fortes. Celles de devant avoient cinq doigts, dont les trois premiers étoient plus forts, plus courts, que les deux autres , et gar- nis d'ongles crochus ; à la suite du cin- quième doigt étoient deux espèces de faux doigts qui servoient ù étendre une assez grande membrane qui les réunissoit tous. Les pattes de derrière étoient con- formées de même , excepté qu'il n'y avoit qu'un faux doigt au lieu de deux ; elles étoient , ainsi que ceDes de devant , re- couvertes d'une peau ridée, d'une couleur verdâtre et sombre. La tortue molle a beaucovip de force ; et comme elle est 104 HISTOIRE NATURELLE farouche, il arrive souvent que, lorsqu'elle est attaquée , elle se lève sur ses pattes , s'élance avec furie contre son ennemi , et le mord avec violence. La queue de Tindividu apporté à M. Garden étoit grosse , large et courte. Cette tortue étoit femelle ; elle pondit quinze œufs , et on en trouva à peu près un pareil nombre dans son corps lorsqu'elle "fut morte. Ces œufs étoient parfaitement ronds , et à peu près d'un pouce de dia- mètre. La tortue molle est très-bonne à man- ger , et l'on dit même que sa cliair est plus délicate que celle de la tortue franche. Nous présumons qu'à mesure que l'on counoîtra mieux les animaux du nou- veau continent , on retrouvera dans plu- sieurs rivières de l'Amérique tant sep- tentrionale que méridionale, la tortue molle que l'on a vue dans celles de la Caroline et de la Floride. Pendant que M. le chevalier de Widerspach , corres- pondant du Cabinet du roi, étoit sur les bords de l'Ovapok dans l'Amérique mi- ridionale . ses nègres lui apportèrent la D E s T O R T U E s. 2oj tcte et plusieurs autres parties d'une tor- tue d'eau douce qu'ils veiioieut de dépe- cer , et qu'il a cru reconiioitre depuis dans la tortue molle dont M. Pcunaut a publié la description. 18 2oS HISTOIRE NATURELLE LA GRECQUE, o u LA TORTUE DE TERRE COMMUNE vJn nomme ainsi la tortue terrestre la plus commune dans la Grèce et dans plusieurs contrées teînpérées de TEurope. On Ta-, pendant très-loug-temps , appelée simplement tortue terrestre; mais comme cette épithète ne désigne que la nature de son habitation , qui est la même que celle de plusieurs autres espèces , nous avons préféré la dénomination adoptée par les naturalistes modernes. On la ren- contre dans les bois et sur les terres éle- vées : il n'est personne qui ne Tait vue ou qui ne la cojnioisse de nom. Depuis les anciens jusqu'à nous , tout le monde a parlé de sa lenteur ; le philosophe s'en * En Languedoc, torUiga dJ garri^a; eu ja- ponois, isicanie j on iaiiki- D E s T O R T U E s. 207 est servi dans ses laisouncmciis , le poète clans ses images, le peuple dans ses pro- verbes. La tortue grecque peut en effet passer pour un des plus lents des quadru- ]f)cdes ovipares; elle emploie beaucoup de temps pour parcourir le plus petit espace : iuais si elle ne s'avance que lentement, les mouv^cmens des diverses parties de son. corps sont quelquefois assez agiles ; nous lui avons vu remuer la tête, les pattes et la queue, avec un peu de viva- cité. Et même ne pourroit-on pas dire que la pesanteur de son bouclier , la lourdeur du poids dont elle est chargée , et la posi- tion de ses pattes , placées trop à côlé du corps et trop écartées les unes des autres , produisent presque seules la lenteur de sa marclie ? Elle a en effet le sang aussi chaud que plusieurs quadrupèdes ovi- pares qui s'élancent avec promptitude jusques au sommet des arbres les plus élevés ; et quoique ses doigts ne soient pas séparés, comme ceux des lézards qui courent avec vitesse, ils ne sont cepen- dant pas conformés de manière à lui in- terdire une marche facile et prompte. -âc8 HISTOIRE NATURELLE Les tortues grecques ressemblent , à beaucoup d'égards , aux tortues d'eau douce. Leur taille varie beaucoup, sui- vant leur âge et les pays qu'elles ha- bitent. Il paroît que celles qui vivent suj? les montagnes, sont plus grandes que le? tortues de plaine. Celle que nous avons décrite vivante, et que nous avons me- surée en suivant la courbure de la cara- pace , av^oit près de quatorze pouces de longueur , totale , sur près de dix de lar- geur. La tête avoit un pouce dix lignes de long , sur un pouce deux lignes de largeur et un pouce d'épaisseur ; le dessus en étoit applati et triangulaire. Les yeux étoient garnis d'une membrane clignotante ; la paupière inférieure étoit seule mobile , ainsi que l'a dit Pline , qui a appliqué faussement aux crocodiles et aux quadrupèdes ovipares en général , cette conformation que nous avons obser- vée dans la tortue grecque. Les mâchoires étoient très-fortes et crénelées , et l'inté- rieur en étoit garni d'aspérités que l'on a prises faussement pour des dents ; la peau recouvroit les trous auditifs, La queue DES T O r. T U E S. 20(> étoit très-courte ; elle n'avoit qtie deux, pouces de longueur. Les pattes de devant avoient trois ponces six ligues jusqu'à rextrémité des doigts , et celles de der- rière deux pouces six lignes. Une peau grenue et des écailles inégales, dures et d'une couleur plus ou moins brune, cou- vroient la tcte, les pattes et la queue; quelques unes de ces écailles qui garnis- soieut rextrémité des pattes, étoient assez grandes , assez détachées de la peau et assez aiguës pour être confondues , au premier coup d'œil , avec des ongles. Les doigts étoient ramassés ; et comme ils étoient réunis et recouverts par une mem- brane , ou ne pouvoit les distinguer ^ue par les ongles qui les terminoicnt. Les ongles des tortues grecques sont communément plus émoussés que ceux des tortues d'eau douce , parce que la grecque les use par uu frottement plus continuel et par une pression plus forte. Lorsqu'elle marche, elle frotte les ongles des pieds de devant séparément , et l'un après l'autre , contre le terrain ; en sorte que , lorsqu'elle pose un des pieds de 13 2IO HISTOIRE NATURELLE devant à terre , elle appuie d'abord sur Toiigle intérieur, ensuite sur celui qui Yient après , et ainsi sur tous successive- ment jusqu'il l'ongle extérieur : son pied fait, en quelque sorte, par-là l'efFet d'une roue , comme si la tortue clierchoit Ti élever très-peu ses pattes, et à s'avancer par une suite de petits pas successifs , pour éprouver moins de résistance de In part du poids qu'elle traîne. Treize lames, striées dans leur contour, recouvrent la carapace : les bords sont garnis de vingt» quatre lames, toutes, et sur-tout celles de derrière , beaucoup plus grandes en proportion que dans la plupart des autres espèces de tortues; et, par la manière dont elles sont placées les unes relative- mient aux autres, elles font paroître den» I telée la circonférence de la couverture supérieure. Le plastron est ordinairement revêtu de douze ou treize lames : il y en avoit treize dans celle que nous avons décrite. Les lames qui recouvrent la ca- rapace, sont marbrées de deux couleurs. Tune plus ou moins foncée ^ et l'autre blanchâtre. D E s T O R T U E s. 2ir La couverture supérieure de la grecque est très -bombée : rindividu que î^ous avons décrit, avoit quatre pouces trois Jigncs d'épaisseur; et c'est ce qui fait que lorsqu'elle est renversée sur le dos , elle peut reprendre sa première situation, et ue pas rester eu proie à ses ennemis , comme les tortues franches. Ce n'est pas seulement à l'aide de ses pattes qu'elle s'efforce de se retourner ; elle ne peut pas assez les écarter pour atteindre jusqu'à terre : elle se sert uniquement de sa tête et de son cou , avec lesquels elle s'appuie fortement contre le terrain, cherchant, pour ainsi dire, à se soulever, et se ba- lançant à droite et à gauche, jusqu'à ce qu'elle ait trouvé le coté du terrain qui est le plus incliné , et qui lui oppose le moins de résistance. Alors , au lieu de faire des efforts dans les deux sens , clic ne cherche plus qu'à se renverser du côté favorable , et à se retourner assez pour rencontrer la terre avec ses pattes , et se remettre entièrement sur ses pieds. 31 paroît qu'on peut distinguer les mâles d'avec les femelles , en ce que celles-ci tiii HISTOIHE NATURELLE out leur plastron presque plat , au lieu que les mâles Tout plus oumoius concave. L'élément clans lequel vivent les tor- tues de mer et les tortues d'eau douce , rend leur charge plus légère ; car tout le monde sait qu'un corps plongé dans l'eau perd toujours de son poids : mais celle des tortues de terre n'est pas ainsi diminuée. Le fardeau que la grecque sup- porte , est donc une preuve de la force dont elle jouit : cette force est d'ailleurs confirmée par la grande facilité avec la- quelle elle brise dans sa gueule des corps - très-durs. Ses mâchoires sont mues par des muscles si vivaces , que l'on a remar- qué dans une petite tortue dont la tète avoit été coupée une demi -heure aupa- ravant, qu'elles claquoient encore avec un bruit assez sensible; et, dès le temps d'Aristote, on regardoit la tortue comme l'animal qui avoit en proportion le plus de force dans les mâchoires. Mais ce fait n'est pas le seul phénomène remarquable que les tortues grecques pré- sentent relativement à la difficulté que l'on éprouve lorsqu'on yeut uter la vie DES TORTUES. 2i3 aux quadrupèdes ovipares. François Redî a fait à ce sujet, eu Toscane, des expé- riences dont nous allons rapporter les, principaux résultats. Il prit une tortue grecque au commencement du mois de novembre; il lit une large ouverture dans le crâne, et en enleva la cervelle ,. sans en laisser aucune portion dans la cavité qui la contenoit, et qu'il nettoya ^ pour ainsi dire, avec soin. Dès le moment que la cervelle fut enlevée , les yeux de la tor- tue se fermèrent pour ne plus se rouvrir: mais l'animal ayant été mis en liberté , continua de se mouvoir et de marcher comme s'il n'avoit reçu aucun mal; à la Térité, il ne s'avançoit, en quelque sorte, qu'en tâtonnant , parce qu'il ne voyoit plus. Après trois jours , une nouvelle peau rouvrit l'ouverture du crâne , et la tortue Yécut ainsi , en exécutant tous ses mou- vemens ordinaires , jusqu'au milieu du mois de mai , c'est-à-dire, à peu près pen- dant six mois. Lorsqu'elle fut morte, Redî examina la cavité du crâne d'où il avoit ôté la cervelle , et il n'y trouva qu'un etit grumeau de sang sec et noir. H P 2L4 HISTOIRE NATURELLE répéta cette expérience sur plusieurs tor- tues tant terrestres que d'eau douce , et même de mer ; et tous ces divers animaux vécurent sans cervelle pendant un nom- bre de jours plus ou moins considérable. Redi coupa ensuite la tète à une grosse tortue grecque ; et après que tout le sang qui pouvoit s'écouler des veines du cou se fut épanché , la tortue continua de vivre pendant plusieurs jours; ce dont il fut facile de s'appercevoir par les mou- vemens qu'elle se donnoit, et la nianière dont elle remuoit les pattes de devant et celles de derrière. Ce grand phj^sicieii coupa aussi la tète à quatre autres tor- tues ; et les ayant ouvertes douze jours après cette opération , il trouva que leur cœur palpitoit encore; que le sang qui reStolt à l'animal , y eutroit et en sortoit , et par conséquent que la tortue étoit en- core en vie. Ces expériences, qui ont été depuis répétées par plusieurs phj^siciens , ne prouvent-elles pas ce que nous avons déjà dit de la nature des quadrupèdes ovipares *? * Voyez, à la têie de ce volume , le Discourt' sur la nature des quadi'uptdes ovipares. DES TORTUES. 2i5 La tortue grecque se nourrit d'herbes, de fruits, et uiêiue de vers, de liuiacons et d'insectes : mais comme elle n'a pas riiabitudc d'attaquer des animaux qui aient du saug, et de manger des poissons comaue la bourbeuse que l'on trouve dans les fleuves et dans les marais , oii la grecque ne va point , les moeurs de cette tortue de terre sont assez douces; elle est aussi paisible que sa démarche est lente; et la tranquillité de ses habi- tudes en fait aisément un animal domes- tique, que l'on peut nourrir avec du son et de la farine , et que l'on voit avec plaisir dans les jardins , où elle détruit les insectes nuisibles. Comme les autres tortues et tous les quadrupèdes ovipares, elle peut se passer de manger pendant très - long - temps. Gérard Blasius garda chez lui une tortue de terre , qui , pendant dix mois , ne prit absolument aucune espèce de nourriture ni de boisson. Elle mourut au bout de ce temps ; mais elle ne périt pas faute d'alimens, puisqu'on trouva ses intestins encore remplis d'excrcmcus , les uns 2i6 HISTOIRE NATURELLE noirâtres, et les autres yerds et jaunes: elle succomba seulement à la rigueur du froid. Les tortues grecques TÎvent très-long- temps. M. François Cetti en a vu une en Sardaigne qui pesoit quatre livres , et qui , vivoit depuis soixante ans dans une mai- son , oîi on la regardoit comme un vieux domestique. Aux latitudes un peu éle- vées , les grecques passent l'hiver dans des trous souterrains, qu''elles creusent même quelquefois , et où elles sont plus ou moins engourdies, suivant la rigueur de la saison. Elles se cachent ainsi en Sardaigne vers la fin de novembre. Elles sortent de leurs retraites au prin- temps , et elles s'accouplent plus ou moins de temps après la fin de leur torpeur, suivant la température des pays qu'elles habitent. On a écrit et répété bien des fables touchant raccouplement de ces tortues, l'ardeur des mâles, les craintes des femelles , etc. La seule chose que l'on auroit dû dire , c'est que le* mâles des tortues grecques ont reçu des organes très-grands pour la propagation de leur D E s T O R T U E s. 217 espèce; aussi paroLsseiit- ils rechercher leur$ femelles avec ardeur, et ressentir l'amour avec force : on a même prétendu, que dans les contrées de l'Afrique où elles sont en très-grand nombre, les mâles se battent souvent pour la lilîre possession . de leurs femelles , et que dans ces com- bats, animés par un des sentimeus les plus impérieux, ils s'avancent avec courage, quoiqu'avec lenteur, les uns contre les autres , et s'attaquent vivemeîit à coups de tête. Le temps de la ponte des tortues grec- ques varie avec Ja chaleur des contrées où on les trouve. En Sardaigne , c'est vers la lin de juin qu'elles pondent leurs œufs; ils sont au nombre de quatre ou de cinq, et blancs comme ceux de pigeon. La fe- melle les dépose dans un trou qu'elle a creusé avec ses pattes de devant , et elle les recouvre de terre. La chaleur du soleil fait éclore les jeunes tortues, qui sortent de l'œuf dès le commencement de sep- tembre, n'étant pas encore plus grosses. (qu'une coque de noix. La tortue grecque ne va presque jamais Ovipam, I. IQ si8 HISTOIRE NATURELLE à Peau ; cependant elle est conformée a, l'intérieur comme les tortues de mer * : si elle n'est point amphibie de fait et par ses mœurs , elle Test donc jusqu'à uti cer»^' tain point par son organisation. On trouve la tortue grecque dans pres- que toutes les régions chaudes et mem'e tempérées de l'ancien continent , dans l'Europe méridionale , en Macédoine , en Grèce, à Amboine, dans l'île de Ceyian, dans les Indes , au Japon , dans l'île de Bourbon, dans celle de l'Ascension , dans les déserts de l'Afrique. C'est sur-tout en Libye et dans les Indes que la chair de la tortue de terre est plus délicate et plus saine que celle de plusieurs autres tortues ; et l'on ne voit pas pourquoi il a pu être défendu aux Grecs modernes et aux Turcs de s'en nourrir. Ce n'est que d'après des observations * Gérard Blasius, en disséquant une tortue de terre , trouva son péricarde rempli d'une quantité considérable dVau limpide. Nous verrons dans rarticle du crocodile , que le péricarde d'un alli- gator, disséqué par Sloaue ,éioit également rem].li d'eau. D E s T O R T U E s. 219 qui manquent encore , que Ton pourra déterminer si les tortues terrestres de r Amérique méridionale sont différentes de la grecque , si elles j sont naturelles, ou si elles y ont été portées d'ailleurs. Dans cette même partie du monde , ou elles sont très-communes , ou les prend ave.o des chiens dressés à les chasser. Ils les découvrent à la piste ; et lorsqu'ils les ont trouvées , ils aboient jusqu'à ce ETTE petite espèce de tortue est ter- restre , suivant Seba. Son museau se ter- mine en pointe. Les yeux , ainsi que dans ies autres tortues , sont placés oblique- ment. La carapace est presque aussi large que longue; les bords en sont unis par- devant et'sur les côtés, mais inégalement dentelés sur le derrière. Les écailles qui les garnissent, sont lisses et planes, excepté celles du dos, dont le milieu est rehausse de manière à former une. arête longitu- dinale : leur couleur est blanchâtre, tra- versée en divers sens par de très-petites bandes noirâtres qui la font paroître mar- brée. Le plastron est festonné par-devant : le milieu en étoit un peu concave dans l'individu que nous avons décrit, et qui avoit près de trois pouces de long, depuis le bout du museau jusqu'à Textrémité de la queucj sur près de deux pouces dç 20 / ù.3o HISTOIRE NATURELLE largeur. Suivant Seba , la raboteuse ne devient jamais plus grande. Cette tortue a cinq ongles aux pieds de devant, et quatre aux pieds de derrière, dont le cinquième doigt est sans ongle : la queue est courte. La couleur de la tête, des pattes et de la queue , ressemblé beaucoup à celle de la carapace : elle est d'un blanc tirant sur le jaune, varié par des bandes et des taches brunes , mais plus larges en certains endroits, et sur- tout sur la tête , que celles que Ton voit sur la couverture supérieure. C'est dans les Indes orientales , et particulièrement àAmboine, qu'habite cette tortue, qui appartient aussi au nouveau monde, et y vit dans la Caroline. D E s T O R T U E s. 23ï LA DENTELÉE. v>ETTE tortue n'est connue que par ce qii'en a rapporté M. Linné. Ses doigts , au nombre de cinq dans les pieds de de- vant, et de quatre dans ceux de derrière, ne sont pas séparés les uns des autres; ils se réunissent de manière à former une patte ramassée et arrondie , comme celles de beaucoup de tortues terrestres. La cou- verture supérieure a un peu la forme d'un cœur : son diamètre^ CvSt ordinairement d'un ou deux pouces ; les bords en sont dentelés j et comme déchirés. Les lames qui la recouvrent , sont hexagones, rele- vées par des points saillans; et leur cou- leur est d'un blanc sale. On trouve cette tortue dans la Virginie. 232 HISTOIRE NATURELLE LA BOMBEE. On rencontre dans les pays chauds; suivant M. Lhmé , cette tortue , qui doit ttre terrestre , et qui est distinguée des autres en ce que les doigts de ses pieds ne sont pas réunis par uue membrane, que sa couverture supérieure est bombée, que les quatre lames antérieures qui gar- nissent le dos , sont relevées en arête , et que le plastron ne présente aucune échan- crure. Nous avons vu dans la collection de M. le chevalier de la Marck nue cara- pace et un plastron de cette tortue. La carapace avoit six pouces de long sur six pouces et demi de large. L'animal devoit avoir deux pouces sept lignes d'épaisseur. Le disque étoit garni de treize lames lé- gèrement striées , les bords de vingt-cinq, et le plastron de douze. La carapace étoit d'un brun verdàtre , sur lequel d'cs raies D E s T O R T U E s. 233 ) aunes s'étendoieut en tout sens. Les cou- leurs de la tortue jaune sont presque sem- blables ; mais elles sont disposées par taches, et non pas par raies, comme celles de la bombée. Le plastron étoit jaunâtre. ^34 HISTOIRE NATURELLE LA VERMILLON. Au cap de Bonne-Espérance habite une petite tortue de terre , que Worm a vue vivante, et qu'il a nourrie pendant quel- que temps dans son jardin. Des marchands la lui avoient vendue comme venant des grandes Indes , où il se peut en effet qu'on la trouve, La couverture supérieure de cette petite et jolie tortue est à peine longue de quatre doigts : les lames en sont agréablement variées de noir , de blanc , de pourpre, de verdâtre et de jaune ; et lorsqu'elles s'exfolient , la carapace pré- sente à leur place du jaune noirâtre. Le plastron est blanchâtre , et sur le sommet de la tète , dont on a comparé la forme à celle de la tête d'un perroquet, s'élève line protubérance d'une couleur de ver- millon mêlé de jaune. C'est de ce dernier caractère , par lequel elle a quelque rap- D E s T O R T U E s. 235 port avec la nasicorne , que nous avons lire le nom que nous lui donnons. Les pieds de cette tortue sont garnis de quatre ongles et d'écaillés très-dures ; les cuisses sont revêtues d'une peau qui ressemble à du cuir ; la queue est effilée et très- courte. La Nature a paré cette tortue avec soin ; elle lui a donné la beauté : mais, en la réduisant à un très-petit volume , elle lui a ôté presque tout l'avantage du bouclier naturel sous lequel elle peut se renfermer ; car il paroît qu'on doit lui appliquer ce que rapporte Kolbe de la tor- tue de terre du cap de Bonne -Espérance. Suivant ce voyageur , les grands aigles de mer nommés orfraies sont très-avides d€ la chair de la tortue. Malgré toute la force de leur bec et de leurs serres , ils ne pourroient briser sa dure enveloppe : mais ils l'enlèvent aisément ; ils l'emportent au plus haut des airs, d'où ils la laissent tomber à plusieurs reprises sur des rochers très-durs ; la hauteur de la chute et la très-grande vitesse qui en résulte , pro- duisent un choc violent, et la couverture de la tortue , bientôt brisée , livre en 236 HISTOIRE NATURELLE proie à Taigle carnassier ranimai qu'elle auroitmis à couvert si un poids plus con- sidérable avoit résisté aux efforts de Taigle pour l'élever dans les nues. De tous les temps on a attribué le même instinct aux aigles de TEvirope pour parvenir à dévorer les tortues grecques , et tout le monde sait que les anciens se sont plus à raconter la mort singulière du fameux poète Eschyle , qui fut tué , dit- on , par le choc d'une tortue qu'un aigle laissa tomber de très - haut sur sa tête nue. La tortue vermillon n'habite pas seule- ment aux environs du cap de Bonne -Es- pérance ; il paroît qu'on la rencontre aussi dans la partie septentrionale de l'A- frique. M. EdvN^ards a décrit un individu de cette espèce qui lui avoit été apporté de Sancta-Crux , dans la Barbarie occi- deutale. D E s T O R T U E s. 287 LA COURTE-QUEUE. vJn trouve à la Caroline cette tortue terrestre , dont la tête et les pattes sont recouvertes d'écaillés dures , semblables à des callosités. Les doigts sont réunis ; elle a cinq ongles aux pieds de devant , et quatre à ceux de derrière. Un de ses ca- ractères distinctifs est d'avoir la queue des plus courtes ; mais elle n'est pas ab- solument sans queue , ainsi que l'a dit M. Linné. La couverture supérieure , éclian- crée par-devant en forme de croissant , n'offre point de dentelures sur les bords , et les lames qui la garnissent sont larges , bordées de stries , et pointillées dans leur milieu. Il paroît que la courte -queue de- vient assez grande. On conserve au Cabi- net du roi une carapace de cette tortue ; elle a dix pouces six lignes de long , e^ huit pouces dix lignes de large. 238 HISTOIRE NATURELLE P^ LA CHAGRINÉE. J-Slous donnons ce nom à une non- velle espèce de tortue apportée des grandes Indes au Cabinet du roi par M. Sonnerat. Elle est très -remarquable par la conformation de sa carapace, qui ne ressemble à celle d'aucune tortue connue. Cette couverture supérieure a trois pouces neuf lignes de longueur , sur trois pouces six lignes de largeur ; elle paroit compo- sée , pour ainsi dire , de deux carapaces placées l'une sur l'autre , et dont celle de dessus seroit plus étroite et plus courte. Cette espèce de seconde carapace qui représente le disque , est longue de deux pouces huit lignes , large de deux pouces, un peu saillante , osseuse , parsemée d'une grande quantité de petits points qui la font paroître chagrinée ; et c'est de là que jious avons tiré le nom de l'animal. Ce To?n i /"r-.Ptn/ 27>p> ^^k 2. LA CHAGRINEE 2. EA XOTRATBE D E s T O R T U E s. 289 disque est composé de vingt-trois jDièces , qui ne sont recouvertes d'aucune écaille. Seize de ces pièces , plus larges que les autres , sont placées sur deux rangs sé- parés vers la tête par une troisième rangée de six pièces plus petites ; et ces troiâ rangs se réunissent à une dernière pièce qui forme la partie antérieure du disque. Les bords de la carapace sont cartilagi- neux et à clemi transparens ; ils laissent appercevoir les côtes de l'animal, le long desquelles cette partie cartilagineuse est un peu j-elevée, et qui sont au nombre de huit de chaque côté. Ces bords sont par-derrière presque aussi larges que le disque. Le plastron est plus avancé par-devant et par-derrière que la couverture supé- rieure ; il est un peu échancré par-devant^ cartilagineux, transparent, et garni de sept plaques osseuses, chagrinées, sem- blables aux pièces du disque , différentes entre elles par leur grandeur et par leur figure , placées trois vers le devant , deux vers le milieu , et deux vers le derrière du plastron. 240 HISTOIRE NATURELLE La tête ressemble à celle des tortues d'eau douce ; les rides de la peau qui environnent le cou , montrent que Tani- mal peut Falouger facilement. Comme nous n'avons rien appris relativement aux habitudes de cette tortue , et comme les pattes et la queue manquoient à Tindi-* vidû que nous venons de décrire , nous ne pouvons point dire si la chagrinée est terrestre ou d'eau douce. Cependant , comme sa couverture supérieure n'est presque pas bombée , nous présumons que cette tortue singulière est plutôt d'eau douce que de terre. D E s T O R T U E s. 24E LA ROUSSATRE. V-i'avous compté dans cette division qu'une 25o HISTOIRE NATURELLE seule espèce , à laquelle nous avons rap- porté tous les lézards ailés décrits par les Toyageurs ; oïl eu verra les raisons à l'ar- ticle particulier du dragon. La huitième division enfin comprend six espèces de lézards , parmi lesquelles nous rangeons la salamandre terrestre et ]a salamandre aquatique. Toutes les six. sont distinguées des autres, en ce qu'elles ont tiois ou quatre doigts aux pieds de devant, et quatre ou cinq aux pieds de derrière. Nous laissons exclusivement à ces animaux le nom de salamandre , qui a été souvent attribué à plusieurs lé- zards , très-différens des vraies salaman- dres , et même très-différens les uns des autres. Ils ont beaucoup de rapports avec les grenouilles et les autres quadrupèdes ovipares qui n'ont pas de queue ; ils leur ressemblent non seulement par leur peau dénuée d'écaillés apparentes , mais en- core par leurs habitudes, par les espèces de métamorphoses qu'ils subissent avant de devenir adultes , et par le séjour plus ou moins long qu'ils font au milieu des eaux 5 ils s'en rapprochent encore par DES L É Z A Tx D S. sSt leurs parties intérieures , et par la forme et le nombre de leurs os. S'ils ont des ver- tèbres cervicales , de même que les autres lézards , ils manquent presque tous de côtes , comme les grenouilles , et ils font ainsi la nuance qui réunit les quadrupèdes ovipares qui ont une queue, avec ceux qui en sont privés. Presque tous les lézards n'ont que deux ou quatre vertèbres cer- yicales : mais le crocodile , placé par sa grandeur et par sa puissance à la tête de ces animaux , et occvipant , dans la chaîne qui les réunit , l'extrémité oppo- sée à celle où se trouvent les salamandres a sept vertèbres au cou comme tous les quadrupèdes vivipares ; il lie par-là les lézards avec ces animaux mieux organi- sés , pendant que , d'un autre côté , il les rapproche des tortues de mer par une grande partie de ses habitudes et de sa conformation. s52 HISTOIRE NATURELLE PREMIÈRE DIVISION. JL É Z A R D S Dont la queue est applatie , et qui ont cinq doigts aux -pieds de devant. LES CROCODILES. Lorsqu'on compare les relations des voyageurs , les observations des natura- listes , et les descriptions des nomencla- teurs , pour déterminer si l'on doit comp- ter plusieurs espèces de crocodiles , ou si les différences qu'on a remarquées dans les individus ne tiennent qu'à l'âge, au sexe et au climat , on rencontre beaucoup de contradictions , tant sur la forme que sur la couleur , la taille , les mœurs et D É s L É Z A R D â. 253 l'habitation de ce grand quadrupède ovi- pare. Les voyageurs lui oiit rapporté ce» qui ne convenoit qu'à d'autres grands lézards très - diSércns du crocodile par leur conformation et par leurs habitudes; Hs lui en ont mènïe donné les noms. Ils ont dit que le crocodile s'appeloit tantôt ligan , tantôt gi/an , noms qui ne sont que des contractions de celui du lézard i^//a«e. C'est d'après ces diversités de noms, de forme et de mœurs, qu'ils ont voulu regarder les crocodiles comme formant plusieurs espèces distinctes ; mais tous Içs vrais crocodiles ont cinq doigts aux pieds de devant , quatre doigts palmés aux pieds de derrière, et n'ont d'ongles qu'aux trois doigts intérieurs de chaque pied. En examinant donc uniquement tous les grands lézards qui présentent ces caractères , et en observant attentivement les diflérences des divers individus , tant d'après les crocodiles que nous avons vus nous-mêmes que d'après les descriptions des auteurs et les récits des voyageurs , nous avons cru ne devoir compter que trois espèces parmi ces éuorines animaux. ^54 HISTOIRE NATURELLE La première est le crocodile ordinaire ou proprement dit , qui habite les bords du Nil ; on l'appelle alligator , principale- ment en Afrique , et Ton pourroit le dé- signer par le nom de crocodile perd , qui lui a déjà été donné ; la seconde est le crocodile noir , que M. Adanson a vu sur la grande rivière du Sénégal ; et la troi- sième, le crocodile qui habite les bords du Gange , et auquel nous conservons le nom de gavial, qui lui a été donné dans rinde. Ces trois espèces se ressemblent par les caractères distinctifs des crocodiles que uous venons d'indiquer ; mais elles difièrent les unes des autres par d'autres caractères , que nous rapporterons dans leurs articles particuliers. On a donné aux crocodiles d'Amérique le nom de caïman , que l'on a emprunté des Indiens. ISous en avons comparé avec soin plusieurs individus de difiérens âges avec des crocodiles du Nil, et nous avon» pensé qu'ils sont absolument de la même espèce que ces crocodiles d'Egypte; ils ne présentent aucune dilFérence remarquable- oui ne puisse être rapportée à riiifiuenc^ D E s L É Z A R D s. 255 du climat. Eti effet , si leurs maclioircs sont quelquefois moins alongées , elles ne diBèrent jamais assez , par leur rac- courcissement , de celles des crocodiles du Nil , pour que les caïmans constituent une espèce distincte, d'autant plus que cette différence est très-variable, et que les crocodiles d'Amérique ressemblent autant à ceux du Nil par le nombre de leurs dents, qu'uu individu ressemble à im autre parmi ces derniers crocodiles. On a prétendu que le cri des caïmans étoit plus foible , leur courage moins grand , et leur longueur moins considé- rable ; mais cela n'est vrai tout au plus que des crocodiles de certaines contrées de l'Amérique , et particulièrement des côtes de la Guiane. Ceux de la Louisiane font entendre une sorte de mugissement pour le moins aussi fort que celui des cro- codiles de Tancien continent , qu'ils sur- passent quelquefois par leur grandeur et par leur hardiesse, tandis que nous voyons d'un autre côté , dans l'ancien monde , plusieurs pays où les crocodiles sont pres- que muets , et présentent une sorte de £56 HISTOIRE NATURELLE lâcheté et de douceur de mœurs égales pour le moins à celles des crocodiles de la Guiaue. Les crocodiles du Nil et ceux d'Amérique ne forment doue qu'une espèce, dont la grandeur et les habitudes varient dans les deux continens , suivant la température , l'abondance de la nourriture , le plus ou moins d'humidité , etc. Cette première espèce est donc commune aux deux mon- des , pendant que le crocodile noir n'a ' été encore vu qu'en Afrique , et le gavial sur les bords du Gange. Les voyageurs qui sont allés sur les côtes orientales de l'Amérique méridio- nale , disent que Ton y rencontre de grands quadrupèdes ovipares , qu'ils re- gardent comme une petite espèce de caï- man, bien distincte de l'espèce ordinaire. Cette prétendue espèce de caïman est celle d'un grand lézard que l'on nomme dragonne , et qui parvient quelquefois à la longueur de cinq ou six pieds. Notre opinion à ce sujet a été confirmée par un fort bon observateur qui arrivoit de la Quiane , à qui nous avons montré la dra^ D E 5 L È Z A R D s. 2^7 gonnt" , et qui Ta recoimuc pour le lézard qu'on y appelle la petite espèce de caiman. Le navigateur Danipicr a aussi voulu regarder coniuie une nouvelle espèce de crocodiles, de très-grands lézards que l'ou trouve dans la nouvelle Espagne , ainsi que dans d'autres contrées de rAinérique, et auxquels les Espagnols ont donné éga- lement le iiDin de caiman; mais il nous paroît que les quadrupèdes ovipares , dési- gnés par Dampier sous les noms de croco- dile et de caïman , sont de l'espèce des grands lézards que Ton a nommésybwe//e- queues. Ils présentent en effet le caractère distinctif de ces derniers; lorsqu'ils cou- rent , ils portent, suivant Dampier lui- même , leur queue retroussée et repliée par le bout en forme d'arc , taudis que les vrais crocodiles ont toujours la queue presque traînante. D'ailleurs les vrais crocodiles ont , dans tous les pays , quatre glandes qui ré- pandent une odeur de musc bien sensible. Les grands lézards que Dampier a voulu comprendre parmi ces animaux , n'en ont point, suivant lui : nous avons donc 22 :i58 HISTOIRE NATURELLE une nouvelle preuve que ces lézards de Dampier ne forment pas une quatrième espèce de crocodiles. Nous allons examiner de près les trois espèces que nous croyons devoir compter parmi ces lézards géans , en commençant par celle qui liabite les bords du Nil , et qui est la plus anciennement connue. 2cmv Fl.S.I'ctETTE seconde espèce diffère de la pre- mière , en ce que sa couleur est presque noire, au lieu d'être verdàtre ou bronzée comme celle des crocodiles du Nil. C'est M. Adanson qui a fait counoître ces cro- codiles noirs , qu'il a vus sur la grande rivière du Sénégal. Leurs mâchoires sont plus alongées que celles des alligators ou crocodiles proprement dits. Ils sont d'ail- leurs plus carnassiers que ces derniers , et pourroient par conséquent en différer aussi par des caractères intérieurs , la diversité des mœurs étant très-souvent fondée sur celle de l'organisation interne. L'on ne peut pas dire qu'ils sont de la même espèce que le crocodile du Nil , qui auroit subi dans sa couleur et dans D E 5 L E Z A R D s. 3o5 quelques parties de son corps, rinflucuce du climat , puisque , suivant le même M. Adanson , la rivière du Sénégal nour- rit aussi un grand nombre de crocodiles vcrds , entièrement semblables ù ceux d'Egypte. Non seulement on n'a point encore observé ces crocodiles noirs dans le nouveau monde, mais aucun voyageur n'en a parlé que M. Adanson, et ce savant naturaliste ne les a trouvés que sur le grand fleuve du Sénégal. ce 3o6 HISTOIRE NATURELLE LE GAVIAL, o u LE CROCODILE A MACHOIRES ALONGÉES. Troisième espèce. \->ETTE troisième espèce de crocodile se trouve dans les grandes Indes : elle y habite les bords du Gange, où on Fa nommée ^ûp-m/. Elle ressemble aux croco- diles du Nil par la couleur, et par les ca- ractères généraux et distinctifs des croco- diles. Le gavial a, comme les alligators, cinq doigts aux pieds de devant, et quatre doigts aux pieds de derrière ; il n'a d'ongle qu'aux trois doigts intérieurs de chaque pied. Mais il diffère des crocodiles d'E- gypte par des caractères particuliers et très -sensibles. Ses mâchoires sont plus D E s L É Z A R D s. 807 aîongées et bcaiicoiip plus étroites , au point de paroître comme une sorte de long bec qui contraste avec la grosseur de la tête. Les dents ne sont pas inégales en grosseur et en longueur comme celles des crocodiles proprement dits; elles sont plus nombreuses ; et l'on conserve au Cabinet du roi un individu de cette es- pèce, qui a environ douze pieds de long, et qui a cinquante-huit dents à la mâ- choire supérieure , et cinquante à la mâ- choire inférieure. Le nombre des bandes transversales et tuberculeuses qui garnissent le dessus du corps, est plus considérable de plus d'un quart dans les crocodiles du Gange que dans l'alligator ; d'ailleurs elles se tou- chent toutes , et les écailles quarrées qui les composent , sont plus relevées dans leurs bords, sans l'être autant dans leur centre , que celles du crocodile du Nil. Ces dificrences avec le crocodile propre- ment dit sont plus que suffisantes pour constituer une espèce distincte. Les crocodiles du Gange parviennent à une grandeur très-considérable, ainsi que 3g3 histoire naturelle ceux du Nil. L'on peut voir au Cabinet du roi une portion de mâchoire de ces crocodiles des grandes Indes , d'après la- quelle nous avons trouvé que l'animal auquel elle a appartenu , devoit avoir trente pieds dix pouces de longueur *. Au reste, nous ne pouvons donner une idée plus nette de ces énormes animaux qu'en renvoyant à la figure et à la note précédente, où nous rapportons les prin- cipales dimensions de Findividu de près * T)im élisions d'un crocodile à tête alongée. pieds, pouces, lignes. Longueur totale ii lo 6 Longueur de la tête 2 i x Longueur depuis l'entre-deux des yeux jusqu'au bout du rau- seau I 17 g Longueur de la machoii-e supé- rieure 2 •» 6 Longueur de la partie de la mâ- choire qui est armée de dents. 16» Distance des deux yeux » 3 3 Grand diamètre de l'oeil « 2 » Circonférence du corps à l'endroit le plus gros 3 6» D E s L E Z A R D s. 309 de douze pieds , dont nous venons de parler. C'est apparemment de cette espèce qu'é- "toient les crocodiles vus par Taveruier sur les bords du Gange, depuis Toutipour]\i?,' qu'au bourg à'Acérat, qui en est à vingt- cinq cosses. Ce voyageur appercut un très- grand nombre de ces animaux couchés sur le sable ; il tira sur eux : le coup donna dans la mâchoire d'un grand crocodile, et fit couler du sang; mais l'animal se retira dans le fleuve. Le lendemain , Ta- vernier , en continuant de descendre le Gange, en vit un aussi grand nombre, également étendus sur le rivage ; il tira pieds, pouces, lignes. Circonférence de la tête derrière les jeux 2 3) » Circonférence du niuseau à l'en- droit le plus étroit a 6 3 Longueur dçs paties de devant jusqu'au bout des doigts 187 Longueur des pattes de derrière jusqu'au bout des doigts r 8 » Longueur de la queue 5 i s Circonférence de la queue à son origine 2, 8 » 3io HISTOIRE NATURELLE sur deux de ces animaux deux coups de fusil chargé à trois balles : au même ins- tant ils se renversèrent sur le dos , ou- vrirent la gueule, et expirèrent. Il paroît que le gavial n'étoit point inconnu des anciens, puisqu'au rapport d'Elien , on disoit de sou temps que l'on trouvoit sur les bords du Gange des cro- codiles qui avoient une espèce de corne au bout du museau. Mais M. Edwards est le premier naturaliste moderne qui ait parlé du gavial: il publia, en i756, la figure et la description d'un individu de cette espèce , dont il a comparé \ts anâchoires longues et étroites au bec dû îiarle , et qu'il a nommé crocodile à bec aloTigé. Cet individu , qui présentoit tous '!|es signes d'un développement peu avan- cé, avoit au-dessous du ventre une poche ou bourse ouverte. Nous n'avons trouvé aucune marque d'une poche semblable dans le crocodile du Gange dont nous ve- nons de donner les dimensions , ni dans un jeune crocodile de la même espèce, et long de deux pieds trois pouces , qui fait aussi partie de la collection du Cabinet D E s L É Z A R D s. 3iî du roi. Peut-être cette poche s'cfface-t-elle à mesure que ranimai grandit, et n'est- clle qu'un reste de Touverture par laquelle s'insère le cordon ombilical ; ou peut-être l'individu de M. Edwards étoit-il d'un sexe différent de ceux dont nous avons vu la dépouille. L'on conserve au Cabinet du roi une portion de mâchoire garnie de dents , à demi pétrifiée, renfermée dans une pierre calcaire trouvée aux environs de Dax en Gascogne , et envoyée au Cabinet par M. de Borda. Elle nous a paru , d'après l'examen que nous en avons fait , avoir appartenu à un gavial. n 12 HISTOIRE NATURELLE LE FOUETTE-QUEUE. JLiE nom àç fouetfe-queue a été employé par différeiis naturalistes pour désigiiei* diverses espèces de lézards qui peuvent donner à leur queue des mouveniens semblables à ceux d'un fouet. Ce nom a été particulièrement appliqué au lézard dont il est ici question, et à la dragonne dont nous parlerons dans l'article sui- Yant. Il en est résulté une obscurité d'au- tant plus grande dans les faits rapportés par les voyageurs, relativement aux lé- zards, que le nom de cordyle a été aussi donné par plusieurs auteurs à la dra- gonne, et qu'ensuite le nom àe fouette- queue a été lié avec celui de cordyle, de manière à être attribué non seulement à la dragonne , qui a réellement la pro- priété de faire mouvoir sa queue comme un fouet , mais encore à d'autres espèces D E s L E Z A R D s. ?i3 de lézards , privées de cette faculté, et dé- signées également par le nom de cordjie. Nous croyons donc , pour éviter toute confusion , devoir conserver uniquement au lézard dont il s'agit ici , le nom de fouette- queue. 11 habite les climats chauds de l'Amé- rique méridionale , et ou le trouve par- ticulièrement au Pérou. Il a quelquefois plusieurs pieds de longueur. Son dos est couvert de plaques quarrées et d'écaillés ovales qui garnissent aussi ses côtés. Sa queue, qui paroît dentelée par les bords, et qu'il a la facilité d'agiter comme un fouet, l'assimile un peu à la dragonne; et la forme applatie de cette même queue, ainsi que ses pieds palmés, le rapprochent du crocodile, dont il est cependant bien aisé de le distinguer, parce que le cro- codile n'a que quatre doigts aux pieds de derrière , tandis que le fouette-queue en a cinq à chaque pied. C'est ce qui nous a déterminés à regarder comme uu fouette -queue l'animal représenté dans la planche CVÏ du premier volume de Scba. 31. Linné l'a rapporté au crocodile: 27 3i4 HISTOIRE NATURELLE mais il a cinq doigts aux pieds de der- rière ; et , d'un autre côté , il ne peut pas être confondu avec la dragonne, puisque ses pieds sont palmés. D'ailleurs Seba do]ine l'Amérique pour patrie à ce grand lézard , ce qui s'accorde fort bien avec ce que M. Linné lui-même a dit de celle du fouette-queue. Nous croyons devoir ob- server aussi que le lézard représenté dans Seba, torael, planche ClII, figure 2, et oue M. Linné a indiqué comme un fouette- queue , est une dragonne , attendu que quoique le dessinateur lui ait donné des membranes aux pieds de derrière , il est dit dans le texte qu'il n'en a point. Le fouette-queue nous paroît être, ainsi que nous l'avons déjà dit *, le lézard que Dampier regardoit comme une seconde espèce de caïman d'Amérique. 11 y a dans l'île de Ceylan un grand lézard qui, par sa forme, ressemble beau- coup au crocodile ; mais il en diilère par sa langue bk'ue et fourchue, qu'il alonge d'une manière efliayante , lorsqu'il la * Article des crocodiles. DES LÉZARDS. 3i5 tire pour sifïïcr , ou seulement pour res- pirer. On le nomme kobbera-guion. Il a communément six pieds de longueur. Sa chair est d'un assez mauvais goût. Il plonge souvent dans l'eau ; mais sa demeure ordinaire est sur la terre, où il se nourrit des oiseaux et des divers ani- maux qu'il peut saisir. Il craint riiommc, et n'ose rien contre lui ; mais il écarte sans peine les chiens et plusieurs des ani- maux qui veulent l'attaquer , en les frap- pant violemment avec sa queue , qu'il agite et secoue comme un long fouet. Nous ignorons si les doigts de ses pieds sont réunis par des membranes : s'ils le sont , il doit être regardé comme de la même espèce que le fouette -queue du Pérou , qui peut - être aura subi l'in- fluence d'un nouveau climat ; sinon il faudra le considérer comme une dra- gonne. 3i6 HISTOIRE NATURELLE LA DRAGONNE. JLja dragonne ressemble beaucoup par sa forme au crocodile ; elle a , comme lui , la gueule très-large , des tubercules sur le dos , et la queue applatie. Sa gran- deur égale quelquefois celle des jeunes caïmans. Sa couleur, d'un jaune roux foncé , et plus ou moins mêlé de ver- dâtre , est semblable aussi à celle de ces animaux; c'est ce qui a fait que, sur les côtes orientales de l'Amérique méridio- nale, elle a été prise pour une petite es- pèce de crocodile ou de caùnan. Mais la dragonne en diflère principalement, parce que, au lieu d'avoir les pieds pal- més, ses doigts, au nombre de cinq à chaque pied , sont très -séparés les uns des autres , comme ceux de presque tous, les lézards. Ils sont d'ailleurs tous garnis d'ongles aigus et crochus. La tête, appla- Tp7}, l J ■ n.o .Jh(7 ojà LA J^RAGONE. ; f^ D E s L E Z A R D s. 3^7 tic par-dessus, et comprimée parles cutés, a un peu la forme d'une pyramide à quatre faces , dont le museau seroit le sommet : elle ressemble par-là à celle de plusieurs serpens , ainsi que la laugue, qui est fourchue, et qui, loin d'être ca- chée et presque imuiobile comme celle du crocodile , peut être dardée avec faci- lité. Les yeux sont gros et brillaus; Tou- Tcrturc des oreilles est grande , et entou- rée d'une bordure d'ccailles; le corps épais, arrondi, couvert d'écaillés dures, osseuses comme celles du crocodile , et presque toutes garnies d'une arête saillante : plu- sieurs de celles du dos sont plus grandes que les autres, et relevées par des tuber- cules en forme de crêtes, dont les plus hauts sont les plus voisins de la queue, sur laquelle les lignes qu'ils forment sont prolongées par d'autres tubercules. Ceux-ci sont plus aigus, et produisent deux den- telures semblables à celle d'une scie, et réunies en une seule vers l'extrémité de la queue, qui est très- longue. La dra- gonne, ainsi que le fouette-queue, a la facilité de la remuer vivement et d» 27 3i8 HISTOIRE NATURELLE Tagiter comme un fouet. Cette faculté lui a fait donner le uom de fouette- queue , que nous avons conservé uniquement à l'espèce précédente , et que nous n'em- ploierons jamais en parlant de la dra- gonne, pour éviter toute confusion. Ou l'a aussi appelée cordyle; mais nous réser- vons ce nom pour un lézard différent de celui que nous décrivons, et auquel on l'a déjà donné. C'est principalement dans l'Amérique méridionale que l'on rencontre la dra- gonne. Il y a au Cabinet du roi un indi- vidu de cette espèce , qui a été envoyé de Cayenne par M. de la Borde , et d'après lequel nous avons fait la description que l'on vient de lire "^ : elle est assez conforme * Principales dimensions d'une dragonne qui est au Cabinet du roi. picfis. pouces, lignes. Longvieur totale 2 5 4 Conioui' cle la guealc » 4 4 Dislance des deux yeux » i » Circonféi'ence du corps à l'en- droit le plus gros ..-. >;! 7 6 JiPligilcur des pattes de dcyan-, D E s L E Z A R D s. Si'o à ce que dit Wormius de cette espèce de î:;raiid lézard, dont il avoit un individu long de quatre pieds romains. Clusius connoissoit aussi le nxenie animal , et Scba Tavoit dans sa collection. Wormius a parle du nombre et de la forme des dents de la dragonne : il a dit que ce lézard en a dix-sept de chaque côté de la mâchoire inférieure ; que celles de devant sont petites et aiguës , et celles de derrière grosses et obtuses. Nous avons remarqué la même chose dans la dra- gonne du Cabinet du roi. On a reproché ù Pline de s'être trompé touchant la forme des dents du crocodile , en les distinguant en dents incisives , en canines et en mo- laires. Nous avons déjà vu ce qu'ente ii- doit ce grand naturaliste par les dents canines du crocodile ; et ù l'égard des ' pieds, pouces. lignes. jusqu'au bout des doigts s 3 lo Longueur des paues de derrière o^ pa jusqu'au bout des doigts.... a 5 6 Longueur de la quene •. 146 Circonférence de la queue à son origine » 5 8 320 HISTOIRE NATURELLE dents molaires , il poiirroit se faire que son erreur est venue de la méprise de ceux qui lui ont fourni des observations. Il se peut en effet que la dragonne habite dans les contrées orientales que les an- ciens connoissoient , que ses grosses dents aient été regardées comme des dents mo- laires, et que Panirnal lui-même ait été pris pour un vrai crocodile. C'est ainsi que , dans des temps très-récens , la con- fusion que plusieurs voyageurs ont faite des espèces de grands lézards voisines de celle du crocodile , a produit plus d'une erreur relativement à la forme et aux habitudes naturelles de ce dernier animal. La grande ressemblance de la dragonne avec le crocodile feroit penser, au pre- mier coup d'œil , que leurs mœurs sont semblables ; mais ces deux lézards dif- fèrent par un de ces caractères dont la présence ou Tabsence a la plus grande influence sur les habitudes des animaux. M. de Buffori a montré dans PHistoire na- turelle des oiseaux , combien la forme de leurs becs détcriuiue respèce de uourri- DES LÉZARDS. S^r iure qu'ils peuvent prendre, les force à habiter de préférence Teudroit où ils trou- vent aisément cette subsistance, et pro- duit ou uioditic par-là leurs principales habitudes. La faculté de voler qu'ils ont reçue , leur donne la plus grande facilité de changer de place , et les rend par coji- séqucnt moins dépendaus de la forme de leurs pieds : cependant uous v03^ons cer- taines classes d'oiseaux dont les habitudes sont produites |>ar les pieds palmés , avec lesquels ils peuvent nager aisément, ou bien par les griffes aiguës et fortes qui leur servent à attaquer et à se défendre. Mais il n'en est pas de même des quadru- pèdes, tant vivipares qu'ovipares y la na- ture de leurs aiiuiens est non seulement déterminée par la forme de leur gueule ou de leurs dents , uiais encore par celle de leurs pieds , qui leur fouriiissent des moyens plus ou moins puissans de saisTr leur proie , d'aller avec vitesse d'un en- droit à un autre , d'habiter le uiilieu des eaux , les rivages , les plaines ou les forets , etc. Une gueule plus ou moins ienduc , quelques dents de plus ou de 222 HISTOIRE NATURELLE moins , des ongles aigus ou obtus , des doigts réunis ou divisés , en voilà plus qu'il n'en faut pour faire varier leurs mœurs souvent du tout au tout. On eu peut voir des exemples dans les quadru- pèdes vivipares , parmi lesquels la plupart dçs animaux qui ont des habitudes com- munes , qui habitent des lieux semblables, ou qui se nourrissent des mêmes subs- tances , ont leurs dents , leur gueule ou leurs pieds conformés à peu près de la même manière , quelque différens qu'ils soient d'ailleurs par la forme générale de leur corps , par leur force et par leur grandeur. La dragonne et le crocodile en sont de nouvelles preuves : la dragonne ressemble beaucoup au crocodile ; n^ais elle en diffère par ses doigts, qui ne sont pas palmés : dès-lors elle doit avoir des habitudes différentes ; elle doit nager avec plus de peine , marcher avec plus de vitesse , retenir les objets avec plus de facilité , grimper sur les arbres , se nourrir quelquefois des animaux des bois ; et c'est en effet ce qui est conforme aux observations que nous avons recueillies. DES LÉZARDS. 32^ M. de la Boiclc , qui a nommé cet animal lézard caïman , parce qu'il le regarde , avec raison , comme faisant la nuanco entre les crocodiles et les petits lézards, dit qu'il fréquente les savanes noyées et les terrains marécageux , mais qu'il se tient à terre , et au soleil , plus souvent que dans l'eau. 11 est assez difficile à prendre , parce qu'il se renferme dans des trous. 11 mord cruellement ; il darde presque toujours sa langue comme les serpcns. M. de la Borde a gardé chez lui , pendant quelque temps , une dragonne en vie. Elle se tenoit des heures entières dans l'eau : elle s'y cachoit lorsqu'elle avoit peur \ mais elle en sortoit souvent pour aller se chauffer aux rayons du soleil. La grande différence entre les mœurs de la dragonne et celles du crocodile n'est cependant pas produite par un sens de plus ou de moins , mais seulement par une membrane de moins et quelques ongles de plus. On remarque des eflets semblables dans presque tous les autres auim.aux *, et il en scroit de même dans 324 HISTOIRE NATURELLE riiomiiie , et des différences très-peu sen* sibles dans la conformation extérieure produiroient une grande diversité dans ses habitudes , si Tintelligence humaine, accrue par la société , n'avoit pas inventé les arts pour compenser les défauts de nature. Les animaux qui attaquent le crocodile doivent aussi donner la chasse à la dra- gonne, qui a bien moins de force pour leur résister, et qui même est souvent dévorée par les grands caïmans. Sa manière de vivre peut donner à sa chair un goiit différent de celui de la chair du crocodile : il ne scroit donc pas surprenant qu'elle fût aussi bonne à man- ger que le discirt les habitans des îles Antilles , où on la regarde comme très- succulente , et où on la compare à celle d'un poulet. On recherche aussi àCayenn© les œufs de ce grand lézard , qui a de nouveaux rapports avec le crocodile par sa fécondité , la femelle pondant ordinai- fement plusieurs douzaines d'œufs. On trouve au Brésil, et particulière- incut auprès de la rivière de Saint -Frau- D E s L E Z A R D s. 3^5 cois , nrie sorte de lézard nominé i^naru- eu , qui ressemble beaucoup au croco- dile , grimpe facileiueut sur les arbres , et paroît ne diSérer de la dragonne que par uue couleur plus foncée et des ongles moins forts. Si les voyageurs ne se sont pointtrompés àcesujet , Ton ne doit regar- der rignarucu que comme une variété de la dragonne. fy farts. 28 326 HISTOIRE ÎSÎATURELLE LE TUPINAMBIS*. Ce lézard liabite également les contrées chaudes de l'ancien et du nouveau con- tinent. On a prétendu que , sur les bords de la rivière des Amazones , auprès de Surinam et des pays voisins , le tupi- uambis acquéroit une grande taille et parvenoit jusqu'à la longueur de douze pieds -, mais on aura sûrement pris des caïmans pour des tupinambis , et Ton doit ranger cette table parmi tant d'autres qui ont déBguré l'histoire des quadru- pèdes ovipares. Le tupinambis a tout au plus une longueur de siK ou sept pieds dans les contrées ou il trouve la nourri- ture la plus abondante et la température * Tupinambis en Amérique; galtahé ^n Sé- ,,égal; caiman, guano, ligan , ^^g^-^'J^'^'^-^ tains voyageurs , ce qui l'a !aU contoud.e avec es ;:::::.L!auisi qu'avec les crocodiles;.//../.;..^/- d° ns la nouvelle Espagne. To/ft /Y/û . y (7^7)2 0. DES LEZARDS. 827 la plus favorable. L'indiviclu que nou;; avons décrit, et qui est au Cabinot du roi , a trois pieds huit pouces de long en y comprenant la queue*; il a été envoyé du cap de Bonne -Espérance. J'ai vu uu autre individu de cette espèce, apporté du Sénégal , et dont la longueur totale étoit de quatre pieds dix pouces. La queue du tupinambis est applatie et à peu près de la longueur du corps. 11 a à chaque pied cinq doigts assez longs, séparés les uns des autres , et tous armés d'ongles forts et crochus. La queue ne présente pas * Principales dimensions du iupinamhis. pieds, pouces. lignes. Longueur totale 3 8 a Contour de la gueule » 4 8 Circonférence du corps à l'eudroit le plus gros l l O Longueur des pattes de devant jusqu'au bout des doigts.... » 5 9 Longueur des pattes de derrière jusqu'au bout des doigts 269 Longueur de la queue I 10 6 Circonl'érence de la queue à son origine » 7 10 328 HISTOIRE NATURELLE de ciète comme celle de la dragoune ; mais le dessus et le dessous du corps , la tête , la queue et les pattes sont garnis de petites écailles qui suffiroient pour distinguer le tupinambis des autres grands lézards à queue plate : elles sont ovales , dures , un peu élevées , presque toutes entourées d'un cercle de petits grains durs , placées à côté les unes des autres , et disposées en bandes circulaires et trans- versales; leur grand diamètre est à peu près- d'une demi-ligne dans l'individu en- voyé du cap de Bonne -Espérance au Ca- binet du roi *. Là manière dont elles sont colorées , donne au tupinambis une sorte de beauté : son corps présente de grandes taches ou bandes irregulières d'un blane assez éclatant qui le font paroitre comme marbré , et forment mènie sur les côlés une espèce de dentelle. Mais , en le revê- * L*on peut voir, dans la colleciion du Cabinet du roi, uu lupinaujbis mâle, lue clans le temps de ses amours. Ses parties sexuelles sont hors de l'anus; les deux verges, très-séparées l'une de l'autre, ont un pouce trois lignes de longueur. L'animal a deui; pieds huit pouces de longueur totale. D E s L É Z A R D s. 3^9 tant de cette parure agréable , la Nature ne lui a fait qu'uu présent funeste; elle Ta placé trop près du crocodile , son en- nemi mortel , pour lequel sa couleur doit être comme un signe qui le fait rccon- 5ioître de loin. 11 a, en eftct, trop peu de force pour se défendre contre les grands animaux. Il n'attaque point riiomme : il se nourrit d'œufs d'oiseaux , de lézards beaucoup plus petits que lui , ou de pois- sons qu'il va chercher au fond des eaux. Mais , n'aj^ant pas la même grandeur , les mêmes armes , ni par conséquent la même puissance que le crocodile, et pou- vant manquer de proie bien plus souvent, il ne doit pas être si difficile dans le choix de sa nourriture : il doit d'ailleurs chas- ser avec d'autant plus de crainte , que le crocodile , auquel il ne peut résister , est en très -grand nombre dans les pays qu'il habite ; on rapporte même que la présence des caïmans inspire une si grande frayeur au tupinambis , qu'il fait entendre un sifflement très-fort. Ce sifflement d'effroi est une espèce d'avertissement pour les hommes qui se baignent dans les cnyi- 23 33o HISTOIRE NATURELLE roiis ; il les garantit , pour ainsi dire , de la dent meurtrière du crocodile ; et c'est de là qu'est venu au tupinanibis le nom de sauve-garde ou sauveur , qui lui a été donné par plusieurs voyageurs et natu- ralistes. Il dépose ses œufs , comme les caïmans , dans des trous qu'il creuse dans le sable sur le bord de quelque rivière ; le soleil les fait éclore. Ils sont assez gros et ovales, et les Indiens s'en nourrissent sans peine. La chair du tupinambis est aussi très-succulente pour ces mêmes Indiens, et plusieurs Européens qui eu avoient mangé tant en Amérique qu'en Afrique , m'ont dit l'avoir trouvée délicate. Cet animal produit des bézoards , ainsi que le crocodile et d'autres lézards. Ces concrétions ressemblent aux bézoards des crocodiles , quant à leur forme extérieure ; elles sont de la grosseur d'un œuf de pigeon , et d'une couleur cendrée claire , tachetée de noir. On leur a attribué les mêmes vertus chimériques qu'aux autres bézoards , et particulicrement à ceux du crocodile et de l'iguane. La disette que le tnpiaainbis éprouve DES LEZARDS. 33i frcqncinmciit , a chi allcrcr ses goûts; tant la faini et la misère dénaturent les habitudes. 11 se nourrit souvent de corps infects et de substances à demi pourries; et lorsque cet aliment abjectlui manque, il le remplace par des mouches et par des fourmis. 11 va chasser ces insectes au milieu des bois, qu'il fréquente, ainsi que les bords des eaux. La conformation de ses pieds , dont les doigts sont très-séparés les uns des autres , lui donne une grande facilité de grimper sur les arbres , où il cherche des œufs dans les nids , mais où il ne peut souvent que vivre misérable- ment , en poursuivant avec fatigue des animaux bien plus agiles que lui. Le seul quadrupède ovipare qu'on a cru devoir uppclcY saupe-garde, souffre donc une faim cruelle , ne peut se procurer qu'avec peine et inquiétude la nourriture dégoûtante à laquelle il est fréqucmuient réduit , et finit presque toujours par être la victime du plus fort. Le tupinambis est le même animal que le lézard du Brésil , appelé teji/guacu et îemaimra-tuplnambis , et dont Ray , ainsi 332 HISTOIRE NATURELLE que d'autres auteurs , ont parlé. Marc- grave en a vu un vivre sept mois sans rien manger. Quelqu'un ayant marché sur la queue de ce tupinambis , et en ayant brisé une partie , elle repoussa de deux doigts. Au reste, il est important de remarquer que ces noms de tejuguacu et de temapaju ont été donnés à plusieurs lézards d'espèces différentes ; ce qui n'a pas peu augmenté la confusion qui a xégné dans l'histoire des quadrupèdes ovipares. D E s L Ë Z A R D s. 333 LE SOURCILLEUX. Ok trouve dans l'île de Ceylan , dans celle d'Aniboine , et vraisemblablement dans d'autres régions des grandes Indes , dont la température ne diffère pas beau- coup de celle de ces îles , un lézard au- quel on a donné le nom de sourcilleux , parce que sa tète est relevée au-dessus des yeux par une arête saillante, garnie de petites écailles en forme de sourcils. Cet animal est aussi remarquable par une crête composée d'écaillés ou de petites lames droites , qui orne le derrière de sa tête , et qui se prolonge en forme de peigne ou de dentelure , jusqu'au bout de la queue. Les yeux sont grands , ainsi que les ouvertures des oreilles; le mu- seau est pointu , la gueule large , la queue applatie et beaucoup plus longue que le corps. Ce lézard a les doigts très-séparçsi 334 HISTOIKE NATURELLE les uns des autres, et très-lougs, sui- tout ceux des pieds de derrière, dont \& quatrième doigt égale la tête en longueur ; les ongles sont forts et crochus. Les écailles dont tout le corps est recouvert, sont très-petites, inégales en grandeur , mais toutes relevées par une arête longi- tudinale , et placées les unes au-dessus des autres, comme les écailles de plu- sieurs poissons. La coulciu- générale des sourcilleux est d'un brun clair , tacheté de rouge plus ou moins foncé. La lon^ gueur totale de l'individu que nous avons décrit, et que Ton conserve au Cabmet du roi, est d'un pied. Comme les doigts de ces lézards sont très-longs et très-divi- ses, leurs habitudes doivent approcher, à beaucoup d'égards, de celles de la dra- 'sonne. On dit qu'ils poussent des cris, qui leur servent à se rallier. Au reste , ce caractère très - apparent d'écaillés relevées , cette sorte d'armure qui donne un air distingué au lézard qui en est revêtu , et que nous trouvons ici pour la seconde fois , n a pas été unique- ment accordé au sourcilleux et a la dra-. D E s L É Z A R D s. 333 c:onne. 11 en est de ce caractère coinine de tous les autres, dont chacun est presque toujours exprimé avec plus ou moins de force dans plusieurs espèces dinérentes. Cette crête que uous venons de reuiar- quer dans le sourcilleux , sert aussi à défendre ou parer la te te-fo incline , Ti- guane , le basilic , etc. Non seulement même elle a des formes difiérentcs dans chacun de ces lézards ; non seulement elle présente tantôt des rayons alongés , tantôt des lames aiguës , larges et très- courtes , etc. mais encore elle varie par sa position : elle s'élève en rayons sur tout le corps du basilic , depuis le som- met de la tête jusqu'à Textrémité de la queue ; elle orne de même la quenc du porte-crête , et garnit ensuite son dos eu forme de dentelure ; elle revêt non seule- ment le corps, mais encore une partie de la membrane du cou de Tiguane ; elle s'étend le long du dos du mâle de la salamandre à queue plate ; elle paroît comme une crénclure s0r celui du plissé ; à peine sensible sur le dessous de la gorge du marbré , elle défend , dans le galéote, 336 HISTOIRE NATURELLE la tête et la partie antérieure du dos ; elle se trouve aussi sur cette partie antérieure dans Tagame ; elle se présente , pour ainsi dire , sur chaque écaille dans le stellion , razu'ré , le téguixin ; elle règne le long de la tête , du corps et du ventre du ca- méléon ; elle paroît à l'extrémité de la queue du cordyle; et, pour ne pas rap- procher ici un i3lus grand nombre de qua- drupèdes ovipares , elle est composée d'é- cailles clair-semées sur le lézard appelé tête - fourchue ; elle occupe le dessus du corps , de la tête et de la queue , dans le sourcilleux , et nous avons vu qu'elle ne s'étendoit que sur la queue de la dra- e;onne. mimât ■ i lau. % D E s L É Z A R D s. SSy LA TÊTE-FOURCHUE. J-JaKS rîle d'Amboiiie ^ et par consé- quent dans le même climat que le sour- cilleux , on trouve un lézard qui res- semble beaucoup à ce quadrupède ovi- pare. 11 a, comme lui, depuis la tête jus- qu'à rextrémité de la queue, des aiguil- lons courts en forme de dentelure, mais qui sont, sur le dos , plus séparés les uns des autres que dans le sourcilleux. La queue , comprimée comme celle du cro- coxiile , est tout au plus de la longueur du corps. Le dessus de la tête , qui est très- courte et très-convexe , présente deux éniinences qui ont une sorte de ressem- blance avec des cornes. Suivant Seba, la pointe du museau est garnie d'un gros tubercule entouré d'autres tubercules blancliâtres ; le cou est goitreux , et le corps semé de boutons blancs , ronds , 29 338 HISTOIRE NATURELLE élevés , que Ton retrouve encore au-des- sous des yeux et de la mâchoire infé- rieure. Les cuisses, les jambes et les doigts, sont longs et déliés. Ce lézard et Tespèce précédente ont trop de caractères exté- rieurs communs pour ne pas se ressem- bler beaucoup par leurs habitudes natu- relles , d'autant plus qu'ils préfèrent Tun ' et l'autre les contrées chaudes de Flnde : aussi leur attribue-t-on à tous les devix la faculté de se rallier par des cris. D E s L É Z A R D s. 339 LE LARGE-DOIGT. J-JES caractères distiuctifs de ce lézard , qui se trouve dans les Indes , sont d'avoir la queue deux fois plus longue que le corps , comprimée , un peu relevée eu carène par-dessus , striée par-dessous , et divisée en plusieurs portions , compo- sées chacune de cinq anneaux de très- petites écailles. Il a sous le cou une mem- brane assez semblable à celle de Tiguane , mais qui n'est point dentelée, A chaque doigt , tant des pieds de devant que des pieds de derrière, Favant-dernière articu- lation est par - dessous plus large que les autres ; et c'est de là. que M. Daubenton a tiré le nom que nous lui conservons. La tête est plate et comprimée par les côtés ; le museau très - délié ; les ouvertures des narines sont très-petites , ainsi que les trous des oreilles. 340 HISTOIRE NATURELLE LE BIMACULE. Nous devons la connoissauce de cette nouvelle espèce de lézard à M. Sparrinan , savant académicien de Stockholm , qui en a décrit plusieurs individus envoyés de TAmérique septentrionale par M. le doc- teur Acrelius à M. le baron de Geer. Quel- ques uns de ces individus avoient le des- sus du corps semé de taches noires; tous avoient deux grandes taches de la même couleur sur les épaules , et c'est ce qm leur a fait donner par M. Sparrman le nom de UmacuUs. La tète de ces lézards est applatie par les côtés ; la queue est comprimée et deux fois plus longue que le corps; tous les doigts des pieds de de- vant et de ceux de derrière , excepté les doigts extérieurs , sont garnis de lobes ou de membranes qui en élargissent la sur- face , et qui donnent au bimaculé un nouveau rapport avec le large-doigt. DES LEZARDS. 3-^t Suivant M. le docteur Acrclius , le bi- maculé n'est point méchant ; il se tient souvent dans les bois, où il fait entendre un sifîlcincnt plus ou moins iréquent. On le prend facilement dans un piège fait avec de la paille qu'on approche de lui en sifllant , et dans lequel il saute et s'en- gage de lui-même. La ieuielle dépose ses opufs dans la terre. On le trouve à Saint- Eustache et dans la Pensilvanie. Le fond de sa couleur varie ; il est quelquefois d'un bleu noirâtre. 29 342 HISTOIKE NATURELLE LE SILLONNE. On trouve dans les Iiides im assez petit lézard gris, dont nous plaçons ici la no- tice , parce qu'il a des écailles convexes eu forme de tubercules sur les flancs , et parce que sa queue est applatie par les côtés comme celle du crocodile et des autres lézards dont nous venons de don- ner l'histoire. Son corps n'est point garni d'aiguillons : il n'a point de crête au-des- sous du cou ; mais on voit sur son dos deux stries très - sensibles. Il a les deux côtés du corps comme plissés et relevés en arête. Son ventre présente vingt-quatre rangées transversales d'écaiUes ; chaque rangée est composée de six pièces. La queue , à peine plus longue que la moi- tié du corps , est striée par-dessous, lisse par les côtés , et relevée eu - dessus par une double saillie. To7n .n. Pl.jz.J'a^ 34'3- f ^•^aiiailtt'J'- DES LÉZARDS. 343 SECONDE DIVISION. LÉZARDS Qui ont la queue ronde y cinq doigts a chaque pied , et des écailles élevées sur le dos en forme de crête. L'IGUANE a JJaks ces contrées de rAmérique méri- diouale , où la Nature plus active fait descendre à grands flots du sommet des hautes Cordilllcres, des fleuves immenses , dont les eaux s'ctendant en liberté inon- dent au loin des campagnes nouvelles , et où. la main de Tliomme n'a jamais * Legnana; en angloîs , ihe guana ; senemhi; lamacolin eu Aiiiéricpe, suivaut Seba, 344 HISTOIRE NATURELLE opposé aucun obstacle à leur course , sur les rives limoneuses de ces fleuves ra- pides , s'élèvent de vastes et antiques forêts. L'humidité chaude et vivifiante qui les abreuve , devient la source inta- rissable d'une verdure toujours nouvelle pour ces bois touffus , images sans cesse renaissantes d'une fécondité sans bornes , et où il semble que la Nature , dans toute la vigueur de la jeunesse, se plaît à en- tasser les germes productifs. Les végétaux ne croissent pas seuls au milieu de ces vastes solitudes ; la Nature a jeté sur ces grandes productions la variété , le mou- vement et la vie. En attendant que l'homme vienne régner au milieu de ces forêts , elles sont le domaine de plusieurs animaux , qui , les uns par la beauté de leurs écailles , l'éclat de leurs couleurs, la vivacité de leurs mouvcmens , l'agilité de leur course , les autres par la fraîcheur de leur plumage , l'agrément de leur pa- rure , la rapidité de leur vol ^ tous par la diversité de leurs formes , font , des vastes contrées du nouveau monde , un grand et maguilique tableau, une scène D E s L É Z A R D s. 3^5 animce, aussi variée qu'imiiieiise. D'un côté , des ondes majestueuses roulent avec bruit; de l'autre , des dots écuinans se précipitent avec fracas de roches éle- vées , et des tourbillons de vapeurs réflé- chissent au loin les rayons éblouissans du soleil : ici , l'émail des fleurs se nicle au brillant de la verdure , et est effacé par l'éclat plus brillant encore du plu- mage varié des oiseaux ; là , des couleurs plus vives, parce qu'elles sont renvoyées j)ar des corps plus polis , forment la parure de ces grands quadrupèdes ovi- pares, de ces gros lézards que l'on est tout étonné de voir décorer le sommet des arbres , et partager la demeure des habitans ailés. Parmi ces ornemens remarquables et vivans dont on se plaît à contempler , dans ces forêts épaisses , la forme agréable et piquante , et dont on suit avec plaisir les divers mouvemens au milieu des jamcaux et des fleurs , la dragonne et le tupinambis attirent l'attention ; mais le lézard dontnous traitons dans cet. article, 8C fait distinguer bien davantage par la 346 HISTOIRE NATURELLE beauté de ses couleurs , Téclat de ses écailles , et la siugularité de sa coufoiv înation. Il est aisé de recoiinoître l'iguane à la grande poche qu'il a au-dessous du cou , et sur -tout à la crête dentelée qui s'étend depuis la tète jusqu'à l'extrémité de la queue , et qui garnit aussi le devant de la gorge. La longueur de ce lézard , depuis le museau jusqu'au bout de la queue , est assez souvent de cinq ou six pieds ; celui que nous avons décrit , et qui a été envoyé de Cayenne au Cabinet du roi par M. Sonini , a quatre pieds de long *. * Principales dimensions d'un iguane conservé au Cabinet du roi. pieds, pouces, lignes, Louguciu- totale ^ « » Circonfureuce clans l'eudroil le plus gros cîu corps I » 4 Circouftrence à l'origine de la queue • " ^ 9 Contour de la m'.cboire supé- rieure " ^ X/OU^ueur de la plus grande écaille •^ 3 D E s L E Z A R D s. 847 La tcte est coiupriiiiéc par les cotés , et applatic par-dessus. Les dents sont ai- nuc'i , et assez semblables , par leur forme, à celles des lézards verds de nos provinces méridionales. Le museau, Tentre-deux des yeux et le tour des mâchoires, sont garnis de larges écailles très - colorées , très-unies et très-luisantes : trois écailles plus larges que les autres sont placées de chaque côté de la tète, au-dessous des oreilles; la plus grande des trois est ovale , et son éclat , semblable à celui des métaux polis , relève la beauté des couleurs de Tiguane. Les yeux sont gros; Fouverture des oreilles est grande : des pieds, pouces, lignes, des cotés de la lête " i » Longueur de la poche qui est au- dessous du cou » 3 4 Largeur de la poche " I lo Loiîgueurdesplusgrandes écailles de la crête ^ l 10 Longueur de la queue 2 7 4 Longueur des pattes de devant jusqu'à l'exiréniitc des doigis «71 Longueur des pattes de derrière "99 Longueur du plus grand ongle. » » b 348 HISTOIRE NATURELLE tubercules qui ont la forme de pointes de diamans, sont placés au-dessus des narines sur le sommet de la tête, et de chaque côté du cou. Une espèce de crête, composée de grandes écailles saillantes , et qui par leur figure ressemblent un peu à des fers de lance , s'étend depuis la pointe de la mâchoire inférieure jusque sous la gorge , où elle garnit le devant d'une grande poche , que Tiguane peut gonfler à son gré. De petites écailles revêtent le corps , la queue et les pattes : celles du dos sont relevées par une arête. La crête remarquable qui s'étend , ainsi que nous l'avons dit , depuis le sommet de la tête jusqu'à l'extrémité de la queue , est composée d'écaillés très- longues , très- aiguës, et placées verti- calement : les plus hautes sont sur le dos , et leur élévation diminue insensi- blement, à mesure qu'elles sont plus près du bout de la queue, où on les distingue à peine. La queue est ronde , au lieu d'être ap- platie comme celle des crocodiles. D E s L É Z A R D s. 849 Les doigts sont séparés les uns des au- tres, au nombre de cinq à chaque pied, et garnis d'ongles ibrls et crochus. Dans les pieds de devant, le premier doigtj ou le doigt intérieur, n'a qu'une phalange; le second en a deux, le troisième trois, le quatrième quatre, et le cinquième deux. Dans les pieds de derrière , le premier doigt n'a qu'une phalange; le second eu a deux , le troisième trois, le quatrième quatre, et le cinquième, qui est séparé comme un pouce , eu a trois. Au-dessous des cuisses s'étend , de cha- que côté, un cordon de quinze tubercules creux et percés à leur somuiet , comme pour doiuiér passage à quelques sécré- tions : nous retrouverons ces tubercules dans plusieurs espèces de lézards ; il seroit intéressant d'eu connoître exactement l'usage particulier. La ^'oulcur générale des iguanes est ordinairement verte , mêlée de jaune , ou