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HARVARD UNIVERSITY.

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MUSEUM OF COMPARATIVE ZOOLOGY

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J.11!RAR\- OF LOUIS CAliOT, U.C., 1858.

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HENRY B. BIGELOW.

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HISTOIRE

NATURELLE

DES

QUADRUPÈDES QYIPARES ET DES SERPENS.

TOME TROISIÈME.

HISTOIRE

NATURELLE

DES

QUADRUPÈDES OVIPARES ET DES SE RPENS ,

PAR LE C^N LACEPÈDE.

TOME TROISIEME.

A PARIS,

Chez Saugrain, graveur, rue du Cimetière Andrë-des-Arcs , no lo.

L'AN VII DE LA RÉPUBLIQUE.

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AVERTISSEMENT.

Jtersonne ne sent plus vivement que moi combien la mort de M. le comte de Buffon m'a privé d'un puissant secours pour l'ouvrage dont je publie aujourd'hui le troisième volume , et que je n'aurois )amais entrepris s'il ne s'étoit engagé à m'éclairer dans la route qu'il m'avoit indiquée lui-même en me chargeant de continuer VHistoire naturelle. Quelque temps avant cet événement funeste aux lettres , l'un des coopérateursf de M. de Buffon , l'éloquent auteur d'une partie de l'Histoire des Oiseaux , et du Discours préliminaire de la Collection académique, avoit été enlevé aux sciences , et sa mort avoit fait évanouir les grandes espérances qu'avoient conçues les amateurs de l'his- toire naturelle , ainsi que l'espoir parti- culier que j'avois fondé sur ses connois- sances et la bouté de son caractère. Heu- leuscmeut pour moi , l'on diroit que

6 AVERTISSEMENT, plusieurs naturalistes de France ou des pays étrangers, et particulièrement ceux qui viennent crentreprendre de grands voyages pour Favanceuient des sciences, ont clierclié à diminuer les pertes que j'ai faites, en ni'cnvoyant ou en me promet- tant un très-grand nombre d'observations importantes. C'est avec bien de la recon- noissance que je les remercie ici , et des bienfaits que j'ai déjà recns, et de ceux que je -dois recevoir encore. J'ai fiiit usage de quelques unes de ces observations dans le volume que je public aujourd'hui , et j'emploierai les autres dans ceux qui le suivront. M. le marquis delà Billardrie, successeur de M. de BulTon dans la place d'intendant du jardin de sa majesté , et qui se propose de ne rien négliger pour l'avancement des sciences naturelles, tant par l'étendue de ses correspondances que par les difleiens voyages qu'il pourra faire faire dans les pays les plus intércs- sans pour les naturalistes , a eu aussi la bonté de ine promettre les différentes observations qui lui arriveront directe- ment, et qui pourront être relatives ù

AVERTISSEMENT. 7

inon travail. D'ailleurs M. de BLiffon m'a- voit remis , dans le temps, les notes , les lettres et les divers manuscrits qu'il avoit reçus à différentes époques , au sujet des animaux dont je devois publier l'histoire. Deux mois avant sa mort , il voulut bien me remettre encore tous les manuscrits et les dessins originaux que feu M. Com- mersou , très-habile naturaliste , a com- posés ou fait exécuter, relativement aux diverses classes d'auimaux , pendant son séjour dans l'île de Bourbon, il avoit été envoyé par le gouvernement. M. de Buffon a publié la partie de ces manus- crits qui concerne les quadrupèdes vIvÎt pares et les oiseaux ; et je serai d'autant plus empressé d'enrichir mon ouvrage de ceux qui traitent des autres animaux , que les naturalistes les attendent depui<î long-temps avec impatience. De plus , M. le comte de Buffon , fils du grand lionime que nous regrettons , et qui , entré avec honneur dans la carrière mili- taire, fera briller au milieu des armes un nom rendu immortel par la gloire des icllres , a bien voulu , ainsi que son

8 AVERTISSEMENT.

oncle , M. le chevalier de Buffoii , officier supérieur distingué par ses services , et connu depuis long-temps par son goût pour les sciences et les beaux arts , nie communiquer toutes les notes qui se sont trouvées dans les papiers de feu M. le comte de Buffon, et qui pouvoient ru'ctre utiles pour la continuation de V Histoire naturelle. Mais ce qui est pour moi l'un des plus grands encouragc- mens , ce sont les rapports que j'ai l'avan- tage d'avoir avec M. Daubenton ; c'est Pamitié qui me lie avec ce célèbre natu- raliste, dans les lumières duquel j'ai trou- vé tant de secours, et que je me plairois tant à louer , si je pouvois , sans blesser sa modestie , répéter très-près de lui ce que la voix publique fait retentir par-tout l*on s'intéresse au progrès des sciences naturelles. Le monde savant l'a vu avec regret cesser , dans le temps , de travail- ler à VHisîoire naturelle^ conjointement avec M. de Bunpn , et suspendre la des- cription du Cabinet de sa majesté : aussi rn'empressé-je d'annoncer au public qu'il jouira bientôt de la contiiiualiou de cetL»

AVERTISSEMENT. 9 partie de V Histoire naturelle , que M. Dau- beiitoii se propose de reprendre au point des circonstances particulières l'ont engagé à l'interrompre.

ÉLOGE

DU COMTE DE BUFFON.

J E préparois ce nouveau volume , entre- pris pour compléter V Histoire naturelle, publiée avec tant de succès parle grand homme qui faisoit un des plus beaux or- iiemens de la Franc'e , lorsqu'il a terminé sa glorieuse carrière. Toutes les contrées éclairées par la lumière des sciences , après avoir retenti, pendant sa vie , des applaudissemcns donnés à ses triomphes, ont répété plus haut encore après sa mort les accens de Tadmiration , auxquels se sont mêlés ceux des regrets; et la posté- rité a commencé , pour ainsi dire , de couronner sa statue. Au milieu de tous les hommages rendus à sa mémoire, que ne puis-je faire entendre une voix élo- quente qui redise son éloge dans le sanc- tuaire même consacré par son génie à la science qu'il chérissoit !

Lorsque Platon quitta sa dépouille uror^

ÉLOGEDEBUFFON. n

telle pour s'élever à rimmortalité , ses disciples eu pleurs se rassemblèrent sur le promontoire fameux *, voisin de la cé- lèbre Athènes , ils avoient si souvent entendu cette voix imposante et enchan- teresse ; ils répétèrent leurs tendres plaintes sur ce même rocher antique contre lequel venoient se briser les flots de la mer agi- tée , et leur maître, assis comme le maître des dieux sur le sommet du mont Olympe , leur avoit si souvent dévoilé les secrets de la science et ceux de la vertu. Ils consacrèrent ce mont à leur père chéri ; ils en firent, pour ainsi dire, un lieu saint ; et pour charmer leur peine , dimi- nuer leur perte , et se retracer avec plus de force les vérités sublimes qu'il leur avoit montrées , ils chantèrent un hymne funèbre, et peignirent dans leurs chants tristes et lugubres , et son génie , et leur douleur.

Que ne pouvonS-nous aussi , nous tous qui , consacrés à Fétude de l'histoire na- turelle , avons reçu les leçons , avons

* Le pvomonloire de Simium. Il est dccrit et tepréseuté daos le J^ojage du jeune yinacharsis^

12 ÉLOGE

entendu la^oix duPlatou moderne, chan- ter en sou honueur un hymne funéraire ! Rassemblés des divers points du globe, chacun de nous a conservé cet amour de la Nature qu'il savoit inspirer si vivement à ses disciples , que ne pouvons-nous pé- nétrer tous ensemble jusqu'au milieu des plus anciens monumens élevés par cette Nature puissante , porter nos pas vers ces monts sourcilleux dont les cimes , tou- jours couvertes de neiges et de frimas , dominent sur les nuées , et semblent réu- nir le ciel avec la terre ! C'est sur ces niasses énormes , sur ces blocs immenses de granits , que les siècles ont attaqués en vain , et qui seuls paroissent avoir résisté aux combats des élémens et à toutes les révolutions éprouvées par le globe de la terre ; c'est sur ces tables respectées par le temps que nous irions graver le nom de Buffon ; c'est à ces antiques témoins des antiques bouleversemeus de notre pla- nète que nous irions confier le souvenir de nos regrets et de notre admiration : tout autre monument seroit trop péris- sable pour une aussi longue renommée.

DEBUFFON. i3

Élevons-nous du moins par la pensée au-dessus de ces rocs escarpés , avançons sur le bord des profonds abîmes qui les entourent, et parvenons jusqu'au sommet de ces monts entassés sur d'autres monts. La nuit règne encore ; aucun nuage ne nous dérobe le firmament ; l'atmosphère la plus pure laisse resplendir les étoiles à nos yeux ; nous voyons ces astres fixes triller des feux qui leur sont propres , et les astres errans nous renvoyer une douce lumière ; ravis d'admiration , plongés dans une méditation profonde , nous croyons voir le génie de la Nature da/is la, contemplation de V univers^ ; tout nous rap- pelle ces vives images prodiguées par BufFon avec tant de magnificence , ce tableau mobile des cieux , que , dans sa noble audace , il a tracé avec tant de grandeur ^ ; et debout sur les lieux les plus élevés du globe , nous entonnons un hymne en son honneur.

^ Yoyez la planche qui sert de froniispice à la Théorie de la terre de M. de Bufron.

^ ]Inirodiiction à l' histoire des minéraux ^ pair M. de BuffQn,

2

î4 ELOGE

Nous te saluons , ô Puffoji , peintre sublime de ce spectacle auguste : toi dont le génie hardi , non content de parcourir V immensité des deux , et de chercher les limites de l'es" pace , a voulu remonter jusques à celles du temps *.

Tu as demandé à la matière par quelle force pénétrante ces astres immobiles , ces pivots embrasés de l'univers, brillent des feux dont ils resplendissent.

Tu as demandé aux siècles par quel moteur puissant ces autres astres errans, qui brillent d'une lumière étrangère et circulent en esclaves soumis autour des soleils qui les maîtrisent , furent placés sur la Joute céleste qui leur a été prescrite , et reçurent le mouve- ment dont ils paroissent animés.

Nous te saluons , d chantre immortel des deux ; que le firmament semé d'étoiles , que toutes les clartés répandues dans l'espace, que tout ce magnifique cortège de la nuit rappelle Q, jama is ta glo ire.

Cependant les piemiers feux du jour

* Article de la formation des planètes : -pre- mière et seconde f^ues Ja la Nature, etc. par M. de BuffoB.

DEBUFFON. i5

dorent rOrient ; Tastre de la lumière se moulre dans toute sa majesté ; il rougit les cimes isolées qui s'élancent dans les airs , et étincelle , pour ainsi dire, contre les immenses glaciers qui investissent les monts. Une vapeur épaisse remplit encore le fond des vallées , et dérobe les collines à nos yeux. Une vaste mer paroît avoir envahi le globe ; quelques pics couverts de glaces resplendissantes se montrent seulement au-dessus de cette mer im» mense dont les flots légers, agités par le vent, roulent en grands volumes, s'élèvent en tourbillons , et menacent de surmonter les roches les plus hautes. Kous croyons voir, avec Buffou , la terre encore couverte par les eaux de l'Océan , et recevant au milieu des ondes sa forme, ses inégalités , ses montagnes , ses vallées; et notre hymne continue.

Nous te saluons , ô Buffoii , toi dont le génie , après auoir parcoum r immensité de l'espace et du temps , a plané au-dessus de notre globe et de ses âges *.

* Théorie de la terre et Époques de la Nature y par M. de Buffon.

i6 ELOGE

Tu as vu la terre sortant du sein des eaux ; les montagnes secondaires s'éleuant par les efforts accumulés des courans du vaste Océan; les vallons creusés par ses ondes rapides ; les ■végétaux développant leurs cimes verdojantes sur les premières hauteurs abandonnées par les eaux ; ces bois touffus livrant leurs dé- pouilles aux flots agités; les abîmes de V Océan recevant ces dépôts précieux comme autant de sources de chaleur et de feu pour les siècles avenir , et les plaines delà mer peuplées d'animaux dont les débris forment de nou- veaux rivages ou exhaussent les anciens.

Tu as vu le feu jaillissant avec violence des entrailles de la terre , sur le bord des ondes qui se retiroient , élevant par son effort de nouvelles montagnes , ébranlant les an- ciennes , couvrant les plaines de lorrens enflammés ; et les tonnerres retentissans , les foudres rapides , les orages des airs, mêlant leur puissance à celle des orages intérieurs de la terre , et des tempêtes de la mer.

Nous te saluons, toi dont les chants ont célébré ces grands objets : que le feu des volcans , que les ondes agitées , que les ton- nerres des airs rappellent à jamais ta gloire!

D E B U F F O N. tj

Mais la vapeur épaisse se dissipe , et nous laisse voir des plaines immeuses , des coteaux fertiles , des champs fleuris , des retraites tranquilles. O Nature , tu te montres dans toute ta beauté ! Les ha- bitans des airs, voltigeant au milieu des bocages , saluent par leur chant Tastre bienfaisant source de la chaleur ; l'aigle altier vole jusqu'au-dessus des plus hautes cimes * ; le cheval belliqueux , relevant sa juobile crinière , s'élance dans les vertes prairies ; les divers animaux qui embel- lissent le globe , paroissent en quelque sorte à nos yeux. Saisis d'un noble enthou- siasme , entraînés par l'espèce de délire qui s'empare de nos sens , nous croyons nous détacher , pour ainsi dire , de la terre , et voir le globe roulant sous nos pieds nous présenter successivement toute sa surface. Le tigre féroce , le lion terrible

* Voyez particulièrement dans l*Histoire des Quadrupèdes et des Oiseaux, par M. de BufFon , les articles du cheval, du tigre, du lion , du cha- meau, de l'éléphant, du castor, des singes , de Vaigle, des perroquets , de l'oi^eau'Tnouche , du kamichi , etc»

î8 ÉLOGE

régnant avec empire dans les solitudes embrasées de l'Afrique ; le chameau, sup- portant la soi F au milieu des sables brû- lans de l'Arabie ; Télépliant des grandes Indes , étonnant rintelligence humaine par rétendue de son instinct ; le castor du Canada, montrant par son industrie ce que peuvent le nombre et le concert ; les singes des deux mondes , imitateurs pétu- lans des mouvemens de l'homme ; les perroquets richement colorés des contrées voisines de l'équateur, le brillant oiseau- mouche et le colibri doré du nouveau continent , le kamichi des côtes à demi noyées de la Guiane ; tous passent sous nos yeux. Rien ne peut nous dérober au- cun de ces objets que Bufiou a revêtus de ses couleurs éclatantes; et au milieu des sujets de ses magnifiques tableaux , nous voyons sur tous les points de la terré habitable le chef - d'oeuvre de la force productrice, l'homme, qui par la pensée a conquis le sceptre de la Nature , domté les élémens , fertilisé la terre, embelli sou asylc, et créé le bonheur par l'amour et par la vertu. Depuis le pôle sur lequel

D E B U F F O N. ig

brille l'ourse , depuis les bornes du Taste empire de la souveraine de la Neva , et cette contrée fertile en héros , Reins- berg 2 voit les arts cultivés par des mains victorieuses, jusques aux plages ardentes du Mexique et aux sommets du Potosi , quelle partiedu globe ne nous rappelle pas

des tributs offerts au génie de BuH'on ?

Nous voyons au milieu de TAlliènes moderne ces lieux fameux consacrés à la science ou aux arts sublimes de l'élo- quence et de la poésie , ces temples de la llenommée, qui parleront à jamî^is de la

' C'est principalement de la Russie, ainsi que de l'Améi-ique septentrionale et méridionale, que l'on s'est empressé d'offrir à M. de Buffpn les divers objets d'histoire naturelle qui pouvoient Tin- té resser. Il en a reçu de plusieurs souverains, et sur-tout de l'impératrice de toutes les Russies.

=^ Château du Brandebourg , appartenant au prince Henri de Prusse. Avec quel plaisir M. de BufFoo re parloit-il pas de soii dévouement pour ce prince î combien ne se plaisoit-il pas à rappeler les marques d'attachement qu'il en avoit reçues, ainsi qu à s en- tretenir de Fa milié que lui a toujours témoignée la digne compa;^ne d'un grand cl célèbre ministre dis Wieilleur des rois!

ao ÉLOGE DE BUFFON. gloire de BufFon , il a laissé des amis ,' des compagnons de ses travaux , un sur- tout , qui , sous le même ciel , et réuni avec lui dès sa plus tendre jeunesse, a partagé sa gloire et ses couronnes. Nous croyons entendre leurs voix; et ce con- cert de louanges du génie et de l'amitié retentissant jusqucs au fond de nos cœurs , nous nous écrions de nouveau t Nous Je saluons, ô Buffon , toi qui as chanté les œuvres de la création sur ta lyre harmonieuse; toi qui d'une main habile as grapé sur un monument plus durable que le Ironze, les traits augustes du roi de la Na- ture ; qui ras suivi d'un œil attentif sous tous les climats , depuis le moment de sa. naissance jusques à celui il disparoit de dessus la terre. A ta voix la Nature a ras- semblé ses différentes productions ; les divers animaux se sont réunis devant toi; tu leur as assigné leur forme , leur physionomie , leurs habitudes, leur caractère, leur pays , leur nom. Que par-tout tes chants soient ré- pétés; que tout parle de toi. Poète suhlime, tu as célébré et tous les êtres et tous les temps.

TABLE ALPHABETIQUE

Des dwers noms donnés aux serpens , et dont il est fait mention dans cet ouvrage.

Aherdeen , voyez éryx. Adder, vipère commune. Aëg ^ céraste. jEsping , chersea. Ak-dsJùlan , couleuvre dione. Alp , céraste. *Aniiudutus , a m m o dy t e . Amphisbœna , amphisbèue enfume'. Amphishœna alba , blanchet. Amphisbœna /lava , amphisbène enfume', Amphisbœna fuliginosa , amphisbène en- fumé.

Amphisbœna magnifica , amphisbène en- fumé.

Amphisbœna prima suhargentea , lom- bric.

22 TABLE

Jmphishœna, varia, amphisbène enfumé.

Jtmphisbœiia pulgaris , amphisbène -en- fume.

jinguille de haie, couleuvre à collier.

Anguille des haies, couleuvre verte et jaune.

Anguis yEsculapii , couleuvre d'Escnlape.

Anguis boa , devin.

Anguis calamaria, calmar.

Anguis cérastes, anguis cornu.

Anguis colubrina , anguis colubrin.

Anguis ciotalophorus , boiquira.

Anguis JlageUiformis , fil.

Anguis fragilis , orvet.

Anguis jaculus, trait.

Anguis laticauda , queue-lancéolëe.

Anguis Inmbricalis , lombric.

Anguis maculata , miguel.

Anguis meleagris , peintade.

Anguis reliculata , réseau.

Anguis rostratus, anguis long-nez.

Anguis schytale , rouleau.

Anguis tessellata , miguel.

Anguis ventralis, anguis jaune et brun.

Anilios , lombric.

Anpoyc , orvet.

ALPHABÉTIQUE. a3

'Apachycoatl, couleuvre pélalaire. Aspic, vipère d'Egypte. Aspide del corno , ammodyle. Aspis Cleopatrœ , vipère d'Egypte. Aspis colore ferrugineo , chersea. Aspis cornu , ainmodyte. Ayug , boiquira.

B

Bali-salan-hoeJcit , bali. Blind worm , orvet. Boa , deviu. Boa aurantiaca , bojobi. Boa canina , bojobi. Boa constriclor , devin. Boa contortrix , groin. Boa exigiia , hipuale. Boa hortulana , broderie. Boa murina , boa rativore. Boa tJialassina , bojobi. Bodly , amphisbèue enfumé, Boiciniiiga , boiquira. Boicinininga , boiquira. JBoiguacu , devin.

24 TABLE

Caçadora , devin.

Cœcilia Gesneri, orvet.

Cœcilia glutinosa, cœcile visqueux.

Cœcilia tenîaculata , ibiare.

Cœcilia typhlus , orvet.

Cœcilia vulgaris , orvet.

Carbon , couleuvre à collier.

Carbonazzo , couleuvre à collier.

Cascapelj boiquira.

Casca i^ela, boiquira.

Caudisona dryinas, dryinas.

Caudisona durissus, durissus.

Caudisona orientalis, dryinas.

Caudisona terrifica, boiquira.

Cega, amphisbèue enfume.

Cenchoa, cenco.

Cenchria, cenchris.

Cenchi'ias, ammodyte.

Cenchris , devin.

Cenchris tardigrada major liitea^ macuUs

ni gris notata , devin. Cencoatl , seconde espèce, cenco. Çerastes agilis» couleuvre agile.

ALPHABÉTIQUE. sS

Cérastes cuivra , aurore. Cérastes candidi/ s, couleuvre très-blanche. Cérastes cobella , cobel. Cérastes lacteus, lacté. Cérastes mexicanus , couleuvre péfalaire. Cérastes nebidatus , couleuvre nébuleuse. Cérastes plicatilis, bali. Cérastes rhombeatus , coul. rhomboïdale. Cérastes seperus , couleuvre hébraïfjue. Cerckrias, ammodyte. Cerisîalis , céraste. Chasseur, deviu. Chain snake, chaîne. Chajquarona , chayque. Coach-whip-snake , fil. Cobra atropos , atropos. \

Cobra de las cabecas , amphisbêne enfumé. Cobra de cabelo , naja. Cobra de capello , naja. Cobra de corais, ibiboca. Cobra de peado, devin. Cobre pega ^, amphisbêne enfumé. Collier, demi-collier. Co.luber JEsculapii, coul. bande noire. Coluber œstivus , couleuvre verdàtre. Coluber agilis , couleuvre agile.

s

26 TABLE

Coluher ahœtulla , boiga. Coluber alhus , couleuvre blanche. Coluher alidras , alidre. Coluber ammody tes y ammodyte. Coluher an gulatus , couleuvre anguleuse. Coluher a nnulatus, couleuvre blanche et

brune. Coluher atrox , couleuvre atroce. Coluher aulicus, laphiati. Coluher herus , vipère commune. Coluher huccatu s , couleuvre joufflue. Coluher carinatus , couleuvre carénée. Coluhej' calamarius > calmar. Coluher candidus, couleuvre blanchâtre. Coluher canus , grison. Coluher cohella , cobel. Coluber cœrulescens, couleuvre bleuâtre. Coluher cœruleus , bluet. Coluher cérastes , céraste. Coluher cinereus , couleuvre cendrée, Coluber constrictor , lieu. Coluber corallinus, , corallin. Coluber coniutus , céraste. Coluher cyaneus, coul. verte et bleue, Coluber dipsas, dipse. Coluber doUatus , couleuvre annelée.

ALPHABÉTIQUE. 27

^Colnherdoinesticus, coul. domestique.

Coluber domicella , couleuvre des dames,

Coluber exoletus , couleuvre décolorée.

Coluber fasciatus , vampum.

Coluber fiU for mis , fil.

Coluber fuluus, couleuvre noire et fauve.

Coluber fuscus, couleuvre sombre.

Coluber getulus , cliaîiie.

Coluber guttatus, fyrie.

Coluber gultatus , couleuvre mouclielée>

Coluber hippocrepis , fer-à-cheval.

Coluber hjdrus, hydre.

Coluber jaculatrix , dard.

Coluber jugularis , rouge-gorge.

Coluber lacteus , lacté.

Coluber laticaudatus , coul. queue-plate

Coluber lebetiiius , lébeliu.

Coluber lemuiscatus , coul. galonnée.

Coluber llneatus , couleuvre rayée.

Coluber maurus y couleuvre maure.

Coluber melaaocephalus , lête-noire. Coluber miliaris , couleuvre miliaire. Coluber mexicanus , couleuvre mexicaine. Coluber Minervœ , couleuvre de Minerve, Coluber molurus , molure. Coluber monilis, demi-collier.

28 TABLE

Coluler mucosus , couleuvre muqueuse. Coluber mycterlzans , couleuvre nasique. Coluher natrlx , couleuvre à collier. Coluber nebulatus , couleuvre nébuleuse. Coluber niv eus , couleuvre très-blanche. Coluber ordinatus, ibibe. Coluber opivorus , couleuvre ovivore. Coluber padera , padère. Coluber pallidus , couleuvre pâle. Coluber pellas, couleuvre pëlie. Coluber petalarius , couleuvre pétalaire. Coluber petola , pëtole. Coluber pUcatilis, bali. Coluber prester , vipère noire. Coluber pullatus, couleuvre minime. Coluber punctatus , couleuvre ponctuée. Coluber reginœ , rëgine. Coluber rhombeatus , -- coul. rhomboïdale. Coluber saturninus , couleuvre saturnine. Coluber saurlta , sa u ri le. Coluber scaber, couleuvre rude. Coluber schyta, couleuvre schyte. Coluber scutatus, -~ couleuvre cuirassée. Coluber seperus , couleuvre hébraïque.. Coluber sibilan s , malpole. Coluber simus» -^ couleuvre camuseï

ALPHABÉTIQUE. 29

Coluber sirtalis , couleuvre sirtale. Coluhcr situla , couleuvre situle. Coluber slolatus , chayque. Coluber striatii lus, couleuvre striée- Coluber trisca lis , triscale. Coluber tjphius, Ijphie. Coluber tyria, tyrie. Coluber vipera y vipère d'Égyple. Coluber vipera Anglorum, vipère noire. Coluber viridissimus , couleuvre verle. Coluber vittatus , couleuvre rubanée. Colubro nero , couleuvre à collier. Coîistrictor auspex , devin. Constrlctor diuiniloquus , devin. Constrictor formosissimus , devin. Constrictor rex serpentum , devin. Copper-belly snake , couleuvre striée. Coronella austriaca , couleuvre lisse. Coronella petola , pëtole. Couleuvre chasseuse , devin. Couleuvre commune, couleuvre à collier. Couleuvre commune , coul. d'Esculape. Couleuvre commune , orvet. Couleuvre commune , quatre-raies. Couleuvre commune, conl. verte et jaune. Couleuvre jaune, fer-de-lance.

3o TABLE

Couleuvre rousse, fer- de-la née. Couleuure vulgaire, couleuvre suisse, Coureresse, couresse. Crotalus horrldus , bo i q u i ra . Crotalus miliaris , millet. Crota lus m utus , boa m u e L Cyiichrias, ainmodyle.

D

JJépone, devin.

Dipsade, vipère noire.

Dipsas indica, couleuvre atroce,

jDouble-marcheur , auiphisbèue enfume.

Draco , devin,

Draco serpens , devin.

JDruinus , amniodyle.

Ecacoatl , boiquira. ^''E-vi.ha., vipère commune femelle. ''Evk, vipère commune mâle.

Embamina , devin.

Empereur, devin.

Enydris, eoydre,

ALPHABÉTIQUE. 3i

F

Tedagoso, devin.

G

Gereiide , devin.

Giarende , devin.

Giboja , devin.

Glass snake , anguis jaune et brun.

Gorende, devin.

Grand hydre , devin.

Grand serpent d'eau , devin.'

Grande couleuvre , devin.

Green snake , couleuvre verdâtre.

Guimpe , couleuvre ovivore.

Guimpuaguara, couleuvre ovivore.

H

Hog-nose snale , groin. Hydrus , couleuvre à collier,

I— J

Jhihoca, ibibe.

Ikijara , amphi&bène enfumé.

32 T A B L E

Jaculus, aurore. Jihoya, devin. Jurucucu, devin.

K

KepaV-iç, cërasle. Koluiu, demi-collier. Ks^yj, lébetiu.

Lamanda, devin. Langnasige , angiiis long-nez. Laticauda imbricata , queue-lancéolée» Laticauda scutata, queue-plaie. Lemnisque , couleuvre galonnée. Losange, laphiati.

M

Malpolon , couleuvre asiatique.

MalpoloTi, malpole.

Mamballa, devin.

Mangeur de chenilles, couleuvre agile.

Mèie de Veau, devin.

Miliaris, ammodjle,

Minia, devin.

Moqueur, . couleuvre rubauée.

ALPHABÉTIQUE. 33

N Naja brasiliensis, serpent à lunettes du

Pérou. Naja fascia ta , naja. Naja lutescens, naja. Naja maculata, naja. Naja non naja, naja. Naja siamensis , naja. Nalle pambou , naja. Nez retroussé , couleuvre nasique. Natrix yEsculapii , bande-uoire. Natrix ahœtulla , boiga. Na trix aulica , la ph ia t i . Natrix cœrulescens , couleuvre bleuâtre. Natrix exoleta, couleuvre décolorée. Natrix filiformis , fil. Natrix flagelUformis , couleuvre nasique Natrix hippocrepis , fer-à-cheval. Natrix lemniscata , couleuvre galonnée. Natrix mucosa , couleuvre muqueuse. Natrix longissima , couleuvre à collier. Natrix mycterizans, couleuvre nasique. Natrix saturnina, couleuvre saturnine. Natrix torquata , couleuvre à collier. Natrix vittata, couleuvre rubanée. Natrix vulgaris , couleuvre à collier.

r

34 TABLE

o

Ophria, ophrie.

Oularsawa, couleuvre jaune et bleue-

nanî<a, couleuvre d'Esculape. Parterre, broderie. Polonga, devin. JPolpogs, devin.

R

JRattle snake , boiquira. Ilegina seqyentum , boiquira. Heine des serpens , devin. Rlnged snake ,. couleuvre à collier. Roi des serpens, devin.

Schuppen-scJdange , anguis long-nez. Sei-pe nero , couleuvre à collier. SerpeJis aqiiatiUs , devin. Se?pens domeslicus nigrlcans carbonariiis ,

couleuvre à collier, Serpens indiens coronatus, naja.

ALPHABÉTIQUE. ^^

Serpens inclicus gmcilis piridis, boiga.

Serpens palustris , devin.

Serpens pereg ri nus , devin.

Serpent âpre, couleuvre rude.

Serpent aveugle, amphisbène enfiiinë.

Serpent bai'îvuge, coul. blanche et brune.

Serpent de blé, couleuvre tachetée.

Serpent à chaîne , chaîne.

Serpent à chapelet > couleuvre mouchetée.

Serpenta chaperon, naja.

Serpent à collier, couleuvre à collier.

Serpent coral , anguis rouge.

Seipent cornu , aminody te.

Serpent cornu , céraste.

Serpent couronné , naja.

Serpent des dames, couleuvre des darnes^

Serpent fétiche , daboie.

Serpent idole , daboie.

Serpent impérial, devin.

Serpenta large queue, queue-lancéolée.

Serpent à large queue > queue-plate.

Serpent à lunettes , naja.

Serpent mangeur de rats, boa ralivore.

Serpent nageur, couleuvre à collier.

Serpent d'or'eil/e, lombric.

Serpenta queue plate , platur^.

36 TABLE

Serpent sans tache . coul. très-blanclie. Serpent à sonnette , dryiuas. Serpent tigré, aspic.

Serpent à t'entre couleur de cuwre, cou- leuvre striée. Serpent de verre , anguis jaune et brun. Serpent de verre , orvet. Sipedon , sipède.

œhên , lyrie. Tamacuilla huilia, devin. Tangedor, boiquira. Tetrauchoaittleoa , bojobi. Teuthlaco , durissus. Teuthlaco zauhqui , boiquira. Teuthlaco zouphj , durissus. Tehua , broderie. Tleoa , broderie. Trasgobane , aiuphisbèue enfumé. Triangle , couleuvre joufflue. Typhlops, orvet.

Water snaJce , couleuvre à collier. Jf^alervipsr, serpeul à ionuelte piscivore.

ALPHABÉTIQUE. 3j

T^iper , vipère commune.

Vipera angUca nigricnns , vipère iioire.

Fripera Brasiliœ caudisona , boiquira.

fripera caudisona , boiquira.

F~ipera indica vitlata gesticularia , naja.

P'ipera rnaculata, aspic.

F'ipera Mosis , vipère commuue.

p'ipera pileata , naja.

Vipera vera Iiidiœ orientalis > vipère com- mune.

Vipère cornue , céraste.

Vipère cornue d'Illyrie , ammodjte.

Vipère d\eau> serpent à sonuelte pisci- vore.

Vipère du Japon , conîenvre hébraïque.

Vipè}-e jaune de la Marlinique, fer-de- lance.

X

Xalxalhua , devin. Xaxathua , devin. Xequipiles, dard.

Y

Yacu-mama , devin. Yellow snake, deviu-

Scrpens, I î ï.

/

HISTOIRE

NATURELLE

DES SERPENS,

" ' - ' »■

DISCOURS SUR LA NATURE DES SERPENS.

A. la suite des nombreuses espèces des quadrupèdes et des oiseaux , se présente Tordre des serpens ; ordre remarquable en ce qu'au premier coup d'ceil , les ani- maux qui le composent paroissent pri- vés de tout moyen de se mouvoir , et uniquement destinés à vivre sur la place le hasard les fait naître. Peu d'ani- maux cependant ont les mouvemens aussi prompts et se transportent avec autant

40 DISCOURS

vitesse que le serpent ; 11 égale presque , par sa rapidité , une flèche tirée par un tras vigoureux, lorsqu'il s'élance sur sa proie ou qu'il fuit devant son ennemi ; chacune de ses parties devient alors connue Tin ressort qui se débande avec violence ; il semble ne toucher à la terre que pour en rejaillir , et , pour ainsi dire , sans cesse repoussé par les corps sur lesquels il sjappuic , on diioit qu'il nage au mi- lieu de l'air en rasant la surface du ter- rain qu'il parcourt. S'il veut s'élever en- core davantage , il le dispute à plusieurs espèces d'oiseaux par la facilité avec la- quelle il parvient jusqu'au plus haut des arbres, autour desquels il roule et dé- roule son corps avec tant de promptitude, que l'œil a de la peine à le suivre. Sou- vent inénie, lorsqu'il ne change pas en^ core de place, mais qu'il est prêt à s'élan- cer , et qu'il est agité par quelque affec- tion vive , comme l'amour, la colère ou la ciainte, il n'appuie contre terre que sa qticue , qu'il replie en contours sinueux; il redresse avec fierté sa tête; il relève avec vitesse le devant de son corps , et^

su R L ES SERPENS. 41

le retenant dans une attitude droite et perpendiculaire , bien loin de paroitre uniquement destiné à ramper , il offre rimage de la force , du courage , et d'une sorte d^empire.

Placé par la Nature à la suite des qua- drupèdes ovipares, ressemblant à un lé- zard qui seroit privé de pattes , et pou- vant sur-tout être quelquefois confondu avec les espèces que nous avons nommées seps et chalcide ' , ainsi qu'avec les rep- tiles bipèdes ^ , le serpent réunit cet ordre des quadrupèdes ovipares à celui des poissons , avec plusieurs espèces desquels il a un grand nombre de rapports exté- rieurs , et dans lesquels il paroît en quel- que sorte se dégrader par des nuances successives offertes par les anguilles, les murènes proprement dites , , les gyra-^ notes , etc.

Malgré la grande vitesse avec laquelle ]e serpent échappe , pour ainsi dire , à

' "Voyez l'article du seps et celui da chalcide^ dans l'Histoire naturelle des quadrupèdes ovipares.

* Article des reptiles bipèdes , à la suite de l'Histoire dçs quadrupèdes ovipares.

42 DISCOURS

la surface sur laquelle il s'avance , plu- sieurs points de son corps portent sur la terre , même dans le temps il paroît le moins y toucher ; et il est entièrement privé de membres qui puissent le tenir élevé au-dessus du terrain , ainsi que les quadrupèdes : aussi le nom de reptile nous a-t-il paru lui appartenir principa- lement , et celui de seqjent vient-il dese/- />e/e , qui désigne l'action de ramper. Cette forme extérieure, ce défaut absolu de bras , de pieds , et de tout membre propre à se mouvoir, le caractérise essen- tiellement , et empêche qu'on ne le con- fonde, même à l'extérieur, avec aucun des animaux qui ont du sang , et parti- culièrement avec les murènes propre- ment dites , les anguilles et les autres^ poissons , qui ont tous des nageoires plus ou moins étendues et plus ou moins nom- breuses.

Les limites qui circonscrivent Tordre des serpens sont donc tracées d'une ma- nière précise , malgré les grands rapports qui les lient avec les ordres voisins.

Leurs espèces sont en grand nombre ;,

SURLESSEBPENS. 43

nous en décrivons plus de cent quarante dans cet ouvrage : quelques unes par- viennent à une grandeur très -considé- rable ; elles ont plus de trente pieds , et souvent même de quarante pieds , de lon- gueur *. Toutes sont couvertes d'écaillés ou de tubercules écailleux , comme les lézards et les poissons , qu'elles lient les uns avec les autres ; mais ces écailles va- rient beaucoup par leur forme et par leur grandeur : les unes, que Ton nomme plaques , sont hexagones , étroites et très- alongées ; les autres , presque rondes , ou ovales , ou rbomboïdales , ou quarrées ; celles-ci entièrement plates; celles-là relevées par une arête saillante , etc. Toutes ces diverses sortes d'écaillés sont différemment combinées dans les espèces particulières de serpens : les uns en ont de quatre sortes , les autres de trois , les autres de deux , les autres n'en ont que d'une seule sorte ; et c'est principalement en réunissant les caractères tirés de la forme , du nombre et de la position de

* Voyez à ce sujet, dans cette Histoire natu- lelle , l'article du dccin*

44 DISCOUTIS

ces écailles , que nous avous pu parvenir à distinguer non seulement les genres , mais encore les espèces de serpens , ainsi qu'on pourra le voir dans la table mé- thodique de ces animaux.

Si , avant d'examiner les habitudes na- turelles de ces reptiles, nous voulons jeter un coup d'œil sur leur organisation interne, et si nous commençons par con- sidérer leur tête , nous trouverons que la boîte osseuse en est à peu près conformée comme celle des quadrupèdes ovipares : cependant la partie de cette boîte qui représente l'os occipital , et qui est faite en forme de triangle dont le sommet est tourné vers la queue , ne paroît pas en général avancer autant vers le dos que dans ces quadrupèdes ; elle garantit peu l'origine de la moelle épinière , et voilà pourquoi les serpens peuvent être atta- qués avec avantage, et recevoir aisément la mort par cet endroit mal défendu.

Le reste de leur charpente osseuse pré- sente de grands rapports avec celle de plusieurs espèces de poissons ; mais elle QÏÏiG cependant une conformation qnl

s U R L E s s E R P E N s. 45

leur est particulière , et d'après laquelle il est presque aussi aisé de les distinguer que d'après leur foruie extérieure. Elle est la plus simple de toutes celles des ani- maux qui ont du sang : elle ne se divise pas eu diverses branches pour donner naissance aux pattes comme dans les quadrupèdes, aux ailes comme dans les oiseaux , etc. ; elle n'est composée que d'une longue suite de vertèbres qui s'é- tend jusqu'au bout de la queue. Les apo- physes ou éminences de ces vertèbres >;ont placées , dans la plupart des serpeus , de manière que l'animal puisse se tourner dans tous les sens , et même se rcpliev plusieurs fois sur lui-même ; et d'ailleurs, dans presque tous ces reptiles, ces ver- tèbres sont très- mobiles , les unes relati- vement aux autres, l'extrémité postérieure de chacune étant terujinée par une sorte de globç qui entre dans une cavité de la vertèbre suivante, et y joue librement comme dans une genouillère. De chaque côté de ces, vertèbres sont attachées des côtçs ordinairement d'autant plus lon-r gués qu'elles sont plus près du milieu d'A

46 DISCOURS

corps , et qui , pouvant se mouvoir en différens sens , se prêtent aux divers mou- vemens que le serpent veut exécuter. Vers rextrcmité de la queue , les ver- tèbres ne présentent plus que des émi- nences , et sont dépourvues de côtes*.

Ces vertèbres et ces côtes composent toute la partie solide du corps des serpens : aussi leurs organes intérieurs ne sont -ils défendus, dans la partie de leur corps qui touche à terre , que par les plaques ou

* J'di voulu savoir si le nombre des vertèbres el des cotes des serpens a quelque rapport coustant* avec les dinfcrenics espcces de tes auiiiiaux. J'ai disséqué plusieurs individus de diverses espèces de serpeus , et j'ai remarqué que le nombre des ver- tèbres et des eûtes augmentoit ou dimiuuoit dans les couleuvres , les boas , et les serpens à sonnettes , avec celui des plaques qui recouvrent le dessous du corps de ces reptiles; de telle sorte qu'il y avoit toujours une vertèbre, et par conséquent deux côtes, pour chaque plaque. Mais mes observations n'ont pas été assez multipliées pour que j'en re- garde le résultat comme consiant. Voyez dans l'ar- ticle intitulé, Nomenclature des serpens ^ ce que l'on peut penser du rapport du nombre de ces plaques avec l'âge du le sexe des reptiles, etc.

SURLESSERPENS. 47

grandes écailles qui les revêtent par- des- sous , et par une matière graisseuse con- sidérable que Ton trouve souvent entre la peau de leur ventre et ces mêmes or- ganes. Cette graisse doit aussi contribuer à entretenir leur chaleur intérieure , à préserver leur sang des effets du froid, et à les soustraire, pendant quelque temps, à l'engourdissement auquel ils sont su- jets , dans certaines contrées , à l'approche de l'hiver ; elle leur est d'autant plus utile , que la chaleur naturelle de leur sang est peu considérable : ce fluide ne circule dans les serpens qu'avec len- teur , relativeiuent à la vitesse avec la- quelle il coule dans les quadrupèdes vivi- pares et dans les oiseaux. Et comment seroit-il poussé avec autant de force dans les reptiles que dans les oiseaux et les vi- vipares, puisque le cœur des serpens n'est composé que d'un ventricule*, et puis-

* L'oreillelte du cœur de plusieurs espèces de serpens est conformée de manière à paroîire double, ainsi que dans un gi-and nombre de quadrupèdes ovipares ; mais aucun de ces reptiles n'a deux ven- tricules.

4S DISCOURS

que la communication entre le sang qui y arrive et le sang qui en sort , peut être indépendante des oscillations des pou- mons et de la respiration , dont la fré- quence échauffe et anime le sang des vivi- pares et des oiseaux ?

Le jeu du cœur et la circulation ne se- roient donc point arrêtés dans les ser- pens par un très - long séjour sous Teau ^ et ces animaux pourroient rester habituel- lement dans cet élément , comme les pois- sons , si Tair ne leur étoit pas nécessaire , de même qu'aux quadrupèdes ovipares , pour entretenir dans leur sang les quali- tés nécessaires à son mouvement et à la vie , pour dégager ce fluide des principes surabondans qui en engourdiroient la masse , ou y porter ceux de liquidité qui doivent l'animer *. Les serpensne peuvent donc vivre dans IVau sans venir souvent à la surface, et la respiration leur est presque aussi nécessaire que si leur cœur étoit conformé comme celui de l'homme et des quadrupèdes vivipares, et que la

Discours sur la nature des quadrupèdes ovi- paies.

s U R L E s S E R P E N S. 4()

circulation de leur sang ne put avoir lieu qu'autant que leurs poumons aspire- loient l'air de l'atmosphère. Mais leur respiration n'est pas aussi fréquente que celle des qnadrupèdes vivipares et des oiseaux; au .lieu de resserrer et de dila- ter leurs poumons par des oscillations promptes et régulières , ils laissent échap- per avec lenteur la portion d'air atmos- phérique qu'ils ont aspirée avec assez de rapidité, et ils peuvent d'autant plus se passer de respirer fréquemment, que leurs poumons sont très - grands en comparai- sou du volume de leur corps , ainsi que ceux des tortues , des crocodiles , des sala- mandres, des grenouilles, etc.', et que dans certaines espèces , telles que celle du boiquira, la longueur de ces viscères éga- lant à peu près les trois quarts de celle du corps , ils peuvent aspirer à la fois une très-grande quantité d'air.

Ils sont pourvus de presque autant de viscères que les animaux les mieux orga- nisés ; ils ont un œsophage ordinaire- ment très-long , et susceptible d'une très- grande dilatation , un estomac , un foie

5

5o DISCOURS

avec son conduit, une vésicule du fiel , une sorte de pancréas , et de lougs intes- tins , qui , par leurs circuits , leurs divers diamètres, et les espèces de séparations' transversales qu'ils contiennent, forment plusieurs portions distinctes analogues aux intestins grêles et aul gros intestins des vivipares, et, après plusieurs sinuosi- tés, se terminent par une portion droite, par une sorte de rectum , comme dans les quadrupèdes. Ils ont aussi deux reins , dont les conduits n'aboutissent pas à une vessie proprement dite , ainsi que dans les quadrupèdes vivipares , mais se dé- chargent dans un réservoir commun , semblable au cloaque des oiseaux, et «e mêlent de même les excrémens , tant solides que liquides. Ce réservoir com- mun n'a qu'une seule ouverture à l'ex- térieur ; il renferme, dans les mâles , les parties qui leur sont nécessaires pour perpétuer leur espèce, et qui y demeurent cachées jusqu'au moment de leur accou- plement : c'est aussi dans l'intérieur de ce réservoir que sont placés , dans les femelles, les oriJÛQes des deux ovaires;

SUR LES S ERP EN S. 5r

et voilà pourquoi , dans la plupart des serpens , et excepté certaines circons- tances rares , voisines de raccouplement de ces animaux , on ne peut s'assurer de leur sexe d'après la seule considération de leur conformation extérieure.

Presque toutes les écailles qui recou- vrent les serpens, et particulièrement les grandes lames qui sont situées au-dessous de leur corps , sont mobiles indépendam- ment les unes des autres : ils peuvent re- dresser chacune de ces lauies par un. muscle particulier qui y aboutit. Dès-lors chacune de ces pièces, en s'élevant et eu se rabaissant, devient une sorte de pied , par le moyen duquel ils trouvent de la résistance , et par conséquent un point d'appui dans le terrain qu'ils parcourent , et peuvent se Jeter, pour ainsi dire, dans le sens ils veulent s'avancer. Mais les serpens se meuvent encore par un moyeu plus puissant ; ils relèvent en arc de cercle une partie plus ou moins étendue de leur corps ; ils rapprochent les deux extrémi- tés de cet arc , qui portent sur la terre ; et lorsqu'elles sont près de se toucher , l'une

52 T) I s c o r n s

ou l'autre leur sert de point d'appui pour s'élancer , en applatissant la partie qui étoit élevée en arc de cercle. Lorsqu'ils veulent courir en avant, c'est sur Fextré- niité postérieure de cet arc qu'ils s'ap- puient; et c'est au contraire sur la partie antérieure, lorsqu'ils veulent aller en ar- rière.

Chaque fois qu'ils répètcist cette action, ils font, pour ainsi dire, un pas ^e la grandeur de la portion de leur corps qu'ils ont courbée , sans compter l'éten- due que peut donner à cet intervalle parcouru , l'élasticité de cette même por- tion de leur corps qu'ils ont pliée , et qui les lance avec roideur en se rétablissant. Ces arcs de cercle sont plus ou moins élevés, ou plus ou moins multipliés, dans chaque individu , suivant son espèce , sa grandeur, ses proportions, sa force , ainsi que le besoin qu'il a de courir plus ou moins vite ; et tous ces arcs, en se débandant successivement , produisent cette sorte de mouvement que l'on a ap- pelé vermiculalre ^ parce que les vers pro- prement dits, qui sont dépourvus de

SURLESSERPENS. 53

pieds , aiusi que les scrpens , sont égale- ment obligés de remployer pour cbaugcr

de place.

Pendant que les serpens exécutent ces divers mouvemens , ils portent leur tête d'autant plus élevée au-dessus du terrain, qu'ils ont plus de vigueur et qu'ils sont animés par des sensations plus vives ; et comme leur tête est articulée avec l'épine du dos , de manière que la face forme nu angle droit avec cette épine dorsale, les serpens ne pourroient point se servir de leur gueule , ne verroieiit point devant eux, et ne s'avanceroient qu'en tâton- nant dans les momens ils relèvent la partie la plus antérieure de leur corps , s'ils n'en replioient alors l'extrémité de manière à conserver à leur tête une posi- tion horizontale.

Quoique toutes les portions du corps des serpens jouissent d'une grande élas- ticité , cependant, dans le plus grand nombre d'espèces , ce ressort ne doit pas être également distribué dans toutes les parties: aussi la plupart des serpens ont- ils plus de facilité pour avancer que pour

5

54 DISCOURS

reculer. D'ailleurs les écailles qui les re- vêtent , et particulièrement les plaques qui garnissent le dessous du ventre, se recouvrent mutuellement , et sont cou- chées de devant eu arrière les unes au- dessus des autres. Il arrive de que lorsque les serpens les redressent , elles forment contre le terrain un obstacle qui arrête leurs mouvemcus , s'ils veulent aller en arrière ; tandis qu'au contraire lorsqu'ils s'avancent , la surface qu'ils parcourent applique ces pièces les unes contre les autres dans le sens elles se recouvrent naturellement.

Quelques espèces cependant , dont le corps est d'une grosseur à peu près égale à ses deux extrémités , et qui , au lieu de plaques , n'ont que des anneaux circu- laires , paroissent jeuir de la faculté de se mouvoir presque aussi aisément en ar- rière qu'en avant , ainsi que nous le ver- rons dans la suite * : mais ces espèces ne forment qu'une petite partie de l'ordre dont nous traitons.

* Articles des serpens amphishènes.

s U R L E s s E R P E N s. 55

Lorsque certains scrpens , au lieu de se mouvoir progressivement pendant un temps plus ou moins considérable , et par une suite d'efforts plusieurs fois répétés , ne cherchent qu'à s'élancer tout d'un coup d'un endroit à un autre , ou à se jeter sur une proie par un seul bond , ils se roulent en spirale au lieu de former des arcs de cercle successifs ', ils n'élèvent presque que la tête au-dessus de leur corps ainsi replié et contourné; ils tendent, pour ainsi dire , toutes leurs parties élas- tiques , et réunissant par-là toutes les forces particulières qu'ils emploient l'une après l'autre dans leurs courses ordi- naires , alongeant tout d'un coup toute leur masse , et leurs ressorts se débandant tous à la fois , ils se déroulent et s'élancent vers l'objet qu'ils veulent atteindre , avec la rapidité d'une flèche fortement vibrée, et en franchissant souvent un espace de plusieurs pieds.

Les serpens qui grimpent sur les arbres, s''y retiennent en entourant les tiges et les rameaux par les divers contours de leur corps -, ils en parcourent les branches

56 DISCOURS

de la même manière qu'ils s'avancent sur la surface de la terre ; ils s'élancent d'un arbre à un autre , ou d'un rameau à un rameau , en appuyant contre l'arbre une portion de leur corps , et en la pliant de manière qu'elle fasse une sorte de ressort, et qu'elle se débande avec force; ou bien ils se suspendent par la queue, et, balan- çant à plusieurs reprises leur corps qu'ils alongent avec effort , ils atteignent la branche à laquelle ils veulent parvenir, sV attachent en l'embrassant par plu- sieurs contours de leur partie antérieure , se resserrent alors , se raccourcissent , ramassent pour ainsi dire leur corps , et retirent à eux leur queue qui leur avoit servi à se suspendre.

Les très-grands serpens l'emportent en longueur sur tous les animaux , en y comprenant même les crocodiles , dont la grandeur est la plus démesurée , et qui ont depuis vingt-cinq jusqu'à trente pieds de long , et en n'en exceptant que les ba- leines et les autres grands cétacées. A l'autre extrémité cependant de l'échelle qui comprend tous ces reptiles arrangés

SUR LES SE 11 PEN s. Sy

par ordre de grandeur , ou en voit qui ne sont guère plus gros qu'un tuyau de plume , et dont la longueur, qui n'est que de quelques pouces , surpasse à peine celle des plus petits quadrupèdes , tant ovipares que vivipares. L'ordre des ser- pens est donc celui les plus grandes et les plus petites espèces diffèrent le plus les unes des autres par la longueur. Mais fti , au lieu de mesurer une seule de leurs dimensions , on pèse leur masse , on trou- vera que la quantité de matière que ren- ferment les serpens les plus gigantesques, est à peu près dans le même rapport avec la matière des plus petits reptiles , que la masse des grands éléplians , des hippo- potames , etc. avec celle des rats , des mu- saraignes , des plus petits quadrupèdes vivipares.

Ne pourroit-on pas penser que , dans tous les ordres d'animaux , la même pro- portion se trouve entre la quantité de matière modelée dans les grandes espèces, et celle qui est employée dans les petites ? Mais, dans l'ordre des serpens, tous les développemens ont se faire en Ion-

58 DISCOURS

gueur plutôt qu'en grosseur ; sans cela , ces reptiles , et sur-tout ceux qui sont énormes , privés de pattes et de bras , auroient à peine exécuté quelques mou- vemens très -lents. La vitesse de leur course ne doit-elle pas en effet être pro- portionnée à la grandeur de Tare que leur corps peut former pour se débander euvsuite ? Auroient-ils pu se plier avec facilite , et chercher sur la surface du terrain des points d'appui qui rempla- çassent les pieds qui leur manquent ? Ne pouvant ni atteindre leur proie, ni échap- per à leurs ennemis , n'auroient-ils pas été comme des masses inertes exposées à tous les dangers et bientôt détruites? La matière a donc être façonnée dans une dimension beaucoup plus que dans une autre, pour que le produit de ce travail pût subsister , et que l'ordre des serpens ne fût pas anéanti , ou du moins très-di- minué ; et voilà pourquoi la même pro- portion de masse se trouve entre les grands et les petits reptiles d'un côté , et les grands et les petits quadrupèdes de l'autre , quoique les énormes serpens l'eni-

s U R L E s s E R P E N s. Si)

portent beaucoup plus par leur longueur sur les plus petits de ceux que Ton coii- noît , que les éléplians ne surpassent les musaraignes et les rats par leur dimen- sion la plus étendue.

Entre les limites assignées par la Nature à la longueur des serpens, c'est-à-dire , depuis celle de quarante ou même cin- quante pieds jusqu'à celle de quelques pouces, on trouve presque tous les de- grés intermédiaires occupés par quelque espèce ou quelque variété de ces reptiles , au moins à compter depuis les plus courts jusqu'à ceux qui ont vingt ou vingt-cinq pieds de longueur. Les espèces supérieures paroissent ensuite comme isolées: ceci se trouve conforme à ce que l'on a déjà re- marqué dans les quadrupèdes vivipares*, et prouve également que dans la Nature les grands objets sont moins liés que les petits par des nuances intermédiaires. Mais voilà donc, depuis la petite étendue de quelques pouces jusqu'à celle de vingt- cinq pieds , presque toutes les grandeurs

* Voyez les articles de l'éléphant et des autres ^'ands (juadrupbdcs.

6o DISCOURS^

intermédiaires représentées par autant d'espèces , ou du moins de races plus ou moins constantes ; et cela ne suffiroit-il pas pour montrer la variété qui se trouve dans l'ordre des serpens ? Il semble , à la vérité, au premier coup d'œil , que des espèces très -multipliées doivent se res- sembler presque entièrement dans un ordre d'animaux dont le corps, toujours formé sur le même modèle, ne présente aucun membre extérieur et saillant qui , par sa forme et le nombre de ses parties , puisse offrir des différences sensibles. IVIais si l'on ajoute à la variété des longueurs des serpens celle des couleurs éclatantes dont ils sont peints , dépuis le blanc et le rouge le plus vif jusqu'au violet le plus foncé, et même jusqu'au noir; si l'on observe que ce grand nombre de cou- leurs sont merveilleusement fondues les unes dans les autres , de manière à ne présenter que très -rarement la même teinte, lorsqu'elles sont diversement éclai- rées par les rayons du soleil ; si l'on se retrace tout à la fois ce nombre de ser- pens dont les uns n'ofîrent qu'une seule

s U R L E s s E R P E N s. 6i

ïinance , tandis que les antres brillent de plusieurs couleurs plus ou moins con- trastées, enchaînées, pour ainsi dire , eu réseaux , distribuées en lignes , s'éten- dant en raies , disposées en bandes , ré- pandues par taches, semées en étoiles, r.^prcsentant quelquefois les figures les plus régulières, et souvent les plus bi- zarres ; et si Ton réunit encore à toutes ces différences celles que Fou doit tirer de la position , de la grandeur et de la forme des écailles, ne verra-t-on pas que Tordre des serpens est un des plus variés de ceux qui peuplent et embellissent la surface du globe?

Toutes les espèces de ces animaux lia- bitent de préférence les contrées chaudes ou tempérées : on en trouve dans les deux mondes , ils paroissent à peu près éga- lement répandus en raison de la chaleur, de riiumidité, et de Tespace libre. Plu- sieurs de ces espèces sont communes aux deux continens ; mais il paroît qu'en gé- néral ce sont les plus grandes qui ap- partiennent à un plus grand nombre de contrées différentes. Ces grandes espèces

6

62 DISCOURS

ayant plus de force et des armes plus meurtrières , peuvent exécuter leurs mou- vemens avec plus de promptitude, sou- tenir pendant plus de temps une course plus rapide, se défendre avec plus d'a- vantage contre leurs ennemis , chercher et vaincre plus facilement une proie , se répandre bien plus au loin , se trouver au milieu des eaux avec moins de crainte , nager avec plus de constance , lutter contre les flots, voguer avec vitesse au milieu des ondes agitées , et traverser même des bras de mer étendus. D'ailleurs ne pourroit-on pas dire que le moule des grandes espèces est plus ferme , moins soumis aux influences de la nourriture et du climat? Les petites espèces ont pu être aisément altérées dans leurs proportions , ' dans la forme ou le nombre de leurs écailles, dans la teinte ou la distribution de leurs couleurs , de manière à ne plus présenter aucune image de leur origine : les changemens qu'elles auront éprou- vés n'auront point porté uniquement sur la surface; ils auront pénétré, pour ainsi dircj dans un intérieur peu busceplible

SUR LES SERPE N s. 63

de résistance : toutes ces variations au- ront influé sur leurs habitudes; et ne pou- vant pas opposer de grandes forces aux accidens de toute espèce, non plus qu'aux vicissitudes de ratmosplière , leurs mœurs auront changé de plus en plus , et tout aura si fort varié dans ces petits animaux, quç bientôt les diverses races sorties d'une souche commune n'auront pas présenté assez de ressemblance pour constituer une même espèce. Les grands serpens au contraire peuvent bien offrir , sous les divers climats, quelques difiérences de couleurs ou d'habitudes qui marquent l'influence de la terre et de l'air , à la- quelle aucun animal ne peut se soustraire: mais, plus indépcndans des circonstances de lieux et de temps , plus constans dans leurs habitudes , plus inaltérables dans leurs proportions, ils doivent présenter plus souvent , dans les pays les plus éloi- gnés , le nombre et la nature de rapports qui constituent l'identité de l'espèce. Ce seront quelques uns de Ces grands serpens, nageant à la surface de la mer , fuyant gur les eaux un ennemi trop à craindre

64 DISCOURS

pour eux , ou jetés au loin par les vagues agitées, élevaut avec fierté leur tète au- dessus des flots , et se recourbant avec agi- lité en replis tortueux , qui auront fait dire, du temps de Pline, ainsi que le rapporte ce grand naturaliste , qu'on avoit vu des migrations par mer de dra- gons ou grands serpens partis d'Ethiopje, et ayant près de vingt coudées de lon- gueur , et qui auront donné lieu aux divers récits semblables de plusieurs voyageurs modernes.

Mais il n'en est pas des serpens comme des quadrupèdes vivipares : moins parfaits que ces animaux, moins pourvus de sang, moins doués de chaleur et d'activité inté- rieure , plus rapprochés des insectes, des vers , des animaux les moins bien orga- nisés , ils ne craignent point l'humidité lorsqu'elle est combinée avec la chaleur : elle semble même leur être alors très-fa- vorable; et voilà pourquoi aucune espèce de serpent ne paroît avoir dégénéré en Amérique : on doit penser , d'après les récits des voyageurs , qu'elles n'ont rien perdu j dans ces pays nouveaux, de leur

SURLESSERPENS. 65^

grandeur ni de leur force ; et même dans les terres les plus inondées de ce conti- nent , les grands serpens présentent une longueur peut - être plus considérable que dans les autres parties du nouveau monde *.

Si riiumidité ne nuit pas aux diverses espèces de serpens , le défaut de chaleur leur est funeste : ce n'est qu'aux environs des contrées équatoriales qu'on rencontre ces énormes reptiles , l'efl'roi des voya- geurs ; et lorsqu'on s'avance vers les régions tempérées , et sur-tout vers les contrées froides , on ne trouve que de très-petites espèces de serpens.

L'on peut présumer que ce n'est pas la chaleur seule qui leur est nécessaire ; nous sommes assez portés à croire que , sans une certaine abondance de feu électrique répandu dans l'atmosphère , tous leurs ressorts ne peuvent pas être mis en jeu avec avantage , et qu'ils ne jouissent pas par conséquent de toute leur activité. U semble que les temps orageux , le

Yojez les articles particuliers de celle His-

loire.

66 DISCOURS

fluide électrique de ratuiosphère est dans cet état de distribution inégale qui pro^ duit les foudres , animent les serpens au lieu de les appesantir , ainsi qu'ils abat- tent riiomiue et les grands quadrupèdes: çVst principalement dans les contrées très-chaudes que la chaleur , plus abon- dante, peut , en se combinant , produire une plus grande quantité de fluide élec- trique ; c'est en effet vers ces contrées équatoriales que le tonnerre gronde le plus souvent et avec le plus de force; et voilà donc deux causes , l'abondance de la chaleur, et la plus grande quantité d& feu électrique , qui retiennent les grandes espèces de Tordre des serpens aux envi- rons de l'équateur et des tropiques.

On a écrit mille absurdités sur l'accou- plement des serpens : la vérité est que le mâle et la femelle , dont le corps est très-flexible , se replient l'un autour de l'autre , et se serrent de si près , qu'ils paroissent ne former qu'un seul corps à deux têtes, Le maie fait alors sortir par son anus les parties destinées à féconder sa femelle ^ et qui sont doubles dans le&

SUR LES SE HP EN s. 67

serpens , ainsi que dans plusieurs quadru- pèdes ovipares , et communément cette union intime est longuement prolongée ^

* Sans cette durée de leur accouplement il sei-'oit souvent infécond : ils n'ont point, en effet, de vé- sicule séminale , et ii paroît que c'est dans cette espèce de réservoir que la liqueur prolifique des animaux doit se rassembler, pour que, daus un court espace de temps, ils puissent en iburmr une quantité suffisante à la fécondation. Les testicules cette licpieur se prépare, ne peuvent la laisser échapper que peu à peu ; et d'ailleurs les conduits par elle va de ces lesilcules aux organes de la génération, étant très-longs, très-étroits, et plu- sieurs fois repliés sur eux-mêmes, dans les serpens, il n'est pas surprenant qu'ils aient besoin de de- meurer long-temps accouplés pour que la féconda- tion puisse s'opérer. 11 en est de même des tortues et des autres quadrupèdes ovipares, qui, n'ayant pas non plus de vésicule séminale, demeurent unis pendant un temps assez long; et cette umon très- prolongée est, en quelque sorte, forcée dans les ser- pens , par une suite de la conformation de la double verge du mâle; elle est garnie de petits piquans tournés en arrière, et qui doivent servir à l'animal à retenir sa femelle, et peut-être à l'animer. Au reste, l'impression de ces aiguillons ne doit pas lire très -forte sur les parties sexuelles de la

68 DISCOURS

Tous les serpeus vieiiueiit cl'uu œuf, ainsi que les quadrupèdes ovipares , les oiseaux et les poissons : mais , dans cer- taines espèces de ces reptiles , les œufs éclosent dans le ventre de la mère ; et ce sont celles auxquelles on doit donner le nom de x^ipères , au lieu de celui de v/t/- pares, pour les distinguer des animaux vivipares proprement dits *.

femelle, car elles sont presque loujours cartilagi- neuses. On peut consulter à ce sujet, dans les Transactions philosophiques , n«> 144, les obser- vations de M. Tyson, célèbre anatoniiste , dont nous adoptons ici l'opinion.

* Nous croyons, pour éviter loute difficulté re- lativement à cette expression d'of^ipare et à la propriété qu'elle désigne, devoir exposer ici la dif- lerence c|u il y a entre les animaux vivipares pro- prement diis et les ovipares; différence qui a été très-bien sentie par plusieurs naturalistes. On peut , à la ngueur, regarder tous les animaux comme venant d'un œuf, et dès-lors il sembleroit qu'on ne pourroit distinguer les vivipares d'avec les ovipares que par la propriété de mettre au jour des petits tout formés, ou de pondre des œufs. Mais l'ou doit admettre deux sortes d'œufs. Dans la première, le foetus est renfermé dans une enveloppe que l'oa

SUR LES s ERP EN s. 69

Le nombre des œufs doit varier suivant

les espèces. Nous ignorons s'il diminue

nomme amnlos y avec un peu de liqueur qui peut ]ui fournir Je premier aliment; mais comme cette liqueur n'est pas suffisante pour le nourrif pendant son dt'veloppement, l'oeuf est par un cordon ombilical, ou par quelque autre communication, avec le corps de la mère, ou quelque corps étranger don^^e fœtus tire sa nourriture : cet œuf ne pou- vant pas suffire à l'accroissemenl ni même à l'en- tretien de l'animal, n*est donc qu'un œuf incom- plet; et tels sont ceux dans lesquels sont renfermés les fœtus de l'homme et des animaux à mamelles, qui ne peuvent point être appelés ot^ipares, puis- qu'ils ne produisent pas d'œuf parfait, d œuf pro- prement dit. Les œufs de la seconde sorte sont, au coniraire, ceux qui contiennent non seulement un peu de liqueur capable de sustenter le fœtus dans les premiers momens de sa formation, mais encore toute la nourriture qui lui est nécessaire jusqu'au ntoment il brise ou dccliire ses enveloppes pour venir à la lumière. Ces derniers œufs sont pondus bientôt après avoir été formés; ou s'ils demeurent dans le ventre de la mère, ils n'y tienuent en au- cune manière; ils en sont entièrement indépendans, ils n'-en reçoi\'ent que de la chaleur, ils sont vérita- blement complets ; ce sont des œufs proprement dus, et tels sont ceux des oiseaux , des poissons, des serpens et des quadrupèdes cjui n'ont poinâ

70 DISCOURS

en proportion de la grandeur des ani- maux , ainsi que dans les oiseaux , et de

de mamelles. Tous ces animaux doivent être ap- pelés ovipares , parce (ju'ils viemienl d'un véritable œuf- ei si dans quelques espèces de Tordre des poissons ou de celui des quadrupèdes sans mamelles, ou de celui des serpens, les œufs éclosent dans le ventre même de Ja mère, d*où les peiits sortent tout formés, ces œufs sont toujours des œuls par- faits^et isolés j les animaux c[ui en éclosent doivent être appelés ovipares ; et si ou en noma e quelques uns vipères ou vit^ipares , pour les di;uinguer de ceux qui pondem , et dout 1 incubation ne se fait pas dans le ventre même de la mère, il ne faut point les considérer comme des vivipares propre- ment dits, ce nom n'appartenant qu'aux animaux dont les œufs sont incomplets et ne contiennent pas toute la nourriture nécessaire au fœtus. On doit donc distinguer trois manières dont \ç^s ani- maux viennent au jour : premièrement, ils peuvent sortir d'une enveloppe à laquelle ou peut, si l*on veut , donner le nom û'œufj mais qui ne forme cju'un œuf imparfait et nécessairement lié avec un corps étranger ou le ventre de la mère ; seconde- ment, ils peuvent venir d'un œuf complet et isolé, éclos dans le ventre de la mère ; et troisièmement, ils peuvent sortir d'un œuf aussi isolé et coujplet, mais pondu plus ou moins de temps avant d'éclore. Ces deux dernières manières sont les mêmes quant

SUR LESSERPENS. 71

même que le nombre des petits dans les quadrupèdes -vivipares : on a jusqu'à présent trop peu observé les mœurs des reptiles , pour qu'on puisse rien dire à ce sujet. L'on sait seulement qu'il y a des espèees de vipères qui donnent le jour à plus de trente vipereaux ; et l'on sait aussi que le nombre des œufs, dans cer- taines espèces de serpens ovipares des contrées tempérées , va quelquefois jus- qu'à treize.

au fond ; elles clifFerent beaucoup de la première mais elles ne dllfèrent l'une de l'autre que par les circousiances de l'incubation ; dans la seconde la clialeur intérieure du ventre de la mère développe le vériiable œuf, tandis que , dans la troisième, la chaleur extérieure du corps de la mère, ou la cha- leur plus étrangère du soleil et de l'atmosphère, le fait éclore. Les animaux qui viennent au jour de la seconde et de la troisième manière sont donc égale- ment ovipares : j'ai donc été fondé à donner ce nom, avec la plupart des naturalistes, aux tortues crocodiles, lézards, salamandres, grenouilles, et autres quadrupèdes sans mamelles; et tous les ser- pens , même les vipères , doivent être aussi regardés comme de vrais ovipares, très-différens également, par leur minière de venir au jour, des vivipares proprement dits.

^2 DISCOURS

Les œufs , dans quelques espèces , ne sortent pas l'un après l'autre iinuiédiate- nient : la femelle paroît avoir besoin de se reposer après la sortie de chaque œuf. Il est même des espèces cette sortie est assez difficile pour être très-douloureuse. Une couleuvre femelle qu'un observa- teur avoit trouvée pondant ses œufs avec lenteur et beaucoup d'efforts , et qu'il aida à se débarrasser de son fardeau , paroissoit recevoir ce secours , non seu- lement sans peine , mais même avec uii plaisir assez vif; et en frottant mollement le dessus de sa tête contre la main de l'observateur , elle sembloit vouloir lui rendre de douces caresses pour son bien- fait.

L'on ignore encore combien de jours s''écoulent dans les diverses espèces, entre la ponte des œufs et le moment le ser- penteau vient à la lumière. Ce temps doit être très - relatif à la chaleur du climat.

Les femelles ne couvent point leurs ceufs ; elles les abandonnent après la pojate j elles les laissent quelquefois sur la

s U R LE S S E R P N S. 78

terie une , sur-tout dans les contrées tiès-cliaudes : mais le plus souvent elles les couvrent avec plus ou moins de soin , suivant que Tardeur du soleil et celle de Tatuiosplière sont plus ou moins vives; nous verrons même que certaines espèces qui habitent les contrées tempérées , les déposent dans des endroits remplis de végétaux en putréfaction , et dont la fer- mentation produit une chaleur active '^.

Si Ton casse ces œufs avant que les petits soient éclos , on trouve le serpen- teau roulé en spirale. U paroît pendant quelque temps immobile : mais si le terme de sa sortie de l'œuf n'étoit pas bien éloi- gné , il ouvre la gueule et aspire à plu- sieurs reprises l'air de l'atmosphère ; ses poumons se remplissent , et le jeu alter- natif des inspirations et des expirations est pour lui un nouveau moteur assez puissant pour qu'il s'agite , se déroule et commence à ramper.

Lorsque les petits serpens sont éclos ou qu'ils sont sortis tout formés du ventre

* Vojez pariiciilièremcnt i'ariicJe de la cou- Icupre à collier.

SiffUlS. III" 7

74 DISCOURS

de leur mère , ils traînent seuls leur frêle existence ; ils n'apprciiiieiit de leur mère , dont ils sont séparés , ni à distinguer leur proie , ni à trouver un abri ; ils sont réduits à leur seul instinct : aussi doit - il en périr beaucoup avant qu'ils soient assez développés et qu'ils aient acquis assez d'expérience pour se garantir des dangers. Et si nous voulons recher- cher quelle peut être la force de cet ins- tinct , si nous examinons pour cela les sens dont les scrpens ont été pourvus , nous troviverons que celui de l'ouïe doit être très-obtus dans ces animaux. Nom seulement ils sont privés d'une conque extérieure qui ramasse les rayons sonores, mais ils sont encore dépourvus d'une ou- verture qui laisse parvenir librement ces mêmes rayons jusqu'au tympan , auquel ils ne peuvent aboutir qu'au travers d'é- cailles assez fortes et serrées l'une contre l'autre. Leur odorat ne doit pas être très- fin , car l'ouverture de leurs narines est petite et environnée d'écaillés : mais leurs yeux , garnis , dans la plupart des espèces , a'une membrane clignotante qui les pré-

SURLESSERPENS. yS

serve de plusieurs accideus et des effets d'une lumière presque toujours trop vive dans les climats qu'ils habitent, sont ordi- nairement brillans et animés , très-mo- Liles , très-saillans , placés de manière à recevoir l'image d'un espace étendu ; et la prunelle pouvant aisément se dilater et se contracter , admet un grand nom- bre de rayons lumineux , ou arrête ceux aui nuiroient à ces organes *. Leur vue doit donc être , et est en effet , très-pcr- cante. Leur goût peut d'ailleurs être assez actif, leur langue étant déliée et fendue de naanière à se coller aisément contre les corps savoureux ^. Leur toucher même

^ Lorsque la piunelle est resserrée, elle est très- alongée , comme dans les cliaîs, les oiseaux de proie de nuit, etc. et elle forme une fente hori- zontale dans ceilaines espî^ces, et verticale clans d'autres, quand la tête du serpent est parallèle à l'horizon.

=* Elle est ordinairement étroite, mince, déliée, et composée de deux 'corps longs et ronds, réunis ensemble dans les deux tiers de leur longueur. Pline a écrit qu'elle étoit fendue en trois: elle peut îs paroîtve lorsque le serpent l'agite vivement j mais

76 DISCOURS

doit être ^ssez fort. ïlsiiepeuveutpas, à lar vérité, appliquer imniédialcuieiît aux dif- férentes surfaces la partie sensible de leur corps; ils ne peuvent recevoir par le tact Fimpression des objets qui les environ- nent, qu'au travers des dures écailles qui les revêtent; ils n'ont point de membres divisés en plusieurs parties , des mains , des pieds , des doigts séparés les uns des autres , pour embrasser étroitement ces mêmes objets : mais comme ils peuvent former facilement plusieurs replis autour de ceux qu'ils saisissent , qu'ils les tou- chent , pour ainsi dire , par une sorte de main composée d'autant de parties qu'il y a d'écaillés dans le dessous de leur

elle ne l'est réellement qu'en deux. Dans la plupart des espèces, elle est renrerméc presque en en liée dans un fourreau, d'où l'animal peut la faire sortir en l'alongeant ; il peut même lu darder hors de sa gueule sans remuer ses mâchoires, et sans les sé- parer l'une de l'autre, ia mâchoire supérieure a3?aDt au-dessous du nuiseau une "petite échancrure par la langue peut passer, et par où, en eft'et, ou voit souvent déborder les deux pointes de cet or- gane, même dans l'état de repos du serpent.

STJRLESSERPEKS. 77

corps , et que par-là ils doivent avoir un toucher plus parfait que celui de beau- coup d'animaux , et particulièreuient des quadrupèdes ovipares , nous pensons qu'ils sont plus sensibles que ces der- niers , et qu'ils ne cèdent en activité intérieure qu'aux quadrupèdes vivipares et aux oiseaux. D'ailleurs l'habitude d'exé- cuter avec facilité des mouveinens agiles et de s'élancer avec rapidité à d'assez grandes distances , ne doit-elle pas leur faire éprouver dans un temps très - court un grand nombre de sensations qui re- montent , pour ainsi dire , les ressorts de leur machine , ajoutent à levu* chaleur intérieure , augmentent leur sensibilité , et par conséquent leur instinct ? La pa- tience avec laquelle ils savent attendre pendant très-long-temps dans une immo- bilité presque absolue le moment de se jeter sur leur proie, la colère qu'ils parois- sent éprouver lorsqu'on les attaque , leur fierté lorsqu'ils se redressent vers ceux qui s'opposent à leur passage , la hardiesse avec laquelle ils s'élancent même contre les ennemis qui leur sont supérieurs , leur

73 DISCOURS

fnrcur lorsqu'ils se précipitent sur ceus qui les troublent dans leurs combats ou dans leurs amours , leur acharnement lorsqu'ils défendent leur femelle, la viva- cité du sentiment qui semble les animer dans leur union avec elle , ne prouvent- ils pas , en effet , la supériorité de leur sensibilité sur celle de tous les animaux , excepté les oiseaux et les quadrupèdes vivipares ? Non seulement plusieurs es- pèces de serpens vivent tranquillement auprès des habitations de Tiiomme , entrent familièrement dans ses demeures, s'y établissent même quelquefois et les délivrent d'animaux nuisibles , et parti- culièrement d'insectes malfaisans ; mais l'on a vu des serpens réduits à une vraie domesticité donner à leurs maîtres des signes d'attachement supérieurs à tous ceux qu'on a remarqués dans plusieurs espèces d'oiseaux et même de quadru- pèdes , et ne le céder , en quelque sorte , par leur fidélité , qu'à l'animal même qui en est le symbole *.

* A'oycz pariiculièrement l'arLicle de la cou- leuvrc commune.

SUR LES S E H P E N S. 79

Il en est des serpens comme de plu- sieurs autres ordres d'animaux : ceux qui sont très-grands , sont rarement plusieurs ensemble. Il leur faut trop de place pour se mouvoir , trop d'espace pour chasser ; doués de plus de force et d'armes plus puissantes , ils doivent s'inspirer mutuel- lement plus de crainte. Mais ceux qui ne parviennent pas à une longueur très- considérable , et qui n'excèdent pas sept ou huit pieds de long , habitent souvent en très -grand nombre, non seulement sur le même rivage ou dans la même forêt , suivant qu'ils se nourrissent d'ani- maux aquatiques ou de ceux des bois , mais dans le même asyle souterrain ; c'est dans des cavernes profondes qu'on les rencontre quelquefois entassés , pour ainsi dire , les uns contre les autres , repliés et entrelacés de telle sorte , qu'on croiroit voir des serpens à plusieurs têtes. Lorsqu'on parvient dans ces antres téné- breux , on n'entend d'abord que le petit bruit qu'ils peuvent faire au milieu des feuilles sèches , ou sur le gravier, en se tournant et en se retournant, parce que.

8o D I S C O U R S

naturcllcincnt paisibles lorsqu'on ne les attaque point , ils ne cherchent alors qu'à se cacher davantage, ou continuent sans crainte leurs mouveuiens accou- tumés : mais si on les effraie ou les irrite par un séjour trop long dans leurs re- paires , on ententl autour de soi leurs sifïïcniens aigus ; et si ron peut apper- eevoir les objets à l'aide de la foible clarté qui parvient dans la caverne, on voit un grand nombre de têtes se dresser au-dcssns de plusieurs corps écailleux , entortlilés et pressés les uns contre les autres, et tous les serpens faire briller leurs yeux et agiter avec vitesse leur langue déliée.

Telle est l'espèce de société dont ces animaux sont susceptibles : mais , dé- pourvus de mains et de pieds , ne pou- vant rien porter qu'avec leur gueule , ils sont plusieurs ensemble sans que leur union produise jamais aucun ouvrage combiné , sans que leurs efforts particu- liers tendentà un résultat commun , sans qu'ils cherchent à rendre leur retraite plus commode ; et peut-être est-ce par unç suite de ce défaut de concert dana

s IT R L E s s E Pv P E N s. 8r

leurs mouveineus , qu'où ne les voit point se réunir contre les ennemis qui les attaquent, ni chasser en commun une proie dont ils viendroicnt plus aisément à bout par le nombre.

Ils éprouvent , pendant l'hiver des lati- tudes élevées , un engourdissement plus ou moins profond et plus ou moins long , suivant la rigueur et la durée du froid : cène sont guère que les petites espèces qui tombent dans cette torpeur , parce que les très -grands serpens vivent dans la zone torride , oii les saisons ne sont jamais assez froides pour diminuer leur mouvement vital au point de les en- gourdir.

Ils sortent de leur sommeil annuel , lorsque les premiers jours chauds du printemps se font ressentir ; mais ce qui peut parottrc singulier, c'est qu'ainsi que les quadrupèdes ovipares , et presque tous les animaux qui passent le temps du froid dans un état de sopeur , ils se réveillent de leur sommeil d'hiver lorsque la tempé- rature est encore moins chaude que celle qui n'a pas suffi , vers la fin de Tau-

82 DISCOURS

lomne , pour les tenir eu activité. On a observé que ces divers animaux se reti- roient souvent , pendant Pautoume , dans leurs asyles d'hiver , et s'y engourdis- soient à une température égale à celle qui les ranimoit au printemps. D'où vient donc cette différence d'effets de la chaleur du prijitemps et de celle de l'automne ? Pourquoi , vers la fin de l'hiver , le rnéme degré de chaleiu* produit -il un plus haut degré d'activité dans les ani- maux? C'est que la chaleur du printemps ji'est point le seul agent qui ranime alors et mette en mouvement les animaux engourdis. Dans cette saison , non seule- ment l'atmosphère commence à être pénétrée de chaleur, mais encore elle se remplit d'une grande quantité de ffuide électrique qui se dissipe avec les orages de l'été ; et voilà pourquoi on n'entend jamais pendant l'automne un aussi grand nombre d'orages ni de coups de tonnerre aussi violens, quoique quelque- fois la chaleur de ces deux saisons soit égale. Ce feu électrique est un des grands agcns dont se sert la Nature pour animer

SURLESSERPENS. 83

les êtres vivaiis ; il n'est donc pas surpre- nant que lorsqu'il abonde dans Tatinos- plière , les animaux, déjà mus par cette cause puissante , n'aient besoin , pour reprendre tous leurs mouvemeiis , que d'une chaleur égale à celle qui les lais- seroit dans leur état de torpeur , si elle agissoit seule. La plupart des animaux qui ont assez de chaleur intérieure pour ne pas s'engourdir, et riionime même, éprouvent cette difierence d'action de la chaleur du printemps et de celle de l'au- tomne ; ils ont, tout égal d'ailleurs, bien plus de forces vitales et d'activité inté- rieure dans le commencement du prin- temps qu'à l'approche de riiivcr , parce qu'ils sont également suscepliblcs d'être pius ou moins animés parle fluide élec- trique, dont l'action est bien moins forte dans l'automne qu'au printemps.

Quelque temps après que les scrpens sont sortis de leur torpeur , ils se dépouil- lent comme les quadrupèdes ovipares , et revêtent une peau nouvelle ; ils .se tiennent de même pius ou moins cachés pendant que cette nouvelle peau n'est pas

84 DISCOURS

pncore endurcie * : mais le temps de leur dépouillement doit varier suivant les es- pèces , la température du climat , e celle de la saison. C'est même dans les serpens que les anciens ont principalement ob- servé le dépouillement annuel ; et comme leur imagination riante et féconde se plai- soit à tout embellir, ils ont regardé cette opération comme une sorte de rajeunis- sement , comme le signe d'une nouvelle existence , comme un dépouillement de la vieillesse , et une réparation de tous les efl'ets de Fàge : ils ont consacré cette idée par plusieurs proverbes ; et suppo- sant que le serpent reprenoit , chaque année , des forces nouvelles avec sa nou- velle parure , qu'il jouissoit d'une jeu- nesse qui s'élendoit autant que sa vie, et que cette vie elle-même étoit très-longue, ils se sont déterminés d'autant plus aisé- ment à le regarder comme le symbole de l'éternité , que plusieurs de leurs idées

* L'ou trouvera , à l'article de la couleuvre d'Esculape , l'exposiùou irès-détaillée de la riia- BJère dout se lait le dépouilleujent des serpens.

SUR LES SERPE N S. 85

astronomiques et religieuses se lioient avec ces idées physiques.

Ou ignore , dans le fait , quelle est la longueur de la vie des serpeiis. Ou doit croire qu'elle varie suivant les espèces , et qu'elle est d'autant plus considérable qu'elles parviennent à de plus grandes dimensions: mais on n'a point, à ce sujet, d'observations précises et suivies. Et com- ment auroit-on pu en avoir ? La confor- jnation extérieure de ces reptiles est trop simple et trop peu variée , pour qu'on ait pu s'assurer d'avoir vu plusieurs fois le même individu dans les bois ou dans les autres endroits ils vivent en liberté : et d'ailleurs les grands serpens ont jtou- jours inspiré trop de crainte pour qu'où ait osé essayer de les observer avec assi- duité ; les moins grands ont été aussi l'objet d'une grande frayeur , ou leur petitesse, ainsi que la nature de leurs retraites , les ont dérobés aux regards de ceux qui auroicnt voulu étudier leurs habitudes. Mais si nous manquons de faits positifs et de preuves directes à ce sujet , nous pouvons présumer , par analogie j

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86 DISCOURS

qu''en général leur vie comprend un granc! nombre d'années. Les quadrupèdes ovi- pares, avec lesquels ils ont de très-grands rapports , tant par leur conformation intérieure , la température de leur sang , le peu de solidité de leurs os , leurs écailles , etc. , que par leurs habitudes , leur engourdissement périodique et leur dépouillement annuel, jouissent, en gé- néral , d'une vie assez longue. Les très- grandes espèces de serpens doivent donc vivre très-long-temps ; si nous les com- parons en effet avec les crocodiles , qui ne parviennent de la longueur de quel- ques pouces à celle de vingt - cinq ou trente pieds qu'au bout de trente ans *, nous trouverons que les serpens dont la grandeur excède quelquefois quarante pieds , ne doivent y parvenir qu'au bout d'un temps pour le moins aussi long. Ces énormes serpens sortent eu effet d'uu œuf, comme les crocodiles ; leurs œufs sont à peu près de la même grosseur que ceux de ces derniers animaux, et le fœtus

* Voyez rarticle du crocodile dans VHisloirc naturelle des <juadnipédes Oi>ipares,

SUR LES SERPE NS. 87

ne doit guère avoir plus de deux pieds de loug lorsqu'il éclot , à quelque espèce démesurée qu'il appartienne: nous avons vu et mesuré de jeunes serpens évidem- ment de la même espèce que ceux qui parviennent à trente ou quarante pieds de long , et leur longueur n'étoit qu'en- viron de trois pieds , quoique leur con- formation et la position de leurs diverses écailles annonçassent qu'ils étoient sortis de leur œuf depuis quelque temps lors- qu'ils a -oient été tués. Mais si ces grands serpens ont besoiji au moins du même temps que les crocodiles pour atteindre à leur entier développement , ne doit- on pas supposer que leur vie est aussi longue ?

Sa durée seroit bien plus considérable, ainsi que celle de presque tous les ani- maux qui vivent dans l'état sauvage , et qui ne reçoivent de l'homme ni abri ni nourriture , s'ils pouvoient passer par un véritable état de vieillesse , et si le com- mencement de leur dépérissement n'étoit pas presque toujours le terme de leur vie. Presque aucun des animaux qui sont dan»

88 DISCOURS

le pur état de nature , ne prolonge sou existence au-delà du moment ses forces commencent à s'afibiblir. Cette époque , qui , dans l'homme placé au milieu de la société , n'indique tout au plus que les deux tiers de sa vie , marque la fin de celle de l'animal sauvage. Dès le moment que sa vigueia* diminue , il ne peut ni atteindre à la course les animaux dont il se nourrit , ni supporter la fatigue d'une longue recherche pour se procurer les alimens qui lui conviennent , ni échapper par la fuite aux ennemis qui le poursuivent , ni attaquer ou se défendre avec des armes supérieures ou égales. Uès- lors ayant moins de ressources lorsqu'il auroit besoin de plus de secours , exposé à plus de dangers lorsqu'il a moins de puissance et de légèreté pour s'en ga- rantir , manquant le plus souvent d'ali- mens lorsqu'il lui est plus nécessaire de réparer des forces qui s'épuisent plus vite , sa foibîesse va toujours en augmentant ; la vieillesse n'est pour lui qu'un instant très-court , auquel succède une décrépie tude dont tous les degrés se suivent avea

s U R 'L E s S E R P E N S. %

rapidité : bientôt retiré dans son asyle , même quelquefois il a bien de la peine à se traîner , il meurt de dépérissement et de faim , ou est dévoré par des animaux, plus vigoureux que lui ; et voilà pour- quoi l'on ne rencontre presque jamais d'animal sauvage avec les signes de la caducité. U en seroitdemêine de l'honnne qui vivroit seul dans le véritable état de nature ; sa vie se termineroit toujours au moment elle comnrenceroit à s'af- foiblir : la société seule , en lui fournis- sant les secours , Tes abris , les divers alimens , a prolongé des jours qui ne peu- vent se soutenir que par ces forces étran- gères ; rintelligence humaine a doublé , pour ainsi dire , la vie que la Nature avoit accordée à l'homme ; et si les pro- duits de cette intelligence , si les résul- tats de la société , si les arts de toute espèce ont amené les excès qui diminuent les sources de l'existence , ils ont créé ces secours puissans qui empêchent qu'elles ne tarissent presque au moment elles commencent à n'être plus si abondantes. Tout compte j ils ont donné à l'homme

ço DISCOURS

bien plus d'années par tous les biens qu'ils lui procurent , qu'ils ne lui eu ont 6té par les maux qu'ils entraînent. Les animaux élevés en domesticité , jouissant des mêmes abris , et trouvant toujours à leur portée la nourriture qui leur con- vient , parviendroient presque tous , comme l'iiomme , à une longue vieil- lesse ; ils recevroient ce bienfait de nos arts en dédommagement de la liberté qui leur est ravie , si l'intérêt qui les élève , ne les abandonnoit des que leurs forces affoiblies et leurs qualités dimi- nuées les rendent inutiles à nos jouis- sances.

Lorsque les très -grands serpens sont encore éloignés de leur courte vieillesse, lorsqu'ils jouissent de toute leur activité et de toutes leurs forces , ils doivent les entretenir par une grande quantité de nourriture substantielle : aussi ne se contentent-ils pas de brouter l'herbe ou démanger des graines et des fruits, ils dévorent les animaux qu'ils peuvent sai- sir; et comme, dans la plupart des ser- pens, la digestion est très-longue , et que

SURLESSERPENS. tjï

leurs alimeus demeurent très-loiig-tenips dans leur corps , les substances animales qu'ils avalent , et qui sont très-suscep- tibles de putréfaction , s'y décomposent et s'y corrompent au point de répandre l'odeur la plus fétide. Il est arrivé à plu- sieurs voyageurs , et particulièrement à M. de la Borde , qui avoient ouvert le corps d'un serpent , d'être comme suffo- qués par l'odeur forte et puante qui s'exha- loit des restes d'alimens que l'animal avoit encore dans les intestins. Cette odeur vive pénètre le corps du serpent , et , se faisant sentir de très-loin , annonce à une assez grande distance l'approche du reptile. Fortifiée , dans plusieurs espèces , par celle qu'exhalent des glandes parti- culières, elle sort, pour ainsi dire , par tous les pores , mais se répand sur-tout par la gueule de l'animal ; elle est pro- duite par un grand volume de miasmes corrupteurs et de vapeurs méphitiques , qui , s'é tendant jusqu'à la victime que le serpent veut dévorer , l'investit , la suffo- que , ou , ajoutant à la frayeur qu'inspire la présence du reptile , l'enivre , lui 6te

f)2 DISCOURS

r usage de ses meuibres , suspend ses mouvemens , anéantit ses forces , la plonge dans une sorte d'abattement, et la livre sans défense à l'animal vorace et carnassier.

Cette vapeur putride , qui produit des effets si funestes sur les animaux qui y sont exposés , et qui a donné lieu à tant de contes bizarres et absurdes , forme une sorte d'atmosphère empestée autour de presque tous les grands reptiles, soit qu'ils aient du venin , ou qu'ils n'en soient pas infectés ; et elle ne doit être presque jamais rapportée à la nature de ce poison , qui , malgré son activité , ne répand pas souvent une odeur sensible , même lors- qu'il est mortel.

Lorsque les serpens se sont précipités sur les animaux dont ils se nourrissent , ils les retiennent en se roulant plusieurs fois autour d'eux , et en les serrant dans leurs nombreux replis ; ils les dévorent alors ; et ce qui sert à expliquer com- ment ils avalent des volumes très-consi- dérables , c'est que leurs deux mâchoires sont articulées, ensemble de manière à

SUR LES S E R P E N S. ^3

pouvoir se séparer ruuc de Pautre , et «'écarter autant que la peau de la tête peut le permettre : cette peau obéissant avec facilité aux efforts de Tanimal , et les deux os qui forment les deux côtés de chaque mâchoire , n'étant réunis vers le museau que par des ligamcns qui se prêtent plus ou jnoins à leur séparation , il n'est pas surprenant que la gueule des serpens devienne une large ouverture par laquelle ils peuvent engloutir des corps très-gros. D'ailleurs , comme ils commen- cent par briser au milieu de leurs con- tours les os des animaux et les autres substances très-dures qu'ils veulent ava- ler ; comme ils s'aident, pour y parvenir plus facilement , des arbres , des grosses pierres et de tous les corps très-résistans qui peuvent être à leur portée; conune ils les enveloppent dans les mêmes replis que leurs victimes , et qu'ils s'en servent comme d'autant de leviers pour les écra- ser , il est encore moins étonnant que leurs alimens , étant broj^és de manière à céder aux différentes pressions , et étant euduits de leur bave et d'une liqueur qui

94 DISCOURS

les rend plus souples et plus gluans , puissent entrer en grande masse dans leur gueule très-élargie ; ils serrent même sou- vent leur proie avec tant de force et de promptitude , que non seulement ils la compriment , la brisent et la concassent, mais la coupent comme le fer le plus tranchant.

Les anciens connoissoient cette manière d'attaquer qu'emploient presque tous les serpens , et sur - tout les très - grandes espèces. Pline a écrit même que lorsque ces énormes reptiles avoient avalé quelque grand animal , et par exemple une bre- bis , ils s'ejfforcoient de le briser en se roulant eu plusieurs sens et en compri- mant ainsi avec force les os et les diffé- rentes parties de l'animal qu'ils avoient dévoré.

Leurs alimens étant triturés et préparés avant de parvenir dans leur estomac, il est aisé de voir qu'ils doivent être aisé- xnent digérés , d'autant plus que leurs sucs digestifs paroissent très-abondans , leur vésicule du fiel , par exemple, étant eu général très-grande en proportion des autres parties de leur corps.

SURLESSERPENS. g$

La masse des aliineiis qu'ils avalent est quelquefois si grosse , relativement à Tgu- verture de leur gosier, que , malgré tous leurs efforts , Técartement de leurs mâ- choires et l'extension de leur peau , leur proie ne peut entrer qu'à demi dans leur estomac. Etendus alors dans leur retraite, ils sont obligés d'attendre que la partie qu'ils ont déjà avalée soit digérée, et qu'ils puissent de nouveau écraser , broyer , enduire et préparer les portions trop grosses ; et on ne doit pas être étonne qu'ils ue soient cependant pas étouffés par cette masse d'aiimens qui remplit leur gosier et y interdit tout passage à l'air : leur tracbée-artère, par l'air de l'atmosphère parvient à leurs poumons * , s'étend jusqu'au-dessus du fourreau qui enveloppe leur langue ; elle s'avance dans leur bouche de manière que sou ouver- ture ne soit pas obstruée par un volume

* 11 n'y a point d'épiglolte poiir feruier l'ouver- ture de la trachée ; cette ouverture ne consiste com- munément que dans une fente très-étroite, et voilà pourquoi. les serpens ne peuvent faire entendre que des sifflemens.

96 DISCOURS

d'alimeiis suffisant néanmoins pour rem- plir toute la capacité du gosier ; et l'air ne cesse de pénétrer plus ournoins libre- ment dans leurs poumons , jusqu'à ce que presque toutes les portions des ani- maux qu'ils ont saisis, soient ramollies , mêlées avec les sucs digestifs , triturées, etc. Quelques efforts qu'ils fassent cepen- dant pour briser et concasser les os, ainsi que pour ramollir les chairs et les enduire de leur bave , il y a certaines parties , telles , par exemple , que les plumes des oiseaux , qu'ils ne peuvent point ou pres- que point digérer , et qu'ils rejettent presque toujours.

Lorsque leur digestion est achevée , ils reprennent une activité d'autant plus grande que leurs forces ont été plus renouvelées ; et pour peu sur-tout qu'ils ressentent alors de nouveau l'aiguillon de la faim, ils redeviennent très-dangereux pour les animaux plus foibles qu'eux ou moins bien armés. Ils préludent pres- que toujours aux combats qu'ils livrent, par des sifflemens plus ou moins forts. Leur langue étant très-déliée et trcs-fen-

s U 11 L E s s E R P E N s. gf

(?u«, et ces animaux la lawçaut en dehors lorsqu'ils veulent faire entendre quelques sons, leurs cris doivent toujours être mo- difiés en sifflemens: et il est à remarquer que ces sifflemens , plus ou moins aigus , ne paroissent pas être , comme les cris de plusieurs quadrupèdes ou le chant de plu- sieurs oiseaux , une sorte de langage qui exprime les sensations douces aussi-bien qne les affections terribles; ils n'an- noncent , dans les grands seri>ens , que le besoin extrême , ou celui de Tamour , ou celui de la faim. On diroit qu'aucune af- fection paisible ne les émeut assez vive- ment pour qu'ils la manifestent par l'or- gane de la voix. Presque tous les animaux de proie , tant de l'air que de la terre , les aigles, les vautours , les tigres , les léo- pards, les panthères, ne font également entendre leurs cris ou leurs huriemens que lorsque leurs chasses commencent ' ou qu'ils se livrent des combats à mort pour la libre possession de leurs femelles. Jamais on ne les a entendus, comme plu- sieurs de nos animaux domestiques et la plupart des oiseaux chanteurs, radoucir

9

98 DISCOURS

en quelque sorte , les sons qu'ils peuvent proférer, et exprimer par une suite d'ac- cens plus ou moins tranquilles une joie paisible, une jouissance douce, et, pour ai\isi dire , un plaisir innocent : leur lan^ gage ne signifie jamais que co/è/e ^ifureur; leurs clameurs ne sont que des bruits de guerre ; elles n'annoncent que le désir de saisir une proie et d'immoler un ennemi, ou ne sont que l'expression terrible de la douleur aiguë qu'ils éprouvent, lorsque Icfur force trompée n'a pu les garantir de blessures cruelles, ni leur conserver la femelle vers laquelle ils étoient entraînés par une puissance irrésistible.

Si les siiflemens des très-grands serpens étoient enteTulus de loin , comme les cris des tigres , des aigles , des vautours , etc. , ils serviroient à garantir de l'approclie dangereuse de ces énormes reptiles : mais ils sont bien moins forts que les rugisse- mens des grands quadrupèdes carnassiers et des oiseaux de proie. La masse seule de ces grands serpens les trahit et les em- pêche de cacher leur poursuite : on s'ap«*j perçoit facilement de leur approche , dans

s r II L E s s E R F E N s. 99

les endroits qai ne sont pas couverts de bois , par le mouvement des hautes herbes qui s'agitent et se courbent sous leur poids; et on les voit aussi quelquefois de loin repliés sur eux-mêmes, et présentant ainsi un cercle assez vaste et assez élevé.

Soit qu'ils recherchent naturellement rhumidité , ou que l'expérience leur ait appris que le bord des eaux, dans les con- trées torrides , étoit toujours fréquenté par les animaux dont ils font leur proie , et qu'ils peuvent y trouver en abondance et sans la peine de la recherche l'aliment qu'ils prêtèrent , c'est auprès des mares , des fontaines, ou des bords des fleuves, qu'ils choisissent leur repaire. C'est que, sous le soleil ardent des contrées équato- riales, et, par exemple, au milieu des déserts sablonneux de l'Afrique , ils at- tendent que la chaleur du midi amène au bord des eaux les gazelles, les anti- lopes , les chevrotains , qui , consumés par la soif, excédés de fatigue , et sou- vent de disette au milieu de ces terres desséchées et dépouillées de verdure , vieunent leur livrer une proie facile à

îpo niscouRs

vaîncre. Les tigres et les autres animàui moins altérés d'eau que de sang, viennenli aussi sur ces rives, plutôt pour y saisir! leurs victimes que pour y étaiicher leur soiF. Attaques souvent par les énormesi serpens , ils les attaquent eux-iuèmes. C'est sur-tout au moment la chaleur de ces contrées est rendue plus dévorante par l'approche d'i^n orage qui fait briller les foudres et entendre ses affreux roule- mens , et l'action du fluide électrique répandu dans l'atmosphère donne eu quelque sorte une nouvelle vie aux rep- tiles , que , tourmentés par une faim ex- trême , animés par toute l'ardeur d'un sable brûlant et d'un ciel qui paroît s'al- lumer , environnés de feu, et le lançant pour ainsi dire , eux-mêmes par "leurs yeux étincelans , le serpent et le tigre se disputent avec le plus d'acharnement l'empire de ces bords si souvent ensan- glantés. Des voyageurs disent avoir vu ce spectacle terrible ; ils ont vu un tigre furieux, et dont les rugissemens portoient au loin l'épouvante, saisir avec ses griffes déchirer avec ses dents, faire couler lo

s U R L E s s E R P E N s. loi sang d'un serpent démesuré , qui , rou- lant son corps gigantesque, et sifflant de douieur et de rage , serroit le tigre dans ses contours multipliés , le couvroit de son écume rougie , Tétoufibit sous sou poids, et laisoit craquer ses os au milieu de tous ses ressorts tendus avec force : mais les efforts du tigre furent vains , ses armes furent impuissantes, et il expira au milieu des replis de l'énorme reptile qui le tenoit enchaîné.

Et que l'on ne soit pas étonné de la grande puissance des serpens : si les ani- maux carnassiers ont tant de force dans leurs mâchoires , quoique la longueur de- ces mâchoires n'excède guère un pied , et qu'ils n'agissent que par ce levier unique, quels effets ne doivent pas produire dans les serpens un très-grand nombre de le- Tiers composés des os , des vertèbres et des côtes , et qui , par l'articulation de ces mêmes vertèbres , peuvent s'appli- quer avec facilité aux corps que les ser- pens veulent saisir et écraser?

A la force et à l'adresse les serpens réunissent un nouvel avantage : ou ne

îoa D I S C O U R S

peut loin- ôter la vie que difficiiernent , ainsi qu'aux quadrupèdes ovipares; et ils peuvent, sans eu périr, perdre une poif-> tion de leur queue , qui repousse presque toujours lorsqu'elle a été coupée ^. Mais ce n'est pas seulement par des blessures qu'il est difficile de les faire mourir; on ne peut y parvenir qu'avec peine par une privation absolue de nourriture , puis- qu'ils vivent plusieurs mois sans man- ger -; et même il leur reste encore quel- que sensibilité lorsqu'ils ont été privés pendant long-temps et presque entière- ment de l'air qui leur est nécessaire pour respirer. Redi a fait des expériences à ce sujet; il a placé des serpens dans le ré- cipient d'une machine pneumatique; et après en avoir pompé presque tout l'air, il les a vus donner encore quelques signes de vie au bout de près de vingt-quatre

' Les anciens ont exagéré cette propriété des reptiles ; Pline a écrit que lorsqu'on arrachoil les yeux à un jeune serpent, il s'en formoit de nou- veaux.

^ Voyez le$ divers articles de celte Kisioire.

SURLESSERPENS. io3

heures *. Cette expérience montre com- înent ils peuvent parvenir à tout leur accroissement , jouir de toute leur force , et même choisir de préférence leur de- meure au milieu des marais fangeux dont les exhalaisons empestées corromperit l'air, le rendent moins propre à la respi- ration , et produisent dans l'atmosphère l'effet d'un commencement de vide.

Quoique de tous les temps les serpens , et sur- tout les très-grandes espèces , ainsi que celles qui sont venimeuses, aient inspirer une frayeur très-vive , leur forme remarquable et leurs habitudes singulières ont attiré sur eux assez d'at- tention pour qu'on ait reconnu leurs qualités principales. 11 paroît que les an- ciens connoissoient, même dès les temps les plus reculés , toutes les propriétés que nous venons d'exposer. Il faut qu'elles aient été observées dans ces temps an- tiques dont il nous reste à peine quel- ques monumens imparfaits, et qui ont précédé les siècles nommés héroïques ,

* Boyle a fait aussi des expédences analogues,

104 DISCOURS

la plupart des idées religieuses des Égyp- tiens et des Grecs ont commencé à prendre ces formes brillantes qui ont fourni tant d'images à la poésie. Si nous ouvrons en effet les livres des premiers poètes dont les ouvrages sont parvenus jusqu'à nous , si nous consultons les fastes de la mythologie grecque, si nous réunissons sous un même point de vue les différentes parties de ces anciennes traditions le serpent est employé comme emblème , nous trouverons que les anciens lui ont attribué , ainsi que nous , une grandeur très-considérable , qu'ils sembloient regarder comm« dépen- dante du séjour de ce reptile au milieu des endroits marécageux et humides , puisqu'ils ont supposé qu'à la suite du déluge de Deucalion , le limon de la terre engendra un énorme serpent qu'Apollon tua par ses flèches, c'est-à-dire, que le soleil fit périr et dessécha par la chaleur de ses rayons. Ils lui ont aussi donné la force : car en parlant du combat d'Aché- lous contre Hercule, ils ont supposé que le premier de ces deux demi-dieux avoit

SUR LES S E R P É N S. io5 revêtu la forme du serpent pour vaincre plus aisément son redoutable adversaire. C'est son agilité et la promptitude de tous ses mouvemeus qui Pont fait choisir par les auteurs de la mythologie égyptienne et grecque pour le symbole de la vitesse du temps et de la rapidité avec laquelle les siècles roulent à la suite les uns des autres ; et voilà pourquoi ils Tout donné pour emblème à Saturne , qui désigne ce temps; et voilà pourquoi encore ils Pont représenté se mordant la queue, et for- mant ainsi un cercle parfait, pour peindre la succession infinie des siècles de siècles , pour exprimer cette durée éternelle dont chaque instant fuit avec tant de vitesse , et dont Pensemble n'a ni commencement ni fin. C'est ainsi qu'il étoit figuré en ar- gent dans un des temples de Memphis.j comme l'attestent les monumens échap- pés au ravage de ce même temps dont il étoit le symbole; et c'est encore ainsi qu'il étoit représenté autour de ces tableaux chronologiques dive,rs hiéroglyphes retraçoient aux yeux des Mexicains , de ce premier, peuple du nouveau inonde.

Tû6 ' DISCOURS

ses années , ses mois , et les divers événe- mens qui en remplissoient le cours.

Les anciens ne lui ont-ils pas aussi at- tribué riustiiict étendu que les voyageurs ««'accordent à reconnoître dans cet être remarquable? Us ont anobli, exagéré cet instinct; ils l'ont ciécoré du nom à'^intelll- gence , de ]>j'é\>oyance , de ciwiuation *; et voilà pourquoi, placé autour du miroir de la déesse de la prudence, il fut consa-

* Les hablians d'Argos vénéroicnt les scrpens. Les Athéniens disoient, suivant Hérodote, qu'où avoii vu dans le temple un grand serpeut gardien et protecteur de la citadelle; et métiie Jupiter étoit adoré sous ki forme d'uu serpent dans plusieurs endroits de la Grèce.

Mais, pour avoir une idée plus précise des opi- nions des anciens louchani l'intelligence , la vivacité et les autres qualités des serpens, on peut consulter Plutarque , Euscbe, Shaw , et M. Savary. Les Eg3^ptiens l'employoient , dans leur langue sym- bolique, pour désigner le soleil. Il rcprcsentoit •aussi, pour ce peuple, le bon génie, la bonté su- prême el infinie , dont le nom cneph lui fut donné, suivant Eusèbe; et les Phéniciens le nommoieçt de même, agalho daimon y bon géniç.

SUR LES S E R P E N S. 107 €iéà celle de la santé , ainsi qu'à Escu- lape , adoré à Epidaure sous la forme d'uu serpent. N'ont-ils pas reconnu sa longue vie, lorsqu'ils ont feiut que Cadmus et plusieurs autres liéros avoient élé méta- morphosés eu serpens , comme pour dé- signer la durée de leur gloire, et que le choisissant pour représenter les mânes de ce qui leur étoit cher, ils Tout placé parmi les tombeaux * ? N'ont-ils pas fait ailusiou à l'effroi qu'il inspire, et principaîeiuent au poison mortel qu'il recèle quelquefois, lorsqu'ils l'ont donné aux Euménides , dont il entoure et hérisse la tête; à l'En- vie, dont il perce le cœur; à la Discorde, dont il arme les mains sanglantes ? Et ce- pendant , par un certain contraste d'idées que l'on rencontre presque toujours lors- que les objets ont été examinés plusieurs fois et par divers yeux , n'ont-ils pas vu dans le serpent cette beauté de couleurs et ces proportions déliées que nous y ferons plus d'une fois remarquer? Ne lui ont-ils

\oyez à ce siijel , dans le cinquième livre de \ 'Enéide, la belle description du serpent cnrEué-; vit autour du tombeau de son pcre.

io8 DISCOURS

pas accordé la beauté , puisqu'ils ont dit que Jupiter, qui, pour plaire à Léda, a voit ])ris la forme élégante du cygne, avoit choisi celle du serpent pour obtenir les faveurs d'une autre divinité ? Toutes ces idées , répandues des contrées de l'Asie an- ciennement peuplées * , s'étendaut parmi

* Un roi de Calécut avoit ordonne que celui qui tueroit un serpent, seroit puni aussi rigoureuseaienL que s'il avoit tué un homme. Il regardoit les ser- pens comme descendus du ciel , comme doués d'une puissance divine, et même comme des divi- nités, puisqu'ils pouvoient donner la mort en un instant.

Dès les temps les plus reculés , le serpent a été aussi regardé par les Indiens comme le symbole de la sagesse; et leur religion avoit consacré cette idée. (Mémoire manuscrit de feu M. Commerson sur V^uiorrha-Badhe ^ commentaire du Cîiasta ou Shasfahf le plus ancien des livres sacrés des lia- bitaus de l'Indostan et de la presqu'île en-decà du Gange.)

« Les Egyptiens peignoient un serpent, couvert « d'éçailles de difTéreuies couleurs , roulé sur lui- « même. Nous savons , par linterpiélation ([u'Horus « ii polio donne des liiérogly plies égyplicus, que,

s r R L E s s E R P E N s. 109 les sociétés à demi policées de TAmérique et parmi les hordes sauvages de l'Afrique»

« flans ce style, les écailles du serpent ck'signoient tt les étoiles du ciel. Ou apprend encore, par Clé- « ment Alexandrin, que ces peuples représentùient « la marche oblique des astres par les replis tor- « tueux d'un serpent. Les Égyptiens, les Perses, « peignoient un homme nud, entortillé d'un ser- « pent; sur les contours du serpent ctoient des- K sinés les signes du zodiaque. C'est ce qu'on voit ff sur difFcrens monumens antiques, et eu parti- « culier sur une représentation de Mithras, expli- « quée par l'abbé Banier, et sur un tronçon de « statue trouvé à Arles en 1698. Il n'est pas dou- « teux qu'on a voulu représenter par cet emblème « la route du soleil daus les douze signes, et son « double mouvement annuel et diurne, qui, en « se combinant , fout qu'il semble s'avancer d'un * tropique à l'autre par des ligues spirales. Ou te retrouve cet hiéroglyphe jusque chez les Mexi- K caius : ils ont^ leur cycle de cinquante-deux ans,- K représenté par nue roue; cette roue est environ- K née d'un serpent qui se mord la queue, et par K ses nœuds marque les quatre divisions du cycle.... « Il est évident que les figures des constellations, « les caractères qui désio-nent les signes du zod!:,nue,

Scryer.', J J I. lO

110 DISCOURS

accrues par leur éloignement de leur ori- gine, embellies par rimagination , altc-

ff et tout ce qu*oii peut appeler la notation asiru- « nomique , sont les restes des anciens hiéroglyphes, a 11 est remarquable que les Chinois appellent les ce nœuds de la lune, la tête et la queue du cie! , « comme les Arabes disent la tête et la queue du « dragon. Le dragon est, chez les Chinois, un animal K céleste: ils ont apparemment confondu ces deux c idées.... 11 est encore fait mention dans VEdda « d'un grand serpent qui environne la terre. Tout « cela a quelque analogie avec le serpent , qui par- « tout représente le temps , et avec le dragon <E dont la tête et la queue marquent les nœuds dt <[ l'orbite de la lune, taudis que ce dragon cause K les éclipses. Mais cette superstition , ce préjugé « universel qui se retrouve en Amérique comme « en Asie , u'indique-t-il pas une source commune , c et ne place -t-il pas même plus naturellemcni « cette source au Nord, peut exister la seule « communication possible entre l'Asie et l'Amé- « rique , et d*où les hommes ont pu descendre fa- c cileraent de toutes parts vers le Midi, pour ha- « biler l'Amérique , la Chine, les Indes, etc. ? » (M. Bailly, de l'académie francoise , de celle des scieuces, et de celle des inscriptions. Histoire de l'astronomie ancienne , page 5i5.)

SUR LES SERPE N s. m

rées par l'ignorance, falsifiées par la su- perstition et par la crainte, lui ont attiré les honneurs divins, tant dans l'Amérique qu'au royaume de Juida , et dans d'autres contrées , il a encore ses temples, ses prêtres , ses victimes ; et pour remonter de la considération d'objets profanes et du spectacle de la raison humaine égarée, à la contemplation des vérités sacrées dic- tées par la parole divine, si nous jetons un œil respectueux sur le plus saint des re- cueils, ne voyons-nous pas toutes les idées des anciens sur les propriétés du serpent s'acrorder avec celles qu'en donne l'écri- vain sacré, toutes les fois qu'il s'en sert comme de symbole ?

Grandeur , agilité , vitesse de mouve- ment, force, armes funestes, beauté, intelligence , instinct supérieur, tels sont donc les traits sous lesquels les serpens ont été montrés dans tous les temps; et en cherchant ici à présenter cet ordre nombreux et remarquable, je n'ai fait que rétablir des ruines , ramasser des rap- ports épars , eu lier l'ensemble et exposer des résultats généraux , que les anciens

112 DISCOURS.

avoicnt déjà recueillis. C'est donc la grande image de ces êtres distiugLiés , déjà peinte par les anciens , nos maîtres eu tant de genres, que je viens d'essayer de montrer , après avoir tâché de la dégager du voile dont Tignorance , Timagination , et Tamoiu- du merveilleux, l'avoient cou- verte pendant une longue suite de siècles; Toile tissu d'or et de soie , et qui euîbel- lissoit peut-être l'image que l'on voyoit au travers , mais qui u'étoit que i'ouvrage de l'homme , et que le flambeau de la vé- rité devoit consumer pour n'éclairer que l'ouvrage de la Nature.

NOMENCLATURE

E T

TABLE METHODIQUE DES SERPE N S.

-L^ous venons de voir que malgré le grand nombre de ressemblances que pré- sentent les diverses espèces de serpens , elles dilfèrcnt les unes des autres, non seulement par la teinte et la distribution de leurs couleurs , mais encore par le nombre, la grandeur, la forme et Tar- rangement de leurs écailles, autant que par leurs habitudes, et particulièrement par la nature de leur hal3itation , ainsi que de la nourriture qu'elles recliercîient. L'ordre des serpens étant d'ailleurs assez nombreux , et renfermant plus de cent quarante espèces ''^j nous avons ciu ne

* Nous décrivons clans cet ouvrage, non seule- ment plus de cent quarante, mais inciTie plus de

10

ÎI4 NOMENCLATURE

pouvoir en traiter avec clarté qu'en éta- blissant dans l'ordre de ces reptiles quel- ques divisions générales , fondées sur la différence de leur conformation exté- rieure, ainsi que sur celle de leurs mœurs. Nous les avons réunis en liuit diiTérens groupes, et nous en avons formé huit genres.

Le premier est composé des serpens qui ont un seul rang de grandes écailles sous le ventre , et deux rangs de petites plaques sous la queue. Nous les appelons couleuvres (en latin coluber') avec la plu- part des naturalistes récens, et particu- lièrement avec M. Linné ; et ce genre comprend la vipère commune , Taspic , la couleuvre proprement dite, la cou- leuvre à collier, la qua tre- raies , cinq

ceut soixante serpeus; cependant, comme plusieurs de ces animaux, au lieu de former plus de cent soixante espèces, ainsi que nous le présumons , pourront, dans la suite, n'ctre regardés, d'après de nouvelles observations des voyageurs ou des na- turalistes , que comme des variétés dépendantes de l'âge ou du sexe, nous avons cra ne devoir parler ici que de cent quarante espèces.

DES SERPE N s. ii5

scrpens très-communs en France , et qui forment, avec Torvet, et peut-être la couleuvre d'Esculape , les seules espèces qu'on y ait encore observées.

Nous plaçons dans le second genre les serpcns qui n'ont qu'un seul rang de grandes plaques, tant au-dessous du corps qu'au-dessous de la queue; et ce genre présente les plus grandes espèces, aux- quelles nous laissons le nom générique de boa, par lequel elles ont été désignées en latin par Pline et les autres anciens auteurs, et en francois, ainsi qu'en latin, parle plus grand nombre des naturalistes et des voyageurs modernes , et qu'on a ainsi nommées , parce qu'on a écrit qu'elles se nourrissoient avec plaisir du lait des vaches.

Le troisième genre est composé des ser- pcns qui ont de grandes plaques sous le ventre et sous la queue, dont l'extrémité est terminée par des écailles articulées et mobiles , auxquelles on a donné le nom de sonnettes * : nous leur conservons le

* Voyez la description de ces écailles ou sonnettes dans l'article du boiquira.

ii6 NOMENCLATURE

nom générique de serpent à sonnettes *,

Dans le quatrième genre l'on trouvera les serpens qui n'ont au-dessous du corps et de la queue que des écailles sem- blables à celles du dos ; nous leur lais- sons le nom générique languis. Et c'est dans ce genre qu'est placé l'orvet, ser- pent très-commun dans quelques unes de nos provinces méridionales.

Nous comprenons dans le cinquième genre ceux qui sont entourés par-tout d'anneaux écailleux , et que les natura- listes ont déjà appelés amphisbènes.

Nous comptons dans le sixième les serpens dont les côtés du corps sont plis- sés , et que l'on a nommés cœciles ( en latin cœciiia').

Dans le septième genre doivent être mis ceux dont le dessous du corps pré- sente , vers la tète, de grandes plaques, ne montre ensuite que des anneaux écailleux, et dont la queue, garnie de ces mêmes anneaux à son origine , n'est ye vêtue que de simples écailles à son

* En latin crotalus.

DES SERPENS. 117

extrénillé. Nous les appelons laiigaJta , avec les naturels du pays on les trouve.

Et enfin nous plaçons dans le huitième serpent qui a sa peau revêtue de petits tubercules , et que nous nommons Xacro- ckorde de Java, avec M. Hornstedt, qui en a publié la description *.

Dans chacun de ces huit genres, diffé- renciés par des signes extérieurs très-cons- tans et très-faciles à reconnoître , il seroit à désirer que Ton pût former une sous- division , d'après une propriété bien im- portante dont nous allons parler. Chacun de ces genres présenteroit deux groupes secondaires : l'on placeroit dans le pre- jnier les serpens dont les petits éclosent dans le ventre de leur mère , et auxquels on doit donner le nom de vipères ; et Ton comprendroit dans le second les serpens

* M. Linué a divise les serpeMis en six genres, auxquels nous a\ous ajouté celui des langaha , que INI. Bruyères, de la suciété royale de Monipellier, a le premier fait connoîlre dans le Journal de -pliysïque du mois de lévrier 1784, et celui que M. Hornstedt a décrit dans les Mémoires de Vaca-^ demie de Stockholm , année 17^7, page 3o6.

un NOMENCLATURE

proprement dits , et qui pondent des œuts. Cette distribution si naturelle, et Fondée sur d'assez grandes dilTérences iutérieures, ainsi que sur un fait remarquable, de- vroit faire partie de tout arrangement méthodique destiné à faire reconnoître Tcspècc et le nom des divers individus: mais pour cela il faudroit qu'on eût trouvé des caractères extérieurs constans et faciles à voir, qui distinguassent les vipères d'avec les serpcns proprement dits. Un fort bon observateur, M. de la Borde, correspondant du Cabinet du roi àCayenne, a cru remarquer que toutes les espèces de serpens dont les petits éclosent dans le ventre de leur mère , sont venimeuses, et que par conséquent elles ont toutes des crochets ou dents mol)iles semblables à celles de la vipère commune d'Europe. Si cette observation impor- tante, que nous avons vérifiée sur plu- sieurs espèces de serpcns reconnus pour vipères, pouvoit s'appliquer également à toutes les espèces de reptiles qui viennent au jour tout formés , et si ces dents mo- biles ne garnissoient les mâchoires d'au-

DE s s E RP ENS. 119

Clin serpent ovipare, 011 pourroit regar- der CCS crocliets coinuie des caractères cUstiuciifs de la sous-division des vipères, dans chacun des huit genres des reptiles^ Ce caractère est d'an tant plus remar- quable, qu'il nous a paru toujours réuni avec une conformation particulière des mâchoires, que nous croj^ons devoir faire connoître ici.

Dans toutes les espèces de couleuvres à crochets que nous avons examinées , nous n'avons trouvé à la mâchoire supé- rieiue qu'un seul rang de petites dents crochues et recourbées en arrière : c'est à Tcxtérieur de ce rang qu'est placé , de chaque côté , un crochet plus ou moins long, creux, percé vers ses deux extré- mités , enveloppé dans une gaine, d'où l'animal peut le faire sortir; et auprès de sa base sont deux ou trois crochets sem- blables , quelquefois cependant plus pe- tits, et destinés à remplacer le premier , lorsque quelque accident en prive le rep- tile *. La mâchoire inférieure ne présente

* Ariiclc de la vipère commune.

!

iiR NOMENCLATURE

proprenieiit dits , et qui poiitieut des œufs. Cette distribution si uaturclle, et Fondée sur d'assez grandes différences intérieures, ainsi que sur un fait remarquable, de- "vroit faire partie de tout arrangement méthodique destiné à faire rcconnoître l'espèce et le nom des divers individus: mais pour cela il faudroit qu'on eiit trouvé des caractères extérieurs constans et faciles à voir, qui distinguassent les vipères d'avec les serpcns proprement dits. Vu fort bon observateur, M. de la Borde, correspondaiît du Cabinet du roi à Cayenne , a cru remarquer que toutes les espèces de serpcns dont les petits éclosent dans le ventre de leur mère , sont venimeuses, et que par conséquent elles ont toutes des crochets ou dents mo]>iles semblables à celles de la vipère commune d'Europe. Si cette observation impor- tante, que nous avons vérifiée sur plu- sieurs espèces de serpcns reconnus pour vipères, pouvoit s'appliquer également à. toutes les espèces de reptiles qui viennent au jour tout formés , et si ces dents mo- biles ne garnissoient les mâchoires d'au-

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DES SERPENS.

119

cim serpent ovipare, 011 pourroit regar- der CCS crochets comme des caractères distiiicdfs de la sous-dlvision des vipères, dans chacun des huit genres des reptiles- Ce caractère est d'autant plus remar- quable, qu'il nous a paru toujours réuni avec une conformation particulière des mâchoires, que nous croyons devoir faire tonnoître ici.

Dans toutes les espèces de couleuvres il crochets que nous avons examinées , nous n'avons trouvé à la mâchoire supé- rieure qu'un seul rang de petites dents crochues et recourbées en arrière : c'est à rcxtéricin- de ce rang qu'est placé , de chaque côté, un crochet plus ou moins long, creux, percé vers ses deux extré- mités , enveloppé dans une gaine, d'où l'animal peut le faire sortir ; et auprès de sa base sont deux ou trois crochets sem- l^îables , quelquefois cependant plus pe- tits, et destinés à remplacer le premier , lorsque quelque accident en prive le rep- tile *. La mâchoire iuférieure ne prcscnle

* Ariicic de la vipère comtnune.

120 NOMENCLATURE

également qu'un seul rang de dents ; mais les deux os qui la composent, Tun à droite et l'autre à gauche, bien loin d'être arti- culés ensemble au bout du museau , ne sont réunis que par la peau et les muscles. Ils sont toujours très -écartés l'un de l'autre , et terni Inès par des dents cro- chues , moins petites que les autres dents, mais qui ne sont ni creuses , ni percées , ni mobiles 5 comme les vrais crochets pla- cés dans la mâchoire supérieure , et ne peuvent distiller aucun venin.

Dans les couleuvres qui n'ont point de vrais crochets mobiles , toutes les dents sont au contraire presque égales. Les deux os de la mâchoire inférieure ne sont pas articulés ensemble; mais ils sont courbés l'un vers l'autre , et ils sont rapprochés au point de paroître se toucher. La mâ- choire supérieure est garnie de deux rangs de dents : l'extérieur est h la place des crochets mobiles , et l'intérieur s'étend très-avant vers le gosier *. Cependant ,

* Voyez l'article de la vipère commune , relali- vemcui au jeu des mâchoires et des os qui les com- poseut.

DES SERPE NS. 121

comme Fou devroit désirer un caractère plus extérieur , et par conséquent plus facile à appercevoir , ces crochets ou dents mobiles pouvant d'ailleurs être qnelquefois confondus avec les dents cro- chues , mais immobiles, de plusieurs es- pèces de serpens venus d'un œuf éclos liors du ventre de la mère, j'ai observé avec soin un grand nombre de couleuvres, et j'ai remarqué que dans ce genre les espèces dont les mâchoires étoieut garnies de crochets , avoieut le sommet de la tète couvert de petites écailles à peu près sem- blables à celles du dos*, et que presque toutes les autres l'avoient revêtu au con- traire d'ccailies plus grandes que celles du dessus du corps , d'une forme très-diflc- rente, toujours au nombre de neuf, et placées sur trois rangs; le premier et le second , à compter du museau , étant

* Quelques serpens venimeux, et par conséquent à crochets, ont quelquefois entre les yeux trois écailles un peu plus grandes que celles du dos- mais je n'ai vu cjue sur la léte du Jiaja les neuf grandes écailles qui garnissent celle de la plupart des cou- leuvres ovipares et non vcuimcuses»

11

Ï22 NOMENCLATURE

composés de deux écailles , le troisième de trois , et le quatrième de deux. Nous ne croyons pas uéau moins que Ton doive établir une sous-division rigoureuse dans le genre des couleuvres , et à plus forte raison dans chaque genre de serpens , avant que de nouvelles et de nombreuses observations aient mis les naturalistes à portée de compléter notre travail à ce sujet. Nous croyons devoir nous conten- ter, en attendant, de séparer, dans la partie historique de chaque genre , les espèces reconnues pour de vraies vipères, on que nous considérerons comme telles à cause de leur conformation extérieure , de leurs crochets mobiles, et de leur ve- nin , d'avec les autres que nous regar- derons comme ovipares, jusqu'à ce que les voyageurs aient éclairci Thistoire de ces espèces peu connues, et presque toutes étrangères.

Le genre des couleuvres étant très-nom- breux , et par conséquent les espèces qui le composent ne pouvant pas être recon- nues très-aisément , non seulement nous aurions voulu pouvoir séparer les vipères

D E s s E R P E N s. i23

«le celles qui pondent , mais nous aurions désiré pouvoir diviser ensuite les cou- leuvres ovipares en deux sections diffé- rentes. Nous avons pensé à faire ce partage d'après la proportion de la lonj:;ueur du corps et de celle de la queue , ainsi que d'après la grosseur ou la forme déliée de cette dernière partie : mais, iudépendain- ment que cette proportion et cette forme ont été jusqu'à présent très-peu indiquées par les naturalistes et les voyageurs , et que nous n'aurions pu , d'après cela, clas- ser les espèces que nous n'avons pas vues^, et dont nous ne parlerons que d'après les auteurs , nous avons cru nous apperce- voir que cette proportion varioit suivant l'âge ou le sexe , etc. Nous devons donc uniquement inviter les voyageurs , et ceux qui ont dans leur collection un grand nombre d'individus de la même espèce, à déterminer, par des observa- tions très-multipliées , les limites de ces variations. Lorsque ces limites seront fixées , on pourra établir une division exacte entre les deux sections que l'on formera dans la grande famille des cou-'

T24 NOMENCLATURE

leuvrcs ovipares, et dont les caractères disliiictifs seront tirés de la grossenr de la queue et de sa longueur comparée avec celle du corps. Nous ne pouvons maintenant que chercher à indiquer des signes caractéristiques de chaque espèce, très-marqués et très-faciles à saisir , afin de diminuer le plus possible Tinconvé- nient d'un trop grand nombre "d'espèces renfermées dans le même genre. Nous avons donc laissé d'autant uioins échap- per les traits de leur conformation exté- rieure qui ont pu nous donner ces carac- tères sensibles, que, sans cette attention de rechercher tous les moyens de distin- guer les espèces , les naturalistes et les voyageurs auroient été très-souvent em- barrasses pour les reconnoître. Lorsqu'en effet les serpens sont encore jeunes , ils ne resseud)lcnt pas toujours aux serpens adultes de leur espèce ; ils en diffèrent souvent par la teinte de leurs couleurs ; et s'ils n'en sont pas distingués par la dis- position générale de leurs écailles , ils le sont quelquefois par le nombre de ces pièces. Ou peut reconnoître facilement

D E s s E R P E N s. t^5

leur genre; mais il seroit souvent difficile de déterminer leur espèce , en n'adoptant pour caractère spécifique que celui qui a été admis jusqu'à présent par le plus grand nombre des naturalistes, et qui a été principalement employé par M. Linné. Ce caractère consiste dans le nombre des grandes et des petites plaques situées au- dessous du corps et de la queue. Nous pensons , d'après des observations et des comparaisons très-multipliées que nous avons faites sur plusieurs individus d'un grand nombre d'espèces conservées au Cabinet du roi , ou que nous avons vues dans différentes collections, que le nombre de ces plaques peut varier suivant l'âge , augmenter à mesure que les serpens gran- dissent , et dépendre d'ailleurs de beau- coup de circonstances particulières et ac- cidentelles. Nous n'avons pas cru cepen- dant devoir rejeter un caractère aussi simple, aussi sensible, et qui ne s'efface pas lors même que l'animal a été conservé pendant long-temps dans les cabinets : nous l'avons employé d'autant plus qu'il établit une grande unité dans la méthode ,

u

126 NOMENCLATURE

et qu'il est quelquefois le seul indiqué par les auteurs pour les espèces que nous n'a- vons pas vues. D'ailleurs nous marque- rons toujours séparément , ainsi que les naturalistes qui nous ont précédés , le nombre des plaques qui revêtent le des- sous du corps, et celui des plaques situées au-dessous de la queue ; et comme il peut être très-rare que ces deux nombres aient varié dans le même individu, l'un pourra servir à corriger l'autre. Mais nous avons cru que ce caractère tiré du nombre des écailles placées au-dessous du corps ou de la queue devoit être réuni avec d'autres caractères. Nous avons donc multiplié nos observations vSur le grand ïiombre de serpens que nous avons été à portée d'examiner : nous avons comparé le plus d'individus de chaque espèce que nous avons pu , afin de parvenir à distinguer les formes constantes d'avec celles qui sont va- riables. Nous n'avons presque pas voulu nous servir des nuances des couleurs, si peu permanentes dans les individus vi- vans , et si souvent altérées dans les

DES SERPENS. 127

animaux conservés dans les collections. Malgré cette contrainte que nous nou«* sommes imposée , nous croyons être par- venus à trouver ce que nous desirions. Nous avons pensé que neuf caractères diSérens pouvoient , par leurs diverses combinaisons avec le nombre des grandes ou des petites plaques placées sous le corps et sous la queue, suffire à distin- guer les espèces des genres les plus nom- breux, d'autant plus qu'on peut y ajouter, dans certaines circonstances , un dixièuie caractère souvent aussi permanent et plus apparent que les neuf autres.

Nous tirons principalement ces carac- tères de la forine des écailles. En effet , si les plaques du dessous du corps ont à peu près la même forme dans tous les serpens , si elles sont presque toujours très-alongées , si elles ont le plus sou- vent six côtés très-inégaux , et si elles ne varient guère que par leur longueur et leur largeur , la forme des écailles qui revêtent le dessus du corps n'est pas la même dans les diverses espèces : dans les unes , ces écailles sont hexagones; dans

Î28 NOMENCLATURE

les autres, ovales ou taillées en losange; plates et unies dans celles-ci ; relevées dans celles-là par une arête trcs-saillante; se touchant quelquefois à peine, ou se recouvrant au contraire comme les ar- doises des toits. Voilà donc sept formes différentes et bien distinctes que les écailles du dos peuvent présenter.

De plus , si quelques espèces de ser- pens ont le dessus de la tête recouvert d'écaillés semblables à celles du dos , les autres ont, ainsi que nous venons de le dire, cette partie du corps défendue par des lames plus grandes , au nombre de neuf , et placées sur trois rangs ; ce qui compose un huitième caractère spéci- fique. Nous tirons le neuvième de la forme et quelquefois du nombre des écailles placées sur les mâchoires; et tous ces caractères nous ont paru constans dans chaque espèce , et indépendans du sexe ainsi que de l'âge.

D'ailleurs , autant les nuances des cou- leurs sont variables dans les serpens , autant leurs distributions générales en taches , en bandes , en raies , etc. sont

DES SERP ENS. 129

le plus souvent permanentes ; de telle sorte que , dans une même espèce de serpens distingués par un grand nombre de taches, quelques individus peuvent, par exemple , être blanchâtres avec des taches vertes , et d'autres jaunes avec des taches bleues : mais dans la même es- pèce ce sont presque toujours des taches disposées de la même manière.

Cette distribution de couleurs est d'ail- leurs peu altérée dans les serpens qui font partie des collections , et ce n'est que la nuance des diverses teintes qui change après la mort de l'animal, ou naturelle- ment, ou par l'effet des moyens employés pour le conserver.

Cependant, comme l'âge et le sexe peu- vent introduire d'assez grands change- mens dans la distribution des couleurs , nous n'employons qu'avec réserve ce dixième caractère.

C'est d'après les principes que nous ve- nons d'exposer, que nous avons fait la Table suivante. Les espèces n'y sont pas présentées dans le même ordre que celui dans lequel nous avons exposé quelques

i3o NOMENCLATURE

traits de leur bisloire. Nous avons dû, en efict , pour bien présenter ces traits , sépa- rer, par exemple, les vipères d'avec les couleuvres ovipares , qui en dlflèrent beaucoup par leurs babitudes ; traiter d'abord de la vipère commune, comme du serpent le mieux connu , et dont on est en Europe très à portée d'étudier les mœurs ; commencer l'Iiistoire des cou- leuvres ovipares par celle de la couleuvre verte et jaune, ainsi que de la couleuvre à collier , que l'on rencontre en très- grand nombre en France , et dont les ha- bitudes naturelles peuvent être très-aisé- ment observées, etc. Dans la Table mé- tliodiquc , au contraire, nous n'avons chercher qu'à donner aux natura- listes, et principalement aux voyageurs , le moyen de rcconnoître les diverses es- pèces , de voir si elles n'ont pas été dé- crites, ou de leur rapporter les observa- tions des différens auteurs, nous avons cru dimiimer beaucoup le nombre des comparaisons qu'ils auroient été obligés de faire , et leur épargner beaucoup de recherches, en plaçant les espèces d'après

DES SERPE N S. i:;i

l'un des caractères que nous avons em- ployés , en les rangeant, par exemple, d'après le nombre des plaques qui re- vêtent le dessous du corps, et en commen- çant par les espèces qui en ont le plus*.

Cette Table est divisée en dix colonnes.

La première présente les noms des es- pèces; la seconde, le nombre des grandes plaques, des rangées de petites écaiiics , ou des anneaux écailleux qui revêtent le dessous du corps des serpens , ou le nombre des plis que l'on voit le long des côtés du corps, selon le genre auquel ils appartiennent. Les espèces sont placées , ainsi que nous venons de le dire , suivant le nouibre de ces grandes plaques, ran- gées de petites écailles, anneaux écailleux ou plis latéraux, afin qu'on puisse trou- ver très-aisément une espèce de serpent que nous y aurons comprise , ou celles avec lesquelles il faudra comparer le rep- tile dont on voudra connoître l'espèce.

* Nous n'avons Jamais compris dans le nombre des plaqnes du dessous du corps, les grandes t'cailies, ordinHiiement an nombre de deux ou de Uuis, qui les s;.'parent de l'auus.

i32 NOMENCLATURE

La troisième colonne renferme le nom- bre des paires de petites plaques , ou de grandes plaques, ou de rangées de petites écailles , ou d'anneaux écailleux , que Fou voit sous la queue des serpens , ou le nombre des plis latéraux placés le long de c€tte partie.

La quatrième offre la longueur totale des reptiles ; et la cinquième , la lon- gueur de leur queue. Ces longueurs ne sont souvent ni les plus grandes ni les plus petites que présentent les espèces ; elles ne sont que les longueurs mesurées sur les individus que nous avons déciits' et nous n'en avons fait mention dans notre Table méthodique que pour indi- quer le rapport de la longueur totale des reptiles à celle de leur queue *.

I^a sixième colonne apprend si les ser- * Nous venous de voir que ce rapport varioit dans plusieurs espèces fie serpens, suivant IVige ou le sexe : cependant, comme il paroît constant dans le plus grand nombre d'espèces de repiilcs, ou du moins que ses variations y sont renfermées dans des limites très-rapprochéc? , nous avons cru qu'il pourroit servir assez souvent à reconnoître l'espèce clc^s individus c[ue l'on cxaaiineruit.

D E s s E R P E N s. i33

peiis ont des crochets venimeux ou non , et laquelle de leurs deux mâclioires est année de ces crochets.

La septième désigne le défaut de grandes écailles sur la partie supérieure de la tète, ou le nombre et Tarraugement de ces grandes pièces, lorsque le dessus de la tcte des serpeus eu est garni. Cette expres- sion abrégée, neuf sur quatre rangs, signi- fie qu'elles sont grandes , conformées et placées à peu près comme celles qui couvrent une partie de la tête de la cou- leuvre à collier , de la couleuvre verte et jaune, et du plus grand nombre de cou- leuvres sans venin. Il est bon d'observer que, dans certaines espèces, comme, par exemple , dans celle du molure, la grande pièce du milieu du troisième rang , à compter du museau, est quelquefois di- visée par une suture ; ce qui ponrroit faire croire que la tète de ces espèces de reptiles est couverte de dix grandes pièces.

Sur la huitième colonne est marquée la forme des écailles du dos :leur figure , en losange, ou ovale, ou hexagone, peut être variable ; mais nous n'avons jamais :vu des individus de la même espèce avoir,

12

ï34 NOMENCLATURE

les uns des écailles unies , et les autres des écailles relevées par une arête.

La neuvième coloune montre quelques traits remarquables de la conforuiation des serpejis ; et enfin la dixième indique leurs couleurs. Nous nous sommes atta- chés beaucoup plus à désigner la disposi- tion de ces couleurs que leurs nuances ; et c'est aussi le plus souvent à cette dis- position qu'il faut presque uuiquenunt avoir égard. Quelques nuances sont ce- pendant peu sujettes à varier sur l'ani- mal vivant, et même à être altérées par les divers moyens employés pour la con- servation des reptiles ; nous les avons marquées de préférence dans la Table mé- thodique *. Au reste , il ne faut pas perdre

* On s*ap percevra aiscment, en lisant les divers articles de cet ouvrage, qu*il éioit iinpossi!)le de donner dans des planches noires une idée de toutes }es couleurs brillantes, et sui'-tout des reflets variés d'au grand nombre de serpens. Nous aurions désiré substituer des planches enluminées à ces planches noires 5 mais ou ne peut pas faire, dans un seul pays, des dessins enluminés et exacts d'animaux qui, habitant presque toutes les contrées des deux mondes, ne peuvent être transportés vivans qu eu id'S-peiit nombre, et dont les couleurs s'altèreut

DES S KTÎ PEN S. i35

de vnc que c'est miiqueiiîcnt d'apics la léuiiioii de plusieurs caracières que Tou devra presque toujours se décider sur l'espèce du serpent que Von examinera. Les places vides de la Table métho- dique pourront être remplies avec le temps; elles présenteront alors des carac- tères dont nous n'avons pas pu parler à cause du mauvais état des serpens que nous avons vus , ou de la trop grande brièveté des descriptions des naturalistes.

d'abord après leiu- mort. Ce ne sera qu'aprî's beau- coup de temps qu'on pourra réunir des dessins en couleur de tous les reptiles connus, dessiués en vie et dans leur pays natal , par différens voyageurs. Au reste, nous devons prévenir que nos descrip- tions indiquent quelquefois une distribution de cou- leurs un peu diitéreiite de celle que la gravure pré- seiile , parce que quelques dessins oui été lails d après des individus dont les couleurs étoienl alté- rées , quoique leurs (ormes fussent bien conservées •* nous avons été bien aises que le dessinateur ne re- présentât que ce qu'il avoit sous les yeux; mais nous avons fait notre description d'après tout ce que nous avons pu recueillir de plus certain relati- vement aux couleurs de l'animal en vie. Quelque- fois aussi la gravure n'a pu indiquer la véritable forme des écailles, dont on trouse la description dans le texte.

TABLE METHODIQUE.

Animaux sans pieds et sans nageoires. S E R P E N S.

P R M I E R GENRE.

Serpens qui ont de grandes plaques sous le corps , et deux rangées de petites plaques sous la queue.

COULEUVRES. Coluhri.

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

312

Longueur ti,- tale , et lan- gueur de Li queue.

Crochets à venin.

Couleuvre jaune et bleu^ ' Colubcr flavo-cizruleus.

9 pieds.

0

93

C. double-tache. C. bimaculatus.

297

I p'. 8 po. 2 lig.

0

72

3 po. 10 lig.

C. galonnée. C. lemniscatut .

2^0

0

35

I Table méthodique. 137

Nota. La petitesse du format in- 18 a obligé à réduire, dans cette édition, le nombre des colonnes que l'on poit dans la Table métho- dique de l'édition in-4°. On a réuni la troisième à la seconde , la cinquième à la quatrième , et la neuuièfne à la dixième; mais on a eu le soin de distinguer par des barres ou des alinéa ce qui appartient à chaque colonne en particulier.

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

Ecailles du dos.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

grandes.

Des raies bleues bordées de jaune, qui se croisent et forment une sorte de treillis sur un fond bleuâtre.

neuf sur quatre rangs.

unies et en losange.

Rousse ; de petites taches blanches irrégulières , bordées de noir et assez éloignées l'une de l'autre ; deux taches blanches derrière la tête.

La tête très-alongée et large par- derrière.

neuf sur quatre rangs.

rhomboï- dales et unies.

La tête blanche; le museau noir; une bande noire et transversale entre les yeux ; le dessus du corps noir, avec des bandes transversales blanches ; de trois en trois, une bande quatre fois aussi large que les deux autres.

Le corps aussi gros que la tête.

}2

TABLE

ESPECES.

Molure. Molurus.

C, domestique. C. d >mcfticus.

Fer-à-cheval. Hippocr&pis.

C. de Minerve.

Situle.

Situla.

Dhara. Dhara,

Fer-de-lance. C. laneeolatus .

C. rude. C. scaher.

CARACTERES.

Plaqua du dzssi'us du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

248

5^9

24T

94

238

94

238

90

23Î

48

2a8

228

44

Longueur to- tale , et Ion- I Crochets sueur de ta à ver} in. queue.

6 pieds.

p

rès

de

2

pieds.

I

pi.

2

po.

2 2

il.

po.

I

li.

a la mâ- choire supé- rieure.

METHODIQUE.

ï39

SUITE DES CARACTERES.

Ecailles du dessus de

la icu.

neuf Sur quatre rangs.

neuf sur quure rangs.

Ecailles du dos.

ovales et unies.

sembla- bles à ce] les du dos

Couleur et traits particuliers de la ce n formation extérieure.

Hianchàtre ; une rangée longitudi- nale de grandes taches rousses bordées dp brun ; d'autres taches presque sem- blables le long des côtés du corps.

La tête très-alongée , et large par- derrière.

Une bande divisée en deux, pré- sentant deux taches noires , et placées entre les yeux.

Lividc ; un grand nombre de taches rousses ; des taches en croissant sur la tête ; une bande transversale brune entre les yeux; une tache en forme d'arc vers l'occiput.

D'un verd de mer ; une bande brune le long du dos; trois bandes

brunes sur 'a tête.

Grise ; une bande longitudinale bordée de noir.

ovales et relevées par une arête

relevées par une arête.

Le dessus du corps d'un gris un peu cuivré ; toutes les écailles bordées de blanc; le dessous du corps blanc.

Le corps tr.'s-menu.

Jaui-ie ou grisâtre ; quelquefois maibrée de Drun et de blanchâtre , avec une tache tri^s-brune et alongée derrière cb'vaue œil.

Le desiusd? U tête applati de maniè- re à représenter une sorte de triangle.

Le dessus du corps onde de noir et de brun ; une tache noire placée suri le sommet de la tête , et qui so divise | en deux dans la partie opposée auj museau. I

140

TABLE

ESPÈCES

CARACTÈRES.

Plaques du dess us du corps, et paif-es de pentes plaques sous la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets à ver. in.

C. mouchetée. C. guttatus.

227

60

Queue-plate. C. laticaudatus.

226

2 pieds.

42

2 po. 9. lig.

C. rousse. C. rufus.

224

I pi.yp0.4l.

68

3 po.

C. tigrée. C. tigrinus.

22Î

I pi. I po, 61.

à la mâ- choire supr-- rieure.

67

2 po.

Cenco.

220

4 pi-

Cejico.

124

I pi. 4 po.

C. blanchàfre, C. candidulus.

220

C. réticulaire. C. reticulatus.

218

3 pi. II po.

S3

10 po.

IVI É T H o D I Q u E.

i4t

SUITE DES CARACTÈRES.

EcailUs du dcisiis de La tète.

EcailUs du dos.

CouUur et traits particuliers de la conformation extérieure.

D'un gris livide : trois rangées lon- gitudinales de taches rouges dans la rangéedu milieu, et jaunes danscelles des côtes ; le dessous du corps blan- châtre avec des taches quarrées , noires et placées alternativement à droite et à gauche.

neuf sur quatre rangs.

rhomboï- dales et unies.

Dessus du corps d'un cendré bleuâ- tre ; de larges bandes transversales très-brunes , et qui font le tour du corps.

La queue très-applatie par les côtés, et terminée par deux grandes écailles.

neuf sur quatre rangs.

rhomboï- dales et unies.

Rousse j le dessous du corps blan- châtre.

sembla- bles à cel- les du dos.

ovales et re- levées par une arête longitudi- nale.

Le dessus du corps d'un roux blan- châtre, et présentant des taches fon- cées bordées de noir.

La tête semblable à celle de la vipère commune.

neuf sur quatre rangs.

ovales et unies.

Brune ; des taches blanchâtres , quelquefois des ba'ndes transversales et blanches.

La tête très-grosse et presque glo- buleuse ; le corps très-délié.

Blanchâtre ; des bandes transver- sales brunes.

neuf sur quatre rangs.

ovales et en 1 losange.

Les écailles du dessus du corps d'une couleur pâle et bordées de blanc.

T42

ESPÈCES.

Quatre-raies,

^. quatuor-Uncatui.

Large-tête.

C. laticapitatus.

C. noire et fauve, C. nigrù-rufus .

C. verte.

C, viridissimus.

TABLE

CARACTÈRES.

Pia^juci du dessous', Longueur du corps, et paires de petites plaques Sous la queue.

to-

C, minime. C, pullatus.

C. bleuâtre. C. subcyaneus.

218

, j

218

taie, et L n-' Crochet- gueur de la, à venin. queue.

3 pi. 9 po.

8 po. 6 li.

4 pi. 9 po

7 po

218

31

217

122

I pi. II po,

2 o.

ic8

21^

2 pi. 2po

9"l

7 po. I !i.

3p'.2po

6J

I pied.

MÉTHODIQUE.

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailla du dus.

ovales et re- levées par une arête; celles des

côtés unies.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

ovales et unies.

hexagones et unies.

ovales et unies.

Blanchâtre; quatre raies longitu- dinales d'une couleur très-foncée ; le< deux extérieures se réunissant au- dessus du museau.

Deux paires de petites plaques en- tre les srandes et l'anus.

Blanchâtre ; de grande* taches irré- guheres d'une couleur foncée , et réu- nies plusieurs ensemble ; des taches plus pet. tes , et disposées loneitudi- nalement de chaque côté du ventre ^ Le museau terminé par une grande écaille presque verticale ; les écailles du dos un peu séparées l'une de l'autre vers la tête.

Des bandes transversales noires, ordinairement au nombre de vin<Tt- rifux, et autant de bandes fauves borc.ees de blanc et tachetées de brun placées alternativement; quelquefois le museau et la partie supérieure de la tête noirâtres.

Verte, plus claire sous le ventre que sur le dos.

Minime; quelquefois des bandes transversales noires ; chaque écaille du dos à demi bordée de blanc.

La tête alongée ; d'assez grandes éca.lles sur les lèvres.

Bleuâtre ; la tc-te couleur de ulon.b.

Ï44

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES. i

Plaquts du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Chafne.

Catena,

2ir

2 pi. 6 po.

44

6 po.

Triangle. Triangulum.

213

2pi,7po.2l.

0

48

3 po.

C. pétalaire. C. pctalarius.

212

I pi. 9 po.

0 j

102

4 po. 9 li.

Tyrie. Tyria,

210

83 209

90

Pétole,

Petola.

0

C. très-blanche. C. candidissimus.

209

6 pieds.

à la mâ- choire supé- rieure.

62

C. haie. C. ha je.

207

109

C, verte et jaune. C, viridi-flavas.

206

4 pieds.

0

107

I pied.

METHODIQUE.

145

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

Ecailles du dos ,

D'un bleu très-foncé; de nettes taches jaunes disposées en bandes transversales et très-étroites ; le des- sous du corps bleu, avec de petites taches jaunes presque quarrées.

unies et en losange.

Blanchâtre ; une tache tria,i?.ila.ie chargée d'une autre tache trlantru- iaire pluj petite sur le sommet df la tête ; des taches rousses , inéguLères et bordées de noir sur le dos ; une tache noire , alongée et placée obli- quement derrière chaque oeil.

ovales et unies.

ovales et unies.

unies.

Couleur et traits particuliers de la conformation, eytprleure.

Noirâtre; des bandes très-Irrégu- hères transversales et blanches.

Blanchâtre ; trois rangs longitu- dinaux de taches rhomboïdaks brunes.

et

Livide; des bandes transversales d'une couleur rougeâtre.

Très-blanche.

La moitié de chaoue écaille , blan- che ; des bandes blanches placées obliquement; le reste du corps noir

Serj>enu III.

D'un verd noirâtre ; plusieurs raies longitudinales , composées de petites taches jaunes et de diverses figures ; le ventre jaunâtre ; une tache et un point noir aux deux bouts de chaque grande plaque.

i3

14^

ESPÈCES.

Dione. Dione.

C. double-raie. C, bilineatus.

C. ovivore. C. ovivortis.

Lacté. C. lacteus.

TABLE

14e de Gronoviîis 140 Gronovii,

C. muqueuse, C, mucosus.

,C. cendrée. C. cinertus^

CARACTERES.

Padère. Fcdera,

Plaques du desious du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

206

66

20y

99

203

73

203

32

202

96

200

140

200

IJ7

Long'ueur te- taie , et lon- gueur de la queue.

3 pieds. 6 pouces.

Crochet:, à venin.

0 <

2 pi. I pO.

6 po. 6 lig.

I pi. 6 po. I po. 7 li.

à la mâ- ciioire supé- rieure.

MÉTHODIQUE.

M7

SUITE DES CARACTERES.

Ecailles du des.'Ui de la ce.

Écailles du dos.

unies et en losange.

hexagones

et relevées

par une

arête.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Le dessus du corps gris ; trois raies longitudinales blanches , et d'autres raies longitudinales brunes ; le des- sous du corps blanchâtre , avec de petites raies brunes , et souvent de petits points rougeâtres.

Les écailles rousses et bordées de jaune ; deux bandes longitudinales jaunes.

D'un blanc de lait ; des taches noires arrangées deux à deux ; la tête noire, avec une petite bande blanche longitudinale.

Des taches brunes.

La tête bleuâtre ; des raies trans versales comme nuageuses et placées obliquement sur le dos.

Les yeux assez gros ; les angles de la tête'très-marqués.

Grise ; le ventre blanc ; les écailles de la queue bordées de couleur de

fer.

Le dessus du corps blanc; plusieurs

m ■iji* .i."'B'

mi.

246

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous La queue.

Long'^eur to- tale , et lon- gueur de la queue.

Crochets À venin.

,

DIone. Dione,

206

3 pieds.

0

66

6 pouces.

C. double-raie. C, biliruatus.

2oy

2 pi. I po. 6 po. 6 lig.

0

99

fc. ovivore. C. ovivoriis.

203

V

73

Lacté. C. lacteus.

203

I pi. 6 po.

à la mâ- choire supé- rieure.

32

I po. 7 li.

-

14e de Gronovias.

202

,

14a Gr<jn.ovii,

96

:

C. muqueuse, C. mucosus.

200

140

C. cendrée. C. çintr&uu

ÛOO

137

Padère. Padera.

;93

1

«

m

56

1

\p-

U>

Do Not Rei

Internet Archive Boston Scanning Cent<

MÉTHODIQUE.

147

tit iW.

SUITE DES CARACTERES.

Ecailles du dessus de la ûu.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

Ecailles du dos.

unies et en losange.

hexagones et relevées

par une

arête.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Le dessus du corps gris ; trois raies longitudinales blanches , et d'autres raies longitudinales brunes ; le des- sous du corps blanchâtre , avec de petites raies brunes , et souvent de petits points rougeàtres.

Les écailles rousses et bordées de jaune ; deux bandes longitudinales jaunes.

D'un blanc de lait ; des taches noires arrangées deux à deux ; la tête noire, avec une petite bande blanche longitudinale.

Des taches brunes.

La tête bleuâtre; des raies trans versales comme nuageuses et placées obliquement sur le dos.

Les yeux assez gros ; les angles de la tête très-marqués.

Grise ; le ventre blanc ; les écailles de la queue bordées de couleur de

fer.

Le dessus du corps blanc; plusieurs taches placées par paires leiongdu dos, et réunies par une petite raie;! autant de taches isolées sur les côtés . \

il

1

148

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites piaqucs sous la queue.

Longueur to-, taie, etlm- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Naja.

ffaja.

197

4pi-4po.61. 7 po. 10 lig.

à la mâ- choire

supé- rieure.

C. rîii Pérou. C. Peruvii.

C. du Brésil. C. Brasilix.

0

Grosse-tête, C, capitatus.

196

2 pî. 5 po. 6 po, 3 Iig.

J pied.

77

G. atroce. C. atrox.

156

à la mâ- choire' supé- rieure.

69

2 po. 2 lig.

C. «olto-ruktr.

IC2

0

Tiiscaie. Triscaiis,

'95

I pi. 4po. 61.

0

86

3 po, 10 lig.

METHODIQUE.

i4q

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la té:c.

Écailles du dos.

Couleur et traits partic-uliers de la conformation extérieure.

neuf sur quatre rangs.

ovales et unies.

Jaune ; une bande transversale large et foncée sur le cou ; une raie souvent bordée de noir, repliée en avant des deux côtés , terminée par deux crochets tournés en dehors , imitant des lunettes , et placée sur la partie élargie du cou du mile.

Une extension membraneuse de chaque côté du cou.

neuf sur quatre rangs.

A peu près comme dans le naja. Le cou ne présente point d'exten- sion memljrr.neusc.

D'un roux clair, avec de» bandes transversales brunes ; une grande tache blanche en forme cœur , chargée de quatre taches noires , et placée sur l'extension membraneuse.

Une extension membraneuse de chaque côté du cou.

neuf sur quatre rangs.

ovales et unies.

D'une couleur foncée ; des bandes transversales et irréguliêres , d'une couleur très-claire, .,

La queue terminée par une pointe très-déliée.

sembla- bles à cel- les du dos.

ovales €t relevées par une arête.

Cendrée; des taches blanchâtres. La tête très-large.

Toute noire ; la gorge couleur de sang.

1

neuf sur quatre rangs.

ovales et unies.

Le dessus du corps d'un verd de mer ; quatre raies longitudinales rousses, qui se réunissent en trois, en deux, et enfin en une, au-dessus de la queue.

ï5o

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Flaques du dessow du corps, et pairci de petites plaques sous la quciLe.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

CoralKn.

C, corallinut.

'93

3 pieds.

à la mâ- choire supé- rieure.

82

ije de Gronovius. ija Gronovii,

28e de Gronovius.

lia Gronovii,

190

I2Ï

C. blanche etbrune

190

I pi. 6 po.

0

C, albo-fuscus.

96

4 po. 6 lig.

C. cuirassée. C, seutatust

190

4 pieds. '

0

17e de Gronovius. 17a Gronovii.

1S9 122

Grifon.

.88

C. cineraceus.

70

Pélie.

tSy

Peliai.

103

0

MÉTHODIQUE.

i5t

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

Écailles du dos.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

arrondies vers la tête, et pointues du côté de la quei'p.

D'un verd de mer; trois raies lon- gitudinales et rousses; le dessous du corps blanchâtre et pointillé de blanc.

Les écailles du dos sont disposées sur seize rangs-longitudinaux, et un

peu tôporoc loc «no Aoc ^nlTPC

Brune; des points blancs.

Des raies transversales blanches et noires.

neuf sur quatre rangs.

lisses et ovales.

Blanchâtre ; des taches brunes , arrondies , et réunies en plusieurs endroits; deux taches derrière les yeux; le dessous du corps roussâtre.

Noire ; le dessous du corps de la même couleur , avec des taches blan- châtres, presque quarrées , placées alternativement à droite et à gauche , et en très-petit nombre sous la queue.

Les grandes plaques revêtent près des deux tiers de la circonférence du corps ; la queue est triangulaire.

Pourprée ; des taches noires.

Le dessus du corps blanc ; des ban- des transversales roussàtres ; deux points d'un blanc de neige sur les

côtés.

Noire ; le derrière de la tête brun ; le dessous du corps verd et bordé de chaque côté d'une ligne jaune.

352

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRE

S.

Plaques du dessous dacorps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets à wiin.

C. asiatique. €. asiatiçut.

187 76

I pied. 2 po. 3 lig.

0

Lien. Ligamtn,

186

9-

7 pi^ds.

0

1

Couresse.

Cursor.

1

105

ipi. icp. 7I. 9po. 7lig.

0

C. nébuleuse. C, nebulosus.

iSt

8y

Laphiati, Laphiad.

1S4

éo

C. agile. C. agilis.

184

I pi. 8 po.

0

ÎO

4po. 3 lig.

Schokari, Schokari.

183

2 pieds.

0

144

6 pouces.

SIbon.

Sibon.

iSo

Si

2oe de Gronovius.

20a Gror.oviî.

.80

80

METHODIQUE.

i53

SUITE DES CARACTERES.

Ecailles du dessus de la tête.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

Ecailles du dos.

rhomboï- dales et unies.

ovales et unies.

en losange et unies.

rhomboï- dales.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Des raies longitudinales sur le dos ; les écailles bordées de blanchâtre.

D'un bleu très-foncé ; le dessous du corps d'une couleur bleuâtre ou bronzée ; quelquefois la gorge blanche.

Verdàtre ; deux rangées longitu- dinales de petites taches blanches et alongées.

Le dessus du corps nué de brun et de cendré ; le dessous varié de brun et de blanc.

Grise ou rousse ; àss bandes trans- versales blanches ou jaunâtres , divi- sées en deux de chaque côté ; le sommet de la tête blanc.

Des bandes transversales et irré- gulières , alternativement blanches et brunes ; les bandes brunes , quelque- fois pointillées de noir.

D'un cendré brun ; quatre raies longitudinales blanches ; le dessous du corps jaunâtre et pointillé de brun vers la gorge.

Le corps très-menu.

Le dessus du corps brun mêlé de blanc; le dessous blanc tacheté de brun.

La queue courte et menue.

Variée de blanc et de brun. (Nota.) Il est à présumer que cette couleuvre est de la mime espèce que le

sibon.

Î04

TABLE

ESPECES.

CARACTERES.

Hydre. Hydrus,

Plaques du dtssous\ Longueur to- du corps, et paires taie, et Ion de petites plaques gueur de la sous la queue. queue

C. brasilienne. C. brasilitnsis.

i8o

66

iSo

46

3 P

leris.

3 pieds. 5 po. 6. lig.

Bande-noire.

180

C. nigro-fasciatus.

43

C. aurore. Aurora.

179 37

C. lisse. C. Ixvis.

178 46

I pi.9po.9l 3 po. 3 Hg.

Ibiboca. Ibiboca.

.76

ypi.5po.6]

121

I pi.7po, 1 1

C. d'Esculape. C, /Esculapii,

I7Ï

3 pi. lO po

64

9 po- 3 lig

22e de Gronovius, 22a Cronovii,

»74 60

Crochets à venin.

à ]a mâ- choire super.

METHODIQUE. 355

SUITE DES CARACTÈRES,

Ecailles du dessus de la téu.

Ecailles du dos.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Olivâtre , mêlée de cendré ; quatre rangs longitudinaux de taches noirâ- tres , disposées en quinconce j le dessous du corps tacheté de jaunâtre et de noirâtre.

sembla- bles à cel- les du dos.

neuf sur quatre rangs.

ovales et ren levées par une arête.

De grandes taches ovales , rousses et bordées de noirâtre j d'autres pe- tites taches brunes.

ovales et unies.

Une bande noire entre les yeux; le dessus du corps livide ; plusieurs bandes transversales et noires, dont qui'Jqiies-unes font le tour du corps.

Grise ; une bande longitudinale jaune ; la tête jaune , avec des points rouges.

neuf sur quatre rangs.

très-unies.

Bleuâtre; deux taches d'un jaune foncé derrière la tête; deux rangées longitudinales de taches plus petites , celles d'une rangée correspondant aux intervalles de l'autre ; quelques taches sur les côtés ; de plus grandes taches sur le ventre.

neuf sur quatre rangs.

rhomboï- dales et unies.

Les écailles du dos grisâtres et bordées de blanc.

Les écailles du dos un peu séparées les unCs des autres en quelques en- droits.

neuf sur quatre rangs.

ovales et relevées par une arête ; celles des côtés unies.

Rousse ; une bande noirâtre et long tudinale de chaque côté du dos ; une rangée de petites taches trian- gulaires et blanchâtres de chaque côté du ventre.

D'un cendré bleuâtre.

(^Scba,Mus. a, tab. ^3 , fi?- !•)

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets

à venin.

Hydre. Hydrus.

180

3 pieds.

0

66

C. brasilienne. C. brasiliensis.

iSo

3 pieds. 5 po. 6. lig.

à la mâ- choire super.

46

Bande-noire.

C. nigro-fasciatus.

180

0

43

C. aurore. Aurora.

179 37

0

C. lisse. C. lûtvis.

r78 46

I pi.9po.9l. 3 po. 3 Hg.

0

Ibiboca. Ibiboca,

176

jpi.5po.6l.

0

lai

I pi. 7 po. 1 1.

C. d'EscuIape. C. jEseulapii.

I7Î

3 pi. lO po.

0

64

9 po. 3 lig.

aie de Gronovius.

22a Gronovii,

>74 60

k

t:-. :.'

mine

i—^ Ib

'<l. !•

M ^

ES.

^■

i.im- à:r: stpér,

Do Not Rei

Internet Archive Boston Scanning Cent<

METHODIQUE.

i55

SUITE DES CARACTERES.

Ecailles du dessus de la titi,

sembla- bles à cel- les du dos,

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

Ecailles du dos.

ovales et re-( levées par une arête.

ovales et unies.

tres-unies.

rhomboï- dales et unies.

ovales et relevées par une arête ; celles des côtés unies.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Olivâtre , mêlée de cendré ; quatre rangs longitudinaux de taches noirâ- tres , disposées en quinconce ; le dessous du corps tacheté de jaunâtre et de noirâtre.

De grandes taches ovales , rousses et bordées de noirâtre; d'autres pe- tites taches brunes.

Une bande noire entre les yeux; le dessus du corps livide ; plusieurs bandes transversales et noires, dont qu'Iqiies-unes font le tour du corps.

virise ; une bande longitudinale jaune j la tète jaune , avec des points rouges.

Bleuâtre; deux taches d'un jaune foncé derrière la tête; deux rangées longitudinales de taches plus petites , celles d'une rangée correspondant aux intervalles de l'autre ; quelques taches sur les côtés ; de plus grandes taches sur le ventre.

Les écailles du dos grisâtres et bordées de blanc.

Les écailles du dos un peu séparées les un?s des autres en quelques en- droits.

Rousse ; une bande noirâtre et long tudinale de chaque côté du dos ; une rangée de petites taches trian- gulaires et blanchâtres de chaque côté du ventre.

D'un cendré bleuâtre.

( Seba , Mus, a, tab. 33 , /g- I-)

II

t'

l U

i56

TABLÉ

CARACTERES.

ESPECES.

Nasique. C. nasittus.

23e de Gronovius, 23a Gronovu.

C. suisse. C. hdvcticus.

Demi-collier. SemimonzU.

C. azurée. C. ccwuUus.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

C, à collier. C. torquatus.

(C. hébraïque. C. hehraïcus.

173

«J7

172

142

170

127

170

S5

170

64

170

53

170

42

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

4 pi. 9 po. I pi. II po.

Crochets à venin.

3 P

ieds.

I pi.

7 po.

4 po.

10 lig.

2 p

ieds.

5 po.

3 lig.

2 pieds.

4 pouces.

à la mâ- choire supé- rieure.

METHODIQUE.

l57

SUITE DES CARACTERES.

Ecailles du dessus de U tête.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

Écailles du dos.

rhomboï- dales et unies.

Ovalej et relevées par une arête.

Couleur et traits particu'iers de la conformation extérieure.

Verdàtre ; quatre raies longitudi- nales sur le corps; deux autres raies longitudinales sur le ventre.

Un prolongement écailleux au bout du museau , qui est très-alongé.

Bleue; une ligne latérale noire.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

en losange et relevées

par une arê- te longitu dinale.

ovales et unies.

Grise ; de petites raies noires sur les côtés; une bande longitudinale composée de raies transversales plus étroites et plus pâles.

Brune ; de petites bandes transver- sales blanchâtres ; trois taches brwnes et alongées sur la tête; trois taches rondes et blanches sur le cou.

Bleue, foncée sur le dos , très-claire sous le ventre.

ovales et re- levées par une arête.

Grise; deux rangées longitudinn- les de petites taches d'une couleur très -foncée; deux autres rangées extérieures de taches plus grandes , noires et irrégulières ; deux grandes taches blanchâtres sur le cou ; le ventre vaTié de noir, de blanc et de bleuâtre.

Les écailles des côtés unies et plus grandes que celles du dos.

Roussâtre ; des taches jaunes , bor- dé's de rouge-brun , et représentant des Caractères hébraïques.

i58

ESPÈCES.

C. blanche. C. albus.

C. rayée. C. lineatus.

Dabcie. Dabch.

Troîs-raies. C. tcrlineatus.

Boiga. Boiga,

Chapelet, Catcnula,

Fil.

C. fiUformis.

2^6 de Gronovius,

25a Groiicvii.

TABLE

CARACTERES.

Plaques du dessous du corps, ce paires de petites plaques sous la queue.

170

169

11 169

46

169

34

166

103

165

,58

165

7i

■i|kiiii%« niiiit iiunw

Loneueur to- tale, ulon-\ Crochets gueur de la à venin, queue.

3 F''-

5 po.

ï po.

9lig-

! pi. î po.6].

2 po.

8 Jig.

3 P

leds.

I pi.

5 po.

r pi. 5 po.6i.

5 po. 6 lig.

: pi. 6 lig. 4 po. 6 lig.

MÉTHODIQUE.

159

SUITE DES CARACTÈRES.

écailles du dcisui de la tête.

Ecailles du dos.

levées par une arête.

en losange er unies.

unies.

lîmes et en losange.

en losange et relevées par une arête.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Blanche, ordinairement sans tache.

Bleuâtre ; quatre raies brunes qui se prolongent depuis la tête jusqu'à l'extrémité de la queue.

Blanchâtre ; trois rangs longitudi- naux de grandes taches ovales, rous- ses et bordées de noir ou de brun.

Rousse; trois raies longitudinales qui s'étendent depuis le museau jus- qu'au-dessus de la queue.

D'un bleu changeant en verd ; trois petites raies longitudinales couleur d'or; une petite bande blanche et bordée de noir le long de la mâchoire supérieure.

Le corps très-délié.

Bleue ; deux raies longitudinales blanches ; dans le milieu une raie longitudinale noire chargée de taches ovales blanches et de points blancs placés alternativement; deux rangs longitudinaux de points noirs sur le ventre.

Latête grosse et applatie par-dessus et par les côtés ; le corps très-délié.

Noire ou livide ; le dessous du corps blanchâtre.

Latête grosse ; le corps très-délié.

Blanche ; des bandes transversales d'une couleur foncée.

( Seka , Mus. a , tab. 2t , fig.3.)

i6o

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES. \

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale , et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

C. à zones. C. cînetus.

i6ï

35

1 pied.

0

1 po. 6 lig.

Bluct.

C. subcdtrultus.

.6î

M

C. annelée. C. do liât us.

164

7 po. 4 lig.

0

43

î po. î lig.

Dard. Jaculus,

i6j

77

C. miliaire. C. miliaris.

162

0

W

C. chatoyante. C. versicolor.

161

I pi. 6 po.

113

Mal pôle. Malpolon.

163

I pi. lO po. î po. 6 lig.

0

ICO

MÉTHODIQUE. i^r

SUITE DES CARACTÈRES.

EcaiLUs du\ dessus de la tête.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

jeuf sur quatre rangs.

euf sur quatre rangs.

Ecailles du dos.

rhomboï- dales et unies.

ovales.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Blanche; souvent quelques écailles tachetées de roussàrre à leur extré- mité ; des bandes transversales d'une couleur très-foncée , qui font tout le tour du corDs.

Les écailles qui garnissent le dos pres- que mi-parties de blanc et de bleuâ- tre; le dessous du corps blanc; la queue d'un bleu foncé sans aucune tache. La queue très-dél ée.

unies et en losange.

Blanche ; des bandes transversales noirâtres, qui se réunissentà d'autres bandes semblTibles placées sur le ventre , mais sans correspondre exactement; le cou blanc ; le dessus de la tête noirâtre.

Gris cendré; trois bandes longi- tudinales noirâtres et bordées d'un noir foncé ; celle du milieu plus large que les deux extérieures; le dessous du corps blanchâtre.

Le dessus et les côtés du corps bruns ; une tache blanche sur chaque écaille ; le dessous du corps blanc.

ovales et re- levées par une arête.

Grise ; une bande longitudinale brune , composée de petites raies transversales et disposées en zigzag; les plaques rougeâtres , tachetées de blanc et bordées en partie de bleuàtn; .

Bleue ; de très-petites taches noires disposées en raies longitudinales; une tache blanche bordée de noir sur le sommet de la tête.

La langue longue et très-déliée ; le corps très-menn.

Serfcns, IIIi

i4

l62

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- taie, et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

28e de Gronovius, 28a Gronovii.

160 60

29e de Gronovius.

29a Gronovii.

42

C. carénée. C. carinatus.

157

0

C. rhnmboïdale. C. rhombeatus.

M7

70

I pi. 6 po.9 l. 4 po. 4lig.

0

Saiirite. Saurita.

<î6 121

0

C. verdâtre. C. subvlridis.

'44

le tiers de la longueur du corps.

0

C. pâle. C. pallidus.

lyr

1 pi. 6 po.

0

96

Lébetin.. Lebetinxis.

'U

à la mâ- choire supé- rieure.

à la mâ- choire supé- rieure.

46

Aspic. Aspis.

'55 37

3 pieds.

3 po. S lig.

34e de Gronovius. \l-^a Gronovii.

153

50

MÉTHODIQUE.

163

SUITE DES CARACTÈRES.

Ec.zilles du dessus de la te te.

neuf sur quatre rangs.

neuf sur quatre rangs.

Écailles du dos.

ovales et re- levées par une arête

sembla- bles à cel- les du dos.

unies.

ovales et unies.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Des raies blanches et noires trans- versales.

D'un roux plus ou moins foncé. (Seba, Mus. I, tab. 33 , fia. 6. )

Toutes les écailles du dessus du corps couleur de plomb et bordées de blanc ; le dessous du corps blanchâtre.

^e «os relevé en carène.

Bleue; des taches bleues en lo- sange et bordées de Hoir.

Brune ; trois raies longitudinales blanches ou vertes ; le ventre blanc. Le corps très-délié.

Bleue ou verte ; le dessous du corps d'un verd plus ou moins mêlé de jaune.

D un gris pâle; un grand nombre de points bruns et de taches grises répandues sans ordre ; une ligne noire de chaque côté du corps.

Le corps et la queue très-déliés.

ovales et relevées par une arête.

Nuageuse ; le dessous du corps par- semé de points roux ou noirs.

Trois rangées longitudinales de taches rousses bordées de noir.

Blanche; des raies et des taches noires.

i64

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dissous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale, et le li- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Cenchrus, Cenchrus,

in

2 nieds.

0

47

3 po. 7 lig-

C. schythe. C. ichythus.

iî3

I pi. 6 po.

à la mâ- choire supé- rieure.

3i

I po.7 lig.

Dipse. Dipsas,

1^2

à la mâ- choire supé- rieure.

'3J

C. maure, C. maurus.

152

0

66

C. iToiie. C. niger.

1^2

2 pi. 9 hg. 2 po. 4 Hg.

à la mâ- choire supé- rieure.

32

Sirtale. Sirtalis.

IJO

2 pieds.

0

114

3 po. gJ'g-

Tête-triangulaire.

C, capitc - trîanga~ latus.

»P'

à la mâ- choire supé- rieure.

64

MÉTHODIQUE.

i65

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

neuf sur q_uatre

neuf sur quatre rangs.

trois sur <Ieux rangs.

sembla- bles à cel- les du dos.

Ecailles du dos.

hexagones et unies.

ovales.

ovales et relevées par une arête.

ovales et relevées par une arête.

relevées par une arête.

en losange et unies

Couleur et traits particuliers de la ccnformatioii extérieure.

Le dessus du corps marbré de blanchâtre et de brun ; «les bandes transversales étroites , irrégulières et blanchâtres.

Noire ; le dessous du corps très- blanc.

La tête a un peu la forme d'un cœur.

Les écailles bleuâtres et bordées de blanchâtre ; les grandes plaques blan- ches ; une raie bleuâtre et longitu- dinale au-dessous de la queue.

La queue longue et déliée.

Brune; deux raies longitudinales; des bandes transversales et noires depuis les raies jusqu'au-dessous du corps ; le ventre noir.

Noire ; quelquefois des taches d'un noir plus foncé, et disposées comme celles de la vipère commune.

Prune ; trois raies longitudinales d'un verd changeant en bleu.

\'erdâtre ; des taches de diverses figures sur la tête, et réunies sur le corps en bande irrégulière et longi- tudinale ; les grandes plaques d'une couleur foncée , et bordées de blan- châtre.

La tête presque triangulaire ; le corps délié du côté de la tête.

ï66

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et paire.' de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Cobel.

Cobclla.

IJO

ipi.4po. 9I.

0

Î4

3 po. 10 lig.

Triple-rang. C, terordinatus.

I)0

I pi. 10 lig.

0

V-

4 pouces.

Chersea. Chenca.

IJO

\

à la tnâ- choire supé- rieure.

34

C. sombre. C. subfustas.

149

0

117

33e de Gronovius. 33" Grcnovii,

149 63

Mélanis. Melanîs,

148

27

à la mâ- choire supé- rieure.

C. décolorée. C. exoletus.

147

0

132

C. saturnine. C. saturninus.

147

-.0

120

MÉTHODIQUE.

167

SUITE DES CARACTERES.

Ecailles du dessus de la tête.

neuf sur quatre

neuf sur quatre

Ecailles du djs.

sembla- bles à cel- les du dos.

ovales et relevées par une

arête.

relevées par une arête.

Couleur et traits particuliers de la {onformati:n extérieure.

D'un gris cendré ; un grand nombre de petites raies blanches placées obli- quement ; 'quelquefois une tache oblique et livide derrière c-aque œil , et des bandes transversales et blarchâtres sur le dos.

Blancbàtre; trois rangs longitudi- naux de taches d'une couleur foncée ; le dessous du corps varié de blan- châtre et de brun.

D'un gris d'acier; une tache noire en forme d: cieursur la tête , et une bande composée de taches noires et ronde? sur le dos.

D'un cendré mêlé de brun ; une tache brune et alongée derrière cha- que œil.

Blanche ; des raies noires et trans- versales.

Noire ; le des'sous du corps couleur d'acier avec des taches plus obscures et d'autres taches bleuâtres et comme nuageuses vers la gorge et des deux côtés du corps.

D'un bleu clair mêlé de cendré ; les] lèvres blanches. Le corps très-délié.

La tête couleur de plomb ; le dessus | du corps d'une couleur nuageuse mê- lée de livide et de cendré.

Les yeux assez gros.

iiS8

t A B L Ë

CARACTÈRES.

ESPECES.

Céraste. Cérastes.

Vipère, fripera.

Sipède. Sipedon,

Chayque, Chaiqua,

C. violette. C, yiolaceus.

iC. rubanée. C. vittatus.

Plaques du dcsscusXLongueur to du corps, etpairesl taie, et Ion

de petites plaques sous La queue.

36e de Gronovius,

36a Gronovii,

M7

63

146

39

i4i

73

143

M3

142

78

142

60

gueur de la queue.

2 pieds. 4 po. 6 lig.

2 pieds.

Crc chefs à venin.

4 pouces.

à la mâ- choire supé- rieure.

à la mâ- choire supe'- rieure.

a la mâ- choire supé- rieure.

'pi- Tpo.31,

2 po. 3 lig.

MÉTHODIQUE.

160

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

sembla- bles à cel- les du dos.

Écailles du dus.

ibl, ce les du dos

semùia bles à cei-

ovales et relevées par une arête.

relevées par une arête.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Jaunâtre ; des bandes transversales' irrégulières et d'une couleur plus ou moins foncée.

Une petite corne de nature écail- leuse au-dessus de chaque œil.

neuf sur quatre rangs.

D un gris cendré; des taches noi- râtres formant une bande dentelée et disposée en zigzag. '

Brune.

unies et en losange.

Deux bandes blanchâtres et lon- gituainales ; deux points noirs sur chaque grande plaque ; neuf taches rondes et noirâtres de chaque côté du cou du mâle.

bl

Violette; le dessous du

orps

anchâtre avec des taches violettes îguhères, placées à droite et à gauche.

irrégulières, placées alternativement

Ovales et petites.

Blanchâtre ; plusieurs raies longi- tudinales noires ou brunes; la tète noire avec plusieurs petites lignes blanches et tortueuses ; les grandes plaques bordées de brun ; une bande blanche, longitudinale et dentelée sous la queue.

La tête très-alongée et large par- derrière.

Bleuâtre ; les grandes plaques blanchâtres , avec des taches noires et un léger sillon longitudinal. j

(Seba,Mus.2, tab. 3') , fig- 4-') 1

lyo

TABLE

ESPÈCES,

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale , et lon- gueur de la queue.

Crochets

à venin.

Ammodyte. Ammodytes.

142

à la mâ- choire supé- rieure.

33

C. symétrique. C. symmetricus.

142

1 pi. 5 po.6 ). 2 po. 3 lig.

0

26

Tête-noire. C. capite nigcr.

140

2pi. I po.71. 4 po. 6 lig.

0

62

Typhie. Typhius. -

140

-

n

Calmar.

C. caUmarius.

140

22

0

Ibibe.

Ibibe,

138

2 pieds.

0

72

4 po, 10 lig.

Régine. C. reginx.

'37 ...

70

r

MÉTHODIQUE.

17c .

SUITE DES CARACTERES.

Écailles du dessus de la tête.

sembla- bles à cel- les du dos.

neuf sur quatre

neuf sur quatre rangs.

Écailles du dos.

ovales Çt unies.

ovale» et unies.

ovales et unLes.

neuf sur quatre

rangs.

Couleur et traits particuliers de ta conformation extérieure.

Des taches noires formant une bande longitudinale et dentelée.

Une petite éminence mobile et deux tubercules sur le museau.

Foncée ; une rangée de petites taches noires de chaque côté du dos , auprès de la tête ; des bandes et des demi-bandes transversales , et placées, symétriquement sur le ventre.

Le dessus du corps brun ; la tète noire ; le dessous du corps varié de blanchâtre et d'une couleur très-fon- cée , par taches transversales et rec- tangulaires.

Bleuâtre.

Livide ; des bandes transversales brunes ; des rangs de points bruns ; des taches presque quarrées et placées symétriquement sous le corps ; une raie longitudinale et couleur de feu sur la queue.

ovales et re- levées par une arête.

Bleue ou verte , tachetée de noir; une rangée de points noirs de chaque côté du corps ; quelquefois une raie longitudinale sur le dos.

Quelquefois quatre grandes pla- ques entre l'anus et les premières paires de petites.

Le dessus du corp varié de blanc et m

du corps brun ; le dessous

e noir.

«P

Î7a

TABLE

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps y et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale , et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

C, ponctuée, C. punctatus.

136

43

38e de Gronovius. 38a Gronovii,

.36

39

39e de Gronovius. 39<î Grcnovii,

•35

42

C. mexicaine. C, mexicanus,

134

77

Lutrix. Lutrix.

134

^

27

Haemachate. Hxtnachata,

132

ipi.4po. Jl.

à la mâ- choire supé- rieure.

22

I po. lolig.

Bali. Balî,

131

6 pî. 6 po.

0

46

Atropos, Atropos,

r3i

à la mâ- choire supé- rieure.

22

MÉTHODIQUE. 173

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dos.

unies et en losange.

rhoinboï- «lales et unies.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

D'un gris cendré ; le dessous du corps jaune , avec neuf pertes taches noires disposées sur trois rangs , chacun de trois taches.

ovales et re-

V<îriée de couleur de fer, de bleu et de blanc.

Blanche ; des taches blanches et noires.

Le dessus et le dessous du corps jaunes; les côtés bleuâtres.

Rouge; des taches blanches.

Une bande longitudinale rouge et tachetée de blanc, de chaque côté du <^ojps, dont le dessus est jaunâtre mêlé de blanc ; quatre rangs longi- tudinaux ai points jaunes sous le corps .

SJanchâtre ; quatre rangs longitu-

I , ' dinaux de taches rousses, rondes et

ijesa cel-| levées par j blanches dans leur centre ; des taches es<tudos,i une arête. | noires sur la tête.

La tête a un peu la forme d'un cœur.

1/4

ESPÈCES.

Vampum.

Vanipum,

C. striée. C. s tri .tus.

TABLE

CARACTERES.

C. camuse. C. simus.

AlJdre. Alidras.

C. verte et bleue. C. viridi-cxruleus.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crocheti à venin.

128

I pi. 10 po.

0

67

6 pouces.

126

Q

4J

r24

46

121

110

C. tachetée. C. maculatus.

119

70

C. des dames.

iiS

C. domiccllarum.

60

C. d'Egypte.

118

C. ■-'^gyptiacus.

22

rt

p'eds.

6

pouces.

2

pieds.

5P

0. 4 lig.

à la mâ- choire supé- rieure

MÉTHODIQUE.

175

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

Ecailles du dos.

Couleur et traits particuliers de la Confjrmation extérieure.

neuf sur quatre rangs.

ovales et re- levées par une arête.

Bleue; des bandes transversales blanches et partagées en deux sur les côtés ; une petite bande transver- sale brune sur chaque grande plaque.

La tête petite à proportion du corps.

Brune; le dessous du corps d'une couleur pâle.

Une petite bande noire et courbée entre les yeux ; une croix blanche , avec un point noir au milieu sur le sommet de la tête; le dessus du corps varié de noir et de blanc ; des bandes transversales blanches; le dessous du corps noir.

La tête arrondie , relevée en bosse , et le museau très-court.

D'un blanc éclatant.

grandes.

D'un bleu foncé ; le dessous du corps d'un verd pâle.

neuf sur quatre rangs.

hexagones et relevées

par une

arête.

Blanchâtre; de grandes taches en losange ou irrégulières , roussâtres et bordées de noir ou de brun ; le ventre blanchâtre et quelquefois tacheté.

Blanche ; des bandes transversales , irrégulières et noires ; une raie noi- râtre , irrégulière et longitudinale sous le ventre.

très-petites.

D'un blanc livide ; des taches rousses.

Le derrière de la tête relevé par deux bosses.

Ï7Ô

TABLE

ESPÈCES,

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et paires de petites plaques sous la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

C. anguleuse. C. angulatus.

117

I pied.

0

70

Léberls. Lçberis.

IIO

à la mâ- choire supé- rieure.

p

c, joufflue. C. buccatus.

107

72

Argus.

Araus.

«

\

MÉTHODIQUE.

Ï77

SUITE DES CARACTÈRES.

ZcailUs du dessus de. la tcti.

Ecailles

du dos.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

neuf sur quatre rangs.

ovales , un peu échan- crées , et relevées par une arête.

Blanchâtre ; des bandes brunes , noirâtres vers leurs bords , anguleuses et très-larges vers le milieu de la longueur du corps.

Des raies transversales , étroites et noires; la tête blanche, avec deux taches rousses sur le sommet , et une tache triangulaire sur le museau.

Rousse ; des bandes transversales et blanches.

Une tache blanche sur chaque écaille ; plusieurs rangs de taches blanches , rondes , bordées de rouge , et rouges dans leur centre.

Le derrière de la tête relevé par deux bosses.

Sirptns, 1 1

î5

178

TABLE

SECOND GENRE.

Sej-pens qui ont de grandes plaques sous i corps et sous la queue.

B O A.

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps, et du dessous de la queue.

Longueur to- tale , et lon- gueur de la queue.

Crochet à venin

Broderie.

290 128

3 po. 6 Lg.

0

7 pouces.

Ophrie. Boa ophrias.

281

64

Enydre. B. eriydris.

270 J15

Cenchris. B. cenchria.

_265_ 57

B. rativore. B. murina.

254

2 pi. 6 po. 4 po. 2 lig.

0

METHODIQUE,

V].y

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

Ecailles du dos.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

-. .. _

sembla- bles à cel- les du dos.

rhomboï- dales et unies.

Une chaîne de taches irréguiières en forme de broderie , le long du dos , et sur-tout sur la tête.

La tête large par-derrière; le mu- seau alongé.

Brune.

-

D'un gris varié d'un gris plus clair. Les dents de la mâchoire inférieure très-longues.

D'un jaune clair; des taches blan- châtres et grises dans leur centre.

sembla- bles à cel- les du dos.

rhomboï- dales et unies.

Blanchâtre ou d'un verd de mer ; cnq rangées longitudinales de taches rousses ,.dont plusieurs sont chargées de taches blanchâtres,

La tête large par-derrière ; le mu- seau alongé ; de grandes écailles sur les lèvres.

i8o

TABLE

ESPÈCES.

CARA CTÈRES.

Plaques du dessous du corps , et du dessous de la queue.

Longueur to- tale , et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Schytale. B. schytale.

a^o

70

Devin.

B. divinatrix.

246

quelquefois plus de 30 pieds.

ordinaire- ment le 9e de la longueur du corps.

\ 0

Ï4

B. îTiuet. B. muta.

217

à la mâ- choire supé- rieure

34

Bojobi. B. bojobi.

aoj

2 pi. II po.

0

77

7 pouces.

HIpnale. B, hipnale.

179 120

I pi. 1 1 po.

0

3 pouces.

Groin,

B. porcaria.

lyo

2 pieds. 8 pouces.

0

40

MÉTHODIQUE.

t8

lOC

SUITE DES CARACTERES.

sembla- îles à cel- és du dos.

Écailles du dos.

hexagones et unies.

rhomboï- dales et unies.

rhomboï- dales et unies.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

D'un gris mêlé de verd ; des taches noires et arrondies le long du dos ; d'autres taches noires vers leurs bords , blanches dans leur centre et disposées des deux côtés du corps ; des points noirs formant des taches alonîrées sur le ventre.

De grandes taches ovales souvent échancrées à chaque bout et en demi- cercle , bordées d'une couleur foncée, et entourées d'autres petites taches.

Le museau alongé et terminé par une grande écaille presque verticale; !a tête élargie par-derrière ; le front élevé; un s il Ion longitudinal sur la tête.

Des taches noires, rhomboïdaies et réunies les unes aux autres.

L'extrémité de la queue garnie par- dessous de quatre rangs de petites écailles.

Verte ou orangée ; des taches irré- gulieres, éloignées l'une de l'autre, blanches ou jaunâtres , et bordées de rouge.

La tête large par-derrière ; le mu- seau alongé ; les lèvres garnies d'é cailles grandes et sillonnées. .

Jaunâtre ; des taches blanchâtres bordées d'un brun presque noir.

Les lèvres garnies d'écailles très- grandes et sillonnées.

Cendrée ; des taches noires dis posées régulièrement ; des bandes transversales jaunes vers la queue.

Le museau terminé par une grande écaille relevée.

s 82

TABLE

TROISIEME GENRE.

Serpe/is qui ont le pentre couvert de grandes

plaques, et la queue tenninée par une grande

pièce écailleuse , ou par de grandes pièces

articulées les unes dans les autres , mobiles

et bruyantes.

SERPENS A SONNETTE. Crotali,

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plaques du dessous du corps , et du dessous de la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Boiquira. Crotalus boiquira.

1S2

4 pi- 10 lig. 4 pouces.

à la mâ- choire supé- rieure.

27

;

Durissus. Crot. durissus.

172

ipi. î po.61.

à la mâ- choire supé- rieure.

21

I po. 3 lig.

Dryinas. Crot. dryinas.

i6y 30

à la mâ- choire supé- rieure.

MiUet.

Crot. miliarius.

132

I pi. 3 p. lol, I po. lolig.

à la mâ- choire supé- rieure.

32

Serpent à sonnette piscivore.

Crot. piscivorus.

î pieds.

à la mâ- choire supé- rieure.

MÉTHODIQUE.

i83

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de lu tête.

Six sur trois rangs.

SIX sur trois rangs.

deux grandes.

neuf sur quatre

Écailles du dos.

ovales et rele-vées par une arête.

ovales et relevées par une arête.

ovales et relevées par une arête.

ovales et relevées par une arête.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

D'un gris jaunâtre ; une rangée longitudinale de taches noires bor- dées de blanc.

Variée de blanc et de jaune : des taches rhomboidales noires et blan- ches dans leur centre.

Blanchâtre; des taches d'un jaune plus ou moins clair.

Griie ; trois rangs longitudinaux de taches noires ; celles de la rangée du milieu rouges dans leur centre , et séparées l'une de l'autre par une tache rouge. _______

Brune ; le ventre et les côtés du cou noirs, avec des bandes transver- sales jaunes et irrégulières.

La queue terminée par une pointe longue et dure.

1S4

TABLE

QUATRIÈME GENRE.

Seî'pens dont le dessous du corps et de la queue est garni d'écaillés semblables à celles du dos.

A N G U I S. ^ngucs.

ESPÈCES.

CARACTERES,

Rangf d'écaiiles sous le corps et sous la queue.

Longueur to- tale , et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Rouleau. Anguls cylindrica.

240

2 pi. 6 po.

0

13

I pouce.

Rouge.

An. rubra.

240 12

I pi. 6 po.

6 lignes.

0

Lombric.

An, lumbrlcalis.

230

8 po. II lig.

les mâ- choires presque toujours sansdent

7

I i- ligne.

Long-nez. An, nasuta.

218

I pied.

iz

Queue-lancéolée.

200

An, latica'uda.

An. cornu. An, cornuta.

2CO

IJ

MÉTHODIQUE.

i85

SUITE DES CARACTÈRES.

Écailles du dessus de la tête.

3 grandes.

3 grandes sur deux rangs.

3 grandes.

Écailles du dos.

unies.

hexagones et unies.

tres-iimes et Très- petites.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Les diverses écailles blanches bor- dées de roux; des bandes transver- sales d'une couleur foncéç , et dont plusieurs se réunissent.

Les écailles rouges et bordées de blanc ; des bandes transversales noirâ- tres au-dessus et au-dessous du corps.

Le dessus et le dessous du corps d'un blanc livide.

La bouche au-dessous du museau et très-petite , ainsi que l'anus.

D'un noir verdàtre ; une tache jaune sur le museau; deux bandes obliques de la même couleur sur la queue ; le ventre jaune.

La bouche au-dessous du museau , qui est très-alongé ; la queue ter- minée par une pointe dure.

Pâle ; des bandes transversales brunes.

La queue très-comprimée par les côtés , et terminée en pointe^

Deux dents qui percent la lèvre supérieure et ont l'apparence de deux

petites cornes^

ï86

TABLE

ESPECES.

Miguel,

'Miç'uel.

Trait. Sagitta.

Colubrin. ^n, çolubrina.

Réseau.

An. rtdculata.

CARACTERES.

Rangs d'écaillés sous le corps et sous la queue.

200

186

[80

177

Peintade.

Meleagris.

Orvet. Orvet.

An. jaune et brun, An. favofusca.

Eryjc. Eryx.

Plature. Platura,

i3ï

i3î

127

223

126

136

Longueur to- tale , et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

ignes.

3 pieds. I pi. 6 po.

I pi. 6 po. I pi. i po. 6 1.

la longueur de la queue , Lin peu plus grande que

celle du

corps.

I pi. 6 po.

2 pouces.

les mâ- choires

sans dents.

MÉTHODIQUE, 187

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

Ecailles du dos.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

neuf sur quatre rangs.

unies.

Jaune; une ou trois raies longitudina- les brunes; des bandes transversales très-étroités et de la même couleur.

-

Les écailles qui recouvrent le ventre , sont un peu plus larges que celles qui garnissent le dos.

grandes.

Variée de brun et d'une couleur pâle.

Les écailles brunes et blanches dans leur centre.

Verdâtre ; plusieurs rangées longi- tudinales de points noirs ou bruns.

neuf sur quatre rangs.

hexagones et unies.

Les écailles du dessus du corps rousses et bordées de blanchâtre ; quatre raies longitudinales brunes ou noires; le ventre d'un brun très- foncé; la gorge marbrée de blanc, de noir et de jaunâtre.

D'un verd mêlé de brun ; plusieurs rangées longitudinales de points jau- nes ; le ventre jaune.

arrondies et unies.

D'un roux cendré ; trois raies noi- res et longitudinales.

La mâchoire supérieure un peu plus avancée que 'inférieure.

arrondies, très-petites, et placées à côté les unes des autres.

Noire ; le dessous du corps blanc; la queue variée de blanc et de noir.

La queue comprimée par les côtés , et un peu arrondie à son extrémité.

i88

TABLE

CINQUIÈME GENRE.

Se/jpens dont le corps et la queue sont entourés (Vanneaux écailleux.

AMPHISBÈNES. ^dmpUshcvnw.

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Anneaux du corps et anneaux de la queue.

Longueur to- ■. taie , et lon- gueur de la queue.

i Crochets à venin.

Blancliet. Amphiibxna alba.

223

ipi, îpo.91, I po. 6 lig.

i6

Amphisbène enfumé.

Amphisbctna fuliginosa.

200

ipî.ipo.61. 6 lignes.

0

50

MÉTHODIQUE, 189

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

Ecailles du dos.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

six sur

trois

rangs.

Blanche.

Huit tubercules près de l'anus.

six sur

trois rangs.

Noirâtre, variée de blanc. Huit tubercules près de l'anus.

a>93

TABLE

SIXIEME GENRE.

Serpens dont les côtés du corps présentent une raTigée longitudinale de plis.

C CE C I L E S. Cœcîliœ.

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Plh des côtés du corps , et plis des côtés de la queue.

Longueur to- tale, et lon- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Coecile visqueux. Cotcilia glutinosa.

340

la

Ibiare.

îbiare.

'35

I picfl.

MÉTHODIQUE. 191

SUITE DES CARACTERES.

Zc ailles du dessus de la tête.

Ecailles du dos.

I

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Brune ; une raie blanchâtre «ur les côtés.

La mâcVoire supérieure garnie de deux petits bariîiilons ; la queue très courte.

192

TABLE

SEPTIEME GENRE.

Serpens dont le dessous du coj'ps, présentant vers la, tête de grandes plaques , montre vers l'nnus des anneaux écailleux , et dont l'ex- trémité de la queue est garnie par-dessous de très-petites écailles.

LANGAHA. ZangaJia.

ESPÈCES.

CARACTÈRES.

Grandes plaques et anneaux écailleux.

Longueur to- tale, et Ijii- gueur de la queue.

Crochets à venin.

Langaha de Madagascar.

Langaha Madagascar.

184

1 pi. 8 po.

à la mâ- choire supé- rieure.

42

MÉTHODIQUE.

193

r

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailla du dessui de la tête.

sept sur

deux

rangs.

Écailles du dos.

rhomboï- dales.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Les écailles rougeâtres , chargées i leur base d'un petit cercle gns et '■■" point jaune.

Jd'un

Ser^tm, III-

16

194

TABLE

HUITIEME GENRE.

Serpens qui ont le corps et la queue garnis de petits tubercules.

ACROCHORDES. Acrochordi.

ESTÈCES.

CARACTÈRES.

Ljrigueur to- tale, et lon- gueur de Li queue,

8 pi. 3 po.

Croche ti à venin.

Acrochorde de Java.

Acrochordus Javan,

O

Il pouces.

MÉTHODIQUE.

195

SUITE DES CARACTÈRES.

Ecailles du dessus de la tête.

petites et en grand nombre.

Écailles du dos.

Couleur et traits particuliers de la conformation extérieure.

Noire; le dessous du corps blan- châtre; les côtés blanchâtres, tachetés de noir.

La queue très-menue à proportion du corps.

PREMIER GENRE.

Serpens qui ont de grandes plaques sous le torps, et deux rangées de petites plaques sous la queue,

COULEUVRES.

COULEUVRES VIPÈRES.

LA VIPÈRE COMMUNE*.

Xj'ordre des serpens paroît être un de ceux qui renferment le plus de ces es- pèces funestes dont les sucs empoisonnés

* Nous cro}'ous devoir préveuir ici, relativement à la nomenclauu'e des diverses espèces de serpens dont nous allons traiter, que plusieurs noms dont les modernes se servent pour les désigner , ont été égalemeut employés par les anciens 3, tels sopt les

Tû/n J

F/ /. Aii/joo.

jIjA.WIFJEj^'E ,l<v/f/fii/ru^.A.J/\?/f^i7/i {/// Corps. ' 2 LE. CERASTE .^ Te/e. C Tnm^'im iùi cbr/Kf

HISTOIHE NATURELLE. 197 (donuenf la mort lorsqu'ils se mêlent avec le sang. Il ne faut pas croire cependant que le plus grand nombre de ces reptiles soit venimeux; l'on doit présumer que tout au plus le tiers des diverses espèces de serpens renferme un poison très-actif. Ce sont ces espèces redoutables qu'il importe le plus de eonnoître , pour les éviter : aussi commencerons-nous , en traitant de cliaque genre de serpens , par donner riiistoire de ceux qui , pour ainsi dire , recèlent la mort , et dont l'approche est

noms de her.cs, presier, aspicj hoa, paiera, cce' "Àlia, miliaris, triscalis, dlpsas, dryhnis, elops, elaps, molitnis, schytale, etc. Mais les anciens ont si peu cai-actérisé les différentes espèces aux- quelles ils ont attribué ces noms, qu'il est pres- que impossible de les reconnoître ; tout ce que j'ai cru découvrir, en général, par une comparaison ai- tentive des expressions des aociens avec les des- criptions des serpens c[ui ont été bien observés , c'est que les anciens n'ont pas toujours applicjué ces noms à des espèces distinctes , et c|u'ils les ont sou- vent employés pour de simples variétés d'âge ou de sexe, appartenant à des espèces communes eu Eu- rope j et patiiculicrerasut eu Grèce.

16

Jq8 HISTOIRE NATURELLE

cPautant plus dangereuse , que leurs> armes empoisonnées , presque toujours enveloppées dans une sorte de fourreau qui les dérobe aux regards , ne peuvent laire naître aucune métiauce ni inspirer aucune précaution.

Parmi ces espèces dont le venin est plus ou moins funeste , une des plus ancien- nement et des mieux connues , est la vi- père commune. Elle est en effet très-mul- tipliée en Europe; elle habite autour de nous ; elle infeste nos bois , et souvent nos demeures : aussi a-t-clle inspiré de- puis long-temps une grande crainte; et cependant avec quelle attention n'a-t-elle pas été observée ? Objet d'importantes recherches et de travaux multipliés d'un grand noml)re de savans , combien de fois n'a-t-elie pas été décrite, disséquée et soumise à diverses épreuves? Nous avons donc cru devoir commencer l'histoire de tous les serpens par celle de la vipère commune : sa conformation tant inté^ jicure qii'cxtérieure , ses propriétés, ses habitudes naturelles, ayant été très-ctu- dices , et pouvajitj par conséquent, clïQ

DES COULEUVRES. 199

présentées avec clarté , répandront une grande lumière sur tous les objets que nous leur comparerons , et dont on pourra connoître plusieurs parties , encore voi- lées pour nous , par cela seul qu'on verra un grand nombre de leurs rapports avec un premier objet bien connu et vivement éclairé.

La vipère commune est aussi petite , aussi foible , aussi innocente en appa- rence, que son venin est dangereux. Fa- rcissant avoir reçu la plus petite part des propriétés brillantes que nous avons re- connues en général dans Tordre des scr- pens , n'ayant ni couleurs agréables , ni proportions très-déliées, ni mouvemens agiles, elle seroit presque ignorée, sans le poison funeste qu'elle distille. Sa lon- gueur totale est communément de deux pieds ; celle de la queue , de trois ou quatre pouces, et ordinairement cette partie du corps est plus longue et plus grosse dans le mâle que dans la femelle. Sa couleur est d'un gris cendré ; et le long de son dos , depuis la tête jusqu'à l'extrémit^ de la queue , s'étend une sorte de chaîne

200 mSTOIRE NATURELLE

composée de taches noirâtres de forme irrégulière , et qui , en se réunissant en plusieurs endroits les unes aux autres , re- présentent fort bien une bande dentelée et située en zigzag. On voit aussi de chaque côté du corps une rangée de petites taches noirâtres , dont chacune correspond à Tangle rentrant de la bande en zigzag.

Toutes les écailles du dessus du corps sont relevées au milieu par une petite arête , excepté la dernière rangée de chaque côté , les écailles sont unies et un peu plus grandes que les autres. Le dessous du corps est garni de grandes plaques couleur d'acier, et d'une teinte plus ou moins foncée , ainsi que les deux rangs de petites plaques qui sont au-des- sous de la queue *.

Quelquefois, dans la vipère commune , de même que dans un très-grand nombre d'autres espèces de serpens , les grandes

* Nous avous compté , sur le plus grand nombiti d'individus que nous avons examinés, 146 graiidts. mlacjues el 3^ rangées de pcliLes.

DES COULEUVRES. 201

pièces qui recouvrent le ventre et le des- sous de la queue , sont , ainsi que les autres écailles, plus pâles ou plus blanches dans la partie qui est cachée par la plaque oii l'écaillé voisine , que dans la partie découverte; et le défaut de lumièr-e. paroît nuire à la vivacité des couleurs sur les écailles des serpens , cemme sur les pétales des fleurs : mais on ne remarque communément cette nuance plus foible de la partie cachée que sur les serpens en vie ou sur ceux qui ont été desséchés. 11 arrive le plus souvent , au contraire , que, sur les serpens conservés dans l'es- prit-de-vin , la partie des grandes plaques ou des autres écailles , qui est toujours découverte , est d'une nuance plus blan- châtre , comme plus exposée à l'action de l'esprit ardent qui altère toutes les couleurs.

Le dessus du museau et l'entre-deux des yeux sont noirâtres ; et sur le sommet de la tête , deïix taches alongées , placées obliquement , se réunissent par un bout et sous un angle aigu. Jifi tète va en diminuant de largeur da

203 HISTOIRE NATURELLE côté du museau , elle se termine en s'arroudissaut ; et les bords des mâchoires sont revêtus d'ccailles plus grandes que celles du dos, tachetées de blanchâtre et de noirâtre , et formant un rebord assez saillant.

Le nombre des dents varie suivant les individus ; il est souvent de vingt-huit dans la mâchoire supérieure , et de vingt- quatre dans rinférieure : mais toutes les vipères ont, de chaque côté de la luâ- choire supérieure, une ou deux et quel- quefois trois ou quatre dents longues d'environ trois lignes , blanches , dia- phanes , crochues et très-aiguës ; ou les a appelées les dents canines de la uipère , ù cause d'une ressemblance imparfaite qu'elles ont avec les dents canines de ])lusieurs quadrupèdes. Ces dents longues et crochues sont très-mobiles , ainsi que celles des autres serpens vipères; l'animal les peut incliner ou redresser à volonté : communément elles sont couchées en arrière le long de la mâchoire , et alors leur pointe ne paroît point; mais lorsque la vipère veut mordre , elle les relève et

DES COULEUVRES. 2o3

les enfonce dans la plaie en même temps qu'elle y répand son venin.

Auprès de la base de ces grosses dents , et hors de leurs alvéoles , on voit, dans des enfonceniens de la gencive , un cer- tain nombre de petites dents crochues , inégales en longueur , conformées comme les dents canines, et qui paroissent desti- nées à remplacer ces dernières lorsque la vipère les perd par quelque accident. On en a trouvé depuis deux jusqu'à huit. L'on peut présumer que le nombre de ces dents de remplacement est limité, et que lorsque la vipère a réparé plusieurs fois la perte de ses crochets , elle ne peut plus les remplacer; elle demeure privée des dents canines pendant le reste de sa vie; et peut-être qu'alors on en seroit mordu sans éprouver l'action de son venin , qu'elle ne pourroit plus faire pénétrer dans la blessure. Ce défaut absolu de crochets , auquel la vipère seroit sujette, devroit être une raison de plus de cher- cher des caractères extérieurs autres que les dents canines , pour distinguer les Tipèrcs d'avec les serpens ovipares.

£04 HISTOIRE NATURELLE

Ces dents canines de la vipère sont creuses ; elles renferment une double cavité et comme un double tube, dont Tun est contenu dans la partie convexe de la dent , et l'autre dans la partie con- cave. Le premier de ces deux conduits s'ouvre à l'extérieur par deux petits trous, dont l'un est situé à la base de la dent , et l'autre vers sa pointe; et le second n'est ouvert que vers la base, il reçoit les vaisseaux ci les nerfs qui attachent la dent à la mâchoire.

Ces mêmes dents canines sont renfer- mées jusqu'aux deux tiers de leur lon- gueur , dans une espèce de gaine com- posée de fibres très -fortes et. d'un tissu cellulaire. Cette gaine ou tunique est tou- jours ouverte vers la pointe de la dent ; *lle s'y termine par une espèce d'ourlet souvent dentelé, et formé par un repli de deux membranes qui la composent.

Le poison de la vipère est contenu dans une vésicule placée de chaque côté de la tête , au-dessous du muscle de la mâchoire supérieure : le mouvement du muscle pressant cette vésicule , eu fait sortir H

DES COULEUVRES. 2a5

venin , qui arrive par uu conduit à la base de la dent , traverse la gaine qui l'enveloppe , entre dans la cavité de cette dent par le trou sitné près de la base, en sort par celui qui est auprès de la pointe,, et pénètre dans la blessure. Ce poison est la seule humeur malfaisante que ren- ferme la vipère; et c'est en vain qu'on a prétendu que l'espèce de bave qui couvre ses mâchoires lorsqu'elle est en fureur ^ est un venin plus ou moins dangereux : l'expérience a démontré le contraire.

Le suc empoisonné , renfermé dans les vésicules de chaque côté de la tète , est une liqueur jaune dont la nature n'est ni alcaline ni acide , comme on l'a écrit en divers temps; elle ne produit pas non plus les effets d'un caustique, ainsi qu'on l'a pensé ; et il paroît qu'elle ne contient aucun sel proprement dit, puisque, lors- qu'elle se dessèche , elle ne présente pas nu commencement de crystallisalion , comme les sels , dont l'eau surabondante s'évapore , mais se gerce , se retire , se fend, se divise en très-petites portions, de uxanicre à représenter, par toutes seg

17

2c6 HISTOIRE NATURELLE

fentes très-dcliccs et très -multipliées , U31C espèce de réseau que l'on a comparé à une toile d'araignée.

Quelque subtil que soit le poison de la yipère, il paroît qu'il n'a point d'effet sur les animaux qui Ji'ont pas de sang; il paroît aussi qu'il ne peut pas donner la niort aux vipères elles-mêmes ; et à l'é- gard des animaux à jiaîig chaud, la mor- .sure de la vipère leur est d'autant moins funeste que leur grosseur est plus consi- dérable , dételle sorte qu'on peut présu- mer qu'il n'est pas ioujours mortel pour l'homme ni pour les grands quadrupèdes ou oiseaux. L'expérience a prouvé aussi qu'il est d'autant plus dangereux qu'il a été distillé en plus grande quanJité dans les plaies par des morsures répétées. Le poison de la vipère est donc funeste en raison de sa quantité, de la chaleur du sang et de la petitesse de l'animal qui est mordu. Ne doit-il pas aussi être plus ou moins mortel, suivant la chaleur de la sai- son, la température du climat, et l'état de la vipère, plus ou moins irritée, plus ou moins animée , plus ou moins pressée par

DES COULEUVRES. 207

la faim, etc.?Et voilà pourquoi Pline avoit peut-être raison de dire que la vipère, ainsi que les autres serpcns venimeux, ne ren- fcrmoit point de poison pendant le temps de son engourdissement. Au reste , M. Tab- f ontana , Vuii des meilleurs physiciens et naturalistes de l'Europe , pense que le venin de la vipère tue en détruisant l'irri- tabilité des nerfs, de même que plusieurs autres poisons tirés du règne animal ou du règne végétal; et il a aussi fait voir que cette liqueur jaune et vénéneuse étoit un poison très-dangereux lorsqu'elle étoit prise intérieurement , et que Redi , ainsi que d'autres observateurs , n'ont écrit le contraire que parce qu'on avoit avalé de ce poison en trop petite quan- tité pour qu'il pût être très-nuisible.

On a fait depuis long-temps beaucoup de reclierclies relativement aux moyens de prévenir les suites funestes de la mor- sure des vipères : mais M. l'abbé Fontana , que nous venons de citer , s'est occupé de cet important objet plus qu'aucun autre physicien ; personne n'a eu plus que lui la patience et le courage uéces*

îLo8 HISTOIRE NATURELLE

saires pour une longue suite crexpé- rlences; il en a fait plus de six mille; il a essayé l'effet des diverses substances indi- quées avant lui comme des remèdes plus ou moins assurés contre le venin de la vipère ; il a trouvé , en comparant un très-grand nombre de faits , que , par exemple, Talcali volatil, appliqué exté- rieurement ou pris intérieurement , étoit sans effet contre ce poison. II en est de même, suivant ce savant , de l'acide vi- triolique , de l'acide nitreux , de Tacide marin, de l'acide phospliorique , de l'a- cide spathique , des alcalis caustiques ou non caustiques , tant minéraux que vé- gétaux , du sel marin et des aiïtres sels neutres. Les huiles , et particulièrement celle de térébenthine , lui ont paru de quelque utilité cçntre les accidens pro- duits par la morsure des vipères, et il a pensé que la meilleure manière d'em- ployer ce remède étoit de tremper pen- dant long-temps la partie mordue dans cette huile de térébenthine extrêmement chaude. Le célèbre physicien de Florence p.€nse aussi qu'il est avantageux de tenir

DES COULEUVRES. 209

cette même partie mordue dans de l'eau, soit pure, soit mêlée avec del'eau de cliaux , soit chargée de sel commun ou d'autres substances salines ; la douleur diminue , ainsi que Fintlammation , et la couleur de la partie blessée est moins altérée et moins livide. Les vomissemens produits par l'émétique peuvent aussi n'être pas inutiles. Mais le traitement que M. l'abbé Fontana avoit regardé comme le plus as- suré contre les eflets du venin de la vipère, consistoit à couper la partie mordue peu de secondes ou du moins peu de minutes après l'accident , suivant la grosseur des animaux blessés , les plus petits étant les plus susceptibles de l'action du poison. Bien plus, cet observateur ayant trouvé que les nerfs ne peuvent pas communi- quer le venin, que ce poison ne se répand que par le sang , et que les blessures enve- nimées , mais superticielles , de la peau , lie sont pas dangereuses, il avoit pensé qu'il suffisoit d'empêcher la circulation du sang dans la partie mordue , et qu'il n'étoit pas même nécessaire de la sus- pendre dans les plus petits vaisseaux ,

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210 HISTOIRE NATURELLE

pour arrêter les eflets du poison. Vn grand nombre d'expériences l'avoient conduit à croire qu'une ligature mise à Ja partie blessée prévenoit la maladie in- terne et générale qui donne la mort à l'a- nimal ; que dès que le venin avoit agi sur le sang dans les parties mordues par la vipère , il cessoit d'être nuisible, comme sMl se décoraposoit en produisant un mal local ; et qu'au bout d'un temps déter- miné il ne pouvoit plus faire naître de înaladie interne. A la vérité , le mal local étoit très-grand , et paroissoit quelque--- t'ois tendre à la gangrène ; et , comme il étoit d'autant plus violent que la ligature ctoit plus serrée et plus long-temps appli- quée, il étoit important de connoître avec quelque précision le degré de tension de la ligature et le temps de son application , nécessaires pour qu'elle pût produire tout son eftet. Au reste, M. l'abbé Fontana, en remarquant avec raison qu'un mauvais traitement peut changer la piqûre en une plaie considérable qui dégénère en gangrène , assuroit en même tejnps que le venin de la vipère n'est pas aussi dan-

DES COULEUVRES. 2ii

gereux qu'on l'a pensé. Lorsqu'on a été mordu par ce serpent, on ne doit pas dé- sespérer de sa vie , quand bien même on lie feroit aucun remède ; et la frayeur extrême qu'inspire l'accident , est sou- vent une grande cause de ses suites fu- nestes '.

Pour faire connoître avec plus d'exac- titude le résultat que ce physicien croyoit devoir tirer lui-même de ses belles et très- nombreuses expériences , nous avons cru devoir rapporter ses propres paroles dans la note suivante ^, d'après laquelle on

^ oc Une simple morsure de viptre u'cst pas moc- c telle naturellement : quand même il y auroit eu a deux ou trois vipères, la maladie seroit plus K grave , mais elle ne seroit probablemeut pas nior- « telle; quand une vipère auroit mordu un homme K six ou sept fois, quand elle auroit distillé dans K les morsures tout le venin de ses vésicules, on ne K doit pas désespérer.» (Fontana, Traité des poi- sons ; Florence , 1781 ; tom. II , p. 4.5. )

* « Le dernier résultat de tant d'expériences sur « l'usage de la ligature contre la morsure de la «vipère, ne présente ni cette certitude ni cctrt» « généralité auxquelles on se seroit attendu dans le

2T2 HISTOIRE NATURELLE

verra aussi que M. l'abbé Foiitana recoii- iioît , ainsi que nous, rinflueuce des sai- sons et de diverses autres causes locales

« commencement. Ce n'est pas que la ligature so!t « à rejeter tomme absolument inutile, puisque nous « l'avons trouvée un remède assuré pour les pigeons > et pour les cochons d'Inde ; elle peut donc l'être « pour d'autres animau-x, et peut-être seroii-elle t* utile pour tous, si l'on connoissoit mieux les « circonstances dans lesquelles il faut la pratiquer. « Il paroît, en général, qu'on ne doit rien attendre « des scarifications plus ou moins grandes, plus ou « moins simples, puisqu'on a vu mourir, avec cette « opération , les animaux mêmes qui auroientété le « plus facilement guéris avec les seules ligatures.

« Je n'ose pas décider de quelle utilité elle pour- }a roit être dans l'homme, parce que je n'ai point; « d expériences directes ; mais comme je suis d'avis « que la morsure delà vipère n'est pas naturellement meurtrière pour l'homme, la ligature, dans ce « cas, ne pourroit faire autre chose que diminuer «la maladie. Peut-être une ligature très-légère K pourroit-elle suffire; peut-être pourroit-on l'ôler •c peu de temps après: mais il faut des expériences pour nous mettre eu état de prononcer , el les expérirtices sur les hommes sont très-rares.

« Je dois encore avertir qu'une pôrlic de lucs

DES COULEUVRES. 2t3 ou accidentelles sur la force du venin des serpens, et qu'il croit que plusieurs cir- constances particulières ont pu altérer les résultats de ces différentes expériences.

« expériences sur le venin de la vipère ont été faites n dans la plus rude saison , en hiver. Il est naturel « de concevoir que les \'ipèi-es dont je me suis servi , « nepouvoient être dans toute leur vigueur, qu'elles K dévoient mordre les animaux avec moins de force, « et que n'étant pas nourries depuis plusieurs mois, <c leur venin devoit être en moindre quantité. Je « n'ai aucune peine h croire que , dans une autre « saison plus favorable, comme dans l'été, dans un climat plus chaud, les effets dussent être, en V quelque sorte , djfférens , et , en général , plus « grands.

« Je puis encore avoir été trompé par ceux qui « me fournissoient les vipères. J*é(ois en usage , «dans le commencement, de rendre les vipères a mêmes dont je m'éiois servi pour faire mordre « les animaux, et que je n'avois pas besoin de tuer. « J'ai tout lieu de croire qu'on m'a vendu pour la « seconde fois les vipères que j'avois déjà em- «ployéesj mais dès que je me suis appercu de « cela, je me suis déterminé à tuer toutes les vi- « pères, après m'en ê^re servi dans mes expé- « riences. » ( Ouurage déjà cite, i. II, p. 59. }

2T4 HISTOIRE NATURELLE

Mais enfin , dans un supplément im- primé à la fin de son second volume , M. Tabbé Fontana annonce , d'après de nouvelles épreuves, que la pierre à cau- tère détruit la vertu malfaisante du venin de la vipère, avec lequel on la mêle; que tout concourt à la faire regarder comme le véritable et seul spécifique contre ce poison , et qu'il suffit de l'ap- pliquer sur lu plaie , après l'avoir agran- die par des incisions convenables.

Quelquefois cependant le remède n'est pas apporté à temps , ou ne se n:icle pas avec le venin. On ne peut pas toujours faire pénétrer la pierre à cautère dans tous les endroits dans lesquels le poison Cst parvenu. Les trous que font les dents de la vipère sont très-petits, et souvent invisibles; ils s'étendent dans la peau en différentes directions et à diverses pro- fondeurs, suivant plusieurs circonstances très- variables. L'inflammation et l'en- flure qui surviennent, augmentent en- core la difficulté de découvrir ces direc- tions , en sorte que les incisions se font presque au hasard. D'ailleurs le veniu

DES COULEUVRES. 2t5

5'inliodiiit quelquefois tout d'un coup et eu graude quantité dans Faniinal , par îe moyeu de quelques vaisseaux que la dent péncLrc ; et la -morsure de la tipère peut donner la mort la plus prompte , si les dents percent un gros vaisseau veineux , de manière que le poison soit porté vers le cœur très-rapidement et en abondance. L'animal mordu éprouve alors une sorte d'injection artificielle du venin, et le mal peut être incurable. On ne peut donc pas, suiVant M. Fontana, regarder la pierre à cautère comme un remède toujours as- suré contre les effets de la morsure des vipères : mais ou ne doit pas douter de ses bons effets ; et même on peut dire qu'elle est le véritable spécifique contre le poison de ces serpenv.

Tels sont les résultats des expériences les plus intéressantes qu'on ait encore faites sur les effets ainsi que sur la na- ture du venin que la vipère distille par le moyen de ses dents mobiles et cro- cliues. Achevons maintenant de décrire cet animal funeste.

Elle a les veux très-vifs , et garnis de

2i6 HISTOIRE NATURELLE paupières , ainsi que ceux des quadru- pèdes ovipares ; et, comme si elle sentoit la puissance redoutable du venin qu'elle, recèle, son regard paroît Lardi; ses yeux ^ brillent, sur -tout lorsqu'on l'irrite; et alors non seulement elle les anime, mais ouvrant sa gueule elle darde sa langue , qui est communément grise, fendue ei* deux. , et composée de deux petits cy- lindres charnus adhérens l'un ù l'autre jusque vers les deux tiers de leur lon- gueur : l'animal l'agite avec tant de vi- tesse , qu'elle étincelle, pour ainsi dire,, et que la lumière qu'elle réfléchit la fait paioître comme une sorte de petit phos- phore. On a regardé pendant long-temps cette langue conime une sorte de dard dont la vipère se servoit pour percer sa -proie; ou a cru que c'éloit à l'extiémité de cette langue que résidoit son venin , et on l'a comparée à une flèche empoi- sonnée. Cette erreur est fondée sur ce que toutes les fois que la vipère veut mordre, elle tire sa langue et la darde avec rapi- dité. Cet organe est enveloppé, d'un bout à l'autre, dans une espèce de fourreau

DES COULEUVRES. 217

qui ne contient aucun poison '. Ce n'est qu'avec ses crocliets que la vipère donne la mort; et sa langue ne lui sert qu'à rete- nir les insectes dont elle se nourrit quel- quefois.

Non seulement la vipère a ses deux mâclioires articulées de telle sorte qu'elle peut beaucoup les écarter l'une de l'autre, ainsi que nous l'avons dit^, mais encore les deux côtés de chaque mâchoire sont attachés ensemble de manière qu'elle, peut les mouvoir indépendamment l'un de l'autre, beaucoup plus librement peut- être que la plupart des autres reptiles ; et cette faculté lui sert à avaler ses alimens avec plus de facilité. Tandis que les dents, d'un côté sont immobiles et enfoncées dans la proie qu'elle a saisie, les dents de l'autre côté s'avancent, accrochent cette même proie, la tirent vers le gosier, Tas- sujettissent, s'arrêtent à leur tour, et celles du côté opposé se portent alors en avant

' Voyez , sur la forme de la langue des serpcns, le Discours sur la naiure de ces reptiles.

^ Discours sur la nature dcsserpcus.

2i8 HISTOIRE NATURELLE

pour attirer aussi la proie , et rester en- suite immobiles. C'est par ce jeu plu- sieurs fois répété, et parce mouvement alternatif des deux côtés de ses mâchoires, que la vipère parvient à avaler des ani- maux quelquefois assez considérables , qui , à la vérité , sont pendant long- temps presque- tout entiers dans son œso- phage ou dans son estomac , mais qui , dissous insensiblement par les sucs di- gestifs, se résolvent en une pà'te liquide, tandis que leurs parties trop grossières sont rejetées par l'animal. Non seulement, en effet , la vipère se nourrit de petits insectes qu'elle retient par le moyen de sa langue , ainsi qu'un grand nombre d'autres serpens et plusieurs quadrupèdes ovipares; non seulement elle dévoie des insectes plus gros , des buprestes, des can- tliaridcs , et même ceux qui souvent sont très-dangereux , tels que les scorpions ; mais elle fait sa proie de petits lézards , de jeunes grenouilles, et quelquefois de petits rats , de petites taupes , et d'assez gros crapauds , dont l'odeur ne la rebute pas , et dont l'espèce de yeuia ne paroît pas lui nuire.

DES COULEUVRES. 219

Elle peut passer un très -long temps sans manger ; et l'on a même écrit qu'elle pouvoit vivre un au et plus sajis rien prendre. Ce fait est peut-être exagéré; mais du moins il est sûr qu'elle vit plu- sieurs mois privée de toute nourriture. M. Pennant en a gardé plusieurs renfer- mées dans une boîte , pendant j)!us de six mois , sans qu'on leur donnât aucun ali- ment , et cependant sans qu'elles pa- russent rien perdre de leur vivacité.. 11 semble même que, pendant cette longue diète , non seulement leurs fonctions vitales ne sont ni arrêtées ni suspen- dues, mais même qu'elles n'éprouvent pas une faim très-pressante, puisqu'on a vu des vipères renlermées pendant plusieurs jours avec des souris ou des lézards, tuer CCS animaux , sans chercher à s'en nour- rir.

Les vipères communes ne fuient pas les animaux de leur espèce; il paroît même que, dans certaines saisons de l'année , elles se recherchent mutuellement. Lors- que les grands froids sont arrivés , on les trouve ordinairement sous des tas dq

220 HISTOIRE NATURELLE

j3ierres ou dans des trous de vieux murs , réunies plusieurs ensemble et entortillées les unes autour des autres. Elles ne se craignent pas , parce que leur venin n'est point dangereux pour elles-mêmes , ainsi que nous l'avons vu ; et Ton peut présu- mer qu'elles se rapprochent ainsi les unes des autres pour ajouter à leur chaleur na- turelle, contre-balancer les effets du froid, et reculer le temps qu'elles passent dans l'engourdissement et dans une diète ab- golue.

Pour peu que leur peau extérieure s'al- tère, les sucs destinés à l'entretenir cessent de s'y porter, et commencent à en for- mer une nouvelle au-dessous; et voilà pourquoi , dans quelque temps qu'on prenne des vipères, ou les trouve presque toujours revêtues d'une double peau , de l'ancienne , qui est plus ou moins altérée^ et d'une nouvelle , placée au-dessous et plus ou moins formée. Elles quittent leur vieille peau dans les beaux jours du prin- temps , et ne conservent plus que la nou-^ velle, dont les couleurs sont alors bien plus vives que celles de raucieune, Soii-*

DES COULEUVRES. 221

vent cette peau nouvelle, altérée par les divers accideus que les vipères éprouvent pendant les chaleurs, se dessèche, se se-, pare du corps de Taniuial dès la tiu de l'automne , est remplacée par la peau qui s'est formée pendant Tété; et dans la mérne année la vipère se dépouille deux fois.

Les vipères communes ne parviennent à leur entier accroissement qu'au bout de six on sept ans : mais après deux ou trois ans elles sont déjà en état de se repro- duire. C'est au retour du beau temps, et communément au mois de mai, qae le mâle et la femelle se reclierclient. La fe- melle porte ses petits trois ou quatre mois; -et si, lorsqu'elle amis bas, le temps des grandes chaleurs n'est pas encore passé , elle s^accouple de nouveau , et produit deux fois dans la même année.

Les anciens, trop amis du merveilleux, ont écrit que, lors de raccouplemcnt , le mâle faisoit entrer sa tête dans la gueule de la femelle; que c'était ainsi qu'il la fccondoit; que la femelle, bien loin de lui rendre caresse pour caresse , lui cou-

222 HISTOIRE NATURELLE

poit la tête dans le moment même elle devenoit mère ; que les jeunes serpens , éclos dans le ventre de la vipère , déclii- loient ses flancs pour en sortir; que par-là ils vengoolent, pour ainsi dire, la mort de leur père, etc. Nous n'avons pas besoin de réfuter ces opinions extraordinaires; les vipères coniuiunes viennent au ;our et s'accouplent comuie les autres vipères: mais les anciens , ainsi que les modernes , ont quelquefois pris des faits particuliers, des accidens bizarres , ou des observa- tions exagérées , pour des lois générales ; et d'ailleurs il seuible qu'ils avoient quel- que plaisir à croire que la naissance d'une génération 'l'aniniaux aussi redoutés que la vipère ne pouvoit avoir lieu que par l'extinction de la génération précédente. Les œufs de la vipère commune sont distribués en deux paquets : celui qui est à droite est communéuient le plus consi- dérable , et chacun de ces paquets est renfermé dans une membrane qui sert ^ comme d'ovaire. Le nombre de ces œufs I varie beaucoup, suivant les individus, " depuis douze ou treize jusqu'à vingt ou

DES COULEUVRES. 223

\ingt-cinq , et Pou a comparé leur gros- seur à celle des œufs de merle.

Le vipereau est replié dans l'œuf; il y prend de la nonrriturc par une espèce d'arrière-faix attaché à son nombril , et dont il n'est pas encore délivré lorsqu'il a percé sa coque, ainsi que la tunique qui renferme les œufs , et qu'il est venu à la lumière. 11 entraîne avec lui cet arrière- faix , et ce n'est que par les soins de la vipère mère qu'il en est débarrassé.

On a prétendu que les vipereaux n'é- toient abandonnés par leur mère que lorsqu'ils étoient parvenus à une grandeur un peu considéralde , et qu'ils avoient acquis assez de force pour se défendre. L'on ne s'est pas contenté d'un fait aussi extraordinaire dausTiiistoire des serpens: on a ajouté que, lorsqu'ils étoient effrayés , ils alloicnt chercher un asyle dans l'en- droit même leur mèrerecéloit son arme empoisonnée ; que , srins craindre ses crochets venimeux , ils cnlroiont daîit^sa bouche, se réfugioient jusque dans son veiilre , qui s'étendoit et sc.gonfloit pour les recevoir, et que lorsque le d::iigcr

224 HISTOIRE NATURELLE

étoit passé , ils ressortoieiit par la gueule de leur mère. Ncus n'avons pas besoin de réfuter ce conte ridicule; et s'il a jamais pu paroître fondé sur quelque observa- tion , si l'on a jamais vu des vipereaux, effrayés se précipiter dans la gueule d'une vipère , ils y auront été engloutis comme une proie , et non pas reçus comme dans un endroit de sûreté : l'on aura eu seule- ment une preuve de plus de la voracité des vipères , qui en effet se nourrissent souvent de petits lézards, de petites cou- leuvres , et quelquefois même des vipe- reaux auxquels elles viennent de donner le jour. Mais quelles habitudes peuvent ^tre plus éloignées de l'espèce de ten- dresse et des soins maternels qu'on a voulu leur attribuer ?

La vipère commune se trouve dans presque toutes les contrées de l'ancien continent : on la rencontre aux grandes Indes , ou elle ne présente que de légères variétés ; et non seulement elle habite dans toutes les contrées chaudes de l'an- cien monde ,mais elle y supporte assez fa- cilement les températures les plus froide*,

DES COULEUVRES. ^^5

puisqu'elle est assez comuiune en Suède , sa morsure est presque aussi dange- reuse que dans les autres pays de TEu- rope. Elle habite aussi la Russie et plu- sieurs contrées de la Sibérie; elle s'y est' même d'autant plusniultipliée ,que , pen- dant long -temps , la superstition a em- pêché qu'on ne cherchât à l'y détruire. Et comme les qualités vénéneuses s'accrois- sent ou s'afloiblissent à mesure qvie la chaleur augmente ou diminue , on peut croire que les humeurs de la vipère sont bien propres à acquérir cette espèce d'exal- tation qui produit ses propriétés funestes, puisque sa morsure est dangereuse même dans les contrées très - septentrionales. C'est peut-être à cette cause qu'il faut Tapporter l'activité de ses sucs , que la médecine a souvent employés avec suc- cès ; peu d'animaux fournissent même des remèdes aussi vantés contre autant d'espèces de maladies. Les modernes en fout autant d'usage que les anciens ; ils se servent de toutes les parties de son corps , excepté de celles de la tête, qui peuvent être imprégnées de poison : ils.

226 HISTOIRE NATURELLE

emploient son cœur, son foie, sa graisse. On a cru cette graisse utile dans les mala- dies de la j3eau pour cflacer les rides , pour embellir le teint ; et de tous les avantages que Tou retire des préparations de la vipère , ce ne seroit peut-être pas celui que la classe la plus aimable de nos lecteurs estimeroit le moins. Au reste , comme des effets opposés dépendent sou- vent de la même cause , lorsqu'elle agit dans des circonstances différentes, il ne seroit pas surprenant que les mêmes sucs actifs qui produisent dans les vésicules de la tête de la vipère le venin qui la fait redouter , donnassent au sang et aux hu- meurs de ceux qui s'en nourrissent, assez de force pour expulser les poisons dont ils ont été infectés , ainsi que Ton pré- tend qu'on Ta éprouvé plusieurs fois.

On it^nore quel degré de température les vipères communes peuvent supporter sans s'engourdir; mais, tout égal d'ail- leurs , elles doivent tomber dans une tor- peur plus grande que plusieurs espèces de serpens , ces derniers se renfermant pendant l'hiver dans des trous soutcr-

DES C O i: L F. r V R E s. 227

rains , et cherchant dans ceS asyles cacliés une température plus douce, taudis que les vipères ne se metteut coiuniuuéuieTit à l'abri que sous des tas de pierres et daus des trous de muraille, le froid peut pénétrer plus aisément.

Quelque chaleur qu'elles éprouvent , elles rampent toujours lentement; elles ]ic se jettent communément que sur les petits animaux dont elles font leur nour- riture : elles n'attaquent point riioniîne ni les gros animaux ; mais cependant lors- qu'on les blesse , ou seulement lorsqu'on les agace et qu'on les irrite, elles de- viennent furieuses et font alors des mor- sures assez profondes. Leurs vertèbres sont articulées de manière qu'elles ne peuvent pas se relever et s'entortiller daus tous les sens aussi aisément que la plupart des ser- pens , quoiqu'elles renversent et retour- îient facilement leur tête. Cette confor- mation les rend plus aisées à prendre : les uns les saisissent au cou , à l'aide d'une branche fourchue, et les enlèvent ensuite par la queue' pour les faire tomber dans un sac , dans lequel ils les emportent;

22Q HISTOIRE NATURELLE

d'autres appuient rextrémité d'un bâ- ton sur la tête de la vipère , et la serrent iortement au cou avec la main : Tanimal fuit des efforts inutiles pour se défendre; ,€t tandis qu'il tient sa gueule béante , on lui coupe facilement avec des ciseaux ses dents venimeuses , ou bien , comme ses dents sont recourbées et tournées vers le gosier , ou les fait tomber avec une lame de canif que Ton passe entre ces crochets et les mâchoires , en allant verslcmuseau; ranimai est alors hors d'état de nuire, et on peut le manier impunément. Il y a même des chasseurs de vipères assez har- dis pour les saisir brusquement au cou, ou pour les prendre rapidement par la queue : de quelque force que jouisse l'a- ]iimal , il ne peut pas se redresser et se replier assez pour blesser la main avec laquelle on le tient suspendu.

L'on ignore quelle est la durée de la vie des vipères ; mais comme ces ani- maux, n^ont acquis leur entier accroisse- ment qu'après six ou sept ans , on doit conjecturer qu'ils vivent , en général , d'autant plus de tenips , que leur vie est ,

DES COULEUVRES. 229

pour ainsi dire , très-tenace , et qu'ils résistent aux blessures et aux coups beau^ coup plus peut-être qu'un grand nonilire d'autres serpens. Plusieurs parties de ieui? corps , tant intérieures qu'extérieures , se meuvent , eu effet , et , pour ainsi dire , exercent encore leurs fonctions lorsqu'elles sont séparées de l'animal. Le cœur des vipères palpite long - temps après avoir été arraché , et les muscles de leurs mâchoires ont encore la faculté d'ouvrir la gueule et de la refermer lorsque cependant la tête ne tient plus au corps depuis quelque temps. On pré- tend même que ces muscles peuvent exercer cette faculté avec assez de force pour exprimer le venin de la vipère ^ serrer fortement la main de ceux qui manient la tête , faire pénétrer jusqu'à leur sang le poison de l'animal ; et comme lorsqu'on coupe la tête des vipères pour les employer en médecine, on la jette ordinairement dans le feu , ou assure que plusieurs personnes ont éio mordues par cette tète perdue dans^ les cendres , même quelques heures après

S^rpcns. III. Ï9

23o HISTOIRE NATURELLE

sa séparation du tronc , et qu'elles ont éprouvé des accidens très-graves *.

Il est d'ailleurs assez difficile d'étouffer' la vipère commune : quoiqu'elle n'aille pas naturellement dans l'eau , elle peut y vivre quelques heures sans périr; lors même qu'on la plonge dans de l'esprit- de-vin , elle y vit trois ou quatre heures et peut - être davantage , et non seule- ment son mouvement vital n'est pas alors tout-à-fait suspendu, mais elle doit jouir encore de la plus grande partie de ses facultés , puisqu'on a vu des vipères que l'on avoit renfermées dans un vase plein d'esprit-de-vin , s'y attaquer les unes les autres et s'y mordre , trois ou quatre heures après y avoir été plongées. Mais,

* Plusieurs personnes maniant impruderanieDt des vipères, tant communes que d'autres espèces, desséchées ou conservées dans l'espril-de-vin, se sont blessées à leurs crochets, encore remplis de venin , tres-long-temps et même plusieurs années uprcs la mort de l'animal j le venin , dissous par le sang sorti de la blessure , s'est échappé par le trou de la dent, a pénétré dans la plaie et a donné ht mcM't.

DES COULEUVRES. 23i

malgré cette force avec laquelle elles résistent , pendant plus ou moins de temps , aux effets des fluides dans lesquels on les enfonce , ainsi qu'aux blessures et aux amputations , il paroît que le tabac et riiuile essentielle de cette plante leur donnent la mort , ainsi qu'à plusieurs autres serpens. L'huile du laurier-cerise leur est aussi très-funeste , lors même qu'on ne fait que l'appliquer sur leurs muscles , mis à découvert par des bles- sures.

432 HISTOIRE NATURELLE

LA VIPERE C H ERSE A.

\-jE serpent a d'assez grands rapports avec la vipère commune , que nous ve- nons de décrire : il habite également l'Europe , mais il paroît qu'on le trouve principalement dans les contrées septen- trionales ; il y est répandu jusqu'en Suède , oij il est même très-venimeux, 3VI. Wulf l'a observé en Prusse. Cette vipère a comuiunément au - dessous du corps cent cinquante plaques très-langues, et trente-quatre paires de petites plaques au-dessous de la queue. Les écailles dont son dos est garni , sont relevées par une petite arête longitudinale; sa couleur est d'un gris d'af^ier : on voit une tache noire en forme de cœur sur le sommet de sa tête , qui est blanchâtre , et sur son dos règne une bande formée par une suite de taches noires et rondes qui se»

DES COULEUVRES.' 233

touclieut eu plusieurs endroits du corps. Elle se tient ordinairement dans les lieux garnis de broussailles ou d'arbres touffus; on la redoute beaucoup aux environs d'Upsal. M. Linné ayant rencontré , dans un de ses voyages , en diverses parties de la Suède , une femme qui veuoit d'être mordue par une cliersea , lui fit prendre de l'huile d'olive à la dose prescrite contre la morsure de la vipère noire : mais ce remède fut inutile , et la femme mourut. On trouvera dans la note suivante* les

* « La vipère œspivg est irès-veniiueuse , et « l'huile ne suffit pas pour en arrêier l'eifet : les « racines du mongos, du mogori, du polygala se- K ueka , gucriroient sans doute en ce cas ; mais ejles o sont extrêmement rares en Europe , et il faut des « remèdes faciles et peu chers dans les campagnes^ « ces accidens arrivent toujours.

« Un paysan fut mordu par un scsping au petit « doigt du pied gauche; six heures après, le pied, o la jambe et la cuisse étoient rouges et enflés , le « pouls petit et intermittent; le malade se plaignoit « de mal de tête , de tranchées , de mal-aise dans le « bas-ventre , de lassitude , d'oppression ; il pleuroit tt souvent et n'avoit point d'apptiit ; ces sympiôuics

19

234 HISTOIRE NATURELLE divers autres remèdes auxquels ou a evt

c prouvoîent que ]e poison étoit déjà répandu dans « loute la masse du sauc

« Ou avoit éprouvé plusieurs fois que le suc des « feuilles du frêne étoit un spécifique certain contre « la morsure de la couleuvre bérus , mais on igno- « roit s'il réussiroit contre celle de l'airspîng : comme « ou n'avoit aucun remède plus assuré que l'on pût o employer à temps, on mit dans un mortier une « poignée de leuilles de frêue, tendres et coupées « menu ; on y versa un verre de vin de France , ou « eu exprima le suc à travers un linge , et le ma- « lade en but un verre de demi-beure en demi- * beure ; on appliqua de plus sur le pied mordu « un cataplasme de feuilles écrasées cle la même « plante; vers dix beures du soir on lui fit boire une- « lasse d'buile cbaude.

« Il dormit assez bien pendant la nuit , et se « trouva beaucoup mieux le lendemain ; la cuisse « n*étoit plus enflée, mais la jambe et le pied a l'éloient encore un peu. Le malade dit qu*il ne « sentoit plus qu'une légère oppression çt de la « foiblesse j le pouls étoit plus fort et plus égal. « On lui conseilla de continuer le suc de frêne et K l'huile; comme il se trouvoit mieux, il le négli- «fgea, et les symptômes qui revinrent tous, furent

DES COULEUVRES. 235

recours en Suède contre le venin de la chersea , que Ton y nomme œspiug.

« dissipés de nouveau par le même remède. Dans ' « cette espèce de rechûie, il parut sur les membres ■• enflés des raies bleuâtres ; le pouls étoit foible et ^ « presque tremblant : on fit prendre de plus le soir, « au malade , une petite cuillerée de tliériaque ; il « sua beaucoup dans la nuîtj les raies bleues, la « rougeur et la plus grande partie de l'enflure se « dissipèrent ; le pouls devint égal et plus fort , l'ap- « petit revint. Les mêmes remèdes furent couti- « nues , et ne laissèrent au pied qu'un peu de roi- ' « deur avec un peu de sensibilité au petit doigt « blessé ; Tune et l'autre ne durèrent que deux « jours, et on cessa les remèdes.

« Le malade étoit jeune, mais il avoit beaucoup €t d'âcreté dans le sang : il est vraisem])lable que Je « suc de feuilles de frêne seul l'auroit guéri ; mais « comme on n'étoit pas certain de sou efficacité , ou « y ajouta la thériaque et l'huile , qui du moins ne « pouvoient pas nuire.» ( Lars Montin, médecin , Mémoires abrégés de l'académie de Stockholm, Colleclio7i académique, partie étrangère j tome XI 5 pages 3oo et 3oi. )

236 HISTOIRE NATURELLE

L^ A S P I C.

V^'est en Fiance , et particulièrement dans nos provinces septentrionales , qu'on, trouve ce serpent. Plusieurs grands natu- ralistes ont écrit qu'il n'étoit point veni- meux. 5 mais les crochets mobiles , creui^ et percés , dont nous avons vu sa mâ- choire supérieure garnie , nous ont fait préférer l'opinion de M. Linné , qui le regarde comme contenant un poison très-dangereux. Nous le plaçons donc à la suite de la chersea , avec laquelle il a de si grands rapports de conforma- tion , qu'il pourroit bien n'en être qu'une variété , ainsi que l'a soupçonné aussi M. Linné ; mais il paroît qu'il est cons- tamment plus grand que cette vipère : l'individu qui est conservé au Cabinet du roi , a trois pieds de long depuis le bout du museau jusqu'à Textrémité de Iq, q^ueue j dont la longueur est de tjoi^

Ti^??i 3

J7^ . 7^r./ 23o

y LASPIC

^LA LISSE

I y^^Kiimét ^

DES COULEUVRES. 23?

pouces huit ligues. Nous avons compté cent ciuquante-ciuq grandes plaques sous le corps , et trente-s^pt paires de petites plaques sous la queue. Ce nombre n'est pas le même dans tous les individus , et l'aspic dont ou trouve la description dans le Système de Ici Nature de ]M. Linné, avoit cent quarante-six grandes plaques , et quarante-six paires de petites.

La mâchoire supérieure de l'aspic est armée de crochets , ainsi que nous venons de le dire ; les écailles qui revêtent le dessus de la tête, sont semblables à celles du dos , ovales et relevées dans le milieu par une arête. On voit s'étendre sur le dessus du corps trois rangées longitu-^ d in aies de taches lousses , bordées de noir ; ce qui fait paroîtrc la peau de Taspic tigrée , et a fait donner à ce reptile , dans plusieurs cabinets , le nom de serpent tigré. Les trois rangées de taches se réu- nissent sur la queue , de manière à repré- senter une bande disposée en zigzag ; et par-là les couleurs de l'aspic ont quelque rapport avec celles de la vipère commune, à laquelle il ressemble aussi par les teiutc!»

233 HISTOIRE NATURELLE

du dessous de son corps , marbré de foncé et de jaunâtre.

Il paroît que les anciens n'ont point connu l'aspic de nos contrées ; car il ne faut pas le confondre avec une espèce de vipère dont nous parlerons sous le nom de W/?é/e d'Egypte , que les anciens nommoient aussi aspic , et que la mort d'une grande reine a rendue fameuse. Afin, même d'empêcher qu'on ne prît le serpent dont il est ici question , pour celui d'E- gypte , nous n'aurions pas donné à ce reptile des provinces septentrionales le nom d'aspic , attribué par les anciens à une vipère venimeuse des environs d'A- lexandrie , si tous les observateurs ne s'étoient accordés à le nommer ainsi.

DES COULEUVRES. 289

LA VIPERE NOIRE.

Voici encore une espèce de serpent venimeux , assez nombreuse dans plu- sieurs contrées de l'Europe , et qui a beaucoup de rapports avec notre vipère commune ; il est aisé cependant de l'en distinguer , même au premier coup d'œil , à cause de sa couleur , qui est presque toujours noire, ou du moins très-foncée avec des points blancs sur les écailles qui bordent les mâchoires. Quelquefois on apperçoit sur ce fond noir , des taches pkis obscures encore , à peu près de la même forme et disposées dans le même ordre que celles de la vipère commune; et voilà pourquoi les naturalistes ont pensé que la vipère noire n'en est peut- être qu'une variété plus ou moins cons- tante. Quoi qu'il en soit , c'est de toutes les vipères une de celles qu'on doit voir avec le plus de peine , puisqu'elle

240 HISTOIRE NATURELLE réunit une couleur lugubre aux traits sinistres de leur conformation , et qu'elle porte , pour ainsi dire , les livrées de la mort , dont elle est le ministre.

Le dessus de sa tète n'est pas entière-^ ment couvert d'écaillcs semblables à celles du dos, ainsi que le dessus de la tête de la vipère commune : mais on remarque entre les deux yeux trois écailles un peu plus grandes , placées sur deux rangs , dont le plus proche du museau ne con- tient qu'une pièce ; et , par ce trait , la vi- père noire se rapproche des couleuvres ovipares plus que les autres vipères dont nous venons de parler.

Les écailles du dos sont ovales et rele- vées par une arcte. Un des individus que nous avons observés , et qui est conservé au Cabinet du roi, a deux pieds neuF lignes de longueur totale , et deux pouces quatre lignes depuis l'anus jusqvi'à Tex- trémité de la queue. Nous avons compté cent quarante-sept grandes plaques au^ dessous du corps , et vingt-huit paires de petites plaques au-dessous de la queue. Uu autre individu que nous avons \u,

DES COULEUVRES. ^4* et que Pou disoit apporté de la Louisiane ^ avoit cent quarante-cinq grandes plaques, et trente-deux paires de petites. Celui que M. Linné a décrit avoit cent cinquante- deui de ces grandes lames , et trente-deux paires de petites plaques ; et ces lames sont quelquefois si luisantes, que leur «clat ressemble assez à celui de Tacier.-

On se sert de la vipère noire dans les pharmacies d'Angleterre , au lieu de la vipère commune. Elle est en assez grand nombre dans les bois qui bordent VOka, rivière de l'empire de Russie qui se jette dans le Wolga ; elle y est très- venimeuse et y présente quelques taches jaunes sur le cou et sur la queue. On la trouve aussi eu Allemagne , et particulièrement dans les montagnes de Schneebcrg : M. Lauren t, qui l'y a observée , ne la croit pas très- dangereuse ; mais comme il n'a fait des expériences sur les effets de sa morsure que dans les premiers jours de novembre, et par conséquent au commencement de riiiver , qui diminue presque toujours l'action du venin des animaux , il se poin- •>oit que, pendant les grandes clialcuis,

iîO

S42 HISTOIRE NATURELLE

le poison de la vipère noire fût aussi re- doutable en Allemagne que dans presque toutes les autres contrées qu'elle habite. Quelquefois elle menace , pour ainsi dire , son ennemi par des sifflemens plusieurs fois répétés; mais d'autres fois elle se jette tout-à-coup et avec furie sur ceux qui l'attaquent , ou sur les animaux dont elle veut faire sa proie.

DES COULEUVRES. 243

LA MÉLANIS.

C'est sur les bords du Wolga et de la Samara qui se jette dans ce grand fleuve , que l'on rencontre la mélanis , dont M. Pallas a parlé le premier. Elle s'y plaît dans les endroits humides et marécageux au milieu des végétaux pourris. Elle res- semble beaucoup à la vipère commune par sa conformation extérieure , sa gran- deur et celle de ses crochets ; mais elle eu diffère par ses couleurs. Son dos est d'un noir très-foncé ; les écailles du des- sous du ventre présentent une sorte d'é- clat semblable à celui de l'acier : sur ce fond très-brun on remarque des taches plus obscures, et des deux côtés du corps, ainsi que vers la gorge, on voit des teintes comme nuageuses, qui tirent sur le bleu. Ses yeux sont d'un blanc éclatant qui donne plus de feu à l'iris, dont la cou- leur est rousse. Lorsque la prunelle est

244 HISTOIPvE NATURELLE resserrée , elle est aloiigée verticalement. La queue est courte et diminue de gros- seur vers sou extrémité. Cette espèce a communément cent quarante-huit pla» ques sous le ventre , et vingt-sept paires de petites plaques revêtent le dessous de §a queue.

DES COULEUYRES. 245

LA SCHYTHE.

VJETTE couleuvre est une de celles qui ne craignent pas des froids très -rigou- reux ; on la trouve en efl'et dans les bois qui couvrent les revers des hautes mon- tagnes de la Sibérie, même des plus sep- tentrionales ; aussi M. Pallas , qui l'a fait connoître le premier, dit-il que son venin n'est pas très-dangereux. Elle a beaucoup de rapports avec la vipère commune par sa conformation , et avec la mélanis par sa couleur. Son dos est d'un noir très-fon- cé , comme le dessus du corps de cette dernière ; mais le dessous du ventre et de la queue est d'un blanc-de-lait très-écla- tant. Sa tête a un peu la forme d'un cœur ; l'iris est jaunâtre. Elle a ordinairement cent cinquante-trois grandes plaques sous le corps , et trente-une paires de petites plaques sous la queue. La longueur de cette dernière partie est un dixième de la longueur totale , qui communément est de plus d'un pied et demi.

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246 HISTOIRE NATURELLE

LA VIPERE D'EGYPTE.

J. ous ceux qui ont donné des larmes au récit de la mort funeste d'une reine célèbre par sa beauté , ses richesses , son amour et son infortuue, liront peut-être avec quelque plaisir ce que nous allons écrire du serpent dont elle choisit le poi- son pour terminer ses malheurs. Le nom de Cléopatre est devenu trop fameux pour que Tintérét qu'il inspire ne se répande pas sur tous les objets qui peuvent rappe- ler le souvenir de cette grande souveraine de l'Egypte, que ses charmes et sa puis- sance ne purent garantir des plus cruels revers ; et le simple reptile qui lui donna la mort , pourra paroître digne de quelque attention à ceux même qui ne recherchent qu'avec peu d'empressement les détails de l'histoire naturelle. C'est M. Hassciquist qui a fait connoître cette vipère, qu'il a dccrite dans sou Voyage en Egypte' Elle a

DES COULEUVRES. 247

îa tête relevée en bosse des deux côtés der- rière les yeux. Sa longueur est peu consi- dérable ; les écailles qui recouvrent le dessus de son corps sont très -petites ; son dos est d'un blanc livide , et présente des taches rousses ; les grandes plaques qui revêtent le dessous de son corps sont au nombre de cent dix-huit , et le dessous de la queue est garni de vingt-deux paires de petites plaques.

Les anciens ont écrit que son poison , quoique mortel, ne causoit aucune dou- leur ; que les forces de ceux qu'elle avoit miordus , s'afiFoiblissoient insensiblement ; qu'ils tomboient dans une douce lan- gueur et dans une sorte d'agréable repos , auquel succédoit un sommeil tranquille qui se terminoit par la mort ; et voilà pourquoi ou a cru que la reine d'Egypte, ne pouvant plus supporter la vie après la mort d'Antoine et la victoire d'Auguste, avoit préféré de mourir par l'effet du ve- nin de cette vipère. Quoi qu'il en soit des •suites plus ou moins douloureuses de sa morsure , il paroît que son poison est des plus actifs. C'est ce serpent dont on

£48 HISTOIRE NATUPxELLE

emploie diverses préparations en Egypte^ comme nous employons en Europe celle» de la vipère commune ; c'est celui qu'on y vend dans les boutiques , et dont on se sert pour les remèdes connus sous les noms de sel de vipère , de chair de vipère desséchée , etc. Suivant M. Hasselquist, on envoie tous les ans à Venise une grande quantité de vipères égyptiennes, pour la composition de la tliériaque ; et dès le temps de Lucain , on en faisoit venir à Rome pour la préparation du même re- mède. C'est cet usage, continué jusqu'à nos jours , qui nous a fait regarder la ■vipère d'Egypte comme celle dont Cléo- patre s'étoit servie. Toutes ses descriptions sont d'ailleurs très-conformes à celle que nous trouvons de l'aspic de Cléopatre dans les anciens auteurs , et particuliè- rement dans Lucain ; et voilà pourquoi nous avons préféré, à ce sujet, l'opi- nion de M. Laurent et d'autres natura- listes à celle de M. Linné , qui a cru que le serpent dont le poison a donné la mort à la reine d'Egypte , étoit celui qu'il a nommé l'ammody te f et dont nous allons nous occuper.

DES COULEUVRES. z^tx

Il paroît que c'est aussi à cette Tipère- qu'il faut rapporter ce que Pline a dit de l'aspic , et la belle peinture qu'a faite ce grand écrivain de rattachement de ce rep- tile pour sa femelle , du courage avec le- quel il la défend lorsqu'elle est attaquée., et de Ja fureur avec laquelle il poursuit- teux qui l'ont mise à m.ort.

25o HISTOIRE NATURELLE

L'AMMODYTE*.

Lt-ES anciens, et sur-tout les auteurs du moyen âge, ont beaucoup parlé de ce serpent très- venimeux , qui habite plu- sieurs contrées orientales , et que Ton trouve dans plusieurs endroits de l'Italie, ainsi que de l'IUyrie , autrement Escla- Vonie. Son nom lui vient de l'habitude qu'il a de se cacher dans le sable, dont la couleur est à peu près celle de son dos , varié d'ailleurs par un grand nombre de taches noires , disposées souvent de ma- nière à représenter une bande longitudi- nale et dentelée ; ce qui donne aux cou- leurs de l'ammodyte une très-grande res- semblance avec celles de la vipère com- mune, dont il se rapproche aussi beau- coup par sa conformation : mais sa tête est ordinairement plus large, à proportion

Cenchrias, cerchrias, cynchrias, miUaris, 9'ipère cornue d'Illjrie, aspide del corno.

"DES COULEUVRES. ^5t

du corps, que celle de notre vipère; et d'ailleurs il est fort aisé de le distinguer de toutes les autres couleuvres connues , parce qu'il a sur le bout du museau une petite éminence , une sorte de corne , liante communément de deux lignes , mobile en arrière , d'une substance char- nue , couverte de très-petites écailles , et de chaque côté de laquelle on voit deux tubercules un peu saillans , placés aux orifices des narines : aussi a-t-il été nom- mé , dans plusieurs contrées , aspic cornu. Sa morsure est en effet aussi dangereuse que celle du serpent venimeux nommé aspic par les anciens : et Ton a vu des gens mordus par ce serpent mourir trois heures après ; d'autres ont vécu cepen- dant jusqu'au troisième jour, et d'autres même jusqu'au septième. Les remèdes qu'on a indiqués contre le venin de l'am- inodyte, sont à peu près les mêmes que ceux auxquels on a eu recours contre la morsure des autres serpens venimeux *.

* Yoyez, dans l'article de la vipère commune y un exlraii des expcrientês de M. l'abbé Foutana au aujet du poison de ce serpent.

252 HISTOIRE NATURELLE On a employé rapplicatiou des ventouse*;, les incisions aux environs de la plaie , la compression des parties supérieures à Teiidroit mordu, ragrandissement de la blessure ^ les boissons qu'on fait avaler contre les poisons pris intérieurement , les emplâtres dont ou se sert pour prévenir ou arrêter la putréfaction des chairs , etc. Ce reptile est couvert, sous le ventre, de cent quarante-deux grandes plaques , et sous la queue, de trente deux paires de petites ; le dessus de sa tête est garni de petites écailles ovales , unies et presque «emblables à celles du dos. La queue est très-courte, à proportion du corps , qui n'a ordinairement qu'un demi -pied de

dong

L'a.mmod37te se nourrit souvent de lé- zards et d'autres animaux aussi gros qut3 lui , mais qu'il peut avaler avec facilité , à cause de l'extension dont son corps est susceptible.

Il paroît que c'est à cette espèce , au développement de laquelle un climat trèsj- chaud peut être très-nécessaire, qu'il faut rapporter les serpens cornus de la côte

DES COULEUVRES. 253

d'Or , dont a parlé Bosmaii , quoique ces derniers soient beaucoup plus grands que l'animodyte d'Esclavonie. Ce vo3-agcur vit, au fort lioUaudois d'Axim, la dé- l^ouille d'uu individu de cette espèce de scrpens cornus ; ce reptile étoit de la gros- ^eiw du bras , long de cinq pieds, et rayé pu tacheté de noir , de brun , de blanc et de jaune , d'une manière très-agréable à Foeil. Suivant Bosnian , ces scrpens ont pour arme offensive une fort petite corne , ou plutôt une dent qui sort do Ja uiâclioire supérieure , auprès du nez ; elle est blanche , dure et très-pointue. Il ■arrive souvent aux nègres, qui vont nud- picds dans les champs , de marcher impu- nément sur ces animaux; car ces reptiles avalent leur proie avec tant d'avidité , et tombent ensuite dans un sommeil si pro- fond, qu'il faut un bruit assez fort, et même un mouvement assez grand, poui" les réveiller.

2i

S54 HISTOIRE NATURELLE

LE CERASTE*.

\J N a donne ce nom à un serpent veni- meux d'Arabie , d'Afrique , et particu-* lièrement d'Egypte , qui a été envoyé au Cabinet du roi sous le nom de pîpère cor- nue : il est très-remarquable et très-aisé à distinguer par deux espèces de petites cornes qui s'élèvent au-dessus des yeux. C'est apparemment cette conformation qui, jointe à sa qualité vénéneuse, et peut-être à ses habitudes naturelles, l'aura fait observer avec attention par les premiers Égj^ptiens , et les aura déter- minés à faire placer de préférence sou image parmi leurs diverses figures hiéro- glyphiques. On le trouve gravé sur les iiionumens de la plus haute antiquité que le temps laisse encore subsister sur cette fameuse terre d'Egypte : on le voit

* j!4lp et àc^, en Égypie^ cerasies , cerislalis.

DES COULEUVRES. 255

seprésenté sur les obélisques , sur les co- lonnes des temples, aux pieds des statues, sur les luurs des palais , et jusque sur les momies. Un double intérêt anime donc la curiosité relativement au cé- raste. Une conuoissance exacte de ses pro- priétés et de ses mœurs , non seulement doit être recherchée par le naturaliste , mais serviroit peut-être à découvrir en partie le sens de cette langue religieuse et politique , qui nous transmettroit les antiques événemens et les antiques opi- nions des célèbres et belles contrées de l'Orient, Si Ton ne peut pas encore expo- ser toutes les habitudes naturelles du cé- raste , faisons donc connoître exactement sa forme, et décrivons-le avec soin d'après les individus que nous avons examinés. Les opinions des naturalistes anciens et modernes ont fort varié sur la nature ainsi que sur le nombre des cornes qui distinguent le céraste : les uns ont dit qu'il en avoit deux , d'autres quatre , et d'autres huit , qu'ils ont comparées aux espèces de petites cornes, ou, pour mieux dire 5 aux. tentacules des limaçons et,

256 HISTOIRE NATURELLE

d'autres animaux de la classe des Ters. Quelques auteurs les ont regardées comme des dents attachées à la mâchoire supérieure : quelques autres ont écrit que le céraste n'avoit point de cornes ; que celles qu'on avoit vues sur la tête de quelques individus n'étoient point naturelles , mais l'ouvrage des Arabes , qui plaçoient avec art des ergots sur crâne du reptile, pour le rendre extraor- dinaire, et le faire vendre plus cher. II se peut que l'on ait quelquefois attaché à de vrais cérastes, de petites cornes artifi- cielles. Il se peut aussi que ces serpens ayant été fort recherchés , on ait vendu pour des cérastes , des reptiles d'une autre espèce qui leur auront à peu près, ressemblé par la couleur, et auxquels on aura appliqué de fausses cornes. Mais le vrai serpent-céraste a réellement au-des- sus de chaque œil un petit corps pointu et alongé , auquel le nom de corne me paroît mieux convenir qu'aucun autre. M. Linné a donné le nom de dents molles à ces petits corps placés au-dessus des yeux du serpent que nous décrivons : mais ce

DES COULEUVRES. 257 ttoïn de dent ne nous paroît povivoir ap- paiteiiir qu'à ce qui tieut aux mâcboires inférieures ou supérieures des animaux ; et après avoir examiné les cornes du cé- raste, eu avoir coupé une en plusieurs parties , et en avoir suivi la prolongation jusqu'à la tête, nous nous sommes assu- rés que bien loin de tenir à la mâchoire supérieure , ces cornes ne sont attachées à aucun os : aussi sont-elles mobiles à la "volonté de ranimai.

Chacune de ces cornes est placée préci- sément au-dessus de Tœil , et comme im- plantée parmi les petites écailles qui forment la partie supérieure de l'orbite; sa racine est entourée d'écaillés plus pe- tites que celles du dos , et elle représente une petite pyramide quarrée dont chaqud face seroit sillonnée par une rainure lon- gitudinale et très-sensible. Elle est com- posée de couches placées au-dessus les lin es des autres , et qui se recouvrent entièrement. Nous avons enlevé facile- m^ent la couche extérieure, qui s'en est séparée en forme d'épiderme , en présen- tant toujours quatre côtés et quatre rai-

21

258 HISTOIRE NATURELLE

nures , ainsi que la couche inférieure ^ que nous avons mise par-là à couverte Cette manière de s'exfolier est semblable à celle des écailles , dont Tépiderme ou la couche supérieure se sépare égale- ment avec facilité après quelque altéra» tion. Aussi regardons-nous la matière de ces cornes comme de même nature que celle des écailles; et ce qui le confirme y c'est que nous avons vu ces petites émi- iiences tenir à la peau de la même ma-, nière que les écailles y sont attachées. Au reste, ces cornes mobiles sont un peu courbées , et avoicnt à peu près deux: lignes de longueur dans les individus que. nous avons décrits.

La tête des cérastes est applatie , le museau gros et court , Tiris des yeux d'un verd jaunâtre, et la prunelle, lorsqu'elle est contractée , forme une fente perpen- diculaire à la longueur du corps ; le der- rière de la tête est rétréci et moins large que la partie du corps à laquelle eîlo tient ; le dessus en est garni d'écailîcs égales en grandeur à celles du dos, ou îucme quelquefois ] lus petites que ces

DES COULEUVRES. 269

dernières , qui sont ovales et relevées par une arétc saillante.

Nous avons compté sur deux individus de cette espèce cent quarante-sept grandes plaques sous le ventre , et soixante-trois petites plaques sous la queue. Suivant M. Linné , un serpent de la même espèce avoit cent cinquante grandes plaques, et TÎngt-cinq paires de petites. Hassclquist a compté sur un autre individu cinquante paires de petites plaques , et cent cin-^ quante grandes. Voilà donc une nouvelle preuve de ce que nous avons dit touchant la,variation du grand nombre des grandes et des petites plaques dans la même es- pèce de serpent ; mais comme il iiC faut négliger aucun caractère dans un ordre d'animaux dont les espèces sont en géné-r rai très-difficiles à distinguer les unes des autres , nous croyons toujours nécessaire de joindre le nombre des grandes et des petites plaques aux autres signes de la différence des diverses espèces de reptiles.

La couleur générale du dos est jau- nâtre, et relevée par des taches irrégu- lières plus ou moins foncées , c|ui repré-»

a6o HISTOTHE NATURELLE

sentent de petites bandes transversales; celle du dessous du corps est plus claire.

Les individus que nous avons mesurés avoient plus de deux pieds de long ; ils présentoient la grandeur ordinaire de cette espèce de serpent. La queue n'avoit pas cinq pouces; elle est ordinairement très- courte en proportion du corps dans le cé- laste, ainsi que dans la vipère commune.

Le céraste supporte la faim et la soif pendant plus de temps que la plupart des autres serpens : mais il est si goulu , qu'il se jette avec avidité sur les petits oiseaux et les autres animaux dont il fait sa proie ; et comme , suivant Belon , sa peau peut se prêter à une très-grande distension , et son volume augmenter par-là du double , il n'est pas surprenant qu'il avale une quantité d'alimens si considérable, que sa digestion devenant très - difficile , tombe dans une sorte de torpeur et dans un sommeil profond , pendant lequel il est fort aisé de le tuer.

La plupart des auteurs anciens ou du moyen âge ont pensé qu'il étoit un des Serpens qui peuvent le plus aisément

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retourner en divers sens , et ils ont écril qu'au lieu de s'avancer eu droite ligne , il n'alloit jamais que par des circuits plus ou moins tortueux , et toujours, onl-ils ajouté, en faisant entendre une sorte de petit bruit et de sifflement par le choc de ses dures écailles. Mais de quelque ma- îiicre et avec quelque vitesse qu'il rampe , il lui est difficile d'échapper aux aigles et eux grands oiseaux de proie qui fondent sur lui avec rapidité , et que les Egyptiens ndoroient , suivant Diodore de Sicile , parce qu'ils les délivroient de plusieurs bêtes venimeuses , et particulièrement des cérastes. Ces serpens cependant ont tou- jours été regardés comme très-rusés , tant pour échapper à leurs ennemis que pour se saisir de leur proie ; on les a même Dommés insidieux , et l'on a prétendu qu'ils se cachoient dans les trous voisins des grands chemins , et particulièrement dans les ornières , pour se jeter à l'impro- viste sur les voyageurs.

C'est principalement avec cette espèce de serpens que les Libyens connus sous le nom dc' Ps;ylles prétendoient avoir \t

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Les individus que nous avons mesurés avoient plus de deux pieds de long ; ils piésentoient la grandeur ordinaire de cette espèce de serpent. La queue n'a voit pas cinq pouces; elle est ordinairement très- courte en proportion du corps dans le cé- raste, ainsi que dans la vipère commune.

Le céraste supporte la faim et la soif pendant plus de temps que la plupart des autres serpens : mais il est si goulu , qu'il se jette avec avidité sur les petits oiseaux et les autres animaux dont il fait sa proie ; et comme , suivant Belon , sa peau peut se prêter à une très-grande distension , et sou volume augmenter par-là du double , il n'est pas surprenani qu'il avale une quantité d'alimens si considérable, que sa digestion devenant très - difficile , ii tombe dans une sorte de torpeur et dans un sommeil profond , pendant lequel il est fort aisé de le tuer.

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C'est principalement avec cette espèce de serpens que les Libyens connus sous le nom de' P$.ylles prétendoient avoir It

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262 HISTOIRE NATURELLE droit de jouer impunément, et dont ils assuroieut qu'ils maîtrisoient à leur to- lonté et la force et le poison.

Les cérastes, ainsi que tous les rep- tiles, peuvent vivre très-iong-temps sans manger ; plusieurs auteurs l'ont écrit , et ou a même beaucoup exagéré ce fait, puisqu'on a cru qu'ils pouvoient vivre cinq ans sans prendre au( une nourriture. Belon assure que les petits cérastes cclosent clans le ventie de leur mère ainsi que ceux de notre vipère commune ; mais nous croyons devoir citer un fait qui paroît contredire cette assertion , et que Gesner rapporte dans son livre de la nature des serpens , d'après un de ses cor- respondans, qui en avoit été témoin à Venise. Un noble Vénitien conserva pen- dant quelque temps , et auprès du feu , trois serpens qu'on lui avoit apportés du pays l'on trouve les cérastes, l'un femelle , et trois fois plus grand que les autres, avoit trois pieds de long, presque de la grosseur du bras, la tête comprimée et large de deux doigts , l'iris noir, les écailles du dos cendrées et noirâtres do.iis

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DES COULEUVRES. 26'"

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leul' partie supérieure , la queue un peu rousse et terminée en pointe , et une corne de substance écailleuse au - dessus de chaque œil. Gesner le regarda comme de l'espèce des cérastes , dont il nous paroît en effet avoir eu les principaux carac- tères. Il pondit dans le sable quatre ou. cinq œufs à peu près de la grosseur de ceux de pigeon. Les rap .orts de confor- mation , de qualité vénéneuse et d'habi- tudes qui lient le céraste avec la vipère commune, ainsi qu'avec un grand nombre d'autres vipères dont la manière de venir au jour est bien connue, nous feroient adopter de préférence l'opinion fondée sur l'autorité de Btlon , qui a beaucoup voyagé dans le pays habité par les cé- rastes ; mais comme il pourroit se faire que les deux manières de venir à la lu- mière fussent réunies dans quelques es- pèces de serpens , ainsi qu'elles le sont dans quelques espèces de quadrupèdes ovipares , et qu'il seroit bon de bien dé- terminer si tous les animaux armés de crochets venimeux éclosent dans le ventre de leur mère , et même sont les seuls qui

Sl64 histoire NATURELLE lie pondent pas , nous invitons les voya- geurs qui pourront observer sans danger les cérastes, à s'assurer de la manière dont naissent leurs petits.

Hérodote a parlé des serpens consacrés par les habitans de Thèbes à Jupiter , ou , pour mieux dire , à la divinité égyptienne qui répondoit au Jupiter des Grecs ; ou les enterroit après leurmortdans le temple de ce dieu; et , suivant le père de lliis-. toire , ils avoient deux cornes , mais ne faisoient aucun mal à personne. Si Héro- dote n'a point été trompé , on devroit les regarder comme d'une espèce différente de celle du céraste ; mais il est assez vrai- semblable qu'on l'avoit mieux informé de la conformation que des qualités de ces serpens , qu'ils étoieiit venimeux comme le céraste , qu'ils appartcnoient à la même espèce, et que la force de leur poison, qui avoit paroître aux anciens donner la mort presque aussi prompte- ment que la foudre du maître des dieux , avoit peut-être été un motif de plus pour les consacrer à la divinité que l'on croyoit lancer 1& tonueire.

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DES COULEUVRES. 265

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LE SERPENT A LUNETTES

DES Ix^îDES ORIENTALES,

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Xja beauté des couleurs a été accordée à ce serpent , Fuu des plus veuiuieux des contrées orientales. Bien loin que sa vue inspire deTeflroi à ceux qui neconiioissent pas l'activité de son poison, on le con- temple avec une sorte de plaisir , on l'ad- mire ; et , pendant que le brillant de ses écailles , ainsi que la vivacité des couleurs dont elles sont parées, attachent les re- gards , la forme singulière du reptile attire l'attention : on a même cru voir sur sa tête une ressemblance grossière avec les

* Cobra de cabelo ou de capello , par les Por- tugais.

Strpins. III. 22

£66 HISTOIRE NATURELLE

traits de rhouime ; et voilà donc l'image la plus noble qui a pu paroître légèrement emoreinte sur la face d'un reptile veni- meux. Ce contraste a plaire à l'imagi- nation des Orientaux, toujours amis de l'extraordinaire ; il a peut-être séduit les premiers voyageurs qui ont vu le serpent à lunettes , et ils ont peut-être éprouvé une sorte de satisfaction à retrouver quel- ques traits de la figure humaine sur un être aussi malfaisant, de même que les anciens poètes se sont presque tous accor- dés à donner ces mêmes traits augustes aux monstres terribles et fabuleux, enfaus de leur génie , et non de la Nature.

Mais sur quoi peut être fondée cette légère apparence ? sur une raie d'une couleur diflcrente de celle du corps de l'animal, et qui est placée sur le cou du serpent à lunettes , s'y replie en avant des deux côtés , et se termine par deux espèces de crochets tournés en dehors. Ces cro- chets colorés sont quelquefois prolongés de manière à former un cercle; faisant ressortir la couleur du fond qu'ils ren- ferment , ils ressemblent imparfaitement

DES COULEUVRES. 267 à deux yeux, au-dessus desquels la ligne recourbée , semblable aux traits grossiers, aux premières ébauches des jeunes dessi- nateurs , représente vaguement un nez ; et ce qui a ajouté à ces légères ressem- blances , c'est qu'elles se montrent sur la partie antérieure du tronc ou sur le cou du serpent, et que cette partie antérieure est tellement élargie et applatie , propor- tionnellement au reste du corps, qu'elle paroît être la tète de l'animal. L'on croit de loin voir les yeux des serpens au mi- lieu de ces crochets de couleurs vives dont BOUS venons de parler , quoique cepen- dant la véritable tête oii sont réellement les yeux et les narines , soit placée au-de- vant de cette extension singulière du cou, La ligne recourbée et terminée par deux crochets ressemble assez à des lunettes , et c'est ce qui a fait donner depuis au serpent naja le nom de ser- pent à lunettes , que nous lui conser- vons ici. Mais pour mieux distinguer le reptile dont nous traitons dans cet ar- ticle , et qui habite les grandes Indes , 4,' avec les serpens à lunettes d'Amérique,

268 HISTOIRE NATURELLE

don til sera question dans rarliclc suivant," nous avons cru devoir réunir au nom très-connu de serpent à lunettes celui de Tiaja, dont se servent les naturels du pays on le rencontre , et qui a été adopté par plusieurs auteurs , et parti- culièrement par M. Linné.

On a écrit qu'il y avoit un assez grand nombre d'es'pèccs de serpens à lunettes ; des naturalistes en ont compté jusqu'à six : mais en examinant de près les diiTé- rences sur lesquelles ils se sont fondés , il nous a paru qu'on nedevoiten compter que deux ou trois ; le serpent à lunettes ou le naja , dont il est ici question \ le serpent à lunettes du Pérou ; et celui du Brésil , qui peut-être même ne diilère que très-légèrement de celui du Pérou. Toutes les variétés que nous rapportons au naja, ne sont que des suites de la diversité d'àgc, de sexe ou de climat ; et , par exemple , on a représenté dans Seba deux petits serpens à lunettes des Indes orientales , qui ne me paroissent que de jeunes naja de Pespèce ordinaire : ils ne diftéroient des naja adultes que par Pcxtension du

DES COULEUVRES. 269'

fcou , qui étoit peu sensible , ce qui ii'au- noiicoiL qu'un âge peu avancé , et par la teinte ou la distribution de leurs couleurs ; l'un étoit d'un cendré jaunâtre, cerclé de bandes transversales pourpres , et arran- gées de manière que , de quatre en quatre , il y en avoit une plus large que les autres ; le second avoit des couleurs moins dis- tinctes , et peut-être avoit été pris dans un temps voisin de celui de sa mue.

Les naja adultes paroisscnt d'un jaune plus ou moins roux , ou plus ou moins cendré , suivant l'âge , la saison , et la force de Tindividu. Ils n'ont pas plusieurs bandes transversales pourpres; mais au- dessus de la partie renflée de leur cou , on voit un coHicr assez larere et d'un brun sombre qui disparoît quelquefois presque en entier sur les naja conservés dans Fesprit-dç-vin. Cette belle couleur jaune qui brille sur le dos du serpent à lu- nettes , s'éclaircit sous le ventre , elle devient blanchâtre , mêlée quelquefois d'une teinte de rouge ; les raies qui for- ment sur son cou un croissant dont les

deux pointes se replient en dehors et eu

22

Syo HISTOIRE NATURELLE crochets , de manière à iraiter des lu- nettes , sont blanchâtres , bordées des deux côtés d'une couleur foncée. Quel- quefois ces nuances s'altèrent après la mort de l'animal ; ce qui a donné lieu à bien des fausses descriptions. Le sommet de la tête est couvert par neuf plaques ou grandes écailles , disposées sur quatre rangs , deux au premier du côté du museau, deux au second , trois au troi- sième, et deux au quatrième *. Les yeux sont vifs et pleins de feu. Les écailles sont ovales , plates et très-alongées ; elles ne tiennent à la peau que par une portion de leur contour , et il paroît que le serpent peut les redresser d'une manière très-sensible : elles ne se touchent pas au-dessus de la partie élargie du cou ; elles y forment des rangs longitudinaux un peu séparés les uns des autres , et

* Voilà un nouvel exemple de ce que nous avons dit à l'article de la Nomenclature des serpens : tous ceux qui ont des dents crochues, grandes et mobiles, et qui sont venimeux, n'ont pas le dessus de la tête garni d'écaillés semblables à celles du dos.

DES C O U L EU "^7 ïl E S. 271

ïaîssent voir la peau nue , qui est d'uu jaune blanchâtre. Comme cette peau est moins brillante que les écailles , qui , étant grandes et plates, réfléchissent vive- ment la lumière , ces écailles paroissent souvent comm.e autant de facettes res- plendissantes disposées avec ordre , et •qui présentent une couleur d'or três-écla- tante , sur-tout lorsqu'elleâ sont éclairées par les rayons du soleil»

L'extension dont nous venons de parler est formée par les côtes , qui , à l'endroit de cet élargissement , sont plus longues que dans les autres parties du corps du serpent , et ne se courbent d'une manière sensible qu'à une plus grande distance de l'épine du dos ; mais d'ailleurs le naja peut gonfler et étendre à volonté une membrane assez lâche qui couvre ces côtes , et que Kœmpfer a comparée à des espèces d'ailes. C'est sur-tout lorsqu'il est irrité , qu'il l'enfle et en augmente le volu- me ; et lorsqu'alors il se redresse en tenant toujours horizontalement sa tête , qui est placée au-devant de cette extension membraneuse , ou diroit qu'il est coiffé

272 HISTOIRE NATURELLE

d'une sorte de chaperon que Ton a même comparé à une couronne , et voilà pour- quoi on a donné ù ce dangereux mais cependant très-bel animal , le nom de serpent à chaperon , aiusi que celui de se/- lient couronné.

La femelle est distinguée aisément du mâle , parce qu'elle n'a pas sur Je cou la raie contournée et disposée en crois- sant , dont les pointes se terminent en crochets tournés en dehors , et d'après laquelle on a donné à l'espèce le nom de serpent à lunettes : mais elle a de cha- que côté du cou , comme le mâle , une extension membraneuse soutenue par de longues côtes ; elle peut égaleineyt en étendre le volume ; elle brille des mêmes couleurs dorées, el elle a porté également le nom de serjyent à couronne.

Les naja ont ordinairement trois ou quatre pieds de longueur totale. Celle de l'individu que nous avons décrit , et qui est au Cabinet du roi, est de quatre pieds quatre pouces six lignes ; l'extension membraneuse de son cou a plus de trois pouces de largeur. Il a cent quatre-vingt-"

DES COULEUVRES. 27?

sept gra iules plaques sous le corps , et cinquante-huit paires de petites plaques sous la queue , qui u'cst lougue que de sept pouces dix lignes. Celui que M. Linné a décrit avoit cent quatre-vingt-treize grandes plaques , et soixante paires de petites.

Le naja est féroce ; et pour peu qu'on diffère de prendre l'antidote de son ve- nin , sa morsure est mortelle ; Ton expire dans des convulsions , ou la partie mor- due contracte une gangrène qu'il est pres- que impossible de guérir : aussi de tous les serpens est-ce celui que les Indiens , quirvont nud-pieds , redoutent le plus. Lorsque ce terrible reptile veut se jeter sur quelqu'un , il se redresse avec fierté , fait briller des 3 eux étincelans , étend ses membranes en signe de colère , ouvre la gueule, et s'élance avec rapidité en mon- trant la pointe acérée de ses crochets venimeux. Mais , malgré ses armes fu- •nestes , les jongleurs indiens sont par- venus à le donrter de manière à le faire servir de spectacle à un peuple crédule, de même que d'autres charlatans de l'É?

S74 HISTOIRE NATURELLE gypJe moderne , à l'exemple de charla- tans plus anciens de l'antique Egypte, des Psylles de Cyrène , et des Ophiogènes de Chypre, manient sans crainte, tour- mentent impunément de grands serpens , peut-être même venimeux, les serrent fortement auprès du cou , évitent par-là leur morsure , déchirent avec leurs dents et dévorent tout vivans ces énormes reptiles , qui , sifflant de rage et se repliant autour de leur corps , font de vains efforts pour leur échapper.

Ces Indiens , qui ont pu réduire les naja et se garantir de leur morsure, courent de ville en ville pour montrer leurs ser- l^ens à lunettes , qu'ils forcent , disent- ils , à danser. Le jongleur prend dans sa main une racine dont il prétend que la vertu le préserve de la morsure venimeuse du serpent, et, tirant l'animal du vase dans lequel il le tient ordinairement ren- fermé , il rirrite en lui présentant un bâton , ou seulement le poing; le naja , se dressant aussitôt contre la main qui l'attaque , s'appuyant sur sa queue, éle- vant sou corps 3 enflant son cou , ouvrant

DES COULEUVRES. 275

sa gueule , alongeant sa langue four- chue , s'agitant avec vivacité , faisant briller ses yeux et entendre sou sifflement , comuience uue sorte de combat contre son maître , qui , entonnant alors une chanson , lui oppose sou poing tantôt à droite et tantôt à gauche ; Taniiual , les yeux toujours fixés sur la main qui le menace , en suit tous les mouveuiens , balance sa tète et son corps sur sa queue qui demeure immobile , et otfre ainsi ri- mage d'une sorte de danse. Le naja peut soutenir cet exercice pendant un demi- quart d'heure ; mais au moment que l'In- dien s'appercoit que , fatigué par ses mou- vemens et par sa situation verticale , le serpent est près de prendre la fuite , il interrompt son chant', le naja cesse sa danse , s'étend à terre , et son maître le remet dans son vase. Kœmpfer dit que lorsqu'un Indien veut domter un naja et l'accoutumer à ce manège, il renverse le vase dans lequel il l'a tenu renfermé , va à la couleuvre avec un bâton , Tarrête dans sa fuite , et la provoque à un com- bat qu'elle commence souvent la pte-

276 HISTOIRE NATURELLE

iiiière. Dans Tinstaut elle veut s'élan- cer sur lui pour le mordre , il lui présente le vase et le lui oppose comme un bou- clier contre lequel elle blesse ses narines, et qui la force à rejaillir en arrière. 11 con- tinue cette lutte pendant un quart d'heure ou demi-heure, suivant que Téducation de l'animal est plus ou moins avancée. La couleuvre , trompée dans ses attaques , et blessée contre le vase , cesse de s'élancer; mais , présentant toujours ses dents et enflant toujoursson cou, elle ne détourne pas ses yeux, ardcns du bouclier qui lui nuit. Le maître , qui a graiid soin de ne pas trop la fatiguer par cet exercice, de peur que, devenant trop timide, elle ne se refuse ensuite au combat, l'accoutume insensiblement à se dresser contre le vase , et même contre le poing tout nud , à en suivre tous les mouvemens avec sa tête superbement gonflée , mais sans jamais oser se jeter sur sa main , de peur de se blesser ; accompagnant d'une chanson le miouvement de son bras , et par consé- quent celui du reptile qui l'imite, il donne à ce combat l'apparence d'une danse : et

DES COULEUVRES. 277

il en est donc de ce serpent funeste comme de presque tous les êtres dangereux qui répandent la terreur ; la crainte sèulepeut les domter.

Mais il ne faut pas croire que les Indiens soient assez rassurés parles efl'ets de cette crainte , pour ne pas chercher à désarmer , pour ainsi dire, le reptile contre lequel ils doivent lutter, Kœmpfer rapporte qu'ils ont grand soin , chaque jour ou tous les deux jours , d'épuiser le venin du naja , qui se forme dans des vésicules placées auprès de la mâclioire supérieure , et se répand ensuite par les dents canines ; pour cela , ils irritent la couleuvre et la forcent à mordre plusieurs fois un inor- ccau d'étoffe ou quelque autre corps mou, et à rimbiber de son poison. Pour l'exci- ter davantage à exprimer son venin , ils ont quelquefois assez d'adresse et de cou- rage pour lui presser la tète sans en être luordus , et la mettre par-là dans une sorte de rage qui lui fait serrer avec plus de force et pénctrf^r d'une plus grande quantité de poison le morceau d'éfofie ou le corps mou qu'eu lui présente ensuite.

23

278 HISTOIRE NATURELLE

Après avoir privé la couleuvre de son ve-^ nîn, ils veillent avec beaucoup d'atten- tion à ce qu'elle ne prenne aucune nour- riture , et ils empêchent sur -tout qu'elle ne mange de l'herbe fraîche, de nouveaux alimens lui rendant bientôt de nouveaux sucs vénéneux et mortels.

Kaempfer prétend que l'on a un remède assuré contre la morsure venimeuse de ce serpent , dans la plante que l'on nomme miingo , ainsi q^uop/iiorriza , qui croît abondamment dans les contrées chaudes de l'Inde , et que l'on a employée non seulement contre la morsure de plusieurs reptiles , ainsi que des scorpions , mais même contre celle des chiens enragés. L'on disoit , suivant le même Ksempfer , que l'on avoit découvert ses vertus anti- vénéneuses en en voyant manger à des mangoustes ou ichneumons mordus par des naja , et que c'étoit ce qui avoit fait appliquer à ce végétal le nom de mungo , donné aussi par les Portugais aux man- goustes. Ces quadrupèdes sont en effet ennemis mortels du serpent à lunettes , qu'ils attaquent tovijours avec acharne-

DES COULEUVRES. 279

ïnent , et auquel ils donnent aisément la mort sans la recevoir , leur manière de saisir le naja les garantissant apparem- ment de ses dents envenimées.

Non seulement les naja servent à amu- ser les loisirs des Indiens ; ils ont encore été un objet de vénération pour plusieurs habitans des belles contrées orientales , et particulièrement de la côte de Malabar. La crainte d'expirer sous leur dent em- poisonnée , et le désir de les écarter des habitations, avoient fait imaginer de leur apporter jusqu'auprès de leurs repaires les alimens qui paroissoientleur convenir le. mieux; les temples sacrés étoient ornés de leurs images ; et si ces reptiles péné- troient dans les demeures des babitans , ou si on les rencontroit sous ses pas , bien loin de se défendre contre eux et de cher- cher à leur donner la mort , on leur adressoit des prières , ou leur offroit des présens ; on supplioit les Bramiues de leur faire de pieuses exhortations ; on se pros- ternoit , on tâchoit de les fléchir par des respects : tant la terreur et l'ignorance peuvent obscurcir le flam.beau de la rai- sou î

2^0 HISTOIRE NATURELLE

On a prétendu que Ton trou voit dans le corps des naja et auprès de leur tête, une pierre que l'on a nommée pierre de serpent , pierre de serpent à chaperon , pierre de cobra , etc. , et qu'on a regardée comme un remède assuré, non seulement contre le poison de ces mêmes serpens à lunettes , mais même contre les effets de la morsure de tous les animaux venimeux. On pourra voir dans la note suivante * , combien peu

* Nous allons rapporter, à ce sujet, une partie tles observations du célèbre Redi. « Parmi les pro- « duclions des Indes, dit ce physicien, auxquelles «l'opinion publique attribue (\<is propriétés mer- « veilleuses, sur la foi des voyageurs, il y a cer- « taines pierres qui se trouvent, dit-on, dans la « tête d'un serpent des Indes extrêmement veni- « meux : ou prétend que ces pierres sont très-bonnes « contre tous les venins. Cetle opinion s'est fortifiée « parTautonlé deplusieurssavaus qui l'ont adoptée, « et l'on annonce deux épreuves de ces pierres, 'ai tes « à Rome avec beaucoup de succès : l'une , par M. « Carlo Magniui, sur un homme; et l'autre, par « le P. Kircher, sur un chien. Je connois ces pierres « depuis plusieurs années 3 j'en ai quelques unes « chez moi, et je me suis convaincu , par des expé-

DSS COULEUVRES. 28f fan doit comptersur la bonté de ce remède ,

«r riences réiLerées, et dont je vais rendre compte, « qu'elles u'ont poiut la vertu qu'on leur attribue a contre les venins.

« Sur la fin de l'hiver de l'an 1662 , trois reli- « gienx de l'ordre de Sainl-Fraucois, nouvellement €c arrivés des Indes orientales , vinrent à la cour de « Toscane , c|ui étoit alors à Pise , et firent voir au « grand duc Ferdinand II plusieurs curiosités « qu'ils avoient apportées de ce pays; ils vantèrent « sur-lout certaines pierres qui, comme celles dont « on parle aujourd'hui, se trouvoieut , disoient-ils, « dans la lête d'un serpent décrit par Garcias da « Orto 5 et nommé par les Porlugais , cobra de cU' « belos (serpent à chaperon); ils assuroient que, a dans tout l'indosian, dans les deux vastes pénm- tt suies de l'Inde , et particulièrement dans le rojau- tt me de Quam-sy, on appJiquoit ces pierres comme « unanlidoie éprouvé sur les morsures des vipères, a des aspics, des cérastes, et de tous les animaux « venimeux, et même sur les blessures l'ai Les par « des flèches ou autres arnies empoisonnées : ils « ajouloicnl que la sympathie de ces pierres avec K le \cuin éioit telle, qu'elles s'altachoieni forie- c ment à la blessure, comme de peiiies veniouses, « el r.e s eu séparoieiit qu'aprls avoir attiré tout le % venin; qu'iilors elles tojiiboient d'clies-mCmcs,

SSt HISTOIRE NATURELLE

qui n'a jamais été trouvé dans le corps

c laissant l'animal tout-à-fait guéri; que, pour les « netidyer, il falloit les plonger dans du lait frais, et K les y laisser jusqu'à ce qu'elles eussent rejeté tout c le venin dont elles s'étoient imbibées, ce qui dou- a noit au lait une teinture d'un jaune verdâtre. Ces <c religieux offrirent de confirmer leur récit par « l'expérience ; et tandis qu'on cherchoit pour cela c des vipères , M. Vincenzio Sandrini , un des plus a habiles artistes de la pharmacie du grand duc, K ayant examiné ces pierres, se souvint qu'il en . a coriservoit depuis long-temps de semblables : il K les fit voir à ces religieux, qui convinrent qu'elles ff étoient de même nature que les leurs, et qu'elles K dévoient avoir les mêmes vertus.

Œ La couleur de ces pierres est un noir semblable K li. celui de la pierre de louche; elles sont lisses et « lustrées comme si elles étoient vernies; quelques « unes ont une tache grise sur un côté seulement, ce d'autres l'ont sur les deux côtés; il 'y en a qui c sont toutes noires et sans aucune tache , et d'autres « enfin cjui ont au milieu un peu de blanc sale , et a tout autour une teinte bleuâtre. La plupart sont « d'une forme lenticulaire : il y en a cependant qui a sont obiougues. Parmi les premières, les plus a grandes que j'ai vues sont larges comme une de ^. ces pièces de ^mounoie appelées ^ro^j^/^ et les

DES COULEUVRES. 283 d'un naja , et n'est qu'une production

« plus petites n'ont pas tout-à-fait la grandeur d*un K cjuattrino. Mais quelle que soit la différence de a leur volume , elles varient peu entre elles pour le tt poids j car ordinairement les plus grandes ne «pèsent guère au-delà d'un denier et dix-huit « grains, et les plus petites sont du poids d'un « denier et six grains. J'en ai cependant vu et essayé « une qui pesoil un quart d'once et six grains. »

Redl entre ensuite dans les détails des expériences

qu'il a faites pour prouver le peu d'effet des pierres'

de serpent contre l'action des divers poisons, et il

ajoute plus bas : a Pour moi, je crois , comme je

a viens de le dire , que ces pierres sont artificielles ,

« et mon opinion est appuyée du témoignage de

a plusieurs savans qui ont demeuré long -temps

c dans les Indes, au-deçà et au-delà du Gange, et

G qui affirment que c'est une composition faite par

« certains solitaii-es indiens qu'on nomme Jogiies,

« qui vont les vendre à Diu, à Goa, à Salsette , et

« qui en font commerce dans toute la côte de Ma-

K labar, dans celle du golfe de Bengale , de Siam ,

c de la Cochinclîine , et dans les principales îles de

« l'Océan oriental. Un Jésuite , dans certaines rela-

K tions , parle de quelques autres pierres de serpeus

c qui sont vertes.

a Je n'en ai jamais vu ni éprouvé de vertes: mais

2^4 HISTOIRE NATURELLE

artificielle apportée de Tlnde , ou imitée en Europe.

K si leurs propriétés sont , comme il le dit, les « mêmes que celles âes pierres ariificielles, je crois « éire bien fondé a douter de la vertu des unes et « des autres , et à mettre ces Jogucs au rang des « cliarlaians ; car ils vont dans les villes commer- « çantes des Indes, portant autour de leurs bras, c des serpens à chaperon auxquels ils ont soin d'ar- ec racher auparavant toutes les dents (comme l'as- « sure Garcias da Orto) et d'ûter tout le venin. Je c n'ai pas de peine à croire qu'avec ces précautions, «c ils s'en fi.ssent mordre impunément, et encore e moins qu'ils persuadent au peuple que c'est à ces «pierres appliquées sur leurs blessures, qu'ils « doivent leur guérisou.

« Ou objectera peut-être comme une preuve de « la sympathie de cette pierre avec le venin, la « vertu qu'elle a de s'attacher fortement aux bles- « sures empoisonnées ; mais elle s'attache aussi « fortement aux plaies il n'j a point de venin , et « à toutes les parties du corps qui sont humectées de ce sang ou de quelque autre liqueur, par la même « raison que s'y attachent la terre sigillée et toute « autre sorte de bol. jj

Au reste, le seniimeul de Redi a été conrirmé pas M. l'abbé Foutana.

DES COULEUVRES. i&5

LE SERPENT A LUNETTES DU PEROU.

J-N ous ne counoissoiis ce serpent que pour en avoir vu la figure et la descrip- tion clans Seba. Quelque rapport qu'il ait avec le naja des Indes orientales , nous avons cru devoir l'en séparer , parce qu'il n'a pas autour du cou ces membranes susceptibles d'être c;onflées , cette exten- sion considérable qui distingue le serpent à lunettes de l'ancien continent ; et l'on ne peut pas dire que Tindividu représenté dans Sebà eût été pris dans un âge trop peu avancé pour avoir autour du cou cette extension membraneuse , puisqu'il étoit aussi grand que plusieurs naja gar- nis de ces membranes, que l'on a compa- rées à une couronne ou à un chaperon. Ce serpent à lunettes du Pérou ressemble d'ailleurs beaucoup au naja des grandes

286 HISTOIRE NATURELLE

Indes ; il a la tête garnie de grandes écailles , une bande transversale d'un gris obscur qui lui forme un collier , le des- sus du corps roux , varié de blanc et de gris , et le dessous d'une couleur plus claire. Peut-être faut- il rapporter à cette espèce un petit serpent à lunettes de la nouvelle Espagne , qui est également figuré et décrit dans Seba , et qui n'a pas autour du cou d'extension membraneuse. Ce reptile a de grandes écailles sur la tête , un collier noirâtre , et le corps jau- ïiâtre, entouré de petites bandes brunes.

DES COULEUVRES. 187

LE SERPENT A LUNETTES D U B R E S I L.

JN o u s séparons ce serpent du précé- dent , à cause d'une petite extension mem- braneuse que Ton voit des deux côtés de son cou ; et il diffère d'ailleurs du naja par la figure singulière dessinée sur cette même partie susceptible de gonflement. Cette inarque,d'un blanc assez éclatant, ne représente pas une paire de lunettes aussi exactement que dans le naja et le serpent précédent ; mais elle ressemble plutôt à un cœur assez profondément découpé 1 sa pointe est tournée vers la queue, et elle est chargée, de chaque côté, de deus: taches noires , dont la plus grande est la plus près de la tête. La couleur du dos est d'un roux clair , avec quelques bandes transversales brunes : celle du ventre est plus blanchâtre. Nous ne savons rien des habitudes naturelles de ce serpent.

i83 HISTOIRE NATURELLE

LE LÉBETIN.

(^ r. serpent est venimeux , et a , par con- séquent, sa mâchoire supérieure armée de crochets mobiles. C'est M. Linné qui en a parlé le premier : ce grand natura- liste Ta décrit dans Touvrage il a fait connoître les richesses renfermées dans le muséum du prince Adoli)he.

Cette couleuvre habite les contrées orientales. La couleur de son dos est comme nuageuse , et le dessous de son corps est parsemé de points rovïx, suivant M. Linné , et noirs , suivant M. Forskac!. Elle a cent cinquante - cinq grandes plaques sous le corps , et quarante-six paires de petites plaques sous la queue.

DES COULEUVRES. idj

L'HEBRAÏQUE.

\~j E serpent venimeux , et dont , par con- séquent , la mâchoire supérieure est gar- nie de crochets creux et mobiles , se trouve en Asie, et particulièrement au Japon , suivant Seba. La couleur du des- sus du corps est ordinairement d'un rou,^ sâtre plus ou moins mêlé de cendre : c'est sur ce fond que l'on voit , depuis la tète jusqu'à l'extrémité de la queue , des taches d'un jaune clair , bordées de rouge brun , disposées de manière à re- présenter des caractères hébraïques; et c'est de que vient à ce serpent le nom que nous lui donnons ici , d'après M. Dau- benton. Quelquefois on remarque une petite bande cendrée entre les yeux et près des narines. Les grandes plaques qui revêtent le dessous du ventre, sont d'un jaune trcs-clair , avec des taches noi-

24

â90 HISTOIRE NATURELLE

îâtres le long des côtés du corps , et or- diuaireiiient au iioiiibre de cent soixante- dix. Il y a sous la queue quarante-deux; paires de petites plaques.

DES COULEUVRES. 291

LE CHAYQUE.

tLi'usT dans l'Asie que Ton trouve ce serpent venimeux , aviquel nous conser- vons le nom de chayque , que lui a donné M. Daubenton , et qui est une abrévia- tion de chayquarona , nom imposé à ce yeptile par les Portugais. Deux bandes jaunes ou blanchâtres s'étendent au-des- sus de son corps depuis le sommet.de la tête jusqu'à l'extrémité de la queue; et, de chaque côté du cou, l'on voit neuf taches rondes et noirâtres , disposées comme les évents des lamproies. Le des- sous du corps est recouvert de plaques bleuâtres dont chaque extrémité présente quelquefois un point noir. La femelle est distinguée du mâle , en ce qu'elle n'a pas , comme ce dernier, neuf taches noirâtres de chaque côté du cou. Le chayque a or- dinairement cent quarante-trois grandes plaqueSj et soixaute-seize paires de petites.

292 HISTOIRE NATURELLE

LE LACTE.

i^E serpent ne présente que deux cou- leurs , l€ blanc et le noir : mais elles sont placées avec tant de symétrie , et ce- pendant distribuées , pour ainsi dire , avec tant de goût, et contrastées avec tant d'agrément, qu'elles pourroient servir de modèle pour la parure la plus élégante , et qu'une jeune beauté en demi-deuil Yerroit avec plaisir sur ses ajustemens une image de leurs nuances et de leur disposition. La couleur de cette couleuvre est d'un blanc de lait relevé par des taches d'un noir très-foncé, arrangées deux à deux ; et au contraire la tète est d'un noir très-obscur , qui rend plus éclatante une petite bande blanche étendue sur ce fond très-foncé, depuis le museau jusque Tcrs le cou. Mais sous ces couleurs sédui- santes est caché un venin très-actif; et le

DES COULEUVRES. 293

lacté est armé de crochets qui distillent un poison mortel.

Ce serpent , qui se trouve dans les Indes, a deux cent trois plaques au-dessous du corps , et trente-deux paires de petites plaques au-dessous de la cj',ieue. Pendant qu'on imprimoit cet article ,'rl6us avons reçu un individu de cette espèce : it avoît un pied et demi de longueur totale; les écailles qui recouvroicnt son dos, étofent iiexagones et relevées par une arête ; le sommet de la tète étoit garni de neuf grandes lames, disposées sur quatre rangs, comme dans le naja; et voilà donc en- core un exemple de cet arrangement et de ce nombre de grandes écailles sur la tête d'un serpent venimeux.

.««

S94 HISTOIRE NATURELLE

LE CORALLIN.

JLl ne faui ^c*» conioiidre cette couleuvre avec le serpent corail, qui appartient à un genre dififcrent , et qui présente la cou- leur éclatante du corail rouge dont on fait usage dans les arts. Le eoral in n'offre aucune couleur qui approche du rouge: tout le dessus de son corps est d'un verd denier, relevé par trois raies étroites et rousses qui s'étendent depuis la tétt- jus- qu'à l'extrémité de la queue ; le dessous est blanchâtre et poiutillé de blanc. Ce serpent n'a été nommé corallin par M.Linné, qu'à cause delà disposition des écailles qui garnissent son dos , et qui sont placées l'une au-dessus de l'autre , de manière à représenter un peu les pe- tites pièces articulées des branches du corail blanc que l'on a appelé articulé. La forme de ces écailles ajoute d'ailleurs à ce rapport \ elles sont arrondies vers la

DES COULEUVRES. 295

tête, et pointues du côté de la queue; et comuie elles sont disposées sur seize rangs longitudinaux et un peu séparés les uns des autres, elles n*en ressemblent que davantage à un corail articulé dont on verroit seize tiges déliées s'étendre le long du dos du reptile.

Les écailles qui revêtent les deux côtés du corps, sont rhoraboïdales, se touchent, et sont arrangées comme celles des cou- leuvres que nous avons déjà décrites. Ou compte ordinairement cent quatre-vingt- treize grandes plaques , et quatre-vingt- deux paires de petites.

Le corallin est venimeux, et se trouve dans les grandes Indes ; il a quelquefois plus de trois pieds de longueur.

1^6 HISTOIRE NATURELLE

L'ATROCE.

-INous conservons ce nom à un serpent venimeux des grandes Indes, et particu- lièrement de i'île de Ceyian. Sa tète est applatie par-dessus , ainsi que par les cotes, et très-large en proporlion de la grosseur du corps ; elle est blanchâtre et couverte de petites écailles semblables à celles du dos , comme la tête de la vipère commune; et on voit au-dessus de chaque œil , comme dans cette même vipère d'Europe , une écaille un peu grande et bombée. Les crochets mobiles et attachés à la mâchoire supérieure sont très-grands. Des écailles petites, ovales et relevées par une arête, garnissent le dos, dont la couleur est cendrée et variée par des taches blanchâtres. La queue est très-menue , et sa longueur n'est ordi- ïiairement que le cinquième de celle du corps. L'individu décrit par M. Linné

DES COULEUVRES. 297 avoit uu pied de longueur total , cent quatre-vingt-seize grandes plaques sous le ventre , et soixante -neuf paires de petites plaques sous la queue.

298 HTSTOIRE NATURELLE

L'H/EMACHATE.

vJn trouve dans Seba deux figures de ce serpent venimeux , que nous allons dé- crire d'après un individu conservé au Ca- binet du roi, et que Ton a nommé /lœ/Tia" chate , à cause du rouge qui domine dans ses couleurs. Le dessous de la tête est garni de neuf grandes écailles disposées sur quatre rangs, comme dans le naja *. Le

* L'impression de ce volume cfoit fléja avancée, lorsqu'on nous a envoyé un baeinuchafe, assez bien conservé pour que nous puissions bien rtconnoîire tous ses caractères. Ce n'esl que d'après cet indi- vidu que nous nous soniuies assurés que ce s( rpent n'avoit pas le dessus de la téie couvert d'écaillcs semblables à celles du dos, comme la plupart des reptiles venimeux, mais garni de neuf grandes écailles disposées sur quatre rangs; et voilà pour- quoi nous avons dit, dans l'article qui traite de la ïjomenclature des serpeus , que le naja doit Je seul serpent venimeux sur ia léie duquel nous eussions.

DES COULEUVRES. 299 pi-emier et le second rang sont composés de deux pièces ; le troisième l'est de trois le quatrième de deux; et voilà une nou- velle exception dans la forme , la gran- deur et l'arrangement des écailles qui revêtent le dessus de la tête des reptiles venimeux , et qui ordinairement pré- sentent , à très-peu près, la même dispo- sition , la même forme et la même gran- deur que celles du dos. La mâchoire su- périeure est armée de deux crochets creux mobiles, et renfermés dans une sorte de gaine. Les écailles du dessus du corps sont unies et en losange. La couleur générale du dos est, dans l'hacmachate vivant d'un rouge plus ou moins éclatant, relevé

vu neuf grandes écailles ainsi dispost'es. Nous avons donc une raison de plus d*inviter les naiuralistes à recberclier des caractères exi rieurs iri.s-sensibles et constans, d'aprts lesquels on puisse , dans suite, séparer les serpens venimeux de ceux qui ne le sont pas; et Ion doit maintenant voir tvidemmeni cora- hien il étoit nécessaire d'emplover plusieurs carac- tères pour composer notre table méthodique des serpens, de maniera qu'on put aisément recon- ^noître les diverses espèces de ces reptile*.

3oo HISTOIRE NATURELLE

par des taches blancli es , dont la disposi- tion varie suivant les individus , et qui le font paroître comme jaspé. Ce ronge de- vient une couleur sombre, plus ou moins foncée, sur les individus conservés dans Tesprit-de-vin , qui altère de même la teinte du dessous du corps , dont la cou- leur est jaunâtre dans Tanimal vivant. Nous avons compté cent trente - deux grandes plaques sous le ventre de Phae- lîiachate qui fait partie de la collection du roi , et vingt-deux paires de petites plaques sous sa queue. La longueur to- tale de cet individu est d'un pied quatre pouces cinq lignes , et celle de la queue , jd'un pouce dix lignes. Seba avoit reçu du Japon un serpent de cette espèce , et un autre liseinacliate lui avoit été envoyé de Perse.

i) E s C O U L E U V R E s. Sot

LA TRES-BLANCHE,

J_iE blanc le plus éclatant est la couleuî de ce serpent , que Ton trouve en Afrique^ et particulièrement dans la l.iby e. Suivant Seba , l'extrémité de sa queue est noire , et on apperçoit sur son corps quelques taches très-petites et de la même couleur; mais M. Linné dit qu'il est absolument sans taches , et il se pourroit que celles dont parle Sei)a , fussent une suite de l'al- tération produite par l'esprit-de-vin , dans lequel ou avoit conservé l'individu que Seba avoit dans sa collection. Il parvient quelquefois à la longueur de cinq ou six pieds. Il se nourrit d'oiseaux et d'autres petits animaux , auxquels il donne la mort d'autant plus facilement , qu'il est très- venimeux. Il a ordinairement deux oent neuf grandes plaques sous le corps , et soixante-deux paires de petites plaques sous la queue.

Serpens, ILl. 20

3o2 HISTOIRE NATURELLE

LA BRASILIENNE.

Ci'est une vipère du Brésil, envoyée et conservée sous ce nom au Cabinet du roi. Sa tête est couverte par-dessus d'é- cailles ovales, relevées par une arête et semblables à celles du dos , tant par leur forme que par leur grandeur. Le inuseau qui est très-saillant, se termine par une grande écaille presque perpendiculaire à la direction îles mâchoires, arrondie par le haut et échancrée par le bas pour lais- ser passer la langue. Le dessus du corps présente de grandes taches avales, rousses bordées de noirâtre , et , dans les inter- valles qu'elles laissent , on voit d'autres taches très - petites , d'un brun plus ou moins foncé. L'individu que nous avons décrit , a cent quatre - vingts grandes plaques sous le corps , et quarante -six paires de petites plaques sous la queue. 6a longueur totale est de tiois pieds , et

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TV^./'a,/ 3o2.

^.LA BRASILIENNE

^.LA INÎASIOUE

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DES COULEUVRES. 3o3

relie de sa queue , de cinq pouces six ligues. Ses crochets mobiles ont près de huit ligues de longueur ; ils sont cepen- dant moins longs de moitié que les cro- chets de deux mâchoires de serpent veni- meux envoyées du Brésil au Cabinet du roi, et semblables en tout, excepté par la grandeur , à celles de la brasilienne. Si ces grandes mâchoires ont appartenu à un individu de la même espèce , ou pourroit croire qu'il avoit six pieds de longueur. Je n'ai trouve dans aucun au- teur la figure ni la description de la bra- silienne.

3o4 HISTOIRE NATURELLE

LA VIPERE FER-DE-LANCE *.

JLiE fer-de-lance parvient ordinairement à la longueur de cinq ou six pieds ; c'est un des plus grands serpens venimeux , et «un de ceux dont le poison est le plus actif. Il n'est encore que très-peu connu des naturalistes ; M. Linné même n'eu a point parlé. On ne Va. observé jusqu'à présent qu'à la Martinique , et peut-être à la Dominique et à Cayenne , et c'est de la première de ces îles qu'est arrivé l'indi- vidu conservé au Cabinet du roi, et que nous allons décrire : aussi les voyageurs l'ont-ils appelé jusqu'à présent, vipèi-e jau7ie de la Martinique. Nous n'avons pas cru devoir employer cette dénomina- tion, parce que la couleur de cette espèce n'est pas constante , et que la moitié à peu près des individus qui la composent g

* Vipère faune de la Marùnique,

T<u/i 3 .

v^/.'.y^A/.v/.

y LA VIPERE FER DE LANCE . ^ LA T E TE TRIAÎ^GULAIRE .

Jy -^mimipt <~

DES COULEUTRES. 3o5 présente une couleur différente àe la jaune. Nous avons préféré de tirer sou nom de la conformation particulière et très-constante de sa tête.

La vipère fei--de-lance a cette partie ^lus grosse que le corps , et remarquable par un espace presque triangulaire , dont les trois angles sont occujjés par le mu- seau et les deux yeux. Cet espace , relevé jiar ses bords antérieurs , représente un fer de lance large à sa base, et un peu arrondi à son sommet.

Les trous des narines sont très-près du bout du museau; les yeux sont gros, ovales , et placés obliquement. Lorsque le fer-de-lance a acquis une certaine gros- seur, on remarque de chaque côté de sa tête , entre ses narines et ses yeux , une ouverture qui est très-sensible dans les individus conservés au Cabinet du roi , et que l'on a regardée comme les trous au- ditifs de ce serpent. Chacun de ces trous est, en effet, Textrémité d'un petit canal qui passe au-dessous de l'œil, et qui nous a paru aboutir à l'organe de l'ouïe. Comme nous n'ayons examiné que des fcrs-de-

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3o6 HISTOIRE NATURELLE Jaiice conservés depuis long-temps dan.' l'esprit-de-vin , nous n'avons pu nous as surer de ce fait , qu'il seroit d'autant pluj intéressant de vérifier, que Ton n'a encore observé dans aucune autre espèce de ser- pent, des ouvertures extérieures pour les oreilles. S'il étoit bien constaté , on ne pourroit plus douter que le serpent fer- de-lance n'eût des ouvertures extérieures pour l'organe de l'ouïe , de même que les lézards , avec cette différence cependant que , dans ces derniers animaux , ces ou- vertures sont situées derrière les yeux , ainsi que dans les oiseaux et les quadru- pèdes vivipares, au lieu que le fer-de- lance les auroit entre les yeux et le mu- seau.

De chaque côté de la mâchoire supé- rieure , on apperçoit un et quelquefois deux ou même trois crochets , dont l'ani- mal se sert pour faire les blessures dans lesquelles il répand sou venin. Ces cro- chets , d'une substance très-dure , de la forme d'un hameçon , et communément de la grosseur d'une forte alêne , sont mobiles , creux depuis leur racine jusqu'à

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leur bord convexe , qui présente une petite fente , et revêtus d'une membrane qui se retire et les laisse paroître lorsque l'animal ouvre la gueule et les redresse pour s'en servir. Leur racine est couverte par un petit sac d'une membrane très- forte qui renferme le venin de l'animal , et qui , suivant l'auteur d'un Mémoire sur la vipère jaune de la Martinique ^ publié dans les Nouvelles de la répu- blique des lettres et des arfs^ peut contenir une demî-cuillerée à café de liqueur. Au reste , ce sac ne nous a pas paru le vrai réservoir du poison , que nous avons cru voir dans des vésicules placées de chaque côté à l'extrémité des mâchoires, comme dans la vipère commune d'Europe , et qui , par un conduit particulier , parvien- droit à la cavité de la dent, pour sortir par la fente située dans la partie convexe de ce crochet *.

* Comme nous n'avons été à même de disséquer que des vipères fer-de-lance conservées depuis long- temps dans l'esprit- de- vin, et dont les parties molles, ainsi que les humeurs, étoient très-alté-» lécs, nous ne pouvons rien assurera ce sujet.

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3o6 HISTOIRE NATURELLE

lance conservés depuis long-temps dans l'esprit-de-vin , nous n'avons pu nous as- surer de ce fait , qu'il seroit d'autant plus intéressant de vérifier, que l'on n'a encore observé dans aucune autre espèce de ser- pent, des ouvertures extérieures pour les oreilles. S'il étoit bien constaté , on ne pourroit plus douter que le serpent fer- de-lance n'eût des ouvertures extérieures pour l'organe de l'ouïe , de même que les lézards , avec cette différence cependant que , dans ces derniers animaux , ces ou- vertures sont situées derrière les yeux , ainsi que dans les oiseaux et les quadru- pèdes vivipares , au lieu que le fer-de- lance les auroit entre les yeux et le mu- seau.

De chaque c6té de la œiâchoire supé- rieure , on appercoit un et quelquefois deux ou même trois crochets , dont l'ani- mal se sert pour faire les blessures dans lesquelles il répand son venin. Ces cro- chets , d'une substance très-dure , de la forme d'un hameçon , et communément de la grosseur d'une forte alêne , sont mobiles , creux depuis leur racine jusqu'à

DES COULEUVRES. So/

îeiir bord convexe , qui présente une petite fente , et revêtus d'une membrane qui se retire et les laisse paroître lorsque ranimai ouvre la gueule et les redresse pour s'en servir. Leur racine est couverte par un petit sac d'une membrane très- forte qu,i renferme le venin de l'animal , et qui , suivant l'auteur d'un Mémoire sur la vipère jaune de la Martinique , publié dans les Nouvelles de la répu- blique des lettres et des arfs^ peut conter ir une demi-cuillerée à café de liqueur. Au reste , ce sac ne nous a pas paru le vrai réservoir du poison , que nous avons cru voir dans des vésicules placées de chaque côté à l'extrémité des mâchoires, comme dans la vipère commune d'Europe , et qui , par un conduit particulier, pnrvicn- droit à la cavité de la dent , pour sortir par la fente située dans la partie convexe de ce crochet *.

* Comme nous n'avons été à même de disséquer que des vipères fer-de-lance conservées depuis long- temps dans l'esprit- de- vin, et dont les parties molles , ainsi cfue les humeurs , étoieni très-alté^ iôcs, nous ne pouvons rien assurer à ce sujet.

3o8 HISTOIRE NATURELLE

Le veuin de la vipère fer-de-lance est presque aussi liquide que de l'eau , et Jaunâtre comme de l'huile d'olire qui «jommence à s' altérer. La douleur qu'excite ce Yeuiu dans les personues blessées par la vipère , est semblable à celle qui pro- Tient d'une chaleur brûlante ; elle est d'ailleurs accompagnée d'un grand acca- blement. Mais ce poison , qui n'a ni goût ni odeur , ne paroît agir que lorsqu'il est un peu abondant ou qu'il se mêle avec 3e sang , puisqu'on a quelquefois sucé impunément les plaies produites le plus récemment par la morsure du fer-de-lance 5 €t il est aisé de voir , en comparant ces faits avec ceux que nous avons rapportée â l'article de la vipère commune d'Europe, que les organes relatifs au venin , la nature de ce suc funeste , et la forme des dents , sont à peu près les mêmes dans la vipère européenne et dans celle de la Martinique.

La langue est très-étroite , très-alongée , et se meut av^c beaucoup de vitesse; les écailles du dos sont ovales et relevées par fîne arête j la couleur générale du corjïs

w DES COULEUVRES. 809 est jaune dans certains individus , gri- sâtre dans d'autres ; et ce qui prouve qu'on ne peut pas regarder les individus jaunes et les individus gris comme for- mant deux espèces distinctes , ni même deux variétés constantes , c'est qu'on trouve souvent dans la même portée autant de vipereaux gris que de vipereaux )aunes. Nous avons vu dans la collection de M. Badier , très-bon observateur, une variété du fer-de-lance, qui, au lieu de présenter la couleur jaune , avoit le dos marbré de plusieurs couleurs plus ou moins livides ou plus ou moins brunes, et étoit d'ailleurs distinguée par une tache très-brune placée en long derrière les yeux et de chaque côté de la tête.

Le fer-de-lance a communément deux cent vingt-huit grandes plaques sous le corps , et soixante-une paires de petites plaques sous la qiieue. Nous avons trouvé ces deux nombres sur un individu dont la longueur totale étoit d'an pied deux pouces deux lignes , et la longueur de la queue de deux pouces une ligne. Nous n'avons compté que deux cent vingt-cinq

3io HISTOIRE NATURELLE

grandes plaques , et cinquante-neuf paires de petites , sur un autre individu , qui cependant étoit plus grand et avoitdeux pieds six ligues de longueur totale.

Lorsque le fcr-de-lance se jette sur l'animal qu'il veut mordre , il se replie en spirale , et , se servant de sa queue comme d'un point d'appui , il s'élance avec la vitesse d'une flèclie; mais l'espace qu'il parcourt est ordinairement peu étendu. Ne jouissant pas de l'agilité des autres serpens , presque toujours assoupi , sur-tout lorsque la température devient un peu fraîche , il se tient caché sous des tas de feuilles , dans des troncs d'arbres pourris , et même dans des trous creusés en terre. Il est très-rare qu'il pénètre dans les maisons de la campagne , et on ne le trouve jamais dans celles des villes ; mais il se retire souvent dans les plantations de cannes à sucre , il est attiré par des rats , dont il se nourrit. 11 ne blesse ordinairement que lorsqu'on le touche et qu'on l'irrite , mais il ne mord jamais qu'avec une sorte de rage. On peut être averti de son approche par l'odeur fétide

ï) E s'^.t>-TJ L E U V R E s. 3ii

quHl répand , et par le cri de certains ciseaux , tels que la gorge-blanche , qui , troublés apparemment par sa ressem- blance avec les serpens qui les poursui- veut sur les arbres et les y dévorent , se rassemblent et voltigent sans cesse autour de lui. Lorsqu'on est surpris par ce serpent , on peut lui présenter une bran- che d'arbre, un paquet de feuilles , ou tout autre objet qui captive son atten- tion et donne le temps de s'armer ; un coup suffit quelquefois pour lui donner la mort. Quand on lui a coupé la tête , le corps conserve pendant quelque temps un mouvement vermiculaire.

C'est dans le mois de mars ou d'avril que ce dangereux reptile s'accouple avec sa femelle ; ils s'unissent si intimement , et se serrent dans un si grand nombre de contours , qu'ils représentent , suivant Pd. Bonodet de Foix , deux grosses cordes tressées ensemble. Us demeurent ainsi réunis pendant plusieurs jours , et on doit éviter avec un très -grand soin de les troubler dans ce temps d'amour et de jouissance , de nouvelles forces ren-

3i2 HISTOIRE NATURELLE

dent leurs mouvemeus plus prompts et Leur veniu plus actif. La mère porte ses petits pendant plus de six mois , suivant Fauteur du Mémoire déjà cité ; et ce temps , beaucoup plus long que celui de la gestation de la vipère commune , qui n'est que de deux ou trois mois , seroit cependant proportionné à la différence de la longueur du corps de ces deux serpens , le fer-de-lance parvenant à une longueur double de celle de la vipère commune d'Europe.

Suivant certains voyageurs , ses petits sortent tout f0rn3.es du ventre de leur mère , qui ne cesse de ramper pendant qu'ils viennent à la lumière ; mais, sui- vant M. Bonodet de Foix , ils se débarras- sent de leur enveloppe au moment même la femelle les dépose à terre. Cliaque portée comprend depuis vingt jusqu'à soixante petits, et il paroît que le nombre en est toujours pair, lis ont , en naissant , la grosseur d'un ver de terre , et sept ou huit pouces de long ; lorsqu'ils sont adultes , ils parviennent jusqu'à la lon- gueur de six pieds , ainsi que nousTavous

DES COULEUVRES. 3i3

dit , et ont alors , dans le milieu du corps , trois pouces de diamètre. Ou en voit de plus gros et de plus longs; mais ces individus sont rares.

Le fer-de-lance se nourrit de lézards aniéiva , et même de rats , de volaille , de gibier et de chats. Sa gueule peut s'ou- Trir d'une manière démesurée , et se dilater si considérablement, qu'on lui a vu avaler un cochon de lait ; mais un serpent de cette espèce ayant un jour dévoré un gros sarigue , enfla beaucoup et mourut. Lorsque la proie qu'il a saisie lui échappe , il en suit les traces en se traînant avec peine ; cependant, comme il a les yeux et l'odorat excellens , il parvient d'autant plus aisément à l'at- teindre , qu'elle est bientôt abattue par la force du poison qu'il a distillé dans sa plaie. Il l'avale toujours en commen- çant par la tète ; et lorsque cette proie est considérable , il reste souvent comme tendu et dans un état d'engourdissement qui le rend immobile jusqu'à ce que sa digestion soit avancée. 11 ne digère que lentement ; et lors-

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3i4 HISTOIRE NATURELLE qu'on a tué un fer-de-lance quelque temps après qu'il a pris de la nourriture , il s'exhale de son corps une odeur fétide et insupportable. Quelque dégoût que doivent inspirer ce serpent, des nègres, et même des blancs, ont osé en manger , et ont trouvé que sa chair étoit un mets agréable. Cependant la mauvaise odeur dont elle est imprégnée lorsque l'animal est vivant , doit se conserver après la mort de la vipère , de manière à rendre cette chair un aliment aussi rebutant que le venin du serpent est dangereux.

On a écrit que ce poison étoit si fu- neste ,. qu'on ne connoissoit personne qui eût été guéri de la morsure du fcr-de- lance ; que ceux qui avoient été blessés par ses crochets envenimés , mouroient quelquefois dans l'espace de six heures et toujours dans des douleurs aiguës; que le venin des jeunes serpens de cette espèce donnoit aussi la mort , mais que la partie mordue par ces jeunes reptiles n'enfloit point; que le blessé n'éprouvoit que des douleurs légères, ou même ne souffroit pas, et qu'il se déclaroit souvent une pci-

DES COULEUVRES. 3i5

ralysie sur des parties différentes de celle qui avoit été mordue. Nous avons lu en frémissant qu'un grand nombre de re- mèdes ont été employés en vain pour sauver les jours des infortunés blessés par le fcr-de-lance , et que l'on étoit seule- ment parvenu à diminuer les douleurs de ceux qui expirent quelques heures après par l'effet funeste de ce poison terrible. M. Bonodet de Foix croit devoir affirmer, au contraire , qu'excepté certaines cir- constances particulières, le remède est même toujours efficace, la guérison est aussi prompte qu'assurée ; que les moyens de l'obtenir sont aussi simples que multi- pliés ; que la manière de les employer est connue des nègres et des mulâtres; que plusieurs traitemens ont été suivis du plus heureux succès, quoiqu'ils n'eussent été commencés que douze ou même quinze heures après l'accident; que la situation du malade n'est point douloureuse, et qu'il périssoit sans sortir de l'assoupisse- Btnent profond dans lequel il étoit toujours plongé dès le moment de sa blessure. L'activité du venin du fer-de-lance doit

3i6 HISTOIRE NATURELLE

varier avec l'âge de ranimai, la saison et la température. Mais , quoi qu'il en soit , pourquoi un être aussi funeste existe-t-il encore dans des îles il seroit possible d'éteindre son odieuse race ? pourquoi laisser vivre une espèce que l'on ne doit' voir qu'avec horreur ? et pourquoi cher- cher uniquement des remèdes trop sou- vent impuissans contre les maux qu'elle produit , lorsque , par une recherche obstinée et une guerre à toute outrance, l'on peut parvenir à purger de ce veni- meux reptile les diverses contrées oii il a été observé ?

DES COULEUVRES. 3*7

LA TETE TRIANGULAIRE.

jN ous donnons ce nom à une couleuvre envoyée au Cabinet du roi sous le nom de vipère de Vile Saint-Eustache. Elle a beaucoup de rapport , par la disposition de ses couleurs, avec la vipère commune : elle est verdâtre , avec des taches de di- verses figures sur la tête et sur le corps , elles se réunissent pour former une bande irrégulière et longitudinale. Les grandes plaques qui revêtent son ventre , et qui sont au nombre de cent cinquante, sont d'une couleur foncée et bordée de blanchâtre. Elle a soixante-une paires de petites plaques sous la queue.

Nous avons tiré son nom de la forme de sa tête , qui paroît d'autant plus trian- gulaire , que les deux extrémités des mâ- choires supérieures forment, par derrière, deux pointes très-saillantes. Cette vipère est armée de crochets creux et mobiles.

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3i8 HISTOIRE NATURELLE

Les écailles, semblables à celles du dos ^' garnissent le sommet de la tête; elles sont en losange et unies, au lieu d'être rele- vées par une arête , comme celles qui recouvrent le dos de la vipère commune. Le corps est très-délié du côté de la tête. L'individu que nous avons décrit, avoit deux pieds de longueur totale , et sa queue trois pouces neuf lignes.

DES COULEUVRES. 3i'^

LE D I P s; E.

\J N rencontre en Amérique , et particu- lièrement à Surinam, suivant Seba , ce serpent venimeux , dont le dessus du corps est couvert d'écailles ovales, bleuâ- tres dans le centre , et blanchâtres sur les bords. Les grandes plaques qui revêtent le ventre de cette couleuvre, sont blanches, et au nombre de cent cinquante-deux. La queue est longue, très-déliée, et garnie en dessous de cent trente-cinq paires de petites plaques , le long desquelles on voit s'étendre une raie bleuâtre. La mâ- choire supérieure est armée de crochets mobiles, comme dans les autres espèces de serpens venimeux.

320 HISTOIRE NATURELLE

L'ATROPOS.

V> E serpent venimeux , qui se trouve en Amérique , mérite bien le nom que M. Linné lui a donné, par la force du poison qu'il recèle ; et c'est en effet à une parque qu'il convenoit de consacrer un reptile aussi funeste. Sa tête a un peu la forme d'un cœur ; elle présente plusieurs taches noires , ordinairement au nombre de quatre , et elle est garnie par - dessus d'écaillés ovales , relevées par une arête , et semblables à celles du dos.

La couleur générale du dessus du corps est blanchâtre , et au-dessus de ce fond s'étendent quatre rangs de taches rousses , rondes, assez grandes , et chargées dans leur centre d'une petite tache blanche. L'atropos a cent trente-une grandes pla- ques sous le ventre , et vingt-deux paires cle petites plaques sous la queue.

DES COULEUVRES. 2it

LE LEBERIS.

V-<ETTE couleuvre est yenimeuse ; le dessus de son corps est couvert de raies transversales , étroites et noires ; elle a cent dix grandes plaques sous le corps, et cinquante paires de petites plaques sous la queue. On la trouve dans le Canada , et c'est M. Kalm qui l'a fait connoître.

322 HISTOIRE NATURELLE

LA TIGREE.

iNous ignorons de quel pays a été envoyé au Cabinet du roi ce serpent , dont la mâchoire supérieure est année de crochets mobiles. Sa tête ressemble beaucoup à celle de la vipère commune ; le sommet en est garni de petites écailles ovales , relevées par une arête , et sem- blables à celles du dos.

Le dessus du corps est d'un roux blan- châtre : il présente des taches foncées , bordées de noir, semblables à celles que l'on voit sur les peaux de panthère , ou d'autres animaux du même genre , ré- pandues dans le commerce sous le nom de peaux de tigre ; et vqilà pourquoi nous avons désigné cette couleuvre par l'épi thète de tigrée. L'individu que nous avons décrit, avoit deux cent vingt-trois grandes plaques , et soixante-sept paires de petites; sa longueur totale étoit d'uu pied un pouce six lignes , et celle de sa «jueue de deux pouces.

To/n ,3 .

I'/ù.Af</325.

^LA VPIRTEct JAUNEoii LA COULEUVRE COMMUNE. ;;LA COULEUVRE À COLLIER.

DESCOULEUYRES. 323

COULEUVRES OVIPARES.

LA COULEUVRE

VERTE ET JAUNE,

o u

LA COULEUVRE COMMUNE.

JN ous n'avons parlé jusqu'à présent que de reptiles funestes , de poisons mor- tels , d'armes dangereuses et cachées ; nous ne nous sommes occupés que de récits eftrayaus , d'images sinistres. Non seulement les contrées brûlantes de l'A- sie , de l'Afrique et de rx\mérique , nous ont présenté un grand nombre de serpens Tenimeux ; mais nous avons vu ces es- pèces terribles braver les rigueurs des climats septentrionaux, se répandre dans

S24 HISTOIRE NATURELLE notre Europe , infester nos contrées , pé- nétrer jusqu'auprès de nos demeures. En- vironnés, pour ainsi dire, de ces ministres de la mort , nous n'avons , en quelque sorte, considéré qu'avec eÉFroi la surface de la terre. Enveloppée dans un voile de deuil, la Nature nous a paru multiplier sur notre globe les causes de destruction, au lieu d'y répandre les germes de la fé- condité. Cette seule pensée a changé pour nous la face de tous les objets ; notre ima- gination trompée a empoisonné d'avancé nos jouissances les plus pures : la plus belle des saisons, celle oii tout semble se ranimer pour s'aimer et se reproduire n'auroit plus été pour nous que le mo- ment du réveil d'un ennemi terrible ar- mé contre nos jours; la verdure la plus fraîche , les fleurs les plus richement colo- rées , étalées avec magnificence par une main bienfaisante et conservatrice , dans la campagne la plus riante, n'auroient été à nos yeux qu'un tapis perfide étendu par le génie de la destruction sur les alfreux repaires de serpens venimeux; et Ici» rayons viyifiaus du soleil le plus

DES COULEUVRES. Zi^

pur lie BOUS auroient paru inonder Fat- luosphère que pour douiier plus de force aux traits empoisonnés de funestes rep- tiles. Hâtons-nous de prévenir ces effets; faisons succéder à ces tableaux lugubres des images gracieuses ; que la Nature reprenne , pour ainsi dire , à nos yeux son éclat et sa pureté. Les couleuvres que nous avons à décrire , ne nous présente- ront ni venin mortel, ni armes funestes ; elles ne nous montreront que des mouve- mens agréables, des proportions légères, des couleurs douces ou brillantes : à me- sure que nous nous familiariserons avec elles , nous aimerons à les rencontrer dans nos bois , dans nos champs , dans nos jardins ; non seulement elles ne trou- bleront pas la paix de nos demeures champêtres , ni la pureté de nos jours les plus sereins , mais elles augmenteront nos plaisirs en réjouissant nos yeux par la beauté de leurs nuances et la vivacité de leurs évolutions ; nous les verrons avec intérêt allier leurs mouvemens à ceux de divers animaux qui peuplent nos cam- pagnes , se retrouver sur les arbres jus-

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326 HISTOIRE NATURELLE

qu'au milieu des jeux des oiseaux , et servir et animer , daus toutes ses parties , le vaste et magnifique théâtre de la Na- ture priu tanière.

Couimencons donc par celles que Von rencontre en grand nombre dans les con- trées que nous habitons. Parmi ces scr- pens, le plus souvent très-doux, et même quelquefois familiers, nous devons comp- ter la verte et jauue , ou la couleuvre commune.

Ce serpent , dont M. Daubenton a parlé le premier , est très-commun dans plu- sieurs provinces de France, et sur-tout dans les méridionales ; il en peuple les bois, les divers endroits retirés et hu- mides. 11 paroît confiné dans les pays tempérés de Tancien continent; on ne Ta point encore trouvé dans les contrées très-chaudes de l'ancien monde, non plus qu'en Amérique ; et il ne doit point ha- biter dans le Nord , puisque le célèbre naturaliste suédois n'en a point fait men- tion. Il est aussi innocent que la vipère est dangereuse : paré de couleurs plus vives que ce reptile funeste , doué d'une

DES COULEUVRES. 827

grandeur plus considérable , plus svelte dans ses proportions , plus agile dans ses inOLivemens , pins doux dans ses habi- tudes , n'ayant aucun venin à répandre, il devroit être vu avec autant de plaisir que la vipère avecefFroi. Il n'a pas, comme les vipères, des dents crochues et mobiles; il ne vient pas au Jour tout formé ; et ce n'est que quelque temps après la ponte que les petits éclosent. Malgré toutes ces dissemblances qui le distinguent des vi- pères, le grand nombre de rapports exté- rieurs qui l'en rapprochent , ont fait croire, pendant long-temps, qu'il étoit venimeux. Cette fausse idée a fait tour- menter cette innocente couleuvre; on l'a poursuivie comme un animal dangereux; et il n'est encore que peu de gens qui puissent la toucher sans crainte , et même la regarder sans répugnance.

Cependant cet animal, aussi doux qu'a- gréable à la vue, peut être aisément dis- tingué de tous les autres serpens , et par-» ticulièrement des dangereuses vipères , par les belles couleurs dont il est revêtu, La distribution de ces diverses couleurs

328 HISTOIRE NATURELLE

est assez constante; et, pour commencer par celles de la tête, dont le dessus est uu peu applati , les yeux sont bordés d'écaillés jaunes et presque couleur d'or, qui ajoutent à leur viv acité. Les mâ- choires, dont le contour est arrondi , sont garnies de grandes écailles d'un jaune plus ou moins pâle, au nombre de dix- sept sur la mâchoire supérieure , et de yingt sur l'inférieure *. Le dessus du corps , depuis le bout du museau jusqu'à l'extré- mité de la queue , est noir , ou d'une cou- leur verdâtre très-foncée , sur laquelle on voit s'étendre, d'un bout à l'autre, un grand nombre de raies composées de petites taches jaunâtres de diverses figures, les unes alongées , les autres en losange, etc. et un peu plus grandes vers les côtés que vers le milieu du dos. Lo

* Il y a communément treize clenis de chaque coté au rang extérieur de la mâchoire supérieure et de la mâchoire inférieure; il y en a ordinaire- ment dix de chaque côté au rang intérieur des deux mâchoires : ainsi la verte et jaune a le plus souvent quatre-vingt-douze dents crochues , mai? iiîiimobiîçs , blanches et transparentes.

DES COULEUVRES. 329

ventre est d'une couleur jaunâtre : cha- cune des grandes plaques qui le couvrent, présente un point noir à ses deux bouts ^ et y est bordée d'une très-petite ligne noire ; ce qui produit, de chaque côté du dessous du corps , une rangée très-symé- trique de points et de petites ligues noi- râtres , placés alternativement.

Cette jolie couleuvre parvient ordinai- rement à la longueur de trois ou quatre pieds , et alors elle a deux ou trois pouces de circonférence dans l'endroit le plus gros du corps. On compte communément deux cent six grandes plaques sous son ventre , et cent sept paires de petites plaques sous sa queue , dont la longueur est égale le plus souvent au quart de la longueur totale de l'animal.

Elle devient même beaucoup plui grande lorsqu'elle parvient à un âge avancé, et elle peut d'autant plus aisé- ment échapper aux divers accidens aux- quels elle est exposée , et par conséquent atteindre à son entier développement , que non seulement elle peut recevoir des

blessures consicîérabies sans en périr ,

2"r

33o HISTOIRE NATURELLE mais même vivre un très-long temps , ainsi que les autres reptiles, sans prendre aucune ncnrrituix *.

D'ailleurs la couleuvre verte et jaune se tient presque toujours cachée , comme si les mauvais trailemens qu*elle a si souvent reçus , Tavoient rendue timide; elle cherche à fuir lorsqu'on la découvre; et non seulement on peut la saisir sans redouter un poison dont elle n'est ja- mais infectée 5 mais méjne sans éprouver d'autre résistance que quelques eflbrtj» qu'elle fait pour s'échapper. Bien plus, elle devient docile lorsqu'elle est prise;

* On eu a vu passer plusieurs mois sans manger. Un de mes amis m'a écrit qu'il avoir vu une jeune couleuvre ( vraisciublabJeineut de l'espèce doui il s'agit daus cet ariicie), trouvée dans une vigne par des paysans , et ai tachée au bout d'un très-long échalas , y être encore en vie au bout de huit jours, quoiqu'elle n'eût pris aucun aliment. {Lettre de M. l'abbé Carrière j curé de Roque- J'ort , près d'yégen.')

C'est avec bien du plaisir que je paye ici un tribut de tendresse et de rfconnoissance à ce pasteur aussi éclairé que vertueux, et qui, dans le temps, voulut bien se cbarger d'élever ma jeunesse.

DES COULEUVRES. 33r

elle subit une sorte de domesticité ;\ elle obéit aux divers mouvcmens qu'on veut lui faire suivre. On voit souveut des enfans prendre deux scrpens de cette es- pèce , les attacher par la queue , et les contraindre aisément à ramper , ainsi att(4és , du côté ils veulent les con- duire. Elle se laisse entortiller autour des bras ou du cou, rouler eu divers contours de spirale, tourner et retourner en dïHTé- reiis sens, suspendre en différentes posi- tions , sans donner aucun signe de mé- contentement : elle paroît même avoir du plaisir à jouer ainsi avec ses maîtres; et comme sa douceur et son défaut de venin lie sont pas aussi bien reccnnus qu'ils devroient l'être pour la tranquillité de ceux qui habitent la campaijçne , des char- latans se servent encore de ce serpent pour auiuser et pour tromper le peuple, qui leur croit le pouvoir particulier de se faire obéir , au moindre geste , par un animal qu'il ne peut quelquefois regarder qu'eu tremblant.

Il y a cependant certains momens , et nicme certaines saisons de i'auuée ,

332 HISTOIRE NATURELLE la couleuvre verte et jaune , sans être dangereuse , montre ce désir de se dé- fendre ou de sauver ce qui lui est cher si naturel à tous les animaux. On a vu quelquefois ce serpent , surpris par l'as- pect subit de quelqu'un, au moment il s'avançoit pour traverser une route , ou que, pressé par la faim , il se jetoit sur wne proie, se redresser avec fierté , et faire entendre son sifflement de colère. Mais dans ce moment même, qu'auroit- on eu à craindre d'un animal sans venin , dont tout le pouvoir n'auroit pu venir que de l'imagination frappée de celui qu'il auroit attaqué , et dont la force et les dents même ne sont dangereuses que pour de petits lézards et d'autres foibles animaux qui lui servent de nourriture ? Dans tous les endroits le froid est rigoureux , la couleuvre commune s'en- fonce , dès la fin de l'automne , dans des trous souterrains ou dans d'autres creux, ©ù elle s'engourdit plus ou moins com- plètement pendant l'hiver. Lorsque les beaux jours du printemps paroissent, ce reptile sort de sa torpeur , et se dépouilla

DES COULEUVRES. 333 comme les autres serpeiis. Revêtu ensuite d'une peau nouvelle, pénétré d'une cha- leur plus vive , et ayant réparé toutes les pertes qu'il avoit éprouvées par le froid et la diète, il va chercher sa compagne et faire entendre, au milieu de l'herbe fraîche, son sifflement amoureux. Leur ardeur paroît très-vive; on les a vus sou- vent s'élancer contre ceux qui étoient venus troubler leurs amours dans la re- traite qu'ils a voient choisie. Cette affec- tion du mâle et de la femelle ne doit pas étonner dans un animal capable d'éprou- ver , pour les personnes qui prennent soin de lui lorsqu'il est réduit à une sorte de domesticité , un attachement très-fort , et qu'on a voulu même comparer à celui des animaux auxquels nous accordons le plus d'instinct ; et c'est peut-être à l'es- pèce de la couleuvre verte et jaune qu'il faut rapporter le fait suivant, attesté par lin naturaliste très-digne de foi. Cet ob- servateur a vu une couleuvre , qu'il a appelée le serpent ordinaire de France, tel- lement affectionnée à la maîtresse qui la >iouiTissoit, que ce serpent se glissoit sou-

334 HISTOIRE NATURELLE

vent le long de ses bras , comme pour la caresser, se cachoit sous ses vétemeiis, ou alloit se reposer sur son sein. Sensible à la voix de celle qu'il paroissoit chérir , il alloit à elle lorsqu'elle Tappeloit ; il la suivoit avec constance ; il reconnoissoit ju'-qu"'à sa manière de rire; il se tournoit vers elle lorsqu'elle mardi oit , comme pour attendre son ordre. Ce même natu- raliste a vu un jour la maîtresse de ce doux et familier serpent , le jeter dans l'eau pendant qu'elle suivoit , dans un. bateau, le courant d*une grande rivière: le fidèle aniinal , toujours attentif à la voix de sa maîtresse chérie , nageoit eu suivant le bateau qui la portoit ; mais la marée étant remontée dans le fleuve, et les vagues contrariant les efforts du ser- pent, déjà lassé par ceux qu'il avoit faits pour ne pas quitter le bateau de sa maî- tresse, le malheureux animal fut bientôt suhmeraé.

Peut-être faut-il rapporter aussi à la couleuvre verte et jaune uu serpent de Sardaigne que M. Cetti a fait connoître , , et que l'on nomme colubro uccellatore » .

DES COULEUVRES. 335 parce qu'il grimpe sur les arbres pour y chercher les neufs et même les petits oi- seaux, dont il se nourrit. Ce reptile est très-couiinun en Sardaigne. Sa longueur est ordinairement de quarante pouces, et sa plus grande grosseur de deux. La cou- leur de sou dos est noire , variée de jaune ; et le jaune est aussi la couleur du dessous de son corps, 11 a deux cent dix- neuf grandes plaques , et cent deux paires de petites. II n'est point venimeux.

336 HISTOIRE NATURELLE

LA COULEUVRE A COLLIER ^

\_/'est encore dans nos contrées que se trouve en très-grand nombre ce serpent , aussi doux, aussi innocent, aussi familier que la couleuvre verte et jaune. Ses habi- tudes ne diflèrent pas, à beaucoup d'é- gards, de celles de cette couleuvre. 11 paroît cependant qu'il se plaît davantage dans les lieux humides , ainsi qu'au mi- lieu des eaux; et c'est ce qui lui a tait donner par plusieurs naturalistes le nom de serpent d'eau, de serpent nageur, à^ an- guille de haie^ , etc. Il parvient quelque- fois à la longueur de trois ou quatre pieds. Sa tète est un peu applatie, comme celle

"En Saidaigne, coluhro nero ; serpe nero j carhon y carhonazzo ; anguille de haie,

» Ce nom à'anguille de haie a été aussi donné , dans plusieurs piovinces, à la couleuvre verte et jaune.

DES COULEUVRES. 337

de la couleuvre commune : le sommet est J-ecouvert par neuf grandes écailles dispo- sées sur quatre rangs , dont le premier et le second, à compter du museau, sont composés de deux pièces ; le troisième Test de trois , et le quatrième de deux. Cette disposition la distingue de la vipère commune , aussi-bien que la forme de son museau , qui est arrondi , au lieu d'être terminé par une écaille presque verticale , comme dans cette même vi- père. Sa gueule est très-ouverte ; les deux mâchoires présentent, au lieu de crochets mobiles , un double rang de dents , mais immobiles , assez petites, et tournées vers le gosier : dix -sept écailles revêtent à l'extérieur chacune de ces mâchoires ; et celles qui recouvrent la mâchoire supé- rieure, sont blanchâtres et marquées de cinq ou six petites raies d'une couleur très - foncée. On voit sur le cou deux taches d'un jaune pâle ou blanchâtre , qui forment comme un demi -collier ^ d'où est venu le nom que nous conser- vons à ce serpent; et ces deux taches, très-semblables , sont d'autant plus scn-

Str^im. III. 2 S

338 HISTOIRE NATURELLE

sibles , qu'elles sout placées au-devant cîe deux autres triangulaires et très-foncées. Le dos est recouvert d'écaillés ovales relevées par une arête , et plus grandes que celles qui garnissent les côtés , et qui sont unies. Tout le dessus du corps est d'un gris plus ou moins foncé , marqueté de chaque côté de taches noires irrégu- licres et plus ou moins grandes , qui aboutissent aux plaques du ventre; et au milieu des deux rangées formées par ces taches , s'étendent, depuis la tête jusqu'à la queue, deux autres rangées longitudi- nales de taches plus petites et moins sen- sibles. Le dessous du ventre est varié de noir , de blanc et de bleuâtre, mais de manière que les taches noires augmentent en nombre et en grandeur , à inesure qu'elles sont plus près de la queue, les plaques sont presque entièrement noires. Il y a communément cent soixante-dix grandes plaques sous le ventre, et cin- quante-trois paires de petites plaques sous la queue *.

* Nous avons compié soixante paires de peiite* plaques daus cpelcpes individus.

DES COULEUVRES. 339

La couleuvre à collier ne renfermant aucun venin , on la manie sans danger ; elle ne fait aucun eliort pour mordre ; elle se défend seulement en agitaut rapi- ècement sa queue , et elle ne refuse pas plus que la couleuvre commune , de jouer avec les cnfans. On la nourrit dans les maisons , elle s'accoutume si bien à ceux qui la soignent , qu'au moindre signe elle s'entortille autour de leurs doigts , de leurs bras , de leur cou , et les presse mollement comme pour leur témoigner une sorte de tendresse et de reconnoissance.Elle s'approche avec dou- ceur de la bouche de ceux qui la ca-~ ressent; elle suce leur salive, et aime à se cacher sous leurs vètemens, comme pour s'approcher davantage de ceux qui la ché- rissent. En Sardaigne, les jeunes femmes élèvent les couleuvres à collier avec beau- coup d'empiessement , leur donnent à manger elies-inêmes , prennent le soin de leur mettre dans la gueule la nour- riture qu'elles leur ont préparée ; et les liaKitans de la campagne les regardent comme des animaux du meilleur augure^

340 KISTOIRE NATURELLE

les laissent entrer librement dans leurs maisons, et croiroient avoir chassé la for- tune elle-même , s'ils avoient fait fuir ces innocentes petites bêtes.

Il arrive cependant quelquefois que lorsque la couleuvre à collier est devenue très-forte , et qu'au lieu d'avoir été éle- vée en domesticité, elle a vécu dans les champs et dans l'état sauvage , elle perd Tin peu de sa douceur, et que si on l'irrite en l'arrachant , par exemple , à ses Jouis- sances , elle anime ses yeux , agite sa langue , se redresse avec vivacité , fait claquer ses mâchoires, et serre fortement avec ses dents la main qui cherche à la saisir.

La couleuvre à collier dépose ses œufs dans les trous exposés au midi , sur le bord des eaux croupissantes , ou plus communément sur des couches de fumier. Ces œufs , qui sont gros à peu près comme des œufs de pie , sont collés ensemble par une matière gluante en forme de grappe ; elle a par-là un nouveau rap- port avec les poissons et certains qua- drupèdes ovipares , tels que les crapauds ^

DES COULEUVRES. 341

les grenouilles , etc. dont les œufs sont de même collés ensemible et réunis de diverses manières.

Les œufs de la couleuvre à collier , déposés dans des fumiers , ont donné lieu à une fable à laquelle on a cru pendant long-temps ; on a prétendu qu'ils avoient été pondus par des coqs ; et comme on en a vu sortir de petits serpenteaux , on a ajouté que les œufs de coq renfermoient toujours un serpent , que le coq ne les couvoit point , mais que lorsqu'ils étoient placés dans un en- droit chaud , comme parmi des végétaux en putréfaction , ils produisoient toujours des serpens.

On assure qu'il est aisé de distinguer les œufs qui ont été fécondés , d'avec ceux qui ne le sont pas , et qu'on appelle des œufs clairs , en les mettant sur l'eau : les œufs clairs sont les seuls qui sur- nagent.

La coque est composée d'une mem- brane mince , mais compacte et d'un tissu serré. Le petit serpent y est roulé sur lui-même au milieu d'une matière

23

34S HISTOIRE NATURELLE

qui ressemble à du blanc d'œuf de poule ; on y remarque un placenta ; et lecordon ombilical est attaché au ventre un peu au-dessus de Tanus. La chaleur seule de l'atmosphère , et celle des matières végé- tales pourries , font éclore ces œufs. Peuî- étre dans des contrées plus voisines de la zone torride que celles ils ont été observés , Tardeur du soleil suffiroit pour faire sortir les petits serpens de leur coque. Nous avons vu , en effet , dans THistoire des quadrupèdes ovipares , les crocodiles déposer leurs œufs sur le sable dans les contrées brûlantes de l'Afrique ; mais sur les plages plus humides et moins chaudes de l'Amérique méridionale , ils les pla- cent au milieu d'un tas de matières végé- tales , dont la fermentation favorise l'ac- croissement du fœtus et la sortie de l'œuf.

Ces œufs de couleuvre à collier sont ordinairement au nombre de dix -huit ou vingt * : aussi l'espèce du serpent à

* Quelquefois ce nombre n'est que de quatorze ou quinze. Gesiier a écrit qu'on lui apporta, vers ia fin du mois de juin, une femelle de l'espèce dont

DES COULEUVRES. 343

rollier seroit-elle beaucoup plus nom- breuse qu'elle ne Test, s'il ne devenoit pas la proie de plusieurs ennemis même très - foibles , dans le temps qu'il est encore jeune et sans force pour se dé- fendre ; les pies , les mésanges , les moineaux le dévorent , et les grenouilles mêmes s'en nourrissent lorsqu'elles peu- vent le saisir sur le bord des marais qu'elles liaoitent.

Il rampe sur la terre avec une très- grande vitesse ; il nage aussi, mais avec plus de difficulté qu'on ne l'a cru. Pen- dant que l'été règne , il vit souvent dans les endroits bumides , ainsi que nous l'avons dit ; mais on le trouve quelque- fois dans les buissons : d'autres fois il se place sur les branches sèches et élevées des chênes , des saules , des érables , sur les saillies des vieux bâtimeus , sur tous les endroits exposés au midi , et le soleil donne avec le plus de force ; il s'y replie eu divers contours, ou s'y alonge avec une sorte de volupté, toujours cher- il est question daus cet article, et que, deux jours iipres 5 elle pouclil quatorze oeufs.

344 HISTOIRE NATURELLE chant les rayons de Tastre de la lumière J toujours paroissant se pénétrer avec dé- lices de sa chaleur bienfaisante. Mais , lorsque la fin de rautomne arrive , il se rapproche des lieux les moins froids , il vient auprès des maisons , et se retire enfin dans des trous souterrains à quinze ou vingt pouces de profondeur , souvent au pied des haies , et presque toujours , dans un endroit élevé au-dessus des plus fortes inondations ; quelquefois il s'em- jjare d'un trou de belette ou de mulot , d'un conduit creusé par une taupe , d'un, terrier abandonné par un lapin , et il passe dans l'engourdissement la saison du grand froid. Lorsqu'il est adulte , l'ouverture de sa gueule , son gosier et son estomac peuvent être très -dilatés , ainsi que ceux des autres serpens , et il se nourrit alors non seulement d'herbes , de fourmis et d'autres insectes , mais même de lézards , de grenouilles et de petites souris ; il dévore aussi quelquefois les jeunes oiseaux , qu'il surprend dans leurs nids au milieu des buissons , des haies , des branches de jeunes arbres ,

DES COULEUVRES. 3^5

«ur lesquels il grimpe avec facilité. Non. seulenieiit il se suspend aux rameaux par le moyen des divers replis de son corps , mais il s'accroche avec sa tête ; et comme elle est plus grosse que son cou , il la place souvent entre les deux branches d'une tige fourchue, pour qu'ar- rêtée par sa saillie , elle lui serve comme d'une espèce de crochet et de point d'appui.

Son odeur est quelquefois assez sen- sible , sur -tout pour les chiens et les autres animaux , dont l'odorat est très- lin. Il aime beaucoup le lait ; les gens de la campagne prétendent qu'il entre dans les laiteries , et qu'il va boire celui qu'on y conserve. On assure même qu'on l'a trouvé quelquefois replié autour des jambes des vaches, suçant leurs mamelles avec avidité , et les épuisant de lait au point d'en faire couler du sang. Pline a rapporté ce fait , qu'à la vérité il attri- buoit à une autre espèce de serpent que celle dont il est ici question. On a pré- tendu aussi que le serpent à collier en- troit quelquefois par la bouche dans Is

346 HISTOIRE NATURELLE

corps de ceux qui doruicieut étendus sur riicrbe fraîche , et qu'où Ten faisoit sortir en profitant de ce uiênie goût pour le lait , et en l'attirant par la vapeur du lait bouilli que l'on approcboit de la bouche ou de l'anus de celui dans le corps duquel il s'ctoit glissé *.

La couleuvre à collier se trouve dans presque touies les contrées de l'Europe; et il paroît qu'elle peut supporter les cli- mats irès-froirls, puisqu'elle vit en Ecosse et en Suède. On a emploj^é sa chair en médecine. M. Cetti a fait mention d'un serpent de Sardaigne qu'on y nomuie le nageur ou vipère d'eau : la couleur de ce reptile est cendrée et variée par des taches Planches et noires ; il n'a point de venin ,

* L'on peut voir particulièrement à ce sujet, dans les Mémoires des curieux de la Nature , une observation irès-déiaillée du docteur Fromman , médecin de Franconie, et d'aprls laquelle on pour- voit penser que, dans certaines circonstances, il seroit difficile de l'aire sortir le serpent par la Louche , sans risquer de faire étouffer celui qui l'auroii avalé.

DES COULEUVRES. 347

et sa longueur ordiuaire est de deux pieds. Peut-être appartient-il à l'espèce de la couleuvre à collier , qui auroit subi , d'une manière plus ou moins marquée , l'influence du climat de la Sardaigne , plus chaud que celui de nos contrées.

Fia du toiue troisième.

TABLE

Des articles contenus dans ce volume.

-A.V ERTISSEMENT, page 5. Éloge du comte de BufFon , lo.

Table alphabétique des divers noms doancs aas serpens, 21.

Discours sur la nature des serpens, 89. Nomenclature et table méthodique des serpeus , Il3.

Premier genre. Serpens gui ont de grandes pla- ques sous le corps y et deux rangées de petites plaques sous la queue. COULEUVRES.

Couleuvres vipères,

La vipère commune, 196. La vipère chersea , aSâ. L'aspic j 236.

TABLE. 3^^

La vipère noire, 239.

La mélanis, 248.

La stiiythe, 245.

La vipère d'Egypte , 246.

L'aramodyte, 25o.

Le céraste, 2,54.

Le serpent à lunettes des Indes orientales, ou

le naja, 265. Le serpent à lunettes du Pérou , 285. Le serpent à lunettes du Brésil, 287. Le lébetin, 288. L'hébraïque, 289. Le cbayque, 291. Le lacté , 292. Le corail in, 294. L'atroce , 296. L'baemachate , 298. La très-blanche , 3oT. La brasilienne , 3o2. La vipère fer-de-lance, 804. La tête triangulaire, 817. Le dipse , 819. L'atropos , 820. Le léberis , 821. La tigrée, 322.

Strpcns. III. 29

55o TABLE.

Couleuvres ovipares.

Ba couleuvre verte et jaune, ou la coukuvr

commune , 323. La couleuvre à collier, 336.

DE L'IMPiliMEillE DE PLASSA

N.

HISTOIRE

NATUREL LE

DES

QUADRUPÈDES OVIPARES

ET DES SERPENS.

TOME QUATRIÈME.

iSîA.V

78 HISTOIRE NATURELLE

du boiga * ; mais la forme de sa langue alougée et divisée eu deux , ainsi que la conformation des autres organes qui lui servent à rendre des sons , ne peuvent produire qu'un vrai sifflement , au lieu de faire entendre une douce mélodie. Le boiga , non plus que les autres serpens prétendus chanteurs, ne mérite donc qvie îe nom de siffleur. Mais si la Nature n'en a pas fait un des chantres des campagnes , il paroît qu'il réunit un instinct plus marqué que celui de beaucoup d'autres serpens , à des mouvemens plus prompts et à une parure plus magnifique. Dans l'île de Bornéo , les enfans jouent avec lui ; on les voit manier sans crainte ce )oli serpent , l'entortiller autour de leur corps , le porter dans leurs mains inno- centes , et nous rappeler cet emblème ingénieux imaginé par la spirituelle anti- quité , cette image touchante de la can- deur et de la confiance , qu'ils repré- sentoient sous la forme d'un enfant sou- liant à un serpent qui le serroit dans ses

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* Voyez laDcscripiion du cabinet de Seba.

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1

qui lui ptuvent au lieu odie. Le >frptn$~ iloiic(]ue urc n'en apagnes, ift plus d'autres prompts le. Dans fnl avec ilnle ce df leur is inno-

lie anti- la can- repré- antsou* daus ses-

DES COULEUVRES. 7«)

contours. Mais , clans cette charmante allégorie , le serpent receloit un poison mortel , au lieu que le boiga ne rend que des caresses aux jeunes Indiens , et paroît se plaire beaucoup à être tourné et retourné par leurs mains délicates.

Comme c'est un spectacle assez agréable que de voir , dans les vertes forets , des animaux aussi innoccns qu'agiles , faire briller les couleurs les plus vives et s'é- lancer de branche en branche , sans être dangereux ni par leurs morsures ni par leur venin , on doit regretter que l'espèce du boiga ait besoin , pour subsister , d'une chaleur plus forte qvie celle de nos con- trées , et qu'elle ne se trouve que ver^^ l'équateur , tant dans l'ancien que tlaus le nouveau continent *.

* Le boiga a communément cent soixante-six grandes plaques, et cent vingt-huit rangées de pe- tites; mais ce nombre varie très-souvent, ainsi que dans les autres espèces de serpeus.

38ô

TABLE.

V

Va M p u M , IV, 147. serpens , IIÏ , 85.

VariéLedes serpens,III, Vieillesse des serpens,-

59,60. 111,87.

Varre, ou harpon, 1,134. Violette (couleuvre),IV,

Venin , I , 98. 2.2,.

des seipens , III , 92, P^ipera dl secco , IV, 196 et suiv. 10.

Vcrdàire (^couleuvre), Vipère, HT, 196.

IV, 173. —d'eau, III, 3.}6.

Vermillon (tortue), I, commune, III, ig6

284. et suiv.

(crapaud) , II , 35^* Vipères , III , 68. Verte (couleuvre), IV, communes (les) peu-

172. vent passer plusieurs

et bleue (couleuvre), jours sans manger , IV, 164. III, 219.

et jaune (couleuvre) , Viscères des serpens j m, 323. III, 49.

Vertèbres, I, 63. Visqueux, TV, 335.

Vessie , I, 63, 108. Umbre, II, 83.

Vessies aériennes ,1,187. Voracité, I, 290.

à air, II , 261. Vue (la) des serpens esc Vie. Durée de la vie des tcès-percanie, III, 75,

Zone torride , 1 , 74. Zones (couleuvre à), IV, 192.

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